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"":v
LA
Revue Philanthropique
PARAISSANT LE lO DE CHAQUE MOIS
PAUL STRAUSS, Directeur
PREMIERE ANNfiE. — TOME II
NOVEMBRE 1897 A AVRIL 1898
PARIS
MASSON KT C'% EDITEURS
LIBRAIRES DE l'aCADEMIE DE MfeDECINE
120, HOULEVAKI) SAINT- r.ERMAIX
1897
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DICTIONNAIRE DE L ASSISTANCE
PREAMBULE
J'entends, sous ce litre, d^finir les termes employes par tous
ceux qui trailent des choses de ]*assistance. D'aucuns penseront
que ce travail est parfaitement inutile ct qu'4 d^faut de T^di-
tion toujours attendue du dictionnaire de TAcaddmie, celui de
Littrd, par exemple, y suffirait. S'il ne s'agissait que de rensei-
gnements lexicographiques, rien ne serait plus exact ; mais tel
n'est pas, on doit le penser, mon but.
Le cercle des Philanthropes devient de jour en jour plus
^tendu, le nombre des personnes s*occupant, ft un titre quel-
conque, de soulager la mis^re d'autrui, est de m6me plus consi-
derable; le Parlement fait des lois d'assistance, les unes sont
appliqudes, d'autres k Tdtude; des revues se fondent; des so-
ci^t^s se ferment; on crde des <^tablissements, des ceuvres; on
leur donne un nom, une etiquette. Bref, il y a 1ft, ft Fheure
actuelle, tout un mouvement d'opinions, d'iddes, de faits dont
t'assistance est le but.
Pour y aider, pour le suivre avec fruit, il faut que les
lennes soient ddiinis et compris de la mfime mani^re; il im-
porte que le langage technique soit clair, precis et unexpose ft
aucun embarras. Cela 6videmment va de soi; mais pour couper
court ft toute objection, j'en veux encore faire la preuve par des
faits et au moins un exemple.
Je prends le mot : ii6pital.
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<; REVUE PHILANTHROPIQUE.
Littr^ le d^finit ainsi : 1*» Etablissement ou Con regoil gratui-
tement des pauvres, des infirmes^ des enfants, des malades. (A
Tappui de ceite definition premiere, il cite une longue phrase
tir^e de la preface de Tenon, M^moire sur les hdpitaux). 2** Par-
liculidrementy dans le langage administratif, maison de chartif^
etablie pour donner des soins gratuits aux malades indigents ^
par opposition a hospice otl on ne regoit pas les malades.
Littrd nous donne ici un exemple des plus remarquables de
Tenibarras que peut offrir le mot hdpital; dans sa premiere
definition gdn^rale, il confond rb6pital et Thospice; dans la
seconde, plus particulidre, il les s^pare. Cependant, au mot
hospice^ r^minent lexicographe donne toute sa pens^e it propos
de la synonymie des deux termes.
« L'hApital est un asile momentan^ ou Ton cherche la gu6-
rison d'une maladie; Thospice est un asile perp^iuel ou Ton
passe tout ou partie de son existence. Cette distinction est
purement administrative. Autrefois il n'y avait qu'hdpital qui
s'appliquait k tons les lieux destines i recevoir des pauvres
malades ou non malades. »
Au point de vue etymologique, qui est, pour les grammai-
riens, sans aucun doute, le plus int^ressant, Littrd veut done
qu'h6pital et hospice ayant m6me radical, hospes, hdte, soient
synonymes, et c'est avec un certain d^dain des ndcessites admi-
nistratives qu'il concede la distinction entre les deux termes.
U faut en appeler de la decision formulae par Littr^ et con-
siderer que les termes, quoique d'origine commune, s'appli-
quent k des objets absolument diff^rents.
Sans aucun doute, dans les temps eloignds de nous, ou
Tassistance hospitali^re naissait, puis se d<5veloppait, les esprits
n'dtaient pas fagonn^s & des exigences qu'on tient aujourd*hui
pour legitimes; ils n'envisageaient que la protection donn^e a
rindividu sous un toit hospitaller ; les hdtes etaient varies de
conditions, d*origines; leurs besoins differaient aussi; la com-
mune maison s'accommodait de toutes ces infortunes. On la
denommait de n*importe quelle fa^on : YAlbergo de poveriy
rH6tel-Dieu, ThOpital ou Thospice de la Misiricorde, etc. La
confusion est alors partout dans les mots et dans les choses et
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DICTIONNAIIIE DE L'ASSISTANGE. 7
il n'y a pas lieu dVpiloguer sur les termes usii^s k ce moment^
ainsi que le font pourtant maintes commissions administra-
iives en possession d'antiques fondations de lits d'hospice pour
les pauvres malades ou non malades.
Le comity de mendicity de TAssembl^e constituante, dont
les travaux font date dans Thistoire de Tassistance en notre
pays, accepte la synonymic des termes; les articles 16 et 18 de
la loi du 24 vend^miaire an H en sont la preuve (1).
Dira-t-on que le langage administratif n'est pas encore cr66
et que les mots conservent leur sens ^tymologique? Soit. Mais,
malgr^ les progrfes incessants que les lois de la R^publiquc
apportent a Torganisation de Tassistance^dans les arrdt^s ou les
lois de 23 brumaire an V, 4 vend^miaire an VI, 24 thermidor
an VIII, 9 frimaire an XII, on emploie indiff^remment, dans les
textes les mots h6pital et hospice; on les traite en synonymes.
II n'y a done, jusqu*ici, en ce qui concerne ces mots, ni lan-
gage juridique, administratif ou autre et la confusion con-
sacrde par Tusage et la tradition persiste.
La loi de 1838 sur les ali^n^s semble commencer une voie
nouvelle; larticle 24 indique que Ton reconnait Idgalementdeux
series d'^tablissements hospitallers diflF6rents. C'est seulement
en 1851 que le langage devient tout k fait precis et la loi du
7 aoul sur les hospices et hdpitaux fait nettement la difference
entre les deux sortes d*6tablissements. On ne dit plus comme
autrefois en 1838 hospices ou h6pitaux, mais on 6crit hospices
et h6pitaux.
L'article premier de la loi s'occupe des conditions d'admis-
sion des malades dans les hdpitaux; Tarticle 2 traite de Tadmis-
sion des meillards et infirmes dans les hospices. La separation
est l^galement accomplie.
U faut reconnaltre qu'elle 6tait faite aussi dans les esprits;
M. de G^rando (1839), dans son traits de bienfaisance qui fut,
avec raison Touvrage le plus consults en cettc mati^re et qu*i[
(1) Art. 16. — Tout vieillnnl j\f:e de soixante-dix ans, sans avoir acquis de
(Jomicile, ou reconnu infirme avant fctte 6poque, recevra les secours de slricte
necessity dans Vhospice le plus voisin.
Art. 18. — Tout malade, domicilie de droit ou non, qui sera sans ressources,
^era secouni. ou & son domirilo do fait, ou dans Vhospice Ic plus voisin.
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8 REVUE PHILANTHROPIQUE.
faut encore relire k noire ^poque, ^tablit qu'il y a deux classes
d'asiles hospitallers et que les denominations d'h6pital et d'hos-
pice servent h ies distinguer.
Le langage administratif, dans les circulaires et instruc-
tions, a consacr6 cette separation depuis cette date memorable
de 1851, et, k ce point de vue, Littrd a raison. Mais ce n'est pas
seulement 1& qu'on la constate; elle existe dans tons les ou-
vrages qui traitent de bienfaisance ou d'assislance; si quelques
commissions administratives charg^es de plusieurs 6tablisse-
ments persistent k s'appeler commission des hospices civils,
c'est par commodity et non par ignorance.
Dans le monde de la bienfaisance, administratif ou non, la
separation est acceptee, la synonymic repoussde. II n*y aurait
done pas de difficultes, tout le monde 6tant d'accord.
Mais les termes vont de nouveau se confondre ; nous allons
perdre le benefice d'une clarte qu'on pouvait considerer comme
definitivement acquise. C'estla loi de 1893, qui va, sans le vou-
loir assurement, en devenir la cause.
Elle stipule en son article 3 que toute commune est ratta-
chee k un ou plusieurs des hdpitaux les plus voisins, et, dans
Tarticle 4, que le Conseil general deiib^re sur la determination
et la creation des hdpitaux auxquels est rattachee chaque com-
mune.
Le terme h6pital ne devait cependant prfiter k aucune con-
fusion; il n'etait question que d'assistance aux malades et le
legislateur n'employait pas d'autre mot qu'hdpital.
Mais les Conseils generaux se sont departis de cette rigueur
de langage. Pour remplir la mission qui leur incombait de
designer les hdpitaux de rattachement, ils ont cru possible dans
un grand nombre de departements de considerer h6pital et hos-
pice comme synonymes, et des lors, pour eux, tout est devenu bon
comme h6pital de rattachement, le grand et le petit h6pital, le
grand et le petit hospice. Dans plusieurs d^entre eux, tout ce
qui etait etablissement hospitaller a et6 designe pour recevoir
des malades; on ne s'estpas preoccupe des distinctions gram-
maticales que probablement bien des conselllers generaux
auraient considerees, en Tespece, comme parfaltement super-
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DICTIONNAIRE DE L'ASSISTANCE. 9
flues h c6l<5 des int^rfits locaux ou peut-^tre ^lectoraux qui pou-
vaient dire en jeu.
A vrai dire, ils ont pour excuse la circulaire du 18 mai 1894.
Elle disait : « Rien n'emp6che qu'i d^faut d*h6pital, les com-
munes soient rattach^es k un hdpital-hospice ou mSme k un
bospice plus sp^cialement r6«erv^ aux vieillards ou infirmes, si
Facte constitulif de r^tablissement ne renferme pas de clause
emp^chant d'y adjoindre un service de malades. La plupart du
temps, en d^veloppant Tinfirmerie de I'hospice, on pourra h peu
de frais cr^er un quartier d'hdpital qui profitera des services
g^n^raux de TStablissement existant. »
L'excuse n'aurait cependant qu'une valeur relative, car
M. le commissaire du gouvemement disait au S6nat, lors de la
preparation de la loi d'assistance en mars 1893 (1) : « Je ne
saurais trop redire combien il importe de laire cesser la confu-
sion persislante entre les services d'h6pitaux et les services
d'hospices.
« II faut pour cela : 1^ appeler chaque ^tablissement de son
vrai nom (hOpital, hospice ou h6pital-hospice) ; 2® prendre
toutes dispositions ndcessaires afin que la r^alit^ de son fonc-
tionncment r^ponde k sa denomination vraie; 3** tendre k ce
que, dans les 4tablissements mixtes, il n'y ait pas melange, mais
juxtaposition de Thdpital et de Thospice. »
La pens6e du gouvernement ^tait done tr^s netle. Les con-
seils g^n^raux n'en ont pas tenu compte et ils ne se sont pas
pr6occupds de la denomination vraie k donner k chaque dtablis-
sement. La faute commise n'est pas seulement grave parce
qu'elle atteint les malades qui seront envoy^s dans de mau-
vaises conditions hygi^niques au milieu des vieillards ; mais
elle Va etendre son eflfet jusqu'4 la bourse m^me de Thospice
ainsi d^nomm^ h6pital de rattachement. L'article premier de
la loi de 1851 ne le concemait pas comme hospice, et mainte-
nant il lui devient applicable. On sait que cet article constitue
line charge extrimement dure pour les hdpitaux; ils doivent
recevoir, pour leur propre compte, tous les indigents, sans dis-
(1} Conseil sup6rieur de TAssistance publique. Rapport de M. le Directeur do
Tassistance et de Thygiene piibliques. Paris, 55, p. 49.
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10 HEVLE PHILANTHROPIQLE.
tinction de domicile, qui tombent malades dans la commune.
La confusion, que le l^gislateur de 1891 avait fait cesser, va
done reparaltre, si on n'y prend garde, et plus compliqu^e
qu'autrefois, puisque des obligations nouvelles sont ndes. Com-
ment faudra-t-il d^nommer, en effel, un hospice ou pour les
besoins de Tassistance m6dicale on aura am^nagd, s'il existait
une infirmerie, crdd de toutes pieces, s'il n'existait rien, un
quartier d'h6pital? Ne sera-t-il pas devenu un h6pital-hospice?
Qu'aura-t-il gagm5 a ce changementd'6tiquette? L'honneurcoA-
teux de recevoir k ses frais les malades que la loi meltait k la
charge de la commune. Quelques conseillers g^n^raux ont pu,
le sachant, se servir de ce changement d'6tiquette, pour favo-
riser les int^r^ts financiers de leur commune, mais d'autres
(^taient certainement bien ignorants d'une telle consequence.
Tousceux qui ont souci des budgets publics, des charges des
contribuables, appr^cieront ce que, derric^re ces querelles de
mots, il y a de choses graves et s^rieuses. II nous semble, pr^-
cis6ment, qu'on n'y a pas assez song6 et, comme premier re-
made, nous voudrions voir appeler chaque chose par son nom;
ce sera ddji un pas fait, dans le cas, vers un classement m6-
thodique des ^tablissements hospitaliers.
Get exemple nous parait topique pour faire comprendre la
ndcessit6 d'un langage precis en mati^re d*assistance. Ce Ian-
gage, l^gislateurs, membres des conseils d^bib^rants, adminis-
trateurs du bien des pauvres, philanthropes et ^conomistes,
tout le monde doit Taccepter dans sa rigueur, sinon avec la
confusion dans les mots apparatt le d^sordre dans les fails.
D' (,. DROLINKAt'.
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A MONSIEUR PAUL STRAUSS
Directear de la Hevue Philanthropique,
l^"" noverabre 1897.
J'ai salu6 avec joie la naissance de votre Revue. II me
semble que mieux que tout autre vous saurez, en la ren-
dant attrayante, vulgariser la plus belle des sciences, celle de la
philanthropic ; car c'est une science. Bien des gens Tignorent,
et bien plus encore en ignorent jusqu'aux 6l^ments. C*est par
une sorte d'A, Bj C, qu'il est n^cessaire de commencer leur
education encette matidre.
Savent-ils mftme ce que sont les philanthropes et quelle
somme immense de travail est accomplie par ceux qui con-
sacrent leur vieausoulagementdes mis^resde leurssemblablcs,
qui mettent leur g6nie, leur science au service de Thumanit^?
Gens de bien, que j'ai eu le bonheur de connaitre, d'en-
tendre etde comprendre, quej'aimeet que je v^n^re! Vous
seuls savez arr^ter le torrent toujours pr6t k d^border, et si
tout k coup vous disparaissiez de ce pauvre monde, quels cris
effroyables se feraient entendre, que de bras tendus dans un
suprfin>e appel... Et puis, quelle r6volte! Et quelle h^catombe !
II est certain que Ton invente peu de chose dans Torgani-
sation de I'assistance.
La misfere des hommes se perp^tue k travers les sifecles el
les philanthropes ne peuvent que s'ing^nicr k adapter les
remMes les plus efficacesaux maux dechaque dpoque.
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12 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Les distributions debl^ etd'huile qui avaient lieu h Athftnes,
h Rome et dans la plupart des villes antiques, les distributions
de riz qui n'ont cess^ de se faire depuis des milliers d'ann^es
dans les pays orientaux, nc sont pas autre chose que nos bu-
reaux de bienfaisance.
On pent, dans eel ordre d*id6es, rapprocher utilement de nos
oeuvres d'assistance par le travail le capitulaire de 807, ou
Charlemagne interdit de faire Taumdne aux mendianls valides,
etd'autres ordonnances, ou se trouve d^cr(5t6e Torganisation do
travaux publics pour les vrais pauvres.
Notre soci6t6 frangaise est une vaste famille, qui doit in-
tervenir lorsque la famille naturelle n'existe plus ou ne pent
pas agir.
Le pacte social fait que chaque dtre doitcoop^rer k Tceuvro
commune qui a pour objet le progr^s et le bien-6tre de tous.
L'homme a le droit de dire k son pays : « Fais-moi vivre. » Le
pays lui respond : « Donne-moi en dchange ta force et ton tra-
vail. »
L*assistance est due k Tenfant. II a droit k une protection
enti^re, complete, permanente. La soci6t^ ne doit reculer
devant aucun sacrifice pour assurer sa vie, sa sant^, lui donner
r^ducation morale et profcssionelle.
L'adulte n'a besoin d'assistance que dans les moments de
crises caus^es par la maladie, le grand nombre d'enfants, le
ch6mage.
Dans le premier cas, des soins a domicile ou dans les h6pi-
taux doivent lui Hve donnas.
Dans ledeuxi^me cas, il faut venir k son aide par tous les
moyens, subsides ou refuges pour les femmes enceintes, secours
d'allaitement.
Dans le cas de chdmage, un travail doit 6tre mis k sa dis-
position; mais un travail pen r^mundr^ et une subsistance
strictement suffisante, afin qu'il ne se complaise pas dans cet
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LETTRE DE M- BfiQUET DE VIENNE. 13
£tat et qu'il n'essaie pas de se d^rober it la grande loi sociale
qui exige que chacun, par ses efforts et son utility personnels,
contribue au bien-^tre commun.
Pour les vieillardsy les caisses de retraites doivent 6tre en-
courag^es et favoris6es. Mais k d^faut de ressources suffisantes,
TEtat doit 6tre tenu d'assurer leurs derniers jours, soit au
moyen de secours qui leur permettent de vivre au milieu des
leurs, s'il est prouv^ que ceux-ci ne peuvent se charger de leur
entretien, soit en leur offrant le repos dans des maisons ad hoc*
Quant aux infirmes, incurables et d^g^n^rds de tous genres,
il est sans doute n^cessaire de leur donner tous les soins et
toutes les consolations que present Thumanit^. Mais pour la
doci£t6 ils ne repr^sentent aucun apport; leurs capacit^s mo-
rales ou physiques m6me d^velopp^es it leur maximum, n at-
teignent pas celles d'un 6tre normal; leur reproduction est un
danger. II importe done, tout en ne leur refusant rien de ce que
rhumanit^ commande, de ne pas s*^garer en leur faveur dans
des entreprises fort coQteuses et tout k fait al^atoires.
Les diff^rents genres d'assistance doivent 6tre proportion-
nfe k rint^rfit social. Celui-ci ne doit jamais 6tre perdu de vue.
L'enfant est secouru parce qu'il est la vie m6me, Tavenir.
L'adulte, parce que ses forces doivent 6tre conserv^es pour
la grandeur et ia prosp4rit6 de la Patrie.
I^ vieillard, parce qu'il arempli son devoir, contribu^, par
son travail, ii Tentretien du corps social.
C*est 1^ Tassistance raisonn^e, telle que T^tat paratt au-
jourd'hui la comprendre.
Viennent les oeuvres privies qui secondent puissamment
Tassistance publique, d^chargent son budget et diminuent le
paup^risme.
Cette assistance doit 6tre 6galement' raisonn^e et logique ;
mais elle permet k tous d'apporter aux infortun6s les tendresses
du coBur, de p^ndlrer les raisons souvent secretes de leur mal-
heur et de faire briller, dans leur noir horizon, Tespoir qui ra-
nime les courages et decuple Teffort.
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14 REVUE PHILAXTIIROPIQUE.
Dans ce genre d*assisiance une chose m*6tonne,.c*estle rang
extr^mement secondaire que les femmes y occupent. Elles sont
nombreuses les institutions dans les conseils administratifs
desquelles je cherche vainement des noms de femmes.
Pourquoi cette abstention deplorable? Pourquoi ne dirigent-
elles pas? Pourquoi n'apportent-elles pas au moinsleurpart de
travail et de lumi^re dans toutes les organisations philanthro-
piques ?
Les hommes doivent se dire :
« Comment! les femmes souffrent (^ juste titre) d'etre assi-
mil^es l^galement aux mineurs^ aux interdits, aux incapables.
Elles nous reprochent d'avoir ^tabli une ligne de demarcation
entre les occupations que nous jugeons dignes do nous, et celles
que nous leur laissons, partage dans lequel nous nous sommes
octroy^ seulement: le pouvoir, Tautorite, Tintegralitd des droits,
les emplois, les faveurs, les distinctions, les privileges, les si-
necures, etc. Mais nous ne leur interdisons pas Tacces de Tas-
sistance privee ! 11 ne s'agit ici que d'apporter travail et
devouement. Avouons que la concurrence n'est pas i redouter.
Pourquoi ne profitent-elles pas de cette porte ouverte et ne don-
nont-elles pas dans cette voie la mesure de leur valeur?
« Elles savent pourtant que la collaboration masculine et
feminine pent seule enfanter le travail parfait. »
Voil^ certainement ce que les hommes se disent.
II faut qu'il existe un malentendu et que la plupart des
femmes croient que tout est pour le mieux dans le meilleur des
niondes; sans cela elles se mettraient a la tAche.
Qu'elles sachent que Ton a besoin de leur concours; car les
femmes qui se sont soumises aux lois de la nature, qui vivent
dans la famille et pour la famille, peuvent seules avoir une
comprehension nette de toutes les soufTrances morales ou phy-
siques et des tresors d'indulgence et de commiseration.
Que votre Revue leur repute done sur tons les tons qu'il est
des meres qui meurent de faim, qui sur leurs seins vides pres-
seiit de malheurcux etres condamnes h la mort. Dites-lcur,
oh ! ditcs-leur sans vous lasser, qu'il est des femmes dont le
mari est mort, ou est ft ThOpital, des abandonnees, qui, h la
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LETTRE DE M- BfeQUET DE VIENNE. 15
derni^re p6riode de leur grossesse, n'ayant plus la force de
travailler, sont sans gite, sans pain, sans v^tement. L'enfant
qu'elles portent en elles endure leurs souffrances ; il est atteint
d'une faQon cruelle, et pour toujours peut-Mre. Dites-leur qu'il
y a des malheureux k visiter dans les hdpitaux. Dites-leur que
dans tons les arrondissements de Paris il faut cr^er et soutenir
et faire fonctionner par une collaboration constante des cnuvres
d'assistance par le travail.
Si elles savaient tout cela, si elles r^ll^chissaient a tout cela,
les femmes comprendraient que Devoir et Droit sont corri^latifs,
que le temps est pass^ o£i les oeuvres de Charite ne servaient
qu'4 faire du prosily tisme, qu'il s'agit maintenant de solida-
rity, de questions infiniment plus larges et qui sont la vie
m^me de notre cher pays, que nous aimons et<jui nc pent ^tre
s6par6 dans nos coeurs de Thumanit^, patrie plus grande
encore.
K^alisons le mieuxsur notre domainc terrestre, 61evons-nous
vers la perfection, cet in^puisable id^al que chacun porte en
soi. Aspirons k tout ce qui est en haut et tendons les mains k
tout ce qui est en bas !
BfeQUET DE VIENNE,
Foadatrice de la Soci^tt^ de rAllaitemcnt matcrnet
et des Refuges - Ouvroirs pour les Kenimos onceiotes.
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LE RETABLISSEMENT DES TOURS
Une nouvelle commission a 616 saisie, il y a peu de temps,
d'une proposition de M. Dulau, d6put^ des Landes, tendant
au r^tabiissement des tours (1). M. Reinach a combattu vive-
ment cette proposition et a demands qu'avant de statuer il soit
proc6d^ a une enqudte auprfes de TAssistance publique, afin
que le l^gislateur piit 6tre entour^ de tous les renseignements
n^cessaires. Ce recent d^bat donne un certain caract^re d actua-
lity k la question du r6tablissement des tours, bien souvent
agit(5e dans les nombreuses soci6tds qui s'int^ressent aux pro-
blfemes d^licats de la protection de Tenfance.
Nous voudrions profiter de cette circonstance pour examiner
quelles sont les raisons qui sont invoqudes pour et contre
rinstitution des tours, ce que valent les arguments produits par
leurs partisans et leurs adversaires, et conclure en indiquant
quelle parait 6tre la meilleure solution au point de vue
social.
(1) Larousse d^finit ainsi les tours : Cdtaient des cylindres convexes d'un
cdt6, et concaves de Tautre, et qui tournaient sur eux-mdmes avec une grande
facility. La partie ouverte du tour faisait face k la rue, tandis que Tautre s'ou-
vrait i rint6rieur d'un appartement. Auprfes du tour et a rext6rieur se trouvait
plac^e une sonnette. La femme qui voulait exposer son enfant agitait la sonnette
pour avertir la personne de garde. Aussit6t le cylindre decrivant un demi-cercle
pr^sentait au dehors son c6l6 concave, et puis, achevant son Evolution, appor-
tait I'enfant dans Tint^rieur de I'hospice. De cette manifere, la femme qui exposait
I'enfant n'6tait vue d'aucune personne de Tfetablissement.
Le tour 6tait aussi quelquefois form6 au moyen dune petite fen^tre, perc6e
dans le mur d'un hospice, gamie de deux portes : Tune ext6rieure, I'autre int6-
rieure ; entre ces deux portes se trouvait un petit berceau, et dfes que la d6po-
sante touchait la porte ext6rieure, une sonnette retentissait qui faisait venir une
surveillante pour prendre I'enfant.
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LE RfeTABLISSEMENT DES TOURS. 17
I. Voyons d'abord quels sont les arguments que Ton peut
faire valoir pour et centre Tinstitution des tours.
On peut r^sumer les discussions qui se reproduisent sans
c^sse & ce sujet, et qui passionnent le public, en disant que la
question met en conflit les sentiments de g^n^rosit^ et les
principes de morale.
D'une part les uns veulent voir adopter le syst^me le plus
large, de mani^re & ne pas laisser de pauvres petits innocents
exposes aux consequences dangereuses du ddsespoir maternel.
D'autre part, les autres ne veulent pas que la gdn^rositd pu-
blique s'exerce au profit de creatures indignes et au detriment
de la masse des contribuables.
Les divers arguments que nous allons rappeler, et pro-
duits de tout temps pour et contre Tinstitution des tours, se ra-
minent aux deux id<^es g^n^rales que nous venons d'indi-
quer.
Les adversaires des tours reprochent surtout a ce systfeme
de provoquer aux mauvais moeurs. Le tour, disent-ils, est une
ressource commode pour les entralnements de la passion . 11
favorise les calculs de Timmoralit^; il est TauT^iliaire de la se-
duction. Grftce k lui, la femme n'a plus h s'inquieter des con-
sequences de ses actes ; elle n'a qu'ii porter son enfant au tour
pour conserver la marque de Thonnetete.
A ce grief sdrieux articuie contre les tours, les partisans
de ce mode d'admission r^pondent que lorsqu'une fille se livre,
elle ne pense pas aux consequences de sa faute, qu'elle n'y
pense qu'au moment oti elle se voit enceinte, et qu*8i ce mo-
ment deux idees se presentent k son esprit: cacher la faute
ou faire disparaitre Tenfant. I^ suppression du tour lui enlfeve
la'possibilite de cacher la faute, elle cherche d^s lors.& faire
disparaitre Tenfant. Elle essaie d'abord de se faire avorter, et,
si elle ne reussit pas, elle tue son enfant au moment de la
naissance. Elle recule d'autant moins devant Tinfanticide que,
si son crime est decouvert, elle court le plus souvent la chance
de beneficier d'un acquittement. Les avocats ont toujours deux
bons arguments k faire valoir en mati^re d'infanticide : 1<^ la
l&chete du pfere, du seducteur, contre lequel la fiUe-mfere
HEVUE PHILANTHROPIQUE. — II. 2
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18 REYL'E PIIILAXTHROPIQIE.
n a aucune action; 2^ la s^v6rit^ de la loi qui oblige k infliger
au minimum une peine de cinq ans de iravaux forc(^s, peine
qui parait injuste quand on rapproche ies souffrances e( les
tortures de la fille-m^re, depuis le premier jowr de sa gros-
sesse, de Tattitude le plus souvent m^prisable du sc^ducteur. ,
Les partisans du tour appuient )€ur raisonnement sur les
statistiques qui d^montrent une augmentation constante des
crimes d'avortement et d'infaflticide depuis Tc^poque dc la sup-
pression des tours.
Le grand avantage de Tinslitution des tours serait done,
d'apr^s ses partisans, de prdvenir les avortements et les infan-
ticides.
Les adversaires de Tinstitution contestent cet avantage.
Dans un remarquable rappoil fait au Gonseil g^n(^ral de la
Seine en 1878, M. le docteur Thulid a prdsent^ h ce propos do
judicieuses observations. 11 a fail remarquer que la femme qui
tue son enfant est celle qui a cachd sa grossesse, qui n'a pas
voulu 6tre assist^e dans son accouchement et que ccUe-lA n'ira
pas porter son enfant k Thospice pendant qu'il vit encore, dv
crainte que les pleurs de son enfant puissent la trahir, do
crainte que sa faute soit d6couverte si elle ne reprend imm(5-
diatement son travail habituel. La suppression des tours n'a
done pas pour consequence, d'apr^s leurs adversaires, de
pousser aux crime? d'avortoment et d'infanticide les m5res qui
veulent cacher leur faute, par la raison bien simple qu'il est
plus sAr de mettre sa main ou sa couverture sur la bouche de
Tenfant dfes sa naissance, que de traverser les rues d'une ville
avec un fardeau aussi dangereux pour aller au tour.
Mais ces observations ne ddsarment point les partisans du
r^tablissement des tours. lis insistent sur ce fait que, dans les
grandes vHles, les fiUes-m^res peuvent dissimuler leur gros-
sesse, sans crainte d'indiscr<5tions comme dans les villages.
En supposant qu'un docteur, qu*une sage-femme, que des
inconnus aient su son accouchement, peu lui importe, si T^vd-
nement se produit loin de son pays. L'essentiel pour elle est
de revenir dans sa contr^e, dans sa famille sans qu'il reste au-
cune tra^e de sa faute. Si done elle 6tait certaine de pquvoir se
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LE RfeTABLlSSEMENT DES TOURS. 19
d^barrasser de son enfant en le confiant a Tadministration et
sans s'exposer h divulguer son malheur dans la region ou il
faut qu'il ne soit pas connu, elle n'auraif. pas recours au
crime pour faire disparaitre Fenfant qui la g6ne.
Le syst^me du tour parait k ses partisans de nature k pr^-
venir des infanticides ou des avortements parce qu'il assure k
la m&re le secret le plus absolu, sinon dans la ville m^me de
Tabandon, du moins au loin, \k oh la mfere tient k ce que le
secret soit rigoureusement gard6.
Mais les partisans du tour ont des contradicteurs habiles,
qui soutiennent qu'il ne faut pas exag6rer Timportance que les
filles-m^res attachent au secret de leur faute. Dans son rapport
au Conseil sup^rieur de T Assistance publique, M. Brueyre
affirmait que les cas dans lesquels les mferes se pr^occupent
d'un secret it garder sont tr^s rares. II les lvalue kip. 100.
Et les adversaires des tours d^veloppent en outre, k I'appui
de leur opinion, des considerations puissantes contre le r^ta-
blissement de cette ancienne institution.
lis font valoir d'abord que s'il est trop facile de se d6bar-
rasser de son enfant, des parents pen sympathiques s'empres-
seront de profiler de la g6n6rosite de Tadministration pour se
d^charger sur elle du soin d'^lever leur enfant legitime. N'a-
t-on pas vu en effet, a T^poque oil les tours existaient, des en-
fants mis k la charge de la charity publique, non pas parce que
les parents ne pouvaient les clever, mais parce qu'ils les gfe-
naient pour des raisons plus ou moins avouables? •
Mais surtout le grand reproche que les adversaires des tours
formulent contre cette institution, c'est de ne pas r6aliser les
intentions de ceux qui la d^fendent. Et en effet les partisans
du tour se flattent de diminuer le nombre des infanticides et
d'assurer le secret k la m^re. Or Fexpdrience a prouv6 que
Tinstitution ne pouvait fonctionner sans une certaine surveil-
lance destructrice du secret que Ton veut garantir. Le tour en
effet avail jadis, dans bien des cas, servi de botte aux infanti-
cides. II n'avait souvent regu qu'un cadavre. La surveillance
s^etait impos^e afin que Ton piit retrouver la personne qui
avail apporte Tenfant, au cas oil un crime aurait 6te commis.
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•20 REVUE PHILANTFFROPIQUE.
La surveillance avait ^16 oi^anis^e surtout & raison du rdle
abominable jou^ par quelques sages-femmes sans scrupules,
qui excitaient les filles-m^res 4 Tabandon. Elles percevaient
une retribution pour porter Tenfant au tour, et souvent elles
gardaient la retribution, mais n'effectuaient pas le voyage pour
aller au tour. L'enfant mourait entre leurs mains, et quand
dies ne trouvaient pas de meilleur moyen de se dcSbarrasser
du cadavre, elles le d^posaient au tour. Ges abus monstrueux
avaient necessity une surveillance etroite de la part de la po-
lice. Mais, avec ring6rence policifere,le secret disparaissait. Du
jour oil le tour fut surveilie, la m^re ne demeurait plus une in-
connue pour Tadministration. Loin done de prdvenir les infan-
ticides et de garantir le secret de la faute, le tour rendait pos-
sibles et faciles les infanticides s'il n'etait pas surveille, et
n'assurait aucun secret s'il 6tait espionn^ par la police. Les
adversaires des tours puisent done dans rexpdrience faite et
dans les r^sultats obtenus des arguments s6rieux pour condam-
ner une institution qui a donn^ lieu a des abus monstrueux.
IL Que faut-il pcnser des divers arguments que nous ve-
nons de presenter, comme constituant les raisons principales
sur lesquelles partisans et adversaires des tours fondent leur
opinion?
A notre avis,ces arguments doivent faire pencher la balance
du c6te des adversaires du r6tablissement des tours.
11 n*est pas k dire cependant que nous approuvions en en-
tier toute leur th^se. C'est ainsi, par exemple, que nous consi-
d6rons comme tr^s n^cessairc de garantir le secret de la faute
k la fille-mfere, et que nous n'approuvons point les adversaires
des tours lorsqulls disent qu'il ne faut pas exagdrer Timpor-
tance du secret. Le fait que rares sont les cas dans lesquels les
m^res, qui abandonnent, d^clarent tenir au secret, ne prouve
absolument rien; car il donne la proportion desmferes qui d6-
sirent le secret parmi celles qui abandonnent, ii ne dit pas le
nombre desm^resqui s'abstiennentd'abandonner parcequ*elles
tiennent au secret. A notre avis, il est certain qu'un certain
nombre d'avortemcnts ou d'infanticides se trouveraient annuel-
lement ^vit^s, si la fille-m5re pouvait confier son enfant k Tad-
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LE BfeTABLISSEMENT DES TOLRS. 21
ministration sans avoir la crainte d'etre connue ou recberch^e.
De m6me, nous ne pensons pas qu'il faille s'arrfiter k Tid^e
que le tour pourrait servir k recevoir des enfants legitimes, el
devenir ainsi un moyen de destruction de la famille. S'il y a en
effet des parents assez d^naturds pour vouloir se s^parer de leurs
enfants par ^oisme ou par vice^ mais sans y 6tre contraints
par la mis^re, il vaut mieux pour la soci6t6 que ces enfants ne
restent pas au contact de semblables parents. Et il est fort pro-
bable que les enfants que Tadministration recueillera ainsi h
leur naissance sont de ceux qu'elle aurait dii recevoir plus tard
comme moralement abandonn^s pour les soustraire aux mau-
vais traitements ou aux mauvais exemples de leur famille.
Mais ce qui nous decide contre le rdtablissement des tours,
c'est I'objection des advcrsaires de Tinstitution, fondle sur Tex-
p^rience que le tour surveilW ne garantit pas le secret, et que
non surveilld il pent ne servir que de botte k infanticide.
III. Et nous arrivons ainsi k conclure avec les partisans des
tours, qu'il y a lieu de s'occuper des moyens de pr^venir les
infanticides eu garantissant le secret de la fiUe-m^re; mais, con-
trairement k eux, nous ne pensons pas que le tour permctte
d'atteindre le but poursuivi. A notre avis, la meilleure solution
r^siderait dans la generalisation du syst^me de Tadmission k
bureau ouvert pratique dans le ddpartement de la Seine.
En quoi consiste ce syst^me? L'avis dont la teneur suit,
affiche dans la salle d'attente du bureau de la rue Denfert-
Rochereau, r^pond clairement k la question : — « Toute personne
qui pr^senteraun enfant en vue de Fabandon est avertie que des
questions vont lui etre posdes dans Tinterfit de Tenfant, mais
qu'il lui est loisible de nepas r^pondre ou de ne fournir qu'une
partie des renseignements demandes. La production du bulletin
de naissance ne sera pas obligatoire. »
La grande difference entre Tadmission k bureau ouvert en
usage dans le ddpartement de la Seine et la procedure d'admis-
sion pratiquee en province, est dans la possibilite pour une fille-
mire de deposer ou de faire deposer son enfant k Paris sans
foumir aucune esp^ce de renseignement ni sur elle, ni sur lui,
tandis que, dans les departements autres que celui de la Seine,
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22 REVUE PHILANTHROPIQUE.
radministration refuse d'admettre Tenfant s'iln'est pasr^pondu
a toutes les questions poshes, et notamment k la question du
domicile de la m^re.
Les d^fenseurs de Tadmission k bureau ouvert consid^rent
que cette procedure est bien sup(^rieure & Tinstitution des tours.
En effet, peuvent-ils dire, cette procedure a le m6me avantage
que le « tour )> ; elle a en plus des avantages que n'a pas le tour,
et elle a en moins les graves inconv^nients des tours.
L'avantage commun au syst^me du tour et k celui de Tad-
mission & bureau ouvert, et leur superiority sur la pratique ha-
bitueile des ddpartements de province, c'est que la procedure
de Tadmission k bureau ouvert garantit k lafille-m^re le secret
de sa faute, puisqu'elle lui permet d'abandonner son enfant,
sans aucune esp^ce d'explications.
L'avantage special k la procedure de Tadmission k bureau
ouvert, c'est que cette procedure permet d'ofifrir un secours k
la m5re, d'insister aupr^s d'elle pour qu'elle n'abandonne pas
son enfant. Et ce ne pent 6tre qu'un grand bien pour Tenfant
d'avoir it6 gard^ par sa mfere au lieu d'avoir 616 jeli au tour,
si la mferc est r^ellement digne des secours qu'on lui offre, et si
elle n'avait song^ k Tabandon que dans un moment de d^tresse
et de d^sespoir.
Enfin, le danger que nous avons signals comme inherent au
syst^me du tour, c'est-^-dire la possibility de ne remettre qu'un
cadavre dans le cylindre, ne se pr^sente plus avec la procedure
de Tadmission k bureau ouvert, puisque la ddposante est obligee
de presenter Tenfant k un fonctionnaire charg6 de le recevoir.
Et radministration n'a plus besoin avec ce systfeme de faire inter-
venir la police secrfete pour surveiller les d6posanles, comme
die serait obligee de le faire avec le systfeme des tours dans la
crainte de ne recevoir parfois que des cadavres.
A tous ^gards done le syst^me de Tadmission k bureau ou-
vert paratt se recommander au l^gisiateur.
II y a cependant des adversaires s6rieux, qui formulent des
objections dignes d'arrcHer Tattention.
M. Brueyre a pr6sent6 contre Tadmission a bureau ouvert,
telle qu'elle fonctionne dans le d6partement de la Seine, un
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LE RfeTABLlSSEMENT DES TOURS. 23
argument qui pcut ^tre de nature k diminuer l*enthousiasme
des partisans de ce mode d'admission. II critique la possibility
pour led d^posants de ne pas produire le bulletin de naissance
de Tenfant, et il fait observer que c'est ouvrir ainsi la porte h
toutes les fraudes, k tons les crimes, qu'avaient favorisds les
tours, que c'est faciliter des crimes de suppression d'etat, de
changement de filiation, d'abandon d'enfants legitimes.
La roponse aux critiques dirig^es par M. Brueyre contre la
dispense de la production de Tacte de naissance est assez facile.
M. Brueyre pretend que cette dispense pent favoriser des sup-
pressions d*<^tat. Qu'on se demande si Tobligation de fournir
cette piece ne pent pas pousser la mire k Tinfanticide, et de
deux maux choisissant le moindre on pr^fdrera le systime qui
expose k des suppressions d'etat que celui qui conduit k des
infanticides.
Mais ce qui rend I'opinion de M. Brueyre difficile k r^futer,
c'est que M. Brueyre soutient que la production de Facte de
naissance n'a pas pour consequence la divulgation du secret, et
qu on ne peutdis lors lui imputer de pousser k Tinfanticide.
Kn effet, si la mire est d^signie dans Facte de naissance, c*est
qu'elle ne tient pas au secret, et si Tenfant est indiqu^ n^ de
pire et mftre inconnus, la production de Facte de naissance ne
nuit pas k la mire.
Le dilemme parait irrefutable. Dans lasiancedul3 mail 892
k la Soci6t6 internationale d'Assistance, M. Lefort a cependant
prouv^ qu'il n'^tait pas sans riplique. M. Lefort a r^pondu k
la thfese de M. Brueyre qu'il pouvait se faire qu'une mire voulAt
abandonner un enfant k la condition de ne pas voir sa faute
divulguie, et avoir cependant laissi figurer son nom sur Facte
de naissance. II est possible en effet qn'k raison de son mitier,
de ses occupations, elle ne puisse pas riussir ^ clever son enfant
en bas Age. Elle se rdsoudra k Fabandon. Mais elle lui aura
peut-itre faitdonner son nom, afin d'avoir un lien qui la rattache
a lui, qui pourra la decider plus tard k le r^clamer, lorsqu'elle
aura fait Faveu de sa faute k sa famille, ou lorsqu'elle aura
trouvi un mari qui veuille accepter Fenfant. Pour Finstant
cependant, elle pent avoir grand int^rit k ne pas divulguer sa
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24 REVUE PHILANTHROPIQUE.
faute k radministration. Obliger les d^posantes k produire le
bulletin de naissance serait pousser les filles-m^res k recom-
mander aux declarants de dire que Tenfant est n^ de p^re et
m^re inconnus, c'est-i-dire ne leur donner le plus souvent
aucun etat civil.
G'est done it bon droit, nous semble-t-il, que le Conseil sup6-
rieur de TAssistance publiquc a rejet6 Topinion de M. Brueyre
qui voulait exiger des d^posantes la production du bulletin de
naissance.
Mais CO n est pas k dire que les critiques de M. Brueyre ne
soient pas fondles. 11 eat certain que Tadmission k bureau ou-
vert pratiqu^e sans production du bulletin de naissance ris-
quera de faciliter certains crimes ou d^lits, d'augmenter Ic
nombre des abandons, et par suite d*exigerdesressources p^cu-
niaires importantes.
Toute la question est de savoir si, avec ce mode d'admission,
on pourra diminuer le nombre des infanticides et des avorte-
ments, et si la perspective de ce r^sultat k obtenir n'est pas de
nature k faire accepter avec resignation toutes les consequences
que nous venons de signaler, et qui, pour Atre toutes regrettables,
f&cheuses, importantes, sont cependant moins dangereuses et
moins prejudiciables que les infanticides et les avortements. Le
systeme de Tadmission 4 bureau ouvert est-il de nature Sirem^-
tlier aux dangers resultant de la frequence des infanticides?Telle
est en r^alite la seule question que Ton doive se poser, pour
se prononcer sur le m6rite de ce mode d'admission des enfants
dans les services des enfants assist^s ?
Le releve des tableaux de la prefecture de police pendant
laperiode decennale de 1884 a 1894 donne des chiffres de na-
ture 4 ebranler la conviction des partisans de Tadmission 4
bureau ouvert. Et en effet le chiffre des infanticides s'est
trouve rester stationnaire dans la Seine de 1884 k 1893; il a
ete en 1893 comme en 1884 de 34 et le chiffre des avortements
s'est plutdt eleve, passant de 129 a 144.
Cette statistique ne doit cependant pas decourager les par-
tisans de la reforme et les obliger a accepter avec resignation
le maintien du statu quo. Et en effet les stalistiques fournissent
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LE RfeTABLlSSEMENT DES TOURS. 25
d'autres constatations de nature k montrer les bienfaits de Tad-
mission k bureau ouvert. L'une de ces constatations pent i&tre
puisne dans le rapport deM. ledirecteurdeTAssistancepublique
au pr6fet de la Seine pour Fannie 1893; il en ressort que le
nombre des enfants dont les parents ont refus6 de se faire con-
naitre a consid^rablement augments (il ^tait de 130 en 1884 et
s'^levait it 238 en 1893), et que la proportion des enfants exposes
sur la voie pubiique ou dans un lieu solitaire 6tait en 1893
inf^rieure de moiti^ k ce qu'elle 6tait en 1884. Or ce double
r^sultat a ^t^ obtenu sans que le nombre relatif des abandons
au-dessous d'un an ait subi d'accroissement. N'est-on pas, en
presence de ces chiffres, autoris^ It conclure qu'un certain
nombre d'enfants eussent 616 victinies du d^sespoir de leurs
mdres, si celles-ci n'avaient pas eu le moyen de confier leur
enfant k I'Assistance pubiique sans trahir leur secret ?
Notre affirmation que la possibility pour les fiUes-m^res de
pouvoir garder leur secret est de nature k diminuer le nombre
des infanticides se trouve d'ailleurs pleinement d^montr^e par
TenquMe de M. le docteur Socquet, lue k TAcad^mie de m^de-
cine le 14 avril 1891. De cette enqu^te r^sultait en effet que,
tandis que le nombre des infanticides reste stationnaire dans le
d^partement de la Seine ou se pratique Tadmission k bureau
ouvert, ce nombre a au contraire double et triple dans les d^par-
tements oil les filles-mferes ont le moins de facilit^s pour faire
I'abandon, double dans le Morbihan, la Mayenne, le Jura, la
Loire-lnf^rieure, les Hautes-Alpes, triple dans TOrne et les
Pyr6n6e8-0rientales.
L'on pent d^s lors conclure de ces di verses statistiques que
la generalisation du syst^me de Tadmission k bureau ouvert
apparatt comme un excellent moyen pr^ventif en mati^re d'in-
fanticide et, s'appuyant sur les raisons que nous avons donn^es,
le declarer infiniment preferable au systeme mecanique et
aveugle du tour.
LtOS MILHAUD.
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DISPENSAIRES GRATUITS
POUR LES ENFANTS MALADES
Jusqu'ii ces derni^l•e8 ann^cs, les mferes indigentes n*avaient
d'autre ressource pour faire soigner leurs enfants malades que
de les conduire soil aux h6pitaux sp^ciaux^ soit aux consulta-
tions gratuites des bureaux de bienfaisance.
Les h6pitaux sont des ^tablissements jd*assistance qui, mal-
gr6 leurs imperfections, rcndent h la soci^t^ les plus ^minents
services. C'est Ik que se Irouvenl, rdunis, les divers modes de
secours qu'une charit<^ inslruite par Texp^rience de plusieurs
Slides assure k tousles malheureux; c'est Ih que se concentrent
les lumi^res d'une science qui est toujours en progr6s pour le
bien de Thumanit^, c*est 1& enfin que les ddsh^rit^s de la vie
trouvent un abri sAr et imm^diat contre la faim et la maladie.
A cdt6 de ces avantages inappr^ciables, les h6pitaux pr^sen-
tent de nombreux inconvdnients. En premier lieu, les h6pitaux
sp^ciaux ne sont pas et ne seront jamais assez vastes pour ad-
mettre tons les enfants qui, sans fetre tenus de garder conti-
nuellement le lil, n'en r^clament pas moins un traitement
joumalier et parfois tr^s compliqud. La chose fAt-elle possible,
cette admission en masse entrainerait des [d^penses qu'aucune
municipality, si riche qu'elle fiit, ne pourrait supporter, et, au
point de vue des malades eux-mdmes, ce serait, d*une part, les
exposer k des dangers de contagion, et, d'autre part, cc serait les
enlever sans motifs suffisants k la maison paternelle : ce serait
courir le risque d'affaiblir les liens de famille el de d^sint^res-
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DISPENSAIRES GRATUITS POUR LES ENFANTS MALADES. 27
ser les parents de Tun de leurs premiers devoirs, qui est de
soigner leurs enfants malades.
A d6faut d'internement (dans les hdpitaux), on avait la res-
source de conduire ces enfants aux consultations hospitali^res
extemes ou Sicellesdes bureaux de bienfaisance. Mais les hdpi-
taux sont et seront toujours forc^ment places dans les quartiers
excentriques : pour y conduire son enfant, une m^re de famille
abandonne pendant plusieurs heures son manage, son travail,
ses aatres enfants : elle le fait une fois, mais elle ne pent renou-
veler chaque jour un aussi Jourd sacrifice, et alors la maladie
n^gligSe devient plus grave, se prolonge ind^finiment ou de-
vient incurable.
Au point de vue de I'^loignement, les bureaux de bienfai-
sance prSsentent des conditions plus avantageuses ; mais au
bureau de bienfaisance, comme du reste k la consultation de
rhdpital, ce qu'on y trouve est insuffisant pour constituer un
traitement r6ellement efficace. On y d^livre une prescription
^rite, au besoin mftme des medicaments; mais ces medica-
ments ne sont ni appliques ni administr^s sur place, et la negli-
gence des parents, leur mis^re, leurs occupations incessantes,
I'indocilite des enfants sont autant de conditions pour qu'a la
maison paternelle une ordonnance ne soit jamais s^rieusement
executee.
On se heurle done de chaque cdte k un ecueil : Thospitalisa-
iion est une mesure trop coilteuse et impraticable, faute dc
place ; Tassistance par le bureau de bienfaisance est incomplete
et insuffisante.
11 s'agissait de trouver une institution intermediaire aux
deux autres, qui permit de procurer gratuitement aux enfants
non alites un traitement aussi complet que celui de Thdpital,
tout en depensant moins d'argent et en assurant aux petits
malades la conservation des avantages de la vie de famille.
Gette institution estle dispensaire.
Le premier dispensaire cree en France est dft k la genereuse
initiative de M. le D' Gibert, du Havre (1875) et Ton pent dire,
suivant Texpression heureuse de M. de Foville, que du premier
coup il avait trouve la formule du but k atteindre et desmoyens
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28 REVUE PHILANTHROPIQUE.
k employer pour r^ussir. Depuis la creation de son dispensaire,
tous les ^tablissements du m6me genre, fond^s k Paris, en pro-
vince ou i r^tranger, Tont 6t6 sur le module de celui du Havre,
dans des proportions variables suivant les ressources qui6taient
mises k la disposition des fondateurs, et partout les r^sultats
obtenus ont 616 aussi heureux.
Pour donner une definition exacte et precise, on peut dire
que le but des dtspensaires est de venir gratuitement enaideaux
infants indiyents^ malades, mats non alitiSj quels que soient
leur dgey les maladies dont Us sont atteints, leur domicile^ leur
nationality, par des pansements, des applications dappareils^
par r alimentation, et par t administration de medicaments au
local mSme du dispensaire; de leur assurer de la sorte un traite-
ment efficace, tout en depensant le moins d argent possible et en
leur conservant les avantages de la vie de famille. C'est, en un
mot, le traitement d'une joum^e k Thopital, moins Thospitali-
sation.
Situ^s au centre des quartiers habitus par leurs clients, ils
sont i la port^e des families et, avec une perte de temps mi-
nime, les m^res peuvent chaque jour y conduire leurs enfants;
si elles sont emp^ch^es de le faire, unevoisine, une soeur atn^e
les remplace; d'ailleurs les enfants sontconnusau dispensaire,
leurs noms et le traitement quails ont k suivre sont inscrits sur
des fiches : la plupart peuvent venir seuls. Si leur 6tat g^n^ral
le permet, ils peuvent, tout en se soignant, continuer leurs
etudes: ils vont au dispensaire avant Touverture et apr^s la
sortie des classes.
Ce ne sont pas seulement les enfants A6}k malades qu'on
pr^sento jila consultation : d'autres, en imminence de maladies,
y trouvent de pr^cieux secours. Dans les families riches, k la
moindre preoccupation sur la sante de leurs enfants, les mdres
font appel ileur medecin, etsouvent, sans avoir de medicaments
k faire prendre, eiles arrivent, par un regime approprie, k
enrayer les consequences d*une imprudence ou d'un accident, i
prevenir le developpement d'une maladie. Toutau moins elles
calment leurs inquietudes.
Pour les meres indigentes, le dispensaire tient la place du
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DISPENSAIRES GRATUITS POUR LES ENFAiNTS MALADES. 29
m^decin de famille : 1^, elles sont connues, elles >se trouvent
dans un milieu bienveillant, dies ne sont pas, comme h la con-
sultation de rhdpitaly un num^ro, et si le m^decin ne juge
pas qu'il y ait de medicaments k prescrire, il leur donne des
conseils d'hygifene et leur indique les precautions k observer.
L*hygifene appliqu^e et la m^decine preventive, qui etaient
absolument inconnues de la classe ouvri^re, ne sont plus des
privities de la fortune.
Organisation des dispensaires. — Parmi les dispensaires, les
uns sont instalies dans des constructions ddjd existantes, qui
ont ete appropriees au mieux k leur nouvelle afTectation. Go
sont d'anciennes ecoles abandonn^es, parfois des boutiques, le
plus souvent des maisons de secours dont Tadministration de
r Assistance publique a concede tout ou partie. C'est dans un
atelier de photographic que M. Gibert a organise son dispensaire
Les autres occupent des immeubles specialement construits
en vue de leur destination.
Parmi ces derniers, celui de M"* Furtado-Heine occupe une
place Itpart, tantpar les sommes considerables qui y ontetecon-
sacrees que par la perfection avec laquelle les moindres details
ont ete prevus et executes. C*est un brillant ideal qu'il faut
connaitre et dont on pent essay er de se rapprocher, mais il
sera trfes rare que Ton puisse disposer de capitaux suffisants
pour realiser quelque chose d'analogue.
Les avantages d'une construction speciale ne sont pas dis-
cutables : neanmoins Texperience prouve que des resultats tr^s
favorables ont ete obtenus avec des installations tr^s modesles ;
le service est moins commode, les programmes theoriques sont
moins correctement realises, les soins donnes peuvent etre tout
aussi protitables. La question dominante n'est pas le local,
c'est surtout Torganisation du personnel et du fonctionne-
ment. II y a toutefois un minimum dont on ne pent s'ecarter.
Locaux indispensables : — Une premifere salle garnie de
bancs, dans laquelle attendent les consultants et dans laquelle
aussi .pout se faire Tadministration des medicaments ; — une
deuxifeme salle pour les contagieux, et il serait fort k desirer
que dans cette deuxieme salle fussent installees des boxes pour
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30 BEVUE PHILANTHROJMQUE.
les divers contagieux, ce qui n'existe nulle pari, — un cabinet
pour le m^decin, — et enfin une quatrifeme salle, la plus vaste
possible, pour les pansements, les applications d'appareils, Ics
injections nasales, oculaires et auriculaires, etc.
Dttns une partie de cette salle ou mieux dans une annexe,
il faut pr^voir une installation de bains et douches.
Ce minimma d'installation se retrouve partout, mais avec
des variantes. Ainsi i U rue du Terrage (X® arrondissement ),
le nombre des appareils ft douches est considerable etle nombre
des douches administr^es plus Mev6 que dans les autres 6ta-
blissements. Rue de Grim^e, rue Je8]i^Marie-J^go(XIII® arron-
dissement), le cdt6 baln^aire, mais cette fois sous forme de bains,
est trfts d6velopp6. Rue Labat, on donnede 20 & 2S 000 bains par
an. Rue Jean-Lantier (I^*" arrondissement), on acrd^une annexe
sp^ciale et isol^e pour le traitement de la teigne, une autre
pour r^glectroth^rapie. Dans plusieurs dispensaires, k cdM du
cabinet du m^decin, il y a une chambre noire outilMe pour
Texamen des yeux, du larynx, du nez, des oreilles.
On comprend que, suivant les ressources du budget et sui-
vant les tendances des organisateurs, on ddveloppe telle ou telle
partie du programme que Ton s*est donn^ ; mais, nous Ic r6p(5-
tons, il y a un minimum au-dessous duquel on ne pent descendre
sans compromettre les int^r^ts des maladcs.
La m6me remarque s'applique an personnel. Dans certains
dispensaires, il y a plusieurs m^decins qui font le service k tour
de rdle; dans d'autres, un ou plusieurs sp^cialistes pr6tent leur
concours pour les affections dont ils s'occupent particulii^rement.
A premifere vue, il semblerait indiqu^ de toujours s'assurer
le concours d'un m^decin et d'un chirurgien : mais rexp6rience
a prouv^ que la clientele d'un dispensaire du quartier est avant
tout mddicale, que les cas de chirurgie qui se presentcnt sont
g^ndralement de la competence d'un praticien ordinaire, et que,
pour les operations graves, il sera toujours preferable, si ce n'est
meme obligatoire, d'envoyer les malades dans les h6pitaux (1 ).
^ (1) Pour toute operation dune certaine gravite, il faut avoir recours au chlo-
roforme, c'est-i-dire avoir &. sa disposition un assistant experiments. Pour Tope-
ration, il faut des aides non moins habilcs ; il faut du linge, un outillage, des
instruments soigneusement sterilises. Pour les malades non infcrtes, il faut une
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DISPEJTSAIRES GHATUITS POUR LES EXFANTS MALABES. 31
Au point de vue du personnel medical, le dispensairc
Furiado-Heine se distingue encore de tons les autres par la
lai^eur de son organisation. Cinq doc tears en m^decine sont k
la t^te d'autant de services spdciaux et k chacun d'eux est attache
un assistant rempiissant les fonctions dlnterne. C'est encore
le cas d admirer la lib^ralit^ apportde par la fondatrice dans
Torganisation de son osuvre, mais c*est aussi celui d'ajouter qu'un
personnel aussi nombreux n'est nullement indispensable.
Le personnel d'un dispensaire rdduit au strict minimum
doit se composer d*un mddecin, d'une surveillante chargde de
Taider et d'exdcuter sur place ses prescriptions, d*une femmc
ou d'un homme de service.
A ce noyau fondamental qui existe seul dans beaucoup
de dispensaires trfes suivis, on pent adjoindre autant d auxi-
liaires que les besoins du service le r^clament et qu^ les
ressources budgdfoires le permettent. La condition indispen-
sable, c'est que la consultation soit rdguliferement faite tons les
jours i la m^me heure, que dans une dcuxi^me stance de Tapres-
midi, certains pansements soient renouvelds et les medicaments
administrds une deuxi^me fois. Le traitement ainsi organised'
repr6sente, nous le r^p^tons, celui d'une journde d'hdpital (1).
Medicaments et mat&iel de traitement. — Le dispensaire
doit dtre approvisionnd des medicaments, instruments et appa-
reils ndcessaires pour le traitement des maladies de Tenfance.
II ne s*agit pas ici de donner seulement des conseils Merits. 11 faut
faire ce quon pent appeler de la thdrapeutique en action, et
ex^cuter stance tenante tout ce qui est ndcessaire. Le mddecin
doit done avoir sous la main un materiel sufiisant, lequel, du
reste, la chirurgie opdratoire dtant dcartie, n'entratne pas k de
grosses ddpenses.
salie d'operation; pour les malades inrcctes, il en faut une autre. Un sujet ({ui
Tient d'etre chloroformd et op6r6 ne pent ^tre remport6 chez ses parents avaut
un temps plus ou moins long. En sonuue, vouluir faire de la chirurgie op^ratoire
dans un dispensaire de quartier, c'est se preparer des difflcultes de toutes sories
qui DC sont pas en rapport avec les services qu'on pourrait rendre.
(1) L© fait d'avoir un m^decin unique pr6sente pour les families certains
avantages : U arrive vite & connaitre tous les enfants, il salt leur histoirc, leiirs
ant^^dents h^r^ditaires, les maladies dont ils ont 6t6 atteint<, il est au courant
de la situaUon et des besoins de la famille.
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32 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Le choix des medicaments exige la plus s^vfere attention.
Toute preparation de luxe doit Mre laiss^e de c6te : le point
important, nous le r6p6tons encore, c'est que les medicaments
soient administr^s sur place.
Therapeutique alimentaire. — Dans les classes necessiteuses,
beaucoup de maladies de Tenfance ont pour cause unique Tin-
suftisance ou la mauvaise qualite des aliments. II n'y a pas de
medicaments qui puissent prevenir le mal que fait & un nouveau-
ne le lait appauvri d'une mere-nourrice dans la misftre ou le
liquide falsitie que Ton vend a bas prix sous le nom de lait de
vache : il en est de mfime pour Tenfant plus Age qui en pleine
croissance manque d'une nourriture suffisamment rep^ratrice.
Pour combattre la mis^re physiologique, resultat d'une veri-
table inanition, il n'y a qu'un moyen, donner aux meres nour-
rices et aux enfants, k titre de medicaments, et sur la prescrip-
tion du medecin, du lait, de la soupe, de la viande si c'est
possible, tout au moins de la poudre de viande. C'est ce qui a
ete vite compris par les administrateurs des dispensaires.
Depuis uu an, un service nouveau a ete organise dans plu-
sieurs etablissements (au dispensaire de Belleville, rue du Ghe-
min-Vert, rue Jean-Lantier, rue Jean-Marie-J6go, peut-etre dans
plusieurs autres) : la distribution journaliere de lait sterilise aux
nouveau-nes que leurs meres ne peuvent nourrir faute de lait,
k ceux qu elles ne peuvent nourrir qu'insufiisamment, aux
enfants plus ftges atteints de gaslro-enterite par suite de sevrage
ou de mauvaise alimentation. Ghaque jour, la surveillante dis-
tribue aux m^res en flacons fermes, laquantite de lait sterilise
prescrite par le medecin, qui tons les huit jours examine et p^se
les enfants et note sur une fiche les changements qui se sont
produits pendant la semaine. Les resultats obtenus ont ete des
plus favorables et il est k esperer que cette pratique se genera-
lisera (1).
^ Statistiques. — Pour toute institution d'un genre nouveau
(1) Dans un recent article, M. le D' Variot fail remarquer que les crdches et
les dispensaires semblent tout d^signes pour servir de centres aux distributions
de lait st6rilis6 que la municipality parisienne a Tintention d'organiser. Nous
sommes absolument de son avis.
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DISPENSAIUES GRATUITS POUR LES ENFANTS MALADES. ^3
dont on veut faire appr^cier la valeur, les statistiques sont in-
dispensabies. C'est ce qui a ^t^ g^n^ralement compris et orga-
nist dans les dispensaires.
Tout enfant nouvellement admis doit avoir une fiche num6-
rotie sur laquelie on inscrit son nom, son 4ge, son poids, sa
taille, Fadresse d6 ses parents et celie de son 6cole ; puis au jour
le jour, on porte les dates des visites, le diagnostic et Tindica-
tion sommaire du traitement.
On arrive ainsi k connaitre le nombre des consultants, le
nombre des cas de telles ou telles maladies, les quartiers et les
Socles qui en sont particuli^rement atteints, le nombre des
visites et la dur^e du traitement pour chaque maladie.
Gr&ceaux conditions de proximity etd'accfes facile des dispen-
saires, gr&ce h la facility du transport des enfants malades, au
service joumalier des consultations avec medications imm^diate-
ment appliqu^es, un grand nombre de maladies aigu^s peuvent
y ^tre trait^es : bronchites, coqueluches, embarras gastriques,
ent^rites, etc. Certaines affections ^ marche rapide et souvent
funeste, les ophthalmies purulentes des nouveau-nes par
exemple, y sont, plus ais^ment que partout ailleurs, enray^es
par un traitement ^nergique r^p^t^ matin et (soir. Mais ce sont
surtout les affections chroniques, toutes celles qui se rattachent
ii la scrofule, h la tuberculose, h la syphilis, les maladies du sys-
ibme nerveux, les affections de la peau, les lesions chroniques
des yeux, du nez, des oreilles, etc., qui trouvent au dispensaire
des traitements r^uliers et prolong^s que les families n'auraient
pu se procurer ailleurs. Les h6pitaux, faute de place, n'auraient
accepts aprfes une longue attente qu'un petit nombre des ma-
lades : le bureau de bienfaisance aurait donn6 une ordonnance
le plus souvent inex^cut^e : le dispensaire les traite imm^dia-
tement, et ainsi de nombreux enfants dchappent h des infirmit^s
qui les auraient laiss^s pour la vie k la charge de leurs families
et de la society.
En presence de ces fails, faciles k constater, on ne pent
s'^tonner du rapide d^veloppement qu'ont pris des institutions
sanitaires qui, il y a vingt ans, ^taient encore k pen pr^s
inconnues.
RBVUE raiLATTHROPIQUB. ~ U. 3
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S4 REVUE PUILANTHROPIQUE.
Depenses, — Parmi les dispensaires, les uns sonl soutenus par
les municipalit^s, les autres par des particuliers, d'autrcs par
des associations privies, congr^ganisles ou laiques.
Leurs modes d'administration et ieurs budgets sont tr^s
diffirents : cependant si Ton met ft part celui de M"* Furtado-
Heine qui fonctionne dans des conditions exceptionnelles et que
Ton peut dire inimitables^ il ressort de I'examen des divers
comptes rendus financiers que ce mode d'assistance est peu
coAteux, que la d^pense moyenne est de beaucoup inf^rieure ft
celle des hdpitaux, el cependant dans un tr^s grand nombre de
cas, le r^sultatoblenuest tout aussi favorable : de plus, Tenfant
a eu le double avantage de rester dans sa famille et de n'etre
expose ft aucun dauger de contagion.
On peut done dire avec M. le ministre de Tintdrieur (circu-
laire du 15 septembre 1887): « Crder des dispensaires c'estfaire
b6n6ficier des milliers de pauvres d'une medication preventive
prompte et rationnelle ; c'est faire Tdconomie de beaucoup de
maladies; c*est, en un mot, accroitre le capital de sant6 qui est
undes principaux aliments de la richesse publique et dela force
d'un pays. »
D' J. DUBUJSAY.
Liste des Dispensaires d^apr^s les dates de fondation.
1875 Dispensaire de M. Gibert, au Havre.
1883 (1 •' avril) . Hue Jean-Lantier, 15, I" arroudissement de Paris.
1883 (15 juillet). Rue de Crimee, 106. Society philanthropique, Xlll* arron-
dissement.
i88't — Madame Furtado-Heine, 8, rue Delbet, XI V« arrondisse-
ment.
1 887 — M. Ruel, 42, rue Sainte-Croix-de-la-Rretonnerie, IV"arron-
dissement.
1887 (t octobre). Rue des Pyrenees, 48. Soci6tephilanthropique,XX«arron-
dissement.
1887 — Hue Rodier, 32, CX« arrondissement.
1888 — Rue Petrarque, 21, XVI* arroudissement.
1888 — Rue des Cendriers, 45, XX" arrondissement.
1888 — Rue Labat, t4. Society phiianthropique, XIX« arrondisse-
ment.
1889 — Rue de la Jussienne, 2, II" arrondissement.
1881» — Rue Marie-Jego, 14. Societt'philanthropique,XUI« arron-
dissement.
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DISPENSAIRES GUATLITS POUR LES ENFANTS MALAUES. :r,
1889 ;4 ociobre). Hue Oudiiiot, i, V1I« arrondissement.
18*11 — Rue Antoine-Dubois, 4, Vl« arrondissement.
I SIM — Rue Legendre, 132, XVIP arrondissement.
fHiH — Rue Rennequin, 2t, XVI1« arrondissemenl.
I8*.»l — Rue Pasteur, 7, XII« arrondissement.
I8*J2 — Boulevard de Belleville, i24, XX* arrondissement.
I8;»2 — Rue Saint-Bernard, 35, XIP arrondissement.
I8U3 — Place du Danube, 2, XIX* arrondissement.
i89:< — Rue du Terrage, 14, X* arrondissemenf.
1893 — Rue de Charolais, 26, XII« arrondissement.
189» — Boulevard d'ltalie, 69, XIII* arrondissement.
iS*.K'9 — Rue du Cbemin-Vert, 70, XP arrondissemenl.
189:; — Rue de la Convention, 48, XV* arrondissemeiit.
1895 — Caisse des Ecoles du XVIIP arrondissement.
189;* — Rue de I'Equerre, 6, XIX« arrondissement.
1895 — Rue Pastourelle, 19, IIP arrondissement.
XHspensaires sp^ciaux pour Enfants tnberculeuz.
188* 1 4 octobre). Rue de la Tour-d'Auvergne, 17. OEuvre de Villepinte.
I8t>0 — Rue (le la Bortit*, 31. UEuvre d*Ormesson.
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L'ASSISTANCE JUDICIAIRE
SON ORGANISATION *, SON FONCTIONNEMENT ; LE8 R^PORMES A APPORTER
A LA LOI DU 22 JANVIER 1851
Qu'on ne s*y trompe pas ! il ne s'agit pas d'assistance pu-
blique, mais bien de V assistance judiciaire et, tandisque Tassis-
iance publique donne des secours aux pauvres, ['assistance
judiciairc, qui en est une des modalit^s, se contente de per-
mettre aux indigents* i'acc^s des tribunaux. Gr&ce k elle, on
pent plaider, sans en avoir les moyens ; il suf fit qu'une cause
soit juste pour qu'on obtienne gratuitement le concours des
avou^s, des huissiers, des avocats, en un mot de tons les gens
de robe, de ces gens de robe si injustement d^cri^s, et pour-
tant si d^vou^s k ceux qui souffrent ! Les magistrats eux aussi
jugenty avec une impartiality parfaile ; et les causes de Tassis-
tance judiciaire, m'a-t-on affirm^, jouissent maintenant d*un
tour de faveur aux chambres civiles.
L^s6 dans ses int^rfits, tromp^ dans ses afTections, victime
d'un accident, le pauvre, tout comme le riche, voit ses droits
reconnus en justice, ses infortunes cesser, son dommage ma-
teriel r6par6. 11 lui suffit de prouver son indigence pour que la
machine judiciaire se mette en mouvement, et qu'il assisle,
sans bourse duller, presque sans d-marche de sa part, k la con-
secration de son droit.
J'entends bien que cette situation n*est pas nouvelle, la
creation de Tassistance judiciaire remontant dejk k pas mal
d'ann^es ; mais je ne crois pas que son fonctionnement en soit
bien connu ; il me semble surtout que certaines ameliorations
sont k y apporter.
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L'ASSISTANCE JUDICIAIRE.
N'est-ce pas suffisant pour en parler un peu ?
Done, c'est la loi du SS Janvier 1851 qui r6g
ment I'assistancc judiciaire ; cette loi a bien 6t6 q
inodifi^e, mais pas dans son essence ; elle n'est pas
plus tout d'une pi^ce, elle a remplac6 d'autres lo
d6crets et Ton pourra consuller avec int^r^t, pour
question une id6e complete, les « d^cret du 18 juin 18i
loi, du 23 mai 1830, 7 aoftt 1850 ; d^crets du 16 ja
2 mars 1859, 18 juin 1884 ; loi du 15 juillct 1893, a
En province, le rouage est un peu moins compli
Prenons Paris pour exemple. C'est, dans les locai
de justice, un peu plus loin que la onzifemo Cham
tionnelle, que se tient I'assistance judiciaire. Com
s occupant sp^cialement de Tassistance : M® Despi
secretaire Taidant de sa longue experience, M*' Pel
figures connues au Palais, Tair terrible pour les p
d'avou^s qui viennent demander des renseigne
demeurant bons et paternels pour tous ces visiteurs,
teurs, plus souvent mis^reux qui crient justice ;
une quantity de scribes. Et, pour tous ces employ^
frais de bureaux, pour le chauffage, r^clairage,
m6s, etc., etc., une somme de 31000 francs vot
ans, par le conseil general de la Seine. En v6rite, (
ici qu'on pourrait parler de r^duire les credits !
Six sections s'occupent des demand es d'assistanc
compos^es chacune de cinq membres, nomm^s Tui
gistrement, Tautre par le tribunal, les autres par le
Fordre des avocats, la prefecture de la Seine, la CI
avoues. Les sections si^gent une fois par semaine
r6le ; une fois Tan, elles se r6unissent en assembl
membres des sections ne sont nommes que pour
jours design^s Tannee suivante ; mais il faut proc
installation, et tout le monde assiste h cette gra
m^me M. le procureur de la R^publique et un de se
Sait-on combien il y eut de demandes d'assis
ciaire, en Tann^e 1896? 14151 I 6432 furent adi
renvoy6es k une autre juridiction, au tribunal C(
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38 REVUE PJIILANTIIIIOPIQLE.
celui oil la demande aurait du, primitivemenl ^tre port^e;
2 13t furent abandonn^es ou transig^es et H28 furent rejetdcs
par les sections.
Les 6432 demandes qui furent admiscs, furent distributes :
54i8 au tribunal civil, 218 au tribunal de commerce, 766
aux diff^renles justices de paix. Je laisse de c6t(^, dans cette
statist ique, les demandes d'assistance form^es devant la
Cour par ceux qui perdirent leur procfes en premiere instance
ct qui, n'ayant pas les moyens d aller, h leurs frais, devant
une plus haute juridiction, furent quand m6me admis au
b^n^fice de la gratuity absolue de Tinstance k la Cour, je
laisse aussi de cdt£, dans mon ^num(§ralion, les demandes
d assistance judiciaire port6es devant la Cour de cassation, le
Conseil d'etat, car il faut savoir se limiter. Je me contente de
rappeler que devant toutes les juridictions — sauf un cas assez
curieux sur lequelje reviendrai — on pent demander et obte-
nir Tassistance judiciaire ; que, quand on Ta obtenue, et qu'on
a gagn(5 son proems, que Tadversaire acham6 vous traine de
cour en cour, elle vous suit et que,rayant, vous avez le b^nd-
ficc de la gratuity, non seulement de Tavocat qui s'enorgueillit
de d(5fendre pour rien la veuve et Torphelin, mais encore de
layout et mftme de I'huissier. L'assist6 est dispense provisoire-
ment du paiement des sommes dues au Tr^sor pour droits de
timbre, d'enregistrement et de greffe, ainsi que de toute consi-
gnation d'amende, et les actes de procedure faits k sa requ6te
sont vis(^s pour timbre et enregistr^s en d^bet.
J*ajoute que Tassistance judiciaire est seulement accord^e
pour avoir un titre ; qu'elle n'est accord(^e que dans les aflfaires
liligieuses; je tirerai, tout a Theure, des conclusions de cette
double observation.
Quelles sont les pidces que doit foumir celui qui soUicite
Fassistance judiciaire ?
La loi du 22 Janvier 1851 est formelle; c'est au procureur
de la R^publique qu'on expose son cas; on lui adresse :
1® Une demande sur papier libre, con tenant les noms, pr6-
noms, profession et domicile du demandeur, et de celui ou de
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L'ASSISTANCE JUDICIAIRE. 39
ceux centre lesquels le fulur assists veut agir judiciairement,
aiasi que I'^nonc^ succinct des fails du proems k engager^
2* l-n extrait du r6le de ses contributions ou un certificat du
percepieur de son domicile constatant qu'on n'est pas impost.
3® Une declaration attestant que le demandeur est, h raison
de son indigence, dans Timpossibilit^ d'exercer ses droits en
justice, et contenant T^num^ration d^taill^e dc ses moyens
d'existence quels qu'ils soient.
Le r^clamant affirme la siac^rit^ de sa declaration devant
le maire de son domicile ; le maire lui en donne acte au has de
sa declaration.
Le procureur de la Republique adresse aussit6t la demande
2i Tassistance judiciaire; un rapporteur est de suite commis;
dans les trois jours, il convoque au Palais le demandeur, le
questionne sur sa pretention, lui demande, ayant un pouvoir
souverain, des explications detaillees sur son cas particulier ;
puis, le rapporteur adresse une convocation au futur defen-
deur; il tf^che de s'eclairerde sonmieux sur la difficulte pen-
dante, il confronte les parties, les concilie si faire se pcul, et,
quand il a tons les renseignements, il fait un rapport a la sec-
tion, qui decide, dans la plenitude absolue de son droit, s'il y a
lieu d'accorder ou de refuser Tassistance, sans expression de
motifs, ni dans Tun, ni dans Tautre cas. C'est, au plus tard,
dans le mois, que la decision est rendue, k moins que des ren-
seignements ne soient demandes aux commissaires de police,
ce qui augmente un pen le deiai.
Les decisions du bureau ne sont susceptiblos d'aucun re-
cours; neanmoins, le procureur general, apr^s avoir pris com-
munication de la decision du bureau etabli prt>s d'un tribu-
nal civil et des pieces 4 Tappui, pent, sans retard de Tinstruc-
tion, ni du jugement, deferer cette decision au bureau etabli
pris la ixyuT d'appel, pour 6tre reformee s'il y a lieu (art. 12
de la loi du 22 Janvier 1851),
L'assistance judiciaire est accordee : la procedure est faite.
Si Tassiste gagne son proces et que Tadversaire soit con-
damne aux depens, Tlitat, par les soins de Tadministration de
renregistrement,recuperera cequ'il a avance; s'il restcquelque
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4a REVUE PHILANTHROPIQUE.
chose, les officiers minist^riels; avou^s ou huissiers, se le parta-
gent; sinon, ils en sont pour leurtemps^Ieur derangement, leurs
frais. Si le public savait cela, s'il connaissait le nombre consi-
dc^rable de dossiers d'assistance judiciaire qui encombrent les
etudes, il serait un peu moins porte k toujours critiquer les offi-
ciers minist^riels, ii comparer les huissiers &des oiseaux de proie.
Les huissiers, les avou^s sont mis k contribution par Tas-
sistance judiciaire ; ils se font un scrupule de suivre avec soin
les affaires de cette cat6gorie sp6ciale ; ils se montrent, en cette
matifere, gens de cceur ; je suis heureux deToccasion qui m*est
offerte, pour le dire bien haut.
11 est II peine besoin d*ajouter — et ce sera mon dernier
mot dans ces explications par trop techniques — que Tassis-
tance judiciaire, une fois accord^e, peut 6tre retiree, si Tas-
siste revient k meilleure fortune, ou s41 a surpris la decision
du bureau par une declaration frauduleuse. En ce dernier cas,
notre homme, qui n'est qu'un vulgaire escroc, est passible de
peines correctionnelles;et c'est la juridiction repressive qui se
chargera de lui apprendre qu'on n'essaye pas de voler, sans
danger, le bien des indigents. J'ai deji vu plusieurs affaires de
cette nature arriver jusqu'd Taudience publique, et je n'ai pas
ete desderniers, dans la presse, k applaudir k la condamnation
du coupable.
Voilk done Torganisation et le fonctionnement de Tassis-
tance judiciaire ; tout se passe fort bien & Paris, m6me en pro-
vince; et, cependant, tout n'est pas parfait dans la loi du
22 Janvier 1851. Des reformes sont a accomplir; elles sont ur-
gentes; m'est avis qu'on sen est bien peu preoccup6 jusqu'Ji
cette heure ; en tons cas, on n a rien fait aboutir.
Et d'abord, Tassistance judiciaire n'a ete creee que pour
conferer un titre k celui qui la demande; elle n'est jamais don-
nee pour aller jusqu'li Texecution de la sentence.
Expliquons-nous k ce sujet; c'est k mon sens le point le
plus important; c'est celui qu'il faudrait modifier.
Je suis creancier de X...; Tassistance judiciaire m'a ete ac-
cordee; un jugement a ete prononce affirmant ma creance;
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•>« nwr^v*
L'ASSISTANCE JUDICIAIRE. 44
mon d^biteur est solvable, des renseignements pr^is le disent.
L'huissier de Tassistance se contentera de signifier le juge-
menl, il n'ira pas plus loin ; il ne continuera pas sa procedure ;
ilfera quelquefois le, commandement, il n'ira pas jusqu'au
proems- verbal de saisie ; il n*ex^cutera pas mon d^biteur : il se
bornera k lui rappeler sa dette ; il ne fera pas rentrer ma
cr^ance.
Je suis m^re de famille : je suis vieille, dans la misfere : j ai
des enfants qui, sans 6tre fortunes, pourraient m'aider en me
donnant, cbacun, quelques francs par mois, ils refusent de
venir h mon secours; je les poursuis devant les tribunaux,
ayant droit it une pension aHmentaire : Tassistance judiciaire
m'a 6t6 accord^e et ]esjuges ont reconnu le bien fond^ de ma
demande, ils ont eondamn^ mes fils. L'huissier se bornera k
le leur dire, k leur signifier le jugement — pour faire courir
les d^lais — mais il ne les ex^cutera pas, etmoi,malheuDeuse,
je resterai dans le d^nilment le plus absolu parce que Tassis-
tance judiciaire est cr66e pour faire obtenir un titre h celui
qui le demande; elle n*a pas ^t^ invent6e pour permettre k
celui qui n'a rien et k qui on doit de poursuivre le d6biteur
jusqu'i ce qu'il ait pay6. A Tassistance judiciaire, on ne con-
naitpas le proc^s-verbal de saisie, la signification de venle,les
placards, les affiches, les insertions ; on ne sait rien de cette
procedure efficace qui fait rentrer le plaideur dans son dA; on
s'arr^le, k mon sens, au bon moment, car les actes d'ex^cution
coAtent tr^s cher (chacun variant entre 10 et 13 francs), et,
partant, Tassist^ n'a g6ndralement pas les moyens de sortir de
sa poche les d^bours^s ndcessaires; or, sans ces actes d* execu-
tion, on a des papiers dans sa serviette, on n'a pas un sou dans
son porte-monnaie.
L'assiste serait-il m^me reconnu, en justice, crdancier d'un
individu, ayant des propri^t^s, des maisons, qu*il ne pourrait
pas rentrer dans son bien ; la procedure de saisie immobili^re
est la plus longue, la plus coflteuse, et Tassistance judiciaire
n'est jamais accord6e k personne pour ex^cuter immobili^re-
ment.
D'aucuns, ne sachant pas, s'arr6tent Ik, attendant du temps,
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42 REVUE PHILANTHROPIQUE.
de la fortune, des moments plus propices; d'autres, conseill^s
pardes tiers habiles ou int€ress6s, s'en vont trouver Thomme
d'affaires qui avancera des fonds et pr^l^vera sur la rentr^e de
la cr^ance le plus clair des b6n6fices. N'est-ce pas un mal dans
un pays de democratic, mal que les bons esprits devraient es-
sayer d'enrayer?
Les bureaux d'assistance judiciaire le comprennent si bien,
que ne pouvant pas appliquer la loi qui choque souvent requite
la plus el^mentaire, ils T^ludent. Dans certains cas, en mati^re
d'opposition par exemple, de saisie-arr6t, Tassistance judiciaire
est accord 6e pour, aprds Tobtention du jugement, arriver h une
execution ; encore faut-il pour que cette faveur soit accord^e
que celui contre qui {'opposition est mise, soit un employ6 de
TEtat, d'une grande administration, ou d'un industriel connu
Tayant depuis de longues ann^es h son service.
Et, bizarrerie strange, quand leddbiteur entame contre son
cr^ancierla procedure de la validit<^ de saisie-arrfit, Vassistance
judiciaire est accord^e au cr^aneier primitivement assists ; on
consid^re ladifficult^ pendante comme une instance nouvelle et,
comme Taffaire revient devant les tribunaux,on donne au plai-
deur malbeureux le nouveau concoursde Tassistance judiciaire.
11 est a peine besoin d'ajouter qu'en mati^re de jugement
par defaut, la peremption etant de six mois, Tassiste a le droit
de faire ex^cuter la sentence qu'il a obtenue. Ce n'est pas pour
qu'il entre dans ses fonds, qu'on accorde ce droit a I'assist^;
c'est dans cette pens^e unique, que la loi sur Tassistance judi-
ciaire veut que les officiers minist^riels eteignent la procedure
pour faire courir les delais. L'assistd a droit k un titre s6rieux;
on le lui donne complet.
Pour ma part — et, si onconsultait les bureaux d'assistance
j udiciaire, ils seraient k peu pr5s tous de monavis, — j'estime
qu'il faut elargir, sur ce point, la loi du 22 Janvier 1851, et ne
pas se contenter de donner un titre ex^cutoire h Tassiste ; il faut
aller plus loin ot lui permettre, sans bourse d^lier, de rentrer
dans son bien, de faire ex^cuter par Thuissier le jugement ou
Tarrfet. Les frais nouveaux occasionn^s par cette procedure se-
raient pay6s plus tard par le d^biteur rdealcitrant.
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■ p**7^^h^v ''■ '■'^"^i"^
LASSISTANCE JUDICIAIRE. 43
Je sais bien que des objections se pr^sentent k I'esprit
d'hommes biea intentionn^s^ qui out 6tudi^ la question, et qui
h^sitent devant ma proposition. Us disent: Mais souvent l*as-
sistance judiciaire est obtenue par le demandeur et le d^fen-
deur; comment voulez-vous qu'on execute quelqu'un qui n'a
pas le sou? Ou encore : Le d^fendeur qu'oncroit recalcitrant est
quelquefois un homme dans la g^ne ; si vous donnez k Fassist^
le secours de rhuissier, cet officier minist^riel ira souvent
trop loin et ruii^era le d^biteur. Ma r^ponse sera simple. Je
dis, d'abord, que si le d^biteur est insolvable, un proc^s-verbal
de carence le constatera de suite et, \k ou il n'y a rien, le roi
perd ses droits, selon le vieil adage ; Vassist^ devra se contenter
de cette Iriste situation. Puis, ai-jc trop k m'apitoyer sur le
sort de celui qui doit, ne suis-je pas dans Tobligation de
donner, sans r6sei*ve, mon concours a celui qui a un titrc re-
connu par justice?
Entin, pour couper court k toutc difficult^, on pourrait
completer ma proposition et dire : « Quand I'assistd aura son
titre, il retournera devant les bureaux d'assistance pour ^tre
soutenu dans la procedure d'ex^cution ; le bureau seul d^cidera
si, oui ou non, il y a lieu d'accorder Tassistance judiciaire. »
L assisti^ aurait droit, ainsi, et k son titre et aux moyens d'ar-
river a ex6cuter son ddbiteur.
Voila la premiere rc^forme que j'avais a signaler; elle est la
plus importante : il y en a d'autres k accomplir.
J'ai dit plus haut que Tassistance judiciaire n'6tait pas ac-
cordie en mati^re correctionnelle; le l^gislateur, pour la re-
fuser, est parti de cette id^e qu'en correctionnelle, il n'y a pas
de frais. On a seulement bcsoin d'un avocat; or, Tavocat
d'office est toujours k la disposition du pr6venu malheureux ;
c'est un des litres de gloire du barreau frangais, de se tenir
toujours a la disposition de Thomme qui n'a rien, quelque in-
digne que soit sa situation. Le criminel le plus endurci, le
traitre lui-mdme n'a qu'Ji s'adresser au b&tonnier etil revolt,
quelques jours apr^s, la visite d'un d^fenseur, quelquefois
jeune et obscur, d'autres fois parvenu k la c^ldbritd, toujours
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44 REVLE PHILANTHROPIQUE.
pr^t k d^fendre la liberty, I'honneur, les int6r6ts du detenu.
Mais est-ce sufiisant, et le I^gislateur n'a-t-il pas 6i6, ici en-
core, sinon induit en erreur, au moins victime de son ignorance
des lois ant^rieures? En mati^re correctionnelle, il y a le de-
tenu : c'est bien; mais il y a aussi la partie civile; la partie
civile est tenue d'exposer des frais : que dis-je? m6me si elle
triomphe, si elle gagne son proems, il lui faudra payer le Tr^sor,
sauf lo recours qu'elle a centre la partie condamn^e; si la partie
condamn^e est insolvable, c'est elle qui paiera tout de sa poche ;
et, dans bien des cas, beaucoup n'en ayant pas les rooyens, ne
risquent pas de se porter partie civile dans un d^bat correc-
tionnel. Or, ici, il n'y a pas qu'une question d'int^rfets en jeu,
il y a sou vent une question d'honneur k faire trancher par les
tribunaux; pourquoi done le pauvre h^re ne pourrait-il pas, par
Tassistance judiciaire, avoir acc^s k la barre correctionnelle, et
avoir la possibility de faire ex^cuter les decisions rendues par
la justice repressive? A-t-il ^t^ diHam^, injuria? comment
voulez-vous qu*il assigne son adversaire, s*il n'a pas le premier
sou pour payer les frais d'huissier?
Est-il ouvrier, victime d'un accident; pourquoi ne pourrait-
il pas, k la barre m6me, k Theure oil I'on juge Timprudent
qui est cause de ses malheurs, se porter partie civile ? Et s*il
est malade ce jour-la, s*il ne pent pas se transporter k Tau-
dience, comment voulez-vous qu*il se fasse reprfeenter par
des conclusions d'avou^ qui coiltent quelque chose, lui qui
ne gagne rien dcpuis des mois et qui n*a souvent pas un
sou vaillant k la maison, de quoi donner la nourriture k ses
enfants?
Que dis-je I le pr6venu a-t-il 6i6 condamn^ k des dommages-
int^r^ts, k la restitution d'une somme qu'il avait audacieuse-
ment d^rob^c, soit par escroquerie, soit par abus de confiance.
Comment voulez-vous que la victime de ce m^fait l6vc le juge-
ment, le signifie, si elle est ruin^e, et que I'Etat Toblige, pour
arriver k ses fms, k avancer les frais du Tr^sor?
Je pourrais multiplier les exemples, qui abondent k Tinfini ;
je n'ai, je Tesp^re, quk montrer le mauvais c6te de la loi, k
dire quelle en est la raison pour qu une rc^forme intervienne. II
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L'ASSISTANCE JLDICIAIRE. 45
est n^cessaire que Tassistance judiciaire soit accord6e aussibien
en mati^re correctionnelle qu'en matifere civile.
Je comprends que I'assistance judiciairenesoit pas accord^e
pour aller au conseil de prefecture ou devant les prud'bommes,
car, lit, il n'y a ni frais ni droits d'aucune sorte ; je ne com-
prends pas pourquoi elle n'est pas accord^e en mati^re correc-
tionnelle.
Mais poussons plus avant la discussion de la loi du 22 Jan-
vier 1851 et cherchoos encore les modifications qu'il convien-
drait d*y apporter.
L*assistance judiciaire n'est accord6eque lorsqu'onse trouve
en presence d'un litige ; il faut un diflF^rend entre deux parti-
culiers, ou une difficult^ sur une question que seule la justice
peut trancher: telle, une question d'dtat, pour vous permettre
d'avoir recours k Tassistance judiciaire, en tons cas pour que
vous puissiez Tobtenir.
Est-ce suffisant? Je ne le pense pas; notre Code fourmille
en obligations sp^ciales qui devraient comporter la possibility
d'avoir le benefice de Tassistance judiciaire, car elles sont quel-
quefois trfes on^reuses, vous contraignant h passer par les etudes
d'officiers minist^riels ou d'auxiliaires de justice et, dans ce cas,
pourquoi ne pasFaccordcr ^celui qui la demande et qui joints
sa requMe toutesles pieces justificatives?
Les bureaux d'assisfance judiciaire Font si bien comprisque,
par faveur sp^ciale, ils Taccordent, outrepassant un pen leurs
droits, pour la reunion d*un conseil de famille, pour dresser un
inventaire, pour renoncer Ji une succession, i une communaut6,
etc., etc., niais ils la refusent quand il s'agit de frais d'actes no-
taries ; vous allez voir par un exemple, que ce refus, motive par
le texte mfime de la loi, ne peut pas raisonnablement se com-
prendre.
Vous voulez vous marier; vos parents refusent de donner
leur consentement k la celebration de votre union : pour arriver
k prononcer le oui sacramentel devant M. le maire, il vous
faudra faire k votre p^re, k votre mere, des sommations dites
respectueuses. Or, ces sommations doivent passer par I'etude
du notaire, non par celle de I'avoue ou de Thuissier. Sait-on
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J6 REVLE PHILAXTHROPIQUE.
combien dies coutent? Depuis la loi de 1896, il n y a plus qu'une
sommation respectueuse ; elle cotkte k peu prts SO francs. On a
beau s'aimer : ou diable voulez-vous que des ouvri^res qui
ont du mat 4 avoir des meubles puissent prendre une pareille
somme? Demandez alors Tassistance judiciaire; elle vous sera
rei'us6c; on vous rtjpondra qu'il ne s'agit pas ici d'un litige, au
sens juridHiiie du mot, el vous serez, tr^s poliment, pri6 de
passer ailleurs.
Et parce que Tassislance judiciaire ne leur a pas 6t6 accor-
d6e, je sais des malbeureux qui se sont mis en manage libre,
augmentant ainsi le nombre d^jk si grand des enfants naturels.
J'aurais, certes, tort de pousser les cboses trop loin; mais
ne pourrait-on pas songer un peu k cette situation sp^iale,
alors qu'on forge tons les jours des lois pour faciliter les ma-
riages r^guliers et que tant de statistjciens se lamentent dc la
diminution sensible des enfants legitimes. On me dira que
c'est une petite cause qui entraine de bien grands effets; pos-
sible! mais aussi pourquoi ne pas la faire disparaitre?
Voil^, sur les principes mdmes de la loi, les critiques que
j'avais k apporter, les objections que j'avais k formuler, les
r^formes quej'avaisk proposer.
11 y en a d'autres; elles touchent des points de detail fort
int^ressants ; qu'on me permelte de les signaler.
I/art. 8 de la loi du 22 Janvier 1831 porte : « Toute personne
qui reclame Tassistance judiciaire adresse sa demande sur pa-
pier libre au procureur de la rc^publique du tribunal de son
domicile. »
Qu'entend-on ici par domicile? C'est k ce propos que les
difficult^s commencent. Kn droit civil fran(;ais,le domicile est le
si^ge l^gal d'une personne ; c*est son si^ge juridique et, partant,
fort sou vent fictif. L art. 102 voulant en donner une definition
precise dit : « Le domicile de tout Frangais, quant a Texercice
de ses droits civils, est au lieu ou il a son principal ^tablisse-*
ment. » Quant a la femme marine, de par Tarticle 108, alin^a 1,
elle n'a point d'autre domicile que le domicile de son mari.
Comment s'opfere le changementde domicile? I/article 103
nous r^pond en ces termes : « par le faitd'une habitation rdelle
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LASSISTANCE JUDIGIAIRE, M
dans un autre lieu, joint a rintention d'y fixer son principal
^tablissement. » Et la jurisprudence decide que cette intention
r^ulte d'une double declaration faite k la mairie du lieu qu'on
quitte, h la mairie du lieu dans lequel on d6sire venir sMnstal-
ler, suivie du transfertde Thabitation (Cassation, 23 mars 1875).
Donc,vous 6tes domicilii en Corse; puis, le pays ne vous plai-
sant plus, vous venez habiter Paris. Vous ne faites pas la double
declaration en quittant Ajaccio ou vous aviez votre principal
etablissement et en venant k Paris ou vous ddsirez vous in-
staller.
Enarrivant dans la capitate, vousMes victime d*un accident;
vous n'fetes pas riche ; vous demandez, pour avoir des dommages-
int^rMs, le benefice de I'assistance judiciaire. A quel procureur
allez-vous envoyer vos pieces? Au procureur de Paris ou au
procureur d'Ajaccio? Votre domicile est toujours a Ajaccio, car,
pour son changement Ugal, vous ne vous 6tes pas conform^
aux prescriptions de Tarticle 103.
C'est done k Ajaccio qn'il faut vous adresser. Mais, parmi
les pieces h joindre h la demande, il faut que le r6clamant
affirme la sinc6rit6 de sa declaration devant le maire de son
domicile; il lui sera done n^cessairede retourner k Ajaccio pour
remplir cette formality, sinon Tassistance judiciaire lui sera
impitoyablement refus^e.
Notez qu'i Paris les membres du bureau d 'assistance ne
sent pas tr^s formalistes; ils dvitent, autant que fairc se pent,
de froisser T^quite et ils ferment souvent les yeux sur les
exigences Idgales, quand elles aboutissent a Tinjustice; on veut
qu'on ne dise plus : Summum jusy sitmma injuria; mais, en
province, on est plus sdv^re; et je sais des bureaux d'assis-
iance judiciaire, notamment au centre de la France ou « le do-
micile » est « le domicile » pour le futur assists et ou des
difticultes sans fin sont cr66es au malheureux qui ne remplit
pas a la lettre les prescriptions de la loi de 1851.
Or, ces difficultes arrivent dans des cas nombreux; on pent
se les imaginer ais^ment; il m'u suffi d'en signaler une pour
qu'il me soit permis de ne pas insister davantage. Comment
alors sortir de cet imbroglio?
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48 llEVUE PUILANTHROPIQUE.
G'est bien simple; en remplaQant dans le texte de loi le mot
domicile par le mot residence.
La r6sidence, lout le monde est d'accord sur ce point, est
le si^ge r^el, le si^ge de fait de la personne. EUe est au lieu de
rhabitation [ordinaire de la personne, par consequent, soit au
domicile, soit ailleurs.
Et partout, tout se passera, sans discussion, le mieuxdu
monde avec cette petite modification.
Vous voulez faire une demande d'assistance; adressez-vous
au procureur du lieu dans lequel vous vous trouvez; de m6me
pour la declaration k la mairie, de m6me pour le ceriificat du
percepteur etablissant que vous n'^tes pas impost.
Mais, me dira-t-on, vous allez cr^er des abus sans fin. Des
individus qu'on ne connaitra pas, riches peut-^trc, souvent
pen interessants, obtiendront ainsi Tassistance judiciaire.
Je ne crois pas que ce soit \k une objection sdrieuse. Vous
pourrez d'abord, avant de vous decider, vous bureau d'assis-
tance, faire prendre des renseignements par le commissaire de
police du quartjer qu'habite Timp^trant; vous pourrez aussi
ordopner une petite enqu^te aupr^s des voisins, des camarades
de travail de Tindividu.
Vous pourrez enfin... 6tre induit en erreur; mais je pr6fferc
cela h la situation que vous cr^ez aujourd'hui Ji celui qui ne
pent pas, h cause d'arguties juridiques, obtenir I'assistance
judiciaire et qui cependant m^riterait de Tavoir.
Et puis, quandon vous a tromp^, on est passible du tribunal
correctionnel. C'est une ^p^e de Damocles suspendue sur la
t6te du futur assists ; perspective suffisante pour Tcmpfecher de
mentir... Ji moins qu'il ne soit par trop gredin; en ce dernier
cas, il vous tromperait tout de m^me.
Qa n'est pas tout.
L'article 12 de la loi de 1851 contient, k mon avis, deux id^es
d'un ordre diif^rent, qui choquent un pen Tdquite et que je
desirerais voir completer.
La premifere, c'est que le procureur g^ndral a seul le droit
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L'ASSISTAKCE JUDltlAIRE. 49
de faire appel de la decision du bureau d'assistance, qu'ellc
soil favorable ou d^favorable h celui qui la demande.
En pratique, leprocureur gdn^ral ne fait appel que lorsque
la demande d'assistance est refus^e h quelqu'un dont le cas est
int^ressant. Je voudrais, moi, que cet appel puisse 6tre interjet^
par le demandeur et aussi par le d6fendeur.
Les proems entam^s avec le b^n^fice de Tassistance judiciair^
sontquelquefois perdus en justice ;<3elatient^ ce qu'on se montre
loujours tr^s large pour Taccorder; or cela n'arriverait pas, ou
cela arriverait moins si le d^fendeur h Tassistance qui n'a pas
pu convaincre le rapporteur, ou qui n*a pas pu se presenter aux
convocations revues, pouvait faire appel de la decision, discuter
k nouveau son cas devant un autre rapporteur, lui apporter
des pieces nouvelles, se faire entendre de lui.
De cette fagon on ^viterait h un d^fendeur des frais judi-
ciaires toujourstrfes coAteux, mdme quandongagne son proems;
on 6viterait k T^tat des pertes d'argent inutiles ; on ^viterait
h des Iribunaux charges les pertes de temps qu'exige Texamen
de ces proems d'assistance qu'on n'aurait pas dH entamer.
L'article 12 decide aussi que les decisions du bureau ne
peuvent Mre communiqu^es qu'au procureur de laR^publique,
jila personne qui a demands Tassistance et k ses conseils.
Pourquoi les decisions seulement, et pas toutes les pi&ces?
Pourquoi cette faveur accord^e au demandeur, jamais. au
d^fendeur?
Le droit devrait 6tre le mfime pour tons les deux ; j'avoue
ne pas comprendre la raison de cette difference qui pent
amener des conflits sou vent fort regrettables; je demande qu'on
la fasse disparaitre.
Je voudrais aussi que Fadministration de Tenregistrement
flit tenue de signifier les jugements par d^faut, d'aller toujours
jusqu'^ Tex^cution, dans certaines affaires qui concement
r^tat et la capacity des personnes, bien qu'il n'y ait dans la sen-
tence aucune condamnation p^cuniaire. Prenons, par excmple,
un divorce. Un assists obtient le divorce k son profit, le ji|ge-
ment estprononc^; il est par d6faut,la partie adverse ne s'^tant
pas pr^ent^e ; Tenregistrement ne veille pas k Tex^cution du
HKVUB PHILAIfTHROPIQUE. -^ II. 4
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50 HEVL'E PHILANTHROPIQUE.
jugementy n'y ayant auc^n int6r^t, puisque aucune coiidamna-
tion p^cuniaire n*est prononc^e centre le d^fendeur.
Certains d^lais passent, le jugement est p^rim^ ; Tindividu
qui croyait 6tre divorce ne Test plus; ilfaut tout recommencer.
U y a 1& une source de responsabilit^s pour les avou^s; il pour-
rait y avoir des consequences graves pour ce divorc6 d*un genre
tout nouveau qui pourrait commettre de bonne foi pourtant des
delits ou mdme des crimes : des adult^res, des entretiens de
concubine au domicile conjugal, ou m^me le crime de bigamie.
Ne devrait-on pas porter remade ft un pareil 6tat de choses?
Mais si j'abordais T^tude d^taill^e de la loi sur le divorce
a mettre en harmonic avec les principes de la loi sur ['as-
sistance judiciaire, je ne sais plus ou cela pourrait me con-
duire. Qa n'est plus la loi de 1851 qu*il faudrait modifier; ce
sont les articles 229 et suivants du code civil, dont il faudrait,
au moins en certaines parties, demander Tabrogation.
Jed^sirais aussi parlerde la creation d'une caisse sp^ciale
pour faire des avances aux malheureux qui ont en mains un
titre de cr^ance qu'ils ne peuvent pas ex^uter, le jugement
n'6tant pas ex^cutoire et Tadversaire les tralnant devant tons
les degr^s de juridiction : tribunal civil, Cour d'appel. Gourde
cassation; c*est Ik un sujet des plus int^ressants, digne d'appe-
ler, de retenir Tattention de tons ceux que passionnent ces
questions d'assistance.
Je pr^f^re, dans cet article, me borner k t'examen de la loi
du 22 Janvier 1851.
Avant de terminer, je veux dire un mot des projets de loi
pr^sent^s aux Chambres sur Tassistance judiciaire, comme aussi
parler un peu de ce qui se passe k T^tranger.
II y a longtemps d6jk que les r^formes de Tassistance judi-
ciaire ont ^t^ mises sur le tapis ; plus on va et plus il semble
qu'on se d^sint^resse de la question, alors qu*il faudrait plus
que jamais s'en pr^occuper. Le 24 mai 1878, Jules Favre,frappe
des difficult^s particuliferes qu'un mineur poiivait rencontrer
sur sa route au cas ou sa fortune serait ob^r^e, ck*itiquale sys-
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L'ASSISTANGE JUDICIAIIIE. M
l^me de protection ^tabli par notre code ; il d^clara qu'il 6tait
inapplicable aux indigents. De suite le grand orateur d^posa sur
le bureau du S^nat un projet de loi concernant Tassistanoe ju-
diciaire.Il voulait qu'on accordftt I'assistance en toutes mati^res
ei que ses effets fussent 6tendus k Tex^cution des jugements.
Les id^s ^mises par Jules Favre ^taient excellentes ; on n'en
comprit pas la grande port6e politique et sociale ; le projet de
loi erra de commissions en commissions et Jules Favre mourut
sans rien avoir fait aboutir.
Plus tard, le 27 mai 1882, MM. EmileBrousse, Louis Blanc,
suivisde quelques autres collfegues,proposferent une r^forme
g^n^rale de Tassistance judiciaire. La composition des bureaux
devait changer d'apr^s eux ; les membres, en grande partie du
moins, seraient nomm^s par le peuple; des ddlais ^taient im-
partis pour statuer plus vite sur les demandes; les ouvriers
victimes d'un accident auraient droit, ipso facto ^ au b^n6fice
de Tassistance judiciaire.
En juin [de la mdme ann6e, MM. Million, Antonin Dubost,
Louis Perra8,etc.,etc.,se pr^occup§rent de cette situation. lis
avaient surtout en vue Tassistance judiciaire devant Ja justice
de paix; illeur semblaitquUl 6tait vraiment [on^reux pour Tin-
digent de porter sa demande au procureur de [la R^publique du
tribunal de I'arrondissement, de remplir certaines formalit^s par
trop complexes ; aussi, pour les affaires de la competence des tri-
bunaux de paix, les auteurs du projet eurent-ils Theureuse inspi-
ration de cr6er le bureau d'assistance cantonal et, naturellement,
en ce cas, Tassistance devait s'^tendre aux voies d'exdcution.
Enfin, en 1891, M. Chollet, que les r6formes judiciaires in-
t^ressent, voulut, lui aussi, faire aboutir un projet de loi sur
Tassistance. Frapp6 des lenteurs mises par les bureaux pour
r^pondre aux diff^rentes demandes qui leur sont adress^es,
M. Chollet voulut leur impartir un d61ai, sous la surveillance
du procureur de la R^publique et, pour que les proems de cette
nature fussent jug^s avec c^l^rit^, il demanda, dans chaque
tribunal, la creation d'une audience suppl^mentaire pour toutes
les affaires relatives li des indigents.
Yuins Merits, peines inutiles I Tons ces projets so sont tratnds
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L 12 REVUE PHILANTHROPIQUE.
I
de commission en commission sans aboutir et les legislatures
I ont suivi les legislatures sans qu^aucun d'entre euxaitvu le
jour de la discussion pubUque. Or^ pendant que chez nous, en
France, on ne faisait rien sur un sujet pourtantsi int^ressant,
a Tdtranger, on proiitait de nos travaux et on amdliorait Tassis-
tance judiciaire.
En Italic, — ddcret royal du 6 ddcembre 186S, article 3, —
Tassistance judiciaire est etendue aux actes d'exdcution; on
pent Tobtenir en mati(*re contentieusc et en mati^re gracieuse,
c*est-k-dire, sans proems.
En AUemagne, — ddcret du 6 ddcembre 1865,— la situation
est la m6me.
En Belgique, — loi du 27 juin 1881, — lassistance judi-
ciaire est accord6e on mati^re correctionnelle et en mati^re cri-
minelle; certes, comme chez nous, la defense des accuses est
assuree devant toutes les juridictions ; mais aussi, Tindigeht
pent se porter partie civile et, tons les actes 2l ce relatif sont
vis6s pour timbre et enregistrds en debet.
On ne comprend pas que de pareiUes reformes n*aient pas
ete inserees dans les lois d'un pays essentiellement democra-
tique comme la France!
Pour finir, un mot encore sur nos relations, k propos de
Tassistance judiciaire, avec les nations etrang^res.
Nous avons des traites diplomatiques avec les puissances
de TEurope et de TAmerique, qui permettent aux etrangers de
«lemander et d'obtenirTassistance judiciaire en France; k titre
de reciprocite, les Frangais qui habitent ces differents pays,
obtiennent lk-bas,quand ils ne sontpas riches et qu'ils veulent
plaider, le benefice de Tassistance judiciaire.
Sait-on, cependant le pays avec lequel nous n'avons aucun
traite?... Je le donne en cent I... La Russie ! Un Russe etabli en
France ne peut pas obtenir, chez nous, Tassistauce judiciaire
et, r6ciproquement, un FranQais etabli en Russie ne peut pas
Tobtenir davantage.
N'est-ce pas bizarre et notre Ministre des Affaires etrangeres
ne pourrait-il pas d'urgence faire cesser une pareille anomalie,
alors que nos relations avec la Russie deviennent, tons les
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L'ASSISTANCE JUDIGIAIRE. 53
jours, plus fr6quentes? La question vaut la peine qu'on la re-
solve et qu'on se presse.
Et maintenant, il faut conclure.
En principe — je n*ai pas h le dissimuler — la loi est fort
bonne : dans la pratique, elle a donn6 lieu h des difficult^s
nombreuses, il ne faut pas qu'elles se renouvellent. Qu'on ouvre
aux indigents la porte toute grande de I'assistance judiciaire ;
qu'on ne retienne pas d'une main ce que de Tautre on a lair
de leur oclroycr g^n^reusement.
La loi a 6t6 cr6de pour donner un titre au plaideur malheu-
reux ; pour qu'elle soit complete, qu'on foumisse k celui qu'on
veut obliger, le moyen de se faire [payer; que I'assistance
judiciaire lui permette d'ex^cuter son adversaire ; le titre c'est
bien, Tex^cution ce sera mieux.
L'assistance judiciaire est accord^e devant certaines juri-
dictions, pas devant d'autres, telle la police correctionnelle.Que
Tasistance judiciaire soit accord^e pour plaider devant toutes
les juridictions.
Qu'on en fasse aussi b^n^ficier les malheureux toutes les
fois qu'une loi leur impose I'obligation de faire un acte extra-
judiciaire qu'ils n'auraient pas les moyens de payer : je gage
que les notaires vis^s par cette r^forme consent! raient de tr^s
bonne grice k s'y soumettre.
Qu'on examine enfin ces questions du domicile, de la com*
munication des pieces au demandeur, de I'ex^cution de toutes
les decisions rendues au profit d'un assists ; qu'on revise nos
trait^s avec les puissances ^trang^res; je ne dis pas que de cette
fagon on aura une loi parfaite, mais j'affirme qu'on aura fait en
justice des r^formes int^ressantes en faveur des malheureux.
Ne sera-ce pas de la bonne besogne?
M«B. MONTEUX,
Avocat k la Cour d'appel,
R^dactcur en chef do la revue: Us Prods CiUbres.
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PLAIDOYER
EN FAVEUR DES ENFANTS fiTOURDIS ET PARESSEUX
C'cst une v6rit6 parfaitement 6tablie k I'heure actuelle qu'il
existe une « mddecine de Tesprit ». On commenced Tappliquer
aux cas menagants, ne serait-il pas temps de Tappliquer aux cas
plus b^nins? En thf^rapeutique^ on ne s'occupe pas seulemenl
du typhus et du cholera, on s'occupe aussi de la rougeole. Je
demande done que Ton cesse de trailer, par la consigne, les
enfants ^tourdis et les paresseux.
lis sont l6gion ; et, jusqu'ici, on les a trainds aux g^monies,
comme s'ils 6taientde grands coupables.
Pour les autorit6s compdtentes, un ^colier paresseux est un
enfant qui ne veut rien faire. Pardon, fetes-vous sAr qu*il pent?
L'enfant n'est pas plus responsable de ses aptitudes intel-
lectuelles, que de sa constitution physique. Lui ferez-vous un
crime de ce qu'il sera lymphatique ou nerveux?... Lui repro-
cherez-vous la couleur de ses cheveux, ou la nature de sa peau?. . .
Non, n'est-ce pas? Vous t^cherez d'amender en lui ce qu*il y a
d'amendable; mais ce sera par un regime patiemment suivi, et
non par des punitions.
C'est ainsi que Von devrait agir pour la paresse et T^tour-
derie qui, k la v6rit6, sont moins des d^fauts qu une disposition
particuli^re de Tesprit.
Tous les enfants n'aiment pas I'dtude, et on Tim'pose k tons
les enfants. G'est une n^cessit^, soit! mais il ne faut pas s*in-
digner s'ils ne t^moignent pas d'un empressement exag^r^, a
Faccomplissement d'une besogne pour laquelle ils n*ont aucun
gout.
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PLAIDOYER EN FAVELIl l)ES ENFANTS feTOURDIS. 55
Les maitres, eux, ont librcment choisi la profession — trfes
aride il est vrai — qu'ils exercent. Rien d'^tonnant k ce qu'ils
y apportent tout leur cceur. Seulement, ils seraient peut-6tre
moins z^l^s, si on les contraignait k cultiver la terre, k faire du
commerce, ou h pratiquer un m6lier quelconque.
II en va de mdme pour les enfants ditsparesseux, Beaucoup
de ceux qui b&illent en classe, se montrent actifs et pleins de
bonne volont^, d^s qu'ils sont hors du lyc6e ou de T^cole. Com-
bien de z^l^s travailleurs, d'excoUentes m^nag^res ont 6t6 de
m^diocres ^coliers? Combien d'hommes remarquables ont,
jadis, 6i6 classes parmi les cancres?
A cotd des paresseux « de carrifere », il y a les paresseux
intermittents^ auxquels on tient ce raisonnement : « Ce que
vous faites parfois, vous pouvez le faire toujours. »
Mais non, mais non ! Savez-vous si la mollesse momentan6e
de Tenfanl n'a pas pour cause une pouss^e de croissance, une
maladie k T^tat larv^, une indisposition dont lui-m6me ne se
rend pas compte, et qui lui 6te toute Anergic ?
II y a encore des paresseux qui sont rebelles au travail, uni-
quement parce que le travail leur est pr6sent6 d*une manifere
qui ne convient pas k leurs aptitudes. Pour des capacit^s, des
goikts, des caract^res varies k Tinfini, il y a un programme, un
seul. Allez!... tons les cerveaux dans le m6me moule... comme
des briques !
L'^minent docteur Th..., dont Tautorit^, en ces sortes de
choses, est incontestable, me disait, il y a quelque temps :
« Certains enfants ne retiennent que ce qu'ils lisent, d'autres
que ce qu*ils entendent. » De sorte qu'un 6colier p&lira sur une
leqcn, sans en rien saisir; qu'un autre ^coutera attentivement
la classe et sera incapable d'en rdp6ter un mot, et que tons les
deux seront punis sansTavoir m^ritd.
Enfin, j'admets que les enfants en question soient de v^ri-
tables paresseux, des paresseux sans la moindre excuse; eh
bien, c'est une cure k tenter, voili tout. Mais croit-on les cor-
riger en faisant pleuvoir sur eux des punitionsetdes consignes?
Car la consigne a ceci d'absurde qu elle n'est pas employee
a r^parer les devoirs et les IcQons manqu^s. L'6l6ve — d'aprfes
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56 REVUE PHILANTHROPIQUE.
le bulletin — doit y accomplir « une t&che correspondant a
2 heures, 4 heures, etc., de consigne ». Le travail k refaire est en
surplus; et, s'il n'est paspr^sent^ k Theure, de nouveaux chft-
timents sont k I'afTilty pr6ts k fondre sur le d^Iinquant. Si bien
que certains enfants arrivent k doubler, a tripler, une tftche
d^j& plus que suffisante.
Or, accabler de travail suppl6mentaire un ^colier qui n'aime
d^jft pas r^tude, me semble tout aussi logique que de traiter le
manque d'app^tit par des indigestions.
L'Angleterre nous est absolument sup^rieure, sinon dans la
composition, du moins dans Tapplication des programmes sco-
laires. La consigne y est inconnue « Pour les mauvais devoirs
ou les lemons non sues, ils sont k refaire ou k rapprendre, mais
Tenfant n*est point enferm^ k Fheure des jeux ; il n'est astreint
qu'4 trouver le temps de r^parer celui qu'il a perdu. Priver
Tenfant du pen d'air qu'il pent respirer dans la journde, parce
qu*on n'a pas su Cint^esser a son travail, ou qu'il Ta fait sans
goAt, ou parce qu*il n'a pas pu rester immobile pendant trois
heures d'dtude, n*est-ce pas faire aveu d'impuissance, et con-
damner tout un syst^me ? La retenue est, et restera la honte
des ^ducateurs frangais, qui Tout invent^e et se croient obliges
de la maintenir (1). »
En Angleterre aussi, dans ce pays ou Finitiative et la res-
ponsabilit^ individuelles sont si bien respect^es, on demande
compte — au professeur, jusqu'd, un certain point — de Fatten-
tion de ses dlfeves. w Faites un cours int^ressant, leur dit-on, et
les enfants vous ^couteront. »
C'est Tapplication de cette id6e si juste et si charmante de
notre Montaigne : « Je voudraisque Tinstruction filt,pour Ten-
fant, plaisir de roi el non besogne d'^colicr. »
Si les programmes scolaires ^taient moins charges, moins
indigestes, mieux appropri^s aux forces de Tenfant, si Teffort
qu'on exige de lui dtait moins pr6matur6, il est Evident que le
nombre des paresseux diminuerait sensiblement.
Passons aux ^tourdis, maintenant. Au dire des s^v^res p^da-
(1) Vl^ducation des classes moyennes et des classes dingeanles en Anglelen^,
pftT Max Leclerc.
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PLAIDOYER EN FAVEUR DES ENFANTS feTOUR
gogueSy les ^tourdis sent « des dires qui ne pensei
sinon it jouer ».
D'abordy c'est de leur Age; et il n*y a pas lieu d'feti
que des enfants de 8, 10, IS ans et m^me de plus vieusi
k jouer.
Ensuite, Mes-vous surs que lesdits enfants ne \
rien? Qu'ils ne pensent pas k la le^on qui les ennuie,
sible. Mais beaucoup de pr^tendus ^tourdis ne sont qu
traits, des enfants dont les id6es personnelles s'impos<
rieusement et ne souflFrent aucun partage. Arrives
pleins de bonnes resolutions, un mot, un Episode qu
du cours fait d6vier leur attention, et les voilA lanc^i
piste autre que celle qu'ils auraient d6 suivre.
Si on les interrogeait, au lieu de les ahurir par la
. on serait parfois surpris des id^es que remuent ces jei
veaux.
Ceux-14 non plus ne seront pas corrigds par la com
contraire, la peur des punitions les affolera et lour fe
ce qui leur reste de sang-froid.
De tout ceci, r6sulte-t-il qu'on doive laisser lei
grandir avec leur paresse et leur ^tourderie? Non, cent
II faut, au contraire, mettre tout en oeuvre pour les {
d^fauts qui leur feraient grand tort, plus tard dans la
c'est par un regime tr^s patient et tr^s suivi, etnon par
de rigueur qui ressemblent presque k de la vengeance
Je ne fais pas le proems de notre corps enseignan
n^ral, il est admirable; mais le syst^me d'une grande
d'enfants, sous une m6me direction et avec un m(
gramme, ne vaul rien. On ne peut nier non plus qi
maltres ont beaucoup de savoir, ils n'ont, en revanch<
connaissance tr^s superiicielle de Ykme et des faculty
fant. Or faire de Torthop^die morale dans de pareill
tions, c'est agir comme les rcbouteux qui se m6lent de
les membres, sans connaitre un mot d'anatomie, et qui
plus souventqu'ils negudrissent.
JEANNE LER(
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CUISINES POPULAIRES
ET
RESTAURANTS COOPERATIFS
Chai^6, Tann^e derni^re, par le Ministere du Commerce*
d'6tudier TiJtat des questions ouvri^res en Suisse, j'ai 6\6 frappd
des heureux r^sultats — k iafois moraux.et mat^riels — obtenus
par les cuisines populaires de plusieurs villes industrielles et
on particulier par celles de Genfeve et de la Chaux-de-Fonds.
J'ai voulu rechercher si une institution qui avait — k tous
les points de vue — si bien rdussi dans un pays voisin du n6tre,
de m^me langue, de constitution analogue et de moeurs assez
semblables, ne pourrait pas, a Paris — aprfes avoir ^t6 plus ou
moins modifi^e suivant les besoins et les circonstances — 6tre
^galement utile et bienfaisante (1).
Dans ce but, j'ai ^tudi6 Torganisation et le fonctionnement
des cuisines populaires et des associations alimentaires k T^tran-
ger et en France et, apr^s avoir recherche les causes de la deca-
dence des unes et de la r^ussite des autres, je suis arrive ft la
conviction que des ^tablissements de ce genre pourraient ren-
dre de rdels services k la population parisienne, que leur fon-
dation ne pr^senterait pas de difficult6s insurmontablcs et
qu'avec une bonne administration et de legferes avances de
fonds, ils offriraient de tr^s grandes chances de succ^s.
(1) II y a (Tailleurs en Fram*e des ^tablissements de re f^enrc ou tout au inoins
d'un genre peu different; les uns n'ont pas rencontre le succ6s; les autres, au
contraire, comme ceux de Lyon et de Grenoble, sont en pleine prosp6rit6.
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CUISINES POPULAIRES. 59
C'cst pourquol j'ai cru int^ressant de faire connaitre aux
lecteurs de la Revue Philanthropique, — c'est-4-dire aux hommes
et aux femmes de cceur qui cherchent partout h faire du bien,
— roi^nisation de quelques-uns de ces ^tablissements, en
uiilisant les observations que j'ai &i6 k m6me de faire et les
renseignements qui m'ont 6t6 fournis par les diverses soci6tds
et associations.
Mon but et mon espoir seraient de savoir ceux qui auront
bien voulu lire les lignes qui vont suivre, convaincus comme
moi de Tutilit^ de Torganisaiion de semblables cuisines ou
restaurants populaires h Paris et de la presque certitude en
mdme temps de les voir r^ussir.
Voici, en pen de mots, Tobjet et le principe de ces dtablisse-
ments :
Leur objet est :
4* De lutter contre Talcoolisme; *
2* De procurer aux ouvriers, aux employes et a tons ceux
dont les ressources sont limit^es, une nourriture saine, sub-
stantielle et k bon march^.
Le principe sur lequel ils sont bas^s est qu'ils doivent se
suffire k eux-m^mes, c'est-2i-dire qu'une fois organises avec le
concours des pouvoirs publics ou de Tinitiative priv6e, ils doi-
vent n'avoir besoin d'aucune subvention, d'aucun don pour
fonctionner, rendre des services et pour prosp^rer.
La somme n^cessaire pour les ^tablir est d'ailleurs peu im-
portante : dix k vingt mille francs sont suffisants et dans la
plupart des cuisines que j'ai visit^es, les fonds n'ont pas 6t6
donnas, mais seulement avanc^s et int6gralement remboursds.
I. — LES CLISINES POPULAIRES DE GENfiVE
1** LES DEBUTS
Le projet de fonder k Geneve des cuisines populaires est du
a I'initiative de M. Wintsch qui avait longtemps habitfi la Chaux-
de-Fonds oii, comme nous le verrons plus loin, un ^tablisse-
ment de cette esp^ce existait depuis plusieurs ann^es et fonc-
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60 REVUE PHILANTHROPIQUE.
tionnait a la satisfaction de toute la population. M. Wintsch
fit la plus grande propaganda pour faire connaitre Tinstitution
qu'il avait su appr^cier et pour engager ses concitoyens k en
cr^er une analogue dans leur ville : il dcrivit des articles dans
les journaux et dans des revues et fit de nombreuses confe-
rences, aide d'ailleurs parquelques amis qui, par leur savoir et
leur devouement, facilitftrent beaucoup Taccomplissement dela
t&che qu'il s*etait assignee.
Pour mettre le projet 4 execution, on eut recours h une
emission publique d'actions de trois francs et Tempressement
du public a souscrire prouva que Tceuvre etait acceptee et bien
vue en general. En quelques jours prfes de 5000 actions furent
souscrites et enti^rement lib6rees.
Le 6 juin 1889, la Society des Cuisines populairesde Genfeve
fut definitivement coostitu^e. L'assembiee des actionnaires
tlomma un comit<5 definitif de vingt et un membres, charge
de la mise Ji execution et, k la suite des demarclies faites
aupr^s du Conseil d'Etat en vue d'obtenir un local gratuit, —
pour les debuts au moins, — un pavilion d'un ancien en-
trep6t, bien situe au centre de la ville, fut mis k la disposi-
tion du Comite et les travaux necessaires furent enlrepris pour
son appropriation. Une commission fut nommee pour s'oc-
cuper des vivres et une autre pour acquerir le materiel; cette
demiere se mit immediatement k Tamvre, se rendit compte de
Tinstallation de differentes cuisines populaires qui existaient
alors et presenta un rapport etuii projet ; un creditde 1 4 000 francs
fut vote pour Tamenagement des salles, cuisines, office, etc.,
et pour Tachat du materiel de tout genre necessaire it la mise
en marche. La commission des vivres, de son cote, organisait
le service des provisions, et s'entendait avec les fournisseurs
pour obtenir des conditions avantageuses, tout en se montrant
inflexible sur la qualite. Pendant ce temps, une autre commission,
celle des r^glements et du personnel, avait travailie et fait les pro-
positions suivantes qui furent acceptees : une directrice et une
sous-directrice, une cuisiniftre et une caissiere,toutes les quatrc
fournissant un cautionnement ; puis des aides de cuisine et des
servantes de salles suivantles besoins.
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CUISINES POPULAIRES. 61
Les travaux d'installation etd'administration ainsi terminds,
les cuisines populaires ouvrirent leurs portes le 26 avril 1890
et, d^s la premifere heure, ainsi que depuis sans aucune inter-
ruption, le public arriva trfes nombreux.
Les debuts n'avaient 6videmnient pas 6t6 sans presenter
quelques difficuU6s; mais celies-ci furent bien vite sur-
montdes, grdce h la bonne volont^ et au d6vouement de tons
les membres de la soci^t^ et de tous ceux qui s'6taient int6ress^s
k cette utile entreprise.
2** ORGAMSATION
Examinons maintenant Torganisation de la cuisine de Ge-
neve et voyohs quelles sont les attributions de tous ceux qui
concourent k sa bonne marche.
Le President de la soci^t^ a la direction g^n^rale ; il a seul
le droit de faire des observations k la directrice, et de lui don-
ner des instructions; c'est k lui qu'incombe la surveillance
g^n^rale de I'^tablissement, de la comptabilit^, du mouvement
financier, etc., etc. 11 signe les mandats sur le tr^sorier et
contresjgne avec le secretaire les bons de commandes qui sont
delivr^s par les presidents des difTerentes commissions et ne
sont valables que rev^tus de ces trois signatures.
Les/lrfmmts/ra/^Mr^,choisis parmi les membres du comity et
nomm^s k tour de r6le pour une p^riode donn^e, surveillent
les salles de consommation et consignent sur un registre spe-
cial toutes les observations qu'ils peuvent avoir a faire.
ha Directrice a la surveillance du personnel, des magasins,
de la lingerie, du materiel, etc. ; elle engage et r^voque, en
pr^venant le president, le personnel inf^rieur, veille 4 la pro-
prete et ft la bonne tenue, ft la regularity du service et ft la pre-
paration des aliments; elle redige les menus journaliers, re(^oit
les fournitures, etc. Elle a une caisse pour les petites depenses
courantes qui ne sont pas de la competence des commissions,
telles que legumes, assaisonnements, servantes supplementaires
occasionnelles, etc. ; ces depenses sont inscrites sur un carnct
de bons ft souches, avec les details nece^saires.
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62 HEVLE PIIILANTIIUOPIQUE.
La caissiire est charg^e de la vente des jetons et tous les
soirs, r^guli^rementy elle doit rcmettre Ics esp^ces en caissc
au tr^sorier qui lui en donne quittance , et a son tour, elle
donne quittance des jetons qui lui sont remis pour la vente du
lendemain ; de plus, dans les moments ou son service ne la re-
clame pas, elle aide dans le restaurant.
Le personnel des salles, qui se compose d'environ seize em-
ployes, doit 6tre toujours irhs poli et empressd, s'abstenir de
conversation avec le public, et il ne peut, sous aucun pr^texte,
recevoir de Targent des consommateurs qui doivent 6tre mu-
nis, avant de s'asseoir, des jetons n^cessaires. Chaque servante
a un jour de repos par semaine et en outre, tous les dimanches,
le local est ferm^ de deux heures a six heures.
Les consommateurs J de leur c6t6, ont k leur disposition une
boite plac^e bien en vue, dans laquelle ils peuvent d^poser
toutes les observations qu'ils auraient a faire sur la nourri-
ture, le service, etc., ainsi que sur les ameliorations qu*ils
croiraient devoir conseiHer. Ils ne doivent pas prendre plus
d*un demi-litrc de vin par personnc, i) est defendu de fumer
dans les salles et d'y sojourner une fois le repas termini.
3° FONCTIONNEMENT
Les cuisines de Geneve servent a deux genres de clients :
les uns qui mangent sur place et les autres qui emporteni
chez eux.
Voici les diff6rentes consommations offertos dans les salles
et leur prix :
Pain (i25 gr.) 0,0R Legumes 0,10
Fromage (M) gr.). . . . 0,05 Viande (100 gr.) .... 0,25
Caf^ 0,10 Vin 1/2 litre 0,25
Chocolat 0,15 — 2/<0— 0,10
Soupe 0,10 — 1/iO— 0,05
Pour ceux qui d^sirent emporter, losprix sont les suivants :
Soupe 1 litre 0,15 L^mes 2 portions. . . 0«15
— 2 — 0,25 Viande 2 — . . . o,50
Vinl litre 0,50
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CUISINES POPL'LAIRES. 63
Aucun objet n'^tant pr^t6 pour le transport des aliments,
chacun doit apporter les ustensiles n^cessaires.
Devant la porte d'entr^e int6rieure se trouvent deux ta-
bleaux, Tun indiquant le prix des jetons, I'autre le menu
journalier que Ton ne manque jamais de consulter, car tons
les jours, il y a plusieurs sortes de viandes, de legumes, de sa-
laisons, de conserves, etc.
Les salles sont toujours tenues avec une extreme propret^ ;
les converts constamment mis d'avance, les tables en marbre
blanc facile h entretenir, la vaisselle en belle et forte porce-
laine blanche, et les carafes, verres, moutardiers, cuillers, etc.,
r^partis par place marquee par une chaise ou un tabouret en
noyer. Si le client le d<^sire, il pent avoir une petite nappe et
une serviette dont le prix est de cinq centimes chacune. Enfm
en hiver, plats, bols et assiettes sont chaufT^s, et cela gratuite-
ment.
Lorsque le consommateur a choisi la place qui lui convient,
la servante de sa table vient lui demander ses ou son jeton —
car on pent ne prendre qu*une seule portion — et lui apporte
aussifdt ce qu'il desire. On pent avoir pour soixante-cinq
centimes un diner complet composd de pain, soupe, viande,
legumes et vin; et m^me, si Ton ne boit pas de vin, on a un
excellent repas pour cinquante centimes.
Je puis d'autant mieux Faffirmer, que j'ai plusieurs fois
mang^ moi-m*me k la cuisine populairo de Geneve.
4® d6veloi»pement de la soci6t6
A la fin de Tannic 1891, le local prdt^ gratuitement, et
d'ailleurs k titre temporaire par TEtat, dut 6tre retir6, car le
b4timent allait disparaitre pour faire place au nouvel Hotel
des Postes. On fit d*actives recherches, mais on ne put trouver
aucun immeuble convenable pour y transporter T^tablissement ;
anssi^ malgr^ Tavis d'un grand nombre de personnes, malgr^
les d^penses considerables qui allaient en r^sulter, et le pen de
ressources dont elle disposait, la Socidt6 prit une grave resolu-
tion : elle se d6cida k construire. Elle acheta a la Ville — qui
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64 REVUE PHILANTHROPIQUE.
consentit un important rabais — un terrain situ^ prfes de
Tancien ^tablissement et quelques g^n^reux philanthropes,
montrant leur eonfiance dans Tavenir, avancferent sur hypo-
th^ques les fonds n^cessaires en renongant aux int^rftts du
capital.
Lestravaux furent aussit6t commences et act ivement men6s.
Un pen plus d'une ann^e seuloment aprfes que la construc-
tion avait 616 d^cid^e, le nouvel immeuble des Cuisines popu-
laires ouvrait ses portes au public et un joyeux banquet
d'inauguration f^tait, le 13 mai 1893, cet heureux ^v^nement.
La foule, d^s lors, n'a cess^ de remplir les salles etd^jk le rap-
port de 1893 s'exprimait en ces termes : « Quand nous pensons
« qvik la fin de 1889, nous ne poss^dions que 14112 francs, que
« sur cette somme 13463 francs avaient 6i6 d^pens^s pour
<( I'agencement, le materiel, les jetons etque nous sommes entris
<i en activity avec seulement 469 francs en caisse et qu'au bout de
\i quatre ans nousavons non seulement amorti tous les fraistTita-
(( blissementy mats reconstitud notre capital j amasse une reserve
« de 45 000 francs et assur6 le credit et la bonne renomm^e de
« nos cuisines, nous pouvons regarder avec joie le chemin par-
<c couru. »
L'immeuble qui semblait tout d'abord bien trop vaste est
devenu au contraire trfes vite insuffisant ; dfes Thiver de 1893, le
conseil d'administration se voyait oblige d'utiliser le premier
^tage de la maison et de placer au fond du vestibule d'entr^e
un escalier int^rieur pour permettre d'ofifrir au public une nou-
velle salle qui fut plus sp^cialement destin^e aux families. Et
ce n'dtait pas encore assez : la clientele augmentant toujours,
il fallul au mois d'avril 1895 ouvrir une seconde pi^ce plus
grande encore.
Malgr^ces agrandissements successifs, c'est k peine si Ton
rc^ussit aujourd'hui h procurer de la place k la foule sans cesse
plus nombreuse et plus empress^e des consommateurs. Le rap-
port do 1895 constate que Ton a du recevoir jusqua quinze
cents personnes en une seule journ^e. Cette affluence vraiment
extraordinaire ne fait que continuer k s'accroitre sans cesse et
Ton pent dire que le succfes des Cuisines populaires de Gendve
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CUISINES POPULAIRES. 65
d^passe certainement de beaucoup les esp6rances Ics plus am-
bitieuses de ses crdateurs.
Pourquoi le succfes des restaurants populaires de Paris ne d^-
passerait-il pas ^galement les esp^rances beaucoup moins am-
bitieuses de ceux qui veulent les cr^er?
Pourquoi une foule toujours plus nombreusc et plus em-
press^e de consommateurs ne se rendrait-elle pas aussi h. des
itablissements similaires k Paris?
II. - LA CUISINE POPULAIRE DE LA GHAUX-DE-FOiNDS
1® ORGANISATION
Trfes analogue k Tinstilution de Genfeve, h. qui elle a donn^
naissance,la cuisine populai re de la Chaux-de-Fonds, qui existe
depuis plus de vingf ans, est une des plus anciennes de la
Suisse.
C'est aussi une Soci^t^ anonyme; mais ses actions ne
peuvenl rapporter ni int6r6t ni dividende et son but, unique-
ment philanthropique est de procurer i la population une
nourriture saine, abondante, k bon march^ et en m6me temps
de venir en aide, autant que possible, aux institutions de bien-
faisance existantes. Les b6ndfices r^alis^s forment un fonds de
reserve en vue du remboursementdes actions lorsde la dissolu-
tion de la Soci^td. La dur^e de cette demi^re est d'ailleurs illi-
mit^e, sous la reserve du cas oil la moiti6 du capital, qui n'est
que de 7 200 francs, serait perdu. La Ville ay ant fait don des
locaux, Tautorii^ municipale ddlfegue un de ses membres aux
stances du Conseil oil il a voix consultative et un de ses contro-
leurs est chargd de verifier les comptes semestriels.
2® FONCTIONNEMENT
Dans ses grandes lignes, le fonctionnement de T^tablissc-
ment de la Chaux-de-Fonds est analogue k celui des cuisines de
Geneve.
II est ouvert k six heures du matin en 6t6, k sept heurcs en
REVUE PHILAXTHROPIQUE. — II. 5
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66 REVUE PHILANTHROPIQUE.
hiver et ferm6 le soir k neuf heures. Chaque client ne peut y
boire plus d*un demi-litre de vin par repas et nul alcool, sous
quelque forme que ce soil, ne peut y Mre vendu. Les prix et les
portions sont les mfemes qu'i Genfeve, le vin cependant est un
peu meilleur marchd et les plats de viande ne sont que de
quatre-vingt-dix grammes au lieu de cent grammes.
3® DfiVELOPPEMENT DE LA SOCl^Xfe
Fond6e comme nous Tavons dit au capital de. . 7 200 fr.
La cuisine populaire de la Chaux-de-Fonds a
encaiss^ pendant Tann^e 1896 une recette de. . . 144 400 fr.
donnant une moyenne par jour de 394 francs.
11 a 616 achete pendant cette p^riode pour. . . 1 1»j 949 fr.
de marchandises, qui ont produit un b^n^fice brut de 28 TH 1 fr.
Les frais generaux ayant (5t6 de 15 981 fr.
il est rest6 comme b^n^fice net de Tannic 1896. 12o30fr.
Le nombre des jetons vendus pendant Tanncie a ^tc de
769269; 10311 ont 6t6 distribu^s gratuitement, ce qui donne
pour Tannic un total de 779 580 et une moyenne de 2 130 jetons
par jour. En voici d'ailleurs le detail.
Pain . . .
loOO'Ja jotons.
Soupe ....
74768 jetoDS.
Legumes .
. 137975 —
Cacao et cafe .
36822 —
Viande . .
. 126726 —
Fromage . , ,
n020 —
Vin. . . .
. 219873 —
En 1896, le nombre de jetons vendus a d^pass^ de 53 i67 le
nombre do ceux vendus pendant Tannic pr^c^dente.
Ainsi que le dit le rapport du Conseil administratif, Tinsti-
tution est bien vue du public et rend de grands services k la
population. II faut bien dire que le comity se fait une r^gle de
ne rien negliger qui puisse contribuer au perfectionnement des
(liffdrents services ou k une sage Economic ; toutes les commis-
sions remplissent avec zMe leurs devoirs etcherchent constam-
ment dans la mesure du possible h am^liorer la qualitd des
diverses denr6es en n'achetant que des aliments de premier
ordre. Si, par hasard, il arrive que des secondes ou des troi-
si^mcs fournitures ne sont pas aussi bonnes que los premidres,
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CUISINES POPLLAIUES. 1,7
les administrateurs competents avisent imm^diatement pour
que le fait ne sc renouvelle plus ; les reclamations sont d*ail-
lours fort rares, surtout si Ton consid^re \o grand nombre des
consommatcurs.
La bienfaisancc est lai^ement pratiqu6e a la cuisine popu-
laire de la Chaux-de-Fonds ; tous les ans, des soupes diles sco-
laires sent abondamment distributes aux enfanls des ^coles
dont les parents sont pauvres ou seulement dans la g^ne ; les
indigents non plus ne sont pas oubli^s et de nombreux jetons
^ratuits leur sont d^livr^s journellement.
Enfin chaque ann^e, Noel est c61ebrd avec son arbre tradi-
tionnel el un joyeux cortege de petits gargonset de petites filles
remplit les salles oil ils trouvent des friandises^ des jouets et
des vdtements chauds pour Thiver. El c'est vraiment un rdcon-
fortant et r^jouissant spectacle que celui deces pauvres enfants
inviK^s ot fdtes dans la maison des ouvriers et des petits em-
ployes de la Chaux-de-Fonds.
Ne voudriez-vous pas aussi, chores lectrices et clicrs lec-
teurs, voir c^lebrer Noi^l avec son arbre traditionnel autour
duquel un joyeux cortege de petits gar^ons et de petites filles
pourraient trouver des friandises, des jouets et des v^tements
chauds pour Thiver et pouvoir inviter et feter un jour les en-
fants pauvres de Paris dans les restaurants des ouvriers et des
petits employes que vous aurez conlribu^ k fonder?
III. — ASSOCIATION ALIMKNTAIKE DE GRENOHLE
1® ORIGINE ET DEBUTS
Vei's la fin de Tann^e 1850, des conseillers municipaux de
Grenoble ayant appris qu'une association alimentaire existail
h Gen^ve (1), le maire, qui ^tait alors M. Taulier, <5crivit pour
avoir des renseignements qu'aussitdt regus il commiiniqua k
ses collfegues. Une commission fut nomm6e et dmit un avis
il) L'association dont il s'agil ici n'existe plus el nest par consequent pjis la
Soci^t^ des cuisines populaires dont nous avons parle au conimcncciuent de cot
article.
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68 REVUE PHILANTHROPIQUE.
favorable, el le Conseil vota en principe la fondation dc T As-
sociation alimentaire qui fonctionne encore aujourd'hui.
Le maire se rendit lui-m6me en Suisse et vit qu'il y avail
]iL une id^e fSconde qui, pour produire lesplus heureuxrisultatSy
rC avail besoin que ditre encouragie et aidee au dibut par t ali-
tor il^ municipale.
Elle le ful : la Ville mil graluilement un local & la disposi-
tion de la Soci^W qui s'^tail form^e (1), pendanl que le maire
h^lail les Iravaux d'appropriation, faisail frapper des jetons et
achetait & credit lemobilier et les uslensiles n^cessaires. Puis,
en dehors de ces soins matdriels, il provoquail des souscriptions
au moyen de placards affich^s sur les murs des b^timents pu-
blics, tandis que des listes (5laienl port^es h. domicile. II avail
aussi convoqu6 les presidents el les pr^sidentes des socidt^s dc
bienfaisance et de secours mutuels pour leur exposer la nature
et le but de la fondation qu'il poursuivait. On Irouva ainsi tr^s
rapidement plus de hull cents souscripteurs qui furent r^unis
le 27 novembre 1850 ft ThMel de ville. Le maire rdpondit a
toutes les objections qui furent prfisent^es, et fournit tons les
^clarcissements qui lui furent demand^s el, sur sa proposition,
on nomma une Commission qui, en quelques jours, arrfeta le
r^glement provisoire de I'Association et forma le bureau. Le
9 d^cembre les employes furent nommds, puis le Conseil muni-
cipal d^cida que si la tentative dchouail apr^s un certain temps
le budget de la ville ferait face au deficit sauf i la Soci^tt^ ft se
dissoudre aussit6t ou ft fonctionner ft ses risques et perils (2).
• Enfin le 5 Janvier 1831, tout dtait pr^l, et un grand, mais
tr^s modeste banquet, ou se trouvaient representees toutes les
classes de la population, inaugura gaiement le nouvel etablis-
(1) G'est le m^me local, dans lequel elle a fait des reparations et des construt-
tions considerables, que I'Association occupe encore aujourd'hui; mais depuis
longtemps elle en paye le loyer h la ville.
(2) Disons de suite que cette Eventuality ne s'est jamais produite, il n'y a eu
i aucun moment de deficit dans la caisse de I'Association. L'administration mu-
nicipade n'eut done pas d'avance h. faire. Son appui — sans lequel sans doute
d'ailleurs rien n'aurait pu Etre enlrepris — fut purement moral. Le mobilier lui-
mfime fut pay6 au moyen d'un emprunt ouvert panhi les soci^taires et ce der-
nier, represents par des actions de 5 francs et s'eievanl a 4 500 franps, fut rem
bourse pen de temps apr^s.
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CUISINES POPULAIRES. 69
sement. Ce fut r^ellement un beau tableau que de voir r^unis
Ji la m^me table, comme des amis et comme des fr^res, des
-riches et des pauvres, de hauts fonctionnaires el de peiits em-
ployes, de grands industriels et de simples ouvriers, des dames
du monde et des femmes du peuple... chacun sentait qu'il ^tait
\k moins pour diner que pour s'associer k une oeuvre dont il
n'(5taii pas plus difficile de saisir la port^e morale pour Tavenir
que d'appr^cier les r^sultats mat^riels pour le present.
Pourquoi un semblable tableau ne pourrait-il pas, h Paris
aussi, charmer nos yeux et nos ccBurs? Pourquoi ne pourrions-
nous pas, dans les cuisines populaires de notre ville, voir aussi
r^unis k la mSme table, dans un grand et joyeux banquet,
comme des amis et comme des fr^res, des riches et des pau-
vres, de hauts fonctionnaires et de petits employes, de grands
industriels et de simples ouvriers, des dames du monde et des
femmes du peuple?...
2** ORGANISATION ET FOKCTIONNEMENT
L' Association alimentaire de Grenoble est en r6alit6 une
reunion de personnes qui font preparer leurs aliments dans une
cuisine commune ; c'est un ^tablissement coop^ratif plut6t que
philanthropique. En effet, il n'est ouvert que pour ses membres
soci^taires, tandis que les cuisines de Geneve et de la Chaux-
de-Fonds vendent k tout venant et k tout passant. Le titre de
soci^taire s'acquiert d'ailleurs tr^s simplement au moyen d'une
carte qui coiite vingt-cinq centimes ou un franc par an, selon
que Ton desire emporterles aliments k domicile ou les eonsom-
mer dans les r^fectoires. Ceux-cine sont ouverts que de 7 heures
k 9 heures du matin, de H heures k 2 heures et le soirde
6 heures a 9 heures, alors qu'ailleurs ils ne ferment pas de
toute la journ^e et qu*entre les heures du dejeuner, du diner
et du souper, on pent y manger des mets froids, tels que con-
serves, charcuteries, viandes froides, etc.
A Grenoble, le soci6taire porteur de sa carte se pr^sente
d'abord k un guichet pour y acheter les jetons qui lui sont
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70 REVUE PHILANTIIUOPIQUE.
n6cessaires (1) et qui varient scion qu'ils repr6sentent une
portion de soupe, de viande, de Idgumes, de vin, de pain ou de
dessert ; ils sont en cuivre et de forme et de couleurs diflf^ren-
tes; d'un cdt^, ils portent les armes de la Ville avec cet exergue :
« Association alimentaire » et de Tautre le nom de la denr^e.
Le soci6taire se pr^sente ensuite k un autre guichet oil il
donne, en ^change de chaque portion qu'il re^oit, le jeton cor-
respondant ; mais il ne peut en aucun cas obtenir plus d'un
demi-litre de vin par repas.
Tons les aliments sont de premiere quality : le pain et la
viande sont fournis par un boulanger et plusieurs bouchers
avec lesquels des marches sont passes et g^n^ralement renou-
vel^s; la soupe est excellente, les legumes apportes chaque
matin ou achet^s par grosses provisions, selon les esp^ces,
sont soigneusement choisis; le vin est bon, enli^rement pur et
achetd longtemps d'avance. Les desserts se composent de fro-
mages, de fruits trfes varies cuits ou crus, entiers ou fraction-
n^s, selon Tesp^ce, oranges, melons, figues, fraises, etc., ces
derni^res m^me aceompagn^es de sucre. Toul d'ailleurs est
appr^t^ et servi avec une extreme propret^ et, commo k
Geneve, 4 Tentr^e de T^tablissement se trouve un grand tableau
indiquant les mets pr^par6s pour chaque repas de la joum^e.
II y a deux r^fectoires : Tun est exclusivement r^serv^ aux
families et aux femmes qui veulent 6tre seules; Tautre, ou les
consommateurs peuvent se mfiler indistinctement, se compose
de deux pieces communiquant entre elles par une] grande ou-
verture. Partout Tair et la lumi^re pin^trent avecabondance
par de nombreuses fen^tres donnant sur la cour d'entr^e et,
pendant la belle saison, des pots de fleurs, provenant d*une
serre construite prfes de Tentr^e, ^gayenl les convives de leurs
riantes couleurs et de leurs fraiches senteurs.
3® Dl^VELOPPEMENT DE L*ASS0CIATI0N
Depuis sa fondation, TAssociation n'a cess(^ de fonctionner
avec une parfaite rdgularit^ et avec un ^clatant succ^s qui ne
1 Mais il peut, s'il le pr^f^re, se les procurer d'avance.
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CUiSlNES POPL'LAIRES. 11
s'est pas dementi un seul jour. Elle est aujourd'hui dans sa
quarante-septifeme ann^e d existence et toujours en pleine pros-
p^rit^. Selon les derniers chiflfres que je poss^de et qui remon-
tent h Tann^e 1895, la Soci6t^ a r^alis6 un fonds de reserve s'6le-
vant a 70396 francs, sans compter en outre son mobilier qui a
coiit6 21 900 francs. Elle a dc plus consacr^, soit en lib^ralit^s
ou k des oBuvres de bienfaisance, soit en gratifications on secours
h ses employes 23716 francs et en constructions ou reparations
pour faciliter et am^liorer le service, une somme de plus de
30000 francs.
Quels beaux r^sultats, surtout si Ton songe que FAssociation
a commencd sans le moindre capital et sans avoir eu kd^bour-
ser quoi que ce soit. En effet :
1** Le local avail 6i6 pour les debuts concdd6 gratuitement
par la Ville;
2^ Le mobilier et les ustensiles n^cessaires avaient 6t6
achel^s Ji credit par le maire etd'ailleurs rembours6s bientdt
aprfes par les soci^taires ;
3** Le Conseil municipal avait decide qu'il ferait face au
deficit si Tentreprise 6chouait apr^s un certain temps, Eventua-
lity qui, comme nous Tavons dit, ne s'est pas pr^sent^e, puis-
que la Soci^tda au contraire prosp^rE dhs le commencement,
Ne pourrions-nous esp6rer aussi :
1^ Que notre Conseil municipal voudra bien conc6der gra-
tuitement un local pour les debuts des restaurants coopEratifs
et cuisines populaires de Paris ;
2** Qu'au moyen d'une souscription, on pourra acheter le
mobilier et les ustensiles n^cessaires;
Et 3* que quelque g^n^reux philanthrope voudrait bien
s'engager k faire face au deficit si la Soci^td k fonder dchouait
aprfes un certain temps, Eventuality qui, nous en sommes per-
suades, ne se prEsentera pas.
CONCLUSION
Une conclusion est-elle bien nEcessaire ou pluldt no s'im-
pose-t-elle pas toute naturelle?
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72 REVUE PHILANTHROPIQLE.
Pourquoi ce qui a pu 6tre fait dans des villes de moyenne
importance et aussi difif^rentes que Lyon, Geneve, Grenoble,
la Chaux-de-Fonds , etc., ne serait-il pas non seulement pos-
sible, mais m^me plus facile k faire dans une grande ville
comme Paris? Et ne devrait-on pas aujourd'hui non pas se
demander si TcBuvre est utile et pratique, mais bien plutdt
comment il se fait qu'elle ne soit pas depuis ddji bien long-
temps une r^alit^?
L'utilit^, jediraim6melan^cessit6 de cuisines populaires ou
de restaurants coop6ratifs n'a gufere besoin d'etre ddmontrde,
surtout h des lecteurs et k des lectrices comme ceux de la Revue
Philanthropique, qui sont tons par principe des convaincus.
Ces ^tablissements sont par la force mc^me des choses une
institution de temperances puisque nul ne pent y consommer
d'alcool ni y boire plus d un demi-litre de vin par repas. Et
peut-il y avoir un moyen plus simple et plus silr de faire p^n^-
trer peu a peu dans les moeurs des habitudes de sagesse et de
sobri6t6? Comme le disait le D' van Corput, membre du S^nat
beige, au recent Congr^s contre Tabus des boissons alcooliques
et dans un excellent article de notreiJ^«?M^ (1) : « Cest surtout
par une alimentation appropriee qu'on pent esperer arriver
lentement, mais sitrement, a la guirison du vice alcoolique, »
lis sont aussi une institution de privoyance par la facility
donn6e aux consommateurs de faire d'avance une provision de
jelons. On voit souvent des ouvriers, qui autrefois d^pensaient
le samedi au cabaret leur salair^ de la semaine tout enti^re,
venir acheter pour vingt-cinq francs de jetons k la fois ; on voit
des m^res de famillealler faire elles-m^mes ce salutaire appro-
visionncment, leurs visages exprimant un air de conqu^te, car
elles se sentent sans inquietude pour le lendemain, et que de
bonheur dans la s6curit6 !
Puis ils sont une institution d'iconomie^ car on n'y prend
que ce que Ton consomme et ainsi il n'y a jamais de restes.
Quatre personnes mangeant ensemble peu vent y faire un excellent
repas pour soixante centimes par t^te et, si elles ne prennent
(1) Revue Philanthropique, num^ro du 10 aoiit 1891, page 543: Ualcoolisme,ses
causes m^sologiques, son ex Unction physiologique.
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CUISINES POPULAIRES. 73
pas de vin, pour quarante centimes. Que d'economies ainsir^ali-
s^es qui toumeront ensuite, sous les formes les plus diverses,
au bien-^tre de Tindividu et de la socidtd tout enti^re!
Enfin ils sont une institution d' association. lis ressemblent
— surtout ceux qui, comme T Association de Grenoble, sont
conQus dans un esprit plus particuliferement coop^ratif — a une
grande famille, ^ un vaste manage, oil chacun est chez soi, ou
chacun est son associ^, ou aucun amour-propre ne pent 6tre
bless^, puisqu'il n'y a ni bienfaiteurs, ni obliges, car le bienfait
est dans TAssociation mdme et qu'il est Toeuvre de tons.
Si j*ai omis de parler, — comme il aurait 616 int^ressant de
ie faire cependant, — d'autres institutions comme de celles de
Lyon (1) par exemple, qui peuventdtre cities comme desmodMes,
et si j'ai donn6 des details un pen etendus sur les cuisines popu-
laires de Geneve, de la Chaux-de-Fonds et sur Tassociation ali-
mentaire de Grenoble, c'est que, d'un cOt^, j'ai essays d*6trc
aussi bref que possible etque, d*un autre c6t6, j'ai voulu montrer
aussi bien que possible les diff6rentes sortes d*^tablissements
qui peuvent 6tre cr^6s dans le m6me ordre d'id^es.
Celui de Geneve est plut6t coop^ratif en ce sens que tons
les b^n^fices y sont consacr^s k am^liorcr Tinstitution etii former
une reserve en provision des moments difficiles, pour assurer
la continuity et la prosp^ritd de la Societ(^.
Celui de la Chaux-de-Fonds est surtout une oeuvre philan-
thropique, puisque la plus grande partie de ses b^n^fices sert u
venir en aide a diff6rentes institutions charitables etadistribuer
des jetonsgratuits aux indigents et aux enfants pauvres.
Celui de Grenoble enfin est couqu dans un esprit a la fois
coopc^ratif et philanthropique. Les consommateurs sont exclu-
sivement les soci^taires de TAssociation, et a ce point de vue,
il r^pond d'ailleurs peut-Mre mieux aux id6es du jour, — puis
une partie importante des b^ndfices est consacree k des auivrcs
de bienfaisance, et de frdquentes distributions de jetons gra-
tuits montrent qu'on n'y oublie pas les malheureux.
On pourrait ^videmment apporter h chacun dc ces dtablis-
• Ij Foodies par MM. Aynard ct Mangini.
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U REVUE PlULANTHROPlQliE.
sements ou h un melange d'entre cux toutes les modiiications
qui paraitraient utiles : il faudrait en particulier profiler des
exemples donnas par le nouveau restaurant coop^ratif des
Champs-EIysees. Je crois qu'il ne conviendrait pas k Paris
d*obliger les consommateurs k aller chercher eux-m6mes leurs
portions a un guichet; et sans doute il serait bon d'avoir
unc pi^ce r^serv^e oil, moyennantun supplement de dix cen-
times, on aurait droit k une nappe et a une serviette. Peut-^tre
faudrait-il aussi avoir une salle sp6ciale ou plulot des heures
sp^ciales pour les indigents auxquels des jetons auraient 616
donnas gratuitement, car, sans cette mesure, il est malheureu-
sement probable qu'une partie de la clientele s'^loignerait.
Toutes ces modifications, d'aillcurs, sont des questions de detail
qui pourront 6tre discut6es plus lard.
Que ceux qui jugent cette oeuvre utile el realisable et qui
seraient disposes k s'y inl6resser veuillent bien me le faire sa-
voir (1), afin que toutes les bonnes volont^s puissenl se grouper
pour fonder le plus tdt possible k Paris un restaurant coopd-
ralif ou une cuisine populaire qui, une fois Texemple et Telan
donnas, no manqueront certainement pas d'etre bientdt imites.
Lentreprise est, je le r^p^te — et je voudrais esp^rer en
avoir convaincu les lectrices et les lecteurs de la Revue Philaii"
thropique :
1** iminemment utile;
Et 2** facilement realisable.
L. D ABARTIAGUE.
(I) En iirerrivant i la Revue Philanthropigvef 1'20, boulevard Saint-Gerniain.
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LA POUPONNIERE DE PORCHEFONTAINE
ET LA
OlESTION DES CRfiCHES INTERNES
I
Peu de questions sont k Tordre dujour autant que celle qui
va nous occuper. La depopulation de la France est un des
grands soucis de Theure pr^sente. La preservation des enfants
du premier Age, chez lesquels la mortality est encore si effra-
yante, est un des elements les plus directs du problfeme; il
s'impose k lous les esprits, il inquifete les gouvernants; il soUi-
cite Tinitiative priv6e. Tel est Tinterfet en jeu, qu*il n est plus
permis k la routine, k Tignorance, aux pr^jug^s invdteres
d'entraver Taction commune. On amiliore les races animales,
ou prime les b6tes les plus saines et les plus belles ; on multi-
plie les expositions, les concours r6gionaux, les comices; on a
des tendresses pour r^curie, ratable et la basse-cour ; la nais-
sance et Televage de I'animal utile sont Tobjet des plus minu-
tieuses ameliorations : fait-on pour Tospi^ce humaine tout ce
qui serait necessaire? Faut-il done que Thomme soitmalade,
infirme ou vieux, pour que Ton songe k lui? La sympathic
commence aux hdpitaux d'enfants, pour finir aux hospices de
vieillards. Rien de plus digne assurdment d'attention et de
soins que les enfants malades : mais combien le deviennent
faute deces m^mes soins! Combien d'entre eux, n6s pour vivre
et ayant droit & la vie, disparaissent d^s le premier ftge,comme
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76 REVLE PHILANTHROPIQUE.
un capital andanti par Tincurie g^n^rale ! Preserver et pr6-
venir, y pense-t-on assez?
Mais maintenons la question dans ses vraies limites. Esl-il
besoin de dire que nous ne parlons pas ici des enfants des
classes riches ou aisles? Pourceux-l&, Taffection plus ou moins
intelligente des parents est una sauvegarde, et, en toutcas, une
garantie relative. La mfere qui nourrit ou qui pent appeler sur
lieux une nourrice de choix, qu'elle surveille avec son mddecin
ordinaire, est la proteclricenaturelle deTenfant. Heureuses les
mdres qui peuvent garder leurs enfants prfes d'elles ; heureux
les nouveau-n^s qui ont, sans qu'ils s'en doutent, las6curit^ du
sein maternel ou du foyer domestique I Encore y a-t-il, m^me
1^, beaucoup k faire, etc'estune science assez nouvelle que
rhygi^ne des nouveau-n6s, m£me avec Tallaitement de la
m^re, et surtout par Temploi recent et si souvent pr^cieux du
lait st6rilis6 ou maternisc^.
Mais ce n'est pas de ces mferes-li qu'il s'agit ; ce ne sont pas
ces nourrissons-li qui ^meuvent et inqui^tent. Oui, le premier
devoir de T^pouse, de la m^re, le devoir primordial et sacr^,
c'est qu'elle nourrisse elle-m^me son enfant; son lait est en-
core son sang ; et, pour obeir k la loi naturelle, elle doit accep-
ter sans plainte, et m6me avec une joie auguste, les servi-
tudes, les fatigues, les insomnies, tons Jes sacrifices. Telle est
Tobligation absolue, et ce n'est pas aux fondatrices ni aux pa-
trons de la Pouponni^re de Porchefontaine qu'on a besoin do
le rappeler.
11
Mais la rdalit^, en toutes choses, r6pond-elle aux concep-
tions id^ales de la vie et du devoir? Et d'abord, toute femme
est-elle apte k nourrir? Quel lait donnerait k son enfant cette
jeune m6re, fr^le, delicate, parfois maladive, ou trop distraite
par les veilles et les plaisirs? Demandez-le aux m^decins les
plus exp^riment6s. Et si la femme est pauvre, si elle vit de
travail et de privations, si elle ignore le bon air et la saine
nourrituro, h quel prix nourrira-t-elle Tdtred^j^ ch(5tif? quelles
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LA POUPONNlfeRE DE PORCHEFONTAINE. 77
generations pr^parera-t-elle h la France? De quels ^tres peu-
plera-t-elle le pays de la mis^re? Et nous supposons qu'elle
pent garder tout le jour son enfant aupr^s d'elle. Mais s'il faut
le confier, du matin au soir, k la creche externe, dans Tins^cu-
rite de Taller et du retour, au pdril de toutes les contagions
ambiantes, et des intemperies de notre climat?
Nous arrivons k une autre categoric de femmes et de
m^rcs, de plus en plus nombreuses, non pas pauvres pr^cis^-
ment, mais de condition modeste, qui vivent, elles aussi, de
leur travail, parfois plus assujetties que des ouvri^res, et qui,
par necessity ou par economic, se s^parent de leurs enfants et
les conficnt aux nourrices mercenaires, bien loin, ^ la cam-
pagne, pour quel lendemain! Comptez-les dans les grandes
yilles : domestiques, employees de magasins, femmes de ser-
vice, concierges, couturi(»res k la joumee, etc. Et qui etonne-
rons-nous si nous ajoutons les institu trices, les professeurs au
cachet, toutes les jeunes mattresses de piano, de chant ou de
dessin, toutes les nouvelles fonctionnaires publiques, cat6gorie
bien moderne de femmes, auxquelles il n'est pas interdit d'etre
mferes, et k qui il n'est pas possible de garder leurs enfants? En
ouvrant au travail des femmes des voies precieuses, en leur
menageant une place dans certains services de FEtat, notre
civilisation k oulrance n'a pu tout prevoir, et la natalite se
heurte k un obstacle de plus.
C*est alors que reparaissent les nourrices mercenaires, ces
paysannes rapaces, ces terribles faiseuses d'anges qui, depuis
un demi-si^cle, ont si bien travaille a la depopulation de la
Fi'ance. Les chiflfres sont connus et navrants. C'est par cen-
taines de mille, chaque annee, que les enfants qu'on leur con-
fiait mouraient loin de leurs parents. Et Ton sait en quel etat se
trouvaient le plus souvent ceux qu'on leur rendait. La situa-
lion a-t-elle beaucoup change? Ce sont ceux-1^, les survivants,
qui peuplent ensuiteles h6pitaux d'enfants et les hospices d'in-
curables. Trois cent mille enfants sont places tons les ans en
province, livres a un regime ou tout est suspect, allaitement,
soins materiels, alimentation prematuree, mepris des prescrip-
tions les plus simples de Thygiene, sans autre protection qu'une
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78 REVUE PIIILANTHROPIQLE.
inspection m^dicale jug^e insufiisante ou [illusoire, de Tavis
des pli^s consciencieux enqu^teurs. Oserons-nous ajouter quMl
y a une question de Talcoolisme des nouveau-n6s? On croit
rdver Ji ce soul mot. Non seulement certaines nourrices, surtout
en Bretagn© et en Normandie, demandent des forces a Teau-de-
vic, pour en faire, disent-elles, profiler leurs nourrissons, — et
la somme d6pens6^ figure au compte des parents, — mais c*est
souvent aux enfants m^oies qu'elles font boire des boissons
alcooliques, dont on devine les eflfets ! Ces femmes ont, d*ail-
leurs, dfes longtemps, des habitudes d'intemp^rance, et c'est
ainsi qu'il nait des enfants atteints d'alcoolisme congenital, et
qu'onberce d'une ivresse inconsciente.
Ainsi, pendant longtemps, en France, point d'autre alter-
native, hors de Tallaitement maternel, que la creche externe,
qui ful un progrfes incontest^, et la nourrice vdnalc, inintolli-
gente, meurtrifere. C est alors qu'estn^e i'id^e de la Pouponntere,
creche interne, nourricerie module, veritable pensionnat de
nouveau-n^s, ou des nourrices de choix, internees ellos-
m6mes, pr^serv^es des influences du dehors, instances dans un
local construit sp^cialement pour son objet, d aprfes les plus
r^centes donndes de rhygi(;nc, allaiteraient au sein et au bi-
beron, selon TAge, leurs enfants et ceux des autres, sous le con-
trdle incessant d'un m(>decin et la haute surveillance d'un Co-
mity medical.
Ce qu*on pouvail craindre, et ce que nombre de mddecins
redoutaient, c'6tait Tagglom^ration des enfants dans un m6me
local, ou la contagion des maladies infantiles, si elles 6cla-
taient, aurait le champ libre et trouverait sur place tons les
elements d'un trop ample ravage. Mais ces maladies ne naissent
pas spontandment ; s'il n'y a pas transmission, le premier Age
en est indemne. Des conditions rigoureuses d'isolement, tout
contact rendu impossible avec les enfants du dehors dtablissent
comme un cordon sanilaire, qui 6carte le danger. Six anndes
d'expdrience ontdonn6 raison a un principe si simple : pas
une maladie contagieuse n'a s6v\ dans la Pouponni^re de Por-
chefontaine. C*4tait un probl^me k rdsoudre, une tentative &
faire : le succfes a ddpasse toute attente.
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LA POUPONNIERE DE PORCHEFONTAINE. 79
111
Le premier essai de creche interne fut fait en 1891, dans
une propri^t^ priv6e. La maison, faite pour 6tre habitue bour-
geoisement, pr^sentait une installation d^fectueuse. On y ad-
mettaii, on y gardait les enfants jusqu'^ cinq ans et au delJi.
Ce n'^tait pas une nourricerie, mais une sorte de pensionnat
de la premiere enfance. On reconnut bien vite les inconv^-
nients et les p6rils de cetle organisation. Les mddecins r(!*cla-
maient un remaniement complet de I'^tablissemenf . C*est alors
qu'ime soci^t6 nouvelle se forma par Tinitiative et sous Tinspi*
ration des deux fondatrices de Toeuvre, M"^*» Georges Charpen*
tier, pr^sidente, et Engine Manuel, vice-pr^sidente, second^es
par un groupe de dames passionn^es pour la m6me id^e, asso-
ci^es avee un d^sint^ressementabsolu dans une pens6e de soli-
darity matemelle, de bienfaisance et de patriotisme.
Grftce h des souscriptions et a des dons g6n6reux, on put
acqu^rir un vaste et beau terrain plants, h Porchefontaine, aux
portes de Versailles, et y dlever un premier pavilion, quo deux
autresont suivi depuis« Les plus hauts patronages encourag^rent
Toeuvre naissante. Un comity medical avait d6cid(5quelechifrro
de trente enfants par pavilion ^tait un maximum qu^on ne de-
vait pas d6passer, par prudence pour ce premier essai ; que les
enfants ne seraient gardes que jusqu'Ji deux ans, c'est-a-dire
pendant la p^riode de Tenfance la plus difficile k franchir, mais
celle, en m£me temps, ou les affections contagieuses ne se d6-
veloppent pas encore ; que nourrices et poupons seraient s6vfe-
rement internes; que les visiles des parents ne se feraient que
dans des conditions sp^ciales de surveillance ; qu'ainsi seraient
surement ^cart6s les dangers des crfeches externes, ofi un
eourant permanent d'infection pent journellement s'^tablir du
logis matemel k la crfeche et de la creche au logis. I/instal-
lation heureuse du premier pavilion eut un plein succ^s. Les
demandes d'admission aflluorent de toutes parts. Quant aux
r^sultats, un rapport ultdrieur de la Commission d'hygi^ne
publique, k la suite d'une exacte enqufite, constata, par la com-
paraison entre les enfants admis k la Pouponni^re et ccux
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80 REVUE PHILANTHROPIQUE.
qu'on avail dii refuser, faute de place, que, dans le premier
cas, la mortalitd n'^tait que de 6 p. 100, tandis qn'elle d^pas-
sait 31 p. 100 dans le second cas. « L'dloquence de ces chiffres,
^crivait T^minent rapporteur, M. le D*" Bergeron, secretaire
perpdtuel de TAcad^mie de m6decine, n'a pas besoin de com-
raentaire. » Lui-m^me, aprfes avoir eubien des doutes au d<^but,
etait convaincu, etcommuniquait sa conviction. Prot^g^e, aid6e
dans une certaine mesure par les pouvoirs publics, grdce k la
sympathique sollicitude du directeur de T Assistance, M. H.
Monod, et plus tard h celle de M. Peyron, directeur de TAssis-
tance de la Seine, la Society malernelle ou Pouponniere pari-
sienney fut reconnue d*utilit6 publique, par d^cret en date du
21 juillet 1896, sous la seule condition d'6tendre a la moiti6
des enfants admis la gratuity qui n'^tait jusque-1^ que du
tiers. C'6tait r^pondre dignement au glorieux patronage des
deux premiers presidents d'honneur de Tcpuvre, MM. Pasteur
et Jules Simon.
11 suffira de r^sumer les statuts de la Societe malernelle
pour se rendre compte de son fonctionnement actuel.
L'association, dont le sifege social est Ji Paris, h la mairie
du Vn« arrondissement, a pour but de cr^er et d entretenir aux
environs de Paris des etablissements destinds k venir en aide
aux mferes qui travaillent et ne pen vent clever leurs enfants
chez elles. On admet les enfants k la Pouponnifere d^s leur
naissance, et on les garde jusqu'Jt deux ans. Les nourrices,
choisies parmi les plus saines et les plus robustes, sont g6nera-
lement recrutdes dans les ouvroirs, refuges et maisons d*ac-
couchement de Paris; elles entrent ila Pouponniere avec leur
enfant, qui est entretenu aux frais de la Soci6td ; elles resolvent
une retribution mensuelle. Elles sont soumises, pour Tallaite-
ment de leur propre enfant et de Tenfant qu'on leur confie,
aux prescriptions de la loi Rousscl; seul, le medecin de Teta-
blissement decide du sevrage et de Temploi du lait sterilise.
L*association est administrde par un Conseil, dit Comiie de
direction, compose de vingt et une dames choisies pour trois ans,
et reeiigibles.
Le bureau est forme par la presidentc, les deux vice-pr6si-
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LA POUPONNlfiRE DE PORCHEFONTAINE. 81
denies^ la secretaire g^n^rale, une secretaire, la tr6sorifere, aux-
quelles est adjoint un conseil judiciaire. Une directrice est k la
t6te de la maison, dont elle gouverne le personnel. Deux co-
mites de patronage, Tun d'hommes, Tautre de femmes, secon-
dent le Comity directeur. Les enfants de nationality frangaise
sont seuls rcQUS, sans distinction de culte. Le prix de la pen-
sion payante est de 40 francs par mois la premiere annde, tons
frais compris, et de 30 francs la seconde ann^e. Outre la gra-
tuity reserv^e k la moitie des enfants, la Society accorde des
bourses et des demi-bourses aux parents qui en fontlademande
motivde.
Le Comite medical a pour president d'honneur M. le D' Ber-
geron et pour president M. le D' Sevestre, m^decin des hOpi-
taux, seconds par le D' CEttinger. Nous relevons parmi les
membres de ce comity les noms bien connus des professeurs ou
docteurs Blache, Boissard, Champetier de Ribes, Charpentier,
Porak, Ch.Richet, Albert Robin,Theophile Roussel, Paul Segond,
Terrier, Anselme Weill, Jules Worms. Nous y lisons encore le
nom de I'illustre et regrett6 Germain S^e. Le service medical
quotidien est fait par le devout et vigilant D' Parelle, de
Versailles.
IV
Mais il est temps de visiter Tetablissement mdme. Quand
on se^rend k Versailles par les tramways ou paries cheminsde
fer de TOuest, rive gauche, on apergoit, non loin de la grille des
Chantiers, les terrains ou s'eifeve la premiere Pouponnifere
construite en France. A droite et k gauche du b&timent prin-
cipal, affecte aux services administratifs et au personnel, et ou
se trouvent ^galement le parloir des parents et le cabinet du
mddecin, s'^tendent, rdunis par des galeries vitrdes, les trois
pavilions actuels, d'aspect gai et riant : ils font avec tout
I'ensemble des constructions, grand honneur k Tarchitecte,
M. Jacques Hermant, qui a g6nereusement fait abandon
h Toeuvre de ses honoraires. A quelque distance, danslejardin,
s'6l6vent une infirmerie, presque toujours vide, et un b&timent
REVCE PHlLAjrrHROPIQUE. — H. 6
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82 REVUE PHILANTHKOPIQUE.
dHsolement, destine aux enfants et aux nourrices mis en sur-
veiUance h leur arriv^e. Unebuanderieet divers services acces-
soires complMent la colonic. Un vasle jardinoflFre aux nourrices
el aux enfants ses pelouses, ses fleurs et ses ombrages. C'esl
un spectacle touchant et charmant, d^s les premiers beaux jours,
de voir au bras de leurs nourrices ou sur le gazon, ou dans de
petites voitures qui circulent dans les allies sabl^es, tons ces
enfants sous leur petit v^tement rose^ tandis que leurs parents,
les jeudis et les dimanches, sont admis k les voir, et peuvent
juger du bien-Atre et des soins donl ils jouissent. Les t^moi-
gnages de leur reconnaissance forment d6j4 un dossier qui de-
viendra Ic livre d'or de I'oeuvre.
Le spectacle est plus int^ressant encore, quand on pdn^^tre
dans rintdriour des bdtiments. Et d'abord, dans le vestibule,
des plaques de marbre portent inscrits lesnomsdes fondatrices,
des donateurs el, en t^te, ceux des premiers presidents d'hon-
neur de Toeuvre, Pasteur et Jules Simon. Ce qui frappe, d^s
Tentrdc, c'est la temperature entretenue, nuit et jour, dans
toutes les salles, galeries et couloirs que les enfants habitentou
traversent. Cette temperature varie de 18*> Jl 20<>, selon I'^ge des
poupons. I/air et la lumi^re sont partout. Les dortoirs des
enfants et ceux des nourrices sont sdpards par des cloisons
vitr^es; des salles de bain, de pesage des enfants, de sterilisa-
tion du lait, faite sur place, le vestiaire, la lingerie, le rdfecloire
des nourrices, la pharmacie, Tusinepour le chauffage Ji reau,le
cabinet medical, tout est distribud, amdnagd dans les conditions
les plus salubros et le confortable le plus ing^nieux.
La direc trice est secondde par une sous-directrice et plu-
sieurs surveillantes,*dont les attributions sont distinctes.Nous
avons iWjk parld du D' Parelle, qui fait sa visite quotidienne
etdu comiie medical, dont le president, le D"^ Sevestre, inter-
vient avec un zMe admirable dans tons les cas urgenls, ainsi
que le D"" OEttinger et le D*" Boissard ; un bulletin medical, redige
journellement parte D' Parelle, est conlr6l6 et contresigne par
oux. Ladmission des nourrices et des enfants, retenus, k Tar-
rivee dansle bAtiment d'isolement, ou lazaret, nVst prononcee
que sur lour visa, commeaussi leur sorlie.
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LA POUPONMKHE DE PORCHEFONTAINE. 83
Plus de cent quinze enfants sont, en cc moment, presents k
la Pouponni^re, etce chiflfre seraitvite, non pas double, mais
quintuple, d^cupI6, si les pavilions pouvaient se multiplier au
grd des demandes! L'insuffisance du premier pavilion construit
en 1893 et inaugur^ par M. Poubelle, pr^fet de la Seine, et
M"* Poubelle, avait 6t6 tout aussit6t reconnue. C'est gralce k
d'actives et persistantes interventions que furent obtenues des
Ministtoes de Tlnt^rieur et de TAgriculture les ressources n^-
cessaires k T^dification du second pavilion, dont I'inauguration
fut faite avec salenmt6 en presence de M"** et de M"" F^lix-
Faure, des prineipales autorit^s de Seine et de Seine-et-Oise,
et d'une glite de visiteurs, invites k parcourir Tfitablissement.
Depuis, un troisifeme pavilion a 6t& 6le\6 et inaugur^, celui-
Ik pour un objet particulier et une 6preuve digne du plus haul
int^rfit. On sait que le D*^ Budin, accoucheur en chef de la
Maternitd, y a organis6 un service de couveuses, destind k rece-
voir les enfants nds avant terme, et que des soins exception-
nels peuvent seuls conserver k la vie. Mais dfes que ces pctits
6lres si fragiles ^taient sortis des couveuses, les nouvelles con-
ditions atmosph^riques leur (^taient presque toujours funestes.
FrappcS des avantages uniques que lui ofTrait Torganisation
int(5rieure de la Pouponni^re, M. le D"^ Budin a eu Tidee de lui
confier les enfants de ces couveuses, entre la ^rlie de scs
appareils et la rentr6e definitive k Tair libre. La temp6rature
de la Pouponni^re et les soins qu'on y donne aux nouveau-n^s
r^pondaient pr6cis6ment au besoin reconnu d'une sorle do serre
Iemp6r6e, complement de la couveuse.
Uid6e6tait bonne. Mais il fallait les moyens de la r6aliser,
sans confondre les deux categories d enfants. Ungendreux bien-
faiteur foumit la somme n^cessaire k Fachevement, k lam^na-
gement et k Tentretien de ce troisi^me pavilion. Les nourrissons,
amends avec precaution de la Maternity, passent par groupes
plusieurs mois k la Pouponni^re, etce roulement, ousc renou-
vellera plusieurs foisparan celte clientele si tendre etsi delicate,
suffit pour permettre ensuite a ces poupons d'afifronter Tair
exterieur et de prendre definitivement possession de la vie.
Ajoutons qu'une statistique speciale a ete etablie pour cette
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84 REVUE PHILANTIIROPIQUE.
cat^gorie dc pensionnaires, dont la mortalit^y au d6bul sur-
tout, pouvaitfetre plus fr6quente,et ne devaitpas sans prejudice
se confondre avec celle des autres enfants. Le D' Budin Tavait
compris, et s'^tait pr6t^ spontan^ment k cette distinction. Mais
tel est d^jile succ^s de cette essai^ que r6cart diminue entrc
les deux statistiques, et que Ton peut d6j4 prfivoir I'^poque oil
elles se confondraient sans inconvenient.
I) y a lieu d'insister aussi, dans ce tableau que nous essayons
d'abr6ger,surles services que la Pouponnifere rend aux nourrices
qu'elle emploie. Libre k certaines personnes, plus exigeantes
sur la nature des mis^res k secourir que vraiment humaines
et charitables, de s'dtonner qu'on prenne un int6r6t compatis-
sant aux iilles-m^res. Pour ces esprits timor^s le mot de soli-
darity reste inintelligible. Les nourrices de Porchefontaine sont,
en effet, des filles-mdres, mais choisies, hdtons-nousde le dire,
parmi cellos dont le malheur et Tabandon inspirent le plus de
sympathie. II y a un devoir social 4 les sauver du d^sespoir, ou
k les arracher k la degradation irreparable : c'est en leur ensei-
gnant la materniie qu'on peut y r^ussir, — et qu'on y a r6ussi.
Les nourrices quittent la Pouponni^re avec leur enfant sain et
bien portant, et elles emportent un p^cule qui leur permet de
vivre k Tabri de la misfere en attendant du travail ou un emploi.
Cinq d'entre ellesj cette ann^e, ont H6 plac^es par les soins du
comite de patronage ; trois ont regularise leur situation par le
mariage; enfin trois sont restees k Tetablissement. Ni Tassis-
lance publique ni les moralistes n'ont k se plaindre de ces
resultats. Quant aux nourrissons, combien dejJt ont 6t6 sauves !
Dirons-nous le regret que laisse, k toutes ces femmes gene-
reuses dont la Pouponni^re est Toeuvre, Timpuissance ou elles
sont de repondre k toutes les mferes qui s'adressent k elles?
Pour assurer une place k Tenfant ne ou k nattre, il faut s'in-
scrire, il faut attendre ; le plus souvent, il faut renoncer k toute
esperance. On a dii, avec une vraie douleur, ecarter, parait-il,
745 demandes d'admission, toutes tr^s dignes d'interfit, la plu-
part pay antes. « Sauvez mon enfant! » c'est le cri de toutes
ces meres, Fappel decourage de celles que des deuils ante-
rieurs ont frappees, ou de celles qui simplement redoutent le
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86 REVUE PHILANTHROPIQUE.
on que les fondatrices de TcBuvre eussent la pens^e d'en tirer
un b^ndfice?
On voit en lout cas, par ce calcul, que la lourde charge de
r^tablissement est produile par la presence des enfants 6lev6s
h titre gratuit, puisque Ton d^bourse pour ces demiers la
somme annuelle de 39 420 francs, contre les 14220 francs
repr^sentis par les nourrissons pay ants.
Si maintenantron songequela plusgrosse part des frais g6-
n^raux d'^tablissement ne se reproduira pas ; que le traitement de
la directrice, du m^decin,dessurveillantes resteront les m^mes
avec trois ou quatre pavilions, — et plus, — comma avec un
seul ; que le b&timent de Tadministration, rinfirmerie, le pavil-
ion d'isolement, loutes les installations accessoires, les planta-
tions, les cl6tures, n'entraineront gufere de d^penses nouvelles,
et que des Economies de detail pourront 6tre r^alis^es sur plus
d'un point,] on 6prouvera moins de surprise et moins d'in-
qui(5tude.
II n'en est pas moins vrai qu*un budget] annuel de prfes de
55 000 francs, c'est une somme, et il faut admirer par quels
efforts, par quelle ardente propagande, m6me avec le con-
cours des ministres de Flnt^rieur et de TAgricuIture, du Con-
seil g^n^ral et du Conseil municipal de la Seine, la Society
matemelle a pu suffire, sans trop s'engager, k de telles charges.
Fondations perp^tuelles ou simples, fondations de berceaux
(que ne les multiplie-t-on pas davantagel), souscriptions an-
nuelles, dons en argent ou en nature, representations thd4-
trales, ventes, etc., tout est venu en aide i\ ces vaillantes
femmes, dont les convictions contagieuses ont fait merveille.
Eu (^gard k la beauts de ToBuvre entreprise, les d^penses ne
paraissent m6me pas excessives: car enfin, de quoi s'agit-il?
D'une creche module, d'un type absolument nouveau en France,
ou tous les progrfes de Thygi^ne infantile, tons les perfectionne-
ments d'installation, toutes les applications pratiques de la
m^decine modeme ont pris place, et ont 6t(5 exig^s. Songe-
t-on bien k ce que coAterait un pareil nombre d^enfants malades
dans les h6pitaux, dans les asiles, ou m6me chez les pauvres
gens qu'il faudrait secourir? Se rend-on bien compte des ^co-
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JJp.nrr^-^'T'-^' -
LA POUPONNlfeRE DE PORCHEFONTAINE. 81
nomies que permettraient de faire dans le budget de TAssis-
tance publique les mesures preventives qu'on veut appliquer ?
ce que la preservation des enfants sains k leur naissance retran-
cherait des d^penses qu'il faut faire pour les tuberculeux, les
scrofuleux, les rachitiques, les aveugles et les iniirmes de toute
sorte, qui n'ont ete, le plus souvent, que des enfants mal soi-
gnis? On pent affirmer hardiment que tout ce qu'on creera, a
rinstar de la Pouponni^re, pour conserver et fortifier la pre-
miere enfance, reduira dans des proportions inattendues le
budget public de la maladie, de Tinfirmite et de la mis^re !
C'est une operation arithmetique qu'on pent recommander aux
gouvernants.
Le Conseil municipal de Paris, qui a t^moigne ses sympa-
thies k la f^ouponnifere de Porchefontaine, ne pourrait-il mul-
tiplier ce type tout autour de Paris, pour la plus grande satis-
faction de toute une classe interessante de femmes laborieuses ?
Mais il faudrait propager partout, en France, les nourrice-
ries modules, les creches internes, les pensionnats de nouveau-
nes, dansle voisinage de toutes les grandes villes, m^me dans
les campagnes, partout od Ton voudra combattre Tinfluence
nefaste des nourrices libres etleur reprendreles enfants qu'elles
tuent.
Et pourquoi les medecins de campagne eux-m6mcs, ceux
qui ont mince clientele, ne prendraient-ils pas un interet direct
k ces creations? Pourquoi, dans des regions saincs, ou le ter-
rain scrait k bon marche, la bfttisse economique, le bon lait
moins coiiteux, n'etabliraient-ils pas, sous leur surveillance et
m^me a leur profit, comme on fait pour certaines maisons de
sante, de ces creches internes payantes, dont ils choisiraient
avee soin les nourrices, oil ils appliqueraient la nouvelle hy-
^ene des enfants, non pas sur une trop grande eehelle, de peur
d'abus, mais en faveur de groupes privilegies de nourrissons
confies k leur vigilance et k leur savoir? Le type existe desor-
mais. On aurait des hospices d'enfants sains et valides, — le
terme est i creer ; — on y entrerait parce qu'on so porte bien ;
on en sortirait sans avoir ete malade : combien une telle nou-
veauie serait populaire ! Les m6decins, mattres chez oux, peres
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88 REVUE PHILANTHROPIQUE.
nourriciers eux-m^mes en quelque sorte, auraient sur Thygidnc
de Tenfance une action qu'ils n'ont pas chez les nourrice^ dis-
pers6es dans les villages ; on les y appelle trop tard, on ne leur
ob6it pas, on ne croit pas en eux. Mais les r^sultats obtenus
dans leur ^tablissement frapperaient vite Tattention, et tout se
ressentirait au dehors de Texemple qu'ils auraient donn6. Quel-
ques-uns ont commence et Tidde pourrait 6tre f^conde.
Pour toutes ces mesures, il faut se h&tcr. La mortality des
enfants du premier 4ge est IJi, toujours menaoante ! Nous lais-
serons-nous pr^venir et distancer, cette fois encore, par les
pays strangers? Non seulement la Belgique, la Hollande, TAu-
triche, TAm^rique m6me, preoccupies de cette grande question
de rhygi^ne et de la preservation de Tenfance, ont envoy6 des
deieguis pour etudier Tetablissement de Porchefontaine et crier
sur ce module des maisons similaires ; mais Tenquite k laquelle
on se livre dans toute TEurope foumit k la question des docu-
ments inattendus.
11 faut lire, sur ce sujet, le rapport |si intiressant et si sub-
stantiel public, sous le litre modeste de Notes par M. le D*" Henri
de Rothschild, chargi d'une mission Ji Vienne, k Berlin, i Buda-
pest, Ji Saint-Pitersbourg, a Moscou. Les immenses et d6ja an-
ciennes institutions qui prosp^rent dans cette derniire ville,
au profit de VEnfance malheureiise {et dish^ritee), pour emprun-
ter k M. Paul Strauss le litre de son beau livre, sont un aver-
tissement pour la France, en m6me temps qu'un exemple. Que
la Pouponni^re de Porchefontaine soit, en quelque sorte, la
maison m5re des nourriceries de demain, et que le sidcle qui
va commencer bientdt en prisente partout les exemplaires,
avec cette simple devise de la Pouponniire de Porchefontaine,
dont Roty a fait un chef-d'ceuvre : « Maternity. »
LE DOCTEUH X...
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LES ORIGINES
DE
L'INSTITUTION DES CAISSES D'fiPARGNE ^'^
L'insiitution des Caisses d'^pargne doit son id^e premiere k
un Frangais, Hugues Delestre, « Docteur bs Droits, conseiller
du Roy », Lieutenant-civil au si^ge royal de Langres, en 1610 :
elle ne fiit mise en oeuvre qu*en 1778, dans la Ville libre de
Hambourg, d'od elle se propagea d'abord dans quelqiies villes
d'Allemagne, de Suisse et de Grande-Bretagne ; elle re^ut sa
premiere incorporation legale en 1816 (13 d6cembre) Ji Boston,
Massachusetts, iStats-Unis d'Am^rique, et sa premiere loi or-
ganique en 1817 (l**" aoAt) en Angleterre, et dans cette forme
elle s acclimata bicntAt dans la plupart des Etats du monde ci-
vilise ; enfin elle prit un nouvel organisme, le plus simple, le
plus commode pour le peuple, le plus sAr, par Facte du par-
lement britannique du 17 mai 1861, qui a cr^^ la Post office
Savings Bank, la Caisse d'^pargne postale, aujourd'hui ^tablie
dans vingt-cinq Etats d'Europe, d'Afrique, d'Am^rique, d'Asie
et d'Australasie.
La Caisse d'^pargne a 6t6 compl6t6e dans ces derni^res anndes
par rinstitution des Caisses d'dpargne scolaires, branche auxi-
liairede r6ducation,6cole d'apprentissage dconomique et moral
pour les futurs ouvriers ; et par des services annexes tels que les
Bureaux d'dpargnedes manufactures, de Tarmde et de la flotte.
L'institution des Caisses d'dpargne est aujourd'hui, surtout
par ses progr^s depuis vingt ans, Tinstitution populaire la plus
rdpandue dans le monde civilisd, et la plus importante par le
1^1) Ce travail forme le premier chapitre de VHistoit'e gin^rale des Caisses
tf^pargne, dont j'ai r6uni les 616ments depuis plusieurs ann^es au cours de mes
missions et voyages d*6tude; j'en ai lu un extrait h rAcad6mie des sciences
morales et politiques. M.
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90 REVUE PHILANTHROPIQIE.
nombre des clients qu'elle sert et les sommes qu'elle sauve, Uu
grand avantage de la morali'16 et du bien-6tre de plusieurs mil-
lions de modestes travailleurs et de leurs families. Les peuples
d'Europe et les fitats-Unis comptent aujourd'hui trente-trois
millions de d^posants dans leurs Caisses d'^pargne, et un
stock d'^pargnes populaires en d6pdt de plus de vingt et un
milliards de francs, dont 8357938 d^posants et 3800 millions
de francs dans le.Royaume-Uni ; et une clientele et un stock
assez equivalents en France.
Le livre de 1610 oil nous avons trouv^ Tid^e premiere d'une
Caisse publique pour recevoir, garder et faire valoir sous la
meilleure garantie possible les menues opargnes du peuple, est
un ouvrage des plus curieux : il n'y a point Ik une simple id^e^
lanc^e au hasard et en termes vagues; mais Tinstitution y est
parfaitement dSfinie dans son caractfere, et formulae avec pre-
cision dans tons ses details administratifs, h ce point que Ton
croirait lire I'expos^ des motifs et le rfeglement d'une des lois
brganiques ^dict^es en notre sifecle sur cette mati6rc. Et Ton
serait port6 k penser que ce livre n'a pas ^t^ ignord de ceux
qui ont fait, sur les Caisses d*6pargne, le premier r^glement
en 1778 k Hambourg, et la premifere loi organique en 1817 en
Angleterre.
L'ouvrage de Hugues Delestre a 6t6 tellement oublid en
France durant deux si^^cles et demi qu'il n'est mentionnd dans
aucun catalogue imprim^ de librairie ou de biblioth^ue en
France. C'est pendant une de nos missions scientiiiques et ad-
ministratives, qu'il nous fut signals, en 1867, en Angleterre,
par un membre du Parlement, lord Derby ; un de ses amis poss6-
dait un exemplaire de cet ouvrage, probablemcnt achetd k Paris
pendant la Revolution dans la vente de quelques fonds de livres
d'anciens convents ou chateaux.
Le titre porte :
Le premier Plant (sic) du Mont de Piet6 francois, consacr^ k Dieu, pn'-
sente k la Heine R^gente (Marie de M^dicis) ra6re du Roy et du Royaume,
Par Hugues Delestre, Docteur ^s Droicls, conseillerde Sa Majesty, lieu-
tenant-civil en son sikfie royal de Langres.
II y a deux avant-propos, Fun a M*^*" rHl'"'™' et Rever"'"'' Cardinal hu
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LES ORIGINES DES CAISSES D'fePARGNE. 91
Perron, archey^qne de Sens, Grand-Aalmosnier de France, Tautre a M'"" le
chancelier de France Messire Nicolas Brulart Sieur de Sillery,'etCM etc.
Pittas ad omnia utilis est, promissionem habens kujuB vitae et fUturw,
D. Paulus.
h Paris, chez Jean Laquehay, imprimeur, rue Judas.
MDCXI.
avec privilege de Sa Majesty.
Le privilfege, imprim6 a la fin du volume, contient les pas-
sagos suivants, qui rappellenl les hautes missions et charges de
H. Delestre sous les r^gnes pr6c6dents :
Par le tires patentes en datte du 20 septembre i610, sign^es par le Roy
en son Conseil, plus bas Gombaud, et scellees du grand seel en cire jaune,
Sa Majesty... exhorte et invite Fautbeur de ce traits k mettre par escript
et en Inmi^re ce qu'il pourra au bien public, bonneur et c^l^brit^ de la na-
tion Francoise : De quoi Sadite Majesty a bien voulu prendre confiance en
loy recogneu, par plusiears belles commissions et charges tant deans que
dehors ce royaume ildMement acquict^es au contentement des Rois defuncts,
de tr^s-beureose m^moire... Pour ces causes lui ayant accords...
C'est un fort volume in-4^, de 1 140 pages, bourr^ de cita-
tions latines, grecques, h^bra'iques m^me, suivant la mode du
temps, mais d'oii Ton pent extraire une centaine de pages mar-
quees au meilleur coin du l^gislateur le plus haut de vues, et
de Tadministrateur le plus ing^nieux et le plus pratique.
Voici, pour la question des Caisses d'^pargne, quelques
passages, dontil faut bien se rappeler la date, 1610, car oncroi-
rait, sauf le style, le livre ^crit d'hier.
Hugues Delestre propose « le plant d'une Caisse oil un ser-
viteur ou servante, et tout autre mercenaire qui loue et en-
gage son labeur par an ou k journ^es (parce que le dire du
vulgaire est justement pris(5 du jurisconsulte : fragilem esse
sine peculio pecuniam), s'il veut se servir de la garde du
Mont, Icelui sera tenu recevoir Targent qu'il lui apportera,
quand mesme il ne viendrait pas de son travail mercenaire,
ains de la vente de quelque bien ou d'autre part. Le lui rendra,
quand il en aura affaire et le redemandera soit le tout en partie
k sa commodity. Et si encore, lui fera present, h proportion de
temps qu'il aura us6 de ses deniers, d autant qu'iis lui eussent
pu raporter, h raison du denier dix sept (5,88 p. 100), d6falquant
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92 REVUE PHILANTHROPIQUE.
seulement le cours d'une huitaine pour les employer, et iine
autre afin de les retirer et apprester avec plus de commodity. »
\oilk bien nos regies actuelles, indiqu^es jusque dans les
details administratifs, jusque dans les dispositions de tr^sorerie
relatives h Tint^r^t, qui ne commence h courir que quelques
jours aprfes le d^p6t, et qui cesse quelques jours avant le rem-
boursement, afin que Tint^rfit porte exactement sur la dur6e
du temps ou le ddp6t est en placement fructueux.
En outre des motifs que donne Delestre de cette institution,
et qui sont les motifs m^mes de T institution actuelle de nos
Caisses d'^pargne, il en est un assez impr^vu pour nous, mais
qui parait fort ancien, car le savant conseiller royal invoque
Tautorit^ de Plalon ; c'est que : « le Mont offrant au serviteur ou
gagne-joum6e le moyen d'assurer la garde de son petit gain avec
commodity et avantages de restitution el profit; les maitres
manqueront de tout pr^texte pour refuser ou delayer (retarder)
le payement des salaires. »
11 parait qu'au xvn*^ sifecle en France, certains maitres rete-
naient les salaires dus, en all^guant que leurs serviteurs ne
sauraient pas conserver leur argent pour Tappliquer h des be-
soins utiles et qu'ils le gaspilleraient. C'^lait la pr^voyance
forc^e k regard des mercenaires, et souvent aussi un calcul de
la part des maitres. A ces deux points de vue, Delestre con-
damne avec raison cette pratique: il veut Taffranchissement
du salaire gagn^ ; il professe aussi que la pr^voyance doit ^tre
libre, et que par \k seulement elle a toute sa valeur,qui est de
sauver Targent du mercenaire, du plus modesle Iravailleur, et
en m^me temps de fortifier la verlu de Thomme en Thabituant
k r^sister aux mauvaises d^penses par sa propre volenti, dans
une pens^e de sage pr6voyance.
A une ^poque oil les ^tablissements de banque sont encore
rares et incertains, Delestre propose « d'utiliser le Mont pour
d^p6ts volontaires de quiconque », et « que Tint^rfet servi k ces
d^p6ts soit seulement le trenti&me denier (3,33 p. 100), c'est-i-
dire moindre que Tint^r^t servi aux d^p6ts des mercenaires ».
Et cette difi'^rence d'int6r6t est aujourd'hui aussi ^tablie dans
certaines Caisses d'^pargne d'Autriche, dltalie et d'Am^rique,
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w^^-^-tT'-f^'-
LES ORIGINES DBS CAISSES D'fePARGNE. 93
oik Ton admet les d^p6ts sans autre limitation qu'un maximum
assez 6ley6, ddtermin^ de temps en temps, suivant les circon-
stanccs, par Tadministration de la Caisse.
a Et ne doubte aucunement, dit Delestre, que maints sei-
gneurs, ambassadeurs, p^lerins, voyageurs et gents de guerre
qui aux bonnes occasions s'absentent de leurs maisons ; encores
plusieurs qui amassent de Targent, k certain effect qu'ils pro-
jettent de loin, mesme pour acheler quelque terre, fes coffres
desquels ce qu'ils ont dfjk croupit inutile, sujet h des larcins
industrieux comme k de violents efforts, ne fassent volontiers
UD pur, simple et naturel d^post, sous la foi de ce Mont duquel
ie mur sera d'airain; il n'y a buffet si certain pour la certitude
de ravoir k sa bonne heure ce que Ton aura d^posd, ou telle
pari que Ton en demandera, argent qui ne puisse ^tre d^roqu^
parsaisie quelquonque. »
Voilk bien en termes precis et ^tonnamment 6nergiques la
sAret^ et le secret de nos d6p6ts d'^pargne actuels, et aussi le
caract^re de valeur insaisissable, reconnu aujourd*hui k ces
d^p6ts par plusieurs legislations d'Europe et d'Am^rique.
Seulement aujourd'hui, nos Caisses d'^pargne les mieux en-
tendues pour Tespiit et le but de Tinstitution, et les plus sage-
ment r^l^es, ont laiss^ k Tindustrie priv^e, fort bien oulill^e
en ^tablissements de banque, les d^pftts d'une certaine impor-
tance; et cela forme aujourd'hui toute une classe de banques,
dites societ^s de dep6ts en comptes courants, exploit^es par des
soci6t6s d'actionnaires qui recherchent dans ces operations des-
benefices; pendant que les depdts des menues epargnes du
peuple sont seuls rcQus, gardes et geres par des administrations
gratuites, qui n'ont en vue que le pur interet des epargnants.
Ainsi, les personnes aisees, capables de discemer et de
contr6ler un bon etablissement de dep6ts, sont servies par
les banques privees; et les modestes travailleurs, la plupart
ignorants et peu aptes k reconnaltre un lieu de toute silrete,
placent leurs petites economies dans les Caisses d'epargne :
service d'utilite populaire, qui ne recherche aucun avan-
tage que Tinterfet des deposants et qui procure la garantie la
plus haute possible, la plus evidente, celle de TEtat; car la
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94 REVLE PHILAMUROPIQUE.
stirel^y tel est le mot fondamental de nos Caisses d'^pargne.
Et il est fort curieux de lire dans I'ouvrage de Delestre le
chapitre vi, justement intitule : Les Seurtfs (les sftret^s), ou cet
habile administrateur organise « les sept seigneurs notables et
du plus haut rang, qui dirigent le Mont sous leur garantie
personnelle et sous la garantie du Roy; les baillis-semainiers,
qui president par semaine a toutes les operations ; les employes,
qui donnent caution et pen vent 6tre condamn^s a payer quatre
fois loute somme deiourn^e; les assemblies annuelles oii se
fait le compte ((inancier et moral) ; les placements des fonds en
valeurs de la Ville et autres de toutes seuret6s ».
(]c chapitre, de cinquante-huit pages, malgr^ le fatras de
citations bizarres, met en puissante Evidence le grand principe
souverain des Caisses d'^pargnc, la siiret6.
Hugues Delestre, dans son Plant, qui semble la vraie p^pi-
nifere de toutes les institutions economiques dont se glorifie
notre sifecle, propose aussi une caisse des retraites : « Le Mont
recevrade Targent dont il paiera une rente viagfere au denier
vingt-sept(3,70 p. 100). » Et dans ce chapitre, on croit lire un ex-
pos6des motifs et m^mele dispositif des lois modernes anglaises,
beiges et frauQaises, qui ont organis6 les annuit^s populaires,
les petites assurances apr^s d^c^s et les retraites populaires
pour la yieillesse, h c6td et au moyen des Caisses d'^pargne.
On trouve vraiment dans cet ouvrage dat6del610rid6eetle
plan de laplupart des institutions d'assislance, de prevoyance et
m6me d'^ducation, populaires, que nous avons coutume de regar-
dercommedes ceuvres toutes moderjics, contemporaines : Tassu-
ranee pour les secoursdemaladie,pourlesfunerailles,ra3sistance
judiciaire, le patronage de jeunes apprentis,etc. Et tout cela est
trait6 h. la fois par un administrateur pr6cis dans les details les
plus intimes d'organisation, de fonctionnement etde contrdle,
aussi bien que par un homme d'Etat aux vues les plus ^lev^es.
Ainsi, par exemple, Delestre formule excellemment ce prin-
cipe moderne de la science administrative, la separation des
ordonnateurs et des comptables : « Ceux qui manient Targcnt
n'ordonnent rien, ceux qui ordonnent nc touchent h rien. »
Et dans un autre passage, il dtablit, avec les vues d'un
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LES ORUaXES DES GAISSES D'tPARGNE. 95
homme de g6nie social, cette distinction, qui ne sera bien admise
dans le monde civilis^ que plus de deux si^cles apr^s, k savoir:
que les masses populaires se composent de deux ordres de
personnes tr^s diff^rents, et qu'il faut consid<5rer et trailer par
des institutions de caract^re tout different : 1° les pauvres
(orphelins, malades, in(irmes et vieillards sans ressource),
individus tombds, que la charity publique ou priv^e a charge
de soutenir; 2° d'autre part, la classe bien plus nofnbreuse des
modestes travailleurs, des mercenaires^ dit Delestre, des tra-
vailleurs qui se tiennent debout et qui ne demandent qu'un peu
d'aide, aide purement morale et ^conomique, non charitable :
distinction fondamentale des institutions modernes, que nous
avons un jour exprim^e ainsi, dans un discours prononc^ k la
Sorbonne en 1867 sur les institutions de pr^voyance et les insti-
tutions d'assistance, ce qui fut not^ dans la presse et ailleurs
comme un point de vue qu'on croyait nouveau : A rindigent,
Fassistance charitable; a fouvrier, faide economigne; distinc-
tion que le roi Henri IV semblait pressentir, quand il parlait
aux paysans, non comme k des pauvres, mais comme k des
travailleurs qu'il voulait aider k amdliorer leur sort, qu*il
voulait mettre ainsi en ^tat, par eux-m6mes, d'avoir poule au
pot le dimanche ; — distinction mdconnue en Europe pendant
plus de deux si^cles; car les esprits les plus ^lev6s de la Revo-
lution fran^aise (sauf Mirabeau peut-^tre, dont nous aurons k rap-
peler ci-apr^s les hautes vues de progrfes sociaux), tons nos
l^gislateurs de cette 6poque de liberation socialo et d aspira-
tions d6mocratiques, confondirent dans leurs projets de lois
ou d'institutions toutes les classes populaires, ouvriers el indi-
gents, dans la classe des pauvres, et ils appliqu^rent k tons les
membres des classes inf^rieures le mfime traitement, avilissant
et funestc aux vaillants travailleurs.
Comment done a-t-il pu se faire que cette onuvre de Ungues
Delestre soit rest^e lettre morte? Comment s'est 6vanouie dans
Ic souvenir mdme des hommcs et pendant plus de deux si5cles
eel admirable plan de r6formes et d*am6liorations socialesqui,
^videmment n'dtait pas en 1610 Tinvention d'un seul homme
d'etat, mais r^sumait sans doute les desiderata de plusieurs es-
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96 REVUE PHILANTHROPIQUE.
prils d'6lite, en t6te desquels on pent ranger Henri IV et Sully?
Get strange ph^nom^ne pent s'expliquer. Des grandes agita-
tions, autani morales que politiques, qui marqu^rent la iin du
xvi®si^cle,sortirent un bon nombred'hommesd'Etat]fortement
tremp6s, \igoureux de pens^e et de ccBur, qui regardaient la
soci^t^ d'une manifere assez nouvelle : le roi n*6tait pas seule-
ment le maitre de la nation, c*6tait aussi le pfere de la famille
nationale, prot^geant, secourant et aidant ses enfants divers
suivant leur condition et les circonstances. L'esprit d'analyse
exp^rimentale avait ainsi pr^par^ les hommes d'Etat du r^gne
d'Henri IV h traitor ce que nous appelons aujourd 'hu i les questions
sociales, c'est-4-dire les moyens d'am^liorerle sort des diverses
classes des membres de la famille fran<^ise. Si Henri IV avail
v6cu sa vie normale, la France aurait vu, sous son inspiration,
et avec le concours de ses compagnons et compares, nobles sei-
gneurs et grands bourgeois, organiser toutes ces institutions
qui auraient li^ les mercenaires aux notables, leurs fr^res ain^s,
pour am^liorer, fortifier et grandir le peuple travailleur. Un tel
r^gne, vraiment grand dans la civilisation du monde, aurait
epargn6 h la France et h bien d'autres nations, de terribles
secousses, pour le plus grand avantage du progrfes social. Mais
Henri IV mort en 1610, le gouvernement, pour pr^s de deux
si^xles, passa aux mains d'hommes d'etat qui ne voyaient dans
un roi qu'un chef d'arm^e et un mattre de peuple, et qui dans
ce mot peuple ne voulait m^me plus distinguer rien, et ne
voyaient qu'une masse hit^rog^ne, od bourgeois, mercenaires
et indigents resteraient confondus ; le roi, entour^ des seigneurs
r^duits au rang de dociles vassaux, et au-dessous, tout le
reste, le peuple, tel fut Fid^al de Richelieu, sous Louis XllI, et
de leurs successeurs, Louis XIV et Louis XV. A peine aper^oit-
on comme une lueur de bon sens social sous Louis XVI avec
Turgot et Malesherbes, et avec Mirabeau.
Henri IV fut le dernier roi dont le peuple ait port6 le deuil;
quand Richelieu et Louis XIII, Louis XIV et Louis XV mou-
rurent, ce fut chaque fois pour la nation comme une d^Iivrance.
U suffit k Louis XVI de montrer son souci dans les ques-
tions sociales pour m^riter une bienvenue dans tons les coeurs,
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LES ORIGINES DES CAISSES D'fePARGNE. 97
un salut populaire k son av^nement. En 1780, il cr^e une asso-
ciation qui devait rechercher, faire connaitre et mettre en pra-
tique tout ce qui pourrait concourir k soulager les besoins
actuels du pauvre, et lui preparer des ressources pour Tavenir.
C'^tait comme un sentiment de la n^cessit^ des r^formes sociales^
mais sans projets d6finis, eten confondant toujours le peuple
travailleur dans la classe des pauvres. Cependant, les iddes
d'6pargnes, de menues ^pargnes, de fructification des petites
Economies, commencent k se d^gager de ces conceptions ob-
scures : en 1787, on cr^e un « Bureau d'dconomie », et Feuchfere
^tablit ensuite la « Chambre d'accumulation de capitaux et
d'int^rfits composes ». Dans cette tendance aux sages progrfes,
peut-6tre la France aurait-elle pris sa bonne voie, siMirabeau,
moins d^ri^ par son pass^ et par ses mceurs, mieux comprisdu
roi et des plus clairvoyants parmi les puissants du jour, avait pu
prendre sa digne place, celle de premier. ministre, leader de
cette Assembl^e natibnale qui, le 3 avril 1791, d^cr^tait les
honneurs du Pantheon k T^loquent orateur, « k Thomme d'etat
capable de r6g6n6rer Tempire ».
Mirabeau, en eflfet, ne fut pas seulement un violent r^volu-
tionnaire, un terrible riJvolt^ centre les abus de tous les despo-
tismes : dans les derni^res ann^es de sa vie, on Tentendit ap-
porter k la tribune des paroles de veritable horn me d'etat, des
pens^es et des projets d'organisation sociale, comme dans cette
stance du 3 mars 1791, un mois avant sa mort, quand, k propos;
de r^tablissement dc la Tontine viag^re et d amortissement
dite Caisse LafargCy il pronon^a ce discours digne du plus sa-
vant ^conomiste, du plus sage r6formateur, sur Tam^lioration
morale etmat^rielle du peuple par les ^tablissements d'^pargne
et de prdvoyance:
w Je voudrais que M. Lafarge eilt appel^ aussi son projet
Caisse des ipargnes. Partout le peuple est k portde de faire quel-
ques ^pargnes; mais il n'a nuUe part la possibility de les faire
fructi&er. L'esprit d'^conomie 6tait done presque impossible
dans le peuple ; il n'en sera pas de m^me quand une caisse des
^pargnes aura r6alis6 les vceux des bons citoyens.
« En vous parlant des avantages de Tesprit d*6conomie,
RIVUE PBILAICTBROPIQUE. ~ 11. 7
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98 REVUE PHILANTHROPIQUE.
comment passer sous silence les bonnes mceurs qui on sont lo
premier bienfait? La pauvret^ se concilie avec toutes les vcrtus^
mais kla pauvret^ succfede Tindigence, la mendicity, et combien
cet 6tat cruel n'est-il pas voisin de la plus dangereuse corrup-
tion ? Tout se tient dans Tordre moral. Le travail est le pain
nourricier des grandes nations ; I'^conomie, jointe au travail,
ieur donne des moeurs ^ les fruits de cette Economic lesrendent
heureuses. Etn'est-ce point \k le but de toutes les lois?
« L'esprit d'^conomie double le travail, parce qu'il en fail
mieux sentir le prix; il augmente les forces avec le courage. »
Ainsi parlait Mirabeau^qui, un mois apr5s ce discours, mou-
rait k V&ge de quarante-deuxans, ayant d6ja bien m6rit^ de son
pays, et si bien que,le lendemain de sa mort, La Rochefoucauld
apporta h TAssembl^e nationale un vobu ou Ton parlait des
« efforts de T^loquent orateur pour les meilleurs moyens de
r^g^n^rer Tempire », et ou Ton faisait allusion « au deuil de la
France et de Tunivers, quand la mort frappa cet Am^ricain il-
lustre (Franklin), dont le nom rappelle k la fois tout cc que le
g^nie a c< de plus vaste, la libertd de plus actif et la vertu de
plus atiguste » .
Avec Mirabeau, cette question sociale semble disparaitre
sous les questions politiques, et pour longtemps.
En vain, une loi du 19 mars 1793 indique, dans son article
13, le projet d'une Caisse nationale de prdvoyance; en vain
aussi, la loi du 24 pluvi6se an VIU, l''*''loi organique de la
Banque de France, porte, article 5:
« Les operations de la Banque de France consisteront...
4** k ouvrir une Caisse de placements et d'dpargnes, dans la-
quelle toute somme au-dessus de cinquante francs serait rcQue
pour Stre rembours^e aux 6poques convenues. La Banque
paiera Tint^rftt de ces sommes ; elle en fournira des reconnais-
sances au porteur ou k ordre. »
Comme il arrive trop souvent en France, il faut attendre
que rid^e fran^ise de 1610 ait pris racine et port6 fruits k
retranger, d'od elle nous reviendra, en institution organis^e et
6prouv6e, en 1818.
. A. DE MALARGK,
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CLASSIFICATION DES DEFENSES
DE L'ASSISTANCE PUBLIQUE DE PARIS
L'administration de TAssistance publique dc Paris vient de
faire paraitrc son projet de budget pour 1898.
G'est un gros volume in-4® raisin de 186 pages, avec unc
annexe de 92 pages.
Les provisions de dOpenses s'61fevent k la somme de
50877997 fr. 50.
Ce chiflfre de 50 millions est souventcit6, et souventaussi on
r^p^te que les services rendus ne r^pondent pas k Timportance
de la somme.
Cette assertion n'est pas en tons points exacte, par celte
simple raison que les d^penses proprement dites d'assistance
publique sont loin de s'^lever au chiffre de 50 millions.
L'administration de T Assistance publique k Paris a pour
mission desecourir, soit k domicile, soit dans les ^tablissements
hospitaliers, trois categories de personnes : 1*» lesmalades; 2<* les
vieillards et les infirmes;3'' les indigents et les ndcessiteux.
Quant aux deux autres categories, les alien^s et les enfants as-
sistOSy ils sont ft la charge du budget dOpartementai, et si I'admi-
nistration de Tavenue Victoria paye certaines ddpenses pour ces
services, elle en est rembours^e par le d6partement de la Seine.
Nous allons done rechercher dans le budget de Tadministra-
tion de TAs^istance publique quelles sommes sont respective-
ment depensOes par elle pour chacune des trois categories de
personnes qu'elle a mission de secourir, et, pour arriver ft d6-
gager ces depenses, nous devons retrancher du total du budget
une serie die sommes concernant des depenses etrangferes au
service propre de Tadministration de TAssistance publique.
Du total de 50877 997 fr. 50, il faut d'abord defalcjuer une
somme de 560040i francs montant de depenses d'ordre ou de de-
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too REVUE PIIILANTHROPIQUE.
penses faites pour des services publics ou privfe et rembours^es
par eux. On sait, en effet, que les magasins de TAssistance :
Pharmacie, Boulangerie, Boucherie, Cave, Approvisionnementy
Magasin central, vendent des medicaments, du pain, de la
viande, du vin, des Idgumes, du linge, etc., h divers ^tablisse-
ments de T^ltat, du D^partement, de la Ville, et Ji certaines in-
stitutions privies, autoris^es k b6n6ficier des prix avantageux
resultant d'achats par adjudication et des garanties de bonne
quality dues au mode de reception de toutes les fournitures par
des experts que d^signe la Chambre de commerce.
Du total des d^penses, il faut aussi d^falquer une somme de
4412439 francs concernant les capitaux ydoni le recouvrement
implique le remploi, comme, par exemple, les prix devented*im-
meubles consacr^s a Tachat de rentes sur rEtat.Ce sontlji trans-
formations devaleursqu'il faut inscrire enrecette etend^pense.
II faut encore d6falquer une d^pense de 2 343 220 francs,
correspondant ft une recette %ale, et concernant les services a
revenus distincts (fondations Galignani, Rossini, Chardon-
Lagache, etc.). Ces ^tablissements, cr^^s et entrelenusau moyen
de rossources sp^ciales provenant de lib^ralit^s, sont dirig^s
par Tadministration hospitali^re, mais leur destination ne pent
6tre chang^e ; plusieurs d^entre eux sont affect^s li une cal6gorie
toute particuli^red'infortunes, et ne viennent qu*indirectement
en aide ft TAssistance publique. Quelques-unes mdme de ces
fondations ne sont pas destinies aux Parisiens : ainsi, les ma-
ternity etablies ft Roubaix, ft Mont-Saint- Agnan, a Chalon-sur-
Sa6ne, en execution des volont^s de M"' Boucicaut.
II faut enfin d^falquer une somme de 3 350 7G2 francs pour
des d^penses qui ne concement point des services d assistance
ft la charge de Tad ministration de I'avenue Victoria, et qui cor-
respondent d'ailleurs ft des recettes, savoir :
1 610500 francs pour les ali^n^s des quartiers de Bic6tre et
de la Salpfitri^re ;
156 160 francs pour les enfants assist^s de Thospice de la rue
Dcnfert-Rochereau et de V6cole de r^forme de la Salpfetrifere;
137 700 francs pour le personnel de la division des Enfants-
Assislds;
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DfePENSES DE L'ASSISTAXCE PUBLIQUE DE PARIS. iOl
591 000 francs pour secours en vue de pr6venir les aban-
dons d'enfants.
Ces sommes sont rembours^es k Fadministration de FAssis-
tance publique, les trois premieres par le D^partement de la
Seine, et la quatrifeme par la Ville de Paris.
D'autre part, en vertu de dispositions testamentaires, Tad-
ministration est obligee de verser 333 375 francs k des cur^s, k
des tr^soriers de fabriques, a des consistoires Israelites ou pro-
testants, et 252027 francs pour rentes, fondations, pensions,
Int^r^ts de capitaux.
Enfin les exploitations (cultures, vacheries, cantines) entrai-
nent une d^pense de 270000 francs.
En cons^uence, si du total du budget, soit 50877977 fr. 50
on relranche :
Pour services li revenus dislinclfl. . . . 2343220 \
Pour operations d'onlre ii 600 404 i AK^(ifiQ9K f
Pour capitaux 4412439 I
Pour divers 3350762 )
II ne reste plus que 35171 172 fr. 50 pour les services k la
chaise de I'administration de TAssistance publique, et pour les
Bureaux de bienfaisance.
Cctte somme se decompose ainsi :
l«»Malades 17470023
2» Vieillards et inflrmes 7609634
3« Indigents et n^cessiteux 6380725,50
31460382,50
4« D^penses diverses 3710700
Total ^gal 35171172,50
1** Malades.
Les 13162 lits d*h6pitaux entralnent une d^pense de . . 15608704
Le traitement des malades & domicile coiite 1295030
Pour les accouchements chez les sages-femraes de la ville,
on pr^voit une d^pense de 446289
L^ann^e demi^re, le Conseil municipal a inaugur^ le se-
cours repr^sentatif du s^jour k rhdpital, pour lequel
on a inscrit un credit do 100000
EnQn, aux vaccinalions k domicile, on consacre une
somme de 20000
Total 17470023
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102 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Le nombre des lits affect^s au traitement des malades scrait
suffisant, si les hdpitaux n'^taient pas encombr^s de Yieillards
et d'infirmes, qui, faute de place, ne peuvent 6tre transport's
dans les hospices.
2* Vieillards et Infirmes,
Les 10757 lits que renferment les hospices et maisons de
retraite k la charge de I'admiDistration occasionnent
une d^pense de 6072034
II a ^t^ CT^€ 4088 secours de 360 francs par an, repr^sen-
tatifsdu s^jour ^Thospice, d'ou une d^pensede . . • 1472000
^administration de T Assistance puhliqae paye la pension
d'uQ certain nomhre d'enfants assist^s majeurs et in-
firmes; le credit est de 65000
Total 7609634
C'est surtout les lits d'hospice qui font d'faut, et les secours
repr'sentatifs ne peuvent supplier au manque de lits, car
nombre de vieillards, sans famille, ou atteints de graves infir-
mifs, ne peuvent vivre avec la pension annuelle de 360 francs
et doivent de toute n'cessit^ 6tre hospitalises.
3** Indigents et N^cessiteax.
Les Bureaux de bienfaisance disposent, pour secours an-
nuels aux indigents, d'une somme de 3867424
Pour secours temporaires aux n^cessiteux, d'une somme de 2 321 266
D'autre part, il est d^pens^ pour secours divers 192035,50
Total 6380725,50
Le credit de 1 92 035 fr. 50 est affects aux ddpenses suivantes :
Secours par le pr^fet . 30000
Secours par le Directeur de TAssistance * 73000
Secours de route 30000
Allocations aux fondations Tisserand et Damet. . 20000
Allocations aux asiles de convalescence d'enfants. 30 000
Loyer du dispensaire du X\* arrondissement . . 2035,50
Frais de recensement de la population iiidigente. 7000
Avec le credit de 3 867 424 francs pour secours aux indigents,
on pent allouer :
4000 secours de 20 francs par mois.
8000 secours de 10 francs par mois.
2604 secours de 8 francs par mois.
32284 secours de 4 francs par mois.
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DEFENSES DE LASSISTANCE PUBLIQUE DE PARIS. 103
et en plus, une somme de 100000 francs k r^partir entre les
46 888 indigents, k Toccasion de la F6te Nationale du 14 juillet.
Le secours de 4 francs par mois ne permet pas de vivre k
des personnes sans ressources ei presque incapables de travailler .
Aussi, sur le credit de 2 321 266 francs affects aux n^cessiteux,
il faut pr^lever une large part pour secours extraordinaires aux
indigents. II en r^sulte que les sommes dont disposent les Bu-
reaux de bienfaisance pour secours d'urgence sont absolument
insuffisantes.
4® D^penses diver ses.
Nous rangeons sous cette rubrique les d^penses qui ne se
rapportent pas imm^diatement aux malades, aux vieillards et
infirmes, aux indigents et n6cessiteux.
Ces d^penses s'61fevent k la somme de 3 710 790 francs, savoir :
Personnel administratif 715900
Agence des travaux de b&timenl 104200
D^penses d'impressions, de poste, de frais d'ad-
judication 185120
Frais de cours et de concours 42500
Allocations k des veuves de m^decins 10000
Expenses d*entretien de TAdministration centraie. 121310
Total 1179030
Pensions de retraite et de repos du personnel
administratif etdu personnel secondaire. . 697200
Frais de perception du droit des pauvres, de ges-
tion domaniale, de contributions, et frais
d'acte et de procedure 460400
Depenses de personnel et de materiel des Bu-
reaux de bienfaisance 755825
Depenses de personnel et de materiel des ^ta-
blissements de service general 618335
Total 3710790
En r^sum^, pout venir en aide aux trois categories de per-
sonnes a secourir dont elle a la charge, Tadministration de
TAssistance publique k Paris ne dispose que d'une somme de
35308872 fr. 50. Nous sommes ainsi loin du chiffre budg^taire
de 50 millions, et la somme de 35 millions parait bien modeste,
en regard du chiffre de la population de Paris.
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VARIETES
Inaaguration de F Asile temporaire pour les enfants
dont les mires sont k Thftpital.
Le 28 octobre dernier, V Asile temporaire pour les enfants dant les mires
sont d rhdpital a ^t^ inaugur^ en presence de M. le President de la R^pu-
bliqne.
Une nombreuse assistance avait r^pondu k rinvitation de la commission
de patronage. Je nommerai presque an hasard, — ne pouyant nommer
tout le mondcy — d*abord, M*** Joles Siegfried, pr^sidente, et les membres
da conseii d*administration ; M"« Frank Puaux, secretaire; M. Oit, tr^
sorier; M"^«* Engine Scherer, Gustave Mirabaud, Permolet, MM. Pyrame
Nayille et Bardac; puis, parmi les invites, MM. Charles Blanc, pr^fet de po-
lice ; Peyron, directeur de TAssistance publique de la Seine ; Henri Monod,
directeor de TAssistance publique; Th. Roussel, s^nateur; D' A. J. Martia;
Bizot, maire du X1V« arrondissement (avec ses adjoints) ; prince d'Arenberg,
depute; les conseillers municipaux du XIV*' arrondissement; le chef du
cabinet du pr^fet de la Seine, Charles Goudchaux; M"^** de Selares, Char^
ras, L^vdque, Henri Monod, Suchard de Pressens^, de Coppet, Adolphe
Puaux, Alfred Engel, Dolfus, Sigismond Bardac, etc., etc.
L* Asile temporaire est une branche tr^s int^ressante de cette (Buvre
touffue de la CKauss^edu Maine, doniy hi d^jd eu Toccasionde presenter une
annexe aux lecteurs de la Revue (1). L'QEuvre de la Chauss^e du Maine
a grandi par additions successives et par essais d'applicalion, au fur et k
mesure des n^cessit^s. Elle n'est pas une creation de la raison pure ; et
r« esprit de g6om6ine», je suppose, yaurapris peu de part; mais IV esprit
de finesse » y a trouv^ quelques-unes de ses plus justes inspirations, — si
Ton veut bien admettre qu'en s'appliquaut aux oeuvres du sentiment,
Tesprit de finesse, k la fois, s'inspire de Texp^rieoce et 6maae de la
bonte...
L'CEuvre dela Chauss^edn Maine a^t^ fondle en 4871, par M*** Edmond
de Pressens^, pour venir eii aide aux families des victimes de la Com-
mune. Le quartier populaire dont elle a pris le nom foisonnait alors de
toutes les rois^res qui tratnent k la queue des guerres civiles. Une des plus
navrantes attesta, tout de suite, son urgence et ses besoins. Des m^res de
(1) Y. les Colonies de vacances, n» du 10 juin.
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VARlfiTfeS. 105
famille, charg^es d'eniants, tombant malades, r^sistatent il la souffrance
et se d^fendaient de l*h6pital, ^puisant leurs demi^res forces dans les
soordes resistances d'une lutte silencieuse contre cette forme de I'Assis-
tance sociale qai prend Jam^re, et, pour la gu^rir, jette les enfants k la
me, k la piti^ du voisinage, ou k la charity publique e t ^ lliospitalite du
D^pdt. D'un contact permanent avec ces soufTrances — et avec d'humbles
h^roismesy 4mana presque imm^diatement Tid^e d*an asile temporaire
pour les enfants dontles m^res devaient se rendre, et d^sormais n'h^si-
teraient plus k se laisser soigner, r^conforter, guerir 4rb6pital...
Gela fut tr^s simple au premier moment. La place manquait. Les fonds
manquaient. Un actif d^fouement se tira d'affaire. J'ai pr^sent^ il y a
quelques mois M"« Vieux (1) aux lecteurs de la Bevue. M"« Vieux dirigeait
en ces ann^es de gen^se I'ouvroir, qui est le noyau autour duquel, par la
suite, tout Tensemble des « OBUvres » s'agglom^ra. Eocourag^e par la fon-
datrice (M*** de Pressens6), aid^e par les dames patronnesses de Toeuvre,
M"* Vieux se multiplia. Elteprit sur ses nuits, demanda Taumdne, re^ut
des b^b^; un beau jour (de Tann^e 1881), un petit dortoir se trouvait
annex6 sans tapage k I'ouvroir (alors sita^ rue des Fourneaux).
*< Notre petit asile est en pleiu soleil, disait M"^* de Pressens^ dans son
compte rendu de Tann^e 1881-1882, bien a^r^, et comptera buit lits... »
(Test le debut modeste d'une oeuvre qui ne s'en tiendra point aux derniers
d^yeloppements realises. L'Asile temporaire est aujourd'bui un gracieux
chalety dont Tarcbitecture delicate s'^rige au fond d'une large cour enso-
leiliee. L'arcbilecle, M. Augustin Rey, s'est heureusement inspire de c< cet
asile modeie que nous r^vions depuis si longtemps, dit un rapport de la
Commission de patronage pr^sidee par M"^* Jules Siegfried;... notre rdve
est devenu une r^alite. Un vaste et elegant bdtiment,... oil rien ne man-
quera au point de vue de Tbygifene, s'elfeve... sur le beau terrain qui nous
a ete concede parl'Assistance publique... »
Le programme est rempli, rien ne manque, « au point de vue de Tby-
giftoe ». Or, lliygiene, quand elle applique toutes ses lois, s'atteste par des
raffinements, etdevient le luxe denossocietes democratiques. Ge luxebieu-
faisant deploie toutes ses coquetteries, — toutes ses promesses de sante
physique et morale, — dans les clairs dortoirs, dans la salle de bains, dans
les salles de jeux, dans la salle k manger, et dans retinceiante cuisine
de TAsile temporaire. Les petits bancs s*aiignent, pimpants sous ieur ver-
nis neuf. Les petites tables sont dressees k Texacte bauteur ou Tenfant s'y
pourra commodement installer. II y a des jouets pour les petits, un par-
loir pour les meres; et le luxe des nettoyages n'est egaie que par le luxe
des soins. — L'enfant qui, apr^s un sejour de quinze jours ou de six mois,
peuimporte, sortira de ce palais des poupons pour rentrer k Tetroit logis
ou s'entasse la famille ouvriere, Tenfant ne souffrira-t-il point par compa-
raison, s'il est assez grand pour comparer; par privation, privation d'air,
privation de bains, privation de lumi^re, privation de jeux dans Tespace et
dans la clarte,8'il esttrop petit pour faire autre chose encore que de sentir?
Peut-etre.
(1) V. tocctl.
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106 REVUE PHILAXTHROPIQUE.
Mais ce n'est pourtant pas une raisoB, parce qae la privation doit ^tre
subie, pour que la privation soit constitute eQ rfegle... Et, au surplus, il
pent arriver ceci, que la mfere compare elle-m^me, el s'efforce, et appreone
k Clever Tenfanl selon desm^thodes nouvelles, par la conception de nour
veaux besoins et de moyens difT^rents. II arrivera ceci encore — ou il pour-
rait arriver que Tenfant, d^j^ grand, capable de comparaison, revlnt de
Tasile k la m6re avec le goCki et la nostalgie de la propret^, qui est le grand
myst^rede Thygi^ne... Par 1&, TAsile temporaire de Tavenue Villemain(l)
n'est pas seulement une tr^s belle oeuvre d'assistance sociale. II est une
permanente le^on de cboses. II est le type sur lequel chaque region de
Paris devrait Hre tent^e de calquer un 6tablissen>ent analoguei—quitte a en
modifier le plan selon les aptitudes, les ressources et les besoins de la re-
gion, — cela pour deux raisons :
Premiere raison, toute de sentiment, si vous voulez, de justice peut-^tre,
et d' (c assistance » veritable: assistance kla, femme qui soufTre; assistance
k Tenfant, qui pdtirait;
Denxi^me raison, d'int^rdt social bien entendu: il est utile k la soci^t^
que la femme du peuple regoive des soinsquand elle est matade; il est bon
qu'elle accepte des soins, et qu'ellene se d^feude point de Thdpital; il est
bon qu*elle se porte bien, et pour avoir des enfants, et pour soigner les en-
fants qu'elle a; el il n'est pas moins utile et bon que Tenfanl ne soil pas
neglige, mdme au profit de la m^re... Je d6die cette reflexion aux ap6tres
de la campagne contre la « depopulation », el je me borne k rappeier,
pour conclure, la conclusion de Tallocution prononc^e par M. le President
de la R^publique k la c^r^monie du 28 octobre : « Mesdames, vous avez
bien m^rit^ de la patrie ».
DICK MAY.
Voici les discours prononc^s par MM. Jules Siegfried et Pyrame Naville,
au nom du conseil d*administralion :
DISCOURS DE M. JULBS SIEGFRIED
AU NOM DU COMSBIL d' ADM Ilf I8TRATI0N
Monsieur le President,
Le Conseil d'administration de Toeuvre que nous inaugurons aujour-
d*hui, m'a charge de vous remercier du grand honneur que vous lui t^vez
fail en acceptanl d'assister k cetle f6le. Cette journ6e est, en effet, une
grande dale pour le comity de eel Asile qui veil se r^aliser ainsi un rSve
qui estle digne couronnemenl de plusieurs ann^es de travaux et de per-
se v^ran Is efforts.
La premiere id^e d'un etablissemenl qui recevrail des enfants dont les
meres sonl malades cbez elles ou k Thdpilal remonle k 1883. G'esl un
contact journalier avec les femmes de la classe ouvriere qui en fit senlirla
grande n^cessite. En elTel, dans un menage d'ouvriers laborieux, lorsque
(1) Avenue Villemain, 39. — L'Asiie temporaire est ouvert aux enfants de tous
les tulles.
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VARlfeTES^ 101
le pire et la m^re sont valides, Iput va bien encore, le travail permet de
sobTenir aqxbesoins jouroaliers de I'existence, mais qa'une maladie grave
arrive, maiadie qui force celui ou celle qui en est attaint a aller^ Th^pitaU
que deviennent les enfants? Les m^decins des bureaux de bienfaisance
sarent combien est dure k vaincre la resistance des m^res k se s^parer
des leurs.C'est pour r^pondre k ces angoisses maternelles que quelques en-
faats furent alors instali^s dans une salle du local de ToDuvre de la Chauss^e
du Maine fondle au lendemain de la guerre et de la Commune par une de
ces femmes decceur qui savent, si discrdtement et si noblement, soulager
et partager les souffrances des bumbles et des petits. En nommant M*** de
Pressens^, je ne puis m'emp^cber d'^voquer aussi Le souvenir de M. de
Pressens^, ce r^publicain et ce patriole Eminent qui a consacr^ sa belle et
forte intelligence et son Eloquence k la defense de toutes les causes nobles
et g^n^reuses. L'exemple de ces deux vies toujours associ^es pour faire le
bien a 6U, on pent le dire bien haut, une force et un puissant stimulant
pour conlinuer la belle oeuvre de fraternity et de solidarity quils avaient
entreprise avec quelques amis en 1871.
L'Asile Temporaire de la Ghauss6e du Maine, install^ tr^s modestement,
rencontra d^s la premiere beure les plus vives sympatbies. Les quelques
lits dont on disposait ^taient toujours insuffisants. 11 faut dire qu'en fran-
chissant le seul de I'Asile, les enfants quittaient leurs parents pour retrou-
ver une vraie m^re en la personne de la directrice, M"* Vieux, que le
Comit6 est bien beureux aujourd'hui de voir k la tdte de cet ^tablisse-
ment module.
En presence des grands services rendus par cette oeuvre k la classe
ouvri^re, le comity de TAsile d^cida la construction du nouveau et vaste
local actuel, ^difl^sur ce magniOque emplacement concede g^n^reusement
par TAssistance publique de Paris. Tout ii Theure, monsieur le President, le
Gonseil d'administration aura rhonneur de vous faire parcourirce bel asile.
Vous pourrez juger par vous-mdme de son parfait am^nagement et vous
fi§liciterez, nous n'endoutons pas, le jeune et intelligent arcbitecte, M. Au-
gustin Rey, qui a su allier k un sens pratique tr^s modeme un style plein
de gaiety et de po^sie. Les gens du quartier, m'a-t-on dit, ont surnomm^
cet asile « la villa des enfants », c'est un nom vraiment bien tronv^ pour
celle jolie demeure qui n*6veille avec son jardin (leuri, ses verandas k
ritalienne et sa fa^de ensoleill^e que des images de vie familiale et
joyeose. 11 y a quelques ann^es, un membre du comity fit entrer k TAsile
trois enCants en bas dge dont la m^re.etait appel^e k subir une grave ope-
ration. Des que le cbirurgien en eut donn^ la permission, la protectrice de
cette famille se fendit k Th^pital pour voir la malade et lui apporter des
nouvelles de ses enfants; mais& peine s'approcbait-elle dulit de la pauvre
femme que celle-ci, dans un dlan de toucbante reconnaissance, lui tendit
les bras en s'^criant avec des larmes dans les yeux : « Ob! ^merci, merci,
gr&ce k vous» j'ai pn souifrir en paix ! »
Ce crt de la femme du peuple courageuse et r^sign^e k la femme
beoreuse et priviiegiee de la vie, n'est-il pas le plus grand eioge qu'on
puisse faire de Tceuvre que nous inaugurons [aujourd'bui ? Preserver les
enfants des dangers physiques et moraux ou les iaissent forc6ment Tab-
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408 REVUE PHILANTHROPEQUE.
sence momentan^e de la m^re, et donner A celle-ci la paix dans la soaf-
france, n'est-ce pas une belle et grande oeuvre, faite poor provoqner non
■ seulement des dons incessants, mais aussi des creations d'asiles noaveaux
dans Paris el daos toutes les grandes villes de France.
En agissant ainsi, nous affirmons de plus en pins cette grande loi de la
solidarity dont la flnde ce si^cle n'a va encore, nons n'en doutons pas, que
la lumineuse aurore*
DISCOURS DE M. PYRAME NAVILLE,
MKMBRB DU COIfSBIL p' ADMINISTRATION DB L*(EUVRB
Monsieur le President,
A la suite de Thistorique si complet qui vient d'etre fait devant tous
par M. Jules Siegfried de ToBuvre de rAsiie temporaire d'enfants que nous
inaugurons aujourd'hui, il n'y aurait v6ritablement rien 4 ajouter, sinon
le renouvellement des plus vifs et sinc^res remerciements que je me per-
• mets, monsieur le President, de vous adresser au nom des membres du
comity, d'avoir bien touIu honorer cette f^te de votre presence. Nous
adressons aussi nos remerciements k M. ie ministre de Tlnt^rieur, M. le
president da Conseil general, M. le president du Conseil municipal, M. le
pr^fet de la Seine, M. le pr^fet de police, MM. les maires et adjoints des
X1V« et XV« arrondissements, qui ont bien voulu ^galement assister en
personne ou se faire representor a cette c^r^monie, et c'est dans un senti-
ment de sincere reconnaissance que je viens leur souhaiter la bienvenue
et les remercier de I'honneur qa'ils nous font.
II est juste aussi et nous nous faisons un devoir de coeur de reconnaltre
les inappr6ciables services qui ont ^i€ rendus d ToBUvre par les pouvoirs
publics dont nouscomptons ici de si nombreux repr^sentanU.
l/initiative priv^e est bonne et excellente. Elle pent quelqnefois riva-
liser, dans les heureuz resultats de ses entreprises, avec tout ce que TEtat
fait de bon dans le domaine de I'assistance et du secours mutuel. Mais le
mieux n'est-il pas encore. de. voir se joindre, par une union aussi profi-
table que bien inspir^e, tout TefTort de Tinitiative priv^e k toute la bonne
volonte des pouvoirs publics, en vue de la realisation d'une oeuvre de fra-
ternity humaine?
Or c*est \k le spectacle, monsieur le President, auquel nous vous avons
convi6 aujourd*hui. Comme Ta rappeie tout ft I'heure M. Jules Siegfried,
c'est k une haute et gen^reuse initiative individuelle qu'est due Tid^e pre-
miere de Toeuvre de la Gbauss^e du Maine dont cet Asile est une branche
ayant pris aujourd'bui sa vie propre. Je me plais, une fois de plus, k
rendre hommage au nom k la fois grand et modeste de M"^^ de Pressense
qui ful la veritable ioitiatrice de r(Buvre;d'autres coBurs que la charite ani-
mait aussi s'unirent k elle, ToDuvre v^cut, grandit, se fortifia, au point qu'il
devint n^cessaire qu*e11e edt sa maison propre pour ne pas etoulTer dans
les modestes logis de rencontre qui abriterent ses debuts.
Cette maison, monsieur le President, vous Tavez sous les jeux, mais je
me bdte de dire que le moment ne serait pas encore venu de vous la pre-
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rvv-#
VARlfcTES.
senter si nous avioas ^te laiss^s u nos seules forces, ou plut6t k ce
DOS nombreox amis et souscripteurs. 11 faut beaucoup d*argent poui
et iant d'oeuvTes aussi yariees qu'u tiles se parlagent Tattention pu
qae cette concurrence pour Je bieo diminue la part qui revient k <
groupe qu^teur. Peut-Stre aurions-nous ^t^ forces d'attendre enc
certain temps, jusqu'i ce que nous eussions r^uni les fonds su
et obliges de relarder Touverture de cette maison de bienfaisance, i
n'arions trouv^ en haut lieu un secours et un appui efficaces, qu
ont permis d'arriyer plus t6t au butpatierament etdepuislongtemp:
suiyi.
M. le president du Conseii, ministre de I'agricultureetMM.lesmi
de la Commission qui collaborent avec lui, ont bien youlu nous fail
allocation imporlante sur les fonds qui, par leurs soins et conform^]
la loi, doiyent 6tre distribu^s k des ceuyres de bienfaisance et d'int^
blic. M. le s^nateur Jules Siegfried, dont la raodestie airae k passe
silence les grands seryices qu'il rend k toutes les nobles causes, no
mettra de rappeler le d^yoiiment infatisable qu'il a consacr^ a 1'
gr^ce k lui, men^e k bien, et de joindre son nom k celui de M. le
dent du Conseii et des membres de la Commission auxquels nous s<
redeyables d'un plus prompt ach^yement de notre Asile. Nous leur
primoDs k tons notre plus profonde reconnaissance.
Nous n'oublions pas qu'ayant cette date, dej&, d*autres autorit^
avaienti non seuiement t^moign^ de la plus gt^n^reuse bonne volenti
materiellenrant aid^s de la mani^re la plus efflcace dans I'entrepi
TediGcation de notre maison k une ^poque oil elle n.'^lait encore
projet. C'est eneffet k Tad ministration de TAssistance publique et av<
sentiment dn conseii municipal de Paris, que nous sommes redeyal
terrain sur lequel nous avons bkii. Chacun comprend Timportance
telle lib^ralil^. Que MM. les directeurs de I'Assistance publi(]
M. le president du Conseii municipal et MM. les membres du Conse
nicipal re^oivent ici Texpression de notre sincere gratitude pour c<
fait.
liais ce n*est pas tout. Mes collogues ducomite de I'Asile m'en vou<
«i j'omeltais de dire bien baut combien ils ont ^tk touches de V
sjmpathique qu'ils ont rencontre^ chez toutes les personnes auxque
ont en uu appel a adresser pour recueillir les fonds n^cessaires.
les mains se sont ouyerteslargement, et c'est d'un coeur kn\n que n(
nons yous dire merci k tons, g^nereux donateurs, dont je yois ici un
nombre, et qui lous, presents ou absents, nous avez permis de con<
bien une entreprise qui n'^tait pas sans difflcult^s.
M'etais-je tromp6 tout k Theure en yous parlant,monsieur le Pr^
des rdsultats bienfaisants auxquels devaieot n^cessairement abouti
onion loyale et actiye,cette sorte de collaboration latente mais r^ell
les initiatives privees, les d^vouements individuels d'une part
bonnes volonles et g^nerosites prolong^es des pouvoirs publics
part?
Le comit^ne croirait pas avoir rempli tons ses devoirs s'il ne p
pas de Toccasion exceptionnelle d*aujourd'hui pour adresser ses pi
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110 REVUE PHILANTHROPIQUE.
cdroB felicitations k Tarchitecte de la maison que nous ioaugurous,
M. Augustin Rey. Les compliments les plus mentis lui ont d6j46t^ adres-
9^8 et il lui en sera encore adress^ souvent, sur le bon goAt, la gr&ce,
]*originalit6 de sa construction. M. Rey s'est montr6 artiste en m^me temps
que travailleur consciencieux. Des mattres en la mati^re se sont plu a re-
connaitre les hautes qualit^s d^ploy^es par lui, et YousallcK T0us-m6me en
juger, monsieur le President, en visitant F^tablissement.
M. Rey a ^t^, du reste, admirablement second^ dans sa tAche, par
messieurs les entrepreneurs dont nous sommes heureux de voir piusieurs
dans cette assembl^e et auxquelsle comity adresse ses roeilleurs remercie-
ments. Ges messieurs seront recompenses de leur tAche difflcile par le
sentiment qu'ils ont contribu^ k une bonne et belle oeuvre vraiment d6-
mocratique. Un seul mot encore. On parle beaucoup de feminisme en ces
lemps-ci. Eh bien! je ne crains pas de le dire, la creation de cette maison
d'asile pour enfants est le triomphe du feminisme bienfaisant, le plus
pratique, le plus digne de tons d'etre encourage et imit^. Sans Tinlassable
pers^vf^'rance, sans la patience k toute ^preuve, sans Th^roTque obstiuation
dans le bien des dames qui ont consenli k prendre le patronage de cette
enlreprise, notre Asile n*existerait pas. Et les dames dont nous avons
I'honneur d'etre les collogues, nous permettront, en leur nom comme au
n6trey que dis-je, ellesnous demanderont express^mentde designer parmi
elles, plus particulidrement notre pr^sidente, M""** Jules Siegfried, et notre
secretaire, M"* Frank Puaux, comme ayant pris, entre toutes, une part
considerable, la part la plus importante dans le travail constant, les efforts,
les peines, soins, soucis, qu'a n^cessit^s raccoinplissementde notre oeuvre.
C'est k elles qu'est principalement dil notre succ^s flnal et nous leur
adressons Tbommage de notre respectueuse reconnaissance.
Les dames du Comite nous permettront de joindre k elles, dans Tex*
pression de nos sentiments reconnaissants, notre directrice de TAsile,
.M^>* Vieux, qui depuis tant d'ann^es consacre sa vie, sa sante, ses forces
et surtout son CGPur, avec le devouement le plus absolu, aux enfants qui
nous sont conOes. Puisse-t-elle continuer longtemps ce qu'elle a si bien
commence, pour la prosperite de notre oeuvre commune.
II nous reste encore a remercier la direction du materiel de la Ville de
Paris qui a bien voulu donnerson concours. bene vole, ainsi que M. le gou-
verneur militaire de Paris qui nous a envoye la musique militaire du 103*'
regiment d*infanterie, ce qui donne a cette rf^union un caractfere patrio-
tique.
L'OSiavre budg^taire de la troisi^me R^publiqne en mati^re
d'assistance.
DISCOURS DE M. LE PROCUREUR UlalNtRAL RENAUD
M. le Procureur general Renaud a prononc6 k la stance solen-
nelle de renlree de \k Cour des Gomptes un important discours sur
VOEuvre budg^taire de la troisidme R^publique en mati^re, (t assistance.
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VARli^TfeS. ill
En raison de sa grande importance et de son exir^e intdr^t, nous
reprodnisons in extenso ce document :
Monsieur le premier Pr^ident,
Messieurs,
« La R6pablique manquerait k sa mission esseniielle si elle n'^tait de
plos eo plas le gouvemement de la fraternity ei de la solidarite sociaies. »
Telies ^taient les paroles prononc^es au mois d'avril dernier, k Tassem-
bl^e g^u^rale de FUnion du commerce, par Thonorable M. Barthon, mi-
nistre de I'int^rieur.
n m'a sembl6 qu'il ne serait pas sans int^r^t de rechercher dans quelle
mesure les Parlements qui se sont succed^ depuis 1871 avaient compris
celte mission et quel est au point de vue budgdtaire le chiiTre exact des
sommes que la troisieme R^pablique inscrit au budget de 1897 pour les
oeuvres d'assistance et de solidarity.
D'apr^s le chiffre des credits qui ont 6t^ vol6s, le budget pour Texercice
i897 se pr^sente de la mani^re suivante :
En recettes 3 385 704 145 francs;
En d^penses 3 385 367 484 francs.
Or, les huit dixi^mes du chifTre total des dSpenses constituent la stride
remuneration des services g^n^raux indispensables a Texistence m^me de
la nation et k sa s^curite ; mais ils sont sans profit direct pour les citoyens
eux-m^mes. Les besoins essentiels auxquels, k ce dernier titre, le budget
d*une democratic doit pourvoir sont, independamment du perfectionnement
de routillage national, feducation, Tinstruction et Tassistance publique.
Ces depenses devralent mdme etre plus largement do tees que les autres,
parce qu'elles contribuent puissamment au developpement de la richesse
nationale.
fin ce qui a trait plus directement aux depenses d'assistance, leur dota-
tion, encore bien modeste il y a vingt-cinq ans, s'est accrue d'annee en
annee. De nombreux projets de loi emanes de initiative parlementaire ou
deposes par le gouvemement sont venus former un ensemble qui morite
d'occuper dans Tesprit public une place importante, et c'est k cet examen,
llessieurs, que je vous demande la permission de vou^ convier au-
joord^ai.
Parmi les lois d'assistance, une des premieres en date est celle relative
k la protection des enfants du premier dge.
Cette loi, qui porte la date du 23 decembre 1874, est due u I'initiative
du docteur Tbeophile Roussel, alors depute de la Lozere k I'Assemblee na-
Uonale, aujourd'bui senateur et membre de Tlnstitut. M. Roussel a donnt'
son nom a cette loi; elle le fera vivre dans la memoire de ses concitoyens
k raison des bienfaits multiples qu'elle a prodigues k I'enfance. Son but
est connu de tons. Elle confle k des commissions locales et u des medecins
inspectears la surveillance des enfants ^es de moins de deux ans, allaites,
places en sevrage ou en garde hors du domicile de leurs parents. Les de-
penses qu elle occasionne sont mises par moitie k la charge de TEtat et
des departements. Elles comprennent les frais d'inspection medicale des
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412 REVUE PHILANTHROPIQUE.
enfants, les indemnit^s k verser aux secretaires des mairies aslreints k de
nombreux travaux d'^criture concernant la protection infantile* les indem-
niUs de dSplacement anx juges de paix charges de verifier dans les mairies
ies registres de la protection, les recompenses accord^es aux noun-ices
les plus meritautes, et enfln tout ce qui a trait aux imprimis r6glemen-
taires.
Lechiffre porte au budget de 1897 pour le service de la protection figure
(chap. 42 du minist^re de Tinterieur) pour une somme de 840 000 francs.
A ce credit se rattache celui du cbapitre qui le suit imm^diatement,
156000 francs, pour secours allou^s aux soci6t6s de charity maternelle et
aux crdcbes.
L'application de la loi sur la protection des enfants du premier dge a
dejii abaisse de 20 k 25 p. 100 la mortality infantile. Mais il faut obtenir.
mieux encore. On peut se demander, en consid^rant dans leur ensemble
les differents tarifsmis en vigueur, et notamment celui des bonoraires des
m^decins inspecteurs dont la surveillance 'm^dicale constitue Torgane .
essentiel de tout le service, si la modicite des credits n'est pas de nature
k nuire k Timpulsion decisive qui devrait etre donn^e k ce service, impul-
sion si desirable et si n^cessaire pour conserver k I'existence de pauvres
petits etres abandonn^s dans un temps ou le nombre des naissances tend
k dlmlnuer de jour en jour.
La depopulation de la France est devenue, en elTet, une des preoccupa-
tions les plus vives du legislateur. Pour la combattre utilement, on parte
du retablissement des tours dans les hospices et les 6tablissements chari-
tables. Ce retabiissement a 6U demand^ au Parlement; s'il est vote, sera-
t-il un remede efOcace pour exercer une influence serieuse sur la nata-
lite ? 11 est permis d*en douter, car le mal tient k Torganisation sociale tout
entiere, &nos lois, k nos moeurs, qui sont une cause de decheance pour la
femme qui voudrait accepter vail lamment les charges de la maternite. Mais
il n*en faut pas moins applaudir k tout ce qui serait de nature k enrayer
ou a diminuer le mal, et, par consequent, au vote erois emis le 12 juin
dernier par la Chambre des deputes qui a pris en consideration la propo-
sition tendant au retablissement des lours.
L*annee meme ou prenait naissaoce la loi sur la protection des enfants
du premier dge, intervenait, a la date du 19 mai 1874, une loi reglemen-
tant le travail des eafants et des flUes mineures employes dans I'industrie.
Gette loi, jugee defectueuse It certains points de vue, notamment en ce qui
concerne Vkge d'admission des enfants au travail, la duree du travail des
femmes pendant la nuit, a donne lieu k de nombreuses modiflcations et a
ete fmalement remplacee par une loi du 2 novembre 1892, qui a regu le
nom de « loi sur le travail des enfants, des fiUes mineures et des femmes
dans les etablissements industriels » et qui est devenue « la loi organique
du travail industriel »,
Les travailleurs qu'elle interesse sont classes en trois categories : les
enfants sans distinction de sexede douzeou treize ansjusqu*li dix-huit ans;
les filles ou femmes de dix-huit k vingt et un ans; enfln les femmes ma-
jeures mariees ou non. La duree du travail pour ces difi'erentes categories
(dixouonze heures au maximum) varie selon Vkge; le travail de nuit est
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VARlfeTfeS. 113
interdil en principe; le travail de jour est coup6 par des repos obliga*
toires.
Gette loi da 2 novembre 1892 a ^t^ pr^c^d^e d'ane vaste enqudte faite
dans toutes les parties du territoire, puis pr^par^e par les discussions et
les YCBux de la conference Internationale de Berlin, ou la France fut repr6*
sent^e notamment par MM. Jules Simon et Tolain. Aujourd'hui on peut
consid6rer comme d^flnitiTeraent acqub les priucipes qu'elle consacre.
Pour assurer son execution, un service complet de surveillance, de con-
tr61e et de repression a ^te organist. A la tdte de chaque region indus-
trielle sont places des inspecteurs justiflant d*une competence technique.
Leurs rapports, centralists au minist^re du commerce, sont remis h. une
commission sup^rleure du travail, compos6e de membres eius par le Par-
lement et de membres d^sigoes par M. le president de la R^pubiique. Puis
des commissions d^partemen tales rempla^nt les commissions locales cr^^es
par la loi de 1874 sont nommees par lesconseils gen^raux, avec mission de
signaler le mode d'ex^cation de la loi et les ameliorations qu'elle pour-
rait comporter.
Au budget du minist^re du commerce (chapitre 22) est inscrite une
somrae de 640000 francs pour assurer Texecution du service, non compris
celle de 15000 francs (chapitre 21} aiiectee specialement au comite supe-
rieur du travail.
Bien des fois s'est pos^e cette question : Comment cette loi estroUe
appliquee? Les credits alloues sont-ils suffisantsfN'est-il pas k craindre
que ces lois de 1874 et de 1892, failes uniquemeut en faveur des enfanls de
la classe ouvriere, ne soient pas de nature h. remplir compietement le but
que le legislateur a cherche k atteindre ?
Or, il resulte des declarations memes de la commission superieure et
des inspecteurs du travail que ces << lois du travail » ne re^oivent qu'uoe
application incomplete, soit parce que Tinspection n'est pas assez nom-
breuse, soit parce que les inspecteurs n'ont pas Tautorite sufQsante et les
facilites necessaires pour les faire observer. 38 p. 100 seulement des eta-
blissements industriels sont visites; 62 p. 100 ne le sont pas.
Un des derniers rapports de la commission superieure du travail s'ex-
prime ainsi : « Sur 286763 usines ou ateliers dontTexistence aete signaiee
en 1895, les inspecteurs en ont visite 109486, soit 38 p. 100. Le nombre
des ouvriers qui y etaient occupes s'eievait k 1764181. Ces chifTres reprd-
sentent 70,57 p. 100 du total des 2 500 000 ouvriers indiques dans le rapport
de 1874 comme soumis aux lois sur le travail et en moyenne pr^s de
17 ouvriers par atelier visite. Quant a la question du travail de nuit et
repos hebdomadaire, les abus ne se produisent guere que dans les petite
ateliers ct ceux de moyenne importance. II est d'ailleurs souvent impos-
sible de les constater et de les reprimer, le travail se faisant souvent dans
an local autre que Tatelier et od Tinspecteur n'a pas libre acces. U fau-
drait an personnel beaucoup plus nombreux pour saisir toutes les con-
traventions. »
Le rapport se lermine par deuxremarques ayant trait aux commissions
cbargees de veiller k Tapplication de la loi.
t< Dans six departements seulement les commissions deparlementales
REVUE PHILA5THR0PIQUE. — II. 8
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114 REVUE FHILANTHROPIQUE.
ont 6t^ convoqa^es en i89o. Dans les aulres d^partements elies n'existent
pas ou sont seulement en vole de formation.
« Quant anx comit^s de patronage qui doivent dtre ihstitu^s dans
chaque d^partement en vue de la protection des enfants dans i*industrie
^tdu developpement de ieur instruction professionnelle, iis ne paraissent
pas avoir exerc^ jusqu'ici, malgr^ les diligences faites par les pr!§fets, une
action bien inutile et bien f^conde. »
Les faits constates dans ces rapports et les consequences qui en d^-
coulent semblent done d^montrer que Tex^cution de la loi de 1892 laisse h.
d^sirer sur bien des points, tant il est vrai qae souvent il est moins diffi-
cile de faire une loi que de Tappliquer. Si TinsufOsance du personnel est
une des causes du mal, le Parlement, qui a le sentiment des graves int^-
r^ts mis en jeu par une bonne et complete execution de la loi, n'h^sitera
pas, le cas ^ch^ant, j*en ai la conviction, k augmenter le credit du
cbapitre 22.
Les lois dont je viens de vous entretenir ont, Messieurs, pour objet
principal et imm^diat la sant6, la constitution physique et le developpe-
ment des forces de I'enfant. D'autres lois sont venues les compMtei' an
point de vue de I'Mucation morale k donner k Tenfant; je citerai notam-
ment celle du 24 juillet 1889, visant la protection k accorder aux enfants
assist^s ou moralement abandonnSs .
Sous le nom de puissance matemelle, le legislateur a r^uni I'ensemble
de tous les droits n^cessaires aux parents pour s^acquitter du devoir
d*education impost par la nature. Mais cette puissance paternelle perd sa
port^e et n'a mdme plus sa raison d'etre si le devoir essentiel d^^ducation
n'est pas rempli. Les parents qui, par de mauvais traitements, ont mis en
p6ril la sant^ de Tenfant ou qui Font corrompu par le spectacle de Ieur
inconduile,ont prononce eux-memes Ieur prppre d^ch^ance.En ce cas, les
droits de la puissance paternelle Ieur sont enlev^s pour 6tre d^l^gu^s k
TAssislance publique, organe et repr^sentant de TEtal, el Texercice de ces
m^mes droits passe k Tdtablissement ou simple particulier gardien de
I'enfant.
Les enfants ainsi abandonn^s que les administrations d^partementales
recueillent en assumant k Ieur ^gard les obligations du p^re de famille
deviennent alors les pupilles de I'assistance et sont conG^s k des nouiTi-
ciers qui habitent la campagne. Des inspecteurs ei des sous-inspecteurs
ont k recruter cos nourriciers, k se transporter p^riodiquement dans Jes
communes ou les pupilles sont places et k constater les soins dont ils sont
Tobjet. Plus tard, lorsque ces pupilles ayant atteint treize ans r^volus ne
sont plus astreinls k frequenter T^cole, ils sont places chez des patrons
(en tr^s grande majority chez des agriculteurs) od ils ^changent Ieur tra-
vail journalier contre les frais de nourriture et d'entrelien. Des gages Ieur
sont m^me ailoues la plupart du temps.
Le service des enfants moralement abandonn^s constitue un service
departemenlal. 11 est r^gie par les conseils g^n^raux ; les d^penses qu'il
necessite sonl voices par ces assemblies et le contingent de TEtat dans le
total des d^penses est flx^ au cinqui^me. Pour ^valuer le contingent 4
inscrire au budget de 1897, on a pris pour base les d^penses pr6vues dans
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VAR1£t6S. H5
les budgets d^parleraentaux de 1896, et comme le chiffre de ces d^peoses
avail 6t6 lvalue poor 1896 & 25 millions environ (exactement 24 133 896 francs),
la part contributive de TEtat a ^t^ inscrite au budget pour la somme de
4900000 francs, k laquelle il convient d'ajouter celle de 985 000 francs pour
frais d'inspection et de surveillance.
A la fin de Tann^e 1896, TefTectif total des enfants moralement aban-
donnas s'elevait au chiffre de 168605. Des inspecteurs au nombre de 94,
des sous-inspecteurs au nombre de 108, soit 202 fonctionnaires r6tribu6s
par r£tat. ont mission d'assurer le bon fonctionnement du service et de
ponrsuivre ainsi le sauvetage de Tenfance en rafTranchissant d'uu contact
malfaisanl et d'une autorit^ demoralisatrice.
Tous les moralistes s'accordent h reconnaitre que la corruption de Ten-
fance abandonn^e est uiie des causes de la criminality. Si plus tard quel-
ques-uns de ces enfants succombent, TEtat a voulu qoe le condamne, une
fois sa peine achev6e, pAt rencontrer une main secourable venant lui offrir
et au besoin lui donner du travail. Des comit^s de patronage se sont
fond^ dans le but de manager pour le condamn^ Iib6r6 les transitions de
la prison k la liberie et de lui preparer en quelque sorte par un travail
jonmalier une convalescence morale. Ces soci6t^s de patronage pour les
lib^r^s tendenl a se multiplier de jour en jour; elles ne sauraient 6tre trop
Tivement soutenues et eucourag^es, et le budget de Tint^rieur consacre
en lear faveur pour 1897 une somme de 120000 francs (chapitre 75).
L'enfanl avance en kge ; il a besoin qu'on donne k son coeur et k son
esprit cette assistance morale qui d^coule de toute culture intellectuelle.
Or, nous savons tous, Messieurs, dans cet ordre d'id^es, combien la troi-
sieme R^publique a largement dot^ et assis sur des bases in^branlables
Topuvre de reducation et de I'instruction nationale.
Ce n'est pas en ce moment le lieu de rappeier, ne fdt-ce que par le
sommaire, tout ce qui s'est accompli en France depuis vingt-cinq ans pour
rinstruction de Tenfance. II a fallu en quelque sorte tout cr6er : les bdti-
ments, le materiel, le personnel et aussi les m6thodes. L'Etat r^publicain
prend Tenfant d'^e scolaire, de sept k treize ans, et lui donne toute rin-
struction que pent comporter cet kge, II a cr6e la caisse des ^coles, les
cours d'adultes, les biblioth^ques scolaires, il a accord^ de larges subven-
tions aux communes, aux villes, aux d6partements pour les aider a faire
face aa paiement des annuit^s et au remboursement des emprunts qu'ils
ont contractus pour la construction des ^tablissements publics d'enseigne-
ment. Les lib^ralit^s de I'Etat se sont ^tendues k Tenseignement secon-
daire et a Tenseignement sup^rieur. Des bourses ont 6t^ cr^^es dans les
lyc^es, les colleges et les ^tablissements d'enseignement primaire supe-
rieur; en6n, de nombreuses ^coles professionnelles ont ^t6 fondles.
Aussi, alors que le dernier budget de rinstruction publique vot6 sous
rEmpire atteignait (budget ordinaire et budget extraordinaire compris) le
chiffre raodeste de 42806721 francs, le m^me budget pour 1897 s'dl6ve k la
somme de 194868146 francs, et dans ce chiffre I'enseignement primaire
el6mentaire figure pour la somme considerable dc 116710020 francs.
L'enfanl a grandi, il est devenu homme. Voyons comment I'Etat, qui a
dirige ses premiers pas, soulenu ses premieres ann^es, va continoer son
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116 REVUE PHILANTHROPIQUE.
ceuvre de protection sociale. Nous allons uous trouver en prudence d'une
organisation complete (soci^t^s de secoars mutuels, caisses d*6pargne, caisse
nationale des retraites pour la vieillesse, caisses d'assurances en cas d'ac-
cidents ou de d^c^sj dont les diverses parties abritenl Touvrier laborieux,
(^conome et pr^voyant, att^nnent les effets du chdmage, les suites de la
maladie et des accidents et assurent enfln des ressources pour la vieil-
Jesse.
Parmi ces multiples combinaisons ofTertes par le l^gislateur pour
^carter la mis^re et fonctionnant sous la surveillance, le contrdle ou la
garanlie de I'Etat, beaucoup d'entre elles b6n6ficient dans une large
mesure des subventions budg6taires. En premiere ligne, il convient de
placer les soci^t^s de secours mutuels.
Le but premier des soci^t^s de secours mutuels avait ^t^ I'assurance
centre les risques des maladies. La retraite n'6tait envisag^e que comme
une Eventuality heureuse, comme une sorte de prime k Tesprit de pr^-
voyance offerte par les membres honoraires de la soci^t^ au moyen de
leurs cotisations. Puis TEtat est intervenn et a manifesto son concours par
des subventions, des bonifications d'int^r^ts et des privileges fiscaux resul-
tant de rexon^ration pour la society des droits d'enregistrement et de
timbre. Un premier fonds de dotation au capital de 10 millions avait ete
constitue k leur profit d^s 1852. Mais h, mesure que le nombre des soci^t^s
et du personnel des membres participants s'est accru, le Parlement n'a
pas h^site k majorer par des credits inscrits annuellement au budget les
reserves de cette dotation. Une somme de 810000 francs figure au budget
duminist^re de I'interieur pour Texercice de 1897 (chapitre 11); un second
credit de 900000 francs est ^galement allouE sous cette rubrique spEciale
(chapitre 12) : « Majoration des pensions de retraite des soci^lEs de se-
cours mutuels. » Un pr^l^vement de 180000 francs snr les fonds des caisses
d'Epargne re^oit une destination analogue, et enfin uu quatri^me credit de
2 millions est inscrit annuellement au ministere du commerce (cha<
pitre 34) avec cette mention : « Bonification des pensions de retraite;
allocation k la vieillesse. »
En regard de la d^pense relativement considerable qu'elles impose nt k
I'Etat, ces subventions offrent Tavantage de provoquer k TEpargne et de
relever la dignity des participants de la society, qui passenl ainsi de la
categoric des assistes dans celle des prevoyants.
Le nombre des societes de secours mutuels s*eievait, lors<iu dernier
recensemenl, au chifTre de 10328, comprenant plus de 1500000 membres,
chifTre modeste si on le compare a ceiui de i'Angleterre, qui compte sur
son territoire plus de millions de mutualistes. L'avoir sociid de toutes ces
societes disseminees sur toute I'etendue de la France s'eieve k plus de
230 millions; et en une annee les cotisations versees par les membres par-
ticipants ont depasse le chifTre de 22 millions. 22 millions preieves sou
par sou sur repargne, k travers toutes les difficultes de la lutte pour la
vie ! Quelle reponse k certaines declamations !
A cette question des societes de secours mutuels se rattache celle des
retraites ouvrieres, et il faut reconnattre qu*il n'est pas de probieme plus
intereisant pour une democratic que ceiui qui consiste k preserver de la
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VARlfeTfeS.
misere et du d^nuement les derniers jonrs des travailleurs. M. Audi
d6piit6 de la Loire, s'est vou6 depuis de longues ann^es k T^tude et
solutioD de ce gros probl^me en y apportant toute la sinc^rit^ d
amour pour le peuple.
Le projet de loi dont il a ^t^ le rapporteur et dont la discuss
occupy plusieurs stances de la Ghambre, cr^e entre les louvriers
patrons une solidarity qui est de nature ^^tablir entre eux des liens
muns d'int^r^t et de pr^voyance. Tout ouvrier, employ^ ou servit
gages qui est dispose k verser k la caisse des retraites peut oblige
patron k participer pour moiti6 dans le versement dont le maximu:
fix6 4 4 p. iOO du salaire. Et, r^ciproquement, tout versement du p
entraine un versement correspondant de la personne employee, q
patron est autoris^ k retenir sur le salaire.
D*une telle disposition on voit se d^gager bien nettementl'id^ef^t
de la pr^voyance. Ed associant ainsi I'ouvrier et le patron k la constit
des pensions de relraites, la loi a pour r^siiltat direct et imm^diat de
tribuer k la paix sociale et k Tentente cordiale entre Touvrier et le ps
Au lieu de se consid^rer comme ennemis, ils comprennent tous deux
ont des int^r^ts communs qu'un sentiment de mesquine jalousie h
caches pendant longtemps. Puis cet accord donne naissance k des d^p
utiles qu'un industriel avis6 et intelligent n'h6site pas k s'imposer,
eomprend que le pays ne sera ?raiment en mesure d'assurer une pe
de retraite aux ouvriers que le jour ou la production agricole, indust
et commerciale aura pris assez de d^veloppement pour amener Taug
tation des salaires et leur faire alteindre un chiffre permettant r6pa
Dans de lelles conditions, la pr^voyance est un fait social de la
haute port^e et on conceit que I'Etat, veritable mutuality sup^rieure,
pas h§sit6 k accorder un nouveau secours financier aux soci^t6s de sei
mutuels. La Ghambre des d^put^s, dans sa stance du 4 juin demi
d^cid^ qu'k Tavenir les soci^t6s de secours mutuels seraient appeli
b^D^ficier d'un int6r6t dont le taux maximum a ^t6 fix6 ^ 4 i/2 p. 10
telle sorte que lorsque la Gaisse des d^pdts et consignations, par exei
servira aux d^posants des soci^t^s de secours mutuels un int^rSt de
p. 100, le budget de T^tat supportera une bonification de 1 p. 10<
soci^t^s ne devant avoir k souiTrir ni directement, ni indirectemen
Tabaissement du loyer de Targent.
Gette disposition flnanciSre n'a pas ^i6 vot^e sans rencontrerune
▼ive opposition. Si la mutuality se d6veloppe, ainsi qu'on est en droit ae le
supposer, les subyentions de TEtat ne seront-elles pas, en efTet, expos^es k
atteindre un chifTre trop considerable? Ne sera-ce m^me pas un budget
snppl^mentaire que le pays sera appel6 k supporter et pour lequel on n'a
pas song6 k cr^er les ressources correspondantes? II y a 1^ un inconnu de-
vant lequel le l^gislateur u'a cependant pas recul^, taut les sentiments de
solidarite et de paix sociale que la mutuality a pour effet de d^velopper
lui ont paru sup^rieurs k un int^r^t financier.
La loi de finances promulgu^e le 29 mars dernier contient la disposi-
tion suivante (article 43} : « Apartir du 1*' Janvier 1897, TEtatcontribuera,
dans les conditions de la loi sur Tassistance m6dicale et conform^ment
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118 REVUE PHILAXTllROPIQLE.
anxbar^mes A et B de cetteloi, au paiement de toate pension annuelle
d'au moins 90 francs et de 200 francs au plus constitute par les d^parteT
ments et les communes d'accord avec les conseils g^n^raux, en faveur de
toute personne de nationality fran^aise pri?^e de ressources, incapable de
subvenir par son travail aux necessit^s de Texistence et soit dg^e de plus
de soixante-dix ans, soit atteiule d'une maladie ou d'une inArmit^ re-
connue incurable, sans que le nombre des pensions auxquelies de?ra con-*
tribuer T^tat puisse d^passer par d^partement 2 p. 1000 dQ la population
et que cette contribution pour chaque pension puisse ^tre sup^rieure ^
50 ft*ancs. Cette pension annuelle sera toujours revocable. »
La question sociale soulev^e par cette disposition de loi de date recente
^ ^t^ trait^e par M. le ministre de Tint^rieur dans une reunion des soci^t^s
mutualistes tenue dans la ville de Rouen au mois de juin dernier. En
m6me temps elle a donn^ lieu dans la presse k une vive discussion. Le
fait de venir en aide aux d^sh^rit^s et aux vaincas de la vie constitue-t-il
une obligation stricte (;t ^troite dontl'Etatne sauraiten aucun cas s'affran-
chir? Est-il prudent de proclamer si haut Tintervention forc^e de I'^tat?
Est-il sage d'^veiller tant d'esp6rances dont la satisfaction peut devenir
difficile et lointaine?
Si la mutuality est la doctrine commune et aussila commune esp^rance
de tons ceux qui d^sirent la solution de certains probl^mes sociauz ; si
elle est par excellence la forme privil^gi^e de revolution sociale, et k ce
titre dans les traditions du parti r^publicain tout entier; si enfin elle
constitue et doit devenir de plus en plus un merveilleux instrument d'edu-
cation morale, c'est k une condition ineluctable ; k la condition qu'on
u'inscrira pas k sa base la croyance k la toute-puissance de I'Etat. Gar ha-
bituer les mutualistes k cette id^e qu'il suffit en toute chose de Tiuterven-
tion de I'Etat, c'est vicier la mutuality elle-mSme, c'est la d^tourner de
toute initiative, de tout sentiment deresponsabilite et surtoutdu souci per-
sonnel de la liberie, si utile k repandre et k propager. G'est, de plus, une
tendance deplorable vers le socialisme d'Etat; et je suis de ceux qui pen-
sent qu'une nation qui en serait reduite k compter avant tout sur I'Etat
pour Taccomplissement de ce qui constitue un des devoirs moraux essen-
tiels de J'individu, le devoir d'assistance et de secours », qu'une nation oil
les desherites de la fortune se considereraient comme les creanciers du
Tresor, serait une nation mtlre pour tons les despotismes et absolument
impuissante k les combattre.
En pareille matidre, la tdche d'un veritable esprit liberal n'est done pas
d'etendre, mais bien de restreindre, en la placant, Tintervention de I'Etat
dans les affaires d'assistance, et c'est en partant de ce principe que, dans
une question comme celle de savoir ceque I'Etat est tenude faire en faveur
de Thomme arrive pauvre k la limite de la vieillesse, apres avoir paye sous
toutes les formes sa dette a la patrie, il est possible de trouver place pour
une solution moyenne dont la democratic ne pourrait etre que reconnais-
sante k la Republique.
L'exemple, du reste, ne vient-il pas de haut? Que voyons-nous dans la
sphere d'activite et de travail qui nous enloure? Depuis que le regime
protectionniste est institue, T^tat refuse-t-ii d'intervenir dans des interdts
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VARlfeTfeS. 119
oii riniUaUve individnelle et la concurrence libre r^glaient nagu^re \es
fluctuations de la richesse et des marches? L'Etat intervient, et il le fait
dans an int^r^t g6n^ral, dans le but de preserver des industries qui font
partie int^grante de la fortune nationale. Or,n'est-il pas^ident que Tex is-
tence et la s^cnrit^ des vieux travailleurs constituent ^galement une part
notable du patrimoine national, et qu'il serait bien injuste et bien cruel
de r^pondre par an non possumm k des classes laborieuses le lendemain
du jour oti Ton vote, par exemple, des primes k Tindustrie sucri^re ou u
la marine marcbande?
Cette disposition de la loi de finances du 29 mars dernier a <^t^ rappelee
aux pr^fets par one circulaire du 20 avril 1897 ^manant de la direction do
['assistance et de i'hygi hue publiques ; puis elle a ^t^ sanctionn^e par Tou-
verture d'un credit special de 590 955 francs au chapitre 44 du budget de
rint^neur. G'est done un premier pas fait vers la realisation du voeu 6mis k
Tunanimite de 572 votants, Je 27 d^cembre 1895, par la Ghambre des
d^put^ [et ainsi eon^u : « La Ghambre, r^solue k organiser dans le plus
bref d^lai possible Tassistance des infirmcs et des vieillards indigents par
la contribution des communes, des d^partemeuts et de r£tat, prend acte
de la promesse faite par le gouvemement de proposer dans le budget de
1897 les credits n^cessaires pour jeter les premieres bases de cette organi-
sation. »
Gette somme de 590955 francs n'est qu'un credit d'amorce inscrit au
budget de 1897 ;il faut s'attendre k le voir s'enfler au fur et k tnesure que
se d^velopperont les id^es d'assistance et de solidarity. Xos ressources
fiuanci^res sufiiront-elles k pourvoir k des charges si g^n^reusement
accept^es ? 11 faut Tesp^rer et ne pas perdre de vue que la loi trouvera un
correctif sufQsant et son juste ^quilibre dansTobligationimpos^e aux com-
munes et aux d^partements d'assurer, avant I'Etat, une part importante
dans ces d^penses nouvelles de I'assistance.
Nous avons encore, Messieurs, k envisager sur bien d'autres points le
rdlebienfaTsant de I'Etat Une loi de date assez r^cente, puisqu'elle porte
la date du 15 juillet 1893, a determine le mode de concours de I'Etat dans
les d^penses de I'oeuvre d'assistance m6dicale dans les campagnes. Aprds
avoir d^fini le domicile de secours et determine les conditions dans les-
quelles ce domicile s'acquiert et se perd, la loi a cr^^ un troisi^me domi-
cile de secours, le domicile national, pour tons les Fran^ais qui n'en ont
pas d'autre. Aux termes de cette loi, (out individu qui a quitt^ sa com-
mune depuis plus d'une ann^e et qui ne pent faire la preuve qu'il s'estfix6
depuis un an au moins dans une autre commune, tombe en casde maladie
ila charge de I'Etat; de telle sorte que I'Etat prend sous sa tutelle exclu-
sive, en cas de maladie, toute une cat^gorie nouvelle d'individus consti-
tuant une population nomade et errante qu'il 6tait tr^s difficile jadis de
rattacher k un domicile communal ou d^partemental.
Les d^penses obligatoires de TlStat sont, dans I'esp^ce, de trois sortes :
1* celles repr^sent^s par les subventions accordt^es aux departements et
aux communes proportionnellement aux charges qu'ils supportent dans Ic
service de I'assistance m^dicale; 2® celles occasionn^es par le traitement
des malades citoyens fran^is n'ayant aucun domicile de secours ; 3<» celles
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120 REVUE PHILANTHROPIQLE.
conceFnant les frais d'administration relatifs k Texdcation de la loi. Les
deux premiers articles de d^penses ^tant soomis & des causes multiples de
variations, soit parce que I'importance de la popalaiion appel6e k b^n^fi-
cier de la loi est difficile k fixer, soit parce qu'elle s'accrolt en fait de toos
ceux que 1e d6faut de traTail, la ruine, la mis^re, la a6cotisid^ration m^me
ont amends k quitter lear pays d*origine, on ne peutse baser d*unemani^re
absolae pour en fixer le chiffre sur celui de telle ou telle ann^e. Une cir-
culaire, en date du 22 juln 1806, a ^t^ adress^e k tous les pr^fets pour leur
demander de renseigner le Parlement sur les r^sultats adminislratifs et
sociaux de la loi. Or ces renseignements 6tablissent que le service d'assis-
tance m6dicale dans les campagnes est une tr^s lourde charge budg^taire
et que les communes cherchent k s'en affranchir le plus possible. Mai:) le
Parlement n'en continue pas moins son osuvre de protection sociale et il a
inscrit an budget de 1897 pour Tex^cution de la loi (chapitre 46) une
somrae de 1 450 000 francs. Un credit suppl^mentaire de 3 400 francs
(chapitre 44 : Frais d'administration relatifs k la loi sur Tassistance m^di-
cale gratuite) a m^me 6i6 vot6 par le S^nat dans la stance du 25 juia
dernier.
Rappelons encore que le credit pour remboursement des frais d'assis-
tance occasionn^s par des individus sans domicile de secours, mais autres
que ceux qui b^n^ficient de la loi du 15 juillet 1893, a M port6 au budget
pour lasomme de 150000 francs employee k pourvoir aux frais d*hospita-
lisation et de transf&rement d'ali^n^s, d'indigents d*origine ^trang^re, de
vieillards et de malades atteints d'infirmit^s incurables.
Je signalerai, mais pour m^moire seulement, les subventions que le
Parlement vote depuis nombre d'ann^es en faveur de I'institution natio-
nale des sourds-mnets de Paris, de Bordeaux et de Ghamb^ry, de I'insti-
tution nationale des jeunes aveugles, des asiles nationaux de Vincennes
et du Y^sinet, de la maison de Gharenton, de I'hospice des Qoinze-Vingts.
Depuis que le service militaire s'est g^n^ralis^, I'Etat n'a pas h^sit6 a
accroltre lemontant des secours accord^s aux anciens railitaires. Bn 1876,
la somme port^e au ministdre de la guerre k titre deallocations de secours
s'^levait k 3332000 francs. Ai\jourd'hui elle d^passe 5 millions (exacte-
ment au budget de 1897 la somme de 5 196500 francs).
De m6me le minist^ de la marine, qui ne pouvait disposer en 1876, k
titre de secours en faveur des anciens marins, que de la somme minime
de 112 521 francs, a vu en 1897 le credit port^ k 1 million, sans compter
les 9161 736 francs forroant la subvention de la caisse des invalides de la
marine .
Je signalerai ^galement une augmentation sensible au minist^re des
Iravaux publics, dans le chifTre des secours accord^s aux agents perma-
nents de I'administration. De 132 000 francs qu*il ^tait en 1880, le credit
est mont^ k 250000 francs de 1884 k 1892, et dans ces derniers temps le
nombre des parties prenantes a pris une telle extension que le Parlement
a jug^ n^cessaire de doubler le credit et de le porter k 503 500 francs.
L'article 66 de la loi de finances du 16 avril 1895 avait d^cid^ que le
credit mis k la disposition du ministre des travaux publics pour bonifier
les pensions de retraites des cantonniers de T^tat serai t r^parti suivant
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111.I IP ^,H» J ^-r
VARlfeTfeS.
on r&glement d'administration publique. Or, ce r^glemeot a
la date da 22 f^yrier 1896, et il permet de porter Je chiffre d
des cantonniers aux deux tiers de lear salaire.
Anssi an credit de 500 OOa francs figare-t<il au budget de
qu'il ne d^passait pas 80000 fraocs en 1870.
Depuis loDgtemps, Messieurs, les pouvoirs publics ont coi
d^plorant, I'^migration du paysan vers les grands centres. Le
se d^peoplent au profit des villes, comme si la lutte pour la
pas aussi p^nible et aussi difHcile. Pourqnoi cet abandon et
meot? L*Etat aurait*il manqu^ de solticitude pour le paysan
Anrait-il ni^lig^ de mettre eu oeuvre toutes les mesures propi
nir sur ]e sol qui Ta vu naltre ?
Je ne parlerai pas de Textension don nee aux grands trav
routes, caiiaux, chemins de fer, qui, en facilitant sur tons U
territoire I'exploitation et la vente des produits, ont accru d
table proportion la valeur de la terre. Mais des lois sp^ciales
t^es dans Tint^rdt exclusif de Tagriculture. Au mois de juillet
'vernement pr^sentait un projet de loi sur le Code rural ; le
itait promulgate la loi relative & la restauration et k la consi
terrains en montagne dans le but de prot^ger les plaines cont
dations. Ind^pendamment de la loi g6n6rale sur les syndicats
nels da 21 mars 1884 s'appliquant dgalement k Tagriculture, es
une loi sp^ciale du 15 d^cembre 1888 autorisant la creation
pour la defense des vignescontre le phylloxera.
L'enseignement agricole longtemps d^daign^ a 6t^ orga
larges bases qui foot de Tagriculture une veritable science ;
6^1es, des ^coles pratiques d'agriculture, un institut agron
6i€ cr^^s. Une loi du 16 juin 1879 a fond^ une chaire d'agric
chaque d^partement et nous voyons aujourd'hui chaque d^par
sMer cette chaire dont les professeurs sont charges de cours
k r^cole normale primaire et de conferences dans les commu
importantes.
Le budget de 1897 est le reflet exact et vivant de ces r6f
ces am^lioraUoos. Sous la rnbrique de : a Subventions h des
agricoles, — Encouragement k Tagriculture etau drainage, —
s^riciculture, — Encouragements k Tindustrie chevaline, —
pour le traitement et la reconstitution des vignobles de France
pour pertes mat^rielles causees par les intemp^ries », le budg
culture dont le chifTre ne d^passait pas 15 millions en 1870
joard'hai le chifTre de 41 734343 francs.
Et le Parlement ne paralt pas dispose k s'arrSter dans ce
question agraire est en ce moment plus que jamais k I'ord
comportant avec elle la solution de plusieurs probl6mes d61i
agricole, banques r^gionales, chambres d'agriculture, assui
taelles agricoles. Dans la derni^re session legislative, les ^choi
Bourbon ont retenti des brillantes discussions engag^es sur c
dont la solution s'impose k bref ddlai. Car, en presence des o
cyclones qui parcourent nos regions les unes apr^s les autres
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122 REVUE PIIILANTHROPIQUE.
les maisons, aD^antissantlesr^oltes et ne laissant que ruines et devasta-
tion derrifere eux, TEtat est impuissant k r^parer lespertes et les deficits
qu'occasionnent de pareils fl^aux. 11 ne peut apporter qu^un soulagement
que la, frequence et T^tendue des d^sastres, comme ceux dontcette ann6e
nous a servi letriste spectacle, rendentA peu pr^s illusoire.
Dans une grande d^mocratie comme la n6lre, il faut de toate n^cessil^
qu'il y ait parity de situation entre Touvrier des villes et [le laboureur des
champs. Le monde agricoie est par essence plus immobile, plus calme,
plus difficile k agiter. Raison de plus pour ne pas le payer de belles
phrases et remplacer les promesses par des r^alites. Or, si nous voulons
faire quelque chose de pratique et de tangible, trouver le vrai remade a
des plaintes trop souvent justifiees, c*est encore dans cet 'admirable prin-
cipe de ^association mutuelle que nous puiserons le moyen de r^soudre le
probl^me des int^r^ts agricoles.
Donnons, sans plus tarder, une solution k la question des assurances
mutuelles agricoles. Sur la demande qu en a faite M. le president du con-
seil des minstres, un premier jalon a et^ pose pour le budget de 1898. II
a ^t6 d^cid^, en efTet, que le chapitre 41 du budget de 1898, au lieu de
s'intituler « Secours pour perle et ^v^nements malheureux », porterait la
rubrique « Subvention aux assurances mutuelles agricoles contre la gr^le
et la mortality du bdtail ». N'oublions pas ^galement tous les services
rendus au pays par les chambres de commerce, et croons k leur image,
dans chaque arrondissement, des chambres consul tatives d*agriculture
qui, sous une autre forme que les banques r^gionales, pourront puissam-
ment aider a la constitution du credit agricoie.
Je m*arr6te, Messieurs, car je ne voudrais pas d^passer les limites d'un
discours de rentr^e, et je termine en me demandant quelles sont les
conclusions qui se d^gagent de cet expose budgetaire.
II en est une premiere [que personne, je pense, ne songera k me con-
tester. « Le monde est fatigu6 de voir des mis^rables », s'6criait un jour
un grand patriote, Godefroy Gavaignac. Gette lassitude g^n^reuse, la troi-
si^me R^publique I'a ressentie plus qu'aucun autre gouvemement. Qui
oserait, en efTet, disputer k la troisi^me R^publique la palme dans les
bienfails g^n^reusement accord^s k Thumanit^ soufTrante et lib^ralement
octroy^s k la classe si nombreuse de ceux qui ne vivaient que par le tra-
vail et le labeur de chaqoe jour ? Je viens de prendre Tindividu k tous les
kges de son existence; je Tai vu nattre, grandir, s'instruire, travailler,
souffrir et vieillir. Depuis le jour de sa naissance jusqu'au jour de sa mort,
quelle que soit la condition sociale dans laquelle le sort Ta place, j*ai
constal^ que T^tat accompli ssait enverslni une partie des devoirs sociaux
resultant de sa fonction, de ses charges dans la vie.
Or, il me semble, Messieurs, que Thumanit^ n'est pas appel^e tous les
jours k contempler un spectacle aussi forliOant et aussi iustructif. GVst
quelque chose, en effet, n*en d^plaise aux pessimistes, que de pouvoir,
pendant un quart de si^cle, suivre pas k pas la trace bienfaisante laissee
par le d^veloppement continu et constant des principes de Tassistance vi
de la solidarity ! On n'est certes pas arrive k la suppression de toutes les
plaies, de toutes les niisdres, et ii n'est que trop vrai, helas I que si Ton
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VARlfeTfeS. 123
demande k un homme riche ou pauvre : « Sou(rrez-you»? » il y aura,
aajonrdliui comme hier> presque unanimity dans la r^ponse ! L'Etat sociu^
lisle lui-m^me, s'il doit se r^liser un jour, ne supprimera pas la plainte
qui s'^^ve de tonte existence humaine; plusieurs pensent mdme qu'il la
rendra plus ftpre c I plus poignante encore.
Anssi, et c'est une deuxi^me conclusion, ne faut<*il pas pousser jusqu*a
rextr^me limite ce privilege que TEtat s'altribue dQ faire ie bien et Tau-
mdne a?ec Targent du budget, c'est-i-dire du contri|)uable? 11 ne faut pas
lais6er s'^tablir dans ce pays la redoutable et fausse conception de I'felat-
Providence. Ne nous abandonnons pas aux sp^culaUons^ m^taphysiques;
il vaut niieux mettre le doigt sui* la plaie et reconnattre franchement et
loyalement que le mal qui nous mine provient la plupart du temps de ce
que nous attendons trop de I'^tat et de ce que le pouvqir central nous ap-
paralt commc une providence chargde de distrlbuer le bonheur et la feli-
city.
Pour r^agir contre une si funeste tendance, il faut faire appel k I'ini-
tiative individuelle, d^velopper la mutuality et I'esprijtde solidarity. Le sen-
timent bien compris de la solidarity sociale est de nature k montrer a la
France r^publicaine tout ce qu'il y a de f^cond dans le gouvernement des
forces de ses enfants. Avec lui et par lui les d^faillances et les aUaques
sont impuissantes k duller les liens 6troits et les rapports de dependance
que revolution sociale ^tablit plus fortement de jour en jour entre les
differentes classes de la soci^t^, colles du pass6 et celles du present.
Comme si, du reste, Tesprit de classe n'avait pas fait son temps! Comme
si ce qui flotte aujourd'hni au-dessus des ^paves de I'ancien mond<i et du
Qouveau n*6tait pas un esprit national r^publicain assez fort pour s'orienter
sans encombre dans les sentiers de la tolerance et de la liberty !
Enfin, et c'est 1^ ma demi^re conclusion, si proclamer les bienfaits de
la fraternity, de la mutuality, de la solidarity, c'est exalter de beaux et
nobles sentiments, je crois qu'il est encore mieux de les vivre. Mais dans
leur pleine sinc^rit^ pratique ces sentiments, qui sont de nature h fonder
la prosperiti§ et la grandeur d'un peuple, supposent une vertu mallresse
puisne dans les profondes Energies de T^me. C'est done k cette dnergie in-
time qu'ii faut recourir!
Par elle, nous verrons se d^velopper et grandir cos qualit^h de peuples
forts qui s'appellent llnitiative. Ten durance, Tesprit de sacriQce! Par elle
avec TelTort personnel et constant de tons les int^ress^s, nous verrons
noire ch&re France, aux henres des difQcult^s et des perils, surmonter
tons les obstacles et conserver dans le concert des nations le rang veritable
qui lui a loujours appartenu !
L'lficole des Sages-Femmes de la Maternity.
DISCOURS DE M. GHARRIN
L'opinion s'int^resse plus vivement que d'habitude k la question
des sages-fenunes et des n^^decins accoucheurs; aussi croyons-nous
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124 KEVUE PHILANTHROPIQUE.
int^ressant de reproduire le disconrs prononc^ par M. le D' Charrin,
m^decin de la Maternity, k la distribution des prix aux dl^ves sages-
femmes de I'Ecole d'accouchement dirigde par M. le docteur Pierre
Budin.
Mesdames, Mesdemoiselles.
Sans avoir un don de divination, j'imagine que parmivous, parmicelles
du nioins qui airivent au terme de leurs etudes, tout en ce moment doit
6tre k la joie. — Les unes vont recevoir les prix justement m6rit6s par
Jeurs efforts, par leurs travaux ; les autres, an peu moins favoris^es, s'ap-
prStent k user bientOt de ce diplOme conquis gr^ce k une pers^v^rante
application. — 11 n'y a pas d'ombre au tableau ! Consultez les proc^s-ver-
baux des examens : ilsvous r^pondront que ia fortune n'atrahi personne,
qu'aucune ^\h\e n*a ^t^ jug6e indigne de ce titre de sage-femme de la Ma-
ternity de Paris, titre depuis longtemps d6sir^, vivement ambitionu^ !
Dans ces r^sultats, que je proclame avec plaisir, j^aper^ois les conse-
quences de votre zMe, de votre discipline ; j'y vois aussi ia marque de celte
mesure a iouer entre toutes, qui a fix^ k deux ans la dur^e de votre s^jour
dans cette 6cole.
Je sais fort bien qu'au d^but tout au moins, on a centre cette mesure
essays queiques critiques : on a parl^, entre antres choses, de carri^res
rendues plus difficiles! Mais, apr^s tout, m^me dans cette bypoth^se, oti
seraitle mal? — Tant que nosmoeurs seront ce qu'elles sont, et j'esp^re
que sur ce point elles ne sont pas k la veilie d'etre boulevers6es, tant que
I'exercice des professions m^dicales en g^n^ral ne sera pas absolument
libre, il importera d*entourer leur accfes, leur exercice de toutes les ga-
ranties possibles ! — Lorsqu'il s'agit d'un pareil recrutement, il est k coup
siir permis de compter les 61ues ; il vaut mieux cependant les peser, les
appr^cier : numerantur $ed ponderantur ; la notion de quality I'emporte ici
sur celle de quantity.
J'ai entendu, k vrai dire, formnler des accusations de routine, accusa-
tions difficiles k comprendre en presence de modifications nouvelles; j'ai
entendu mettre en avant des revendications au nom du progr^s, de ia
liberty, ou encore pr^ciser des arguments que Ton croit sans r^plique,
parce qu'ils s'appuient sur Texemple de coutumes ^trang^res! Mais — on
Toublie trop — autre nation, autre civilisation, autre Education publique
exigent souvent autre mani^re de faire. — A ceux ou celles qui veulent voir
dans ces r^glements une atteinte k cette liberty qui paralt autoriser bien
des conceptions, je r^pondrai que traiter les jours de ses semblables sans
un contrOle sufQsant, c'est sortir des justes limites de ce qui est permis,
c'est tomber dans ia licence, dans I'arbitraire ! — Quant aux aulres griefs,
j'avoue ne pas les comprendre. — Le progr^s n'a jamais consists k reculer !
— On ne saurait, enGn, invoquer la routine ausujeldes changements qui
sont sa negation m^me.
Remarquez, du reste, qu'on r^glemente toutes les professions. — Aux
avocats, aux ing^nieurs, k ceux qui s'occupent avant tout de nos int^rdts
mat^nels, on impose des examens, des coocours; on prend, dans ces
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VARlfeTfeS. 125
conditions, nne s6rie de mesures en quelque sorte preventives. — D^s
lore, commeot comprendre que ceux qui out charge de la vie humaine, de
sa conservation, de sa sauvegarde aient seuls la faculty de se coniporter
suivant leur bon plaisir !
Yraiment, le moment serait mal choisi ! — Si, & toutes les 6poques, la
sage-femme a vis4 m^mebut, k aacune p^riode eilen'a eu, pour atfeindre
ce but, des notions comparables k celles dont elle dispose aujourdliui! —
Celles qui vons ont pr^c^d^es ont entendu parler de raiasmes, de contage,
de mali^re peccante, voire d'espritsanimauxl Toutefois, avec leurs contem-
porains, elle^ out ignore la nature solide, liquide ou gazeuse des agents
de Hnfection ; elles ont ignor^ leur provenance, leurs habitats, leur genre
de Tie, leurs modes de fonctionnement, de pullulation, de transport, de dis-
semination : partant, elles ont dA renoncer k la connaissance rationnelle des
proc^^s capables de proteger T^conomie contre de funestes agressions.
