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Voir aussi commentaires sur Vépitre aux Hébreux et sur les livres
respectifs de l'A. T.
Menegoz. — La Théologie de Vépitre aux Hébreux {Paris 189^).
Menegoz. — Exégèse sur Vépitre aux Hébreux (cours inédit).
Stapfer. — Introduction aux livres du Nouveau Testament (cours inédit).
LoDS A. — Histoire littéraire du peuple d'Israël {cours inédit).
LoDS A. — La religion d'Israël (cours inédit).
Stapfer. — La Palestine au temps de Jésus- Christ {Paris 1898).
INTRODUCTION
Une étude des citations de l'Ancien Testament dans le Nou-
veau s'impose à tout étudiant en théologie et à tout chrétien
par son importance capitale. Elle nous mène droit au centre
de la révélation divine. Elle nous permet d'embrasser d'un
seul regard l'ensemble du plan de la pédagogie divine que
Dieu employa pour mener les hommes à la connaissance de la
vérité et elle nous permet de suivre les étapes successives
de cette pédagogie. Elle nous permet d"entrevoir comment
les conceptions théologiques du peuple de Dieu, plongeant
par leurs origines dans les âges préhistoriques, se purifient,
se raffermissent d'époque en époque, de siècle en siècle, et
après avoir trouvé leur expression la plus haute, la plus
idéale dans la bouche de Jésus et de ses apôtres, passent et
descendent jusqu'à nous. Elle nous permet de voir les dii-
férentes attitudes des auteurs de la nouvelle économie vis-
à-vis des auteurs de l'ancienne. Elle nous permet de voir
comment Jésus et les apôtres ont connu, compris, expliqué
les auteurs de l'Ancien Testament, et l'importance qu'ils
y attachaient. Elle nous permet d'entrer, jusqu'à un certain
degré, dans l'intimité de la pensée de Jésus et de ses apôtres
et de suivre leur exégèse et leurs études bibliques. Nous
étudions ainsi l'Ancien Testament, ce livre si précieux, auprès
de maîtres incomparables.
Cependant, cette étude qui s'impose à première vue par
son charme divin et sublime, cette étude qui mène notre
pensée dans des régions supra terrestres, nous fait aussi
•entrevoir des nuages. 11 est connu qu'il n'y a pas de rose sans
épines, et l'étude des citations de l'Ancien Testament dans le
Nouveau a aussi son côté épineux Tout lecteur du Nouveau
Testament, pour peu qu'il le lise avec attention ne tarde pas
à s'apercevoir que dans la reproduction des passages de
- 7 —
l'Aticien Testament l'exactitude scrupuleuse n'est pas tou-
jours observée. Si le lecteur est réfléchi et qu'il veuille
poursuivre ses investigations, ses premières constatations
ne feront que se confirmer. Ce sont des substitutions de mots,
et quelquefois de phrases entières; changements dans le
nombre ou le temps des verbes, et dans le nombre des sub-
stantifs, omission de mots et quelquefois de phrases entières;
transpositions dans la coupure des versets, ce qui est dans
l'Ancien Testament la fm d un verset est dans la citation le
commencement. Souvent les citations semblent être aussi
bien prises au hasard qu'employées arbitrairement, surtout
lorsqu'on se rapporte à leurs contextes. Si le lecteur est un
lettré capable de se rapporter aux textes originaux, il s'expli-
quera facilement beaucoup de discordances que nous venons
d'indiquer, mais il verra surgir devant lui une difficulté
autrement grande. Tous ceux qui se sont essayés à faire des
traductions savent que la version la mieux réussie ne vaut
jamais l'original. La traduction est généralement à l'original
ce que la reproduction est au tableau de maître. Il y a tou-
jours de petites nuances, des finesses, des subtilités que l'on
ne parvient pas aisément à saisir, et même lorsqu'on les a
saisies, on n'a pas toujours le bonheur de trouver l'équivalent
nécessaire, l'expression adéquate. La difficulté dans la tra-
duction est de rendre l'esprit, le génie de la langue, et le
traducteur le plus habile se voit souvent obligé de sacrifier
l'esprit à la lettre, s'il veut donner un mot à mot scrupuleux,
ou de sacrifier la lettre à l'esprit s'il veut être fidèle à l'idée
de l'auteur. Le lecteur qui est capable de se rapporter aux
textes originaux sera donc souvent tenté de se demander si
les traductions existantes de l'Ancien Testament sont parfaite-
ment entrées dans l'esprit de l'auteur du livre saint, et si la
traduction donnée exprime parfaitement ce que le traducteur
avait senti et compris. Souvent il se verra obligé de se
demander quelle est la valeur de la version grecque des Sep-
tante même là où elle avait le même texte que les massorèthes
et quelle a été l'influence de cette version sur les thèses et
démonstrations des auteurs du Nouveau Testament.
Y
— 8 -
Nous ne sommes pas les premiers qui se soient aperçus de
ces difficultés. Elles ont été senties plus ou moins profondé-
ment par tous les exegèles sérieux. Nous pouvons remonter
ainsi jusqu'à Théodore de Mopsueste et jusqu'à Origène pour
constater les tours de force exégétiques qu'on a faits, afin de
concilier ce qui est inconciliable et d'expliquer ce qu'à notre
avis ils ne pouvaient pas comprendre (' ). En effet, la transcen-
dance de l'évangile contrastait si profondément avec l'état
d'abaissement et d'effacement du peuple Juif, le Christianisme
s'élevait si puissamment et si majesteusement au dessus du
berceau où il est né, que le bon sens le plus droit et le plus pé-
nétrant ne pouvait songer à faire de rapprochements entre les
écrits apostoliques et les productions théologiques des rabbins
de leur temps. On confessait que Jésus est né de la viergeMarie.
qu'il a été crucifié sous Ponce Pilate, les récits des évangiles
ont été bien connus, au moins à partir du second siècle, mais
toute l'attention des théologiens se portait sur le côté méta-
physique de la figure de Jésus, sur ce qu'il y a de sotériolo-
gique, de rédempteur dans sa personnalité. On cherchait à
connaître l'effet salutaire de l'œuvre rédemptrice de Jésus, la
finalité de sa vie, mais non pas sa vie toute entière, son édu-
cation, sa manière d'être et de penser. Les disciples ont eu
.le même sort que le maître. On cherchait dans les écrits
apostoliques leurs conceptions christhologiques sans poser
sérieusement le pourquoi de leur conception, sans s'enqué-
rir de leur éducation et des conditions de vie qui ont déter-
miné leur état d'âme. Il faut donc placer Jésus et ses
disciples dans leur cadre historique, c'est-à-dire dans le
centre des spéculations et des discussions religieuses de leur
temps qui furent aussi nombreuses, aussi variées, qui écha-
paient à tout contrôle, et qui ignoraient tout frein et toute
limite. 1*1 faut avoir présent à l'esprit ce tourbillon d'idées,
ces assertions et ces négations qui se rencontrent et s'entre-
(i) Voir dans Toi.ucK, Y Ancien Testament dans le Nouveau. — Hambourg i8j6,
•pp. 1-8, sur les différents essais qu'on. a lait à travers l'histoire de concilier l'Ancien
Testament avec le Nouveau.
choquent sur un point donné, et qui, bien que diamétralement
opposées, sont confirmées l'une et l'autre par un passage de
la Bible et admises comme révélation divine. Il faut avoir
présent à l'esprit le ou les livres qui servaient à l'éduca- V-
tjon, l'influence et l'importance des écoles, si nous voulons
réaliser la manière de penser de Jésus, des apôtres en géné-
ral et de l'auteur de Tépître aux Hébreux en particulier.
- 10 —
PRÉLIMINAIRES
DES LIVRES QUE TOUT MAITRE ÉTAIT CENSÉ CONNAITRE
En première ligne vient l'Ancieri Testunient. C'était le
livre connu de toutes les sociétés juives, il formait la base,
le canon de la piété et de la vie religieuse Cela n'empêche
pas que les différentes sociétés en possédaient des copies qui
différaient dans le détail l'une de l'autre. La Bible, ou du
moins les cinq livres de Moïse des Sadducéens, différait de
celle des Pharisiens''^^ Les Pharisiens mêmes semblent avoir
eu plusieurs copies. Ainsi le Talmud a connu un recueil des
Psaumes dans lequel le premier et le second Psaume ne
formaient qu'un seul chapitre ^^K Les Juifs d'Alexandrie pos-
sédaient un texte de l'Ancien Testament avec les Apocryphes
qui différait notablement du texte massoréthique. Nous ne
pouvons pas déterminer si les « Malédictions» de Achija de
Silo mentionnées Taanith 19,2 formaient un recueil à part
ou s'il s'agit là seulement de 1 Rois XIV, 10-16.
LES VERSIONS DE L'ANCIEN TESTAMENT
Les versions de la Bible ont été commencées en Babylonie.
Il était d'autant plus facile pour les Juifs de la captivité
d'abandonner la langue hébraïque et d'adopter le chaldéen
que ce dernier idiome est d'une parenté très étroite de
l'hébreu. Déjà de très bonne heure on s'aperçut que la lec-
ture de la Bible dans les Synagogues n'était plus comprise
du public et l'on se vit obligé d'instituer des interprêtes offi-
ciels qui traduiraient en chaldéen la portion de la Bible
hébraïque lue au culte. Beaucoup de ces interprètes officiels
ont dû écrire leurs versions, mais comme ces sortes d'écrits
(i) Voir Megilah f. 15 ; Souccah f. 43.
(2) Berachotli t. 9.
— 11 —
rentrent dans la catégorie de la loi orale, les rabbins s'oppo-
sèrent à la propagation de ces manuscrits parnii le public.
Nous savons d'après le traité de Sabbath f. 115,1 que Gama-
liel, le maître de St Paul, cacha une version chaldéenne du
livre de Job et que son petit fils qui portait également le nom de
Gamaliel, eût à cacher une autre version du même livre. Ces
deux versions successives d'un livre qui ne rentre pas dans le
rituel de la Synagogue, duquel il n'est fait aucun extrait de
Haphthorah, nous font supposer que les versions en chaldéen
d'autres livres ont dû être faites en grand nombre. Cependant
il ne nous est parvenu que trois Targoumim sur le Penta-
teuque; celui d'Oakelos, le Targoum de Jérusalem et le
Targoum. dit Jonathan et un seul sur des autres livres de
l'Ancien Testament, celui de Jonathan.
LA PESlilTTHO
Des versions syriaques nous ne possédons que laPeshitthô
«la simple» ou «la certaine».. C'est surtout dans ce dernier
sens que le mot Peshitthô est fréquemment employé dans
le Talmud. D'après la tradition, cette version a été faite sous
Abgar bar Manou, vers la fin du second siècle après J. C,
La relation de cette version avec les Targoumim ne se borne
pas à une parenté de langage seulement. Ce sont deux tra-
vaux qui vont de pair, donnant spontanément les mêmes
phrases, ou se faisant des emprunts, ou des échanges mu-
tuels. Ainsi le Targoum du livre de Proverbes a été lait
d'après une version syriaque que l'on chaldaïsée, tandis que
la version syriaque des livres des Chroniques a été faite
d'après un Targoum.
L'auteur de notre épître n'a certainement pas connu la
Peshitthô sous sa forme actuelle, mais nous aurons l'occa-
sion de constater au cours de notre étude qu'il comprend et
traduit certains passages de l'Ancien Testament de la même
manière que les traducteurs syriaques.
Un mot sur ce qui concerne la version syriaque de l'épître
- 12 -
aux hébreux : Elle diffère souvent dans les lectures des
manuscrits grecs qui nous sont parvenus. Elle contient sur-
tout une foule de suscriptions, de titres qui ne se trouvent
pas dans les manuscrits grecs Néanmoins, cette version a
été faite sur un manuscrit grec, et non hébreu ou araraécn.
Cela se voit surtout dans les citations qui se présentent
comme étant une version de la version des Septantes, avec les
changements que l'auteur de notre épîtrey a apportés. Ainsi,
la Peshitthô n'a pas connu, malgré le témoignage de Clément
d'Alexandrie (cité par Eusèbe Hist. Eccl. VI, 14) 1 épître aux
hébreux écrite en hébreu ou araméen.
Les caractères syriaques sont de plusieurs formes, nous
nous servirons dans le cours de notre étude des caractères
carrés (hébraïques).
LA VERSION DES SEPTANTE
Nous avons vu que les versions chaldéennes ont été faites
sous l'empire des nécessités -d'ordre intérieur. Ce sont la
décadence de la langue hébraïque d'un côté et les exigences
du culte de l'autre qui ont suscité l'institution d'interprètes
officiel.^ dans les Synagogues. On est donc tenté de supposer
que la version greque de l'Ancien Testament a'été inspirée
parles mêmes besoins, cependant Josèphe, la Mishnah et le
Talmud lui attribuent une toute autre origine. D'après eux,
elle n'a pas été motivée par les besoins intérieurs de la com-
munauté, mais par une circonstance extérieure, un ordre ou
un désir de Ptolomée. Voici le résumé de ce que nous lisons
dans Josèphe ^^\ Ptolomée, sur les conseils de son bibliothé-
caire Dimitrius de Phalère a envoyé par Aristée et un autre
officier une lettre et de riches présents à Eléazar, grand-prêtre
à Jérusalem. Ce dernier choisit soixante-douze vieillards,
(i) Voir Josèphi Opéra, vol. 2 ; ff, 103-132, éd. Havcrcamp.
— 13 -
six de chaque tribu, auxquels il fournit un précieux manus-
crit de l'Ancien Testament, qu'il traduisirent à Alexandrie.
Cette version, dit Josèphe, a été approuvée par le Sanhédrin
d'Alexandrie. Le contenu de ce témoignage se trouve aussi
dans la Mishnah '^^ et dans le Talmud ^^^ où il ne semble se
rapporter qu'au Pentateuque seulement. Ces témoignages
malgré leur caractère légendaire sont cependant dune grande
importance. Le point essentiel des assertions qu'ils contien-
nent se trouve confirmé par des considérations historiques.
Il faut se représenter les goûts littéraires de ces trois Ptolo-
mées, qui ont succédé à Alexandre le Grand. C'est par Ptolo-
mée I (Lagûs) qu'ont été fondés à Alexandrie un musée et
une bibliothèque qui ont contribué à faire de cette ville un
centre d'études et un foyer littéraire remarquable pour
l'époque. Son fils Ptolomée II (Pliiladelphe) hérita des goûts
littéraires de son père, qu'il développa au point d'en devenir
maniaque. Les sommes qu'il dépensa pour des manuscrits
rares, et qui souvent, n'avaient qu'une valeur médiocre,
dépassent l'imagination. Ptolomée III suivit l'exemple de ses
prédécesseurs. 11 faut aussi tenir compte de la faveur dont la
communauté juive jouissait auprès de ces trois monarques et
auprès du public, au milieu duquel elle vivait. Elle se trou-
vait en contact avec toutes les classes de la société, et ses
rapports avec l'élite intellectuelle ne pouvaient manquer de
susciter chez cette dernière le désir de connaître les principes
fondamentaux de la religion des Juifs et les traits essentiels
de leur histoire. Que les savants grecs n'aient pas cherché
à connaître le contenu des écrits juifs, cela serait inexplicable.
Il serait également surprenant que les Ptolomées, dans leurs
généreux élan littéraire, n'aient pas cherché à enrichir leur
bibliothèque d'une bonne version des livres saints Israélites.
Ainsi nous pouvons conclure des témoignages précités, après
les avoir corroborés par des considérations historiques, que
(2) Sophrim, halachah 8.
(3) Megilah f. 9,1.
- 14 -
la version grecque du Pentateuque, car c'est de cela qu'il
s'agit dans le Talmud et dans le Halachah ('^ a été faite
durant le règne et peut-être sous le patronage de Ptoloméell
(Philadelphe) 286-284 ; qu'elle a été motivée non pas par
les besoins du culte national, mais par le" désir de personnes
qui étaient tout à fait en dehors du culte Juif et qu'elle a été
destinée à être lue non pas par les Juifs, mais par des per-
sonnes dont la culture intellectuelle, et par conséquent aussi
les appréciations, différaient profondément de celle du peuple
au milieu duquel le Pentateuque a été composé. Cette ver-
sion se recommande à nous par son impartialité et sa sobriété.
Point de commentaires; abstention totale des spéculations
théologiques. Ce sont là des qu'alités que nous ne retrouvons
pas dans les versions chaldéennes, mais elle avait un texte
qui souvent différait notablement de celui des massorèthes.
Quels livres de l'Ancien Testament, autres que le Penta-
teuque ont été traduits à cette époque? C'est ce qu'il nous est
impossible de déterminer. Il est probable que les Haphthoras,
les fragments des prophètes qu'on lisait avec le Pentateuque
ont été traduits à cette époque ou bientôt après, mais tout
l'Ancien Testament n'a pas été traduit à une seule et même
époque; au contraire, la version complète parait l'ouvrage
de plusieurs personnes et de divers siècles. Cependant elle a
un grand caractère d'unité. A rencontre des Targoumim, elle
ne fait pas de spéculations théologiques, elle s'efforce de
donner le sens littéral des mots hébreux souvent au détri-
ment du bon style grec. C'est la version qui a été destinée,
dès son origine, à être lue par des gentils, d'où aussi sa
netteté et son impartialité. Par ces avantages, et aussi pour
des raisons purement économiques, car un manuscrit grec
était relativement bon marché, tandis que le prix d'un manus-
(i) Megilah f. c)» Sophrim, Halachah 8 est dit aaan n&û n'-i)n '^ îans «écrivez-
moi la Thorah de votre maître Moïse » ; Ceci peut vouloir dire non seulement la
Bible entière, mais, par extension, aussi la loi orale. Néann7oins, les 15 variantes
que le Talmud énumère dans cette version, se rapportent toutes au Pentateuque-
C'est donc du l'entateuque qu'il s'agit.
— 15 —
crit hébreu était inabordable, elle a pénétré jusqu'en Pales-
tine, où peu à peu elle a vaincu les oppositions des rabbins
et jouissait finalement de la même autorité que la Bible
hébraïque (i). C'est de cette version que les auteure du Nou-
veau Testament se servent généralement.
Les manuscrits les plus anciens que nous possédons sont
(B) Vaticanus ; (A) Alexandrinus ; («) Sinaiticus. Ils sont
du IVmQ siècle. Nous n'avons pas de manuscrits vraiment
anciens datant de l'époque apostolique^ Le temps a fait son
œuvre à laquelle la guerre que les rabbins ont déclarée
contre cette version, dès son début, contribua beaucoup. Un
manuscrit du Pentateuque des Alexandrins dans lequel les
noms propres de Dieu ont été écrits avec des lettres d'or fut
condamné à être caché (2). Nous aurons donc à nous deman-
der chaque fois que la citation dans notre épitre diffère du
texte des Septante quelle doit être la lecture la plus probable.
LA MISNAH, LE TALMUD ET LE MEDRASH
Les grandes spéculations théologiques, controverses et
préoccupations légalistes, qui s'expriment dans la Misnah,
le Talmud et le Medrash, ont eu pour origine, et peut-être
aussi pour cause, la captivité babylonienne. Le point de
départ de ce grand remue-ménage d'idées a été exclusivement
biblique. Le but était de sauvegarder l'intégrité de la loi
écrite et de lui donner une interprétation fidèle, mais finale
ment on s'occupait de tout ce qui peut exciter la curiosité
humaine, et toute l'étendue, limitée du reste, de la science
contemporaine se trouvait traitée. Il va de soi que toute
question, de n importe quelle nature qu'elle soit, se trouvait
traitée sur le terrain purement biblique, et l'on tranchait une
(i) Megilah 8".
(2) Sepher Thorah Halachah 10.
— 16 —
importante question physiologique avec un verset de la
Genèse.
La rédaction définitive de la Misnah a été faite vers l'an
200 de notre ère, et celle du Talmud vers la fin du 5^^
siècle W. Malgré leur rédaction tardive, la majeure partie des
idées qui s'y trouvent exprimées, surtout celles qui ont trait
à la venue du Messie, 6u au royaume messianique, provien-
nent des siècles qui précédèrent ou qui suivirent immédiate-
ment l'ère chrétienne. Dans les siècles post-chrétiens on
évitait les discussions messianique ou on les dénaturait en
faisant passer la doctrine chrétienne, pour la doctrine épicu-
rienne. Nous aurons l'occasion de constater, pendant le cours
de notre étude, jusqu'à quelle point l'auteur de notre épître
était imbu des idées théologiques des rabbins, et les cas
particuliers où il diffère d'eux.
(i) Voir Graetz Ges'ch, der Juden vol. IV 407-409.
17 -
L'HERMÉNEUTIQUE ET SES RÈGLES
L'élément propre de la vie mentale d'un docteur de la loi
était la Bible. Il y vivait si profondément et avec une telle
intensité de vie que sa personnalité se trouvait comme
absorbée par les textes sacrés, ou plutôt les textes sacrés se
trouvèrent absorbés dans sa personnalité. Il y cherchait tout
et trouvait tout ou presque tout par le fait que la Bible était
devenue pour lui une sorte de miroir qui devait refléter ses
pensées. Il résulta de là que le docteur de la loi ne disait pas
toujours ce que le contenu d'un tel texte aurait pu suggérer
à un exégète impartial, mais il y trouva l'expression plus ou
moins précise et claire de ce qu'il pense, désire et espère. Le
parchemin devînt la lettre patentée qui garantissait ses aspi-
rations et ses assertions, ou un socle, un support sur lequel
il édifiait ses prévisions et par lequel il étayait ses jugements.
La conscience était le seul guide de l'herméneutique, mais
comme les consciences diffèrent l'une de l'autre à 1 infini, il
y eut aussi à l'origine une variété infinie d'interprétations,
et des manières d'envisager les textes. Cependant on en dis-
tingua quatre, probablement les plus répandues, que l'on
désigna avec les lettres du mot DTifî, « paradis »; terme d'ori-
gine persane qui se trouve dans l'Ancien Testament. Chaque
lettre fut prise comme signe mnémonique pour désigner un
mode particulier d'herméneutique.
i) fi Peshaie, simplicité, certitude. /C'est la méthode qui
visait à une interprétation scrupuleuse, à un mot à mot des
textes. C'est la méthode des positivistes à outrance en fait
d'exégèse. Aucun texte de l'écriture ne peut être détourné de
son sens littéral. Que le texte soit à peine compréhensible par
son mot à mot, qu'un récit historique implique contradiction
ou invraisemblance, peu importe. Il ne faut pas vouloir com-
prendre autre chose et au delà de ce que le texte dit. Mais
cette méthode portait dans son principe les germes de sa
condamnation. Elle était rigide, mécanique, privée d'espiit,
de souffle et de vie, et comme toute méthode de positivisme
— 18 —
intransigeant, elle fut abandonnée pour sa rigidité et sa
stérilité.
2) ") Reniez indice. C'est la méthode qui s'efforça de corriger
les défauts de la précédente. Tout trait, tout indice hors
texte, tout mot superflu en apparence, ou manquant tous
les écarts visibles dans le texte sont là pour nous indiquer
ou nous enseigner quelque chose.. Souvent un récit tout
entier pL.ut signifier tout autre chose que ce qui est dit dans
son contenu littéral] C'est la méthode qui fut grandement
pratiquée par les rabbins de la diaspora orientale. Dans la
diaspora occidentale c'est Philon qui en est le plus distingué
représentant.
3) 1 Driish aussi drash. Le sens étymologique de ce mot
est discuté. D'après Maïmonide (i), il vient de darasli dans le
sens de chercher, rechercher. D'après d'autres, dont Eders-
heim (2), il vient du même verbe mais avec le sens de fouler,
marcher en tout sens. S'il y a doute sur le sens étymologique
du mot, nous savons cependant d'une manière aussi approxi-
mative que possible la chose qu'il désigne.[C'est le sermon
d'il y a deux mille ans) C'est une sorte d'allocution oii l'on
appliquait les paroles prophétiques el historiques de ce qui
avait été, à ce qui est et à ce qui sera, vu l'état actuel des
choses. C est une vue panoramique de l'ensemble de l'Ecri-
ture qui aboutit à des affirmations purement morales et d'une
application immédiate. C'est aussi une sorte d'exhortation
où l'auteur s'attendrit, prophétise, s'excite, s'emballe et saute
à pieds joints d'un sujet à l'autre sans éprouver le moindre
malaise Les auxiliaires sont l'histoire, la légende, le pro-
verbe, la parabole, rédigée et arrangée d'après les lumières
de la dialectique contemporaine.
4) D Sod secret, mystère[c'est la méthode d'envisager toute
l'Écriture à travers les images hardies et imprécises des visions
(i) Voir introduction à la Hagadah, éd. Vilna 1897, vol. l- feuille 3b, texte
hébreu.
(2) Life and times of J.-N., vol. i, p. 11, London 1883.
— 19 -
d'Es. VI, 1-7: d'Ez. X, etc. C'est la méthode par laquelle on
cultiva une foule de visions fantastiques et brillantes des
choses -surnaturelles, et où l'on discutait l'existence de Dieu,
l'angélologie, la démonologie, l'exahatologie, le royaume de
Dieu et le paradis^ Les échos de cette science se retrouvent
dans le Gnosticisme et dans la Cabale. Cependant, en général,
on évitait ses spéculations hardies, supra-terrestres, et bien
peu de personnes étaient initiées aux choses de la création et
du chariot, c'est-à-dire, la manière d'être de Dieu.
Ce sont là quatre modes d'herméneutique qui, à l'origine,
représentaient des individualités et des mentalités différentes.
.Lê_positiviste ne pouvait trouver dans les textes sacrés autre
chose que le peshat, c'est-à-dire le sens littéral, le récit inté-
gral quelle qu'en fut la valeur. L/id_é_a1iste investissait les récits
et les lettres d'esprit, il y meitait du souffle et de la vie. Les
idées prédominantes du siècle, la philosophie et la législa-
tion s'introduisaient dans les interlignes des textes sacrés,
elles s'echafaudaient sur une lettre superflue en apparence,
ou prenaient racine à la place d'une lettre absente. L'historjen-
mgraliste ne voyait que le drush, l'application des récits his-
toriques et des paroles prophétiques à l'état actuel des choses. -
Le visionnaire voyait partout le mystère. Mais, par cette loi
bizarrement libérale de l'époque, qui veut que lors même
qu'il y aurait contradiction flagrante entre les idées et les
jugements des autorités exégétiques, ils soient néanmoins
« les uns les autres parole du Dieu vivant », un ssul docteur
pouvait cultiver les quatre mélhodes à la fois, et chaque texte,
chaque parole, renfermait virtuellement et implicitement les
quatre sens.
Nous pouvons "nous représenter facilement tout ce qu'il y
avait de vague et de flottant dans les spéculations d'un doc-
teur de la loi qui voulait cultiver les quatre méthodes à la
fois. Dans l'impossibilité de pouvoir se dédoubler en quatre»
il en faisait une sorte de synthèse, d'amalgame ou de super>
position où elles perdaient leurs caiactères distinctifs et leur
vigueur. Le vieil adage rabbinique, « qui trop embrasse,
n'embrasse rien », trouva ici sa plus haute confirmation En
— 20 -
voulant faire tout on ne fait rien, au moins rien de sérieux;
la pensée spéculative semblait se débattr'e dans l'anarchie, et
l'exégèse que l'on fit semble être imprégné d'arbitraire.
Ce fut sfin de remédier à cet état de choses que Hilïel pro '
mulga ses sept règles. Il fit là une œuvre de psychologue, il
recueillit les règles de logique des penseurs de son temps ou
de ceux qai l'ont précédés, et les mit en vigueur.
Ces règles sont les suivantes :
i) lûim hp à fortiori, à plus 'forte raison. La formule équi-
valente dans le Nouveau Testament est rr-i^w p.à/ov ou mlm p.à/).ov.
2) ma> mnJ, classe parallèle.
3) nnx iinDû :j« j^ja. construction principale d'après un
texte.
4) D"'mn:D ""Jîy/'Jî ^x pa, construction principale d'après deux
textes
5) Î2-121 '^^^j conclusion du général au particulier, de la règle
à l'exception.
6) im Dipoo nî3 «VPD, la conclusion se trouvant dans un autre
endroit,
7) ir:yû noSn nm l'enseignementducontenu; l'idéegénérale
qae le contenu d'un texte suggère.
Il y a encore les 13 règles de rabbi Ismael et les 32 règles
du rabbi Eliezer, mais ces docteurs étant d'une date posté-
rieure à la rédaction du Nouveau Testament, nous n'avons
pas à nous en préoccuper. Les quelques cas exceptionnels
où il semble que l'un des régies de ces derniers a précédé au
raisonnement d'un auteur sacré du Nouveau Testament ne
doivent être considérés que comme des coïncidences for-
tuites.
— 21 -
La Citation de l'A. T. dans l'Epître aux Hébreux.
PLAN DE L'EPITRE (i)
« On peut la diviser en deux grandes parties,
dont la première, plutôt théorique, va du commencement de
récrit jusqu'au ch. lo, i8, et la seconde, plutôt pratique, parc-
nétique du ch. lo, i9 jusqu'à la fin de l'épître.
« La première partie comprend deux grandes divisions.
Dans les sept premiers chapitres, l'auteur compare les organes
de l'ancienne alliance, avec Jésus-Christ, l'organe de la nou-
velle alliance, et il montre que l'organe de la nouvelle
alliance est infiniment supérieure à ceux de l'ancienne. Dans
la seconde subdivision (ch. 8, lo, i8), l'auteur compare les
deux Alliances elles-mêmes, et établit la supériorité de la
nouvelle alliance.