Plus heureuses que vos atn^es, k la lumi^re des denudes positives de
la m^tbode exp^rimentale, qui n'admet que ce qui tombe sous le sens,
rous saisissez peu a peu ce que sont les 6tres myst^rieux, aptes k engen-
drer les plus terribles accidents! Vous savez comment ils 6voluent, com-
ment on les cultive, el, fait capital ! comment on les d^truit I Vous savez
la conduite k tenir pour ne pas les laisser p^n^trer en nous, ou m^mepour
entralner au dehors ceux qui ont commence k s'iutroduire, sans avoir
r^assi cependant k seglisser dans la circulation g^n^rale. Vous savez qu*on
rencontre ces germes sur la peau, dans le tube digestif, dans des regions
de Torganisme en communication avec Tair, dans ces parties qui, suivant
les expressions de CI. Bernard, con tinuent ^apparteniraumonde ext^rieur.
Vous parvenez k entrevoir les proc^d^s capables de s'opposer au passage de
ces microbes des surfaces cutan^es ou muqueusesjusque dans Tintimit^des
tissus. — Ainsi, los notions positives, solides, sdres, permettant d'^viter le
danger, sont d6}k nombreuses, d^j^ clairement codifl6es : Theure n'est
done pas venue de laisser libre carri^re aux ignorants.
Cette heure est d autant moins venue q\x*k ces notions Ib^oriques
s'ajoutent des donn^es pratiques ! — Antisepsie, asepsie, ou, pour parler
moins pr^tentieusement, proprete, propret^ exterae, interne, propret6
scientiOque : voili vos grands moyens ! — Ou vous enseigne m^mea inter-
roger lejeu de quelques appareils, celui des reins, par exemple, on vous
apprend k rechercher Talbumine, k conseiller le [regime lact^, k faire
appeler, en vous guidant sur des Elements de pathologie ici m^me d6ve-
lopp^s, k faire appeler le m^decin avant tout sans retard.
C'est qu'on sait le prix du temps, en mati^re de pathologie ; le mal a
bientdt diminu^ la resistance des tissus; toute atteinte k T^tat normal
ouvre la porte aux parasites. Or,precis6ment Taccouchement est une de ces
circonstauces qui, promptement, peuvent amener un instant de faiblesse,
de receptivity pour Tinfection : il importe k ce moment de surveiller T^co-
nomie, de la preparer. — Pr6venir, en effet, vaut mieux que gu^rir. — Si
nous sonunes en pleine saute, notre pouvoir contre les parasites est rela-
tivement grand; aussi a-t-on pu dire avec raison, au risque de rendre
jalonx M. de la Palice : « II est difficile de devenir malade, quand on est
reellement bien portant. »
I
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12l» UEVLE PIIILANTIIHOPIQUE.
Vous le voyez, ce n'esl point k I'dpoque ot les sciences que vous culU-
vez s'61oignent plus que jamais de rempirisme pur pour se rapprocher
desclaires, des saines denudes du domaine positif, ce n'est point k cette
^poque oil il fait bon vivre qaand on s'int^resse k ces sciences ;non, ce n'est
point & cette ^poque qu'il convient de cesser d'entourer de garanties ieur
pratique, Ieur acc^ft.
Ges garanties sent d'autant plus n^cessaires que la plupart d*entre vous,
Mesdames, Mesdemoiselles, arrivent ici — permettez-moi de Je dire — dans
une complete ignorance des notions dapprendre; le programme, d'un
autre c6t^, comporte des sujets ^tendus, [les uns, k coup si!kr, plus impor-
tants que les autres, sans qu'aucun puisse dtre n^glig^ ; dans ce domaine
de la biologic il existe des sciences auxiliaires; je me refuse, en d^pH
d'une nomenclature coasacr6e, k en reconnaltre d'accessoires.
Rdll^chissoz doncun instant, et vous verrez de suite que deax ann^es sont
oourtes pour parcourir ce programme, pour acqu^rir des connaissances
qui vous permetlrant d'affronter sans trembler les situations difflciles, de
supporter vaillamment les lourdes res{^nsabilit^s, d'^viter ces erreurs
propres k entralner un arrdt fatal, une irrevocable condamnation!P6n^tr^es
des moindres details de ce program n(ke, vous parviendrez peut-^tre k parer
k tons ces accidents dontquelques-uns, secondaires en appare nee, susci tent
n^anmoins d'interminables infirmites! Celies d'entre vous qui se perfec-
tionneront sans reldche, celies surtout qui seront attach^es k des services
d'hdpital, jugeront promptement, en d^pit des efforts r^alis^Sy deslacunes
de Ieur instruction : on commence k savoir, quand on commence k s'aper-
cevoir qu'on ne sait rien.
D'autres considerations militent encore en faveur d'^tudes plus com-
pletes. — Sous rinfluence d'une pouss^e irresistible qui fait craquer les
vieux monies de notre civilisation, les femmes r^clament, k Tegoisme de
Thomme qui se croit seul digne de l^gif^rer, leurs droits aux carri^res li-
berates, leurs places dans uneserie d'institutions! Au milieu de ce grand
mouvement vous devez ap prendre sans cesse pour consenervotre situation,
vous, sages-femmes, qui depuis longtemps occupez un domaine que les pe-
titesses de la society ont renonce k vous contester, vous qui, depuis des
annees, connaissez des secrets que d'autres commencent k peine a sender,
vous dont rinstruction n'est point affaire deluxe, de mode, de caprice,
mais bien de necessite, de Constance, de profession!
La science marcbe : s'arr^ter, pour elle, c*est reculer. Aussi, sons peine
de dechoir, vous prolongerez chef, vous ces periodes d'etudes.
Vous le ferez au souvenir des jours passes sur ces bancs oil vous aurez
ignore le vers du po^te : « Notre ennemi, c'est notre maltre... »; |vous le
ferez au souvenir de cette Maison ou les Mattres, dans la mesure de leurs
forces, auront facilite votre tdche, ou Tamitie de compagnes plus avancees
aura assure, affermi, guide Thesitation de vos debuts.
Vous serez les apdtres de Thygiene, de la propret^ dans tons les sens.
Vous lutterez centre les pnguges; vous ferez penetrer partout le soleil, la
lumiere, ces grands hygic^nistes ; vous ferez aerer ces pieces ou s'entassent
nialades et bien portants, au point de s'auto-intoxiquer. Vous repousserez
toute alimentation trop solide, trop t6t administree au tube digestif trop
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VAUlfeTfiS. 127
delicat des nouveau-D^s. Car ces nouveaa-n^s, comme les accQuch^es, dans
quelque mesore vons appartiennent. — Sans doate, vous ne devez pas
oublier les limites impos^es h votre intervention par la sagesse de la loi,
sagesse qui, h dire vrai, n'est pas immuable! — Maie, d^ji, dans la sphere
rescrv6e k votre activity, vous pouvez beaucoup. — Vous pouvez, surtout
par risolement, ^viter la contagion; vous pouvez op^rer de salutaires
-vaccinations, en particulier dans des pays rebelies a ces pratiques; vous
pouvez, au sujet des nourrices, donner d'excelients conseils, ^carter une
foule d*ennuis s^rieux ; vous pouvez, au souvenir des notions de pathologie
ici m^me enseign^es, pr^venir ou gu^rir bien des maladies, en faisant
appeler, comme je le disais, le m^decin en temps utile, pour une affection
respiratoire, digestive, circulatoire, etc.
A d'autres 6gards, vous parviendrez k rassurer une m^re ^plor^e, qui
se d^sole a la vue de son rejeton second par l*horreur de convulsions, que
leur mauvais renom, h^las! fr^quemment justifl^, fait rattacher k la fatale
m^ningite; vous mettrez (in k ces convulsions parfois accidentelles, dont
vous saurez d^pister la b^nignite ; vous le ferez, suivant les circonstances,
en calmant une dentition, en expulsant un tienia, en supprimant une
^pingie, agents, causes capables, en irritant la peau ou les muqueuses, de
snsciter des processus reflexes I
Je parte de consolation, Mesdames, Mesdemoiseiles, parce que, si vous
devez votre science aux personnes qui s'adressent k vous, vous leur devez
aussi autre chose : vous leur devez une assistance morale.
A l*heure ou vons penetrez dans I'intimite des foyers, bien souvent les
cceurs sont agites; Tangoisse est entree avant vous. — Ou craint des com-
plications ; on redoute la divulgation d'un secret, principalemenl dans un
manage m^diocrement uni; Tenfant qui va venir pent staler au grand jour
lesstigmatesd'une maladieher^ditairejusqne-l&soigneusementcach^e; des
jalousies se dissimulent peniblement k la pensee du patrimoine que va
diminuer le nouveau venu, etc. !
C*est k ce moment qu'il faut vous souvenir du serment d'Hippocrate :
%'08 yeux ne doivent rien voir; vos oreilles ne doivent rien entendre! N er-
gotez pas sur les limites du secret professionnel ; ne faites pas de distinc-
tions a la facon des casuistes, entre les confidences recues et ce que vous
avez vous-mSme spontan^mentapercu! Une indiscr<^tion de votre part serait
le plus odieux des abus de confiance, dont, m6me en mettant de c6te les
rigueurs de la loi, vous uc tarderiez pas a t^tre pnnies par I'abandon de
tous : aucune medaille, aucun dipl^me, aucune habilete ne sauraient rem-
placer le moindre dSfaut d'honorabilite.
A toutes les families vous devez indistinctement votre discretion, votre
honn^tet^, votre patience, votre dt^vouement, aussi bien que votre science.
Assur^ment, de justes honoraires doivent ^quitablement r^compenser
vos Lotenentions, sans entrer jamais dans ces compromissions ignorees des
int^ress^ qui, depuis quelque temps, tendent k jeter le discredit sur cer-
taines professions; la valeur de ces honoraires en aucun cas ne servira de
mesore a la valeur des soins que vous prodiguerez, sans introduire de
difference entre le riche et Tindigent.
Vous ii'avez pas davantage a tenir compte du rang, du caracttTC de la
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128 REVUE HHILANTHROPIQUE.
naissance, k savoir, pour le rejeton, a d'illustres parents s'il doit son ori-
gine, ou si dans le vulgaire obscur quelque sort Ta piac^, d'autant qu*4 ce
point de vue nombre de pr^jug^s devraient avoir fait leur temps! Enquoi,
d'ailleurs, ou pourquoi I'enfant du libre amour meriterait-il moins votre
bont^, votre soUicitude que cet autre issu d'une union d^cid6e par le poids
deTor plus encore que par la sinc^rit^ou la d^licatesse des sentiments? —
On voit des femmes repousser un petit-fils, parce qu'il est n6 d'une jeune
m^re que leur fils a cboisie, au lieu d*accepter docilement Th^riti^re que
leur s^che cupidity d^sirait lui imposer : je ne sais rien de plus hypocrite,
de moins matemel!
Souvenez-vous, d'ailleurs, que, si par hasard il se rencontre des mis^res
indignes d'estime, il n'en est pas qui puissent exclure la piti^ ! — La tole-
rance, Tel^vation an-dessus des mesquineries humaines, le d^sint^resse-
ment : voiU quelques-uns des caract^res qui doivent signaler tout 6tre
jug^ digue de porter secours k ses semblables dans les moments difficiles.
— Si parfois la justice sociale intervient autour de vous, n'onbliez pas que
la recherche des coupables n'entre point dans votre rdle. — Pour vous, en
un mot, il n'y a que des m^res ou des nouveau*nes, et cela en toute cir-
constance, comme en toute circonstance, in^me et surtout dans les temps
les plus tiM)ubl^s, rh6pital, pour le m^decin, ne contient que des malades.
En adoptant cette ligne de couduite, vous rencontrerez plus d'uu
obstacle ; vous trouverez, en revanche, votre recompense !
Quelques-unes, si la clientele leur sourit, arriveront k la fortune, forr
tune que je vous souhaile k toutes, bien qu'eile n'alleigne pas le plus
souventles proportions de celle du financier! — Quelques autres, un peu
plus nombreuses, connaltront ces amities solides, profondes, qu'engendrent
seuls les services de la nature de ceux que vous rendrez : par-ci, par-14,
la reconnaissance se manifestera, juste assez pour prouver qu'eile ne se
r^duit pas k un vain mot! — La plupart n'auront d'autre satisfaction que
celle du devoir accompli, et c*est quelque chose en toute situation, en par-
liculier dans la v6tre !
II y a peu d'ann^es, sur 2000 femmes venues ici pour accoucher, des
centaines parfois succombaient ! Aujourd'hui, ces d^c^s se chifTrent par
quelques unites ! De ces nombreuses m^res que les d^couvertes modernes
permettent d'arracher k ces premieres atteintes du mal, la plupart auront
de nouveaux enfants.
I^ science k coup siir ne salt pas supprimer la mort; toutefois, cette
simple constatation, nette, Jumineuse, plus eioquente que de longues
demonstrations, car rien n'est plus fort que Tarithmetique — cette simple
constatation revendique pour cette science le pouvoir de reculer I'dge
moyen,de faciliter la repopulation, grave probleme de Theure pr^sente!
Croyez-vous done qu'il n'y a aucun m^rite, aucune joie, aucune fierte,
kHre appelee k concourir k une pareille oeuvre? Or, c'est ik precis^ment
4a destin6e qu'ouvre d^sormais devant vous le dipl6me conquis en ce jour!
II vous conf&re le droit, le pouvoir, Tobligation de gu^rir si cette guerison
est possible, de soulager quand on ne pent pas davantage, de consoler
toujours!
Mesdames, Mesdemoiselles, je termine en m'excusant, en me reprochant
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VARlfiTfeS.
cetrop long discours ! — Vous dtes impatientes de vous apparte
pletement, d^Boitiyement, et voici que, jalouse de ses droits,
tradition vous retient encore pour vous adresser les derniers cons(
voas rappeler, au milieu de voire allegresse, les devoirs qui voc
bent, les responsabilit^s qui vous atleadent! Le sort m*a d^sij
faire entendre, dans ce concert de joie, quelques notes s^v^rc
jeunesse aimable, insouciante, saura, je I'esp^re, ne pas m'en vov
Instmotions sor la oonsommation du Lait,
R^DIG^BS PAH MM. P. BUDIN, GOMBY, MIQUEL, ROUX ET P. STR.
Le lait, aliment si precieux lorsqu'il est consomm6 au momen
tir^ da pis de la vache saine, peut 6tre dangereux s'il est foumi
vache malade ou si des microbes s*y ajoutent.
Ges microbes peuvent venir de la vache elle-m4me (vache at
taberculose, fi^vre aphteuse, etc.) ou dtre apport6s de Text^rien
poufsi^res adh6rentes aux vases, par Teau qui sert k les laver,
d^veloppant dans le lait, ils Talt^rent; introduits dans le tube
ils d^terminent parfois Tapparition d^accidents tr^s graves , tel
diarrh^es des nourrissons et le cholera infantile.
U est done n^cessaire de d^truire ces microbes pour avoir un
meat inofTensif. Le chauflfage est actuellement le seul moyen pi
efRcace pour atteindre ce but.
Les precedes de conservation du lait par V addition de substances
coDstitQent des pratiques frauduleuses et souvent dangereuses
sant^ des consommateurs. lis doivent Hre rejet^s.
les procidis actuels de rifrigiration du lait offrent des avantages
veiUr son aUiration et faciliter son transport^ mais ils ne constitue>
moyen de st^ilisation de ce liquids alimentaire.
La pasteurisation^ telle qu*on la pratique pour le vin et la bidre, &
le ehauffage une seule fois a une temperature voisine de 60 degris, e
uinte pour dHruire les germes nuisibles contenus dans le lait . Tc
mode de chauffag-e, comme la rifrig^ation, peut itre utilise pour f
transport dans certaines conditions favorables,
Quand le lait doit Hre consomnU dans les vingt-quatre heures, il
wit chauffi a 100 degrispour donner une s^curit^ suffisante. Ce lait
cmserte dans le vase oil il a He chauffi et mis au frais.
D'habitade on fait boaillir le lait en vase ouvert. S'il ne doit
imm^diatement consomm^ et si on veut le couvrir, il faut attc
refroidissement. En effet, la vapeor d'eau, se condensant sur le
froid, forme des goultes qui entralnent dans le lait des impurel
germes.
(I) Travaux de la Commission d'6tude de rAlimentation par le lait.
REVUB PHU-ANTHROPIQl'B. — II.
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130 IIEVUE PIIILANTIIUOPIOL'K.
Dans le cas ou Ton veut recouvrir le lait encore chaud, il faut que le
couvercle vienne d'etre pass^ k Teau boaillante.
L'^bullition fait p^rir presque tons les microbes; il en est cependant
qui r^sistent et qui, si la temperature ambiante est sufOsamment ^leveo
(par exemple pendant T^to ou dans une pi^ce trop chauff6e), peuvent se de-
velopper et amener une alteration du lait. (Vest pourquoi on recommande
de le mettre au frais quand il a bouilli.
Pour les enfantSf quand le lait de ferame, toujours preferable, fait de-
faut, ou a generalement recours au lait de vache. Le lait destine aux nour-
rissons doit Hre reparti en flacons clos, contenant la qtiantit^ qui sera con-
sommie en une fois. Les flacons seront chauffis au bain-marie et maintenus
pendant trois quarts d'heure dam Veau bouillante,
Les enfants prennentlelait souventetparpetites quantites^la fois ; si pour
chaque repas on puisait dans la provision de la journ^e, k chacune de ces
manoeuvres on introduirait de nouveaux microbes dans le lait et on per-
drait ainsi le benefice du chaufTage. 11 vaut done mieux r^parlir k Tavanct^
dans des flacons le lait destine aux nourrissons. Ces flacons contiendront
la quantite necessaire pour uu repas.
Avant d'employer les flacons, on les lavera k grande eau, puis on les
egouttera. Une fois qu'on y aura mis la quanlite de lait sufflsante,on los
fermera, soit avec un tampon d'ouate introduit dans le goulot, soil avec
un linge lie autour du col, soit k Taide d'uu des bouchons de raoulchour
inventes pour cet usage.
Les flacons, places ensuile dans un support special; un panier metal-
lique, par exemple, seront introduits dans la marmite conlenant Feau
froide, et on chaufl'era jusqu'4 I'ebullition, qui sera maintenue pendant
trois quarts d*heure. Ce temps ecoule, on retirera le panier et on mettra au
frais.
Au moment du repas, on fait tiedir le Uacon au bain-marie. Quand il
est arrive k la temperature convenable, on le debouche et on adapte sur le
goulot une tetine propre qui a ete bouillie.
Dans ces conditions, le lait passe de la bouteille dans Teslomac de Ten-
fant aussi pur que du lait qui viendrait du sein de la m^re.
Lorsque le coupage du lait aura ete present, c*est avant la sterilisation
qu'on ajoutera la quanlite d'eau potable necessaire.
Du laitreste-t-il dans un flacon, il ne faudra point, plus tard, le donuer
k Tenfant ; il se trouvc, en efifet, souilie par les microbes de la bouche qui
ont passe par I'ouverture de la tetine; ces microbes pullulent rapidement
dans le lait et Talterenl.
Tout flacon vide doit 6tre immediatement et soigneusement nettoye.
Pour cela on fera usage d'eau carbonatee (cristaux, carbonate de soude) ou
d*eau savonneuse, qui enleveront plus facilement les matiferes grasses; on
rincera ensuite a grande eau. Ce nettoyage est tres important, car s'il
reste un pen de lait dans le flacon, il s'aigrit et pent faire cailler le lait
qu'on y verse ensuite.
Si un ou plusieurs flacons n'ont pas ete ouverts, et si on veut les em-
ployer le lendemain, on devra chaufl'er de nouveau au bain-marie et les
laisser pendant trois quarts d'heure dans Teau bouillante.
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VARllilTIiS.
Quand ie lait doit Hre conserve plus de vingt-quatre heures avant d\
consomme {lait dit de conserve), il ne doit contenir aucun microbe vivant.
obtieiU actuellemenl ce rdsultat soit par un chauffage en une fois et »uffis
ment prolong^ a HOdegres, soit par un chauffage discontinu au-dessous
cette temperature. Le chauffage du lait dans ce.s conditions ne lui fait
perdre ses qualit^s nutritives.
Le9, laits de conserve, quand ils sont bien prepares, penvent 6tre ai
donnes aux enfants et aux nourrissons. Avant de les employer,
s'assurera :
!• Qu'ils ont bon aspect, c'est-i-dire qu'ils ne sont pas trop fonc^s
oouleur, qu'ils ne sont pas cailles, qu*ils ont conserve Tapparence r
male;
2<* Q\i*k Foaverture de la bouteille ils ne d^gagent ni gaz ni mauvi
od eiir ;
3« Qu*il n'onl aucun mauvais go lit.
Si la cr^me est remont^e h, la surface, on la remettra en suspens
en agitaat le flacon apr^s Tavoir fait ti^dir.
On versera directement ce lait de la bouteille dans le biberon, prei
blement nettoye k Teau bouillante comme il a et^ explique plus haul.
Si ce lait doit etre coupe, on emploiera de Teau potable bouillie.
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CHRONIQUE ETRANGERE
AUemagne.
UNE SOCIETY d'assurances contre le cb6mage
Une soci6t^ d'assarances contre le chomage d'hiver a ^t^ fondee a Co-
logne et fonctionne depuis plus d'une ann^e d'une facon satisfaisante. Cette
institution originale vient de publierson premier rapport annuel et ies con-
stalalions qu'il expose sont fort int6ressantes, d'apr^s le r^suni6 qu'en
donne le Labour Gazette du mois dernier.
Pendant la p6riode que ce document embrasse — du 9 mai 1896 au
31 mars 1897 — 229 personnes demand^rent k contracter une assurance,
mais 9 furent refus6es comine ne rentrant pas dans la cat6gorie des ou-
vriers ou employes pouvant participer k celte nouvelle cat6gorie d'assu-
rance. La plupart des assures sont des ouvriers des diverses industries du
bdtimenl, des ouvriers agricoles, des jardiniers om des journaliers ruraux.
Une grande partie des assures ne versa pas r^guli^rement Ies cotisa-
tions ou Ies laissa en retard; mais sur 220 inscrits 132 remplirent exacte-
ment leurs engagements et acquirent ainsi le droit k indemnites en cas de
chdmage du 15 d^cembre au 15 mars, p^riode que visent Ies polices de la
soci^t^.
Parmi ces 132 personnes, 96 se pr^sentferent comme inemploy^es :
mais des situations permanentes furent procurdes k 15 d'entre eiles,
grdce k la creation d'un registre de placement, avant le d^lai de quiuze
jours apr^s lequel le droit k indemnity estouvertaux assures, et8l autres
soci^taires furent pourvus d'emplois temporaires repr^sentant 2 181 jour-
n^es, soit environ un mois de travail pour cbacun. Ge placement mutuel
r^duisit k 1408 journ^es de chdmage, soit k environ 2950 francs, Ies in-
demnites support^es par la compagnie.
Les resultats moraux et financiers de ce premier exercice sont des plus
encourageants, car, en On d*annee,le bilan pr^sentait un solde cr^diteur de
129500 francs et dans les trois sematnes qui suivirent la cloture de Texer-
cfice, cent nouvelles demandes d'assurance furent adress^es.
Nous signalons avec grand plaisir les excellents resultats d'une tenta-
tive qui, imit^e et g^n^ralis^e, pent rendre d'incalculables services aux
ouvriers de toutes les professions que les rigueurs de la temperature met-
tent en chomage forcr.
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CHRONIQUE feTRANGfeRE* 133
Am^rlque du Sad. •— Republique Argentine.
Dix ann6es de statistique a bdenos-ayres
La direction g^n^rale de statistique municipale de la ville de Buenos-
Ayres vient d'envoyer en Europe Tannuaire de la capitale de la R6pu-
blique Argentine pour 1896 (1).
Nous ne sommes pas habitues k une telle rapidity dans la publication
des documents ofRciels en Europe, surtout en France, et, rien que pour
sa c6l^rit6| M. Albert B. Martinez, le directeur de la statistique municipale
de Buenos-Ayres, devrait recevoir nos felicitations les plus sinc^res.
11 les merite a bien d'autres tttres, plus importants encore que Tacti-
vite mise a 6diter d'excellents documents, car commerannuai re precedent,
le liTre qu'il vient de faire paraitre estdignederetenirlonguementl'atten-
tion de tons ceux qui s'efTorcent de rechercher, dans le fonctionnement
des ronages si compliqu^s de Tadministration des grandes villes, de
r^elles ameliorations, soit au point de vue purement municipal, soit au
point de vue plus special de la sant^ et de ia morality publique, de I'aide
aaz malades, aux orpbelins,aux vieillards et aux ali6n6s. C'est par ce der-
nier c6t6, que nous allons ^tudier rapidement, que Tannuaire argentin
merite d'etre signals k Taltention des lecteurs de la Revue Philanthropique.
Sous avons essay^ de coordonner et de comparer soit dans cet annuaire,
hoitdans les. precedents se r6ferant au cycle 1887-1896, tant pour Buenos-
Ayres que pour d'autres grands centres, ce qui a trait aux questions
etudiees dans cette revue.
« Ol-
sons forme de preface, M. Albert B. Martinez, a ecrit pour le dernier
annuaire une etude bistorique des donnees de la demographie des plus
consciencienses et des mieux deduites.
Au debut de ce curieux essai, ou Ton sent partout Tardente rechercbe
de la verite, le directeur de la statistique de Buenos-Ayres met en lumidre
une remarque consolante : k savoir que, dans tout corps social important et
done d'une vitalite suffisante pour conserver son originalite, si I'individu
reste libre de faire ou de ne pas faire telle ou telle chose — favorable ou
prejudiciable k la collectivite — la societe, dans son ensemble, parait
soumise k de mystedeuses lois de conservation de Tespece et de progr^s
qui corrigent les fautes individuelles.
L*Angleterre, par exemple, denote une Constance merveilleuse dans sa
puissance de nuptialite et dans les per les dues^ sa mortalite par rapport
a la quantite de ses habitants. De 1841 k 1868, la nuptialite n'a, pour ainsi
dire, pas change, oscillant aux environs de 8 pour 1 000 habitants, tandis
que la mortalite ne s*eioignait jamais que de quelques chifTres fraction-
naires de la somme fatidique de 22 pour 1 000. Quant k la natalite, en
{i) Anuario Estadistico de la Ciudad de Buenos-Ayres, — Imprimerie
G. Kraft, rue Saint-Martin, a B.-A., 1897.
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134 REVUE PHILANTHROPIQUE.
d^pit des transformations extraordinaires des conditions de la vie, elle
n'accuse, pendant toute cette p^riode, dans le Royaume-Uni qu'une difT^-
fence l^g^re de 3 pour i 000 habitants. C'est ik une tr^s curiense obser-
vation.
S'il est une nation que Ton ne songerait jamais k comparer, en mati^re
de recensements d^mographiques, a la proiifique Albion, c'est bien la
France. Or, la mdme loi de persistance des statistiques vitales s'afQrme
encore plus imp^rieusement pour la France casani^re, ^prouv^e par la
grande crise de la guerre franco -all emande, que pour I'Angleterre voya-
geuse et paciflque. Si Ton prend les recensements des manages francais,
de 1801 k 1869 — veille de la crise — ils repr^sentent, sans aucune variatioriy
le chiffre entier de 7 pour 1 000 des habitants qui se sont succ6d6 au cours
de ces soixante-dix anuses et, en d^pit de la crise de 1870-71, cette pro-
portion s'est presque identiquement conserv^e depuis les ann^es 1872-73.
La vie des peuples serait-elle done dominie par des lois in^luctables
encore inconnues? Gomme le dlt le savant statisticien argentin, pour
arriver k savoir s'il existe vraiment des lois qui gouvernent les mouve-
ments des groupes d'hommes sur le globe d'nne facon aussi inflexible que
celles [qui r^glent les mouvements des astres dans Tespace, il est essen-
tiel que tons les peuples civilises olTrent k la science les donn^es com-
pletes de ce probl^me, c'est-ii-dire des recensements p^riodiques ^tablis
partout sur des bases identiques sinon uniformes.
C'est un travail qu'avait autrefois entrepris Korosi k Budapesth et que
la ville de Paris devrait s'efforcer de mener a bien pour 1900.
LE PATRONAGE DE L ENFANCE A BUENOS-AYRES
Memoria de la comision directiva del Patronato de la infancia. — Nous
recevons de Buenos-Ayres le rapport du Comit6 de direction de la Soci6t6
pour le patronage de Tenfance (mai 1896-mai 1897). Cette socidt^ qui fut
cr^^e il y a cinq ans, et dont la premiere reunion a eu lieu le 23 mai 18921,
a d^j4 fait beaucoup de bien. Elle place ses pupilles dans une ^cole des
Arts et Metiers dependant de la Soci^te.
Nqus trouvons dans ce m^ moire, outre le bilan financier, le nom des
patronn^s, des donateurs, etc., un rapport du m^decin attach^ k T^cole des
Arts et Metiers, sur I'^tat sanitaire de la population scolaire, un rapport
du Comitd des dames patronnesses et un rapport du directeur de T^cole.
Notons parmi les professions enseign^es les metiers de tailleur, de cor-
donnier, d'encadreur, etc.
M. D.
En compl^tant les uns par les autres les chiffres donnas — et v^rifi^s
— par M. Albert B. Martinez aussi bien dans I'annuaire de 1896 que dans
les pr^c^dents, nous avons ^tabli le tableau suivant pour la mortality an-
nuelle des treize plus grandes m^tropoles du monde entier — la Chine et
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CnaONIQLE feTRANGfeRE.
isr;
rinde except^es — afin de meltre en pleine lumi^re Timportance extra-
ordinaire que pr^sente pour nous, Parisiens, la latte contre la tuberculose.
Population
an 31 d^cembre 1
Londres 4436000
Paris 2425000
New- York 1922000
Beriin 1689000
Vienne 1526600
PhUadelphie . . . . 1188800
Brooklyn 1125000
Saint-P6tersbourg. . 95^00
Moscou 753400
Buenos-Ayres. . . . 712100
Glasgow 705050
Liverpool 632500
Hambourg 625550
Natalitd
Mortality par
pour 1000 habi-
1 000 habitants, tants (1).
18,8
20
»
18
22.5
31,4
30,6
24,6
27, i
32,6
33.7
19,1
40, i
20,7
34,3
23
35,4
17,8
35
Mortality
par phtisio
pulmonaire
sur
100 d6c6s g6n6raux.
9,31
20,42
M
13,28
18,47
13,20
12,02
9,29
12.11
Ce r^sum^ assigne un rang excellent sous le rapport de la saute g^n^-
rale k la ville de Buenos-Ayres et la met en premiere ligne comme resis-
tance k la phtisie pulmonaire, forme la plus banale de la tuberculose.
On Toit en outre par ce tableau que la pbtisie pulmonaire, qui reste la
maladie actuellement la plus meurtri^re cbez tous les peupies, ne pr^sente
nuUe part une virulence aussi redoutable qn'k Paris, oii plus d*un cin-
qai^me de tous les d^ces lui sont iraputables, alors que Londres n'a gu^re
plus de d^c^s par tuberculose, que Buenos-Ayres, soit moins de 10 p. 100 de
1 'ensemble. C'est plus qu*une honte pour Paris, c'est un danger perma-
nent des plus redoutables, contre lequel tous ceux qui d^tiennent une part
d'autorit^ out le devoir de lutter ^nergiqueraent.
Comme celui de 1895, Tannuaire de 1896 contient une 6lude de la cri-
minality dans la capitale de la R^publique Argentine. Nous avous fait un
compte rendu du travail precedent dans noire num^ro du mois de juillet
dernier. Dans cette nouvelle 6iude, ^crite par M. Oswald P. Pinero, pro-
fesseur de droit p6nal a Tuniversit^ de Buenos-Ayres, il est constats que,
si Ton compare entre eux les deux cycles 1881-1887 et 1889-1891, Taccrois-
sement absolu de la population de Buenos-Ayres est, dans le dernier,
de 23,4 p. 100, alors que Taugmentation du nombre des crimes et d^lits
a ^t€ de 250 p. 100. L'^cart est vraiment terrifiant.
Les statisticiens argentins continuent a attribuer au jeu une influence
considerable sur les manifestations de la criminality, lis ont calculi que,
dans le cours d'une ann^e, taut sur les hippodromes que par les loteries
et les quinielas (pans sur les jeux de paume), la passion du jeu a mis eu
'i) Les mort-n6s exclus.
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136 REVUE PHILANTHROPIQUE.
mouvement pr^s de 41 500 000 piastres papier, k Buenos-Ayres, somroe
qui, ^valu^e en or, au taux de 300 pour 100, repr^sente, rien que pour
Buenos-Ayrea, 60 107 500 francs; c'est-i-dire prfes de quatre fois la somme
des recettes g^n^rales de la ville pendant cette raSme p^riode !
Qui pourrait tenter une semblable Evaluation pour nos vieilles melro-
poles d'Europe? Quelles fortunes 4 Paris sont annuellement absorb^es par
les courses, les cercles et les tripots, sans parler de la Bourse!...
* »
Enfin nous puiserons, pour terminer, dans cette comparaison des con-
ditions de la vie d'une grande ville pendant dix ans, une confirmation
Eclatante de TutilitE des mesures pr^servatrices et de desinfection contre
les maladies contagieuses ainsi que de refiicacitE du sErum anti-diphte-
rique.
En 1887 il y eut, k Buenos-Ayres (p. 129 de Tannuaire) 4299 dec^s
occasionn^s par la variole.
A la suite des mesures Energiques prises pour Etablir la vaccination et
la revaccination ainsi que la disinfection des locaux contamin6s,Ie nonibre
des d^c^s s'abaissa k 30 en 1892, k 44 en 1893, k 45 en 1894; et, en d^pit
d'Epid^mies, dues peut-6tre k un rei^hement dans Tapplication des me-
sures de preservation, on n'a eu k d^plorer en 1897 que 176 d^c^s de
varioleux. «
11 est naturel d'attribuer cet abaissement si remarquable de mortalite au
succ^s des vaccinations et des revaccinatioiis qui ont H^, de 1887 k 1897,
de 219 981, ayant fourni 125 645 cas de r^ussite contre 22 800 r^sultats
n^gatifs et 71 536 cas non suivis de constatations. Cette quasi-suppression
de la variole — 14 d6c^s au lieu de 1 300 — est k noter et k souligner.
Pour la dipbt^rie (croup et angine),le nombre des d^cEs qui, en 1887, a
4i6 de 995 et de 1 385 en 1888, s'est abaissE, en 1895 a 381 et en 1896 k 230.
L^ encore on a r^ussi k 6pargner de nombreuses vies bumaines.
Puissent les lecons fournies par les faits constates a Buenos-Ayres pen-
dant ces dix ann^es ne pas Hre perdues pour nous.
»
Dans I'ordre du soulagement des malades, de trds grands efforts ont
et6 realises par la ville de Buenos-Ayres, et ces efiForls, qui se traduisent
par de lourds sacrifices d'argent, sont d'autant plus meritoires que, sur
22 011 malades recus dans ses hdpitaux en 1896, il y avait 13 564 Stran-
gers; ce cbiffre est hors de proportion avec ceux de n'importe quelle
grande ville.
Pendant cette derni^re annSe, le nombre des dSc^s survenus dans les
b6pitaux n'a pas atteint 1 1 pour 100 des entries (2308 d6c6s pour 22 Oil en-
tries); c*est, du reste, le cbiffre le plus satisfaisant de la p^riode decen-
nale 1887-1896.
La capitale argentine comptait en 1887 douze itablissements bospita-
liers destines k recueillir les enfants trouvis ou moralement abandonnes,
les orpbelins, les mendiants, les invalides et les immigrants indigents. Ces
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CHRONIQUE tTRANGfeRE
douze asiles recurent, en 1887, 41 704 hospitalises et c
d^cembre de cette mdme ann6e, 4 566 pensionnaires.
En 1896, ii existait 18 de des ^tablissement charitable
tation du nombre des pensionnaires n'a pas H6 corn
d^pit de raccroissement consid^rcJile de la population,
cours de Tann^e, que 46 350 hospitalises — dont 42 122
n'y avail, au 31 decembre,dans les asiles que 4 904 pensi
lement 348 de plus qu'en 1887. G'est un excellent symj
eoDditions Sconomiques actuelles de la r^publique sud-i
La m^me situation n'existe malheureusement pas
Alors qu'en 1887 il n*y avait au 31 decerabre dans
hommes et 518 femmes, en 1896 on complait 968 homm<
La, comma en Europe etdans les autres grandes villes d
fait des progr^s alarmants.
# TiASl
Angleterre.
HOPITAL DES ENFANTS TROUVES (FOUNDLING H(
Si nous n^h^sitons pas k reconnaitre dans les oeuvres
tance un certain nombre de qualit^s dignes d'etre etudi
t^es nous ne sommes pas cependantdes admirateurs quan
qui a 6te fait chez nos voisins, et nos lecteurs ont pu voir
craignons pas de m<Her h nos eioges les critiques qui noi
fi^es. Nous ne songeons pas, par example, i citer comm
pital des eufants trouv^s de Londres, oeuvre d'un caract
et public, dont le fonctionnementestbien loin de valoirc
ments similaires de notre pays. Mais ies conditions d
hdpital a et6 fonde, les transformations qu il a subies, le
des enfants, sont des points curieux de Thistoire de I'ass
terre, et k ce titre il nous a paru interessant de les pres
lions de ceux qui lisent la Revue Philanthropique.
Le Foundling Hospital de Londres a 616 fond6 en 1739,
roi George II, sur la petition d'un capitaine de vaisseau :
Thomas Coram. Les pouvoirs de cetle charte ont He con
par divers actes du Parlement.
Les details qui suivent, sur Thistoire du commencera
relativement ^ Tadmission des enfants, sont extraits d'un
pr^s de cent ans plus tard, en 1836, c'est-4-dire d'un ii
pr^sent^ au Parlement par une commission d'enqufite sur
de charity.
<c La pratique actuelle, disait ce rapport, a commenc
Di}k, dans sa petition. Coram demandait qu*on elevdt un
pie de la France, de la HoUande et des autres pays chr^
taux de ce genre ^taient ouverts a tous indistinclement
pr^alable. Les gouverneurs de ThOpital de Londres, des
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138 REVUE PIIILANTHROPIQUE.
rent en m^yorit^ favorables k ce mode d'admission, dans la limite d^s res-
sources dont on pouvait disposer. »
Tne des premieres decisions prises par le goavemeur dbs que la charte
fut promulgu^e fut d'envoyer one mission dans les pays strangers pour
^tudier le fonctionnement et les rdglements des hospices d'enfants trouv^s.
En suite de quoi no rapport fut d^pos6 et unr^glement fut adopts. II y 6tait
dit notamment : — Qu'ane maison appropri^e serait choisie ; qu'il y aurait
k Tentr^eune petite couravec des mursd'aumoinssiz piedsde haut; qu'un
portier serait charge de laisser entrer les persounes qui apportoraient des
enfants et de porter les enfantsaux personnescommi8es4radmission;que
les circonstances obligeant Tadministration k ne recevoir qn'un nombre li-
mits d'enfants chaque enfant serait d'abord examine ; que s'il n 6tait pas
admis il serait rendu immddiatement k la personne qui ravaitameQ^,mais
qu'il serait admis en principe et autant que possible s'il avait moinsde
deux mois et n'^tait pas atteint de maladies nomm^ment d^signdes. Des
m6decins ^tainat charges de cet examen d'entr^e.
Les gouverneurs ayant lou^ une maison k Hatton Garden pour ser\'ir
temporairement d'hdpital, le premier avis informant le public que les en-
fants pourraient dtre admis fut sanctionn^ par un comity g^n^ral tenu le
4 mars 1741 etauquel assistaient sept gouverneurs dont 6tait Coram. Cet
avis 6tait ainsi concu :
« Les gouverneurs... etc... donnent avis que le mercredi 25 mars a
8 heures du soir, et depuisce moment jusqu'^ ce que la maisou soitpleine,
ladite maison sera ouverte pour la reception des enfants.
« Aucun enfant ayant plus de 2 mois ne sera recu, ni aucun enfant
qui soit atteint d*une maladie pouvant mettre en danger la sant6 des
autres.
« A cet effet les enfants seront examines d^s leur arriv^e a rh6pital et
chaque personne apportant un enfant devra entrer par la porte ext^rieure
et sonner k la porte int^rieure et ne pas s'en aller avant que Tenfant lui
ait 6l6 rendu ou qu'on lui ait donn6 avis de son admission. Mais aucune
question ne sera pos^e a la personne qui apporte un enfant ; les gens de
service de Fhdpital qui chercheraient k connaltre le nom de la personne
d^positaire seraient imm^diatement cong6di^s.
« Les circonstances actuelles et TexiguU^ du local obligeant les gouver^
neurs k ne recevoir qu'un nombre limits d'enfants, un avis sera affich^d^s
que la maison sera pleine. »
Depuis r^poque de la premiere admission, c'est-ii-dire depuis le 25
mars 1741, on continua u recevoir de temps en temps quelqnes enfants,
quand il se produisait des vacances que la mortality excessive rendail
d'ailleurs fr^quentes, et quand les ressources n6cessaires 6taient assu
r^es.
En octobre 1745, la maison d'Hatton-Garden 4tait abandonn^e et Taile
ouest de T^tablissement actuel 4tait ouverte au public. Mais il se pr^sen-
tait tant de monde que parfois plus de cent femmes, avec les enfants
qu'elles apportaient, se pressaient a la porte, alors qu*on ne pouvaitjen
admettre que vingt; de 1^ des troubles, des disputes, des scandales, si bien
qu'on fut oblige de proc^der par vole de tirage au sort. En 1754, il y avait
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r
CUROMQUE fiTRANGfeUE. 139
dans l'6tablis8einent 600 enfants, et les d^penses que n^cessitait leur entre-
tien d^passaient cinq fois le revenu doot on pouvait disposer.
Pour sortir d'embarras on s'adressa h la Ghambre des communes et au
Parlement.
La Chambre des communes vota 10 000 livres par an (250 000 francs),
en stipulant que tout enfant au-dessous d'un certain 4ge devrait 6tre re^u.
En m^me temps, par arr^t du Parlement, ii fut ^tabli d'autres maisons
analogues dans diverses parties da royaume, et ces maisons furent dot^es
selon leur importance. L'admission se faisait alors sans formality; un
paoier ^tait suspendu k la porte, on y d6posait Tenfant et Ton tirait une
sonnette pour avertir. Le premier jour de cette admission gen^rale, 117 en-
fants furent deposes k Londres et de cette 6poque (1756) jusqu^en 1783 le
aombre des admissions alia toujours croissant.
Les consequences de cette admission g^ndrale furent consid^r^es comme
lamentables. On ne manqua pas de dire que la prostitution s'en trouvait
favoris^e, puisque des facilit^s ^taient offertes pour I'admission des en-
fanls. Cela ne laissait pas de mettre k bien faible prix la pudeur des femmes
et on oubliait que faute de pouvoir abandonner leurs enfants elles ne
manquaient pas, h61as ! de moyens de s*en d^barrasser. Ceux qui faisaient
de telles critiques, qui ne sont pas sans analogues aujourd'hui, se pr^occu-
paient plus de la vertu des m^res que de la vie des pauvres petits.
Mais ce qui 6tait plus s^rieux et plus grave, c'est que, sur 14944 enfants
admis, 10389 ^taient morts d6s les premiers mois. D'aulre part, les fonc-
tionnaires des paroisses avaient imaging, para!t-il, d'envoyer par fraude ou
par force les enfants legitimes de leurs pauvres k I'hospice des enfants
irouv^s pour 6viter la d^peuse de leur entretien ; — des parents appor-
laient aussi leurs enfants mouranls pour n'avoir pas d'enterrement k
payer; — des habitants de la campagne confiaient k des interm^diaires
obligeauts, pour les abandonner k ThApital de Londres, des enfants qui
D*arrivaient jamais k leur destination.
Lne enqu6te qui r6v61a ces fails avait 6t6 ordonn^e en 1759 par la
Chambre des communes et, en 1760, on decida de renoncer k I'admission
g^n^rale. On decida aussi que les enfants d^j^ recus seraient gard6s et en-
tretenus, mais successivement les hospices de la province furent ferm6s et
vendus, et le produit de la vente vers6 au compte de r^tablissement
central. 11 y avait alors 6000 enfants, chifTre qui, par suite de placements
au dehors, fut r^duit i 1 000 en 1769. On ne recut plus les enfants que
contre le paiement de 100 livres, ce qui ne mettait Tabandon qu^ la
port^e des j<ens riches. On ne s'explique gu^re comment cette mesure
sauvegardait la morale, k moins qu'on admit qu'avant de faillir, une flUe
devait s'assurer des arrhes pour I'abandon en cas de grossesse. Quoi qu'il
en soil, 4 partir de cette ^poque, les admissions ne furent gu5re que de
56 enfants par ann^e; ce nombre ne s'augmenta qu'exceptionnellement,
notamment apr^s la bataille de Waterloo, ou Ton decida de recevoir 30 en-
fants orphelins de soldats, kg€s de moins d'un an.
A present Thdpital des enfants trouv^s n'entretient que 520 enfants. II
est ouvert au public une fois par semaine, le lundi de 10 heures k 3 heures ;
le rfeglement pour I'admission des enfants porte que :
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ho REVUE PHILANTHROPIQUE.
u Les enfants ne seront recus k Thopital que sur la demande person-
nelle de leur rafere.
u La demande doit indiquer I'^tat r€e\ de la m^re, et elle est rejet^e si
la raoindre fraude est constatee.
u Aucune demande ne doit 6tre faite avant la naissance de Tenfant ou
ne saurait 6tre recue si celui-ci a 42 niois r^volas.
« Aucun enfant ne pent 6tre admis sans que le comit6 ait constate, par
une enqu^te, la bonne conduite habituelle de la m^re et sans qu'on soil
certain qu'elle est abandonn^e, elle et son enfant, par le pere de celui-ci.
Enfin le comit6 ne recoit Tenfant que s'il lui paralt probable que c*est un
moyen de remettre la m6re dans le chemin de la vertu et d'une vie r^ga-
li^re ;
« Les demandes doivent Hre faites au comity, et on ne doit s'adresser
ni k un gouvemeur en particulier, ni k aucun fonctionnaire de rh6pital.
« On ne recoit pas d'argent pour Tadmission d'un enfant, et aucun em-
ploy6 ne peut accepter quoi que ce soit, sous peine de renvoi. Les offres
faites k des employes par la p^titionnaire sont une cause de rejet de sa
demande.
« Les enfants des femmes marines ou veuves ne sont pas recus.
On voit comme on est loin du but originel de Tinstitution et, s*il reve-
nait au monde, le brave Coram, capitaine de vaisseau marcband, dont le
cceur s'etait ^mu en faveur des pauvres petits, ne reconnaitrait pas Tceuvre
qu'il avait voulu fonder. 11 n*en reste plus rien; rien que son nom donn^
k une rue voisine. Pauvre bon capitaine Thomas Coram ! Ce n'est pas cela,
silrement, quil avait rAve.
Henbi Napias.
Le Board of Ti'ade vient de publier dans le dernier numdro de la Labour
Gazette une nouveile statistique de I'^tat du paup^risme en Angleterre et
dans le pays de Galles, en Ecosse et en Irlande.
Le nombre total des pauvres recens^s au cours de la deuxieme semaine
de septembre, dans 3b districts du Royaume-Lni, a 6i^ de 322 254, ce qui a
augmente la proportion des pauvres par rapport k la population, et aux
statistiques de 1896 ainsi que par rapport aux recensements analogues
de cette annee.
En 1896, il n*y avait, dans les m^mes districts, que 205 pauvres recenses
par 10 000 habitants, alors qu'il y en a maintenant 206 et qu'il n*y en avait
eu, pendant le premier semeslre de 1897, que 204.
La misere semble, d'apr^s ces documents, avoir augments, surtout en
Ecosse et en Irlande.
Espagne.
LES monts-de-pi6t6
En Espagne, les Monts-de-Pi6t^ sont en faveur aupr^s des pouvoirs pu-
blics; ils trouvent toujours un appui lorsqu'il s'agit de faciliter leur bon
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GHROMQUE ^TRANGfeRE. lil
foQctionnement; la protection du Gouvernement se manifeste notamment
sous forme d*exon^ratioQ de droits et cette diminution de leurs charges a
one repercussion heurense sur celles des emprunteurs.
On raconte,dans la notice qui accompagne le compte rendu des opera-
tions de 1896 du Mont-de-Piet6 de Valence, qu'un inspecteur de rimp6t du
timbre, ayant signal^ des omissions dans les operations de cet etablisse-
ment, lui intenta une action. II fut deboute une premiere fois, puis de nou*
veau et defiuitivement, par ordonnance du 4 mai 1896.
Les immeubles occup^s par le Mont-de-Piete apr^s des reductions sue-
cessives sont aujourd'hui entidrement et definitivement decharges de la
contribution fonci^re par une decision recente.
Les conditions des prets au Mont-de-Piete de Valence ne sont pas aussi
avantagenses que celles de Madrid, elles sont k peu pres celles du Mont-
de-Piete de Paris, bien que le chifTre des operations soit considerable-
ment inferieur k Valence.
On yprete depuis un franc & 6 p. 100 Tan, sur bijoux, linge et autres
objets de facile conservation et vente ; les hardes se renouvellent aprfes
6 mois, les bijoux apres un an; il est per^u un demi p. lOOpour frais d' es-
timation et un demi p. 100 de frais de ^arde pendant le premier semestre;
ce droit est reduit k un quart p. 100 les semestres suivants. .
C'est aussi dans Textension donnee k leurs operations que ces Institu-
tions trouvent les moyens de subvenir a leurs frais, sans surcharger les
emprunteurs.
L'etablissement de Valence qui fait ?aloir ainsi les fonds de la Caisse
d'£)pargne, prete egalement sur ?aleurs et effets publics k raison de
5 p. too Tan; sur les bies & 6 p. 100, et aussi sur hypoth^ques.
w L'elat de prospedte de la Caisse d'Epargne et du Mont-de-Piete, ex-
pose le rapporteur, est des plus satisfaisants et est dd sans aucun doute k
la visible protection de la Sainte-Vierge, Notre-Dame des Abandonnes, et
k la vigilance des dignes personnes qui en assurent la direction. »
HYGIENE POPULAIRE
La Higiene popular (n° 15, Madrid, 31 juillet 1897). En sa chronique de
tkygitne populmrey le D** Mariano Belmas constate les progr^s accomplis
de nos jours par ITiygifene, dans toutes les parties du monde; il espere
tf que les principales nations du Nouveau Monde eompteront bient6t un
ministere de plus, le Minist^e de la Salubrity publique ».
La meme cbronique nous apprend que le general Fernandez Losada, di'
recteur du service de sante militaire k Cuba, vient ,de publier une etude
sur Tassainissement de la Havane. Le general se propose de changer avec
une rapidite toute militaire Taspect de la capitale de la Perle des Antilles.
Dans les provinces de Gadix, Santander, Tolfede, etc., des comites d'or-
ganisationet de propagande se ferment en vue du Gongr^s international
dTiygiene.
Bien des etudiants en medecine d*il y a vingt ans ont connu, comme
moi, ce chirurgien k la langue aussi aceree que le bistouri, qui ne pouvait
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142 REVUE PIIILANTHKOHIQUE.
▼oir arriver un raalade portant sur le visage les traces d'une variola an-
cienne, sans Tinterpeller aiosi : « Vous aviez el6 vaccin6, n*est-ce pas, avaiit
d'avoir la petite v^role? » Et» sur la r^ponse affirmative du patient, le
maltrese toarnant vers les Aleves ajoatait : » Naturellement ! Vous voye/,
Messieurs, k quoi sert la vaccine I » Les temps ont change.
On sait les heureuz r^sultats atteiuts dans certaines armies earo-
p^ennes par la pratique de la vaccination obligat<>ire. Get ezemple a ^t^
suivi en France, dans les h6pitaux, les groupes scolaires, les casernes, etc.
En Espagne, il est question d*aller plus loin encore. Le D*" Iglesias y
Diaz pr^sente au S^nat un projet de loi tendant d rendre la vaccination
obUgatoire en temps (T^id^ie, pour tous les citoyens dgH dt moins de sot-
Xante ans, et n' ay ant pas m vaccinas dans les dix demUres annies (art. 2).
11 va sans dire que, toujours d'apr^s ce projet de loi, la vaccination es!
obligatoire pour les nouvean-n^s, dans le!4 quatre premiers mois de la
vie (art. 1).
En cas d'infraction i ces regies, les pdres, tuteurs, chefs de famille et
int^*essis seraient rendus responsables et punis d'amende (art. 4).
Des Instituts de vaccination seraicnt cr^^s (art. 5) et le Gouveroement
prendrait les dispositions n^cessaires pour faire appliqner la loi (art. 6).
Le D^ L. S^ailles, president de la Society roedicale de bienfaisance de
Madrid traite Timportante question des « crachoirs et crachats ». L'article
est h sa place en un journal d'hygii'^ne et les int^ress^s y trouveront d'uliles
indications et toute une r^glementalion judicieusement formulae. LeMt
prescriptions hygi6niques sont, sur ce point, rigoureusement observ^es
dans nos hopitaux. Malheureusement il n'en est pas toujours de mc^me
daus certaines families. Combien de malheurs seraient ^vit^s, si les per-
sonnes qui ontun malade k soigner a domicile se conformaient plus scru-
puleu^ement aux avis du m^decin.
La revue espagnole signale sous le tilre: hygiene indnstrielleles incon-
v^nients et les dangers de diverses industries; celles du phosphore, du
mercure, des couleurs, des Others, etc., et publie la traduction d'un remar-
quable rapport sur le travail des enfants et des femmes (1) dii iJi la plumo
d'un Eminent collaborateur de la Revue Philanlhropique, le D"" Henri Napias,
inspecteur g^n^ral de TAssistance publique, membre de la Commission
sup^rieure du travail et de Tindustrie.
Les lecteurs de VHygiine populaire trouveront enfln, k la derni^re page,
des renseignements qui nesont pasdepourvusd'int6r^tsur le lait d'Anesse
et son emploi. Ce lait, si fort k la mode, il y a quelques anuses, a joui de
tout temps d'un credit qui n*est pas injustifi^. « Les Grecs le consid^raient
comme un excellent remade et les Romains comme une boisson de luxe. »
Le lait d'dnesse serait, parait-il, celui qui se rapprochele plus par sa com-
position de celui de la femme. Les dnesses sont, moins que les vaches, su-
jettes k la tuberculose. Toutefois ce lait s'alt^re rapidement et il doit 4tre
utilise au moment de la traite, etc.
On voit que la revue madril^ne tienlA justilier son titre : VHygi^e popu-
laire. Marius Dupont.
^1 Mdmoire pr6sent6 k I'Acad^mie de iii^ilerinc, 12 Janvier 1897.
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INFORMATIONS
Les OOQlistes des H6pitaux.
Ine commission du Gonseil de surveillance de TAssistance p oblique a
approuT^ dans sesgrandes lignes une proposition de M. Paul Strauss, rela-
tive aux sp^cialit^s et tendant notamment d la creation de services sp^-
ciaux de maladies d'yeux confi^s k des oculistes.
Le recrutement des oculistes des hdpitaux aurait lieu d*apres un concours
^tabli sur les bases snivantes :
Epreoves ^liminatoires : i^ Epreuve sur tilres comportant le d6p6t par
le candidatdes travaux qu'il a publics et d'un r^sum^ 6crit de ses travaux;
2* Epreuve 6crite d*analomie et de pbysiologie sp^ciales ; 3^ Epreuve orale
de m^decine g^n^rale.
Epreuves definitives: 1° fipreuve de m^decine op6ratoire sp^ciale sur
des animaux anesthesias ou des cadavres; 2^ Epreuve clintque sur deux
malades.
1^ jury du concours serait ainsi form^: cinq membres, dont trois sp^-
cialistes, un cbirnrgien et un ra^decin des h6pitaux.
Les sp^cialistes seraient actuellement prisparmi les cbirurgiens desb6-
pitaux charges d*un service d*ophtalmologie, les agr^g^s d'ophtalmologie,
les chirorgiens des b6pitaux ayant effectiyement dirig^ un service reconnu
d'opbtaimologie.
II a ete decide qu'un nouveaa service de maladies d'yeux serait etabli a
rhdpital Laennec, d'aatres services devant «^treulterieurement etablis dans
d'autres etablissements hospitaliers. On sait que, sans parler de la clinique
ophtaimologique des Qainze-Vingts, les hdpitaux parisiens ne renferment
auJourd*hui que deux services de maladies d'yeux, tout k fait insuffisants
comme nombre de lits, Tun k rHdtel-Dieu, Tautre a Lariboisi^re.
Le Transport des Enfants Assist^s.
Le ministre des travaux publics s'est pr^occup^ des conditions d^fec-
taenses dans iesquelless*effectuegeneralement le transport, en chemin de
fer, des enfants envuy6sen nourrice, par les services d'Assislance publique.
Les cloisons s6paratives des voitures de troisieme classe, dans lesquelles
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REVUE PIIILANTIIROPIQUE.
voyagent toujours les noarrices,ne s'^l^vent pas, en effet, jusqu'au plafond
des voitures. II en r^sulle que les nourrissons sont exposes non seulement
k la fum^e du tabac, mais encore aux courants d'air, d'autant pJus pr^ju-
diciables k leur sant^, que ces inconv^nients viennent s^ajouter a la fatigue
du voyage.
M. Turrel,dans une circulaire toute r^cenle, vient d'appeler ratiention
des compagnies de chemins de fer sur cette importante question, en les
invitant k 6tudier d'urgence les mesures qu*elles pourraient prendre pour
rem^dier a ces dangers.
Le Gonoours des H6pitaux.
A la suite de pol^miques r^centes sur certains abus, la Soci^t^ m^dicale
des hdpitaux de Paris a d^l^gu^ une commission de 21 membres, charg^e
d'^laborer un projel de r6formes du Goncours du bureau central en m^de-
cine. Les travaux de cette Commission paraissent devoir 6tre pouss^s tr^s
activement. La premiere stance a eu lieu le 15 octobre, et les autres stances
ont lieu deux fois la semaine.
De son cdt6, le conseil de surveillance de TAssistance publique anomm^
une commission pour T^tude des modifications k apporter au r^glement;
les voeux ^mis par la Soci^t^ medicate des b6pitaux seront transmis k
cette commission dont font partie des repr^sentants de la Faculty de
m^decine et du corps m^dico-chirurgico-obst^trical des h6pitaux.
Les D^penses des H6pitaux parisiens.
Voici quelles ont ^te en 1896 les d^penses des hdpitaux de Paris 1
Personnel administratif 389651 88
Impressions, frais de bureau 15101 02
Frais de cours et de concours 51756 31
Personnel m6dical 953193 51
Personnel secondaire 1631209 38
B&timents 787906 71
Pharmacie 924810 36
Boulangerie 478489 96
Boucherie 2002051 11
Cave 875736 41
Comestibles 1938953 41
Combustibles 1334431 14
Blanchissage 786257 03
Coucher, linge, habillement, etc 1328713 14
Appareiis, instruments dc chirurgie, etc 1184167 83
Transports. 137700 10
Frais de loyers, eaux, salubrity, etc 797606 33
Fonds de reserve » »•
Totaux 15617735 6
En 1896, pour 4 420497 journ^es de malades, 11 a ^t^ depens^
15617 731 63 d'ou le prix de journ6e de 3 fr. 533.
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. *!^-
INFORMATIONS. 145
Poor 1898, oa pr^voit 4 584 000 journ^es de malades et uae d^pense
de 15608704 d'ou un prix de journ^e de 3 fr. 405 en diminution de fr.
12803 sor celui de 1896.
Si Ton decompose les prix de journ^es en lears divers ^l^ments, on
obtient le tableau suivant :
Personnel adminlstratif 0,08814
Impressions, frais de bureau 0,00341
Frais de cours et de concours 0,01170
Personnel medical 0,21563
Personnel secondaire 0,36901
BAtiments 0,17823
Pharmacie 0,20920
Boulangerie 0,10824
Boucherie. . . ' 0,45290
Cave 0,19810
Ck>mestibles 0,43862
Combustibles 0,30192
Blanchissage 0,17786
Coucher, linge, habillement, etc 0,30058
Appareils, instruments de chirurgie, etc 0,26788
Transports 0,03115
Frais de loyers, eaux, salubrity, etc 0,18043
Fonds de reserve »
ToTAUX 3,53300
Le Fonctionnement des Bureaux de bienfialsance.
A la suite de rinterpellation au directeur de TAssistance publique
sur les reserves des bureaux de bienfaisance, le Gonseil municipal a
voi^ la proposition suivante, sign^e de MM. Lerolle, Paul Bernard,
Alpy,Gay, Deville :
La 5* Commission est invitee k presenter au Conseil un rapport sur les
questions suivantes :
1<* Comment sont faites les Economies des bureaux de bienfaisance et
dans quelle limite elles peuvent ^tre faites?
2^ Quel usage doit Hre fait des reserves actuelles pour qu'elles soient
utilement distributes aux pauvres?
3^ Quelles r^formes peuvent assurer d'une mani^re plus efficace les
secours en cas d'urgence et Tassistance des infortunes passag^res qui ne
rentrentpas dans la clientele ordinaire des bureaux de bienfaisance?
L'Orphelinat Parent de Rozan.
Un nouvel orphelinat vient de 9'ouvrir dans un immeuble l^gu6 d TAs-
sistance publique de Paris ; des difflcult^s contentieuses, anjourd'hui apla-
nies, avaient retard^ la realisation du legs Parent de Rozan.
REVIB pmLAKTHROnQCV. — U. 10
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U6 REVUE PIIILANTHROPIQUE.
L*orphelJnat Parent de Ro/.an est destin6 k recevoir douze jeunes Giles
pauvres, de Dationalit^ francaise, dont six appartenant aa IX" arrondisse-
ment, et six appartenant au XVI®, et prises de pr^f^rence parmi les orphe-
lines de savants, de litterateurs ou d'artistes.
Les orphelines seront admises dans Torphelinat sur le choix fait dans
les IX* et XVI« arrondissements par leurs municipalit^s respectives, avec le
concours de deux membres du bureau de bienfaisance, nomm^s par le
bureau, et d'un d^l6gu6 cantonal, nomm(^ par la delegation.
Les enfants sont admises dans Torphelinat k partirde Vkge de huit ans,
jusqu'^ Vkge de douze ans.
Elles seront eiev^es simplemeni et babiluees k tous les soins et travaux
(le I'interieur d*un manage.
Elles recevront, conformement aux intentions exprimees par le fonda-
teur, une instruction liberate et profession nelle destinee, autant que le
permettront leurs aptitudes, k les mettre k meme de se diriger vers les
arts industriels ou le professorat.
Celte instraction, donnde k Tinterieur de Tetablissemcnt, pourra etre
compietee dans les ecoles commerciales ou professionnelles de la ville de
Paris, ou m^me par Tapprentissage, au dehors, dune profession.
La duroe du sejour des eieves u Torpheliuat est liroitee k huit annees,
sauf les exceptions admises par le directeur de TAssistance, d'accord avec
les municipalites interessees. En aucun cas une el?»ve ne pourra etre gar-
dee apres sa raajorite.
Les eieves, sortant de Torpheliuat, pourront recevoir un trousseau et
uoe dot dont la valeur, subordonnee aux ressources de la fondation,
pourra atteindre i 500 francs. L'allocation en sera faite par le directeur
de TAssistance publique sur I'avis de la direclrice.
II estbien entenduque la liberalite ci-dessus ne serait pas accordrn* a
lorpheline qui se mettrait dans le cas d*exclusion de Tetablissement par
inconduite, insoumission ou toute autre cause.
Le revenu de Tetablissement est de 23 750 francs par an.
La Fdte de rAgrHcolture au Mus^e social.
Pour faire suite a la belle fete du travail offerte I'an dernier aux ou-
vriers les plus meritants de I'industrie nationale, M. le comte de Cham-
brun a inslitue une fete de t'Agriculture k laquelle etaient convies les
representanls des syudicats ruraux.
Au mois de mars deniier, une conference preparatoire tenue a Nice de-
tei-minait les conditions du concours des s^Tidicats agricoles ; il devait
distinguer par des recompenses les heureuses initiatives prises par ces
laureats en matiere d'organisation de la solidarite reelle entre leurs membres
ou d*institutious presentant uu caractere d amelioration sociale, telles que
renseignemeiil agricole, la cooperation, le credit agricole, les diverses
formes de la prevoyance, Tassistance mutuelle, la conciliation des diffe-
rends, le placement des ouvriers, etc. 1 676 syudicats etaient invites par 14
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INFOKMATIONS. 147
circulaire k faire connaitre les principaux points de Toeuvre accomplie
par eux; sur ce nombre, 153 candidatures ^taieot poshes; diss^min^es
sar toule T^tendue du territoire, elles repr^sentaient environ 127000 agri-
col tears, qui furent jug^s par leurs pairs, les membres du bureau de
rUnion centrale des syndicats agricoles.
Cast la distribution des prix de ce cpncours qui a eu lieu le 31 octobre
aa Mus^e social, sous la prSsidence de M. M^line, president du conseii,
mioistre de rAgriculture, ayant k sa droite le comte de Ghambrun et h ses
cdt^s MM. Jules Siegfried, Tb6ophile Roussel, etc.
M. de Rocquigny a donn^ lecture de son rapport sur les r^sultats du
concours, et M. Emile Duport, de Lyon, president du syodicat class6 le
premier, a expose les origines et le d^veloppement de la cooperation rurale
en France.
On a proc^de ensuite k la distribution des prix, dont le total atteignait
25 000 francs, ainsi d6compos6s : quatre grands prix d'bonneur (2000 et
3000 francs, et m^dailles d'argent), les syndicats de Belleville-sur-Sadne,
de Poligny, du Loiret, d'Allex et Crest (Drdme) ; dix-sept prix de 1 000 francs,
aox syndicats d'Anjou, de Belignieux, de Cadillac, du Calvados, de Castel**
Daudary, du Comtat, de Die, du Doubs, d'lUe-et-Vilaine, de la Manche, de
Remiremont, de Roquevaire, de Saint-Amand-de-Boixe, de Saint-Genis-
Laval, de la Sarthe, de Vaucluse et de Saint-Fiacre (Paris).
Apr^s la proclamation de vingt-trois m^dailles d'argent et de vingt-
einq mentions honorables, M. M^line a pris la parole et, apr^s s^dtre in-
cline devant « Thomme de grand coenr et de baute intelligence qui a si
bien compris les besoins de son temps et qui donne un si noble exemple
de d^sint^ressement et d'amonr de i'humanit^ », a insists sur Tinitiative
du monde agricole qui « le premier a compris et appliqu^ la grande for-
mole de solidarity et de mutuality qui contient la vraie, la seule solution
possible du probl^me social ».
Le pr^ident du conseii a annonc^ qu'ii allait prochainement proposer
an Parlement la creation de banques r^gionales mutuelles destinies k
completer les assurances mutuelles agricoles.
M. le comte de Ghambrun a.remerci^ en quelques paroles 6mues : « On
me remercie, etc'estti moi de remercier. Je ne serais arrive k rien sans le
puissant concours de ceux qui m'^coutent; c*est leur d^vouement qui
m'inspire ; je n'ai pas k leur demander d'avance pardon des nouveaux tra-
Taux que j'aurai k leur imposer, tant je sais qu'ils seront heureux de par-
ticiper au bien-^tre de tous, k Tapaisement social dont a pary M. le ministre.
Notre force vient de ce que Tarticle I" de nos statats nous interdit toutes
discussions politiqnes et religieuses. Aussi nos sections r^unissent-elles des
gens qui, en dehors de leur amour commun pour le bien social, professent
ies opinions les plus diffi§rentes. »
Le soir, M. de Ghambrun a donn6 chez lui un diner de deux cent cin-
quante converts. Des toasts applaudis ont 6te prononc^s par MM. le comte
de Chambrun, Jules Siegfried, Cheysson, Kergall et Duport.
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ECHOS
Le Basar da la Charity. — On annonce que le Bazar de la Charity
chdmera Tan prochain.
M. Garnier, secretaire g^n^ral du Bazar, a d^clar^ & un le r^dacteur du
Figaro que sur les cent soixante oeuvres du Bazar, plus d'une centaine
comptent organiser elles-mdmes Tan prochain des ventes partielles dont
le produit subviendra k leurs besoins pour une ann^e.
II resterait trente k quarante oBUTres, les plus pauvres, qn*il faudrait
aider. Celles-ci ont demand^ k M. Gamier de bien vouloir, avec quelqaes
dames pr^sidentes, s'occuper d'elles d^s le d^but de Tann^e prochaine : on
les r^unirait done au printemps en une installation provisoire oh serait
faite k leur proQt une vente qui durerait quelqaes jours.
Mais le Bazar de la Charity ne rouTrirait ses portes, avec un nouYeau
Comity, qu'en i899, et dans le nouveau local ^lev^ par la iib^ralit^ de
M"^* la comtesse de Castellane.
L^Orphelinat des Arts. — La distribution des prix aux pupilles de
rOrphelinat des Arts a eu lieu le dimanche 24 octobre dans le grand h^mi-
cycle de TEcole des beaux-arts, sous la pr^sidence de M. Barthoo, ministre
de Tint^rieur, assists de !!"• Marie Laorent, pr^sidente de TCEuvre, de
M"* Hirelle, directrice de Torphelinat.
Autour de la pr^sidente, et aux premiers rangs de Th^micyle :
Ifmef Poilpot, vice-pr6sidente, Krauss, Roty, Doche, Marni, Frantz-Jour-
dain, Vrignault, Rachel Boyer, Roger Marx, Francis-Magnard, Alban Chaix,
Bertol-Graivil, Roosevelt, Ulmann, Lenoble, Barbottin, Morin, Laudmann.
11 ressort du rapport de la pr^sidente-fondatrice que, depuis dix-sept
ans, Torphelinat des Arts a recueilii, 61ev^, plac4, et parfois mari^
131 ei^ves.
M"^* Marie Laurent rappelle que M. Duquesne, Tancien Miteur, a fait
don k la soci6t6 d'un chdteau tout meubl^ dans ie Calvados oil les pupilles
de Torphelinat vieonent de passer leurs vacances.
M. Barthou prononce une allocution appiaudie; il remet les palmes aca-
d^miques k M"* Scalini, vice-pr^sidente tr^sori^re, et a M. Sock, profes-
seur de litt^rature k Torphelinat.
2300 francs de livrets de Gaisse d*epargne sont distribu^s : six certifl-
cats (616mentaires et cinq certiQcats d'^tudes sont obtenus.
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£CHOS. 149
Le Prix Osiris. — M. Osiris, r^ajisant d^s maintenant sa promesse,
vient de verser & la Banqne de France une somme de cent mille francs re-
pi^sentant le montant du prix qn'il a mis k la disposition du Syndicat de
la presse parisienne pour r^compenser ToBUvre la plus m^ritoire de I'Expo-
sition de 1900 au point de Tue artistique, industriel ou humanitaire.
L'Orphelinat de la BUouterie. — Le 17 octobre, I'orphelinat de la
bijouterie, joaillerie, horiogene, a proc^d^, k deux heures, dans la salle
des f^tes du Trocad^ro, k la distribution annuelle des recompenses aux
enfants places sous son patronage. La c^r^monie ^tait pr^sid^e par M. Bar-
thou, mioistre de Tint^rieur, aux cdt^s duquel avaient pris place, en
oatre des membres du bureau de la Soci^t^, plusieurs deputes et conseillers
municipaux.
Apr^s un discours de M. Richard, vice-president de Torphelinat,
M . Barthou a prononc^ une courte allocution.
L'orphelinat a ensuite distribu^, k ceux de ses fpupilles qui se sont
signaies dans Tann^e, des recompenses consistant en livrets de caisse
d'6pargae et de retraites, livreset instruments de travail. Les principaux
laur^ats ont ete Ferdinand Goqueret, Rosalie Goqueret, Charles Marais,
Mathiide Manage, Paul Audrianne, Ferdinand Chardon.
Un concert a suivi,auquel avaient prSte leur concours plusieurs ar-
tistes de rOp^ra, de rOpera-Comique, de la Comedie-Francaise, du Vau-
deville et des BoufTcs-Parisiens.
Alcooliques et Abstinents. — M. Forei a communique au recent Con-
gres international centre Tusage des boissons alcooliques, la statistique
snivante, concernant les personnes sorties de Tasile d'Ellikon de 1888 k
1896 (environ 740). Parmi celles-l&, les unes sont restees entierement ab-
stinentes, et les aatres se sont remises k faire usage des boissons alcoo-
liques. La proportion des dec^schez les abslinentes est seulement de 1,7
p. 100, tandis qu'elle est de 22 p. 100 chez les autres. Ges chifTres mon-
trent que Talcool est un aliment dangereux pour les alcooliques et qu*on
peat en sevrer ces demiers pour leur plus grand bien et sans danger.
Une F6te de Charity. — Un grand nombre de membres des comites
d'admission de irExposition de 1900 ont eu la genereuse pensee de preiu-
der a leurs fonctions par une fete de charite; ils ont Tintention d*organiser
an grand bal qui serait donne k TOpera au profit d'ceuvres de bienfai-
sance, sous la presidence d'honneur du ministre du commerce, la presi-
dence du commissaire general et la vice-presidence des directeurs gene-
raux, directeurs et secretaires generaux de I'Exposition.
L'organisation de cette fete serait reservee aux gronpes syndicaux du
commerce et de Tindustrie, aux associations des jurys des Expositions na-
tionales et des expositions frangaises k retranger.
La fete aurait lieu, si aucun retard ne se produit, dans la premiere
quinzaine de decembre.
Une petition. — Les pensionnaires de Thospice d'lvry viennent de
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150 REVUE PHILANTHROPIQUE.
d^poser au Consei) mnnicipal une petition demandant 'qu'^ Tavenir, les
pauvres vienx qui meurent dans I'dtablissement soient en terras gratuite-
ment ou tout au moins au prix de quatorze francs, comme le sont les in-
digents parisiens, au lieu d'etre iivr^s aux amphitheatres de disseclion.
Gette requite touchante trouvera certainement Taccueil le plus favo-
rable au Conseil municipal de Paris.
Le Pavilion Ofiiris k la Salp6tri^re. — M. Osiris a propose k Tad-
ministration de rAssistance publique, qui a accepts cette ofTre avecjrecon-
naissance, de faire constrnire k ses frais, h la Salp6tri^re, un pavilion de
chirurgie destine au service de M. le docteur Segond.
Le Conseil de sunreillance, consults sur cette donation, a ^mis un avis
favorable.
La Fourniture de Lait des h6pitaax. — Le mercredt 17 novembre
1897,i deux heures, il sera proc^d^ publiquement, au chef-lieu de Tadmi-
nistration de TAssistance publique, a Paris, avenue Victoria, 3, k Tadjudi-
■cation, sur soumissions cachet^es et au rabais, de la fourniture de lait n^
cessaire au service des hdpitaux et hospices civils de Paris pendant
I'ann^e 1898.
Ladite fourniture est ^valu^e k 3 009 800 litres et divis^e en 23 lots.
Secours aux Naufrag^s. — La Socidt^ centrale de sauvetage des nau-
frag^s a re^u de la Soci^td imp6riale russe de secours aux naufragds la
.somme de 100 francs pour la famille d'un homme du Surcouf, qui s'est
noy^ dans la N^va, lors de la visite du president de la R6publique.
L'Orphelinat d^Audiffired k Troyes.— 11 y a peu de jours a eu lieu
k Troyes, sous la pr^sidence du prdfet, Tinauguration |de Tasile destine
aux jeunes garcons orphelins. Gent enfants y seront admis. M"*' AudifTred
a donn^ 450000 francs en mdmoire de son mari, pour eriger cet asile. La
Ville a doun6 50000 francs et les hospices 5000 francs. Des discours ont
ei6 prononc^s par MM. Mony, maire; Rostaing, pr^fet, et Lebrun, repr^-
sentant M™« Audiffred. Les travaux ont 614 executes par M. Fontaine, ar-
chitecte a Troyes, d'aprfes le projet de M. Lebrun.
Un Sonrd-Mnet avocat. — Le Journal des Sourds-Muets nous apprend
que la cour supreme de Galifornie vient d'admettre dans son barreau
M. Theodore Grady, sourd-muet.
Lenouveau d^fenseur a pass4 un examen dcrit; il donnera ses consul-
tations par 6crit. 11 est lui-m^me marid k une sourde-muette et a trois
enfants jouissant de toutes leurs facult^s.
Le Denxi^me Dtner des Mutnalistes Aran^als. — Le deuxi^me
diner des Mutualistes francais aura lieu k Paris, le jeudi 25 novembre, sous
la pr^sidence de M. M^line, president du Gonseil des Ministres.
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REVUES ET PUBLICATIONS FRANfAISES
Dans son int^ressant Bulletin de la Revue d'hygi^e (20 oclobre 1897),
M. le D' Vallin expose avec sa clart^ habitaelle les efforts tenths en France
pour la lutte si n^cessaire contre Talcoolisme ; il s'attache surtout k mon-
trer Tefficacit^ dn mouvement anti-alcoolique scolaire dont nous avons
entretenu les lecteurs de la Revue Philanthropique (1).
« Dans cette nouvelle forme de la ligue contre ralcoolisme, 6crit-il, il y
a un effort loaable qu'il faut encourager. Les rdsultats obtenus dans les
autres pays sont d^j^ remarquables. On a pu s'en assurer recemmeht par
les diverses communications qui ont ^t^ faites au Congr^s international
contre Talcoolisme, tenu k Bruxelles au mois de septembre dehiier, et en
particulier par une nouvelle notice de M. Roubinovitch. M. le D' Legrain,
ni^decin en chef de Tasile d'ali^n^s de Ville-Evrard, charg6 d'un rapport
sur les liens k 6tablir entre les soci6t^s de ce genre, a conclu a la creation
d'un OfXice international reliant toutes les unions ou associations de tem-
perance de divers pays, question unpeu ardue, pour laquellela competence
personnelle nous fait d^faut et que nous ne voulons pas aborder icL
« On ne pent nier qu'actuellement en France il y a une recrudescence
immoder^e dans le goM des liqueurs alcooliques. Est-ce affaire de mode
ou de contagion ? La mode a parfois de ces courants qui surprennent ; il
n'est pas douteux que la nouvelle generation a beaucoup moins le goiit du
tabac, sous toutes ses formes, que celles qui Tont precedee. 11 etait de bou
ton de priser au xviii® sifecle et jusqu'au commencement de celui-ci. II y a
vingt ans, cet ignoble go&t de chiquer le tabac en caroltes etait encore
tr^s repandu; on cache aujourdliui cette habitude comme un vice mal-
propre. L'education, le snobisme surtout, ont amene cet beureux resultat;
on n'ose plus gu^e fumer la pipe, si ce n'est k la chasse, a la campagne,
k peine en voyage ; on ne concede que la cigarette ; dans un certain monde
il est plus < distingue » de ne pas fumer du tout. Que n'en est-il ainsi de
hi pemicieuse habitude de Tabsinthe et de tons les aperitifs!
« S'il y a quelque naivete k Tesperer et k se liguer ainsi contre i'alcoo-
lisme, laissons k ces naifs et k ces bonne tes gens Tespoir que leur bonne
(1) Vou-Ien» 1, p. 94 et 95.
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452 REVUE PHILANTHROPIQUE.
intention ne sera pas sans profit coutre 1e fl6au qai menace y^ritablement
Tavenir de notre race. »
M. Andr^ Honnorat, dans le Rappel, s'occnpe des pharmacies ambn-
lantes o'u plutdt de I'organisation des premiers secours dans ies trains de
voyageurs.
« Un de nos lecteurs r^clamait, il y a trois joors, ]a creation de phar-
macies ambulantes k d^poser dans Ies trains.
— Yoil^, nous 6crit un autre de nos Jecteurs, qu'on n'a pas k r^clamer
pour la bonne raison qu'en yertu des ordonnances de 1845 et de 1846 qui
sont applicables aux chemins de fer, chaque ohef de train doit avoir dans
son fourgon une bolte de secours contenant des bandes, de la charpie, et
Ies principaux medicaments dont on pent avoir besoin en cas d'accident.
Mais Yoil^ aussi dont on fait fort bien de s'occuper, car si ces bottes
existent effectivementjamais, au grand jamais, on n'a rid6e de Ies ouvdr
pour s'assurer que ienr contenu est toujours en bon ^tat*
La rectification n'enl^ve done rien k la valeor des observations que nous
avons presentees. Tout au plus peut-on dire qu'elie en modifie leg^rement
Ies termes.
Qu'importe, en effet, qu'on edicte Ies meilleure s mesures si personne
n'en surveiile Tapplication et si, par-dessusle marche, le public ignore Ies
avantages qu'il en pent retirer?
Or, nous ne croyons pas nous tromper en affirmant que parmi Ies mil-
Hers de voyageurs qui circuient chaque jour sur nos voies ferries, il ne
s'en trouve pas deux qui sachent qu'en cas de malaise subit ils peuvent se
procurer immediatement Ies medicaments qui leur sont necessaires .
Nous ne pouvons par consequent que reprendre la proposition de noire
correspondanl pour reclamer :
1^ La verification reguli&re des bottes de secours;
2" L'apposition dans tons Ies compartiments d'un avis faisant connattre
Texistence de ces « bottes de secours » k tous Ies voyageurs;
3<» La creation de dep6ts de brancards et d'appareiis chirurgicaux de
premiere necessite dans chaque station;
4<» L'obligation pour tous Ies medecins attaches aux Gompagnies d'en-
seigner aux chefs de trains Tusage des medicaments mis k leur disposition
et la fa^on d'etablir un pansement sommaire.
A ces conditions, mais k ces conditions seulement, Ies ordonnances de
1845 et de 1846 repondront au butqu'elles se proposent.
M. le D' Gibert (du Havre) expose, dans une lettre au TempSf ses idees
sur le tueur debergers et la responsabilite de la presse; il deveioppe ces
trois propositions:
1<» II y a un grand nombre de criminels des plus dangereux qui sont
laches sur la societe, etqui sont des malades qui devraient eire enfermes ;
2'> Nos moeurs, notre legislation ne nous permettent pas de Ies tenir
enfermes, et il faut une serie de crimes pour qu'on prenne, trop tard, des
mesures coercitives centre eux ;
S"" La presse a contribue pour une large part k ce triste etat de choses.
Pour Ies criminels malades, M. le D' Gibert se ref^re k son etude parue
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REVUES ET PUBLICATIONS FRANgAISES. 153
dans la hevue Philanthropique et il Ini emprunte rindication de quelqaes
types ; il poursuit en ces termes :
<< Ponrquoi de pareils ^tres sont-iis laiss^s en liberty? Pourquoi I'assas-
sioy le monstre Yacher, est-il sorti de Tasile de D61e?
« G'est id, monsieur le directenr, que j'ai besotn de toute votre indul-
gence pour que je puisse faire la part de Tinfluence n^faste de la presse
dans cette ^pineuse question des responsabilit^s sociales.
« G'est d*une fagon terriblement l^g^re que la presse fran^aise accueille
tons les jours (affaire Laporte» affaire Heim) d'odieoses accusations, sans
jamais, ou presque jamais, se donner la peine de les contr61er. Yous rap-
pelez-Tous la campagne men^e il y a quelque vingl ans h propos de I'avo-
cat S...., — qui remplissait I'air et les journauxde ses plaintes au sujet de
sa sequestration soi-disant ill^gale? Quel tapage, grand Dieu! Et puis,
quVtroij trouv6 a Tautopsie ? Des alterations teliement graves de pacby-
ni6ningite que tout a ete subitement 6claire dans la vie de ce malheureux.
Est-ce qa*un seul journal a fait son mea culpa? En aucune facon. Mais
c'est tous les ans que sur un point quelconque du territoire frangais de
cmelles accusations sont prononc^es contre des m^decins qui, c^dant,
dit-on, h des int^r^ts inavouables, font s^questrer des gens admirablement
sains! Yous rappelez-vous les accusations toutes recentes k propos d'un c^-
l^bre commandant?
« Qu'est-il results de cet ensemble de faits?Ceci : c'estque les m^decins
des asilesd'alienes, pour ne pas ^tre accuses, ont pris Thabitude, d^s que
la crise de folie^est pass6e, de rendre le malade ^la famille. Rien que dans
ma clientele, je pourrais cboisir de nombreux exemples oCi cette facon de
faire a €i6 la cause de malhenrs irr^parables. Et c'est toujoura la terreur
de la presse, la terreur du reportage qui est la vraie cause de la conduite
de lagrande majority des m^decins contemporains, et quandleur bonneur
est ainsi en jeu, avonez qu'il fandrait plus que de I'beroisme pour agir
autrement qu'ilsne le font. Remarquez, monsieur le directeur, quejereste
en deck de la v^rite en vous faisant ce r^cit qui vous parattra exag^r^; le
nombre d'alienes qui circulent et s^ment leurs m^faits dans la societe est
beaucoup plus considerable qu'on ne croit, et il a fallu cet exemple hor-
rible du tueur Yacher pour que Topinion publique devoyee commence
pent-etre k voir ce qu'il faut faire pour remedier k ce perilleux etat de
choses. En resume, la iecon qui ressort de ces faits d'assassinats et de viols
nombreux est celle-ci :
« !• Les alienes reconnus tels ne devraient pas etre remisen libertesur
le simple visa du chef de service, llfaudrait, pour la remise en liberty, une
consultation de plusieurs medecins auxquels serait toujours adjoint le me-
decin des families ;
«< 2» La presse frangaise, revenant de ses errements, devrait se parder
de jamais parler de sequestration iliegale avant d'avoir en mains cent
preuves contre une de la verite de cette accusation;
« 3* Des asiles speciaux devraient etre crees ou seraient en.ermes tous
les etres malades depuis leur enfance avec des tares manifestes, ui ne sont
ni des alienes, ni des responsables, mais des Hres anormaux dont il fautse
garer.
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15i HEVUE PHILANTHROPIQUE.
M. Lenoir, premier adjoint au maire de Versailles, a calculi dans le
BuUetin de la SocUU de mendicitS contre les enfanls la d^pense qae n^cesw^
terait Tassistance aux families nombreuses:
« Parian t de ces deux id^es, qu'il fauten moyenne des families de trois
enfauts pour assurer le renouvellement de la population, car on doit tenir
compte des pertes et des non-valeurs, et qu'il serait it la fois juste, poli-
tique et patriotique de venir en aide aux families de plus de trois ent'ants,
j'ai fait, pour la ville de Versailles, le relev6 de toutes les families qui sont
dans ce cas, soit 397 families d'ouvriers. Le nombre total des enfants est 1 931
et le nombre des enfants de moins de treize ans, en plus de Irois enfants,
s'^lfeve a 698.
« 35 families semi-ouvri^res ou d'employes: 168 enfants; 59 en plus de
trois enfants.
u 71 families de commercants avec 342 enfants et 120 en plus de trois
enfants.
« 105 families bourgeoises: 494 enfants; 165 en plus de trois enfants.
« Com me vous le voyez, en additionnanl, nous avons dans notre ville
608 families de plus de trois enfants coroptant ensemble 2.935 enfants,
parmi lesquels il y en a i 042 ^g^s de moins de treize ans au-dessus du
nombre de trois enfauts.
« Accorder & ces families une allocation mensuelle de 10 francs, soit
120 francs par an, pour chacun de leurs enfanls de moins de treize ans en
plus do nombre de trois, serait une aide serieuse, surtout pour les families
ouvri^res, d*employ^s et de petits commercants.
«c 11 en resulterait done ^ Versailles une depense annuellede 120 fr. x
1042 = 125040 fr. Or la population de Versailles est de 43138 habitants,
c*est-ii-dire un neuf centi^me de celle de la France, qui est de 38 a 39 mil-
lions d'habit^nts. On pent admettre que la proportion des families de plus
de trois enfants est k peu pres la m^me partout. On voit done que, pour
venir utilement en aide aux families de plus de trois enfants, k raison d'une
allocation annuelle de 120 francs pour chaque enfant de moins de treize ans
en plus de trois, il sufflrait d'une somme d'environ 125000 x 900 =
112500000 francs. »
M. L^z6, le savant professeur ^ TEcole de Grignon, analyse et appr^oie,
dans le journal la Laiterie, Tceuvre de la grande commission du lait; il est
d'avis qu'il faul en arriver k ne recevoir k Paris que du lait dejii sterilise
et st^rilis6 sur les lieux de production :
« C'est la, dit-il, qu'une nouvelle ^tude devient n^cessaire. Le Gonseil
municipal ne faillirii pas k Tentreprendre. II va ^tre presque indiqu^ de
creer un concoiirs entre les nombreux appareils de sterilisation du com-
merce, un concours s^rieux, de longue haleine, dans lequel les membres
du jury seront des bact6riologistes,et des d6gustateurs. 11 va s'agir d'indi-
queraux laitiers engros les meilleurs appareils de sterilisation et d'etablir
alors, k Paris, non pas Vusine, mais le controlCf et de decider impitoyable-
ment que les laits non sterilises, presentant le goi\t de cuit ou une altera-
tion dans la couleur, puis enflu, con tenant moins de 35 grammes de beurre
par livre, seront condamnes et rejetes comme mauvais.
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REVUES ET PUBLICATIONS FRAXgAISES. 155
« II ne reste plus, alosi que nousvenons dele demontrer, qu'ane petite
rectification k imprimer k la voie dans laquelle on s'est engage. Le vi£u,
I'id^e, toot cela 6tait bon ; la mise en pratique est une affaire de voies et
moyens, on la trouvera, et ce sera un titre de plus k roettre k Tactif du
-Gonseil k la reconnaissance des Parisiens d'avoir r^solu la question de
Tali mentation de lagrande viile en lait pur et sain, d'avoir fait disparailre
la fraude et avec elle les inconv6nients et les dangers qn'elle comportait
pour la 3ant^ publique. »
M. de Pion fait conoaitre, dans la Revue politique et parlementaire {n»40,
10 octobre), les essais d'organisation de commissions cantonales d'assistance
dont M. Alapetite, pr^fet du Pas-de-Calais, a pris rinitialive; il rappelle
les tentatives analogues faites en 1855 et en 1862 dans les departemenls de
la Niftvre et de I'Ome, dans I'Ain et dans TAisne, k une 6poque plus r^-
cente^
D'apr^s Tautenr, les commissions cantonales constitutes dans le Pas*
de-Calais paraissent mieux r^pondre au v(^ritable but k atteindre; elles
offrent le moyeii de former un budget extraordinaire de la charity pour les
eommunes rurales.
Les commissions sont compos^es de la fagon suivante : « Le conseiller
general et le conseiller d'arrondissement, tous les maires, un d^l^gu^ de la
commission administrative du bureau de bienfaisance dans chaque com-
mune comptant plus de 500 habitants (les plus petites communes parais-
sant sufflsamment representees par leur maire), le juge de paix, le cure et
i'instituteur du chef-lieu de canton, tous les percepteurs et trois on quatre
personnes charilables choisies parmi celles qui peuvent apporler k la com-
mission le concours le plus z6U et le plus intelligenL
M La commission eiit son bureau et nomme des delegations ciiargees de
faire des toumees dans le canton, ilafois pour recueillir desfonds et pour
Tisiter les pauvres les plus interessants. u La mission de chaque delegation
one fois terminee, la commission se reunit en seance pJeniere et fait le
coropte des dons recueillis en y ajoutant le montant de la subvention de-
partemenlale. Elle classe ensuite les propositions de secours emanees de
chaque delegation en les limitant aux ressources disponibles et au but
poursuivi. Les fonctionnaires et en particulier les percepteurs qui con-
naissent mieux que personne la situation pecuniaire des habitants de leur
circonscription peuvent rendre les plus grands services dans les commis-
sions en se chargeant de la besogne materielle et en servant de trait d'union
entre les divers elements locaux. »
M. Pion estime que le departement peut donner eu vertu de la loi de
1871 une sanction suffisante aux commissions cantonales d^assistance, dont
il preconise la creation; il est d'avis que Tinstitution doit rester jusqu'i
nouvel ordre essentiellement departementale, malgre son siege localise
dans le canton.
Un nouvel organe vient de paraitre : /7n/?rm/er, journal d'interets cor-
poratifs, organe du groupement du personnel secondaire de I'Assistance
publique de Paris.
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136 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Le premier nura6ro contient des articles de M. Paul Strauss, s^nateur,
et M. Ghauvi^re, ddput^, des lettres de M. Landrin, conseiller municipal et
de M. le D** Ed. Toulouse, m^deciu de Tasile de Villejuif, etc.
Voici le court programme des fondateurs de la revue :
« Le but du journal est de rendre compte des travaux faits et des de-
mandes d'am^lioration soumises k Tadministration, au conseil de surveil-
lance et au Conseil municipal; de publier les comptes rendusde toutes les
reunions et de tous les travaux du groupement.
Nous ins^rerons toutes les communications que radministrationvoudra
bien nous faire telles que : circulaires, nominations, mutations, demandes
de cbangement, etc.
Nous publierons de mdme les vacances d'emplois aux ambulances, aux
^tuves municipales; les demandes des hdpitaux et hospices de province, et
m6me celles des particuliers.
Nous recevrons tous les travaux, toutes les etudes, que Ton voudra
bien nous adresser, k la condition qu'ils s'appliquent k la g§n6ralit^ el
qu'ils soient sign6s. — En attcun cas il ne sera term compte de faU$ personnels
ou (Ticrits anonymes, »
Les num^ros 2, 3 et 4 contiennent des lettres ou articles de MM. Girou
et Ranson, conseillers municipaux, le rapport g^n^ral de la commission
de la tuberculose, Tbistoire de Bic^tre.
Dans le num^ro 4, un des r^dacteurs anonymes donne, en excellents
termes, k ses camarades, le conseil d'agir en vue d'obtenir les ameliora-
tions soumises k Tadministration de i'Assistance publique : « N'oubliez pas,
6crit-il, que rien ne r^ussit sansune volenti ^nergique et sans cette conti-
nuity d'efforts que tout apostolat r^solu et ardent reclame ; ne vous laissez
pas envahir par rindifference et Tapathie, car souvent jles ameliorations
demand^es ne sont consenties par ceux qui les accordent que s*ils y sent
contraints et forces. Occupez vos pensies d des id^es grandee, ginireuses,
donnez un but 6leve d votre vie. Agissez autour de vous. Ne demeurez pas
des 6tres passifs. Allez de Tavant, ayez de Tactivite, ne vous habituez pas
k compter sur Taction des autres pour am^liorer votre situation. // faut
agir comme si tout d^endait de vous* »
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BULLETIN
L* affaire Laporte a profond^ment passionne 1
la neuvi^me Ghambre n'est pas fait poar call
medical. U ne s'agit pas, dansTesp^ce, d'un int^i
la m^decine est plus et mieux qu'un metier, ell
nn service public; rien de ce qui la touche ne
rents.
11 n'y a pas de plus 6crasante responsabiiit
dont la moindre imprudence pent tuer un bom
responsabiiit^? La ma^strature. En vertude qi
ment des juges, Strangers a toute notion de I'ai
discemer les causes d'erreur, a d^couvrir les fai
On Ta dit de tons c6t^s au lendemain de la <
instance du docteur Laporte : que deviendront
le sendee medical des bureaux de bienfaisance,
la chirorgie et des accoucbements, si le bras d
par la crainte d'un 6cbec et de ses coQs^quen<
da d^vouement est tarie cbez les m^decins? Car
la grande majority des m4decins n*ob6it pas exi
tions^goistes; le d^sint^ressement est monnaie
ciens et la modicit^ des honoraires ne compens
perils d'une profession insalubre et dangereuse
Le bon m^decin est un philanthrope pratiqui
savoir, k la facon de Jourdain.
Le m^decin, qui pr^te son concours aux adr
gagne que des Emoluments disproportionn^s ai
Nol n'a plus droit au respect ; nul ne doit St
(Test pourquoi tout ce qui est de nature k re
cale doit 6tre attentivement recherche.
On a d6j& essays de marquer ici m^me, et ti
des circonstances de ralTaire Laporte, les respo
mMecine, dispensatrices des grades et compt«
dipldmes vis-^-vis de r£tat et du public.
Lorsque Tincident Laporte sera d^finitivemi
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158 HEVUE PIIILANTIIROPIQL'E.
T^evenir sur ce grave sujet, notammeat sur reuseignement obst^lrical en
France et sur rinslruction pratique et professionnelle des 6tadiants en
m^decine.
L'administralion de ['Assistance publique de Paris n'est pas en bonne
posture; eile ne m^rite pas assur^meut tons les reproches qn'on lui
adresse, elie n'est pas responsable de tons les abus qu'on iui impute, mais
francbement elle ne fait rien pour faciliter la t^che de ceux qui ia vou-
draient d^fendre contre d'excessives attaques.
Apr^s rincident symptomatique des r^senes des bureaux de bienfai-
sance, la publication du rapport de M. Navarre sur le compte financier n'est
pas faite pour rehausser le prestige d'une administration si fdcheusement
discr^dit^e.
Le rapport aborde les menues constatations qui, rapprochees les unes
des autres, ne font pas une impression brillante. Ainsi, k Bicdtre, les ^tats
d'appointements ne sont pas strictement conformes k Tetat nominatif du
personnel administratif et secondaire.
Les consommations de denrees different d'h6pital a b6pital, m^me pour
une population similaire ou la composition de la population et le regime
alimentaire sont identiques. L'H6tel-Dieu consommait en 1894 par 100 jour-
nees de malades 45 lit.82 de vin, tandis que Lariboisi^re, dans les m^mes
conditions, ne d^passait pas une proportion de 37 lit. 19. M^me en fai-
sant entrer en ligne de compte la consommation du personnel, une marge
de 5 litres subsiste encore entre les deux ^tablissements.
Le lait, comme le vin, prSte aux gaspillages les plus ^hont^s. I'n 6ta:
blissement a d^pens^ 100 litres de lait pour assaisonnement de bceuf & la
mode, 27 litres pour assaisonnement de lapin !
Les foumitures d*objets de pansement sont Ja source d'un coulage scan-
daleux. M. Navarre en cite quelques exemples tout a fait topiques, celui
notamment d'un ^couome qui demandait 120 kilogrammes de coton hydro-
phile et 500 metres de gaze iodoform^e, alors que les magasins en conte-
naient des reserves suffisanles pour assurer le service pendant trois tri-
mestres.
L'insouciance ct Tincurie ^clatent a cbaque pas, et Tadministration cen-
trale se borne k repriraander platoniquement les directeurs et les 6co-
nomes pris en flagrant d61it de d^sordre. M. Navarre propose au Conseil
municipal d'inviter M. le directeur de I'Assistance publique k rendre effec-
tive la responsabilit^ p^cuniaire des directeurs-comptables qui, par lour
negligence ou ledr incurie, compromettent les finances de I'Assistance pu-
blique et les int^r^ts des malbeureux.
Le personnel administratif n*est pas seul coupable, et le service medical
a sa part de responsabilit^. Les cabiers de visite, conQ^s aux externes des
hdpitaux, ne sont pas tenus comme ils devraient r6ti»e,les chefs de service
se desint^ressent trop de la surveillance 6conomique; quelques-uns
poussentm^me le detachement jusqu'^ favoriser le gaspillage; cela s'est
vu, cela se voit encore dans plus d*un hdpital.
II faudra du temps et de T^ncrgie pour mettre fin a ces habitudes d^-
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BULLETIN. 159
plorables; la premiere mesure efflcace serait de rendre responsables le
directeur et les m^decins de chaque hdpiUl du budget de leur ^tablisse-
ment. Le chef de service, si des statistiques comparatives r6v61aient son
insouciance administrative, y regarderait k deux fois avant de tol^rer le
gaspillage auquel it est accoutum^. Les internes et les exlernes des bdpi-
tauxy s'ils J ^taient encourages, si leurs cbefs se donnaient la peine d'y
Teiller, ne tarderaient pas k se d^partir de leur indifference pour le bien
des pauvres.
Le d^vouement est la verlu dominante des m^decins et de leurs
i^leves: il ne serait pas malais^ de leur inculquer avec le sentiment du
devoir administratif des notions d'^conomie et de bon ordre sans lesquelles
les depenses des b6pitaux de Paris continueront de s'accrottre dans des
proportions d^mesur^es et inqui^tantes.
II y faut aussi et par-dessus tout la fermete attentive de Tadministration
centrale, un meilleur recrutement desdirecteurs et des ^conomes d*h6pi-
taux, la decentralisation des enqu^tes en vue d'obtenir le remboursement
des depenses de nombreux malades, relativement ais^s, qui viennent
prendre dans les hdpitaux la place des pauvres et des n^cessiteux ; il y
faut aussi la reforme de la loi de 1819, une reorganisation complete de
FAssistance publique direclement rattachee, ainsi que le redamait na-
gaere un ancien fonctionnaire de ceite administration M. d'Echerac, k
radministralion municipale de Paris.
«
Cette horrible et monstrueuse affaire du tueur de bergers Vacher sou-
leve plus d'uu probleme; elle met en cause plus d*une response bi lite etTon
ne saurait trop Tanalyser en toutes ses causes, en ses divers symptdmes.
Le miserable a ete interne dans un asile d'alienes pour tentative de
meurtre; il a ete reUcbe apres uneannee de sejour. L'opinion, si prompte
a soupconner les medecins alienistes de sequestration iliegale, se retoui ne
cette fois contre eux et leur demande compte d'une remise en liberte qui
a engendre tant de consequences tragiques, de si epouvantables meprises,
des crimes si odienx et si multiplies.
Dans une iettre au Figaro, M. Joseph Reinach, qui a pris une si grande
part ^la reforme en preparation d.e la loi de 1838 sur les alienes, denonce
une fois de plus Tinfirmite de la legislation fraucaise qui ne prevoit pas le
cas des alieoes criminels; il demontre que, s'il avait ete sujet anglais, le
lueur de bergers aurait ete, des sa premiere tentative de meurtre, enferme
a perpituiU dans un asile d'alienes, en vertu de Vact royal du 28 juillet 1800
ainsi con^u : « Lorsqu'une personne, accusee de meurtre ou autre crime,
est acquittee pour cause de folie, la Cour devant laquelle le verdict est
rendu doit ordonner que cette personne soit tenue en stricte garde, jus-
qu'i ce que le bon plaisir de Sa Majeste soitconuu, et qu'il est par conse-
quent du droit de Sa Majeste de donner des ordres pour la garde de cette
personne, tant que dure son bon plaisir, en tel lieu et de telle maniere
qu'il lui parallra convenable. »
Cette disposition prevoyante a trouve place dans le projet de loi vote
par le Senat, par le Conseil superieur de TAssistance publique et sourais
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160 REVUE PHILANTHROPIQUE.
deptusdix am aux deliberations de laChambre; rarticie 38 de la proposi-
tion Joseph Reinacb, conforme au projet senatorial, est ainsi r^dige :
(c Lorsque est demandee la sortie d'un des ali^nes internes en Tertu des
articles 35 et 36 (c'est-^-dire d'un individu qui, poursuivi pour crime, a
ete, en iant qu'atteint d'ali^nation menlate, I'objet d'un Terdict de non-
culpabilite), le medecio traitant doit declarer si Tinteresseest ounon gaeri
et, en cas de guerison, s'il est ou non Ugitimement suspect de rechute. La de-
mande et la declaration motivee sont deferees de droit au Tribunal, qui
statue en chambre du Gonseil. »
On n'en est que plus ^regretter la lenteur desesperante avec laquelle
nos assembiees deiiberantes, tantdt le Senat, tant6t la Chambre, accom-
plissent ToBuvre reformaUice qu'attendent d'elles les philanthropes. Nous
sommes en retard d'un si^cle sur TAngleterre, etM. Joseph Reinach a eu
raison de dire que si Tarticle 38 de la nouvelle loi avait eie vote « Vacher,
apr^s son premier crime, ti'eiii pas trouTe un seul medecin alieniste pour
le declarer non suspect de rechute ; le tueur de bergers n'aurait pas ete
remis en liberie, il n*aurait pas souilie, egorge huit nouvelles victimes,
peut-etre davantage(l) »!
A son tour M. le D' Gibert a fait une large part k Tinflucnce de la
presse daos cette grave affaire. D'apr^s lui,les medecins des asiles d'alienes,
terrorises par le reportage, cedent trop facilement au desir de rendre le
malade k sa famille; il estime queVexeat ne devrait etre prononcequ'apr^s
une consultation de plusieurs medecins, dont le medecin des families.
De soncdie, M. le D** Bourneville a demande k la Gonunission de sur-
veillance des asiles de la Seine d'emettre levceu que les renseignements de
police etde justice concernant les atienes deiinquants soient communiques
aux medecins des asiles appeies k donner leuravis sur la sortie de ces ma-
lades. Gette motion est des plus judicieuses; il est indispensable que le
medecin d'asile ait sous les yeux toutes les pieces du dossier, qu'il soit
compietement informesur les antecedents d'un interne; la communication
d'un dossier administratif et judiciaire lui sera d'un precieux secours pour
apprecier ropporluniie, la legitimite d'une demande de sortie.
M. le D' Toulouse est meme d'avis d'etendre le benefice de cette mesure
^tous les alienes, pour permetlre aux medecins de connaltre les condi-
tions de milieu de ces convalescents qu'il serai t sou verainement imprudent
de rejeterau dehors seuls et sans ressources, sans appui materiel ou moral.
II va de soi que Tinternement dans an asile d'alienes doif etre entoure
du maximum de garanties ; mais, d^s qu'un aliene a passe le seuil d'un
asile, la responsabilite du medecin est d'autant plus redoutable que la
societe lui accorde un plus large credit; c'est bien le moins qu'on lui
donne tous les elements d'information pour le mettre le plus possible &
I'abri des chances d'erreur et poor renforcer sa vigilance prevoyante et
pr^veniive.
Paul Strauss.
(1) Lettre au Figaro^ n» du 14 octobre 1897.
Le Dh-ecteui'-g^rant : PAUL STRAUSS.
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162 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Ministre de rint6rieur, sur Tavis du Conseil de surveillance et
sur la proposition du pr^fet de la Seine. En fait, tant qu'ils ne
sont pas atteints par la limite d'A^e, ils sont k proprement
parler inamovibles, prot^g6s par la quasi-gratuit6 de leurs ser-
vices, par Tesprit de corps, par tout un rempart d'influences et
de camaraderie.
Les bureaux de bienfaisance, charges de la distribution des
secours k domicile, sont k la fois dependants et autonomes,
places dans u ne situation bizarre et mal d^finie ; ils fonctionnent
sous la surveillance du maire d'arrondissement, qui relfeve
exclusive ment du pr^fet de la Seine.
II y a pen de jours, dans un rapport remarqu^ au Conseil
municipal, un des plus nouveaux membres de cette assemblde,
M. Leopold Achille, relevait avec son experience d'ancien adjoint
au maire les anomalies d'un dualisme sur lequel M. Ars&ne
Lopin avait appele Tattention de ses collogues.
Le maire cumule deux fonctions : il est tout ensemble re-
pr^sentant de la municipality et du directeur de TAssistance
publique.
Au nom du pr^fet ou du Conseil municipal, il est chargdde
distribuer les secours de loyer, de chOmage, les bons de loge-
ment, de soupe, les secours de grfeve, d'incendie, et en general
tons les secours extraordinaires accordds k Toccasion des fttes
publiques, des rdjouissances nationales, etc.
En sa quality de reprdsentant du directeur de TAssistance
publique et de president du bureau de bienfaisance, il r^partit
entro les indigents et les n^cessiteux les secours mensuels du
bureau, les secours aux n^cessiteux, les secours de maladie,
de grossesse, d'allaitement, les secours aux filles-m^res et aux
mferes nourrices, les secours Montyon aux convalescents d'h6-
pitaux, les dons particuliers (Rothschild et autres).
Ces deux categories de secours, au lieu d'etre distribuees
par un seul et meme service, comportent un double service
d'enqufetcs, un double jeu de fiches, une double caisse, un pet^
sonnel double. Les uns sont distribues et payes par les bureaux
de la mairie, les autres par le bureau de bienfaisance, — dans
le premier cas, sous la direction du secretaire chef des bureaux
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L'ASSISTANCE PUBLIQUE DE PARIS.
de la mairie, dans le second par les soins du sec
rier. Le premier de ces fonctionnaires est un agei
feclnre de la Seine, le second un employd de VA
blique.
M. L. Achille a mis en lumi^re les cons^quen
de ce dualisme regrettable :
« II se produit une chose simple, inevitable :
vices etant strangers Tun h Tautre et fonctionnani
du r^glement, isol^ment, sous deux autorit^s dist
fois jalouses de leurs attributions respectives, les <
font, chacun de leur c6l6, les enqu^tes qui leur i
distribuent selon leur appreciation particuli^re,
tant les dossiers dont ils disposent, les repartitions
charges.
Les deux caisses — caisse de la Mairie et caisi
de bienfaisance — paient s6parement ces deux sorl
accordes separement et il se produit alors freq
anomalies suivantes :
Un malheureux bien noti au Bureau de bien
suite de renseignements errones ou anciens, touch
alors que ce mfime secours eflt dfl lui etre refus
connu au Bureau de bienfaisance le renseignem^
resultat d'une enqu^te nouvelle, possede par le
Mairie.
Et vice versa.
En d'autres cas, ce m6me malheureux pent tou
jour un secours au Bureau de bienfaisance et un
caisse de la Mairie.
L'evenement n'a rien de surprenant, puisque k
distinctes, puisque le personnel d'un service ignoi
Fautre, puisque les resultats des enquetes instn
categorie d'employes ne sont pas communiques a
de Tautre service.
Les professionnels qui ne se contentent pas d'a
derde bureau en bureau, mais qui vont de mairi
connaissent admirablement ce double rouage el
qu'il rend possible Texploitation la plus ehontee.
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164 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Cette superposition de rouages identiques n'a malheureuse-
ment rien d'exceptionnel ; elle est comme la r^gle d'administra-
tions enchev^trdes les unes dans les autres et pourtant distinctes
ou ri vales.
Si Ton envisageait tons les services de la Yille de Paris et
du d^partement de la Seine, on y verrait que, pour des attri-
butions similaires, rien que sur le domaine de la bienfaisance
publique, des doubles et triples emplois existent. Ainsi, la
prefecture de police et la prefecture de la Seine ont, en dehors
de TAssistance publique de Paris, des attributions d'assistance :
la prefecture de police accorde des secours d'urgence, hospita-
lise des malheureux k Nanterre; la prefecture de la Seine a
deux directions, celle des Affaires municipales et celle des
Affaires d6partemen tales, qui ont la premiere de nombreux
etablissements d*hospitalite, d'assistance par le travail, la seconde
tout le service des alienes sous leur autorite.
L'administration de TAssistance publique elle-meme, sur
son propre territoire, n'echappe point k cette surabondance
contradictoire d'emplois et de fonctions. Le bureau de bienfai-
sance a ses visiteurs qui vont k domicile pour s'informer de la
legitimite d'une demande de secours ; Tadministration centrale
a d autres visiteurs pour s'enquerir dela solvabilite des malades
d'h6pitaux en etat de rembourser le montant de leurs frais de
sejour ou pour instruire unc demande de placement dans un
hospice ;• la division des Enfants-Assistes est pourvue d'enque-
teurs speciaux pour les secours d'allaitcment, Tadmission dans
le service des enfants moralcment abandonnes.
Le meme jour, k la meme heure, — et cette observation to-
pique a ete faite par un des plus distingues fonctionnaires de
TAssistance publique, M. Gory, dans son memoire prime au
concours de la ville de Paris sur la reorganisation des secours
k domicile, — ces trois visiteurs ou enquftteurs appartenant k
la meme administration peuvent se rencontrer dans la meme
maison, sous Toeil narquois d'un concierge.
Byzance n'est plus sur les bords du Bosphore, mais k Paris,
dans cette ville de clarte et de bon sens malicieux.
Les secours d'allaitement, accordes aux m^res pauvres, sont
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166 REVUE PHILANTHROPIQUE.
L'Asile de convalescence des mferes, — qu'il appartienne,
comme r^iablissement du V^sinet, au Ministfere de rint^rieur
ou, comme TAsile Ledru-RoUin, k la Ville de Paris, — n'est
pas moins distinct de Thdpital que le vestibule des maternit^s.
Ainsi, pour Paris seulement, les organes de bienfaisance
ofiicielle sonl dparpill^s entre plusieurs administrations : Assis-
tance publique, Service des Enfants assist6s, Direction des
Affaires ddpartementales, Prefecture de police, Direction des
Affaires municipales, Minist^re de Tint^rieur.
II est k peine besoin de montrer la complexity inutile d'em-
plois, le luxe extravagant de paperasserie, le gaspillage d'ar-
gent qui en r^sulte ; tout cela tombe sous le sens, delate aux
yeux. L'unite d'administration n'aurait pas seulement pour effet
de r^duire notablement les fpais g^n^raux, d'abaisser les d6-
penses, — et ce premier rSsultat aurait h lui seul un int^r^t de
premier ordre, — mais encore de simplifier les formalit^s,
d'am^liorer les m^thodes, dc faire produire h. la bienfaisance
publique son maximum de rendement avec un minimum de
*
» ♦
La loi de 1849, qui a determine Torganisation actuelle de
Tassistance parisienne, a sa large part de responsabilit6 dans
cet 6parpillement et ce d^faut d'harmonie ; elle n'a pas fait sa
place au Conseil municipal.
Le projet de la Commission (comity de rint6rieur), d^fendu
par M. Frichon, proclamait hautement le contr61e des repr^sen-
tants de la Cite. « Tout ce qui touche aux ^tablissements hospi-
taliers et aux secours h domicile int^ressant essentiellement la
commune, dcrivait le rapporteur, le droit de contrdle des con-
seillers de la commune nous a paru n^cessaire et m6me indis-
pensable. »
Le gouvemement s'en rdf^rait purement et simplement aux
dispositions de la loi du 18 juillet 1837 sur les attributions
municipales; il n*accordait qu'un droit d'avis au Conseil de
surveillance comme au Conseil municipal lui-m6me. c< Le droit
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L'ASSISTANGE PUBLIQUE DE PARIS. 16T
de simple surveillance, objectait avec force un reprfeentant du
peuple, M. Repellin, ne garantit rien ; ilfaut, au contraire, avoir
un conseil qui d6lib^re, qui rdgle le budget, arrfite les d6penses
et un agent qui soit charge de Tex^cution; alors vous 6tes dans
les conditions normales de gouvernement et d'administration ;
vous avez une responsabilit^ el un contrdle sdrieux ; voili pour-
quoi je m'associe h la pensde du projet de la Commission, ce
projet ^tablit les rfegles v6ritables d'une bonne administration
et un contr6le s^rieux, tandis que le projet du gouvernement
cr^e un administrateur disposant d'un 6norme budget, selon sa
volenti, et soumis k une surveillance riellementillusoire. »
Le projet gouvememental Temporta devant TAssemblde.
Le Conseil A' administration projet^ fut ramen6 au r6le de Com-
mission de surveillance et Tintervention du Conseil municipal
riduite h un simple droit d'avis.
Le Conseil municipal, dont les subventions entrent pour
plus de moitii dans le budget de T Assistance publique, est con-
sults sans que TautoritS supdrieure soit li6e par ses votes, sauf
en ce qui conceme les marches de fourniture des aliments et
des objets de consommation nScessairesauxStablissements hos-
pitallers et Talidnation des biens immeubles (art. 10 et 16 de la
loidu 7aoM1851).
En dehors de ces deux espfeces, le gouvernement a la haute
main, il prononce le dernier mot sur Tadministration gSnSrale
de TAssistance publique de Paris, sur les budgets, comptes,
et en gdniral toutes les recettes et dipenses des Stablissements
hospitallers et de secours h, domicile.
Ce regime Idgal n'a pu nianmoins fonctionner dans sa rSa-
litS originelle.
Pen i pen, par la force des choses, par Faccroissement des
subventions de la Ville, par Tinitiative et la vigilance de ses
membres, par la continuity de ses vues et sa mithode de travail,
par la publicity et le retentissement de ses dibats, le Conseil
municipal a fini par exercer une action trfes forte sur le gouver-
nement de TAssistance. L' augmentation ricente du nombre des
reprdsentants de THdtel de Ville au Conseil de surveillance est
encore venue renforcer une influence sans cesse grandissante.
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168 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Mais le disaccord n'en subsiste pas moins entre la loi et le
fait; cette discordance n'est pas faite pour r^soudre Ja crise de
VAssistance publique de Paris.
La multiplicity contradictoire des influences directrices aug-
mente Vincertitude, amoindrit les responsabilit^s.
S'agit-il de la distribution des secours k domicile ?Le d^cret
de 1898 n'a pas rem6did aux imperfections des rfeglements et
ddcrets ant^rieurs; le rattachement complet des bureaux de
bienfaisance ft TAdministration centrale n'a pas 6t& op^r6, la
curatelle des pauvres, inspirde du systfeme d'Elberfeld, n'a pas
6t6 institute. Un regime b&tard, qui ne satisfait pas plus les
centralistes que les d^centralisateurs, met les bureaux locaux
d'assistance dans un ^tat manifeste dlnfdriorit^, sinon d'im-
puissance.
L' Administration des h6pitaux est aussi lente et aussi rou-
tini^re, molle et inddcise, n'osant pas rdprimer les abus,
enrayer le gaspillage, imposer le respect du rfeglement. Les
directeurs et ^conomes n*ont d'autre preoccupation que celle
d'dviter les affaires et de tourner les difficult^s et TAdministra-
tion de Tavenue Victoria les encourage dans cette attitude pas-
sive et r^sign^e.
LeConseilde surveillance, malgr^ la competence et la bonne
volonte de ses membres, Tinfatigable d^vouement de son pre-
sident, n'a pas charge d'administration, il est destitue de toute
initiative; il est k chaque pas ddcourage devant tant d'inertie
et de laisser aller.
Le Conseil municipal ne pent intervenir que par boutades
et de haut et ses moyens d'action sont d'ailleurs limitds et
mediocres ; il n'a pour faire entendre sa voix que le vote des
subventions ordinaires, extraordinaires etsp^ciales, et Tautorite
superieure lui denie toute quality pour mettre des conditions h
Foctroi des subsides de la Ville. Deux decrets prdsidentiels du
14 Janvier 1884 et du 21 Janvier 188S ont annule les delibera-
tions de cette assembiee en tant qu'elles subordonnaient Tem-
ploi des credits inscrits au budget de la Ville de Paris k titre
de subventions arAssistance publique, k Texecution de mesures
que le Conseil etait incompetent pour prescrire et que la loi
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k^
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110 ilEVUE PHILANTHROPIQUE.
En lui confiant la direction des bureaux de bienfai^ance, des
hftpitaux et hospices, les pouvoirs publics lui imposeront un
surcroit de vigilance et de responsabilit^ ; ils ne feront pas vaine-
ment appel ft son d^vouement et ils mettront ainsi le droit et le
fait en harmonic, en indme temps qu'ils pr^pareront le rappro-
chement et la fusion des services rivaux et distincts qu'il est
indispensable d'unifier pour rendre Tassistance sous toutes ses
formes plus rapide, moins coftteuse et plus efficace.
PAUL STRAUSS.
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CRUELLES ENIGMES
L'autre semaine, la Ghambre criminelle de la Cour de cassa-
tion s'est dii r^unir, pour examiner la demande en revision
d'un proems fameuxqui, en son temps, bouleversa les consciences
et d^partagea les avis. Deux hommes furent arr^t^s, condamn^s,
envoy^sau bagne, sous Tinculpation d'avoir, ^maintes reprises,
attent^ k la sAretd de leurs concitoyens, ddchain^, sur la region,
le fl6au de Tincendie.
Ni Tuu, ni l'autre n'avoua. II y eut seulement d^s pftleurs,
des larmes, des protestations. On les exp^dia h la Guyane, oix
tous deux moururent apr^s vingt ans de honte et de supplice,
vingt ann^es de bonnet vert, de chaine au pied, de labeurs
effroyables, sous la trique de Damocles!
lis se nommaient Pierre Vaux, Tinstituteur, et Jean Petit,
comme lui habitant de Longepierre. lis ^taient innocents.
Aprfes leur d^c^s, la preuve en fut acquise, mat^rielle, irre-
futable, par documents authentiques. La loi de 1895 va per-
mettre, aprfes quarante-cinq ans, de rdhabiliter leur m^moire.
C'est toujours Qa!
En m^me temps, le Ripublicain de VEst, par la vaillante
pl^me de M. Ariste Dody, se remet en campagne pour Redon,
ce gar^on accusd jadis d'avoir tu6 un rentier de Moulins,
M. Talabard.
Tout meurtre implique un meurtrier: & la loi il faut un
coupable... Par quelque point circonstanciel de temps, de lieu,
quelque coincidence d'heure ou de voisinage, Redon parut suf-
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172 REVUE PHILANTHROPIQUE.
fire k exercer la vindicte legale et la formality d'un procfes. Les
arguments probants firent faute, mais le r^quisitoire du procu-
reur Sevaux n'en fut que plus foudroyant — rien ne sachant
6tre dangereux et pervers davantage que ces culpabilitds qui
s'appliquent k conserver le dehors de Tiiinocence.
Redon, en effet, s'obstinait, disant:
— Je jure que je ne suis pas coupable.
11 fut d^p^chd au bagne, lui aussi! Heureusement, il avait
un pfere, h^roique vieillard, qui le suivit, Taida k s*6vader. On
dtait d^shonor6, soil; mais V « enfant », du moins, ^chappait k
la chiourme, aux coups, k Timpuissance de se d6fendrey de
mener k bien Toeuvre de revanche !
Tons deux s'y attel^rent, le jeune et le vieil homme. En
Espagne, ils furent d^nonc^s (cas d'extradition) par le miserable
avocat qu'ils 6taient all^s consulter. Mais la population, outr^e
de pareille forfaiture, prit une telle attitude, que le gouveme-
ment, c^dant au sentiment national, omitde livrer les r^fugi^s.
J'ai cont6 cela, jadis, plus en detail, voici longtemps; j'y
suis revenue encore, lorsque, le pfere ayant tr^pass^, le fils ne
put venir escorter la d^pouille de celui qui, Tayant tant aimd,
Tavait si bien servi, et jusqu'^Theure dernifere, souffrant ^ son
sujet, n'avait jamais doutd de lui.
Aujourd'hui, la m^re, la veuve, Tisolde, alors que les pr(5-
somptions s'accumulent en faveur de Texil^, attend, espfere,
vieil lit...
» •
D'autre part, c'est Cyvoct, condamn^ pour des Merits, rien
que pour des Merits, lors de Texplosion de TAssommoir, k Lyon,
dont M. Ranc et beaucoup d'autres prennent la cause en main.
L'alibi fut 6tabli, inddniablement. Le dialogue entre. les textes
et le jury fut ainsi couqu :
— Cyvoct est-il coupable d'avoir pos^ la bombe ?
— Non.
— Cyvoct est-il coupable d'avoir foumi les engins?
— Non.
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\U REVUE PHILANTHROPIOCIL
neuse >> apr^s des ann^es aussi de maison c^ntrale reconnue
non coupable, le four k chaux voisin ayant continue ses for-
faits ; et c'est Jamet, L^ger, la femme Vernet, celle-ci h Cler-
mont, ceux-lJi k la Nouvelle-Cal^donie, condamn^s comme
auteurs ou aides d'un viol que la pr^tendue victime, la d6non-
ciatrice, apr^s des ann^es encore, proclame indeomes, attesle
innocents I
Et, derri^re ceux-lii, c'est la malheureuse, Tinterminable
thdorie de ceux qui attendent leur tour, des moins favoris^s
pour qui le jour n'est pas venu, mais dont le jour est proche :
les Rorique-de Grave, dont le cadet, ainsi que je I'ai cont6
ici, vient encore de sauver un homme au p6ril de sa vie ; Ben-
jamin Reynier, Rambert, la petite Droulin, — et tant, et tant,
et tant, que les fantdmes assaillant la barque de Virgile ou la
barque de don Juan sont mis^re, en regard des spectres innom-
brables se ruant aux rostres du Forum, pour r^clamer justice
contre la justice.
Et les arrestations, les detentions arbitraires : M. Delmas, le
docteur R^mond, k'ne parler que des plus r6cents!
Et le martyrologe des suspects, en Taflfaire Vacher? Ce sont
les trois pauvres diables de Beaurepaire, appr^hend^s pour
Tassassinat d'Eugdnie Belhomme (le neuvifeme meurtre du fou)
et detenus quatre mois: quatre mois livr^s, sans nul recours, k
ce tourmenteur qui s'appelle le juge d'instruction. C'est Tinfor-
tun6 Grenier, au Bois-du-Ch6ne, aprds TiJgorgement d'Augus-
tine Mortureux, arrfet^ ; renvoyS de prison sur un non-lieu,
aprfes six semaines de detention ; en proie k la calomnie depuis
le 12 mai 1895 jusqu'en octobre dernier; forc6 de quitter le
pays. C'est Bannier, un misdreux, un journalier,&Saint-Etienne,
de-Boulogne, aprfes I'^ventrement du petit Massot, empoign6,
maintenu vingt-six jours en cellule, relach^ devant T^vidence,
et supplicie par la l&chet^ de ses concitoyensi
Oh! la navrante Enumeration! Quelle legon de prudence,
quel enseignement de sagesse d^gagent ces faits ! Comme il faut
prendre garde, avant de se prononcer !
Pierre Vaux, Jean Petit, Kirail (que j'oubliais), Cauvin, la
femme Doineau avaient 6i^ condamnEs. Mais les poids etaient
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CRUELLES feNIGMES.
faux qm avaient d^tennin^ le jeu de la balance —
jug6e » a dix 6tre d^jug^e. II va en Mre de m^me
L4ger, la femme Vernet. Pour Cyvoct (il ne saurai
avoir d'6quit6 en politique) la grftce, r(^paratrice,
Et apr^s, peu h peu, ce sera le tour des autres,
aura laiss^ aux passions locales le temps de se caln
de gens engages dans Terreur n'auront pas int^rfr
soit maintenue... ce qui est le secret de bien des
sera celui-ci, ce sera celui-lJi, dont les chaines to
leur rendra la liberty ; on leur rendra Thonneur.
Mais qui leur compensera les ann^es g^chdes,
subies, les hontes affront^es, les deuils survenus
abrdge Texistence, tout ce qui, prdcocement, fait
cheveux, tout ce qui fane la pens6e et ride le coeui
ccBur de la post^ritd de Galas, de la lign6e de Lesi
bl^e sous la fatality ?
justice des hommes, faillible justice!...
stvi
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LES CRiCHES
En 1801, une femme de bien, M"* de Pastoret, avait rSuni,
rue de Miromesnil, douze enfants k la mamelle que les m^res
veoaient allaiter pendant les intervalles de leur travail elrepre-
naient le soir. C'^tait Ik une Crfeche et peut-6tre serait-elle
devenue le point de depart dela creation de ces ^tablissements
si, ses 61feves 6tantgrandis, M"* de Pastoret les avait remplac6s.
Mais elle ne put les renvoyer, dans la crainte de les laisser sans
abri; Toeuvre devint une salle d'asile, la premiere qui ait
exists k Paris (1), et ne laissa pas d'autre souvenir; elle fut
ferm6e apr^s quelques ann^es. Plus tard M"* de Pastoret aida
aetivement M. Denys Cochin k crder des salles d'asile qui ne
furent constitutes en service public qu'Ji partir de Tannic 1837.
La premiere Crfeche fut, en r6alit6, fondle k Chaillot, rue
des Jardins, le 14 novembre 1844, par M. Jean-Baptiste-Firmin
Marbeau, maire de Fancien premier arrondissement de
Paris (2).
M. Marbeau, qui naquit JtBrive, dans la Corrfeze, le 18 mai
1798, appartenait k une famille nombreuse : ses parents
(1) Trente ans auparavant, Oberlin et Louise Schoeffer avaient cr66 dans les
Vosges de petits 6tablissements qui ^taient des salles d'asile.
(2) Dans son cinquantidme rapport annuel, public en 1879, la Soci6t6 royale
de Philanthropie de Bnixelles dit qu'en 1826 un instituteur franQais, du nom de
Duflot, ^tablit k Li^ge, ou il ^tait venu se fixer, le premier asile de I'enfance, connu
sous le nom de Creche. 11 aurait €i€ aid6 dans sa mission philanthropique par
M. Coquilhat, p6re du g^n^ral de ce nom. Cette Creche aurait 6t6 install^e dans
xm ancien convent devenu propri6t6 communale et ayant servi, en 1815, aux
bless6s de la bataille de Waterloo. L'institution aurait v6cu deux ou trois ans,
puis roouvre aurait disparu.
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LES CRfiCHES. m
avaient dix enfants. II fit ses etudes au college de sa ville na-
tale ; 11 Ics termina h Tftge de dix-sept ans et travailla chez un
avou6 et un avocat de Brive. En octobre 1816, il fut d6cid^
qu'il irait faire son droit k Paris; son p^re et quelques amis d6-
vou6s Tadress^rent k un avou6 chez lequel il continua iiapprendre
la procedure. En 1819 il passait sa thfese de licence et commen-
^ait k 6crire son Traili des Transactions qui parut quelques
ann^es plus tard. Ce livre attira sur son auteur Tattention de la
Chambre des avou^s qui le d^signa pour succ^der k Tun des
avou^s les plus forts et les plus occup^s de Paris. En 1830 son
^tude prosp^raitlorsque ^clata la Revolution de Juillet. II publia
alors une brochure intitul^e : Reflexions (Tun decteur sur la Revo-
lution de 1830.
L'exc^s de travail altera sa santd et le contraignit, sur Tavis
des m6decins, k un repos absolu. II vendit sa charge et s'abstint
momentan^ment de travaux intellectuels. Au bout de quelques
mois, se sentant r^tabli, il 6crivit, en patois corr6zien, les
scenes les plus agr^ables de sa jeunesse. II suivit en m^me
temps les cours du CoUfege de France et devint un auditeur
assidu de Rossi^ de Cuvier, de Lherminier, d'Eliede Beaumont,
de Cousin, de Guizot. En 1834, ^tantmembre du Comity d'in-
struction primaire du premier arrondissement, il fitparaitre La
Politique des Int^rSts, ou Essai sur les moyens dameiiorer le
sort des travailleurs sans nuire dux propri^taires. Get ouvrage
ftait sign6 : Parun Travailleur devenu propria taire.
Quelque temps aprfes cette publication, il fut nomm^ adjoint
au maire du premier arrondissement.
II remplissait encore cette fonction lorsque, en 1844, il fut
charge, par le comity local d'instruction primaire, d'un rapport
general sur les asiles de Tarrondissement (1). Une lacune
le frappa : Tenfant, qui etait regu k la salle d'asile k V&ge de
deux ans, manquait d'une institution sociale quipAt le soutenir
depuis sa naissance. Les m^res de famille pauvres, obligees de
travailler pour vivre, [qui ne voulaient pas se s^parer de leur
enfant pour Tenvoyer en nourrice, et qui ne pouvaient
<1) Ce fut aussi en 1844 que Firmin Marbeau publia ses Etudes sur V^conomie
sociale.
MYUB PBILAirrBROnQUE. — II. 12
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nS REVUE PHILANTHROPIQUE.
Temmener avec elles chez leurs patrons^ le confiaient pendant
la journ^e h une gardeuse. Celle-ci 6tait gdn^ralement une voi-
sine, vieille femme k qui Ton supposait beaucoup d'exp^rience
dans Fart d'6lever les enfants parce qu'elle 6tait 4g6e, et qui
exer^ait cette profession parce qu'elle n'en pouvait faire d'autre.
La m^re venait, quand elle pouvait, allaiter son enfant, ou
la gardeuse se chargeait de donner le biberon au nourrisson
qui poussait comme il pouvait. Quand il n'y avait plus de lait
dans la bouteille apport^e par la m^re et que le poupon criait
trop fort famine, la gardeuse avait un moyen de Tapaiser : elle
lui mettait dans la bouche un morceau de sucre nou6 dans un
linge qui prenait la forme d'une esp^ce de t^tine. Ce su^on
donnait de la tranquillity k la gardeuse, au detriment de Testo-
mac et de la sant6 du nourrisson.
Si Tenfant 6tait sevr^, la m^re apportait des aliments k la
gardeuse, dans un petit panier; elle foumissait aussi les v^te-
ments et le linge. Gomme rien ne disparatt jamais tout k fait
dans les grandes villes, il y a encore des gardeuses k Paris qui
sont soumises aux inspections devenues plus fr6quentes et
plus rigoureuses des m^decins de la protection des enfants du
premier Age.
L'id^e vint k M. Marbeau de cr^er des asiles du premier
&ge oti les enfants recevraient des soins plus surveill^s, plus
intelligents que chez les gardeuses. Trfes chr6tien, s'inspirant,
dans sa philanthropie, de ses id^es religieuses, en souvenir de
la croyance qui affirme que J^sus est venu au monde dans une
stable de Bethl^em et qu'il eut pour premier berceau une crfeche,
il d^cida, avec les personnes qu'il associa k son ceuvre, que le
nom de Creches serait donn^ k ces asiles nouveaux (1). Ses
premiers collaborateurs furent les membres de la municipality
et du bureau de bienfaisance du premier arrondissement qui,
agissant comme personnes privies, versferent ou recueillirent
des souscriptions et des dons en vue de la fondation nouvelle (2).
(1) Ce nom 6tait adopts depuis longtemps dans les h6pitaux pour designer
les salles destinies aux enfants du premier hge.
(2) Extrait du rapport pr6sent6 par M. Eugene Marbeau, president de la So-
ci4ti des Creches, au Conseil sup^rieur de TAssistance publique (10 et il mars
1897).
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LES CRfeCHES. 179
« Les debuts de Tceuvre, dit M. Eugene Marbeau, fils du
fondateur des Creches (1), furent tr^s humbles; douze berceaux
d'osier furent install^s dans une petite boutique d*une rue trfes
pauvre; le loyer 6tait de 300 francs; la d^pense d' installation
et d'ameublement s'^leva h, 229 francs. »
Comme le but des fondateurs 6tait de substituer progressi-
yement la Creche aux garderies en usage, ils s*attachferent k se
rapprocher autant que possible des habitudes stabiles par la
force des choses. La Creche de Ghaillot ne fut qu'une garderie
perfectionn^e (2). Seulement on fit payer moins cher que dans
les garderies. On adopta le chiffre de 20 centimes qui repr^-
sentait alors k pen pr5s le cinqui^me ou le sixi^me du salaire
d6 la mfere. Celle-ci devait aussi fournir la nourriture. La
Crfeche ne se chargeait de Tenfant que pendant les heures de
travail de la mhre : celle-ci apporlait son baby le matin^ le re-
prenait le soir et le gardait chez elle la nuit, les dimanches et
les jours f^ri^s.
La direction de la Grfeche fut confine k une religieuse k
laquelle on adjoignit pour berceuses deux vieilles gardens es.Un
m^ecin venait, par d^vouement, visiter la Creche chaque jour;
des dames patronnesses Tinspectaient le plus souvent possible,
apportant des conseils et des secours.
Tel fut le d^but des Crfeches.
« Dans les deux ann^es qui suivirent la fondation de la Creche
de Ghaillot, dit M. Eugene Marbeau, les bureaux de bienfai-
sance de Paris, le Gonseil g6n6ral des hospices, le Gonseil gd-
n^ral du d^partement de la Seine, se prononcferent pour
FoBuvre nouvelle, d'accord avec le sentiment public, avec les
plus hautes persounalit^s du pays, avec TAcad^mie frangaise,
Je clei^6, le Saint-Si^ge (3). »
L'impulsion ^tait donn^e : Tannic suivante naquirent les
(1) Extrait du rapport de M. Eugene Marbeau, au Gonseil sup6rieur de T Assis-
tance publique.
(2) Parmi les fondateurs de la Crtche de Ghaillot, il faut citer : M«« Gurmer,
qui accepta les fonctions de directrice-tr6sori6re et souscrivit la premiere. M. Fram-
boisier, alors directeur de Sainte-P^rine et administrateur du Bureau de bienfai-
sance du !•' arrondissement ; M. le D' Canuet.
(3) Extrait du rapport de M. Eugene Marbeau, au Gonseil sup^rieur dc I'AssiS'
tance publique.
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180 REVUE PHILANTHROPIQLE.
Creches de Saint-Louis d'Antin et de Saint-Philippe-du-Roule,
de Belleville, de Saiat-Pierre du Gros-Caillou , de Saint-
Vincent-de-Paul. En 1846, on en cr6a 7 a Paris et dans la ban-
lieue : il y avait alors 14 Creches dans le d^partement de la
Seine.
Gependant Tinstitution ne s'^tait pas d^velopp^e sans dtre
Tobjet de nombreuses critiques et sans ^prouver de grands d6s-
agr^ments. La mortality infantile est Ir^s grande et, dans toute
agglomeration d'enfants, les 6pid6mies se d^veloppenl facile-
ment. La Crfeche est un terrain dans lequel la contagion pent
se propager avec rapidity. En 1844, la science de Thygifene
n'avait pas fait les progr^s qu'elle a accomplis depuis et Tan-
tisepsie n'avait pas encore '6t6 appliqude! Aussi y eut-il, dans
les Crfeches d'alors,de nombreux casde rougeole, de coqueluche
et d'autres maladies sp6ciales k la premiere enfance dont sont
encore loin d'etre indemnes les Creches d'aujourd'hui.
Une des critiques les plus curieuses, affirme M. Eugfene
Marbeau, fut que la Crfeche dtait trop confortable.
« EUe dut prouver, dit-il, qu*en pla^ant les enfants pendant
la journ^e, dans des conditions meilleures que celles qu'ils re-
trouvaient le soir chez leurs parents, elle ne les tuait pas par le
contraste ; qu'en dispensant les m^res de les envoyer au loin en
nourrice, elle n'affaiblissait pas le lien de la famille; qu'en
substituant le travail i Taumdne, en permettant h Touvri^re
de gagner dignement et courageusement un salaire toujours
sup^rieur k ce que d^pensait la Crfeche pour garder Tenfant,
elle ne gaspiilait pas Targent de la charity ; enfin, el ce n'6tait
pas \k le reproche le moins strange, car c'6tait par certains re-
prdsentants de TAssistance publique qu'il ^tait formula, on
accusa la Crfeche de faire une concurrence fdcheuse aux autres
oBuvres publiques ou priv6es ! A ce dernier reproche , il r6-
pondit que, bien au contraire, elle alMgeait les charges de
r Assistance publique (1).»
M. Firmin Marbeau et ses collaborateurs invitferent alors
les administrateurs des diverses Creches de la Seine k se r^unir
(1) Extrait du rapport de M. Eugdne Marbeau au Conseil sup6rieur de I'Assis-
tance publique.
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m-^ >tr -T
LES CRfeCHES. 181
pour combiner leurs efforts et se concerter sur les ameliorations
kapporter dans Tinstallation et le fonctionnement de ces 6ta-
blissements. Ce fut Torigine de la Sociiti des Crkches qui eut
pour programme la propagande de Toeuvre et Tallocation de
subsides aux Creches qui en avaient besoin, tout en laissant k
chacune d'elles son ind^pendance et son autonomic.
La stance d'inauguration de la Society eut lieu St THdtel de
Ville, salle Saint- Jean, le 24 f^vrier 1847. L'assembl^e ^tait
nombreuse, elle fut pr^sid^e par M. Dupin. M. Marbeau fit un
discours Eloquent dans lequel il d^fendit son oeuvre avec cha-
leur. II d^montra la possibility de Ja Crfeche par son existence;
il r^pondit au reproche d'imperfections par le pen de temps
^coule depuis la fondation de Toeuvre ; il fit ressortir les avan-
tages qu'en tiraient les mferes en ne payant qu'une faible retri-
bution et le bien que faisait la Creche it pen de frais ; il fit
comprendre les services que la nouvelle institution pouvait
rendre 4 Tifitat.
A la suite de cette reunion, on songea k modifier Torgani-
sation du debut. Primitivemeat, on avait cru ne devoir ad-
mettre 4 la Grfeche les enfants que jusqu'd. T&ge de deux ans,
parce qu'i partir de cet Age ils pouvaient 6tre reijus dans les
salles d'asile ; mais on se rendit compte qu'il valait mieux pro-
longer le sejour i la Creche jusqu'i Tftge de trois ans. On
reconnut enfin qu'il fallait que le bien-6tre de la CrSche
fit ameiiore et que Ton y suppler Ji la g6ne du logis mater-
nel ; on se pr^occupa d'am^liorer les conditions materielles de
retablissement; on s'appliqua it rechercher des locaux bien
a^r^s et bien exposes ; on foumit la nourriture aux enfants et
on ne demanda plus aux mires le petit panier d'aliments
plas ou moins choisis ou approprids que la mire apportait au-
trefois.
A c5te de H. Marbeau, philanthrope chritien, d'autres amis
de I'enfance qui avaient etudie son ceuvre, tout en en recon-
naissant Tutilite, avaient songe h, Timiter en la modifiant. lis
avaient trouve bizarre que Ton confi&t la direction des Criches
k des religieuses qui, si dfivou^es et bien intentionnees qu'elles
pussent 6tre, ne semblaient pas, par leurs voeux, par leur si-
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181 REVUE PHILANTHROPIQUE.
tuationet par leur ^tat^ devoir rcmplir les m6mes fonctions
que des mferes de famille ayant 6\ey6 et fait vivre de nombreux
enfants.
Des hommes et des femmes de bien ne s'inspirant point] des
mSmes id^es que M. Firmin Marbeau song^rent k ouvrir des
asiles pour les enfants du premier ^ge qui ne seraient point des
foyers de propagande religieuse.
Des francs-maQons fond^rent des Crftches oil Ton ne s*in-
qui^ta point de savoir si les enfants qu'on y amenait ^taient
baptises ets'ils ^taient n6s ou non hors mariage.
En 1847, 3 Crdches nouvelles furent ouvertes h Paris et
dans la banlieue ; 2 en 1848 ; 2 en 1849; 2 en 1851 ; 1 en 1852.
En 1856, le d^partement de la Seine compta 21 Creches : c'^tait
k pen pris un nombre ^gal k eelui des asiles qu'il possddait en
1837.
D6s Torigine, la Ville de Paris, le d^partement de la Seine
et le minist^re de Tlnt^rieur soutinrent la Soci6t6 des Crfeches
par des subsides, et des circulaires du pr^fet et du ministre
encourag^reat la fondation de nouvelles Crfeches.
Aujourd'hui le Conseil municipal de Paris et le Conseil g6-
n6ral de la Seine ont cess^ de donner leurs subventions k la
Soci^t6 des Creches : ces deux assembl6es r^servent leurs allo-
cations aux Creches affectant un caract^re laique. Elles sont
disposdes, de m6me que le ministfere de Tlnt^rieur, k n'accorder
de subsides qu'k ceux de ces ^tablissements qui se soumettront
k des prescriptions dont nous aurons Toccasion de parler dans
un prochain article de la Revue philanthropique.
La revolution de 1848 et le coup d'Etat de 1851 ne semblent
pas avoir beaucoup trouble M. Marbeau qui s*accommoda tr^s
facilement du regime imperial et demanda pour son ceuvre k
la famille de Napoldon 111 le patronage qu'il avait eu de la fa*
mille d'Orl^ans.
Le mouvementded6veloppement des Crftches ne se renferma
pas dans le d^partement de la Seine; il s'^tendit i la France et
k r^tranger.En 1866, la Crfeche de Rochefort fut reconnue d'uti-
lit6 publique; la m6me disposition fut prise en 1867 en faveur
des Creches de Tours et, en 1869, de la Crfeche de la Madeleine.
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LES GRfiCHES. t«3
Depuis, de nombreuses Creches ont obtenu la personnalitd
civile. II y en a maintenant dans toutes les parties de la
France (1).
Aujourd'hui 61 Crtches fonctionnent h Paris (2); d'autres
{\) U existe des Crdches en France dans les villes suivantes :
Aisne : Guise, La F6re, Vervins, Sain t-Quen tin. — Allier : Vichy, Montlu^on.
— Alpes-Maritimes : Menton, Nice. — Ardfeche : Largentifere, Bourg-Saint-And6ol.
— Ardennes : Givet, Rethel, Sedan. — Aube : Troyes. — Aude : Carcassonne,
Narbonne. — Bouches-du-Rh6ne : Marseille, Aix, Aries, Tarascon. — Calvados :
Caen, DeauviUe, Lisieux, Pont-l'tvfique, Trouville, Villerville. — Charente : An-
gonldme. — Charente-Inferieure : La Rochelle, Rochefort, Saintes. — C6te-d'0r :
Dijon. — Cdtes-du-Nord : Saint-Brieuc. — Dordogne : P6rigueux. — Doubs : Be-
san^on. — Eure : Louviers, Romilly-sur-Andelle. — Eure-et-Loir : Chartres,
Dreux, NogenHe-Rotrou, Saint-Lubin des-Joncherets, Saint-Remi-sur-Avre. —
Pinistere : Brest, Morlaix. — Gard : Alais, Anduze, Nlmes. — Garonne (Haute-) :
Toulouse. — Gironde : Bordeaux, Arcachon, Ards, B6gles, Taussat. — H^rault :
Agde, Cette, Montpellier, P6zenas, Beziers, Clermont, Loddve. — Indre : Ch&teau-
roux. — Indre-et-Loire : Tours, Amboise. — Isdre : Grenoble, Pont-de-Claix. —
Loire-Inf6rieure : Nantes. — Loiret : Orl6ans. — Lot-et-Garonne : Villeneuve-
sur-Lot. — Maine-et-Loire : Angers, Cholet. — - Manche : Saint-James. — Mame :
Ch&lons, Ay, fepemay, Reims, Sainte-Menehould. — - Mayenne : Ch&teau-Gontier.
— Meurthe-et-Moselle : Baccarat, Lun6ville, Nancy, Thiaucourt, Toul. — Meuse :
Bar-le-Duc. — Morbihan : Lorient. — Nord : Lille, Armenti^res, Cambrai, Dun-
kcrque, Roubaix, Tourcoing, Loos. — Oise : Beauvais, Chantilly, Compifegne,
Noyon, Ourscamp, Saint-Agnan, Senlis, Thieux, Trye-Ch&teau. — Orne : Alen^on,
Bagnols, Piers. — Pas-de-Calais : Boulogne, Calais, Lens. — Puy-de-D6me : Cler-
mont-Ferrand. — Pyr6n6es (Basses-) : Bayonne, Biarritz. — Pyr6n6es-Orien-
tales : Perpignan. — Rhdne : Lyon. — Sa6ne-et-Loire : Chalon-sur-Sadne. —
Haute-Sa6ne : Luxeuil. — Sarthe : Le Mans, Tr61az6. — Savoie : Aix-les-Bains. —
Seine-et-Mame : La Fert6-sous-Jouarre, Meaux, Melun, Montereau, Nemours,
Noisiel, Provins. — Seine-et-Oise : Argenteuil, Bellevue, Buc, Gonesse, Jouy-en-
Josas, Le Pecq, Le V6sinet, Meudon, Pontoise, Port-Marly, Rueil, Saint-Germain-
en-Laye, Versailles, Ville-d'Avray, Viroflay. — Seine-Inf6rieure : Le Havre, Rouen,
Dieppe, Elbeuf, Lillebonne, Saint-fetienne-du-Rouvray. — Somme : Amiens, Abbe-
ville, Nesle, Flixecourt. — Tarn : Albi. — Var : Hyferes, Toulon. — Vaucluse :
Avignon, Carpentras. — Vienne (Haute-) : Limoges. — Vosges : tpinal, G6rard-
mcr, Granges, Moyen-Moutier, Saint-Di6, Saint-fetienne, Senones.
Alg^rie : Alger, Blidah, B6ne, Constantino, Oran, Philippeville. — Guadeloupe :
La Pointe-i-Pitre. — Tunisie : Tunis.
(2) Voici la liste des Creches de Paris :
!•' arrondissement : Saint-Roch, rue Saint-Hyacinthe-Saint-Honor6, 4 ; Crdche
mnnicipale du I" arrondissement, rue de I'Arbre-Sec, 17. — !!• : Bonne-Nouvelle,
me Saint-Denis, 218; Cr6che du Mail, 70, rue Montmartre. — ill' : Crdche des
Archives, rue de Saintonge, 43. — IV* : Sainte-Philomfene, rue Sainte-Croix-de-la-
Bretonnerie, 20; Saint-Francois de Sales, rue Poulletier, 5; Crfeche municipale
du IV« arrondissement, rue Saint-Antoine, 164. — V* : Cr6che Monge, place
Monge, 4; Grfeche Sadi-Carnot, 3, rue des Trois-Portes ; Crdche Sainte-Lucie,
15, rue des Bemardins. — VI- : Bethl^em (Saint-Sulpice), rue de M6zidres, 6;
Crfeche du VI* arrondissement, rue Jacob, 11. — VII* : Saint-Pierre du Gros-
CaiUou, rue de Grenelle, 182; Saint-Vincent-de-Paul, rue Oudinot, 3; Saint-Tho-
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184 REVU5 PHILANTHROPIQUE.
sont en voie de formation. 11 y en a 30 dans la banlieue (1).
Les Creches furent plac^es, par le d6cret du 26 f6vrier 1862,
sous la protection de rimp6ratrice. Un rtglement en dale du
30 juin 1862 indiqua les prescriptions auxquelles devaient se
soumettre ces ^tablissements, soit pour6tre approuv6s soitpour
6tre tol6r6s. Les Crfeches sont en outre soumises aux disposi-
tions de la loi du 23 d^cembre 1874, dite loi Roussel sur la
protection des nourrissons.
En 1875, quelque temps avant sa mort, M. Firmin Marbeau
avait adress^ h, TAssembi^e nationale une petition demandant
mas-d'Aquin, rue Peironnet, 9. — VIIIo : Saint-Philippe, rue de Monceau, 13;
Sainte-Madeleine, rue de laVille-l'fevdque, 14. — IX* : Saint-Louis d'Antin,rue de
la Chauss6e-d*Antin, 27 ; Notre-Dame de Lorette, rue Rodier, 60 ; Grfeche laique du
IX* aiTondissement, rue La Rochefoucauld, 25. — X* : Crftche du X* arrondisse-
ment, rue Saint-Maur-Popincourt, 185 ; Creche du Faubourg-Saint-Martin, rue
du Faubourg-Saint-Martin, 122. — XI* : Cr6che Charles Floquet, rue Saint-iMaur-
Popincourt, 6; Saint-Joseph, rue d'Angoul^me, 81. — XII* : Sainte-Marie-des-
Quinze-Vingts, 8, passage Gatbois, avenue Daumesnil, 66 ; Saint-Joseph (Bercy),|rue
des Meuniers, 63; Crfeche de Picpus, ruelle des Toumeux, 4. — XIII* : Saint-
Marcel (Maison-Blanche), rue Vandrezanne, 42; Sainte-Rosalie, rue de la Gla-
cidre, 35 ; Maison matemelle, Crdche laique du Berceau de I'Enfance, 7, passage
Ricaut, rue du Ch&teau-des-Rentiers ; Creche municipale du quartier Croulebarbe,
rue des Gobelins, 7; Creche lafque de la Maison-Blanche, 1, rue Barrauit; Creche
municipale de la Salp6tridre, 5, rue du Bancpiier. — XIV* : Grdche municipale
laique de Plaisance, rue de TOuest, 115; Creche Furtado-Heine, rue Jacqiuer, 7;
Crfeche F6nelon-Gharles, rue Gharles-d'lvry. — XV* : Sainte-Marguerite (Grenelle),
rue Ginoux, 6 ; Crdche laique municipale de I'Esp^rance, rue Violet, 69 ; Creche
laique municipale du quartier Saint-Lambert et Necker, rue d'AUeray, 13; Grdche
Fourcade, 25, rue Beuret. — XVI* : L'Annonciation (Passy), rue Singer, 8 ; Creche
Sainte-Marie, avenue Victor-Hugo, 117; Crfeche du XVI* arrondissement, rue
Claude-Lorrain, 22 bis; Cr6che du XVI* arrondissement, rue Francois-Millet. —
XVII* : Saint-Joseph (Temes), rue Bacon, 11 ; Crfeche de la Gompagnie de I'Ouest,
avenue de Glichy, 163; Petite Grdche des BatignoUes, avenue de Glichy, 47 bis;
Grfeche municipale des ^pinettes, rue Berz^lius prolong^e, 8 bis; Gr6che Made-
leine Br6s, 86, rue Nollet; Petite Grfeche de la rue Gauthey, rue Gauthey, 49. —
XVIII* : Grdche de Glignancourt, rue Damr6mont, 98 ; Cr6che de la Ghapelle et de
la Goutte-d'Or, rue Gav6, 5; Gr^che Arthur Panckoucke, rue Gaulaincourt, 39;
Crdche Asile Sainte-Marie, avenue de Saint-Ouen, 146. — XIX* : Sainte-Eug^nie
(La Villette), rue de Grim^e, 146; Grdche laique du quartier d' A mdrique, rue de
Bellevue, 18. — XX* : Saint-Jean-Bap tiste (Belleville), rue de la Mare, 73; Grdche
Sainte-Am^lie, fondation Wion-Pigalle, rue de Bagnolet, 63 ; Gr6che laique du
XX* arrondissement, 121, rue de Bagnolet; Creche laique du quartier Saint-Far-
geau, 33, rue du T^l^graphe.
(1) Voici la liste des creches du d^partement de la Seine :
Asnidres : Grdche municipale, place de I'Asile. — Boulogne : Crfeche munici-
pale, rue de Paris, 105. — Gachan : Saint-Raphael, rue des Toumelles, 7. — ChA-
tiUon : Gr^che municipale, passage Chariot, 2. — Ghoisy-le-Roi : A la Manufac-
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LES CRfeCHES. 185
une loi destin^e h faire suite h la loi de 1874 et qui 6tait ainsi
formulae :
« Article premier. — Toute commune oil plus de cent
femmes travaillent habituellement hors de Icur domicile pourra
6tre tenuede fournir un local pour 1*6 tablissementd'uneCrfeche.
« Art. 2. — Toute usine occupant habituellement plus de
cent femmes pourra 6tre tenue d'avoir une Creche.
« Art. 3. — Dans Tun ou Tautre cas, la n^cessitd de la
Creche sera constat^e par un arr6t6 du Pr6fet, pris aprfes avis
du Conseil g^n^ral. »
Cette petition ne fut pas prise en consideration (1).
Depuis leshygi^nistes, les municipalit^s, les pouvoirs publics
ont ^tudie k nouveau la question des Creches.
Le Conseil municipal de Paris institua une Commission des
Crfeches qui fut charg6e de s'occuper de toutes les details con-
cemant le fonctionnement de ces etablissements^ de sur^-eiller,
turc de porcelaine, rue du Pont, 3. — Clamart : Sainte-femilie, rue du Trosy. —
Clichy : Saint- Vincent-de-Paul, rue Marthe, 84. — Colombes, Crfeche municipale.
— Gourbevoie : Crtche municipale, square de la Mairie. — Cr6teil : Creche, mu-
nicipale, Grande-Rue. — Gentilly : Creche municipale de Gentilly-Rremlin,
46, me Danton; Crfeche municipale de Gentilly Centre, rue de la Mairie, 12. —
Issy : Creche du Centre, place de la Mairie; Crfeche des Moulineaux, cit6 G6velot.
— Levallois-Perret : Creche municipale, rue Marjolin, 2. — Les Lilas : Crfeche
intercommunale, 8, passage Griselin. — Montreuil-sous-Bois : Crdche municipale,
roe Voltaire. — Montrouge ; Crfeche municipale, rue des Ruelles. — Nanterre :
Creche communale de Sainte-Genevifeve, rue de la Mairie. — Neuilly : Sainte-
Am^lie, rue des Poissonniers, 24. — Nogent-sur-Mame : avenue du March6, 3. —
Pantin : O^che Sainte-l^lisabeth, rue Thiers, 3 ; Crfeche municipale, rue du Com-
merce. — Puteaux : Creche municipale, rue des t coles, 59. — Saint- Denis, Grdche
municipale, me Compoise, 59. — Saint-Onen : Crfeche municipale, rue de la Gare.
— Sceaux : Creche municipale, rue Picpus, i. — Suresnes : Grftche de Suresnes,
19, rue de Neuilly. — Vanves : Sainte-Genevifeve, rue de la Mairie, 38. — Vin-
cennes, roe des Carridres, 5.
(!) Une loi promulgu^e le H avril 1891, en Portugal, et destin6e k r6gler le
travail des femmes et des enfants dans les manufactures, porte, article 21 :
• Toute fabrique dans laquelle travaillent journellement plus de cinquante femmes,
devra poss^der une Creche install6e dans les conditions hygi^niques d^termin^es
par des r^lements. La distance de la Crdche h T^tablissement sera de 300 metres
au plus. Plusieurs usines pourront 6tablir ou subventionner en commun une
Creche pour les enfants des ouvriferes de chacune d'elles, h condition toutefois
que la Creche soit d'une capacity suffisante et distante de 300 metres au plus de
chacune de ces usines. »
L'article 22 ajoute que : a Les femmes ne seront pas admises au travail dems
les quatre premieres semaines aprds Taccouchement, la m^re pourra toujours
allaiter son enfant dans les Creches. »
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186 REVUE PHILANTHROPIQUE.
tant au point de vue administratif et financier qu'Jt celui de
de I'assainissement, les Crfeches 8ubventionn6es par la Ville
et d'examiner les demandes de subventions adrcss^es par les
Crfeches privies.
La Ville de Paris se prdoccupe d'dtablir une Creche vrai-
ment municipale (2) qui pourra servir de type aux autres,
et oil des cours sp^ciaux sur les soins k donner aux petits
enfants seront faits aux m^res de famille et aux grandes jeunes
filles qui ont charge de petits frferes et de petites soeurs.
En 1895, le ministre de Tlnt^rieur demanda au Conseil
sup^rieur de TAssistance publique son avis sur le fonctionne-
ment des Creches et sur les modifications & apporter au d^cret
et au rfeglement de 1862. U fut reconnu, Jila premifere section
du Conseil sup6rieur, qu'un grand nombre de'questions devaient
6tre soumises au Comity consultatif d'hygifene auquel le presi-
dent du Conseil des ministres demanda, le 28 f^vrier 1896, de
delib^rer sur les dispositions relatives k Thygitoe que doit
contenir le nouveau rfeglement des Crfeches. Le rapport, confix
ii M. le D*^ Henri Napias, fut pr^sent^, le 30 novembre 1896, au
Conseil sup^rieur de TAssistance publique, devant lequel
M. Eugfene Marbeau fit, le 10 et le 11 mars 1897, un rapport
d'ensemble. Nous aurons occasion de revenir sur ces travaux
et sur ceux que vient de terminer la Commission municipale
du lait, lorsque nous nous occuperons des nombreux details
qu'il faut examiner dans Tinstallation et le fonctionnement
des Crfeches.
ALFRED BREUILLt.
(1) Bien que plusieurs Creches de Paris se d^nomment Creches municipaleSf
elles ne sont point administr^es, comme les Crdches municipales de la banlieue,
par la commune dont elles dependent. Ce sont des oeuvres privies auxquelles
s'int^ressent les conseiliers municipaux et les membres de la municipality de
rarrondissement dans lequel elles sont situ6es, et qui sont administi^es par des
comit^s priv6s.
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L'ASSISTAIVCE ET L^EDUCATION
DES JEUNES SERVANTES
A PARIS ET A LONDRES
Au dernier recensement dont les chiffres sont connus, en
1891, il y avail en France plus d'un million de femmes domes-
tiques (1) ; h Paris exactement 104373.
La presque totality de cette population est fournie h la oa-
pitale par la province. Ge sont des filles de la campagne qui
d^barquent compl Element ignoranles pour la plupart des tra-
yaux domestiques, inaptes, par manque de culture, k com-
prendre et s'adapter rapidement au nouveau milieu oil elles se
trouvent, n'ayant en t^.te qu'une id^e bien nette : gagner de
Fargenly gagner beaucoup et le phis vite possible ^ en donnant le
moins possible en retoitr.
Si la jeune servante tombe dans une maison oil la maitresse
lui ressemble dans son ignorance de T^conomie domestique,
incapable de Teffort d'imagination pour comprendre le doulou-
reux et stupide ahurissement de la campagnarde, sans vouloir
pour exercer la patience et la persdv6rance n^cessaires pour
la former i ses devoirs nouveaux et complexes, ddsirant seule-
ment avoir le moins cher possible une machine domestique
marchant bien; dans ce cas, les mutuelles exigences am^nent
rapidement la rupture.
La jeune servante renvoy6e se place de nouveau, est de nou-
(i) 1042245.
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188 REVUE PHILANTHROPIQUE.
veau renvoy^e pour les mSmes causes. EUe recommence dans
des conditions plus ou moins semblables jusqu'k ce qu'elle ait
tant bien que mal appris son metier et suffisamment att^nu^
ses pretentions pour dtre gard6e malgr^ son incompetence... ou
bien elle tombe dans le fosse. Elle va grossir les rangs de la pro-
stitution (1), ou elle meurt h ThApital^ de misfere ou de ma-
ladie (2).
Telle est la situation de la jeune servante : elle, comme sa
maitresse, est victime de la periode de transition que nous tra-
versons.
Les vieilles choses n'existent plus et les nouvelles ne sont
pas encore !
L'opinion, autrefois, n'admettait pas que la femme dAt avoir
d'autres regions que le foyer oil exercer son activity ; aujour-
d'hui encore, malgre la diversite des theories sur « le r6le de
la femme » il y a un point oil les divergences cessent, oil r^vo-
lutionnaires et retrogrades trouvent un terrain d'entente, —
temporaire et transitoire il est vrai, — d'od souvent ils partent
pour de nouvelles disputes, mais od ils se rencontrent aussi
pour se reconcilier et repeter k Tunisson :
« La place de la femme est au foyer. »
Cependant, malgre cette unanimite k ne pas lui disputer la
suprematie, la femme ne semble pas se rendre compte de Tim-
mensite de son royaume. Par sa nonchalance k gouverner, par
la facilite avec laquelle elle s'est laisse enlever Tadministration
de reconomie domestique, elle donne un semblant de raison a
ceux qui pretendent que Taptitude d'organisation et la faculte
de diriger lui font defaut.
Autrefois la femme filait, tissait et confectionnait les vete-
ments de la maisonnee. Encore hier, chaque menage faisait son
pain, lessivait son linge et faisait ses conserves en prevision de
Thiver.
Aujourd'hui les conditions de production ont change ; Ten-
treprise commerciale masculine s'est emparee des differentes
branches de Fiudustrie feminine. La femme a laisse echapper
(1) La prostitution clandestine h Paris, par le docteur 0. Commenge, p. 335.
(2) Annuaire de la VUle de Paris, n« XIV, 1893, public en 1895.
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f.'ST'^-'v--
ASSISTANGE ET EDUCATION DES JEUNES SERVANTES. 189
de ses mains les multiples sources de richesse et d'ind^pen-
dance mat^rielle et morale. Elle s'est laiss^ d^pouiller insidieu-
sement sous pr6texte de sciences et de progrfes ; c'est seulement
quand elle s'est vue entiferement d^poss^d^e, qu'elle s'est ren-
due compte qu*elle est maintenant paria, \h oh auparavant elle
r^gnait.
Le foyer est devenu simplement son but k lui-m6me, au
lieu d'6tre, comme jadis, le centre d'od rayonnait la femme. La
maisonn'est plus la ruche; c'est Tendroit oil Ton mange et od
Ton dort. On consomme k la maison ; la production se fait k
Talelier (1).
Par suite de ce d^placement de forces, une grande pertur-
bation s'est produite dont se ressent le corps social tout en-
tier.
De notre ^poque tourment^e, nul ne sait ce qui en sortira
pour rhumanit^. II n'y a qu'un devoir ciair et net devant nous,
e'est d'effectuer la transition avec le moins de soufifrances pos-
sible pour les faibles. Dans cette categoric se trouve « la petite
bonne » ; c'est elle qui, avec Touvrifere k Taiguille, paye le plus
fort tribut a la mis^re, k la maladie et k la mort. G'est elle
aussi qui foumit le plus gros contingent k Tarm^e de la prosti-
tution et It la lamentable th^orie des mferes hors mariage.
La gravity de la situation pr6occupe Tattention; Topinion
s'^meut et Tavis est unanime qu'il est urgent dlntervenir.
Malheureusement on est loin d'etre d'accord sur les moyens
k employer pourrem6dier auddsarroi regnant. On s'apergoit bien
(1) Occupations de la femme aux temps anciens.
a. Filage. . . |
Tissage . . \ Totalement transferees aux fabriques.
Brasserie . I
b. Boulangerie 1
Confiserie et conserves I ^
Laiterie et fromage > _ ^,^ ^^^*^ P^^
Lessivage. \ '""^^'^rees ^^ fabriques.
Broderie et confection de vdtements. |
Occupations nouvelles techniques, scientifiques et artistiques de la femme ,'de
noi? jours:
Imprimerie. — Tenue de livres. — Photographie. — Tei^graphie. — T6l6pho-
nie. — Stenographie. — Joumalisme. — Enseignement sup^rieur. — M^decine
ei chirurgie. — Peinture et Sculpture. — Musique et Art dramatique. — Chimie
indnstrielle, etc., etc., etc.
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190 REVUE PHILANTHROPIQUE.
que la charity n'estpas la solution du problfeaie;la philanthropie
n'^tant qu'un palliatif, un moyen de soulager momentan^ment
des cas de d^tresse Isolds et passagers, mais inutile lorsqu'il
s'agit d'^tablir et de maintenir F^quilibre social et ^conomique
de millions de personnes.
Les oeuvres de bienfaisance rendent n^anmoins de tr^s
grands services aux jeunes servantes Isoldes et 6trang5res dans
les grands centres. II est impossible de les passer sous silence.
Des cceurs compatissants ont eu pitid de la triste position de ces
pauvres filles seules, inconnues, incomprises, au milieu de la
grande ville,balIott6es, sans racines et sans appui.
II y a & Paris seul un certain nombre d'asiles pour les do-
mestiques sans place. Les sceurs Servantes de Marie ont, en
1849, iondi une association qui a pour but de donner aux per-
sonnes en service, le plus souvent Isoldes k Paris, un centre oil
elles retrouvent autant qu'il se pent lafTection et les conseils
de la famille absente, puis un asile od elles sont reQues lors-
qu'elles sont malades.
Les Soeurs de la Croix recueillent dgalement les jeunes
filles qui ddsirent se placer comme domestiques. Les soBurs de
Saint-Charles s'occupent de placer les jeunes filles alsaciennes
et allemandes.
Le premier asile frangais de ce genre fut ouvert en 1844. II
futfondd par une brave personne de la classe ouvrifere, une
veuve, M""' Chassaigne. II s'appelle V Asile des domestiques pro-
testantes. A sa fondation, il ne possddait que six lits; pourtant,
la directrice avait accueilli en douze ans 1 205 femmes. Aujour-
d'huiToeuvre s'estagrandie; dans son nouveau local, 24 femmes
peuvent 6tre regues. Depuis que Tasile est transfdrd 25, rue Sal-
neuve, on y regoit en moyenne 200 k 250 femmes: ce qui donne
un total annuel de 3 000 k 4 000 journdes d'assistance.
II existe'a Paris d'autres asiles protestants, le Home fran-
Qais et les Homes allemands, anglais et suisses pour les jeunes
servantes de ces diffdrentes nationalitds. Dans toutes ces mai-
sons on regoit les domestiques it loger. Ton s'occupe de leur
placement, dans quelques-unes on tdche de les former.
II y a il Paris Tune des maisons de la Socidtd amicale des
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ASSISTANCE ET jfeDUCATION DES JEUNES SERVANTES. 191
jeunes filles (Girls Friendly society), fond^ en 1873, dont le
si^ge social est Si Londres, 39, Victoria Street. Cette soci6t6,
sous le patronage de la Reine d'Angleterre et de la Princesse
de Galles, est compos^e de:
1* Les Membres. — Les jeunes filles elles-mSmes qui participent aux
charges selon leur capacity et qui b^n^Qcient des a vantages selon leur
D^cessit^.
2» Les Associ^s. — Les personnes qui donnent temps, argent, appui et
influence aux membres en proportion des besoins de ces derniers.
Cette association compte :
EnAnglelerre 150055 jeunes filles.
EnEcosse 18528 —
En Irlande 10694 —
Aux Colonies anglaises 4733 —
Aux Indes 207 —
Dans rAm^rique du Nord 9710 —
Dans les villes du Nord et du centre de
TEurope, dont Paris 222 —
Total 194215 —
Sur les 150 053 membres en Angleterre, 60 460 sont des
domestiques et sur les 222 membres des villes d'Europe, 39
sont des domestiques, les autres sont des institutrices, des pro-
fesseurs, des gardes-malades, des 6tudiantes (arts et sciences),
des blanchisseuses et repasseuses, des serveuses de restaurants
et buvettes, etc., etc.
Pendant Tannic 1896, 13 554 mattresses se sont adress^es k
la soci^t6 et 4 626 domestiques ont 6t€ plac^es par ses soins.
Cette partie de ses travaux, loin d'6tre on^reuse, s'est traduite
par un b^ndfice de 9 547 francs.
I^ maison de Paris, situ6e 17, rue de Courcelles, est sous le
patronage de lady Monson, ambassadrice d' Angleterre ; elle
compte 149 membres dont le plus grand nombre sont des insti-
tutrices. Un bureau pour domestiques y fonctionne sous la di-
rection de M°' CoUyer.
Un autre asile, le Mission Home, s'occupe 6galement delo-
ger et de placer des domestiques anglaises et amdricaines.
Dans les soci6tds fonctionnant sous la direction anglaise,
notamment dans la « Soci^t^ amicale des Jeunes Filles »
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192 REVUE PHILANTHROPIQUE.
(Girls Friendly society), on est frappd par la multiplicity des
moyens employes pour rencouragement des jeunes servantes.
A celles dont Tftge varie entre 18 et 21 ans, qui par leur bonne
conduite et leur iid^lit^ les ont m^ritds, il est distribu^, outre des
primes d'argent, des certificats constatant la satisfaction qu'elles
ont donn^e k ceux qui les emploient. 2 575 de ces recompenses
ont 6i6 accord^es en Tann^e 1896. D'autres primes d'argent
sont allonges k titre d'encouragement pour des habitudes
d'^pargne et d'abstinence des boissons alcooliques.
Un autre trait caract^ristique de ces oeuvres, est le souci
constant de la sant^ morale et physique de leurs jeunes pro-
tegees. On se preoccupe de Temploi fait des heures de deiasse-
menty des jours de sortie ou des vacances. On procure k ces
jeunes fiUes des lectures, on les incite k frequenter la maison
de la societe, oii sont offerts, chaque dimanche, des thes k leur
intention et d'y amener leurs amies (1). On leur fournit des
recreations, des amusements et du repos.
Un autre signe distinctif de ces associations, c'est leur acti-
vite. Sur une population totale de 1 386 167 domestiques femmes
en Angleterre, 60 460 sont connues comme faisant partie de la
seule Societe amicale des Jeunes Filles (Girls Friendly society),
oil elles patent une cotisation annuelle d'au moins 1 shilling
(1 fr. 25).
Gependant, cette societe, quoique admettant les domesti-
ques k profiter des avantages qu'elle offre it ses membres,
s'adresse plus particuliferement aux institutrices, aux gouver-
nantes, aux employees de commerce, c'est-Ji-dire aux travail-
leuses en faveur desquelles une selection s'est dejSi operee,
puisqu' elles sont en possession de moyens d'existence plus
avantageux, moins penibles. Du reste, mfime parmi les institu-
tions frauQaises fondees pour venir en aide aux domestiques,
y en a-t-il qui se consacrentexclusivement k la « petite bonne » ?
Existe-t-il k Paris une CBuvre qui a pour but unique Fassis-
tance et Teducation des servantes de 13 k 20 ans?
Non, n'est-ce pas.
(1) A la maison de la Soci6t6 amicale des jeunes filles, 11 a 6t6 senri, pendant
Fannie 1896, 1 420 de ces th^s gratuits.
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ASSISTANCE ET 6DUCATI0N DES JEUNES SERVANTES. 193
Londres est plus heureux. Depuis 1874 fonctionne une ad-
mirable association fondle par Mrs Nassau Senior, Inspectrice
des Ecoles, pour venir en aide aux petites filles qui sortent des
6coIes et orphelinats de T^tat. Laplupartde ces enfants sont
orphelines, ill^gitimes ou moralement abandonn^es. EUes
quittent les Ecoles, au plus tard k FAge de 14 ans. II s'agit
alors de les placer et, une fois plac^es, I'administration ne se
considfere plus comme ayant des devoirs sp^ciaux envers ses
anciennes pupilles. Chaque ann^e, 500 environ sont pourvues
d'un mince trousseau et plac6es dans des maisons honn6tes, en
quality de petite bonne.
C'est une p6riode difficile que ces premiers temps d'in^vi-
table isolement, de travail r^gulier et de responsabilit^ indivi-
duelle. Ces premieres ann^es de service sont les plus dures. La
servante enfant n'a pas de camarades de jeu, pas de distractions.
Elle a peu d'amis, elle les voit rarement. Elle s'ennuie, elle
pense que, dans une nouvelle place, elle serait plus heureuse,
qu'elle auraitmoins de travail et s'amuserait davantage;... si
elle changeait ? C'est ici que commence Faction de V Association
mitropolitaine pour rassistance des jeunes servantes.
Au lieu de les laisser aller k la derive, sans boussole dans
la vaste cit6, une « amie » est pr6te pour guider, conseiller et
secourir la jeune servante, pour la gronder aussi. Pour servir
d'interm^diaire discrete dans les petits conflits entre elle et sa
maitresse, pour d^m^ler et^tablir, autant que possible od iinit
le droit et oil commence le devoir de chacune.
Si cependant la petite bonne finit par quitter, ou par 6tre
renvoyde, « Tamie » la recueille. L' « Association » prend dans
son sein cet atome d'humanit6, elle I'attache k la famille et
jamais, jamais plus, elle n'est sans foyer, ni sans amis.
1 017 femmes remplissent ce r6le d' « amies » auprds de
7 474 petites bonnes de Londres.
21 « homes » regoivent les jeunes servantes sans place,
31 comit^s de district dirigent et administrent cette vaste entre-
prise, dont le mouvement de caisse pour Fannie 1896 a 6t^ de :
Recettes 261383 francs
D^penses 246950 —
REVUE PHILARTBROnQUS. ^11. 13
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194 REVUE PHILANTHROPIQUE.
VAssociaiion mitropolitaine pour F assistance desjeunes ser-
vantes a, depuis sa fondation, secouru 12 442 petites bonnes.
Dans cette question des domestiques, aussi bien qu'ailleurs,
la philanthropie doit 6tre consid^r^e comme un palliatif essen-
tiellement transitoire. La politique qui envisage la charity
autrement que comme un moyen int^rimaire, prepare h la pos-
t6rit6 des problfemes sociaux encore plus inextricables que ceux
qu'elle a elle-m^me eu k r^soudre.
Etablir les moyens de secours, des adoucissements du sort,
4es appliquer prompts et efficaces aux victimes, c'est bien, c'est
beaucoup, mais c'est insuffisant. Car demain am^nera de nou-
velles victimes, plus nombreuses et plus pitoyables, sans ap-
porter des ressources toujours croissantes pour leur soulage-
ment.
II faut d'autres medicaments pour gu^rir cette plaie. II faut
avec courage et franchise envisager la situation et reconnaitre
loyalement qu'il n'y a que deux mani^res pour avoir de bons
domestiques et pour dtre bien servi : la premidre, ainsi que le
dit Ruskin, c'est de faire votre domestique. J&levez-le delicate-
ment depuis son enfance, a la longue vous Vaurez^ tel un fils.
L'autre mani^re, c'est de payer son prix, c'est-Ji-dire trfes
cher, cet objet rare. que d'autres se sont donn6 la peine de
faQonner.
II y a bien un autre moyen, c'est d'attendre le r6gne de la
justice absolue, quand la sant^ morale sera parfaite et que
requite seule fixera les conditions du travail. Seulement ce
sera long, si long qu'il faut en laisser I'espoir aux mill^naires.
Au demeurant, il s'agit de rem6dier Ji la situation actuelle
au mieux de notre pouvoir.
Les femmes sont solidaires les unes des autres ; toutes sont
plus ou moins responsables, lorsqu'il y en a une qui se perd !
La question des domestiques est une question ^minemment
feminine, il ne tient qu aux femmes qu'elle devienne une ques-
tion f^ministe de bon aloi.
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ASSISTANCE ET EDUCATION DES JEUNES SERVAXTES. 195
II y a de quoi passionner des ^mes avides de sensations
d'ordre sup^rieur, k qui le foyer moderne ne suffit pas pour
satisfaire au besoin grandissant d'activit^ utile. II y aurait k
eflFectuer Foblit^^ration de cette sorte d'opprobre qui s*attache au
nom de domestique, la rehabilitation morale de la servante et
reffacement de ce stigmate d'inf^riorit^, qui, plus que toute
chose, la rend la proie facile du libertinage.
Ou si Ton persiste k vouloir tenir les serviteurs comme
inf^rieurs, il faudrait travailler k rendre les maitres veritable-
ment sup^rieurs, plus intelligents, plus^clair^S; plus polis, plus
justes et plus serviables, de caract^re plus 6gal et plus 6le\6,
Pour des esprits pratiques, ce serait le moyen de commencer
Torganisation et la discipline indispensables pour rdcup^rer
Fh^ritage industriel dont la femme a 6t6 spoli^e.
Jusqu'& ce que le moment soit venu d'attaquer le systeme
qui am^ne k la ville des jeunes paysannes, laissant \k bdtes et
champs pour devenir servantes de citadins; pendant que des
fiUettes de Paris, en attendant qu'elles aillent gagner leur vie
dans Tatmosph^re malsaine des ateliers, apprennent, dans les
dcoies les plus simples notions d'^conomie domestique.
JEANNE E. SCIIMAIIL.
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COMITE DE DEFENSE
DES
ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE
DU VAGABONDAGE, DE LA MENDiaT^
ET DE LA PROSTITOTION DES ENFANTS DE MOINS DE 16 ANS
Nous avons indiqu^ dans notre pr6c6dent article que les
dtudes du Comity avaient 6t6 r^parties en trois p6riodes : Ten-
fant avant son arrestation, — Fenfant pendant la durde de la
prdvention, — Tenfant aprfes le jugement qui Ta frapp6.
C'est cet ordre que nous allons suivre pour exposer les tra-
vaux d6]k accomplis, conformc^ment au programme dont nous
avons donn6 le texte.
Bien que le Comity poursuive Tam^lioration de toutes les
mesures legislatives, administratives, p^nitentiaires et autres
relatives aux mineurs de 16 ans dans leurs rapports avec la
justice et par consequent se place St un point de vue general, il
ne saurait oublier qu'il s'est propose comme mission plus sp^-
ciale la defense des interets des enfants traduits devant les tri-
bunaux du ressort de la Seine, laissant ainsi aux Comites de
defense des departements le soin de s'occuper h leur tour des
enfants des tribunaux de leur ressort. II eiait done logique
qu'au debut de ses travaux il voulAt etablir son champ d'action
et connaitre le nombre des mineurs de 16 ans — Age, nous
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 197
le rappelons, de la majority p^nale — que les autorit6s de po-
lice font admettre au d^p6t. En m6me temps s'imposait k lui
r6tude des causes g6n^rales qui d6terminent leur arrestation.
M^ Manuel Fourcade, avocat iilacour de Paris, dansunm^moire
trts substantiel et lar gement traits, nous fait d'abord connattre,
d'aprfes les statistiques foumies par la Prefecture de police, que,
pour les ann^es 1891, 1892 et 1893, le nombre moyen annuel
des mineurs de 16 ans arr6t6s, s'est 6\e\6 pour la Ville de
Paris k 1750 gargons et 100 fiUes, en tout prds de 1900. Ce
chiffre est-il bien exact? 11 est difficile de se prononcer. Les re-
lev6s des entries tenus au D6p6t m^me accusent des chiflFres
un pen plus ^lev^s ; on y reldve les chififres suivants :
En 1885 1519
— 1886 1527
— 1887 1629
— 1888 1750
— 1889 1652 dont 271 filles.
— 1890 2102 — 272 —
En ce qui concerne Paris, cette progression n'a rien qui
doive surprendre, puisqu'elle suit Faugmentation de la popu-
lation. Mais elle n'est pas particuli^re h Paris, car, ainsi que le
fait remarquer M. Guillot, si on consulte les grands comptes du
minist^re de la justice de 1881 k 1889, on voit que, pour toute
la France, le nombre des enfants arr6l6s a et6, en 1888, de
7351, au lieu de 6307 en 1881, Ajoutons qn'k partir de 1890, le
nombre des arrestations d^crolt k Paris d'une contain e par an.
Quoi qu'il en soit des divergences des statistiques, suivant
qu'elles sont dress^es par le deuxi^me bureau de la Prefecture
de police ou par le service du D6p6t au Palais de Justice, — et
ces divergences sont une des gaietds de la statistique et un
motif de ne pas partir en guerre sur des chiflFres en g6ndral dis-
cutables, — on pent accepter un chiflTre moyen annuel d'environ
2000 arrestations de mineurs de 16 ans, dont 250 filles. En
lui-mSme, ce chiffre ne nous semble pas, comme Ji plusieursde
no8 collogues, bieneffrayant en regard des 2500000 habitants
de Paris, Bien entendu, d'ailleurs, ne figurent pas dans ces
chiffres les enfants amends au D^pdt, soit comme s'^tant ^gar^s,
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198 REVUE PHILANTHROPIQUE.
soit pour Stre envoy^s k Thospice des Enfants assist^s, soil pour
toute autre cause ^trangdre k une faute de 1 'enfant (1). 11 va
de soi aussi qu'il ne s'agit que des enfants amends au D6p6t
pour ^tre examines par le petit parquet et qu'en dehors d'eux,
ont 6i6 conduits dans los postes de police, puis rel&ch^s pres-
que aussit6t un grand nombre d'enfants arrfit^s pour des v^tilles.
L'important est de savoir, d'apr^s les motifs des arrestations,
quelles sont les causes de la corruption des enfants; une fois
le diagnostic connu, de rechercher, puis d'appliquer le remade
que le mal comporte.
Or, le motif dominant des arrestations, c'est le vagabondage
qui repr^sente presque invariablement tons les ans 45 p. 100,
soit prds de la moitid des d^lits commis par Tenfant. C'est done
la question du vagabondage qui domine tout ce qui concerne
Fdtude de Tenfance coupable. Nous y reviendrons tout h I'heure.
Apr5s le vagabondage, la mendicity repr^sente environ 16 p. 100
dans la proportion des d^lits. Or un enfant mendie parce que
ses parents le laissent dans la misfere ou, ce qui est encore trds
frequent, parce que ses parents, pour en tirer parti, le forcent k
mendier. Ici, comme partout dans les d^lits de Fenfance, appa-
rait la responsabilitd directe des parents. Quant au vol, il figure
pour une proportion de 35 p. 100. Tons ces d^lits [sont d ail-
leurs frferes jumeaux, souvent mfime ils vont de compagnie. Le
vagabondage est le point de ddpart, les autres d61its en d^cou-
lent comme de source, et parmi eux, pour les fiUes, la prosti-
tution.
Parlous maintenant du vagabondage (2). Nous savons en
quoi consiste ce d6litpour Tadulteetlemajeur, c'est-Ji-dire pour
ceux auxquels leur Age et leurs forces permettent de travail-
ler. L'article 270 du Code p6nal exige quatre conditions : dtre
1® sans aveu ; 2^ sans domicile ; 3^ sans moyens de subsistances ;
4<* sans metier. Or, pour un mineur de 16 ans, pour un en-
(1) Par exemple, en 1892 (rapport Guillot de 1894), il a 6t6 amen^ au d^pdt :
233 enfants ^gar^s, 619 enfants assistes, 1012 enfants en bas &ge entr^s avec
leurs mftres.
(2) Voir les substantiels rapports de M. Passez, avocat au Gonseil d'l^tat, au
Comity de Defense.
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 199
fant, existe-t-il un vagabondage? Nous sommes deceux qui pen-
sent qu'il ne saurait y avoir en principe de vagabondage pour
I'enfant, par la raison trfes simple que Tenfant a pour domicile
celui de ses parents et que c est k eux qu'il appartient de pour-
voir k sa subsistance et de le surveiller. S'ils n'ont pas eux-
mSmes de domicile, enquoi Tenfant en peut-il 6tre tenu comme
responsable? Quant au metier, comment reprocher k un enfant
de n'avoir ni Vkge, ni la force physique, ni les aptitudes pro-
fessionnelles n^cessaires pour rexercer?Et puis avant 13 ans
est-ce que les lois scolaires et celles qui r^glementent le travail
n'interdisent pas le travail de Tenfant? D'ailleurs, de .13 k
16 ans, c'est k peine si Tapprentissage est termini. — II faut
done bien reconnaitre que Tenfant ne remplit aucune des
quatre conditions exig^es par Tart. 270 du Code p6nal pour 6tre
un vagabond. Nous sommes done autoris^ k dire que la quali-
fication de vagabond n'a pas de sens k Tdgard du mineur de
16 ans. L'enfant errant, sans domicile, TArabe des rues,
selon rexpression anglaise,n'est en fait qu'un moralement aban-
donn^. La soci6t6 n'a pas le droit de le punir de ce chef seul ;
ce n'est pas un coupable, c'est un malheureux. Et la preuve,
c'est qu'il n'y a pas de vagabond parmi les enfants de families
riches. Quand les enfants pauvres vagabondent, couchent sous
les ponts, dans les carri^res, s'endorment sous une porte co-
ch^re, malgr^ le froid et la pluie, ce n'est pas assur^ment pour
leur plaisir, c'est parce que la n^cessit^ et la mis^re ne leur
laissent pas d'autre alternative. II faut done user vis-^-vis d eux
non de p^nalitds, mais de moyens d'assistance. — Voulons-
nous dire qu'il n y a pas d'enfants vicieux, pervers, capables
de ddlits et m^me de crimes? En aucune faQon. 11 est clair que,
aprfes un certain temps de cette existence nomade, de la fr6-
quentation de mauvais sujets, de la misdre, mauvaise conseil-
I^re, Tenfant a fait son apprentissage du vice. II fmit mSme par
s'y complaire. L'6tat de nature, comprim6 par F^ducation et
les liens qui nous unissent tous, pauvres ou riches, k la soci^t^,
cet 6tat de nature reparait dans toute sa sauvagerie et avec
toates ses consequences de rapine et de violence. Dfes lors, la
society doit se d^fendre. Seule T^ducation correctionnelle
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200 REVUE PHILANTHROPIQUE.
pourra — encore s'il n'est pas trop tard — r6former ces carac-
t^res indompiables. Mais au d^but de sa vie nomade, si lors-
qu'il u'^tait encore qu'un moralement abandonn^, la socidt^,
suppliant h la d^faillance des parents, avail mis en oeuvre ses
moyens d'assistance, I'dducation hospitali^re aurait, sans aucune
difficult^ s6rieuse, — Texp^rience le prouve tons les jours, —
de cette graine de mauvais siijet fait un excellent et docile
apprenti.
II y a done deux types bien distincts dans T Arabe des rues :
Tun n'est encore qu*un malheureux digne de pili^, Tautre est
devenu un 6tre redoutable par ses m^faits. Toule Thabilet^
du juge et de Tadministrateur sera de ne pas confondre Tun
avec Tautre afm de leur appliquer un syst^me different. Mais
avant que TAssistance publique de Paris n'eAt en 1881 organist
son service des moralement abandonn^s et fait de la pratique
avant toule thdorie, avant que la loi du 24 juillet 1889 n'edt
officiellement introduit Tid^e de mansu^tude dans le traitement
des d6lits de Tenfance, la soci6t6, faisant un bloc des malheu-
reux et des coupables, les avait indistinctement et brutalement
soumis au m6me regime, absolument comme avant Pinel on
mettait h la chaine et en cabanon aussi bien les fous qui n'^taient
que des malades, que des gens perdus de crimes. Nous allons
voir quels singuliers proc6d6s avait imagines le « sage » l^gis-
laleur. Les articles 269 et suivant du Code pdnal d6terminaient
les 6l6ments du d^lit de vagabondage et fixaient ainsi la peine,
pour Tadulte : la prison; pour le mineur de 16 ans — eh
quoi ! des cnfants de 5, 6 ans? parfaitement ! — la surveil-
lance de la haute police, — excusez du pen ! — jusqu*i Tftge
de 20 ans. Depuis la loi du 27 mai 188S sur la relegation,
la surveillance de la haute police a 6t6 remplacde par Tinter-
diclion de s6jour, et comme le fait remarquer justement notre
ami M. Guillot dans un dc ses rapports toujours si impr6gn6s
de tendresse et de piti6 pour Tenfance, ces 6tranges pdnalit^s
semblent s'adapter si mal & Tenfant, qu'on pent se deman-
der si elles sont bien faites pour lui. Aussi, St Paris du moins,
en vertu dune jurisprudence ing6nieuse qu'a consacr^e la Cour
de cassation dans un important arr6t du 30 juin 1892, Tinter-
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 201
nement du mineur, en vertu de Tarticle 66 du Code p^nal, est
consid^r^ comme Equivalent k Tinterdiction de sEjour. Mais
comme, malgrE tout, la loi n'est pas modifi^e, il est loisible h
des tribunaux d'appliquer cette peine singulidre, dont le r^sul-
tat est d*6Ioigner Tenfant du domicile de ses parents, de ceux
que le Code civil et la nature lui donnent pour protecteurs pen-
dant sa minority. Mais c'est pr^cisEment organiser le vaga-
bondage officiel. Comment alors cet enfant — n'oublions pas
qu'il n'y a pas de minimum d'Age — pourra-t-il vivre, livrE k
lui-m6me et sans secours de personne ? c'est le condamner au
vol et k la prostitution. On ne saurait rien imaginer de plus
inintelligent et de plus barbare.
II est done de toute Evidence que le Code pEnal doit 6tre
rEformE sur ce point. Aussi, k TunanimitE, le ComitE a votE la
proposition de M. Passez : « L'interdiction de sEjour est inap-
plicable aux mineurs de 16 ans, traduits en justice pour vaga-
bondage. » Remarquons toutefois que Timportant arrfet du
20 juin 1842 citE plus haut, tout en ayant dans TespEce 616 un
bienfait, n'en a pas moins consacrE la doctrine que le vaga-
bondage du mineur de 16 ans est un dElit et qu'il doit 6tre
poursuivi devant les tribunaux correctionnels. Cette doctrine
a dautre part 616 adoptde par la majority du ComitE, malgrE
les efforts de M. Guillot et les ndtres, sur les observations de
M. Petit, conseiller k la Cour de cassation, qui a soutenu qu'il
serait dangereux de declarer que le vagabondage n'est un dElit
que suivant T&ge. Mais ce qui pent nous consoler, c'est que la
question a surtout un caractfere thEorique et philosophique et
que la qualification de d6lit appliqude au vagabondage, permet
d utiliser Tarticle 66 du Code pEnal. En r6sum6, la situation du
mineur de'16 ans qualifiEe de vagabondage est la suivante :
s'il a agi avec discernement, il est condamn6 k Tinterdiction
de sEjour avec faculty — si TautoritE militaire Taccepte — de
s'engager Ji 18 ans; s'il est dEclarE avoir agi sans discerne-
ment, application de Tarticle 66 et envoi en correction jusqu'i
sa majority.
Quel est done le remfede au vagabondage de Tenfant? II faut
le rEpEler sans se lasser, c'est dans des mesures de tutelle et
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aoa REVUE PHILANTHROPIQUE.
d'assistance et non dans I'arsenal des p^nalitds qu'il faut le
chercher, tant que Tenfant n'est pas perverti et qu'il n'est
encore qirun moralement abandonn^. Mais lorsque du fait de
ses mauvaises frdquentations, la corruption Ta gangren(^, il
convient de Tenvoyer r^solument dans une maison d'^ducation
correctionnelle pour un long temps, sauf, s'il s'est amende, Ji le
faire b^n^ficier de la liberation conditionnelle. Quant a lui
appliquer une courte peine, tout le monde est d'accord pour
declarer que rien n'est plus funeste k Tenfanl; ce n'est pas
un cb&timent qu'il faut lui infliger, c'est un redressement m^-
thodique de ses habitudes vicieuses, et il ne pent s'obtenir que
par les m^thodes longues et la discipline rigoureuse des mai-
sons d'^ducation correctionnelle.
Ce n'est point tout Ji fait ainsi que M. Passez, rapporteur de
la question du vagabondage devantle Comity de defense, a envi-
sage le probl^me. M. Passez reconnait bien que la plupart des
petits vagabonds sont simplement des enfants non surveill6s
ou que leurs parents ont expuls^s pour s'en d^barrasser ; nean-
moins, ne poussant pas son raisonnement jusqu'au bout, il a
propose auComite de s'inspirer des mesures de correction paler-
nelle qui seraient appliquees d'office par les magistrals h
Tenfant arrete pour vagabondage une premiere et une deuxieme
fois. Apres la premiere arrestation, le president du tribunal
civil enverrait Tenfant en correction pour un mois et pendant
six mois apres la seconde arrestation. Ce ne serait qu'apres la
seconde arrestation que le jeune vagabond pourrait 6tre con-
damne h la prison ou envoye en vertu de Tarticle 66 en correc-
tion jusqu'ii sa majorite. Ges propositions n'ont pas trouv6
faveur aupres du Comite, ce qui nous dispense d'en faire res-
sortir les inconvenients. Nous serous plus d'accord avec lui sur
le principe d'une penalite St trouver contre les parents respon-
sables de la mauvaise conduite de leur enfant. Mais nous ne le
sommes plus du tout quant aux mesures qu'il propose; nous
les croyons inapplicables et inefficaces. Ce serait ladmonition
au moment de la premiere et de la seconde arrestation du mi-
neur et h la troisieme on leur infligerait une amende. C'est le
systeme usite en Angleterre. Mais TAngleterre n'est pas la
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 203
France et nous mettons bien au d6fi de faire recouvrer Tamende
sur la majority des parents par la raison p^remptoire que ce
sont des indigents sans aucune ressaurce ou des gens sans feu
ni lieu. Nous pensons que la pdnalitd doit plutdt 6tre cherch6e
d'une part dans la privation des droits civiques et de Tautre
dans Tapplication de Tarticle 2 de la loi du 24 juillet 1889
qui permet de prononcer la d^ch^ance des droits paternels
centre les parents dont les enfants ont 6t6 envoy^s en correc-
tion.
U est toutefois juste de reconnaltre que la responsabilit^
des parents est att^nu^e par les conditions m6mes du travail
dans sa forme modeme, que souvent ce n'est pas leur faute s'ils
iaissent leur enfant livr6 k lui-m6me, obliges qu'ils sont d'aller
travailler au loin et de ne rentrer qu'i la nuit. D'autres causes
sociales p^sent encore sur Touvrier et sont, sans qu'il y ait de
sa faute, des ^l^ments actifs de demoralisation de la famille;
au premier rang, il faut placer le logement dont Texiguit^
favorise la promiscuity. La r^forme du logement est capitale
entre loutes; comme Ta 6crit M. Georges Picot, le probl^me du
logement est le noeud de la question sociale, et Jules Simon a
proelam^ avec raison « qu'U faut sauver la society par la morale,
la morale par la famille, et la famille par le logement ». A ceux
qui ont lu, dans cette Revue m^me, Tadmirable article de
M. Siegfried sur les habitations k bon march^, il n'y a plus
rien k apprendre sur ce sujet. On voit comme tout se tient,
s'enchatne, se r6per<;ute dans les questions sociales, puisquepour
chercher le rem^e au vagabondage de Fenfant, on est amen^
i tenir compte d'une foule d'6l6ments au premier abord stran-
gers k la question, comme par exemple des conditions du tra-
vail en atelier dans les usines, les grands magasins, de la
question des garnis, de rexiguitd des logements d'ouvriers, etc.
Nous conclurons avec M. Guillot que la vraie solution de
TamSlioration de Tenfant doit 6tre recherchSe « dans la recon-
stitutionde la famille, dans un sentiment plus vif dela solidarity
sociale se dSveloppant chaquejouriFhonneur de notre sifecle »•
M. Guillot remet enfin k la lumifere un article en eflfet bien
oubliS du Code p6nal, c'est Tarticle 273, qui n'a jamais 6t6
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204 REVUE PHILANTHROPIQUE.
appliqu^. 11 n'est pas en effet bien applicable, mais il n'en est
pas moins fort curieux. Aux termes de cet article 273, le
vagabond peut, m^me aprds le jugement, 6tre Iih6r6 de sa peine
et des mesures de surveillance qui en sont la consequence, si le
conseil municipal de sa commune prend une deliberation pour
le redamer ou si un citoyen solvable se prdsente pour le r6cla-
mer. — Pour utopique que soit cet article, surtout dans un
Code penal, il n'en etait pas moins interessant h rappeler, « car
il contient en germe le devoir communal, le patronage ct le
concours de Tinitiative privee » en faveur des vagabonds.
II serait trop long d'entrer dans les debats qui ont occupe
plusieurs seances du Comite, nous nous bornerons h donner le
texte resume des vceux soumisau Comite par M.Passez, rappor-
teur et qui onl ete adoptes dans leur principe : 1® Seront consi-
deres comme vagabonds les mineurs de 16ans, qui, ayant, sans
cause legitime, quitte le domicile legal de leurs parents ou leurs
lieux de placement, ont ete trouves soit errants, soit logeant
en garni, soit sans profession reguliere, soit tirant leurs res-
sources de la debauche oude metiers prohibes. 2*> Les jugements
declarant les mineurs de 16 ans en etat de vagabondage seront
transcrits sur un registre special; il n'en sera fait mention que
sur les extraits du easier delivr6s k Tautorite judiciaire. 3® Les
vagabonds, mineurs de 16 ans, ne pourront etre condamnes h
la prison; ils seront places jusqu'^ leur majorite dans desecoles
de preservation, relevant de Tadministration penitentiaire, mais
pourvus d'un personnel special ct soumis k la surveillance
prescrite par Tarlicle 8 de la loi du 8 ao6t 1880. 4® Les mineurs
qui s'evaderont ou seront insubordonnes pourront etre in-
ternes dans une maison de correction ; ceux dont la conduite
sera bonne pourront 6tre mis en liberte provisoire et confies i
des societes de patronage ou rendus k leurs parents. 5^ S'il est
constate que la faute de Tenfant est imputable aux parents,
le tribunal, sans prejudice de Tapplication de la loi de 1889,
leur infligera une amende de i& ki 000 francs et prononcera
contre eux Tintcrdiction des droits civiques. lis devront, en
outre, participer aux frais de Teducation dans la maison de
preservation ou de correction. 6^ Les mSmes dispositions sont
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 205
applicables aux mineurs de 16 ans convaincus de mendicity.
Enfin, le Comity, pour indiquer combien il approuvait la
sagesse de la disposition finale de Tarticle 271 du Code p^nal, a
vot^ la resolution suivante : « L'internement dans la maison
de preservation et de correction cessera pour les pupilles rem-
plissant les conditions exig^es par les lois et r^glements mili-
taires, qui conlracteront un engagement r^gulier dans les
armies de terre ou de mer. » Le Comity s'associait ainsi 4 Tuna-
nimite aux conclusions du rapport de M. le conseiller Felix
Voisin sur Tengagement militaire du jeune vagabond {Bulletin
de la Society g^irale des prisons, mai 1893, page 600) et du
rapport au Comite de M. Albert Rivifere. On ne pent qu'fitre
convaincu, avec cet homme d'un si grand cceur, quele meilleur
moyen et le plus efficace de reformer un grand nombre de
natures indisciplinees, c'est de les incorporer dans Tarmee, oil
ils sontbien obliges d'y prendre des habitudes d'ordre, der^gu-
larite et de discipline. Nous ajouterons m^me que si, dans la
vie civile, telles tendances de caractfere comme Texuberance,
renergie sans emploi y sont des defauts qui conduisent h, des
delits, au contraire, sous Taction de la discipline, elles se
transforment facilement en de pr^cieuses qualites dans la vie
militaire. L'engagement dans la marine — surtout celle de TEtat
— a particuli^rement donnd les r^sultats les plus satisfaisants.
Ainsi qu'en temoigne M. Rivifere, « Tenfant, k bord des bdti-
ments, est suivi de trfes prfes par ses chefs; il vit avec eux, il
sent leur attention fix^e constamment sur lui ; de \k ces habi-
tudes de proprete, de bonne tenue que nous admirons dans
notre arm^e navale. Les chefs, de leur c6te, ont Tesprit remar-
quablement ouvert aux questions d'ordre social; leur discipline
est paternelle autant que ferme. L'enfant subit cette superiorit6
morale, sans s'en rendre compte, il obeitsans eflFort et acquiert
rapidement Tesprit militaire. » Tout cela est fort juste. Mais il
ne suffit pas d'inscrire dans une loi une prescription en faveur
de Tengagement; le legislateur avait oublie dans Tarticle 271
que Tautorite militaire est seule juge de Topportunite d'auto-
riserles engagements. C'est ainsi que le ddcret du 19 Janvier 18H ,
qui specifiail que les enfants des hospices seraient incorpores
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206 REVUE PHILANTHROPIQUE.
dans les armies de terre et de mer, est demcur^ de tout temps
lettre morte. La marine notamment a toujours refus6d'accepter
comme mousses ou pilotins les enfants assist^s qu'on lui pro-
pose, k cause du privilege que tr^s l^gitimement elle reserve
aux enfants des inscrits maritimes. A plus forte raison, Tarm^e
et la marine n'accueillent pas volon tiers les mineurs sortant des
maisons correctionnelles. Elles ob^issent en cela h des preoc-
cupations que des civils ne peuvent tout d'abord comprendre. Et
il faut bien le reconnaitre, quelle que soit notre soUicitude pour
tout ce qui concerne la rehabilitation, le relfevement et le patro-
nage, il est une question plus haute et d'une importance sup6-
rieure pour le pays. C'est de n'affaiblir en rien cet esprit mili-
taire qui, avec son code special d'honneur, de sacrifice et de
patriotisme, est la force morale de Tarm^e. II ne faut pas ris-
quer pour des experiences gen^reuses de froisser par le contact
d'elements impurs les jeunes soldatset peut-^tre de leur appor-
ter la corruption ; surtout k une epoque ou le service est obli-
gatoire pour tons, cette susceptibilite legitime en soi est plus
eveillee. II a done fallu k M. Felix Voisin une prudence con-
sommee, depuis qull a fonde cette admirable societe de pro-
tection des engages volontaires el eves sous la tutelle adminis-
trative (1), pour surmonter les difficultes de cette nature et
(1) Objet de la SocUU,
Article premier. — Une Soci^t^ est form^e dans le but d'encourager les enga^
gements volontaires des jeunes gens ^lev^s .
1° Dans les maisons d'^ducation correctionnelle', publiques ou privies ;
2" Sous la tutelle de I'Assistance publique en quality : soit d'enfants assist^s,
soit d'enfants moralement abandonn^s qui, ayant atteint I'dge de Tengagement
pour les armies de terre (18 ans) et de mer (16 ans), se seront montr^s dlgnes
d'aide et de protection par leur bonne conduite, leur assiduity au travail et leur
progrfes i r6cole.
L'action protectrice de la Soci6t6, i regard de ces jeunes gens, s'exercera
pendant la dur6e de leur s6jour au corps, dans les conditions et les limites d^
termin6es par Tautorit^ militaire. ainsi que par Tautorit^ maritime; elle les
accompagnera 6galement au moment de leur rentr^e dans la vie civile.
Article 2. — La sollicitude de la Soci6t6 pourra aussi s'^tendre aux jeunes
gens qui, frapp^s d'une condamnation, auront 6t6 appel^s au service militaire
par la loi du recrutement, si, pendant leur detention, ils ont t6moign6 d'un veri-
table repentir et donn6 des gages certains de leur retour li des sentiments hon-
ndtes.
(Par suite d'une decision de M. le Ministre de la Marine, les engagements ne
sont plus re^us, dans les Equipages de la flotte, qu'& 18 ans.)
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 207
obtenir les autorisations d'engagement. Par les consolants et
probants r^sultats dont t^moignent les comptes rend us annuels
de cette belle oeuvre, ila pu ddmontrer par le faitaux autorit^s
militaires que leurs repugnances centre Fintroduction dans
Fannie d'^I^ments que certains consid^raient comme dange-
reux n'^iaient pas fonddes. Mais il est vrai que M. Voisin ne*
propose et ne patronne que I'engagement de natures r6for-
mables et qu'il procMe h des selections judicieuses. C'est dans
cet esprit de sagesse et de discernement que devra toujours
^tre maintenue la direction de cette grande oeuvre de relfe-
vement.
II ne nous reste, pour terminer cette question des deiits de
Tenfance, qn'k indiquer les moyens proposes par le Gomite pour
reprimer dans la mesure du possible la prostitution des mineurs
de 16 ans. II ne faut pas oublier, ainsi que Fa ^crit M. d'Haus-
sonville^ dans sa belle etude de Fenfance k Paris, que « la
prostitution, k ses debuts, n'est pour les mineures qu une des
formes et une des consequences du vagabondage ». — Plu-
sieurs rapports sur ce sujet ont ete presentes au Comite par
MM. RoUet, avocat, M. Bregeault, substitut du procureur general
et Ferdinand Dreyfus, membre du conseil superieur des pri-
sons. II y faut ajouter un travail tr^s interessant de M. Marc
Reville {la Prostitution des mineurs selon la loipinale, a propos
du Congres penitentiaire de 1895).
Si la situation des jeunes garQons qui, par suite de la negli-
gence de leurs parents, mfenentune vie errante est digne d'inte-
ret, combien plus lamentable et digne de pitie celle de ces
infortunees petites fiUes qui, livrees k elles-mdmes sur le pave
de Paris, deviennent le jouet de vauriens de tout 4ge, en atten-
dant que la debauche, la misfere, quelque lugubre maladie les
envoie k Fh6pital! Comment peut-on les empecher de tomber
dans cet abime?par quels moyens peut-on reprimer la prosti-
tution de ces malheureuses?
Et tont d'abord nous nous demandons, comme pour le jeune
vagabond, pourquoi la loi a fait un delit de la prostitution de
ces enfants? Nous voyons en elles des victimes, nous refusons
de les considerer comme delinquantes. Les deiinquants ce sent
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208 REVUE PHILANTHROPIQUE.
ceux qui en abusent, vieux ou jeunes, ce sont ceux qui tra-
fiquent de leur d^bauche, ce sont les souteneurs, les logeurs en
garnis, les d^bitants qui favorisent et facilitent la prostitution
en leur foumissant les moyens de s'y livrer.
La discussion devant le Comity de defense de cette triste
question de la prostitution des mineures avait 6t6 6clair6e par
destravaux nombreux.Le Congr^s p^nitentiaire delSOSTavait
d^ji trait 6e et avait adopts des voeux proposes parMM.le comte
d'Haussonville, Yves Guyot, B^renger, etc. Le Comity avait en
outre sous les yeux le projet d^pos^ au S6nat par un de ses
membres les plus considerables, M. B^renger, et qui adopts
par cette assembl^e ^tait soumis au Corps l^gislatif. Enlin, il
connaissait les r^sultats d6]k obtenus par M. Adolphe Guillot
en faveur de ces malheureuses, par son entente avec la prefec-
ture de police et le parquet et qui permettaient d'envoyer les
mineures arr6t6es pour prostitution d'abord k Tinstruction ju-
diciaire, puis soit en correction, soit dans une des rares oeuvres
de sauvetage qui consentent k les recueillir.
La premifere conclusion du tr^s remarquable et trfes sub-
stantiel rapport de M. Ferdinand Dreyfus avait pour but de
relier les vceux du Comit6 au projet plus etendu depose au
S^nat par M. B^renger. A 1 'unanimity, le Comity a done declare
qu'il donnait son enti^re approbation aux intentions g^ne-
reuses qui out inspire la proposition vot^e par le Sdnat en
juin 1893 sur le rapport de M. Berenger et qu'il approuvait
notamment les dispositions relatives : 1<> ft la repression des
faits commis par ceux qui ont soutenu, aide ou assiste la pro-
stitution d'autrui sur la voie publique; 2*» aux penalites encou-
rues par les cabaretiers qui fournissent aux femmes le moycn
de se livrer a la prostitution; 3<> k la repression de Tembau-
chage par violence ou par fraude en vue de la prostitution.
Un second point fut egalement admis sans difficulte :
Textension ft 18 ans de la majorite penale, ainsi que Tavait
admis le Senat.
Mais un point en apparence purement psychologique et qui
ressemble ft une question d'ecole a ete Tobjet de grandes dis-
cussions. Doit-on assimiler la prostitution au vagabondage? De
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 809
graves consequences pratiques d^coulent de la solution doim^
k cette question. L'article 2 du projet votd par le S^nat est
ainsi con<^u :
« Tout mineur de Tun ou Tautre sexe, &g€ de moins 4e
18 ans, saisi en ^tat habituel de prostitution sera conduit, apr^
instruction ou enqu6te, devant le tribunal correctionnel, sta-
tuant en chambre du conseil, qui ordonnera, suivant les cir-
constances, sa remise k ses parents, son envoi jusqu'& sa ving-
ti^me ann^e dans les conditions pr^vues par la loi du 5 aoAt
1850, dans tel ^tablissement de correction, d'^ducation ou de
r^forme ou telle famille honorable qu'il d^signera, ou sa remise
k I'Assistance publique dans les termes de la loi du 24 juillet
1889. »
En ce qui nous conceme, nous dirons tout de suite que nous
trouvons cette proposition parfaite. Elle r6sout le problfeme en
lui donnant un caract^re hospitalier, en en faisant une ques-
tion d* assistance. Mais le Comity n'a pas ^l^ de cet avis et sur
les observations de M. Guillot il a pr6f6r6 se placer sur le ter-
rain judiciaire, ce qui permettait d'adapter les regies des codes
p^nal et d'instruction criminelle k TappHcation des mesures de
sauvegarde de la mineure. Le Comity a done vote que : « la
prostitution, mfeme non habituel] e — le texte du S^nat avait au
contraire vis6 la prostitution habituelle — des mineurs des
deux seres de 18 ans est assimil^e au vagabondage. Toutefois
et vu I'utilite d'appliquer au fait de la prostitution des mi-
neures une procedure sp^ciale, le Comity ^met le va5u que les
tribunaux statuent k huis clos, le defendeur entendu, et qu'ils
ordonnent, suivant que les int^rfits de I'enfant Texigeront, ou
qu'il sera remis k ses parents pr6sentant des garanties suffi-
santes de morality, ou qu'il sera, pendant tel nombre d'ann^es
que le tribunal appr^ciera et qui ne pourra toutefois d^passer
la majority, confix k T^tat, represents par Tadministration
p^nitentiaire, pour 6tre place dans les maisons d'education cor-
rectionnelle organisees k cet effet. Les dispositions de la loi du
5 aoAt 1850 seront applicables k cette mesure comme en ma-
tifere d'envoi en correction.
Les parents declares responsables de n'avoir pas surveilie
■KTCI PHILAIfTHfiOFIQUI. — II. 14
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210 REVUE PHILANTHROPIQUE.
leur enfant seront tenus, en tout ou en partie, des frais de
garde et d'^ducation des mineurs. »
Nous le rfip^tons, nous d^plorons ce vote qui 6carte, con-
trairement aux tendances ordinaires du Comity, la solution hos-
pitali^re du projet de M. B^renger.
Mais sur un autre point trds important, le Comity a pris une
resolution pratique qui a permis imm^diatement d'atteindre et
de r^primer les exploiteurs de la prostitution.
D^ji, sur le rapport de M. Passez, le Comity avait votd un
vceu tendant k frapper d'un mois k un an de prison et d'une
amende les logeurs et cabaretiers donnant asile k des mineurs
pour se livrer k la d^bauche. A la premiere infraction, le tri-
bunal pourrait fermer T^tablissement ; k la r^cidive la fermc-
ture etait obligatoire. S'inspirant de la m6me pens^e, une des
propositions de M. Guillot ^tait ainsi formulae : « Le Comity
estime que la prostitution des mineurs de 16 ans rencontre-
rait plus d'obstacles, si les inspecteurs qui arrfitent les jeuncs
filles se livrant au racolage Staient tenus de verbaliser contre
les logeurs, de pr^ciser les circonstances de la contravention et
de noter dans leurs rapports les indications diverses pouvant
servir de base k une instruction judiciaire pour excitation k la
debauche ou d^toumement de mineures. » Appuy^e par M. B^-
renger, par M. Ferdinand Dreyfus, par M. Finspecteur g6n6ral
Puibaraud, par M. Bregeault, cette proposition fut vot6c. Son
importance est dvidente. Jusqu'ici la Justice n'avait aucun
moyen juridique d'atteindre les logeurs. Le syst^me indiqud et
qui ne demandait aucune mesure legislative, mais simplement
un acquiescement de la Prefecture de police, permettait au
contraire aux tribunaux correctionnels d'appliquer aux logeurs
Tarticie 334 du Code penal. Le vote du Comite a ete aussitdt
entendu par M. le prefet de police, et ce magistrat a donne des
ordres immediats pour qu'^ Tavenir le bureau des mo^urs
adress&t au procureur de la republique les proc^s-verbaux
dresses pour infraction aux ordonnances du 6 novembre 1778
et 8 novembre 1780, destines jusque-lli au tribunal de simple
police. La circulaire prefectorale terminait ainsi : « A cette occa-
sion, il conviendra de faire autant que possible mentionner par
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 211
les commissaires de police, dans leurs procfes-verbauXy I'^tat
civil des fiUes do d^baucho roQues chez les contrevenants aux-
dites ordonnances, afin que ceux-ci n'^chappent pas, le cas
teh^ant, aux p^nalit^s pr^vues par I'article 334 du Code p^nal.
<( Je profile de cette circonstance pour rappeler que nous
devonSy au point de vue sp<Jcial qui nous occupe, faire tout ce
qui est en notre pouvoir pour prot^ger les enfants mineurs en
atteignant par tons les moyens possibles les individus vis^s par
rarlicle334. »
Cette d^pdche de M. le pr6fet Lupine, inspir^e par M. le
chef de division Honnorat, leur fait le plus grand honneur et la
prefecture de police, en donnant simplement un ordre au
bureau des moeurs, k rendu k la cause de Tenfance un service
signals dont il faut leur avoir la plus grande reconnaissance.
Un pareil r^sultat, si considiJrable dans ses consequences,
est un des principaux obtenus par Taction du Comit6 de de-
fense. II montre que la cooperation, dans une m6me assembiee,
des bons vouloirs de collogues appartenant au barreau, k la
magistrature, k Fadministration, aux assemblies eiectives
permet la solution facile et pratique de problfemes douloureux
qui sans ce travail en commun, poursuivi avec un egal d^voA-
ment aux interftts de Tenfance, risquerait de demeurer indefi-
niment sans realisation.
La mesure de M. le prefet de police devait causer un grand
emoi parmi certains logeurs et dans leur clientele, et pen
de temps aprfes M. Tavocat general Bregeault annouQait joyeu-
sement au Comite que le tribunal etait dej^ saisi de poursuites
contre certains logeurs. Desormais c'est k la vigilance du par-
quet, des juges d'instruction et du tribunal que dans le depar-
tement de la* Seine il appartiendra de tirer de cette nouvelle
jurisprudence, les consequences utiles. La prefecture de police,
sar rinitiative du Comite de defense, a foumi Tarme la plus
efficace pour atteindre les exploiteurs de la debauche des
mineures.
C'est k la Justice k agir sans s'arreter aux doleances d'une
corporation plus puissante qu'on ne croit. Toutefois il ne
s'agit ici que du ressort de la prefecture de police. Les Comites
I
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212 REVUE PIIILANTHROPIQUE.
de defense institu^s dans les grandes villes de France oii,
sans 6tre aussi aiga et aussi ^tendu, le mal est de m6me na-
ture, devront k leur tour agir aupr^s des autorit^s adminis-
tratives comp^tentes pour obtenir les m6mes r<Jsultats.
Quelques mesures compl^mentaires ont 6t6 recommand<Jes
par le Comity, commc la creation d'^tablissements sanitaires
sp^ciauxy d'un caractfere moralisateur pour les prostitutes mi-
neures de 16 ans, Torganisation, pendant la prevention, d'un
quartier cellulaire distinct, afin de preserver les autres enfants
de la contagion morale, etc.
Telles sont les mesures r^clam^es par le Comity, dont
quelques-unes sont ddjft r6alis6es, dont d'autres le seront cer-
tainement. Mais pour grande que doive 6tre notre satisfaction,
nous ne sommes pas assez naif pour penser que la plaie de la
prostitution enfantine en puisse 6tre s^rieusement cicatris^e.
La prostitution enfantine est une maladie sociale qui derive
de causes trop multiples et trop enracin<Jes pour qu'on puisse
esp6rer la gu^rir. C'est d6ji beaucoup de pouvoir Tendiguer, de
larendre plus bdnigne, d'en att^nuer les consequences. Les vrais
palliatifs ^y apporter consisteraient, suivant nous, dans la large
application de mesures d'assistance, dans Tutilisation s^rieuse
de la loi de 1889 qui permettrait de placer ces malheureuses
non surveill6es par leurs parents, ou exploit6es et debauchees
par eux, sous la tutelle des services hospitallers et de les faire
eiever ensuite dans des etablissements speciaux oil serait re-
faite leur education morale. Le tout est de les recueillir au
debut, car lorsque les enfants ont mene un certain temps ceU©
vie de vagabondage et de debauches, la pourriture est coii\*
pl^te et le mal est irremediable.
Nous preconiserions aussi toutes les mesures de nature k
fortifier le lien familial, & arr6ter le developpement de la littd-
rature et des excitations pornographiques, que dis-je? i recon-
stituer la morale sur des bases solides et fixes. Mais k soutenir
ces opinions, on passe pour un esprit fort arriere, k tendances
reactionnaires, *que sais-je mfime? clerical, fAt-on juif, libre pen-
seur ou bouddhiste. Ce qui serait pis, — car de ces accusations
on pourrait prendre gaiement son parti, — c'est qu'on parlerait
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 213
dans le desert. Et puis, on serait traits de vieille baderne. Et
aprfes tout, il est possible qu'on n'eAt pas tort.
Dans un article suivant, nous exposerons les travaux du
Comity en ce qui touche la detention par voie de correction
patemelle, puis en ce qui regarde Tapplication de la loi du
24 juillet 1889 relative k la protection des enfants maltrait^s
et moralement abandonn^s, enfin nous ferons connaltre une
proposition fort int^ressante de M. Paul Nourrisson sur Tattri-
bution aux soci6t6s de bienfaisance, reconnues, du droit de
citation directe contre les auteurs d'actes de violence ou dlm-
moralitd contre I'enfance.
LOYS BRUEYRE.
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LES SOURDS-MUETS ET L'ASSISTANCE
HISTORIQUE DE L'ENSEIGNEMENT DES SOURDS-MUETS
PAR LA PAROLE
Toute infortune imm^rit^e a le don de nous ^mouvoir; mais
il semble qu'une piti6 plus vive nous monte au coeur quand le
malheur frappe des enfants. C'est pourquoi ToBuvre de Tas-
sistanee, belle entre toutes^ revfit un caract^re plus touchant
encore^ quand elle se donne pour mission, en r^parant les er-
reurs et les injustices de la nature, de soulager les mis^res phy-
siques et morales des jeunes aveugles et des sourds-muets.
Plus que les autres enfants, puisqu'ils en out plus besoin,
ces d6sh6rit6s ont droit k Tinstruction et k T^ducation.
L'instruction des sourds-muets est une obligation pourT^tat,
« une dette nationale », suivant T^nergique expression de Roger
Ducos k la Convention. Les assemblies de la Revolution, ren-
dons-leur cette justice, comprirent de suite qu'il y avait dans
Tabandon oti vivaient les sourds-muets, sous Tancien regime,
comme un crime de l^se-humanit6.
Une deputation de TAssemblee constituante vint trouver
Tabbe de L'fip^e k son lit de mort ; et comme il paraissait craindre
pour Favenir de son oeuvre : « Mourez en paix, lui dit Cham-
pion de Cice, archevfique de Bordeaux, la Patrie adopte vos en-
fants. » Les reprdsentants de la nation ont tenu cet engage-
ment.
Les 21 et 26 juillet 1791, les Constituants d6clarferent « que
le nom de Tabbe de L'^p^e serait place au rang des citoyens qui
ont le mieux m^rite de I'humanite et de la Patrie » et decr6-
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LES SOURDS-MUETS ET L'ASSISTANGE. 215
tdrent que son humble ^cole de la rue Desmoulins serait trans-
form6e en Institution nationale.
Le 28 juin 1793, les conventionnels adopt^rent les sourds-
muets comme enfants de la France. « Tons les enfants appar-
tiennent Jila Patrie ». s'^crie Roger Ducos, et, pour leur assu-
rer « rinstruction qu'ils ont droit d'exiger », on ordonne la
creation de six dcoles nalionales.
Le Comitd de secours de la grande Assembl^e r^volution-
naire proclamait, par la voix de Roger Ducos : « La R^publique
ne pent tol^rer que des enfants qui ont besoin d'une instruction
extraordinaire pour surmonter le tort que la nature leur a fait,
en soient priv^s... » et le rapporteur demandait que les pferes,
m^res, tuteurs, et tons les citoyens ayant des sourds-muets h
leur charge, fussent tenus de les confier h Tinstruction que la
R^publique leur oflFrait.
Si les projets de la Convention ne se sont point r6alis6s, —
si la France ne poss^de encore que trois ^coles nationales pour
les sourds-muets, alors que TAUemagne en a 33 et les £tats-
Unis prfes de 60, — si la loi sur Tenseignement obligatoire ne
leur est pas rigoureusement appliqu^e, comme en Danemark,
par exemple, nous avonsdu moins la satisfaction de penser que
la tr^s grande majority des d^sh^rit^sde Touie trouve asiledans
les 70 ^coles, tant publiques que privies, qui sont r^parties sur
notre territoire, et que le sourd-muet sans instruction est au-
jourd'hui non plus la rfegle, mais I'exception.
Le progrfes ne s'est pas bom6 k Taugmentation du nombre
des 6coles, il s'est manifesto par Tam^lioralion des m^thodes
d'enseignement,
Le sourd n'est plus fatalement condamn^ aux horreurs du
surdimutisme, et il est maintenant pour Tinstruire un autre
moyen que la t^l^graphie myst^rieuse et pittoresque du Ian-
gage des signes mimiques; cet autre moyen, c'est la parole.
D^sormais la soci^t^ se fait un devoir d'^lever le sourd-muet
jusqu'i elle, en r^tablissant les communications dont la nature
Tavait priv6. Dans presque toutes les dcoles de France, d'Alle-
magne, d'ltalie, etc., [les sourds-muets sont instruits par la
parole.
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216 REVUE PHILANTHROPIQUE.
lis apprennent h articuler les 30 sons de notre langue ; ils
disent des mots, des phrases; ils parlent. Ils sont capables k la
sortie de T^cole d'exprimer leurs besoins, leursdfoirs, leurs ju-
gements. La parole du sourd, il est vrai, n'est en g^ndral ni
agr^able, ni harmonieuse ; mais elle est intelligible. Que peut-
on demander de plus k des 6tres priv^s d'audition?
Et ce n'est pas tout, ils comprennent ce que vous ou moi
pourrions 6tre tenths deleur dire; ils saisissent nos paroles aux
mouvements par lesquels Tarticulation des mots se trahit sur
notre visage, ils 6coutent, que dis-je? ils entendent avec leurs
yeux; ils voient notre parole aux mouvements de nos organes,
commc nous Tentendons aux vibrations de Fair; ils lisent sur
leslevres, suivant Texpression consacr^e. L'oeil suppl^e Toreille;
la vue remplace Touie. La patience et le travail ont triomph6 de
la nature, en errant a leur profit Tart subtil de la lecture sur
les Ifevres.
Voil& plus de cent ans que toutes les ^coles d'AUemagne
instruisent leurs ^Ifeves par la parole. Chez nous, au contraire,
cette m^thode d'enseignement n'a d^finitivement conquis son
droit de citd que depuis une vingtaine d'anndes. Si Tadhdsion
de la France k la mdthode ovale a dt6 tardive, du moins a-t-elle
dtd f^conde; et Tlnstitution nationale de Paris, en ces demi^res
anndes, a puissamment contribud, par son exemple et par ses
publications, k la rdpandre k travers le monde.
Toutefois, avant d'Mre accept6e par tons, cette m^thode a
dA soutenir bien des luttes, surmonter bien des obstacles, et il
n'est que juste de rendre un hommage mdritd k ceux qui, par
leurs efforts et leur d6vouement, ont prdpard son triomphe.
C'est ceque nous nous proposons de faire, enesquissant bri^ve-
ment Thistorique de Tenseignement de la parole en France el
plus particuli^rement k Tlnstitution nationale des sourds-muets
de Paris.
♦
Labbi de VEpie. — Je professe pour le caractfere et Toeuvre
du plus populaire des instituteurs de sourds-muets une admi-
ration sans homes; sa renomm^e, entourde du respect universal,
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LES SOURDS-MUETS ET L'ASSIS.TANCE. %a
va grandissant h travers les Ages ; son nom rcstera glorieux,
aim^et v^n^r6 tant qu'il y aura des sourds-muets et des hommes
de coBur pour les instruire ; mais, il faut le dire, puisque c'est la
y6nt6, le fondateur de T^cole frangaise fut Tadversaire de la
m^thode orale. Uniquement pr6occup6 d'instruire le plus grand
nombre de sourds-muets possible, et de les ramener k Dieu en
les initiant aux v^rit^s religieuses, il crut y parvenir par la voie
des signes m^thodiques, si bien qu'il linit par m6connaitre
Tutilit^ et jusqu'Jt la possibility de I'enseignement oral. D^s
cette ^poque pourtant, P6reire en France et Heinicke en AUe-
magne, sans parler de leurs pr^d^cesseurs (1), faisaient parler
des sourds-muets.
Cette erreur dubon abb^ devait retarder d'un sifecle Tavfene-
ment de la m^thode orale en France. Ceci soitdit sans rien re-
tirer de la gloire incomparable de Thomme, de Tinstituteur, de
Tapdtre qui.seul peut se flatter d'avoir ouvert pour les sourds-
muets r^re de la redemption. Dans I'abb^ de L'^p(§e en effet, il
faut voir Tapdtre glorieux, le promoteur du mouvement d'hu-
manite qui a fait surgir de terre des institutions dans tons les
pays; le cr6ateur hors pair, Thomme de cceur et de sacrifice.
Sam^thode est d6fectueuse .sur bien des points? Qu'importe!
llrestera ^ternellement le modMe des instituteurs, si, suivant
le conseil de de G^rando, ces instituteurs cherchcnt h imiter,
non ses proc6dfe d'enseignement, mais ses grandes vertus. Et
voilJi pourquoi Toeuvre de \enr pire spirituel, comme ils se plai-
sent k Tappeler, marque le point de depart d'une ^re nouvelle
dans Tenseignement des sourds-muets.
Chez son ^l^ve et successeur Tabb^ Sicard, la defiance que
Tabbe de L'Ep^e ^prouvait pour rcoseignement oral se transfor-
mait en un veritable d^dain. « Donnez-moi des hommes de
peine, avait-il coutume de dire, et je ferai parler tons mes
sourds-muets. » Les hommes de peine firent toujours d^faut
sans doute, car sous sa direction la parole ne fut point en-
seign^e.
D' Jiard. — Le c6l6bre D' Itard, m^decin de Tlnstitution de
(1) Bonet, en Espagne; Amman, en Hollande, etc.
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218 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Paris, fut, pendant le premier quart de ce sitele, Tunique soutien
de Tenseignement oral dans cette ^cole ; encore ne r6clamait-il
la parole que pour quelques privil^gi6s. II travailla trente ans
pour faire introduire dans T^tablissement de la rue Saint-
Jacques la culture de Taudif ion chez les demi-sourds.
Aprfes avoir adress^ k TAcaddmie de mddecine des rapports
qui de nos jours encore font autorit6 en la mati^re, Itard obtint
enfin gain de cause. Unc classe fut crd6e, rue Saint-Jacques,
pour cultiver la parole et Taudition chez les 6l^ves les mieux
dou^s. Le D*" Itard ne fut pas seulement le grand m6decin au-
riste que tout Ic monde connait; dans ses dcrils il se r^vfeie
instituteur de premier ordre. Voulant assurer Tavenir de son
oeuvre, il laissa par testament 8 000 francs de rente h T^cole des
sourds-muets, pour cr^er une classe de perfectionnement oil
Tenseignement devait 6tre donnd uniquement j[)ar la parole et
Tdcriture, Ji Fexclusion des signes mimiques (1837). Cette classe
porte toujours le nom de Cours Hard.
D^sir^ Ordinaire. — Mais celui qui ale plus fait dans le cours
de ce sifecle pour introduire la m6thode orale en France est sans
contredit D6sir^ Ordinaire, ancien recteur de TAcad^mie de
Strasbourg et directeur de T^tablissement de la rue Saint-
Jacques de 1831 h 1838.
En visitant les ^coles d'Allemagne, il avail acquis cette con-
viction qu'on pouvait et que par consequent on devait faire
parler les jeunes sourds-muets. Aussi, lorsque, en 1836, h la
suite du d^cfes d'un professeur on manque de maltre pour faire
la classe de premiere ann6e, le vieil universitaire revendique
pour lui-m6me, ft Fftge de soixante-trois ans, le p6rilleux
honneur d'enseigner la parole et la lecture sur les Ifevres aux
derniers venus de ses petits sourds-muets. Et ce ne fut point
un spectacle banal que celui de cet ancien recteur faisant la
classe k de tout petits enfants, de ce m^decin, de ce savant, de
ce philosophe remplissant Thumble fonction que ses illustres
pr^d6cesseurs, de L'fip^e et Sicard, avaient trouv^e bonne tout
au plus pour des manceuvres.
Le baron de G^rando, qui pr^sidait le Conseil d'administra-
tion de T^cole de Paris, croyait avoir trouvd dans D. Ordinaire
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LES SOURDS-MUETS ET L'ASSISTANGE. 219
un homme capable de faire p6n6trer Tenseignement oral dans
la maison de Tabb^ de L'^p^e.
Malheureusement la m^thode orale, introduite brusquement
et sans precaution h rinstitution de Paris, y fit naufrage. Mai
seconds par Tadministration sup^rieure, Ordinaire, en d6pit de
son savoir, de son zfele et de ses efforts, vit toute sa bonne vo-
lonte dchouer devant Thostilite du corps enseignant, duConseil
et de FAdministration supdrieure.
« Vous voulez faire parler les sourds-muets, disait k cette
occasion le comle Alexis de Noailles k ses collogues de TAdmi-
nistration; mais Dieu ne le veut pas! »
Les bonnes intentions d'Ordinaire furent paralysdespartant
d'obstacles. Sa direction ne fut qu'une longue lutte. ^Chaque
jour il lui fallait livrer bataille. Dans cette guerre de la mi-
mique contre la parole, de la mdthode frangaise contre la m6-
thode allemande (ainsi qu'on disait alors), il fut vaincu et se
retira avec dignitd. Je ne m'associerai pas k un crime, dit-il,en
envoyant sa demission de directeur, lorsqu'on lui refusa jus-
qu'i ce faible cours d'articulationtant defois r6clam6par Itard,
deson vivant, et que ce dernier imposa enfin k T^cole, aprfessa
mort, par une clause de son testament.
Ordinaire eut le grand m^rite de vouloir faire appliquer dfes
1831, dans institution de Paris, la mdthode qui est aujour-
d*hui en vigueur dans presque toutes les ^coles d'Europe. II eut
le tort d'etre de cinquante ans en avance sur son ^poque. On le
lui fit bien voir.
Son remarquable Essai sur C Education et specialement sur
celk du sourd-muei (Hachette, Paris, 1836) ne fut point appr^cid
k sa valeur. Ce livre venait trop t6t, comme son auteur.
Dans le voisinage de la Suisse, k BesauQon comme k Stras-
bourg, Ordinaire avait subi Tinfluence de Pestalozzi et du P^re
Girard, visits leurs ^coles et partag6 les id^es des deux grands
instituleurs suisses en matifere d'instruction et d'^ducation.
Aussi, bien que son autorit^ ait 6t6 contest^e k T^cole de Paris,
sa direction n'y fut pas sterile ; il contribua k former toute une
g^ndralionde maitresqui, par la suite, acquirentun grand renom
et dirig^rent k leur tour les principales ^coles de sourds-muets
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220 REVUE PHILANTHROPIQUE.
de France, — la tradition qui consiste h confier la direction de
ces glablissements k des personnalit^s ^trangferes h Venseigne-
ment n'^tant pas encore fort ancienne.
Apr^s Ordinaire, une reaction se produisit. La mimique
rentra triomphante dans la maison d'oton Tavait voulu bannir.
On fit tout juste assezdc parole pour ne pas encourir le reproche
de n'en pas faire du tout. C'est le temps od Ton disait ironique-
ment iir^tranger que la m^thode fran^aise, c*dtait la m^thode
h bon marchd, — car de tout temps la m^thode orale a coiit6
cher.
Bref, de 1839 k 18S9, la parole futfort n^glig^e, malgr^ les
efforts de Dubois, du D' Blanchet et d'Houdin. B. Dubois, sourd-
muet lui-m6me, fonda une dcole oil, seconds par divers mem-
bres de sa famille, il instruisit par la parole ses compagnons
d'infortune. Ancien 6\h\e d'Ordinaire, Dubois (sourd depuis
r&ge de sept ans) fit honneur it son maitre, continuasa tradition,
ct fut attache h Tinstitution des sourds-muets de Paris en qua-
lit^ de professeur d 'articulation pendant douze ans (1856-1868).
Un m^decin de Fficole, le D** Blanchet, continuateur d'ltard,
essaya, mais en vain, de remettre en honneur la culture de
Taudition. Aprfes avoir port6 le d^bat devant TAcad^mie de
mddecine (1) qui refusa de se prononcer entre les deux sys-
tfemes, il intdressa le ministre k sa cause et parvint k faire
ouvrir dans Paris quelques externals qui disparurent & sa mort.
Cependant le professeur A. Houdin, son fiddle lieutenant,
ouvrait k Passy une pension-famille oil les sourds-muets ^talent
instruits et 6duqu^s par le syst^me oral.
Leon Vaisse. — En 1859, gr4ce aux efforts du censeur de Tin-
stitution de Paris, L^on Vaisse, ancien professeur du temps
d'Ordinaire, nous assistons k une v6ritable renaissance de Ten-
seignement de la parole. Devenu directeur de cette ^cole en
1866, L. Vaisse voulut relever le drapeaii de Tenseignement
oral, mais il eut k lutter contre les m6mes difficult^s que ses
devanciers, et sa volont6 se brisa contre les m6mes obstacles •
Faute d'un suffisant concours de la part de tons ses coUabora-
(1) 1853.
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■P ^JJWUKMi^. gJ^r'
LES SOURDS-MUETS ET L'ASSISTANGE.
teurs, et surtout faute de I'appui u^cessaire de Tadmi
il dut r^signer ses fonctions, sans avoir pu donner k 1
ment de la parole Tcxtension qu'il aurait voulue. D^i
qu'^ la fin de ses jours, il fut un des plus ardents props
la m^thode orale qu'il rdussit k introduire dans plusi
pai-ticuli^res, qu'il difendit dans les congr^s interna
Paris, Milan, Bruxelles, et dont il eut la joie de
triomphe avant de mourir, ne souhaitant plus qu'
disait-il, << c*^tait de voir les ^tablissements de soi
qui reinvent du minist^re de Tlnt^ricur, passer dan
butions du ministfere de Tinstruction publique, ou
^lait toute marquee ».
Le successeur de Vaisse k Tinstitution de Paris,
sous-chef de bureau du ministfere de Flntdrieur, pen
des n^cessit^s de Tenseignement, supprima presqi
ment, par mesure d'^conomie, Tenseignement de h
rMuisit k n^ant Toeuvre de son pr6ddcesseur.
En 1875, Tabb^Rota, de Trieste, un musicien, fit
blissement de la rue Saint-Jacques des experience
santes dans le but de d^montrer la possiblitd de h
tousles sourds-muets. L'abb^ Rota avait de Tenseign
une conception assez curieuse. Selon lui, pour a
sourds-muets k parler il fallait d'abord commencer p
chanter, afin d'am^liorer leur voix. Et il op^rait, con
fois Blanchet, k grand renfort d'instruments de mn
essais, trop Isolds et trop hMifs, firent plus de br
besogne. lis ne furent pourtant pas inuliles k leur au
qu'il put, dans la suite, fonder, avec le concours de s
nement une 6cole k Trieste.
Nous devons signaler, en 1879, une tentative de
lien Balestra, qui, bien que peu vers6 dans Tenseigr
sourd-muets, m^rita d'6tre surnommd Tapdtre et le
errant de la parole. Direcleur de T^cole de C6me, oi
aujourd'hui sa statue, Tabb^ Balestra, seul, sans i
sources que Tardeur de ses convictions, avait entrep
qu^rir toutes les ^coles de sourds-muets du monde i
Aprfes avoir pr6ch6 la croisade contre les signes mi
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222 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Italie, en France, en Espagne, en Am6rique, il mourut 4
Buenos-Ayres, dans la gloire de son aposlolat.
En France, cependant, des 6coles privies avaient ouvert
leurs porlesau nouvel enseignement. Kilian, h Saint-Hippolyte-
du-Fort (Gard), Hugentobler k Lyon, Magnat h Paris avec le
concours de la famille Pdreire, instruisaient des sourds-muets
par la parole.
D^s 1879, Fadministration du ministfere de Tlnt^rieur,
voulant introduire la m^thode orale dans les institutions natio-
nales, prit une s6rie de mesures qui assur^rent la rdussite de
ce systfeme d'instruction.
Des fonctionnaires regurent mission de visiter les ^coles de
r^tranger ou celte m^lhode 6tait en vigueur, des d^ldguSs
furent envoy6s au congrfes de Milan, des maitres allferent 6tu-
dier sur place les proc6dds d'enseignement. Le nombre des
professeurs fut considdrablementaccru, les instituteurs sourds-
muets furent remplacds par des entendants, et Ton inscrivit au
budget les d^penses n^cessaires pour faire face k ces nouveaux
besoins.
Le congrfes international de Paris, 1878, se prononga en
faveur de la mdthode orale. Les 6coles natiouales de Bordeaux,
de Paris, de Chamb^ry adoptferent ce systfeme d^enseignement.
L'inspecteur g6n^ral 0. Claveau, donl les savants rapports font
^poque, favorisa ce mouvement, tandis que les decisions du
Congrfes de Milan (1880) et de Bruxelles (1883) triomphaient
des derniferes resistances.
C'est au D'' E. Peyron, aujourd'hui directeur de Tadmini-
fltration g6n6rale de T Assistance publique, que revient Thonncur
d'avoir pr6sid6 en quality de directeur h I'introduction de la
m6thode orale k I'institution de Paris, et d'avoir donn^ k Ten-
seignement de la parole dans cette maison une impulsion
vigoureuse dont elle se ressent encore.
»
« f"
11 ne suffit pas de rendre les sourds-muets k la soci^te, il
faut encore les mettre en 6tat d*y gagncr leur vie. Les faire par-
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LES SOURDS-MUETS ET L'ASSISTANGE. 223
ler est bien, leur donner un gagne-pain est mieux. C'est pour-
quoi presque toutes les 6coles fran^aises ont des ateliers k c6t6
de leurs classes, joignent Tinstruction professionnelle iirensei-
gnement intellectuel.
Lorsque le sourd est instruit et qu'il a appris un metier,
ToBUvre de Tassistance n'est point termin^e. 11 s'agit mainte-
nant de lui assurer du travail, en lui faisant ouvrir les portes
des ateliers ordinaires. C'est ici que trouvera k s'exercer le z^e
de cette soci6t6 de patronage dont un coUaborateur de la Revue
Philanthropique (1) ddmontrait r^cemment Tutililfi et que
M. Henri Monod, nous le savons, va faire cr6er k Tinstitution
de Paris par une decision de M. le ministre de rint6rieur.
A ces diverses creations, si onajoutait des 6coles maternelles
pour les tout jeunes sourds-muets, un ^tablissement pour les
arridr^s et une maison de retraite pour les vieillards, TcBuvre de
solidarity serait complete.
Mais k chaque jour suffit sa tdche, et lorsqu'on songe k ce
que le d^vouement de leurs maitres a d6j^ fait pour eux, on
est moins effray6 k la pens6e de tout ce qui reste encore k faire
pour les sourds-muets.
MARIUS DUPONT.
Octobre 1897.
(1; L'Assistance des Sourds-Muets par le trayail, par M. A. Dubranlb, n* 5 de
la Revue Philanthropique, page 671 et suivantes.
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gf;f»r.7iJVj^we?^
LA PROTECTION DE UENFANCE
AU CONGRfiS DE ROUEN
I
Parmi les questions soumises k I'^tude de la deuxi^me sec-
tion du Congr^s, celle de la Protection de TEnfance est certai-
nement unedes plus importantesy on pourrait mSme dire des
plus inqui^tantes, au point de vue individuel comme au point
de vue social.
Depuis quelques ann^es, les martyres d'enfants se sont r6-
v^l^s sinombreux que la grande presse s'est ^mue; elle « a fait
campagne » en faveur des « petits » et leur a conquis Topinion
publique, tandis que les derniers recensements, en montrant
grand ouvert le gouffre de la depopulation, ont toum^ vers les
« berceaux » les regards de tous ceux qu'int^ressent la vitality
et Tavenir du pays ; si bien qu'aujourd'hui cette question de
protection est devenue une veritable preoccupation nationale.
La demi^re consideration, la depopulation, aurait probable-
ment ete impuissante h faire vibrer le coeur de la foule, mais
les cruautes commises par des parents denatures ont souleve,
parfois jusqu'Ji la fureur, le sentiment populaire ; aussi les me-
sures de sauvegarde k regard des enfants sont-eiles assurees de
rencontrer unaccueil favorable. Cette sympathie, m6me poussee
k Texcfes, est du reste bien naturelle et bien legitime, car, de
toutes lez souflFrances, celles de Tenfance, toujours immeritecs,
sont plus particulierement dlgnes de pitie, et la sauvagerie de
certains actes accomplis avec un cynisme r6voltant n'est que
trop susceptible d'exalter Tindignation jusqu'au paroxysme.
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PROTECTION DE L'ENFANGE AU CONGRftS DE ROUEN. 225
Quelques exemples sufQront k expliquer cette exasperation
et k d^montrer la n^cessitS de la protection.
Au num^ro 37 de la rue des Entrep6ts, k Saint-Ouen, demeu-
raitavec son amanl une fiUe de 19 aiis, Anna Vals, mfere d'un
petit garQon de 14 mois. D'aprfes les voisins, le pauvre petit
£tait depuislongtemps]'objet de traitementsodieux; sous prd-
texte de le corriger — corriger un enfant de 14 mois ! — les
deux amants le rouaient de coups. La mort survint ; en pre-
sence du petit cadavre qui n'dtait qu'une plaie, le m^decin de
retat civil refusa le permis d'inhumer. Le commissaire de po-
lice inform^ se rendit k domicile accompagn^ d'un m^decin ;
celui-ci dedara que Tenfant avait succomb6 k des sdvices
graves : il avait des cdtes d6fonc6es, une plaie dans la region du
coBur,de8 ecchymoses sur tout le corps etune horrible blessure
i VanuSy comme si on avait voulu Tempaler.
Le petit Pierre Grfeze avait 616 plac^en nourrice parsam^re
Marie Gr^ze, demeurant k Paris. 11 se d^veloppait admirable-
ment, lorsque brusquementelle leretira; il avait alors 17 mois.
A peine arriv6, le b6b6 commenga h d6pdrir; sa m^re le cou-
chait dans une malle, sans matelas ni couverture et quand il
pleurait, elle lebattait jusqu'kcequ'il setAt. Vaguement avertie
par des rumeurs de voisins, la police fit transporter le pauvre
enfant k I'hospice ; c'6tait trop tard, il expirait le lendemain.
L autopsie r6v6la que la mbrt 6tait la consequence des traite-
ments barbares qu'il avait endur6s.
Apr^s Paris, la province. A Chftteau-Gontier, le petit Chre-
tien a subi des violences quotidiennes etplusicurs fois les voi-
sins ont entendu ses cris de douleur et d'effroi. Un jour, une
locataire dela maison Fa trouve dans undtat complet de nudite
coucy au grenier sur de la paille. Outre les traces de coups
qu'il portait sur le corps et le visage, Tenqufite a 6tabli que,
souspretexte de lui apprendre la proprete, sa mfere I'obligeait Ji
rester le nez dans ses ordures.
Les enfants legitimes ne sont pas plus epargnds que les
enfants naturels. Voici la petite Bourras, kg6e de 3 ans,
d'Arles-sur-Tech, torturde par son p5re. Entre autres mauvais
traitements, il la faisait coucher dans 1 'Stable avec un pore ou
RBVCB PHILATraROPIQUE. — 11. 15
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226 . HEVUE PHILANTHROPIQUE.
Tattachait toute nue au pied de son lit et la ilaissait ainsi pas-
ser la nuit. Criait-elle la faim ? Son bourreau la rassasiait avec
de3 poign^es de moucfies.
Ce sont encore les dpoux Parey, du quartier de la Folie-
M^dcourt, qui enfermaient leur petit garQon.<le 3 ans dans un
placard sans lumidre et sans air; couch^ sur ^n pen de paille
pourrie, le malheureux ne recevait pour topte nourriture que
des croiltes de pain que les devix ivrognes lui jetaient comme h
un chien. S'il pleurait ou demandait h manger, les deux brutes
le battaient k qui mieux mieux.
Inutile de poursuivre une Enumeration qu'un volume n'Epui-
serait pas; pour terminer, nous rappellerons seulement le petit
martyr de la rue Vaneau, dont la douloureuse agonie est
encore suffisamment prdsente h toutes les m^moires pour nous
dispenser de la narrer en detail.
Ainsi la petite Lalie de VAssommoir, tu^e lentement ii coups
de fouet par son p^re, Tignoble Bijard, n'est pas un mythe en-
fante par imagination de M. Zola, mais un document humain.
11 est vrai qu'il existe des fauves, des monstres plut6t, qui
n'ont mfime plus Tinstinct des bWes pour leurs petits, et dont
la cruautE s'achame k torturer jusqu'li Ten faire mourir un 6tre
innocent et sans defense.
Oui, contrairement a rhypothdse optimiste des Jean-Jacques,
des Perez et des Preyer, il est des enfantsqui, en entrant dans
la vie, n'y trouvent ni affection ni bonheur, mais haine et mal-
heur.
Et puis, h cdtE des drames connus, combien se perp^tuent
avec rimpunit^ presque assurde aux tortionnaires s'ils agissent
avec une certaine discretion et de sorte que leurs victimes ne
donnentpas « mesure au fossoyeur ».
II
QUE FAIRE?
INSTAURER LA PROTECTION SOCIALE AU BERCEAU.
Mais est-ce que devant cette formule ne va pas se dresser le
fameux Paterfamilias? Ky a-t-il pas \k une atteinte k la puis-
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PROTECTION DE L'ENFANCE AU GONGRfeS DE ROUEN. 227
saoce paternelle? ^'est-^ce tpas mdeonnattre le coradlfere sacr^
de la famille et afTaiblir I'autoritd au foyer? Ne seraitr-ce ipas
dbranler les bases m6mes du Code et violer.un principe plu-
sieurs foiss^culaireet'Consid^r^jusqu'aloFs aomme intangible ?
Nous reconnaissons toute la valeur deces objections ; aussi
allons-nous essayer dly r^pondre et^ api^s la n^cessit^, de d6-
montrer la 16gitimit^<de la protection.
Longtemps le pouvoir n?a sembl6 Tespeotable et imposant
qu*autant qu'il lui 6tait donn^ d'aller jusqu'k I'arbitraire et de
s'exercer sans contrdle. Le contenirdansiles bomes de la jus-
tice, c'dtait lui faire perdre son prestige. Maisidepuisiun sl^cle,
cette conception absolutiste a perdu chaquejour du terrain; la
declaration des Droits de rhomme, :malgrd de nombreuses
transgressions, afait p^n^trer dans lescoBurs et dans les con-
sciences les id6es de dignity individuelle, de respect de la per-
sonnalit^ humaine, d'autonomie. fii lent que soitle progrfts,
nous sommes arrives, suivant Texpression d'^mile AcoUas, i
mal nous figorer « qu'un individu soit Tobjet de la puissance
d'un autre individu » ; nous nous habituons i Tid^equ'en face
des droits de rhomme, il y a bien aussi les droits de Tenfant.
Du reste, n'est-ce pas une anomalie d'admettre ceux-li sans
ceux-ci? Est-ce que Fonfant n*est pas le d^but de rhomme?
Ainsi Tavait compris la Convention. Son Code, mieux pdn6tr6 et
fortement imbu des principes d'^galit^ et de droit, avait, au
^oi iepttissanoe ytoupnrs menaQant, substitu^ les termes de
surveillance et Ae protection ; de sorte que la mission des pa-
rents rev^tait bien plut6t un caract^re de tutelle que celui d'un
pouvoir discrdtionnaire. C'6tait r^ellement Texpression du droit
isBu de la Rdvolution, tandis que le Code Napoleon, manifes-
tement inspire du vieux droit remain, a maintonu Tantique
pairia potestas et nous fait remonter it deux miile ans en ar-
riftre.
Pour fonder une soci6t6 libre, pour habituer les citoyens it
I'^galit6, on est aU6 chercher des mat^riaux dans une soci6t6
bas^e sur Tesclavage, dans ime soci^td qui, selon le langage
^nergique de Maria Deraismes, « traitait Tenfant comme un
veritable animal dont Texistence depend de la volont^ et du
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228 REVUE PHILANTHROPIQUE.
caprice d'un individu, comme un objet dont le possesseur
peut se ddfaire 4 son gr^. »
ifitrange illogisme en v6rit^. Oui, si I'auleur du Code s'dtail
propose r^panouissement et la fructification des iddes r^volu-
tionnairesy mais ses vis^es dtaient tout autres. Dou6 au plus
haut degr6 du g^nie du despotisme, il comprenait que le plus
stir moyen de Finstaller dans T^tat, c'^tait de Timplanter dans
lafamille; que pour asseoir Tautocratie sur le tr6ne, il fallail
r^tablir solidement au foyer. II voulait justifier dans la famille
Torigine de la tyrannic, parce que la famille est la soci^td prin-
cipe, la citd 61dment.
Cette preoccupation et ce reniement des principes de la
Revolution ressortent nettement de Texamen de la gen^se
des dispositions du Code relatives k la famille. Chacun sait
« qu'elles ont 6t6 votdes sous la Constitution du 22 frimaire
an VIII (1799) qui, enmSme temps que le Consulat, avait etabli
un syst^me 16gislatif des plus compliqu6s dontle but manifesto
etait de faire prdvaloir la volonte d'un seul. En eflfet, sous Tini-
tiative unique du gouvernement consulaire, un Conseil diktat
etait charge d'elaborer les projets de lois. Le Tribunat discutait
ces projets et dmettait un vceu pour ou contre, sans avoir le
droit d'amendement. Un Corps legislatif admettait ou rejetait
sans discussion et sans amendement les projets, apr^s avoir
ecoute les orateurs du Conseil d'Etat et du Tribunat. Enfin, un
S4nat conservatetir 6tait investi du droit d'annuler les lois qui
seraient contraires k la constitution. Nous aurons donnd une
juste idee de ce mecanisme, si nous ajoutons que les membres
du Conseil d'l^tat, du Tribunat el du Corps legislatif etaient, au
moyen de combinaisons ingenieuscs, presque k la nomination
du gouvernement.
Malgre toutes ces precautions, il arriva que Tesprit rdpu-
blicain ayant survecu dans le Tribunat, ses orateurs parvinrent
k faire rejeter par le Corps legislatif les titres du Code qui nous
occupent. Tant d'independance ne pouvait convenir au premier
Consul. II fit retirer le projet. Puis, pour reprendre la discus-
sion avec certitude et faire triompher ses idees, par le senalus-
consulte du 16 thermidor an X, il reduisit le Tribunat de cent
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PROTECTION IXE L'ENFANCE AU CONGRfeS DE ROUEN. 229
membres h cinquante et TafiFaiblit encore en le divisant en trois
sections, dont une seule s'occupait de legislation. Supreme
prudence : on imagina par surcroit de faire donner son avis k
cette pauvre section avant toute communication au Corps 16gis-
latif, et ce n'dtait qu'aprfes que le Conseil d'Etat et le Tribunat
s'^taient mis d'accord que la communication au Corps l^gislatir
avait lieu.
Dans ces conditions, la discussion contradictoire se r^duisait
i un tournoi d'^loquence, ou plut6t Ji unecom6die oil toutdtait
convenu d'avance. Les muets — c'estle nom que reQurent Jes
deputes du Consulat — approuvaient et la loi (5tait promul-
gu6e.
U est permis de se demander si une loi vot^e dans de
pareilles conditions a bien 6t6 Texpression de la volont^ de la
nation, ou de celle dumaltre qui mettait en mouvement le m6-
canisme l^gislatif de la Constitution de Tan VIII. Le doute n'est
pas permis lorsqu'on connalt lesprojets beaucoup plus lib^raux
qui avaient 6td pr^sent^s, et la part que prenait le premier Con-
sul aux deliberations du Conseil d'fitat dont il 6tait president
de droit (1). »
Voila Torigine des lois relatives k la famille; n^es sous
rinspiration pour ne pas dire la pression de Napoleon, elles ne
sent que le reflet de sa pensee et de sa volonte et ne represen-
tent, en fait, que des ordonnances emanees d'une seule autorite
mais nuUement sanclionnees par la nation.
Ainsi edaire, le Code ne saurait pretendre k une sorte d'in-
tangibilite et Tautorite paternellese dresser commel'expression
familiale du droit nouveau. L'aureole disparatt, le prestige
s'evanouit et la critique reprend ses droits.
Mais n'aurions-nous pas demontre la caducite des origines
que nous ne nous croirions pas tenu d'admettre Timmutabilite
de cette codification, ^laboree dans le temps, elle porterait
quand m^me, bon gre mal gre, Tempreinte de Tactualite qui
limite la duree des monuments de Tintelligence humaine, car
s'il est vrai que toute legislation contient une partie imperis-
(1) Gustave Lejeal (Revue Encyclop^dique, 28 novembre 1896).
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23e< REVUE PHILANTHftOPlQUB.
sable, sftna oesae justifide par rexpirience, il n'est pas moins vrai
qu'elle renfermeune partie destructible^ consequence des pas*
sions^ des pr^jug^s, des ignorances d'un si^cle. Et comme les
hommes ne sentent et ne pensent pas toujours de la m6me
faQon^ne sont pas toujours boumis auK. mdmes n^cessit^s, c'est
unidroit et un devoir pour chaque generation' de soumettre k
un libra examen les institutions que lui l^guent ses devanci^res.
Du reste, sous la pouss^e des faits, les textes ont d6jh H6
obliges de fleohir et des brfeehes ont ete ouvertes dans le mur
d'enoeinte du foyer, par oil la societe oherche i voir et ii pene-
trer, pour defondre Tenfant si besoin est. Telle la loi du
7 decembre 1874; cette timide intervention ne vise qu'un cas
particulicr : celui des enfants employes dans les professions
ambulantes, les cirques et autres etablissements forains ; la loi
du 24 juillet 1889 a une portee plus generate, elle present la
decheance de la puissance patemelle dans des cas determines
et la permet dans d -autres qui restent soumis k Tappreciation
de Tautorite judiciaire.
II n'est pas sans inter6l de rapprocher de ces deux disposi^
tions legislatives les mesures analogues prises dans plusieurs
pays etrangers et qui souvent vont plus loin que les ndtres.
Dans le Massachusetts, depuis 1882, tout enfant qui grandit
sans direction, sans education, doitetre confie par les magistrats
iL Tassistance publique.
Dans r^tat de New-York, tout mineur de 16 ans trouve
en <train.de mendier, de ramasser des debris dans la rue, ou
dont retat de mis^re r6\h\e Fimpossibilite pour ses parents de
reiever et de Tentretenir, est considere comme moralement
abandonne et recueilli comme tel aprds decision judiciaire.
A Genfeve, fonctionnent. depuis 1892 une commission cen-
trale et sept comit6sdequartier qui ont pourmission de recher-
oher< les infants en etat de vagabondage ou de misfere manifoste,
de se livrer h des investigations sur leur situation et sur le
traitememt moral et physique qu:ils resolvent de leurs parents.
A^ Hambourg, 1 iautortte pla<» d'office dans des etablissements
speciaux les mineurs pour lesquels il est demontre que les soins
de la maison sont insuffisants.
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^■^pp^^lp^^^"*^
PROTECTION DE L'ENFANCE AU CONGRtS DE ROUEN. 23!
A Quebec, la loi de 1884 envoie dans une 6cole sp6ciale,
od'ils sonl places sous la protection pnblique, les enfants de
7 k 12 ans que les parents laissent priv^s des soins indis-
pensables.
Enfin en Pnisse, en Pensylvanie, dans la Colombie et Tfitat
d'Ontario, existent des lois tr^s sensiblement ^gales comme
effets k notre loi de 1889.
Mais qu'il s'agissede la loi fran^aise ou de la loi ^t^ang^^e,
la protection de Tenfant dans la famille ne s'exercequ'k travers
la repression h regard des parents et que si elle est imp6rieu-
sement command^e par des manifestations ext^rieures. Loin
d'^re la rft^, elle ne constitue qu'une exception et imprime
une sorte d-infamie k ceux qui la motivent. D'oii une extreme
prudence iyrecourir etseulement aprfes que Tenfant est d^jJi
apparu comme une victime, ;aprfes qu'il a eu Jt supporter des
traitements ou it snbir des exemples dont Tempreinte funeste
persistera parfois ineffa<^able.
La mnltiplieite des faits dela nature deceux que nousavons
rappel^s au d6but, asnggfirfeTid^e de renforcernos lois depro*
tection et d'^dicter des peines plus s6vferes centre les martyri-
seurs d'enfants. Derni^rement des propositions dansce sens ont
M d^pos^es k la Ghambre. Mais leur auteurs eux-m^mes ont
pris soin de faire remarquer qu'ellesne donneront qu'un rfeul-
tat ineomplet et que la r6v§lation des actes d^lictueux restera
tonjours rare et difficile.
Sans n^gliger ce c6t6 de la question, il nous semble que
c'est dans une autre voie qu'il conviendrait de diriger particu-
liferement les eflForts, et de donner k Tintervention une forme
plQl6t preventive que repressive. Ne vaut-il pas mieux, en effet,
empe^cher lemal de se produire que d'attendre pour cicatriser
ensnite les plaies qu'il aura faites? Ne serait-il pas preferable
de recoulir k des loi^ de preservation plut6t qu'^i des lois de
repression, k des lois d'hygiine sociale, dirions-nous volontiers,
phit6t qa^k des lois de medecine sociale?
De m£me qtre ITiygifene bien entetidue rend de moins en
moins necessaire rinter>'ention medicale, dem^me les mesures
de preservatiouf sociale atrront ponr effet de restreindre de plus
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232 REVUE PHILANTHROPIQUE.
en plus la repression sociale sur le point qui nous occupe. L'ex-
p^rience est faite et la loi du 23 d6cembre 1874 sur la protec-
tion des enfants du premier &ge dlevds hors du domicile de
leurs parents et due i Tinitiative de notre v^n^rable president,
estlSi pour nous convaincre. NVt-elle pas suffi a faire dispa-
raitre les nourrices faiseuses (fan^^^PNousaurons it y revenir.
Avec la loi du 28 mars 1882 sur Tobligation scolaire, elle
forme une premifere assise d'un code de Tenfance, que t6t ou
tard il faudra bien ^laborer dans son entier en face du code de
la puissance patemelle.
Au surplus, elle est trfes suggestive cette loi du 28 mars. A
6 ans, elle prend Tenfant et dit au p^re : II n'est pas ta chose,
je ne te reconnais pas le droit d'en disposer selon ton bon
plaisir et de priver son intelligence de culture. Tu lui as donn^
la vie, c'est peu; il faut lui foumir le moyen de la pratiquer.
Aux parents grossiers et ignorants qui ne se font aucun scru-
pule de laisser leurs enfants grossiers et ignorants comme eux,
4 ceux qui vont r^p^tant : « Nous avons bien vdcu comme Qa,ils
feront comme nous », elle r^pond hautement non. Sans hesita-
tion, elle incline la puissance paternelle devant le droit de
Tenfant h Tinstruction.
Ce qui precede nous parait etablir de suffisante faQon qu'au
point de vue individuel, la protection de Tenfance ne saurait
fitre considir^e, ni en fait ni en droit, comme contraire aux
principes modemes et attentatoireii I'autorite et au respect dus
h. la famille.
Ill
Examinons maintenant la question au point de vue social,
et voyons si, dans Finterfit de sa propre conservation, notre
society n'a pas le devoir 6troit de garantir le d^veloppement de
Tenfant et desauvegarder son existence.
Statistiques en main, notre accroissement de population est
si lent qu'il ^quivautiune veritable depopulation en face des
progrfes realises par les autres nations.
Si Ton calcule Taccroissement moyen annuel, pour une
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PROTECTION DE L'ENFANCE AU GONGRfeS DE ROUEN. 233
p^riode de vingt ans, des divers ^tats de TEurope, on obtient le
tableau suivant :
Accroissement mojen
annuel
£tats europdons. par 1 000 habitants.
SuMe 15,7
Pays-Bas 15,6
Danemark 15,5
Norv^ge ^3,9
Angleterre 13,4
AUemagne 12,3
Espagne 9,6
Belgique 9,0
Antriche 8,6
Italic 7,1
Suisse 7,0
Hongrie 4,1
France 2,3
Si nous consid^rons raccroissement absolu, notre pays
depuis 1811, a pass6, en millions d'hommes
De 29,9 k 38,5
L'Angleterre de 10,2 k 38,1
Les EtatsrUnis de 7,3 i 62,4
En 1815, la Russie comptait 45 millions d'hommes; elle en
poss^dait 100 millions 600000 en 1889.
En 1841, r AUemagne avait kpeu prfes la mfeme population
que la France (il s'agit du territoire actuel des deux pays). Au-
jourd'hui sa population d^passe la n6tre del 4 millions. Depuis
cinq ans notamment, elle a gagn6 3 millions d'habitants, et
pendant ces m^mes cinq anuses, nous avons p^niblement
augments de 175 027 habitants.
Les consequences de cet 6tat de choses nous sont signaldes
avec une brutality toute tudesque par le docteur allemand
Rommel :
« La politique des races est impitoyable, 6crit-il. Le moment
approche oil les cinq fils pauvres de la famille allemande,
all^chfe par les ressources et la fertility de la France, viendront
facilement k boutdu fils unique de la famille frangaise. Quand
une nation grossissante en coudoie une autre plus clairsem^e,
Jiii^.
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234 REVUE PHILANTHROPIQUE.
qui, par suite, forme centre de depression, il s -^tablit un cou-
rantd'air vulgairement appel6 invasion, ph^nom^ne pendtot
lequel la loi et la morale sont mises provisoirement de c6t6. »
Si Tavertissement n'est pas tr^s charitable, il a tout au
moins le mdrite de ia franchise. A nous d'en tenir compte et
de combatlre les causes de notre inferiority. Mais quelles sont
ces causes? Bien que trfes nombreuses et tr^s enchev6tr6es,
elles se rapportent toutes, en definitive, & la natality ou h la
mortality.
II est incontestable que notre natality est tr^s faible, tout
au moins dans les classes riches, od, k Tancien regime du droit
d'alnesse, a succdde, suivant Texpression du docteur allemand,
le regime des enfants uniques. Un classemeut des quartiers
de Paris d'apr^s leur richesse etablit que ce sont les riches qui
font le moins d'enfants.
Natality pour 1000 femmes ea an aa.
Arrondissement exceptionnellem^nt riehe 34
— trfes riche 53
— riche 65
— aisd. , 72
— pauvre 95
— trfes pauvre 108
La comparaison entre les departements conduit aux
mfemts conclusions, et piuisque nous sommes en Normandie,
qu'il nous soit permis de rappeler que cette riche province,
depais longtemps, ne les justifie que trop.
Le mal progresse d*une fa^on continue ; d'annee en annee,
le nombre des naissanees va diminuant, ainsi que le prouvent
les chiffres ci-dessous :
Anodes. Naissanees.
1884 937750
1885 924558
1886 912838
1887.. . 899333
1888 882639
1889 880579
1890 838059
1891 866377
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PROTECTION DE L^ENFANCE AU CONGRftS DE ROUEN. 235
AnniSeB. Nftissancet.
1892 855847
i893 8758S8
1894 845388
1805 834173
Noii5 avons vu tbut Jirheure quelle 6tait la situation res-
pective de 13 nations euFop^ennes sous le rapport de Faccrois-
sement moyen annuel, et nous constations que la France arri-
vait au dernier rang. Si noua groupons ces mfimes nations
d'apr^ le nombre des naissances, nous obtenons une autre
classification* dans laquelle la France occupe encore le dernier
rang,
Nombre
des naissances
l^ts europdons. par 1 000 habiUnts.
Hongrie 42,8
Autriche 39,7
Espagne 39,3
ItaUe. 37,1
Pays-Bas 36,2
Angleterre 35,3
AUemagne. . 35,1
Be(gique 31 ,8
Danemark 31,2
SuMe 30,9
Norvftge 30,8
Suisse 30,&
France 21,4
Nous ne pouvons nous empdcher de faire remarquer
qu'entre la France et la Suisse, qui la pr6c^de imm^diatement,
r^cart est de 9,2, tandis que de la Suisse a la Hongrie la diffe-
rence totals n'est que de 12,2. C'est-Ji-dire de 1 en moyenne
entre chaque nation.
Si int^ressante et si importante que soit T^tude des causes
de cette st^rilit^, nous ne croyons pas pouvoir I'aborder sans
sortir des limites de la question qui nous poeupe, et dans
laquelle la p^nurie des naissances n'intervient- elle-m6me que
comme argument.
Nous passons done imm^diatement ft la mortalit6, et puis-
qu'il s'agit de Tenfance, ft la mortality infantile.
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2C6 REVUE PHILANTHROPIQUE.
II y a chez nous excfes de d^c5s du premier 4ge.
D'une communication faitc k TAcad^mie de m^decine le
14 Janvier 1896 par le D*" Lagneau, il r^suite que sur 875888
d6c5s survenus en 1893, 133 618, soit plus du sixifeme, repr^
sentaient des sujets 4g6s de moins d'un an.
De 1887 Ji 1891, sur 4 366987 enfants n^s vivants,il en est
mort 706 887, soit 16,1 p. lOOavantTaged'unan, ainsi r^partis
suivant rann6e.
Anodes. Naissances. Ddcfes. Tantieme.
1887 899333 U4934 i6,li p. 100
1888 882639 145829 16,52 —
1889 880579 136087 15,45 —
1890 838059 142271 16,97 —
1891 866377 137766 15,90 —
Notre taux de mortality, d'aprfts ces donn^es, oscille autour
de 16 p. 100 pour la premifere ann^e de Texistence ; nous n'avons
pas les renseignements pour la p^riode 1892-96, mais il est
probable qu'ils ne modifieraient gu^re la proportion, s'ils la
modifiaient. Acceptons done comme vrai ce chiflFre de 16 p. 100.
Au dernier rang parmi les peuples comme natality, notre
int^rfet nous fait un devoir de conserver le plus grand nombre
possible d'existences. Eh bien ! sous ce rapport encore, loin
d'occuper, je ne dirai pas le premier rang, mais une place sim-
plement honorable, nous nous tenons dans les demiers ; t^moin
le tableau suivant qui donne la proportion des d^c^s de ft
1 an, sur 100 enfants n6s vivants, calcul^e sur une p6riode de
cinq ans.
Nombre des ddcte
fitats enropdens. sur 100 enfants.
Danemark 9,32
Norv^ge 10,33
HoUande 11,37
SuSde 14,35
Angleterre 15,39
Belgique 15,53
France 16,10
Espagne 17,07
Autriche 17,33
Prusse 20,05
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PROTECTION DE L'ENFANCE AU CONGKfeS DE ROUEN. 237
Ainsi, non seulement la France est un des pays od il ncdt
le moins d'enfants, mais encore un de ceux od il en meurt le plus.
Les consequences d'un pareil 6tat de choses sont trop visibles
pour qu'il soil n^cessaire dlnsister. Mais de ces deux facteurs
de la depopulation, si la diminution de la natality ^chappe
k peu pr^s compl^tement k Taction sociale, une 6nergique in-
tervention pent, au contraire, r^duire sensiblement la morta-
lity. Bouchons les fissures qui alimentent la mort, organisons
lalutte pour la vie avec toutes nos ressources scientifiques ;
nous sommes persuadds que nos efforts ne resteront pas std-
riles et que nous aurons tout lieu de nous feliciter des rdsultats.
Sans doute, le nombre des naissances a une importance
incontestable y mais celui des survies en a au moins autant^
sinon plus. Rapprochons les unes des autres les statistiques qui
prdcMent, elles suffiront k nous 6clairer. L'Autriche et TEs-
pagne qui tiennent le premier rang comme natality n'arrivent
que dans un rang moyen comme accroissement de popula-
tion par suite d'une mortality infantile excessive. Au contraire,
le Danemark, la Su^de et la Norv^ge, relativement peu proli-
fiques, sont k la tete des nations comme accroissement, parce
qu'elles sont celles qui perdent le moins d'enfants.
Que la France suive Texemple de ces derni^res et cherche
k conserver le plus grand nombre possible d'existences qui
viennentk la vie, et ellene verra plus, comme en 1895, lesddcfes
surpasser les naissances de 18 000. II est n6 pendant cette annde
834 173 enfants sur lesquels, d'apr^sle taux moyen de 16 p. 100,
il en serait d6c6d6 133 467. Calculus au taux du Danemark
(9,32), les d6cbs ne s'6lfeveraient qu'^ 77 744 etnous laisseraient
55723 survies de plus.
Pendant la p6riode 1887-91, les ddcfts des uouveau-n6s se
sont eievds i 696 887 ; rdduits k la proportion du Danemark,
ils n'auraient pas ddpassd 405936, doti un gain de 290 951
existences pour ces cinq anndes, c'est-Ji-dire plus d'un demi-
million en dix ans.
En attendant que, par d'autres moyens, on arrfite la depo-
pulation, avouons que nous sommes bien coupables de negliger
celui-li, it moins que ce qui est possible en Danemark ne le
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238 REVUE PIULA^THHOPJQUE.
soit pas en France. Nous ^tablirons tout h trheure que nous
pouYons r6alUer le mdme progr^s <que ce petit peuple du
Nord.
Mais ladfipopulaiion n'est pas la seule forme que revdte. le
p6ril social, .il se manifeate ^ous des apparences tout aussi re-
doutables et tout aussi menaQantes avec la progression de la
criminalitd ohez les enfants. Si, apr&s iles statistiques de mor-
tality, nous consultionsceJles.de la criminality, nous serious
effray6s du nombre de ceux qui n'dchappentii la mort que pour
tomber dans le vice ou dans le crime. Un coup d'oeil settle-
ment.
De 1826 a 1880, tandis que les d^lits de droit commun
avaient triple chez les adultes, ils avaient quadruple chez les
jeunes gens et presque triple chez les jeunes fiUes. Quant aux
enfants poursuivis, le nombre en avait double. De 1880 h 1893,
I'augmentation est beaucoup plus rapide : le nombre des en-
fants criminels s'accroit du quart, tandis que celui des adultes
s'accroit seulement du neuvi^me. Et hien que les mineurs
de 7 Ji 16 ans ne repr&entent pas 7 millions d'individus,
tandis que les adultes en comptent plus de 20, la criminality
des premiers d^passe presque du double aujourd'hui celle des
seconds. La prostitution va aussi en croissant, et on aesttm^ k
40 000 en dix ans le nombre des enfants atteints. Quant aux
suicides, ils ont 6t6 de87 en 1893 pour les enfants de moins de
16 ans. Et ce n'est pas seulement le nombre qui progresse;
selonM. Adolphe Guillot, on remarque dans les actes des jeunes
accuses « une exag^ration de f^rocit^, une recherche de lubri-
city, une forfanterie de vice qui ne se rencontrent pas au
mdme degr6 k un ftge plus avanc6 ».
Nous bornerons \k ces douloureuses constatations.
Au nom du Droit de Tenfant et au nom de Tintfer^t social,
nous pouvons d^ormais soutenir hardiment cette th^e de la
protection sociale ^tendue k tous les enfants et conclure avec
les Dibats « qu'il faut les d6fendre de bonne heure et long-
temps^ les prot^ger contre la maladie et contre la mort, contre
les gens et contre les choses qui les menacent, contre leurs
parents eux-m6mes, h(Slas ! contre la rue qui les attend et qui les
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PROTECTION DE L'ENFANGE AU (GONGRfeS DE ROUEN. «39
coFTompt, contre les mauvaises companies i]ui les perdent,
contre leCode et la pj^ison, car la justice ne leur.est pas ftou-
jours assez tendre, bref, contre les dangers, les entratnements
et les ^preuves de toute nature ».
Le principe ^tabli, il reste & dire ce que doit 6tre cette pro-
tection. De suite, on comprend qu'elle doit diif^rer avec les
6poques de la vie. Le b6b6 au berceau, lebambin qui fait ses
premiers pas « offrant de toutes parts sa jeune &me h la vie » ne
r^lament pas la mfime intervention que le gargonnet et la filiette
d'4ge scolaire, et ceux-ci n-ont pas k redouter les m6mes 6cueils
que Tadolescent qui entre dans la p^riode de puberty. De Ih,
trois stades dans la protection : dependant la p6riode enfan-
tine; 2** pendant la p6riode scolaire ; H® pendant Tadolescence.
Etant donnas le programme et le caract^re du Gongr^s, nous
ne croyons pas devoir entrer dans Texamen d6taill6 de la pro-
tection Si chacune deces pdriodes. Nous nous bornerons Ji rap-
plication h la premiere enfance.
A cet &ge, la question de vie ou de mort prime toutes les
autres; elle est, pour ainsi dire, la seule et.c'estessentiellement
d'hygifene qu'il s'agit. S'il est vrai qu'on ait k ddplorer les
cruautfe de parents barbares, ce n'est fort heureusement qu'&
r^tat d'exceptions ; mais qui a jamais d6nombr6 les viotimes de
Fignorance dans laquelle sont toutes les m^res des soins k
donner aux nouveau-nds? Avec le D*" Brochard, on pent af-
firmer que la veritable cause de la mortality du premier 4ge
est rinexp^rience des mferes avec tout son cortege de pr^jugfe
et de fautes contre Thygifene.
Ici, ime alimentation d6fectueuse est la grande pourvoyeuse
de la mort ; Iky un emmaillotement stupide fabrique des estro-
pi^s et des infirmes ; ailleurs les rem^des de (c bonnes femmes »
aggravent les maladies au lieu de les gu6rir ; plus loin, on
inflige de v^ritables soufiErances avec la conviction de procurer
la sant^, telles ces expositions sur la dalle froide d'un tombeau,
k Villers-SaintrS^pulore (Oise), d6clar6es infaillibles contre le
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240 REVUE PHILANTHROPIQUE.
carreau. Gombien de maladies de la peau sont dues & la salet^!
Gombien d'aflfections c6r6brales sont dues k la crasse de la t6te,
aux croAtes laiteuses pour lesquelles on professe partout un
saint et profond respect ! Gombien d'enfants s'enrhument,
deviennent rachitiques, parce qu'on les couche sur la plume
ou qu'on met leur berceau prfes d'un mur humide !
Est-ce que dans ce d^partement de la Seine-Infifirieure
m^me, on ne voit pas des m^res demander Taumdne et entre-
prendre avec cet argent de « Thumiliation et de la penitence »
un pfelerinage au Neufbourg ou ailleurs, pour aller chercher la
gu^rison du « mal de Saint-Main » ou de toute autre affection
dont leurs enfants seraient pr^serv^s par des soins ^clair6s?
Une heure de chemin de fer nous conduirait en plein pays de
Caux, oil, sans grandes rccherches, nous trouverions de pauvres
b6b6s dans une « tournette » ou « potence ». Entrain6s par
leur propre poids, ils tournent, les bras en Tair, suspendus
sous les aisselles et offrent, selon la juste expression d'un m6-
decin-inspecteur, Taspect d'un Z, la t6te port^e en avant et les
jambes, trop faibles pour supporter Le poids du corps, trainant
mis^rablement en arrifere. Nous y rencontrerions aussi Tusage
de la « hotte », sorte de panier en osier, rappelant la forme
d'une cruche k bifere, et dans laquelle on plante les enfants de-
bout, serr^s dans leur maillot.
Mais voici qui est plus douloureux encore. Dans le tr5s intd-
ressant bulletin de la Soci6t(5 prolectrice de TEnfance, M. le
D'de Welling constate que de 1887 k 1893, sur 7444 enfants d6-
c6d6s avant F&ge d'un an, dans laville de Rouen, 3 892 soit 88
p. 100, ont succomb6 k la diarrhde microbienne. Ces 3892 d6-
c5s repr6sentent de v6ritables homicides, puisque la diarrh6e
microbienne est une maladie dvitable par la sterilisation.
On ne salt done pas 6lever les enfants. Or, si Topinion pent
encore varier sur certaincs pratiques de Tdlevage, il y en a qui
sont unanimement condamndes par la science et qui, par con-
sequent, ne sauraient plus 6tre toldrdes, car, avec notre Emi-
nent directeur, M. Monod, nous pensons que « ce qui 6tait
permis quand on le jugeait inoflfensif, ne doit plus Tdtre
quand on le salt nuisible ». Et de mdme que ]a loi est inter-
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PROTECTION DE L'ENFANCE AU CONGRfeS DE ROUEN. 241
venue pour assurer le d6veloppement de rintelligence de Ten-
fant, elle doit intervenir pour assurer le d^veloppement du
corps et sauvegarder parfois Texistence. Logiquement la pro-
tection physique doit pr6c6der la protection intellectuelle.
Mais sous quelle forme et par quels agents s'exercera cette
action de la loi ? La r^ponse va nous 6tre foumie par la loi
Roussel et ses r^sultats.
En 1892, sur 102 408 enfants prot^g6s de ft 2 ans, il en
est mort 9 357, soit 9,13 p. 100, tandis que nous avons vu que
la mortality g^n^rale des enfants de ft 1 an oscille autour
de 16 p. 100; elle atteint mdme 23,7 p. 100 dans TArd^che,
23,8 dans les Hautes-Alpes et 23,9 dans la Seine-lnf^rieure.
Dans ce dernier d^partement, en particulier, la mortality des
nourrissons a 6t6 de 7,25 p. 100, soit une difference de 16,65.
N'esl-ce pas ^norme ? Que la diminution naturelle de la mor-
tality chez les nourrissons pendant la deuxi5me ann^e contri-
bue ft augmenter T^cart entre les deux taux, nous le recon-
naissons, mais cette cause ne saurait ft elle seule expliquer une
difference aussi grande et il faut admettre — ce que les rap-
ports officiels proclament depuis longtemps — « que les nour-
rices bien dirigdes, bien conseill^es, finissent par suivre les
conseils d'hygifene donn6s par les m^decins-inspecteurs, de
sorte que leurs nourrissons se trouvent dans des conditions
meilleures que nombre d'enfants eiev^s par leur mfere ».
Eh bien ! si Tinspection m^dicale produit de si heureux
effets chez les nourrices, pourquoi ne pas I'introduire dans la
famille?
Nous croyons avoir r^pondu aux objections de principe qui
pourraient 6tre soulev6es, et nous ne voyons pas de difficult^s
sirieuses dans la pratique. Dira-t-on que des parents refuseront
de recevoir le m^decin ou de suivre ses conseils ? Ce ne serait
en tout cas que des exceptions, et quand elles se manifeste-
raient, on agirait comme dans toutes les circonstances oil il y
a resistance ft la loi. En face du droit de Tenfant et, de Tinterfet
de la societe, le droit du p^re doit s'incliner et, comme Ta dit
M. le Directeur Monod, « la liberty de vivre doit avoir le pas
sur la liberty de tuer ».
nvm pmLAMTBRonQUE. — > ii. 16
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242 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Qu'on nous permette h ce sujet une remarque personnclle.
Au cours de nos tourn^es, il nous est arriv^ quelquefois de nous
rencontrer chez une nourrice avec la mftre de Tenfant et de
faire des observations. En donnant la raison de telle prescrip-
tion, enexpliquant les inconv^nienis ou les dangers de telle
pratique, en montrant la surveillance uniquement pr^occup^e
de la vie et de la 8ant6 de Tenfant, loin d'avoir k essuyer un
refus et de voir la mfere prendre parti contre nous, nous avons,
au contraire, toujours reQu des remerciments.
Du reste, quelle est la m^re qui, aimant son enfant, ne
serait heureuse d'avoir une sorte de directeur k consulter et de
recevoir des conseils ^clair^s? Et puis, Ik oii Taffection ferait
d^faut, Ic m^decin inspireraitune crainte salutairc. Sachant que
Tenfant sera visits et examine chaque mois, les brutes redou-
teraient TobII exerc6 du praticien et n'oseraient plus se livrer k
loisir k la torture et perp^trer impun^ment un infanticide. Est-
ce que les nourrices faiseuses d^anges n'ont pas disparu par-
tout oil la protection fonctionne r6guliferement? II faut aussi
que les mferes faiseuses (tanges, volontaires ou involontaires,
disparaissent ; il faut que quelqu'un aille au foyer d6fendrc les
petits contre Tignorance et les pr^jug^s ; il faut qu'une senti-
nelle veille autour des berceaux prdte k jeter Talarme si, mal*
gr6 tout, Tenfant apparatt comme une victime. Nul ne saurait
mieux remplir cette haute mission que le m^decin.
Pour 6viter toute apparence vexatoire ou inquisitoriale,
tout froissement de susceptibility, rien n'emp^cherait de dis-
penser de la visite du m^decin-inspecteur les families qui en
t6moigneraient le d^sir, sous reserve qu'elles feraient visiter
leurs enfants par un m^decin de leur choix et que celui-ci four-
nirait la preuve de ses visites mensuelles ; ainsi, la liberty des
parents serait respectfie^jusqu'i Textrfime limite oil elle reste
compatible avec les droits de Tenfant. Cette m^thode ne serait
que I'application de la rfegle suivie en mati^re d'instruction
obligatoire.
Si les parents pr^fferent les ^coles privies ou T^ducation
dans la famille aux 6coles et it Tenseignement de TEtat, ils
sont absolument libres ; ce qui leur a 6t6 retire, c'est la liberty
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PROTECTION DE L'ENFANGE AU GONGRfeS DE ROUEN. 243
de choisir entre Finstruction et rignorance. De mdmey ils
seraient libres de choisir le m^decin qui leur conviendrait pour
veiller au d6veloppement physique ; la soci^t6 n'aurait pas k
imposer le sien, mais elle ne permettrait plus Tabsence de sur-
veillance et de direction.
En presence des petits martyrs et de la depopulation^ le
' droit de Tenfant & la vie ne sauraitfitre trop hautement affirm^,
j Bt la society doit assumer r^solument le devoir de le garantir
I envers et contre tons ; trop longtemps le d^veloppement de ces
I fr^les existences a 6t6 abandonn^ aux caprices du hasard ou aux
fantaisies de I'ignorance ; il faut ^clairer la tendresse des pa-
rents, au besoin leur imposer la lumi^re ; il faut que les progr^s
de la science avec les pr6ceptes de Thygi^ne aillent k tons les
berceaux porter la sant6, ce pr^cieux talisman sans lequel la
vie n'est qu'un p6nible fardeau.
A. GAMBILLARD.
A la suite de ce rapport, le Congrfts a adopts le vcbu suivant,
I sign6 par MM. Andr^ Leffevre, Paul Strauss et Cambillard :
] Les families devront produire tons les deux mois un certificat medical
J conslalant que Tenfant de 4 1 an est 8oign6 conform^ment aux regies
^elliygi^ne.
^ certificat 6manera soit d'un m^decin choisi par la famille, soit, si
c«Il€-ci en fait la demande, d'un m^decin d6sign6 par TAdministration (et
flODl les visites poorront 6tre gratuites).
^° cas oil le certificat ne serait pas produit en temps touIu par la
'^imUe, l*autorit^ administrative pourra faire proc6der d'office k la visite
^'^^'examenderenfant.
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LE SANATORIUM D ANGICOURT
ET LA
CURABIUTfi DE LA TUBERCULOSE PDLMONAIRE
La creation, par TAssistance publique de Paris, du sanato-
rium d'Angicourt pour tubercaleux pauvres, constitue Tune
des tentatives les plus nouvelles, et la plus int^ressante au
point de vue de la th^rapeutique m^dicale qui ait 616 faite de-
puis bien longtemps. Malheureusement, comme toutes les
creations d'ordre tout k fait nouveau, celle-ci a rencontr6 des
difficult6s sansnombre. Bien que les premiers projets remontent
k 1886, il est encore impossible de pr^voir T^poque probable
de Tachfevement. Cette tentative, jusqu'ici incomplfete,n'en four-
nit pas moins un important objet d'dtude. G'est le premier
essai d'application d'un principe qui tend de plus en plus k
pr6valoir Ji Tdtranger, et qu'on pent r^sumer dans cette brfeve
formule « les hdpitaux k la campagne ». Les oeuvres d'assis-
tance priv^e s'int^ressant k la tuberculose, sont d'ailleurs au-
jourd'hui de plus en plus nombreuses. Pour elles aussi, les r6-
sultats obtenus dans les ^tablissements analogues de T^tranger,
I'histoire brifevement r^sum^e dela tentative officielle frauQaise,
ofiFre un r6el int^rfet.
I
La p^riode de constitution ou plutdt de discussion du sa-
natorium d'Angicourt fut une p^riode de septicisme predomi-
nant. Sans doute, les r^sultats th^rapeutiques obtenus par le
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r
LE SANATORIUM D'ANdlCOURT. 245
traitement de la tuberculose dans les sanatoria allemands ne
pouvaient ^tre discut^s. Les chiflfres de 24 p . 1 00 de gu6risons ob-
tenues, k Falkenstein, de 27 p. 1 00 de gu^risons obtenues k Hohen-
honnef, indiqu^s par M. Paul Strauss, dans un rapport qui fut
d^cisif, ^taient singuliferement encourageants. Mais contre ces
chiffres une objection revenait, toujours formulae, m6me par
qnelques m6decins. Ces gu^risons ont 6t6 obtenues chez des
malades de la classe ais^e et payante. Angicourt, r^serv^ aux
maiades de la classe pauvre, donnera-t-il d'aussi heureux r^-
sultats? Et Fid^e de la transformation en un simple asile de
vieillards fut m^me un moment discutSe.
En r^fl^chissant, il 6tait facile de concevoir que, mis k ^ga-
lit^ de conditions hygi^niques, les tuberculeux pauvres devaient
gu^rir tout aussi bien que les riches. Un fait curieux sur lequel
insistait jadis beaucoup mon regrett^ maitre de Thdpital de
Berck, M. Cazin, pouvait m6me faire pressentir qu'ils gu6ri-
raient mieux que les riches. A Berck, en efiFet, les gu^risons et
les ameliorations sont encore infiniment plus rapides et plus
nombreuses chez les enfants tuberculeux de Thdpital que chez
les enfants riches de la plage. C'est que, chez les premiers, la
tuberculose est en quelque sorte accidentelle, cr6de artificielle-
ment par le manque d'air et de soleil, la nourriture insuffi-
sante. Mais cet argument ne sufhsait pas k convaincre les
incr^dules. Quand, en 1894, Taffiche d'adjudication des travaux
fot enfin pos^e pen de temps aprfes le rapport de M. Paul
Strauss, cette affiche portant en t6te : construction d'un hospice
^^ phtisiques, le mot hospice ne semblait pas indiquer de bien
pandes esp^rances de gu^risons.
Mais, depuis 1894, des sanatoria pour tuberculeux pauvres
se sout cr6^s un peu partout. Un pen partout, sauf en France,
d ou la premifere id^e 6tait cependant partie, et oil n*existent
encore que les sanatoria sp^ciaux pour enfants tuberculeux de
ViiJepinteetd'Ormesson. Les r^sultats deces deux^tablissements
"^PJ^visfe en quelques mois,parrinitiativepriv6e, 30 p. 100 de
S^*rtson8, pouvaient 6tre discut^s comme s'appliquant k Tadulte.
Mais les r^sultats des sanatoria pour tuberculeux pauvres de
*^^Ikenstein, de Rehburg, de GcerbersdorfT sont singuli^rement
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246 REVUE PHILANTHROPIQUE.
encourageants. A Falkenstein , oti les malades sont reQus k
toutes les p^riodes de la phtisie et s6journent douze semaines
seulement, 102 malades sur 133 trait6s en un an,sont tr^s am£*
lior^s. L'augmentation du poids est en moyenne de 7 livres.
La disparition complete des bacilles dans les crachats est
not^e dans 10 p. 100 des cas. Au Rehburg,sur 170 tuberculeux
soign^s en deux ans,63 (37 p. 100) quittent le sanatorium, con-
sid^r^s comme gu^ris, 67 (38 p. 100) sont am^lior6s. — A Goer-
bersdorfiF, le D' Weicker 6tudie, non la gu^rison on Fam^-
lioration, mais Taptitude au travail h la sortie, ^l^ment plus
facilement appreciable. Sur 65 malades soign^s, 47 avaient
recouvr^ cette aptitude k leur sortie. Chez 40 de ces malades
I'aptitude au travail avait persists au bout d'un an. — II serait
facile de multiplier ces exemples, comme I'a fait M. Beaulavon
dans un excellent travail sur les sanatoria pour phtisiques in-
digents k retranger, paru r^cemment dans la Revue de la
tuber culose. En Suisse, au sanatorium du Schwendi; en Angle-
terre, aux sanatoria de Vendnor, d'Adirondack, les r^sultats sont
6galement satisfaisants.
Comment s'expliquer ces r^sultats surprenants dans une
affection g^n^ralement regardi^e comme si grave? S'il s'agissait
de plaider uniquement le proofs d'Angicourt, il suffirait d'enre-
gistrer ces nombreusesgu^risons, sans en rechercher les causes.
Mais TAssistance publique, dans son projet de campagne contre
la tuberculose, a decide la creation de deux sanatoria intra-
urbains. Tun k Thdpital Saint-Antoine, Tautre k Thdpital Cochin.
Ces sanatoria intra-urbains, dont les plans sont d'ailleurs fort
remarquables, seront certainement commences etprobablement
m6me terminus avant Tachdvement d'Angicourt. Si le mot de
sanatorium a pour but d'augmenter les illusions des malades
qui y sonttrait6s,on ne pent qu'approuver cette pens^e pieuse.
Mais si Ton s'imagine vraiment que la cure d'air, le grand ele-
ment de succfesdans les sanatoria, puisse se faire aussi bien avec
Tair du faubourg Saint-Jacques et du faubourg Saint-Antoine,
qu'avec Fair de la pleine campagne, cela m^rite discussion.