« En étudiant le développement des idées dans ces deux
grandes subdivisions, nous remarquons, dans la première,
l'ordre suivant : Jésus Christ est supérieur i) aux anges; 2) à
Moïse; 3) au souverain sacrificateur juif; 4) aux prêtres lévi-
tiques. Dans la seconde subdivision, l'auteur, comparant
entre elles les deux Alliances, démontre que la nouvelle
Alliance est supérieure à l'ancienne i) par son sanctuaire :
l'un est terrestre, l'autre est céleste; 2) par ses sacrifices :
d'une part, les victimes sont des animaux, d'autre part, la
victime est le Fils de Dieu; d'une part, le sacrifice est impar-
jait, il a besoin d'être renouvelé, d'autre part, il est parfait, il
a une valeur éternelle.
« ...... La partie parénétique commence par une exhor-
tation à la fidélité chrétienne : Puisque la nouvelle Alliance
est si parfaite tenons ferme à notre foi, n'abandonnons pas
nos assemblées, soyons fidèles, car la parousie du Christ est
proche (ch. 10, 19. 39'. Puis l'auteur expose la notion de la
joi, qui, dans sa pensée, s'allie à celle de la fidélité. C'est par
(i) MénégOi;, tbéol. de l'ép, aux Hébr,, p,-p. 12, 13.
- 22 -
la foi que nous sommes sauvés (ch, ii). Enfin, aux ch. 12
et 13, il exhorte à la concorde et à la sanctification; et il ter-
mine, après énumération des vertus chrétiennes, par des salu-
tations et des vœux. ,>
PASSAGES DES LIVRES SAINTS
CITÉS PAR L AUTEUR
L'emploi que l'auteur fait de l'Ancien Testament est extrê_
mement vaste. Il ne fait pas seulement appel à un très grand
nombre de passages bibliques pour confirmer ou pour appuyer
ses thèses, il ne fait pas seulement un usage fréquent des
descriptions des institutions de l'ancienne Alliance telles que
l'institution sacerdotale, de temple et ses ordonnances, le
Sabbath, mais on constate encore que tout son langage, que
tout son style est éminemment imprégné d'expressions et de
locutions purement scripturaires. Le nombre des livres que
l'auteur emploie ainsi est immense, presque toute la Bible y
passe. Mais étant donné que le but que nous nous proposons
d'atteindre est modeste, car nous ne cherchons à connaître
que ce qu'il cite et comment il le cite, nous ne traiterons pas
à fond toutes les allusions de l'Ancien Testament qu'on relève
dans l'épître. Nous nous arrêterons seulement aux citaticns
proprement dites, c'est-à-dire aux passages qui sont précédés
par une formule d'introduction, ou à des textes de l'Ancien
Testament employés sans formule d'introduction, mais sur
lesquels il fait une sorte de commentaire et desquels il tire
des leçons. Nous passerons cependant en revue, il est vrai,
d'une manière sommaire, l'ensemble des textes de l'Ancien
Testament que l'auteur emploie dans l'épître, y compris les
locutions purement rhétoriques, ou allusions.
— 23 —
Les citations dans l'ordre où elles se rencontrent dans
répître aux Hébreux.
ch. 1,3 sIttcv : Ps. 2,7.
1.5 xal TràX'.v : 2 Sam. 7,14
1.6 )iys', : Deut. 32,43.
1.7 » Ps. 104,4.
1.8 » Ps. 45,7-8.
1,10 Ps. 102,26-28.
1,13 s'ioY.XcV : Ps . 1,1 , 1
2,6-7 (ir!.£|j.apT'jpaTO ^^ ''^^'^ '^'"' ^^^y^v : Ps. 8,5-7.
2.12 Xéycov Ps. 22,23
2.13 xal Trà).'/^ : Es. 8,17; 2 Sam. 22,3.
2.13 » » Es. 8,18.
3,2-5 Nom. 12,7 (i).
3 7-1 1 xadw^ )iys'. tÔ T:vcO'[j.a -zo ày>,ov : Ps. 95,7-11
4.4 sl'prjxsv yàp iro-j : Gen. 2,2.
5.5 6 Xa)//;(7a!" Trpoç auTOV : Ps. 2,7.
5.6 xal £v STspw }iy£!,: Ps. 110,4.
6.14 Àiycov: Gen 22,16-17.
7,1 Gen. 14, 18-20.
7,17 ij.y.o'zopthy.'. yàp : Ps. 110,4.
7,21 XiyovTo; Tcpo? aÙTOv : Ps. 110,4.
.8,5 6Y,a-!,v : Ex. 25,40.
8,8 12 lérz'.: Jer. 31,31-34.
9,20 )iyojv:.Ex. 24, 6-8.
10,5-7 ^^^T''-: Ps. 40, 7-9
10,16-17 [j.y.p'zopzi tÔ 7ryc'j[j.a -ô ày',ov:Jer. 3 1. 31 -33.
10,30 tôv siTîôvTa : Deut. 32,35.
10,30 xal 7:à).'.v : Deut. 32,3(5; Ps. 135,14.
io>37"38 Hab. 2,3-4.
11,18 Tipôç ôv D.aAT-Gy, : Gen. 21,12.
12,5-6 rj-:'.; O'.c/lzrz-zai : Prov. 3,11-12.
12.21 Ex. 19, 16 19.
12,26 sTc/yysAsxa'. Àsycov : Hag. 2,6.
13.5 s'ip'/.xsv : Deut. 28,29? 31,6,8? Jos. 1,5.
13.6 Ps. 118,6.
Cit. I.
ch
2
»
3
»
4
»
5
»
• 6
»
7
»
8
»
9
»
10
»
II
))
12
»
13
))
14
»
15
»
16
»
17
))
18
»
19
»
20
»
21
»
22
»
23
>
24
»
25
»
26
»
27
»
28
»
29
>;
30
»
3i
»
32
»
33
»
34
»
24 -
Les allusions dans l'ordre où elles se recontrent dans
répitre aux Hébreux sont:
Chap. 2,i6 Es. 41,8
3,1 Nom. 12,7
3,i'i Nom. 14,32
5>9 Es. 45.17
6.7 Gen. r.2
6.8 Gen. 3,17
6,19 ^. Lev. 16,2; 12
7.1 Gen. 14.7
8.2 Nom. 2,4,6 (diffère du texte
massoréthique'.
Ex.
26,3
Ex.
16,33 (Nom. i7,8; 19,9)
Ex.
30,10
Lev.
16,1
Ex.
19 10
Ex.
53,1^
9,2
9,4
9,7
9.12
9.13
9.28
10,21 Zach. 6,11
10,27. Es. 26,2
10,28 Deut. i7,6
10,37 Es. 26,20
11.4 Gen. 4,4
11.5 Gen. 5,24
ir,8 Gen. 12,1 et 13 4
11,12 Gen. 22,17
11,13 • Gen. 23,4
1I1I7 Gen. 22,1
11,21 Gen. 47,31 (diffère de la
lecture massoréthique).
11,23 Ex.
11,26 Ps.
11,28 Ex.
11,33 Dan.
12,3 '. .. Nom. 16.38
12,12 Esaïe 35,3
12 13 * Prov. 4,26
2,2 et II
69,9(89,50)
12,21
6,22
- 25 -
Chap. 12,14 Ps. 4,14
12.15 Deut. 29.18
12.16 Gen. 2533
12.18 Deut. 4,11
12.19 Ex. 19,16 ; Deut. 4, 23 et 25
12,21 Deut. 9,19
12,29 Deut. 4,24
13,2 et 13 Lev. 1627
13,15 Lev. 7,17; Ps. 115 (116) 17
13,15 Hos. 14,2 (comp. Jes.
57, 19 Hébr)
13.20 Es. 43,2; 55.3
13,20 Zach. 9,2
En distribuant les citations directes et les allusions d'après
les livres de l'ancien Testament, nous aurons :
CITATIONS ALLUSIONS
Pentateuque 12 • 33
Livres historiques i —
Psaumes 11 2
Proverbes i i
Esaie i 7
Jérémie ï —
Daniel — i
Osée — I
Habacuc i —
Aggée I —
Zacharie — 2
29 47
- 26 -
LA SUPÉRIORITÉ DU FILS SUR LES ANGES
La comparaison entre le Fils, le médiateur de la Nouvelle
Alliance, elles Anges, les médiateurs de l'Ancienne Alliance
est la plus minutieuse. L'auteur de Lépître aux Hébreux étaie
son argumentation sur un groupe compacte de sept citations,
et il arrive à la conclusion que le Fils est supérieur aux anges
parce qu'il jouit d'une filialité toute spéciale, que Dieu
s'adresse à lui comme un père s'adresse à son fils, qu'il règne
éternellement à la droite de Dieu; tandis que les anges ne
sont que des serviteurs dont la mission est limitée. Ils sont
les ministres, les. fonctionnaires placés entre le père et ceux
qui doivent hériter le salut.
Rémarquons, en passant, que cette argumentation serait
complètement superflue si l'auteur était de la dispora orien-
tale et s'adressait aux Babyloniens ou aux Palestiniens. Ceux-
là ne faisaient pas intervenir les anges dans la transmission
de la loi au peuple dlsraëL et n'avaient pas pour eux la même
adoration, ou vénération que les juifs d'Alexandrie.
Citation 1 [Héhr., chap. 1, 5)
ulo; ^ou tX cr'j, èyw (j-f\'^tpo-'^ ysysvvrixà (7£.
fComp. Texte Moss. et Sept., Ps. 2, 7/.
La citation est probablement faite d'après les Septantes,
mais elle pouvait être aussi faite d'après le texte hébreu, si
l'auteur voulait faire une version d'un mot à mot rigoureux.
L'auteur de l'épître sait très bien que les anges sont appelés
« fils de Dieu », qu'Israël est « son fils premier né ». (Exode 4,
22; Ps 39, i) que « Dieu a engendré Israël ». (Deut 32, 18),
et lui-même va encore plus loin en disant que tous ceux qui
sont dans le processus de la conversion sont des fils de Dieu
(ch. 2, 10; TToÀXoù; uloù;, etc.), mais ce que l'auteur veut faire
ressortir, c'est qu'à aucun d'eux Dieu ne s est jamais adressé
d'une manière aussi direte et aussi personnelle.
Il considère Ps. 2, 7 comme messianique, puisque le Psaume
ne peut s'appliquer à aucun des rois d'Israël. David avait son
- 27 -
berceau à Béthleliem et non à Sion. Salomon n'a jamais vu
des peuples se liguer contre lui pour se soustraire à son
joug. Aucun des rois, tant de Juda que d'Israël, depuis
répôque de la scission ne méritait les éloges du Psalmiste.
Et l'auteur, comme tous les docteurs de son temps, naurait
jamais pu songer à rapporter ce psaume au passé, à y voir un
regard rétrospectif sur une époque fictivement glorieuse du
peuple d'Israël; car ceci contrasterait formellement avec
la notion qu'on avait des prophéties, qui sont les oracles
de l'avenir, la révélation de ce qui doit arriver plutôt que
des registres du passé.
Ce même verset du Psaume est cité dans un des discours
de Saint- Paul (Actes 13, 33), et ce ne sont pas seulement les
auteurs du Nouveau Testament qui considèrent ce Psaume
comme essentiellement messanique, mais aussi les docteurs
du Talmud. Traité Souccah, feuille 52, 2, nous lisons :
nû hm ^ja r]"2pn )h iûix )yt2':i mnDi r\tih mv^ nn p n^^t^ p::i i:n
^Jûû bm "li^ nn« ^33 ^'?x lax "n pn hi< nnsD« iQXJty ^7 fn^^ ''Jni tî'paû nn«
Les rabbins enseignent : Au Messie fils de David, qui doit
se révéler bientôt, en nos jours, TÉternel dit : Demande ce
que tu désire, et je te le donne, car il est dit : Je raconterai
la loi, Dieu m'a dit tu es mon fils... . demande de moi, etc.
Le Targoum rend ce verset :
inna jn N?:r i'?\s3 nxsî n:n •'h n:ii6 122 T:in tu m'es cher
comme un fils à un père, tu es juste (ou pur) comme si je
t'avais ciéé aujourd'hui.
La christologie de l'épître aux Hébreux reflète parfaite-
ment ces idées rabbiniques. Le Messie est le fils, le médiateur
(ch. 8, 6: 9, 15; 12, 24); il est pur, sans tache (ch. 7, 26): il
doit se révéler bientôt, en nos jours (ch. 9, 37).
L'auteur de notre épître, comme les rabbins, pouvait avoir
d'autant plus de facilité à considérer le Ps. 2 comme essen-
tiellement messianique, qu'il se peut qu'ils aient eu sous la
main le recueil des Psaumes mentionné dans le Talmud
[Berachflth f. 6) dans lequel le premier et le second Psaume
- 28 —
ne formaient qu'un seul chapitre. Le contenu en était, i) le
bonheur des hommes qui marchent d'après la loi divine, 2)
le bonheur des hommes qui se confient en le roi-messie. Le
changement du sujet serait par trop grand si l'on voulait voir
dans l'autre moitié un roi terrestre.
Citation 2 (Épîli'c aux Hébr., 1, 5J.
èyw irjo'^.y.i aù-rw elq Tta-^spa, y.al a.'Jxbç, S(T-cf.<. u.o\ elç ulov.
fComp. T. M. cl Sept. 2 Sam. 1, 14'.
La citation se rat4;ache étroitement à la précédente par les
mots xal TtàXw — mv^ et encore, dans un autre endroit. C'est
la formule courante du Midrash et de la Hagadah, lorsqu'il
s'agit de rattacher une citation à l'autre.
La citation est tirée de 2 Sam, 7, i4. (Septante 2 Rois 7, i4),
ou de I chr. 17, 13, où nous avons un récit parallèle à celui
du 2 Sam. avec quelques variantes, mais danslesquelle verset
cité est le même. Elle est faite d'après les Septante qui ren-
dent le h datif hébreu par el? suivi de l'accusatif. Il est difficile
d'admettre que l'auteur, faisant une version indépendante
sur le texte hébreu se soit accordé avec les Septante dans
cette particularité.
L'emploi messianique de notre citation se justifie par le
fait que l'on ne considérait pas seulement 3 Sam. 7, i4 comme
■y
une prophétie messianique, mais que toute la dynastie davi-
dique avec les promesses qui s'y rattachent, devait la véné-
ration qui l'entourait à ce qu'elle était considérée comme le
type, comme le symbole de celui qui devait venir. C'est
encore le positivisme vaincu par l'idéalisme, le P es liât par le
Reniez, le fait historique par la philosophie de l'histoire^? A
l'époque de notre auteur, l'état de la communauté revenue à
l'exile babylonien était si précaire, qu'on avait le pressenti-
ment qu'aucun des rois terrestres ne parviendrait à réaliser
les promesses glorieuses faites à l'égard de la dynastie davi-
dique. Du reste, Dieu seul savait dans quelles basses cou-
ches de la société, la' lignée de David cachait les promesses
faites à son égard. Aussi, à la place du royaume de David
disparu, à la place de sa famille dissoute, l'espoir, ce guide
— 29 —
suprême envoyé à l'homme par Dieu, a mis un royaume
messianique, et ainsi tout ce qui se rapportait auparavant à
David où à sa descendance, se rapporterait dorénavant au
Messie, fils de Dieu. Certes, le texte cité comporte quelques
obstacles à cette manière de voir; ainsi, le Messie ne peut
pas être châtié à la manière des hommes, mais ces hommes
de Dieu ne voyaient que les grandes lumières et passaient
par-dessus les obstacles sans même s'y heurter.
Citation 3 {Hébv. cli. 1,6).
La citation est entourée de grandes difficultés, mais avant
d'aborder le citation elle-même, il faut examiner le verset
d'introductron qui est non moins difficile. La place de la cita-
tion dans les ivres saints dépendra du sens qu'on veut donner
à ce verset :
OTav oï TiâA'.v ôlc-avàyr, tov TîpcoTÔ-îoxov sic t/jV oixo'J.uivTiV Asys!..
Le mot TràX'.v peut avoir trois sens :
i) Il peut être considéré comme conjonction antithétique
avec oi. On le trouve dans ce sens chez Philon. Leg. AU. 3, 9,
éd. Mangey, 6 oï tJjX\^ aTTOOiopàa-xtov Gsôv Tj ôè 7ra)v!.v Osov
à-ooox!.(j.à;oyTa, lui, de son coté, s'enfuit de Dieu, elle de son
côté, désapprouve Dieu.
2) Il peut être considéré comme une conjonction avec ôé
servant à introduire une nouvelle citation. C'est un hébraïme
Il a la valeur de ti;;i qu'on peut traduire par xal iràX'.v et par
ôè TîàÀ'.v, et encore, ou mais encore, puisque le vau i a le sens
de et, et de mais.
3) Il peut être considéré comme un adverbe à sla-ayàyri
encore une fois, de nouveau.
Nous pouvons donc donner deux versions de ce verset :
i) Mais encore, lorsqu'il introduit le premier-né dans le
monde, il dit : « mais encore » se rapporte à « il dit », et le
verset a un sens présent, il parle soit de l'incarnation, soit
de la résurection,
•i) De nouveau, considéré comme adverbe donne un sens
futur à notre verset. Lorsqu'il introduit de nouveau, c'est-à-
dire à la parousie, la seconde venue du christ.
\r
- 30 -
Les grandes autorités exégétiques sont divisées quant au
sens exact de ce sens, Calvin, Kûbel, Ménégoz et beaucoup
d'autres le rapportent soit à l'incarnation, soit à la résurrec-
tion. D'autres, dont Weiss, Vaughan, Westeott, Kurtz, Keil,
Lange, le rapportent à la parousie. Ces deux manières de
voir offrent de grandes difficultés. Si l'on donne au verset un
sens futur et qu'on le rapporte à la parausie,on se demande,
est-ce seulement alors que les anges l'adorent? nel'adorent-ils
pas depuis le moment où il est monté au ciel et s'est assis à
la droite du Père ! Si Ton donne au verset un sens présent ou
se heurte contre l'ordre des mots. Il aurait dû y avoir pour
faire un bon hébraïsme tSkiv Ss ô^av, etc,
La citation elle-même ne comporte pas moins de diffi-
cultés. Elle peut être tirée de trois endroits différents : du
Deut ch. 32, 43; du Psaume 97, 7, et des Hymnes qui se trou-
vent annexés dans certains manuî^crits de la Septante à la
fin des Psaumes.
Le texte du Deut ch. 32, 4^ des Septante est le suivant :
i t ' \ i >
>:al TTpoa-x'JVYic-à^riocrav auTco Ttkv'ztc, v.yrzXo'. ôîoù
De ces quatre vers, le' troisième seulement se trouve dans
le texte massarétique. Le cod. V^t. seul contient le passage
tel qu'il est cité dans notre épître/'Le cod. Aled. lit ulol, d^ns
le second vers, c'est-à-dire dans le passage cité dans notre
épître, et ayyzloi dans le quatrième. eùfpccAr^-zt « réjouissez"
vous », ne correspond pas au mot ^''iin « chanter » du
texte hébreu, mais à la version du Targoum Jonathan qui lit
«ûy """lûlp )ùhp « réjouissez-vous devant lui peuples ». C'^ci ne
peut pas être une pure coïncidence.
Essayons de reconstituer le texte hébreu d'après le cod,
Vat, Les manuscrits hébreux de cette époque n'avaient pas
de voyelles. Nous conservons quelque doute sur la question
si on laissait ou on ne laissait pas d'espace entre les mots.
31 —
Du reste, cette question ne saurait avoir aucune influence sur
les objections que soulève la version grecque du texte hébreu
en question :
Le texte hébreu que nous obtenons, d'après le cod. Vat.,
est le suivant :
ù'nbn [■'j:]] bD nj; ib um
Le dernier mot du premier vers, comme celui du troisième
vers, ne pouvait pas êtie autre que ioî;. Le mot "inx serait com-
plètement étrange dans le style poétique du ch. 32 de Deut.
Du reste, cela se voit à l'œil nu que la strophe 3 est une
reprise, une répétition de la strophe i, comme la strophe 4
est la répétition de la strophe 2. C'est un des traits caracté-
ristiques de la poésie hébraïque de répéter l'idée avec tirés peu
de changement dans les mots. Il y avait donc dans la première
strophe, comme dans la troisième, le mot loj;, et nous nous
demandons comment il se fait que les Septante aient procédé
avec un tel arbitraire dans la lecture du texte? Pourquoi
veulent-ils lire à la première strophe ibî^ avec chirek, et tra-
duire aij-a aùxw « avec lui », tandis que dans la troisième ils
lisent h)i_ avec un patach et traduisent {j-s-rà toû ).aoù y-b-où «avec
son peuple? C'est l'un ou l'autre. Ou bien il faut lire dans la
première et dans latroisième sitophe ibj/avec un patah, et tra-
duire « son peuple » ou bien avec un chirek, et traduire dans
les deux strophes « avec lui ». L'auteur de notre épître a pu
citer Deut ch. 32, 43, parce qu'il lit avec les Septante à|jLa aÙTÔ)
« avec lui », c'est-à-dire avec Dieu et que le passage suivant :
que tous les anges se prosternent devant lui, se rapporte à
Dieu, où Jésus-Christ, qui pour l'auteur sont la même per-
sonne; il n'aurait pas pu le faire s'il lisait « son peuple «, car
alors le passage suivant ne se rapporte pas àDieu, mais à Israël^
Or la vocalisation des Septante de la strophe i est le moins
probable. La strophe 3, qui existe dans le texte massorétique,
et qui se trouve citée par St-Paul. (Romains ch. 15, 10) est
lue à l'unanimité ibj; avec un patah, « son peuple», et telle doit
— 32 -
être aussi la lecture de la strophe i.- Ainsi l'auteur de notre
épître, si réellement il cite Deut 32, 43, ne le fait qu'après
avoir été induit en erreur par une vocalisation arbitraire des
Septante et sans avoir connaissance ou sans se préoccuper
du texte hébreu.
Le second endroit duquel notre citation pouvait avoir été
tirée est Ps. 97, 7 ;
ù'rhn h2 i'? inr.îiTi que tous les Elohim s 3 prosternent
devant lui.
Cette citation serait faite d'après le texte hébreu, et non
d'après les Septante qui lisent 7:pocrx'jv7;cra-:s au lieu de Tcpoo--
x'jvrio-à'rwcrav, et aO-roG au lieu de OsoCi. L'auteur traduit, wnhUi qui
au propre signifie toujours Dieu et par extension, autorité,
puissance terrestre ou supra terrestre par « anges de Dieu »
L'auteur de l'épître est ici en contradiction formelle avec
le Targoum Jonathan. Ce dernier traduit Ps. 97, 7 par |nJD''i
i<r\)Viù ^nhsi nv^v h2 Mûnp que toutes les nations, servant les
fidoles au propre «erreur») se prosternent devant lui.
Il faut supposer que le Targoum avait ici un autre texte.
On n'a qu'à changer le n du mot ù^rha « Dieu » en h pour
avoir ù'^bba. Mais il est vrai aussi que le Targoum fait souvent
des paraphrases, des sortes de commentaires, et il aurait pu
traduire, tout en ayant le texte massoréthique devant lui, le
mot DTi'pw par « idole » ou par une autre phrase.
En admettant l'authenticité de la lecture massoréthique du
Ps. 97, 7, et qu'il faut absolument lire Elohim, et non Elilim
la traduction de DMb»s par franges de Dieu» est arbitrai re.a'n'?x
signifie, puissance, autorité terrestre ou spirituelle. Ex.
ch. 21 6; ch. 22, 8; ch. 22, 27, le terme est appliqué aux
juges Ex ch. I, il est appliqué à Moïse^ il désigne aussi
«anges et idoles». Job. ch. i, 6: ch. 2 i; Ps.ch. 29, i;ch.89,7.
La traduction la plus exacte serait : « que toutes les puissances
(ou autorités) se prosternent devant lui », plutôt que tous les
anges, etc., des Septante.
La citation peut avoir été tirée des hymnes qui se trouvent
ajoutés à la fin des Psaumes et où nous avons une autre
récdiision du cantique de Moïse dans lecod. Alex.
— ;53 —
Cette hypothèse a été émise par Kurtz, Bleek et autres. Ils
appuient leur hypothèse sur le fait que l'auteur cite généra-
lement le cod. Alex, et non le cod. Vat. L'auteur de notre
épître n'a pas connu le texte du Deut 32, 43, qui se trouve
dans le cod. Vat., mais les hymnes du cod. Alex. Cette
hypothèse écarterait toutes les difficultés si nous pouvions
avoir la certitude que le cod. Alex est le plus ancien, et
que l'auteur de notre épître a connu cette récension. Or,
comme Keil le fait remarquer, le cod. Alex, ne paraît pas le
plus ancien. S'il semble se rapprocher du texte hébreu plus
que les autres manuscrits, c'est qu'il a subi des corrections
postérieures (i). Il est aussi difficile d'admettre que l'auteur
ait connu les différentes recensions de la Septante; caria
diversité des recensions est beaucoup moins le résultat de la'
négligence des copistes que de l'usage extrêmement long
des textes sacrés par des communautés, qui n'avaient que peu
ou point de rapports entre elles. Or, s'il existait en Egypte
des communautés isolées^ au sein desquelles l'Écriture Sainte
aurait subi une transformation aussi notable que de placer le
Cantique de Moïse à la fin des Psaumes, l'auteur de notre
épître ne pouvait en avoir connaissance que si cette trans-
formation existait de son vivant, et qu'il ait appartenu à cette
communauté.
L'hypothèse de Kurtz étant à notre avis trop hardie, il
nous faut chercher notre citation dans le Deut. ou dans les
Psaumes. Nous ne pouvons pas dire avec certitude lequel
des deux livres notre auteur cite; il nous est cependant
permis d'indiquer la solution la plus probable. Ce qui doit
nous guider, c'est le sens du verset 6". Si l'auteur a voulu
dire : <c mais encore une fois, lorsqu'il introduit le premier-né
dans le monde », il a en vue l'incarnation ou la résurrection,
et dans ce cas, il cite Deuter. 33, 43, dont tout le discours
est d'actualité et où le prophète parle toujours au présent;
mais si l'auteur dé notre épître veut dire : « mais lorsqu'il
(i) Keil, épître aux Hébr. p, 41.
- 34 -
introduit de nouveau le premier-né dans le monde », c'est-à-
dire, s'il a en vue le second retour du Christ, la parousie, il
cite probablement le Psaume 97, dont le thème est rétablisse-
ment du royaume de Dieu sur terre. « Jehovah a régné, que
la terre tressaille de joie, que le îles nombreuses se réjouis-
sent, et que tous les Ëlohim se prosternent devant lui. »
La question se pose: par quel mobile fondamental, par
quel raisonnement, l'auteur de l'épître était-il amené à rap-
porter un chapitre qui parle de la manifestation de Jehovah
à la manifestation de Jésus-Christ? L'explication que n'ayant
pas de connaissances directes du texte hébreu, il considère
par erreur comme messianique chaque verset où l'on lit
x'jp'-o; «Seigneur», n'est pas seulement par trop insuffisante,
mais aussi elle ne repose sur aucun fondement sérieux.
Nous pouvons au contraire affirmer que l'auteur connaissait
l'hébreu. Il s'efforce toujours de donner l'interprétation la
plus large et la plus solide aux expressions hébraïques qu'il
• se voit obligé d'incorporer dans son exposé. L'explication
d'après laquelle l'auteur aurait rapporté un chapitre qui parle
d'Israël comme fils, à Jésus, le Fils, est cherchée pour ne
pas dire impossible. Si l'auteur cite Deut32, 43 c'est qu'il lit
«réjouissez-vous avec lui,» c.-a.-d. avec Dieu, et non avec
Israël. L'explication la plus probable est celle de Delitzsch,
et à laquelle nous nous rangeons. Voici ce qu'il dit:
« Partout où il est parlé dans l'Ancien Testament d'un
avenir décisif, de la fin des Temps, (la parousie) partout où
il est parlé de l'apparition et de la manifestation de Jehovah
dans sa puissance salutaire et dans sa gloire, partout où il est
parlé d'une révélation analogue et correspondante à celle de
Moïse, ce Jehovah, c'est Jésus-Christ; car celui-ci est le Jehovah
manifesté en chair, le Jehova apparu dans l'humanité et dans
l'histoire, le Jehova qui monte comme le soleil de justice
au-dessus de son peuple. Cette thèse est une vérité immua-
ble ; sur elle repose l'unité indivisible de l'Ancien et du
Nouveau Testament, et le développement du plan du salut
à travers l'histoire. Tous les auteurs du Nouveau Testament
— 35 -
sont imprégnés de cette conviction; Elle s'exprime à l'ori-
gine même des évangiles. Elie doit précéder le jour de
Jehovah (Mal. 3, 23) et c'est Jean qui marche devant la face
du Sjigneur. (Luc. 1,76). C'est ainsi que tous les Psaumes
dans lesquels il est parlé de l'établissement du royaume de
Dieu sur terre sont considérés comme messianiques, car
dans le plan divin du salut, la théocratie ne peut pas être
autre chose que la christocratie; le royaume de Dieu et le
royaume du Christ sont une seule et même chose.
Deut 32. est aussi considéré comme messianique par les
Targoumim qui ajoutent rinû''ûi « par sa parole il fera l'expia-
tion pour son peuple et pour sa terre. »
Le Siphré dit: les promesses de Deut 32.43 se réaliseront
aux jours du Messie (i).
CITATION 4 fÈp. aux Hébr., ch. i, Ij.