La cure d'air permanente prolong^e jour et nuit est le prin-
cipe mdme du traitement des sanatoria. La quality m6me de
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LE SANATORIUM D'ANGICOURT. 247
I'air n'est pas plus indifr6reiite pour cette cure que ne Test la
bonne quality des aliments pour le deuxifeme 6l6ment du trai-
tementy pour la suralimentation. Bien des raisons th^oriques
ont dt6 donn^es pour expliquer cette efficacit6 de Tair pur de
la pleine campagne. On a suppose que cet air, tr5s pauvre en
germes, nettoyait m^caniquement les bronches et les poumons,
tandisque I'air des villes, Fair rerespir6 comme Tappellent les
m^decins anglais, apporte sans cesse des germes nouveaux. A
cet 6gard, Taction purifiante de Tair des villes pourrait done
6tre compar^e k celle d'un bain pris dans une eau bien sale. On
a invoqu^, pour expliquer Taction plus particuUftrement favo-
rable des sanatoria situ^s en pleines for^ts, la presence de
Tozone. Dans Tincomparable action de cet agent physique, Tair
pur, bien des donn^es sont encore inconnues. L'argon par
exemple, ce composant qui semble avoir une importance r^elle,
est i peine connu d'hier. Mais, sans s'attarder aux raisons
th^oriques, il y a 1& un fait de simple bon sens : si quelque m6-
decin croit que Tair de Paris favorise la respiration, reveille les
forces et stimule Tapp^tit aussi bien que Tair de la pleine
campagne, je lui serais fort oblige de m'envoyer Tombre d'un
fait justifiant son opinion.
N'y eAt-il m6me que Texcitation de Tapp6tit, ce fait banal
et joumalier qui s'observe dfes le second jour de toute arriv^e
k la campagne, qu'il y aurait Ih un 6l6ment preponderant. La
suralimentation, cet excellent trait ement de la phtisie pulmo-
naire qu^a imaging M. Debove, se trouve prodigieusement faci-
lit^e. Au Schwendi, une des preoccupations du rfeglement est
d'emp6cher les malades de manger en dehors des six repas
reglementaires. Voil& une debauche d'appetit qui ne sera sans
doute gu^re k craindre dans les sanatoria intra-urbains. Un der-
nier fait justifierait, si c'etait n^cessaire, cette efficacite de Tair
pur au point de vue de la suralimentation. Nombre de maladies
d estomac m6me independantes de toute tuberculose se trouvent
Irfes favorablement influencees par une hygifene plus ou moins
analogue k celle des sanatoria oh la cure d'air au repos occupe
au debut le principal rdle. Et c'est peut-etre k la pratique des
sanatoria qu'on pent emprunter les meilleurs moyens de trai-
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248 REVUE PHILANTHROPIQUE.
tement de ces affections si tenaces et si rebelles k tout traitement
m6dicamenteux. Les constructions 6lev6es h grands frais dans
Paris, pour le traitement des . tuberculeux curables, pourront
6tre 6gales, sup6rieures mfime, au point de vue hygi^nique, i
celles d'Angicourt. Au point de vue th6rapeutique, on pent
parier k Tavance qu'elles ne donneront pas les mdmes r^sultats.
II
La situation topographique du domaine d'Angicourt est en
effet des plus favorables. Son dtendue atteignait, au moment du
premier achat, 28 hectares. Cette 6tendue ^tait d^jii considerable.
G'est exactement la superficie sur laquelle, k Paris, le quartier
Bonne-Nouvelie r^unit et entasse ses trente mille habitants.
Depuis, une s^rie d'acquisitions successives ont regularise les
contours un peu irreguliers du terrain primitif et ont augments
son etendue de prfes de moitie.
La configuration gen^rale, assez accidentde, est celle d'un
plateau boise, sillonne en tons sens par deux valines d'orienta*
tion differente, et par des ravins profonds. L'altitude de ce pla-
teau atteint une centaine de metres. II est entourd de toute une
s6rie de collines plus ou moins 6lev6es, en majeure partie bois^es
de sapins. L'immunit6 singulifere dont jouissent, k regard de la
tuberculose, l^s campagnes eiev6es, entour^es dc for6ts, est un
fait bien connu, d^montr^ surtout par les travaux de M. Des-
hayes de Rouen. L'usage ancien, usage renfermant une part de
v6rit6, de tbujours choisir pour le s^jour des tuberculeux les
localit^s o{i la tuberculose spontan6e est rare, trouve done ici
satisfaction.
Bien que la propri6t^ renferme une source tr^s abondante, le
sol du plateau n*offre nulle part trace d'humidit^; cette eau
d'ailleurs est une eau courante, offrant cet avantage de consti-
tuer une exceliente eau de source. Les brouillards ne sont pas
non plus tr^s k craindre k cette altitude, malgr^ le voisinage des
grands bois.
Le vent assez violent qui r^gne sur le plateau d'Angicourt,
comme sur tons les ^plateaux Isolds et un peu 6lev6s, exigeait
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LE SANATORIUM D'ANGIGOURT. 249
seul quelques precautions sp^ciales dans r^dification des b&ti-
ments. Ces precautions ont 6t6 fort habilement prises par Tar-
chitecte M. Belouvet. La forme de chaque pavilion oflFrant une
partie mediane, flanqu^e de deux ailes k angle obtus, Forienta-
tion de ces pavilions vers le sud-est garantit au centre un es-
pace lai^ement ensoleill6 et sufiisamment abrit6 contre les
vents les plus froids. Dans le pare mdme, les nombreuses de-
pressions de terrain permettent de constituer facilement d'autres
abris.
Le premier pavilion, le seul actuellement en construction, a
m6me fait Tobjet, au point de vue de la protection contre le
vent, d'un travail des plus considerables. D'enormes deblais^
enlevant pr^s de 160000 metres cubes de terre, ont ete faits
de fa(^n k etablir le rez-de-chaussee k six mfetres en contre-
bas du sol du plateau. Le b&timent se trouve ainsi place dans
une depression artificielle. Les depenses necessitees par ce tra-
vail, les difficultes qu'a donnees la rencontre, k cette profon-
deur, d'un sol devenu mouvant et necessitant I'emploi de pilotis,
feront sans doute abandonner, pour le deuxi^me pavilion ce
syst^me d'une construction en contre-bas. Un simple talus de
remblai, plante d'arbres, situe en arriere des b^timents, ana-
logue k ces brise- vents si frequents dans les clos de Normandie,
doit avoir un effet prolecteur presque analogue avec une grande
difference d'economie.
Tous les details de construction ont ete calcules pour la
construction d'un sanatorium module. Aucun malade ne sera
couche au rez-de-chaussee. Les chambres du premier etage
auront au plus huit iits. Beaucoup sont k deux et mftme k un
lit. En avant du pavilion, s'etendra une vaste marquise permet-
tant aux malades, mdme par les plus mauvais temps, de rester
k I'air etendus sur une chaise longue. Le chauffage sera assure
par un calorif^re k vapeur et k eau chaude, seul moyen assez
puissant pour entretenir une temperature suffisamment elevee
dans les chambres des malades. Le principe de la cure d'air
exige en effet que les fenfetres restent ouvertes k pen pr^s par
tous les temps. L'edairage sera fait exclusivement k la lumibre
electrique. L'alimentation du sanatorium en eau potable et sur-
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250 BEVUE PHILANTHROPIQUE.
tout r^puration de toutes les eaux souill^es ont ^galement
n^cessitd d'int^ressants travaux.
Malheureusement, les credits disponibles ne permettent
r^dification que des services g^n^raux, et de la moiti6 d'un des
pavilions de 100 malades. II fut un moment question d'inau-
gurer le sanatorium avec 50 malades seulement. Cette solution
aurait permis un ach^vement rapide. Peut-fetre mfime les r6-
sultats auraient-ils 616 plus certains. Tons les sanatoria pour
tuborculeux pauvres ne renferment qu*un nombre de lits des
plus restreintSy 26 au d^but puis 75 seulement k Falkenstein,
30 au Rehburg, 25 k GoerbersdorflF, 24 au Schwendi. L'accumu-
lation des malades, si bonnes que soient les dispositions hy-
gi^niques,ne permet plus cette surveillance m^dicale de tous les
instants, la condition principale des succ^s des sanatoria. Le
chiffre de 100 lits, auquel on s'est arrfet^ pour Tinauguration
d'Angicourt, est d6}k considerable. Le chiffre de 200 lits, qui
doit fetre atteint plus tard, offrira des difficult^s r^elles de
rfeglement int^rieur pour ne pas transformer en un simple
hdpital ce qui doit 6tre un sanatorium.
Actuellement d'ailleurs, Targent parait manquer et man-
quera peut-fitre encore longtemps, pour aller au deli de 50 lits.
Les besoins de TAssistance publique sont si nombreux et si
varies que Tallocation n^cessaire, qu'on la demande au Gonseil
municipal ou k la commission du pari mutuel, semble devoir
se faire attendre. Jusqu'ici les d-marches tent^es n'ont abouti
qu'i des promesses vagues. II est done impossible de pr6voir, k
plusieurs ann^es pr^s, T^poque de Tach^vement d'Angicourt.
Ces retards sont fftcheux pour les malades. Actuellement
les chances de gu^rison des tuberculeux dans les h6pitaux de
Paris peuvent 6tre k bien pen de choses pr6s r6sum6es dans le
mot ^nergique de Grancher : « lis y meurent tous. » Ce qui est
vrai du traitement k Thdpital, Test plus encore du traitement
dans les bureaux de bienfaisance. C'est un m^decin des bureaux
de bienfaisance qui a 6crit la phrase d^sesp^rfie : « A Paris Tas-
sistance des tuberculeux sous toutes ses formes se r6duit d.
rien. »
Au point de vue du plan gdn^ral de la lutte contre la tuber-
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LE SANATORIUM D'ANGICOUHT. 851
culose, il est non moins f&cheux qu*avant d'adopter dans les
hdpitaux ordinaires toute une s^rie de mesures dispendieuses,
les r^sultats du traitement d'Angicourt ne soient pas encore
connus. Sans doute^ si favorables que soient ces rdsultats, Tisole-
ment des phtisiques trop avanc^s et manifestement incurables
continuera k s'imposer et devra 6tre fait sur place sans leur
imposer de voyages inutiles. Mais les malades curaUes consti-
tueront toujours Timmense majority. L'aphorisme du vieil Hip-
pocrate : « La tuberculose est la plus curable de toutes les
maladies », oubli^ pendant des si^cles est aujourd'hui de nou-
veau reconnu comme vrai. Sans doute, on essaiera bien de
trailer ces malades curables dans les sanatoria intra-urbains
de Saint-Antoine et de Cochin. L'installation, toute question
d'air mise k part, sera parfaite ; les soins les plus d^vou^s, les
plus ^clair6s ne leur manqueront pas. Mais, dans cette voie
nouvelle, on marche sans s'appuyer sur aucune experience
ant^rieure. Tons les beaux r^sultats signal^s plus haut ont €t6
obtenus k la campagne, en pleine campagne. II semblerait done
prudent et logique d'attendre les rdsultats que donnera le sana-
torium rural avant d'entreprendre cette creation absolument
nouvelle et un pen suspecte des sanatoria intra-urbains.
D' A.-F. PLICQUE.
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ENFANTS OUVRIERS
II y a cinquante ans que quelques personnes se groupferent
pour fonder la Sociiti protectrice des antmauXy et la loi de
Grammont fut vot^e en 1850.
Prot^ger les animaux.c'est bien ; prot6ger^es jeunes ouvriers,
c'est mieux, disent certains humanitaires.
C'est ce qu'avaient compris, en 1874, les pouvoirs publics,
mais cette loi trfes incomplete fut remplac^e par celle du 2 no-
vembre 1892.
Cette dernifere, compldt^e par des 'd6crets et arr6t6s, limite
lajoum6ttde travail ponr les enfants au-dessous de 18 ans,
exige qu'ils aient un jour de repos par semaine, les rend libres
les jours de fdtes ligales. Elle r^glemente les charges qu'ils
peuvent sans danger, suivant leur ftge, porter, pousser ou
trainer h Tint^rieur des ateliers comme sur la voie publique et
interdit pour eux les travaux nuisibles et dangereux.
Des inspecteurs sp^ciaux sont charges de Tex^cution de cette
loi, mais leur nombre, tout au moins pour Paris, est loin d'Mre
suffisant, et seraient-ils plus nombreux, qu'ils ne pourraientse
trouver sur tons les points de la voie publique ou des sur-
chai^es d'enfants ont lieu d'fitre constat^es.
Quant aux gardiens de la paix qui pourraient seconder les
inspecteurs, ils ne se croient obliges k intervenir que lorsque
les victimes se plaignent, ce qui ne se produit jamais pour dif-
f^rentes raisons.
U y a done lieu d'intervenir et de prot^ger quelquefois
contre lui-m6me, Tenfant plein de courage et d'amour-propre.
£mu des nombreuses plaintes concernant la fausse interpre-
tation et le d^faut d'ex^cution de cette loi, destin6e & manager
nos enfants k cet instant de leur formation oil les efforts et
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ENFANTS OUVRIERS. 253
les exc^s de fatigue peuvent compromeltre leur d6veloppement
et mSme les estropier pour le restant de leur existence,
M. Quillent, conseiller prud'homme ouvrier, a propose au comit6
de vigilance des prud'hommes ouvriers du Conseil des m^taux
et industries diverses, qui se compose des d^l^gu^s de Syndi-
cats ressortissant k ce Conseil, de constituer, d'accord avec ses
conseillers, une Union protectrice des jeunes travaiileurs des
deux sexes (1).
Son titre est son programme.
Des soci6tds de ce genre existent d6j4 en grand nombre k
r^tranger ; pour ^tablir une comparaison, dans les divers pays
d'Europe, de Tetge auquel la loi admet que d'un enfant on
puisse faire un ouvrier, je me suis rendu k TOffice du travail
pour enqudter sur ce grave sujet.
En France, d'apr^s la loi du 2 novembre 1892, Tadmission
au travail est interdite avant V&ge auquel se terminent les obli-
gations scolaires, soit 13 ans rdvolus, en g^n^ral de 12 k 13 ans,
pour les enfants munis du certificat d'^tudes primaires : pour
^tre admis au travail dans ce dernier cas, les enfants doivent
produire, en outre, un certificat medical d'aptitude physique.
En ce qui concerne sp^cialement Temploi des enfants dans
les th^Mres, ils ne peuvent 6tre employes dans les represen-
tations de theatres et caf^s-concerts s^dentaires avant T^ge de
12 ans r^volus, sauf exceptions nominatives et relatives k la
representation d'une pi^ce determinee, autoriseesparleministre
de rinstruction publique k Paris et par les pr6fets dans les de-
partements.
Gette condition d'&ge est la seule limitation apportee k
Femploi des enfants dans les theatres et cafes-concerts seden-
taires, sauf pourtant ceux qui exicutent des tours de force
perilleux et des exercices de dislocation. Pour ceux-li et pour
tous les enfants employes dans des spectacles forains, c'est la
loi speciale de 1874 qui reste applicable : elle interdit k tout in-
dividuy m6me aux pfere et m?ire,de faire executer par les en-
fants des tours de force perilleux ou des exerciees de dislocation
(1) Sihge social, 27, boulevard Saint-Martin.
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254 REVUE PHILANTHROPIQUE.
avant V&ge de 16 ans. Jusqu'i cet Age, ils ne doivent inline
pas paraitre dans les spectacles forains^ sice n'est sous la direc-
tion de leurs pfere et m^re, qui peuvent les employer dans leurs
representations k partir de 12 ans. Toutefois, les dispositions
sp^ciales d*un d^cret de mai 1893 interdisent Temploi des en-
fants au-dessous de 18 ans dans les menageries quand elles
renferment des bfites firoces ou venimeuses.
Siy dans les pays d'Europe, nous commeuQons par ceux qui
envoient le plus t6t Fenfant h Tatelier, nous Irouverons tout
d'abord Tltalie od V&ge d'admission est de 9 ans dans les
industries autres que celles des travaux souterrains et de 10
ans dans ceux-ci; toutefois, avant T&ge de 15 ans, la loi n'ad-
met les enfants de Tun et Tautre sexe au travail industriel que
moyennant un certificat medical d'aptitude physique et 1 'obli-
gation oil se trouve tout patron qui pent employer des enfants
de cet &ge it en faire la declaration k Tautorite.
Nous trouvons ensuite TEspagnCy dont les lois fixent unifor-
m^ment & 10 ans pour Tun et Tautre sexe et pour toutes les
industries T&ge d'admission au travail. U en est de mftme au
Danemark, od cette limite est fix^e k i'&ge de 10 ans constate
par un acte de naissance, et moyennant un certificat medical
d'aptitude physique.
Avec TAngleterre, nous arrivons jusqu'& TAge de 11 ans;
jusqu'& 16 ans, les enfants ne peuvent travailler dans une
fabrique sans etre munis du certificat medical qui est facul-
tatif dans les ateliers de famille et les ateliers d'artisans. Le
travail des enfants en Grande-Bretagne est soumis, dans toutes
les categories d'etablissements, k un regime special, aujourd'hui
abandonne par toutes les legislations europeennea, et qui est
connu sous le nom de systfeme du demi-temps. Sous ce regime,
Tenfant travaille, soit une demi-joumee chaque jour, soit une
joumee entiere tons les deux jours, et consacre le reste de son
temps k ses obligations scolaires.
C'est la limite de 12 ans, nous Tavons dit, qui est le plus
generalement adoptee par les Etats europeens; nous trouvons
dans cette categoric : la Belgique, oti toutefois les travaux sou-
terrains des mines et carriferes sont interdits aux fiUes et femmes
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ENFANTS OUVRIERS. 255
Ag^es de moins de 21 ans; les Pays-Bas, le grand-duch6 de
Luxembourg, la Hongrie, la Sufede, la Russie. En Autrichey
dans les fabriques, Tadmission au travail ne pent avoir lieu
qu'aprfes 14 ans pour les deux sexes; dans ces ateliers, elle
pent avoir lieu k partir de 12 ans; mais pendant les deux
premieres ann6es, la nature de Toccupation doit 6tre subor-
donn^e k T^tat de sant^ et de vigueur du jeune ouvrier.
Par contre, au Portugal, Tadmission au travail ne pent
avoir lieu qu'aprfes 12 ans accomplis; toutefois un d^cret pent
autoriser certaines industries k occuper des enfants k partir de
10 ans, k des travaux qui n'excfedent pas leurs forces; Fexer-
cice de la profession d'acrobate n'est permis qu'aprds F&ge de
16 ans.
Avec TAUemagne, nous arrivons k une limite d*&ge plus
^lev^e : Tftge d'admission des enfants au travail est, en effet,
fix6 k 13 ans r^volus, avec cette restriction que les patrons
priv6s de leurs droits civiques ne peuvent employer d'ouvrier
kgi de moins de 18 ans.
C'est la Suisse, nous Tavons dit, qui recule le plus le mo-
ment od elle estime que, sans danger, Tenfant pent travailler;
c*est en effet, jusqu'i 14 ans r^volus que les dispositions de la
loi helv^tique interdisent le travail.
II est int^ressant de conslater, entre des pays voisins, des
differences aussi considerables quisemblent, ensomme,resulter
beaucoup plus des diversit^s d'appr^ciation des l^gislateurs que
de raisons logiques et inh^rentes au dSveloppement plus ou
moins rapide de Tenfant et & sa faculty de travail. Agir autre-
ment serait cependant humain et pratique. Voil& pourquoi
Y Union pro tec trice des jeunes travailleurs des deux sexes orga-
nise pour septembre 1898 un Congr^s international, afin que
nous mesurions toute la distance qui nous s^pare encore
d'un apprentissage bienfaisant et salutaire, pour le moral et
le physique des jeunes travailleurs.
F. MARTIN-GINOUVIER.
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL
Une des formes de I'assistance appel^e, selonnous, Prendre
de grands services est, sans contredit,rassislance par le travail.
Les r^sultats obtenus par les diverses Soci^t^s fondles, tant
en France qu'k T^tranger, pour pratiquer ce syst^me d'assis-
tance, sont une preuve de ce que Ton en doit attend re lors-
qu'une extension plus grande aura, d'une part, augment6 Tim-
portance des socidtds existantes et, d'autre part, quand beaucoup
de soci^t^s nouvelles existeront.
Par assistance par le travail, on entend secourir les malheu-
reux d'une manifere efficace sans qu'il y ait la moindre gftne
pour ceux qui sont obliges d'avoir recours h la charity de leurs
concitoyens.
En efTet, Taumdne ordinaire qui consiste k remettre k de
pauvre diables des secours directs, nous paratt humiliante pour
ceux qui se trouvent dans la n6cessit6 de la soUiciter.
De plus, les documents qui existent sur les multiples formes
de la mendicity, prouventabsolument que, trois fois sur quatre,
on oblige des professionnels, c'est-i-dire une cat6gorie d'indi-
vidus peu int^ressants qui ont fait leur profession de mendier.
« Tons ceux qui ont fait de la question de Tassistance Tob-
jet de leurs preoccupations sp^ciales, sont unanimes pour re-
connattre que le meilleur moyen de venir au secours de la ve-
ritable misferec'est d*organiser Tassistance par le travail toutes
les fois qu'il s'agira de secourir des n^cessiteux valides.
« L' assistance par le travail a pour but de remplacer Tau-
mdne par le travail et de demander un eflFort, un acte de
bonne volonte k celui qui vient demander un secours.
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL. 257
« L'assistancepar le travail ne s'adresseybienentendu^qu'aux
valides. Ghaque fois qu'un homme ou une femme valides affir-
ment itre des sans travail, rassistance par le travail les reQoit,
lesloge, les nourrit, les chauffc et tes^claire.
« En ^change de ces secours, elle leur demande de travailler
quelques heures chaque jour.
« Je dis quelques heures parce que les soci^t^s d'assistance
parle travail laissent g^ndralement Sileurs assist^s la libre dis-
position de leurs matinees, afin de pouvoirchercher et trouver
i se placer.
« Toutes les oeuvres d'assistance par le travail, sans aucune
exception, perdent beaucoup d'argent et cela est tout naturel
car le semblant de travail qu'elles ont organist n'a qu'un but :
Eloigner les faux pauvres, attirer les vrais malheureux (1). »
Si les soci6t6s d'assistance par le travail perdent beaucoup
d'argent, et cela est vrai puisque nous allons le prouver im-
m^diatement, elles ne sont done pas, comme le disait derni^re-
ment un d6putd socialiste : un nouveau syst^me d'exploiter la
misftre et de rabaisser les salaires de Touvrier. D'abord il ne
saurait 6tre question ni de salaire, ni de travail. On se trouve
en presence d'hommes et de femmes qui sont en ^tat de mis^re,
d^nu^s de toutes ressources et talonn^s par la faim. Les travaux
qui leur sont donnas ont un caract^re moral, destines h relever
ileurspropres yeuxceux qui les acceptent et pour lesquels on
leur donne des secours en ^change. En m6me temps, les direc-
teurs des soci6t6s d*assistance par le travail ^tudient la mani^re
dent travaillent leurs assist^s et cherchent k voir ceux qui md-
^^n\ que Ton s'occupe d'eux d'une autre fagon.
Car ces soci^t^s cherchent i placer dans le commerce, dans
les ateliers, partoutoii elles peuvent ces sans-travail et elles y
rtussissent assez bien, ainsi que le d6montrent les comptes ren-
dus que nous poss^dons.
Mais revenons k la prdtendue exploitation que nous signa-
Hons tout k rheure.
Dans lecompte rendu de Tassembl^e g6n6rale de 1895 dela
(*) GtoRGEs Berry, Proposition de loi n» 11"0. Assistance par le travail.
**VrB PHlLAKTHROnQUE. — II. 17
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258 REVUE PHILANTHROPIQUE.
soci^t6 d'assistance des 8« et 17« arrondissements, nous trou-
vons ce passage dans Texpos^ de la situation financi^re fait par
M. Lalance, president.
En 1894, les travaux des femmes ont rapports :
Ventes d'objets fabriqu^s. . . 4 085 fr. 40
Pour travaux divers 91 fr. 60 4177 francs.
Et ont coiit6 :
En salaires pay6s 6 908 fr. 35
En mati&res achet^es 3 493 fr. 40 10 400 fr. 75.
Soitun deficit de 6000 francs.
Les travaux des hommes ont rapport6 :
Vente de margotins 9 069 fr. 40
Travaux interieurs 1611 fr. 80 10681 fr. 20.
Et ont coiit6 :
En salaires 16608 fr. 50
En mati^res achet6es 6264 fr. 80 22 873 fr. 30.
Soit un deficit de 12 000 francs.
Et, au total, cela fait 18 000 francs de pertedans une ann^e.
« On peut done dire, d'une faQon g6n6rale, que nous payons
trois k quatre fois trop cher les travaux que nous faisons faire.
Si nous ne donnions k nos assist^s que ce qu'ils gagnent r^elle-
ment, ilsn'auraientpas de quoivivre. De plus, nous ferions con-
currence k rindustrie priv6e. » Voici comment s'exprimait
M. Lalance ; on peut en d^duire qu'aucune id6e de faire des b^-
n^fices n'est jamais venue le guider dans Torganisation de la
soci^t^ qu'il preside.
Nous allons voir maintenant cequ'a fait FUniond'assistance
du XVP arrondissement pour le placement des n^cessiteux qui
m^ritaient un int^rftt particulier.
Le compte rendu de Passembl^e g6n^rale de 1894 nous
apprend que 181 personnes, dont 101 hommes et 80 femmes, ont
6t6 pourvues, par ses soins, de travail d6finitif ou d'emplois.
Dans le compte rendu de Fassembl^e g^n^rale de 1895, nous
trouvons que 78 personnes, dont 48 hommes et 30 femmes ont
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL. 259
U& plac^es dans les m6mes conditions que ci-dessus. Et le
rapporteur ajoute : « Nous n'inscrivonssuria liste des placements
que les personnes pourvues d*un emploi k demeure.
« Lorsqu'il s'agit de travail ou d'emploi temporaire, nous les
inscrivons dans lacat^gorie des personnes dont on s'est occupy ».
Un point trfes int^ressant k connaitredans le fouctionnement
des soci^t^s d'assistance par le travail est celui du service
d'enqu6tes. Lorsqu'une personne se pr^senteavec un bon de tra-
vail, en Tacceptant on lui demande son nom et son domicile
et Ton fait une enqufite sur cette personne, non pas en allant
demander des renseignements k la concierge, mais aupr^s du
bureau de bienfaisance de Farrondissement, k la mairie, k
Tassistance publique, aux soci^t^s d'assistance, en un mot par-
tout oh celui qui veut vivre k ne rien faire pent s'adresser.
Les r6ponses indiquent si Ton se trouve en presence d'un
de ceux que pendant des ann^es Ton pent rencontrer comme
M pauvre ouvrier sans travail » ou si Ton a affaire it un indigent
momentan^ et duquel on doive s'occuper. Si nous voulions
vous donner quelques exemples des trues des mendiants, nous
n'aurions que Tembarras du choix. Mais lisez Touvrage d^
M. Paulian et celui de M. G. Berry sur la mendicity, et vous
serez fix6.
Pour que la charity publique ne soit pas exploit6e ind6fini-
ment par des indignes, il faudrait que Tassistance par le travail
ffttr^lement^e et organis^e dans toute la France.
Dans Fouvrage de M. Albert Mar6chaux, sur Fassistance pu-
blique, je d6tache le chapitre intitule: suppression de la mendi-
city; Fassistance par le travail.
1® La mendicity, sous quelque forme qu'elle soit exerc^e,
est interdite sur tout le territoire de la R6publique.
2* Tout individu dont les moyens d'existence, pour une
cause quelconque, viendront k lui manquer, et qui n'aura ni
parent, ni ami pour le secourir, devra en faire la declaration au
comity d'assistance g^n6rale de la commune oti il se trouvera.
S"" Si cette commune est celle de son domicile de secours, le
comity lui procurera imm^diatement de Fouvrage ou lui remet-
tra, en attendant, un secours provisoire.
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260 REVUE PHILANTHROPIQUE.
l^ Si cette commune n'est pas celle de son domicile de se-
courSy le comity lui fournirales moyens de r^int^grer librement
son domicile de secours. Par cette declaration, il ^chappera aux
prescriptions des articles 6, 7 et 8.
5® Gependant, siun individu se trouvait trois fois dans le cas.
pr^vu k Tarticle 4, il seraiti la troisifeme fois, reconduit k son
domicile de secours, dansles conditions prescrites ^Tarticle 6.
6® Tout individu, surpris mendiant sur la voie publique, sera
imm6diatement conduit par les agents de Tautoritd devant le
commissaire de police, dans les villes oh il existe un fonction*
naire de cet ordre, ou devant le mairede la locality, danstoutes
les autres villes ou communes. Apr^s avoir 6i6 interrog^ par ce
magistrat, Finculp^ de mendicity sera amen6 devant leddl^gu^
du comity d'assistance g^n^rale de son domicile de secours qui
lui procurera du travail ou un secours pro visoi re.
Si son domicile de secours n*est pas dans la locality ou il a
et6 trouv6 mendiant, il y sera ramen^ par les soins du magistrat
qui aura procddd k son interrogatoire.
Co magistrat enverra, le m6me jour, au pr^fet ou au sous-
pr^fet, suivant la division administrative klaquelle ilappartient,
un ex trait du registre sur lequel il aura consign^ I'interroga*
toire de Tinculp^.
Cet extrait devra indiquer : les noms et pr6noms de Tinculp^,
son &ge, son domicile de secours, le lieu de sa naissance, sa
profession et les motifs qn'il aura donnas pour se disculper.
7® Tout individu qui se sera mis trois fois dans le cas d'fetre
ramen^ k son domicile de secours dans les conditions 6nonc6es a
Tarticle 6, ou qui aura cherch6 k s'^chapper des mains des agents
de Tautoriti, aprfes avoir 6t6 par eux invito k les suivre, soit au
commissariat de police, soit k la mairie, soit chez le d^I^gu^ du
Comity de I'assistance g^ndrale, soit & son domicile de secours.
sera livrS ^ la gendarmerie et 6crou<§ dans la prison la plus voi-
sine, en attendant qiiele ministredela Justice ait f ait connaitre.
d'accord avec le ministre de Tlnt^rieur, la Colonic agricole, fo-
resti^re ou industrielle vers laquelle il devra 6tre dirig^.
8® Cette colonic sera situ^e :
« 1® En France, pour lesindividus n'ayantli leur easier ju-
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL. 261
diciaire aucune condamnation ou n'ayant 6t6 condamiiiSs que
pour mendicity ou vagabondage.
« 2® Dans les colonies frangaises ou dans les pays soumis k
notre protectorate pour les individus condamn^s ant^rieurement
pour ddlits de droit commun.
9^ Le minimum de s^jour dans Tune quelconque de ces co-
lonies est de 3 ans. A Texpiration de ce temps, le colon qui se
sera distingu^ par son travail, son ^conomie et sa conduite
sera ramen^ gratuitement k la residence de son choix et y sera
pourvu de travail. Ses Economies lui seront remises d. sa sortie.
10^ Tons les ans, la m6me mesure de cl^mence pourra ^tre
appliqu^e aux colons ayant d6jk accompli une p^riode d^au
moins trois ann^es k la colonic.
Le colon lib6r^ qui serait pris se livrant de nouveau k la
mendicity serait dirig6 d'office vers une colonic en dehors de la
m^tropole dans laquelle il ferait une nouvelle p6riode de
15 ann^es.
11^ Tout individu de nationality ^trangfere convaincu de
mendicity sera imm^diatement expuls^ du territoire de la R6-
publique dont les portes lui seront k jamais ferm^es.
12** Toute personne qui sera surprise faisant Taumdne k un
mendiant sur la voie publique, tout propri6taire, principal
locataire ou concierge qui laissera stationner k la porte ou dans
la cour de sa maison un mendiant, tout boutiquier qui tol^rera
devant son magasin un individu se livrant k la mendicity seront
consid^r^s comme complices de ces individus, et punis d'une
amende de 20 k 500 francs, au b^n^fice de Tassistance g6n6rale.
En cas de r^cidive, Tamende sera portie au maximum.
13* Les articles 269, 270, 271, 272, 273, 274 et 275 du code
pinal sont abrog^s.
Les mots mendiants et vagabonds seront remplac^s dans les
articles 276, 277, 278, 279, 281 et 282 du mfeme code, paries
mots individus.
ii^ Les d6p6ts de mendicity sont et demeurent supprim6s.
Les conseil& g6n6raux dans les d^partements desquels ils se
trouvent proc6deront it leur d^saffectation et les convertiront en
maisons hospitaliferes : hospices, hopitaux, colonies agricoles
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262 REVUE PHILANTHROPIQUE.
et industrielles, d^pdts de nourrices, etc., suivant Ics besoins
locaux.
II faut dire que ces articles, relatifs k Tassistance par le tra-
vail, font partie d'un plan concernant la reorganisation de T As-
sistance publique qui en a grand besoin, ainsi que Font cons-
tats tousceux qui se sont occupSs de cette question. Nous savons
que parmi les membres du Comity de Direction, comme parmi
les lecteurs de la Revue philanthropique, il y en a beaucoup qui
s'intSresseront au ddveloppement de Tassistance par le travail ,
c'est pourquoi nous avons pensS les intSresser en plaidant cette
cause. Puissions-nous avoir r6ussi !
JEAN VOIRIEN.
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_£_ 2_
VARIETES
^'Organisation hospitali^re lyonnaise.
Les hospices civils de Lyon comprennent huit ^tablissements dont quel-
qnes-uns eurent, dans rorigine, une administration distincte, mais qui
actuellement sont tons r(5unis sous la direction de la m6me administration.
Ges ^tablissements sont :
!• L'H6tel-Dieu fond^ en 542 par le roi de France Childebert et la reine
Ultrogothe; ouvert aux adultes indigents etmalades. Get hdpital atoujours
1100 k 1200 lits occup^s.
2* L*hospice de la Charity fond^ en 1531 aumoyen de quotes et de dons
de tons les habitants. Son administration, d'abord s^par^e, a ^t^ r^unie k
celle de rH6tel-pieu, en 1802.
Get hospice dispose ^galement de 1200 lits environ.
3» L'hospice de TAntiquaille fond^ par TEtat le 25 germinal an VIII, a
^t^ reoni a Tadministration actuelle en 1845, et dispose de 1159 lits.
4» L'hospice des vieillards de la Guillotifere, cr^^ en 1830 avec le pro-
duit d'une qu^te faite par les habitants de la Guilloti^re, alors commune
distincte, a et^ r^uni d*office h. T administration actuelle en 1869. — Get
hospice comprendl55 lits.
5» L'hospice du Perron, cr^d aux frais de Fadministration des hospices
en 1844, dans une propri^td qui lui avait 6t6 legume en 1762. Get hospice
dispose de 417 lits.
6*L'h6pital de la Groix-Rousse. — Gonstruiten 1860 par I'administra-
tion des hospices, avec ses propres ressources. — Dispose de 451 lits.
7» L'asile Sainte-Eug^nie cr^^ en 1867 par Tadministration des hospices
4 1'aide d*un don de 200000 francs fait par Timp^ratrice Eugenie, dans ce
but special. — Get asile dispose de 103 lits.
L'asile Paul-Michel Perret annexe k celui de Sainte-Eug^nie a ^t^ fond^
par ['administration des hospices en 1895, k Taide d'un don fait par
¥■• veuve Michel Perret. — Get asile destind aux enfants convalescents des
deux sexes, sortant des h6pitaux, dispose de 100 lits.
8» L'hdpital Ren^e Sabran k Giens (Var), fond6 sur des terrains domi^
parM. et M"** Hermann Sabran, a ^t^ ^difl^ en 1888-1891 au moyen de
souscriptions particuli^res, et inaugurd le 12 novembre 1892. Get ^tablisse-
ment destine aux enfants, garcons et fllles, qui ont besoin du traitement
marin comprend 150 lits.
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264 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Ges huit ^tablissements hospitaliers, dependant de radministration des
hospices civils, disposent ainsi de 4 750 lits environ et hospitalisent, chaque
ann^e, de 30000 k 32000 malades.
AdminisircUian. — L'administration des hospices de Lyon a ^t^ essen-
tiellement laique depuis sa remise aux ^chevins, en 1478, et les recteurs
qui leur succ^dferenlen 1583, eurent des demSl^s nombreux avec lepouvoir
eccl^siastique repr^sent^ par les archevfiques de Lyon. lis ne c^dferent
jamais et s'opposerent toujours, avec succ^s, aux atteintes qu'on cherchait
k porter k leur autorit^.
Pendant longtemps, les recteurs, pour subvenir aux charges de I'Hdtel-
Dieu, ^talent tenus de verser, k titre d'avance, une somme de 10000 livres.
Le recteur quiremplissait les fonctions de receveur 6tait oblige de verser la
somme de 100 000 francs. A I'^poque de la Revolution, I'avancefaite par le
recteur-receveur a ete de 400000 francs et a entrain^ sa mine par le fait
du remboursement op^r^ en assignats.
La denomination de recteur fut supprim^e le 28 nivdse an X; un
arrets du ministre de Finierieur de la R^publique francaise confia, k cette
date , radministration des hospices k un conseil de 15 membres et
quelques jours apr^s de 20 membres, auquel on donna le nom de Conseil
general.
Une ordonnance royale de 1822 maintint k 20 le nombre des mem-
bres du conseil g^n^ral, et enfin une ordonnance du 30 juin 1845 a orga-
nist definitivement le conseil g^n^ral actuel et a porte le nombre de ses
membres 4 25, qui sont renouvelables par 1/5. La nomination des mem-
bres du conseil appartient au pr^fet seul, sans presentation offlcielle de la
part du conseil.
La constitution et Torganisation du conseil d'administration des hos-
pices civils sont done sp^ciales k Lyon et ont ete respect^es par les lois
successives qui ont modiA^ Torganisation des commissions hospitali^res en
France.
Corps medical et chirurgical ;mode de rccnifemcnf. — Les services des h6-
pitaux de Lyon sont assures par :
\ 1 chirurgiens ; 27 m^decins titulaires ou suppliants ; 7 pharmaciens
de premiere classe, chefs de service ; 49 ei^ves internes; 120 eieves ex-
ternes; 17 eRves pharmaciens portant le nom de pharmaciens adjoints.
II y a, en outre, 9 cliniques ouvertes k I'enseignement conOees aux
professeurs de la Faculty et comprenant :
2 cliniques chirurgicales ; 2 cliniques m^dicales, 1 clinique obstetricale;
1 clinique ophtalmologiqne; 1 clinique des maladies cutan^es et syphiliti-
ques ; 1 clinique des maladies des femmes ; 1 cliniqae des maladies des
enfants.
Le mode de recrutement impose pour les fonctions du service de sante
est le concours et, k cet egard, radministration bospitaliere lyonnaise
revendique la prioriie de Tinstiiution.
Le concours fut, en efiTet, etabli k Lyon, pour la premiere fois, en 1739,
pour la reception des garcons chirurgiens (plus tard appeies internes) ; ii
n'a cess6 de fonctionner depuis cette epoque, tandis qu'i Paris il n'a ete
institue pour les eieves internes qu'en 4802.
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VARlfiTfeS.
efs de service, les chirar
I m^decins depuis 1811.
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t lui qui les place ou l
itudes de chacune.
6es scBurs ou servantes di
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rutement se fait facileme
Illes recoivent pour tout
preuves et donn^ d'excel
'it religieux, le d^vouem
[que, parce que ces com
ement d'aucune aulre ai
sorter k leur r^gle, k leui
IS qu'elle juge convenabi
le 6cole a et6 ouverte di
nel une instruction prim
s font, en outre, des cou
sur le rdle de Tinfirmi^i
sonnel pour acqu^rir Tin
a produit les plus henr(
ion et les chefs de servi
ours plus actif et plus int
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266 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Enfin comme r6sultat pratique* radministration hospitali^re compte
actuellement 264 soeurs infirmi^res ayant les certificats d'^tudes primaires
ou d'aptitude ;
44 soBurs infirmi^res ayant l6 brevet dl^mentaire et servant de moni-
trices, dans les diverses ^coles d'instruction primaire ouvertesdans chaque
^tablissement.
24 soeurs inflrmi^res poss6dant le dipldme d'herboristes (dont 20 de
1'® classe) et attacb6es au service de la pharniacie pour la distribution des
medicaments aux malades ;
47 soeurs infirmi^res ayant le dipl6me de sages femmes de !'• classe;
20 soeurs infirmi^res ayant le dipldme de sages femmes de 2° classe.
Les maternit^s sent toutes confines sans exception & des soeurs ayant
le dipldme de sages femmes de i^^ classe.
Patrimoine; dotation, — La dotation comprend les immeublesjdans les-
quels se trouvent les ^tablissements hospitallers et qui couvrent une su-
perficie de 60 hectares, pour les 6tablissements lyonnais, et de 25 hectares
pour rbdpital de Giens.
Elle comprend, en outre, 60 maisons k Lyon, et une surface de terrain
de 1 500000 metres environ, dont la plus grande partie est situ^e sur larive
gauche du Rh6ne, aux Broteaux.
Elle comprend, enfin, des vaieurs mobiliSres, et le revenu propre de la
dotation, ^tabli par le compte moral de 1894, s'^l^ve au chiffre annuel de
3353000 francs.
Les immeubles de la dotation comprennent:
1° Les dtabUssements hospitaliei^s qui, dans leur ensemble, ne sont pas
susceptibles de revenu, mais dont quelques-uns, i'H6tel-Dieu et la Charity,
ont des portions contigues, non affect^es au service hospitalier et [qui sont
loaves.
2^ Soixante maisons bdties.
Presque toutes ces maisons ont ^t^ l^gu^es. Quelques-unes ont €i^ bftties
par radministration pour remplacer des constructions anciennes inutilisa-
bles en raison de leur peu de solidity ou de leur mauvaise distribution.
3<^ Les emplacements ou terrains a Lyon^ source de revenus croissants
depois de longues anuses, proviennentd'acquisitionsetd'^changes remon-
tant au moins au milieu du xvin<> si^cle. Des adjonctions, proportionnelle-
ment peu importantes, y ont h\A faites pendant les vingt demi^res ann^es
pour regulariser les limites et les voies de communication.
Ces terrains sont lou^s. Les locataires construisent sur le sol lou6 dea
b&timents qui sont et demenrent leur propri^t^, sans qu'il y ait accession
du sol.
4<> Vingt'huUdomaines ruraux.
Ces domaines sont peu importants. lis proviennent tous de legs. Quel-
ques-uns sont la propriete des hospices depuis plus de trois cents ans.
Les vaieurs mobili^res autres que les rentes sur I'Etat proviennent
toutes de legs faits aux hospices.
Les rentes sur TEtat ont pour origine Temploi des capitaux 16gu^s, des
capitanx provenant de la vente des vaieurs mobili^res, et surtout d'im-
meubles.
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VARIfeTfeS. 261
Grdce aax ressources dont dispose radministration des hospices et qui
^manent de la bienfaisance priv^e, tous les services peuvent 6tre assures
sansle conconrs de subventions 6trang^res.
L'admiaistration ne recoit, en effet, aucune subvention, ni de i'£tat, ni
dn d^partement, ni de la commune. Elle ne permit rien sur le prix des
concessions dans les cimetieres ; il ne lui est rien afloat non plus sur les
droits prelev^s sur les spectacles, bals et concerts.
Neanmoins la gestion a ei6 assez beureuse pour que Tensemble des
bodgets, depuis vingt-cinq ans, pr^sente un ^quilibre entre les recettes et
les d^penses.
Et sur ses seules ressources, Tadministration des hospices a pu con-
stniire :
l«L*hospice du Perron en 1844;
2« L'hdpital de la Croix-Rousse en 1860 ;
3«Une buanderie centrale en 1877;
4<> Une meunerie et une boulangerie centrales en 1880 ;
S^Enfm, une cave centrale, en 1886.
Elle a cr66 et entretenu depuis vingt ans, prfes de 900 lits nouveaux
dans diff^rents services.
Elleaachev^ la construction de rH6tel-Dieu qui n'avait pas 6l6 ter-
mine.
Elle a 6Iev^ un hdpital d'isoleraent i la Croix-Rousse, cre^ un h6pital
maritime sur les bords de la M^dilerran^e, aux environs d'Hytjres, dans le
Var; elconstruit un ^tablissement destine h recueillir les enfants conva-
lescents sortant des hdpitaux, Tasile Paul-Michel Perret, i 00 lits, 50 pour
^ gmrgms, 50 pour les filleSy situ6 aux environs de Lyon dans le domaine
deLoDgch^ne oCi Tadministration entretenaitdej&un asilede convalescents
adultes.
L'CEavre du a Vestiaire » de la Ligue firaternelle
de Montmartre.
Lorsqn'elle a fond^ Toeuvre du « Vestiaire », la Ligue fratemelle de
Montmartre a 6t6 simplement pr^occup^e d'adoucircertaines souffrances;
^ais elle n'a pas eu la ridicule pretention d'apporter une panacee, gu6ris-
^Dt infailliblement le mal de mis^re, lorsque ce mal provient d'un ch6-
niage prolong^. Pensant que, pour dtre efAcace, Tassistance priv6e doit
pr^ciser et limiter son intervention, elle a concentre sa soUicitude sur une
^«gorie Irfes sp6ciale et trfes interessante d'indigents.
1a situation du travailleur sans ouvrage, se d^battant au milieu des
^^iter^ts concurrents sous les yeux de Tindifif^rence publique, Ta exclusi-
l^nient occup6e. Prise de piti6 infinie devant Fagonie de ce vaincu, dans
^^uel se personnifie la grande iniquity de tous les temps et de tous les
P^yples, elle a cherch^ a att6nuer les maux causes par Teffroyable insensi-
^*^ et la stupefiante inconscience de I'^goisrae humain.
Sou attention a 6t6 attir^e sur I'importance que pr^sente la question
^ ^^tement, principalement pour remploy6, qui est irr6missiblement
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.268 REVUE PHILANTHROPIQUE.
. perda, lorsqu'il n'ofTre pas a la critiqae s6vSre du patron unext6rieur cor-
rect. Elle s'est demands si rassistance par le v^tement ne serai t pas le
mode de secours qui conviendrait le mieux aux plus pressants besoins des
travailleurs en quSte de travail.
La mis^re a la plate laideur des choses abjectes, qui salissent le regard,
Elle produit n^cessairement des repugnances organiques qui ne raison-
nent pas. Getle repulsion instinctiTe fait k I'bonnSte homme sordide-
ment v6tu des preventions d^favorables, que ne parviennent pas k vaincre
les sympathies dues k son malheur. Impitoyablement repouss^ de partout,
cet infortune tombe, de chiite en chftte, k la condition de mendiant profes-
sionnel et^ conservant la conscience d'avoir €i6 victime d'un monstrueux
d^ni d'humanite et de justice, il marche dans I'abjection avec une impla-
cable s^renite.
Si, lorsqu'il elait encore debout, lorsqu'il gardait quelque espoir de
rel^vement, lorsqu'il n'avait pas acquis, par I'impression reflexe du d^goiit
d'autrui, le m^pris de lui-mSme, on avait 6chang6 centre des v^tements
d^cents les haillons devant lesquels se fermaient toutes les portes, les der-
nitres d^cheances lui auraient ete peut-dtre ^pargn^es, peut-Stre aurait-il
fini par trouver Temploi de ses forces et de ses facult^s.
Dans tons les cas, il aurait un moment cess^ de se m^sestimer, car le
vdtement exerce son influence prestigieuse autant sur le spectateur que
sur celui qui en est revStu. Pour le premier, c'est le signe symbolique de
Thonorabilite; pour le second, c'est le signe magique qui lui ouvre I'acc^s
du monde et I'autorise ^r^clamer les droits que ce monde conf^re k chacun
de ses membres.
Quand, le 17 mars 1895, le « Vestiaire » fut inaugur^ par le maire et
avec le concours de laplupart des Gonseillers municipaux du XVIIl* arron-
dissement, la Ligue fraternelle de Montmartre avait bien I'intuition qu'elle
entrait dans une p^riode de labeurs f^conds, mais la grandeur de sa Ulcbe
ne lui eiait pas compl^tement apparue. Elle lui a ete r^vel^e plus tard,
dans la transfiguration et le redressement de I'^tre courbe sous le faix de
la fatalite, dans le rayon de joie furtive qui, illuminant parfois la morne
resignation d'un visage eteint, lui denoncait I'eveil soudain d'^nergies
nouvelles.
Le <c Vestiaire » a H6 install^ sans capitaux et presque sans domicile.
Pour que, d^s sa naissance, il n'ait pas 6i6 en etat de vagabondage, il a falla
que M. le Directeur de Tassistance publique lui accorddt la jouissance
temporaire du local oH est etablie aujourd'hui la pharmacie 'de la maison
de secours de la rue Ordener. S'il poss^de enfin, rue Sainte-Isaure n<» 17,
pr^s de la mairie de Montmartre, un si^ge social inamovible, il le doit k
une ingenieuse et tr^s bardie combinaison.
Ne pouvant etre locataire, pour des motifs qu'on devinera ais^ment, la
Ligue fraternelle de Montmartre a eu Tid^e g6niale de devenir proprietaire.
Elle a constitue une societ6 anonyrae immobilifere; cette society a achete
un vaste terrain, rue Sainte-Isaure, et elle y a eieve une salle, qu'elle ox-
ploite actuellementet dans les d^pendances de laquelle elle a donnei'hos-
pitalite au « Vestiaire ». 11 est bon d'ajouter que, pour^carter tout soup^on
de speculation, cette societe s*interdit de servir k ses aclionnaires d'autre
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r'
mm^
VARI6t£S. 269
inUr^t que Fint^r^t minimum fix^ par la Loi, et reserve les b^n^fices faturs
i ses (BQvres de bieniaisance, ce qui, on en conviendra, se lit rarement
dans les statnts des soci^Us immobili^res.
Enr^ome, s'il a prosp^r^, s'il a dur^, si M. le President de la R^pu-
bliqne, qui demi^rement fondait le vesliaire de la maison d^partementale
de Kanterre, vient de I'bonorer de sa souscription, si le Gonseil municipal
de Paris lui accorde une subvention annuelle, le « Vestiaire » le doit k la
foi imperturbable de quelques bommes et k leur ferme resolution de ne
setfrayer devant aucun obstacle.
Afin de laisser k son oeuvre I'enti^re disposition des ressources obtennes
de la charity pnblique, a laquelle elle fait un incessant appel, la Ligue
fraternelle a pris k sa charge la totality des d^penses qu'entraine son fouc-
tionnement ; en outre, les divers emplois que celui-ci n^cessite (tenue de
livres et caisse, reception bebdomadaire des indigents et jusqu'^ Tessayage
des T^tements), sont remplis, — gratuitement cela va sans dire, — par
certains roembres de la Commission executive de la Ligue.
C'esl ainsi qu'a ^t^ r6solu le probl^me de consacrer int^gralement le
montant des dons en argent et celui des cotisations des membres hono-
raires 4 Tacquisition d'efTets d'habillement et de n'en pas distraire un cen-
time poor ces frais d'administration, sous le poids desquels ont succomb^
taut d'institations de bienfaisance. G'est ainsi que pendant les deux der-
nitres ann6es, le Vestiaire a pu donner, avec de tr^s faibles mojens, des
r^sultats qui ont d^pass^ les esp^rances les plus optimistes.
En 1895, en efTet, il a recu une somme de 444 fr. 35 et 681 objets, et il
en a distribu6 421 ;
Eq i896, il a recu une somme de 212 fr. 85 et 754 objets, et il en a dis-
tribue 566.
An 31 d^cembre 1896, il restait en magasin 668 objets, la plupart, 11 est
▼rai, inulilisables ; car certains de nos donateurs n'ont pas compris que, si
nous leur demaudons leurs vieux vdtements, nous ne leur demandons pas
cependant ceux qu*il n'est mSme pas possible de r6parer.
En somme, le « Vestiaire » a pu r6partir, d. la date actuelle, plus de
1 2O0 effels d'habillement k environ 600 travailleurs.
^ux-ci, comme on pourrait le croire, ne sont nullement recrut^s dans
la classe ouvri^re, qui n'est representee dans ce nombre que par quelques
▼ieillards et desinflrmes, et par bien peu d'hommes valides. La classe des
employes de commerce est celle qui fournit lalpresque totality des soUici-
tenrs, sion excepte pourtant quelques artistes, des bommes de lettres et
des professeurs.
Lecommerce estdonc redevable k I'cBUvre du« Vestiaire »d*uneaide que
jnsqa*k present, celle-ci lui prfite gratuitement; car,jusqu'^ present, peu de
commercantsont lules appelsft euxadress^s en faveurde leurs employes, qui
cherchent desesperement une place et qui n'en trouvent pas faute de vete-
ments. Parmi les grands magasins, par exemple, un seul s'est rencontre
pottr envoyer quelques objets, deux pour envoyer une somme d'argent insi-
Snifiante, mais aucun n'a eu I'idee de donner un de ces vdtements en soldo
^8ont?endus k des prix derisoires, simplement pour sauvegarder un prin-
cipe d'^conomie commerciale;
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270 RKVUE PUILANTHROPIQUE.
Les donaieurs du « Vestiaire. «, en dehors des pouvoirs pnblics, sont ces
personnes qu'on retrouve partout oil il y a une soufTrance humaine k
soulager et qui n'ont pas besoin, pour en dtre touch6es, de voir la mis^re
deTant leurs yeux et d'en ^prouver la seusatton importune d'horreur phy-
sique.
A ces Yolontaires de la charity, le « Vestiaire » n'ose mSme pas dire
merci, de peur d'ofTenser la pudeur exquise, avec laquelle ils n'appr6cient
dans leurs bienfaitsque cequi en demeure ignore.
Un noaveau Patronage.
Un Patronage int^ressant et peut-^tre utiles signaler, s'est form^ depuis
trois ans dans une ^cole de jeunes filles, k Paris. Les Patronnesses sont
dg^es de quinze k dix-sept ans ; leurs pupilles en ont de dix k douze. Celles-
ci choisies parmi les ^i^ves tr^s pauvres d*une 6cole commanale du voisi-
nage, vont chaque semaine, le jeudi, passer quelques heures k I'^cole de
leurs grandes amies, qui, k tour de rdle, viennent travailler k Taiguille,
causer et jouer avec elles. Lk ne se bornent pas les rapports des jeunes
filles riches ou aisles avec les enfants moins bien partag^s. Des groupes de
deux ou trois grandes jeunes flUes adoptent une petite fUle, I'aident dans
son travail scolaire, se font au besoin ses r^p^titrices pour les lemons « dif-
flciles », se prominent avec elle un dimanche ou un jour de €ong6 — et,
devenues ainsi les cicerones d'enfants plus jeunes, apprennent pour leur
propre compte, k visiter utilement musses et monuments.
Depuis le mois d*octobre de cette ann4e une partie de la stance du
jeudi est employee k un cours de chant. On devient ambitieux et Ton r^ve
de chanter de beaux chceurs ensemble. On a aussi abandonn6 la couture,
tr^s bien enseign^e k I'^cole primaire, et Ton s'ing^nie k des travaux
d'agr^ment destines k produire de ces objets dont laprincipale utility con-
siste k 6tre jolis.
Du chant, des travaux d'art k des enfants pauvres ! Ne risqne-t-on pas
de leur donner des godts de luxe, et leur pauvret^ n'en paraitra-t-elle pas
plus triste?
Nos jeunes filles ne Tout pas pens^. Dans la vie des pauvres, ce qui les
afQige surtout, c'est moins la lutte quotidienne pour le pain, le toit, le v^-
tement, que la difficult^ de jamais sentir et goMer ee qui est beau, ce qui
seul en fait le charme et la valeur de la vie. Elles avaient essays d'accom-
pagUjBr le travail k Faiguille de lectures simples ou mSme de r^cits agr^a-
bles. Mais I'^ducation de nos petites ^l^ves d'^cole commuoale est sur ce
point si nulle, leur vocabulaire est mdme si restreint, que lectures et recits
ont dd Hre abandonn^s, les enfants n*y prenant aucun int^rdt. La musique
r^ussit mieux et par elle un rayon p6n6trera peut-dtre dans ces petites
Ames.
Quant k la confection d'ouvrages de fantaisie, c'est une bonne lecon
de soin, de propret^ raflQn^e, d'ordre, de sym^trie, sans parler du plaisir
d'omer unint^rieur m^mepauvre, surtout pourvu d'objets ^l^gants qui ne
codtent gu^re que du travail et de Tattentiou.
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VARlfeTES. 271
Uestbon de remarquer que ce petit Patronage impose fort peu de d^-
peose. La pins grosse, ce sont les vacances des petites ilUes go 'on envoie
passer chaqne annde trois semaines k la campagne; il fauty ajoaterl'arbre
de NoSl, occasion de Les habille r et le petit service medical indispensable.
U a falla, en effet, s'assurer avant tout que les petites illles de T^cole
commonale n'apporteraient k leurs amies aucun vilain microbe. Deux
dames, Tune docteur en m^decine, Tautre fort avanc^e dans ses etudes m&
dicales, se partagent les families 4 visiter chaque semaine, la veille du
joar de reunion et ne permettent aux enfants de s'y rendre qu'apr^s s'^tre
assur^es non seulement de leur bon ^tat de sant4 mais de celui de la fa-
mille. L'une des deux dames seule est r^tribu^e.
A la suite d'une lecon sur la charity on avait demand^ aux Slaves de
l*£co1e *** comment des jeunes flUes ne poss6dant rien par elles-mdmes, si
ce n'est de la bonne volont^ et un peu de temps libre, pourraient prendre
cependant one part directe, personnelle k la lutte centre le mal, la souf-
france, la mis^re. Ne peut-on pas dire que leur Patronage r^pond assez
bien k cette question et d^sirer que leur exemple soit suivi par d'autres
jeunes fiUes des classes aisles? Elles ne peuvent s*occuper que d'un fort
petit nombre d'enfants ; mais que d'autres petites soci^t^s se ferment dans
le m^me esprit, n'y aura-t-il pas \k ^change de bonne volenti, de bons sen-
tifflents, en un mot beaucoup de bien produit simplement, sans bruit, sans
peine?
Dotation de la Jeunesse de France.
De toutes les ceuvres de creation r^cente, une de celles qui a obtenu le
succ6$ le plus retentissant au cours de cette ann^e, est certaioement la
Mation de la Jeunesse de France.
N^e dans les derniers mois de 1895, elle a en effet d6}k groups autour
de son drapeau, bumanitaire, patriolique et familial, plus de 30000 enfants
dans 712 villes ou villages de France ou d'Alg6rie.
Les soci6t6s mutuelles ant^rieures s'6taient pr6occup^e8 d'assurer le
pain de la vieillesse; il y avait place pour une autre institution qui ne
nuirait en rien a leurs atn^es dont elle ne serait en quelqne sorte que la
preface.
Les fondateurs ont pens^ qu'^ cdt^ de la r^colte des grains, des fruits,
des vendanges vermeilles, il y avait une moisson de fleurs k recueillir, et
que le printemps de la vie devait s'ouvrir pour les d^sh6rites de la fortune,
plein de soleil et plein de roses, car tous ne vont pas jusqu'^ la vieillesse,
tandis que tous peuvent pr^teodre voir luire la vingti^me ann^e.
De cette id^e attrayante et r^confortante est n^e :
La Dotation de la Jeunesse de France,
Sans doute, il est sage de penser k la vieillesse, c'est^^-dire I'dge cri-
tique, oii rhomme apr^s avoir accompli son dur labeur, se voit contraint
de laisser tomber de ses mains d^biles Toutil qui Ta fait vivre jusque-1^ et
qui ne pourra plus le nourrir; mais il est permis de songer k cette 4poque
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272 REVUE PHILANTHROPIQUE.
de la vie, oii le coeur s*ouvre k TamoDr, oil les jeuaes gens pensent au ma-
nage, k faire souche de citoyens, k s'uiiir pour supporter plus facilemeDt k
deux, le poids du joor, des peines et des chagrins.
lis sont 16gion, ceux qui ne peovent — faute d'un modeste p6cule —
mettre k execution ce rfive, qui comblait leurs vcbux les plus chers.
Gombien est difficile pour les jeunes filles sans fortune, le moment de
Tentr^e en manage. Si Ton ne redoute pas la misfere, il faut s'endetter
lourdement pour faire face aux exigences de la plus modeste installation
et sans espoir de se remettre k flot, surtout s*il survient un enfant I'ann^e
d'apr^s, lot commun aux nouveaux mari^s.
Les fondateurs ont trouv^ un moyen bien simple de constituer une dot,
qui permettra d'envisager sans crainte T^poque du mariage.
Pendant dix ans, au minimum, plus, si vous le d^sirez, les parents
versent cinqnante centimes par roois. Gette somme sera grossie par leg
lib6ralites des membres donateurs, fondateurs, des conseiliers municipaux,
g^n^raux, des subventions minist^rielles et aussi par les demissions des
membres actifs, rint^rSt du capital plac^ en rentes sur TJ&tat, ou en valours
de tout repos, le produit des fdtes, concerts, representations, etc., etc.
Gette institution semble digne d'etre encourag6e par les hommes qui
s'occupent de philanthropic et de mutuality. Les mutualistes ont remarqu6
son caractSre moral, qui assurait aux orphelins la m^me dot qu'aux plus
heureux qui auraient conserve leurs parents.
Les patriotes ont constate son r6le special, puisqu*elle viendra bientdt
augmenter de cette dot, la prime de rengagement des sous-ofGciers et
soldats, et accrottre ainsi le nombre de ces veterans que son President
d'honneur, M. Mezieres, president de la commission parlementaire de
Tarmee, a toujours souhaite de voir eucadrer les jeunes.
lis y ont vu un moyen de iavoriser la natalite en augmentant le chifTre
des unions legitimes de nos enfants. Les moralistes ont vu dans notre in-
stitution, la faculte de preserver, dans nos grands centres, les jeunes filles
du contact dissolvant de I'hdtel ou de la maison meubiee en |leur permet-
tant de constituer leur modeste menage et en leur evitant Texploitation de
certaines maisons de vente d. credit.
EnGn les esprits clairvoyants, ceux qui recherchent le bien sans vanite,
ne tarderont pas k entrevoir la haute mission de reconciliation sociale,
puisque dans notre oeuvre on voit des patrons dotant des enfants d'ou-
vriers, des ouvriers entre eux dotant les enfants de leurs camarades.
\o\ik les grands caracteros qui ont valu k cette oeuvre les precieuses
adhesions de MM. Magnin, vice-president du Senat, gouverneur de la
Banque de France; Poincare, Deschanel, vices-presidents de la Ghambre
des deputes; d'un grand nombre de membres du Parlement; des notabi-
Htes de la magistrature ; de plus de 600 maires ou conseiliers municipaux
de Paris, sans distinction de partis; de philanthropes comme M. le comte
de Ghambrun, de grands industriels comme MM. Meunier et Leon Edeline ;
de maitres de forges comme M. Georges Holland, ingenieur en chef des
mines, le comte de Saintignon, et les barons d'Huart freres ; et c'est pour-
quoi nous avoiis demande k la Reoue philanthropique de signaler cette in-
stitution digne de sympathies k ses lecteurs. Z.
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VARI^TfeS. 273
A propofl de la Pu^riculture 4 bon maroh^.
COMMUNICATION DU DOCTEUR NAPIAS
A la suite de la discussion ^laquelle a donn6 lieu devant laSo-
ci6t^ de mddecise publique le m^moire de M. le docteur Bertillon
SOT la pa^ricuUure k bon march6 et des critiques dirig^es centre
M. le docteur Pinard centre rallaitement artiflciel, M. le D** Henri
Napias a d^fendu le lait st6rilis6 centre le proc6s de tendance qui
Im est fail ; il a trac6 une jolie page d'histoire que nous aurions voulu
reproduire en son entier (1), mais dont nous publions la plus grande
partie.
Aprts avoir rappel6 le plaidoyer c616bre de J. -J. Rousseau en fa-
veur de rallaitement matemel, notre savant coUaborateur poursuit
en ces termes :
J.-J. Rousseau ne faisait que reprendre ce qui avait 6i^ dit avant lui et
tantde fois! 11 puisait notamment dans un livre du D' Desessartz^ qui avait
para deux aus avant V6mUe et dont Piron Im avait remis un exemplaire
dclaparlde Tauteur. Ilparlail du charme de son style, des v6rit6s trop
connnes, sou vent dites avant lui depuis des si^cies, et souvent avec force,
et trop souvent aussi sans succ^s.
Dans on de ses int6ressants volumes si document's sur La vie privie
d^Qutrefois (2), Alfred Franklin rappelle ces campagnes successives en fa-
venr de rallaitement maternel et il montre que Fhabitude pour les m^res
de con6er les enfants k des nourrices mercenaires est fort ancienne :
« Le Roman de Robert le Diable, dit Franklin, 4crit au xiii« si^cle, nous
apprend que ce fut une 'trangfere qui offrit son sein k ce I'gendaire
gaerrier. »
Quant li efens ot pris baptesme, .
Et sell et oile et eve et cresme,
Dont li fait noriches venir
Pour allaitier et por norir.
Franklin aurait pu ajouter que, apr^ quelque temps, Robert le Diable,
qui mordaitses nourrices, fut tout simplement nourri au biberon.
Les noriches eel aversier
Redoutent tant h alaitier
Uny cornet li affaitdrent
Oncques plus ne TaUaictdrent.
^cornet €imi un biberon primitif ; j'ai signal^ dans un rapport sur
iAsastance publique k I'exposition de 1889 (3) que c'^tait sans doute une
(*) Voir io il«OT«? d'hygiSney n» du 20 octobre 1897, n" 906 etsuivants.
W A. PaAXKUii, VEnfant, Paris, Plon, 1896.
1^) Happort de Juny de la Glorce, 64.
•*^^ PHILAHTflROPIQVE. — H. 18
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274 REVUE PHILANTHROPIQUE.
come de vache dont la pointe ^lait remplac6e par une t^tine de par-
chemiii.
Ainsi, dis le xiii* si^cle, voici d6j& que raliaitement artificiel remplace
I'allaitement maternel. — Saint Louis, tout roi qu*il 6tait et tout saint qu'il
est devenu, a et6 nourri par une femme venue de Picardie, Marie la Pi-
carde, ainsi qu'il resulte des recherches de M. Tardif (1).
Mais on pourrait remonter beaucoup plus haut encore et fappeler que
les tombeaux des enfants de Tepoque gallo-romaine renfermenl des bi-
berons deterre (gutti). ^videmment, les Gaulois n'avaient conna cet arti-
fice que par les Romains : la civilisation ne va pas sans abus ; ce n'est pas
toutefois une raison sufflsante pour la maudire et d'ailleurs je ne crois
pas devoir remonter aussi haut daus I'bistoire. Je rappelle seulement que
le biberon ne se retrouve pas pendant la periode m^rovingienne et le com-
mencement de la p^riode carlovingienne; le Roman de Robert le Diable
nous montre 6tabii I'usage du cornet au xiii* siScle, le vrai biberon ne se
montre gu^re de nouveau qu'au xv» si^cle.
Alors, en efTet, on a perdu Thabitude de Tallaitement maternel, au
rooins dans un certain monde; Franklin (2) qui nous I'apprend en cherche
les raisons et les trouve dans le Jardin des NobUs, ceuvre manuscrite de
I'austere franciscain Pierre des Gros : « La premiere, pour ce que ce n'est
pas la coutume de nourrir; la seconde pour plus garder leur beaute et
frescbet^; la tierce, pour plus prendre esbatement k leurs maris, et c*est
incontinence. »
Le mal ^tait connu, vous le voyez, et d6j& des m^decins le signalaient et
s'efTorcaient de le combattre; et desauteurs, quidevan^aient J.-J. Rousseau
de deux si^cles, disaient leur fait aux m^res oublieuses de leurs devoirs.
Le po^te Jean Rouchet, en 1545, le leur rappelait en vers :
Apres qu'elle a son enfant enfant6.
Si bs t^tins a du laict h plants
Ou a suffire, m^re doit par nature,
Et selon Dieu, h son fnilct nourriture.
Dieu ne lui a laict et t^tins donnez
Pour ses plaisirs fols et d^sordonnez
Mais pour nourrir son fruict de sa mammelle.
11 est vrai que d^j5, les femmes trouvaient des complaisants pour les
excuser et'pendant que Jean Bouchet les gourmandait comme je viens de
dire, le cbanoine (luillaume Coquillard, tra^ant un portrait des plus natu-
ralistes de la femme qui s'est faligu^e a nourrir, disait de son c6t^ :
Ainsi ce n*est pas chose vaine
Si femme mignote et f^tisse
De peur d enlaydir en la peine,
Reffuse k devenir nourrice.
(l)Inventaire des monuments historiques conserves aux Archives nationales.
Carton des Hois, n« 1748, p. 423. Voir aussi VHisloire de Blanche de Castille, par
felie Bergcr, p. 21.
(2) Fraxklin, la Vie pnve'e d'autrefois; VEnfant, Paris .Plon, 1896).
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VARlfeTfeS. 215
Apr^s les pontes, les prosateurs. Franklin cite an passage curieux
d'Henri Eslienne sur ce sujet :
(( Je sais maintenant en doute si je me doy taire des femmes qui aban-
donnent leursenfants aux premieres nourricesqu'el]esrencontrent...etqui
depois les avoir mis en leurs mains, n'y pensent gu^re, ou du tout point,
si Qon k i'heure qa'on lear vient dire les nouvelles de la mort de ces
povres nourrissons.
« Si je n'ose dire que telles mdres sont meurdrifires (et principalement
qaand ceci se fait parcelles qui n'ont point excuses legitimes, les dispensa et
de faire elles-mesmes office de m^re), je ne feray point de difficult^ de
dire jusque \k (et s'en scandalise qui voudra, car il me suffit de n'offenser
point les femmes de bien), qu'elles font pis que les payens et payennes qui
exposoyent leurs enfants. Gar si elles all^quent que tons les enfants de
ceux qui tombent ainsi entre les mains des nourrices ne meurent pas, je
leur r^pondray qu'aussi ne mouroyent pas tons les enfants qui estoyent
exposez. Ainsi avenoit k plusieurs des rencontres qui les faisoyent heureux
toute leur vie : au lieu que ceux qui sont en la charge de telles vilaines,
s'ils De meurent bien tost apr^s, pour ie moins en rapportent des maux et
des maladies qui les rendent, aucontraire, malheureux pour tout le temps
deleur vie (1). »
N*estr<;e pas \k la preuve du d^laissement de Fallaitement matemel au
XVI* si^cle? Alors comme aujourd'hui, on admiraitles femmes courageuses
qni nourrissaient leurs enfants elles-m^mes, mais on ne les imitait gu^re.
11 y arait pourtant d6ji des m^decins qui, comme mon ami Pinard,
parlaient ^loqueroment en faveur de I'allaitement maternel et qui, s'ils
n'avaient pas comme Henri Estienne Texp^rience personnelle d*un homme
qni a en 3 femmes et 14 enfants, avaient Texp^rience d'une clientele nom'-
brense; 6coutez de Laurent Joubert cette citation, que Franklin nous
donne, et qui est d'un si joli langage que j'ose penser que vous ne la trou-
verez pas trop longue :
« Pensez-vous que la natore ayt donn6 aux femmes des mammelles pour
omement de leur poitrine et non pour nourrir leurs enfants? Ne sont-ce
pas femmes prodigieuses celles qui travaillent a tarir et estaindre cette
trts sacrte fontaine du corps, nourrice du genre humain, et mesmement
avec danger de leur personne, k cause du retour et de la corruption du
laict? Quelle diffi^rence y a-t-il de cette folie k la forcenerie de celle qui
s'efforcent, par certaines meschantes inventions, de se faire avorter, k ce
que la lizeur et polie planure de leur ventre net vienne ei se corrompre, qu'il
se fendille, s'estende et amplie de la pesanteur du fardeau et du travail de
I'enfantement?
« Si les femmes s^voyent quel plaisir il y a de nourrir ses enfans, duquei
jouyssent leurs nourrices ; elles se loueroyent plus tost k nourrir les enfans
d'antmi que de quitter les leurs... »
« Les femmes s'excusent sur leurs marys, aux quels elles sont (comme
(1) Apologie pour H^odole (cit6e par Franklin). La premifere edition est de
*556,
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; REVUE PHILANTHROPIQUE.
ivent estre) subjectes. Car il y a plusieurs marys qui ne veulent pas
yr ou endurer le bruit et la tintamarre que donnent souvent les
fans. »
Malgr6 ces objurgations pressantes, les choses ne s'am^liorent pas.
Lude Joly, en 1667, nousapprendqa'ilse trouve encore quelquefois dans
petites villes « de bonnes et bonnestes damoiselles qui ne tiennent
nt k deshonneur de rendre k leurs enfants ce bon ofQce que la' nature
ir ordonne (2) ».
Le doyen de la Faculty de m^decine en Tan 1708, Philippe Hecquet
>rend la m^me th^se et, tout comme fait aujoord'hui le professeur
lard, 11 soutient que Texcuse tir^e de lafaiblesse dela m^re ne saurait
e accept6e (3) ; etil se livre k des calculs d*une physiologie un pen fan-
siste pour le d6montrer.
Quels r^sultats obtiennent-ils pourtant?
Bien petit, sansdoute, puisque dix ans apr^s, en 1718, Dionis, dansson
liU general des accouchements pent ^crire : « Aujourd'hui, non seule-
nt les dames de quality, mais encore les simples bourgeoises et les
imes des moindres artisans ont perdu Thabitude de nourrir leurs en-
ts. »
Voila oti on en ^tait au xviii" si^cle et Franklin remarque (4) juslement
alorsun Talleyrand, un Lauzun, ou bien une petite bourgeoise comme
^ Roland dtaient habituellement mis en nourrice.
Faut-il pourtant dire que le public ne puisse 6tre jamais touchy par de
mes raisons? Certes, non, et ce qui le prouve c'est que Tapparition de
nile, en 1762, fit une veritable revolution si bien qu'on constata une
rudescence de tendresse maternelle et qu'un certain nombre de
imes, un grand nombre m^me au t^moignage de Desessartz (5), se
^ent k allaiter leurs enfants. Tout le monde voulait faire son devoir et
icrifier ses plaisirs; Marie-Antoinette, devenue grosse en 1778, disait k
;sone qu*elle voulait vivre en m^re et nourrir son enfant, si bien que
md elle accoucba, le 19 d^cembre, il y avait \k trois nourrices qui
mdaient le nouveau-n6. Les bonnes resolutions avaient disparu tout k
ip et S^bastien Mercier, dans ses Tableaux de Paris, disait tranquille-
at : « Pendant un temps les femmes ont voulu nourrir elles-m^mes ;
is ce n'^tait qu*une mode, elle a pass6. »
Pour moi je ne doute pas qu'on arrive k r^tablir cette mode et k la
e durer et qu'on ^coute aujourd'hui, s'ils savent parler fort, les hygi6-
es, les accoucheurs, les conseillers sinc^res et autoris^s, les hommes
ants et ^loquents comme Piuard qui leront mieux certainement que le
losophe de Geneve assez mal qualifl^ pour parler des devoirs des pa-
ts envers leurs enfants.
1) Ca. JoLY, Traits de la nourriture des petits enfants, etc,
2) Hecquet, De VindScence aiix hommes d'accoucher les femmes.
3) Franklin, loc. cit.
4) Desessartz, loc. cit.
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VARlfiTfeS.
C'est une campagne qu'il faut reprendre et contiouer longtemps
se lasser.
Mats il ne faut pas oublier, d'autre part, que Telat social aclue
particuli^rement defavorable k rallaitement maternel dans la classc
vriftre, c'est-ft-dire dans la partie laplas nombreuse de la population,
est deplorable ; je ie d6pIore pour mon compte tout autant que mon
Pinard, et je g^mis de ny pouvoir rien changer. Les circonstances 6c
miques, les lois de la production industrielle sont destructives de I
mille et j'appelle de tous mes vqbux Ie temps b6ni oh les femmes sera
comme elles doivent fitre, les m^res, les nourrices, les ^ducatrice
Tenfance, les gardiennes du foyer, et noa les rouages surmen^s c
grande machine industrielle et commerciale. Mais ce temps viendra
En tout cas, n'est-il pas loin encore? et en attendant ne fant-il
qu'aux femmes que les habitudes sociales privent du devoir et des pl<
d*6tre nourrices, alors mSme qu'elies Ie d^sirent et Ie veulent, nou
sions : qu*au lieu de donner d leur enfant un lait quelconque oil fermente
$e eultivent les germesdes maladies graves et mortelles,il faut donner di
sUrilisi,
Ce n'est pas I'id^al ; ce n'est pas Ie respect de la nature, c'est
transaction n^cessaire; c'est un pis-aller, comme dit Tarnier, qu'il
conseiller pourtant apr^s qu'on a constats que Fallaitement par la i
n'est pas possible et que des circonstances sociales, barbares etcru
sans donte, mais trop certaines, h^laslempdchent quelquefois les n
de donner Ie sein k leur enfant.
Les Prix de Vertu.
DISCOURS DE M. JULES CLARETIE
11 nous est impossible, k notre grand regret, de publier in extei
brillant discours de M. Jules Claretie k TAcad^mie francaise sur les
de vertu, mais nous tenons k en reproduire T^Ioquente p^roraison.
« Votre rapporteur, contraint de r^editer, comme chaque ann^
qn'ont dit ses pr^d^cesseurs, craindrait, messieurs, je Ic r^p^te, de 1
votre patience en ^num^rant tous les d6vouements que lui r^vfele la Ie
de ces dossiers. Vous en trouverez la liste, vous en pourrez lire Ie r6cit
ce livret des actions vertueuses qui est comme Tannuaire du d^vouei
J'anrais pu rencontrer chez chacun de vos laur^ats un aussi grand no
de traits ^mouvants, autant de noblesse instinctive, autant de verti
peu uniforme peut-6tre.
« Car, il faut bien I'avouer, Ie moule des verlus semble toujours Ie m
da moins, s'il est U86, laisse-t-il de Tor pur au fond du creuset, et
crime, plus vari6 et plus ing^nieux, trouve des raffinements de f6roci
si je puis dire, se perfectionne plus que la vertu, c'est peut-6tre q
vertu a tout de suite atteint la perfection absolue. Seulement, je song(
effroi que les causes c^i^bres, les grandes affaires qu'un ironiste e
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278 REVUE PHILANTHROPIQUE.
appelait les beaux crimes, font in^vitablement, et dansune proportion ma-
th^matique, monter ]e tirage des journaux; et je ne suis pas bien siir qae
la publication quotidienne du r^cit des belles actions et des rapports sur
les prix de vertu ne le ferait point baisser.
(( Le pessimiste Nietzsche, qui voit un signe de decadence dans une mo-
rale altruiste, a 6crit : « On manque du meilleur des instincts quand on
commence k manquer d'^goi'sme. » Vos laur^ats, messieurs, je dois le re-
counattre, manqoent de cet instinct raffing. Ge sont des decadents k leur
mani^re, ils s'en tiennent modestement k I'amour et au respect de la beauts
morale. Ge sont des naifs aussi et qui consentent k vivre dans un triste
monde, celui des d^sh^rit^s et des souffrants.
« Gar ces paralytiques, ces impotents, ces aveugles, ces d^biles sont
comme une cour des Miracles de la soci^l^; mais ces miracles, c'est la
charity qui les fait. Et il est bon qu'il y ait, en ce monde, quelques specta-
teurs attendris et quelques juges sp^ciaux par qui Ja mis^re soit signal6e,
honor^e dans ses actes, car, en montrant les diverses facons de la conso-
ler, on pent faire naitre aussi, par Texemple, le g6n6reux desir etl'app^tit
de la vaincre. Le paup6risme, dont Textinction, probl^me social redou-
table, est le rfive g^n^reux des philanthropes, ces braves gens que vous
couronnez ne le d^truisent pas, h^las! — la charity n'est qu'un palliatif
— mais les mis^res sontd6ji consoldes quand les mis^rables sentent qu'on
les aime et qu'on les aborde fraternellement avec un sourire d'amour et
de piti6.
a Et c'esl pourquoi il est utile que vous c616briez trfes haut les vertus de
ces messagers de fraternity. Le huis-clos est souvent mauvais. Autour du
crime, le myst^re qui en enveloppe les secrets permet de former parfois de
dangerenses l^gendes, inqui^tantes pour la conscience publique. Vous
n'avez pas de huis-clos pour vos h6ros et ces actions qui s'accomplissent
dans Tombre, vous les saluez en pieine lumi^re. EUes ne demandaient pas
mdme cette recompense. Aucun de vos laur^ats n'a place sa vertu en
viager.
« II m'en a coi!lt6 de me s6parer de ces dtres vraiment sup^rieurs en leur
obscurity poignante, pour reprendre, dans Texistence de tons les jours, la
vie accoutum^e. Je m'6tais habitu6 k consid^rer le monde comme une reu-
nion de h6ros et d'h^roines, et je me demandais pourquoi le roman et le
th^dtre, dont les fictions sont parfois plus puissantes sur la foule que la
reality mdme, ne nous montrent pas plus souvent le spectacle de ces su-
blimes devouements, au risque de subslituer au vice en chapitres et en
actes la vieille morale en action.
« Je crois bien que la grande tristesse et la d^sesp^rance un pen faciice
qui s'abattent sur certaines Ames s'att^nueraient siuguli^rement si lesirUel-
lectuels, comme ils se nomment, dirigeaient leur attention vers ces humbles
qui semblent avoir pris pour devise : « Gharit6 bien ordonn^e commence
par autrui ». Et si la liste est longue des vertus que vous avez pu r^com-
penser, plus longue serait celle des vertus anonymes que nous ignoronset
qui fleurissent dans Tobscurite. On ne les voit pas, elles ont la discretion
et la pudeur de leur h^roisme. II est d'admirables femmes qui gravissent
les escaliers des pauvres, p^n^trent dans les mansardes, soulagent les mi-
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VARlfeTfeS. 279
s^res et laissent aprSs elles le souvenir de leurs bienfaits sans laisser Leur
nom. Lesmalheureux disent d'elles : « Cest cettedame qui vient quelque-
fois. » Ou encore elles prennent un faux nom, comme M°^° de Lamartine
qui faisait le bien sous un ipseudonyme. Je parlais des vertus cach^es, des
tertas instinctives dont ne se rendent mdme pas compte ceux qui les pos-
sMenU Qu une occasion arrive, qu'une catastrophe survienne, alors ces
tertns ^clatent, soudaines, irr^sistibles, inoubliables. Les proverbes, pessi*
mistes aussi, pr^tendent que I'occasion fait le larron. Dans Tordre ciyique,
dans Tordre miiitaire, ou la vertu s'appelle d'un mot tr^s simple, le devoir,
partout, roccasion fait aussi des h6ros. Ne I'avons-nous pas vu, messieurs,
dans ce tragique jour d*^pouvante, dont la date sera toujours pour Paris
iin souvenir de deuil, lorsque les ilanunes du Bazar de la Charity consu-
Di^rent, en quelques minutes, tant de creatures humaines, le matin sou-
t^^%, heureuses, loutesallant au rendez-vous de Ubonte, les unes pour
wndre, les autres pour acheter? En mdme temps que le sentiment d*hor-
rearunissait tons les cceurs, le d^vouement inn^ qui git au fond des dmes
poossaitdes spectateurs, des passants, k sauver leurs semblables et lamdme
minnte qui faisait tant de victimes innocentes faisait aussi des h^ros im-
• Elles d^veloppent imm^diatement, ^lectriquement, le sentiment de la
solidarity humaine, ces grandes occasions de deuii qui sont comme les
grands joars de la pitie. Plus de rangs; on s^aborde, on se parle, on s'en-
tr'aide; pareilles aux grandes catastrophes nationales, ces heures d'6pou-
Tante font les ccBurs confondus dans une mSme ^treinte, et c'est alors
qn*apparaissent comme entour^s d'une aureole de flamme on de temp^tes
les impulsifs de I'h^roi'sme, les entSt^s du sacrifice et du d^vouement.
Ceux-)^, tout Paris sait leurs noms. Les recompenses, les m^dailles et les
croix brillent sur leurs poitrines, et Thorrible journ^e a du moins permis
de mettre en lumi^re de braves gens, comme elle nous a permis d'unir,
<luis noe mdme admiration douloureuse, ceux qai sont morts, 1^-bas, de
cette mort atroce, ces femmes, ces jeunes fllles, ces enffiints, toutes ces
mariyres, k Theure oili la destin6e rdunissait dans une promiscuity lugubre
one princesse royale et une fille du peuple, de ferventes chretiennes et des
isra^Iites, une nihiliste et des soeurs de charity. Et dans ce tas afTreux et
snblime, Fadmiration humaine n'a pas eu k reconnaltre les siens. Elle les
a salons, elle les a honoris, elle les a pleur6s, Elle ne les oublie pas!...
• Onserait presque tent^ de trouver k ces ^preuves sinistres, immerit^es,
Kroces, comme k toutes les 6preuves humaines, guerres, 6pid6mies, mas-
sacres, une sorte de farouche consolation en calculant I'esp^ce d'^closion
spontan^e de d6vouements qui marque aussi les heures maudites de ces
^catastrophes. La fraternity dans la mort enseigne la solidarity dans la vie
«t le malheur fait soudain briller certaines vertus comme la nuit fait scin-
^Uer les eloiles. Le coear homain a des ressources profondes, secretes et
sacr^es, pour opposer la contagion de la charit6 k la contagion de la mi-
**w. Parfois est-il dupe : le mendiant, frfere Cain du malheureux, exploite
«tt nous ce que le xvih« si^cle appelait d'un nom charmant, la sensibility
«tce que nous nous nommons tout simplement la bont^. M. do Montyon,
^ ful sensible, connaissait le prix des vertus cach^es et n'ignorait pas le
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280 REVUE PHILANTHROPIQUE.
pouvoir des vertus publiquement c616br6es. II ne s'agit pas ici de doaner
raison au m6chant motde La Rochefoucaald : « La yertu n'irait pas loin si
la vanity ne lui tenait compagnie ». II n'est point question de vanity, mais
de justice. Qui, « il faut qu*uue action louable soit lou6e ». Peut-^tre le
souvenir de quelque d^vouement fera-t-il nattre dans d*autres dmes Tam-
bition, I'app^tit d'un sacriflce nouveau. En attendant, admirons ceux que
nous couronnons aujourd'hui. Qui ne se sentirait un peu humili^ par ieur
grandeur inconsciente? Toutes les belles phrases ne valent pas la plus
simple de leurs belles actions et il y aurait uu moyen plus certain d'hono-
rer nos laur6ats — un moyen h^rolque que je n'oserais proposer — ce
serait de les imiter. Gontentons-nous de les saluer bien bas et de nous
rappeler, au moins jusqu'ii demain, les noms vSn^rables de ces bons sau-
▼eteurs et de ces filles braves qui nous apportent, si je puis dire, desann^es
de d^vouement et k qui nous donnous, en ^change, une gloire d'une heure,
un 6ioge d'une minute. Mais quoi I ils ne demandaient mSme pas cela, ils
n'esp6raient rien!... ils faisaient le bien pour le bien; ils ne souhaitaient
que la joie du sacrifice. L'Acad^mie ne Ieur eftt-elle rien accords qu'ils
auraient encore la meilleure part! »
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CHRONIQUE ETRANGERE
AUemag^e.
LA LUTTE CONTRE LA TUBERCULOSE
En Hanovre vient de se fonder une association pour la lutte contre la
tobercolose.
Le but de cette association est de r6pandre dans le public, par voie de
conferences et de brochures, les notions relatives k I'^tiologie et k la pro-
phylaxie du terrible il6au qui fait tant de ravages parmi les hommes.
LE TRAVAIL DES ENFANTS
L'inspection industrielle en AUemagne a fait cette triste constatation
que le travail des enfants va de uouveau croissant. Non seulementle nombre
des adolescents de 14 i 16 ans, employes dans les fabriques, a consi-
tl^rablement augments (9,1 0/0 de 1895 k 1896), mais encore celui des
enfants au-dessous de 14 ans s*est accru de 23,2 0/0 dans cette seule
ann^e (les mines de sel et les salines, qui occupent un nombre consi-
derable d'enfants, n*y ^tant point compris.)
Dans le rayon de Gassel, le chifTre a mSme augments de 50 0/0 et la
dar^e moyenne de la journ6e ouvriSre pour les enfants se trouve 6tre de
dix heures. Dans une raffinerie de sucre k Leer, prfes de la frontifere hoUan-
daise, les fabricants, aprfes avoir 6t^ r6primand^s par le gouvernement
pour Temploi 6tendu qu'ils faisaient du travail enfan tin, allftrentau delude
la frontifere recruter des petits ouvriers en Hollande. La loi allemande se
troava hors d'etat de prot^ger ces jeunes Strangers, qu*on avait eu soin de
manir de certidcats hollandais les dispensant de I'^cole.
Un autre grave inconvenient consiste dans le travail mercenaire des petits
ecoliers pendant leurs heures de loisir.
Le conseil municipal de Berlin se propose de voter un r^glement
defendant Temploi des enfants au-dessous de 14 ans comme commis-
sionn aires, porteurs cle kit, de pain, de journaux, etc. Le Berliner
Tagblatt remarque fort justement qu'une telle loi sera illusoire pour
ramelioration du sort des enfants. Au lieu de gagner en f aisant des courses,
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REVUE PHILANTHROPIQUE,
devront ^changer ce metier fatigant contre le travail bien plus ruineux
Tindustrie k domicile.
D^j^ d'innombrables enfaDts sont employes pendant toutes leurs heures
res k coudre des boutonni^res, k fabriquer des fleurs artificielles, des
s en papier, des boites en carton, etc. ; Touvrage k domicile, exempt de
i contrdle et de loute inspection, leur ablme le corps, leur abAtit I'es-
t et empSche les pauvres 6tres epuis6s de tirer avantage de Tinstruction
laire, qu'ils sont trop fatigues pour suivre attentivement.
Cependant la mis^re sociale ne permet pas k bien des families de se
iser des minces ressources rapport^es par le sacrifice des enfants, le
'liner Tagblatt appuie sur TinutilitS d'une surveillance de police tant
on ne donnerapas aux families indigentes une compensation mat^rielle.
On pourrait peut-6tre aussi combattre d'une mani^re efficace, le travail
! enfants en ^largissant le syst^me des asilesjournalierspour la jeunesse,
ctionnant sous le nom de « Kinderhorte ». Ces asiles abritent les ^coliers
ivres pendant leurs heures de loisir, les r^unissent sous une surveillance
sonnable pour les devoirs et les jeux en commun. Berlin en poss^de k
1 pr^s 40.
lultipli^s, r^form^s, les « Kinderhorte » pourraient Hre destines non
ilement k soustraire i'enfance aux dangers et ill la corruption de la rue,
is aussi k une usure pr^malur^e par le travail indastriel. Les repas
tuits ofTerts aux ecoliers d^dommageraient en quelque sorte les parents
igents de la perte occasionn^e par le chdmage des enfants.
Adelb Schreiber.
LKS SANATORIA POUR LES TUBBRCULEUX
Le D"^ Gumprecht (d*I6na) public des notes int^ressantes sur les sanatoria
tuberculeux indigents cr^^s jusqu'ici. L'Angleterre en poss^de 18, pou-
\i recevoir ensemble 7 000 malades, les £tats-Lnis disposent de deux,
France (1) et TAutriche chacune d'un seul. La Belgique n*a aucune ins-
ition de ce genre, la Suisse, par contre, en comptera bient6t 10, et en
emagne i i sanatoria fonctionnent d6j^ dans toutes les parties de I'em-
e, tandis que sous peu leur nombre sera plus que triple. La fondation
iuvres pour les tuberculeux est r6solue dans les localitSs suivantes :
dreasberg, Altena, Altona, Baden, Berlin, Danzig, Erfurt, Hagen, Halle,
aau, Hannover, Kassel, Kdnigsberg, Leipzig, Nilrnberg, Oldenburg,
peln, Regensburg, Siichsische Schweiz, Stettin, Stiege, Stuttgart, Sulz-
n, Hurzburg.
L'un des plus beaux sanatoria, k Harlaching en Bavi^re, est pr^s d'etre
lev^; on esp^re que Tinauguration pourra avoir lieu en aatomne 1898.
; frais de construction s'^l^vent k 1 228 000 marcks. L'^tablissement abri-
a 400 tuberculeux, dans deux divisions s^par^es a proportions ^gales
ommes et de femmes. Des halles ouvertes longeant toute la facade per-
(1) Lc sanatorium d'Angicourt en preparation.
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CHRONIQUE tTRANGfeRE. 283
Jiiellent m^rne aux plus malades de respirer Tair salubre des bois envi-
I'onnants, les lits 6tant k cet effet flx^s sur des roulettes et se transpor-
^^^ sans difficult^ aucune.
^ien entenda le sanatoriam sera pourvu de tout confort, rien n*y man-
l^era pour y rendre le s6jour aussi efficace et aussi agr^able que possible.
A.S.
1- EFFET DES ASSURANCES EN GAS DE MALADIE ET DES CAISSES
DE PR6vOYANCE pour LA ^lEILLESSE SUR LB PAUP^RISME
i#7 ^^'^ce statistique de I'empire allemand vient de publier (1) les r^-
^'une enquSte entreprise A la demande du chancelier imperial par
Qvernements des divers 6tats conf(5d^r^s afin de s'assurer Si les
*"«ijjes iiQposdes par les diff^rentes lois d'assurances ouvriferes se- trouvent
^^VipeasSes par ime ^conomie dans les charges d*assistance publique, et,
si oBi, dans quelle me sure.
C'est, croyons-nous, la premiere fois que la question est pos6e.
Les renseignements recueillis ont 6t^ de deux sortes : en promier lieu,
une statistique d^cennale (1884 A 1894) du nombre total de chefs de families
obtenant des secours de 1' Assistance publique et la somme to tale par annSe
de ces secours; en second lieu lesr^ponses k un questionnaire adress^ par
TofQce imperial de statistique de Berlin k toutes les administrations
d*assislance.
Cest une enqu^te tr^s m^thodiquement con9ue et qui peut sinon per-
mellre de trancher cette face curieuse de la question du d^veloppement
du paup^risuie, tout au moins apporter des ^l^ments d'information exacts,
susceptibles de servir de base k des enqu6tes analogues, en Allemagne ou
dans d'autres pays.
Les r^sul tats de cette enqufite r^sument environ 1500 r^ponses k ce
questionnaire. En g^n^ral les administrations allemandes d'assistance
considerent que les operations dues aux lois sur les assurances ouvriferes
onlemp^ch6 leurs charges des'accrottre aussi rapidement qu'elles Teussent
lutsiceslois n'existaient pas; mais le nombre des personnes assist^es et
le montant des secours ont augment6 plut6t que diminu^.
La loi sur les accidents a eu moins d'efTet que celle sur I'assurance
^Dtre la maladie et celle de pr6voyance pour la vieillesse sur le d^velop-
pement du paup6risme. Cette demiftre aurait permis k un grand nombre
^ personnes de ne pas recourir aux fonds des pauvres. Par exemple, k
"*™n le nombre de malades envoy6s dans les hdpitaux municipaux par les
caisses d'assurances en cas de maladie a augments pendant que le
nombre des patients envoy^s dans ces 6tablissements par les ad-
J>^iQislrations d'assistance publique a diminu6. De plus, le pourcentage de
* population berlinoise secourue k domicile par les m^decins de I'Assls-
PnLi ^^^^^i^^^^f^^ -S'' Statistikdes deutschen Reichs, Jahrgang 1897 ; Rerlin,
™W«umner et Muhlbrecht.
L
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284 Rj:VUE PHILAxNTHROPIQUE.
tance est tomb^ de 4,46 — chiffre de 1883 — k 2,79 en i 887-88 pour re-
monter h 3,76 en 1891-92, taux encore inf^rieur k celui de 1883. II est fort
regrettable que Tenqu^te n'ait pas port^ sur les ann^es 1894 k 1896.
L'enqu^te allemande assignearaugmentationdunombre des personnes
r^clamant I'aide de I'Assistahce publique une cause que nous signalons
parce qu'elle influe, croyons-nous, sur le d^vcloppeniement des d^penses
d'assistance parlout oh. la r^gularit^ du secours distribuS transforme le
pauvre occasionnel en indigent inscrit, immatricul^ et rent^. Une parlie
de la population ouvri^re allemande, ne jouissant pas du b^rK^fice des
lois d'assurance ou n'en jouissant que parti ellement, a une tendance
mcu'qu^e & accepter plus volontiers qu'autrefois les secours de TAssistance
publique et affirme mhne son droit aux secours publics,
Dans une parlie de la Prusse, cependant, Taugmentation des d^penses
d'assistance est attribute k la loi sur les pauvres de 1891 , sans que nous
puissions nous rendre compte de cette assertion.
Enfln,* dans certains cas, les autoritds bienfaisantes ont aIlou6 des
secours k des families ou k des individus recevant une rente des institu-
tions d'assurance — surtout des vieillards — parce que la faiblesse de la
pension vers^e aux assures 6tait telle qu'ils ne pouvaient subsisler saus
Taide de I'Assistance. Ge dernier contingent sera de plus en plus r^duit au
fur et k mesure que les lois sur Tassurance s'appliqueront plus com-
pl^tement.
G. G.
Angleterre.
Poplar hospital for accidbnts (H6pital de Poplar pour les accidents).
— En facade sur Gommercial Road, en plein quartier des Docks, dans
Test de la ville, adossS aux quartiers les plus pauvres de Londres, Stepney
et Whilecbapel, se trouve le Poplar hospital, qui se donne pour mission
principale de soigner les accidents el qui, sur la couverture de ses pros-
pectus et de ses rapports imprimis, affirme que le nombre des accidents
trait^s par ses soins est de plus de quatre par heure chaque jour.
Le voyageur qui longe Gommercial Road d6couvre ais6ment, k cinq
minutes de la station de Poplar, un double bdtiment dont une partie a
deux stages sur rez-de-chauss6e, avec un bow-window k la fenfire m^diane
du premier 6tage, et dont Tautre partie ofTre sur la rue une facade ^troite
k trois Stages avec deux Urges balcons. Ges constructions de style bien
anglais sont couronndes de simili-crSneaux. D^s qu'on arrive k Tune des
extrSmitSs de la grille qui s6pare de la rue les constructions, un grand
Scriteau frappe le regard : Gocbbrs ! vkuillez marcher au pas devant l'hopital !
.Si vous 6tes en voiture, vous pourrez remarquer que votre cocher ne
manquera pas de se conformer k Tavis qui est ainsi formuld, et qu'il ne
reprendra son allure ordinaire qu'apr^s avoir lu, k Tautre extr^mild de la
grille, une nouvelle pancarte ingSnieusenient reconnaissante : Merci, co-
ghersI
Le Poplar hospital a H6 fondd il y a quarante-trois ans. Mais, depuis
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CHRONIQUE feTRANGfeRE. 285
qaelques ann^es, il s'est agrandi, amSlior^, et grdce aux souscripteurs et do-
naleursg^n^reux, il peut faire face aux d^penses croissantes de son budget.
Actuellement (1896) ses recettes s'^l^vent^ 21 056 livres (526400 francs]
et sesd^penses se balancent exactement ayec ses recettes, mais il convieat
d'ajouter qa'on volt figurer aux recettes les legs et ie samaritan fund et
qu'aox d^penses se trouvent mentionn^es plus de 15000 Jivresde dSpenses
exlraordinaires.
D'apr^s les comptes du dernier exercice, chaque malade externe coilte
k Tadministration 1 shelling 1/2, soil 1 fr. 85, et chaque hospitalism re-
Tient i30 shellings par semaine, soit environ 5 francs par jour.
Le nombre de lits n'est pas considerable et 52 sur 65 en moyenne ont
^tdoccupes en 1896; le nombre des hospitalises a et6 de 876, savoir : hom-
mes 506, fern mes 125, gar^ons de moins de douze aus 162, (illes 83. La
dur^e raoyenue du s^jour de chaque hospitalise a H€ de 22 Jours.
Les malades trait^s dans la partie reservde aux consultations pour les cas
d'accidents ont H6 de 17 479, soit 48 par jour.
La iDorlalite n'a pas atteint 6 p. 100, puisque 51 d^ces ont ete constates
sor 876 malades; encore faut-il constater que 3 d^c^s ont eu lieu pendant
le transport k Thdpital et que beaucoup parmi les autres sont morts quel-
qnes heures apr^s leur entree k Thdpital.
Quoique la situation fiuanci^re soit bonne, les ad minis trateurs n'ont pas
riotenlion d'augmenter le nombre des lits ; ils pensent seulenient k in-
^'er una dizaine de lits pour un service de maladie des yeux et un ser-
vice dentaire. Ces services sont rendus n^cessaires par ce fait que dans
Textrdme est de Londres il n'y a aucun hdpital special pour les dents et
Jes yeux.
I^'autre part, retablissementveot faire bien, dAt-il faire moins, et r^ser-
ver ses ressources en provision de Taugmentation du nombre des malades
externes qui, en onze ans, de 1885 k 1896, s'est eieve de 7 000 k 17000. .
£uQo,il ne veut pas economiser sur son personnel. Ild^pense actuelle-
ment U19 livres en salaires et gages (35 475 francs) dont 580 pour les in-
finnieres (13 500 francs).
" C*est un miserable calcul, dit le dernier rapport du comite d'adminis-
tration, que d'economiser sur les infirmieres », et il ajoute que les malades
troQTent autant de proQt que les infirmieres quand on ne les surm^ne pas
etqu'onleur donne une demi-journee de conge tons les huit jours et,
lOQsles mois, 60 heures de suite qu'elles peuvent passer loin des salles.
Depuis le mois d*avril 1896, on a pris Thabitude de demander aux ma-
lades exteraes 2 deniers (environ 20 centimes). On a vbulu ainsi eviterdans
nne cerlaine mesure les malades non compl^tement denues de ressources
el qui Tont de consultations en consultations. Mais il va de soi que le ma-
^equi ne peut payer celte petite somme est soigne tout de mSme; de
plus on n'exige rien pour les enfants; — on estime en eflfet que les parents
Qenverraient peut-eire pas leurs enfants kin consultation s'il leur fallait
P^yer ?ingt centimes poor chaque fois.
^ Poplar hospital y comme la plupart des autres hdpitaux de Londres, a
'^f-omit^de dames qui visitent les malades en traitement.
L'^tablissement est administre par un president, un vice-president eti
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286 REVUE PHILANTHROPIQUE.
des gouverneurs. Dix goaverneurs au moins forment le comiti qui se
r6anit obligatoirement une fois par semaine. line cotisation d'une guinee
donne le titre de gouverneur. Le versement de dix gain^es au moins est
n^cessaire pour ^tre gouvemeor k vie. Le president du comity est actuelle-
ment Thonorable Sydney Holland.
Henri Napias.
Antricbe.
LE DEFICIT DES FONDS d'aSSURANCB GONTRE LES ACCIDENTS
Apr^s avoir examine la situation en Allemagne, nous signalerons les
conditions peu satisfaisantes des caisses autrichiennes d'assurances en cas
d'accidents pendant les derniSres ann^es.
En 1893, le deficit, c'est-ii-dire Vexc^s des depenses sur les recettes,
^tait de 1825000 francs; en 1894, il montait au total inqui^tant de
2 061 000 francs et en 1895, 11 a epcore atteint le chiffre de 1 158500 francs.
Ges chiffres portent sur les caisses d'assurances soumises k la loi de
juillet 1894, mais ne comprennent pas les caisses de mineurs, regies par
le code minier et qui sont dans dee conditions de prosp6rit6 relative.
Le deficit que nous relevons ne tient nullement k un recul de Tesprit
de pr6voyance en Autriche, car de i 231 818 en 1890, le nombre des assures
a moot6 k 1 877 194 en 1895 ; mais, bien qu'on semble g6n6ralement d'accord
dans les milieux ofQciels k assignor com me cause le taux trop bas des
primes, nous croyons que ce n'est pas \k le motif veritable de la crise
f&cheuse que traversent ces int^ressantes institutions. Le motif serait plu-
t6ty selon nous, dans les d^fectuosil^s de la loi autrichienne qui permet
trop ais^ment aux patrons d'^chapper aux responsabilit^s et aux verse -
ments qu'en bonne ^quit6, dans de nombreux cas, ils devraient faire aux
caisses auxquelles sont assures leurs ouvriers.
G. C.
Belgique.
Bel^que. — Le Gongr^s pour le repos du dimanche, qui s'est tenu
iBruxelles, a vot^ k la grande majority de ses membres qu'il fallait une
loi pour assurer le repos dominical; il s'est prononc^ en faveur d*une
mesure s'appliquant pour Tindustrie k tons les employes sans distinction
et il a 6t6 d'avis que, toute reserve faite sur la mesure de Tinterveution
des pouvoirs publics, cette intervention pourra se produire ^galement en
vue de la fermeture des magasins le dimanche.
Russie.
LES AMBULANCES URBAINES
Les voitures.d'ambulances urbaines^ qui rendent chaque jour k la po-
pulation parisienne d'inappr^ciables services, out fait leur apparition en
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CHRONIQUE ^TRANGtRE. 287
Pologne grdce a la g^nSreuse iaitiative de M. le comte Przezdziecki ; un
service d'ambu lances urbaines vient, depuis quelques mois, d'etre inaugur^
iVarsovie, ou il jouit de lafaveur populaire. Lors de leur r^cente visile en
Pologne, I'Empereur et I'lmp^ratrice de Russie se sont vivement inUress^s
k cette oeuvre, appelee k rendre de grands bienfaits, et ont compliments le
philanthrope qui lai a donn^ Tessor.
Les voitures d'ambulances de Varsovie n'ont pas cependant la ISgSretS,
l*616gaQce et presqae la gattS de nos voitnres parisiennes. GopiSes sur
celles qui fonctionnent k Vienne, elles sont lonrdes, d'aspect un pen lugubre,
et sent trainees par deux chevaax. Telles qu'elles sont, elles rendent de
T^rilables services qui justiflent I'enthousiasme que les habitants profes-
sent pour Toeuvre.
Puisque nous parlous des ambulances urbaines, il convient de rappeler
que c'est en France qu'elles se sont manifestoes pour la premiere fois en
Europe, grdce k M. le docteur Nachtel.
En 1880, le docteur Nachtel faisa it, lo 30 novembre,une communication
^ TAcad^mie de mOdecine touchant la creation d'ambulances urbaines.
Cette communication faisait, en fOvrier 1881, Tobjet d'un rapport favorable
de VAcad^mie, rapport qui a eu un 6norme retentissement, et k la suite
dnquel M. le docteur Nachtel, soUicitO par M. le baron de Mundy,commu-
niqnaitice personnage les bases du fonctionnement qu'il prOvoyait pour
Toenvre, en m6me temps que la description sommaire de la voiture qu'il
convieodrait d'employer. C'est sur ces derni(»res qu'un service d'Ambu-
l^ces Urbaines fut ct6& k Vienne avec des voitures insufflsamment Stu-
^Ij^es, k la suite du terrible incendie qui dOti*uisit de fond en comble le Karl
Tbeater, vers 1883.
Oq sait, en ce qui touche les ambulances urbaines de Paris, qu'A la
*^te d*un rapport favorable du Conseil d'hygifene du dOpartement de la
Seine et du Conseil municipal de Paris, datant de 1884, Tojuvre ne fut
"^ogur^e qu'en 1888. Elle compta, parmi ses protecteurs, les personnages
^6s plus illustres, notamment le regrelt6 Jules Simon, eut comme pr6si-
"Cntes M"«" la baronne de Mohrenheim, la duchesse de Doudeauville
** <luchesse de Rohan, etc., et fut remise solennellement k la ville de Paris
«n 1893,
Aujourd'hui on se propose de crSer un service d'ambulances urbaines
a Londres, qui en est encore priv6. Soutenu par la sympathie de lord
*^**ter, du president du conseil municipal de Londres, du lord-mayor et
^autres pouvoirs publics anglais, M. le docteur Nachtel poursuit avec sa
^outumi^re activity sa philanthropique campagne, k laquelle on ne saurait
'''^P applaudir, car elle a pour objet le soulagement de ThumanitS.
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INFORMATIONS
L'H6pital Boucicaut.
Le l^'d^cembre a eu lieu, dans la plus grande solennit^, rinaoguration
de I'hdpital Boucicaut sous la pr^sidencjs du President de la R^publique.
Le 8 d^cembre 1887, M""** Boucicaut mourait,laissant un testament aux
termes duquel TAssistance publique ^tait institute l^gataire universelle.
L'ensemble de sa fortune d^passait quarante millions. La majeure
partie de cette somme 6tait afTect6e k des institutions de charity publique
ou priy^e, et, tout comple fait, apr^s la d^livrance de ces divers legs dont
le total s'^levait k 33 millions, I'Assistance publique ne conservait pour sa
part qu'une somme de 7 millions 500 000 francs, destin^e, dans Tintenlion
de la testatrice, k fonder un hdpital dans nn quartier avoisinant le Bon
March^ d'oii cette fortune 6tait sortie. Cette obligation cependant se trou-
vait subprdonn^e k cette condition que le reliquat de la fortune totale res-
tan t entre les mains de I'Assistance publique atteignlt un chiffre de
8 millions de francs. Cette administration ne se trouvait done pas stncte-
meot tenue k fonder un hdpital : elle pouvait, d'accord avec les ex^cuteurs
te stamen taires, appliquer le disponible k des oeuvres quelconques. Mais,
jalouse de rester scrupuleusement dans Tesprit de la testatrice, elle d^cida
de surseoir k la construction de ThApital jusqu'^ ce que les int^r^ts capita-
lists de la somme qui lui revenait fussent devenus suffisants pour parfaire
les 8 millions indiqu6s. Ce moment yenu, elle ouyrit un concours sur un
programme 61abor^ par ses soins et dans ce programme elle s'effor^a de
tenir compte de toules les indications de la science et de Thygi^ne mo-
dernes. Ainsi les services de chirurgie devaient 6tre divis^s non seulement
par sexes, mais par categories de malades : de mdme les services de m&-
decine se trouvaient disposes de fa^on que les contagieux ne fussent
jamais m^lds aux autres malades, m^me k Tentr^e de rhdpital, dans le
service de la consultation. La volont^ de I'Assistance publique fut scrupu-
leusement respect^e par les concurrents. Sur une trentaine de projets
pr^sent^s, huit re^urent une prime. C'est sur celui de MM. Legros p^re el
fils que s'arr^ta le choix d^finitifdu jury. On leur conlla la direction des
travaux, et au cours de I'ann^e 1894 le premier coup de pioche fut donn^
dans le terrain acquis par I'administration au centre du quartier de Javel
absolument denu6 jusque-R de tout ^tablissement hospitalier. Ce terrain.
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r
INFORMATIONS. 289
d'one snperficie de 30000 metres, avait coilt4 545 348 fr. 85. Les construc-
tions qui le couvrent sar une surface de 7500 metres, et qui sont aujour-
d*hui termin^es, oot eotraiaiane d^pease de 2855 471 francs ; les frais fails
pour rameublement tout spScialement soign^, ne s'dl^venl pas h, moins
de 270000 francs. L*ensemble de I'op^ration revient done h un total
de3670819fr. 85.
Le nouvel h6pital, dii k la gSn^rosit^ de M°^* Boucicaut, se compose de
bait pavilions, dont quatre de mSdecine et quatre de chirurgie.
Ges paTilloDS sont d'in^gales grandeurs, les plus grands affect^s aux
hommes, ceux-ci Temportant sur les femmes dans la proportion de trois
pour deux. En outre des services de m6decine et de chirurgie g^n^rales se
troove on service d'accouchement qui comprend 20 lits. Ghaque pavilion
se compose d'une salle k rez-de-chauss^e sur6lev6 et de ses annexes, au-
dessas desquelles, seules, se trouvent plac^es, au premier 6tage par conse-
quent, des chambres r^serv^es aux malades du Bon March^ qui ont, en
outre, la jouissauce exclusive d'un petit bcitiment, sorte de cercle con-
strait a leur usage.
L'hdpital contiendra en tout 152 malades formant trois services,
confi6s : celui de m^decine au docteur Lctulle, celui de chirurgie au
docteur Marchand, enfin la maternity au docteur Dol^ris. Huit religieuses
deTordre des dames augustines de rHdtel-Dieu et cinquante infirmiers
ou infirmi^res laiques composent le personnel de Thdpital.
Aa point de vue des dispositions architecloniques et des mat^riaux em-
ployes, ThApital Boucicaut offre un int^rfit tout particulier. Les salles, de
forme ogivale, m^nagent un cube d*air renouveie de 80 rafetres par ma-
lade et par heure, toutes construites 6n fer et en briques avec soubasse-
meat de meuli^re. La paroi interne est s^par^e du mur ext^rieur par un
matelas d'air et rev^tue de briques de lieges enduites d'une peinture ver-
iuss6e. A rextr^mite de chaque salie se trouve une veranda orn6e de
plantes k Tusage des malades et qui leur servira de fumoir. Le sol est en
gr^s c4rame. Le chauffage est & circulation de vapeur, r^clairage se fait
par reiectricite. Tons les services sont pourvus d'un ascenseur ainsi que
d'un roonte-charge et relies entre eux pcu'une galerie souterraine desservie
par an petit chemin de fer, de telle sorte qu'a Texterieur rien n*appa-
raisse du fonctionnement de ThApital.
L'etablissement est d6cor6 de plantations et de Jardins riants qui lui
donnent un cachet particulier.
M. Felix Faure, accompagn^ de M. Barthou, a 6t6 recu par M. Peyron,
directeur de I'Assistance publique, MM. Sauton et Dubois, presidents du
conseil municipal et du conseil general, Henri Monod, directeur de
I'hygiene et de TAssistance publiques, de Selves, prefet de la Seine, et
Charles Blanc, pr^fet de police, F61ix Voisin, president du conseil de sur-
veillance, Louis Lucipia, president de la commission d'assistance du con-
seil municipal, Alphonse Humbert et Chauvi^re, deputes de Tarrondisse-
ment, Paul Strauss, s^nateur de la Seine, de nombreux conseillers munici-
paux.
Un grand nombre de notabllit6s m^dicales et scientiGques assistaient
k la ceremonie.
REVOE PHnJl!fTHROPIQUE. — H. 19
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290 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Des discours applaudis ont 616 prononc^s par MM. de Selves, Sauton et
Pejrron.
Au nom des ex^cuteurs testamentaires, M. Plassard a remerci^ le presi-
dent de la R6publique d*avoir assists k cette f^te, puis M. F^lix Faure a
prononcd quelques paroles.
« G'est au nom des malhenreux, des souffrants et des mis^rables que
I'adresse k la fondatrice uo hommage que je diraipresque national. Nous
sommes venus ici pour honorer le travail, la charity et la reconnais-
sance. »
La Commission de revision des Listes d'Indigents.
Le conseil sup^rieur de TAsBistance publique s'etait prononc^, dans la
preparation du d^cret snr les secours k domicile k Paris, en faveur de la
creation d*une commission devant laquelle seraient port^es les rc^clama-
tions des indigents el des n6cessiteux. Gette disposition n'a pas 6l€ main-
tenue par le conseil d'Etat.
Mais, k la suite d'un vceu du Conseil municipal, et en raison des disac-
cords survenus entre Tadminislration centrale et les bureaux de bienfai-
sance au sujet d«; Tinscription ou de la radiation des listes d*indigents, et
sur I'avis conforme du Conseil de surveillance, un arr^t^ vient de constituer
cette eommission de revision.
Cette commission, charg^e de se prononcer sur les contestations aux-
quelles peut donner lieu Tinscriplion ou la radiation des lisles d'indigents,
sera pr^sidSe k tour de r61e par le president dm Conseil de surveillance et
par le president de la commission municipale d'assistance.
Les Inflrmiers et Inflrmi^res des H6pitaax.
Le personnel secondaire des h6pitaux parisiens a ^t^ r^cemment aug-
mentS pour une somme de 203 641 francs, sp^cialement vot^e k cet efifet
par le Conseil municipal.
L'augmentation est de 84 francs pour les surveillants et surveillantes,
les sous-surveillants et sous-surveillantes, de 63 francs pour les suppliants
et suppleantes, de 43 francs pour les premiers infirmiers et premieres in-
firmi^res, de 48 francs pour les infirmiers et inflrmi^res de premiere
classe, de 43 francs pour les infirmiers et infirmi^res de deuxi^me classe,
les garcons et fiUes de service de premiere et de deuxiSme classe.
line circulaire du 25 juin 1897 a ainsi r6glement6 le recrutement du
personnel secondaire :
Article premier. — Le personnel des infirmiers, infirmiferes, garcons et
filles de service, comprendra d^sormais deux categories :
\^ Les infirmiers, infirmi^res, gardens et filles de service stagiaires;
2^ Les infirmiers, iofirmi^res, garcons et filles de service titulaires de
premiere et de deuxi^me classe.
Art. 2. — Les infirmiers et infirmi^res, garcons et filles de service sta*
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INFORMATIONS. 291
giaires, seront recruits par les directeurs des ^tablissements; ils seront
sonmis au plus tard dans les huit jours qui suivront leur admission pro-
visoire, d an examen medical qui aura pour but de determiner si les can-
didal sont exempts d'affections contagieuses et s'ils poss^dent les apti-
tudes physiques n^cessaires pour remplir les fonctions qu'ils sollicitent.
Si le r^sultat de cet examen leur est favorable^ ils seront admis A accomplir
QD stage dont la dur^e sera de six mois au moins, et k I'expiration duquel
ils pourront Hre nomm6s infirmiers titulaires, sous la condition expresse
qae pendant ce laps de temps, ils auront donn6 toute satisfaction k leurs
chefs et que le stage dont 11 s'agit aura 6t6 accompli dans le m^me ^ta-
blissement et sans interruption.
Ceax qai, au contraire, n'auront pas 6i6 jug^s aptes k remplir les fonc-
tioDs d'infirmier ou d'infirmi^re devront dtre cong6di6s dans uu d^lai
maximum de huit jours.
Art. 3. — Les infirmiers et infirmi^res, gar^ns et filles de service sta-
giaires, recevront ind^pendamment des prestations en nature, une indem-
nity calcul6e k raison de 350 francs par an et payable par mois.
Art. 4. — Le grade d'infirmier, inflrmi^re, gar9on et fiUe de service
titulaire sera conf6r6 et ne pourra 6tre retir^ que par le directeur de
TAdministration.
Art. 5. — Toot titulaire qui quitterait r^tablissement oh il exercait ses
fonctions, sans y avoir €i6 autoris^ par le directeur de 1' Administration,
perdrait le benefice de son grade.
11 ne pourra dtre admis de nouveau dans les ^tablissements dependant
de Tadministratipn qu*en quality de stagiaire et dans les conditions pr6-
▼ues k Tarticle 2.
Cet arr6t^ a eu son efifet k partir du !«' juillet 1897.
Le Service medical de nnit.
A la suite d'une question de M. Paul Bernard sur le fonctionnement du
service medical et pharmaceutique de nuit, le Conseil municipal de Paris
a adopts la proposition suivante de M. Patenne :
« En cas d'accouchement, les brigadiers des postes de police donneront
la preference au m^decin demand^ par les families lorsque le medecin
sera inscrit sur le tableau de service. »
Une autre proposition, formui6e par M. Paul Bernard, a et6 renvoy^e
k Texamen de la cinqui&me commission. Elle est ainsi concue :
« Le service medical de nuit sera assure, dans chaque quartier, en
instituant le service par semaine au lieu d'etre k tour de r61e par nuit.
« Les ordonnances k prescrire, k Toccasion du service de nuit, seront
laiss^es k la liberty pleine et enli^re du medecin, dans riutSrSt du ma-
lade. »
Par une r^cente circulaire, M. le pr6fet de police vient de donner, aux
agents charges de la requisition des m6decins de nuit, des instructions
nonvelles.
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292 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Dor^navant, chaque fois qu'an m^decin de nuit appel^ aupr^s d'an ma-
lade, jugera nScessaire I'assistance d'uQ de ses confreres, il sera proc^d^
d'urgence k uae seconde requisition : chacun des m^decins touchera la to-
talit6 de rindemnit6 allou^e par visile de nuit.
Gette decision a 6U proyoqu6e par un fait signal^ par M. Ribemont-
Dessaigne, chef du service de la Maternity k rhdpital Beaujon.
Un m^decin de nuit, appel^ aupr^s d'une albuminurique en coaches,
dont nne sage-femme avait en vain tent^ la d^livrance et chez laquelle une
abondante h^morrhagie s*6tait d6clar6e, refasa d'intervenir et prdfera en-
voyer imm^diatement la malade k ThApital. Gelle-ci, qu'une intervention
rapide edt peut-^tre sauv^e, succombait au moment m6me ou elle ^tait
hospitalis^e.
La Tuberoolose dans rArmde.
Dans sa stance du 8 avril 1897, le Gonseil g^n^ral de la Seine avait
adopts une proposition de MM. Glairin, Bompard, Prache et Gervais, ten-
dant k combattre la tuberculose dans Tarm^e.
M. le Di* Dubois a propose de son cdt^ un projet de vobu, qui vient d'etre
adopts par la m6me assembl^e, pour « que Tautorit^ militaire tienne l^gi-
timement compte des constatations et des certificats des m^decins civils
int^ressant les jeunes gens qui se pr^sentent devant les conseils de revi-
sion, et que tout jeune homme suspect de tuberculose soit soumis k une
observation approfondie et qu'il ne soit envoys au regiment que si Texa-
men bacteriologique I'a reconnu indemne du bacille de Koch. »
L'Enseignement medical.
L*Union des Syndicats m6dicaux de France a adopts, dans sa reunion
annuelle de novembre 1897, la resolution suivante k TunaQimite :
Gonsiderant que le nombre des Facultes actuellement existantes sufOt
amplement k assurer le recrutement et que leur creation ne r^pondant k
aucun besoin des populations, serait de nature k augmenter I'encombre-
ment d^jd trop grand de la profession : qu'il serait surlout n^cessaire de
renforcer Tenseignement dans les Ecoles, afin de donner plus de valear
aux dlpl6mes professionnels, I'Assembiee gen^rale de TUnion des Syndi-
cats medicaux de France signale le danger de toute nouvelle creation de
Facultes ou Ecoles de mddecine. »
La Dispense du Timbre pour les Afflches philanthropiques.
Le Gonseil municipal de Paris, sur la proposition de M. Gherioux, a
invite Fadministration k faire, d'urgence, les demarches n^cessaires en vue
d'obtenir, soit k litre de simple tolerance, soit aulrement, que les affiches
k placarder k I'exterieur, emanantdes oeuvres philanthropiques (caisses des
ecoles, creches laiques, dispensaires, bureaux de placement gratuit et
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INFORMATIONS. 293
antres (Buvres similaires), soient dispens^es du droit de timbre et puissent
dtre imprim^es sur papier blanc.
Afin d'^viter les abus, et pour sauvegarder les droits du fisc, la liste
des oBUTres qui seraient appel^es k b^n^ficier de cette mesure serait arrd-
t^e, tons les ans, par M. le Ministre des finances, apr^s entente avec le
Conseil municipal et les pr^fets de la Seine et de police.
Le Conseil g^n^ral de la Seine s'est associ^ k ce vceu pour le d6parte-
ment tout entier.
Prime anx Families nombreuses.
M. Gervais, conseiller g^n^ral, a propose au conselller g^n^ral de la
Seine d'allouer k tout homme de service ou ouvrier du d^partement, dont
les salaires ne d^passent pas 2 400 francs par an, une somme de 50 francs
par enfant au-dessus de deux enfants.
L'administration pr^fectorale a ^t^ charg^e d'^tablir la statistique des
enfanis susceptibles de recevoir la somme de 50 francs.
La Maison maternelle.
DISCOURS DE M. l£0N BOURGEOIS
L*as8embl6e g^n^rale annuelle de la Maison maternelle a eu lieu le
^ novembre sous la pr^sidence de M. L^on Bourgeois, assists de MM. Mar-
guery, president de la Maison maternelle, et Vorbe, conseiller municipal,
^ce-pr4sident; de MM. Th^ophile Roussel, s^nateur; Moreau, maire du
XlX'arrondissement, e\ de M"<* Louise Koppe, directrice de la Maison ma-
ternelle. La f^te s'est lermin^e par un brillant concert vocal sous la di-
action de M. £mile Bourgeois, chef d'orchestre k rOp6ra-Comique.
M. Uon Bourgeois a prononc^, k cette occasion, un discours ^mu, dans
leqnel il a rappel^ le but de la Maison maternelle, cette oeuvre si simple et
si toucbante, fondle et dirig^e par une femme d*6nergie et de coeur,
M"" Louise Koppe.
" line faut pas, a dit M. L^on Bourgeois, il ne faut pas qu'un Stre humain
menre s*il y a un moyen social de Temp^cher de mourir. Et, quand il s'agit
de Tenfant, le devoir est encore plus sacr^. On peut discuter avec Thomme
fait, on peut lui demander s'il n'est pas jesponsable, dans une certaine
mesure, de T^tat de mis^re et de p6ril dans lequel il est tomb^. On ne de-
^t pas discuter; car cette loi me parait absolue : il ne faut pas qu'un
homme puisse mourir m^me s'il est coupable, m6me si c'est par sa faute
qo'il est arrive k cet ^tat de mis^re. Mais quand il s'agit de I'enfant, peut-
>i ^tre responsable de quelqne chose? A-t-il fait le mal? Est-il responsable
<ie son 6tat de d6 nuement et de faiblesse ? Et ne le sommes-nous pas
covers lai si, alors qu*il n'est pas responsable, nous le laissons p^rir sans
I'aider, sans lui tend re la main pour le sauver?
Victor Hugo a dit de Tenfant : « Double virginity ! Corps ot rien n'est
"wnonde! Ame oh rien n'est impur!... »
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294 REVUE PHILANTIIROPIQUE.
Eh bien! puisque ce petit corps, que cette dme ne connaissent pas le
mal, ie devoir de tous est de sauver cette dme et ce corps, et qui ne le fait
pas, pouvant le faire, manque au premier des devoirs et m6rile d'etre
appel^ un m^chant et un malhonn^te homme, tout aussi bien que s'il avail
fait un de ces actes que nous appelons des actes de m^chancet6 et] de mal-
honn^tet^, comme de prendre la bourse du voisin, ou lui donner ua coup
violent.
Nous lisons, k chaque instant, le r^cit de souffrances et de mis^res
cruelles, de suicides aflreuz; un p^re et une m&re de famille meurent avec
leurs enfants ; il ne s'agit pas d'enfants abandonn^s pouvant 6tre recueillis
par TAssistance publique, mais d'enfants vis-4-vis desquels la loi dit : II y
a une famille r^guli^rement constitute, je n'y peux rien; le p^re n'a qu'i
travailler, la mSre doit Clever ses enfants. Gela est juste, cela est l^gal.
Mais vous lisez tous les jours ce r^cit dans les joumaux : On a ouvert la
porte 4 un cinqui^me ou un sixi^me 6tage, on u'avait pas vu japparattre
les habitants de ce logement depuis quelques jours; on croch^te la porte,
on entre, et sur le lit on trouve le p^re et la m^re et k cdt4 les enfants
morts et le r^chaud 6teint.
Je le disais, il n'y a pas seulement une question de plus ou de moins de
bienfaisance, de bienveiliance : c*est un devoir strict de ne pas laisser s'ac-
complir des faits semblables. G'est ce qu'on se dit en lisant de pareils
r^cits, mais on lit et ou passe.
Eh bien ! il ne faut pas qu'on passe, il faut qu'on s'arr^te, qu'on emp^che
ces maux de se renouveler.
II faut sauver Tenfant sans d^truire le lien de famille, sans I'enlever a
ses parents, sans contraindre ceux-ci k I'abandon. Tel est le but de la
Maison maternelle. L^, on dit aux parents : Nous recevons votre enfant,
mais nous vous supplions de venir le reprendre, et de venir le plus tdt
possible, car vous feriez de la place pour uu autre, et nous vous prions
aussi de venir le visiter le plus souvent possible; de vous assurer qu'il est
en bonnes mains, de rester les parents de cet enfant dont nous nous faisons
les tuteurs. »
« Nous faisons en mdme temps, ajoute M. L^on Bourgeois, T^ducation des
parents. Croyez-vous qu'il ne leur est pas salutaire de penser que I'enfant
n*est pas s^par^d'eux, qu'il est tout pr6t k retourner avec eux? Dans cette
lutte qu'iis vont engager pour I'existence, I'idee de cet enfant qui les attend
ne va-t-elle pas 6lre incessamment k leur esprit? II faut faire sentir aux
parents que i'enfant les attend, comme, quand nous ^tions internes dans
nos grandes pensions, nous attendions le jour de la visite des parents,
pour voir a la porte du parloir le visage aim6 de la maman ch^rie. 11 faut
que Tenfant se dise : « Papa ou maman vont revenir domain apr^s avoir
trouv^ la situation dont ils parlaient ». Et il confondra dans sa recon-
naissance la maman provisoire, M"* Koppe, et la maman definitive, qu'il
aura retrouv^e, et de son coeur jaillira un grand mouvement de reconnais-
sance et d'amour pour une soci^t^ dans laquelle il y a des gens qui agissent
ainsi...
Que de fois un ouvrier, une pauvre femme, entratn^s par mille tentations
et les mille occasions qu'ofiTre la society troubl^e de nos nlles, ont M
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I INFORMATIONS. 295
' aiT^t^s an seuil de rabfme par cette pensee : « L enfant est k la maison ! »
I Croyez-le ! Souvent le bouton de la porte d'un cabaret, d^j& dans la main
de Touvrier qui aliait y ddpenser sa paie, a ^t6 ldch6, parce que brusque-
menty dans cette l^te un peu obscure et peut-^tre d^j^ obscurcie par d'autres
arrets dans d'antres cabarets, est apparue cetle vision du b^b6 qui attend
Ik'hsLS k la maison. (Applaudissements.) II ne voyait autour de lui que le
plaisir prochain, facile ei ddprimant, et tout k coup k son esprit et k son
c(£ar est apparue Timage d'un autre plaisir plus pur qui ne devait lui
laisser ni tristesse ni regret, I'image du petit enfant qui aliait lui tendre les
bras.
L'enfant, c'est pour nous un 6tre sacr6 ; ce n'est pas seulement le petit
dtre charmant, d^licieux, aimable autour duquel il est si doux de r^unir la
famille pour rire de ses saillies, de ses joies, de [ses curiosit^s, pour
s'int^resser k ses mouvements, au d^veloppement rapide de son esprit;
c*est quelque cbose de plus encore : c'est la race, c*est la patrie, c'est Tes-
p^ce humaine.
C'est en effet dans Tenfance qu'on pent commencer k donner cet dbran-
lement int^rieur de la conscience qui produira plus tard une action bien-
faisante. C'est trop tard si on s'adresse k I'homme fait, si on veut lui per-
suader qu'il a des devoirs : il est pris par ses passions, ses int^rfils, les
habitudes de sa vie. II est tard pour faire un humain. C'est tout petit qu'il
laut le prendre. Ce que nous voulons trouver dans les yeux do& petits eu-
fants, derridre leurs fronts, c'est le commencement de la conscience, car
ce que nous voulons d'eux plus tard, c'est qu'ils soient des hommes capa-
bles d'accomplir le devoir bumain. »
L'Assembl^e des Dames firanfaises &la Sorbonne.
M. Poincar^, vice-preside ut de la Chambre des d^put^s, a preside, le
19 novembre, dans le grand amphitbMtre de la nouvelle Sorbonne, I'As-
sembl^e gdnerale de TAssociation des Dames francaises, Soci^t^ de secours
anx militaires en cas de guerre, aux civils dans les calamit^s publiques.
^me p^iix Fdure avait accepts la pr^sidence d'bonneur de I'Assembl^e.
Les divers rapports sur la situation mat^rielle et morale de I'association
ont 6i€ lus ensuite par M™' Delaruelle, M. Pruvost et le docteur Duchaus-
soy, fondateur et secretaire general. II en r^sulte que la situation de la so-
ciety devient d'annee en ann^e plus prosp^re. Cette ann^e, cinquante-hix
dames se sont pr^sent^es aux examens : quarante-six ont 616 admises et
des prix d'bonneur out ei6 decern6s k neuf d'entre elles. De plus, une
vingtaine d'autres dames ont fait leur stage d'inflrmieres k I'bdpilal de
rAssociation ; une d'elles, M"*' Polack-Meyer, a 6i6 jug6e digne du titre
d'infirmi^re-major. Cet b6pitai a rendu, au cours de i'ann^e r^volue, de
grands services : il a recu, tant dans ses salles que dans ses services de
consultation, plus de 40000 malades, dont 5 500 ont 616 op^r^s et pansys.
Les divers comitds de TAssociation ont distribu^, dans le m^me temps, aux
soidats rapatri^s et aux victimes des d^sastres publics une somme de
75 000 francs.
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296 REVUE. PHILANTHROPIQUE.
Mais, pour ^tendre encore son action bienfaisante, TAssociation a be-
soin de concours nouveaux. Gette ann^e, vingt-deux comit6s noaveaux ont
6i6 fond^s; les plus iipportants sont ceux de Grenoble, Voiron, Talle, Brive,
Aries, Bruxelles, Arcueil-Gachan, Montruuge. II est permis d'esp^rer qu^un
jour prochain viendra oil le nombre des comit^s de femraes francaises de
la Croix-Rouge ^galera celui des comit^s'de femmes allemandes. C'est par
Texpression de cette esp^rance que le docteur Duchaussoy a termini son
int^ressant rapport.
Aprds Tex^cution par les musiciens du regiment de Preobrajensky de
la mazurka de Golka, op^ra de Mokerviesko, et de I'ouverture de Rouslane
et Ltuimilaf op^ra de Glinka, des mddailles d' « honneur au d^vouement »
ont ^te remises a M°^^" la baronne de Hirscb, Altemer, del6gu^e k la pro-
pagande, Fayolle, ducomit6 de Montmorency, Rabel, du comity de Meulan,
Hutrel, du comity de Xice,Villot, dela section de laBiblioth^quemilitaire,
et au docteur Chaplain, d^l^g^ regional d Marseille. En outre, des m^
dailies de reconnaissance ont 616 accord6es aux membres de TAssoclation
qui se sont distingu6s par d'heureuses initiatives : citons parmi ces der-
nidres celle de notre confrere L6on Prieur, chroniqueur judiciaire au
Soleil.
M. Poincar6 a pris ensuite la parole.
II f6iicite I'Association des Dames francaises d'etre « neutralis6e entre
les partis, jcomme elle le serail en cas de guerre entre les bellig6rants, de
savoir Eloigner d'elle tout ce qui divise etretenir tout ce qui unit ».
Apr6s ce discours trds applaudi, au nom du ministre de rinstruction
publique ont 6t6 proclani6es les nominations que voici :
Officiers de Tlnstruction publique : M*"® Pilliet, docteur en m6decine,
et le docteur Renouard, tous deux professeurs h I'Association des Dames
francaises.
Officiers d'acad6mie : le docteur Dubosc, professeur, et M"® Vasseur,
r6p6titrice de TAssociation.
La reunion s'est termin6e par Tex^cution de la marche de la Vie pour
le Isar, ex6cut6e par les musiciens russes.
L'Orphelinat de la Seine.
> ous sommes heureux de reproduire cet Eloquent appel du Con-
seil d'administration de Torphelinat de la Seine :
VOrphelinat de Ui Seine a 6t(5 fond6 sous le coup desd6sastres de 1870-71
et pour contribuer liles r6parer. QEuvre k la fois philanthropique et so-
ciale, il est venu au secours de Tinfortune la plus touchante, celle de Ten-
fant, et a travaill6 h Tunion entre Fran^ais.
A cette id6e doublement humanitaire se sont aussitdt associ6sles esprits
les plus lib6raux, les bommes les plus en vue : Henri Martin, Schoelcher,
Quinet, Littr6, Louis Blanc, Victor et Jules Guichard, Sadi Gamot, Victor
Hugo, Faidherbe, Denfert-Rochereau, Jules Ferry, £tex, Boucicaut, Salicis,
Henri Monod, Buisson, Th6ophile Roussel, et combien d'autres! l/un d*eux,
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INFORMATIONS. 297
Henri Martin, J'historien natioDal, president d'honneur de rOrphelinat, en
a ainsi d^fini i*id^e :
a Notre principe estTappel &tous et la reception de tous : orphelins par
Tabandon comme par la mort de leurs parents ; orphelins de la guerre
civile comme de la guerre etrang^re ; enfants dont les p^res ont eu la mort
glorieuse des champs de bateuUe de la defense nationale ; enfants dont les
p^res ont disparu fatalement -dans le gouffre de nos discordes, aidez-nous
k les r^unir dans ces asiles de la fraternity I G'est une oeuvre de reparation
et d'union que nous poursnivons. Heureux qui, h un degr6 quelconque,
aura contribu6 k refaire la palrie I »
Et, depuis plus de vingt-cinq ans, ce but a 6t6 poursuivi sans d^fail-
lance, d'abord an profit des orphelins de la guerre et des deux sieges, puis
de cenx que recommandait ieur abandon ou leur d^tresse. Au d6but, des
garderies leur ont ^t^ ouvertes k Paris, puis une grande maison k la
Varenne-Saint-Hilaire. L'effectif moyen a ^t^ de cent enfants k I'ficole et
60 apprentis. 11 en a ^l^ ainsi adopts 600. .
Tous ont suivi les 6coles publiques jusqu'^ leur treizi^me ann^e, m^lds
aux autres de leur dge ; tous, sans exception, ont fait un apprentissage
complet, chose de plus en plus rare pour les enfants rest^s dans leurs
families, et ils ne nous ont qultt^s qu'eo possession des moyens de se suf-
lire. Telles 6taient les prescriptions de nos Statuts : « Recueillir sans dis-
tinction de culte, le plus grand nombre possible d'eiifants du d^partement
de la Seine, orphelins ou abandonn^s, et leur assurer I'^ducation, Tinstruc-
tioD et Tapprentissage d'une profession. »
Le succ^s moral a ^t^ des plus satisfaisants. A peine si quelques-uns,
Tictimes d'un triste atavisme ou de mauvais exemples retrouv^s k la sortie
de Torphelinat, ont d6serl6 la voie du travail honn^te que nous leur avons
indiqu^e. La presque totality a r^ussi k un degr^ qui nous a surpris nous-
m^mes.
Mais la mission de TOrphelinat de la Seine n'est point flnie sur ce
succ^s.
Si les blessures de la guerre sont en partie cicatris6es, les plaies sociales
restent profondes et s'enveniment peut-6tre. Loin d'avoir k nous reposer,
la t4che accomplie, nous avons a redoubler d'elforts ; ainsi Texige un sen-
timent du devoir de la solidarity toujours plus intense dans la Society con-
temporaine.
Ce sentiment a suscit6 k c6te de nous de grand es et nobles oeuvres de
protection de Tenfance : oeuvres de sauvetage, de patronage officiel ou
libre pour les enfants en danger moral, de gu^rison dans les stations mari-
times. Ces oeuvres se partagent justement les sympathies de la bienfai-
sance ; mais notre rdle demeure essentiel. Pour une multitude de mferes,
de p^res isol^s, de vieux grands-parents sans ressources, nous sommes
Teducation, sans laqueile leurs enfants vont se perdre.
M. Henri Monod, directeur de Tassistance et de Thygi^ne publiques,
nous disait k Tinauguration du nouveau batimenl de TOrphelinat: « Vous
venez au secours de la situation la plus douloureuse que je connaisse dans
notre soci^t^ fran^se, celle de m^res veuves, divorcees ou abandonn^es,
pauvres et charg^es de petits enfants ; il n'est pas de situation plus digne
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298 REVUE PHILANTHROPIQUE.
de compassion, plus d^poanrue. Notre legislation n'a rien organist pour
Tenir an secoars de ces m^res-l^, Qu'une m^re qui vent Clever honorable-
ment ses enfants ne le puisse pas ; qu'elle soit accul^e an d^shonneur, k
Tabandon de ses enfants ou k la mort, cela est abominable. » Voil^ les mi-
s^res aaxquelles nous Tenons en aide, mais c*est surtout auz enfants qui
en sont les victimes. Mai sur?eilMs, laiss6s k eux-mdmes pendant les
lougues heures de travaU du pdre ou de la m^re, ils se fourvoient in^vita-
blement dans les mauvaises fr^quentations de la rue, et de maiheureux
qu'ils etaient, devienneut des mis^rables. Nous sommes pour nos pupilles
an complement indispensable de la famille : sans nous ils seraieot des
moralement abaudonn^s.
Nous Savons par une p^nible experience, par le uombre considerable
d'enfants que I'insufQsance de nos ressources laisse frapper iuutilement a
notre porte, qu'il faut etendre Taction denotre oeuvre, la doubler, la decu-
pler peut-etre, dans un departement aussi prodigieusement peupie que le
n6tre.
Aussi, M. Theopbile Roussel, apr^s avoir, comme il le disait, « apporte
le temoignage de son respect k Tceuvre humaine, morale el fran^aise » que
nous avons fondee, et salue « cet esprit large et liberal qui avait enchatne
sa reconnaissance », ajontait-il ces paroles dont nous avons a cceur )a pro-
chaine realisation :
« II faudra de nouveaux moyens et de nouveaux efforts pour poursuivre
et completer roeuvre de I'Orphelinat de la Seine ; 11 faut de nouvelles res-
sources, il faut de nouveaux adherents. Mais Tentreprlse est si belle et son
succes est si necessaire, qu'elle s'accomplira. Un jour, dont je ne doute
pas, Toeuvre de la Societe se resumera en ce resultat supreme : un groupe
nombreux, compact, d*honnetes gens sortis de son sein, qui seront ses
fermes soutiens et qui inscriront sur leur drapeau la plus belle devise
qu'on puisse trouver pour notre civilisation et pour notre patrie : faire des
hommes. »
C'est k coUaborer k celte oeuvre que nous convions tons ceux qui ont
au coeur la pitie pour Tenfance malheureuse et Tamour de la France.
LR CONSEIL D ^ADMINISTRATION
President : M. M.-J. Gaufr^s, membre du Gonseil superieur et du Conseil de
surveillance de FAssistance publique.
VicB-pR^siDBifTs : MM. Fehiinand Bellmann ; Henri Aron, maire-adjoint du
II* arrondissement ; Maurice Muret, conseiller g^ndral de Seine-et-Oise ; P. Pra-
dines, conseiller k la Cour de cassation.
Secretaires des stances: MM. F. Cabanis, rentier ; E. Patin, rentier ;E. Lava,
commis principal au ministdre des Finances ; E. Delaville, inspecteur au Bon-
Marc he.
Tri^sorier : M. L6on Decaye, associ6 d'agent de change.
TrEsorier-adjoixt : M. a. Mayrargues, ancien professeur.
Membhes : MM. Boivin-Champeaux, av^ocat & la Cour de cassation ; R. Bompard,
conseiller municipal ; F. Buisson, professeiu* k la Sorbonne ; Ganat, instituteur ;
Ch. Delamare, ancien conseiller municipal de Vlncennes ; le general F6vrier, an-
cien grand-chancelier de la Legion d'honneur ; F. Gabriel, rentier; Geny, ancien
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INFORMATIONS. 299
adjoint au maire da XVII* arrondissement ; Robert Guichard ; E. Horn ; Houzeau,
n^ociant ; M. Lailler, avocat h la Conr d'appel de Paris ; le D' Albert Mathieu*
m6decin des hdpitaux de Paris ; H. Math6, ancien d6put6 ; Melouzay, professeur
dc lUniversit^ ; Ernest Melouzay, ancien n^gociant ; A. MoUeni, fabricant d'op-
tique ; Charles Quentin, ancien directeur de 1' Assistance publique ; A. Vanden-
dorpel, propri^taire, ancien adjoint au maire du III* arrondissement.
Secretaire gEnEral : M. E. Blondel, 28, rue Saint-Lazare, i Paris.
Gaisse des Olfraades nationales.
Les operations en 1896 de la caisse des ofTrandes nationales en favenr
des armies de terre et de mer ont ^t^, succinctement r^sum^es, les sui-
vantes :
Au 31 d^cembre 1896, le nombre des rentiers 4tait del688, n^cessitant
one d^pense de 145 970 francs. Les titulaires de complements de pensions
6taient au nombre de 7216 pour une somme de 1 216 851 francs.
Le nombre de secours permanents ^tait de 1101 et la d^pense de
110440 francs.
Dans le courant de I'ann^e 1896, le comity sup6rieur a accords, par di-
Terses decisions, 3 374 secours eyentuels;la d^pense faite sous cette ru-
brique s'est eiev6e a 254 380 francs. Les secours ^ventuels ne peuvent se
cumuler avec une rente viag^re, un complement de pension ou un
secours permanent.
Pour Tann^e 1897, les provisions budgOtaires accusent un exc6dent de
rentes de 194252 francs; cet excOdent est destine k donner des secours
evenlueb k d*anciens militairesou marlns blesses, ainsi qu'aux veuves, aux
ascendants ou aux enfants mineurs, d'hommes morts de blessures ou
d'inflrmites contraclees au service.
Gaisse nationale des Retraites pour la VieiUesse.
Les versements recus en 1896 sont au nombre de 1 811 685 et s'eifevent
k 37913363 francs. Les chiffres correspondants de 1895 etaientde 1 338859
versements et de 32638 155 francs. 11 y a done augmentation de 472826 sur
le nombre etde 5275 208 francs sur le montant des versements. La moyenne
par versement a ete de 21 francs ; elie avait ete de 24 francs en 1895.
En comparaison avec Texercice precedent, les versements coUectifs ont
augments de 469621 en nombre et de 5 068114 francs dans leur montant.
Quant aux versements individuels, iis prOsentent egalement un excOdent
de 3206 sur les nombres et de 207 114 francs sur les sommes versOes.
L'augmentation du nombre et du montant des versements coilectifs re-
sulte principalement du fait que Tapplication des dispositions de la loi du
29 join 1894, sur les retraites des mineurs, n'a eu lieu d*une mani^re com-
plete qu'en 1896.
Le nombre des rentes viag^res en cours au 31 dOcembre 1896 etait de
208241 pour une somme totale de 33396864 francs. Ges chiffres accusent
une augmentation de 7 501 sur le nombre des titres de rentes et de
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300 REVUE PHILANTHROPIQUE.
245 686 francs sur le montant des rentes. La moyenne par litre est de
460 francs et est inf^rieure de 5 francs k celle de 1895.
La caisse a pay 6 pendant i'ann^e 31 839 452 francs d'arr6rages de rentes
et a rembours^ 13142131 francs de capitaux r^serv^s anx h6ri tiers de
7 485 titulaires d^c^d^s. Les remboursements ont diminu^, en comparai-
son avec 1895, de 2872012 francs en sommes et de 919 en nombre. La
moyenne des remboursements est de 1 756 francs au lieu de 1 905 francs
en 1895.
Le taux de 3,50 p. 100 & servir aux d6posants a 6t6 maintenu en 1897
par dScret en date da 27 d6cembre 1896. Jusqu'^ present le taux moyen
des placements de la caisse a pu rester tr^s voisin de ce chiffre et s'en rap>
proche plus que de celui de 3,25 p. 100. Or le taux des tarifs de la caisse
ne pent varier que par fractions de 0,25 p. 100, ce qui, entre autres consi-
derations, justifie le maintien du taux actuel k 3,50 p. 100.
Les frais d'administrationrelatifs a Tann^e 1896 s'^l^vent^ 942 618 francs
et ne d^passenl que de 7 231 francs les frais occasionn^s par Texercice
precedent, bien que le nombre des operations se soit accru dans une pro-
portion plus considerable. Le coiit moyen de chaque operation effectu^e
par la caisse, qui etait de 0,46 en 1895, s'est abaiss^ en 1896 k 0,37.
Un Restaurant cooperatif d'Ouvriers.
Une society vient de se former pour foumir des aliments de bonne qua-
lite et k bon marche aux nombreux ouvriers des chantiers de TExposition
de 1 900. Les principaux caract^res de cette soci^td resident dans la parti-
cipation du personnel aux benefices, la creation d'une caisse de secours,
le partage, apr^s les prei^vements stipul6s aux statuts, entre tons les ou-
vriers consommateurs, de tons les benefices realises au prorata des repas
ou consommations qu'ils auront pris au restaurant et enfin dans la Oxa-
tion k un extreme minimum de la part falte au capital de fondation,
La Societe est fondle sous le titre : « Society anonyme du restaurant coo-
peratif des chantiers des Champs-Elysees ». Son siege social est fixe provi-
soirement k la Soci^U de participation aux b^rUfices, 20, rue Berg^re, Paris.
EUe est administree par un conseil compose de sept membres an
moins, de douze au plus, pris parmi les associes.
lis sont nommes pour trois ans. Le premier conseil est compose de:
MM. BuissoN, directeur de I'Association d'ouvriers peintres « Le Tra-
vail » ; Felix FiTSCH, president de la Soci6te cooperative de consommation
du xviii« arrondissement; E.-O. Lamf, president de T Association coopera-
tive de consommation des sciences, des lettres et des arts, membre du con-
seil d' administration de la Societe pour I'etude de la participation aux bene-
fices; Maghubon, directeur de la Banque cooperative des associations de
production; Provost, membre de TAssociation ouvriere d'alimentation;
L. SoRiA, secretaire general du comite central de I'Union cooperative des
societes fran^aises de consommation; Steinmetz, administrateur de la so-
ciete cooperative de consommation « La Solidarite » ; Thuiluer, conseiller
municipal de Paris, membre de. la Societe pour la participation aux bene-
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INFORMATIONS. 301
fices; TuLBUy membre du conseil d* administration de la Soci^t^ pour
r^tude de la participation aux b^n^flces.
Le conseil nomme parmi ses membres un bureaa compost d'un presi-
dent, d'un ou de deux vice-presidents, d'un secretaire et d*un tresorier.
lis n'ont aucune part dans les benefices de TAssociation et leurs fonctions
sent gratuites. Toutefois, il pent leur etre attribu^, suivant decisions de
Tassembiee generate, des jetons de presence, destines k les defrayer des
depenses que leur occasionne Texercice de leur mandat.
Aprfes le payement des frais generaux et depenses de toute nature, y
compris ramortissement des depenses de premier etablissement, il est
preieve avant tout partage des benefices :
i^ 5 p. 100 pour la formation d'une reserve legale;
2<» 10 p. 100 pour la constitution d'un fonds de reserve special;
3« 3 p. 100 affectes au capital verse.
Les benefices nets seront ensuite distribues de la mani^re suivante :
A la caisse de seconrs: 10 p. 100;
Au personnel, suivant le mode de repartition adopte par le conseil :
30 p. 100;
Aux consommateurs : 60 p. 100 au prorata des consomraations et repas
pris aux restaurants.
La repartition des benefices se fait :
1* Aux consommateurs ^ur production de tickets deiivres par la Societe
et representant sur chacun d'eux le total de chaque depense journalifere.
Cette repartition se fera suivant la decision du conseil, et, au plus tard,
tous les trois mois ; il en sera donne avis par des affiches apposees dans
les etablisseroents de la Societe et par la voie des journaux, dont un d'an-
nonces leg ales.
2« Au personnel, tous les six mois apr^s Tinventaire et retablissement
da bilan et des comptes.
Le Refage de Nenilly.
La Maison Israelite de Refuge pour TEnfance, administree par un
Gomite de Dames, sous la presidence de M'^^ Goralie Gahen, chevalier de
la Legion d'honneur, a ete fondee en juillet 1866. Etablie A Romainville
(Seine), dans des conditions tout k fait modestes, elle n'etait destinee, k
Torigine, qu'A recueillir et k guider dans la voie du bien les quelques
jeunes filjes arretees dans le departement de la Seine pour vagabondage
et autres deiits, ou pour fautes de conduite plus ou moins graves, en vertu
de I'article 66 duGode penal. Ces enfants jusque-1^ avaient 6t6 detenues
k la prison de Saint-Lazare.
Deux cEuvres confessionnelles, le patronage de la rue de Vaugirard, le
disciplinaire de la rue de Rennes, avaient donne Texemple.
Le nombre des enfants soumis k la correction etaut restreint, la Mai-
son fut ouverte k des orphelines, k des enfants abandonnees, k celles que
leur naissance irreguliere eioignait des autres institutions hospitaliferes,
aux jeunes filles qu'il etait urgent de soustraire k de dangereuses in-
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302 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Iluenced et k de pernicieux exemples, enfln k celles dont le caract^re dif-
ficile ou Tintelligence pea d^velopp^e demandaient une surveillance
attentive que leurs parents, obliges soavent de travailler au dehors, ne
pouvaient exercer sur elles.
Ainsi, le but primitif de TCEuvre, atteint tout d'abord^ se trouvait d6-
pass6 d^ik et, pen k peu, ]e caractdre de la Maison subissait une heureuse
transformation. Gr^^e, dans le principe, en vue d*une action ripressive, la
MaisoQ de Refuge ^largissait son cercie moralisateur et prenait le carac-
t^re essentiellement prdventif qu'elle rev6t aujourd'hoi.
Successivement, le refuge fut install^ k Romainville, k Neuilly (boule-
vard Eugene), et enfin, grdce k de g^n^reux donateurs et au puissant
concours de M. Zadoc Kahn, dansde nouveaux bdtiments 6difi^s k Neuilly
et inaugur^s le 4 juin 1883.
Les pensionnaires sont au nombre de 100 a HO. Trois ateliers : cou-
ture, broderies d'art, coupe de robes, sont ^tablis dans la maison. Les ate-
liers prennent des coramandes et chaque enfant re9oit un quart des b6n^
fices r^alis^s sur le produit du travail. Ces sommes, plac^es en livrets de
caisse d'^pargne, lui sont remises k sa sortie.
Les 6l^ves sont plac6es par les soins du comity de Tceuvre et mises
sous la surveillance spdciale d'une des dames, qui doit rendre compte du
travail et de la conduite de sa prot^g^e.
De nombreux livrets de Caisse d'^pargne, das k la g^n^rosit^ des
Dames du Gonseil d'administration et s'^levant k pr^s de i 400 francs par
an, sont ^galement distribu6s k litre de recompenses scolaires, profession-
nelles et personnelles, lors d'une distribution de prix annuelle, institute
solennellement depuis Tann^e 1887.
Outre les ouvri^res formSes par la Maison, quelques-unes des jeunes
fiUes, t^moignant d'aptitudes sp^ciales, sont sorties, les unes munies de
dipl6mes d'institutrice et de brevets spdciaux (gymnastique, etc.), les
autres comme employees de commerce. Toutes sont k m^me de se suffire
bonorablement par leur travail.
Les pensionnaires de la Maison prennent part au service de r£tablis-
sement et de la cuisine ; elles sont ainsi mises au courant des soins divers
que comporte Tentretien d'un manage.
Les enfants en correction sont absolument s^par^es des autres. Un pa-
vilion special ieur est r6serv6; elles Thabitent jusqu'i ce que leur con-
duite leur ait m6rit6 la faveur de la vie en commun, comme recompense
de leurs efforts vers le bien.
Le rapport de Tann^e 1896, pr6sent6 k TAssembl^e g^n^rale du
23 mai 1897, marque une situation financi^re des plus briUantes.
Les Iib6ralit6s faites en faveur de Toeuvre out d^pass^ de beaucoup les
provisions. Les recettes ont atteint 141 221 fr. 30, tandis que les d6-
penses n'ont et6 que de 60658fr. 80. Un solde de 70000 francs a6te vers^
an fonds de reserve.
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ECHOS
La Commission d'Assistanoe pnbliqne da Gonseil municipal de
Paris. — Notre coilaborateur M. Louis Lucipia a ^t^ 61u president de la
commission d*assislauce publique du Gonseil municipal de Paris, en rem-
placement de M. Paul Strauss, d^missionnaire.
La Revue Philanthropiqtie est heureuse de f^liciter M. Louis Lucipia de
eette designation flatteuse.
Secoors aux Expuls6s. — Le pr^fet de la Seine vient, en ex6cu1ion
d*Qne deliberation du Gonseil municipal qu'il a approuvee, de prendre un
arrets par iequel il est allou^, k litre de subvention, pour bons de loge-
ment a distribuer par les mairies de Paris anx victimes d'expulsion, une
somrae de 15.000 francs qui sera r^partie entre les vingt mairies au pro-
rata de la population indigente de chaque arrondissement.
L^Asile Moreau & Jamac. — L'inauguration de Tasile Moreau ^ Jarnac
(Cbarente), s'est faite avec edat. Le nouvel etablissement contient 16 lits
et pent recevoir 13 vieillards indigents et 3 pensionnaires payants.
M. Laporte, s^nateur, maire de Jarnac, a preside cette f6te, k laquelle
assistaient le president du Gonseil de prefecture, M. Brisson, maire de
Cognac, et de nombreux assistants.
£cole municipale d^Inflrmi^res du Havre. — Le jeudi 28 octobre
a en lieu Tinauguration de TEcole d'infirmieres k I'Hdtel de Ville, devant
one nombreuse et brillante assistance, venue pour temoigner sa sympa-
thie k roeuvre nouvelle. M. Marais, maire du Havre, pr^sidait ayant k ses
cdtes le sous-prefet, M. Gathala, MM. les vice-presidents de la Gommission
administrative des hospices et du Bureau de bienfaisance ; daos la salle,
plusieurs conseillers municipaux, les professeurs de TEcole, des medecins,
les ei^ves, et un nombreux public.
Apres un discours de M. Marais et les remerciements de M. le D» Lau-
nier, au nom des professeurs, M. le D' Sorel a fait la premiere lecon du
cours de chirurgie.
Le professeur Tamier. — Le professeur S. Tarnier, le ceiebre pro-
fesseur d*accoachements k la Faculte de Medecine de Paris, vient de mourir ;
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304 REVUE PHILANTHROPIQUE.
ses obs^ques ofncielles ont eu lieu k Paris k la Madeleine. Apr^s la cM-
monie, le corps a 6t6 transports k Dijon ; M. le professeur Pinard et M. le
D' Pierre Budin onl prononc6 d'Sloquenls discours, ie premier au nom de
la Faculty, le second au nom de TAcadSmle de mSdecine. D'autres alloca-
tions ont StS prononcSes par MM. Hergott, Demelin et Louis Dubrisay.
M. le D' Pierre Budin a r6sum6 ainsi les admirables titres de son
maitre k la reconnaissance publique :
« Tarnier est mort; avec lui disparait une des plus grandes figures roS-
dicales de notre 6poque.
G'est au nom de TAcadSmie de mSdecine, k laquelle il appartenait
depuis Tingt-cinq ans et dont il avait 6tS le President en 1891 , que nous lui
apportons notre tribut d'admiration.
Avant qu'il f^t admis dans notre Gompagnie, son nom y avait 6tS bien
souYent prononc6 pendant la memorable discussion sur la fi^vre puerp^-
rale. Par ses observations, en efTet, par ses statistiques, il avait 6t6 conduit
k admettre I'existence d'un « poison », d'un « virus capable de se propager »
d'un « miasme contagieux ». Anssi, apr^s avoir montrS la nScessit^ d'iso-
ler les malades, fut-il un des premiers k accepter et k enseigner les bien-
faits de Tantisepsie.
II fit plus, c'est 4 lui que nous devons I'usage si jastement rSpandu du
sublinU. II a done puissamment contribu^ k diminuer la mortality des
femmes en couches.
Ceux qui ont vu Tarnier n'oublieront jamais sa physionomie si carac-
tSristique : il Stait calme, il Stait pensif, il opSrait avec une grande babilet^
et un grand sang-froid, puis il r6fl6chissait longuement aax difficultSs
qu'il avait rencontr6es : il cherchait alors avec tSnacitS les moyens d*en
triompher dans I'avenir. C'est ainsi qu'il fat condait a imaginer un cer-
tain nombre d'instruments qu'il a success! vement prSsentSs k I'Acad^mie
de m^decine.
Tarnier, par ses d6couvertes, fut un bienfaiteur de Thumanltd ; en
tSmoignage de reconnaissance, le Gonseil de surveillance de rAssist^nce
publique, sur la proposition de M. ledirecteur general, a dScidS que I'hdpi-
tal ou il avait fait son enseignement dans ces derni&res annSes, s'appel-
lerait dSsormais la Glinique Tarnier.
11 avait done toutes les qualitSs qui sont le propre de I'homme de
science accompli : il a 6t6 un professeur d'une clartS lumineuse etun ^cri-
vain d'une remarquable precision ; il fut ie veritable maitre, dont la vie
doit sei-vir d'exemple ».
Petition des Sages-Femmes. — Ls^ « ligue de protection des accou-
cheuses de France » vient d'adresser au Parlement une petition pour
demander: !• I'abrogation de la loi de I'an XI, qui interdit aux sages-
femmes i'emploi du forceps; 2° raugmentattoii de durSe des etudes pro-
fessionnelles, qui seraient portSes de deux k trois ans, dans le but d* (Clever
le niveau scientifique de la corporation.
Ecole d'Infirmiers et dUnflrmi^res des asiles d'a]i6n6s da la
Seine. ~ La distribution des recompenses aux Slaves de I'Ecole d'infir-
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&GHOS. 305
miers et d'iaflrmidres des asiies d'ali^n^sa ea lieu ie samedi 13 novembre
k deax henres k TAsile clinique, sous la pr^sidence de M. Emile Dubois,
president da Conseil g^n6ral de la Seine, assists de MM. Paul Bronsse,
Qiaosse, Andr^ Lef^vre, Levraud, Navarre, Henri Rousselie, conseillers
g^n6ranx, Le Roux, directeur des Affaires • d6partementales, Prestat,
membre de la Commission de surveillance des asiies d'ali^nds, Louvard et
Pelletier, chefs de bureau, et de plusieurs membres da personnel medical
des asiies.
Apr^s le compte rendu des r^suUats de Tann^e scolaire par M. le Doc-
teur Taule, directeur de Tasile Sainte-Anne ou asile clinlque, deux allocu-
tions applaudies ont ^t^ prononc^es par M. Emile Dubois, President du
Conseil g^n^ral, et par M. le docteur Boumeville.
Le Legs Marjolin. — Un d^cret vient d'autoriser la Faculty de m6de-
cine de Paris k accepter le legs fait k son proOt par M. Ren6 Nicolas Mar-
jolio, et consistant dans la nue-propri^td d'une maison sise k Paris,
5, place des Vosges, dont le revenu sera employ6, apr^s le d^c^s de Tusu-
fruiti^re, au remboursement des frais d'inscription d*6tudiants en m^de-
cine fran^ais, internes ou externes des h6pitaux de Paris, s'6tant fait
remarqner par leur z^Ie, leur exactitude et ayant recueilli avec soin des
obsenralions dans leurs services.
Le Honoment des f^res Lionnet. — L'Assistance publique de Paris
garde nn souvenir reconnaissant k la m^moire des fr^res Lionnet, qui out
pendant si longtemps organist des concerts dans les hospices de Bic^tre
et de la Salp^tri^re. Aussi le conseil de surveillance a-t-il vot^ une sub-
vention de deux cents francs k T^rection d'un monument k ces artistes
philanthropes.
Un Bienfaiteur. — M. Adam Ledoux, qui fut pendant longtemps le
doyen du conseil municipal de Gourbevoie et qui vient de mourir k Vkge
de qoatre-vingt-cinq ans, a, par son testament, l^go4 une somme de
iOOOOO francs k la commune. Gette somme est destin^e k cr^er des pensions
de retraite pour de vieux ouvners faisant partie de la soci6t6 de secours
mutuels de Gourbevoie.
M. Ledoux laisse en outre 50 000 francs k Thospice municipal de vieillards
du Cayla.
La Groix-Roage ft*aii9ai8e. — Le conseil central de la Soci^t^ de se-
eonrs anx blesses militaires (Groix-Rouge fran9ai8e) vient de nommer le
g^n^ral Davout, due d'Auerstaedt, grand chancelier de la Legion d'honneur,
president de la soci6t^, en remplacement du due d'Aumale.
En execution du vote ^mis par le conseil, une double d-marche a M
faite par le bureau aupr^s du president de la R^publique, qui a donn^ sa
bante approbation k ce vote, et aupr^s du g6n6ral Davout, qui a accepts
&Tec empressement la pr^sidence de la soci^t^.
L*nnion des Socidt6s de Patronage. -^ Le conseil central de
lllnion des soci^t^s de patronage de France a repris ses travaux sous la
ISVCK FHQ.A1ITHR0PIQUS. — U. 20
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306 REVUE PHILANTHROPIQUE.
pr^sidence de M. le conseiller k la Gour de cassation Charles Petit, presi-
dent d'honnenr de TUnion, assists de M. Louiche-Desfontaines, secretaire
g^n^ral.
La stance da 42 novembre a 616 presque enti^rement consacrSe k
retude du programme du 4* congr^s national de patronage, qui se tiendra
en 1898 k Ulle, pendant les vacances de la Pentec6te.
Gette society poursuit ce double but: la preservation et le sauvetage de
Tenfance abandonn^e ou coupable et )e reclassement, dans un haut int^ret
social, des lib^r^s repentants. A ses efTorts^le jury de la section d'^cono-
mie sociale k I'Exposition de Bruxelles vient de rendre hommage en d^cer-
nant k TUnion un de ses dipl6mes d'honneur.
La Sooi6td de Secours aux militaires coloniaux. — L'assembMe
g^n^rale annuelle de la Society de secours aux militaires coloniaux a eu
lieu le 21 novembre.
G'est M. Etienne, ancien sous-secretaire d'etat des colonies, president
du groupe colonial de la Chambre et raembre du comite de patronage
de la Societe, qui pr6sidait. 11 etait assists du president, des membres du
comite de patronage, des membres du conseil d'administration et du re-
presentant du ministre de la Marine.
Le compte rendu financier a €i6 presents par M. Emile P^an, secr^-
taire-tresorier. L'oraleur a dit combien )a society a prosper^ depuis sa
fondation. Mais les besoins ont egalement augments, le dortoir jefectoire
de la place de la Ghapelle est devenu insufflsant en presence du grand
nombre de soldats liber^s qui s'y pr^sentent.
Ensuite M. Lemire, president honoraire, a dit quelques mots sur la
maison de convalescence des militaires coloniaux.
Apr^s la lecture d*un rapport de M. A. de Pouvourville sur la marche
du comite de Nancy et un discours de M. Etienne, un concert a eu lieu.
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REVUES ET PUBLICATIONS FRANgAISES
)
M. Andr^ Honnorat poursait, dans le Rappel, sa campagne en faveur
des d6pdls pharmaceutiques et de Tinstruction medicate.
« De nombrenses lettres nous sont parvenues au sujet de Tarticle que
nous aTOQs r^cemment public sur la question des pharmacies rurales.
« Uune d'entre elles, qui ^mane deM. ledocteur Fr6bault,nousfaitcon-
ndtre que le projet que nous avons expose a d^'}k recu un commencement
d'ex^cution par la creation de ['Association des Ambulancieru de France,
« II DOQS manque seulement, ajoute-t-elle, le concours de la presse
pour mener k bien ToBUvre que nous avons entreprise.
« C'est une invite toute gracieuse &,radresse de ce journal et du signa-
taire de ces llgnes, et c'est une invite qui pent d'autaut inoins nous laisser
indiff^rents que la tentative de M. le docteur Fr6bault a droit k tons les
^loges et k tons les encouragements,
« Notre honorable correspondant nous permettra cependant de lui faire
'ine toote petite observation : c'est que, pour r6pondre compl^tement k
I'idie qae nous avons d6veiopp6e Tautre jour, V Association des Ambulanciers
de France devrait pr^ciser davantage le but qu'elle se propose.
u D'apr^s Tarticle premier de ses statuts, elle est constitute en vue « de
r^pandre dans le public des vilies et des campagnes les notions ^l^mentaires
et pratiques de medecine et de chirurgie pour permettre de donner aux
malades et blesses les soins indispensables avant Tarriv^e du docteur ».
c C'est 1^ une tr^s noble t4che,mais c'est 1^, k notre avis, une tdche qui
n'est pas tout & fait suffisante.
« Comment r^pandre, en efTet, ces notions 6i6mentaires et pratiques de
mMecine et de chirurgie? En instituant dans toutes les communes des
sections charg^es d'organiser des cours et des conferences, nous dit M. le
docteur Fr^bault.
« Mais comment r6unir dans chaque commune tons les concours n6ces-
saires^Mais comment 6lre assure que le public r^pondra k Tappel des
organisateurs, qu'il suivra les cours et les conferences de Tassocialion ?
« Voilk ce qu'on pent se demander avec inquietude, et voil§. ce qui peut
faire craindre que Toeuvre des Ambulanciers de France ne rende pas tous
les services qu'on est en droit d'en attendre.
« Qu'elle ajoute, au contraire, au premier article de ses statuts un para-
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308 REVUE PHILANTHROPIQUE.
graphe disant qu'elie a ^galement pour but de cr^er des d^p6ts de medi-
caments de premiere n^cessit^ dans chaque commune, et de suite on dis-
tingue beaucoup mieux les r^sultats qu'elle pent atteindre.
« U ne s*agit plus seulement en efTet d'ane lente dififusion des connais-
sances m^dicales. II s'agit en m^me temps d'une immediate amelioration
aux defectueuses conditions dans lesquelles se trouvent places les habi-
tants des campagnes lorsqu'ils sont victimes de quelque accident ou de
quelque indisposition.
« Pourquoi M. le docteur Frebault ne compl^terait-ii pas ainsi son
oeuvre ? Pourquoi n'^largerait-il pas son champ d'action?
« II nous sembie qu'ii n'aarait pas de peine k grouper de cette fa^on de
nombreux conconrs et qull obtieudrait sans grande difBculte des subven-
tions des deparlements et de TEtat pour cr^er chaque ann^e quelques nou-
veaax d^pdts pharmaceatiques dans des localit^s 6loign6es?
« Geci ne Tempdcherait nuUement de r^pandre des notions ei^mentaires
de medecine et de chirurgie dans le public, et ceci donnerait au moins k
V Association des Ambulanciei's de France un caract^re d'institution pratique
qu'elle n'a peut-^tre pas assez nettement pour tout le monde.
« M. le docteur Fr^bault nous fera sans doute observer qu'il rencontrera
pour etablir ces d^pdts les m6mes obstacles qu'il rencontre aujourd'hui
pour organiser des sections d'instruction m^dicale.
« Mais ne pense-t-il pas que dans les communes oil il y a une sage-
femme, par exemple, il trouvera en elle une aide tout indiqu^e et que
dans les communes oil il n'y a ni m^decin, ni pharmacien, ni sage-
femme, il lui sera ton jours facile de confler la gestion de cesd6p6ts soit
k rinstituteur, soit k Tinstitutrice ?
La question, en tout cas, vaut d'etre etudi^e, et puisque M. le D' Fr6-
bault veut bien nous recommander V Association des Ambulanciers de
France, k notre tour, nous prenons la liberty de recommander notre pro-
position k cette interessante et belle association. »
M . le docteur Ed. Toulouse examine, dans la Revue de Psychiatrie, le
cas du tueur de bergers; il fait observer que la loi ne permet pas de priver
indeflniment de sa liberty un individu qui a presents des troubles men-
taux consistant m^me en des impulsions homicides ; il ajoute qu'on ne
pent garder inddfiniment s^questr^ quelqu'un qui poss^de une possibility
de deiire dangereux. Mais il estime que Torganisation actuelle des asiles,oili
un m^decin est charge de 1200 malades, est de nature k faire nailre des
erreurs d'appreciation ; il recherche ensuite comment la society pent se dd-
fendre centre le danger des desequilibres.
« Faut-il les punir? Pour ma part, je ne serais pas tr^s eioign6 de cette
opinion que ces degln^res lucides k impulsions perverses devraient etre
jnges et mdme condamnes comme des individus tonus pour sains d' esprit.
Une ordonnance de non-lieu, me ttant hors de cause, sur une simple exper-
tise m6dicale, uu de ces criminels me paratt une chose tout k fait mau-
vaise, car enfin personne de nous n'est responsable de son organisation
bonne ou mauvaise; alors pourquoi cette inegalite de traitement et pour-
quoi ^carter du tribunal une categoric de priviiegids? C*est au jury, repre-
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REVUES ET PUBLICATIONS FRANgAISES. 309
sentant de la soci^t^, qu'il appartiendrait dans tous les cas de prononcer,
apr^s atis des m^decios, les mesures k prendre.
f< Gette inviolability inscrite dans ie code p6nal en faveur du citoyen
ali^n^ est une chose ai>solument inique et dangerease. Pour ma part, je
suis persuade que la crainte d'une mesare de repression ou de protection
sociale est un frein capable d'agir sur les impulsions de certains d^s^quili-
br6s; en tout cas c'est le seul moyen de suggestion dont on dispose et il se-
rait d^raisonnable de ne point s'en servir.
t( II est, d'ailleurs, un terrain sur lequel tout le monde peut se mettre
d'accord. Qu'on admette ou que Ton rejette la responsabilit6 des ali^n^s
criminels, chacun est d'avis qu'ii faut se preserver de leurs actes. Appelons
la mesure k prendre pimition ou protection, pen importe ; mais il est clair
qu'il en faut prendre une et ce ne peut ^tre qu'une mesure d'isolement.
£tre anormal, ^crivait r^cemment M. Paul Brousse, il n'est pas fait pour
la normale liberty. Actuellement un ali6nd commet un crime. II est ac-
quitt6 parce que irresponsable. S'il est envoys dans un asile, ce n'est que
par ?oie administrative et non pas k la suite d'un jugemenl. Par conse-
quent, le m^decin peut y maintcnir un temps plus ou moins court cet
ali^ne. Or voil& ce qui est monstrueux. Que Ton sauve rali6ne de la prison,
la chose peut se justifier. Mais qu*on ne le condamne pas k un isolement
de dur^e determin^e ulterieurement dans chaque cas par une commission
de mapistrats et de m^decins, voil^ qui est inadmissible.
« 11 faut done modifier la legislation sur ce point et decider que tout
ali^ne criminel sera toujours juge, d'abord ; qu'il sera ensuite, en cas de
decision du jury, isoie d*office dans un asile special, d'oii il ne pourra
sortir qu'apr^s avis motive d'une commission medico-judiciaire. Si une
telle reforme avait ete faite il y a quelqnes annees, Vacher, qui a ete dej^
interne k Fasile pour avoir commis une tentative criminelle, ne serait pas
sorti si facilement de son asile. II aurail ete plus soigneusement examine
et vraisemblablement soumis k une observation plus prolongee en raison
de la cause de sa sequestration. Et c'etait peut-Stre une vingtaine d'ado-
lescents qui auraient ete ainsi sauves Jes grifTes du monstre. »
VEclair appuie la requite des m6decins, admin is trateurs et eieves de
la Salpetriere en faveur de la decoration de M^^*' Bottard, surveillante, dont
TAssistance publique ceiebrait le 29 Janvier 1891 les cinquante annees de
bons et loyaux services.
M^^® Bottard appartient depuis cinquante-six ans aumeme etablissement,
et, aprfes avoir servi sous les ordres de I'illustre professeur Charcot, elle est
aujourd'hui la coUaboratrice du professeur Raymond.
« De sa main, M. Charcot a ecrit la petition adressee au ministre d'alors
pour que la croix de M"« Nicolle passe k M"® Bottard. Tous les eifeves et
anciens ei^ves de Charcot tinrent k honneur de signer : MM. Gilles de la
Tourette, Brunot-GeofFroy, mfime ceux qui etaient k Lyon, MM. les doc-
teurs Picrret et Lepine ou Pitres k Bordeaux.
c Hier encore, nous nous entretenions de cette excellente femme avec
M. Jean Charcot, qui nous rappelait maintes anecdotes deiicieuses, et no-
tamment comment, un jour, les internes projet^rent de lui faire franchir
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
>rtes de la Salp^tri^re. lis se flrent ses cavaliers servants et lui de-
^rent de venir diner avec eux. Elle accepta : c*dtait sa premiere sortie
s depuis six ans. « Oh voalez-vous que j'aille, raes enfants? disail-
>uis-je pas mieux ici que partout ailleurs? » Ge soir-l&, cependant,
i laissa faire, et les grands jeunes hommes, tcndres et respectueux,
,e ils eussent fait pour leur m^re, conduisirent maman Boltard chez
rouse, puis au th^dtre, voir jouer Surcouf, Puis, ils remmen^rent
r. Ah ! dame ! quand on se d^bauche pour la premi^refois k 70 ans il
ider la coupe du plaisir jusqu'au fond !
1 n*y a qu'elle, nous rappelait M. Gilles de la Tourette, qui sClt apaiser
[irroux du patron. Quand Charcot n'6tait pas content, que nous
i eu quelque d^faillance, seule maman Bottard avait le secret de le
ler k sa hienveillance coutumidre. Elle raimait et le devinait si bien!
u'il mourut, elle voulut, k pied, jusqu'au cimeti&re Montmartre, dans
ags de la famille mdme, k c6t6 du fils, suivre le funfebre convoi. »
leure paratt venue dlionorer cette serv.ante des pauvres, depuis pr^s
Xante ans, sur la br^che, sans une parole de regret, qui s'est faite,
saint Vincent de Paul, « leur soeur par la gr&ce. »
le D' Bourneville examine, dans le Progr^s midicaly 1*6 tat des services
)uchements k Paris et leur utilisation par la Faculty de m^decine au
de vue de Tenseignement ; il commente le r^glement de 1891 qui
( les 6tudiants en m^decine k faire un stage d'un mois dans une des
ues de la Faculty ; il rappelle la promesse faite que les ^tudiants
aient ^tre autoris6s k faire leur stage dans les autres services d'accou-
ent des h6pitaux.
Depuis cette 6poque, depuis 1891, quVl-il 6t^ fait? Rien. Pardon!
oublions deux petites modifications. Afln que les internes et les ex-
i des h6pitaux puissent continuer k suivre sans interruption les ser-
de m^decine et de chirurgie, ils sont aatoris6s k faire, la nuit^ un
d'un mois a la clinique Baudelocque (!). Quant aux internes et
nes des services d'accouchement, un certiflcat de leur chef de senice
[es dispenser de ce stage nocturne.
Ainsi done il y a, dans les^hdpitaux de Paris : un service d'accouche-
k la Charity, k la tSte duquel se trouve M. Porak ; un autre k Beaujon,
6te duquel se trouve M. Ribemont, avec un assistant, M. Lepage; un
k Lariboisifere, k la tfite duquel se trouve M. Maygrier; un autre a
ital Saint-Antoine, k la tdte duquel se trouve M. P. Bar, avecunassis-
M. Tissier ; un autre & J'H6tel-Dieu, k la tSte duquel se trouve M. Cham-
r de Ribes; un autre a la Piti6, k la tdle duquel se trouve M. Dol^ris;
itre k rhdpital Saint-Louis, k la tdte duquel se trouve M. Auvard ; un
k rhdpital Tenon, k la tdte duquel se trouve M. Bonnaire, et, dans
1 de ces services, les ^tudiants ne sont admis k faire leur stage,
irmi ces chefs distingu^s, MM. Ribemont-Dessaignes, Maygrier, Bar,
aire sont agr6g6s de la Faculty de m^decine ; ils sont charges par
ie I'enseignemeut th^orique (cours professoral, conferences, cours aux
s sages-femmes) ; ils sont d^sign^s par T^tat pour faire passer les
lens de doctorat, et pas plus que les autres accoucheurs des hdpitaux
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REVUES ET PUBLICATIONS FRANgAISES. 311
ils ne sont admis k donner un enseigneinent clinique qui Boit consid^r6
par la Faculty comme ayant quelque valeur pour les etudiants. Si nous
ajoutons qu'il ne serai t probablement pas bien difficile d'obtenir que les
femmes enceintes qui se pr^senteut pour 6tre revues dans les asiles soient
examinees par les etudiants ; que la visite du chef de service de I'asile
Ledru-Rollin, ou se trouvent les femmes convalescentes de suites de
couches, soit de temps en temps suivie de plusieurs Etudiants inscrits, on
pourrait presque r^p^ter le mot rest^ c616bre d'un professeur 6lranger,
qui, visitant Paris avant 1870, disait en parlant de Tanatomie pathologique :
« Quel immense materiel 1 et tout cela perdu I » S'il en est ainsi, ce n'est
certainement ni la faute de FAssistance publique, ni celle du Gonseil mu-
cipal.
c( Unfait recent, qui aeuun immense retentissement dans Topinion pu-
blique et a vivement ^mu le corps medical tout entier, est venu mettre en
relief Finsuffisance de Fenseignement de la Faculty. Ce n'est pas toujours
la faute des jeunes m^decins s'ils n'ont pas une pratique s6rieuse des ac-
couchements. Les moyens d*enseignement existant k profusion, des mat-
tres en nombre convenable s'ofTrant, la Faculty manquerait k ses devoirs
sociaux si elle tardait plus longtemps k organiser largement Venseignement
pratique des accouchements, en utilisant tons les services et tons les accou-
cheurs. »
Pour faire suite k la note ajout^e au Bulletin de la Soci^t6 de mendi-
city contre les enfants relatant le projet de M.Lenoir, adjoint au maire de
Versailles, sur les families nombreuses (1), voici les explications fournies
hn Journal de Versailles par Fauteur du projet :
« M. Lenoir s'est pr^occup^ de rechercher les ressources n^cessaires
powt couvrir cette d^pense.
« II s'est dit que, dans une association mutuelle, comme est une nation,
chacun doit contribuer aux charges en raison de ses ressources, c'est-i-
dire en proportion des garanties et de la protection qu'il refoit de la so-
ci6t^ ; qu'il est Evident que les families qui ^Ifevent pour la patrie plus de
trois enfants lui procurent une source de prosperity et de puissance, et
qo*k raison des sacrifices qu'elies s'imposent elles m6ritent d'etre aid6es
par la communautS; qu'il n'est pas moins Evident que les families de
moins de trois enfants resolvent des families plus nombreuses une protec-
tion plus grande que celles qu'elies apportent elles-m^mes, et que par
consequent il serait de la plus stricte 6quit6 de leur demander, k raison
de leurs moindres charges, une contribution, afin de venir en aide aux
families plus charge es.
u Continuant le travail de statistique qu'il avait commence, M. Lenoir a
troav6 qu'il y a ^ Versailles :
957 families de 3 enfants,
l.«19 — de 2 enfants,
2.708 — de 1 enfant,
2.588 — sans enfants.
(1) N" 1 de la Revue philanlhropique, p. 154.
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312 REVUE PHILANTHROPIQUE.
823 c^libaiaires de 21 h 25 ans,
1.836 — de26d45ans,
379 — de 46 & 55 ans,
et 634 — de plus de 55 ans.
« II a pens6, et nous croyons qu'il a eu raison, que personne ne trouve-
rait excessif de demander une contribulion de tin centime par jour k toute
famille non indigente n'ayant que deux enfants, — de deux centimes par
jour aux families n'ayant qu'un seul enfant, — de trots centimes par jour
aux families sans enfant, et de cinq centimes par jour k tout c^libataire ne
faisant point partie de I'arm^e active.
« Partant de ces chiffres bien modiques, il a trouv^ que :
« Les 1.619 families de deuxenfants produiraient 3fr. 60x1.619=5.828.
« Les 2.708 families n'ayant qu'un enfant 7 fr. 20 x 2.508= 19.497 fr.
« Les 2.588 families sans enfant produiraient 10 fr. 80 x 2.588=27.950.
« Et les 2.849 c^libataires non compris dans I'arm^e active, 18 fr. x
2.849 = 51.281 francs.
a La somme de ces contributions serait de 5.828 + 19.497 + 27.950 +
51.281 francs = 104.556 francs.
« La d^pense totale ^tant de 125.000 francs il manquerait 125.000 fr.
— 104.556 francs = 20.444 francs.
« Le centime addilionnel au principal desquatres contributions directes
produisant k Versailles environ 8.000 francs, il sufBrait d'une imposition
sp^ciale de deux centimes et demi pour couvrir cette difference.
« M. Lenoir termine en nous faisant observer qu'il s'est plac^ dans le cas
maximum de Tassistance h toutes les families de plus de trois enfants,
sans exception. »
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BIBLIOGRAPHIE
r«a M61aiicolie, par les docteurs J. Roubinovitch, chef de clinique des
maladies mentales k la Faculty de M^decine de Paris, et Edouard Toulouse,
m^decin de TAsile de Villejuif, ouvrage couronne par VAcad^ie de nUde-
cine (Prix Lef6vre, 4896). ln-18 de vin-424 pages avec figures et traces dans
le texte. (Masson et Cie, ^diteurs.) 4 francs.
I Get oavrage, qui a obtenu Tann^e derni^re le prix Lef^vre k rAcad^mie
de m^decine, est le dernier livre qu*on ait 6crit sur la nUlancoliey cet dtat
TUorbide observe si commun^ment dans les milieux hospitaliers et en ville.
H n'esl pas nouveau que par la date, mais aussi par les id^es g^n^rales et
I les tendances exp^rimentales qui y sont manifestoes. On y trouvera une
critique de la throne de Lange, qui donne aux conditions physiques des
Amotions la premiere place, antOrieare raOme au fait de conscience. On y
I ^rouTera aussi de nombreux traces, graphiques et photographies; c'est
■ \k d'ailleurs un des c6t6s originaux de celte monographie, qui marque un
r^el ppogr^s sar toutes ses devanciftres par I'application k FOtude des ma-
I ladies mentales de la mOthode expOrimentale. Enfin les praticiens y liront
, a?ec plaisir un trfes substantiel chapitre de thOrapeutique, longue revue
' S^'^^rale sur tons les moyens de traitement employes centre ces Otats
■. "^entanx qui vont de la simple neurasth6nie k la m61ancolie d^irante et k
^ stupear,en passant par Thypochondrie. L*eau, I'air, la lumifere, tons les
I agents physiques, les scrums, les mOdicameuts hypnotiques et sOdatifs, le
f^^iOent par le lit sont 6tudi6s ; la technique de ralimentation artifi-
cieue y est exposOe avec beaucoup de details. Mais les paragraphes les plus
pportantg ^qq^ ^g^^ consacrOs au traitement moral, si dOlicat, et k Tin-
"^^naenL A cette occasion, les auteurs se livrent k des appreciations,
J7^^^^ sOvSres, sur Torganisation des asiles d'aliOnOs et van tent les bien-
^ ^e Tassistancefamiliale.
«. ^^^8 8oci6tte de premiers seoours en Allemacrne. — Le D'' George
4tn^^** vient de publier chez Seitz et Schauer, k Munich, deux excellentes
^^3 sar les soci0t6s de sauvetage et TAssociation du Samaritain(Sama-
^^** tinterricht) au siOcle pass6.
^^Ite Otude historique, pleine d'apercus et de comparaisons utiles, est
^W6t4e par une seconde brochure : Das Samariter und Rettungs-Wesen im
L
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
>iit nous recommandons la lecture k tous ceux qui s'in-
ions de secours imm^diats aox malades et aux blesses
itres ou a la camp ague.
G. C.
icole. lies patronacres (V. Lecoffre, ^dit.). — Sous ce
nn, professeur au CoLUge litre des sciences sociales, publie
r6s documents, que voudront lire tous ceux qu'int^resse
sse. On s'accorde k reconnaltre aujourd'hui qae I'^du-
kole primaire ne suffit pas. II lui faut un complement.
> apprenti — ouvrier ou employ^ — trouve sur sa route,
guides. M. Max Turmann, qui n'est pas un ^conomiste
qui a d^pens^ dans les oeuvres d'assistance morale une
ctivite, semblait d^sign^ pour retracer les origines et les
IS patronages, soit des ^coles congr6ganistes, soit des
'a fait avec une precision remarquable, et, ce qui ne
mis beaucoup de son coeur. Dans un rapport officiel
i de rinstruction publique, M. fidouard Petit parle « des
tier ordre, tr^s completes, de lumineuse precision, dues
». Nous n'ajouterons rien k cet ^loge. Nods indiquerons
jartie historique est jointe une partie pratique, qui fait
lel tr&s utile pour la formation et la direction des patro-
J. B.
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316 REVUE PHILANTHROPIQUE.
d'assistance de Rouen donnait une adhesion ^clatante aux grandes lignes
du projet vot6 par le Gonseil sup^rieur sur le rapport de M. Sabran; un
excellent rapport a ^t^ soumis k la Chambre par M. Fleury-Ravarin sur ce
projet de loi ; la Chambre a proclam6 qu'il convenait d'organiser dans le
plus bref delai possible Tassistance des infirmes et des vieillards indigents
par la contribution des communes, des d^partements et de TEtat; les
t^moins les plus impartiaux s'accordent k reconnaitre que la situation
pr^sente est intolerable. Voici en quels termes s'exprime le rapporteur
du budget du minist^re de rinl^rieur, M. Maurice Lasserre : « Si done
I'assistance des vieillards et infirmes existe k I'^tat facultatif et d'une
mani^re plus ou moins imparfaite dans les villes de quelque importance,
elle est nulle, ou peu s'en faat, dans les campagnes. En presence des cas
extremes, un seul moyen s'offre k I'administration d'^pargner k cette
catdgorie de malheureux les tortures de la faim et du froid : c'est de les
assimiler aux vagabonds, aux mendiants et de les placer dans un dep6t de
mendicity. »
11 n'y a point dans cette constatation le moindre pessimisme,le sort des
vieux indigents apitoie les plus indifT^rents. Pourquoi, dans ces conditions,
ajourner I'^tablissement du regime d'assistance obligatoire qui seul per-
mettra de rem^dier k ces mis^res et de mettre un terme k un spectacle
aussi affligeant? Les raisons manquent pour justiOer ou pour excuser an
retard aussi grave dont les consequences sont k ce point funestes et dou-
loureuses.
«
La r^gle mentation des creches, pr^par^e et discutde par le Gonseil
supdrieur de I'Assistance publique.sur le rapport de MM. Marbeau et Henri
Napias, n'a pas encore va le jour, et la lenteur avec laquelle s^accomplis-
sent les plus modestes r^formes ne permet pas d'esp^rer une solution pro-
chaine. Et pourtant, s41 est une mati^re ou Tintervention des pouvoirs
publics est urgente, c'est bien celle-1^. Depuis quelqaes ann^es, la creche
tend k se developper, k jouer un rdle de plus en plus considerable dans
la protection des enfants du premier kge. On ne considere plus, tout
au moins en theorie, cet etablissement comme une simple garderie,
comme un vestiaire d'enfants, et les hygienistes et les medecins ont montre
la haute importance d'une institution qui n'est pas n^cessairement bien-
faisante par elle-meme et peut faire courir les plus grands dangers k ses
jeunes beneficiaires. Non seulement la creche doit etre install6e dans des
conditions irreprochables d'hygi^ne, mais elle a besoin, pour etre utile et
tuteiaire, de fonctionner d'une mani^re intelligente et convenable. M. le
docteur Gauchas a d^montre, parses observations loyales et attentives, que,
mdme avec une surveillance m(5dicale toujours en eveil, les creches
n'etaient pas k I'abri d'accidents et de mecomptes survenus du fait des
parents. M. le docteur Gharles Leroux, m^decin en chef du dispensaire
Furtado-Heine, a fait ressortir avec beaucoup de force, dans une etude
recente (1), I'importance du service medical dans les creches.
(1) Journal de clinique et de th4rapeutique infantiles, 5« anneci n» 4, 7 octobre
1897.
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BULLETIN. 3n
« n faut absoloment, dlt-il, qu'une cri^che soit dirigie par un nUdecih
mique, ehargi du service, responsable moralement des r^sultats obieniis, Dans
ces coDditions seules, le service sera bien fait. Le m^decin attach^ k I'^ta-
blissement doit chaque matin pratiquer, dans une salle Isolde bien entendu,
Don seulement Texamen de tons les nouveaux arrivants — ce qui est de
rijgle; — mais aussi faire i'inspection de tons les anciens; faire en somme,
apr^s sa consultation d'admission, sa visite des salies, c'es(-a-dire voir si
quelqne affection de contagion douteuse n'a pas ^chapp^ <i Fexamen de la
directrice k Tentr^e du matin ; r^gler ralimentatton, les bains ; peser les
nourrissoos » etc.
M. le docteur Leroux consid^re que le m^decin doit avoir )a haute main
sor tout le personnel, veiller k la bonne execution du r^glement au point
devue de I'examen des enfants par la directrice, des mesures de propret^,
d'antisepsie, etc. ; bref, il lui attribue, non sans raison, la responsabilit^
absolue du fonctionnement de T^tablissement.
Apr^s une vive discussion, le Gonseil sup^rieur de TAssistance publique
avot^ r&rticle 7 du projet de r^glemeut minist^riel portant qu'un m^-
decin a la direction du service hygi^nique et medical. Ge n'est pas sur le
papier et d*ane fagon decorative que cette stipulation s'impose. 11 est vrai
<IQe les praticiens acceptent par d^vouement ces fonctions honorifiques,
6^ comme on ne saurait exiger d'eux un sacrifice trop 61ev6, les adminis-
^teurs des creches font appel au concours de plusieurs m^decins ; la gra-
tnit^ u'est pas faite pour favoriser cette organisation m6thodique dU ser-
^'ce medical.
^' en estde mdme du personnel, qui n'est pas toujours assez nombreux,
'^samment exerc^. Une creche module, telle que I'ont propos^e les doc-
*^«rs Henri Napias et Landouzy, et une 6cole normale, telle que I'a r6v6e
^** Madeleine Br^s, r^pondraient k un besoin de plus en plus pressant, k
"**« n^cessit^ chaque jour plus ^vidente. La nouvelle r^glementatiou des
creches, qui, sans ^tre parfaite, favorisera ces ameliorations projet^es,
J ^^ ®8t que plus n^cessaire et plus urgente et le gouvernement a le devoir
® 'Je pas la diff^rer longtemps.
^« Albanel, juge d'instruction au parquet de la Seine, a communique k
"istitut international de statistique qui a derni^rement si6ge k Saint-
^^rsbourg une etude sur les enfants traduits en justice (1) qui merite un
''leux et sympathique examen.
*-»*^titeur a limits son champ d'observations et d'etudes statistiques au
^ort du tribunal de la Seine dont la jurisprudence liberale s'inSpire
. ^f^xisement des travaux du Comite de defense des enfants traduits en
^^*'ce et de renergique et infatigable propagande de M. Adolphe Guillot.
J . ^Ux* ce terrain parisien, si perilleux pour les enfants negliges ou de-
^^s, la criminalite infantile ne subit pas cette aggravation dontun emi-
^**^ philosophe s'est tant alarme. Qu'on en juge plut6t par les renseigne-
1^^*^) Paris, Imprimerie et Librairie generale de jurisprudence Marchal et Bil-
L
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318 REVUE PHILANTHROPIQUE.
meats autoris^s de M. Albanel. Le nombre des arrestatious est tomb^ de
722 en 1887 k 403 en 1896, gr4ce k la pratique pr6conis6e et adoptee de
n'arrdter que les enfants r^eliement d^linquants et susceptibles d'etre tra-
duits en justice; les courtes peines ont suivi une progression d^croissante :
217 en 1887, 93 en 1888, 133 en 1887, 30 en 1896. Les condamnations tant
k ramende qu'i remprisonnement, qui s'^levaient k 243 en 1887, 154 en
1888, ne sont plus qoe de 37 en 1896.
Pour la France enii^re, la statistiqaeiiedonne pas le chifTre des mineurs
arrdt^s et M. Albanel regrette de ne ponToir ^i&blir une comparaison
entre les poursuites exerc^es et les affaires class^es, mais le rapport sur
les r^suitats statistiques de la justice criminelle en France et en Alg^rio
pendant I'ann^e 1895 (1) n'en marque pas moins un r^sullat significatif :
« Au point de vue de Tftge des pr^venus, ^crit le Garde des sceaux, nous
sommes heureux de constater une diminution notable de la rooyenne aussi
bien que de la grande criminality des mineurs. » Gette amelioration s*est
produite non seulement pour les mineurs de seize ans, dont le nombre
ne crotl gu^re, mais encore pour les pr^venus de seize k vingt et un ans
doni la progression nximMquepr^sentaUdepuis longtemps une rigulariU et une
rapidiU inquiHantes : 20 836 en 1875, 32 317 en 1894. L'ann^e 1895 a yu
s'interrompre cette mont^e funeste et le d^nombrement tombe k 30763
pour 1895.
Ge r^sultat ne donne pas assortment le droit de chanter victoire, et la
statistique d'une seule ann6e est trop pr^caire pour qu'on se r^jouisse pr6-
matur^ment. Toutefois, si Ton rapproche ces constatations des etudes de
M. Albanel pour Paris, un indice rassurant s'en d^gage, c'est que I'emploi
des moyens ^ducatifs, pr^ventifs et pr^servateurs commence k porter ses
fruits. M. Albanel est parfaitement p^ndtr^ de cette v6rit6 : « Le r61e da
magistral, dit-il, doit, dans I'esp^ce, consister plut6t k pr^venir qa'k punir.
II doit apparattre k Tenfant comma un ^ducateur chez lequel la s^vdrite
n*exclut pas la bienveillance. » On nous permettra d'ajouter que moins les
enfants vicieux, vagabonds, seront en contact avec les juges, mdme avec
les plus indulgents, et plus cette t&che de rel^vement pr^ventif sera fa-
cilit^e.
M. Albanel 6met le yobu de voir se g^n^raliser la jurisprudence du tri-
bunal de la Seine, qui a compl&tement renonc^ a la procedure des fla-
grants d^lits, depuis la belle initiative de M. Adolphe Guillot; il voudrait
que, dans toute la France, on piUt constituer, par une statistique oniforme
et une information approfondie, les Archives morales et sociales des enfants
d^linquants et de leurs families. « Muni de ces renseignements, le magis-
tral instructeur pourra prendre, k regard de I'enfant, telles mesures de
repression ou de protection que sa conscience lui diclera. Mais le crimi-
naliste et le l^gislateur y trouveront surtout, chaque ann^e, des rensei-
gnements pr^cieux, et, grdce k ces documents, pourront rechercher les
reformes k effectuer. »
La p6dagogie des enfants arri^rds, des faibles d*esprit, y puisera de son
c6te plus d'un enseignement; le moraliste et I'educateur consulteront un
(1) Journal officiel du 9 novembre 1897.
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BULLETIN. 319
pareil dossier avec an profit extreme. La protection morale de Tenfant
eslle plus sAr rempart centre la criminality jav^oile et les iastitations qui
graviteat autour de I'^cole et de I'atelier foumissent le vaccin le plus effi-
cace da Tice et de la depravation pr^coce.
« »
Le savant M. G. Tarde a victorieusement d^montr^ que le danger de la
crimiDalitI juvenile n'^tait pas circonscrit k la France et que le mattre
d*^cole ^tait exempt de toute responsabilit^. D'ailleurs, dans nn noarel ar-
ticle para dans la Revue Bleue, le c^l^bre auteur de Tarticie retentissant de
la Rmie des Deux Monde8,U. Alfred Fouill^e, remet lai-mdme les choses au
point : « La principale raison, ^crit-il, da ficheux exc6dent de la crimina-
lity, surtout chez les jeunes, est Tinsafflsauce de Tdducation dans la fa-
mille ». Tout en mettant en cause ce qu'il d^nomme la toute-puissance
de TeDseignement immoral dans la presse fraucaise, M. Alfred Fouill^e,
sans m^connaltre rinflucnce da regime industriel et de rorganisation du
traTail ^loquemment signal6e dans la Revue socialiste par M. Georges Re-
nard,conclut qu'il j a lieu de se pr^occuper davantage de T^ducation et
de la protection des enfants pauvres ; il consid^re que morality et immo-
rality oat des causes principalement morales. « Ge n'est pas sur le regime
mtoe de la propria t^, ce n'est pas mdme sur la question d'estomac »,
quelle qu'en soit la valeur, que les r^formes doivent porter exclusivemeat
ni mdme principalement : plus importante encore est la question du
< coeur »; plus que les fortunes valent les consciences (1) ».
Nous n'avons pas k discuter ici des probl^mes aussi difflciles, des
theses aussi redout€d)les; il nous paralt toutefois que le cel^bre philosophe
amoindrit k Texc^s la part des agents ^conomiques. La condition de la
femrae, de la m^re, d^tourn^e par des servitudes industriel les de son rdle
domestique, intervient dans des proportions ^normes dans le d^laissement
p4rilleux des enfants et des adolescents ; Tinsalubrite, Tincommodit^, Tin-
suflisance des logements jouent un rdle considerable dans I'extension du
vagabondage ; combien d'autres facteurs, Tinferiorite des moyens de trans-
ports, le defaut d*education domestiqne et menagSre, d^terminent Taban-
don da foyer, la ir^quentation des cabarets, les progr^s de Talcoolisme !
Mais, ces reserves faites, il convient de retenir que les contradicteurs
de tonte opinion, M. Alfred Fouill6e, M. G. Tarde, M. Georges Renard,
sont ananimes k r^clamer un surcrolt de vigilance et d'^ducation de
V4cole.
A d^faut des parents retenus hors du logis par leurs occupations, I'au-
toril^ scolaire est tenue d'accorder an supplement d*bospitalite aux ei^ves
^^ la loi lui confie. L'institution des classes de garde, qui correspond aux
Etudes sorveiliees des lyc^es et colleges, ne doit pas dtre facultative, mais
obligaloire dans tous les cas od les families ne peuvent elles-mdmes assu-
nier les charges de cette surveillance. II n'est pas possible de tol^rer qu'en
^chors des heures de classe, et notamment depuis la fermeture de Fecole
^P^\ la tombee de la nuit, des ecoliers soient livr^s k eux-mdmes, libres
(1) Betme Bleue du 30 octobre 1897.
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3i0 REVUE PHILANTHROPIQUE.
de leurs mouvements et de leurs fr6quentations, abandonn^s h. toutes les
promiscuit^s de ]a rue. Envainrinstituteur s'efTorcera-t-il de les moraliser.
« Us sont bien loin des sermons da maltre d'^cole, ces petits, a 6crit
M. Georges Renard, quand ils rentrent le soir an logis, ou les parents
harasses et maossades leur donnent la becqa^e qui pr^c^de le sommeil. »
De toutes les mesures de precaution k prendre pour sauvegarder et
completer les bienfaits de I'^cole, celle de la generalisation des classes de
gardey de la surveillance continue en dehors des heures d'^cole, n'est pas
la moins importante ni la moins urgente.
En economie sociale, tout se tient, les solutions les plus eioign^es ont
leur repercussion lointaine ; le prolongement d'action, de surveillance et
dliospitalite de recole primaire est le premier, le plus simple et le meil-
leur des patronages pour suppieer la famille et preserver Tenfant pauvre
des dangers de la rue, pour moraliser la jeunesse fran9aise.
Paul Strauss.
Le Dtrecteur-girant : PAUL STRAUSS.
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2 REVUE PHILANTHROPIQUE.
I vie : nous voulons dire pas Ih qu'ils sont fortuits, mais on
3vrait penser plut6t qu'il n*y a rien de fortuit, que tout s*en-
lalne et se determine par la logique
lots d 'accident et de hasard, dont noui
ous servent ^ couvrirnotre ignorance
ne pas nous en corriger.
Les orateurs adressentaux accidents 1
« aveugle », de « stupide », mais les
ms doute de se r^server ces ^pithi
ii'ils n'aient pas pris le soin d'emp^
)uvaient 6tre ^vit6s, soit qu'ils ne vei
n6vitable.
De m^me nous ne parlous toujours
js « disgraces » de la fortune, « destn
autres [choses semblables et, commo
)us peuplons ainsi TUnivers de toute
tpricieuscs qui nous dispensent de co
J nous reformer.
S'agit-il des accidents de la nature, (
^clones, inondations, Eruptions de vol
rre : nous les disons « accidents » pan
^yons pas et que nous sommes incapa
insemble des ph^nom^nes. S*agit-il de
Lgnent notre activity propre, qui se mi
) nos travaux et de nos jeux, nous ne
I'ils sont les suites, les rdsultats ou les
ais tr^s certains, de nos erreurs et de
icccident n'est qu'une hypoth^se llal
nee et il seraitplus sincfere et plus av
y a pas d'accidents.
11 nous faut bien pourtant rassemble
Eiccidents et consid6rer comme tels toi
impr^vus qui abondent dans la vie el
)mmes entre eux et avec les filaments.
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LA PSYCHOLOGIE DES ACCIDENTS. 323
Les accidents sont relativement beaucoup plus nombrenx
surmer que sur terre, et dans Fair que sur la mer; ils sont
infiniment plus nombreux de toutes faQons dans le travail des
champs que dans celui des villas. La simple piqilre qui tourne
mal, le coup de come ou de pied de la b6te qui tue le conduc-
teur ou le berger, la chute de Tarbre qui 6crase le bAcheron,
r^boulement de la montagne qui entraine avec elle le hameau,
sont des exemples pris au hasard entre la foule des accidents,
connusetinconnuSy quisonfsem^s journellement dansT^tendue
des campagnes et produisent une quantity de maux et de souf-
frances bien sup6rieure sans nul doute ft toute celle qui provient
du travail urbain ou minier.
Mais ni les malheurs des paysans, muettes victimes, ni
ceux des marins 6parpill^s sur les mors ne frappent Topinion
comme les accidents et les catastrophes qui surviennent dans
les grandes villes et dans les centres du travail industriel.
La question des « accidents du travail », c'est-ft-dire plus
particuliferement du travail industriel, est aujourd'hui et restera
loDgtemps encore Tune des preoccupations dominantes du
Ifigislateur dans toute TEurope, depuis que les machines ont
mulUpIi^ les risques retentissants et que les ouvriers plus
instruits sont devenus dlecteurs et Tune des forces qui d6ter-
minent la politique des ^tats.
II n'est pas du tout certain que les accidents soient plus
nombreux sous le regime du machinisme ft vapeur et des appli-
calions de r6lectricit6 que dans Tabsence de toute machine,
lorsque les hommes doivent subvenir ft leurs besoins sans autre
secoars que celui de leurs propres membres. S41 est vrai,
comme on croit Tavoir d6montr6 par les statistiques, qu'il y a
moins d'accidents de voyages, moins de bless6s et d'^cras^s
avec les chemins de fer qu'il y en avait autrefois avec les
diligences, on est amen6 ft ponser qu'il en est de mSme dans
toules les parties du travail et de Tactivit^ humaine, sous le
gouvemement de la science.
Ces navires cuirasses sur lesquels se multiplient les cata-
strophes sont plus sArs que les canots d'6corce des sauvages,
etlacharrue 4 vapeur estropie moins sou vent le paysan que la
L
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324 REVUE PHILANTHROPIQLE.
simple b^che ou que les cailloux, les plantes et les bdtes, lors
qu'il travaillait la terre de ses mains. Dans eel 6iat primitif d(
rhomme, une quantity innombrable d'accidents k peine sentii
produisent, par la suite, les maladies les plus graves, des mu
illations et des pertes de membre? '*"'^ ^'^^'^ '^^ °**'* ^ ««£»iii
cause rapporter.
Mais, comme les machines foi
efifroyables etquelcs explosions, les
causent tout d'un coup un grand nor
des ouvriers rassembI6s dans une i
on est frapp<5 par ces spectacles, et,
cit6 les porlant k la connaissance
notre civilisation abonde en catastro
Tout paradoxe mis k part, il est
r5gne de la science et des machines
coup d'accidents et de maux, et m
que les guerres modcrnes servies pa
dables et par des explosifs d'une p
en definitive moins de victimes que
et k Tarme blanche.
Mais il faut tenir compte du non
nombre des travailleurs, et si les <
maine sont infiniment agrandis et m
prodigieuse de moyens d'action tou
faudra pas s'6tonner si le nombre re
cidents, des blessures et des morts p
digne depiti6.
*
Pendant vingt ans, nous avons
texte de loi gdn^ral qui assure aux ti
tion des accidents qui les frappent (
traite s'ils ne peuvent plus travail
dcrivons ces lignes, nous apprenoi
S6nat se sont mis d'accord pour no
temps attendue, mais certainement
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poi
lora
;aus
^ror
ises
ans
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326 REVUE PHILANTHROPIQUE.
oil sont rassembl6es un grand nombre de personnes : th64tres,
salles de concert ou de bal, ^glises. Nous avons eu rdcemment
chez nous un exemple, dont le souvenir effroyable restera Ion-
temps present k toutes les m6moires. 11 y a quelques semaines,
une 6g\ise de Russie a ^16 le th^^tre d*une catastrophe presque
semblable. Sans doute, il y 1^ une maladresse premiere, une
^tincelle qui tombe, une tenture qui s'enflamme, mais avec un
peu de sang-froid on serait vite maltre du feu, tandis que le d6s-
ordre el la panique perdenttout en un instant. Tout le monde
a sa part dans de telles calamit^s, et si on voulait soutenir que
celui qui a laiss^ tomber la premiere 6tincelle est responsable
d'une si grande quantit6 de souffrances, on commettrait une
grande injustice.
Je citerai un exemple tout individuel, et qui n*eut qu'une
victime, mais il prouve aussi tr^s clairement que le caractere
propre des accidents est de n'avoir pas de responsable. Je veux
dire cette jeune miss Maud qui, sur une sc^ne parisienne,
faisait tons les soirs applaudir et frissonner les spectateurs par
la hardiesse et la siiret^ de ses exercices de trapeze. Elle est
tomb^e du haut du trapeze sur le sol, on Ta relev6e, on I'a
conduite k Thdpital : elle expira.
Paris a oubli6 cette jeune martyre du th6Atre. L'accident
doit ^tre rang6 parmi les accidents du travail. Elle n'avait point
manqu^ son but, mais le trapfeze s*6tait d^croch6. Voil^ une
chose bien extraordinaire! Un 6v6nement hors de toute pro-
vision possible! c*est le p5re de Tenfant qui lui-m6me ac-
crochait le trapfeze. Ce pfere devait prendre toutes les precau-
tions que pent dieter la prOvoyance humaine. II appuyait sur
Tappareil, le tirait, Tessayait, vOrifiait les crochets, avec tout
le soin que pent y apporter un homme qui va livrer h ce jeu
son enfant et sa fortune k la fois. Ces crochets-1^ sont fails de
telle sorte que Tanneau du trapeze ne pent absolument pas s*en
Ochapper. Certainement, il y a eu une faute humaine. Ce n'est
pas un malfaisant gOnie qui est venu dOcrocher le Irapfeze.
Mais la faute, quelle qu'elle soit, k qui vous permettrez-vous
de Tattribuer? C'cst un accident, un de ces fails impr6vus sur
lesquels on se dispute en vain apr^s coup.
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LA PSYCHOLOGIE DES ACCIDENTS. 321
Je trouve bien t6m6raires ces statistiques qui complent
29 pour 100 d'accidents dus h la faute des patrons, 26 pour 100
dus k la faute des ouvriers, 33 pour 100 provenant de cas for-
tuits, et le reste, de causes inconnues. Accidents, causes in-
connues, cas fortuits, ce sont li autant de synonymes. 11 faut
chercher Fexplication des accidents dans Timperfection des fa-
cult^s de rhomme et dans Timperfection de ses moyens.
Les enqu^tes administratives sur les accidents peuvent nous
donner des renseignements pour le perfectionnement des
moyens m^caniques, et surtout pour rinstruction et T^ducation
des hommes qui travaillent et des chefs qui les dirigent. Nous
ne conseillons pas de n^gliger ces enqu6les et de vivre en
aveugles au milieu de tons les risques de Tindustrie. Mais c'est
la une recherche qui doit 6tre poursuivie par les savants : les
magistrats y apportent peu de lumi5re. Nous ne pouvons
compter que sur le d^veloppement des qualit^s d'attention
pour pr6venir, et sur les progr^s de Tesprit de solidarity pour
r^parer, dans la mesure du possible, les accidents qui afiligent
une riche et iilustre soci^t^ si fidre de ses inventions et de sa
science. Quant aux p6nalit6s que Ton croit utile d'y ajouter,
elles font penser h ces parents assez incultes qui ne manquent
jamais d'ajouter quelques sdvices suppl^mentaires et de luxe
aux accidents, coups et blessures que leurs enfants se sont
attires par m^garde et qui sont les p^nalit^s de la nature des
choses !
HECTOR DEPASSE.
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MEDECINE PUBLIQUE
►E QUELQUES RfiFORMES A OPfiRER
)q ne saurait denier une haute port6e philanthropique h
s les questions qui se rapportent, directement ou indirecte-
k la protection de la sant6 publique; k ce titre la Revue ne
a pas de son programme en accueillant quelques consid6-
IS critiques d'ordre g^ndral sur diverses particularit^s de
inisation sanitaire actuelle : ioutes ces remarques sont ba-
;ur des observations personnelles prises sur le vif.
t d'abord il est permis de se demander si, en fait d'hygi^ne
ime de m^decine publiques, ce qui reste des anciennes
utions, des organismes offlciels d'antan est susceptible de
3ter harmoniquement, sans modifications serieuses, aux
nces des nouvelles lois, des d^crets en vigueur, des der-
r^glements. En d'autres termes, et i d6faut d'une riorga-
on d'ensemble dont Topportunit^ pourrait d'ailleurs tr6s
se soutenir, conviendrait-il de ne plus tarder k proc^der k
;orte de mise an point d'une legislation que les donnSes,
ivues il y a quelque vingt ans, de la science moderne font
IS d'un endroit apparaitre comme surann^e et incomplete?
)mbreux sont les exemples de telles d^fectuosit^s. Ainsi,
jrmes de la loi municipale du 5 avril 1884 , le maire seul,
outes les communes de France, reste en premier res-
[) invesli du droit et du devoir d*assurer « le maintien de
V. d^faut du maire, c'est le pr^fet qui, suivant les cas, intervient soil par
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330 REVUE PIIILANTHROPIQUE.
liveou absolue de la plupart d'entre eux, mais qui, en attendant,
laissent le champ libra k T^closion et k Tessor des maladies ^vi-
tables.
Nous venons de faire allusion k Targument d'incomp^tence
que pourrait ^ventuellement all^guer le maire; pourtant, il y a
quelques ann^es, le ministfere de Tlnt^rieur a fait parvenir
d'office k toutes les communes la s^rie des Instructions detail-
l^es rddigies par le Comity consultatif d'hygi^ne publique. 11
est certain que, partout, ces instructions doivent 6tre pour
ainsi dire sous la main du maire afm de le renseigner sur les
mesures ^ prendre vis-k-vis des difF^rentes ^ventualitds 6pid6-
miques; mais, en faity il n'est nullemenl prouv^ que, dans
toutes les communes, la collection de ces documents reste tou-
jours au complet et k la porlde de qui de droit. Et puis, si in-
telligibles que paraissent leurs prescriptions, du reste obliga-
toirement couQues en termes g^n^raux, ne peut-il pas s'y
trouver quelque particularity dont, notamment pour une
municipality rurale, Tinterpr^tation precise devienne Tobjet
d'un r6el embarras sous le rapport de la decision a prendre,
comme de Tex^cution k assurer? L'article 3 de Tarr^l^ du mi-
nistre de Tlntdrieur en date du 23 novembre 1893, rendu con-
form^ment a Tarticle 15 de la loi du 15 novembre 1892, dit
bien que les formulcs de declaration des maladies ^pid^miques
« peuvent contenir Findication des mesures prophylactiques
jugdes utiles » par le m6decin declarant; mais quand cet avis
technique tout facultatif ne fera pas d^faut, il sera le plus sou-
vent conQu en termes trop brefs et trop peu explicites pour
sugg^rer a un profane les voies et moyens de detail suscep-
tibles d'une prompte realisation pratique. Dans maintes cir-
constances, il faudra aussi renoncer k obtenir verbalement, de
la part d'un praticien tr^s occup^, parfois seul pour plusieurs
communes, les commentaires topiques et les explications mi-
nutieuses indispensables, k la campagne surtout, pour appro-
prier i tel ou tel cas determine les instructions du Gomite. En
presence de pareilles incertitudes, n'est-il pas k craindre que
plus d'un maire de petite ville ou de village ne se laisse alter
k temporiser, sinon k renoncer k toute initiative d assainisse-
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MfeDECLNE PUBLIQUE. 331
ment rationnel, au grand dommage de la sanl6 de ses admi-
nistr^Sy dont la sauvegarde ei^t au contraire exig6 la mise en
CBuvre immediate d'actives mesures preventives?
S'il s'agitd 'habitations h d6sinfecter, on objectera peut-^tre
la possibility th^orique de recourir aux Commissions des loge-
ments insalubres, institutes par unc loi du 13 avril 18S0, mais
seulement k litre facultatif, et par suite n'existant ou ne fonc-
tionnant pas, tant s*en faut, dans toutes les localities. Or, il y a
lieu de le remarquer, leur competence et leurs droits l^gaux
sont h pen prfes nuls : elles ne peuvent d'ailleurs qu'6laborer
de simples rapports, sur lesquels, l^galement, il ne saurait6tre
delib^re ni statue par le Gonseil municipal avant un mois,
deiai imparti aux interess^s pour produire leurs observations.
En fait, les decisions h intervenir font le plus souvent defaut
ou sont au moins sans portee effective, en Tabsence de sanction
penale precise; et puis — autre atermoiement suspensif de
loute execution de mesures urgentes — il reste en cas de conflit
la faculte d'en appeler au Gonseil de prefecture, juridiction
sans competence en matifere d'hygiene publique. En somme,
il n'y a actuellement aucun fond h faire sur la loi archaique
relative aux logements insalubres, tombee du reste presque
partout en desuetude ; il faudrait la reprendre en entier ou tout
au moins en eliminer les timidites et les anachronismes.
Quand il eprouve quelque embarras au sujet des mesures
particulieres d'hygiftne ou d*assainissement appropriees a cer-
taines 6ventualites epidemiques, le maire peut-il du moins
s'adresser k litre consultatif k la Commission cantonale ou
meme au Conseil dhygihie d'arrondissement, dans les attribu-
tions desquels, pour la circonscription correspondante, ren-
trent de droit les questions de cet ordre? Nous n'etonnerons
personne en affirmant qu'en province, tels qu'existent et fonc-
tionnent aujourd'hui ces comites — dans les regions oil ils
existent reellement — leur intervention officielle, k laquelle
d'ailleurs nul ne contesterait Fautorite technique requise, ris-
querait souvent de ne [pas s'exercer k temps : les formalites et
d^lais de convocation, ainsi que les deplacements, expertises
et discussions scientifiques k pre voir avant le vote de la moindre
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132 REVUE PHILANTHROPIQUE.
conclusion pratique occasionneraient les plus inopportuns ater-
noiemcnts. 11 arriverait m£me certainement que des raisons
malogues viendraient par anticipation f rapper de st^rilit^ le
•ecours direct du maire au Conseil dipartemental dhygihne.
Quel parti prendre dans un tel ddsarroi et en presence des
njonctions sArement plus cat^goriques comme des responsabi-
it6s accrues de la future loi sur la protection de la sant^ pu-
)lique? Tons nos voeux appellentla creation d'une organisation
complete et syst^matique de la m^decine publique, qui com-
)rendrait une sorte de hierarchic medico-administrative allant
le la Direction centrale institute au ministfere jusqu'au ser-
vice sanitaire cantonal, sinon communal, en passant par les Di-
ections r^gionales ou ddpartemen tales , dot6es d'ailleurs
I'une large autonomie en veriu de la plus legitime d^cen-
ralisation.
Mais en attendant une semblable r^forme, il faudrait refaire
>u rajeunir I'antique loi de 1850 sur les logements insalubres
it de plus chercher h. tirer tout le parti possible de Tinstitution
les midecins des dpiddmies, aprfes avoir remanie h fond la charte
le leurs devoirs officiels et de leur competence 16gale. En droit,
lexiste aujourd'hui, par arrondissement, un de ces fonclion-
laires, dont le mandat se borne k Telaboration de rapports qui
lagu^re etaient centralises au minist^re du Commerce, puis
ransmis h TAcademie de medecine,ou, une fois Tan, la lecture
n public d'un compte rendu solennel les tire pour quelques
nstants de Toubli. La creation des medecins des epidemics re-
Qonte h une epoque tr^s lointaine oti nul n'aurait pu prevoir
'extraordinaire developpement actuel de Thygi^ne publique,
li par suite la complexite du rdle militant aujourd'hui devolu
. tons ceux qui professionnellement s'en occupent, comme k
eux dont les attributions fonctionnelles impliquent le devoir
I'en faire observer les regies.
Avec Textension prodigieuse et toujourscroissanteimprimee
, cette heure aux differents problemes de la prophylaxie sani-
aire par les doctrines modernes issues des memorables decou-
^ertes de Pasteur, ce ne serait plus Tarrondissement, mais bien
e canton — sinon la commune, comme le proposait M. Droui-
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MfeDEGINE PUbLIQUE.
333
neau (1) — qui devrait devenir le ressort l^gal du mMecindes
6pid6mies. NommS par radministration d^partementale, mais
sur la proposition de Y Inspection rigionale de Fhygiine pu-
blique (2), ce qui assurerait aux choix ainsi faits toutes les
garanties de competence possibles, il serait d^sormais oblige
de se transporter sur les lieux i toute requisition de Tautorite
rnunicipale et meme spontanement d^s la premiere nouvelle de
1 'apparition d'une maladie transmissible. Apr^s examen de la
situation, de concert avec le ou les m^decins du pays, il pren-
drait vis-&-vis de la municipality la responsabilite technique
cies indications sp^ciales k donner en fait de prophylaxie ou de
^alubrite publiques, sauf Si en rendre compte immediatement
au pr6fet k qui la loi du 5 avril 1884 (art. 99} attribue un veri-
table contrdle de Thygiene communale. Une pareille mission,
autrement active que Tancienne, comporterait, en province,
de tr^s frequents et inopines deplacements aux extremites de
circonscriptions souvent fort etendues et parfois sans moyens
rapides de communication ; il appartiendrait aux pouvoirs pu-
blics d'examiner la question de I'indemnite k lui attribuer de ce
chef.
Dr BEDOIN.
(1) J. Rochard, Encyclop^die d*hygidne et de m^decine publique^ t. IV, p. 898.
(2) Cre6e par un d6cret du.23 avril 1888 qui pr6voit les rapports naturels k
^tablir entre ce nouvel organisme et les m6decins des 6pid6mies, ainsi que les
<^onseils d'hygiftne et de salubrity de la region.
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LA PROTECTION DE L'ENFANCE
EN BELGIQUE
On peut discuter — et Ton ne manque pas de le faire — le
droit, r^el ou suppose, des adultes pauvres k se faire secourir
par la collectivity que repr6sente I'Etat, la province ou la com-
mune. Certaine 6co\e ^conomique poussant la logique de la doc-
trine jusqu'k ses consequences extremes conteste m6me le droit
du gouvernement k se substituer aux families pour 61ever
leurs enfants, moralement, physiquement ou intellectuelle-
ment. Mais pen de gens, parmi ceux-l& mftmes qui protestent
contre la transformation de Tinstruction primaire en service
public ou qui s'insurgent k la pens^e que la commune veuillc
clever sur le fond commun dans les pouponni^res, dans les
creches ou les 6coles gardiennes, les enfants de la classe ou-
vri^re, soutiendraient que la Socidt6 ou que ses repr^sentants
doit se d^sint^resser du sort des enfants tomb6s aux mains de
parents brutaux, vicieux ou criminels. Une m6g5re trouvera
des accents indign^s pour bMmer Thomme qui aura frapp^ un
enfant ! les passants s'arrfiteront, nombreux, devant un petit
bonhomme qui racontera, en se lamentant, quelque abracada-
brante histoire et ils lui rempliront la poche de gros sous en
guise de consolations. Qu'un instituteur irrit^, 6nerv6, donne
une taloche k un gamin indiscipline et Ton criera au mariyre.
L'enfant maltraite, ou vivant au milieu de parents indignes,a le
don d'emouvoir particuli^rement. On prend fait et cause, tout
de suite, pour le premier marmot qui vous assourdit les oreilles
de ses cris. En France, ce penchant k s'apitoyer sur cette cat^-
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SFANGE EN BELGIQUE. 335
^s vif. Mais la manifestation de
. Nous sommes en cela, comme
s hommes du premier mouve-
prficherons la croisade contre
lendemain d'un fait divers de
u zMe s'^vanouit bient6t. U en
e chose, un pen d'agitation en
, agitation qui finit ordinaire-
t6.
iepuis le jour lointain oil Jules
le d'une Societe pro tec trice de
ie la Socidt^ protectrice des ani-
;ique, il existe de ces soci£t6s
s. Elles sont calqu^es Ics unes
a plupart d'entre elles se sont
, d'oBUvres frangaises, du Saw-
s. Mais le titre de Society pro^
eu froid aux Beiges qui savent
5 sensibles, ils lui ont pr6f6r^
En f ants martyrs (1). Cela fait
IX plus durs : frissons et larmes
Soci^U protectrice de VEnfance portant
{He a plus de trente ans d 'existence. D6s
Belgique une crdche ^cole-gardienne.
remier des statuts est :
it 6tre n^cessaire ou simplement utile a
3ment les enfants des n^cessiteux contre
s : manque ou insuffisance d'alimenta-
des locaux insalubres, etc.; en un mot,
ifants et de les preparer h la culture de
ut par tons les moyens dont elle pourra
s pouponni^res, colonies maternelles et
it du public sur les divers dangers qui
IS ou des mauvais traitements dont ils
ihysique et morale toutes les r6formes
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336 REVUE PHILANTHROPIQUE.
font k ToBUvre le cortege qui lui convient et s'^changent centre
bonne monnaie k la caisse de la Soci^t^ qui en a besoin pour
atteindre son but.
Ce que se proposent ces soci6t6s, le statut de celle de
Bruxelles nous Tapprendra :
Art. 2. — La Soci^t6 a poar but de prot6ger, par tous les moyens en
son pouvoir, la personne morale et la personne physique des enfants de
toutes conditions et de tout ^e, conlre Tabaodon, Tincurie, la mis^re,
Fexploitation, les mauvais traitements, I'^ducation pernicieuse ou crimi-
nelle, les exemples immoraux auxquels ils peuvent 6tre exposes de la part
de leurs parents ou des personnes charg^es de leur garde, en un mot, dans
toutes les circonstances ou ils ont besoin d'aide et de protection.
On couQoit que les moyens de r^aliser un si vaste pro-
gramme soient varies: comment done op6rent ces soci6t^s?
S'agit-il d'enfants maltraitds, brutalis^s par ceux qui en ont la
garde ? Un des commissaires de la Soci^t^ va trouver au nom
de celle-ci les bourreaux. Cette seule intervention leur donne
peur bien souvent. lis changent d'attitude. Continuent-ils
leurs cruels agissements? La Soci6t6 adresse une plainte au
procureur du Roi qui les fait appeler au parquet. La perspective
de la prison est salutaire. Rarement les coupables recom-
mencent,car ils se sen tent surveill^s par les reprdsentants de
la. Soci6t6 protectrice. Quand il y a d6lit, exploitation de Ten-
fant en le faisant mendier par exemple, la procedure est la
m£me.
Pour les enfants moralement abandonn^s, enfants excites
au mal ou vou6s k la d^bauche par Fexemple des parents, la
Soci^t^ est, en partie,d6sarm^e. La Belgique ne connait pas la
d^chdance de la puissance paternelle. M. Le Jeune, Tancien
ministre dcla justice, dont le nom est attache en Belgique &
toutes les oeuvres de charity, a d^pos^ il y a des anndes un
projet de loi en ce sens qui n'est pas encore votd. En attendant
qu'il le soit, les parents Idgitimement unis, vivant tous deux,
peuvent k loisir corrompre leurs enfants, les livrer au vice.
Si les Societis protectrices de FEnfance ne peuvent rien en
faveurde ces enfants (sauf dans les cas signal6s plus haut), il
n'en est pas de mfime pour les enfants naturels ou les orphe-
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► E L'ENFANCE EN BELGIQUE. 337
teur incapable ou indigne ? La Soci^t^
destitution. Les juges de paix secon-
de bienveillance la soci^t^ en nom-
iteurs soit tuteur, soit subrog^-tuteur.
5, on le devine, la Socidt^ obtientdes
miable. Que deviennent les pupilles
elles, tout enfant recueilli est d'abord
6t6, rue des Com^diens, 25, ddnomm^
1 du propri^taire de Fimmeuble, qui
Ltuite h la Soci6t6. L'enfant y est sou-
l. Son caractfere, ses habitudes, ses
urant une quinzaine de jours. Apr^s
R6 suivant TAge et certaines circon-
nne charitable qui le demande (une
tble sur cette personne par laSoci^t^),
end comme apprenti, log6, nourri. Le
chez un cultivateur que Fenfant est
les cas, Tenfant qui demeure sous
la Surveillance est emp^ch^ de re-
ignes. Le lieu de pension de Fenfant
isementi ceux-ci. Pour justifier cette
ifere vue, paraitre cruelle, les admi-
t)ro tec trices de VEnfance expliquent
5es parents, quand ils parviennent a
Fenfant qu'on leur a enlev^, est de
I nourricier, k se rebeller contre son
5t surtout, les plus pervers et les plus
rents, n'apparaissent qu'au jour ou
leur rendre service (1).
?s raisons, il le faut reconnattre.
ft »
conversion employes par la Soci6t6
de FEnfance, pour ramener au bien
>tectrice des Enfanis marhjn de Bruzelles pour
11. 22
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338 REVUE PHILANTHROPIQUE.
quelques-uns des enfants dont elle est devenue la tutrice, il en
est un qui paraltra un peu strange, quoique scientifique. C'est
rhypnotisme. Les m^decins de la Soci6td, convaincus de Futi-
lity de la suggestion appliqu6e sp^cialement au redresscment
moral des enfants vicieux, font usage de Thypnotisme quand
les mdthodes naturelles ont dchou^.
D^fauts et perversion de caractfere, penchant ou impulsion
aux vices, mauvais instincts, peuvent Hre toujours am^lior^s
ou gu6ris, affirment ces m6decins, par la suggestion, « proc^d^
inoflfensif d'orthop^die morale » (1). Le bulletin delaSoci6t^
k Tappui de ces affirmations, cite le cas d'une enfant dedix ans
« menteuse, voleuse, entM^e et mdchante » qui, hypnotis6e et
suggestionn^e, est devenue, apr^s une douzaine de stances,
« une enfant douce, soumise, franche et respectueuse du bien
d'autnii, faisant m£me la morale h ses compagnes de Tasile et
leur montrant le bon exemple ».
D'autres enfants ont 6t6 gudris d*habitudes vicieuses, d'in-
firmit^s nocturnes. Si, r6ellement, la suggestion permet les
r6sultats merveilleux qu'annoncent les mddecins de la Soci6t6
protectrice des Enfants martyrs de Bruxelles et, en particu-
lierM. le docteur Van Velsen, directeur de I'lnstitut hypno-
tique, quelles espdrances ce mode artiflciel de culture ne per
met-il pas d'entretenir?
*
Les Soci6t6s beiges de protection des Enfants Martyrs
n'existent pas uniquement.par Tinterm^diaire de leurs repr6-
sentants r^guliers, les membres de leur bureau ou commis-
saires de quartiers ; tons les adherents sont invites k marcher
dans la m^me voie, et laSoci^t^ leur en fournit la possibility
en les instruisant des lois et rbglements concernant I'Enfance
et en les priant d'en assurer le respect en toute occasion. A
son OBUvre, la Soci6t6 conviele public tout entier.
On a pu voir sur les murs de Bruxelles et dans les princi-
(1) Rapport de la Soci6U protectrice des Enfants martyrs de Bruxelles pour
Tann^e 1894,
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LA PROTECTION DE L'ENFAxNGE EN BELGIQUE. 3?9
paux ^tablissements publics des affiches illustr^es oil elle
recommandait au public « de ne plus rien acheter aux petits
colporteurs, dans Tintdrfet m6ine de ceux-ci ».
£mus qu'on voulAt empficher de pauvres enfants de gagner
leur vie ou de venir en aide h leurs parents en vendant des
allamettes ou des mannekenpisse, de braves gens se sont
rfcriis. La Soci^t^ protectrice, tenant bon, a r^pondu : « Nous
avons fait une enqufete sur la situation r^elle de ces jeunes
colporteurs. Le r^sultat en a 6t6 navrant. Ou ce sont de petits
vagabonds abandonn^s par leurs parents et vivant de rapines,
ouce sont des victimes de parents indignes qui les font tra-
vailler h leur place. Quiconque donne k ces enfants encourage
le vagabondage ou favorise Todieuse exploitation des parents. »
Aux moyens divers qu'elle met en ceuvre pour arriver h la
r&lisation de son programme, la Soci4t4 protectrice des Enfants
martyrs de Bruxelles que nous prenonspour type afin de ne pas
ressasser les observations, en a r6cemment ajout6 un autre.
Ce mode d'action nouveau constitue une innovation prdcieuse
qu'il importe d'autant plus de mentionner ici qu'il a 6t6 pr6-
conis^, voil& assez longtemps d6j&, au conseil municipal de
Paris, par M. Paul Strauss, aujourd'hui s^nateur de la Seine :
c'estlafoujrniture, dans les meilleures conditions possibles de
bon marchg et de quality, du lait pour les besoins de la classe
pauvre (1).
A cet effet, la Soci6t6 protectrice des Enfants Martyrs a in-
stalls k son si^ge social, rue des Com^diens, 2S, k Bruxelles, ou
se trouvent d6}k Tasile et la creche (2), une Laiterie fnaternellej
(1) Le 7 d^cembre 1896, sur la demande de M. Paul Strauss, le Conseil muni'
c»pal de Paris constituait une Commission d'6tude de I'alimentation par le lait.
Les travaux de cette Commission ont 6t6 consign^s dans un rapport de M. Pierre
^din, accoucheur en chef de la Maternity, qui conclut & la distribution h. prix
JJ^<™>t aux mferes n^cessiteuses de lait frais ou st6rilis6 et ^ la reduction des frais
de transport du lait sur les voies ferries.
(2) Nous nous abstiendrons de parler de ces locaux. Pr6t6s obligeamment par
^ des meiUeurs soutiens de rinstitution, M. de Grimberghe, ils sont d'un entre-
L
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340 REVUE PHILANTHROPIQUE.
destinee a distribuer du lait pur stMlisSy gratis ou seulemeni a
ban marcM, Ce service fonctionne depuis trfes peu de temps.
La salle de sterilisation est pr^c^d^e d*une chambre ou sont
nettoy6s, m^caniquement, les biberons. Ghaque bouteille-bi-
beron regoit 150 grammes de lait de ferme et 4 grammes de
Sucre. EUes sont ferm^es i I'^meri, puis plong^es dans Teau
bouillante pendant trois quarts d'heure. La t^tine ^tant sur la
bouteilie pendant cette operation se trouve ^galement st^rilis^e.
Ces flacons sont d^iivr^s aux parents pauvres jug6s dignes de
cette faveur apr^s enqufite. Une surveillance est exerc^e a
TefTet de savoir si ce sont bien les enfants qui consomment ce
lait. Le nombre des families servies par la Laiterie matemelle
est encore tr^s restreint. Mais I'idde germe (1). Ce qu*une so-
cidte priv^e a tent^ dans un pays voisin, la Ville de Paris n'a-
t-elle pas le devoir de rexp^rimenter au plus t6t chez elle,
comme le demande, en ses conclusions, le rapporteur de la
Commission de Talimentation par le lait? La fourniture de lait
sain, nourrissant, 4 bas prix, n'est-elle pas, des multiples
moyens avanc^s pour lutter contre la mortality infantile, celui
dont les effets sont les plus certains?
Faut-il dire que la sympathie du public ne fait pas d^faut
aux soci^t^s qui ont assume la t&che de prot^ger les enfants
contre les mauvais traitements ou les honteux exemples?Des
societies dont le nombre augmente d'ann^e en ann^e collectent
fr^quemment a leur profit. Des bienfaiteurs connus et inconnus
envoientdes dons de toute nature. Des propagandistes ardents
vont porter la bonne parole aux quatre coins de la Belgique.
M. Le Jeune leur a donn^ I'exemple. C'est grice Ji son d^voue-
ment infatigable Ji la cause de Tenfance que la society m^re de
Bruxelles a vu naitre sur diflF^rents points et grandir vite des
societ^s sceurs qui Tout vaillamment imit^e.
tien tr^s coilteux et ne satisfont point aux besoins. Telle a k\Jk notre impression
lipr(;s les avoir visit6s. II est des dons on^reux.
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:E en BELGIQUE. 341
Soci^t^s protectrices des
eurs mauvais c6t6s qu'il
[n6me que dans la foule
;idt6 protectrice des ani-
d'un z^le excessif et par-
des Soci6t^s protectrices
. voir par tout des petites
artyrs »i n'en fftt-il plus
ssent leurs investigations
[ions : ils se m61ent sou-
lais ce reproche, sont-ils
ALBERT xMONTHEUlL.
Buvres identiques dans les pays
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lSILES JO]
dans le dernier c
ion annuelle des
attre au congr^s
qui 6taient, disa
t le monde non
it bien des philai
ahn Bost et elle
ait desirable qu
I'ont permis de V(
; de visiter ce gr
mme un eharma
[)mmairement le
iost sont exclusii
protestante. Jol
Ilavait, au d^bi
d'un veritable ai
berg et des Liszt.
pens^e de deve
veritable fut cell
e i La Force (Doi
s idiotes qu'il aii
isance, et seul, s(
son inspiration
ie la vie.
rt est int^ressant
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N BOST. 343
rapidement faire connaitre
nque.
t neuf ^tablissements diflf6-
n destind aux filles et aux
3oteau, se compose de :
X jeunes filles orphelines,
de protestants dissdminds;
les filles infirmes ou incu-
;6cit6, idiotes, imbeciles ou
aes filles dpileptiques ;
L des filles idiotes, gMeuses,
dpileptiques qui sont idiotes
stitutrices incurables, des
,mes veuves ou cdlibataires
rvantes, des femmes veuves
isources, que leur education
, h trois kilometres environ
IS. II comprend :
is infirmes ou incurables,
)ts ou imbeciles ;
3 dpileptiques ;
i des gargons idiots g&teux
Lce, dpileptiques idiots et
uf asiles dtait en 1896 de
B considerable d'assistance ;
t asiles sont exclusifs aux
passion pour les gargons;
rde pour les filles, ce sont
le population. Les autres,
ssistance, pen vent contenir
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344 REVUE PHILANTHROPIQUE.
des d^sh^rit^s de la vie, mais non des infirmes, quoiqu'il y en
ait ^videmment quelques-unes dans le nombre.
Ges asiles ont 6t6 cv66s successivement ; John Bost faisait
des quotes, des tourn6es, pr^chant pour son oeuvre dans les
paroisses du cuite protestant, en France et k Titranger; il for-
mait Qa et \h des groupes sympathiques h ses id^es qui lui
fournissaient des subsides ; les donations importantes arrivfereni,
et k mesure que les ressources augmentaient, les creations
nouvelles se faisaient; ce fut d'abord la famille ^vang^lique;
Bethesda^ Eben-Hezer, Bethel, Siloi viennent ensuite. Alors
ToBuvre ^taitfaite, les bases r^elles en^taient jet^es, et e'en 6tait
assez assur^ment pour que John Bost reQilt en 1861 le pris
Monthyon. En 1877, les asiles John Bost furent reconnus ^ta-
blissement d'utilit^ publique, et depuis ce temps, et malgr£ la
disparition du fondatcur, ToBuvre continue son fonctionnement
rdgulier, s'am^liorant sans cesse, mat^riellement surtout, car
moralement, c'est dvidemment toujours le m^me esprit reli-
gieux et les m^mes preoccupations morales. Au point de vue
materiel, le vieux Bethesda a disparu, et c'est aujourd'hui un
asile neuf, pour lequel il a fallu trouver 200000 francs de res-
sources extraordinaires. Un ch&teau d'eau a 6td elev6; une
etuve fixe i vapeur sous pression assure avec un pulv^risateur
un service complet de disinfection. Dans le pavilion de Bethesda,
une infirmerie trfes convenable avec une salle d'op^ration oi
les antiseptiques sont de rigueur, est destin^e aux maladies
incidentes graves. Enfin, c'est passer un moment plutdt
agr^able que triste que se promener dans le village fait d'asiles
s^pards, au milieu de potagers, de voies ombragdes, de jardins;
on a ddnommd les chemins qui s'entre-croisent aux alentours
des asiles; il y a une avenue Jcanne-Lapeyre, la rue du Ghftteau-
d'Eau, la sente du Prieurd, la sente des Accacias. Rien ne rap-
pel le extdrieurement les misferes physiques abritdes sous ces
toits et au milieu de cette vdgdtation. C'est, on le voit, une con-
ception autre des dtablissements d'assistance, et c'est un point
sur lequel il conviendrait d'insister, car il y a lit mati^re k de
prdcieuses indications pour Tavenir.
Intdrieurement, la propretd la plus miliculeuse partout,
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,LES ASILES JOHN BOST. 345
pas de luxe, mais ce qu'il faut, lout ce qu'il faut; de Fair, de la
lumi^re et du soleil, une application tr^s m^thodique des con-
seils de Thygifene, pas de lits entass^s dans les dortoirs, des
salles de reunions, de classes ou de travail. Des pieces pas trop
grandes et permettant une selection des enfants, tout cela est
^galement trfes bien, je puis m6me dire que cela ^tonne, ^tant
donn^ le petit personnel secondairc qui est aflFect6 aux divers
asiles.
Mais on a 6rig6 en principe qu'il fallait dans ces asiles ^lev6s
par la charity priv^e se venir en aide, et alors chacun travaille
dans la mesure de ses forces physiques et intellectuelles.
Quand il s'agit des travaux int^rieurs, de manage, rien k dire,
et rien n'est, en somme, meilleur que d'entrainer m^me les
faibles d'esprit, les idiots non g&teux vers ces soins int^rieurs ;
ce n'est pas toujours ais^, beaucoup s'y refusent ; c'est alors
qu'il faut s'ing^nier k lesy decider par des moyens et des arti-
fices d'oii la violence, bien entendu, est toujours exclue; aux
asiles John Bost un personnel de choix arrive vraiment k des
r^sultats bien int^ressants. Cependant, sur un point, je n'ac-
eepte pas volontiers la rfegle en honneur k La Force et qui nalt
de celte solidarity charitable et 6vang6lique qui est un puissant
moyen d'action, je le reconnais; c'est en ce qui concerne les
soins aux malades ; je ne parle pas de ce qui est purement me-
dical, tout it fait hors de cause ici. Mais qu'un petit ^pileptique
en ^tat de mal, concha dans son lit, tant les crises sont fr6-
quentes, soit assists par un autre malade, assis pr^s de lui, j'es-
time que c'est pousser loin la solidarity et de tels infirmiersou
infirmi^res seraient sujets it blendes m^faits dont onne saurait
vraiment les rendre responsables.
Ici, la surveillance demande un certain effort d'intelligence
que des d^biles nesont pas toujours en ^tatde fournir; sans
doute, on n'a pas eu k constater k La Force d'accidents et la sur-
veillance g^n6rale, les soins des directeurs ou directrices les
out pr^venus. Mais le pass^, fAt-il heureux, pourrait-il 6tre
garant de Tavenir ? C'est au moins un doute et c'est pour cette
i raison que je n'accepte pas jusqu'k cet extreme la solidarity
charitable.
i
f
L
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346 REVUE PHILANTHROPIQUE^
Mais en dehors de ce cas particulier, il faut reconnalire
qu'elle est vraiment tr^s encourageante par ses r6sultats. Ce
n'est pas sans quelque Amotion qu'on entend Thistoire de Co-
ralie Walter depuis vingt ans k Bethesda qui, ayant perdu ses
deux avant-bras, s'est mise courageusement, sans mains, k ap-
prendre h ^crire, k faire de la tapisserie, k se servir d'un cou-
teau, d'une cuillfere, d'une fourchette, d'un verre comme une
valide, qui a d6velopp6 aussi son intelligence de telle sorte
qu'elle est devenue T^ducatrice de T^cole enfantine. S'occuper
sans cesse de ces intelligences atrophi^es ou arri^r^es, leurap-
prendre des choses usuelles, exercer leurs membres, accroitre
leur adresse par des petits travaux, cr6er pour eux des classes,
des ateliers, occuper le plus possible leur esprit, tout cela est
mis en pratique danslesasiles des garcjons etfilles perfectibles
et fort heureusement. Disons aussi que la confiance est venue
apr^s avoir vu ce que le docteur Bourneville avait d6ji si bien
r^ussi k Bic^tre, M. le docteur Holland le declare lui-m6me
dans un de ses comptes rendus.
Uadministralion enti^re des asiles est confi6e k un direc-
teur g^n^ral, M. le Pasteur Rayroux; il est assists d*un con-
seil d*administration qui se recrute lui-m6me et se renouvelle
dans des conditions prdvues dans les statuts, et d*une com-
mission de permanence.
Asiles. Population. D^penses. Prix de revient.
La Famille 79 27871,40 0,95 par jour.
Bethesda 124 30831,10 0,70 —
Eben-Hezer 57 16275,45 0,78 —
S1L06 83 21716,70 0,71 —
Bethel Compassion. . . 90 23399,25 0,71 —
Repos 29 17597,10 1,66 —
Retraite 26 10753,40 1,13 —
M1S6RICORDE 52 13378,05 0,70 —
Toutes les operations financiferes sont contr6l6es avec soin.
Un Sconomat gSnSral a mission de s'occuper de toutes les ques-
tions Sconomiques et de la gestion matSrielle. Ghaque asile
a son autonomie, sa direction et sa d^pense. Aussi on pent se
rcndre compte tr^s exactement du prix de revient de chacun.
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LES ASILES JOHN BOST. 347
On m'a communique trfes gracieusement ies r^sultats de Tann^e
1895-1896; je n'en prends ci-dessus que Ies chififres d*en-
semble.
On voit que ce prix de revient qui comprend la totality des
d^penses n'est pas 61ev6, il tSmoigne d'une vigilante 6conomie.
Gependant le chapitre reiatif h Talimentation repr^sente k lui
seul, pour un ensemble de d^penses ordinaires s'^levant k
235681 fr. 77 une somme de 99 257 fr. 25, c'est dire qu'elle con-
stitue la grosse et importante d^pense et par sa proportionna-
lit§, on juge de la preoccupation sur ce point de la direction et
de Fadministration des asiles.
Quant aux recettes, la charity priv^e y pourvoit et sous des
formes varices.
Telle est dans son ensemble Toeuvre de John Bost; il est
difficile d'en montrer dans un rapide expose tons Ies avantages
et toutes Ies particularites interessantes.
Je veux seulemeni, en terminant, en degager Ies traits sail-
lants. Ce qui frappe dans ces asiles, c'est que tout converge
vers I'hospitalise lui-m6me; on voit nettement qu'il est Tob-
jectif principal, exclusif, moralement et physiquement ; puis,
conception un peu inusitee dans notre pays, ces asiles sont ou-
verts, ou plutdtne sont pas mur^s; leurs cl6tures sont faites
d'une grille, d'un chemin, d'une haie. C'est un village au mi-
lieu duquel on circule; le medecin y asa demeure, ainsi que le
pharmacien, et c'est en vain que I'etranger, imbu de nos habi-
tudes architecturales, chercherait, en arrivant k La Force, le
bfttiment clos de murs solides et it fagade monumentale; il
ne le trouverait pas.
J'ai dit plus haut que cette conception etait k retenir, et je
suis convaicu que c'est ainsi qu'il faudrait comprendre des 6ta-
blissements de bienfaisance qui nous fontdefaut et que quelques
d^partements songent k edifier, Ies asiles d6partementaux pour
incurables. En pleine campagne, ainsi amdnag^s, ils rendraient
Ies plus grands services ; car si la charite priv^e a fait La Force
pour Ies protestants^ si un etablissement analogue, dit-on,
existe dans le Gantal k Ladev^ze pour Ies catholiques, il faut
reconnaitre que ces efforts de la charite priv^e et religieuse ne
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J5a REVUE PHILANTHROPIQU
lemagne, qui est aujourd'hui le pays qui ei
Maisons de travail k Paris, et dans quelqu
province ; — Colonie ouvri^re libre agricol
)bjet est toujours le m^rne^ precede du m6
litaire : ofiFrir aux travailleurs dans Temfa
poraire en ^change d'un labeur utile ; ren<
Idvoy^s qui, succombanta Tadversit^ ou aa
lements, ont perdu la notion du devoij
xavail.
Relativement au nombre immense d'ir
30urrait utilement s'appliquer, ce genre de
;rop pen r^pandu. En France, il existe k p<
m mati^re d'assistance par le travail agrici
3lus moralisateur et aussi le plus productif,
'aire chez nous.
Quand nous aurons fait connaitre les j
jes diverses organisations, d'apr^^s des not
me r6cente tourn^e en Belgique et en Hoi
)eut-6tre contribu^ a h&ter la solution de c(
'eux et difficile : Assurer Texistence de toi
nalheureux, en ^change d'une t^che adapts
iomme consequence, diminuer le vagab(
nendicite, d^sencombrer les prisons.
Dans r6tat actuel de notre legislation,
uite de circonstances fftcheuses dont il n'es
le trouve pas d'ouvrage, et, partant, pas d
ixpddient, pour ne pas mourir de faim, que
►u de se faire arrfiter comme vagabond.
Mendiant, quand il demande et rcQoit 1
»ond, quand, sans moyens d'existence, il a <
aent qu'il ne pent payer, la loi ne disting
ans se pr^occuper du mobile qui a fait ag
ans tenir compte de la necessity impanel
>eut le comdamner k la prison.
A defaut d'autres refuges, le dep6t de n
3 convert et la nourriture,lui apparalt com
e salut, comme un sort relativement heure
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u^
L'ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL AGRIGOLE. 351
Apr^s un court s^jour, qui n'a rien de bien r^confortant, il
en sort d%rad6, aigri, m^ditant sur son crime qui consiste h
n'avoir pu se procurer d'ouvrage ; et, s41 ne survient pas quel-
que heureux incident, ou quelque intervention bienfaisante, il
retombera bientdtdans Tomi^re, reviendraau Ddp6t et entrera
dans la categoric des r^cidivistes.
L'intervention bienfaisante devrait 6tre Tassistance par le
travail. Et pour produire tons ses efifets, il faudrait qu'elle se
manifesto avant la premiere chute, avant la premifere condam-
nation.
En 1891, un de nos d6putds les plus distingu^s, M. Maurice
Paure, pr^sentait ^ la Chambre une proposition de loi ayant
pour objet la creation d'asiles pour les invalides du travail, et
de maisons dites de travail pour les ouvriers valides sans
ouvrage. — Et voici ce qu*il signalait dans son expos6 des
motifs :
« Quand un homme a subi une premifere condamnation ,
pour vagabondage et mendicitd, il est condamnd par celam^me
Ji devenir un r6cidiviste.
« Sur une moyenne de 60000 individus conduits aud6p6tde
police, ceux qui onl dt6 arr^t^s pour vagabondage et mendicity
figurent pour un tiers.
« 11 en est, parmi ces derniers, qui sont des vagabonds
d'habitude et des mendiants de profession; mais laplupartsont
des malheureux sans travail et sans abri, de pauvres gens qui
n ont pas eu de gtte le soir, et qui n'ont pas trouv6 de place
dans les asiles de nuit, ou qui ont 6puis^ les trois jours r^gle-
mentaires accord^s dans ces 6tablissements. »
Cette observation vise sp6cialement Paris qui poss^^de d'im-
portants moyens d'hospitalisation temporaire, dus en grande
partie k Tinitiative priv^e.
L'argument n'a que plus de force en ce qui conceme la
banlieue et les d^partements limitrophes de Paris, oil lenombre
des individus sans travail et sans abri augmente d'ann^e en
ann^e, et o\x il n'y a pour tout refuge que des d6p6ts de mendi-
city, ou m6me moins encore.
« On les arrfite, continue le rapporteur, et on les relllche,
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r
I
L'ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL AGRICOLE. 353
le sentiment d'aller se livrer k des inquisiteurs, qu*il ne soit
pas contraint do se courber, comme pour subir une peine ou
une degradation.
C'est ici que Tintervention de la bienfaisance privde est n6-
cessaire pour donner Ji cette sortede charity, car cen est bien
une, un caract^re discret et affectueux, pour faire en sorte que
le secours donn6 n'ait pas Fair d'une aumdne, que le mode
d'information sur r^tat et la condition de la personne soit r^»duit
aux moindres formalit^s et ne soit pas une enqu^te judiciaire,
que le registre d'entr^e ne soit pas assimil6 k un registre d'^crou ,
que le moral de Tindividu soit relev^ et non humili^.
II faut que Tesprit de la direction, le caract^re du personnel,
Vallure g6n6rale d'un tel ^tablissement, donnent k ses h6tes
Timpression d'un milieu familial, d'unc certaine libertd, du
calme et de Tapaisement si n^cessaires aux malheureux tour-
ment^s par les rigueurs dela vie. II faut qu'apr^s la premiere
p^riode de recueillement, de r^confort physique et moral, les
individus hospitalises comprennent qu'ils ont aupr6s d'eux,
non des gardiens, mais des guides, non des juges, mais des
conseillers.
Alors apparait Timmense importance de la question du pla-
cement, question difficile entre toutes, mais qui est le comple-
ment necessaire, Texutoire indispensable de toute oeuvre
d'assistance par le travail, industriel ou agricole. Car ce n'est
pas tout de donner Tabri et la nourfiture, d'occuper les bras,
d'enseigner k Tun ou k Tautre le maniement d'un outil ; ce
n'est que la moitie de la besogne. 11 s'agit de faire reprendre k
rhomme rhabitude d'une occupation r^guliere, de Tameiiorer
enpeu de temps, assez pour pou voir le recommanderJi un patron,
le placer, le r^integrer dans le monde du travail, en un mot,
pour assurer son existence ulterieure par ses propres moyens.
Telle une barque desempar^e par la bourrasque et jetee k la
c6te, qu'il faut r^parer d'abord et remettre k flot ensuite.
Plus cer^bultat sera vite obtenu, et plus I'oeuvre rendrade
services; car pour un nombre donnd de places, moins les
s^jours seront longs, plus grande sera la faculty d'admission.
Nous aurons Jiciterplus loin Texemple dela modeste colonic
WVIE raiLAXTHROPIQUE. — II. 23
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354 REVUE PIIILANT
de Haeren (Belgique), qui, avecSC
h un ing^nieux syst^me de placec
ann6e prfes de 300 individus.
Mais examinons d'abord la colo
est le prototype de toutes les autres
ayant 6i6 fondle, il y a environ
soci^te priv^e, la Socidt^ de Bienfa
I. LA COLONIE ACRICOLE DE FI
Le programme de cette Soci6t6,
son acte de constitution, ^tait de
donnant une occupation et un ap
hommes valides, malheureux et si
Apr^s les guerres du commenc
^puise tons les pays d'Europc, des m
vaient sans ressources et sans emp
r^pandaient aussi bien dans les cam
tendaient k devenir Funique moye
de gens. C'est alors qu*on vit en 1
mifere fois une oeuvre d'assistance ]
humanitaire se doublait d'un bu
mise en valeur de terrains incultc
vente pouvait ^tre obtenue k tvhs I
En 1816, le g^n^ral Van don
des indigents k mettre en culture
un syst^me qu'il avait d^j^ mis lu
dans une colonic de Chinois ^tabl
11 se disait que si un homi
instruction, sans metier, sans habi
faire produire a la terre le moyen
raison, des indigents appartenant
vaient ^tre en ^tat de suffire ^ leurs
II ne s'agissait que de trouver d
des terrains, un local et le premier
Le travail agricole, une bonne
m^thodique devaient utiliser les
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L'ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL AGRIGOLE. 35;;
voir k leur existence, am^liorer leur moral, etles rendre utiles
k la Soci^t^, aa lieu qu'ils lui fussent h charge.
D^s la premiere annde, plus de 20000 souscripteurs appor-
taient a roeuvre leur obole, formant un total d'environ 55 000
florins ou 115 000 francs. On acheta 300 hectares de terre
d'assez mauvaise quality dans la province de Drenthe, pr^s de
Steenwijk, et la premiere colonic fut cr^6e, sous le nom de
Fr6d6riksoord. Une partie de ce domaine 6tait une plaine sa-
blonneuse, coup6e de petits cours d'eau;rautre 6tait bois(5e.
Pour payer cette acquisition, la Socidtdfitun emprunt amorlis-
sable en 16 ans. Avec le surplus de ses ressources, elle con-
struisit 52 maisons ou Ton installa 52 families, formant une
population totale de 356 individus. A chaque maison ^tait
raitach^e une concession de 2 hectares et demi.
On. 61eva aussi une 6cole, un magasin d'approvisionnc-
ment, et on rendit navigable la rivi5re qui traversait la pro-
pri6t6. La main-d'oeuvre pour tons ces travaux fut presque
enti^rement foumie par les nouveaux colons.
Deux ans plus tard, la Soci6t6 installait une seconde co-
lonie de 50 habitations. Tannic suivante une troisi^me, en
1816, une quatridme, de sorte qu'en 1821, il y avail en tout
200 maisons de construites, abritant une population de
1450 personnes, et 300 hectares de terre etaient en pleine
culture.
La Soci6t6 comptait 23 000 souscripteurs qui lui versaient
chaque ann^e 95000 florins, soit plus de 200000 francs do
colisations.
La conduite de Texploitation 6tait confine h un directeur
assists de quatre sous-directeurs. Chaque colonic (5tait divisee
en districts occupds chacun par 25 colons, sous la direction
d'un surveillant, qui pouvait ^tre pris parmi des colons capa-
bles, ayant fait leurs preuves au point de vue du travail et de
la bonne conduite.
Quelques regies de discipline dtaient ^videmment neces-
saires pour tenir en main une si nombreuse agglomeration
d'individus.
L'insubordination, une conduite irrdgulicre, Tivresse, des
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REVUE PHILANT]
es non autoris^es, la pares
ameubles ou du materiel
ci consistaient en amendes ]
ans les cas graves ou en cas
pable. On a rarement ou 1
iS de rigueur. La tenue g
[ du temps, excellente.
z'\ maintenant comment ont
aandation du comity, d'une i
a de toute personne honora'
*t sans occupation, seul ou
our entrerk la colonic, en r
— 11 lui est donne connaissa
• commencer, on le place co
^tablies sur le domaine et
installc, s'il est c^libataire,
narid et p^re dc famille, dai
ites par la Soci^td. II y troui
Is, dont la soci^t^ lui fait Ts
)mmence par travailler a 1
g^ndrale. 11 y osl nourri, aii
son travail soit convenable
un l^ger salaire.
)Out d'environ six mois, qua
cultiver h pen pres seul, c'e
surveillant gdndral de Te:
les deux hectares et demi
luifournit des sonienccs et
ne vache ou des brebis, ni(
I passe au rang de cultivatei
rmais, il est maitre chez lu
son potager, il vendra au mz
jxifeme ou Iroisieme ann^o,
m plein rapport, il aura a p?
\Y tout loyer, une redevance
'ois install^ dans sa maison
re cullive et exploile a sa j
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L'ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL AGRICOLE. 357
sonnel, sous la surveillance g^n6rale du directeur, et avec la
seule restriction de ne pas vendre en dehors de la colonic le
foin, la paille et le fumier, dont la Soci^t^ a toujours besoin
pour reuforcer le produit de ses propres fermes, et qu'elle paj e
au cours du march6.
11 a aussi toute liberty de travailler h. gages au dehors,
quand Toccasion s'en pr^sente, par exemple k TSpoque de la
fenaison.
S'il ne r^ussit pas comme fermier libre, il redescend au
rang de simple ouvrier, et est employ^ dans une des fermes ou
dans les ateliers d'industries accessoires.
Chacun se nourrit selon son goAt et ses moyens. Le pain,
le seigle, les pommes de terre, le saindoux, lesoeufs, lejambon,
le laitet le fromage sont en g^n^ral le fond de Talimentation.
La bi^re n'est pas d^fendue, mais on n'en consomme pas
beaucoup, car on n'en vend pas dans Tinlc^rieur du domaine.
D' ailleurs, les colons ont toute liberty d'acheter au dehors tout
ce qui leur plait.
Quant k I'habillement, Ik aussi, liberty complete, lis peu-
vent acheter des chaussures, du linge, des blouses k la colonic
m^me qui fabriqueces articles.
En dehors des occupations agricoles, les colons trouvent k
s'employer dans les ateliers, notamment en hiver oil il y a
moins k faire pour les travaux du dehors. 11 y a un atelier de
charpente, une forge, un atelier de tissage oil Ton confec-
lionne des sacs, des couvertures de toile, des paillassons, un
atelier de vannerie ou Ton fait des paniers, des malles en
osier, des sieges de jardin, des corbeilles de tous genres. —
Enfin, il y a, dans la colonic, des tailleurs, des cordonniers et
des boulangers.
Dans tous ces metiers, on forme des apprentis, pris parmi
lesenfants des colons, selon leur gout personnel et leurs apti-
tudes.
Les produits de ces industries sont en grande partie uti-
lises dans la colonic m^me, sauf la vannerie, qui est vendue
au commerce en assez grande quantit6, et fournit un benefice
appreciable.
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338 REVUE PHILANTHROPIQL E.
En 1882, on a cr66 une importante fabrication, tr^s appro-
pri6e a ce milieu de petite culture. C'est une usine pour les
conserves de Idgumcs et de fruits. La quality du sol se pr^tait
admirablemonl au d^veloppement de la culture maraich^re,
^tant sablonneux et facilement irrigable. Les fruits y r^ussis-
saient 6galement tr^s bien. La creation de cette nouvelle in-
dustrie a vivement stimuli le zele des cultivateurs. Et Tusine
est maintenant assez largement approvisionn^e pour produire
chaque ann6e de 18 k 20 000 boites de conserves. Trente
jeunes filles ont trouv(5 k s y employer, en dehors, bien en-
tendu, du personnel d'hommes et de jeunes gens, auxquels est
rdservd le plus gros de la besogne.
Cest done 1^ une precieuse ressource pour la colonie,
puisque cette fabrication stimule Textension des travaux agri-
coles, emploie des bras disponibles, et procure des benefices a
la Socidt^. Enfin, on a cv66 tout r^cemment une installation
pour la fabrication du beurre et du fromage. Les appareiis
refrigerants, les caves k tempc^^rature constante sont organises
d'apr^s le systc^me danois.
Ces industries annexes, qui ont ndcessitddes mises de fonds
d'une ccrtainc importance, ont notablement am6lior6 le ren-
dement g6n6ral de la colonie.
L'enseignement est parfaitement organist dans la colonie,
et a toujours et6 Tobjet des soins particuliers du comity de sur-
veillance. Cinq Creoles ont 61^ bMies sur les diflf^rents points de
la proprietc'*, et chacun des directeurs est un instituteur nomm6
et rdtribu^ par I'Etat.
Ceux-ci sont aid^s par six instituteurs et deux institutrices
libres (car la population scolaire est fort nombreuse) ; et, en
outre, par deux maitresses spdcialement charg^es de Tense i-
gnement des travaux mahuels.
Les ecoles sont baties dans d'excellentes conditions; toutes
ont un vaste jardin, un gymnase et un prdau couvert. L'a^ra-
tion des salles est largement assur6e. II n*y a jamais plus de
quarante enfants r^unis dans une m^me classe sous la direc-
tion d'un maitre.
Une commission de trois membres nomm6s par le ministre
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r
L'ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL AGRICOLE. 359
de rint6rieur, sur la presentation des membres du Comity, a
le contrdle g^n^ral de Tenseignement.
C'est le directeur de la colonic qui a la surveillance des bA-
timents et des ^l^ves. II signale ceux qui ne fr^quentent pas ia
classe^ et adresse aux parents les admonestations n^cessaires.
A r&ge de 12 ans, quand les enfants quittent T^cole pri-
maire, ils ont la faculty d'apprendre le dessin et de suivre les
eours du soir, oil ils regoivent un enseignement plus g^ndral
etplus 6lev6. II y a enfin, pour les sujets d'6lite qui manifes-
tent des dispositions sp6ciales, une s6rie de cours pr6para-
toires aux emplois administratifs, soit pour les fonctions de
commis, soit pour entrer dans les chemins de fer, les postes ou
les teldgraphes.
Au point de vue du placement au dehors, cet enseignement
a une importance considerable. C'est le vrai moyen d'all6gerles
charges des families trop nombreuses, de cr^er des places dis-
ponibles dans la colonic, et en m6me temps d'utiliser les faculty
des jeunes colons qui ne se sentent pas de dispositions pour la
culture de la terre.
La colonic poss^de aussi une biblioth^que, riche de plus de
1 800 volumes, dont un quart environ sp^cialement destine k
lajeunessc. — Les ouvrages sont prM^s gratuitement aux fa-
iniiles; et c'est la grande ressource des soirees d'hiver. Le
nombre des pr^ts d^passe chaque annde 5 000. C'est dire les
services que rend cette fondation, due presque exclusivement
^ux liberalites des particuliers.
Une autre creation importante, dont la ddpense a 6t6 de-
"^y^e egalement par un g6nereux donateur, est celle de TEcole
" horticulture et de TEcole de sylviculture.
L'enseignement tout special qui y est donn^ embrasse une
P^riocle de trois ans. Lk encore, on forme des sujets distingues,
"^* He manqueront pas de trouver plus tard au dehors des em-
P*^^'s bien retribues.
Eixfin, pour que cette description soit complete dans sa
'^^^Vete, mentionnons qu'il y a sur le territoire de la compa-
^^^ deux eglises, une catholique et une protestante ; et une
*iSoii pour les vieillards incapables de travailler, dans la-
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LASSiSTANCE PAR LE TRAVAIL AGRICOLE. 361
s'ils sont en 6tat de fournir un travail convenable, Taident k
vivre, Tain^ prenant autant que possible la place du pfere.
Par le fait, il entre tout auplus, chaqueann^»e, en moycnne
dix k douze families dans cette immense Colonie.
Ceux quiy sont install^s y restent; mais, par suite de Tin-
suffisance des ressources financi^res, il ne se cr^e presque pas
de maisons nouvelles. La sphere d'action de Tceuvre se trouve
ainsi forc^mcnt limit^e, tant qu41 ne lui viendra pas de nou-
veaux dons ou de nouvelles souscriptions, pour 6tendre ses
constructions.
Tout autres seraient les moyens d'action de la Soci(^t6 si
elle se bornait a garder les families pendant le temps stricte-
ment suffisant pour les mettre en ^tat de gagner leur vie, pour
les rdconforler aprds des p^riodes de mis^re, pour les perfec-
Uonner dans un metier, pour les placer d*une mani^re quel-
conque.
Alors le roulement annuel de la population de la Colonie, ft
^lendue et k ressources 6gales, pourrait profiter k plusieurs
^^entaines d'individus, et au lieu d'etre un grand phalanstfere
^ffricole, ce serait une a3uvre d'assistance, d'apprentissage et
"6 placement, qui rendrait des services infiniment plus nom-
*>reux, plus rapides et plus pratiques.
C'est dans ce sens que s'est exercee Tactivitd 6clair6e du
^omit^ (les Colonies ouvri^res libres de Belgique, dont nous ex-
posei»ons Topuvre dans la seconde partie de cette ^tude.
ll. LA COLONIE OL'V«I]feBE LIBRE DE HAEREN (bELGIQLE)
^^'est au d^but de Tann^e 1893, qu*un groupe de philan-
op^g beiges, incites par Texemple des fondations faites en
" ^ude et en AUemagne, se forma pour cr^er ft Bruxelles une
ison de travail.
■--^ but ^tait toujours semblable : ofTrir ft Touvrier valide et
^ occupation le moyen d'employer ses bras, lui Monner un
^*^ temporaire, la nourriture, des vfetements, et, ce qui ca-
^^^^risela fondation beige, Taider ft trouver un emploi.
*^H Maison de travail ouverte en f^vrier, dans un des fau-
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362 REVUE PHILANTHROPIQUE.
bourgs de Bruxelles avail d^j^, au bout de six mois, recueilli
135 malheureux. — II est intdressant de parcourir les rapports
annuels de la Soci^t^ et de suivre la progression des entries,
les ameliorations rdalis6es, et surtout Torganisation si mitho-
dique et si efficace de TcBuvre du placement.
Si le but poursuivi par le Comity beige est identique a
celui des fondateurs des colonies agricoles hollandaises, Tor-
ganisation de I'entreprise, surtout ^ Torigine, en a ei6 infini-
ment plus modeste ; elle a quelqu^ analogic avec Tassistance
par le travail, telle quo nous la voyons fonctionner chez nous.
Le Comity beige commenga par louer dans un des bas quar-
tiers de la ville, dans la region des terrains vagues, une mai-
son quelconque, moyennant un loyer annuel de mille francs;
et il obtint de la commune la concession de 60 ares de terre
situ6s k proximity. — Que nous sommes loin des 1500 hectares
de Frdderiksoord !
On installa des lits, une cuisine, un r^fectoire, et les diflf6-
rents services les plus nicessaires, aussi simplement, aussi 6co-
nomiquement que possible.
Les hommesfurent mis au travail de la terre, sous la direc-
tion d'un surveillant-jardinier, et, dans Tespace de quelques
mois, les 60 ares de terrain, nagu^re encombr^s de detritus et
de gravats, ^taient transform6s en un potager, fertilises par les
boues des rues que fournissait la ville, et donnaient, au debut
de rete, une abondante r^colte, qui fut consommie paries pen-
sionnaires de la maison.
En dehors de la culture, les hommes etaient, bien entendu,
employes a tons les travaux de la maison, a I'entretien, a la
cuisine, aux nettoyages, aux services de tout genre; et de plus,
pendant la mauvaise saison, a la fabrication de fagots et de
margotins.
Le soir, des lectures publiques etaient faites sur des sujels
instructifs et divertissants. — Une fois par semaine, un insti-
tuteur de Bruxelles, tout devoue k roeuvre, venait faire une
conference, choisissant particuli^rement comme themes, les in-
ventions modernes, les entreprises de Tindustrie et de Tagri-
culture, la biographic d'hommes arrives, par leur travail et
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L'ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL AGRIGOLE. 363
leur perseverance, h de hautes situations, de faQon a bien in-
culquer 4 son auditoire, que le travail et la conduite r6gl6e
sont la source de tout relfevement materiel et moral.
Unebiblioth^ueetm6mequelquesjournauxillustresetaient
mis a la disposition des habitants de la maison.
Le r^glement intdrieur n'a rien de bienrigoureux. Le matin
k 6 heures, les hommes aptes aux travaux de culture se ren-
dent sur le terrain, et travaillent jusqu'^ midi sous la direction
d'un premier ouvrier choisi parmi les plus capables et les plus
s^rieux. Ceux qui savent un autre metier s*occupent dans Tate-
lier,selon leurs connaissances sp^ciales. A midi a lieu le diner,
puis la recreation. Le travail est repris k unc heure et demie,
jusqu'a six heures du soir, puis vient le souper, une lecture pu-
blique, et k neuf heures le coucher.
A rheure des recreations, Touvrier pent sortir librement,
pourvu qu'il avertisse le surveillant chef, et qu'il lui dise le lieu
oil il se rend et Tobjet de sa sortie.
La journee du dimanche est entierement consacree au re-
pos. Toute liberie est laissee aux hospitalises de remplir ou
^on leurs devoirs religieux ; ils peuvent se rendre en ville de
neuf heures k midi et de deux heures h sept heures.
Voici maintenant dans quelles conditions se font les admis-
sions et dans quelle mesure le travail est retribue.
Pour toute formalite, Thomme qui desire entrer k la colonic
"Oil se procurer aupr^s d'un protecteur quelconque, d'un par-
^iculierqui le connait, d*un juge de paix, d'un deiegue de la
Boui^e du Travail, etc., un bulletin de la Societe, libelie
conanne suit :
MAISON DU TRAVAIL
COLONIE OUVRIERE LIBRE
*-^ soussigne 'propose k Tadmission dans la Colonic ouvri^re libre le
Donaine
- u ^^ Pr^sentera au bureau du Directeur entre 8 heures du matin et
'•^^ures dusoir.
^^liyrT6 k , le
Bourse du Travail, VEmploye d^Ugue,
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364 REVUE PII ILANTHROPIQUE.
II faut dire qu'en Belgique, les Bourses du Travail, 6traii-
g^res k tout r6le politique, s'occupent efTectivement de venir
en aide aux travailleurs dans Tembarras.
Une marge est r^serv^e pour les renseignements qu'on pour-
rait, le cas ^chdant, fournir sur Tidentit^ du porteur.
Ces renseignements et cette demande d'admission sont
donn(5s par la personne qui recommande le postulant et qui a
^16 Tobjet d'une soUicitation de sa part.
La Soci6t6 a fait imprimer au bas de ce bulletin, la note
suivante qui resume enti^rement le but de Toeuvre et qui pour-
rait 6tre grav(5e au fronton de la Maison :
Tout homme qui veut travailler, dans la mesure de ses moyens, est ad-
mis, occupy, log^ et nourri k la Golonie, quels que soient ses antecedents
ou son origine.
Au moment o\\ Touvrier sans travail se pr^sente pour fetre
admis dans la maison, il luiest donn^ lecture du r^glement im-
prim6 au dos d'une feuille de papier, qu'il doit signer, du mo-
ment qu'il en accepte les termes, et ou il inscrit son nom, son
^ge, sa profession, sa derni^re r(5sidence, son lieu de naissancc
et son domicile de secours. S'il a un easier judiciaire, il doit
aussi en faire mention. On prend note (^galemcnt des effets el
objets qu'il a sur lui k son arriv6e.
Au bout de tr^s peu de temps, huit ou quinze jours, Tou-
vrier tant soit peu capable ou laborieux rcQoit un I6ger sa-
laire. Le montant en est 6videmment trfes faible, variant de 25
a 30 centimes par jour, au maximum; c'est cependant une r^
tribution raisonnable, si Ton r^lldchit qu'en dehors de cette
gratification, il est loge, pourvu des soins de propret6, et
nourri trfes suffisamment, aux frais de la Soci6t(5.
Mais rimporlant au point, de vue du relbvement moral, au
point de vue de la sauvegarde de Tamour-propre de I'individu,
c'est qu'il ne reQoit pas la charite. Ce n'est pas un indigent au-
quel on fait Taumune sous une forme quelconque : c'est un
travailleur qui se rend utile dans la mesure de ses moyens, en
attendant une situation meilleure, et qui est r^mun6r6 pour
son labeur d'une faQon ing6nieuse et discrete.
Les cons(5quences de ce. syst^me sont faciles k ddduire.
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\AVAIL AGHIGOLE. 36:i
ravail, aspire de nouvcaii a
e lui donncr la s^curitd du
le ou d^bauch^, il se forme
s*aperQoil qu*on n'en meurt
1. La part jfaite a la culture
rprend agrdablement. Com-
lais entendu une parole in-
3SSUS tout, la liberty relati-
est aecordee leur donne
itacte, qu'ils sont la de leur
our ^chapper aux entraine-
, ils sortiront uu jour de la
humiliation, reconfort6s et
documents publics par la
npte de son ddveloppement
ot de ses ressources, de ses
3 d*existence, elle avait rcgu
« rCEuyre du Travail », ijn
donateurs lui fournirent un
ae centaine de souscripteurs
)mme totale de 2300 francs ;
ae de ces souscriptions ^tait
it^ressante il parcourir. En
donn6 chacune cent francs,
rencontre presque unique-
iq francs, ^manant de mo-
ommerQants, d'hommes de
riche cit^ comme Bruxelles !
lans la suite. Mais du ca-
i modestes se d^gage I'im-
B d6but, il y a une certaine
, il y a un sentiment de soli-
courage pour lavenir aux
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VUE PHILANTHROPK
5. Et quoi que puisse
rerait assur^ment enc
modeste citoyen qui
mais qui les donne, <
e au millionnaire disl
Maison du Travail, (
5 seront les gros bata
vivre les oeuvres de (
peuple, Tatelier, la f
jc-mdmes par des mon
; qu'ils connaissent;
j services que rend la
dus fermes et les plui
consiater que, d^s 1
)athie en faveur do Vc
insensible ou incrddi
s que ceux constates
ionnement ?
t, celui de 1894, enre;
is et de 8300 franc
ns s^6lfevent ^6800 1
Ts pour 1 000 et 1 200
francs.
y a pour 3200 francs (
progression est conti
3mitd redouble d'acti'
:rc la fondation en (
IS ceux qui vont veni
ille de Bruxelles une
terrain, et la dispoi
boues de rues pour
d^frich6 par les pensi(
suivant, une abondan
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ICOLE. 367
piques g6n6reux
1 pour baiir une
^ts du chemin de
itale et lou^ par
francs par an.
ort pen dispcn-
ises de Scine-et-
5s et paralleles,
tout en briques
t de plain-pied,
mrs marches. li
•vent de grenier
ration et la lu-
js sont suffisam-
e buanderie, un
mi un cheval et
leux vaches, un
couvert; le tout
se d6tachc on
nere litre. — Et
jui ont pour tout
Her de toile, on
amille de culti-
rouver tout pr6-
rtable, libre de
confortde par la
ion que donne le
ni pas se prolon-
is son d6veloppe-
attendre trop
lent par oublier
tier a reprendre
irekeix-m^mes.
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»AR LE TRAVAIL AGRIGOLE. 369
5S qui parlent d'eux-mfemes :
f avait eu 135 admissions.
— 195 —
— 201 —
— 268 —
I s^jour avait 6l6 de 4 semaines. Cer-
se placer au bout de 8 4 10 jours; —
leureusement, sdjournaient pendant
lie, soil pour cause de faiblesse phy-
le k un travail r^mun^rateur. On cite
ireux, incapable de tout effort s^rieux,
►rit, quoique jeune encore, qu'il a fallu
iemi,et qu'on a pu placer difficilement
[u'il n'a m^me pas pu conserver. Mais
omme celui-ci ne se pr^sentent pas
les de mesures d'hospitalisalion sp^-
quatre ans h peine, de mars 1893 k
at6riel de 80 lits, en tenant compte
de Haeren n'a 6tdinstall6e qu'en 189S,
)r6s de 800 malheureux, auxquels elle
Tentretien, un l^ger salaire et, k un
IX, un emploi. Et cola avec un budget
e 20000 francs,
'analyse :
vons dit, ont 6t6 concedes moyennant
mt Ji la maison actuelle construite a
^ralit^s particuli^res,elle ne coiite Ji la
Tais d'entretien. Les principales d^-
i'alimentation n^cessaires pour com-
din, la literie, le combustible, la r^tri-
mati^res premieres pour la culture
recettes, en dehors des dons et des
gure un b^n6ficc d'environ 2000 francs
3n des fagots.
ire avec trfes pen d'argent, avec beau-
fivdrance, d'energie et d'initiative per-
de la vie ont 6i^ recueillis et ont eu
II. 24
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370 REVUE PHILANTHRO]
la sensation d un milieu familial, au li(
un d6p6t de mendicity, ou le regime esl
sont r6pugnants, od la d^chdance est i
avili et m^prisd. Des jeunes gens, qui
vagabondage et peut-6tre du crime, so
ouvriers, apr^s quelques mois pass6s k
grand air, loin des mauvaises frequent;
rinjustice humaine ou de la mauvaise
ralement et physiquement par Jes angc
ont (5t6 r6confort^es, ramen^es a envisa]
leurs moins sombres, pourvues d'un gj
Et tons, h c6te du secours mat6r
lavement intellectuel, le secours moral,
tion, Texemple du travail, de Tordre,
sont sentis accueillis et non internes,
voie par la persuasion et non pouss6s ^
troupeau de formats,
lis ont iravaill^, et ils ont 616 pay^s
sortis de 1^, librement, comma ils y 6i
sans humiliation, pouvant se presenter i
que ce soit, ameliorc^s par le travail, re
dignity, capablcs de renaitre au bien.
*
* *
Si maintenant il fallait ^tablir un pa
agricole hollandaise de Fr^d^riksoord
libre de Haeren, notre tache serait assez
institutions n'ont, en somme, gul^re de [
Leur but seul est idcntique : c'est la r^
parte travail agricole.
A Freddriksoord, 'c'est un immense
pens^, depuis plus d'un demi-si^cle, des
terre, a batir desmaisons, des fermes,
c'est un modeste terrain d'une quinzai
strict n6cessaire pour donner un abri el
cinquantaine d'individus.
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L'ASSISTANCE PAR LE TRAYAIL AGRIGOLE. 371
Mais k Fr^ddriksoord, nousl'avons signald, malgr6 la per-
fection des cultures et de rorganisation, les services rendus
sont relativement restreints ; les families s'y immobilisent, le
nombre des nouveaux arrivants est mimme, puisqu'il ne s'y
cr^e que rarement des places disponibles ; et si de nouvelles et
importantes subventions ne surviennent pas k la Soci^t^, ellq
estvou6e api6tiner sur place, peut-6tre m6me ksetrouverdans
Tembarras.
Au contraire, k Haeren, par le soin tout particulier apport^
k TtBuvre de placement, chaque semaine des lits deviennent
libres ; le roulement est continu ; — et avec ses faibles res-
sources, son modeste dortoir et sa petite culture, Toeuvre re-
cueille chaque ann^e plus de deux cents personnes, les'pr^serve
de lamisftre, de la prison et les ram^ne dans la voie du travail
etde rhonneur.
Ce n'est pas pour critiquer le syst^me hollandais, qui a sa
raison d'etre, de par les cir Constances, d'oii il tire son origine,
de par la nature du pays, de par le nombre et le caract^re de sa
population. Ce n'est pas non plus un bl&me a Tadresse du co-*
mit^ de la Soci^t^ de Bienfaisance des Pays-Bas, dont Tintelli-
gence et le sens pratique n'ont d'6gal que le d^sint^ressement
et le d^vouement de tons les instants.
Mais si nous examinons ces deux creations a notre point de
vue national, c'est-^-dire au point de vue du profit que nous
pourrions en tirer pour notre pays, c'est 6videmment au sys-
t6me beige d'assistance par le travail agricole que nous devons
donner lapr^f6rence, comme^tant celui qui, avec le minimum
de d^penses et lorganisation la plus sommaire, donne les
r^sultats les plus rapides, au profit du plus grand nombre
possible d'individus.
« La plupart du temps, ^crivit derni^rementun de nos ju-
ristes les plus distingu6s, c'est faute d'une intervention judi-
cieuse et prompte que des hommes, dont les capacit^s et Tin-
lelligence sont au-dessous de lamoyenne, descendent lesdegr6s
deT^chelle sociale. L'ouvrier sans travail, press^par la faim et
le froid, n'a qak choisir entre la mendicity, une mauvaise
action ou Ied6p6t. » C'est Ied6p6t qu'il choisit g(5n^ralement, et.
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312 REVUE PHILANTHROPIQUE.
dans r^tat d'abattement oil il se trouve, on ne pent demander
delui ni un acte do courage, ni une grande resolution.
La promiscuity avec les vagabonds et les malfaiteurs, le
regime du D6p6t, Vallure quelque peu brutalc d'un personnel
qui a parfois 3 ou 4 000 sujets, et d^s pires, a tenir en respect
(et c'est 1^ son excuse), Tabsence de tout r^confort moral,
tout cela n'est pas fait pour relever un homme. On le sustente,
onl'hdberge pour un temps, puis on le rejette sur la voie pu-
blique, en luirecommandant de se tirer d'aflairecomme il pourra.
A cela on objectera qu*il est impossible i une grande admi-
nistration publique de pourvoirau placement deceuxqui vien-
nent par milliers 6chouer k sa porte, et que c'est d6jk une charge
enorme de les abriter, de les nourrir, de les occuper tant bien
que mal k des travaux int6rieurs. On est submerge par ce flot
qui augmente d'ann^e en ann6e.
Mais ne devrait-on pas plut6t rechercher s*il n'appartient
pas k d'autres qu'aux pouvoirs publics d'apporter une solution,
au moins partielle, un remade au moins relatif, k ce doulou-
reux 6tat de choses?
N'y aurait-il pas un r6le hautcment bienfaisant et morali-
sateur k jouer, en venanl au secours de Tindividu non coupable
— en offrant k celui qui ne demande qu'i travailler, mais que
Tadversitd poursuit, un refuge d'aspectfamilial,exemptde con-
tr6le policicr, ou il puisse gagner sa nourriture avec ses bras,
et attendre des jours meilleurs?
N'y a-t-il pas lieu d'apporter aussi dans ce genre de charity
et d*assistance des iddes nouvelles de decentralisation, d all^ger
les grandes villes de tant de lourdes charges, de tant de mal-
saines agglomerations?
Ce qui a assure le succfes des colonies ouvriferesen Hollande
en Belgique, en Allemagne, ce sont les initiatives particuli^res
et locales. Des hommes devou6s, pen6tres de leurs devoirs so-
ciaux vis-k-vis de leurs concitoyens malheureux, se sont mis
les premiers a roeuvre. Les souscripteurs sont venus ensuite;
puis les municipalites, les provinces, TEf^t m6me, qui ont
consolide par leurs subventions, par des concessions de terre
ou de b^timents Tentreprise qui leur apparaissait clairement
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^AIL AGRICOLE. 373
es, comme un avantage
mme un 6l6ment d'am6-
aivailleurs malheureux.
e priv6e se mettrait en
lans plusieurs centres h
jue de Tassistance par le
lI pas de grandes diffi-
m^me pas a inventer, il
>armi les exemples pro-
urtout en Belgique et en
6jh r^sum^ a leur profit
lans les autres pays,
(car dans bien des d^-
TEtat puisse disposer),
hectares; on y ^Idverait
t pen compliqu6es dont
tmbreuses combinaisons.
3up de ddvouement per-
ir chez nous, chaque fois
tunes immdritdes et de
e semblable ne serait pas
fortunes de ce monde,
ju^s des Bourses du Tra-
une large communaut^
e ceux qui peinent et qui
rti, d'aucune confession,
die aurait de quoi tenter
I'il y a dans chacun de
p de situations doulou-
revenir, et, d'autre part,
3 ressources h mettre en
ttendu si longtemps; ce
ler k nos traditions de
us longtemps en arri^re.
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
Sauver de la prison ceux dont le seul crime est de ne pas
>uverd'ouvrage, faire des d6sesp6r^sde laviedestravailleurs
^nn^tes et courageux, voilJi de quoi
jhes, le d^vouement de lous ceux qi
iti^re de philanthropie et de r^habil
Aucune t&che ne serait pluseffic
§ments que Ton veut mettre en gi
itres, pour ramener au bien des vie
laiser les haines et les rancunes qu<
souffrance. — II ne faut pas qu'au
lisse, dans un pays d6mocratique el
jr errer sans secours et sans appui,
bles suggestions du d^sespoir ou de
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r
SIMPLICE
CONTE DE NOELt*)
II y avail dans un coin des montagnes dc la Crease une
famille de paysans qui ne vivait pas en paix. EUe se composait
du p^re paralytique et de quatre gardens dont T&ge variait de
dix a seize ans. lis ^taient violents, et s'ils ne connaissaient pas
la douceur, c'6tait sans doute parce qu'ils avaient perdu la m6-
moire des baisers de leur m5re ddfunte. Us dtaient paresseux
et par consequent travaillaient sans joie ; ils ^taient ^goistes et
par consequent toujours mecontents, ayant fait de leur per-
sonne une idole insatiable. Ils m^prisaient leur p5re parce
qu'il ne pouvaitrien pour eux, et au lieu de le servir avec defe-
rence, ils le narguaient de sa faiblesse. Aussi le ccBur du
malade s'etait aigri, et il restait tout le soir dans son vieux
fauteuil de paille, impuissant, jusqu'a ce que la resine fdt con-
sumee, songeant k son malheur et murmurant contre Tinjustice
de Dieu. Alors le domestique, anime de Thumeur mauvaise des
maitres, le portait sans egards sur sa paillasse ou il Tetendait.
Un hiver, vers le temps de Noel, cette famille etait reunie
autour de Tfttre et soupait de chMaignes bouillies trempees
dans du lait, de pain noir et d'une boisson faite avec des poires.
lis demeuraient silencieux. Le p^re songeait tristement i sa
belle metairie qu'il avait soignee vingt ans durant avec tant
d' amour etqui periclitait dans les mains de ses enfants et de ce
domestique sans bonne volonte, les fr^res se chicanaient pour
(I) Ce conte a 6U compost i I'mtention des enfants de rUnion fran^aise pour
le sauTetage de l*enfance, et leur a 6t6 lu h I'arbre de Noel.
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376 REVUE PHILANTHROPIQUE.
des motifs futiles qui ne mdritaient pas
ratlention, le chien Tomy r^vait en rej
flammes quand le Valet s*6cria :
— Mais qu'a done ce chien, il est agit
En effet, Tomy remuait la queue et raba
inquietude et son museau tourn^ vers la
quer qu'un visiteur approchait.
Com me il n'aboyait pas, on n'y prit pas |
et le maitre, qui ne se piquait pas de fai
exactes, rdpondit :
— Ce chien se nourrit trop, il devic
loup.
— 11 a mang^ toutes les poules, dit Tui
— Dame, reprit le valet, il ne veut
viennent picorer dans sa soupe ; sa sou
moins.
Et il se redressa tout fier d'avoir p
poules dont Testomac de Tomy s'cStait si b
— II n'en mangera plus, gronda Taind
ai pendu une au cou pour Ten d^goiiter.
Le plus jeunc dit en ricanant :
— C'(^tait notre derni^re, c'est pour eel
plus.
— Laissez Tomy tranquille, repartit
mieux que vous.
Mais on entendait vraiment un craquc
la porle s'ouvrit soudain. L'on vit un enfai
ri^re lui, toutc blanche de neige immaculd
a lune, avait un air irr^el de paysage c6\e
Ce n'est pas la coutume de chasser u
par un jour de neige, par un jour tout
dans toute autre chaumifere de la vallde
petit inconnu, outre sa place a Tdtre, une
Le maitre s'^tant tourn6 k demi s(
meler :
— AUons, approche, vaurien, chauffe
L'enfant surgit en pleine lumi^re. C'^
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SIMPLICE, 377
de douze ans v6tu pauvrement et k la mode des enfants de ces
campagnes, il s'assit sur la pierre de Tdtre aux pieds de Tin-
firme el lui dil en le regardant avec des yeux pleins de caix-
denr:
— Ne me chassez pas, je veux rester ici.
— Resler chez moi, fit Thorame avec m6pris, est-ce que je
n ai pas assez de ces paresseux d'enfants a manger mon pauvre
bien et la terre nous a-t-elle donn^ des grains de reste? D'oii
viens-lu, toi, d'abord?
Le nouveau venu eut un joli sourire muet et montra
rorient, puis il se tut, baissa les yeux, el, tirant de sa veste une
grive k demi-morte de froid, il T^chaufTa doucement pour la
rammer.
Au bout d'un moment Thomme remarqua que le petit
stranger arrangeait avec soin sa couverture qui avail glissd sur
ses jambes amaigries de malade, puis ramassait une k une
toutes les brindilles de bois perdues dans les cendres, les ras-
semblait et en avivait le feu k demi-mort que personne ne
s'avisait d'entretenir, de sorte qu'une bonne chaleur p^n6trait
ses moelles. II fit reflexion aussi que le chien avail pos6 la t6te
sur les genoux du petit, ne flairant pas un m^chant, que ses
membres dtaient forts, ses mains d^j^ fermes et endurcies au
travail et qu'il lui ob^irait peut-6tre. 11 consentit k le garder
quelques jours.
Et quand le brutal valet eut couchd le vieil homme, celui-ci
seutit des mains adroites qui bordaient sa paillasse, redres-
saient son oreiller, puis effleuraient son front d'une caresse et,
comme sous Tempire d'une magie, il s'endormit d'un bon som-
meilqu'ilne connaissaitplus.
Le lendemain il y avail tant de neige autour de la chau-
mi^re qu'il fallut la deblayer avec de grands et lourds balais de
Jxjuleaux, elle roulait k droite et i gauche en atomes menus el
brillants plus blancs que de la rapure de marbre, el, pen k pen
le chemin se d6couvrait tout noir au-dessous. Les fils du me-
tayer ne cessaient pas de se plaindre, soufflant dans leurs
^^igts, essuyant leur nez mouill^ sur la manche rude de leur
veste, puis ils se chicanferent, s'accus^rent de paresse, inter-
L_
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378 REVUE PHILANTHROP
rompirenl leur besogne pour se battr
stranger se mit avec ardeur au travail et
las de s'invectiver, ils virent que le sen
la route et que Ic chien Tomy y garabadi
Un peu honteux, ils suivirent cet en
maison, et le maitre, accoutum^ h leur h
— Avez-vous sit6t fini?
— Nous n'avons pas perdu de temps
Et ils n'os^rent protester ni m^me s
11 demeura avec eux les jours suiva
les travaux du dehors, coupant le bois k
ramassant les foug^res, enlassant les fe
chAtaigneraies, hachant lesbetteraves dai
est coutume a cette ^poque de Tann^e,
saient rien, s'allant mettre tout seul k
les fr^res, entrain^s par son exemple e
flexible douceur, ne tardaient pas a le n
II ne riait, ni ne pleurait, ni ne se pla
de son p^re, ni de sa m^re, et paraissail
Quand on lui demandait son nom, il se
pondre et comme, avec cela, il ob^issail
parlait que quand c'dtait n^cessaire, on 1
ceux qui n'ont pas de sagesse prennent
de la naivet6. Et comme il 6tait simple
Insensiblement une paix inconnue f
mi^re. Simplice parlait si doucement q
clever la voix aussi haut que par le pa
s'impatientait presque plus contre ses fil
de Simplice et que le tendre et imp6ri<
sans qu'il s'en rendit trop compte, fond
qu'un flocon de neige k la flamme.