6 Tto'.tôv Toùç àyviXo'j; a'j-ro'j TzvîuaaTa, xal to'j; Às'.TO'jpyo'j^ a'j':oùi
(Comp. T. Mass. Ps. 10i,i; Sept. 103,4)
La citation est faite d'après le cod. Alex, qui correspond de
tout point au texte massoréthique, à l'exception d'un xat. qu'il
insère pour lier les phrases. L'insertion des conjonctions est
assez fréquente dans le cod. Alex. Le cod. Clarom. de l'épître
aux Hébreux lit Tr^sù^-a, au singuher au lieu du pluriel. De
même le Syriaque nn \T13n'?û i::ï;n "vent" au singulier. Le
cod. Vat. lit Tîup oXÉyov pour Tzupbç cpXôya.
Le texte hébreu permet deux interprétations :
i) Il fait ses anges des vents., etc., il les transforme en vents,
il transforme ses ministres en feu éclatant.
2) R fait les vents ses anges, etc., les vents sont ses anges, le
feu éclatant sont ses ministres.
La majorité des exégètes modernes sont pour la traduction
Siphré t. 138"
36 —
2. (Ewald, Hupfeld, Hitzig), mais l'ancienne exégèse et Luther
sont pour la traduction i. Le Targoum Jonathan traduit
«nin "]\n pimD )1M lijnqui fait ses messagers légers comme le
vent. Luther traduit : Der du machest deine Engel zii Windeii
und deine Dieiier zu Feuerflammen. C'est ainsi aussi que cette
citation est comprise par l'auteur de notre épître.
Quelques exégètes modernes s'élèvent contre l'épître aux
Hébreux et contre Luther, et leur reprochent de prêter au
Ps, 104, 4 un sens qu'il n'a pas. Mais leurs griefs nous sem-
blent peu fondés. Nous ne pouvons pas dire, quel est le sens
exact de ce verset. Toutes les probalités sont même en faveur
de la traduction 2, mais le Targoum, qui était si près de la
source, qui vivait à une époque où l'hébreu possédait encore
sa vitalité, est décidément contre l'exégèse moderne. Ajou-
tons que l'angélologie de l'Ancien et du Nouveau Testament
ainsi que celle des rabbins est avec l'auteur de notre épître.
Dans l'Ancien Testament, les anges sont des êtres trans-
cendants et spirituels que Dieu envoie à une certaine classe
d'individus pour leur annoncer soit un châtiment, soit une
récompense ; ils sont les ministres exécutants de la volonté
céleste sur terre. Ils prennent à cet effet une forme naturelle,
concrète; ils se travestissent en hommes, afin de pouvoir se
mettre en contact avec l'humanité.
Abraham est visité par les anges qui lui annoncent la nais-
sance d'Isaac. Abraham leur offre un repas, auquel ils parti-
cipent comme de simples mortels; ils quittent le patriarche
pour aller détruire Sodome et pour sauver Lot. A la naissance
de Samson l'ange que Manoah prend pour un homme, s'élève
au ciel avec la flamme du sacrifice. Les anges se transforment
en chariots et en cavaliers de feu. (2. Rois 6,16) (voir aussi
Ps. 91, ii-i2; 103,20). Dans le Nouveau Testament Zacharie
voit un ange en vision seulement, tandis que Marie et
Elisabeth parlent aux anges comme l'on parle à un homme.
Dans le Midrash Shmoth R. les anges naissent chaque matin
et après avoir loué Dieu, ils retournent dans la rivière de feu
d'où ils sont sortis.
- 37 —
L'idée que Dieu transforme les éléments de la nature en
anges, idées que les exégètes modernes croient voir dans
notre passage, est tout à fait étrangère aupsalmiste Dieu peut
se servir des éléments de la nature; il monte les nuages; il
marche sur les ailes du vent ; les cieux racontent sa gloire,
(Ps. 19,1.) mais ces éléments n'ont nulle part les attributs
d'anges ou de ministres.
CITATION 5 [Ep. aux Hébr. 1,8)
9p6voç cou 6 Gsos zU "^ov aldyoL toù aiwvoç
xal Yi pà[38o; r/^ç s'jQ'JTriTo;, pà|Bûo; f^^ [iv.'jO.eiy.^ croo.
Y,yà7:7,c7aç û!.xa'.0(7Jvr,v xal ÈjjL'ls-yio-aç àvoaiav
o'.à 'zo'J'zo è'ypio-sv o-s 6 Ôîo^, 6 ^zô^ trou D.a'.ov àva).)>!,àa-£wç
7:apà TO'jç [j-cTÔy^ou; o-ou.
(Co/n/î. r. Moss. Ps. ^5,7-8 ; Sept. P. U,7-S)
La citation paraît être tirée des Septante, mais elle n'est
complètement d'accord avec aucun des manuscrits, auôva toû
alwvo; est du Cod. Alex. LeCod. Vat. omet tou. Elle s'accorde
avec le Cod. Val. 'dans àoix'.av; le Cod. Alex, lit àvoaiav. Elle
s'écarte de l'un et de l'autre en mettant xal y, pà[3oo; qui n'exi-
ste ni dans l'un ni dans l'autre, mais qui se trouve dans le
Sinaïticus.
Le Ps. 45, est un hymne nuptial. Il était composé à l'occa-
sion des fiançailles d'un roi d'Israël (les fiançailles de Salomon
avec la fille de Pharaon d'après Hoffmann; celles de Joram
avec Athalie d'après Delphes). II est entré dans le recueil du
psautier au même titre que le Cantique des Cantiques et
quelques autres livres contestables.
Nous savons qu'on a voulu cacher le Cantique des Cantiques,
les livres d'Esther, de Ruth, des Proverbes et même d'Ezékiel,
et que, grâce à quelque rabbin du Talmud, qui par ses spécu-
lations exégétiques est arrivé à leur donner un sens mystique
et religieux, indépendamment des faits historiques et quelque
fois à rencontre du contexte, ces livres ont été conservés
- 38 -
dans le canon de l'A. T. Dans le traité Sabbath, f. 30, nous
voyons que lorsqu'on a voulu cacher un livre où un autre, un
rabbin de grande notoriété s'enfermait dans une chambre
haute, avec des provisions pour une durée de temps extrê-
mement longue, afin d'élaborer une exégèse mystique,
• d'écarter les contradictions ou de donner un sens religieux à
un fragment qui n'en avait pas. C'est ce qui est probablement
arrivé à notre psaume.
Déjà de très bonne heure on sentit la difficulté de ce vocatif
DM^N=o 6£o; au milieu d'un verset qui ne parle nullement du
royaume de Dieu. Aussi s'efforça-t-on d'écarter cette difficulté
par une foule d'inventions, plus subtiles les unes que les
autres. Saadiah Gaon sous-entendici pi"-» ton trône Dieu éta-
blira pour l'éternité. » Aben Ezrah sous-entend encore une
fois le mot i^DD «ton trône est le trône de Dieu pour l'éternité».
Il trouve un parallèle à cette construction dans 2 Chr. 15,8
et c'est à cette interprétation qu'adhèrent la majorité des exé-
gètes modernes. Certes, cela ne serait pas d'un hébreu excel-
lent; on trouverait difficilement une autre construction
correspondante, mais on l'accepte afin d'éviter le trouble dans
l'harmonie de l'idée du psaume.
Parmi toutes les propositions qu'on a faites, la plus ingé-
nieuse est celle de Mr. Bruston : il suppose qu'il y avait n\T'
« il sera » que le copiste à pris pour le tétragramme, et qu'il
a écrit Elohim. Cependant, malgré l'avis de ces grandes
autorités, nous ne voyons aucune urgence d'apporter de
changements dans le texte; au contraire, il nous semble pré-
férable de maintenir le « Elohim » de notre passage. Nous
avons vu, ce mot signifie une autorité terrestre ou spirituelle;
il remplace le mot « juge » chef du peuple, (Ex. 22,26) le
mot « maître » de Pharaon, (Ex. 7, i); il n'y aura donc rien
d'étonnant à ce que le psalmiste applique ce mot à un roi, et
nous traduirons par- conséquent: « ton trône, ô majesté,
est pour l'éternité »
Nous ne pouvons pas admettre que les deux versets de
notre citation forment une parenthèse, une digression, oii
— 39 —
l'auteur, parlant d'un roi terrestre, s'élèverait, subitement
et sans transition à chanter la gloire da royaume de Dieu.
Une telle supposition ne ferait qu'obscurcir les deux versets.
« Ton trône, ô I)ieu, est éternel et c'est pourquoi Dieu, ton
Dieu, t'a oint etc. » formerait une contradiction flagrante.
Dieu ne peut pas s'oindre lui-même; Dieu ne peut pas s'a-
dresser à lui-même à la seconde personne et parler de lui à la
troisième.
Comment l'auteur de notre épître est-il arrivé à lapporter
à Jésus-Christ un Psaume qui parle d'un roi d'Israël? Nous
ne pouvons pas admettre l'explication, suivant laquelle, ne
sachant que le grec, il aurait entendu par le mot Osô^ « Jésus-
Christ ». Ce serait une méthode par trop facile. Nous ne
pouvons pas admettre non plus qu'il s'est fait un rappro-
chement dans la pensée de l'auteur entre r/pio-sv « oint » et
ypio-Toç, car l'onction dont il s'agit dans notre texe, n'est pas
une onction spirituelle, mais une onction de joie, des jours
de fête, l'opposé de l'onction des morts et des jours de deuil,
et l'auteur de notre ép^!tre devait savoir cela. L'explication la
plus plausible serait à notre avis, de rapprocher cette citation
de la citation 2. C'est le même principe qui a dirigé l'auteur,
lorsqu'il a cité 2 Sam. 7,14 et lorsqu'il a reproduit Ps. 45,7-8.
f ■--
jTout ce qui se rapporte à David et à sa descendance se rap-
porte au Messie le fils de David, et trouve la réalisation en
luijll était probablement encouragé dans cette vue par l'ex-
pression D\l'7K=9£o; du verset 7, titre exceptionnel pour un roi
terrestre et surtout par les expressions 6 6e6ç 6 Gsôç o-ou. « Ton
Dieu qui est à toi d'une maoiore particulière », le Dieu, dans
lequel tu occupes la première place; et de T^apà toù; {j-sToyou;
o-ou « au-dessus de tes compagnons »; La citation, considérée
sous cet angle, vient admirablement bien à propos, car la filia-
tion divine du Messie est une des thèses principales qui occu-
pent l'auteur dans ce moment.
Le Ps-,45 esf considéré comme messianique par le Targoum
qui traduit verset 3'"^ : « Ta beauté, ô roi Messie, est plus
grande que celle des fils des hommes /> Aussi par le Mudrash,
Breshith R. f ITS--» éd. Versovie.
40 —
CITATION 6 [Ep. aux Ilcbr. 1,10)
G\j xar: àpyàç, x'jpu, tv,v yriv z £(l£|j.îÀ(wa-a>;
X7.1 l'ora TWV 7£t,pwv G-oû slo'v,' ol O'jpaVO'l.
aùrol aTroXoDvTa'., o-ù os oiajj.svî',;
xaî. coo-s". 7:cp',pûAa'.ov sAt.çs'.ç auTOu;
(to^ laà-:!.ov) xal aA^.ayrîo'OVTa'.
(T'j û£ 6 auTOC si xal -^à sV/", (70u o'jx èxÀsi^ouc-iv.
(Comp. T. Mass. Ps. 102,26-^8: Sept. Ps. 101,26-28)
cT'j et xûpLs se trouvent dans les cod. Alex, Psalt. Graeco lat.
Ver. et Psalt. Turicense ; les deux mots manquent dans les
autres manuscrits et dans le texte massoréthique. Dans la Pes-
hittô nis=a"j existe dans l'épitre et dans le Ps. etle x-jp'.s mhn
manque dans les deux. sAiçs!.; est du cod. Alex, et Vat., les
autres ont \yX\y.^t'.:;. élU'.; est une réminiscence d'Es. 34,4
è).!,y/](7ovxa!. etc. « Les Cieux se rouleront comme un livre » (Keil).
Cette lecture peut aussi provenir d'une petite défectuosité
dans le mar-uscrit hébreu. Dans le mot DS"''?nn la tête du h
lamed et le point central du pé se sont effacés, ils avaient un
n et D. Le n et le a sans daguesh avaient la même prononci-
ation; Ils ont la DDnsn pour DS^'^nn.
La citation fait pendant à la citation 5 (Hébr. 1,8). Après
avoir démontré rinfériorité des anges, il indique en passant
I l'infériorité de l'univers vis-à-vis du Fils. L'Univers, l'en-
semble des choses créés, est changeant, il vieillit. et il est
destiné à disparaître. Autrement grand est le Fils, par lequel
l'univers a été créé, son trône est éternel, il est toujours le
même, et, ses années ne finissent pas. Les versets 26 et 27 sont
cités à dessein. Il avait besoin de prévenir ses lecteurs d'ori-
■^ gine non Israélite qui adoraient la « création » au lieu du
créateur {Rom. 1,25), aussi bien que ses lecteurs d'origine
Juive qui eux aussi n'étaient pas exempts d'une certaine ado-
ration pour l'ensemble de la création riTlf et pour les esprits
de la terre qui accompagnent chaque personne, au nombre de
— 41 —
mille à gauche et de dix mille à droite (^Brachott, f. 8).
Remarquons que dans la pensée du Psalmiste il n'est nulle-
ment question du Messie. L'être qui est toujours le même et
dont les années ne finissent pas, c'est Jéhovah. Mais pour
l'auteur de l'épître les versets 26-28 se rapportent au Messie,
le fils de Dieu puisque c'est par lui que l'univers à été créé
(Hébr. 1,2).
CITATION 7 {Ep. aux Hcbr. 1,13)
KàOo'j ex. ôs^',à)v [j.O'J sco; av 9co toj; syGpouç go'J Gtto-oo'.ov twv toocov
cou.
fComp. T. Mass. Ps. 110,1; Seplante Ps. 109,1.)
La citation est faite d'après les Septante qui donnent un
mot à mot crupuleuxdu texte massoréthique. C'est le Psaume
le plus souvent cité dans le Nouveau Testament. (Delitzsch).
La valeur messianique du Psaume iio réclame notre atten-
tion d'une manière toute spéciale II n'était pas considéré
comme messianique dans les cercles rabbiniques de- l'époque
de Jésus et des Apôtres. Dans les deux curieuses versions du
Targoum aucune ne l'attribue au Messie:
Voici comment les Targoumim l'ont compris:
^rûn Nn^n\x ish'inh n^^nn ef^n «nmi ''b pu'? n^it^'Q:: ^^ lox (i
^-p^i? îi>^D3 ia:3i "^bv:! '''\^ii'-\ r; iiix
« Dieu a dit par sa parole de ne donner la suprématie (le
rabbinat) parce que tu t'es assis à étudier la loi (car à ma
droite est la lumière) jusqu'à ce que je subjuguerai tes ennemis
sous tes pieds ».
3-1:1 î Sxnty'' b2 bv l'iyi '«n"' nxity^ nnû^û:i "«^ iû« m^mn T'h t» bv (2
6^:: '»'iîi«« p nn:3i . . . mû''n r; p^j:jn n^y^ p^sn b)mb y\m :nn ^b iûx
« Une louange, par David. Dieu a dit par sa parole de me
faire maître de tout Israël, car il m'a dit, assieds-toi et je te
montrerai Saûl de la Tribu de Benjamin avant qu'il meure.. .
et après cela je mettrai tes ennemis sous tes pieds »
— 42 —
Dans les deux paraphrases le mot '•j'nx'?, est interprété non
pas par « à mon seigneur», mais « de me faire seigneur, roi
d'Israël ou prince de la science Par '^i'^ù'^h 2^ assieds-toi à ma
droite, la première version entend : tu t'es assis à étudier la
Horas, (qui est la lumière et la droite de Diea), la seconde
paraphrase comprend, « attend patiemment la fin de la
dynastie benjamineïte. Toutes les deux l'attribuent à David
exclusivement et pour eux le Messie n'a rien à voir dans ce
Psaume.
Nous ne trouvons au sujet de ce Psaume, autant que nous
avons pu nous en assurer, aucune spéculation messianique ni
dans le Talmud, ni dans le Midrash. Le Midrash des Psaumes
fait exception à cette règle (^^ Il comprend les mots « assieds-
toi à ma droite » comme se rapportant au Messie; mais nous
ne croyons pas que ce Midrash soit vraiment ancien, ou qu'il
exprime des idées réellement anciennes au sujet de notre
citation.
Ce Psaume a t-il été considéré comme messia:nique, du
moins parle peuple ? Nous n'en savons rien. Il est probable
que dans certains cercles galliléens il était considéré comme
tel, mais en tout cas il n'était pas messianique pour la classe
intellectuelle de la Palestine, pour les Pharisiens, les Scribes
et les Çadducéens.
Nous comprenons maintenant pourquoi, lorsque Jésus citait
ce Psaume, la foule prenait plaisir à l'écouter (Marc 12,27)
tandis que les pharisiens n'ont pas pu lui répondre. (Matth.
22,46). La foule attendait ardemment la venue du Messie, et
tout passage de 1 Ecriture, annonçant la fin de cette longue
attente était saisi avec avidité. Il n'en était pas de même des
membres des classes cultivées. Eux, ils se turent, non pas parce
qu'ils n'ont pas pu reconnaître en Jésus le Messie attendu, mais
plutôt parce que leur exégèse était différente de celle de
Jésus, Ils ne voyaient pas, au contraire de Jésus, le Messie
annoncé dans le Psaume iio.
(1) Voir Midrash Thilinie sur Ps. 18.
- 43 -
Jésus à fait sur le Psaume iio une exégèse particulière et
personnelle, qui n'était pas connue des rabbins, et autour de
laquelle, on a fait, pendant de longues générations un silence
voulu, calculé, prémédité. L'auteur, en citant ce Psaume,
connaît donc l'exégèse personnelle de Jésus. IL connaît donc
les synoptiques. Il se sert du Psaume iio parce que Jésus s'en
est servi, et il l'envisaga exégétiquement avec le regard du
Maître.
C'est le seul cas où l'auteur se départît de l'exégèse rabbi-
nique de son temps. Il montre par là qu'il est vraiment
disciple de Jésus. Le fait d'avoir rejeté l'enseignement officiel
de grandes académies, et d'avoir introduit un enseignement
nouveau serait considéré comme un acte courageux à toute
les époques historiques, l'était encore davantage à cette
époque, car il expose moralement l'auteur à une peine exces-
sivement sévère et diffamante.^
CITATION '8 {Ep. aux Hébr. 2,6)
r wjç à-jQprJmov ort sTriçxETrTvj «ùrôv ;
Yily.r-M<T(/.ç «ÙtÔv PfiK/y Tt Tra/j' c/.yyfj.ov:,
SiSri y.y.i TL^.r, ècrre^fix'joxry.ç «ùrciv,
TrâvTK ÛtTî'tkÇkî VTTOy.y.TM T6JV TToSwV C/.VTOU,
{Comp. T. Mass. et Sept. P. S, 7-7)
L'interrogatif t1 » qu'est-ce », qui correspond à l'ébreu nû
est du Cod. Vat. ; le cod. Alex, lit au contraire v.q. Il est très
difficile de rendre dans une autre langue l'hébreu tî>'iJXetD1Xp,
fils d'Adam, fils de la terre, être faible et débile. Le Targoum,
la langue sœur de l'hébreu, y a presque réussi. Il met pour
l'un et l'autre mi "i3 qui inclut le sens de « faiblesse, débilité »,
Les Septante se sont contentés de mettre àvQpwTcos et ulo^
avOpo'jTcoco, mais le sens original et intime du texte hébreu est
(i) « Celui qui donnera un sens à la Thorah qui n'est conforme à la halachah est
coupable de la peine de mort. »
- 44 -
complètement perdu pour le lecteur grec. y.Xà'CTwa-a; aùrov
imonm/d'après l'avis de plusieurs des commentateurs modernes
la version des Septante ne correspond pas à l'hébreu. En effet
sXc/.-z-oùy « rendre inférieur» et ion «diminuer » ne se couvrent
pas tout à fait. Nous nous rangeons ici à l'avis de Delitszch.
Dans les Septante èXa-r-roùv n'a pas strictement son seiis
classique. Ils traduisent "ion et tû"'j;ûn par ce même verbe (Voir
Gen. 8, 35; Ecel. 4,8), et l'auteur de notre épître aurait
employé ce même verbe s'il avait fait une version à lui du
texte hébreu, '^j^y-yy t'. correspond à £3î;û du texte massoréthique.
Dans le contexte hébreu il ne peut pas être autre chose qu'un
adv. de degré, la Traduction doit-être: « Tu las diminué
un peu d'Elohim, il lui manque peu pour être un
Elohim. » On ne peut pas le considérer comme un adverbe
de temps, et traduire « Tu l'as diminué pour un peu de temps »
à moins de torturer le texte. L'auteur de l'épitre ignore donc
l'hébreu, où il ne s'en occupe pas. Son raisonnement du
ch. 2,9 est fait sur le fipay'j t». des Septante qu'il considère
comme un adverbe de temps, et non sur le texte hébreu. Nous
avons une autre preuve, plus éclatante, qu'il se sert des Sep-
tante, et non du texte massoréthique, par l'ordre des mots de
ôoHa ei'z'.ij.r,. Dans le texte massoréthique nous avons mm 11:j3:
1U3 = T'.jj.rî (( honneur », désigne sa position dans le monde,
il exprime, la vénération qui lui est due de la part de ses
semblables, du monde. mn= oHa « splendeur, gloire», exprime
ce qu'il est en lui-même. L'auteur de Tépître, comme les Sep-
tante, renversent les termes, ils mettent « gloire et honneur »
pour l'hébreu, «honneur et gloire. » Ces deux mots sont au
datif d'après le cod. Vat. Le cod. Alex, lit l'accusatif, Socav
T'.pîv. C'est le cod. Vat. qui est plus près de l'hébreu.
Dans la pluralité des cas DTi^K/ avec ou sans article, est
synonyme à nin\ et désigne le vrai Dieu. Mais, comme nous
avons déjà vu plus haut D\n^N, a souvent un sens flottant et
vague ; Moïse est le Elohim de Pharaon ; une autre fois le mot
signifie f idole, faux dieu, » (Ex. 18,13) et encore « puissance^
autorité. » Les Septante en traduisant le Elohim de notre
texte par « anges» sont évidemment dans l'idée du psalmiste.
— 45 —
Hupfeld et beaucoup d'autres traduisent : « Tu Tas rendu un
peu inférieur à la divinité, mais à tort. » Le psalmiste n'aurait
jamais songé que l'homme est de bien peu inférieur à la divi-
nité, parce que Dieu met à sa disposition certaines classes du
règne animal et parce qu'il lui permet de dominer sur une
faible partie des œuvres sorties de sa main. La version des
Septante est sous ce rapport d'accord avec le Targoum qui lit
«••^sto h'hp n^n^ «mom « Tu l'as diminué légèrement des anges.
» Cela est certai- nement le sens de notre verset; à l'homme
faible, débile ti^JH, il manquerait bien plus que a peu de chose»
pour être l'égal de Dieu. A peine peut-il, avec de rares excep-
tions, être quelqu'un qui vaille un ange.
Verset 8. Nous avons ici l'omission de la moitié d'un verset
qui se trouve dans le texte hébr. et dans les Septante.
L'omission de toute une moitié d'un verset reste inexplicable
malgré les tours de force exégétiques qu'on a faits pour en
rendre compte. Toute la citation est faite avec un mot à mot .
scrupuleux d'après le Cod. Vat, La coïncidence de ti pour
T'.; et du datif olii-r^ -t'.ja-^ pour l'accus, transposition dans
l'ordre de mot «gloire et honneur» pour «honneur et gloire»,
nous empêchent de supposer que faisant la citation de mé-
moire, auteur l'ait oublié la première moitié du verset. On a
fait la supposition que l'auteur de l'épître aux Hébreux a omis
cette partie de la citation avec intention, soit. parce que les
mots sont en contradiction avec i, lo (Lachmann , soit parce
qu'ils ne lui paraissaient pas nécessaires pour sa thèse.
(Hoffmann, Keil, V. Soden), ou encore parce que^, en mettant
tout l'accent sur Tiàvra, on pourrait dire qu'il ne se rapporte
qu'à %k Ê'pya etc., tandis qu'au fond l'auteur entend par le
mot TîàvTa beaucoup plus que cela. (Weiss).
Toutes ces explications ingénieuses nous paraissent quand
même insuffisantes, celle de Weiss même erronée. Nous ne
voyons pas en quoi « toute chose > serait plus que l'univers
crée; les esprits, les éons ne rentrent-ils pas dans la classe diis
êtres crées? Ne pouvant accepter aucune de ces explications,
nous nous voyons obligé de considérer la citation comme un
talmudisme. Dans le Talmud il arrive souvent lorsqu'on à citer
- 46 -
un long passage de l'Ecriture Sainte, on néglige les parties
les moins importantes d'un verset que l'on suppose être
connues, et on les remplace parlesformules courantes de "iûi:n
« et finir », en "di = •T'^DI « et entièrement » à compléter. La
première formule appartient à l'hébreu de la mishnah, la
seconde est un araraaisme pur. On en faisait un usage courant
à l'époque de notre auteur, surtout de Ja dernière. II n'y aurait
donc rien d'étonnant à ce qu'il s'en soit servi aussi. 11 a mis
n'i'p.lDl s'il a écrit son épître dans le dialect palestinien de cette
époque, ou x.t. -àv-ra, s'il l'a écrite en grec. Ainsi, la citation
existe intégralement dans la pensée de l'auteur, il ne s'est
servi du signe sténographique que par économie de temps ou
du parchemin. Elle existait également pour les lecteurs de
son temps si l'épîtie avait été écrit en araméen; ils savaient
que le signe .t'^I^I veut dire qu'il faut compléter la citation
d après le texte du Psaume. Il en était de même si l'épître a
été écrite en grec Ses lecteurs étaient principalement des
Juifs convertis, ils n'avaient pas de difficulté à comprendre
que le signe xal xb. TràvTa mis à la fin du verset 8, veut- dire
qu'il faut lire le verset 8 entièrement. Il n'en était pas ainsi
avec un lecteur, ou un copiste grec, d origine non Israélite
ignorant la source de la citation et étranger à ces formules
d'abréviation;- il n'y a absolument rien compris. Il a vu qu'il y
avait un Tràv-ra de trop, que le râvTa du signe sténographique
se heurte contre le Tràv-ca du verset 8 b dans notre citation,
et il crut qu'il ne pouvait mieux faire que de le supprimer.
Comment, fauteur de notre épître est-il arrivé à donner un
sens messianique au Ps. 8 qui, pris à la lettre ne semble pas
en avoir. Kurtz s'efforce defexpliquerdela manière suivante.
Voici le résumé de son raisonnement,^'^ Dans le verset qui
précède (Hébr. 2,5), l'auteur ayant dit « Car ce n'est pas aux
anges qu'il (Dieu) a soumis le monde à venir», on doit satten-
dre naturellement à l'antithèse suivante : Ce n'est pas aux
anges que Dieu a soumis le monde à venir, mais au Fils, (de
(i) Voir Kurtz, ép. aux Hébr. p. p. 88, 89,90.
— 47 -
Dieu), ou. plutôt « au fils de Thomme», puisque l'auteur a déjà
dans la pensée la citation du Ps. 8. Il se fait ensuite un rap-
prochement, dans la pensée de l'auteur, entre l'expression
<•< fils de l'homme» de notre Psaume, et le «fils de l'homme»
du livre de Dmiel, (D.m. 7 13).
A notre avis, cette explication de Kurtz, loin d'écarter la
difficulté ne fait que l'aggraver. En effet, il en résulte que non
seulement.l'auteur détournerait Je Psaume 8 de son vrai sens,
mais que' il confondrait de plus, deux significations différentes^
et diamétralement opposées, de l'expression « fils de
l'homme » dans l'A. T. Le fils de l'homme du Psalmiste, est
l'hoQime mortel, l'héritier d'Adam déchu, tandis que le « fils
de l'homme » du livre de Daniel est un être surhumain, un
phénomène particulier des spéculations de ce livre, une
créature qui s'approche jusqu'à Dieu Une telle confusion, est
à peine comprébensible si l'auteur avait dans la pensée le
texte grec, où nous avons, dans le Psaume et dans Daniel,
uioç àvQpto-o'j ; elle l'est encore moins si l'auteur raisonne sur
le texte mâssoréthique, où nous avons d'un côté un hébraïsme
pur m« p, et de l'autre un chaldaïsme pur tî>J« 12.
A notre avis, l'emploi du Psaume 8 par l'auteur est fait dans
1 esprit rabbinique de son temps, et d'après la méthode
particulière de Reniez, (voir p. 18.) Il s'efforce d'envisager
premièrement le Psaume dans son sens concret et positif,
mais il se'heurte contre l'expression -rràvTa «toutes choses»
Dieu lui ayant assujetti toutes choses, n'a rien laissé qui ne.lui
soit assujetti; cependant nous ne voyons pas encore
maintenant que toutes choses lui soient assujetties. Or, le
Psaume ne parle pas de l'homme et du fils de l'homme, mais
du Fils de Dieu ; s'il est dit qu'il est inférieur aux anges c'est
de Jésus, qui a été rendu inférieur aux anges pour un peu de
temps, qu'il s'agit; et s'il est dit que toutes choses lui sont
assujetties, il ne s'agit pas des choses de ce monde, mais du
monde à venir.
Les rabbins se sont heurtés contre les mêmes difficultés que
l'auteur de notre épître, et ils se sont efforcés de les expliquer
d'une manière analogue :
- 48 —
Traité Nedarim f. 21, i, nous lisons :
imonm i^xjîy nn« non n^^tih iiij d^i^i ùh)V^ ixi:jj nj^a n^ty ù'^^'^m
Cinquante sources (littér. por/es) d'intelligence ont'été créés
dans le monde, et toutes ont été données à Moïse, moins
une ; car il est dit : « et tu l'as diminué », etc.