Les travaux rustiques se poursuivaiei
rit6. Le poulailler regorgeait de poules
ment Simplice avait convaincu le chien,
plus manger aucune. C'est que Simpli
faire aimer, le don du ciel qui donne la
comprendre et ob6ir m6me d'un pauvi
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SIMPLICE. 379
encore la t^elle beautd du travail joyeusement accompli, les
fibres en avaient contracts la noble habitude. Quelquefois
Tun disait : Je ne suis pas bien ici et ma tAche est trop rude.
Alors Simplice changeait aussildt de place avec ce dernier et
ex^culait sa besogne avec lant de goikt et de promptitude que
I'autre en ^tait surpris et avait honte de s'dtre plaint. II arri-
vait que le cadet des gargons, un petit coiff^ de cheveux roux
et h^riss6s, 6tait charg6 de paitre la vache; il jurait, tempfttait
aprfes la pauvre b^te, Taccusant de toutes sortes de m6chantes
incartades. etillaramenait le soir k grands coups de fouet dans
ratable; le m^me animal, veilld par Simplice, broutait paisible-
ment sans chercher h allonger sa corde : voyant cela, le gamin
se rendait bien compte que c'dtait lui qui ^tait m6chant et non
la vache.
Cependant comme le maitre et ses fils croyaient Simplice un
innocent, ils ne remarquaient pas assez que ses id^es ^talent
belles et bonnes et que de les suivre rendait toute besogne 16g^re,
de sortequ'ils ignoraient que la Sagesse mfime les avait visit^s.
Bientdt une ann^e 6tait accomplie depuis que Tenfant
stranger avait franchi le seuilde la chaumiftre. Au fur et k me-
sure que s'^coulaient les jours, les paroles de Simplice deve-
naientplus rares, mais remplies da vantage d'inoubliables choses.
Un jour, il mena ses frferes, car il donnait maintenant ce titre
aux fils du paysan, dans les champs et il les arrfita pr^s du der-
nier sillon oi Ton venait de jeter le bl6 et qui formait une
courbe velout^e sur le renflement de la colline. — Voyez, dit-
"> quand on a convert la semence, il faut pour la faire germer
oe longs jours d'attente, — et un geste de lui leur fit saisir la
"isolation morne de laterre nue, — mais bientdt il y aura ici
"6 1'herbe drue qui portera plus tard un bl6 superbe que ne bru-
lera pas le soleil.
Et ils songeaient entre eux : « Lldiot est sorcier, il lit dans
* «veiiir, il salt que le bl^ sera lourd. »
^ais les arbres secou6rent toutes leurs feuilles qui jonch^-
rent les bois de leurs grandes mains d'or fr6missantes au vent;
1^ bruy^res qui rev^tent les montagnes de la Creuse d'une
?loire pourpr^e p&lirent, la neige vint qui couvrit les rochers
1
L
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380 REVUE PHILANTHROPIQl
de granit bleu et rendil noirs les yeux des i
nouveauon se r^unit autour de I'&tre, le s<
ch&taignes en parlant des f6es d^funtes. Et
dans la chaumi^re, mais avec un coeur pli
Or, la veille de cette grande f6le, le
tomba dans des reflexions profondes et eu
lui etaient jamais venues.
II appela Simplice.
L'enfant vint et le paysan lui dit :
— Simplice, quand tu es venu chez mc
as apporte Tordre et Taisance sous ce toit.
le disent mes fils etquel est ton secret?
Les yeux du jeune stranger brillaient d
grande joie, il r6pondit :
— Je n'ai que de la bonne volont6.
— Ecoute-moi encore, dit le maitre
attendri; je ne me reconnais plus, au lieu
mon malheur comme jadis, je ne songe qv
ma terre et k donner des conseils judiciei
Les b^tes sont redevenues grasses et proi
emplira les greniers, le domestique a soin
brutalisc plus, petit Simplice, c'est de toi
bien, tu ne me quitteras jamais?
— Homme, r6pondit Tenfant, je serai
On mit la bAche de Noel dans Tdtre ce
massive racine de ch^ne oil s'attachaitenc
mais, quand elle flamba, Simplice ne la vit
Et pour la premiere fois le paraly tique
reQu son bonsoir si doux et ses tendres soil
II lui sembla qu'il s'assoupissait en pi
r6veillait tout a coup, que Simplice ^tait ai
riant.
Alors le paysan s'^cria, a sa vue.
— Comme tu rentres tard. Oil 6tais-
Puis une terreur le prit, car Simplice i
ments de petit patre. ll^tait environn6 com
neuse. II disait :
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381
)urae vers mon Pfere. Et
lit et il sanglotait :
us, car je te reconnais k
me quitter.
js r^sigiK^ et bon, r6pon-
aqu'une grande lumi^re
du paralylique et Tem-
LCQUES FRfeHEL.
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LA SOI
SOCIETE EN FAVEUR DE
A LAUSAN
J ai dit, dans un pr6c^dent a
malheureuse pr6occupe, en Si
appartenant k loutes les claj
Vaud, pays protestantou il est
servants du culte d'etre ma
laiques et ministres de la rel
que les autres sur les questioi
ne cherchent point a agir s^j
traver I'effort individuel, acc(
connaissant k celui qui lui fou
lique. Rien de plus facile, aux
que d'obtenir du gouvernemeB
facilities matdrielles.
G'est ainsi qu'en 1881, a 1
Solidarity fut donn^e par MM
bureaucrates k la gare des i
altruistes avaient r6dig6 un
chaque terme avait 6i6 miirem
convoqu^ le plus possible de b
d'oublier leurs chefs et sup^rie
de tMonnements, la Soci6t6 se
naitsous Tinipulsion d'un com
(1) Les cantines scolaires, n" 4 de la
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LA SOLIDARITY. 383
rel^Te surtout des noms officiels. D'abord celui de M. le juge
cantonal Gusiave Correvon, actuellement encore pr6sident de
la Solidarity. Le nom de M. Samuel Cu^noud, k cette ^poque
maire de Lausanne ; celui du directeur des postes, M. Deles-
sert; celui d'un conseiller d'Etat en retraite, M. J. Berney ;
d'autres encore, qui Equivalent Jt un gage donn6 par le gouver-
nement. Et celadEmontre que les parrains de la SocitE nouvelle-
ment n^e n'entendaient pas rester inactifs. Cinq ans plus tard,
devenue grande fille, la Solidarity 6tait, le 1®' mars 1886, recon-
nue personne morale par d^cret du grand Conseil (Chambre des
d^put^s de TEtat de Vaud) et inscrite de ce chef au registre du
commerce.
En France, elle avail ddjJi pris rang : le 23 juin 1884, la
Society frauQaise d'encouragement au bien lui avait d§cernE un
dipl6me d'honneur.
Son but? A la fois g6ndreux et fort simple. Retirer les enfants
pauvres de leur milieu naturel, si ce milieu est viciE, puis les
conduire elle-mfeme jusqu*i TAge d'homme. En outre, venir en
aideaux p^resde famille honnfites et travailleurs, trop pauvres
pour clever leurs enfants avec soin. Adopter, de plus, lesorphe-
lius, les abandonn^s, et leur reconstiluer un foyer.
Pourmettre en pratique ces intentions excellentes plusieurs
moyens sont prdconisEs, et les circonstances particuli^res a
chaque enfant en d^terminent Temploi. Aux rejetons du vice
et de I'alcoolisme allferent d'abord les premieres soUicitudes.
Eolev^s a ceux qui les Eduquent pour le mal, ils spnt places
tlans des families honn^tes, et la Solidarity qui paie leur pen-
sion leur devient comme une tr^s haute et peut-^lre un peu
^inlaine providence. Je dis lointaine, car, 6tant donnE que le
dfeint6ressement sincere a peu cours dans le monde, on ne pent
toujours 6viter certaines experiences fdcheuses. Mais, avant de
voir les r6sultats, il faut considdrer Tintention premifere, telle
qu elle se trouve expos6e dans divers statuts du comit6 :
Art. 14. — La Soci6t6 exercera son action, soit en aidant
^ttci^rement des parents capables d'^lever leurs enfants dans
des principes d'ordre et de morality, soit en plac^ant les enfants
^hez des personnes dignes de confiance.
L
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38i REVUE PHILANTI
Art. 15. — Les enfants seront a(
par ordre d'inscription, sans egard
religion.
Art. 16. — Les demandcs d'adm
pr6sent6es au comity par dcs mer
rechercheront les enfants malheui
que les besoins les plus grands se
pauvres honleux.
Art. 17. — La Soci^td prend a sj
les d§penses n6cessaires pour metti
de gagner leur vie^ quand ils auron
sances ndcessaires.
Art. 18. — Le comity et ses \
enfants en bons p^res de famille et
loppement, afin de connaitre leurs i
les aider dans le choix d'une carrifei
Ces points principaux rdgl6s,
d'admission et de sortie. En princi]
k celui de cinq ans, comme limite
6tre ddpass6e) k celui de dix-neuf.
Mais la grande, la serieuse diffi
mille id^alea laquelle on confierait
la question de parfaite morality, il 1
des ndcessitds matdrielles. Ce n'^
c'dtait aussi le corps du d6shdrit6 q
meilleure. Et, pour la culture de 1
ndcessaires au second, la Solidaril
mince pension de 15 a 18 francs p
chose etait compliquee ; k la campa
res elle devenait plus facile. Mais il
en hygiene, on le perdait en culture
au hasard des champs comme une 1
que certains logeurs, attires par le
r6guli^re, ne se monlr^rent gu^re s
indignes...Et il fallut un grand cou
m^me.
Cependant, ^dress6 a dure ecol
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LA SOLIDARITY. 385
tales, on finit par augmenter consid^rablement les chances de
i^ussito. Telqu'il est actuellement organist, le placement dans
les families campagnardes offre de meilleures garanties qu'au
d^but. D'abord, sur les logeurs qui s'offrent, des renseigne-
ments sont demand^s au maire de la locality qui connait assez
bien ses subordonn^s, puis au pasteur de cette m^me locality,
qui peut-6tre les connait encore mieux. La premiere condition,
c'est qu'ils habitent une autre commune que celle habitue par
les parents de Tenfant, ce qui est une precaution fort sage. La
seconde est qu'ils puissent justifier d'une existence suffisam-
ment large pour qu'on n'ait pas k redouter une alimentation
trop asc^tique, un logement malsain. On leur demande aussi
« de jouir d'une reputation irr^prochable, d'avoir de Tordre
domestique, des sentiments paternels vis-2i-vis de Tenfant
adopts ». II faut encore qu'ils soient de la mdme confession
religieuse que lui, et defense leur est faite d'avoir plus de trois
pensionnaires k la fois.
Tout cela trouve — Ton juge si c'est facile ! — la Solidarity
avant de conclure aucun contrat avec le logeur exige une p^-
riode d^essai qui doit durer un mois. Pendant ces quatre
semaioes, Tenfantale temps de s'acclimater k sa vie nouvelle,
et de son c6ie Thdte pent Tetudier k Taise. Tdche evidemment
ardue des deux c6tes, et qui plus d'une fois a procure, procu-
rera de lourds soncis au Comite bien intentionne. Suspicion,
manque de patience, injuste severite d*une part; sournoiseries,
vices hereditaires, rebellion k toute contrainte de Tautre, pro-
duisent, heias ! des chocs qui endurcissent encore ces ftmes d6]k
trop fermees. Le Comite Ta si bien compris, qu'il se reserve
expressement le droit de retirer Tenfant « en tout temps, sans
avertissemeni prialable et sam indemnity ».
Enfin supposons Telftve place et bien place, et voyons-le
entrer dans sa nouvelle famille. D'abord,une premiere joie bien
inconQue, celle de posseder un trousseau modeste, mais parfai-
temeuten ordre.
II y a un article 20 qui parle ainsi : « Si les parents ne peu-
veat le lui procurer, les frais sont k la charge de la Solidarite.
Le Comite demande, suivant les circonstances, k la commune
MVUB PHILANTHROPIQUl. -- II.
1
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386 REVLE PHILANTH
d'origine de I'enfant, de participer «
par I'achat du trousseau. II doit Hn
la soci6t6 une note exacte de toui
trousseau de chaque enfant. »
Voulez-vous maintenant savoir
Pour les garqons : un v^tement com]
ton, gilet et pantalon. Un v^temei
travail et une blouse. Deux paires <
socques. Un chapeau de feutre, un c
quette. Six chemises; six mouchoir
six paires de chaussettes en coton ;
en laine. Un peigne, un peigne fii
Pour les fxlleties : trois robes, doi
jupons dont deux en laine. Deux
quatre bonnets de nuit. Quatre ta
Deux chapeaux, six chemises, six
paires de bas en laine, six paires en
paires de souliers. Un peigne, un p(
veux.
Lorsque ces v^tements sont foi
logeur doit veiller aux reparations
pouvoir en tout temps montrer le
m^me pour les fiUettes un excelle
m^nag^re.
Je ne sais si je me trompe : mi
ces derni^res, accessibles par leur
toilette, il me semble que cette pro
remplai^ant tout k coup les maigr<
leur procurer une sensation douce
de se sentir « vfetues comme tout
ment cette abondance pent leur de\
series et de rappels k Tordre. Si ell
n^es, a unem^nag^re pointilleuse, q
il n'en manque pas en pays protests
arrivent k maudire cette richesse ii
misfere de jadis. Mais si Ton sail &
choses pour leur apprendre la teniic
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LA SOLIDARITY. 387
Autre enseignement, bien plus compliqu6 et plus d^licat :
« L'^l^ve doit avoir un lit particulier ; il ne peut coucher avec
un autre enfant ou une grande personne sans Tautorisation for-
melle du Comity.
« Les garQons Ag^s de plus de douze ans, et les fiUes ayant
plus de onze ans ne peuvent ^galement pas coucher dans la
m^me chambre que des grandes personnes sans que le Comity
ait donn^ express^ment son consentement. »
Precaution excellente, quoique tardive, h^las! Si Ton songe
aux entassements des logis ouvriers, et k la prdcoce exp6rience
des enfants venus au monde dans certains bouges par trop
encombr^s!
Afin de rem^dier autant que faire se peut aux mauvais
exemples, on r^duit au minimum les relations de Tenfant avec
son milieu primitif. Aucun pensionnaire ne peut quitter — ne
Wl-ceque pour un jour — la famille oil il est plac6 sans auto-
mation du Comity. Ses rares visites k la maison paternelle ne
sont permises par ce dernier que lorsque le moral de Fenfant
ne doit pas souffrir de ce retour momentan^ k ses habitudes
d autrefois. En outre, il est bien recommand^ au logeur d*occu-
per son pensionnaire. A c6t<5 des heures d*4cole auquel nul, en
Suisse, ne peut se soustraire jusqu'i Vkge de seize ans (car la
loi eslformelle et veille s6vferement), il est facile, k la campagne,
de Irouver Temploi d'une journ^e. Certains gargons de douze k
seize ans, sains et vigoureux, peuvent fort bien remplir Toflice
dun petit domestique de ferme. Trfes judicieusement, les fon-
dateurs de la Solidarity ont pr6vu la chose, et ils s'en sont servis
pour diminuer la pension de Tadolescent capable de se rendre
utile, tandis qu'on augmente fr^qtiemment la pension d*un en-
^t tr^s jeune exigeant de nombreux soins. Par la m^me rai-
^n, certaines pensions sont abaiss^es durant les mois d'^tS oti
se font les travaux agricoles, tandis qu'elles se reinvent pendant
Inactive saison d'hiver. Voici Ik-dessus les dispositions du
Comity :
" L' education d'un enfant en has Age exigeant beaucoup de
^ins et d'aifectioa, le prix de pension de Tenfant au-dessous
deneufans doit 6tre suffisamment r^mundrateur pour que le
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388 REVUE PHILANl
Comity puisse exiger les soins et 1
la part de la famille k laquelle I'e
« Par centre, pour les enfants ]
des services qu'ils peuvent rendre
habitent. (Si IVl^ve est employ^
xgricoles, I'on ne peut exiger de
nables et mod^r^s et k la conditioi
de nature h nuire k son d^velopp
et moral.)
« Pour les garQons places dans
sont diff^rentes, puisqu'ils ne peui
^es mfemes services aux families qi
Pour ceux-ci le prix va en augmei
entrent en apprentissage.
« En ce qui concerne les fiUes
compte, pour le prixde la pension,
rendre dans Tinl^rieur du manage
Ainsi est enlev^e, pour certaii
rhumiliation de se sentir tout k i
lance d'autrui. Peut-6tre, du res
presque introuvable. Nul doute qu
k mesure que s'affineront les mass
Une bonne education ne va po
Les logeurs sont tenus d'avertir le
la moindre maladie. Pour parer i
cins et les pharmaciens de campag
assez louer le d6sintdressement. P
cours k rhospice de Tenfance, ou
Ces deux ^tablissements, situ^s k Ls
de premier ordre, et leur renomm
la fronti^re Suisse. Dans Tune et
lades, installds dans des dortoirs
sitds par un personnel medical d
Qoivent k prix r6duit les soins 1
Tenfant est ressortissant d'une <
cette derni^re qu'on pr6sente la i
que le traitement soit fort long : i
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LA SOLlDARlTJfe. 389
remontent k des sources si lointaines qu'elles sonl ingu^ris-
sables... Malgrg tout, les rapports du Comity constatent —
non sans orgueil — combien la mortality de ses prot^g^s est
faible.
Pour veiller a tant de preoccupations diverses, le comit6
si^eant k Lausanne (et ne se dSplagant qu'en des occasions so-
lennelles) a dii, cela se comprend, se donner des aides. Un pen
partout, dans le canton dont Lausanne est le chef-lieu, il s'est
choisi des membres auxiliaires qu'il a baptises du nom d!ass€S'
seurs, Ceux-ci doivent en r^f^rer pour toutes choses au groupe
si^eant dans la capitale; mais pour les questions de detail et
surtout pour les inspections, leur utility est grande. Car la ve-
rification du bien-6tre des enfants est la vraie pierre d'achoppe-
ment de la Solidarity. L*on devinera sans que je m'y appesantisse
combien il est difficile et d6licat d'obtenir, soit des logeurs, soit
des enfants, des attestations parfaitemenlv6ridiques. Partout oti
il y a dissentiment, il y a passion. Alors, comment savoir ce
qui est exactement Equitable?
Pourr^soudre cette difficulty grave, la Solidarity s'est inspi-
r^e de son principe primordial, qui est, nous Tavons vu, de re-
crter une famille aux enfants orphelins ou mal partag6s. Fai-
sant de cet id6al moral une r^alite effective, elle imagina de
nommer un protecteur special k chaque enfant pris sous sa
sauvegarde. A chacun done, le Comit6 central d^signe un cor-
respondant qu'il appelle patron. Ce patron a mission de suivre
cet enfant tout sp^cialement, de visiter ses logeurs, d'inspecter
sa nourriture, de verifier les m^thodes d 'education mises en
^sage pour lui, enfin d'envoyer sur son d6veloppement de fre-
quents rapports au Comite directeur.
Sans peine on con^oit combien cette fonction exige de tact,
^e finesse, de bonte eclair^e. Elle ne saurait done 6tre confine
^u premier venu, d'autant que les rapports avec le logeur doi-
vent 6tre empreints d'une certaine cordialit6; que la morgue
^* le ton cassant iraient k Tencontre du r^sultat d6sire. Aussi,
dans les campagnes, le grand recours du Comite est-il encore
'e maire et surtout le pasteur. Les fonction^ de ce dernier, qui
^^portent de nombreuses tournees pastorales, se combinent
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390 REVUE PHILANTIIRO
a merveille avec cetle inquisition n^ces
De plus, le pasteur jouit en g6n6ral
lui permet de p^n^trer au coeur des ft
les confidences; on le juge moins intin
de la ville ». Autre avantage : le repo
6tre une femme, la compagne du past
au moins aussi qualifi^e que son mar
la Solidarity, chaque enfant doit rece\
tron ou de sa patronne au moins tou
Comitd central doit fetre chaque fois a^
sanitaire.
(rest beaucoup, si Ton considfere le
en tutelle; c*est pen, si Ton envisage h
est terriblement encombr^ de mauvaise
veut ensemencer de bon grain ! Souvei
ftmt, vrai sauvageon battu de tons le
averses, n'a jamais distingu^ le mal d
ne sont pas plus indemnes que les pi
voyaient faire a leurs parents r^els et (
faire dans leurfamille adoptive, quelle
cervelle! Rien d'^tonnant k ce que I'l
souvent signal^s au Comity soit le mens
figure un gout furieux pour Tind^pend
bondages. Habitudes d'autant plus diff
sont le r^sultat de profonds atavismes
enfants a s'enfuir de chez leurs logeu
rent le gtte probl^matique et les nourrii
r^gulifere, tracee d'avance, coupant toi
k la fantaisie. J'ai dit, du reste, que c(
d'etre k la hauteur de la mission qui I
serait k d6sirer que leur Education, k €
comply t6e.
Je ne puis m'emp^cher de songer qi
fuit, cela suppose au moins une assez f(
comprim^es. Les fugitifs sont vite re]
s'^chappent encore. Deux fois, trois fois
d^test^, k moins qu'il ne soit prouv6 qu
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r
LA SOLIDARITY. 391
tort, auquel cas Fenfant est change de demeure. Si malgr^ tout
eet enfent persiste h vouloir reprendre sa vie errante et bal-
lott^e, de guerre lasse on rabandonne.
Dans les rapports du Comity, je trouve la mention de ces
abandons, qui toujours ont des origines attristantes. En pre-
mier lieu, les d^plorables conseils donnds aux enfants par des
parents qui savent tromper toutes les surveillances. Quelques-
ans des petits pensionnaires ont 6U litt^ralement volSs k la Soli-
darity, et celle-ci n'a jamais pu les reprendre. II est arriv6 aussi
qoedes p^res, des m^res, se sont 6nergiquement refuses h lais-
ser leurs enfants sortir de chez eux ! Et ces parents ^taient de
ceux qui donnaient les pires exemples. En pareil cas, la Solida-
rity pent provoquer Tinterdiction des pouvoirs paternels, el ob-
lenir de Tfitat que Tenfant lui soit confix. Mais ce sont moyens
extremes qu'on r^pugne h employer.
On les emploie pourtant, surtout lorsque Tobjet en litige est
une fillette guett^e par la d^bauche.
Une difficult6 encore, c'est le flottement qui se produit chez
les jeunes gens, lorsque TAge est venu pour eux de choisir leur
carrifere. Entre tant de metiers qui s'offrent, lequel choisir?
Peu habitues k raisonner leurs actions et leur vie, ils h^si-
tent, se trompent de voie, au bout de quelques mois s'apergoi-
vefht de leur erreur, et tout est k recommencer. D'aucuns ont
r^ussi cependant k conduire jusqu'au bout leur apprentissage,
puis, ayant gagn^ une somme suffisante, sesont fait une joie de
rembourser la Solidarity des d^penses faites pour eux, — rem-
boursemeut toujours bien accueilli : c*est la rauQon d'un nou-
veau prisonnier de mis^re.
Car pendant bien des anndes elle ne fut pas riche, la Solida-
rity. EUe connut m^me le deficit sous toutes ses formes, ayant
souvent plus d'enfants itsa charge que ses revenus ne Tauraient
comports. Trfes brave, elle fit face aux difficult^s, rognant hardi-
ment son capital de reserve lorsqu'elle se trouvait au-dessous de
ses affaires, n'h^sitant point chaque ann^e k solliciter la g^n^-
rosit^ publique. Bazars de charity, demandes de subsides aux
communes, annonces dans les journaux, quotes k domicile,
tout lui fut bon pour parfaire la somme n6cessaire k son ann6e
I
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LA SOLIDARITY. 393
C'est done par centaines qu'il faut compter les bdn^fieiaires
de cette institution qui, en si pen d ann^es, a tant agrandi son
champ de travail.
A Tftge de seize ans, qui est en pays protestant T^poque de
la premiere communion, et comme une porte de sortie par la-
quelle on s'^chappe deTenfance, on fournitaux enfants un petit
trousseau de c^r^monie.
II se compose, pour les garQons : d'une jaquette, un pan-
talon, un gilet, un chapeau, une paire de souliers, une che-
mise. (Le tout ne doit pas d^passer une valeur de 60 francs.)
Pour les jeunes fiUes : d'une robe, un jupon, une paire de
souliers, un chapeau, une chemise. (Ne pent d^passer une va-
leur de 50 francs.)
Seize ans, sa communion faite et le temps d'^cole termini,
la loi permet au jeune homme d'entrer en apprentissage, k la
jeune fiUe de se placer comme bonne dans une maison bour-
geoise. Lit encore la Solidarity intervient, apportant Tappui de
son experience et de son autorit6.
Pour 6tre franc, il faut avouerqu'elle n'est pas toujours r^-
compens^e de sa sollicitude. N'importe. Sa besogne est bonne
et elle la poursuit avec une tdnacit^ tranquille. Aussi, mdme
qiiand elle n'aurait qu'un seul r^sultat excellent pour dix r^-
sultats m^diocres — ce qui n'est pas le cas — encore faudrait-il
louer bien haut les deux modestes promoteurs de cette oeuvre
vraiment humaine et d^sint^ress^e.
M- GEORGES RENARD.
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L'ASSISTANCE ID^ALE. 393
reorganisation sur des bases impr^cises quidemeurenttoujours
Imsondable mystdre.
Et comme il ressort des elements constitutifs d'une admi-
nistration que ses participants n'ont pas quality pour eflFectuer
spontan^ment le remaniement des services sans passer par une
th6orie de d^bats, de commissions, d'avis et de deliberations,
qui diminuent et parfois annihilent Teffet bienfaisant d'une
reforme dans son principe, il y a lieu de desesp^rer bien sou-
vent de Tissue des plus gendreux eflforts.
J'insiste : ils sont trfes rares dans la presse, ceux qui, avec
^ne relative competence accusent quelque propension k pene-
^I'er clairementau fond des questions d'assistance. Ils paraissent
pour la plupart, oublier que la notre depend des pouvoirs
publics, et qu'elle ne pent etre modifiee que de leur chef. Fon-
dee sur le principe de libre charite, succedane du droit de
propriete, elle est mandataire irresponsable des vices de son
principe, aussi bien que de ceux qui resultent de I'application
terdigrade d'une jurisprudence souvent anterieure ft son organi-
sation unitaire dejJi bientdt semi-seculaire. Ge n'est pas k dire
9^® la saine influence de Michelet, Jules Simon, Gerando,
"^ophite Roussel, et autres emerites philanthropes, n'ait sug-
ger^ cle s6rieuses ameliorations en la mati^re, mais j^imagine
^^otxtjgps que la comparaison, proposee plus souvent aux lee-
eur^ d'eiite, entre des syst^mes d'assistance ideale, congus
^^^ les donnees rationnelles propres k chacun de ceux qui
'^ *^«*€nt la facile, mais sterile ironie, et le statu quo, suscite-
**' *^^quemmentdes idees novatrices et progressistes, et s'affir-
**^it ainsi plus utile k la cause publique.
*-^^jJl les seuls parallMes etablis entre les r^glements etran-
^^^ ^t les n6tres ont ete pour nous un precieux element de
|, ^^-^euses recherches. II n'est done nul besoin d'exhaler de
^^iionie en souhaitant que la charite n'apparaisse point
^'^^^e uneatteinte k Tamour-propre, voire une tare, k quelque
^ition d'4ge ou d'etat social qu'elle s'adresse.
^^ n6tre reconnait jusqu'ici Timpossibilite materielle ou elle
V^^jours ete de venir en aide k d'autres indigents que ceux
» ^pontan^ment, lui revfelent leur mis^re. Or, de toutes les
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REVUE PHILANTHROPIQ
sitions civiques, celle de TAssisti
vue la micux qualifi^e pour alii
preoccupations budg^taires, et i
ine question de credit, k T^poi
lidnations de capitaux, pour r^di
Sl^ments de secours et de ce che
^ciation charitable, lequel est de ]
[)ssible, les atteintes de la mis^]
la veillo d y succomber.
rs surgit le plus imminent des
domicile,
glements actuellemenl en viguei
5S allocations variant de 4 & 20 f
, et pendant un temps ind^termii
d'entre les b^n^ficiaires de ces
isualit^s, et susceptibles de s'en ]
^d,ce k de subtiles combinaisohs,
opes, et mat^riellement irr^press
> dans la perspective de faciles
nt comme dues, par la force de 1
I pens^e de changer leur situatio
oportionn6 k leur dge ou k leurs
lignement procurer,
en revanche, il apparait impossil
;lementation de venir utilement i
passag^re a d^courag^s, et auxqi
un secours imm^diat, susceptible
de francs permettrait de repren
squ*il est & pen prfes prouv§ que
laque mois aux indigents officiel
$ plus experts, qu'un tr^s m6dio<
u budget une grosse d^pense, n
e dispenser dans une mesure toi
i, dfes qu'adroitement couQue ?
scours les plus urgents sont, de
ut est de preserver Tindigent dei
*ance8 d'une nuit hivemale sans
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L'ASSISTANCE ID^ALE. 397
bons de pain, de viande et de logement en pareil cas, et I'in-
scriplion en vue de la d^Iivrance de ces bons jusqu'ii Tor^e des
jours meilleurs, suppriment d'office toute id6e d'abus, en Tes-
pftce, car elles supposent chez le b6n6ficiaire I'id^e bien arrAt^e
de se tirer de la mauvaise passe oil il s'est involontairement
engage, en m6me temps qu'elle ^carte celle d'une speculation
possible entretenuc par Tapp&t d'un secours monnay^.
C'est alors qu'intervient, pour tons ceux dont la situation
s'affirme digne d'int^r^t, la n^cessit^ d'une enqu^te s^rieuse k
Veffet de justifier la concession d'un premier secours utile, de
100 francs, par exemple, susceptible d'etre renouvel^, une fois
et m^me deux, et accords de telle faQon qu'il ressorte bien de
ce mode d'assistance qu'i moins d'Mre victimes de Fin^luc-
lable fatality, tons ceux qui n'ont pas pu normaliser leur exis-
tence le doivent surtout h une coupable ^conomie d'efforts de
leur part.
Ce raisonnement, sp^cieux en apparence, devient essentiel-
iement rationnel, si Ton ajoute qu'en vue de pallier le deplo-
rable eflfet de r^goisme moderne, on doive s'inquieter de la
creation d'un office du travail pr^cisement destine k ceux qui,
uUlement secourus selon les proc6d6s precit6s, s'empresseraient
^y '•ecourir, etnon ft ceux qui, apr^s trois ou quatre jours de
contrainle morale, pr^fferent Toisive mendicity aux p^nibles
wbeixi^^ ainsi que Tetablissent malheureusement les statis-
'?^es relatives aux oeuvres actuellement existantes d'assistance
f^^ lo travail.
^^ I Office du Travail ne serait d'ailleurs, en raison mSme
. ^^o but, couQu selon aucune des donn^es que les pr^cedentes
* *'^t\jitions de ce genre laisseraient supposer.
^^ntralise dans un des services de T Assistance publique, il
^ttacherait par sa nature k la Division des Travaux dont la
^"^l-on parait chaque jour devoir s'imposer en raison de Tim-
j. ^^-nce croissante et du nombre des constructions hospila-
**^^, et serait de ce fait en relation directe avec les entrepre-
U^xi^ ' ^
xij. ^ constructeurs et industriels, foumisseurs de toules
^^^es d'ouvrages, ainsi qu'avec leurs syndicats.
'i lui serait loisible de ce chef, de relever les emplois
L
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398 REVUE PHILANTHR(
d'ordres varies susceptibles d'etre d(
investigation adroitement conduite au:
mis^re inavouee, el que la perspective
honn^te, rendra capables des plus gro
Et je ne donne ici cet ordre de reb
vital, comme noyau primitif d'op^ra
adjoindre certains d'enlre les emploii
stration hospitali^re dans ses propres
Le cercle s'^tendrait avec le temp
baucher dans leur personnel des ge;
abnegations pour ^chapper k la mis^i
patrons & donner la preference aux ol
vail.
Oui, il s'impose, le devoir de disc€
et de les preserver du malheur quand
sans attendre qu'humilies, ils formule
tile et qui devient un reproche trop sc
Mais, comment? s'6crie le philan
tel par decret ou par arr6te, et qui n'e
tique de TAssistance qu'cn vertu de r(
ment prdvenir cette mis^re sans por
personnelle, et sans s'exposer k de vio
Evidemment, ce n'est pas en con!
d'anciens militaires meritants et bono
dans la pratique du devoir et de Th
reconnaltre, mais atrophies moralen
profession oii la rudesse apparente
toutes les intemperies physiques et i
investissant de ce soin des neo-bacheli
k merveille sur la morale sociale,mai:
k des catamites d'ordre multiple aux
bourgeois cossus ne saurait pardonner
que Ton pourrait obtenir les amelioi
quisse ici le schema.
Mais, ce qu'il existe incontestable!
gens, au sens moral encore intact n'et
k fait epuisee, c'est, dans chaque q
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L'ASSISTANGE IDfeALE. 399
chaque rue, trois ou qualre de ces natures d'^Iite, de ces coeurs
d'or, dont le spectacle des perp^tuels conflits de I'^goisme hu-
main et des rancunes sociales, n'a pas annihil^ la sensibility,
et qui seraient les premiers it mettre k profit pour la bonne
cause, les renseignements officieux qu'observateurs affin^s, ils
sauraient recueillir q^ et \k sur ceux d'entre leurs voisins que
le destin s'appr^te k marquer d'une croix n^faste.
La gen^se de ces misferes est presque invariable. Cesont les
sacrifices ou les deceptions, la maladie ou les impr^Tnes ca-
tastrophes qui pr^parent le triste roman, et presque aussitAt
Vappel d^sesp^rfi k la bonne volont6 des foumisseurs, cr^an-
ciers imm6diats, du boulanger et du boucher ; c*est it la surve-
nue du terme, Taveu p^nible de Tinsolvabilit^ que Ton esp^re
6ph6mfere.
Qu'on suppose dans un quartier pris au hasard, seulement
une trentaine de ces pr^curseurs k qui sourirait la perspective
d'aider au salut d'un semblable, pour la seule satisfaction du
devoir accompli, telle Toeuvre d'art, cisel^e en d6pit de toutes
les critiques et dont Tunique souci nous fait traverser Texis
tence indiff^rents au reste des choses, qu'on se les imagine,
mettant^quitablement & profit les indications recueillies, pour,
aux jours de reunion du comity par eux ainsi form6, les
transmettre aux visiteurs, qu'un long s6jour dans Farrondisse-
ment recommanderait k la consideration g^nerale, qui ^carte-
raienl de leurs preoccupations toutes idees d'intrigues politi-
ques, et qui soumettraient aussitdten cas d'urgence, et dans les
deux jours, lorsque la mis^re n'apparaitrait pas tr^s immi-
nente, le r^sultat de leurs enqu^tes au service des secours.
Si favorable, desinteressement imm6diat des foumisseurs,
dans une mesure proportionn6e aux depenses accus^es, etavis
de ce secours pr^ventif aux interess^s.
Le visiteur, loin d'etre half ou redoute s'il est correct et
d'esprit subtil, saura amener k bonne fin sa delicate mission.
De sa visite il resultera plusieurs conclusions possibles se
relativant toutes plus ou moins k la suivante lorsque pro-
pices k rinteresse: — L'indigence est profonde; le secours en
Hj^nre ou en argent s'affirme indispensable , et ledit inte-
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400 REVUE PH
ress^ fait preuve d'une sto'iqi
C'est a celui-ci qu'iront d
viande, le secours de loyer,
mcnt k sa p^nurie ; ei, si Tei
favorable, s'ii en ressort netl
grande somme d'efTorts, ma
en presence des circonstanci
les allocations plus s^rieuses
sa rentr^e en rade, apr^s ce
des autres p^cheurs amis et
lui enfin que TOffice du Trai
sorte que son amour-propre
ment, il s'attachera volontiei
aura 616 Tobjet, non comme
ches minuscules k la rapacity
le caract^re le d^gage de toi
une avance utile que son pre
Taube des jours meilleurs,
perspective inqui^tante d'un
sociale.
Et dans le cas d'une enqi
ment contrdl^e comme telle
secours en nature de prime
mesure du possible les quelqi
encore Tindividu et de lui r
de son prochain.
Voici done, brifevement
pr^ventifs digne d'un peupli
blicaines, et qui semble s'6c
temporains quelque peu re
romain.
Mais il semble supposer
les r^partir la libre dispositi(
devrait pouvoir suffire ft se
Tintromission int^ress^e dc
dispositions. Non, il ne faut
repr^sentent, ft vrai dire, en
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L'ASSISTANCE ID^ALE. 401
sion de Tavenir, le mois d'avance, le placement du bon pferede
famille. Que Targent des pauvres, leur appartenant, soit dis-
Iribu^, fort bien, mais i condition toutefois que si Tenti^re
repartition est aujourd'hui effectu6e, les affam^s qui survien-
dront deoiain ne s*en retournent point le goussetvide, parce
que tout a ^t^ distribu6.
Distribuez tout pour complaire a quelques proseurs m6-
contents dont le caquetage soi-disant litt^raire denote une re-
doutable ignorance de toute T^conomie d'un pays, et puis oyez
ensuite les recriminations du corps medical, a qui Tinsuffi-
sance des credits ne permettra pas de crder des salles d'op^ra-
tions, d'installer des frigorifiques et de conslruire des services
sp^ciaux dans les ^tablissements.
Mais ce sont Ih questions subsidiaires, et il importe de gra-
viter autour du principe, k savoir que le plus ou moins d*ur-
gence, la plus ou moins-value des secours h allouer et du tra-
vail k procurer d^pendront de la sinc6rit6 des enqufites, ce qui
implique pour ces derniferes un contr6le minutieux, d^gagd de
tout personnel parti pris stranger aux questions de paup6risme.
*
Se pr^sente ensuite k Tesprit du philanthrope la question
des secours k la vieillesse.
Llndigence des vieiilards quiert sa source la plus g^n^rale
dans Tabsence d'une caisse nationale des travaiileurs, destin^e
i les pr^munir riellement contre les difficulties des derniers
jours.
Si la pens^e, dans la solitude, se mi]iritet s'affine,si Thomme
^loigni de ses semblables est plus apte k les juger sainement,
il n'en est pas de m6me quant aux choses de Texistence mat^-
rielle.
Seule, Ta^sociation est de nature k faciliter les moyens
d'existence, k quelque point de vue qu'on se place. Une mul-
titude de petits efforts concentres vers un m^me but devient
un ineluctable levier, et puisqu'il est impossible it tons ceux
qui occupent Touvrier de lui assurer, outre le present, Tave-
RKVCK PHILAIVTHROPIQUB. — U. 26
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402 REVUE PHILANTHROPI
nir, dans la mesure de leurs moyens in
de r^unir leurs efforts en vue de cr^er d
ratives capables de manager, moyennan
tion, les six ou huit cents francs ann
Texistence de ces anciens laborieux.
Je m'arrSte i ce chiffre d'ail leurs pen
respond k pen pr^s au tarif d'entr^e de
ouvertes aux humbles, et parce que je v
les avantages ^vidents que trouverait 1
de ces 6tablissements, sur ceux oti, gra
grSce ^ d'ang6liques patiences ainsi qu'i
il semble devoir h la commiseration publ
vie de labeur honorable, si modeste, lui
droit d'exiger.
Indubitablement mieux traits, gr^ce
taires ainsi augment^es par Tappoint in
d^s son entree; plus libre de ses insta
pourra jouir en toute s^r^nit^ du fruit di
laire, et demeurer en paix avec son amou
cr6puscule de la vie.
On objectera, dans Tesp^ce, que les
genre ne sont pas assez nombreux pour
tous les vieux ouvriers.
C'est, a la vdrit6 regrettable, et la fai
imputer h personne, attient en fait aux in
k Tagglomeration des masses dans um
subvenir k I'existence de tous ceux qui
par un s^jour suffisant, le domicile de s(
Mais, outre que tous les veterans du
pas, s'ils ont encore quelques vestiges de
k rinternat de ces invalides civils, il n'ei
semblable que la perspective de cons
grftce aux associations gen^rales et profes
le montant des pensions individuelles, k
titulaires au moyen desdites pensions, sei
pour TAssistance publique, etTinciterait
k ^difier des maisons de retraite sp6ci
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L'ASSISTANGE IDfeALE. 403
diverses professions, le pr^c^dent ayant 6t6 d'ailleurs avanta-
gensement 4tabli, conform^ment aux dispositions teslamen-
taires de feu Br&in, par exemple, pour Thospice de la Recon-
naissance, enfaveurdes forgerons; icelles de M"® veuve Rossini
lilafondation Rossini, hYigard des artistes malheureux; k celles
de William Galignani k Neuilly, relativement aux ouvriers du
livre et de la pens^e.
GonQoit-on, dhs lors, combien seraient ainsi all6g^es les
charges de tons ceux d'entre les laborieux obliges le plus sou-
vent de pourvoir k Tentretien de vieux parents inaptes au tra-
vail, voire mfime infirmes, combien aussi serait diminu^
I'effectif des mis^reux de nos grandes cit6s?
U y a mSme lieu de s'itonner de ce que, jusqu'i ce jour,
apr^s la creation des syndicats professionnels de toutes sortes,
riStat, qui a su pourvoir iTavenir de tous ses fonctionnaires,
ait ainsi, de grd ou de force, n^glig^ les 6l6ments les plus
notoires de sa vitality : Touvrier de la terre et celui de Tusine,
et se soit, pour ainsi dire d6sint6ress6 de son sort, sous le pr6-
texte vain d'une fallacieuse diff6renciation entre les affaires
publiques et celles privies.
Le secours k Tenfance complete la trilogie de charity qui
nous prdoccupe. Ind^pendamment des moyens d'assistance
maternelle pr^conis^s dans le bel ouvrage de M. Paul Strauss,
YEnfance malheureuse, et dont quelques-unes d6jk sont en voie
de fructueuse application, il apparait indispensable aux condi-
tions de Texistence modeme, d'abolir k jamais le coupable
pr^jug^ qui s'attache k la b&tardise, cause d'un si grand
nombre d'abandons non volontaires et r^solus pour la plupart
k dessein de respecter des conventions tout artificielles. J6sus,
fils de Marie ! Le jour oil le fils naturel, fils de Famour le plus
souvent, aura l^galement reconquis la place qui lui est due dans
la soci^t4, la question des abandons sera presque r^solue. De
plus, li^e intimement k la solution du problfeme paup^riste et
d<jkatt6nu6e enthrone, paries moyens pr^ventifs sus-indiqu^s.
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404 REVUE PHILANTIIRC
il ne restera plus h rem^dier qu'a
transitoires susceptibles de se produ
rapplication r^guli^re des vrais prin(
Ce n'est pas en coupant les derni^
Tarbre de sa ruine, mais en 61aguant
terre ou s'alimente sa racine, pour
d*une s^ve nouvelle et bienfaisante.
A ces m^mes comit^s de quartier,
de la mis6re, echerrait la delicate m
enfants malheureux, et de les signaU
est de ces petits desh^rit^s qui, les 6\&
prouv^, demeurent ignores, et dont lei
pour la soci^t6, tant k cause de rint6r
tur^s peuvent apporter k Tirr^v^latioi
de la pusillanimity des voisins, h^sita
sid^rent comme une d^nonciation c
vengeance.
Ge syst6me,qui trouve sonapplicat
certains cantons helv6tiques, apport
d'avantages k la situation des petits q
d'all6ger du poids des tares que ses
eux.
Au titre conclusif, 1' Assistance pul
fonctionnement, ainsi que le d^clarail
tance communale M. Fleury-Ravarin,
dans ses bases pour qu'il y ait int^r^t
que dans les details, k condition toutef<
nomie implicitement suppose parcette
integral, cequi, malheureusement, n't
Mais il n'en appert pas moins netl
du sentiment k la bonne gestion ad
imp^rieuse dans ce rouage social, du f
sous peine des'attirer haine et r^prob
probit6 la plusrigoureuseetlaclairvoy(
devraient 6tre exig6es ^toute heure,de
auxquels incombe le soin de discernei
mis^re, et de lui dispenser des secours
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3S1STANGE ID^ALE. 405
ratives, d6ja trop loin du mal pour en
deviner I'utile remade, s'imposent des
oire d'ilots, et qu'enfm, trois natures
lemandent k Hre g^n^ralis^es dans un
antir la s^curit^ morale du pays, savoir :
11 et place de la minuscule et sp^cieuse
[ de huit francs, tropl6g^rementr6partie
jRs PR^vENTiF s^ricux, conuexe k Toffice
iu laborieux marqu6 passag^rement du
; enfin, la Caisse sociale de Retraite des
dre, deslin^e k les pr6munir contre les
la vieillesse.
jolutionner ces trois grandes questions,
)[es,seraproche de V^rede f6licit6id6ale
:e rejette rageusement au rang des st6-
jue ce si6cle serale prochain, puisque le
ALCANTER DE BUAHM.
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LES COLONIES DI
Dans les num6ros 2 ct 6 de cette i
D' Delvaille ont plaids avec une ferv(
des colonies de vacances.
En effet, non seulement les enfani
habitant la ville, travaillant sans i
mise en 6tat de passer annuelleme
repos complet au grand air de la cam
forces consum^es par le travail. D
calculd que cette tr^ve r^guli^re p
tiers la dur^e de la vie dans les clasi
r^duirait d'un tiers la mortality !
Malheureusement; la realisation
moment une chim^re ; cependant, en
fants, en les fortifiant et en les gudri ss(
gagn^. Leurs corps aguerris r6sistero]
la vie, h Tinfluence pernicieuse du
misfere.
C'est encore bien peu, mais gutta (
colonies de vacances m6rite done d'^
notre Anergic. II s'agit de trouver un
teux, permettantde soulager avec d
milliers et des milliers d'enfants. II n
etendue, r^gl^e, occasionnant la moi
La bonne volonti de quelques fer
ques propri^taires campagnards ne
bien petit nombre de n^cessiteux ; d'f
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408 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Combien de stations pourrait-on ainsi fonder !
Chaque endroit joliment situ6, jouissant de qualit^s clima-
t^riques, de for^ls et de prairies s'y adapterait.
Une organisation philanthropique obtiendrait sans difficulty,
je crois, la permission d utiliser les 6coles dans ce but bienfai-
sant et le grand nombre de bMiments permettrait de ne plus
6tre oblig6 de limiter le chiffrc des secourus.
Ces colonies provisoires, il est vrai, ne seraient gu^re
luxueuses; dans les salles de classes transform^es en dortoir
on se bornerait k poser de bons matelas, munis d'un oreiller
et d'une couverture, on reslreindrait les uslensiles de manage
au strict n^cessaire, mais ce s^jour h la campagne n*en serait
pas moins salubre et efficace, et ce modeste mobilier serait ais6-
ment conserve pendant Tannde scolaire dans un grenier lou6
k cet effet ou cdd6 gracieusement par quelque fermier.
Les habitants de la locality et les propridtaires des environs
fourniraient volontiers chacun une partie des vivres.
Un tel se ddclarerait pr6t k faire cadeau de pommes de terre
et de Idgumes, un autre de lait, d'oeufs, un troisifeme de farine
ou de beurre; le boulanger procurerait du pain k des prix
exceptionnels, le boucher la viande.
En effet, je crois qu'avec un pen d'encouragemenl et de sti-
mulation, bient6t chaque endroit supporterait k lui seul les
frais de « sa colonic ».
A Taide de la presse, avec Tintervention des prdtres des
villages et des maitres d'dcoles, on gagnerait la sympathie de la
population. Combien de sous gaspillds, d'objets superflus pour
leurs propridtaires viendraient enrichir les fonds de la colonic I
M6me les frais de voyage (restant toujours k la charge de
la Socidtd, ainsi que la paie des personnes de surveillance) se
rdduiraient considdrablement par la possibilitd d'envoyer les
enfants dans la colonic la moins dloignde, sauf ceux dont Tdtat
de santd exigerait des conditions spdciales de sdjour.
Je crois qu'avec ces donndes d'dconomie on parviendrait a
soulager moyennant une somme relativement petite un grand
nombre d'enfants. On rendrait accessible k tons ce qu'on ne
pent pour le moment accorderqu'^ quelques centaines. Et pent-
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LA MIE DE PAIN.
e dans le Figaro, d'autres (
Its k Foeuvre nouvelle, la
Uastr^es s'int^ressent k el
aspects. Un jour, elle aur
es Dames de la Halle qu
e en sc^ne vaut qu'on la i
brel894. Faute d'argent,
e qiielqu un eut Tid^e de
nsionnement facile, comi
idiants, d'apprentis et d'
Aux Dames de la Halle.
IS int^resser i TCEuvre de la J
tribuer pendant les jours les
I malheureux qui se pr^sentei
t de d6passer le chifTre de sc
irces sont modestes. Malgr^ n(
suspendre bientftt notre cBUvre
ijue vous ne refuseriez pas de
3 charity ; notre espoir ne sera
;tudiants se pr^senteront h voi]
leur remettre.
linsi qu'ils Tavaient anno
s k bras, se rendirent aux
zcfiSy qu^tant pour les pa
coches s'ouvrirent. Les cc
imes de terre, choux, nave
Q fut telle, qu'elle suffit
J fonctionnemont de TeBuv
luit rdguli^rement. Chaq
bb6 Lemire h la Chambre des d^
inique d^signant le petit carr^
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412 REVUE PHILAN'
diants rendent visite aux Dames
aussi, en t^moignage de reconnais
nage Saint-Joseph de la Maison-
gratuite.
D'aulres concours se joignent
vriers, des journalistes, des Dami
flu de les enum^rer. Qu'il nous si
de Pain se developpe, 6tend son a
multiplier) t. Nous poss^dons k cet
catifs.
Voici, ann^epar ann^e, la liste
la fondation :
Premiere annee (489i-92). Litres c
— — Moyenn
— — Bons d(
— — V^teme
Le refectoire a 6U ouveri
Deuxi^me annee (1892-93). Litres c
— — Moyenm
— _- . Bons dc
— — Vfiteme
Le refectoire a eU ouvert
Troisifeme annee (1893-04). Litres d
— — Moyenn
— — Bons d€
— — V^teme
Le refectoire a iti ouveri
Quatri^ine ann6e (1894-95). Litres <
— — Moyenm
— — Bons d(
— Vfiteme
Le refectoire a et6 ouver
Cinquifeme ann^e (1895-96). Litres <
— — Moyenm
— — Bons d(
— — Vdteme
Le refectoire a M ouvert
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LA MIE DE PAIN. i]
>6-97). Litres de soupe 40 000
— Moyenne par soirie 666
Bons de pain 40 000
— Vetements 2 800
ire a Mouvert pendant 60 jours.
616 distribu^, depuis rorigine : 125300 li
bons de pain; 14 500 vfitements. Stalis
I on pense qu'il a pu se trouver dans li
grand nombre de gens ayant faim e
lis statistique consolanfe, si Ton envisag(
nt 6i6 secourues !
gression conslante des chiffres. Pendan
;efois, ils fl^chissent sensiblement. Ilfau
nque de ressources. Pour y rem^dier, oi
:erie. Autoris^e par le Pr^fet de police
commerce parisien (cette protection s'es
lagnifiques), la loterie de la Mie de Pair
897. Son succ^s al^gitim^ les esp6rancef
es met h, m^me de payer leurs detles, dc
^ au moins pendant quelque temps, leui
sont multiplids, Torganisation est deve
IX distributions dc soupes et de bons de
ules au d6but, s'ajoul^rent presque im-
de v^tements, linge et chaussures. Au-
)ntinue, pendant toute Tannic, par :
IS m^dicales gratuites ;
3 placement des enfants orphelins ou
n d'unions ill6gitimes et la legitimation
de bons de travail et de logement (c€
nt une extension considerable) ;
es pauvres qui se charge de la corres-
ces lignes, la Mie de Pain va commencer sa sep-
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REVUE PIIILANTIIROP]
des renscignements, dfts rapa
a de la soupe par les jeuncs ou
isiniers et servit6urs des pau\
Afin de la mieux connaltre,
1, la visiter ensemble.
uivrons la route k pied, qu
5 cochers de fiacre la conna
maitre pas du tout.
Lvoir gravi la coUine des Gobe
loulevards ext^rieurs qui, pari
place d'ltalie. Puis, on bifui
]Iailles. Des ruelles 6troites,
is hautes ot profondes, tristei
3st laid. Au haut de la rue B
espace s'agrandit; Thorizon d
palissades, d'immenses terra
; qk et 1^ quelque misiSrable b
1 trou, descendent vers la Bih\
itions, Bic^tre dresse sa mas
aeuse d'hiver, ou les flammes ;
brouillard avec peine, ces ch
tr^s confuses, chaos d'imag(
Bs obscurit6s ind6cises dans le
p6le-m6le, ceux qui n'ont riei
nous, i Tangle de deux rues p
s'interrompent, font place i
tre un mur, nous devinons da
distinguons, une foule qui
bre, six cents, sept cents pen
autres, coudes serr^s pour avi
ience sous Toeil apitoy^ de d
des portes. Sur eux, un silen
joup, dans le mur, une porte
, projette une clart^. Nous v
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LA MIE DE PAIN. 415
blanchis h la chaux, sans autre omement
ic, au-dessous de lui, cette devise : « Ai-
es autres. » Sur de longues tables — des
'6teaiix — sont align^es de copieuses ga-
r anse est fich^e une cuiller d'dtain.
is; nous sommes en retard. Vite un b6ret,
besogne. Plusieurs de nos amis (les jeunes
ettent une sorte de point d'honneur h arri-
Dus ont devancds. Depuis deux heures, ils
ain, ^pluchant les Idgumes, attisant le feu,
office, autour de six ^normes marmites de
venu d'introduire les pauvres et de les
t sans bruit sur les bancs disposes autour
dans leurs doigts raidis. <( Apr5s Tattenle
chaleur de la salle leur donne un instant
[Is ont un sourire fugitif lorsqu'on leur sert
jettent dessus avec une avidity febrile. Des
enfants grelottants et blfimes, de jeunes
5b^tds par le froid et la faim, de vieux
3t hirsutes (4)... » Quelles misbres sont
[rames se pressentent? Celui-ci est un ing^-
vail depuis de longues anndes. Celui-la est
rvatoire, ancien maitre de chapelle de deux
autre, revient d'une colonic lointaine ou
jheuses Font ruin6. Ce petit enfant venu
ste vie : son p5re mort dans un accident
ilade, son frfere infirme; il doit k quatorze
LC famille.
uns se livrent, font des confidences, se
r de leur pass^. Mais c'est une exception,
ire se tait, reste morne. On n'ose les obser-
I d^pcndance du patronage Saint-Joseph de la Maison-
;es gamelles est d'un litre et demi environ.
t6e pour faire la cuisine et servir la soupe.
lique de M. Andr^ Hallays dans le Journal des Debats.
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416 REVUE PHILA^
ver, dans la crainte qu'ils ne sais
sit^ apitoy^e, et qu'une souffra
qu'elie soit, ne leur gdte la joie
gamelle chaude
Avant qu'ils ne commencent,
Pere qui etes aux Cieiix,.. donne
guottdien... » Le souvenir de U
fond de ces &mes. A voix basse, i
tent. Et des regards se tournent
retenlit : « Bon app6tit, mes amis
unanime. On ne per^oit plus, p(
le bruit des cuillers.
A mesure que les gamelles
baiss^es, se reinvent. Les yeux
peu de sang circule sur les pau^
de ce spectacle, des sentiments
Tftme. On 6voque le souvenir de
d'or se gaspille, par exemple dc
converts k 45 francs par t6te. On
journaux mondains :
Exquises les pdtes aux fraises ayan
fruit nouvellement cueilli. C'est en ce
dessert k la mode. On lui donne la f(
Sucre ! On le sert dans des coupes de ci
Yeille pour plaire k la vue avant de sal
fisent k completer le convert. Mais on
savoureuses, les plus fines, et chaque i
de coquetterie k se cr^er en ce genre u
Ou encore :
Voici les derni^res nouveaut^s pou
petit paletot de basin bleu k ample coll
ebon destin6 k les prot^ger sur les rou
de drap vert chasseur, liser^ de drap
avoir, autant que possible, son costum<
dtoife, k celui de sa maitresse.
On fait des manages. La jeune ^poi
avec collerette de tulle. Au collier, du
maria^e, de la fleur d'oranger. La cort
iiierveille, vStements varies, mouchoi
grelots d'or et colliers de perles.*.
Digitized by
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LA MIE DE PAIN. 417
Alors, ce luxe insolent apparait comme un crime. Pourquoi
388 inigaliWs? Pourquoi toutes les jouissances aux uns, aux
etutres toutes les mis^res? On s'afflige, et Ton s'indigne. C'esl
\rraisemblablement k Vid6e d'un tel conlraste que Lucien Des-
caves cria le cri de colfere qu'il a mis en exergue de son der-
nier livre (1) : « Les philanthropes distribuent des soupes; j'en
trempe. »
Lorsque les gamelles sont vides, les mis^reux se retirent
pour faire place k d'autres. Rapidement on nettoie les tables
avec de la sciure de bois. On prepare de nouvelles gamelles.
El le d6fil6 recommence. Cent cinquante personnes seulement
peuvent prendre place h la fois. 11 y a chaque soir trois et
quatre fourn6es successives. Que vont-ils devenir en sortant?
Oil dormiront-ils?
L'autre nuit, apr^s avoir mang^ la soupe, un vieillard est
all6 mourir sur les fortifications — ce dernier abri des gueux.
Quelques-uns s'adressent k THospitalit^ de nuit. Mais^ pendant
rhiver, les refuges sont encombr^s. La Mie de Pain distribue
iceux qui n^ont pas de gite des bons de logemenl grftce aux-
quels ils sont recueillis dans les garnis du quartier. Ce c6t^ de
Toeuvre se d^veloppe de plus en plus.
»
» «
Lorsque tout est fini, apprentis, ouvriers et ^tudiants retrous-
sent leurs manches, balayent le plancher, nettoient les tables,
ou bien, transform^s en plongeurs, lavent la vaisselle. II y a 1&
huit cents gamelles, autant de cuillers, six grandes marmites
qu'il fauttenir prates pour le lendemain. Car chaque soir, la
distribution recommence. Chaque soir, des centaines de mal-
heureux, quelquefois venus de tr^s loin, reprennent le chemin
de la bonne demeure, au seuil de laquelle il semble qu*une
main bienfaisante ait ^crit : « Vous qui avez faim, entrez et
mangez. »
La Mie de Pain apparait encore comme une 6cole de solida-
(1) Soupes f par Lucien Descaves (1898).
MVUB PHILAlfTHROPIQUB. — II. 27
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418 REVUE PHILAN
rit6. C'est un point sur lequel il c
jeunes apprentis sur tout, c'est k
t^moignera le plus d 'affection au]
Celui-ci apporte huit sous, s(
appelle Targent qu'on lui donne ]
Celui-1& demande la permissic
gamelle. II la porte chez une p
pent sortir. Puis, — la charity i
deux agents de police qui station]
le bon ordre, remettant cinq frar
Comment accueillera-t-on une so
cusent presque : « C'cst le produ
nous. Nous nous connaissons e
Nous Savons que ceux qui vier
courus. »
C'est encore un ancien client (
« tir6 d'affaire » qui tient k deve
qui apporte son obole.
La liste de ces faits serait ic
dont la beaut6 vaut qu'on le m
redire, tr^s simplement, comme (
Ghaque dimanche, au patrons
sur un registre par groupes de (
eux un roulement pour assurer
Albert P... s'6taitinscrit comme 1(
il avait contribu^ k distribuer le
selle.
C'^tait la premiere fois qu'il ^
Chez lui, on est presque dam
de buanderie, sa m^re, confection]
r^ussissent k force de travail, d'o
k leurs enfants une sorte de bien
se distinguent de leurs petits ami
Leur logis connait la propretd, —
Jamais ils n'ont souffert de la fail
Aussi Albert est-il profond^me
il a 6t6 le t6moin I Son Amotion s'
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LA MIE DE PAIN. 419
ie ressources, va 6tre obligee de fermer ses
er ses pensionnaires.
evenir, les mioches d^uenill^s, presque nus,
jr une gamelle de soupe, dont, lui, e6t fait
itte pauvre m^re qui sollicitait comme une
p pr^s du po6le pour r^chauffer son enfant k
;es vieillards qui, converts de haillons sor-
ssouvie, explorent les gamelles de leurs voi-
I'y d^couvrir quelques bribes !
rentre chez lui, des sentiments confus, inex-
ent son ftme. II se reproche presque de ne
, lui, d*avoir un bon lit k partager avec son
toujours bien v6tu, d'avoir toujours suffisam-
deux heures de corvee de vaisselle, ce n'est
part de d^vouement n'est pas suffisante, qu'il
lelque chose pour aider la Mie de Pain.
t k ses camarades d'atelier ! S41 leur deman-
itre eux une collecte. C*est une id^e cela! II
nt bon ccBur an fond. Silrement, ils ne lui
ir un refus.
5 la nuit, il songe k la fagon dont il s'y
e un plan de bataille. II mtlrit ses questions
: — Toi, je te fais toutes tes commissions; tu
jf user deux sous. — Toi, tu boiras un canon
Btc.
)re en arrivant k Tatelier. Sa gait^ ordinaire
a air de tristesse, comme un reflet de ce qu'il
le son visage. Tristement, il gagne son ^tabli,
imentil s'y prendra pour lancer son appol,
entree en mati^re.
imarades arrivent, se mettent an travail, apr^s
ign^es de main, lis sont de bonne humeur.
presage. Quelques-uns grognent vagtiement
qui, venu en retard, n a pas sufftsamment
giis ga ne tire pas k consequence. En travail-
ufife vite. Et Tatelier d6borde de vie. Le grin-
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420 REVUE PHILANTHROPIQUE.
cement sourd ct continu des limes met comme une sourdine au
chant cadencd des marteaux. Quelques-uns causent ; d'autrcs
sifflent. Le bruit des outils et des voix se confond, se m^le...
Albert, qui vientde bourrerle poftle, croitle moment venu:
— Vous ne vous plaindrez plus. Le voici tout rouge, le
po^Ie ! II fait bon ici, tandis qu'au dehors, tant de malheureux
ont froid...
Et, brusquement, la voix tremblante, il raconte sa soir6c h
la Mie de Paiuy et explique i ses compagnons ce qu'il attend
d'eux.
— Bravo, petit, dit un vieux. La misfere, nous connaissons
Qa ! A r^poque de mon accident, j'ai 6td heureux que les
copains se cotisent. Prends ton b6ret et fais le tour des ^tablis.
Ceux qui n'ont pas d'argent sur eux en apporteront tant6t, ou
bien on leur en prfitera.
L'apprenti ne selefait pas r6p6ter. II va d'^tabli i Stabli,
recueillant Tobole de chacun. Ilsembleque lediscoursdu vieux
rcQoive Tapprobation unanime, lorsque tout k coup une protes-
tation s'^lfeve :
— Pour qui me prends-tu? Ce n'est pas it moi qu'il faiit
conter ces blagues. Plus souvent que je te donnerais de la mon-
naie pour des feignants ! Et cela s'accompagne d'une bord^e
d'injures.
Albert ne souffle mot. II a d'abord rougi. Sa nature ardente
a fr6mi sous Tinsulte. Mais il regagne sa place. Et, sans avoir
le courage de compter le produit de sa collecte, il se met k limer
avec rage. L'atelier, tout k Theure si bruyant, est presque
silencieux. Plus de lazzis, plus de chansons. Un sentiment de
g^ne oppresse tout le monde. Les limes mordent plus durement
le fer, comme pour hurler la plainte que Tenfant a su contenir.
A deux ou trois reprises, Touvrier qui est ]a cause de ce
changement veut entamer une conversation. II essaie de
gouailler,mais, hesitant devant les visages soudain plus durs, il
lente une diversion. D'un bout k Tautre de Tatelier, il crie k
un camarade : (^ On mange ensemble aujourd^hui. C'est moi qui
regale. — Non, r^pond Tautre. J ai invito Albert. Je Temm^ne
kla maison. » Et, pour mieux marquer la mise k I'index, le
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^INSTITUTION
DES
CAISSES D'fiPARG
Au-dessous des agitations pol
blent nos soci6t6s modernes, il se
dans ie calme des trdfonds social
tinu, puissant, qui prdpare les vr
Ainsi, en France, depuis vingt-
si^cle, — long espace de la vie hi
riode active d'une g^n^ration, —
notre pays cinq pr^sidences, tout
solant de ministferes varies et les
soufflant actions et reactions, au gi
dehors, dc la paix int^rieure et de
On pourrait citer des projets de lo
(sur les mutualit^s, sur les retraite
ans, remani^s constamment sous
attendent encore une solution et
oeuvres tronqudes et stdriles.
Mais au-dessous de ces courai
fois funestes, certaines institutio
organis6es ou ddvelopp6es par dc li
samment servi le travail national,
gr^s moral et materiel du peuple
grand journal anglais The Times^
regard de ce qui se fait en dehoi
sujet de Tinstitution frauQaise des
si heureusement rdussie depuis 1
chez tons les peuples civilises : « In
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L'INSTITUTION 6DUGATRICE DES CAISSES D'fePARGNE. 423
En v^rit^, e'est un grand succ^s pour la France! » Et M. de
Bismarck ^tant chancelier de TEmpire, a ddnonc^ \k un des
signes de notre relfevement nationaL
En 1874, comme en 1870, notre pays 6tait en arrifere de
tons les principaux peuples civilises sous le rapport des Gaisses
d'^pargne, de la plus importante des institutions populaires
du monde modeme : la France ne comptait dans ses Caissesr
d'^pargne que deux millions cent mille d^posanis, et un stock
d'^pargnes en d^p6t de cinq ceM quarante-cinq millions de
francs; elle compte aujourd'hui plus de huit millions de d^po-
sants, et plus de trois milliards de francs en d^p6t.
Et les rapports officiels du ministere du Commerce, aussi
bien que les comptes rendus annuels des administrations lo-
cales de nos Gaisses d'^pargne, de nos Gonseils g^n^raux et de
nos autorit^s scolaires constatent que ce progr^s est dA en
bonne partie aux Gaisses d'^pargne scolaires : cette institution
a exerc6, depuis vingt ans, une grande influence sur Textension
de la clientele adulte des Gaisses d'^pargne, soit par le nombre
des ^coliers devenus ouvriers, soit par le nombre des ouvriers
amends aux Gaisses d'^pargne, gr&ce k la propagande instinc-
tive des ^coliers dans leurs families et des instituteurs parmi
les populations de leur entourage, h Toccasion de I'exercice des
Gaisses d'^pargne scolaires.
G'est en France que la veritable id^e premiere des Gaisses
d'^pargne scolaires a surgi, en 1834, et c'est en France que
rinstitution, apr^ quarante ann^es de tentatives rest^es Isoldes
ou incertaines, a pris en 1874 son oi^anisation precise, facile,
siire et essentiellement educative; ce qui est un fait assez rare,
chez nous, dans notre pays oh les id^es naissent nombreuses,
mais le plus souvent vont se r^aliser et grandir k Tdtranger,
d'oCi elles nous reviennent plus tard comme des oeuvres 6tran-
gferes. En 1874, la France ne possddait encore que sept Gaisses
d'6pargne scolaires; depuis Torganisation r^l^e en 1874, Tin-
stitution s'est propag^e dans pr^s de vingt-quatre mille 6coles
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42i REVUE PHILANTHROPIQUE.
(= 23 980). Et ce progrfes s'est accompli par une libre initiative
faisant appel k des d^vouements v^^'^TifnirAa • p/Asf AnonrA \h nn
fait k remarquer, car il montre (
initiative existe avec autant de p
les plus iiers de cette pr^cieuse 1
vivifiant pent se r6v61er k tout dij
Paris, mais encore en province,
dans nos municipalit^s, dans no
raires, industrielles, agricoles, (
autres compagnies ^conomiques
d^partements m6me les plus 61oij
Voil^ ce que d'^minents ho
strangers ont reconnu, et (nous d
de la meilleure grftce du mond
viennent surtout d'Angleterre, d(
magne.
Dans deux articles tr^s appr
glaise. The XIX^^ Century y a d6cr
Caisses d'^pargne scolaires. Voici
« Cest k la France qu'appart
elle pent Hve justement fifere —
de Caisse d'^pargne scolaire; ju
plusieurs pays d'Europe, des essa
part n'avaient rien d'un syst^mc
catif...
« En 1873, M. de Malarcecomb
scolaire sur la base d'une institui
et ^ducatif. Les premieres ann^e
depuis 1874 ont ^videmment pro
de bon syst^me que, durant les <
les Caisses d'^pargne scolaires 6
de tentatives Isoldes et peu r^usi
venu k obtenir des notabilit^s 1
pr^voyait pas ; et k son appel pai
discours et autres moyens de pro
seignement k tous les degr^s ont
tique et un sens d'^ducateurs to
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L'lNSTITUTION feDUGATRIGE DES CAISSES D'fePARGNE. 425
depuis que la m^thode franQaise de 1874 a 6td formulae, ily
avail eu en Angleterre sur ce sujet un tant soit peu seulement
de Tesprit public quia £t^ cr^^ en France par la sage et habile
politique et Tindomptable Anergic de Torganisateur frauQais,
nos instituteurs et nos Boards of Schools ne seraient pas resl6s
la plupart dans rindiff^rence ou Tignorance des recommanda-
tions que notre D^partement de TEducation a adress^es dans
ces demi^res ann^es...
« Une Caisse d'^pargne scolaire n'est pas une banale coUecte
de sous, mais elle doit Mre un exercice d'^ducation : elle diff^re
d'une Penny-Bank ordinaire en trois points distincts: 1** elle
forme partie int^grante desexercices de T^cole; 2<> elle est di-
rig^e, op6r6e et comment^e par Tinstituteur, k Texclusion de
tout intrus, de toute personne ^trangfere k T^cole; 3** Ies<5colier8
sont seuls d^posants, et ils ne d^posent queles menues sommes
de leur propre argent de poche. »
On voit qu'en Angleterre, les esprits d'^lite ont bien com-
pris le caract^re ^ducatif et la port^e morale de cette institution,
qui, k rinstigation de la France, et depuis 1876, a trouv6 dans
la Grande-Bretagne de dignes promoteurs, d'abord k Liverpool,
k Birmingham et k Londres.
Un 61oquent commoner^ M. Samuel Smith, M. P. pour
Liverpool, a dit cette parole de profonde observation morale et de
haute port^e sociale : « Ces faits d'ipargne de la part de nos
enfants sont des actes de sacrifice; et toutes les grandes choses
se font par la vertu d*un sacrifice; Texercice habituel et m^-
thodique de T^pargne des 6coliers, dirig^ et ^clair^ par le
maitre, dans T^cole m£me, forme ainsi des 6nergies morales et
bien r^gldes qui, dans la vie de Tadulte, se retrouvent d6cu-
plSes... » Lord Derby, r6v6que d*Exeter et d'autres moralistes
et^ducateurs de grande autorit^ ont consacr6 parleurs discours
k Liverpool, d'apr^s Texp^rience, des observations analogues.
En 1896, la ville de Liverpool comptait 82 School-Banks, avec
36 327 ^coliers ^pargnants, ayant un ensemble de petites
^pargnes en d^p6t de 5739 livres st. (= 143475 francs).
A Birmingham, dans la grande cit6 industrielle, le
T. Hon, Joseph Chamberlain, ancien chef du parti avanc6.
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426 REVUE PHILANTHROPIQUE.
actuellement ministre d'etat, a donn^ une forte impulsion aux
School Savings Banks de la viile qu'il repr^sente au parle-
meDt et qui est aujourd'hui munie de School Savings Banks
dans toutes les dcoles du Board municipal. Le rapporteur de ce
Board constate que ce sont les directeurs des ^oles qui ont
demands Torganisation dans leurs ^tablissement^ de cette nou-
velle branche auxiliaire d'^ducation; ils consid^rent que cet
exercice scolaire a augments Tattrait et Tint^rfit des enfants et
des parents k regard de T^cole.
Ce qui s'est y^rifid d'ailleurs plus largement dans les six
demi^res anndes, depuis la loi nou velle dite Free Education
Actf mise en vigueur le 1" septembre 1891. Cette loi, imitie
de la loi frangaise de 1833, a exon^r^ des frais d'^colage la ca-
tegoric des dcoliers la moins ais^e. Au moment de la promul-
gation de cet Acty le Conseil royal de F^ducation adressa k to us
les directeurs d'6cole une circulaire ou il leur rappelait qu'une
bonne ^cole ne se borne pas k preparer les 6lftves k des examcns
d'instruction, mais s' applique aussi k agirsur le caract^re
moral des enfants ; que d6jk le Parlement avail 6dict6 qu'une
^cole ne serait qualifi^e d'excellente^ litre donnant droit k la
plus haute gratification parlementaire, que si elle pratiquait
Texercice ^ducatif de la Gaisse d'^pargne scolaire ; et qu'une
occasion se pr6sentait de populariser plus encore les School
Savings Banks, dijk stabiles dans plus de 2 500 6coles en An-
gleterre : les instituteurs, les pasteurs, les juges de paix, les
trustees et autres notables locaux, pourraient engager les fa-
milies exondrdes des frais d'^colage par la loi nouvelle k
employer cet argent disponible en recompenses donn^es de
temps en temps k leurs enfants, suivant leurs bonnes notes de
classe et leurs m^rites k la maison ; et les enfants mettraient
ces pennies k la Gaisse d'^pargne scolaire. La recommandation
a parfaitement rdussi; et d^s Fannee suivante, en novembre
1892, on constatait qu'un beau quantum des sommes liberies
avail dejJt pris refuge dans les School Savings Banksy soil une
somme totale de 143 000 livres sterling (3 575000 francs). Et
ces bons effets sont signal6s dans les campagnes comme dans
les villes. A Londres, ou, en 1887, sur 1075 directeurs d'^coles.
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L'lNSTITUTlON feDUCATRICE DES CAISSES DMfePARGNE. 427
922 avaient agr^6 Is, School Savings Bank, les families des 6co-
liers ont parfaitement r^pondu k Tappel duGonseil d'^ducation.
Ces progr^s avaient €16 fort bien pr^par^s par les efforts du
savant et illustre aveugle, Henry Fawcett, professeur d'^cono-
mie politique de TUniversit^ de Cambridge, ministre d'Etat
(grand maitredes postes) de 1880 k 1884.
En Allemagne, ou M. le pasteur Senckel a fait organiser,
depuis 1877, 2 899Caisses d'^pargne pour la jeunesse, ayant
243 933 6pargnants, M. de Bismarck, 6tant chancelier de Tem-
pire germanique, a recommandd aux ^ducateurs allemands :
« cette nouvelle branche d*^ducation, la Schulsparcasse^ Tap-
prentissage de la vie dconomique et morale du peuple travail-
leur, le siminaire de toutes les autres institutions populairesy
comme une des forces du relbvement de la France, qui forme
d^s r%e malleable les generations nouvelles k la vie sobre et
r^glee, k la domination de soi, k ces vertus domestiques et
sociales qui constituent chez les adultes les caractferes forts,
virils... »
Et le grand stratfege de I'AUemagne, lemar^chal de Moltke,
dans sa retraite, a tenu le mdme langage aux maitres d'^cole
allemands, k ces Schulmasters qui, disait-on, avaient prdpard
la victoire, et qu'on s'occupe aujourd'hui de stimuler « k for-
mer encore, pour Tarmee, les enfants de TAllemagne par un
apprentissage de la vie 6conomique et morale, de la vie forte
et regime, par Texercice habituel du sacrifice, notamment par
la pratique de la Caisse d'^pargne scolaire, k Tinstar de la
France »• Etil a contribu^ de ces dons, autrement assez parci-
cimonieux, pour encourager par des m^dailles et des prix les
educateurs de sa province, et ensuite de toute TAUemagne, a
etablir des Schulsparcassen, s^minaires de discipline morale,
facteurs de force nationale.
En Autriche-Hongrie, Franz D6ak, le r^novateur de la Hon-
grie, dont la mort (1876) fut marquee par des fun^railles dignes
d'un Sobieski ou d'un Franklin, a laiss^ k ses amis une sorte
de testament politique, ou, entre autres conseils, il leur rappelle
ce qu'il avait dit it M. de Malarce dans un entretien, k Buda-
pest, sur les institutions populaires : « J'ai bcaucoup pensd k
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
; je sens bien que si j'ai fait mon peuple politique-
le reste & le former suivant les moeurs ^conomiques
; aux qualit^s brillantes, vaillantes, tout en dehors el
de nos races orientales, il faut ajouter les vertus plus
! rOccident, la sobri6t6, Tesprit d'ordre, la vie r6gl^e,
•6voyance, qui les arracheront un jour aux vaines
s, au gaspillage et i I'usure : ce que feront excellem-
laisses d'^pargne, et surtout les Caisses d'^pargne sco-
ig6es et comment6es par nc
it ainsi, d6s T^ge tendre, les v
s. » Suivant le voeu de Franl
al, Franz Weisz, president d
e, vint i Paris en 1878 s'^cl
t de retour Ji Budapest, il fit cr6er une section sp^-
la Handels-Academia pour la propagation des Caisses
scolaires.
•tugal, comme en Espagne, cette institution fran^aise
ris^e par de notables hommes d'Etat, de science et
ration : ainsi par Tancien premier ministre, M. de
m^s, M. da Costa Goodolpheim, de TAcad^mie des
jt M. Jos6 Ribeiro, directeur du Monte Pio official ;
rid^e ing^nieuse d'apposer aux murs des 6coles ces
pour r^dification des maltres, des icoliers et des
>as de meilleur instrument pour ouvrir au peuple la vraie voie
ition que la Caisse d'^pargne scolaire.
Franz D4ak.
\ d'^pargne scolaire enseigne la sage ^conomie comme on en-
rertu en la faisant pratiquer.
Malarce.
iliation k toutesles institutions de pr^voyance.
LUZATTI.
on est et doit Stre Tiniliation pour la vie complete.
Spencer.
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L'INSTITUTION feDUCATRlCE DES CAISSES D'fePARGNE. 429
II
L'exercice scolaire de la Gaisse d'6pargne a, en effet, le m6-
rite de montrer complfetement k V6lh\e, au futur ouvrier, ce
qu'est une caisse de compensation 6conomique;elle fait toucher
du doigt Tavantage de cette operation k double effet, oh d'abord
on se prive de quelque objet futile pour obtenir ensuite, plus
lard, par compensation, un objet n^cessaire ou d*une s^rieuse
valeur. Seule, de toutes les institutions de pr^voyance popu-
laire, la Caisse d'^pargne permet k un ^colier de jouir de cette
compensation k courte ^chdance, dans un temps mesur^ suivant
son esprit d'enfant k courte vue : les sous qu'il 6pargne aujour-
dliui en les sauvant de petits gaspillages, de d6penses en bon-
bons, chiffons et autres futilit^s, illes retrouvera dansquelques
mois, dans quelques semaines, et avec quel honheur ! — pour
s'acheterun livre, un objet de v6ture, que sa famille ne pour-
rait peut-6tre pas lui acheter k ce moment; ou encore, pour
contribuer k une bonne oeuvre, non pas avec des sous subtilises
k la faiblesse de ses parents, mais avec des sous de son propre
petit p6cule, recompenses de ses m6rites k r^cole et k la mai-
son, et qui repr^sentent fi^rement, par la mise k T^pargne, les
sacrifices de r^colier aux vertus d'ordre, de sobriety, de pr6-
voyance.
Et \oi\k pourquoi on a nomm6 la Gaisse d'^pargne scolaire
recole pratique d'initiation de toutes les institutions de pr^-
voyance.
Plus tard, quand les vues de Tecolier, devenu apprenti,
s'etendront, il sera prepare pour comprendre la compensation
economique k plus longue port^e qui s'offre au travailleur 6co-
nome dans les combinaisons des societ^s de secours mutuels
pour les cas de maladie et pour la vieillesse.
Mais k Fenfant de dix k douze ans, gardons-nous de dire
qu'il ne recevra le fruit de ses ^pargnes actuelles qu'6 une
ipoque indefinie, inddpendante de sa volont^ou tr^s lointaine;
il penserait qu'en fait vous le leurrez par une sorte de confisca-
tion. Si ses Spargnes etaient affect^es k une society de secours
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430 REVUE PHILANTHROPIQUE.
mutuels^ elles prendraient la forme de cotisations mensuelles
rigoureuses, peu en rapport avec ses ressources de poche va-
riables, et deviendraient ainsi des cotisations servies par le pfere
qui plus nettement ferait mieux de payer par versement direcl
k la Soci^t6 mutuelle les cotisations de son enfant. L*^coUer n(
ferailplus I'exercice salutaire, ^ucatif, moralisant, deT^pai^^
libre et personnetle. Et si les ^pargnes de Tenfant ^taient affec-
t^es ^ une caisse de retraite, T^colier comprendrait moins en-
core une compensation de ses ^pargnes qui ne se r^aliserait que
dans trente ou quarante ans.
Et cette premiere impression d'enfance : les institutions de
pr^voyance voilant une confiscation, pourrait affecter poai
toujours Tesprit de Tenfant devenu homme, et» le rendre mal
dispose k appr^cier, dans Tind^pendance de son ^ge viril, h
Soci^t^ de secours mutuels et de retraite.
Lorsque, k la Caisse d'^pargne scolaire, T^colier aura vu el
touch6, a sa guise, suivant son d^sir et son besoin, Tai^nl
qu'il a confix nagu^re k la Caisse d'^pargne, et qu*il vcut em-
ployer aujourd'hui pour une satisfaction utile, quand il aura
pratiquS pendant plusieurs ann^es de son enfance cette caisse
de compensation, vous pourrez, k sa sortie de Ticole, offirir au
jeune homme qui va devenir ouvrier, un livret de Sociit^ dc
secours mutuels et m^me de Retraite pour la vieillesse ; alors il
comprendra, car son Education 6conomique de prdvoyance sen
faite, et T^conome apprenti deviendra bon mutualiste et boB
coop^rateur.
Done, que Tinitialion aux institutions de compensation 6ca-
nomique commence par la Caisse d'^pargne scolaire; et que
cette Caisse d'6pargne scolaire fonctionne dans son plein exer-
cice de compensation : ouverte pour recevoir les sous de pach(
personnels de l*6colier, ouverte aussi pour rendre les ^pargnes I
I'^colier.Que si,k la distribution des prix qui termine les dtudei
primaires d'un 6colier, on le gratifie d un livret de Soci6t6 di
secours mutuels ou de retraite, au lieu d'un livret de (^aiss<
d'^pargne (puisque Tdcolier poss^de d^ja son livret de Caisse
d'ipargne acquis par ses propres, efforts), rien de mieux
Et voilii ce que Ton devrait faire de I'argent que les municipa
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r
-rr^
L'INSTITUTION feDUCATRICE DES CAISSES D'tPARGNE. 431
lit^sou les comit^s soolaires emploient aujourd'huikdistribuer,
enprix,deslivretsdeCais8ed'6pargne; on gratifierait de Sfrancs,
10 francs et plus un certain nombre de livrets de soci^t^s de
secours mutuels, et on remettrait ces livrets ainsi amorces anx
4l^ves sortants des 6coles primaires.
Ainsi se r^glerait Vidtkcation de lapr^voyance.
Cette education de la pr^voyanoe n'est pas moins importante
pour les fiUes que pour les gar^ons :
En 1876 et 1877, sur un rapport de M. de Malarce, le Con-
grades agriculteursde France, pr^sid^ parM. Drouyn deLhuys,
^mettait k Tunanimit^ deux voeux, fortement motives et ap-
puy^s par M. le conseiller d'fitat Tisserand, directeur g6n6ral
de Tagriculture, k savoir : « que les 6coles et les fermes-^coles
soient dot^es de Caisses d'^pargne scolaires partout ou les eir-
constances locales lepermettront; — et que les 6coles de fiUes
soient munies de Caisses d'^pargne scolaires comme les 6coles de
gar^ons. »
On invoquait ce motif que, dans les manages d'ouvriers, et
surlout dans les formes, la femme est la veritable minagere de
la famille; que la femme fail la d^pense par le menu au jour le
jour, et qu'ainsi elle pent faire T^conomie ; que la femme a aussi
le soin des grosses d^penses, loyer, v6tures, approvisionne-
ments de m^age, etc., et que oe souci la porte i la pr6voyance
joumali^re, h. la discretion pour les d^pcnses courantes, sur
lesquelles on doit faire des ^pargnes en vue des d^penses plus
fortes etplus lointaines; et enfin qu'eng^n^raljdans lesfermes,
c'est la femme qui dirige la basse-cour et tient les comptes des
petites exploitations.
Ces vues justes et pratiques ont ^16 bien comprises, enFcance
et ensnite k T^tranger. Ainsi, notamment, aux Etat-Unis, ou de-
puis vingt ans, k Texemple de la France, des hommes degrande
autorite tels que les Hon. S. Pomeroy Townsend, president de
la principale Caisse d'^patgne de toute TAm^rique, et S. Mer-
rill, fondateur et president des Faculty et college de Belloit,
et, M- J. H. Thiry, ancien president de Board of Schools, ont
suscit6 la creation de nombreuses Caisses d'^pargne scolaires
dans les Etats de TEst de la grande R^publique am^ricaine
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432 REVUE PHILANTHROPIQUE.
une femme de haute culture intellectuelle, M"* Sara-Luis
Oberholtzer, publiciste tr^s vers6e dans les questions d'6duca
tion, s'est appliqu^e k la propagande des School Savings Bank
pour r^ducation 6conomique et morale des femmes. A un
6poque et dans un pays ou Ton tend i augmenter les droit
16gaux de ia femme, il parait convenable de fortifier par Tddu
cation les habitudes et les Energies de la femme, pour 6lever se
facult6s au niveau de ses nouveaux devoirs et de ses droit
acquis.
Ge n'est pas seulement dans le nouveau monde am^ricai
que institution frangaise des Caisses d'^pargne scolaires a ^t
bien comprise et propag6e pour le biendu pen pie; bienplusloi
encore, dans VAustralasie, k nos antipodes, dans ce nouvea
monde du xix® sifecle, une soci6t6 s'est constitute, d5s 1871
pour propager les Caisses d'^pargne scolaires (suivantle system
de France, dit Texpos^ des motifs de la fondation). Et le gouvei
neur de la colonic de la Nouvelle-Z^lande, Lord Normanb)
dans son discours d'inauguration de cette ceuvre fondamei
tale de T^ducation populaire, dit aux colons, aussi ardeni
aux d^penses extravagantes qu'Ji la conqu6te de la fortune
« Vous venez ici pour acqu6rir les moyens de vivreensuite hei
reux. Eh bien, si vous voulez vous assurer cebonheur, but d
votre ambition, travaillez detoutesvos forces, mais d^pensc
avec mesure. Pour le travail. Go ahead! AUez de Tavant. Mai
pour la jouissance, Sc//re^/ram// Soyez mesur^s. Voilkce qu
les enfants de ce nouveau monde apprendrontexcellemment pa
la pratique famili^re de \h School Savings Bank. »
Par cette oeuvre frangaise des Caisses d'^pargne scolaires
la France, au lendemain de ses d6sastres, et dans cette period
p6nible de Tisolement que fait le malheur, notre ch^re Franc
s'est bientdt sentie relive avec la plupart des hommes d'Etal
de science ou de bien des diverses nations ^trangferes; de tou
les pays civilises du monde,, m6me de TAUemagne (lettre spor
tan6e du 1®'' juillet 1876 du ministre d'etat Stephanz, gran
maitre des postes de Tempire germanique), des t^moignagc
d'accession impr^vus, sont arrives k Paris au secretaire g^n^
ral de la Society des institutions de pr^voyance de France c
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r
L'INSTITUTION ^DUCATRICE DES CAISSES D'fePARGNE. 433
de r Association permanente du Congr^s universel des institu-
tions de pr6voyance : ceuvresde science et de propagande fondles
par M. de Malarce sur ie succ^s des Gaisses d'^pargne scolaires
el pour ^tendre Taction h toutes les institutions populaires,
Caissesd'6pargnedetoutordre,ordinaires,postales,etc.,Soci6t6s
desecours mutuels,Retraites, Cooperations. Et suivant Tobser-
vation, unanimement applaudie, d'un illustre savant stranger,
L. Luzzati (plus tard ministre d'Etat), disant le dernier mot de
notre premifere session de 1878 k Paris, oil tous les peuples
civilises ^taient repr^sent^s : « La France, malgr^ ses malheurs,
vient de nous r6apparaltre comrae le paysessentiellement uni-
versel, Torgane central des id^es g6n6reuses et bienfaisantes. »
Surce, ilest permis dereconnaitrequeTinstitutionde 1874
2 bien m^rit^ de la patrie frangaise, non moins que du peuple
fravailleur de tous pays et de la civilisation.
Nous ne pouvons mieux terminer cette dtude histori^ue
<Itt'en donnant un extrait de la revue TUnion postale dniver-
'ELLE, organe de V Office international officiel institu^ i Berne
P^i* tous les feats agr^g^s dans cette Union, c'est-k-dire par
tous les ^tats civilises du monde ; dans sa livraison mensuelle
^^ d^ccmbre 1897, cette revue contient une notice approfondie
^} estcomme la r^sultante des opinions exprimdes, surTin-
^^^Ution des Caisses d'^pargne scolaires, par la plupart desgou-
^^^ments et administrations d'Europe et d'Am^rique dans
5&% Verniers temps.
Aprfes avoir montr^ le caractfere de cette nouvelle branche
auxiliaire de T^ducation, la Revue universelle appr^cie cette
institution comme la base de toutes les institutions de pr6-
voyance; elle constate que « les premiers essais de 1834 4 1873
ne firent que peu de progrfes en France, et it T^tranger, ofi pour-
tant Tidee avait p^n6tr^, et que ce fut seulement par Taction de
Torganisateur frangais, qui avait pu constater, au cours de
voyages d'<5tudes effectu^s k travers TEurope en 1873-74, les
d^fauts inh^rents aux divers systfemes usit6s, que Tidee regut
nn d^veloppement rationnel par une m^thode administrative
facile et siire... Depuis 1874, depuis vingt-trois ans, Tinstitu-
tion ainsi organis6e s'est d6velopp6e en France et duns d*autres
MVUB PHILARTHROPIQCE. — II. 28
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VARIETES
L'As flistanoe m^dioale grratuite dans le d^partement
de I'Bure.
RAPPORT DE M. SAVOUR^-BONVILLE
En raison de I'importance du service d'assistance m^dicale gra-
t^te, et k litre d'exemple, nous empruntons au rapport de M. Sa-
Tonr^-Bonville, inspecteur d^partemental d*assistance publique de
I'Eore, un aper^u du service et des observations gdn^rales dont nos
lecleurs appr6cieront l'int6r^t :
Dans mon rapport de I'ann^e derni^re» j'ai 6tabli que le service de
I'assistance m^dicalegratuite, organist k la fin de 1894, avail fouctionn^
d^ le 1« Janvier 1895, el que, dans le cours de 1895, la mise en pratique
<)e laloi du 15 juillel 1893 s'^lail op^r^e d'une mani^re salisfaisanle, pro*
gressivement.
En 1896, la sitaation s'eslaccentu6e de telle sorle qu'on pent afQrmer
V^^f dans I'Eure, le service fonclionne normalemenl, dans loules ses
parties.
Toutefois, dans rapplication d'une loi aussi compleze que Test celle de
I'assislance m^dicale graluite, el dans un d^parlemenl comme celui de
I'Eare ou le nombre des communes est tr^s grand, il n'esl pas surprenanl
d'avoir a relever certalnes irr^galarit^s de principe, cerlaines difficullds,
oa des cas d'inertie.
C'est ainsi que, malgr6 des inslraclions precises, r^it^r^es, qaelques
communes onl continue, en 1896, k payer direclement leurs d^penses me-
dicates et pbarmaceutiques, alors que celles-ci, anx lermes de la loi, doi-
vent ^tre payees par le d^partement.
Ges irr^gularit^s, il y a tout lieu de le penser, ne se reprodniront pas.
C'est ainsi que plusieurs administrations communales onl marqu^ une
tendance k vouloir s'affranchir, au detriment d'autres collectivity, jde d^-
penses iear incombant du chef de leurs malades indigents.
G'est ainsi, eneore, que des administrations communales, s'^cartant des
dispositions l^gales, onlcru devoir, en vue de b^nSficier de la subvention
dipartementala pr^vueau bar^me A (article 27 de laloi du 15 juillel 1893),
ioserire k leurs budgets des centimes sp^ciaux k Tassistance m^dicale gra-
tiite, abrs qoe leurs budgets pouvaienl supporter les d^p^nses dej ce ser-
^ saas 1 aide d'one imposition extn^ordioaire.
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436 REVUE PHILANTHROPIQUE.
De sorte qu'elies ali^geaient indictment lears charges an d6trimei
d^partement.
Mais une verification minutieuse des budgets communaux par la S
vision de la prefecture, conform'ement k vos instructions, a remis tc
choses au point.
Vous avez di!l, Monsieur le pr^fet, rappeler k certaines communes 1
obligations et m6me proceder k des inscriptions d*ofOce.
Mais ce sont \k des faitsinh^rents k la p^riode de debut de I'applici
de la loi ; ils disparaltront d'autant plus s(kement que nous nous attac
k faire observer les prescriptions Mgales par toutes les coliectivites,
moyen de sauvegarder les interets de chacune d'elles, en mdme temps
ceux des indigents malades.
Ainsi qu'il sera etabli en detail dans la deozi^me partie de mon
port, le nombre des inscrits comme celui des malades soignes tant a
micile qu'& Thdpital se sont accrus, en 1896, mais dans des proporl
difrerentes.
Alors que le nombre des inscrits s*est l^g^rement eieve (12853 au
de 12736), celui des malades soignes k domicile a subi une augraenta
veritable : de 3575, chiffre constate pour 1895, il s'est eleve 4 4151,
une difference en plus, pour 1896, de 576.
Celui des malades soignes k rhdpital a ete de262 au lieu de 205.
De cet accroissement du nombre des malades, il est resuJte neces
rement une augmentation de d^penses.
Gette progression ne saurait causer la moindre surprise. Elle etait
vue, dansce sens que la mise en pratique de la loi du 15juillet 1
quelque pen incomplete en 1895, s'est generalisee, en 1896, dans pres
toutes les communes du departement.
A cetegard, il y avait interdt k pouvoir comparer nos depenses
celles des departements oil le service de Tassistance medicale gratuii
fonctionne en 1895.
Le nombre de ceux-ci a ete de 57, mais il convient d*en retranche
dans lesquels le service n'a fonctionne qu'en partie.
Le tableau coniparatif annexe k mon rapport sous le n® 5 res
toutes les depenses de ces departements pour Tassistance medicate ,
tuite. II etablit que la depense moyenne a ete, par matade, de :
8 fr. 32 c. pour honoraires des medecins;
6 fr. 84 c. pour frais pharmaceutiques ;
23 fr. 09 c. pour Tensemble du service.
Dans I'Eure, la depense moyenne, par- malade, a ete de :
6 fr. 84 c. pour honoraires des medecins;
7 fr. 30 c. pour frais pharmaceutiques;
22 fr. 60 pour Tensemble du service.
Le departement de TEure se trouve done, quant aux depenses, dans
situation normale d'autant plus satisfaisante que son service d'assisU
medicale gratuile fonctionne dans toutes ses parties et dans toutes les c
munes, k quelques exceptions pr^s.
Neanmoins, le fait de Taugmientation tr^s sensible des depenses m
cales et pharmaceutiques, par rapport k Tannee 1895, aussi bien que c
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y ^ wT ' ^
VAR1£t6S. 437
de la constatation d'on certain nombre d'abus, vous ont amen6, monsieur
le pr^fet, k adresser a MM. les m^decios et pharmaciens des instructions
sp^ciales et precises, touchant les d^penses pharmaceutiques, et k faire
appel au concours d^vou6 des m6decins et pharmaciens.
VoQs a?ez rappel^ ainsi que la loi du 45 juillet 1893» inspir^e par un
sentiment huraain et d'int^rSt social, rdpondait k une n^cessit^ d^mocra-
tique incontestable, mais que la bonne application de cette loi se trouvait
sobordonn^e k la mani^re de faire des coUaborateurs de cette oeuvre so-
ciale.
En effet, si ces coUaborateurs ne s*inspirent pas de Tint^rdtdes finances
pobliqaes, comme de I'int^r^t des malades indigents, il peut arriver que
les communes et les departements, effray^s des consequences flnanci^res
de ladite loi, ne tardent pas k se montrer rebelles k Tapplication, exacte
toot au moins de celle-ci.
Ge qui revient k dire que les m^decins et pharmaciens doivent, aussi
bien que les communes, s'efTorcer d'assurer le service le plus ^conomique-
ment possible.
L'avenir de la loi du 15 juillet 1893, sauvegarde des malades indigents,
depend de Tobserration stride de ce principe.
Les instructions adress^es aux m^decins et pharmaciens, par vos circu-
laires des 5 et i8 roars 1897, tendent k ce but.
Je les reproduis ici :
Circulaire d MM. les Midecins du Service de C Assistance m^dicale gratuite.
c Monsieur le docteur, le service de Tassistance m^dicale gratuite, qui
foDctionne dans le d^partement depuis le mois de Janvier 1895, tend k
charger de plus en plus les finances communales et d^partementales.
« 11 convient de se pr^occuper, d^s maintenant, de cet ^tat de choses,
dans Tint^r^t des finances publiques comme dans Tint^rdt m^me des
indigents.
« Pour produire lous ses effets^ le service de Tassistance m6dicale gra-
toite ne doit pas comporter de d^penses superfiues.
« Or, Texamen des ordonnances m^dicales, d61ivr6es par un certain
nombre de m^decins, explique Texag^ration des d^penses pharma-
ceutiques.
« Certains m^decins prescrivent des medicaments composes d'un prix
eieve, dans lesqueis les sirops, dont la vertu th^rapeutique est uulle, sont
une cause de d^penses superfiues.
« D'autres m^decins ordonnent avec une facility excessive des prepara-
tions medicinales k base de vins de Bordeaux et de Malaga, ou autres vins
fins et sucr^s, alors que la substance active seule devrait etre prescrite; le
vin pouvant soit etre achete par la famille ou foumi par des personnes
charitables, soit etre deiivre par le bureau de bienfaisance, au m6me titre
que le pain, la viande, etc.
« Enfin, certains produits, d'un prix relativement eiev6, ont ete ordonn^s
par quantites reellement enormes.
c La therapeutique du service de Tassistance m^dicale devrait, sauf des
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438 REVUE PHILANTHR'
cas exeeptionnels, ^tre faite aa moyen de q
par la pratique et d'une efficacit^ incon testa
le sulfate de quiDine, I'ip^ca, Tiodnre et
liqueur Fowler, la pondre de charbon, i'exti
(c Poor Tantisepsie, les solutions boriqi
Swielen, riodofonne, en petites qnantit^s,
soffisantes.
<f Telles sent, monsieur le docteur, les
I'examen des d^penses pharmaceutiques.
« En les formnlant, je n'ai pas eu la p
^troit dans lequel vous deviez limiter vos
ment k appeler tout particali^rement vol
absolue d'assurer, aussi ^conomiquement <
si stance m^dicale gratuite, k seule fin de n(
de la loi du 15 juillet 1893 snr Fassistance
par les sentiments humains et d^mocratiqn
impose aux communes et au d6partement (
« Je compte, monsieur le docteur, sur y
vegarder, par une sage reserve dans vos oi
rations m^dicinales, les int^rdts des colle
surer aux indigents les seconrs m^dicaax ei
u Agr^eZy monsieur le docteur, Tassur
distingu^e.
« Le pr6fet c
Circulaire a MM. ks M^dedn
« Monsieur, la commission de v^rificat
Tassistance m^dicale a constats avec regr
de cas, les prix de certains medicaments
d'apr^s les quantit^s inscrites au tarif, si
vient de ces medicaments par livre ou par
« Je citerai, par exemple, richthyol, qu
i^ francs pour 60 grammes, prix conform
du calcul les 10 grammes indiqu6s comme
2 fr. 50, mais nullement Equitable si on
de ce medicament lorsqu'il est achete ai
prix du kilogramme, en effet, est de 50 fri
« Pour prevenir le retour de ces exag
informer, conformement k I'avis de la c
MM. les pharmaciens ne devront plus, k 1
dn service de Tassistance m^dicale gratuit
saperieures k celles indiqu^es au tarif.
« Lorsque, dans les cas exceptionnels
d«cins croiront devoir s'^carter de cette r^
de medicaments superieures k celles port^
fcromir briftvement Texplication dans leu
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VARltTfeS. 489
le savez, doivent 6tre formal^es sur Tordonnance d^tach^e da billet de
mite special aa serYice de ['assistance m^dicale gratuite.
K Agr^ez, Monsieur, rassnrance de ma consideration distingu^e,
« Le pr^fet de i'Eure,
« Sign6 : Beverini-Yico. »
Je ne doute pas qoe MM. les m^decins et pharmaciens qui» pour la pin-
part, sont natarellement disposes k seconder Tadministration, repondront
k Totre appel.
A ce sujet, je ferai remarquer que, dans le cours de chaque trimestrey
les m^decins et pharmaciens envoient k radministration des paquets de
pieces et m^moires se rapportant k Fassistance m^dicale gratuite, et dont
un certain nombre leur sont renvoy^s pour rectification. lis se plaignent
de la formality et des frais de rafifranchissement.
II serai t juste, je crois, de leur accorder la franchise postale pour leur
correspondance avec le pr6fet, et r6ciproquement, pour tout ce qui touche
I'assistance m^dicale gratuite.
D'autre part, quelques h6pitaux paraissent vouloir s'affranchir, dans
certains cas, de d^penses leur incombant de droit.
Tantdt, ils refusent de recevoir an indigent tomb^ malade sur le terri*
toire de la commune dont depend i'hdpital, et, alors, ils oublient que la
loi du 15 juillet i893 sur Tassistance m^dicale gratuite n'a modifi^ en
rien les dispositions de la loi du 7 aoilt 1851 sur les hdpitaux et hospices.
Aux termes de Tarticle l^'' de cette loi, 11 ne peut dtre exig^ aucune condi-
tion de domicile pour Tadmission k llidpital de tout individu priv6 de
ressources qui tombe malade dans la commune oh est situ6 cet hdpital.
Taotdt, lorsqu'il s'agit d'op^rations chirurgicales, ils demandent que
les malades soient admis dans un autre hdpital. Quand le fait provient
d'un scrupule, toujours trfes louable, du m^decin de I'hdpital, c'est assu-
r^ment fort juste.
Mais la demande, si elle est bas^e sur ce fait que T^tablissement ne
dispose pas d*appareils ou d*instruments spdciaux, n'est pas equitable :
d'une part, elle 6tablit que T^tablissement hospitalier ne poss^de pas un
bon senrice de chirurgie; d'autre part, elle entraine, pour la commune du
domicile de secours du malade, une d^pense suppl^mentaire correspon-
dant a r^l^vation du prix de joum^e de Fhdpital ayant accepts le malade.
Jusqu'ici, il n'y a pas eu abus sur ce point; mais j'ai cru utile de mar-
quer la tendance, sans doute irr6 Archie, de deux ou trois hdpitaux.
Le nombre des communes ayant invoqu^ les dispositions de Tarticle 35
de la loi du 15 juillet 1893 s'est accru, en 1896, de deux.
Ces demandes portent k sept le nombre des communes ainsi en in-
stance aupr^s de I'administration sup^rieure en vue d'etre autoris^es k
a?oir une organisation sp^ciale.
EUes ont, toutes, et6 transmises, avec avis favorable, k M. le ministre
de llnt^rieur, dont les decisions ne me sont pas encore parvenues.
Mais la plupart de ces communes ne paraissent pas appel6es k recevoir
satisfaction.
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440 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Les demandes de cette nature sont examinees par le Gonseil sup^rieur
de TAssistance pablique. Or, ce Gonseil semble s*dtre ralli^ a cette opinion :
1*^ Que i'article 35 est consid^r^ comme devant permettre k certaines
grandes villes de conserver Tancienne organisation, trds satisfaisante
parce qu'elles sont bien outiii6es;
2<> Que les dispositions de Tarticle 35 ne doivent pas 6tre appliqu^es
aux communes qui ne sont pas pourvues d'une organisation d'assistance
complete et puissante (bureau de bienfaisance, hdpital, hospice, etc.)-
Les commissions cantonales ont eu h se prononcer sur 46 reclamations
en inscription sur les listes d'assistance : elles ont donn^ une suite favo-
rable k 10 de ces reclamations.
La commission de veriQcation institute par le r^glement a examine
avec soin toutes les affaires qui lui ont.^te soumises: elle a op^r^ des re-
ductions sur 326 memoires de m^decins, pharmaciens et sages-femmes.
Son mandat expirera k la fin de Tannle. 11 y aura done lieu de la re-
constituer pour le !•' Janvier 1898, point de depart d'une nouvelle p^riode
de 3 ann^es.
Je rappelle ici que cette commission est compos^e de 4 medecins et de
2 pharmaciens, eius par leurs confreres du d^partement.
Nous aurons k renouveler aossi, pour une periode de 3 ann^es, k courir
du !«>* Janvier 1898, les tarifs de medicaments, d'appareils et d'operations
chirurgicales.
Somme toute, je le repute, le service de Tassistance medicale gratuite,
dans TEure, a fonctionne reguli^rement, en 1896, dans toutes ses parties.
Le deuxi^me Diner des Mutualistes.
DISCOURS DE M. AUDIFFRED
Le deuxi^me Diner des Mutualistes a eu lieu le 17 decembre au Grand
Vefour sous la presidence de M. Lebon, ministre des Colonies. Le Presi-
dent de la Republique s'etait fait representor par le commandant Serpette.
Le banquet comprenait environ deux cents convives parmi lesqaels
MM. Paul Deschanel, Deloncle, Papelier, Treiat, Ghaudey, Marmottan, Bory,
Guillain, Ouvre, Escudier, Plassard, Van Brock, etc. Les deiegues des asso-
ciations departementales des Mutualistes etaient : MM. Dumond, Dethieux,
Bouchet, de Lyon; Roche, de Lille; Demelin,deSenlis; Gillet et Gagneux,de
Tours, etc.
Au dessert, M. Audi fired a prononce le di scours suivant :
« Quel but poursuivons-nous ? Nous voulons contribuer au developpe-
ment des institutions de prevoyance, el determiner tous les Francais k se
garantir contre les consequences de ces deux grandes causes de misere,
la maladie et la vieillesse.
«Dans notre societesi agitee,sollicitee par Tetude de tant de probl^mes,
nous ne devons certes rester etrangers k aucune des recherches instituees
pour rendre I'homme plus instruit, plus capable de decouvrir les secrets de
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VARlfeTfeS. 441
la nature et de mattriser ses forces, pour lai assurer une plus haute culture
morale et loi garantirune existence mat^rielle meilieure. Mais, comme il
est necessaire de divisor et de sprier les questions, Tobjectif de la Mutua-
lity nous paratt 6tre, k Theure pr^sente, de s'appliquer sp^cialement h cetle
tdche restreinte et d'une port^e si considerable que nous venous d'indi-
quer.
c Nous trouverons sur notre route des obstacles nombreux, des j)r^jugds,
des erreurs a dissiper, et notanament cette croyance a la toute-puissance
de I'Etat, trop r^pandue et qui deviendrait mortelle pour notre pays si elle
parvenait k s'accr6diter.
« G'est Tindividu qui doit ^tre Partisan de son sort, c'est lui qui doit
faire acte de pr^voyance en vue des ^ventualit^s fdcheuses, pr^lever r6gu-
li^rement sur ses gains quotidiens les quelques centimes n^cessaires k
Tassurance contre la maladie etla vieillesse.Et c'est ^d^velopper ce senti-
ment de la pr^voyance que doivent tendre toutes les preoccupations d'une
nation fi^re et g^n^reuse comme la n6tre.
u La loi sur les Soci^t^s de secours mutuels en preparation depuis quinze
ans et qui sera promulgu^e avant la fin de la legislature actuelle, notre
caisse existante des retraites, la loi en preparation sur les retraites qui ap-
portera, dans des conditions determinees, des subventions et des encoura-
gements aux citoyens, faciliteront I'exercice de la prevoyance.
« Gertes, la prevoyance n'est pas une vertu facile ; elle est le resultat d'un
effort coiitinu, d'une privation volontairement et peniblement consentie,
mais comme elle eieve et trempe les caracteres, comme elle fortifie et
reod puissante la volonte !
« Toute une ecole la combat et la denigre, essayant de persuader k des
esprits trop accessibles k de pareils conseils que Tepargne est impos-
sible, voire mdme condamnable ; qu'il faut, sans souci du lendemain, tout
consommer au jour le jour, et redamer imperieusement k Tfitat Tassis-
tance dans les moments difficiles, sous cette faliacieuse raison que la pro-
sperite de TEtat serait faite uniquement du travail des salaries.
c Ce n'est pas au moment ou, de toutes parts, les nations etrangeres
s'outillent pour produire ce qui leur est necessaire et lutter avec nous sur
tons les marches du monde, od entrent egalement en lice les peuples
d'Extreme-Orient, qui n'onl pas nos besoins et se contentent de salaires in-
fimes, qu'il faut laisser passer sans les combattre ces theories dissol-
vantes.
« Un de nos convives nous apprenait recemment qu'atia; Etats-Unis,pour
la $eule assurance en cos de (kcds,8478100 adherents avaient d^jd realist des
assurances en capitaux d^passant 35 milliards 975 millions de francs,
« Comme nous sommes loin de ce merveilleuxresultatobtenu par le seul
effort de Tinitiative individuelle, sans la moindre intervention de TEtat I
« Que pour les faibles, les inflrmes, les vaincus de la vie, nous ayons un
budget d'assistance, suffisamment dote, rien n'est plus legitime.
« La Republique n*a pas manque ^ cette partie de sa tAche,et tout recem-
ment encore elle organisait Tassistance medicale gratuite, qu'elle dotait de
credits annuels depassant 12 millions. Mais en dehors de cette minorite
d'assistes, qui doit aller sans cesse diminuant, sous Tinfluence du progr^s
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442 REVUE PHILANTHROPIQUE.
g^n^ral de la richesse, c'est par la pr^voyance, c'est par Tefforl persons
que nous devons r^aliser Tassarance contre la maladie et la eonsiitatio
de la pension de retraite pour la vieillesse.
«Nous y parviendrons, si nous voulons bien r^solument nous livrer k (
travail de propagande, dans le but de faire cr^er partout des Soci^t^s d
secours mutuels et de retraites, ou des Soci^t^s de retraites pures k c6l
de Soci^t^s de secours pour la maladie, et si nous nous appliquons k fail
connaitre les conditions, aujourd'hui bien d^termin^es, que doivent ren
plir toutes nos associations, pour donner k to us leurs membres les m^m(
avantages pour les mSmes cotisations et pour garantir la s^curit6 d<
dpargnes.
« Les esprits sont partout pr6par6s k cet enseignement.Nous serons su
pris des rSsultats que nous obtiendrons, si nous savons poursuivre ave
m^tbode, avec perseverance et tenacity, cette entreprise patriotique.
« Monsieur le ministre des Colonies, je vous ai remercie d'avoir bie
voulu repr6senter ici le gouvemement : permettez-moi de vous dire qt
vous devez Hre pour nous un coUaborateur n^cessaire.
« La pratique de la prSvoyance devient plus facile dans un pays 4 mesui
que ses ressources augmentent. Avant d'^pargner, il fant pourvoiraux di
penses n^cessaires et nos exigences, au point de vue intellectuel et mat<
riel, vont beureusement grandissant. Pour faire face ^ toutes ces necessity
nous sommes condamn6s k produire plus economiquement et davantag
La science, avec ses merveilleux progr^s, en nous permettant d'utiliser h
forces naturelles, a decuple nos moyens d'action. Nos colonies noi
ofTrent un champ immense a defricher. Laissez-moi vous dire que les am
de la pr^voyance saivent avec int^rdt vos travaux, et atteudent de tous U
hommes de progr^s qui vous secondent une partie des ressources qui lei
permettront de r^aliser le but qu'ils poursuivent sans cesse, d'assurer at
malades toutes les ressources qui leur sont n^cessaires, aux vieillards 1<
moyens de vivre dignement.
« Lorsque votre collogue, M. Barthou, a pr6sid6 notre premier banque
je lui ai demand^ de nous faire autoriser, par M. le ministre de rinstru<
tion publique, k cre^r des Soci^t^s de secours mutuels enlre les ei
fants de nos etablissements secoudaires et de nos ^coles primaires, afm c
d^velopper entre ces enfants d'origine et de fortunes diverses des Hei
d'affeclueuse solidarity. Ce voeu a et6 bien accueilli.
« Permettez-moi, en terminant, de vous adresser une requite d'un aulj
ordre.
« La maladie nous coilte en France, aimuellement, plus d'un milliarc
elle nous enl^ve 825000 personnes. Les maladies infectieuses et cont
gieuses que la science, depuis Pasteur, declare si^irement ^vitables, cai
sent 220000 d^ces, plus que la guerre de Fannie terrible. Dans la r^ceni
expedition de Madagascar, ot nous avons eu 49 soldats qui sont mortsp]
le fait de blessures, nous avons enregistr^ SOOOd^c^s du fait de maladie
infectieuses et contagieuses.
« Aprfes le vote de la loi sur les Societes de secours mutuels, la Gommi
sion du Pari Mutuel a bien voulu, conform^ment k une decision de I
Ghambre que j'avais provoqu^e, accorder une subvention de 125000 fran
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VARliTfeS. 443
qui sera renonvel^e, je I'esp^e, pour faciliter^ nos savants les rechercbcs
poor la d^coiiTerte de nouvelles in^thodes de traitement de ces maladies.
Llnstitut Pasteur et 20 laboratoires de Paris et de province ont 6t6 dot^s
deressources indispensables. Je vons prie, monsieur le ministre,d'examiner
s'ilvous serait possible d'instituer danenos principales colonies, comme le
S^n^gal et Madagascar, des recherches de ce genre, en assurant, k nos sa-
vants de la ni^tropole les moyens d'y poursuivre k certains moments
leurs ^tndes si f^condes.
«< Un des grands obstacles k la raise en valeur de nos colonies, qui doit
nous aider k alimenter nos budgets de pr^voyance, c*est la maladie. Vous
poQvez contribuer a le faire disparaltre ; la t^che est de celles qui peu-
vent tenter votre esprit g^n^reux et §lev^.
« Je me resume. Si nous qulttons cette reunion avec la resolution bien ar-
TH4e de r^pandre ces id^es de prtvoyance qui nous ont group6s ce soir, si
radministration des colonies nous aidait k r^duire ce tribut de la maladie,
qui gr^ve si lourdement le budget des Soci^t^s de secours mutuels, notre
soiree n'aurait pas 6t6 perdue. »
Apr^s Thonorable d^put^ de la Loire, des toasts ont 6t6 port^s par
M. Martin Ginouvier, fondateur da diner; par M. Bonjean, president de
I'Association des voyageurs; par M. Arboux, secretaire g^n^ral de la Ligne
de la Mntualite.
EnQn I'auditoire a fait k I'allocution de M. le ministre des Colonies le
phis chaleureux accueil.
Cette reunion cordiale a laiss^ sous la meilleure impression tons ceox
qui y participaient.
Traitement de la Tuberculose & domicile.
RAPPORT DE M. LE DOCTEUft THOINOT
Comme suite aux documents d6ji publics (1) sur les Iravaux de la grande
Commission de la tuberculose, nous reproduisons aujourd'hui le rapport
de M. le D' Thoinot sur les tuberculeux indigents soign^s k domicile.
Messieurs,
En commengant ses travaux votre sous-commission a tenu k se pronon-
cer sur une question de principe et I'a fait k I'unanimit^: le tuberculeux
soign^ k son domicile ne pent 6tre plac^ dans de bonnes conditions de
gn^rison. II y est en outre la source de contagions constantes dans son
entourage. Seule I'bospitalisation dans des milieux pr6par^s pent foumir
les conditions de non-contagion et de gu^rison .
Les dangers dont le tuberculeux soign6 k domicile peut 6tre la source,
la stalistique suivante les d^montre nettement.
L'Administration, sur I'invitation de la sous-commission, a recbercb^
(1) N* 3 de la Betme Philanthropique, p. 438 et 439, et n" 4, p. 593 et suiv.
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444 REVUE PHILANTHROPIQUE.
combien de tuberculeux ^taient soign^s actuellement k domicile, et com-
bien de ces tuberculeux vivaient c^libataires, combien en famille.
Elle a relev^ 348 tuberculeux k domicile, chiffre assurement au-dessous
de la r6alit^, mais ce qui s'applique k ces 348 malades serai t vrai pour un
nombre dix ou vingt fois plus grand.
Or sur ces 348 tuberculeux, 36 vivent isol^, 312 vivent en famille, et
I'enqu^le nous montre 852 personnes eutourant ces 3i2 tuberculeux; en
d'autres termes, 852 personnes sont expos^es k la contagion tuberculeuse
par le traitement k domicile, si nous ne venous pas efficacement k leur
aide.
L'assislance m^dicale du tuberculeux k domicile est done unmal social,
mais c'est un mal longtemps encore inevitable.
Comment en att^nuer les dangers dans la mesure du possible ?
Votre sous-commission vous propose les trois moyens suivants :
\^ Le tuberculeux, traits k domicile, recevra par les soins de TAdmiDi-
stration un cf*achoir, l\ y aura ^videmmentlieu de munir cbaque malade de
deux crachoirs du module de celui que vptre sous-commission a choisi
pour les salles des hdpitaux ;
2*» L'Administration vulgarisera danstoute la mesure les notions fonda-
mentales et ^l^menlaires comprenant la propbylaxie de la tuberbulose.
Ces notions ont^t^ condensdes enune plaquette r^dig^e par votre sous-
commission.
Cette plaquette sera remise k tout malade soign^ k domicile par TAssis-
tance, qu'il s'agisse ou nond'un tuberculeux, et la Commission comprendra
le sentiment qui nous a fait rejeter la dislribution aux seuls tuberculeux.
Mais la sous-commission estime qu'une diffusion plus large encore s'im-
pose et qu'il y a tout avantage k faire p^n^trer ces notions dans la popula-
tion, r^ducation faite par elle ^vitera sans doute plus d'une contagion
tuberculeuse. Elle desire pour ces instructions la publicity la plus large et
par tons les moyens possibles.
Voici r^nonc^ de notre plaquette.
ADMINISTRATION O^NERALE DE L'aSSISTANCB PUBLIQUE A PARIS
INSTRUCTIONS CONTRE LA TUBERCULOSE
1« La tuberculose est la maladie la plus r^pandue.
2» La tuberculose est ^vitable. La tuberculose est ga^rissable.
3<* Si la tuberculose est si commune, c*est qu'elle est propag6e par
les crachuts du malade.
On 6vite la tuberculose en faisant la guerre aux crachats.
Le malade doit, h domicile, ne cracher que dans un crachoir toujours pourvu
d'une certaine quantity de liquide : au dehors, ^ d^faut de crachoir, ne cracher
que dans un mouchoir.
Tout crachat tomb6 sur le sol (parquet, tapis, paillasson, trottoir, voitures,
wagons, etc.) r6pand la tuberculose.
Autant de crachats d^trults, autant de tuberculoses 6vit6e8.
4" Le crachoir devra 6tre nettoy6 chaque jour en le mettant dans de I'eau
froide que Ton fera bouiliir pendant cinq minutes.
Tout linge sur lequel on aura crach^ (mouchoir, serviette, etc.), devra, comme
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VARlfeTfiS. 445
le crachoir, Stre plong6 et maintenu cinq minutes dans I'eau bouillante ou soi-
gneusement mis h part pour 6tre Iivr6 aux services public de disinfection.
{Instruction ridig4e par la Commission institute d, V Assistance publique de
Paris, pour la prophylaxie de la tuberculose.)
3« Le troisi^me moyen prophylactique vis6 par votre sous-commission
consiste k 6tendre dans la plus large mesure possible la disinfection, disin-
fection au cours de la maladie, disinfection apr^s terminaison de la
maladie.
Mais les moyens proposes resteraient inefOcaces s'ils n'^taient consi-
gn^s que dans une plaquette populaire et dans les circulaires administra-
tives. La Commission ne saurait oublier que, pour la prophylaxie de la tu-
berculose k domicile, elle a des auxiliaires tout d^sign^s dans les m^decins
du traitement k domicile.
A euxrevientla tdche d'6clairer directement le tuberculeux et sa famille
surla necessity et la facility des moyens de lutte centre la contagion; k
eux de veiller k Temploi rigoureux du crachoir; k eux d'appeler le service
de disinfection toutes les fois que la n^cessit^ en apparatl.
Votre sous-commission fait appel k ces m^decins par la lettre circu-
laire suivante qu'elle soumet k votre approbation et que i'Administration,
forte de votre opinioh, pourra alors faire tenir, en son nom, k chacun de
ses m^decins du traitement k domicile.
Messieurs,
L'assistance k domicile est une oeuvre humanitaire qui s'impose : mais au
point de vue de I'hygifene familiale et publique, elle n'est exemple, vous le savez,
ni de difficult6s, ni d'inconv^nients.
Le tuberculeux, difficilement curable k domicile, devient un danger pour son
entourage. Soigner les tuberculeux k domicile, c'est augmenter incontestable-
ment les points de contact et les surfaces de tuberculose.
Le traitement du tuberculeux & domicile doit, vous le comprenez, comporter
autant de prophylaxie que de th6rapeutique.
Le m6decin doit se pr6occuper autant de Tentourage du tuberculeux que du
tuberculeux lui-mdme, pour r^duire au minimum la contagion.
U lui appartient de se faire I'^ducateur du malade et de son entourage, pour
que chacun soit k m^me de se d6fendre centre la tuberculose, en ayant appris h.
connaitre son mode de contagion.
Cest le crachat, vous le savez, que doit viser le m^decin ; c'est en vue de
cette guerre k faire aux crachats qu'a 6t6 libellde VInstruction conb'e la tubercu-
lose, r^dig^e en plaquette, qui, par les soins du bureau de Bienfaisance, devra
p^n^trer chez tout malade traits comme tuberculeux.
Vous aurez k d6velopper, smvant Toccasion et les milieux, les instructions de
cette plaquette, et k veiller k leur application. Cest dans cet ordre d'id6es que
vous aurez, en particulier, k appeler le service de la disinfection toutes les fois
que vous en verrez la n6cessit6, tant pour le linge que pour le logement, soit
pendant la vie du malade, soit aprds le d^c^s.
II y a tout int6r6t — int^-^* du malade, int6r6t familial, int6r6t public — ^ ce
que ce^ instructions soient lormellement remplies. Elles le seront d'autant mieux
que votre experience et votre tact auront su faire comprendre leur importance ;
que vous aurez trouv6 Toccasion de dire que la tuberculose est curable, qu'elle
est 6vitable, et que nous n'en sommes plus ^ I'^poque ou Von voyait dans un
tuberculeux un phtisique incurable.
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446 REVUE PHILANTHROPIQUE.
L'assistance des tuberculeux k domicile ne sera plus seulemeat une OBuvre
humanitaire, vous n'aurez pas seulement assists, soulag6 et gu^ri les tubercu-
leux, vous aurez 6t6 la sauvegarde de la famille, ei vous aurez puissamment
servi la grande cause de la prophylaxie de la tuberculose.
Tel est, Messieurs, rensemble des mesures propbylactiques, arr^t^ par
Yotre sous-commission pour pallier, autant que faire se pent, aux dangers
inh^rents k Tassistance dn tuberculeux k domicile; elle les soumet k YOtre
approbation.
Un dernier point a pr^occup^ enfin Yotre sons-commission, c'est celle de
Tassainissement des Bureaus de bienfaisance.
II n'est pas utile d'insister pour d^montrer la n^cessit^ de cet assainisse-
ment: chacun sait en efTet que les locaux de consultation constituent de
dangereux entrepdts de germes de contagion aussi varies que nombreux.
Yotre sous-commission estime qu'ily a lieu:
i* De munir chacun de ces locaux d'uu ou plusieurs crachoirs, du type
adopts par votre sous-commission pour les crachoirs communs des escaliers,
coiirs, corridors des hdpitaux.
L'AdministrationL fera placarder un avis portant defense de cracber ail-
leurs que dans le crachoir etinstituera une sanction centre les d^linquaiits;
2<' Lavage antiseptique quotidien du local par le personnel attacb^ k ce
local, le balayage k sec et le cirage^tant^naturellementproscrits; et disin-
fection m^thodique, k intervalles r^^uliers par les soins du service muni-
cipal de disinfection.
II y aura lieu, enfln, d'afflcher dans le local, en un format special, faci-
lement visible et lisible par tons, les instructions centre la tuberculose
dont nous avons donn^ lecture tout k Fheure.
La Situation des Inflrmiers et Inflrmiires des H6pitaiix
de Paris.
UN DISCOURS DE M. H. D^ROUIN
A la distribution des prix de Tficole mnnicipale d'infinniers et
d*infirmidres de Bic^tre, M. H. D^ronin, secretaire g6ndral de TAssis-
tance publique, a fait cet expos6 de la condition morale et matdrielle
des infirmiers et inflrmi^res :
Depuis vingt ann^es les Ecoles d'inflrmiers de Paris accomplisseni leor
oeuvre. Elles sont tellement li^es aujonrd'hui k notre organisation hospiU-
li^re qu'on ne pourrait plus concevoir la possibility de recruter, sans ce
foyer d'enseignement, un personnel en 6tat de r6pondre aux besoins des
malades et du corps medical. Gr^ce k elles, la valeur du personnel secon-
daire des ^tablissements hospitallers de Paris est devenue incontest6e ;
aussi est-ce k notre porte que les hdpitaux de province viennent frapper
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r
VARlfeTtS. 447
quand ils out besoin de coticours experiments ; bien plus, et nous en
arions Texemple il y a quelques mois, il arrive mdme, en cas de guerre,
que les ambulances ^trang^res font appel k nos inOrmiers, parce qu'elles
saTent trouver en eux, avec le courage, Tintelligence et Taptilude.
En effet,alors que lachirurgie modeme montre tant d'exigences; alors
que Tapplication de la m^thode anliseptique n^cessite, chez ceux qui sont
appel^s k soigner les blesses, des precautions minutieuses, que ne prennent
pas ceux ou celles qui n'eu connaissent pas Timportance, le dipldrae des
Ecoles crepes par le h^^ Boumeviile est une garantie pr^cieuse et la plus
certaine de toutes.
Et pourtant quelles luttes ont dt ^tre engag^es lors de la creation des
Ecoles? Quelle persistance de volonte a dill d^ployer M. le D' Boumeviile,
quand, malgr^ tant d'obstacles, il a voulu importer en France ces Ecoles
professionnelles inconnues k Paris, et qui cependant existaient d^j^ depuis
longtemps aux Elats-Unis, en AUemagne et en Angieterre I
Gette ^re de luttes est aajoard'hm close.
En m^me temps qu'on constataitles heureux et indispensables r^sultats
des Ecoles professionnelles, on jugeait aussi, et il y avait Rune correlation
n^cessaire, qu'ii fallait rendre enfin justice, en les retribuant mieux, k
ceux et celles auxquels ces l^coles sont destinies.
Bien que les traitements actuels soient encore minimes, quelle diffe-
rence enorme entre leur montant en 1853 et en 1897!
En 1853, a la suite d'une augmentation d*appointements qui fut alors
tres appreciee, les sous-employes de premiere classe, c'est-ii-dire les sur-
veillants et les survei Halites forent appointes de 360 francs par an; les
sous-surveillants et sous-surveillautes, qu'on appelait alors sous-employes
de deoxieme classe, recurent 250 francs.
Pour les infirmiers, garcons et filles de service, on considera alors que
les femmes n'avaient pas des droits egaux k ceux de Thomme. On n'accorda
que 180 francs par an aux infirmiers, 150 francs aux garcons attaches aux
services generaux; les inflrmieres ne recurent que 450 francs et les filles
de service que 120 francs.
II est vrai que, par un syst^me aujonrd'hui abandonne, il existait alors
des augmentations periodiques. Au bout de dix ans, les infirmieres et gens
de serviee des deux sexes pouvaient etre augmentes de 48 francs et au bout
de quinze ans de 60 francs.
L'annee 1861 fut une annee genereuse.
Les sous-employes de premiere classe recurent comme traitement annuel
on minimum de 360 francs, avec droit k une augmentation de 24 francs p£ir
an jusqu'aun traitement maximum de 500 francs.
Les sous-employes de deuxieme classe obtinrent un traitement annuel
minimum de 320 francs avec une augmentation annuelle de 12 francs jus-
qu'au traitement maximum de 380 francs.
Les serviteurs de premiere classe ou suppteants recurent 252 francs
avec une augmentation annuelle de \2 francs jusqu'au maximum de
300 francs. - -
Les infirmiers et gens de service obtinrent 180 francs par an, avec une
augmentation annuelle de 18 francs jusqu^i un maximum de 252 francs.
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448
REVUE PHILANTHROPIQUE.
L'Sgdit^ des sexes se trouYait ainsi proclam6e dans les services hospi
taliers, k une 6poque oil on ne s'occupait guhre encore de ce qu'on appell
aujourd'hui le f^minisme.
En 1875, nouvelle r^forme : les infirmiers et gens de service, en verti
d'un arrdte de 1' Ad ministration, recurent le droit d'atteindre leur maxi
mum de traitement au bout de deux ans an lieu de quatre.
De U, il faut passer k 1878 et 1879 pour trouver la trace de nouvelle
ameliorations.
Les budgets de 1878 et 1879 constatent qu*en ces deux annees, le Gonsej
municipal de Paris a accord^ pour Tam^lioration des traitements du pei
sonnel secondaire un credit total de 184000 francs, sur le rapport d
D' BourneviUe, alors membre de ce Gonseil.
En consequence, le directeur de TAssistance publique r^glait comm
il suit, par arrets du 5 mai 1880, les traitements du personnel secondair
pour les deux sexes :
Sous-employ6s de !'• classe.
Sous-employ6s de 2« classe.
Serviteurs de 1" classe. . .
Serviteurs de 2* classe.
!'• section 600 francs
2* section 540 —
1" section 480 —
2* section 420 —
!'• section 360 —
2* section 330 —
!'• section .300 —
2« section 270 —
3- section 240 —
Dans un rapport sur le budget de I'Assistance publique de 1882, M. 1
D' BourneviUe, conseiller municipal, s'exprimait ainsi:
« Au nombre des augmentations de credit r^clam^es par I'Administrs
lion, vous avez remarqu^ une somme de 114000 francs destin^e ^ Tei^vc
tion des traitements des sous-employes et serviteurs; M. le Directeur, a
Gonseil de surveillance, parlant de cette nouvelle augmentation, ajout
que le Gonseil municipal ne refusera pas de la voter et qu'il en a la coi
viction. M. le Directeur aurait pu aller plus loin et declarer que celte au^
mentation, il Tinscrivait &la demande du Gonseil municipal. En effet, c'es
sur* vos instances reiterees et vos vceux repetes que le personnel secondair
doit Tameiioration de son traitement. »
Et k la suite du vote du nouveau credit de 114000 francs, un arrete di
7 avril 1884 du Directeur de TAssistance publique fixa les traitement
com me il suit:
Sous-employes.
Serviteurs.
1" classe. . .
2* classe. . .
1" classe* . .
2« classe. . .
1" section 800 francs
2* section. 700 —
I'* section 600 —
2* section 500 —
i** section 400 —
2* section 300 —
1" section 330 —
2« section 300 —
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VARlfeTfeS. 449
suppliants et suppl6antes (anciens serviteurs
;ection) ^tait porlS de 400 k 425 francs, celui
rmi^res de 360 k 400 francs, celui des infir-
ire classe de 330 k 380 francs, celui des infir-
me classe de 300 k 350 francs,
resultant de cette r^forme entratnait un cr^-
vot6 par le Conseil municipal et k pr61ever
Taugmentation des salaires de tous les tra-
1 nom de lacinqui^me Gomraission, pr^sid^e
nseiller municipal Navarre d^posait un rap-
ent vetoes, tendanl k Tallocation d'un credit
slevementdu traitement du personnel secon-
on qui a H6 faite de ce credit,
lents de chacuue des cat6gories du personnel
doubles et le personnel peut attendre avec
il et les no uvelles augmentations de traite-
s ult^rieurement et aussi le rel^vement des
se plus n^cessairement encore, k mon avis,
lepuis 1877.
int, en disanl qu'on ne s'est pas occupy de
gt ans. Par une bienveillante decision du
e D' Bourneville n'est pas Stranger, le Direc-
, d'accord avec le Conseil de surveillance et
aadmis les chefs d'atelier de Bic6tre ^b^n^-
n argent dans les mSmes conditions que les
re.
n. 29
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CHRONIQUE ETRAINGERE
Allemagne.
UN NOUVEL HOPITAL A BERLIN
La fondation d'un h6pital grandiose a 6i6 r^solue k Berlin. Les frais son
pr^vus k 13100 000 Mk. Eutre aatres, Thdpital contiendra an bdtimen
pour la graduation du sel, revenant au prix de 1 demi-million. Cette gra
duation, ex^cul^e d'apr&s les principes reconnus excellents k Reichenhall
ofTriraaux personnes soufTrantdes organes respiratoires tous lesavantage
ohtenus dans les localit^s de cures salines.
L'espace destine k cet ]i6pital est si vaste qu'on pourrait y placer cii
quanle-six fois tout THOtel de Ville de Berlin!
On se propose de cr^er un ^tablissement modMe, r^unissant tous le
avantages hygi^niques. La salle mortuaire, dont la facade contient 19 fe
netres, disposera des plus completes ressources pour T^tude de raaatomi
et sera destinee aux recherches scientifiques.
A. S.
LES ACCIDENTS DE FABRIQUE
Les accidents occasionn^s par I'industrie allemande en 1895 furent a
nombre de 300000, dont 6000 mortels. Les ouvriers constructeurs partici
pent a ce chifTre pour 34000 accidents et 800 morts.Un grand nombre d
ces sinistres ont 616 6vit6s au moyen d'une inspection am^lior^e, Tinspec
tion actuelle^tant absolument insufflsante, en plusieurs provinces presqu
d^risoire. Les sommes vot^es sont minimes ; Wurtemberg d^pense dans c
but 7 000, la Baviere 8000, la Saxe 15 000 Mk par ann^e.
A. S.
Angleterre.
MAISONS DE CONVALESCENCE
I'n service hospitalier, si bien lenu et amenagd qu'on le suppose, n'ei
tout k fait complet que si on a prevu des salles ou des asiles sp6ciau:
pour les convalescents.
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CHRONIQUE tTRANGfeRE. 451
La convalescence est qaelquefois plus longae que la maladie; elle pent
etre abr^g^e si le convalescent est ^loign6 du milieu nosocomial, s'il est
dans un air pur et s'il pent b6n^Qcier d'un regime particuli6rementr6con-
fortant. L'int6r6t du malade n'est pas doateux ici ;ajoutonsque i'int^rdt de
r^tablissement est ^galement enjeu. En effet on ne pent songer k immo-
biliser des lits trop longtemps dans un hdpital qui, suivaot une ancienne
definition francaise trop oubli6e est et doit dtre une machine a soigner des
malades. hhs que la maladie a cess4, d^s que des soins m^dicaux ne sont
plus indispensables, c'est k Fasile de convalescence que Thospitalisd doit
hire envoye. Nous avons en France deux 6tablissements modules pour les
convalescents des h6pitaux de Paris : I'asile national de Vincennes pour
les hommes, I'asile national du V^sinet pour les femmes. La ville de Paris
a cr^e des maisons de convalescence pour les accouch^es. Quelques hdpi-
taux de province (Lyon, Rouen) out des maisons sp^ciales pour leurs con-
valescents.
Les asiles de Vincennes et du V^sinel, ceux des hdpitaux de Lyon sont
en pleine campagne, dans les domaines ^tendus et bois^s; ils rendent des
services si importants que, d^s qu'on les connait, on s'^tonne de ne pas
voir toutes nos grandes villes pourvues de maisons de convalescence ana-
logues.
En Angleterre, cette question des convalescents est depuis longtemps
r^solue etle nombre des ^tablissements qui lesadmettent est considerable ;
mais c*est surtout depuis une dizaine d'ann^es que ce nombre s'est aug-
ments et qu'il tend k crottre encore. Beaucoup des grands hdpitaux de
Loadres ont des asiles de convalescents ou bien out pass^ un traits avec
des etablissements priv^s pour envoyer leurs malades se refaire au grand
air des champs ou mSme au bord de la mer.
Certains de ces etablissements sont r6serv6s aux convalescents de ma-
ladies contagieuses, les uns sont reserves aux hommes et les autres aux
femmes, qnelques-uns ne resolvent que des enfants, d'autres des femmes
et des enfants, d'autres enfln sont ouverts k la fois aux hommes, aux
femmes et aux enfants.
Le nombre total de ces etablissements est de 326, dont 146 k la cam-
pagne et 180 au bord de la mer.
Les maisons r^serv^es pour les convalescents d'affections contagieuses
sont au nombre de 3, toutes situ6es k la campagne. — Celles qui re9oivent
^ la fois des hommes, des femmes et des enfants s'^l^vent au nombre de
136. — II y en a 94 qui regoivent des femmes et des enfants. — 28 ne re-
Qoiventque des femmes. — 63 ne sont ouvertes qu'aux enfants.
Les prix pay^s pour les convalescents, par les personnes charitables
qui les assistent ou par les hdpitaux, varient beaucoup dans ces ^tablis-
semeats selon les conditions de confort, de 7 shillings k 3 livres par
semaine.
H. N.
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452 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Belgique.
LES HABITATIONS A BON MARGUi;:
L'Inddpendance beige expose dans quelles conditions a pris naissanc
Scbaerbeck (faubourg de Bruxelles) le probl^me des habitations ouvri^i
il est r^sult^ de la disposition des impasses insalubres de la rue i'Oii^
appel6es k disparallre. Celte demolition aura pour effet de priverde lo
ments un tr^s grand nombre de families ouvri^res qui 6prouvent de ce
un assez grand embarras.
Ons'estmis d'accord pour Tallocation d*un credit de 150000 francs d
tin^ k la construction d'habitations k bonmarcli^ du cdt^ oppos^ k la futi
6cole moyenne, dans la nouvelle rue reliant les rues Van Dyck et rOlivi
£taDt donn^e la cherts des terrains dans cetle purtie agglom^r^e,
commune ferait ^difier, dans ce quartier, de vastes maisons de rappor
cinq 6tages ou I'air et la lumi^re seraient r^pandus k profusion et q
pour un modeste loyer, donneraient asile aux families d'ouvriers et pel
employes.
Les rez-de-chauss^e de ces b&timeiits qui auraient un di^veloppemi
de facade de 12 metres seraient convertis enmagasins. Chaque ^tage c<
tiendrait quatre chambres spacieuses avec annexe, latrine, robinets d'e
et deversoirdes immondices. Ceux-ci, d^vers^sdans une colonne, serai(
recueillis dans des poubelles que les ouvriers de la voirie viendraient vie
chaque jour.
D'aprfes les premiers calculs, le prix moyen de location mensuelle j
chambre serai t de 7 francs.
Teiles sont les grandes lignes du projet qui a obtenu Tadh^sion
tous les membres du College. Le diff^rend porle uniquement sur les moy(
d'exploitation de cesimmeubles. Les uns veulent confler cette exploitali
k des soci^t^s dans lesquelles la commune s'interesserait k concurrei
d'une soinme flx^e par le College; les autres veulent conceder cette expl
tation au conseil des hospices et au bureau de bienfaisance.
D' autres encore veulent tenter la constitution d'un domaine commun
Le Conseil communal aura k se prononcer entre les trois syst^mes.
titats-Unis de FAm^rique du Nord.
LA CONDITION DES NEGRES DANS LES YILLES
Depuis longtqmps d^ja les philanthropes am^ricains signalent les c(
ditions d'ezistence d^plorables des families n^gres dans la plupart <
grands centres de TUnion et demandent que, surmontant leurs pr^jug
les hommes de bonne volont6 viennent en aide, mat^riellement et mo
lement, aux pauvres n^gres, abrutis par la mis^re et par ralcool, <
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. CHRONIQUE £TRANG6RE.
^ouillent dans une honteuse promiscuity, dans certains faubourgs d'o]
lentes citds am^ricaines du Nord et du Sud.
Ges plaintes ont flni par ^mouvoir le public, et J'universit^ d' Atlanta
a entrepris et men^ a bonne fln une int^ressante enqu^te sur les conditii
d'existence des n^gres ciiadins en Am^rique. Un avocat de Boston a c
duit cette vasle euqudte d'une facou scientifique et a cherch^ k en ti
d'utiles indications pour la solution de la question toujours si discut^e
rel^vement et de T^ducation da n^gre am^ricain.
Gette vaste enqu^te a M conQ6e, la plupart du temps, & des homi
ou k des femmes de couleur intelligents (surtout dans les villes du Sud)
itaient mieux k mSme que des blancs de p4n4trer dans I'intimit^ des
milles n^gres et moins susceptibles d'etre influences par le pr^^jug^ dec(
leur, si puissant encore aux Etats-Unis.
Une premiere constatation a montr^ que Taccroissement du nombre
maisons ou fermes acheUes ou loupes par des n^gres,dans les Etats S
de la confederation, est eu r^alite beaucoup moindfe qu'on se I'imagin;
Gela est tres regrettable, car le n^gre vit beaucoup plus confortablem
etpius moralement a la campagne q\x*k la ville et certains fermiers nc
ont su se constituer de tr^s belles situations.
Uoe seconde constatation, toute k Thonneur des sentiments des feme
n^gres, a montre que beaucoup de femmes de couleur subviennent tota
meat ou pour une tres forte part k Tentretien de toute la famille, prin
palernent en allant travailler hors de chez elles, ce qui les oblige malh<
reusemeut a negliger leur inl^rieur et leurs enfants.
Enfmla mortalite excessive desnegrescitadins(enraoyenne73,8p.mi
est attribute k leur ignorance presque absolue des lois les plus^ei^mi
taires de I'hygiene ; les maladies les plus meurtri^res sont non des affectii
aisement transmissibles import^es du dehors, mais des affections dues,
majeure partie aux conditions mis^rables et anti-hygieniques de la yie
I'immense majorile de ce proletariat noir.
La defaillance du p^re de familJe n^gre qui se soucie peu, en genei
des besoins des siens, a eu Tinfluence la plus detestable sur la vitalite
lamoraliie de la race plus particuUerement dans le Sud.
Comme remade k ces maux, on preconise la creation d*associations p(
veniren aide aux mferes de families de couleur, de creches et d'ecoles (
fanlines auxquelles elles pourraient confler leurs nourrissons et leurs
tits enfants pendant leur travail. Enfin on se propose de former des as
ciationsde visiteurs qui, periodiquement, iront encourager les chefs de
mille k se creer un « home » propre et confortable, associations dans l
quelles eutreraient des hommes de couleur honorables et devoues k o
de blancs philanthropes.
On voit, d'apres les resultats de cette enqufite que le douloureux p
bieme de la mis^re des families nombreuses citadines est a pen pr^s
meme sous toutes les latitudes : qu'il s'agisse de n^gres dans TAmedq
du Nord, d'lrlandais dans les cites industrielles d'Angleterre,d'Alleman
(1) Annals of the American Academy of political and social sciences; Philac
phie, 15 seplembre 1897.
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454 REVUE PHILANTHROPIQUE.
de Francais ou d'ltaliens dans les grands centres d'Earope, Taction mor
lisatrice et bienfaisante des noj^les coeurs trouve toujours k s'exerc
utilement.
G. C.
Hollande.
D'apr^s le journal Soziale Praxi8,le gouvernement a pr6sent6 un proj
de loi pour etablir des assurances contre les accidents en faveur des oi
vriers de certaines professions consid6r6es comme plus particuli^reme
dangereuses, notamment les mines, la navigation et les transports.
En cas de d^cfes, les domraages et int^rfits consisteraient en une somr
Sgaie k 10 p. 100 du gain annuel de Touvrier tu^,^ titre d'indemnit6
fun^railles, ensuite eri une pension 6gale k 30 p. 100 du gain annuel
profit de la veuve ou du veuf survivant et de 15 p. 100 au proflt
chaque enfant mineur.
En cas d'infirmit6 totale,la pension serait de 70 p. 100 du gain annu(
et en cas d'infirmit^ partielle, Touvrier estropi^ recevrait une pension pr
portionn^e k la gravity de son ^tat.
Les patrons seraient, d'apr^s ce projet de loi, divis^s en plusieurs cal
gories payant divers tarifs de primes, et la banque de Hollande centralis
rait les primes et accumulerait les int^r^ts des sommes vers^es pour c
fonds d'assurances, qui seraient g^r^s d'apr^s la m^thode autrichienne d
Kapital Qeckung,
On pent prdvoir que ce projet sera prochainement di8cut6 et adopts ji
les Ghambres n6erlandaises. II r^alisera un grand progr^s 6conomique
social et sera un utile instrument de pacitlcalion dans le monde ouvri
hoUandais.
Russie.
LES ASILES POUR LES ALCOOLIQUES
Le docteur russe H. Olderagge propose de fonder un sanatorium pour
gu^rison des alcooliques dans une des lies d* Aland; Tid^elui a 616 inspii
par une visile ^I'lle de Walaam, dans le lacde Ladoga. Gette lie, ou s'^lc
comme unique habitation un monast6re, sert depuis longtemps k y isol
les alcooliques des villages voisins. Priv6s de toute communication, ]
alcooliques ysont mis dans Timpossibilit^ de se procurer des boissons e
vrantes. SurveiJ16s par les moines qui les exhortent k la penitence, its i
prennent Thabilude du travail et retournent gu6ris dans leurs families
ils persistent souvent k rester sobres et religieux.
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ONIQUE fiTRANGfeRE. 455
le si les moines de Walaam, n'ayant d'autres
et la pri^re, parviennent a obtenir des r^sultats
m muni de tous les auxiliaires de la science
1 m^me temps et les d^dts du corps et ceux de
irprenants.
A. S.
Suisse.
f NOUVEAU SANATORIUM
I etablissement pour les tuberculeux. II sera bclti
iUT admirablement expos6e dans la commune de
da grand et beau village de ce nom. L'emplace-
nidi. II est protege par desbois etdes replis de
)res du Nord et de TEst. II se trouve k une alti-
ssus, par consequent, de la zone des brouillards
ver, s'^tendent pendant des semaines, souvent,
i 800 metres sur le plateau situ^ entre les Alpes
is faites avec soin pendant deux hi vers ont per-
peut compter au Faltiberg sur autant de jours
a Davos. L'eau est abondante et d'excellente qua-
itour6 de forfits, enfin la vue sur le lac de Zurich
belle et (^.tendue.
posera de trois bdtiments, un pter I'administra-
s, un pour les femmes. II pourra recevoir une
s devis pour la construction sont ^valu^s k
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INFORMATIONS
La Ligue fratemelle des Enfants de France.
La Ligue fratemelle des Enfants de France a tenu le \ 9 d^cembre, dans 1
Salle de la Soci6t^ d'horticulture, rue de Crenelle, son assembl^e g^n^ral
annuelle, sous la pr^sidence de M"* Lucie Faure.
• Cetle ligue, fondle en 1895, sur rinitiative de M"» Faure, a, on le sail
pour but de grouper les jeunes gens ou les jeunes flUes qui jouissent d
Taisanco, en vue de venir en aide aux enfanls pauvres, orphelins ouaban
donnas .
Devant un public trfes nombreux, ou Ton remarquait beaucoup d'61fevc
de nos grandes 6coles et de nos lyc^es, M. P.-E. Decharme, secretaire g^
n^ral, et M*'« de Gourlet, trisorifere, ont pr6sent6 les rapports moraax <
financiers sur T^tat de la ligue.
La ligue, d'aprfes les reuse igne men ts fournis par M. Decharme, compi
aujourd'hui 10000 membres; son budget est de 56000 francs. Elle a fern]
des comit6s au Havre, i Bordeaux, & Dreux, k Pau, k Vesoul, ^ Dunkerqa(
k Gray; elle esp^re en former prochainement dans d'autres villes; elle
des adherents, non seulement dans toutes les parties de la France, ma
de TEurope.
Grdce au d^veloppement pris par la society et aux recettes r^alis^i
surtout lors de la representation de gala doun^e k TOp^ra avec le concou]
de Tamagno, la ligue a pu yenir en aide k bien des mis^res int^ressanb
pendant Tann^e qui vient de s'dcouler. La commission des secours, pn
sid6e par M"« Lucie Faure, est venue en aide k 296 families. La commissic
du placement des flUes a op^r^ 139 placements d^finitifs. Enfin, la con
mission du placement des garcon s a efTectu^ 23 placements d^finitifs et \
placements provisoires.
Le rapporteur M. Decbarme qui a retrac6 ici mSme (1) les origines c
la Ligue, a montre le rdle du d^l^gu^ de lyc^e et du del^gu^ de quarti<
dans la jeune association :
ft Le deiegue de lyc^e est charge de porter autour de lui la bonne p
(i) N" 1 de la Revue Philanthropique, p. 57 et suiv.
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INFORMATIONS.
role, de faire connaitre k ses camarades Tesprit de notre OEuvre
recueillir leurs adhesions pour les soumettre directement k noire
dente. 11 nous permet ainsi de ne pas recourir ^ rintervention a
mais ofQcielle, des mattres on des directeurs, et il noas donne la i
tion de penser que, s'il a du socc^s, il le doit uniquement k la be^
la cause qu'il soutient, an zMe ardent avec lequel il s'en fait Tinte
Plusieurs fois, cette ann^e, les d^l4gu^s des Ijc^es de Paris se sont
au Palais de TEIys^e, sous Ja pr^sidence de M"" Lucie F. Faure, p
cevoir des remerciemenls et des conseils, et presenter eux-mdme
observations. Les jeunes filles des lyc6es Molifere, F^nelon, Racine
Hugo et du college S^vign6, suivront prochainement cet exempl
comptons beaucoup sur les uns et sur les autres.
«Le d^le^u6 de quartier, davantage maitre de son temps et de si
Teroents, a un rdle plus complexe. Ce rdle, je vpudrais non pas von
finir(car sa vraie d^fioition reside dans le d^vouement ing^nieux et
siaste avec lequel il est rempli), mais vous Tesquisser k grands tra
qu'il ne soit ^personne comply tement Stranger.
« Un des premiers devoirs du d^l^gu6 de quartier est de faire aui
dement, aussi en detail que possible les enqu^tes qui lui sont den
par le Couseil d'adminislration, et pour cela non seulement de vis
eufants chez eux, mais encore de s'adresser aux diff^rentes GEuvres (
faisance du voisinage, pour constater que les families dont la situa
signal^e comme digne d'int^rSt ne se procurent pas des ressou
pen de tous cdt^s. S'il y a des pauvres elTront^s, il y en a de hoi
ces derniers, il faut enseigner par quels moyens lis peuvent l^gi
solliciter Tappui d'institutions oflicielles comme FAssistance publ
ne pas craindre de les guider sur les cberains longs parfois et
qa'ils doivent suivre.
« Le d^l^^u^ doit Htq, cela va de soi, en relations constanles c
collogues, puisque aussi bien son champ d'action a des limite:
fictives, oil il serait invraisemblable que les affaires dont il s'occupe
r^guli^remenl et rigoureusement renferm^es. II doit encore, et
plus d^licat, mais non moins n^cessaire, connattre la plupart des n
actifs de son quartier, afln de s'^clairer de leurs lumi^res et de
de leur force. Les jeunes filles, notamment, ayant plus de loisirs
jennes gens, peuvent se r^unir de temps k autre pour mettre en
leur talent de couture, et tout en travaillant, faire en commun de
d'aveoir pour leur ch^re Ligue.
«Le d61egu6 doit enfin porter aux prot^g^s de la Ligue les sec(
esp^ces ou en nature qui leur out et6 accord6s, veiller k ce que, a
cas, les enfants auxquels il s'int6resse fr^quenlent T^cole, soient
aux classes de garde, b^n^ficient des cantines scolaires, leur cherc
tard de bonnes places d'apprentissage, et, cela fait, ne pas les pe
core de vue. Chacun trouvera d*ailleurs en soi-mfime je le r^j
meilleures inspirations. »
M*^« de Gourlet, tr6sori6re, a indiqu6 dans son rapport que . h
des recettes atteint Tan dernier a M presque exactement double ;
tal de la ligue est quatre fois ce qu'il ^tait k la pr^c^dente asseml
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458 REVUE PHILANTHROPIQUE.
n^rale. « II vous appartient, a-t-elle ajout^ en s'adressant k Tassembl^e,
d' assurer la continuity de cette progression; Tavenir de la fraternelle so-
lidarity de Tenfance est entre vos mains. »
Apr^s une chaleureuse allocution de M. Paul Desjardins, Tassembl^e a
proc6d^ k TMection de six nouveaux membres du conseil,enremplacement
de membres mari6s ou demissionnaires ; puis M. Maingon, avocati la Cour
d'appel, a expose qu'une revision des statuls 6tait rendue n^cessaire par la
demande de reconnaissance d'utilit6 publique de la Ligue, demande qui
sera examinee prochainement par le Conseil d'fital. Lecture a 6t6 faite des
nouYeaux statuls, que Tassembl^e a adopt^s k I'unanimit^. M"« Lucie P.
Faure a prononc6, pourclore la s6ance, cette br^ve et delicate allocution :
« Je tiens k remercier, au nom de la Ligue Fraternelle des Enfants de
France, toutes les personnes qui sont venues nous apporter ici Tencoura-
gement de leur sympathie.
<(Je remercieparliculi^rement M. Paul Desjardins, pour les baotes et
belles paroles qu*il a bien voulu nous adresser. La Ligue en conservera
toujours le pr^cieux et vivant souvenir. Je remercie ^galement Torchestre
et les cbojurs que nous avons tons admires dans la savante et delicate
execution d'oeuvres magislrales. Grdce a leur concours, notre reunion s'est
par^e d'un nouvel attrait, et, dans une barmonie tr^s douce, le prestige de
leur art s'associe k notre pens^e fraternelle.
« Combien de remerciements ne devrions-nous pas encore ajouter k
ceux-ci! L'^num^ration en serait trop longue. Mais, apr^s deux ann^es
d'existence , ayant rencontr^ les marques d'un int^rfit Si touchant et si
spontan^, notre Ligue envisage I'aveiiir avec confiance. Elle esp^re fpie
son action sera de plus en plus efficace, de plus en plus large, de plus en
plus affecteuse : car, — nous ne Foublions pas, — elle ofifre son aide au
nom de Taffection. Et Ton dprouve tant de joie k s'entr'aider ainsi, que
nous n'avons jamais su, que nul ne saura jamais lequel des deux doit reraer-
cier son fr^re : de celui qui donne on de celui qui re^oit! »
Les Enfants martyrs.
M. le procureur g6n6ral Naquet, de la cour d'Aix, vient d'adresser aux
procureurs de la R^publique du ressort une circulaire relative k la re-
cherche et k la repression des « actes de cruaut^ que des parents indignes
commettent sur leurs enfants ».
Aprfes avoir indiqu^ la « frequence relative » de ces actes qui consti-
tuent « un danger social des plus graves », et d^plor^ « la repugnance »
qu'ont ceux qui les connaisseat k les signaler aux parquets, M. Naquet
poursuit ainsi :
« L'action publique doit done s'exercer avec une vigilance toute particu-
li^re pour decouvrir les coupables et avec une fermete irr^ductible pour
les punir. Certes, la mesure est n6cessaire en toutes choses, et les agents
et officiers de police ne doivent pas, pour des motifs futiles, so livrer k
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INFORMATIONS. 459
des recherches inquisitoriales qui troubleraient la Tie de famille. Mais ils
De doivent pas h^siter, non plus k ^couter tous les bruits du dehors de na-
ture k les mettre sur la trace de crimes ou d'abus et k vous saisir d'urgence
d^s que ces bruits prennent une certaiDe consistance.
« Je compte sur votre intelligent d6vouement pour faire comprendre k
MM. les commissaires de police le sens et la haute port^e morale de
mes instructions etpour veiller a ce qu'elles soient slrictement ex6cut6es. »
Le procureur g^u^ral appelle ensuite Tattention de ses auuliaires sur
les suites l^gales & donner aux faits criminels dont il s'agit :
« La tendance des parquets, dit-il, est de correctlonnaliser les afTaires de
ce genre, en vue, sans doute, de mieux assurer la repression ; je voudrais
au contraire, si c'etait possible, qu'on les criminalisdt.
« Les crimes commis par des parents sur leurs enfants r^voltent au plus
haut point la conscience publique et seront sainement appr^ci^s par le
jury el punis par lui avec une juste rigueur. II ne s'agit point la de faits
d^licats ou compliqu4s, demandant un examen difficile pouvant d^passer
la mesure commune du discernement; il s'agit, au contraire, de faits simples
compris de tons. Dans ces conditions, les jur^s sont les meilleurs Jtiges,
car ils jugent avec leur coeur autant qu'avec leur raison, et il se trouve (|ue
I'instinct du ccBur yient ici fortiOer la Yoix de la raison.
« C'est, d'ailleurs, une id^e qui est tr^s g^n^ralement accept^e aujour-
d'hui et qui paratt 6tre dans les tendances du Parlement, puisque la
Chambre des d^put^sapris en consideration les projetis de loide MM. Odi-
lon Barrot, Henry Cochin, Julien Goujon, destines k r^primer les actes
de cruaute commis sur la personne des enfants. (Chambre des deputes,
21 et 26 Janvier 1897.)
« Vous devrez, en consequence, vous preoccuper sp^cialement de la qua-
lification legale a donner aux faits qui vous seront signaies. Cette qualifi-
cation pourra varier suivant les esp^ces, mais elle se rattachera le plus
soavent au crime de coups et hlessures ou de detention arbitraire.
<c Les coups etblessures dont les enfants sontvictimes sont presquetou-
jours accompagnes de premeditation et deviennent ainsi punissables de
peines criminelles toutes les fois qu'il en est resulte une incapaciie de
travail ou une maladie de plus de 20 jours.
c< Quant k la detention arbitraire, elle sera tantdt absolue, tantdt rela-
tive; meme dans ce dernier cas, vous n'hesiterez pas k requerir le renvoi
en cour d'assises.
« Je vous prie, d'ailleurs, de vouloir bien me consulter toutes les fois
que vous aurez quelque doute sur le sens des requisitions que vous
devez prendre.
« Vous voudrezbien, egalement, inviter MM. les jugesd'inst ruction k in-
diquer sur les notices, par une mention speciale, les crimes ou delits quel-
conques commis sur des enfants par leurs parents ou par des personnes
ayant autorite sor enx. Ils pourront, par exemple, faire suivre la qualifi-
cation des mots « mauvais traitements sur des enfants par leurs parents ou
« par des personnes ayant autorite ».
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460 REVUE PHILANTHROPIQUE.
(Euvres d'assistance du Gorps medical.
Les m^decins se d6vouent assez pour qu*on sMnteresse k leurs
efforts mutuels, It leur solidarity corporative, d*autant plus qu'unc
affaire r6cente prouve que ces efforts ue sont pas superflus.
Voici, d'apr^s le Bulletin officiel du syndicat des medecins de k
Seine, la nomenclature des oeuvres d'assistance du corps medica
frangais :
Association m^dicale mutuelle du departement de la Seine, approuv6e pai
arr6t6 minisl^riel du 7 d^cembre 1886. — Si^ge social : i4, rue Desbordes-
Valmore.
President : D' Rondeau. — Secretaire g^o^ral : D' Signez, 123, boulevarc
Voltaire.
En payant une cotisation de 10 fr. par mois, tout docteur en m6decin<
exercant dans le departement [de la Seine peut s'assurer le droit a un(
indemnity de 10 francs, pour toute joumee d'incapacite profession nelli
soit temporaire, soit permanente, par suite de maladie ou d'accident
quelle qu'en soit la dur^e. — Les vieillards inflrmes et tout k fait incapa
bles d'exercer recoivent Tindemnit^ de maladie.
Lors du d^c^s d'un assure, il est alloue k sa veuve, ou k ses enfants, urn
indemnity proportionnee k Timportance du capital reserve.
Droit d'entr^e : 1 franc par ann^e d'Age du candidal. — La limite d'Agi
pour Tentree est fix^e k quarante ans.
Association des Medecins de la Seine, fondle en 1833; si^ge social
Faculte de m^decine.
- President : D*" Brouardel. — Secretaire general ; D» Earth, 2, rue Saint
Thomas-d'Aquin.
Distribue k ses membres malheureux, k leurs veuves, k leurs enfant
des allocations, des secours temporaires ou annuels, des pensions d
retraite.
Droit d'entree : 12 francs; cotisation annuelle : 20 francs.
Association amicale des Medecins frangais. Siege social, 23, rue d(
Dunkerque.
President : D"" Cezilly. — Secretaire general : D' Jeanne, k Meulan (S.-et-O.
Donne une indemnite de maladie de 10 francs par jour pendant les deu:
premiers mois; k partir du troisieme mois, I'indemnite est de 100 franc
par mois, mSme en cas de chronicite indefinie.
Le chiffre de la cotisation est proportionnel k Tdge des membres (de 5i
k 100 francs par an environ).
Association generate de prevoyance et de secours des Midedns de Fhmce
approuvee en 1858. Siege social : 7, rue de Suresne.
President : D' Lannelongue. — Secretaire general : D' Lereboullet
44, rue de Lille.
Le but est de venir au secours des societaires kg6a, infirmes ou roalades
de secourir les veuves, les enfants et les ascendants laisses sans ressourcei
par des societaires decedes.
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462 REVUE PHILANTHROPtftUE.
Get 6tat olTre cet int^rSt qu'il permet de suivre et de aoter les amelio-
rations accomplies ou projet^es, dans les villages comme dans l«s grands
centres, dans Tint^r^t des malheureux.
Constitution de dots par I'assurance aox Enfants Assist68.
M. de Grisenoy expose, dans son int^ressante monographie des questions
d*as8istance et dhygi^e publiques trait^es dans les Conseils genirauXy les r^-
sultats obtenus par une combinaison d'assurances en vue de constituer
une dot aux enfants assists parvenus k leur majority.
Deux Gompagnies d'assurances sur la vie, VAbeille et la Natumale, ont
ofTert aux Gonseils gSn^raux leur concours dans ce but, le capital k verser
devant dtre fourni k leur majority aux garcons, k Tepoque de leur mariage
aux fiUes.
Gette proposition, adoptee le "26 avril 1895 parle Gonseil g^n^ral du
Puy-de-D6me, a ^t^ r6alis6e dans ce ddpartement.
Tons les pupilles du d^partement seront assures, les garcons k partir
de sept ans, les lilies k Vkge de six ans, moyennant le versement d'une
somme annuelle. Gette assurance est destin^e k leur constituer une dota-
tion de 500 francs k delivrer aux pupilles lilies, lors de leur mariage k par-
tir de dix-huit ans et aux pupilles garcons k partir de vingt et un ans, tant
pendant leur sejour au regiment qu'aprfes leur retour dansle d^partement.
Un arr^te pr^fectoral a cr^e et r6glement6 une Gaisse de pupilles de
FAssistance publique d^partementale du Puy-de-D6me qui depend de la
Gaisse des D^p4ts et Gonsignations. Le montant de chaque assurance
n'6tant pas vers^ ea une seule fois, les sommes payees par la Gompagnie
sont capitalis^es.
Gette int6ressante combinaison a 6te accept^e en principe par les d6-
partements de Gonstantine et d'Oran. M. de Grisenoy nous apprend que le
Gonseil g6n6ral de la Ni^vre en poursuit I'^tude, que celui des Deux-S^vres
a decide d'accorder des dots de 300 francs k ceux de ses pupilles qui se
marieraient avant vingt-cinq ans; utie decision de principe analogue a 6i6
prise dans la Loire-Inf^rieure; le d^partement du Galvados majore les
versements des enfants assist^s k la Gaisse d'^pargne.
Comity central des oeuvres d'assistance par le travail.
L'AssembMe g^n^rale annuelle s'est tenue lundi 14 d^cembre 4 4heures
dans la salle de TUnion des Femmes de France, 27, chauss^e d' An tin.
Elle ^tait pr6sid6e par M. M^zi^res, de I'Acad^mie francaise, assists de
M. Ferdinand Dreyfus, ancien d^put4, membre du Gonseil sup^rieur des
prisons, et de MM. Tr^zel et Lecointe, avocats au Gonseil d'Etat.
Apr^s une ^loquente allocution de M. M^zi^res, M. le D*" Bouloumie,
secretaire g^n^ral, a pr6sent^ un rapport tr^s int^ressant et tr^s compLet
sur Tassistance par le travail k Paris et dans les d^partements.
Nous en publierons des extraits importants dans notre prochain num^ro^
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FORMATIONS.
^sent^ les comptes qui ont 6i^ approuv^
Uance presque tous les repr^sentants (
:6s, Brueyre, Charles Petit, Louis et Alb
6ral Parmentier; M™" B^quet de Vieni
6 des Visiteurs.
at le si^ge est rue de Lille, 25, constitue u
lont6s, eu vue de procurer un appui mo
i peuvent Hre relev6s de lamis^re. Son 1:
nilles dignes d'int^rfit qui n'ont pas encc
ont la volont^ de vivre par le travail, et n
les voient k domicile, se rendent compte
nt avec elles des relations de sincere et cc
s emplois, leur font au besoin des avanc
ees k I'extinction de leurs dettes.
'est d^velopp^erapidement; elle compte a
s actifs, appartenant aux conditions, aux oj
iriees, maisr^unis dans un parfait accords
3 et f^conde. Grdce au z6le des visiteurs
jlle qu'ils se sont apport^ dans leur tAc
!, la Soci^t6 a oper6 d^j^ de v^ritables sa
elle s'est occupee, 00 ont dej^ 6t^ mises (
3 secours de la charity,
ats assurent Tavenir de la society : inspir
, de charity, et par une vive compr6hensi(
attirer k elle tous ceux qui out la l^gitin
^^s social par des actes et non par d
dtal d'Auteuil.
r TAssociation des Dames francaises et qi
aure, a ses salles de malades ferm6es pei
let; toutefois les salles de consultation re
li sont occup^s par des malades pauvre
3ntes dont Templacement est fixe dans I
treport^ en temps de guerre k 124. D'auti
^,- dans laquelle sont soign6s ou op^r^s I
T chez eux, recoit chaque matin envirc
tation sp4ciale pour les maladies des yeu
es dents. Au lit des malades, k la salle d(
iullations, Tenseignement est donn^ au
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464 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Dames fran^aises. Elles font le service d'inOrmi^res volontaires dans le
salles, aux consultations et k la pbarmacie.
L'hdpital des Dames francaises est le premier hdpital d'enseignemen
^tabli en France pour ies Dames de la Groix-Rouge. Les autres pays sont
comme en beaucoup d'autres progr^s, plus avanc^s que nous; cbacun i
plusieurs bdpitaux de ce genre.
Malgr^ le pen de ressources dontelle dispose, TAssociation des Dame
francaises a donn6 Texemple chez nous. Le D*" Duchaussoy, le fondateur e
le secr6taire g6n^ral de roeuvre, felicity par le president de la Republiquc
iui a dit que la prosp6rit^ de I'Association 6tait li^e k celie du pays; aoss
les Dames francaises demandent-elles k toutes les femmes de coeur, k tou
les patriotes de les aider dans la mesure de leur fortune, de travaille
avec elles a secourir les victimes de la maladie, en attendant de orte
secours aux victimes de la guerre.
L' Assistance mutuelle des Professeurs
de Lyo^es et de Colleges.
En conformity avec une decision du recent congr^s des professeurs de Tei
seignement secondaire dont nous avous expose les travaux(l),il a 6tecr6^
apr^s ]acl6turede ce congr^s, une Society temporaired'assistance mutuelk
Cette society est ouverte k tons les professeurs, charges de cours <
d^l^gu^s de Tenseignement classique et de Tenseignement modeme; au
professeurs et maitres des classes 61^mentaires ; aux instituteurs et insti
tutrices charges des classes ^I^menlaires, primaires et enfantines; au
professeurs et charges de cours de dessin; aux professeurs de gjmnastique
aux pr^parateurs (en exercice dans les lyc^es et dans les colleges de gai
^ons), et, dans les mdmes conditions, aux professeurs et charges de coui
du prytan^e et des 6tablissements libres agr^^s par le ministre de Tin
struclion publique et inscrits au tableau d'anciennet^.
Elle a pour but de venir en aide k un soci^taire ou k sa famille (veuv<
enfants, parents k sa charge) dans le cas oil la loi n'accorde pas de secoui
ou n'accorde que des secours iusigniflants.
Son si^ge est aulyc^e Louis-le-Grand.
Au 10 octobre dernier, apres le paiement des d^penses d'administratio
et de plusieurs secours, il y avait dans sa caisseune somme de 10 733 franc!
Elle compte 66'}k pr^s de 2 000 membres appartenant k 161 lycees ou co
16ges : c'est le tiers du personnel de Tenseignemeut secondaire.
L'jficole Braille.
Cette Ecole, qui deviendra plus tard la maison des Aveugles, a ^i6 fond^
par la « Societe d'assistance pour les aveugles », dont le si^ge est a Thoi
pice national des Quinze-Vingts.
(1) Articles de M. H. Mooin (n^* 1 et 4), de M. Michel, n*> 3 de la Revue Pkilai
ihropique.
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INFORMATIONS.
Ouverte k Maisons-Alfort, ie i«' Janvier 1883, avec dei
6tait bientdl transportee h Paris, 152, rue de Bagnolet, p
abriter les pupilles que lui confiaient la Ville de Paris et le
de la Seine.
L'6tablissement de la rue de Bagnolet fut bientdt reconn
Un grand ^v^nement pour Tavenir de cette oeuvre venai
duire.
Le Conseil g^n^ral de la Seine prenait enti^rement TEcol
le l«'-mai 1887, et d6cidait, dfes 1888, de louer k Saint-Mand
stitution Ancelio, 7, rue Mongenot.
Cette institution pourra r^pondre longtemps auz besoins
Silude k rentr6e du bois de Yincennes, elle r^unit k peu |
conditions que les fondateurs de TEcole Braille peuvent d^s
^tablissement naissant.
La superficie est de 5 000 metres environ.
Elle a quatre cours, dont trois sont affect^es au service
ouvriers divis^s en grands, moyens et petits.
Les dortoirs spacieux et bien aer6s ont k chaque extr6
veillant.
Deax inQrmeries et une pharmacie j sont instances.
£a fondant TEcole Braille, la « Soci^t^ d'assistance pour
etie Conseil general, en Tadoptant, se sont propos6 de co
cfine et d*olfrir k Taveugle le moyen de sufflre k peu pr6s se
^Qce, sans recourir k la mendicity.
^a Soci6t6 et le Conseil g^n^ral de la Seine n'ont pas voul
"fi^'ancierset se contenter de cr6er un asile,une 6cole, une i
^<^fait pour Taveugle un aide et un secours teniporaires.
'^s ont cherch^ k devenir pour toujours les tuteurs de ces
Apr^g avoir re^u Tenseignement primaire, Tenfant avf
^i^lier ou il exerce le metier dont il a fait Tapprentissag
^* ^O.n6es pr6cedentes.
/^ 1 '^teller, il est consid^r^ comme un ouvrier, et il doit
* * bolder toutes ses d6penses.
„ * 5^^^ lefois, le Conseil g^n^ral consent k' venir k son aid
., *^^, jusqu'i sa majority, ^ passer deux heures par,
^^tes, et il alloue au jeune ouvrier, encore inhabile, un
^^*X calcul^e d'aprSs ses m^rites.
. p v^r 6lablir ses calculs, TEcole fait tenir des feuilles de
^^Mltats mensuels sont port^s sur le livret de Touvrier.
^^ feuilles quotidiennes indiquent, avec les beures
^, ^^^ k Tatelier, la nature du travail ex6cut6, sa valeur e
^ Jp^lentle prix dela matifere premiere employee.
..,, *i^s permettent k la Direction de contrdler exactement
^^ mati^res et de guider stlremcnt le jeune aveugle en
^Ue les 61oges ou les reproches qu'il aura m^ritds.
. ^« matitre$ premieres sont livries a litre d'avance a Couvri
^^Hon de VEcole, qui se charge d'icoukr les produits fabriqui
HEVUE PniLANTHROPIQUE. — H.
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466 REVUE PHILANTHROPIQUE.
L'instructioii primairc et professionnelle est donn^e aux enfants dg<
de 6 ^ 13 ans.
Le programme d*6tudes comporte :
La lecture et T^criture en points saillants d'apr^s le syst^me Brailh
Torthographe, le calcul, T^tude des objets usuels par la manipalation <
les lecons de choses, la g^ographie d'apres des cartes sp^ciales faites
TEcole, les recits les plus saillants de notre histoire nationale, la biogn
phie des grands hommes, les excercices de recitation, les explications dc
mots, la musique.
A 13 ans, apr^s examen, I'atelier leur est ouvert. Jusqu'^ leur maj<
rit6, ils doivent chaque jour, k l*Ecole, suivre les cours d'adultes.
A la majority, ils donnent tout leur temps k Tatelier.
Des dortoirs sp^ciaux recoivent les enfants et les adultes.
La maison met des logements pour cdlibataires, raari6s ou sans famiih
k la disposition des ouvriers raajeurs qui n'acceptent pas la vie en commui
Le mobilier des logements est la propri6te de Taveu^le.
Les ouvriers majeurs ne seront pas tonus de prendre leurs repas au
r^fectoires. Ils pourront, ileur gr6, faire leur cuisine chez eux ou prendi
leurs aliments k la can tine de T^tablissement.
L'ouvrier ne quitte la maison que lorsqu'il est devenu incapable d
travailler. II est alors plac^ dans un ^tablissement special, s'il n'a p
amasser un p^cule suffisant pour prot^ger sa vieillesse.
Le paresseux, Tindisciplin^ est purement et simplement renvoye.
L*6tablissement peut recevoir cent cinquantes Hhves ou ouYriers dc
deux sexes.
Une commission de surveillance et de perfectionnement, designee pi
le Gonseil g^n^ral de la Seine, qui a d^l^gu^ ses pouvoirs au fondateur d
TEcole, dirige la Maison.
Le personnel administratif, enseignant et servant, se compose d'un di
recteur, d'une institutrice en chef, de six institutrices, de cinq institutric(
aveugles, d'une surveillante g^n^rale, d'une sous-surveillante, des che
d'ateliers pour la vannerie, le cannage etTempaillage des chaises, les coi
ronnes de pedes (la flleterie et les travaux de tricot et de crochet sont ei
seign^s par les maitresses aveugles), et enfin des gens de service.
Le service de sant^ est confix k un m^decin ; les m^decins consnltani
(oculiste, chirurgien, dentiste) sont ceux des Quinze-Vingts.
Tout enfant aveugle, Ag6 de 3 i 13 ans (i), incurable, indigent, r
de parents francais domicili^s dans le d6partement de la Seine, est rec
gratuitement k I'Ecole.
Une notice sp^ciale indique les formalites k remplir par le candid^
pour obtenir son admission.
Gette notice est fournie par la Direction de Thospice national d<
Quinze-Vingts.
(1) L'fecole matemelle qui recjoit les enfants de trois ^six ans a 616 ouver
le 15 juin 1897.
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iLi^iiOS
A rinstitntion nationale des Jennes Aveugles. — Le President de
iaR^pablique et M. Barthou, ministre de Tlnt^rieur, ont visits le 15 d6-
^embre Tlnstitution des jeunes aveugles, boulevard des Invalides. M. F^lix
?aure etait accompagn^ de deux officiers de samaison militaire et du chef
le son secretariat.
Le directeur et les maltres de r^tablissement ont recu le president en
lui offrant leurs souhaits de bienvenue. lis Font conduit en suite dans les
classes, les ateliers, Tinfirmerie, le gymnase oCi les enfants ont 6te inter-
'og^s sur rhistoire, la g^ographie, leurs dispositions personnelles, leurs
>arcDts et leur sant^.
Les petits aveugles ont donn^ la mesure de leurs talents k leurs h6tes,
rbarm^s, dans des choeurs d'un ensemble parfait ou par des soli executes
1760 brio. G'6tait un vrai concert, et les artistes ont 616 chaleureusement
ipplaudis.
Parmi les invit6s qui s'int^ressent au fonctionnement de Tceuvre se
rouvaient MM. Labiche et Leydet, s^nateurs, et la duchesse d'Uz^s.
Le President de la R^publique apportait une bonue nouvelle, accueillie
ivec enthousiasme. La croix de la Legion dTionneur a 6i6 d^cern^e a un
ncien ^l^ve de rinstitulion, M. Maurice de la Sizeranne, T^minent fonda-
Bur de TAssociation Valentin Hauy. Celui-ci n'^tait pas present, n'ayant
^s 6t6 pr^venu de cette visite.
M. Martin, directeur de Tlnstitution, a ^te fait offlcier de rinstruction
)ablique; les palnies acad6miques ont 6t6 reraises It plusieurs profes-
ears.
H. Maurice de la Sizeranne. — M. Maurice de la Sizeranne, le bien-
iiteur des aveugles, a 6i6 d^cor^ par le President de la R^publique. Cette
§compense si m^ritde a ^t^ unanimemeut approuv^e, et la Revue Philan-
hropiquey k laquelle M. Maurice de la Sizeranne a bien voulu accorder son
r6cieux patronage, joint ses felicitations k toutes celles que cet acte de
istice a provoqu^es de toutes parts.
La Soci6t6 de prdvoyance de la Prefecture de Police. — M. Bar-
LOU, ministre de rint6rieur, ayant k ses cdt^s MM. Vel-Durand, Charles
lane, pr^fet de 'police, et Laurent, secretaire general, a preside, le 12 de-
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468 . REVUE PHILANTHROPIQUE.
cembre, h la Sorbonne, Tassembl^e g^n^rale de la Soci^t^ amicale et
pr^voyance de la prefecture de police. Plus de quatre mille employes, i
specteurs ou gardiens de la paix, emplissaient jusqu'au cintre la gran
salle des ffites.
M. Vel-Durand, president de la Soci6t6, a sonhait6 la bienvenue au n
nistre et fait T^loge des morts de rann^e derni^re : MM. Gamescasse
Clement. II a adress^ k M. Lupine, anclen pr^fet de police, rhommage i
connaissant de ses anciens subordonn^s et assure de leur d^vouement
nouveau pr6fet M. Blanc. Puis, il a demand^ k M. Barthou de soulenir d
vant le S6nat, comme il Ta fait devant la Chambre, avec une €nergie do
tous lui sont reconnaissants, la cause des caisses des soci^t^s de secou
mutuels.
Le ministre, en une allocution tr^s applaudie, a remerci6 les membi
de rassociation.
11 promet k la Soci6t6 son concours le plus d^vou^ et fait Teloge
MM. Charles Blanc et Laurent.
Le pr^fet de police prononce quelques paroles ^mues ; puis M. Guill
min, inspecteur g^n^ral de la navigation, lit son rapport sur la situali<
flnanciere dela Soci^t^.
Enfin, le ministre remetau docteur Chambellan, m^decin de rAssoc
tion, la rosette d'officier de Tinstruction publique et les palmes d'offici
d'academie k MM. Ferr6, inspecteur principal du XVII« arrondissemei
Boy, brigadier des garnis, Moitrier et Millier, commis principaux, et V(
Durand, avocat.
LaSocidtd mddicale des Bureaux de bienfaisance de Paris. —
banquet annuel de la Socidt^ medicale des Bureaux de bienfaisance de Pari
eu lieu, le vendredi 3 d^cembre 1897, sous la prt^sidence de M. le D' Sdaill
president de la Soci6t6.
A ce banquet, auquel assistaient M. Peyron, directeur g6n6ral de VI
sistance publique, el M. Baudouin des Salles, chef de la division des secou
avaient 6te invites gracieusement les m^decins des Bureaux de bienf
sance nommes au concours au mois de juin dernier.
Au dessert, le president de la Soci(jt6 a port6 un toast k ses jeunes c
I6gues et remercie M. le directeur de ^Assistance publique d'avoir acce]
I'invitation de la Soci^t^. M. Peyron a bu ensuite, en excellents termes,
la bonne entente entre Jes mddecins des Bureaux de bienfaisance et Vi
ministration, au plus grand profit de la population indigente parisieni
Apr^s une allocution de M. Billon, secretaire gen6ral, et de M. Roiill
M. L6vi (Leopold) a remerei^ la Soci6t6 de son aimable accueil, au n<
des nouveaux promus. En resume, excellente soiree pour la confratern
et la solidarity m^dicales.
La Soci(''t6 medicale des Bureaux 4e bienfaisance a renouvel^ son 1
reau dans sa stance du 8 d6cenibre. Ontet6 nommes pourTann^e 1898
President : M. Gourichon ; vice-prisidents: MM. Bimsenstei?] et Dufourni
secHiaire g^n^ral:ii. Billos ; archiviste : M. Gastinel; secrHaires des seana
MM. Pascal et Malbe .
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fiCHOS. 469
L'Atelier familial. — Mercredi 15 d^cembre, k huit heures et demie
du soir, a eu lieu, dans la salle des ffites de la mairie du IX" arrondisse-
menl, rinauguration de TAtelier familial. Un nombreux public s'etait rendu
a Tappel de la fondatrice de cette (Puvre, et bien avant Theure fix^e par
ses invitations. il n*etait plus possible de trouver une seule place dans la
salle iquantitede personnes ont dH renoncer k y p^n^trer.
Nous avons ^t^ tr^s heureux de constater la croissante sympathie que
rencontre partout Tinstitution nouvellement cr^^e (i).
Le but g^n^reux que se propose M™« Jane Elias a ^t6 montr^ d'une
fagon convaincante dans une vibrante allocution prononc^e par M. Paul
Strauss qui avait bien voulu accepter de pr^sider cette int^ressante soiree.
L'bonorable s^nateur a esquiss6 le r61e de la femme dans la soci6t^
modeme ; il I'a convive h redoubler encore d'^nergie et de d^vouement
pour contribuer an d^veloppement des oeuvres de solidarity etd'assistance
qui ont pris un si grand essor dans ces demi^res ann^es.
Parmi tous ceux qui ont applaud! k ses chaudes paroles, nous citerons
^mct Kergomard, Schmabl, Delaporte, Deremis, Devri^s, M. et M"*® Zadoc
Kahn,M. Roux, M. et M=»» Chain, M»« Faure-Budin, M.et M"»« de Saint-Preux,
M. et M™« Dupuy Wallbaum, M. et M"*« Meyer Bemheim, le docteur De-
cours.etc, etc.
Plusienrs artistes ont offert leur pr6cieux concours k M™** Jane Elias,
M. et M™« Charles Hayera, M™®» L6a Maujan, Marie Denis, Marie Chassaing,
Van Parys, Florida Salacoglu, MM. Veyret, Depas, Paul Seguy, Hirsch,
Andrieu, tous ont particip6 au succ^s de cette briilante soiree qui laissera
<ians les espijts un souvenir durable et f6cond.
L.
Congr^s du Patronage & Lille. — Le prochain Congr^s des Societds
^^ patronage aura lieu k Lille dans les salies de la Socidt6 industrielle, du
^^i^ai aul"juin 1898.
^"oici le programme des travaux :
^ ■"• Section : Horames. — 1° De Tengagement dans Tarmee des con-
oo^*^*^^* correctionnels (Question renvoy^e par le Congrfes de Bordeaux).
vin^Kes sont les relations k <5tablir entre les institutions d'assistance et
ceuyres de patronage en vue de pr^venir la mendicity el le vagabon-
^ Action :Femmes. — 1° De Torganisation des refuges pour les jeunes
p^ ^ ciu les femmes Iib6r6es. 2° L'expatriation des femmes condamn^es
Q^^^*^terait-elle certains avantages au point de vuede leur reclasseraent ?
J ^ ^ I'affirmative, k quelles categories de condamn^es pourrait-elle 6tre
1^^ . ^ Action : Enfants. — 1® Des ameliorations k introduire dans la pratique
^^^ire en mati^re de correction paternelle. 2° De la mani^re d'orga-
^ ^ous rappelons aux personnes d^sireusc
^ Action nement de I'A teller familial qu'
^lias, la fondatrice, 53, rue de Maubeuge.
|g ^ ^ Nous rappelons aux personnes d^sireuses d'avoir des renseignements sur
ui^^^ Action nement de I'Atelier familial qu'elles n'auront qu'a s'adresser h
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470 REVLE PHILANTHROPIQUE.
niser la surveillance des enfants patronn^s places chez les particuliers et d
concours a obtenir dansce but des oeuvres et des autorit6s locales.
4« Section: Patronage international. — i° Rapatriement des mineui
strangers en danger moral. 2° Des mesures k prendre en vue de faciliter I
patronage, dans leur pays d'origine, des individus expuls^s.
La stance d'inauguration aura lieu le 30 maly h Lille.
La Commission de contrMe des asiles manicipanx de femmes. -
En conformity d'une d4iib6ration du Gonseil municipal de Paris, prise su
Tinitiative et sur le rapport de M. Louis Lucipia, le pr^fet de la Sein
vient de constitiier ainsi qu'il suit la commission administrative charg6
du contrdle du fonctionnement des asiles municipaux de femmes (Asiie
Michelet, Ledru-Rollin, Pauline RoUand, George Sand) :
MM. le pr^fet de la Seine, president; Louis Lucipia, Faillet, Emile Du
bois, Navarre, Ranson, conseillers municipaux, ^lus par le .Gonseil; Jule
Siegfried, Paul Strauss, s6nateurs; Risler, maire du vii« arrondissement
F^lix Voisin, vice-president du conseil de surveillance de TAssistance pu
blique; le docteurThuli^, vice-president du conseil sup^rieur de TAssistanc
pablique, membres d^sign^s par le pr^fetde la Seine; les docteurs Budi
et Napias, medecins design^s par le pr6fet de la Seine ; Menant, directea
des affaires municipales ; le docteur A.-J. Martin, iuspecteur general d
service d'assainissement; Gontant, chef du bureau du travail, secretaire.
Soci6t6 de secours mutuels mnsnlmane. — Le 4 d^cembre a e
lieu i Alger la f^te de Finauguration de la Societe de secours mutuels « li
Musulmane », fondee par des notables musulmans d' Alger et quelques Fran
cais pour secourir les indigenes malbeureux. Gette Society est la premier
de ce genre qui ait ete fondle en Alg^rie; aussi i'inauguration a-t-ell
eu le plus grand eclat.
Le gouverneur general, M. Lepine, a assiste k la ceremonie de la mos
quee de Sidi-Abi-Er-Rohman.
Une distribution de couscous a ete faite grataitement aux indigenes ne
cessiteux.
Ali-Gherif, conseiller general, Timan de la mosqueo, M. Faure, anciei
officier; Ahmed ben Brimat, ancien interpr^te militaire, et M. Lepine on
prononce des allocutions.
Gette solennite a vivement impressionne les indigenes.
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iCATIONS FRANgAIS
lappel, propose la creation de pb
oici :
riirales en soul^ve une autre qui
3st celle des pharmacies commui
rurales.
'et, que de se procurer i la cam
besoin.
chef-lieu de Tarrondissement, qu
lis d'un village ou d'un hameau au
-lieu de canton, il y a souvent
metres ne se franchissent pas fa
pas la precaution d'avoir chez sc
i6e, on pr^ffere neuf fois sur dix
journ^e pour aller chercher un
2 qii'il sufdt souvent d'un de ces
depend pas forc^ment d'ane on
adie.
ie de d^poser b. la mairie de cha<
^dicaments de premiere necessity
3 de Vichy, les th^s purgatifs,
\, tels que I'acide ph^nique et Vi
voisine serait charg^ de Tentreti
et les habitants de I'endroit troi
re, tons les medicaments dont oi
'acult6.
ipplication du public. Mais ou n
jront les m^res qui appuyeront
Brueyre prend part, dans la Re
le engag^e entre MM. Alfred Fi
e ; il est d*accord avec M. Tai
nt est le produitdu milieu ou il
que ce que valent les parents de
nmunale eiaut ouverte h, tous, e
lors que dans certains milieux oi
immorality, les ei^ves, reflets
e une atmosphere pemicieuse c
etes, est une cause de demoralise
I dans la discussion qui s'est en§
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472 REVUE PHILANTHROPIQL'E.
la criminality juvenile anglaise ; il n'accepte pas Topinion de MM. Henri
Joly et Louis Riviere evaluant ^70p.i00i'accroissementde cette criminality
et il se livre k une analyse tr^s sdv^re des statistiques dont il d^couvre les
contradictions.
(c En r^sum6, dit-il, bien qu'il soit possible que la criminality juvenile
ait diminu6 chez nos voisins, T^lat de leurs statistiques, k la suite de leurs
changements de jurisprudence, ue perraet pas d'en fixer le quantum. II
faut cependant, comme nous Tavons dit plus haut, tenir compte du fail
que la population (Angleterre et pays de Galles) s'est ^lev^e de 2141299^
habitants en 1864, h, 30060763 en 1894, augmentant ainsi en trente ans de
pr^s de moiti6 et que, par consequent, ce ne sontplus les chiffres des con-
damnations qu'il faut comparer, mais leur importance sp^cifique par rap-
port k la population. Mais oh cesse la contestation, c*est que, sans Tadmi-
rable creation des Industrial Schools, la criminality [aurait 6i6 inflnimeni
plus considerable; ce qu'ilfaut aussi louer chez nos voisins, c'est leur ef-
fort par les m^thodes les plus vari(5es et les plus ing^nieuscs, pour subsli-
lueraTemprisonnement soit des p^nalit^s plus efflcaces, soit une Educa-
tion appropride, soit les bienfaits de Tassistance et de la charit6. La soci^t^
Howard a 6i6 Fun des principaux promoteurs de ce mouvement, et nous
devons la saluer avec respect. Et, comme le dit avec raison M. Morrisoi
dans son excellent ouvrage Juvenile Offenders : « La criminality de Tenfanct
« a pour facteurs les conditions sociales et individuelles au milieu des
« quelles il est forc6 de vivre. Ce sont ces conditions qu'il faut am^liorer,
(c si on veut TamEliorer lui-m^me. Le chdtiment n'est que sccondaire. >»
«Il r^sulte de ces principes Ir^s justes que puisque les facteurs de la
criminalite anglaise ne se sont pas, pour la plupart, modifies dans uc
sens favorable, k Texception de la belle creation des 6coIes industrielles,
la criminality ne saurait avoir decru, malgr6 les apparences d'une statis-
tique ouue figurent ni les admonestations ni les condamnationsii Tamendc
qui ont remplac6 les anciennes p^nalilEs! Ce qu'il fallait d6montrer. »
M. le docteur Variot expose, dans un remarquable article de son /ouma<
declinique et de th^rapeutique infantiles, les r^sultatsde ses observations sui
Tusage du lait pur dans Tallaitement artificiel; il rappelle Topinion hostile
des m^decins am^ricains et en particulier de M. Morgan Hotch et dc
M. Marfan.
« Les faits que j'ai observes, ecrit-il, depuis dix-huit mois sur enviroE
200 nourrissons, sont directement contraires aux assertions de Morgai
Rotch et de M. Marfan.
« Aucun raisonnement ne pr6vaut contre les faits, et je ne crains pa!
d'affirmer maintenant, qu'aprfes TAge de un mois, V immense majority des
enfants supporte parfaitement le lait pur, et que leur croissance v6rifi6c
par des pes^es hebdomadaires s'efTectue tres normalement. Sur ce point
je suis enti^rement d'accord avec M. Budin, dont Topinion a ^t^ geuerale-
ment combattue tant en France qu'i T^tranger.
« Pendant les cinq ou six premieres semaines de la vie, Testomac subit
de profondes modifications tant dans sa structure que dans sa capacity qui
varie de 30 k 90 centimetres cubes.
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BLICATIONS FRANgAISES. 473
Q de grands managements, et pendant cette
ble de faire couper le lait d'un tiers d'eau
ler soigneusement la quantity en suivant les
>gique de Teslomac. En mSme temps qae ie
gratuitement aux m^res de petites bouteilles
laque t6tee est marqu6e suivant I'^ge, les
sterilise, non seulement comme un aliment
in remfede pr^cieux centre les troubles gas-
iberons gradu^s suivant I'dge des enfants, en
de capacity calcul4es d'aprds les meilleurs
onstater que les enfants 61ev6s au lait pur
[uantit6s moindres de lait qu'on ne doit s'y
:emple qu'un nourrisson normal de 5 mois
tin de 150 grammes loutes les deux heures
ires. A cet dge, la plupart de nos nourrissons
de lait pur k chaque t^tee. — Cette remarque
int k tous les enfants, car il en est que]ques->
, qui boivent moins ou plus, etqui se d6ve-
itites filles boivent un peu moins en g6n6ral
iracbe pur ^lant bien plus ricbe en principes
, il ne faut pas s*6tonner que I'app^lit des
les quantit^s de lait moins fortes que s'ils
uvoirapporterlesr^sultats si encourageants
, en faveur de Tallaitement artificiel avec le
Une statistique rigoureuse des faits obser-
le sera prochainement publico par Tun de
t pur, je la consid^re comme bien pr^s d*6tre
. Marfan dont la competence est si grande
ablement 6i^ tromp6 par une sdrie de faits
,r nos nombreux nourrissons allait^s au lait
s du lait pur ».
nserve encore des doutes sur ce sujet, k venir
r les 70 ou 80 nourrissons qui sent apport6s
aire de Belleville, k 9 heures du matin. II
es enfants 61evds au lait pur ne s'en portent
iants que les recherches de ce genre peuvent
J bienvenus.
st pas une de ces d^couvertes k grand fracas
mpare pour les r^pandre partout ; le corps
lur de cet admirable progr^s dans Tallaite-
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47i REVUE PHILANTHROPIQUE.
ment artificiel. G'est \k un rdle humanitaire bien digne de tous les mMe-
cins (1). »
M. le docteur Michaut soutient cette th^se dans rEnfant, la publication
dirig^e par M. Henri Rollet, que, suivant I'expression d'un voyageur an-
glais, le Japon est le Paradis des enfants.
D'apr^s lui, nulle nation europ^enne ne peut rivaliser avec le Japon aa
point de vue de son organisation universitaire. Au Japon, ralimentation
lact^e artificielle est inconnue, le biberon n'existe pas, et la mortality dans
la premiere enfance est bien sup^rieure acelleindiquee par nos statistiques.
On n*y fume pas, on n'y boit pas.
L*enfant japonais Slev^ k F^cole de la sobri^t^ devient robaste et sain,
les maladies si nombreuses qui d6ciment notre enfance roalheureuse
n'exislent pas au Japon. Ayant une bonne hygiene, les enfants n'ont pas
besoin de m^decin.
Inclinons-nous et profitons si possible de cet exemple dono^ par un
peuple ^loign^.
Un dernier point sur lequel je voudrais insister, bien que la place me
soit mesur^e et qu'il me faille indiquer plut6t que d^velopper les ques-
tions qui touchentdi i'iustruction desjeunes Japonais est celui-ci : I'enfance
malheureuse n'existe pas au Japon. I/ceuvre de cet bomme bienfaisan
que nous admirons tous, Toeuvre de Maitre Rolletn'aurait pas lieu d'exister
au Japon, ce qui n'empdcbe que, tel est Tentbousiasme dont les Japonais
sont anim6s pour tout ce qui int^resse Tenfance, M. Rollet serait port6
aux nues au Japon, car nulle part ailleurs on n'adore mieux les enfants
et ceux qui les aiment. 11 n'y a pas d'enfants abandonn^s, il n'y a pas
d'enfants livr^s a la charite d'oeuvres de bienfaisance. Pourquoi? Parce
que I'enfant estsacr^. L'enfant est toujours bien elev6. Quand son p6re ou
sa m^re lui manque, ce sont des parents qui le recueillent. Plus une fa-
mille a d'enfants, plus elle est consid6ree ; c'est une distinction d'avoir
beaucoup d'enfants et quand malgre la polygamie, le mari n'a que quatre
ou cinq enfants, il adopte d'autres enfants pour grossir sa famille. G'est
cette prolifique affection pour les enfants qui fait la prosp^rite du pays.
Les Japonais commencent b. avoir des colonies prosp^res et depuis le com-
mencement du si^cle la population a presque double... Le Japon est en
train de devenir une grande nation. Remarquez que le pays est pauvre si
vous le jugez h. un point de vue ^troit, car il ne poss^de pas de b^tes k
corne et pas de vignobles; un rdti de boeuf, ungigotde mouton de m6me
qu'un verre de vin y sont aussi introuvables qu'un ivrogne ou qu*un en-
fant abandonn^ ou qu'un bomme qui ne sait pas lire. Mais les Japonais ont
suivi le principe de T^vangile : « Groissez et multipliez » auxquels par sar-
croft lis ont ajout4 : « Protegez et instruisez les enfants, » et le Japon es
grand. »
(1) La consultation de nourrissons du dispensaire de Belleville a lieu tous les
vendredis k 9 heures, 124, boulevard de Belleville. Les m6decins et les ^tudiants
qui d^sirent approfondir les questions d'allaitement sont admis librement.
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'U
BULLETIN
La lulte centre la tuberculose n'int^resse pas exclusivement les mdde-
cins et les hygi^nistes, elle met eu jeu des responsabilit^s multiples; elle
rentre k proprement parler dans ces questions sociales qui prennent une
place de plus en plus grandedans les preoccupations des pouvoirs publics.
Une d-marche solennelle a et6 faite aupr^s de M. M61ine, president du con-
seii des ministres, par le president et les rapporteurs de la commission
sp^ciale institute ft FAssistance publique, MM. Brouardel, Grancber et Thoi-
not, par les repr6sentants du Conseil municipal et du conseil de surveil-
lance de TAssistance publique, par le directeur de FAssistance publique,
pour appeler toute la soUicitude du gouvernement sur un danger grave et
inqui^tant. Les d^l^gu^s ont rappel^ que la tuberculose fait chaque ann6e
en France 225 000 victimes.
D'ici quelques jours, lorsque le S6nat examinera en deuxi^me lecture le
projet de loi sur la sant6 publique, M. Henri Monod, M. Brouardel et
M. Ck)mil ne manqueront pas d'^voquer ce p^ril des maladies contagieuses
et §vitabies pour faire ^clater aux yeux les plus pr^venus F^norme impor-
tance de ces mesures de prophylaxie commune qui s*imposent en Europe k
la vigilance de tous les gouvernements.
Pour Paris, un programme considerable a et6 dress^; il n'a pas
encore et6 soumis k la ratification du Conseil municipal, dont le bon vou-
loir n'est pas douteux, puisque la premiere initiative est venue de lui par
Torgane de M. Raoul Bompard. Un premier credit de six millions a ^t^
mis k la disposition de FAssistance publique pour am6nager dans plusieurs
h6pitaux de quartier des pavilions sp^ciaux destines au traitement et k
Fisolement des tuberculeux ; une seconde cat6gorie d'^tablissements a et6
pr^conisee, celle des sanatoria, comme celui d'Angicourt actuellement en
construction.
Le sanatorium d'Angicourt, dont notre collaborateur M. le D' A. Plicque
exposait derni^rement lliistoire (1), avance lentement; il a ete dote sur
les fonds du pari mutuel, et les ressources ne sont pas encore suffisantes
pour ie mettre k bref d61ai en pleine activit6. Ces retards sont extrfime-
ment regrettables, si Fon envisage Fextr^me urgence de cette creation qui
M
(1) N*' 8 de la Revue Philanthropique, p. 244 et suiv.
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476 REVUE PHILANTHROPIQUE.
r^pond k une n^cessit^ absolue. La grande commission parisieane de la
tuberculosey tout en donnant la pr^f^rence aux pavilions d'hdpitaux intra-
urbains pour Thospitalisation des tuberculeux, a plac^ au m^me rang la
construction de sanatoria, en ^mettant le vgbu que TAssistance publique
etle Conseii municipal mfenent de front I'ach^vement d'Angicourt et I'or-
ganisatioQ des pavilions sp^ciaux.
Partout les administrations se hatent de reformer ou de compldtei
leur outillage hospitalier. A Lyon, M. Sabran et le Gonseil g^n^ral des
hospices pr^parent un sanatorium dans le d^partement de TAin. « Algei
s'organise, nous apprend le docteur Leou Petit dans son Bulletin mensuei
de VOEuvre des enfants tuberculeux, Orleans etle Loiret continuent avec ui
plein succfes leurs collectes et leur campagne de propagande. Nice vient d(
cr^er un service d'hygiene et de tuberculinisation des vaches laitieres,
.pour emp^cher la propagation de la tuberculose et sa difTusion par le lait.
A Troyes, plusieurs des conferences du mercredi k THdtel de Ville onl
6t^ consacr^es k T^tude de la tuberculose et des moyens de la combattre
A Nancy, la question est pos^e d'un sanatorium. La ville de Li^ge, prdoc-
cup6e du grand nombre de dcc^s causes par la phtisie, fait des voeux poui
que la charity publique cr6e des asiles pour les tuberculeux.
Un de iios coUaborateurs 6num6rait, dans le dernier num^ro de h
Revue P hilanthropique (1), les sanatoria existants : TAngleterre en pos
shde 18, TAllemagne il,la Suisse en coraptera bient6t 10. Les nations ri-
valisent de d^vouement, les cures d'air se multiplient, les tuberculeux in
digents sont prot^g^s et soign^s comme les millionnaires. La France e
Paris ne tiennent pas un rang honorable dans ces tentatives; k coup sAr le
resolutions sont prises, les foods sont prdts tout au moins pour Thospitali
sation urbaine des phtisiques, mais ce premier sanatorium d'Angicourt
depuis si longtemps en voie d'ex^cution, n'ouvre pas ses portes, et lei
apdtres de la lutte contre la tuberculose se d^solent' de tant de lenteur e
d'une telle inertie.
II appartient au Gonseil municipal, qui a pris une si grande part k h
preparation de ces mesures de defense contre la tuberculose, de secouei
ces torpeurs et d'accei6rer Tex^cution du programme de la commissioi
dont MM. Grancher et Thoinot ont resume avec tant d'autorite les travau:
et les conclusions.
«
L'6parpillement des efforts de la bienfaisance officielle, le morcelle-
ment des etablissements publics, ont de longue date apparu comme aQ(
cause d'inf^riorite, et, si la ville de Paris soufifre d'une organisation coii
leuse et compliqu^e, les autres communes de France ne sont pas dani
une situation plus favorable, bien au contraire. II n'y existe aucun poin
. de contact, aucun lien direct entre Thospitalisation des malades ou de:
vieillards et la distribution des secours £i domicile : partout, sauf k Paris
(1) N* 8, chronique etrangere : les Sanatoria pour les tuberculeux, par A. S.
p. 282 et 283.
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■«r:T^.:T'7^'=':*'
BULLETIN.
dans les conditions peu satisfaisantes que nous avoiis dites, le bi
benfaisance et I'bospice ont une administration separ6e ; ces deu:
tutions ont le droit dene pas se conna!tre,de s'ignorer mutuellemc
cone des deux commissions administratives, celle du bureau de
sance et celle de Tbospice, agit comme si elle ^tait seule.
En 1871 d^j^ les incon?enients de ce dualisme avaient 616 sig
depuis de longues annees les philanthropes les plus qualifies d^plo
separation nuisible aux int^rdts communs. Pourquoi Tindigent m
le n^cessiteux secouru Ji domicile rel^veraient-ils de deux admini
distinctes? N'y a-t-il pas, au contra! re, le plus [grand avantage h, i
le traitement medical k domicile, di!it-on m^me accorder k I'indige
Q^cessiteux ainsi trait6 un secours d'argent qui lui permette de
de manger? Une des raisons qui rendent le s^jour de Thdpital i
pour les raalheureux est qu'ils y trouvent le vivre et le convert, tai
domicile, s'ils sonl hors d'etat de travailler, ils sont r^duits, dan:
th^se la plus favorable, aux maigres subsides du bureau de bienl
Les h6pitaux ^conomiseraient encore sur leur budget s'ils conti
pour une certaine part k I'assistance k domicile de ces malades c
pas rigoureusement besoin d'etre hospitalises et dont le s6jour a
des leurs est preferable k tant d*egards.
Combien d'autres motifs plaident en outre en faveur de Tunite
nistration des etablissements d'assistance communale, et par suiti
malentendu un certain nombre de commissions administratives
accueilli avec hostiiite le projet gouvernemental destine k r6ali\
unite? Nous rignorons, mais nous avons Tespoir qu'un examen
d'un texte qui respecte les patrimoines des etablissements distinc
disparaitre plus d'une prevention.
Le projet de fusion des commissions administratives des hoi
des bureaux de bienfaisance, approuve par le Conseil superieur
sistance publique et par le Conseil d'Etat, est soumis k Tapprob
Senat; il est de nature k apporter dans le fonctionnement de TAi
communale en France un nouveau progrSs, en concentrant les efil
la loi de 1893 sur Tassistance medicale gratuite s'est dej^ pre
reunir. 11 est k souhaiter que cette modeste reforme, grosse d
quences pratiques, ne se fasse pas trop attendre et que les devoi
missaires des pauvres et des hospices n'y voient pas une atteinte ^
dependance; Tunite d'administration, loin d'amoindrir leur aut
fera au contraire que la fortifier et la vivifier.
« «
L'Assistance publique de Paris est lente k se transformer, k i
aux besoins nouveaux de la science moderne ; elle ne tient cerU
pas la tete en Europe, et la Faculte de medecine de Paris, si ricl
lenls et en illustrations, ne fait pas tout le necessaire pour tirer
merveilleuses ressources hospitalieres. En 1890, au retour d'ui
d'etudes en Russie, M. Henri Huchard jetait un cri d'alarme ;
avertissements ont ete proferes.
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478 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Paris est surtout arri6r^, iant dans son enseignement que dans son or-
ganisation hospitali^re, au point de vue des sp^cialit^s; TAliemagne, TAu-
triche-Hongrie, Tont visiblement distance sur ce terrain.
Une reaction se manifeste contra cette m^connaissance des necessit^s
contemporaines, et ie conseil de surveillance de TAssistance publique,
avec Tactive adhesion de M. Peyron, a fait ie meilleur accueii au principe
d'une proposition d'initiative municipale k laquelle nous portons Ie plus
vif int^r^ En ce qui concerne Ie traitement des maladies d'yeux, i1 a H6
reconnu que ces affections comportaient pour I'hespitalisation comme
pour la consultation externe la creation de services sp^ciaux k titre d^fl-
nitif et en mSme temps Ie recrutement de m^decins sp^ciaux, nomm^s au
concours comme les m^decins, chirurgiens et accoucheurs des h6pitaux.
II n'est que juste de reconnaitre que, contrairement k ce qui s'est pass6
pour la constitution des accoucheurs des h6pitaux, Ie corps m6dico-cbi-
rurgical a accueilli de bonne grdce cette innovation.
II est d^s k present acquis que, pour completer lesdeux services d'yeux
de rH6tel-Dieu et de Lariboisifere, un troisifeme service d'ophtalmoiogie
sera 6tabli k Thdpitai Laennec; Ie programme du concours des oculistes
des hdpitaux a ^t^ definitivement adopts, sauf en un point (1).
La commission des sp^cialit^s n'a pas achev^ son cBuvre; il lui reste k
soumettre au conseil de surveillance ses resolutions sur les maladies du
larynx, de la peau, etc., et k conclure pour chaque esp^ce d'une maniere
aussi heureuse que pour les affections des yeux.
En ne faisant pas leur place auxsp^eia/i7^$, les h6pitauxn'accomplissent
pas leur mission, ils manquent k leufs obligations envers les malheureux
etles ddsh^rit^s; tout progrfes hospitalier est un bienfait pour les pauvres,
pour les n^cessitenx. L'esprit de corps obscurcit parfois certains jugements
qu'on aimerait k voirmoinsentach^sd'erreur; c'est ainsi qu*i notre grande
surprise nous avonslu une protestation d'une des associations m^dicalesde
Paris, Ie Syniicat general des medecins de Paris et du ddpartement de la Seine,
centre Texcellente reforme relative k Tophtalmologie dans les h6pitaux.
L'information, d'ailleurs inexacte en ces termes, que chaque hdpital soit
pourvu d'une consultation pour les maladies d*yeux, a ^mu les membres
de celte honorable soci6t6.
En admettant par hypothfese qu'au lieu d'etre limit^es k trois ou quatre
pour Tensemble de Paris, les consultations d'yeux soient g^n^ralis^es, en
quoi cette innovation serai t-elle pr^judiciable k la corporation m^dicale?
On objecte que les cliniques ^ratut^es suffisent et qu'il y aurait injustice k
les d^pouiller de leur clientele.
Gertes, les protestations du Syndicat giniral seraient fondles s'il s'agis-
saitde restreindre la clientele payante des praticiens de la ville; mais Ie
d^bat porte uniquement sur les clients gratuits. Ceux-ci reinvent sans con-
tredit des h6pitaux, qui doivent leurs soins gratuits aux indigents et aux
(1) Voir n» 7 de la Revue Philanthropique, informations, p. 143.
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■PWCP^^'"
BULLETIN.
479
n^cessiteux atteints d'une affection d'yeux, et les cliniques libres, dont
qnelques-unes ont rendu de si grands services k rophtalmologie, ne sau-
raient en prendre ombrage ; si elles sont dirigees par des maltres consom-
mes, elles n'ont rien i risquer, les hdpitaux ne leur feront pas concurrence ;
au contraire, si la comparaison tourne k leur d^savantage, il y aura lieu
de se f^liciter d'une amelioration dont proQtent les malades pauvres.
Que les syndicats de m^decins d^noncent les abus de I'admission des
malades riches ouais^s dans les hdpitaux, ils d^fendent une cause juste;
en m^me temps qu'ils servent un int^r^t ^minemment respectable, ils
saavegardent le bien des pauvres ; ils out raison d'insister, d'en appeler k
leur confreres des hdpitaux qui couvrent parfois de leur complaisance ces
abus et de r^clamer des mesures administratives efficaces. Autant cette
reclamation est fond6e et soutenable, autant Topposition au meilleur fonc-
tionnement des hdpitaux tombe k faux.
II est du strict devoir des administrateurs et des municipalit^sde porter
leurs services hospitallers au plus haut point de perfectionnement, sauf 4
redonbler de vigilance pour en r6server le benefice aux pauvres et aux
malheureux. Plus les medecins pr^tent leur concours d^vou^ et d^sinte-
resse aux mesures de progr^s et d'humauite et plus leur t^moignage aura
de poids pour la delimitation des fronti^res de TAssistance mddicale gra-
tuite; le probl&me est malaise pour Paris et les villes; raison de plus de
I'aborder en toute impartialite et d'un esprit large et liberal.
i&
^m
*
Un honorable administrateur d'un bureau de bienfaisance de Paris a
congn le projet de former un faisceau, d'etablir un groupement entre les
vingt bureaux parisiens ; ii a interesse le Rappel k cette proposition, et
M. Andre Honnorat, qui la soutient avec beaucoup d'habilete, expose
qu'apr^s avoir rSve de reunir en une association fraternelle les 400 admi-
nistrateurs parisiens, Tauteur du projet proposait en derni^re analyse aux
bureaux de se faire representer par vingt deiegues : «I1 ne s'agit pas, bien
entendu, fait observer M. Honnorat, de substituer un pouvoir nouveau aux
pouvoirs actuels, deconstituer,au-dessus des bureaux de bienfaisance, une
sorte de conseil superieur reglant et limitant leur action. II s'agit simple-
ment de permettre aux representants des divers bureaux de s'entendre sur
la repartition des secours, de comparer les resultats obtenus dans tel ar-
rondissement avec les resultats obtenus dans tel autre, d'examiner en-
semble sur quels points Torganisation actuelle devrait etre modifiee. »
En effet, le projet n'a rien de subversif ; il emane d'un administrateur
de\oue qui n'a pour but que de grouper des bonnes volontes et de coope-
rer par cette entente au soulagement des malheureux, au meilleur fonc-
tionnement de I'Assistance publique.
II est k presumer que si Tidee federative a rencontre des objections,
dans la forme primitive oh elle etait presentee, le souvenir des meetings
bruyants organises pour manifester contre le decret de 1895 n'y a pas
ete etranger.
Aucune arriere-pensee de ce genre ne hahte Tesprit des organisateurs
"^ A
j^"-' ;
,.'-^,-.
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480 REVUE PHILANTROPIQUE.
da nouveau groupement, celui-ci n'eet pas destine ^sauvegarderles pr^n
gatives des administrateurs, mais k rehausser leur rdle en les faisant part
ciper d'une maniSre plus g^Q^rale k la recherche et k la promulgation d(
meilleures m^thodes d'assistance k domicile.
Ni le conseil de surveillance de TAssistance publique, ni le Gonseilmi
nicipal ne se plain dront, suivant toute apparence, d'un regain d'activi
des bureaux de bienfaisance, surtout si une telle initiative avait pour r
sultat de susciter quelques-unes de ces petites r^formes, qui, additionn^e
ont un si grand prix en philanthropie. Ledecret de 1895 n'est pas encoi
appliqu6 dans son esprit, puisqu'il laisse aux bureaux toute latitude d'au|
menter au dela de seize le nombre de leursadministrateurs. Un seul arroi
dissement, le troisi^me, avait devanc^ le r^glement en fondant, d'apr^s I
principes d'Elberfeld, une curatelle des pauvres tr^s active et trfes util
Pourquoi cet exemple n'est>il pas suivi? Les autres arrondissements i
peuvent s'en tenir ind^flniment au statu quo, confier k un seul administn
teur un grand nombre d'administr6s, n^gliger les concours f^minin
suivre les sentiers battus. G'est d6jd beaucoup que la loi ne les entra^
.pas et qu'elle ouvre la porte k des modifications grdce auxquelles le fom
tionnement de nos bureaux de bienfaisance pourrait Stre radicalemei
transform6. Seulement il convient de tirer de la loice qu'ellecoraporte,
tout ce qui sera tent^ pour rajeunir les bureaux, pour leur donner la vi
sera profitable aux pauvres.
Paul Strauss.
Le Directeur-G^rant : PAUL STRAUSS.
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I\
L^ASSISTANCE PUBLIQUE
LE PROJET DE LOI SUR L' ASSISTANCE AUX VIEILLARDS
ET AUX INCURABLES
1-e conseil d'Etat est charge par le gouvernement de pr^-
P^i'Gr xin projet de loi sur Tassistance aux vieillards, aux infirmes
^t atix: incurables. PeuWtre le moment est-il favorable pour
'^otxtx-er que ce projet n'est pas isold, qu*il fait partie d'un
^J^soixk J}le, d'un plan m^thodiquement suivi pour Torganisation
®' ^-^sistance publique en France.
^*^st en novembre 1886 qu'a 6i6 cr^^e au ministfere de
*nt^i»ieur la direction de Tassistance publique. Du rapport
aare^^^ iicette occasion par le ministre de Tint^rieur au pr^si-
d^ la R^publiquc, j'extrais le passage suivant :
/^ • - . Sans exposer ici le fonctionnemcnt des institutions de
*^*^-isance, il est bon de rappeler que les dispositions Idgis-
<i^ qyj l^g r^gissent no se sont presque jamais inspir^es de
P^J^^ijifces gdn^raux et qu'aucune conception d'ensemble n'a
pre&xd^ j^ leur elaboration. A une 6poque ou les questions d'as-
^^^ ^CiesocialesontiTordre du jour et passionnent tous les
^P^vt^^ il faut que Tadministration se tienne k la hauteur de
^^che. La creation d'une direction de Tassistance publique
^ ^^^itue un progr^s s^rieux, en permettant d'^tudicr le pro-
^^^Uie dans son ensemble. »
Musi, la direction nouvelle avait pour tAche d^dtudier
^^ dans son ensemble » le probli^me des secours publics, en se
BEVUE PniLAI^TIIROPIQlE. — H. 31
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482 REVUE PHILANTHROPIQUE.
p^ndlrant des << principes g6n6raux » de fraternity et de soli-
darity qui sont les principes r^publicains.
Ces principes avaient 6i6 proclam^s en 1789. lis le furent
aussi en 1848. Et cependant, s'ils avaient inspire beaucoup
d'initiatives g^n^reuses, ils n'avaient pas inspire notre legisla-
tion. Les secours aux malheureux dtaient abandonnes aux
hasards des bonnes volont6s, publiques ou privies. Aucune
categoric de malheureux n'^tait assur^e par la loi de recevoir
les secours dont elle avait besoin.
La loi rangeait bien les d6penses faites en faveur des enfants
assist6s parmi les ddpenses obligatoires des communes, mais le
service est d^partcmental, et la d^pensc n*est pas obligatoire
pour le d6partement, de telle sorte que si un ddpartement se
d^robe, totalement ou partiellement, k son devoir sur ce point,
Tobligation des communes disparait.
La loi des alidn^s 6tait une loi de police plus qu'une loi
d'assistance.
Des h6pitaux, des hospices, des bureaux de bienfaisance
existaient; ces ^tablissements n'dtaient dus qu'h des impulsions
individuelles et fonctionnaient surtout avec des fonds prove-
nantdela charity priv^e (1). D'ailleurs plus d'un tiers de la
population de la France n' avait pas de bureau de bienfaisance;
pr^s des trois quarts de cette population n'avaient pas de
moyen d'hospitalisation dans un dlablissement public.
Certes, il y avait beaucoup de bien produit, mais sans r^gle
directrice; sans plan; sans m^thode; abondance ici, Ih disette;
c'6taitdcsmembres6pars, cen'^taitpas unorganisme, cen'^iait
pas un corps ayant et donnant la vie.
Que fallait-il faire ?
II fallait sans doute rechercher d'abord et fixer les principes
sur lesquels doit 6tre fondle une assistance publique ration-
nelle, en dvitant les dangers et les fautes que nous r^v^le
notre propre experience ou la pratique d'aulres nations, et ne
passer h Tapplication que lorsque, ces principes etant bien
^1) En 1885, prfes de 73 millions, sur 95 millions depens^s, avaient cette en-
gine.
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L'ASSISTANCE PUBLIQUE. 483
vus, le terrain de Faction se trouverait nettement d61imit6.
Pour s'^clairer dans cette ^tude, le gouvemement cr6a le
conseil sup^rieur de Tassi stance publique. II y appela les bommes
qui lui parurent les plus comp^tents dans les questions de la
bienfaisance, quelques-uns d'origine et d'opinions politiques
ou religieuses fort diverses^ en maintenant n^anmoins dans le
conseil une forte majority r^publicaine, car il importait que
Toeuvre sociale entreprise par la R^publique fiit couQue et con-
duite dans Tesprit rdpublicain.
L'exposition de 1889 offrit en outre Toccasion de r^unir k
Paris un premier congr^s international d'assistance^ oti vingt-
cinq nations se trouv^rent representees par les bommes qui,
sur tous les points du globe, s*etaient le plus utilement et le
plus gdnereusement adonn^s h I'etude de Tassistance publique.
La aussi, dans cetle grande assembl6e, dont les travaux ont
une s^rieuse importance, ce fut Tesprit de fraternity, Tesprit
r^publicain qui pr^valut.
Ce fut aussi un esprit de sagesse et de prudence.
Dis le debut des travaux du congrfes, la question de I'assis-
tence obligatoire fut pos^e. Le rapporteur demandait que le
pnncipe en fiit proclame sans limitation. C*6taitle principenon
limits qui avait inspire la legislation anglaise. Cetait celui
qu'adnaettent un grand nombre de ceux qui ont traite de la
'^^^i^re. C'etait, h mon avis, celui qui avait fait ecbouer les
^«stes projets de la Convention. C*etait ce principe que Ton
6toiij^g de voir consacrer en ces termes par un ecrivain aussi
^"''v^oyant que Montesquieu :
^* Quelques aum6nes que Ton fait Ji un homme nu dans la
we n^ remplissent pas les obligations de TEtat, qui doit k tous
^ ^^tcjyens une subsistance assuree, la nourriture, un vete-
^^^^ Oonvenable et un genre de vie qui ne soit pas coatrairc
^'^ ^^iite(l). »
, ^st ce principe de Tassistance publique obligatoire gene-
^^^ qui met si justement en defiance les esprits reflechis.
*^^ congrfes de 1889 se refusa k Tadopter. Ceux qui ont
^ Esprit des Lois, 1. XXIlf, cb. xxix : Des Hdpitaux.
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484 REVUE PHILANTHROPIQUE.
assists k cetle s6ance se rappellent rintervention decisive dans
la discussion de M. le professeur Ulysse Tr^lat qui, avec sob
admirable eloquence, montra les c6t6s « redoutables » de la
solution propos^e, la n6cessitd de limiter Tobligation de Tassis-
tance, et, ramenant Tassemblee k la proposition qui lui avail
6t6 soumise dans le discours d'ouverture du Congr^s, d6fendi1
Tobligation de Tassistance aux enfants, aux malades, aux vieil-
lards avec autant d*6nergie qu'il en mettait k ^carter de Tobli-
gation ceux qui n'^taient pas incapables de travail.
Apr^s de longs ddbats, le congr^s vota, k Tunanimit^ moins
une voix, la formule suivante :
« L'assistance publique doit 6tre rendue obligatoire par la
loi en faveur des indigents qui se trouvent, temporairemenl ou
d^finitivement, dans rimpossibilit6 physique de pourvoir aux
n^cossit^s de Texistence. »
C'est sur cetle formule que nous vivons : c'est elle qui a
depuis lors inspire tons les travaux du conseil sup^rieur, tons
les projets de loi pr^par^s par le gouvemement.
Ceux qui se trouvent dans Timpossibilit^ physique...
C'est-Ji-dire : les enfants, les malades, les vieillards, les
infirmes et les incurables.
Ainsi se trouvaient d^s Tabord 6cart6s le plus grand em-
barras et le plus grave p^ril.
Si, en elTet, toute organisation de Fassistance publique pr(5-
sente \m danger dcvant lequel reculent, non seulement les 6co-
nomistes purs, mais presque tons ceux qui ont quelque peu
^tudid sans parti pris les questions sociales, n'est-ce pas que
Ton craint que cette organisation ait pour r^sultat d'entretenir,
et mOnie de d^velopper le paup^risme? Mais ce rdsultat n^rasto
n'est k craindre qu'autant que lessecours publics vont aux indi-
gents valides, dont on risque d'encourager la fain^antise et dc
faire des parasites sociaux. Li, le danger est Evident, et jamais
il ne doit 6tre perdu de vue. Plus Ton est p(^n(5tr^ du devoir d(
Tassistance, plus il faut redouter de diminiler, si peu que ce soit
ce stimulant au travail qui est la n^cessit^ de vivre.
Ce danger n'existe pas quand il s'agit d'enfants, de malade^
pauvres, de vieillards. Ici, la cause diJtcrminante du secours, h
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L'ASSISTANCE PUBLIQUE. 485
faiblesse, Tinvalidit^, ne dependent pas de la volenti de Tas-
sisl^. Et si Ton objecte qu'au moins pour les malades et les
vieillards, il y a une autre condition essenlielle du secours qui
peat leur ^tre imputable, Tiadigence, qu'ils auraient pu 6viter
cette indigence par plus de pr^voyance, par une vie mieux
r^gl^e, il est permis de r^pondre que leur faute en ce cas n'est
pas une raison suffisante pour ne pas leur venir en aide. Dans
un pays ou la loi contraint le p^re h venir au secours de son fils
dans le besoin, quels qu*aient 416 les torts de ce fils, la patrie ne
peut refuser a ses enfants, eussent-ils^td impr^voyants ou dissi-
pateurs, les aliments n^cessaires k leur existence quand il est
^tabli qu'ils sont dans Timpossibilit^ physique de se procurer
ces aliments par leur propre effort.
Ainsi, le conseil sup^rieur a considdr^, et le gouvernement
a consid^r^, que Tassistance publique ne devait ^Ire rendue
obligatoire qu'en faveur des enfants, des malades, des vieillards
et des infirmes.
L'on a commence par les enfants. La loi du 24 juillet 1889 a
permis de retirer la puissance paterneJle aux parents indignes. Si
i ofciigation n'a pas 6t6 inscrite dans cette loi , c'est que les enfants
^oralement abandonn^s dtaient par cette loi assimil6s aux enfants
^sist6s pour lesquels Tobligation n'existait pas (robligation est
P^opos^e dans un projet de loi soumis depuis plusieurs ann^es
^ s^nat) et que de tels avantages ^laient faits aux ddparlements
"^ Voleraient cette assimilation qu'il n'y avait pas k douter de
^^ ^.dl^^sion. L'assentiment fut en effet unanime. La loi fonc-
'^^^^ ; actuellement, le nombre des enfants qui, en vertu de
^ *^^i, ont ^t6 retires de milieux abjects ou de la plus extreme
^spv^^ qui ont 6t6 confiis aux services d^partementaux et qui
^^^xdront, en trfes grande majority, d'utiles citoyens ou de
^^^^^ m^res de famille, d^passe 15000.
-^^pr^s les enfants, les malades. En faveur de ceux-ci inter-
^ ^^ loi du 15 juillet 1893 sur Tassistance m^dicale gratuite.
^^^ ^lle, le principe de Tobligation entra dans notre droit pu-
^^^^- V^'opposition Jt cette loi fut beaucoup moins forte qu'on ne
^^vail pr^vu. D^s Fannie 1895, elle a fonctionnd dans 63 d6par-
Iftinents; cette ann^e-li, grftce h cette loi, 12995 malades pau-
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486 REVUE PHILANTHROPIQUE.
vres ont ^t^ hospitalises qui n'auraient pu T^tre en vertu de h
ioi de 1851, et 107 569 malades de plus que les ann^es pr6c6
denies ont 61^ secourus h domicile.
Le gouvemement a done suivi jusqu'ici une marche m^tho
dique. Le projet de ioi organisant I 'assistance aux vieiilardi
est une troisi^me ^tape dans la carri^re qu'il se propose d<
parcourir.
C'est la plus difficile^ parce que c'est la plus obscure, sinoi
par le devoir qui doit nous y guider — ceiui-l& parait assez clair
— du moins par les r^sultats, sociaux et financiers, auxquel
elle pourra conduire. En cette mati^re, des informations authen
tiques sont presque impossibles h recueillir; Tadministratioi
n'y a pas m6nag6 ses efforts; elle a jusqu'ici ^chou^.
Une premifere question se pose : La Ioi est-elle n^cessaire? I
est Evident que, quelle que pilt6tre lajustesse devuesth^oriques
si, en fait, la totality, ou la presque totality, des vieillards oi
des incurables pauvres recevaient en France les soins qu'exig(
leur etat, il ne faudrait pas mettre en mouvement Tappareil 1^
gislatif, au risque d'effrayer, ou de d^courager des initiative:
privies g^n^reuses.
Mais, hSlas, il n'en est pas ainsi.
M. Sabran, president du conseil g6n6ral des hospices d
Lyon, a 6t& charg6 par le conseil sup^rieur de lui presenter ui
rapport et un projet de Ioi sur Tassistance aux vieillards et au:
incurables. « Si nous cherchons, dit-il, h savoir comment cett<
assistance est exerc^e, nous pourrons facilement nousconvaincr
par les plaintes qui s'dl^vent de tons cdt^s, par les douloureu:
abandons dont nous avons ^ chaque instant le spectacle affli
geant, que cette assistance est insuffisante, surtout dans lei
campagnes, malgr6 les g^n^reux efforts tenths de divers c6te
par la charitd priv6e.
« Le vieillard indigent, dont I'ftge a affaibli les forces, et qu
n'est plus capable de fournir un travail quelconque, n'a le plui
souvent d'autres ressources que le bureau de bienfaisance oi
des secours lui sont donnas au m^me titre qu'aux autres indi
gents, mais vous savez combien ce secours est insuffisant pou
assurer Texistence d'un vieillard incapable de gagner sa vie
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L'ASSISTANCE PUBLIQUE. 487
car il r^sulte des demi^res statistiques que la moyenne des se-
coars allou^s par ies bureaux de bienfaisanee s'^l&ve annuelle-
ment k 19 fr. 50 par personne, et m^me cette assistance, tout
insttffisanie qu'elle soit, ne peut 6tre procur^e partout, puisque
19000 communes enyiron n'ont point encore de bureau de
bienfaisanee.
« Si Ies bureaux de bienfaisanee sont insuffisants pour se-
eoorir Ies vieillards indigents, peut-on compter sor Fassistance
bospitali^re, et troaverons-nous dans Ies ressourees dont nous
disposons Ies ^I6ments suffisants pour venir en aide k Findigent
devenu incapable de travailler?
« lA encore la r^ponse sera negative.
a ... Nous n'apprendrons rien h personne en affirmant que
Fassistance est insuffisante et qu'il ne se passe pas de jour ou
Ies administrations bospitali^res, Ies bureaux de bienfaisanee,
Ies mairies, ne sment sollicit^s par de malheureux yieillards ri-
diiits au d^nuement le plus absoiu ou, cbose plus p^nible en-
core, par de malheureux incurables dont la mis^re est aggrav^e
par la maladie.
«... Nous rdsumons cette premifere partie de notre rapport
en disant :
« que, d'apr^s notre legislation, Tassistance des vieillards et
des incurables est purement facultative ;
a qu'en fait elle n'existe r^liement que dans Ies vilies d'une
certaine importance;
« qu'elle s'exerce souvent au detriment des malades dans
quelques h6pitaux ;
« qu'elle s'exerce presque partout an prejudice des pension-
naires des d^p^ts de mendicity;
c qu'en tons cas elle est insuffisante et que nous serious ex-
poses h une situation bien plus doulou reuse encore si la cha-
rity priv^e ne recueillait un grand nombre de vieillards. »
A Tappui de ses conclusions, M. Sabran fournit le tableau,
vraiment lamentable, de Tassistanee des vieillards dans un cer-
tain nombre de d^partements. Dans Ies vilies Ies plus riches,
rtput^es Ies plus chari tables, des vieillards pauvres restenl sans
secours, et n'ont d'autre moyen de vivre que la mendicity.
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488 REVUE PHILANTHROPIQLE.
M. Sabran cite Ic fait, signals par le pr^fet de la Gironde, d'uD
incurable qui n'a pu 6tre hospitalism k Bordeaux, parce qu'il
n 'avail pas les 20 ans de residence qu'exige le r^glement de
cette ville. II declare que « sur diifdrents points du territoire,
des vieillards, des incurables incapables de gagner Icur vie
souffrent, et meurent, faute d'assistance. »
Dans les villes qui forment la banlieue de Paris, et ou Tas-
sistance est organis^e mieux que dans beaucoup d'autres, celle
aux vieillards est tr^s insufiisante. Rapporteur devant le
conseil g^n^ral de la Seine, M. Paul Strauss s'exprime ainsi :
« La notori6tm publique, les dol^ances de nos collogues,
notre propre experience nous ont r6vel6 de longue date Tinsuffi-
sance des secours communaux h la vieillesse. Toutes les com-
munes du d^partement de la Seine sont pourvues de bureaux
de bienfaisance, mais les vieillards ne rcQoivent que des allo-
cations d6risoires, et les moyens d'hospitalisation de la vieil-
lesse font totalement d^faut dans la moiti^ de ces communes.
Pr^s de 200000 habitants du ddpartement de la Seine ne dispo-
sent pas d'un seul lit d'hospice pour leurs vieillards indigents,
pour leurs infirmes, pour leurs incurables (1). »
S'il en est ainsi aux portes de Paris, on pent juger de ce qui
se passe ailleurs.
Une circonstance particuli^re permet d'fitre renseign^, au
moins partiellement, sur une categoric d'incurables : les aveu-
gles. Cette circonstance, c'est Texistence des pensions des
Quinze-Vingts.
Eh bien ! les aveugles sont en France dans la condition la
plus cruelle. J'ai les mains pleines de preuves, et chaque cour-
rier, pour ainsi dire, m'en apporte de nouvelles. J'ai dans mes
cartons 1 800 demandes de secours d'aveugles &g6s de moins de
60 ans, 270 demandes d'aveugles ftg^s de plus de 60 ans^ et
Tadministration n'a aucun moyen de soulager ces mis^res, qui
parfois sont v6ritablement atroces. Les rares pensions des
Quinze-Vingts ne sont attributes qu'aux aveugles les plus Ag^s
et combien meurent avant qu'il ait 616 possible d'accueillir
(1) Paul Strauss, Rapport au Conseil g^niral de la Seine, 18 d^cembre 1895.
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L'ASSISTANCE PUBLIQUE. 489
leur demande ! Depuis un an, sauf quelques cas tout k fait ex-
ceptionnels, il n'a pu 6tre attribu6 de pension qu'aux aveugles
ayant d^pass^ 70 ans.
Veut-on quelques exemples? Je les prends au hasard.
Un aveugle fait 6crire :
Y..., demeurantk M..., fut, le i«' mai 1863, compl^tement aveugl^ par
un coup de mine, la poudre avait fus^. Bepuis cette ^poque, il est r6duit
k )a pire extr^mit^, vivant des quelques rares aum6nes qu'il peut recueil-
lir. Par charity on Ta pris en demi-pension dans une petite auberge oCi
pour cinq (^ous par jour on lui trempe sa soupe, quelle soupe ! et on lui
fournit son miserable coucher. Detail navrant ! 11 y a des jours ou ce pauvre
malheureux n'arrive pas k ^quilibrer ce budget si pr^caire.
Un autre signe les lignes suivantes :
Le a mars dernier, vous avez bien voulu m'informer que ma demande,
tendant h obtenir \m secours viager sur les fonds de I'hospice national des
Quinze-Vingts, est r^guli^rement inscrite.
• Depuis r^poque susdite, mon 6tat s'est beaucoup aggrav^.
Ma femme est malade depuis vingt ans, je n'ai aucun moyen d'existence
qae la mendicity, et cette trlste ressource est sur le point de memanquer.
Je suis infirme et ne peux plus marcher; ma belle-m^re, qui m*a servi de
guide jusqu'4 present, ne peut plus m'^tre utile, h cause de son grand
dge.
D'un autre, le pr^fet ^crit :
C^libataire, sans parents^ sans moyens d'existence et sans asile, il ne
peut se livrer k aucun travail en raison de son infirmity.
Pour un autre, c'est le maire qui s'exprime en ces termes:
11 s'agit d'un vieux soldat de Tarm^e d*Orient, qui fit parlie de Fexp^dition
de Crimea et re^ut pour sa belle conduite une m^daille avec agrafe.
Quand, priy^ de la vue, il est rest6 k la charge de sa famiUe, tons ceux
qui Fapprochaient admiraient la resignation avec laquelle il supportait son
afTreox malheur et ses continuelles soufTrances. Jusqu'ici sa vieille femme
et une fille maladive ont pu lui assurer Texistence; mais elles deviennent
elles-m^mes incapables de travailler, et Ton se demande avec inquietude
qui donnera du pain au pauvre aveugle.
n importe cependant de ne pas laisser mourir de faim un digne vieil-
lard, ancien d^fenseur de la patrie.
Je pourrais continuer longtemps. Et je ne transcris pas les
demandes de secours individuelles directes, demandes toujours
sujettes h suspicion. Je cite des documents officiels ou des de-
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490 REVUE PHILANTIIROPIQUE.
mandes transmises et certifi^es par des pr^fets et des maires^
qui^ en m^me temps qu'ils les prodaisent, d^clarent ne rien
pouvoir pour adoucir les infortunes qu'ils d^peignent.
Mais si Texistence des pensions des Quinze-Vingis fait que
nous sommes mis en presence de ces mis^res, que dirons-nous
des autres categories d'incurables? Nous n'en connaissons offi-
ciellement presque rien, parce que Ton sait que TEtat ne dis-
pose d^aucun moyen de leur venir en aide. Les idiots? Les
^pileptiques? Tons ceux qui ont habits la campagne ont 6te les
t^moins attristds, parfois indign^s, de situations horribles aux-
quelles personne n'apportait de remade. La remade, c*est la
mort, ou la mendicity.
Dans une lettre que j ai reQue il y a quelque temps de Bre-
tagne, mon correspondant me signale un malheureux vieillard
&g6 de 75 ans, paralyse des deux jambes, sans parents, et abso-
lument d^nu^ de toutes ressources, incapable m^me de mendier
vu son 6tat, qui agonise absolument depuis des mois. « Ne pour-
rait-on pas, dit-il, le caser dans quelque hospice de vieillards
incurables ?... Le maire, en vrai rapace paysan qu'il est, refuse
de faire une demande, de peur de grever le budget de la com-
mune de sa part d'hospitalisation. J 'aide ce malheureux comme
beaucoup d^autres, h6las I mais son cas d^passe Thorreur cou-
rante. »
Que pent Tadminislration, dans r6tat actuel de nos lois,
pour assister ce malheureux?
De loin en loin, une correspondance administrative signale
des faits qu'il n^est certainement pas tdm^raire de g^n^raliser.
Le 29 d^cembre 1896, un pr^fet 6crit :
Sur le vu d'un certificat d^livre le 10 d^cembre 1895 par le m^decia de
Tassistance m^dicale gratuite, M. le maire d'H... a fait admettre k rh6pi-
tal de T... le sieur G..., recueilli dans sa commune et atteint d'emphys^me
pulmonaire et d'arthrite du genou gauche. L'enqu^te que j'ai prescrite a
fait ressortir que ce malheureux, u6 k D..., le 16 juin 1828, exer^ait la
profession de chanteur ambulant et, depuis loogtemps, n'avait pas de
domicile fixe, mais qu'avant son retour dans son d^partement d'origine,
il avait s^journ^ pendant plus d'une ann^e sans interruption dans un
autre d^partement ou 11 avait ainsi acquis et conserve le domicile de
secours d^partemental au sens de la loi du 15 juillet 1893. Mes informa-
tions ont 6t^ corrobor^es par mon collogue de ce d^parteraent qui a n^an-
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L'ASSISTANCE PUBLIQUE. 491
moins d^clin^ la charge des frais d'hospitalisation k raison du caractdre
d'incurabilit^ des affections dont Tassist^ est atteint.
11 ne me paraltpas possible de r^clamer k la ville de D..., lieu denais-
sance du sieurC..., le paiemeot des d^penses de s^jour de ce vieillard
incurable h Tbdpital ; j'estime, en outre, que mon d^partement n'esi tenu
envers lui k aucun devoir d'assistance.
D'an autre cdW, il serait inhumain de renvoyer de Thdpital oh il est en-
toore de toos les soins desirables cet infortnn6 qu'une paralysie progres-
sive des membres inf^rieurs empdche aujoord'hui de marcher et mdme de
se tenir debout, et qui ne pourrait vivre p^niblement que de la charity
publique.
Dans cette situation, je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre,
de Touloir bien me faire connattre votre avis...
Le 30 d^cembre de la mdme ann^e, un autre pr^fet ^crit:
Conform^ment aux prescriptions de votre d^p^che du 24 de ce mois,
j*ai Thonneur de voos faire connaltre, ci-apr^s, les raisous qui out motiv6
Tadmission k Thospice de... du nomm6 L..., malade incurable actuelle-
ment en traitement dans cet ^tablissement.
Cet homme, qui est originaire de mon d^partement, est arrive dans
cette commune le 2 juillet 1895 et s'est prdsent^ devant le maire pour
obtenir son hospitalisation. 11 ^tait porteur d'un livret d'ouvrier d61ivr6
par. le maire de M... (d6partement voisin) et sortait de Thospice oh il
avait s^joume du 9 octobre 1894 au !•' juillet 1895. A sa sortie de cet 6ta-
blissement, il avait ^t^ dirig6 sur P..., son lieu de naissance qu'il avait
quitt^depuis 1847. II n'avait done ni domicile de secours d^partemental,
ni domicile de secours communal puisque, atteint de paralysie depuis 1890,
iln'avaitfait depuis cette 6poque que vagabonder dans les d^partements du
Calvados, de la Manche et de TOrne sans y acqu6rir le droit k Tassistance
publique.
Gompl^tement indigent, sans parent pouvant lui venir en aide, il 6tait
atteint, an moment de son hospitalisation, de paraplegic qui lui permet-
tait difflcilement de se tenir debout et lui rendait la marche presque impos-
sible. II se trouvail dans Tincapacit^ de travailler pour gagner sa vie et
m^me de mendier, ainsi qu*il r^ulte d*un certificat d^livr^ k la date du
43 juillet 1895 par M. le D' C..., m6decin de I'hospice de S... et dont copie
est ci-jointe. C'est en presence de cette situation sp^ciale et par mesure
d'humanit^ que mon pr^d^cesseur crut devoir le maintenir a Thospice en
attendant que vous voulussiez bien prendre une decision d^Onitive k son
^gard.
A la date du 11 d^cembre 1895, en vous transmettant la liste nomina-
tive ci-incluse des malades dont Tassistance incombe k TEtat, j*eus I'hon-
neur de vous signaler ce malade tr^s int^ressant par une annotation sou-
ligD^ et consignee dans cette liste et de vous demander s'il devait 6tre
8oign6 au comple de Tfitat ou si sa sortie devait 6tre ordonn^e. Je vous fai-
sais toutefois remarquer que, dans cette demifere hypothftse, c^^tait pour
hii la mort sur la voie publique...
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492 REVUE PHlLAiNTHROPIQUE.
Je vous serais reconnaissant, de me faire savoir quelle roesore je dois
prendre, pour ravenir,i Tegard de cet infortnne qui, je le r^p^te, est inca-
pable de marcher et par consequent de pourroir k son entretieu et qui ne
poss^de ni domicile de secours communal ni domicile de secours d^parte-
mental.
Encore une fois, que peut faire radministration ceniralc
pour ces malheureux abandonnc^s par les administrations locales?
II est impossible de pr^tendre que le projet de loi n'est pas
justifi^ par la condition en France des vieillards et des incu-
rables indigents.
Dans une democratic, au sein d'une R6publique qui se re-
clame de la fraternity, il n'est pas possible d*admettre qu'un
grand nombre de citoyens, incapables de travail, ^tant affaiblis
par Tftge ou par les infirmit^s, n'aient d'autres ressources que
les pratiques hasardeuses et ddgradantcs de la mendicity pour
ne pas p^rir d'inanition.
Le gouvernement a done d6cid6 de presenter au Parlement
un projet de loi r^glant les secours publics ft accorder aux vieil-
lards et aux incurables.
II a demands au conseil d*£tat de preparer ce projet. II a
pens^, d'accord en cela avec le conseil sup^rieur de Tassistance
publique, que la loi devait fttre fondle sur la base de Tobliga-
tion legale. Les raisons qu'en donne M. Sabran semblent d^ci-
sives :
Cette assistance doit-elle avoir un caract^re obligatoire, comme le con-
seil sup^rieur Ta d^cid^ pour Fassistance medicate gratuite? Telle est la
premiere question d r^soudre, et de la solution de laquelle depend le sort
du projet. Apr^s un ^change d'observations, la majority des membres qui
composent voire troisi^me section n'a pas b^sil^ k adopter cette opinioD,
et nous croyons, en effet, que si Tobligalion n*6tait pas impos6e, tout pro-
jiH qui serait pr^sente d^nu^ de sanction ne recevrait aucune application.
II faut bien reconnaitre que I'assistance des vieillards et des incurables,
par sa nature, se rattache plus a Tassistance medicate qu'^ I'assistance
donn^e k des indigents valides. Le vieillard et Tincurable peuvent k bon
droit ^tre assimil^s k des malades, et les mdmes raisons qui nous out d^
terminus k inscrire Tobligation en t^te du projet de I'assistance m^dicale
doivent nous engager k raccorder k notre projet.
N*oubIions pas du reste que les lois de 1851 etde 1873 n'ontpas formula
d'obligation, mais ont laiss^ la faculty aux communes et aux commissions
hospitali^res d'assister les vieillards et les inOrmes. L'exp^rience est \k
pour nous d^montrer qu'on n'a us6 de cette faculty que d'une fa^on abso-
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LASSISTANGE PUBLIQUE. 49$
lument excepiionnelle et que, par apathie, d^faut de ressources ou d^faut
d'entente, les articles 2, 3, 4 et 17 de la loi du 7 aoClt 1851 n'ont recu que
de bien rares applications.
Lemdme sort serait r^serv^ k tout projet qui ne prescrirait pas Tobli-
gation de Tassistance et nous vous proposons done de decider que le ca-
racltre de Tassistance des vieillards et des incurables, sera Vobligalicn
telle que tous Tavezd^finie dans vos stances pr^c^dentes (1).
II est inutile en effet de faire une loi, si cette loi ne doit pas-
6tre ob6ie.
Quant k la persuasion, Tadministration croit en avoir dpuis6
les moyens. II faut lire, k la suite du rapport de M. Sabran, le
rdsum6 des r^ponses des conseils g^n^raux k la circulaire du
l^'^^aoilt 1888, par laquelle le ministre de Tint^rieur les enga-
geait a organiser les secours h domicile en faveur des vieillards.
Bien pen de di^partements organis^rent un service effectif, et
Ih m^me oil les conseils g<5n6raux montrferent de la bonne vo-
lont^ ils ne furent pas suivis, et durent revenir les anndes sui-
vantes sur leur decision, les communes ayant obstin^ment
refus6 de voter leur part contributive. Dans la Charente-Inf6-
rieure, le conseil g6n6ral avait inscrit au budget de 1894, comme
essai, un premier credit de 6 000 francs. U a 6ti constats Tannde
suivante que le pr^fet, en presence des resistances des com-
munes, n'avait pu d^penser que 2 090 francs, et le credit fut
naturellement r^duit. Dans la Somme, le conseil g^n^ral avait
vote le credit n^cessaire pour venir en aide, par un secours de
120 francs par an, dont moitie a la charge des communes, k
cinquante vieillards. Les resistances des communes furent
telles qu'au cours de Tannee 1894, on n'en put secourir quo
dix-huit. Deux deparlements, le Puy-de-Ddme et le Doubs,
crurent repondre i la pensee du minislre sans charger les
finances departementales ni communales en organisant legale-
ment la mendicite, et leurs conseils generaux emirent le voeu
que Ton presentSt au parlement un projet de loi qui debutait
ainsi :
Article premier. — Le territoire de la R^publique est interdit aux men-
diants de nationality ^trang^re.
(I) Publications du Conseil sup^rieur de I'Assistance publique, fascicule n° 32,
p. 54.
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494 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Xrt. 2. — Tout vieillard, infirme, malheureuz, incapable de IraTail, qui n'a
pas d'autre moyen de subsister que Taumdne el qui n'aura pa ^tre hospi-
talism, devra solliciter Tautorisation de demander la charity.
II recevra une carte sp^ciale, etc.
11 n'y a done pas h compter que les d^partements, et surtout
les communes, s'acquitteront de leur devoir d'assistance envers
les vieillards et les infirmes s'ils n'y sont pas contraints par la
loi.
Cest pourquoi cette loi doit avoir un caractfere d'obligation.
On dit : Vous allez ddcourager T^pargne, affaiblir Tesprit de
pr^voyance; la pr6voyance n'est-elle pas un meilleur instru-
ment social que Tassistance ? Ah ! ce n'est pas moi qui le nie.
J'appelle de tons mes vceux un 6tat de choses oil la pr^voj'ance
sera plus encourag^e encore qu*elle ne Test, sans examiner si,
elle aussi, ne devrait pas 6tre rendue obligatoire, comme elle
I'a ^t^ dans un grand pays voisin. Mais la question actuelle
n'est pas Ik. La question est de savoir si Thomme qui est arrive
k la vieillesse et k Tincapacitd de travail, et qui n'a pas 6i6
pr^voyant, qu'il n'ait pas pu ou qu'il n'ait pas su Tfitre, doit
6tre secouru, doit avoir un abri et du pain; s'il ne doit pas
exister une organisation telle qu'il ne puisse pas se trouver
sans abri et sans pain. Pour Tinfirme incurable et pauvre, la
plupart du temps, la question d'une pr^voyance possible ne se
pose mdme pas. A celui-l& aussi un abri et du pain ne doivent-
ils pas 6tre assures?
II semble que la r<^.ponse ne saurait Ure douteuse.
On dit encore : Quelle sera la d^pense ? Combien y a-t-il de
vieillards, d'incurables k secourir? Je rdponds franchement :
Je n*en sais rien. Mais qu'importc, si le devoir de les secourir
est certain ?
Quand on a ^dict^ la loi sur les ali6n^s, avaii-on pu calculer
d'avance la d^pense? Savait-on combien il faudrait intemer
d'ali^n^s en France? Ce qu'on a fait alors pour la s6curit^, on
doit le faire aujourd*hui pour rhumanil6.
Quand on a r^solu de rendre en France Tinstruction pri-
maire obligatoire, a-t-on 6t6 arr6l6 par la provision des dnor-
mes ddpenses qu'entratnerait ce service ? N'est-il pas permis de
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L'ASSISTANCE PUBLIQUE. 4»5
penser que le droit k la vie prime le droit i Tinstruction ?
L'^valuation des d6penses possibles, ou probables^ n'est pas
ici la chose importante.
La collectivity doit-eUe, ou non, venir au secours des vieil-
lards sans ressources ?
Si elie ne le doit pas, je serais assez dispose k croire qu'elle
n'a m^me pas le droit de le faire, et que, conform^ment k la
jurisprudence du conseil d'Etat qui ne permet pas les impo-
sitions extraordinaires pour constituer des secours auxpauvres,
Tassistance publique n'^tant pas obligatoire, n'est pas m^me
facultative, car Targent des contribuables ne pent 6tre Idgitime-
ment employ^ que pour des services publics.
Si elle le doit, elle le doit quelle que soit la d^pense.
Ce n'est pas le cas de dire : Nemo liberalis nisi liberatiis.
L on ne fait pas de Iib6ralit6s aux d^pens d'aulrui. L'Etat, le
d^partement, la commune, satisfaisant ii Tobligation du secours
aux vieillards, ne font pas une lib^ralit^ : ils assurent un ser-
vice public.
Le souci de menager TeflFort des contribuables n'est pas seule-
ment legitime ; il est de devoir ^troit. Mais de ce souci, quelle
doit ^tre la consequence ? De ne pas accorder le secours du ? Ce
serait sacrifier un devoir pour en accomplir un autre. La con-
sequence doit 6tre d'entourer Tallocation du secours de pre-
cautions telles que Ton ait la certitude qu'il n'ira qu'i Tabsolu
besoin, et dans la mesure de Tabsolu besoin.
A toutes les 6poques, les republicains ont affirm6 le devoir
social de Tassistance obligatoire. II est permis maintenant de
privoir que cette grande entreprise, renfermee dans des homes
prudentes, sera r^alisee par la troisifeme republique.
En quoi consistent ces homes prudentes ?
D'abord, comme je Tai montr6, k n'admettre k Tassistance
que des malheureux qui se trouvent dans Timpossibilite phy-
sique de sortir de leur misfere.
Ensuite, k ne recourir k Tassistance publique que dans les
cas oil il a iii prealablement constate que tout autre secours
fait defaut.
En troisieme lieu, k maintenir la distinction, qui me parait
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496 REVUE PHILANTHROPIQUE.
fondamentale, entre le droit aux secours et le devoir social
d'assistance.
Enfin, k ne jamais abandonner cette rfegle qui a 6li afRrm^e
par Ic congrfes de 1889, confirmee en toute occasion par le con-
seil sup^rieur, qui est comme le palladium de Tassistance pu-
blique, la digue efficace contre les abus possibles : Tassistance
est en principe communale, et la commune doit 6tre financifere-
ment int6ress^e k limiter le nombre de ses assist^s.
HENRI MONOD.
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L ORTHOPEDIE ENFANTINE
1
Des d6couvertes r6centes, deTordre chirurgical, permettent
"sfjfirmerque, dans un avenir assez rapproch^, la plupart des
^^ants qui naissent afflig^s de diflformit^s ou de tares muscu-
^'res et anatomiques pourront 6tre non seulement soulag^s
*^3is gu^ris, redresses, all^gfe, rendus pareils aux camarades
® '^vir &ge, favorises par la sant^ et privil^gicJs par la consti-
^tioj:^ physique normale, harmonieuse. Les miracles racontes
P^p l*,^vangile sont ainsi k la veille d'etre r^alisis par cette
ocien^^^^ dont on s*est trop press6 de proclamer labanqueroute.
^^A l^s boiteux marchent droit, les bossus reprennent la posi-
tioa i:*^ctiligne,avec T^pine dorsale perpendiculaire, les b^gues
P*''^^^^*^^* nettexnent, les strabistes regardent en face, et peut-6tre
Ediso^j^ en ce moment se dispose-t-il h nous montrer des
aveu^j^g qui voient, d^passant le ph6nomfene de la clairvoyance
obtexix:!^^ ft Taide des rayons Roentgen.
^'c^rthop^die enfantine physique est un fait, et la soci(5t6 en
gc^^r^l^ comme les families, si longtemps affligdes par des
" ^^^tions, des infirmit^s, des asym^lries riput^es incurables,
'*^^^Vent les bienfaits d'un effort scientifique habilement dirig6.
^^ reiouche la nature imparfaite et Tart vient rdparer ses
oublis, rectifier ses erreurs.
^sl-il possible de r^aliser, dans ledomaine moral, lagu6rison
Aiufirmit^s originelles plus fftcheuses pour Findividu, et sur-
lout pour la soci^t^, que la claudication, le bdgaiement, la
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gibbositd? "Existe-t-il une orthop^die enfantine morale? Est-il
permis de supposer et de pratiquer un redressement, vers le
Bien, vers le Droit, vers le Juste, des ftmes tortues, des con-
sciences louches? Est-il scientifique, est-il possible d*ad-
mettre et d'accomplir la rectification intellectuelle et sentimen-
tale de ces 6tres malfaisants, qui, selon le langage populaire,
ont la bosse du crime?
Le probl^me est peut-^trc Tun des plus importants k t6-
soudre, car si Tordre social, si la prosp^rit^ des £tats s'accom-
moderaient mal dune multiplication des bossus, des bancals,
et d'autres 6tres impropres k la reproduction d une noble race,
aussi bien qu'aux divers services ettravauxexigeant des hommes
normalement constitu^s et bien portants, encore plus cet ordre
social etTEtatr^clament-ils une jeunesseinofiFensiveethonn^te.
La soci^t4 ne tarderait pas k se d^sagr^er et k p^rir, si les
vices, les debauches, les mauvais instincts gangrenaient de
plus en plus, d^s le jeune Age, ceux qui doivent 6tre plus tard
des hommes, des p5res de famille, des serviteurs de la patrie,
des citoyens.
A toutes les ^poques, on a essays de corriger, de moraliser
Tenfance vicieuse. Les legislations antiques donnaient au chef
de famille, au maitre, au patron, au juge, le droit de mort.
Sparte expurgeait sans piti6 les enfants venus au monde avec
des difformitds physiques : elle livrait k la hache et retranchait
de la cit6 les adolescents en qui se reconnaissaient des instincts
d61ictueux. La fameuse anecdote du renard vole, mordant sous
sa tunique le jeune Spartiate, qui contenait sa douleur et de-
meurait impassible devant le juge, prouve non seulement Tin-
difference k la douleur de Taccus^, mais aussi la s6y6nX6 avec
laquelle la justice laced^monienne recherchait les jeunes delin-
quants.
Jusqu'k present, pour am^liorer Tenfance, on a surtout cher-
che k TefiFrayer ou k la punir. On lui a inflig^ les ch&timents
du code reserves aux hommes, lorsque la loi Ta autoris^; on
la menace des punitions divines, quand la p^riode de discer-
nement ne se trouvait pas atteinte. L'effroi d'une peine celeste
et future, ou Tintimidation d'un ch&timent terrestre et immediat,
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voilk tout ce qu'ott a trouv^ pourcontenir ^galementlesadulteset
les enfanls. Le Gendarme et le Diable composent tout Tarsenal
d^fensif de la soci^t^, qu'il s'agisse de m^faits d'adultes ou de
perversit^s d'adolescents.
Remarquons ici combien il est t^m^raire de compter sur la
crainte desp^nalit^s extra-terrestres, aussi bien pour leshommes
que pour les jeunes gens. La peur de Tenfer n^arr6te que ceux
quicroientiTenfer. Sont-ils vraimentnombreux?Nousn'avons
pasii^tudier ici les causes de la criminality juvenile. Elles sont
multiples, sociales et accidentelles. La mis^re, la paresse, Taban-
don, Tinsuffisance de la surveillance patemelie, la facility de va-
guer par les rues avant el apr^sles heures de classes, les f&cheux
exemples, la tentationdesplaisirs, les occasions de libertinage et
de godaillerie foumies par les villes, les lectures et les conver-
sations dans les ateliers, dans les centres de travail, sont les
principaux agents de la corruption pr^coce. L'enseignement se
trouve d6sarm6 etne saurait 6tre mis en cause. Des hommes de
parti, des publicistes passioDU^s et injustes ont prdtendu rendre
rinstruction laique responsable de la demoralisation des jeunes
gens. II y a eu des coupables imberbes k des ^poques o\x Ten-
seignement religieux ^tait la r^gle universelle. La morale est
ind^pendante des cultes, des exercices. Le pr^tre k la chapelle
et Tinstituteur dans sa chaire enseignent les m6mes principes
de morality. Les commandements de Dieu sont reproduits dans
tons les manuels d*enseignement la'ique. Ce n'est pas T^cole
sans Dieu qui fa^onne les kmes criminelles. Pour que le cat^-
chisme et Tinstruction confessionnelle puissent servir de frein
k la jeunesse, il faudrait que cette jeunesse eAt la foi. La reli-
gion enseign^e et m6me pratiqu^e ne suffit pas. Paudrait-il k
I'appui citer les noms de criminels fameux qui avaient rcQU
une exceilente education religieuse? Pour ne parler que du
plus recent des sc^l^rats notoires, est-ce que Vacher n'^tait pas
un fort bon ^l^ve des pferes maristes? L'enseignement religieux
et la pratique m6me du culte ne sont susceptibles d'am61iorer
et de retenir sur la pente du crime que ceux qui redoutent les
peines ^temelles et ^prouvent, en confessantleurs fautes, leurs
penchants, ce que FEglise nomme la contrition. La morale
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laique ne peut agir que sur ceux qui ont conserve le don du
remords.
L'inefficacit^ de la vieille m6thode repressive et ^ducatrice
est affirm^e par raugmentation loujours croissanle de la crimi-
nality juvenile. La plupart des crimes non passionnels, princi-
palement les attaques a main arm6e, par escalade ou sur les
voies publiqueSy les vols par associations de malfaiteurs, les
incendies, les rixes sanglantes, les vols qualifies, ont pour
auteurs de tr^s jeunes gens, presquc des gamins. Faut-il rap-
peler les noms hideusement c^l^bres de Gamahut, d*Abadie, et
de vingtautres h6ros pr^coces denos cours d'assises?Ces jeunes
criminels avaient k peine atteint Tftge de la responsabilit^ en
justice; mais,avant d'accomplir des m^faits qui les ont envoy^s
devant le juged'instruction,combien de menus actes, mauvais,
bUmables, d^liclueux n'avaient-ils pas commis^ attirant sur
eux Tattcntionet les reprochesdeleurs parents, de leurs maitres,
des voisins, des passants?
Rien cependant n'avait 616 experiments pour amSliorer ces
mauvaises plantes humaines ; aucune greffe de bonte^ de dou-
ceur, de justice ne fut teniae sur ces sauvageons rebelles. La
society n*a m^me pas cherche h se dSfendre contre ces parasites
venimeux. EUe a eu seulement recours au fer du bourreaupour
les extirper, mais combien trop tard, et alorsque tant de victimes
montraient Tinsuffisance de la sScurite sociale. U est possible
que Tonefltechoue dans une tentative d amelioration de tels cer-
veaux surexcites par les passions nocives, autant qu'engourdis
par la paresse et le goOt des plaisirs acquis sans travail. Mais
que de jeunes gens qui n'ont pas atteint, heureusement pour
eux, le degr6 de notoriety dans le crime de ces sceierats fameux,
ont cependant traine une existence miserable dans les prisons,
faute d'avoir dte corrigSs, redresses dans leur jeune 4ge !
Des institutions bienfaisantes, tout en ayant le caractere
penitentiaire, existent sans doute en grand nombre, ayant pour
objet Tameiioration de Tenfance vicieuse. On a lu ici mdme
les travaux de M. Lucipia h propos de la maison de Montesson,
recommandantque, dans les prisons pour Tenfance, les jeunes
delinquants fussent traitSs comme dans une 6co\o de moralisa-
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L'ORTHOPfeDIE ENFANTINE. 501
(ion, de travail et de douceur. La philanthropic religieuse, de
son c6td, a multipli^, surtout pour les fiUes, les ^tablisse-
ments hospitaliers, les ouvroirs, les refuges. Tous ces moyens
sont excellents, tous font honneur k la nature humaine,
tous r^alisent certainement des progr&s sur Tordre de choses
existant jadis, mais ces rem^des sont insuffisants ; ils ne peuvent
donner que des r^sultats partiels, peu appr^ciables, et ils consti-
tuent une augmentation formidable dans les d^penses de tout
ordre, sans qu'on en soit r^compens^ par une diminution sen-
sible de la criminality juvenile.
II fallait done trouver autre chose, tout enlaissantsubsister,
tout en d^veloppanty tout en enrichissant, par des subventions
et des dons, les ^tablissements qui ont pour but la preservation
sociale en isolant Tenfance contamin^e par le milieu, par les
mauvais exemples, ou impr^gn^e de tares ataviques, auxquelles
il ne faut pas cependant attribuer une influence trop absolue,
trop pessimisle. II convient de chercher dans un ordre pure-
ment scientifique, en dehors de toutes preoccupations judi-
ciaires, politiques ou confessionnelles, la solution du grand
problftme de Torthop^die morale des enfants.
C*est dans ce but que, sans pr^tendre apporter la panache
k ce mal presque universel, car il sfevit non seulement dans
toutes les regions civilis^es du globe, mais encore dans toutes
les classes, m^me les plus cultiv^es, les plus favoris^es par le
luxe et par le milieu, je signalerai les tr5s int^ressantes obser-
vations auxquelles ilm'a 6U donne d'assister, faites par M. le
D' Berillon, dans sa clinique de la rue Saint-Andr^-des-Arcs,
me ref6rant aussi aux trfes int^ressants rdcits d'exp^riences aux-
quelles se sont livr^s ses coUaborateurs, notamment le D' Paul
Farez.
C'est par rhypnose quele D'Berillon, s'inspirant des maitres
comme Liebeault, Bernheim, Li^geois, etc., a tente la m^thode
curative de Tenfance dont la moral est gangrene. II ne s'agit
ici ni de charlatanisme ni de miracles, comme on Tentendait
autrefois. L'hypnotisme, cette merveilleuse science moderne,
ne doit pas sortir du domaine de Texperience et des faits. Pas
plus qu'&Ia vapeur, ft Teiectriciteetfttant d'aulres forces physi-
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502 REVUE PHILANTHROPIQUE.
ques, il ne faut rdclamer Timpossible et le supra-naturel, on
ne doit demander k la su^estion hypnotique d'aller au deli dcs
limites de son 6nergie ct de sa port^e.
D^finissons d*abord, en langage vulgaire, la suggestion et le
sommeil hypnotique, vulgairement appel^ somnanbulisme.
L'dtre plac^ dans le sommeil hypnotique se trouve transports
dans ce qu'on appelleTStat second; il conserve sa personnalitd,
mais sa volontS se trouve subordonnSe aux commandements
de la personne qui a provoquS le sommeil; il n'accomplit, il
n'entend, il ne subodore, il ne savoure que ce que TopSrateur
veut, et dans les conditions oil il le veut.
II faut, bien entendu, pour que cephSnomfene si surprenant
de Tanesthdsie de la volontS, de la subordination complete d'un
6tre k un autre se produise avec toutes ses consequences, qu'il
n'y ait pas resistance intSrieure ni parti pris du sujet; il est
nScessaire que ce dernier soit dans les conditions d'aptitude
suggestible nScessaire. Tout le monde n'est pas hypnotisable.
Ainsi, pour les enfants soumis d6}k aux experiences de M. le
D' Berillon et de ses emules, il a 6te constate que certains
petits sujets eiaient absolument refractaires aux suggestions
hypnotiques, par consequent incurables moralement. Ces
jeunes fttres refractaires se trouvaient invariablement parmiles
moins intelligents, les plus balourds, les indolents, ceux qui,
au premier aspect, pour un observateur superficiel, imbu des
anciennes methodes, auraient paru les plus faciles k amender,
k mater, comme disaient les antiques magisters.
Cette observation prSsente ce caractfere consolant que les
jeunes gens, vicieux, pousses au mal, disposes i la cruaute
envers les animaux, en vers les personnes, les precoces debau-
ches, les voleurs imberbes, sont generalement ceux qui ont
rintelligence la plus vive, les facultes les plus ouvertes, k
quelque condition qu'ils appartiennent. Cette precocite de Fin-
telligence chez les garQons et les lilies dont les parents signa-
lent les mauvais instincts a ete constatee de tout temps; ce
n'est pas une decouverte particulifere k Thypnotisme. L'intelli-
gence plus ouverte, la ruse, la malice de ces enfants, les ren-
daient plus impropres k profiter des bonnes legons des mattres
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L*ORTHOPfeDIE ENFANTINE. 503
etdes parents, h suivre Finfluence morale des milieux sains,
et h recueillir les bienfaits des enseignements, des exemples,
voire des ch&timents qu'on multipliait k leur dgard. La dispo-
sition favorable k TorthoptSdie morale, d'apr^s Tancienne
m^thode, 6tait en raison inverse de Tactivit^ c6r6brale de Ten-
fant. Sa superiority intellectuelle, d^veloppant ses forces de
resistance, le pla^ait dans une inferiority curative.
Avec la cure hypnotique, au contraire, ces enfants, qui
sortent des maisons de correction pires qu'ils n'y sont entr^s,
plus exerc^s, plus entraines au mal, ayant pour ainsi dire
passe par Tecole normale du vice, en attendant qu'ils prennent
leurs degres sur la voie publique ou dans les penitenciers, se
trouvent dans les conditions les meilleures pour ressentir la
domination hypnotique, et pour guerir radicalement. La fa-
culte de comprendre, la reflexion, la comparaison, jouent un
r6le decisif dans le travail interieur de la suggestion morali-
sante.
• Les premiers essais de cette medication mentale speciale ont
eie faits par le D' Berillon et les autres medecins de sa clinique
pour des defectuosites k la fois mentales et physiques, par
exemple pour premunir et guerir Tenfantd'habitudes vicieuses,
d'incontinence d'urine, d'onycophagie, etc. Par une serie de
patientes remontrances, de degoilts suggeres, d'admonitions
patemelles, dans presque tous les cas qui leur ont ete soumis,
les operateurs ont obtenu des resultats satisfaisants. Puisqu'on
pouvait detourner un enfant de la repugnante manie de ronger
ses ongles, indice presque toujours d'un caract^re difficile, d*un
temperament vicieux, d'indolence et de paresse, Tinduction
devait venir de chercher k corriger, par la mdme methode, le
penchant au vOl, la disposition k la brutalite, peut-dtre le gotit
du sang.
Si, dans Tordre physique, la chirurgie et Torthopedie pro-
cMent pareillement et obtiennent les memes resultats, qu'il
s^agisse d'operer un malade dont le strabisme, la claudication,
la gibbosite soient anciennes ou recentes, il n'en est pas de
meme dans cette chirurgie morale. Pour que le resultat soit
certain, pour que la guerison de Vkme depravee soit radicale, il
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504 BEVUE PHILANTHROPIQUE.
faut prendre le sujet dfes sa plus tendre enfance. Les r^sultats
obtenus jusqirici sont d'autant plus encourageants qu'& la cli-
nique de la rue Saint-Andr^-des-Arcs on n'amfene g^n^rale-
ment que des sujcts d6]k avanc^s dansTadolescence, des enfants
pour lesquels on a ^puis^ tous les moyens de r^primande ct de
coercition paternelle, qui ont 616 renvoy^s des ^coles, et qui
passent pour incorrigibles. Les parents et les maitres procfedent
pour cette cure comme lorqu'on va trouver, en presence de
maladies graves et chroniques, un grand m^decio, c*est-8i-dire
quand il n'y a plus grand*chose k esp^rer, aprfes avoir partout
consults et essays vingt remfedes.
Si, au contraire, dfes les premieres impressions de Tenfant,
lorsque sa jeune imagination s'^veille au monde ext^rieur,
quand la sensibility enfante rintelligence, quand au moyen du
monde ext^rieur qui se r6vMe h lui Tenfant perQoitson moi, en
m^me temps qu'il s'initie k Text^riorit^, quand il acquiert la
notion de la chose en soi, et de ce que Schopenhauer appelait
la representation, c'est-k-dire le monde existant par le fait de la
pens6e humaine qui le conQoit, si k cette heure favorable, el
sans attendre que naisse Tessaimdes pens^es malfaisantes,sans
laisser se produire dans le jeune 6tre les mauvajs d^sirs, les
coupables tentations, qui chez lui sont choses innocentes,
puisqu'il ignore le bien et le mal, on appliquait avec m^thode,
avec perseverance, avec adresse et precision, la suggestion
hypnotique, on serait k peu prfes certain d'obtenir une jeune
generation saine, et, si ce mot n'avait pas un caractfere de
phraseologie un peugenevoise, on pourrait dire une generation
vertueuse.
Cette education de la premiere heure a ete vainement
essayee par les parents, par les pedagogues, par les directeurs
d'asile, par les instituteurs religieux. On a dA avouer que Ton
ne pourrait agirsur Tenfance que vers huitans, par lesoraisons,
les catechismes, les livres de morale, pieuse ou laique, et, d'une
faQon plus efficace, vers quinze ans seulement, par la revelation
des penalites que le code reserve k ceux qui portent tort k
autrui. Sans nier Timportance et Tinfluence, au point de vue de
la protection sociale et de la mise en garde contre les mauvais
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L'ORTHOPfeDlE ENFANTINE. 505
instincts des jeunes gens, du gendarme, nous devons recon-
naitre qu'il n'est pas toujours suffisant, ei cependant c'est ft pen
pr^s le seul frein s6rieux que nous ayons h noire disposition
pour contenir les passions, les app^tits, les haines.
Avec la nouvelle m^thode, au contraire, onn'attend pas que
le mauvais arbre ait donn6 ses fruits, on Tattaque dfes les
premiers bourgeons. N'est-ce pas \k une belle et vraiment scien-
tifique m^thode? Pour extirper un mal comme celui de la cri-
minality, ce n'est pas dans les branches qu'il faut porter le fer,
c'est dans les racines que, cherchant la s^ve mauvaise, il faut la
purifier, la d^tourner, la rendre salubre et bienfaisante.
C'est done h la premiere enfance que doit s'adresser Ten-
seignement moral par la m^thode hypnotique, avant m^meque
rinstituteur ait regudes parents etde la socidt^ le jeune cerveau
dans lequel il va ddposer la notion des faits, Tenseignement de
la lecture, de I'^criture, du calcul, des devoirs envers les
parents et envers TEtat. C'est au seuil de la premiere enfance,
avant Talphabet, aprfes la nourrice et pendant la dentition,
qu'il conviendrait de confier ces jeunes enfantsft un mddecin en
qui on aurait confiance. Celui-ci examinerait soigneusement
le sujet et le soumettrait ft une medication mentale, qui accroi-
trait d'abord le champ de ses jeunes id^es, de ses impressions
neuves, et qui imprimerait dans cette vierge intelligence des
notions ineffaQablesdebien, de travail, d'applicationet d'ob^is-
sance. Toute sa vie il en garderait le d6pdt.
Voilft Toriginalite de la m^thode du D' B^rillon, voilft ce qui
fait de Torthop^die enfantine non seulement une des branches
les plus neuves et les plus hardies de la th^rapeutique mentale,
mais encore la m^thode la plus efficace et la plus simple de pe-
dagogic. En Temployant, la tftche 6ducatrice du p^re de famille
et du maitre sera simplifi^e par la suite. On pent affirmer que
les maisons de correction, que les colonies p^nitentiaires, que
tous ces tristes refuges, qui ne sont point des ports paisibles et
definitifs, mais des caravans^rails hasardeux oti le jeune vice fait
halte seulement, pourraient 6tre non seulement diminu^s, mais
dans un avenir rapproche definitivement ferm^s. La society
n'aurait plus en face d'elle que des criminels adultes, bien
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506 REVUE PHILANTHROPIQUE.
moins nombreux, car, ainsi que le prouvent les registres des
greffes, les enqufites judiciaires, les dossiers de police, en dehors
des cas exceptionnels, dus k Talcoolisme ou aux passions
amoureuses, le crime adulte est toujours issu do Tenfance per-
verse.
II
Les avantagesde lam^thode hypnotique pour I'am^lioration
de la race humaine, pour son Education, pour son perfection-
nement moral, sont indiscutables et reposent sur le fait scien-
tifique de Tautomatisme, ou se trouvent ploughs les indi-
vidus endormis, aptes h suivre toutes les impulsions qui leur
sont donn^es. Mais un probl^me se dresse : ces a vantages ne
sont-ils pasachel6s au prix d'une sorte de viol de la conscience
humaine? Tenfant hypnotist se trouve comme le cadavre
dont larfegle desj^suites faisait lemod^ede T^tatde perfection.
Le savant, le m^decin ont-ils le droit d'abuser de cette puis-
sance singuli^re de la suggestion pour dominer un ^tre qui ne
pent se d6fendre, pour lui imposer leur voIont6, pour le sou-
mettre h tous leurs caprices, 8i toutes leurs fantaisies ? L'hypno-
tisme ne peut-il devenir un instrument de perversion, et ne
peut-on voir un hypnotiseur abuser de T^trange pouvoir qu'il
aurait acquis sur un 6tre d^sarm6? Enfin, en admettant que
jamais un m^decin n'ait la pens^e coupable de [forfaire k Taide
de sa puissance, n'y a-t-il pas une violation du libre arbitre et
de la conscience dans Tusage de la su^estion hypnotique ? Est-
il permis de transformer Tenfant en machine, et n'est-il pas
plus noble, plus juste de chercher Jt faire appel h sa raison,
quandil est en 6tat de veille, quand il pent contr6ler les af6r-
mations du pedagogue, lorsqu'il se trouve plac6 comme THer-
cule de la fable entre le vice et la vertu, et qu'il pent faire son
choix en toule liberty?
Ce dernier raisonnement serait un pur sophisme. Est-ce que
Tenfant doming par un instinct fiLcheux, influence par le milieu,
subissant de . tristes influences h^r^ditaires, se trouve r^elle-
ment libre de choisir entre le bien et le mal? en a-t-il la notion
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L'ORTHOPfeDIE ENFANTINE. 507
et peut-il en peser les avantages et les inconv^nients ? est-il
libre, en un mot, de se conriger lui-m6me? II est Evident que
cette liberie n'existe qu'en throne ; Texp^rience a d'ailleurs
d^montr^ le peu de cas qu'il fallait faire Hu libre arbitre. Par
consequent le m6decin, le pedagogue, le chef de famille, sans
aucune esp^ce de remords, sans crainte, sans hesitations
peuvent essayer d'imposer k Tenfant, progressivement, des prin-
cipes moraux, une rfegle de conduite, les notions du juste et
du bien, sans avoir k s'inquidter du libre arbitre de cet enfant.
Est-ce qu'on tient compte de ce libre arbitre dans Teducation
d'aujourd'hui, dans Tamas de notions, que Tdlfeve ne pent ni con-
trdler, ni discuter, sur la Religion, sur la Patrie, sur Tobeis-
sance aux Lois, la soumission aux sup^rieurs, voire sur les con-
venances mondaines, et sur les ^gards dus entre personnes se
connaissant, se fr^quentant?
La society tout^enti^re repose sur un viol permanent du
libre arbitre, dfes le jeune Age. Nous ne recevonspas les id^es
avec la vie ; elles se ddveloppent successivement au contact des
choses dans Tordre des sens et des observations que Tenfant
pent faire lui-mdme directement. Mais ceci ne forme que le
petit bagage de Tintellect naissant; c'est par Tenseignement
oral de la nourrice, de la m^re, du fr^re aln^, de la grande
s(Bur, que Fenfant acquiert des notions plus ou moins com-
pletes, plus ou moins justes, plus ou moins profitables, sur
tout le monde moral. Les idees de Dieu^ de foi, de bonte, de
docilite, de courage, de respect, d'amitie, de charite sont ainsi
imposees h Tenfant par de veritables suggestions h Tetat de
veille, pratiqu^es en vertu de la crainte r^verentielle du petit
etre envers les plus grands, les plus forts. C'est par une quoti-
dienne tyrannic insensible, coutumifere, familiere, tr^s puis-
sante pourtant, que ce qu'on appelle la liberty de Tenfant est
des ses premieres annees enchainee.
La legitimite, la moralite de la suggestion hypnotique re-
sultent du but que se proposent les educateurs. Vous admettez
vis-i-vis de Tenfant le droit patemel et social k la correction,
ailons m6me plus loin, h Teducation, c'est-Ji-dire le plus sou-
vent k la transmission forcee de jugements tout fails, de pre-
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508 REVUE PHILANTHROPIQUE.
jugds, d'opinions courantes, d'antipathies et de sympathies de
races, de religions, de castes, et vous oseriez contester le droit
h rain6lioration sans chlitiment et h Tenseignement, par la per-
suasion, desprincipes d'uneimmuable morale? Une seule objec-
tion s^rieuse : Tenfant ^tant ^minemment suggestible, ne peut-il
arriver que, d6jh entrain^ par des stances de suggestions pour
le bien, il ne puisse 6tre facilement soumis h des suggestions
pour le mal ? L'argument serait de nature h faire r^fl^chir les
parents, les chefs dlnstitution, TAssi^tance publique, lorsqu'on
viendra leur demander, au nom de ia science, des enfants pour
les soumettre a la cure par Thypnose. II serait k redouter, par
la suite, que ces enfants puissent ^tre su^^rds dans un sens
diamdtralement oppose k celui des ^ducateurs. lis auraient
acquis une aptitude suggestible qui pourrait faire d'eux Tin-
strument passif, le joiiet facile de suggestionneurs d^prav^s,
sc6l6rats ou d^s6quilibr^s.
Cette objection tombe devant le fait suivant :
Le D*" Liebeault, dont les beaux travaux sur cette mati^re,
ainsi que ceux du professeur Li^geois et du D** Bernheim, sont
la gloire de T^cole de Nancy, assure que la premifere chose h
faire, en pratiquant la suggestion hypnotique sur un enfant,
est de lui inculquer Tordre suggestif de ne se laisser hypnotiser
ni sugg6rer jamais par aucune autre personne. La puissance de
cet ordre est telle que jamais, en dehors du m^decin qui aura
entrepris la cure, le sujet ne pourra tomber dans le sommeil
hypnotique. Par consequent, le danger signals se trouvera con-
jure. Mais, en admettant mdme que quelques bons efifets de la
cure hypnotique soient d^truits par la suite, est-ce que la
situation comme r^sultat serait pire que dans T^tat actuel des
choses? A Texeat des maisons d'^ducation les plus estimables,
aprfes avoir 6t6 lib^rds des ^tablissements de correction, apr6s
6tre sortis de la famille ou d'asiles philanthropiques, ne voit-
on pas des jeunes gens entratn^s au mal par des camarades,
par de f&cheuses suggestions non hypnotiques? Par cons^
quent, on pourrait, enfaisant la part dumal, comme dans un
incendie celle du feu, en retranchant ces d^chets, trouver en-
core un benefice considerable, au point de vue de Tameiiora-
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L'ORTHOPtDIE ENFANTINE. 509
tion humaine, dans Temploi de Thypnose h Torthop^die des
enfants.
La m^thode k employer est simple, sans grande demon-
stration ni charlatanisme ; il s'agit surtout de s'emparer de
lattention et de la bonne volontd de Tenfant. Le petit 6tre se
defend contre les taloches qu'il croit avoir m^rit^es pour
quelque infraction en avangant son bras ploy^, de fa^on h pro-
l^ger sa joue. Au moral, il se d6bat contre les remontrances
et contre Tenseignement en se repliant sur soi-m^me, en con-
tractant pour ainsi dire sa conscience. Le but du gu^risseur
doit 6tre de forcer cette conscience repli^e h se d6tendre. C'est
par la douceur, c'estpar un langage facile k saisir, etnullement
menaQant, qu'il doit redresser les habitudes vicieuses.
Par exemple, un enfant avait Thabitude inv^t^r^e de voler
des pieces d'argent dans les poches de ses parents. C'6tait le fils
d'un honorable instituteur : Tenfant n'avait sous les yeux que
de bons exemples, il 6tait fort intelligent. Les coups, les me-
naces, le croquemitaine h baudrier jaune 6voqu6 devant lui,
rien ne pouvait Fempficher de pratiquer des larcins dans le
porte-monnaie de son p^re ou de sa m^re, et m6me des per-
sonnes dtrangferes venant visiter Tinstituteur.
En d^sespoir de cause, on amena le jeune kleptomane k la
clinique du D"" B^rillon. L'enfant fut endormi, puis on le fit
approcher d'une table sur laquelle se trouvait une pifece de
monnaie : « Tu vois, mon petit ami, cette pifece d'argent, lui
dit le D*" B^rillon? Tu as envie de la prendre?... Eh bien !
prends-la si tu veux, et mets-la dans ta poche. » — L'enfant
ob^it, et le docteur ajouta : « C'est ce que tu as Thabitude de
faire, mon petit garQon, mais qa n'est pas bien ! Si tu avals de
Targent k toi, et qu'un camarade vint, pendant que tu dors, te
prendre une pifece de monnaie sur laquelle tu comptais pour
Tamuser en ricrdation et t^acheter des friandises le jour de
congd, tu trouverais que c'est bien mal?... Eh bien! puisque
tu as compris cela, tu vas remettre la pi^ce d 'argent ou tu Tas
prise, et d^sormais tu agiras toujours ainsi. S'il t'arrive k
Tavenir, de succomber k la tentation, tu auras honte d'avoir
vol6 et tu t'empresseras de remettre Tobjet k sa place. »
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5i0 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Geci se passait durant les vacances de Pftques de cette
aim6e. Le D'^B^rillon, dinant chez moi, m'avait contd le faille
premier jour oil ii commenQa sa cure; le pfere de Tenfant, in-
stituteur dans une grande ville de I'Ouest, devait repartir au
commencement de la semaine suivante. Quand j'ai revu le
D"^ B6rillon, m'informant du r^sultat de la cure entreprise par
lui, il m'apprit que rinstituteor ^tait reparti avec son enfant
trois jours plus tdt qu'il ne le pensait, h la suite de quelques
experiences. L'enfant n'avait plus jamais depuis touchy h des
pieces d'argent qu'on avait laiss^es trainer exprfes sans qu'il
s'en aperQftt; il n'est plus jamais retomb^ dans le mensonge,
et, de mauvais 61^ve qu'il 6tait, il est devenu Tun des premiers
de sa classe.
Ce second bienfait de Thypnose 6tail dtl it ce qu'en le ser-
monnant pour le gu6rir du vol, incidemment, et sans penser &
cette amelioration sp^ciale, le D' B^rillon lui avait recom-
mande de bien travailler, d'apprendre ses leQons, de t&cher de
faire plaisir h ses parents et d'avoir de bonnes places dans ses
compositions. La gu^rison de la paresse et du mauvais vouloir
avait 616 obtenue par surcroit, et pour ainsi dire par raccroc.
On poiirrait multiplier les exemples : les archives de la So-
ciety d*hypnologie, les procfes-verbaux du congrfes de Nancy, la
collection de la Revue de rHypnotisme sont remplis de faits
indiscutables de gu^rison par la suggestion hypnotique d*habi-
tudes vicicuses, d'incontinence d'urine, du vol , d'onycophagie,
et aussi de la colfere, de la paresse, de la cruaute envers les
animaux et d'autres f&cheux instincts.
C'est done une m^thode k la fois neuve et ancienne qu'il
s'agit d'appliquer : elle est neuve parce qu'elle substitue aux
moyens physiques, aux punitions corporelles, k Temprisonne-
mentpour Tenfance perverse, des moyens coiTectifs purcment
moraux ; elle est ancienne, car tons les philosophes, tous les
educateurs, tous les fondateurs de religion, ont eu recours pour
perfectionner la race humaine & des suggestions vertueuses, it
une morale qui se retrouve k peu prds la m6me dans la Bible,
dans les Vedas, dans les ^vangiles, et dans le Goran. Les sa*
vants modernes ne font done que perfectionner les moyens pi-
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L'ORTHOPfeDlE ENFANTINE. 3H
dagogiques et moralisateurs instituds par les l^gislateurs du
genre humain. lis les rendent plus exp^ditifs en se servant de
celte mysWrieuse ^nergie : Thypnose.
L'orthop^die morale des enfants n'est ni une utopie ni une
aberration. C'est un fait scientifique immddiatement applicable
partout. Nous demandons que des essais de cette m^thode
aient lieu en presence de savants et sous le contr6le des auto-
rit^Sydu Gonseil municipal, du conseil de TAssistance publique,
dans les hdpitaux oil se trouvent de jeunes enfants, dans les
asiles, dans les ^coles maternelles, et enfin dans ces tristes
maisons de repression ou les detenus sont des gamins.
Quand Texp^rience sera connue de tons, T^cole commu-
nale, sans cesser d'Mre un laboratoire du savoir primaire, de-
viendra une clinique, oil, par la suggestion hypnolique, Tinsti-
tuteur, m^decin mental et moral, r^alisera pour Tamendement
et le perfectionnement moral de la race, des miracles que
les l^islations et les religions ont 6t6 jusqu'ici impuissantes
k accomplir. La culture de la plante humaine doit 6lre Tart
supreme des civilisations.
EDMOND LEPELLETIER.
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r P_
LE CLASSEMENT DES ALIENES
DANS LES ASILES
Un detail de Tassistance des ali^n^s qui m'a frapp^ dans le
voyage que j'ai fait en Ecosse avec la d6l6gation du Conseil
general de la Seine, c'estle classement des malades. Lk-bas les
individus internes sont r^pariis en des groupements nombreux.
C*est d'abord les malades payants (private) qui sont sdpar^s
des malades indigents (pauper) , comme cela s'observe chez
nous. Mais alors qu'en France il existe des pensionnats ratta-
ch^s k des asiles, en Angleterre, on trouve, outre ces annexes
aux ^tablissements publics, des hdpitaux 6lev6s k Taide de
souscriptions particuliferes at plus sp^cialement destines k re-
cueillir des malades de la classe moyenne de la soci^t^ qui nc
peuvent acquitter le prix integral d'une pension. Ces maisons
regoivent les malades qui payent une retribution minime, inf6-
rieure au prix de revient. De cette fagon se trouve satisfait le
besoin de classement social qui est si vif et si r^pandu dans
toute TAngleterre. Si Ton appartient k un rang quelque peu
different de la condition populaire et que Ton peut payer une
pension, m^me tr^s modeste, on est facilement plac^ dans un
de ces grands et luxueux asiles-pensionnats.
Les Anglais ont remarquS que cette pratique encourage les
families k faire quelques sacrifices pour assurer St leurs parents
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LE CLASSEMENT DES ALlfeNfeS DANS LES ASILES. 515
uoe situation meilleure. Et de la sorte le comt6 et la paroisse
y gagneni, puisque ces malades ne restent plus h leur charge
commeils leseraient sans cctte possibility qui leur est donn^e
de devenir des pensionnaires. En France ceux qui n'ont pas les
moyens de payer le prix d'une pension sont class6s avec les^
indigents. Ne pouvant pas faire tout TefFort p^cuniaire n^ces-^
saire, leurs families ne veulent souvent en faire aucun ; et
voilii des malades h la charge complete de la collectivity.
II faut chercher Torigine de cette tendance anglaise au clas-
sement dans ce sentiment si d^velopp^ outre Manche du rang^
social. Entrez dans un des grands bars de Londres. Vous ver-
rez le plus souvent des box ou compartiments in^galement con-
fortables. L'un est presque luxueux, Tautre est d'un am^nage-
ment sommaire et le troisi^me est inlerm^diaire entre les deux.
Chacun des consommateurs qui p^n^trent dans le bar prend une
direction diff^rente : les gentlemen vont dans le premier, les
ouvriers dans le second, et les gens de la classe moyenne choi-
sissent le troisi^me. Et ne croyez pas que c'est parce que les
consommations sont d'un prix in^gal qui varie avec la nature
du box. Le prix est uniforme. Si les consommateurs se classent
dans chacun des trois compartiments, c'est volontairement et
parce qu'ils ont le sentiment du classement social. L'ouvrier
de mise n^glig^e et simple se trouve mieux avec ceux de sa
condition et prdffere leur compagnie h celle des messieurs bien
mis qui n'ont ni le m6me costume ni les mdmes mani^res.
Ge sentiment bien anglais du classement se retrouve dans
les asiles. L^ ce ne sont pas seulement les petits pension-
naires qui sont s^par^s des malades pauvres, mais bien d'autres
categories d'ali^n^s et notamment les criminels. On salt qu'il
existeit Broadmoor, pr^s de Londres, en Angleterre, et k Perth,
en Ecosse, des asiles sp^ciaux, oil sont enferm^s tons les ali6-
D& deiinquants, c'est-i-dire les pr^venus et condamnds deve-
nus fous, les individus qui ont commis un crime et ont et6
acquitt^s comme ali^n^s et enlin ceux qui, d6jh reconnus ali6-
nfe, ont perp^trd au cours de leur internement un acte crimi-
nel. Ainsi sont Isolds de la foule des malades les individus
dangereux aux instincts pervers, de meurtre, de vol ou immo-
REVUE PHILANTHROPIQUE. ~ H. 33
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514 REVUE PHILANTHBOPIQUE.
raux. Enfin le classement s'op^re encore, dans chaque asile,
entre les diff^rentes categories des maladies mentales. Les
etablissements anglais et ^cossais sont constita^s par de nom-
breux et petits quartiers divis6s en dortoirs et salles de reunion
destines k un petit nombre de malades. Aussi le m^ecin peot-
il grouper ses malades d'aprfes leurs troubles intellectoels, leur
sympathie r^ciproque, leur morality et leur condition sociale.
En France, il n'y a rien de pareil. Ces divers classements —
et je n'envisage ici que ceux qui ont une port^e morale — sont
impossibles dans notre pays. Les asiles et particuli^rement
ceux de la Seine sont de grand organismes oil triomphe
une r^glementation ^galitaire. Les malades payants sont k
part, dans les pensionnats. Et ceux qui ne peuvent payer le
prix d'une pension sont, m6me s'ils acquittent int^grale-
ment les d^penses qu'ils occasionnent, classes avec les indi-
gents. En outre, les ali^n^s criminels sont mi\6s au reste
des malades. 11 existc bien un asiie d'ali^n^s criminels, celui
de Gaillon, mais il n'est affects qu'aux hommes et seulement
aux condamn6s k des peines d^passant un an de prison et
qui ont 6U atteints apr^s leur condamnation de troubles men-
taux. La peine finie, le condamn^ ali^n^ est renvoy^ dans
un asile ordinaire. Mais si un individu, aprfes avoir commis un
crime, est acquitt^ comme ali^n^, TAdministration pent —
remarquez qu'ellc n'y est pas obligee par un jugement —
interner le malade, mais dans un ^tablissement ordinaire. Cette
organisation est done bien diff6rente de celle qui existe dans la
Grande-Bretagne, ou les asiles sp^ciaux contiennent, outre les
criminels devenus ali^n^s, les inculp^s acquitt^s pour cause dc
folic et les ali^nds devenus criminels. En France, ce n'est done
qu'une petite partie des ali^n^s d^linquants qui est ^limin^e
— pendant un temps limits — de la masse des fous et hospita-
lisde h part. Enfin les asiles fran^ais ont en g^n^ral ^t^ con-
struits k rinstar de vastes casernes, avec de grands quartiers,
pouvant loger jusqu'i 100 malades et plus. Ces cent internes
sont r^unis dans une m6me salle de reunion. Les dortoirs con-
tiennent vingt-cinq k trente lits environ. C'est dire que tout
groupement un pen medical est impossible. C'est la chaudiire.
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LE CLASSEMENT DES ALlfiNtS DANS LES ASILES. 515
oil Ton jette pAle-mfile tousles malades, au risque de les laisser
s'exciter les uns les autres, se battre ou se corrompre.