Traité Sabbath f. 88,2 nous lisons :
"l'? ntjjjty nnjji mion t-js^ i-iqk «;: mm h^ph n"apn on'? nû« irai ntî>i<
iiys'? njD^'? typ:io nnx D'?iï;n K"i:3Jtî> onip nnn nv:^!';'^ Q^v^m minû ï;îî'£3
« Au moment où Moïse est monté au ciel, les anges dirent
à Dieu: Maître du monde que fait un (être) né d'une femme
(c.-a -d. homme) dans notre milieu ? Dieu leur répondit, il est
venu recevoir la thorah; mais les anges lui dirent: ô la
désirée, la secrète, qui est restée cachée chez toi pendant
neuf cent soixante-quatorze générations avant la création du
monde, et tu désires la donner maintenant à un être de chair
et de sang! qu'est-ce l'homme que tu te souviennes de
lui, etc. »
Il n'y a rien d'étonnant à ce que l'auteur ait choisi intention-
nellement ce Psaume, qui pour les rabbins se rapportait à
Moïse, le législateur de l'Ancienne Alliance, et est substitué
à celui-ci Jésus, le médiateur de la Nouvelle Alliance. Si
Ps, 8, 5 parle du fils de l'homme, ce fils de l'homme n'est pas,
d'après lui. Moïse, un être fait de chair et de sang, un mortel,
mais le Fils. Si le verset'6 dit « tu l'as rendu un peu inférieur
à Elohim-, » il ne parle pas de l'infériorité intellectuelle de
Moïse vis-à-vis de Dieu, mais de l'infériorité temporaire du
Messie vis-à-vis des anges. Il prend à dessein les mêmes
versets 5 et 7 que les rabbins rapportaient au premier légis-
lateur; il accepte le cadre de leurs idées a car il (Dieu) n'a pas;
donné sa préférence aux anges mais il l'a donnée à la postérité
d'Abraham » ; il se sert même de, leur terminologie parti-
culière al[j.a xal cràp^ = Dl"i 16^5 (v. i4), mais il les surpasse en
donnant au Ps. 8 un sens plus noble et plus spirituel. Il'
— 49 —
montre aussi par là à ses lecteurs, jusqu'à quel point il est
d'accord avec l'exégèse rabbinique et jusqu'à quel point il
diffère d'eux, et il les prépare ainsi à l'exposé suivant, dans
lequel il traitera de l'infériorité de Moïse vis-à-vis du Fils. Si
ce n'est pas là la raison de l'emploi du Ps. 8 par l'auteur, nous
ne pouvons songer a aucune autre. Il serait même surprenant
si l'on rejette notre explication, qu'un bibliciste aussi dis-
tingué que l'auteur de notre épître n'ait pu trouver un texte
plus approprié à la thèse qu'il émet. Es. ch. 9, 5-6 ; ou ch.
II, i-io, nous semblaient tout indiqués.
CITATION 9 (Ep. aux Ilébr. 2,12)
Il ' - i '
fComp. Texte iMass. Ps. 22,23; Sept. Ps. 21,23)
Au lieu de à-arysAw « j'annoncerai » de notre citation, les
Septante ont o'.v.'r^(70[j.a'. « je raconterai » qui correspond exac-
tement à n"lSD^< du texte m^ssoréthiqae.Mais cetnifîDWdu texte
massoréthique est une erreur de copiste manifeste. Le verbe
ISD dans le contexte a le même sens que notre verbe « racon-
ter ». On raconte une histoire, une nouvelle, mais on ne
raconte pas un nom. Dans la rédaction primitive, ou, du moins
dans la pensée du Psalmiste, il y avait mt^iK « j'annoncerai,
je ferai connaître » et non môDX « je raconterai » du texte
massoréthique.
On serait tenté de supposer que l'auteur de l'épître corrige
les Septante après le texte primitif hébreu, mais au fond il
n'en est rien. Il se sert intégralement du texte des Septante,
y compris l'omission de la seconde moitié du verset, du mot
il, Cette omission ne s'expliquerait pas si l'auteur avait
connaissance du texte hébreu, car cet adjectif :n aurait pu lui
rendre de grands services. Il aurait pu traduire : « Au milieu
de beaucoup d'assemblées » et le verset se serait rapporté
admirablement bien à la prédication de l'évangiJe de Christ.
— 50 —
L'auteur transforme o'//-|Vr^c-o[j.a'. des Septante en aTrayvsÀtTj parce
que ce dernier verbe est plus adéquat à la pensée générale du
Psaume; i) est plus compréhensible dans le contexte. Il
rappelle aussi le mot £'jaYY£).',ov, un mot qui s'imposait avec
force à l'entendement de l'Église primitive.
Comment l'auteur en est-il arrivé à comprendre ce Psaume
: comme messianique? Cela s'explique par le fait qu'il suit les
méthodes rabbiniques. Le psaume, malgré sa suscription, ne
peut pas se rapporter à David Le poète, après avoir épanché
sa tristesse, sa désolation, et être descendu au dernier degré
de découragement se ressaisit et s'élève, plein d'espoir, jus-
qu'à Dieu. Tout le Psaume respire la douleur d une âme en/
détresse, qui par moments se sent abandonnée par son Dieu,
mais qui la certitude du triomphe final de sa propre cause
et de celle de Dieu. Or, tout ceci ne cadre pas avec le règne
de David. Les rabbins l'ont expliqué comme devant se rap-
porter au Messie (voir Jalkut sur Ps. 22, 16; sur Es. 40) et
l'auteur de Fépître est d'accord avec eux. Delitzsch remarque
avec raison que les versets 15-18 nous peignent avec l'habi-
leté d'un artiste, la situation pénible d'un crucifié. ^^) Le Psaume
ne parle pas, en termes précis, du Messie mais l'image qu il
donne, à quelques exceptions de détails près, ressemble
parfaitement à « l'homme de douleur » au « Fils vainqueur ».
CITATION 10 [Ep. aux Hébv. 2,13)
£V(0 S'JOU.'y.'. TtcTTO'/jwC ZTz'aÙ'ZlO
I i -1
Pour cette citation nous ne saurons indiquer avec exac-
titude aucun des livres de l'Ancien Testament soit en hébreu
ou en grec, desquels l'auteur tire sa citation, car dans sa
forme présente elle ne se trouve nulle part.
Des mots similaires se trouvent dans beaucoup d'endroits.
Les Septante traduisent avec totto'.Ôco; èdo^y.'. sTr'aÙTco Es. 8, 17
•h wipi ; Es. 12, 2 hîoix et 2 Sam. 22,3 1:} noUN.
(i) Delitzsch sur Ps. 22. Keil, ép. aux Hébr. p. 72.
- 51 --
La citation peut-être tirée du 2 Sam. 32,3 (Ps. 18, 2), si nous
pouvons affirmer que l'auteur de l'épître traduit lui-même la
citation sur le texte hébreu. Certes, sa traduction n'est pas
parfaite, car le verbe non dit plutôt « s'abriter, se réfugier »,
que « se confier », mais tout de même, elle serait soutenable.
Mais nous n'avons pas, jusqu'à présent, une preuve assez
certaine qui nous permette d'affirmer que l'auteur de notre
épître traduit un texte hébreu. Aussi la majorité des exégètes
sont-ils d'avis que la citation est faite de mémoire d'après les
Septante, Es. ou 2 Sam., avec une insertion de eyw et le dépla-
cement de £a-o]j.a'. ; qu'il cite surtout Es. 8, 17, vu que le contenu
de ce fragment d'Esaïe parle d'Emmanuel ou du Messie.
Si la citation est tirée d'Esaïe 8, 17, nous ne pouvons établir
aucun rapport entre l'auteur de l'épître et le Targoum. Pour
le Targoum Jonathan Es. 8, i7, se rapporte au Prophète. Il
traduit \niuip'? W^iai « Je demandais à lui, » ou « je priais
devant lui ». C'est le prophète qui demande à Dieu. 11 y 'a, au
contraire des rapports extrêmement étroits entre l'auteur de
l'épître et Je Targoum si la citation est tirée de 2 Sam, 22,3
ou d'Es. 12, 2. Il paraphrase 2 Sam. 22, 3 par pm N'JX nn?:''» hvi
car à sa paroZe je me confie, et Es. 12,2 par xn^x lûVi bv î<n
pm KJX «ipTit3 « car à la parole de Dieu je confie ma rédemp-
tion ». Le sens de ^''^û^'3 chez les Targoumims étant à peu près
le même que celui du lôyo:; chez les auteurs du Nouveau
Testament,' le contact entre l'auteur de l'épître aux Hébreux
et le Targoum est donc très grand. Ce que David, ou Esaie
disent de Dieu le Père, de Targoum et l'auteur de l'épître aux
Hébreux le rapportent au Logos.
D'après cette manière de voir, que 2 Sam 23 (ou Es. 12), où
il s'agit da Dieu le Père, parle en réalité du Logos ou du
mémreh, la citation est très à propos. Dans 2 Sam. comme
dans Es. 13 nous n'avons pas seulement un acte de confiance
d'un seul individu : c'est le formulaire éternel de la foi
de tous les croyants et de toutes les églises. Ce « je me
confie » etc., veut dire : je c. a. d. moi, auteur, comme tous
ceux qui croient en lui. Ainsi sa thèse sur les rappoits du
Christ et de l'humanité se trouve toute indiquée. Le rap-
- 52 -
port, le lien entre le Fils et l'humanité c'est la confiance
commune des croyants.
CITATION 11 {Ep. aux Hébr. 2,13)
loo'J eyco xat, toc Tzaioiy. a u.oi eowxev o Usoç
(Com/j. r. Mass. et Sept. Es. 8, 18)
La citation est faite d'après la Septante qui couvre parfai-
tement le texte hébreu, sauf qu'elle met le [Aot, avant le verbe.
Le Cod. Marchalianus donne le même ordre des mots que
l'hébreu; il met plo-. après Iùcoxsv.. Cet accord parfait entre
l'auteur de l'épître et la Septante nous force d'admettre que
l'auteur ne s'est nullement soucié du texte original hébreu,
mais qu'il suit mot pour mot la traduction grecque.
Comment a-t-il pu arracher de son contexte un passage où
l'on parle d'Esaïe et de ses enfants, puis substituer à Esaïe le
Christ et mettre à la place des enfants d'Esaie, les chrétiens
ou l'humanité appelée à la conversion, ceci a étonné et
étonne encore tous les commentateurs. En effet la preuve
scripturaire pèche par la base. Uans Esaïe il est parlé d'un
prophète, l'auteur de notre épître parle du Fils de Dieu; là
il est parlé des propres enfants d'Esaïe; lui il parle des
enfants de Dieu; Pour sa thèse il lui fallait un passage qui
établit la véritable fraternité qui existe entre le Christ et
l'humanité, mais la citation en question ne parle pas de cela
et ne prouve rien à cet égard. La seule supposition qu'il nous
reste à faire c'est que l'auteur fait cette citation, non pas po^ir
! prouver le lien de fraternité qui existe entre le. Christ et l'hu-
1 mànité, mais pour appuyer sa thèse e^ évo? Tràv-reç « nous
sommes tous d'un ». Il est vrai que l'auteur aurait pu choisir
un passage plus probant,, à supposer qu'une thèse aussi uni-
versellement admise ait encore besoin d'un appui scripturaire.
- 53 -
DE LA SUPÉRIORITÉ DU CHRIST SUR MOÏSE
Après avoir établi la supériorité du Christ sur les anges,
l'auteur met en parallèle la personnalité du Christ avec celle
de Moïse. Ce parallèle s'imposait, en toute nécessité, après
celui que l'auteur avait établi entre le Christ et les anges. La
mémoire de Moïse était entourée ajuste titre, d'une auréole
sainte. Moïse fut dans la pensée Israélite de toute la diaspora,
non seulement le libérateur et jusqu'à un certain degré le
créateur du peuple d'Israël, considéré dans son unité nationale,
mais il était encore le plus grand des prophètes, la plus haute
personnalité dans l'ordre de la révélation. Deut 34,10 affirme
qu'il ne s'est plus levé en Israël un prophète tel que Moïse, que
l'Eternel connaissait face à face, et cette assertion, vraie dans
ses grands traits, a gravé la croyance à la valeur unique de la
personne de Moïse dans la mentalité du peuple d'Israël en
traits ineffaçables. Dans cette mentalité il n'y a psychologi-
quement plus de place pour un autre être qui prétendrait à
être vénéré au même titre et à l'égal de Moïse, mais vouloir
mettre le Christ au-dessus de Moïse entre Dieii et les élus
est une thèse qui a besoin d'être confirmée par une preuve
scripturaire, par un témoignage de JDieu même.
- GITÀTlbN 12 {Ep. aux Hébv, 3, 2-6)
{Nombr. ch. 12,7)
Nous ne nous trouvons pas ici en présence d'une citation
directe. C'est line allusion à Nom. 12, 7, dont l'auteur reproduit
seulement le contenu général, en faisant quelques inver-
sions pour les besoins de sa thèse.
C'est évidemment de la version des Septante qu'il se sert
et non |)as des T^rgoumim, Ces derniers, à Teiicontre des
Septante, dorihént pour lé mot |û«j. non pas toottô; « fidèle »,
mais |p\-ii3 « cru ». îl est cru par toute rria maison .
- 54 —
L'accent que l'auteur met sur le T.i'7i:ôq n'est certainement
pas fortuit. Dans le Talmud Babba Bathra on spécule aussi
sur le mot p«J. Dans le Midrash Vaikra Rabba il est dit :
« tous les prophètes n'avaient leurs visions qu'à travers des
miroirs ternes; Moïse avait ses visions à travers un miroir
brillant » ou encore « tous les prophètes n'avaient leurs
visions qu'à travers neuf miroirs; Moïse voyait à travers un
seul miroir ».
CITATION 13 [Ep. aux Hébr. S, 7-llJ-
IJ.Y, tAYiP'jvYiTî Ta^ xapo'la^ 'j^^jmv (o; èv -rw izy.oy.TZ'.y.py.'j^M
y.cf.-k Tr,v T,!J.£pav xoù 7:î'.paa-[j.0'J sv Tr, î.^r^>^.Oj,
où eTTcipacrav rA TzaTÉpsç -jucov àv ooxi.aa'T'.a
xal î'.oov-rà £ova aou -Z'yy tpy.y.oy-y. sVa.
I o'.oj Trpocrwy 0'.!7a t/j YcVca Taûx'^,
xal sIttov àsl -AavtovTa', 7?, xapSia
r "\
a-j-o'. 0£ O'jy. cyvcoo-av Taç ooo'jç pio-J
cl clTîAî'JTOVTa', si-; rÀ|V xaTa— auo-Lv aou.
i
/Co/77p. 7\ Mass. Ps. 95, S-11 Sept. 9//, 7-11
Les nombreuses divergences entre la Septante et le texte
massoréthique, divergences que l'auteur de l'épître s'approprie
sans les rectifier, ne proviennent pas de ce que les traducteurs
grecs avaient un autre texte devant eux, mais plutôt delà
lecture si difficile du texte hébreu.
Dans l'hébreu « aujourd'hui, si vous entendez sa voix »
forme la fin du verset 7; La Septante en fait le commencement
d'un verset. Le texte original hébreu n'ayant ni signes spé-
ciaux, ni points, ni voyelles, -permettant de reconnaître la fin
des versets, la tâche de séparer les versets était après la lecture
du texte, une des plus difficiles. Aussi arriva-t-il assez souvent
au traducteur de commettre des erreurs. Dans notre Psaume
cependant ils ont mieux réussi dans la séparation des versets
que les Massorèthes. 11 est préférable de commencer le verest
- 55 --
par: « aujourd'hui > etc., et cela pour deux raisons: i° Le
texte est ainsi beaucoup plus clair.Dans le texte inassoréthique
le mot « aujourd'hui » a très pea de rapport avec ce qui
précède; il n'a aucune relation avec ce qui suit; la phrase
paraît cherchée. D'après la Septante la phrase occupe sa place
naturelle; le style devient tout à fait clair. 2° Le psaume 95 se
compose de versets de deux et de trois vers ou phrases; 1-4
contient deux vers chacun, 5 et 6 trois. D'après la coupure
des versets dans la Septante, tout le reste du chapitre, à l'ex-
ception du dernier V. li, se compose de trois vers ou phrases
par verset; il n'en est pas ainsi avec le texte massoréthique.
En ]e lisant tel qu'il est devant nous, c'est-à-dire avec les mots
« aujourd'hui, etc , » rattaché au verset 7, nous aurions ici
contrairement à tous'les autres versets, un verset de quatre
vers ou phrases.
En rendant DX par Èàv les Septante donnent une traduction
correcte malgré les objections qu'on a soulevées contre elle.
Certes, elle n'est pas d'accord avec le sens qu'il faut donner
„au mot D« dans le texte massoréthique, où il équivaut à une
exclamation et exprime un souhait : « ô si vous entendiez
aujourdhui sa voix! » Mais comme nous venons de le voir,
« aujourd'hui etc., forme le commencement d'un nouveau
verset, et DKle comme le èàv est bien un conditfonnel : si vous
entendiez sa voix etc.» La traduction donnée parla Septante,
du mot DX, ainsi que la séparation du verset 7, paraît être
appuyée par le Targoum Jonathan. Il lit: nh nnû''i2:îDN' p «ri?
hh^ipn (( ce jour si vous, etc. »
xaç y.a^oiy.q ujawv VOS cœurs DDTilp'?. Le texte massoréthique
n'a que « votre cœur ». Nous'ne croyons cependant pas que la
traduction grecque eût ici un autre mot. r>,v xap&tav au singulier,
laisserait à désirer dans cette phrase, et il a préféré mettre le
pluriel.
ev Tto TrapaTï'.xpaa-uKÔ '/.a-zk tTjV Y,u.£pav to'j Tce'.pao-u-O'J. Massall et
Meribah sont des noms propres, qui ont été donnés à Refidim
à loccasion des plaintes et des murmures des Juifs contre
Moïse et contre Dieu (voir Ex. 17, i-7), mais comme cette
localité n'a probablement pas conservé ces noms, les Septante,-
- 53 -
par ignorance, les traduisent par 7:apa7r!,xpa3-Li.6; et Trs'.paa-tjLo; aii
lieu de donner simplement des noms propres. Remarquons
que dans notre texte la Septante ne lit pas Meribah, mais
m''lû. Le traducteur grec des Psaumes a donc une connais-
sance vague ou nulle des récits de Nomb. 20 ou Ex. 17, que
ce soit dans le texte original ou dans la traduction grecque;
autrement il aurait accepté la traduction de Xo'.o6pY,(T'.; et
d'àvTO.oyUç que nous lisons là.
sTte'lpacrav sans le pronom [j.£ est du Cod. Vat , cependant
il existe dans le texte massoréthique ; aussi K ca X ajoutent y-e
après le premier et le second verbe, et le cod. Alex, ajoute
[JL£ après le second verbe seulement. Au lieu de èôox[[jLaa-ay
de la Septante, l'auteur de l'épître aux Hébreux a sv 8ox',p.aa-ta
La différence entre ■zk è'pva [j.ou« mes œuvres » (pluriel) et '''?ï;£5
mon œuvre (singulier) provient simplement d'une différence
dans lavocdbilisation: l'^ys pour '''^Vfi.L'épître aux Hébreuxinclut
encore dans ce même verset les mots Tco-o-apàxovra hr^ qui for-
ment dans les Septante et dans le texte massoréthique le com-
mencement du veiset lO.' Là préférence doit-êre donnée ici àla,
lecture de la Septante et du texte massoréthique. L'ordre des
rythmes est plus régulier dans ces deux derniers textes; il est
moins bon dans l'épître aux Hébreux. En outre, d'après celle- -^
ci^ il faudrait encore insérer au commencement duverseti^ùn
ph qui jure dans le style de notre psaume. •
Tri yevcâ. Taur^i. Les Septante ont èxcîvr, . Dans le texte
massoréthique il y a ici un lapsus manifeste de la part d'un
copiste; il devait y avoir xinn 'd'après la Septante ou nin
d'après le texte de notre' épître. eIttov est la lecture des
manuscrits Alex, et Turicence. 'Les autres manuscrits de la
Septante ont zlrca..
Pour àsl « toujours » le texte massoréthique lit dï^ « un
peuple ». Nous avons cherché en vain un mot hébreu répon-
dant au grec àsl et pouvant convenir au contexte. Tous ces
mots hébreux, signifiant toujours û'^lj;'? /Iï;"? /nïj'? /T'ori, placés
avant lynetc, transformeraient la poésie de ce verset en un
jargon. Nous nous voyons donc acculés à expliquer la diver-
gence entre la lecture de la bible hébraïque et celle de la
— 57 -
Septante par une faute des copistes. Le scribe, au lieu d'écrire
Dy « un peuple, » s'est trompé et l'a écrit avec un aleph DK.
Une fois que cette erreur existait dans le manuscrit Hébreu,
le traducteur grec ne pouvait faire autrement que de lire, im
« si »; car il n'aurait jamais pu songer qu'il y avait ici, dans
le manuscrit, une faute d'orthographe. Il ne pouvait prendre
cet DK pour la conjonction « si » introduisant un conditionnel,
car alors le verset n'avait plus aucun sens; il lui a donné le
sens affirmatif et l'a traduit par ad < toujours, »
a.ù'zol ok; le oï « mais » se trouve dans les manuscrits Alex.
Sinaiticus et Taricense; les autres ont xal aù-zo'.. Leide ûm
peut avoir le sens de noire conjonction «et» et delà conjonc-
tion « mais». Sans doute le 03 ici doit-être compris comme
une particule antithétique « mais » car les Septante aiment
généralement suivre l'ordre des mots du texte hébreu, et s'ils
avaient voulu mettre une conjonction correspondante au
« et » français, ils auraient mis xal aÙTo-..
Il résulte de ce que nous venons de dire, que "l'auteur de [
l'épître aux. Hébreux n'avait aucune connaissance du texte ^
des massorèthes tel qu'il nous est parvenu. 11 accepte' toutes
les améliorations que la Septante a apportées, soit dans la
séparations des versets (Sept. v. 8) soit dans la lecture des
voyelles (v. 9 è'pya) ou même des mots, que les massorèthes ont
omis par négligence, mais il accepte aussi les erreurs mani- J
festes que la Septante a commises. (Merirah a;u lieu de
Meribah; l'omission de p après sTcsipao-av ; àcl « toujours »
pour Dy « peuple ». Cependant il ne cite pas un des manuscrits
de la Septante que nous possédons, mais un codex grec que
n'avons plus. Le plus grand, le plus hardi des changements,
qu'il fait subir à la Septante, et que l'on dirait être fait d'une
manière arbitraire, ne provient cependant pas d'une erreur de
lecture ou de ce que l'auteur de l'épître cite le psaume de
mémoire, mais d'un des manuscrits de la Septante; la même
leçon se trouve ainsi dans le Psal Graec. Lot. Veron.
Les coïncidences entre les spéculations rabbiniques et
celles de Tauteur de notre épître sont très nombreuses. Aassi
avons-nous l'impression qu'il prend de préférence ce fragment
- 58 -
des Psaunies, parce que dans la synagogue on a de même fait
à son propos des spéculations hardies, On expliquait, en
s'appuyant sur le verset 7 de notre Psaume, que la Parousie?
la révélation du Messie dans le monde, ne dépend que d'une
Tepentance immédiate, s'accomplissant avant que le « aujour-
d'hui » passe.
Voici le texte tel que nous le lisons dans lé traité Sanhédrin
fol. 98.
ï^tyin^ ^:5-i nr,:s' nm jnxn nvi^îi^D^ )h iûx .^isi nû'?^'? xrnt< i^ -idk \snr
nnn'? n"''?^^îi' h^i )h nox n^t!v,: Tis nû\s Vs ^i^qî^ "j 'pipi \"i^n-i d'-jî^ ^l'^'p
nty i^isi Q'nhn ^h::)^ "r; ^rn n\"i^ ht^^d \xûi ['] xmpi t^nnsx 3W nD^n^
Nn« orn '^''x na ""nx nn\s':' V'x \si^b 12 ybv D)b\i^ *?"« moi ^::-i jhv a)b^
-]i::s'?i ■]':' •]r\^:2ii b"i< wS 13 y*?:; Di'^ty V'x 1^ iûx ""xd i'? iûx i,t':'X '':]j'?
n^'? lî^x snx x':»! xrnx dim ^':' y^ai ':i ip^ xp '•■npîî^ V'x ^nxn x^b^'?
.lyàtyn l'^ipi dx Dvn l'p "idx ^dh
« Rabbi Josué ben Lévi trouva le prophète Elle qui se tenait
à la porte du caveau de Rabbi Siméon ben léchaï. 11 lu^
demanda : viendrai-je dans le monde à venir. Il (Elle) lui ré-
pondit : Lorsque le maître que voici le voudra. Rabbi josué
ben Lévi dit : J'ai vu deux (personnes) et j'ai entendu la voix
de trois. Je lui ai demandé quand le Messie viendrait. Il me
répondit : va le demander à lui-même. — Et où se trouve-
t-il ? — A la porte de la ville (i) (de Jérusalem). Quels sont
ses signes? (à quoi le reconnaîtrai-je?) Toutes les autres
(malades) bandent toutes leurs plaies à la fois; lui il bande
les siennes l'une après l'autre ; car il se dit, peut-être aura-t-
on besoin de moi, et que je n'en sois pas empêché. (Josué)
donc alla et dit ; la paix soit avec vous, mon chef et mon
maître ! Il lui répondit : La paix soit avec toi, fils de Lévi.
(i) Dans certaines éditions on lit ici /am au lieu «mp^T et certains théologiens ont
compris, à la porte de la ville de Rome. Ceci est une erreur de leur part. S'il laut lire
ïOm dans le texte, cela ne peut dire autre que la porte. sud de Jérusalem. 11 n'au-
rait jamais pu germer dans la pensée d'un palestinien, que le Messie fixeerait son
siège à Rome.
- 59 -
Il (Josué) lui demanda : quand viendra le Seigneur? (c.a.d.
tu.) Il lui répondit : Aujourd'hui. Josué revint à Elle. Elie lui
demanda : qu'a-t-il dit? Josué répondit : Paix sur toi, fils de
LévylEliell t'a assuré par là, à toi et à ta famille^ la vie future.
Jossué : Mais il m'a enduit en erreur; car il m'a dit : aujour-
d'hui je viendrai, et il n'est pas venu ! £lie lui répondit: Voici
ce qu'il voulait te dire: aujourd'hui si vous entendez sa voix!»
Le texte dans le traité Sanhédrin fol iio" est [non moins
intéressant. Là le talmud spécule sur le mot « repos », dont
il est parlé dans notre chapitre, et il enseigne que le dernier
verset de notre psaume n'affirme pas seulement que la géné-
ration. qui a vécu au désert ne rentrerait pas en Palestine à
cause de son rébellion mais aussi qu'elle a perdue à cause de
cela sa part à la vie éternelle, au paradis, qui revenait à tout
Israélite, a tout fils d'Abraham.
Voici la teneur du texte : nûiNi...«::n ùb)vh p':'n urh |^« '\:ïit:^n nn
«Les hommes de la génération du désert n'ont pas de partà
la vie éternelle. Il est dit : parce que j'ai juré dans ma colère
s'ils entrent dans mon repos. »
A ces deux textes du Talmud ajoutons en un autre, que
nous trouvons dans le traité Sanhédrin fol. 99% dans le Mé-
drash Tanchuma, dans la Pesikteta dans le Zohar, et qui par
sa haute antiquité, par sa brièveté et sa forme énigmatique
a dû s'imposer à la mentalité palestinienne avec la force d'un
oracle sortant des Ourim Vetoumim du Grand-Prête même.
En voici la teneur :
. nJiy û''î;31N rr'tyûn m»'' «Les jours du Messie sont quarante ans.»
Pour peu que l'on mettre en face de ces .trois textes du
Talmud la longue et pressance exhortation de l'épître, on ne
tardera pas à s'apercevoir que ces divers morceaux mettent
tout l'accent sur des mots particuliers du psaume, en tirent
les mêmes leçons et parlent à peu près le même langage.
Pour l'auteur de l'épître aux Hébreux comme pour le Tal-
mud le mot « aujourd'hui» du psaume forme le centre delà
leçon et ils en tirent les mêmes conclusions : une repentance
immédiate, faite pendant que Dieu dit encore, «aujourd'hui»
- GO -
Le royaume du Messie ne peut venir sans cela sur le terre,
d'après le Talmud. On perd la vertu rédemptrice du Christ
et le royaume du ciel, que cette vertu inclut, si l'on se relâche
dans la repentance ou si l'on se soustrait aux exhortations
mutuelles qui se font dans l'église. (Hébr*3, i2-r4). Le repos
dont il est parlé au verset ii du psaume est pour l'auteur de
1 epître aux Hébreux, aussi bien que pour le Talmud, non
pas la possession du Canaan, le repos après le long esclavage
en Egypte et la jouissance calme de la fertilité du sol palesti-
nien, mais c'est le repos d'au-delà, le repos que Dieu accorde
à ses enfants dans le royaume avenir. C'est le Sabbat de Dieu
même, dont il jouissait, après avoir achevé l'œuvre de ses
mains.