Cette situation est-elle r^ellement mauvaisc? Est-il n6ces-
saire de diviser les grands quartiers d'alidnds, de s^parer les
individus d'aprfes leur rang social, leurs d^lits ant^rieurs, leurs
instincts vicieux et m6me leurs sympathies ? Sans raffirmative
quels seraient les remfedes h T^tat de choses actuel?
Qu'il y ait des inconv^nients au melange des conditions
sociales — pour envisager ce premier ^l^ment de classification
— le fait est hors de doute pour le m^decin. Mais Je classement
social a d'autre part quelque chose d'anti-d^mocratique, et
blesse violemment le sentiment ^galitaire que tout bon r6pu*
blicain porte en soi. Cependant, il n'en est pas moins certain —
el lav^rit^ doit toujours 6tre proclam6e — que le melange
d'individus d^^ducation in^gale pent froisser certaines suscep-
tibilit^s et parfois augmenter la douleur de Tinternement et
m6me exacerber Tdmotivit^ morbide de quelques malades. C'est
m^me 18l une des raisons de Timpopularit^ de tons les ^tablissc-
ments publics et notamment des asiles. On est habitu^ dans la
vie sociale k des groupements qui ont surv^cu h toutes les revo-
lutions. Les chemins defer, la plupart des voiturespubliquesont
deuxet mfime irois classes; au th^fttre, les categories sontplus
nombreuses encore. En prison m6me, le regime cellulaire per-
met aux individus appartenant k une certaine classe sociale
de s'isoler. On tolfere toutes ces in^galites, et cependant elles
sont justifiees par des differences de prix qui parfois ne de-
passent pas un sou. Or, il suffit que Ton soit pris par une ma-
ladie, et la pire de toutes — la folic — pour que ces in^ga-
lites disparaissent. Si Ton ne pent payer la totality d'un prix
de pension relativement eleve, on est m6le aux indigents. Dans
les asiles de la Seine, entre le rdgime commun et celui de la
pension de troisifeme classe (1), dont le prix est de 1 400 francs
par an, il n'y a pas de classement interm6diaire. Beaucoup
pourraient payer ou payent m^me jusqu'i 60 francs et plus
— car Tassistance n'est pas gratuite et la commune a recours
(i) On n'accepte plus actuellement de pensionnaires de troisifeme classe.
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516 REVUE PHILANTHROPIQUE.
sur la fortune du malade — et sont confondus avec ceux qui ne
donnenlrien. Cela esl-il juste? Certes, il est trfes beau en un
sens que dans le malheur i'ali^n^ pauvre soit le voisin au point
de vue du traitement de celui qui possfede certaines ressources.
Mais cette 6galit6 pourrait exister tout aussi bien si Ton clas-
sait les gens d'aprfes ce qu'ils payent. Les uns et les autres au-
raient, tout en 6tant s^par^s, les m6mes soins et le mdme con-
fortable. Remarquez que la difference existe bien entre le
pauvre etcelui qui pent solder le prix integral de la pension.
II serait done peu contraire k nos mceurs de constituer une
quatri^me classe qui comprendrait des malades payant le prix
de joumde r^lemeritaire ou m6me un prix inf^rieur. On pour-
rait en peupler un ou plusieurs services, qui ne se distingue-
raient en rien des autres. Les malades seuls seraient diff^rents
par les habitudes sociales. Le d^partementaccorderait quelqnes
bourses dans certains cas comme il le fait d6jk et le prix en
serait moins ^lev^. Ce serait enfin un encouragement au rem-
boursement par Tindividu des frais d*assistance ; et de ce fait
le d6partementrecouvrerait bien des sommes qui sont aujour-
d'hui perdues pour lui ; car les families, n ayant aucun int^r^t
a payer, ne le font que si elles y sont forc^es et ne s'imposent
aucun sacrifice.
Plus je rdfl^chis sur cette question du classement social,plus
je le trouve Equitable. Au premier abord, il choque le sentiment
^galitaire. Mais Torganisation actuelle des trois classes de pen-
sionnaires ne le choque-t-il pas davantage ? Ces pensionnaires
forment mfime une aristocratic d'autant plus ferm^e que le plus
bas prix de pension s'^carte davantage du prix pay^ par les
ali6n6s places au regime commun. S'il y avait une quatri^me
classe, la difference entre les deux regimes diminuerait encore.
Le classement social — je le r^pMe — pousserait en outre les
families k assister lours malades. Enfin ce serait une mesure
m^dicale. Et c'est ainsi que je voudrais le voir surtout consi-
derer, les ali(?nes etant classes plus encore d'aprfes leurs habi-
tudes de vie, c est-4-dire d'aprfes leurs sympathies, que d'apr^s
une r^glementation financifere tr6s rigoureuse. D'ailleurs le
jour n'est peut-fttre pas tr^s eloign^ oil les progrfes de Tinslruc-
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r
LE CLASSEMENT DES ALltNtS DANS LES ASILES. 317
tion et du bien-6tre att6nueront les differences d'dducation qui
existent encore entre les diverses classes sociales.
L'isolement des ali^nds criminels et des criminels devenus
ali^n^s, c'est-Ji-dire de tons les malades k instincts pervert,
serait une mesure encore plus utile. Les inconv^nients du
melange de ces malades avec les autres ali^n^s sont nom-
breux. Tout d'abord ils entrainent une discipline g^ndraletrop
s^v^re et par consequent injuste pour la majority de la popu-
lation hospitalifere. Ensuitc, ils sont des foyers de demoralisa-
tion; et enfin ils commettent parfois des attentats sur leurs
camarades. On se figure les alien^s commedes 6tresinconscients
et incapables d*6tre touches par le spectacle et les conversations
des gens qui sont autour d'eux. D'abord ce ne sont que les
alien^s aiguS; qui seuls peuvent faire cette impression ; et ils
sont la minority dans nos asiles actuels. La plupart des autres
malades, A6g6n6T6s, alcooliques ou delirants partiels, sont des
6tres lucides, susceptibles d'etre contagionnes au moral. C'est
ainsi que les evasions ont lieu en s6rie ; les tentatives de suicide
ebruitees en amfenent d'autres; les actes de violence pareille-
ment. On pourrait meme dire que ces alienes lucides ou k demi
lucides sont encore plus suggestionnables que les gens raison-
nables. Ce sont des esprits plus faibles, qui versent facilement
dans rimitation. La logique voudrait done que Ton ftlt plus
severe pour le choix du milieu ou on les place.
Mais les alienes aigus, ces maniaques qui gesticulent, chan-
tent, parlent d'une faQon incoherente et qui representent pour
le public le type du fou, eux aussi sont capables, tout comme
les autres, de se laisser impressionner par le milieu oil ils
vivent. II n'y a qn'k interroger les maniaques gueris, comme
aussi les meiancoliques stupides, pour se rendre compte qu'ils
ont conserve le souvenir de tout ce qui s'est accompli autour
d'eux et qu'ils sont aptes k se laisser diriger par les impres-
sions mauvaises ressenties pendant leur maladie. J'ai dansmon
service une maniaque guerie qui, il y a quelques jours, etait
dans une periode d'agitation extrfeme, chantant, gesticulant, se
livrant k des actes obscfenes. Aujourd'hui, elle est douce, tran-
quille, docile, de tenue reservee. Ellese rappelle parfaitement
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HS REVUE PHILANTHROPIQUE.
tous les faits dont elle a 616 t^moin durant sa crise; mais par
une sorte de pudeur elle dit avoir oublid certaines de ses ex-
centricit6s inconvenanles. J'ai public derni^rement Tobserva-
tion d'une femme qui ^tait tomb^e, au cours d'une intoxication
alcoolique aigu^, dans un ^tat de stupeur profonde. Elle parais*
sait inerte comme une statue. Onpouvait latoucher, la pincer,
approcher une lumifere de ses yeux, lui parler, crier; rien ne
la faisait sortir de son immobility et de son mutisme. On
aurait pu penser que, dans cet ^tat, elle ^tait incapable de se
rendre compte de ce qui se passait autour d'elle, et un mise-
rable aurait peut-6tre essayd dansces conditions deselivrer sur
elle k quelque acte obscene. Mai lui en aurait pris, car une fois
gu^rie elle a racont^ tout ce qu'on lui avait fait et tout ce qu'on
avait dit.
Les ali^n^s sont done — . k part les idiots, les dements
et les paralytiques g^n^raux — des personnes capables de subir
des impressions, et il est dangereux de mettre des gens hon-
ndtes avec des gens d*instincts immoraux. Voili done une rai-
son imp^rieuse pour justifier la separation des delinquants des
autres alien^s. II est curieux de constater que, alors que les
condamn^s de droit commun sont versus dans des regiments
sp^ciaux, les fous condamn^s sont melanges avec la masse
honnete. On objectera vainement que ceux-li sont irrespon-
sables. Gar ils n'en sont pas moins des personnes d'instincts vi-
cieux, anti-sociaux, et par consequent dangereux pour autrui.
II seraitdonc necessaire d'avoirun asile special pour les alienes
criminels et les criminels devenus alienes, qu'on retiendrait
durant tout le cours de leur maladie.
II y aurait peut-fttre lieu de creer un jour une section pour
les filles publiques, qu'il est scandaleux de voir cohabiter avec
des filles vierges. J'ai actuellement dans mon service une vieille
alcoolique, qui a vecu durant quaranle ans dans les maisons de
tolerance des grandes villes de France. Elle se fait gloire de- sa
longue et briUante carrifere et decrit complaisamment les phases
de sa vie accidentee, rappclant volonliers certains incidents
fdcheux de son existence. N*est-il pas au plus haut point im-
moral que cette femme, dont les moBurs, les habitudes, le Ian-
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LE GLASSEMENT DES ALI6n£S DANS LES ASILES. 519
gage, ont des stigtaates ind^libiles^ puisse viTre intimement
avec des jeunes fillesii peine nubiles et chastes, et les corrompre.
Mais quel ^l^ment de classement aurait-on aojourd'hui pour
envoyer les prostitu^s dans la section sp^ciale? Tiendrait-on
compte settlement de I'inscription reconnue des fllles qui n'ont
jamais Hi mises en carte? D'autre part, la r^lementation est
une mesore injuste, et en qnelqne sorte ili^gale ; il est inique
de poursuivre jusqu'ii I'asile nne malhenreuse prostitute mise
d^jk hors la loi durant sa vie libre. Mais cependant il n'est pas
moins important de songer k la defense des instinetft moraox
du plus grand nombre. Si la prostitution ^laitun d^lit, la ques-
tion serait simplifi^e. On enverrait k Tasile d'ali^n^s criminels
toutes les prostitutes condamn^es pour ce d6lit special. En
attendant les filles publiques pourraient 6tre classics avec des
femmes &g^es ou pen susceptibles de contamination ; mats
pour cela il est n^cessaire d'avoir des quartiers nombreux et
contenant un petit nombre de malades.
Si je suis partisan de Tasile d'ali^nds criminels, je n'en
aime point Tfitiquette, et je pense avec M. Paul Gamier que
celle d'asile de siAreti conviendrait mieux. Cela permettrait
d'^tablir une section d alcooliques r^cidivistes, condamn^s pour
d^lit d'ivresse (1), et qui seraient soumis k un regime d'absti-
nence et de travail.
Enfin un dernier point resterait k ^tudier, la n^cessitd de
rdpartir les malades d'apr^s leurs sympathies, leur morality
g^n^rale, leur education. Les consequences de I'absence de
tout classement k ce point de vue ont d^jk ^t^ en partie exami-
nees. On pent dire que les asiles actuels ressemblent trop k des
pensionnats et qu'Ji ce point do vue I'antipathie personnelle et
Timmoralite y ont trop libre jeu.
La necessity de nombreux groupements s'impose encore
davantage si Ton consid^re le point de vue th^rapeutique. Cette
6tude pourrait faire Tobjet d'un autre article; elle ne ferait
d'ailleurs que montrer la necessity de diviser et subdiviser nos
quartiers actuels. Mais on n'a pas besoin de construire denou-
(1) Malheureusement la loi sur Tivresse n'est pas suffisamment appliqu6e.
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B20 REVUE PHILANTHROPIQUE.
veaux asiles avec des pavilions nombreux et coAteux. Certains
asiles ^cossais ne consistent que dans un seul blocky dans un
b&timent unique ; et cependant les dortoirs y sont trfes petits,
«t les salles de reunion multiples, de manifere que les malades
y sont tr^s divis6s. On pourrait, en utilisant les vastes biti-
ments de nos vieux asiles, en sectionnant les dortoirs et les
salles de reunion, en am^nageant les couloirs en lieux de Ira-
vail — c'est-k-dire i Taide de simples cloisonnements — cr^er
des quartiers suffisamment morcell^s pour permettre le classe-
ment naturel des malades.
EDOUARD TOULOUSE.
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LES
TRAVAUX DU COMITE DE DEFENSE
DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE
PENDANT L'ANNEE 1897
RAPPORT
LU A LA STANCE DE RENTR^E DU 19 JANVIER 1898^
L'ann^e 1897 a vu se completer la suite, non interrompue
pendant sept ann^es, des efforts du Comity pour assurer k la
jeunesse en p^ril la place qui doit lui appartenir parmi les
preoccupations d'une justice r^ellement soucieuse des int^rdts
sociaux.
Dans un pays oh la population diminue chaque jour, ce
n est plus seulement au nom de la philanthropic, mais pour la
vie m6me de la nation, que le devoir s'impose de ne rien n^-
gliger afin d'arracher aux ravages du vice cette portion si
considerable de la jeunesse, contre laquelle les tribunaux sont
appeles h agir.
Son nombre seul suffirait k le rendre redoutable. Les der-
ni^res statistiques criminelles (ann^e 1894) r6v6lent en eflfet
un chiifre de plus de 40 000 mineurs deiinquants et criminels
dont 7183 de moins de seize ans et 32 849 de seize k vingt et
un ans. G'est, sans exag^ration, toute une armde.
J) La stance 6tait pr^sid^e par M. Milliard, Garde des sceaux, assists de
MM. Ployer, Mtonnier, president d'honneur; F61ix Voisin, conseiller h la Cour
de cassation, vice-president.
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522 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Chaque jour le Comit6 est intervenu pour assurer k ses
etudes des r^sultats se traduisant tout k la fois par de nou-
veaux soulagements apport^s a la condition des jeunes pr^venus
et par des soins plus minutieux donnas aux procedures ou leur
sort se d&ide.
Les questions de principe n*ont trouvi§ place dans ses ordres
du jour qu'ii cette intention.
Depuis que son action s'exerce, les mineurs ont 6te Tobjet
d'une sollicitude de plus en plus active. lis ont 6t6 mieux
defendus contre eux-m6nies. 11 faut bien le dire aussi, avec
tristesse, contre leur propre famille. Leur mise en liberty
a cess6 d'fitre considfir^e comme Tid^al de Tint^rfit que la
justice peut leur t^moigner. Le regime hospitaiier s'est com-
bing heureusement pour eux avec le regime p^nitentiaire,
oil rid^e de preservation a de plus en plus p6n6tre; la juris-
prudence est devenue tout k la fois plus ferme et plus clair-
voyante k leur ^gard; le bon sens et Topinion publique mieux
6clair6e, ont r^pudi^ presque partout, comme inutiles et cor-
fuptrices, les courtes peiaes d'emprisonnement.
Tout cela est d^jk quelque chose. Un jour ce sera plus encore
si eeux qui nous remplaceront ne se lassent pas trop tdt.
Dans cette salle du Conseil oii chaque bMonnier se plait k
continuer les traditions d'une hospitality qui est raffirmatioB
de la solidarity du barreau et de la magistrature pour la pro-
tection de Tenfance, le Comity a pu avec les refur6sentants de
r^tat et du d^partement faire une alliance dont les enfants
traduits en justice ont chaque jour k s'apphiudir.
Si on eonsid^re les snjets trait^s eette ann^e, en les rap-
prochant de ceux des ann^es pr^c^dentes, on voit que tons,
ob^issant k la mSme pens^, tendent k substituer de plus en
plus r^ucation k la repression, la preservation, k la fletrissore.
Toutes ces idees ne rencontrent gu&re de contradicteurs.
Pourquoi ne sont-elles pas plus souvent appliqu^es ? Le but da
Comite est de les faire entrer dans nos lois, dans nos habi-
tudes judiciaires et administralives.
La preoccupation du resultat a atteindre rapidement ne
devait pas faire dedaigner les principes qui en sent U source.
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LES TRAVAUX DU GOMIXfe DE DEFENSE. 523
Pour d^fendre ees principes, des philosophes, des moralistes
9ont venus prendre place ji c6t6 des magistrals et des crimi-
aalistes.
C'est ainsi qu'^ notre premiere stance, M. Hatzfeld, dont le
nom appartient& TUniversitd, a trait6 devant vous la question
de savoir ce qull faut entendre par le « discernement » dont
parle Tarticle 66 du Code p^nal k F^ard des d^linquants de
BH>ins de seize ans, elk partir de quel dge la question du dis-
cernement doit se poser aux magistrals.
C^tait bien k un philosophe spiritualiste qu'il appartenait
de rappeler au Comity que, pour admettre la possibility de re-
dresser Tenfant par T^ducation, il faut voir en lui autre chose
que le jouet inconscient d'un d6terminisme implacable ou
d'une h^r^dit^ fatale.
&IaJs, tout en proclamant la responsabilit^ de la conscience
humaine m6me chez Tenfant, le juge n'en doit pas moins,
Urt'On dit avec raison, se montrer exigeant sur la preuve de la
plenitude du discernement. *
Comme il faut, pour que ce discernement existe, que Tenfant
ait tout k la fois, par un double acte de son esprit, la connais-
sance du mal el de ses consequences, et la volont^ de le com-
meltre, on voit que le juge trouvera presque loujours, sans
s'6carler de la v6ril6, une excellente et ti*fes irr^prochable rai-
san de declarer que le mineur, tout en possddant d^ja la notion
du bien et du mal, a besoin, dans la plupart des cas, qu'une
education, plus r^formatrice que le ch^timent brutal, vienne
parfaire son discernement.
« Le nom seul du Comity, disail Ir^s justement le rappor-
teur, indique assez quelle est k ses yeux Tutilit^ d'avoir pos6
dans la plus large mesure la question du discernement. II y
cherche surtout un moyeji de pouvoir sauvegarder et ramener
au bien le plus grand nombre possible. C'est son but trfts g^n^-
reux, tr^s noble, c'est aussi son honneur. »
Cependanl la foi la plus robuste dans la puissance r^for-
matrice de T^ducation est trop souvent ^branl^e par certaines
manifestations du mal dans des &mes semblanl, malgr^ leur
jeunesse extrdme, appartenir aux criminels les plus endurcis.
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524 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Tout r^cemment, en quelques jours, les chroniques judi-
ciaires, moins rassurantes parfois que les chiffres variables et
trop muets des statisliques, nous montraient un enfant de qua-
torze ans ^gorgeant dans son sommeil un vieillard, son maitre,
un ^colier de seize uns assassinant dans la m^me nuit sa mai-
tresse de dix-neuf ans et une autre femme; un souteneur de
seize ans tentant de luer une fiUe qui se refusait d'etre com-
plice de ses vols ; une autre jeune fiUe de dix-huit ans k peine
6tranglant, pour avoir un peu d'argent, deux de ses parentes
apr^s les avoir endormies avec de la morphine, et h Theurc
m^me, dans un de nos cabinets d'instruction, comparatt une
enfant de quinze ans accus^e du crime d'infanticide.
En presence de cette criminality pr^coce, ne peut-on pas se
demander avec le rapporteur si, au lieu dlmposer au juge
Tatt^nuation de la pdnalit^ des crimes commis avec discerne-
raent paries mineurs, il ne serait pas pr^f^rable de lui en laisser
la faculty, de peur que cette attenuation n'ait Tair quelquefois
d'une sorte de prime donn^e au crime.
Mais le Comit6 de defense a pens^ que son titre mis6ri-
cordieux ne lui permettait pas de conclure h une plus grande
s6v6rit6 et que, tout atroce que soit le forfait, il y a toujours
quelque chose k mettre entre Tadolescent et le chdtiment.
G'est au ddveloppement des mesures d'^ducation, ordonn^es
par la justice, d5s que les mauvais instincts se manifestent,
quel que soit le jeune Age de Tenfant, et continudes le plus
longtemps possible, jusqu'Ji la majority, elev6e de seize k dix-
huit et m6me k vingt et un ans, que tendait, comme les ann^es
pr^c^dentes, T^tude philosophique qui a inaugur^ vos travaux
cette ann^e.
EUe r^sumait bien votre programme dans ces paroles hu-
maines que les applaudissements ont soulign^es : « On ne doit
laisser ^chapper aucune occasion de ramener au bien ceux que
les circonstances peut-ftlre ind^pendantes de leur volont^ ont
^garis ».
C'est pour cela que le Comity suit, avec une sympathie vive
et active chez beaucoup de ses membres, cette oeuvre compl^-
mentaire nouvellement sortie de V&me de Taumdnier de la
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LES TRAVAUX DU GOMITfe DE DEFENSE. 525
Petite Roquette, en faveur des mineurs de seize, k vingt et un
ans, r&ge oil se fait le plus sentir reflfet d'une mauvaise Edu-
cation et oil se perdent le plus facilement les leQons de la
meilleure.
Mais comment doivent ^tre organisEes les mesures d'^duca-
tion destinies i corriger le mineur et h prot^ger la soci^td
centre ses fautes ?
Tel a 6X6 tout nature! lement ensuite Tordre d'id^es sur le-
quel Tattention du Comity a 616 appel6e.
En premier lieu, M. Henri Joly, doyen honoraire de faculty,
a bien voulu soumettre quelques-unes des observations int^-
ressantes qu'il a pu faire au cours d'une mission des minist5res
de rinstruction publique et de Tlntdrieur (1), Ji TefFet d'^tudier
a r^tranger les divers systfemes d'dducation correctionnelle.
Ses conclusions, que le Comity a approuvEes avec d'autant
plus d'unanimitE qu'elles sont conformes aux opinions les plus
r^pandues, c'est que partout lestrop grandes agglomerations de
detenus sont une cause de r^cidive et que les petits etablisse-
ments, i forme un pen patriarcale appelant des d^vouements
plus intimes, exergant une sorte d'action familiale se prolon-
geant au dehors par le patronage (2), sont pref^rables k tous
les points de vuc k tout ce qui ressemble k de grandes casernes
oil Tenfant est expose k devenir un num^ro.
Les m^mes doctrines ont 6t6 6galement appuy^es avec au-
torite par M. Louis Riviere, membre du conseil de la Society
Generate des Prisons, k la suite d'un voyage dans le canton de
Berne. C*est \k qu'un des plus grands philanthropes dela Suisse,
M. Guillaume, lui avait dit : « En France vous avez trop d'ar-
gent, vous depensez trop (sansdoute il avait visite Montesson!),
vous mettez dans des palais des enfants de classes pauvres.
Nous, nous les mettons dans de modestes chalets et nous avons
moins de recidive. »
En Angleterre aussi, M. Louis Riviere nous a montre les
(1) Les Maisons (Viducation con^ectionnelle dans les diffirenls pays de I'Eu-
rope. Voir aussi son livre A travel's l*Europe, enqudte et notes de voyage, 1898.
(2) C'est sur ce principe que, le 29 juillet 1839, a 6t6 fond6e la colonie agricole
de Mettray par M. le conseiller Demetz et son ami, M. le vicomte Bretigniferes de
Courteilies.
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326 REVUE PHILANTHROPIQUE.
bons r^sultats obtenus par les petits groupements et rinfluence
du personnel enseignant au nom de la morale religieU8e.
Le Comity 6tait k Tavance p^n^tr6 de ces v^ril<5s. S'il s'agis-
sait de porter la conviction dans les esprits, la cause serait de-
puis longtemps gagn66. 11 est plus difficile de convaincre les
commissions du budget. Mais quand la question d'argent s'im-
poseet met obstacle aux r^formes les plus urgentes, faudrait-ii
au moins que Tfitat, providence Irop souvent impuissante, ne se
privftt pas de Tappoint considerable que I'initiative priv^e offre
de foumir.
Les colonies priv6es qui lui prfilent un concours dont Tad-
ministration p^nitentiaire, dans sa haute impartiality, aime k
proclamer les avantages, sont expos^es k p6rir lorsqu'elles re-
^oivent un prix de journ6e trop inf^rieur aux d^penses necessi-
ties par Tentretien des enfants qu'elles reQoiventdela confiance
du minist^re de Tlnterieur.
Aussi, dans sa stance du 11 mars dernier, le Comite, apr^s
avoir ^mis le vceu que FAdministration fasse le plus largement
possible appel k Tinitiative particuliferc, a-t-elle pensd qu'elie
devait appuyer aupr^s de la Commission du budget les justes
reclamations des colonies privies afin que le prix de la joumee,
qui n'est encore que do 75 et 80 centimes, chiffre vraiment di-
risoire, soit mis un pen plus en rapport avec les exigences mo-
rales et materieiles de la vie actuelle.
Depuis, la Commission du budget k laChambre et auSenat,
tout en reconnaissant le mal, a pense, sans doute k regret, que
retat de nos finances ne permettait pas de voter un relfevement
de plus de 10 centimes par jour. C'est au moins une marque de
sympathie (1).
L'examen compare dans les differents pays de TEurope des
modes d'education correctionnelle, issus presque tons de notre
loi du3 aoiit 1850, a ensuite amene le Comite k recherchersi,
(1) Tous ceux qui suivent attentivement la distribution faite h des opuvres
des millions provenant du Pari mutuel ont pu ronstater avec un certain ^tonne-
ment, qu'aucune des demandes faites au profit des colonies privies, rccevant des
enfants de I'^tat, ne parait avoir H6 accueillie. Ainsi ont ^t^ ajoum^s des ain4>
liorations qui eussent ^t^ tr^s profitables It ces enfants, et dont les plans ^taient
tout pr^ts.
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LES TRAVAUX DU GOMlTfe DE DEFENSE. 527
en France, certaines des dispositions de cette loi n'avaient pas
616 trop n^lig^es,
C'est ainsi que M. Puibaraud, inspecteur g6n6ral des services
administratifs et membre du Conseil sup^rieur des prisons,
a compl^t^ r^tude qu'en 1894 il vous avail pr^sentde sur les
r^formes k poursuivre dans le regime des colonies correction-
nelles et a signal^, dans un travail sur les conditions des en-
fants sortant des maisons de correction, non pas des lacunes k
combler, mais un texte trfes clair et tr^s imp^ratif k lirer de
loubli.
Ce texte, c'est Particle 19 de la loi de 1850 disant que « les
jeunes detenus sonty d f Opaque de leur liberation, places sous le
patronage de F Assistance publique pendant trois ann^es au
moins ».
Ce patronage qui n'a rien de commun avec la surveillance
de la police, le Rapporteur le d^finissait trfes bien en disant :
« Ce n'est pas la main qui tient rhomme par le collet, c'est la
main tendue et parfois Taide de la main ouverte ».
En songeant, comme A6]k en 1895 au Comity et dans la qua-
tri^me section du Congrfes p^nitentiaire international le faisait
remarquer M. Loys Bruyfere, membre du Conseil sup^rieur de
TAssistance publique, qu'une r^gle aussi sage n'a pas m^me
rcQu le moindre commencement d'ex^cution depuis prfes d un
demi-si^cle, faut-il s'^tonner que la maison de correction n 'ait
pas produit tons ses eifets et que la r^cidive s'^l^ve jusqu'k 35
pour 100, au moins, Ik oil aucune protection ne s'^tend au de-
hors sur Tadolescent lib^r6 (1)?
II serait bien injuste de faire retomber sa r^cidive sur T^du-
cation qu'il a rcQue. Elle a pu 6tre excellente. Les exhortations
de raum6nier, les enseignements du maitre ont pu ne pas faire
d^faut, mais en y6v\{6 comment supposer qu'ils conserveront
leurs effets sur lui si, dans la liberty oil on le rejette, il ne trouve
(1; Des colonies privies songent It se mettre en rapport avec de grandes oeu-
vres parisiennes telles que le Patronage des Jeunes Lib6r6s de la Seine, I'Office
central des institutions charitables, pour venir en aide aux jeunes gens arrivant
k Paris k leur sortie de la maison de correction. C'est une id^e qu'on ne saurait
trop enconrager. On sait que les engagements militaires trouvent le plus utile
des appuis h Toeuvre patriotique de M. F^lix Voisin, rue de Milan, 11 bis.
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528 REVUE PHILANTHROPIQU E.
aucun conseil, aucun soutien, aucune force pour le raffermir
et le rendre capable de r^sister aux suggestions Tattendant sou-
vent dans sa propre famille?
Sans doute, plus d'un jeune ddtenu n'aura pas 6t6 oubli^
dans sa vie correctionnelle. II aura 616 mis en rapport avee
ces oBuvres admirables qui se nomment « le Patronage des
Jeunes Iib6r6s » du d^partement de la Seine, et la « Soci6t6 de
protection des Engages Militaires ». Celui-lft, k sa sortie, ne se
trouvera pas seul, et il sera sauv^. Mais que deviendra lagrande
masse? Elle continuera sa marche a Tabtme sans que rien ne
VarrMe.
C'est k elle qu'un Patronage g^n^ral comme celui que la pr6-
voyante loi de 1850 voulait confler h TAssistance publiqueserait
utile.
Dfes ses premieres stances le Comity ^tudiera les moyens in-
g^nieux proposes par M. Puibaraud pour organiser, avec Taide
du personnel d^j^ existant, celui des inspecteurs d^partemen-
taux des Enfants Assist6s, sous le contrdle des pr^fets, ce pa-
tronage dont Tabandon a 6t^ une grande faute sociale.
Toujours favorable au d6veloppement de Tinitiative priv^e,
le Comity accueillera avec une faveur toule parliculi^re les
demi^res conclusions que M. Puibaraud donne k son beau rap-
port, en proposant que, dans chaque chef-lieu, un comitd
de six personnes notables, choisies par parties ^gales par Tau-
torit^ administrative et Tautorit^ judiciaire, soit chai^^ de vi-
siter les colons lib^rds, de se mettre en rapport avec leur patron
et rinspecteur de I'Assistance publique.
C'est ainsi que la solution du probl^me que soul^ve le sau-
vetage des mineurs d^linquants pourra 6tre surtout r^solue par
1 'alliance de la charity priv^e et des efforts ofliciels.
Le Comity se plait k voir un des instruments les plus puis-
sants de cette grande id^e dans ToBUvre d6ji forte de rUnion
des Soci^t^s de patronage de France (1) qui, par ses membres
et ses doctrines, tient de si pr^s au Comity de defense.
Au nom de Tid^c maitresse de T^ducation Femportant de
(1) L'Union est admiaistr^e par un bureau central, place Dauphine, 14, au
si^ge de la Soci6t6 g^n^rale des Prisons.
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LES TRAVAUX DU COMITfe DE DEFENSE. 529
plus en plus sur I'idfie inKrieure de p^nalit6, le Comity a tou-
jours doDn6 ses preferences au systfeme de procedure le plus
capable de mettre, en parfaite connaissance de cause, le jeune
delinquant sous la tutelle d'une education appropriee k son
etat.
La question de la procedure est capitale ; dfes le premier
jour, elle a appele Tattention du Comite.
II a toujours ete Tadversaire des procedures sommaires
appliquees aux enfants et il ne croit pas superflu de renouveler
son sentiment sur ce point i une heure od des revolutions s*ac-
complissent dans les regions de Tinstruction criminelle.
La procedure du flagrant delit, si efl^rayante par son extreme
rapidite, avait paru trop longtemps assez bonne pour les enfants
dont les interets n'avaient pas encore eveille, autant qu'aujour-
d'huiyla sollicitude que le peril social commande, meme aux
plus indifferents, de leur temoigner.
On ne voyait pas trfes nettement ce que la Societe gagnerait
a prendre au serieux ces minces delits par lesquels les jeunes
font leurs premiers pas dans le chemin trop frequente qui mene
aux prisons.
La lutte k entreprendre rencontrait bien des objections ; sauf
chez quelques-uns, la conviction se faisait attendre. « Est-ce
que la justice, murmurait-on plus ou moins bas, ne se dimi-
nuerait pas, en laissant tons ces petits venir h elle, avant qu'ils
soient devenus des criminels de marque? Est-ce que les cabi-
nets d'instruction, dont les assassins font le prestige aupr^s
d'un certain public, n'allaient pas descendre au rang de simples
bureaux de bienfaisance ou de placement? Est-ce que les magis-
trats n'avaient pas mieux h faire, pour eux surtout, qu'i perdre
leur temps k vouloir changer le sort de ces enfants nes fatale-
ment pour le vice et la mis^re? » L'honneur du Comite a ete
de ne pas s'abandonner k ce pessimisme connu qui paralyse
tout eflFort, de reagir contre ce dedain et cette indifference. II y
a reussi en partie. Le premier pas est fait; il serait impossible
de revenir en arrifere; c'est toujours en avant qu'il faudra mar-
cher. L*ideal que le Comite s'etait propose dans son manifeste
initial et dans celui qu'il a envoye il y a deux ans k tons les tri-
lUEVUB PHILAXTHROPIQUE. — II. 34
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530 REVUE PHILANTHROPIQUE.
bunaux de France, tend k devenir partout une r6alii^. U6cho
en a retenti utilement dans les grands Gongrfes p^nitentiaires
d'Europe, et tout r^cemment encore le gouvemement russe
demandait la collection de tons les travaux du Comity.
Notre programme est done sorti de la pure th^orie pour
entrer non seulement dans nos moeurs judiciaires, mais encore
dans le mouvement g^ndral des iddes en Europe.
La premiere condition pour rendre efficace le r6le de la jus-
tice en cette matifere a toujours paru 6tre Tunit^ de procedure
et de jurisprudence, obtenue par Tattribution des affaires, con-
cernant les mineurs, aux m6mes juges d'instruction et aux
m^mes chambres correctionnelles.
G'est ainsi que la 8® chambre du Tribunal de la Seine, sous
la pr6sidence de deux membres de ce Comity, M. Paul Flandrin
d'abord, et ensuiie M. Paul Bernard, a pu donner k la jurispru-.
dence sur les envois en correction une fixite qui favorise chaque
jour les oeuvres de patronage et a sauv6 bien des enfants.
Au d^but, les parquets avaient pu s'alarmer de la difficult6
k pourvoir au plus grand labeur que cette sollicitude nouvelle
pour les jeunes d^linquants allait en trainer.
Les choses ont 6t6 bien facilities k Paris et dans les plus
grands tribunaux de France par les oifres de service qui sont
venues spontandment des juges d'instruction eux-m6mes, en
g6n^ral membres des Gomit6s de defense.
Esp^rons que le surcroit d'efforts que la loi du 8 d^cembre
1897 sur la procedure contradictoire va imposer & un per-
sonnel, assur^ment trop nombreux, ne sera pas obtenu aux dd-
pens des affaires des mineurs ; ce serait un malheur.
L'ann6e derni^re, au moment ou se pr^parait cette loi, une
occasion excellente avait paru s'offrir d'assurer aux mineurs
inculp^s toutes les garanties de la procedure du droit commun
et de r6aliser ainsi, dans Toeuvre de leur protection, un progr^s
considerable.
Le Gomite, dans sa stance du 6 Janvier, avait demands de
conserver simplement dans la nouvelle loi, fragment d^tach^
d*un premier projet d'ensemble de r^forme de Tinstniction cri-
minelle, une disposition de ce projet ainsi congue au rapport
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LES TRAVAUX DU GOMlTfi DE DEFENSE. 531
de M. le d6put6 Bovier-Lapierre : « La procedure sommaire
n'est pas applicable aux mineurs de seize ans. »
C'eAt 616 f avec la consecration absolue et irrevocable de
Vid6e g6nereuse, dont le Comite s'est constitu^ le champion
depuis plus de sept ans, le salut de bien des enfants. Notre
legitime attente a 6t6 tromp^e! (1)
On ne comprendrait pas que Tinterfit des mineurs ait 6te md-
connu d'une fa^on si impr^vue, si on ne savait, de Taveu m6me
du legislateur, comjbien d*idees sages et progressives se sont
tout k coup, aprfes de longues ann^es d attente, trouv6es exclues,
dans la precipitation de la derni^re heure, par une legislature
arriv6e k son terme.
En attendant que cette reforme puisse faire le sujet d*une
proposition separee, bien faite pour tenter un jour quelque
membre de nos Ghambres, la Girculaire aux procureurs gene-
raux qui nous avait ete promise Tannee demifere pour leur re-
commander d'adopter Tusage, dont le Parquet de la Seine, sur
les vceux du Gomite, a donne Texemple de ne jamais traduire
des mineurs devant le tribunal, soit sur citation directe, soit k
I*£lat de flagrant deiit, sera la bienvenue.
M. le garde des Sceaux Milliard a vu tout k Theure par les
remerciements que M. F. Voisin lui a adresses, au nom du
Gomite tout entier, qu'en nous annon<;ant Tenvoi de cette cir-
culaire, il ajoutatt une faveur toute particulifere & sa visite, elle
nous laissera ainsi un souvenir durable de sa sympathie pour
I'enfance malheureuse.
« II vous sera ainsi plus facile, disait-il aux magistrals
nombreux dans cette assemblee, de ressaisir ces enfants; « il
<c vous sera plus facile d'exercer votre bienfaisante influence
« sur eux ; il vous sera plus facile d'en faire d'honnetes citoyens,
« car c'est Ik votre but, le grand but de votre soci6te ».
{Applaudissements. )
La loi du 8 decembre dernier, qui tend k assurer le benefice
de rinstruction contradictoire k tout inculpe rendra de plus en
rare, il faut Tesperer, le renvoi du mineur devant le tribunal
(1) Voir notre rapport sur Tann^e 1896, p. 17, 18, 19, 20.
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532 REVUE PHILANTHROPIQUE.
par voie de citation directe, ou son 61argissement sans instruc-
tion pr^alable; elle sera un bien, s'il en est vraiment ainsi;
mais d'un autre c6t6 quelques-unes des dispositions de cette ioi
rigoureusement appliqu^es aux mineurs semblent en d6saccord
avec leurs int^rfits et tout k fait au-dessus de leur comprehen-
sion.
Longtemps, avant m6me qu'il ne filt question de la Ioi
nouvelle, les mineurs, par un accord entre le Gomit6, le bar-
reau et les magistrats, ^taient pourvus d^s le d^but de Tinstruc-
tion d'un avocat d'offlce, presque toujours membre, soil du
Gomite, soit d'un des principaux patronages et ayant d^s lors
par la pratique des ceuvres la longue habitude de ces affaires
delicates qui demandent k 6tre envisag^es tout autrement que
les autres.
Suivant les excellentes regies, trac^es de main de maitre
sous ce titre : « Des relations du magistrat et du d^fenseur avec
les parents et les ceuvres », par M. le bfttonnier Cresson, vers
lequel vont aujourd'hui nos coeurs attrist^s de sa lointaine
absence et reconnaissants des services qu'il a rendus au Co-
mity, le jeune avocat se plaisait h 6tre Tallin du juge, et non
k se faire son contradicteur. Cette entente sur le terrain de la
charity rassurait Tenfant et le disposait k ^couter les conseils
bienveillants de ses deux protecleurs rarement en disaccord.
Aujourd'hui on pent craindre que la faQon imperative dont
la Ioi appelle I'avocat dans le cabinet du juge n'^veille dans
Tesprit de Tenfant une id6e de defiance, de discussion et de
resistance.
La reponse qu'il fait k la premiere question traduit tout de
suite son etonnement. Cette question imposee par la Ioi n'est
pas faite pour lui, elle depasse la poriee de son discemement.
C'est ainsi qu'une petite voleuse de douze ans, prise sur le fait,
k laquelle j'apprenais quelle avait le droit de ne rien declarer (i )
me disait en me regardant d'un oeil inquiet : << Pourquoi voulez-
vous done que je mente? Monsieur, on m'avait toujours dit
(1) Art. 3 de la Ioi du 9 d^cembre 1897. « Lors de la premidre companition, le
magistrat re^oit les declarations de Tinoulpd, aprds I'avoiraverti qu'il e$t libre de
ne pas en /aire, »
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LES TRAVAUX DU COMlTfe DE DEFENSE. 533
que c'6tail vilain de mentir. » J'eus quelque peine — peut-6tre
n'y ai-je pas rf^ussi — k lui faire comprendre que dans ma pa-
role il n'y avait ni un pi^ge ni un mauvais conseil.
La loi du 8 d^cembre devra 6tre suivie par le Comity avec
une attention toute particuli^re toutes les fois qu'elle sera
appiiqu^e aux enfants. Les observations recueiilies pourront
completer Texp^rience loyale qui se poursuit en ce moment,
avec un d^sir 6gal chez tons, de mettre dans la procedure la
plus grande somme possible de justice et de g^n^rosit^ (1).
Le souci de tout ce qui tend k perfectionner la procedure a
continue comme les ann^es pr^c^dentes k marcher de front avec
Tam^lioration de la condition mat^rielle des jeunes d^linquants.
Mes pr^c^dents rapports vous ont d6}k r^sum^ les nombreux
adoucissements apport^s au regime des postes de police, du
d^p6t, de la souricifere et des prisons.
Nous remercierons comme toujours le Conseil G^n^ral de la
Seine, Tadministration de FAssistance publique, ceux de leurs
membres qui assistent k nos stances de la force qu'ils ont
donn^e k nos reclamations toutes les fois qu'ils ont bien voulu
les appuyer. Des 6v6nements impr6vus viennent d'appeler au
dehors M. le pr^fet de police Charles Blanc, il edt d^sir^ par sa
presence, au moment oil il arrive ila Prefecture, nous montrer
que, pour lui, comme pour son Eminent pred^cesseur M. Lu-
pine (2), nos petits gavroches du pav^ de Paris, dont dix mille
ne sent m6me pas inscrits sur les registres de nos ^coles, aban-
donn^s, exposes aux dangers des rues, ne seront pas, parmi
ses administr^s, ceux aux souffrances. aux mis^res, aux perils
desquels il s'int^ressera le moins.
Cette annde, le Comity s'est aussi pr^occup^ d'am^liorer les
(1) Dans I'int^r^t des enfants, on pent craindre qu'en voulant leur appliquer
trop strictement I'obligation de la comparution devant un juge dans les vingt-
quatre heures de I'arrestation, le parquet n'^prouve quelque difficult^ h les tra-
duire deTant les magistrats specialises pour leur service ; mieux vaut pour un
mineur paraitre quelques heures plus tard devant un juge experiments que d'etre
amene sur Theure devant un juge sans experience de ces sortes d'affaires et les
dedaignant.
(2) Le Gomite n'oublte pas qu'il avait toujours pu compter sur Tappui bienfai-
sant de M. Lepine. 11 gardera le souvenir de la sympathie que son administra
tion, 81 edairee, aimait toujours h temoigner aux oBuvres d'assistance.
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534 KEVUE PHILANTHROPIQUE.
conditions d^fectueuses et vraiment inouies dans lesquelles se
faisait, avec tons les dangers de la promiscuity, bien que le mal
ait 6t6 signals depuis 1848 et 1855 par deux ministres dont
I'un ^tait M. Dufaure, le transferement des mineurs d'un lieu h
un autre, des postes au d6p6t, du d6p6t aux prisons, des pri-
sons au tribunal, h TAssistance publique, aux ^tablissements
de correction dans les d^partements.
Le sujet avait paru si important que M. le Conseiller k la
Gour de cassation Voisin a voulu le traiter lui-m6me. 11 nous a
montr^ dans des tableaux affligeants les enfants arr^t^s h. Paris,
transport's, s'ils sont mal v6tus (est-ce leur faute?) avec ce que
la police ramasse de plus vil dans les rues.
Nous avons tout lieu d'esp6rer que M. le pr'fet de police ne
tardera pas k prendre les mesures n'cessaires pour que la mi-
sfere sordide de la plupart de ces enfants ne les condamne pas
k cette Yoiture que Targot appelle cc le panier k salade » et oii
les plus mauvais contacts sont k redouter.
En province, c'est au ministre de I'lntdrieur que le Comit'
fait appel pour que le transport des jeunes detenus soit Tobjet
d'une plus grande attention. Le rapport de M. Voisin nous les
montre dirig's sur les maisons d'^ducation correctionnelie par
les m^mes voitures qui emportent les r'clusionnaires et les
formats .
Ecoulez ce dernier trait, dont m'informait, il y a quelque
temps le comif de Toulouse : Un enfant de quinze ans arrfeli
par ordre de justice dans une locality k une distance de vingl-
huit kilometres de la prison a di!i faire trois fois de suite, k pen
de jours d'intervalle, le trajet k pied entre deux gendarmes. Get
enfant n'^tait ni un pr^venu, ni un de ces jeunes condamn's
dont vous parlait ici m6me le President du Comit' de Marseille
qui des tribunaux du ressort d'Aix viennent en appel & la Gour
enchain's avec les autres prisonniers. Get enfant 6tait tout sim-
plement soumis k la correction patemelle. Quel souvenir k
jamais irritant Tautorit' paternelle servie de la sorte a-t-elle
dA laisser dans son esprit!
Au mois de juillet dernier, des d-marches ont 6t6 commen-
c6es avec succfes par votre bureau pour que Taccord se fasse le
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LES TRAVAUX DU COMITfe DE DEFENSE. 535
plus promptement possible entre Tadministration et les com-
pagnies de chemins de fer en vue d'am^liorer les conditions du
Iransftrement des enfants auxquels le minist^re des Travaux
publics parait appliquer de vieilles circulaires qui ne sont plus
de notre temps, sans tenir aucun compte de ce qui a ^t^ fait
dans ces demi^res ann^es pour la moralisation de Tenfance.
Nous sayons par une longue experience que Tappui de
M. le Directeur des services p6nitentiaires est toujours acquis
aux r^formes g^n^reuses. La Commission du budget a 6t6 par
lui saisie d'une demande de credit pour que les enfants soient
conduits k part sous la surveillance de gardiens sp^ciaux. II
ne s'etonnera done pas que nous ne cessions de lui recom-
mander la suite de ces r^formes. En le faifsant, le Comity res-
tera plus que jamais fiddle h sa noble mission, de m6me que
Tadministration poursuivra la sienne en rempla^ant de plus en
plus le gedlier par Tinstituteur.
La question du d^placement des jeunes detenus a pris cette
ann^e un int^rfet d'actualit^ tout particulier depuis qu'un quar-
tier de Nanterre est devenu la maison d'arr^t cellulaire des
filles privenues mineures de seize ans. C'est de cette maison,
ou plutdt de cette ville p^nitentiaire, qu'elles viennent passer
vingt-quatre heures k Paris, dans une cellule du d6p6t qui leur
sert d'h6tellerie, toutes les fois qu'elles doivent 6tre entendues
par le juge, ou visit6es par Tavocat, dont le zfele serait vrai-
ment mis k une trop rude 6preuve s'il devait lui-mfeme faire le
voyage. On lui am^ne sa cliente. La justice vraiment ne sau-
rait mieux faire.
Au moins faudrait-il que ces allies et venues fussent mieux
organis^es et mieux surveill^es qu'elles ne le sont. La dur6e
du voyage simple est de deux heures et demie environ. On n'a
pas pu encore assurer le retour dans la m6me journ^e et si
Tenfant est extraite le samedi, elle ne pent 6tre reconduite
que le mardi. Elle couche au D^pdt dans une cellule sans
doute bien tenue, mais de passage et beaucoup moins bien in-
stance que celle de Nanterre ; le plus grave, c'est que le voyage
se fait dans des voitures h compartiments dont les minces cloi-
sons et les portes k grillages laissent entendre par les enfants
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536 REVUE PHILANTHROPIQUE.
les propos les plus corrupteurs, que pour les pervertir — on ap-
pelle cela « les d^saler » — se plaisent k ^changer les lilies
soumises, les adultes, r^clam6es par la police des moeurs, les
filles en correction patemelle, que ces voitures de honte trans-
portent en m^me temps, sans qu'il y ait pendant ce long trajet
d*autre garde que celle d'un agent de la prefecture.
Faut-il s'etonner que les d^vou^es surveillantes de Nanterre
aient souvent Toccasion de remarquer que les d^placements
imposes aux enfants dans de telles conditions exercent sur elles
une influence fdcheuse qui persiste pendant plusieurs jours (1).
Gependant vous avez toujours pens^ que ces inconv^nients
— on ne saurait les nier — sont encore moins k craindre, tel-
lement le mal ^tait grand, que la promiscuity permanente dont
les enfants avaient eu k soufiFrir dans leurs anciennes prisons.
Jetez un regard en arri^re, reportez vos souvenirs i ce
temps, si proche encore, oil les petites filles 6taient entass^es
dans les vieux bfttiments de la Conciergerie, d'ou elles ne sor-
taient que pour se perdre davantage dans certains asiles qui
avaient usurps le beau nom de Patronage et dans cet 6tablisse-
ment qui, en voulant 6tre un module, a attache au nom de « la
Fouilleuse » et k Tid^e m^me de T^ducation correctionnelle, le
souvenir encore vivant d'exp6riences pour le moins impru-
denies.
Sans remonter si loin, il suffit de se rappeler en dernier
lieu combien 6tait insuffisante Tinstallation improvisie pour
ces jeunes filles dans Tun des b&timents de Saint-Lazare et pour
reconnaitre que le Comity a obtenu un r^el progrfes le jour oil
elles furent envoy^es k Nanterre dans des chambrettes dont
ring^nieuse disposition enlfeve au regime cellulaire ce qu*il au-
rait de trop dur et lui laisse son action moralisatrice.
Depuis Touverlure de cequartier cellulaire, le 21 d^cembre
1896 jusqu'au 1*' d^cembre 1897, 215 jeunes filles y ont 616
mises, sous mandat de d^pdt, sur lesquelles 115 ^taient ma-
lades par suite de leur mauvaise vie.
(1) Sur le rapport de M. Voisin, le Gomit6 a ^mis le vcbu suivant le 5 mai
1897 : o Qu*& Paris une maison d*arrit ceUulaire aoit idifUe h proximiU du Palais
de justice et exclusivement riservie aux mineurs de seize ans, filles et gatxons. •
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r
LES TRAVAUX DU GOMlTfe DE DEFENSE. 537
Vos r6clamations en faveur de ces enfaats ont obtenu enfin
que les soins n^cessaires puissenl lour 6tre donnds h Nanterre
mftme dans une infirmerie cellulaire parfaitement install^e,
sous la direction d*un m^decin (1). Gr&ce k cette rdforme, les
jeunes pr^venues, quelque soil leur ^tat de sant6, peuvent tout
de suite 6tre envoy^es en cellule par le mandat de d^pdt du
juge d'iilstruction, au lieu de voir leur s^jour se prolonger a
rinfirmerie sp^ciale de Saint-Lazare oil souvent elles ^taient
conserv6es comme auxiliaires de service (2), etoii leur morality
achevait de se d^truire sous la deplorable influence du regime
en commun. Aujourd'hui Toeuvre de la gu^rison morale dans
la cellule marche de front avec Toeuvre de la gti6rison corpo-
relle; elles se prfetent un mutuel appui. Ce progrfes obtenu au
profit des mineures de seize ans poursuivies judiciairement sera
peut-6tre un point de depart pour d'autres r^formes.
Qui sait si un jour le regime du traitement isol6 ne viendra
pas remplacer pour toutes les femmes que la police des moeurs
consigne i Saint-Lazare, sans que la justice ait k sen occuper,
ces d^plorables agglomerations oil le vice se propage en liberty
et oil la prostitution est cultiv^e plutdt que combattue comme
le piredes^fleaux.
II est triste de penser qu'un Comit6 qui a pris pour r^gle de
se consacrer exclusivement k la protection des enfants de moins
de seize ans, ait renconlr^ tout d*abord Thorrible prostitution
parmi les dangers dont ils sont constamment menaces. Nous
ne pouvions, sans aller au delft de notre programme, soulever
la question de savoir si c/est une bonne manifere de d^fendre la
morale que de mettre les femmes perdues hors la loi, le Comity
pense tout au moins qu'il lui est permis de dire qu'une fiUette
de moins de seize ans ne saurait, sans barbarie, ^tre appel^e
une femme perdue ; vous savez dejft par quels moyens I6gaux
il a cherche ft la mettre sous la protection du droit commun et
y a r6u8si dans une certaine mesure.
L'arrfit souvent cit6 de la Cour d'appel de Paris du 10 mars
(1) M. le docteur Laugier.
(2) Sous le nom de soubrettes, de cahieties (tenant le cahier de visiles du
m^decin).
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538 REVUE PHILAxNTHROPlQUE.
1893, en rappelant que la prostitution ne saurait jamais 6tre
consid^r^e comme un moyen d'existence avouable, au sens de
Tarticle 270 du Code p^nal, dans sa definition du vagabondage,
a fonde une jurisprudence que vous avez heureusement pro-
voqu^e et dont la consequence a 6U de faire consid^rer comme
vagabondes les petites prostitutes de moins de seize ans.
Ainsi ont pu 6tre defer^es chaque jour k la justice'de v^ri-
tables enfants, trainant leur vie de debauche de garnis en
gamis, avec la complicity des logeurs rendus, gr&ce k vous>
plus souvent responsables qu'autrefois de leur strange faQon
d'entendre la liberty du commerce; les enfants victimes de la
debauche v6nale ontete mieux protegees h Taidede cette nou-
velle pratique appliquant Tarticle 66 du Code p^nal pour
remplacer Tinefficace r6glementation de la police des mceurs
par rinfluence prolongde et rfiformatrice de Teducation correc-
tionnelle.
Le Comit6, cette annde, s*est pr^occup^ d'une autre faQon
encore de garantir la morality des mineures autour desquelles
les perils, tout d^nonc^s qu'ils soient, ne font que s'accroitre
davantage.
Les plus optimistes sont bien obliges de constater que les
attentats contre les mceurs vont en progression et que Fenfant,
si bien prepare au mal par la licence des rues, n'est pas assez
protege contre les raffinements du vice.
L'un de vos confreres, M. Paul Nourrisson, frappe de la
gravite du mal et s'inspirant des avertiss^ments de la statis-
tique elle-mftme, a bien voulu se charger d'etudier les reformes
& apporter au Code penal pour fortifier la repression des delits
et des crimes contre la moralite des mineurs de seize ans.
Ses conclusions, qui vont etre examinees prochainement,
consistent k soumettre k la commission de revision du Code
penal plusieurs propositions qui tendent principalement k pro-
longer de treize k seize ans Tftge oh le consentement de Ten-
fant ne fera plus disparaitre la criminalite de Facte dont il
aura ete victime, k mieux assurer la repression du deiit d'exci-
tation k la debauche, si mal defini par une loi qui semble s'etre
trop preoccupee d'epai^ner certains coupables, et la repression
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LES TRAVAUX DU COMITfi DE D6FEx\SE. 539
du crime de d^toumement de mineurs presque toujours impuni
par le jury.
Le rapport de M. Paul Nourrisson soulfeve aussi une ques-
tion d'une haute port6e qu'il a d^jh trait^e avec succ^s dans
d'autres enceintes (1).
C'est la question de savoir si la justice ne. trouverait pas un
auxiliaire des plus pr6cieux dans Taction des particuliers, k
Texemple d'autres pays, comme TAngleterre, oix la magistra-
ture k coup sAr n'est ni moins honor^e ni moins forte qu'en
France.
N*est-ce pas surtout dansles efforts faitsenfaveur desjeunes
fiUes mineures de seize ans que Futility de ce concours des
CBUvres privies se manifeste de la fa^on la plus 6vidente.
L'id^e d4nt6resser la justice k la protection de ces malheu-
reuses, qui paraissent ^tre vou^es k Finfamie, semblait une
entreprise bien hasard^e.
Demandez-vous pourquoi Tid^e de leur sauvetage est main-
tenant plus facilement accept6e, pourquoi un souffle de piti6 et
de redemption a pass^sur ces ftmes d6jk pr6tes pour la marque
officielle de la degradation.
Les magistrats m^l^d journellement k ces mis^res vous r^-
pondront: c'est qu'il s'est trouv^ dans les murs des prisons et
k leurs portes des femmes admirables, religieuses et laiques,
sans distinction de cultes, sceurs des prisons, membres des Pa-
tronages, toutes unies pour tendre la main k ces infortun^es,
pour leur apprendre qu'il n'est pas d'avilissement si profond,
dont on ne puisse se relever. Dans leurs prisons oh elles les vi-
sitaient, dans les asiles oxx elles les recevaient, elles leur mon-
traient Tesp^rance et la possibility du relfevement.
« Si tu es lassie de ce honteux metier oil t'a pouss^e la
brutality de Thomme, oh Tignorance te retient, oil Thabitude
t'enchaine, oil le m^pris te clone, sache qu'il est ime maison
tranquille, solitaire et bienfaisante oil tu n'auras qn'k frapper
pour que Ton t'ouvre, ainsi qu'il est promis dans TEvangile, oil
(1) De la participation des particuliers it la poursuitedes crimes et des dilits,
ouTrage couroim^ par TAcad^mie des sciences morales et politiques (Revue Pi-
nitentiaire de mars 1896).
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540 REVUE PHILANTHROPIQUE.
ToQ ne te demandera pas de suite le repentir, oil I'on ne te de-
mandera que le regret et le d^gotlt de ce pass^ dont il depend
de loi de te s^parer en une minute. »
Ces lignes 6taient dcrites par Alexandre Dumas, il y a long-
temps d6}k (1) k propos de Tasile Sain te- Anne (2), pour les
pauvres fiUes repienties ; elles s'appliquent admii*ablement k
toutes ces oeuvres de mis^ricorde que chaque jour voit naitre
cette terre Frangaise, oil la charity se relfeve plus forte de ses
^preuves et de ses catastrophes.
N'est-ce pas cette ann^e encore que, grftce aux magnifiques
lib^ralit^s de dames charitables, dont les enfants de Nanterre
et de Saint-Lazare connaissent toute la bont^, il s'est fond^ k
Clichy, sous le titre gracieux de « Notre-Dame du Bon Con-
seil » (2\ un asile contenant soixante lits install^s dans les
conditions les plus satisfaisantes qu'on puisse imaginer pour la
vie morale et mat^rielle des jeunes filles dont la justice peut
avoir k s'occuper.
La creation de cette maison, d6jk reconnue d'utilit^ pu-
blique, s'ajoutant aux oeuvres anciennes, m^ritait bien d'etre
mentionn^e (3), k propos des questions auxquelles le comity
porte le plus d'int^rdt et dont elle peut h&ter la solution.
Par cet expos6 pour lequel j'ai dA demander une trop
longue attention, les membres du comity qui n'ont pas suivi
dfes le premier jour la marche de ses travaux ont pu voir de
quelle faQon il a toujours compris ce qu'il se plait k appeler
« la defense des enfants traduits en justice ».
Dans le langage ordinaire « defense » veut dire « effort
pour combattreune accusation » etil semble que Tacquittement
soit le seul but qu'elle ait k poursuivre.
Pour le Comity, la defense de Tenfant devant la justice,
c'est Teffort fait pour soumettre ses mauvais instincts au frein
qui leur est n^cessaire, c'est la recherche ^clair^e, c'est Tappli-
(1) Les Madeleines repenties, Alexandre Dumas fils, broch. de 35 pages, chex
Dentu, 1869.
(2) A Ch&tiUon, Paris.
(3) OEavre de preservation et de rehabilitation des jeunes fllies de quinze 4
vingt-cinq ans, boulevard de Lorraine, h Clichy.
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LES TRAVAUX DU COMITfe DE DEFENSE. 541
cation ferme, prompte et prolong6e des mesures que reclame
son ^tat moral.
On se tromperait done sur les intentions du Comit6 si on
voyait en lui un adversaire du systftme consacr^ par Tarticle 66
du Code p^nal, de Tenvoi en correction, tel que i'a perfeclionn^
la loi de 1850. Eile en a fait par la faculty de la liberty condi-
tionnelle un veritable instrument de preservation et de tutelle
prolong^e jusqu'^ la majority.
Ce que le Comity combattra toujours avec ^nergie c'est la
peine d*emprisonnement appliqu^e au mineur de seize ans.
II faut des maisons d'^ducation correctionnelle dans cer-
tains cas, tout le monde le reconnait, TAssistance publique elle-
m^me.
En th^orie, ilest facile de prendre parti, soil pour le systfeme
hospitaller, soit pour le syst^me p^nitentiaire ; quand on
passe k la pratique, on s'aperQoit bien vite que si les syst^mes
sont difiF6rents, les enfants sont les m^mes, et que quoi qu'on
fasseil y en aura toujours un certain nombre pour lesquels le
regime de la liberty, de Tindulgence prolong^e et du laissez
faire sera un danger.
G'est pour cela pr^cis^ment qu'on ne saurait donner assez
de temps et de reflexion aux a£Eaires qui ont pour objet de
choisir le traitement, preservation, r^forme ou correction, qui
convient h chaque cat^gorie de jeunes delinquants.
II y en a auxquels le regime de la correction qui ne doit
jamais exclure d'ailleurs ni la douceur, ni Taction morale est
indispensable. Les partisans les plus convaincus, comme je le
suis, des mesures de preservations savent tr^s bien qu'elles
ont souvent besoin d'etre compietees par des procedes plus
severes et qu'il y a bien des moralement abandonnes, frferes
jumeaux des pupilles de Tadministration penitentiaire , dont
la place est dans la maison de reforme ou dans les quartiers
de correction paternelle que nos colonies publiques ou privees
mettent k la disposition de T Assistance publique.
On se souvient que quand TAssistance publique a bien
voulu, et on ne saurait assez Ten remercier, mettre son hospice
de la rue Denfert-Rochereau k la disposition des juges d'in-
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542 REVUE PHILANTHROPIQUE.
str action pour qu'ils puissent y envoyer dans un asile tempo-
poraire des enfants paraissant dignes d'une compassion
particulifere, il semblait aux optimistes que les maisons de cor-
rection allaient devenir inutiles, que pour assurer le sort d*un
enfant, il suffirait au magistrate pour peu qu'ii ftlt un peu
press^ de mettre sa signature au bas d*un ordre k peine motive
d'envoi k Thospice (1).
Qu'est-il arrive bientdt? C*est que TAssistance s'est vue d^-
bord^e et d^tourn^e de sa mission. Les m^decins des enfants se
sont plaints qu'on empoisonn&t leurs salles par des fiUes faites
pour les infirmeries de Saint-Lazare et de Nanterre. Des na-
tures indisciplin^es et vicieuses ont souvent trouv6 trop de li-
berty dans les douceurs d'un r^glement hospitaller. L'Assistance
se sentant d^sarm^e n'a eu d'autres ressources que de se d^-
faire de ces enfants, en les renvoyant au juge, et elle a eu bien
raison, avec des notes tellement mauvaises que c'^tait par elles,
en fin de compte, que les tribunaux se d^terminaient k Tenvoi
en correction.
Le comity n'a pas de parti pris. Sa m^thode est celle de
Tobservation et, tout en rendant hommage, en faisant une
large place aux id^es g6n^reuses de T Assistance, si bien repre-
sentee dans ses rangs et k ses belles oeuvres, il s'effraierait
justement au point de vue de Taccroissement de la criminality,
sHl voyait la Justice, par une sorte d'enervement de la repres-
sion, ne plus comprendre tout le profit que I'enfant pent
tirer de I'education correctionnelle, sagement combin^e avec
la liberte conditionnelle et le patronage; malgre ces echecs
auxquels aucune (Buvre n'a pu echapper, elle arrive cependani
k sauver du delit et du crime les deux tiers des enfants qu'on
lui confie, bien que dejft trop pervertis ; ce sont souvent des
miracles qu'on lui demande d'accomplir.
Le comite fera ceuvre utile en s'eflforQant de pr^venir cer-
taines preventions qui viennent d'une connaissance trop su-
(1) II serait k d^sirer que dans le bulletin d'envol, dont les formules ont ^t6
arr^t^es entre la justice et Tassistance, te juge fasse toujours bien connaltre
la situation morale et famiiiale de Tenfant et ses titres particuUers h une mesurc
de faveur.
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LES TRAVAUX DU GOMlTfe DE DEFENSE. 543
perAcielle de I'organisation actuelle des colonies correctionnelles
et du bien qui s'y fait, gr&ce k I'admirable d^vouement des
hommes g^n^reux et modestes qui y mettent toute leur &me,
en mSme temps qu'il s'eiforcera d'appuyer tout ce qui serait de
nature h am6liorer encore ces ^tablissements et k leur ramener
la coniiance n^cessaire et m^rit^e de la justice.
II y a au fond de certaines preventions, mftme dans les mi-
lieux judiciaires, une question de mot qui a son importance. Ce
qui trouble le plus les esprits, c'est que ce mot matson de cor-
rection dit aujourd'hui autre chose que ce qu'il devrait signifier
pour le pnblic, les families et la justice.
On le sent si bien que I'administration p^nitentiaire elle-
m6me doni^e k ses ^tablissements le titre, plus heureux et plus
vrai, de colonies d'^ducation p^nitentiaire, maistantque Tar-
tide 6 du Code P(§nal n'aura pas 6t6 change, le litre I6gal de
maison de correction restera dans les esprits et entretiendra la
defaveur.
EUe existe, il faut le reconnaitre. On est arrive k r6pandre
cette id^e funeste qu'il vaut mi^ux jeter un enfant dans la rue,
le rendre k une famille indigne, le confier k Tun de ces asiles
dont les moyens de sauvetage sont quelquefois les d^pdts de
mendicity ou les asiles de nuit, que tout vaut mieux enfin que
de le mettre dans une maison de correction.
II suffirait peut-6tre d*un changement de mot, d'une termi-
nologie plus exacte pour ^clairer le public.
En r6alit6, si Ton r^fl^chit, qu'est-ce que le syst^me de la
correction ? C'est la mise en tutelle de Tenfant, c'est le droit de
garde retir6 aux parents, sans aller jusqu'i cette d^ch^ance qui
semble souvent briser la famille elle-mfeme; c^est le pouvoir
d'^ducation transporte de mains indignes ou impuissantes k
une administration ^clair^e et ferme.
Supposons que le jugement qui intervient pour le jeuned^-
linquant fasse bien comprendre cela, rassure au lieu d'eifrayer,
que la loi permette au tribunal, jugeant peut-6tre sous une
forme plus paternelle et moins publique, de remplacer les mots
x< envoi en correction » par les mots : « placement sous la tu-
telle de VtXdX », charge d'assigner k 1 enfant parmi des 6tablis-
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544 REVUE PHILANTHROPIQUE.
sements de categoric vari^e celui qui conviendrait le mieux k
sa situation, on ne s'indignerait plus, on ne crierait plus & la
barbarie; lejuge n*aurait plus le public contre lui.
Les mauvaises definitions entretiennent des erreurs, et ces
erreurs devenant des l^gendes finissent par impressionner les
magistrats eux-m^mes, quand ils n'ont pas le temps ou Tocca-
sion de se faire une opinion par T^tude directe des choses.
G'est une des causes des trop nombreuses mises en liberty
des mineurs arr^t^s.
Je voyais dernidrement dans une statistique partielle que
dans un cabinet d'instruction sur 102 enfants traduits, 6 seule-
ment avaient 6t6 envoyds en correction. La statistique de la
Petite Roquette constate les m6mes tendances. L'ann^e derni^re
sur 1 100 enfants mis sous mandat de dep6t ,216 seulement ont
4i6 soumis k T^ducation correctionnelle . Cette ann^e, sur
859 places sous mandat, 123 ont 616 mis en correction.
En deux ann^es, 1 603 enfants ont ^t^ Tobjet d'ordonnance
de non-lieu. Si on ajoute k ce nombre d6]k effrayant ceux que
le petit Parquet met si facilement en liberty sur une premiere
impression, on est bien oblige de convenir qu'il ne reste plus
gu^re pour T^ducation correctionnelle et pour les patronages que
des r^sidus d6testables, que des enfants si profond<^ment per-
vertis qu*il devient bien difficile de les amender; de lirei6va-
tion du chiflFre de la r^cidive.
On a le droit de s'inqui6ter quand on voit quele remede mis
k la disposition des magistrats pour combattre le ddveloppe-
ment de la criminality ^veille en eux des defiances qui les
emp^chent de Tappliquer k temps.
En m6me temps que du Comity partira sans cesse un appel
k la magistrature pour qu'elle use avec la m^me sollicitude,
mais moins de faiblesse, de son droit d^imposer T^ducation cor-
rectionnelle, il en partira aussi des voeux pour que les m6-
thodes de cette Education soient sans cesse perfectionn^es.
Tel avail 6t6 d^ji le but du projet de revision de la loi
de 1850 prepare en 1871 par deux membres de TAssembl^e na-
tionale, MM. d'Haussonville et Voisin,et en 1879 par M. Th^o-
phile Roussel.
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LES TRAVAUX DU COMlTfi DE DEFENSE. 545
Les questions qui, h cette 6poque, paraissaient Ji la veille
d*6tre r^solues et qui Tauraient ^t^ sans les ^v^nements poli-
tiquesy h la satisfaction des amis les plus ^clair^s de Tenfance^
ont souvent, depuis, rencontr^ Tappui du Comit6, il a t&chd de-
les faire avancer.
II ne voudra pas se s^parer sans en avoir r6uni les conclu-
sions derni^res de ses travaux dans une proposition d'ensemble
en vue de donner au Code p^nal et k la belle loi de 1850 tout ce-
qui peutleur manquer encore pour que la justice, de plus en plus-
p^n^tr^e de sa responsabilit^ vis-Ji-vis dujeune d^linquant,
n'^prouve aucune h^itation k se servir des moyens l^gaux mis-
Ji sa disposition pour le prot^ger ou Tarracherau mal.
Un grand service aura 6t6 rendu au pays.
ADOLPHE GUILLOT.
RSTUB PHiLAirrHRonQUE. — n. 35
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HISTOIRE DTN AVEUGLE
Les hommes sont aveugles el sur le bien
et sur le mal.
F^NELOX.
L'aveuglc dont je veux center ici Thistoire n*est pas un
inconnu pour vous; ne Tavez-vous pas vu souvent assis sous
le porche de T^glise ou, Ik-bas, sur le pont, roulant sous ses
paupi^res rougies ses yeux blancs inutiles et faisant sonner un
sou de cuivre dans un gobelet de fer-blanc? Ne I'avez-vous pas
maintes fois rencontrd, conduit par un enfant ennuy^ ou par
une bonne femme indiff^rente — ou simplement par un chien
qui tire sur la corde tendue au bout de son bras gauche allonge,
— marchant a petits pas trainants, le corps en arri^re, la IMe
haute et tMant de son biton les murs et les trottoirs?
C'est de cet aveugle-la que je veux parler, et si je ne dis
d'abord ni son nom ni quel pays Ta vu naitre, c'est que ces
renseignements, pour utiles qu'ils puissent paraitre, seront
mieux k leur place un peu plus loin et que, par 6gard pour
Topinion de Toussenel, qui affirmait que ce qu'il y a de meilleur
chez rhomme c'est le chien, je veux avant tout dire quelques
mots de cecompagnon de notre aveugle.
Ceux d'enlre nous qui ont commence de descendre la pcnte
des ann^es se souviennent sans doute que c'^tait autrefois un
caniche blanc, d*une candour un peu ternie, qui excellait i
tenir dans sa gueule une petite sdbille qu'il tendait aux passants.
Mais la mode a fini des caniches blancs (car il y a une mode
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r
HISTOIRE DUN AVEUGLE. 547
pour les chiens commc pour les fourrures); les dames — qui
out toujours aim6 les b6tes — out successivement favoris6 de
leurs tendresses les kings-charles aux longues oreilles soyeuses,
les frileuses levrettes en paletot, les havaaais de laine blanche
moussue, puis les caniches noirs tondus en lion avec des man-
chettes de poil aux pattes et iila queue et des bracelels d'argent
brillant. Aujourd^hui le caniche noir lui-m6me n'est plus de
mise et c'est — dit-on — le chien ^cossais h longs poils, h
museau de renard avec unc queue en panache qui tient toule
la place dans les caprices f^minins pour la race canine.
Le pauvre aveugle ne peut suivre ces modes qui ne laissent
pas d'etre dispendieuses et le chien qui le guide est mainte-
nant d'une espfece quelconque, anonyme, croisde au hasard
des rencontres, offrant au naturaliste comme un compendium
de loutes les races connues.
Telqu'il est, c'est un brave homme de chien, compatissant
aux souflFrances des malheureux avec lesquels il vit, et c'est
assez qu'il ait la bont^ sans la noblesse.
Le d^partement ou est n6 notre aveugle, il y aura bient6t
soixante ans, est naturellement un de nos plus beaux ddparte-
ments et ressemble pourlant h tons les autres. Les habitants
ont une raison native d'en 6tre fiers; je ne songe pas h les en
bl&mer. — On y parle, parmi eux, de charity, de bienfaisance,
i^assistancey voire de solidarite, et il n'est pas de discours un
peu officiel, prononc^ par un personnage 6lu, fiit-ce au conseil
municipal de la plus petite commune, qui ne fasse cliqueter
ces mots dans des phrases creuses, comme un grain de sable
dans un grelot, en guise d'^loquence.
On y est individuellement secourable au prochain; pour-
tant la collectivity laisse les hdpitaux et hospices qui soignent
les malades ou recueillent les vieillards dans un (Jtal de d61a-
brement et de p^nurie regrettables et, pour les aveugles, le
conseil gdn6ral a imaging de voter chaque annde unc somme
fixe qui sort h entretenir autant d'enfants ou d'adultes atteints
de c^cit^ que la chose est possible sans d^passer les credits. Si
cela ne peut permeltre de secourir que deux ou trois aveugles,
sur cinq, il n'importe gufere. Quand on a fait cette assistance
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548 REVUE PHILANTHROPIQUE.
incomplete mais k bon march^, on se tient pour satisCait.
Je le serais aussi bien volontiers si on voulait seulement,
en m6me temps, supprimer des discours grelottants dont je
parlais tout k Fheure, le mot de solidarity qui vraiment jure un
peu trop avec les faits.
Et comme il n'est pas inutile de se montrer ^clair^, mdme
en parlant des aveugles, il me parait juste de mentionner ici
qu'en 1885, d'apr^s une enqufite faite par les soins du minis-
tfere de I'lnt^rieur sur les d^penses publiques d'assistance^
rfitat donnait pour les aveugles 495 000 francs environ, savoir :
315 000 pourThospice des Quinze-Vingts et 180 000 pour Tlnsti-
tution nationale des Jeunes Aveugles ; la mftme ann^e les d6-
penses des d^partements s'6levaienl de ce chef i 187 086 francs
et les d^penses consenties par les communes k 222 fr. 50.
Mais ces dfipenses, qu'elles soient faites par ]'£tat, les
d^partements ou les communes, s'appliquent k la fois, dans
leur ensemble, k Tassistance des aveugles de tons les Ages, sauf
liceux k qui la vieillesse ouvre les portes des hospices; et si
elles sont insuffisantes pour tons, dans une proportion difficile
k dtablir, on pent dire que certainement elles sont insuffisantes
de plus du dixi^me pour les seuls aveugles do Tdge scolaire.
En effet, on comptail alors 1053 aveugles de V&ge scolaire et si
TEtat en entretenait, avec les concours d^partementaux, 236 k
rinstitution des jeunes aveugles, il enrestait 817quinepouvaient
profiter de cetenseignementn'ayant,pour une part, c'est-Ji-dire
pour 697 d'entre eux, que Tenseignement d'^coles privies mal
outill^es et tout k fait insuffisantes. Enfin, 120enfants aveugles
ne recevaient aucun enseignement malgr6 le voeu formel de
la loi.
Au m6me moment, en 1885, onze d^partements ne votaient
aucun credit en faveurdes aveugles! Cela ne prouve pas que
c'6taient n^cessairement des d^partements clairvoyants.
Mais s'il en 6tait ainsi en 1885, quelle ^tait, ily a cinquante
ou soixante ans, la situation des pauvres aveugles? Quelles
d^penses occasionnaienl-ils k notre pays? Nous ne le savons
gu^re ; et pourtant, si nous sommes sArs que les d^partements
et les communes d^pensaient pour eux moins qu*ils font au-
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HISTOIRE D'UN AVEUGLE. 549
jourd'hui, nous sommes plus siirs encore que les aveugles
n'^taient pas moins nombreux. Certainement, au contraire, les
aveugles dits de naissance^ c'est-li-dire ceux qui donnent une
proportion de 30 ou 40 p. 100 du total T^taient bien davan-
tage; Tophtalmie purulente des nouveau-n^s faisait plus de
victimes en I'absence des moyens antiseptiques ou des proc^d^s
aseptiques sipeuconnus aujourd'hui encore et si mal appliques.
C'est 4 cette ophtalmie purulente que notre aveugle dut sa
c^it^.
Sa mfere 6tait une pauvre femme de la campagne, enfant
trouv6e, 6lev6e chez des paysans et venue au chef-lieu pour se
placer. Elle y trouva la banale aventure de beaucoup de pauvres
filles : la seduction par la facile et fallacieuse promesse du
manage, Tabandon l&che et cruel, la grossesse d'abord cach^e,
puis apparente, le renvoi par des maitres qui trouvaient I3i une
occasion de manifester une farouche vertu personnelle par la
condamnation delafauted'autrui que peut-£tre lis avaient aid^
k commettre, — sinon dans cette circonstance au moins dans
quelque autre analogue, — enfin le recours ultime h. Thospice.
L'hospice de la ville ou cela se passait, et dont la ville^tait
fiftre, 6tait un b&timent tr^s vieux, un ancien convent appro-
pri6 vaille que vaille Ji son usage actuel, oh Ton entassait p6le-
m6le, dans les m^mes salles, vieillards et malades, adultes et
enfants, fi^vreux et blesses, contagieux et non contagieux,
Seules les filles du dispensaire ^taient tenues k part dans un
local d^labr^ prfts des communs et des 6curies; et, tout Jt cdt^,
on pla^ait les femmes en couches dans une grande chambre
qu'on appelait la g^sine.
On disait la gisine comme on aurait ditla porcherie; c'6tait
un lieu r^prouv^, oil les religieuses n'allaient pas, conform^-
ment aux termes de leur contrat (1), et qui ^tait confix k une
vieille femme malpropre, vfitue de loques sordides d'oii s'exha-
lait une odeur complexe de tabac, de crasse et de mauvaise
(1) La plupart des contrats passes par des congregations avec les commissions
hospitalidres contiennent la clause suivante :
« Les religieuses ne' donneront leurs soins ni aux filles de mauvaise vie, ni
anx femmes atteintes du mal qui en procMe, ni aux m^res dans leurs accouche-
ments. •
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550 REVUE PHILANTHROPIQUE.
eau-de-vie. C*(^tait elle qui devait appeler la sage-femme au
moment d^cisif etqui se passait habituellement de son concours
dans les cas les plus simples ; on avail confiance en sa pratique
qu'on prenait pour de la science k cause de son anciennet^; et
si le local oil elle exercait son metier voyait mourir tant de
pauvres m^res de fi^vre puerpdrale, c'est qu'on ^tait pcu accou-
tumd alors aux soinsde propret^ et d'antisepsie.Neperdait-on
pas, k Paris m£me, avant les r^formes dues k Tarnier et k ses
^l^ves, 10 et parfois 20 p. 100 des accouch^es de la Matemit6;
c'est une ^poque trfes voisine et qui parait lointaine aujourd'hui
que des progr^s r6els ont 616 faits et que tant de vies ont pu 6tre
^pargndes. II y a encore, il est vrai, des ^tablissements ou les
choses ne vont gu^re mieux que jadis, mais si le nombre s'en
fait constamment plus rare surtout depuis une quinzaine d'an-
n^es, que de morts encore — morts inutileset injustes — dont
on pourrait aujourd'hui m6me rendre responsables les com-
missions administratives routini^res et mal ^clair^es, ainsi que
le personnel insuffisant et incompetent qu'elles choisissent!
La pauvre mfere qui accoucha IJi de notre triste h^ros fut
^pargnde par I'infection puerp^rale : c'^tait une chance. Son
enfant, moins heureux, eut une ophtalmic; et comme, avant
de pr6venir le m^decin, on usa de divers remfedes conseill^s par
rinfirmi^re, qu'on lui mit dans les yeux du lait ou d'aulres
liquides organiques rdput^s souverains, il arriva que le m^de-
cin vint trop tard et que Tenfant avail les deux yeux perdus dfes
les premiers jours de sa naissance. II ne devait jamais voir ni
le ciel bleu ensoleill^, ni cette autre clart^ douce el chaude
qu'est le sourire de la m^re pench6e sur le berceau et, quand
la pauvre femme Temporta dans ses bras et qu'il eut quitti
rhOpital, personne n'y sentit de remords : ni la malrone qui
continua de vaquer au dispensaire el k la g^sine, ni radmini-
strationqui Temployail, ni le m^decin qui n'avait os6 dire aux
administrateurs Thorreur de ce crime dont ils dtaienl tons les
inconscients complices.
La malhcureuse fille m^re abandonn^e s*en allail avec, dans
ses poches, ses maigres ^cononomies de servante el, dans ses
bras, le b6b6 aveugle. Elle aurait pu Tabandonner, le mettre au
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HISTOIRE D'UN AVEUGLE. 551^
tour oil elle avail ^t^ d^pos^e elle-m6me, mais il se trouva qu'elle
avail le cceur haul plac6 cl que, iaissant pour compte, au mi-
sjSrable qui Tavait s^duitc, son ignoble I4chet6, elle eut le cou-
rage el le sentiment de la dignity humaine. L'abandonner I Elle
n'y pensa m^me pas; il semblait que Fintirmit^ du mignonpetil
6lre vagissant le lui rendil plus cher et qu'elle exit trouv6 dans
le devoir accepts le rachat sublime de la faute.
Elle quitla le pays, tr^s vite, el s'en ful chercher fortune
en une autre vilie plus grande et dloign^e.
Elle plaQa pour quelque argent son enfant en nourrice chez
une paysanne el se mil elle-m6me en service. La pens^e de son
enfant loujours pr^sente, elle ful une domeslique infatigable,
d^vou^e, soumise, supporlanl lout, acceptant tout : fatigues et
rebuffades, durs travaux et dures paroles; si bien qu'on finil
par Taimer pour son bon caract^re el son bon vouloir el que
de longues ann^es elle resta dans la place ou elle dtail entree,
chez des mallres devenus indulgents k qui elle put dire son
secret el qui, d^s que Tenfant eut cinq ou six ans, Taidferent k
le placer dans une pension locale qui recevail quelques pelils
aveugles moyennant un prix modique et une subvention du
d^partement.
Elle se trouvait heureuse ainsi; heureuse de pouvoir de
temps en temps courir embrasser son Ir^sor, de constaler que,
s'il ne la voyait pas, il entcndait sa voix, devinait sa presence,
cherchait avec ses petites mains k reconnaitre les trails de son
visage. Elle goi]ltait aupr^s de son fils les joies malemelles les
plus inlenses et les plus pures, les joies consolantes el fiferes,
faites deson d^vouement et de son abnegation.
C'esl qu'il dlait vraiment joli le petit aveugle avec ses
bonnes joues rouges jet ses Ifevres roses el ses cheveux tout
blonds qui frisaienl. Et si habile avec cela ! Et sachant si bien
diriger ses pas h^sitants dans la cour et la maison paysanne oi
il vivait, puis dans Tficole dont il 6tail devenu T^lfeve. Et il
avail de si gentils rires et de telles gaieWs quand venait la
maman ! Ne connaissanl rien, il ne regrettait rien, franchement
heureux des caresses du soleil qui chauffaient son visage et des
baisers maternels qui r^chauffaient doucemenl son coeur.
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552 REVUE PHILANTHROPIQUE.
II apprit k cette ^cole les ^l^ments de la lecture en relief;
mais rien de plus, et la mhre comprit bientdt que Tavenir res*
terait inqui^tant et sombre si les connaissances de Tenfant ne
s'^tendaient pas au delii du cercle ^troit oh il se mouvait.
Cette pauvre illettr^e, qui savait lire k peine, 6coutait et
retenait toutes les histoires d'aveugles qu'elle enlendait conter ;
apprenant par les bribes recueillies des conversations qu'il y
tivait des aveugles qui savaient des metiers, qui jouaient de
Torgue ou d'autres instruments de musique. II y en avait un
dans la ville qui accordait les pianos et qui venait chez ses
mattres;elle le questionna;elle apprit qu'il y avait k Paris une
institution nationale pour les aveugles; elle osa en parler It son
maiire et — voyez k quoi tiennent les choses, — il se trouva
que son mattre venait d'fetre nomm^ conseiller g^n^ral aux lieu
et place d'un homme, d'ailleurs honndte et distingu^, qui avait
mal r^ussi k satisfaire ses concitoyens dans une affaire de lavoir
et de marchd convert. Le nouveau conseiller apportait k la
prefecture une majority toute neuve et une autorit6 toute fratche ;
il demanda pour le fils de sa bonne une bourse k Tlnstitution
nationale des Jeunes Aveugles, et comme I'enfant avait dixans,
ce qui est T&ge minimum d'admission, il Tobtint.*
Sans cette question de lavoir et de march^ convert beaucoup
de choses de cette histoire v6ridique ne seraient pas arriv6es.
Ainsi va le monde !
Voici done notre jeune ami k Paris, k I'lnstitution des Jeunes
Aveugles.
L'Institution nationale des Jeunes Aveugles de Paris est la
plus ancienue de toutes celles qui existent en Europe pour
Tenseignenment des enfants atteints de c^cit^. EUea et6 fondle
par Valentin Hatiy en 1784 et elle est rest^e une des meilleures,
^inon la meilleure de celles qui existent actuellement. Ind^
pendamment d'un enseignement primaire sup^rieur et aa
besoin d'un enseignement secondaire qui est loin d'etre sans
^ucc^s (1), on y donne Tenseignement professionnel ; on y ap-
(1) Un jeune aveugle de rinstituUon nationale, qui suit les cours au iyc^
Buffon, a obtenu, Fannie demi^re, neuf premiers prix & ce lyc6e ^classe de se-
•conde), et en m^me temps, au grand concours, deux prix et un accessit.
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HISTOIRE DUN AVEUGLE. 553
prend la musique vocaie et instrumentalef le cannage et Tem-
paillage des chaises, lafiieterie, Timpression sp^ciale des iivres
pour aveugleSf le toumage du bois, le tricot et d'auti'es metiers
qui ne permettent gufere k Taveugle de vivre de son travail
mais seulemeut, quand il est devenu un ouvrier habile, surtout
dans lasparterie et la brosserie, de ne demander k la bienfai-
sance que la moiti^ de ce qui est n^cessaire k sa vie.
Quelques ceuvres se chargent de pourvoir au surplus, telles
r^cole Braille, laSoci^t^ des ateliers d'aveugles de Marseille, etc. ,
mais ce sont des oeuvres tr^s r^centes. — Seule la musique ouvre
vraiment k Taveugle une carri^re; et c'est comme organiste,
comme accordeur de pianos, qu'il trouve lo mieux k se placer
et k gagner son pain.
L'humble domestique eut cet espoir, d^s que son fils fut k
Paris, qu'il pouvait devenir un musicien distingu^, et vraiment
le gamin montrait d'heureuses dispositions. II 6tait habile de
sespetites mains, avait J'intelligenceouverte, Toreille musicale,
et dfes la premiere ann^e il semblait justifier les esp6rances
maternelles.
11 les eiit r^alis^es peut-6tre s'il eiit pu continuer ses etudes
un temps suffisant; mais elles se trouv^rent tout k coup inter-
rompues. — Le Conseil g^n^ral de son d^partement s'avisa que
le prix de la bourse 6tait trop 6\e\i et, bien qu'il ne pay&t pas
toute la pension qui s'^lfeve k 1 200 francs, il songea k faire une
Economic en plagant le jeune boursier dans une ^cole priv^e
qui coAtait beaucoup moins cher, h^las ! Le Conseil g^n6ral ne
comprit pas, — et combien d'autres, de nos jours mdme s'ob-
stinent k ne pas comprendre, — que les ^coles libres oil le nombre
des jeunes aveugles est limits, ne peuvent ouvrir autant d'ate-
liers qu'il faudrait pour assurer Tapprentissage d'une profession
manuelle et sont trop pauvres pour s'assurer le concours des
bons maitres de musique.
Le conseil g^n^ral fit de la charity k bas prix au lieu de faire
de Tassistance rationnelle et pensa avoir fait tout son devoir en
m^ageant les finances du d^partement. Dans une question d'as-
sistance il n'oublia que Tassist^.
L'enfant, dans ce milieu insuffisant au point de vue de
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554 REVUE PHILANTHROPIQUE.
rinstruction, perdit bien vitece qu41 avait commence d'apprendre
& Paris; quand il en sortit k dix-huit ans il savait jouer assez
mal de Taccord^on et du flageolet, et 6tait capable de rempailler
grossi^rement quelques chaises rustiques. — Comment vivre
avec cela !
La pauvre mfere, min^e par le chagrin et Tinqui^tude,
s'alita un jour en venant du lavoir et mourut la semaine d'aprfes
laissant Tenfant sans ressources, sans affection, sans appui
moral, sans esp^rance.
II n'y avait alors aucune soci6t6 r^guliferement constitute
pour Taide morale des aveugtes; V Association Valentin BaUy
n'existait pas encore (i) ni aucune autre analogue, et il est assez
triste de penser que, aujourd'hui m6me, h peine 40 4tablisse-
ments ou oeuvres diverses s'occupent des aveugles dans notre
pays, et que si nous avons les Quinze- Vingts, un des plus vieux,
sinon le plus vieux des 6tablissements d'hospitalisation, et si
notre Institution Nationale est, pour Tinstruction, la premifere
en date, nous nous sommes laiss^s devancer sur beaucoup de
points par des strangers : allemands, suisses, anglais, etc. — -
Rien qu'en Angleterre, il existe actuellement 42 oeuvres qui s'ef-
forcent de donner des pensions et des secours it des aveugles;
12 ^tablissements qui leur servent de refuge s'ils sont vieux ou
infirmes; 38 dtablissements qui sont k la fois des maisons de
refuge, des lieux d'dlude et des ateliers non sans analogie avec
notre belle £cole Braille ; 78 ^tablissements qui ne reQoivent
que des externes et qui sont destines & Tinstruction, T^ducation
et le travail professionnel ; soit en tout 170 ^tablissements et
oeuvres diverses en faveur des aveugles.
Mais revenons k noire orphelin. II se trouva quelques per-
sonnes charitables, ^mues de sadouleur, qui songdrent pendant
quelque temps k s'en occuper ; et tr^s convaincues qu'iln'y avait
qu'ft s'adresser k Thospice oil il 6tait n6 pour Ty faire admettre
comme infirme, ellcs ^crivirent aux administrateurs ; mais
ceux-ci r^pondirent qu'ils ne pouvaient grever le budget trop
pauvre de Thospice par I'admission d'un indigent stranger; que
(1) EUe a 4t6 reconnue d'utilit^ publique en 1891.
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HISTOIRE D'UN AVEUGLE. 555
sans doute si la m^re, au moment de sa naissance, Tavait aBan-
donn6 comme il eiit 616 raisonnable, Thospice 6tant ddpositaire
aurait contracl6 des devoirs qu*il aurait comme toujours rem-
plis, mais dans Tesp^ce on ne pouvait absolument rien.
11 fut 6tabli par cette r^ponse que, la mere ayant 616 une
honnMe creature qui s'^tait sacrifice pour son enfant au lieu
de le laisser h la charge de Tassistance, cet enfant devenu or-
phelin 6tait repouss6 par Thospice oil il avail contracts I'oph-
talmie qui Tavait fait aveugle presque en naissanl. L'hospice ne
se sentait aucune responsabilit^ dans ce malheur et iaissait dans
la rue Tinnocente victime de son incurie et de sa coupable
routine.
11 n'avait plus qu'une ressource pour vivre, — une seule, —
mendier!
I^ pauvre enfant commen^a bien i chercher quelque tra-
vail, quelques chaises k empailler (il ne savait gufere autre
chose), mais il ne trouva rien qui vaiile et, comme sa mfere lui
avait donn^ Tannde d'avant, pour sa f^te, un bel accordion, et
comme il avait un caniche blanc qu'il avait 61ev^, il s*enalla au
hasard, devant lui, s'arr6tanl de porte en porle, jouant les airs
qu'il savait et recevant quelque menue monnaie de temps 4
autre.
II couchait sur les routes, dans les meules de foin, dans les
granges, dans les ^curies; il allait de village en village et de
ville en ville, et, faute de pouvoir payer un gite ou de trouver
un coin abritd, il couchait aussi dans les asiles et les violons oix
le garde champfetre Tenfermait le soir avec des vagabonds : ou-
vriers sans travail, trimardeurs d'habitude, errants parfaiblesse
d'esprit et par paresse, qui contaienl tout haut leurs peines,
leurs misferes, leurs vices et parfois leurs crimes et qui, plus
d'une fois, profit^rent de son sommeil pour lui voler les quel-
ques sous recueillis dans la journ^e.
C'est ainsi qu'il fit Tapprentissage de la vie. — II sut, pour
Tentendre dire, qu'il y a des gens trfes riches avec des belles
voitures et de beaux chevaux qui valent autant qu'une maison
avec un champ oii un homme simple et travailleur serait heu-
reux pour toute sa vie ; il connut, par les r^cits des chemineaux,
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556 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Texistence des grands ch&teaux et des grandes fermes; et, dans
les villes, des magasins pleins de tout ce qui est bon et de tout
ce qui est beau ; mais, retenu de toute envie, k la fois par son
infirmity, par sa bont^ native et par le souvenir des douces
exhortations de sa m6re dont la pens^e ne le quitta jamais,
il ne songea point k hair comme ses compagnons de misire;
— il se dit seulement dans les jours allonges par le jeAne, par
les froides nuits sans gite, qu'il y avait certainement quelque
chose d'incomplet et d'injuste, un mauvais sort ou une inexpli-
cable malediction qui pesait sur les pauvres 6tres sans defense
comme son chien et comme lui-m6me. G'est ainsi qu'il devint
philosophe.
Une fois embauch^ dans la grande arm^e de la mendicity, il
n'en devait plus sortir. II fut, en somme^un mendiant relative-
ment honnfite ; il acquit avec les ann^es la sAre pratique du
metier et y devint parfaitcment habile : nul ne sut mieux que
lui prendre une voix dolente au moment precis oil passaient
devant lui les promeneurs; nul ne connut mieux, dans les
villes oil ii s^jouma, les bons endroits selon les temps et les
saisons. II avait le don.
Et d'ailleurs, comment aurait-il pu sortir de Timpasse oil il
6tsit engage par la misftre ? Pas de famille, pas d'amis, personne
qui songe&t k soUiciter pour lui soit une place aux Quinze- VingtSy
soit d'abord une des pensions d*aveugles dont cet etablissement
dispose. Sans doute, Tad mission aux Quinze-Vingts avec le lo-
gement, le pain et 1 fr. 50 par jour eAt ^ii une fortune ines-
p^r^e; s'il avait eu une femme et des enfants, les 30 centimes
par jour pour la femme et les i5 centimes pour chaque enfant
lui auraient fait un petit revenu trfes enviable ; mais il n'y a que
300 aveugles qui puissent profiter de cette aubaine, et les places
son! si rares, si recherchees, qu'il est au moins prudent d'avoir
des prolecteurs influents pour esp^rer en profiter.
Peut-6tre aurait-il pu d'abord (encore aurail-il fallu qu'il
connAt cette ressource et que quelqu'un Taid&t k la soUiciter)
profiter d'une des pensions que les Quinze-Vingts font k des
aveugles externes. Ges pensions sont au nombre de 1830 et va-
rient de 200 k 150 et 100 francs par an. Maiselles sont r^parlies
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HISTOIRE DUN AVEUGLE. 557
entre les aveugles de tous les d^partements^ dans une propor-
tion qui ne donne aucune id^e de la statistique ddpartementale
de la c^cit6, mais qui indique plut6t ie degrg d'activit6 et
d'influence des d^put^s et s^nateurs qui repr^sentent chaque
d^partement.
D'autre part, sans famille et sans asile, qu'eM-il fait de 5 &
6 sous par jours? Et ne lui et^t-on pas refuse cette pension parce
qu'il vivait de mendicity? La charity des passants, habilement
soUicit^e valait mieux que cela. Elle lui donnait autrefois
3 francs par jour, parfois 4 et m^me 5 le dimanche et les jours
de f6te.
U Y^cut ainsiy les ann6es passferent, la vieillesse survint. II
fut moins actif et moins habile; lass6 de souffrir.et blas^ de
vivre, il ne rtogit plus aussi ^nergiquement contre la misfere.
D'ailleurs le metier est devenu difficile; il s'en plaint avec une
philosophie un peu amfere :
« Depuis quelque temps, me disait-il Tautre jour, moiti^ s^-
rieuXy moiti6 gouailleur, il s'est trouv6 des philanthropes ing4-
nieux qui rdvent de r^soudre la question du paup^risme, en assis-
tant le pauvre par le travail ; peut-6tre connaissent-ils mal les
causes de la mis^re et les conditions du ch6mage, mais Tid^e est
belle et on pent croire que quand tous les hommes auront appris h
fabriquer des margoltins, on aura r^solu au moins le problfeme
de r6galit6. Seulement rid6e ne vaut rien pour les aveugles k
qui ce genre de travail ne convient pas; pour eux, cette id^e a
€i6 plutdt f&cheuse, parce qu'elle a conduit beaucoup de gens k
croire qu'on ^tait toujours malheureux par le refus de travailler
et que, prenant quelques exceptions pour la rfegle, on donne vo-
lontiers pour excuse k son ^go'isme qu'il est trfes mal de donner
k des pauvres qui rembourrent leurs paillasses de louis d'or et
d'obligations de chemin de fer. Cette opinion est commode et
Sconomique, encore qu'elle soit exag^r^e. Les pauvres aveugles
d'aujourd'hui en subissent le contre-coup, et tendre la main
leur rapporte souvent 15 ou 20 sous par jour, avec quoi il faut
se loger et se v6tir, et se nourir et nourrir son chien. »
(c Je suis, pour mon compte, tout k fait las du metier et, bien
volontiers, je donnerais ma demission d'aveugle!... j'appelle les
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558 REVUE PHILANTHROPIQUE.
ann^es h mon aide, me souvenant qu'un administrateur phil-
anthrope a pu dire qu'avant soixante ans nul n'a le droit d'etre
aveugle dans notre pays ; m*y voili bientdt, et je bdnirai le jour
qui m'ouvrira les portes de Thospice! »
« Ce que je sais de la vie, me disait-il encore, m'a prouvd
qu'il y a par le monde beaucoup de gens plus aveugles que moi;
comment croire en effet, s'il y avail tant de gens clairvoyants,
qu'on rencontrerait, comme je Tai fait souvent, des enfants
abandonn^s aux suggestions, de la mis&re et du vice, des vieux
inftrmes sans toit ni pain, des gens qui meurent de froid et de
faim; et tant de crimes sociaux sans un tribunal k qui les pou-
voir d6f^rer ! Et tant de mis^res k c6\6 de tant de richesses ! Je
crois volontiers que la bont^ et la g6ndrosit6 ne manquent pas
tout k fait dans notre pays ; peut-6tre est-ce seulement la ma-
ni^re de s*en servir qui, en vue de plus de justice, devrait 6tre
r^form^e; mais il n'est que trop certain que T^goisme ne
manque pas non plus!... »
Je ne veux pas dire que les plaintes de mon vieux mendiant
soient toutes fondles; beaucoup y trouveront de Texagfiration,
parce que, ne pouvant voir les choses dans un ^loignement fa-
vorable comme ceux qui ont leurs yeux, il est oblige de les ap-
procher de tr^s pr^s pour les toucher et qu'ainsi elles semblent
plus grosses; mais vraiment on pent lui accorder que tout n*est
pas pour le mieux dans le royaume des aveugles.
N'est-il pas triste de penser qu'il y a des malernitds ou Ton
observe Tophtalmie purulente ? Et cela est-il malaisd d y re-
m^dier? II ne s'agit pas ici de d^penses k faire, mais de respon-
sabilit^s k afflrmer et k mettre en cause.
Nos^colesd'aveuglessontinsuffisantes, il faudrait, revenant
k une id^e de la Convention, que le Gonseil sup^rieur de Fassis-
tance publique a reprise pour Tdtudier, cr6er des 6colcs r6gio-
nales pour Tinstruclion des jeunes aveugles.
Les maisons de travail comme TEcole Braille, comme les
ateliers d aveugles do Marseille, doivent 6tre favorisdes, d6ve-
lopp^es, cr66es en nombre suffisant.
Pour ceux k qui lout travail est impossible il faut ouvrir des
maisons de refuge, sans quoi c'est bien inutilement qu'on affi-
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r
IlISTOIRE D'UN AVEUGLE. 539
chera sur les grandes routes, a Tentr^e des communes, que la
mendicity est interdite.
Mais je ne cherche pas aujourd'hui i savoir si tout cela cotX-
terait cher; je conte une histoire que je sais, et ce n'est pas ma
faute s'il se trouve qu'elie arrive h cette conclusion que cela serait
juste, Je pense qu'il se trouve encore en France des gens pour
qui cette consideration est de quelque valeur.
Seulement je m'apergois que j'ai oubli6 tout h. fait de vous
dire le nom de mon aveugle, et de vous apprendre le d^partement
o& ii a vu le jour, — pas longtemps, h^las!
Mais je me demande si vraiment cela est bien n^cessaire; ne
se trouve-t-il pas dans cette histoire des trails qui sont com-
muns h. beaucoup d'autresaveugles. Alors je suis d^cid^ h, laisser
^ mon h^ros le b6n6fice de Tanonymat. II est sans vanity, sans
d^sir de parattre; il ne m'en voudra pas de ne Tavoir pas
nomm6... J'ai tout lieu de croire, d*ailleurs, qu*il ne lira pas
cet article.
HENRI NAPIAS.
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ASSISTANCE AUX M£RES
En 1784, Beaumarchais disait: « N'oublions jamais qu'il n'y
a pas un sein tari sans qu'on trouve un enfant qui souffre.
Rendons son cours k la nature ; le lait des mferes suppl^e k
tout et rien ne suppl^e au lait des mferes. »
Voici alors ce qu'il proposa : « Un institut de bienfaisance
vers.lequel toute femme reconnue pauvre, inscritei sa paroisse,
puisse venir dire, son enfant au sein et avec Tattestation du
cur^ : Je suis m^re et nourrice ; je gagnais vingt sous par jour,
mon enfant m'en fait perdre douze.
« Vingt sous par jour, calculait I'auteur du Barbier de Seville ,
font trente livres par mois : ofifrez k cette mfere neuf francs ;
avec les neuf livres qu'elle ne donnera plus k une ^trang&re en
voilk dix-huit de retrouv6s.
« La m^re aura bien pen de courage, si elle ne gagne pas
huit sous par jour, en allaitant : voili les trente livres retrou v6es. »
« Donnons gaiement pour le bon lait, ajoutait-il, et nous
irons k la bienfaisance. Quand je devrais 6tre trait6 d'homme
vain, d'ignorant, de sot auteur, j'y mettrai tout mon Figaro. »
Aiusi agit-il et la cinquanti^me representation du Manage
fut donn^e, le 2 octobre 1784, au profit de r(£uvre projetSe de
Tallaitement maternel.
11 avait ajoute, pour la circonslance, ce couplet chants par
Figaro, et applaudi fr^n^tiquement.
Rapprochons du sein des m^res
L'enfant presque abandonn^.
Faut-il un exemple aox p^res?
Tout autant qu'il m*en nailra
Ma Suzon les nourrira.
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ASSISTANCE AUX MSRES, 561
Malheureusement pour rceuvre naissante, Beaumarchais
comptait un grand nombre de jaloux, qui firent ^chouer sa
tentative...
Les id^es bonnes et g^n^reuses ^taient cependant dans i'air
et, en 1793, la Convention dlaborait un magnifique d^cret d'as-
sistance nationale aux m^res.
Voili plus d'un sifecle de cela, et pourtant en 1898 des mferes
et des enfants meurent de faim.
Beaumarchais ! oh est-il Tinstitut que tu as r6v6, ou la
mfere n'aurait qu'4 se presenter pour 6tre k Tabri de la souf-
france ?
H^las! h^las ! surles cent soixante-dix mille enfants qui dis-
paraissent chaque annde, plus de la moiti^ meurent faute de
nourriture et de soins.
On parle de depopulation, mais c'est nous qui la laissons
mourir cette France de demain!
On croit g^ndralement que toute mfere veuve ou c6libataire
a droit aux secours de TAssistance publique, secours qui doi-
veut lui permettre d'allaiter son enfant, ou de payer ses mois
de nourrice. On consid^re cela comme un droit. Eh bien, la
moitie de ces malheureuses, veuves ou c6libataires, dans les
conditions les plus navrantes, ne peuvent obtenir ce secours.
« V Assistance publiqtie ne dispose pas de ressources suffi-
sanies. »
Voili ce que Ton repond. Et j'avoue que je ne comprends
pas. La France est riche, ses gouvernants saventtrouver en elle
des sommes fabuleuses. 11 me semble que nourrir ses enfants
est pour notre pays le plus grand int^r^t et le premier devoir.
Ce n'est pas le pan du drapeau dont parle Michelet que re-
clame Tenfant, c'est le berceau, c'est le lait de sa mfere auquel
il a droit. Or, lorsqu'une malheureuse sort de Thdpital sans un
sou, avec son enfant dans les bras, oti doit-elle porter ses pas?
Quelle est la maison qui lui ouvre ses portes ? Quelle protec-
tion lui oflFre son pays ?
Elle a, il est vrai, la faculty d'abandonner son enfant...
L'abandon! mais c'est monstrueux, eflfroyable 1 C'est m6-
connaitre ce qull y a de plus beau dans Thumanit^: Famour
RBVCE PBILAirTHROPIQUE. — II. 36
i
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562 jaEVUE PHILANTHROPIQUE.
materncl si fort, si puissant. Eh quoi ! ces femmes ont endurt
les douleurs de renfantement, elles adorent ce petit fetre qui est
leur chair et leur coeur. Et comme abri, comme appui^ je dirai
presque comme recompense pour leur martyre, on leur offre
quoi? — le bureau d abandon!
Mais cela outrage et r^volte la nature qui, elle, n'a pas
prdvu cette separation de deux 6tres qui n*en font qu'un. La
p^riode qui s'^coule apr^s la naissance de Tenfant, et pendant
la premiere ann^e, n'est que la suite de la creation dont la
moitie s*est op^r^e h Tinlirieur et dont Tautre s'op^rera k Vex-
terieur du sein de la m^re.
Non, il ne faut pas permettre qu'un enfant soit enlev^ k
une mfere pauvre, pour 6tre confix k une autre femme ^gaie-
ment pauvre , qui ne Taime pas et que Tapp&t du gain seul pent
guider. II faut que Tassistance se r^pande sur toutes les m^res
qui font appel k elle. Que la maternity ne soit plus une appre-
hension, que la mftre puisse en paix veiller sur les jours vacil-
lants de son petit, et qu'elle puisse accomplir son devoir
sacre.
*
En 1876, nous avons fonde une society d'allailement ma-
ternel.
Les secours qu'elle distribuc annuellement repr^sentent
une somme de 63710 francs. De plus, les dames visiteuses don-
nent personnellement des secours assez considerables; les
unes paient des loyers, d*autres habillent les fr^res et sceurs
de nos pupilles. *
La Societe de Tallaitement matemel, comme on le salt, no
tient compte d'aucune consideration de condition civile ou de
croyance ; elle ne cherche qu'& soutenir la m^re moralement
et materiellement, de faQon qu'elle puisse elever son en-
fant, sans chercher de Touvrage au dehors, sans confier le
malheureux petit aux creches, k des mains etrangferes et sou*
vent inexperimentees. Les brouillards du matin, la pluie, la
neige sont nefastes k ces petits etres, et le salaire de la femme
est si derisoire, que tout travail qui la retient chez elle est prd-
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ASSISTANCE AUX MfiRES. 363
f^rable et compense facile ment les d6penses mat^rielles qu en-
tralne Tabandon du foyer. \
Lorsqu'une femme est admise aux secours de rallaitement, |
un dossier est ouvert k son nom et contient tous les details la \
concemant. Une dame visileuse in^ique les secours h attribuer ^
el donne tous les renseignements moraux et matdriels qu'elle ^
peut se procurer avec beaucoup de d^licatesse, afin que rien j
dlnquisitorial ou de policier ne puisse froisser les int(5ress6es. '}
Mais on peut 6tre tranquille sur ce point; les femmes qui
metlent leur joie dans le soulagement des misferes, qui s'enrd- .^
lent dans les ordres ialques, sont des natures d'dlite chez les- J
quelles Tamour du prochain est immense, et elles ont toutes t
les d^licatesses. ^]
Un m^decin de la soci^t6 est ^galement charge d'examiner 5
la mfere et Tenfant, et d'indiquer F^tat de^sant^ de Tun et de J
Tautre. j
Trois sortes de secours sont alors accordds : j.
Ghaque mois, trente-deux livres de pain et de la viande ; des I
denr^es alimentaires, des fortifiantSy des medicaments sll y a ]
lieu. Layette, vfitements, literie, selon les ressources du mo- ^
ment. ,
Du lait, quand le m^decin juge que le lait maternel est in- ^
suffisant. P^riodiquement on fait d^shabiller les enfants et on
les pfese.
On comprend les bons r^sultats de cette surveillance con-
tinue et assidue. Enfin, dans des cas urgents et particuliers.
des secoura^uAiques sont accord^s*
Voil& ce que fait la Soci4ti6 de Fallaitement maternel fondle
en 1876, reconnue d'utilit^ poblique en 1880. Elle a de cette
faQon secouru irenie-quatre mtMr fuatre cent soixante-douze en-
fants. Et elle s'est trouvde, faute de ressources suffisantes,
d^sarm^e devant environ quaire cmt mille demandes parfai-
tement fondles et int^ressantes.
Pauvre oeuvre priv^e, soutenue par des acfii^sions, des dons
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564 REVUE PHILANTHROPIQUE.
qu'il faut soUiciter, provoquer sans cesse, parune vente qui
demande plus de peine et de fatigue qu'on ne ie croit g^n^ra-
lement!... II fautsefaire mendianis, et lutter sans cesse contre
r^goisme et la frivolity, pour arriver k sauver ces malheureux
petits enfants, victimes d*un organisme social ddfeclueux.
A ce point de vue, le Gonseil municipal et le Conseil g6-
n^ral de la Seine m^ritent une mention particulifere. On sait
quel int^r^t ces deux assemblies portent k Tassistance de Ten-
fiance.
L'appui qu'elles donnent k notre ceuvre scrait sans doute
considerable, si les n^cessitds de leur budget d'assistance, mal-
heureusement beaucoup trop restreint, le leur permettait. Der-
ni^rement encore, une dame inspectrice, d^l^gu^e du Conseil
municipal, a examine conscicncieusement, durant plusieurs
jours, nos comptes, nos dossiers d'enfants, etc. EUe a pu se con-
vaincre ainside la bonne gestionde notre Society. Nos frais d'ad-
ministration sont r^duits, en effet, k un minimum impossible k
atteindre dans une organisation publique : un loyer de 300 fr.,
une seule employee, tons les travaux ^tant faits par les mem-
bres du Conseil administratif.
Mais que sont les milliers d'enfants sauv^s par notre oeuvre
k cdte de la population gdn^rale des autres enfants?
En attendant des jours meilleurs travaillons sans rel&che
k am^liorer la situation navrante de la m^re qui, dans le d^-
nuement, accepte les charges de la maternity... Aidons-la k
vivre et soutenons son cotlrage.
MARIE BfeQUET DE VIENNE.
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LES COMMISSIONS COMMUNALES
D'ASSISTANCE
Tout le probl^me de Tassistance municipale est pos6 devant
le S^nat, sous la forme d'un projet de loi irfes modeste sur la
representation des pauvres et V administration des itablissements
d! assistance ^ et le gouvernement n'aura pas trop de toute son
autorit^ pour obtenir une solution conforme h. ses d^sirs. II
convient de louer la continuity de vues qui n'a cessd de pr^-
sider, depuis dix ans, it cette elaboration delicate; les diff^rents
ministres de Tlnt^rieur qui se sont succ^d^, M. Charles Floquet,
M. Georges Leygues, M. Ldon Bourgeois, M. Louis Barthou,
n'ont pas diff^r^ d'avis; chacun d'eux a fait honneur h. la signa-
ture de son devancier et s'est attache 5 preparer une de ces
r^formes dont Topinion indiff^rente n'aperQoit pas les avan-^
tages et qui ne s'en heurtent pas moins aux rdsisfances les plus
fortes.
Quel que soit le m^rite des ministres, le r6le de leur prin-
cipal coUaborateur M. Henri Monod n'a pas 6t6 stranger 4 cet
effort continu auquel le Conseil sup^rieur de FAssistance pu-
blique a pr6te le concours de sa grande competence. Le Conseil
d'etat lui-m6me, peu suspect de tendresse pour les nouveaut^s
aventureuses, a sanctionn^ de son approbation savante le projet
tendant \ unifier Tadministration des 6tablissements publics
d'assistance.
L'objet poursuivi par le gouvernement consiste en effet a
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566 REVUE PHILANTHROPIQUE.
rapprocher des services similaires, & placer sous la inftme au-
torit^ la direction des h6pilaux et hospices ei celle des bureaux
de bienfaisance, compl^tement dislinctes en fait et en droit. Si
a Paris cette unit6 d'administration a 616 r^alis^e, d'une ma-
ni^re tr^s imparfaite (1), elle fait totalement dSfaut pour la
France enti^re.
Les bureaux de bienfaisance et les hdpitaux et hospices sont
administr^s s^par^ment par des commissions administratives
tout a fait ^trang^res Tune k Tautre. Ce double fonctionnement
a d'abord Tinconv^nient d'augmenter les frais g^n^raux d*admi-
nistration; il a surtout le grave d^faut de favoriser les doubles
emplois, d'entraver Tassistance k domicile et de nuire au
d6veloppement rationnel de Tassistance publique urbaine et
rurale.
Avec le regime actuel, les deux commissions administra-
tives, rivales pour le bien, empiMent souvent I'une sur Tautre.
M. le docteur Henri Napias, avec son habituelle silret^ d*infor-
mation, a signals au Conseil sup^rieur quelques-uns de ces
empi^tements et mfime do ces interversions d*attributions (2).
A Caen, par exemple, Fhospice distribue des secours, et le
service des malades est assure par le bureau de bienfaisance.
A Saint-Malo, au Puy, les hospices secourent des families
pauvres, tandis que le bureau de bienfaisance supporte les d^
penses du service medical.
L'enqu6te du 31 juillet 1888, annex^e au rapport pr^sent^
par M. de Crisenoy au Conseil sup^rieur (3), fournit d'autres
exemples de cette confusion.
A BrianQon, Fhospice donne des secours de vieillesse, des
secours aux malades indigents et aux malades n^cessiteux ; h
Ch&lons-sur-Marne, il agit de m^me. Les hospices de Lille
accordent des pensions mensuelles aux vieillards qui pr^fferent
rester dans leurs families.
A Beauvais, chacun des ^tablissements fournit de son cdt^
les soins du m6decin et les medicaments, de sorte qu'il se pro-
(1) N* 8 de la Revue philanthropiquey V Assistance publique de PariSf p. 161.
(2) Conseil sup6rieur de T Assistance publicpie, fascicule n* 31.
(3) Gdnseil sup^rieur de i'Assistance public[ue, fascicule n* 26.
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LES COMMISSIONS GOMMUNALES D'ASSISTANCE. 567
duit des doubles emplois sans qu'aucun contr6le soil possible,
en raison de la multiplicity des details du service.
Le d6faut d'entente a d'autres consequences, plus g^n^rales
et plus saisissantes ; il a pour effet d'encombrer les 6tablisse-
ments hospitaliers de malades qui pourraient ^tre utilement
traitds k domicile. Les commissions administratives d'AleuQon
en firent Taveu dans TenquMe : un sixifeme des malades trait6s
h rhospice pourraient 6tre soignfe k domicile. // en est de m^me
pour les vieillards et les infirmes.
En d6pit de Toptimisme d^concertant de la consultation de
1888, il est certain que la situation doit 6tre la mfime dans un
grand nombre de localites.
Lorsque,aucontraire, les deux administrations se concertent
— ce qui est une heureuse exception — comme k Brian^on, k
M&ddres, k Annecy, k Chalon-sur-Sa6ne, k Sedan, ailleurs
encore, Thospitalisation diminue au profit de Tassistance k
domicile.
A Rouen, oil le conseil municipal a vainement tent6 d'ob-
tenir la fusion des deux services, Taccord n'en a pas moins
616 atteint de la mani^re la plus heureuse ; les deux commis-
sions administratives out 6t6 form^es des mfimes elements; le
r^sultat en a 6t6 la creation de petits dispensaires, r^partis
dans la ville, qui rendent les plus grands services et all^gent les
charges des hdpitaux.
La plupart des commissions administratives, il y a dix ans,
ne paraissaient pas faire grand cas du traitement medical k
domicile et leur scepticisme a quelque pen fauss6 le caract^re
de la petite enquMe destin^e au rapport de M. de Crisenoy.
Cette consultation du31 juillet 1888, qui a port^ sur 174 villes,
dont 118 seulement ont r6pondu, n'a pas 6t6 decisive ; d'ailleurs,
le questionnaire, trfes prudemment r^dig^, ne portait en grande
par tie que sur Fhospitalisation de malades ou de vieillards
pouvant 6tre convenablement soign^s ou secourus it domicile :
« S'il est £tabli des dispensaires ou un service medical k domi-
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568 REVUE PHILANTHROPIQUE.
cile, 6tait-il demands, par qui est-il dirig^ et qui en paye les
d^penses? — Dans le cas contraire, conviendrait-il et serai t-il
possible d'^tablir une entente entre les deux administrations
charitableSy pour organiser un service de cette nature^ afin de
n'envoyer k Thdpital ou it Thospice que les malades ou les
infirmes pour lesquels Thospitalisation serait reconnue indis-
pensable ? »
Le questionnaire sugg^rait plusieurs combinaisons entre
lesquelles les administrateurs des deux services ^taient invites
k choisir. 1 1 villes ont r^pondu en adh^rant k F^tablissement
d'une commission unique administrant led deux institutions
dont les patrimoines demeureraient distincts : ce sont les villes
de BrianQon, Sedan, Foix, Narbonne, B^ziers, Saint-Malo, Toul,
Gompidgne, Belfort, Rouen et Monteux (Vaucluse).
Les administrateurs de Carpentras se sont prononc^s pour
Tunification compile; ceux de Valence, Romans^ Goutances
et du Havre ont des preferences pour deux commissions admi-
nistratives compos^es des mdmes membres.
Le&administrateurs d'hospices et de bureaux de bienfaisance
de vingt villes, tout en r^clamantle maintiendu regime actuel,
acceptent Tid^e d'une entente etablie au moyen d'une commis-
sion mixte consultative ; ils appartiennentaux villes deM6ziferes,
Rodez, LaRochelle, Bordeaux, Rennes, Fougdres, Saint-^tienne,
Montbrison, Mende, Vitry-le-Francois, Ghaumont, Dunkerque,
Compi^gne, AlenQon, Glermont-Ferrand, Perpignan, Le Mans,
Mantes et Montauban.
26 r^ponses ont done et6 in^galement favorables it une
r6 forme, officieuse ou legale.
Toutes les autres commissions mixtes ont repoussi sans la
moindre reserve toute modification du statu quo; ce sont celles
de Bourg, Digne, Gap, Embrun, Nice, Privas, R6thel, Troyes,
Carcassonne, Gastelnaudary, Villefranche ( Aveyron), P6rigueux,
Caen, Vire, Angoulfeme, Bourges, Saint-Brieuc, BesanQon,
Romans, Evreux, Louviers, Auch, Montpellier, Lodfeve, Redon,
GhMeauroux, Issoudun, Lons-le-Saunier, Blois, Le Puy, Nantes,
Orleans, Saint-L6, Cherbourg, Chftlons, Reims, Langres, Laval,
Chftteau-Gon tier, Nancy, Lun^ville, Bar-le-Duc, Verdun, Vannes,
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LES COMMISSIONS GOMMUNALES D'ASSISTANCE. 569
Lorienty Nevers, Lille, Roubaix, Tourcoing, Gambrai, Douai,
Yalenciennes, Bayonne, Lyon, Vesoul, M&cod, Ghalon, Annecy,
Saint-Denis, Le Havre, Melun, Meaux, Versailles, Etampes,
SainUGermain-en-Laye, Pontoise, Niort, Castres, Avignon et
neuf communes de Vaucluse, Poitiers, Limoges, Epinal,
Auxerre et Sens.
Sans doute, le r6sultat de cette enqufite pr^liminaire n'est
pas encourageant ; il n'a pas toutefois 6t6 de nature h modifier
les intentions du gouvemement,ropinion du Conseil sup6rieur
de TAssistance publique et celle du Conseil d'£tat. Un homme
aussi mod6r6 que M. de Crisenoy, pen portd par son pass^ ad-
ministratif aux solutions extremes, aport^ ce jugement sdv^re
sur les r^ponses des honorables et d^vou6s administrateurs des
hospices et des bureaux de bienfaisance : « Si les situations et
les modes d'op^rer des ^tablissements d'assistance offrent une
grande vari^t^, on a pu remarquer en revanche, dans la plupart
des deliberations des commissions, un sentiment uniforme et
tr^s marque de satisfaction de la marche de leurs services. Ge
sentiment est naturel, il se justifie pleinement quelquefois
par les r^sultats obtenus, et presque toujours par le devoue-
ment et leseflForts personnels des membres descommissions.On
comprend que des administrations laiss^es k elles-mftmes,
ignorant ce qui se pratique ailleurs et ayant conscience du bien
qu'elles font autour d'elles, se montrent satisfaites de leur
oeuvre et soient pen portees i accepter des changements qui
troubleraient d'anciennes habitudes sans qu*elles en aperQoi-
vent clairement Tutilite. On ne saurait se dissimuler cepmdant
que, malgri ces dtres, tout n'est pas par fait , qu'il y a dans beau-
coup cTendroits des lacunesj des services defeclueux, incompletSy
des ressources gaspilUes ou mal employees. On le lit entre les
lignes de certaines deliberations, et Fexamen attentif du dos-
sier de Tenquete, necessairement restreinte, que nous avons
faite, suffirait it en donner le sentiment, alors mfime que les
representants de Tadministration superieure ne viendraient pas
le confirmer. »
L'honorable et savant rapporteur au Gonseil superieurn'apas
manque de relever les dires accusateurs tires de Fenquete elle-
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570 REVUE PIIILANTIIROPIQUE.
m^meet il a proclam6, malgr^ tout son respect pour les insti-
tutions existantes, son vif dc^sir de voir aboutir les rSformes
n^cessaires.
Au surplus, la consultation de 1888 n'a pas eu la valeur
d'un referendum; elle a 616 superficielle et restreinte. II existe
en France, d'aprfes le plus recent volume de la Staiistique gi-
n^rahy 1761 6tablissemeuts hospitallers (h6pitaux ethospices),
sur lesquels 48 h Paris. Le nombre des bureaux de bienfaisance
est d'environ 15000 (en 1892 exactement 15227).
De plus, la loi du 15 juillet 1893 sur Tassistance mddicale
gratuite a introduit un nouvel ^l^ment et cr^6 un troisi^me
rouage, le Bureau d'assistance, dont la commission adminis-
trative est form^e paries commissions administratives r^unies
de rhospice et du bureau de bienfaisance, ou par cette demifere
seulement quand il n'existe pas d'hospice dans la commune.
Un premier pas a 6i& fait ainsi vers la fusion, vers Tunit^
administrative, puisque, dans le cas ou ils coexistent, le bureau
de bienfaisance et Fhdpital-hospice sont associ^s pour la ges-
tion du Bureau d'assistance.
Pourquoi ne pas completer ce qui a 6t6 6bauch^, non seule-
ment pour assurer Tunit^de representation des pauvresau point
de vue juridique et contentieux, mais encore et principalement
pour mettre un terme au d^sarroi, suivant Texpression de
Texpos^ des motifs du projet de loi d^pos^ par M. fiarthou, et
aussi pour grouper, coordonner en un faisceau plus compact
et plus competent les repr^sentants de Tassistance publique
dans chaque commune.
On n'a pas Tillusion do croire que cette fusion suffira pour
r^soudre toutes les difficult^s, mais on a le droit de penser que
la constitution d'une commission municipale, et, sur un terri-
toire plus ^tendu, de la commission d^partementaie d'assis-
tance, fera beaucoup pour la r^forme et Textension de la bien-
faisance publique (1) dans les villes et dans les campagnes.
(i) Voir aux Info**mation8, dans le present numdro, le texte du projet de loi
soumis aux deliberations du S6nat.
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LES COMMISSIONS COMMUNALES D'ASSISTANCE. 511
L'article premier du projet de loi stipule que toutes les com-
munes seront pourvues d'un bureau de bienfaisance. Comment
sera-t-il appliqu6? Le syndicat des petites communes pauvres
nedevra-t-il pas intervenir, ou bienconviendra-t-il deg^ndraliser
lesessais d'organisation de commissions cantonales d'assistance,
dus k rinitiative de M. Alapetite, pr^fet du Pas-de-Calais? Le
point d'interrogation se dresse de vant nous, mais k mesure que la
loi sur Tassistance m^dicale gratuitercQoitune application plus
gtendue et plus profonde, il sera possible de determiner si la
petite commune a la force suffisante pour avoir une existence
propre au point de vue de la bienfaisanc, et des conclusions ine-
vitables s*imposeront pour le secours aux indigents comme
pour Taide m6dicale et pharmaceutique aux n6cessiteux.
L'unite d'action ne sera pas moins profitable aux institutions
annexes, telles que les crfeches, les dispensaires d'enfants ma-
lades, les orphelinats, qui gravitent autour de Fassistance
publique sans se confondre avec elle, et que les conseils mu-
nicipaux pourront, k leur gr6, placer sous Fadministration
commune de leur assistance publique.
Dix ans ont passe depuis Fenqu6te reduite du Conseil sup6-
rieur, les idees d'assistance ont progress^, la notion du devoir
social s'est elargie, et tout permet d'esp^rer que, si un grand
nombre de municipalites et de commissions administratives,
mieux informees, etaient sollicitees k nouveau k emettre un
avis, la plupart sauraient s'elever au-dessus des prejug^s parti-
cularistes et dchapper aux suggestions dc cet optimisme infe-
cond et dficevant, contre lequel proteste le lamentable defile des
mis^res et des souffrances inapaisees de Fimmense armee des
malheureux (1).
PAUL STRAUSS.
N. B. La Revue Philanthropique publiera sur cet imporlant sujet les
communications les plus contradictoires et leur accordera Thospitalite la
plus impartiale.
(1) Voir les Commissions cantonales d'assistance, par M. J. Pion, dans la
Revue politique et parlementaire du 10 octobre 1891.
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL
ASSEMBLE Gl^N^RALE
DU C0MIT6 CENTRAL DES (EOVRES d'aSSISTANCE PAR LE TRAVAIL
SOUS LA prMsidence de M. A. M^ZI^RES
de TAcad^mie fran^aise.
{ExtraUs du rapport du D' P. Bouloumie, secretaire general)
Pendant I'exercice 6coul6, le comit6 central, poursuivant
le cours normal de ses travaux, s'est aitach^^. il'^tude de toutes
les questions int^ressant Tassistance par le travail et sp^cia-
lement sa pratique et sa vulgarisation. En ce qui conceme le
fonctionnement des oeuvres, il a particuli^rement ^tudi6 les
modes d'admission, Tex^cution du travail, la durde de Fassis-
tance, la quality des assist^s; il a fait une enqudte toute r^cente
sur Fdtat actuel des oeuvres d'assistance par le travail en
France et les rapports ^tablis entre ces oeuvres et les bureaux
de bienfaisanee, conform^ment ^ la circulaire minist^rielle du
8 novembre 1894 et k Tarticle 28 du d6cret du 15 novembre
1895:
11 a mis h T^tude certaines questions sp^ciales poshes par
des oeuvres de province et donn6 des solutions auxquelles elles
se sont utilement conform^es ; il a donn^ son concours aux
oeuvres sous forme de subventions directement octroy^es ou
obtenues des pouvoirs publics, etc. ;
II a, par voie de conferences el de brochures, fait en faveur
de rid^e et de son application une active propagande.
Modes d' admission. — Le ban de travail remis aux sollici-
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL. . 573
teurs valides nous parait toujours 6tre le mode d*admission k
pr^coniser, mais il faut que les g^rants des oeuvres soient auto-
ris4s it en d^Iivrer directement au solliciteur de travail qui se
rend directement k I'atelier plutdt que d'aller mendier, m6me
un bon de travail, dans la rue ou k domicile. A Paris, laplupart
des (Buvres ont aujourd'hui admis ce principe et des bons en
blanc sont laiss6s, par les adherents ou les conseils d'adminis-
tration, k la disposition du directeur de Tatelier de travail pour
en assurer Tapplication.
Le bon doit fetre une carte d'admission au travail pour un
temps plus ou moins long, mais non une lettre de change
d'une valeur d6termin^e tirde sur Toeuvre d'assistance, car,
dans ce cas, Tassist^ connait cette valeur et pent en r6clamer
le paiementapr^s un simulacre de travail, les professionnels
peuvent en trafiquer et les adherents peuvent en misuser en en
donnant k tel solliciteur habile qui les vend ou k tel solliciteur
int^ressant, mais sans Anergic ou incapable de reprendre
jamais rang' parmi les travailleurs, qui d^s lors devient un
pensionnaire de Tatelier et ne cherche plus k en sortir.
Execution du travail, — Le comitd central et son v6n6r6 pre-
sident, Jules Simon, n'ont ccssd de pr^coniser Tobligation d'un
travail s^rieux, execute k la tdche autant que possible. Ces
principes, adopt6s d6ji par un grand nombre d'oeuvres, tendent k
se g^n^raliser de plus en plus. Comment n'en serait-il pas ainsi
quand on voit les heureux r^sultats obtenus un pen partout
et notamment St la maison hospitali^re de M. le pasteur Robin,
k Tatelier de Bordeaux, etc., ou par Tapplication de ces prin-
cipes, la production a augments du simple au double. Dans les
ateliers ou la nature des travaux ne comporte pas le travail k
la tdche, des primes de fabrication ont 6t6 utilement octroy^es,
notamment k ToBuvre du march6 Saint-Germain.
Dur^e de rassistance. — La durde de Tassistance ne saurait,
dans des ateliers qui ne doivent foumir qu'un travail provi-
soire, un travail d'attente, 6tre illimit^e. Elle doit varier sui-
vant les localit^s, mais 6tre limit^e, avec possibility laissde au
directeur de faire flSchir la rfegle g^n^rale dans des cas ou un
s^jour exc6dant les limites r6glementaires est vraiment n^ces-
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514 . REVUE PHILANTHROPIQUE.
saire ; on ne peut, par cxemple, mettre dans la rue un homme &
qui un emploi est assure et qui doit, quelques jours apr^s la
date rdglementaire de sa sortie, entrer en possession de cet ,
emploi.
Placement, — La plupart des a3uvres d'assistance par le
travail se pr^occupent aujourd'hui du placement et le consi-
d^reijit comme le compl6ment n^cessaire de leur action tempo-
raire. Les opinions et les pratiques varient toutefois beaucoup
avec Torganisation fondamentale des ceuvres. Ainsi, tandis
qu'au march^ Saint-Germain, k la maison hospitali^re, le pla-
cement est pratiqu6 aussi largement que le rapatriement, aux
ateliers d'assistance de la rue Salneuve il est fait tr^s peu de
placements. En voici la raison : au march6 Saint-Germain
comme & la maison hospitalidre, le paiement du travail ^tant
fait sous forme de logement, nourriture et v6tement, il ne s'y
pr^sente gufere et on n'y garde que des individus (hommes seu-
lement it la maison hospitalidre ; hommes et femmes au
marchd Saint-Germain) plus ou moins capables et d^sireux de
reprendre un travail r^gulier, il n'y a jamais dans les ateliers
qu'un nombre de travailleurs assez limitd (25 k 50 au march6
Saint-Germain, 40 2i 80 ^ la maison hospitali^re) pour qu*on
puisse les bien interroger, surveiller et connattre, et on les
garde pendant un temps relativement long, 15 Ji 20 jours et
plus parfois, sur la simple production d'un bon de travail
d^livr^ par un adherent. Aussi arrive-t-on k une proportion de
placement qui atteint jusqu'i 30 et 40 p. 100.
A la rue Salneuve au contraire, tout porteur d'un bon de
travail sait qu'aprfes 3 heures de travail il recevra fr. 75 (la
valour dtait jusqu*& present mentionn^e sur le bon] et, en
plus, une soupe pendant les mois d'hiver ; le bon 6tant une
lettre de change tir^e sur Toeuvre par Tadh^rent, qui a pay6
ces fr. 75 en achetant son bon, Tceuvre ne peut refuser Tad-
mission et la rdadmission ind^finie de tout porteur de bon (le
directeur peut Texclure pour inex^cution du travail ou faule
contre la discipline de Tatelier, mais ne peut refuser de Tad-
mettre). De \k : un nombre parfois si considerable d'assist^
qu'il est impossible de prendre sur eux le moindre renseigne-
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL. Slo
menty pourbeaucoup un passage de trois heures seulement dans
les ateliers, et pour quelques-uns, habiles k se procurer des
bons, des s6jours tr^s prolong^s ou trfes r6p6t6s, ce qui faisait
dire avec raison au directeur, M. Pfeiffer, que je quesiionuais
rdcemment au sujet du placement : « Du placement, mais je
n'en peux pas faire avec mes assist6s ; les uns, je ne les con-
nais pas, et les autres, je les connais trop. )>
Ceci m'amfene h dire un mot de la quality des asstsi^s. Dans
une ville comme Paris ou existent plusieurs ceuvres, la quality
des assist^s varie d'une mani^re g^n^rale avec le mode de
fonctionnement adopts par ces oBuvres; el le varie en outre
avec les saisons. En province, elle varie avec les localit^s et les
regions, industrielles, agricoles ou mixtes.
Dans les ^tablissements de travail gardant longtemps leurs
assist^s et r6mun6rant le travail en totality ou en partie sous
forme de logement, nourriture et vAtement, on pent ^valuer h
30 k 40 p. 100 les assistds pouvant ^tre placds, tandis que, dans
les 6tablissements r^mun^rant le travail au jour le jour et en
argent et acceptant sans distinction tons les porteurs de bons,
il n'y a g6n^ralement que 10 k 15 p. 100 d'ouvriers pouvant
6tre placi^s.
La moyenne pour Paris nous parait ainsi pouvoir 6tre
^valu^e k 20 p. 100, chifTre maximum.
En province, notamment, d'aprfes les documents qui me par-
viennent de Bordeaux, d'Amiens, de Marseille, la proportion
des travailleurs assistds capables de reprendre une occupation
r^guli^re me paratt 6tre sensiblement plus forte qu'^ Paris,
sans queje puissetoutefoisT^tablir avec precision.
Une cat6gorie d'assist^s a particuli^rement attir^ notre
attention : je veux parlerdes valides dg^Sy ni vieillards ni infir-
mes,et par ce motftg^s j'entends des hommes, pourtant dans la
force der&ge,puisqu'ils n'ontque quarante k quarante-cinq ans,
mais que Tindustrie classe et refuse comme ftg^s. A laporte de
certains ateliers, on pent lire aujourd'hui unavis dans le genre
de celui-ci : « Tout homme ayant d^pass^ quarante ans n'est pas
embauch6 » ; tant ilest admis maintenant qu'uaouvrier est dans
rindustrie consid^r^ comme vieux dds qu'il addpass^ quarante
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576 REVUE PHILANTHROPIQUE.
ans. Que faire pour cette cat%orie noifibreuse d'individus que
nous avons assist^s temporairement par le travail ? Nous nous
le demandons avec anxi^i^ ct, personnellement j'e demande que
pour eux s'organisent, par Tiniliative priv6e second6e par les
pouvoirs publics, sur les points de la France oii ily a encore des
landes incultes, des colonies agricoles de travail libre k Tinstar
de celles qui ont donn^ de si beaux r^sultats k T^tranger. Ce
n'est qu'en retenant aux champs ou en Ty ramenant qu'on
pourra assurer la vie de Touvrier qui afflue actuellement vers
les villes, surtout si la nouvelle loi contre les accidents du
travail est appliqu6e telle qu'elle est propos^e, c'est-8i-dire avec
des responsabilit^s telles pour le patron employant des hommes
mari^s et des p^res de famille qu'il ne voudra plus dans un ave-
nir prochain engager que de jeunes c6libataires. Ce sont ]k de
graves questions dont nous avons le devoir de nous pr^occuper
dbs a present.
La question tou jours int^ressante k 6ludier est celle de
la proportion dans laquellc sont utilises les bons de travail
remis aux soUiciteurs, c'est-i-dire quelle est la proportion des
valides r^ellement dignes d'int^rfit el cherchant 4 sortir de la
misfere par le travail, parmi tous ceux qui tendent la main dans
la rue ou sollicitent la charity k domicile, se disant r^duits k
la mendicity par le manque de travail. Elle est difficile a r<5-
soudre parce qu'on ne sait jamais exactementcombien de bons
ont H6 distribu^s par les membres des diverses oeuvres d assis-
tance par le travail. Nous avons cherch6 quelques 6idments
precis d 'appreciation dans Tutilisation de bons que nous avons
donnas gratuitement aux diverses oeuvres distribuant des ali-
ments aux malheureux :
En f^vrier et d^cembre 189S, nous avons r6parti 1200 bons
de travail du comitd central cntre les soci6tes suivantes : la
Society philanthropique (SOO), les Conferences de Saint Vincent-
de-Paul (500), laBouchee de pain (200). Nous avons fait une
nouvelle distribution de 250 bons k la Society philanthropique
et 250 aux Conferences de Saint Vincent-de-Paul. — Aprds
nous etre assures que tous les bons avaient 616 distribues (sauf
.41 restant k la Bouchee de pain), nous avons constate, par le
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^W'-^
ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL. 577
remboursement que nous avons fait aux diverses ceuvres d'as-
sistance par le travail, auxquels les bons oiit ^t^ pr^sent^s, que,
sur les 1659 bons distribu^s, 143 ont 6t6 utilises de f6vrier 1895
k ddcembre 1895; 80 de dficembre 1895 ft d^cembre 1896, et 171
de d^cembre 1896 h d^cembre 1897, soil au total 394, ce qui,
pour 1659, donne une proportion approximative de 24 p. 100,
chiffre notablement sup^rieur h la moyenne d'utilisation des
bons distribu^s dans la rue. La moiti^ environ des assist^s qui
se sont ainsi pr6sent6s aux ceuvres avec leur bon de travail
n'ont pas travaill6 plus d'un jour ou ont mal travaill^; environ
14 p. 100 de ceux k qui des bons ont 6i§ remis par les ceuvres
de foumeaux ont bien travaill^ et manifesto r6ellement le d6sir
de sortir de la mis^re par le travail; c'est environ 5 p. 100 de
plus qu'on n'en trouve parmi les solliciteurs de la rue.
Les ^tablissements les plus recherch^s par les porteurs de
bons ont ^t^ ceux oti la remuneration a lieu en argent.
Les femmes ont proportionnellement plus profits de Tassis-
tance offerte que les hommes, et k ce sujet nous adressons nos
plus sinc^res remerciements k M°* Ferdinand Dreyfus qui a
donne une lai^e etgen6reuse hospitalite dansses ouvroirs ate-
liers aux femmes munies de nos bons.
II y a eu des erreurs de la part de quelques distributeurs de
bons, ou des abus de la part de certains assistds, car nous avons
retrouve jusqu'ft 20 bons^manant de la m^me oeuvre de four-
neaux et portant le nom de la m6me personne.
Les assistes de la Bouchee de pain ont utilise leurs bons en
plus grande proportion que ceux des autres societes et ceux
de la Societe philanthropique en plus forte proportion que ceux
de la Societe de Saint- Vincent-de-Paul.
Une nouvelle attribution de nos bons du comite central va
etre faite k ces ceuvres.
Entente entre les bureaux de bienfaisance et les ceuvres
d'assistance par le travail. — La circulaire de M. Dupuy, mi-
nis tre de rinterieur, en date du 8 novembre 1894, engageant les
bureaux de bienfaisance k pratiquer Fassistance par le travail
et le decret des 15-19 novembre 1895, portant (art. 28) que « les
bureaux de bienfaisance pouiTont s*entendre avec les comites
REVUE PHILANTBROPIQUE. — II. 37
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578 REVUE PHILANTHROPIQUE.
d'assistance par le travail h TeflFet de substituer autant que pos-
sible les secours en travail aux secours en ai^ent » ; il 6tait
int^ressant de savoir quelle suite avait 6t6 donn^e h cette pres-
cription ; nous avons demands des renseignements k ce sujet
aux di verses oeuvres de Paris et de la province.
A Paris, les oeuvres d'assistance par le travail du march^
Saint-Germain, des VHP etXVlParrondi8sement(rue Salneuve),
du XVI® arrondissement ont ^tabli une entente avec le bureau
de bienfaisance et donnent, apr^s travail, des secours jusqu'i
concurrence d'une somme de 10 francs g^n^ralement^ suivant
des modes diffdrant avec Torganisation etle fonctionnement de
ces oeuvres. II est k remarquer que dans bien des cas les assistds
ne sont pas encore choisis avec tout le discernement n^cessaire
et qu'un bon nombre d'entre eux sont incapables de reprendre
un travail normal aprJ^s le travail d'attente qui leur est donn6
dans les ateliers d'assistance ; ilfallait du reste s'attendre ^cela,
6tant donn^e la clientele sp^ciale des bureaux de bienfaisance
et les attributions normales de ceux-ci. II est toutefois k sou-
haiterque cette entente, pr^vue et pr^conis6e par le d^ret de
novembre 1895, persiste, car, avec un peu plus d'habitude de la
part des r6partiteurs des secours, elle pourra dtre f^conde en
bons r^sultats. Dans certains arrondissements, dans le IP no-
tamment, elle n'a pu s'6tablir malgr^ les d-marches faites dans
ce sens par le president de la Soci6te d'assistance par le travail,
M. Blachette.
Les oeuvres d'assistance par le travail qui ont un but special
(pour les Iib6r6s, les enfants et adolescents, les aveugles, les
femmes) n'ontaucune relation avec les bureaux de bienfaisance.
Douze oeuvres de province rdpondant k ma question m'ont
fait savoir, les unes qu'elles ignoraient les dispositions du d6cret
ou le ddcret lui-m^me, les autres que les dispositions 6taient
pour les bureaux de bienfaisance rest^es lettre morte, mais
qu'elles essaieraient d'^tablir I'entente pr6vue qui leur parais-
sait en effet pouvoir 6tre trfes f^conde en r^sultats.
L'assistance par le travail de Nancy est seule en relations
r^guliferes avec le bureau de bienfaisance, qui lui donne ime
subvention annuelle de 1500 francs et auquel elle donne en
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL. 579
retourdesbonsde travail. EUe a re^u de lui 250 assist6s dans
le dernier exercice. Les bureaux de bienfaisance achfelent
quelques vMements pour les pauvres k Pau et k Bordeaux, un
certain nombre de ligots a Tassislance par le travail.
On peut done dire que, dans Tensemble, le d^cret est rest6
lettre morte tout, comme- la circulaire minist^rielle de
M. Dupuy, et que c'est sur Tinitiative priv6e qu'il faut compter
pour d^velopper Tassistance par le travail et lui faire donner
les r^sultats qu'on peut en attendre. II faudrait^ toutefois, que
les bureaux de bienfaisance fussent bien convaincus de Futility
qu'il y aurait k se conformer aux prescriptions du d6cret; les
pauvres dignes de ce nom y gagneraient grandement. Ce qui
s*est pass6 k ToBuvre du XVP arrondissement en t^moigne :
sur 350 n^cessiteux envoyfe k Fatelier, 160 ne se sont m^me
pas pr^sent^s et, comme ils ^taient en 6tat de travailler, ils ont
pu 6tre sans scrupule ray^s de la liste des assist^s et les vrais
pauvres ont profits de ce qui leur aurait 6i6 attribu^ sans
eela.
Parmi les questions mises ^ T^tude sur la demande d'oeuvres
de province directement int6ress6es k leur solution, je citerai
la question du certificai de travail et celle de la validity dun
legs fait a un bureau de bienfaisance en vue d' organiser rassis-
tancepar le travail,
A Toccasion d'un incident survenu k Bordeaux (plainte
port^e par des assist^s et demande d'explication de M . le procu-
reurde la B^publique), M. P. de Pelleport-Burette, administra-
teur g^n^ral deTOEuvre bordelaise de Tassistance par le travail,
a pos^ au comity central la question suivante : Les (Buvres d'as-
sistance par le travail sont-elles tenues de d^Iivrer aux assist^s,
lors de leur sortie des ateliers, un certificat de travail^ confor-
m6ment k la loi du 2 juillet 1890 sur le contrat de louage de
travail?
Sur un savant rapport de M. G. Frenoy, notre secretaire ge-
neral adjoint, il a 6t6 admis unanimement qu'une ceuvre d'as-
sistance par le travail ne pouvait 6tre assimilc^e k un dtablis-
sement industriel, la remuneration du travail de I'assiste,
une charite toujours sup^rieure k la valeur du travail produit,
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T580 REVUE PHILANTHROPIQUE.
^tant plus qu un salaire. Un prdc^dent existait d'ailleurs k
Paris, il nous a ^U signals au cours de la discussion par
M. Brunei, directeur de la maison hospitali^re de M. le pasteur
Robin : des assist^s ayant adress^ une reclamation k Teffet
d'obtenir un certificat de travail ont 6t€ d^bout^s de leur de-
mande par le commissaire de police.
Nous avons toutefois formula Topinion suivante : « Le
comity central estime qu'il est conforme au principe qui anime
nos oeuvres de d^livrer aux assist^s qui le demandent et
aprfts verification autant que possible de leur identity, une
« attestation de prhence » etablissant uniquement d'une fa^on
exacte et detaill^e le nombre d'heures ou de jours passes dans
retablissement et les dates de ccs presences.
Cetle attestation de presence ne pourrait 6tre confondue avee
un certificat de travail ou m6me de s^jour, celui-ci ne pouvant
gu^re s'appliquer qu'aux oeuvres qui hospitalisent leurs assis-
tes. Les mentions port^es sur Tattestation doivent 6tre stricte-
ment limit^es au nombre d'heures de presence et exclusives
de toute indication d'un travail professionnel.
Gette attestation n'a d'autre but et d'autre raison d'etre
que de permettre & Tassiste de justifier de son moded*existence
et de Temploi de son temps pendant le cours de Tassistance.
A la suite de cette consultation, le comite de TOEuvre borde-
laise de Tassistance par le travail a ajoute Tarticlesuivant it son
r^glement : « Le directeur accordera une attestation de presence
aux ouvriers, sauf le cas de fautes graves. »
A Foccasion d'un legs important fait au bureau de bienfai-
sance de Redon,en vue de cr6er ou faire fonctionner une oeuvre
d'assistance par le travail, M. le maire de Redon nous a consultes
pour savoir s'il pouvait ou non accepter ce legs dans les condi-
tions enoncees. Dans un rapport trfes precis et tr^s documents,
M. G. Frenoy a fait observer que si la loi du 7 frimaire an V,
portant que les bureaux de bienfaisance sont etablis exclusive-
ment pour procurer des secours k domicile, semblait interdire
Tacceptation du legs, la circulaire du 8 novembre 1894, et le
decret des 15-19 novembre 1895, sur Tassistance k domicile,
portant (art. 28) : « les bureaux de bienfaisance pourront s'en-
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL. 58:1
tendre avec les comit^s d'assistance par le travail a Teffet de
substituer autant que possible les secours en travail aux se-
cours en argent », semblait devoir Tautoriser, d'autant mieux,
que d6jk plusieurs bureaux de bienfaisance, do Paris notam-
ment, pratiquaient par rinterm^diaire des oeuvres priv6es Tas-
sistance par le travail.
Le comit6 central, adoptant les conclusions de son rapporteur ^
a engage M. le maire de Redon k accepter le legs dans les con-
ditions 6num^r6es dans le rapport, c*est-8i-dire pour la fondation
d'un ^tablissement d'assistance dans lequel des secours en travail
seraient donn6s par le bureau de bienfaisance. Je viens d*ap-
prendre que c*est ce qui a 616 fait.
Deux autres questions sont encore en ce moment k Tordre
du jour des reunions du conseil : (a) Les graves et les oeuvres
d'assistance par le travail ; {b) Tassistance par le travail et les
oeuvres de patronage des libdr6s.
Fiddle h son programme : vulgariserTid^e de Tassistance par
le travail, en faciliter et en g^n^raliser les applications, le
comity central a donn^ un concours actif aux oeuvres d'assis-
tance par le travail.
Comme les annees pr6cddentes, nous avons employ^ les
dons qui nous ont 6t6 faits et une partie de notre avoir a des
subventions aux oeuvres de Paris et de la province. Les dons de
M. Porg^s{l 000 fr.), deM.Desmazures(500 fr.),deM. Alexandre
Weill (SOOOfr.), du cercle de la rue Volney (150 fr.) ont 6i6
ainsi r^partis; 15 oeuvres ont regu des subventions variant de
200 k 1800 francs suivant leurs bf soins, leurs ressources, les
r^sultats obtenus.
Nous avons mis au service des oeuvres notre activity, nos
relations, notre influence pour leurfaireobtenir les subventions
qu'elles demandaient et qui nous paraissaient justifi^es, et nous
avons 6t6 assez heureux pour r^ussir dans nos d-marches. Nous
en avons encore quelques-unes k tenter en ce moment, notam-
ment en faveur des oeuvres d'assistance par le travail de Mar-
seille et d'Amiens, qui mdritent tons les encouragements et
tons les appuis; nous espdrons bien les voir aboutir prochaine-
ment. C'est surtout auprfes de la commission de repartition des
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582 REVUE PHILANTHROPIQUE.
fonds du pari mutuel que nous sommes pri^s dintervenir h
Toccasion de fondations oud'agrandissements d*ateliers, mais k
cela ne se bornent pastes demandes qui nous soniadressdes, les
desiderata qui nous sont exprim^s. Un grand nombre d'oeuvres
nous prient d'intervenir pour chercher h obtenir une modifica-
tion k la jurisprudence adoptee jusqu'i ce jour. La Commission
donne en effet pour un besoin urgent et exceptionnel, la con-
struction ou la refection d'un atelier par exemple, mais elle ne
donne rien pour aider au fonctionnement de Toeuvre. C'est une
m^re qui se soustrait k la loi de Tallaitement matemel. Bien
qu'approuvant absolument les considerations qui accompagnent
le d6sir exprimd par nos correspondants, car nous savons
quelle heureuse influence aurait une subvention, si minime
Mt-elle, qui serait consid6r6e comme un t^moignage de bon
fonctionnement, nous craignons fort de ne pas r6ussir sur ce
point ii faire donner satisfaction it nos coUaborateurs, pourtant
si d^vou^s et si dignes de rint6r6t des pouvoirs publics. Les
oeuvres int^ressantes qui sollicifent des subventions sonl si
nombreuses et les sommes attributes k I'assistance publique,
et notamment au service de Tassistance mddicale dans les cam-
pagnes, sur les fonds provenant du pari mutuel, que nous
n'osons, quant k present du moins, espdrer une amelioration
de la situation en ce qui conceme sp^cialement les ceuvres
d'assistance par le travail.
Nous avons fait une active propagande, tant par la cor-
respondance manuscrite que par la parole et par Tenvoi de
nos documents imprimis, en faveur de Tid^e et de ses appli-
cations. L'an dernier nous avions adressi nos tableaux d*en-
qu^te sur Tassistance par le travail en France k tons les con-
seils g^n^raux qui, sur notre invitation, nous en avaient fait
lademande; cette annde, sansnouvelle invitation de notre part,
plusieurs demandes nous sont encore parvenues : nous nous
sommes empresses d'y r^pondre et dans plusieurs d^partements,
sur les 20 qui ont ainsi demands nos documents, Tid^e fait
son chemin et la fondation d'oeuvres d'assistance par le travail
nous parait prochaine.
Je me suis personnellement, au cours de cette ann^e, occupy
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL. .>83
de la fondation de Tassistance par le travail a Amiens, i Lille,
h Reims, Jl Toulouse ; partout, j'ai rencontre des activit6s et des
bonnes volont^s qui nous permetteni d'esp6rer un succ^s pro-
chain. A Amiens, ce succ^sest aujourd'hui certain, TcBuvre est
constitute et fonctionne d'une manifere remarquable. Je suis
en outre cncorrespondanceavec Dijon, Pontivy, Poitiers, Tours,
^pemay en vue d'y organiser Tassistance par le travail.
Les difficult^s ou preoccupations qui arr^tent T^lan de ceux
que s^duisent Tid^e et les r^sultats, aujourd'hui connus,de son
application sont partout k peu prfes les m femes : il y a d6jh tarit
d'oBuvres ! Quel travail ferons-nous exdcuter ? Comment trou-
verons-nou.s T^coulement des produits du travail ? Ne va-t-on
pas dire que nous faisons concurrence k Tindustrie locale ? A
toutes ces preoccupations on pent r6pondre ; on pent mdme les
dissiper en montrant ce qui se passe partout oti existent aujour-
d'hui des ceuvres d'assistance par le travail. A cette objection:
il y a tant d'cEuvres ! nous r6pondons : Tassistance par le tra-
vail est I'ceuvre de pr^voyance des autres ceuvres comme de
Tassistance publique ; elle tend la main k Touvrier temporaire-
ment sans travail, pour lui conserver la quality et la dignity
de travailleur; elle ne veut pas qu'il tende la sienne sans rece-
voir une aum6ne, perde sa dignity et devienne un mendiant.
Empfechant ses proteges de devenir successivement des oisifs,
des mendiants, des ivrognes, des vicieux, des crimineh et de
donner le plusfftcheuxetle plus contagieux des exemples,celui
de la paresse, dans la famille et dans rentourage,nos ceuvres,
par une assistance honorable donn^e en temps opportun, dimi-
nuent, c'est incontestable, les charges qui incomberaient plus
tard au budget de la charity puj>lique et priv^e, des ceuvres, de
r^tat et de la commune qui auraient tour k tour k pourvoir k
leur subsistance, car ils seraient sans elles venus augmenter le
nombre d6jk si grand des parasites de notre vieille society. Et
les pauvres, les vrais pauvres," ceux que nous aimons et respec-
tons, ne seront-ils pas heureux que vous ayez d^fendu leur
bien?
Quant au travail, il doit 6tre, nous Tavons toujours dit, un
travail banal, facile k ex^cuter sans apprentissage, ne consti-
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584 REVUE PHILANTHROPIQUE.
tuant pas un Iravail industriel proprement dit, portant sur
une mati^re premifere sans valeur, ne faisant pas concurrence,
pr6cis6ment parce qu'il est de pen de valeur et qu'il ndcessite
beaucoup de main-d'oeuvre, un travail industriel: fabrication
de margotins ou ligots, d'^tiquettes pour colis, de sacs en
papier, cassage de pierres pour macadam, triage de chiffons,
d^pcQage de vieux corsets, effilochage de vieux clibles, triage
de graines et autres travaux divers, polissage de pierre ponce,
ajustage de debris de cuir pour talons de chaussures h bon
march^, fabrication de liens pour Tagriculture, fabrication de
chainettes on fer, reparation de vieux sacs, phage et mise
sous bande d'imprim^s, etc., etc.
L'6coulement du produit dii travail n'est r^ellement diffi-
cile que s'il y a un tr^s grand nombre d'assist^s et par inter-
valles seulement. II a fini par s'op^rer partout k pen pr^s r6gu-
li^rement, grAce k Tactivitd d^ploy^e par les directeurs ou
administrateurs des oeuvres et an concours donn6 par les adhe-
rents, en ce qui concerne les margotins ; quant aux autres
objets, ils s'dcoulent au fur et k mesure de la fabrication puis-
qu*ils ne sont faits ou manutentionn^es que sur commando.
Au point de vue des reclamations que pourrait faire en-
tendre rindustrie, nous pouvons rassurer entidrement nos col-
laborateurs, les fondateurs d*oeuvres d*assistance par le tra-
vail. Ni It Paris ni ailleurs, aucune reclamation ne s'est pro-
duite ou, pour etre absolument exact, une seule s'est produite,
et de qui venait-elle? d'un entrepreneur de travaux dans les
prisons? Cost tout au moins bizarre. Get industriel se plai-
gnait que Toeuvre si interessante des jeunes adultes liber^s
fondee parM. Tabbe Millard, et presidee par M. le conseiller
Petit, recevant les jeunes detenus a leur sortie de prison, les
rehabitu&t & la vio honorable en leur faisant executor dans
ses ateliers d'assistance des travaux de polissage de cuivre et
autres.
Par contrc, et ceci a plus de valeur que cela, j'apprends par
M. le conseiller Fournier qu'i Amiens « une Chambre syndicate
d'ouvriers vient d'adresser k la Societe d*assistance par le tra-
vail une somme de 202 francs recueillie dans une petite fete de
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ASSISTANCE PAR LE TllAVAlL. 58&
la corporation ». Je ne connais pas de plus touchant et de plus
pr^cieux encouragement que celui donn6 par ce groupe ouvrier,
et je suis plus heureux encore de le faire connattre que defaire
savoir Tappr^ciation, pourtant tr^s flatteuse, du jury de Tex-
position de Bruxelles qui nous a fait d^cerner un dipl6me
d'honneur.
SITDATION ACTUELLE DE l'aSSISTANCE PAR LE TRAVAIL
EN FRANCE
Si nous nous reportons k Thiver 1890-91, dont la rigueur
exceptionnelle a n6cessit6 rimprovisation de secours excep-
tionnels qui, par leur mauvais fonctionnement et leurs mauvais
r^sultats, m'ont fait entrevoir la n^cessit^ de d^velopper et
d'^tendre Tassistance par le travail et pour cela de fonder
notre comit6 central, nous voyons qu*& cette 6poque, mettant h
part les travaux dits travaux de charity, il y avait en tout en
France dix oeuvres au plus pratiquant sous des formes diverses
Tassistance par le travail, et que le mot et la chose n'dtaient
connus que d'un petit nombre de philanthropes et d*6cono-
roistes.
Aujourd'hui, au contraire, grftce en grande partie k Tactive
propagande faite par le comity central, au retentissement
qu'ont eu dans la presse et dans le public les discours pronon-
c^s dans ses assemblies g^n^ralespar ses ^minents presidents,
M. L^on Say, M. Jules Simon, M. Alfred M^zi^res, il y a en-
viron 30 ceuvres d'assistance par le travail fonctionnant sur
divers points de la France; lout le monde salt qu'il existe un
mode d'assistance dit assistance par le travail et tr^s nom-
breux sont ceux qui Tappr^cient, le pratiquent et le pr^co-
nisent. Les congr^s s'en occupent, non seulement au point
de vuc de la repression de la mendicity, mais comme d'un
moyen de maintenir Touvrier atteint par un ch6mage involon-
taire dans la voie et Thabitude du travail. Une th^se vient
d'Wre soutenue sur la question par M. Jacot, devant la faculty
de theologie de Montauban, Tassistance par le travail est men-
tionn^e au programme des cours d'^conomie politique k la Sor-
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586 REVUE PHILANTHROPIQUE.
bonne. 11 y a m6me des outranciers de Tassistance par le
travail, tel M. A. Marechaux dont M. Jean Voirien analysaii le
travail sur Tassistance publique dans le num^ro de d^cembre
de la Revue PhilanlhropiquCy qui propose une amende de 20 k
500 francs, avee augmentation de p^nalit^ en cas de r6cidive,
pour celui qui fait Taumdne dans la rue ou laisse mendier de-
vant sa porte, alors qu'il pourrait donner un bon de travail.
Nous ne sommes pas si fdroces, mais nous voyons sans peine
ces exag^rations qui t^moignent des progr^s faits vers le but
que nous poursuivons, la substitution du bon de travail k
Taumdne banale pour tout individu valide.
Tandis qu'auparavant les conseils g^n^raux se bornaient
Jl ^mettre des voeux purement platoniques pour r^clamer des
mesures propres k restreindre le vagabondage et la mendicity,
vingt-quatre ont pr^conis^ Tan dernier dans ce but Tassistance
par le travail, sur lesquels : sept se sont d^clar^s prdts k favoriser
rinitiative priv6e qui voudrait Torganiser : ceux de TAriftge, la
Dordogne,le Finist^re, TH^rault, le Jura, les Basses-Pyr^n^es,
la Somme. Six approuvent Tid^e de Tassistance par le travail
et ses applications; ce sont ceux de TAUier, la C6te-d'0r,
TEure, le Haut-Rhin, les Vosges, ITonne. Quatre pr^conisent
des ateliers municipaux d'assistance ; ce sont ceux de Tls^re,
la Loire, le Maine-et-Loire, la Haute-Mame. Trois r^clament
une maison de travail d^partementale ; ce sont ceux du' Loiret,
de la Seine-lnf^rieure, du Vaucluse. Un demande la creation
de gites d'6 tapes avec travail, celui de Sa6ne-et- Loire. Trois
mettent la question k T^tude ; ce sont ceux de la Loz^re, le
Nord, rOrne.
Nous constatons avec plaisir qu'un certain nombre de d6-
partements favoriseraient Tinitiative priv6e, et que plusieurs
seraient disposes k cr^er des maisons de travail, qui seraient
des d6p6ts de mendicity modernises et restreints k I'usage des
individus ^qui le travail pourrait ^tre impost. Plusieurs ont
adopts le projet d'organisation r^gionale d'assistance, si bien
couQu, que M. Paul Deschanel a pr^sent^ au conseil g^n^ral
d'Eure-et-Loir.
Les circulaires ministdrielles des 8 novembre 1894 et i9
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL. 581
avril 1895, aux pr^fets recommandent Tassistance par le tra-
vail, les publications de Toffice du travail sur les soci^t^s privies
d'assistance par le travail, le ddcret des 13-19 novembre 1895,
la presence d'un reprdsentant de M. le President de la Rdpu-
blique et des ministres h nos assemblies gdndrales tdmoignent
deTintdrfet que les pouvoirs publics attachent i notre entreprise
philanthropique et de Tappui moral qu'ils tiennent h nous
donner.
Les oeuvres nouvelles dont la fondation n'avait pas encore
616 annoncde lors de la demi^re assemblde sont celles de
Caen, Nancy, Amiens, Chartres et celle du V* arrondissement
k Paris (58, rue Daubenton).
11 n'y a pas de grands changements k signaler dans le fonc-
tionnement des ceuvres de Paris; je signalerai ce pendant :
Tannexion d'un bureau de placement gratuit h VQEuvre du W
arrondissemoUf place des Petits-Pferes ; le prochaind^placement
de VOEuvre du marchi Saint^Germain, la ville reprenant ses
locaux pour y ddifier un palais des examens ; Taugmentation
considerable des journdes de travail accord^es aux assistds
munis d'un seul bon et Tam^lioration notable dans les condi-
tions et lesproduits du travail, h VCEuvre desVIII'' et XVW
arrondissement (rue Salneuve); Tachfevement de Torganisa-
tion des ateliers et de son outillage et Tinstallation d'un four-
neau pour distribution gratuite de soupes et distribution facul-
tative d'aliments k bon marchd, k V Atelier d^assistance du XVI^
arrondissement (avenue de Versailles); Tach^vement du nou-
vel atelier et des nouveaux dortoirs k la Maison hospitaliire
(rue Fessart).
V Association charitable pour les Pemmes du Monde (27, rue
d'Anjou), prdsid^e par le g6n6ral Bdziat, ddveloppe de plus en
plus Tassistance par le travail, de m6me que VOEuvre de la
Charity par le travail {^y rue Blanche), et VOEuvre des femmes
du Monde fondle par M"* Holstein (29, avenue de Wagram).
Les socidtds pour femmes pauvres, ouvriferes ou domes-
tiques suivent la m^me voie ; telles : VAsile temporaire pour
femmes pro testantes (68, rue de la Villette), V Assistance par le
travail (ouvroir rue du Val-de-Grftce), la Maison de famille^
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588 REVUE PHILANTHROPIQUE.
129, rue de TUniversit^), fondle par le P6re du Lac; VCEuvre des
mhes de famille, dirig^e par la soeur Saint- Antoine, conjoin-
tement avec V Hospitality du travail (de Tavenue de Versailles).
Parmi les ceuvres h destination sp^ciale, quelques-unes ont
subi quelques modifications ou transformations. Le Patronage
des libMs (rue des C^vennes), pr6sid6 parM. lesdnateur B^ren-
ger, a r(5uni en un seul ^tablissement^ par la construction d'une
annexe importante, les deux ailes autrefois s^pari^.es, et facilit6
ainsila surveillance, en diminuant les frais g^n^raux. La SociStS
desjeunes adultes libMs (rue du Chemin-Vert), fond6e par
M. Tabb^ Millard et pr^sid^e par M. le conseiller Petit, aujour-
d'hui bien organis^e quoique de date r^cente, obtient au point
de vue du travail produit et au point de vue moral d'excellents
rdsultats. La Maisoii de travail pour jeunes gens (rue de TAn-
cienne-Com^die) a organist solidement le travail, la sur-
veillance des ateliers et des dortoirs et 6tabli une entente avec
la commission des patronages pour faire surveiller ses assistds
aprfes leur placement. Les Ateliers d'aveugles d^pendantde Tas-
sociation Valentin Hatiy font travailier en atelier et Ji domicile
et d^veloppent le plus possible Tapprentissage. Sur environ
40 000 aveugles existant en France, environ 2000 seulement
sont secourus par Tadministration, les devoirs et les charges
dela soci^t^ sont done considerables et celles-ci augmentent
d*autant plusqu'elle est plus connue et plus sollicit^e. LOEuvre
des lib^r^es de Saint-Lazare, dirig^e par M""' I. Bogelot, voit ses
chargesaugmenter grandement par Tapplication de la loi B^-
renger, car ellc recueille et fait Iravailler, en attendant qu'elles
trouvent un emploi, les condamn^es bdn^ficiant du sursis.
En province : Amiens, — L'CEuvre amiennoise d'assisfance
par le travail a 6t6 fondle k la fin de Janvier 1897. EUe fonctionne
dans d'excellentes conditions et rend des services unanimement
appr^ci^s ; ses travaux consistent en fabrication de ligols, triage
de chiffons, ajustage de cuirs pour talons de chaussures. Elle
regoit 43 assist^s par jour et a besoin d'agrandir ses ateliers.
Elle demande une mcJeste subvention que nous nous effor-
cerons de lui faire obtenir.
Bordeaux, — L'organisation et la direction de Toeuvre sont
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL. 589
parfaites et, grftce k la g6ii6rosit4 des administrateurs, et k la
bonne r^glementation du travail, les recettes couvrenl les
d^penses.
L'oBuvre de Bourges nous signale la difficult^ de T^coule-
mcnt des produits et nous demande notre appui. Les travaux
ex^cut^s sont : cassage de noix, fabrication de paillassons^ de
tresses d'osier, de margotins.
Caen. — La Soci6t6 de solidarity sociale a fond6 en fSvrier
1896 une oeuvre d'assistance par le travail, fonctionnant seule-
ment pendant les mois d'hiver (cassage de pierres pour ma-
cadam) ; Tassistance par le travail pour les femmes est en voie
d'organisation.
Chartres, — A Chartres, M. Andr6, procureur de la R6pu-
blique, a greff^ sur la Soci^td de patronage des libdrds un 6ta-
blissement d'assistance par le travail pour les hommes, libdrds
et sans travail quelconque. Trfes beau local, admirablement
situ6, tr^s bien amdnagd au point de vue des ateliers, dor-
toirs, etc., entourd d'un terrain clos de 2 hectares. U peuthospi-
taliser 30 assistds.
Aprfes dix jours rdservds k la mise k Tipreuve, I'assistd, s*il
veut rester, signe un engagement de sdjour de six mois, jugd
ndcessaire pour la constitution d'un p6cule. II perd le droit au
pdcule s41 sort avant, sans 6tre placd, ou se fait renvoyer, et son
pdcule va, k titre de gratification, aux autres assistds. Travail :
fabrication de chaussons de laine, broiement de briques pour
ciment, travaux divers. Rdsultats trfes satisfaisants.
Dans le m6me ddpartement Tadministration a annexe un
dtablissemeut d*assistance par le travail au d6p6t de mendicity
de Courville, le fonctionnement est sensiblement le m6me que
celui de Tassistance par le travail de Chartres.
Limoges. — De nouveaux ateliers ont6t6 ouverts grftce k la
subvention obtenue de la commission du pari mutuel. La fre-
quence des graves partielles a oblige k insurer dans les statuts
que Toeuvre dtait r6serv6e aux seuls ouvriers atteints par un
ch6mage involontaire. L'oeuvre d6velof>pe en ce moment le
travail k domicile, plus moralisateur quand il est possible.
Lyon, — Beaucoup d'assistds sont envoyds par. les mairies
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590 REVUE PHILANTHROPIQUE.
et les asiles de nuit&i'assistance par le travail pour les hommes ;
beaucoup de femmes sont aussi envoy6es par les mairies k Tas-
sistance par le travail pour les femmes.
Marseille, — L'assistance par le travail a6t^reconnuecomme
(Stablissement d*utilit^ publique, — un terrain a 6t6 achet(5» un
chautier dit « chantier module a 6t^ construit. L'oBuvre a pr^t6
un concours actif k Tadministration municipale et aux pouvoirs
publics lors des grands chdmages forces de 1897. Elie demande
une subvention trfes justifi6e, que nous espfirons bien voir pro-
chainement accord^e.
Melim, — Une ailea 6i6 ajout^e k la maison de travail qui
pent ainsi recevoir 32 assist^s et 36 au besoin. L'oeuvre a orga-
nist cette annde, depuis le mois d'octobre, Tassistance aux
femmes. Elles sont log6es et nourries au dehors.
Nancy. — L'assistance par le travail a m fondle pendant
rhiver 95-96. Elle fonctionne pendant 5 mois, il y a dans son
organisation une d^fectuosit^ facheuse, c'est qu'il y a & c6t6
des assist^s temporaires, pouvant rester pendant 15 jours au
chantier, des assist^s permanents au nombre de 15 environ ; or
les oeuvres d assistance par le travail ne sont faites que pour
donner un travail temporaire, un travail d'attente, il ne faut
pas Toublier.
Ninies. — L'oeuvre ntmoise d'assistance par le travail est
en bonne situation, mais parfois il y a encombrement par les
produits fabriqu^s (ligots et sarments) et on doit fermer les
ateliers pendant 3 mois d'dt^.
Pati. — La soci6t6 a ajout^ Toi^nisation du travail de cou-
ture k domicile k ses travaux ant^rieurs (sandales, parapluies,
travaux de voirie). L'oBuvre est en progrfes. De concert avec les
autres oeuvres, elle public un journal, le Bulletin mensuel de
runion (T assistance.
Po'pignan. — L'assistance par le travail a acquis un im-
meuble au prix de 15 000 francs, sur lesquels 5 000 francs seule-
ment sont pay 6s. II a 6td inaugur6 le 1*^ d^cembre. En dehors
dc la dette contract^e, la situation est bonne, le travail estabon-
dant et le concours de la population assurd.
Toulouse. — L'assistance par le travail est, pour les hommes,
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ASSISTANCE PAR LE TRAVAIL. 591
r^serv^e aux Iib6r6s, dans I'atelier organist par la Soci(Sl^ de
patronage. Nous esp^ronsqu'elle sera ulWrieurement 6tendue
aux sans travail en g^n^ral. Pour las femmes, Thospitalit^ du
travail, fond6e et dirig6e par le p^re Guillermin sur le module
de rhospitalit^ du travail de Paris, fonctionne tr^s bien.
Tours. — N'a encore, comme Toulouse, qu'un atelier d*assis-
tancepar le travail pour les lib^r^s, mais M. Maurice, president
du tribunal, qui dirige la soci^td du patronage, va fonder une
0Bu\Te d'assistance par le travail pour les non-condamnds.
Sedan. — L'oeuvre de la reconstitution de la famille, fondle
par M"* F^licie Hervieu, a inaugur^ il y a plusieurs anndes les
jardins ouvriers, donnant pour un an d'abord et pour plusieurs
ann^es ensuite, du terrain, des graines, des engrais k des fa-
milies d'ouvriers. Les r^sultats obtenuspar ce mode d'assistance
aux travailleurs, par le travail de la terre, ont donn6 d'excellents
r^sultats ; aussi des jardins ouvriers ont-ils ^t^ cr^^s depuis h
Arras, Besangon, Boulogne-sur-Mer, Hazebruck, Mende, Mon-
treuiUsur-Mer, Nantes, Orleans, Reims, Saint-^tienne, Sois-
sons, Valenciennes, i pen prfes partout avec Tappui du clergd,
qui a justement consid^r^ qu'il y avait Ik un excellent moyen
d'6viter a Touvrier un s^jour prolong^ au cabaret et des promis-
cuil6s dangereuses, en m^me temps qu'un moyen d'am^liorer
les conditions d'existence de la famille ouvrifere.
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VARIETES
Visite da ministre de I'lnt^rieur k Tateller de runion
d'assistance da XVI^ arrondissement.
Le 24 jauvier, M. le ministre de I'lnterieur s'est rendu k Tatelier d'as-
sistance ^tabli il y a dix-huit mois avenue de Versailles n** 7, aupr^s du
pont de Crenelle, par 1' Union d'assistance du XV1« arrondissement, surun
terrain que la ville de Paris lui a lou6 poor dix-huit ans. L'ann^e derni^re
le ministre avait accord^ k Toeuvre une sorome de 2000 francs en vue de
la creation d'une cantine pour les travailleurs de Tatelier, et il profitail
de la r^cenie inauguration de cette cantine pour visiter Tatelier lui-m^me,
se rendre compte de son fonctionnement et des services qu'il rendait.
11 a ^t^ re^u ^son arriv6e par M. Gasimir Perier, president de la Soci^t^,
le Gonseil d'administration, et quelques amis de ToBUvre. L'atelier conte-
nait une soixantaine d*ouvriers, occup^s k la confection des ligois resin^s,
comprenanl le sciage du bois au moyen d'une scie rolalive actionn^ par
une roue que quatre hommes mettent en mouvement, le fendage, le ligo-
tage, le r^sinage, enfin Tassemblage en paquet de cinq ligots. Le ministre
a pass4 en revue ces difT^rentes operations, interrog^ un certain nombre
de travailleurs, visits Fatelier des femmes oil Ton confectionne des sacs
pour marchands de comestibles, le logement du chef de I'atelier et de sa
femme qui y est attenant , et la cuisine ou se pr^parait le repas.
Onze heures. Llieure du dtner ayant sonn^, la cloche a donn4 le signal
de la cessation du travail, et les ouvriers se sont pr^sent^s au guichet de
la cuisine, oil ils ont re^u "un bol de soupe, un plat de ragout, une demi-
livre de pain et un quart de litre de vin. lis se sont rendus aux tables pr^-
parses dans Tatelier mSme. Le ministre les y a rejoints, leur a demand^
ce quails pensaient de la cuisine, agoiit^ la soupe qu'il a trouv^e excellente
et a fait la reflexion qu'il eUt H^ bien heureux d'en avoir de semblable
au college.
La soupe est donn^e gratuitement. Elle revient a cinq centimes par por-
tion, et la d^pense est couverte par des dons des associ^s, qui s'inscrivent
pour une semaine, un mois ; d^s le d^but. Tun d'eux a pris la soupe k sa
charge pendant trois mois. Le reste du repas est pay6 par les travailleurs
eux-m^mes sur leurs salaires, a raison de iO centimes par portion et de
io centimes pour le quart de vin. Leur repas complet et tr^s substantiel
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r
VAR1£t6s. 5»3^
puisqu'il s'y ajoate un litre de soupe environ, leur revient a 35 centimes.
Quelques-uns ne prennentpas devin, en tout cas on u'en donne pas plus
d'un quart de litre; d*autres apportent leur pain.
II arrive parfois que le repas tout entier est donn^ gratuitement par un
associ6 ou un visiteur charitable. G*est ce qui est arriv6 le jour de la visite
du ministre.
Pendant que le diner se poursuivait, M. Gasimir Perier a ramen^ le
ministre dans I'atelier des femmes pour lui presenter ses coUaborateurs et
lui donner qnelques renseignements sur I'atelier qu'il venait de visiter et
sur Toeuvre elle-mfime.
L*^tablissement completde i'atelier acoiit^ 40000 francs, dont33 000 pour
les constructions, 4000 francs pour i'outillage qui est tr^s perfectionn^, et
3000 francs pour le fourneau et la cantine. La d^pense a ^t6 couverte par
une subvention de 30000 francs du pari mutuel, une allocation de 2000 francs
du ministre de I'lnt^rieur pour la cantine, et le surplus par une souscrip-
tion ouverte parmi les associ^s.
Les ouvriers sans travail sont admis k Tatelier soit sur la presentation
de bons de travail, soit directement, et ces derniers sont sonvent les plus
dignes d'int^r^t, maisils ne gagnent qu'une partiedu salaire de 25 centimes
environ par heure,soit 2 francs par journ^e de huit heures qui leur est
donn^, le surplus reste k la charge de Tceuvre, ou plut6t d'un fonds de
travail aliment^ par des donations sp^ciales. Ge fonds est employ^, soit 5.
faire travailler les ouvriers qui se pr^sentent sans bons, soit k conserver
les porteurs de bons le temps n^cessaire pour leur permettre de trouver
de Touvrage. Le d^veioppement du fonds de travail quiconstitue I'^l^ment
vital de Tateiier est en ce moment ^I'^tude.
Pendant les dix derniers mois, du I*' mars au 31 d^cembre, ila 61^ regu k
Fatelier 3700 bons de travail, et le travail fait repr^sente 4621 journ^esde
huit heures, dont 2 708, c'est-^-dire plus de la moiti^ k la charge du fonds
de travail.
Le nombre des travailleurs a 6t6 de 801, dont 143 femmes.
II a 6i6 pay6 8650 francs de salaires dont 6100 francs 4 des assist^s
appartenant au XVI'' arrondissement.
L'atelier n'est que Tune des branches de Toeuvre qui comprend en
outre une agence et un ouvroir.
L*agence est un bureau de renseignements au service des associ^s, de
renseignements sur les indigents et de renseignements sur les ouvriers
auxquels on pent recourir pour leur venir en aide. G'est, en outre, pour
les indigents un secretariat dupeuple, s'occupant de leurs affaires. G'est enfin
a Tagence que se tient et se centralise la comptabiiit^ assez compliqu6e des
trois branches de Tceuvre.
Elle n^nctionne a la mairie mSme dans une petite pi^ce que le maire a
Men voulu mettre k la disposition de I'Union d'assistance.
L'ouvroir donne du travail de couture k domicile aux m^res de famillc
indigentes, un comity de dames en assure le fonctionnement, en dirigeant
les confections et en procurant I'ecoulement des produits. L'oBUvre est labo-
rieuse, ingrate, et 11 ne faut rien moins que le d^vouement k toute 6preuve
de ces dames pour la mener k bien.
REVUE PHUJkJCTHROPIQUE. — II. 38
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594 REVUE PHILANTHROPIQUE.
A rouvroir, comme a i'atelier, le secoars materiel, le tra?ail procure
ne repr^sente qn'une pari) et non la plus importante da bien qui se fait,
c'est un terrain sur lequel se rencontrent les deux ^l^ments de Toeuvre,
ceux qui sont tomb^s dan« le malheur et ceuz qui leur tendent la main.
En mdme temps que Touvrage, les premiers recoivent le secours moral, le
secours du coeur qui les r^conforte. L'ouvroir et I'alelier seraient peu de
chose s'ils ^taient surtout le terrain oii s'exerce la charity active.
M. Gasimir Perier a termini I'expos^ de Toeuvre en appelant Tattenlion
du ministre sur les relations tr&s ^troites qui se sont stabiles entre TUnion
d'assistance et le Bureau de bienfaisance. Grdce k de pers^v^rants efforts
et apr^s beaucoup de t^tonnements, on est arrive k une application tr^s
satisfaisante de cette entente.
Le Bureau de bienfaisance a substitu^ les secours en travail aux secours
en argent pour les n^cessiteux, hommes et femmes, en ^tat de travaiUer,
et le travail est ex^cut^ k Touvroir ou k Tatelier de TCnion. Deux chiffres
feront saisir les r^sultuts de cette entente : le Bureau de bienfaisance a
donnS dans ces demiers mois 351 bons de travail, repr^sentant ensemble
une somme de 3 360 francs. Le tiers de ces bons n'a pas M pr^sent^, les
b^n^ficiaires ayant pr6f6r6 renoncer an secours plut^t que de le gagner
par leur travail.
Le ministre a vivement f^licit6 M. Gasimir Perier et ses collaboratears
de Toeuvre qu'ils out accomplie. Pr^c^demment d6']k il avait assists k des
reunions de soci^t^s d'assistance par le travail, mais il n'avait pas encore
visits d'ateliers, ni saisi ce mode d'assistance en pleine activity, et il a 4t^
tr^s frapp^ des services qu'elle peut rendre lorsqu'elle est bien organis^e et
dirig^e. Les entretiens avec un certain nombre de travailleurs I'ont toat k
fait ^difi6 k cet ^gard. Un point a particuli^rement appel^ son attention;
c^est; pour beaucoup, le manque de v^tements convenables qui les emp^che
de se presenter chez des patrons. 11 serait k d^sirer que Ton pilt constituer
un vestiaire au moyen de dons en nature ou de dons en argent avec cette
destination sp^ciale. Le ministre recommande cette id^e qui lui paralt
devoir completer tr^s utilement le fonctionnement de I'atelier.
Mais ce qui I'a surtout frapp 6 dans tout ce qu'il vient de voir, c*est cette
entente entre Toeuvre priv6e et le Bureau de bienfaisance, pour utiliser au
profit des secours publics cette forme si delicate k manier de I'assistance
par le travail. II adresse ses felicitations k M. Laffitte, adjoint du XVI* ar-
rondissement, d^l^gu^ k la pr^sidence du Bureau de bienfaisance dont les
efforts ont beaucoup contribu^ k la realisation de cette id^e, et |a remis
la croix de la Legion d'honneur k M. Baillard, membre du Gonseil d'ad-
ministration de TUnion d'assistance, qui, depuis des ann^es ,s'est consacr^
k cette oeuvre et n'a cess^ d'inspirer et de d^fendre toutes les id^es dont
I'appli cation a abouti aux r^sultats qu'il a aujourd'hui sous les yeux.
En se retii'ant, le ministre a traverse le grand atelier oh les travailleurs
s'etaient r^unis pour le saluer. II s'est arr^te au milieu d'eux et les a
exhortes k ne pas s'abandonner dans leur detresse momentan^e et k re-
prendre courage en vojant que des dmes g^nereuses s'occupent d'eux,
leur offrent ce travail qui les sauve de la mendicity. lis doivent recon-
naitre le service qui leur est rendu en s'aidant eux-ni6mes, en s'efforrant
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VARifiTES. 595
de retrouver le plus vite possible le travail r^gnlier qui leur permettra
de c^der la place k d'antres. C'est un abri temporaire qui leur est ouvert
ici ; ils contribueront k en multiplier les bienfaits en n'y s^journant que le
temps indispensable et retrouver un travail normal. JI. Casimir Perfer
a vivement remerci^ le ministre de sa visite qui est pour lui et ses collabo-
rateurs un pr^cieux encouragement ^continuer Toeuvre entreprise ; il I'a re-
merci^ aussi des sages et r^confortantes paroles qu'ilaadress^esaux assist^s,
et dont ils ont bien compris I'enseignement et la pens^e bienfaisantes.
J. DE GRISENOY.
Le Logement insalubre
PAR LE PROFESSEUR BROUARDEL (1)
Messieurs, il y a un peu plus d'un sifecle, en 1773, un membrede TAca-
d 6mie des sciences, Leroy, avait cboisi corome sujet de lecture, pour la
rentr^e publique de la Saint-Martin, une ^tude surlesh6pitaux, suivied'un
projet de construction d'un nouvel Hdtel-Dieu. Le ministre, auquel le ma-
nuscrit dut ^tre communique, engagea Tauteur k nepas faire cette lecture
« de peur qu'elle ne donndt I'alarme ».
Le silence imposd k Leroy ne rem^dia pas au mal, il retarda peut-^tre
les r^formes, etles plaintes s'61ev^rent de plus en plus vives. Dans sa cor-
respondance, Voltaire ^crivait k M. Paulet: « Vous avez dans Paris un
H6tel-Dieu ou r^gue une contagion ^ternelle, oti les maJades enl asses les
uns sur les autres se donnent r^ciproquement la pesle et la mort. » II
ajoutait: « Personne ne songe k y rem6dier. »
Sur ce dernier point, Voltaire se trompait. Saisie en 1777, par Leroy,
du m^moire qu*il n'avait pu lire quatre ans auparavant, puis en 1785 d'un
projet de translation de I'Hdtel-Dieu dress^parunarchilecle appel6 Poyet,
I'Acad^mie fut profond^ment ^mue par le tableau des mis^res qu'on expo-
sait devant elle; elle nomma une Commission compos^e de Lassone, Dau-
bentoo, Tenon, Bailly, Lavoisier, Delaplace, Coulomb, Darcet et Tillet.
Elle lui donna la mission d'^tudier d'une fa^ou g^n^rale Thygi^nc hospi-
tali^re.
Baiily, eu 1786, r^suma dans un brillant rapport les Etudes de ses col-
logues Tenon et Lavoisier.
Nous avons le droit de noter que dans cet effort vers le bien TAcad^mie
des sciences a montr6 ses sentiments de profonde piti^ pour les malheu-
reux; elle a fait plus: elle a su pr^ciser ce que Ton pouvait et Ton devait
faire. C'est de ses indications que sont n^es les r^formes accomplies
depuis lors.
(4) Cette 6tude s\ir le logement insalubre a 6t6 lue par M.le professeur Brouar-
del, doyen de la Faculty de m^decine et president du Comity consultatif d'hygifene
publique de France, dans la stance publique annuelle de rAcad^mie des sciences
du 10 Janvier 1898.
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I
I 596 REVUE PHILANTHROPIQUE.
' Je ne veux pas analyser les m^moires de Bailly, de Tenon, et exposer
I devant yous les^vices d'one organisation hospitali^re ydritablement ^pou-
vantable. Qu'il nous sufOse de suivre les commissaires de I'Acad^mie dans
les salles de rH6tel-Diea : leur aspect nous ^clairera sur ce qui constituait
alors un hdpital.
II y avait deux sortes de lits: les grands et les pelits. Les premiers
^taient les plus nombreux, chacan d'eux ^tait occapd par piusieurs ma-
lades, quatre et parfois six, tellement serr^s les uns contre lesautres quUls
n'avaient pas la possibility de se mouvoir dans le petit espace qui leur
6tait r^serv6.
Quand I'afQuence des malades ^tait trop grande on couvrait le lit d'une
sorte de soupente dans laquellc on entassait cinq ou six nouveaux
malheureux.
« Dans ces lils, od on couche quatre et six, dit le rapporteur, la cha-
leur morbidque particuli^re k chaque malade est d^natur^e et convertie
en une chaleur commune. » Plus loin, il ajoute: « Les contagieux, 4com-
mencer par les variolas, sont confondus dans les mdmes salles, dans les
m^mes lits, avec des personnes dont les maladies ne sont pas contagieuses. »
Ces horreurs datent d'un si^cle ! Je ne crois pas que dans la Divine
Com^die la puissante imagination du Dante ait jamais invoqu6 de supplice
aussi horrible que celui que la piti6 ainsi mise en pratique infligeait k ces
malheureux.
L'Acad^mie les prit sous sa protection . Les 6venemen(s qui se succ^-
d^rent pendant les derni^res ann^es du xviii' si^cle, la suppression tem-
poraire de rAcad6mie, interrompirent son OBuvre, mais sa voix avait M
assez puissante pour 6tre entendue de toute la France et du monde entier.
Aujourd'hui encore, lorsqu'il s'agit de construire un hdpital nouveau,
d'apporter une amelioration mdme de detail dans les am^nagements int^-
rieurs, les m^decins, quelle que soit leur nationality, invoquent les m6-
moires et les plans qui furent alors soumis k I'Acad^mie.
L'impulsion qu'elle avait donnee k la fin du dernier si^cle s'est done
prolong^e jusqu'd nos jours.
Je ne puis faire en ce moment une comparaison entre TH^tel-Dieu de
1787 et les hopitaux actuels; quelques mots suffiront pour caract^riser un
des progr^s accomplis; il est, suivantmoi, le plus important. Dans les
anciens 6tablissements hospitallers, tout ^tait confondu : les malades et
les maladies. Aujourd'hui chacune des affections contagieuses est ou sera
prochainement isol^e dans un quartier special. Ce n'est pas sans lutte
qu'une telle separation a ete obtenue et nous n'avons r^ussi que depuis
quelques ann^es k isoler les uns des autres, dans les hdpitaux d'enfants,
ceux qui sont atteints de dipht^rie, de scar la tine, de rougeole ; dans les
salles de chirurgie, k distinguer les blesses en deux categories. Enfin,
depuis un an, nous avons cr^e des quartier s ou des hdpitaux speciaux
pour les malheureux tuberculeux.
Un exemple permet de jugerTimportance de cette reforme et les diftl-
culies de son application.
En 1856, le professeur Tarnier etait interne k la Malemite de Paris; la
mort enlevait une femme sur 17 accouchees. MO par un sentiment de pro-
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f
VARlfeTES. 59T
fonde piti^ pour ses malades, giiid6 par une sagacity exceptionnelle, une
perseverance qui n'a connu aucnne d^faillance, Tarnier parvint k ^tablir
que le'germe de la fi^vre puerp^rale se transmet d'une femme malade k
ses voisiDe&; ii lui falint dix ans pour faire pln^trer sa conviction dans
Tesprit de ses confreres, il lui fallut dix autres ann^es pour obtenir la
construction d'un pavilion dans lequel les accouch^es fussent absolument
Isoldes entre elles. On perdait une ferome sur 17, il n'en succomba plus
qu'une sur 100.
Qu'avait f$ut Tarnier? II avait appliqu6 le principe que TAcad^mie avait
formula il y a un si^cle: il avait isol^ les malades dangereux les uns pour
les autres.
Depuis lors votre Compagnie a entendu expose r devant elle les im-
mortelles d^couvertes de Pasteur. Elle sait que, dans des conditions
ddtermin^es, les m^thodes antiseptiques pr^servent les malades de tout
contage.
Ce serait une erreur de croire qu'elles suffisent dans toutes les circon-
stances. Dans un grand nombre de cas, le principe de Tisolement peut
encore seul £tre appliqu^. L'expdrience faite dans les hdpitaux nous a
moutr^ sa valeur, les d^couvertes de Pasteur nous out appris qu'il n'y a
pas de maladie contagieuse naissant par generation spontanee.
D^s* 1860, Trousseau disait: « Je professe que les maladies conta-
gieuses se s^ment de graines, par consequent se transmettent par des
graines. »
Ce principe a triomphe dans Torganisation des hdpitaux actuels. Son
application est encore bien incomplete, mais il n*est plus conteste.
Devons-nous nous arreier? Pouvons-nous, quittant le malade rerua
Tbopital, ne pas nous demander oii il a contracte sa maladie, dans quelles
conditions elle est survenue, et ne devons-nous pas rechercher si celles-ci
ne peuvent pas etre modiiiees?
G'est sur ces candidats k Tbdpital que je voudrais appeler votre pitie.
Je demande k TAcademie de prendre leur cause en main, de faire pour
eux ce qu'elle a fait, il y a un siede, pour les malades de THdtel-Dieu.
U est etabli qu'^ llidpital les maladies contagieuses se propagent de lit
a lit. Ce qui est vrai dans les h6pitaux Test egalement en ville. C'estdans
les logements etroits, encombres, que ces affections se cultivent. Le nombre
des contacts se multiplie en raison de retroit espace accorde k chaque
habitant. G'est dans ces logements insalubres que seconstituehtdes foyers,
c'est de \k qu'ils rayonnent, frappant dans le voisinage et parfois k de
longues distances, etablissant une solidarite funeste entre tons les citoyens
d'une ville et mdme d*une nation. Cela est incontestable pour les maladies
dites epidemiques, les fl^vres eruptives, par exemple; cela est vrai egale-
ment pour d'autres maladies que Ton tient pour moins suspectes. Je vou-
drais concentrer votre attention surtout sur Tune d'elles, la phtisie.
Voyons comment elle se propage. Quand plusieurs personnes occupent
une chambre unique, souvent pen spacieuse, si Tune d'elles devient tuber-
culeuse, est-il possible de preserver les autres?
Combien de fois les medecins n'ont-ils pas eu devant les yeux le triste
tableau soivant: un onvrier vit assez k Taise dans une ou deux chambres
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598 REVUE PHILANTHROPIQUE.
avec sa femme et ses enfants. II est pris de tuberculose. Sa femme le
soigoe avec un d^voaement qui, je le dis avec fiert6, est une r^le dans
lQU3 les milieux de notre soci^t6. Elle lutte pour subvenir aux besoins de
sa famille; les ressources s'^puisent, la maladie du man s*aggrave, la mi-
s^re s'abat avec ses privations sur la m^re et les enfants. Gette derni^re
tombe malade, contagionnee par son mari; tous deux prennent le chemin
de rh6pital. Les enfants sont recueillis par TAssistance publique, mais
celle-ci les regoit inocul^s eux-m§mes par legerme de la maladie, vou^s k
Ja mort ou aux infirmit^s.
Ce n*est pas \k un fait exceptionnel, pris au hasard ; c'est le spectacle
auquel, impuissants, les m^decins assistent chaque jour.
G'est ainsi que se propage, se multiplie de plus en plus la tuberculose,
qu'elle enl^ve les parents par phtisie et les enfants par la m^ningite, la
tuberculose osseuse ou intestinale.
De ces foyers primilifs la phtisie irradie dans la vide, en fait un centre
redoutable pour le reste du pays, et comme gr4ce aux facilit^s de la circu-
lation, les n^alades vont chercher k la campagne, dans des zones priviU-
gi^es, une gu^rison ou une amelioration, ils diss^minent danstoute T^ten-
due du territoire les germes de leur maladie.
Chaque ann^e, la tuberculose tue en France plus de cent cinquante
mille personnes. Elle pent revendiquer le cinqui^me ou le sixi^me de la
mortality totale. Elle frappe sortout les jeunes, ceux qui n'ont pas d^pass^
vingt-cinq ans ; les uns n'ont pas encore constitu6 une famille, les autres,
plus malheureux, en ont une; ils laissent leur femme trop souvent conta-
tamin^e, des enfants qui tombent k la charge de TAssistance publique,
gr^vent les Qnances de la commune et font plus tard, s*ils survivent, des
hommes peu vigoureux.
L'accoutumance est un terrible mod6rateur, elle ^mousserimpression,
et nous assistons impassibles k ce d^sastre continu, se r6p6tant chaque
ann^e. Nous ne semblons pas avoir conscience de sa gravit^. Prenons un
example : n'eprouvons-nous pas un sentiment d'indignation, de rivolte,
quand un accident deplorable, mais limits dans ses efTets, une explosion,
une collision sur un chemin de fer, fait, comparativement k la phtisie, un
nombre restreint de victimes.
G'esl Timpr^vu, la crainte de Tinconnu qui nous etreint. La plus meur-
tri^re des epidemics de cholera qui ait ravage la France, celle de 1854-
1855, a fait en deux ans 145 000 victimes, un peu moins en deux ans que
le tribut annuel de la tuberculose. Qui de nous n'a present k Tesprit Temo-
tion provoquee, 11 y a quelques mois, par la crainte de voir debarquer
dans nos ports la peste qui regnait k Bombay ? Gette crainte a boule verse
le commerce. 11 en est de meme de toutes les epidemies. Le cholera de
1884 a codte k laseule place de Marseille plus de 80 millions.
Je voudrais eveiller en vous, pour les epidemics permanentes de tuber-
culose, lliorreur que vous fait eprouver la crainte des autres fleaux.
Je le veux pour deux raisons : nous ne sommes pas desarmes, nous
pouvons enrayer la propagation de la tuberculose, nous n'avons pas le
droit d'excuser par notre impuissance notre indififereiice apparente ; puis
la phtisie n'est pas incurable, elle guerit m^me plus souvent que bien des
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VARlfeTtS, 590
maladies qui n'ont pas la m6me r^putatioD de gravity devant ropinion
pnblique.
EUe ga6rit si bien qu'h rouyerture des corps, dans plus de la moiti^
des eas, nous trouTons les traces d'uue luberculose aucienne, d^fiuitive-
ment enray^e, n'ayant aucun rapport avec la cause de la mort. II en est
ainsi rndme chez ceux que leur genre de vie, leurs habitudes ont priv^s des
soins n^cessaires. Gette certitude doit augmenter notre courage et auto-
rise k imposer pour la preservation et le traiteraent des tuberculeux des
mesures d'un caract^re radme un pea vexatoire .
II 7 a trente ans, eu 1865, Yillemin a d^montr^ que la tuberculose est
iuoculable, contagieuse ; en 1882, R. Koch a determine les caract^res du
germe tuberculeux. Nous savons comment celui-ci se propage, nous con-
naissoDS notre ennemi, ses moBurs : deyons-nous renoncer k le combattre?
GrAce aux travaux des ^l^ves de Pasteur, de Nocard en particulier, nous
. sommes ou nous aliens ^tre arm^s pour en pr^serrer nos stables: ne pou-
▼ons-nouB pas faire pour Tesp^ce humaine ce que nous prescrivons pour
Tesp^ce borine ?
Ou se fait la propagation de la tuberculose ? L'exp^rience de tons les
slides nous r^pond : Dans les grandes villes. Ceux qui ont creus^ le pro-
bl^me d'un peu plus ^hs ont fait remarquer que, k Paris, par exemple, la
mort par tuberculose se rdpartit bien in^galement, qu'elle pr^l^ve une dime
deux fois plus ^lev^e dans les quartiers pauvres, \k oil le logement est
insalubre et encombr^ ; que, dans les communes ouYri^res qui entourent
Paris, k Saint -Ouen, par exemple, la mortality par tuberculose est trois
fois plus ^ley^e que dans les quartiers riches de la capitale.
D'ailleursy si les conditions qui provoquent la maladie dans les grandes
Tilles se produisent dans des agglomerations de moindre importance, le
taux de la mortalite par tuberculose s'^l^ve et d^passe celui de la capi-
tale. Ainsi, iOOOO habitants perdent chaque aim6e, k Paris, 31 tubercu-
leux; Laval et Foug^res en perdent 60,8 i. Pourquoi ? Parce que \k encore,
du moins il en 6tait ainsi il j a trois ou quatre ans; les tissserands Ira-
vaillent dans des caves sombres et humides.
Je pourrais multiplier les exemples, suivre Passot k Lyon et vous
d^rire des logements tellement noirs, tellement humides, que, suivant
son expression, « ils no conviendraient pas k des animaux », suivre le
0^ Maurin k Marseille, vous montrer avec le D' Ou Mesnil ce qu'est le
logement du pauvre a Paris. Partout ce sont les m^mes vices et j'ajoute-
rai, parfois s'y ajoute une cruelle exploitation du pauvre par des dtres im-
pitoyables. Chevalier, en 1857, a rapports Thistoire d'un terrain de 5 hec-
tares, lou6 5 000 francs, et sous-lou^ par tranches k des mis^rables qui y
avaient 6difid des huttes de toute esp^ce. Ce terrain donnait un revenu de
22600 francs.
Ceux qui ont lu le livre de M.Du Mesnil savent que la situation ne s'est
pas modifl^e.
II ne faodrait pas croire que ces logements insalubres, encombr^s, ne
se rencontreut que dans les villes. Les m^decins de la campagne, les
0» Munaret, Layet, Monin, nous ont ^clair^s sur ce point. Nous-m^mes,
pendant les missions dont nous avons ^t^ charges lors des ^pid^mies de
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«00 REVUE PHILANTHROPIQUE.
cholera, de suette, de typhus, en avons observe dans toutes les regions de
la France. A Tourlavilie, dans la Manche, onze terrassiers couchaient dans
nne ancienne Stable, sans fenfire, n'ayant d'air que par la porte, les lits
se touchaient et on ne pouvait les atteindre qu*en passant les uns sar les
autres. Six de ces ouvriers furent atteints de cholera en deux jours.
Ge qui domine dans les vices de Thabitation dn paysan, c'est I'absence
^'air et de soleil. Les oavertures sont r^duites an minimum. G*est k ces ha-
bitations que peut s'appliquer le proverbe persan :«L& ou le soleil etl'air
n*entrent pas, le m6decin entre souvent. » Nous dirions plnt6t pour la
campagne la maladie entre souvent, car le paysan n'appelle pas volontiers
le m^decin.
II y a un si^cle, c'^tait dans les h6pitaux que la promiscuity assurait la
formation de foyers de pestilence et de mort ; aujourd'hui c*est dans les
logements insalubres, encombr^s que se cultive la tubercnlose. II en est
d'ailleurs de m6me pour le cholera, le typhus, la peste.
Les mddccins anglais venus k la conference de Venise, au commence-
ment de cetle ann6e, nous oat donn6 sur ce point les relations les plus
d^monstratiyes. Peu d'Europ^ens furent atteints de la peste k Bombay
parce qu'ils habitaient des maisons saines, planch^i^es, mais| dans ces
m^mes maisons les Indiens qui couchaient au rez-de-chauss6e, surlaterre
battue, etaieiit frapp^s en grand nombre.
Cette question des logements insalubres, la seule sur laquelle en ce
moment j'appelle votre attention, n'estpas neuve en France. En 1850, un
mouveroent g^n^reux provoqua T^laboration d'une loi sur les logements
insalubres. A la t^te des combattants, nous trouvons les noms de plusieurs
membres de Tlnstitut. Inspir^e par un noble sentiment, cette loi fut mal
concue dans ses moyens d'aclion, et Tun de nos confreres actueU, M. Th^o-
phile Roussel, pouvait, d^s cette ^poque, annoncer k la Chambre des
^^put^s qu'elle resterait sterile. La prediction de M, Th^ophile Roussel se
r^alisa malheureusement de point en point.
Un grand nombre de nos confreres flrent de louables efforts ; ils con-
stitu^rent des soci^t^s particulidres et cr6^rent des maisons ouvri^res
salubres.^ Mais que peut la meilleure volonte si elle reste Isolde ? Nous
admirons leur ardeur, leur perseverance, qui ne s*est pas dementie depuis
un demi-siede ; elies ne sont pas restees sans resultal, mais devant Tim-
mensite du mal, lorsque chacun est solidaire de son voisin, qu'attendre de
rem^des locaux, sans coordination entre eux ?
Le Parlementest de nouveau saisi de la question. Les esprits les plus
droits, les plus ouverts aux idees gen^renses restent hesitants; obliges
d'etablir une loi sur une base scientiflque,ils se deOent de leur competence.
Si I'Academie veut se saisir de la question, si elle rent se souvenir de
Toeuvre accomplie il y a un si^cle, du succ^s obtenu, je ne doute pas qn'elle
ne donne k ce probieme une solution aussi henreuse. Lorsqu'elle aura
mis en pleine lumiere les necessites auxquelles il faut pourvoir, les der-
nieres hesitations s'evanouiront.
11 y a quelques mois, M. Bernaert, president du Conseil des ministres
de Belgique, recevait k Bruxelles les membres du Gongr^s des logements
insalubres. 11 leur disait : « Ge sera Thonneur de notre temps d'avoir corn-
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VARlfeTfeS. 601
pris, mieux qu'aucane autre ^poque, qu*il y a des int^r^ts imp^rieuse-
ment collectifs, que le bien de chaque partie du corps social est n^cessaire
-au bien des antres, que le d^voaement etFamour du prochaiu ne sont pas
seulement des vertas mais des devoirs, et qu'il appartient k ceux qui sont
arrives aa sommet de la colline d'aider les autres k y parvenir k leur
tour. »
C'esl cette ceuvre de salut que je mets, plein de confiance, entre les
mains de TAcad^mie des sciences.
Socl6t6 des Visitenrs des Pauvres.
DISCOURS DE M. JULES LEMAITRE
L'Assembl^e g^n^rale de la Soci^t^ des visiteurs des pauvres
dont nous avons parl6 dans notre dernier .num6ro, a tenu le
dimanche 30 Janvier son assembles g^n^rale annuelle, sous la pr^si-
dence de M. Jules Lemaitre, de TAcad^mie fran^aise.
Apr^s la lecture d'un int^ressant rapport de M. Ren6 Bazin,
M. Jules Lemattre a prononc^ une allocution charmante, pleine
d*esprit et de bon sens; nous sommes heureux de la reproduire in
extenso.
Mbsdames, Messieurs,
Yous connaissez le mot d*Augier. Une dame, venant d'entendre un
pr^dicatenr k la mode, s'^crie avec admiration: «ll a ditsurla charity des
choses si nouvelies! — A-t-il dit qu'il ne fallait pas la faire? » demande
quelqu'un. Des choses noavelles, je crois bien que, sur ce sujet-li, on n'en
trouve gu^re depuis T^vangile. Je ne vous en dirai done point : je ne ferai
que vous r^p^ter k ma mani^re ce que j'ai la dans le simple et Eloquent
rapport de M. Ren^ Baziu, et ce qui etait auparavant dans vos esprits et
dans vos coeurs.
Ne nous flattens point. £tre charitable m^me au hasard et sans discer-
neraent, cela &^']k veut un effort. Les pharisiens, peu estim6s de J^sus, don-
naient la dime. Or c*est d^j& tr^s rare de donner le dixi^me de son re-
vena. II y a des gens, mdme riches et assez bons, pour qui ce serait un
veritable arrachement. Mettons cependant tout au mieux. On a, je suppose,
bonne volenti. On fait assez volontiers Taumdne. On la fait sans orgueil.
On la fait dans une pens^e de reparation et de restitution, comme le re-
commandaient les P^res de I'^glise, pour qui la 'conception roraaine de la
propri^te — jus utendi et abutendi — ^tait une damnable erreur, el aux
yeax de qui certaines fortunes d^mesur^es 6taient par elles-m^mes un
scandale et un p4ch6.
Mais avec les meilleures intentions et ie plus ferme propos de n'^tre
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602 REVUE PHILANTHROPIQUE.
point ^oiste ni avare, on est sou?ent fort embarrass^. Dans les petits
groupes ruraux, m^me dans les petites villes* on salt ou sont les pauvres
et qui iissont. A Paris il en va autrement. Un des crimes de la civilisa-
tion industrielle et scientifique, |c'est en entassant les tdtes par millions,
d'isoler les 4mes. Dans ces agglomerations des grandes villes, oh les riches
et les pauvres ne se connaissent point et sont plus s^par6s par les moBurs
qu'ils ne F^taient jadis par les institutions, ou toute communication
semble couple entre ceux qui p^tissentet ceux qui seraient disposes k les
secourir, et ou, par surcrott, on a^ se garder des professionuels de la men-
dicity, il y a une chose aussi difficile que TefTorl de donner, c*est de savoir
h. qui donner; c'est d'atteindre les pauvres.
Et les atteindre n'est pas tout : on voudrait leur apporter un soulage-
ment efficace. 11 en est, par mi euz, dont la mis^re est telle — quelquefbis
h61as!4 cause de leurs vices — qu'elle ne peut 4tre, pour ainsi dire,
qn'entretenue et prolong6e. Ge n'est pas que vous vous d^sint^ressiez de
ceux dont le cas parait sans remade, ni m^me des misi^rables qui ne sont
pas vertueux. Mais vous ne pouvez toutfaire et vous 6tes bien obliges de
vous en remettre, pour emp^cher ceux-14 de mourir de faim, k des ceuvres
plus ancieunes et plus riches que la v6tre. Ge que vous vous proposez,
c'est justement d'enlever des recrues posssible k la sombre et dolente
arm^e du vice pauvre et de la d^tresse sans espoir. Vous recherchez ceux
qui peuvent encore ^tre sauv^s. L'article premier de vos nouveaox statuts,
fruit d'une experience genereuse,*deflnit ainsi votre objet : « La Society des
Visiteurs a pour but de venir en aide k des families qui, se trouvant dans
rimpossibilite momentanee de subvenir k leurs besoins, sont reconnues
susceplibles d'^chapper, grdce k un appui temporaire, k la mis^re defini-
tive. »
Quand vous avez trouv^ vos pauvres, une seconde difficulte se pr^sente :
c*est.d'etablir entre eux et vous des rapports vraiment affectueux et qui
leur semblent, It eux com me k vous, « naturels ». II n'est pas eommode
d aborder les pauvres d'un air qui soit exempt d'affectation, qui ne sente
ni un effort Irop grand, ni, d'autre part, le contentement de soi et le sen-
timent de sa superiority. Ges gens que vous voulez aider sont souvent tr^s
difrerents de vous par Teducation, par les mani^res, par tout le detail de
la vie extedeure. lis ne sont pas toujours agreables k voir. 11 j a, chei eux,
des choses qui peuvent d'abord vous choquer, et I'impression que vous en
recevez risque de vous donner un air de contrainte. Par suite, Jl est k
craindre que le premier mouvement de vos clients ne soit la defiance, et
que cette defiance fasse bient6t place k I'hypocrisie.
Surtout, il faut se garder de TafTreuse « condescendance » de certains
philanthropes. II faut venir aux pauvres comme de plain-pied. II faut les
convaincre que nous les aimons tout simplement parce qu'ils sont des
hommes comme nous; et je ne sais qu'un moyen de les en convaincre,
c'est de les aimer en efTei.
Les aimer... cela ne va pas tout seul. Pour en arriver li, les personnes
pieuses trouvent une aide merveilleuse dans leur foi. Elles crotent au prix
inestimable et k la sainte egalite des dmes rachetees par le m^me Dieu.
G'est en ce Dieu qu'elles les aiment, et, en ^travaillant pour les pauvres,
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VARlfeT]6S. 60S
elles travaillent pour kii. Rien, j'imagine, n'^gale en puissance ces myst^-
rieuses raisons.
On peut ndanmoins concevoir d'aulres excitants d'une vraie charit^^
d'un sincere amour des hommes. C'est d*abord le sentiment de la solida-
rity humaine, laquelle est un fait, quoique nous ne Tapercevions pas tou-
jours. G*est Tid^e que chacun est int^ress^ au bien-Stre et h la sant6 mo-
rale de tons et inversement; et que si la soci^t^, dont nous neretirons^nous
aatresy qoe b^o^fices, commet des erreurs ou des oublis et fait des vic-
times, noas en de?enons responsables, pour notre part, d^s que nous nous
retranchons dans notre ^goisme. C'est encore I'ld^e que, seui, un hasard
heureux nous a pr^servd des n6cessit6s qui oppriment les pauvres et qui
parfois les r^duisent k un abaissement moral que nous aurions peut-Stre
subi comme eux si nous avions ^t6 k leur place, mais qui, d'autres fois^
d^veloppent en eux des vertus dont nous n'aurions peutr^tre pas 6t6 ca-
pables. C'est aiissi un sentiment de fraternity dans la souffrance, la fai-
blesse et Tignorance commune k tons les hommes, ricbes ou pauvres.
C'est enfln la preoccupation de ne point laisser d^croltre, par notre faute,
ia somme de vertus indispensable k la vie de Fhumanit^, et de sauver de
ce tr^sor fragile et necessaire tout ce qui peut encore en dtre sauv6 ; c'est le
d^sir de rechercher s'il ne subsiste pas, chez ces dtres accabl^s, humili^s
et ulc6r^s par leur triste destin^e, quelques germes de noblesse et de di-
gnity morale, de preserver ces germes et de les faire fructiQer; bref,
d' a Clever » les malheureux par la mani^re dont on leur tend la main.
lis vous accorderont pen k peu leur conQance, s'ils sentent en vous une
fraternelle pens^e et que vous ne vous croyez pas meilleurs qu'eux ni
d'une essence sup^rieure. En 6tant trfes simples et trfes francs; en y met-
tant, s'il se peut, de la bonbomie ; en les Iraitant comme des hommes ; en
respectant d'avance — sans vains discours, mais par votre facon d'etre —
la dignity que vous leur supposez, vous la ferez renaitre en eux, Des con-
seils, des recommandations, des services plut6t que des aumdnes ; Taide
spirituelle, qui rend efficace le secours materiel et Tempfiche d'6tre humi*
liant,voila la v^rit^. Vous I'avez parfaitement compris. La forme que vous
savez donner k votre charity imp lique que vous regardez le pauvre comme
6lant moralement votre ^gal et comme n'^tant pas incapable de le devenir
mSme socialement. D^s lors, vous pouvez causer ensemble. Tout cela, je le
rdp^te, est d^licat dans la pratique, demande de la patience, de la finesse,
du tact. Mais ce tact, vous Taurez si vous avez de la bonne volenti et un
bon coeur.
Vous en serez recompenses, soyez-en sClrs. L'esprit de votre societe
est excellent : il n'a rien d'etroit, rien d'adminislratif ni de formaliste. U
respecte votre iiberte et vous excite mSme k en user ; il d^veloppe en vous
I'iuitiative, TefTort individuel, tout comme si vous eiiez des Anglo-Saxons.
Votre oeuvre vous fait mieux connaitre la vie et les hommes. En sorte que
la charite, comme vous Tentendez, non seulement sauve et ei^ve les
autres, mais vous ameiiore vous-m^mes etvous fortifle ; que c*est k vous-
mSmes aussi que vou& la faites, et que vous etes les obliges de vos
obliges.
Je suis etonne des propos edifiants que je vous ai tonus, et j'en
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«04 REVUE PHILAMHROPIQUE.
^pronve qaelque pudeur, car mes paroles valent ^videmment mieux que
moi. Mais vous ne m'accoserez pas d'avoir voulu me faire valoir en les pro-
non^ant, puisque je vous ai pr^veaus que ce que j'exprimerais ici, ce se-
raient vos propres pens^es.
Jules Lemaitre.
Mouvement de la Population de la France en 1896 (f).
Naissancex et cUc^s, — L'ann^e 1896 offre des r^sultats totalement
difT^rents de ceux des ann^es prec^denles et parliculi&rement de l*ann^e
1895. En efTet les chifTres de 1895 ^taient loin d'etre favorables au d^velop-
pement de la population de la France : nous avions eu k constater un
exc^denl de 17813 d^c^s sur les naissances, et je disais, k cette occasion,
que la situation m6ritait d*attirer toute I'attention des pouvoirs publics et
du Parlement. Tout au conlraire, en 1896, nous avons le plaisir de constater
un exc^dent de 93 800 naissances sur les d^c^s, et si nous additionnons les
r^sultats des deux ann^es, nous trouvons un boni total de 111 513 en fa-
veur de 1896, form^ k la fois de Texc^dent de 1896 proprement dit et du
deficit de 1895.
En 1896, si les d^c^s out diminu^ de 88100, en tombant de 831980
pour 1895 k 771 886 en 1896; de leur c6t6, les naissances, qui n*^taient que
de 834173 en 1895, sont pass^es eu 1896 k 865 686, soit une progression
de 31 413. D*oii il r^sulte que ces naissances, quirepr4sentaient21,4p. 1000
habitants en 1895 sont remont^es k 22,7, tandis que les d6c^, qui avaient
donn^, en 1895, 22,4 p. 1000, ne donnent plus, en 1896, que 20,2. Cest
done, k tons ^gards, une amelioration r^elle que nous devons relever, sans
toutefois avoir la pretention de Texpliquer et surtout d'en tirer des con-
clusions trop generates que des faits ulterieurs se chargeraient peut-^tre
de r^duire k n^ant.
Gomparons Tann^e 1896 avec celles qui Font pr^cedee, et, pour que
cette comparaison soit plus concluante, remontons k 1871 ; ?oyons ce que
nous foumit cette p6riode d*un quart de si^cle. Pendant cette p^riode,
nous avons vu les naissances d^passer 900 000 par an, et atteindre,
en 1872 et en 1876, 966 000. A partir de cette derni^re ann^e, la diminution
est presque constante, et 1896 elle-mfime n'^chappe pas k cette reraarque,
bien qu'elle remonte aux cbiffres de 1876.
La moycnne des naissances de la p^riode de vingt-six ans est de 907 000:
nous sommes done encore sensiblement au-dessous de cette moyenne.
Par contre, les d^c^s sont en notable diminution sur I'ensemble de la
p^riode que nous examinons : la moyenne, en efifet, 6tait de 852 000, soit,
en 1896, une diminution de 81000 ou 9,5 sur cette moyenne.
(1) Extraits du Rapport sur le mouvement de la population en iS96 adress^ &
M. le ministre du Commerce par le Directeur de TOfflce du travail, public au
Journal officiel du 24 d^cembre 1897.
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VARlfeTfeS.
605
Or, il y a deux raoyens d'accrottre une population : c*est i'accroisse-
meat des naissances, d'une part, et, d'autre part, la diminution de la mor-
tality; k ce dernier point de vue, Tann^e 1896 a donn6 lieu k des consta-
tations satisfaisantes.
On a dit qnelquefois que Taugmentalion du nombre des mariages
^lait suivie d'un accroissement du noinbre des naissances : il ne
faudrait pas faire de cetle assertion un principe absolu, car pr6cis^-
ment le nombre des mariages, en 1895, avait baiss^ de 3 744 unites et s'est
relev6 en 1896. Ce rel^vement n'a pu exerccr sur la natality, en cette ra^me
ann^e, qu'une inOuence peu considerable. D'autre part, ies naissances na-
turelles ont aussi augments de 3000, c'est-&-dire contribue pour 10 p. iOO
a I'accroissement total des naissances.
Nous ne parlous que pour m^moire des morl-n^s, au nombre de
42054, chifTre a peu prds ^gal a la moyenne des autres ann^es.
Void, du reste, le tableau comparatif des naissances et des d^c^s pen-
dant la derni^re p^riode d^cennale :
Excddent
Aon^es.
1887..
1888..
1889..
1890..
1891..
1892..
1893..
1894..
1895..
1896..
Naissances.
D^cds.
des naissances.
des ddc
899333
842797
56536
V
882639
837867
44772
»
880579
794933
85646
»
838059
876505
»
38446
866377
876882
»
10505
8o5847
875888
»
20041
874672
877526
7146
M
855388
815620
39768
»
834173
851986
»
17813
865586
771886
93700
»
En somme, Tann^e 1896 est la meilleure de la derni^re p^riode d^cen-
nale, et il faudrait remonter k Tann^e 1883 pour trouver un semblable
excddent de naissances.
Mariages et divorces. — Au sujet des mariages, nous aurons peu de chose
k ajouter k la remarque faite pr^c^demment : I'ann^e 1896 atteint, k
quelques unit^ pr6s, le chiffre de 1892, soit 290000. Ce chifTre est sensi-
blement le plus ^lev^ de la p6riode qui s'est ^coul^e depuis 1871, exceple
pour Ies ann^es 1872, 1873, 1874 et 1875, ou Ies mariages ont, k la suite
des 6v*nements de 1870-1871, atteint un niveau trfes ^iev* qui n'a pas 6t4
constate dans le courant de ce si^cle.
Quant aux divorces, ils suivent leur marche progressive. Partis de 4277
en 1885, ils atteignent en 1896 le chiffre de 7051, en progression de 308
surle r^sultat de 1895. Du reste, au point de \iie purement d^mographique,
Ies divorces n*ont sur le mouvement de la population qu'une influence a
peine sensible, puisqu'ils ne repr^sentent que 0,18 p. 1000 et qu'un certain
nombre de ces divorces sont suivis de nouveaux mariages. Voici, du reste,.
le tableau compart des mariages et des divorces pendant la derni^re p^-
riode d^cennale :
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606 REVUE PIllLANTHROPlQUE.
Anndes. Mariages. Divorces.
1887 277060 3636
1888 276848 4708
1889 272934 4786
1890 26^332 5437
1891 • 285458 5752
1892 290319 5772
1893 287294 6184
1894 286662 6419
1895 282218 6743
1896 290171 7051
Observations gin^rales, — Si maiotenant nous passons k Texamen des
d^partementSy nous constaterons que tons, sans exception, ont pris part k
Tam^lioration que i'ann^A 1896 pr^sente snr 1895. Tons ne pr^sentent pas
des augmentations de naissances : trois seulement font exception : ce sont
la Corse, qui en compte 78, le Loiret 94 et la Haute-Savoie 24 en moins
qu'en 1895. Et encore ces d^partements pr^sentent-ils une amelioration sur
Tann^e 1895.
La Corse a compte 552 d^c^s de moins que I'ann^e pr^c^dente, le Loiret
1 124 et la Haute-Savoie 463. Ces m^mes d^partements pr^entent aussi des
exc^dents de naissances sur les d^c^s : la Corse 1 999, le Loiret 793 et la
Haute-Savoie 652. Le Var compte, il est vrai, 28 d^c^s de plus qu*en 1895,
mais en revanche il ofTre 269 naissances en plus.
II parait inutile d'entrer plus profond^ment dans le detail de chaque
d^partement. Ce sont toujours les mSmes regions qui produisent les mdmes
ph^nom^nes, soit comme naissances, soit comme d^c^s. Ce sont ^galement
les d^parteraents industriels qui comptent le plus de naissances naturelles
relativementit leur population.
Quant aux manages, le progr^s ne s'est pas exerc^ d'une mani^re aussi
g^n^rale que dans les naissances. On compte en effet vingt-trois d^parte-
ments dans lesquels le nombre des manages a ^t^ inf^rieur k celui de
Tann^e 1895. Ceux qui se distinguent dans cette diminution sont, pnr
ordre d'imporlance:laVienne (205),laHaute-Garonne (124), Vaucluse(112),
la Haule-Loire (109), le Pas-de-Calais (96), etc. Dans tous les autres, le
nombre des mariages a ^U sup^rienr aux chiffres ant^rieurs.
En ce qui conceme plus sp^cialement le d^partement de la Seine, il
repr^sente 363 mariages de plus pour 1896, 1 462 naissances en plus, soit
pr^s de 2 p. 100, et 5057 d^cfes eu moins, soit 6,8 p. 100.
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CHRONIQUE ETRANGfeRE
Angleterre.
l'assistange publique a londres en 1897
Depuis de longues ann^es, le journal [le Times a I'habitade, k Noel, de
publier une 6tude sur la situation de TAssistance publique a Londres
L'article de d^cembre 1897 pr^sentait un int^rfit particulier en ce qu'il
n'^tait pas seulement un r^sum^ des progr^s accomplis dans I'ann^e, mais
qu'il comprenait une vue d'ensemble sur revolution de TAssistance depuis
plus de quarante ans. Nos lecteurs nous sauront gr6 de mettre sous leurs
yeui les principaux passages de ce longettrfes precieux rapport.
Les anciens « workhouses » de Londres, — Nous ne saurions mieux montrer
Timportance des changements accomplis qu*en donnant tout d*abord quel-
qoes renseignements sur ce qu'^tait un workhouse de Londres sous Tancien
regime. Vers i8oO, M"^' de Morgan, relatant ses impressions personnelles
sur le workhouse d\i quartier Saint Pancras , comprenant de i 400 k
1 700 hOtes, ^crivait :
« Pour arriver k rinfirmerie, le visiteur traversait une cour oil se trou-
vaient un grand nombre d'idiotes, d'^pileptiquea et de folles, jeunes et
vieiileSy creatures iuoffensives, mais navrantes k voir, surtout quelques-
ones des filles, qui saisissaient le v^tement du visiteur et le suppliaient
de leur donner des sucreries, ou de leur faire rendre leur liberty. On ren-
contrait souvent parmi elles de pauvres femmes afflig^es de dilT^rentes
sortes de maladies ou de deformations. Les paroles inarticul^es, les
bi-uyantes querelles de ces tristes creatures qui n'avaient aucune chance
de recouvrer la sant6 ni la liberty, faisaient de cet endroit un veritable
enfer : « Qurconque y entrait laissait derri^re lui Tesp^rance. »
M^me les vieiUards infirmes ^talent soumis k un regime alimentaire qui
leur accordait, trois ou quatre fois par semaine, du boeuf bouilli tr^s dur
ou de la viande coriace. lis recevaient, les autres jours de la semaine, le
bouillon de ce boeuf additionn^ de quelques pois. Dans toute la maison
r^gnait nn besoin terrible de boire.
Une implacable classification ^tait partout appliqu^e. Tous les vieiUards
4^taient mis ensemble et les vieilles femmes 6taient condamn^es k vivre
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608 REVUE PHILANTHROPIQUE.
en tie elles; de sorte que tout stimulant dans la torpeur de leur existence
^tait accueilli avec joie. La fi^vre 4tait en permanence dans le dortoir des
femmes en coaches, ou les lits ^latent tr&s serr^s, tandis que les enfants
hospitalises avaient une apparence m^lancolique, tons, sans exception,
etant atteints d'ophtalmie. « lis Tattrapent d^s qu'ils entrent ici », expH-
qua-t-on k M^^ de Morgan. Le fait semblait 6tre consid^r^ comme an inci-
dent ordinaire de la vie des workhouses,
Le dortoir des gardens ne contenait d*aatre mobiiier que 40 petits Ills,
ranges d'uo c6te de la pi^ce. 11 y avait de Tautre c6t6 un ruisseau k d^coa-
Tert qni se d^versait dans un conduit commaniquant, k Text^rieur, avec
un gros tujau; de telle sorte que les gaz qui montaient de I'^gout rendaient
Tatmosph^re de la pi^ce intolerable. Le quartier des ali^n^s ^tait encom-
br^ el ils ^taient si mal soign^s que Ton s'aper9ut, une fois, que les draps
et les couvertures de leurs lits n'avaient pas ^t^ changes pendant seize se-
maines. Si bien que lorsque enfln on les enleva, on pensa qu'il valait
mieux en faire un brasier dans la cour. II existait aussi deux ateliers daus
la maison. Dans Tun on se livrait aux travaux k I'aiguille; dansTautre, les
gar9ons apprenaient le metier de charpentier. Mais il y a an fait bien hor-
rible et tr^s significatif, c'est que M^^ de Morgan trouva les ouvri^res occu-
pies k coudre des linceuls, tandis que les gargons aldaient le charpentier
k clouer des cercueils. Les femmes avaient travaill6 aux linceuls toute la
semaine, et il y avail une telle demande de cercueils que le charpentier
n'avait pas le temps d'enseigner a ses ^l^ves k faire autre chose.
Et rien ne nous indique que la vieille maison de refuge de Saint Pan-
eras f&t plus mal tenue qu'aucun autre wof*khouse de I'^poque.
Le commencement des riform»is. — La p6riode des r^formes s^rieuses, en
ce qui concerne Torganisation des workhouses, semble dater surtout du
jour de Tintervention de T^l^ment f^minin, repr^enl6 par le petit groupe
de dames visiteuses k la tSte desquelles ^tait M™' de Morgan. G'^tait pen de
chose encore, mais c'6tait la negation de la vieille th^orie qui voulait que
les affaires du workhouse, malgr^ la grande proportion de femmes et d'en-
fants qui Thabitaient, malgrd ses mille et un details domestiques, fussent
oxclusivement g^r^es par des hommes. Le comity des dames visiteuses de
M°^* de Morgan est 'probablement le premier qui ait 6i^ approuv^ par un
Gonseil d' Administration de la taxe despauvres. 11 fut suivi, eni857,d'une
oeuvre connue sous le nom de Society des visiteuses des workhouses, Cette
society etait due k Tinitiative de M"<> Louisa Twining qui, par sa plume el
autrement, avail d^jii tant fait pour appeler I'altention publique sur Torga-
nisation des workhouses de Londres.
Les soins aux malades. — Parmi les diff^rentes r6formes qui ont et^
effectu^es, les plus frappantes sont peut-^tre celles qui concement le trai-
tement des pauvres malades et d^cid^rent de I'^tablissement des inflrme-
ries et de Tam^lioration du service des soins.
Comme nous Tavons indiqud plus haut, sous I'ancien syst^me, les pau-
\Tes malades ^taient install^s dans un quartier qui faisait parlie du work-
house, lis y etaient soign^s par des hospitalises comme eux qui recevaient,
en recompense de leurs services supposes, quelques rations de nourriture
ou d'alcool.
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CHRONIQUE feTRANGiRE. 609
Le premiere chose k faire 4tait de s^parer compl^tement le quartier
des malades de celui des hospitalises. En 1867, une loi dans ce sens fat
promulgate. G'^tait un ^norme progr^s. Aajourd*hui,des infirmeries, in-
stances avec tons les perfectionnements desirables, recoivent les malades.
L'organisation y est aussi parfaite qae dans Th^pital le mieax dirigC.
Garde-malades des pauvres, — La question des garde-malades des
paavres a longtemps prCoccape les dmes charitables en Angleterre. En 1879,
on petit comite de dames, parmi lesquelles nous retronvons le nom de
M*^** Louisa Twining, qui s'est associCe k tous les rCcents progr^s de I'as-
sistance en Angleterre, fonde une Association de « garde-malades des
workhouses ». Le but Ctait de faire placer k la t6te de toutes les infirme-
ries des personnes expCrimentees et de foumir des gardes aux inOrmeries
de Londres et de la province.
AprCs dix-huit ans d'efPorts et de luttes, la Society a 616 dissoate,le
1" dCcembre dernier. La plus grande difilculte qu'elle ait rencontrCe est
le recrutement de ses 61^ves. La plupart des postulantes devaient Hve
ecartCes k premiere vue.Gelles qui continuaient jusqu'au bout le cours de
leors etudes etaient extremement rares. Ces femmes aimaient mieux en-
trer dans les hdpitaux ou soigner des particuliers que de donner leurs
soins aux indigents sous les ordres d'une directrice qui, souvent, manquait
de competence.
Traitement des maladies contagieuses. — Les reformes de 1867 compre-
naient la creation d'un Gomite des Asiles metropoli tains qui devait pour-
Yoir k I'installation d'etablissemenls spCciaux pour les maladies conta-
gieuses [et particuli^rement la petite verole qui est une des plaies de
Londres. Deux h6pitaux furent install es, oil Ton pouvait soulager en tout
600 malades. Mais, par suite de la mauvaise volonte ou de Tincurie des
auloritesdu service hygienique de laville, les asiles metropoli tains furent
amenes k admettre les malades non indigents et Tencombrement devint
tel que de nouvelles constructions bient^t s'imposerent. Pour faire face aux
exigences nouvelles, le Gomite des Asiles poss^de actuellement neuf hdpi-
taux separes pour recevoir les malades dans la periode aigu€ et deux
pour les convalescents. Ges etablissements reunis peuvent hospitaliser
5 497 malades. Le Gomite se voit force de faire bdtir k Lower Tooting un
hdpital qui contiendra encore 500 malades. Un autre est projete k Garshal-
ton pour les convalescents de la il^vre scarlatine et de la diphterie. II re-
cevra environ 700 malades. Si Ton consid^re que, pendant le cours de
Tannee 1897, on a re^u notification de 23 500 cas de flevre scarlatine,
13000 cas de diphterie et 3 200 cas de fi^vre enterique, ce qui fait un total
de 39700 cas, on comprendra Timportance de la tdche confiee au Gomite.
Les a enfants de V£tai ». — Les enfants indigents furent longtemps lais-
ses, dans les workhouses, au quartier des femmes, negligence qui ne
manquait pas de donner les plus mauvais rCsultats.
Plusieurs unions (groupements de plusieurs paroisses pour Tentretien
des pauvres) cre^rent des ecoles des pauvres vers 1834. Mais ces ecoles
etaient ruineuses pour celles des unions qui comportaient seulement un
petit nombre d'enl'ants et le recrutement des maitres etait difficile. En
1844, un acte du Parlement autorisa les unions k se grouper pour fonder
REVUE PHUiAirrHnOPIQUE. — II. 39
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610 REVUE PHILANTHROPIQUE.
des ^coles de district ou les enfants de plusieurs unions [seraient rassem-
bl^s et 61ev^s dans un ^tablissement commun. En 1861, la Commission
d'6ducation, frapp^e des services rendus par ces^coles'de district, demanda
que leur creation devint partout obligatoire. Gelte id^e pr^valut si bien
qu'en 1867 un acte de ['Assistance publique de Londres d^cr^ta que les
enfants seraient retires des workhouses et places dans des ^tablissements
s^par^s.
Peu k pen les 6coles de district devinrent une institution aassi rSpandue
dans la capitale qu'ailleurs et en m^me temps leurs avantages commence
rent k 6tre contested. L'id^e premiere 6tait que les ^coles seraient instal-
16es pour 300 ou 500 enfants. Mais elles prirent le caract^re de veritables
casernes ou Ton r^unissait, dans certains casjusqu'^l 000 ou 1 500 enfants
et davantage. On fit remarquer, entre autres, que dans ces 6tablissements,
les enfants perdaient toute individuality el n'avaient aucune chance de|res-
sentir cette sympathie qui est indispensable au d^veloppemeut normal de
tout ^tre jeune. En dehors du tort caus6 k TMucalion intellectuelle et
morale des indigents, on s'aper(^ut que la reunion d'un aussi grand nombre
d*enfants, tir^s des bas quartiers les plus misdrables de la ville, avait de
s^rieux inconv^nients au point de vue hygi^niqueet propageait plusparti-
culi^rement les maladies des yeux.
Le placement. — Ce sont des considerations de ce genre qui ont sugg^r^
le syst^me du placement dans les families pour remplacer la caserne-
^cole. Le Gonseii (Poor Law Board) se livra h une enqu^te minutieuse sur
la question et, apr^s avoir et^ tout d'abord (^nergiquement oppose au sys-
t^me, il emit en 1870 un d^cret qui indiquait aux bureaux de bienfaisance
la superiority du placement en famille sur les ecoles de district, les ecoles
independantes et les ^coles de workhouse, Le nouveau syst^me donua des
resultats si satisfaisants que, pendant Tannee suivante, ii ne se forma pas
moins de 30 comitds de placement. 11 y en a mainienant 243, en Angleterre
et dans le pays de Galles, 35 de plus qu'en 1896. Gependant le nombre des
enfants places ne represente qu'une faible parlie du nombre des enfants
assistes. Dans la capitale, par exemple, sur 17807 enfants entretenus par
rimpdt il n'y en a que 1 000 qui soient places dans des families.
Malgre Texcellence reconnue de ce syst^me, plusieurs objections ont
ete soulev^es, inspir^es surtout par la difficult^ de trouver un assez grand
nombre de personnes recommandables d^sirant prendre chez elles les
enfants. Au lieu du placement, deux unions de Londres ont adopts le sys-
t^me connu sous le nom de cottage homes, qui consiste k organiser un groope
d'asiles s^par^s contenant chacun 40 garcons ou de 30 k 40 filles. Une autre
union, celle de Saint-Giles, Gamberwell, pr6conise un syst^me d'asiles
eioign^s les uns des autres. D'aprfts cette conception nouvelle, les membres
du bureau de Tassistance louent des maisons particuli^res dans difTerentes
parties de la ville et n'y logent pas plus de 16 enfants confi^s k la garde
d'une famille. Les enfants vont k Tecole du quartier el vivent de Texistence
d'enfants ordinaires.
Un dernier syst^me vient d'etre propose par V Association proiectrice des
Enfants Assist^s fondde en Janvier 1897. 11 tend non seulement k obtenir
la dissolution des grandes agglomerations, afin que les enfants soient eie-
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CHRONIQUE feTRANGfeRE. 611
v6s, autant que possible, dans des families ou de petits groupes, raais il
tend encore k ^viter aux enfants tout rapport avec le workhouse et avec les
fonctionnaires qui ont affaire aux indigents. On laisse entendre que ce
projet entralnerait T^tabiissement d'autres asiles que les workhouses,
d'autres fonctionnaires que ceux du Poor Law et aussi un d^partement et
un comity de TEtat en dehors du conlrdle direct du Local Government
Board. De toutes les r^formes propos^es sur la question des enfants asbis-
t^s ce dernier projet est certainement le plus vaste.
Des diff^rentes experiences tent^es par I'Administration il r^suite que
les grandes agglomerations d'enfants sembleut a jamais condamnees en
fayeur de l'6ducation dans les families et des groupements partiels.
Patronage des Filles Assist^es, — II fut un temps ou la situation des filles
assistees etait deplorable. Ne connaissant que fort peu ou pas du tout les
plus simples devoirs de la m^nag^re, elles s'en aliaient en qu^te d'une
place de domestique pour laquelie elles n'etaient aucunemeut qualiOees.
Sans personne au monde pour les conseiller et les soutenir elles erraient
d'une place k I'aulre et flnissaient presque invariablement dans la rue. En
theorie, les filles assistees qui entraient dans une place etaient surveill^es
par le commissaire des pauvres. Mais, apr^s s*etre assure que leur pre*
miere place etait conveoable, ce fonctionnaireperdait de vue lafille quand
elle s'en allait ailleurs... En 1875, sur les instances de M™* Nassau, la pre-
miere inspectrice de TAssistance, fut fondee V Association m^tropolitaine de
patronage des jeunes servantes. Tons les ans, environ 300 filles de quatorze
fk quinze ans quiltent les ecoles des pauvres pour entrer en condition.
Aujourd*hui chacune de ces filles, grdce k une entente entre TAssociation
et le Bureau de bienfaisance, est dotee d'une dame protectrice qui ira la
voir dans sa place, s'interessera k son sort, Taidera par differents moyens
iorsque son appui sera necessaire et la recommandera k une autre dame
protectrice Iorsque la jeune servante changera de quartier. Et ce n'est pas
tout. L'Association, au besoin, enseigne aux jeunes filles leur service, leur
fournit un logement convenable quand elles sont sans place, leur procure
des vetemenls s*il est necessaire et les soigne en cas de maladie. Cette sol-
licitude est accordee aux jeunes filles jusqu'd vingt ans. A cet Age elles ne
sont plus officiellement reconnues pas TAssociation. Mais il arrive souvent
que bien avant cette epoque les relations entre la visiteuse et sa protegee
sont devenues une amitie qui sera conservee k cette demiere pendant
toute sa vie. II j a actuellement 21 maisons de refuge appartenant k I'Asso-
elation et le nombre de jeunes servantes pourvues de dames protectrices
est d'environ 8000. Plus de 1000 dames s'occupent de la protection des
jeunes servantes. Le sauvetage moral opere par TAssociation est dans une
proportion de 80^ 90 p. 100.
Les femmes dans les Commissions d*assistance, — Nous avons vu que des
1854 il s'etait forme une societe de dames visiteuses des workhouses, Les
resultats furent constates excellents dans tons les etablissements visites.
De plus, la lumiere fut faile sur la question de Torganisation des workhouses
en general et du traitement des femmes et des enfants en parliculier. Mais,
bien que les societes de dames visiteuses fussent d'une utilite indeniable,
leur pouvoir etait limite aux recommandations, aux membres du bureau et
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612 REVUE PHILANTHROPIQUE.
k telle action qui leur ^tait permise par ces fonctionnaires. On pensa entin
qu'il 6tait desirable que les femmes eussent une voiz dans la direction
d'institutions qui int^ressaient aussi vivement leur sexe. G'est en 1875 que
M^^" Martha Merrington fut ^lue membre du bureau de Kensington. D'autres
dames suivirent son exemple. 11 y a actuellement 921 dames ponrvnes du
mSme titre. 95 d'entre elles font partie des bureaux de Londres.
Les indigents non assist^s. — Dans une ^tude sur la situation des pauvros
officiellement assist6s, pendant une period e aussi longue que le r^gne de
la reine Victoria, il ne faut naturellement pas perdre de vue les differentes
influences, les diff^rents agents qui ont concouru k ^carter de I'Assistance
publique des gens qui, autrefois, eussent re^u des secours au moment de
leurs infortunes. Les soci^t^s amicales et les socidt^s ouvri^res ont certai-
nement eu une tr^s grande influence dans ce sens. La large expansion des
h6pilaux a 61oign^ des infirmeries des unions des milliers d'indigents qui
s'y fussent autrement r^fugi^s.
Des institutions telles que la Charity Organization Society, la Salvation
Army et les innonibrables associations philanthropiques de toute sorte ont
fait beaucoup pour soulager les mis^res qui, autrefois, ^taient secourues
exclusivement par TAssistance publique (Poor Law), A Londres enparticu-
lier, nous devonsnousrappeler que pendant prds dequarante ans la soci^t6
juive a secouru elle-m^me ses pauvres. Quiconque sait combienia mis^re
juive est ^tendue et profonde dans le quartier East-End de Londres com-
prendra toule la difGcult^ de la t&che.
Une entreprise trds utile, dontToeuvre demande une mention sp6ciale,
c'est la Church Army. Uestvrai que lorsque cette arm^e fut fondle, en 1B82,
«lle n'avait d'autre but que de combattre Tirr^ligion des classes ouvriferes.
L'exp^rience montra bientdt que la condition temporelle de la classe con-
•cem^e demandait autant de soins que sa condition spirituelle, En 1888,
Taccroissement considerable du nombre des vagabonds, des criminels et
des ivrognes a Londres et autre part d^cida la soci^t^ k creer une sec-
tion sociale et k ouvrir des maisons de travail. Le but de cette action so-
dale ^tait de d^montrer k la nation et k TEglise comment on peut ^viter
la charity inconsid^r^e en ^tablissant un sjst^me complet d'assistance
ayant pour bases la philanthropie, le travail et la religion et pour objectif
le rel^vement d'individus soigneusement s6Iectionn6s. Les dlff^rentes
branches du c6td social de Tarm^e comprenuent : les maisons de travail
pour les vagabonds, les asiles de nuit, la nourriture populaire k bon mar^
ch^, la ferme d*exp6riences pour les Emigrants, le potager, un asile pour
Jes hommes, un syst^me de bons de travail, un syst^me d'^migration, des
blanchisseries pour les femmes, des maisons de sauvetage pour les femmes,
avec sections particuli^res, des asiles pour les femmes, un bureau de pla-
cement, un dispensaire pour femmes et enfants, un d^partement des vieux
v^tements. Le r^sultat de toute cette organisation est non seulement de
soustraire les indigents k Tassistance, mais encore d'en faire des contri-
buables. En recompense de ses efforts, Tarm^e re^oit annuellement des
subventions de beaucoup de bureaux de bienfaisance el, k en juger d'apr^s
Texpose ci-dessus, Targent ainsi donnd est bien employ^.
Slatistique. — D'apr^s les rapports officiels de d^cembre 1897, le nombre
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GHRONIQUE jfeTRANGtRE. 613
des indigents dela ville de Londres ^tait de 104619. II ^tait de 104611 dans
la semaine correspondante de 1896, de 106716 en 1895 et de 104418
en 1894. On voit done que le chiffre actuel indique une angmentation de
8 indigents snr celui de I'an dernier, une diminution de 2097 sur 1895
(qui fut une ann^e de mis^re excepiionnelle causae par la temperature)
etune augmentation de 201 sur 1894. Les indigents hospitalises etaient au
nombre de 67301, alorsqu'on en comptait 66585 dans la semaine corres-
pondante de 1896, 67216 en 1895 et 66614 en 1894. Les pauvres secourus
k domicile 6taient 37 318 en 1897, 38026 en 1896, 39500 en 1895 et 37 804
en 1894. Done, si Ton compare Tann^e i897 avec 1896, leschifTres nous
montrent un accroissement de 201 pour les hospitalises et une diminution
de 708 pour les non-hospitalises.
En ce qui concerne la d^pense causae par le soulagement de cette masse
d'indigents et de malades, il suffira d'iodiquer, d'apr^s le dernier rapport
du Local Government Board, que la taxe destiii^e k couvrir les frais de Tas-
sislance a ete de 13 shillings 8 pence 1/4 (17 fr. 07 1/2) par t6te pour la ca-
pitale et de 5 s. 6 1/2 d. (6 fr. 90) dans le reste du pays.
Gaston S^vrbtte.
(D'aprdsle Times.)
Espagne.
LA CONTAGION TUBERCULEDSE A l'6C0LE
11 7 a vingt ans, des professeurs de faculty de ro^decine enseignaient h
leurs el^ves que la tuberculose n'etait point contagieuse. Cetait avant les
decouvertes de Pasteur et, parlanf, avant les travaux de Kocb. II faut re-
connaltre que, sur ce point, le pressentiment popuiaire avait devance la
science. Le pr^juge d'alors est devenu une verite d'aujourd'hui, verity qui
a produit une revolution dans Tbygiene et la medecine modernes.
On n'hesite plus, dans les armees europeennes, k reformer le soldat,
des Tapparition des premiers symptdmes de la tuberculose; et, en atten-
dant qu'il y ait un nombre sufftsant d'hdpitaux speciaux pour le traitement
de cette maladie, on separe les tuberculeux des autres malades en leur
afifectant des salles speciaies dans les hdpitaux ordinaires. G'est ainsi qu'on
les isole, k Lariboisiere, k Laennec, k Tenon, etc. Les sanatoria se mul-
tiplient (1). L' Assistance s'occupe de repandre un notice br^ve et claire in-
diquant les precautions qui permettent d'eviter la contagion. II n'etait que
temps d'aviser, car ce redoutable mal fait chez nous tons les ans plus de
200 000 victimes. G'est beaucoup pour une affection qu'Hippocrate, dit-on,
considerait coram e « la plus curable de toutes les maladies ».
Apres avoir pris les mesures que comportait la situation pour les hdpi-
(1) V. le Sanatorium d'Angicourt et la curability de la tuberculose pulmo-
naire, par le D' A.-R. Plicque.— ilepMc Philanthropique^ t II, n«» 8, decembre 1897,.
p. 244 et suiy.
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614 REVUE PHILANTHROPIQUE.
taux et les casernes (1), les ra^decins ont ^t^ amends & s'occuper de la
tuberculose, k T^coie et dans les families (2). (V. le rapport du D^ Thoinot
dans le dernier num^ro de la Revue Philanthropique.) A ce sujet, voici, en
abr^g^y robservation instructive publi^e par le D' Jean Givit, dans la Ga-
zette m^dicale de Barcelone novembre 1897.
Une vacance s'^tant produite k T^cole primairede Blancafort, proyince
de Tarragone, le poste fnt confi^ k un mailre d'exp^rience et de valeur,
lequel, malheureusement, soufTrait d'une tuberculose dejk fort avanc^e.
Les ravages da mal 6 talent d^j^ visibles sur toute sa personne. Aussi,
Tinstituteur ne trouva pas dans tout le village une faniille qui consentit k
lui fournir le logement et la nourrilure (car, k d^faut de science, les villa-
geois ont le pressentiment que la tuberculose est contagieuse).
Bref, rinstituteur dut se loger dans une portion de r6cole, une cbambre
voisine de la salle de classe ; et il eut k son service une vieille femme
veuve (la croyance populaire ^tant que les personnes kg^es sont moins que
les jeunes sujettes a la contagion).
De menus services lui ^taient rendus dans son interiear par quelques-
uns de ses ^l^ves, ceux en qui il avait le plus de confiance, ceux qui se
montraient le plus appliqu6s, faveur tenue en grande estime par les
enfants et que le mattre r^mun^rait aa moyen de friandises et autres re-
compenses.
L'^cole, quelque pen ddlaiss^e dans les premiers temps, ne tarda pas k
s'emplir, grdce au prestige du nouveau matlre. « Le nombre des ^l^ves d^-
passa 90 et 100 : Tinstituteur en admettait plus que T^troitesse du local ne
Vetki permis... La terrible maladie suivaitsamarcbe: acc6sdetoux r^p^t^s,
cracbats expector^s sur le sol, acc^s de sutfocation, surtout aux beuresdes
repas, sueurs,etc. ;il passait les beures de classe tant6t assis, tant6t debout,
au grand contentement de ses ^l^ves qui appr^ciaient fort sa direction. »
Le temps se passait, et, malgr^ les progr^s du mal, malgr^ les conseils
de ses amis qui Tinvitaient k se soigner, le maitre demeurait k son poste.
Les preventions des premiers jours aval en tdisparu; une famille avait con-
sent! k le prendre comme pensionnaire ; lorsqu'il fut cmporte par une
tuberculose pulmonaire. Gela avait dure an an.
« Trois mois apr^s la mort de Tinstiluteur un de ses ei^ves pr^f^r^s
succombait k une tuberculose milliaire aigue; c'etait an enfant de douze k
treize ans, n*ayant jamais fait de maladie, ne presentaut aucun antecedent
morbide d*aucune sorte, et dont les parents etaient des paysans sains et
robustes.
« Pen de temps apr^s la mort de cet enfant, un de ses freres, &ge de
douze k treize ans fut atteint de tuberculose pulmonaire et succomba qnatre
ou cinq mois apr^s les premieres manifestations de la maladie. L'alne
avait rempli a Tecole les fouctions de moniteur, aidant le maitre, Tappro-
cbant, communiquant avec lui pendant la classe et bors de la classe, lui
rendant eniln dans son menage les petits services dont il a ete question
plus baut.
(1) V. Revue Philanthropique ^ n* 3, p. 438, et n" 4, p. 593.
(2j V. le Bulletin de P. Strauss, Revue Philanthropique, t. 11, n* 9, p. 415.
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CHRONIQUE feTRANGfeRE. 615
« EnTiron huit mois apr^s, un autre ^l^ve studieux, qui avait, lui aussi,
rempli les fonctions de monitenr et appproch^ le mattre, tombamalade,et,
malgr^ les soins dont il fut I'objet, succomba k la tuberculose apr^s six
mois de maladle. II 6tait Ag6 de onze k douze ans, comme les autres, et,
comme eux, sans antecedents morbides.
« Un autre enfant de 7 ans, tombe malade six mois apr^s la mort de Tin-
stituteur, succomba k une mHiingite tuberculeuse, apr^s une vaioe et
longue lutte contre le mal — car Tenfant jouissait auparavant d'une excel-
lente constitution — sa m^re, quelque peu an^mique, supportait sans se
plaindre tons les travaux de la maison et des cbamps; le p^re^eiait un ro-
buste paysan. »
Ces divers cas doivent Hre imputes k la contagion; etvoici, sansdoute,
comme elle se produisit : « Le local qui servait de classe etait tr^s eiroit
(5 metres de long sur 2^,50 de large) et hermetiquement clos, car le
maltre redoutait les courants d'air. L'air, vu le nombre des ei^ves, y deve-
nait toxique ; Tinstituteur expectorait ses cracbats ; la classe etait balay^e
deux fois par semaine par les Aleves euz-mSmes; les cracbats dess^cb^s
pulverises, meltaient des bacillesde Kocb dans Talmospbere... » Le reste
se devine.
La protection de Tenfance contre la tuberculose est un point tr^s im-
portant de Thygi^ne sociale.
« L'ecole est, k tons les points de vue, unendroil fort perilleux, ennotre
pays surtout, oil les etablissements d'instruction primaires reunissenl les
pires conditions bygieniques. »
L'Etat doit compte aux p^res de famille de la vie de leurs enfants; il
doit assurer la securite de l'ecole, et exiger par une loi, non seulement la
capacite intellectuelle, mais la capacite physique des mattres : « Aucun
poste ne devrait etre confle sans s'fitre assure que le titulaire reunit, outre
les aptitudes professionnelies, les conditions pbysiques necessaires pour le
bienremplir. »
Les ecoles primaires de France ne sont pas, heureusement, dans ces
tristes conditions : c*est une satisfaction pour nous et un devoir de le
constater. Nos bdtiments scolaires — celuxedu gouvernement de la Repu-
blique — constituent un facteur important de la sante publique. Ce titre
seul, k defaut d'autres, suffirait pour justifier les depenses qu'ils ont occa-
sionnees.
Dans nos ecoles en6n, maitres et ei^ves sont soumis k des visites me-
dicales et k de sages mesures d*bygiene qu'on ne saurait trop louer. Est-ce
k dire que tout le possible a ete fait dans cet ordre d'idees, et que les pres-
criptions les plus indispensables ne sont pas quelquefois regardees comme
de simples formalites? Nous n'aurions garde de Taffirmer.
Marius Dupont.
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INFORMATIONS
Projet de loi concernant la reprdsentation des panvres et
radmlnistaration des ^tablissements d'assistance.
Void le texte du projet de loi d^pos^ par le gouvernemeQt sur le bureau
da S^nat sur la reunion des commissions administratives des bareaux^de
bienfaisance et des hospices .
I. — DES ^TABUSSEMENTS COMMUNAUX
Art. premier. — Uue commission, dite « Commission communale d'as-
sistance », est charg^e dans ehaque commune de representor les pauvres,
de g^rer leur patrimoine et d'administrer le bureau de bienfaisance, le bu-
reau d'assistance m^dicale, les hospices, hdpitaux et autres ^tablissements
constitu^s comme 6tabiissements publics communaux d'assistance.
Dans ehaque commune un bureau de bienfaisance est charge du service
de la bienfaisance k domicile.
Les orphelinats, creches, asiles et aulres institutions, ayant un objet
d'assistance communale, peuvent 6tre constitu^s comme 6tablissements
publics par d^cret rendu en Gonseil d'Etat.
Art. 2. — La commission communale d'assistance est compost du
maire et de six membres renouvelables : deux sont 61us par le Conseil
municipal ; les quatre autres sont nomm^s par le Pr^fet. ;
Toutefois, dans les communes ou il existe un h6pital ou hospice, le
nombre des membres renouvelables est (1x6 a douze, dont quatre 61us par
le Gonseil municipal et huit nomm^s par le Pr^fet.
Art. 3. — Les bureaux de bienfaisance contribuent aux d^penses ordi-
naires de I'assistance mSdicale gratuite dans la proportion fix6e ehaque
ann^e par la Commission, et qui ne pent exc^der le cinqui^me de leurs
revenus non affect^s k une destination sp^ciale.
Art. 4. — Les dons et legs faits au profit des pauvres, sans autre desi-
gnation ni affectation, seront, par Tacte d'autorisation, et apr^s avis de la
Commission, r^partis entre les divers etabllssements ou mis en reserve en
vue d'une destination determin^e.
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INFORMATIONS. 617
n. — DES 6TABUSSEMENTS INTERCOMMUNAUX
Art. 5. — Lorsqae denx ou plosieurs communes se proposent de fonder
on ^tablissement intercommunal d'assistance , il est form6 entre euzun
syndicat, suivant les regies ^dict^es par la loi du 22 mars 1890.
II est proc6d6 dans les mdmes formes lorsque des dons on legs ont ^t^
faits k deux ou plusieurs communes, en vue de la creation d'un 6tablisse-
ment d'assistance.
Art. 6. — L'^tablissement est administr^ par une Commission dite
« Commission intercommunale d'assistance », et compos^e du maire de la
commune oh il est situ^ et des six membres renoavelables choisis dans les
commissions d'assistance des communes int^ress^es : deux sont Mus par le
Comity du syndicat; les quatre autres sont nomm^s par le pr^fet.
Art. 7. — Le Comity de syndicat determine, s'il y a lieu, et sur I'avis
de la Commission, dans quelle proportion chacune des communes associ^es
est admise k b^n^ilcier des services de T^tablissement, et doit contribuer
aux frais de son entretien.
La deliberation du Comity est soumise k Tapprobation des conseils mu«
nicipaux.
111. — DES ^TABLISSEMENTS DEPART EMENTAUX
Art. 8. — Les institutions ayant un objet d'assistance d^partementale
peuvent 6tre constitutes comme etablissements publics par d^cret rendu
en Conseil d'£tat.
Art. 9. — Une Commission, dite « Commission d6partementale d'assis-
tance », est cbarg^e, s'il y a lieu, [d'administrer les fondations, dons et
legs faits aux pauvres du canton, de Tarrondissement ou du d6partement,
ainsi que les etablissements publics pr^vus k Tarticle precedent.
Art. 10. — Cette Commission est compos6e du pr6fet ou de son d^l^-
gne, president, et de huit membres renouvelables : quatre sont eius par
le Conseil general; quatre sont nomm^s par lepr6fet.|
Les d6i6gu^s du Conseil general peuvent etre cboisis en dehors de
cette assembiee. [lis sont eius pour trois ans. L'election a lieu dans la
session qai suit chaque renouvellement.
Lorsqu'il y a lieu de pourvoir au remplacement d'un des d^Ugn^s du
Conseil general avant le d^lai de trois ans, les fontions dunouveau membre
expirent k T^poque oil auraient cess6 celles du membre qu'il a remplac^.
Art. 11. ~ Le Conseil gen6ralou la Commission d^partemen tale, dans
rintervalle des sessions, donne son avis sur les comptes et budgets, les
autorisations d'acqu6rir, d'ali§ner, d'emprunter, d*6changer, de plaider ou
de transiger, pr6sent6s par les 6tablissements publics d^partementaux
d'assistance, sur Tacceptation des dons et legs qui leur sont faits.
IV. — DES FONCTIONS COMMUNES AUX TROIX CAT6G0R[ES
d'^tabussements
Art. 12. — Le President des Commissions pr6vues aux articles 1, 6 et 9
de la pr^sente loi repr6sente les etablissements en justice et dans les actes
de la vie civile
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618 REVUE PHILANTHROPIQUE.
II a, en outre, le droit d'accepter, k titre conservatoire, les dons ou
legs, et de former avant Tautorisation toute demande en d^Iivrance.
Le d^cret du President de la R^publique ou Tarr^t^ du Pr6fet qui in-
tervient ult^rieurement a effet du jour de cette acceptation.
Art. 13; — Lorsqu'un 6tablissementest dans le cas d'intenter oude sou-
tenir une action judiciaire contre un autre ^tablissement administr^ par
la m^me commission, il est form^ pour chacun des ^^tablisseraents int6-
ress^s une commission distincte de trois membres: un de ces membresest
61u par le Conseil municipal, le Comity du syndicat ou la commission d^-
partementale, suivant les cas; les deux autres sont nomm^s par le Prefet.
Art. 14. — Chaque 6tablissement conserve son patrimoine distinct et
des comptes et budgets sont dresses separdment; des recettes ayant une
alTectation sp^ciale y sont port^es dans un cheque particulier.
Les revenus de chaque ^tablisseroent devant Hre appliques aux defenses
des oeuvres en vue desquels il a ^t6 institue, sous reserve de la deposition
contenue h Tarticle 3 de la pr^sente loi, et de la faculty accord^e aux hd-
pitaux et hospices par les lois du 7 aoiit 1851 et21 niai 1873 d'apporter une
portion de leurs revenus 'au traitement des malades k domicile et a Tallo-
cation de secours annuels en faveur des vieiilards ou des inflrmes places
dans leurs families.
Art. 15. — La commission d^signe parmides membres un ordonnateur
special pour chaque ^tablissement.
EUe pent, en outre, designer un ou plusieurs commissaires charges de
surveiller chaque ^tablissement.
Art. 16. — Les lois qui r^gissent les commissions administratives des
6tablissements de bienfaisance, ieur gestion et leur comptabilite, notam-
ment les lois du 7 aoAt 1851 et du 21 mai 1873, 5 aolt 1874, sont, en tout
ce qui n'est pas contraire k la pr^sente loi, applicables aux Commissions
institutes en execution des dispositions qui precedent.
Les dispositions de Tarticle 2 de la loi des 21 mai 1873,5ao(lt 1879 sont
applicables k ces commissions.
Art. 17. — Les hdpitaux cr^es en vertu des dispositions des articles 4
et 26 de la loi du 15 juillet 1893 pourront, par le d^cret d'institution et en
cas d'insuffisance de ressources, Hre temporairement except^s de Tappli-
cation de Tarticle premier de la loi du 7 aoilt 1851.
V. — DISPOSITIONS DIVERSES
Art. 18. — Les institutions d'assistance qui n'ont pas d'eiistence legale
pourront recevoir des legs si elles sont constitutes comme ^tablissements
publics dans le d61ai d'une ann^e, k partir du d^c^s du testateur.
La m^me disposition est applicable aux institutions d'assistance fondles
par les d^partements ou les communes et qui o ont pas d'existence propre.
Ces institutions ne peuvent ^tre constitutes comme ^tablissements publics
que sur la demande de Conseil g^n^ral ou du Conseil municipal.
Art. 19. — Les dons et legs faits aux d^partements ou aux communes
en faveur d'une institution d'assistance fondle ou k fonder par eux sont
accept^s par le prefet, au nom du d^partement ou par le maire, au nom
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INFORMATIONS. 619
de la commune, quand cette institution se rattache direclement h un ser-
vice ddpartemental ou communal pr^vu et organist par la loi.
Dans le cas contraire, ils sont accepi^s par la commission d^partemen-
tale ou communale d'assistance, au nom de TinstitutioD, si celle-ci est
constitute comme ^tablissempnt public, conform ^ment k Tarticle pr^c^-
dent, ou au nom des pauvres, si Tinstiiution n'est pas [encore fondle.
Art. 20. — II n'est pas d^rog^ par la pr6sente loi aux ordonnances,
decrets ou autres actes du pouvoir ex^cutif en vertu desquels certains 6ta-
blissements sont organises d'une maniftre sp^ciale, ainsi qu'aux disposi-
tions qui r^gissent ies monts-de-pi^l^.
Art. 21. — La pr^sente loi n'est pas applicable k la ville de Paris.
Art. 22. — Desr^glementsd'administration publiqae d6termineront Ies
mesures n^cessaires pour assurer I'ex^cution de la pr^sente loi, ainsi que
ies conditions de son application k I'hygi^ne.
Art. 23. — Sont abrog^s:
1<» Le paragraphe 4 de Tarticle 5 de la loi des 21 mai 1873, 5 aodt 1879.
20 Les paragraphes 2 et 3 de I'articie 10 de la loi du 25 juiilet 1893 et
Ies paragraphes 1, 2 et 3 de Tarticle II de la mfime loi.
Et g^n^ralement toules les dispositions de iois ou de r^glements con-
traires k la pr^sente loi.
Soci^t^ Internationale pour TMltude des Questions
d' Assistance.
La Soci^t^ internalionale pour I'^tude des questions d'assistance a re-
pris ses seances mensuelles le 26 novembre 1807.
M. le president Gaufr^s fait Texpos^ de ia situation actueile de i'Assis-
tance par le travail. Sa communication, tr^s int^ressante et trds documen-
t^e, se termine par les dix conclusions suivantes :
1° L'assistance par le travail, destin^e aux n^cessiteux valides, est un
progr^s^ sur la simple assistance, surtout faite au hasard; en exigeant de
I'assist^ un effort, elle manage sa dignity.
2<> II est bon de I'adjoindre autant que possible k l'assistance ordi-
naire.
3<» Comme elle vise au relevement moral des n^cessiteux, elle doit, en
m^me temps qu'elle leur assure un salaire d'attente, s'appliquer k fortifier
leur moral.
4<^ Gette action morale suppose, 'dans chaque groupement, un nombre
limits de n^cessiteux, avec un nombre sufflsant de personnes s'int^ressant
activement k eux. Elle est done surtout afTaire d'initiative priv^e.
o^ Ainsi comprise et limitde, Tassistance par le travail est impuissante
centre les grands chdmages et les disettes.
6" Les meilleures formes d'assistance par le travail sont celles qui four-
nissent le travail agricole avec facility de longs s^jours.
7* 11 est utile au point de vue moral et financier d'associer I'hospitalit^
de nuit k l'assistance par le travail.
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620 REVUE PHILANTHROPIQUE.
8^ Plus les soci^t^s d'assistance par le trayail, en ^liminant les profes-
sionnels de la mendicity, seront ouvertes aux n^cessiteux digoes d*iiit6r6ty
mieux elles atteindront lenr but. De U, la convenance de I'enqu^te avant
radmission, ou, k d^faut, d'un travail provisoire, consid^r^ comme ^prenve
dn boa vouloir de Tassist^.
9^ La multiplication de ces soci^t^s leur permettrait seule de r^aliser
tout lenr programme eu rendant difficile la mendicity professionnelle et
en poussant k Tentente entre les diverses soci6t6s charitables.
10® U est essentiel que les boos Touloirs s'offrent en nombre k ces so-
ci^t^s, pour les aider dans raccomplissemeut de leur oeuvre sociale.
A la suite de cette communication, une discussion g^n^rale s'est enga-
g^e k laquelle ont pris part MM. Brueyre, Van Brock, Lefort, Grosseteste-
Thierry, Riviere, Barth^s, Drouineau, Cercueil et Matter.
Yu la complexity de la question, les id^es g^n^rales ont senles ^t^ dis-
cut^es et I'examen de cbacune des conclusions de M. Gaufr^sa^t^ renvoy^
k une stance ult^rieure.
Le 24 d^cembre 1897, apr^s I'expos^ sommaire, par le Secretaire g6n4ral
et le tr^sorier, de la situation morale et financidre de la Soci^t^, qui est
tr^s satisfaisante, M. le docteur Bartb^s a expose k ses collogues le r^sum^
d'un travail qu'il vient de preparer pour le Gongrds des Soci^t^s savantes
et relatif aux mesures k prendre pour I'amendement des jeunes detenus. 11
a constate Taugmentation constante des charges de TAssistance 'publique
et pr6conise la creation des soci^t^s de patronage. M. Brueyre a reconnu
rinsufOsance des moyens mis k la disposition de Tadministration p^niten-
tiaire pour Tamendemeut des enfaiits vicieux, moyens qui ne sont autres
que ceux auxquels peuvent recourir les parents dans les cas ordinaires, et
approuve la fondation de maisons sp^ciales interd^parte men tales. II a fait
remarquer que la loi a d^ji pr^vu les comit^s de patronage et que c'est
rinitiative priv6e qui fait actuellement d^faut.
Apr^s un ^change d'observations auquel prennent part M** Pognon,
MM. Van Brock, Lefort et les deux orateurs d^ji cit^s, la Society decide
d'entendre dans une prochaine stance le travail ddtailie de M. Barlh^s sur
la question. Dans la m^me stance, la Society a precede au renouvellement
de son bureau pour 1898. Ont 6ti 6\us:
President : M. Henri Lefort, inspecteur g^n^ral bonoraire des 6tablisse-
ments de bienfaisance; vice-presidents : MM. Henri Monod, Hermann Sa-
bran, Schmidt et Derouin; secretaire general: M. Alfred Muteau; secre-
taire general adjoint : M. Muie; secretaires des seances : MM. Billon, Bel-
min, Zenot ; bibliothecaire-archiviste : M. Belmin; tresorier : M. Van Brock.
Comity de Defense des Enfants traduits en Justice.
Le Gomite de defense des enfants traduits en justice a tenu sa seance
de rentree le 19 Janvier dans la salle du conseil de I'ordre des avocats,
que les bdtonniers, depuis huit ans que le comite fonctionne, ont mis gra-
cieusement k sa disposition pour donner une marque de la sympathie da
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INFORMATIONS. 621
barreaa tout entier k I'oeuvre philanthropique ponrsuivie avec tant de per-
severance par le comity.
En I'absence de sod president ordinaire, M. Gresson, ancien bAtonnler,
la stance etait pr^sid^e par M. Ployer, b^tonnier en exercice. — M. le
garde des sceaaz Milliard avait tena comme ses pr^d^cesseurs k la chan-
cellerie k ouvrir lui-merae cette stance solennelle, afin de t^moigner de
rint^rdt profond que le gonvemement de la R^publique porte k la cause
de Tenfance. L'assembiee tr^s nombreuse comptait les repr^sentants les
pins eiev^s de la magistrature, du barreau et de radministration ; des
s^nateurs, des deputes, des membres du Gonseil municipal de Paris et du
Gonseil general de la Seine.
M. le bdlonnier Ployer a d'abord salu6 le garde des sceaux et comnie
chef de la magistrature et comme ancien confrere appeie k reprendre nn
jour au barreau la place ^minente qu'il yoccupait. L'allocution du bdlon-
nier, faite en des termes dont Teioquence n'etait que le moindre m6rite, a
6te couverte d'applaudissemenls, et le garde des sceaux lui a r6ponda
que, depuis I'origine du comity, il n'avait cess^, en sa quality de membre du
barreau k Paris, de s^int^resser aux grandes questions qu'avait mises k
i'etude le comite et que, place maintenant k la tete de la magistrature, il
ayait consider^ comme un devoir de sa charge en mdme temps que comme
un honneur pour lui de s'associer publiquement k des travaux qui se pro-
posaient comme un but sacre de prendre la protection d'enfants d^sherites
et malheureux, de les relever quand ils etaient coupables et de substituer
de plus en plus aux chdtiments et k la repression des mesures preventives,
par reducation et Thospitalisatioa. II a donne I'assurance que la chancel-
lerie etudierait avec le sincere desir d*y donner la suile la plus favorable
les resolutions qui lui seraient transmises par le comite et comme pre-
miere preuve, il a fait connattre que, conformement aux voeux du comite,
il avait adresse des instructions pour remplacer dans la plupart des cas la
procedure du flagrant deiit vis-4-vis des mineurs de seize ans, par celle de
rinstruction ordinaire, plus longue il est vrai, mais en definitive plus favo-
rable k I'enfant.
Apres quelques mots de M. Felix Voisin, conseiller k la Gour de cassa-
tion, remerciaot vvvement leministre de la mesure dont il apris I'initiative,
des rapports ont ete presentes par M. Guillot, secretaire general, par
M. Brueyre sur la situation flnanciere, par M. Albanel,juge d'instruction au
tribunal de la Seine, sur les comites de defense au recent Gongr^s de sta-
tistique de Saint-Petersbourg.
Nous publions in extenso dans le present numero le reroarquable rap-
port de M. Adolphe Guillot.
L' Amelioration des Grdohes.
Le Gonseil municipal de Paris a decide, sur le rapport de M. Alfred
Breuilie, qu'il imposerait desormais k toutes les creches subventionnees
par la Ville de Paris le respect des prescriptions formuiees dans les rap-
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622 REVUE PHILANTHROPIQUE.
ports de M. le docteur Badin sar le lait st^rilis6 et de If. ie doc tear Napias
sur rinstallation et la tenue des cr^hes.
Aux termes de cette deliberation, les 32 creches subventionn^es par la
Yille de Paris poor une somme de iOOOOO francs pour 1898, n'auront droit
h cette aide que si leurs administraleurs s'engagent k accepter les con*
dilions suivantes: 1<» ne donner que du lait st^rilis^ aux eufants allait^s ar-
tiflciellement ; 2<' donner aux m^res de ces enfantsla provision de lait ste-
rilise n^cessaire pour la nuit et pour les jours od la creche est fermee;
3<> inscrire regulierement sur un regislre ou des Aches speciales les pes^es,
faites k iutervalles r^guliers, des enfants de la creche; 4® se soumettre aux
analyses de lait que rAdministration, d'accord a?ec la Commission des
creches, jugerait k propos de r^clamer; 5<» d*engager k faire tons am^na*
gements, transformations, installations, transferts, desinfections ; k suivre
toute methode — soitdsns les soins, soit dans le choix du personnel —
qui peuvent assurer rhygi^ne et la sante des enfants et que I'Administra-
tion indiquera, d'accord avec la Commission des creches; 6^ s'engager k
soumettre les comptabilites et comptes k Texamen de Tinspecteur des
caisses.
Dans ie cas oh des creches ne croiront pas devoir accepter ces condi-
tions, il en sera r^f^re au Conseil municipal par un rapport de rAdministra-
tion.
L'Assistance aux Vieillards et inflrmes Indigents.
M. Paul Strauss a depose sur le bureau du S^nat la proposition
suivante que nous reproduisons avec son expose des motifs :
Messieurs,
La loi de finances a institue, k partir du !•' Janvier 1897, un regime
d'assistance facultative a la vieillesse indigente d*une portee restreinte et
d'une efticacite mediocre. II convient de ne se faire aucune illusion sur le
caract^re de cette tentative, destinee k preparer et pour ainsi dire k
amercer la reforme definitive. Le principe de la contribution des com-
munes, des deparlements et de I'^tat a ete promulgue une fois de plus,
une promesse a ete faile; toutefois, cette promesse doit etre tenue k href
deiai, si Ton veut eviter tout mecomple.
Depuis 1889, grdce k Tinitiativede Charles Floquetet de M. Henri Ifonod,
les pouvoirs publics sont saisis. En 1892, le Conseil supeWeur de TAssistance
publique adoptait un projet de loi dont les dispositions essentielles s'im-
posent avec autorite a Tapprobation du Parlement.
Ce projet de loi a ete depose k la Chambre sous forme de proposition
par MM. Emile Rey et Lachi^ze, deputes; il a ete accepte avec certaines
modifications par la Commission de mendicite et rapporte par M. Fleury-
Ravarin sans avoir ete discute en seance publique.
Le principe de Tassislance obligatoire k la vieillesse necessiteuse a ete
proclame par la Societe generale des prisons, le Congr^s international
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INFORMATIONS. 623
d'assistanee publiqne de 1889, le Gonseil sup^riear de TAssistance publiqne,
le Gongr^s p^nitentiaire de Paris, le Gongr^s d'assistanco de Rouen, il vient
d'etre reconnu par le Gouseil d'Etat, auquel le gouvemement avail soumis
pour examen juridique et complet le projet de loi pr^par^ par le Gonseil
sapdrieur de TAssistance publique de France.
11 ne saurait done y avoir de difficult^s k rdaliser l^gislativement une
r^forme k Jaquelle aucun minisl^re r^publicain ne refusera son concours.
Quoi qu'on fasse en mutuality, dans Tordre de la pr^voyance, en fait
de retraites ouvri^res, la situation pr^sente exige imp6rieusement des me-
sures dliumanit^ et d'aide fratemelle aux invalides du travail priv^s de
ressources. L'article 43 de la loi de finances a le d6faut de perp6tuer I'as*
sistance facultative, c'est-i-dire en somme, sauf quelques attenuations sur
certains points, de Jaisser les choses en Tetat.
En outre, Tapplication aux pensions de vieillesse et d'invalidit^ des
berimes de Tassistance m^dicale a provoqu^ des reclamations nombreuses
anxquelles il y a lieu d'accorder une satisfaction legitime.
L*interpretation la plus lib^rale n'ouvre aux d^partements et aux com-
munes un droit aux subventions nationales que dans le cas oCi ils con-
sacrent ^Tassistance des ressources extraordinaires,meme crepes ant^rieu-
rement.
Une rectification est n^cessaire sur ce premier point ; il sufflra d'exiger
que la d^pense communale ou d^partementale soil couverte en partie par
des ressources ordinaires tiroes de Timpdl, sans que les communes et les
d^partements soient tonus de justifier de ressources nouvelles, sp^ciales
ou extraordinaires.
Le calcul de la contribution de T^tat par les bardmes A et B a H6
Tobjet de critiques fondles; Tindication apport^e par la valeur du centime
ne suffit pas k donner une notion sufllsante des besoins k satisfaire ; un autre
element comparatif pourrait utilement intervenir; cet element serait fourni
par la proportion de la population indigente et necessiteuse de cbaque
commune.
Une subvention compiementaire serait faite directement par I'Etat aux
communes en conformite d'un bar^rae C qui s'etablirait comme suit :
L'n tableau G servirait k determiner le montant de la subvention com-
piementaire qui doit etre allouee par T^tat aux communes pour attenuer
la part de depense couverte au moyen de ressources budgetaires (centimes
additionnels ou taxes d'octroi),'et restee k leur charge apres application du
bareme A, sans que celte subvention puisse eiever au-dessus de 90 p. 100
le total des subventions reunies du departement et de I'Etat.
Pour 1 p. 100 d'indigents, le coefficient de la subvention compiementaire
de r£tat serait de i p. 100; il se trouverait ainsi, au fur et k mesure que
la proportionnalite d'indigence s'accroi trait, de 1 p. lOOjusqu'a 20 p. 100.
Toute commune qui justiflerait d'une population indigente entrant
pour 10 ou pour 20 p. 100 dans son chifTre de population aurait droit, en
plus de la subvention desbaremes A et B, si une subvention compiementaire
proportionnelle jusqu*iji concurrence d'un coefficient maximum de
20 p. 100.
II serait ainsi possible, en etendant la subvention de TEtat k tons les
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624 REVUE PHILANTHROPIQUE.
cas oii le commencement de la d^pense est convert par des ressonrces ordi-
naires et en accordant nue aide compl^mentaire anx communes panvres,
de faciliter le fonctionnement d'une loi de solidarity ^l^mentaire.
11 nons a paru que le S6nat ferait acte de haute et pr^voyante philan-
throple en pr^parant d'ores et d6}k, sans retard ni d^lai, pour 6tre soumis
anx deliberations de la Ghambre, an projet de loi dont Turgence est absolae
et dont le vote imm^diat Ini fera le pins grand honneur.
En consequence. Messieurs, j'ai Thonneur de soumettre au S^nat la pro-
position de loi ci-apr^s :
PROPOSmON DE LOI
Article premier. — Tout Fran^ais, prive de ressources, dge de soixante-
dix ans au moins, ou atteint d*une inQrmite on d'une maladie reconnue
incurable, qui est incapable de pourvoir k ses besoins par son travail,
recoit gratuitement de la commune, du departement ou de TEtat, suivant
son domicile de secours, I'assistance, soit k domicile, soit dans un etablis-
sement hospitaller, soit dans des families oh ii est place moyennant pen-
sion.
Art. 2. — II est organise dans chaque departement un service d'assis-
tance gratuite pour les vieillards et les infirmes remplissant les conditions
indiquees par Tarticle premier.
Le Conseil general deiib^re dans les conditions prevues par I'article 48
de la loi du 10 aoClt 1871 :
i^ Sur Torganisation du service de I'assistance aux vieillards et aux
infirmes (secours k domicile, placement dans des families, creation et
determination des hospices auxquels sont rattaches les communes et les
syndicals de communes/ affectation des lits d'hospices et d'h6pitaux spe-
cialises) ;
2^* Sur la part de depense incombant aux communes et au depar-
tement.
Art. 3. — A defaut de deliberation du Conseil general sur les objets
prevus k Farticle precedent, ou en cas de suspension de la deliberation en
execution de Farticle 49 de la loi du 10 aodt 1871, il peut etre pourvu k la
reglementation du service par un decret rendu dans la forme des regie-
ments d'administration publique.
Art. 4. — La commune, le departement ou I'fitat peut touj ours exercer
un recours en remboursement de ses avances, soit Tun centre I'aulre, soit
centre toutes personnes, societes ou corporations tenues k I'assistance en-
vers le vieillard, I'infirme ou Tincurable indigent, notamment centre les
membres de la famille de I'assiste designes par les articles 205, 206, 207 et
212 du Code civil
Art. 5. — Toute commune ou tout syndicat de communes est rattache
^ un ou plusieurs hospices.
Art. 6. — Le domicile de secours s'acquiert pour le septuagenaire,
pour TinQrme et Tincurable par une residence habituelle de cinq annees
dans la meme commune ou dans le departement; il se perd par une ab-
sence d'egale duree. A defaut du domicile conununal et departemental,
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INFORMATIONS. . 625
Tassistance des vieillards, des infirmes et des incurables incombe k TEtat.
Art. 7. — L'admission k Tassistance du vieillard, de rinfirme et de
I'incurable, avec Tindication du mode d'assistance {k domicile, hospitali-
sation, placement dans des families), est prononc^e par le Gonseil muni-
cipal eo comit6 secret, apr^s Tavis de la commission municipale d'assis-
tance (institute par la loi sur Tassistance m6dicale gratuite).
Les dispositions des articles 13 ^ 18 de la loi du 15 juillet 1893 sont ap-
plicables k Tassistance k la vieillesse indigente.
L' assistance d^partementale est accord^e par le Gonseil g^n^ral, I'as-
sistance de TEtat par le ministre de i'lnt^rieur assists d'une commission
speciale.
Art. 8. — Les d^penses du service d'assistance des vieillards, des infirmes
et des incurables sont obligatoires ; elles sont support^es par les com-
munes, les d^partements et TEtat, d'abord, en principe, d*aprfes les bar^mes
A et B de la loi de 1893; en second lieu, d'apr^s un nouveau barfime C
qui aurait pour objet de majorer la part contributive de TEtat, en faisant
entrer en ligne de comple la proportion des indigents et des n^cessiteux
par rapport k la population, sans que, d'ailleurs, cette subvention comply -
mentaire puisse Clever au-dessus de 90 p. 100 le total des subventions
r^unies du d^partement et de I'Etat.
Art. 9. — . Un rfeglement d'administration publique, pris sur Tavis du
Gonseil superieur de TAssistance publique, d^terminera les mesures tran-
sitoires ou definitives destinies k assurer I'ex^cution de la loi.
Un second r^glement, ^labor^ aprfes enqu6le aupres du Gonseil g^n^ral
de la Seine, du Gonseil municipal de Paris et du Gonseil de surveillance de
TAssistance publique de Paris, fixera, apr^s avis du Gonseil superieur, les
conditions d'applicalion de la loi k la Ville de Paris et au d^partement de
la Seine.
Le budget de 1' Assistance publique de Paris.
Le budget de TAssistance publique de Paris, tel qu*il a 616 pr^vu
pour Tann^e 1898, s*61^ve en recettes et en d§penses k la somme de
50877997 fr. 50.
' Sur cette somme de 50 millions, la subvention allou^e par la
ville de Paris est de 20819235 francs, dont 4;871378 francs pour les
d^penses des bureaux ds bienfaisance et 15947857 francs pour les
d6penses des autres services.
Le Gonseil municipal a invito, sur le rapport de M. Navarre, les
administr^s :
l** A reclamer au Gouvernement le b^n6fice de Tart. 43 de la loi de
finances dii 29 mars 1897, relative k la participation de I'fitat dans les d6-
penses resultant des pensions institutes en faveur des vieillards et des in-
firmes; ; I . * . t
REVUE PHlL\KTHROnQUE. — II. 40
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626 REVUE PHILANTHROPIQUE.
2^ A ddposer le plus promplement possible le projet de coostruction
d'une buanderie g^nirale ;
4® A inscrire au sous-chap. 8, « Personnel secondaire », les credits nd-
cessaires au paiement des salaires de tons les ouvriers &la journ^e;
4<* A etablir une r^glementalion g^n^rale des salaires poor cbaque
corps de metier;
5^ A se r^server le droit de nommer k litre d^finitif les ouvriers k la
journ^e et de rSvoquer, apres enqu6te, les ouvriers titulaires.
II a en outre 6mis le voeu :
i^ Qae le Gouvernement prenne Tiniliative des lois flscales qai p^sent
sur FAssistance publique;
2<* Que la ialcisation de rH6teI-Dieu etde Saint-Louis soit efTectu^e con-
form^ment aux deliberations anterieures du Gonseil municipal.
liO Serviee des alidnds de la Seine.
Le Gonseil general de la Seine, vivement pr^oecup^ de Taagmentalion
incessante du nombre des ali^nes, de Tencombrement des asiles, a decide,
sur rinitiative de M. Paul Brousse, qu'une commission mixte, constitute k
rimage de la Gommission d'^tnde d'alimentation par le lait, serait charg^e
dVtudier dans tons ses details cet inextricable probl^me.
i<» Gette commission morale, r^unie sous la pr^sidence du President de la
3< Gommission du Gonseil gdn^ral, examinera les differentes questions in-
t^ressant Thospitalisation desali^n^s, des resolutions & prendre, questions
actuellement soiilevees devant Topinion : hdpitaux pour le traitement des
maladies aigu6s, hospices k Tusage des alienSs chroniques ou incurables,
divers proc^d^s de colonisations agricoles et familiales, patronage, assis-
tance k domicile, etc. Gette Gommission fixera elle-mdme le programme
de ses etudes.
2* GeCte commission redigera un rapport sur lequel le Gonseil sera appeie
k deiiberer.
3<^ Elle sera composee des membres de la 3<> Gommission, de medecins
titulaires et adjoints des asiles, de deiegues des deux administrations
prefectorales interessees ; de deiegues de la Gommission de surveillance, de
savants appeies k donner leur avis sur Torganisation d'un laboratoire cen*
tral des asiles, de salles de chirurgie et de salles d'isolement pour op^r^s
ou contagieux.
« Hors les membres de droit, les autres membres seront designes par
le Gonseil general sur la ptopogition de la 3« Gommission. »
En outre, radministratioti A ete invitee :
l« A preparer un es^di^ de colonisation familiale pour les dements
(hommes) k Ghalivoy, pr^s de Dun-sur-Auron ;
2* A etudier un projet d'exploitation agricole dans le Gher, pour les
chroniques adultes (epilepliques, imbeciles), et k introduire ce projet de-
vant la Z^ Gommission au cours de Tannee 4898;
De plu^^pour donner satisfaction aux voeux emis le 29 decembre 1897
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INFORMATIONS. 621
sur r^iude du transfer! de la clioiqae de Sainte-Anne k la Salp^tri^re etsur
robligation d'un stage de trois mois dans un service de m^decine mentale
pour tout dtadianl en m^decine, le Bureau du Gonseil g^n^ral est pri6 de
provoquer I'organisation d*une conference entre les repr^sentants de TAs-
sistance publique, du service des Aliin^s, des d^l^gu^s de la 3* Commis-
sion, de M. le Doyen de la Faculty de ra^decine de Paris.
L' Assistance pobllque & I'Exposition de 1900
On sait que TAssistance publique forme k Texposition de i900 uue
classe sp^ciale : la classe ill. Lejury d'admission de cette classe est com-
post en grande partie de personnes k qui teiles ou telles des questions
d'assistance sont famili^res; on regrette sur la liste Tabsence de quelques
noms qu'il eAt 6i6 juste d*y trouver et peut-^tre qu'il s*en trouve, par
contre, quelques-uns qui ne s'imposalent pas d'une facon ineluctable. Ge
jury s'est r^uni le lundi 24 Janvier pour se constituer et nommer son bu-
reau; il a design^ comme president M. le s^nateur Th. Roussel, comme
vice-president M. Henri Monod, comme rapporteur M. le docteur H. Napias
et enfin comme secretaire M. Raoul Bompard.
Notre collaboraleur M . Napias a demande k M. Dervilie, qui assistait k
la reunion, que les objels et documents exposes k la classe Hi jouissent
des memes prerogatives et immunites que les objets exposes k la section
des beaux-arts et a I'exposition retrospective. On se souvient que notre
collaborateur a traite dejii cette question avec des developpements interes-
santftdans le premier numero de la Revue Philantkropique, — M. Dervilie
a prbmis de defendre devant M. le Commissaire general les interets des
OBuvres qui exposeront k la classe ill et de faire appel en leur faveur k
des mesures d'exoneration qui sont prevues par le r^glement.
Le Goneoors medical des h6pitaux.
A la suite des protestations et des plaintes nombreuses auxquelies a donne
lieu Torganisation actuelle des concours de medecine, la Societe medicale
des hdpitaux de Paris a confie k une commission le soin de rechercher les
modifications et de proposer les reformes.
L'etude de la commission a abouti k un rapport remarquable de M. le
docteur Dreyfus-Brisac, medecin de Thdpital Lariboisiere, et au depdt des
conclusions suivantes :
La Societe des medecins des h6pitauxemet le voeu que les modifications
suivantes soient apporiees au concours de medecins des bdpitaux :
i^ Substitution du vote secret au vote k mains levees dans toutes les
epreuves, avec engagement d'bonneur pris par les membres du juiy de ne
jamais faire connattre leur vote.
2^ Institution d'un concours unique annuel o(i seraient donnees toutes
les places racantes, jusqa'it concurrence de six.
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628 REVUE PHILANTHROPIQOE.
3° Remplacement du jury unique acluel par deux jurys, pr^sidant I'un
aux ^preuves d'admissibilit6, Tautre aux ^preuves de nominaliou. Ghacun
de ces jurys, exclusivement compost de m^decins chefs de service, comp-
terait 14 membres. Le second jury serai t constitu^ avant la publication de
la lisle des admissibles ; ne pourraient en faire partie les m^decins qui au-
raient refuse de faire partie du premier.
^'^ Fixation du nombre des admissibles au triple des places k donner,
avec un minimum de dix.
5° Remplacement de T^preuve de deux malades par deux ^preuves : a)
une le^on sur un malade d'une demi-heure de dur^e, apr^s trente minutes
dont le candidal disposerait a son gr^ pour Texamen du malade et la
preparation de la le^on ; b) une consullalion ^crite sur un malade : vingt
minutes seraient accord^es aux candidats par I'examen clinique, y compris
Tanalyse des urines, et une heure pour la redaction de la consultation.
6° Publicity de diagnostic d6taiil6 formula par le jury dans les ^preuves
classiques.
Ces conclusions ont ^16 accept^es dans leur ensemble, sauf quelques
modifications de forme, par la Society m^dicale des hdpitaux; elles out ^t^
transmises au direcleur de I'Assistance publique qui les soumettra au Con-
seil de surveillance.
Le Droit des pauvres & Paris.
Le taux de perception du droit des pauvres k Paris a H6 f\i6 ainsi qu'il
suit pour 1898 par le Gonseil de surveillance de TAssistance publique, sur
le rapport de M. Risler :
1<> Quinze pour cent de la recette brute dans les bals publics.
2<* Le onzi6me de la recette brute des concerts non quotidiens, autres
que les concerts d'artistes, des jeux, divertissements, etc.
3<^ Cinq pour cent de la recette brute pour les f6tes organisdes dans le
but de soulager des inforlunes publiques ou privies qui n'int^resseraient
pas les pauvre? de Paris ou des ffites organis^es dans Paris par les munici-
palit^s ou OBUvres des localil^s suburbaines.
4*^ Un pour cent sur le produit des f^tes donn6es par les soci^t6s de
pure bienfaisance, comit6s et 6lablissements fond^s dans le but de venir en
aide aux n^cessiteux fran(^ais et strangers habitant Paris et aussi pour les
soci^tis de secours mutuels.
Ces soci6t6s, comit^s, etc., devront produire leurs statuts et leurs
comptes moraux et financiers.
5° Lorsqu'un contr61e serait trop long ou trop difficile et, par suite,
on^reux k VAdministration, dans les f^tes foraines notamment, et dans les
etablissements de peu d'importance, il pourra 6tre pr^lev^ une somme fixe
se rapprochant autant que possible du taux l^gal.
6^ 11 sera percu le onzi6me de la recette brute (un d^cime en sus) dans
les th^dtres et dans les concerts quotidiens et cinq pour cent dans les con-
certs d'artistes ou d'associations d'artistes, conform^menl aux lois des
7 frimaire et 8 thermidor £Hi v, 46 juillet 1840 et 3 aoilt 4875,
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ECHOS
Gonseil sap6riear de 1' Assistance pnblique. — Un recent d6cret a
nomm6 membres da Conseil sup6rieur de I'Assistance publique : M. ]e
docteur Person, de Nantes (Loire-Inf^rieure), president de TUnion des
syndicats m^dicaux de France, en remplacement de M. le docteur Mirenr,
d^missionnaire ; M. Van Caawenberghe, maire de Saint-Pol-sur-Mer (Nord),
.en remplacement de M. le docteur Gibert, d^missionnaire.
Visite de M. le President de la R^pnblique k TAsile clinique
(Sainte-Anne). — Le mercredi 26 Janvier, M. le President de la Republique,
entour^ des officiers de sa maison militaire, a visits TAsile clinique.
Assistaient ^galement k cette visite : M. le Ministre de Tlntdrieur, M. le
Pr^fet de la Seine, M. Emile Dubois, president du Conseil g^n^ral, M. Lau-
rent, secretaire g^n^ral de la Prefecture de police, M. Barrier, vice-presi-
dent du Conseil general, M. Navarre, president de la 3« Commission,
M. Gervais, ancien president du Conseil general, M. Ranson, conseiiler
general, M. Michelin, depute de la Seine, M. Barbier, president honoraire
de la Cour de cassation, president de la Commission de surveillance des
asiles d'alien^s, M. Prestat et M. Maucomble, membres de la Commission
de surveillance des asiles d'ali^nes, un grand nombre de m^decins des
asiles d'alien^s de la Seine, les directeurs de ces asiles et plusieurs hauts
fonctionnaires de la Prefecture de la Seine.
La visite termiuee, M. £mile Dubois, president du Conseil general, a
prononce les paroles suivantes :
« Monsieur le President de la Republique,
« Permettez-moi de vous remercier de nouveau d'avoir bien voulu nous
faire Thonneur de visiter cet asiie, ainsi que vous visitez les autres etablis-
sements hospitaliers.
c< C'est qu'en elTet les malades du cerveau meritent autant de sollici-
tude que les autres malades.
■ Les asiles comme celui-ci devraient etre consideres comme de veri-
tables h6pitaux.
a Vous voyez, Monsieur le President, autour de vous le personnel de
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630 REVLE PHILANTHROPIQUE.
cetie maison. Yoas lui apportez une marque de haate sympathie, d'estime
et d'encouragement.
(( II la m^ite et s'en montrera digne, depuis les chefs, qui sont des
savants r^pandas dans le monde eotier, jusqu'aux employes les plus
modestes, jusqu'aux inflrmiers et aux inflrmi^res auxquels le Gonseil
general est heureux de reudre hommage pour un inalterable d^vouement
dans raccompiissement d'une tdche dilicate^ingrate, etsouvent p^rilieuse.
« Recevez, Monsieur le President de la R^pubiique, au nom dn Gonseil
general de la Seine, au nom de tons ceux qui s'int^ressent au sort des
ali^n^s, au nom des malades eux-m6mes, Fexpression de notre vive recon-
naissance. i>
M. le President de la R^publique, apr6s quelques paroles d'encourage-
ment et d'eloges au personnel des asiles de la Seine, a d^cerne les distinc-
tions suivantes :
Les palmes d'oMcier d'acad^mie : k MM. les docteurs Dagonet et
Antheaume.
La m^daille d'honneur : k M"« Olry, M"^« Bonnefoy et M. Gaudmer.
Mademoiselle Bottard. — La campagne faite par plasieurs joamaux
et notamment par VEdair en favour de M"« Bottard, la doyenne des infir-
mi^res, a etd couronn^e de succ^s. Le roinistre de rint^rieury M. Barthou, a
compris Tancienne surveillante de Gharcot dans la promotion de la Legion
d'honneur de Janvier.
M^^® Bottard appartient k la Salpdtri^re depuis 1841; elle surveUle depnis
pr^s de quarante ans le service des ^pileptiques et des ^hyst^riques dirig^
avec tant d'^clat par le professeur Gharcot et confix aujourd'hui au profes-
seur Raymond ; elle a d^but^ comme inOrmi^re aux appointements de 10
francs par mois et elle est rest^e k ce modeste poste pendant onze ans.
Sous-surveillante en 1852, dans le service des alienees, elle recut alors«
ainsi que nous Tapprend le Bulletin professionnel desinftrmiers et infirmi^es,
une solde de 17 fr. 50 par mois; en 1861 elle fut nomm^e surveillante du
service qu'elle n'a jamais quitt^ depuis cette ^poque. Gette distinction si
m^rit^e a ^t^ chaleureusementaccueiilie dans tous les hdpitaux de Paris.
Le samedi 29 Janvier la remise de la croix a eu lieu solennellement
sous la pr^sidence de M. de Selves, pr^fet de la Seine et en presence de
MM. le D' Dubois, Louis Lucipia, Peyron, F61ix Voisin, le professeur
Raymond, les chefs de service de la Salpdtri^re, les principaux fonction-
naires de Fadministration de TAssistance publique, les internes, les sur-
veillants et surveillantes,etc. Des discours ont ^t^ prononc^s parM.LeBas,
directeur de la SalpStri^re, M. Peyron, directeur de TAssistance publique,
M. le Professeur Raymond, M. Emile Dubois, president du Gonseil g^n^
ral, M. Louis Lucipia, au nom du Gonseil municipal et de la 5« commission,
M. F^lix Yoisin president du Gonseil de surveillance de I'Assistance pu-
blique de Paris, et M. de Selves, pr^fet de la Seine.
Au cours de la fSte, de maguifiques gerbes de fleurs ont ^t^ offertes k
M^^* Bottard par ses collogues et par les malades de son service dontTune,
en des paroles ^mues et touchantes, s'est faite Tinterpr^te de toutes ses
compagnes pour exprimer leurs sentiments de vive reconnaissance.
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fiCHOS. 631
Lesinteroesjes surveillantes etles inflrmi^res de laSalp^tri^res'^taient
cotis6s pour offrir une croix en brillanls k (c maman Rottard », la nouvelle
chevali^re de la Legion d'honneur. Le monlant de la souscription ayant de
beaucoup d^pass^ le prlx de Tinsigne, les souscripteurs se proposaient
d'offrir un objet d'art h la doyenne mais, sur la demande expresse de la
charitable femme, le reliquat de la souscription sera affects k une oeuvre
de bienfaisance.
Gonsell de sarveillance de rAssistanoe publique de Paris — Le
ministre de Tlnterieur vient de nommer pour une nouvelle p^riode membres
do conseil de surveillance de ('Assistance publique de Paris les membres
sortants suivants : MM. F^lix Voisin, conseiller k la Gour de cassation,
Opportun, Alfred Breuill^, Georges Girou, membres du Gouseii municipal;
Le docteur Perier, chirurgien des hdpitaux ;
Morel, repr^sentant patron des conseils de prud'hommes. »
Emile Level et Thomas, repr^sentant les municipalit^s de Paris ;
L^n Gl^ry, avocat k la cour de Paris, et le docteur Dubrisay.
Le legs Gha9segro8. — M"^^ Ghassegros a laiss6 toute sa fortune, qui
s'dl^ve k 2 millions 610 000 francs, k la Soci^t6 protectrice des animaux.
Aux termes de ce testament, la Soci^t^ Idgataire se trouve obligee d'or-
ganiser des postes de chevaux de renfort au has des c6tes du boulevard
Saint-Michel, de la rue Monge, de la rue Lafayette (pr^s du square Mon-
tholon), de la rue Notre-Dame-de-Lorette et du faubourg Saint-Honor^ (en
face Saint-Philippe-du-Roule).
En ce qui concerne Tenl^vement des chevaux blesses sur la vole publi-
que, la Soci^t^ a Tintention de faire construire une voiture k fraction m^-
canique. Des m6dailles de 50 francs en or et des sommes de 200 francs se-
ront distributes deux fois par an. Mille francs par an seront consacr6s k
Taffichage p^riodique de laloi Grammont. Mille autres francs devronl servir
k la Soci^t^ pour se procurer la liste quotidienne des chiens conduits en
fourri^re et avertir en temps utile leurs propri^taires. EuQn on a parl^ de
douze nouveaux postes d'inspecteur; la Soci^t^, k cet elTet, comple ouvrir
k la fin de Fannie un concours ou, seuls les anciens gendarmes, serpents
de viile et sous-officiers retrait^s seront admis a prendre part.
Le Conseil de sarveillance du Mont-de-Pi6t6 de Paris. — Le mi-
nistre de IHnt^rieur vient de renommer membres du conseil de surveil-
lance du Mont-de-Pi6t^ de Paris les trois membres sortants qui suivent :
MM. Muzet, repr^sentant du Gonseil municipal; Risler, maire du VII* ar-
rondissement, repr^sentant de TAssistance publique ; Ducuing, adjoint au
maire du VIII** arrondissement.
En outre, sont nomm^s membres du m6me conseil : MM. Ducourau, an-
cien banquier, en remplacement de M. Lesage, d^c^d^, et Golly, repr^sen-
tant du Gonseil municipal, en remplacement de M. Paul Strauss, qui a
cess6 de faire partie du Gonseil municipal.
L'honorable M. Ducourau, president du Pain pour ious, et membre du
Gomit^ de Patronage de la Revue PhilarUhropiquef est une pr^cieusc acqui-
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632 REVUE PHILANTHROPIQUE.
sition pour le Conseil de surveillance du Mont-de-Pi^t^ et nous f^Iicitons
I'adminislration de cet excellent choix.
Les m^decins de Rodez. — Les m^decins de Rodez ont adress^ uue
leltre collective hu pr6fet de FAveyron, pour Tinformer qu'ils cesseront
de concourir au service de {'assistance m^dicale graluile dans les cam-
pagnes.
Dans )e but d'^viter toute difticult^ k Tadniinistration, disent-ils, ils
avaieut accepts provisoirement et seulement pour Tann^e 1897, ie rdgle-
ment sur Tassistance m^dicale gratuite dans les campagnes malgr^ ses im-
perfections. Ils esp^raient que, dans le courant de cette ann^e, le Conseil
g^n^rail voudraitbien faire droit aux jusles reclamations de la Soci^t^ des
m^decins de TAveyronetleuraccorderles r^formes demand^es. Mais, con-
trairemeut h leur attente, leur petition fut rejet^e.
Comity des hal>itatlons k bon march^ de la Seine. — Le Comity
des habitations k bon march6 de la Seine a ainsi constitu^ son bureau pour
Tann^e 1898: president, M. Paul Strauss, s^nateur ; vice-president, M. Lan-
drin, conseiller g^n^ral ; tr^sorier, M. Naville; secretaire, M. Raulez.
La Soci6t6 de Statistiqae. — La Societe de statistique de Paris vient
de proc6der au renouvellement partiel de son bureau, qui se trouve con-
stitue, pour Tann^e 1898, de la mani^re suivante:
President :M. Beaurin-Gressier;
Vice-presidents: MM. Fernand Faure, C. Moron et Edmond Duval;
Secretaire general : M. Emile Yvern^s ;
Tresorier:M. Adolphe Coste.
Le legs Sanzillon. — La ville de Clichy el le deparlement de la Seine
se sonl mis d'accord au sujet du legs de la marquise de Sanzillon. Une
somme de quatre millions sera affectee k la creation d'un orphelinat et
d'un hospice de vieillards. L'orphelinat sera simplement hospitaller et
ne comprendra aucune organisation scolaire. La ville de Clichy aura droit
aux deux tiers des lits el le deparlement k un tiers. Le deparlement sera
represente dans le conseil d'adminislration.
Gomit^s locanx d^habitation k bon march6. — Des comiies locaux
d'habilations k bon marche viennenl d'etre institues dans les deparlements
de TAisne, TAllier, le Calvados, la Charente-Inferieure, la OMe-d'Or, le
Cers, le Jura, la Loire-Inferieure, la Haute-Marne, le Morbihan, TOme, le
Pas-de-Calais, le Puy-de-D6me, le Rhdne, Seine-et-Marne et l*Yonne.
Le comite da Bazar de la Charity. — Les roembres du comite da
Bazar de la Chariie, s'etant reunis dernierement, ont prie le baron de
Mackau d'ecrire k la comtesse GreiTulhe qu'apr^s la douloureuse catas-
trophe de la rue Jean-Goujon et la suite que le parquet avail cm devoir y
donner, les membres du comite consideraient leur mission comme termin^e
^t remettaient leurs pouvoirs aux mains des presidentes des differentes
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fiCHOS. 633
CBUvres de charity groupies au Bazar, qui leur avaient fait Thonneur de
Ics lear confier.
La cointesse GrefTuIhe, aprds avoir donn^ k ses collogues lecture de la
lettre de M. de Mackau, a r^pondu au comity en le f^licitant du z^le dont
il a doQn6 taut de preuves, en exprimant le regret que la justice ait cru
devoir dire son mot dans un ^v^nement oCi il semble que sa parole doive
d^faillir comme sa pens^e, et en formulant Tespoir que le comity voudra
bien continuer k niettre au service des ceuvres le d^vouement qu'il leur a
si lib^ralement consacr^ jusqu'^ ce jour.
La creche de Perpignan. — Le maire de Perpignan a re^u du baron
H. Despr^s une somme de 25000 francs pour la creation d'une creche des-
tin^e aux enfants en bas dge, dont les m^res sont obligees de viyre ext^-
rieurement de leur travail.
Un monnment an professeur Tamier. — Les anciens 6I^ves de
M. Tarnier d^sirent lui Clever k Paris un monument qui perp^tue sa
jn^moire. lis ont k cet effet provoqu^ la formation d'un comity compos6 de
d^l^gu^s pris parmi les membres de TUniversit^, les anciens ^l^ves et amis
de H. Tamier, les 61us du d^partement de la C6le-d'0r, les membres du
.Gonseil g6u6ral de la Seine et du Gonseil municipal de Paris, les Soci^t^s
savantes dont M. Tarnier faisait partie, etc.
Les souscriplions sont regues k Paris : chez MM. Fontana, notaire, 10,
rue Royale; Collin, 6, rue de TEcole-de-M^decine ; Georges Masson,
.120, boulevard Saint-Germain; G. Sleinheil, 2, rue Casimir-Delavigne.
Commission d'ex6culion. — President : M. Brouardel. — Membres :
MM. Pinard, Budin, Ribemont-Dessaignes, Maygrier, Bar, Bonnaire, Potocki,
Tissier, Dubrisay, anciens 6l6ves de M. Tarnier. MM. Laboulb^ne, Guyon,
professeurs a la Facult6% MM. Bergeron, Cadet de Gassicourt, membres de
TAcad^mie de m^decine. MM. Magnin, s6nateur; Lucipia, conseiller muni-
cipal; E. Dubois, conseiller g^n^ral. M. Peyron, directeur g^n^ral de
.TAssistance publique. M. Millard, m6decin des b6pitaux. M. Collin, fabri-
cant d'instruments de chirurgie. MM. Laurens, artiste peintre; Moreau,
sculpteur; Scellier de Gisor, architecte, amis de M. Tarnier. MM. Bourne-
ville, directeur du Progr^s medical; Huchard, directeur du Journal des Pra-
ticiens. MM. Georges Masson, G. Steinheil,^diteurs. — Secretaire :M. Cham-
petier de Ribes, 19, rue Saint-Guillaume. — Secretaire-adjoint : M. Demelin,
49, rue de Rome. — Tr^sorier : M« Fontana, nolaire, rue Royale.
De leur c6te, des dames ont song^ k joindre leur hommage k celui du
comite preside parM. Brouardel et un comity s'est form6sousla pr^sidence
de M™* Brouardel ; il coraprend comme membres : M"*«» Bar, Bonnaire, Pierre
.Budin, Cbampetier de Ribes, Glin, Deutsch-Raba, Dubrisay, Gadala, Guyon,
Hanicot, Renault, Henry, Hutinel, Maygrier, Millard, Panas, Pinard, Roze,
Schmahl et Varnier; Tappel du comit6 des dames est particuli^rement
touchant :
« Les jeunes femmes de nos jours peuvent, elles, se rendre compte de
quels dangers etaient autrefois meoac6es les nouvelles accouch^es, que la
mort guettait.
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634 REVUE PHILANTHROPIQUE.
« Dans les hdpitaux la mortality 6tait effrayanie. Pendant I'ann^e 1856,
oil le docteur Tarnier fut interne k la Maternity de Paris, la situation §tait
telle que Ton dut fermer la maison d'accoachement. Une ^pid^mie de
fifevre puerperale y r^gnait.
« Je voyais, dit le professeur Tarnier, des femmes entrer k rh6pital bien
« porlantes, pleines de vie ; vingt-quatre on qaaranle-huit heures apr^s,
« j'assislais k ieur agonie; c'6tait un spectacle dpouvantable. »
a Ces paroles ne furent pas Texpression d'une Amotion ^ph6m^re.
« L^impression produite par ce spectacle ^ouvantabU fut profonde et
durable.
« Diminuer pour les femmes les dangers de Taccoucbement, preserver
la frdle existence des nouveau-nesfut la tAche de toute la vie du professeur
Tarnier. Gr&ce k ses travaux, grdce k rapplication des mesures d'isolement
et d'antisepsie, ik oh autrefois mouraient de 15 & 20 femmes p. 100, il
ineurt k peine i p. 100 aujourd'bui.
i< De lels services rendus k I'humanit^ commandent la reconnaissance
de tons. Les femmes cependant ont la plus large dette de gratitude.
« Elles le voudront assur^ment reconnattre en souscrivant pour le mo-
nument k 61ever k la memoire de M. le professeur Tarnier. »
La Maison de la Jeune fille. — Aux environs de Pdques sera inau-
gur^e une nouvelle oeuvre, dirigee par M"® Sara Monod, et due k la muni-
ficence de M"'^ veuve Jules Lebaudy. Get dtablissement est destind a donner
asile k toutes les jeunes filles, de pr6f6rence aux employees de commerce
et aux insli tutrices, momentan^ment sans ouvrage, sans distinction de con-
fession. Ces jeunes flUes, k des prix modiques, auroiit k Ieur disposition
des chambres meubl^es avec godt, une superbe salle de restaurant, [un
cercle, une salle de conferences, etc.
Sauvetage de I'enfance. — L'Union francaise pour le sauvetage de
Tenfance, pr^sidde par M"^*' Jules Simon, a la charge de plus de 700 enfants
maltrait^s ou abandonn^s, tons sauves de la mis^re et du vice. Pour sub-
venir aux d^penses considerables qu'enlrainent Tentretien et r^ducation
de ces petits malheureux, TUnion fran^aise organise une tombola pour
laquelle elle a re^u de nombreux lots d*une grande valeur artistique ou
commerciale.
Le Vestiaire du soldat. — V£cho de Paris annonce que, pour venir
en aide aux militaires lib^r^s et pour Ieur procurer une tenue propre et
d^cente, une association vientdese fonder & Paris sous le titre de Vestiaire
du soldat.
Cette a?uvre s*attachera surtout k vStir, k Ieur liberation du service mi-
litaire, les anciens soldats n^cessiteux, depourvus de tout p^cule, qui,
faute de vfitemenls civils, ne parviennent pas k trouver du travail ou un
emploi.
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BIBLIOGRAPHIE
« Manuel pratique de la garde-malade et de rinfirmi^re » public
par le D"" BoumeTille (1). — Le mouvement qui s'accentue depuis quel-
ques ann^es en faveur de rinstructiou professionnelledu personnel secon-
daire des h6pitaux, a d^lermin^ Tapparition de toute une litt^rature sp^-
ciale. En Angleterre, aux Etats-Unis, en Suisse, en Autriche et dans
quelques autres pays il existe, depuis un temps plus ou moins long, des
6coles sp^ciales ou Ton enseigne toutce qu'il importe de savoir aux gardes-
malades, aux indrmiers et infirrai^res et, pour aider les 41^ves dans leurs
Etudes, ii a H6 public des manuels plus ou moins complels. Rlllrotti en a
fait un qui est pour ainsi dire classique en Allemagne ; il existe de nom-
breux specimens en Angleterre lels que ceux de George Black (Sick-Nur-
sing) (2) et de James Anderson (Medical Nursing) (3), sans parler des g6-
niales publications de miss Nightingale.
Les publications fran^aises sont plus rares sans doute, mais d'unevaleur
incontestable. Les publications du minist^re de la Guerre [icole de Vinfir^
mier militaire, icole de IHnfirmier el du brancardier (4) sont tout k fait
sp^ciales etno doivent fitreque mentionn^es ici, malgr^ leur valeur r^elle;
par contre, le Manuel de la garde-malade et de rinfirmi^re, edit6 par Bon-
neville et qui depuis 1878 aeu six Editions successives, merite une attention
particoli^re. Q'a, 6t6 chez nous le premier travail complet et il est rest^ le
meilleur, grdce k Tautorit^ du direcleur de la publication et k la science
des collaborateurs dont il a su s'entourer, tels que Brissaud, Budin,Duret,
Keraval, Maunoury, Monod, Poirier, Regnard, Sevestre, Yvon, etc.
Les cinq petits volumes in-12 qui forment I'ouvrage permettent de
passer successivement en revue : I'analomie et la physiologic; I'admini-
stration et la comptabilit^ hospitali^re, lespansements; les soins^ donner
aux femmes en couches, aux ali^nes; les medicaments les plus usuels, et
enfin Thygi^ne.
C'est surtout au personnel des infirmiers et inflrmi^res de TAssistance
(1) Paris, aux bureaux du Progrds m^dicaly 14, rue des Cannes (6« Edition),
1897.
(2) Londres, Ward, Lock and C*»; Warwick House, Salisbury Square.
(3) Londres, Levis, 136, Gower Street, 1894.
(4) Veuve Rozier, 26, rue Saint-Guillaume, Paris, 1894.
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636 REVUE PHILANTHROPIQUE.
publiqae de Paris qu'il s'adresse, et il n'est pas doutenx que, poar les
femmes du monde, il est an peu trop ^tendu; il serait n^cessaire qu'one
Edition alleg^e fiit faite k ieur asage. II est (vrai que des publications sp^-
dales ont ^l^ faites depuis et & rimitation^du manuel de BoumeviUe. L'une
d'ellefsaumoins, celle qu'a publi^e VUnion des Femmes de France, est tout h
fait r^ussie (1).
Ge n'est pas un des moindres mdrites du manuel de Bourneville que
d' avoir suscit^ des publications analogues ^et nous citerons en passant celles
qui sont ^dit6es par les hospices de Lyon, notamment le Cours de m^decine
profess^ aux hospitali^res de TAntiquaille par le D' Horand, et le Cours
de petite chirurgie profess^ aux hospitali^res deTHdlel-Dieuetde la Charity
par le D' Michel Gangolphe (2).
Toutefois aucun de ces trait^s n'est aussi complet, aussi documents que
le manuel du D"^ BoumeviUe, dont le nom reslera attache k Toeuvre si utile
de r^ducation professionnelle des infirmiferes.
H. N.
(1) Paris, Masson, ^diteur.
(2) Lyon, imprimerie Waltener et 0«.
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BULLETIN
Aa point de vue d^mographique, Tann^e 1896 doit Hre marquee d'un
caillou blauc; elle peut compter parmi les plus favorables de ce dernier
quart de si^cle. Au lieu do deficit de Tann^e pr6c^dente, le mouvement de
population pour 1896 accuse un exc^dent des naissances snr les d^c^s et
cet exc^dent s'616ve au chiffre respectable de 93 700.
Get heureux r^sultat, si on le decompose, n'est pas fait seulement d'un
accroissement des naissances, mais d'une diminution de la mortalitd.
-Voici les chiffres de 1895 et de 1896 : naissances, 834173, 865 586, soit un
gain de 31 413 ; d6c6s, 851 986, 771 886, soit nne baisse de 88 100. D'une
maniere relative, la proportion de 21 ,4 pour 1 000 habitants des naissances,
8'61^ve pour 1896 k 22,7, tandis que la proportion mortuaire de 22,4
pour 1000 en 1895 s'est abaiss^e en 1896^ 20, 2 p. 100.
II y a done lieu de se r^jouir ample men t, patriotiquement de cet in-
yentaire r^confortant; toutefois il serait imprudent de chanter victoire et
de tenir (pour d^ftnitivement acquis un rel^vement peut-6tre fortuit. Le
souvenir de 1895 n'est pas encore elTac^, et, si 1893 et 1894 ont 6t6 k peu
pr^s satisfaisants, les exercices 1890, 1891 et 1892 ont accuse un deficit.
n suffit de Jeter les yeux sur un grapbique pour constater que tout danr
ger n'a pas disparu'et que la productivity reste inf^rieure k ce qu'elle 6tait
au lendemain de la guerre; les 865000 naissances de 1896 n'atteignent pas
les 966000 de 1872, elles sont au-dessous de la moyenne des vingt et one
derni^res ann^es; la proportion de 22,7 p. 1000 est inf^rieure k la natality
moyenne de TEurope de 38 p. 1000.
Amelioration certes, mais pas gu^rison, tel est le diagnostic prudent
qui s'impose.
A quoi tiennent ces differences et quelle cause aproduitce revirement?
U est presque impossible d'^mettre une hypotb^se soutenable, d'aventurer
nne provision s6rieuse. L'bonorable directeur de TOffice du travail,
M. Moron, confesse loyalement son impuissance k expliquer quoi que ce soit :
« C'est qu'en r^alite, ecrit-il, en mati^re de d^mographie, il est bien difficile,
pour ne pas dire t^m^raire, d'echafauder des theories sur le d^veloppement
ou Tamoindrissement des populations, mdme en se basant sur des obser-
vations de plusieurs ann^es. La natality et la mortality tiennent, en effet,
it tant de causes d'ordres si diff^rents, parfois impossibles k saisir, qu'ou
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638 REVUE PHILANTHROPIQUE.
ne doit s^aventurer qu'avec des pr^cau lions extremes k tirer de ces ph6no-
m^nes des conclusions th^oriques qai, pour solides qu'elles soient, ne sau-
raient dtre ^rig^es en lois absolues. »
II n'y a qu'un point sur lequel il est perrais de hasarder une opinion
plus ferme, c'est en ce qui touche la diminution des d^cds. En comparant
le chiffre des d6c^s de 4896 k la moyenne de 1871-1896, le progr^s est sen*
sible, puisque la moyenne des 26 ans ^tait de 852 000, soit une diminu-
tion de 81 000 ou de 9,5 sur cette moyenne.
Queiles que soient les fluctuations de la sant6 publique, et sans se
payer d'iilusions, Tam^lioration est r^elle, tangible ettoutpermetd'esp^rer
qu'elle ne sera pas 6ph^m^re.
Le rapport sonmaifeas minislre du Commerce n*est pas assez d^taiil^
pour qu'on puisse analyser les ^Im^ts de la mortality et nous devous
nous tenir k des inductions approximatives. Mais tout ce que nous
savons nous autorise h penser que, si depuis plosieurs ann^es la mor-
tality tend k baisser, avec des alternatives de hausse, Thygidne publique et
la th6rapeutique pastorienne y sont pour beaucoup.
II est acquis, par Texemple de TAngleterre, pour les mesures d^assai-
nissement des villes et de prophylaxie des maladies contagieuses, par celui
de FAllemagne pour la variole, qu'une legislation sanitaire rigoureuse
donne le moyen de r^duire dans une forte proportion les maladies
actuelles.
La France a certainement particip^ au mouvement g^n^ral, elle recueille
un certain benefice de rapplicalion des d^couvertes de Pasteur, mais cenx-
Ik qui Youdraient exploiter les r^sultats du mouvement de population pour
1896 contre toute r^forme sanitaire seraient bien aveugles et bien coupables.
Si la mortality fran^ise est relativement faible, elle ddpasse celle de
plusieurs nations d'Europe et il n'y a pas de raison pour qu'un pays de
climat tempore comme le n6tre se laisse distancer par des peuples da
Nord.
II reste beaucoup k faire et la loi sur la protection de la sant^ publique,
en preparation au S^nat, n'est pas moins indispensable au lendemain d'uo
inventaire prosp^re qii*k la suite d'un bilan charge.
Cette pauvre loi a subi, dans la premiere deliberation senatoriale, des
amputations graves. La majority du S^nat s'est refus^e k pr^voir I'exislence
de fonctionnaires de la sante publique, d*agents de contrdle et dimpulsion
en qui le gouvemement, responsable de la defense sanitaire comme de la
defense natiooale, aurait place sa confiance. Peut-etre etit-i\ mieox valu
proposer la creation d'agents nouveaux, plntdt que de reunir les attribu-
tions d'hygi^ne et celles d'assistance dans les mdmes mains. Sans doute,
cette combinaison n'avait ete imaginee que dans une pensee d*economie, en
vue de desarmer toutes les resistances; cette concession, qui risquait de
porter atteinte au bon fontionnement des services d'enfants assistes et de
protection de Fenfance, n'a pas tronve gr^ce devant le Senat. Seulement,
meme restreinte et mntiiee, la loi sanitaire n*en sera pas moins un progr^s
considerable sur la situation actuelle et les demographes attentifs comme
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BULLETIN. 639
les patriotes clairroyanls doivent faire des vceux ardents poor qu'elle ne
tarde pas h aboutir et k 4tre promulgu^e.
« II y a un si^cle, d^clarait M. Brouardel dans sa belle ^tude sur le
Logement insalubre, c*6tait dans les h6pitaux qae la promiscuity assarait
la formation de foyers de pestilence et de mort; aujourd'hai c'est dans les
logements insalubres, encombr^s que se cultive la tuberculose. 11 est (Tail-
leurs de mime pour le choUra, le typhus^ /a peste. » Grave et redoutable pa-
role qui devrait dtre conslamment presente k I'esprit de tons ceux qui d^-
tiennent, k un titre quelconque, une parcelle d'autorit6 et d'influence sur
la marche des affaires publiques !
*
Le Gonseil g^n^ral de la Seineapris une excellente decision; il a r^solu,
sur la proposition de M. Paul Brousse, rapporteur g^n^ral du service des
ali^n^, de constiluer une grande commission dans laquelle des savants et
des administrateurs rechercheraient de concert les moyens pratiques de
faire face aux besoins croissants de Thospitalisation des ali^n^s. M. Paul
Brousse s'est inspir6 de la m^thode suivie avec tant de proGt k THdtel de
Ville pour Talimentation par le lait et pour la reorganisation des ambulances
urbainesy & TAssistance publique pour la tuberculose et il a pris une initia-
tive analogue.
Le d^partement de la Seine est aux prises avec les difQcult^s les plus
insurmontables au point de vne du traiteroent des ali^n^s. Ghaque ann^e, la
population d^mente s'accrott en nombre ; les asiles actuels n'y suffisentplus
depuis longtemps; un cinqui^me asile est en construction pour lesali^n^s
alcooliquesy et il n'aura pas plus i6i ouvert ses portes qu'il sera encombr(^
comme les autres. Sur les 12000 ali6n6s de la Seine (Paris et la banlieue),
6000 environ sont bospitalisds dans les asiles urbains et suburbains, 6 000
autres sont conO^s, moyennant un prix de journ^e, k des asiles de province.
Ce transfer t de malades k Tautre extr^mit^ de la France, tantdt au nord,
tautdtau sud-ouest, est toutce qu'il y ade plus p6nible et de plusattristant.
L'administration choisit de preference les pensionnaires les moins visit^s;
cette pierre de touche n'est pas infaillible, et Texode n*en reste pas moins
douloureux pour un grand nombre de families.
Un nouvel essai de colonisation familiale est k I'etude aux environs de
Dun-sur-Auron (Cher) ; Tadministralion a 616 invitee k etudier un projet
d'exploitation agricole pour les chroniques adultes (^pileptiques, imbeciles).
II est question d'nne colonie familiale de convalescence dans le voisinage
d'un asile. La commission mixte aura justement k examiner la valeur de
ces diirerentes teutatives, k en sugg^rer de nouvelles, k determiner Turgence
de certains essais, patronage, assistance k domicile, etc.
A queis moyens recourir pour resondre les difficultes croissantes? Con-
vient-il d*etendre Texperience si concluante de la colonie de Dun-sur-Auron
od le placement familial a parfaitement reussi? De nouveaux asiles seront
ils construits? Distinguera-t-on entre rasile-h6pitai pour malades aigus
et I'asile-hospice pour chroniques? Les asiles de temperance pour les alcoo-
liques seront-ils preconises? Les questions se posent et se pressent, et le
Gonseil general de la Seine a sagement pense qu'il n*aurait pas trop des
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640 REVUE PHILANTHROPIQUE.
lumi^res de ses membres les plus experiment's et des ali'nistes les plus
qualiQ's, reunis cdte k cdie avec les commissaires de surveillance des asiles^
pour d'couvrir la meilleure m'thode k suivre ou plut6t pour 'laborer un
plan m'thodique de traitement et d'hospitalisation des ali'o's.
L'heure est propice pour cette 'tude, parce que, depuis peu de temps,
les id'es ont march', rorganisation des asiles d'ali'n's est en pleine
p'riode de recherches et de reorganisation. On n'en est plus k penser, comme
en 1838, comme il y a peu d'ann'es m'me, que Tasile ferm' avec ses
quartiers d'agit's, de demi-agit's et de tranquilles, soit le dernier mot et
le type d'finilif du traitement des malades atteints d'ali'nation mentale.
MM. Magnan et P'charman op^rent, dans \me 'tude r'cente (i), cette selec-
tion id'ale, enlevant successivement de Tasile les incurables non dange-
reux, les d'ments, les alcooHs's, les 'pileptiques et les idiots; le classique
etablissement ne conserve plus entre ses hauts murs que les ali'n's curables
et les ali'n's dangereux ; encore parmi ceux-ci un certain nombre de cri->
minels, de d'g'ner's en 'tat de folie morale, devraient-ils prendre place
dans un 'lablissement interm'diaire, uoe sorte de prison-asile, relevant 4
la fois du magistrat et du m'decin, oil les m'thodes de moralisation et de
rel'vement du criminel seraient le coroUaire forc'de la sequestration.
Le remarquable article de M. le docleur Edmond Toulouse, qui a pam
plus haut, est une contribution importanle k ces travaux d'un si grand
int'ret en vue de T'tablissement d'une assistance rationnelle des alien's.
Paul Stracss.
(1) Revue de Psychiatries Janvier 1898, organisation des asiles, chapitre extrait
d'un article Notions de pathologic et de Ih^rapeutique g4n4rales dans les maladies
mentales, qui va paraitre dans le Traite de th^rapeutique pratique dc M. Albert
Robin.
Le Direcleur-G^rant : PAUL STRAUSS.
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L^ASSISTANCE INTERSCOLAIRE
DANS UNE fiCOLE NORMALE
De mon carnet de route.
Deux fois dans un m6me jour, je suis all6 k T^cole normale
de Montauban; et visite du matin, visite du soir m'ont caus6
de joyeuses surprises. G'est que les vormaliens de Montauban
sont de ceux qui ont le mieux compris ce que les instituteurs de
demain pouvaient faire pour se former i leur r6le d'dducateurs
nationaux. T6te et coeur, ils se sont mis tout entiers h roeuvre.
L'apprentissage de bont6 aura 616 bon qu'ils revendiquent et
accomplissent...
Et voici ce que j'ai vu le matin. Apr^s avoir fait une cau-
serie sur Finstruction populaire aux ^l^ves-maltres, causerie
bien abr^g^e, car il n'est pas n^cessaire d'enfoncer des portes
ouvertes, je me suis rendu k T^cole annexe.
Les enfants y chantaient. Quoi ? Un hymne special d6di6 au
Tam-et-Garonne. lis ont un charme bien k eux, ces chceurs, —
tel « 6 mon Berry » que j'ai entendu retentir dans le Cher, —
que Ton entonne k la louange de la « petite patrie ». Ils disent
Tunion, Famiti^ entrejeunes concitoyens dpris des m6mes hori-
zons, fagonn^s aux m^mes habitudes. lis disent les raisons que
Bretons, Proven^aux, Savoyards, ont d'etre attach6s au sol natal
qui partout, par ses rivieres ou bien ses montagnes, ses valines
ou ses champs, ses cdtes ou ses plaines ade quoi flatter Tamour-
propre de ses enfants. II a du reste du mouvement, un fier ^lan,
ce Chant des 6coliers qui, le soir, par un simple changement de
mot au refrain, sera le Chant des adultes.
BBVUI PHILAKTHROPIQUB. — II. 41
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642 REVUE PHILANTHROPIQUE.
11 est precis, il introduit Thistoire dans la po^sie :
... De la France, doace patrie,
Trois lits ont fait notre teiroir.
La Gascogne ardente y d^ploie
Ses tr^sors f^conds k merci,
Et le fier Rouergue y coudoie
Les rudes causses du Qaercy.
II y introduit aussi la geographic et la flore :
Trois fleuves y roulent leurs ondes.
La Garonae aux flots indomptds,
Le Tarn sombre aux gorges profondes,
L'Aveyron aux Apres beaut^s.
Sur leurs bords, le soleil caresse
Blondes moissons et fruits dor^s.
La vigne 6ia\e sa richesse
Aux flancs des coteaux empourpr^s.
Et il n'est pas banal, le couplet patriotique qui vient apr&s
le couplet des « grands hommes » : Ingres, Fermat, Saint-Andr6,
des « gloires » nationales et locales :
Travailler est ia loi du monde,
ManoeuvroDS ferme au gouvemail,
L'h^ritage humain se f6conde
Et s'ennoblit par le travail.
R^p^tons aux heures ingrales,
Ainsi qu'un appe! de clairon,
Le mot des jeunes Sparliates :
« Ce que vous fates nous serons ! »
II faut voir avec quelle ^nergie de conviction ces demiers
mots sont lances ! Je suis bien sAr que la promesse sera tenue.
Je me fais cette reflexion i part moi et aussi cette autre : qu'il
serait desirable de voir se r^pandre dans chaque d^partement
Tusage d'avoir un « Chant des ^coles ». Pofetes et musiciens ne
manqueraient pas qui seraient heureux de voir une de leurs
ceuvres jouir d'une saine et durable popularity et graver dans
les m^moires de nobles sentiments exprim^s en strophes bar-
monieuses.
Mais la prose, — une prose qui a sapo^sie, — me reprend. Je
passe aur^fectoire. Dans une ^cole annexe, oil iln'y a que des
externes? Oui, dans une 6cole annexe. Car MM. les 6lfeves-
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L'ASSISTANCE INTERSCOLAIRE. 643
mattres de T^cole normale ont eu la g^n^reuse, la philanthro-
pique idde de constituer une Sociiti de bienfaisance en faveur
des ^l^ves de T^cole annexe. Et la Soci4t4 de bienfaisqnce a
d6but^ en fondant une Cantine coop^ative.
Des amis de Tenseignement, le personnel de T^cole nor-
male, les ^l^ves-maltres contribuent aux frais, et, en outre, les
enfants participent ft la d^pense. On aide qui s'entr'aide. Le
principe est bon.
Et bonne aussi Tapplication.
L'organisation est tr^s simple, de facile adaptation.
a) Versements des Aleves. — Le prix du repas est de fr. 10, les 6lfe?es
qui ne peuvent payer cette somme ne versent que fr. 05, ceux qui ne
peuvent payer fr. 05 sont admis gratuitement.
h) Menus. — Ghaque repas comprend : utie soupe, uo plat de viande ou
de morue, un plat de legumes, du via et, deux fois par semaine, un des-
sert. Chaque ^l^ve apporte son pain.
Le6 principales f^tes de I'ann^e donnent lieu k un repas plus copieux.
Tous les comestibles sont de premiere quality et pr^par^s avec soin.
c) Ration pah tAte d'^leve. — Viande : 40 grammes ; morue 40 gr. ; le-
gumes frais ou pommes de terre,200gr.; graisse,Ogr. 05; vin : 4 centilitres.
Mais voici le menu de la semaine (17 au 22 Janvier 1898) ou
j'ai visits la cantine :
Lundi 41 Janvier 1898, — Soupe citrouille. — Beefsteak. — Haricots
biancs. — Gdteaux. — Vin.
Mardi 18 Janvier. — Soupe pois. — Fritons. — Lentilles m^nag^re.
— Vin.
Mercredi 19 Janvier. — Potage gras.— Bouilii nature k la paysanne. —
Pur^e de pois. — Vin.
Vendredi 21 Janvier. — Soupe choux. — Morue aux pommes maitre
d'hdtel.— Vin.
Samedi 22 Janvier. — Soupe lentilles. — Filet brais^. —Garottes bour-
geoise. — Noisettes. — Vin.
Tout.cela pour deux sous ! Mais comme me le disait k Tou-
louse quelques jours aprfes M. Perroux, recteur de FAcad^mie :
« Je comprends votre ^tonnement. Je Tai partagd. Mais rien
n'est impossible & cet ap6tre : M. Cazaubiel, ^conome et pro-
fesseur d'histoire, seconds par M. Lalaurie, directeur de TEcole
Bormale, et par M. Roum^ga, directeur deT^cole annexe. A eux
trois ils feraient des miracles. »
Et puis... Ma foi, tant pis. Je vous livre le secret. Sansdoute,
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644 REVUE PHILANTHROPIQUE.
il y a eu des dons en nature. Des fournisseurs se sont laissd
gagner h la contagion de Texemple. Mais n'emp6che que bouillis,
beefsteak, filets braises, coiileraient k eux seuls plus de dix cen-
times, — si la yiande de cheval, oh! bien choisie, app^tissante k
souhait, — ne formaitle fonds du repas. G'est ainsi. A Montauban,
les pupilles de laSoci^te de bienfaisance,les abonn^s de la Cantine
cooperative sont des hippopbages. M6me ils s'en trouvent bien.
Les r6sultats le prouvent. Depuis Janvier 1897, date de la
fondation, jusqu'au 31 d^cembre, trente ^Ifeves en moyenne ont
« coop6r^ » au dejeuner, et avec un app^tit soutenu. 4678 repas
ont 6t6 servis, savoir2524 i fr. 10; 1 857 i fr. 05. Les ver-
sements des ^l^ves se sont elev^s i 345 fr., 25. Et voici la mer-
veille, la chose inouie, due k Tapparition sur la table (c de la plus
noble conqufite de Thomme », chaque repas en moyenne a coMd
huit centimes I
Comme il y a eu des cotisations de « patrons », la « Soci6t^ de
bienfaisance » ne s'est pas bom^e k ouvrir la cantine.
Elle a fourni des v^tements k quatre ^Ifeves indigents, et je
sais qu'elle a Tintention de porter ses efforts sur cette ^bauche
de « vestiaire ».
Elle a achet6 un petit materiel de jeux (quilles ballons,
foot-ball, etc.) pour les dfeves de T^cole annexe, ce qui n'a pas
peu contribu^ k donner vie aux recreations et k d^velopper le
godt des exercices physiques.
Elle a pris Tinitiative de promenades dirig^es vers des
cultures, vers des exploitations agricoles, et les collations n'ont
pas ete oubliees, qui procuraient plaisir et r^confort k des en-
fants pauvres, si souvent priv^s d'un peu de joie.
Elle a etendu son action k toute la vie de Ti^cole annexe,
devenue vraiment et comply tement un champ d 'experience de
vivante demonstration, pour les instituteurs de domain.
A Toccasion de la distribution des prix, sept livrets de la
Gaisse nationals des retraites, de cinq francs Tun, ont ete re-
mis aux jeunes « certifies » de Tannee.
De plus hiSoctiti de Bienfaisance s'est interessee au « lende-
mainde Tecole », aux cours du soir qui ont lieu k r£coIe
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L'ASSISTANCE INTERSCOLAIRE. 645
annexe. Elle est intervenue pour offrir des livres h quelqueg
anciens ^Ifeves ddsireux de s'inslruire.
Cette ^cole du soir ft Tlficole annexe, je Tai vue, je me suis
assis sur ses bancs, le m6me jour. G'est une organisation modMe.
Le cours d'adultes a lieu deux fois par semaine, le mercre-
dietle samedi. La premiere stance est consacr^e k des exer-
cices pratiques se rapportant ft la revision des matiferes ^tudi^es
ft r^cole primaire; la seconde ft des exercices de chant et ft une
lecture ou causerie, accompagn^e le plus souvent de projec-
tions lumineuses. M. Roum^ga, directeur de T^cole annexe,
assists d'un 6l^ve mattre de troisi^me ann6e, est charge de r6gler
la marche des exercices pratiques. Les lectures ou causeries
sont faites altemativement : 1** par les professeurs de Tdcole et
le directeur; 2^ par les 6l6ves-maitres de troisi^me ann6e. Ce
premier essai a r^ussi au delft de toutes les esp6rances: le
chiflFre des inscriptions s'est 6lev6 jusqu'ft 34 et la moyenne des
presences ft 35.
J*ai le bonheur d'etre ft Montauban un samedi. Et j'entends
an dlftve-maitre de troisifeme ann^e, le joune C..., faire une
conference sur la region des Gausses. II connait ft fond les publi-
cations du d^couvreur de grottes et d abimes, M. Marlel. II
nous le fait suivre en ses pdrdgrinations souterraines. Gomme
le conf^rencier est lui-m6me du pays, il entremfele au souvenir
de ses lectures ses impressions personnelles. La pr6sence de
rinspecteur d'acad^mie, M. Athan^ de Finspecteur primaire et
de plus de deux cents auditeurs ne Tintimide pas, car, ainsi que
ses camarades, il est pr^par^, enlrain6. II est lout prfet ft jouer,
d^s sa nomination, son r6le de confdrencier populaire. II a la
note juste, une suffisante autorit^. II sait approprier sa de-
monstration ft Timageprojet^e sur T^cran par un deses camarades
qui, lui aussi, a le metier dans la main.
Est-ce tout ce que Ton voit ft T^cole normale de Montauban?
Est-ce tout le bien qu'on y fait ? Non pas.
J'ai r^servd pour la fin un trait de « morale en action », de
touchante solidarity qui m'a beaucoup frapp6. Figurez-vous
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5U6 REVUE PHILANTHROPIQUE.
que la Sociiti de Bienfaisance a adopts un orphelin ! C'est un
^Iftve de r^cole annexe. II avait perdu sa mfere. Son pfere, al-
teint d'une tuberculose incurable, 6tait k rhApital. Pouvait-on
se d^sint^resser de Tenfanl? La SociSi^ Ta pris sous sa tutelle.
EUe Ta confix h une Famille de braves gens k qui, gr^ce au con-
cours de Tadininistration des enfants assistds, elle paie une
petite pension. Elle Fhabille. Elle Tadmet gratuitement h sa
cantine. La « Fille du regiment » a son pendant. II y a le « Fils
de r^cole »... Je le dis sans nuance de plaisanterie m£me inof-
fensive, car le fait ne prftte pas k sourire, mais est tout k la
louange de ses auteurs. « Nous n'abandonnerons pas le jeune
orphelin, » m'a-t-on dit li-bas. Et la promesse sera tenue.
Sans compter que la SociM de Bienfaisance de I'^cole
normale a « de longs espoirs et de vastes pens^es ». Son succ^s
Tentratne k d'autres tentatives, et qui r^ussiront gr4ce au trio
devaillants etde d^vou^s qui conduisent Taffaire.
La Soci^t6 a ^tabli les statuts d'une soci^t^ de mutuality ei
de pr6voyance, une Petite Cavi en faveur des 6lfeves et des
anciens ^l^ves de T^cole annexe. M6me elle desire ^lendre le
b^n^fice de cette excellente institution k toutes les ^coles pu-
bliques de Montauban.
Au vrai, matin et soir — it la cantine et au cours — j'ai pu
constater ft Tficole normale de Montauban ce qu'un groupe-
ment de forces jeunes et actives, ce qu'une association de braves
gens d6cid^s k rendre service autour d'eux, pouvaient tenter
d'heureux et d'efficace dans le combat contre Tignorance et la
misfere. La Soci4t4 de Bienfaisance d'oii vient de sortir la Pra--
temeliey — nom donn6 k la « mutuality entre enfants » — con-
stitue un organisme bien vivant, dont Tavenir est assure par
une collaboration incessante des professeurs de V6co\e et des
^Ifeves-maitres.
Et c'est dans toute la France scolaire m6me tendance ft Taide
mutuelle, ft la solidarity. Un mouvement irresistible de bonti,
de pitie, d'humanite emporte les jeunes generations. li est
temps qu'elles arrivent ft la vie civique, qu'elles opposent aux
OBUvres de discorde et de haine les oeuvres d'amour et d'union.
fiDOUARD PETIT.
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LE
PARADOXE DE LOISEAU PINSON
En recevant ces jours derniers la circulaire de la f^d^ration
abolitioniste interaationale, dont le but hautement proclam^ est
la suppression de la r^glementation de la prostitution, un para
doxe d'un de mes anciens collogues du Gonseil municipal m'est
revenu k la m^moire. Loiseau Pinson 6tait un r^publicain
ardent ; il avait fait ses preuves dans les luttes contre TEmpire
et pendant le sih^e de Paris. D'un caracti^re aussi joyeux que
son nom, possesseur d'une voix tonitruante, dou^ d'un aplomb
d^contenauQanty interrompant aved fracas les orateurs, son
audace apparente dans la discussion cacbait une timidit6 r^elle
qu*il dissimulait avec le plus grand soin; allant jusqu'aux
extr^mit^s les plus avanc^es des doctrines d^mocratiques, il se
gardait soigneusement de divulguer ses iddes r^formatrices
quand elles lui paraissaient n'fitre pas encore dans le courant
des opinions de son parti. Malgr6 son affectation du contraire,
il avait la plus grande terreur du ridicule, et une de ses propo-
sitions, repouss^e par ses amis, surtout si cet ^chec 6tB.it accom«
pagnS de quelques signes d'ironie, lui ett caus6 une veritable
douleur. Ce n'^tait que confidentiellement qu'il ^mettait cer
taines de ses id^es, le plus souvent dans Tintimit^ de ces diners
qui s6paraient les stances de jour des stances de nuit si tT6*
quentes h ce moment de labeur excessif occasionn^ par les
d^sastres de la guerre.
Quand vint la premiere discussion sur la r^glementation de
la prostitution, il y a quelque vingt-cinq ans, Loiseau Pinson
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648 revue; philanthropique.
nous donna en petit comity son proc^d^ pour supprimer toute
ing^rence policifere, en sauvegardant du m^me coup la sant^
publique. Et comme on lui conseillait de faire une motion en
stance ou de d^poser un projet de deliberation, il s^^cria : « Le
temps n'est pas encore venu, mon projet serait actuellement
consider^ comme un paradoxe, je voterai comme les amis. »
Gertes, les attentats commis contre la liberty excitaient sa
fureur; il s'6levait en discours v6h6mcnts contre les arresta-
tions arbitraires commises au nom de la morale etde Thygiifne.
11 s'exaltait en decrivant la rafle : « Une compagnie d'estafiers du
service des moBurs, disait-il d'une voix ronflante, ceme une
rue, un point du boulevard; toutes les filles qui s'y trouvent
soDt prises en tas et meu^es au poste ; la clairvoyance de Tar-
gousin suffit & distinguer la prostitute de celle qui ne Test pas.
Tant pis si cette clairvoyance est insuffisante, si celle qui est
empoign^e est bonn^te; elle est en d^faut, puisque le policier
la tient. Si elle r^siste, on la bouscule, on la bourre, et maigr^
ses protestations, malgr^ ses clameurs et ses larmes on Ten-
traine, elle est prisonnifere ! »
Et les rafles dans les h6tels ! Toute femme en compagnie
d'un homme est saisie et' amende ; seule m^me elle est prise
aussi quelquefois ! Et il cilait le mot du cdl^bre chef de service
Lecour : « Une femme honn^te ne loge pas en garni. »
II rappelait certaines erreurs terribles commises par cette
vertueuse police des moBurs : une femme est arrfet6e k une
heure du matin ; elle pretend aller chercher des medicaments
pour son enfant malade ; le sceptique agent lui dit : « Je la
connais celle-lJi! )> et la m^ne au poste malgrd ses pleurs et ses
supplications. Le lendemain son honorabilite etait reconnue ;
mais son enfant 6tait mort. Elle devint foUe.
Puis il rappelait cet autre mot du policier Lecour k propos
de Tarrestation de la femme d'un banquier de Dijon : « Est-ce
qu'un mari laisse sa femme Tattendre sur le trottoir? »
« Et cela aboutit, continuait-il, si la malheureuse n'est pas
reclam6e k temps, ou si, plus malheureuse encore, personne ne
s'occupe d'elle, k un sejour au ddpdt au milieu de filles per-
dues, et enfin k une visite medicale ignominieuse. Selon la fan*
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LE PARADOXE DE LOISEAU PINSON. 649
-taisie ou Terreur d'un agent, sur sa d^nonciation k huis clos,
elle peut 6tre inscrite sur le livre des prostitutes. Une fois
inscrite, elle est hors du droit comiuun, elle n'est plus mal-
tresse d'elle-m^me, la police peut Tempoigner h toute heure de
jour et de nuit, et renfermer dans une prison sans autre sanc-
tion que sa volontd. Du temps du pr^fet de police Gisquet, cet
emprisonnement administratif pouvait durer un an; cette peine
ill^galc s'est grandement abaiss^e, la police avoue aujourd'hui
vingt jours de detention au maximum ; cette dur^e s'abaissera
encore et disparaitra (1). »
Protestant contre ces violences et ces ill6galit^s, il citait la
definition de la libert6 par le jurisconsulte Batbie : « La liberty
^st le droit de n'fetre detenu qu'en vertu de Tordre de la jus-
tice. » Et, pour donner plus de poids k cette definition, il ajou-
tait Topinion du grand criminaliste Faustin-Hdlie en ce qui
touche la liberty des femmes : « A regard des filles, nous ne
parlerons ici que du seul droit de les arr^ter et de les detenir
arbitrairement ; aucune disposition quelconque ne donne un tel
droit k Tadministration. Quelle que soit la position de ces
femmes, elle doit les surveiller; mais elle ne peut les arr6ter
quand elles ne commettent pas un delit punissable. On ne peut
reconnaitre de classe k part qui soit en dehors du droit com-
mun et pour laquelle les lois n'aient ni force ni protection; on
ne peut reconnaitre d'autres droits que ceux que la loi lui
conf^re. »
Voil& parler, disait Loiseau Pinson, voilJi qui d6montre que
Tadministration viole la liberty. Quant k r^galite, proclamde
par la loi, elle n'est plus respect6e. Comment ! la fille qui fait
commerce de son corps est hors la loi? On s'est donnd le droit
de la saisir de force, de Texaminer de force, de Temprisonner
sans jugement! Si c'est pour sauvegarder la morale, n'y a-t-il
done que les filles qui fassent du racolage? Ce sont les libertins
qui font le libertinage. La femme est passive dans sa vie
(1) En annon^ant cette diminution, Loiseau Pinson ne se trompait pas; en
1880, une note de la Prefecture de police disait : « Les filles publiques arr^t^es
pour contravention aux rdglements sont envoy^es en punition h Saint-Lazare
pour un temps qui vane de quatre jours i dix jours. Ce maximum est tpfes
rarement d^pass^. »
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650 REVUE PHILANTHROPIQUE.
physiologique et c'est rinitiative de I'homme qui fait la pro-
stitution.
Si cette injustice est commise au nom de Thygibne, si c'est
pour prot^ger Ja sant6 publique que vous la jetez dans une
prison-hApital avec une inscription sur un livre d'infamie,
pourquoi ne frappez-vous et ne soignez-vous que Tun des pro-
pagateurs du mal ? Si les femmes sont contamin^es, c'est que
les hommes I'ont bien voulu, et alors pourquoi ne pas saisir
les mis^rables, qui propagent la terrible maiadie, pourquoi ne
pas les envoyer au ddpdt pour les faire examiner d'autorit^, et,
s'ils sont infect^s, les sequestrer dans une prison de traitement,
dans un hdpital moralisateur, un Saint-Lazare pour hommes?
Ah ! si les femmes avaient voix pr^pond^rante dans le gou-
vemement, elles diraient certainement : La cause de tout le mal
c'est rhomme, c'est sa d^bauche et son cynisme; qu'il soit
livr6 h la police, examine d'autoril^, enferm^ pour 6tre gu^ri et
mis dans Fimpossibilit^ de nuire.
Les definitions m6mes de la prostitution ddmontrent que
r^galite n'existe pas. Le surintendant Wakefort « regarde
comme 6tant k quelque degr6 une prostitute, une femme qui
friquenie phis d'un seul hommey ne fiit-ce qu'occasionnelle-
ment ». Mais k ce compte combien compterait-on de prostitu^s
parmi les honnfeles gens? Le surintendant Wakefort lui-m6me
etait-il bien sdr de ne pas entrer dans ce classement s^vfere?
Et la definition que donnait le colonel Vincent dans son
projet expose devant la Chambre des lords : « Une prostitute
commune est une femme qui soumet sa personne k des rela-
tions sexuelles, ou est raisonnablement suspectee de le faire
pour son propre profit ou le profit d'autrui. » Et les hommes?
s'ecriait Loiseau Pinson ; mais n'y a-t-il pas des prostitu^s com-
muns qui entrent de toute pifece dans cette definition ? et avec
Taggravation d'une invincible horreurl pourquoi la prison
administrative n'existe-t-elle pas pour eux comme pour les
femmes? pourquoi n'ont-ils pas Tinscription, la carte etla visite
obligatoire ?
Si, avec toutesces illegalites et ces injustices, la morale etait
en eflfet protegee ! Mais en verite Test-elle? Partout la prosti*
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LE PARADOXE DE LOISEAD PINSON. I55J
tution s'^tale, invite, provoque. Dans les quartiers les plus
honnfttes on voit des filies pi^tinant pendant des heures sur le
m6me trottoir, coudoyant les hommes, leur jetant au passage
les offres les plus crues; on voit sur la porte des maisons told-
r^esj selon Teuph^misme de la police, la servante, tirant Tceil
avec son tablier blanc, rester immobile sur le seuil et r^p^ter k
mi-voix, pendant toute la soiree, le mftme boniment provoca-
teur. Tout cela avec Tautorisation de la police, avec la r^gle-
mentation morale. Mais les yeux des jeunes filies sont souill^s
par ce spectacle, ses oreilles salies par ces mots qui volent
jusqu'it elles. D'autre part, les adolescents aux ardents d^sirs,
harcel^s k tons les carrefours par ces provocations, en rfivent
et succombent d^s qu'ils ont dans leur poche le prix d'entr^e.
Et c'est 1ft ce que Ton appelle prot6ger la morale publique?
Mais ce sont des attentats aux moeurs qui devraient 6tre rdpri-
m^s el vous avez la loi pour y r^ussir.
Avec le rfeglement vous ne frappez que les femmes, avec la
loi vous atteindrez les hommes. Combien de libertins font le
metier de courir les rues, d'aborder les femmes, de les pour-
suivre et de les ofTenser par leurs propos obsc^nes, par leurs
propositions insultanles. Qui n'a assists ft ce spectacle, qui n'a
il6 r6volt6 par ce cynisme? Et si la police s'en m6le, c'est la
femme qui sera arr^t^e en vertu du r^lement. Et Thomme ira
unpen plus loin emboiter le pas ft une autre fille.
S'agit-il de la sant6 publique? mais cette organisation ill^-
gale est absolument impuissante ft la prot^ger.
Ah ! si cette organisation pouvait avoir une influence r^elle
et faire disparaitre le mal horrible qui tient Tfitre jusqu'ft la fin
de ses jours, dontles r^cidives 6clatentau moment le plus im-
prdvu, mal dont on meurt mis^rablement et qui se transmet de
g^n^ration en g6n^ration, abaissant la race, diminuant ses
forces physiques et intellectuelles, faisant une lign6e de d^g6-
n6r^s; si la r^lementation, dis-je, pouvait avoir une influence,
je ne la combattrais pas, malgrd son atteinte aux principes. Mais
elle est impuissante. Ces mesures polici^res sont impuissantes,
en effet, parce que Ton ne pent atteindre qu'une portion minime
de celles qui habituellement colportent la contagion. Dans son
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652 REVUE PHILANTHROPIQUE.
livre, Lecour donnait le chiflFre de 3656 en 1870; admettons que
ce chiffre soil aujourd'hui au-dessous de la v6rit6 et qu'il y ait
actuellement S 000, 6000, 10 000 fiUes inscrites. Qu'estce chiffre
aupr^s de celui des insoumises qui, pour le mfime Lecour, ya de
30 000 k 60 000, qui, pour Maxime Du Camp, monte h 120 000,
chiffre au-dessous de la y^rit^ quand nous r^fl^chissons qu'en
dehors des femmes dont c'est Tunique metier, la prostitution
clandestine est partout : chez Touyrifere par entrainement, par
effroyable misfere, par education criminelle, chez nos servi-
teurs, chez nos jeunes bonnes faisant par leurs avances coarir
les plus effroyables dangers aux 6tres que nous aimons plus que
nous-m^mes. Mai d'autant plus menagant qu'il est enferm^ dans
nos maisons, que nul ne s'en m^fie, qu'il pent se communiquer
par le seryice de table, par les objets de toilette et dont on
ne pent deyiner la provenance quand il a ^clat^. Admettons, ce
qui est absurde, que cettc arm6e de folles de leur corps soit
yisil6e, inscrile, soumise h la prison administrative et k la visite
m^dicale, aurait-on la s6curit6 ? Non certes, car la femme n'a
pas le triste privilege de r^pandre le mal; Thomme aussi bien
qu'elle en est le coupabJe propagateur.
En rdalit^, la protection de la sant6 publique est nulle,
puisquc, d'une part, la police ne surveille, et d'une fa^on insufB-
sante, qu'une faible partiedes femmes qui peuvent propager le
mal, et ne surveille pas du tout les hommcs qui le propagent
incontestablement, sans quoi, en parlant comme La Palisse, les
femmes ne seraient jamais ou presque jamais contamin^es. En
r^alit^, on ne sera prot6g6 efficacement que lorsqu'on se pro-
t^gera soi-m6me.
Mais il faut donner k chacun la possibility de soigner et de
gu^rir cette horrible maladie. Ce que Ton pent demander k Tad-
ministration, c'esl d'^carter toutes les difficult^s qui emp^chent
ou retardent Tentr^e desmalheureux infect^s dans les hdpitaux,
car, par un reste du pr^jug^ du moyen &ge, ces malades sont
les parias dans beaucoup d'hospices, dans certains ils sont re-
pousses, et Ton devine sous quelle influence. Certes, il est plus
honteux d'avoir la petite v6role, puisqu'on pent I'^viter en se
faisant vacciner, que lorsqu'on est alteint par sa soeur atn^e qui
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-L**-.'--,*-^^'-
LE PARADOXE DE LOISEAU PINSON. 653
n'a pas encore son vaccin ; rhoiume qui par de longs exc^s est
arrive au d^lire alcoolique est plus m^prisable qu'un malheu-
reux qui est frapp^ pour avoir c^d^ k un entrainement physio-
logique.
Non seulement les salles d'hdpitaux doivent s'ouvrir devant
ces maladesy mais encore les consultations sp^ciales doivent
6tre prodigu6es partout, les medicaments livr^s gratuitement,
Talimentation aid6e par des dons en nature chez tous ceux qui
sont assez pauvres pour ne pas avoir un regime suffisamment
r^parateur. Vous pouvez traiter de paradoxe une partie de ce
que je viens d'avancer, dit-il, r^pondant h quelques sourires^
mais ce que je vais vous declarer vous parattra encore plus pa-
radoxal.
Lorsque le D"" Diday, pour arrfeter la contagion, cherchant
avec raison d'aulres moyens que celui du certificat obligatoire
de sante qu'il avait invents, accusait Tadministration de tra-
casser les filles, de les enfermer comme des criminelles, et con-
seillait de « tenter d'obtenir des prostitutes, par les voies de
douceur, les garanties que la soci(St6 est en droit de leur de-
mander », Lecour ne tarissait pas de sarcasmes sur rhdpital
attrayant. « Dtlt Lecour s'esclaffer de rire danssa retraite, s'^cria
Loiseau Pinson, j'affirme que Diday proposait la seule solution
du probl^me. Une population intelligente, d6ban*ass6e des pr^-
jug6s mystiques et niais, ne voyant pas plus de honte d'etre
contamin^s par cette maladie contagieuse que par toute autre,
consid^rant Tint^r^t capital de soigner le mal pour em packer sa
diffusion, ne doit pas h^siter, malgr^ les plaisanteries et les re-
sistances, h cr6er Thdpital attrayant ou Ton irait sans terreur,
oil Ton scrait siir de trouver le confort, le bien-6tre et la bien-
veillance. Je voudrais qu'autour de Paris, dans des localit^s
largement agrees, sur des sites pittoresques d'oilla vue s'etend,
on construisit des asiles sp^ciaux aussi bien outill^s pour la
sante de Tesprit que pour le traitement du corps. Je voudrais
que la nourriture y filt non seulement saine, mais soignee.
Autour des pavilions de traitement seraient install^s des ate-
liers donnant au malade la possibility de sortir, aprfes gu^rison,
avec un p^cule suffisant pour permettre aux femmes de ne pas
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€64 REVUE PHILANTHROPIQUE.
reprendre leur horrible metier. A cdt^ de Torganisation de
jeux varies, Tesprit devrait avoir ses satisfactions : des confe-
rences moral isatr ices seraient institutes, des cours du soir se-
raient ouverts h ceux qui dSsirerai^at completer leur education.
Je voudrais, en un mot, que Fexistence y fiit si facile et si
attrayante que le malade s'empressftt d'y accourir pour s'y faire
soigner et ne le quitt4t qu'i regret aprfes sa gu^rison. Toutefois
il faudrait faire savoir et afficher partout que tout malade quit-
tant Tasile avant I'autorisation du m^decin n'y rentrerait
jamais.
« Mais, dit un des convives, si malgr^ tons les charmes de ce
traitement, malgr6 la menace de voir les portes de cet £den-
hdpital ferm^es ii jamais derri^re le fugitif, quelques malades
d'un caract^re difficile s'en allaient quand m6me! n'iraient-ils
pas semer la contagion ? »
« En v^rite, s*6cria Loiseau Pinson, chacun n'est-il pas res-
ponsable du dommage qu'il cause ? et dans ce cas le dommage
est terrible puisqu'il n'atteint pas seulemcnt celui qui en est
victime, mais encore sa posterity. La loi commune doit lui
6tre appliqu^e. Le docteur Despr^s qui, quoique chirurgien pas
propre, n'est pas une b6le, fait remarquer dans une de ses bro-
chures que lorsqu'une nourrice est contamin^e par un nour-
risson elle obtient des dommages-int^r^ts; pourquoi ne pas
etendre cette responsabilit^ k tons les cas de contamination, et
certes, en y ajoutant une sanction p^nale, car si le nourrisson
est innocent du mal qu'il fait, puisqu'il n'en a pas conscience,
il n'en est pas de m6me des pervers qui le r^pandent, ne pou-
vant rignorer.
« Pour conclure, dit-il, suppression de toute r^glementation
qui donne au public Tillusion d'une surveillance efficace garan-
tissant la sant^ des libertins; ne se sentant plus prot^g^s ils
surveilleront leurs mauvais app^tits. C'est peut-6tre pour cette
raison qu'en Angleterre, h ce que Ton pr6lend, les cas de con-
tagion etaient plus rares avant Tapplication des Conitzgious acts;
« Assistance attrayante pour les malheureux contamin^s;
« Et enfin, pour les misdrables r^fractaires, la responsabi-
lit6 p^nale, le droit commun. »
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LE PARADOXE DE LOISEAU PINSON. 655
II
Si Loiseau Pinson avail v^cu, il aurait eu la satisfaction de
voir que ses successeurs au Conseil municipal se sont active-
ment occup6s de cette grave et difficile question et ont demands
Tapplication d'une partie de son paradoxe; une tr^s minime
par tie, il est vrai. II aurait pu constater en outre qu'au S^nat,
dans la loi sur la prostitution vot^e en 1895, k la Chambre,
dans le projet de M. Georges Berry, quelques-unes de ses id6es
sont appUqu^es. Mais il aurait pu se convaincre aussi que la
suppression de toute r^glementation, comme cela existe actuel-
lement en Angleterre, est loin de sauvegarder la santd pu-
blique.
Le 20 avril 1883, le parlement anglais, aprfes une discussion
approfondic, a abrog6 les Contagious diseases acts qui, selon la
conviction des membres de la f^d^ration abolitioniste, causaient
tout le mal.
. Si Ton veut des renseignements exacts sur les r6sultats de
cette r6forme, c'est k Tarmde que Ton doit les demander, parce
que c'est chez elle seulement que Ton pent faire des statistiques
completes sur cette mati^re delicate. Or actuellement Tarm^e
anglaise est certainement la plus cruellement frapp^e de toutes
les armies d'Europe. En 1894, pendant la discussion du budget
il la Ghambre des communes, M. Jeffrys donne connaissance
d'un rapport officiel du minist^re de la guerre. Ce document a
T6y6l6 une situation des plus graves; en 18^, Tarm^e anglaise
comptait dans sa totality 196334 hommes; lamoyenne annuelle
des entries dans les hdpitaux pour maladies vdn^riennes a
atteint le chiffre de 521S5, ce qui constitue plus du quart de
Tefifectif ; la moyenne journali^re des v6n6riens hospitalises
§tait de 4 191 hommes.
Les Contagious diseases acts n'existent plus depuis 1886, on
ne pent done s'en prendre k eux de ce d6sastre.
En 1893, la Ghambre des communes prescrivit une enquftte
qui aboutit k un rapport dont le D' Longuet a rendu compte de
la fa^on la plus sincere et la plus d^taill^e dans les Archives de
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656 REVUE PHILANTHROPIQUE.
midecine et de pharmacie militaires. L'enqu6te est faite sur la
p6riode qui s'^coule de 1870 h. 1892.
De 1870 i 1873, les Contagious diseases acts sont rigoureu-
sement appliques; on Irouve alors joumellement par 1000
bommes 12,33 hommes atleints d'affections v^n^riennes.
Eq 1874, on change de m6thode : tout homme alteint est
soumis k une peine disciplinaire (suppression de toute solde
pendant la dur^e de s6jour i rhdpital). Naturellement le soldat
fuit rh6pital et dissimule son mal le plus possible ; le cbiffre
du nombre des malades s'abaisse k 9,S3 par jour et par 1 000
hommes. Mais la maladie s'aggrave dans son intensity.
Enfin en 1880, les Contagious acts sont combattus avec
ardeur; dans nombre de vlUes ilsne sont plus appliques, quoique
leur suppression n'ait 6t6 vot^e qu'en 1883; en 1886, ils 6taient
supprim6s partout. De 1880 k 1886, la moyennejoumali^re s'est
61ev6e k 17,46 pour mille, et s'est maintenue jusqu'enl893 k peu
prfes 4 ce chiffre; en 1892 ce chififre 6tait de 17,48 pour 1000.
Dans son beau livre intitule : La prostitution clandestine ^
livre d'oii je tire ces renseignements, M. le D' Commenge 6la-
blit un parallfele int^ressant entre Tarm^e anglaise et Farm^e
fran^aise au point de vue du nombre des maladies sp^cifiques.
« Dans le tableau des maladies v^n^riennes, dit-il, concernant
Varmde frangaise, le chiffre le plus 6\ey6 a 6t6 constats en 1875 :
il est de 74,9 pour mille. Pendant cette mSme pSriode, le chiffre
des maladies v^n^riennes dans Varm^e anglaise a 6i6 de 139,4
pour mille. Le chiffre le plus 61ev^ du tableau de Tarm^e an-
glaise se rapporte k 1885; il 6tait de 274,4 pour mille. Dans
rarm6e frangaise la proportion des maladies v^ndriennes n'a
6t^, durant cette m6me ann^e 1885, que de 52,1 pour mille.
« Pendant les cinq derni^res ann^es 1888, 1889, 1890, 1891
et 1892 la proportion des soldats entr^s dans les h6pitaux pour
maladies v6n6riennes a ^t6 dans Tarmde anglaise de 224,5
p. 1000,212,1 p. 1000, 212,4p. 1000, 197,4 p. 1000, 201, 2p. 1000.
M Pour la m6me p6riode nous trouvons dans Tarmtfe fran-
(jaise46,7 p. 1000, 45,8 p. 1000, 43,8 jt 1000, 43,7 p. 1000,
44 p. 1000. »
Enfin je reproduis le tableau dress6 par M. le D' Commenge
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LE PARADOXE DE LOISEAU PINSON. 657
pour ^tablir la comparaison au point de vue de la syphilis seule^
dans ies armies anglaise et franQaise.
Annies. ADgleterre. France.
i888 40,3 p. 1000 9,3 p. 1000
1889 35,7 — 9,1 —
1890 37,3 — 9,1 —
4891 32,2 — 8,6 —
1892 33,8 — 9,2 —
La demonstration donnde par Ies chiffres de la statistique
anglaise ont converti en Angleterre un des adversaires des
Contagious diseases acts^ le docteur Graham Balfour qui avail 61^
k la t6te d*un bureau de statistique du d^partement medical
de Tarm^e anglaise. « Ce ne fut, dit-il, qu'aprfes un examen soi-
gneux des faits recueillis et dtablis par la statistique que je
changeai d'opinion : Ies r^sultatsu tiles obtenus pendant Tappli-
cation des«c/.s m'avaient pleinementconvaincu. »
Cette mdme statistique a modiiid Topinion d'un 6crivain (1)
scientifique frangais, qui s'^tait jusque-lJi montr6 Tennemi de
la r6glementalion, le D*" de Pietra Santa, directeur du Journal
d'hygiine. En 1894, aprfes avoir analyst dans son journal la sta-
tistique des maladies v6n6riennes dans Tarm^e anglaise, il
publia Ies lignes suivantes, une conversion en r^gle : « Ce genre
de constatations et de recherches limit^es h Tarm^e de terre et
ilia marine royale dans Ies grands ports auxiliairesdu Royaume-
Uni a 6t6 trfts contests : toutefois, malgr^les variations etlesd^-
faillances de la statistique, il serait injuste de ne pas consid^rer
Ies rdsultats obtenus comme un facteur important de la solu-
tion du problftme. Unseul fait reste inattaquable, c'est la nices-
sitidune rSg lamentation moderdeet legale. »
Ce qui s'est pass6 en Italie ne pent que confirmer la conver-
sion si nette du savant H^ de Pietra Santa. Si M. Crispi, par sa
m^galomanie, a ruin6 ies finances de son pays, il a aussi ruin6
bien des sant^s italiennes par sa rage de se mettre k la mode
anglaise. Les Contagious diseases acts ayant ^t^ supprim^s com-
pl5tementen 1886, le minist^re Crispi en mars 1888 supprima
(1) J'apprends & Tinstant sa mort.
RKVUB PHILANTHROPIQUE. — II. 42
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638 REVUE PHILANTHROPIQUE.
la r^glementation de la prostitution. D*abord la mesure fut
appliqu6e dans neuf provinces, bientdt aprfes dans toutes les
villes italiennes sans exception. A partir de juillet 1888 Tltalie
ne compta plus de prostitutes inscrites.
D^s la premifere ann^e qui suivit la suppression de la r^-
glementation par la loi Crispi, en 1889, le nombre des soldats
atteints de maladies v^n^riennes avait augments de 62 p. 100, la
garnison comprenant le m6me nombre de soldats. L'annde qui
avait prdc^d^ Fapplication de la loi Crispi, en 1887, la propor-
tion des soldats infect^s 6lait de 4,25 p. 100, en 1890 elle attei-
gnait le chiflFre do 10 p. 100. Cela devint un vdritabie d^sastre
constats aussi bien dans les services civils que dans les services
de sant^ de Farmde et de la marine. En 1891, un r^glement nou-
veau, ^tudid par le conseil sup^rieurde la sant^, vint remplacer
la loi Crispi dont Tapplication n'avait dur^ que trois ann^es.
Ces trois ann^es laisseront des traces profondes en Italie.
Ces statistiques et cet exemple ddmontrent qu'on ne pent
admettre la lij)ert6 de la prostitution, qu'il faut s'efforcer d'ar-
r^ter la propagation du mal ; mais le difficile est d'en trouver le
moyen.
Le Conseil g6n6ral de la Seine Ta trouv^ pour une fraction
de la population des prostitutes, pour les iilles mineures. Elles
constituent une grande partie des insoumises, et sont, d'aprfes
les syphiligraphes, les prostitutes les plus dangereuses au point
de Tue de la contagion. Le nombre de ces insoumises mineures
est trfes grand, et on en trouve d'un Age improbable; le
D"* Commenge cite des cas effrayants de pr^cocit^ ; une fille de
12 anspar exemple, ne voulant faire aucun travail, affirmant sa
resolution formelle de continuer k se livrer au vilain metier
qui la fit prendre et arr^ter plus tard, h 13 ans, syphilis^e.
Dans le livre du D' Commenge on trouve Thistoire de jeunes
lilies d^pourvues de toute id6e de pudeur; Tune, &g4e de 15 ans,
livre sa virginitfi Ji un inconnu qu'elle n'a jamais revu, pour
la somme de deux francs; une autre, vierge aussi, s'offre k Tern-
ploy^ d'un manage de chevaux de bois contre la bien mince fa-
veur de la faire tourner quelques instants; cette malheureuse
avait 14 ans.
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LE PARADOXE DE LOISEAU PINSON. 659
Peut-on inscrire ces enfants sur le grand livre de la prosti-
tution ? L'4ge de Tinscription a vari6 avec ies diS^rents pr^fets
de police ; on a vu i'inscription pronoac6e pour des filles de
47, 16, et m6me 15 ans. Ce n'est quk partir de la presence de
M. Lupine k la Prefecture de police que Tinscription n'a eu lieu
qu'aprfts 18 ans.
Le Conseil g6n6ral de la Seine a supprim6 cette premiere
difficult^ apr^s une longue discussion du rapport d'fimile Ri-
chard (1).
Cette discussion, il estvFai,n'aurait pas abouti,en raisonde
la multiplicity des opinions irr^ductibles, si MM. Paul Strauss,
Alphonse Humbert et plusieurs autres conseillers n'avaient
sauv6 la partie la plus importante du projet en faisant deux
propositions qui furent vot^es :
^^ {Tt Proposition. — II sera ouvert un asile sanitaire dans
lequel seront envoy^es Ies femmes reconnues malades par le
m^decin du dispeusaire municipal.
« Get asile ne pourra 6tre, ni comme emplacement, ni comme
regime, confondu avec la prison de Saint-Lazare ni avec un
autre ^tablissement p^nitentiaire.
« 2® Proposition. — Le Conseil est d'avis qu'il y a lieu de
fonder pour Ies filles mineures, en ^tat de vagabondage immoral,
originaires du d^partement de la Seine, un dtablissement spe-
cial qui devra 6tre rattach^ au service des moralement aban-
donn^s.
M Une infirmerie special e pourra y fetre annex^e et devra
recevoir Ies filles mineures se livrant d'habitude k la prostitu-
tion et reconnues atteintes de maladies vdn^riennes. »
Par la premi&re proposition, le Conseil g6n6ral supprime la
qualification de prison ; mais il ne r^sout pas la question de
sortie. Rien nlndique dans le texte que la sequestration est sup-
primde aussi, ou qu'elle est impos^e jusqu'i la gu^rison? Ce
qui dans ce dernier cas constituerait un hdpital-prison au lieu
d'une prison-hdpital.
Sur la seconde proposition le Conseil g^ndral arrache Ies
(1) La prostitution d Paris, 1890.
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660 REVUE PHILANTHROPIQUE.
mineures h la r^glementatioD, puisqu^il fait de ces jeunes pro-
stitutes une cat^gorie des enfants moralement abandonn^s et
les enferme jusqu'4 lour majority dans une maison de r6forme.
Malheureusement cette proposition ne comprend que les enfants
n^s dans le d^partement de la Seine, sans doute pour raison
budg6taire ; mais avec cette restriction les autres mineures res-
teront soumises h Tancienne r^lementation. Tons les anciens
inconv^nients subsistent done pour une grande partie des mi-
neures insoumises, ce qui dte au projet une grande partie de sa
valeur au point de vue de la sant6 des Parisiens. S'^tendant h
toutes les mineures, cette deuxi^me proposition ^tait parfaite,
et c'est la solution qu'il faudra prendre si Ton veut faire une
r6forme efficace.
Restent les prostitutes majeures. On pent affirmer qu'en
France, k quelques rares exceptions pr^s, les m^decins de-
mandent Tinscription et la visite m^dicale. fimile Richard et le
docteur Georges Martin demandaient I'inscription volontaire.
Tout fait supposer que le registre destine k recevoir ces inscrip-
tions n'aurait pas besoin d'fitre bien gros. Toutefois on cite un
certain nombre de filles qui sont allies k la prefecture de police
demanderleur inscription avant de commencer le triste metier;
entre autres une institutrice. G'6tait k ses yeux sans doute le
dipl6me garantissant son 6tat. Pour celles-l^, rien de mieux, et
il n'est pas besoin de les garantir du pouvoir judiciaire ; majeures
elles ont le droit de s'astreindre k cette servitude volontaire.
Mais les majeures qui se livrent k la prostitution clandestine
qui cause tant de ravages, par quel pouvoir seront-elles inscri-
tes? L6on Lefort, dans la discussion de FAcadc^mie de m^decine
de 1888, demanda que Tinscription devint une peine provisoire
et ne f6t prononcde que par Tautoritd judiciaire. C'est \k la
seule solution; en faisant remarquer toutefois que Tinscription
et renvoi dans un hdpital special n'est pas une peine, mais une
garantie hygi^nique, de la prophylaxie sociale.
Mais, pour en arriver k cette inscription, pourquoi ne pas
envoyer toute personne saisie en action de racolage ou con-
vaincue de prostitution habituelfe et aprfes instruction ou en-
qu6te, devant le tribunal correctionnel statuant en chambre de
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LE P.ARADOXE DE LOISEAU PINSON. 661
Conseilqui ordonnera suivant les circonstances et aprfes examen
mMicalla sequestration dansunhdpital special jusqu 'it gu^rison
des accidents transmissibles et ne pouvant sortir, selon les cas,
qu'apr^s inscription sur le livre des visites r^glementaires.
Get hdpital pourrait fetre et devrait 6tre Thdpital attrayant
de Diday et de Loiseau Pinson. Le savant professeur Foumier
qui, iui aussi, demande la creation d'h6pitaux spdciaux, ne
demanderait certainement pas mieux que de voir essayer Fas-
sistance assez attrayante pour faire accourir tons les malheureux
en qu6le de sant6.
En fin la poursuite.des hommes qui vivent de la prostitution
est comprise dans Tarticle 1" de la loi sur la prostitution, vot6e
par le S6nat en 1895. Voici cet article : « Ceux qui auront aid6,
assists ou soutenu la prostitution d'autrui sur la voie publique
ou dans les lieux gratuitement accessibles au public, ou qui
en auront sciemment partagd les profits serontcondamn^siiun
emprisonnement de trois mois k deux ans et k une amende de
100 ft 1 000 francs.
« lis seront en outre soumis, aprfes Fexpiration de leur peine
pendant cinq ans au moins et dix ans au plus, k I'interdiction
de s^jour ^dict^e par Tarticle 29 de la loi du 27 mai 1885.
« En cas de r6cidive, dans un d^lai de cinq ans et si la der-
ni^re peine est sup^rieure k six mois d'emprisonnement, les
tribunaux pourront en outre prononcer la relegation. »
Ge n'est pas Ik tout k fait ce que demandait Loiseau Pinson,
mais c'est d6jk un acheminement vers ce qu'etait son ideal; on
a ose toucher k Thomme.
On le voit, son paradoxe est devenu v6rite pour certaines
parties : suppression de la reglementation pour les mineures^
introduction de Tautoritd judiciaire pour les inscriptions,
poursuite des proxdn^tes d'habitude ou d'occasion, enfin hdpital
special, pas encore attrayant; toutcela, il estvrai, n'est encore
que sur le papier.
Mais, d*autre part, Texemple de TAngleterre et de Tltalie
nous a magistralement prouve que la suppression de toute
reglementation aboutit au desastre. Quant k la responsabilite,
il n'y faut pas songer encore ; on n'a pu appliquer Timpdt sur
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662 REVUE PHILANTHROPIQCE.
le revenu par la peur des enqu6tes sur T^tat des fortunes pri-
vies; comment accepterait-on jamais, enmati^re de contagion,
la responsabilit^ qui demanderait des enqufttes autrement in-
times7D'ailleurs la crainte du cliantage, qui emp6che T^tablis-
sement de la recherche de la paternity, emp6chera bien plus
silrement encore F^tablissement de la responsabilit^ sp^ciale
que demandait Loiseau Pinson prenant Despris pour point
d'appui.
D' H. THULlfe.
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LES
DERACINES ET LEUR RiiPATRIEMENT
I
Pour tous ceux-li qui sont venus vers la vingti^me ann6e
de leur province 4 Paris, le dernier et trfes beau livre de M. Mau-
rice Barr^s, les DiraciniSy ^voqua brusquement dfes les pre-
mieres pages, avec une precision singuli^re et surprenante,
toute une p^riode de leur vie. Ce livre, aujourd'hui c6l5bre,
est le roman d'une poignde de jeunes Lorrains r^unis par la
camaraderie commune du lyc^e de Nancy et brusquement trans-
plant^s dans Tagitation de la grande ville, loin de leur famille,
loin de leurs horizons coutumiers. Leur histoire s'y ddroule
avec ses r6ves, ses espoirs, ses deceptions, ses catastrophes,
minutieuse et puissante comme celle de quelques-uns des per-
sonnages les plus vivants de Balzac. Jamais peut-6tre ne fat
mieux exprimde Tivresse un peu douloureuse des premieres
ann^es de Paris; jamais non plus ne fut plus dloquemment d6-
montrde et par le titre seul et par les p^rip^ties de ce puissant
ouvrage. Taction bienfaisante qu'aurait dans beaucoup de cas,
pour les faibles qui succombant dans une lutte trop dure ne
peuvent h Paris prendre racine, un rapatriement fait assez tdt.
Gette action bienfaisante du rapatriement pourrait fournir, au
point de vue social et moral, Tobjet d'une importante 6tude.
C'est dans bien des cas la seule mesure qui puisse sauver non
temporairement mais d6finitivement ces provinciaux, demi-
vaincus de la vie des grandes villes, exposes par la misfere me-
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664 REVUE PHILANTHROPIQUE.
na^ante h toutes les tentalions. Plus encore que pour les indi-
vidus le rapatriement pourrait dtre bienfaisant pour les families
si mal partag^es, si k T^troit dans la m6l6e parisienne. Mais en
se limitant h un point de vue plus restreint, le point de vue
medical, la puissance merveilleuse de ce retour au pays natal
pent 6tre 6tablie plus netlement encore. Ici les mesures pra-
tiques sont plus faciles k formuler. Leur application est digne
de tenter les socidt^s r^gionales si nombreuses et quelques-unes
si puissantes k Paris. En s'occupant tout d'abord de ceux k qui
la valeur physique et la sant6 firent d^faut, peut-6tre, en pre-
sence des r^sultats obtenus, seront-elles amen^es plus tard k
etendre leur activity sur les autres, sur tons ces D^racin^s dont
Fambition d^passa T^nergie.
II
La puissance thdrapeutique du rapatriement est form^e de
deux facteurs distincls. Le premier est d'ordre banal. C'est
Taction bienfaisante du retour k la campagne n'importe com-
ment et n'importe oil, Le second, Taction particulifere du pays
d'origine, est d'ordre plus special et plus subtil. On pent toute-
fois Texpliquer, mais bien incompl&tement, en invoquant le
rdle dans le fonctionnement des organes des accoutumances
non seulement personnelles, mais h^rdditaires.
Un seul exemple emprunt^ k Tune des maladies les plus
redoutables, la tuberculose, suffit k d^montrer la haute valeur
supdrieure k celle de tons les medicaments, de la campagne
quelle qu'elle soit. Le sort des tuberculeux soign^s dans les
hdpitaux des villes est malheureusement bien d6fini. M. Gran-
cher Ta resume d*un mot trfes sommaire et trfes 6nei^que : ils y
meurent tons. Soign^s au grand air dans les sanatoria, ces
m6mes tuberculeux des villes donnent une proportion de gu^
risons definitives qui atteint jusqu'ii 30 p. 100. Cette action de
Tair pur, de la tranquillity substitute au surmenage et au tu-
multe ambiant, constitue certainement un des aliments fonda-
mentaux de Taction du rapatriement. Get element est indis^
pensable, et il est bien certain qu'un Lyonnais d*origine tomb6
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LES D6RACIN£S ET LEUR RAPATRIEMENT. 665
malade dans quelque appartement sans air et sans soleil du
faubourg Saint-Antoine n*aurait aucun avantage k le quitter
pour alier chercher un appartement analogue h la Croix-Rousse.
L'action sp6ciale du deuxi&me ^l^ment, le pays natal, moins
facile Ji d6montrer directement par des chiflFres, n'est pas moins
certaine. Au d^but de ce sifecle, I'importance de la nostalgie avait
certainement 6t6 exag6r6e en m^decine. On ne se contentait
pas de rinvoquer non seulement pour bon nombre d'hypocon-
driaques — les neurasthdniques d'aujourd'hui — et cela non sans
quelque cause. On attribuait k la nostalgie toute une s^rie de
lesions organiques dans lesquelles elle avait tout au plus jou6
le r6le de cause bien accessoire. Actucllement, ce qui est un
tort, le mot de nostalgie n'est m6me plus prononc6 dans les
trait^s de maladies du syst^me nerveux. La facility des d^pla-
cements, le nombre et la s6rie des transplantations successives
en des lieux divers ont rendu moins Evident, plus facile k m6-
connaitre ce facteur morbide : T^loignement du pays primitif.
Pourtant m^me aujourd'hui on le retrouve souvent trfes net dans
deux races qui constituent deux des colonies d'^migration pari-
sienne les plus importantes, les Auvergnats et les Bretons.
L'instinct populaire est en pareil cas chez eux bien remar-
quable. Quand de plus en plus leur santd faiblil, sans trop
s'attarder k la cause du mal, sur le remede cet instinct n'h^site
pas. Gette foi robuste et justifi^e daus Fair natal a 6t6 pittores-
quement not^e par M. Aj albert dans son livrc si int^ressant sur
TAuvergne. « C'est leur hygiene, dit-il, k beaucoup d' Auver-
gnats de Paris, un traitement pr6venlif qui leur r^ussit. D'ail-
leurs ils n'attendent pas d'etre k Tarticle de la mort pour y
recourir. Dfes qu*ils se sentent « quelque chose qui ne va pas »,
ils songent au pays et comme les enfants qui ne confient qu'4
leur m^re le soin de dorloter leurs chagrins, eux tout de suite
toument les yeux vers la montagne, ne comptent que sur elle,
n'esp^rent qu'en elle. »
Et dans le m^me livre de M. Ajalbert se trouve une obser-
vation profonde, fort juste au point de vue medical et renfer-
mant en germe I'explication de Cette action de Fair natal par
les accoutumanccs h^r^ditaires
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666 REVUE. PHILANTHROPIQUE.
« Auxheurcsde langueur, laplusd^sesp^r^e, dit-il, Tid^eme
hantaque parlamontagnejepouvais6lregu^ri,rid6e fixedfeor-
mais. Est-ce que tout de suite, au premier malaise, ces Auvergnats
dontjeconnaissais un grand nombre ne partaient pas confiants
pour un tour au pays, quelques semaines ISi-bas? Et commeils
revenaient solides, retrempds, renouvel6s. II leur suffisait de
toucher terre — sur laterre natale — pour ramener leurvigueur
^puis^e. Ce que la montagne accomplissait pour ses fils ne le
ferait-elle pas pour unde ses petits-enfants? » L'espoir se v^rifia
merveilleusement. C'est qu'en effet, k c6t6 du lieu de naissance
souvent accidentel, il y a lieu de tenir compte du vraipaysd'ori-
gine. Tel Parisien n^ k Paris appartient en r^^^alit^, au point de
vue de sa race, k la plaine, k la mer ou k la montagne.
Ill '
Une s^rie de circonstances favorables m*ont pour ma part
permis de conseillerbien des foisle rapatriement et d'en appr^-
cier la merveilleuse puissance. Malheureusement ces circon-
stances 6taient en r6alit6 de nature un pen exceptionnelle. II
s'agissait, dans la grande majority des cas, d'^tudiants apparte-
nant k des families de province toutes prates k les recevoir. La
caisse des pr^ts de TAssociation des ^tudiants leur 6tait au
besoin ouverte pour les premieres ddpenses du voyage. Ils'agis-
sait aussi d'employ6s d'une grande compagnie de chemins de
fer. Pour eux aussi le voyage devenait facile et des secours de
maladie 6taient tr^s lib6ralement accord^s. Mais dans un
nombre considerable d'autres cas, les difficult^s mat^rielles
etaient tr^s grandes. EUes ^talent de deux ordres, tenant aux
frais m^mes du rapatriement, aux premiers frais de s^jour du
malade rapatri^. Trop souvent elles devenaientinsurmon tables,
et le malade ^tait r^duit k attendre tristement la mort dans ce
Paris qu'il n'avait plus les moyens de quitter.
Pour ceux de ces pauvres D6racin6s qui sont absolument
sans ressources, qui ont perdu tout lien d'attache avec le pays
d'origine, le probldme restera malheureusement presque inso-
luble. II ne faudrait pas seulement les rapatrier, ilfaudrait, une
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LES DfeRACJNfeS ET LEUR RAPATRIEMENT. 667
fois rapatri6s, leut faire des rentes. Mais dans beaucoup d'autres
cas — les plus nombreux peut-^tre — la difficult^ serait incom-
parablement moindre. II suffirait de leur assurer les frais de
voyage et tout au plus les premiers frais de s^jour. Les uns oat
conserve au pays des families assez aisles pour les recevoir.
Les autres sont assez I6g^rement atteints pour qu on puisse
esp^rer h bref d^lai une gu Prison permettant la reprise du tra-
vail, gu6rison qui deviendra d'autant plus solide et definitive
que le rapatri^ aura cette sagesse de ne plus quitter le pays.
C'est surtout dans cette deuxi^me cat^gorie de cas que pour-
rait fort utilement s'exercer Taction des nombreuses asssocia-
tions r^gionales d^j^ mentionn^es au d^but de cette ^tude.
Beaucoup d'entre elles sont suffisamment riches pour pouvoir
ouvrir k leur budget un compte de secours pour les frais de
voyage et m6me pour les premiers frais de s6jour. Par les
influences locales dout elles disposent, il leur serait en general
facile d'assurer au rapatri6 une fois r^tabli soit un emploi, soit
un travail compatible avec ses forces. Assur6ment la plupart
de ces associations s'occupent d6ji pour des cas isol^s de cette
intervention bienfaisante. 11 ne s'agirait que de la gdn^raliser
et de la d^velopper. Et cette ceuvre est assur6ment aussi une
de celles qui m^riteraient le plus de tenter les nouveaux comit^s
de patronage des hdpitaux.
Si le but de cette ^tude n'^tait pas avant tout medical, peut-
6tre conviendrait-il de plaider, en terminant, la cause, non
seulement des malades, mais de tons les autres D^racin^s. Tons
nous avons connu des compatriotes qui, moinsd^faut de sant6
que defaut d'une sdrie d'aulres qualit^s u^cessaires pour le
combat de Texistence, neparvenaientd6cid6ment pas Ji6merger
dans la m^l6e parisienne. lis alJaient, resistant de plus en plus
mal, se d^classant de plus en plus. Pour ceux-lSi, la n6cessite
du retour au pays, si elle n'est plus d'ordre physique, devient
souvent une n^cessit^ morale. Leur conseiller et leur faciliter
ce retour est assur^ment k eux aussi le plus grand service qu'on
puisse leur rendre ; conseil qui malheureusement sera toujours
accepts sans enthousiasme et sera loin d'etre souvent suivi.
Pourceux-li beaucoup plus que pour les malades, la sagesse sera
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668 REVUE PHILANTHROPIQUE.
de prendre quelques precautions en leur assurant les frais de
rapatriement. L'argent du re tour au pays seraitbienfacilement
d6toum6 de sa destination. Ce sont les pires D^racin^s.
Parmileslivresdecesderniferesann^es, FouvragedeM. Barr^s
est assur^ment celui qui a eu le retentissement ie plusprofond
surtout parmi les jeunes. Ge volume^ bien que formant un tout
complety doit 6tre continue par deux autres poursuivant This-
toire de ces ^tudiants devenus hommes aprfes avoir suppport6
le premier choc. Comme la bataille initiale, cette s^rie d'autres
batailles aura certainement ses vaincus. Pour Tun d'entre eux
bris6 par un grand chagrin d^amour, M. Barrfes ad^ji biennot^
rinstinct myst^rieux du retour au pays natal, comparable k
celui de la bMe bless6equi revient it songite. Ilseraiti souhaiter
qu'il YOuUit bien aborder plus en detail cette question dans la
suite de son ceuvre et mettre au service de la cause que nous
d^fendons — le rapatriement des D6racin6s — son merveilleux
talent d'^crivain.
D' A.-F. PLICQUE.
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L^ASSISTANCE EN ESPAGNE
I
AUer chercher en Espagne quelque chose de nouveau, dont
puisse profiler notre pays, ence qui concemerhygifene scolaire
et les exercices physiques d*un c6ld, rhygifene g^n^rale, Tas-
sistance gdn^rale et m^dicale de I'autre, ^tait sans doute une
tentative hardie. L'Espagne n'est pas de ces peuples qui
marchent h la tdte de la civilisation, et il semble que dans les
mati^res dont je viens de parler, on pouvait trouver en elle
une imitatrice, non une initiatrice.
Cependant, la p^riode brillante qu'a travers^e ce peuple
sous la domination des Maures doit avoir laiss6 quelques
traces dignes de notre admiration, et il 6lait agr6able, peut-
fetre m6me utile, de les retrouver. Cette p6riode, malheureuse-
ment, a 6t6 fort courte. L'esp^ce d'apathie dans laquelle est
tombde I'Espagne par suite de I'expulsion des Arabes, la soif
de For qui s*est emparde de ce pays, aprfts la ddcouverte de
TAmirique, la grande Emigration eflfectuEe, soit pour satisfaire
cette soif, soit pour aller guerroyer au dehors, TEnorme dimi-
nution des naissances qui en fut la consequence, la predomi-
nance d'une noblesse exploitant les autres classes de concert
aveclescommunautes religieuses etlesordresmilitaires,laruine
de cites, d'etablissements industrielsetagricoles autrefois floris-
sants, sous la domination des Maures, et que Texpulsion vio-
lente de ces civilisateurs an^antissait tout d'un coup, toutes ces
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670 AEVUE PUILANTHROPIQUE.
causes r^unies, d'autres encore, oat fait subir k TEspagae une
decadence profonde. Elle n'est que momentan6e (1).
L'Espagne essaie, depuis d^jkquelque temps, de se repren-
dre, de r^veiller son Industrie, de multiplier les moyens de
communication, de corriger, par de sages mesures d'hygifene,
la situation que cr^ent iice beau pays la nature du sol, sa topo-
graphie, la longueur d^mesur^e deses c6tes et d'autres parlicu-
larit^s desquelles r6sulte un climat heurt^, irr6gulier, divers,
et, sur quelques points, peu salubre.
Cette race est sobre, encline k Toisivet^, k raison de la mo-
deration de ses app^tits; elle amoinsdorgueilqu'on ne lecroit,
et certains de ses hommes d'etat, de ses litterateurs, de ses sa-
vants, s'accusent plus qu'il n'est raisonnable de T^tat de leur
pays.
D*ailleurs, ce sentiment, n6 d'une modestie exag^r^e chez
la plupart des hommes distingu^s que j'ai rencontrds, je le
crois sincfere; d'autant plus que je Tai trouv^, — It part choz
quelques-uns qui ne demandaient qu*4 6tre contredils, — asso-
ci6 k un grand d^sir de reconqu6rir pour TEspagne une bonne
place au soleil de la civilisation.
En instruction, en hygiene, dans le domaine des sciences
d'experimentalion et d'observalion, — j'abandonne les sciences
exactes, — les Espagnols marquants etudient, recherchent, font
effort.
Mais ce qui manque k ces tetes, ce sont des corps qui leur
obeissent. Bien souvent j*ai entendu parler des chefs; ilsexpo-
saient leur ambition, mais en mftme temps leur impuissance ;
il leur manquait d'etre suivis : c'etaient des g^n^raux sans
arm^e. Ce qui leur fait aussi defaut, ce sont les ressources
materielles. Dans certaines parties priviiegiSes, lesol estaride;
on connalt le proverbe : « L'alouette en traversant la Castillo
doit emporter son grain. » II y a on Espagne beaucoup de
montagnes, peu de riviferes, ou plut6t peu de cours d'eau utili-
sables et soumis. L'Espagne est, sur un grand nombre de points,
un pays nu, desol6, ingrat; on a d^vaste les for^ts qui le cou-
(1) Ces notesy on le reconnait, ont €t6 ^crites avant la guerre Carlisle qui, de
nouveau, niina I'Etpagne.
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L'ASSISTANCE EN ESPAGNE. 671
vraient, et parfois Toeil se pose attrist^ sur de vastes deserts.
Cette absence de for^ts est sans doute cause que ces mdmes
cours d'eau, trfes rares, se gonflent aux jours de lemp6te, et
am5nent d'efifroyables d^sastres, comme on Ta pu voir dans
ces demiers temps.
Tons ces facteurs de la pauvretd du sol contribuent h la
mis^re de Thabitant : celui-ci a de la peine k vivre du produit
de son labeur, plus de peine encore k payer rimp6t. Toute
id^e d'dconomie parait impossible.
Aussi les contributions sont-elles difficiles k percevoir, et
par cela m^me est rendu tr^s aldatoire Tenlretien des routes,
des dcoles, des hOpitaux. J'ai eu Toccasion d'en observer des
exemples : des instituteurs k qui les municipalitds doivent
plus de 8 millions, et dont plusieurs ne vivent que de la
charity des parents de leurs 6lfeves, ou des pr6ts ruineux des
usuriers; des h6pitaux, oti, comme k Almdria, que visitait le
ministre de rint6rieur k la suite des inondalions de septem-
bre 1891, les soeurs, les internes, les infirmiers se sont plaints
de n'avoir pas ^16 payds depuis plus de dix mois; la Maternity
de la m6me ville, aux nourrices de laquelle il est d\i huit mois
de leurs gages, bien gagnds, cependant, par ces pauvres
femmes k qui Ton impose d'allaiter chacune deux, et m6me
trois enfants.
II
La rdglementation des hftpitaux est tr^s compliqu6e et trfes
minutieuse. EUe ne comprend pas moins de 220 articles : Tun,
entre autres, prescrit qu'il n'y aura pas dans chaque ville, si im-
portante qu'elle soit,plus de quatre hdpitaux, places aux extrd-
mit^s; Tarticle 107 prescrit Tisolement facultatif d'un h6pital de
convalescence et obligatoire d'un asile d'alidnds [manicomio) ; il
est, actuellement m6me, pen frdquemment observd. En parlant
de ces asiles,le r^glement defend Temploi des moyens violents
it regard des fous, et recommande Tinstallation de travaux qui
puissent les occuper et les distraire.
A propos de Tassistance individuelle, le r^lement prescrit
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672 REVUE PHILANTHROPIQUE.
des maisons de secours pour les cas de maladie les plus
urgents et les accidents de la voie publique ainsi que le trai-
tement Si domicile. De ce dernier, r§form6 par un d6crel recent
(14 juin 1891), nous aurons k parler plus ionguement.
Disons, en attendant, que d'apr^s le rfeglement de 1822, tout
individu habitant la commune, T^tranger lui-m6me, pounru
qu'il ait un metier ou profession, a droit k 6tre secouru s'il est
pauvre.
La Commission locale de bienfaisance doit, autant que pos-
sible, lui fournir du travail; en cas de maladie, il est soign^
chez lui, mais si la chose est impossible, le malade est envoy§
iirh6pital de la province aux fraisde la ville.
On trouve comme consequence de cette excellente r%le-
mentation de Tassistance un certain article 93 qui defend la
mendicity partout oil Ton a 6tabli des maisons de secours ou
Tassistance k domicile ; mais les prescriptions n'en sont g^n^-
ralement pas observ6es, et les mendiants se rencontrent plus
nombreux, peut-6lre, en Espagne que dans les autres pays.
Ill
J'ai fait allusion plus haut klsi loide 1875. Celle-ci, corame
on le verra, a donn^ les rfegles de la bienfaisance priv^e. Je
vais dire un mot de Timportante loi de 1849, qui a ^tabli les
divers rouages de la bienfaisance publique.
EUe determine les dtablissements qui onlle caract^re public
et les divise, comme la loi de 1822 Tavait fait, en g^n^raux,
provinciaux et communaux. La loi confie Tadministration et
la surveillance de ces trois categories d'oeuvres k trois com-
missions sp^ciales.
La Commission g^n^rale qui a son sidge & Madrid so com-
pose de Tarcheveque de Tolede, du patriarche des Indes, du
commissaire general desCruzadas, membres de droit, de deux
conseillers d'Etat (interieur et contentieux), d'nn conseiller de
rinstruction publique, d'un m^decin membre du Gonseil de
sante, de quatre membres nomm^s par T^tat qui designe aussi
un ou deux membres d'un etablissement general de bienfaisance.
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L'ASSISTANCE EN ESPAGNE. 673
On comprend que ce Conseil, qui a assez d'analogie avec
notre Conseil sup^rieur de TAssistance publique, soit le comity
consultatif du directeur g^n^ral de la bienfaisance, subordonn6
lui-m6me du ministre de Tlnt^rieur.
La Commission provinciale est, sous la pr^sidence du gou-
vemeur (pr^fet), compos^e des ^l^ments suivants : le pr6lat
dioc^sain, vice-president, deux chanoines d^signSs au gouver-
nement par lechapitre, ou, s'il n'y a pas de chapitre, deux eccl6-
siastiques proposes par le pr^lat, un depute de la province
(conseiller g^n^ral), un m^decin, deux membres r^sidant au
chef-lieu et nomm^s par le ministre sur la proposition du gou*
vemeur, un membre du Conseil de surveillance d'un ^tablisse-
ment provincial (hdpital ou asile). Rien d'analogue n'existe en
France. Chez nous, en effet, it part les asiles d'ali^n^s, les
d6pdts de mendicity et les maternit^s, le Conseil g^n^ral ne
cr^e pas une organisation hospitalifere propement dite, et les
maisons de refuge pour les vieil lards et les orphelins sont des
eiablissements purement municipaux.
Je dirai en passant que la loi de 1 875 6leva de 7 & 1 1 le nombre
des membres des Commissions provinciales, et qu'en 1885
celui des membres de la Commission provinciale de Madrid fut
portd & 15.
Les commissions municipales sont pr^siddes par Talcade
(maire). Elles ont la composition suivante: un cur6, un ou
deux conseillers municipaux, le plus ancien des m^decins de
Tassistance communale, deux ou trois membres du conseil de
surveillance d'un 6tablissement provincial ou municipal.
Ces commissions sont chargfies de Torganisation des secours
k domicile et plus sp^cialement des secours en argent. La loi
specific que si les commissiQUS municipales se subdivisent dans
les villes importantes en plusieurs sous-commissions, il y aura
toujours dans leur sein un eccl^siastiqne nomm^ par Talcade,
sur la proposition de la Commission. Quant k celle-ci, ses
membres sont nomm^s par le gouvemeur sur la proposition
du maire.
D'apr^s le r^glement de 1849 le public doit connaitre par
des avis insdr^s dans le Journal of ficiely dans le Bulletin de
RBVUE PHIL4ICTHR0nQDB. — S. 43
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674 REVUE PHILANTHROPIQUE.
chaque province ou par des affiches appos^es k la porte de
chaque mairiey les sommes qui ont 6t6 acquises par legs ou
par donations aux divers 6tablissements de bienfaisance pen-
dant le mois pr^c6dent. C'est une excellente mesure qui met le
public au courant de ce qui se passe et lui permet de porter ses
lib^ralit^s sur telle ceuvre moins favorisde que les autres.
L'administration des 6tablissements de bienfaisance de
rifitat est placde sous Tautorit^ du ministre de Tlnt^rieur, du
directeur g6n6ral de la bienfaisance et d'un comity de dames
cv66 par d6cret du 27 avril 1875. Un inspecteur g^n6ral inler-
vient pour tout ce qui regarde Thygifene, le service medical et
pharmaceutique. II a dgalemenl Tinspection de tons les asiles
d'ali^n6s provinciaux ou municipaux, au point de vue surtout
de la situation morale des individus qui y sont enferm^s.
Un r^glement concernant les aumdniers d'hdpitaux leur
prescrit d'attendre, pour donner les secours religieux, le d6sir
formellement exprim^ par le malade, et leur d^lfegue la direction
morale et spirituelle de ceux-ci.
La nomination des m6decins et pharmaciens se fait g^n6-
ralement au concours {oposicion), quelquefois sur litres {con-
curso). lis se divisentpar moiti^ en m^decins titulaireset sup-
pliants, ces demiers nonpay^s; mais lesm^decins d'hdpitaux,
en Espagne, rcQoivent une retribution qui n'est pas d6risoire,
comme en France, et qui varie d'ailleurs, avec Timportance de
retablissement.
IV
Voici la r6glementation en ce qui concerne les ^tablissc-
ments priv^s. lis avaient acquis des richesses considerables;
en Espagne, comme dans d'autres pays, la piete des fiddles, aussi
bienque leur esprit de charity, avait remis jadis entre les mains
du clerge les sommes n^cessaires k la fondation d'oeuvres
diverses de bienfaisance, qui remonte h. une ^poque recul6e, et
leur installation se ressent de cette anciennete d'origine.
La loi du 23 Janvier 1822, qui se pr^occupait surtout de la
double autonomic provinciale et communale, arriva k supprimer
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L'ASSISTANGE EN ESPAGNE, 675
rind^pendance des fondations particuliferes. La loi du 20 juin
1849 les ^mancipa et les s^para un peu trop des ^tablissements
publics. Un dtScret rendu, en 1875, sur la proposition de
M. Romero Robledo, r^gularisa leur situation et renforga Tac-
tion administrative relftch^e depuis la loi de 1849. « La bien-
faisance particulifere, disait le ministre, viendra ainsi en aide 3i
la bienfaisance publique et sp^cialement k la bienfaisance
g^n^rale en all^geant ses budgets, et jamais plus Targent du
pauvre ne sera d6tourn6 de sa destination. »
Et, en efTet, le rfeglement qui accompagnait ce d^cret de
1875, tout en respectant les fondations particuliferes etles attri-
butions qu'elles ont regues de leurs fondateurs, donne h T^tat
la surveillance sur le domaine de Thygi^ne et de la morale, sur
celui de Taccomplissement strict des obligations auxquelles les
OBuvres particuliferQs sont soumises. II complete et rend facile
le fonctionnement de ces oeuvres, dispose des fonds suppl^men-
taires ou dont la destination est caduque, et les applique k
d'autres oeuvres du m6me genre.
Chaque ^tablissement est sous la direction d'un patronage
{Junta de Patronos) qui doit se tenir toujours en r^gle vis-Ji-vis
de FEtat, lequel pent destiluer, pour des faits [graves, les mem-
bres de cette Commission nomm^s par lui dans les conditions
prescrites par les fondateurs. Ces commissions soumettent leurs
comptes et budgets k la Commission provinciale dans le ressort
de laquelle elles fonctionnent, et ces documents sont envoy^s
k la direction g6n6rale de Madrid pour approbation definitive.
11 n'est pas de commune espagnole, si pauvre qu'elle soil,
qui, d'aprfes les lois de bienfaisance du pays, ne doive poss^der,
r^duit k sa plus simple expression, un asile dispose pour des
malades ou infiimes, jusqu'au moment od ils seront envoy^s
k retablissement provincial le plus voisin (article 88 de la loi
de 1849).
L'article 88 du r^glement du 14 mai 1852 dit que ces ^ta-
blissements pourront 6tre aussi simples que possible, eu dgard
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676 liEVUE PHILANTHROPIQUE.
k lapauvret^ de la commune; ils comprendront une salle de
reception, une chambre avec deux lits, une voilure ou tar-
tane, et deux chevaux bien entretenus. L'article 89 demande
que dans les communes aisles Tinstallation de ces asiles soit
digne de la ville, ct qu'elles puissent m^me garder les malades
ou blesses, s'il y a danger de- les transporter ailleurs.
L'article 90 y insiste en disant que les secours et Fhospitali-
sation k domicile constituent Tobjet veritable' et essentiel de la
bienfaisance municipale. La plupart du temps, ce sont des
m^decins municipaux qui font le service de ces asiles qu'on
appelle maisons de secours [casas de socorros), et j'aurai k dtudier
cette organisation de la m^decine municipale, et par consequent
les conditions de Tassistance k domicile. Mais auparavant je vou-
drais dire un mot des casas de socorros elles-m6mes. La loi, en
en prescrivant Tinstallatioa dans chaqueville, indique qu'elles
seront compos^es d'une petite pifece pour pansement, d'une
autre contenant quatre lits au moins, d'une salle de consulta-
tion, d'une chambre k coucher pour le m^decin de garde, d'une
autre pour Faide [practicante) praticien (i pen pr^s analogue k
un interne), enfin d'une piftce pour magasin, vestiaire, lin-
gerie, etc.
Dans chacune de ces maisons, il y aura deux m^decins
nomm^s au concours et qui seront de garde i tour de rftle, soit
pour Mre pr6ts k soigner les malades qu'on leur amfenera, soit
pour donner des consultations gratuites. La maison de secours
est sous la direction de Talcade assists de trois conseillers
municipaux ; c'est k cette autorit^ que le m^decin le plus ancien
doit rendre compte de tout ce qui se passe dans T^tablissement,
statistique et nature des secours, d^penses, etc. La maison est
munie de moyens de transport pour les malades ou blesses qui
tombent dans la rue, et qu'il y a lieu de transferer soit k la
maison de secours, soit kThOpital, soit & domicile; g^n^ralement
ils passent par la maison avant d'aller k une des autres desti-
nations. Dans les grandes villes, les maisons ont un telephone
permettant de communiquer avec Thdpital, I'autorit^ ou les
particuliers. La loi qui prescrit Tinstallation de ces asiles n'a
pas 6t6 toujours ob6ie. L'Etat s'6tait d'abord charge de leur
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L'ASSISTANCE EN ESPAGNE. 677
installation et de leur entretien. Un rfeglement r6cent les met
k la charge des villes; et* cependant toutes n'en oht pas orga-
nist elles-m^mes; dans certaines on n'a pu en avoir que grice
k la gdn^rosit^ d'enfants du pays. Santander, ville de 40 000 ha-
bitants, en est d^pourvue, ou plut6t ce que Ton connait sous ce
nom manque de m^decins. Voici un aper^u du nombre des
cas soign6s dans quelques villes et que je trouve au bulletin
officiel public chaque mois par la direction g^n^rale, Tanalogue
pour toute TEspagne du bulletin que public mensuellement
pour Paris mon distingu^ confrere et ami le D' Bertillon. A
Seville, ville de 143 182 habitants, ily a depuis 1870 troismaisons
de secours dont Tune dans le faubourg populeux et industriel
de Triana. Les frais, pendant Tann^e 1890, se sont 6lev6s k
42955 francs, les deux maisons urbaines ont eu k soigner
3211 cas de maladies internes, 4000 cas de maladies extemes,
2904 accidents; 1858 operations ont 616 faites. Pour la maison
du faubourg, il y a eu 1 630 malades internes, 1 698 externes,
4100 operations. On voit que la proportion est plus forte pour
le quartier populeux et industriel. La totality des cas dans les-
quels ont eu k intervenir les maisons de secours de Seville est
done de 15 453 ; il y a eu 2 958 operations.
En outre, pour le premier trimestre de 1891, le nombre de
cas a ete de 876 en Janvier, 1 121 en f6vrier, epoque du camaval,
282 en mars. Barcelone, ville beaucoiip plus importante,
277 000 habitants, a presents pendant cesm^mes mois 310, 435 et
307 cas; Alicante, port marchand de 32563 &mes, en a donne
461,170,208.
Dans son excellente monographic sur Seville, M. Hauser,
faisant la statistique des maisons de secours de cette ville, trou-
vait que le minimum des cas se presentait en hiver et le
maximum en ete, et il expliquait cette superiorite par ce fait
que, dans cette dernifere saison, les marches sont moins abon-
damment pourvus k cause de Texportation des produits du sol,
qu'il y a plus d'occupations pour les ouvriers du b&timent, que
la taveme est plus frequentee pour le jeu et la boisson ; qu'enfin
la chaleur tropicale qui r^gne alors — en aoM 1891 on a observe
44© — YQj^^ jes t^tgs pluschaudesetrhumeur plus balailleuse.
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678 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Inutile de dire que les castxs de socorros 6tablies dans chacun
des dix districts de Madrid sont fort bien install6es et dirig^es ;
j'ai pu m'en convaincre dans une visite faite en la compagnie
de mon confrfere le D' Espina, m^decin distingu^ de rhdpital
provincial.
Je vais maintenant arriver aux m^decins municipaux.
VI
Un vieux livre trfes curieux de Cristobal Perez de Herrenera,
paru en 1568 et intitule : Discours sur la protection des pauvres
vrais {legitimos pobres), fait allusion h, Tassistance des pauvres
honteux qu'il voudrait voir organiser par toute TEspagne
comme elle Testd^jJi JiVitoria, Lisbonne, Valence, Madrid, par
les soins des confr^ries de la Mis^ricorde. II s'agit d'associ^s
qui vont visiter les pauvres deux fois par semaine, les consolent
et leur donnent une carte, laquelle est remise au m6decin ou
au chirurgien salari^ qui les visite 8i son tour avec deux bar-
biers, et leur donne en secret des remfedes, un petit pain, une
demi-livre de viande et huit marav^dis pour acheter des oeufs,
le tout appuy6 d'un certificat de confession, sauf, si la maladie,
se prolonge, Ji ajouter de la volaille, des biscuits, des conserves;
s'occupe aussi de Tadministration des derniers sacrements, et
en cas de mort les fait enterrer avec lelinge et les cierges qu'on
tient en reserve pour cet objet. Et Tauteur ajoute que, si le ma-
lade ne pent se faire soigner & domicile, on Tenvoie dans une
infirmerie sp^ciale, ou, s'il ne s'agit pas de maladies conta-
gieuses, Si Thdpital d' Anton-Martin, oil Ton donne chaque jour
1 r^al (^25 centimes) par malade; k Tinfirmerie est attache un
majordome mari6, qui est aid^ de sa femme, d'un domestique et
d'une servante.
J*ai tenu k citer ce passage, qui montre ce qu'^tait Tassis-
tancc publique en Espagne, il y a trois sifecles. J'arrive k ce qui
se fait de nos jours, c'est-i-dire aux m^decins municipaux qu'on
appelle m^decins titulaires, ou de partido. On verra que cette
organisation est celle qui est connue en France sous le nom
de m^decine cantonale et qui n'existe d'ailleurs que dans la
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L'ASSISTANCE EN ESPAGNE. 679
inoiti^ environ de nos d^partements. En Gspagne, eette m^de*
cine est plus g^n^ralis^e et fonctionne assez convenablement
dans les plus petiies villes; mais, comme on le verra, siles r^-
glements imposent certaines conditions aux m^decins titulaires,
leurs honoraires sont quelquefois tr^s m6diocres, et forcent le
praticien k exercer une profession k c6t6.
Je connais un m6decin d'un petit village de la frontifere
qu'un de mes confreres frangais trouva occup6 k labourer sa
terre. Interrog6 k ce sujet, le m^decin espagnol r^pondit qu'o-
h\ig6 par le rfeglement k ne pas s'^loigner sans Tautorisation
du maire, et brouill6 avec ce magistrate il ne pouvait exercer
en dehors de sa commune, et 6tait contraint de demander au
travail manuel de quoi suffire k ses besoins et k ceux de sa
famille.
L'article 66 de la loi de 1866 cr^e des m^decins municipaux
charges du soin des indigents, et autorise les communes trop
pauvres k s'associer k d'autres pour payer ce m^decin. Les
honoraires de celui-ci sont r6gl6s par contrat, et le paiement en
est obligatoire pour les municipalit^s. On present aux m^de-
cins titulaires de ne pas s'absenter en cas d'dpid^mie; ils doi-
vent dans les autres cas pr^venir la municipality de leurs
absences. Une pension de 500 k i 250 francs est donn^e k chaque
m^decin devenu incapable de travailler, par suite des services
rendus dans une ^pid6mie, et pour tout le temps que dure celte
incapacity. II en sera de m6me pour les m^decinsnon titulaires
qui auront pr6t6 leurs services en temps d'6pid^mie. En cas
de mort, la pension est reversible sur les veuves. L'article 79
de cette loi, s'appuyant sur la liberty de profession, declare
qu'aucun service public ne pent ^tre demands it un autre m6-
decin que le titulaire,k moins de cas urgent, et moyennant re-
tribution sp^ciale. Pour maintenir « la dignity m^dicale » Tar-
ticle 80 prescrivait Tetablissement d'une sorte de jury medical
dans chaque province avec rfeglement k etablir par Tfitat. C'est
Tanalogie de Tordre des m^decins contre lequel se sont eiev6es
en France tant d'objections. En ce qui concerne les pharma-
ciens, la loi leur defend la delivrance d'aucun remfede, s'il n'est
present par une ordonnance de medecin, ecrite clairement,
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680 .REVUE PHILANTHROPIQUE.
sans abriSviation, correctioji, ni signes. On leur interdit de d6-
livrerdes medicaments « Wro'iques.)) d'une dose sup6rieure i
celle du Codex, k moins que le m^deein consults ne persiste et
n'affirme k nouveau son ordonnance.
Les rem^des secrets sont interdits, mais ceux qui veulent
trafiquer d'un remade par eux d^couvert doivent en demander
le paiement par I'Etat, au moyen d'un m^moire que le gouver-
nement soumet it TAcad^mie de m^decine; si Tinventeur n'est
pas satisfait de la recompense, le gouvernement consulte le
Conseil royal de sante, et alors les eflfets, et la composition du
remade, sont publics dans la Pharmacopie officielle.
Laissant de c6t6 le texte d'une nouvelle loi publiee- le
24 octobre 1873, je dirai qu'un d6cret du 14 juin 1891 a mo-
difie Torganisation que je viens d'esquisser; bien que faite
sous rinspiration d'une commission m^dicale pr^sid^e par
M. Matias Nieto Serrano, secretaire de TAcademie de m6de-
cine et directeur du Siglo medico^ elle a souleve un grand
nombre de reclamations au sein de la profession medicale, et
pour faire un corps de ses reclamations, Ic Siglo medico lui-
meme a organise un congrfes de m6decins titulaires qui s'est
tenu le premier decembre k Madrid.
VII
Le decret nouveau determine que chaque commune de
moins de 4000 families [vecinos) (1) a des medecins et phar-
maciens municipaux munis du titre de docteur ou de licencie,
delivre par Tune des Universites espagnoles.
L'obligation des medecins municipaux ne se borne pas- k
I'assistance gratuite des pauvres (accouchement et vaccination
compris), ils doivent encore donner leur concours k Tautorite
gouvcrnementale ou municipale pour toute mesure de leur
competence touchant la sante publique, faire la verification des
(1) On appelle vecino rhabitant d'une ville n€ ou domicilii depuis longtemps
dans Id commune, et qui paie ses impdts et figure sur les feuilles de reoensement.
La reunion des vecinos forme la population de droit; au contraire, si on ajouie
la populatit>n flottante, on obtient la population de fait . .
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l;assistance en espagne. est
d6chs, s'il n-y a pas un service municipal special, enfin prfeter
sur requisition, et moyennant des bonoraires fix^s par la Ibi,
ieur aide k rautorit6 judiciaire en cas d'abseilce des m^decins
sp^ciaux (del6gu6s).
^ Le r^glement nouveau considfere comme indigents ceiix
qui ne paient aucune contribution k TEtat, i la province, ou Ji
la commune, et ne sont les salaries d'aucune de ces admini-
strations.
Dans les {villas) villes de plus de 4000 vecinos, il y aura
une liste des pauvres dress6e chaque ann^e par le conseil mu-
l4cipal et communiqu^e aux m^decins et au public, mais elle
teste ouverte pour les inscriptions pendant Tann^e.
Les communes de moins de 4 000 vecinos auront un m6-
decin chirurgien municipal pour chaque groupe de 300 fa-
pdilles pauvres et un en plus pour chaque groupe suppl6-
mentairede 150. Ndanmoins, m6me pour 300 families pauvres
seulement, s'il y a des difficult^s dans Ieur assistance, la ville
pourra 6tre divis6e en districts ayant chacun son m^decin. Lea
communes trop pauvres pourront se r^unir pour ne payer
qu'un mSdecin; ces groupes devront 6tre approuv^s par le
gouvernement. Les villas devront aussi entretenir des « pra-
ticiens » municipaux. Le mMecin est libre de trailer de gr6 k
gr^ avec les malades ais6s (le plus sou vent par abonnements),.
mais ceux-ci peuvent se former en soci6t6, sous la surveillance
et avec Tintervention du maire, autoris^par le gouvernement.
L'^lection du m^decin communal se fera par les soins de la
commission de sant6 k la majority des suffrages, apr^s annonce
officielle de la vacance et apr^s un d§lai suffisant.
Les pharmaciens d^sign^s comme pharmaciens municipaux'
devront poss6der tons les rem^des de la pharmacopde espa-
gnole; les m^decins et chirurgiens devront possdder tousles
instruments, appareils chirurgicaux et moyens n^cessaires k
Texercice de leurs fonctions d^termin^es nominativement par
le Conseil royal de sant^.
Comme charges de proposer les mesures propres k faire dispa-
raitre les causes d'insalubrit^, et diminuerles dommages causes
par une maladie quelconque regnant en ville, les m^decins
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682 REVUE PHILANTHROPIQUE.
communaux sont de droit membres des commissions munici-
pales de sant^^ dont nous parlerons plus tard. Les m6decins ne
pourront 6tre priv^s de leur emploi qu'en des cas sp^ciaux et
par decision de la deputation provinciale sur avis de la com-
mission de sante provinciale. En cas d'absence ou d'empfiche-
ment, les m^decins municipaux doivent trouver un confrere
qui les remplace. lis ne doivent pas quitter la commune en
temps d'dpid^mie, et en temps ordinaire ils doivent pr6venir
Talcade de leur absence. S'ils meurentdans une6pid6mie, leurs
veuves et leurs orphelins out droit it une pension dont j'ai
parle plus haut. Dans d'autres conditions, et k raison des m6-
rites du titulaire, ces m^mes pensions peuvent 6tre accord^es
it leurs veuves et orphelins. Les contrats actuels entre m6-
decins et communes pourront 6tre renouvel6s par accord entre
les parties, tout en ^tant soumis aux regies du present r^le-
ment. S41 n'y a pas accord, il y aura lieu de recourir k une no-
mination r^guli^re sur presentation de titres (concours) ; la dur^e
des contrats est de quatre ans, avec renouvellement facultatif.
VIll. — ASILES DE BIENFAISANCE
Ces asiles de bienfaisance regoivent les enfants abandonn^s
ou orphelins, les impotents, les vieillards des deux sexes. Ils
sont le refuge des pauvres de tout dge, et,de plus, ils mettent
un outil dans la main de Tenfant, le moralisent par le travail
apr^s lui avoir donn^ Tinstruction et Teducation. On les ap-
pelle,suivantles villes oil ils sont etablis, maisons de bienfai-
sance, de charite ou de mis^ricorde. Parmi ces etablissements
je citerai la Misericordia, de Pampelune qui, malgr^ le pen
d'espace dont on pent disposer, est trfes vaste, et, en d^pit de
sa v6tust6, fort bien entretenue. II y a li, comme ailleurs, des
^coles, des ateliers, des dortoirs pour jeunes et vieux, de
grands r^fectoires, et de grandes cours qui ne valent pas celles
de retablissement similaire de Valence, oil tout est neuf et
grand, comme je le dirai.
Comme specimen de r^glement, jedonnerai les articles 8 et
9 de celui de la capitale de la Navarre, dans lequel on remarque
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L'ASSISTANGE EN ESPAGNE. 683
la particularity relative aux opinions ; les autres regies se ren-
contrent k peu prfes dans tons les r^glements qui r^gissent le
fonctionnement de ces asiles d'enfants et de yieillards. Void
ces articles :
« Article 8. — On n'admettra pas d'enfants de Tun et Tautre
sexe au-dessous de sept ans, ils devront 6tre vaccinas et n6s k
Pampelune, ou bien n^s d'un p^re qui aura dix ans de residence
dans la ville. On ne pourra pas non plus admettre, k titre de
pauvres ni de pensionnaires^ les individus d'opinions douteuses
[opinion contenciosa), bien qu'Us soient recommand^s par des
personnes d'autorit^, ni ceux qui, par leur vie et leurs habi*-
tudes, ripugneraient aux r^glements de la maison ; on ne re-
cevrapas de pauvres atteints de maladies contagieuses, d'af-
fections cutandes, et tons * ceux qui d6sirent entrer seront
examines, k cet effet, par le m^decin de T^tablissement. II sera
n^cessaire qu'ils soient v^ritablement pauvres, c'est-i-dire non
soutenus par des parents, qu'ils soient natifs de Pampelune
ou habitent la ville depuis dix ans.
« La maison fournit ^galement des secours en argent, pain,
legumes aux individus ou families, que Ton ne pent admettre
dans la maison, s'ils sont n^s k Pampelune ou y ont dix ans de
residence, et qui, par leur Age ou leurs infirmit^s, ne peuvent
vivre du produit de leur travail ; on ne donnera les secours en
argent qu'aux families de pauvres qui ne pourraient, ou n'ose-
raient, venir chaque jour i Tasile prendre la portion qu'il dis-
tribue.
« Article 9. — L'expdrience a d^montr^ qu'il y a des cas dans
lesquels, par suite de revers de fortune ou de malheurs de
famille, des individus soUicitent TentrSe dans Tasile sans 6tre
tout k fait d^pourvus de rcssources; quand m6me ils n'auraient
pas le temps de residence indiqu^ dans Tarticle pr^c^dent ils
pourront 6tre admis sur decision de la commission administra-
tive, moyennant le paiement quotidien de 75 centimes; ils
doivent fitre c^libataires, Tasile n'^tant pas dispose pour rece-
voir des manages. »
Je ne sais dans quel chapitre de ces notes je pourrai pla-
cer un article relatif k une institution qu'on appelle le Vinculo
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684 ilEVUE PHILANTHROPIQUE.
(le lien) et qui, depuis de longues ann^es, possSdant des mou-
lins hors ville, k trfes peu de distance, fabrique pour le compte
de la municipality de grandes quantitds de pain, dont le prix
de vente est inf6rieur parfois h celui des boulangers de Pam-
pelune. J'ai visits le Vinculo le soir, au moment oil se fabri-
quait le pain, h Taide de p^trins et de fours qui sont les demiers
mots du progrfes. L'organisation de cette grande boulangerie
m'a paru parfaite ; elle a en ville quatre d^pdts, et le pain
qu'elliB y envoie est excellent.
La Casa de Misericordia de Valence compte parmi les mieux
organis^es ; elle a une population de 700 hommes et femmes ;
elle recueillait autrefois les aveugles et les sourds-muets pour
lesquels on a fait un dtablissement special. On y re^oit les
vieillards et les impotenls, les enfants depuis V&ge de sept ans,
ct aussi les enfants dela Maternity. L'^tablissement est vaste;
tout marche k la vapeur : cuisine, buanderie, fabrication du
pain ; les cours sont sillonn^es de rails qui facilitent le service.
Dans les ateliers destines aux gargons on fabrique des chaises,
des tissus, des espadrilles, etc. En bas est une 6cole de gar^ons,
grande salle virtuellement divis^e en trois parties, k raison
de Tenseignement mutuel, et par consequent la lumifere n'est
pas uniform^ment donn^e aux ^l^ves fort nombreux. Les classes
des ftUes sont au deuxifeme 6tage, k c6t6 de leurs ateliers.
" Valence a en outre Tasile del Campo, ^tablissement parti-
culier, que je n'ai pas 616 autorisd k visiter, et qui reQoit envi-
ron 400 orphelins.
Un autre ^tablissement provincial de charit6, qui joue le
m6me r6le que la Casa de Misericordia, c'est la maison de bien-
faisance ou Casa de Benefiericia, qui a 2S0 fiUes, iOO gar^ons,
40 vieillards. L'^tablissement, nouvellement bftti, est divis^ en
7 cours, les unes destinies aux vieux, les autres, sur lesquelles
donnent deux ateliers, aux enfants qui, ce jour-li (un di-
manche), jouaient aux soldats, costumes originalement et
arm^s de sabres de th6&tre ; les dortoirs, les r^fectoires, tons
les services sont bien organises, il y a une.infirmerie et une
salle d'isolement.
L'6cole des gargons est fort curieuse, elle se compose d'ua
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L'ASSISTANCE EN ESPAGNE. 6^5
immense T dont la branche supdrieure est naturellement divi-
s6e en deux salles, gauche et droite ; cette branche renferme
260 ^Ifeves divis^s en deux classes, dont les professeurs ont la
chaire aux deux extr6mit^s ; la chaire de la branche verticale
est h Finterseclion.
. Parmi les oBuvres de la charity priv6e, j'ai visits k Alicante,
tout h cdt^ de la u Maison de Bienfaisance » existant dans chaque
province, un « Asile des enfants pauvres », fond^ il y a six ans
par une femme g^n^reuse et destin6 plus spdcialement aux en-
fants des ouvri^res de la fabrique de tabacs. L'enseignement
est confix k cinq soBurs qui reQoivent environ 250 enfants r^par-
tis en ^coles de gargons, de filles et maternelles. Les ouvriferes
conduisent 14 leurs enfants d6s cinq heures du matin en allant
& leur ouvrage, mais ces petits n'entrent en classe qu'4 neuf
heures, et au repas de midi que suit une r^cr^ation d'une demi-
heure, on leur sert, moyennant 5 centimes, une bonne soupe
de riz et de pommes de terre.
IX. — MATERNITfiS, TOURS
Un des genres d'^tablissements laiss^s par la loi k la charge
des provinces, c'est la maison de Maternity k laquelle est tr^s
souvent jointe celle qui reQoit les enfants trouv6s, et dans la-
quelle est un tour.
Le tour, en eflFet, qui a 6t6 supprim^ en France, a 6t6 con-
serve en Espagne, et jusqu'ici aucun d^bat public assez impor-
tant ne s'est ^levd k propos de sa suppression.
Je n'ai pas k faire ici le proems de ce moyen employ^ pour
sauver la vie k un grand nombre d'enfants, que leur mfere,
coupable d'entrainement, aurait supprimds avant ou apr^s leur
naissance. II est certain que le tour, permettant k une femme
de cacher ses fautes, Tencourage k laisser la vie k son enfant,
sAre qu'elle est qu'on soignera le petit 6tre qui est sa honte, et
que sa mis^re, k d^faut de son courage, lui interdit de conser-
ver. Mais tout n'est pas dit, quandTenfant a^t^ ddpos6au tour;
il n'est m6me pas sAr quHl y arrive vivant, car les conditions
clandestines dans lesqueiles ii est venu au monde, la fa^onpeu
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686 REVUE PHILANTHROPIQUE.
hygi^nique dont on lui a fait faire ce voyage, de la maison au
tour par toutes les saisons, par tous les temps, et v6tu, Dieu
salt comme, tant d*autres causes ont menace son existence, quHI
arrive souvent mourant au tour. M. Hauser, dans sa monogra-
phic de Seville, dit que, sur 350 enfants apport^s en moyenne
chaque ann^e au tour de cette ville , 1 5 arri ven t morts ou mourants.
Une fois au tour, nourris par une femme qui a un ou deux
autres enfants au sein et qui n'est qu'une mercenaire, envoy^s
par r^tablissement k des nourrices du dehors, dont les condi-
tions d'hygifene sont d^plorables, les pauvres petits ^tres voient
encore leur vie menac^e de diverses fagons. II se pourrait que,
proportions gard^es, le syst^me du tour donn&t autant de morts
d' enfants du premier ftge dans les pays oil il existe, que les avorte-
ments et infanticides dans les pays od il n'existe pas (1). Le tour
diminue la responsabilit6 de la femme, il Tencourage k procr^er
des enfants qu'elle abandonne d^jk d^s le jour de sa faute; les
unions ill^gitimes sont done ainsi favoris6es, et le s^ducteur et
sa complice sont h Tavance rassurds sur les consequences de
leur action; c'est la charit6 publique qui en feratous les frais.
En Espagne, la proportion des naissances naturelles est plus
forte que dans d'autres pays. L'an dernier, dans une des villes de
gamison que j'ai visit^es, elle ^tait de 1 sur 6. En France, onle
voit dans la demifere statistique, cette proportion est beaucoup
moindre. Gependant, dans certains de nos villes ou villages
prfes de la fronti^re espagnole, dans lesquels les unions ill^gi-
times sont fr^quentes, le nombre apparent d'enfants naturels
est plus faible qu'il ne le serait, ^tant donn^ le rel&chement
incontestable des moeurs. La cause de cette faible proportion
d'enfants naturels, c'est le voisinage de TEspagne ; dans les
tours de ce pays, les filles-mferes frangaises, gr4ce i la compli-
city de leurs parents ou de sages-femmes, se d^barrassent de
leurs enfants, au benefice de la maison espagnole d'enfants
trouv6s, dont la clientele est alors plus grande que ne le com-»
porte la population de la province.
La premiere maison de ce genre que j'ai visitde au d^but de
(1) Au moment ou j'6cris ces lignes, plusieurs affaires d'avortement se jugent
en France. U y a longtemps que je n'en Tois pas se juger en Espagne.
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L'ASSISTANGE EN ESPAGNE. 687
men voyage est celle de Pampelune : la Inclusa. On m'a mon-
tr6 le m^canisme du tour, la sonnette qui, lorsque le nouveau-
n^ est pos^ dans la botte de bois, avertit la soeur de garde dans
la chambre voisine qu'un enfant vient d'etre confix aux soins
de la maison. La sceur de garde prdvient aussitdt la nourrice
d^sign^e h, Favance pour donner le premier lait au nouveau
venu, on baptise celui-ci, si, dans les papiers qui Faccom-
pagnent, rien ne dit qu'il a d6ji §t6 baptist; on prend son
signalement, on lui attache un ruban retenu par un plomb que
la soeur marque, h, Faide d'une matrice, du num^ro d'entr^e de
Fenfant. Tout ce qu'il faut pour faire reconnattre celui-ci plus
tard est tenu en note; les parents pourront, en effet, un jour
retrouver le petit abandonnd.
La Inclusa de Pampelune n'est pas dans des conditions d'es-
pace suffisantes. La population de cette maison, entretenue par
la province, d^passe la capacity de la Jnclusa. L' administration
le sent elle-m^me, et le directeur des ^tablissements hospita-
liers de la Navarre a propos6, il y a d6}h quelque temps, k la
deputation provinciale de transporter hor& des murs cette insti-
tution, et peut-^tre aussi les autres asiles de charity. Pampe-
lune est, en effet, une ville forte, et si Fon mettait au dehors
tons les etablissements hospitallers, la salubrity de la ville, de
m6me que la sant^ des malades, pauvres, vieillards, enfants que
la province secourt, seraient sauvegard^es. Onannexerait&ces
edifices une exploitation agricole qui ferait du bien aux prot6->
gds de la province et k la culture du pays.
La Maternity de Pampelune se recrute par Fadmission des
enfants du tour, et de ceux qui, dans les diverses communes
de la province, sont abandonn^s de leurs parents, des enfants
orphelins de pfere et de mfere et sans ressources. Tons les en-
fants ainsi recueillis sont mis en nourrice, comme je Fai dit,
ou nourris dans F^tablissement, s'ils sont dans Ffige de Fallai-
tement. Une fois sevr6s, ceux du dehors rentrent k la Mater-
nite, k moins que leurs parents nourriciers ne les gardent ou ne
les adoptent, ce qui se voit fr^quemment chez ces braves cam-
pagnards, et non seulemcnt dans la province de Pampelune,
mais ailleurs.
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688 REVUE PHILANTIIROPIQUE.
Les garQons ne sont gardes k la Maternity de Pampelune
<[ue jusqu'JL Tftge de sept ans ; faute de local, ils passent k la
maison de Mis^ricorde, oil on continue leur Education et oil on
leur apprend un metier, et comme la Mis^ricorde appartient k
la municipality, la deputation lui paie pour chaque enfant
75 centimes par jour. Quant aux fiUes, gard^es k la Maternity
jusqu'& leur manage, elles reQoivent k ce moment de la depu-
tation une dot de 250 francs.
Un grand nombre de maisons d'enfants trouv^s (1) sont an-
nex6es k une Maternity, mais celle-ci en est quelquefois s^pa-
r^e, ou bien elle fait partie de Thdpital dans lequel il y a un
service special d'obstetrique. Ces Matemit^s m*ont paru nioins
nombreuses que les Maternit^s fran^aises.
La maison d'enfants trouv^s a un directeur nomm^ par la
province, mais elle est ^galement administr^e par une society
de dames de la viile (junta de sehoras) qui s'occupent avec une
grande sollicitude de la recherche des nourrices, soit pour le
dedans, soit pour le dehors, et qui visitent les enfants nourris
par les unes et les autres.
La maison de Maternity de Valence est annex^e au. grand
h6pital de cette ville ; il y a communication directe entre les
deux etablissements, ce qui est peuts^tre un tort. Les enfants
sont recrutds dans les salles d'obstetrique de Thdpital, ils soat
re^^us dans un d^partement bien organist, avec des salles sp^-
ciales pour les 35 nourrissons ; la maison en fait nourrir 250 au
dehors. A la maison, une nourrice a deux enfants, exception-
nellement trois.
Les nourrices ont un dortoir s^par^ de celui des enfants,
dans lequel couche une soeur qui va, deux fois par nuit, r^veiller
les nourrices pour qu'elles donnent k teter aux petits.
Je trouve k signaler une salle des berceaux tr^s propre,
une salle destin^e k la toilette k grande eau, un syst&me de
petites chaises rang^es le long du mur, et dont la caisse con-
tient le linge des enfants pour la joumee; k c6te sont une lin-
gerie et une garde-robe admirablement tenues.
(1) Plusieurs de ces asiles d'enfants trouv^s sont tr^s peupl^s. L'one des der-
ni^res statistiques attribuait h Tasile de Salamanca 1 633 enfants.
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L'ASSISTANGE EN ESPAGNE. 689
Mais la maison de Maternity que j'ai le plus admir^e est
celle de Cadix, dont le m^decin, le D'Tniba, m'a faitleshonneurs
avec une amabilit^ parfaite. On appelle la maison Casa Matri-
cia, elle estnouvellement bftlie, a^r6e, agr^able 4 voir, elle a
un tour comme toutes les autres, et est sous la direction d'un
comit6 de dames. Elle fait nourrir les enfants dedans et dehors ;
la jolie salle des berceaux est circulaire, pav6e en marbre,
propre et bien entretenue ; les salles de nourrices, leur dortoir
sont aussi fort bien. II y a 25 enfants dedans, beaucoup plus
au dehors.
Les nourrices de Tint^rieur ont 30 francs par mois ; celles
du dehors 22 fr. 50. C'est k peu pr^s le m6me prix pour toute
TEspagne.
X. — SOURDS-MUETS ET AVEUGLES
M. Glaveau, inspecteur g^n^ral honoraire des 6tablissements
de bienfaisance, dont la competence, en ce qui concerne Ten-
seignement des sourds-muets, est trfes grande, 6crit ceci dans
le Dictionnaire de p6dagogie public par M. Buisson (Hachette) :
« L'honneur d'avoir cr^fi cet enseignement (des sourds-muets)
appartient incontestablementau b^n^dictin espagnol, don Pedro
Ponce de L6on, el, chose remarquable, les eflForts de ce maitre
furent dirig6s dans la voie oil Ton devait, ce semble, redouter
de rencontrer les obstacles les plus graves, c'est-4-dire vers
Tenseignement de la parole. »
G'est dans le couvent des b^n^dictins de San Salvador de
Aria (Burgos) que Ponce de L6on (1520-1584), n6 k Valladolid,
fit la connaissance de deux jeunes sourds-muets, les prit en pi-
tie, et leur apprit k prononcer les mots 6crits en caractferes places
k c6te des objets que ces mots d^signaient. 11 eut d'autres elfeves
qui, suivantun ^crit de Ponce de L6on, trouv^ dans les archives
du couvent, « conversaient, ^crivaient, parlaient le latin, le
grec et Titalien, et raisonnaient fort bien sur la physique et
Tastronomie )>.
Gette methode orale fut appliqu^e en France 4 la fin du si5cle
dernier, par un juif espagnol chass^ de son pays, Jacob Rodri*
REVUie FQILANTBROnQUE. — U. 44
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690 REVUE PHILANTHROPIQUE.
gucz Pereire y mais longtemps d^laiss^e pour la m^thode des
signes de Tabb^ de r^p6e; on Tapplique maintenant en
Espagne.
II s'est cr6d, h la suite de divers d^crets, et entre autres de
celui qui prescrivait un 6tablissement pour les sourds-muets
dans chaque district universitaire, un certain nombre d'^coles
de sourds-muets qui donnent aussi asile aux aveugles, chez
lesquels lesm^thodes les plus rdcentes (mdthode Braille, etc.),
sont employees. Ces deux sortes de d6sh£rit^s sont done dans
les mfimes institutions, sous une direction unique.
L'6cole des sourds-muets et aveugles de Seville est bien si-
tu^e, bien am^nag^e ; quoique fondle en 1873, eJle n'est d6fl-
nitivement install^e que depuis Janvier 1887.
Les pensionnaires paient 150 francs par an et les extemes,
10 francs par mois; mais on regoit aussi des enfants pension-
n^s par la deputation de Seville, ou d'autres deputations faisant
partie du district universitaire.
L'enseignement des sourds-muets comprend tout ce que
Ton enseigne en France, dans une ^cole primaire forte ; de plus,
on leur enseigne le dessin sous diflF^rentes formes : acad^mique,
lin^aire, ornemental, h la plume; on en fait des imprimeurs,
des coiffeurs, des cordonniers. Les aveugles rcQoivent lesmftmes
notions d'enseignement primaire, plus la lecture du latin et de
ritalien, etdeslegonsdemusique : solf^ge, chant, piano, oi^ue,
harmonium, instruments k cordes (guitare et mandoline). Ces
instruments sont enseignds au plus grand nombre des Slaves,
leur usage, joint au chant, constituant le gagne-pain de ces
d^sh^rit^s. Les filles sont regues k T^tablissement de Seville;
a celles qui sont aveugles comme aux sourdes-muettes, on
donne le m^me enseignement qu'aux gargons, en appuyant un
peu plus sur les ouvrages de main chez les unes et les autres
et sur Tenseignement du piano chez les aveugles.
Le jour de mavisite (8 mai 1891), Fasile comptait 20 sourds-
muets internes et3 extemes, 48 aveugles internes et 22 externes,
en tout 93 ^Ifeves,
L'6cole de sourds-muets et aveugles de Barcelone, actuelle-
ment dirig^e par M. Walls y Ronquillo, directeur du Monitor
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L'ASSISTANCE EN ESPAGNE. 691
de laEnsenanza, a eu pour directeur, au d^but (d^cembre 1816),
un homme d'une grande abn^ation, Estrada, qui s'^tait adjoint,
pourles filles sourdes-muettes, un collaborateur d^vou^, Simon;
r^tablissement, d'abord, prospdra, puis il se mit k ddcliner, et
en 1845 il ne comptait que 12 garQons, 6 filles ; on le transporta
en 1855 k Tdcole des aveugles, et k partir de ce moment les deux
institutions eurent le m6me directeur. L'6cole est un externat,
ce qui est un inconvenient pour les aveugles, qui ont besoin de
faire quatre fois par jour le trajet de Tdcole ou de trouver asile
chez des amis, aux heures des repas, pour les sourds-muets
que le contact trop frequent avec leurs parents etie sdjour trop
court k r^cole, exposent k perdre Thabitude du langage oral;
cet inconvenient est d'autant plus grand que les habitants de
Barcelone parlent le Catalan, et que c'est I'espagnol qu'on en-
seigne oralement k Tdcole.
L'6cole rcQoit des filftves gratuitement, c'est Tayuntamiento
qui entretient Tdcole ; on y admet mdme des enfants qui ne
sontni absolument sourds, ni tout k fait aveugles; lis partici-
pent aux exercices des autres ; T&ge de Tadmission est entre 5 et
25 ans; la durde des etudes est de dix ans. Les el^ves des autres
provinces, qui n'ont pas les moyens d'etre nourris par des amis
ou des parents, sont heberges par la Maison de charite qui en a
8 & 10 d*une faQon permanente. Uenseignement pedagogique
ou professionnel (musical chez les aveugles) est le meme qu'k
recole de Seville et probablement qu'aux ecoles de Madrid,
Santiago, Burgos et Saragosse qui sont les seules existantes en
Espagne. Parmi les eleves de Barcelone, je dois mentionner
Inocencio Yuncas, sourd-muet de naissance, &ge de 30 ans,
qui, alteint d'une maladie d'yeux k T&ge de 5 ans, devint
aveugle k ce moment. Une autre maladie ebranla son pauvre
corps et attaqua mdme son intelligence, et il fallut tout le zele,
jepourrais dire toute la passion de M. Walls y Ronquillo, direc-
teur de cette eoole, pour ressusciler celte intelligence engour-
die. II a la physionomie vive, gaie, il recherche la societe de
ses camarades et aide les paresseux dans leurs reponses. Si on
veut Tattaquer, il desarme son adversaire par un sourire, mais
il salt aus3i se defendre et imposer la deference. II a le tact si
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692 REVUE PHILANTHROPIQUE.
d^velopp^qu'il lui suffit de toucher une partie du corps ou des
vfetements d'une personne pour la reconnaitreun an aprfes, et se
souvenir de son nom. Son education a 6t6 relativement facile.
II connut d'abord par le toucher les objets les plus usuels ; en
mSme temps il apprit Talphabet des signes des sourds-muets,
Talphabet en relief des aveugles, et connut ainsi tout ce qu'il
touchait; actuellement il connait certains pr6ceptes religieux.
certains points d'histoire sainte, il sait les regies de la pro-
pret6 du corps, des particular! t^s sur Fhygi^ne des individus et
des maisons, sur Texercice, sur les diverses postures du corps;
il a quelques notions tr^s suffisantes decosmographie, d'histoire
naturelle, de geographic, d'arithm^tique et de g^om^trie.
II y a quelques ann^es, en 1873, k Toccasion de TExposition
de Vienne, le directeur de T^cole des sourds-muets et aveugles
de Madrid revenait avec un autre sourd-muet aveugle, nomm6
Martin de Martin. II y eut 3i Barcelone m^me une rencontre de
cet infortun^ avec Inocencio, et lous ceux qui ont assists k leur
entretien ont ^t^ dmus de r^molion m^me de ces deux interlo-
cuteurs. A peine se furent-ils touches qu'ils se rendirent compte
de leur mis^re commune, ils se communiqu^rent toutes les
connaissances qu'ils possMaient, leurs ddsirs, leurs aspirations,
se dirent la reconnaissance qu'ils ressentaient pour leurs
maftres respectifs, ne s'occupant que d'eux-m^mes, et traitant
d'importun un simple sourd-muet qui voulait se mAler k leurs
silencieuses conversations.
XI. l'aSSISTANCE a MADRID
L'histoire de Fassistance k Madrid devrait, pour ^tre com-
plete, comprendre une foule de details et de dates, car, depuis
1438, ^poque k laquelle Thdpital de Buen Suceso fut fond^ en
vue d'une dpid^mie, jusqu'ii nos jours, un tris grand nombre
d'hdpitaux furent cr^^s, puis disparurent. Je me bornerai done
k quelques indications propres k donner une id^e des res-
sources mises it la disposition de la charity publique ou plut6t
des moyens de Texercer.
Le recours it la charity dans les rues fut interdit en 1531,
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L'ASSISTANCE EN ESPAGNE. 693
SOUS peine de la prison; maison exceptait de cette defense les
moines, les voyageurs et les ordres mendiants. Parmi les men-
diants qu'on recueillait dans les rues, il y avait un grand
nombre d'enfanls. On fonda pour eux, an commencement du
XVI* si^cle, le College des enfants de la doctrine, ou Saint-Ilde-
fonso ; les documents de 1543 disent qu'il s'y trouvait k cette
^poque 40 enfants qu'on instruisait, et k qui on enseignait un
metier.
L'ayuntamiento s'occupa de cet ^tablissement. Une maison
pour femmes en couches futcr^^e en 1546 {la Inclusa). Pour
les voyageurs, on fonda un hdpital des Peregrinos en 1539.
L'hdpital de TAmour de Dieu, origine de rh6pital g^n^ral ac-
tuel, date de 1852.
Pour 12 prfetres, don Juan d'Autriche ^tablit Thdpital de la
Mis6ricorde en 1559.
Pour les femmes auxquelles on donna d'abord 40 lits, puis
200, on 6lablit Thdpital de la Sagrada Pasion. Pour les orphe-
lins, Philippe II cr6a en 1580 le College des enfants orphelins,
sous Tinvocation de Notre-Dame deLorette. En 1598 parait une
-soci^ld pour le secours des pauvres honleux, qui comprend
12 pr^tres et 72 laiques. J'ai racontd dans une autre partie de
cette dtude la fondation, en 1598, de I'Albergo de Lorenzo (au-
berge ou h6lellerie de Saint-Laurent) pour les personnes qui
sont sans domicile, et j'ai dit avec quels soins touchants on
traitait les malades, soit k domicile, soil k Thdpital m6me. Les
femmes repen ties sont recueillies en 1587 et le roi donne en
1637 de Targent pour Clever une maison k elles destinies (Casa
de Arepentidas). Un petit h6pital est cr^6 en 1594 pour 12 pauvres
honteux. La peste faitdlever en 1597 Thdpital de Saint-Antoine
oti sont aujourd'hui les frferes enseignants {escolapios de San
Antonio). Pour les Portugais, en 1606, on cr^e une maison-
hdpital (Saint Anton de los Portuguh)^ qui, rest^e sans emploi
k la separation du Portugal, est donn^e par Marie d*Autriche
aux voyageurs allemands. Un hdpital est cr^^ en 1606 pour les
Plamands. En 1629, c'est le tour des Irlandais, en faveur des-
quels un de leurs compatriotes fonde Thdpital San Patricio.
1 En 1664 se cr6e un h6pital de convalescents pour les ma-
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■■ *M
694 REVUE PHILANTHROPIQUE.
lades sortant de Fhdpital Anton Martin; une statistique de 1655
constate qn'k cette 6poque il yen avait 771.
En 1696, sous le nom de Monte de Piedad de San Ginfes,
s'organise une congregation qui donne des remfedes et des soins
m^dicaux, ainsi que des secours mensuels aux pauvres de la
paroisse. On exceptait soigneusement de ces secours les mala-
dies chroniques : rhumatisme, goutte, hydropisie, phtisie.
Je trouve sur mon chemiu, en 1756, une r^forme des or-
donnances de la paroisse de San Ginfes, un rapport des visiteurs
constatant la disparition des fonds de la congregation v6ritiee k
la mort d'un tr^sorier k qui on n'avait jamais demands de
comptes. Le 6 octobre 1768 parait une ordonnance {cedula) du
roi, qui divise Madrid en quatre sections, avec autant d*alcades
de quartier et demande que I'on recherche ceux qui ont le mal
de Saint-Lazare, la teigne, le feu Saint- Antoine, et ne peuvent
se soigner chez eux. On les mettra dans un h6pital et on leur
interdira de mendier. En 1778, on organise la charite, on donne
des in uctions pour secourir les malades pauvres, on etablit
des « deputes de charite » eius par les habitants [Vecinos). Cette
reunion de deputes [lunta general de Caridad), avait k Ma-
drid, au commencement du siede, des ecoles, des fabriques de
ruban, de passementerie pour garQons et filles, etc., etc.
Un decret du 28 mars 1834 met les etablissements de cha-
rite du royaume sous la direction des deiegues du ministre del
fomento. G'est le signal de la resurrection de labienfaisance, dit
un auteur qui s'est occupe de la question ; on ordonne k ces
deiegues nommes dans toutes les provinces de veiller auxabus,
de presider les commissions provinciales, de ne pas choisir les
membres de ces commissions parmi les nobles et le clei^,
mais parmi ceux qui sont verses dans les sciences economiques
et qui sont zeies pour le bien. C'est d'ailleurs Tepoque de Tin-
vasion du cholera et alors edateune grande ardeur pour la cha-
rite; les victimes du fleau etant nombreuses, un decret de 1834
ordonne de recueillir les orphelinsde 12 k 17 ans dans la In-
clusaj ceux de 17 & 14 ans dans la Maison de bienfaisance. On
cree aussi, pour les enfants au deli de cet &ge, une maison de
travail que Ton installe au convent des Bernardines. En 1834|
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L'ASSISTANGE EN ESPAGNE. 695
I'assistance domiciliaire est reprise, et en 1837 la commission
municipale demande aux m^decins de prater gratuitementleurs
services. En 1844, on ajoute aux fonctions des m^decins celle
d'examiner les enfants k leur entree dans les ^coles gratuites.
1887 est la date de fondation de THdpital de la Princesse. Le
28 novembre 1858, on organise les caisses de secours de Ma-
drid, qui jusque-lJi avaient 19 m^decins et 14 chirurgiens avec
I real (0 fir. 25) i 4 par jour. On cr6e 83 places de m^decins
et chirurgiens pay6s 2 000 francs par an, et on ajoute 40 m6de-
cins et chirurgiens suppliants.
Actuellement avec les deux salles d'asile de San-Bernar-
dino et le d^pdt de mendicity, le service coftte 651 000 francs.
Avant la creation des caisses de secours. on conduisait les ma-
lades et les blesses chez des barbiers inhabiles {barberos) ou
aux h6pitaux situ^s plus loin ; il n'y avait la nuit aucun secours.
Ghaque casa avait 2 m^decins, elle en a aujourd'hui 3. En Jan-
vier 1864, on decide de donner 2800 francs pour subvention i
chacune des cinq casas; en 1864, un ddcret attache Irois m6de^
cins sp6cialistes (yeux, syphilis) & Tensemble de ces maisons.
En aoAt 1876, on cr6e trois autres maisons. Dfes le 12 septembre
1880, chaque casa a 16 mtSdecins; c'est dans le rfeglement de
1878 que Ton trouve tout ce qui a rapport & Tassistance et sur-
tout k Fassistance m^dicale h Madrid. Le chapitre I determine
le but de la bienfaisance municipale, le chapitre 11 vise Tin-
stallation de casas de secours; j'ai suffisamment indiqu^ plus
haut leur installation. Le chapitre III parle de Tassistance h
donner aux pauvres, aux femmes en couches, des nourrices h
procurer aux enfants sans m^res, ou dont les m^res sont inca-
pables de les nourrir, de la vaccination et de la revaccination.
II est question des secours en argent k distribuer aux ouvriers
sans travail. Le chapitre IV traite des secours passagers, du
transport des malades k Thdpital, des secours en temps d'^pi-
d^mie. Le chapitre V parle de la vaccination aux casas; le presi-
dent de ces maisons doit donner avis des jours de Top^ration.
Le chapitre VI s'occupe des enfants perdus que Ton recueille et
que Ton conduit aux maisons ou ^tablissements d^sign^s par
la commission de bienfaisance. Le chapitre VII traite de Thy-
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iB96 .REVDE PHILANTHROPIQUE.
gi5ne des marches, des produits alimentaires, des abattoirs^ de
la disinfection des %outs, de Tassainissement des maisons gar-
nieSy de Texamen des maisons qui sc construisent. Au cha-
pitre YlII, on trouve que Vayuniamiento doit designer une com-
mission spdciale qui d6l^guera ses membres h la pr^sidence
des commissions de district et des casas de secours. Le cha-
pitre IX parte de la composition et des attributions des commis-
sions de district; elles doivent tenir note siir un registre de
Routes les personnes secourues, desfemmes enceintes, payer le
loyer des malades, acheter des appareilsorthop^diques, donner
^es secours aux voyageurs, aux accouch^es (pendant huit jours),
aux valides pauvres, six jours de secours d^finitifs aux veuves
-sans travail, aux malheureux charges de famille, qui gagnent
moins de 2 francs, mais elles refusent toute aide m^dicale aux
servantes en chdmage, aux individus atteints de maladies chro-
niques, aux strangers k Madrid, aux institutrices , aux iilles
enceintes. Lechapitre X parle du corps medical employ^ soit Ji
-^'assistance domiciliaire, soit aux casas de secours.
Un rfeglement special vise les attributions de ces maisons.
Elles doivent donner les premiers secours ; les personnes qui y
sont attach6es font les visites ii domicile, en cas d'^piddmie ;
«lles pr^tent les brancards pour le transport des patients, ontun
registre des nourrices inscrites; elles admettent le d6p6t des
^6tements k donner aux pauvres. Ghaque maison de secours it
Madrid a une salle pour les blesses, une infirmerie sp^ciale, une
salle de consultation, un cabinet m6dical, une salle d'atlente^
une salle de reunion des m^decins, une salle d'archives, une
cuisine servant aussi demagasin, le logement des employes.
XII
Je n'ai pas eu le temps de visiter k Madrid T^tablissement
qui sert d'asile aux enfants que les m^res viennent y d^poser
en secret, gr&ce h la discretion dti tour; mais je suppose qu'il en
.est de cet ^tablissement comme des analogues d'Espagne que
j'ai d^crils dans le cours de ce travail. Seulement, 6tant donn^e
la misfere de la population ouvrifere de la capitale, on comprend
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L/ASSISTANGE EN ESPAGNE. 697
quelle est la situation des pauvres enfants que Tasile confie aux
nourrices du dehors. On lira k ce sujet, dans rexcellent livre
du do(5teur Hauser^ uri tableau navrant qu'il emprunte lui-
mSme k un article de YImparcial 6crit en 1883 ou 1884. « Ces
nourrices, dit Tauteur de Tarticle, sont des mferes qui ont
perdu leur enfant ou vont les sevrer. Une enqufite du juge tinu-
nicipal de sa' commune^ une autre du cur6 suffisent pour que
VInclusa ou la Maternity livre ces malheureux nouveau-n^s
anonymes k la nourrice mercenaire.
On comprend que lorsque, pour 15 francs par mois, elles
s'imposent la t&che pdnible d*un allaitement etlea soins d'une
maternity nouvelle, leur mis^re sera extrdme. En eflFet, la plu-
part, soit 99 p. 100, sont des mendiantes ou des femmes de
joumaliers besogneux qui gagnent k peine pour se nourrir et
qui, dans ces conditions, donnentkleursnourrissonsunlait sans
principes nutritifs appauvri par le rachilisme ou empoisonn^
par d'autres maladies. Dans les provinces de Madrid, Ciudad
Real, Soria, Guadalajara, Tol^de, les nourrices qui partagent
avec leurs maris les travaux des champs abandonnent le nour-
risson k la maison oil il crie, oil il dort. Quand la nourrice re-
vient suante, briil^e par le soleil et Teau-de-vie, quel lait peut-
elle donner k Tenfant?
Aussi, dit Tauteur, I'enfant meurt la plupart du temps, et la
nourrice vient en chercher un autre k la Maternity, dans les ar-
chives de laquelle on voit figurer des femmes qui, enun an, ont
allait^ dix enfants k qui le m^me sort a 6t6 r^servd. II y a encore
un autre abus, et c'est celui commis par les gens charges de
payer la nourrice. II parait que certains avancent le mois k
ces pauvres femmes moyennant un int^rfitde 50 p. 100, d'autres
les obligent k accepter des marchandises aulicu d'argent. II y a
encore les nourrices qui cedent leur nourrisson 4 des femmes
qui n'ont pas delaitetseserventde Tenfantcommed'unmoyen
d'dmouvoir la charity publique ; quelquefois la nourrice cache
la mort de Tenfant et continue de recevoir sa pension. Le r^-
dacteur de YImparcial ajoute : « II est n^cessaire que le Comity
des dames d*honneur et de m^rite aux sentiments matemeis
desquellessont confi^s les orphelinsde YInclusa soientinstruites
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698 REVUE PHILANTHROPIQUE.
du crime qui se commet centre Thumanit^. EUes sont m^res,
elles sont femmes, elles sont Espagnoles, elles ne peuvent assis-
ter aux horreurs du spectacle qu'oflFre Tallaitement des enfants
en dehors de T^tablissement. La Soci^t6 protectrice des enfants
est ^galement obligee de s'int6resser k cet 6tat de choses.
Qu'a-t-on fait depuis pour empficher tons ces abus? Je Fignore.
Ce sont ceux qui existaient en France avant la loi Roussel. II y
avait aussi chez nous des « faiseuses d'anges » (rexpression
est dans Tarticle de r/m/?ama/). On y a mis bon ordre k cet
envoi pr6matur6 « au ciel » de bon nombre de petits fitres
sans defense.
cc Fera-t-on de m6me en Espagne? »
D' G. DELVAILLE.
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GRAND'DENTS ET C"
C'est dans le petit port de mer oil nous passons ordinaire-
ment les vacances que j'ai fait la connaissance de Grand' dents.
La rue que nous habitions, un pen en dehors de la ville,
est bord^e de jardins d'oii Emergent de grands arbres. Cette
venelle, peu frdquent^e, et peupl^e seulement do petits bour-
geois, est propre k la maraude; or, cet 6t6, une bande de vau-
riens Tavait faite sienne, et y opdrait des coupes sombres. De
la fenfitre oil je travaillais, je les voyais se faire la courte
^chelle, pour cueillir les fruits qui se trouvaient h leur port^e ;
ceux qu'ils ne pouvaient atteindre ils cherchaient k les abattre
h coups de pierres, et y r^ussissaient trop souvent.
A une demi-douzaine qu'ils 6taient, le plus vieux n'ayant
pas treize ans, ils avaient terrorist le quartier. Derrifere toutes
les portes, il y avait des fouets et des gourdins pr6ts k ch&tier
le crime, les chiens ^taient Iftch^s k la moindre alerte, mais ce
d^ploiement de force demeurait inutile. Outre que la rue a des
toumants brusques qui se pr^tent k une fuite rapide, les ga-
mins ^taient si souples, et le guet si bien 6tabli qu'on n'arrivait
pas k les pincer.
J'avoue mfime, sans en 6tre autrement li^re, que, n'ayant
pour mon propre compte ni pommes ni cerises k sauvegarder,
leurs ruses d' Apaches m'amusaient quelquefois.
Mais il n'en allait pas de m^me pour les propri6taires de la
rue. A les entendre se communiquer leur exasperation et leurs
craintes, on aurait dit que Mandrin ou le Roi des Montagues
avaient ^tabli leurs quartiers dans le voisinage.
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700 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Parmi ces jeunes bandits^ un surtout ^tait abhorr^, c'^lait
Grand'dents.
Grand'dents 6tait &g6 d'une douzaine d'ann^es. II avait les
cheveux souples et brillants, les sourcils bien arqu^s, les cils
soyeux, ToBil humide et tr^s doux, le teint superbe qu'ont par-
fois les scrofuleux ; mais un engorgement considerable du bas
de la joue lui tirait la figure tout d'un c6t6, laissant h dicou-
vert les dents sup^rieures qui n'^laient pas sensiblement plus
grandes que la moyenne, mais que Ton voyait tout enti^res.
Impossible i lui de passer inaperQu. Les stigmates de Thor-
rible maladle le d6signaient h rattention, et, il faut bien le
dire, h une haine qu*il ne m^ritait pas plus que les autres. Car
j'avais fini par me rendre compte que, non seulement il n'6lait
pas le pire, mais encore qu*il dtait le moins effront^ de la
bande.
Une fois, au petit jour,comme j'etais all^e respirer Tair de
la mer, je trouvai Grand'dents assis sur la grfeve, la tftte appuyde
dans sa main.
II connaissait si bien la reputation dont il jouissajt que, ne
se sentant pas en nombrey il voulut s'enfuir dfes qu'il m'apergut.
— Pourquoi te sauves-tu, lui deniandai-je, je te fais done
peur ?
Grand'dents s'arr^ta net, et fit, avec la tftte, signe que now,
que je ne lui faisais pas peur. Je repris :
— Comment es-tu si t6t dehors? Tu serais mieux dans ton
lit.
Son lit ! Tenfant me regarda de tons ses yeux. Je lui aurais
parie du trdne d'Angleterre qu'il n'aurait pas 6i6 plus eflfare.
— Chez toi, du moins.
— J'avais trop chaud; il fait meilleur ici.
Je remarquai, en efTet, que sa joue etait rouge et enflamm^e.
— Tu dois soufFrir? lui demandai-je, en pointant Tendroit
malade.
— Non..., oui...,desfois..., cela tire.
II etait tellement accoutum^ k sa souffrance qu'elle lui sem-
Wait faire partie int6grante de son 6tre.
— On ne t*a done jamais soign6?
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. GRAND'DENTS ET C". 701
— Si; quand maman est morte, le miSdecin avait 6crit un
papier pour que la bonne sceu me donne du sirop, mais le cat a
chavird la bouteille.
— Et tu n'en as pas eu d'autre ?
— Non.
— On n'a pas eu Tidee de te faire entrer k Tlidpital ?
— Ah ben! c'est moi qui n'aurais pas voulu y aller, fit
Grand'dents avec une sorte d'cffroi.
— Ainsi, ta mfere est morte... ; et ton p^re, que fait-il?
Le gamin se mit k rire.
— Mon p5re!... avec cela qu*on en a des pferes, nous
autres!...
— Oil demeures-tu ?
— Rue Varin, dans la maison de la Pompe.
Rue Varin!... la maison de la Pompe!... Les souvenirs me
revenaient en foule... ; des choses que j'avais vues quand j'dtais
petite fiUe, qui, alors, ne m'avaient pas frapp^e, et qui, tout k
coup; dclairaient pour moi la situation de Grand'dents et de
sa bande.
Au temps oil nous ^tions petits, mes fr^res et moi, si
nous salissions nos effets, on nous disait : « Vous ressemblez
aux enfants de la rue Varin » ; si la malice passait les bornes :
« Vous irez, ce soir, couch er rue Varin. »
Les enfants de la rue Varin nous semblaient des 6tres k part,
un pen eflfrayants, mais dont le mystfere nous attiraitn^anmoins.
Nous ne nous doutions pas k quel point ils ^taient malheureux.
La maison de la Pompe est une grandee construction nor-
mande, aux poutres apparentes et aux larges toits d^passant
la facade. L'immense cour int^rieure, avec ses escaliers en
saillie et ses galeries couvertes, agardd fort grand air, malgrd
son d6labrement. Les archives communales indiquent qu'elle a
4t6 construite autrefois par un riche armateur, mais il y a de
cela plusieurs si^cles ; et mdme dans ma petite enfance, je ne
I'ai connue que ruincSe.
La population est aujourd'hui ce qu'elle ^tait autrefois, ce
qu'elle est sans doute depuis bien longtemps : une nu^e d'en-
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702 REVUE PHILANTHROPIQUE.
fants sans p^re, ainsi que Tavait dit Grand'dents, soit que le
pfere ait disparu, enlev6 par la tempdte, soit qu'on ne Tait
jamais connu; quelques m^res collectives, tant6t plus, tantdt
moins, au gr6 de la phtisie et des accouchements, et qui, dans
toute cette marmaille, seraient incapables de reconnaitre ce
qui leur appartient en propre.
Quant aux moyens d'existence, les voici :
La plupart de ces femmes vont pftcher des monies au Ratier,
un ^cueil en pleine mer que la mar^e basse laisse k ddcouvert.
II faut compter sept heures, avec le voyage alter et retour, quel-
quefois plus si le vent est contraire. A deux stances par jour,
cela fait quatorze heures survingt-quatre, de cette besogne trfes
dure, tr^s p6rilleuse et qui tient les femmes mouill^es jusqu'aux
chevilles. Le repos de dix heures doit done 6tre pris en deux
fois et n'importe i quel moment de jour ou de nuit, puisque
Tembarquement se r^gle sur le flot. Avec quel temps, les mal-
heureuses s'occuperaient-elles de la nich^e?
Le gain varie entre deux et six francs, mais attendez. Le
patron des mouli^res est en m6me temps cabaretier ; les
comptes se font sur le zinc, et ils sont g^n^ralemeat longs k
faire. Comme les pftcheuses out froid, et qu'elles sont lasses,
elles prennent patience en absorbant des consommations, ce
qui diminue d'autant leur salaire. II en est de m6me au depart.
Encore abruties de fatigue, et parfois de boisson, elles prennent
des petits verres pour se donner du coBur. C'est ainsi que le
gain va s'6miettant au b^n^fice du patron, et qu'il est r^duit k
presque rien en arrivant au logis. Que le ch6mage survienne et
c'est la mis^re noire.
L'hiver, la p6che est remplac6e par le plumage dela volaille.
Entre les marches et le depart des paquebots anglais, des cen-
taines d'oies, de dindons, etc., doivent 6tre tu6s, plumbs, par^s.
Les stances durent entre trente-six et quarante-huit heures,
pendant lesquelles on ne soutient les ouvriferes qu'i Taide de
cafd et d'alcool. De temps en temps, Tune d'elles tombe dans
un coin, assomm^e de lassitude, et s'endort pour deux heures
au milieu de la puanteur de ce massacre.
Par la vie infernale que mfenent les mferes, on peut juger
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GRAND'DENTS ET C*. 703
de celle des enfants. Rentr6es k la maison dans Fabrutis^ement
que Ton devine, elles donnent aux marmots les quelques sous
qui reslent disponibles, et dame 1 qu'ils se d^brouillent. Une
fois, i'ai vu la totality des fonds employee k Tachat de sucre
candi; une autrefois, c'^taitdu raisin sec.
Avec un pareil regime, inutile de dire que la mortality est
effrayante dans cette colonie oil la scrofuJe, la tuberculose, le
rachitisme r^gnent en maitres; les petits cercueils d6filent
sans que personne songe it s'apitoyer. Mais quand le chol6ra
ou la variole entrent en danse, on commence k s'6mouvoir,
parce que chacun se sent menace, Et il faut entendre les mal^-
. dictions dont on couvre les coupables, des gens qui ne peuvent
mourir sans mettre les autres en danger !
C'est une bande de ces petits mis^reux qui, cet 616, cau-
sait la colore de mes voisins ; c'est pour eux que Ton excitait
les chiens, pour eux que Ton chargeait les fusils de gros
sel. Ce sont ces tristes mioches que Ton s'dtonnait de ne pas
voir le module de toutes les vertus, eux qui grandissent sans
direction ni sans conseils, sans un mot affectueux^ sans un
baiser.
Commeunjour je m'6tonnais que, dans cette ville de dix
mille habitants, oil les mferes, si souvent, doivent travailler
dehors, il n'y eAt pas quelques crfeches, des ^coles maternelles
plus nombreuses, une surveillance et une protection effectives,
en un mot, je fus interrompue avec colore. Pour que cette
belle charity se r^gle par une augmentation dlmpdts, merci
bien. Avant la nouvelie loi, on n'^tait pas encombrS de ces
chenapans; k huit ans, on les embarquait comme mousses, ou
bien on leur faisait tourner la roue aux corderies, c'6tait bien
mieux.
On n'est pas plus l&chement ^gol'ste.
Les enfants qui, si petits, toumaient la roue aux corderies,
pendant des heures et des heures, jusqu'Ji ce que leurs os en
craquent, devenaient presque tons bossus. Leur mine hftve,.
leur attitude pleine d'accablement disaient assez haut combieu
leur tUche 6tait dure. Le minimum de treize ans^ impost par la
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:V.
104 REVUE PHILANTHROPIQUE.
loi, est k peine suffisant, et ce serait criminel de vouloir le
ramener k huit ans comme autrefois.
Pour les jeunes mousses, je laisse la parole h un vieux
marin dont les souvenirs n'ont point besoin de commentaires :
u Ma ch^re dame, h huit ans, on m'a embarqud dans un bateau
qui faisait la saison de Torbay , pour la raie boucl6e ; c'^tait
trois ou quatre mois sans descendre & terre. Pendant ce temps,
je ne me nettoyais jamais, et personne ne me disait de le faire
ni comment le faire. La vermine m'incommodait teilement que
j'arrivais i ne plus pouvoir ni dormir ni manger. Quand je
lombais sur le pont terrass^ par la fatigue ou par la fi^vre, les
matelots m' amarraient, fuis me jetaient des seaux d'eau en
eriant: « Un paquetde mer! sauve qui pent! » Encore mal
6veill^, je cherchais k me relever, k la grande joie des autres,
qui riaient de ma frayeur et de mon impuissance. Et je restais
mouill^, jusqu'^ ce^que le grand air eM s6ch^ mes habits.
L'hiver, j'avais les mains gerc^es jusqu'aux os, et des enge-
lures qui saignaient au moindre mouvement. La manceuvre
6tait rude, mais il fallait la faire quand m6me. Oh ! le pain dur
que j'ai mang6 sans rien avec !... les coups de garcette que j ai
rcQus, et que je n'avais pas m^rit^s!... mais plus encore, les
moqueries, les mauvaises paroles que j'ai entendues : tout cela,
jeFai gard^ sur le coBur, et tenez, c'estce qui m'a emp^ch6 de
me marier. Une supposition que j'aie eu des enfants et que je sois
venu k leur manquer, ils auraient done endurS des horreurs
semblables; ah!. ma foi non I Ma ch5re dame, c*est & seize
ans seulement, quand votre oncle m'a pris comme matelot
l^ger, que j'ai eu un pen meilleur temps. Ce n'est pas qu'il
6tait tendre, mais il ^tait juste; et jamais un mousse na 6t&
battu k son bord. »
Non, Toncle Paul n'6tait pas tendre ; pourtant je me rap-
pelle comme ses joues ^aient blanches et comme sa voix trem-
blait, en nous racontant la mort d'un petit mousse.
« Pauvres mioches ! disait-il, cela pfese comme une plume, et
c'est tout de suite enlev^ ! Celui-1& avait pu se cramponner it
une 6pave, ce qui prolongeait son agonie, oh bien inutilement !
car nous nepouvions aller&sonsecours. Pendant des minutes.««
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GRAND'DENTS ET 0\ 705
des si^cles^ on a entendu crier sa voix claire que le vent ame-
nait vers nous : « Cap'taine I... capHaine !... sauvez-moi !... »
Et c'est vers de pareilles horreurs que certains osent parler
de revenir. Prot^ger, assister, moraliser des enfants, cela
donne trop de peine, mieux vaut les laisser mourir.
L6gislateurs qui 6dictez des lois protectrices de Tenfance,
philanthropes qui remettez dans le droit chemin ceux qui
viennent it trSbucher, bonnes 4mes qui fondez des creches, des
asiles, des nids chauds et douillets pour les oisillons sans
plumes, vous 6tes dans Terreur... Pour que de bons bourgeois
mangent tran^quillement leurs fruits bien mArs, il faut que de
pauvres marmots sans p^re descendent dans la mine comme
les petits Italiens des soufriferes, fr^quentent Tusine meur-
trifere et corruptrice, ou soient jet6s en pftture k la mer
furieuse.
JEANNE LEROY.
REVUE PHILANTHROPIQUE. ~ II.
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DE L'ENTENTE A ETABUR
ENTRE
LES BUREAUX DE BIENFAISANCE
ET
LES (EUVRES D'ASSISTANCE PAR LE TRAVAE
NOTE COMMUNIQU^E PAR M. LE D' P. BODLOUMI^, SBCRlfiTAIRS G^N^RAL
DU COUlTt CENTRAL DBS (EUVRES DU TRAVAIL (1)
D'aprfes les r^ponses que MM. les Pr&idents ou Directeurs
d'cBuvres d*assistance par le travail ont bien voulu faire k la
lettre que nous leur avons adress^e le 15 novembre dernier,
pour savoir si, coDform^ment aux circulaires minist^rielles des
8 novembre 1894 et 19 avril 1895 (M. Ch. Dupuy, ministre de
rint6rieur), et k Tarticle 28 du d^cret du 18 novembre 1895,
il est intervenu une entente entre les bureaux de bienfaisance
et ToDUvre d'assistance qu'ils president ou qu'ils dirigent
« a I'effet de sudstituer autant que possible les secours en travail
(1) Le Comity central des OEuvres du travail, place Dauphine, 14, li Paris, est
coastitu6 dans le but :
1" De vulgariser rid6e de V assistance par le tt^vailf d*en g^n^raliser les appli-
cations et d'en determiner les moyens pratiques ;
2«» De favoriser le d6veloppement des oeuvres de travail qui fonctionnent avec
succ^s ;
30 De favoriser la creation, dans divers quartiers de Paris qui en sont d^-
pourvus et dans les d^partementSf de nouveaux 6tablissements de travail en
s'inspirant de ceux qui ont d^jft. fait leurs preuves ;
En laissant h chacune de ces oeuvres son nom et sa complete autonomie.
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LES BUREAUX DE BIENFAISANCE. 707-
awar secours en argent », nous voyons que, sauf 4 Nancy et
dans trois arrondissements de Paris, nuUe entente dans ce but
n'est intervenue, et que dans un assez grand nombre de villes
les circulaires et le d^cret n'ont pas &i6 port^s h, la connaissance
des inl^ress^s.
Gonsid^rant la realisation de cette entente comme trfes
desirable, le Comit6 central des OBUvres d'assistance par le tra-
vail a dfes lors pens6 qu'il ^tait bon de rappeler les termes de
ces divers documents administratifs et d'engager, dans Tint^rfit
de tons, et particuliferement des vrais pauvres et des v^ritables
ouvriers sans travail, les bureaux de bienfaisance et les oeuvies
d'assistance par le travail i r^aliser Tappiication des disposi-
tions sp6ciales qu'ils contiennent.
Sachant de plus quelles sont les difficult^s soulev^es dans
certains cas contre cette application, en raison, d'une part, des
statuts et rfeglements sp6ciaux de chaque oeuvre, et d'autre part
des lois, r^glements et usages qui r^gissent les bureaux de
bienfaisance, il a pens6 qu'il ^talt bon d^ndiquer les conditions
diverses dans lesquelles cette entente a ^t^ d'ores et d^jit
6tablie.
Le but de cette note est, en rappelant ces documents et en
montrant ce qui a 6t^ fait, de favoriser et de faciliter cette en-
tente parlout oil elle n'existe pas encore.
Pour convaincre MM. les administrateurs des bureaux de
bienfaisance de Tutilitd qu'il y aurait k entrer dans la voie
tracde par les circulaires et le decret prdcit^s, il suffit de quelques
exemples : Dans le VI® arrondissement de Paris, sur 29 assist^s
envoyds par le bureau de bienfaisance, 13 seulement ont con-
senti k travailler pendant les 10 jours pr^vus, et sur ces 13,
4 hommes et 1 femme ont pu retrouver un travail r6gulicr. Dans
le XVI* arrondissement, sur 350 n^cessiteux capables de tra-
vailler, envoyds k Tassistance par le travail par le bureau de
bienfaisance au cours de Fannie 6coulde, 160 ne se sont m£me
pas pr^sentds k Tatelier; ils ont pu ainsi 6tre, sans scrupule,
ray^s de la liste des assist^s, et les vrais pauvres ont dfes lors
profite de ce qui aurait 6i6 sans cette 6preuve attribu6 i tort h
ces nombreux exploiteurs de la charity publiquc.
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M ' REVUE PHILANTHROPIQUE.
DOCUMENTS
Circulaire du Ministre de l*InUrieur en date du 8 novembre 189i adre$$ee
aux prefets au sujet de l*assistance par le travail.
Monsieur le Pb£fet,
Depuis quelques ann^es on s'est efTorc^ dans plusieurs villes de France
d*organiser des Soci^t^s d'assistance par le travail; plusieurs de ces essais
ont 6i^ couronn^s de succ&s, sans parier des OBuvres qui fonclionnent d^j^
dans quelques arrondissements de Paris, des philanthropes se sont
^oup^s pour cr^er k Marseille, k Lyon, a Rouen, k Nlmes, elc, des insti-
tutions d'assistance par le travail. Nombre d*associations anglaises, am6-
ricaines, suisses, allemandes, italiennes appliquent le m^me principe aGn
de prot^ger la charit6 contre ses propres ahus et d'^viter que les auni6nes
soienC donn^es sans discernement et de faire du travail la base du
secours.
Malheureusement ces id^es sont encore peu rdpandues, les soci^t^s
ainsi fondles ne sont pas assez connues et leurs moyens d'action sont trop
restreints.
Je crois done utile de faire ressortir le m^canisme special et le carac-
t^re particulier de ces associations. Leur but essenliel est d'^liminer les
faux indigents en attachant au secours Tobligation du travail, de r6duire
la mendicity professionnelle et de fournir, d'autre part, k Touvrier inoccup^
la possibility d*obtcnir quelques ressonrces momentau^es, qui, si mininies
soient-elles, Temp^chent de mouiir de faini et lui 4pargnent i'humiliation
d^primante de la mendicity. Pour atteindre ce resultat, le moyen le plus
simple et le plus moral qu'elles puissent employer est d'organiser le travail
avec salaire daitentej avec ou sans hospitalisation,
Lorsqu'il s*agit de combattre la mis^re, il faut tout d'abord chercher k
tirer de leur delresse les pauvres de bonne volont^; il faut aussi emp^cher
les malheureux de descendre dans la rue pour tendre la main; les ceuvres
d'assistance par le travail y arrivent en procurant autant que possible de
i'occupation k chacun dans sa sp^ciulit^ professionnelle, k defaut, en s'in-
t^ressant au malheureux et en s*occupant de le placer. Les efforts tenths
par ces associations pour restreiudre ia mendicite et fournir un travail
provisoire a Tindigent, pour lui faeiliter la recherche d'un travail normal,
le sauver de Tinanition en attendant qu'il ait trouv6 une occupation rdgu-
li^re et lui faire gagner honorablement un salaire, m^ritent Tattention des
pouvoirs publics et leurs encouragements.
Les bureaux de bienfaisance ou d* assistance ne sortent pas de leurs attribu-
tions en pratiquant ce mode rationnel d* assistance ; plusieurs ont organist,
priocipalemeut Thiver, des ateliers dits de charity. Mais Ik oh, pour une
raison quelconque, T^tablissement public n'entreprendrait pas une organi-
sation de cette nature, vous pourriez donner votre concours aux particu-
tiers qui, dans un but exclusif de bienfaisance, seraient disposes k s'asso-
cier pour instituer I'assistance par le travail.
A tilre d'indications je vous transmets ci-joint copie du decret du
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LES BUREAUX DE BIENFAISANCE. 709
24 aoAl dernier rendu sur Tavis du Conseil d'Etat, qui ^-econnalt comme
^tablissement d'utilit^ publique i*Union d'assistance du XYI^ arrondisse-
ment de Paris et des statuts que ce d^cret a approuv^s.
Recevez, Monsieur le Pr^fet, i'assurance de ma consideration la plus
disUngu^e.
Ch. Dupuy,
President du Conseil,
Miniatre de riot^rieor et des Cultes.
CirctUaire 4u Ministre de' VlntMeur en date du y 7 avril 1895 accompagnant
I'envoi d'une note pour la repression du vagabofidage et de la mendicite
adressie aux conseils g&n&rauxpar la Society g^H'ole des prisons et la So-
ciety Internationale pour I'Uude des questions d'assistance.
Monsieur le Pr^fet,
le re^ois la lettre suivante de M. F^lix Yoisin, president de la Soci^te
g^u^rale des prisons.
Mon administration, qui dan? una circulaire du 8 novembre dertiier a
manifesto sa Sympalhie pour les oeuvres d'assistance par le travail et qui a
invite les autorit^s pr6fectorales k encourager ces oeuvres, k en const! tuer
de nouvelles, a en developper faction oil elles existent d^jdy ne pent voir
qu'avec bienveillance Tinitiative prise par la Society g6n6rale des prisons
pour retude des questions d^assistance aupr^s des assemblies d^partemen-
tales, afin de les engager dans la m^me voie k relTet de venlr en aide sous
cette forme intelligente aux <( valides de bonne volonte ».
Ch. Dupuy.
D^cret du 15 novembre 4895.
Art. 28. — Les bureaux de Bienfaisanco sont autoris^s k s'entendre
avec les Soci^t^s d'assistance par le travail d Veffet de substiluer, autant que
possible, les secours en travail aux secours en argent.
On pouvait esp^rer que ces documents, t^moignant des
sympathies et des d^sirs du ministre de I'lnt^rieur, provoque-
raient de la part des bureaux de bienfaisance des d-marches
ayant pour butd*6tudier les conditions dans lesquelles une en-
tente pourrait s'6lablir entre eux et les soci6t6s d'assistance
par le travail. D'une mani^re g6n6rale, on pent dire qu'il n'en
a rien 6i6 et que dans les localit^s ou arrondissements dans
lesquels elle est intervenue, c'est k Tinitiative des oeuvres
d'assistance par le travail, etnon des bureaux de bienfaisance^
qu'elle est due. Dans quelques localit^s ou arrondissements de
Paris, les bureaux de bienfaisance ont refuse d'6tablir des rela-
tions directes et r^guliferes avec elles pour des raisons qu'il est
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710 REVUE PHILANTHROPIQUE.
bon d'dtudier. Les objections qui ont 616 faites sont de deux
ordres, les premiferes sont des objections de principe, les se-
condes des objections de pratique.
En principe y les bureaux de bienfaisance sont, d'aprfes laloi
du 7 brumaire an V, exclusivement cr66s pour fournir aux in-
digents et n^cessiteux des secours k domicile et ne s'adressant
qu'ii des individus incapables de Iravailler.
En pratique, il semble y avoir des difficult^s sinenses te-
nant aux regies comptables qui dans les bureaux de bienfai-
sance exigent un acquit donn^ par la partie prenante pour tout
secours octroy^.
A Tobligation de principe, les circulaires et le d^cret rdpon-
dent suffisamment. lis autorisent et encouragent les bureaux
de bienfaisance h pratiquer Tassistance par le travail, par Tin-
termddiaire des oeuvres, reconnaissant ainsi un fait acquis, h
savoir que parmi les assistSs des bureaux de bienfaisance il en
est un assez grand nombre qui sont en 6tat de travailler et se-
raient plus utilement secourus par le travail que par Taumdne
administrative on autre.
Pour ce qui conceme la pratique, Texamen des divers
modes d'assistance par le travail pratiques par les bureaux de
bienfaisance montre que, malgr^ les differences existant entre
les (Buvres, les rfegles comptables des bureaux de bienfaisance
sont toujours applicables, sinon dans leurs formes habitueiles,
au moins dans leur esprit. A ce point de vue, les oeuvres d'as-
sistance par le travail doivent 6tre divis6es en : a) oeuvres ne
gardant normalement leurs assist^s que pendant la dur^e de
validity de leurs bons, dont la valeur est pay^e ou rembours6e
i" ToBuvre par Fadh^rent qui les a dilivr^s ; b) oeuvres dans
lesquelles Tadh^rent paie ou rembourse le bon qui a servi k
Tassiste pour 6tre admis au travail et lui assure la premiere
journ^e d'assistance et dans lesquelles la remuneration du tra-
vail est faite soit en argent, soit en nature (logement, nourri-
ture, vfetement), soit partie en argent et partie en nature.
Dans le premier cas, le bureau de bienfaisance achate des
bons k Toeuvre d'assistance par le travail. II appose son timbre
eten deii\Te, contre rcQu, kl'assiste un nombre correspondant
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LES BUREAUX DE BIENFAISANCE. 711
comme valeur au secours en argent qui lui aurait 616 octroy^
(10 francs en g^n^ral). L'assist^ muni de ces bons, sur iesquels
sont inscrits ses nom, pr^noms et adresse, se pr6sente h Tate-
lier d'assistanoe et y trayaiile jusqu'ii ce qu'il les ait 6puis6s, k
moins que, chose rare, il n'ait trouv6 h se placer avant.
Quand chaque bon a 6i6 « travailli », Tassist^ signe, sur le
bon lui-m6me, le rcQU de la somme qu'il repr^sente et qu'il
touche en ^change de son travail. L'ensemble des bons tra-
vaillis par chacun des assist^s est remis ensuite au bureau de
bienfaisance comme pifece comptable. G'est \k ce qui se pra-
tique au bureau de bienfaisance du XVI® arrondissement de
Paris.
Au XVII® arrondissement, les choses se passent autrement.
Le bureau de bienfaisance remet au directeur de I'atelier de
travail un registre des secours en argent ; Tassistd arrive avec
des bons d^livr^s comme ci-dessus par le bureau de bienfai-
sance et chaque fois qu'un bon a 6i6 « travailld », Tassist^ rcQoit
la somme ^quivalente k sa valeur et signe un r^c^piss^ dans
une case du cahier dans laquelle sont inscrits son nom et son
adresse.
II est bon d'ajouter que,dans ces deux 6tablissements d'as-
sistance par le travail, roeuvre octroie & chaque assists du bu-
reau de bienfaisance ayant bien travaill^ un certain nombre de
bons suppl^mentaires pour lui continuer ['assistance au cours
de laquelle elle Taide dans la recherche d'un travail permanent,
et r6gulier. (11 en est de m6me k Marseille pour les assist6s
envoy68 Ji Tassistance parle travail parle patronage des Iib6r6s,
et il en serait de m6me pour les assistSs du bureau de bienfai-
sance si celui-ci consentait k lui en adresser.)
A Nancy, le bureau de bienfaisance donne une subvention
annuelle de 1 500 francs k Tceuvre d'assistance par le travail qui
lui remet en ^change des bons de travail qu'il distribue k ses
assist^s. 250 indigents ou n^cessiteux ont ainsi 6t6 adress^s k
ToBuvre au cours de Tannic 1897.
Parmi les oeuvres dans lesquelles Tadh^rent paie ou rem-
bourse le bon d'entrde seulement, Toeuvre du marchd Saint-Ger-
main, k Paris, est la seule avec laquelle un bureau de bienfai-
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712 REVUE PHILANTKROPIQUE.
sance (celui du VI® arrondisseinent) ait 6tabli une entente.
Voici la teneur de la convention intervenue :
Entre les soussign^s :
10 M. le Maire du VI® arrondissement, President da bureau de bienfai-
sance du m6me arrondissement, d'unepart;
H^ M. le President de TUnion d'assistance par le travail du march^
Saint-Germain (VI« arrondissement), d'aulre part; il a ^t^ convenu et
arr6t6 ce qui suit :
Art. 1«'. — L'union d'assistahce par le travail du march6 Saint-Ger-
main s'engage k recevoir dans ses ateliers, dans les m^mes conditions que
les autres assist^s, les n^ces^iteux valides des deux sexes qui lui seront
adress^s par le bureau de bienfaisance du VI* arrondissement sur la pre-
sentation d'un bon de travail immatricule BB-VI, dat^ et sign6 du maire,
president dudit bureau de bienfaisance.
. Art. 2. — Le bureau de bienfaisance s'engage k payer, a TUnion d'as-
sistance par le travail du march6 Saint-Germain, la somme de 1 franc par
journ6e d'assist^, sans que la somme h payer pour chaque assists puisse
en aucun cas d6passer dix francs pour dix jours cons^cutifs, Tunion d'as-
sistance restant toujours libre de conserver ou renvoyer Tassist^ (1).
Art. 3. — A la (in de chaque mois, TUnion d'assistance pr^sentera au
tr^sorier du bureau de bienfaisance un bordereau des journ^es d'assistance
dues par le bureau de bienfaisance avec les bons de travail justiflcatifs k
Tappui.
Ces bons porteront Tindication de la date de TentrSe de Tassist^ dans
les ateliers du march6 Saint-Germain, la dur^e de son s^jour, des rensei-
gnements sur son compte et les conditions de sa sortie. lis sont 6marg6s
chaque jour par Tassist^.
Art. 4. — Tout bon de travail pr6sent6 plus de quarante-huit heures
apr^s sa d^livrance k Tassist^ sera consider^ comme p^rim^.
Art. 5. — M. Biny, directeur de l'union d'assistance, aura quality pour
toucher k la caisse du bureau de bienfaisance les fonds dus pour Tex^cn-
tion des prdsentes et en donner quittance.
Art. 6. — La pr^sente convention est faite pour une ann^e et conti-
nuera de plein droit pour la mdme dur^e k d^faut de d^nonciation par
Tune des deux parties un mois avant I'ezpiration de I'ann^e en cours.
Fait double k Paris le premier mars mil huit cent quatre-vingt-seize.
Lu et approuv^ : Lu et approuv^ :
Le President de V Union . Le President du bureau de
d'assistance par le travail, bienfaisance, maire du VI* arrondissement,
Henry Defert. F. Herbet.
(1) En fait, runion d'assistance par le travail du march^ Saint-Germain garde
parfois, pendant longtemps aprds rexpiration de ce d61ai, les assist^s dignes
dlnt^rdt et pouvant dtre places.
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LES BUREAUX DE BIENFAISANCE. 713
On a vu plus haut lesr^sultats qu'a donnas Tapplication de
ce traits. lis ne sont pas considerables, encore qu'il soil digne
de remarque que sur 6 individus ayant accepts le travail, 5
aient pu 6tre pourvus d un travail ou d'un emploi r^gulier
apr^s un passage de 10 i 15 jours dans les ateliers de TUnion.
Mais il convient de faire observer qu'au ddbut des rapports a
dtablir entre les bureaux de bienfaisance et les oeuvres d'assis-
lance par le travail, les bons de travail ne sont peut-6tre pas
toujours distribu^s avec un discernement sufiisant aux n^cessi-
teux vraiment en 6tat de les utiliser. Peut-6tre aussi la clien-
tele habituelle des bureaux de bienfaisance ne se pr6te-t-elle
pas autant qu'on pourrait le croire i Fexp^rience qu'il y a lieu
de tenter. 11 s'agit, en g6n6ral, sinon d'invalides proprement
dits, du moins d'individus depAmis physiquement et morale-
ment 2i un point tel qulls n*ont plus que la force de solliciter, de
gens qui retrouveraient peut-6tre quelque ^nergie pour tra-
vailier, si le travail leur 6tait impost, mais qui sont incapables
de s'y remettre spontan^ment (si tant est qu'ils s'y soient ja-
mais mis) sur la simple invitation qui leur est faite d'aller por-
ter leurs bras k Tatelier de travail au lieu de tendre la main au
bureau de bienfaisance.
Quoiqu'il en soit, le Comit6 central, trfes d6sireux de voir se
gdn^rjiliser Tentente entre les bureaux de bienfaisance et les
ceuvres d assistance par le travail privue et pr6conis6e par les
circulaires et d^cret ci-dessus rapport^s, espfere, gr&ce h. Ten-
semble des documents et renseignements qu'il a r^unis dans
cette note, faciliter son adoption et sa mise en pratique dans
loutes les villes et tons les arrondissements de Paris ou fonc-
tionnent des oeuvres d'assistance par le travail. II sera tres re-
connaissant de tons les renseignements compl^mentaires qui
pourront lui 6tre adress^s ft ce sujet,et il se tient de son c6te ft
Tenti^re disposition des oeuvres pour leur fournir toutes les in-
dications qui pourraient leur fitre utiles pour cet objet, ou tout
autre concemant I'assistance par le travail.
D'P. BOULOUMlfe,
Secretaire g^n^ral du Comity central des (Kuvres
d' assistance par le travail.
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UNE CLAUSE LITIGIEUSE
Les tribunaux et le Gonseil d'etat sont en disaccord sur la
validity de la clause par laquelle un testateur^ en faisant un
legs aux pauvres, present que sa lib^ralit^ sera distribute par
un tiers d^sign^.
Le plus souvent, ce tiers est un cur^, un pasteur, un rabbin;
plus rarement c'est une personne priv6e.
Pour Tautorit^ judiciaire, une telle clause est valable. Du
moment que le legs charitable est accepts et recueilii par le
bureau de bienfaisance^ d!]kment autoris^, repr^sentant l^gal
des pauvres, le fait de recourir k un tiers pour la distrilyition
n'est qu'un point accessoire; la loi n'interdit pas aux testateurs
de r^gler le mode d'ex6cution de leurs legs; la question de
sp^cialit6 des ^tablissements publics n'est pas en jeu. Au sur-
plus, le bureau de bienfaisance, en recourant au tiers d^signd
pour la distribution, ne re nonce pas k ses attributions; il con-
serve un droit de contrdle et pent exiger du distributeur la
liste des personnes secourues; il a un droit de recours contre ce
dernier s'il constate, aprfes enquMe, que les fonds ont 6t6 ver-
sus k des personnes non qualifi^es pour les recevoir.
Au contraire, le Gonseil d'fitat estime que la clause ayant
pour objet d'enlever le droit de distribution au bureau de bien-
faisance repr^sentant des pauvres institu^s l^gataires par le
testateur, est en contradiction avec le principe de la sp6cialit^
des ^tablissements publics, surtout lorsque le distributeur d^si-
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UNE CLAUSE LITIGIEUSE. 715
gai est le ministre d'un culte, c*est-4-dire est lui-m6me le repr6-
sentant ou Tagent d'un 6tablissement public religieux n'ayant
pas dans scs attributions Tadministration des secours publics.
En consequence, lorsque le Conseil d*^tat est saisi de Taccep-
tation d'un legs fait aux pauvres et contenant la clause pr^cit^e,
il prepare un d^cret d'autorisation ^nouQant que Tacceptation
de la libdralitd est autoris^e aux clauses et conditions impos^es,
&n tant qu'elles ne sont pas contraires aux his. Cette reserve a
pour but d'indiquer qu'il consid^re comme contraire aux lois la
clause relative h la distribution.
L'dtablissement public ainsi autoris^ demande aux b^ritiers,
par la voie judiciaire, la d^livrance du legs; et ces derniers
concluent it ce qu'elle ne soit accord^e que si r^tablissement
autoris^ s'engage Ji ne pas tenir compte de la reserve contenue
au d^cret. Les Iribunaux donnent le plus souvent gain de cause
aux b<^ritiers. Nous citerons notamment dans ce sens Tarr^t de
la Cour de Paris du 23 Janvier 1891, intervenu entre les
b^ritiers Poiret et Tadministration de TAssistance publique.
Nous avons dit que Tautorit^ judiciaire consid^rait le plus
souvent comme valable la clause de distribution par un tiers.
Cependanty contrairement it de nombreux arrets et jugements,
deux arrfits d'appel, Fun de Toulouse, du 4 novembre 1890,
Tautre d'Agen du 16 novembre 1891, admettent la solution
contraire.
D'autre part, un jugement du tribunal de Pau du 4 no-
vembre 1897, rendu sur la plaidoirie de M. Beurdeley, avocat
ft la cour de Paris, maire du YIII<' arrondissement, a imaging
un nouveau systdme qui chercbe k concilier ing^nieusement le
respect Ad aux intentions des testateurs avec le principe de la
speciality des dtablissements publics. II s'agissaitd'un legs fait
aux pauvres de la commune de Rebenacq, ft distribuer par un
membre de la famille du testateur. Le jugement present que les
fonds seront distribu^s aux pauvres par le distributeur design^,
maisque la distribution aura lieu ft la mairie,sur une liste four-
nie par le bureau de bienfaisance. Pr^voyant ensuite le cas oil ce
mode de distribution serait impossible ft r^aliser, il decide que
la condition serait r^putde non ^crite etque le legs devrait etre
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IIG REVUE PHILANTHROPIQUE.
consid^r^ comme pur et simple. Le jugement ainsi intervcnu
6tait interpr^tatif d'une decision antdrieure du mdme tribunal,
qui avail d^cid^, conform^ment d'ailleurs ft Ja jurisprudence,
que la disposition testamentaire litigieuse constituait, non une
simple charge d'h6r6dit^, mais un legs assiijetti i la rfegle de
rautorisation.
II. DEROUIN.
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LES THEORIES MALTHUSIENNES
ET
LE MARIAGE DES INDIGENTS
Le Idgislateur de 1850 et celui de 1896, qui se proposaient
de faciliter le mariage des indigents, ne furent point disciples de
Malthus. Nous n'cntendons point ici, bien ^videmment, le Mal-
thus de la Idgende, le propagateur suppose de vices contre
nature, le penseur d'une immorality r6voltante. L'bistoire des
^conomistes comme celle des peuples s'^crit souvent d'une
strange faQon, et Ton prfite avec complaisance aux penseurs
des theories qu'ils n'ont cess6 de r^pudier avec une ^nergie in-
dign^e. Malthus eut Texistence la plus chaste, la plus verlueuse
et la plus honorable qui se puisse concevoir, et sa doctrine ne
fut point la proclamation audacieuse de la d6bauche, elle en
demeure la condamnation impitoyable. Ge fut un philanthrope,
mais un philanthrope qui s'^gara singuli^rement. L'bomme,
pensait-il, ne doit fonder un foyer, constituer une famille nou-
velle que le jour ou de suffisantes ressources, une situation
assurde et lucrative lui permettent d^envisager Tavenir avec
une absolue confiancc. Geux-lji done, k qui la vie fut incl^-
mente, que la fortune a m^pris^s, et dont Texistence de chaque
jour n'est qu'une lutte sans cesse renouvel^e oil toujours ils
sont vaincus, ceux-l& ne peuvent songer au mariage : les indi-
gents, convolcr en justes noces, quel danger social et quelle
folie! Un sort lamentable attendrait, en effet, les 6tres qu'ils
appelleraient 4 la vie et combien ces nouveaux venus trouble-
raient les possesseurs actuels des biens terrestres, quels insup-
portables assauts ne livreraient-ils point h T^goisme commode
des heureux de ce monde ! La nature, la bonne nature protec-
trice des forts et des riches, ne le tol6rerait point elle-m6me!
Uindigence est une tare originelle; ilen faut, sans pili^ comme
sans retard, arrfiter la contagion hdrdditaire. ^coutez les paroles
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718 IIEVUE PHILANTHROPIQUE.
de Malthus ; elles aotti suggestives et typiques : « Un homme,
qui est n^ dans un moiiit d^jii poss^d^, s'il ne pent obtenir de
ses parents la subsistance qu'il pent justement leur demander,
et si la soci^t^ n'a pas besoin 4% son travail, n'a aucun droit de
r^clamer la plus petite portion d^ i^mrriture et, en fait, il est de
trop.- Au grand banquet de la nature, il a'y a pas de convert vacant
pour lui. Elle lui commande de s'en iUer, et elle mettra elle-
m^me promptement ses ordres k ex^cutioa^ s'il ne pent recourir
il la compassion de quelquesruns des convives 4u banquet. Si ces
convives se serrent et lui font place, d'autrea intrus se pr^-
sentent immddiatement demandant la m6me fKveur. Le bruit
qu'il existe des aliments pour tons ceux qui arriveat remplit la
salle de nombreux r^clamants. L'ordre et Tharmonie du festin
en sont troubles, Tabondance qui rdgnait auparavant se change
en disette, et le bonheui: des convives est d^truit par le spec-
tacle de la mis^re et de la' gAne qui r^gnent dans toutes les par-
ties de la salle, et par la clameur importune de ceux qui sont
justement furieux de ne pas trouver les aliments sur lesquels
on leur avait appris k compter. Les convives reconnaissent trop
tard Terreur qu'ils ont commise, en contrecarrant les ordres
stricts k regard des intrus donnds par la grande maltresse du
banquet, laquelle, d^sirant que tous ses b6tes fussent abondam-
ment pourvus, et sachant qu'elle ne pouvait pourvoir un
nombre illimit^ de convives, refusait humainement d'admettre
de nouveaux venus, quand la table ^tait d6j4 remplie. » Dans
le syst^me g^n^ral de Malthus, cette exclusion brutale et sans
appel du banquet de la vie de quiconque nalt pauvre, cette
exclusion est parfaitement logique, elle apparait intimement
li^e aux autres points de sa th6orie. En effet, la population a
tendance k se reproduire en progression g6om§trique, alors
que les subsisiances ne croissent qu'en progression arithm^-
tique; certains fl^aux, p^riodiquement renouvel^s, tels que les
maladies et les guerres, se chargent, mais d'une faQon insuf-
fisante, de rdtablir Fdquilibre; pour le fixer ddfinitivement, il
faut le renoncement volontaire de Thomme. C'est done le
souci du bonheur de Thumanit^ actuelle qui inspire Malthus.
Est-il besoin d'insister sur le redoutable dementi que les pro-
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LE MARIAGE DES INDIGENTS. 719
grfes ininterrompus de la depopulation ont inflig(5 k ses predic-
tions pessimistes? En fait, le malthusianisme est faux ;ilne I'est
pas moins en droit. Dans la society, le mieux-6tre depend du
plus-6tre; chaque individu, pour peu que la destin^e ne lui soit
pas trop injustement cruelle, produit au del& de ses besoins et
augmente de ce fait m^me la prosp^ritd g^n^rale. En d^pit des
protestations de Malthus ou de ses disciples, il n'y a done pas
lieu d'entraver les manages modestes, voire m6me miserables.
Si la claire notion du bien gdn^ral, et par suite du bonheur
individuel, n'^tait pas obscurcie dans nos soci^t^s contempo^
raines par le stupide pr^jug^ du luxe et des apparences fas-
tueuses, si la dot ne constituait pas la clef de yoAte de toutes
les unions projet^es, il n'y aurait sur la question qu'un avis
parmi les ^conomistes et les l^gislateurs. Voyez les Am^ricains,
dont le bon sens pratique nous doit sur bien des points servir
d'exemple et d'enseignement : deux jeunes gens se plaisent; ils
ont la force- et les longs espoirs, disons, si Ton veut, les bril-
lantes illusions qui accompagnentpresque toujours le printemps
de la vie; la fortune, Taisance m^me, ils la connaissent h peine
de nom. Qu'importe, ils mettent en commun leurs mis^res et
leur amour, et cette union f^conde donnera souvent naissance
k la prosperity. Et, pour atteindre ce but, il a suffi que la loi
n*entrav4t pas leur mariage, s'y montr&t complaisante, en ne r6-
clamant que des formalit^s rapides, simples et gratuites ; qu'elle
ne craigntt pas, d'un mot, de leur laisser prendre une place, k
eux et ^ leurs enfants, au banquet de la vie. Peut-6tre a-t-il
fallu aussi que la bienfaisance publique et priv6e intervint, pour
subvenir aux frais inseparables du mariage. Que grande est son
erreur! s'ecrierait&la suite de Malthus le sociologue contempo-
rain Herbert Spencer. L'assistance publique, il la supprime
d'un trait de plume; TEtat n'a pour mission que d'assurer aux
citoyens la paix et la justice; il ne saurait alter au delk sans
empieter sur un domaine qui n'est point le sien; il commet
les pires exc5s lorqu'il touche k la repartition des richesses.
Cest \k la doctrine pure de I'ecole d'economie politique, dite
indifferemment etpar uneetrange synonymic liberate ou ortho-
doxe. Quant 4 la charite particulifere, elle n'est pas moins con-
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720 REVUE PHILANTHROPIQUE.
damnable. Les misi^rables, pense-t-il, sont des vaincus dans le
combat de la vie, par suite des non-valeurs; la soci6t^, les r6-
morquant h sa suite, s'embarrasse d'un poids mort; si on leur
vient en aide, si on leur permet de se perp6tuer, ils sont alors
une enlrave pour le present et deviennent un danger pour
Tavenir ; on produit ainsi une selection h rebours, qui contrarie
la selection naturelle; la marche glorieuse de Thumanit^ se
heurte h nn inutile obstacle. Est-il besoin dlnsister sur ce fait
que bien des mis^res sont le r^sultat m6me de Torganisation
sociale et qu'il incombe k la soci6t6, qui est responsable des
Messures, de les panser et de les gu6rir? Mais il y a mieux,
aucun individu n'est descendu k un tel degr6 de d^ch^ance que
son rel^vement soit impossible, et qu'il ne puissc encore remplir
un office social. La loi de solidarity n'est pas seulement une loi
morale; elle est Texpression de Tint^rfit g^n^ral et, k descendre
au fond des choses, d'un ^go'isme sup^rieur, mais d'unv6rilable
^goisme. Et, pour nous en tenir au problfeme particulier du
manage des indigents, la th^se de Th^r^dit^ veut-elle qu*un
miserable donne naissance k un miserable? La liste est longue
et glorieuse des homme de g6nie, auxquels Thumanit^ doit une
part notable de ses progrfeset de son bonheur, qui virent lejour
dans les families les plus humbles et les plus d6nu6es.
Mais c'est une v6rit^ d*exp^rience et une sorle de ,lieu com-
mun que les enfanls de Taristocratie sont souvent ch^tifs et
malingres, tandis que les manages des humbles artisans ^i^vent
des enfants robustes, sachant r^sister aux intemp^ries et au
manque de soins. Et leur mis^re mat^rielle ne leur interdit pas
Tavenir; d'admirables chefs-d'oeuvre n'ont-ils pas ^t^ cnfant^s
dans la douleur ou la g6ne! Si, du droit naturel nous en
venons au droit 6crit, et de la th^orie pure ii son application
pratique, il apparaltra que le l^gislateur frangais voit d'un ceil
favorable les unions entre indigents, qu'il a beaucoup fait pour
en faciliter la realisation, mais qu'il a peut-£tre beaucoup k
faire encore dans cette voie, soutenu par I'initiative indivi-
duelle et les institutions privies, pour se rapprocberde cetid^al
de justice vers lequel il faut marcher sans cesse sans qu'on
puisse esp^rer I'atteindre jamais.
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LP MARIAGE DES INDIGENTS. 721
On ne saurait douter que bien des unions irr^guliferes ^e
-r^soudraient i brfeve ^ch^ance en manages legitimes, qu'une
-foule de concubinats seraient 6vitds, si le modeste travailleur
ne reculait devant le9 pertes de temps et les d^penses/ lourdes
pour le budget des humbles, qui pr^c^dent la comparution de-
vant Tofficier de T^tat civil. En presence des obstacles qui encom-
brent la voie legale, il s'abstient : la Crainte des boards et du
stigmate, injuste d'ailleurs, qui s'attache k eux, ne pfesent pour
rien dans le poids de ses deliberations : Tinfecondiie volontaire
parera k toute difficult^. Et puis, n'aura-t-il pas ainsi les agr^-
ments du ipariage,sapseix assumer les charges et les devoirs ?
Ces inconvenients multiples, ce danger social n'ont point
echappS au Idgisilateur. La loi du 10 d^cembre 1856 decide, en
effet, que les pieces n^cessaires au manage des indigents leur
seront fournies gratuitement ; et, pour qu'ils ne soient point
arrfites par le manque de loisir ou riiiexp6rience, elle charge
du soin de les rdunir Tofflcier de r§tat civil lui-m6me de la
commune oil ils d^clarent vouloir se marier. Une lacune sub-
sistait qu'est venue combler la loi du 20 juin 1896. Le jeune
homme majeur de 25 ans, la fiancee qui avait atteint sa vingt et
uni^me ann^e, pouvaient se heurter au refus de consentement
de leurs parents. Dans ce cas, il fallait recourir k la significa-
tion d'actes respectueux; ceux-li n'etaient point gratuits ; et des
unions etaient parfois aiosi emp^ch^es par Timpossibilite oil se
trouvaient les promis d'acquitter les frais de ces actes. Jusqu'k
30 ans pour les fils^ 25 ans pour les filles, Facte devait se renou-
veler par trois fois, de mois en mois I C'etait Ik une source de
frais et de retards, trop souvent d^courageants; Depuis le
20 juin 1896, Tacte respectueux est gratuit pour les indigents,
etdesormais, et dans tons les cas, il est unique. Mais qui done
est indigent au regard de la loi de 1850? La definition qu'elle
donnede Tindigence sembletropetroiteet vaudrait certes d'etre
eiargie : spnt indigents ceux qui ne figurent pas aux r6les des
contributions directes (et cette condition est toute naturelle),
ou paient moins de dix francs d4mp6ts. Si Ton songe qu'i Paris,
pour unloyerde5i0 francs par exemple (les loyers de500 francs
ne sont pas imposes), on paye 26 fr. 52 de cote mobilifere, on
REVUB PHILARTHROPIQUB. — 11. 46
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722 REVUE PHILANTHROPIQUE.
conQoit qu'on puisse, sans 6tre un Cr6sus, payer plus de 10 francs
d'imp6t, et ne point se trouver en situation de verser les pJu-
sieurs centaincs de francs que content, dans certaines condi-
tions d6favorableSy les pieces n^cessaires. U faudrait done aller
^lus loin et le minimum d'imp6t de 30 francs n'aurait rien
d'exag^rd. Aussi bien,les futurs ^poux, si ^conomeset si simples
de goi!it qu'on les imagine, sont astreints h des frais indis-
pensables. L'initiative priv^e Ta parfois heureusementcompris,
et je sais une soci^t^, fort peu connue et dont Tactivit^ est des
plusrestreintes, qui a pr^cis^ment pour objet d'offrir une aide
p^cuniaire aux fiances dans la g6ne. Que m^riterait-elle d'avoir
des imitatrices, et que cette contrefaQon aurait de pr^cieux effels I
Une autre voie, dans laquelle bien des tentatives ont ^t^ faites
et de nombreux syst^mes proposes, consisterait dans Tamdin-
drissement des charges contributives au profit des manages
indigents : la cote mobilifere, k Paris, ob^it bien ft celtc r^gle
d'6quit6 et de justice, mais qu'est-elle 4 c6t6 des dnormes con-
tributions indirectes et des taxes d'octroi? D'heureux signes
pr^curseurs permettent d*esp6rer que la troisi^me R^publique
n'abdiquera pas ses devoirs h cet ^gard et saura traduire en
actes les d^mocratiques preoccupations de tons.
Qu'il y a loin de ces tendances de notre legislation aux
theories malthusiennes ! Et comme il faut encourager le Idgis-
lateur et Tinitiative priv^e dans ces heureuses dispositions!
Aussi bien, n'est-il pas, h Theure pr^sente, de probldme plus
redoutable que celui de la depopulation. Le moment est mal
choisi de se montrer delicat et de n'appeler h Texistence que
certains priviiegies. Au demeurant, on se marie peu dans la
bourgeoisie, et les rares unions qui s'y contractent ne sont
gu^re fecondes. Puisque Tavenir mdme de la France et ses
destinees futures dependent pour une large partdu mariage des
indigents, c'est faire acte de patriotisme que de le favoriser et
de vouloir ainsi, autant qu'il est en soi, conserver un rang glo-
rieux parmi les nations « h la plus haute personne morale qui
soitau monde ».
ALFRED LAMBERT.
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VARIETES
L'Hospice de Brdvannes.
Get ^tablissement a ^i6 ouvert en 1885, k la suite de racquisition
faite, le 19 septembre 1883, deTancien cMteau de Br^vannes qiii,avec ses
d^pendaDces, occupe one superficie de 23 hectares, 55 ares, 20 centiares,
et dont le bAtiment principal ainsi que le pare ont pu 6tre conserves, k
LimeiUBr^vannes (Seine-et-Oise).
Br^vannes est cit6 comme un des lieux les plus d6lieieux dans TAlm^i*
nach des plaisirs de Paris pour I'ann^e 1815.
L'on ne saitque peudechoses sur le chdteau de Br^vannes, avant 1394;
ii deTait toutefois exister depuis longtemps, car dans certains actes rendu^
au roi par les anciens barons de la Queue-en-Brie, Br^vannes est d^sign^
comme fief mouvant de cette baronnie, par consequent, arri^re-fief du roi.
Cette terre jouissait du droit de moyenne et basse justice. La prison
^tait situ^e sous le colombier k pied droit existant encore aujourd'hui, k
cdt^ du logement actuel du Directeur.
Le ch&teau proprement dit se composait de b^timents irr^guliers ; il
avait k ses angles des toarelles k encorbeilement entour^es de larges fosses
remplis d'eau, proveoant des sources de la montagne. On communiquait
a^ec le chateau par des ponts-levis.
De 1394 &1551, le chdteau parait 6tre rest^ la propri^t^ de la famille
des Corbie.
A cette 6poque, il passe de la maison de Corbie k la famille Duval, le
premier propri^taire de ce nom fut Francois Duval, grand pr<5vdt et che-
valier, conseiller du roi en ses conseils d'£tat.
En 1675, le chdteau appartienl k Pierre Fremont, secretaire de M">« la
dnchesse d'Orl^ans et k son fr^re bourgeois de Paris.
A cette 6poque, un h6te illustre, M"" de S6vign6, vint plusleurs fois k
Br^vannes. On a d'elle une lettre dat^e du 22 juillet 1676 et^crite de Br^-
vannes k M">« de Grignan ; on y remarque le passage suivant : « Vous ai-je
mand^ que je fusse diner Tautre jour k Sucy... Je fus ravie de revoir cette
maison oh j'ai pass6 ma belle jeunesse; je n'avais pas de rhumatismes en
ce temps-Id!.. »
Dans une autre lettre dat^e dull novembre 1688, pour marquer combien
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724 REVUE PHILANTHROPIQUE.
elle se plait h, Br^vannes, elle dit : « Pais ce que tu youdras, c*est la devise
d'ici. »
Les fr^res Fremont ^tant protestants durent quitter la France apr^s la
revocation de T^dit de Nantes; leurs biens furent saisis et an bail fait en
cour du Parlement an profit de Charles Bernard, bourgeois de Paris.
En 1695, Br^vannes fut adjugd k Nicolas Dubuisson, conseiller d'Etat,
intendant des finances, lequel a sa mort le l^gua k Augustin Lepileur,
qui eut poursuccesseur son arri&re-petit-cousin, Marx-Henri Lepileur, pre-
sident k la cbambre des Gomptes. Ge fut ce dernier qui fit reconstruire le
chateau tel qu'il existe actuellement.
Depuis, le chateau a passe successivement au baron de Varange, regent
de laBanque de France; au banquier Glaremont, qui y mourut en 1839;&
Tagent de change Sarchi ; au prince Achille Murat, qui le fit r^parer k la
suite des devastations commisespar les AUemands en 1870;enfln au baron
Hottinguer, qui le vendit k ladministration de TAssistance publique,
moyennant uno somme de 300000 francs.
L'etablissement comprend :
jo Le chdteau proprement dit, dans lequel se trouvent 100 lits devieil*
lards ceiibataires (50 hommes et 50 femmes);
L'inflrmerie ;
Le cabinet du directeur;
L'n logement de surveillante, deux logements de suppleante, les dor-
toirs des fllies, les caloriferes, la cuisine, deux salles de bains, le r^fectoire,
la pharmacie, la cave, la boucherie.
2» Le quariier des m^ageSy compost d'un rez-de-chauss^e et d'un pre-
mier etage, dans lequel son t .hospitalises 100 menages ayant chacun une
chambre k deux lits.
3« Le quariier des chroniques, ouvert au mois d'octobre 1896, et conte-
nant 736 lits, dont 464 sont actuellement occupes.
Ainsi retablissement est k la fois un hospice et un hdpital.
Au chdteau et au quartier des menages, les vieil lards ne sont admis
qu'en vertu d'un titrede placement, et doivent remplir les conditions exi-
gees des personnes hospitalisees k Bicetre, k la Salpetriere ou k Ivry.
Dans le quartier des chroniques, au contrairc, les malades sont recus k
titre temporaire, mais leur sejour dans retablissement peut etre de longue
duree par suite de la nature des afTections dont ils sont atteints.
L*etablissement est dilaire k reiectricite,ct dote d'une double canalisa-
tion d'eau de source et d*eau de Seine.
Les matieres usees sont evacuees sur un terrain d'epandage.
L' Administration se propose d'ediOer trois autres groupes de bdliments
semblables au groupe des chroniques.
Quand toutes les constructions projetees seront terminees, retablisse-
ment de Brevannes comprendra 3 250 lits environ.
Pour 1898, les credits mis k la disposition de I'hospice de Brevannes
s'ei^vent k la somme de 51 Q 165 francs.
En 1896, le prix de journee est revenu au chifTre de 2 fr. 58.
On peut se rendre de Paris a Brevannes par deux chemins de fer.
Par la gare de Lyon, on descend k Villeneuve-Saint-Georges.
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VARlfeTfeS. ^25
Par la gare de Viocennes, on s'arrfite k Boissy-Saiat-L6ger ou k la sta-
tion suivante, k Limeil.
Mais, par une voie ou par Tautre, il faut faire vingt-cinq on trente mi-
nutes k pied. G'est I^ un gros incony^nient pour les hospitalises de Br^vannes.
Le chemiu de fer de Vincennes passe devant le chateau, luais ne s'ar-
rfile point.
Le jour ok Ton pourra obtenir une station de la Gompagnie, Thospice
de Br^vannes sera tr^s recherche.
II ne faut pas oublier, et il est n^cessaire de le r^p6ter en toute occa-
sion que les hdpitaux contiennent un nombre de lits sufflsant pour les ma-
lades, et si les hdpitaux out trop de brancards, c'est qu'ils sont encombr^s
de vieiilards et d'infirmes que, faute de place, on ne pent admettre dans
les hospices. Ge sont les hospices qui font d^faut, et c*est pour ce motif
qu'il est desirable de voir achever i'hospice de Br^vannes.
Le Mont-de-Piete de Paris,
PAR H. LOUIS LUCIPIA
Nous empruntons au rapport au Gouseil mnnicipal de M. Louis
-Lucipia sur le fonctionnement du Mont-de-Pi6t6 ce pr^ambule ^ru-
dit que nos lecteurs liront avec le plus vif int^r^t (1).
« Messieurs,
« II y a pr^cis^ment aujourd'hui cent vingt ans que le Mont-de-Pi^t^
de Paris a €16 ct66 par lettres patentes donn^es k Versailles le 9 d^-
cembre 4777 et enregistr^es au Parlement le 42 d^cembre de la m6me
ann^e.
« II n'est pas sans int^r^t, croyons-nous, de voir comment du fonc-
tionnement initial organist par lesdites lettres patentes — scell^es du
grand sceau de cire jaune — on est parvenu au fonctionnement actuel.
« On pourra juger ainsi le progrfes accompli et mesurer ce qu'il reste
k faire.
NOTICE PRI&LIMINAIRE
« Origine des Monts-de-FUU. — Sans vouloir refaire ici Thistoire des
Monts-de-Piet6 en France et k T^tranger, il est permis de rappeler, en
quelques lignes, que Tinstitution des Monts-de-Pi6te ne s'imposa pas faci-
lement et que si elle eut de chauds partisans, elle eutaussi des ddtracteurs
infatigables.
« La lutte ne fut pas toujours courtoise et elle amena parfois des
^changes d'6pith6tes un peu vives. M. Edmond Duval, T^minent directeur
du Mont-de-Pi6te de Paris, dans une « Notice historique », qui sert dc
(1) Gonseil mimicipal de Paris, 1897. — Rapport au nom de la 5* Commission
sur le fonctionnement du Mont-de-Pi6t6, pr6sid6e par M. Louis Xucipia, conseiller
municipal.
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720 REVUE PHILANTHROPIQUE.
preface h. son Manuel de LigislaHon, d^ Administration et de ComptabilUi du
Uont'de-FUti de Paris (1), a racont^ les 'principales phases de ces luites
oti les champions s'appelaient volontiers: « hardy menteur », « mendax »,
c m§tempsychos6 », « stiiltus », « fol », etc.
c( Des moines pr6naient les Monts-de-Pi^t^, d'autres moines les d^cla-
raient d6testables inventions diaboliques . L'affaire fut mdmeport^e jusque
devant un Goiicile oecum^nique, le Goncile de Latran (1512 k 1517), qui
donna raison aux Monts-de-Pi6t6. li yaen outre, surla mati^re, des Bnlles
pontiflcales, une notamment de L^on X en 1515, qui autorise les Monts-
de-Pi^t^, ce qui, du reste, n'emp^cha pas les docteurs en th^ologie de
rUniversit^ de Paris de declarer le 2 novembre 1624 qu'ils repoussaient
formellement I'^rection des Monts-de-Pi^t^, comme <c mauvaise et perni-
cieuse ». II est vrai que trois ans plus tard, en 1627, Philippe IV, roi d'Es-
pagne, excellent catholique, conflrmait les priyildges des Monts-de-Pi^t^
des Pays-Bas.
«c Les Juifs,& qui une ordonnance royale de i360permettait d'habiter en
France et de prater sur gages, combattaient aussi les Monts-de-Pi^t6 dont
quelques-uns pr6taient graiuitement, alors que letaox de I'int^r^t autoris6
pour les Juifs ^tait flx6, k cette 6poque, k 4 deniers par livre par semaine,
soit enyiron 86 p. 100 I'an.
« De m^me, les « Lombards », concurrents des Juifs, banquiers, chan-
gears et prSleurs usuraires, s'efiror9aient de faire ^chouer les Monts-de-
Pi^t6, en leur faisant refuser la licence de prdter de grosses sommes, les-
quelles pour ces ^tablissements sont seules r^mun^ratrices ; les petits
prSts occasionnant des pertes lorsque Tint^r^t est mod6r6.
« Parmi les repr^sentants du pouvoir civil, les unsfurent pour, d'autres
contre. La Reynie, lieutenant g^n^ral de police, fit ^chouer toutes les ten-
tatives dont il eut connaissance, et ce fut Lenoir, ^galement lieutenant
g^n^ral de police, qui proc^da k Tinstallation du Mont-de-Pi^t^ de Paris
qui fonctionne encore aujourd'hui.
<t On croit savoir que le premier ^tablissement de prdt sur gages fut
^tabli en Bavi^re, k Freisingen, vers 1198; c'est du moins I'opinion de
ReiCTenstuel, cit^ par M. Amould, ancien directeur du Mont-de-Pi6t6 de
Li^ge.
(c En tons cas, on a des renseignements plus precis sur un autre qui
fonctionnait k Saiins, en Franche-Comt^, au xiv* sidcle, en 1350, et sur un
troisi^me k Londres, en 1361.
« D'ailleurs, aucun de ces ^tablissements ne r^ussit. n faut attendre un
sifecle plus tard pour rencontrer un Mont-de-Pi^t^ en exercice, celui de
P^rouse, fond^ par un moine r^collet, Barnab^ de Temi, en 1462, au moyea
de quotes k domicile et dans les lieux publics, dont le produit constitua
une dotation qui permit de prater de petites sommes sans int^rdt.
«
« Elymologie. — Definition, — Nous ne voulons point reprendre ice sujet
les discussions sur I'^tymologie du nom Uont-de-PiiU qui sig^ifie simple-
(1) 1 vol. in-S"; Coulommiers, 1886.
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I
VARlfeTfiS. W
ment banque (moni) de charity on de pi^t^, mais nous d^sirons faire
remarquer que loTsque Litlr^ dit: « Mont-db-Pi£t£, ^lablissement oil Ton
u pr^te sur nantissement et k int^rdt », il doone une definition qui s*ap-
pUque an Mont-de-Pi6t6 de Paris et k la plupart des Monts-de-Pi^l^ de^
France, mais non a tons. II y a des Monts-de-Pi^t^ — nous les signalerons
plus loin — qui pr6tent sans int6r6t, sans rede^ance d'aucune sorte. 11 vaut
mieux, croyons-nous, accepter la definition plac^e en iHe de la loi du
24 juin 1851, ainsi con^ue :
« Article premibr. — Les Monts-de-PiSte, ou maisons de prSts sur nan-
tissement, seront institu^s comme etablissements d'utilite publiqne, et avec
Tassentiment des Gonseils municipaux, par des d^crets du President de la
R^publique, selon les formes prescrites pour ces 6tablissements.
« «
« En Prance et d Stranger. — Les Monts-de-Piet6 se multiplierent et pros-
p^r^rent surtout en Italie et dans les Pays-Bas. En France ils eurent des
alternatives de succfes et de decadence. 11 fut question des Monts-de-Piet6
aux Etats gen^raax de 1614, inaugurSs au convent des Auguslins, 4 Paris,
les derniers avant ceux qui servirent de preface ^ la Revolution. Le « Tiers »
rejeta Tinstitution qu*ii consid^rait a comme un moyen d'introduire de
« nouveaux usuriers en France od il y en avait dej^ trop ». Ce qui n^emp^cba
Louis XIII, en 1626, de publier un edit favorable qui n'eut d'ailleurs pas de
suite, pas plus que les lettres patentes de Louis XiV en 1643 et 1664, ega-
lement favorables. Gependant une ordonnance royale, enregistree au Par-
lement le 23 mai 1673, regla les conditions du pret sur gage et cette ordon-
nance subsista jusqu'd la promulgation du Code civil.
« «
« Thiophraste Renaudot. -— Bien qu'il ne s'agissequed'esquisser^ longs
traits rbistoire des Monts-de-Piete publics, nous eslimons que dans une
notice sur les Monts-de-Piete, si courte soit-elle, il est impossible de ne
pas prononcer le nom de Tbeophraste Renaudot, k qui est eievee une sta-
tue k Paris, rue de Lutece, presque k Tendroit od se trouvait, rue de la
Galendre, la maison de Tbeophraste Renaudot, k Tenseigne du Grand Coq.
« Le mieux est mdme, en cette circonstance, de faire comme M. Edmond
Duval, de laisser la parole k Tbeophraste Renaudot lui-m^me.
« Tbeophraste Renaudot s*adresse au cardinal de Richelieu qui est venu
lui faire visite en compagnie de « I'Emineuce grise » :
« Monseigneur, Texperience a appris que, dans les affaires de la vie.
un secours venu k propos avait toute Timportance d'un tresor... »
« Qu'il nous soit permis d'interrompre Torateur pour dire que cette
parole devrait toujours etre presente k I'esprit lorsqu'on s*occupe de la
question des secours aux necessiteux.
« ... L'ouvrier, faute d'une avance, ne peut prendre maltrise, et, pousse
par le decouragement, s'abandonne k Tivrognerie, mere de la misere et
des maladies ; le marchand, Tentrepreneur, faute d*un petit pecule, suc-
combent k la premiere gftne quails eprouvent, ou ne peuvent realiser soit
un bon coup de commerce, soit uue commande; je n*en finirais pas, Mon-
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728- REVUE PHILANTHROPIQUE.
seigneur, si je voulais ^num^rer toutes les circoastances ou an secours
venu k propos vaut mieux, je le r^p^te,qu'an y^ritable tr^sor.
~ « Eh bien, Monseigneur, j'ai donn6 au peuple cette ancre de salut; je
lui ai fourni les avances dont il ponvait avoir besoin; mais comme nne
fortune royale n'y sufOrait pas, je n'ai fait qu'un pr^t de ces avances et,
me conformant anx regies de cette sorte de transactions, je n'ai fait que
prendre les mesures n^cessaires pour garantir et accroitre les capilaux
que j'affectais k ces prSls.
* « Je pr61^ve 3 p. 400 d'irit^r^t, un'faible droit d'enregistrement et j'exige
comme s^curite de mon pr6t un gage dont je ne puis disposer qu'apr^s
I'expiration des 6ch^ances convenues entre Temprunteuret moi.
« Je ne suis point, Monseigneur, Tinventeur de ce syst^me; depuis long-
temps les Lombards le pratiquent en Italie, oh le peuple reconnaissant
Tappelle Mont-de-Pi6t6, le mettant ainsi au rang des oeuvres de la charity
chr^tienne.
« Je n'ignore pas, dit Richelieu, que N. S. P. le Pape L6on X a permis,
en 4521, de retirer un int^rdl des fonds qui sont consacr^s en Ilalie k cet
emploi charitable. — Mon P^re, continua-t-il, en se toumant vers le P. Jo-
seph qui I'accompagnait, prenez note de T^tablissement de M. Renaudot et
m'en faites souvenir au besoin. »
« A la suite de cette visite, Th6ophraste Renaudot recut le brevet de
« coihmissaire g^n^ral des pauvres valides et invalides du royaume, inten-
« dant et maltre g6n§ral des Bureaux d'adresses ou rencontre de France ».
Son ^tablissement prosp^ra jusqu'^ Tarrdt du Parlement en date da
1^' mars 4644 qui lui fit « tr^s expresses inhibitions et deCTences de plus
« vendre ny prater k I'avenir sur gages ». Gui Patin, Tennemidu novateur
Renaudot, triomphait comme il triompha des enfants de Renaudot en les
emp^chant de prendre leurs degr^s k la Faculty sous prdtexte qu'il ^taient
a affiliez k im traflc et negociation tendant a vendre des gazettes, k enre-
« gistrer des valets, des terres, des maisons,des gardes de malades,4 exer-
« cer une friperie, prater argent sur gages et autres choses indignes de la
« dignild et de Temploi d'un m6decin. »
« «
« Fondation. — Done ce fut le 9 d^cembre 4777 que des lettres patentes
sign^es Louis et contresign^es Amelot, institu^rent le Mont-de-Pi^t^ de
Paris. On pretend que ces lettres patentes furent r6dig^s par Framboisier
de Beaunay, ancien conseiller procureur du roi honoraire au bailliage et
vicomt^ de Lyon, alors directeur du bureau des nournces. Framboisier de
Beaunay fut, du reste, le premier directeur g^n^ral du Mont- de-Pi 6t^ .
« Le pr^ambule de ces lettres patentes dit que « le b^n^fice qui r^sal-
tera de cet ^tablissement sera enti^rement applique au soulagement des
pauvres et k Tam^lioration des maisons de charit6.
« Puis, aprfes la formule protocolaire de I'^poque:
<c A ces causes el autres, k ce nous mouvant, de Tavis de notre conseil
et de notre certaine science, pleiiie puissance etautoritd rojate, nousavons
dit, status et ordonn^ et, par ces pr^sentes sign^es de notre main, disons,
statuons et ordonnons, votllons et nous plait ce qui suit:
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VARltTfeR. 729
« Se troavent les dix-huit articles r^glementaires ainsi codqus :
« Article premier. — II sera incessamment ^tabli dans notre bonne Ville
de Paris un Mont-de-Pi4t6 ou Bureau gdn^ral de caisse d'emprunt surnan-
tissement, tenu sous Tinspection et administration du lieutenant g6n6ral
de police, qui en sera le chef, et de quatre administrateurs de I'hdpital
g^n^ral, nomm^s par le bureau d'administration dudit hdpital g6n6ral, et
dont les fonctions seront charitables et entitlement gratuites,
w Art. 2. — Toutes personnes connues et domicili^es, ouassist^es d'un
r^pondant connu et domicilii, seront admises k emprunter les sommes qui
seront d^clar^es pouvoir 6tre fournies, d'apr^s Testimation qui sera faite
des effets ofiTerts pour nantissement, et ces sommes leur seront prfet^es des
deniers et fonds qui seront mis dans la caisse dudit bureau, savoir : pour
la vaisselle et les bijoux d'or et d'argent, k raison de quatre cinqui^mes
du prix de la Taleur au poids, et, pour tons les autre* eflfets, k raison des
deux tiers de revaluation faite par les appr^ciateurs dudit bureau, qui
seront choisis dans la communaut^ des huissiers commissaires-priseurs de
otre Chdtelet de Paris, laquelle sera garante des Evaluations et percevra
des emprunteurs, k I'instant du prfit; pour droit de prisEe, un denier pour
livre du monlant de ia somme prdt^e.
« Art. 3. — Permettons aux administrateurs d'6tablir aussi, s'ils le
jugent ndcessaire, dans notre bonne ville de Paris, sous la denomination
de prfit auxiliaire, diff^rents bureaux particuliers dudit Mont-de-Pi6l6, ou
caisse d'emprunt des sommes depuis trois livres jusqu'& la concurrence de
dnquante livres.
- « Art. 4. — II ne pourra 6tre percu ou retenu, pour frais de garde, frais
de r^gie, et pour subvenir k toutes les d^penses g6neralement quelcon-
ques, relatifs audit Etablissement, sous quelque pr^texte et denomination
que ce puisse 6tre, autres que pour les frais de pris^e par nous ci-dessus
regies, et pour ceux de vente dont il sera parlE ci-apr^s, au dela de deux
deniers pour livre par mois du montant des sommes prdt^es, et le moid
commence sera paye en entier, quoique non Oni.
« Art. 5. — Les efTets mis en nantissement seront, au plus tard,drexpi-
ration de TannEe du pr^t revolue, retires par les emprunteurs ou par les
porteurs de la reconnaissance qui aura H6 deiivr^e audit Mont-de-Pidte :
sinon, dans le mois qui courra d'apr^s ledit temps Ecouie, lesdits effets
seront, par ordonnance du lieutenant general de police et par le miuist^re
d'un des huissiers commissaires-priseurs de notre GhAteiet de Paris, ven-
dus publiquement, sur une seule exposition, au plus offrant et dernier
encherisseur, aux lieu, jour et heure indiquEs par affiches contenant
enumeration de tous lesdits effets. Ce jour sera le premier non feriable
d'apres le 2 et le 16 de chaque mois.
« Art. 6. — Les deniers qui proviendront de la vente des effets mis en
nantissement seront remis aux proprietaires, apr^s le preievement fait de
la somme empruntee et des deux deniers pour livre, par chaque mois
echu depuis le jour du pret jusqu'i celui de la vente.
«Art. 7. — Les frais de vente seront de cinq sols pour les ventes du
pnx de vingt livres et au-dessous; de dix sols au-dessus de vingt livres -
jusqu'^ cinquante livres ;de vingt sols au-dessus de cinquante livres jus-
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730 REVUE PHILANTHROPIQUE.
qu'^ cent liyres;de vingt-cinq sols au-dessus de cent livres jasqa'& deax
cents livres, et toujours en augmentant de cinq sols pour chaque cent
livres de plus. Ges frais seront paj^s en sas du prix de I'adjudication par
les acheteurs. Exemptons lesdites ventes de tous droits et mdme de ceux
du contr61e des proc^s-verbaux d'icelles, que nous dispensoDs d'etre iaits
sur papier timbr^, ainsi que tous autres actes concemant Tadministration
dodit Mont-de-Pi^t6.
« Art. 8. — Dans le cas od il serait apport^ au Bureau ou caisse d'em-
pTunt sur naatissement, et dans les bureaux particuliers du pr6t
auxiliaire, quelques efTets qui fnssent reconnus, d^clar^s ou mdme sua-
pect^s vol^s, il en sera sur-le-champ rendu compte au lieutenant g^n^ral
de police, et il ne sera prdt^ aucune somme au porteur desdits effets, qui
resteront en d^pdt au magasin desdits bureaux, jusqu'k ce qu'il en soit
autrement ordonn^. Youlons que ceux qui les auront pr^sent^s soient
poursuivis extraordinairement, eux et leurs complices, suivant Texigence
des cas.
« Art. 9. — Tout effet qui sera revendiqu^ pour vol ou pour telle autre
cause que ce soit ne pourra ^tre rendu au r^clamant qu'apr^s qu'il aura
justifi^ qu'il lui appartient et qu'apr^s quil aura acquitt^, en principal el
droits, la somme pour laquelle ledit effet aura ^t^ laissd en nantissement,
sauf le recours dudit r^clamant centre celui qui Taura d^po86, lequel en
demeurera civilement responsable.
« Art. 10. — II sera pr^pos^, par le lieutenant g^n^ral de police, un on
plusieurs commissaires du Ghdtelet et inspecteurs de police, pour veiller
au roaintien du bon ordre dans ledit Bureau g6n6ral et dans lesdits bu-
reaux particuliers; k regard des v^rificateurs et contr61eurs de la r^gie des-
dits bureaux g^n^ral et particuliers, ils seront pr^posSs et commis par le
Bureau d'adminislration.
« Art. 11. — Les proposes et employes, tant au Bureau g6n^ral qu'aux
bureaux particuliers, seront sous les ordres d'nn directeur g^n6ral, lequel
sera nomm^ par le lieutenant general de police et les administrateurs ; les-
dits pr^pos6s et employes seront pr^sent^s par le directeur et pareiilement
nommes par le bureau d'administration qui fixera leurs appointemenls,
ainsi que les honoraires du directeur, sous la condition, de la part des
uns, de fournir un cautionnement avec hypoth^que sur biens fonds, et, de
la part des autres, de consigner telle somme en argent qui leur sera r4-
gl^e pour leur cautionnement, laquelle sera d^pos6e k la caisse du bureau
d'emprunt, et dont il sera pay^ 5 pour cent d*int6r6t par ann^e.
((Art. 12. —Le directeur general et tous les aulres pr^pos^s et employ6&
ne seront admis k faire leurs fonctions qu'apr^s avoir pr^t^ serment de
bien et ftddlement s'en acquitter, par-devant le lieutenant g^n^ral de po-
lice et les administrateurs, pour laquelle prestation de serment il ne sera
exig^ aucuns frais, ni mdme aucun droit queleonque, au greffkr que le
bureau d'administration commettra pour la tenue de registre de ses deli-
berations .
((Art. 13. — Dans le cased il serait fait quelques oppositions sur le prix
des effels vendus au Mont-de-Pi6te, elles ne pourront fitreformees qu'entre
les mains du Directeur et au bureau dudit etablissement, et elles ne seront
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VARltTfeS. 731
valables qu'autant qa'elles auronl ^t^ vis^es par le Directear sur roriginal,
ce qn'il sera tenu de faire saos frais.
€ Art. 14. — Toutesles oppositions qui seront entre les mains da Direc-
tear, sur les efTets d^pos^s en nantissement an Mont-de-Pi^t^ avant la
vente d'iceux, n'empdcheront point qne ladite vente ne soil faite confor-
m^ment aux dispositions de Tarticle 5 des prdsentes, sans qu'il soit besoin
d'y appeler I'opposant, sauf k lui k exercer ses droits sur les deniers qui
resteront aprds le pr61^yement ordonn^ en Tarticle 6 ci-dessus.
c Art. 15. — Tontes les contestations relatives k Tdtablissement, r^gie et
administration desdits bureaux, g6n^ral et particuliers, seront port6es par-
derant le lieutenant g^n^ral de police, auquel nous en avons attribu^ la
connaissance comme pour fait de police, sauf n^anmoios I'appel en la
grand'chambre de notre Cour de Parlement, pour y 6tre fait droit en la
forme prescrite par notre ordonnance du mois d'avril de 1667, pour les
appointements k mettre.
« Art. 16. — II sera, tons les moi8,fourDi parle Directeur,au lieutenant
g^n^ral de police et aux administrateurs, un bordereau de sa recette et
d^pense, avec un tableau de situation dela caisse et du magasin et, chaque
ann^e, il en sera rendu un compte g^n^ral par-devant qualre de nos am6s
et f6aux conseillers de la grand'chambre de notre Cour de Parlement, en
presence de Tun des substituts de notre procureur g^n^ral : ledit compte
sera par eux clos et arrdt^, un double d'icelui sera d^pos^ au greife de
notre Parlement et, lorsqu'il se trouvera des fonds en caisse au delk de
ceux n^cessaires pour la r^gie et les charges de T^tablissement, ils seront
appliques au profit de rh6pital g^n^ral de notre bonne ville de Paris, sui-
vant Tordonnance qui en sera rendue par nosdits conseillers, ensuite de
I'arrfit^ et cl6ture dudit compte.
c Art. 17. — Autorisons le lieutenant g^n^ral de police et les quatre ad-
ministrateurs de faire tels r^glements qu'il appartiendra, concemant Ten-
tr^e et la sortie des gages ou nantissements, la sClret^ et conservation
d*iceux, la tenue des registres et g6n^ralement pour prescrire les forma-
lit^s qui seront employees dans la r^gie et administration de ladite caisse
d'emprunt et des bureaux particuliers de prdt auxiliaire, k la charge que
lesdits reglements soient homologu^s en notre Cour de Parlement sur la
Requite de notre procureur g^n^ral.
fl Art. 18.— Seront nos ordonnances, declarations et les reglements ren-
dus au sujet de Tusure, executes suivant leur forme et teneur. Si donnons
en Mandement k nos am6s et f^aux les gens tenant notre Cour de Parle-
ment k Paris que ces pr^sentes ils aient k faire lire, publier et enregistrer
et le contenu en icelles garder, observer et ex^cuter suivant leur forme et
teneur; car tel est notre plaisir, en t^moin de quoi nous avons fait mettre
notre seel k cesdites pr^sentes. »
Les debuts, — Les quatre Administrateurs de Th^pital g^n^ral qui, aux
termes des lettres patentes, devaient avec le lieutenant g^n^ral de police
administrer le Mont-de-Pi^t^, furent nomm^s le 20 d^cembre 1777, et le
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m REVUE PHILANTHROPIQUE.
surleDdemain ils ^taient r^unis sons la pr^sidence de M. Lenoir, lieutenant
g6u6ral de police. On paraissait vouloir aller vite.
Ces quatre administratears 6taient MM. Josson, Basly, Vieillard et
Henry.
* Ce jour-li on nomma le Directeur g6n6ral et les principaux employes.
MM. Henry et Vieillard furent charges de tronver un local pour la nou-
velle administration. Leur choix s'arrfita sur deux maisons contigues, sises
rue des Blancs-Manteaux et appartenant au marquis de La Grange et k
M. Joly de Fleury, son beau-fr6re, alors procureur g^n^ral. Le bail fut
pass6 le 5 Janvier 4778, moyennant un loyer annuel de^CiOO livres et k
charge dMndemniser les locataires si Tadministration voulaitoccuper tons
les locaux. Tel fut le berceau du Mont-de-Pi^t(5.
La maison rue de Paradis, aujourd'hui rue des Francs-Bourgeois, ne
fut acquise qu'en 1783.
D^s le debut T^tablissement jouit de la faveur du 'public. Seulement il
arriva bient6tqu*il fallut se procurer de nouveaux fonds parce que les d^-
pdts augmentaient. Le Pr6vdt des marchands proposa aux administraleurs
de leur venir en aide en leur foumissant des fonds pris sur les recettes
de la Ville, h condition que la Ville partagerait avec le Mont-de-Pi6t6 le
ben6Qce qui pourrait r^sulter. On refusa, pr^textant la teneur des leltres
patentes.
On fit face k tout jusqu'en 4787. A partir de ce moment les operations
commenc^rent k d^croltre jusqu'au moment od il fallut cesser les opera-
tions, au mois de fructidor an IV.
En 4789, les sommes prSt^es atteignaient 18477 355 livres pour 534 i5l
articles. En 4793, les engagements ne furent plusqu'au nombre de 277557
livres pour 7 882747 livres. II n'est pasdouteux que ces r^sultats ne
fussent dus en partie k la creation des assignats et aussi k la liberty des
pr^ts sur gages qui avaient 616 d6cr6t6es par FAssembl^e nationale.
Enfin, en Tan IV, I'entree s'abaisse au chifTre de 64585 articles poor
4 606 435 livres.
II fallut cesser.
Lorsque les operations furent suspendnes, le solde en magasin etait
reduit k 4 045 articles repr^sentant en assignats une somme de 21 466345
livres.
On rendit gratuitement les nantissements.
Quand le Mont-de-Pi6t6 ferma ses portes, le nombre des pr^teurs sur
gages si! multiplia k ce point que, dit une note des archives du Mont-de-
Piete, « dans certains quartiers, les lantemes qui annoncaient les maisons
de pret auraieut pu suffire pour eclairer la voie publique et par ce moyen
epargner au d^partement la moiti6 des frais d'illumination ». Dans ces
maisons, le taux dii par les emprunteurs atteignait 20 pour iOO par mois.
L' Administration du departement d^cida, le 24 plu?i6se an V, la reor-
ganisation du Mont-de-Piete.
Alors commenca la p^riode dite des actionnaires qui a dure
jusqu'en 1805.
Voici quelle etait Teconomie de cette organisation nouvelle :
La direction de cet etablissement fut confiee k cinq administrate urs des
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VARlfeTfeS, 733
hospices auxquels on adjoignit cinq administrateurs faisant fonds, nom-
m^s au scrutin et choisis parmi les porteurs des actions k ^mettre. On
cr6a 4000 actions de iOOOO livres chacune; chaque admiiiistrateur ^en
devait poss^der dix et fournir en plus an cauUonnement de 50000 livres
en immeubles. Ges actions, qui u'4taient 6mises qu'au fur et k mesure des
besoins, produisaient 5 pour 100 d'int^rfit i compter du jour dc remis-
sion ; en outre les actionnaires profltaient de la moiti^ des benefices nets,
deduction faite des frais de r^gie. La moitl^ des cinquante actions appar-
tenantaux cinq administrateurs faisant fondsrestaitd^pos^e dans lacaisse
du Mont-de-Pi6t6 et servait, avec le cautionnement en immeubles, de
garanlie pour les actionnaires.
En attendant la realisation des fonds par l'6mission des actions, le
Mont-de-Piete fit savoir qu'il emprunterait de Targent pour trois, six ou
douze mois.
Au debut, les droits k payer furent les mdmes que ceux flx^s par les
lettres paten tes et par le d^cret dela Convention du 17 thermidor an III :
deux deniers par livre par mois et un sol par livre pour I'enregistrement.
Mais ce taux fut trSs consid^rablement abaiss6 k la fin de la p^riode des
actionnaires. ^ous trouverons les chiffres plus loin, lorsque nous nous
occuperons du taux des pr6ts.
Les benefices faits dans la periode des actionnaires, qui avait dure huit
ans et deux mois, s'etaient eieves k 2 109 810] francs. G'est sur cette
somme que fut preieve le premier fonds de la caisse des retraites des
employes du Mont-de-Piete.
« «
D^cret du 8 thermidor an XllL — A partir de la fin de la periode des
actionnaires, le Mont-de-Piete a pour charte le decret du 8 thermidor
an XIII, qui est encore en grande partie la base de Torganisation actuelle*
T^ous n'insisterons pas, puisque, en examinant une k une les diverses
rubriques du budget, nous aurons montre le fonctionnement des rouages
de I'administration du Ment-de-Piete et que nous verrons les modifications
apportees et eel les qui sont demandees.
Void cependant les litres de chapitres.du rSglement insere dans ce
decret du 8 thermidor an XIII, qui fut signe k Saint-Cloud par Napoleon^
empereur des Francais et roi dltalie, et contresigne par le secretaire
d'etat, Hugues-B. Maret.
TITRE PREMIER. — Organisation.
Chapftre premier. — Ribgle gerUrale.
Chapitre II. — Fonctions du directeur gin^al,
CHAPrrRB III, — Fonctions des divers agents, pr^osis ou employes.
Chapitre IV. — Des appr6ciateurs.
Chapitre V. — Des cautionnements.
TITRE U. — Des operations du Mont-de-Pi£t^,
Chapitre premier. — Dispositions g^nirales.
Chapitre II. — DuprHsur nantissement.
CflAprTRB III, — De Vemprunt.
On le voit, c'est un r^glement comprenant toutes les parties de* Tadmi-
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734 REVUE PHILANTHROPIQUE.
nistration arofi ses deax operations esseotielles : Temprunt da Mont-de-
Pi^te pour se procurer ^ Targent destine k ceux qui viennent emprunter
au Mont-de-Pi6t6.
L'emprunt est r6g\^ de la m^me fagou et les regies g^n^rales du pr^t
sont les mdmes. Seul, le cadre administntif pr^vu par le d^cret du
8 thermidor an XIU a 6i6 modifi^ quant au aombrQ et aux attributions.
Assistance par le travail.
RAPPORT DE M. FAILLGT SUR LA GOLONIE DE LA CHALlfELLE Ct)
Messieurs,
Une pauvre petite ferme abandonn^e depuis plusieurs ann^es, aux ch6-
tifs b&timents d^labr^s, pourrissant pour ainsi dire dans un mar^cage, des
terres devenues des landes, de roaigres ressources financi^res accord^es
par gr&ce, enfin une centaine de malheureux recruits dans les refuges
municipaux : telles ^taient les conditions dans lesquelles un jeune ing6-
nieur agronome, faiblement r6tribu6, M. Malet, avait le courage de cr^er
la colonic agricole de la Ghalmelle.
La colonic se composait de :
23 cultivateurs, 1 vigneron, 24 journaliers ayant travaill^ aux champs,
i terrassier, 9 jardiniers, I cocher, 9 charretiers, 1 vacher, puis 5 domes-
tiques, 4 m^caniciens, 3 bo dangers, 2 menuisiers, 1 serrurier, 1 parque-
teur; puis 1 Spicier, 1 doreur, i fai'encier, 1 teinturier, i gazier, 1 impri-
meur. La plupart des cultivateurs ou journaliers avaient k pen pvhs perdu
la pratique professionnelle. Quant aux autres, ayant rould de refuge en
Tcfuge, forces entre temps de coucher sous les ponts ou dans d'abominables
cabarets, et par consequent dans de d^gradantes promiscuil^s, il y avait
peu k en attendre, si ce n'est la paresse et Tinsubordination. N^anmoins,
M. Malet, grdce k une selection habile des temperaments et des aptitudes,
k une fermete qui n'excluait ni la douceur, ni la persuasion, gr^ce k T^mu-
lation des amours-propres, M. Malet a su relever le plus grand nombre et
placer ceux-ci chez des fermiers et ceux-U chez des cultivateurs, et ayaut
emporte de la colonic un p^cule variant de 25 k 35 francs.
Ges hommes, loin d'oublier le service moral et materiel rendu par leur
Directeur, entretiennent avec lui des relations ^pistolaires dans lesquelles
ils expriment leurs sentiments de gratitude. Les colons ont transform^ au
moins les deux tiers des terres qu'ils avaient trouv^es couvertes de petits
ajoncs, de mauvaises herbes, et, & cause de Timpermeabiliie quasi g^n^rale
du sol, perdues d'humidite. Quelle methode et quels efforts il a fallu! En
1895, il restait, sur 128 hectares, k peine 25 en jach^re nue. Disons-le par
avance, avec les moutons, que le Directeur vous demande, ces 25 hectares
seront nettoy6s, ^pur^s, engraiss6s et prepares pour uue culture prochaine.
(1) Rapport au Gonseil municipal pr^sente par M. Faillet, au nom de la
^« commission, sur la colonie de la Ghalmelle.
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VARI6t6S. 735
En 1895, la surface culiiv^e comprenait : en c6r6ales, environ GO hec-
tares; en fourrages, 21 hectares; en betteraves, pommes deterre, haricots,
carottes, choux, 40 hectares; en jardin potager, 1 hectare; le charmant
jardin d'agr6ment qui entoure la maisonnette du Directeur, 1 demi-hectare.
Au milieu de ce jardin, gr&ce k un drainage intelligent, les (laques
d'eau out disparu pour former un grand yivier. Dix hectares en bordure
ont 6i^, en 1896, sem^s en trifle.
Yotre Rapporteur a visits la colonie agricole (Goloniel uh mot qui
Sonne mal aux oreilles des paysans de la region ; pourquoi pas le mot,
plus juste d'ailleurs, de Ferme municipale) ^ la fin de juin dernier. Ila vu
avec joie dans cesplaines, nagu^re d^sol^es, ici des hUs jaunissants, Ik
des prairies verdoyantes, des trifles en (leurs et des champs de pommes de
terre.
Les hommes allaient, venaient, joyeux du travail accompli. Sur le bord
d'un chemin une cabane, et de son toit s'^chappait dans Tazur la noire
fum^e d*une forge; \k, deux hommes, en manches de chemise, en chantant,
rSparaient telle ou telle pi^ce de machine agricole. Tout ce monde, six
mois auparavant, trimardait loqueteux, soumois, souvent avin^, dans nos
refuges du quai de Valmy ou du Chdteau-des-Ren tiers, — la plupart k la
veille d'ob^ir aux suggestions malhonndtes.
Sans doute, il y a des efforts k accomplir, des disillusions k toujours
attendre; mais, en v^rit^, comme la terre, Thomme est amendable.
Sans doute, la Ghalmelle coClte encore cette ann^e, elle coCltera Tann^e
prochaine; mais quand elle occupera, dis-je, ie double de travailleurs, la
Ghalmelle ne demandera plus rien au Gonseil municipal. Et quand elle de^
manderait quelques sacrifices encore? N*est-ce pas une excellente ceuvre
que d'arracher, bon an mal an, aux bas-fonds du ^vagabondage, une cen-
taine d'hommes oisifs, devenant mauvais, fauteurs predestines du crime?
N'est-ce pas aussi quelque chose que d'avoir rendu 4 la culture 128 hectares;
que d'avoir cr^e, en plein centre de routine agricole, une veritable ^cole
pratique d'agronomie od les paysans-fermiers, cultivateurs, viennent
apprendre, k leur profit direct, les proc^d^s qui leur permettent de faire
produire k la terre quatre et cinq fois plus, c'est-i-dire de gagner leur vie
au lieu de v^geter?
jfeTAT FINANCIER
Les recettes r6alis6es depuis le 1«' octobre 1896 sont de. . 15 615 fr. 13
et celles d percevoir de 2 918 fr. 96
Total 18 564 fr. 09
soit 565 fr. 09 en plus sur Tann^e derni^re. Elles eussent H6 beaucoup
plus eiev^es si la mauvaise saisou n'avaitdonne d' aussi m6diocresrecoltes,
comme du reste dans les regions au sol argileux.
Yoici ci-dessous T^tat actuel des d^penses :
Pour Tann^e 1898, il ne faut pas esp^rer d'^conomie, ni prdsumer de
d^penses. D'odil suit, le m^me etablissement de budget qu'en 1897, c'est-
^-dire en ddpenses^ 43 300 francs, en recettes, 27 400 francs.
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736
REVUE PHILANTHROPIQUE.
La colonie coiite done i5 900 francs. Or comme elle a recrat^^cent dix-
huit perspnues au lieu de quatre-vingt-treize Tan dernier, en fin de compte
la situalion est des pins satisfaisantes.
REPARTITION DV CREDIT
Personnel,
Traitement des gagistes
Indemnit^s aux colons
Frais de voyage du personnel et des colons.
Allocations diverses et gratifications ....
Materiel.
D6penses de la ferme
Frais de location et taxe
D^PENSES
PAITBS. BN0AG6B8. T0TALK6
fr. c.
6091,50
3990,50
2153,40
363,23
9051,63
3454 »
1012,34
26116,62
fr. c.
1818,30
609,50
436,60
436,15
3848,37
6346 »
3687,66
17183,18
fr. c.
7909,80
4600 »
2590 •
800 »
12900 n
9800 »
4700 1
43299,80
Nous Yous proposons de fixer k 27 400 francs rarlicle 5 du chapitre IX
des recettes ordinaires : Produit de la Colonie agricole de la Chalmelle; k
43 300 francs, Tarticle 38 du chapitre XX des d^penses ordinaires : Colonie
d*indigents de la Cltalmelle.
Enfin, Messieurs, consid^rant que, pour les nouvelles constructions en vue
de Tagrandissement de la Chalmelle, le concours technique, 6clair§ etz61^
du Directeur est digne des plus grands 6Ioges, qu'il est rSsult^ do ce con-
cours une ^conomie importante de vos ressources, considerant que le Di-
recteur a, pendant cinq anuses, montr^ une competence agronomique k
laquelle ont rendu et rendent hommage tons les cultivateurs de la rdgion,
en assistants ses conferences et en profitant de ses lemons pratiques, qu'il
y a en outre une consideration s^rieuse du principe de colonie agricole
inaugur^e par le Conseil municipal ; considerant qu'en accomplissant ainsi
sa mission, le Directeur de la Gbalmelle m^rite un temoignage de notre
haute satisfaction, je ?ous prie, au nom de la 5*^ Commission etde nos col-
logues qui, dans leur visile k la colonie, out appr^cie Tinfatigable devoue-
ment de M. Malet, de vouloir bien voter le projet de deliberation suivant :
Une somme de 1 000 francs est ajontee au hudget des depenses de la
Colonie de la Chalmelle, annee 1897, enfaveurde M. Malet, son Directeur.
Nous vous prions d'adopter nos conclusions.
' En annexe, votre Rapporteur vous presente un extrait du memoire du
Directeur de la Cbalmelle concernant C^tat moral et Cexploitation de la Co-
lonie (1). Nous appelons votre attention tonte particuliere sur ce docu-
ment; il est remarquahle au point de vue : 1<* de rezposition, trOs-precise
en meme temps que trOs detailiee, du rendement, gr^ce k la methode de
culture appliquee k des terrains reputes jusqu'ici stMles; 2* au point de
vue de Tutilisation d*un personnel recrute dans des conditions morales qui
(1) Nous publierons ce document dans un prochain numero.
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VARltTJfeS. 137
rebuleraient tr^s certaiDement des fermiers ou des propri^taires et qui,
cependant, ont apport^ des r^sultats incomparables.
A Toaverture de la prochaioe session, nous entretiendrons le Gonseil
d'un projet d'^tablissement d'une icole agricole ^manant de M. le Direcieur
de TAssistance publique, et d'une vue d'ensemble de cetle creation. Vods
^ yerrez que M. Malet n'b^site pas k offrir son concours pour mener ^ bien
(et nous nous en rapportons k Jul) une oeuyre que nous pr^conisons dans
.un rapporl snr noire inspection des Enfants assist^s.
Gomme toute chose doit venir en son temps, nous demanderons alors k
la 3^ Commission du Gonseil g^n^ral de vouloir bien ^tudier le m^moire
dn Direcieur de la Ghalmelle et d'exaniiner les plans dresses par rarchi-
tecie, M. Michelin, plans d*am^lioraiion et d'agrandissement de la ferme
diie la Grandi^re-aux-Essaris, appartenant k T Assistance publique.
Rapport de M. Nooard sur Thygitoe des stables et I'^tat
sanitaire des vaches (1).
La question soumise k la Gon^mission du lait est des plus complexes;
elle peut cependant se r^sumer en ceci : meltre k la disposition du con-
sommaieur du lait pur, non nuisible, au meiUeur marche possible.
La premiere condition que doit remplir le lait mis en vente, c*est
d'avoir une valeur nutritive suffisante, dont le minimum doit ^tre ofOcielle-
ment determine.
Ge point n'est pas de notre competence.
_ Ge lait, d'une valeur nutritive sufflsanie, ne doit pas dire nuisible au
consommateur.
Or, le lait peut dtre nuisible pour des raisons multiples :
\^ Ou bien il est d^j^ nuisible au soriir de la mamelle, en raison de
r^iat sanitaire d^fectneux de la vache laiti^re ;
2* Ou bien il devient. nuisible apr^s la traite, parce qu'on y a ajout^,
voloniairemeni ou non, des substances ^trang^res k sa composition.
Parmi ces substances ^trang^res il faut ranger celles que les produc-
ieurs de lait y ajouteni dans le but de prolonger sa conservation ; mais les
plus redouiables soni k coup sdr les substances qui peuveut y introduire
des microbes, soit pendant la traite, soit par le fait'de sa distribution dans
des vases malpropres ou neiioy^s avec de Teau impure, soit parce qu'on ne
i'a pas suffisamment proi^g^ contre les poussi^res aimosph^riques , les-
quelles peuveni reufermer, avec les agents des fermentations vulgaires, des
germes des maladies contagieuses les plus diverses et les plus graves.
II n'est pas impossible de rem^dier k ces causes multiples de nocivit^
dn lait.
La chose serait relativement facile s'il ne s'agissait que dulaitproduii dans
r^tendue du d^partement de la Seine, od le personnel du service sanitaire
(1) Travaux de la commission d'6tude de ralimentation par le lait. — Voir
le n« 5 de la Bevue Philantki*opique, p. 252 et suiv., et n« 7, p. 129 et suiv.
HIVITB PBILANTRROPIQUB. — H. 47
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738 REVUE PHILANTHROPIQUE.
T6t6rinaire est nombreax, iostruit et discipline, od Ton vient de lui confier
rinspection hygi^oique dn groupe des ^tablissements classes qui comprend
les vacheries. Mais les vacheries du d^pariement de la Seine ne produiseot
gu^re plus du tiers de la quantity de lait que Paris consomme chaque jour;
plus de 400000 litres proviennent des d^partements environnants, dans un
rayon de 20, 25, 30 lieues et plus. Pour ces vacheries de la grande ban-
lieue de Paris, la surveillance hygi^nique et sanitaire fait k pen pr^s com-
pl^tement d^faut et, pour Torganiser, il faudrait faire des d^penses consi-
derables, augmentant dans une proportion notable le prix de revient du
lait introduit dans Paris. A supposer m^me que Ton r^ussisse k organiser
•aussi parfaitement que possible cetle surveillance hygi^nique et sanitaire,
'A est bien certain qu'elle ne sufflrait pas k assurer la pure<^ du lait d^livr^
au consommateur : au cours des manipalations nombreuses que ce lait
aura subies pendant la traite, la distribution, le transport et le debit, on
n'aura pu ^viter la penetration d'au moins quelques germes dont la multi-
plication pourrait en rendre Tusage dangereuz, alors mdme que le lait ne
semblerait pas en avoir subi la plus petite alteration.
Geci nous amene k formuler en principe que la seule precaution qui
puisse mettre le consommateur k I'abri de tout danger consiste k u faire
bouillir le lait avant de le consommer ».
Ge principe admis, on doit se demander s'il est necessaire de poursuivre
I'organisation d'une inspection hygienique et sanitaire de toutes les va-
cheries qui concourent k Tali mentation de Paris, inspe9tion qui augmen-
terait necessairement dans une proportion considerable le prix de revient
du litre de lait sans pourtant donner au consommateur une securite absolue,
ou si,au contraire, il ne serait pas preferable de concentrer tons nos efforts
pour faife entrer dans Tesprit du Parisien cette notion que la seule pre-
caution necessaire et saffisante pour eviter tout danger consiste k « faire
bouillir le lait avant de le consommer ».
Nous avons mis dix ans k faire comprendre k la population parisienne
I'extreme importance de la purete de I'eau de boisson; k Theure actuelle,
d^s qu'on annonce que le debit des sources est insufflsant — et c'est
malheureusement trop frequent, — il n'est pas de petit menage qui ne
fasse bouillir son eau de boisson. Ainsi en adviendrait-il, si nous le vou-
lons bien, pour la question du lait cm ; peu k peu tout le monde en saura
le danger et les moyens d'y parer. — Le resultat sera peut-etre un peu long
k obtenir, si tenace est le prejuge absurde qui veut que le lait bouilli ait
perdu sa digestibilite et memo une partie de ses qualiies nutritives. On y
parviendrait pourtant, si Ton se decidait k faire la propagande necessaire
en s'adressant surtout aux enfants de nos ecoles; il ne serait cerles pas
impossible d'afflcher dans chaque classe ces braves incriptions : « Ne cra-
chez pas sur le parquet; ne bnvez pas de lait sans Tavoir fait bouillir; vous
eviterez ainsi beaucoup de maladies qui se propagent, soit par le lait era,
soit par [les poussi^res des crachats desseches. » L'homme adulte n'oublie
pas les impressions qu'il a revues enfant. Cette mesure simple rendrait les
plus grands services & Thygiene. Pour ma part,j*y vols la solution pratique
et generate du grave probieme qui nous occupe.
Mais, dira-t-on, il est des gens qui ne peuvent'pas ou ne croient pas
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VARltTfeS. a39
poavoir supporter le lait bouilli. Entendez-vous leur interdire I'nsage da
lait?
En aucune fa^on; da moment oil il n'est plus question d'exiger de
toutes les vacheries qui concourent k Taiimentation de Paris les garanties
saftitaires et hygi^niqaes n^cessaires, il est possible de satisfaire k ces
bMoins exceptionnels. On pourrait par exemple provoquer la constitution
de soci6t6Sy poursuirantbien moins un int^r^t p^cuniaire que la sauvegarde
de rhy^ne» imposant k leurs fournisseurs des conditions tr^s rigoureuses
et n'acceptant que ceux qui s'engageraient k les remplir. On pourrait aussi,
— et peut-dtre serait-ce la meilleure solution — encourager la Prefecture
de police k pers^v^er dans la voie oh elle vient d'entrer, sur rinitiative du
Service sanitaire v^tdrinaire, k faciliter aux nourrisseurs qui le d^sirent
Tassainissement de leur» 4Ubles par Temploi officiel de la tuberculine et
de tout autre moyen utife.
Les consommateurs qui vevlent boire du lait cru, de bonne quality,
pourraient s'en procurer en s'adressant k ces vacheries; ils y trouveraient
du lait fratchement trait, par consequent indemne des fermentatious se-
condaires, si redoutables pendant I'^t^.
Voyons maintenant k quelles conditions faygi^niques et sanitaires
doivent satisfaire les vacheries pour prodnire un lait de bonne quality,
offrant au consommateur le maximum possible de garantie.
I. — CONDITIONS QUE DOTYBNT REMPLIR LES LOCAUX
(vacheries et LAITERIES)
Le Gonseil d'hygi^ne et de salubrity du d^partement de la Seine vient
de remettre cette question k T^tude, et void quelles sont les conditions
adoptees par ia commission charg^e de cette ^tude, commission dont vos
rapporteurs faisaient tons trois partie :
i^ L'^table devra avoir des dimensions telles que chaque vache ait k sa
dispositioo un cube d'air d'au moins 20 metres et une surface de 1"^,45 en
largeur sur 3"*,20 en longueur. On devra, en outre, manager, derridre
chaque rang^e de vaches, une all6e de service ayant an moins 1>*,30 de
largeur. Par exception, si la largeur de ratable ne peat d^passer 4 metres,
la hauteur devra Stre port^e k 3"^,50.
2f^ Les urines, purins, eaux de lavage ou de pluie seront Iconics k
ragout par une canalisation souterraine s'amor^ant par un siphon dans
ratable ou dans la cour.
3<> Le sol de Tetable et de la cour sera rendu impermeable et dispose
en pente pour le facile ecoulement des liquides k I'amorce de la canalisa-
tion souterraine. Dans les cours de grandes dimensions, rimperm6abilisa-
tion du sol pourra 6tre limitee : a) aux ruisseaux; b) k la partie attenant
k ratable ainsi qa'& la laiterie, sur une largeur minima de 2 metres; la
partie de la cour non impermeabilisee devra 6tre pav^e, et le pavage tou-
jours maintenu en bon etat.
En aucun cas, Tecoulement au ruisseau de la rue ne pourra etre
toiere.
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T40 REVUE PHILANTHROPIQUE.
L'^coulement dans des cilernes stanches, se Tidant k la mani^re des
fosses d'aisances, ne sera permis que dans des Stablissemeots 61oigQ^s de
tout ^gout et de toute agglomeration et It la condition qu*il y aura, k
proximity, des terres arables sur lesquelles on pourra faire T^pandage de
la vidange de ces fosses.
4<» On plafonnera le plancher haut de ratable, au niveau des solives; si
ratable est surmont^e de chambres habitues, le plancher sera construit en
fer et hourd^ plein.
5» En outre des portes et des ch&ssis vitr^s, ^tablis en nombre snfEsant
pour assurer un bon ^clairage, ratable sera ventil^e par des chemin^es
d'a^ralion (1 au moins sur 6 vaches) ; ces chemin^es devront 6tre construites
en poterie, monter au-dessas du toit, mesurer au moins 0'^,25 de c6l6 et
n'toe jamais obstru^es.
6* A rint^rieur, les mnrs de Triable seront ciment^s jusqu'4 la hauteur
de l^^JS au-dessus dn sol; dans le reste de leur ^tendue, ils seront enduits
en p]4tre et blanchis k la chauz, ainsi que le plafond, au moins une fois
Tan, au mois de mai.
7^ Les mangeoires seront ^tablies en mat^riaux imperm^ables et sup-
port6espar un contre-mur, enduit en ciment et mesurant au moins 0", 92
d'^paisseur.
8^ Les fumiers seront d^pos^s sur une aire impermdable, dispos^e en
pente eteutour^e d'un ruisseau ^tanche conduisant les purins k Famorce
de la canalisation souterraine. Ces fumiers seront compl^tement enlev^s,
avant huit heures du matin, trois fois par semaine en toute saison. Dans
les quartiers popnleux, les fumiers seront enlev^s tons les jours, si cela
est jug^n^cessaire. Apr^s chaque enlevement de fumier, Taire sera lav^
et d^sodoris^e.
La liti^re sera toujours maintenue en 6tat de siccit6 et renonvel^e au
moins deux fois par jour.
9^ On aura de Teau sous pression en quantity suffisante pour laver,
matin et soir, les ^tables, la laiterie, les ruisseaux et les cours; chaque
Stable aura sa prise d'eau avec robinet filets.
En cas de plaintes reconnues fondles, le sol de ratable, les ruisseaux
et les fumiers seront d^sodoris^s matin et soir. (A cet efTet, on utilisera
avec avantages une solution de chlorure de zinc ^5 p. 100, du plAtre cuit
ou des superphosphates pulv^ris^s, etc.)
10^ Les d^pdts de fourrage seront s^par^s de ratable par un mur enma-
^onnerie ; s'ils sont places au-dessus, le sol du grenier sera rendu incom-
bustible et impenetrable aux poussi^res au moyen d'un carrelage, d'nne
aire en pl&tre ou en ciment ou de tout autre moyen ; il ne pourra etre
^lace aucun foyer ni aucun tnyau de fumee dans le local servant k emma-
gasiner les fourrages.
11^ L'eievage ou Tengraissement des pores est interdit, sauf autorisa-
tion speciale. Toutefois, on pourra toierer I'entretien de deux pores pour
mtiliser le lait non vendudans la joumee; mais la porcherie devra 6tre
s^paree de la vacherie, eioign^e de la laiterie et remplir toutes les conditions
d'impermeabilite du sol et des murs, d'ecoulement k T^gout des urines et
eaux de lavage, ordinairement impos^es aux porcheries.
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VARltTtS. UV
12«Toute vacherie comporte un local special servant de laiterie. Ce
local D'aura aucnne communication directe, soit avec ratable, soit avec les
locanx servant k Thabitationdes personnes, soitavecles cabinets d'aisances.
13<» Le sol de la laiterie sera impermeable et dispose en pente poor le
facile ^conlement des eaux r^sidaaires et de lavage ; les murs seront pour-
vus d'un revStement impermeable (ciment, marbre, verre, c^ramique on
autre) jusqu'^ la hauteur de i^,lb au-dessus du sol; dans le reste de
leur etendue, ils seront reconverts d'une peioture permettabt le lavage
ainsi que le plafond.
14® L'^clairage sera assure par de larges chassis vitr^s et la ventila-
tion par une on plusieurs chemin^es d'appel s'eievant au-dessas du toit et
mesurant au moins 0™,25 c. de c6te.
15<* Les tables, consoles, rayons, etc., seront eiablis en materiaux im-
perm^ables.
16® Les vases destines k recevoir on ^ distribuer le lait seront en ma-
ti^res impermeables (verre, porcelaine ou metal toujours bien etame k
retain fin), ils seront munis d'un couvercle de m^me nature, Temploi de re-
cipients emaiiies ou vernis au plomb est formellement interdit.
17® Tout vase ayant servi devra etre lave avec soin k Teau bouillante;
on ne devra le rincer qu'avec de Teau bouillie ; cette precaution est in-
dispensable, Teau non bouillie renfermant des microbes capables d'alte-
rer le lait.
18® La laiterie ne devra renfermer aucune substance ou appareil (dep6t
de petrole, essence minerale ou autre) pouvant degager des gaz, des va-
peurs ou des odeurs capables d'impregner le lait et de lui donner mauvais
goftt.
19® Toutes les eaux residuaires et de lavage provenant de la laiterie
doivent etre dirigees vers Tamorce de la canalisation souterraine conduisant
k regout.
11. — CONDITIONS AUXQUELLES DOIVENT SATISFAIRE LES VACHES LAlTltlRBS
POUR DONNER LB MAXIMUM POSSIBLE DE S^CURITE
1® Toules lesvaches de retable ou Ton produit du lait destine k la con-
sommation publique doivent etre soumises par un veterinaire k repreuve
dela tube rou line.
2® Apr^s repreuve. les vaches saines seront separees des malades; k cet
eCTet, on leur affectera une e table speciale, ou, k defaut, on divisera Fan-
cienne etabie en deux compartiments distincts, au moyen d'une cloison
pleine occupant toute la hauteur de I'etable. L'an de ces compartiments,
desinfecte k fond, sera affecte aux vaches saines ; on n'y introduira pas de
vache nouvelle sans Tavoir prealablement soumise k repreuve de la tuber-
caline.
3® Quant aux vaches ayant reagi k la tuberculine, elles feront Fobjet
d'nn examen clinique minatieux; celles qui presenteront quelque signe
cliniquede tuberculose devrontetre, sans deiai, conduites ^ Tabattoir, dont
Tinspecteur veterinaire decidera, conformement k laloi,si leur viande peut
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•HZ REVUE PHILANTHROPIQUE.
canon ^tre mise en vente; les antres pourront 6tre conserv^es tant
qu'elles donneront du lait; mais leur lait ne pourra dtrelivr^ k laconsom-
mation qu'apr^s avoir 6t^ boailli ^la vacherie. D^s qu'elles ne donneront
plus de lait, elles devront 6tre r^form^es et condnites k Tabattoir.
4<> Toutes les vaches de ratable devront Hre visit^es par un v^t^rinaire
au moins une fois par mois.
5<> Toule vache reconnue malade devra 6tre s^par^e des autres et son
lait mis k part jusqu'k ce que le v^t^rinaire, pr^venu imm^diatement,
decide si Tanimal peut rentrer dans le rang, si son lait doit 6tre jet6 k
ragout ou s'il peut Hre consomm^ apr^s avoir 6t^ bouilli.
Pourra 6tre venduapr^s Ebullition le lait produitparlesvachesatteiotes
de fl^vre apbtease, de p^ripneumonie, d'exanth^me coital on de cowpox
vrai ou faux, et par celies qui ont 6t^ mordues par un animal enragd.
Devra Etre jet6 k I'^goatle lait provenant des vaches atteintes de cbar*
bon, de rage d^clar^e, de m^trite suppur^e, de non-d^livrance, d'ent^rite
diarrh^ique, de mammite (aigue ou chroniqne), de nephrite ou de cystite
calculeuse ou himaturique.
6<> On devra aussi jeter k ragout le lait colore en bleu, en rouge ou en
jaune, celui qui renferme du sang, celui qui se recouvre de moisissures.
celui qui provient d'une vache k laquelle on a administr<^ k litre de medi-
cament de rather, du chloroforme, de I'ammoniaque, de I'asa-foBtida, de
Tessence de t6r6benthine, de Tacide ph^nique, etc. ; il en sera de m^me
pour le lait additionnE d'une substance Etrang^re quelconque, m^me des-
iin6e k le conserver.
7^ Le lait produit par les vacbes en parturition ne pourra 6tre livrE Jila
consommation que huit jours aprds la mise-bas.
8<> A chacune de ses visites, le vEt6rinaire devra s'assurer de la bonne
quality des aliments donnas aux vacbes, de la bonne tenue de ratable et
de la laiterie. 11 devra, chaque fois, noter ses impressions sur un registre
special dEpos6 k la vacherie et dont le laitier producteur aura la garde.
Avant de terminer, voire sous-commission croit devoir soumettre k
votre appreciation la question de savoir s'il n'appartient pas k I'Assistance
pobiique de Paris de donner I'exemple et d'ins^rer dans le cabier des
charges de ses adjudications I'obligation, pour ses fournisseurs, de satls-
faire aux conditions que nous venous d'^num^rer.
II est probable que le prix du lait qu'elle consomme en serait l^g^re-
ment augments ; mais la sant6 des enfants et des malades qui lui sont con-
fi^s ne justiQerait-elle pas, et an delk, un l^ger surcrdtt de d^penses ? Et
d'ailleurs n'est-il pas probable, comme Tindiquait M. Duclaux dans la der-
nidre stance, que I'usage d'un lait meilleur hdterait la gu^rison de nom-
bre de malades et diminuerait la d^pense aff^rente k chacun d'eux.
Notre president Etudiera cerlainement cette question et saura lui don-
ner, nous en sommes bien convaincus, la meilleure suite qu'elle comporte.
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CHRONIQUE ETRANGfeRE
Allemagne.
l'aSSURANGB OBLIGATOIRE CONTRE lbs ACaDENTS EN 1896 (1)
Le nombre moyen de personnes assar^es contre les accidents, pendant
I'ann^e 1896, s'^^ve k 17605190.
Ge total se compose de :
5734680 personnes appartenant h rindustrie.
11189071 — k ragriculture et aux travaux forestiers.
681439 — aux administrations publiques.
Le nombre des accidents de personnes survenus pendant Tannee et
ayant motive indemnity est de 85 272'et comprend :
38538 accidents survenus dans I'industrie.
42934 , — dans i'agriculture et les for^ts.
3800 — dans les administrations publiques.
An point de vue des consequences, les 85272 accidents de Tann^e 1896
se d6composent en :
Gas de mort 6989 soit 8,2 p. 100
Gas d'incapacit^ permanente totale 152i — 1,« —
Cas d'incapacit^ pennanente partielle 44373 — 52,0 —
Gas dlncapacit6 temporaire (de plus de 13 se-
maines) 32386 — 38,0 —
Total des accidents indenmis^s. . . 85272 100,0 p. lOQ
Le nombre total des accidents d^clar6s s'^l^ve k 349 388, dont 233 319
aux corporations industrielles, 91 099 aux corporations agricoles et fores-
ti^res, et 24970 aux administrations publiques. En ce qui concerne parti-
cuH^rement les corporations de Tiudustrie, la statistique des accidents en
1896 foumit les r^sullats suiyants :
Accidents survenus dans Vensemble des coi*porations industrielles en 1896.
Proportions p. 100
du Moyennos
total des accidonts par
N ombres. indemnis^s. 1 000 assures.
Gas de mort 4040 10,5 0,71
Gas dlncapacit^ pennanente totale. . 595 1,5 0,10
Cas d'incapacit^ pennanente partielle. 20251 52,6 3,53
Gas d'incapacit^ temporaire 13652 35,4 2,38
Ensemble des accidents indemnis^s. 38538 100,0 6,72
Ensemble des accidents d^clar^s . . 233319 » 40,69
(1) BulUtin de VOffice du travail, 5* annde, n» 2, fdvrier 1898.
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Cas
do mort.
Gas d*iocapacit«
permaneDte
totale. paniell«.
Cas
d'inoapacit^
temporaire.
Ensemble
des accidenU
indemnis^
0,10
0,44
1,09
0,57
2,80
0,77
0,73
2,11
0,53
4,14
0,68
0,43
2,38
0,86
4,35 '
0,71
0,49
2,70
0,81
4,71 .
0,73
0,38
3,27
0,98
5,36
0,71
0,32
3,42
1,10
5,55
0,65
• 0,30
3,55
1,14
5,64
0,69
0,27
3,82
1,25
6.03
0,66
0,16
3,82
1,62
6,25
0,67
0,13
3,57
1,85
6,24
744 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Les moyennes rapport^es anx nombres d'assur^s mesarenl la frequence
des accidents. Depuis rorigine de Tassurance (1886), la frequence annuelle
des accidents a subi les variations qn'indiquent les chiiTres ci-dessous :
Nombi^es annuels moyenSy par 1000 assuriSy des accidents moHvant indemniU
survenits dans Vensemble des corporations induslrielles.
Annies.
1886. . .
1887 . . .
1888, . .
1889 . . .
1890. . .
1891 . . .
1892 . . .
1893 . . .
1894 . . '.
1895 . . .
1896 .... 0,71, 0,10 . 3,53 2,38 6,72
L'ensemble des accidents a augments d'ann^e en ann^e. Mais I'augmen-
tation ne porte que sur les accidents les moins graves. La frequence des
cas de mort manifeste une Constance remarqaable et les cas d*incapacit6
permanente absolue ont mdme dimina^. Toutefois, cette diminution est
plus apparente que r^elle. Au d^but, la statislique des accidents enregis-
trait comme cas d'incapacit6 « permanente » toutes les incapacitSs de plus
de six mois. Les moyennes des premieres ann6es expriment, par suite, la
frequence des incapacit^s totales de plus de six mois, tandis que les
chiffres plus r^cents r^sultent d'une appreciation plus exacte et plus con-
forme k la r^alite des cas d'incapacit^ permanente.
Les trois derni^res ann^es ont donn^ 0,16, 0,15 et 0,10, moyennes trfes
voisines de celles qu'indiquent, sous le titre d^incapacit^s permanentes
absolues, les statistiques de I'assurance centre les accidents en Autriche;
or, dans ce pays, I'organisation financi^re de I'assurance, bas^e sur la ca-
pitalisation et la constitution immediate des capitaux des rentes de blesses,
oblige k n'enregistrer comme incapacity permanentes que les incapacit^s
qui paraissent devoir ^tre efTectivemenl definitives, et k exclure de la ru-
brique toutes celles qui ne sont, en r^alit^, que des incapacit6s tempo-
raires de longue dur^e.
L'augroentalion des cas d'incapacit6 permanente partielle semble avoir
atteint son terme. La proportion a pass^ par un maximum en 1893 et en
1894.
Quant aux cas d'incapacit^ temporaire, k Tinverse des precedents, lis
ont augments surtout pendant les derni^res ann^es et leur accroissement
n'est probablement pas acheve.
R^sultaU financiers. — Les d^penses de I'annee 1896 se montent k
73 389500 marks. EUes pr^sentent une augmentation de 5065230 maii^s
sur les depenses (68 324 270 marks) de Fexercice precedent .
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CHRONIQUE feTRANGfeRE-
745
En particulier, les corporations indastrielles onl supports Un chiffre de
d^penses ^gal k 51 001 311 marks et ont perdu 64522466 marks de recettes;
Les salaires entrant enligne de compte poor Tassurance, en 1896, atteignent
le chiffre de 3 922 996 000 marks. .
Les d^penses des corporations industrielles se d^composent ainsi qu'il
suit :
Dipenses des corporadons industrielles en 1896,
MoDtant moyen
par 1 000 marks
de salaires
entrant en ligne
de compte
pour I'assuranoeJ
marks.
9,87 ' ^
1,32
0,28
0,14
0,24
1,15
13,00
Designation.
Sommes. par assnrd.
marks. marks.
Secours et indemnit6s 38707865 6,75
Frais d'administration 5183306 0,90
Frais d'enqu^te 1104761 0,19
Frais de justice arbitrale 535814 0,09
Frais de mesures pMventives. . . 936114 0,16
Versements aux fends de reserve. 4533451 0,79
Total des d6penses. . . . 51001311 8,88
La d^pense moyenne totale par 1 000 unites de salaire mesure le coilt
de Tassurance; la proportion correspondant aux seules d6penses en se-^
cours et indemnit^s mesure les charges impos^es exclusiyement par I'in-
demnisation des victim es ou de leurs ayants droit et le traitement des
blesses. Voici les moyennes annuelles constat^es depuis la premiere annSe
d'assurance :
Montant annuel moyen par iOOO marks de salaire, des d^penses totales
et des secours et indemnit6s dnns Vensemble des corporations industrielles.
Annies.
D^pensos totales. Secoars et indemnitds.
marks.
1886 4,64
1887 8,02
1888 9,53
1889 10,07
1890 10,49
1891 11,47
1892 12,62
1893 13,42
1894 13,77
1895 13,78
1896 ... . .-. 13,00
marks.
0,77
2,25
3,27
4,17
5,13
6,12
7,28
8,16
9,06
9,64
9,87
Le mouvement ascensionnel des d6penses totales est, pour le moment,
arrdt^. Cela r6sulte de la diminution des versements aux fonds de r^serv^
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746 REVUE PHILANTHROPIQUE.
des corporations, qui, dans les premieres ann^es, constituaierit une part
importante des d^penses. A partir de la doazidme ann^e, ces fonds de re-
serve seront d^flnitivement constitu^s, et ne receyront pins de versements
pr^lev^s sur les cotisations. Par contre, Ja progression des d^penses en
secoars et indemnil^s se poursait sans rel&che, et ces charges flniront par
atteindre et par d^passer le montant actuel des d^penses totales elles-
mdmes.
l'aSSURANCB OBLIGATQiRB CONTRE L'iNVAUDIT^
ET LA VIEILLESSB EN 1896
Pendant Texercice i896,les31 caisses r^gionales d'assurance contre Tin-
validity et la vieillesse ontconc^d^ 25402 rentes de vieillesse et 60 562 rentes
d'invaUdit^, soit en tout 85 964 pensions. Le nombre de pensions liquid^es
depuis le d^but de Fapplication de la loi (1^' Janvier 1891) jusqu'au
31 d^cembre 1896 s*61^ye, pour Tensemble des 31 caisses r^gionales, A
202408 rentes d'in validity,
et 288212 rentes de vieillesse.
Soit en tout 490620 rentes.
De plus les 9 caisses sp^ciales de pensions relatives aux mines et aux
cheniins de fer ont allou^ pendant la m6me p^riode et par application de
la loi :
14889 rentes d'in validity,
et 5511 rentes de vieillesse.
Soit 20400 rentes en tout.
De sorte que le total des rentes cdnc6d^es par les divers organes de
Tassurance obligatoire pendant les six premieres ann^es de fonctionne-
ment se monle d 611 020 rentes, dont 217 297 pour invalidity et 293 723
pour vieillesse.
Les sommes payees, en 1896, par les 31 caisses r^onales et les
9 caisses sp^ciales atteignent le chifTre de 50489 477 marks A la charge de
TEmpire. Cette somme se decompose comme suit :
marks.
Arr^rages de rentes d'invalidit^ 2H0H79
Arrerages de rentes de vieillesse 27 412939
Remboursements de cotisations :
1<> Aux femmes en cas de mariage 1458107
2* Aux h^ritiers en cas de mort 517252
Total 50489477
Voici, d'ailleurs, les chiffres globaax des sommes payees aux assures
par I'ensemble des caisses r^gionales et particuli^rea :
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CHRONIQUE fiTRANGfeRE.
741
Sommes payees aux assures par les SI caisses rigionalcB et les 9 caisses speciales.
Arr^rages Sommes
do CotisatioDS i la charge
Anndes. rentes. restitutes. Total. de I'Empire.
marks. marks. marks. marks.
1891 15306754 » 15306754 6049848
^ i892 22425035 » 22425035 8971072
1893 28046187 » 28046187 11261653
1894 34647626 » 34647626 13854897
1895 42102002 219369 42321371 16813429
1896 48514118 1975359 50489477 19119658
En ce qui conceme les caisses r^gionales seules, les d^penses de Tannee
1896 semontent^37017413 marks etlesrecettesglobales&lU 536734 marks.
La vente des timbres des cotisations a produit lOi 526 396 marks.
Les rentes liquid^es par les caisses r^gionales sont au nombre de
490620. EUes se d^composent, au point de vue du montant (pour la part k
la charge des caisses) et du capital de couverture, de la mani^re sui-
vante :
Montant annuel Capital
(non compris de
Nombre la subvention couverture
de rentes. derEmpire). correspondant.
Rentes de vieillesse 288212
Rentes d'invalidit^ 202408
marks.
21722842
13882631
marks.
124739862
122985307
Le capital de couverture s'^lftve, en moyenne, i 5,7 fois la rente, dans
la cat^gorie des rentes de vieillesse, et li 8,8 fois la rente, dans la cat^gorie
des rentes d'invalidit6.