Enfin le texte énigmatique du traité Sanhédrin 99" n'est non
plus sans inflluence sur l'auteur de l'épître aux Hébreux, Il a
dû contribuer à lui suggérer le parallèle qu'il établit entre le
peuple du désert marchant vers la Terre Promise, et l'Eglise
chrétienne primitive à la veille de l'entrée dans le royaume
du. Messie. (Hébr. 3, 16, 19). Ce parallèle est d'une parfaite jiis-
tesse. Ce sont deux événements historiques qui se super-
posent. C'est la résurrection d'un fait historique (si je
puis m'exprimer ainsi) qui revient sous une forme plus pure,
plus sainte^ plus morale, et plus universelle. L'un avait trait à
un peuple isolé, l'autre à l'ensemble de l'humanité. Le peuple
du désert, dans la pensée de l'auteur, attendait un royaume
terrestre qui s'élèvera jusqu'à Dieu; l'Église primitive attendait
un royaume des cieux qui s'abaissera jusqu'à la terre. Comme
le peuple du désert, les premiers chrétiens étaient dans la
détresse et dans l'angoisse, mais avaient en mênië temps la
conviction inébranlable, qu'ils ne faisaient que traverser une
période de tribulations pour en arriver à une meilleure.
Encore un peu, bien peu de temps, et Celui qui doit venir
viendra certainement. Ce sont quarante années pour la con-
templation des oeuvres de Dieu, une période, pendant laquelle
on doit cultiver par l'espoir des choses qu'on ne voit pas
encore, comme si elles étaient déjà, présentes; ce sont des
années de préparation à la manifestation du Fils de Dieu sur
- 61 -
la terre. Peut-être est-ce pour cette raison que l'auteur de
répître rapporte les mots Tso-c-apàxovTa hr^ au verset précédent
et dit « ils ont vu mes œuvres pendant quarante ans >} au lieu
de les rapporter aux verset suivant et de dire : pendant qua-
rante ans je me suis irrité contre cette génération. » Il ne peut
pas les rapporter au verset suivant, car l'espace de temps
qui sépare la première et la seconde venue de Christ n'en-
ferme pas exclusivement des années de colère, mais des
années d'attente et d'espoir.
CITATION 14 (Ep. aux Hébr. ////-)
Comp. T. Mass. et Sept. Gen. 2,2
La version des Septante paraît s'écarter dans la dernière
moitié du verset du texte hébreu, L'hébreu a in^H^û « de tout
son travail » au singulier; la Septante lit spycov au pluriel. C'est
le mot ^DD qui généralement est un pluriel, « de tous », qui a
induit les auteurs de la Septante à rendre le substantif suivant
nD«^û par un pluriel.
La citation -de Fépître diffère des Septante et du texte
massorétique par l'insertion des mots 6 Oso; et xal qui n'existent
ni dans l'hébreu ni dans la Septante, et en second lieu l'omis-
sion de wv ÈTcoiriosv qui existe dans l'hébreu, dans la Septante
et dans les anciennes versions importantes, telles que le Tar-
goum et la Peshitto.
Si nous nous demandons d'où viennent ces deux grandes
divergences entre l'auteur de l'épître aux Hébreux et la Sep-
tante ou le texte massorétique (car ces deux derniers se
couvent parfaitement) deux hypothèses se présentent :
a). L'auteur de i'épître fait lui-même sa version sur un texte
hébreu, qui était le même que celui des Massorèthes. Mais
comme les deux moitiés du Gen. 2,2 disent tout à fait la même
— 62 —
chose ; ^^''l et m:3ti'"'l expriment la même idée : cessation.
,r]^V ity« m^x'^rj h^: ^v^:!^^ or 3 mjsty^ v. 2"
il s'est fait une petite confusion dans la version ; il a transposé
le D\n'?t<— Oso^ du 2" dans 2'', et il a omis n^V llî>x wv £7rou,(7£v
qui se trouvent dans 2-* . Il se peut aussi que cette transpo-
sition ait été faite intentionnellement, afin de donner plus de
clarté au texte. Il procède de la même manière que les Tar-
goumim; il fait une paraphrase qui est en même temps une
sorte d'explication et d'exégèse,
Cette hypothèse écarterait toute les difficultés, mais elle
soulève plusieurs objections, i) L'auteur pense en grec en non
en hébreu niityi n'a pas du tout pour lui le sens de cessation,
comme '?2''i,mais de repos, il dit xaTi-ûaucrcv «i.ls'est reposé etc. »
2) Nous n'avons jusqu'à présent aucune preuve qui nous per-
mette d'affirmer que l'auteur traduit lui-même un texte.
3) L'étude que nous avons faite sur la citation précédente.
(Ps. 95, ep. aux Hébr. 3, 7-11) a démontré d'une façon indiscu-
table que l'auteur se sert d une version grecque des Septante et
non du exte hébreu du Ps. 95. Il nous est donc impossible
d'imaginer que dans un seul et même développement, dans
un fragment qui parait être écrit au courant de la plume,
l'auteur se soit servi tantôt d'une Bible grecque et tantôt d'une
Bible hébraïque. 4) La citation précédente (Ps. 95) a été faite
d'après un texte grec. Il divise cette longue citation en plu-
sieurs parties et en fait des applications diverses, Ch. 4, 3-6
il spécule sur le mot xaTaTtaucnç du Ps. 95, 11. C'est ce dernier
mot qui, par association d'idée, a appelé la citation de
Gen. 2,2. Après le xaTàTiaua-^ du Ps. 95, 11, la citation de
Gen. 2, ù y.y.\ xaTSTca-jo-sv s'est présentée à sa mémoire
sans effort. Il n'en est pas ainsi si l'auteur se servait
du texte hébreu. 11 n'y a aucune similitude phonétique
entre le mot nhlJû « repos > du Ps. 95, 1 1 et m:3a'''1 « il se reposa »
du Gen. 2,2. Outre l'absence totale d'une similitude phoné-
tique, ces mots expriment pour un hébraïsant deux notions
différentes, le premier dit repos, quiétude ; le second, cessa-
tion, rupture avec les occupations précédentes. Certes, le
- 6H -
rapprochement est toujours possible, mais il est plus difficile
et plus recherché que si l'auteur s'étoit servi du texte grec.
b) La citation serait-elle faite d'après un receuil de prières ?
Ps. 95 et Gen. 2, 1-3 se trouvent dans les recueils deprières
du Samedi soir dans le même ordre que dans notre épître. Les
Psaumes viennent en premier lieu, ensuite plusieurs bénédic-
tions et après Gen. 2,1-3.11 se peut donc que les citations 13
et i4 (Hébr. 3,7-11 et Hébr. 4, 4) soient faites non pas d'après
le texte hébreu ou grec de la Bible, mais d'après le recueil
de prières où elles avaient la même, forme que darrs4'Epître
aux Hébreux. Ces prières pouvaient parfaitement être engrec
comme l'on avait des prières enaraméen! Cette hypothèse,
si nous pouvions la confirmer, écarterait toutes les difficultés,
mais nous ne pouvons pas affirmer l'existence d'un recueil
de prières dans les cercles Judeo-Alexandrins. En admettant
l'usage d'un recueil, de prières hébreux ou grec par les Juifs
d'Alexandrie, nous ne saurions dire ni ce qu'il contenait, ni
si l'auteur a voulu en faire usage pour ses citations. Du grand
nombre de citations de l'épître, trois citations seulement se
trouvent dans le recueil de prières actuel, et il est. plus que
probable que ce ne soit là qu'une coïncidence fortuite.
— 64 -
LA SUPÉRIORITÉ DU CHRIST
SUR LES GRANDS-PRÊTRES,
CITATION 15 {Ep. aux Hébr. 5,5; Ps. 2,7)
w.ôi [j.o'j si o-û, etc.
Pour les rapports de cette citation avec le texte massoré-
tique et les Septante voir citation i, page 26, mais l'applica-
tion que l'auteur en fait ici, est toute nouvelle. Là(Hébr. 1,5;
il s'en est servi pour établir la filiation du Christ et du Père,
l'état et la qualité du Fils. La paraphrase des mots « Dieu dit»
par « à qui a-t-il jamais dit » lui a permis de conclure que le
Christ est supérieure aux anges et qu'il est le premier-né. De
sa première conclusion du Ps. 2,7, il en résulte, pour l'au-
teur, une nouvelle, qui doit tendre à établir le sacerdoce du
Christ. Le Christ est le Fils, le premier-né, mais comme dans
l'ancien Israël le fils premier-né était investi d'ane sorte de
pouvoir religieux ou sacerdotal, exerçait une sorte de prêtrise
lians la famille et recevait du père les bénédictions ou les
promesses (Hébr. 11, 17-18), le Christ est donc prêtre pour le
fait même qu'il est le fils premier-né; il est supérieur aux
autres prêtres par le fait qu'il est d'essence divine et éternelle.
C'est le raisonnement implicite que l'auteur a dans la pensée
losrqu'il fait ici usage du Ps. 2,7, car sans ce raisonnement
nous ne voyons pas le rôle de la citation dans ce développe-
ment; elle ne semble avoir, sans ce raisonnement, aucun lien,
ni avec ce qui précède ni avec ce qui suit. Il est au contraire
très convaincant, si nous entrons dans la pensée secrète
de l'auteur.
A la démonstration du sacerdoce suprême du Christ par
le Ps. 2, 7, l'auteur ajoute la citation du Psaume i^o, 4,
C'est la construction fondamentale d'après deux textes, une
des lois exégétiques de Hillel. (voir p. 20)
— 65 —
CITATION 16 {Ep. aux Hébr. 5,6)
o-ù Upeùç zlq xov atwva xara rr\v Ta^Lv MeXyidtrAy.
{Comp. T. Mass. Ps. 110 A: Sept. Ps. 109,4)
La citation s'accorde avec la version des Septante des ma-
nuscrits Alex, et Turicence, qui omettent le verbe el. C'est le
mot à mot du texte massoréthique. L'omission du verbe d pro-
vient-elle de la dépendance de l'auteur vis-à-vis d'un manus-
crit des Septante ou d'une traduction qu'il a faite lui-même sur
le texte hébreu original? Nous ne saurions le dire, mais ce qui
nous décide à supposer que l'auteur de lépître aux Hébreux
se servait de l'une des versions des Septante, c'est la partie b
de la citation : xa-cà t7,v Ta^^v MtXyj.(7&Béy,,
Cette autre moitié du verset a quelque chose d'inattendu;
elle semble être cherchée de loin. Nous ne trouvons qu'une
seule fois la personnalité de Melchisedek, dans la Genèse.
Là il est roi de Salem, que l'on croit être la ville de Jérusa-
lem, et en même temps il est prêtre (Kohen) au Dieu su-
prême. C'est l'unique mention qui soit faite de lui dans les
livres saints. Nous ne connaissons ni son origine, «sans père,
sans mère, sans généalogie », ni l'étendue de son royaume,
ni le peuple, sur lequel il régnait. Nous ne savons pas à quel
rang, à quelle catégorie de prêtres il appartenait, ni en quoi
consistait son sacerdoce ou quel en était le cérémoniel; nous
ne pouvons pas savoir, d'après le texte massoréthique, si en
sa qualité de prêtre il était de son rôle à percevoir la dîme
des autres ou de donner des dîmes aux autres. Tout ce que nous
savons c'est que le pain et le vin jouaient un rôle dans son
ministère, et que dans ses conceptions théologiques il y avait
l'idée du rachat du monde, (des cieux et de la terre) par un
Dieu très haut. Malgré le silence dans les écrits sacrés sur ce
personnage énigmatique. il a dû circuler sur son compte des
traditions qui se précisèrent, et trouvèrent des adhérents
de plus en plus nombreux dans le monde palestinien^
- (1(5 —
SI bien qu'à l'époque de l'ère chrétienne nous trouvons
toute une secte de Melchisédéciens, établie officiel-
lement à côté de la secte des Esséniens. Il va sans dire que
les docteurs de cette secte lisaient le nom de Melchisédek
aussi dans le Psaume iio. On n'a qu'à constater l'effort avec
lequel les docteurs de toutes les sectes cherchaient à établir,
à étayer sur l'écriture sainte leurs doctrines^ leurs rites et
leurs dogmes. Dans ce désir de trouver leurs dogmes dans
les Ecritures saintes ou de les voir confirmés par elles, on en
est même arrivé à faire un usage abusif et arbitraire. On n'a
qu'à jeter un coup d'œil sur le Zohar pour voir comment les
cabbalistes trouvent la Schinah un peu partout dans la Bible
et ceci dans les passages qui pour nous parlent de tout autre
chose. Les docteurs de la secte Melchisedekienne lisaient
évidemment le nom de Melchisédek dans notre Psaume et
retrouvaient leur « grande force » encote ailleurs dans les
livres saints. Mais devons-nous vraiment lire le nom de Mel-
chisédek, dans le Psaume qui nous occupe? Sans doute, nous
ne saurions faire autrement, si nous acceptons la version des
Septante qui rend les mots Tilil hv par « à la manière de 7/.
Mais cette version est ici, à notre avis, extrêmement contes-
table. Les Septante, considèrent cette locution de la même
valeur que les mil hy du livre d'Eccl. Dans ce dernier livre
c'est un hellénisme, nian hv est l'équivalent de xaTà t7|V àywy/iv.
Le livre. d'Eccl, possède beaucoup de locutions grecques et
celle-ci s'ajoute à tant d'autres, sans que nous en soyons sur-
pris. Mais l'influence de la langue grecque est nulle ou insigni-
fiante sur les auteurs des Psaumes, et nous nous demandons,
si ce n'était pas à tort que les Septante ont rapproché le TniT hV
du Psaume iio de ces mil hv du livre de l'Ecclésiastique.
Nous ne serions pas surpris, si dans le manuscrit, sur lequel
les Septante ont fait leur version, le jod de '•miT manquait; ils
ont lu mil hv et comme on ne faisait pas à cette époque l'hisr-
torique du développement des langues, ils ne pouvaient pas
faire autrement que de lui donner le sens qu'il a dans le livre
de l'EccL, et ils ont mis pour plus de clarté xarà Tr,v Tàç-.v,
« selon le rang » au lieu de xa-rà t/jV àyiov-z-v.
- 67 -
Le Tnil h^ du Psaume 110 serait-il l'équivalent de i:ji hv ou
''-):i1 hv, et faudrait-il traduire « à cause de » ? Cette hypothèse
a été déjà émise par Aben Ezra, et Hoffmann dans son
commentaire sur l'épître aux Hébreux l'a reprise. Ce dernier
soutient que la version de la Septante est inexacte, et qu'il
aurait fallu traduire « Tu es prêtre éternellement à cause de
moi, un Melchisedek »
Nous avouons que ceci est très ingénieux mais à peine sou-
tenable. Que fait Hoffmann du n dans le mot ""ni^n ? Évi-
demment pour lui il est de trop et il faut le rejeter. Il faut
également changer toute la vocalisation et les notes musi
cales ; les mots piï *d'?û restent à la fin du verset tout seuls,
sans se lier étroitement avec ce qui précède; tout le verset
devient d'un style haché, cahoté, qui est beaucoup au-dessus
du talent poétique de l'auteur de ce Psaume. La traduction
de Hoffmann, si ingénieuse qu'elle soit, est encore en somme
moins bonne que celle de la Septante. Aussi Aben Ezra n'a-t-il
fait qu'indiquer cette hypothèse sans y insister.
A notre avis le Tiiil hv n'est pas, comme la Septante l'a
compris, un néologisme, mais au contraire un archaïsme.
L'influence de la langue araméenne sur l'hébreu a été de tout
temps extrêmement puissante, et cette influence se fait sentir
sans exception dans tous les écrits de l'A. T. Le mot Tnil de
Ps. iio ne serait a-utre chose qu'un mot hébreu, qui a subi
l'influence chaldéenne, quant à sa forme. Au lieu d'écrire i:n
«parole » simplement, on l'a transformé en Nm^T ou peut-être
nii"i. Ceci n'est pas une pure hypothèse que nous émettons
sur l'existence d'un mot, qui n'est que dans notre imagination ;
il a dû réellement exister. Nous ne pouvons trouver dans les
livres de l'A. T. ce substantif dans sa forme primitive et pure,
vu la quantité relativement restreinte des écrits vraiment
anciens, mais nous le retrouvons cependant avec sa décli-
naison pronominale. La forme TTililû (Deut. 33,3) n'est
autre chose que la déclinaison pronominale d'un substantif
de forme Chaldéenne. Le ^mm du Psaume 1 10 ne doit-être
autre chose qu'une autre forme de ce même substantif avec
— 68 -
une déclinaison pronominale. >m51 bv doit-être traduit « sur
ma parole, » c'est une des formules de serment, et la traduc-
tion de notre verset doit donc être, par conséquent, celle-ci:
Jehovah a juré et ne se repentira pas, tu es prêtre éternelle-
ment sur ma parole, (tu es) mon roi juste.
La version que nous venons de proposer n'est pas abso-
lument nouvelle et inédite. Bechaï a compris Ps. iio,4 comme
nous. Les commentaires de Bechaï sont malheureusement
perdus pour nous, sauf ces notes sur les cinq livres de Moïse
et qui sont évidemment une traduction de l'original hébreu
ou arabe, mais Aben Ezra dans son commentaire sur les
Psaumes reproduit les paroles de Bechaï; elles se résument
dans cette petite phrase « et Rabbi Bechaï dit: sur ma parole,
ou crois-moi sur ma parole ». Mais étant donné que Aben
Ezra mentionne cette interprétation de Bechaï simplement en
passant, sans commentaires ni réfutation, nous ne pouvons
pas savoir quelles ont été les raisons qui ont déterminé ce
maître à donner au Ps. iio, 4 le sens que nous avons vu.
La version que nous venons de proposer, rencontrera la
faveur des exégètes futurs ou elle sera rejetée par eux ; mais
quelque soit son sort, il n'en restera pas moins acquis que la
version donnée par les Septante du Ps. iio, 4 est discutable,
Cette version n'a pas été suivie ni acceptée par les traducteurs
d'origine palestinienne. Le Targoum traduit Ps.iio, 4: «'?i i'» pip
♦■•^î "l'^û «n^im xm^î pa \"i«t \frhvb \<y^h ''jonû nJNn iin*' «Dieu a juré
et ne se repentira pas, que tu sera nommé maître (Rab) dans
je monde à venir, à cause du mérite que tu as été un roi juste. »
La Peshittô rend le ''m:n'?ï;, contraire à la Septante, par «mûi:i
« selon l'image, la similitude ».
..,,; L'auteur en reproduisant mot à mot la version des Septante,
d:é préférence aux versions d'origine palestinienne, prouve
qu'il la connait, et, que, seule cette version fait autorité pour
lui. Remarquons que tout en reproduisant mot à mot la ver-
sion des Septante, l'auteur semble avoir dans la pensée la
version de la Peshittô. Ainsi, au ch. 7, 15 il dira xaTàxriV 6jj.o'.6-
TT.Ta-xniûli, selon l'image, la similitude.
- 69 —
CITATION 17 (Èp. aux Hébr., ^y..
el [X71V euXoywv sùXoyrjO-w o-s xal 7rATi9ûvtov ttXyiOuvw (o-s).
/Co/n/j. T. Mass. et Sept. Gen. 22,17)
el fji/]v est la lecture la plus autorisée de notre texte. Nous la
trouvons dans les plus anciens manuscrits de l'épître aux
Hébreux ; elle est aussi la plus ancienne lecture des Septante
du Gen. 22, 17. La lecture ^ [/-/iv qui se trouve dans d'autres
manuscrits, ne serait, d'après Mr. Westcott qu'une particula-
rité d'idiome. Les deux lectures des Septante, ou de l'épître,
ne correspondent pas du tout au texte massoréthique. Ce der-
nier texte porte le mot ''3 que les Septante auraient dû tra-
duire par oxi. Avaient-ils un autre texte hébreu dans lequel
on lisait n'^dk? Nous ne le pensons pas. Le style hébreu'du
Genèse 22 perd une grande partie de sa beauté et de sa sim-
plicité pour peu que l'on s'imagine le moindre changement
dans le texte. A notre avis, la transformation de 6x1 en el {ji>,v
provient de l'embarras dans lequel les auteursdes Septante se
sont trouvés pour rendre le sens exact du texte hébreu. L'in-
finitif absolu "j3"iiK "jii doit être traduit : « je te bénirai abon-
damment, certainement. » Les Septante voulant le rendre mot
à mot par eùXoytôv eùXoyyjo-w, se sont aperçus que cela ne dira
rien aux lecteurs grecs. Un helléniste, sans connaissances
hébraïques, n'aurait jamais pu voir dans cette version la force
de l'affirmation que le texte original comporte. Aussi ont-ils
essayé de combler cette lacune en remplaçantoTi par d p,v ou
r, [XYiv, qui est l'équivalent de l'hébreu ah DKaffirmutif, ou parri
p/iv qui, d'après M. Ménégoz^ serait l'équivalent de |û«-Amen.
Quelle que soit la valeur réelle de la version donnée de
notre texte par les Septante, il n'en reste pas moins pour
nous comme un fait acquis que l'auteur de répître,en l'accep-
tant telle qu'elle est sans montrer la moindre velléité de la
corriger, prouve qu'il ignore le texte hébreu, ou du moins,
ne s'en occupe pas.
— 70 —
Au lieu de Tzlrfiùvoiv Tzlrfi. o-s, les Septantes, d'accord avec le
texte massoréthique lisent t6 o-Tràppia o-ou. Pour expliquer cette
déformation volontaire et intentionnelle dutexte des Septante
et des massorèthes, plusieurs raisons ont été proposées. Pour
Bleek, de Wette, Lûnemann elle provient de ce que l'auteur
s'occupe exclusivement d'Abraham et non de sa postérité.
Pour Delizsch (i) elle résulte de ce que l'auteur voulait pré-
senter la promesse sous la forme la plus courte et la plus
succincte. Nous avouons que ces raisons ne nous semblent
pas suffisantes pour expliquer la déformation que l'auteur
fait subir au texte, Cette déformation devient encore moins
explicable, si l'on se représente la conception que l'auteur
se fait de l'inspiration de l'écriture sainte. Pour lui elle est
toute entière parole de Dieu, personnalité vivante, et l'on ne
peut s'imaginer que l'auteur arracherait des membres de
phrases de cette parole vivante pour lui substituer des phrases
de lui. La seule explication que nous pouvons donner serait
celle-ci : La citation est faite avec la même méthode que la
citation 8, p. p. 45, 46, c.a.d. avec la méthode d'abréviation
employée couramment dans la Mishnah et dans le Talmud.
Après avoir paraphrasé les mots: « J'ai juré par moi-même
dit l'éternel » qui sont le commencement de Gen 22, 16, il né-
glige le reste qu'il ne croit pas devoir citer textuellement, et
cite immédiatement le verset i7: «Je te bénirai certainement
et abondamment je multiplierai...» La suite du verset était
indiquée par un signe sténographique équivalent de V'3l ouV'jl.
Ce signe était o-.£,=!7Ùv hépc.q « avec les autres,» «et les autres »,
qu'un copiste grec, n'ayant pas compris ces signes particuliè-
rement palestiniens, a lu o-s. La citation existait intégrale-
ment pour l'auteur de l'épître et pour ces lecteurs d'origine
juive, mais par une erreur de copiste bien excusable on est
arrivé à faire dire à la citation de Gen. 22, i7 tout autrechose
de ce qu'elle dit en réalité.
Nous émettons cette hypothèse sont toutes réserves, non
seulement parce qu'à notre connaissance, aucun exégète ne
(i) Voir Delitsh, Ep. aux Hébr.
-Ti-
ra donnée avant nous, mais aussi parce nous ne pouvons pas
remonter à un manuscrit vraiment ancien pour la confirmer.
Cependant nous croyons pouvoir la maintenir, et ceci pour
deux raisons qui nous semblent plausibles, i) L'auteur joint
à sa tournure d'esprit hébraïque une connaissance très sé-
rieuse de spéculations théologiques de la Mishnah et du
Talmud 2) C'est la seule explication qui écarte la contradic-
tion flagrante qui existe entre la conception que l'auteur a de
l'inspiration de la Bible et la manière dont il s'en sert.
CITATION 18
p o-uvavTrj araç 'A[3paà[A u-oc-irpÉoovT!. c/.7zq r^; xott/J; tcov (Sao-'Aétov xal
euXoy/jo-aç auTov, w xal osyÂrr^v 7.7:0 TràvTwv èiji£pi,(7£v '^(âpaàu..
(Ep. aux Hébr. 7,1-3. Gen Vi, 18-20)
Nous ne trouvons pas ici en présence d'une citation régu-
lière et directe, mais plutôt d'une paraphrase, d'une adapta-
tion des passages ee Gen 14, 18-20 que l'auteur suppose con-
nus de ses lecteurs. Elle est faite d'après les Septante, et non
d'après le texte hébreu; car il reproduit le mot qui se trouve
souvent dans les Septante. (Deut. 38,^5, Es. lo, ao), mais qui
ne se trouve pas dans le N. T. en dehors de ce seul passage.
Le texte de Gen. 13, i8-2onous donne une image un peu ^
vague, imprécise, et jusqu'à un certain degré énigmatique de
la personne de Melchisedek C'est moins une description
qu'une mention hâtive et obscure. La personnalité de Melchi-
sedek y passe comme un éclair et laisse le lecteur dans la
perplexité, dans les ténèbres. Ce récit si embarrassant pour
les commentateurs ne l'est nullement pour l'auteur de l'épître.
Ils s'y sent d'autant plus à l'aise qu'il n'y cherche pas des
données historiques. L'auteur ne se demande pas sur quel
peuple il régnait. 11 décompose le mot MEkyi<js.hkx et traduit: roi
de justice ; il ne sent pas le besoin d'avoir des détails sur son
72 -
sacerdoce ; il lui suffit de constater que l'Ecriture ne donne
pas sa généalogie pour conclure qu'il n'a pas de commence-
ment de jours ni fin de vie. (Hébr. 7,3) On ne doit pas se de-
mander non plus, si l'auteur s'est embarrassé de la question
de savoir, sur quelle ville il régnait. Si le Salem était pour
lui la ville de Jérusalem, comme pour les Targoumin, ou si
c'était la ville de SaXsijjt. mentionnée dans Jean 3, 24 et que
d'après Jérôme ( Ep. 87) les savants juifs (?) la considéraient
comme ayant été la ville de Melchisedek. Pour lui Salem
veut dire: paix; et, le roi de Justice qui n'a ni commencement
de jours ni fin de vie, est roi de paix.
Par la manière dont l'auteur comprend Gen. 14, 18-20 nous
surprenons un renseignement très important; c'est que l'auteur
savait l'hébreu. 11 décompose le nom de Ms^yj-o-soix, qu'il trou-
vait dans les Septante, le considère comme formé de deux
mots hébreux ']ht2 et pi'i, et traduit « roi de justice. » Il lit
dans le texte grec Sa)^y][7.. et traduit, comme si il avait devant
lui l'hébreu Q)h^ « paix». L'auteur confond évidemment ùh^
adj., « en paix » (littéralement, eniièr) avec ù)h^ subst, « paix. »
Mais cette légère confusion ne nous surprend nullement.
Elle devait se produire fatalement. Dans notre texte ch^ est
le nom d'une ville et non un adj. se rapportant à ']hù. La
langue courante en Palestine à l'époque de l'auteur n'était
pas l'hébreu pur, mais l'araméen ou syriaque. Dans les salu-
tations, on se servait de l'expression «û'^iy ou ùhiif (pion, sa-
lem) (i). C'est une formule dont on faisait un usage constant.
On s'en servait pour les salutations aussi bien que pour les
vœux et les bénédictions. C'est le sens que ce mot avait dans
le premier siècle qui a prévalu dans la pensée de l'auteur
sur son sens strictement hébraïque et biblique. Ajoutons que
l'auteur de l'épître n'est pas le seul qui ait confondu
ahiif avec nh^. Nous trouvons la même erreur dans Pilon,
Leg. AH, m 25, vol. I ; p. 103 oè [Bao-'Asùç 7,y£[jLwv etprjVYiç, 2a).7Î[j..
(r) Voir Buxdorf, Lex. chald. art. Hnhvif et bhif; Uhlmann, Gramm Syr. p. xvni,
- 73
CITATION 19 (Ep. aux Hébr. 7, 17; Ps. IW, 4)
Ta est prêtre éternellement selon l'ordre de Melchisedec.
Le texte de la citation est le même que celui de la citation
i5, (Héb. 5,6),mais l'usage dogmatique que l'auteur en fait ici
diffère de celui qu'il en a fait précédemment. Au ch. 5,6 il a
mis tout l'accent sur les mots « tu es prêtre», ici il le met sur
le mot « éternellement » et de ce seul mot il déduit la supé-
riorité du Christ sur les prêtres aaronides. Ceux-ci tirent leur
institution de l'une des lois de la chair, mais comme la chair
est périssable, l'institution sacerdotale, l'est aussi. Christ, au
contraire, est institué prêtre par la force d'une vie indes-
tructible.
CITATION 20 {Ep. aux Hébr. 1,21)
lOjjLOffcV v,ii^in^.i xal où jj-STaji-cX-^ôriC-sTa!, o-ù tspsù^ sU "^ov auova.