Les 490 620 rentes liquid^es depuis Torigine repr6sentent 511 030 titres
partiels r^partis entre les 31 caisses; car, d'apr^s le m^canisme de Tinsti-
tution, plusieurs caisses distinctes peuvent intervenir dans le payement
d'une mdme rente si le titulaire y a vers^ successiveitaent ses cotisa-
tions.
Jusqu'au 31 d^cembre 1896, il s'est produit 154307 extinctions, pour
une somme de 10528175 marks. De sorte qu'& la fin de 1895 il ne restait
plus en cours que 356760 titres partiels formant un chifTre total de
25078298 marks, dont voici le detail :
Rentes de vieillesse
Rentes d'in validity.
Montant
(non oompris
Nombre la subvention
de titres partiels. deTEmpire).
marks.
202015 15026072
. 154745 10051226
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148 REVUE PHILANTHROPIQUE.
L^e mbntant moyen des pensions a 6t6y comme il ^tait k pr^voir, ea
augmentaot progress! vement :
Montant moyen Montant mojen
dela rent e de vieille&se de la r ente d'i avalidit^
Ann^e sans avec sans avec
de liqnidation lasnbvention la subvention lasabvention lasabvention
des rentes. de TEmpire. de TEmpire. del'Empire. de TBrnpire.
marks. marks. marks. marks.
1891 73,60 123,60 63,38 113,38
1892 77,69 127,69 64,70 114,70
1893 80,00 130,00 67,99 117,99
1894 76,14 126,14 71,23 121,23
1895 82,80 132,80 73,98 123,98
1896 85,34 135,34 75,75 125,75
Les frais d'administration, de perception et de contr61e s*§ldyent, pour
1896, k 5 447 303 marks. lis repr^sentent 5,4 pour 100 des colisations
pergues.
L'avoir total des caisses r^gionales, au 31 d^cembre, atteint le chiffre
de 460 638 855 marks, les fonds places 6tant 6valu^s non au prix d'achat,
mais d'apr^s les cours k la m4me 6poque. Le revenu moyen de ces fonds
ressort k 3,53 p. 100.
L'int^rSt de placement diminae lentement d'ann^e en ann^e; |il a ^t^
successivemeDt de 3,67 p. 100 en 1891, 3,67 'p. 100 en 1892, 3,66 p. 100 en
1893, 3,65 p. 100 en 1894, 3,58 p. 100 en 1895 et 3,53 p. 100 en 1896.
Allemagne et Bulgarie.
LA RECONSTITUTION DES MAITRISES
Une certaine ^cole de sociologues en Allemagne consid^re, depuis long-
temps d^jk, qa'une bonne part de rinsucc^s des artisans qui tentent de
sortir de la condition d'ouvriers pour devenir patrons, est due, en premier
lien, k Tinsuffisance de leurs connaissances professionnelles et ensuite, k
ce que, faute de poss^der les premiers dl^ments de la comptabilit^, ces arti-
sans ne peuvent ni tenir leurs livres de comples, ni m^me chillier exacte-
ment la d^pense qu'ils font pour r^aliser tel ou tel outrage ou fabriqaer
tel ou tel objet.
Or, pour rem^dier^ ce doub!e.inconv6hient,Toici que, au lieu de laisser
au jeu de la libre concurrence le soin d'^liminer les pauvres gens man-
quant des aptitudes n^cessaires pour r^ussir comme patrons, ces socio-
logues, ^pris de I'intervention de T^tat, ont demandd aux autorit^s imp^ •
riales d'agir. G'est k leur iniluence qu'en Allemagne, puis en Bulgarie, on
doit les essais de r^tablissement des vieilles mattrises, que la Revolution
ddtruisit en France, et qui viennent d'etre l^galement restaur^es en Alle-
magne et dans la principaut^ bulgare.
En Allemagne, on n'empdche pas encore les ouvriers qui ont I'ambition
d'ouvrir boutique k leur comple de s'^tablir. Mais, dor^navant, pourront
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CHRONIQUE tTRANGfrRE. 749
seals prendre le litre de « maltres » ceux qui,lear apprentissage termini,
auront travaill^ trois ans comme compagnons et qui aaront pu justifier,
devant une sorte de jury nomm^ par I'autorit^ administrative sup^rieure,
des connaissances techniques sufflsantes pour bien exercer leur profession,
lis auront de plus k d^montrer & ce jury qu'ils peuvent ^tablir leurs piix
de revient et tenir correctement leurs livres. Ceux qui n'auront pas ce
titre seront bient6t, esp^rent les promoteurs de cette mesure, d^laiss^s
par les clients.
En Bulgarie, on a 616 plus loin, si nous en croyons un rapport de
M. Elliott, consul g^n^ral d'Angleterre k Sofia. Une loi vient tout sim-
plement de rdtablir les guilds ou anciennes corporations du moyen &ge
dans la principaut^ bulgare.
D'apr^s cette loi, toute personne qui desire exercer une des professions
dont on donne une longue Enumeration et parmi lesquelles Ogurent celles
de : tailleur, cordonnier, tonnelier, ma^on, menuisier, tapissier, mouleur,
forgeron, sellier, chapelier, horloger, bijoutier, tanneur, potier, ferblantier,
imprimeur, relieur, etc., est obligee de faire partie de la corporation formSe
par tons les artisans ou ouvriers de m^me metier.
Tout stranger s'^tablissant en Bulgarie doit fonmir, aux dignitaires de
la corporation dont ij relive, la preuve Ecrite qn'il a appris son metier en
servant comme apprenti ou qu'il est qualifiE comme mattre.Faule de cette
preuve, il iui est interdit d'exercer son metier, avant d'avoir passd un
examen devant ces dignitaires... et payE certains droits d'inscription.
L' stranger qui ne veut travailler que temporairement en Bulgarie doit
payer une taxe annuelle, f)x6e par sa corporation avec approbation du
ministre du Ck)mmerce, apr^s I'obtention d'une permission d^livr^e par la
corporation.
Voillt, on en conviendra, une singuli^re fagon de prot^ger les ouvriers.
Sans doute, Tid^e premiere des socialistes d'Etat allemands qui a
amen6 le vote de ces deux lois, calquEes sur les r^glements des xiv* et
XV* si^cles, est n6e du d^sir explicable de garder contre eux-m6mes les
artisans manquant des aptitudes indispensables pour devenir des patrons.
Mais, d^s qu'on entre dans cette voie retrograde, on va rapidement fort
loin en arri^re ; les Bulgares le d^montrent.
Sous couleur de protection, les guilds bulgares ne tarderont gu^re,
nous en faisons la facile prediction; k tomber dans Tintoierance et la r^gle-
mentation tyranniqne des jurandes et des maltrises.
Puisse cet exemple ouvrir les yeux k ceux qui, en Autriche, en Pologne,
en Roumanie et mdme en France, ont saluE les examens de mattrise alle-
mands comme un progrds 6conomique et social.
G. C.
Bspagne.
LA MANlfeRE DE VIVRE CENT ANS
On dit volontiers du mal de Texistence, bien qu'au fond chacun y tienne
fort. V Guenille si i'on. veut, ma guemlle m'esl ch^re », ditun po^te ; « xnieux
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750 REVUE PHILANTHROPIQUE.
vaut souffrir que mourir, c'est la devise des homroes oidjoute an autre. On
est done siir d'int^resser le lecteur en lui indiquant le moyen de devenir
centenaire. C'est ce qu'a fait un r^dactear d'une revue espagnole (i) qui
signe Nicaise.
Darwin assure que si un ing4nieur m^canicien pouvait d^monter pi^e
k pi^ce cetle machine si parfaite qui est le corps humain, il ne verrait
aucune raison pour que cet admirable m^canisme ne fonctionne pas ind^-
finiment.
Et pourtant, bien que chaque partie de notre corps ne cesse de se re-
nouveier et de se refaire par elle-m^me, nousmourons tons, 4 peu d'excep-
tions pr^s, vers les soixante-dix ans. Ge qui a conduit quelques savants k
afflrmer que chacun recoit de la nature, k sa naissance, une impulsion,
line force de vie pouvant durer soixante-dix ans. D'apr^ cette th^orie,
notre €orps serait sembiable k un instrument d'horlogerie capable de fonc-
tionner environ soixante-dlx ans, ^ condition, bien entendu, qu'on n'oublie
pas de le remonter et qu'il ne lui arrive pas d'accident. Chacun ^tant venu
au monde avec la mdme quantity de vie k d^penser, ceux-U vivraient les
plus vieux qui, ^pargn^s par les f^cheux hasards de I'existence, sauraient
le mieux faire durer la provision de vie qui nous est d^partie par la na-
ture. Or, il est certain que, depuis les premiers temps historiques et dans
toutes les parties du monde, Thomme meurt peu ou prou vers le m4me Age.
« D'autres ne croient pas k une telle limitation. Us pensentque la mort
se produit k la suite de robstruction de T^conomie par les mati&res min^-^
rales absorb^es avec les aliments. » Ilssupposent done que nous pourrions
vivre aussi longtemps que Mathusalem. Voici en effet, d'apr^s enx, pour-
quoi Ton meurt : « On sait que chez le jeune enfant les os des cdtes, da
crAne, des m^choires, des bras sont en majeure partie constilu^s par des
cartilages ^lastiques. » On peut infl^chir jusqu'& un certain point Tos du
bras chez un enfknt sans le casser. 11 plie et ne rompt pas. (Heureux kge
oh les chutes ne sont point dange reuses!) « Mais, k mesure que le sujet
avance en Age, la nature depose dans les os des millions de molecules de
chaux qui les convertissent en os durs. » Vers trente ans, notre squelette
se compose enti^rement d'os tr^s denses qui ne plient plus. « Or, toute
cette mati^re calcaire provient de Talimentation. Et, comma nous conti-
nuous k nous nourrir de la mdme cat^gorie d'aliments toute notre vie, la
mati^re calcaire continue, v6hicol^e par le sang, k se d^poser dans tout
notre corps, et, comme les os n'en ont plus besoin, elle commence k se
d^poser dans les muscles, le foie, le coeur, les poumons et surtout dans
les art^res. » L'organisme subit I'envahissement progressif des mati^res
calcaires. Cela dure une trentaine d'ann^es; le temps ji peu pr^s qu'il avait
fallu k la nature pour op^rer Tossification complete du squelette.
II est permis de supposer que cette « obstruction » du coBur par les
atomes calcaires en alt^re le bon fonctionnement. « En mdme temps, les
vaisseaux sanguins s'^paississent, leur capacity diminue, et le coeur est
contraint de d^ployer une ^nergie plus grande, pour dispenser le sang it
toutes les parties deT^couomie. »
(1) La Hygiene papular; Madrid, 31 octobrvflPT, a^tnnyfte,
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i
CHRONIQUE fiTRANGtRE. 751
Les consequences se devinent : le cenreau, donl la nutrition se fait
moins bien, voit Tintelligence d^croUre ; 1*6 tat du foie am^ne des dyspep-
sies, les muscles cessent de se fortifier et perdent de leur ^laslicit^; les
cheveux blanchissent, la peau devient s^che et rugueuse. Bref, la vie finit
par s'arrdter, tel le mouvement d'une horloge us^e. Et tout cela, parce
que la nature a continue de d^poser de la chaux en notre organisme, alors
que ce n'6tait plus n^cessaire. De sorte que si od pouvait, vers la quaran*
taine, enrayer cette surproduction de la chaux, on^pourrait prolonger
Texistence dans de notables proportions. Tons les dangers ne seraient
pas ^cart^s pour cela; et Ton courrait toujours ]e risque de succom-
ber h une maladie, k une infirmity ou k un accident ; attendn que si Ton
d^couvrait aujourd'hui r61ixir de vie tant cherch^ par les alchimistes du
moyen 4ge, il ne pourrait servir qn*k ceux qui auraient 6chapp^ k ces
perils.
« A premiere vue, il paralt facile de supprimer la chaux; mais, k la bien
examiner, [la chose pr^sente d'insurmontables difficult6s. Tout aliment
contient de la chaux. Les y6g^taux Tempruntent k la terre; les boeufs et
les moutons la tiennent des v^g^taux et nous des uns et des autres. » Tou-
tefois, certains aliments en contiennent plus que d'autres; on pent done
par la selection arriver k prolonger Texistence.
Ici Tauteur passe en revue les aliments. Chose strange, dit-il, le pre-
mier de tous, le pain, « le soulien de Texistence » (el baculo de la vida) en
contient une notable proportion ; le mais ^galement, tandis que les fruits
de toutes sortes n'en recMent que fort peu. « Et c*est une grande erreur
de croire que les fruits ne sont pas nourrissants. Ceux qui en consomment
en abondance conservent longtemps leur jeunesse. »
Voili qui n'est point pour d^plaire aux v^g^tariens. « Un Allemand d^*-
couvrit, il y a peu de temps» que le moyen de vivre longtemps ^tait de
manger des citrons en quantity suffisante. » Le traitement n'avait qu'un
defaut (c'^tait fatal) : le sujet devait absorber [chaque jour autant de ci-
trons que le chiffre 6 ^tait contenu de fois dans le nombre de ses ann^es;
si bien qvL*k partir du deuxi^me ou troisi^me si&cle il ne servirait k rien de
prolonger Texistence puisque tout le temps devrait dtre consacr^ k la con-
sommation obligatoire des citrons.
« Les oignons aussi sont d*admirables conservateurs de la jeunesse,
puis viennent les lentilles, ce grand aliment des races de TEst », le poisson,
(le meilleur aliment aprds les fruits), les ceufs, et successivement ie riz, le
pore (chants par Monselet) les divers v^g^taux et, pour finir, la chair da
veau, du mouton, du lidvre, des oiseaux, du boeuf, et les c^r^ales.
Mais, « s'il faut faire attention k ce qu'on mange, il convient de re-
doubler de precautions quand il s'agit de boire. Dans les Alpes et les Pyre-
nees se perpetue une race qui vieillit k quinze ans et meurt k trente, parce
qu'elle boit de I'eau calcaire ». L'auteur ici fait allusion aux nains et aux
goltreux si nombreux dans les regions montagneuses en question, et dont
Finfirmite, au moins pour le goitre, doit 6tre attribute k la quality de Teau.
An contraire, dit-il, les Chinois qui boivent uniquement de I'eau de pluie
meurent extraordinairement vieux. Par consequent, si vous desirez vivre
plus d'un si^cle, vous boirez [de I'eau de pluie ou de I'eau distiliee sous
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•752 KEVUE PHILANTHROPIQUE.
forme de th6, caf^, etc. L'eau sucr^ea, parait-il, les m^mes propri^t^s que
Feau de la fontaine de Jouvence.
On peut boire k volont^, mais il convient de s'alimenter avec discre-
tion. G'est assez de trois repas k la joarn6e. « Mangez peu de pain, et des
fruits k tous vos repas. Ne dine/, pas trop tard. Faites une lieue par jour.
Dormez profond^ment et assez longtemps chaque nuit. Prenez un bain
cbaud k tout le moins une fois la semaine. Portez de la flanelle. ^vitez,
autant que faire se peut les preoccupations et les chagrins. Travaillez avec
activity, mais sans exc^s. Et si, dans ces conditions, vous n'arriyez pas k,
I'^ge de Mathusalem, du moins vous contribuerez k mettre vos descendants
dans les conditions requises pour y arriver. »
Ces utiles principes d'hygi^ne formulas sous une forme humoristique
m'ont remis en m^moire les joyeux pr6ceptes de r^cole de Salerne, trop
connus pour que je les transcrive ici, m 6 me en latin.
lis m'ont rappeie 6galement les recherches faites, il y a peu d'ann^es,
par une revue anglaise, chez tous les centenaires d'un Gomie, parmi les-
quels on trouva, apr^s interview, des ivrognes et des buveurs d'eau, de
gros mangears et des gens sobres, des amateurs de cafe, des fumeurs, des
priseurs, et m^me des personnes n'ayant ni prise, ni fume. Le difficile
etait de conclure.
Citons, pour terminer, la statistique du D' Luigi Samboni, de Rome,
4'apres laquelle la moyenne des personnes ayant depasse Tdge de 60 ans
est, par 1 000 habitants, de 1 27 en France, 402 en Angleterre, 90 en Norvege,
88 en Suede, 84 en Danemark, 77 en AUemagne et en Hollande, 72 en
Ecosse, 70 en Autriche et en Portugal, 60 en Irlande, 58 en Espagne,
50 daus I'Amerique du Sud, et 40 seulement dans les Indes. AUons, notre
^ieux monde a du bon !
Marius Dupont.
EXHUMATION DE CADAVRES (mESURES SAMTAIRBS)
. La commission des cimetieres de Madrid demande que, etant donne le
peu de place dont on dispose pour les sepultures gratuites, il soit procdde
k I'exhumation des cadavres inhumes depuis plus de cinq ans dans le ci-
metiere de Notre-Dame de la Almudena, k Fexception de ceux qui ont ete
enterres pendant Tepidemie de grippe. (Novembre et decembre 1889. Jan-
vier et fevrier 4890.)
Le Conseil d'hygiene, tout en regrettant cette triste necessite, — due i
un eiat de chbses centre lequel il a proteste depuis longtemps, — admet
qu'on procede k Texhumation de ces cadavres, k Texception tontefois de
ceux qui furent inhumes durant Fepidemie de cholera de 1884-1885; et,
pour eviter les risques que ces exhumations pourraient faire courir k la
sante publique, le Conseil estime qu'il est indispensable que ces exhuma-
tions soient faites dans les conditions et suivant les regies parfaitement
determinees dans le reglement suivant (1) :
(1) La Hygiene popular; Madrid, 31 oclobre 1897.
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GHR0NIQU:E EXRANGfeRE. 153
\^ On procSdera & ces exhumations en suiyant rigoureusement Tdrdre
indiqu6 par les dates des enterrements en commencant par les plus
anciens...
2^ Les travaux dont il s'agit 6tant r^ellement pSnibles et soavent dan-
gereux pour ceux qai les ex^cutent, ils n'auront lieu que pendant trois
heures au plus par jour. On utilisera pour cela les premieres heures de la
matinee, toujours par les jours sees, clairs, ensoleill^s et jamais par les
journ^es plnvieuses ni lorsque dans le sol persislera Thumidit^ de pluies
ant^rieures.
3* Les ouvriers charges des exhumations devront, pour ces travaux,
rev^tir des habits distincts de leurs v^tements ordinaires et qu'ils devront
d^siofecter chaque jour avec le plus grand soin.
4<* Les r^sidus de cercueils, v^tements, etc., seront d^sinfectes au moyen
d'une solution de bichlorure de mercure et de chlorure de sodium (bichlo-
rure 1 gramme, chlorure de sodium 5 grammes, eau 1 litre.) Gette solu-
tion sera r^pandue avec un pulv^risateur sur les portions de terre qui
auraient et^ en contact avec les restes inhumes et, si on le juge k propos,
ces terres seront arros^es au moyen de cette solution.
5*> On n'ach^vera pas Texhumation dans les cas ou, cette operation
commenc^e, on trouverait des restes de parties molles de I'organisme plus
ou moius adh^rentes au squelette; on s'empressera au contraire de recou-
vrir ces restes avec d'abondantes couches de chaux et de sable altem^es.
On en fera autaiit lorsque, au d^but de Texhumation, on rencontrera de
Teau en grande ou petite quantite.
6® Les restes de squelettes provenant des exhumations seront trans-
port's soigneusement dans Tossuaire au moyen d'urnes sp'ciales doubl'es
de zinc et ferm'es qui seront iav'es et ddsinfect'es journellement. Dans
Tossuaire ces restes seront disposes par couches successives recouvertes
chacune d'une couche correspondante de chaux et de terre.
1^ Les d6bris de v^tements ou de chaussures qu'on pourrait Irouver
seront transport's dans one voiture sp'ciale au four oh il sera proc'd' k
leur cremation jusqu'4 complete incineration.
8<* Les urnes fun'raires devront 6tre conserv'es en un lieu reunissant
toutes les conditions d'hygi^ne voulues.
9^ Les pulverisations et irrigations d'sinfectantes auront lieu sous la
surveillance directe d'un personnel competent emprunt' au Laboratoire
municipal de chimie. (Madrid — 49juin 1897. — Approuv^ par le Conseii
d'kygidne le 26 du m6me moi$.)
M. D.
l'enseignbhbnt primairb dans l*arm6e
D'apr&s la statistique dress'e le 31 d'cembre 1887, TEspagae poss^de
une population de 17 565 632 habitants, parmi lesquels 11945 871 ne
savent ni lire ni 'crire. Parmi les autres, un demi-millioti sait lire sans
savoir 'crire. Total; 12 millions et demi d'Espagnols sans instruction
d'aucune sorte ! A peine un tiers des habitants sachant lire et 6crire I
RBVUE PniLANTimOriQUB. — II. 48
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754 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Si, du nombre de ceox qui ne savent ni lire ni ^crire nous retranchons
les enfants Ag4s de moiDs de six ans qui s'^l^vent k 2 522 984 : il reste an
contingent respectable de 9422886 illeltr^s.
- Le Monitew* de VEnseignement primaire (1), atiquel nous empruntons ces
details, proteste contre an si triste 6tat de choses, et demande qu'on se
pr^occupe davantage de rinstruction du peuple. Les jeunes soldats en ma-
jeure partie illettr^s peuvent recevoir un commencement d'instniction
pendant leur s^jour sous les drapeaux. L'arm^e, dit Tauteur de Tarticle, a
le devoir d'instruire les ignorants qu'elle re^oit, d'en faire des citoyeiis
conscienls de leurs devoirs, de d^truire leur^ pr^jug^s : et ce n'est poiat
t4che facile dans an pays plus ^pris de la routine en tonte chose, et plus
mbu de superstitions qu'aucun autre people civilisS.
: En attendant que les ^coles primaires re^oivent de TEtat ane impulsion
plus s^rieuse, il convient que cbaque garnison ait une veritable ^cole od,
pendant deux heures au moins chaque jour, rinstruction primaire sera
donn^e k tons les soldats. Ces ^coles devront 6tre pourvues d'un materiel
convenable et confines k des mattres exp^rimenU^s ; sans oublier que lu
local doit r^unir de bonnes conditions d'exposition, de lomi^re, de salu-
brity, etc. Les exercices de gymnastique, les bains, feront partie du pro-
gramme.
- « Nous devons louer I'esprit du r^glement provisoire actuellement
en vigueur en mati^re d'hygi^ne ; et il est k d^sirer que le r^glement
d^finitif confirme et complete ces bonnes dispositions. On doit aussi tenir
compte de ce fait que Thygi^ne embrasse un vaste champ. II faudrait, pour
bien faire, modifier Tuniforme da soldat suivant les exigences du pays ou
il stationne, et am^liorer son logement.
L'alimentation, aussi, influe sur le d^veloppement de Tindiyidu, sur ses
capacit6s inlellectuelles, sur la quantity et la quality du travail qu'il pent
fournir. Gette influence se fait surtout sentir chez les jeunes gens, et ilme
paralt incontestable que c*esi a tinmffUanee et d la mauvaise qualiti de
talimenlation chez les pauvret, que CEspagne doit de payer chaque annie un
iribut cromant d FanHnie et d la tuberculose. Les jeunes gens ont besoin
d'une nourritnre plus substantielle que les hommes faits, pour cette
bonne raison qu'une bonne part des aliments ing^r^s doit servir, chez eux,
aiu d^veloppement du corps. De Ik les nombreuses infirmit^s contract^es
durant la jeunesse. Les hommes faits n*ont besoin que de compenser les
pertes ^prouv^es par Torganisme. »
L'auteur poursuit, recherchant quelle estTalimentation qui convient le
mieux aex troupes.
«
Sous 1 e rapport de Thygi^ne et de la nourriture, TarmSe fran^aise n a
rien k envier k aucune autre. Nulle part, plus qu'en France, les chefs de
corps ne se pr^occupent du bien-6lre physique et moral des troupes. Nous
somDaes loin du temps od les soldats coochaient deux par deux, oii toute
une chambr^e mangeait k la mdme gamelle, od Tordinaire ^tait invaria-
(1) Le Moniteurde I'Bnseignement p^Hmaire, 39* ann^e, n» 2, p. 19; Barcelona
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CHRONIQUE fiTRANGfeRE. . 755
blement le m^mo d'un bout de TannSe k Taatre, oii les brimades et les
cbitiments corporels ^laienl tol^r^s, etc. Tandis que de sages r^glemeiits
sauvegardaient la sant6 physique dans notre arm^e nationale, Fapplica-
tion des lois sur Tenseignement primaire faisait disparaitre peu h peu les
illetlr^s et c'est h peine, anjourd'hui, si dans la plupart des d^partements
on en compte un on deux pour cent. En presence de ce qui se passe
ailleurs, ces constatations sont bonnes k faire.
Marius Dupont.
MstatfihUnis d'Am^ric[ae.
LE STNDICAT DU LAIT A NEW-TORK
II vient de se constituer a New- York un syndlcat ay ant pour but de
monopoliser la veute du lait dans cetle ville. Gette soci^t^ dispose de
75 miilloDs de francs.
ItaUe.
PREMIER CONGR^S DE BIENFAISANCE POUR LES SOURDS-MUETS A MILAN
A la suite du Gongr^s des Instituteurs de sourds-muets tenu k G^nes
du 1*' an 6 septembre 1892, il s'^tait form^, pour r^pandre I'instruction
des sourds-muets en Italie, un comity dont le si^ge 4tait k Milan. Faisant
appel h toutes les bonnes volont^s, le comity a organist, en faveur des
sourds-muets, un premier congr^s de bienfaisance qui tiendra ses stances
k Milan les 21, 22 et 23 avril prochain. D^Jk les organisateurs ont regu de
nombreuses adhesions de la part de personnes influentes et autoris^es. La
circulaire envoy^e par eux contient une lettre de Sa Majesty la reine
d'ltalie, qui a bien voulu prendre le congr^s sous son auguste patronage,
— deux letlres du ministre de I'instruction publique, les leltres d'adh6-
sion du cardinal archev^que de Milan, du pr^fet et du maire de la ville.
M. Godronchi, ancien ministre, a adress^ lui aussi au president du comite
une lettre de chaleureuse adhesion.
Les jouruaux el revues qui s'occupent de I'enseignement special des
sourds-muels en Italic ont r^serv^ le meilleur accueil k V\dke de ce con-
gr^s, et la presse politique de toute nuance s'y est ^galement montr^e
favorable. L'organisation actuelle de Tenseignement des sourds-muets en
Ilalie est parfaitement insufflsanle et la plupart des sourds-muets de ce
pays restent priv6s d'instruction. Les instituteurs de sourds-muets italiens
ont beau faire entendre d'^loquentes protestations, la situation ne change
pas.
A diverses reprises, des hommes de bonne volenti ont saisi le Parte-
meutde la question. Les ministres interrog6s ont vivement regrett^ que^
r^tat du budget ne leur permit pas de faire autre cho3e que des promesses
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756 REVUE PHILANTHROPIQUE.
et la loi sur Finstraction des sourds-muets, en preparation depuis une
vingtaine d'ann^es, ne paralt pas devoir aboutir de sitdl. II est k craindre
que les preoccupations du gouYernement, k llieure ou la famine s^vit
dan^ plusiears provinces, ne lui permettent pas d'accorder^ cette branche
de renseiguement tout Tinteret qu'elle m^rite. N^anmoins, il convient de
feiiciter le comity milanais d'avoir attird Tattention publique sur le triste
sort des sourds-muets sans instruction.
I] y a quelques jours, comparaissait devant le tribunal de Milan, an
sourd-muet de cinquante-cinq ans, lotalement illettr6, accuse de vol. Le
malheureux avait pris deux verres d'eau-de-vie chez un marchand de vins
sans les payer. Les juges I'acquitt^rent en le declarant irresponsable, mais
en demandant qu'il filt consigne k la Silrete pour cause de securite pu-
blique. M. P. Fornari, directeur de T^cole normale pour les sourds-muets
de Milan, qui lui avait servi d'interprete, rapporte le fait dans la Revue de
TP^dagogie et d'hygihie de Naples, en ajoutant : « De pareils etres, on en
compte de quinze ^vingt mille dans le beau pays oh fleurit Toranger. »
«
« «
Les sourds-muets totalement prives d'instruction sont heureusemenl
beaucoup moins nombreux en France. Gependant il y en a plus qn'on ne
le croit generalement, et probablement beaucoup plus qu'on ne le dit
dans les statistiques officielles. Gelles-ci avouent que 5 k 600 sourds-muels
en Age de scolarite ne trouvent point de place dans les ecoles. Des insli-
tuteurs afflrment que ces chiffres sont fort au-dessous de la verite, et sou-
trennentque 1 500enfants prives d'oule et en dge de scolarite, demeurent
prives de tout enseignement. En Tabsence d'uoe statistique bien faite, il
est fort difficile de se prononcer. Mais quecesjeunes sourds-muets soient
eh realite au nombre de 500, de 1 000 ou de i 500, cela fait toujours pour
la France plusieurs milliers de sourds-muets adultes illettres. La societe
niauque au plus sacre des devoirs en n'assurant pas leur instruction ; et
Ton ne saurait reclamer assez energiquement pour ces malheureux Tap-
plication de la loi sur Tinstruction obligatoire. La loi du 28 mars 1882, en
effet, dit en propres termes ; « Un reglemenl determinera les moyens
(f assurer I'instruction primaire aux enfants sourds-muets et |aux aveu-
gles. » A quand le reglement?
Marius Dupoxt.
R^poblique Argentine.
OEUVRE DU PATRONAGE DE L*ENFANCB
A la fin de Tannee 1897, on a inaugure k Buenos-Ayres la premiere ecole
d'arts et metiers de YGEuvre du patronage de VEnfance. La revue hebdoma-
daire illustree Buenos-Ayres qui nous apporte cette nouvelle est malheu-
reusement tr&s sobre de details precis et tr^s remplie de phrases sonores
et d'idees generales et vagues sur la bienfaisance. Ellc detaille, un peu
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CHRONIQUE JfeTRANGfeRE. 157
longuement peut-6tre, celle pens^e que la charit6 publique est une dette ^
lasocidt^. Nous pensons que cetle oeuvre est assez r^cente, car elle ne
figure jpas dans la nomenclature donn^e il y a quelques ann^es parflmilid
Goni; elle a ^videmment pour but Tinstraction morale et professionnell^
des enfants abandoun^s, et noas voyons, plus par les illustrations que par
le texte» qa'elle a construit un vaste bdtiraent avec des ateliers oii Ton
fabrique la vannerie, la sparterie, les balais et les plumeaux, sans parler
d'un atelier de couture pour ^Idves tailleurs et d'un atelier de relinre.
Ges constructions paraissent bien comprises ; elles ont dH coiiter assez
cher, mais le journal Buenos-Ayres se borne k nous dire qu*elles ont M
6rig^es raoins par les soins de Tarchitecte que par la g6n^roslt^ des dames
de la R^publique Argentine.
La R^publique Argentine est, nous avons eu d^j^ k le dire, dans une
p^riode d'activit^ feconde au point de vue de Thygi^ne etde Tassistance. Pour
les enfants il n'y avait gu^re jusqu'il une 6poque voisine de nous, c'est-^-
dire jusque vers I'ann^e 1880, que I'asile des enfants trouv^s fond^ en 1774
par d^cret du vice-roi Juan Jos^ de Yestiz k la suite d'une petition de Mar-
cos Jos^ de Rigloset de douze de ses voisins qui pensaient qu'ily avait ur-
gence de prendre les mesures'destin^esli emp^cberle spectacle douloureux
de rencontrer des enfants dUvoris par des chiens et des porcs^ morts dans les
rues ou abandonn^s dans des terrains vagues.
N'est-il pas curieux de rapprocher ce fait de la cr<$ation du Foundling
Hospital de Loudres sur la petition du Thomas Goram en 1739, 6tablisse«
ment dont nous avons racont^ Thistoire dans celte Revue?
Quoi qu'il en soit, c'est en 1779 que fut ouvert Thospice des enfants trou-
v68 de Buenos-Ayres. — Ferm6 en 1838 par Rosas, ouvert de nouveau en
1852, il revolt les enfants ubandonn^s jusqu'^ 5 ans, puis il les place dans
un orphelinat. 11 y a ^ Buenos-Ayres d'autres dtablissements qui recueillent
les enfants sans famille : un Asile d'orphelins fond^ en 1871 ; une Maison
des orphelines de la Merci, qui semble plus ancienne ; une Soci^t^ protectrice
d' enfants orphelins et abandonn^s, fond6e eu 1884 sur Tinitiative du Club
industrial argentino ; un Asile Soi'jihelines pauvres fond^ aussi en 1884.
La SodHe du Patronage de I'Enfance est une oeuvre digne d'int^r^t, puis-
que c*est par T^ducationprofessionnelle qu'elle entend assister ses petits
hospitalises. On nepeut qu'applaudir aux sentiments de charity ^lev^s qui
ont conduit les dames argentines a adopter cette forme de Tassistance.
H.N.
Russie.*
LE REPOS DU DIMANGHE DANS LES MAGASINS A P^TERSBGURG (1)
line ordonnance municipale entree en vigueur le 15 aotlt dernier ne per-
met plus Touverture des magasins, le dimanche et les jours de fdte, dans la
(1) D'apr^s une communication de I'ambassadeur de la R^publique franchise
h. Saint-P^tersbourg, reproduite par le Bulletin de I'Office du travail.
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158 REVUE PHILANTHROPIQUE.
capitale russe, que de midi k cinq heares. Get arrSt^ pr^voii, toaiefois, de
nombreuses exceptions, notamment en faveur des pharmacies, spectacles
et lieux d'amusement, entreprises de transports, restaurants et debits de
boissons populaires dits traktirs, ces derniers d^jd soumis k une legis-
lation sp6ciale.
Les magasins de denr^es alimentaires et de boissons non spiritueuses
sont, en outre, autoris^s k vendre jusqu'd 10 heures 4u matin.
Gette ordonnance a souley^ de violentes reclamations des commer^ants
doQt elle l^se les int^rSts. Mais ces reclamations ont ete repouss^es avec ce
considerant « que les int^rdts de la population sont confies k la manici-
paiite comme repr6sentant de la totality de la population, et, qu'en con-
sequence, le droit des particuliers de porter plainte, en se pla^ant k leur
point de vue special, centre les decisions de la municipalite n'existe pas. »
Su^de.
LES HABITATIONS OUYRltRES
M. de Stadling, dans la Revue municipaley analyse les causes du manque
de petits logements k Stockholm; cette penurie provient, d'apr^s lui, en
premier lieu de la regularisation des rues et voies publiques, en second
lieu de la repugnance des flnaociers k engager leurs capitaux dans des
entreprises de constructions peu remuneratrices.
Malgreies tentatives faites par les associations cooperatives « pour habi-
tations x>, qui n'ont pas reussi, malgre certains efforts philanthropiques, la
situation ne fait que s'aggraver. Le Gonseil municipal s'estreuni et a nonune
une commission pour s'occuper specialement de cette importante question.
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INFORMATIONS
L'Assistanoe auz Strangers.
Le Conseil sup^rieor de TAssistance publique, dont nous avons
public Tavis sur la question des malades strangers trait^s dans les
bdpitaux fran^ais (1), a dmis sur le mdme objet les voeux ci-apr^s :
1<* Que les hospices soient admis k exercer un recours contre les em*
ployeurs pour lesd^penses effectu6es dans les hospices, par les ouvriers
strangers atteints de maladies aiguesjusqu'^ concurrence de... jours d'hos-
pitalisation.
2'> Qu'unetaxe variable et que la loi de finances fixerait pour une p^-
riode d^lermin6e soit per9ue k litre de centimes addllionnels sur les
quatre contributions directes auxquelles seraient soumis les Strangers do-
micili^s en France.
Dans les communes oii par suite d'une subvention d'un gouvernement
stranger, d'une Iib6ralit6 de source quelconque, Tassistance aux strangers
sera assur^e par des fondations sufflsantes, les strangers serout r6dim^s
de la taxe. . .
Sans prejudice des traitSs qui pourraient* 6tre conclus avec tel gouver-
nement Stranger.
« II est desirable que les communes int^ress^es au s6jour des strangers
contribuent aux frais d'hospitalisation des malades Strangers qui conti-
nueront k 6tre re^us dans les h6pitaux en cas d'urgence ».
L' Assistance auz vieillards, auzinflirmes et auz incurables.
Dans la Revue Philanthropique du iO septembre dernier, nous avons
iudiquS les premiers rdsultats de Tlnvitation faite aux dSpartements d'orga-
niser Tassistance aux vieillards, aux infirmes et aux incurables en confor-^
mitS de Tarticle 43 de la loi de finances de 1897.
A ce moment, dix-huit dSpartements avaient adh6r6 au principe de la
loi et yot6 on credit. Tons les autres dSpartements avaient ajournS leur
(1) No 1, informations, p. 121. *
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760 REVUE PHILANTHROPIQUE.
decision ou refuse, pour diverscs raisons, d'entrer dans la yoie de cette
assistance.
La situation que nous ayons k signaler anjourd'hui est bien meilleure.
En Yoici le relev^, tel qu'il r^sulte des propositions vot^es pour le budget
dei898:
Ont organist le service (47 d^partements) : Ain, Hautes-Alpes, Alpes-
Maritimes, Ari^ge, Aube, Aude, Ayeyron, Bouches-du-Rli6ne, Charente-
Inf^rieure, Cher, Corr6ze,Cdte-d'Or, Creuse, Dordogne^Eure, Eure-et-Loir,
Gard, Haute-Garonne, Gironde, llle-et-Vilaine, Indre, Indre-et-Loire, Jura,
Loiret, Lot, Lot-et-Garonne, Loz^re, Maine-et-Loire, Marne, Meurthe-et-
Moselle, Ni^vre, Nord, Oise, Pas-de-Calais, Puy-de-D6me, Rhdne, Sadne-et-
Loire, Savoie, Haute-Sayoie, Seine-et-Marae, Seine-et-Oise, Deux-S^yres,
Somme, Vaucluse, Haute- Vienne, Vosges, Yonne.
Ont a jour n^ d la session d'avril (19 dSpartements) : Aisne, Allier,
Ardennes, Drdme, Finist^re, H^rault, Is^re, Landes, Loir-et-Gher, Loire,
Haute-Loire, Mayenne, Meuse, Morbihan, Pyr^n^es-Orientales, Tarn-et-
Garonne, Var, Vendue, Vienne.
Ont ajoum6 n sine die » (11 d^partements) : Ard^cbe, Calvados, Corse,
G6tes-du-Nord, Gers, Haute-Mame, Orne, Hautes-Pyr6n^es, Haute-Sadne,
Sarthe, Seine-Inf^rieure.
Ont ajoum^ jusqu*au vote (Tune loi organique (6 d^partements) : Basses -
Alpes, Canlal, Cbarente, Manche, Haut-Rbin, Tarn.
Ont refuse (3 d^partements) : Doubs, Loire-Inf6rieare, Basses-Pyr^n^es.
Parmi les d^partements qui ont organist le service ou conserve un
service d^j& existant, 15 n*ont pas encore vot^ de credit. Voici Tindication
des 32 autres avec le cbifTre du credit vot^ :
fr. c.
Ain 10000
Alpes (Hautes-) 19999 87
Alpes-Maritimes 9000
Arifege 1470
Aude. 4366 02
Aveyron 5000
Bouches-du-Rh6ne 27000
Charente-Inf6rieure 2600
CoiT^ze 11610
CAte-d'Or 3183 16
Dordogne 8000
Eure-et-Loir 13615 50
Card 24236
Garonne (Haute-) 36085
Gironde 2400
lUe-et-Vilaine 10620
Indre-et-Loire 15000
Jura 5636 36
Loir-et-Cher 10000
Loire 15000
Lot 40000
Report , . 234821 91
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INFORMATIONS. 161
' tr. c.
A reporter 234 821 91
Lozdre 4750
Mame 58793 81 .
Meurthe-et-Moselle.. 7850
Nord 156000
Pas-de-Calais 35402 70
Savoie 5571 42
Savoie (Haute-) 3870
Seine-et-Marae 1200
Sevres (Deux-) 5592
Somme 6000
Vaucluse 5250
Vienne (Haute-) 10000
Vosges 17849 69
Total 592951 53
Pluslears des d^partements qui ont prononc6 rajoumement sine die et
la piupart de ceux dont la decision est reporl^e It la session d'avrii 1898
ayant adh^r^ express^ment au principe de la loi, il est certain qu'avant la
fin de 1898 I'assistance aux vieillards, aux infirmes et aux incurables fonc*
tionnera dans 80 d^partements environ.
Girculaire relative aux Societes de secours mutuels.
Le ministre de rint^rieur vient d'adresser par rinterm^diaire des
Pr^fetS; aux Presidents des Soci6t6s de secours mutuels approuv^es,
la circulaire suivante :
Monsieur le PRiFET,
Le rapport annuel dress^ par mon administration^ sur ies operations des
Soci^t^s de secours mutuels en France pendant Tann^e 1895, fait ressortir
que les frais de maladie support^s par ces Soci^t^s ont augmente d'une
ann^e ^Tautredans des proportions considerables et veritablement inqui^-
tantes pour leur avenir. Gela tient k deux causes principales que le rapport
en question met en evidence : \^ Tabus des ordonnances niedicales; %^
Tadmission dans les Societes, d litre de membre participants, de societaires
dont retat de fortune les classe piutdt parmi les membres bonoraires.
Dans une circulaire en date du 15 avril 1891, Tun de mes predecesseurs
a dejd mis en garde les administrateurs des Societes de secours mutuels
contre les depenses pbarmaceutiques exagerees. L'augmentation enorme
de ces depenses en 1895 sur Tannee 1894 appela de nouveau mon atten-
tion, et je vous prie de vous reporter aux ternies de la circulaire precitee
pour inviter ces administrateurs &contrdler plus rigoureusement le service
de la visite de leurs malades.
D'autre part, les medecins des Societes de secours mutuels se plaignent
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762 HEVUE PHILANTHROPIQUE.
que des soci^taires dont I'aisance leur fait an devoir d'etre membres ho-
noraires se font inscrire et soot accept^s en quality de membres partici*
pants, et bdn^ficient ainsi, lorsqu*ils soot malades, des soins m^dicanz aaz
piix r6duits accord^s k la mutuality.
Si les rangs des mutualistes sont oaverts k toas les trayaillears de si-
tuation pr^caire on modeste» il n'est pas juste que des gens ais^s, qui ont
le moyen de payer, le cas 6ch6ant, les m^decins au tarif de lear clientele
ordinaire, obtiennent gratuitement, en yersant une minime cotisation, les
visites medicates, les medicaments et mdme one indemnity pour les jour-
n^es oil la maladie les emp^che de yaquer k leurs occupations habituelles.
Tel n'est pas le but des Soci^t^s de secours mutueis ; elles ont ^t^ cr64es
surtout pour les laborieux qui viyent de leur salaire. Les plus fortunes
doivent en 6tre les soutiens naturels en leur consacrant leurs ioisirs et
leurs conseils, et ils font acte de bons citoyens en leur accordant, It litre
de bienfaiteurs, la cotisation exig^e des membres participants. Gette cate-
goric de societaires existe dans presque toutes les Soci^tes. G'est gen^rale-
ment lorsqpi'elles se fondent que la confusion se produit. Les fondaleurs
sont beureux de recruter le plus grand nombre possible d'babitants de la
commune pour grossir le fonds social, et, sans s'arrdter k la difference des
situations, ils les admeltent indistinctement, selon leur d^sir, aussi bien
en qualite de membres participants que parmi les membres honoraires^
G'est \k une erreur de calcul qu'il est necessaire de rectifier.
Je tiens done k ce que les Societes de secours mutueis sachent bien
qu'il est de leur inter^t de se renseigner sur la situation de leurs adhe-
rents, et qu'il leur appartient de ne pas attribuer k ceux qui peuvent etre
membres honoraires les ayantages alloues aux participants. En conse-
quence, les fondateurs ou administrateurs deyront apporter la plus grande
circonspection <dans la reception des nouveaux societaires participants, et
-9ngager les anciens dont la situation de fortune denote plus I'aisance k
entrer dans la categorie des membres honoraires.
Le Ministre de I'lntirieur,
Louis Bartuou.
L' Assistance ans Sourds-Muets.
Dans le numero de la Revue Philantkropique du 10 septembre, noos
demandions la creation d'une societe de patronage pour les sourds-muets (1).
II a ete donne suite k notre demaode. Nous apprenons en effet qu'one
SocUti pour le placement^ le patronage et Vasmtanee des anciens iUves de
rinsHtutionnationale des Sourds^Muets de Paris yient d'etre creee, et que la
premiere Assembiee generale a eu lieu il y a quelques jours.
Les membres adherents, au nombre d'une soixantaine, se sont reunis
(!) Assistance des sourds-muets par le travail (creation d'une societe de patro-
nage), par M. A. Dubranle, n» 5, p. 677.
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INFORMATIONS. 763
pour adopter les projets de Statuts etpour procdder k F^IeclioQ d'un Con-
seil d'adminislration compost de 21 membres.
M. le ministre de I'lal^rieur, M. le directeur de TAssistance et de I'hy-
gi^ne publiques et M. le President de la Gommission consultative de Tin-*
slitution nationale sont nomm^s Presidents d'honnear de la Sooi^t^.
M. le Directeur de rinstitution nationale est de droit President du
€k)nseil.
Ghoisissant parmi ses membres, le Gonseil a 61u pour constituer son
bureau :
MM. DuBRANLE, censeur de rinstitution 'nationale, vtce-pr^judent ;
Mavr^, avocat k la Gour d'appel, secretaire;
Mauricb Pkrbirb, ing^nieur des arts et manufactures, Msarier,
Nous tiendrons nos lecteurs au courant du d^veloppement de cette
eeuvre naissante qui, nous en avons la conviclion, saura se montrer k la
hauteur de sa tdcbe. Pour le moment, nous nous bomons k sonhaiter que
le nombre de ses membres augmente et qu'elle recrute, non seulement des
philanthropes, mais aussi des industneis susceptibles d'aider au placemen^
des anciens ei^ves ou m^me de les employer dans leurs ateliers. Souhaitons
enfin que, dans un avenir plus ou moins ^loign^, elle puisse s'occuper non
seulement des Sourds-Muets de Paris, mais encore de tous les Sourds-
Muets de France.
Le Service des Enfants moralement abandonn^sde la Seine.
Yoiei, d'apr^s les rapports de M. Peyron, directeur de i'Assistance pu-
bliquede Paris etde M. Patenne, rapporteur du Gonseil g^n^ral, la situa-
tion du service des enfants maltrait^s et moralement abandonn^s pendant
Tann^e 1896:
Aui*' Janvier 1896 la population des enfants moralement abandonn^s
6tait de 3284; les radiations ont et6 de 878; les admissions de 281.
11 restait done au 31 d^cembre 1896 2 987 enfants.
Les radiations se sont produites ainsi:192 rendus k leur famille; — 23
rapatn^s dans leur d^partement d'origine ; — 155 ayant atteint leur ma-
jorit6 ; — 13 mari^s ; — 26 engages volontaires ; — 13 d^c6d6s ; — 55 ray^s
des contr61es; — 16 passes dans la cat^gorie des enfants assist^s; — 95
ayant quitt^ leur placement et n'ayant pas encore ^t^ r^int^gr^s au 31 d^
cembre 1896.
Sur les 192 el^ves remis k leur famille, 174 ont ^t^ rendus gratuitement
et 18 Tont €i^ apr^sremboursementpartiel desfrais d'entretien. La somme
totale vers^e par les families pour ces 18 enfants s'^Uve a 815 francs.
Dix demandes de rapatriement ont 4t6 introduites en 1896 pour des en*
fants moralement abandonn^s Strangers au d^partement de la Seine. Six
de ces demandes ont 6i€ accueillies par les d6partements, et quatre ont €16
reponss^es; 13 enfants dont le domicile de secours a4t^ reconnu au cours
de Fannie 1896, ou Favait 6i€ antdrieurement, ont 6t^ effectivement rapa-
^ Les 281 admissions se d^composent ainsi : 32 enfants envoy^s par le Par-
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764 REVUE PHILANTHROPIQUE.
quet, 70 par la Pr(§feciure de Police, 453 pr^sent^s par ies parents, 26 ad*
mis indireciement.
Ges m^mes enfants, r^partis en categories d'apr^s Ies condiiioDS de lear
milieu dorigine,donnentiieu a laclassincation suivante:46 enfants de pa-
rents indignes; — 461 enfants de parents indigents; — 10 enfants de pa-t
rents disparus; — 5 enfants de parents d^c^d^s; — 59 enfants vicieux de
parents honndtes.
Les enfants enyoySs en 1896 par le Parquet et la Prefecture de Police
8ont an nombre de 102, alors que la proportion correspondante arait 6tS
de 174 en 1895 et de 265 en 1894.
Les 281 admissions comprennenl 134 enfants indisciplines ou ayant de
mauvais penchants; lis se r^partissent eux-m^mes de la mani^re suivante
d'apr^s leur proTcnance familiale:i6 enfants de parents indignes, 57 en-
fants de parents indigents, 2 enfants de parents disparus, 59 enfants yi*
cieux de parents honndtes.
L'administration de I'Assistance publique a recu, en 1896, 864demandes
ayant pour but le placement d'enfants dans le service.
Sur ces 864 demandes, 281 seulement ont ^l^ admises apr^s avis de la
commission speciaie institute par le Gonseil general.
Une somme de 8 300 francs a 6i^ distribute en secours.
Au 31 decembrel896, les 2 987 pupilies du d^parlement de la Seine
(Enfants moralement abandonn^s) etaient ainsi r^partis :
1 039 (620 gardens, 419 fllles) places isol^ment moyeunant pension.
i 614 (1097 garcons, 517 (lUes) places isoiementhors pension.
122(120 garcons, 2 fllles) places en groupes.
173 (110 gar9ons, 63 fllles) places dans les ^coles professionnelles de
Villepreux, Montevrain,Port-Hallan, Yzeure, Sauvic.
28 (gardens) places & Boulogne
1 1 (4 gardens, 7 fllles) restants k I'Hospice.
Les 122 enfants places en groupe etaient ainsi r^partis :
22 (garcons) k la verrerie de Bar-sur-Seine (Aube) ; — 20 ^la verrerie de
Bayel (Aube); — 13 i la faienceriede Choisy-le-Roi (Seine) ; — - 47 i la ver-
rerie de Navez (Meurthe-et-Moselle); — 36 dans une booneterie de Troyes
(Aube); 12 a la verrerie de Vierzon (Cher). 2 Qlles dans une maison debro-
derie de Montreuilsous-Bois (Seine),
Le Traitement marln.
A la dale du 30avril 1897. M. leministre de rinterieur a tr^s vive-
ment appeie rattention des pr^fets sur rappiication da traitement
marin en verlu de la loi sur Tassistance medicale gratuite anx en-
fants indigents attaints de rachitisme ou de scrofule :
Voici le texte de celte circulaire.
J'ai I'honneur de vous signaler ci-apr^s les conditions dans lesqaeiiea.
les enfdnts indigents atleints de rachitisme ou de scroftde doivent, quand
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INFORMATIONS. 765
levCr mal est curable, proflter de la loi du i5 juillet 1893 sur Tassistance.
m^dicale gratuite.
Yous remarquerez d*abord qu*il ne s'agit pas d'^tendre, par une bien-,
veillante interpretation, i'assistance m^dicale a cette cat^gorie d'enfants :
ce benefice leur est dH en conformity de la r^gle g^nSrale que Tarticle .1^'
de la loi du 15 juillet 1893 a ^dict^e.
Aux termes du premier paragrapbe de cet article, « tout Frangais. ma-
lade, priv6 de ressources, re9oit gratuitement de la commune, du d^par-
teraent ou de TEtat, suivant son domicile de secoars, Tassistance m^dicaie
h domicile ou, Vil y a impossibility de le soigner utilement k domicile,
dansun ^tablissement bospitalier ».
L'enfant racbitique ou scrofuleux, dont le mal est curable, n'est pas un
inflrme, un de ceux pour qui Taction tb^rapeulique ne peut s'exercer et
auxquelsen consequence Tassistance cr^^e par la loidu 15 juillet n'estpas
due : il est un malade ; et s'il est « priv^ de ressources », ii doit ben6(lcier'
de cette Joi.
Comment pourra-t-il en b^neAcier, dtre « soign^ utilement » ? Ge ne-
sera ni k domicile, ni dans un bdpital ordinaire : ce sera dans un b6pital
marin. Les medicaments donnas anx rachiliques et aux scrofuleux peuvent
attenuer les manifestations du mal; ils ne I'enrayent que pour de courtes
periodes, ils ne le gudrissent pas. line experience decisive, poursuivie
aussi bien en France, et notamment k Tbdpital de Berck, qn'k I'etranger,
prouve qu'iin'y a centre le racbitisme et la scrofule qu'un remMe efficace :
ce remede est le traitement marin, la cure par les bain? de mer.et surtout
par Tair de mer. II est d'ailieurs evident que plus le traitement est iustitue
k une epoque voisine du commencement de la maladie, plus sont nom-
breuses, toutes autrescboses egales, les cbances d'une complete guedson.
EUe n'est souvent obtenue, mdme & regard des malades soignes au debut,^
que par un sejour prolonge k Thdpital marin; et de ce chef la depense
sera, je lereconnais, relativement eievee. Mais les scrofuleux et les racbi-
tiques sont sujets k des maladies incidentes plus frequentes et plus graves
que celles qui atteignent la population normale. Si le traitement marin
leur est refuse, ii deviendroht les clients les plus assidus des h6pitaux or-'
dinaires. II est moins coiiteux de guerir maintenant un racbitique ou ua
scrofuleux que de Tbospitaliser plus tard k des intervalles de plus en plus
rapprocbes : le traitement marin imposera aux presents budgets de Tassis-
tance medicale des depenses inferienres k celles qu'il epargnera aux
budgets futurs.
En deborset au-dessus des considerations flnanci^res, vous serezfrappe
de I'interdt social qui est ici engage.
Les racbitiques et les scrofuleux, quand 11 ne sont pas vpues k une
mort prematuree, ne peuvent se livrer qu'^ un travail intermitttent dont
le rendement est tr^s faible; et sHls ont une descendance, elle n'ecbappe
que rareraent k la tare her^ditaire. GueHr unde ces malades, c'est k lafois
exonerer d'une charge ulterieure FAssistance publique et transformer une
non-valeur en une force.
Yous savez d'ailleurs que la scrofule predispose k la maladie qui est
beaucoup la plus meurtri&re, k la tuberculose pulmonaire, L'extension du
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766 REVUE PHILANTHROPIQUE.
traiiement marin coniribtiera au relfevement Qum^rique de noire popala-
tion et lui apportera de nouyeaux 6l6ments de sant^, de bien-dire et de
richesse.
Je Yous recomraande instamment de faire assarer, autant que vous le
poUrrez, ce traitement k ceax des enfants ioscrits sur la liste d'assistance
m^dicale pour lesquels il est indiqu^ ; j'ai k peine besoin d'ajouter que le
contingent de TEtatest acquis, suivant la mesurefix^eparla loi du ISjuil-
let 1893, aux frais de s^jour de ces malades dans des hdpitaux marins.
Aux termes da second paragraphe de TarticleS de ladite loi, « dans le
cas odil yaurait impossibility de soignerun malade A domicile, le m^dedn
d^livre an certiflcat d'admission k rh6pital. Ge certiflcat doit 6tre centre-
sign6 par le president du bureau d'assistance, oa son d^l^ga^. »
Les regies trac^es par la circulaire minist^rielle du 18 mai 1894 en vue
de I'appHcation de ces dispositions me semblent devoir 6tre corapl^t^s sur
un point.
II conviendra de ne dinger un enfant racbitique ou scrofaleux sur un
bdpital marin qu'apr^s que vous aurez concerts I'admission du malade avec
le directeur de T^tablissement. Gette entente pr^alable est n^cessaire, le
nombre des bdpitaux marins ^tant fort loin de r^pondre aux besoins.
Le certificat d61ivr6 par le m6decin de service et que vous aurez k com-
muniquer au directeur constatera que I'enfant n'est ni atteint ni conva-
lescent d'une maladie transmissible, sp^cialement qu'il n'est pas atteint de
tuberculose pulmonaire.
. M. le D' Bergeron, secretaire perp6tuel de TAcad^mie de m^decine,
president de i'oeuvre des bdpitaux marins, m'adresse au uom de cette
ceuvre une communication dont je crois utile de vous faire part.
II rappelle d'abord que les enfants atteints de scrofule ou de rachi-
tisme c( ne peuvent 6tre soign^s avec Tefficacite desirable ni k domicile, ni
dans les bdpitaux ordinaires, la seule medication pleinement efflcace centre
le rachitisme 6tant le traitement marin ». M. le D' Bergeron ajoute :
« L'oeuvre des bdpitaux marins voudrait coop6rer, dans toute la mesure
de ses forces, k la generalisation de ce traiiement, et j'ai I'bonneur de
vous informer que les jeunes scrofuleux et rachitiques pris en charge par
le service de Tassistance medicate gratuite seront re9us dans les eiablisse-
ments de Banyuls-sur-Mer et de Saint-Trojan aux mdmes conditions qne
les pupilles de I'Assistance : pour les premiers, le prix sera, comme pour
les seconds, abaisse de deux francs k un franc soixante centimes (1 fr. 60). »
Ge dernier taux ne depasse d'ailleurs que de buit centimes la moyenne
des prix des journees d'hdpital fixes par les prefets, conformement a
Tarticle 24 de la loi du 15 juillet 1893; en effet,le rapport general concer-
nant Texecution de ladite loi pendant I'annee 1895, rapport dont vons rece-
vrez prochainement des exemplaires, constate que cette moyenne est deun
ranc cinquante-deux centimes (1 fr. 52).
Les deux etablissements de Toeuvre des bdpitaux marins sent dignes,
tant par leur installation que par leur fonctionnement, de voire entiere
confiance. L'hdpital de Saint-Trojan, dont M. le president de la Repoblique
a bien voula Tan dernier presider Tinauguration, est situe dans Ftled'Oie-
ron (Gharente-Inferieure).
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INFORMATIONS. 767
Je vous prie de m'accuser reception de la presents circulaire par un des
prochains courriers; je voqs serai ^galement obiig6 de m'informerbient6t
de la suite que vous aurez donate k ma commanication.
Four le Ministre,
h Conseiller d'itaty
Directenr de rAssistanee et de I'Hjrgidne publique,
H. MONOD.
L'Assistance matemelle.
M. le D' Pecker adresse k ses confreres ce pressant appel pour la
protection des m^res :
APPEL AUX M^DEGINS EN YUE DE LA FONDATION DE L'aSSOGIATION
DES FEMMES FRANQAISES
Ghers Confreres,
V Association des Dames MatUoises, pour secqurs aux femmes en couches,
que les boones volont^s locales m'ont permis d'organiser dans les limites
de ma modeste clientele, et qui a re^u, le 4 f^vrier 1898, 1'approbation mi-
nist^rielle, poursuit et atteint un double but.
Gonvaincue, avec M. le Professeur Pinard, dont les observations ont 6t6
soumises^ TAcad^mie de m^decine,que le poidsetlavigueur du nouveau-
n^ sont d'autant plus remarquables que la m^re a moins pein6 pendant
les demiers temps de la grossesse, elle a voulu permettre k la femme n6-
cessiteuse un repos suffisant, aa cours du mois qui pr^c^de raccouchement,
et lui assurer les secours indispensables en alimentatioD, chauffage, etc.
C'est le premier point.
Le second vise la possibility de pratiquer Taccoucbement dans des con-
ditions de s^curit^ et d'bygi^ne, conformes aux exigences de la science mo-
derne : il est rempli en fournissant A la femme tout le n^cessaire, afln que
le secours medical ne soit pas compromis par quelque cause inb^rente au
milieu dans lequel vit Taccoucbee. Enfln, par surcrolt, TAsssciation dote
Tenfant de sa premiere layette, et lui assure un sein que la misdre ne
yiendra pas tarir pr^matur^ment.
Ne vous semble-t-il pas, cbers confreres, que I'expansion de cette
oBUvre de pu6riculture, intra et extra-uterine, soul^ve une question d'in-
t^rdt national qui m'autorise A r^clamer votre concours?
Gomme moi, vous avez constats que ce sont encore les ouvriers, les
paysans, les joumaliers, en un mot, les humbles, qui sont charges de
grandes families ; c'est A eux que r£tat prend le plus, sans leur accorder
une compensation m6rit6e.
Qui de vous ne se rappelle cette femme en haillons, qui vient, un en-
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168 REVUE PHILANTHROPIQUE.
faDt dtir le bras, nn autre accroch^ a ses japes, vons demander un conseil
sur les mouYements insolites qo'elle ressent dans son yentre ?
Et,si dans voire regard elle devine lar^ponse fatale» quelle doaloureuse
6tape s'ouvre devant elle! Elle le connait ce chemin de cal?aire, tant de
fois parcouru par elle : neuf mois de grossesse, neuf mois de soufTrance,
neuf mois pendant lesquels I'dtre k venir est d^j^ en dStresse, nourri qu'il
est par le sang an^mi^ de cette m^re qui se prive de tout, pour empdcher
de mourir ceux qui vivent d6j& et qui crient la faim !
La Toil4 aulit! Qui s'occupera d'elle, de ses enfants? Comment calmer
les premiers cris de son nouveau-n^? Tant qu'il ^tait dans son sein, sa
chaleur le prot^geait: maintenanl que le voilk au monde, comment le r^-
chauffer, comment le v^tir? Taut qo'il ^tait dans son sein, il se nourrissait
de son sang; et maintenant, pourra-t-i1 vivre de son lait? II se trouve
ainsi que le jour de joie et de bonheur est, pour cette pauvre m^re cou-
ch6e sur son lit de misfere, un jour de tristesse et de pens^es noires. II se
trouve que le jour od la France est devenue plus riche d'un citoyen pour sa
defense, la femme qui lui fit ce don pr^cieux en est devenue plus pauvre !
Heureusement, le m^decin, qui veille sur ses semblables, .qui est \k au
seuil de la vie, qui sent toutes les mis^res de la d^sh^rit^e, doit ponvoir,
au nom de la g^n^rosit^ de ses sceurs plus fortun6es, adoucir les rigueurs
de rin^galit6 sociale. Ne lui est-il pas possible, tout d*abord, de rendre
I'isolement de la femme en couches moins p6nib]e?Ge1le-ci a des enfants k
surveiller; son 6tat exige, en dehors du traitement m6dical, des soins
particuliers, des pansements sp^ciaux. Qui s*occupera de ses enfants? Qui
la soignera?Doit-on Tabandonner k son sort si triste?
Pas un de nous, mes chers confreres, qui n'ait vu cette femme pauvre,
d^s le lendemain de son accouchement, soutenant d'une main tremblante
son ventre douloureux, et, de Tautre, faisant son manage, habillant ses
enfants. Elle est imprudente, et cette imprudence fait que, souvent, les
enfants deviennent orphelins, ou que, si la m^re ne meurt pas toujours,
elle sera une de ces boiteuses du ventre, qui, a la mis^re, ajoutent la dou-
leur de la chair soufTrante.
Et le mari qui, jusque-l&, courageux, travaillant dix, quatorze, seize
heures par jour, apportait son salaire pour nourrir sa famille, trouve, en
rentrant chez lui, sa femme souvent au lit, soufTrante, n'en pouvant plus,
malgr^ toute son abnegation maternelle, les enfants se trainant k I'aban-
don, le repas non pr^par^, inhospitalier. Bientdt, d^sold, d^courag^, il
apprend le chemin du cabaret od il noie ses chagrins.
\oilk comment, k la mis^re, k Tisolement, k la maladie, viennent
s'ajouter Tabandon et la disorganisation du foyer domestique, qui, cepen-
dant, ne demandait qu'k prosp^rer, si la solidarity sociale eftt ^t^ mieux
comprise !
II est vrai que, parfois, une femme charitable fait de son mieux pour
garder les enfants de sa voisine en couches; mais ce secoors bienfaisant
n'intervient pas toujours, et souvent il n'est pas assez ^clair^ pour pouroir
prodiguer en mSme temps les soins n^cessaires k la mfere alit^e.
Je vous prends encore k t^moin, mes chers' confreres, pour constater
que, souvent, Tintervention la plus f^pr^cieuse de notre art se trouve corn-
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INFORMATIONS. 169
promise, par une voisine tr&s bonne, mais ignorante, et en brouille avec
les principes de Thygi^ne pasteurienne.
Mais oil prendre alors ceite f6e bienfaisante qui, k Tamour de son pro-
chain, puisse ajouter les qualit^s d'une garde-malade instruite et ^clair6e ?
Frappez, mes chers confreres, k la porte de ces Dames flrangaises ou de
ces Dames de France y qui, grdce aux efforts de nos atn^s, comme I'honorable
D' Duchaussoy, peuplent maintenant tons les coins de ce noble et g^n^reux
pays, et elles r^pondront k voire appel, comme elles oht r^pondu an
ndtre. Ce sont elles qui seront vos collaboratrices 6clair^es, c'est parmi les
plus d^Yoii^es d'entre elles que tous trouverez les membres actifs de vos
soci^t^s.
Qui, mieux qu'elles, Ak\k enti^rement conquises aux nobles idles d'une
patrie forte et g^nlreuse, pourra contribuer It I'accroissement des forces
vives de la nation en protlgeant sa natality ? C'est \k leur poste d'honneur
en temps de paix, et c'est encore \k qu'elles apprendront les qualitis mat-
tresses indispensables & une garde-malade, qui se prepare It panser ses
fr^res, sur le champ de bataille, oa dans les ambulances.
Est-ce que celle qui assiste k un accouchement, et seconde le praticien,
n*a pas besoin de courage et de sang-froid ? Est-ce que celle qui fait une
injection, ou un lavage antiseptique, k une femme en couches, pent se
dispenser de connaltre les regies de Tantisepsie ?
Non, et de m^me qu en temps de guerre Tantisepsie doit dtre le credo
de celle k qui incombera Thonneur de soigner les blesses, de m^me celle
qui pr^tera son concours divoul k une femme en couches, ne saura ignorer
la science de Timmortel Pasteur, si elle ne veut pas 6tre la cause d'une
Infection puerplrale, el par consequent la cause de la mort de celle dont
elle aura k sauvegarder I'existence.
Et yoWk pourquoi nous pouvons dire que les grandes Soci6t6s, dont
nous parlous, nous accorderont leur puissant appui, aQn de fonder I'Asso-
ciation des femmes fran^aises pour la protection de la natality nationale.
La nouvelle oeuvre sera leur compliment indispensable, c'est-&-dire une
vaste Icole, oil les praticiens, se chargeant de I'instruction midicale et du
diveloppement des qnalitis civiques des dames ambulancilres, prouveront
ainsi, uDe fois de plus, que leur divouement est k la hauteur de leur tdche,
quand il s'agit de la grandeur et de la prosplriti du pays.
N'est-il pas vrai, chers confreres, qu'il y a 1& une belle utilisation k faire
des sentiments de chariti, de divouement, de solidarity qui sont aux coeurs
des femmes ?
C'est a nous, midecins, qu'il appartient d'en prendre la bienfaisante
initiative, mettant ainsi, dis le debut de I'existence du pauvre, k cdtl du
roal qui se nomme la misire, le remade qui s'appelle la touchante soli-
dantl.
A I'oDUvre, je vous en prie, pour les mires daos le dlntLment, pour la
noble mission da corps midical, pour Tavenir de la patrie fran^aise !
Maule (Seine-et-Oise), 25 fivrler 1898.
D' Pecker,
BBVUB PHttAHTHROPIQCB. — U. 49
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770 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Le Recrutexnent des Inflrmiers et Inflrmiires des H6pitaax
de Paris.
M. Peyron, directeur de rAssislance publique de Paris, vient
d'adresser la circulaire suivanie aux directeurs d'^tablissements
hospitallers :
Monsieur le Directeur,
Aax termes de la circulaire du 20 aodt 1897» les inflrmiers, inflrmi^res,
gardens et flllesde service sent soumis &un examen medical, mais ils ne
subissent cet examen qu'aprds qu'ils ont €U recrut^s et d6j& mis en
fonctions.
L'exp^rience ayant fait ressortir les nombreux inconv^nients qui
r^sultent de ce mode de proc^der, j*ai d6cid6que Texamen d'aptitude phy-
sique pr^c^derait d^sormais I'admission des inflrmiers et infirmiferes et,
afin que cette mesure n'apporte aucune entrave k la marche du service
des ^tablissements, je me suis enlendu avec Messieurs les m^decins char*
g^s de Texamen medical dans les hdpitaux Cochin, Boucicaut et Bichat,
pour que cetle visite ait lieu, non plus deux fois par semaine, mais bien
chaque matin ; je yous prie done de mettre d^s maintenant en pratique
ces nouvelles instructions. J'ajoute que, pour ^viter le retonr de fdcheuses
indiscretions, j'ai invit6 MM. les directeurs des hdpitaux dans lesquels a
lieu la yisite, k ne plus remettre directement aux int6ress6s le ceriificat
medical qui leur a ^t^ d^livr^, mais bien k le faire parvenir k leurs col-
logues sous pli ferm^ et par TintermOdiaire du secretariat general, cette
transmission pouvant et devant Hre assur^e dans la journee m6me de la
visite.
D'antre part, mon intention a ^t^ souvent appelOe sur les longs et
pOnibles dOplacements qui sent imposes aux inflrmiers et aux inflrmiOres
en qudle d'un emploi. Je desire faciliter leurs recherches dans la mesure
du possible, et le moyen le plus pratique d'atteindre ce but, m'a paru dire
d'afficher tous les matins k TAd ministration centrale la liste des emplois
vacants.
Je YOUS prie done de faire connattre chaque matin, au Bureau du Per-
sonnel, le nombre d'emplois non grades qui pourraient etre vacants dans
votre etablissement, en ayant soin d'indiquer, pour cbacun d'eux, s'il
s*agit d'un emploi d'homme ou de femme, de jour ou de vellle, et depreci-
ser la nature do service: m^decine, chirurgie, accouchement ou service
general.
Les etablissements qui, chaque matin, font connaitre au chef-lieu, par
telephone, la situation des lits de malades, n'aurout qu'4 faire suivre cette
derniere communication de leur demande de personnel ; les autres mai<»
sons en feront Tobjet d*une communication speciale qui devra, en tout
etat de cause, etre parvenue k I'administration, avant onze heures du ma-
tin : quant k ceux des etablissements qni ne sent relies au chef-lieu ni par
le telephone ni par le teiegraphe, ils auront k m*informer par lettre des
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INFORMATIONS. 771
yacances d'emplois auxquelles il y aurait lieu de pourvoir ; de ces diverses
indications, ii sera imm^diatement form^ une liste g^n^rale, qui sera afH-
ch^e au Bureau du Personnel et que les int^ress^s pourront consulter de
neuf heures da matin k cinq heures du soir.
II demeure bien entendu^ue den n'est innovd dans le mode de recru-
tement du personnel non grad^» et que c'esl k vous qu'il appartient, comme
par le pass^, de choisir ces agents, en vous entourant de tous les rensei-
gnements utiles.
Je vous prie de m' accuser reception de la pr^sente circulaire.
Recompenses aax Mtoes nourrices.
M. Albert Montheuil a expose dans la Bevue municipale le syst^me suivi
par le Bureau de bienfaisance du XY* arrondissement, sur initiative de
son secrdtaire-tr^sorier, M. Tessoo, pour la distribution des secours d'allai-
tement. Non seulement dans cet arrondissement on proportionne, en quel-
que sorte, le secours rSgulier d'allaitement aux soins que re^oit Tenfant,
augmentant on diminuant cette allocation suivant que le nouveau-nd parsdt
mieux ou moins bien traits, mais on accorde des primes en argent, avec
dipldmes, aux m^res qui se sont le mieux acquitt^es de leur sainte fonction
de nourrioe. Tous les trois mois, les m^res-nourrices sont r6compens6es
dans une c^Hmonie publique, k la mairie, en presence des reprSsentants
de lamunicipaliU et des membres du Bureau de bienfaisance.
La nouvelle institution fonctionne depuis le mois de mai 1897 ; les m^res
nourrices qui se sont bien acquitt^es de leur tdcbe, re9oivent une prime
d'argent de 25 ou de 50 francs et un certiAcat attestant officieliement les
bons soins qu'elles out doun^s 4 leurs enfants.
M. Dard, adjoint au maire du XV* arrondissement, fatsait connaitre, a
la derni^re distribution des recompenses, que la proportion des laureates
augmente sensiblement depuis la fondation de Tceuvre.
Hospitalisation et Traitexnent des Tmbercaleux.
En r6ponse k une demande de renseignements formulae par plusieui^s
delegations cantonales, le Prefet de la Seine a adresse k ces delegations,
le 11 Janvier dernier, une Circulaire k laquelle nous empruntons le passage
suivant :
« L' Administration de TAssistance publique fait en ce moment con-
struire k Angi court (Oise) un Sanatorium pour la tuberculose. D'autro part»
et conformement aux indications de la Commission specialement instituee
en vue de recbercher les moyens de combattre la tuberculose, TAdmini-
stration poursuit la creation, dans divers hdpitaux d'adultes,de divers ser-
vices reserves auta*ailementde cette affection. Un de ces services fonctionne
dej4 k Lariboisi^re, un second est envoie d'installation k I'bdpital Laennec;
d'autres seront prochainement crees. Ces services etant d'ailleurs destines
k tous les malades parisiens, sans distinction de profession, les instituteurs
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712 REVUE PHILANTHROPIQUE.
et institutrices pourront y 6tre admis; j'ajoute qu41 en sera de m^me k
I'hdpital d'Angicoiirt.
« En ce qui conceroe les enfants iuberculeux, rAdministration de FAs-*
sistance publiqne ne dispose actnellement d^aucun service d'h6pital oil ils
puissent Hre sp^cialementadmis. J'excepte pourtant la tuberculose osseuse
qoi est trait^e k notre grand hdpital de Berck. Les admissions k cet ^ta-
blissement sont subordonn^es k la decision d'une commission m^dicale
qui se r^unit une fois par mois, dans chacun de nos hdpitaux d'enfants :
Trousseau. et les Enfants-Malades.
« Pour le traitement des enfants atteints de la tuberculose pulmonaire,
je rappelle que la Ville de Paris subventionne rceuvre des Enfants tuber-
culeux (rue MiromesniU n*' 35), qui doit mettre 20 lits^ sa disposition dans
son ^tablissement d'Ormessoo. »
Les Prix de vertn de Reims.
L'Acad^mie frant^ise n'est pas seule k distribuer des prix de Tertu, et
la ville de Reims est entree dans cette voie depuis 1887, grice k rinitiative
du maire de F^poque, M. le docteur Henrot, directeur de TEcole de m6de-
cine et membre du Gonseil sup^rieur de I'Assistance publique, dont le nom
est loujours associ^ aux bonnes oenvres de la ville qu'il a longtemps admi-
nistr^e .
Tons les ans, une somme est distribute en prix de vertu; le credit,
qui a d'abord 6t6 de 12000 francs, s'^l^ve actuellement k 26000 francs. Les
prix sont distribu6s solennellement, la liste des bienfaiteurs est proclam^e,
et les b^ros du travail et du devoir recompenses.
La derni^re c^r^monie, pr^sid^e par M. Georges Picot, n'a pas offert
moins d'int^r^t que ses devanci^res. La nomenclature des lib^ralit^s, dons
et legs, publi^e par Vlnd^endant R^mois, est beureusement tr^s longue;
le total s'en ^l^ve k la somme' de 625000 francs, donnas aux diffdrentes
institutions et oeuvres charitables de la ville, sans compter les 26000 francs,
distribu^s en prix et livrets de caisses de retraites.
Une de ces lib^ralit^s doit 6tre nol^e ; elle conceme la construction
d'un bospice, destin^ k recevoir 40 vieillards des deux sexes, dot^ par
M. F^lix Boisseau, selon le d§sir exprim^ par sa soeur M"»« Eug. Rcederer.
Le rapporteur a dH constater que, si les dons augmentaient, la pauvret^
augmente ^galement et daus des proportions efTrayantes ; le nombre des
demandes pour les prix de vertu, g^n^ralement justifl4es par le besoin et
Tinfortune, ont 6t^ de plus de 300.
Ge bel exemple de decentralisation philanthropique — imit^ de M. de
Montyon et de TAcad^mie francaise — m^rite d'etre connu et vulgarise.
Gongr^s du Patronage des Lib^r^s de Lille.
Gonformement k la decision prise par le Gonseil central de VUnion
des SociiUs de patronage de France, dans sa stance du 16 decembre i806.
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INFORMATIONS. 773
ie quatri^me Gongrds liational du Patronage des lib^rSs se iiendra cette
ann^e k Lille, du 30 mai au i*' juin, sous les pr^sidences d'honneur de
M. le president du Conseil, ministre de rAgriculiure, de M. le garde des
sceaux, ministre de la Justice, de M. le ministre de I'lnt^rieur, de M. le
ministre de Tlnstruction publiqae et de M. le ministre des Colonies, et sous
la pr^sidence eflfective de M. F^iix Yoisin, conseiiler k la Gour de cassation,
membre da Gonseil supdrieur de TAssistance pubtique, president de la
SocUte de Pi*otection des Engages volontaires.
Ge Gongr^s comprendra trois sections et une conference Internationale,
dont M. Jules Le Jeune, ministre d'J^tat du royaume de Belgique, a bien
voulu accepter la pr^sidence.
Les questions suivantes y seront discut^es :
!'• SECTION. Uommes, — 1<> De Tengagement militaire des condamn^s
correctionnels.
%^ Quelles sont les relations k ^tablir entre les institutions d'assistance
et les ceuvres de patronage, en vue de pr^venir la mendicity et le vaga-
bondage.
2* SECTION. Ewnmes. — i® De Torganisation des refuges pour jeunes lilies
et femmes lib^r^es.
2<» L'expatriation des femmes condamn^es pr6sente-t-elle certains avan-
tages au point de vue du reclassement? Dans Taffirmative, k quelles cate-
gories de condamn^es pourrait-elle s'appliquer?
3* SECTION. Enfants. — i^ Des moyens d'organiser la surveillance des
enfants patronn^s places chez des particuliers, et du concours k obtenir
dans ce but des oeuvres et des autorit^s locales.
2^ Des ameliorations k introduire dans la pratique judiciaire en mati^re
de correction paternelle.
CONFERENCE INTEB NATION ALE
jo Do rapatriement des mineurs etrangers en*danger moral.
2^ Des mesures k prendre en vue de faciliter le patronage dans leur
pays d'origine des individus expnls^s.
La stance solennelle d'ouverture aura lieu le lundi dela Pentecdte 30
mai. Les sections se reuniront pour la premiere fois le mSme jour k 1 heure
et demie. Pendant leur s^jour k Lille, les membres du Gongr^s pourront
visiter les diverses oeuvres regionales qui interessent le Patronage.
L'Inspection xn^dicale des licoles pHinaires de Paris.
La circulaire suivante a 6i6 transmise par les maires des vingt
arrondissements anx medecins-inspecteurs de la Ville de Paris.
Paris, le 12 fevrier 1898.
Monsieur le Docteur,
• Aux termes de Tarticle 13 du r^glement de I'inspection m^dicale des
ecoles primal res et des ^coles maternelles publiques de la Ville de Paris,
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77i REVUE PHILANTHROPIQUE.
les m^decins inspecteurs des Scolesdoivent, une fois par mois an moins...
proc^der k un examen attentif et individuel des enfants au point de vne
des dents, des yeux, des oreilles et de T^tat g^n^ral de la sant4.
Un bulletin certifl4 par le m^decin-inspecteur et destine k la famille
sera remis k chaqne enfant qui serai t reconnu presenter une affeclion de
la bouche, des yeux ou des oreilles oudont F^tat g^n^ral n^cessiteraitune
surveillance ou des soins particuliers.
J'ai rhonneur, monsieur le docteur, de recommander k toute votre
attention Timportance de ces prescriptions et particuli^rement celle rela-
tive k la ?isite individuelle.
Veuillez agr^er, etc., etc.
Operations de la Gaisse nationale d'lipargne en 1896 (1).
Le nombre des versements effecta^s, dans le cours de 1896, s'est ^levd
k 2803412, repr^sentant une somme totale de 355274279 francs. La
moyenne par versement a 6t^ de 127 francs (144 francs en 1895).
Le nombre des remboursements s'est 6ieT6 k 1 375 703, pour uq montant
total de 342522859 francs. La moyenne par remboursement a ^l^ de
149 francs (270 francs en 1895).
L'exc6dent des versements sur les remboursements n'est que de
12751419 francs, en diminution de 30271 315 francs, sur Texc^dent con-
stats en 1894,qui se montait k 43 022 734 francs. G'est 1^ une consequence
de la loi du 20 juillet 1895, qui a StS appiiqu6e intSgralement It partir du
1" Janvier 1896, et d'aprSs laquelle le montant maximum des d^pdts se
trouve abaissS k i 500 francs.
Le nombre de comptes existant au !«' Janvier 1896 ^tait de 2486952.
Dans le courant de I'exercice, il en a 6t6 ouvert 466957 nouveaux et il en a
6U soldS 271001. Le nombre de comptes existant au 31 dScembre 1896
s'Slevait, par consequent, 42682908.
L'avoir des deposauts,au 31 dScembre 1895, se montait 4 753458 528 fr.
Au 31 decembre 1896, il atteiguait 784950207 francs, accusant ainsi une
augmentation de 31 491 679 francs pendant Texercice.
Depuis le debut de Finstitution, le nombre et le montant des versements
annuels ont ete presque constamment en augmentant.
Ainsi, en 1882, le nombre des versements etait de 473 155 et leur mon-
tant de 64628663 francs, tandis qu'enl896, il a 6te de 2799158, reprSsen-
tant une somme de 355208086 francs.
Le nombre des versements s'est accru cbaque ann^e (sauf en 1893). Le
montant des versements a subi quelques oscillations ; nSanmoins, la
marche genSrale de ces chiffres est en accroissement.
Les frais d'adminislration se sont Sieves en 1896 k 3329476 Arancs. lb
ne repr^sentent que 0,42 p. 100 des sommes dues aux d^posants au 31 d^-
cembre, dont le chiffre est de 784950207 francs.
J) D'aprfts le rapport officiel, en date du20 novembre 1897 public au 17 Janvier
1898. Journal Officiel,
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INFORMATIONS.
775
Au 31 ddcembre 1896 il exi8tait2682908 livrets en circolation sar les-
quels 1 093065 livrets de 20 francs et au-dessons.
II a ^16 d^livr^, en i896, 466957 livrets nouveaux, dont 270154 kdes
hommes et 196 803 k des femmes. En void le classement d'apr^s le sexe
et la profession des d^posants :
Designation. Hommes. Femmes. Total.
Chefs d'6tal>lissements agricoles, in-
dustrials et commerciaux 23153 6989 30142
Joumaliers et Guvriers agncoles. . . . 38414 11170 49584
Ouvriers d'industrie 49843 26512 76355
Domestiques 25379 40788 66167
Militaires et marins 19025 259 19284
Employes 34062 9209 43271
Professions lib^rales 11760 5174 16934
Propri6t«dres, rentiers et personnes
sans profession 16712 50712 67424
Mineurs n'exer^ant aucune profession. 51103 45766 %869
Nomades 703 224 927
Totaux 270154 196803 466957
Proportion
p. 100.
6,48
10,62
16,37
14,18
4,13
9,27
3,63
14,44
20,76
0,12
100,00
Gette division des livrets est sensiblement la m^me que celle observ^e
au coursdes ann6es pr^c^dentes, sanf une 16g6re diminntion daDs la cat6-
gorie des d^posants propridtaires, rentiers et personnes sans profession
(14,444 p. 100 au lieu 18,22 p. 100 en 1895).
En outre, 441 livrets ont ^t6 d61ivr4s i des soci6t^s, dontvoici la desi-
gnation :
Ddsignation. Nombre.
Soci6t6s de secours mutuels 198
Syndicats ou associations professionnelles 52
Ck)mpagnies de sapeurs-pompiers 27
Ck)mices agncoles 4
Cercles d''officiers 11
Cercles et mess de sous-offlciers 11
Soci^t^s de cooperation 14
Soci6t6s de bienfaisance 29
Soci6t6s diverses 95
Total "441
CAISSE NATIONALE d'aSSURANGES EN GAS DE D^G^S
Op^ations et situation en 189^. — Le nombre des assurances indivi'
duelles contract^es en 1896 est de 83, et le capital assure correspondant
s'ttfeve 4117 448 francs.
Deduction faite des r^glements de sinistres et des annulations> le mon-
tant total des capitaux assures, au 31 d^cembre 1896, est de. 3016613 fr.
Au 31 d^cembre 1895, ce monlant etait de 3037 218 fr.
.11 y a done eu diminution de 20605 fr.
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176 REVUE PHILANTHROPIQUE.
' II a ^t6 encaiss^ pour le compte des assurances individuelles 1 074
primes repr^sentant une somme de 68393 francs.
Les capitaux pay6s au d^c^s s'^l^vent k 45561 francs ponr 24 polices.Ils
sont, par rapport aux primes de Tannic, dans la proportion de 65 p. 100.
Les assurances collectives, contract^es en 1896 par les soci^t^s de se-
coursmutuels approuv^es, sont au nombre de 69 et comprennent 1333B
membres participants. Les primes afT^rentes k ces assurances se montent
a 66750 francs. Les payements de capitaux assures, y compris les rem-
boursements de primes, formentun total de 92780 francs. L'exc^dent des
d^penses sur les recettes, en ce qui concerne les assurances coUectiyes,
est done de 16030 francs, et les payements repr^sentent 120 p. 100 des
primes correspondantes.
Les fonds places ont produit 37709 francs d'int^rdts. L'exc^dent des re-
cettes totales sur les d^penses totalcs de la Gaisse ressort k 41 763 francs.
Le montant total de Tactif a 6t6 de 1240664
Le montant total du passif. . 1026045
Soit un exc^dent de Tactif sur le passif 214619
L'exc6dent constats au 31 d6cembre 1895 6tait de 207591
II y a eu, par suite, augmentation d'exc^dent, pour 7 028
L'augmentation de Texc^dent de I'actif sur le passif a pour cause, en
premier lieu, Texistence m^me d'un exc^dent, d*oii r^sulte un revenu sn-
p^rieur k celui de la reserve math^matique normale. EUe provient aussi
de ce que les titres de rente qui composent Tactif produisent inl6r4t k un
taux l^g^remeut plus 61ev6 que ie taux des nouveaux tarifs, d'apr^s les-
quels les charges sont calcul^es.
CAISSB NATIONALS D*ASSURANGES BN CAS D^ ACCIDENT
OpH'ations et situation en 4896, — Les cotisations yers^es en 1896 sont
au nombre de 1 488 et repr^sentent une somme de 9 460 francs.
Les indemnit^s allouees aux viclimes d'accident on k lenrs ayants droit
se montent k 6800 francs et se composent de 6400 francs yers^s k la Gaisse
nationale des retrailes pour constituer deux pensions et de 400 francs al-
lon^s en cas d|accident ayant entrain^ la mort.
Les int^rdts produits par les fonds places s'^l^yent k 202782 francs.
Les recettes totales ont 6t6 de 212714 francs, et les d^penses totales de
7 475 francs ; ce qui porte I'exc^dent des recettes de Tannic a 205239 francs.
Depuis Torigine de la Gaisse (11 juillet 1868) jusqu'au 31 decembrel896,
les primes vers^es, au nom de 39654 assures, forment un total de
251 516 francs. Les r^glements de sinistres iet iesfrais accessoires n'ont en-
train^ qu'une d^pense de 190 216 francs, qui n'a atteint que 75,63 p. 100
des yersements et laisse un exc6dent de 61 299 francs.
Sur les 39654 assurances, la Gaisse n*a eu k r^glerqueSl sinisfres,dont
61 ayant occasionn^ une incapacity permanente de travail et 20 ayant 6t6
Suivis de mort.
G'est une moyenne de 2,0i par 1000 assures, dont 1,54 est d'incapa-
cit^ permanente, et 0,50 cas de mort.
Le nombre moyen des personnes assur^es annuellement est de 1 416.
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INFORMATIONS. in
La Protection de PEnfanoe.
Nous recevons communication de Tappel suivant :
Aux Grands Noms de France.
EXP0S6 ET BUT DE LA SOCI6t6 FRANgAISE D'ENCOURAGEMENT
AUX BONS SOINS DE l'eNFANT
La France est certainement le pays da monde oti la protection de I'en-
fant est le plus en honneur. Mais il s'en faut de beaucoup que, pr^conis^e
en principe, elle soit r^alis^e dans la pratique.
Les enfants sent Tavenir de la Soci6t6 et de la Patrle. La mortality qui
s^Yit si afTreusement k T^poque du premier dge fait considSrer la mani^re
de les Clever comme une question vitale du plus grand inter^t.
Plac6 dans une situation sp^ciale, en contact joumalieravec les enfants
des families ouvri^res, j'ai ^16 frapp^ de la difference qui les distingue les
ones des autre s.
Dans les premieres, j'ai rencontrd I'ordre, la propret^, le soin, une
femme intelligente et avenante, des enfants bien portants.
Dans les secoudes, I'oppos^ de tout ceci : la salet6, le d^sordre, une
femme ignorante, grossi^re, des enfants n^glig^s, ch^tifs.
Une statistique bien entendue ^tablirait facilement les chances de la
mortality qui s^vit dans ces divers milieux.
A mon avis, il faut encourager les bons soins k donner k I'enfant, sur-
veiller, conseiller, guider les m^res dans leur tdche difficile.
C'est aux femmes elles-m^mes que revient la mission de protdger Ten-
fant au berceau. Avec le ddvouement et Tardeur qu'elles apporlent a faire
le bien, nul doute qu'elles ne r^ussissent en prenant en main la cause de
I'Eufance.
A lacampagne qui ne sait la toute-puissante influence que les personnes
intelligentes et d^vou^es prennent ais6ment autour d'elles.
^tendue k toute la France, leur action bienfaisan te en faveur des nou-
Yeau-n^ serait comme un veritable patronage qui compi^terait icelui de
la loi de 1874.
C'est k ce titre que s'impose la creation d'une SocUU d*Encouragement
aux bom soins de V Enfant. Gette oeuvre aurait pour but :
L'education physique et morale de la premiere enfance par la propaga-
tion dans les families de publications claires et precises sur Tart de bien
Clever les enfants.
Encourager les bons soins maternels en distribuant des mddailles
d'encouragement aux m^res et aux nourrices qui auront 6i6 signal6es.
Accorder des prix en argent aux families charg^es d'enfants qui, se
trouvant dans une situation n^cessiteuse, auront fait tout le possible pour
les Clever convenablement.
R^compenser par des mSdailies d'honneur les personnes qui se seront
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778 REVUE PHILANTHROPIQUE.
distingu^es par leurs actes, leurs travaux, leur d^voaement pour les
enfants.
L'oeuyre nouvelle ne soalagera done pas les infortanes. Elle laissera ce
soin aox admirables oeavres d'assistance qai poursaivent ce but, mais elle
les servira utilement en pr^venant souveat les maux.
A ceux qui ue comprendraient pas Tutilit^ de Taction de cette (BUTre,&
ceux qui diraient : Quels avantages voyez-vous k d^cerner nn morceaa de
bronze k une pauvre villageoise?
Nous r6pondrons : » Dans ces m^dailles d'encouragement et de d^voue-
ment nous y voyons une grande puissance. Par experience nous sa?ons
que rieu n'agit plus sur les espcits simples que de voir combien on porte
d'int^rdt k leurs actes et surtout de soUicitude k leurs enfants.
Dans ces milieux surtout ou les cruelles ^preuves, la mis^re, les mauvais
exemples endurcissent les coeurs, nos conseils, nos recompenses seraient
nn puissant levier d'action et porteraient assur^ment leurs fruits en don-
nant le r^confort moral pour la continuation des bons soins qui font Ten-
fant robuste, sain et beau.
Puissent done les classes sup6rieures, celles qui sent investies de I'in-
lluence de la richesse ou du pouvoir, puissent-elles s'int^resser k cette
oBuvre sociale pour laquelle je pr^vois un long et brillant avenir.
G'est avee la plus grande confiance que je fais appel aux grands noms
de France pour sa realisation.
tDOUARD TRUCHON,
D^l^gud de la Ligue FrtUemilU de* Enfants de France,
Attach^ an service dos Enfantt Assists da d^partement de la Seine.
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ECHOS
Gonseil 8up6riear de rAssistance publique. — Par arrdt6 de
M. le ministre de rintdrienr, le conseil sup^rieur de TAssistance pnblique
est convoqu6 en session ordinaire pour le roercredi 16 mars coarant.
Suivant Tusage, les stances se tiendront dans la salle des f^tes de
I'Institution nationale des jeunes aveugles.
L'ordre du joar de la session est flx^ comme suit : 1* Election du pre-
sident et de deux vice-presidents; 2® Projet de revision du r^glement
nt^rieur des etablissements hospitaliers. — MM. les docteurs Drouineau
et Campagnole, rapporteurs; 3*> Projet relatif au recrotement du personnel
secondaire des etablissements hospitaliers. — M. le docteur Napias, rap*
porleur;4*> Projet relatif & Tlnstitution nationale de sourds-muets. —
M. Paul Strauss, rapporteur; 5*^ Avis k ^mettre sur les demandes presen-
tees par les communes en vertu de Tarticle 35 de la loi sur Tassistance
medicale. — M. Rondel, rapporteur.
L^OSuvre des enfants tuberculeuz. — L'assembiee generate de
rCEuvre des enfants tuberculeux a eu lieu le 6 fevrier, dans la salle de la
Societe des agriculteurs de France/sous'la presidence de M. Georges Picot,
secretaire perpetuel de TAcademie des sciences morales et politiques.
Apr^s une allocution du docteur flerard, M. Georges Picot a enumere
les victoires que I'oDUvre remporte chaque annee sur le terrible mal de la
tubercolose. A rh6pital de Villiers-sur-Mame, oti sont soignes les adoles-
cents, les guerisons ont atteint, en 1897, la moyenne de 25 p. 100; k I'hd-
pital d'Ormesson, qui ne recoit que des enfants, elles sont aliees jusqu'i
34 p. 100. M. Georges Picot a vivement feiicite tons ceux au devouement
desquels sont dus ces resultats.
Puis M. d'Ayguevives, au nom de la commission des finances, a con-
state la situation prospere de I'oeuvre ; enfln, le docteur Leon Petit a fait
un chaleureux appel k des concours nouveaux qui en permettront le deve-
loppement.
Les M^deoins dans le d^partement de la Seine. — D'apres une sta-
tistique dressee k la Prefecture de police, on compte dans le departement
de la Seine et les communes de Seine-et-Oise (Enghien, Saint-Cloud, Meu-
don et Sevres ressortissant k la Prefecture) :
2 783 medecins, dont 2 463 k Paris :
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•780 REVUE PHILANTHROPIQUE.
70 officiers de sant6, dont 62 k Paris;
1 528 sages-femmes, dont 1 242 k Paris;
225 chirurgiens-dentistes, dont 164 k Paris;
i 315 pharmaciens, dont 1 032 a Paris ;
392 dentistes, dont 347 k Paris.
L'arrondissement qui poss^de le plus de m^decins est le VIII«, qui en
compte 462; c'est Tarrondissement le plus riche. Gelui qui en a le moins
est un des plus pauvres : c'est le XII^, avec 160.
tie Legs Le Royer. — L'Assistance publique de Paris a 6t^aQtoris6e k
accepter le legs universel qui lui a ^t4 fait par M. Le Royer, ancien presi-
dent du S^nat; ce legs est ^valu^ 4 152 000 francs. Les hospices de la ville
de Lyon sont l^gataires d'^gale somme.
Le bureau de bienfaisance du Yl* arrondissement de Paris recoit la
somme de mille francs.
Infirmiers et Inflrmiires. -;- M. Pierre TUlier signale dansle journal
Unfirmier, une ^mule de W^* Bottard, la glorieuse surveillante de la Sal-
pfitriftre.
M"^^' Aloncle, surveillante depuis 22 ans du service des ali^n^s du doc-
teur Auguste Voisin, apparlient k la Salp^tri^re depuis le5avril 1849; elle
compte 49 ans de service dans les h^pitaux ou elle s'estmari^e; elle a tra-
verse trois epidemics de cholera, elle a plusieurs fois risqu^ sa vie aa
contact et au service des ali^nSs.
An mois de mai 1895, le President de la R^publique lui a remis une
m^daille d'honneur.
M. Pierre Tillier pense que cette femme de bien et de devoir m^rite une
plus haute recompense.
. Pour les GouTalescents. — M. LeonBriere, president de I'Association
de la presse republicaine departementale et directeur du Journal de Rouen,
qui avait fait don Tann^e derniere d'une somme de 50000 francs k la Society
protectrice de Tenfance, vient de faire un nouveau don de 50 000 francs k
la societe TAssistance aux convalescents. Voici les principaux passages de
la lettre adre^s^e par M. Bridre au president de la society TAssistance aux
convalescents, pour lui annoncer Tenvoi de cette somme :
« Le spectacle de la vie m'a appris de longue date k combien de paayret
gens la maladie apporte la misdre et la mine en ^puisant leurs minces et
meritoires economies et en entratnant souvent la perte de I'einploi qui
assurait leur existence et celle de leur famille.
. « Lorsque, sufilsamment gueris pour t^der k d'autres leur lit d'hdpital,
mais trop debiles encore pour reprendre leur ancien travail, lis se trouvent
dans la rue sans abri et sans pain, c'est votre Societe qui, pour ces jours
d'incertitude et de detresse, leur garantit un gite, la nourriture et repare
leurs forces, tandis qu'ils cherchent, souvent de^us dans Idurs penibled
demarches, une plape k Tusine ou k I'atelier.
« Je ne connais pas d'oDuvre plus digne que la\dtre. II a manque josqu'ici
ivotre Societe de jouir des avantages attribues aux oBUvres reconnues
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feCirOS. 78f
d'utilitd publique. G'est poor vous mettre dans les condiCions requises pom:
obtenir cette reconnaissance que je voire prie d'accepter les 50000 francs
que je vous offre en souvenir de M"*" Elisabeth et Marguerite Bri6re. »
Lecture ayant ^t^ donn^e de cette lettre k i'assembl^e g^n6rale de la
soci^t^ « I'Assistance auz convalescents », Tassembl^e a vot^ par acclama-
tion que tons les membres de la Soci^t^ iraient, aprds la reunion, porter
k M. Bri^re I'expression de ieur bien vive reconnaissance.
Liguenationale centre rAlceelisme. — Le bureau de la Ligue natio-
nale centre Talcoelisme (Soci^t^ fran^aise de temperance), pour 1898, est
constitu6 de la fa^on suivante : president, docteur A. Motet; vice-presi-
dents, docteurs Bouchereau et Gouraud, MM. Gbeysson et Glandaz; secre-
taire general, docteur E. Philbert; secretaires generauz adjoints, docteurs
Audige et Moreau (de Tours) ; secretaires des seances, docteurs Garra et
Roubinowitch; bibliothecaire-archiviste, docteur Gruet; tresorier, M. Bar-
taomieux.
LeLegsDessalgnes. — M.PhilibertDessaignes, ancien mairedeGbam-
pigny-en-Beauge et ancien depute, a legue au departement de Loir-et-Gber
un million pour rbospitalisation et le traitement des epileptiques, idiots,
aveugles et sourds-muets.
Le Progris medical espdre que ce legs genereux aidera le departement
de Loir-et-Gher k organiser lliospitalisation, le traitement et reducation
des enfants anormaux et k completer ce qui a ete fait k I'asile de Blois,
sous la direction de M. Doutrebente pour Fassistance des epileptiques
adultes.
Gears de rUnien des Femmes de France. — Les cours publics et
gratuits organises par I'Union des Femmes de France, en vue de repandre
les notions Indispensables de I'bygiene, ainsi que les connaissances neces-
saires pour secourir les malades et blesses dans la famille, dans la rue et
dans les services bospitaliers que cette Societe serait appeiee k creer en
cas de guerre ou de desastres publics, out commence lundi 10 Janvier, k
8 beures 1/4 du soir, dans les P', IVs X% XVI% XVIP et XIX« arrondisse-
ments; mardi 11 dans les III*, XI<> et XV« arrondissements, le 12, dans les
ns V°, VI* et XII® arrondissements et enfin jeudi 13 dans le VHP arron-
dissement.
Pour tous les renseignements, s'adresser au siege de la Societe, 29,
cbaussee d'Antin.
Les Faux Pauvres. — D'apr^s VAurore, le Gonseil municipal de
Gbartres vient de prendre une interessante decision. Une mendiante se-
courue par le Bureau de bienfaisance, ayant laisse dans sa paillasse, k sa
mort, un joli magot, le Gonseil municipal a decide d'intenter auz heritiers
un proces en restitution des secours inddment touches par la defunte.
laa Croiz-Rouge fran^se. —La Societe de secours aux blesses mill-
taires (Groix-Kouge fran^aise), presidee par le general due d'Auersteedt»
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782 REVUE PHILANTHROPIQUE.
grand d&AOceliei de la Legion d'honneor, a ouvert la session annnelle de
ses cours Inndi H Janvier, k son si^ge central, rue Matignon, 19.
Ges cours sont destines k renseignement des inflrmiers et des dames-
infirmi^res de la s6ci4t^;ils soront continues to as leslundis^^troisheures,
jusqu'au 27 mars.
Les professeurs charges de ces cours so&i le docteur Gautru, laor^at de
la Faculty de m^decine, le docteur Maurice GaziB« chef de clinique chirur-
gicale k THdtel-Dieu, et M. Jean Roger, interne des M|ttUttx.
Le docteur F^lix Allard, licenci^ 6s sciences physiques, et le docteur
Lucien Picqu^, chirurgien des h6pitaux de Paris, feront des conftences
qui seront annonc^es ult^rieurement.
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HEYUES ET PUBLICATIONS FRANgAISES
M. Maurice Colin expose, dans la Revue polUique et parlementairet
les r^sultats obtenas en \lg6rie par la creation d'hdpitaux indigenes; il
rappelle combien les musulmans ^prouvent de r^pngnance k b^n^ficier de
Tassi stance hospitali^re k laquelle lis ont droit comme tons les autres
habitants. En 1890, sur 50282 malades hospitalises en Alg^rie, flgurent
settlement 6 477 indigenes musalmans, soit une proportion d'un peu plus
de 12 p. 100, alors que la population europ^enne n'atteint pas 500000 dines
et que la colonie compte plus de 4 millions d'indig^nes.
« Gette repugnance des indigenes k entrer dans nos hdpitaux s'accusesi
nettement qu'elle a donn^ favour kcette id^e qne,mdmeappropriee kleurs
habitudes sociales et religieuses, rhospitalisalioa ne saurait leur convenir.
Groire qu'ils Taccepteront jamais, c'est, dit-on, oublier leur fatalisme.
Envoy^e par Dieu, la maladie doit 6tre accept^e avec resignation. S'effor-
cer de la gu^rir, c'est s'insurger coutre les arrets d'en haut. C'est a Dieu
seul qu'il appartient de retirer le mal qu'il a envoye. £videmment ce fata-
lisme n'est point fait pour d^plaire dans certains milieux algedens, oii Ton
pense volontiers que Fadministration se detourne de sa mission quand elle
se pr^occupe des int^rets et des besoins des indigenes. Faut-il dds lors
s'etonner qu'on Vy ait accredit^, qu'on I'y invoque encore? II n'est rien
moins qu'orthodoxCi Loin dedeiournerle croyant des soins ^apporter aux
maladies dont il est frappe, la vraie doctrine musulmane lui fait un devoir
de les rechercher. Une petite brochure, publiSe il y a quelque temps
par les soins du gouvemement general, a r^uni un certain nombre de
kadiths (1), qui sufQsent h faire justice du pr^tehdu fatalisme trop gratui-
tement pr6te aux musulmans algerieus. »
Si Fhospitalisation commune r^pugne aux indigenes, c'est qu'elle blesse
leurs habitudes et leurs croyances; I'experience tentee par le cardinal
Lavigerie le prouve, puisque Fh^pital ouvert par lui k Saint- Cyprien-des-
Attafs a brillamment r^ussi. C'est dans cette voie que s'est engage M. Cam-
bon, par la creation des hdpitaux indigenes d'Ouarzen en Kabylie et d'Aris
(1) Ce sent les preceptes et les paroles du prophdte qui, sans avoir trouve
place dans le Koran, ont ete recueillis et conserves par la tradition.
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784 REVUE PHILANTHROPIQUE.
dans TAurfes; cesdeux hdpitaux ne sont pas moins fr^quent^ qae le pre-
mier. Ges iniiiatiyes du gouvemement francais ont excite les plus viyes
sympathies des musulmans.
« La construction de rhdpital d'Aris notamment a 6t6 pour les tribus de
TAur^s I'occasion d'un mouvement populaire analogue k ceux qui, au moyen
dge, vouaieut des populations enti^res k r^diOcation de ces merveilleuses
cath^drales gothiques dont peuvent se glorifler tant de vieilles cit^s fran-
Raises. Adoss6 k Tun des contreforts du Boutriel, le nouvel h6pital doinine
une ^troite valine, sans autre moyen de communication que d'abrupts
sentiers de montagne, k peine des chemins de ch&vre. La route la plus
rapproch6e s'arrdte k plus de 30 kilometres. G'est k dos d*hommes, d'does ou
de mulets qu'il a fallu transporter k Aris lous les mat^riaux n^cessaires k
la construction de Thopital. II sufOt d'en examiner les proportions pour se
rendi'e compte des innombrables joum^es que repr^sente un semblable
labeur.Eh bien,tout ce labeur a ^t^ le fait gratuit et yolontaire des tribus
aur^siennes appel6es k b6n6(lcier de Th^pital. »
M. Marcel Baudouin plaide, dans le bulletin du ProgrH midical, en
favenr de Tenseignement de Thygi^ne au village.
it Gbacun sait que» dans un grand nombre des ^coles communales
de gardens, se font le soir des cours sp^ciaux, qu'on appelie des cours
d*adultes. Depuis quelque temps, on a institu^, avec raison, des cours ana-
logues daus les ^coles de filles ; et il est k souhaiter que cette innovation
acqui^re I'extension qu'elle m^rite.
« L^ oil les divergences d'opinion commencent k se faire jour, c'estlors-
qu'il s'agit de r^gler le programme de ces cours. Que faut-il enseigner k
une jeune Olle de quinze k vingt ans, en dehors, bien entendu, des con-
naissances indispensables k toute personne de cet Age? Evidemroent les
notions ^l^mentaires dont elle aura besoin quand elle sera devenue k son
tour une m^re de famille I Parmi ces notions indispensables, il faut citer
en premiere ligne Thygidne des mdres et des b6b^s ; et nous vouLons nous
borner ici k ces seuls points, pour ne pas sortir de notre domaine accou-
tum4.
« II faut avoir pratique la mSdecinedans nos villages perdus du fond de
la Bretagne et de la Vendue pour comprendre Tint^nftt social qu'il yak
engager les jeunes paysannes, sachant aujourd'hui presque toutes lire, k
suivre ces cours du soir, dans les 6coles de leurs bourgades, cours peadant
lesquels on les initierait aux soins el^mentaires de propret^ etsurtout k la
fa^n dontil convient d'alimenter lespetits enfants. Dans les campagnes.
en effet, les erreurs d'alimentation sont vraiment extraordinaires et on de-
meure stup^fait quand on constate jusqu'd quel point peuvent aller Tigno-
ranee et Tiucurie des mamans lesmieux inteutionn^es.
« II est un excellent moyen d'int6resser, m^meles femmes, k ces cours
du soir et les y faire assister. G'est, non point d'organiser des conferences
th^oriques k grand orchestre, avec maire et depute k Tappui, comme on
le fait trop, — jusqu'au village Torateur veut pontifier I — mais de simples
causeries, accompagn^es de projections int^ressantes. Ge syst^me, orga-
nist en particulier dans TOuest par la SocUtd pidagogique, donne d'excel*
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REVUES ET PUBLICATIONS FRANgAISES. 785
lent r^sultats aox divers cours dn soir, Jeunes gens et jeunes filles y
yiennent avec plaisir voir la lanteme magique et les images varices qu'elle
foumit. lis se flgurent qu'ils vont aa spectacle oa dans une baraqae de
foire. Qu'importe, pourvu que le but soit atteint!
« Pour ce qui concerne Thygi^ne des m^res et des enfants par exemple,
il suffirait de confier k chaque inslituteur quelques plaques relatives k ce
sujet; comme dans presque tontes les ^coles il y a actuellement de ces
appareils k projections, on obtiendrait de la sorte an enseignement
gratoit, qui porterait rapidement ses fruits. Gomme ces plaques pourraient
circuler d'^coles en ^coies, par Tinterm^diaire de la Soci^t^ p^dagogique
ou d'une autre institution analogue, on n'aurait besoin d'en faire faire
qu'un tr^s petit nombre : ce qui entralnerait k des frais de premier ^ta-
blissement tr&s minimes. Les soci^t^s d'bygi^ne et en parliculier la
Society de Midecine publique et d^HygUneprofessionnelle s'honorerait certai-
nement enprenant en I'esp^ce une initiative tr^s ^clair^e. Elle rendrait
an service immense k tout le pays a I'aide d'une tr^sl6g^re misede fonds.
NoussoubaitoDS en tons cas qu*elle s'int6resse k cette id6e daos la mesure
de ses moyens; car nous savons qu'ils sont grands! »
Les Annates frangaises des sourds-muets, un nouvei organe, publient surla
signature de leurdirecteurM.Bertoux un article dans lequel i'auteurse plaint
que la loi sur Finstruction obligatoire ne soit pas appliqu^e aux enfants
sourds-muets; il conteste la statistique sur laquelle s'appuyait la commis-
sion minist^rielle pour 6tablir que le nombre de ces enfants restant priv^s
d'instruction ^tait insigniflant. « Mais sur quoi base-t-elle son affirmation ?
Snr les statistiques ? II est d6montr^ qu'aucune statistique s^rieuse n'a 6ie
faite depuis 1832. Encore on pretend, 6crit Tabb^ Carton, que le d^nom-
brement a 6t^ trop pr^cipit^. Les autres statistiques n'ont 6il faites que par
comparaison, que par analogie, que par deduction. EUes sont purement
sp^culatives. Jugez-eu. La Convention porta le nombre des sourds-muets en
Age de scolarit^ & 4000. Lachmann, de Jobn, de Scbmal, le fixent k 7000
environ; 5 000 semble 6tre le cbifTre du D' Holger Mygind ; ce nombre
serait loin d*6tre atteint suivant M. le D^ Ladreit de Lacharri^re, m^decin
en chef de Tlnstitution nationale des sourds-muets de Paris. Le ministdre
de llnt^rieur s'en tieut au chiffre de 4 000.
« D'une statistique publico par M. Ludovic Goguillot, dans sonlivre : Com-
ment on apprend d porter aux sourds-muets, il ressort que 3 619 enfants fr6-
quentaient, en 1889, les 6coles sp^ciales. Si instructif soit-il, ce nombre
ne nous dit pas la quantity d'enfants qui ne resolvent aucune instruction.
Et cependant nous poss^dons les donn^es statistiques ^num^r^es plus haut.
Gertes, je n'oublie pas que si les enfants en kge de scolarit^ sont au
nombre de 5000 environ, pour prendre un chiffre moyen et que s'il y en
a 3619 fr^quentant les ^coles, il rcste 1 300 sourds-muets expectants. Mais
ce chiffre, tout mathematique qu'il est, est faux, archifaux, vous dis-je.
Void pourquoi. — Ces donn6es ne sont pas susceptibles de comparaison.
— Examinons-les. Voyons les ^l^ments qui entrent en leur composition.
Des enfants de dix k dix-sept ans composent le premier; de sept k dix-
sept ans, le second. Nul ne sait k combien s'61&vent les enfants compris
RBVCE PBILANTHROPIQUE. — H. $0
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m REVUE PHILANTHROPIQUE.
entre sept et dix aDS. Par Ik oh voit ce que vaat ce nombre de 3 619
comme terme de comparaison.
« Voulez-vous coiinaitre le nombre exact des sourds-maets en France?
proclamez pour eux rinstruction gratuile et obligatoire; dispensez les
families des 400 francs qu'elles doivent quand leur enfant arrive h Tinsti-
tution, ce qui 6vitera k de malheureux parents de ramener an village le
pauvre sourd-muet et d'attendre, pour faire de nouveau le voyage de Pari«>,
que la commune, ou le Gonseil g^n^ral, se soit d^cid^ d voter le montant
du trousseau. Oui, si vous voulez savoir le nombre des sourds-muets en
France, si vous voulez vous rendre compte qu'une population nombreuse k
hospitaliser soufTre, faites une loi, et 6dictez-y des peiness^v^res contre les
administrateurs des communes qui ne feront pas connaftre k temps les
sujets dignes de profonde piti^ et auxquels la soci^td doit, qui oserait le
contester ? la nourriture de Tesprit. »
Le Bulletin de la Socidt^ des creches combat tout projet tendant k rendre
Tinstitution des creches obligatoire.
L'obligation impos^e aveugUment k tonte commune ayant une popu-
lation d^termin^e pourrait cr^er, sur certains points, des ^tablissements
peu utiles, et n'en cr^erait pas partout oh ils seraient n^cessaires ; ce n'est
pas le nombre des habitants, c'est le nombre des ouvri^res qu'il faut con-
sid^rer.
D'autre part, cetle obligation, impos^e dans de pareils termes, abou-
tirait k une augmentation d'impdts, k la creation de nouveaux fonction-
naires, k la fondation d'^tablissements municipaux, qui, peul-6tre, accrof-
traient I'influence et le prestige des personnalit^s municipales, mais qui
seraient administr^s par des agents salaries, remplissant leur t^che sans
goiU, uniquement pour gagner leur traitement.
Ce qui importerait le plus, ce serait de supprimer les entraves qui ar-
r^tent et paralysent les fondations. Ce serait d'encourager et de faciliter la
creation d'oeuvres privies, entreprises et administr^es par des personnes
qui s'y ddvoueraient avec copur et avec d^sint^ressement, sans Hre pous-
s^es par Tappdt d*un traitement k toucher ou d'une decoration k soiliciter.
II faudrait avant tout, comme le demandait en 1875 le fondateur des
Creches et comme nous le demandons sans reldche dans ce Bulletin, enga-
ger les commmunes k provoquer la formation d'oeuvres privies, marchant
d'accord avec elles, mais avec ind^pendance, et k fournir gratuitement k
ces oeuvres uu local. La difficult^ de trouver et de payer un local est en effet
lepluss^rieux obstacle que rencontrent partout les Creches. L'affectaiion k
Toeuvre d'un local serait la plus pralique, la plus efflcace, la moins on^reuse
des subventions.
II faudrait eusuite simpliiler, par une r^forme facile de notre legisla-
tion et de notre jurisprudence administrative, les formalit^s qui entravent
inutilement la fondation et la marche des Creches comme de toutes les
oeuvres de bienfaisauce.
11 serait notamment facile et utile d'accorder plus rapidement aux
Crdches quelques-uns de ces droits civils que notre legislation actuelle ne
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REVUES ET PUBLICATIONS FRANgAlSES. 787
leur octroie que d'une main si avare et qui sont indispensables k toute
oeuvre pour marcher, souvent m^me pour se coustituer. II faudrait que ,
sans recourir k cette solennelle reconnaissance com me ^tablissement d'uii-^
lit6 publique qui devrait Hve r^serv^e aux ceuvres d'une r^elle importance,
unecBUvre etit facilement quality pour placer ses capitaux en son nom,
pour prendre en location, sans 6tre forc4e de recourir k i'interm^diaire
d'un pr6te-nom, le local qui lui est n^cessaire pour s'installer; nous pen-
sons m6me qu'elle devrait avoir le droit d'en devenir propri6taire.
La legislation des soci^t^s de secours mutuels offre, sous ce rapport, un
modMe qu'il serait facile d'imiter en Tadaptant aux besoins des autres
OBuvres. G'est depuis qnele d^cret du 26 mars 1852 a permis aux soci^t^s
de secours mutuels approuv^es de poss^der en leur nom sans avoir le titre
d'^tablissements d'utilit^ publique que ces soci^t^s out commence k se
multiplier. Les progr^s considerables qu'elles ont faits, au grand avantage,
lion seulement des classes ouvri^res, maisde la chose publique en g^n^ral,
devraient ouvrir les yeux de Tadministration et lui prouver qu'un regime
analogue k celui-ci, soumis, bien entendu, k certaines conditions soigneu*
sement d^termin^es par la loi, pent avoir beaucoup d'avantages pour Tin-
t^r^t public, et n'offre aucun danger, ni pour Tunit^ nationale, ni pour la
s6xet6 de T^tat, ni m6me pour les finances publiques.
Mais pour r^aliser cette utile et facile i^forme qui rendrait tant de ser-
vices i la population ouvrt^re, quel'anteur de ces lignesavait demand^e,
avait esp^ im instant obtenir d^s 1866, il faudrait qu'en France, au lieu
du godtdes places etdu d^sir que la conflance en notre infaillibilil^ per-
sonnelle inspire k cbacon de nous d'imposer aux autres samani^re devoir,
nous eussions le respect et le godt de riniliative individuelle, la conviction
g^n^reuse que, quand notre voisin agit, il a une bonne intention et agit
pour le mieux. L'administration fran^aise.malgr^ les reproches qu'il est de
mode de lui adresser et que notre legislation m^rite plus qu'elle, est intelli-
gente, bien intentionnee et sympathique k Taction priv6e ; il serait digne
d'elle d'entrer rSsolument dans la voie lib^rale et de tenter les moyens de
faciliter les oeuvrer privies, au lieu de les entraver, bien malgr6 elle, par
la seule force de rdgiements qui pr^tendent les diriger et les contr61er.
La Revue m^dicale signale et commente un recent arrdt de la Gour d'ap^
pel de Bruxelles.
Dans la plupart des villages de la banlieue bruxelloise, il existe des
nourrices qui, moyennant remuneration, se chargent d'eiever les enfants
qui leur sont confies. Le plus souvent, ce sont des enfants iliegitimes; le
nourricier r^gle avec la m^re les conditions d'entretien, variant de iO jb
30 francs par mois; parfois les payements continuent, parfois ils s'espacent
ou cessent compl^tement. Quand le nourricier a du coeur et que ses moyens
le lui permettent, il garde I'enf ant et s'en charge gratuitement; mais il
n'est pas sentimental de necessity et il se debat peul-etre aussi contre une
situation difficile.
Un nourricier de Lombeek, k qui un enfant etait ainsi demeure « pour
compte » s'adressa, au bureau de bienfaisance de la locality pour qu'il in-
tervint dans le payement de la pension : le bureau refusa et les juges de
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188 REVUE PHILANTHROPIQUE.
premiere instance ratiO^rentlc refus. La Cour a sanctionnS la m^me th^se,
« atlendu que I'indigent n'a pas droit au secours ».
Que va-t-il suivre de 1^? Ou que les nourriciers de banlieue refuseront
dor^navant des pensionnaires, a moins d'un contrat en due forme, ce qui
multipliera les infanticides; ou que, s'ils conservent Tenfant apr^s cessa-
tion de payement, le pauvre^tre court le risque de nepaslongtemps vivre;
11 sera, selon la pittoresque expression beige, « Iaiss6 dans un courant
d'air ».
M. Henry Lemesle s'expriine ainsi, dansle bulletin du Progrts medical,
sur le cas du tueur de bergers :
« Maintenant que Timpulsion ^pileptique a fait oeuvre grande et sans
pr^c^dent, que le cycle de Vacher s'est accompli sons les yeux d'une gen-
darmerie impuissante, Tappareiljudiciaire mis en mouvement depuis plu-
sieurs semaines fonctionne comme d'usage et fonctionnnera, nous promet-
on, jusqu'aux premieres cerises. Que sortira-t-il de toutcela?
« Des ^l^ments de la cause consid6rSs inglobo, et sans p^n^trer la psycbo-
logie de cenouveaunum^rodel'ali^nationd^linquante, dece d6g^n^r6cbez
lequel il semble d'ailleursque les troubles psychiques, les troubles d'inver-
sion sexuelle aient eu pour point de depart un amour normal, trouble
violemment dans son evolution, de Tensemble de ces faits, retenons au
9ioins Tenseignement.
« Et d'abord Vacber aorait-il eu la voie libre aux viols etmeurtres qu*il
commit, si les m^decins des asiles de D61e et de Saint-Rambert, oil il fut
intern^, avaient eu connaissance des circonstances de la tentative d'assas-
sinat de sa fiancee, des antecedents judiciaires,du dossier deleur malade?
Cela n'est pas presumable, et una fois de plus nous soufTrons de cette la-
cune legislative. — En second lieu, Tinstruction nous apprend que Vacher,
par intermede, non content de fumister Pandore, a voulu donner le salat
d'obedience aux magistrats d'Angers et de Tournon, et que dans ces villes
U fut arrete et juge pour vagabondage. Si la mesure de Vlnspection
medicaid des inculpislm avaitete appliquee, est-il besoin de dire que son
etat mental etii ete reconnu et la sede de ces crimes interrompue?
« Enfin, k ceux qui viennent dire, avec la loi et avec raison peut-eire,
qu'un aliene considere comme gueri ne doit pas etre garde k jamais k
Tasile dans la crainte de crimes ou de deiits futurs; que la liberte indivi-
duelle ne doit pas etre sacriOee k des exigences exagerees de Tinteret
social; que, pour unerdcidive possible, Ton ne saurait detenirde nombreux
alienes, k ceux-1^ nous repondrons que, dans ie conflit eieveentre Tinteret
social et Finteret individuel, une transaction est tr^s realisable.
<( Au sortir de Tasile, tout aliene doit etre consideree comme un tare, en
puissance de recidive et de dedenchement criminel; que Ton organise alora
une maniere discrete de surveillance de haute police, que I'aliene d'hier
soit astreint^ se presenter pedodiquement devant unmedecin de Tasileou
d'atlleurs, charge de lui deiivrer un certiflcat de capacite mentale, d'apti-
tude a la vie sociale, certiflcat donne pour un certain temps et renouve-
lable k pedodes plus ou moins eioignees, suivant retat psychique de
raiienei »
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REVUES ET PUBLICATIONS FRANgAlSES. 78*
M. Paal Rougier defend dans le Mutualiste lyonnais le principe de Tas
sarance en cas de ch6mage, contests par M. Vermont, bMonnier de
Tordre des avocats de Rouen, dansun pr^c6dent article du mdme journal;
il analyse, k i'appui de son opinion, un rapport pr^sent^ en 189^ k la So-
ci^t^ d'^conomie politique de Lyon, par M. V. Peiosse, docteur en droits
secretaire-adjoint de la Chambre de commerce.
« N'y a-t-il pas lieu, par exemple, d*6tudier, m6me d'encourager cet
essai de la Chambre syndicate des ouvriers coupeurs, brochews et ("ombreurB
enchaussttres de la ville de Lyon? Nousvoyons scs adh^reuts, au nombre de
150 environ, verser chaque mois un franc de cotisation. La moiti^ de la
recette annuelle, qui s'61^ve k i 500 ou 1 800 francs, constituant une caisse
spieiale de pr^voyance pour le chdmage involontaire, chaque soci^taire a
droit annnellement, ie cas ^ch^anl, k 40 journ^es de chdmage, dont le
taux est fix6 k 2 francs. D'apr^s les renseignements que nous avons re-
cneillis aupr^s des ouvriers eux-mfimes, dit M. Peiosse, cette caisse fonc-
tionne assez bien depuis une dizaine d'ann^es.
« En effet, le nombre des journ^es de chdmage payees est, enmoyenne,
de 350 r6parties entre 30 ouvriers chdmeurs.
« II en T^sulte que le ch6mage de Tindustrie k laquelle se livrent les
adherents est restreint, d^s lors facile k pr^voir. II n'atteint jamais & la
fois une parlie importanle des associ^s, qui sont r^partis entre 45 maisons
ou ateliers. Done, ch6mage restreint et grande division du risque. Ou
comprend que, dans ces conditions, la caisse puisse normalement fonclion-
ner. Voil^ une premiere r^ponse k TafQrmation de M. Vermont, disantque
Tassurance en cas de chdmage n'est pas possible et qu'elie a ^chou^ k
Lyon. »
Apr^s avoir cit^ les autres associations de caisses contre le chdmage
ezistant a Lyon, Tauteur de Tarticle poursuit ainsi :
« Nous ne voulons pas examiner plus amplement et au fond toutes les
questions que comporte Tassurance en cas de chdmage. Nous n'ignorons
pas qu*en Suisse, dans le canton de Saint-Gall, elle a d6nn4 de d^plorables
r^sullats.Nous critiquerions par Texemple que nous fournissent nos voisins
Tobligation de I'assurance et Tintervention des subventions municipaies,
cantonales ou de TEtat. Dans ces conditions, ce n'est plus ^videmment de
Tassurance au sens propre du mot. C'est de Tassistance d^guis^e, c'est du
socialisme d'etat, comme Ta d^montr^ la discussion qui a suivi le rap-
port de M. Peiosse k la Soci^t^ d'Sconomie politique. II n*en r^sulte pas.
moins que Tinitiative individuelle qui a dii crder en France des caisses
sp6ciales d'assurances contre le chdmage, dans des conditions restreintes,.
k Taide de ressources sp^ciales et suivant des calculs pleihs de prudence,
c'est-^-dire suivant une p^rSquation s^rieuse, doit dtre encourag^e et a
droit k toutes les sympathies. »
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REVUES ET PUBLICATIONS fiTRANGfiRES
Norv6ge. — Le fonctionnement des assurances eantre Us accidents. Fre-
miers r^suUais de la loi de 189i,
Nous avons r^sum^, dans les pr^c^dents num^ros de la Revue PhUan-
thropique,\es renseignements tir6s de publications officiellesallemandes, au*
trichiennes et anglaises, sur le fonctionnement des assurances, en faveur des
ouvriers contre les accidents professionnels. Le bureau des assurances
d'etat de Norv&ge vient k son tour de faire connaitre les r^sultats obtenus
par Tapplication de la loi de 1894, et nous extrayons de son rapport (i) les
renseignements suivants, qui embrassent la p^riode comprise entre le
i» juillet 1895 et le 31 d6cembre 1896.
Le Comity directeur de TofQce d'assurance, instilu6 par la loi du 23 juil-
let 1894, se compose de trois membres nomm^s par la couronne.
Le personnel ext^rieur compte 500 inspecteurs r^gionanx, nommds par
les autorit^s municipales. Leurs appointements sont pay^s, moiti6 par
r^tat et moili^ par les communes.
Tons les propri^taires d'^tablissements soumis k la loi out dd fonmir
k leur inspecteur, au plus tard trois mois avant I'application de la loi, une
note descriptive de leur atelier, cbantier ou usine, en menlionnant le
nombre des onvriers occup6s par eux et la moyenne de leurs salaires.
A la fin de 1896,ces notes avaient Hi envoy^es par les propri^taires de
8896 ^tablissements, dont 7 794 furent imm6diatement r^partis entre les
categories, correspondant aux divers degr^s de risques pr^vus par la loi ;
687 furent reconnus exempts de taxe et 415 retenus pour examen suppl6-
mentaire.
A la suite de reclamations et de revisions, il resta finalement 7488 6ta-
blissements assures, payant ensemble une prime annuelle totale de
1098 595 francs.
Entre le 1«' juillet 1885 et la fin de Tann^e 1896, on constata 3842 ac-
cidents; mais on estime qu'un certain nombre de menus accidents et m6me
quelques accidents importants ne furent pas d^nonc^s k TofQce d'assu-
rance.
(1) Beretning fra Rigsforsikringsanstalten om dens Virksomhed i 1$te regns^
kabspetHode omfattende Udsrummet,
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REVUES ET PUBLICATIONS felRANGtRES. 791
Gomme accidents graves il n'y eut, en 1895, que 31 morls et 4 cas d'in-
capacity to tale. Gomme accidents du second degr4,il y ent.toujours en 1895,
158 cas d'incapacitd partielle et 25 cas d'incapacit^ temporaire de plus d*an
mois.
Le nombre des pensions servies pour les accidents de 1895 a 4t6 de
235, dont Tarr^rage mojen est de 190 francs seulement; 25 allocations ont
6U vers^es pour infirmit^s temporaires, en moyenne de 276 francs. Endn
15 veuves ont recn des pensions, ainsi que 31 enfants mineurs et 2 parents;
mais les veuves n'ont eu que 205 francs et les enfants que 135 francs de
pension.
La loi donne droit aux indemnit^s suivantes : en cas de diciSf une in-
demnity de fun^raiiles de 70 francs. Les veuves et les enfants mineurs,
jusqu'^ 15 ans r^volus, et, dans certains cas, les parents et grands-parents
resolvent une pension calcul^e k 20 p. 100 du salaire annuel de la victime
pour la veuve, et k 15 p. 100 pour chacun des enfants, sans que les pen-
sions cumnl^es puissent toutefois d6passer 50 p. 100 du salaire de I'ouvrier
d^cidd.
En cas d'infirmit^ permanente, la victime revolt, pendant cinq semaines,
le remboursement des soins m6dicaux, et une pension pouvant atteindre
60 p« 100 du gain annuel, sans descendre toutefois au-dessous de 215 francs
par an, ni de 65 centimes par jour onvrier.
On voit que cette loi norv^gienne est, au point de vue des indemnit^s,
moins lib^rale que le projet de loi pr^sent^ aux Chambres n^erlandaises,
et que nous signalions dans notre dernier num^ro. Mais il faut dire que la
valeur de Targent est beaucoup plus grande en Norv^ge qu'en Hollande,
car avec 5 francs on pent ais^ment avoir moitid plus d'objets daus le pre-
mier de ces deux pays que dans le second.
G. C.
Allemaflrne. — La revue mensuelle Therapeutische Monatshefte que
public la librairie Springer k Berlin a donn6, k la fin de 1897, une 6tude
des plus document^es du D' George Liebe sur la lutte contre la tuberculose
que nous signalons aux sp6cialistes.
L'excellente revue Hygieniscke Rundschau^ publi^e & Berlin sous la direc-
tion des D«^ Max Rubner, Garl Fraenkel et Hans Thierfelder, depuis sept
ans, a perdu, depuis le 1*' Janvier 1898,1a pr^cieuse collaboration du pro-
fessenr Thierfelder qui se consacre tout entier k ses cours, et qui est rem-
plac^ par un hygi^niste ^galement fort appr^ci6, le D' Gunther.
Signalons, dans les deux demiers num^ros de cette publication, une
6tude de MM. Olshausen et Reineke sur les soins m^dicaux k domicile, en
Angleterre et en £cosse, et un article de M. Paull, sur la disinfection des
locaux contamin^s dans les campagnes.
Antriche. — La nouvelle institution de Soci^U des sauveteurs volontaires
a Vienne,
A la suite de T^pouvantable catastrophe de 1881, qui laissa ensevelies
sous les mines du Ringtheather tant de victimes qu'une organisation
rationnelle des secours eiit pu sauver, une soci^t^ se forma dans la capi-
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792 REVUE PHILANTHROPIQUE.
tale de i'empire autrichien en vue de porter secours aax victimes de
malheurs publics on d'accidents survenus dans les rues de Yienne.
Les dons affln^rent, et un grand nombre de jeunes gens et d'hommes
de toutes conditions, ainsi que de dames se constitu^rent en sauveteurs et
en infinniers on infirmi^res volontaires, sous le titre de Soci^t^ viennoise
de sauveteurs volontaires. Le comte Jean Wilczek en fut le promoteur et
le bienfaiteur initial ; le premier capital fut constitu6 par le versement
qu'il fit de 5000 florins.
Les commergants, les industriels, les gens du monde envoy^rent des
dons en nature, et la Soci^t^ s'installa modestement.
EUe cr^a des cours d'infirmiers et d'infirmi^res, des cours de gymnas-
tique pour les sauveteurs, et finalement organisa pour toute la ville un
service permanent, de jour et de nuit, d'ambulances municipales et de pre-
miers secours qui a rendu de tr^s grands services.
La Soci^t^ vit les sympathies I'entourer et ne cessa de prosp^rer; elle
est, depuis, devenue assez riche pour faire ^difier sur un vaste terrain, rue
Radetzky, une station cenlrale qui pent ^tre consid^r6e comme un modMe
d'installation pratique d'ambulance arbaine.
Cette station centrale vient d'etre d^crite, avec des vues photogra-
phiques k Tappui, par le D' Heinrich Gharas dans une tr^s int^ressante
publication : Das neue heim der Wiener freiwiUigen, RettungsgeselUchaft,
6dit^e par la Gazette de Vienne {Wiener Zeitung) et que nous signalons h
toutes les personnes qui s'occupent de ces questions de prompts secours
ou d*enl^venient des victimes d'accidents sur la voie publique.
Services de voitures d'ambulance et de brancards, chambres de secours
dol^es de tous les ustensiles imaginables, salle de pansement, salle de
garde avec t^l^graphe et t^I^phone, salle de cours pour « Ecole de Samari-
tains », rien ne manque k ce bel et utile ^tablissement.
G. C.
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BIBLIOGRAPHIE
Une Creche k Lnxemboiirg, par M. Auguste Ulveling, conseiller k la
Ghambre des comptes, vice-president des Googr^s d'ADvers et de Geneve
pour la protectioD de Teiifance (I).
L'auteur, trds d^vou^ k la protectioD de I'eDfance, philanthrope actif
et inform^, s'est propose d'^difier ses concitojens sur Tutilit^ d'une creche;
ii a reley^ les accidents dus au d^faut de surveillance des enfants du pre-
mier dge en mdme temps qa*il a rappei^ leur grande mortality dans le
grand-duch^ de Luxembourg.
La brochure tr^s docuraent^e de M. Ulveling expose les conditions de
fonctJonnement d'ane creche convenablement outill6e, offrant toutes ga-
ranties d'hygi^ne et de surveillance m^icale, oti les enfants au-dessous de
quiuze mois seraient pes6s chaque semaine, et qui ponrrait devenir un
centre de distribution de iait st^rilis^.
M. Ulveling accorde ses pref6rences k un ^tablissement ^rnanant de la
bienfaisance priv^e ; il pr^conise la formation d'une socidt^ constitute sous
le patronage de I'administration communale et marchant d'accord avec
elle, mais conservant son budget s^par^ et Tind^pendance d'une oeuvre
libre ; il adresse un chaleureux appel aux dames charitables de la ville de
Luxembourg et leur sonmet un projet de statuts de la creche k fonder.
M. Ulveling n'a pas seulement ^crit une brochure instructive* il a pris
Tinitiative d'une bonne oeuvre.
I«^ Assurance municipals centre le Gh6mage inTolontaire, par
M. Georges Gomil, avocat k la Gour d*appel de Bruxelles, professeur k
rUniversite (2).
M. Georges Gomil a ^crit une monographie qui n'est pas seulement
historique on critique, mais qui a le grand m^rite d'aboutir k des conclu-
sions fermes, k un projet positif.
Successivement, Tautenr passe en revue la caisse libre d'assurance
centre le chdmage dans la commune de Berne, Tassurance facultative k
(1) Luxembourg, Em. Simonis, 6diteur.
(2) BruxeUes, imprimerie de H. Moreau, 6, rue d'Or, 1898.
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794 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Cologne, les caisses libres de chdmage de Laasanne, de ragglom^ration
bnixelloise, de Gand, Tassurance obligatoire de Saint-Gall, de BAle-ville, etc.
Apr^s avoir ainsi ezpos^ T^tat de la question avec une clart^ parfaite»
M. Gornil, tout en s'attachant modestement k un travail de compilation el
de traduction, n'en 6met pas moins, dans son projet de statuts d'ane mu-
tuality d'assurance contre le ch6mage involontaire k constituer dans Tag-
glom6ration bruxelloise, des id^es personnelles ; il aura certainement
atteint son but, dans cette ^tude difficile, poisquHl se propose, pour prayer
le chemin dans la forit encore bien sombre de Vcusurance contre le chdmage^ de
dSfricher et de faire apparaltre en pleine lumi^re les quelques clairi^res
qui y ont^t^ hardiment pratiqa^es par d'autres.
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BULLETIN
Depuis de loDgues ann6es, les mutualistes fran^is attendent avec impa-
tience une legislation definitive et lib^rale; ils sont enfin k la veille de re-
cevoir satisfaction. L'accord ne tardera pas k Hre realise entre les deux
Ghambres, le texte vote par le Senat dans les stances des 10, 11 et i5fevrier
etant^ pen pr^s conforme au projet de la Ghambre. 11 n'y avait au surplus
qu*une difficulte s^rieuse : elle porlait sur le traitement accord^ par la
Gaisse des dep6ts et consignations aux societes de secours mutuels. De-
puis 1852, ces societes ben6flcient d'un taux constant de 4,50 p. 100 pour
leur fonds commun inalienable et pour leur compte courant disponible,
le depdt de leurs fonds etant d'ailleurs obligatoire k la Gaisse des dep6ts
ct consignations. Arorigine,ce taux de 4,50 ne constituait pas un avantage
en raison du lojer de Targent et du taux des placements courants ; aujour-
d'hui ces conditions sont exceptionnellement favorables, puisque Tinteret
servi par la Gaissedes retraites aux ddposants individuelsestde 3 1/2 p. 100.
Mais etait-il Equitable de priver les Societ^s d*un avantage ch^rement
pay6, d'aggraver encore la situation qui leur a M faite pour les retraites
par la loi de 1886? La Gbambre et le S^nat ne Tout point pens^ et n'ont
pas voulu amoindrir les consequences heureuses d'une loi d^emancipation.
Le trSs devou6 rapporteur du Senat, M. Lourties, et M. Barthou, ministre
de Tinterieur, ont eu la bonne fortune de dissiper certaines preventions et
d'obtenir un vole conforme du Senat sur Tarticle 21 qui maintient, par
une disposition ingenieuse et au moyen de subventions de I'Etat, le taux
de 4 1/2 aux societes de secours mutuels pour leur compte courant et
leur fonds commun. L*interet servi par la Gaisse des dep6ts et consigna-
tions sera egal k celui de la caisse nationale des retraites pour la vieillesse
(3,50 p. 100) ; seulement la difference entre ce taux et le taux de 4 1/2 p. 100
determine par le decret-loi du 26 mars 1852 et le decret du 26 avril
1856 sera versee & titre de bonification 4 chaque societe de secours mutuels
appronvee ou reconnue d'utilite publique, en raison de son avoir k la
Gaisse des depdts et consignations au moyen d'un credit inscrit chaque
annee au budget du minist^re de Tiuterieur.
GrAce k cette disposition tuteiaire, la loi nouvelle se traduira pour les
societes de secours mutuels, suivant la parole de M. Barthou, non par une
deception, mais par on encouragement bienveillant. Desormais afTranchies
legalement (car depuis la troisieme Republique la jurisprudence etait plus
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796 REVUE PHILANTHROPIQUE.
lib^rale que la loi ), ces soci^t6s vont prendre un nouvel essor, reeueillir
de nouveaux adherents parmi les feromes et les enfants jusqu'^ ce jour
exclus, prolonger la dur^e des secours de maladie, d^velopper leurs
fonds de retraites, en r^alisant de nombreuses ameliorations de detail
qui leur sont actuellement interdites.
Et pourtant, malgr^ toutes ces entraves, les mutualistes frangais out vu
lear nombre double de 1872 k i896. L'honorable M. Lourties a pu citer k la
tribune du S^nat comme dans son rapport des cbifTres r^confortants. Le
nombre des soci^t^s de seconrs mutuels, qui ^tait de 4 237, est aajourd'hui
de iO 588. II y a pr^sentement 1 700 000 membres participants. L'avoir des
soci^t^s, apr^s avoir ^t^ de 57 millions en 1872, s'^levait k 226 982 i 19 francs
au 31 d^cembre 1895. Et ces soci4t6s ne se bornent pas en g^n^ral aux
assurances k court terme, elles organisent la retraile pour la vieillesse en
d^pit des obstacles de la loi elle-m^me. Au 31 d^cembre 1895, 4071 so-
si6t6s sur 7 696 soci^t^s approuv^es poss^daient un fonds de retraite de
115 253 442 francs.
II reste assur^ment un effort gigantesque k poursuivre, tant du t:6td des
assurances k court terme que des assurances k long terme, et la loi en
preparation ne r^soudra pas, tant 8*en faut, toutes les difflcult6s, mais la
mutuality y puisera de nouvelles forces et une stimulation puissante.
Le Gomite de defense des enfants traduits en justice poursuit modeste-
ment, avec beaucoup d'esprit de suite et de mdthode, une oeuvre admi-
rable. Un de ses membres les plus actifs, M. L. Brueyre, s'est fait pour nos
lecteurs son bistoriographe impartial et sagace, et M. Adolphe Guillot, le
fondateur et le propagateur infatigable de cette belle oeuvre, a bien voulu
donner k la Revue Pkilantkropique la communication de son remarquable
rapport. Les comit6s de defense de Paris, des d^partements et de I'^tranger
tronveront toujours ici les sympathies les plus vives et Thospitalite la
plus cordiale; leur action m^rite d'etre soutenue el vulgarisee.
II est des cbiffres qu*on ne saurait trop reproduire et rep6ter ; ce sont
ceux que M. Albanel, juge d*instrucliou au tribunal de la Seine, a fait con-
naltre dans son rapport au Gongresde I'lnstitut international de statislique
de Saint-Petersbourg, et qu'il a de nouveau rappel^s ^la seance de rentr^e
du Comite de defense de Paris. Si Ton examine la situation numerique
des enfants arretes ou deferes au tribunal de la Seine, et si Ton compare
les annees 1887 et 1896, un resultat considerable apparatt: le nombre des
arrestations est tombe de 722 en 1887 k 405 en 1896. D'oti proyient cette
decroissance? Du fait que, grdce k Tintervention du comite de defense,
grice k une jurisprudence plus humaine et plus clairvoyante, I'arrestalion
a ete epargnee k des petits malheureux que Tancienne procedure du fla-
grant deiit aurait amenes sur les bancs de la police correctionnelle. Les
courtes peines ont suivi la meme decroissance, de 217 en 1887 k 30 seale-
ment en 1896 ; le total des condam nations k Tamende et 4 Temprisonne-
ment s'est abaisse, pour la mdme periode, de 243 k 37.
« L'enseignement qui decoule de cette constatation, a expose M. Albanel
au comite de defense, est qu'il ne faut pas trailer I'enfant comme Tadulte.
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BULLETIN. 797
« Le mineur de 16 ans ne doit plus ^tre traduit k la barre du tribunaly
sans qu'il ait fait au pr^alable I'objet d*une instractiou judiciaire. Le ma-
gistrat instructeur doit, avec le concours de Tavocat du mineur el sans se
pr6occuper duplus ou moins de gravity du d^lit impute k I'enfant, 6tudier
surtout sa condition morale et rechercher, dans i'int6r^t de Tenfant, la
meilleure solution possible. Le rdle du magistrat doit, dans I'espice, con-
sister plutdt a pr^venir qu'd punir, II doit apparaitre k I'eiifant comme un
Mucateur cbez lequel la s6v^rit^ n'exclut pas la bienveil lance. De son
cdt^, le tribunal doit se p^n^trer de cette id^e, que toute peine, si courte
qu'on la suppose, est toujours fdcheuse pour I'avenir de I'enfant, qu'il
vaut mieux prononcer contra luil'envoi en correction, filt-ce jusqu'^ vingt
ans, Tenfant pouvant toujours b^n^Gcier d'une liberation condition-
nelle. »
II va de soi qu'avant de recourir k Tenvoi en correction, et k defaut de
la remise aux parents qui offre trop so a vent des inconv^nients graves,
TAssistance publique doit avoir la preference. Depuis 1893, I'asile tempo-
raire de Thospice des Enfants-Assist^s permetde preparer et de faciliterce
triage des jeunes pr^venus, heureusement soustraits k la promiscuity du
D^pdt.
En 1896, 233 enfants ont 6ii envoy^s par le juge d'instruction k I'hospice
des Eofants-Assist^s pour 6tre tenus en observation. Yoici, d'apr^s le rap-
port du directeur de I'Assistance publique, quel a ete le sort de ces 233 hdtes
de TAsile temporaire : 66 ont ete d6Qnitivement admis dans le service des
moralement abandonn^s, 44 ont et6 immatricul6s comme enfants assist^s,
72 ontete rendus k leurs parents, 14 ontdt^ renvoy^s dans leur d^parte-
ment d'origine pour 6tre remis k leurs parents ou remis au service des
Enfants-Assist^s des d^parlements dont ils etaient lespupilles, 37 ont 6i6
remis k la disposition de Tautorite judiciaire. 37 sur 233, la proportion
n'est pas forte et la part de la repression est aussi r6duite que possible.
Le placement de ces enfants par I'Assistance publique a pu paraltre
aventureux; il n'est pas toujours exempt d'eonuis et de m^comptes,
mais, dans son dernier rapport sur le service des moralement abandonn^s,
Thonorable M. Peyron fait cette declaration interessante : « Des k present,
nous pouvons dire que, sauf quelques exceptions, tons les enfants donnent
en general satisfaction k leurs patrons et k leurs nourriciers. »
Aussi, loin de vouloir restreindre le rdle de I'Assistance publique et des
societes de bienfaisance et de patronage, il convient de I'etendre et de le
fortifier. Le comite de defense des enfants traduits en justice, sur Tinitia-
tive de M. Brueyre et de M. Poibaraud, a remis en memoire une disposi-
tion excellente de la loi de 1850, celle de I'article 19 d'apres laquelle « les
jeunes detenus sont, k repoque de leur liberation, places sous le patronage
de I'Assistance publique pendant trois annees au moins ».
Comment une prescription aussi sage, aussi tnteiaire est-elle compiete-
ment tombee dans I'oubli? Sans doute, les administrations d' Assistance
publique ont une tdcheassez lourde aremplir etle cadean qu'on se pro-
pose de leur faire n'est pas attrayant, mais le zeic des inspecteurs depar-
tementaux des enliats assistes est assez eprouve pour qu'on piiisse avec
conflance faire appel k leur devouement edaire pour accepter ce suppie-
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798 REVUE PHILANTHROPIQUE,
ment de clientele et de responsabilit^ ; toutes les forces sociales doiyent
ooDcourir k pr6venir la r^cidive et h r^duire la criminality juvenile.
« »
Pea k pea, la lumi^re se fait, les notions se pr^cisent sur les meilleurs
moyens k employer pour combattre I'infanticide et TaTortement. Un
honorable d^piit€> M. Constant Dulao, avait propose, d'accord avec deux
de ses collogues, MM. Henri de Lacretelle et de Folleville (de Bimorel), le
r^tablissementdes tours. La commission parlementaire, charg^ede I'examen
de la proposition, a substitu^ k cette conception la formule des bureaux
secrets d'abandon. Le bureau secret d'abandon, tri qa'ii fonctionne k Paris
depuis le premier Janvier 1887, consiste, comme on sait» dans L'admission
secrete des nouveau-n^s dont les parents ne veulent pas se faire consaibre;
il realise, k proprement parler, le tour moral, avec cette superiority swr
I'antique receptacle qu'il n'est ni muet ni passif et qu'il permet de pr^-
venir I'abandon necessity par la mis^re.
Et non seulement la commission de la Ghambre a pris cette decision
excellente, mais encore elle a choisi pour rapporteur I'un des aoteurs dela
proposition premiere de r^tablissement des tours. II est k pr^sumer que, si
i'honorable rapporteur M. Dulau n'avait pas etdconvaincu, il aurait decline
le mandat qui lui a ete confix. Apparemment il a dH reconnaltre que le
bureau secret d'abandon avait tons les avantages du tour sans ofTrir les
m^mes inconv^nients, et sa conversion est toat k fait significative.
Les partisans du retablissement des tours auraient, m^me au point de
vue de la tactique, le plus grand tort de se montrer intransigeants. Que
veulent-ils, en somme? sinon assurer, par un precede qui aleurs preferences,
Tadmission discrete, mysierieuse,desenfants nes dans des conditions excep-
tionnellement irreguli^res on clandestines? La situation legale ou nous
sommes, avec ses interrogatoires, la prodaction obligatoire du certificat de
naissance et de pieces d'identite, avec la recherche du domicile de secours,
leur parait k juste titre regrettable. On leur oiflre, par le bureau secret, une
solution qui, si elle n'est pas irreprochable k leurs yeox, se rapproche
sensiblement de la leur, qui tout au moins est preferable* au statu quo,
Pourquoi, des lors, ne s'uniraient-ils pas de toutes leurs forces aux cham-
pions du bureau secret pour redamer et obtenir la revision du decret de
i8il ? Que si, plus tard, le bureau secret ne leur parait pas un precede
convenable et suffisant, ils auront toute latitude d'aller plus loin et d'en
revenir k leur revendicalion romantique du tour.
Au contraire, si la reforme de la loi des enfants assistes se heurte k
la fois aux defenseurs du bureau ferme et auxavocats du tour, les obstacles
seront plus grands et le resultat plus lointain.
Le conseil superieur de TAssistance publique a ete d'avis qu'il convenait
de generaliser la pratique parisienne, c'est-i-dire d'instituer dans tons les
hospices depositaires de France des bureaux secrets d'abandon ; le gouvef^
nement est du m^me avis; la commission du Senat, qui a ponr rapporteur
M. Theophile Roussel, aboutit aux m^mes conclusions. D'ici peu,le rapport
sera pret k venir en discussion, et tout porte k croire que la miyorite du
senat sanctioni^era le projet de deliberation de son eminent rapporteur:
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BULLETIN. 799
II n'ya done qn'k s'en tenir k ce texte et k le faire pr^valoir le plus
promptement possible. Ayec les ineilleures intentions du monde, lerapport
de rhonorable M. Dulau tend k disjoindre da projet de loi sur les enfants
assistds toute la partie relative aox secours pour pr^venir les abandons et
anx bureaux d'admission ; cette nouvelle procedure ne tendrait k rien
moins qu'4 retarder le vote de la r^forme definitive.
Une fois la loi sur les enOpints assist6s votde, tout ne sera pas flni sans
doute, et les Ghambres devront 6tre saisies, soit par le gouvernement, soit
par rinitiative parlementaire, du projet d'assistance maternelle ^labor^
par le Gonseil sup^rieur de I'Assistance publique sur le rapport de
M. Drouineau.
Plus t6t les deux lois seront promulgu^es et plus les philanthropes se
rejouiront ; seulement les deux Ghambres doivent suivre la m^me m^thode
de travail, sous peine de ne pas se rencontrer et d'aagmenter encore les
causes de retard d4j4 sufflsantes et excessives en cette mati^re.
»
La profession m^dicale traverse indubitablement une crise et les meil-
leursespritss'enpr^occupent, non seulement dansun int^rdt corporatif tr^s
louable en soi, mais encore d'une mani^re g^n^rale, au point de vue de
Tint^r^t public. Lasoci^t^ enti^re ne saurait se d^sint^resser de la condition
des m6decins, et nul ne conteste ^I'Etat son droit et son devoir de conf^rer
les. grades, de d^cerner les dipldmes ; c'est pourquoi toutes les mesures qui
tendent k augmenter les garanties de savoir professionnel des gu6risseurs
dipldmes ne reinvent pas uniquement de la competence universitaire ; elles
ont leur retentissement j usque dans les milieux les plus strangers k Ja
science.
La Faculty de m^decine de Paris avait d'abord incline k fermer les porles
de son enseignement aux etudiauts etrangers, afln de se desencombrer et
d'accroitre la clientele des Universit6s de province. GrAce k Inopportune
intervention du Gonseil municipal, due k Tinitiative de M. Astier, cette
fdcheuse mesure n*a pas etd prise, car elle aurait prive Paris d'auditeurs et
d'eieves sans enrichir le moins du monde Montpellier ou Nancy. Si floris-
santes que soient ou que deviennent les Facult^s de medecine de province,
elles ne peuvent entrer en paralieie avec Paris au point de vue de Tattrac-
tion exerc^e sur les strangers. Si ceux-ci avaient ete ecart^sde Paris, Berlin
et Vienue y auraient gagne, et la France aurait perdu une partie de sa
force et de son rayonnement dans le monde.
Est-ce k dire que Teucombrement croissant de la Faculty de medecine
de Paris ne doive pas eveiller de grandes inquietudes, et qu'il n'y ait pas
des precautions k prendre, une enquete k ouvrir, des am'eliorations 4 appor-
ter k retat de choses actuel? Les mattres de la Faculte de medecine et des
hdpitaux ne le pensent pas, et les etudiants eux-memes jettent un regard
inquiet sur Tavenir. Un interne des hdpitaux, M. Paul Tissier, president de
I'Association generale des etudiants, exprimait nagu^re (1) ces inquietudes
(1) L' University de Paris f bulletin mensuel de I* Association g^€rale des ^tu-
diantSf n" 84, 13« annee, novembre 1897.
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800 REVUE PHILANTHROPIQUE.
en son nom personnel : « Nous assistons, dcrivait-il, k une crise. inqai6-
tante : des 4^8astres joumaliers nous ouvrent de tristes apergus sur U
situation mat^rielle des jeunes m^decins ; nous voyons notre carridre p^nible,
mais jadis rcspect^e, devenir Tobjet d'attaques retentissantes dans la
litt^ratare, au th^dtre et devant lestribunaux; et surtout nous d^convrons
ayec amertnme que, sous Tempi re des difficult^s de la vie, nombre de pra-
ticiens compromettent la dignity et la bonne renomm^e de toute la cor-
poration. De tels symptdmes m^ritent qu'on s'^meuve, et que les jeunes
fassent les premiers aveux et, au besoin, les premiers frais du rel^vement. i
11 est bon, en elTet, que les jeunes r6fl6chissent et qu'ils apporteut leur
t^moiguage. Ge qui frappe M. Paul Tissier, c'est la duality qui existe entre
r(§cole et rh6pital, c'est surtout le caractfere trop th6orique des examens.
n ^met Tavis, appuy^ sur Topinion de ses maltres, que, sans augmeoter la
difficult^ des ^preuves, il conviendrait de modifier la nature de ces
epreuves; il demande que Ton d^veloppe et que Ton surveille ^troitement
le stage hospitalier, et que les examens soient le controle tr^s s^rieux du
stage; au lieu d'etre purement oral, Texamen de m^decine comporterait
des Epreuves Sorites.
Nous n'avons pas & discuter ici ces propositions, k prendre parti pour tel
on tel projet, ce que nous voulons surtout, c'est dire combien I'^tude k la-
quelle la Faculty de m^decine ne tardera pas sans doute k se livrer sera
suivie avec soUicitnde par les mddecins, par les 6tudiants et par tons les
citoyens soucieux de la chose publique.
II ne servirait de rien de dissimuler la crise de la m6decine, de se bon-
cher volontairement les oreilles pour ne rien entendre, et cette surdity pas-
sag^re ne serait pas de longue durde. Tons les probl^mes d 'assistance pu-
blique touchent k Fexercice de la m^decine, au recrutement des docleurs,
au fonctionnement du service de sant6. Ge haut enseignement professionnel
brille assur^ment duplusvif 6clat en France, k Paris, k Lyon, dans d'autres
villes encore; il n*est pas, de I'aveu de tons, exactement conforme aux n^-
cessit^s pr^sentes, il suscite de nombreuses critiques de valeur in6gale ; les
professeurs et les maitres des ^coles de m^decine et des bdpitaux
s'honoreront grandement en prenant I'initiative des r^formes n^cessaires
daos Tint^r^t des m^decins et des malades.
Paul Strauss.
Le Dii^cteur-G&anl : PAUL STRAUSS.
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LA PROTECTION DES PETITS MARTYRS
D'abominables attentats ont 6mu la conscience publique et
le Parlement s'est donnd pour t&che, grftce k Tinitiative de plu-
sieurs de ses membres, MM. Henry Cochin, Julien Goujon et
Odilon-Barrot, de renforcer la justice repressive. Les magistrats
de premiere instance et d'appel se plaignaient eux-m6mes d'etre
ddsarm^s pour atteindrecomme il convenait d'odieux bourreaux
d*enfantSy tels, par exemple, les assassins du petit martyr de la
rue Vaneau, les tourmenteurs de la jeune Borlet; les actes de
barbarie n'entratnaient que des condamnations d^risoires ou
insuffisantes.
La Ghambre et le S^nat ont ^t6 d'accord, sur les savants rap-
ports de M. de FoUeville et de M. B6renger, pour completer
ou modifier les dispositions des articles 312, 331, 349, 350, 351,
352 et 353 du Code p6nal, pour 6tendre la portde de la loi du
7 d^cembre 1874 sur la protection des enfants employes dans
les professions ambulantes et pour rdgler le droit de garde de
Tenfant maltrait^.
Gette aggravation de p^nalit^s, ce renfort de precautions r^-
pondent pour une part considerable aux necessitds les plus
pressantes, et c'est deji quelque chose d'61ever Techelle des
peines reservfies aux tourmenteurs.
Malheureusement, les rigueurs du Gode ne sont point suf-
fisantes pour preserver les petits martyrs et la revision de la
loi, pour utile qu'elle puisse etre, n'aura qu'une efficacite me-
diocre.
On Ta dit ici m^me (1) en montrantla necessite absolue
(1) Les Enfants martyrs^ par M. Paul Strauss, n* 5 de la Revue Philanth^o-
pique, p. 641 et suiv.
RBTUE PHILAflTBROPIQUB. — II. 51
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802 REVUE PHILANTHROPIQUE.
d'organiser, sous une forme quelconque, la police des actes de
cruaut^ commis envers les enfants. Le proprc de ces crimes est
de se d^rober, de se dissimuler, de s'accomplir dans Tombre et
le myst^re ; ils restent pour le grand nombre ignores et im-
punis. Est-ce une raison pour se croiser les bras et ne rien
feire? Les Anglais et les Am^ricains ne Tont point pens£; ils
n^ont pas voulu s'en remettre au hasard du soin de soustraire
les petits maltrait^s k leurs bourreaux. Du coup, leur bardiesse
lib^rale a H6 r^compens^e; le sort de Tenfance malheureuse a
4td notablement am^lior^.
Ce qui importe en pareil cas, c'est d'intervenir en temps
utile, soit pour d^livrer le petit prigonnier, soit pour lui ^par-
gner k Tavenir de mauvais traitements.
L' action r6pressive n'est pas la seule qu'on doive exercer;
une intervention moins tardive et plus vigilante s'impose.
Les grandes associations anglaises et am^ricaineSf qlii
prMent leur concours k Tautoritfi publique, ne se boment pas
k d^f^rer k la justice les parents d^natur^s; elles s'efforcent de
ramenerau sentiment du devoir les parents d^faillants ; elles
procfedent par voie A'avertissements. Dans un grand nombre de
cas, ces avertissements sont salulaires; Tenfant est laiss^,
comme dans Tfitat de Massachusetts, a litre dipreuve, k la
garde de ses parents, sous la surveillance de Tagent de TEtat;
dans la pratique ordinaire, le reprc^sentant des soci^t^s de pro-
tection est investi d'une sorte de tutelle officieuse, les parents
savent qu'en cas de r6cidive de brutalit^s et de violences, ils
seront silrement chftti^s ou bien qu'ils perdront la garde de
leur enfant, et ils s'amendent, soit par crainte de la prison,
soit par un reste d 'affection patemelle.
Ces soci^t^sont des attributions fort ^tendues ; elles tiennent
de la loi la faculty de poursuivre directement les parents cou-
pables; elles sont de vdri tables auxiliaires de la justice et leur
r6le est d'autant plus important qu'elles sont plus d^sint^res-
s6es. En elles reside un ddvouement toujours en 6veil, une
sollicitude constamment pr^te, une tutelle prompte, ^nergique
et bienveillante.
En Am^rique, les associations protectrices des animaux ont
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LA PROTECTION DES PETITS MARTYRS. 803
agrandi leur sphere d'action et ^largi leur competence ; elles se
sont presque toutes transform^es^ comme rassociation protec-
trice des animaux du district de Golombie, en Humane
Society.
Pourquoi ne pas tenter en France Tapplicationd'un sys-
thme qui a tait ses preuves en Angleterre et aux ifitats-Unis ?
Pourquoi ne pas accorder h, certaines associations, dans des
conditions d^termin^es, la poursuite des crimes et d^lits contre
renfance?La proposition a 616 formulae iila Soci^t^ g^n^rale
des prisons par M. Paul Nourrisson ; elle a rencontre Tappui de
philanthropes et de criminalistes tels que M. F61ix Voisin,
M. Brueyre, M. Henri Joly, M. Geoi^es Picot, M. B^renger,
d'autres encore ; elle a obtenu Fadhdsion unanime et autorisde
du Comity de defense des enfants traduits en justice; forte de
tels patronages, elle a 6t6 port^e devant le Parlement avec la
signature de M. Th^ophile Roussel et la mienne. .
Un article 7, qui a beaucoup fait parler de lui, a ^16 inlro-
duit dans le projet de loi vot6 par la Chambre; il 6tait ainsi
r6dig6, aprfes accord entre la commission s^natoriale et le garde
des sceaux : « Le droit de poursuivre et de se porter partie ci-
vile dans les termes des articles 63 et 182 du Code d'instruction
criminelle, peut 6tre concede par d6cret' special, apr^s avis du
tribunal de premidre instance^ aux associations protectrices de
I'enfance reconnues d'utilit^ publique, en ce qui touche les
violences et les attentats commis envers les enfants. Ce droit
sera exerc^ pour chaque association par un de ses membres
sp^cialement d^sign^ par elle, agr^6 par le garde des sceaux
etassermente. »
A la premiere deliberation, la disposition nouvelle passa
sans encombre; elle avait recueilli Tadhesion chaleureuse de
M. Milliard, ministre de la justice, et Finnovation n'avait 6t6
contestee par personne. Les amis de Tenfance, tout au moins
dans le pays, avaient cru la cause gagn^e ; la Society protec-
trice de Tenfance s'en felicitait publiquement dans son assem-
blee annuelle; les champions de Tinitiative priv^e applaudis-
^ent k cette victoire impr^vue.
Mais il restait 5 franchir le redoutable ddfile de la deu-
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804 REVUE PHILANTHROPIQUE.
xi^me lectureet plus d'un signe avant-coureur laissait pressen-
tir que le passage serait terriblement malaisd.
L'article 7 du projet de loi^aprfes avoir, sinon pass6 inapergu,
du moins bdn^Qci^ d'un assentiment de surprise, soulevait dans
tous ies groupes du S6nat Topposition la plus vive et la plus
passionn^e.
Les juristes intransigeants ne lui pardonnaient pas de cr^er
un pr6c^dent redoulable ; ils I'accusaient de porter atteiute aux
principes de notre droit public, d'empi6ter sur le domaine de
la magistrature.
Beaucoup se flattaient d*ob4ir exclusivement k des appre-
hensions poliliques, dont T^ducation juridique r^pugnait k ce
partage d'attribuiions entre le minist^re public et certaines
associations privies.
La grosse objection, celle des couloirs, des conversations
particuliferes, 6tait tirde des abus de mandat, des excfes de pou-
voir auxquels les soci6t6s protectrices de Tenfance seraient
e^pos^es. Une nouvelle inquisition allait nattre, protestante,
juive ou franc-magonne pour les uns, cl^ricale pour les
autres! Les soupQons les plusinattendus se donnaient carri^re,
les m^fiances les plus injustcs s'^veillaient^ les esprits les plus
robustes ne rdsistaient pas k celte obsession d'un p6ril d'ordre
politique ou religieux.
Si cet dtat d'^me ne s'est pas r6v6l^ avec ^clat dans la dis-
cussioti publique, oules orateurs ont mis une sourdine k leurs
inquietudes, il a sans contesle inspire le vote du S^nat. Aggra-
v6e par la retraite en bon ordre du garde des sceaux, la defaite
a et6 edalanle et ce nouvel article 7 a 6te repousse par Tuna-
nimite du Senat moins 23 voix.
Ce denouement d'un effort si meritoire, dont Thonorable
M. Berenger pent revendiquer la plus grande part, est regret-
tabled plus d'un titre; il a mis une fois de plus en lumi^re la
timidite d'esprit du legislateur frangais, docile aux enseigne-
ments d^ecole, penetre de respect pour la tradition, gardien
farouche du texte ecrit et de la formule, et, dans Tesp^ce, il a
frappe de steriliie la reforme 6laboree dans I'interet de Ten-
fance marly re.
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LA PROTECTION DES PETITS MARTYRS. 805
Le S^nat a redouts de mettre aux mains d'associations ca-
pables d'en abuser, des attributions d'ordre public ; il aurait eu
raison, si le droit de poursuite avait 616 conc6d6 en bloc et
d*une mani^re indistinte k toutes les sooi^t^s fondles sous le
couvert de la protection de Fenfance. Les pr6cautions les plus
minutieuses 6taient prises, les garanties les plus s^v^res exi-
g6es pour Tobtention de ce nouveau droit : d'abord, la recon-
naissance d'utilit^ publique, en second lieu, Tavis du tribunal
de premiere instance. Le minisl^re de rint6rieur et le Gonseil
d'Etat ne reconnaissent pas k la l%^re comme ^tablissements
d'utilit^ publique des associations de bienfaisance, un tribunal
n'aurait pas 6mis un avis favorable, sans avoir proc^d^ k Yen-
qu^te la plus attentive sur la soci^t^ demanderesse.
Une association protectrico de Tenfance, reconnue d'utilit^
publique, agr^^e par le tribunal deson si6ge, aurait eu encore k
^olliciter Fautorisation du gouvernement. Celui-ci ^tait libre
d'accueillir on de repousser la requite; il ne Taurait pas fait,
j'imagine, sans peser toutes les consequences de sa determina-
tion, un d^cret special eAt 6i6 nicessaire, en cas d affirmative,
pour conc6der le droit de poursuivre et de se porter partie
civile.
Le garde des sceaux se r6servait en outre le choix du re-
pr^sentant de Tassociation ainsi autoris6e,k qui serait confi(5 ce
mandat special et le d6l6gn6 aurait dH pr6ter serment.
Est-ce que tout n'avait pas 6t6 pr6vu pour restreindre dans
la mesure du possible les risques d'erreurs et d'abus? En r^a-
lit6, le Gonseil d'Etat, le minist^re de Tlntdrieur, le tribunal,
le garde des sceaux auraient confer^ sous leur responsabilite Ji
un tr^s petit nombre d'associations cette extension plus redou-
table qu'envi6e de pouvoirs et de competence.
Le gouvernement n'aurait pas manqud de proc^der avec une
prudence extreme, surtout au debut. Une ou deux grandes
associations seulement auraient sollicite cette attribution, et,
si les demandes avaient par extraordinaire ete plus nombreuses,
elles auraient ete it coup stir ajournees.
Meme en cas de succ^s, il etil ete desirable, dans Tinterei
de Tenfance, de ne pas multiplier les centres de protection.
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806 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Une soci^t^ centrale et unique, soil actuellement exislante,
soit form^e i cet eflfet, aurait 6t6 plus apte k remplir cet office
que des associations rivales ou sp4cialis4es : « Ce qu'afaitLon-
dres, ^crivions-nous Jicetteplace,lelO 8eptembrel897,ce qu'ont
accompli les l^tats-Unis, est-il au-dessus de nos forces? N'y a-
t-il point parmi nous de merveilleuses ressources d'initiative et
de bienfaisance, et le reservoir de Tactivitfi feminine n'est-il
pas assez riche pour alimenter une grande (Buvre, form^e
comme on voudra, pourvu qu'elle surgisse ! »
En se fM^rant, sans abdiquer leur autonomic, plusieurs
des associations actuelles, la Soci^t^ protectrice de Tenfance,
r^nion frauQaise pour le sauvetage de Tenfance, la Soci6t^ de
mendicity centre les enfants, la Soci^t^ de propagation de Tal-
laitemeht maternel, etc., etc., auraient pu faire en commun cette
d6licate experience et oflFrir au public un sifege social unique,
oti auraientet^recueillis et centralists tousles renseignements.
Cette concentration aurait eu plus d'un m^rite et plus d'un
avantage ; ellen*6tait d'ailleurs pas \i6e n6cessairementii Toctroi
du droit de citation directe, et elle n'a pas perdu toute raison
d'Mre par le rejet de Tarlicle 7 du projet de loi sur les actes
de cruaut6.
On a essay6 de montrer au S^nat, qui peut-6tre n*a pas ^t^
suffisamment frapp6 de cette liaison, le lien direct qui rattache
le martyrologe de Tenfance k la criminalit6 juvenile. Un petit
martyr, s'il ne succombe pas sous les coups de ses bourreaux,
est presque toujours un candidat au vagabondage etiila depra-
vation pr^coce; le s^jour au foyer domestique lui est aussi fu-
neste au moral qu'au physique. Quand des parents sont assez
denatures pour se livrer k des violences abominables sur de
petits 6tres sans defense, ils sont capables des pires exc^s et la
negligence est leur moindre defaut. Tons ceux qui ont Texpe-
rience de ces choses connaissent la genfese, le point de depart
des vocations vicieuses; lauteur responsable en est habituelle-
ment une marMre, un beau-p^re plus ou moins legitime.
Le plus souvent, dans les milieux industriels, un des con-
joints a disparu ; le p^re ou la m^re a reconstitue une union irre-
guli^re, et Tenfant legitime est traite en paria. Comment ne
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LA PROTECTION DES PETITS MARTYRS. 807"
s'6vaderait-il pas, une fois adolescent* de sa prison? Livr6 k
lui-m6me, 6ley6 dans la rue, il est k la plus mauvaise 6cole,
celle du vagabondage, et il se d^forme k vue d'oeil.
Le service des moralement abandonn^s de la Seine renferme
une population qui, pour lesneuf dixifemespeut-6tre, asubi de
mauvais traitements au logis familial. L'enqu6te s^natoriale
de 1882 sur les mineures prostitutes des villes de province a
produit une constatation analogue.
En r^clamant un surcroit de garanties et de protection de&
petits martyrs, les philanthropes n'ob^issent pas seulement k
une impulsion irresistible de piti^ pour d'innocentes creatures,
ils font preuve d'une profonde connaissance des sources du
mal contemporain, ils ont Fambition d'accomplirtout ensemble
une CBuvre de pure humanity et de pr^voyance sociale.
Peu s'en est fallu, dans cette discussion memorable du Sdnat,
qu'on ne les accus&t de vouloir troubler pour des billeves^es
la paix des manages et la s^curit^ des families ! Leur curiosity
semblait indiscrete et leur z^le ^tait d^nonc^ comme suspect!
Quant aux associations philanthropiques, elles ont pass6 un
viiain quart d'heure. Une d'entre elles, dont la fondation a fait
un si grand honneur k Jules Simon, V Union frangaise pour le
sauvetage de I'enfance (1), a 6t6 Fobjet d'imputationsinjustes
qui d ailleurs ont 616 victorieusement contredites.
Les soci6t68 protectrices de Tenfance ne conserveront pas de
Tincident un souvenir tropamer ; elles redoubleront de vigilance
et de d6vouement pour aggraver encore Tinjustice de certains
jugements passionn6s ; ce sera leur seule vengeance et le bien
public y trouvera sa part.
Une occasion exceptionnelle a 6t6 perdue; le S6nat n'a
pas os6 innover dans une matifere oti Tinitiative priv6e pouvait
le plus utilement seconder Taction publique.
T6t ou tard, le probl6me sera pos6 de nouveau devant le
Parlement, car, h6las ! il est loin d'etre r6solu par un vote
n6gatif.
Les adversaires de Tarticle 7 au S6nat ont rivalis6 d*op-
(1) Voir le num6ro du 10 septembre, V Union francaise po,ur le sauvetage de
VenfancCy par M. G. Gayte, p. 708 et suivantes.
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tO% REVUE PHILANTHROPIQUE.
ti^isme ; k les entendre, des r^formateurs trop im patients pro-
posent un remMe « k un mal souvent imaginaire et parfois fart
exag^r^ ». L'honorable M. Leporch^ achaleureusement exprim^
^a confiance dans le sentiment familial fran^is.Nul ne songe it
instituer un d^bat comparatif sur la solidity des sentiments de
famille en France, en Angleterre et aux Etats-Unis; les 61^-
ments de comparaison ne sont pas faciles k rassembler. Les
Anglo-Saxons seraient fond^s k s'inscrire en faux contre une
•conclusion d^sobligeante pour leur race et ces sortes de parall^les
ont plus d'un inconvenient. En tenant toutefois pour exacte cette
assertion ilatteuse pour notre amour-propre national que la
femille frangaise est plus robusteque la famille anglo-saxonne,
on ne fera croire k personne que T^cart soit k ce point formi-
dable que les actes de cruaut^ se comptent par milliers en An-
gleterre et par vingt ou trente en France !
A supposer mfime que la difference de temperament et d'edu-
cation nous assure un avantage marque, il y a loin denos vingt-
cinq condamnations par an aux 12 000 avertissements et aux
2000 poursuites de la Societe nationale anglaise. L'immense
majorite de ces actes deiictueux ou criminels echappe k toute
repression, et le martyrologe de Tenfance n^est ni divulgue ni
reprime^^le bruit des plaintes enfantines est assourdi et leur
echo ne se repercute pas au loin ; mais il traverse les minces
cloisons, les murailles peu epaisses des logements ouvriers.
Les voisins entendent, des temoins fortuits sont informes ; seu-
lement ils repugnent k denoncer k la police ou au parquet les
auteurs de ces mefaits caches.
Un de nos contradicteurs a protesie contre une telle allega-
tion. « Et qu'on ne vienne pas soutenir, s est-il eerie, que les
voisins, ceux qui sont spectateurs de ces cruautes, excretes
rarementy il faut bien le dire, mais d'unc fa^on quelquefois
epouvantable, par certains parents sur la personne de leurs cn-
fants, ne sont pas disposes k saisir la justice : il rCen est rien. »
L'affirmation est toute gratuite; elle ne repose sur aucune
preuve; elle est en contradiction avec les statistiques de Tetran-
ger, notamment celles de TAngleterreetdesEtats-Unis, avec les
observations et constatations faites en France k la prison de
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LA PROTECTION DES PETITS MARTYRS. 809
Saint-Lazare, dans le service. des moralement abandoDn6s, etc.
II est au contraire av^r^ que les voisins n'aiment pas 4 frap-
per k la porte du commissariat de police, qu'ils ne veulent
point passer pour ddlateurs, qu'ils craignent d'etre appel^s en
t^moignage, et,quc,malgr^ leur ardent d^sirde venirau secours
d'un malheureux, ils h^sitent, ajournent, temporisent et fina-
lement s'abstiennent.
Un interm^diaire plac6, commeunj^tat-tampon, entrelc pu-
blic et le parquet aurait provoqu6 les confidences, les revela-
tions, et il n'eAt pas vraisemblablement manqu^ de clients.
Get intermediaire pouvait 6tre une SocidW protectrice de
Tehfance ; il avait besoin, pour inspirer confiance, d'etre accre-
dits, pourvu d'attributions sp6ciales, pour ainsi dire garanti
par le gouvernement.
La majorite du Senat a refuse d'entrer dans cette voie sans
indiquer la solution qui lui paraissait la meilleure. Car, pour
proteger efficacemeht les enfants maltraites, il n'existe k pro-
prement parler, comme nous Tavons indique precedemment
ici meme, que deux procedes differents : « ou bien une societe
particuliere reconnue par Ti^tat, pourvue de certaines immu-
nites, ou bien un comite directement institue par Ti^tat ou la
collectivite (1) ».
A quelle institution publique va-t-on recourir, k defaul
d'uneoeuvre priv6e? Les demolisseurs ont neglige de le dire;
ils se sont imagine qu'en sauvegardant les principes du droit et
en preservant les citoyens d'abus eventuels, ils avaient assex
fait pour Tenfance malheureuse.
La question n*est pas close ; elle reste entiere et toutes les
difficultes apparaissent comme avant le depdt des propositions
destinees a elever I'echelle penale. La justice repressive est
sans doute mieux armee et les peines seront desormais propor-
tionnees aux delits ; mais la police de Tenfance maltraitee n'cst
pas organis6e et les tourmenteurs peuvent compter sur Tim-
punite.
Puisque k tort Tinitiative priv6e n'est pas en faveur dans
(1) N** 5 de la Bevue Philanlhropique, p. 646.
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810 REVUE PHILANTHROPIQUE.
notre pays, il faudra bien, bon gr6, mal gr^, en revenir it une-
solution d'etat, dans le genre de celle qn'avait admise mon
maitre et ami M. Th^ophile Roussel dans sa proposition de loi
de 1883 sur les enfants abandonn6s, d^laiss^s ou maltrait^s. Un
comity devait fonctionner dans chaque d^partement, un autre
dans chaque canton, pour assurer Tex^cution de la loi et aussi
pour recueillir et contr6ler toutes les informations relatives
aux enfants maltrait^s.
II est en tout cas impossible de se r^signer au statu quo
16gal ; un premier 6chec n'est pas fait pour nous d6courager ;
il conviendra de rechercher avec le plus grand soin, en
dehors de toute pr^f^rence doctrinale, le meilleur systfeme, le
plus facilement acceptable, de protection preventive des enfants
maltrait^s et d^laiss^s.
Soit qu'il s'agisse de la loi du 24 juillet 1889 et de son ap-
plication plus sdre, soit qu'on se pr6occupe de la mendicity des
enfants, du vagabondage, de la non-fr6quentation scolaire,il ya
lieu, commc pour la ddcouverte opportune desactes de cruaut6,
de faire appel aux moyens les plus ^nergiques et les plus d6-
cisifs et d 'examiner dans quelle mesure et sous quelle forme
Taction priv^e et Fintervention publique peuvent se combiner
et se pr6ter la main ; le probl^me est pos^ devant Topinion,
devant la conscience populaire, non moins pressant et non
moins aigu, et nul n'a le droit de s'en d^sint^resser; tons les
bons citoyens et toutes les femmes de cceur ont leur mot k dire
et leur devoir k faire.
PAUL STRAUSS,
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LETTRES A UN MILLIONNAIRE
II
Assez longuement, dans ma premiere lettre (1), je vous ai^
dit comment je concevais Torganisation des secours admini-
stratifs : aujourd'hui, je serai plus bref, bien qu'ayant k vous
parler d'une question ^galement int^ressante, celle de Thospi-
talisation des vieillards indigents et des infirmes. Elle est,
dans notre ^tat social, le complement naturel de la pr6c6-
dente. Je n'ai plus k vous exprimer des id^es g^n^rales ; je n'ai
k voir que le mode d'application des ressources consacr^es a
cette oBuvre d'assistance et k 6tudier k votre intention le plus
judicieux emploi de ces ressources.
Peut-^tre allez-vous me dire que cela vous int^resse fort
secondairement, puisqu'il ne s'agit plus de vous indiquer
quelque moyen de ddpenser louablement votre argent, et que,
d^s I'instant oil je ne vous entraine pas k puiser dans votre
cofifre, vous n avez que fairede mes theories?
D^trompez-vous ; vous pouvez encore ici servir la cause des
pauvres gens. Ef, tout de m^me, c'est votre fortune qui vous
permettra de le faire; elle vous donne de la consideration, vous
ouvre toutes les portes, vous permet de recevoir k votre table,
de r6unir dans vos salons des 6crivains, des 6conomistes, des
legislateurs, des ministres, toutes personnalit^s ayant une ac-
tion indirecte ou directe sur les destinies des citoyens, gens
considerables dont vous avez la rare chance d'etre considere,
qui vous ecoutent avec deference, sur lesquels vous pouvez
certainement exercer votre influence en faveur de Telaboration
d'une loi bienfaisante, tout comme s'il s'agissait d'echafauder
(1) Voir la Revue Philanihropique du 10 octobre 1897.
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812 REVUE PHILANTHROPIQUE.
quelqu'une de ces difficiles et avantageuses combinaisoDS
iinanci^res dont vous 6tes parfois le maitre artisan.
A ceux-li vous direz, quand vous aurez un peu m^dit^ sur
ce que je vais tout d'abord vous dire moi-mfime, qu'ils out
r^ellement k enrichir notre code d'un utile instrument l^gal
de plus.
Vous avez puvousrendre compte de Tinsuffisance des se-
cours en argent, de la difficult^ de Torganisation des secours
en travail ; vous avez pu, surtout, reconnaltre Texactitude de
cette v6rit^ que tout secours inf^rieur k trente francs par mois
pour un vieillard, pour un infirme, dont la place serait dans un
hospice, est une assistance d^risoire, une condamnation aux
pires raiseres, k la famine et k la mort.
Ce secours r^gulier, mensuel, de trente francs, qui serait, k
fi*ais modestes, le salut d'une foule d'^tres et en somme Tall^
gement de beaucoup de charges administratives, combien de
temps ceux qui le r^clament comme ^conomistes, ceux qui
rimplorent comme int^ress^s, mettront-ils k Tobtenir?
It n'y faut pas songer maintenant. Les ressources publiques
continueront, selon toute apparence, k se morceler, k se mon-
payer en faibles subsides, insuffisants k tirer de peine celui
qui les re^oit, parfois se traduisant en une sorte de prime & la
paresse.
Unhomme,que j estime pour le bien qu'il aime k faire,plus
particuli^rement parce qu'il cherche k le faire judicieusement,
me racontait, Tautre jourceci :
« SoUicit^ d'appuyer une demande de secours, j*ai couqu
quelques doutes sur la sinc^rit^ du solliciteur et sur la r^alit^
de ses besoins. Avant de rien faire, j'ai voulu consulter le se-
cretaire tr^sorier de mon bureau de bienfaisance. Je lui ai fait
part de mon d6sir d'obligeance et aussi de mes doutes. II m'a
r6pondu, d^s le lendemain,que le qu^mandeur lui ^tait connu,
que sa conviction ^tait faite, que nous ^tions certainement,
comme je Tavais craint, en presence d*un faux pauvre. Eh
bien, admirez la force de « Thabitude »! Le bureau Tavaitd^ji
assists : I'homme a eu son secours tout de m^me.
« Je Tai rencontr^ trois ou quatre jours apr^s. Et il m'a
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LETTRES A UN MILLIONNAIRE. 813
adress6 un petit salut de la main , quasiment protecteur.
« Jecrois me souveair que cela se passait le. matin m6me
oh les journaux ont annonc^ un de ces suicides de pauvres
honteux qui font couler tant de phrases de la plume des jour-
nalistes. Le hasard vous offre parfois de ces contrastes iur
struct if s. »
En mati^re d'hospitalisation, la simulation d'etat n'est
point aussi commode que dansle cas que je viensde rapporter,
bien que les grands 6tablissements tels que Bicfitre et la Salp6-
trifere aient connu certains pensionnaires encaissant discr^te-
ment de belles et bonnes rentes etjouissant,depuis desann^es,
des bienfaits de Tindigence officielle.
II y aura done toujours fort k faire pour distinguer les mi-
sferes vraies des mis^res feintes.
Je reviens k Tobjet de ma lettre. Pour Tadmission dans les
hospices, qui sont le point de mire des mis6rables arrives sans
ressources et sans force au d^clin de la vie ou des individus
parfois tr^s jeunes frapp6s de quelque mal incurable, une com-
mission administrative se r^unit tous les mois et examine les
titres des postulants soit k Fadmission effective, soit k cette
pension representative du secours d'hospice, au taux mensuel
de trente francs, dont je vous ai expose la n^cessit^ souveraine.
Pour 6tre class6 en plus ou moins bon rang par cette com-
mission, il faut, selon sa jurisprudence constante, justifier
d'une residence k Paris assez longue pour y avoir acquis son
domicile de secours, et toutefois n'y 6tre pas venu en ^tatd'in-
firmite, n'y 6tre pas arrive apr^s Tdge de soixante-dix ans.
Des motifs d'exclusion particuliers atteignent les enfants
qui, par exemple, ne peuvent 6tre adrais dans les services d'in-
curables que s'iis sont n^s k Paris.
II ne faut pas parler des exclusions pour antecedents judi-
ciaires. Les postulants de cette categoric vont generalement
s*6chouer au depftt de Nanterre, ou aboutissent aussi forc6ment
ceux que la commission a dA repousser, comme ne remplissant
pas les conditions d'admissibiiite, telles que le domicile acquis
it Paris, et ne;^pouvant, par consequent, etre traitesque comme
les vagabonds et les indignes.
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•gl4 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Sans insister sur ce triste aperQu d'aprfes kquel vous
pouvez vous faire une id^e du nombrede ceux kqui sont for-
c^ment refus^es les res»ources deThospitaliM publique, je veux
faire ressortir ranomalie r^sultalit de I'application rigoureuse
de cette jurisprudence, que, si & propos, rectifierait la loi en
faveur de laquelle vous vous emploierez, je n'en doute pas.
La commission sp^ciale pour Tadmission dans les hospices
fonctionne trfes r6guliferement et opfere avec beaucoup de soin,
s'6clairantde toutes les notions utiles k I'examen des demandes
de placement.
Un certain nombre de oes demandes s'appliquent k des
personnes occupant un lit dans un hdpital, reconnues atteintes
de maux chroniques ou incurables, impotentes par consequent,
qu'il conviendrait de transferer dans un hospice, afinderendre
iibres les Jits qu'elles immobilisent au detriment de malades
frappes d'affections aigu^s ainsi exposes k rester k la porte.
A ces personnes, on n'a rien demands pour les admeltre h
rh6pital, sinon la constatation de leur etat de maladie par le
medecin qui, les ayant gard^es plus ou moins longtemps dans
son service et les ayant jug^es Inguerissables, so hAte de pro-
duire un certificat de translation pour s'en debarrasser ; en quoi
il op^re humainement puisqu'il s'agit, au resume, de faire de
la place k des sujels dont son art pent amener la guerison.
Jusqu'ici tout est bien pour Tincurabie k transferer; Ik oil
tout prend mauvaise tournure, c*est lorsque la commission
reconnait, aprfes enqu6te, que le postulant, dont Tentree &
rh6pital a ete chose toute simple, est dans une deces situations
particuliferes qui lui ferment la porte de I'hospice.
Alors, que se passe-t-il? La Commission, rigoureuse obser-
vatrice de la jurisprudence speciale, rejette la demande : pour
pousser jusqu'au bout Timpitoyable iogique, elle devrait aussi
rejeter dans la rue le postulant, puisqu'elle ne peut et ne doit
equitablement plus rien faire pour lui ; qu'il occupe indftment
le lit destine k un malade curable et ne peut pretendre a Thos*
pitalisation definitive.
Heureusement, T Administration est humaine^EIle retire le
dossier de la circulation ; elle le classe ; et le sujet repousse
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LETTRES A UN MILLIONNAIRE. 8i5
continue 4 vivne k Thdpital, ce qui est, me direz-vous, Tessen-
tiel; et vous aurez bien raison^en vous plaQant au seul point de
vue de Fint^rfet individuel.
Votre conclusion sera tout autre si vous vous dite^ que
Fostracisme frappant Thomme ou la femme qui aspiraient ii
rhospice frappe k leur suite une foule d'individtialit^s int^-
ressantes ; que le fait de ce lit occupy par un infirme les pri-
vera peut-6tre des soins qu'elles auraient le droit de recevoirA
rh6pital.
Ajoutez, si vous voulez sp^culer ^conomiquement, que cet
incurable maintenu dans un service de curables, par la pitr^
publique, parce que la loi le repousse de Thospice, coille k
rhdpital en moyenne 3 fr. 53 par jour selon les plus rficents
calculs, tandis qu'k I'hospice il ne cotlterait que 1 fr. 74.
N'appuyons pas trop cependant sur ce detail : il ne nous
fournit, en eflfet, qu'une comparaison iinanci^re k premifere vue
assez piquante, mais que d^daigneront ceux qui proclament
volontiers qu'un lit coAte toujours k peu prfes autant k TAd-
ministration, qu'il ait eu, durant Tannic, cinquante occur
pants ou qu'il ait 6t6 immobilise au profit d'un seul. Moi>
j estime, et vous estimerez peut-fttre, bon juge de Timportance
morale deschoses mat^rielles, que Temploiid^al desressources
individuelles ou g^n^rales est d'en tirer la plus grande somme
de benefices ou de r^sultats possibles.
lei, c'est de cela surtout qu'il s'agit. Si un lit utilise au profit
de cinquante individus ou d*un seul ne coiite, dans les deux
cas, qu'une somme ^gale, le benefice moral qu'on obtiendra de
cet emploi sera d'en faire profiter le plus grand nombre possible
d'individus.
Dans ce but, il faudra faire tomber les barriferes fermant
rhospice knn certain nombre de postulants el, par suit<^f activer
le mouvementdes malades dans les salles d'h6pital.
Ceux qui, d'ailleurs, immobilisent des lits d'h6pital pour
d'autres causes, que nous 6tudierons peut-6tre un jour, et pra-
tiquent parfois, sous le couvert de Tautorit^ professionnelle,
un parasitisme d'un autre ordre que celui des b^n^ficiaires de
secours, doivent ^galement c6der la place aux vrais malades.
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816 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Mais, cette place, je crois bien qu'il faudrait Vemporter d'as-
saul. Et encore serait-ce une victoire douteuse, tandis que
pour les premiers, jiour les refuses de f hospice, une loi Tas-
surerait, s6rieuse et durable.
Cette loi obligerait toutes les communes k se soucier du
placement de leurs incurables ou de leurs vieillards indigents
ayant gard^ domicile l^gal en leur lieu de naissance ou Tayant
acquis au lieu de leur residence habituelle; elle les solidari-
serait toutes en vue d'une action collective, elle d6charge-
rait Paris de quelques lourds fardeaux, en r^partissant plus
^.quitablement les responsabilit^s en matifere d'assistance, elle
permettrait d'efifacer les rfegles d'exclusion et par consequent
les anomalies que je viens de dire; loi delicate, sans doute,
difficile h formuler, mais qui serait un soulagement pour les
consciences et une esp^rance ferme pour les blesses de la vie ;
loi enfin qui serait parce qu'elle doit fetre, selon la logique et la
conscience.
Voilft une cause que je voudrais plaider et pouvoireflFective-
ment servir, si j'^tais comme vous le familier et Tami des
archontes; elle n'est peut-6tre pas trfesbrillante, elle ne permet
de fairemontre d*aucunevertudeclamatoire,d'aucun sentimen-
talisme pseudo-philanthropique ; demeurez pourtant persuade
qu'elle fournitune bonne et honn6te th^se d'^conomie sociale,
digne de Texamen du droit esprit et du brave homme que vous
fetes, selon ma croyance.
11 y a plus de dix ans, j'^crivais sur ces choses k pen prfes ce
que je vousdis aujourd'hui; j'^tais hant^ de cette id^e qu'il faut
combattre de toutes ses forces Tillogisme, et cr4er entre les
communes une mutuality de devoirs assurant k tous les mfemes
droits : droit k Tassistance en cas de maladie ou d'accident,
droit ii Tassistance en cas de vieillesse indigente ou d'infirmit^s,
droit k Tassistance enfin dans toutes les circonstances et sous
toutes les formes A6]k ^num^r^es et pr^vues.
« Une commune, disais-je, n'est-elle pas en r^alit^ une
famille civilement responsable de tous ses membres, de m6me
qu'elle doit a tous protection et soUicitude? Etne serait-il pas
juste que Tarlicle 5 de la loi des 22 Janvier, 8 avril et 7 aoAt 18S1 ,
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LETTRES A UN MILLIONNAIRE. 817
qui dispose que rAdministration des hospices peut toujours
exercer son recours, s'il y a lieu, contre les membres de la
famille du malade, fAt compl6t6 par ces mots : « et contre la
commune oti le malade a gard^ son domicile ». Gette loi rigide
formulae sans obscurity de texte, invoqu^e k la suite de consta-
tations rigoureuses, fermement appliqu^e par les soins des pr6-
fets, obligerait les communes d^partementales h se soucier plus
constamment des int6r6ts de leurs enfanis ^loign^s, k ne point
spicule? si facilement k leur sujet sur la Iib6ralit6 de la ville
de Paris, la bonne nourrice, k lui apporter, au contraire, un con-
tingent de ressources, en rapport avec la part de charges qu'elles
imposent k ses services hospitaliers.
C'est un point de vue special int^ressant la question dont
je vous ai entretenu dans cette lettre; ce n'est pas toute la
question. Je vous ai dit que T^tude d'une telle loi serait deli-
cate et laborieuse.
Ce qui importe, c'est que Tassistance administrative ne soil
pas entrav^e dans son action humaine par ce que les irr^v^-
rencieux appellent des « chinoiseries » ; qu'un infirme ou un
vieillard ne soient pas mis en interdit quand il s'agit de Thos-
pice et maintenus dans leur lit quand il ne s'agit que de rh6-
pital.
Je m'aperQois que je vais me r^p^ter, et je m'arrfete,..
Faites une activtf propagande en faveur de cette loi n^cessaire.
Un depute de Paris s'inspirant de certaines id^es en cours parmi
certains collogues de province, que les questions d'int^rfit, je
veux dire d*6goisme local, touchent avant tout, me disait, il y
a quelque temps :
— Oui, cette loi serait bonne, elle serait excellente! mais
qu'on la pr^sente, nous serous quarante k la voter! Ceux des
d^partements ne nous suivront pas.
N'6coutons pas ce sceptique. Croyons au triomphe final du
bien.
LOUIS GALLET.
F^vrier i898.
RBVUE PHILAIfTHROnQUB. — II. 52
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L'ASSISTANCE COMMUNALE
Le S^nat est appel^ k se prononcer sur un projet de loi qui
lui est soumis par le gouyernement concernant la representation
des pauvres, et Tadministration des ^tablissements d'assistance.
C'est on ne pent mieux. II ne faut pas 6tre tr^s initio en
mati^re d'assistance publique pour savoir quelle anarchie r^gne
Ik ou il existe Tautonomie entre les administrations d'assistance
communale, d^partementale et nationale, et entre les ceuvres
d' initiative priv^e.
Je sais que c'est k cause de cette autonomic en matidre d'as-
sistance, que Ton doit la mauvaise repartition des secours, que
Ton signale de partout; mais je sais aussi que les lois qui
entravent Taction municipale et d^partementale sont respon-
sables de la perpetuation et de Taggravation de ce regrettable
etat de choses.
II faut une patience extraordinaire, unie k une lutte de tons
les instants, pour arracher aux commissions communales d'as-
sistance quelques r^formes dans leurs vieux services de secours
et d'hospitalite, car c'est surtout chez elles que r^gne la forme
surannee de charite, et que dominent les pretentions admini-
strati ves.
On sait combien la municipalite est vassale du pouvoir
central; on sait, par consequent, tons les ennuis et les entraves
qui en r6sultent pour elle.
En matifere d'assistance, le maire est pr6sident-ne du bureau
de bienfaisance, des hospices civils, et du Mont-de-Piete, mais
il ne pent deieguer ses pouvoirs, ou se faire remplacer dans
I'une quelconque deces administrations, par un de ses adjoints,
la municipalite n'a le droit de nommer que deux deiegues k
Tadministration du Bureau de bienfaisance, deux del6gues ega-
lement k celle des hospices, et un seul au Mont-de-Piete, tan-
dis que le prefet a le droit k la nomination de quatre deiegues
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L'ASSISTANCE COMMDNALE. tf9
pour chacune de ces administrations d'assistanee, et de cinq
d^l^gu^s pour I'institution du pr6t.
La municipality a aussi le droit de donner son avis sur les
budgets d'assistance, mais les commissions charitables peuvent
ne pas en tenir compte; elle a le droit de refuser ces budgets,
mais alors ce sont les pauvres qui en souffrent.
Comme on le voit, les droits de la municipality sur Tassistance
communale sont al6atoires.
Gette anomalie fftcheuse, consa<^r^e par laloi du 5 avril 1884,
pourrait disparaitre au plus grand profit des v4ritables indigents,
si Tarticle 1*^' du projet de loi en question devant le S^at et qui
a trait k la reunion des commissions administratives des bu-
reaux de bienfaisance, et des hospices, n'^tait pas suivi d'ar-
ticles qui viennent ddtruire toute la portde de la r^forme.
En effet, Tarticle I*' qui semble promeltre toute une reor-
ganisation administrative, en mati^re d'assistance communale,
s'exprime ainsi :
« Une commission dite « Commission communale d'assis-
« tance » est chargde dans chaque commune de repr^senter les
pauvres, de g§rer leur patrimoine, et d'administrer le bureau
de bienfaisance, le bureau d'assistance m^dicale, les hospices,
h6pitaux et autres 6tablissements constitu^s comme 6tablis-
semenls publics communaux d'assistance.
« Dans chaque commune un bureau de bienfaisance est
charge du service de la bienfaisance & domicile.
« Les orphelinats, creches, asiles et autres institutions ayant
un objet d'assistance communale peuvent 6tre constitufe comme
etablissemeats publics, par d6cret rendu par le Conseil d'Etat.»
Ce serait 1&, dvidemment, une rdforme s^rieuse dans Tas*
sistance communale, k condition toutefois que Tadministration
en soit confide k des deldguds nommds, en parties 6gales, par le
Conseil municipal et par le pr6fet.
Mais, non ! le projet de loi k Titude laisse en Tdtat actuel
la nomination des commissions communales d'assistance, main-
tenant ainsi la municipality sous la tutelle de l*Etat.
Ce n'est pas la peine vraiment de faire une nouvelle loi pour
si pen de chose.
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«20 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Je sais pourtant ce que Ton va me r^pondre ; on trouvera
que la transformation de toutes les commissions communales
^'assistance, en une seule et unique commission communale,
s'^tendanl depuis le bureau d'assistance m^dicale gratuite aux
creches, asiles et autres institutions humanitaires, reconnus
comme 6tabiissements publics communaux, est un progr^s,
oonstitue une importante r^forme.
Je Tadmets de suite ; mais cette r^forme ainsi faite est pr^-
, judiciable aux franchises municipales ; c'est grftee h elle que le
pouYoir central mettra d^flnitivement la main sur Tassislance
fublique.
En r^sum^y cette sorte de representation des pauvres en-
Ifevera aux municipalit^s leurs oeuvres d'assistance communale,
et aux villes qui subviennent d'elles-m6mes k leurs pauvres
le regime special dont elles profitent quant it la loi sur Fassis-
tance m^dicale gratuite.
Certes, je regrette beaucoup le mal que fait cette autonomic
communale en mati^re d'assistance, et je plains les v^ritables
d^sh^rit^s d'etre les premiers a souffrir des divisions entre des
administrations trop jalouses de leurs prerogatives ; mais k qui
Ja faute?
Aux lois qui ne permettent pas aux municipalites de mieux
r^partir les secours aux pauvres autrement que par Tinterme-
diaire de bureaux de bienfaisance, imbus d'une deplorable
routine; aux lois qui, pleines de mefiance envers les municipa-
lites, leur accordent une representation insuffisante dans les
etablissements publics d'assistance ; aux luttes intestines que
^onsacrent ces lois entre les municipalites et entre les admini-
strations publiques responsables, en quelque sorte, du patrimoinc
d'assistance sociale.
Et aujourd'hui, on voudrait aggraver cette faute en essayant,
par un moyen detourne, par decret du Conseil d'etat, d'enlever
aux municipalites leurs ceuvres d'assistance communale, lelles
que les refuges de nuit, les cantines scolaires, les maternites,
les creches, etc., etc., restreindre en un mot le droit municipal
au point de retirer k la commune ce que la loi du 5 avril 1884
lui accorde?
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L'ASSISTANCE GOMMUNALE. 82r
Ge n'est pas la peine, je le r^p^te, de faire une loi qui ren^
drait celle de 1884 plus restrictive encore de la vie municipale
en mati^re surtout d'assistance sociale.
Que r^tat 6tablisse une caisse de retraites pour les vieux
travailleursy qu'il fixe par une loi la responsabilit^ patronale
en matifere d'accidents professionnels, qu'il organise largement
la gratuity de la justice, qu'il cr^e des lois de protection du
travail, et qu'il tienne s^rieusement la main h Tex^cution sincere
et fiddle de ces r^formes, c'est parfait.
Qu'il cherche k solidariser les communes entre elles dans
le devoir social, c'est-k-dire dans Tassistance publique, en leur
fixant leurs devoirs et leurs droits; qu'il transforme les com-
missions administratives des bureaux de bienfaisance, et des
hospices, en d'uniques commissions communales d'assistance,
c'est desirable.
Mais alors, puisqu'il ne restera plus k un moment donn^,
apr^s les quelques r^formes cities, qu'k r^partir les secours aux
indigents, qu'i laisser les hospices aux incurables, qu*^ d^ve-
lopper les crfeches et les maternit^s, dans le but de sauver les
enfants pauvres et leurs m^res, qu'ii dtendre plus que jamais
Tassistance m^dicale k domicile, et crder et accroitre les can-
tines scolaires, les soupes et le pain populaires, les refuges et
autres oeuvres de solidarity sociale^ que T^tat accorde done k la
commune et aussi au d^partement ^galit^ de representation
dans les administrations bienfaisantes et charitables, c'est-&-dire
dans les commissions communales et d^partementales d'assis-
tance, sous la pr^sidence des maires, et des presidents des
Conseils g^n^raux ou des pr6fets : ce serait on ne pent plus juste
et tr^s d^mocratique.
En dehors de cette r^forme, je trouve le projet de loi sou-
mis au S^nat trds dangereux pour les tributaires de TAssistance
publique, car ils peuvent devenir ainsi les sportulaires d'un
C6sar, ou de I'arislocratie d^positaire de la richesse et du pou-
voir.
VoilJi since rement ce que je redoute.
H. GUESQUlfeRE.
Conseiller gindnl du Nord.
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C0MIT6 DE DEFENSE
D£8
ENFANTS TRADUHS EN JUSTICE
CORRECTION PATERMELLE. — APPLICATION DE LA LOI
DU 24 JUILLET 1889. — ORGANISATION PRATIQUE D£S TUTBLLES
Pour terminer ce qui nous reste k dire des iravaux du Co-
mity de Defense en ce qui conceme les questions inscrites
dans la premiere section du programme dont nous avons donn^
le texte, c'est-k-dire celles qui sont relatives h Tenfant avant
son arrestation, nous devons traiter de rinternement par voie
de correction paternelle et de Tapplication de la loi de 1889
sur la d^ch^ance paternelle. Enfin nous ferons connattre les
yceux du comity en faveur d'une organisation des tutelles pour
les enfants pauvres.
Correction paternelle. — Le devoir le plus imp^rieux que
la loi de nature et la loi civile assignent au p^re de famille,
c'esty apr^s qu'il a assure Texistence mat^rielle de son enfant,
de pourvoir k son education, et par education il faut entendre
ce mot dans son sens le plus large ; T^ucation de I'enfant ne
comprend pas seulement Tinstruction qui malgr^ son impor-
tance n'y occupe qu'une place secondaire, mais en premiere
ligne, elle doit se proposer de lui inculquer les principes de
morale, d'amour de son pays qui devront r^gler sa conduite
dans la vie, le fa^onner et le diriger de telle sorte dans son d^-
veloppement physique, intellectuel et moral, qu'il tire le meil-
leur parti de ses facult^s et de ses forces pour lui, pour son
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DfeFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 823
pays et pour la soci6t^ ou il est appeI6 Ji vivre. — De quels
moyens le p^re dispose-t-il pour atteindre ces r^sultats? L'au-
torit^ paternelle, r^poud le Code. Mais c'est un terme dont on
comprend le d^faut de precision, d^s que Tenfant, au lieu
d'etre ob^issant et docile, devient recalcitrant, que ses instincts
mauvais ne peuvent 6tre refr^n^s par des conseils, par Tas-
cendant de son p^re, la tendresse de sa m^re, par les punitions
familiales admises par Tusage et qui varient singuli^rement
avec les 6poques et les courants d'opinions, mais que le Code
ne sp^cifie pas. Afin que ces punitions ne deviennent pas des
s6 vices, qu'elles ne d^g^nferent pas en des sequestrations, la loi
intervient et met k la disposition du chef de famille Tinteme-
ment par voie de correction paternelle. Celle-ci est r^gl^e par
le titre IX du Code civil, articles 375 k 383, en ce qui con-
ceme les droits du p^re et par Tarticle 483 quant aux droits du
tuteur. On peut les r^sumer ainsi : au-dessous de seize ans, le
president du tribunal, sur la demande du pfere, doit delivrer
I'ordre d'arrestation de Tenfant et le faire intemer pendant un
mois; au-dessus de seize ans, le pfere peut seulement soUiciter
du president un intemement maximum de 6 mois. Dans les
deux cas, il ne doit y avoir ni Venture, ni formality judiciaire.
Le pfere est toujours maitre d^abrSger la dur6e de Tinternement.
Sauf indigence, le p^re est tenu de payer tous les frais d'entre-
tien. Si apr^s sa liberation, Tenfant retombe dans de nouveaux
ecarts, rinternement pourra de nouveau etre prononce. L'en-
fant detenu peut adresser un memoire au procureur general
et sur le rapport de ce dernier, le president de la cour peut
modifier ou faire cesser Tinternement.
Enfin, en ce qui touche Texecution et Tapplication des ar-
ticles du Code civil, Teducation k laquelle est astreint le mi-
neur interne est determinee par la loi du 5 aoAt 1850; c'est le
regime de la separation individuelle ou, selon Texpression ha-
bituelle, le regime cellulaire. Pour des details plus precis d'ap-
plication, nous renverrons au rdglement ministeriel du
id aoiit 1869, encore en vigueur dans son ensemble, suranne
en plus d'un point, et naturellement modifiable comme heu-
reusement toute decision ministerielie.
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824 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Gette legislation est-elle satisfaisante? Notre opinion per-
sonnelle y est trfes nettement contraire. Nous allons en donner
les principaux motifs.
Et tout d'abord un fait materiel d^montre qu'elle est inap-
plicable, c'est qu'elle est k peu pr^s inappliqu^e. Si en effet on
consulte la statistique officielle p^nitentiaire parue en 1894, on
relfeve avec ^tonnement qu'au 31 d^cembre 1892, le nombre
des mineurs internes par voie de correction patemelle est en
tout de 160 seulement, k savoir :
d'arra (2"!^^^^- *'
^--^'-^^ {Fair: III''
Etablissements publics et prives d'education | Gardens. 23 )
correctionnelle ( Filles. . 54)
160
Etqu*on ne croie pas a un fait special k Tann^e 1892; nous
avons relev6 des chiffres k peu prfes ^gaux pendant quinze ans ;
en 1881, le total 6tait de 227, il n'a cess^ de d^croltre depuis
lors et en 1889, il est m6me tomb^ i 121.
Qu'estce que ce chiffre maximum de 200 par rapport & la
multitude de mineurs vagabonds, mendiants, voleurs, etc., par
rapport aux 6487 mineurs internes dans les etablissements
d'education correctionnelle? N'existe-il done en France que
200 enfants rebelles k Tautorite paternelle?etle rapprochement
que nous faisons k dessein entre ce chiffre et ceiui de 6 487 mi-
neurs intemds en vertu des articles 66 et 67 du Code p^nal n'in-
dique-t-il pas par lui-m^me qu'en fait les parents ne se soucient
pas de recourir aux moyens que la loi metk leur disposition pour
venir k bout de leurs enfants par le systfeme de la correction
patemelle, et pr^f^rent, en les laissant vagabonder, mendier ou
commettre des delits, les faire intemer par la voie des articles
66 et 67 du Code p^nal? Laplupart des parents agissent ainsi
inconsciemment; lis se d^sint^ressent du sort de leurs enfants
qui deviennent des moralement abandonn^s et qui, s'ils ne
sont pas recueillis par les services publics ou par les oeuvres
privies, sont fatalement destines k etre arr^t^s, puis envoy^s
en justice et d6finitivement mis en correction comme ayanl agi
sans discernement. Mais beaucoup de parents aussi n'ont pas
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 825
recours h la voie de la correction paternelle pour des motifs
qui ont une grande valeur et que nous allons iudiquer. Le
premier et le plus puissant, c'est que, pour faire intemer son
enfant par correction paternelle, il faut, en vertu de Tar-
ticle 178, § 2, supporter les d^penses d'arrestation et de trans-
f^rement, puis payer le prix des aliments. En principe, rien de
plus juste. Mais en fait, comment des cultivateurs, des ouvriers
gagnant k peine de quoi subvenir k leurs besoins et a ceux de
leur famille, pourraient-ils subvenir k ces d^penses d'entre-
tien ? et m6me quand ils le pourraient, c'est une d^pense qu'ils
cherchent k 6viter. On pent les en bl&mer, mais on ne change
pas la nature humaine. 11 faut bien reconnattre que ceux qui
font des lois se placent toujours k un point de vue th^orique.
Ils ont en vue une famille ais6e, dispos^e k faire des sacrifices
pour Tdducation de ses enfants. lis n'ont pas r^fl6chi que la
masse des ciloyens n'est pas, ou par impossibility ou par mau-
vaise volont6, dans ce cas. En r^alit^, la correction paternellep
n'est possible que pour les parents fortunes. Ceux-ci peuvent
faire intemer leurs enfants dans cetle admirable maison de
Mettray, mais sait-on que la pension y est de 200 k 300 francs
par mois, plus un droit d'entr^ede 100 francs et des supple-
ments nombreux ? Aussi le nombre des pensionnaires de cette
oat^gorie est des plus restreints, et ce n'est gu^re 6tonnant.
Mais si le motif materiel que nous venons d'indiquer agit
avec le plus de force pour d^toumer les families de recourir k
la correction paiemelle, il est d'autres considerations qui ne
rendent pas desirable la pratique de ce syst^me. En premier
lieu, il est regrettable que, pour les enfants au-dessous de seize
ans, la loi fasse Tobligation au president du tribunal de delivrer
Tordre d'arrestation, quand il est reclame par les parents, sans
examiner si la demande n'est pas dict^e par des sentiments de
haine ou de vengeance. Hdlas! n'existe-t-il pas des parents per-
vers, injustes? Nous voulons croire que ces cas sont rares, mais
6videmment ils ont dii se produire. Heureusement, car les
maux contiennent parfois leurs remddes, Tobligation de payer
pension empftche-t-elle un grand nombre de parents de recourir
k la correction paternelle, en province du moins; mais k Paris,
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826 REVUE PHILANTHROPIQUE.
il est assez ais^ d'obtenir la remise de la d^pense et alors la
gratuity du placement devient un moyen tentant de se d6bar-
rasser sans bourse duller d'un enfant g6nant. Quel est le recours
decelui-ci? Farticle 982 qui I'autorise & adresser une requite
au procureur g^n^ral? Nous serious curieux de savoir combien
de fois des enfants y ont eu recours. C'est encore Ik une pre-
caution th^orique. Est-ce que les enfauts savent seulement ce
que c'est qu'un procureur g^n^ral? 11 est tr^s piquant, mainte-
nant que nous sommes bien rassur^s sur leur resurrection, de
reconnaitre qu'avant le Code civil, les lettres de cachet, ces fa-
menses lettres de cachet, offraient jadis plus de garanties que la
legislation modeme pour les enfants contre des sequestrations
arbitraires dans leur immense generalite tout au moins, car il
faut laisser de c6te des exceptions. L'ordre du roi ne s'obtenait
sur la requete des parents qu'^rfes des enquetes approfondies.
Et ceux que le sujet interesse, nous les renvoyons, soil aux
rapports inedits d'Argenson publies en 1891 par M. Paul
Cottin, soit h un trfes curieux article de M. Funck-Brentano
dans la Revue des Deux Mondes d'octobre 1892. Ce n'est pas
tout. Le Code n'a pas fixe d'dge minimum pour Tinternement
de lenfaut; rien ne s'oppose k I'internement d'un enfant de
quatre, cinq ans et m^me au-dessous! !
Avons-nous termine nos critiques? HelasI non. Nous en in*
diquerons succinctement seulement deux, pour ne pas abuser
de Tattention de nos lecteurs. — Nous reprochons 4 I'inteme-
ment par correction patemelle d'etre un ch&timent et non un
moyen d'education. Pour obtenir le redressement d'un enfant,
ce n'est pas une (sequestration d'un mois au-dessous de seize ans,
de six mois au plus au-dessus de seize ans, qui peut suffire. II
y faut un long temps, un effort prolonge,un maintien sous une
discipline speciale et eu outre Tenseignement d'un metier, un
apprentissage industriel ou agricole. Pour tout cela, il faut du
temps, et ce n'estpas dans une maison d'arret ou de correction
qu'il faudrait intemer Tenfant, mais dans des ecoles de preser-
vation. 11 serait necessaire d'y maintenir Tenfant non pas dans
ces durees fixes d'un mois ou de six mois, mais pendant le
temps iudetermine et variable suivant les circonstances, sui-
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DtPENSE DES ENPANTS TRADUITS EN JUSTICE. 827
vant la conduite de renfant, que reclame son amendement.
NoQS serions done d'avis d'instituer aupr^s de chacune des
^oles de preservation une sorte de tribunal charge d'appr^cier
le moment oti Tenfant devrait 6tre rendu k la liberty et k sa
famille. C'est ici le cas de reprendre Tidde des commissions de
surveillance prfivues dans Tarticle 8 de la loi de 1850.
Une autre consequence de ce syst^me serait de renoncer k
la cellule pour le mineur, sauf bien entendu pour des manque-
ments graves k la discipline int6rieure. Autant nous sommes
partisan de Temprisonnement cellulaire pour les majeurs con-
damn^s^ parce qu'il constitue non seulement un ch&timent,
mais surtout parce qu'il rem^die aux terribles dangers de la
promiscuity, autant pour Tenfant, nous trouvons que c'est une
barbarie parce que la society n'a pas le droit d'arrfiter le d6ve-
loppement physique de Tenfant it im ^ge ou le mouvement, le
grand air lui sont indispensables, sans compter en outre qu'il
n'est pas possible de donner Tinstruction ou Tapprentissage
d'un metier k un enfant en cellule. Et puis, au point de vue de
la moralite, comment ne pas prfivoir les pens^es que lui sugg^re
son desoeuvrement? — D'ailleurs, nous nous refusons k com-
prendre — en dehors de Tidee de chMiment — pourquoi le
mode d'education correctionnelle qu'on trouve salutaire pour
les enfants de Tarticle 66 et mdme pour des mineurs condamn^s
de Tarticle 67 et qui consiste k les astreindre en commun k des
travaux des champs ou dans des ateliers ne pent etre applique
k des enfants qui en fait n'ont commis aucun deiit, qui n'ont
que de mauvais instincts, des penchants malfaisants non encore
arrives k Tetat d'actes. Pourquoi aux uns la prison sous sa
forme la plus dure : la cellule; aux autres le travail en plein
air? II nous revienl en pensee ce remede excellent pour des
menuisiers et dangereux pour des ebenistes !
Nous voulons arreter ici nos observations. Aussi bien auront-
elles Toccasion d'etre d6veloppees quand la question de la cor-
rection patemelle sera traitee avec toute son ampleur au Comite
de Defense. Elle I'a dej^ ete k la Societe generale des Prisons
et ceux qui voudront etudier cette fort interessante question
feront bien de lire dans le Bulletin de la Socidt^ des Prisons
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828 REVUE PHILANTHROPIQUE.
(ann^e 1890, p. 454 et suiv.) et ann^e 1894 (p. 1 et suiv.)
les discussions qui y out eu lieu sur le rapport de M. Henri
Joly et sur le n6tre. — Jusqu'ici la question de la correction
paternelle n'a encore ^t^ ^tudi^e au Comity de Defense que
sous un de ses aspects particuliers, celui de T^ducation physique,
intellectuelle et morale de Tenfant, pendant la dur^e de son
interoement. Personne n'6tait mieux qualifi^ que le D' Mottet
pour cette 6tude pour ainsi dire anthropologique. Dans un rap-
port fin, ^l^gant et profond, le D*" Mottet a voulu faire passer
dans les esprits la conviction que le systfeme d'^ducation appli-
que aux internes de la correction paternelle ne donnait et ne
pouvait donner aucun bon r^sultat et qu'il importait de Torga-
niser d'une manifere plus humaine, plus scientifique, par la
creation d'^coles de r6forme ou de maisons de preservation sui-
vant les cas. Mais le D*" Mottet, qui pourlant eAt 6t6 un bien
eminent rapporteur, a voulu demeurer sur le terrain psycholo-
gique, oil il a acquis une autorite incontestee et laisser h des
jurisconsultes le soin de traiter la question de legislation quo
souleve Texamen des articles 376 et suivants du Code civil.
La lot du i4juillet 1889 sur la protection des enfants mal-
traitis ou moralement abandonnes, — 11 pent paraitre malaise au
premier abord que la critique impartiale de cette loi puisse etre
faite par Tun de ceux qui ont le plus participe k sa redaction et
et k son application. « Mes petitssont jolis et d'agreable figure »,
disait le hibou de la fable ; nous ne tiendrons pas ce langage et
pourquoi?D'abord la loide 1889 commetoutes les lois modernes
est une oeuvre collective; sortie des deliberations de la Societe
des Prisons, elle a ete elaboree en 1880 par une Commission
extra-parlementaire reunie k la Ghancellerie; puis apr^s une
laborieuse gestation de dix ans et des ballottages nombreux
entre le Senat et la Ghambre, elle a passe par le crible du Con-
seil d'fitat (rapporteur, M. Courcelle-Seneuil), du Conseil supe-
rieur de TAssistance publique (rapporteur, M. Brueyre), de la
Ghambre des deputes (rapporteur, M. Gerville-Reache), du Senat
(rapporteur, M. Th. Roussel). Dans ces peregrinations, letexte
et Tesprit initial de la loi se sont forcement alteres. Bref, la
loi est un enfant de plusieurs p^res et si Tun y reconnait son
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 829
nez et le Irouve charmant, il ne peut s'emp^cher de blftmer la
bouche qui a'est pas de lui et lui paraiigrimaQante. Et puis pour
faire sortir la loi des limbes oh elle mcnaQait de s'enlizer ad
wtemum^ il a fallu faire des concessions, accepter des compro-
mise consentir it des aniputations douloureuses, concilier des
opinions d6rivant de tendances d'esprit diflf^rentes, suivant que
leurs auteurs appartenaient ^ la magistrature ou ^ Fadministra-
tion. Avant tout, il fallait obtenir le vote de la loi. On vcrrait
apr^s. Ge moment est venu. Voilii pr^s de dix ans que la loi
fonctionne. Ses bienfails et ses d^fectuosit^s d'application se sont
r^v^l^s k tons les yeux. Et chaque fois que la loi de 1889 a fait
Tobjet d'^tudes etde discussions, soit k la Soci6t^ des Prisons,
soit au Comity de Defense, soit dans les cours de Droit, soit
dans les nombreux travaux qu'elle a suscit^s, Taccord a 6t^ k
pen pr^s unanime sur les points dont il convenait de demander
la r6forme. HAtons-nous de dire que telle qu'elle est, la loi de
1889 est un instrument puissant & qui sait le manier pour la
protection de TEnfance. Le nombre des enfants recueillis dans
les services d^partementaux et moralement abandonn^s est de
prfesde 19 000, dont prfes d'un millier pour les oeuvres privies,
dont 700 pour la seule Soci6t6 du sauvetage de Tenfance. —
La loi a done 6ii efficace, mais elle devrait procurer ses bien
faits it plusieurs fois ce nombre et c'est pour atteindre ce but
qu'il faut d'abord indiquer les r^formes dont elle est susceptible,
puis lutter pour obtenir du gouvemement et du parlement
un remaniement de la loi.
En dehors des enfants, dont sous le nom g^n^rique d'Enfanls
assist^s, comprenant trois categories : trouv^s, abandonn^s,
orphelins, les services d^partementaux d'Assistance ont pris
la charge depuis la loi du 15 pluvi6se an XIII et le d^cret du
19 Janvier 1811, il existe, notamment dans les grandes villes,
une multitude d'enfants que leurs parents n'ont pas officielle-
ment abandonn^s etmis kla charge de I'Assistance, mais qu'ils
laissent, sans ressources, sans abri, sans moyens d'existence
et qui, ddslors, sont contraints pour subsister de recourir k la
mendicity, au vol, k la prostitution. C'est ce qu'on a appel6
des moralement abandonn^s. Leur definition globale la plus
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830 REVUE PHILANTHROPIQUE*
juste nous a toujours paru celle-ci t des enfents que leurs
parents, par suite de circonstances dependant ou non de leur
volont^, laissent dans un ^tat habituel de mendicity, de vaga-
bondage ou de prostitution. A ces enfants il faut ajouter ceux
qui sont I'objet de s6vices et de mauvais traitements. — C'est
de ces enfants qu'il y avait lieu d'assurer la protection. La defi-
nition admise, il en r^sulte que les moralement abandonn^s
se divisent en deux categories, semblables dans leur malheur,
mais dont on ne pent assurer la protection par les mtoies pre-
cedes legaux. Ces deux categories sont : 1^ ceux qui sont en etat
d'abandon moral par la faute ou les vices de leurs parents,
mais dont ceux-ci par interet ou pour toute autre cause refusent
de se dessaisir; 2^ ceux dont les parents sont dans Timpossibi-
lite, par suite d'infirmites, de mis^re, de negligence, d'exercer
sur eux leurs devoirs de surveillance. — De lit, la necessite soit
de faire deux lois, soit une seule loi avec deux titres distincts
correspondant auxmesures protectrices dissemblables imposees
par la difference des situations. C'est h ce dernier parti qu'on
s'est arrete, et Ton a sagement agi. Mais il n'en resnlte pas
moins que, de ce fait, la loi a perdu son caractere d* unite et que
des consequences importantes en decoulent dans Tapplication
et dans la procedure. Telle qu'elle a ete promulguee definitive-
ment, laloi dans sontitre I, tout en etant une loid'assistance, a
un caractere incontestablement penal et judiciaire, et dans son
titre II, elle est sans melange une loi administrative d'assistance
departementale, comme les lois concernant les Enfants assistes.
Parlous d'aborddutitrel, c'est-Ji-dire des enfants mendianls
que les parents tiennent 4 conserver, parce qu'ils sont pour eux
un instrument de profit, des enfants que leurs parents soit par
simple negligence, soit parce qu'ils sont eux-memes perdus de
vices ou ivrognes, laissent vagabonder ou pis encore, enfindes
enfants maltraites. Ces enfants, il faut les sauver, mdme
quand leurs parents s*y refusent, arguant de leur puissance
paternelle. Pour cette categoric, les malheurs des enfants ayant
pour cause Tindignite des parents, la loi devait constater cette
indignite, la frapper d'une peine et comme consequence, dans
rinteret superieur des enfants, faire cesser Tautoriie pater-
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 831
nelle et confier les enfants h des institutions privies ou pu-
bliques ({'assistance. La deduction ^ait logique et rigourease,
mais dtait-il n^cessaire de prononcer la d^h^ance des parents?
et surtout et dans tons les cas^ de decider que cette d^ch^ance
^tait absolue, qu'elle s'appliquerait k d'autres enfants que celui
qui avait eu h souffrir de Tautorit^ paternelle^ qu'elle s'^tendrait
aux enfants n^s et m^me h na!tre ? qu'elle comprendrait tons
les droits indistinctement qui composent Tautorit^ paternelle?
C*est une solution que nous avons combattue h la Commis-
sion de la Chancellerie et ailleurs, mais en vain, parce que les
magistrats et les jurisconsultes, sauf trois membres appartenant
h r Administration, composaient la grande majority de cette
commission et qu'ils ont impost leur mani^re de voir. lis
arguaient que le Code p^nal, en son article 335, § 2, avait d6]k
pos^ le principe de la d^ch^ance et qu'il suffisait pour prot^ger
les enfants de T^tendre ii des cas nouveaux. Nous pensions et
nous pensons toujours qu'il suffisait, commeTavait demands la
Soci^t^ g^n^rale des Prisons, de se borner k retirer aux parents
la garde de Fenfant, et du seul qui avait eu k souflFrir de Tauto-
rit6 paternelle, pour le confier k TAssistance ou k une OBUvre
priv6e, de ne pas soulever sans utility, sauf pour les cas rares
etmonstrueuxvis^s par Tarticle l^, la question de la d^ch6ance
et d'agir comme les Anglais et les Am^ricains, gens pratiques,
pen soucieux des theories philosophiques et visant k atteindre
leur but, avec le moindre effort. — L'application de la loi n*a
que trop justifi^ nos provisions, et devant la rigueur des conse-
quences d^coulant de la prononciation de d4ch6ance, un grand
nombre de tribunaux refusent de la prononcer, et alors plus de
protection pour Tenfant. Dans d autres cas, au contraire, la
d^ch^ance ayant 6t6 prononc^e, des consequences dOplorables
en sont r^sultees, disproportionnOes avec les avantages obtenus.
— Nous ne saurions nous etendre sur ce point ; il a ete mis en
lumi^re au comity et par le rapport que nous lui avons adressO
et par un rapport de M. Tavocat general BrOgeault. On estuna-
nime sur ce point, et le comity a approuvO notre proposition
consistant k ne conserver la ddch^ance absolue que pour les cas
vis6s par Tarticle 1*^% mais quant aux cas enumOres dans Tar-
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
i Ji se bomer h retirer aux parents le droit de garde et
ues autres subsidiaires et vis-ii-vis seulement de Tenfant
le d'un abus de Tautorit^ paternelle.
I secondc r^forme importante consiste h 6tendre la protec-
le la loi aux enfants naturels non reconnus, si nombreux
t les moralement abandonn^s. En eifet, la loi de 1889, du
mt qu'elle preuait pour point de depart la d£ch6ance, ne
que les enfants places sous Tautorit^ paternelle, c'est-ii-
3s enfants legitimes on naturels reconnus ; mais pour les
3, il n'existe pas l^galement d'autorit^ paternelle ; done
I moyen d'utiliser la loi de 1889. Le comit6 a adopts not re
sition, et la resolution qu'il a prise a ^t^ transmise au
smement.
)us ne pouvons pas, dans un simple compte rendu des tra-
du comity, entrer dans des details d'application et de pro-
e, un peu techniques et qui fatigueraient nos lecteurs. Bor-
aous k faire connaitre que le comity a adress6 au garde
[^eaux un rapport lui demandant de faire ^tudier les
\ suivants :
Utility de signaler aux tribunauit le bienfait k retirer
large application de Tarticle 5 qui aulorise la Chambre du
il, d^s le debut deTinstance en d^ch^ance, k confiertem-
*ement Tenfant k la garde de TAssistance publique ou
OBuvre priv^e consentante.
Necessity de r^duire k leur minimum toutes les forma-
d'adresser sur papier libre notification du jugement au
e qui doit prendre charge de Tenfant, s'il ne Fa d6jk
[Hi en vertu de Farticle 5. L'intervention d'un avou^ est
B en ce qui touche le titre II. Toutes notifications, convo-
s adress^es aux interess^s doivent 6tre faites sur papier
st adress^es par la poste ou par la femise a domicile:
Uliliie de recommander aux juges d'instruction la
ue des formules de renseignements sur les parents en
au tribunal de la Seine et d'inviter les juges d'in-
ion k faire porter leur enqu^te sur les faits pouvant en-
r la dech^ance et justifier la constitution d'une tutelle.
Le Gomite a 616 d*ayis que Tinterpretation de la loi auto-
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 833
risait les tribunaux r^pressifs et m^me les cours d'assises a
organiser la tutelle.
0® Le comit6 a 6t6 d'avis qu'il serait desirable que TAdmi-
nisiration p6aitentiaire au cours de rinternement des enfants,
en verlu de Farticle 66 du Code p^nal^ p6t recueillir des ren-
seignements sur la situation de leurs families, afin de provo-
quer s'il y avail lieu la d^ch^ance des parents par application
de Tarticle 2, § 5, de la loi de 1889.
Disons que, sur ce dernier point, le reprisentant de T Admi-
nistration p^nitentiaire, M. Vincent, a fait connaitre que le mi-
nistre de Tlnt^rieur avait prescrit Tadoption de cette mesure
tul^laire, conform6ment au vobu du comity.
Nous terminerons ce que nous avons k dire de la loi de 1889,
en annouQant que la Soci^t^ g6n6rale des Prisons a charge unc
commission sp^ciale, pr^sid6e par le v6n6rable D"* Th. Roussel,
d'6tudier k nouveau toutes les r^formes dont la mise en appli-
cation de la loi depuis neuf ans a d6montr6 la n^cessitd. Un
rapport tr^s interessant de M. Bonjean, juge au tribunal de la
Seine, a indiqu6 certaines difficult^s k r^soudre. La commission
a ddsign6 comme rapporteur M. Georges Leloir, substitut a
Paris, et qui, comme auteur d'un ouvrage excellent sur « la
puissance paternelle », connait k fond la loi de 1889. La com-
mission comprend trois membres de la commission de la Chan-
cellerie qui a pr^par^ le projet dcvenu la loi de 1889 : MM. Th.
Roussel, Bonjean et Brueyre.
Lorsque le travail aura 616 soumis et discut6 par la Soci^lc^
des prisons, il aura ainsi une autorit^ particuliftre et il est a
esp6rer que le garde des Sceaux auquel il sera transmis consi-
d6rera qull y a lieu, dans Tint^rM de la protection de TEnfancc,
d'en faire Tobjet d*une proposition au Parlement.
Organisation des lutelles. — Tout le monde sait que si dans
les milieux bourgeois et aisds, il est de r^gle, pour sauvegarder
les int^rfits des enfants, devenus orphelins, de leur donner un
tuteur, un subrog6 tuteur et un conseil de famille, au contraire,
il n'est organise aucune tutelle, en faveur de Timmense majo-
rity des orphelins de families ruralesou urbaines, lorsque, au
moment du ddc^s de leurs parents, ils n'ont aucun heritage a
UEVIE PHILAXTIIROPIQUE. — II. 53
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834 REVUE PHILANTHROPIQUE.
recueillir. Et cependant FinWrtt d'argent, s41 n'existe pas k
r^poque du d^cfes des parents, peut survenir ult^rieurement,
et puis cet int^rfet est loin d'etre le seulpour le mineur qui doil
6tre prot6g6 dans tous les actes de sa vie de mineur. La faute
en est-elle au Code civil? non ; seulement, par suite d'indiff^-
rence de la part et des parents et des juges de paix, la loi ne
rcQoit pas son application. Les consequences en sont graves pour
Tenfant, et il n'est pas douteux que, faute d'avoir assure aux
mineurs pauvres le bienfait d'une tutelle, lorsque ceux-ci n'onl
pas et6 officiellement remis aux services d'enfants assistis, la
society ne soit responsabled'avoir placS, par sa negligence, les
mineurs non proteges dans cet 6tat d'abandon moral, source de
tant de maux pour eux et pour elle. On estime qu'il n'est pas
un orphelin pauvre sur six en faveur duquel ait 6t6 oi^nis^e
une tutelle. Dej&dans les derniferes ann6es de TEmpire, Jules
Favre avait signals cette situation douloureuse et pr^conis^
cette organisation des tulelles. Rien n'a ^t^ fail, et il n'est que
juste de reconnaftre qu'il n'est pas facile de trouver toujours
six parents ou amis pour constituer un conseil de famiile, un
tuteur pour veiller sur Tenfant, enfin un subrog^ tuteur.
D'ailleurs pour un enfant pauvre, Timportant est avant tout
de pour voir & son entretien et h sa nourriture et si 1 'Assis-
tance publique ne Ta recueilli,ou trouver un tuteur qui assume
une charge qui ne lui incombe pas, et qui consente k ajouter
ce surcroit de fardeau k ceux que d6}k lui imposent sa propre
famiile, sa femme et ses enfants? Le probl^me est done trds dif-
ficile k r6soudre et des syst^mes trfes divers, danslesquels Tas-
sistance communale ou provinciate entre pour une part, fonc-
tionnent a T^tranger. C'est dans le but de rechercher comment
il serait possible d'instituer dans notre pays une organisation
pratique des tutelles en faveur des enfants pauvres que le
Comit6 a confix cette dtude k une Commission compos^e de
MM. Cresson, Guillot, Brueyre, Le Bourdel^s, Morel d*Arleux,
Tommy-Martin et Varin. Un rapport trfes int^ressant de
M. Tommy-Martin, juge de paix du 2® arrondissement, complete
par un rapport bien ^tudi^ deM. Achille Varin, ont 6l€ discut^s
par le Comild. Si Tunanimit^ des membres du Comity s'est ma-
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 835
nifest^e pour reconnaitre combien il serait utile k Tenfant de*
veau orphelin d'6tre pourvu d'un protecteur l^gal, les diver-
gences se sont produites quant h la possibility d'organiser
pratiquementcette protection. II a d'abord 6t6dit que pour deux
categories d'enfants, il n'y avait rien k innover. Pour les enfants
de families aisles, possddant des biens, les prescriptions du Code
civil sont en g^n^ral observ6es, et au d^c^s des parents, la tu-
telle est presque toujours constitute. Le fonctionnement et la
composition [des conseils de famille assurent-elles d'une fa^on
suffisante la sauvegarde des int^rfits du mineur? D*une mani^re
g6n6rale on pent r^pondre affirmativement et k eoup sdr on ne
pent que rendre hommage 4 la conscience scrupuleuse avec
laquelle les juges de paix s'acquittent de cette partieimportante
de leurs attributions. En tons cas, il ne s'agit ici que de mineurs
poss^dant des biens, etnous n'avons pas k nous occuper d'eux
en ce moment. Demdme, les loisdes 15 pluvidse an XIII, 10 Jan-
vier 1849 et le d6cret du 19 Janvier 1811, en coniiant aux ser-
vices publics d'enfants assist^s la tutelle et T^ducation des or-
phelins pr^sent^s aux hospices d^positaires, ont assure de la
fa^on la plus compile et la plus satisfaisante le sort de ces en-
fants. Mais entre ces deux groupes se trouve k T^tat flotlant une
foule' considerable d'orphelins dont des parents plus ou moins
eioign^s, des amis ou mfime des personnes charilables ont pris
d'abord soin; les mobiles en sont divers et ils varient mfime
avecTdge des enfants; Tinterfit n'y est pas toujours stranger.
Apr^s un temps plus ou moins long ou par suite de circon-
stances multiples, 1 'enfant, sans ^.tre men^ aux hospices d6po-
sitaires quilerecueilleraient,se trouve livr6 k Iui-m6me et il se
transforme en moralement abandonn^. A quel moment deleur
existence la protection publique peut-elle s'6tendre sur eux ?
Gomme Ta dit M. Varin, il appartiendra toujours au juge de
paix, en vertu de Tart 406 du Code civil, soil d'office, soit sur la
requisition d'un parent ou de toute autre personne, de provo-
quer I'organisation de la tutelle. Si pour Tenfant legitime Tuti-
lite de le pourvoir d'une tutelle ne se manifeste qu'au dec^s de
ses parents, c'est-4-dire k Tinstant oCi il devient orphelin, pour
y enfant naturel non reconnu, c'est I'epoque de sa naissance qui
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836
REVUE PHILANTHROPIQLE.
determine Ic moment. Mais est-il pratique de s'enqu6rir dans
les mairies, k chaque declaration de naissance, de la n^cessit^
de la constitution d'une tutelle et de signaler chaque cas au
juge de paix? De nombreuses raisons s'y opposent, en dehors
de la besogne extraordinaire qui s'imposerait ainsi aux juges de
paix; mais il est un motif qui dispense de tons les autres, c^est
qu*il serait mat^riellement impossible de trouver le nombre
exig^ par la loi de tuteurs, subrog^s tuteurs ct membres de
conseils de famille. En outre, la mortality considerable qui frappe
les enfants du premier dge rendrait, h^las! sans objet pour un
nombre important d*enfants la constitution d'unc tutelle ob-
tenue avec tant d'efforts. Le Comity a pens6, sur la proposition
de M. Morel d'Arleux, que I'dgede la scolarit^ 6tait Tdpoque la
plus favorable pour dresser la liste des enfants k pourvoir d'un
tuteur. II a done adopts la resolution suivante : Chaque ann^e,
en dressant, d'accord avec la commission scolaire, la liste de tons
les enfants desix^ treize ans, le maire en extraira une secondc
liste de ceux de ces enfants dont la tutelle devra 6tre organis^e
et la transmettra au juge de paix et au procureur de la R6pu-
blique. La seconde resolution adoptee a ete celle-ci : A chaquo
declaration de dec^s d'une personne mariee ou veuve, le maire
s'informera s41 existe des enfants mineurs et, le cas echeatit,en
avisera le juge de paix et le procureur de la Republique.
Afind'obvier i la difficulte de creer un conseil de famille
applicable k chaque mineur orphelin, on instituerait aupr^s
dechaquejuge de paix qui en serait le presidentunecommission
cantonale de Torganisation des tutelles. Lorsque celle-ci n'au-
rait pu constituer une tutelle de droit commun, elle ferail
office de conseil de famille, etTun de ses membres ferait fonc-
tion de tuteur. C'est un syst^me qui est usite a Teiranger.
Mais, nous le dirons franchemcnt, il nous parait impraticable
en France, pour la majorite des cas tout au moins. La raison
en est simple. Si un pareil organisme etaitcree,les parents,
amis ou ceuvres quelconques qui se seraient charges de Ten-
fant se presenteraient sans tarder aupr^s des tuteurs et fe-
raient la remise de I'enfaht, heureux de pouvoir si facilement
lui remettre un fardeau si lourd. Qu'en ferail le tuteur? Re-
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DEFENSE DES ENFANTS TRADUITS EN JUSTICE. 837
fuserail-il de prendre charge de Tenfant? Alors celte tutelle
tomberait rapidement en discredit. S41 ]'accepte, de quelles
ressources disposera-t-il pour assurer Texistence de Tenfant?
Ce serai t cr6er k c6t6 des services organises, dans chaque d^-
partement, en faveur des enfants assist^s, des services canto-
naux concurrents qu'il faudrait doter sur Timpdt, des services
qui devraient cr6er les rouagesadministratifs,linanciers,m^di-
caux, les inspections, les contr6les, les surveillances m^dicales
indispensables k leur fonclionnement. A notre sens et sans y
insister davanlage, cetle Resolution subsidiaire est purement
chimdrique. Deux autres resolutions subsidiaires nous parais-
au contraire fort sages et susceptibles do produire de grands
bienfaits. La premiere formule le voeu que lors de la declara-
tion de naissance d'un enfant naturel il soit remis au declarant
deux exemplaires, destines au p^ro et^ la m6re, d*un avis rela-
tif Sila reconnaissance des enfants naturels et k leur legitima-
tion par mariage subsequent. Le second voeu demande que la
commission etablie aupr^sde chaque justice de paix pour Tor-
ganisation des tutelles s'emploie a faciliter la reconnaissance
des enfants et le mariage des parents. Ce serait, sous une forme
laiqiie, la SocietedeSaint-Fran^ois-Regis. Comme de celle-ci,
on pent en attendre de serieux services.
En resume, si le Comite n'apas, k notre opinion du moins,
donne la solution definitive au difficile problfeme qu'il avait
aborde, il en a d'abord determine parfaitement les elements, et,
en outre, il a signale des mesures denature k attenuergrande-
ment le mal, et, fait k noter, des mesures que les pouvoirs pu-
blics peuvent prescrirc, sous la forme administrative et sans
qu'il soit besoin de recourir au Parlement, puisqu'elles ne sont
que lamise k execution des prescriptions du Code civil. Le Co-
mite a done sur ce point faitcBuvre utile, et c'est maintenant au
garde des sceaux et au ministre de Flnterieur qu*il appartient
de donner aux municipaliteset aux juges de paix les instruc-
tions necessaires.
LOYS BRUEYRE.
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L'EDUCATION MENAGilRE
J'avais pens6 tout d'abord k d^dier cet article aux lectrices
de la Revue.
Je leur aurais dit :
« Gonnaissez-vous des maisons pauvres? C'est trfes probable.
Vous traversez des quartiers excentriques pour aller h la cam-
pagne. Vous avez vu des maisons pauvres. Avez-vous p^n6tr^
dans ces maisons? Gonnaissez-vous des int^rieurs de faubourg?
Avez-vous visits chez elles des paysannes, des ouvriferes, des
femmes d'ouvriers? — Cela encore est trfes probable...
« Et done, vous avez vu ces int^rieurs. — Un ou cinquante,
peu importe. — lis se ressemblent. lis sont tristes. G'est leur
caractfere g^n^ral; ils sont tristes.
« Non parce qu'ils sont pauvres ! car la pauvret^ n'est pas
triste en elle-m^me, — heureusement, — mais parce qu'ils sont
mal tenus, mal soign6s — ou point soignds, point surveill6s,
sans confort, et pis que cela : sans notion, ni recherche, ni souci
du conforl, ni de la gaitd, ni de la propret^, ni de certains
details plus d^licats, et que je n'essaierai point de ddfinir ; — il
est, vous connaissez cela? une imperceptible combinaison de
rinsaisissable et deTimpalpable paroti le mari, comme le p^re,
le ills ou le fr^re se sentent & Taise, el se devinenl accueillis, et,
habitues k Taccueil, — sArs d'etre attendus, — se plaisent par
avance k ces ind^iinissables d6lices groupies par Tid^e du re-
tour, et la sensation de rentrer chez sot...
« Et ces choses ne s'expriment pas : la joie qui n'est jamais
semblable etqui se recommence, ne se r6p^tant jamais, car elle
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L'feDUCATlON M6NAG£RE. 839
se cr6e tous les jours, expris, pour le fils, le p6re ou T^poux, dans
la souple imagination de x^es f6es que vous 6tes quand vous 6tas
des minagires; la joie infiniment douce et que Ton peut bien,
par instant, oublier, ou m^connaltre et n%liger, par cela m6me
qu'elle est trfes douce et ne s'impose pas ; et Ton y revient tou-
jours, cependant, pour sa douceur, et par cela m6me qu'elle
p^nfetre et ne s'impose pas... Toujours! ou avec si pen d'excep-
tions, — millionnaire ou gagne-petit, — Thomnie y est revenu.
Cela est plus ou moins r6gulier, plus ou moins intermittent, ou
durable, ou instable et lent. Cela est, — 3i la condition, bien
entendu, que le chez-soi existe, que Taccueil se devine, que
Taltente s'atteste, et qu'Si rind6finissable une femme ait pr6-
sid6, — qui soit une m6nag^re...
« La femme du peuple est trfes rarement une m6nagfere. Ou-
vrifere ou paysanne, — ou femme d'ouvrier, ne travaillant pas
pour un salaire et restant chez soi, pen importe ; prise en g^-
n6ral, la femme du peuple n'est pas une m^nag^re. Les excep-
tions existent, c'est Evident. Elles sont rares. Et la femme du
peuple n'y peut rien. EUe ne sait pas. EUe n'a pas appris. EUe
n'a pas le temps. Petite fiUe, — sa mfere travaillant Ji la fabrique
ou aux champs, ou restant chez elle et visil^e par des voisines,
ou, hors de chez elle, absorb6e par le lavoir, par le march^, par
les comm^rages encore, — petite fiUe, elle a suivi des classes ;
eUe a 6t<5 k T^cole ; peut-6tre au cat6chisme ; elle a su la chro-
nologic des rois de France ; et elle a jou6 en liberty, dans les rues,
sur le pav6 de son faubourg ou par les chemins desacampagne;
puis elle a 6i6 mise k son tour, aussit6t aprfes « son certificat »,
en apprentissage ou au b^tail, k la fabrique ou aux. champs.
Personne n'a tenu le balayage, ni le savonnage, ni la surveillance
du linge, ni Thygifene, ni la propret6, ni le pot-au-feu pour des
^l^ments n^cessaires k son education. Et persoiine n'est respon-
sable de ces lacunes. La mfere ne peut pas enseigner ce qu'elle
ne sait pas, ce que nul k elle-m6me n'avait enseign^. Reste
r^cole. Mais T^cole n'adopte point T^ducation m^nagfere.
L'6cole a fort k faire; elle a Thistoire sur les bras, et lasyntaxe,
et Torthographe, et le style, et des notions de science. L'6cole
prepare au certificat. Le devoir de Tinstitutrice ne va pas plus
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840 REVUE PHILANTHROPIQUE.
loin. On lui a demands du style et des connaissances p^dago-
giques, aux examensdu brevet; personnene lui a demands ses
id6es sur T^ducation m^nagfere, et il est probable au surplus
qu'elle n'a pas d'id^es; elle n'a pas appris, — pas plus que ses
6l6ves; rid6e du manage ne lui est pas naturelle ; elle n'est pas
^lev6e pour le chez-soi; elle a grandi dans la culture du pro-
gramme, et sa fonction normale est de preparer pour le certi-
licat les petites fiUes du faubourg et les petites fiUes des champs.
Entre r6cole et le foyer, comment des minag^res se formeraient-
elles — sauf par don special de la Grdce — sur les chemins
de la ferme et de Tusine, pour ne parler que de ceux-lk? La
femme du peuple n'est pas une m^nag^re. Ce n'est pas de sa
faute. Mais Tirresponsabilit^ ne change rien h. Vitaty qui se for-
mule trop sou vent par Tinsuffisance, ou la non-existence du
« manage » dans le peuple, et par le transfert du chez-soi, pour
rhomme, au cabaret.
« De ce transfert, Thomme du moins est-il responsable?
« L'homme, sa journ^e faite, a besoin de repos, de soin, de
chaleur, de gatt6, d'un « chez-soi ». L'homme a besoin d'un
manage, que la femme ne sait pas tenir et organiser, pour
Taccueillir, en Tattendant. — La femme n'est pas une m^nag^re.
Elle ne pent pas Tfitre. La vraie m^nagfere, par tout ce que ce
mot implique de supdrieur et de bienfaisant, c*est la femme
dlev^e par une m^re qui a le temps, et qui donne ses loisirs, el
qui laisse de son ftme dans cette education ; c'est la femme de
condition moyenne, et aussi la femme de haute condition; c'esl
la femme de bourgeoisie; c'est la femme du monde; c'est
vous... »
J'aurais pu dire ces choses; et j'aurais pu en dire d'autres
egalement, et longuement prolonger Tentretien entam^ de la
sorte, par une d6dicace aux lectrices de la Revue. Reflexion faite,
je n'aipas mis de d^dicace k cet article. Et, certes, les femmes
paraissent plus naturellement aptes a concevoir selon Turgence
une forme trfessp6ciale — et inattendue, je suppose — de T^du-
tion « int6grale »... D'autre part, cependant, il semble bien que
les hommes aient un intdr6t plus g6n6ral et, — chaque « cas »
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L'feDUGATlON M6NAG6RE. 841
pris en parliculier, — plus personnel k T^tude pratique d'une
question que (discretion pure) je m'abstiehdrai de elasser
parmi les questions sociales. Int^rfit de la femme k « cultiver
sonmoi », Ji le mettre en valeur, hie d6velopper, et k d6velopper
aussi, par des moyens tr5s sArs, son milieu d'influence; int6rfet
de rhomme k toute culture dont il doit tirer profit; Tint^rfit
social, du moins, se trouve ici, — hors de conflit, — en harmo-
nie profonde avec Tint^rfit naturel aux deux sections de la
soci6t6.
*
Je ne voudrais pas insister. Les int^rfits sont 6vidents. Celui
de la femme est hors de doute. II s'agit de r^gner chez soi, —
et je sais bien : quelques femmes, mettons, si vous voulez :
beaucoup de femmes, — en notre temps, pr^ftrent les « plus
larges » royaumes et les rfegnes brillants, hors de chez soi, et
de m6me une action ext^rieure, ind^pendante du manage; et
beaucoup aussi, qui ne le pr6f6reraient point, sont obligees, pour
n'avoir point de chez-soi, ni de manage, k Taction ext6rieure
et ind^pendante. Mais il ne s'agit nullement de mettre T^du-
cation m^nagfere a la place de T^ducation — n6cessaire — qui
fait rinstitutrice, Temploy^e de banque et la demoiselle du tele-
phone. 11 s'agit, tr^s simplement, de la mettre oil elle n'est pas,
au programme de toute education feminine, et principalement
de toute education feminine dans le peuple, qui en est le plus
generalement prive; par consequence laterale, au programme
des ecoles ou se forment les institutrices, par lesquelles Tedu-
cation est, ou doit, ou pent etre donnee aux femmes du peuple.
II y aurait beaucoup k dire, et, pour fttre k pen prfes complet,
il faudrait une etude speciale, et, au surplus, votre experience
suppieera, je suppose, k ce que — sur chacun de ces points —
j'ai laisse de vague et de trop general; par suite, d'incomplet.
Pour se confondre plus immediatement avec Tinteret social,
Tinterfit de Thomme, epoux, pfere ou mari, en serait-il moins
personnel, et moins evident? — On s'est beaucoup preoccupe,
durant le dernier demi^siede, et Ton s'est occupe tr^s utilement
des logements et de la vie en menage des ouvriers et des
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842 REVUE PHILANTHROPIQUE.
paysans. Des modules d'habitations ouvriferes ont 616 construits
par des hygi Enisles. Des hommes de coeur ont foumi des fonds.
Jusque dans les derniers hameaux de France, des cours du
soir et des conferences d'adultes ont et6 chercher et solliciter
le paysan, le disputerau tragique divertissement de Talcool, et,
parfois, le garder, sauf de la seduction, pour la femme, Ten-
fant, le manage et T^pargne. Et ces efforts, — k titre de type,
— compteront certainement parmi les excellentes actions de ce
si^cle. Et — le type, hors de cause — les ing^nieuses archi-
tectures resteront toujours k la merci d'une tenue de manage,
et du soin donn^ k sa fonction naturelle par une m^nag^re
ignorante ou « entendue ». Et sachez-vous beaucoup de « cours
du soir » en mesure de lutter, k d^faut du chez-soi, attrait
contre attrait, avec la r^elle, explicable et legitime attraction
du zinc?...
Ligitime^ parfaitement! Et c'est oeuvre pie, certes, que de
maudire Talcool, et les actions de Talcool, et de se lamenter,
trop justement, h^las!... sur Tentreprise de degradation qui
masse un peuple, par troupeaux stupides, autour de triom-
phants mastroquets; oeuvre pie, lamentations justes, — et
pourtant!...
Get homme, dont vous bl&mez la faiblesse, ouvrier, paysan,
pen importe : cet homme du peuple est rentr^ chez soi, le soir,
Tappetit exigeant, les membres las. II a fmi sa journ^e de tra-
vail, huit, dix heures (et au deli) de rude travail au grand air,
ou de travail alourdi par I'air pauvre, par Tair ^pais, par Fair
m^phitique ou etouffant des ateliers. II rentre, et son « chez-
soi » est un interieur d^sordonne, mal a^r^, mal chauffe, mal-
propre ; dans le detail : une femme depeign^e — ou trop peign^e,
parfois accorte, souvent criarde; des enfants negliges, grognons
parce que negliges; une cuisine mal pr^par^e, mal surveiliee,
peut-6tre insuffisante, peul-6tre indigeste : le r^confort impos-
sible, le loisir du soir gfttd, sans lumifere, sans joie, sans beaute:
car la beaute, forme indefiniment relative et multiple dldeals
sans analogic, est — heureusement! — realisable, pour Tinfi-
niment humble, par Tinfiniment petit...
L'homme du peuple sort de chez soi, et rien n'est plus na-
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L':6DUCATI0N MtNAOfeRE. 843
turel. II cherche hors de chez soi, pour son loisir du soir, le
divertissement et la beauts ; rien n'est plus juste. II les prend
oil il les trouve, k la taverne, au caf^, chez le marchand de vin,
peu importe ; rien n'est plus legitime... Ohl je sais bien! il y a
autre chose; il y a le cours du soir, la conference, les formes
diff^rentes et excellentes d'une id^e juste, — Tid^e de la lutte
par le divertissement intellectuel contre les formes nocturnes du
divertissement populaire. Organisations particuli^res, organisa-
tions philanthropiques, organisations politiques, organisations
confessionnelles, organisations d'etat, multiples applications
d'une id^e sage et trfts belle, rien n'est ^pargn^ pour attirer au
travail « noble » et k la paix les loisirs de Thomme du peuple.
Et rien de ces efforts n'est n^gligeable ; — rien n'est sufBsant,
car il arrivera toujours ceci (qui sera legitime), que I'hommedu
peuple, ouvrier ou paysan, satur6 de travail, refusera son loisir
du soir k I'effort de I'attention et de la reflexion ; et encore ceci,
que I'homme du peuple, insuffisamment nourri, ou m^content
de sa nourriture, ira demander k I'alcool un complement de
subsistance — ou un complement de jouissance. Et, certes, du
besoin r^sultera le desir, puis I'habitude, puis Tabus, et, avec
Tabus, le vice. Rien n'est plus Evident. Rien n'est plus de-
montre. Rien n'est plus affligeant, — et cependant il reste ceci
d'incontestable, que le besoin, k un moment quelconque, s'est
impose. Or, k ce moment, le cabaret, qui empoisonne et ruine
Thomme du peuple, a pratique sur lui Tattraction du caravan-
serail sur le pterin. II lui a ouvert comme un havre d'alle-
gresse son porche de lumifere et Tenceinle joyeusc de ses cloi-
sons stuqiiees. Et Thomme du peuple retournera done chercher
au debit de liqueurs une salle balayee, une salle claire, de la
grosse gaite, du feu en hiver, un arrosage en et6, le comple-
ment ou le correctif de son repas, Tapparence du confort et la
joie vague des faciles somnolences ou les brutales deiices de
Toubli... II y retournera. C'est evident. Oil irait-il?
On a dit : qu'il ne sorte pas; qu'il repose; il en a besoin;
qu'il dorme; sa sante s'en Irouvera mieux; de meme, la sante
de la race; qu'il reste chez lui, Thomme du peuple...
Trfes bien. Donnez-lui une femme elevee selon la notion du
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
il domestique, avec le go6t de Tordre, et sachant mal
6tre la r^gle des participes, et ne sachant plus du tout la
des rois de France, mais sachant' faire la cuisine et coudre,
jseter, raccommoder, et blanchir et repasser le linge;et ne
ppelant pout-6tre de T^cole que les « lemons de choses »,
se rappelant au besoin qu'une « rfegle g^n^rale », k sa-
que rhygifene est tout bonnement la propret^; par la pro-
, la santd; avec la sant6, la joie, et aussi r6conomie r^a-
e, et par suite Taisance possible...
onnez cette femme k Thomme du peuple. Donnez-lui le
Lge et la m^nag^re. Donnez-lui le pot-au-feu, la soupe fu-
e, le gros 16gume odorant. Etonn6 de trouver, sans bouger
ez soiy la jouissance et le r^confort, rhomme du peuple
I toujours par demeurer au logis, un de ces soirs en tem-
jui font la rue maussade k la ville, et la grande route ob-
I, glaciale et boueuse aux champs. Et que Texp^rience se
e, et laissez faire Thabitude, et Tindolence, et Tenveloppe-
, et le raisonnement, et cela pourrait devenir & la longue,
Bi reconstitution du manage, la reconstitution de la famille
nlle et aux champs...
ant de consequences 6man6es d'un pot-au-feu? — Oh! pas
5diatement, et nul, certes, ne pense k les voir r^aliser a un
ier, ni k un centi^me, ni probablement k un milli^mc
. Est-ce une raison pour ne pas se metlre au travail, et
ne pas tenter, tout au moins, Texp^rience? Or, toute la
tion actuellement pos^e se ram^ne k cela, pr6cis6ment, aux
liferes experiences, — celles qui faciliteront les autres, —
resulteront peut-6tre les consequences, ou quelques cons^-
ces, ou une preparation aux consequences esperees.
es experiences ne seront pas tout k fait neuves. J'en con-
quelques-unes, emanees surtout, en France, de Tinitiative
ie.Ilyen a d'autres,trfescertainement,eparses surtout dans
Bimpagnes, et principalement autour des chMeaux. Ce sont
3xceptions heureuses, et qui restent des exceptions, pour
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L'feDUCATION MfeNAGfeRE. 845
*tre pr6cis6ment trfes heureuses et se garder Isoldes, se suffisant
k elles<m6mes, ddlachdes de toute propagande, ne tendant point
k la cohesion. L'iDitiative privde s'en est tenue i cela, k quel-
ques exceptions gdn^reuses, viag^res el isoldes. Les 6coles pro-
fessionnelles, k Paris, ont fait un effort d'intdr6t plus gdndral ;
Teffort n'a produit que pen, tr^s peu de rdsuUats; peut-6tre les
ficoles, preoccupies de leur donner une profession, n'ont-elles
pas insists avec assez de chaleur sur Tutilitd de Tdducation md-
nag^re pour les fiUes du peuple, et de m^me pour les fiUes de
petite et de moyenne bourgeoisie (1). Toujours prdoccupde de
progr^s pratiques et de progr^s moraux, la ville de Paris a fait
plus rdcemment, dans ses dcoles primaires, quelques essais
d'6ducation mdnagfere, sur lesquels M. Paul Strauss, je pense,
serait plus que n'importe qui k m^me de fournir d'exacts ren-
seignements. Et d*autres essais encore ont 6i6 tenths, que j'ai
connus, d*autres, que j'ignore, en plus grand nombre probable-
ment, « dcoles de cuisine » pure et simple, dcoles d'arrondisse-
ment, dcoles de quartier, dcoles particuli^res, entreprises com-
merciales, oeuvres d'intelligenle bont6; dans cette derni^re
categoric, je tiens a mentionner ici les cours de cuisine et
d'dconomie domestique donnas, avec une admirable perseve-
rance, par une coUaboratrice de la Revue, — M"* Seignobos, —
aux quartiers populaires du sud parisien.
Or, tous ces essais attestent un sentiment confus, ou, k un
degr6 plus haut, des vues individuellcs d'utilite gdnerale, do
progr^s concevable et de necessity. Et tous ces essais, d*autre
part, rcstent encore des essais isolds, partiels et sans cohesion;
la portee en est tr^s mediocre ; le grand public y prend peu
d'interftt, pour n'en voir ni la valeur, ni Tapplication gdn^rale,
ni le lien possible ; il faudrait constituer le lien, organiser des
essais, attester Tutilite par des rdsultats, — et que Tart deTeco-
(1) Je n'ai pas parl6 des filles de classes sup6rieures. Par une singuli^re ano-
malie, ces jeunes personnes sont les seules favoris6es d'une education m^nag^re
organis6e excellemment. Des 6coles de cuisine et de manage sont fr6quent6es
avec beaucoup de z^le par des jeunes filles de bonne et m^me de grande maison.
Les prix (d'6colage) sont ^ la hauteur des fr6queiitations. 11 est tr^s bien port6
d'etre « forte » en cuisine. L' Annette de Francillon a 6t6 prise sur nature. Elle a
des imitatrices.
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
ie domestique cess&t d'6tre un raffinement de femme « bien
ie » pour devenir accessible aux couches profondes de la
>n...
omment organiser T^ducation m^nag^re?
nlre nous, je n'en sais rien...
ours de manage dans les 6coles, — cours du soir pour les
i^res, — cours pratiques dans les ^coles de village^ — addi-
de la cat6gorie : manage aux programmes d'^eoles nor-
s, — coacours de bonnes volont6s sans mandat, — « pa-
iges » de femme^ du monde, ^coles du dimanche, lemons
Loses et formation ckla m^nagfere, dans le peuple, au con-
Bt par Texemple et par le secours de la femme du monde-
ig^re, — ^coles sp^ciales organis^es par une adaptation, &
lesoins de France, des mod^l^s que nous foumitlMtranger :
•6tre tons ces 6l6ments pourraient-ils ulilement s'associer
etudes, puis ^ la mise en train d'un enseignement tout bat-
neuf ; Texp^rience pent seule constituer les programmes,
er les cadres, d^finir les fonctions.
t c'est, au surplus, une trfes lourde affaire que des pro-
imes h. constituer, des cadres k d^finir, tout un enseigne-
k mettre en route. N'y aurait-il pas quelque chose i tenter
tendant Tentrde en ligne de la grosse ca valeric, des com-
mons et des projets? Des patronages de femmes du monde,
5xemple, ne pourraient-ils, allant au plus press^, com-
;er par tons ses bords a la fois cette ceuyre philanthropigue
xcellence : Tdducation reelle de la femme du peuple?
eut-^tre. II faut voir. La question vaut probablement quel-
6tudes. Je n'ai voulu, pour ma part, que soumettre ces
:ions tr^s simples aux lecteurs et aux leclrices de la Revue.
DICK MAY.
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L'ASSOCIATION VALENTIN HAUY
POUR LE BIEN DES AVEUGLES
FONDLE EN 1889
KBCONNUE D*UTILIT6 PUBUQUE EN 1801
Plusieurs fois, d^ji, la Revue Philanthropique a eu Toccasion
de parler incidemment de TAssocvation Valentin Hatty; peut-
6lre ses lecteurs seront-ils bien aises de savoir avec precision
quelle a 6t6 roriginc, quel est le but, Torganisation, le fonction-
nement de cette soci6t^ bien jeune encore, bien restreinte dans
ses ressources, mais qui, par son activity, sa vie intense, les be-
soins pressants auxquels elle r^pond, a rapidement pris rang
parmi les (euvres les plus int^ressantes de notre 6poque.
Cette Association, sociale autant que charitable, n'a pas 6t^
une OBuvre imagin^e de toutes pieces, en un jour d'inspiration,
par un philanthrope souvent plus g^n^reux, plus enthousiaste
que pratique. Depuis 1883, T Association Valentin Hatty existe
Jl r^tat latent, ses ^l^ments tr6s homog^nes se sont group^s pen
h pen, et Tacle officiel du 28 Janvier 1889 en a simplement
dress6 T^tat civil; c'est justement son m^rite tr^s neuf d*6tre
venue relier, consacrer des oeuvres non improvis^es, mais for-
nixes peu i pen. C'est \h, prdcisXment la cause de son succ^s et
de sa stability.
U arrive trop souvent que, ne procXdant pas de la sorte,
on veut faire du bien sans trop savoir par quels moyens et, au
lieu de s'unir a ce qui existe de similaire pour en augmenter la
valeur, on imagine un litre; puis, en vingt-quatre heures, des
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KEVUE PHILANTHROPIQLE.
ui ne se sont jamais vues se trouvent, sur le papier,
omit6; beaucoupde litres, de fonctions honorifiqucs
Li^s, et ce n'est que plus tard, beaucoup plus tard,
e de regarder quelles peuvent bien 6tre les assises
. Aussi, qu'arrive-t-il? T^difice construit se trouve
inhabitable parce qu'il n'a pas ^t^ cr^^ pour les
u'au contraire il faudrait presque cr^er des besoins
ctement avec Tddifice.
'une (Buvre vive et prosp^re, c'est un fait d'exp6-
t n^cessaire qu'en r^pondant h un vrai besoin de
fivent en b6n6ficier, elle corresponde i une forme
ie r6elle de ceux qui la constituent; puis, qu'elle
insi que commence tout ce qui persiste : modeste-
grand bruit d'abord, sur une surface restreinte, y
J fortes racines et se d^veloppant ensuite avec le
oiseux de discuter sur Tutilit^ de cette association,
mtyphlophile (l),au faitde la question desaveugles
qui ne rcconnaisse cette utility en parcourant les
articles de ces statuts doivent surtout fixer Tatten-
[u'ils montrent dans quel esprit large et 6ley6 Tasso-
rganisde. Le ddsir d'^tablir Tunion entre les typhlo-
oordonner les efforts tenths en vue d'am6liorer le
ugles, la volont^ de provoquer, d'entretenir en leur
rand mouvement d'opinion, la foi en leur capacity,
es pens6es maitresses qui s'en d^gagent.
3 faire entrer dans le conseil d'administration des
^eugles et d'exiger qu'ils soient aussi nombreux
ibres clairvoyants a 616 emprunt^e k la Socidt^ de
it de secours en faveur des dlfeves sortis de Tlnsti-
nale des jeunes aveugles de Paris. Cette id6e est
t raisonnable, puisqu'on compte en France un bon
^eugles qui, par leur valeur intellectuelle et morale,
aveugles.
plaire des statuts et le rapport du dernier exercice sont envoy^s
e qui en fait la demande.
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L'ASSOClATiON VALENTIN HAUY. 849
leur d6vouement k la cause de leurs confrferes, la connaissance
pratique qu'ils ont des besoins de la c^cit^, sont h mSme de
s'occuper activemeat et avec entiftre competence de ram^lio-
ratioQ du sort des aveugles.
La valeur de cette disposition a ^t^ dprouv(§e par une expe-
rience de quarante ans. La Societ6 de placement et de secours a
fait, sans bruit, il est vrai, un bien inappreciable Ji des centaines
d'aveugles qui lui doivent la creation ou le maintien d'une
honorable position ; il est k remarquer que ce bien a 616 oper6
avec des ressources relativement restreintes.
En effet, cette mesure concourt k pr^venir certaines de-
penses qui profitent plus aux aveugles en apparence qu'en
realite.
L'idee de mettre les cotisations k un trfes bas minimum, afin
d'avoir beaucoup d'adh^sions et, par lJi,de cr^er aux aveugles de
nombreux amis en tons lieux, est empruntee aux associations
qui cherchent et trouvent dans une grande quantity de coti-
sations infimes des ressources considerables et une popularite
immense : c'est ce qu'il faut k la cause des aveugles.
I. BUT
L'Association Valentin Hauy, ainsi nommee en souvenir de
celui (1) qui, le premier au monde, crut k la possibilite de
rcndre Taveugle k la vie utile, a pour but d'etudier, d'appli-
quer et de propager tout ce qui pent contribuer k Finstruction,
au soulagement, en un mot, au bien moral et materiel des
aveugles. Pour atteindre ce but, elle cherche k agir, en leur
favour, sur Topinion publique, k unir, k seconder les personnes
et les OBUvres qui s'occupent d'eux. Embrassant toute la ques-
tion des aveugles, elle est, entre les groupes etles oeuvres locales
qui font un bien reel aux categories dont elles s'occupent mais
restreignent leur action Ji ces categories, le lien vivant, le fil de
transmission ayant pour nceud Tinitiative privee et permettant
un constant echange des idees, des efforts de tons au profit de
(1) Valentin Hauy (1745-1822), n6 k Saint-Just-en-Chauss€e (Oise), cr6a k
Paris, en 1784, la premifere 6cole d'aveugles.
RBVUK PHILANTHROPIQUB. — lU 54
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850 •. REVUE PHILANTHROPIQUE.
tous. C'est auprfes d'elle que les personnes charitables qui s*in-
t6ressent k un aveugle peuvent trouver les renseignemenis el
la direction que soUicite leur bonne volont^ ; c'est elle qui
prend en main les int^r^ls de Taveugle isold et Tiniliative
d'am^liorations sou vent pressantes, mais ne correspondant pas
au but particulier de telle oeuvre, de tel ^tablissement.
II. SliGE DE l'cEUVRE
Depuis la fin de 1895, gr&ce k de g^n^reux bienfaiteurs qui
se sont charges de la premiere annde du loyer, TAssociation
occupe, k Paris, au 31 de Tavenue de Breteuil, un modeste local
devenu bien r^ellement « la maison des aveugles » et oil ses
CBuvres multiples, jusqu'alors dispers^es, ont pu 6tre r^unies
avec les divers services qu'elles comportent, services qui s ac-
croissent constamment el sur lesquels on trouvera plus loin des
details : secretariat g^n^ral avec dossiers des patronn^s, reper-
toires, renseignements de tous genres concemant la excite, con-
ferences Valentin Hatty, redaction des periodiques, biblioth^uc
Braille, bibliotheque et musee Valentin Hatty, depdt d'objets &
vendre manufactures par les aveugles, dep6t de vieux papiers,
atelier, vestiaire, ouvroir, caisse des loyers, consultations juri-
diques et medicates gratuites, reunions du dimanche, etc. Ainsi
groupees et centralisees, les oeuvres de TAssociation fonctionnent
avec plus de precision, d*ensemble et d'economie de temps pour
ceux qui en beneficient et pour ceux qui s'en occupent.
Gette petite maison a ete entierement meubiee par les dons
ou prets de personnes charitables amies de Toeuvre ou avertles
par la Presse de ses besoins. De Ik resulte un certain disparate
dans le mobilier plus que modeste, mais aussi une economie
des plus appreciables dans un budget si restreint. L' Association
Valentin Hatty evite autant que possible les frais generaux qui,
trop souvent, dans les oeuvres, profitent plus aux employes
qu'aux assistes; jusqu'ici les seuls employes remuneres par elle
sont six aveugles. La « maison des aveugles » est ouverte tous
les jours (dimanches exceptes^ de dix heures k midi et de
deux k cinq heures; elle est parliculierement inieressanle k
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L'ASSOCIATION VALENTIN HAUY. 851
visiter le mercredi, jour oil la plupart des services fonctionnent
simuUan6meiit.
III. ORGANISATION
Lcs raoyens d'action de TAssociation Valentin Haiiy sont :
1® Le concours actif de ceux des membres qui consacrent
une part de leur temps et deleursfacuit^s au service deTceuvre
(r Association a un mouvement annuel d'environ 8 000 lettres
rcQues ou 6crjle8 dans Tint^rfit des aveugles) ;
2® Les ressources matdrielles suivantes :
Membres adherents 1 fr. paran.
— perp6tuels 25 fr. uoe fois donnas.
— donateurs. ........ don au-dessous de 500 fr.
— bienfaileurs don au dessus de 500 fr.
Tout don, quel qu'ilsoit, est reQu avec reconnaissance. £tant
reconnue d'utilil6 publique, T Association Valentin Hatty est
apte h recevoir des legs.
Elle est administr^e par un Gonseil compost par parlies
dgales dc clairvoyants et d'aveugles (elle a actuellement pour
Secretaire g6n6ral un aveugle). Ce Gonseil se partage en trois
commissions qui se r^unissent p^riodiquement: i® Admini-
stration et propagande ; 2* Etudes et publications ; 3<* Patronage
(on trouvera plus loin tons les details concernant ce patronage),
prophylaxie et statistique.
Un comite de dames patronnesses s'efForce d'intdresser le
public aux diff^rentes oeuvres de TAssociation et d'augmenter
ses ressources.
IV. — ADMINISTRATION ET PUOPAG.VNDE
L' Administration comprend la comptabilit^, les mesures
propres h accroltre le budget de Toeuvre, les d-marches offi-
cielles, la correspondance gdn6rale,etc. La Propagande, non point
synonyme de pros6lytisme pour ^Association Valentin Hatty,
maisextr^mement large, embrasse la cause entifere des aveugles.
La premiere Commission est, en consequence, charg^e des rap-
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852 REVUE PHILANTHROPIQUE.
ports avec la Presse, c'est-i-dire de la publicity 4 donncr k tous les
fails concemant les aveugles et pouvant ^clairer ropinion suv
leur veritable situalion ; elle doit solliciter des pouvoirs publics,
des grandesadministrationsy Tadoption des mesuresfavorables,
provoquer la creation ou, selon le besoin, aider au perfection-
nement des dtablissements utiles aux aveugles, amener les
diverses ceuvres k se connaitre, k s'entr aider en vue du plus
grand bien de leurs prot^g^s.
V. — fiTUDES ET PUBLICATIONS
La deuxifeme Commission de TAssociation est compos6e de
sp^cialistes qui ont 6tudi4 la plupart des sysl^mes, des appa-
reils imagines pour les aveugles et se tiennent exactement
inform^s de tout ce qui paralt ; afin de s'dclairer mieux encore,
elle reclame souvent le concours de personnes faisant leur sp6-
cialit6 absolue d'un point particulier. Partout, maintenant, on
reconnait la ndcessit6 de former des groupes pour ^tudier les
questions et unifier les efforts : la Commission d'Etudes et
publications est ce groupe technique; gr&ce k elle, lorsqu'en
France ou k T^tranger, il se produit un 6v6nement concemant
les aveugles, TAssociation est imm^diatement avis^e, presque
toujours consultde, car on sait qu'elle ne demande qu'Ji faire
profiler tous les typhlophiles de la somme considerable de travail
et de connaissances emmagasin^e par elle. Syst^mes d'ensei-
gnement intellectuel et professionnel ; unification de ces sys-
t^mes et coordination des efiForls ; experimentation des proc^d^s
et des appareils nouvcaux; perfectionnement et vulgarisation
du materiel scolaire et de Toutillage special; impression et
vente k bon marche des livres en relief, pour diminuer Tecart
enorme existant entre le prix de ces livres et les ressources
des aveugles; choix des ouvrages it publier; organisation de
concours pddagogiques et autres, tel est le champ d'etudes et
d^action de la deuxi^me Commission de TAssociation k iaquelle
se rattachent les services suivants :
Conferences Valentin HaHy. — Fondles depuis 1883, elles
reunissent, le dernier jeudi de chaque mois, k deux heures, les
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L'ASSOCIATION VALENTIN HAUY. - 853
typhlophiles r^sidant k Paris ou s'y trouvant momentan^ment.
L&, de nombreux sp^cialistes se donnent rendez-vous pour 6tu-
dier en commun toutes les questions relatives aux aveugles :
details sur les ^tablissements, les metiers, les appareils qui
leur sont propres, biographies d'aveugles remarquables, etc.,
qu'ii s'agisse de la France ou de Tdtranger, tout ce qui a trait it
la c6cit6 figure au programme de ces reunions, it la fois sp^-
cialistes et cosmopolites, gv&ce auxquelles les typhlophiles nc
sont plus exposes k travailler dans Tisolement et sans point de
contact entre eux.
Miisie Valenthi Haily. — Fondd en 1886, ouvert le mercredi
de quatre k cinq heures, lemusde Valentin Haiiy est une collection
unique au monde des specimens de travaux ex^cutds par les
aveugles, d'outils, d appareils ou d'objets Ji leur usage, collection
r^unie non pour satisfaire une vaine curiosity, mais dans un
but r6el d'utilitd pratique. Tons les sp^cialistes doivent visiter,
dans rinldrfit des ceuvres ou des ^tablissements dont ils s'occu-
pent, ce « conservatoire des arts et metiers » des aveugles, ou
prendre au moins connaissance de son catalogue.
Bibliotheque Valentin HaUy. — Ouverte le mercredi et Ic ven-
dredi de deux k cinq heures, elle r^unit tout ce qui, dans chaque
pays, se public ou a ^t6 public sur les aveugles, gr4ce au zele
b^n^vole d'une trentaine de typhlophiles polygloltes qui se char-
gent de traduire les documents de toutes langues adress^s k
TAssociation.Commelemus^e, dont elle est le complement n^ces-
saire, la bibliotheque Valentin Haiiy constitue une source de
documents indispensable iqui veut ^tudier latyphlopddagogie.
Bibliothkque Braille. — Une des principales soulTrances que
traine aprfes elle la c6cit6, c'est la privation de lecture: tousles
aveugles Taiment passionn^ment, mais la ndcessit6 de recourir
k autrui implique, pour la plupartd'entreeux, une d^pense dis-
proportionn^e k leurs ressources et, pour tons, une d^pendance
p^nible. Fondle en 1884, pour combler cette lacune, la biblio-
theque Braille renferme actuellement plus de 2000 volumes
(lettres et musique) imprimds ou manuscrits en points saillants
d'aprfes ring^nieux syst^me dft k Taveugle Louis Braille. Elle
est aliment^e par les dons des dtablissements qui impriment k
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85i REVUE PHILANTHROPIQLE.
lusage des aveugles et surtout (la grosseur des caract^res en
relief rendant les livres tr^s volumineux et, par suite, fort chers
it imprimer) par le travail b^D^voledepr^sde deux cents personnes
intclligentes et z6I^es, dont beaucoup de femmes du monde, qui
se sont familiaris6esavec ce systftme d'^criture en relief, facile h
apprendre, et transcrivent des livres destines aux aveugles. Ces
Mvres de tous genres: instructifs, religieux, r6cr6atifs, sont
ensuite relics par des aveugles et mis en circulation. C'est le
mercredi, de deux it cinq heures, que la biblioth^ue estouverte
ct le service est confie k des biblioth(^caires non moins aveugles
que les lecteurs qui viennent eux-mdmes faire leur choix. De
plus, les volumes de la biblioth^ue Braille circulent par toute
la France et k T^tranger au moyen de colis postaux, s'il s'agit
d'aveugles isol6s, ou de biblioth^ues roulantes exp^di^es p^rio-
diquement dans les localit^s oil se trouvent un certain nombre
d'aveugles instruits, pour lesquels ces livres ou ces cahiers de
musique constituent souvent Toutil professionnel de premiere
n^cessitd. Quand la lecture a usd les manuscrits, ils sont
recopids par des aveugles qui, n'ayant pas de travail plus
lucratif, gagncntainsi quelques centimes par heure. La biblio-
th^que Braille compte aujourd'hui environ quatre cents lecteurs;
olle se d^veloppe chaque jour, et le bien qu'elle fait intellec-
tuellement et moralement est considerable. On pent y contribuer
soit par des dons en argent, soit par un concours personnel
d'activite intelligente que les besoins croissants de cette branche
de rCEuvre rendenttrfes pr^cieux.
Le « Louis Braille ». — Ce recueil, imprira6 en relief dans le
type Braille, paraissant, le 1*' de chaque mois, en une livraison
de 16 pages in-8**, prix : France, 3 francs ; dtranger, 3 fr. 50, a 6i6
fond6 en 1883 dans le but d'aplanir aux aveugles instruits le
dur sentier de la vie. A ceux qui ont appris une profession, il
fournit les conseils, les renseignements sp^ciaux qu'ils ne
sauraient trouver ailleurs, k ceux qui sont dans Taisance ou
qui, n'ayant pu r^ussir dans un apprentissage, vivent dans leur
famille ou dans un asile, le Louis Braille apporte un peu de vie
et de lumifere par des lectures utiles et fortiKantes.
R^dig^ dans un but d'utilit^ pratique, son programme
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L'ASSOGIATION VALENTIN HAUY. 855
comprend : explication des syst^mes, des appareils nouveaux
ou perfectiona^s reconnus bons et utilisables par des aveugles
comp6tents; biographies d'aveugles remarquables dont les
exemples peuvent fetre salutaires ; articles sur des questions in-
t^ressant directement les aveugles; catalogues des livres pu-
blics en Braille, de la musique ^dit^e dans tons les pays;
livres et appareils 4 vendre d'occasion ; oeuvres d'aveugles pu-
bli^es pour les clairvoyants ; r^ponses k des questions faites par
des abounds, lorsqu'elles sont instructives pour tous; emplois
obtenus par des aveugles; fondalion d'^tablissements sp^ciaux;
n^crologie des aveugles ou des personnes qui s'occupent d'eux,
etc. Depuis sa fondation, le Louis Braille a rendu de grands
services, Timportance des renseignements sp6ciaux qu'il r^unit,
et que lui seul pent donner k cause des nombreuses relations
qu'il entretient avec tout ce qui toucbe k la c6cit6, le fait re-
chercher par les aveugles frangais et strangers. Sa direction
est devenue rapidement le centre des aveugles instruUs et une
correspondance quotidienne tvhs ^lendue lui permet de suivre
pas k pas leurs besoins et de leur venir en aide de mille fagons.
Les aveugles n^cessiteux qui ne sauraient faire les frais de
I'abonnement (si modique cependant) rcQoivent gratuitement,
par les soins de TAssocialion, le Louis Braille en seconde
lecture.
La « Revue Braille ». — Recueil hebdomadaire imprim^ %a-
lement en relief, paraissant le dimanche (France, 7 francs;
stranger, 8 fr. 50), et fond6 en 1883; elle informe ses lecteurs
de ce qui se passe dans le monde litt^raire, scientifique, mu-
sical et politique, en France et k T^tranger, et donne, dans
chaque numdro, une chronique des 6v6nements de la semaine ;
elle forme, par an, quatre gros volumes de 208 pages, soit
832 pages.
Grftce k cette revue s6rieuse, concise et substantielle, r^dig^e
par des ^crivains d'une veritable valeur, Taveugle intelligent
se tient au courant de tout cequi pr^occupelesespritscultiv^s,
et pent, sans peine, prendre part k leur conversation. Ce recueil,
tout en se rapprochant du journal quotidien par ses informa-
tions et par Failure rapide de ses articles, est plut6t une revue
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856 REVUE PHILANTHROPIQUE.
en raccourci. Les revues contiennent g^n^ralement des articles
ir^s d^velopp^s destines aux personnes qui s'int^ressent &
telle ou telle question. Ge qu'il faut pour une publication im-
prim^e en relief, ce sont des reductions en quelques pages du
fait int^ressant, de la d^couverte r^cente, de la pensde sail-
Ian te qui se rencontrent de temps k autre dans Tun des num^ros
d'une volumineuse revue.
Le Louis Braille et la Revue Braille comptent parmi leurs
abonn6s non seulement des aveugles d^veloppds d^s Tenfance
par une instruction et des aptitudes sp^ciales, mais encore
beau coup de personnes qui, atteintes par la c6cii6 k une
p^riode plus ou moins avancde de leur existence, ont eu
rheureuse id6e d'apprendre k lire les caractferes en relief. A
tout &ge, en effet, on peut se familiariser avec ie syst^me de
lecture et d*6criture Braille, et en retirer les plus grands avan-
lages. Voili ce qu'il importe de faire savoir k tons ceux qui
perdent la vue ; on ne saurait trop les engager 4 acqu6rir le
plus t6t possible toutes les connaissances capables de leur ser-
vir dans leur nouvelle situation.
Le « Valentin Hauy ». — GrAce au Louis Braille y Taveugle
n'est plus isoie au milieu des aveugles ; grftce k la Revue Braille^
il n'est plus isol^ au milieu des clairvoyants ; le Valentin HaHy
a pour but de faciliter la t&che k tons ceux qui s'occupent des
aveugles. Fondle en \ 883 et imprim^e k Tusage des clairvoyants
(paraissant le 15 de chaque mois; France et stranger, 3 francs
par an), cette revue universelle des questions relatives aux
aveugles est en m^me temps le bulletin mensuel de TAssociation
Valentin Haiiy, elle s'adresse aux directeurs et aux professeurs
des etablissements consacr^s aux aveugles, aux parents d'en-
fants aveugles, en un mot, k tons les typhlophiles frauQais et
strangers. £lle r^pand, dans le monde entier, une immense
quantity de faits et dinformations pouvant les int^resser, cen-
tralise les renseignements les plus utiles et les plus divers, et
publie aussi des etudes approfondies sur toutes les questions
qui pr^occupenl ou.doivent prdoccuper les sp^cialistes. Une
table analytique et alphab^tique des mati^res (Education, en-
seignement intellectuel et professionnel, 6coles, ateliers, ou-
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L'ASSOCIATION VALENTIN HAUY. 857
vroirs, asiles, biographies, bibliographies, nouvelles et ren-
seignements, etc.) permet une prompte et facile recherche
dans cette encyclop^die indispensable atousceux qui s^occupent
des aveugles.
VI. — PATRONAGE, PROPHYLAXIB, STATISTIQDE
Le Patronage, qui ne saurait 6tre confondu avec Tassistance,
est la cl^ de voAte de TCEuvre des aveugles ; celui de TAsso-
ciation Valentin Haily s'6tend k tout aveugle digne d'int^rfit
qui lui est signals ou qui s'adresse directement k elhe ; le Secre-
tariat g^n^ral constitue et conserve avec soin des dossiers sur
tous ceux dont il a eu & s'occuper ; il en a d^jft groupd plus de
deuxmille. La Commission de Patronage est form^e de membres
duConseild'Adminislralionetdenombreuxmembresauxiliaires.
EUe se r^unit le troisifeme vendredi du mois, pour s'occuper de
toutes les questions relatives au patronage ayant un caract^re
g^n^ral ou motivant une decision, et elle se fractionne en quatre
sections dontchacune a, en outre, une reunion mensuelle, pour
etudier les cas particuliers et preparer les decisions qui doivcnt
6tre soumises k la reunion pl^ni^re.
!• Enfants, — L'Association veillesur les premieres ann^es
de lenfant priv6 de la vue et, parfois, doit Tarracher k des pa-
rents indignes qui le maltraitcnt ou Texploitent. Dans certains
cas, elle obtient son admission k T^cole primaire en attendant
son entree k F^cole sp^ciale, mettant k la disposition de Tin-
stituteur bienveillant les indications (d*ailleurs fort simples) n^-
cessaires k cet enseignement pr^liminaire, ou bien, par un
court manuel r^dig^ dans ce but, dirigeant les parents dans
cette premiere education si importante, les encourageant et
leur facilitant Tacc^s de T^cole sp^ciale. Si Tenfant est indigent,
TAssociation lui fournit les livres et les appareils d'6criture et,
soit par son entremise pr^s des Conseils g6n6raux ou munici-
paux charges d'accorder les bourses, soit par celles encore trop
peu nombreuses dont elle dispose dans quelques ^tablissements
de Paris ou des d^partements, soit enfin par un secours destine
au trousseau, elle aplanit les difficult^s que Tintervention de
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858 REVUE PHILANTHROPIQUE.
TEtat ou de la commune n*aurait pas supprim^es et assure k
Tenfant le bienfait d'une education religieuse, intellectuelle et
professionnelle.
2° Adultes susceptibles d'apprendre un milter. — L' Associa-
tion fait les d-marches n^cessaires pour faciliter cet apprentis-
sage, pour faire voter des bourses, h cet efFet, par les Gonseils
g^Q^raux et municipaux, pour obtenir des secours des particu-
liers ou des institutions charitables ; elle-m6me y contribue dans
la mesure de ses moyens.
3® Adultes munis dune profession. — La plus grande diffi-
cultd n'est pas d'apprendre aux aveugles a gagner leur vie, mais
bien de la leur faire gagner. Tout conspire Ji les emp^cher
d'utiliser leur profession, et les services que TAssociation est
appel^e k leur rendre varient comme les circonstances ou ils
se trouvent places : d-marches faites pour les aider k trouver
du travail, k se former une clienlfele ; recommandations, con-
seils et encouragements, dans les phases souvent si difiiciles
de cette lutte pour Texistence; secours sous forme d' « avances
au travail » pour ou tillage ou matii^rcs premiferes, s*il s'agit
d'ouvriers ; dons ou pr6ts de livres et d'instruments de musique,
s'il s'agit d'organistes, de professeurs ou d'accordeurs; en un
mot, secours moral et materiel sous toutes les formes, tel est le
patronage exercd par TAssociation Valentin Hatiy et qui s'^tend
parfois k toute la famille de Taveugle. Les membres charges
sp^cialement de cette section se partagent les visites et la cor-
respondance k entretenir avec leurs palronn^s ; la plupart de
celle-ci (un ^change d'environ 600 lettres par an) est faite en
Braille. L'une des faveurs les plus appr^ci^es est celle du
demi-tarif accords, pour les places de chemin de fer, sur la
demande de T Association, par les Gompagnies, et permettant k
I'aveugle qui voyage pour Texercice de sa profession, sur un
rayon d^termin^, de ne payer qu'une place pour lui et son
guide. Une moyenne de 450 permis est ainsi obtenue, annuelle-
ment, au grand avantage des travailleurs aveugles.
i^ Aveugles dgis ou impotents. — Relativement aux aveugles
incapables de pourvoir k leur subsistance, la t&che de TAssocia-
tion consiste k leur procurer un travail facile, k les faire se-
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L'ASSOCIATION VALENTIN HAUV. 859
courir chez eux ou hospitaliser. Gritce aux rapports suivis
qu'elle entretient, soit avec TAssistance publique, soit avec les
OBUvres de bienfaisance privies, elle s'efForce de les faire bdn^-
ficier des institutions charitables cr^6es pour tons les indi-
gents; parfois, elle est Tinterm^diaire de lib^ralit^s particu-
liferes que ses enqufetesJi domicile, ses relations constantes avec
ses patronn^s la mettent k m6me de distribuer k bon escient.
Aux malades, elle procure des cartes qui leur assurent, dans
d'excellents dispensaires, soins et medicaments gratuits.
Atelier d'apprentissage pour les femmes. — Pour secourir
une cat^gorie d*aveugles particuli^rement int^ressante, les
femmes que leur Age ou d'autres causes empSchent d*6tre ad-
mises dans une 6cole et qui, privies de ressources, veulent
demander leur subsistance non k Taumdne, mais au travail,
TAssocialion a cr^^, chez les Soeurs aveugles de Saint-Paul,
88, rue Denfert-Rochereau, un atelier (avec internal) d*appren-
lissage de brosserie, Tun des rares metiers manuels quelque peu
r^mun^rateurs qui soient k la portde de la femme aveugle.
Gelles des ouvri^res qui ne peuvent, leur apprentissage ter-
mini, aller exercer chez leurs parents la profession apprise
sont conserv^es dans Tatelier. Eniin, TAssociation entretient k
TAsile-ouvroir des aveugles de Saintes (Charente) celles des ou-
vriferes que leur sanld rend incapables d'un travail suftisant.
Atelier pour la fabrication des sacs en papier, — Pour les
aveugles ayant perdu la vue aprfes la quaranti^me annde ou
rest6s jusqu*^ cet fige sans travailler, pour ceux auxquels le
manque d'adresse et d'initiative interdit Tapprentissage d'un
mdtier difficile, TAssociation a cherch6 une occupation tr^s
facile n'exigeant ni longue initiation, ni outillage complique,ni
mat^riaux coilteux, it, en 1893, elle a cv€& un atelier d 'appren-
tissage pour la fabrication des sacs en vieux papier destines
aux halles et marches; il est situ6 62, rue Saint-Sauveur. Mais,
pour que cette modeste Industrie soit suffisamment rdmunira-
trice,.il importe de fournir k un prix infime le papier nicessaire
aux ouvriers aveugles; dans ce but, TAssocialion fait appel k la
charity des grandes administrations, comme k celle de tons les
particuliers d6sireux de venir en aide Ji une classe intdressante
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860 REVUE PHILANTIJROPIQUE.
de travailleurs en lui abandonnant le papier hors d'usage; vieux
livres, journaux, etc., tout est utilise. Surun simple avis, rOEuvre
fait prendre h domicile, et plusieurs d^pdts r^partis dans Paris
facilitent cette r6colte de vieux papier. Une succursale de
I'atelier de la rue Saint-Sauveur existe maintenant au sifege de
I'Association.
Travail a domicile pour les femmes aveugles m^es de famille.
— Les mferes de fajniile pauvres qui perdent la vue sont
peul-6lre les plus int6ressantes victimes de la c^citd; aussi
TAssociation cherche-t-elle k leur procurer un travail facile :
tricot, crochet, filet (quelques-unes font mdme un pen de cou-
ture), qu'elles puissent ex^cuter tout en gardant leurs enfants
et en vaquant aux soins du manage rest^s h leur port6e. Cette
oeuvre du travail k domicile s'^tend maintenant de Paris en
province; Tdcoulcment de ces travaux, qui constituent pour les
ouvriferes un bienfait k la fois moral et materiel, se fait grftce
aux personnes qui veulent bien r^server leurs commandes de
bienfaisance k FCEuvre ; quelques dons de laine faits par de cba-
ritables industriels, malheureusement trop pen nombreux, per-
mettent de livrer k des prix mod^r^s les objets ainsi confec-
tionn^s.
En outre de ce qui prdc^de, TAssociation Valentin Hauy
a ct66 les services suivants qui viennent en aide k toutes les
categories de ses patronn^s :
Vestiaire. — 11 est aliments par des dons en nature (v6te-
ments, linge, chaussures) qui sont rcQUs avec reconnaissance,
et par le travail de dames charilables se r^unissant le deuxifeme
et le quatric^me vendredi de chaque mois k Touvroir de TAsso-
ciation. Le vestiaire est ou vert tons les mercredis,de deux k cinq
heures; au moyen de bons d^livr^s par le' Secretariat gSn^ral,
les aveugles peuvent faire r6parer leurs vfetements k pen de
frais ou m^me gratuitement et s'en procurer au besoin.
Caisse des loyers. — Elle a pour but de faciliter aux aveugles
ndcessiteux le paiement de leur loyer et de les encourager ii
reconomie, k la pr^voyance k cet ^gard, en leur accordant
Taide de TAssociation, sous forme d'une prime trimestrielle de
10 pour 100 proportionnde k I'^pargne r^alis^e par eux.
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L'ASSOCIATION VALENTIN HAUY. 861
Consultations graiuites. — Deux membres de 1' Association,
un ancien magistrat et un docteur en mddecine, donnent gra-
tuitement aux aveugles (soit de vive voix, le mercredi de 2 &
5 heures, soit par correspondance) des consultations juridiques
et medicates.
Cercle Valentin HaUy. — Sous ce nom, une salle de reunion
et de r^crdation est ouverte, pour les hommes aveugles^ le di-
manche de deux Ji six heures; ils y trouvent des jeux, des lec-
tures et des causeries int^ressantes.
Prophylaxie, — L' Association Valentin Hatty, non moins
d^sireuse d'6viter la c^citd que de la soulager, ^tudie et vulga-
rise la prophylaxie. Afin de prdvenir Tophtalmie purulente,
qui, on le sait, cause 35 p. 100 des cas de c^citd, elle r6pand
et fait distribuer par les municipalit^s et les personnes chari-
tables qui s'y prfitent des milliers de notices populaires intitu-
I6es : Conseils aux mkres qui ne veulent pas que leurs nou-
veau-nis deviennent a/veugles.
Par rinterm6diaire des oculistes, TAssociation se met ii la
disposition des personnes dont la vue est afFaiblie pour leur
fournir gratuitement renseignements et conseils, leur indiquant
les procdd^s et appareils k Taide desquels on pent lire, 6crire,
calculer en laissant reposer Torgane fatigu6, les jeux appro-
prids, etc. L'un des vice-presidents de FAssociation Valentin
Hatty, le commandant Barazer, lui-m6me aveugle, a r6digd,
dans ce but, un utile manuel intitule : Conseils aux per-
sonnes quiperdent la vue.
Statistique. — Indispensable k qui veut faire le bien avec
ordre et m^thode, la statistique provoque, de la part de TAsso-
ciation, d'utiles enqudtes ayant pour but de rendre plus precis
et plus efficace Texercice du patronage : nombre de places va-
cantes dans les divers ^tablissements sp6ciaux, r^sullats pra-
tiques donnas par les diverses professions qu'exercent des
aveugles Isolds, etc., etc.
Telles sont, en rdsum6, les oeuvres entreprises par TAssocia-
tion Valentin Hatty, oeuvres qui rendent d^jk de grands ser-
vices, mais en rendraient de plus grands encore si ses ressources
lui permettaient de les ddvelopper, de les completer. Gombien
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862 REVUE PHILANTHROPIQUE.
d'aveugles seraient sauvis du ddsespoir et rcndus k la vie
utile si elle poiivait leur prtter un concours plus efficace!...
Gombicn d'enfants seraient arrach^s k la mis^re physique et
morale oh s'atrophient leur corps et leur Ame, si ses ressources
lui permettaient d'entretenir, en leur faveur, un plus grand
nombre de bourses dans les 6coles sp^ciales !...
L'action de TAssociation Valentin Haiiy est extrfemement
vaste; elle s*^lend^ oq Ta vu, k presque toutes les situations de
la vie de Taveugle. Elle a, gr&ce k de nombreux et d^vou^s con-
cours, pris rapidement unegrande extension; pour soutenir ses
creations, il faut que tons les gens de cceur qui jouissent de la
vue pensent qu'il y a en France quarante mille aveugles dont
les trois quarts sont indigents... II faut que chacun, riche ou
pauvre, donne sa sympathie et envoie son obole k TAssociation
Valentin Haiiy pour le bien des aveugles.
MAURICE DE LA SIZERANNE.
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UNE
PETITE FAMILLE A MENILMONTANT
L'ABRI DE LA FILLETTE
La rue Julien-Lacroix est une des pauvres rues qui relient
la rue de Belleville k la rue de M^nilmontant. C'est IJi, au nu-
mdro 25, qu'une Su6doise, M"* Andersson de Meijerhelm, vit au
milieu de dix petites lilies qu^elle a recueillies dans le modeste
logement qu'elle occupe, et qu'elle garde h demeure chez elle.
Venue en France, il y a quatre ans, elle se fixa aussitdt dans
le XX® arrondissement. Tun des plus pauvres de Paris et cher-
cha k y faire tout le bien que lui permettaient ses modestes
ressources. Elle commenQa par rdunir quelques enfants, les
jours de congd, c'est-k-dire le jeudi et le dimanche, demandant
aux directrices des ^coles du quartier de lui envoyer ceux que
leurs parenis, ouvriers occup^s tout le jour dans les fabriques,
ne pouvaient surveiller, recherchant elle-m6me ceux qui,
dresses k la mendicity par des p^res ou des mferes indignes,
^chappaient 4 TEcole et s'engageaient dans la voie de la per-
dition. Un bon nombre de fiilettes de huit k quinze ans vin-
rent ainsi le jeudi et le dimanche former un petit ouvroir ou
M"* Andersson les occupait k des ouvrages qu'elles pouvaient
ensuite achever chez elles, ks distrayait on les faisant jouer ou
en leur apprenant it chanter en chceur. Mais que sont deux
apr^s-midi par semaine, quand il s'agit d'exercer une influence
quelconque sur des enfants le plus souvent abandonn^es k
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864 REVUE PHILANTHROPIQUE.
elles-m6mes el en bulte k toutes les seductions et k tous les
dangers de la rue? Aussi M""* Andersson ne s'en tint-elle pas k
ces deux reunions; elle fit venir chaque jour celles qu'elle
jugeait le plus exposdes, les r^unissant aprfes la classe, k Theure
oh elles avaient k faire leurs devoirs et oil, le plus sou vent,
elles trouvaient la porte du logis ferm^e et attendaient dans la
rue la rentr^e de leurs parents. Elle les encourageait ainsi k
suivre r^guli^rement T^cole et s'assurait que la classe n'^tait
pas d^sert^e pour le ruisseau.
Un pas restait k faire. Un jour de 1895, la direclrice d'une
dcole demanda k M"* Andersson de recevoir k demeure une
petite fille de douze ans que sa mfere, adonn^e k la boisson,
brutalisait et forgait k mendier avec elle. Elle resta quatre mois
chez M""* Andersson, couchant dans un lit qu'on lui avait pr6t6.
Ce fut I'origine de la petite famille. Et en efifet, ce ne fut
bientdt plus une petite fille, mais quatre, puis huit, puis dix
que put recueillir « TAbri de la Fillette », d^sormais constitu6
gr&ce k quelques personnes g^n^reuses qui aidferent la fonda-
trice k acheter les meubles indispensables et k payer le loyer
d'un logement un pen plus grand.
L'Abri de la rue Julien-Lacroix est compost de quatre petites
pieces dont la premiere sert k la fois d'antichambre, de salle
d'^tude et de chambre de jeu. Les deux suivanles sont les dor-
toirs; les repas se prennent dans la cuisine. Le tout est d'une
simplicity extreme : rien que le strict ndcessaire, mais le petit
appartement est propre et bien tenu. Une femme d6vou6e
s'occupe des enfants, leur prepare i manger et les surveille.
La directrice habite k Tdtage au-dessus, mais elle est plus
souvent avec les enfants que chez elle. Elle entre et les petites
filles de se jeter aussitdt au cou de « grand'mfere », comme elles
Tappellent. C est qu elles n'ont pasdt^ habitudes i^lreentour^es
de soins et d'affection. Et cependant presque toutes ont des
parents, un pdre ou une m^re, auxquels il a fallu les enlever
pour une raison ou pour une autre. Toutes jeunes, il y a deces
enfants qui ont d^jk bien souffert, moralement et physique-
ment, de la mis6re et de la brutality, des mauvais traitemcnts
et des mauvais exemples. En voici une qui, k treize ans, ne
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UNE PETITE FAMILLE A MfiNILMONTANT. 865
savait pas lire : pas de p^re ; la m^re partait le matin de bonne
heure pour Tusine, fermait la porle du logis, et voil^ la petite
livr^e k elle-m6me jusqu'au soir! Ce cas-l& n'est pas rare dans
les pauvres quartiers de Belleville ou de M^nilmontant. Beau-
coup de femmes boivent et malm^nent leurs enfants. Quel n'eAt
pas 6t6 le sort de ces pauvres petites si elles n'avaient trouv6
dans M"* Andersson une m^re et dans TAbri une famille, une
vraie famille, oil la vie est calme, r^gl^e, saine! Ici elles re-
prennent confiance et retrouvent la gaiet6 de leur 4ge. On les
sent heureuses et on les sait sauv6es. Le bon pli est pris : elles
ne vagabondent plus dans la rue, elles vont rdguli^rement ft
r^cole et, en rentrant, elles font exactement leur devoir. Sans
doute il y a cerlaines de ces petites filles dont on a bien du mal
k faire quelque chose. H est difficile de triompher de certaines
tares hdr^dilaires. L'alcool exerce des ravages affreux sur notre
population des faubourgs. Contrefaits, d6g6n6r6s, ^pileptiques,
sont legion. Ici cependant les r^sultats obtenus sont encoura-
geants. Une des fiUettes, fille d*alcoolique, d^sesp^rait au d6but
M""* Andersson par ses lubies et sa sant6 ch^tive; depuis qu'elle
est k TAbri, les soins de la brave femme qui s'occupe des enfants
et rinfluence d'un milieu paisible ont fait merveille ; les acc6s
passagers de folie ont disparu; Tenfant est niaintenant soumise
et donne toute satisfaction .
La « petite famille » est composde de dix petites filles,
ftg6es de cinq k treize ans. A cet ^ge de tieize ans, M°** Anders-
son les place en apprentissage ; elle continue k s'en occuper,
va les voir et les suit; le milieu est choisi et reconnu bon et il
y a beaucoup de chances pour que les enfants tournent bien.
En plus des dix dont nous venous de parler, quatre petites
filles viennent pour la journ6e seulement; elles ne couchent
pas k TAbri, mais chez leurs mferes, occupies tout le jour dans
un atelier.
Le jeudi et le dimanche, M"* Andersson continue k inviler
des enfants du quartier k venir se joindre k ses petites pension-
naires, pour jouer, travailler ou se promener. Une vingtaine
de fillettes r^pondent r^guliferement k son appel, heureuses de
prendre part au modeste goAter qui leur est offert etde confec-
REVUE PHILANTHROPIQUE. — 11. 55
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866 REVUE PHILANTHROPIQUE.
tionner un petit ouvrage k la fois amusant et instructif. Quand
le temps est beau, toute la bande va se promener et on devine
le piaisir que fait une excursion au Jardin des Plantes ou an
Bois de Vincennes !
Ces enfants appartiennent toutes k la partie la plus mise-
rable et la plus moralement d^sh^rit^e de la population de
Paris. 11 est presque superflu de mettre en relief Textr^me uti-
lity, dans unpareil milieu, d'une petite CBUvre comme celleque
nous venons de d^crire. On voit clairement une fois de plus
quelle pent 6tre Faction personnelle d*une volont^ ^nergique et
ardemment tendue vers le bien. 11 est Evident que, pour un
grand nombre d'ouvriers Irhs pauvres, de femmes veuves occu-
p^s tout le jour k travailler en dehors de chez elles, il est ma-
t^riellement impossible, m^me avec la meilleure volont^, de
surveiller et d'6lever leurs enfants. Un abri, comme celui dont
nous nous occupons, se charge de ces soins. Les enfants y sont
recueillis entre les classes, on veille k ce qu'ils fassent r^gu-
li^rement leurs devoirs et on les enl^veaux plaisirs dangereux
de la rue qui habituent au vagabondage. Ainsi nous avons vu
qn'k TAbri de la Fillette, quatre petites filles ne sont que demi-
pensionnaires et retournent coucher chez leurs parents auxquels
on a pu les laisser sans danger. Mais Tabri est surtout de pre-
miere necessity pour ceux qui, victimes de parents n^gligents
ou vicieux, se perdraient infailliblement, si on nelestransplan-
tait dans cette famille d'adoption. II est bien entendu que Tabri
ne se substitue pas k la vie de famille, quand celle-ci pent
mat^riellement et moralement exister : il ne fait que la rem-
placer, Ik oil elle manque totalement, Ik ou elle est pernicieuse.
M"' Andersson pense avec beaucoup de raison qu'une petite
famille comme celle qu'elle a formie ne doit pas r^unir plus
d'unedizaine d'enfants, afin de conserver ce pr^cieuxcaract^re de
« famille » qu'on ne pent obtenir dans les grands 6tablissements.
Ici Vaffection est vraiment celle d'une mfere pour ses enfants,
et ces mots seuls en disent long. Ce qu'il faudrait done, ce n'est
pas que le nombre des enfants augmente dans chaque petite
famille, mais que le nombre de ces petites families se multi-
plie. II faudrait qu'il s'en fonde une pour les garc^ons et une
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UNE PETITE FAMILLE A MfeNILMONTANT. 867
pour les filles aupr^s de chacune des 6coles des quartiers les
plus pauvres; il faudraitque chacun de ces petits abris ait dix
lits et une salle de reunion pour une trentaine d'enfants, afin
que d'autres enfants pauvres du quartier puissent venir se
rdunir le jeudi et le dimanche k leurs petits camarades, se dis-
traire avec eux, et subir la bienfaisante influence de la petite
famille; ilfaudrait que certains de ces abris aient des succur-
sales k la campagne pour les enfants maladifs ou pourceux qui
ont besoin de quelques semaines d*air pur. II faudrait... mais
nous sommes loin de la r6alit6 actuelle !
Cependant la petite oeuvre de M"' Andersson, toute modeste,
toute pauvre — on peut le dire — qu'elle soit, realise d^j^
quelques-uns de ces desiderata. Elle rcQoit les fillettes k demeure
depuis 1895. Depuis cette ^poque, elle en a rcQu trente qu'elle
a toutes suivies, apr^s les avoir plac^es en apprentissage a
r&ge de treize ans. Depuis le 10 f6vrier 1894, elle a eu le jeudi
et le dimanche plus de cent enfants, dits externes. Elle n'a pu
les suivre tons, mais elle a pu s'occuper efficacement de cer-
tains d'entre eux, en particulier pour leur faire suivre T^cole
et leur procurer des soins m^dicaux en cas d'infirmit^s ou de
maladies.
C'est un bel exemple d'initiativc privde qui m^rite d'etre
encourage et imit^.
M. G.
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CONSEIL SUPERIEUR
DE
L ASSISTANCE PUBLIQUE
Le Gonseil sup^rienr de TAssislance publiqiie a tenu sa premiere sessioa
ordinaire de 1898, du 16 au 19 raars dernier, dans le local habituel de ses
stances, h. Tlnstitulion nationale des Jeunes Aveugles.
MM. Th^ophiie Roussel, president, et MM. Hermann Sabrati el Thuli^,
vice-pr6sidents sorlants ont H^ r661us par acclamation.
Les stances ont 6t6 pr^sid^es par M. Sabran en ['absence de M. Th^o-
phile Roussel, empfich^ par la maladie grave de sa fenime.
M. Monod, directeur de Tassistance et de Thygi^ne publiques, a d^pos6
sur le bureau du Gonseil, les nouvelles demandes d'avisdonl le ministre de
I'int^rieur a saisi le Gonseil, savoir :
1° Projet d'organisation de services de secours en faveur d'enfaiits
Ag^s de moins de deux ans, non menaces d'abandon;
2<* Projet d'organisation du patronage de TAssistance publiqueen faveur
des jeunes lib^r^s;
3<> Projet de creation d^ quartiers sp^ciaux pour les ali^nes ara^lior^s;
4° Avis ii dmettre sur la question de savoir si les m^decins et chirurgiens
attaches aux ^tablissements hospitallers peuvent se faire payer des bono-
raires par des hospitalises.
Revision du r^glement-modile des hdpitaux et des hospices. — La pre-
miere question k Tordre du jour des deliberations, a ^16 expos6e par
M. le docteur Drouineau, rapporteur. Les r6glements actuellement exis-
tants ont et6 fails sur le r^glement module de 1840. Depuis lors, bien des
modifications ont ^16 introduites dans Thospitalisation des malades et des
vieillards ou inflrmes, surlout des malades. Bien que les hdpitaux fussent
libres de mettre leurs reglements en harmonie avec ces modifications, ih
ne Tout pas fait, sauf dans queiques grandes villes.
La place nous manque pour reproduire aujourd'hui le projet de r^le-
ment tel qu'il est sorti des deliberations du Gonseil. Nous tenons seulement
k signaler quelques-uns des points sur lesquels le nouveau r^glement s'esl
applique it ameiiorer celui de 1840.
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GONSEIL SUPfeKlEUR DE L'ASSISTANGE PUBLIQUE. 869
Le nouveau r^giement precise quelles conditions sont n^cessaires pour
assurer la liberty de conscience des hospitalises.
11 etablit une demarcation bien nette enlre I'hdpital, exclusivement
r^sery^ aux malades et Thospice, destine surtout aux vieillards.
II rappelle aux commissions administratives, les obligations qui leur
sont impos^es par les lois de 1851 et de 1893.
Pour Tex^cution de la premiere de ceslois, qui n'est pas obligatoire en
ce sens qu'ellen'a pas de sanction, les commissions administratives mesu-
rent les admissions aux ressources de I'^tablissement; mais pour I'ex^cu-
tion de la loi de 1893, elles doivent pourvoir k Tinsufflsance de leurs res-
sources par les moyens financiers que la loi a indiqn^s. II faut faire inter-
venir les provisions de ces deux lois dans la determination des lits.
Dans le chapitre vii relatif aux malades hospitalises, le Conseil a affirm^
que I'hdpital est exclusivement reserve aux malades ind igents, sauf des cas ex-
ceptionnels. Ceci pour couper court, s'il est possible, aux abus devenus s^rieux
de malades ais6s et mdme riches qui se font hospitaliser, moyennant des-
retributions illusoires.
Dans ce meme chapitre, ilest dit que les femmes enceintes peuvent dtre-
re9ues pendant la dernifere quinzaine de leur grossesse et non plus, comme
le disait Tancien r^glement, au terme de leur grossesse. L'hospi tali sat ion
leur est assurOe jusqu'^ ce que le medecin ait certifie qu'elles peuvent
quitter Thdpital sans danger pour elles et leur enfant.
Pour les hospices, les modifications effectuees par le nouveau r^glement
sont de peu d'importance.
Les membres du Conseil qui ont pi is la plus grande part k la discussion
sont : MM. Armaingaud, Berenger, Bnieyre, Caubet, Henrot, Hebrard de
Villeneuve, Emile Labiche, Lefort, Henri Monod, Napias, Regnard, Sabran,.
Paul Strauss, Voisin.
Institution nationale des sourds-muets de Paris. — En 1895, M. Henry
Boucher, rapporteur du budget du minist^re de I'interieur, avait signaie
reievation du prix de pension des sourds-muets h Tlnstilution nationale
de Paris, et avec lui la commission du budget avait suggOre I'idee du
transport de Tetablissement k la campagne, par mesure d'economie. II lui
semblait que le sejour de Paris n'etait pas n^cessaire aux sourds-muets,
qu'^ la campagne ils seraient eievOs dans des conditions plus economiques
et que la vente du terrain sur lequel s'eieve Tlnslitution couvrirait et au
dela les frais de transport. L'avis du Conseil supOrieur ayant eie demaude,
M. Paul Strauss fut charge de presenter un rapport sur cette question.
11 a d'abord etabli qu'il fallait ecarter Tidee d'un exode complet,absolu,
de rinstitution nationale en dehors de Paris, « le sejour dans une grande
ville etant plus propre qu'une residence rurale k eveiller Tinteliigence des
sourds-muets qui apprennent surtout par les yeux et dont I'education se
fait principalement par la vue, par le spectacle exterieur ».
Cette solution ecartee, deux hypotheses peuvent etre envisagees.
M. Paul Strauss les a resumees en quelques lignes :
a Ou bien, debarrassee de ses relardataires ; ne conservant que ses
meilleurs sujets, linstitution deviendrait une veritable ecole normale; elle
donnerait Texemple non seulement aux ecoles regionales, mais encore
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870 REVUE PHILANTHROPIQUE.
anz institulions de I'^tranger. Les cours normaux, suivis depuis 1881 par
les d^l^gu^s du Mexique, da Portugal, da Dr^sil, de la Russie, par le per-
sonnel enseignaat de Bic^tre et de la Salp^tri^re ei par des instiluteurs et
des inslitutrices de la Ville de Paris, seraient encore plus fr^quenUs
qo'aujourd'hui. Elie coiiterait moins cher et ferait faire pJus de progres
aux 61feves.
"^ i< Dans ane annexe sito^e a la campagne, aYec an personnel enseignant
sorti de ll^cole de Paris, avec des classes contenant on plus grand
nombre d'61^yes, avec des programmes et un enseignement professionnel
appropri^s aux aptitudes et aux besoins des ^l^ves de cette cat^gorie, let
arri^r^s eux-m^mes se d^yelopperaient mieax pbysiquement et intellec-
tuellemeot. Leur prix de revient subirait une diminution sensible. Les d^
penses seraient moindres et T^ducation meilleure.
< Ou bien, sans fonder deux ^tablissements distincts, T^cole normale
et r^coledes arri^r^s formeraient deux sections s^par^es^maisjuxtapos^es
et rdonies sous une administration commune, avec des bAtiments g^neraux
communs, sur un emplacement ^conomiquement choisi dans le Toisinage
des fortifications.
« Mais on ne saurait improviser, sans devis de d^penses, sans propo-
sitions fermes, une transformation de cette nature, d'aotant mieux que le
Gonseil sup^rieur n'est pas interrog^ sur cette transformation, mais uni-
quement sur le transfert de Tlnstitution.
« Votre section estime. Messieurs, que, pour se prononcer en toute
connaissance de cause et pour 6tre en mesure de donner un avis explicite,
elle a besoin d'etre consult^e par le Gouvemement, non sur une solution
restreinte et d^termin^e, mais sur la reorganisation totaie de rinstitution
nationale des soards-muels de Paris, sur sa conversion en ^cole normale,
sur la creation d'une annexe d'arri^r^s et, par voie de consequence, sur
I'ensemble des probl^mes de Teducation intellectuelle et professionnelle
des sourds-muets en France. »
Ges conclusions ont 6te adoptees par le Gonseil sup^rieur.
Le recrutement du personnel secondaire de$ itablissemenis hospitaUer$. —
Gette question, depuis iongtemps k Tordre du jour du Gonseil sup^rieur et
dont la solution rencontre beaacoup de difficult^s, se trouve d^sormais
vivement dclair^e par le rapport considerable et du plus haut interdt que
lui a consacre M. le D' Napias, rapporteur. En dehors de Paris et de Lyon
pen de villes, en France, ont pris des mesures s^rieuses pour assurer le
recrutement d'un personnel d'inOrmiers et d'infirmieres k la hauteur de
ses devoirs. En opposition k cet etat arri^re, M. ie D' N^ias a expose la
situation remarquable de quelques pays etrangers, surtout de TAngleterre.
G'est k une femme, miss Nightingale, que nos voisins doivent recole d*in-
fi rmieres de Saint-Thomas qui a alimente tons les h6pitaux anglais d'in-
flrmi^res etafourni des professeurs aux ecoles fondees, sur son module,
par plusienrs grandes villes, Berlin par exemple.
La France ne saurait rester en dehors de ce progres. Bien que la Ville
de Paris avec sa fondation des ecoles municipales d'infirmiers et dUnfir-
mieres, que dirige le D' Boumeville, ait cree un mouvement dans ce sens,
son exemple a ete pen suivi, et 11 est indispensable d'indiquer aux eta-
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CONSEIL SUPtRIEUR DE L'ASSISTANCE PUBLIQUE. 87!
blissements hospitallers la voie dans laqnelle ils doirent s'engager.
Void les propositions, adoptees par les 2* et 3' sections qui forment ia
conclusion du rapport de M. Napias.
I. — Les 6tablissement8 hospitaliers devront 6tre invites par Tadmini-
stration snp^rieure, k s'assurer le conconrs d'nn personnel secondaire (in-
firmiers et inflrmi^res, surveillauts et surveillantes), instruits et experi-
ment's dont la competence, prouv^e par des examens, sera constat'e par
Tobtention d'on certiflcat ou dipldroe special.
II. — Pour atteindre ce but, il sera ct^€, au fur et k mesure qn'il sera
n'cessaire, dans les principales vilies et notamment dans celles oil il
existe des foculfs ou 'cole de m^decine, aupr^s de grands hdpitaux k ser-
vices multiples comprenant toutes les formes de Tassistance, des 'coles
d'infirmiers et d'infirmi^res. Ges 'coles pourront 'tre fond'es par les vilies
ou les commissions hospitali'res.
ni. — L'enseignement dans ces 'coles sera k la fois technique et pra-
tique. Sa duree ne pourra 'tre iofrienre k une ann'e.
IV. — Get enseignement, confl' aux m'decins et chirurgiens de Tta-
blissement, sera uniforme pour toutes les 'coles et donn' confonn'ment k
un programme 'tudi' dans ses d'tatls par une commission sp'ciale
nomm'e par M. le ministre de Tinfrieur et arr't' d'flnitiyement apr's
avis du Gonseil sup'rieur de TAssistance publique.
V. — Le jury d'ezamen pour Tobtention du dipldme sera compos':
!<* Du pr'sident de la Gommission administrative de Fhospice, si'ge
de T'cole ou d'un membre de ladite commission d'l'gu' par le pr'si-
dent;
2« D'un professeur de la facult' ou de T'cote de m'decine d'sign' par
la facult' on T'cole ;
3^ De Irois membres du corps m'dical de T'tabiissement : un ro'deein,
un chirurgien, un accoucheur, d'sign's par lenrs coli'gnes.
VI. — Le personnel des asiles publics d'ali'n's et des asiles priv's fai-
sant fonction d'asiies publics (infirmiers et inflrmi'res, surveillants et sur-
veillantes) sera choisi, autantque possible, parmi les personnes dipl6m'es
et devra, en tons cas, pendant la premiere ann'e suivre des cours sp'ciaux
faits par les m'decins de T'tablissement.
VII. — II est n'cessaire que le salaire des infirmiers et inflrmi'res soit
relev' et qu'une retraite leur soit assur'e.
Apr's une courte discussion ces conclusions ont 't' adopt'es.
Demandes des communes faites en vertu de Particle 35 de la loi sur Vassis-
tance mMicale, — M. Rondel, d'l'gu' au contrAle du service de Fassistance
m'dicale, a pr'sent' le rapport g'n'ral sur les demandes form'es par les
communes en vertu de Tarticle 35 de la loi de 1893 pour obtenir Tautori-
sation d'avoir une organisation m'dicale.
Gette autorisation a 't' accord'e k 15 communes qui ont justifl' rem-
plir d'une maui're complete leur devoir d'assistance envers leurs malades.
Elle a 't' accord'e, sous certaines r'serves, k 48 autres communes. La d'-
cision k T'gard de 19 communes a 'I' ajourn'e. Et la demande de 4 com-
munes a 't' rejet'e.
DMaration, — En son nom personnel et au nom d'une vingtaine de
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872 REVUE PHILANTHROPIQUE.
membres du Conseil sup^rieur, M. Paul Strauss a ensuite donn^ lecture de
la declaration suivante :
« Le Conseil sup^rieur, qui va compter aujourd'hui dix ann^es d'exis-
tence, renouvelle son adhesion aux regies g^n^rales qu'il a formul^es d^s
ses premieres reunions, et qui ontdepuis guid^ tous ses travaux. Ges regies
sont les suivantes :
« L'assistance publique est due k ceux qui se trouvent, temporairement
ou d^finitivement, dans Timpossibilit^ physique de pourvoir aux n^cessil^s
de la vie.
« l/assistance publique n'est due qu'^ d^faut d'autre assistance.
« L'assistance publique est d'essence communale. Cest par la commune
que doivent Hre d^sign^s les b^n^flciaires de Tassistance, parce que seule
elle est en situation de les connattre.
u (/organisation de Tassistance doit toujours ^tre telle que la commune
soit fmanci^rement interess^e a la limitation du nombre de ses indigents.
Des recours doivent pouvoir 6tre exerc^s contre sa decision, si cette limi-
tation est abusive.
« L*assistance publique est une OBUvrc de solidarity nationale. Elle doit
s'exerccr, non seulement de la soci^t^ k rindividu, mais de groiipe a
groupe, les communes riches venant au secours des communes panvres,
les d^partements riches venant au secours des di&partements pauvres. La
proportionnalit6,et non la fixity, doit en consequence Htb la r^gle des sub-
ventions soit des d^partements, soit de TEtat.
« Le Conseil sup6rieur ^met le vobu que ces principes, qui sont ceux
adopt^s k Tunanimitd par le Congr^s international de 1889, continuent k
inspirer la direction que dooue le gouvernement k Tadministration de
TAssistance publique, soit dans la preparation de lois nouvelles, soit dans
Tapplication des lois existantes. »
Cette declaration a ete approuvee par acclamation.
VcBu. — MM. Hebrard de Villeneuve et Paul Strauss ont ensuite pre-
sente le vodu suivant:
« Le Conseil superieur emet le vceu que les femmes soient appeiees k
faire parti e des commissions chargees de Tadministration des etablisse-
ments publics de bienfaisance. »
Ce VOBU a ete approuve.
Le samedi 19 mars, k midi, la session du Conseil superieur a ete
close.
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VARIETES
Societe ft*ancaise des Habitations d. bon march^.
ASSEMBLEE GEN^RALE DU 6 MARS 1898
La neuvi^me Assembl^e g6n6rale de la SocUt^ frangaise des Habi-
tations d bon marchi a eu lieu le 6 mars dans la grande salle du Mus4e
social, sous la pr^sidence de M. le docteur Brouardel, membre de
rinstitul, assist6 de M. le commandant Meaux Saint-Marc, reprdsen-
tant M. le President de la R^publique; Jules Siegfried, president
d'honneur de la Soci6t6; Georges Picot, pr6sident; Cheysson, vice-
president; Fleury-Ravarin, secretaire general; Charles Robert,
tr6sorier.
A 2 heures et demie, M. Brouardel, president, ouvre la stance en
donnant la parole k M. Georges Picot, qui s'exprime ainsi :
M. Georges Picot. — Mesdames, Messieurs, nous tenons aujourd'hui la
neuvi^me assembl^e g^n^rale de la Soci6t6 francaisedes Habitations &bon
march^.
L'oBuvre que nous poursuivons, vous le savez, est considerable. Vous
vous y Hes associ^s depuis le debut. M. le Secretaire general vous donnera
tout^ rbeure Texpose detaille de tout ce qui a ete accompli dans le cou-
rant de Tannee 1897.
Le danger des Societes qui reussissent — et assureoient la nAtre est de
celles-li — c'est de subir au bout d'un certain temps une sorte d'engour-
dissement, de perdre le but de raction, de trouver roeuvre accomplie suf-
iisante, de se regarder elles-memes et de se complaire dans les resultats
obtenus.
Nous n'avons pas cesse, Mesdames et Messieurs, d'exciter k TefTort et,
pour y exciter plus siirement, nous n'avons pas cesse de considererlemal
qui est au point de depart mdme de notre action. Nous avons estime que
les enquetes etaient le seul moyen d'apporter k notre Societe ce ferment
d'initiative que cause k d'honuetes gens la vue d'un mal. {Applau-
dissements.)
Nous avons envoye de tous c6tes pour savoir quelle etait la situation
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
te du logement des families ouvri^res en France et nous nous sommes
ch^s avec tons ceux qui ont commence ces enqudtes.
ans le bulletin de la Soci6t6, nous avons donn6 h. ce sujet les indica-
I les plus precises. Nous avons eu la satisfaction demi^rement d'avoir
enqu^te faite dans TOise, faite par M. Daudran et qai est assur^ment
lod^le d'enqu^le rurale.
ous avons suscit^, il y a quelque temps, le grand travail auquei les
surs Mangenot et du Mesnil ont attach^ leur nom. lis ont visits,
un arrondissement de Paris, toutes les maisons d'un certain tlot, et
it constats les choses les plus lamentables, au point de vue du loge-
t de ceux qui habitaient ces maisons. lis ont constats surtout que, sur
aisons, il y avait 31 cabarets. lis sont entr6s dans ces demeures, ils
m les vices de rhabitalion et, apr^s avoir not6 les causes d'insalubrit^
rieures et int^rieures, ils ont r^dig6 le plus lumineux rapport, indi-
it le nombre des enfants, les conditions morales k cdt^ des conditions
Tielles et nous laissanti'impression que donnent des hommes de bien,
^oeurs g^n^reux qui constatent un des maux les plus sensibles de I'hu-
it^ de notre temps.
8 ont fait des descriptions qui resteront ei, dans un mot que Tun
c a 6crit k la Qn de son rapport, ils ont donn^la formule qu'aucun de
ne doit perdre de vue. U dit que, dans le temps ou nous vivons, ii
ssait de se p4n^trer de la pens^e et d'en p^n^trer les autres, que les
X dont souffre la classe n^cessitense ne sont pas irr^m^diables.
laiuiissements.)
e mot doit rester. II indique notre devoir; il montre la voie dans la-
le nous devons marcher. La Soci6t4 francaise des Habitations k bon
;h^ a pr^is6ment ^t^ cr^^e pour chercher ie remade k ces maux.
le cherche dans toutes les voies, sous la forme de Soci^t^s dont elle
ite la creation, sous la forme d'initiatives Individ uelles qu'elle provoque,
la forme de moyens de toutes sortes qu'elle apporte aux hommes de
le Tolont^ pour r^aliser leurs efforts.
lie fait im primer des statuts, des plans, des devis. Elle montre, sous
3s les formes, ce qui pent Hre r^alis6.
II le fait plus. Elle s'est apergue, d^s le d^but, qu'une des plus grosses
suites en presence desquelles se trouvaient le constructenr, les Soci^t^s
3nstruction, c'6tait le d^faut de capitaux ; il ^tait done absolument n^-
lire, pour que I'^diiication de maisons salubres etit lieu, de disposer
ipitaux importants. Ces capitaux, le jour oh on leur fait appel, sont
3s^s k croire que Toeuvre k laquelle on les convie est sterile. Pen
tre eux, nous le savons par experience, sont disposes k faire les frais
e tentative qui peut avorter. Ils ne croient pas aux afOrmatioDS que
! leur apportons sur la certitude, si une Soci^t^ est bien g^r^c, d'un
nu correspondant au capital.
t alors les Soci^t^s les plus int^ressantes risquent, d^s le d^but, de voir
ter leurs efforts.
ous avons cette grande experience de la Society de Lyon, une des
grandes qui existent en France et qui, faute de capitaux au point de
rt, aurait risque*, de p^ricliter. Elle a ^t^ trouver la Gaisse d'^pargne
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VARltTfeS. 875
de Lyon qui a compris de quelle importance dlait une telle initiatiFe, et
nne sommede 500000 francs a ^t^ mise k la disposition des fondatenrs.
Gette somme est devenne le noyan, )e point de depart d'un effort qai se
cbifTre aujoard'hui par 6, 7 et8 millions d'op^rations. La Soei6t6 de Lyon
a teno k honneur de rendre les fonds prdt^s, d^montrant ainsi k tons que
ce qu'on doit attendre des Caisses d'^pargne, ce n'est pas, k coup st^r,
d'aventurer leurs capitaux qui sent sacrds, mais c'est d'apporter TefTort
initial, ce qu'un philosophe a appel^ comme la mise en mouvement du
syst^me plan^taire tont entier, cette chiqnenande qui fait tout marcher.
^Applattdi8sements,)
Voili un acte qui sera imit^ par d'autres et le monven>ent se prodnira.
La circolaire du 10 mars 1897 a tenu aux caisses d'^pargne un langage
que le ministre du commerce avait d^ja fait connaltre, langage d'initiative,
d'ddncation. Le mouvement est d^j4 assez important pour m^riter I'atten-
tion et la reconnaissance de la socidt^.
D'autres efTorts sont faits. Ge n'est peut-^trepas le moment d'en parler;
mais le Gonseil se pr^occupe toujonrs de cette question, et il esp^re trou-
Ter d'ici peu d'autres ressources qui d^termineront un nouvei effort.
Voil^ ToBuvre pers^v6rante k laqoeUe nous nous livrons et qui, nous y
eomptons, arrivera k prodnire, dans la transformation de rouTrier en
France, des r^snltats T^ritablement importants.
La Soci^t6 fran9aise des habitations k bon march^ est ainsi Tinterm^-
diaire enlre les besoins de Touvrier, besoins que yous connaissez mais que
vousn'estimez, qu'aucun de nous, peuMtre, n'estime pas assez. II n'est pas
un atelier, pas un groupe d'ouvriers, pas un point oh nous ne soyons en
contact avec des ouvriers pour arriver k 6largir leur habitation, pour la
rendre plus saine. G'est ce besoin que nous constatons etdont nous sommes
les interm^diaires.
La Soci^t^ fran^ise est en m6me temps le conseil de Soci^t^s privies.
Puis il y a le Gonseil sup^rieur des habitations k bon marchS dont nous
sommes heureux de saluer ici le president, qui nous permet de connaltre
les enqu6tes qui se font sous Timpulsion du Gonseil sup^rieur, enqu^tes
qui, pour Saint-Quenlin, Marennes et pour les Ardennes, constituent des
investigations pr^cieuses.
Nous avons des relations perp6tuelles avec ces divers ^I6ments. Nous
nous souvenons aussi des inspirations qui out guid^ les premiers pas de
notre Soci6t^, la maui&re si 61ev6e, le langage si Eloquent avec lesquels, k
cette mdme place, pendant si longtemps, Jules Simon venait nous parler
de ToBuvre k laquelle il s'6tait d6vou6.
Geux qui Tout connu savent depuis quelle ^poque il s'^tait attach^ k
cette oBUvre, parce qu'il se souvenait de toutes les preoccupations qui
Tavaient assailli [quand il avait commence k s'occuper des conditions de
Inhabitation ouvri^re en France {Vifs applaudissements,)
Pendant trente anuses, il s'est d^vou^ tout entier k cette oeuvre. Jus-
qa'k sa mort il s'est pr6occup6 des conditions de Thabitation avec toute la
conviction qu'il apportait dans la defense de la famille ouvri^re. II nMtait
pas le seul. Tons ceux qui se sont attaches k la solution du probl^me com-
prennent la port6e de cette ceuvre. flier encore une grande initiative se
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876 REVUE PHILANTHROPIQUE.
produisait dans le sein de TAcad^mie des sciences. Un savant qui honore
notre temps, faisait une proposition f^conde en r^sultats. M. le D' Brouar-
del, saisi des consequences de Tinsalubrit^ des logements, a propose la
nomination d'une Commission qui sera i'origine d*une action s^rieuse.
Nous lui avons manifest6 notre reconnaissance en lui demandant d'ajoater
a ce que nous lui devons d^j^, en venant ici pr^sider cette stance. 11 y a
consent!, et je Ten remercie, (Applaudisaements.)
La plus haute personnalit^ de France, qui suit nos travaux avec ie plus
vif int6rdt, a bien voulu d^l^guer, pour le repr^senter ici, M. le comman-
dant Meaux Saint-Marc, que nous remercions profond^ment d'assisler k
notre Assembl^e. Nous le prions de reporter k M. F61ix Faure Texpression
de noire profonde reconnaissance et I'^cho des efforts auxquels nous nous
livrons. (Applatuiissements unanimes.)
Ainsi toutes les forces de ce pays, tons ceux qui yeulent travailler k
ram^lioration de la condition des ouvriers et au d^yelopperaent de la fa-
mille, sont r^unis dans notre Society, faisant des efforts communs et les
accomplissant avec un sentiment absolument d^sint^ress^.
Aussi ai-je Fesp^rance que sur tons les points du territoire, en pen
d'annees Teffort sera si general, qu'on aura le sentiment que cette Society
est profond^ment impr^gn^e des sentiments de solidarity et d'amour mu-
tuel, sans lesquels il n'y a pas d'ceuvre qui puisse prosp6rer. {Vive adhesion
et applaudissements unanimes,)
M. le President donne ensuite la parole k M. Fleury-Ravarin, se-
cretaire g^n^ral.
Mbsdames et Messkurs,
Chaque ann^e, votre secretaire g^n^ral est appel6 k effeuiller, au d^-
but de son rapport, le n^crologe de Tann^e pr^cedente. L'an dernier, nous
saiuions ensemble la m^moire de Jules Simon, Tun de nos presidents
d'honneur, et celle du docteur Jules Rochard.
Cette fois encore, mallieureusement, les circonstances ne nous out pas
affranchi de cette pieuse et trisle coutume.
La Societe fran^aise des habitations k bon marche a ete en effet cruel-
lement eprouv^e par la mort d'Henry Bossut, ancien president du Tribunal
de commerce de Roubaix, membre de la Society d'^conomie sociale, et
par la mort deM. Alban Chaix, president honoraire du conseil d'admini-
stration de Timprinierie Chaix.
Appartenant a Tune de ces vieilles et nombrenses families qui font
Taristocratie bourgeoise du Nord, Henry Bossut etait le president de la
Societe roubaisienne des habitations k bon marche, dont il avait ete le
fondateur. Quoique n^gociant, c*est-i-dire quoique pen en conlact avec
Touvrier, il s'est toujours attache a I'etude des questions sociales, toujours
il s'est preoccupe des moyens d*ameiiorer le sort de la classe ouvrifere.
Homme d'aclion, imbu des doctrines de Le Play, il imprima, dfes le debut,
k la Societe qu*il avait fondee, une activite telle qu'en 1895, nous lui decer-
nions une medaille en argent en reconnaissance de son devouement 4
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VARlfeTfiS. 877
ToBUvre en vue de laquelle nous nous sonimes group6s. Heniy Bossut fut
un philanthrope et un homme de bien ; la mort Ta empdch6 d'agrandir en-
core son r61e, mais son nom demeurera dans nos annates comme celui de
Tun des propagateurs les plus actifs et les plus d6sint^ress4s de cette
id6e de reI6vement social par la reconstitulion de la faraille, k laquelle il
a consacr^ jusqu'^ ses derniers jours ses plus ardenls efforts. Saluons done
recpectueusement la m^moire du pr^cieux et respects collaborateur que
nous avons perdu !
Ge devoir accompli, 11 nous faut dresser le bilan de I'ann^e 1897, t^che
dont vous Youdrez bienexcuser Tapparente ingratitude.
Les travaux de la Society, dans le cours de Tann^e qui vient de
s'^couler, ont dt6 plus nombreux encore que ceux de Tann^e pr4c6-
dente.
Dans sa stance du 7 ayril, le Conseil a procM^ k la nomination des
membres de son Bureau, dont les pouvoirs ont expire lors de la reunion
de rAssembl6e g^n^rale du 21 mars. Tons les membres sortants ont H6
r661us, et votre secretaire g^n^ral estheureux de se faire aujourd'hui
Tinterprfete des remerciements de tons les membres du Bureau pour cette
nouvelle marque de confiance que nous a donn^e le Gonseil.
Les stances mensuelles, r6guli6rement tenues, ont eu leur ordre du
jour irhs charge. De nombreuses et int^ressantes communications y ont
6te faites, notamment par notre Eminent president, M. Georges Picot, par
MM. Ghallamel, Gheysson, Gharles Lucas, Rostand, et Jules Siegfried, pre-
sident d'honneur.
En outre, le Gonseil a 6i6 appeie k examiner les projets de statuts de
plusieurs Soci^t^s, dont quelques-unes ont vu le jour en 1897, les autres
devant se constituerdans le courant de la presente ann^e. Tous ces projets
de soci6t4s anonymes ou cooperatives ne sont gu^re, pour la plupart, que
la reproduction et Tadaptation des statuts modules que nous avons eia-
bor^s ensemble. Permettez-nous de profiter de cette circonstance pour
vous dire combien la Society frangaise des habitations k bon marche a^te
satisfake de constater I'utilite incontestable des statuts modules qu'elle a
arretes et la haute valeur que ce^ documents ontacquise aupr^s du public
special qui les consulte.
Les modMes primitivement arretes out et6 cependant remanies; cette
annee, plusieurs seances ont ete consacrees kun examen attentif de leur
texte, dans le but de leur donner plus de rigueur au point de vue juri-
dique, et nous croyons, sans fausse pretention, que notre nouveau mo-
dule de statuts de societes cooperatives est maintenant a I'abri de toute
critique serieuse.
La constatation des services rendus par nos modules dfe statuts nous a
encourages k eiaborer egalement deux nouveaux modules dont le besoin
s'etait fait sentir : modele de bail avec promesse de vente, et raodMe du
cahier des charges.
Ces deux modules ont 6te etudies, discutes et arretes par notre comite
de consultations juridiques, et le conseil les a revetus de son approba-
tion. II est k prevoir que ces deux documents seront appr6cies par les
societes locales au mfime degre que nos naodfeles de statuts.
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878 REVUE PHILANTUROPIQUE.
lod^ndamment da cette CBUvre d 'Elaboration juridique en commun,
nous avons entendu, dans nos staices, la Jecture de rapports nombreux
sur des questions di verses. Gitons» parmi les plus int^ressants, ceux de
M. Gacheux sur les soci^tes d 'habitations 4 bon marchE en Aileoiagne.
D'autre part, des etudes ont €16 commenc^es sur le conconrs que pen-
vent donner k nos soci^t^s de construction ou de credit d'habitations k bon
marchE les caisses d'administrations pubiiques et les grands Etablissements
financiers de credit. Mais aucune solution definitive n'a pa encore dtre ar-
rdt^e, cette question est en eCTet grossede difQcult^s et de consequences,
et elle soul^ve de nombeuses questions connexes qui int^ressent aa plus
baut point le d^veloppement et m^me la creation de soci^t^s de aon-
struction. Aussi votre Conseil n'a-t-il pas voulu se prononcer sar ce gros
probl^me,avant d'avoir status sur ces diverses questions secondaires qui
gravitent autour de lui, et dont la solution constituera un Element impor-
tant de decision.
Void pour les efforts eollectifs de notre Soci^tE.
Passons aux r^sultats de nos efforts iudividuels.
Les membres du Conseil n'ont pas cessE de remplir avec le d^vouement
et le z^le que nous leur connaissons, et dont ils nous permettront de
rendre ici ud public homroagey leur rdle de propagateurs des principes
et des vues de la Soci^te frao^aise des habitations ci bon marchE.
Des allocations, des discours ont 6i€ prononcEs par vos orateurs habi-
tuels, MM. Georges Picot, Cheysson, Siegfried. Des conferences ont ^t^
faites dans plusieurs reunions, dont quelques-unes avaient un caract^re
offlciel. Nous citerons ies conferences de M. Georges Picot k Versailles;
de M. Siegfried k Fonlainebleau et^ Villeneuve-Saint-Georges ; de M. CheyssoD
k Plaisance et k Pontoise; de M. Challamel k la Garenne-Colombes. Notons,
en passant, que chacune de ces conferences a marque le point de depart
de I'organisation de societes locales, dont la constitution definitive appar-
tiendra k I'annee 1898. Deux d'entre elles sont aujourd'hui fond6es: « le
Foyer garennois » et « le Foyer du travailleur ».
Ginq inaugurations ont ete faites en 1897 sous le patronage de notre
Societe :
A la Rochelle, celle du groupe de Tasdon de la Societe Rochelaise des
Habitations k bon marche;
A Paris, Tinauguration de la quatrieme maison des Habitations econo-
miques, 19, rue d'Haulpoul.
A Roubaix, celle du groupe du Blanc Seau de la Ruche Roubaisienne ;
A Rordeaux, celie du groupe Georges Picot de la Societe Rordelaise des
Habitations k bon marche;
Enfin, k Athis, Tinauguration des nouvelles maisons du cottage d'Athis.
Au Gongres international des habitations k bon marche de Bruxelles,
aupr^s duquel M. Cheysson a ete deiegue par la Sodete et par le ministre
des travaux publics, et M. Jules Challamel par le ministre de la justice, la
Societe francaise a participe d'une maniere tres active, tant par ses rap-
ports ou communications, que par les discussions soutenues par ses
membres, k I'etude des questions qui nous interessent. Rappelons en pas-
sant la creation, par ce Gongres, d'unnouvel organe, sous le nom de Comite
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VARI^TfiS. 879
international des habitations k bon march6, dont Torganisation est en ce
moment Tobjet des soins les plus ^clair6s du Comity, qui a pris Tinitiative
de ce congr^s. Ce nouvel organe nous parait appel^ k jouer, au point de
vue international, le r6ie que notre socl^td remplit en France.
Au Gongr^s d'6conomie sociale, M. Jules Challarael a 6tudi^ les dispo-
sitions contenues dans la proposition de loi d^pos^e par M. Siegfried alors
qu'il si^geait encore k la Ghambre, tendant k favoriser la constitution et le
maintien de la petite propri^t^ rurale. Le but de M. Siegfried, en pr^sentant
cette proposition de loi, a ^t6 de faci liter aux ouvriers agricoles Tacc^s de
la propri6t^, et de les fixer ainsi, d*ane fa^on stable, dans les campagnes.
Au Congr^s de la propri6t6 b4tie — dont M. Georges Picot 6lait presi-
dent d'honneur — une importante place a ^t^ r^serv^e aux questions d'ha-
bitations k bon march^.
Enfin, I'Exposition interna tionale de Bruxelles a foumi encore une
occasion k notre Soci^t^ de faire connaltre les bienfaits dont Thonneur lui
revient, et, parmi les recompenses d6cernees par le jury de cette exposi-
tion, nous sommes heureux de relever les recompenses concernant les
habitations k bon marche :
1» EXP08ANTS
Dipldmes de Grand Prix.
Society frangaise des habitations k bon march^, k Paris.
Society Philanthropique de Paris.
Dipldmes d^honneur.
Cacheux, Emile^ k Paris.
Gaisse d'Epargne et de Pr^voyance de Marseille, k Marseille.
Society bordelaise des habitations k bon march6, k Bordeaux.
Societe des habitations ouvri^res de Passy-Auteuil, k Paris.
Dipldmes de m^daille d'or,
Guyon, Georges, k Saint-Maurice.
La Ruche, Society d'habitations k bon march^, k Saint-Denis.
Dipldme de m^daille d'argent,
Verberckmoes, Gustave, k Paris.
2« C0LLAB0RATEUR8
Dipldme d'honneur,
Dubois Alfred, Society frauQaise des habitations k bon march^.
Dipldmes de midaille d*or.
eenard, Soci6t6 des habitations ouvri^res de Passy-Auteuil.
Cazalet, Charles, Soci6te bordelaise des habitations k bon march^.
Trial, Alphonse, Society nlmoise des habitations k bon march^.
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S80 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Dipldmes de medaille d'argent,
Mayer Samuel, Soci^t^ des habitations ouvriferes de Passy-Auleail.
Souillart, Soci^t6 des habitations ouvriferes de Passy-Auteuil.
Les consultations au si^ge social ont 6t^ aussi nombreuses que les
ann^es pr^c^dentes, et la correspondance, toujours aussi active, a port^
principalement sur Torganisation de Soci^t^s, la demande de plans et de
devis de maisons. 11 est k noter cependant que de cette ann^e date une
nouvelle s^rie de demandes ^manant directement des Comit^s locaux
d'habitations k bon march6 et nous constatons avec plaisir que notre
Soci4t6 donne un concours, indirect sans doute, mais incontestablement
efficace, k cette institution de la loi du 30 novembre 1894.
La Soci^t^ a public dans son bulletin de 1897 la premiere partie, due
au docteur Mangenot, de la belle enqudte sur la Pointe-d'Ivry, qui n'a pas
demands moins de quatre ann^es pour dtre men6e k bonne (in. La seconde
partie, due au docteur du Mesnil, est en ce moment sous presse et sera
ins6r6e dans le plus prochain nuraero du bulletin.
Nos correspondants k T^tranger nous ont constamment tenus au cou-
rant des travaux et des faits susceptibles de nous int^resser; qu'ils reroi-
vent ici tons nos renierciements.
Nous ne signalerons rapidement k votre attention que la belle ^tude de
M. Paul Langer, sur Tusine Krupp, ses habitations ouvri^res et ses insti-
tutions de pr^voyance, pour laquelle nous avons nomm^ M. Langer, membre
correspondant.
Nos relations avec T^tranger, notamment, avec TAllemagne, la Suisse,
ritalie et la Russie, s'^tendent de plus en plus. Nous sommes heureuz de
relever la creation k Nicolateff de la Soci^t^ d'am^lioration du logement,
dont le fondateur et Torgauisateur est M. Henri Guygnard, un de nos so-
ci^taires les plus d^vou^s k ToBUvre des habitations k bon raarch^.
Disons encore que, cette ann6e, pour la premiere fois, des demandes
de documents, suivies d'un ^change de correspondance, nous ont ^te
adress^es par des personnalit^s influentes du Br^sil et du Portugal. Si les
projets k T^tude se r^alisent, Toeuvre des habitations k bon march^ aura
commence son essor dans ces deux pays, et notre Society en suivra la
marche avec une grande attention.
11 nous reste maintenant k dire quelques mots des Soci^t^s en cours de
d6veloppement.
Toutes les Soci^t^s d'habitations k bon march^,dont le nombre depasse
aujourd'hui 50, poursuivent avec perseverance leur d^veloppement. Citons
parmicelles dont I'extension prise en 1897 a ^i€ le plus notable: le Cot-
tage d'Athis, le Coin du feu de Saint-Denis, la cit6 Gabrielte, les Societes
beauvoisine, rochelaise, bordelaise des habitations k bon march^, la Soci^l^
des habitations 4conomiques de Saint-Denis; la Soci6t6 des logemenls
^conomiques et d*alimentation de Lyon, dontle capital a et^ port^ k 4 mil-
lions; la Ruche roubaisienne qui a cr^^ un comity d'obligataires.
Nous devons ici appeler toute votre attention sur un fait administratit
d'une haute importance pour tout ce qui louche k notre CEUvre. Par une
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VARlfeTES. 88t
circulaire en date du 10 mars 1897, M. le ministre du commerce a invito
les directeurs des Caisses d'6pargne ordinaires k entrer dans la nouveile voie
que leur ouvre rarticle 10 de la loi da 20 juillet 1895. A la suite de cette
invitation gouvernementale, un certain nombre de Caisses d*^pargne ont
demand^ et obtenu des modiflcations de leurs statuts les autorisant k em-
ployer la totality du revenu de leur fortune personnelle et ie cinquiSme du
capital de cette fortune en prdts aux Soci^l^s de constructions ou de credit
d'habitations k bon march^. Nous vous signalerons particuli^rement les
pr^ts consentis par la Caisse des Bouches-du-Rh6ne et le prdt de 60 000
francs consenti par la Caisse d'6pargne de Paris k la Soci^t^ cooperative
« le Coin du feu », de Saint-Denis.
A propos du concours des Caisses d'epargne k notre oeuvre, une ques-
tion du plus grand int^r^t a ^t^ soumise dl'examen de votre Conseil par la
Caisse d'^pargne de Vire. II s'a^issait de savoir si une caisse pouvait, aux
termes de Tarticle 10 de la loi du 20 juillet <895, construire et administrer
elle-m^me des maisons k bon march^, en supprimant tout interm^diaire.
Devant le texte un peu obscur de cet article, le Conseil a cm devoir en
r^f^rer k la haute competence du Conseil sup^rieur des Habitations k bon
marche, et son Comity permanent, apr^s une ^tude tr^s approtoiidie de la
question, a conclu affirmativement, disant que les Caisses d*6pargne peu-
ventagir directement, et, sans aucun interm^diaire, acqu6rir et construire
elles-m^mes des maisons k bon march^. Cette decision du Comity perma-
nent a d'ailleurs ^t^ ^clair^e et justifi^e par des arguments juridiques des
plus s^rieuz developp^s devant lui par M. Eugene Rostand.
Nous pouvons vous annoncer aujourd'hui que les Caisses d'^pargne de
Vire, de Rarabouillet et de Chartres sont entries dans cette voie oh d*au-
tres, nous Tesp^rons, ne tarderont pas k les suivre.
Le Conseil sup^rieur des Habitations a bon march6 s'est r^uni le 2 avril
1897 et, dans un rapport tr6s precis, adress6 k M. le President de la R^pu-
biiquc, M. Boucher, ministre du commerce, a r^sumd lous les travaux de
1896, que notre precedent rapport vous a d^ji fait counallre. Dans cette
stance du 2 avril, quatre rapports ont ete preseiit^s au nomdu Comity per-
manent: par M. Georges Picot,sur Tenqufite relative aux Habitations d bon
marche ; par M. Cheysson, sur les demandes fo rmul^es par les Soci^tes d'habi -
tations d bon march^ pour obtenir Tapprobation de leurs statuts; par
M. Challamel, sur les travaux des Comit^s d'habitations k bon marche
pendant Fannie 1896; enfin, par M. Jules Siegfried, sur les pr^ts faits aux
Societ^s de construction d'habitations k bon march 6.
Depuis cette ^pogue, le Conseil sup^rieur n'ayant pas eu de nouveile
reunion, nous ne pouvons que vous ciler les noms des auteurs des rapports
qui seront pr^sent^s k la prochaine stance au nom du Comity permanent :
MM. Georges Picot, Cheysson, Challamel et Siegfried. Rendonsici hommage
au labeur incessant qu'a ete celui du Comity permanent pendant toute
Tann^e 1897.
Enflii, pour ne rien oublier, rappelons que les Comit^s d'habitations k
bon marche ont si^gS en grand nombre pendant cette m6me ann^e, et
qu'au Comite de la Seine, des questions d'habitations collectives ont 616
discut^es par des hommes de haute competence, MM. Felix Mangini et
RBVnS PHILANTHROPIQUE. — II. 56
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882 REVUE PH1LANTHR0PIQUE.
Bouvard, tandis que le Comity de Seine-et-Oise organisait des reunions k
Pontoise, k Versailles et k Villeneuve-Saint-Georges, avec le concours de
nos plus ^minents conf6renciers. Nous sommes heureux de les en remercier
ici, car leur propagande a port^ d^jk des fruits et elle nous en promet
d'autres encore; grAce k eux, de nouveaux comit^s sont, en ce moment, en
voie d*organisation.
Nous voici arrives an bout de Texamen r^trospectif que nous devions
faire de ToBuvre accomplie en 1897 par notre Soci6t^. En presence des iaits
que nous avons eu Thonneur de vous rappeler, n'avons-nous pas raison
de dire cpie cette ann^e 1897 a marqu^ un nouveau progr^s dans le d6ve-
loppement des id^es qui nous sont chores?
II faut de longs efTorls, une perseverance qui ne se rebute jamais, pour
vaincre Tinerlie, Tignorance, r^goisme, les prejuges du monde. Les id^es
les meilleures, avant de circuler dans Tesprit populaire, doivent subir un
longue elaboration; Teducation des masses se fait avec une lenteur qui
parfois irapatiente, enerve les esprils d*eiite. Pourtant, ne nous d^coura-
geons done pas. Messieurs, la grandeur des rdsultats obtenus montre que
nous n'avons pas frappe k faux et que nous poursuivons la realisation d'une
idee juste. Continuous done k travailler ensemble, unissons nos forces pour
eclairer Topinion sur Tinlensite du mal que nous voulons guerir; faire
comprendre k tons que nous apportons, non, certes, une panacee pour guerir
tons les maux, mais un remede efficace, consacre par Texperience, capable
d'apporter aux travailleurs un bien que la plupart ne connaissent pas au-
jourd'hui : la possession d'un logis hygi6nique et moral!
Apr^s les applaudissements qui couvrent la fin de ce com pie
rendu, la parole est donn6e k M. Charles Robert, tr6sorier.
Messieurs,
J'ai Thonneur de vous presenter, au nom du Conseil d'administration,
les comptes de 1897 et le budget de Texercice 1898.
Nos recettes de 1897 comprennent les articles suivants :
<r. c.
Cotisations annuelles de 311 membres titulaires 6270 •»
Coupons d'obligations en portefeuille et intdrets du compie
courant 1292 10
Arrerages de fends places provenant de diverses souscrip-
tions et lib6ralites 1 815 »
A rrerages de la rente provenant du legs Giffard 3000 »
Abonnements et recettes diverses 701 •
Ensemble 13078 10
Voici maintenant Tenumeration de nos depenses :
Loyer du si^ge social 1 000 »
Frais de bureau et indemoit^s du personnel • . 5275 35
Frais d'irapression du Bulletin 5158 85
Frais de gravure de medailles 493 80
Souscription au monument Jules Simon .... 500
Total 12428 »
Soit un excedent de recettes 650 10
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VARltTfiS. 883
Notre actif social, au 31 d^cembre 1897, s'el^ve h. une somme totale de
100892 fr. 01 formant, confo rm^ment k nos statuts, une reserve indispo-
nible. Get actif social ne comprend pas le capital correspondanl aux arr^-
rages du legs Giffard servis k notre Soci6t^.
Voici mainteuant notre budget de Tann^e 1898 :
ACTIF SOCIAL
Budget de 1898.
RECETTES
fr. c.
Cotisations annuelles des membres tltulaires ordinaires. . . 6150 »
Coupons de 84 obligations Nord 1 209 60
Revenu de la rente 3 0/0 amortissable 1815 »
Arr6rages du legs Giffard . 3000 •»
Souscriptions du Minist^re de I'lnstruction publique et du
Comity de salubrity de la Seine. 660 »>
Ensemble des recettes 12834 60
DEFENSES
Loyer et contributions 1000 »
Frais de bureau et indemnit^s du personnel . . 4700 »
Bulletin et publications diverses 5000 »
Subventions, expositions et irapr6vu 2100 »
Ensemble des d^penses. ... 12800 ^
Soit un exc6dent de ressources de 34 60
TABLEAU 1
Situation flnanci^re au 31 d6cembre 1897.
fr. c.
Espfeces en oaisse 1182 26
En corapte au Comptoir national d'Escompte 7 843 75
En valeurs : 84 obligations du Chemin de fer du Nord et
1815 francs de rente 3 0/0 amortissable 95746 90
En arr6rages de rente et coupons ft encaisser 1354 80
En cotisations arri6r6ea h recouvrer 200 »
Ensemble 106327 71
II convient d*en retrancher :
Pour autant dt h divers foumisseurs, le montant de leurs
factures 5375 70
Cotisations de 1898 revues d'avance 60 »>
5435 70
Reste repr^sentant le montant de I'actif social . ..... 10089201'
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884
REVUE PHILANTHROPIQUE.
TABLEAU II
1<^ Fixation de la Reserve statutaire.
fr. c.
La reserve indisponible s'^Ievait au 31 d^cembre i896 &. . . 61683 10
Elle s'augmente, pour 1897, de la cotisation vers6e par un
membre titulaire ^ vie, soit 300 »
Total de la reserve statutaire au 31 d^cembre 1897 .
61983 10
20 Explication da Capital disponible.
Le solde ^ reporter de I'exercice prec6dent
6tait de 38258 81
Auxquels vient s'ajouter Texc^dent des res-
sources annue lies 650 10
Total du capital disponible
Ensemble 6geA h Tactif social ressorti ci-dessus.
38908 91
100892 01
D'apr^s un usage constant, suivi depuis rorigine de noire Soci^t^, le
tr^sorier, aprds avoir lu I'expose de la situation A nanci^re, demanded tous
de faire une propagaude active pour amener a la Socidt^ de nouveaux
adh^renls.
La n6cessit6 d*augmenter ainsi en m^me temps nos recettes el notre
influence est d'autant plus ^vidente aujourd'hui, qu'un grand ^lan se
man! Teste partout en faveur du progr^s social. Dans un importaut discours-
programme, prononc^ 11 y a quelques jours, devant le Gomite national r6-
pnblicain du Commerce el de Tlnduslrie, M. Paul Deschanel a parl^ du
devoir qui s'irapose k tous de d6velopper la cooperation et de permetlre
aux Guisses d'^pargne de mieuz utiliser, dans rint^r^t des classes labo-
rieuses, les fonds dont elles doivent op^rer le placement. Ces deux id^es
s'appliquent i notre oeuvre. Ne s'agit-il pas en effet pour nous de multiplier
les Sociel^s de construction de toute nature, notamment les cooperations
et de procurer a touies ces Sociei^s des avances? J*ajoute que la construc-
tion des habitations salubres et k bon march^ sera bientdt rendue plus
facile par la creation procbaine d'une instiiution speciale de credit qui sera
fond6e grdce k Tinitiative toujours en ^veil de notre president d'honneur,
M. Jules Siegfried.
Nous avons le droit d'esp^rer que, dans de telles circonstances, si favo-
rables k nos communs etforts, tous les amis du progr^s voudront aider et
soulenir la Society, reconnue & juste titre d'utilite publique, qui a pris la
t^te de ce beau mouvement.
Les comptes de Texercice 1897 et le projet de budget de rann^e 1898
sont approuv^s.
Puis TAssembiee vole a Tunanimite la reelection des membres soriants
du Gonseil d'administration : MM. Blech, Bourdeix, Gheyssou, Fleury-Ra-
varin, Guillotin, Ledoux, Charles Lucas et Treiat.
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VARltTfeS. 885
Enfln, M. Georges Picot proclame les noms des collaborateurs auxquels
\sl SociM des Habitations dbon marchi d^ceme des m^dailles en recon-
naissance des services rendus k i'oeuvre des Habitations k bon marcb^.
M^dailUs d'argent,
MM, le D' du Mesnil, le D' Mangenot, G. Raudran.
M^daille de bronze.
M. £mile Henne, comptable de la Society des Habitations ^conomiques de
Saint-Denis.
De chaleureuz applaudissements saivent la proclamation du nom de
chacun de ces laur^ats, et M. Brouardel prononce ie discours suivant:
Mesdambs, Messieurs,
Mon cher President, en m'appelani a pr^sider cette c6rdmonie, vous
m'avez fait un grand honneur, mats un honneur bien p^rilleux. II sufflra,
pour comprendre le danger auquel vous m'avez expose, d'^voquer le sou-
venir de Jules Simon, qui a si souvent pr6sid^ vos reunions. Je suis sdr
d'etre I'inlerpr^te de tons et surtout des sentiments du president en t^-
moignant nos regrets d'etre pour toujours priv^s de ce concours si pers^v^-
rant et si persuasif. (Trd5 bien! tr^s bien!)
Messieurs, je suis appel^ ici surtout comme hygi^niste, et je remercie
vivement votre president de m'avoir permis de conslater, en consultant les
bulletins de votre Soci^t^, que nous marchons vers le mSme but, quoique
nous soyons partis de points ^loign^s en apparence. Nous, hygi^nistes,
nous avons donn6 k nos revendications une forme diff^rente de celle que
vous avez adoptee, mais, au fond, tout dissentiment avee vous est loin de
notre pens^e. Nous avons pris une attitude un pen r^volulionnaire pour
demander que Ton fit disparaitre les maisons insalubres et que Ton ne
constmistt plus que des maisons salubres, et nous avons paru porter ainsi
atteinte au droit de propria t^. On nous Fa reproch^.
Vous, Messieurs, vous vous fites dit ceci: Si Ton d^truit les maisons
insalubres, ou logera-t-on leurs habitants? II faut bien qu'ils trouvent un
abri. Nous aliens leur construire des maisons salubres.
Vous voyez que si, au d^but, nous paraissions ^tre des r^volutlon-
naires, ce n'est qu'en apparence, puisque nous arrivons au mdme r^sultat
que vous qui ne Tfites pas. (Tris bien! trds bien! )
Les deux OBUvres sont inseparables. Je dois dire tout de suite, pour ras-
surer les personnes qu*inqui6teraient nos vcbux de demolition, que, jusqu'd
present, nous n'avons k notre actif que le succ^s obtenu par le docteur du
Mesnil qui, faisant I'histoire du logement du pauvre k Paris, et citant la
rue Sainte-Marguerite, disait: 11 y a dans cette rue, au u^ 21, une habita-
tion plus malsaine encore que les autres, et si une epid6mie de cholera
delate k Paris, c*est k ce n*» 21 qu'elle commencera.
Messieurs, le docteur du Mesnil s'est tromp^: c'est au (9 que le pre-
mier cas de chol6ra s'est montr^. {Applaudissements et rires,)
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886 REVUE PHILANTHROPIQUE.
En presence de cette prophetie, si malheureusement r^alis^e, un vif
mouvement d'opinion se produisit, od d^molit la me Sainte-Margaerite et
Ton construisit de nouvelles maisons.
II y a aussi en France, certaines casernes accus^es d'6lre des foyers de
dipht^rie et de fi^vre typhoide, et apr^s en avoir condamn^ une k dispa-
rattre, on s'est contente deTassainir. Ge qui fait que les m^decins donnent
une forme plus absolue k leurs revendications, c'est qu'ils voient tous les
jours de pauvres gens, des ouvriers atteints, frapp^s par la maladie et ils
assistent, en peu d'ann^es, k la disparition, parfois, de toute une famille.
J'ai cit^ k TAcad^mie des sciences, dans un travail auquei a fait allu-
sion M. le president, un exemple, h^las! trop souvent r^p^t§.
Un ouvrier a des jenfants. Tant qu«j sa 8ant6 est bonne, la famille vit
dans une certaine aisance. n devient phtisique. Les ressources dn manage
s'^puisent; la femme et les enfants sont contamin6s par le mari. II n'y a
plus de ressources, le p^re va k Thdpital, la m6re Ty suit bientdt et I'Assis-
tance publique prend les enfants, vou^s k la mort ou auz inOrmit^s.
Ce fait se reproduit souvent, et Ton pent chififrer les pertes que subit la
France du fait [de maladies de ce genre. La statistique, bien inf^rieure k
la r^alit^, constate qu'en France il meurt, tous les ans, 150 000 personnes
par la tnberculose (phtisie, tuberculose ra^ning^e, osseuse ou intestinale).
Vous voye/. par ce chiffre qu'on est en presence d'un veritable d^sastre.
Nous sommes profond^ment ^motionn^s par des menaces d*6pid^mie,
par des accidents impr^vus, accidents de cherains de fer, de mines, etc.
Quelque p^nibles qu'ils soient, ils ne font que quelqnes victimes; 10, 15,
20 personnes ont ^t^ frappdes et ont disparu. Nous sommes ^pouvant^s. An
contraire, les accidents auxquels nous sommes habitues, ne produisent
plus d*6motion ; il y a une sorte d'accoutumance.
Rappelez-vous T^motion qui s'est produite en France quand, il y a un
an, on a eu la crainte que la peste ne d^barqu^t k Marseille. On r^clama
et on prit des mesures bien singuliferes, peu importe. Elles correspondaient
k un ^tat de I'opinion. Mais quelle est IMpid^mie qui a jamais fait en
France i 50 000 victimes par an ?
La plus meurtriere des epidemies de cholera, celle de 1854-1855, qui
dura deux ans, n'a caus6 en deux ans que 145 000 d4c6s. Et, je le r^p^te,
la tuberculose en fait annueliement 150000. Elle se d^veloppe dans les lo-
gements insalubres ; c'est \k qu'est son foyer.
On m'a demande parfois: Qu'appelez-vous logement insalnbre? 11 est
difficile de donner une definition precise. Beaucoup de circonstances font
qu'un logement d'abord salubre devient insalnbre. Mais quand toute une
ftimille n'a qu'une chambre pour vivre, dans laquelle se passent tous les
actes de la vie joumali^re, oil le p^re, la m^re, les enfants se trouvent
constamment r6unis, vous apercevez tout de suite les eCTets de cette pro-
miscuity, k tous les points de vue. Voili un logement insalnbre qui de-
viendra vite un foyer de contagion.
Je vous ai montr^ tout k Theure une famille oil la maladie avait com-
mence par atteindre le chef pour frapper ensuite la m6re et les enfants.
La maladie se borne-t-elle 1^? Non. Je veux vous montrer comment ce
petit foyer n^ d'un homme tuberculeux pent s'irradier. Aulour de lui, il y
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VARlfeTtS. 887
a des Yoisins qui vieauent le voir, des enfants qui j orient avec ies siens
dans son logement. lis sont bient6t contamin^s par ie malade. El toute
une maison, tout un groupe de maisons se trouve successivement empoi-
sonD6.
11 en est ainsi dans ies quartiers ouvriers et le ph6nom^ne se prodoit
avec une intensity, une fatalit6 cruelle k constater. II y a des quartiers,
des villescomme Saint-Ouen, par exemple, oii la mortality par la phtisie
est trois ou quatre fois plus grande que dans d'autres quartiers de la ca-
pitale.
G'est affreux 1 II y a dans Ies mauvais quartiers des logements oii Ies lo-
cataires qui se succMent deviennent fatalement tuberculeux. II y a cer-
taines maisons qui sont des foyers d*infection.
Voil^ un 6tat de choses qui nous a obliges k montrer notre radicalisme.
Nous avons demand^ qu'on ne construislt plus de maisons sans en |sou-
mettre d'aljord le plan aux hygi^nistes. On a trouv6 cette proposition un
pen violente. [On rit.)
Elle est pourtant bien legitime. II y a, sur Ies grandes art^res de la ca-
pitale, sur le boulevard Malesherbes, etc., des maisons somptueuses. Yisitez
au cinqui^me, au sixi^me 6tage, Ies logements r^serv^s aux domestiques
et vous serez 6pouvant6s de constater qu*il y a li des gens qui vivent sans
air, sous Ies toits, dans des d^pendances qui se trouvent dans un ^tat de
malpropret^ hideuse.
C'est \k que se forment des foyers d'infection qui, par Ies domestiques,
descendent d'^tage eu ^tage et propagent la phtisie dans tons Ies apparte-
ments. Si bien que si ce n'^tait pas notre devoir, au point de vue de I'in-
i^r^t social, de combattre la terrible maladie, nous devrions au moins le
faire par ^goisme, pour preserver nos enfants et nous-m^mes. En soignant
Ies pauvres gens, on se soigne soi-m^me, on soigne sa Tamille.
Je viens de parler des logements des ouvriers, des domestiques ; je
pourrais citer d'autres exemples si je ne craignais d'allonger cette confe-
rence. {Parlez ! parlez /)
Jetez un coup d'oeil autour de vous. II n'est pas un de vous. Messieurs,
qui n'ait 6U dans un 6tablissement financier, comme il y en a tant h Paris,
ou chez un notaire pour toucher des fonds, ou chez un avou^, ce qui est
quelquefois moins agr^able, pour r^gler une affaire. Vous 6tes entr^s dans
ces bureaux, dans ces Etudes et vous avez constats quelle en ^tait la tem-
perature et quel air on y respiratt. II y a 1& des conditions d' hygiene ^pou-
yantables. A midi quelquefois on y travaille k la lumi^re du gaz. Pas d'air
et pas de lumi^re, et si Ton ^chappe au danger en quittant sa maison, on
le retrouve dau? ces etudes, dans ces bureaux.
Vous disiez tout k I'heure, monsieurle President, que vos efforts ne se limi-
taient pas k rendre salubres Ies maisons, mais que vous vouliez encore et
surtout leur donner de I'air et de la lumi^re, en un mot y apporter la pro-
prete. Le bien que vous faites dans ce sens sera contagieux aussi, croyez-
le bien, comme Test le mal qu'il s'agit de combattre. Quand, dans une
impasse, vous voyez une maison sale, soyez certains que Ies maisons voi-
sines ne sont gu^re propres et que cette maison constitue un foyer d'od
rayonnera la contagion qui atteindra Ies autres maisons.
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888 REVUE PHILANTHROPIQUE.
J'ai montr^ comment la phtisie descend des stages sup^rieurs d'une
maison dans les Stages inf^rieurs ; j'ai montr^ aussi comment, existant
dans un quartier, elle envahit un quarlier voisin. Que se passe-t-il main-
tenant quand des villes populeuses* comme Paris, Lyon, Bordeaux sont
infect^es ? Quelle esl I'action des foyers constitu^s dans ces villes, sur le
reste du pays ?
Nous touchons ici k une des constatations les plus certaines au point de
vue de la propagation de la phtisie. Tout autour de Pans il se fait une
couronne de petites villes, de villages, d'agglom^rations qui deviennent
des foyers secondaires, surtout les centres habitus par les blanchisseuses
qui lavent un linge contamin^. Dans ce derniers centres, la phtisie frappe
les gens dans d'^normes proportions.
Consultez les slatistiques et vous verrez qu'& Saint-Ouen, Aubervilliers,
Gennevilliers, la mortality est plus grande que dans Paris m^me, sur
10 000 habitants de la capitale 54 sont atteints par la phtisie; k Saint-Ouen,
il y en a 81 ; k Gennevilliers, c'est le m^me chiffre.
Vous voyez qu*il y a I& des foyers de contamination qui s'a^lom^rent
autour d'un foyer principal, d'autant plus que cette contamination, ap-
port^e dans des logements d'ouvriers pen sains ou peu spacieux, ne se
borne pas k cette action p6riph^rique.
La premiere pens^e d'un homme qui tombe malade k Paris, c'est de
retourner dans son pays, esp^rant que I'air natal lui rendra la sant^. 11
Emigre done dans une ville du littoral m^diterran^eu r^put^e pour la
gu^rison de sa maladie. Et \k il transporte cette m^me maladie; il cr^e
un foyer secondaire qui fera son oeuvre. Des causes de mortality sont
apport^es k Paris qui les renvoie en province. 11 y a lit un ^change con-
tinu.
Voici ce qui s'est produit dans une ville de Normandie dont je ne veux
pas citer le nom pour ne pas me faire une querelle avec mes compalriotes.
Depuis 1854, dans cette ville de 6 000 4mes, on comptait autrefois, sur le
nombre des d^cSs, cinq k six morts par phtisie. Aujoord'hui les d^c^s par
phtisie s'6l6vent k plus de la moiti^ de la totality de la mortality.
Pourquoi ? A quoi attribuer cet exc^s de mortality par phtisie ? C'est
que notre ville, r6put6e agr^able, esl fr^quent^e par beaucoup de Parisiens,
qui viennent y chercher la saiit^; ils y apportent des germes de contagion.
Le mdme ^change se fait eutre la population civile et I'arm^e; les soldats
reportent dans les regiments les germes infectieux qu'ils ont re^us de la
population civile, et daus leur pays les germes des maladies contract^es k
rhdpital.
11 y a \k, vous le voyez, un ^change incessant, une solidarity absolne,
depuis ce qui se passe dans la chambre d'ouvriers, dont j'ai parl6 au d^but,
jusqu'^ la campagne.
Je parle de la campagne. Pendant longtemps on s'est fait Tillusion de
croire que tout se passait admirablement k la campagne. J*ai faitpartie de
commissions d*enqu6te k I'occasion d'^pid^mies de cholera en Bretagne et
ailleurs, et j'ai constats qu*k la campagne les maisons sont en g^n^ral tr^
roalsaines, les ouverlures sont insuftisantes pour laisser passer I'air et la
lumi^re, et le sol est en terre battue. Des flaques d'eau, qui ne se des-
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VARI6t6S. 889
s^chent presque jamais, existent souvent sur le sol, et presque toujours
entourent les maisons. L'^ table est souvent en continuity avec la chambre
et les cochons se prominent autour des lits.
Taut que personne n'apporte un foyer d'infection dans ces milieaz, tout
le moude se porte bien, mais s'il arrive un pbtisique, tout le monde est
atteint et peu d'babitants ^cbappent.
Yous connaissez, en Bretagne, ces lits-armoires qui font tr^s bien au
point de vue d^coratif, voici ce que j'ai vu. Un Breton se marie, sa femroe
meurt pbtisique. II se remarie, sa seconde femme meurt de phtisie. Sa
troisi^me femme est morte encore de la m6me affection, et j'ai appris qu'il
s'est remari^ pour la quatri^me fois. (On ril.)
Lui a r6sist^ au milieu de ce foyer. II y a en efTet des personnes qui
r^sistent k tout, et on les cite en disanl : Vous voyez que tout le monde ne
meurt pas de la pbtisie. Ge sont des t^moins qui sont nos plus terribles
ennemis. [Applaudissements,)
AssurSment, je ne veux pas leur mort, mais its sont un des plus grands
obstacles au progrSs.
Ge n'est pas tout. Nous venons de voir ce que deviennent les humaias
dans ces milieux infect^s; mais,^ c6t6 d'eux, il y a les Stables de bestiaux
et quand la phtisie y pdn^tre, que deviendront les animaux ?
Voici un exemple que j'ai cit6 k M. le President du conseil, M. M^line,
ministre de Tagriculture, que je tenais k associer k nos efforts.
II y avait aux environs du Mans une ferme tenue dans des conditions
de propret^ excessive. Le fermier prend, sans s'en apercevoir, un bouvier
pbtisique. Ge bouvier crache partout, les boeufs sont atteints el meurent de
la phtisie.
Ge fait a beaucoup frapp6 M. le President du conseil qui s'interesse tant
aux choses de Tagricullure. Et puis il y a le lait, la viande qui, contamines,
deviennent des moyens d'infection; transport's dans les grandes viiles, ce
sont de nouveaux germes qui feront de nouvelles victimes.
Je ne voudrais pas, Mesdames et Messieurs, vous laisser sous Timpres-
sion d'un tableau aussinoir. Pouvons-nous combattre le mat? Qui, et nous
pouvons faire beaucoup. Nous avons entre les mains non pas la possibility
de tout enrayer, ne nous faisons pas cette illusion, mais la possibility de
diminuer le mal dans des proportions considerables.
Que faut-il faire? Avant de le dire il est un point que je tiens k bien
'tablir, c'est colui-ci ; il n'est aucune maladie — je parais avancer un pa-
radoxe — qui soit aussi curable que la phtisie. En voulez-vous la preuve?
— Mais d'aburd je demande pardon aux dames de leur parler de choses
aussi macabres. (On rit,)
Je fais assez souvent des autopsies k la Morgue, eh bien ! dans plus de
la moiti' des cas les individus avaient des lesions tuberculeuses gurries,
ils etaient morts victimes d'un accident. Or, la clientele qui fr'quenter^ta-
blissement dont je viens de parler n'est pas une clientMe de choix. (Hires,)
Elle ne se compose pas de gens prenant journeliement des precautions hy-
gi6niques. Ge sont, pour la plupart, des alcooliques, ayant men' une
existence aventureuse, et qui, malgr6 tout, oni gu'ri de la phtisie. Eh bien I
si Ton pent gu'rir dans ces conditions, on pent guerir assez souvent pour
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
que la soci^t^ n'a pas fait, poar les phlisiques de la classe ouvri^re,
li devrait dtre fait.
assi, au Gonseil de surveillance de I'Assistance poblique, avons-nous
i, avec Taide du Gonseil municipal de Paris, k constituer une commis-
de la taberculose qui a constate que, dans les salles d'hdpitaux, les
'culeux contaminaient leurs voisins. On a decide de les separer, de
oler, mais on ne peut atteindre le but qu'en proc^dant dans de cer-
s conditions, sinon il faut laisser tout espoir d'atteindre le but, et le
*est de gu^rir.
Dus savez qu'ou a install6 dans certaines regions des sanatoriums
gu^rir certaines maladies. 11 en sera de m^me dans les hdpitaux,
istance publique a trouv^ six millions pour faire des installations
elles dans les hdpitaux et nous avons obtenu du Gonseil municipal de
la promesse que la* Ville voterait six millions. Nous pourrons d^truire
un des foyers prlncipaux de contamination dans la ville de Paris.
laudissements,)
ous avons dit que le malade phtisique contaminait ses voisins ; quand
1 de rhdpital, il lui faut gagner sa vie; il retourne dans sa famille ou
rte des germes d'infection. Nous voulons le mettre dans un tel ^tat
i^rison qu'il ne soit plas un danger pour personne, Avec le conconrs
mvernement et surtout avec le concours de votre Soci^t^, si vous ar-
, comme k Lyon, k nous faire esp^rer que dans dtx ans les logements
ubres auront disparu, alors nous aurons r6alis^ un ^norme progr^s.
applaudissements.)
3 que j'ai dit de la phtisie et de la tuberculose, je peux le dire du
fra et de la peste. G'est toujours la question du logement insalubre
st en jeu. II est k remarquer que ce sont toujours les m^mes pro-
s qui, cbez nous, sont atteintes. G'est en Provence, en Bretagne, en
tandie ou se d^veloppe toujours avec le plus d'intensit^ le cholera, et
des raisons sp^ciales. G'est ce qui prouve que ce sont des provinces
fant assainir.
iLemple. Lorsque la peste eut envahi Bombay, aux Indes, pour pr6-
r TEurope, les gouvernements organis^rent une conference sanitaire
les ont 616 les observations rapport^es par les m^decins qiii avaient
?y6 la peste aux Indes ?
9 avaient remarqu6, k Bombay, que, d'une facon g^n^rale, c'6taient
idiens qui etaient atteints et que, parmi les blancs, tr^s pen etaient
l6s, a moins que, comme les m^decins, les scBurs, les inllrmiers, ils
ssent en contact avec les pestif6r6s.
aurquoi les Indiens sont-ils alteints? Parce qu'ils vivent par terre, sur
[ oil se cultivent les germes de la peste. Et vous savez que les rats, qui
t dans le sol, au moment des ^pid^mies s'^loigneut imm^diatement.
3S blancs mouraient beaucoup moins, pourquoi? Parce qu'ils sont
dans des appartenients planchei6s. G'est-^-dire qu'on meurt dans les
es insal ubres d'un m^me immeuble et non pas dans ses parties
•res.
Bs m^decins ont rapports ce fait curieux. J'ai dit qu'il ^tait tr*8 rare
►ir mourir des personnes habitant des stages 61ev6s, et cependant on
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VARI^TfeS. 89i
fat tr^s ^tonn6 de constaler que, dan^ de grands ^tablissements construits
pour rindustrie du colon, la mortality avail e(^ trfes grande. On fit des re-
cherchesy on observa et on d^convrit que ces grandes constructions ^taient
divis^es, k chaque ^lage, par un couloir m6dian au bout duquel ^lait in-
stall6 un petit 6tablissement indispensable. Mais comme il ^tait absolument
insuffisant, il y avail un amoncellement d'ordures dans tous les corridoi*s.
G'est-&-dire que ces ^tablissements mal construits ^laient infect^s, insa-
lubres et que ceux qui les habitaient ont ^16 les premieres victimes.
La cause de toutes les ^pid^mies est toujours la m3me : Tinsalubrit^, le
d^faut de proprel^.
J'ai tenu, Mesdames et Messieurs, k vous dire quelques mots sur cette
question d'hygi^ne. (Applaudissements.)
Je ne terminerai pas sans rappeler une observation essentielle, c'est que
ia sant^ pliyslque se trouve ^troitement li^e &la sant6 morale. Jules Simon
disait que la meilleure garantie de la morale, c'est le logement. II ajoutait :
II faut que le logement soil attrayant ; c'est lamani^re laplusstlre de lulter
contre le cabaret. (Applaudissements,)
Qui, le logement salubre est celui dans lequel on est heureux de ren-
trer. Tandis que le logement insalubre, avec sa promiscuity, est la disorga-
nisation de la familie ; il est le repaire de tous les vices, je dirai de bien
des crimes. Ce n'est pas seulement k une ceuvre d'bygi^ne physique que
vous 6tes associ^s, mais encore k une oeuvre d*hygi^ne morale. Et grdce k
voire zele, k vos efforts, je compte que nous finirons par triompher.
{Applaudissements unanimes.)
Creation de services pour le traitement des Maladies sp^-
ciales dans les H6pitaux.
M. Brouardel, rapporteur, a pr6sent6 le rapport suivant, au nom
de la Commission sp6ciale du Conseil de surveillance de I'Assistance
publique de Paris (1).
Messieurs,
Le 20 mars 1897, noire ancien collogue, M. Paul Strauss, communiquait
au Conseil municipal la proposition suivante, relative au traitement des
maladies sp^ciales dans les ^tablissements hospitaliers :
(c Messieurs,
« Malgr6 le progr^s r^alis6 en ces derni^res ann^es, le traitement int6-
rieur et ext^rieur des maladies sp^ciales dans les h6pitaux laisse beaucoup
dd^sirer. L'outillage hospitalier est loin de r^pondre auxbesoins modernes,
qui tendent k faire une place de plus en plus considerable k la specialisation
des maladies.
(1) Commission composee de : MM. Brouardel, Budin, Dubrisay, Gibert, Le-
vraud, Masson, Mourier, Navarre, Perier, Potain, Paul Strauss, F61ix Voisin.
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892 REVUE PHILANTHROPIQUE.
I
« Au point de vue du traitement k Tint^rieur des h6pilaux, sans parler
des maladies de la peau et similaires, en dehors de risolement pratiqu^ oa
projet^ pour certaines afTections dpid^miques ou contagieuses, il n'existe
dans les services de m^decine et de chirurgie d'adultes que 131 His atfect^s
au traitement des maladies des voies urinaires, 119 r4serv6s aux maladies
des yeux, 37 d'ovariotomie, 78 de maladies nerveuses.
« II n'y a pas de service special « interne » pour les maladies du larynx,
du nez, des oreilles.
« Pour les maladies des yeux, le nombre de lits est de :
« H6tel-Dieu, 58 ills ;
« Lariboisi^re, 20 lits ;
a Clinique ophtalmologique des Quinze-Vingls, 110 lits.
« 11 convient d'observer que la Clinique nationale des Quinze-Vingts
hospitalise des malades venus de tous les points de la France et que la
moili^ de ces lits rentre dans les disponibilit^s parisiennes, soit en tout
133 lits pour recevoir les indigents opbtalmiques d'une population de
3300000 habitants (Paris et la banlieue). Ces 133 lits doivent suffire aux
besoins d'une clientele qui est annuellement, pour les divers ^tablissements,
de 5 000 nouveaux consultants inscrits par an k THdtel-Dieu, 3 000 & I'hdpitai
Lariboisi^re, 15 000 aux Quinze-Vingts; ces 23000 malades nouveaux pa-
raissent repr^senter la moiti6 des personnes qni, dans une ann6e, deman-
dent k Paris des soins ophtalmologiques gratuits, si Ton en juge par la
clientele apparente des 27 cliniques libres des maladies d'y^ux.
u II est permis d*estimer k 50 ou 60000 le nombre annuel des maladies
d'yeux pour lesquelles TAssistance publique etla Clinique des Quinze-Vingts
disposent uniquement de 133 lits; cette insufflsance a d^termin^ I'habi-
tude de ne recevoir k Thdpital que les cas op^rables, les cataractes par
exemple, tandis que T^tablissement hospitaller repousse les malades dont
la gu^rison reclame un long traitement, et qui, laiss6s k eux-mdmes ou
r^duits aux soins intermittents de la consultation, deviennent aveugles et
tombent d^iinitivement k la charge de TAssistance publique.
« Non seulement les lits d'yeux sont insuffisants, mais encore nul
r^partis; le sud et I'ouest de Paris ne sont pas desservis. En outre, les ser-
vices actuals d'yeux de Lariboisifere et de l'H6tel-Dieu, soumis a la r^gle
commune, ne peuvent r^gull^rement recevoir des jeunes malades Ag6s de
moins de seize ans.
« Nous croyons indispensable de cr^er dans les h6pitaux des services
sp^ciaux pour les maladies du larynx, du nez, des oreilles, d'aogmenter le
nombre des services de maladies d'yeux (d*au moius deux), d*instituer un
recrutement special d'oculistes des h6pitaux .
II
« Les sp^cialit6s ont une part plus importaute dans les consultations
externes des h6pitaux. Non seulement les services sp6ciaux de Saint-Louis,
Ricord, Broca, la Salpdtri^re (en laissant de c6t^ les services d'accouche-
ments et d'enfants malades, les deux services sp6ciaux des yeux de THdtel-
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VARltTtS. 893
Dieu et de Lariboisi^re) onl leurs consultations disttnctes, non seulement
il exisle des consultations pour les dents, mais encore an petit nombre de
chefs de service ont justement obtenu, en raison de leurs services rendus
et de leur competence sp^ciale, Tautorisation de donner des consultations
de specialit6s pour les goitres, les maladies du larynx, du nez et des
oreilles, la gyn6cologie, les maladies du systfeme nerveux, de la peau etc.
« Ges consultations sp^ciales sont d'ailleurs facultatives et pour ainsi
dire provisoires, puisqu'elles peuvenl disparattre avec le m^decin consul-
tant, soit que celui-ci change d'h6pital, soit qu'il soit mis k la retraite;
elles n'ont rien de stable ni de definitif. Telle region de Paris pent en 6lre
^riv^e, suivant que le roulement am^ne le depart de ces consultants sp^-
cialisles de bonne volont^.
« En outre, ces consultations, d'^tablisseroent pr^caire, ne r^pondent
pas h tons les besoins; elles ne sont sufflsautes ni par leur organisation ni
par leur nombre.
« Nous croyons que, sans porter atteinte aux preferences du corps me-
dical des hdpitaux et sans diminuer pour autant la specialisation faculta-
tive de bonne volonte, il convient d'organiser rationnellement, methodi-
quement,en tenant compte de la situation topographique desetablissements
et des besoins presumes de la clientele hospitali^re, des consultations
pour les maladies des yeux, du larynx, du nez, des oreilles, de gyneco-
logie, de la peau, du systerae nerveux, etc.
Ill
« L'Assistance publique en conformite du r^glement nouveau des
secours k domicile, prepare en ce moment la creation de « dispensaires »
dans chaque arrondissement pour les malades indigents ou necessiteux.
a Ces dispensaires, pour rendre tons les services qu'on en attend, doi-
vent egalement donner place aux specialites essentielles, c'est-&-dire aux
maladies « des yeux » et« des dents » pour les adultes; ils devront com-
porter une consultation de nourrissons avec pesee hebdomadaire et distri-
bution de lait sterilise aux m^res indigentes.
« Ges differentes mesures, tres faciles k appliquer, seront tr^s bien-
faisanteset tr^s utiles; elles feront honneur k TAssistance publique et an
Conseil municipal.
« Paris, le 19 mars 1897.
u Sign^ : Paul Strauss. »
Gelte proposition fut renvoyee en seance du Gonseil municipal k I'Ad-
ministration de TAssistance publique.
Le 8 avril 1897, la Gommission, chargee d'etudier les besoins et les res-
sources de TAssistance publique, adoptait en priucipe la proposition de
M. Strauss.
Dans le memoire par lequel elle a saisi le Gonseil de surveillance, TAd-
ministration s*est montree favorable k la proposition de M. Strauss, et elle
a, des le debut, formuie, d'accord avec notre coliegue, cette opinion tres
decidee que ces nouveaux services devaient eire confies k des medecins
issus d'un recrutement special.
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894 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Visant plus particuli^rement les services d'ophtalmologic, M. le Direo
teur ajoutait: « Je m'occupe en ce moment de rechercher dans quels h6-
piUux du sad et de Fouest il serait possible d'installer des nouveaax ser-
vices d'ophtalmologie. Leur installation complete exigera certainement des
constructions neaves; mais s'il ^tait possible de trouver d^s k present, dans
chacan des hdpitaux appel^s h recevoir ces services, une douzaine de lits
disponibles, on pourrait imm^diatement mettre les deux services en fonc-
tion. La plnpart des malades, attoiats d*affections oculaires, peuvent en efTet
se soigner sans danger chez eux. On peut en juger par ce qui se passe k
Londres, od les services sp^ciaux d'ophtalmologie sont bien install^s.
« A Londres, qui coniporte une population presque double de celle de
Paris, il n'y a que cinq h6pitaux, afTect^s au traitement des affections des
yeux, renfermant un total de 198 lits. Or, il ressortdes relev^s statistiques
publics en 1897 dans les The annual charities register and digest^ qu'au Cen-
tral ophtalmic Hospital^ qui renferme 13 lits, 170 malades ont 6ti trait^s k
rint^rieur et 9 521 ont suivi le traitement externe; qu'au Royal Eye ho$fital
ou Royal South London ophtalmic hospital^ il y a 40 lits r^serv^s :
Malades internes 401
14052 anciens.
1
Maladies externes ^ .^gg^j nouveaux.
Au Royal London ophtalmic hopital, 100 lits :
Malades internes 2184
Malades externes 26290
Au Western ophtalmic hopital , 1 5 lits :
Malades internes 220
Malades externes 6494
u La publication dont il s'agit ne donne pas de cbifTres pour le Royal
Westminster ophtalmic hospital, quicomporte 301its; mais il est presumable
que la proportion pour les malades internes et les malades externes est
la m^me que dans les b6pitaux de mSme nature.
« De la statistique qui pr^c6de et que j'ai cru utile de placer sous vos
yeux, on peut lirer cette conclusion qu'en dotant Paris, ou plut6t le d^par-
tementde la Seine, qui compte 3 300 000 habitants, tandis que Londres en
compte 5 millions, de deux nouveaux hdpitaux sp^ciaux d*opbtalmologie,
le traitement des maladies des yeux pourra 6tre sufflsamment assur^.
« J'aurai Thonneur prochainement de vous soumettre des propositions
k ce sujet. En attendant, il est une question sur laquelle je dois appeler
d^s aujourd'hui Tattention du Conseil de surveillance, celle du recrule-
ment des praliciens auxquels ces deux nouveaux services seront cooflds.
Actuellement, d'apr^s le r^glement sur le service de sant^, les places des
m^decins et des chirurgiens, charges des services speciaux existant dans
les hdpitaux, sont donn^es par voie de recrutement k Tanciennet^. Ce re-
crutement peut ne pas presenter toutes les garanties desirables. La propo-
sition faite par M. Strauss d*instiluer un mode de recrutement special
pour les oculistes me paralt un corollaire indispensable de son projeU
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YAfkitTkB. ma
a Oa posrrait, comme pour la nomination de six places d 'accoucheurs
on de m^decins du service des ali^n^s, organiser un concours special avec
6preQve8 sur Tophtalmologie. Une difficult^ pourrait s'(51ever en ce qui
louche la composition du jury appele k juger ces ^preuves. Mais, ind^pcn-
damment des deux chefs de service actuellement qualifies, M. leprofesseur
Panas et M. le docteur Belens, on pourrait le composer avec des chirur-
giens des hdpitaux ayant fait une ou plusieurs anndes d'internat dans des
services d'yeux. On peut compter actuellement parmi nos chirurgiens une
dizaine d'anciens internes, ayant 6t6 attaches k un service d'pphtalmologie,
soit un nomhre sufflsant pour composer le jury, dans lequel la pathologie
externe et celie des maladies nerveuses devraient Hre ^galement repre-
sentees par deux m^decins des hdpitaux.
u G'est une question dont aura k s'occuper la Commission sp^ciale,
charg^e d'organiser le concours dont il s'agit. »
Dans la premiere reunion de la Commission, le 14 mai 1897, M. le Di-
recteur et M. Strauss ont developp^ leurs propositions et la Commission a
adopts la m6thode de travail suivante :
!'• etude : Des maladies des yeux.
2« — Des maladies du larynx, des oreilles et du nez.
3« — Des maladies de la peau.
4* — Gyn6cologie.
5* — Maladies nerveuses.
Chaque etude a ete elle-meme suhdivisee en ;
1" Hospitalisation;
2" Consultation;
S' Personnel medical.
Premi&re tlude. — maladies des yeux
La necessite, signaiee par les memoires de M. Strauss et de M. le Di-
recteur de TAssistance publique, de donner des soins aux 50 000 malades^
atteints d'affections des yeux dans le deparlement de la Seine, a ete re-
counue & Tunanimite par la Commission. Suivant Texpression de M. le
professeur Panas, entendu k diverses reprises par la Commission, VAdmi-
nistration a le devoir de soigner ces malades.
Comment doit-on organiserjes services ? Votre Commission s'est ralliee
au systeme anglais. Elle pense qu'un petit nombre de lits sufOra, 40 ou 50,
repartis dans deux h6pitaux, mais qu'il y a lieu d'organiser une consul-
tation speciale dans le plus grand nombre des h6pitaux, sinon dans tons.
C'est pour elle et pour M. Panas le point capital. Celui-ci a rappeie qu'en
Allemagne un ophlalmologiste est attache k toutes les [consultations des
hdpitaux; son intervention ne se borne pas a donner des soins speciaux
aux malades atteints d'aifections des yeux, c'est souvent lui qui, grdce k
I'examen par Fophtalmoscope, permet de faire le diagnostic des maladies
des centres nerveux.
La Commission vous propose done de creer dhs maintenant un premier
service d'ophtalmologie comprenant 20 lits pour les hommes et 10 lits pour
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896 REVUE PHILANTHROPIQUE.
les femmes. II serait plac6 k Thdpital Laennec, dans le pavilion Boyer,
occupy actuellement par des malades atteints d'affections chirurgicales
chroniques. L'appropriatiou de ce local a sa nouvelle destination ne n^-
cessiterait pas une forte d^pense.
Votre Commission reconnait qu'il est indispensable de cr6er prochai-
nement un second service d'ophtalmologie ; mais jnsqu'^ ce moment, elle
n'a pas trouv^ d'emplacement favorable. Elle estime toutefois que celui-ci
doit dtre cherch^ du c6t^ des ^tablissements hospitaliers, places au nord-
ouest de Paris.
Votre Commission vous propose d'organiser le plus vite possible des
consultations, sans adjonction de lits d*h6pitaux, dans le plus grand
nombre possible d'hdpitaux. Elle pense que ces consultations, install^s
tr^s simplement, doivent pourtant avoir an local special, muni d'un ouUl-
lage convenable. II lui a sembl6 desirable de ne pas emprunter les locaux
consacr^s aux consultations g^n^rales, surtout pour laisser au chef de ces
nouveaux services la responsabilit^ de la garde et de Tentretien des in-
struments etappareils h, lui confi^s.
Votre Commission ne croit pas qu'il soit utile de placer des services
d*ophtalmologie dans les dispensaires ; elle estime que les creations pro-
jetees dans les hApitaux suffiront k tontes les n6cessit6s.
A quelles personnes doivent Hre confi^s ces services? A Funanimit^, voire
Commission pense que les concours doivent ^tre I'unique mode de recru-
tement des chefs de service. Elle maintient le principe qui fait la force et
la reputation du corps medical des h6pitaux.
Elle a pense que le jury pouvait 6tre compos6 de cinq membres ; trois,
repr6seat«mt plus particuli^rement I'ophtalmologie, un la m^decine, un
la chirurgie g^n^rale. Tons les juges doivent faire partie du corps medical
des h6pitaux.
Pour les premiers concours, une difficult^ se pr^senie. II n'y a en ce
moment que deux services d'ophtalmologie : celui de M. PaHas et celui de
M. Delens. La Commission a pens6 qu'on pourrait choisir les juges ocu-
listes, outre ces deux chefs de service, parmi les chirurgiens qui ont
dirig6 efTectivement dans un ^tablissement hospitaller un service, officiel-
lement reconnu, d'ophtalmologie. La Commission a 6cart6 Tid^e d'adjoindre
au jury un neuropathologiste. Dans T^tat actuel des choses, tous les m6-
decins sont comp6tents en neuropathologie ; ^tablir parmi eux une selec-
tion, serait cr^er une specialisation nouvelle que votre Commission, vous
le verrez au cours de ce rapport, n'a pas cm devoir accepter.
Quelles ser ont les 6preuves imposees aux futurs candidats? Apres une dis-
cussion, qui n*a pas pris moins de trois stances, la Commission a vote les
conclusions suivantes :
Epreuves diminatoires.
1^ Depdt par le candidat des travaux qu'il a publies et d'un resume
ecrit de ces travaux ;
20 Epreuve ecrite d'anatomie et de physiologie speciale, pour laquelle
il sera donne trois heures aux candidats;
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VARlfeTfeS. 891
3» Epreuve orale sur la m^decine g6n6ra1e ; cette 6preuve durera vingt
miaotes, aprfes vingt minutes de reflexion.
tpreuves cUfinUives.
4* fipreuve de m6decine op6ratoire sp^ciale sur des animaux anesthesias
ou sur des cadavres (une seule operation).
5<» Epreuve de cUnique sp^ciale sur deux malades. Elle aora une dur^e
d*une heure (vingt minutes pour I'examen des malades, dix minutes pour
la reflexion et trente minutes pourTexposition).
Quelles sont les raisons invoqu^es poiw et contre ces diverses epreuves ? La
plus discut^e de ces Epreuves a 6t6 la premiere. M. le professeur Panas a
^nergiquement soutenu F importance de T^preuve des titres; pour lui, elle
est capitale. Elle figure k F^tranger dans les concours m^dicaux, et, h
son avis, ces concours sont pr^f^rables aux ndtres. Que sont, en effet, les
candidats? Des docteurs en m^decine, qui pourront n'avoir jamais 6U in-
ternes ou externes; d'autres, au contraire, qui auront^t^chefs de clinique,
chefs de laboratoire, qui auront travaill^ pendant de tongues ann^es dans
les salles de malades. Peut-on assimiler les premiers aux seconds? Ceux-ci
n'ont*ils pas des connaissances pratiques bien sup^rieures? II faut, k tout
prix, dit II. Panas, « faire figurer celte ^preuve dans nos concours d'oph-
talmologie, car c'est par une 6preuve de ce genre, dans laquelle il vient ex-
poser devant le jury le r^sultat de ses travaux et de ses recherches, que le
candidat prouve qu*il est v^ritablement quelqu'un ».
Pour M. Panas, cet expos6 de titres doit 6tre public, sans intervention
des juges par des questions ou interpellations, sans discussions.
A cette proposition, quelques membres de la Commission ont repondu,
les uns faisant opposition k I'^preuve des titres, publique ou non publique,
les autres admettant T^preuve sur titres, celle-ci 6tant jug^e en de-
hors du candidat. En faveur de cette solution, M. Potain dit : « Admettre
lediscours public, I'exposition publique par le candidat de ses travaux,
c'est s'exposer k provoquer des accusations mal fondles contre la mani^re
de juger du jury. Tel candidat pent avoir fait des travaux trfes s6rieux et
mal s'exprimer devant les juges; tel, au conlraire, fera un expos6 tr^s
brillant de travaux moins m^ritoires ». M. Budin a fait remarquer qu'un
m^me candidat, pr6sentant les m^mes litres, pourrait dtre jug6 tr^s
diff^remmenl par deux juges successifs.
Votre Rapporteur consid^re I'^preuve sur titres publique comme une
excellente mani^re d'appr^cier la valeur d'un candidat. Ce serait, selon
lui, un grand progr^s; actuellement, comme Ta fait remarquer un des ad-
versaires de ce genre d'^preuve, on tient indirectement compte des titres et
travaux ant^rieurs; cet aveu renferme k lui seui une justification des
critiques adress6es k nos concours. D'autre part, dans un concours, toutes
les raisons sur lesquelles pent s'appuyer unjury pour rendre son verdict
doivent 6tre jug^es par toua, juges, assistants et comp^titeurs. Introduire
une 6preuve que, seuls, les juges peuvent appr^cier est, de Tavis de votre
Rapporteur, extrdmement dangereux.
HEVUE PlllLAXTnROPIQUE. — II. 57
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898 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Chacun des commissaires s'est r6serv6 le droit de faire valoir les raisons
de soa vole devant le Gonseil. G'est k lui qu'il appariient de decider.
Les autres ^preuves ont 6t^ adoptees k runanimii^ par votre Commis-
sion. EUes sont institutes de telle sorte que les comp^titeurs deTront
fournir la preuve qu'ils ne sont pas seulement des sp^cialistes distingu^s
mais qu'ils ont des connaissances m^dicales et chirorgicales, qui les pla-
cent au niveau de leurs futurs collogues appartenant au corps des mede-
cins des h6pitaux.
La cote de chacune de ces epreuves est flx^e h 30 points.
Deuxi^e Hude. — maladies des orrilles, du larynx et du nbz
l/Administration a propose k votre Commission de ne pas cr6er, poar
ces maladies, un corps special de m6decins. Elle se contenterait actuelle-
ment de reconnaltre officiellement comme chefs de services sp^ciaox
MM. Gouguenheim et Lermoyez, qui ont organist pour les maladies de la
gorge et du larynx des consultations particuli^res.
La Commission s'est rang^e k Tavis de M. le Directeor, apr^s avoir
^chang^ quelques observations dont le r^sum^ doit 6tre pr^sent^ an
Conseil.
Votre rapporteur a fait remarquer qu'en France ces services, au point
de vue hospitaller et au point de vue de Tenseignement, sont distances
par les services analogues de T^tranger. Suivant lui, cette situation s*ex-
plique pour deux raisons.
Normalement, les affections du larynx, du nez et des oreilles consti-
tuent un groupe admis par les m^decins de tous les pays; k I'^lranger,
c'est un m^me chef de service qui est charge de cette sp^cialit^. En France,
les affections des oreilles sont consid6r6es comme plus particuli^rement
chirurgicales, celles du larynx et du nez comme plus particuli^rement
medicales. D'autre part, la division entre les attributions des m6decins et
des chirurgiens est, k Paris, absolument s^par^e, si bien que lorsqu'une
affection du larynx et du nez n^cessite une intervention chirurgicale, le
m^decin traitant adresse ce malade k son collogue chirurgien du mdme
h6pital. II n'y a pas Tunit^ n^cessaire pour qu'un ro^rae medecin ou
chirurgien tienne dans sa main la direction de cette triple sp^cialit^. Elle
se trouve rompue par nos habitudes et les regies administratives.
Lorsqu'on se d^cidera k cr6er d^finitivement ces sp^cialit^s, il faudra
se souvenir qu*elles sont absolument m^dico-chirurgicales et conferer aux
chefs de service des droits correspondant k ces n^cessit^s.
MM. Potain et Perier n'ont pas accepts sans reserve cette opinion. Pour
le second, les grandes operations sur le larynx ne doivent pas sortir du
domaine purement chirurgical ; pour le premier, les affections du larynx
sont si souvent liees k la tuberculose et autres affections generates qu'il y
aurait inconvenient a les faire sortir du domaine medical.
Dans ces conditions, votre Commission a decide k Tunanimite de r^-
server pour une ^poque ult6rieure Torganisation d^Gnitive des services
sp6ciaux de laryngologie et de conflrmer seulement, actuellement.
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VARlfeTfeS. 899
MM. Goaguenheim et Lermoyez daos la direction des services qu'ils ont
cr6^8.
Nos deax collogues, consult 6s par M. le Direcleur, ont accepts cette
solution.
TroisUme etude. — maladies de la peau
Actuellement, il existe dix services sp^ciaux des maladies de la peau
et de la syphilis, six i Saint-Louis, deux k Ricord et deux h, Broca. Des con-
sultations sp6ciales extemes fouctionnent k Saint-Antoine, la Piti^ et La
Rochefoucauld.
Les modifications soumises k T^tude de la commission par TAdmini-
stration et par MM. Besnier, Fournier, Haliopeau, Brocq, Gaucher, Thi-
blerge et Sabouraud visent trois points principaux : Thospitalisation, les
consultations, le recrutement des m^decins.
Ho^^alisation. — Le nomhre des lits dans lesquels sont re9us les ma-
lades all^iBts d'affections de la peau ou de maladies v^n^riennes, si on
totalise cea services de Saint-Louis, Ricord et Broca, est suffisant.
La CommissiQQ, d*accord avec les m^decins de Saint-Louis, pense qu'il
serait contraire auz int^r^ts des malades et aux progr^s de la science de
diss^miner les serrioes dans les difT^rents hdpitaux. Leur groupement
s'impose. II y sera poorru si le Gonseil accepte une proposition, qui lui
sera ult^rieurement faite» ifi r^unir Ricord a Broca. La d^saffectation de
ce dernier hdpital, dont Torganisation et la discipline rappellent des temps
fort anciens, s'impose. On conaititaerait par la reunion de ces deux h6pi-
taux un groupe sur la rive gauche, aussi favorable aux besoins des ma-
lades qu'aux int^rftts de la science et de rinstruclion des 616ves.
Consultations. — Tons les m^decins entendus demandent leur multi-
plication. M. Fournier a fait remarquer que ces consultations gratuites
sont tr^s on^reuses pour I'ouvrier, qui, oblig6 a un grand d^placement, k
une attente prolong^e, perd une. demi-joura^e, parfois une joum^e. U a
insists pour que ces consultations soient privies, individueltes, pour que
Thomme et surtout la femme ne soient plus comme aujourd'hui obliges de
confesser publiquement leurs maladies secretes. Enfln il a demand^ qu'il
soit 6tabli des consultations du soir, ainsi que du dimanche.
Sur tons ces points, Taccord est complet, mais les consultations ac-
tuellement organis^es dans quelques hdpitaux g^n^raux sufOsent-elles
ou doit-on en organiser de nouvelles? Les avis sont partag^s; votre Com-
mission a pens6 qu'il y avait lieu de ne pas prendre parti, d'attendre que
Texp^rience, coromenc^e il y a quelques anndes, ait prononc^. D'ailleurs,
si des m^decins autoris^s demandent k en 6tablir dans un hdpital, le Gon-
seil pourra ^tudier le bien fond^ de la demande.
Mode de recrutement des mddecins. — Des plaintes d6j4 anciennes se
sont 6lev6es contre le mode actuel du roulement. On a fait remarquer
que, suivant cette tradition, les mddecins qui ont fait des maladies de la
peau leurs etudes pr6fer6es, ne peuvent parfois entrer k Saint-Louis qu*k
un Age d6j^ avanc^, que, de plus, tent6 par Touverture impr^vue d'une de
ces places, un m^decin, Stranger jusque-1^ k ces etudes, pent la choisir,
emp^chant ainsi d'entrer ud plus competent qua lui.
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90e REVUE PHILANTHROPIQLE.
Voire rapporteur se fait simplement I'^cho de ces allegations^ peul-
etre un pen exag6r6es. Quoi qu'ii en soit, on a propose, pour rem6dier k
ces inconv^nients, les uns d'^tablir des concours sp^ciaux, les autres de
faire un concours special entre les candidats qui auraient €i^ admissibles
au Bureau central.
Apr^s examen des diverses m6thodes propos^es par MM. Besnier Four-
nier, Hallopeau, Broq, Gaucher et Thibierge, la Commission serait d'avis
d'adopter la proposition de M. Tbibif^rge ainsi formulae par lui :
f< Les m^decins de Thdpital Saint-Louis et des services de dermatologie
s'il en est cr^^ dans d'autres hdpitaux, seront choisis sur une liste sp6-
ciale, dress^e par la Society d«s m^decins des h6pitauz, en suivant
Tordre de leur inscription sur cette liste.
« Cette liste comprendra :
« 1® Dans Tordre de leur nomination aux h6pitaux, les m^decins des
bdpiiaux actuellement en fonctions qui, dans le d61aidedeux mois, auronl
r4clam6 leur inscription.
« 29 Au fur et k mesure de leurs demandes, les m^decins des hdpitaux,
norom^s ou k nommer, qui r^clameront leur inscription dans un d^lai
maximum de deux ans apr^s leur nomination.
« Les m^decins, inscrils sur cette liste, ne participeront pins au roule-
ment pour le choix des services g^n^raux ou sp6ciaux, autres que ceux de
la dermatologie.
« Ceux d'entre eux, qui ne sont pas encore nomm^s chefs de service,
seront charges de rem placements dans les services de dermatologie et des
fonctions d*assistants de consultations. »
Tout en se ralliant en principe k cette proposition, votre Rapporteur a
fait remarquer que la question est assez delicate en raisondes droits acquis
et des difflcult^s que Ton ^prouverait probablement ^imposer ides mede-
cins, qui ont subi le concours sur la foi des rfeglements anciens, Tobserva-
tion d'nn nouveau r^glement, qui ne laisserait pas que de pr^judicier k
leurs inter^ls. II serait bon, suivant lui, que T Ad ministration s'entendil k
ce sujet avec la Soci^t^ des m6decins des h6pitaux.
La Commission s'est ralli^e k cette mani^re de voir, et vous propose de
renvoyer T^tude de la question k la commission charg^e d'^tudier la
reorganisation du concours des m6decins des h6pitaux.
Quatritme itude, — maladies du systemb nbrveux
La Commission, d'accord avecTAdministration, penseque les sp^cialit^s
sont parfaites Ik ou apparatt la n^cessit^ de divisor les malades et de
diff^rencier les traitements, mais que pour les maladies nerveuses, qui
appartiennent ^li la m^decine gen^rale, cette necessity est beaucoup moins
^vidente que pour les maladies des yeox et de la gorge par exemple. EUe
estime qu'il y a simplement k rester dans le statu quo, en permettant aux
m^decins qui d6j^ groupent dans leurs services des malades de cette
nature de continuer k agir ainsi.
La Commission vous propose done dene pas cr^er de nouveaux services
sp^ciaux pour les maladies du sysl^me nerveux.
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VARlfeTfeS. 901
Cinquiime Hude, — gyn^cologib
Voire Commission pense que, pour les malalies des femmes, comme
poar les maladies nerveuses, il n'y a pas lieu de cr^er de nouveaux ser-
vices; mais, sur la demande de M. Strauss, elle a vot^ la proposition sai-
vante, qu'elle soumet k voire approbation :
Les mddecins, chirurgiens et accoucheurs des h6pitaux, peuvent 6tre
autoris^s k faire des consultations special es externes de gyn^cologie.
Voici en consequence, Messieurs, les conclusions que nous vous pro-
poseroDS d adopter :
CONCLUSIONS
A. — MALADIES DES YEUX
i^ Creation immediate d'un service d'ophlalmologie k I'hdpital
Lagnnec ;
2^ Creation prochaine d'un second service d'ophtalmologie dans un des
etablissements du N.-O. de Paris;
3"* Installation de consultations d'ophlalmologie dans un certain
nombre d.'h6pitaux sans lils, poor Fhospitalisation des malades;
4<^ Les chefs de service seront nomro^s par un concours sp^ciaL
Le jury se composera de cinq merobres : trois ophtalmologisles, un
m^decin et nn chirurgien des h6pitaux.
Les 6preuves comprendront trois 6preuves 61iminatoires :
1° Depot par le candidal des Iravaux qu'il a publics et d'un resume de
ces Iravaux;
%** £preuve d'anatomie et de physiologie sp^ciales, pour laquelle il sera
accord^ trois heures aux candidals ;
3" Epreuve orale sur la m6decine g^n^rale; celle dpreuve durera vingt
minutes apr^s vingt minutes de reflexion.
Deux epreuves definitives :
f * J^preuve de medecine op^ratoire sp^ciale sur des animaux anesthe-
sias ou sur des cadavres (une seule operation);
%^ Epreuve de clinique speciale sur deux malades. Celle epreuve aura
une duree d'une heure (vingt minutes pour I'examen des malades, dix
minutes pour la reflexion, el trente minutes pour Texposition).
Chacune de ces epreuves sera cotee de & 30 points.
B. — MALADIES DU LARYNX, DES OREILLES ET DU NEZ
i^ Reconnaissance officielle des deux services de laryngologie exislanl
actuellemenl k Lariboisi^re et k Saint-Anloine«
2® Pas de creation nouvelle.
C. — MALADIES DE LA PEAU]
\^ Organisation d'un h6pital consacre aux maladies de la peau et de
syphilis, k la place de rh6pilal Ricord ;
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902 REVUE PHILANTHROPIQUE.
29 Restitution des services sp^ciaux de Broca aux maladies g^n^rales ;
3<^ Les consultations speciales dans les hdpitaux g^n^raux pourronidlre
augment^es en nombre ;
4<> Le mode de recrutement da personnel medical sera alt^rieurement
soumis au Gonseil par la Commission de la r^forme du concours des
h6pitaux.
D. — MALADIES DU SYSTKME NERYEUX
II n'y a pas lieu de cr^er de nouveaux services sp^ciaux pour les
maladies du syst^me nerveux.
E, — GYN^OLOGIE
II n'y a pas lieu de cr^er de nouveaux services sp6ciaux pour les mala-
dies des femmes;les m^decins, chirurgiens et accoucheura des h6pitaux
peuvent 6lre autoris^s k faire des consultations speciales extemes de
gyn^cologie.
Les Monts-de-Pidt6 en Corse au XVIP si^de.
Des Monts-de-Pi6t6 ont exists en Corse au xvii* si^cle.
L'6v6que di Policastro, visiteur apostolique, en 1618, en avail 6dicle
les statuts communs k trois ^tablissements fonctionnant k Bastia, Corte et
Ajaccio.
Pour doter chacun d'eux, il alloua 150 6cus.
Le Mont-de-Pi^t6 d'Ajaccio ouvrit ses portes le 16 f^vrier 1618. La popu-
lation ^tait alors pour cette ville de 2400 habitants.
Ce furent les 6v6ques qui, par Tinterm^diaire des cur^s, annonc^rent
Touverture de cet ^tablissement.
II dtait stipule dans les statuts que le Mont, plac6 sous la surveillance
el la direction des ^v^ques, serai t administr^ par trois gouverneurs ^lus
parmi les meilleurs, les plus fiddles et les plus dclair^s des ciloyens,
deux nomm^s par T^v^que, le troisi^me, par rillustrissime commissaire de
la R^publiqne de G^nes; six autres membres nomm^s, moitiS par \er
commissaire g^nois, leur 6taient adjoints.
Leurs fonctions 6taient renouvelables chaqueann^e le jour de la fdle de
TAnnonciation de la Vierge Marie sous la protection de laquelle Toeuvre
^lait plac6e : les administrateurs ^laient tenus de prater serment entre les
i](iains des ^v^ques et en leur absence entre celles des vicaires g6n6raux,
soil le jour de leur nomination, soit le lendemain.
Le registre des engagements et des retraits, ctait confle k un gouver-
neur ayant la pratique de la comptabilil^.
Ge registre, qui contenait 300 feuillets, portait en t^te, outre les statats,
les noms des bienfaiteurs disposes k faire des dons et legs k Toeuvre.
II mentionnait la designation des nantissements, la somme pr6t6e el la
date de Tengagement.
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VARlfeT S. 903
Un bulletin 6lait remis aa d^posant, il lui 6tait recommaad^ de ne pas
r^garer.
Le pr^t^tait consenti pour six mois et repr^sentait la moiti^ de la valeur
de Tobjet, il ne pouvait exc6der 12 livres.
Ce d61ai expire, les gages ^taient, sans avis pr^alable, vendus aux en-
ch^res.
Les bonis ^talent remis k Temprunteur en ^change du bulletin
d'engagement.
En cas de perte de ce bulletin, une bonne et valable caution 6tait
eiig^e.
Les engagements 6taient accept^s le lundi de chaque semaine, les d^ga-
gements le vendredi. La caisse du Mont-de-Pi^t^ ^tait confine aux soins
des offlciers municipaux; elle 6tait k trois cl6s dont une restaitentre les mains
de r^Y^que, la deuxi^me 6tait la propri6t6 des conseillers municipaux ; Tun
des gouverneurs, alternant tons les six mois, conservait la troisi^me.
Le service courant 4tait assur6 par le d^p6t entre les mains du gouver-
neur d'une somme de 50 ^cus, soit 200 livres.
(c En commen^ant, disaient les statuts, les pr^ts auront lieu en argent;
par la suite, les 6v6ques pourront les faire,partie en argent, partie en hU;
on s'en rapportera h la prudence des ^v^ques. »
II 6tait en outre stipule que le Mont-de-Pidt^, pour venir en aide k un
plus grand nombre de pauvres, soUiciterait Tautorisation n6cessaire, afln
de pouvoir accepter des emprunteurs qui y consentiraieut la restitution
(' d mesure comble du hU prSt^ a mesure rase » et le versement d'un et demi
par ^cu pr6t6 pour six mois.
' Les prfits ne devaient fitre faits qu'aux vrais pauvres, sans exception
aucune, avec rapidity, empressement et charit6.
An moment du d^gagement, le Mont-de-Pi6t6 pouvait faire quelque
aum6ne k Temprunteur, si les ressources le permettaient.
La limitation des pr^ts k 12 livres provenait de la limitation des res-
sources, mais combien grande a dA 6tre la difficult^, pour les gouverneurs
de rinstitut, de faire un choix entre les malheureux qui venaient demander
secours, et d*ob6ir aux injonctions des statu ts qui leur prescrivaient de
s^parer les vrais pauvres de ceux qui ne I'^taient sans doute pas moins,
puisqu'ils venaient emprunter une mesure de bl^.
GesMonts-de-Pi6t^, cr^6s & une ^poque ott la Corse faisait encore partie
de la R^publique de G^nes, avaient h6rit6, dans leurs statuts, des disposi-
tions d'^tablissements similaires qui existaient d^j^ dans la p^ninsule ; ils
^taient mixtes, c'est-i-dire qu'ils faisaient partie des Monts-de-Pi6t6 dits
nummarii,
Les premiers ^taient surtout r^pandus dans la division de Nice, qui en
comptait 63, dont 58 en province; 3 appartenaient k la division de Guneo;
7 k celle d'Alexandrie et 2 k celle de Novare.
Les Mont8-de-Pi6t^ de la division de Nice, en raison Je leur nombre,
^laient ceux qui avaient le plus grand fonds de denr^es pour leurs op^ra-
rations — 3522*»,83^ — Les 3 divisions de Guneo op^raient avec un fond^
de 247»>,33* de graine; les 7 d'Alexandrie avec 438*»,18 et les deux de Novare
avec 48^,98^
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904 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Tous les fonds r^unis repr^sentaient une somme de 85 666^54, consti-
tuant le fonds de roulement de tous les Monts-de-Pi^l^ granatici des
Etats de terre ferme.
La Soci^M des Gr^ohes, par M. Eugdne Marbeau.
Nous empuntODS au Bulletin de la Soei4U des Creches le compte
moral et financier de cette Soci6t^ en 1897, par M. Eugene Marbeau.
Au moment oil, pour la derni^re fois sans doute, je prepare ce compte
rendu annuel, je suis heureux de constater que notre oeuvre est en pleine
prosp6rit6. Les difOcult^s qui jadis ont si longtemps arrdt^ ses progr^s
centre lesquelles le fondateur des creches eut k soutenir des lultes ^tranges
et incessantes n'existent plus. D^sormais, non seuiement la France, mais
tous les pays reconnaissent que la creche, comme T^cole, comme la salle
d'asile, est une institution rendue indispensable par T^tat actuel de la
civilisation. Partout la creche est r^clamde par les populations ouvri^res ;
partout elle est encourag^e par les gouvemements ; partout elle est en
faveur anpr^s de Tinitiative priv^e qui lui apporte son d6vouement d6sin-
t^ress^, ses souscriptions, ses dons g^n^renx, ses lib^ralit^s testamen-
taires.
Cette sympalbie unanime, la cr^cbe la justifie k tous 6gards. L*objet de
ses secours, c'est le petit enfant et sa mere, c*est-4-dire ce qu*il y a
de plus touchant au monde. GEuvre dminemment sociale, elle rapprocbe
aupr^s du berceau la femme qui a besoin d'aide et celle qui pent Taider.
Elle est le secours en travail, secours efficace et moralisateur, au lieu
d'etre Faumdne sterile. Elle permet a Touvriftre de se suffire k elle-mdme
par son salaire. Par la petite retribution qu'elle exige, elle respecte la
dignity de la m^re vis-4-vis de son enfant comme vis-^-vis de la Soci6t6.
Elle est essenliellement ^ducatrice. A la m^re, elle enseigne les soins
qu'il faut donner k Tenfant pour preserver sa sant^ et pour former son
coeur. A Tenfant, elle apprend d6s le berceau k vivre avec d'autres enfants,
k leur laisser leur part k c6te de la sienne, k comprendre et k sentir qu*il
n'est pas seul sur la terre, que tout ne gravite pas autour de sa petite
personne.
Dans ces malheureuses families ouvri^res ou la n^cessit^ de gaguer le
pain de chaque jour oblige le p^re et la m^re k aller, cbacun de sou cdt^,
travailler loin du logis, la creche fait de Tenfant que la m^re reprend le
soir le lien qui rapprocbe les parents, I'attrait, la raison d'etre, la joie du
foyer.
Mais, pour conserver sa valeur sociale et moralisatrice, la creche doit
rester une oeuvre d^sint^ress^e. Elle perdrait toute autorit^ morale si ceux
qui la dirigent pr^tendaient en faire un moyen d'aclion politique ou d'in-
fluence personnelle.
Dans notre pays oh elle est n^e, elle avait diH jadis attendre pr^s de
vingt ans avant de conqu^rir le droit de cit^ par la r^glementation officielle,
brevet indispensable cbez nous pour attester Tutilite d'une institution;
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VARlfeTfeS. 905
d^sormais cette protection de rautorit^ Im est complMement acquise. Si
nous avions une crainte pour les creches, ce que nous redouterions pour
elles ne serait plusTindiff^rence des pouvoirs publics, mais au contraire
an int6r6t trop sympathique qui se tradairait par une ing6rence trop
minutieuse. Le d^sir de la perfection est certes iooahle en lai-m^me, mais
il pourrait devenir funeste si, par une r^glementation trop 6troite, il ren-
dait le fonctionnement de la creche trop difQcile; s'il d6courageait les
bienfaiteurs, race ombrageuse et jalouse, qui, avant toute chose, veut
rester ind^pendante, libre de ses dons, de ses id^es, de sa mani^re de
comprendre et de faire le bien.
Ge danger, nous sommes heureux de pouvoir le dire, parait encore
^loign4. Le gouvernement a sanctionn^ dans le courant de Tannde derni^re
avec quelques amendements inspires par une pens^e bienveillante et libe-
rate, le d^cret et le r^glement minist^riel que le Gonseil sup^rieur de
TAssistance avait ^labords dans sa session de mars 1897. Notre Bulletin
donne le texte de ces deux documents, l/administralion s'est attach^e h
n'y inscrire que les prescriptions qu'elle a jug^es indispensables pour
sauvegarder la sant^ des enfants ou pour ^clairer Tautorit^ et le public
sur le fonctionnement et les r^sultats des creches. Ces prescriptions sont
toutes utiles, et la plupart sont d'une execution relativement facile. Des
instructions minist^rielies ult^rieures, destinies ii expliquer et k completer
les r^lements, recommanderont aux creches, non plus h titre d'obligation
absolue, mais k titre de conseil, certaines precautions qu'elles devront
s'atlacher k suivre toutes les fois que cela ne leur sera pas impossible.
Nous ayons le ferme espoir qu'en appliquant Tensemble de ces r^glements
et en r^digeant ses circulaires, Tadministration saurajusqu'au boutr^sister
k ce besoin de r^glementation k outrance que Ton n'ose bl^mer trop
sev^rement puisqu'il part d'un bon naturel, mais qui est le fl^au de notre
pays oil il semble la caract6ristique parliculiere de notre temps, qui y
paralyse et y eteint I'initiative individuelle.
L'arr^te ministeriel demande aux creches d'adresser chaque ann^e au
pr^fet un compte moral et un rapport medical. II ne reclame de compte
financier qu'aux creches qui sol lici tent une subvention de Tautorite
pablique. Nous applaudissons k ce respect de Tautoritepour rind^pendance
des oeuvres privies ainsi que pour le secret des bienfaiteurs qui ne sau-
raient admettre que I'administration vienne contr61er le chififre de leurs
dons, la forme et la destination qu'ils donnent k leurs bienfaits.
Toutefois nous n'hesitons pas k engager les creches k publier leur
compte financier et k Tenvoyer au pr^fet avec leur compte moral, mdme
quand elles ne demandent pas de subventions aux dispensateurs de Tar-
gent des contribuables. Les cBUvres privies, qui, pour accomplir le bien
qu'elles font avec tant de charity et de d^vouement desint^resse, viventde
dons volontaires, out toujours int^r^t k faire connattre leur gestiou finan-
cifere comme elles oht int^ret k faire connaltre leur fonctionnement et les
r^sultats qu'elles obtiennent. Le fondateur des creches etait tellement
p6netre de cette pens^e qu'il avait pose en principe que les creches doivent
toujours ouvrir leurs portes au public :« Le public, ecrivait-il en epigraphe
de ses r^glements, est inspecteur des creches. » Fidele k ce principe, nous
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906 REVUE PHILANTHUOPIQUE,
n'avons jamms n^gligS l*«ecasuMi 4*flBgag«* les creches & publier leurs
comptes, comme le font, si utileinent pour eltes et po«r le public, les
oeuvres anglaises et am^ricaines. Publier ses comptes, ce n'est pas trahir
la charil^ de ses bienfaiteurs, c'est prouver au public que Toeuvre m^rite
sa confiance. En principe moral, toule oeuvre qui fait appel aa public doit
compte au public de I'usage qu'elle fait de ses dons : c*est son devoir, c'est
aussi son int^r^L D'autre part, monlrer les difflcult^s que rencontre une
(Buvre et les r^sultats qu'elle obtient, indiquer comment elle fontionne et
ce qu'elle coiite, c'est aider les personnes qui voudraient cr6er des cpuTres
semblables : la publication des comptes est, vis-i-vis des autres oeuvres, un
acte de charit6. Nous ne saurions done trop la recommander k toutes les
creches.
Le conseil municipal de Paris et le conseil gdn^ral de la Seine s'effor-
cent de multiplier et d'am^liorer les creches. Nous avons dit, Tan dernier,
que le conseil municipal avait instilu^ une Commission sp^ciale charge
de lui donner des avissur toutes'les questions relatives & ces ^tablissements.
Sur la demande du conseil g^n^ral de la Seine, cette Commission com-
pl6l6e par Tadjonclion de membres nouveaux, ^clairera d^sormais I'Admi-
nistration ddpartementale comme I'Administration municipale.
Les deux conseils ont, cette ann^e, €\ev6 leurs crMits ant^rieurs. Au
budget municipal, le credit destine h, encourager les cr^cbes existantes a
H^ port^ de 100000 h 115000 francs, et le credit destine k provoquer la
creation des creches nouvelles a ^t^ ^lev^ de 32 000 & 40 000 francs. Au
budget d^partemental, le credit vot^ a 4i^ de 28000 ^francs environ pour
les creches de Paris, et de 15 000 francs pour celles des communes subur-
baines.
D'apr^s une decision qui a il6 prise d'accord par les deux Conseils, les
subventions municipales et d^partemeutales ne seront d^sormais allou^es
qu'aux creches qui s'engageront ^ se conformer^ une s^rie de conditions
propos^es par la Commission des creches. Parmi ces conditions, les unes
sont relatives k Tbygi^ne : elles prescrivent Temploi exclusif du lait st^ri-
lis6 et la pes^e p^riodique des enfants. Les autres, dont la redaction estun
peu vague, pourraient, contrairement sans aucnn doute k i'intention de
ceux qui les ont indiqu^es, sembler une sorte de main mise surlescr^ches
subventionn^es. Esp^rons qu'elles n'auront pas pour efTet d'effaroucber et
de d^conrager les ad minis trateurset les bienfaiteurs de ces ^tablissements.
La cbarit^ priv6e accepte avec reconnaissance un conseil, mais elle est
jalouse de son ind^pendance.
Deux creches ont 6t^ ouvertes^ Paris en 1897 : Tune rue Francois-Millet,
Tautre rue Bolivar. Toutes deux ont 6t^ construites avec de larges subven-
tions municipales et sont tr^s bien am^nag^es sous le rapport de I'installa-
tion mat^rielle et hygi^nique. Toutes deux ont eu le grand bonneur de voir
leur inauguration pr^sid^e par M°^" F^lix Faure.
Plusieurs autres cr^cbes sont en vole de construction et ne tarderont
pas k 6tre ouvertes, notamment avenue Mac-Mahon et rue Schemer. Gelle-
ci est destin^e k remplacer la creche actuellement 4tablie rue de I'Ouest.
A Levallois-Perret une jolie creche, unie k une ^cole matemelle, a ^t^
ouverte par un grand industriel qui a voulu venir en aide k ses ouvri&res et
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VARlfeTES. 901
qui admet dans ses 6tablissemenls les enfants des autres families du quar-
(ier et du voisinage.
Nous avons appris aussi Touverture de plusieurs creches k Nantes, d
Baccarat, k Rochefort, k Lillebonne, k Aurillac, ainsi qa'k Bucarest. D'autres ,
sont projet^s a Perpignan, & Rennes, au Havre, k Lille, etc.
Malheureusement, comme compensatioa de ces creations nouvelles, nous
avons vu disparaitre deux creches de Paris, qui. Tune et I'autre, existaient
depuis plus de cinquante ans. La creche Notre-Dame-de-Lorette a H6 fer-
m^e au mois d'avril et la creche Sainte-Oeiievi^ve, au mois d'aoiit, toutes
deux par la m^me raison, rimpossibilit6 de trouverun Ipcal. A Paris, c'est
presque toujours par suite de cette difficult^ que les creches disparuesont
ii€ abandonn^es. H eu est de m^me dans les autres grandes villes. Ge fait
nous autorise k r6p^ter que le mode le plus efQcace de propager comme
d'am^liorer les creches seraitd'assurerun local auxoeuvres qui s'^tablissent
ou k celies qui existent.
Pour atteindre ce but, il y aurait deux moyens. L'un consisterait k de-
mander aux communes de fournir un local k toute oeuvre dont elles
auraient v^rifl^ la vitality el les bonnes conditions. Cette forme de subven-
tion serait k]a fois la plus utile pour la cr^he et la moins on^reuse pour
la commune. Seulement, il faudrait que la commune n'abusM pas de l*au-
tori t^ que lui donneraient ses subsides pour absorber I'oeuvre priv^e, pour
lui 6ter toute ind^pendance et, par consequent, toute ardeur. II faudrait
qu'elle stit se contenter d'aider, d'encourager, de guider Taction priv^e
sans r^teindre, que le d^sir de rendre service a la population (dt son seul
mobile, son seul but.
L'autre moyen,nous Tavonsindiqud bri^vement dans notre dernier Bu/-
letin. 11 faudrait accorder plus facilement aux OBUvres les droits civils qui
leursont vraiment indispensables pourse constituer et pour fonctionner :
droit de placer ses fonds en son nom, droit de louer son local en son nom,
droit de devenir, en son nom, propri6taire de ce local. L'obligation impo-
s6e par la legislation actuelle de recourir pour tons ces actes 616mentaire8
et n^cessaires k Tintermediaire d'un pr^te-nom est une entrave deplorable
et vraiment sans inters t pour I'ordre general. II semblerait que Tancien
legislateur qui a, autrefois, etabli,sous un etat social absolument different
du n6tre, ces regies aujourd'hui surannees et inutiles, n'ait eu pour but
que d'empecher la creation et la marche des oeuvres privees. Pour ne pas
sortir de notre sujet actuel» nous pouvons remarquer que la crecbe Sainte-
Genevifeve existerait peut-etre encore si, comme Tavait demande en 1879
san ancienne Presidcnte, qui desiraitlui assurer par testament une dota-,
tion, elle avait obtenu le litre d'etablissement d'utiliie publique, ou mfime
si, tout simplement, elle avait eu le droit de prendre en sonnom le bail de
Tappartement qu*elle occupait.
Notre Socieie a continue en 1897 sa marche normale, etaucun incident
ne meriterait une mention particuliere si nous n'avions pris part ^ TExpo-
sition intemationale de Bruxelles, od le jury nous a decerne un dipldme
d'honneur, et si plusieurs de nos coUegues ne nous avaient representes au
Gongres de bienfaisance de Rouen, ou out ete discutees plusieurs ques-
tions relatives aux creches.
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908 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Nous avons le devoir de remercier, comme toas les ans, les bienfailears
dont le concours g6n6reux nous permel de continuer noire oBUvre de pro-
pagande et de soutenir par nos subventions quelques creches pauvres. Ces
subventions se sonl ^lev^es cette ann6e ^14 HOG francs, r^partis entre
vingt-neuf creches. Suivant notre tradition ancienne et constante, nous les
distribuons, dans la limite de nos trop modestes ressources et sans distinc-
tion d'organisation laique ou congr^ganiste, k toutes les creches qui r^unis-
sent ces deux conditions : 6tre bien tenues et avoir besoin de nos secours.
Le minist^re de I'lnt^rieur nous a continue son allocation annuelle de
300 francs, en ^change de laquelle noas lui servons 500 exemplaires de
notre Bulletin trimestriel. II les distribue aux raaires des vilies manufac-
turi^res, k des fonctionnaires dont le concours est utile pour la propagation
et la surveillance des creches, et k un certain nombre d*industriels qui
emploient des femmes dans leurs ateliers.
Les cotisations de nos souscripteurs ont atteint le chiffre de 5 253 francs,
cbifTre sup^rieur k celui des annees pr^c^dentes. Ce resultat est dA a Tac-
tive propagande de notre d^vout^ tr^sorier, M. Marcel Guillet, qui s'efTorce
de combler les vides que la mort creuse dans les rangs de nos bienfaiteurs.
Nous avons eu le regret de perdre notammentdeux denos fiddles et g^n^-
reux souscripteurs, M"»* Foucart et M"»* Guidon. Gr&ce k une dernifere lib6-
ralit^, le nom de M"^^ Guidou continuera k figurer sur nos listes, parmi
ceux des souscripteurs'perp6tuels. Quelques-uns de nos souscripteurs nous
r^servent fld^lement leur cotisalion depuis la fondation de la premiere
creche en 1844 ! Si notre bonne fortune veut qu'ils jeltent les yeux sur ces
lignes, ilsy verront la preuve que leur pers6v6rante sympathie pour ToBuvre
qu'ils ont contribu6 k fonder il y a plus de cinquante aus n'^chappe pas
k notre gratitude.
Les dons qui nous sont adress6s se partagent en deux categories. Les
uns ne nous sont remis que pour les transmeltre k certaines cr^cbes d^ter-
minxes qui en sont les v6ritables destinataires. La veuve d'un ancien pre-
sident de la creche Bonne-Nouvelle nous a, comme les ann6esprecedentes,
donne pour cette oeuvre 200 francs, en m^moire de son mari. Une autre
bienfai trice, veuve d'un de nos anciens collogues, a adopts, en souvenir de
son mari, la creche de la rue Caulaincourt, silu^e dans un des quartiers
les plus pauvres de Paris ; elle nous a remis pour cette crfeche, 500 francs
par mois, soit, pour Tann^e enti^re, 6000 francs. Nous lui exprimons, au
nom de la creche destinataire et au n6tre, une reconnaissance dont nous
faisons remonter I'hommage au collogue aim^ et regrette dont la Creche
Arthur Panckoucke portera d^sormais le nom.
La seconde cat^gorie de nos dons se compose des sommes qui nous
sont adress^es sans destination particuli^re et qui viennent augmenter nos
ressources gen^rales. Nous citerons, comme tons les ans, parmi nos dona-
teurs, la Chambre des notaires, la Gompagnie des Assurances generates,
la Chambre syndicate des Agenls de change, la Chambre des avou6s de
premiere instance et celle des avou^s d'appel, les deux branches Incendie
et Vie de la Gompagnie d* assurances la Nationale et la Chambre des com-
missaires-priseurs. Cette ann^e, le Credit Foncier de France s'est joint,
par deux dons gen^reux, k nos anciens bienfaiteurs.
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YARlfeTfeS. 909
Une de nos bienfaitrices accoutum^es, M"« Dursus de Courcy, a eu la
boni6 d'organiser une veiite de charity et un concert dont elle a bien
Youlu atlribuer en parlie le produit k notre oeavre : noire part s'est Slev^e
k 700 francs.
EnQn nous temoignerons sp^cialement notre reconnaissance & la
doyenne de nos bienfaitrices qui est entree, le 31 d^cembre 1897, dans sa
centi^me ann6e. Quelques joars apr^s, elle nous a envoys son ofTrande,
500 francs, et, lorsque nous sommes all^ la remercier au nom de Toeuvre,
elle s'est excus^e de n'avoir pu, comme les ann^es pr^c^dentes, nous Tap-
porter elle-m^me, ayant 6t6 retenue au logis par une l^g^re indisposition.
<c Quand on est mont^ chez vous, nous a-l-elle dit gracieusement, on y est
trfes bien, mais il y a soixante marches k gravir, et c*6tait trop pour moi
cette ann^e. » Nous n'avons pas besoin de dire combien sont sinc^res les
voBUx que nous formons pour que noire bienfaitrice ait longtemps encore
le plaisir de nous remettre sa g6n^reuse offrande. Ce plaisir paratt 6tre
grand pour elle, car, nous a-t-on assure, sa plus douce joie est de faire
du bien, de se faire b^nir par les pauvres.
Par contre, nous ne retrouvons plus sur notre liste de 189T une autre
bienfaitrice qui, tout en gardant Tanonyme, nous a, plusieurs ann^es de
suite, envoys par Tinterm^diaire de M. Henry Sergent, notaire k Avranches,
un don g^n^reux de 1 000 francs. Cette ann^e, Toffrande accoutum^e ne
nous ^tant pas arrivde, nous avons craint d*abord qu'un malheur n'eiit
frapp6 notre donatrice. Nous avons eu la consolation d'apprendre que les
pauvres ne Tont pas perdue. Mais elle concentre d^sormais ses dons sur
une OBUvre locale k iaquelle elle consacre tous ses efforts. Nous n'aurions
pas voulu, au moment ou cessent ses bienfaits, les passer sous silence,
comme si nous les avions d^]k oubli^s, et nous r^p^tons encore ici Texpres-
sion de notre vive et profonde reconnaissance pour le pr^cieux concours
que de si loin et sans se faire connaltre elle a si largement donn6 k notre
CBuvre.
La creche Fourcade est toujours en pleine prosperity. En 1897, elle a
secouru 131 enfants et compt6 11 856 joum^es de presence. On trouvera
plus loin le compte special de cette fondation dont le budget est compl^-
tement distinct du budget g^n^ral de la Soci6t6 des creches.
Eugene Marbeau.
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CHRONIQUE ETRAINGERE
Allemagne.
LES GAISSES D*£PABGNE EN SAXE
Depuis vingt-cinq aus, les caisses d'^pargne du royaume de Saxe ont
pris un grand d^Teloppement. En 1870, il n'existait dans le Royaume que
142 caisses d'^pargne; en 1880, on en comptait 175; en 1890, ce chiffre
s'^levait k 220, et en 1895 h. 247. Les operations efTectu^es suivaient ^gale-
ment une marche ascendante, comme en t^moigne ie tableau que yoici :
Montant total Moyenne
Annies. det d<p6tt. dMd^pdtiparcalsM.
Marks. Marki.
1870 115720000 814800
1880 338807000 1925000
1890 581720000 2644200
1895 741898000 3003600
DeschifTresqui prSc^dent, il r^sulte que le nombre des caisses d'^pargne
saxonnes s'est augraente, depuis 1870, dans la proportion de 14 p. 100 et
que le montant total des d^pdts s'est accru dans la proportion de 54 p. 100.
Belgique.
l'^pargne sgolairb
Au 31 d^cembre 1894,le nombre total des ^coles primaires de toute
nature en Belgique, pour garcons et lilies 6taitde8538 avec 988881 ^l^ves
(494780 gari^ons et 494101 fllles).
D'apr^s le Bulletin de VOffice du Travail, on pratiquait T^pargne dans
5 684 ^coles, soit 66 p. 100 du nombre total de celles-ci. 214084 enfants
(116 792 gargons et 97 292 fllles), soit 22 p. 100 de la population scolaire
totale, poss^daientui) livret et 46 274 enfants, soit 4,7 p. 100 (23 900garcons
et22 374filles),6pargnaientsans encore en avoir un.Le montant total de leur
epargne6taitde5 472398 francs(2889 868 francs aux garcons et2 582 530aux
niles).
LES SOa^T^S SCOLAIRBS DE TEMPERANCE
Au 31 d^cembre, il y avait en Belgique 4 026 ^coles primaires de garcons
ou mixtes (dont 3 069 communales et 957 adoptees ou subvenlionn^es) f.vec
104 297 eleves. Sur ce nombre, 1 834 ^coles, soit 45 p. 100, possedaient des
soci^t^s de temperance groupant 34 158 ei^ves garcons de 11 ansaumoins,
soit 33 p. 100 de la population scolaire totale.
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CHRONIQUE fiTRANGfeRE. 911
Depuis la fondalion del'oeuvre, 64344 ^Ifeves ont pris Tengagement de
renoncer k Fusage des boissons fortes.
Danemark.
LOi Du i5 JANVIER 1898 suR l'assurance gontre les accidents (1)
La responsabilit^ des patrons en cas d'accidents du travail vient d'etre
I'objet d'une loi promulgu^e le 15 Janvier 1898, et dont voici les princi-
pales dispositions :
itendue d' application de la loi, — Le droit aux indemnit^s accord^es,
en cas d'accident sarvenu dans le travail, s'dtend k tous les ouvriers et
apprentis des exploitations industrielles, des mines, carri^res et chantiers
de construction, des entreprises de transports, des magasins et entrep6ts,
et, en gSn^ral, de toute exploitation soumise, en raison du travail m6ca-
nique qui s'y efifectue, k Tinspection des fabriques. Les employes ne sont
admis au b^n^flce de la loi que s'ils participent directement k la partie
technique m^canique de Texploitation. Sont exclues toutes les personnes
dont le gain annuel dipasse 2400 couronues (2) (3000 francs environ).
Enfin, les accidents causes soit volontairement, soit par negligence grave,
ne donnent pas droit k indemnity (art. 1 k 4).
Taux des indemniUs.
10 En cas d'incapacit^ absolue de travail dont les consequences deOni-
tives ne sont pas encore fix6es, il est allou6 au bless^, k partir de Texpira-
tion de la treizi^me semaine, une indemnity journaliere ^gale k 3/5 du
salaire quotidien, avec minimam de 1 couronne et maximum de 2 cou-
ronues par jour. Si Tincapacit^ est partielle, rindemnite ci-dessus est
r^duite en raison de la capacity de travail restante.
2<> Quand Tincapacite de travail est consid^r^e comme permanente,
Tindemnite est allou4e k la victime sous forme de capital. Si I'incapacit^
de travail est absolue, le capital est ^gal k 6 fois le salaire annuel, avec
minimum de 1800 couronnes et maximum de4800 couronnes. Si I'inca-
pacite est partielle, le capital all ou^ est une fraction de la somme pr^c^-
dente calcul^e, en raison de la capacity de travail restante. De plus, le
bless6 recoit Tindemnite journali^re, calcul^e d'apr^s les regies indiqu6es
au n9 1 ci-dessus, pour une p^riode de 13 semaines. De la somme ainsi
calcuiee, on d^duit le montant de Tallocation journali^re qui a €i€ d6j^
attribute au bless^ par application des dispositions du n<* 1. Les blesses
flg^s de plus de 30 ans et de moins de 55 ans peuvent demander la trans-
formation en rente viag^re du capital qui leur est dil.
3° Quand Taccident entraine la mort, les ayants droits recoivent une
indemnity fun^raire de 50 couronnes et une somme ^gale k 4 fois le salaire
annuel du d^funt, avec minimum de 1 200 couronnes et maximum de
3 200 touronnes. Le Conseil d*assurance ouvrifere determine le mode suivant
lequel cette somme doit etre partag^e entre les ayants droit. (Art. 5 et 18.)
(1) Bulletin de VOfpce du travail (mars 1898).
(2) La couronne danoise a une valeur nominale de gr., 4032 d'or, soit 1 fr. 3892.
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912 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Garantie des indemnitis. Mode d^ assurance.
Le chef d'entreprise peut rester son propre assurear. II est, dans ce
cas, garaDt des indemQitSs, et ies victimes d'accidents ainsi que leurs ayants
droit ont leur cr^aDce privil6gi6e en vertu de Tarticle 33 de la loi sur Ies
faillites.
Le chef d'entreprise peut se d^charger de son risque, en s'assurant k
une soci^t^ d*assurance mutuelle ou anonyme reconnue et approuv^e par
r^tat. Toute disposition du contrat de travail qui consisterait a faire sap-
porter, dans ce cas, k Touyrier tout ou partie de la prime d'assarance, est
nuHe de plein droit. (Art. 8 k 11.)
Conseil d'assurance ouvri^e.
II est cr^e un Conseil d'assurance ouvrUre qui se compose d'un president
et de deux membres, dont un m^decin, nomm^s par le roi, de deux
patrons et de deux ouvriers appartenant aux exploitations assujetties. Les
patrons sont d^sign^s par le ministre de I'lnt^rieur, et les ouvriers ^lus par
les membres des caisses de maladie.
Le Conseil revolt les declarations d*accidents et Qxe les indemnit^s en
capital, les indemnit^s journalieres 6tant d^termin^es par accord entre Ies
parties int^ressees. Si cet accord n'intervient pas, le Conseil statue en der-
nier ressort. (Art. 13 k 21.)
Espagne.
MESURES PREVENTIVES CONTRE LA VARIOLE
Le 29 ao6t 1896, k la suite d'une ^pid^mie de variole, le conseil
d'hygi^ne de Madrid pr^sentait au ministre un projet de r^lementation
dont nous reproduisons d'apr^s la Higiene popular lesprincipauz passages :
10 Conform^ment k la circulaire minist^rielle du 10 Juin, il est recom-
mand6 aux m^decins des bureaux de bienfaisance de propager la vaccina-
tion et la revaccination dans les families de leurs malades, surtout pour les
personnes ^g6es de douze k trente ans. Les m^decins devront signaler tons
les malades soign^s par eux, afin qu'on puisse connaltre ezactement le
nombre des cas de variole.
2<* Sit6t qu'un cas se pr^sente, on doit proc^der k I'isolement du ma-
lade, k la disinfection du logement, et les locaux oi!i il a s^joum^ doivent
6tre blanchis apr^s une ^nergique disinfection.
3° Les v^tements des varioleux, au lavage, ne seront jamais mdl6s aux
autres avant d'avoir ^16 ploughs dans un liquide disinfectant.
4° Les objets k I'usage du malade, comme les vases par exemple, qui
ne peuvent 6tre d6sinfect6s, seront d^truits par le feu.
5<* Les varioleux qui ne peuvent ^tre soign^s chez eux seront conduits
k Thdpital en prenant loutes les precautions n6cessaires.
6° Les malades de cette cat6gorie qui devront 6tre conduits dans les
^tablissements de bienfaisance, le seront au moyen de voitures sp^ciales,
destinies exclusivement k cet usage, et de preference au moyen de bran-^
cards, ceux-ci pouvant etre desinfectes immediatement et dans de meil-
leures conditions.
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CIIRONIQUE tTRANGfiRE. 913
7<> 11 est recominand6 aux employes d'alcade dans les divers districts
de Madrid^ d'exercer, par tous les moyens en leur pouvoir, une surveillance
active sur les lieux et habitations dans lesquels ils connaissent ou soup-
fonnent Texistence de cas de varioie, afin d'^viter des absences de decla-
ration toujours dangereuses, notamment dans les ^tablissements oil la
nature des objets vendus el Taffluence da public peuvent donner lieu h un
contage imni^diat. M. D.
CONGRfeS INTERNATIONAL D'flYGlfeNE ET DE D^MOGRAPfllE (1898)
VHygi^ne populaire de Madrid consacre son num6ro de novembre au
Gongr^s international d^hygi^neetde d6mographie qui doit se r^unir^ Ma-
drid du 10 au i7 avril 1898. Ce Congr^s sera accompagn^ d'une Exposition
d'Hygi^ne qui aura lieu dans le local derExpositionconligukrHippodrome.
Le premier Congr^s international d'bygi^ne fut tenu h Bruxelles en i 877.
Vinrent ensuite ceux de Paris (1878), de Turin (1880), de Geneve (1882), de
la Haye (1884), de Vienne (1887), de Londres (1891), et de Budapest (1894).
Le septi^me Gongr^s, celui de Londres, comptait 2483 adherents et 400
dames : 1 132d616gu6s officiels y repr^sentaient 25 gouvernements, 197 uni-
versitds et soci6t6s savantes de divers pays, 366 villes et soci6tes anglaises;
39venaientde Tlnde et de Geylan et 19 desautres colonies. Au dernier Gon-
gr^s, celui de Budapest, prirent part 2240congressistes et 317 dames, com-
prenant 1171 d^l^gu^s officiels, dont29 repr^sentaient des gouvernements
strangers, 68 des universit^S) 163 des villes et292des sociltes savantes.
<c Les premiers Gongrfes n'eurent point d*exposition. Mais on ne tarda
pas A comprendre la n^cessit^ d'y joindreune exposition des objets les plus
utiles et les plus nouveaux du riche materiel de Thygifene modeme et des
r^sultats des Etudes d^mographiques. »
Les hygi6nistes et les d^mographesy figurent avec leurs Qeuvres;livres,
cartes, photpgrapbies, tableaux, etc.; les ing^nieurs et arcbitectes expo-
sent des plans, des modules, des mat6riaux de construction ; les pbysiciens,
les cbimistes font connaltre leurs nouveaux proc^d^s et leurs instruments
d'analyse; les fabricants pr^sentent des appareils; les villes envoient des
m^moiressur leurs institutions sanitaires, et leurs ^tablissements de bien-
faisance ; le commerce, Tindustrie y font valoir leurs produits ; le corps de
sant^ militaire y montre son materiel, ses ambulances, etc.
La revue madril^ne publie in extenso le r^glement g^n^ral du Gon-
grfes, tel qu'il fut vol6 A Budapest en 1894.
Nous nous contenterons de tirer un r^sum^ succinct de ce programme,
pour donner un l^ger aper^u des questions propos^es.
GLASSE 1. — HYGlfeNE
Section 1. — La microbiologie appliquie d t hygiene.
Dans cette section on traitera, entre autres sujets, des derniers r^sultats
obtenus au sujet de la propagation de la fi^vre typbo'ide. De Texamen
du bacille cholerique dans les eanx, sa difference avec les autres
esp^ces similaires. Des moyens de preservation, etc.
RBVUB PBILANTHROPXQUB. — U. 58
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914 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Section 2. — Propkylaxie des infirmiUs transmisHbles.
Li mite d'action des pouvoirs publics. — Vaccination obligatoire. — La
l^pre. — La pellagre. — Organisation du service de sant^ auz fronti^res
en temps d'^pid^mies exotiques. — Cremation. — Disinfection.
Section 3. — Climatologie et topographic midicales,
Le climat et la topographic consid^r^s comme ^l^ments ^tiologiqaes des
maladies infectieuses. Zones climatologiques en Espagne. — G^ographie
de la tuberculose. — Carte de la tuberculose en Europe. — £tude de la
climatologie par rapport k cette aCTection.
Section 4. — Hygiene urbaine.
Cette section n'a pas k traiter moins de neuf questions, int^ressant au
" plus haut point la sant6 publique dans les viJles (mortality, irrigation,
assainissem^nt des cimeti&res, des abattoirs, etc.).
Section 5. — HygUne de I' alimentation.
Du lait, comme agent de transmission dela tuberculose. — Moyens rapides
d'analyser les eaux potables. — Alcoolisme. — Melanges des vins. —
Conserves alimentatres, etc.
Section 6. — Hygiene infantile et salaire.
Causes qui contribuent k la mortality cbez les enfants ; moyen d'y rem^dier,
Statistiques comparatives. — Propbylaxie de la conjonctivite pumlente
cbez les nouveau-n^s. — Hygiene de la vue, maladies contagieuses. —
Sanatoria maritimes. — Colonies scolaires. — Avantages et inconv6-
nients de Tinternat au point de vu6 hygi^nique.
Section 7. — Hygiine de iexercice et du travaiL
Travail des femmes et des enfants. — Hygiene dans les mines, les chemins
de fer, etc. — Hygifene du cyclisme, etc.
Section 8. — Hygiene militaire et navale,
Dans les pays insalubres, dans les h6pitaux, asepsie. — Disinfection, etc.
Section 9. — Hygitne vdUrinaire civile et milittUre,
Moyen d'emp^cher la propagation de la tuberculose aux animaux domes-
tiques et sa transmission k I'esp^ce humaine. N^cessit^ dun r^glement
de police sanitaire sur les animaux de boucherie, etc.
Section 10. — Architecture et constructions sanitaires.
H6pitaux. — Asiles. — Etablissements p^nitentiaires, etc.
CLASSE II. — DEMOGRAPHIE
Section 1. — Technique de la statistique dAmographique,
MIthode. — Organisation. — Moyens pratiques pour obtenir une statistique
exacle des maladies, de la morlalit^, do la long^vit^ suivant les profes-
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CHRONIQUE tTRANGfeRE. 915
sions. — N^cessit^ d'une classiQcation rationuelle scientiftque des mala-
dies. — ClassiQcation des professions.
Section 2. — Les r^sultats de la statistique appliques a la d6mographie.
La statistique d^montre-t-eile que la moyenne de la vie s'fest 6lev6e au
cours de ce siftcle? — Manages consanguins; leur influence sur les
enfants. — Prostitution. — Natality. — Maladies mentales. —■ Epilepsie.
Section 3. — D4mographie dynamique.
Mouvement de la population en Europe. — Lois quid^terminent Taccrois-
sement exag6r6 de la population dans les grandes villes. — Moyen d'y
rem^dier — Emigration des Espagnols. — Inconv^nients et perils de la
depopulation rurale. — Influence des mesures d*hygi6ne sur I'augmen-
tation de la population, etc.
Marius Dupont.
UraiTuay .
l'eNSEIGITBMBNT des AVEUGLES a PARIS (1). — LES SALLES D'aSILE
DE FERRARE
Relatant son voyage k travers TEurope, nn r^dacteur du Bulletin de
renseignement primair^ de Montevideo (2) parle avec un veritable en thou-
siasme de Texposition des aveugles qui eut lieu au mois de mai dernier
dans les salles du Figaro. J*y assistai quatre jours de suite avec ma femme,
dit-il, et nous vlmes \k des merveilles. L'enseignement des aveugles est h
coup silr une des plus* prodigi eases conqu^tes de notre si^cle. En voyant
les hommes et les femmes occup6s aux travaux divers de Tindustrie, les
jeanes gardens et les jeunes filles lisantlthaute voix, les groupes de musi-
cians executant leurs morceaux, on ne ponvait s'empdcher de songer k la
grandeur de I'oeuvre .
« C'^taient des ouvriers couteliers, manianl leurs outils avec assurance
et promptitude : ceux-ci travaillaient le bois avec une ^tonnante dexte-
rMf ceux-l& faconnaient le papier avec grdce et l^g^ret^, d'aulres, tracant
de» caract^res en relief, pr^paraient des livres pour leurs corapagnons
d'infortune et... tous 6taient aveugles. j»
L'auleur raconte que celte exposition fut pour lui et pour sa femme
une des grandes attractions de Paris, qu*il y passait des heures en litres k
voir travailler les jeunes aveugles, garcons et filles, et qu'il a ^ludi^ les
proc6d6s d'enseignement, les m^thodes, le materiel scoluire, etc., afin de
pouvoir Hre utile aux aveugles de TAm^rique. II raconte combien il a ^t^
6mu, en voyant une petite fille aveugle, toute jeune, jouer avec une poup^e
qu'elle habillait et d^shabillait avec une extreme facility, tandis qu'une
autre lisait k haute voix k ses compagnes un r^cit amusant.
(1) Voir Histoire d'un aveugle, par II. Napias. Revue Philanthropique, t. II,
n" 10, p. 346 et suiv.
(2) Bulletin de VEnseignement primaire, 9* ann6e, n*» 101, p. 280 et suiv.
Montevideo, nov. 1897.
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916 REVUE PHILANTHROPIQUE.
En pleine sant^, on ne songe pas k la maladie. Et pourtant, parmi les
enfants de nos 6co1es, il en est qui sont destines k perdre la vue. En pr^yi-
sion de cet horrible malheur, I'auteur voudrait que, dans les ^coles, tons
les ^l^ves soient exerc^s k la construction de travaux en papier, de boltes
de carton, etc., h lire, les yeux fermSs, des caract^res en relief, k distin-
guer des objets divers au toucher, dans le but de d^?elopper et d'afflner
le sens du toucher. « Je lance I'id^e, dit-il, siir qu'elle ne sera point
perdue. »
En Italie, I'auteur a assist^ k la calibration du cinquanti^me anniver-
saire de la fondalion des Salks cVasile de charity de Ferraro. Elles sont au
nombre de deux. L'une porte le nom de Louise GriUenzonij Tautre celui de
Victor' Emmanuel, Gette derni^re, on le devine, doit sa fondation k une
g^n6rosite du roi galantuomo. Les enfants resolvent a Tasile de la
soupe et du pain. Beancoup de soleil, beaucoup d'air, beaucoup de mou-
vement et beaucoup de liberty : telle est la consigne. Les salles sont spa-
cieuses, les cours vastes, les jardins ombrag^s et riches en plaotes de toate
nature. « Une infinite de sentiers, des monticules couverts de gazou, des
petits ponts el des pieces d'eau, convertissentartiflciellement T^cole en un
camp ou les petits jouent, courent, chantent, se constituent en armies
minuscules qui d^feudent un mSme drapeau, le drapean yert, blanc et
rouge du royaume d'ltalie. »
Le mobilier ne peut r^pondre aux prescriptions de I'hygi^ne lorsqull
faut se soumettre aux exigences de T^conomie administrative. II se com-
pose ici de larges tables auxquelles cinq enfants prennent place pour
lire, 6crire, travailler, manger le pain et la soupe qu*on leur dislribue k
midi et faire la sieste Tapr^s-midi.
De grandes salles de r^cr^ation sont utilis6es, les jours de pluie et
pendant Thiver, quand les cours et les jardins sont couverts de neige.
« Aux jours de f^te nationale, les enfants se r^unis^ent dans les jardins ;
chacun tient un petit drapeau italien et marche en cadence en chaiitant
des hymnes k la patrie et k ses protecteurs. Ces jours-li, Tordinaire est
moins frugal que de coutume, et on distribue des souliers, des chapeaux,
des tabliers, des chemises, des mouchoirs. »
L'enseignemeUt est surloutobjectif et le materiel emprunl6 au syst^me
Froebel.
Les cuisines sont vastes, 6clair6es, situees au rez-de-cbauss6e et les
plats sont transport's aux dilT'rents stages par un ascenseur. « Dans le
plat de soupe se trouve la viande hach^e menu aOn d'dviter les accidents
qui ne manqueraient pas de se produire si ces petits messieurs 'taient
armes de couteaux et de fourchettes. II y a m'me des combats k la cuil-
l^re : petites vengeances, au cours desquelles le plus courageux frappe
son compagnon pour lui prendre son pain ou lui d'rober une cuiller'e de
soupe. »
Le matin, les p^res accompagnent leurs enfants k Tasile avant de se
rendre k leur travail ; le soir, ils viennent les chercher k la sortie des fa-
briques et des ateliers, « et c*est un spectacle attrayant et ^mouvant que
cette sortie de Tasile ». . .
Marhjs Dupont.
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INFORMATIONS
Le Gonseil snp^rieur de I'Assistance publique.
Uq d^cret du 9 mars 1898 modiQe comme suit Tarticle V' du d^cretdu
15 Janvier 1894 :
Le conseil sup^rieur de I'Assistance publique est compost de soizante
membres, savoir : qualorze membres de droit et quarante-six membres
norom^s par d6cret.
Sont membres de droit du conseil :
1° Le directeur de Fassistance et de Tbygifene pnbliques;
2<> Le directeur de Tadministration d^partementale et communale ;
3« Le directeur de I'administralion p6nitentiaire ;
40 Le directeur des afiFaires civiles au minist^re de la justice;
5«> Le directeur du service de sant6 au minist^re de la guerre;
6^ Le directeur du service de sant^ au minist^re de la marine;
V Le president du comity consul tatifd'hygi^ne publique de France;
8» Le secretaire perp6tuel de TAcad^mie de m^decine;
9<^ Les inspecteurs g^n^raux de Fassistance publique ;
10* Le directeur de Fassistance publique de Paris;
110 Le directeur du Mont-de-Pi6t6 de Paris.
Les membres nomm^s par d^cret comprennent six s^nateurs, douze
deputes, vingt-huit personnes d^sigodes soit par les fonctions administra-
tives ou 6iectives qu'elles remplissent, soit par leur competence sp^-
ciale.
Reglementation des Creches.
D^CRET DU 2 MAI 1897
Le President de la R^publique fran^aise,
Vu le d^cret du 26 f^vrier 1862, concernant les creches;
Vu I'arr6t6 minist^riel du 30 juin 1862, ayant le m6me objet;
Vu les deliberations du Gonseil supedeur de I'Assistance publique, en
date des 10 et 11 mars 1897;
Sur ie rapport du ministere de Finterieur,
Deere te :
Article premier. — La creche a pour objet de garder et de soigner les
enfants en bas dge pendant les heures de travail de leur mere.
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918 REVUE PHILANTHROPIQUE.
Les enfanls y re^oivent, jusqu'4 ce qu'ils puissent entrer k T^cole ma-
ternelle ou jusqu'k ce qu'ils aient accompli leur troisi^me ann^e, les soias
hygi^niques et moraux qu'exige leur dge.
Art. 2. — Nulle creche n'est ouverte sans rautorisation du Pr6fet;
cettc autorisation n'est refas^e que lorsque les locaux destines k la creche
ne satisfont pas aux conditions indispensables d'hygi^ne ou lorsque les
personnes qui doivent dtre pr^pos^es k r^tablissemenl ne pr^sentent pas
des garanties suffisantes.
Art. 3. — L'arrfit^ pr^fectoral qui autorise Touverlure d'une creche
fixe le nombre des enfants qui pourront y Hre r^unis.
Art. 4. — Les personnes ou les soci^t^s qui poss^dent une creche
d^sigoent au Pr^fet un repr^sentant auquel sont adress^es les notiilcalions
pr6vues par le present d6cret et par le r^glement ^dict^ en execution de
I'article ci-dessous.
Art. 5. — Le ministre de I'lnt^rieur et le Pr6fet oot le droit de faire
inspecter les crdches par leurs del^gu^s ; lis se font rendre compte p^rio-
diquement du fonctionnement des cr^cbes et s'assurent qu'elles se cou-
forment aux conditions qui leur sont impos6es.
Art. 6. — Si le Pr6fet juge que, par une installation d6fectueuse ou
par d^faut de soins, une cr^cbe met en danger la vie ou la sant6 des en-
fants, il ordonne la fermeture provisoire de cette cr^cbe. Le repr^sentant
de r^tablissement est mis en demeure de rem^dier aux d^fectuosit^s si-
gna16es. Apr^s trois mises en demeure resides sans effet et sur avis con-
forme du Conseil d^partemental d'bygi^ne, Tautorisation accord^e k la
creche est retiree.
Art. 7. — En cas d'6pid4mie survenue'dans une creche, cette crfecbe est
ferm^e, soit par les personnes ou les soci^t^s qui la poss^dent, soil
d'office par le Pr6fet; elle n'est r^ouverle qu'apr^s que le Pr6fet a fait
constater qu'elle a 6t4 d^sinfect^e.
Art. 8. — Le ministre de I'lnt^rieur determine par un r^glement :
- !• Les conditions d'bygi^ne que doit remplir tout local affects i une
cr^cbe, ainsi que celles qui doivent Hre observ^es dans la tenue de IVta-
blissement ;
2* Les garanties exig^es des directrices de creches et des personnes
qui, dans les cr^cbes, donnent les soins aux enfants ;
3<> Les registres que les directrices des creches doivent tenir.
Art. 9. — Le d6cret susvis^ du 26 f^vrier 1862 est abrog^.
Art. 10, — Le ministre de Tlnt^rieur est cbarg^ de Tex^cution du pr^
sent d6cret.
Fait a Paris, le 2 mai 1897.
F^ux Faure.
Par le President de la Republique :
Le ministre de VlnUrieur^
Louis Barthou.
ARR^6 MINISTfeRIEL DU 20 D^CEMBRE 1897
Le ministre de Tlnt^rieur,
Vu le d^cret en date du 2 mai 1897 concernant les cr^cbes;
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INFORMATIONS. 919
Vu les deliberations da Gonseil superieur de TAssistance publique en
date des iO et 11 mars 1897;
Sur la proposition du Conseillerd'Etat, direoteur de TAssistance et de
I'hygi^ne publiques ;
Arrfite :
Article premier. — Les dortoirs et les salles oCi se tiennent les enfauts
re^us dans les creches ont au moins une hauteur de trois metres sous
plafond, et pr^sentent au moins une superficie de trois metres et un cube
d'air de neuf metres par enfant.
Le Pr^fet peut toutefois, dans des cas exceptionnels dont il est juge,
autoriser des dimensions moindres, sans que le cube d'air puisse jamais
dtre inf(§rieur k buit metres par enfant.
ARf. 2. — Les salles doivent etre largemenl eclairSes et a^r^es. Elles
doivent pouvoir 6lre convenablement chaufir§es et dans des conditions by-
gi^niques.
Art. 3. — Personne ne passe la nuit dans une salle occup^e le jour par
les enfants.
Pendant la nuit, les salles sont aSr^es et tous les objets dont se com-
pose la literie demeurent exposes k fair.
Art. 4. — Le inobilier est simple, facile k laver et k d^sinfecter.
Art. 5. — Chaque enfant a son berceauou son lit, son peigne, sabrosse,
sa tetine s'il est allaite au biberon; tous les objets dont il se sert sont nu-
m^rotes et ne servent qu'^ lui.
Son mouchoir, sa serviette, son costume ne servent ^galement qu'4 lui
taat qu'ils n'ont pas et6 lav^s; sa literie est d^sinfect^e avant de servir i un
autre enfant.
Toute couche salie est chang^e sans retard. Le linge sale est imm^dia-
tement pass^ k I'eau.
Art. 6. — L'usage des biberons k tube est interdit.
Art. 7. — Dans chaque creche un mddecin a la direction du service
hygi^nique et medical.
Art. 8. — Aucun enfant n'esL admis k la creche sans dtre muni d'un
certiftcat medical datant de moins de trois jours : ce certiOcat constate que
Tenfant n'est atteint d'aucune maladie transmissible et, s'il est convales-
cent d'une de ces maladies, qu'ii a franchi la p^riode pendant laquelle il
pouvait la transmettre.
Si un enfant reste huit jours sans venir k la creche, il n'y est r^admis
que muni d'un nouveau certiflcat relatant les constatations ci-dessus.
Aucun enfant n'est admis s'il n'est vaccina ou si ses parents ne con-
sentent k ce qu'il le soit dans le deiai fix<§ par le m^decin ou par Fun des
m^decins de la creche.
Art. 9. — Aucun enfant paraissant attaint d'une maladie transmissible
ne doit 6tre garde k la creche.
Tout enfant qui parait malade doit 6tre imm^diatement s^par^ des
autres et rendu le plus t6t possible kssL m^re.
Art. 10. — Les creches sont tenues exclusivement par des femmes.
Art. 11. — NuUe ne peut devenirdirectrice d'une creche si elle n'avingt
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920 REVUE PHILANTHROPIQUE.
et un ans accomplis et si elle n'est agr6^e par le Pr6fet da d^partement.
Nulle ne peut fitre gardienne si elle n'est pourvae d*un certificat de
morality d61ivr6 par le maire ou, encas d'omission oude refas non jasU-
156 du maire, par le Pr^fet.
Nolle ne peut devenir directrice ou gardienne d'ane creche siellen'6ta-
blit par la production d'un certiflcat medical qu'ellen*est atteinte d'aucune
maladie transmissible aux enfants, qu'elle jouit d'une bonne sanl6 et
qu'elle a 6t6, depuis moins d'un an, vaccinae ou revaccin^e.
Art. 12. — La creche doit avoir une gardienne pour six enfants ^^sde
moins de dix-huit mois et une gardienne pour douze enfants de dix-huit
mois k trois ans.
Art. 13. — Les locaux et le mobilier de la crdche sont nettoy6s chaque
jour ou la creche est ouverte. Les gardiennes tiennent les enfants et se
tiennent elles-m6mes dans un 6tat de propret6 rigoureuse.
Art. 14. — La directrice de toute crfeche doit tenir:
1° Un registre matricule sur lequel sont inscrits les noms, pr^noms et
la date de la naissance de chaque enfant, les noms, adresse et professions
de ses parents, la date de Tadmission, et, s'il y a lieu, au moment des
r^admissions, la constatation de la vaccination;
2« Un registre sur lequel est mentionn6 nominativement le nombre des
enfants presents chaque jour ;
3° Uq registre ou sont inscrites les observations et les prescriptions du
m6decin ou des m6decins;
4<^ Uq registre ousont consignees les observations des inspecteurs et des
visiteurs.
Art. 15. — Les enfants recus dans la creche sont pes6s chaque semaioe
jusqu'd r^e d'un an, et chaque mois de un k deux ans : le r^sultat de ces
pes6es estsoigneusement relev6.
Art. 16. — Le rfeglement inter! eur de la creche est afQch6 dans un en-
droit apparent d'une des sailes; il est communique au maire de la com-
mune.
Art. 17. — Le repr^sentant de la creche transmet chaque ann^e au
Pr^fet un compte moral de Toeuvre ainsi qu'un rapport medical dres86
conform^ment au module adopts par le ministre de Tlnt^rieur.
Uu compte financier est joint k toute demande de subvention.
Art. 18. — L'arr^te minist^riel du 30 juin 1862 concemaut les creches
est rapporte.
Art. 19. — Le Conseiller d'etat, Dtrecteur de I'assistance et de Thy-
gi^ne publiques et les Pr^fets sont charges, chacun en ce qui le conceme,
de rex^cution du present arrSte.
Fait k Paris, le 20 d6cembre 1897.
Louis Barthou.
Arrdt^s municipaux r^glementant la vente du lait ^cr^m^.
Dans la stance du 14 mars 1898, le Gomite consultatif d'hygi^ne pu-
blii|ue de France a en i ^mettre son avis sur des arr^t^s municipaux 76gle-
mentant la vente du lait ^cr^me. Le maire de Lyon (18 juillet 1896)» et le
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INFORMATIONS. 921
maire de Bordeaux (3 novembre 1896), ont pris des arrM6s imposantaux
marchands, livreurs et debitants qui font le commerce du lait, de placer
sur cbaque recipient destine a recevoir le lait ^cr^m^ mis en vente, une
dtiquette fixe, apparente et lisible, portant les mots de : lait 6cr^m6.
Apr^s discussion, le Gomit6 consultatif a d^ciar6 que le maire tire de
ses pouvoirs de police, le droit de ne permettre la vente au detail d'une
denr^e qui a subi une manipulation ayant pour effet d'en alt^rer les qua-
lit^s essentielles, qu'i la condition que le public soit pr^venu de cette
manipulation par une annonce sp^ciale sous forme d'^criteau ou d'6tiquette.
Le maire ne fait alors que prSvenir une fraude qui tombe sous le coup de
Particle premier de la loi du 27 mars 1851 ou de I'article 423 du Code p6-
nal, suivant qu'il s'agit d*une denr^e alimentaire ou de tonte autre denr6e
ou march and ise.
Du reste, le tribunal de simple police de Bordeaux a reconnu la l^ga-
\M de Tarr^t^ pris par le maire de cette ville.
Si les maires de toutes les grandes villes prenaient des arrSt^s ana-
logues, un grand progr^s serai t fait au point de vue de Thygi^ne. Les en-
fants, les vieillards et les malades en particulier, en retireraient grand
b^n^flce.
Les Services d' Assistance publique de Paris.
A la suite d'une proposition de M. Ars^ne Lopin et sur le rapport de
M. L. Acbille, le Gonseil municipal a vot^ le projet de deliberation ci-
apr^s :
L'administration est invitee k etudier sur les bases [suivantes la mo-
dification de la comptabilite et des services administratifs des mairies de
Paris.
UnU^ de direction. — En confiant au secretaire chef de bureau de la
mairie les fonctions remplies acluellement par le secretaire-tr6sorier du
bureau de bienfaisance.
UniU de caisse. — La caisse du Bureau de bienfaisance et celle de la
mairie seront r6unies sous la direction du secretaire chef des bureaux de
la mairie.
UniU de personnel. — En rattachant au personnel de la Prefecture de
la Seine le personnel parliculierement affecte au Bureau de bienfai-
sance.
En outre, le Gonseil a vote, sur la proposition de M. Louis Lucipia, la
proposition suivante, dont les considerants ont ete empruntes au conseil
superieur de T Assistance publique :
Le Gonseil,
Gonsiderant que Tassistance publique est due k ceux qui se trouvent
temporairement ou definitivement dans Timpossibilite physique de
pourvoir aux necessites de la vie ;
Gonsiderant que c*est Tadministration municipale qui pent le mieux
connaitre ceux qui ont droit aux secours ;
Gonsiderant que TAssistance publique est d*essence communale,et ce
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922 REVUE PHIL ANTHROPIQUE.
sp^cialement k Paris, ou la plus grandesomme de subsides estfournie pa
la ville de Paris,
fimet le vobu :
Que Tad ministration de TAssistance publique de Paris soit communa-
lis^e.
Mitablissements partiouliers affeot^s au traitement
des malades. — Pouvoirs de radministration.
Le Gonseil d'etat vient de statuer sar une question parliculi&rement
delicate. U s'agissait de savoir quelle est T^tendue des pouvoirs de police
d'un maire sur un ^tablissement particulier affects au traitement des ma-
lades.
Une demoiselle N... demeurant h, Limoges, re9oit et soigne gratuite-
ment chez elle un certain nombre de malades. Mais le maire de Limoges
a pris un arrSt^ lui interdisant de recevoir cbez elle aucune personue
atteinte de tuberculose ou autre maladie contagieuse.
La demoiselle N... a d^f6r6 Tarrfit^ municipal au Gonseil d'Etat pour
exc^s de pouvoir, et au cours de Tinstance le ministre de Tint^rieur, k qui
TalTaire a 6t6 communiqu^e, a ^mis un avis tendant k Tannulation de cet
arr6t6. L'avis minist^riel se fondait notamment sur ce que Tadministra-
tion ne pourrait ezercer aucune surveillance sp^ciale sur un immeuble
priv^, ou sont recus des malades, et sur ce que les pouvoirs de police
g'6n^rale du maire ne lui permettent pas de porter atteinte au droit que
chacun poss^de d'user de sa propri^t^ comme il Tentend.
Le Gonseil d*£tat a rendu un arr^t duquel il r^sulte que, s'il appartient
k un maire d'user de ses pouvoirs de police dans le cas ou la requerante
aurait nlglig^ de prendre les mesnres de precaution n^cessaires, il ne
pent, sans porter atteinte au droit de propriety, interdire k an particulier
de recevoir chez lui aucune personne atteinte de tuberculose ou d'autre
maladie contagieuse.
L'arr^te du maire de Limoges a done 6t^ annuls. II faut d'ailleurs re-
marquer qu'au cours d'une enqu^te k laquelle il a ^i6 proc^dS par uii in-
specteur g^n^ral du service de Thygi^ne publique, il a 61^ recounu que la
maison de la demoiselle N... a re^u un am^nagement r^pondant aux exi-
gences de la science et pr^sentant toutes les garanties.
La R^forme des Expertises m^dico-l^gales.
A la suite de la condamnation en premiere instauce du D' Laporte, la
Society de m^decine de Paris a ^tudi^, k la demande d'un de ses membres,
M. le D' Rougon, les r^formes k apporter aux expertises m^dico-l^gales.
Sur le rapport de M. le D' Martin-Durr, et apr^s une discussion appro-
fondie k laquelle ont pris part MM. A. Voisin, Rougon, Millet, Martin-Durr,
Ladreit de la Gbarri^re, de Ranse et Moran, la Soci^t^ a vote ces conclu-
sions :
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INFORMATIONS. 923
La Society de m^decine de Paris appelle Tattenlion des pouvoirs pu-
blics et des corps comp^tenls sur les r^formes a apporter aux expertises
m^dico-legales et leur soumet les vceux suivants :
1^ Creation d'uo Institut m^dico-16ga] ;
2<> Contre-expertise dfes le d6but de rinstniction ;
3® Non-responsabilit^ p6cuniaire des experts;
4<^ Nomination des mddecins experts par la plus haute personnalit6
judiciaire du ressort;
5^ Creation de commissions sup^rieures de contrdle;
6** Non-fonctionnarisation des m^decins experts.
Subventions du Gonsell municipal
aux CEuvres philanthroplques.
Le Gonseil municipal de Paris a accord^, sur le rapport de ,M. Haoul
Bompard, au nom de la 5* commission, les subventions suivantes sur le
budget de 1897 aux oeuvres pbilanthropiques (nous comptons les creches,
les dispensaires, les soupes populaires, les patronages, les bureaux de
placement, etc.
Mutuality maternelle, 5000 francs; allaitement matemel et refuge-ou-
vroir, 10 000 francs; orphelinat des Arts, 1200 francs; orphelinat de la
bijouterie, 1000 francs; maison maternelle, 6000 francs; patronage des
Hb^r^s, iOOO francs; society de patronage des jeunes d6tenus et liber^s,
500 francs ; les engages volontaires, 1800 francs; OEuvre des lib^r6es de
Saint-Lazare, 500 francs; h6pital'et dispensaire francais de Londres,
300 francs; society frangaise de bienfaisance de Londres, 500 francs; asso-
ciation Yosgieune, 300 francs; association corr^zienne, 200 francs; soci6t6
parisienne de sauvetage, 300 francs; les secouristes francais, 800 francs;
society fran^aise de sauvetage, 200 francs ; soci^t6 de secours aux marins
francais naufrag^s, 200 francs; 6cole et dispensaire dentaires, 1000 francs;
association V. Hauy, 400 francs ; hdpital des Dames francaises, 1 000 francs;
CBUvre des loyers de Bercy, 200 francs; oeuvre des loyers du 11'' arrondis-
sement, 2000 francs; solidarity de Picpus et du Bel- Air, 300 francs; caisse
des invalides du 14* arrondissement, 200 francs ; oeuvre des loyers du
16« arrondissement, 1000 francs; oeuvre des loyers du 17* arrondissement,
3000 francs; denier des veuves et des vieillards, 300 francs; pr6t gratuit,
3000 francs; pain pour tous, 4500 francs ;asile de nuitMouffelard, 300 fr.;
pr^t gratuit de couvertures du 2' arrondissement, 200 francs; prSt gratuit
de couvertures du 3« arrondissement, 300 francs; oeuvre des couvertures
du 1" arrondissement, 200 francs; vestiaire de Montmartre, 1000 francs;
visiteurs des pauvres, 200 francs; soci^t^ du mariage civil, iOOO francs;
total : 50900 francs.
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924 REVLE PHILANTHROPIQUE.
Socl6t6 protectrice de TEnfance.
ASSEMBL^E GJ^N^RALE DU 13 MARS 1898
L'Assembl^e g^n^rale annuelle de la Soci6t6 protectrice de TEnfance a
eu lieu le 13 mars, k 2 beures, dans la salle de la Soci^t^des Agriculteurs
de France, 8, rue d'Athdnes.
M. Stephen Li6geard, ancien d^put^, president de la Soci^t6 nationale
d'Euconragement au Bten, qui avait consenti k accepter la pr^sidence
d'honneur, avait, k ses cdt^s, M. le D' Gouraud, president de la Soci6t6
protectrice de Tenfance; MM. Bertin et le D** Sevestre, vice-presidents; le
D' Blache, secretaire g6n6ral ; les docteurs J. Bergerou, B^clfere, Derocq,
Gallois,Herard, Leroux, Porak, Riocreux, Variot, Voisin(Aug.); MM.Carlier,
tr^sorier de la Soci6t6, Andr^, E. Bezan^on, Mansais, Georges Picot, M. le
D*" Georges Petit.
M. le D** Gouraud, president, a prononc^ une allocution fort applaudie.
Apr^s avoir rappel6 tout le bien fait par TCEuvre, il a exprim6 Tespoir
que la Society protectrice de Tenfaiice pourrait, grdce k une loi vot^e aux
premieres deliberations par le Senat, intervenir d'ofQce pour poursuivre.
les parents indignes qui martyrisent leurs enfants.
La fin de son allocution a ete trfes ecoutee et a vivement impressionne
FAssembiee. Voici en quels termes M. le D' Gouraud a termine cette eio-
quente allocution :
« Yous le voyez, Mesdames et Messieurs, les circonstances sont solen-
nelles et passionnent si vivement Topinion publique que nos legislateurs
s'en sont emus; lis out voulu etablir une egale justice entre le crime et le
chAtiment et rendre plus rigoureuseune loi qui n'autorisait qu'une repres-
sion sans vertu, au prix de Tattentat qu'elle devait punir.
« Encore une fois, le mouvement d'opinion dont nous avons pris Tini-
tiative a porte ses fruits. G'est avec joie que je vous annonce la grande
reforme qui vient d'etre vot6e par le Parlement; la voix vengeresse qui
avait dej& ete favorablement entendue au Palais-Bourbon vient d* avoir son
echo au Luxembourg et le vole du 10 mars 1898 inaugure une ere 'nou-
velle, qui permetlra k la Societe protectrice de Tenfance de faire entifere-
ment son devoir et de rendre son action charitable.
« Tons, nous souvenant que nous sommes Fran(^ais, c*est-i-dire les
defenseurs des faibles et des persecutes, nous pourrons, maintenant, sau-
ver les petits enfants de France qui, sans nous, seraient devenus des
martyrs. »
M. Stephen Liegeard aprononce un eloquent discours frequemment in-
terrompu par les applaudissements, dans lequel il a rappeie la necessite de
proteger les petits qui naissent dans des families depourvues de tout et
dont le chef chdme trop souvent.
M. le D' Blache, secretaire general, qui a pris ensuite la parole, a rap-
peie eu termes emus le souvenir des membres de la Societe qui ont peri,
victime de leur devouement, dans la terrible catastrophe du Bazar de la
Charite, de tous les autres membres et des medecins inspecteurs morts
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INFORMATIONS. 925
dans le courant de Fannie et il a faitdes yqbux pour que les vides soient
combl^s ail plus tdt par de nouveaux adh^reuts, car Je nombre des mi-
s^res k soulager d^passe encore de beaucoup les ressoarces de la Soci^t^.
En 1897, la Soci^l^ a distribn6 3 947 secours repr^sentant nne somme
de plus de 34000 francs.
Les dons fails a la Soci6t^ par M. le ministre de rint^rienr, le Gonseil
g^n^ral de la Seine, le Gonseil municipal de Paris, par des ^tablissements
divers et par de» particuliers ont contribu^ k sauver un grand nombre
d'existences de pauvres enfants.
M. Blache oxprime toute sa gratitude aux dames qui se d^vouent k la
Soci^t6 en fabriquant des layettes pour les petits d^sh^rit^s, Pr&s de 7000
pieces de layettes ont ^t^ confectionn^es sp6cialement pour les prot^g^s
de la Soci^t^. On nesaurait trop admirer ce bel ezemplede solidarity form^
par ces dames el demoiselles qui, outre leur argent, ont donnS leur tra-
vail et leur temps, c'est-Ji-dire leur coeur lout en tier.
Ce sont tons ces d^vouements qui ont valu k la Soci6t6 le dipldme
d'honneur qu'elle a obtenu, en 1897, k FExposition de Bruxelles.
M. earlier, secretaire g^n^ral de la Compagnie du chemin de fer d*Or-
l^ans, tr^sorier de la Soci^t^, a rendu comple de sa geslion flnanci^re.
M. le D' P. Gallois a communique les travaux des m6decins-inspectetirs
de la Society; il a fait ressorlir le z^le et le d^vouement de ces collabora-
te urs qui, par charity et par humanity, acceptent de surveiller gratuile-
ment tons les nourrissons places dans leurs circonscriptions.
Les principaux laur^ats de cette ann6e sont les suivants :
MM. les docleurs Grosjean, de Montmirail (Marne), nomm^ membre
honoraire; Bauzon, de Ghalon-sur-Sadne, qui a obtenu la m^daille d'or;
MM. Barth^s, de Ghartres, Girat, de Neuvy Saint-S6pulcre (Indre), mSdailles
de vermeil.
MM.Duponl, de Nogenl-sur-Vemisson (Loiret), Laurent, de Saint-Saulge
(Ni^vre); Sulils, de la Ghapelle-la-Reine (Seine-et-Marne), m^dailles d'ar-
gent.
II a ete decern^ en outre 4 m^dailies de bronze et de nombreux rap-
pels de m^dailies.
M. le D' L^on Derecq, m^decin en chef du dispensaire de TCEuvre des
enfants tuberculeux, a proclam6 ensuite la lisle des recompenses p^cu-
niaires accord6es aux mhres nourrices. II a fait ressorlir les m^rites de la
femme du peuple qui, avec un budget d^risoire, arrive k Clever une fa-
mille souvent nombreuse, par des prodiges d*ingeniosiie et d'Sconomie et
qui, malgre ses lourdes charges, n'h^site pas k adopter des orphelins. « On
etaitdix d4j3i; lafamille augmente, voili tout! »
II a eie accords 4 prix de 100 francs k M»«» Maureau, Raffel,
Boulillier et Brandin, et 31 prix de 50 francs; ces 35 m^res nourrices ont
eu 328 enfants, sur lesquels 260 sont actuellement vivants.
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9K REVUE PHILANTIIROPIQUE.
Institution iwltomle des Jeunes Aveugles.
(PARIS — BOULEVARD DBS CCVAUBtt, 36)
L'lnstitution nalionale des Jeuoes Aveugles de Paris, qui a ^U fondle
en 1784 par Tillustre Valentin HaQy, est la premiere ^cole d*aTQ«xgles qui
ait exist^ dans le monde.
Les vicissitudes qu'elle eut a subir pendant ses cinquante premieres
amines anten^rent pour elle six collocations diff^rentes, toutes insufflsantes,
quelqnes-unes d^plorables a cause du contact qu'elles ^lablissaient. Enfin,
une lol du 18 juillet 1838 statua T^rection des bAtiments sp^ciaux ou I'ln-
stitution a^t^ transf^r^e le 9 novembre 1843.
L'Etablissement, bdti par Tarchilecte Philippon, occupe un rectangle
d'une superiicie de 11800 metres, dont 3 500 occup^s par des construc-
tions. II est serti dans un cadre form6 par le boulevard des Invalides, la
rue de Sevres, la rue Duroc et la rue Masseran. Au milieu de la cour d*en-
tr^e s*^16ve un groupe, ceuvre de Badiou, qui repr^sente le fondateur de
TEcole exp^rimeutant ses proc^d^s sur le jeune Le Sueur. Le fronton de
r^difice, dii au ciseau de JoufTroy, figure Hauy, inspire par la Charity,
pr^sidant aux travaux d'enfants aveugles. Les constructions se composent
d'un bdtiment central destine aux services g^n^rauz et de deux ailes lat6-
rales sym^triquement oppos^es; celle de droite attribute aux garcons, celie
de gauche r^serv^e aux filles.
Deux pavilions distincts, qui occupent ensemble une superiicie de
640 metres, sont affect^s au logement des professeurs. Le rez-de-chauss^e
de ces pavilions forme, dans chaque quartier, un vaste pr^au convert dans
lequel les ^ISves prennent leurs recreations en casde mauvais temps.
La chapelle et la salle des exercices publics embrassent le premier et
le deuxi^me etage du corps central de T^difice et peuvent ^tre r^unies ou
s^par^es au moyen de grandes portieres. Le chocur et la coupole de la cha-
pelle ont ete peints par Lehmann.
Les locaux sont distribu^s avec entente et largement a^r^s; les classes,
(Etudes, ateliers, r^fectoires, dortoirs et infirmeries sont bien emm^nages
et chauff^s par des calorif^res k eau et k air.
Liu vaste pr6au d^couvert, plants en quiuconce, est attenanl a chaque
quartier.
Une salle de bains contenant trente baignoires et les appareils k dou-
ches permet de faire baiguer les ei^ves au moins une fois tous les quinze
jours.
Ind^pendamment de Torgue d*eiude k deux claviers manuels, un cla-
vier p^desire et un syst^me k p^dales, qui se trouve dans chacun des quar-
tiers, un grand orgue construit par la maisonGavaill6-Goll etquicomprend
trente-six jeux, trois claviers k mains et un syst^me k p^dale est plac^
dans la salle des exercices publics. II sert pour les Eludes sup^rieures
pour le culte et pour les auditions.
II y a dans le quartier des garcons un atelier de tournage sur bois, un
atelier de fileterie, uu atelier de cannage et d'empaillage de si^ges et un
atelier d'accordage et entretien des pianos.
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INFORMATIONS. 927
Dans le quartier des jeunes filles, il existe on dfelier de fileterie et de
travaux de fantaisie (tricot, crochet, etc).
I /Institution poss^de aiissi ane imprimerie sp^ciale dans laquelle on
6dite un tr^s grand nomlire d'onvrages (litt^raturo ou musique) k Tusage
des avengles. On en tronve le catalogue k Tl^lconomat de T^tablissement.
La bibliothk[ue de Tlnstitution se compose de 250 volumes en relief et
de 1 600 volumes k Tusage d^s voyants.
L'institution re<^oit 150 gargons et 80 jeunes filles; elle relive directe-
roent du minist^re de rint6rieur. '^
Le directeur a sous son auiorit^, pour la surveillance de T^ducation et
de Tenseignement, dans le quartier des gargons, un censeur; et, dans le
quartier des jeunes flUes, une institutrice.
Un aumdnier est charge du service et de Tenseignement religieux. Des
mesures soot prises, de concert avec les families, pour rinstruction reli-
gieuse des enfants appartenant anx cultes non catholiques reconnus par
II y a pour le service de sant6 un m^decin et un dentiste ordinaires, des
mMecins, un oculiste et un chirurgien consultants.
Les ^l^ves sont admis de dix k treize ans.
La dur^e du cours d'^tudesest de huit anuses pour les ^l^ves musiciens
etde cinq ann^es pour les ^l^ves qui ne peuvent apprendre qu'une profes-
sion manuelle.
Le prix de la pension est de 1 200 francs,
Des bourses sont entretenues dans T^tablissement sur lesfonds de TEtat
et sur ceux des d^partements. Ges bourses sont diyisibles.
Une somme de 320 francs doit Hre vers^e, k Tentr^e de I'^l^ve, pour la
fourniture de son trousseau et son entretien pendant toute la dur^e des
etudes.
L'institution, k la fois ^cole secondaire et 4cole professionnelle, donne
k ses ^ISves, avec les soins spdciaux d*^ducation que n^cessile leur itat,
les connaissances qui ^l^ventla pens^e et m(irlssent la raison, el un metier
ou une profession qui doit les rendre ind^pendants. Elle est encore 6cole
normale pour la formation de ses professeurs, k qui elle confdre les
grades.
Outre Le Sueur, qui fut le premier ^l^ve d'HaOy, Fournier, qui fut son
collaborateur le plus dislingu^, Braille, qui compl6ta son oeuvre en inven-
tant r^crilure en points saillanls, d'autres aveugles, 61ev6s k Tlnstitution,
t>nt acquis une honorable notori^t^; Rodenbach exerga en Belgique, de
1862 k 1869, ann^e de sa mort, le double mandat de bourgraestre et de
d6put^; Penjon, laur^at du grand concours, chevalier de la Legion d'hon-
neur, fut professeur de math^matiques au lyc6e d'Angers; Mental se dis-
tingua comme facteur de pianos, et les perfectionnements qu'il apporta
dans son Industrie lui valurent la decoration de la Legion d'honneur ;
Foucaud, m^canicien habile, inventa divers appareils pour faciliter la cor-
respondance 6pi8tolaire entre les aveugles et les voyants ; Gauthier, Rous-
sel et Lebel, professeurs ^ I'lnstitution, ont laiss^ des compositions musi-
cales sacr6es et profanes d*nne grande valeur.
Dans un ordre moins 61evd, mais qui tSmoigne aussi hautement du
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928 REVUE PHILANTHROPIQUE.
bienfait de rinstruction donni^e anx aveugles, se trouvent les nombreux
oavriers et artistes sortis de Tlnstitution et rendus par elle k la vie utile et
ind6pendante. Les 6Uves qui n'ont pu que faire Tapprentissage d'un me-
tier, Tont g^n^raleraent I'exercer dans leur famille ; ceux qui, plus heu-
reusemeut dou^s, ontpu apprendre Taccord des pianos ou faire ieurs etudes
musicales, sont places comme accordeurs, professeurs de musique ou or-
ganistes. On oblient pour les' jeunes (llles aveiigles musicieunes des places
dans les communaut^s religieuses, dans les ouvroirs et dans les pension-
nats et ^coles laiques.
L'accord des pianos fait actuetlement yivre fort honorable men t plus de
deux cents anciens ^l^ves; quelques-uns m6me dirigent une maison de
vente oude facture de pianos.
Dix-sept ^glises importantes de Paris ont en ou ont encore des orga-
nistes formes k Tlnstitution. Un nombre considerable d'^glises, cath^drales
ou paroissiales des d^partements ou de T^tranger ont pour organistes
d'anciens ^l^ves de Tlnstitution qui sont tr^s estim^s comme professeurs
de musique.
Les r^sultats brillants que Ton pent constater dans les exercices publics
et les succ^s r6cents obtenus au Conservatoire oh deux 61^yes de cet ^ta-
blissement ont obtenu, en 1886 et en 1888, les premiers prix de la classe
d'orgue, attestent que Tlnstitution Nationale marche rapidement dans la
voie du progr^s.
Aoole professionnelle indigene pour la fabrioatton
des tapis.
L'Ecole professsionnelle indigene pour la fabrication des tapis a ^16
fondle k Alger, en novembre 1895, par M"' Delfau.
Elle a eu pour but : la renovation d'une Industrie qui tendait k dispa-
rattre, et qui avait ete jusqu'alors la seule occupation lucrative de la
femme indigene, elle seule pouvant s'y adonner utilement.
Les debuts eurent lieu avec quatre femmes de la province d'Alger: one
d'Alger et les trois autres des environs d'Orieansville. Quelques jours
apr^s arrivaient et s*iostaIlaient deux femmes kabyles de Fort-National.
Au bout de quatre mois, ces femmes, devenues ouvri^res, retoumaient
dans leur tribu, et faisaient place k huit femmes de la Bousariah, d^par-
tement d'Alger. Puis six femmes kabyles, dont deux femmes et quatre
petites fiUes, venaient augmenter ce nombre. EUes rest^rent toutes jns-
qa*k la fin de Tannee.
Les femmes de la Bouzariah rest^rent beaucoup plus longtemps que
les autres pour deux raisons : elles travailierent tr^s pen pendant la
periode de Rhamadan, et comme elles demeuraient tout pr^s d'Alger, on
perfectionna leur Industrie, pour avoir, en cas de besoin, des monitrices
sous la main.
La deuxi^me ann^e debuia avec 4 femmes des environs de Biskra et de
Gonstantine et 8 petites filles d'Alger. Puis vinrent 3 femmes de Tiaret,
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INFORMATIONS. 929
(d^partement d'Oran) et 5 d* Alger. II resta en ce moment k TEcole pro-
fessionnelle 6 femmes kabyles, 4 femmes ei 12 petites tilles d' Alger.
Les femmes seules sont plac^es en face des metiers. Les petites filles
ont une salle k part ; elles y sont occupies k preparer la^laine qui doit
servir an tissage. Entre temps et deux fois par jour, la sous-directrice,
M"^** Dugeuet, leur donue des iegons de choses, et leur fait aimer la France
et les Fran^ais. Deux jours par semaine, elles consent et brodent des T6te-
ments qui leur sont destines. Tons les soirs on leur apprend k lire.
Le Service des Enfants assistes de la Haute-Qaronne.
Le d^partement de la Haute-Garonnecomprenait, au 31 d^cembre 1896 :
Enfants trouv6s : gardens 56
— filles 59
Enfants abandonn6s : gardens 296
— filles 261
Orphelins : gardens 70
— filles 33
Moralement abandonn6s : gardens 52
— filles 37
Total seT
11 ressort des tableaux du mouvement que pendant I'ann^e 986 enfanls
ont 61^ hospitalises, 712 ont ^t^ secourus temporairement, soil au total
1,698 enfants qui ont b^n^flcie de TAssistance poblique pendant Tan-
n€e 1896.
M. le docteur Lanti^, iospecteur du service, expose dans son rapport
annuel la situation des enfants k lait; elle ne paratt pas tr^s satisfaisante :
i( J'ai dA placer, ^crit-il, au biberon la majeure partie des pupilles, en
raison de la p^nurie de nourricesau sein, et s'il est difficile de trouverdes
nourrices au sein, c'est k cause du prix de pension pay6 par TAdministra-
tion, qui n*^st que de 18 francs, et moyennant lequel il est tr^s difficile,
sinon impossible, de trouver one bonne nourrice. Le chiffre des d^cfts
n'augmente pas cependant; il a ^t^ de 74 en 1896, dont 43 se sont pro-
doits k la campagne et 31 k la creche.
« Je ne contesterai cependant pas la superiority de Tailaitementau sein,
et si la proportion des d^cfes n'augmenle pas, bien que les enfants soieot
eiev^s au biberon, la cause m'en parait facile k determiner. Les nourrices
au sein qui demandent des enfants assistes sont en general pauvresjet pre-
sentent un lait dej& vieux, d'oi!i il decoole qu'avantla periode de sevrage
de Tenfant le lait de la nourrice devient insufOsant, soit au point de vue
de la quantite, soit au point de vue de la valeur alimentaire ; de plus, il en
coi]lte a une nourrice qui a pris un enfant pour 6tre eieve au sein de se re-
soudre, vu I'insuffisance de son lait, k acheter du lait pour conduire Ten-
fant jusqu'au sevrage par Tallaitement mixte.
u En resume, si Tallaitement an biberon ne parait pas plusmeurtrier
REVUB PHU.AirrHROFlQUE. — II. 59
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930 REVUE PHILANTHROPIQUE.
pour les pupilles que I'allaitement au sein, c'est parce que la comparaUou
s'^tablit en regard de nourrices au seia de m^iocre valeur. »
Le nombre des enfants moralement abandonn^s etaitde89; il s'est
augments au cours de Fannie 1898.
Les d^penses ont^W en 1896, pour ces deux categories de pupilles, de
fr. 164 477 fr. 96. Sur cette somme, la part des secours temporaires a et6
de 61 553 fr. 62
M. le docteur Lanti^ n*a pas dissimui^ au Gonseil g^n^ral de la Haute-
Garonne que Teffectif des enfants moralement abandonn^s ^talt en vote
d'accroissement ; il s'exprime ainsi :
a II n'y a pas lieu de s'efTrayer de Taugmentatiou du nombre des mo-
ralement abandonn^s admis dans le service, car la question Qnanci^re me
paralt bien secondaire en presence du devoir social impost par la loi du
24 juillet 1889 en faveur de ce contingent d'enfants legitimes ou iiaturels
que la maladie, la disparition momentan^e ou dSflnitive de leurs parents,
leur negligence et leurs vices laissent sur le pav^ en proie k la misire,
dont les consequences fatales sont trop souvent la prostitution et la crimi-
nality.
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ECHOS
Visite du President de la RApabliqae k I'tiScole de mddeoine et k
rii6pital du Val-de-Gr&ce. — Le President de la Republique, accom-
pagn^ du g^n^ral Billot, ministre de la guerre, et du general Hagron, de
M. Le Gall et des commandants Lamy et Meaux Saint-Marc, s'est rendu au
Val-de-Grdce, dont il a visits Vhdpital et Vdcole. — M. Felix Faure a quitte
rflys^e a neuf heures et deraie, en landau decouvert. Le g^n^ral Zurlinden,
gouverneur militaire 'de Paris, entour^ des m6decins-inspecteurs Dieu et
Mathieu, du m^decin en chef Madamet, de Torficier principal Sauvant et
de Taumdnier Sihossier, Ta re^u dans la cour de Tecole. Apr^s que
M. Mathieu, medecin-inspecteur et directeur de I'^cole, lui eut presents les
ofllciers du Val-de-Gr4ce, le president de la Republique a commence la
visile de Th^pital. II a traverse success! vement deux salles con tenant des
blesses, une salle de fievreux, une salle de contagieux. Plusieurs fois 11
s'est arr^te devant les lits des blesses, adressant k ceux-ci quelques pa-
roles d'encouragement. Aux cuisines, le president a goiU6 la soupe du
matin; k la buanderie, il s'est fait expliquer le fonctionnement des appa-
reils mecaniques; dans T^cole, il a adress^ ses felicitations aux officiers,
professeurs ou 6l^ves. Avant de quitter le Val-de-Grdce, M. F^lix Faure a
Yisil^UQ coin curieux du vieii etablissement, une salle qu'on pretend his-
toriqoe et qu'on appelle la chambre d'Anne d'Autriche. C'est 1^, dit la
Mgende, qu^ T^pouse de Louis XIII recevait mysterieusement le c^l^bre
Buckingham. Un grand portrait de la reine orne cetle chambre, ou les
visi tears ne p^n^lrent que rarement.
Mort de M'"^ TMophile Roussel. — M. Theophile Houssel, le
grand et v^nerd philanthrope, a ^16 cruellement frapp^ dans ses affections
les plus chores; il a perdu sa fiddle et vaillante compagne.
Nous adressons au president de comity de patronage de la Revue Phi-
lantkrapique nos plus respectueuses et plus profondes condoleances.
La Tuberculose 4 TAoaddmie des Sciences. — A la suite de Ja belle
communication de M. Brouardel sur le logement insalubre, q\m nous
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932 REVUE PHILANTHROPIQUE.
avons reproduite, rAcad^mie des sciences, a cbarg^ uoe commission de
Fexamen dcs questions relatives k la toberculose et aux habitations insa-
lubres.
Cetle commission est form^e des deux secretaires perp^tuels, de
MM. Potain, Bouchard, Marez, Guyon, d'Arsonval, Lannelongue, Brouardel,
de Freycinet, de Jonqui^res, Chauveau, Duclanx et Armand Gautier.
M. le docteur Pierre Badin. — « M. le docteur P. Budin, bien connu
non seulement comme accoucheur, mais aussi comme p^diatre, par les
services qu'il a rendus aux nourrissons en perfectionnant et vulgarisant la
st^rilisfition du lait, vient d'etre d^sign^, d la presque unanimity de ses
collogues, pour occuper la chaire de clinique obst^tricale vacante par la
mort de Tarnier. La Faculty ne pouvait donner k ce grand homme de
science et de bien un successeur plus digne. » Ainsi s'expriment les
Archives de medecinedes Enfants, n^ 4, avril 1898.
Nous sommes heureux de nous associer k ces ^loges et de nous r^jouir
de la nomination — tardive et m^rit^e — de M. le professeur Pierre Budin,
notre savant collaborateur et ami.
L'CEuvre des Bnfants taberculeux. — L'Assembl^e g^n^rale de
rOEuvre des enfants tuberculeux s'est tenue le dimanche 6 f4vrier dans la
salle des Agriculteurs de France.
La stance s'est ouverte k 2 heures et demie, sous la pr^sidence de
M. Georges Picot, secretaire perp^tuel de TAcad^mie des Sciences morales
et politiques. A la tribune avaient pris place MM. les docteurs H^rard,
Blache, Leon-Petit, Bucquoy, Derecq, Vaquier, Georges Petit, M. Gautrelel,
membres du comit6 medical.
MM. le comte d'Ayguesvives, Cottreau; M"«« la marquise de Moustier,
la comtesse de la Vitlestreux, membres du Conseil d'administration. Dans
la salle le Comite des dames patronesses etait represents par M"'*' Thion
de la Chaume, Reynier, LSon-Petit, Duboys de la Vigerie, Derecq, Desprez,
Kuntzelmann, etc.
L'ordre du jour comportait une allocution de M. le D' HSrard, un dis-
cours de M. Georges Picot, le compte rendu financier dc M. le comte
d'Ayguesvives, le rapport du D*" L^on-Petil, secretaire general.
L'assembiee, k Tunanimite, a nomme les membres du Conseil d'admini-
stration pour une periode de quatre annSes, k dater du !•' mars 1898,
M"'^ la marquise de Moustier, M. le D*" Leon-Petit, membres sortants reeii-
gibles, M. Georges Picot, secretaire perpetuel de TAcademie des Sciences
morales et politiques en remplacement de M. Boinviiiiers, decede.
Recompenses d^cemdes k 1^ Association des Dames Fran^aises.
— L' Association a pris part k huit Expositions. Nice, 4884, internationale,
dipl6me d'honneur ; Rouen, 1884, regionale, dipl6me d'honneur; Beauvais,
1885, regionale, dipl6me d'honneur; Anvers, 1885, universelle, dipl6me
d'honneur; Boulogne, 1887, de la ville, dipldme d'honneur; LeHdvre, 1887,
regionale, dipl6me d'honneur; Paris, 1889, universelle. Grand Prix; Chi-
cago, 1894, dipl6me et medaille.
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feCIIOS. 933
M^daille de la Soci^t^ d'encoara^ement an bien.
Croix du gouvemement de Bulgarie, en reconnaissance des services
rendas pendanl la guerre entre la Bulgarie et la Serbie.
M6daille de reconnaissance de la Soci^t^ nationale de Tir, pour les
soins donnas aux malades sous les tentes au camp de Satory, 1892.
Qaatri^me Gongr^s pour T^tude de la Tuberculose. — Le qua-
tri^me Congrfes pour T^tude de la tuberculose aura lieu, k la Faculty de
m^decine du 27 juillet au 2 aoAt 4898, sous la pr^sidence de M. le pro-
fesseur Nocard (d'Alfort), et la vice-preside nee de M. le docteur H^rard.
Voici la liste des questions raises k Tordre du jour :
!<• Des sanatoria comme moyens de prophylaxie et de traitement de la
tuberculose; rapporteurs : MM. les docteurs Le Gendre, Neller et Thoinot.
2<> Des scrums et des toxines dans le traitement de la tuberculose;
rapporteurs : MM. les professeurs Landouzy et Maragliano.
3** Des rayons X (radioscopie et radiographic) dans la tuberdulose ; rap-
porteurs : MM. les docteurs Berleri, Claude et Tissier.
3® his Des rayons X dans le traitement de la tuberculose ; rapporteurs :
MM. les professeurs Bergenia, de Bordeaux, et Lortet, de Lyon.
4° La lutte centre la tuberculose animale par la prophylaxie ; rappor-
teur : M. le professeur Bang, de Copenhague.
5*> La lutte centre la tuberculose humaine par la desinfection des locaux
habitus par lestuberculeux; rapporteur : M. le docteur A. -J. Martin.
6^ De la propagation de la tuberculose dans I'arm^e et de sa prophylaxie ,
rapporteur : M. le jprofesseur Vallin.
7° Questions diverses au choix des membres du Congrfes.
Pour cea questions, le Comil6 d'organisation appelle Tattention sur
qnelques-unes d'entre elles, parmi lesquelles nous citerons celles-ci :
De la contagion de la tuberculose par le lait et la viande (faits authen-
tiques) et des moyens del'^viter. En particulier, des moyens pratiqiies d'ob-
tenir le lait sterilise et d'eng^n^raliser Temploi excessif.
De la sterilisation des viandes provenant d'animaux iuberculeux.
De la cure d'alfcitude et de la cure marine de la phlisie.
Les demandes d'adh6sion et de billets de chemin de fer doivent etre
adress6es (avant le 1*' juillet) h M. Masson, tr6sorier du Congres, 120, bou-
levard Saint-Germain.
Pri^re d'adresser tout ce qui concerne les communications du Congr6s
k M. le docteur L.-H. Petit, secretaire general k Menton (Alpes-Mari times).
Le Patronafi^e des Lib^r^s. — M. Barthou, ministre de Tlnterieur, a
preside, le 31 mars, Tassembiee annuelle de la Societe generate pour le
patronage des liberes.
M. Berenger, senaleur, qui est le president de cette oeuvre depuis de
longues annees, en a expose le but et le fonctiounement. II a insiste par-
ticulierement sur les difficuRes que non seulement les Iiber6s, mais mfime
les personnes ayant sur leur easier judiciaire une simple condamnation k
Tamende, rencontrent lorsqu'il s'agit pour eux de trouver un emploi.
La Societe de patronage, lors de sa fondation, en 1870, assista seule-
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034 REVUE PHILANTHROPIQUE.
ment unc cinquantalne de liber es. Elle en a aid^ plus de 4000 au cours
de rann6e demi^re.
M. Barthou, en quelques mots, a f61icit6 la 6oci6l6 et son president.
<( J'aurais manqu^, dit-il, h. un devoir et ^ nn plaisir en ne saisissanl pas
cette occasion d'af firmer ^ voire president la sympathie que nous avons
pour lui et pour Toeuvre qu^il preside. »
« M. Berenger est, dans ce pays, k la l^te de toutes les belles et nobles
initiatives. 11 vient de vous exposer j^loquemment les services rendus par
votre Soci6t6 et vous a dit ce qu'on attend d'elle encore. Je ne saurais
mieux dire.
<c 11 est en effet des condamnations qui ne doivent pas entrainer un per-
p^tueld^shonneur. Certains repentirs doivent 6tre encourages, car souvent,
les fautes ponies ne sont que des p^ch^s vlniels, ou des p^ch^sdejeunesse,
11 faut done les oublier et en faire disparattre les consequences, par la
rehabilitation judiciaire et par la rehabilitation morale.
« C*est Toeuvre excellente que vous accomplissez. Je vous en feiicite au
nom du gonvornement dont la sympathie vous est acquise et dont la solli-
cilude ne vous fera pas defaut. n
Assembl^e g6n6rale de rOrphellnat de la Seine. — Le dimanche
3 avril a eu lieu, dans le grand amphitheatre de la nouvelle Sorbonne.
TAssembiee generate annuelle dela Societe de TOrphelinat de la Seine, sous
la presidence de M. Jules Claretie.
M. Gaufres, president de Toeuvre fondee au lendemain de 1870-71, a
donne lecture du rapport sur la situation de la societe qui comptait, au
31 decembre 1897, 1 042 membres eta 165 pupilles presents iForphelinat ;
102 eieves, gar^ons et fiUes, et 63 apprentis, filles et gar^ons.
Une exposition des specimens des travaux des apprentis accompagnait
la distribution des recompenses aux orphelins, et Texcellente musique de
recole d'artillerie de Vincennes, dirigee par M. Ad. Blin, executait des
morceaux pendant la ceremonie, terminee par la Marseillaise.
Aprfes le rapport tres interessant de M. Gaufres, M. Jules Claretie a
prononce une allocution chaleureusement applaudie.
I<a Maison de travail de la rue Fessart. — M. Laurent, secretaire
general de la Prefecture de police, a inaugure le 30 mars, aux lieu et place
de M. Barthou, ministre de llnterieur, empeche, les nouveaux locaux de
la maison ouvriere de la rue Fessart.
Les ateliers, inslalies depuis 1891 pour la fabrication des margottins,
etaient assez defectueux. Grftce k des dons genereux, Toeuvre de TAssis-
tance par le travail, fondee par le pasteur Robin, a pu restaurer I'etablis-
sement, qui comprend : au rez-de-chaussee, un atelier pour 75 ouvriers,
un refectoireet une buanderie; au premier etage, un dortoir de quarante
lits et des lavabos.
L'inauguration a eu lieu en presence [de WA. Maurice Sibille, depute et
president de Toeuvre, de M. le pasteur Robin et de M. Mallet. M. Laurent
a prononce une allocution applaudie et a remis les palmes d'officier d'Aca-
demie k M. Mallet.
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feCHOS. 935
L'CEavre parlsienne des bains-douches. — Plusieurs philanthropes
et hygi6nistes, MM. A.-E. Hausser, doctear Ghaslin, William Hausser,
Honzeau et Escuyer ont r^soln de constituer, dans une reunion tenue au
Mas^e social sous la pr^sidence de M. Jules Siegfried, s6nateor, une soci6t6
parisienne de bains-douches k 20 centimes (savon compris) .
Une conference a 6i6 faite le 10 mars, sous la pr^sidence de M. le
docteur Brouardel, par M. Charles Cazalet, ancien adjoint au maire de
Bordeaux, sur les bains-douches k Bordeaux et d'ailleurs.
Le Patronafi^e des Jeunes Adultes liMr^s. — M. Milliard, garde des
sceaux, a preside le dimaoche 20 mars, dans la salle des conferences de
rUnion des femmes de France, rue de la Ghauss^e-d'Antin, Tassembiee
generate de la Society de patronage des jeunes adultes lib^r^s.
Apr^s une allocution de M. Charles Petit, conseiller k la Cour de cas-
sation, MM. Paul Bailli&re, secretaire general, et Adolphe D^my, tr^sorier,
ont donne lecture de leurs rapports sur la situation de Tassociation. Le
garde des sceaux a pris ensuite la parole. II a feiicite les societaires de
I'oeuvre de regeneration qu'ils ont entreprise.
LlJnion d^assistanoe par le travail da VI<* arrondissement. —
L'assembiee generale annuelle de TUnion d'assistance par le travail du
marche Saint-Germain a eu lieu le dimanche, 6 mars, k la mairie de
Saint-Sulpice, sous la presideace de M. Levasseur, membre de Tlnstitut,
reminent economiste qui rempla^a comme president de cette tr^s interes-
sante association M. Jules Simon.
Le but de I'oeuvre est d'abord explique par M. A. Trezel, docteur en
droit et avocat k la Cour de cassation; la societe, dit-il, combat la mendi-
cite professionnelle en remplacant Taumdne par le bon de travail, et
reieve, encourage les travailleurs victimes du ch6mage. Elle revolt, k cet
effet, dans ses ateliers les individus valides de tout Paris, leur assure sub-
sistance et logement. Depuis sa fondation, en 1892, TUnion a assiste
3166 travailleurs et les a tires de la mis^re dans la proportion de
82 p. 100.
Les Secouristes fran^ais. — La Societe des secouristes francais et
des inflrmiers volontaires a tenu, le dimanche, 6 mars, k deux heures,
dans le grand amphitheatre de la Sorbonne, son assembiee annaelle. Le
ministre de I'lnterieur, M. Barthou, devait la presider; mais, empeche au
dernier moment, il s'est fait representer parle prefet de police, M. Charles
Blanc. Un chceur et une musique militaire rehaussaient Tedat de cette
ceremonie. Apr^s Texecution de la Marseillaise, le prefet de police a pro-
nonce une allocution dans laquelle il s'est feiicite, lui, vieil ami de la
societe, de representer aupr&s d'elle M. Louis Barthou. II a rappeie que
Toeuvre humanitaire et patriotique de cette assemble s*est affirmee par
cinq ans d'eiforts. II a annonce que le president de la Republique venait
de signer le decret qui reconnatt d'utilite publique la Societe des secou-
ristes francais .
Apres avoir affirme que Paris ratiflerait sans reserve le decret du pre-
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
[ui donne UDe coos^cration officielle k\em Ligue saiate des cheva-
prompt secours », il a termini en disant que la reconnaissance
isiens ^crira sur le drapeau de la soci^t^ : « D^sint^ressement,
8 et courage ».
3 allocution a 6t^ accuelllie par de vifs applaudissements. On a
ensuite k la distribution des recompenses.
osition au profit de la Ligrue fk*aternelle des Bnfants de France.
Exposition des ceuvres des peintres Joseph, Carle et Horace Vemet
u dans le courant du mois de mai, k TEcole des Beaux-Axts, an
3 la Ligue fratemelle des Enfants de France qui vient d'etre reconnue
politique. Le Gomit6 d'organisation, preside par M. Ger6me,
i de rinstitut, comprend d'^minentes personnalit^s appartenant au
de Tart et de la litt^rature : MM. Henner, Glarelie, Francois Gopp^e,
I Dayot, Gustave Larroumet, comte Delaborde, Georges Glairin,
Le Roux, SuUy-Prudhomme, Paul Dubois, Victorien Sardou,
1 Detaille, g^n^ral Du BaFrail,amiraI[Miot, Henry Roujon,K8empfen,
e, de Nolhac, prince d'Arenberg, Henry Houssaye, etc.
exposition, oCi, grkce k Tobligeance des coUectionneurs, figurera
id nombre de toiles inconnues du public et de dessins in6dits,
ce comme un grand succ^s.
)rie au profit de la Maison de travail. — M. le ministre de
ur vient d'autoriser MM. Henri Rollet et Paul-fidouard Decharme a
ane lolerie de 40000 billets k 1 franc au benefice de la Maison de
itde Tasile temporaire de garcons, installSs, 13, rue de TAncienne-
e.
lacement de 20 billets de cette loterie donnera droit a une invita-
ituite fit la f^te qui sera donn^e k I'occasion du tirage. II y aura un
serie de 20 billets.
inscription est d^s k present ouverle en vue d'acheter une.voiture
bile qui sera Tun des gros lots de la loterie.
r^renoes de TAtelier familial. — Nous avons eu d^jd Toccasion de
e I'Atelier familial r6cemment ouvert, 16,rue de la Tour-d*Auvergne,
aes filles pr^voyantes qui ne jugent pas inutile d'apprendre un
soit un metier d*art appliqu^ k Tindustrie, soit simplement la cou-
ates notions utiles a tons les degr^s de renseignement des femmes.
d^vouee fondatrice de cetle ceuvre, M™* Elias, vient en quelque
en eiargir le programme : M. le docteur Meyer-Bernheim a bien
ir sa pri^re, donner aux jcuues habitudes de Tatelier, sous forme
irences, des lecons pratiques d'hygi^ne, « infantile ».
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REVUES ET PUBLICATIONS FRANgAlSES
Le Temps a public, sous la signature de M. Maxima Leroy, avocat
k la cour d'appel de Nancy, h propos de Taffaire de Chateau-Thierry,
une lettre sur les droits de Vindigent que nous reproduisons int^gra-
lement :
Le jugement du tribunal de Ghdteau-Thierry, que le Temps signalait ces
jours-cj, n'est pas une manifestation inopin6e et isol^e, sans racines dans
notre pass^ jnridique. Dans Taucien droit, dans les codes napol^oniens
m6mes, dans la jurisprudence de ce si^cle, commeutaire vivant de ceux-ci,
il y a quelques textesprecurseurs, quelques decisions judiciaires qui accor-
dent au pauvre un certain droit contre leriche. II est curieux de lesnoler,
comme les premiers sympt6mes du nouveau droit social en Yoie de
formation.
Dans Tancien regime, selon M. Glasson, dans sa magistrale Hisioire du
droit frangais (t. VI), le suicide de I'indigent n'^tait pas consid6r6 comme
an crime ; dans tous les autres cas, au contraire, la loi civile ^dictait cer-
taines peines, d'une origine eccl^siastique, contre ceux qui, sans ce motif
d'excuse, s'^taient supprimes. D'autre part, Tenfant avail le droit de
prendre, de voler k ses parents ce qui 6tait n^cessaire cl sa subsistance. Le
d^sir de vivre l^gitimait ce droit au voL II faut voir, ii est vrai, dans cetic
mansu^tude, la survivance visible du primitif communisme familial qui a
pass^, dans une plus faible mesure, dans notre droit, notamment dans le
Code p6nal et dans le Code civiL Gelui-1& excuse, en effet (mais excuse
seulement} Tenfant voleur : il ne va pas jusqu'k cr^er directement en sa
favour un droit, comme dans Tancienne legislation. 11 est curieux de con-
stater, en passant, dans le droit napoI6onien, cette survivance communiste,
bien oppos^e k ses tendances strictement individualistes et qu'ont origina-
lement renouvel^e les juges de Ch4teau-Thierry.
Dans le mdme esprit d'aide sociale, je citerai dans le Code civil le droit
pour certains parents pauvres k une pension alimentaire, a faire ,valoir
contre un parent plus riche. II est certain que Tid^e familiale iutervient
^alement ici ; mais cette disposition est nettement oppos^e, en contresens ,
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
au principe de Tappropriation individuelle : celui qui reclame sa part de
pain k sa famille, reclame sa part dans une forlane qu'il n'a pas person-
nellement contribn^ u cr6er; ce qui est contre les principes du droit
conimun.
Dans ces deux cas, tr^s nelteraent, la loi ac€orde des droits a des indi-
gents contre des plus riches, ^tablissant une solidarity, ^troite il est vrai,
entre certain es personnes, que quelques tribunaux ont voulu 6lendre sans
limite. Dans cet esprit, quelques conseils de prud'hommes ont essaj6 de
cr^er une nouvelle jurisprudence, mais que la Com* de cassation a arr^t^e
dansses germes. Sans aller aussi loin que ies juges de Chdteau-Thierrj, et
restant sur le terrain du droit civil, deux de leurs d^isioos, en 1853 el en
18$4,coQsid^r^reDt la « d^.tresse » comme une i< contrainte morale » viciant
le consentement au mSme litre que la violence morale ou physique d*un
tiers et, partant, ouvrant un recours contre celui qui en avail proflt^.
(V. Dalloz, 1853, 1,102.)
11 nous semble parfaitemenl legitime, psychologiquemenl et juridique-
ment, de consid^rer la faim, besoin physiologique irresistible, comme un
moyen de contrainte sur la volont^. Celui qui est en cas de legitime defense
a le droit, d'apr^s le Code p^nal, de blesser ou de tuer; celui qui est con-
Iraint est excusable et parfois plus. La faim, le couteau ou le revolver, c*est
lou, jours la m6me menace k la vie; le mobile de Tacte consid^r^ p^nale-
menl comme mauvais est, vis-i-vis de ces Irois facleurs, le d^sir violent el
irraisonn^ d'^chapper k la mort. 11 y a lieu d'^tendre dans un sens humani-
taire les termes stricts de la loi punissant ie vol, de la vivifier de quelques
sentiments qui ne nous semblent pas contradicloires avec son essence.
En effet, on pent juridiquement fonder notre th^se, en se basaiil sur
Farticle 64 du Code p^nal, ainsi concu : 11 n*y a ni crime, ni delit, lorsque le
privenu itait en 4tat de demence au temps dc faction ou lorsquHl a H6 contrcUnt
par une force d laquelle il n'a pu risister. L'article ne sp^cifle pas le genre,
le mode de la force contraignante et laisse toute latitude auxcommentaires
les plus compr^hensifs. L'exemple suivant pent indiquer la nuance qui
exisle entre la force physiologique personnelle, venant de I'^tre et r^agis-
sant sur lui, et la force venant d'un tiers, exl^rieure k Iui«m6me.
Un homme est devant une boulangerie : je le force k voter un pain sous
la menace d un revolver : les tribunaux lui appliqueront, sans h^siter,
Tarticle 6^. Repla^onsle mdme homme devant la m^me boulangerie, mais
seul et volant sous la pression de la faim. Gelle-ci vaut celui-U, comme
ineluctable imp^ratif de la volonte.
Entre les deux situations que pr^sente notre exemple, il y a lieu de
noter une difference : dans le second cas, I'homme poursuivi devra prouver
qu'il a fait tons ses efforts pour trouver le salaire ou I'aumdne n^cessaires
qu'il n'a pu ^chapper, malgr^ ses efforts, aux violences de la faim. La
preuve, il est vrai, d'un fait n^gatif, est plus difficile k faire que celle d'un
fait positif, mais on pent arriver, dans le deuxi^me cas de Texemple, k une
certitude morale, par I'etude des circonstances de temps, de lieu, d'ant^c^-
dents, etc., qui vaudra pour la conscience du juge, la certitude physique
du premier cas. II n'y a entre les deux situations qu'une nuance qui pou-
vail, autrefois, entrainer deux traitements diff^rents, mais qui, aujourd'hui.
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REVUES ET PUBLICATIONS FRANgAISES. 939
ne nous semble, k nos consciences modernes plus paternelles, plus tendreSf
selon Macaulay, qu'unefacon plus humaine d*^tendre un tezte de loi, dont
les id4es morales contemporaiues out bris6 le vieux moule ^troit.
II faut remarquer, d'ailleurs, que le mouvement de la jurisprudence
depuis une trentaine d'ann^es, vadans d'un tout autre sens que Tancienne,
prend des liberies avec les articles des Codes, errant des lois judiciaires,
pr^toriennes, anim^es de Tesprit social nouveau, comme dans Torsanisa-
tion tr^s compliqu^e du devoir patronal. II s'^labore un droit nouveau, en
favenr du faible, de Tindigent, de Tignorant; au capital s'attache une cer-
taine responsabiUt6; le propri^taire n'a plus le droit de loner des loge-
ments insalnbres et malsains; le cr6ancier ne peut plus consid^rer Ja per-
sonne de son d^biteur comme une annexe de la cr^ance, par la contrainte
par corps. A la vie juridique montent lentement tons les hommes, vers une
vie plus pleine, la lente ascension, comme dans la Ballade de Longfellow,
toujours plus haut, vers la lointaine justice, toujours plus proche de
rhumanit^«
M. le docteur L. Gourillon appr^cie ainsi, dans le Bulletin Officiel
du syndicat des midecins de la Seiney racquittement en appel du doc-
teur Laporte :
La Gour d'appel de Paris {7« cbambre), dans son audience du 4 mars, a
rendu un arr^t infirmant le jugement de la 9* cbambre du tribunal cor-
rectionnel, qui avait condamn^ notre confrere Laporte k trois mois de
prison avec application de la loi B6renger.
Get arrSt a ^t^ accueilli avec la plus grande satisfaction par tout le
corps m6dical. II reconnait qu'un accident survenant au cours d'une inter-
vention chirurgicale nettement indiqu^e n'est pas une faute op6ratoire, et
qu'en pareille circonstance, le medecin qui en est I'auteur ne tombe pas
sous le coup de Tarticle 319 du Code p6nal.
Devant la Cour d'appel, le d^bat a 6t6 port6 sur son veritable terrain,
celui du droit strict, aussi bien par M^ H. Hoberl, T^minent d^fenseur de
notre confrere, que par T^loquent r^quisitoire de M. Tavocat g6n6ral.
Nous n'entendons pas nous soustraire k laresponsabilit^ de nos actes,mais
nous entendons fttre k Tabri de la justice repressive, si nous n'avons pas
commis de faute lourde, en cas d'insucc^s op6ratoire, dans les intei^en-
tions les plus difflciles. G'est pr^ci^^^ment cette question qui a ^t^ mise en
relief pai* M« Robert et M. Tavocat general, et nous ne saurions trop les eu
f^liciter.
Dans le cas de notre confrere, on ne pouvait lui imputer aucune faute
lourde, aucune inobservation des regies jde Tart, nettement caract^ris^es
dans Tarticle 319. En admetlant qu'il ait produit les lesions constat^es
dans les rapports des experts, il ne peut Hre rendu responsable p6nalement
de la mortde la dame Fresquet; il suffit de rappeler rapidement les faits
et les circonstances pour en juger.
Le D' Laporte, en faisant successivement trois applications de forceps,
puis en tentant la crdniolomie, a-t-il rempli toutes les indications th6ra-
peutiques, 6tant donn^ les circonstances? Oui, dvidemment. A-t-il 6t^
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940 REVUE PHILANTHROPIQUE.
imprudent ou a-t-il contrevenu aux regies de Tart, en se servant d'instm-
ments de hasard? Gertainement non.
Plac6 dans cette cruelle alternative, ou de laisser mourir la femme, qui
se refusaitkaller k rhdpttal et 6tait dans rimpossibilitdd'y ^tretransport^e,
on de mettre tout en oeuvre pour la sauver, le D^ Laporte n*h^si(e pas: il
faitce que son devoir et sa conscience lui commandent, et ititervient...
La Gour d'appel, en r6formant le jugement de la 9« chambre, a juste-
ment jug^. Elle n'a pas permis, en si delicate mati^re, qu'il s'^tablisse
une jurisprudence nouvelle touchant la responsabilit^ m^dicale. Ge faisant,
elle a rendu un grand service aux m^decins, dont la profession est toujours
synonyme de devoir, mais elle a rendu un plus grand service encore aux
malades, qu'un moment de trouble ou d'h^sitation de la part du m^decin,
dans des cas graves, en face d'une condamnation toujours possible, eHi pu
mettre en danger.
Notre confrere Laporte a 6t^ cruellement ^prouv^, II se consolera en
pensant qu'il n'avait k aucun moment perdu Testime de ses confreres, et
que, dans Tadversit^, il a ^t^ I'objet des sympathies unanimes, et la cause
d'une admirable solidarity. Puisse cette union du corps mMical, n6e dans
lemalhfur, persister dans les bons comme dans les mauvais jours!
D*" L. GocRicHox.
M. le docleur L.-R. Regnier s'occupe, dans le Journal dChygiene,
de la lutte centre la tuberculose dans Tarm^e et dans les h6pitaux
de Paris.
. On se plaint chez nous de la depopulation et, comme presque ton
jours, on cherche le remMe k cdt6. Assainissons et dans dix ans, la France
comptera 1 million d'habitants de plus. A Paris, sous ce rapport, nous
n'avotis pas k nous plaindre et les progr^s marchent d'un pas s(ir, bien
que peut-6tre un peu lent.
En ce qui concerne les tuberculeux, I'administration de F Assistance
publique commence k r^aliser un desiratum depuis longtemps altendu et
reclame par le corps des mddecins des h6pitaux.
Elle vient d'ouvrir k I'hdpital Lariboisi^re deux pavilions contenant en-
semble 160 lits, ^galement r^partis entre les hommes et les femmes, et
consacr^s exclusivement aux tuberculeux.G'est peu encore, si on veutbien
songer que ces malades remplissent le tiers des salles de nos hdpitaux, ou
ils constituent des foyers de contagion d'autant plus dangereux qu'ils n'y
s ont I'objet d'aucune mesure d'hygi^ne sp^ciale. Mais ce n'est que le com-
mencement et plus tard on leur consacrera d'autres pavilions k Laennec et
k Tenon, sans compter le sanatorium d'Augicourt qui finira peut-Stre bien
un jour par sortir de ses fondations depuis longtemps poshes. Ges services,
s'ils sont convenablement dirig^s, formeront un noyau bien int^ressant
pour retude des divers modes de traitement de la tuberculose. Mais atten-
dons avant de trop nous r^jouir. Actuellement dans les pavilions de La-
riboisi^re, c'est le crachoir qui joue le principal rdle, et on a pris toutes
les precautions pour qu'il remplisse convenablement son but.
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REVUES ET PUBLICATIONS FRANgAISES. 941
La Commission s*est aussi bien occup^e de Tassistance m^dicale des
tuberculeux k domicile, qui sont un danger permanent pour la ville. Mais
ici le probl^me est d'une solution plus difDcile.
Tout lioge sur lequel on aura crach^ devra, comme le mouchoir, Hre
plong6 et maintenn pendant cinq minutes dans Teau bouillante ou
soigneasement mis k part pour ^tre livr^ au senrice public de disinfection.
Pour que les indigents puissent ob^ir k ces derni^res injonctions, il
faut que I'Administration songe k les pourvoir de linge de rechange et k
organiser des chemin^es ou des foorneaux dans un nombre assez respec-
table de chambre ou cabinets servant au logement des tuberculeux indi-
gents qui en sont totalement d^pourvus. II faudra aussi qu'eile leur four-
nisse le combustible n^cessaire; car ce n'est pas avec le tr^s maigre secours
que ces malades recoivent du Bureau de bienfaisance, insufHsant d6j4
pour leur permettre de manger autre cbose que du pain, qu'ils pourront
faire conveoablement bouillir linge et crachats.
Envoyer leur linge au service public de disinfection est plus ^cono-
» mique, mais comment Tenverront-ils? V Instruction est muette k ce sujet.
Est-ce par colis postal de fr. 25 c. ou en faisaot la demande par lettre
non affranchie au pr^fet de la Seine? Dans ce dernier cas, les m^decins
consultants des h6pitaux et les m^decins des Bureaux de bienfaisance du
service k domicile et des consultations devront 6tre munis d'un certain
nombre d'exemplaires de Vlnstruction (ce qui n'est pas encore fait), et de
carnets de cartes qu'ils pourront donner k leurs malades pour corres-
pondre avec le service de desinfection. Mais cela augmente consid6rable-
ment la besogne de ce service, dont le personnel d^j&surmen^ sufQt k peine
aux demandes de plus en plus multipli^es de la population parisienne.
Ces questions de detail, si importantes, auraient besoin d'etre tran-
cb^es et nous serious heureux de voir M. le Directeur de TAssistance pn-
blique prendre les mesures n^cessaires pour que les indigents puissent se
conformer aux instructions de la Commission. 11 pent 6tre certain que les
m^decins veilleront k les leur rappeler et k leur en enseigner Futility.
Mais jusque-l& ne nous hMons pas de chanter un hosannah k la Com-
mission et ne nous endormons pas sur Tillusion que Vlnstruction sera
suivie k la lettre taut qu'on n'aura pas donn^ aux indigents les moyens de
s'y conformer sans augmenter leurs d^penses personnelles auxquelles ils
subviennent d^j& si difflcilement. »
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REVUES ET PUBLICATIONS fiTR4NGfiRES
Allemagne. — Dans la Hevue berlitioise Hygienische Rundschau sigua-
lons une elude sur TefTet hygi^nique pour les titles de r^vacuation syst^-
matique des mati^res us^es telle qu'elle fonctionue k Berlin.
L'auteur, Ting^nieur en chef Metzger, a relev6, pour Berlin, la morla-
VM de 1840 k 1890, et 11 constate que, bien que la ville ait ^t^ muuie de
derivations d'eau pure Taliineiitant d^s 1875, la mortality nioyenne de la
capitate pnissienne n'a pas beaucoup diminu6 du fait de la plus grande
purely de son alimentation en eau. Mais, dans la p^riode qui va de 1876 d
1891, unecertaine amelioration se manifeste (de 31,31 la mortality descend
k 28,77) et cette amelioration s'accentue encore notablement dans la pe-
riode suivante qui groupe les ann6es 1882 k 1886. Pour cette derni^re
p^riode la mortality descend au chifTre de 20,77 qui est le plus bas qui ait
jamais ete constate.
M. Metzger pretend qu'on doit surtout aitribuer cette amelioration de
la sante publique au systeme de canalisation et d'enievement des eaux
usees et des matieres de vidange adopte k Berlin.
Sans meconnaltre Tinfluence bienfaisante d'une evacuation rapide,nous
croyons que les tres remarquables progr^s sanitairea realises^ Berlin sonl
das k un ensemble demesures qui comprend etTadduction d'eaux potables,
et la surveillance de la vente du lait et des denrees, et i'evacuation rapide
des matieres de vidange, et Tameiioration des egouts et du sol de la voie
publique, etc.
Ne quittons pas VHygienische Rundschau sans menlionner encore une
note de M. Probsting sur les suicides de soldats.
G. C.
fttats-Unis de TAm^rique du Nord. — Les Annates de CAcadimie
amMcaine des sciences politiques et sociales, editees a Pbiladelphie, sont
toujours iuteressantes ^ consulteret les sujetsy sont traites avec une reellc
indepen dance.
Dans les Sociological Notes du dernier numero de mars, nous signale-
rons un resume des plus instruclifs du rapport du commissaire fiscal de
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REVUES ET PUBLICATIONS ^TRANGfeRES. 943
TEtat de New-York sur le trafic des liqueurs alcooliques dans la grande
m^tropole am^ricaiae, en 1B97, par comparaison k 1896.
La loi exercant les d^bitants et r^primant Tivresse semble encore peu
efQcace; loutefois, par comparaison avec Tann^e ant^rieure, le commis-
saire du fisc a constats qu'il y a eu, en 1897, une r^duclion de 5 484 debits,
soil la fermeture de 9 p. 100 de Tensemble des dtablissement de d^bit de
boissons compris dans le territoire de I'^tat de New-Vork.
L'auteur de la note ne paralt pas bien convaincu que cette diminution
du nombre des debits corresponde k une diminution de Tivrognerie ; les
hdtels et les pharmaciens d^bitant des alcools.
Le fdcbeux cdt^ de toutes les lois dites r^pressives de Talcoolisme est
que, presque partout, par Timposition de licences aux cabaretiers ou de
surtaxes sur le degr^ alcoolique des liqueurs qu*ils d^bitent, elles orient
pour la Ville ou pour TElat, un int6rSt fiscal diam^tralemeut oppose
k la repression rigoureuse de Tivresse.
C*est la pierre d'achoppement qui fait, en Europe comme en Am6rique,
disparattre la repression efflcace.
*
La m^me revue contient une note sur Torganisation charitable dans la
ville de Washington. Nousy relevons que, sur la demande du Gomit6 cen-
tral de charite, les credits de 1 000 k 2000 dollars mis annuellement k la
disposition de la police locale pour dislribution de petits secours ont 616
supprim^s. Ces secours d'urgence sont maintenant distribues par le Go-
mite lui-m6me,qui entend ainsi mettre fin aux accusations de partiality
portees centre la police.
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BIBLIOGRAPHIE
Allaitement mixte et allaitement artificiel. — Depuis le jour ou le
professeur P. Budin montra, avec preuves k Tappui, lesbienfaits qui peuTent
r^sulter, pour les nourrissons, de rallaitement mixte et de rallaitement ar-
tificiel parle lait sterilise, alors que Tallaitement maternel est iosufOsant on
impossible, un pas immense a ^t6 fait an point de vue de Thygi^ne infan-
tile. Des articles parusdansce journal, rann^ederni^re,ont fait connattre&ses
lecteurs les progr^s considerables r^alis6s dans cette voie : [De VaUaite^
ment des enfants, Progr^s rMisis. La Revue Philanthrapique, 10 mai iH97,
n<^ i» p. 31, par P. Budin. V alimentation lactie et les nouveaU'tiH d Paris,
10 aoiit 1897, n« 4, p. 519, par Al. Boissard). C'est qu'en effet Tautorite qui
s'attacbe au nom de celui qui s'est fait en France le promoteur de cette
id^e, lui donnait d^s le d6but une impulsion d'autant plus justifl6e qu'elle
6tait appuy6e par des faits et des statistiques aussi probants que conscien-
cieux. Quoi d'^tonnant alors que rapidement son initiative ait trouv6 des
imitateurs? A Paris, ont 6t6 cr^^es des consultations de nourrissons sur le
module de celle qu'il avait organis^e k la Charity d'abord, k la Maternity
ensuite; des dispensaires priv^s, des cr^cbes se sont eiev6s oil Ton donn«
du lait sterilise et ou Ton suit le d6veloppement progressif des nourris-
sons. De mdme en province : k Rethel, k Fecamp, k Grenoble, les m^de-
cins ont propag^ par des distributions gratuites, Tusage du lait st^rilis^,
k Texclusion du lait cru et du lait bouilli. Les pouvoirs publics n'ont pas
tard^ k se pr^occuper de cette question. A Tinstigation de N. Paul Strauss,
le Conseil municipal de Paris a nomm^ une commission compos^e de
m^decins, de bacteriologistes, de chimistes, de v^t^rinaires, etc., pour
etudier Falimentation par le lait. Rapporteur g^n^ral de cette commission,
le professeur Budtn, en juillet 1897, en faisait connaitre les interessantes
resolutions et les voeux qu'elle avait ^mis. Et non seulement en France,
mais k T^tranger, I'^lan etait donn^; de toutes parts, on ezposait les r^-
sultats obtenus par le lait sterilise.
Parmi les enthousiastes de la premiere beure, un des sieves du maltre
a su cr^er sa place. Esprit bon et actif, passionn^ pour les questions de
Tenfance, H. de Hotbschild etudia pendant deux anuses, sous la direction
du professeur Budin, les questions relatives k Tbygi^ne et k Tallaitement
des nourrissons, puis il fonda dans la rue Picpus une polyclinique qui lui
permit de poursuivre ses etudes et ses recherches tout en soulageant les
enfants des pauvres.
DejS, plusieurs travaux qu'il a fait parattre en 1897 ont fait counaltre
les r^sultats qu'il a obtenus. Ge sont : Les laUs dits maternisH, leur fabriea-
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BIBLIOGRAPHIE. 945
tion et leur emploi, Bevuedes sciences pures et appliqueeSy n^ du 30 juin 4897.
— Quelques observations sur Valimentation des nouveau-nis et de Cemploi
raisonn6 du lait st&rilis^. Doin, 6ditear. — Note sur V hygiene et la protection
de CenfancCf d'apr&s des Etudes faites h Berlin, Saint-Petersboarg, Moscou,
Vienne et Budapest. Masson, ^diteur, Paris.
Mais ces travaux n*6taienl que le prelude d'un ouvrage qu'il vient de
publier et qui embrasse toute la question. II a pour tilre : Allaitement
mixte et allaitement artificiel. « G'est de Texamen attentif et r4p^t6 des
faits, dit-il dans sa preface, que Ton parrient k tirer les regies de la pra-
tique journali^re : M. le professeur Budin en avait formula un certain
nombre dfes 1894. Les r6sultats acquis aujourd'hui les ont consacr^es. Pre-
senter ces regies et mettre le lecteur an courant des progr^s realises dans
ces demi^res ann6es, apporter des preuves convaincantes avec Taide de
courbes et de statistiques, tel est le but de ce livre. » Nous pouvons aller
plus loin et dire que ce travail est en quelque sorte le r^sum^ de tout ce
qui a et6 fait jusqu'^ ce jour sur Tbygi^ne et Tallaitement des irourrissons,
c'est la mise au point k cette date, des recberches et des r^sultals obtenus
toucbant cette question si imporlante au point de vue social. lA^ le prati-
cien trouvera des conseils et un guide pour sa pratique joumali^re et le
savant les indications qui lui seront n^cessaires, car dans T^norme biblio-
grapbie qui complete Touvrage, Tauteur s'est efforc^ d'etre aussi complet
et aussi exact que possible. « Toutes les indications qu'il donne ont H6
coUationn^es et v^rifi^es sur les ouvrages originaux. Les dispositions
adoptees pour cette bibliographie ont €i^ prises en vue de faciliter les re-
chercbes, aussi bien en prenant pour point de depart un sujet ayant rap-
port k une matiSre trait6e dans le volume, qu'en partant du nom d'un
auteur connu pour avoir traits sp^cialement tel ou tel sujet. G'est ainsi
que toutes les indications ont ^t^ class^es par chapitre suivant Tordre des
mati^res ^tudi^es dans cbaque chapitre par ordre chronologique de publi-
cation et enfln, dans cet ordre, par ordre alphab6tique d'auteur. »
Nous ne pouvons donner ici qu'une analyse sommaire de cet impor-
tant ouvrage. Comme son mattre, M. H. de Rothschild pose tout d'abord en
principe que la meilleure m6thode d 'alimentation pour le nouveau-n6,
c'est Talimentation au sein de la m^re. G'est la perfection quand T allaite-
ment est bien r6glement6, bien conduit. Mais la m^re ne pent pas tou-
joiirs allaiter son enfant; des causes locales, g^n^rales ou d'ordre social,
peuvent 6tre un obstacle partiel ou total k Talimentation au sein. Que
faire alors? Recourir k Tallaitement mixte (sein et lait st^rilis^) ou a Tal-
laitement artificiel exclusif. Mais ce mode d'alimentation avait donn6 jus-
qu'il ces derni^res ann^es des r^sultats d6plorables. Les travaux de Pas-
teur, en montrant la cause du mal, y apportaient un remMe. On ^tudia le
lait des animaux (dnesse, vache, etc.,) au point de vue chimique, au point
de vue bact^riologique, au point de vue pathologique, on le vit receptacle
de microorganismes provenant de Tanimal producleur malade ou apport^s
de Text^rieur, transmettant les maladies anx nourrissons. On apprit que
ces microbes pathog^nes ne resistaient pas k une temperature ^lev^e. Le
lait st^rilisS 6tait invents. L'important pour un lait, c'est qu'il soit pur de
tout germe nuisible. M. de Rothschild k ce propos fait le tableau d'une
REVUE PHILANTHROPIQUB. — II. 60
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946 REVUE PHILANTHROPIQUE.
laiterie module, il passe en revue le local, les ^tables, les animanx, la
traite, les conditions d'un bon lait. 11 nous montre toutes les fraudes aux-
quelles ce lait est sujet, le nombre de mains, d'interm^diaires par les-
quels il passe avant d'arriver an malade, an pauvre b^b^ qu'il empoison-
nera. Et ceci n'est pas de lliypoth^se si Ton pense qn'k Paris il se con*
somme journellement 650000 litres de lait» on voit quelle importance il y
a pour la sant6 publique k ce que cet aliment soitbon.
Or, M. de Rothscbild a fait des recberches qui ne manquent pas d'in-
t^r^t. On sait que, pour qu'un lait soit bon, il doit contenir an moins
30 k 35 grammes de beurre par litre. Eb bien, k la consultation sp^ciale
de sa polyclinique, il a fait pr^ lever des 6chantillons de lait aux adresses
que lui donnaient les m^res de certains enfantsqui lui 6taient amends avec
des accidents de gastro-ent^rite et qui ^taient aliment^s avec du lait
frelat^vendu '20, 25 et 30 centimes le litre. Ges ^cbantillons ont Hk analyses
avec soin et il donne le r6sultat de 6 analyses prises entre 46 ; la tenenr
en beurre dans ces 6 sortesde laits ^taienlde 15, 19,20,24,25, 29 grammes
pour un litre. Ces chifTres se passent de tout cominentaire. Une enqu^te
faite par le Laboratoire municipal dans les 20 arrondissements a fait 66*
couvrir des laits ne renfermant que 15, 17, 19 grammes de beurre par litre.
II n'y a plus lieu d^s lors de sMtonner de T^norme mortality des nourris-
sons. Ne pourrait-on suivre Texemple de certaines villes allemandes? A
Berlin, k Francfort-sur-le-Mein, se trouvenl, en pleine cit^, des laiteries
parfaitement entretenues, de 200 animaux, fournissant une moyenne de
^0000 litres de lait par jour, k un priz pen ^lev6. Pourquoi n'en ferait-on
pas autant k Paris ?
Quoi qu'il en soit, pour Tinstant, le lait en g6n6ral, quand il arrive k
Tenfant, est alt^r^. II faut le faire steriliser. Le lait st^rilis6 industrielle-
ment a donn^ des r^sultats tr^s importants entre les mains de certains
ra6decins, de M. Yariot, par exemple, dans son dispensaire de Belleville.
Mais ce qui importe, parce qu'elle semble donner les meilleurs r^sultats,
c'est la sterilisation k domicile, dans de petitesbou tellies, telle que Tare-
commandee le professeur Budin dans ses communications. Les proc^d^s ne
different que sur lemode de bouchage, tons sontdes derives du proc^d^ de
Soxhlet.
On a fait an lait sterilise des objections sur sa digestibilite. Des tra-
vaux r6cents, ceux de C. Michel en parliculier, ont montre, au contraire,
sa plus grande digestibility. Dernierement, M. Marfan, a parie de toxines
qui seraient eiaborees par les micro-organisraes du lait. Rien en ciinique
n'esl encore venujustifier les idees porement Iheoriques de M. Marfan;
les toxines ne resistent pas k la temperature qui determine la sterilisation.
On a voulu faire mieux, on a tentede fabriquer des laits matemt>ds;c'estdu
lait de vache sterilise prepare de telle sorte quo sa composition se rap-
procbe de la composition du lait de femme, et qui semble donner d'assez
bons resuUats. A ce produit se rattachent les noms de Winter, Gaertner,
Backhaus.
Pour etre complet, Tauteur examine les laits fermentes (koumis et
kephir), les laits condenses qui sont plut6t dangereux, et arrive k un pro-
duit inieressant destine & Talimentation des enfants debiles, on nes avant
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BIBLIOGRAPHIE. 947
terme, dont Testomac et Tintestin ne sont.pJus aptes ou ne sontpas encore
aptes k dig^rer et ^assimilerle laitst6rilisd, voire rndme lelaitde la m^re:
c'est le lait peptomsi employ^ par MM. Badin et Michel, dans le service des
d6biies &Ia Maternity, et qui lenr a donQ^ d'excellenls r^soltats, mais c'est
UQ produit encore k T^tude.
M. de Rothschild termine en faisant un expos6 de la question de Tallai-
tement mixte etde rallaitement artiOciel au point devae philanthropique.
U montre ce qui a 6i6 fait dans ce sens k Paris, en province et k T^tranger.
II expose enOn lesr^sultatsqu'il a obtenus k laPolycIiniquedelarue Picpus,
r^sultatsqui viennent corroborer de tons points ceux de M. le professear
Budin.
Des dessins, descourbes, des tableaux statistiques ajoutent encore k la
clart^ de cet ouvrage qai marque une date dans revolution de I'hygi^ne
infantile.
L. M.
Delia beneflcensa nel presente momento storico, par Riccardo
Dalla Volta (Florence, Seeber, ^diteur, ^895, 64 pages) (1).
Sous ce litre: la Bienfaisance d notre epoque, Tauteur critique certains
points d'un livre public par le professeur Edouard Luchini avec la colla-
boration de deux de ses confreres, avocats comme lui, MM. Charles Roselli
et Marias Pugna, livre qui traitait des institutions publiques de bienfaisance
dane la legislation italienne .
La legislation sociale en Italie s'est developp^e d*une maniere lente et
insuffisante. L'explication que Luchini donne de cette lenteur et de cette
insufOsance peut se r^sumer ainsi : Tunite et Tindependance, but des aspi-
rations nationales, redam^rent toutes les energies morales du pays et ten-
dirent surtout k consolider Tunite italienne. « L'influence francaise, Tab-
sencc d'une conscience juridique nationale, la hdle de donner au nouveau
royaume une legislation uniforrae, flrent que, obliges de realiser des re-
formes pour notre pays, nous allftmes d'abord vers celles qui paraissaient
les plus brillantes, plutdt que vers cellesqui auraient pu donner de solides
garantiesde liberte, de justice et de renovation morale et sociale. »
L'economie politique classiqne elle-meme, apr^s avoir ete une cause
d'atneiioration, avait flni par devenir un obstacle au progres...
M. Dalla Volta n'admet qu'en particles explication de Luchini. Lorsque,
dit-il, on compare TAngleterre et i'Ailemagne k notre pays pourdemontrer
comment les probiemes economiques ont ete poses et resolus dans ces
pays, on oublie les circonstances multiples qui constituent entre eux et
ntalie des differences sensibles. On ne peut regler par une loi ni la vie d'une
nation, ni les consequences douloureuses de son developpement. Pourquoi
altribuer k la predominance de reconomie politique classique des ten->
dances legislatives qui tiennent^ des causes plus variees etplus profondes?
« II y a vingt ans que le socialisme d'Etata ete importe en Italie, et il
n'a pas realise de grands progres au point de vue pratique dans notre le-
gislation ; et pourtant, etant donne les conditions dans lesquelles il a trouve
(1) Brochure extraite de V^conomiste de Florence.
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948
REVUE PHILANTHROPIQUE.
r^tude de T^coDomie politique chez nous, il anrait pu faire oeuvre meil-
leure. »
Un pays qui,jusque-l^,n'availpas de d^veloppement industriel propre,
qui ne connaissait point la grande industrie et ses consequences, un pays
yivant d'agriculture, an milieu des traditions, des pr6jug6sphilosophiques
et historiques, des illusions, ne pouvait s'engager hardiment dans la vole
du progr^s en mali^re de legislation sociale. L'cBuyre eM ^te pr^maturee.
Luchini est, avec Cavour, partisan de la chariU Ugale; Tauteur au con-
traire, on le voit, combat ce syst^me. II rappelle ces mots de Cavour: « La
certitude de n'avoir pas k craindre les revers de la fortune el d'obtenir en
toute circonstance d'abondanls secours, detniit dans la classe ou?riere
tout esprit de pr^voyance et d'industrie. » Cavour pourtant etait partisan
de I'assistance legale, et d6clarait en son discours k la Chambre dn 27 f^-
vrierl851:« Dans un avenirprochain, la charity legale sagementadmi-
nistr^e et bien r^gl^e pourra produire d'immenses bienfaits sans avoir les
funestes consequences que d'aucuns redoutent. »
Ces bienfaits, dit Tauteur, la charite legale ne les a pas realises, et ne
pouvait le faire, « bien que, au premier abord, les chiffres que nous aliens
imparlialement reproduire, sur le pauperisme en Angleterre, puissent
faire croire qu'elle a eu des resuitats avantageux ».
D'apres le droit anglais, T^tat doit k tout citoyen ce qui est necessaire
k son existence. De \k\es loissurles pauvres,et les abus ruineux du paupe-
risme. Pour remedier ^cette plaie toujours croissante, on institua d^s 1834
les secours k domicile, eton introduisit dans les workhouses et autres asiles
un regime sevfere et une discipline qui les font ressembler k des penilen-
ciers. L'opinion publique s'eieva centre cette reforme qui fut consideree
comme inhumaine.
Mais, sitdt que le regime fut moins severe, les abus recommencerent,
et on dut revenir aux mesures de rigueur. « Lesfaits done demontrent que
Tassistance legale se heurte k deux ecueils, pour ne pas parler de ses
autres inconvenients : ou elle est inhumaine, ou elle devient impuissante et
corrvptrice. »
II est vrai que la statistique du pauperisme en Angleterre signale une
diminution dans le nombre proportionnel des indigents secourus. Voyons
done les chiffres; nous verrons ensuite comment Tauteur les explique.
Le nombre des indigents secourus par Vassistance Ugale en Angleterre et le
budget destine d combattre officiellement le paupMsme ont diminue sensible-
mentde 1 832 d 4 892.
^nndes.
Nombre
des indigents
secouras.
Indigents
secourus
dans les
maisons de travail
in door paupert.
Indigents
secourus
k domicile.
out door
paupers.
Par
miUe
habitants.
Les indigents secoorus
maisons de travail
sent It cenx qui sent
secourus k domicile
. dansla proportion de
1832. .
. 1200000
n
M
85
n
1849. .
. 1088659
133513
955146
63
1 k 7
1871. .
. 1037360
156430
880930
46
i k 6
1892. .
744757
186607
558150
23
1 k 3
1894. .
812441
212629
599812
26
i & 2,82
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B1BLI0GRAPHI£.
949
Si on ]atsse de c6t6 les vieillards etlesenfants,pour]esquels TassistaQce
est, dans bien des cas, inevitable, etqu'onoetienne'compte que des adultes
valides assist^s [Adult able-bodied) la diminution est encore plus sensible.
Anndes.
1849. .
1871. .
1892. .
1894. .
Indigents Indigents
secourus secourus
Nombre dans les h domicile.
des indigents maisons de travail out door
assistds. in door paupers. paupers.
228823
172460
92465
116478
26558
34700
26382
38919
202265
147760
66073
77559
Les indigents seconras
dans les
maisons de travail
Par sent kceux qui sont
mille secourus 4 domicile
habitants, dans la proportion de
13 1 di 8
8 1^4
3 1 i 2,5
3,8 1 & 2
Durant la mSme p^riode 18^9-4892^ le nombre des enf ants assist^s admi-
nui de plus de moitU et celui des vieillards de plus d*un tiers. La reduction
porte en majeure par tie eur les secours a domicile,
Bien que les d6penses g^n^rales aient consid^rablement augments,
bien que les secours soient devenus plus importants, etbien que le niveau
du bien-Stre se soit 61ev6, la taxe pour les pauvres a diminu^ :
nn6es.
Produit
de la taxe
pour les pauvres.
Par indigent
Par habitant.
Par
livre sterling
de rente taxde.
1818. . .
francs.
9320440
francs.
fr.c.
n
pence.
1849. . .
5792962
in
8,30
5
1871. . .
7886724
189
8,75
4
1892. . .
8847678
297
8,70
3
Si Ton ne consid^re que la m6tropoie, il se trouve que la situation de
Londres, h, regard du paup^risme officiellement constats, ne difTfere passen-
siblement de celle de TAngletene.
En 1875, Londres avait 321) indigents secourus d'apr^s la poor law pour
10 000 habitants; en 1879, elle en avait259; en 4885, 240; en 1890, 246;en
octobre 1893,232. Londres ne serait done plus Tenfer dont parle Shelley:
hell is a city muck like London.
Ici I'auteur interpr^te les chiffres qui pr^c^dent et ses commentaires
valent d'etre cit^s textuellement :
« Etmaintenant, quelle conclusion faut-il (Irer de ces chiffres? 11 n'est
pas douteux — les statistiques Tout d^montr^ — que Taugmentation des
salaires, le d^veloppement des associations ouvri^res (trade unions) la le-
gislation protectrice du travail et autres causes semblables out contribu^ k
la diminution du paup^risme anglais que la charity legale secourt.
« Quand on envisage la bienfaisance, en un pays ou le principe de la cha-
rity legale est admis, on ne doit pas oublier que cette derni^re n'exclut
point la charite privde et publique. Tel est le cas de TAngleterre, od, en
presence des graves consequences 6conomiques, sociales et iinanci^res
qu'entralnait Tapplication de la poor law, et surtout en presence des pro-
bldmes multiples qui sont li^s k Tam^lioration du sort de la classe ou-
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
i la plus pauvre, on a pens^ qu'il fallait trailer le paap6risme scienti-
ment, comme one veritable maladie,et on a organised! verses instilu-^
de bienraisance en t^te desquelles il convient de placer la Charity
^isation Society (1)... »
auteur enfln estime qu'on ale droit de tirer des chiffres mentionn^s
haul cette simple conclusion : que la charity legale en Anglelerre
eint peu k peu son action; ce qui ne veut point dire que le paup^risme
aue dans ce pays; car la charity priv6e a pris en Angleterre une
Lsion considerable et ses charges sh sont probablement accrues dans
nesure supdrieure k la diminution ^prouv^e par la charity legale. Le
ment de la dignity humaine plus d^velopp^, la reduction des secours
nicile ont coulribu^ k diminuer le nombre des indigents assist^s par
arite legale... Le dur regime des workfiouses barrant la route au |mu-
me, celui-ci a pris d'aulres voies. « De nombreuses institutions de
!aisance priv^e accomplissent plus efiicacement et avec plus d'huma-
Tceuvre autrefois uniquement d^volue k la charity legale. »
'auteur examine ensuite les objections que provoque la charitd legale
part de la sociologie moderne et de la doctrine de revolution,
allace, Spencer et Loria, aprfes Darwin, constatentque, dans noire civi-
on moderne, la selection naturelle ne se fdit pas toujours au .proGt
>lus forts. La bienfaisance est une des causes qui emp^chent la s^lec-
de se faire k leur profit. La bienfaisance, en prot^geant les faibles, eu
idant dans la lutte pour Texistence, contrarie I'ceuvre salutaire del'^li-
Uion naturelle. Si on renon9ait, comme le voudrait Spencer, k ces
ques qui ont pour r^sultat la conservation des personnes les plus
es, la societe humaine s'am61iorerait contiimellement comme les
is espfeces animales. Pour Darwin, comme pour Malthus, les pauvres
ml etre abaudonn^s aux lois inexorables de la nature. « Nourrir les
pables aux d6pens des capables, ajoule Spencer, est une grande
ul6. C*est accumuler de propos deiiber6 une reserve de mis^res pour
en^ralions futures... »
out effort fait en vue de diminuer les penibles consequences de Tim-
oyance a pour efTet inevitable d'augmenler le nombre des impre-
nts.
rop secourir les faibles, c'est faire de la selection k rebours.
,e professeur Luchini ne croit pas que les objections de Spencer et de
le de Darwin contre la charite legale et en general contre la bienfai-
e aient un grand fondement. A la lulte individuelle pour Texistence, il
>se la loi de Cunion pour Vexistence et fait remarquer que combaltre la
faisance publique au nom de la selection, c*est detruire dans ses
les la bienfaisance privee.
,e difflcile, dit Dalla Volla, est deconcilier I'exercicede la charite, cette
e vertu morale, avec les lois de la selection naturelle, de maniere a
Scher I'abaissement physique et intellectuel de Tespece humaine. La
) V. Revue Philanthropique, tome 11, n" 10 (mars 1898), p. 612. VAssistance
ngleterre, par G. Sevrette. V. les chroniques d'Henri Napias : V Assistance en
eterre, n" 1, p. 3, lesHdpitaujc de LondreSy n"» 6, p. 923, etc.
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BIBLIOGRAPHIE. 951
philanthropie scientifique a pour but d'arriver d cette conciliation, en tenant
compte des lois biologiques et psycho logiques...
La bienfaisance ne pent dtre bien exerc^e qu'apr^s an classement des
pauvres. 11 faut jugeret comparer; connaftre tons ceiix qui m^ritentd'6tre
secourus dansun territoire d6termin6; s^parer lesfaux pauvres des vrais;
s6parerJa pauvret^ m^rit^ede Taulre; celle qui a droit k quelque indul-
gence, quoique m^rit^e, de celle qui n'y a poinl droit; la misire doit avoir
son cadastre comme larichesse..,Le bienfait doit frapper juste et produire un
efTet salutaire tout comme le ch^tlment. Telle est en r^sum^ I'opinion de
Luchini.
Dalla Volta objecte que cette fa^on de comprendre la bienfaisance, la
r^duit k une simple distribution de secours, d'apr^sce cadastre de lamish*e
que Luchini consid^re comme nonmoinsn^cessaire que celuide larichesse.
« Et quel effet produira Tassistance ainsi comprise et consid^r^een quelque
sorte, comme un droit de Tindividu centre la socidt6, 11 est inutile de le
dire; quiconque connalt les r^sultats de la charity 16gale le devine...
L'assistance legale ne pent se targuer d*aucun de ces succ^s qui sent si
fr^quemment obtenus par Finitiative due k la charity priy6e. »
La philanthropie scientifique, dit Fauteur, vise k 61i miner le moins
douloureusement possible les faibles, k transformer les moins aptes, sui-
vant les cas, par le travail, Tinstruction, la pr^voyance, la tuteile, les soins
m^dicaux. « Or la charite legale n'est point apte k ce rdle. » II y faut une
bienfaisance priv^e « pulsant ses racines dans le sentiment religieux et se
transformant suivant les exigences de la soci6t6 modeme ».
Au contraire, T^coie socialiste veutque la charity fasse place k la jus-
tice. Cette ^cole proclame le droit au travail et k Texistence. Elle se faitde
l'assistance une conception plus conforme aux id6es modernes.
Rappelons pour terminer les conclusions de Luchini que son contra-
dicteur admet presque sans reserves.
EUes peuvent se r^sumer en trois points.
jo Etabtir une bonne legislation sociale qui peu k pen, mais aussitdt
que possible, efface les consequences des in^galites di verses, et permette
aux classes les moins fortun^es de s'61everpar la pr^voyance et par le
travail.
%^ Introduire dans la legislation civile les changements requis par la
transformation des conditions sociales, et par requite (par exemple dans
les locations d'objets,d'oBuvres, dans les contrats de colonies agraires etc.).
3° Surtout faire converger toutes les forces priveeset publiques vers un
maximum d'education populaire; chaque loi, chaque institution s'inspirant
de la conception la plus haute de la dignite humaine, de la responsabilite
de chacun, de la solidarite entre I'individu et la communaute.
Marius Dupont.
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BULLETIN
Le Gonseil sup^rieur de I'Assistance publique en France a ^t6 cr6^ pat
le minist^re Charles Floquet, pour « 6clairer Tadministration sur toutes
les questions d'assistance et de pr6voyance » et pour seconder Taction
ezerc^e par la direction nouvellement institute au minist^re de Tlnt^rieur.
En 1886 seulement, tons les services d'assistance publiqae out ^t^ concentres
dans une direction unique ; deux ans plus tard, cette heureuse initiative a
^U compl6t^e par le d6crel da 14 avril 1888 instituant aupr^s da ministdre
de rint^riear un Gonseil sup^rieur de I'Assistance publique, charg6 de
r6tude et de Texamen de toates les questions qui lui sont renvoy^es par
le ministre et qui int6resseut Torganisation, le fonctioonement et le d6ve-
loppement des diff^rents modes et services d'asslstance.
M. Henri Monod, I'actif et entratnant directeur de Tassistance et de
Thygi^ne publiques, a eu d^s lors, pendant ces dix ann^es, des coop^rateurs
de haute competence et de grand d^vouement. Le Gonseil sup6rieur, pr^
side par M. Theophile Roussel, a fourni une contribution ^norme aux
projets d'initiative gouvernementale ; il alimente, il inspire la plupart des
propositions d'initiative parlementaire et il est loin d'avoir acheve sa
tdche.
On a lu plus haut le compte rendu de la session du mois de mars 1898;
le Gonseil superieur, puissamment second^ par M. Henri Monod et par ses
inspecteurs gen^raax, poursuit avec m6thode, avec esprit de suite, son
oeuvre reformatrice et son esprit pourrait Hve donn^ en exemple k plus
d'une assembiee. II est en effet tout k fait consolant de constater que,
malgre les divergences d'opinion politique on religieuse de ses membres,
ce grand comite consul tatif otfre une r^elle unite d'inspiration et de doc-
trine. Un vceUy vote k Tunauimite des membres presents k la stance du
19 mars, a afflrme d'une mani^re edatante cette remarquable communaute
de vues et de principes entre ces philanthropes d'origine differente et de
sentiments si dissemblables.
Le Gonseil superieur a tenu, sans doute avec intention, et non seule-
ment pour flxer sa propre tradition, k rappeler ces regies generales : « L'as-
sistance publique est due k ceux qui se trouvent, temporairement ou defi-
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BULLETIN. 953
nitivement, dans rimpossibibiiit^ physique de poarroir aux n^cessit^s de
la vie. »
Le goavememeat et le Parlement trouveront, s'il en est besoin, dans ce
rappel de principe, an nouveaa motif de r^aliser en On Tassistance aux
vieiUards indigents et aux inflrmes, telle qu'eile a ^t^ r4clam6e par le
Gonseil sup^rieur, c'est-^-dire obligaioire.
« L'assistance publique est d'essence commnuale. » L'aphorisme
semble au premier abord inutile ; il a son opportunity, puisque Ton semble,
dans certains milieux, rattacher compi^tement k Tassistance d^parmentale
le secours k la vieillesse. Quels que soient les moyens Onanciers, et dans
n'importe quelle organisation, c'est par la commune que les assist^s doi-
vent 6Lre d^sign^s, sans quoi les pires abas sont k redouter.
a L'assistance publique est une ceuvre de solidarity nationale. » Gette
belle formule ne serait, k vrai dire, contesl^e par personne ; elle a sa raison
d'etre pratique, car elle a pour consequence, dans la doctrine du Gonseil
sup^rieur, d'6tablir la proportionnaiit^, non la flxit6, sur les subventions
accord^es aux communes par les d^partements et par T^tat. Une com-
mune surcharg^e d'indigents, et de ressources m^diocres, ne doit pas dtre
trait^e sur le mSme pied que sa voisine au budget opulent et & la popula-
tion moins ^prouv^e ; la justice distributive vent que Tune recoive une aide
plus efficace, des subventions plus fortes des autres collectivit6s.
II n'etait pas inutile de formuler et de rappeler ces vues, puisqu'elles
avaient ^chapp^ k Tattention vigilante de la Ghambre des deputes au cours
d'un d6bat trop rapide.
Le Gonseil sup^rieur, qui avait ant^neurement ouvert la porte des Bu-
reaux de bienfaisance de Paris aux administratrices, n'a pas 6t6 moins
unanime dans Tadoption du voeu qui lui 6tait soumis sur la participation
des femmes k Tadministration des ^tablissements publics de bienfai-
sance.
Ge n'est pas un simple vobu platoniqne, et lorsqn'une assembl^e aussi
prudente et aussi pr^parde invite le gouvemement k donner acc^s k V6[€'
ment f^minin dans les commissions administratives des hdpitaux et des
bureaux de bienfaisance, dans les commissions de surveillance des ^tablis-
sements nationaux, la manifestation n'est pas de celles que les pouvoirs
publics puissent n^gliger.
Pourquoi les femmes ne seraient-elles pas appel6es k jouer un r61e
dans le fonctionnement des oBuvres et des institutions d'assistance pu-
blique? N'ont-elles pas fait leurs preuves k la tdte de nombreuses OBUvres
priv6es, m6me en France oii leur ddvouement n'est pas suffisamment solli-
cite, surtout en Angleterre et aux Etats-Unis?
II ne s'agit pas de passer d'un extreme k Tautre et de substituer
syst6matiquement, de propos d^lib^r^, des administrateurs feminins aux
administrateurs inasculins ; on ne se propose pas davantage de confdrer de
piano cette fonction nouvelle k toutes les ppstui antes qui se pr^sente-
ront. Les administrateurs de Tun et Tautre sexe devront dtre cboisis pour
leurs aptitudes, leur morality, leur z^le, et le recrutement reste soumis
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954 REVUE PHILANTHROPIQUE.
aux garanties d'usage, k toutes les formalil^s reqaises.Toutes lesfois que,
dans une locality d^termin^e, une femme de bien et d'inititiative voudra
bien assamer ce mandat malaisd, elle sera la bienvenue; mais, jaslement
parce que I'opinion accneiilera cette innovation avec one cerlaine m^flance,
il y faudra mettre une discretion extreme et ne procider qu'^ bon escient,
pour que Texp^rience seprononce dans les conditions les plus favorables et
pour qu'elle fasse d^finitivement justice de pr^jug^s surann6s, mais vi-
vaces.
Ce second voeu du Gonseil sup^rieur de TAssistance publique sera suivi
d'eCTet, tdt ou tard; il ne peut pas manquer de I'dtre pour le plus grand
bien des pauvres et des malheureux.
Le c^l^bre jugement du tribunal de Cbdteau-Thierry a eu non seule-
raent en France, mais dans toute l*Europe, un relentissement m^rit^; il
n'a pas ^t^ une manifestation banale d'indulgence et de piti^; ii a pos6
devant Topinion, devant les pouvoirs publics, avec une fermet^ courageuse,
le probl^me du devoir social d'assistance. Les consid^rants du jugement
s'appuieot sur ce que la pr^venue, coupable d'avoir d6rob6 un pain pour
nourrir son enfant, a & sa charge un enfant de deux ans, pour lequel per-
sonne ne lui vient en aide, que de plus, elle se trouve « sans travail, mal-
gr^ ses rechercbes pour s'en procurer, 'qu'elle . est bien not^e dans sa
commune et passe pour laborieuse et bonne m^re ».
Au point de vue juridique, nous avouons sans detour notre incompe-
tence; des juristesexerc^s ont invoqu6 ^ Fappui de cette decision de jus-
tice Tarticle 64 du Ck>de 'p^nal, ainsi con9u : « II n'y a ni crime ni d^lit,
lorsque le pr^venu '^tait en etat de d^mence au temps de Taction ou
lorsqu*U a M contraint par une force a laquelle il rCa pu risister, » Dans sa
belle lettre au journal le Temps sur le droit de Tindigent, M. Maxime Leroy,
avocat k la cour d'appel de Nancy, consid^re comme parfaitement legitime
psycbologiquement et juridiquement, « de consid6rer la faim, besoin
physiologique irresistible, comme un moyende contrainte sur la volonte. »
Est-ce que, humainement, ii est possible d'admettre comme un fait
normal, r^gulier, legitime, qu*une creature humaine meure de faim, et
n'y a-t-il pas un devoir absolu de solidarite qui nous ordonne d'accorder
les secours d'urgence, le morceau de pain lib^rateur, aux personnes en
detresse? Cette forme d'assistance, pratiqu^e k Paris par le Pain pour
iouSf par la Bouch^e de pain, par les soupes populaires, est, k propremenl
parler, du sauvetage.
Peu importent les moyens d'intervention sociale ou priv^e : Tessentiei
est d'agir, de venir au secours de ceux qui meurent de faim, dont la vie
ou la moralite est en danger par exc^s de mis^re.
Au point de vue plus restreint de la mfere deiaiss^ede ChAteau-Thierry,
une question plus precise se pose : celle des secours publics de matemite.
Ces secours existent en r6alite, surtout pour les filles-m^res; tons les de-
partements out un credit du service des enfants assistes destine aux secours
temporaires pour prevenir les abandons. Ces secours sont-ils sufQsants
pour leur quotite, pour leur duree ? Qui Toserait soutenir ? Au contraire,
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BULLETIN. 935
toutesles eaqudtes administralives ^tablissent que, malgr^ les progiis
r^alis^s, les credits sont natablemeot laf^rieurs k ce qu'ils devraient 6tre,
facultatifs au lieu d'etre obligatoires.
Nous rentrons ici dans ie grave probl^ine de Tassistance matemeile,
non seulemeut aux niles-m^res, mais aux m^res legitimes u^cessiteuses.
Le gouyernement a d^pos^ sur Ie bureau du Conseil sup^rieur de I'Assis-
tatice publique un projet concemant les enfants secourus; il a eu raison
de proToqner les resolutions indispensables, carle statu quo n*estpas digne
d'on pays civilis^.
Le jugement de Gh&teau-Thierry a rappel6 k tous ceux qui ont une
parcelle d'autorit^ le caract^re imp6rieux du devoir d'assistance : les aver-
tissements ^clatent de toutes parts.G'est ainsi qu'a rassembi^e annuelle de
rHospitalite de nuit, M. Costa de Beauregard adressait aux riches et aux
heureux qui Tentouraient cet appel ^mouvant :
« Venez done k ceux qui souCTrent. Venez pour eux, venez pour vous-
ro^mes. A Theure de justice aigu6 qui sonne, justifiez vos derniers privi-
leges. La politique, r6cole, la presse ont transform^ la vieille clientele de
la charity. II faut qu'elle aussi se transforme. II faut qu*^ ses oeuvres elte
envoie des ouvriers qui d^scendent vaillamment sur tous les chantiers de
la mis^re. »
La charity transform^e, elargie, n'est aulre que la solidarit6, et, de
quelque nom qu'on la d^nomme, elle est pour tous le devoir social
d'assistance.
Le fameux proverbe « connais-toi toi-m6me » n'est pas moins vrai pour
les collectivit^s que pour les individus et la sagesse des nations aurait tout
profit k s'approprier Taphorisme grec. Autant la statistique brutale, avec
ses chiffres moyens, risque d'etre d^cevante, autant la d^mographie com-
parSe, analytique, ofTre des points d'appui solides.
Nous n'en sommes encore, au point de vue des enqufites sur la popu-
lation, les naissances et les d^c^s, qu'^ I'enfance de rart,et les belles etudes
de M. Ars^ne Dumont Tout depuis longtemps ^tabli. M. le D' G. Drouineau,
notre savant collaborateur, s'est attach^ k le d^montrer dans une int^res-
sante communicalion k la Soci6te de m^decine publique (1); il compare,
pour deux ann^es, 1889 et 1896, les d^partements d'apr^sleur exc6dent ou
leur deficit de natality et il constate que la repartition reste la mSme.
Ainsi, par exemple, les quatre groupes normand, champenois, proven^al,
toulousain, et un d^partement du centre, celui du Puy-de-D6me, restent,
k sept ans de distance, en etat d'inf6riorite et de d^croissance ; mais il y
a dinquante ans, d*apr6s les statistiques de Bertillon p^re, tous les d6par-
tements eu voie de d^peuplement (tout au moins par rexc6dent des d6ces
sur les naissances et reserve faite des gains provenant de Pimmigration
etrang^re) ne se trouvaient pas dans cette situation d^favorable ; il y a done
recul manifeste. Quelle est la cause profonde de cette decadence de nata-
(1) Revue cThygihie et de police sanitaire, 20 mars 1898, n" 3, p. 212 et sui-
vantes.
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
oila ce qu'il convient de rechercher avec un soin jaloux, d^partemeot
partement, commune par commune, et les conclusions de M. Drooi-
sndent k g^n^raliser la m^thode inaugur^e par M. Ars^ne Dumoat
3s monographies rurales.
n est de mdme pour les chiifres moyens de mortality. M. Drouinean
Uement observer que ces renseignements sont g^n^rauz et approzi-
et que, pour porter un jugement d^finitif, la mortality par &ge est
msable. En eCTet, si telle agglomeration a plus de vieillards ou plus
Its que sa voisine, les conditions de milieu sont difT^rentes et les
)s statistiques ne sont pas exactement comparables.
le D' Drouineau, reprenant et ^tendant I'id^e ancienne du easier
raphique d^partemental, formulae par M. Bertillon p^re, propose
stituer ce easier d^mographique en partant de la commune par unit^
ontinuant par arrondissement et par d^partement. Un m^me syst^me
es serait employ^ sur toute la surface du territoire. « Une copie de
che communale serait adress^e au chef-lieu du d^partement et lenr
ble constituerait le veritable easier d^mographique d^partementai
i en vue. Ce easier d^partemental serait mis entre les mains du Con-
lygi^ne, qui aurait mission d'en faire chaque ann^e, aussit^t con-
st eomplet, I'examen et le d^pouillement attentif. On pourrait d^s
oduire chaque ann^e a TOfQce du travail, avec les r^sultats g^n^raux
mvements ddmographiques, des apercus partieuliers d'un tr^s grand
puis^s dans les rapports que les conseils d'hygi^ne pourraient
ettre aussit6t leur examen termini. »
t-dtre cet examen ainsi limits au point de vue sanitaire aurait-il
ictSre trop 6troit; ce serait d^j& sans doute un rSsultat important
naitre, locality par locality, les points faibles au point de vue de
sit6 des maladies evi tables, de la mortality g6n4rale, de la mortality
Pants du premier Age; il faudrait y joindre, suivant Texemple donn6
Dumont et par d'autres ddmographes attentifs, une etude minntieuse
iditions de travail, de salaires, de logement, de nuptialit^, de pro-
bref une ^tude en quelque sorte monographique de tontes les
mes francaises; Thygi^niste, le 16gislateur et le moraliste y puise-
sans nul doute de puissants et d6eisifs enseignements.
Paul Strauss.
Le Db^cleur-G&ant : PAUL STRAUSS.
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TABLE
PREMIERE ANNEE. — TOME II
DU 10 NOVEMBRE 1897 AU 10 AVRIL 1898
Llvraison du 10 Novembre 1897.
Paget.
DiCTiONNAiRE DE l' ASSISTANCE, par Ic D' G. DROUINEAU 5
Lettre a Monsieur Paul Strauss, directeur db la Revue Philantrhopiquey
pap M- BfeQUET DE VIENNE 11
Lb RtiTABUssEifENT DBS TouRS, par L£oN MILHAUD 16
DispENSAiRES GRATCiTS POUR LBS Enfants BiALADES, par Ic D' J. DUBRISAY . 26
L' Assistance judicuire : son organisation ; son fonctionnement ; lbs r£forbies
A apportbr a la loi du 22 juiLLET 1851, par M* B. MONTEUX 36
Plaidoter en faveur DBS Enfants Stourdis et paresseux, par M"»* Jeanne
LEROY 54
Cuisines populaires et Restaurants coopMratifs, par M. L. D'ABARTIAGUE. 58
La Pouponni^re db Pohchefontaine et la Question des Cr6ches internes,
par le D' X 75
Lbs Orioines de l'institution des Caisses d'^pargne, par M. A. DE MALARCE. 89
Classification des Defenses db l' Assistance publiqub db Paris, peu* ***,., 99
Vari^t^s : Inauguration de I'Asile temporaire pour les enfants dont les
mdres sont h l'h6pital. — L'QEuvre budg^taire de la troisidme R^publique
en mati^re d'assistance. — L'tcole des sages-femmes de la Maternity. —
Instruction sur la consommation du Lait 104
Chronique £trang£re : AUemagne : Une soci^t^ d'assurances contre le chd-
mage. — Am6rique du Sud, R^publique Argentine : Dix ann^es 4e sta-
tistique ^ Buenos- Ayres ; Le patronage de Tenfance ^ Buenos-Ayres. —
Angleterre : Hdpital des enfants trouv6s (Foundling Hospital). —
Espagne : Les Monts-de-Pi6t6 ; Hygiene populaire 132
Informations 143
fecHOs 148
Revues et Publications fran^aises 151
Bulletin, par M. Palx STRAUSS 157
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REVUE PHILANTHROPIQUE.
LiTraison du 10 D^cembre 1897.
ANCE PUBLIQUK DE PaRIS, par M. PAUL STRAUSS 161
3 iNiGMES, par M— SfeVERINE Ill
CHES, par M. Alfred BREUILLI^ 176
AKCB ET l'^ducation des jel'Nes servantes A Paris et A LoNDHES, par
Jbaotb E. SCHMAHL 181
>e d^fetvsb dbs elcfarts traduit8 en justice : du yaoabondage, de la
[cite et de la prostitution dbs eltfasts db moins de 16 ans, par
OYS BRUEYRE 196
RDS-MUETS ET L' ASSISTANCE. HlSTORIQLlS DB LTllMMlViMBNT DES SOURDSH
s PAR LA PAROLE, par M. Marius DUPONT 214
ECTioN DE l'Enfancb av Conor^s DB RouEN, par M. A. CAMBILLARD. i2i
TORIUM D'AnGICOURT ET LA CURABILITY DE LA TuBERCULOSE PULMONAIRE,
e D' A.-F. PLICQUE 242
ouvRiERS, par M. F. MARTIN-GINOUVIER 252
ICE PAR LE Travail, par M. Jean VOIRIEN 256
3 : L'Organisation hospitalifere lyonnaise. — L'OEuvre du « Vestiaire »
I Ligue fraternelle de Montmartre. — Un nouveau Patronage. —
tioQ de la Jeunesse de France. — A propos de la pu^ricultare ^ bon
h6. Communication du docteur Napias. — Les Prix de vertu. Dis-
\ de M. Jules Glaretie 263
[JE ^trang^re : AUemagne : La lutte contre la tuberculose; Le tra-
les enfants; Les Sanatoria pour les tuberculeux; L'effet des assu-
•s en cas de maladie et des caisses de pr^voyance pour la vieillesse
i paup6rlsme. — Angleterre : Udpital de Poplar pour les accidents,
jtriche : Le deficit des fonds d'assurance contre les accidents. —
que : Le repos du dimancbe. -r- Russie : Les ambulances urbaines. 281
riONS. . , 288
303
ET Publications francaises 307
APHIB 313
, par M. Paul- STRAUSS 315
Livraison du 10 Janvier 1898.
fioLOOiE DES Accidents, par M. Hector DEPASSE 321
! PUBLIQUE : De quelques Ri^>formes a op^rer, par *" 328
ECTioN DE l'Enfancb en Belgique, par M. Albert MONTIIEUIL . . . 334
BS DE John Bost, par le D' DROUINEAU 342
iNCE PAR LE Travail agricole, par M. Guillaume BEER 349
: GoNTE DE NofiL, par M. Jacques FRfellEL 375
)arit6 : SocuJt^ en faveur de l'Enfancb maliwureuse a Lausanne
e), par M— Georges RENARD 382
iNCE iD^ALE, par M. ALCANTER DE BRAHM 394
>nies de Vacances, par M— Ad^le SCHEIBER 406
E Pain, par M. J. BERGERON 410
tion ^ducatrice des Caisses d'^pargne scolaires, par M. A. de MA-
:E 422
: L' Assistance m^dicale gratuite dans le d^partement de I'Eure :
art do M. Savour^-Bouville. — Le deuxi^me Diner des Mutuaiistes :
urs de M. Audiffred. — Traitement de la tuberculose h domicile :
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TABLE DES MATlfeRES. 959
Pagei.
Rapport cle M. le docleur Thoinot.' — La situation des infirmiers et infir-
miferes des h6pitaux de Paris : Un discours de M. H. D^rouin 435
Gbronique iJ.TRANGfcRB : Allcniagne : Un nouvel h6pital ^ Berlin; Les acci-
dents de fabrique. — Anglelenre : Maisons de convalescence. — Belgique :
Les habitations h bon march6. — £tats-Unis de TAm^rique du Nord : La
condition des n^gres dans les villes. — HoUande. Rusaie : Les asiles pour
les alcooliques. — Suisse : Un nouvean sanatorium. . 45C
Informations 456
fecHOs - 467
Revcrs rr Pckications fran(:aises 471
BuLLBTOr/par M. Paul STRAUSS 475
Uvraison do 10 F^vrier 1898.
L'AssisTANCE PUBUQCE I Le Projbt db loi sur l'Assistancr acx vieillards et
Aux incurables, par M. Henri MONOD 481
L'Orthop^die ENFANTiNB, par M. Edmond LEPELLETIER 497
Lb Classement des aldSn^s dans les asiles, par M. 6douard TOULOUSE. . 512
Les Travaux du Comit6 de defense des Enfants traduits en justice pendant
l'ann^e 1897, par M. Adolphe GUILLOT 521
FIiSTOiRE d'un Aveuolb, par M. Henri N API AS 546
Assistance aux MftuES, par M— BfeQUET DE VIENNE 560
Lbs COMMISSIONS coMMLT«ALES d'assistance, par M. Paul STRAUSS. ..... 565
Assistance par le Travail, par *** 572
VARiiTtis : Visite du ministre de I'lnt^rieuri Tatelier de I'Union d'assistance
du XVI* arrondissement. — Le logement insalubre. — Soci6t6 des visi-
teurs des pauvres : Discours de M. Jules Lemaitre. — Mouvement de la
population de la France en 1896 592
Chronique i^TRANofeRE : Angleterre : L'Assistance publique a Londres en 1897.
Espagne : La Contagion tuberculeuse ^ T^cole. 607
Informations 616
fecHOs 629
BiBLIOGRAPHlE 635
Bulletin, par M. Paul STRAUSS 637
Uvraison da 10 Mara 1898.
L'Assistance interscolaire dans unb £cole normale, par M. ^douard PETIT. 611
Lb Paradoxe de Loiseau Pinson, par le D' H. THULlfe 6i7
Lbs DMraciniSs et leur rapatriement, par le D' A.-F. PLICQUE 663
L'Assistance EN Espagne, par le D' G. DELVAILLE 66')
Grand'Dents et G'% par M""* Jeanne LEROY. 699
De l'Entente a ^tabur entre les Bureaux de bienfaisance et lbs OEuvres
d'assistance par le travail, par le D' P. BOULOUMIE 706
Une Clause LiTioiEUSE, par M. II. DEROUIN 714
A Les Theories malthusiennes et le Mariage dks i.ndii;exts, par M. Alfred
LAMBERT 717
VariSt^s : L'Hospice de Br^vannes. — Le Mont-de-Pi6t6 de Paris, par
M. Louis Lucipia. — Assistance par le travail, rapport de M. Fail let sur
la colonic de la Ghalmelle. — Rapport de M. Nocard sur Tllygidne des
^tables et I'^tat sanitaire des vaches 723
Chronique ^trang^re : Allemagne : L'Assurance obligatoire contre les acci-
dents en 1896; L'Assurance obligatoire contre I'invalidit^ et la vieillesse
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7
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2
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