{Comp. T. Mass. Ps. 110,^ ; Sept. Ps. W9,li)
h2i citation concorde avec le texte de la Septante qui tra-
duit exactement le texte hébreu. Les différents manuscrits de
l'épître aux hébreux ne s'accordent pas sur l'étendue de la
citation. Le cod. «* arrête la citation après ]XBxci.]j.zkr^y[uzxct.\. « il
ne se repentira pas ». L'édition de Nestlé qui représente l'au-
torité des meilleurs textes, arrête la citation après tov alwva
« éternellement », d'autres textes enfin, dont «% et la Peshittô
donnent tout le verset 4 du Psaume 110, et incluent dans
notre citation « selon l'ordre de Melchichedec ». Il est évi-
dent que l'auteur de l'épître aux Hébreux pouvait parfaite-
ment arrêter la citation après « et il ne se repentira pas ». Il
a besoin d'apporter un appui à sa thèse, que le Christ a été
institué prêtre par un serment; or, la première partie du ver-
set 4 est suffisante pour cela. Cependant il est possible que
l'auteur avait étendu la citation jusqu'à « éternellement » ce
qui -donne plus de clarté et plus de force à l'argument. Y
avait-il aussi dans la citation les mots « selon l'ordre de Mel-
— 74 —
chisedek ? » D'après Lueneman ces mots ont existé, et les
copistes les ont omis involontairement. Il croit qu'ils se sont
trompés de ligne et au lieu de mettre xaTà t7,v -îà^vv... ils ont
par erreur, commencé la ligne par xarà -zo'joû-o. Cela est bien
possible, mais cette hypothèse n'est nullement indispensable,
puisque la citation serait tout à fait normale, même si l'au-
teur de l'épître aux Hébreux ne reproduisait que les deux
mots w[xoa-£v y.ùpioqa Dieu a juré. >- Il est aussi possible que l'au-
teur de l'épître se soit servi de signes d'abréviation rabbini-
ques. Il a pu s'arrêter à i).z'za^,tk'i]^-ri(jt'zy.i ou à tov alwva et indiquer
le reste par un signe sténographique comme c'était l'usage à
cette époque. Il a indiquée ce V'31 ou V'jii par x. t. tt. et les mots
xaxà to(toOto que nous lisons au verset 23 et qui ne semblent pas
être indispensable dans le texte, peuvent bien être là à la
place de toute autre chose
CITATION 21 {Ep. aux Hcbr. 8,5)
opa TzoUjCTî'.ç TràvTa xaxà tov vj-ov tov otvf^vna. crot. ev tw opst.
(Comp. T. Mass. et Sept. Ex. 25/i0)
La version de la Septante et l'auteur de l'épître diffèrent
ici du texte hébreu dans plusieurs points; ils lisent opa sans
le xai,-i,et TTor/içE'.ç, le futur, tandis que le texte hébreu a l'impé-
ratif ; la Septante lit « selon le modèle » au singulier, l'hé-
breu au contraire a le pluriel « dans leur modèle». D'après la
Septante, le texte original devait être ainsi conçu nB>ï^ nxT
n''Jin3. Le Cod, Ambrosianus, possède le mot Tiàvra que
nous avons dans le texte de l'épître aux Hébreux. La diffé-
rence verbale entre ces textes et le texte massoréthique
devient ainsi encore plus grande; il faudrait intercaler h:)n
ou plutôt D^ID après nt^j;. Cependant malgré la différence
verbale, le sens qui se dégage de ces deux derniers textes se
rapproche davantage de l'hébreu que la version donnée par
les Septante. Le mot Tcàvxa semble atténuer le singulier de
cette dernière version. « Tu fefas toutes choses d'après le
- 75 -
modèle » se rapproche davantage du texte hébreu que « Tu
feras d'après le modèle » de la version de la Septante. Cette
amélioration ne nous permet cependant pas de conclure que
l'auteur connaissait l'original hébreu. Ce dernier mot, comme
nous l'avons dit, se trouve dansle Cod. Ambrosianus, et
Philon cite aussi notre texte avec une insertion de -navra (i).
Surtout ce qui nous induit à penser que l'auteur n'avait pas
connu le texte massoréthique, c'est que le mot Tràv-ra ne cor-
rige rien. S'il avait connu et voulu corriger les Septante
d'après le texte massoréthique, il aurait mis le pluriel xaTà tov
TUTtOV aUTCÔV.
(l) Voir Deliizscli. l'p. aux Hébr. p. 336.
— 76 —
LA SUPÉRIORITÉ DE LA NOUVELLE ALLIANCE
SUR L'ANCIENNE
CITATION 22. (Ep. aux Hébr. 8,8-12)
'ISoù Yiy.ipxt ïpyoMTV.t, liyît v.ûtoî,
y.Cf.l (TuvTs/î'crw stt'i. tov oiy.ov [lapur^. y.cà ÈttÎ
tÔv «ixov 'loûSa ùtxOriy.YiV y.uiVYiV,
où y.v~y. T/,v S«a9y,zviv v^v hnovridy. ~oï; Tïc/.rpicxtv
«•JTWV £V Yi^jApCf £7ri)>«|3of/.ï'vOU «OU TViÇ yjtph^ «ÙTWV
èÇa-j'K'yîtv «ÙToùç Ix Y'^Ç Atyinzrov,
on c/.vToi oùx svcpstvav ev t*^ StaOyjxv; fzov,
xx-yw Yi^Dcfidv. «ÙTwv, ^i-j/st y.\jpioq,
on kÛtv) -fl Staôy/Z// viv ^iuOYi(Toy.c/.i ~m oÎzw Iff^oxy/),
p.î~à rà; Yi^épui ly.zhuq, léysi y.vpiog,
5t5où; itô^oxi^ pioy stj --/jv Stâvotav avT&iv,
ZKJ IttÎ y.KpiiÎKç «ùrwv iiztypy.-^o) «ÙToû;,
X«t 's(TOl/.C(l «ÙTOt; S£J OïCiV.
x«j «ÙToi s70VTui u.oi si: ).y.ô-j.
X«t où p/i SlSâÇwfTtV £X«(TrOÇ TÔV TTO/îr/JV V.\JTO\>
y.y.'i ïyMCtroq tÔv àSê)>çpôv aÙTOÛ, léycav' jvôiOt rbv yJjpiov
on TrâvTSç d§Yiaopj.(TL-j y.s ành ^ly.pou ïwg ps'yâXo'J «ÙTwv.
0T£ D.swj scro^.Kt. rv.iq vZiyiv.n; «ùtwv
:<«t Twv (Zu«|OT«wv «Ùtwv où p// fAVr/TÔoJ s'~£.
(Comp. r. Mass. Je/-. SI, 31-3^; Sept. Jer. 38, 31-34-)
La citation est faite d'après un texte des Septante, et non
d'après un texte hébreu, mais les divergences qui existent
entre le texte de lepître, le texte des Septante, et celui des
massorètes méritent une comparaison minutieuse et une
attention toute spéciale.
Pour Xéyst (ép. Hébr. 8, 8) l'auteur est d'accord avec le cod.
Alex. Le cod. Vat. dit cpyio-t. Les Septante, comme l'auteur
de l'épître. sont d'accord avec le texte massoréthique qui dit
D1NJ, (le Pa-oul du verbe dxj).
Pour cruvT£)io-w Sta9v)x-/iv (Hébr. 8,8),' les Septante lisent
Bt.a^(TO]J.y.'. StaG/ix'/iv. On dirait que les Septante ont lus nni mi
— 11-
avec un beth pour nna TTù; car, généralement, les Septante se
servent d'un participe et d'un verbe, ou d'un subst; et d'un
verbe pour rendre l'infinitif absolu, (voir citât. 17. p.69)£ÙXoywv
£ÙAoy7]<Tto ; TxX'/iÔùvwv uX'/iOuvio) Le verbe m:: voulait dire à l'ori-
gine couper, fendre; de ce verbe on a formé le subs. ^'''la, une
alliance qu'on fait après avoir coupé en tranches une victime.
(Voir Gesenius, art. K"i:i et mi). Cependant dans le texte
massoréthique nous avons partout et toujours n''"iû mD et non
m::.
Pour l'expression invariable du texte massoréthique et des
Septante n''*ii iTù = St-axiGevat Sta97ix-/iv Jer. ch. 31, (Septante
ch. 38) V. 30, V. 31 et V 32, l'épître donne trois expressions
différentes, l) o-uvréXew Si-aB. 2) tûolsIv 8la9. 3) SiaTiôevat. S(,a 9.
(Ep. aux Hébr. ch. 8, v. v. 8, 9, 10. Ces trois expressions
diftérentes, pour une expression des Septante, ou de l'hébreu,
paraissent être confectionnées par l'auteur lui-même. Il a des
qualités de style remarquables, il a un vocabulaire de plus
riches et il sait en disposer. « Rien que dans le ch. 3, 16-18, il
arrive à changer les «expressions trois fois h}X 00^ obyl, d
{JI-/1 » (i). Il nous est difficile, au contraire de nous imaginer
que l'auteur ait déjà trouvé cette variété d'expression dans
une version des Septante. Ceux-là s'occupent généralement
beaucoup plus du mot à mot hébreu, que de la langue grecque
dont ils se servent.
Pour ETil Tov aixov les Septante ont tc5 o'ixcp, et qui correspond
exactemet à l'hébreu nx. Il est évident que l'auteur n'a pas
trouvé cet âul dans une version des Septante. Il aurait fallu
qu'il y eût dans le texte hébreu h'if, or ce mot ne pouvait pas
s'y trouver et s'il s'y était trouvé par erreur, un traducteur
grec ayant une connaissance rudimentaire de la langue
hébraïque n'aurait pas tardé à découvrir cette erreur. Ce
changement du tw des Septante en e-rù tov est, à notre avis,
fait avec intention par l'auteur de l'épître. La Nouvelle
alliance, n'est pas comme l'ancienne, faite avec la maison
(i) Ménégoz, cours inédit.
- 78 -
d'Israël, mais au-dessus èttI, elle surpasse la maison d'Esrael;
de même que le christ est fidèle, non pas comme Moïse dans
sa maison, mais au-dessus de sa maison eitl tov oIxov aùroû.
(Hébr. ch. 3,5)
èv '^[xépa eTTiapoXèvou [jlou est un mot à mot rigoureux
du texte massoréthique, que l'auteur a puisé des Septante. Ce
texte se trouve aussi cité dans Justin Martyr (2) mais là nous
lisons £v Tipiépa £v Ti £7!:'Aa[3ôpiv. Que l'auteur cite la version des
Septante, cela est tout indiqué; s'il avait fait sa version lui-
même, il se serait probablement servi d'un meilleur grec.
oùx èvép'.vav. Les textes de la Septante et de l'épître aux
Hébreux ne correspond pas au texte massoréthique. Celui-ci
dit qu'ils ont détruit ou anéanti nsn . Il nous est impossible
d'expliquer cette divergence; nous n'avons pas pu trouver
un mot hébreu qui corresponde exactement à ce £V£[j.£t,vav.
. . . i IIûï; i6 /"lûp i6 sont les seules expressions qui se rappro-
chent de cette phrase de la Septante, et encore la version de
la Septante laisserait à désirer; car nous avons vu que les
traducteurs grecs de Jer. 31, 31-34 s'efforcent de donner une
version aussi littérale que possible; ils se seraient donc servis
du verbe ïcjrr\iv..
xàyw. Cette contraction se trouve dans le Cod. Alex, les
autres manuscrits ont ici deux mots xal èyio. Pour àij.£)v£'t;v le
texte massoréthique ab)}^ « maîtriser ». Ce dernier mot est
certainement à tort dans le texte massoréthique. Il n'a aucun
sens malgré les tours de force exégétiques, que l'on a faits
pour le maintenir. Deux hypothèses principales ont été
faites. D'après l'une, la leçon originale était h^i et les
massorèthes ont pris, a pour un ji. D'après l'autre hv^
et hti:: veulent dire la même chose par la raison que les
lettres j^nriK se remplacent souvent les unes les autres. Ce
serait alors un verbe tout a fait courant, et nous sommes
étonnés de ne pas le rencontrer plus souvent sous cette
forme ; nous ne le trouvons qu'une seule fois dans toute
(2) Juitin Dial. c. Tryph. ch. ii.
— vo-
la Bible : ici (Jer. 3, 14 est d'un autre genre). A notre avis le
verbe hv^ se trouve dans le texte par suite d'une erreur de
lecture, non pas comme les autres supposent, parce qu'on
a pris un ;i pour un :i, mais parce qu'on a pris un n pour un j;.
Dans les anciens manuscrits hébreux le h se composait de
deux zaïn et d'un point au-dessus de la ligne qu'on reliait à
ces deux lettres en forme de circonflexe, comme ceci fj. La
partie supérieure de ce cheth se trouvait effacée ; on a pu le
prendre facilement pour un aïn. Que cette erreur se soit
glissée dans le texte massoréthique d'une manière ou d une
autre, cela est de peu d'importance, mais ce qui est intéres-
sant, et ce qui est à constater, c'est que la lecture du texte ori-
ginal parlés traducteurs delà Septante est ici supérieure à
celle des Massorèthes.
aij-T, Y, ÔLaQ. sans jj.ou. Le Cod, Vat, a ici |j.ou. Il est omis dans
les Cod. Alex. Syn, et Mardi, C'est la lecture de ces derniers
manuscrits que l'auteur del'Epître aux Hébreux accepte pour
la citation. Elle est eonforme au texte massoréthique. y,v
S{,aQ7]o-o{7.'.. Il accepte cet expression des Septante et des Mas-
soreths après l'avoir rejetée 2 fois. La première fois il dit
cruvTc/ia-w (v. 8), la seconde fois £7zoi■r^'7a (v. 10), maintenant il
accepte oi.</J}-/{(jo^y.>.. Seul le cod. March, a comme l'épître
èTroÎTio-a au verset ^^ - Hébr. v. 9.
liyzi X. ne se trouve dans aucun manuscrit des Septante ;
tous ont cpr^o-t. y,. Les deux mots manquent complètement dans
le texte massoréthique. /. '
û'.ôoù; p.6p.ouç qui correspond à TinJ du texte massoréthique,
se trouve dans les manuscrits Alex, et March. Le cod. Vat.
et les autres insèrent otôo-w, comme s'ils avaient dans' leur
texte hébreu la construction par l'infinitif absolu im |nJ. La
version du texte hébreu est assez difficile ici. tidj est régu-
lièrement un passé «j'ai donné. >, mais il a souvent le sens
d'un futur dans le langage des prophètes. Les Septante le
rendent parun présent ou un futur; (voir Sept. Mal. ch 3,1).
Ici, dans notre texte ils ont rendu par un part présent. C'est
le sens exact du mot.
— 80 —
v6[ji.ouç etc. «mes lois». Le texte massoréthique a « ma loi »
au singulier. Les Septante et les massorèthes avaient ici le
même texte, mais comme les anciens textes hébreux ne por-
taient pas de voyelles, les Septante ont lu TiTiD « mes loi ».
Pour St.avoi.av des Septante et de l'auteur de l'Epître, le texte
massoréthique dit D5"ip5 « en eux, dans leur intérieur ». La
version des Septante est ici admirablement réussie, car c'est
bien cela ce que le Prophète voulait dire. èraypà'W est con-
iorme aux Cod. March. Les autres manuscrits ont ypà(|;co. Les
Septante comme l'auteur de l'Epître lisent è7rt.ypàcj;to auToûç
pnD«, le pluriel ; le texte massoréthique n'a que le sing.
nJinSK « je l'écrirai. »
xal où iKr\ se trouve dans les manuscrits Alex. Sin, et March.,
le Vat. omet le dernier mot \j:}\. 7ïoHrr\y est du cod. Vat, le
Cod Alex, donne ào£).cp6v, le cod. March. donne 7zl-fi<jlo\> .
C'est cette dernière version qui se rapproche le plus de
l'hébreu j^i. «Tiolirr^q pour j^n est beaucoup moins souvent usité
dans les Septante que Tzl-riTiov ^ on le rencontre cependant
dans les livres de Jérémie et dans Job » (Delitzcsh).
Tov àoeXcpov est du cod. Vat. qui traduit exactement l'hébreu
ITIW. Le cod. Alex, dit twXyio-îov. yvwGi. « connais », au sing., le
texte massoréthique dit ij^l « connaissez » au pluriel. Il est,
évident que les Septante n'ont lu que ï?i le i se trouvait effacé.
La lecture la plus probable est celle des. massorètes. C'est le
pluriel que le prophète a dans la pensé : « ils n'enseigneront
plus » etc. £lû7]a-ouo-i,v se trouve dans tous les manuscrits des
Septante, sauf Vat.^ qui lit ot.ûy]o'ouo-!,v. aTzb ^iy.po\j sans auTwv,
est du cod. Alex., le Vat. lit ici aiiTtôv. Le cod. Vat. est plus
près de l'hébreu qui dit Ditapû'? « depuis leur plus petit » que
le cod. Alex, et l'auteur de lépître. V. ii fin (texte Mass.
V. 14"'^ nw D1«3 « dit l'Eternel », qui se trouve dans le texte
massoréthique, est omis par tous les manuscrits des Septante
à l'exception du cod March. qui porte dans sa note marginale
cp/jO-i. xç.
V. 12. 'Ovswç scro^Kai « je serai indulgent, favorable », se
trouve dans tous les manuscrits des Septante, contrairement
au texte massoréthique qui dit n^DX « je pardonnerai ». Les
- 81 -
Septante ont lu dans leur texte hébreu ûmK pour nhoa. Nous
n'avons pas besoin de supposer ici, pour les Septante un autre
texte hébreu que celui des massorèthes. On pouvait lire facile-
ment Dm« pour nhûiH si le parchemin était ancien et avait été
souvent roulé et déroulé ; il arrive alors que des parties des
lettres ou quelque fois des lettres tout entières sautent, dis-
paraissent, sans laisser de traces, àiy-apr-wv Nous avons une
variante dans certains manuscrits de l'épître qui lisentàvojjAwv
contraire à tous les manuscrits des Septante qui donnent le
premier de ces deux mots.
CITATION 23 {Ep. aux Hébr. 9,20)
(Comp. T. Mass. et Sept. Ex. 2â,S)
La citation diffère des Septante et du texte massoréthique.
Pour -ro'jTo nous avons dans les Septante loob et dans le texte
massoréthique nin. Au lieu de htxelly.-zo nous avons dans les
Septante et le texte massoréthique ouUxo ma. Nous avons
vu plus haut (cit. 22 p ^94'.) que l'auteur de l'épître a donné
trois expressions différentes pour la seule expression des
Septante et des Massorèthes, o'.a-rtOcva'. o'.aGrixr|V=n''*i3 ril3/ ici
nous avons encore une autre expression à ajouter aux précé-
dentes., evsTsXÀs'.v ô'.aO. 11 change aussi 6 x'jpt.oç des Sep-
tante en 6 Qcôç. La citation est évidemment faite de mémoire.
On s'en rend facilement compte, lorsqu'on compare
Ex. 24, 6-8 avec Hébr. 9, 18-21, où des différences de détail
sautent aux yeux. Ex. 24, 6-8 ne mentionne pas l'offrande
de boucs, ni l'addition de l'eau au sang, ni la laine rouge et
l'hysçpe, ni l'aspersion du livre de Talliance. Nous ne nous
trouvons pas ici en présence d'une citation proprement
dite, mais en présence d'une adaptation, d'une paraphase,
faite à la manière des Targoumim, qui est en même temps
une sorte de commentaire, de là aussi les détails additionnels.
- 82 -
CITATION 24 {Ep. aux Hébr, 10, 5-15)
Q-jrrl.v.'j Y.vX nporrmpy.'j oiiy. ■}fizkf,ny.z, awj.v. Oi y.v.zr.rjxlno) u/ji.' o).ozc<u~wp.!ZT« y.v.L
Tvtpl y.^.c/.priy.g oùx v',ùSo-/v;r(Zç. rorî îi— ov" i()o-j -/îxw, iv Y.tyylJ.ùi. pi.p)lo\> '/i^/rjyKXv.i ~zpi.
è'j.oy, ToO 7T0i.r,Ty.t. o Oîh: zo ()i):r,ij.y. ao'j.
(Comp. T. Mass. Ps. W,7-9', Sept. Ps. 39, 7-9)
La citation commence par un accord parfait avec le texte
massoréthique et les Septante, mais elle finit dans la plus
grande divergence. Au lieu de a-ô3[7.a oh y.a-r,pT(<rw « Tu m'as
formé un corps » ]e texte massoréthique dit: nn^ D''JïN. « Tu
m'as creusé (ouvert) des oreilles ». La différence entre ces
deux textes c.-a.-d., entre la Septante et le texte massoré-
thique paraît tellement grande que beaucoup d'exégètes n'ont
pu trouver d'autre solution que celle d'inventer pour les
Septante un autre t^xte hébreu que celui des massorèthes.
C'est une hypothèse qui écarte toute la difficulté. Elle est
possible puisque nous avons déjà constaté dans le cours de
notre étude que les Septante, en faisant leur version, avaient
sous la main un texte qui différait notablement de celui des
massorèthes. Mai^pourla citation qui nous occupe nous ne
«
sommes pas obligé de recourir à l'hypothèse de l'existence
d'un autre texte.
On peut expliquer cette divergence de deux manières: Par
une erreur commise par un copiste grec. Les anciens manus-
crits grecs n'avaient pas d'espace entre les mots, les lettres
se suivaient d'un bout de la ligne à l'autre. Aussi a-t-on pris
le ^ du mot précédent rfizlr^<jaq et on l'a ajouté au mot sui-
vant oiv.c/.,, ainsi o-coTî-a et on a lu enfin o-â)|j.a. Cette erreur
pouvait se glisser d'autant plus facilement que l'on se servait
des majuscules. L'erreur pouvait se produire également si
l'on s'est servi des minuscules : c'est l'explication de
MM. Lûnn., Bleck et Ménégoz.
A côté de ces grandes autorités exégétiques, nous émettons,
sous toute réserve, une autre explication qui nous parait
assez vraisemblable. Le texte massoréthique tel qu'il est
devant nous n'offre aucun sens. « Tu m'as creusé les oreilles,
- sa -
ne nous dit rien ànous, et ne pouvait pas dire grand chose
aux lecteurs palestiniens; tout au plus auraient-ils compris
par ce métaphore : tu m'as fait esclave, en rapprochant ce
mD creuser, de yïn perforer, d'Exode 20.6; mais ceci n'offre
aucun sens ici, cela trouble l'ordre d'idées du Psalmiste. Le
texte original hébreu portait donc ici un autre verbe, et ce
verbe ne pouvait être autre que n':':i. Ainsi, le texte primitif,
avait i'? n'''?J û"'Jïî< «Tu m'as révélé les oreilles, w C'est une locu-
tion familière aux grands prophètes et au livre de Job; le
sens en est « Tu m'a inspiré, tu m'a donné la révélation.
Dans les copies du texte primitif, les massorèthes ont bien lu
D''Jm « oreilles », mais au lieu de n''h> «tu m'as révélé» ils ont lu
JT^niJ «tu as -creusé». Les Septante ont bien lu n'''?J, mais le « du
mot D'iJiN se trouvait complètement effacé, ils ont confondu
le reste avec iTlJi « corps ». Mais comme « Tu m'as révélé un
corps » n'offrait pas de sens, ils ont cru entrer dans l'idée
du Psalmiste en traduisant: tu m'as préparé, arrangé, formé
uacorps.
Que le texte original hébreu comportait de défectuosités
cela est tout à fait visible par le mot m^t^ ; ce substantif n'a
pas d'autre sens que celui de «péché». C'est un mot qui n'a pas
de raison d'être dans notre texte, et le mot exact saute aux
yeux par sa simplicité. Ce n'est pas nsïûn, «péché ». qui doit
s'y trouver, mais nsûn « le sacrifice pour le péché »; on a sim-
plement lu un n pour un n. Les Septante sont ici supérieurs
aux massorèthes, ils ont luDNtan et donnent Trspl àij.ap-r[a^. C'est la .
formule qu'ils emploient couramment avec ou sans l'article
rr\q pour le mot r\m\i (voir version de la Septante sur Levi-
tique ch. 4-1 3; ch.6,7).
Le pluriel 6).oxa'jTWjj.aTa du texte de la citation se trouve
dans le cod. Alex., le Psalt. Graeco-Lat. Veronense et le Psalt.
Turiciense, tandis que le texte massoréthique et le cod. Vat.
ont le singulier. Ils lisaient donc dans leur texte niNtsm r\hy\
Cette lecture est la moins probable. Nous ne voyons pas
pourquoi le Psalmiste, ayant commencé avec le singulier,
intercalerait, tout à coup sans motif plausible, un mot au
pluriel dans le texte.
— 84 -
Nous nous voyons obligé de tirer deux conclusions ici :
(i) L'auteur de l'épîtren'a pas connaissance, ou du moins ne
se préoccupe pas, du texte hébreu, il a accepté le moto-wf/a qui
est certainement une erreur provenant soit d'un copiste grec
qui a ma] lu son lexte, soit des trad acteurs, qui ne sont pas
parvenus à déchiffrer le texte original hébreu. 2)11 suit mot à
mot un texte grec. L'auteur de l'épître aux hébreux est un
écrivain de grand talent, par son langage et son style il est
supérieur aux autres hagiographes du Nouveau Testament. Il
n'est donc pas admissible que citant de mémoire il commette
la faute peu ordinaire de placer deux substantifs l'un après
l'autre sans les faire accorder dans le nombre, et de dire, «Ho-
locaustes » au pluriel et « sacrifice expiatoire » au singulier.
C'est donc un texte grec qu'il suit avec la même fidélité,
avec la même piété que les massorèthes et les rabbins ont
suivi leur texte hébreu. La lecture la plus probable est celle
du texte massoréthique en corrigeant nnD en n'''?;i et riNton en
riNïûh d'après le cod.Vat.
YiùooxYicraç ne se trouve dans aucun manuscrit des Septante
existants. Le Vat.lit '^r^o-aç il est d'accord avec le texte masso-
réthique ; les manuscrits x, Alex., Ps. Grecco-Lat. Veron. et
Ps. Tur. lisent k^riTricraç ntyin. Mais comme nous ne pouvons pas
admettre que l'auteur cite de mémoire, il faut supposer que
d'après cette version, le texte original hébreu portait n^^npour
rbm.
h y,z'faXioi f). c'est le mot à mot hébreu nfiD n':'Jiûi. xccpa}.^
signifiait tête, chapiteau, partie supérieure du bois qui
portait le parchemin, ensuite le manche de bois sur
lequel on enroulait le parchemin et à la fin le rouleau
même. C'est le mot que les Septante donnent souvent pour
le mot n^Jû(voir Ez. ch. 2, 9; ch. 3, 1-3; Esdras ch. 6.2.) Sous
l'influence des idées et de la langue grecque en Palestine ce
mot est passé dans l'usage courant et au lieu de se servir du
mot biblique n'p^iû on se servait couramment du mot grec
hébraïcisé bùp « parchemin », rouleau de parchemin (i) Le
(i) Voir Buxdorf, Lex. Hébr. Chald. art. hùp.
— 85 —
mot xscsaXt; était donc pour les traducteurs grecs le plus
naturel et l'auteur de i'é pitre aux Hébreux comme les Sep-
tante auraient pu-,s^4i^î-s£x:v^i-r de préférence à toute autre.
Toû 7:o'/?ia-a'. etc. Cette phrase s'accorde avec des manuscrits
des Septante qui déplacent les mots 6 ôsoç, (en supprimant le
[xou qui correspond au i pronominal du ni'^x) et les mettent
tout de suite après le verbe « de faire, » au lieu de les mettre
après le régime « ta volonté ». Ce bouleversement dans "
l'ordre des mots n'est pas de grande conséquence, car au fond
l'idée sera toujours la même si l'on dit : « de faire ta volonté,
ô Dieu » ou si l'on dit « de faire, ô Dieu, ta volonté, » mais ce
qui change profondément le sens de la citation, c'est que
l'auteur de l'épître aux Hébreux supprime complètement le
dernier mot è^jouk-ri^iy <' j'ai désiré» de sorte que l'on com-_
prend dans la citation : Je viens (il est écrit de moi dans le
livre) afin « de faire, ou d'accomplir, ô Dieu, ta volonté », con- (
trairement au sens réel du Psaume 40,7-9, tel que nous le
voyons dans le texte massoréthique ou dans les Septante.
Ici la phrase « il est écrit de moi etc, » se rapporte à ce qui
précède «je viens» et non à ce qui suit. Cette manière de
retrancher la fin d'un verset afin de lui faire dire tout autre
chose que ce qu'il dit en réalité, surprend, et pour cause, tout:
exégète et tout lecteur sérieux. On est docteur de la loi, on
est apôtre, lorsqu'on s'est donné corps et âme à l'étude et à
la prédication de la parole de Dieu. Mais le fait de creuser,
de sonder, les centres mystéri eux de la volonté divin e, le fait de
s'être enfoui dans les profondeurs de textes sacrés, ne vous
confère pas le droit de dénaturer, de mutiler ces textes et de
leur faire dire le contraire de ce qu'ils disent. Ce maniement
des textes, qui à notre époque serait considéré comme une
anomalie qualifiée, ne constitue pas une particularité de l'au-
teur de l'épître aux Hébreux seulement, mais nous le cons-
tatons aussi presque chez tous ses contemporains. Dans le
Talmud, ces cas de spéculations sur une partie du texte de
laquelle on tire des conclusions, contraires à son contenu con-
sidère dans son ensemble, abondent. D'où vient cette ano-
malie spirituelle qui semble avoir perdu toute relation et tout
- 86 -
rapport avec les méthodes exégétiques actuelles? Pour l'ex-
pliquer il faut entrer dans l'état d'esprit de cette époque loin-
taine. Dans Tancien Israël toute question grave était tranché
t
parle grand prêtre. C'est lui qui expliquait et commentait
l'oracle d'Ourim Vetoumim. A l'époque du second Temple
le sanctuaire et la hiérarchie lévitique avaient à peu près perdu
leur prestige. Les docteurs de la loi jouissaient d'une influence
colossale auprès du public. Les écoles ràbbinique rivalisaient
avec le temple. On disait même « qu'un bâtard instruit dans la
science ràbbinique est supérieur à un grand prêtre ignorant ».
Peu à peu les rabbins arrivèrent à supplanter le grand-prêtre,
et lés textes sacrés l'ourim vetoumim. Dans les moments cri-
tiques de l'histoire du second Temple, p.ouj savoir l'avenir,
on ne s'adressait plus à l'ourim vetoumim mais à un texte
sacré (i). Seul, le fait d'avoir transformé l'Écriture Sainte en
une sorte d'oracle, présentait déjà de grands dangers de mé-
sinterprétation; mais si l'on ajoute à cette vue de l'Ecriture
l'état des textes dont on se servait, c, à. d. un manuscrit dans
lequel les lettres se suivaient, sans espaces entre les mots,
sans voyelles, sans virgules et sans signes pour marquer la
fin des versets, on conçoit aisément qu'un docteur de la loi
pouvait faire un usage peu légitimé d'un texte, tout en étant
de bonne foi, et croyant servir la bonne cause.
CITATION 25 {Ep. aux Hébv. 10, 16-17)
AÛV/; Y, 3t«Gy/Zr; Y,'J ^wMi(JO^.V.l TTjOÔç «LITOÙç ^.STÙ. TV.q Y,^.ip'KÇ By.îL-JC/.Ç, IviU vJjOtO^'
SiSoyç voaouç |l/.0'j ItvI y.v.pZiv.ç «ùtwv y.v.'i Ini Ty,v 5«âvot«v «vtwv è—t.ypy.-li(,i c/.vtov:, v.v.i
Twv vM.c/.rjXiw «Ot&jv y.v.i twv à-JOi^Mt-j «ùrwv o\} u.yi ^.vYi'jOYitToao'.i sri.
(Comp. T. Mass. Jer. Si, 32-34; Sept. Jer. 38, 33-34)
Les différences entre cette citation et celle du chap. 9. 6-12
sont énormes. Outre que l'auteur omet la plus grande partie
des verets du contexte, il apporte des changements dans les
(i) Yplbû ''? plDS « verse moi ton verset ». Gittin f. 56, i et ailleurs souvent.
- 87 —
mots du texte même. Il commence par aur/-, en omettant ov.
« car » qui fait partie dïi verset. A rw oIym 'Icrcar,À « avec la
maison d'Israël, » il substitue r.pb; y.ùxobç « avec eux «. Il met
le mot xapota, « cœur » et o'.àvo'.a < entendement » pour o'.àvot-a
«entendement» et xapoia, « cœur*:»; il insère la phrase xal vwv àvo-
[7.(.wv ab-zCoy « et de leurs iniquités » qui ne se trouve pas dans la
citation 20, et enfin il remplace la conj. aor. pY.crGco par le
futur ij.vr,<78-/](70(ji.a'.. Cette manière de bouleverser le texte de la
citation ne doit nullement nous surprendre, car en réalité
nous ne nous trouvons pas ici en présence d'une vraie citation
c.-à.-d., d'un fragment biblique que l'auteur emploie pour
appuyer ou illustrer une thèse quelconque, il a fait cela au
chap. 9,8-12. Ici, il fait seulement appel a cette citation du
chap. g. 8-15, qu'il reproduit d'une manière sommaire et de
laquelle il ne veut tirer aucune nouvelle conclusion.
• Cette paraphrase de la citation 20 n'est amené ici que pour
terminer le long développement sur la supériorité de la Nou-
velle Alliance sur l'Ancienne, qui inclut en elle Tidée de la
supériorité du sacerdoce de Jésus sur les prêtres lévitiques.
L'auteur est un homme d'un grand talent démonstratif et
pédagogique. Tout en se servant d'un langage bibique, il
termine cette longue démonstration de la supériorité de la
nouvelle Alliance sur l'Ancienne par l'idée capitale de sa
thèse, à savoir que le pardon de péché n'aura plus pour con-
dition première et indispensable les sacrifices perpétuels,
mais par le sacrifice du Christ consommé une fois pour
toutes, qui apporte une nouvelle loi, une loi intérieure, écrite
dans le cœur et dans l'intelligence.
- 88 -
PARTIE MORALE
CITATION 26 (Ëp. aux Hébr. 10,30)
£]j.ol sy.oLxY,c-!,ç, eyco àvTaTroôwTto.
(Comp. T. Mass. et Sept. Deiit. 33,35)
Cette citation ne s'accorde ni avec la Septante ni avec le
texte massoréthique. Dans ce dernier il faut considérer ûpJ
ûhtif) comme deux verbes et il faut traduire, « c'est à moi de
venger et de rétribuer », à moins qu'on ne les considère à la
rigueur comme deux substantifs et qu'on traduise « à moi est
la vengeance et la rétribution. L'auteur de l'épître donne pour
le premier mot DpJ un substantif « la vengeance » pour le se-
cond d'?éî> un verbe, avecune insertion Èyto, « je récompenserai.»
Devons-nous considérer la citation comme une paraphrase
c.-à.-d., une sorte d'adaption surle texte hébreu? En effet on fit
des paraphrases à l'époque de l'auteur de l'épître, le Targoum
Onkelos donne une paraphrase qui se rapproche beaucoup
du texte de notre citation: ùb^H njxi «njyiifl ""Dlp a devant moi
est le châtiment et je rétribuerei ». Le Targoum Jonathan
donne la même paraphrase que celle d'Onkelos. Tous les
deux insèrent le mot « je » qui se trouve dans notre citation
et qui manque dans Thébreu. La paraphrase du Targoum de
Jérusalem est encore plus surprenante. Elle correspond mot
pour mot à notre citation sauf qu'elle a de plus « et ». Le
Targoum de Jérusalem dit d'pîî'K «3«"i Knjynfi) nn « car c'est à
moi la vengeance etje rétribuerai.» Sinous pouvions admettre
que l'auteur emploie ici le procédé du Targoumim, la discus-
sion sur la source de la citation serait tranchée, mais des tai-
sons très sérieuses nous conduisent à nier que l'auteur de
notre épître ait employé le procédé du Targoumim. L'auteur
de l'épitre aux Hébreux ne se préoccupe pas du texte hébreu,
il le néglige à tel point que nous nous demandons sérieuse-
ment s'il a jamais eu le texte hébreu devant lui au moment
de faire ses citations. Il va de soi que pour faire la para-
— 89 —
phrase d'un texte il faut au moins l'avoir lu. La coïncidence
littérale delà citation de notre épître avec celle des Rom 12,
19, n'est certainement pas fortuite II est à peine concevable
que l'auteur de notre épître en faisant une adaptation d'un
texte hébreu dont il est assez difficile de faire la version, se
soit servi exactement des mêmes termes que Saint-Paul. La
citation dans Rom 12,19 n'est certainement pas une adapta-
tion faite sur le texte massorétique, car nous y lisons encore
lèyti xupi,oç « dit le Seigneur > qui ne se trouve pas dans Deut-
32,35. Ce Aiys!. xupioç estlaformule avec laquelle les prophètes
terminent, et pour ainsi dire signent lesgrandesprophéties.Ils
'^scellaient ainsi leurs prédictions sur le sort des nations avec
le sceau divin. Saint-Paul, en apôtre qu'il était, n'aurait ja-
mais eu la hardiesse d'ajouter cette formule, d'apposer cette
signature à une prédiction, car c'est de cela qu'il s'agit dans
Deut ^2, qui ne la portait pas; c'est donc un texte, inconnu
de nous, et dans lequel cette formule existait déjà, que Saint-
Paul cite intégralement. Ajoutons encore que plusieurs manus-
crits de l'épître aux Hébreux portent aussi dans notre citation
les mots XÉys'. xûp'.o; et bien qu'ils manquent (ians « et D,
Delitzsch revendiqueleurplacedansleseditions.il croit qu'on
les a omis de très bonne heure comme étant de trop, après la
formule d'introduction de la citation TÔv elTtovrx « celui qui a
dit». Cette coïncidence encore plus grande entreles deuxtextes
nous amène nécessairement à la conclusion que l'un et l'autre
ont tiré leur citation d'une source commune que nous ne
possédons plus.
CITATION 27 (Ep. aux Hébr. 10,-30)
xpiveï 6 v.6p^.o^ TOV Xaov a.ù'zou.
{Comp. T. Mass. et Sept. Deut. 32,36)
La citation s'accorde avec la Septante et le texte massoré-
thique, sauf qu'elle omet le mot ov. par lequel la Septante
rend le mot ""a du texte massoréthique. La citation peut pro-
venir de Deut 32, 36 ou du Ps. 135, 14. Dans ce dernier livre,
— 90 —
le texte massorétliique, le cod.Alex., le Ps.G.-Lat Ver. et Ps.
Turicense donnent la même phrase que daps Deut. Seue le«
donne olx-rsips'. « Dieu aura compassion, etc. » Le texte hébreu
supporte également bien les deux versions.
La citation considérée dans son contexte est admirablement
approprié pour l'usage que l'auteur en fait. Il veut prévenir et
conjurer les défections et les apostasies qui se produisent au
sein de son Eglise, il veut aussi raffermir, édifier et consoler
ceux dont la foi est indécise et chancelante; or, il ne pouvait
trouver dans toutes les exortations des prophètes des paroles
qui fussent aussi saisissantes, aussi captivantes que celles de
Deut 32. Ce chapitre est le canevas et le modèle inimitable
de toutes les exhortations prophétiques; il était toujours
considéré comme étant de Moïse, et adressé par lui, dans -les
derniers moments de sa carrière, à la veille de sa mort, au
peuple d'Israël; cet Israël dont il a souvent vu les chutes et
enduré les rébellions. Aussi l'auteur de 1 épître ne pouvait
mieux faire que de reproduire l'ancienne exhortation si pathé-
tique, dans une circonstance nouvelle et tout à fait analogue-
CITATION 28 {Ep. aux Ilébr. 10,37-38. Es. 26,20? Hab. 3,3-7?)
l-z'. yàp [jL!.xpôv 0C70V oiov., 6 t^yô^-iyoç r^\^l xal où '/ooviitv
6 ôà o'ixawç [JLO'J £X TcLo-ïôcoç HvîcreTa!., xal eàv UTcoo-TcOaiTai,, oùx
t\)O0Y,t\ r, 'iu'/'/ u-O'j £v auTW.
£T'. vàp p.'/x.pov oVjv ôctov, ne se trouve nulle part, à moins que
ce ne soit une réminiscence- d'Es. 26, 29 d'après les Septante.
A partir de 6 sp'^ô^asvoç le langage est celai de Habakuk
ch. 2,3-4, mais avec un bouleversement dans l'ordre des
phrases. Dans Hab. 2, 3-4 nous lisons xal èàv u-oa":£Oa,Ta'.
avant 6 os oixa-ro; etc. Nous ne croyons pas devoir com-
-parer cette citation avec le texte des Septante et de l'hébreu;
car nous ne pensons pas que l'auteur fasse ici une citation
directe. Pour Habakuk le IpyoïjLsvo; « celui qui doit venir »,
n'est pas le Messie, mais la vision qu'il attend, ou l'armée ba-
bylonienne et le •jTîOfT'îsÀÀofj.sr^oç « celui qui se retire » n'est
- 91 —
pas le croyant, mais encore la vision, ou l'armée Babylo-
nienne. Les paroles d'Habakuk sont devenues, selon toute
probabilité, une formule en quelque sorte stéréotypée des
espérances messianiques. C'est par elle qu'on a exprimé une,
et non la moindre, des « Promesse » messianiques qui cir-
culaient dès avant le premier siècle de notre ère. Elle se divi-
sait en trois sentences :
i) Le Messie doit venir dans très peu de temps. Les consé-
quences de sa venue, de la parousie du Messie, seront :
2) Le juste, vi\^ra par la foi. Il sera membre de la commu-
nauté messianique, dont le chef est le prince de la vie.
3) L'injuste, le î^ti^l, celui qui se soustrait à la croyance qui
est celle de l'auteur de l'épître et aussi d"ô tout homme juste
et craignant Dieu, (voir Luc, 2,25-26), le messie ne prend point
de plaisir en lui. Par où Fauteur de l'épître entend, les béné-
dictions divines ne reposeront pas sur lui. Dans son style
imagé il compare ce dernier à une terre- fertile qui se trouve
privée de culture, de soleil et de pluie, et qui au lieu de pro-
duire des fruits, ne donne que des épines et des chardons,
bons a être brûlés; elle ne peut pas tarder à être abandonnée
et redevenir un désert (voir Hébr. 6,4,8.) Cette promesse
messianiqu'e, revêtue des paroles de Habakuk exprime
tout à fait la même idée que le fragment apocalytique
Math, 25,32-33, la parabole de l'ivraie, (Math. 13,24-30). A
celle du figuier stérile, (Luc. 13, 6-9) elle se retrouve sous des
formes différentes dans les livres rabbiniques, tels que
Akedah, Ikrim, le Talmud de Babylone, traité Souccah,
f. 48". Il n'y aurait rien d'étonnant à ce qu'on ait exprimé
cette croyance, qui est une des synthèses de plus substantielles
de l'ensemble des prédictions prophétiques, dans des termes
se rapprochant de plus en plus du langage biblique, et, qu'à
la fin, on ait utilisé textuellement les paroles de Hab.
2, 3-4. Il est aujourd'hui universellement admis que les
13 articles de foi que nous trouvons dans les liturgies syna-
gogales sont de Maïmonide et non des hommes de la Grande
Synagogue; on est néanmoins frappé de voir que l'article 12,
traitant delà croyance à la venue du Messie, insère aussi les
— 92 -
paroles du Prophète Habakuk. « Je crois » y est-il dit, «avec
une fidélité parfaite à la venue du Messie, et si même il tarde
attends-le, car il viendra certainement, il ne sera point en
.retard. » )b n^n nanr^n^îî' '•s hv ^i<) n'^tî-'ûn nx"":::: r]t:h'^ nJiDs:: Î^dnq ""JX
CITATION 29 {Ep. aux Hébr. ll,îg
OT!. £V 'lo-aàx x)\T,G7]a-£T7i (70t. cTrépfjia
/^Co/îîp. T. Mass. et Sept. Gen. 21,12)
La citation s'accorde avec les Septante et lesMassorèthes.
Le mot ''D du texte massoréthique comme les o-zi du texte des
Septante est une proposition exprimant cause « car ». on dans
lesensde« car» n'est pas un vocabulaire de l'auteur de l'épître.
Aussi Nestlé, dans son édition du Nouveau Testament, ne
semble pas considérer ce ov. comme appartenant au texte de
la citation. Cependant nous ne pouvons pas voir là une raison
sérieuse de refuser ce mot au texte cité. La facilité avec la-
quelle l'auteur manipule l'Ecriture, le nombre considérable
des livres saints qu'il cite, témoignent jusqu'à quel point la
Bible lui était familière. Il devait être en mesure, et il l'étai*
en effet, de citer un texte de la longue haleine où le style
était moins grec que l'hébreu, il devait donc aussi être en
mesure de citer intégralement le texte de Gen. 21, 12 sans en
retrancher un mot lui appartenant, on avec le sens de « car »
bien qu'il ne suit pas du vocabulaire de l'auteur, se trouve
cependant avec le même sens dans la citation 20 (Hébr. 8, 9),
l'auteur pouvait donc le reproduire aussi dans' le texte de
notre citation.
Si le ox!, appartient au texte de la citation, comme cela est
de notre impression, il est tout démontré que l'auteur ne fait
pas lui-même sa version du texte hébreu mais se sert du texte
desSepteute.
- 93 -
CITATION 30 (Ep. aux Héhv. 12,5-6)
mé pi.ou, p.yj d),fyw(Oât Txy.i^slv.ç z-upia-j, ur,Zh IyJJjo-j i)n(/Sj~o\} D.z'jyjju.i'jrjç . ov
yào à'iKKV. yJjrjtoç TTKidsvst, p.««7Tjyot §1 Trâvra vihv ov ~c/.p</.()iys~Kt.
fComp. T. Mass. et Sept. Prov. 3, 11-12)
wÀ [j-ou Dans tous les manuscrits des Sept le pronom per-
sonnel [AO'j manque. Ils commencent tous par un vocatif,
«fils» etc. Contrairement au texte massorétliique qui dit •
« mon fils, » et contrairement bon style hébreu.
L'auteur de Tépître aux Hébreux est d'accord avec le texte
massorétliique, mais cela ne prouve pas que l'auteur, ait
connu le texte massorétliique, et qu'il ait voulu corriger les
Septante d'après ce dernier texte; car dans ce cas il aurait
aussi corrigé r.c/.iotùu en sXiyys'.. Le verbe n''3T' correspondand
au substantif nUDin de la phrase précédente, et du moment
qu'il a pour ce premier sXsyyôjj-svoç, il aurait dû mettre aussi le
verbe èXiyysî et non tto-'.os'js'. qui correspond au verbe id"" et qui
serait accordé avec le mot "idid de la première phrase de notre
citation.
[j.ao-î'.yo'î;, etc. « il frappe des verges ceux qu'ils reconnaît pour
ces enfants » Le texte massoréthique dit nïn'' p ns axiDl « et
comme un père l'enfant qu'il chérit ». Cette divergence entre
les Septante et le texte massoréthique, qui parait irréductible,
ne provienten somme que d'une toute petite différence de lec-
ture. Le texte original avait 5XD1 qu'on peut lire de deux ma-
nières différentes, selon les voyelles qu'on ajoute. Le texte
massoréthique à lu-ix^i «et comme un père^) etc. La Septante
a lu S«bl « et il fait mal », (i) cette dernière vocalisation nous
paraît la plus probable, elle donne au texte plus de clarté que
celle du texte massoréthique.
(i) « Midr. Thillim sur Ps. 94 lit le texte cité avec la même vocalisation que les
Septante : DiMsaty'JaNSI «'?« a«31 n"« « ne lis pas: ouke-ab (et comme un père)
mais vekôéb (et peine) quand il lui envoie de la peine Nous devons l'indication de
ce texte précieux à M. A. Loçls, à qui nous exprimons pour ceci et pour tant d'autres
leçons, notre vive gratitude.
_ 94 -
TràvTa ulov « chaque » « ou tout fils... »; le mot Tcàv-ua manque
dans le texte massoréthique mais se trouve dans tous les
manuscrits des Septante, c'est une preuve qui s'ajoute à tant
d'autres, que l'auteur cite une version grecque des Septante
sans se préocuper du texte massoréthique.
CITATION 31 (Ep. aux Hébr. 12,21)
Nous ne trouvons pas dans le texte d'Ex. 19, 11-25 que
Moïse ait dit «je suis effrayé et tout tremblant » mais noas
lisons au verset 10 du texte massoréthique "i5y« D^n h'ii TilT'l
njriDi que les Septante traduisent xal Ir^-zrji^h^. r^â.c, 6 laoq 6 kv r^,
7rap£[j.poAf, «et tout le peuple dans le camp fut effrayé », et au
verset 18 où nous avons dans le texte massoréthique h2 I't\'>)
^Sû "^m « et toute la montagne trembla énormément » les
Septante lisent Dj^n pour -inn et traduisent xal Içéa-r/-! ~â; 6 Xao?
G-cpoSpa « et tout le peuple fut dans une grande épouvante »
Le izy.q, tout le peuple mclut aussi Moïse dans la crainte géné-
rale qui fut partagé par le peuple-, et comme l'auteur s'efforce
de donner un tableau saisissant et exact, quant à son ensemble
de l'apparition de Jéhovah sur le Sinaï, il arrive à faire dire
à Moïse « je suis effrayé et tout tremblant » (cy que du reste
est vrai, Moïse, commele peuple, d'après le récit, durent avoir
peur) bien que nous ne trouvons pas dans le texte que Moïse
eût dit cela.
Il se peut aussi que les deux mots sxooi^ô; sIjj.'. proviennent
d'une réminiscence de Deut. 9.19 (la scène du veau d'or), xal
£VTpo|j.o; qui paraît appartenir au texte de, la citation ne se
trouve nulle part.
CITATION 32 {Ep. aux Hébr. 12, 26)
STL y.Tvv^ èyô) Uzioroi o\j jxôvov Ty,v yz/V à),),« '/.al tov ovokvov.
{Comp. T.. Mass. el Sept. Aggé 2,6)
La citation est tirée des Septante qui om mettent les mots :
«\n t2ï;û du texte massoréthique. En effet on ne voit pas bien
le sens de ces deux mots. Littéralement ils veulent dire « c'est
- 95 -
peu i, mais la traductioQ littérale n'offre pas de sens dans
notre passage, car on ne peut pas dire que le bouleversement
des deux et de la terre est peu de chose. Un grand nombre
des exégètes supposent qu'il faut lire le mot taVû comme s'il 3^
avait ïûï;d^w presque, bientôt, dans peu de temps » (voir Ps.
119 87; 73,2). Il ne nous appartient pas de discuter ici si ces
deux mots du texte hébreu sont authentiqués ou non; il nous
suffit de constater que l'auteur ne connaît pas le texte mas-
soréthique qu'il suit scruplusementles premiersmots du texte
de la Septante et qu'il finit par transposer les phrases en met-
tant T/jvy^Vj'rov ojpavov «La terre» avant « le ciel » et insère les
mots où ]xôvov a/.la xal « non seulement mais aussi ».
Ce bouleversement de la citation n'a pour nous rien de sur-
prenant, malgré le culte que l'auteur del'épître, comme tous
ceux de son temps, rendait à la lettre. On avait l'intui-
tion à cette époque que la venue du royaume de Dieu, coïn-
ciderait avec un boulversement du monde physique, avec un
changement des phénomènes naturels. De ce boulversement
il sortiraitunmonde plus ira matérielet plus pieux. Les germes,
de cette idée se trouvent dans les écrits de tous les prophètes
mais elle a trouvé son expression la plus nette et la plus caté-
gorique dansAgg. 2 6-7 (voir Math. ch. 24) Apocalypse 20, 11-
15; aussi dans le traité Sanhédrin Ch.Chélék où nous lisons:
ty^^-iD ""Jin r\):hù imx ins'^i ]::iin inM^h 'rNiîy^^ anh \r\i< nobo mf^
,n'^^ Ni::^i inxi D'»j:îy
«Je donnerai à Israël un court règne après la destruction
(du Temple), et après ce règne je bouleverserai le ciel et la
terre et le Messie viendra ». Rabbi Akiba s'appuyait aussi sur
le passage d'Agg. 2,6 pour affirmer que le Messie devait ve-
nir à la fin du second temple (voir traité Sanhédrin feuille 97"
surtout les explications Raschi sur ce fragment talmudique).
C'était une des prophéties messianiques les plus connues;
elle devait être présente à l'esprit de tous lesfidèles,c'estaussi
pourquoi l'auteur de l'épître aux Hébreux se permet de faire
une paraphrase de ce passage et d'accentuer la gravité du
boulversement, « non seulement la terre mais aussi le ciel».
— 96 -
convaincu que ses lecteurs ou ses auditeurs connaissent très
bien le contenu du texte auquel il fait allusion.
CITATION 33 (Èp. aux Hébr., 13, ôj.
o-j y.ri (TE àvw où^'ov ^.ti as èyy.Krci).l.7V(,i,
Le texte de la citation tel que nous l'avons devant nous ne
se trouve nulle part dans l'Écriture Sainte. Des fragments
de textes qui se rapprochent de notre citation se trouvent
dans le texte massorétique et dans la Septante Gen, 28,15,
Es. 14, 17 Deut. 31, 6 et Deut. ch. 28,29, Ij^^ïs ces passages se
servent de la troisième pers. « Il ne te laissera etc. » Le
contenu littéral de ces textes s'accorde mal avec la formule
d'introduction où il fait parler Dieu même>>.OTo; = t^in, « c'est
lui qui a dit,» et qui exige «Je ne te laisserai ». Le texte
de notre citation se trouve exactement mot à mot dans le
texte massoréthique Jos. 1, 5 « Je ne te laisserai point, je ne
t'abandonnerai point ». La citation serait admirablement
appropriée si elle est tirée de Jos. C'est une promesse que
Dieu fit à Josué immédiatement après la disparition de Moïse,
c'est un encouragement adressé à Josué pour le stimuler en
présence des dangers d'une guerre et l'enhardir à conduire le
peuple d'Israël dans la terre promise. La communauté chré-
tienne à laquelle notre épître fut adressée se trouvait, au
point de vue moral, dans une situation analogue. Le grand
chef, le Messie, vient d'être enlevé. Le culte Mosaïque, le
Temple .et ses ordonnances présentaient de graves signes de
vétusté; « il était vieilli et près delà disparition» (Hébr. 8, 13)'
Battu en brèche, déchiré intérieurement par les nombreuses
sectes qui se combattaient mutuellement, il ne devait évo-
quer dans la pensée du croyant que l'idée d'un désert. Et
au milieu de cette désagrégation on attendait l'évanouis-
sement de l'économie présente et l'établissement d'une éco-
nomie nouvelle qui sera inaugurée par le Messie et qui re-
présentera la vraie terre promise, le vrai Sabbath. Oii peut-
on trouver des paroles plus consolantes que celles de Jos?
- 97 —
Peut on imaginer quelque chose Je plus consolant que l'af-
firmation que le Dieu de leurs pères, le Dieu de Josué, est en-
core leur Dieu. La citation serait dans ce cas d'un à propos
admirable, mais nous ne sommes pas du tout certain que la
citation soit tirée de Jos. 1,5. L'auteur ne montre nulle part une
connaissance directe du texte hébreu nous permettant de
supposer qu'il fît lui-même la version du texte original
hébreu. En admettant .même que l'auteur ait eu con-
naissance du texte hébreu de Jos. 1,5, nous avons de la
peine à admettre que la traduction qu'il en donne soit de lui,
par la raison que le verbe àvî/.ij.'. n'est pas de son vocabulaire,
il ne s'est jamais servi de ce verbe au cours de son écrit (i).
Partout oh ce verbe se trouve dans les écrits du N. T. il a
une toute autre signification que dans notre texte (voir
Actes 27, 40; 16,18011 il a le sens de lâcher, délier.) 11 faut
ajouter que le texte de la citation, bien qu'il ne se trouve nulle
part dans les Septante, se trouve cependant mot à mot dans
Philon. (De Conf. Ling. tome l'p. 410, éd Mangey). Cet ac-
cord entre l'auteur de l'épitre aux hébreux et Philon ne peut
s'expUquer que si on leur suppose une source commune, un
écrit Grec, où l'un et l'autre ont puisé cette citation.
CITATION 34 (Ep. aux Hébr. ISJl]
T
{Comp. T. Mass Ps. 118,6: Sept. Ps. 117,6)
La citation est évidemment faite d'après les Septante; elle
n'est certainement pas une version personnelle de l'auteur.
C'est aux Septante qu'il doit le mot Kupw; sans article. C'est
un mot à mot servile du textehébreu, et un traducteur ayant
un talent littéraire comme celui de l'auteur de l'épître aurait
certainement mis l'article. C'est aux Septante qu'il doit le
mot |3or|G6? = tiîï;^. Ce mot ne se trouve pas dans le verset 6 du
texte Mass., mais dans le verset 7. Il est d'accord avec les
(i) Westcott, ép, aux Hébr. p. 433.
- 98 -
Septante en ce qui concerne la vocalisation de ce mot. En
traduisant les versets 6" et 7" « Le Seigneur est mon aide »,
ils lisent évidemment le singulier nîV3 tandis que les Masso-
rethes lisent au verset 7 " ''-lîya* « Jéhovali est de ceux qui
t: :
m'aident». Si le mot hébreu correspondant à [5iori06s;^c-à-d., nîyn
se trouvait déjà dans le verset ô*" (ce qui est fort probable) et
que l'auteur de l'épître ait lu ce verset en hébreu, il aurait eu
à choisir entre deux vocalisation et interprétations différentes.
i) '^l'^V^ Nom concret; Jéhovah est de ceux qui m'aident,
de ceux qui me secondent (texte Mass.)
2) nry;! Nom Abstrait; Jehovah est mon aide, mon secours
(Septante).
L'auteur en acceptant le mot nî^n qui ne se trouve. pas dans
le texte Massoréthique, et en lui donnant la vocalisation des
Septante prouve qu'il ne traduit pas lui-même et qu'il cite un
texte des Septante.
- 99 -
CONCLUSIONS
(A)
Le lecteur qui nous aura suivi dans notre étude jusqu'ici et
qui aura comparé avec nous les citations de l'épître avec les
textes des Septante et des Massorèthes, se serait aperçu,
comme nous, qu'il est impossible de ramener les textes cités
à une source unique et définie. 'En effet, les divergences entre
les textes cités, les Septante et le texte massoréthique sont
si grandes et si nombreuses que l'on s'y perd complètement.
On dirait à première vue, un pêle-mêle chaotique qui n'est
dominé que par des principes hétérogènes et qui n'est régie
que par des méthodes contradictoires. Dans un seul et même
texte, l'auteur montre des velléités de corriger la Septante
d'après le texte massoréthique, de rejeter la lecture et voca-
lisation des massorèthes pour ne suivre que les Septante,
tout à coup il semble abandonner et le .texte hébreu et les
Septante pour faire de rhétorique et du style, pour donner
plusieurs expressions, là où dans la Septante et l'hébreu nous
n'en avons qu'une seule, et enfin il semble rejeter aussi cette
méthode pour suivre une des lectures d'un des manuscrits des
Septante les moins connus, et dont il ne se servira qu'une
seule fois. Cependant, en dégageant les traits prédominants
de l'ensemble des textes cités, nous pouvons dire que le con-
tenu essentiel et les expressions fondamentales, de chaque
citation, ainsi que la presque totalitédes passages cités s'ac-
cordent généralement avec une des formes du cod. Al. Pour
les passages tirés des Psaumes il se rapproche généralement
du Psalt. Gr. Lat. Veronense et du Ps, Turicense. L'auteur ne
s'occupe pas du texte hébreu, ne traduit jamais lui-même un
passage du texte hébreu et ne corrige pas, d'une manière gé-
nérale, les Septante d'après ce texte.
Font exception, cit. 3 (Hébr. i, 6; Deut. 32,43) qui est du
- 100 -
cod. Vat.(i); cit .8, (Hébr. 2, 6-7 ; Ps. 8, 5-7, qui est en partie du
Cod. Vat; cit. 26 (Hébr. 10, 30), qui se trouve cité ainsi mot
à mot par St. Paul (Rom. 12, 19) et citation 33 (Hébr. 13,5)
qui se trouve aussi mot à mot chez Philon (de Conf. Ling. 8,1;
page 430 éd. Mangey).
Des 29 passages différents dont l'auteur s'est servi dans son
écrit, 23 sont pris du Pentaîeuque et des Psaumes, c.-à-d., des
livres dont on se servait fréquemment dans les synagogues.
De la Thorah qui était lue au moins tous les samedis, et des
Psaumes que l'on chantait, ou récitait peut être tous les jours.
ÎLe fait que l'auteur cité de préférence des livres qui^ àl'origine,
ont été à la base du rituel des synagogues et qui ont été con-
sidérés comme livres de piété par excellence, est de grande
importance,^L'influence de la Grande Synagogue surles idées
de l'auteur est incontestable, et nous devons nous demander
si les nombreux textes qui nous ont embarrassés autant par"
leur forme que parla source d'où ils ont été puisés, n'ont pas été
pris dans un recueil de prières? Quelques unes des citations
semblent vouloir confirmer cette hypothèse: Ainsi citation 13
et 14 (Ep. aux Hébr 3, 7-11 et 4,4) se trouvent dans le même
ordre, dans le rituel du samedi soir. Citation 34 (Ep. aux
Hébr. 13,6) est du Grand Hallel (Ps. 113-118). Citation 3 (Ep.
aux Hébr. I, 6) serait encore du rituel du samedi soir, si elle
est prise du Ps, 97. Mais là s'arrête toute preuve. D'un
autre côté, on est surpris de ne pas voir figurer dans les cita-
tions, les Psaumes des jours. (Ps. 24, 48, 82, 94, 81, 93 et 92)
Ces Psaumes ont été chantés par les lévites dans le Temple
(voir Sophrim ch. 15,1) de là ils ont passé dans le receuil de
prières actuel. Un Israélite lettré devait donc les connaître bien
plus que tous les autres, et cependantl'auteur ne s'en sert pas.
Il ne se sert pas non plus des Haphtorahs, c.-à-d. les extraits
des livres des prophètes qu'on lisait avec la loi.
L'auteur ne connait pas le livre de prière 4^ns sa forme
actuelle ou plutôt ne s'en occupe pas", Les trois citations qui
semblent avoir quelque rapport avec le rituel du Samedi, ne
(i) A moins qu'elle ne soit du Ps. 97, 7, d'après le texte Massoréthique.
101
doivent être considérées, à notre avis, que comme des coïn-
cidences fortuites.
Deux citations se rapportant à la parousie du Clirist sont
données comme étant des « promesses >) e7za.yysXb.. (Cit. 28 et
32; Ep. aux Hébr. 10, 37-38 et 12, 26). Ces citations ont elles-étë
prises d'un « reccueil des promesses » une des formes des an-
ciennes « promesses », mais plus étendue plus large, plus
appropriée aux nécessités du moment, que la bénédiction de
Jacob (Gen. 99, 1-28) ou la bénédiction de Moïse (Deut. 3 ,
,T 29)? nous n'en savons rien. Ces sortes de recueils ont cer-
tainement dû exister, du moins oralement, mais l'histoire -ne
nous en a rien transmis.
[Notre impression est que l'auteur se sert d'une version des
Septante que- nous n'avons plus. L'hypothèse que l'auteur,
citant de mémoire, reproduit inexactement le texte des Sep-
tante, ne nous charme pas. L'auteur est un homme de beau-
coup de tact, il ménage toutes les susceptibilités de ses lec-
teurs, et il aurait certainement prévu l'objection que ses lec-
teurs, ou ses auditeurs, auraient pu lui faire : tel passage que
vous citez pour appuyer telle thèse ne se trouve pas du tout
dans notre Bible. Ajoutons encore que si l'auteur faisait ses cita-
tions vaguement, de mémoire, les inexactitudes devraient se
produire d'une toute autre manière. Lorsque la mémoire fait
défaut, le vocabulaire se rétrécit, le style se simplifie j'usqu'à
la monotonie. En premier lieu nous aurions dû constater des
changements et des substitions dans les mots qui ne sont pas
de son vocabulaire : àvuifjit. j'oublie. (Ep. aux Hébr* 13.25) ot».
dans le sens de «car». Hébr. 8,10; £m)^a^o[ji£vou [j.ou. 89; £'-; Tra-rlpa
1,3 ; xo7r/,c( défaite» 7,1. Nous n'aurions pas non plus pu trouver
chez lui trois à quatre expressions différentes pour' une seule
expression des Septante et du texte massoréthique. Or, nous
voyons qu'il donne bien les mots et les locutions des Sep-
tante qui ne sont pas de son vocabalaire. tandis que tout à coup
il abandonne leur version pour en donner une autre qui, celle-
là aussi, peut être soutenue par le texte hébreu. Il cite donc
une des versions grecques que nous ne possédons plus.
102
DE LA MANIÈRE DONT L'AUTEUR TRAITE
LES TEXTES DE LANCIEN TESTAMENT
L'interprétation biblique de l'auteur est, autant par le fond
que par la forme, purement rabbinique. Il cultive les trois
méthodes, le Peshat, le Reniez et le Drush à la fois (voir pp.
T7 et i8). Il cultive aussi la quatrième méthode, le Sod. (voir
ép.auxHébr. ch. 12, 22-24) mais sans excès, sans exagération
et en évitant de trop insister sur les détails.
11 cultive la méthode du Peshat. Melchisedec, veut dire: roi
de justice: Salem, veut dire: paix. Mais c'est encore la méthode
du Remez qui est au centre de toute son interprétation et qui
domine tout son système. C'est par cette méthode qu'il
trouve un sens plus profond, plus spirituel et plus divin dans
toute parole de l'Écriture Sainte quel qu'en soit le caractère,
qu'elle soit poétique, historique ou législative. Un mot que
l'on nepeut prendre au pied de lettre, qui offre contradiction,
par la méthode du Peshat (7ràv-a = '?3 ; ép. aux Hébr. ch. 2,9), et
un autre mot dans le même texte, qui semble être superflu
[ipayù v. û5;o, lui permet de transformer le sens intime du
fragment poétique du Ps. S, et de le rapporter entièrement
à Jésus. Une lacune dans un texte, ouïe simple silence dans
un récit, lui suggèrent également des conclusions métaphy-
siques et spirituelles (ch. 7, 3). Cette spiritualisation, cette
idéalisation, si nous pouvons nous exprimer ainsi, que l'au-
teur fait des écrits de l'Ancien Testament, ne se limite pas
aux textes seulement, il spiritualise et idéalise également les
personnes, les institutions, le temple et son cérémonial.
Le principe qui lui dicte son Remez à lui est, comme pour
tous les hagiographes de la Nouvelle Alliance, le principe du
salut en Jésus. Tous, ils envisagent l'Ancien Testament à
travers le prisme du fait chrétien. Mais il y a lieu ici de faire
des distinctions et de saisir des nuances dans la manière dont
les divers auteurs du Nouveau Testament se servent du
Remez et envisagent le rapport de l'Ancien Testament avec
la Nouvelle Alliance.
— 103 —
La conception particulière que l'auteur de l'épître se fait de
l'Ancien Testament, ou plutôt de l'Ancienne Alliance, est
énoncée dans son préanibule, ch. 1,1-2. Elle consiste en ceci :
Dieu a mis a la disposition de l'humanité un plan de salut.
Dans ce plan d'éducation divine il y a d'étapes d'épuration, de
perfectionnement, qui aboutissent enfin à l'économie chré-
tienne. Les personnages et les faits historiques, conservent
leurs caractères contemporains. Ils disparaissent et renaissent
sous une autre forme plus pure et plus sainte parce que les
temps ont changé, ont progressé. Il y a eu progrès dans la
méthode d'éducation divine Melchisedec réapparaît dans le
Christ-Grand-Prêtre. La loi Mosaïque disparaît, mais elle
revient, non plus écrite sur les tables de pierre, mais dans les
cœurs des croyants. En général il ne s'occupe pas des lois
isolées de l'institution mosaïque quelle que fût la profondeur
avec laquelle elles s'étaient gravées dans la conscience du
peuple d'Israël. S'il s'occupe des anges, de Moïse, du temple
et de ses ordonnances ce n'est qu'en autant qu'ils sont organes
de l'Ancienne Alliance. «Toute la loi se résume pour l'auteur
dans l'ancienne Aliance. et tout l'évangile dans la nouvelle
Alliance, (voyez ch.7, 22; 8,6; 9, 15-20; 10, 16-29; 12,24;
13 20. » (i).
Cette attitude de l'auteur vis à vis de l'Ancien Testament
mérite d'être comparé avec celle des quatre auteurs aposto-
liques, à qui la tradition, d'après Origène (2) a tour à tour
attribué l'épître aux Hébreux.
L'AUTEUR ET SAINT-PAUL
Le Remez de Saint-Paul est aussi dictée par le fait chrétien,
mais la manière dont il s'en s'ert est diamétralement opposé
à celle ds l'épître. Ce que Saint-Paul voit dans l'Ancien
Testament ce n'est pas avant tout l'ancienne Alliance mais
la loi. La loi mosaïque n'a pas été surpassée par la Nouvelle
(i) Ménégoz, Théol. de Tép. aux Hébr. p. 158.
(2) Origène, cite par Eusèbe, Hist. Ecc, vi, 25.
— 104 -
Alliance comme pour l'auteur de notre épître, mais elle a
été abolie. (Rom. lo, 4) La loi c'est l'esclavage. Elle sollicite le
péché et elle donne la mort. Saint-Paul s'angoisse constam-
ment, on dirait c'est son tourment, son cauchemar, pour
snvoir quel est le rapport des lois isolées de l'ancienne
Alliance avec la Nouvelle Alliance (voir Rom. ch. 2 à 12) Il
heurte de front le mystère du rôle permanent du peuple
d'Israël, et se tourmente pour connaitre sa mission et son
but final. L'auteur' de i'épître aux Hébreux n'éprouve pas
même le besoin d'effleurer ces graves questions. Pour lui
ce sont des institutions de l'ancienne Alliance, qui n'ont
d'autres attaches avec la nouvelle Alliance que celles du lien
et du progrès historique.
Saint-Paul voit dans l'ancien Testament les reflets de la
Nouvelle Alliance et les « promesses » (voir Gai. 3, 15; 3,23;
4,23; 5. I Cor. 5,6; 9,9ss.) L'idée de reflets delà Nouvelle
Alliance dans l'ancienne est complètement étrangère à l'au-
teur de notre épître. Quant à la notion de Promesse, elle est
tout à fait différente de celle de Saint-Paul. Pour lui les
«Promesses.» se rapportent, non pas à la Nouvelle Alliance?
mais exclusivement à la parousie du Christ, (voir pp. loi).
L'AUTEUR ET LUC
Nous avons deux écrits de Luc, le troisième -évangile et les
Actes des apôtres. Dans les deux écrits Luc fait montre de
rares qualités d'historiographe. Il a receuilli toutes les
données que les documents et la tradition ont pu lui fournir,
et ils les a arrangées par ordre. (Luc. i, 1-4), Les Citations de
l'Ancien Testament que nous trouvons dans l'évangile selon
St-Luc et dans les Actes des Apôtres sont toutes de seconde
main, Nous ne pouvons donc pas nous représenter exac-
tement comment il comprenait, personnellement, le rapport
de l'Ancien Testament avec la nouvelle alliance, et de quelle
manière il se serait servi du Remez. Luc était le compagnon
de Saint-Paul, il a dû épouser en grande partie les vues
spécifiquement pauliniennes sur l'Ecriture. Mais nous sommes
— 105 --
obligés de nous tenir ici à des impressions purement subjec-
tives. Nous verrons plus loin pour quelles raisons l'épître n'a
pas pu être écrite par Luc. (voir p. 113-114).
L'AUTEUR DE L'EPITRE AUX HÉBREUX
ET CLÉMENT DE ROME
ANALOGIES d'iDÉES
Celui qui aura étudié l'épître aux Hébreux et qui jetterait
ensuite un regard sur l'épître de Clément de Rome sera
surpris de la ressemblance frappd^nte qui existe entre ces deux
écrits. On dirait que celle de Clément est la suite, la seconde
partie des exhortations morales de l'épître aux Hébreux.
Cette similitude entre les deux écrits porte non seulement
sur le fond des idées, sur la tendance morale, mais aussi sur
la forme. Ils peignent souvent la même idée avec les mêmes
mots, l'illustrent par les mêmes exemples et donnent les
mêmes citations. Comparez l'épître de Clément 9-12, avec
l'épître aux Hébr. 11. C'est la même idée fondamentale et
souvent aussi les mêmes exemples. L'épître aux Hébr.
dit : ttLo-ts'. 'Paà[3 T, TTopvYj où (j'Jva-KwXs'ro 'zolç a.Tzs'Jir^'yy.'y'.v . L'épître
de Clément dit aussi : o'.à rJ.^v.y xal cpOvOçsviav ècwOr, 'Paà[îi r,
TTopv/] et, ajoute Clément «Ils (les espions) lui ont ordonné de
donner un signe, qu'elle mette du rouge en dehors de sa
maison. Ils ont montré par là qu'il y aura une rédemption par
le sang du Seigneur pour tous ceux qui croient et qui
espèrent en Dieu. Vous voyez, mes bien aimés, que la femme
a reçu non seulement la foi, mais aussi la prophétie » (i)
L'exemple de Rahab la courtisane comme modèle de foi et
de piété est clair et explicite; nous voyons en quoi consistait
sa foi. Elle croyait les messagers (les espions) qui lui ont
donné le symbole de la rédemption par le sang du Christ. Au
contraire l'exemple de Rahab comme modèle de piété dans
(i) Clément de Rome i Cor. 12 1-8.
— 106 —
l'épître aux Hébreux est moins précis ; on dirait que l'auteur
connaissait déjà les explications de Clément et qu'il les
résume seulement.
Si Clément de Rome dit : M'.^:riTCf.\ vcVfoasBa xàxsivwv oïv.vsç èv
oèp^ao-'.v aivsioi^ x.al ^.r^Mo-zoÀ; r.a^izTikrr^iyy . (i) « devenons les
imitateurs de ceux qui erraient vêtus de peaux de brebis et de
chèvres », il rappelle deux idées de l'épître. D'imiter la
foi des saints, est particulière à l'épître aux Hébreux (ch. 13,8)
Elle est contraire à la conception Paulinienne de la foi.
L'autre moitié de ce texte se tiouve à peu près mot à mot
dans l'épître aux Hébreux 13,37.
Clément de Rome ch. 31',!. «Voici la voie dans laquelle
nous trouvons notre rédempteur Jésus-Christ, le grand-
prêtre de nos offrandes,» etc., nous rappelle l'épître aux
Hébr. 4, 14-16 et 5,1.
Ch. 36,2 s. s. oç (ov àTîa'jyacruia T/is [J.£ya)vW(7'JV'^ç auTOÙ, TOffOUTO)
y.ti'Qwv £<7-:lv àyyi}^wv oo-to o(.acoopcL)STpov ovopia xex)vripov6[Ji.'^X£V, se
trouve dans l'épître aux Hébreux i,3-4. Suivent 3 citations
qu'il donne mot à mot, comme dans l'épître aux Hébr.
Ps. io4, 4; Ep. aux Hébr. 1,7. — Ps. 2, 7; Ep. aux Hébr. i, 5
et Ps. iio, i; Epître aux Hébr. i, 13.
Ajoutons que deux textes qui ne se trouvent cités dans le
Nouveau Testament que par l'auteur de l'épître, sont aussi
cités par Clément de Rome. Ce sont nomb. 12, 7 ; i cor. 17,
5, comp. ép. aux Hébr. 3,3 et Prov. 3, 17; i cor. 55, 6; comp.
Ep, aux Hébr. 12,6.
LEURS BIBLICISMES
Clément de Rome, commel'auteur de l'épître aux Hébreux,
est bibliciste, mais il l'est plus que l'auteur de l'épître aux
Hébreux. Il ne parle que Bible. 11 cite parfois des chapitres
tout entiers. Cette manière de citer n'est pas du tout palesti-
nienne. Le langage des rabbins est aussi assez* souvent
(1) Clément de Rome i Cor. 17, i
— 107 —
imprégné de locutions de l'Ancien Testament; ils font aussi
fréquemment des citations directes, précédées par la formule
d'introduction: «car il est écrit», ou «car il est dit», mais elles
sont très courtes, un ou deux versets tout au plus. L'auteur de
l'épître aux Hébr. dépasse déjà la mesure de ce que nous
avons l'habitude de voir, mais Clément de Rome fait une
véritable exception. Nous ne trouvons nulle part, ni chez les
rabbins ni dans le Nouveau Testament, des citations d'aussi
longue haleine.
LKUR MANIÈRE D'ENVISAGER LES TEXTES SACRÉS
ET LEUR REMEZ
Clément de Rome, comme l'auteur de l'épître aux Hébreux,
met sur le même niveau toute la série des écrits qui forme le
canon de l'Ancien Testament. Toute la Bible est « sagesse
Dieu» I Cor. 50, i, (cparole de Dieu» ou ccoracle de Dieu» xà
Xôyia. r Cor. 5 3,1. C'est une personnalité vivante, éternelle,
une sorte de in mû''û des Targoumim qui entre en communi-
cation directe avec les générations passées et présentes, qui
nous donne une sagesse divine et nous rend meilleurs, (Cl. de
Rome chap. 19,5 s. s; voir ép. aux Hébr. 4, 12) ««Les prophètes
sont des ministres de la grâce qui parlent de repentance par le
Saint-Esprit.» (i) Mais ici Clément dépasse l'auteur de l'épître
aux Hébreux, Non seulement il connaît et cite un évangile
(ou des évangiles) et Saint-Paul, (voir l'Auteur et Clément de
Rome, pages 113 et 114, mais il les met au même niveau
que les prophètes. (( Nos apôtres ont été évangelisés par le
Seigneur Jésus-Christ, Jésus-Christ a été envoyé par Dieu;
ils sont donc l'un et l'autres. régulièrement (institué) par la
volonté de Dieu » (i cor. 42, 1-2). « Recevez la lettre de
Saint-Paul qu'il nous a écrit àl'origine de l'évangile (i cor. 47,1)
L'auteur de l'épître aux Hébreux, au contraire, ne connaît
pas d'évangile ou de lettre de Saint- Paul. Il ne
(i) I Cor. 8, I.
— 108 —
connaît que la tradition. « Le salut a été premièrement
annoncé par le Seigneur, nous a été confirmé par ceux qui
l'avaient entendu. (Hébr. 2, 31
Il y a aussi lieu de faire une distinction dans la manière dont
ils se servent du Remez, et du champs de manœuvre vers
lequel s'orientent leurs spéculations typologiques. L'aureur de
l'épître prend un organe de l'ancienne Alliance, un être saint,
ou une institution sainte, les anges, Moïse, Melchisedek, le
temple et ses ordonnances, c.-à -d, une chose qui était déjà
objet de piété et de vénération de la part des Juifs, et il la
compare à Jésus-Christ. L'idée fondamentale de sa typologie
est que la Sainteté du Christ dépasse tout ce qu'il y a de plus
sacré et de plus saint chez le peuple juif. Clément de Rome
fait une typologie de hasard, et prend pour base démonstra-
tive n'importe quoi: le fil rouge de Rahab la courtisane était
le symbole de la rédemption par le sang du Christ, (voir
Clément de Rome i cor. 12,7).
L'AUTEUR DE L'ÉPÎTRE AUX HÉBREUX
ET L'épître de barnabas
Si nous établissons une comparaison entre l'épître aux
Hébr. et l'écrit qui porte le titre « Epître de Barnabas », ce
n'est que par acquit de conscience. Il est aujourd'hui univer-
sellement admis que l'épître de Barnabas, qui nous est par-
venue, n'a rien de commun avec le Barnabas, mentionné
dans les Actes 4, 6. Du reste, c'est moins une comparaison
que nous aurons à faire ici qu'une constatation de diver-
gences iréductibles de pensée et de méthode.
L'auteur de l'épître aux Hébreux s'efforce de démontrer que
le Christ a été aussi fidèle dans»la maison de Dieu que Moïse
o)ç xal Mto'Jo-ri^ (Hébr. 3. 2). Le Christ est néanmoins
supérieur à Moïse; (Hébr. 3,34). L'épître de Barnabas ne
s'embarasse pas avec des démonstrations de la supériorité
du Christ sur Moïse. Les Prophètes tenaient la grâce de lui
(c -à.-d, de Jésus), et ils « prophétisaient pour lui ». (ép. de
Barn. 5.6)
— 109 —
Il y a aussi un abîme entre leurs méthodes exégétiques.
L'èpître de Barnabas connaît déjà laGuematria et le notari con_
La circoncision d'Abraham a été faite selon l'esprit en l'hon-
neur de Jésus. Abraham a circoncise 318 hommes. osxaoxTcô
y.al Tp'.axoo-iouç; les 18 sont ensemble (forment un mot grec)
et «trois cents» est dit après; cela nous enseigne: 18= i H veut
dire: Jésus, et T veut dire: la croix: (voir Ep. de Barn.
9, 7-9). L'auteur- de l'èpître aux Hébr. ne connaît ni la Gue-
matria ni le notaricon. Il ne connaît que le Remez.
Il serait intéressant de savoir à partir de quelle époque
l'Anagramme, le Notaricon et la Guematria sont devenus les
méthodes exgégétiques des pères. Dans le Rabbinisme ils ne
sont entrés en vigueur qu'avec rabbi Eliezer fils de Rabbi Josi
Haglili, c.-à -d. vers la fin du second siècle, et encore ils ont
rencontré une très grande opposition de la part des rabbins
(voirTosiphta à Berachoth dans la grande édition duïalmud,
Vilna 1879 ; et traité Chulin 89, i).
110
CONCLUSION
(B)
LES FORMULES DE CITATION
Nous avons constaté après chaque citation que la méthode
de l'auteur est, autant pour le fond que pour la forme,
purement rabbinique. Tons les livres de l'Ancien Testament
sont mis sur le même niveau, et tous ils recèlent la parole
vivante, présente et éternelle de Dieu. Ce n'est pas autant
un livre ou un recueil des livres qu'une personnalité vivante,
agisante, une sorte d être surnaturel qui se met en contact
avec l'homme et exerce une influence sur sa vie. Cela
rappelle la mo^û des Targoumim. Toute l'écriture est
parole éternelle de Dieu. Cette conception purement pales-
tinienne et Targoumiste de l'Ancien Testament s'exprime
aussi dans les formules de citation. L'auteur et le titre du
livre n'existent pas pour l'épître aux Hébreux. C'est Dieu qui
parle (1,5; 1,6; i, 13 etc.), ou le Saint-Esprit (3, 7; 10, 1659,8).
Dans deux citations seulement, les paroles sont a:iises dans,
la bouche de Jésus (2, 11, ; 10, 5).
La conception biblique de l'auteur est purement pales-
tinienne, et aussi, en un sens, ses formules de citation. Mais
ici nous nous heurtons à une anomalie inexplicable. Il a seu-
lement une des formes des formules rabbiniques, mais il ne
se sert jamais de l'autre forme. Les rabbins, dans la mishnah
et dans la Talmud, se servent invariablement de deux for-
mules des citations : idxjît « car il est dit », et :j^nDT
« car il est écrit». Or, l'auteur de l'épître a une très grande
variété des formules dérivées de la première : fm-v, léyzi
uprr/.fJ, J.î'yojv, lyl-fi'jry.:;, /-'yc/vroç, friibj, z'nrfi-j-v., ïi.vjùfhi t)Lvj.iyirv.t., et il ne Se
sert jamais de la formule ■iû«jty = y^ypaTcra'., ou de ses dérivées
Comparons maintenant les formules de citations de notre
- 111 —
épître, avec celles des quatre auteurs à qui la tradition attri-
buait l'épître.
Saint-paul se seit invariablement de deux formules rabbi-
niques \iyt\, ylv-âa-K-ra'.. Lorsque ce léyt'. ne se rapporte pas à
Dieu, c.-à.-d, si ce n'est pas Dieu qui parle à la première per-
sonne, il a soin d'ajouter le nom de l'auteur, ou il dit simple-
ment, l'Écriture dit; la loi dit :
Rom. 10, 1 6 'Wtvjm; ).irizt
» 10, 19 Mw-jo-y),- li'/zi
2> 11,9 AK'j-i5 li'/ii.
» 4j 3 ''^' V,^«'f') >.^V^'-
» ^ji'^l /iy^"'- -h ^■/[j'y/f/,
» 1 T voy.oç i'/îyiv
La formule de (xaOtoc) Y£ypa--a'. se trouve plus de
16 fois dans l'épître aux Romains seulement. L'auteur de
l'épître aux Hébreux ne mentionne jamais le nom du Prophète
et ne se sert jamais de la formule ysypa-Tau Saint-Paul
■^ lit
cite une parole de Dieu, c.-à.-d, ou Dieu parle à la première
personne comme simple Ecriture )iy£'. /, ypacpr,. (Rom. 7, 9).
L'auteu]' de l'épître aux Hébreux, au contraire, cite des pa-
roles où le prophète parle à la première personne comme
parole de Dieu. (Hébr. 2, 13).
L'AUTEUR ET LUC
Nous n'avons pas pu découvrir quelle a été la conception
personnelle de Luc sur le rapport de l'Ancienne Alliance avec
la Nouvelle, mais nous serons plus heureux maintenant qu'il
s'agit de définir sa conception de l'inspiration biblique. Nous
avons dit, en manière d'hypothèse, que la conception du rap-
port de l'ancienne Alliance avec la nouvelle, et son Remez
devraient-etre, en grande partie, hérités de Paul, et cette
hypothèse se trouve grandement confirmée par les formules
des citations que Luc emploie dans son évangile et dans le
livre des Actes. Elles sont toutes Pauliniennes, à quelques
nuances de près :
- 112 —
Luc 2. 23 -AC/Jl'.); 'ji'irM~-r/.t.
2, 24 doviVÀ-jo-j h Tw vov/.).
4, V. 4, V. 8, V. TO yiyoKTTTKt
4. 17 pifSÙVJ TO-J 7rrjrj'i,r,70V 'HdVJ.O-J ' ' OÙ Yi'J yiyfjC/.u.y.iyO'J .
— 7, 27 7rs/>t o-'j yiypc/.nzc/.i.
— 20, 42 ).î'7=« i"v pijS)/.) -i/K/y-Mv
Actes I, 20 » » «■ »
» 7» 4" îîkOwç Ô TzrjOfhffiÇ li'/îi..
Comme Saint-Paul il indique généralement la source de la
citation : dans le livre d'Esaie ; dans le livre des Psaumes,
dans la loi. Il emploie alternativement les formules ysypaTrira!.
etXÉys!.. De même que Saint- Paul, il cite comme paroles du
prophète, et non comme parole de Dieu, un texte dans
lequel Dieu parle à la première personne. (Actes 7,48)
Luc disposait pour la rédaction de son évangile et des
Actes de deux sources distinctes: la tradition orale et la tra-
dition écrite. L'une et l'autre se sont si bien transformées
sous sa plume que nous ne pouvons plus distinguer, d'après
les formules des citations, quel fragment provient de la tradi-
tion orale et quel fragment provient de la tradition écrite II
a une assez grande variété des formules pauliniennes qu'il
emploie uniformément aussi hien pour la source écrite, que
pour la source orale. Luc nous donne des discours de Jésus,
de Pierre, d'Etienne et de Paul qui contiennent beaucoup de
citations, et, dans ces discours si différents l'un de l'autre,
nous constatons encore l'uniformité des formules des cita-
tions, Luc se serait donc servi de ces formules des citations
qui lui sont familières s'il eût été le rédacteur primitif de
l'épître aux Hébreux et nous aurions également dû les
retrouver si Luc eut traduit ou rédigé J'épître aux Hébreux
d'après Saint-Paul.
Les formules de citation ne sont pas, comme on pourrait le
supposer, une quantité négligeable dont il n'y a lieu de tirer
aucune conclusion sérieuse. Au contraire, elles représentent
la conception de l'inspiration biblique de l'auteur et les diffé-
rences que nous constatons, trahissent des divergences
- 113 -
d'école si ce n'est pas des différences de secte. Nous pouvons
donc conclure, après examen des formules de citation, qu'il
n'y a rien de commun, au point de vue de conviction reli-
gieuse personnelle et d'école, entre Saint-Paul et Luc d'un
côté et l'auteur de l'épître aux Hébreux de lautre.
Essayons de descendre le courant, et voyons si nous ne
pourrions pas trouver un parallèle aux formules de citation
de l'épître, dans Clément de Rome ou dans l'épître dite de
Barnabas.
L'AUTEUR ET CLÉMENT DE ROME
Les analogies entre Lépître aux Hébreux et la première
épître de Clément de Rome aux Corinthiens sont remar-
quables. L'une et 1 autre supposent la même conception des
écrits de l'Ancien Testament à savoir: que Dieu est celui qui
parle dans tous les écrits; qu'ils sont en quelque manière l'ex-
pression vivante, présente et éternelle de la volonté et de la
pensée divine. L'Écriture est plutôt iine pjrsonnalité qu'un
livre. De là provient la manière de citer les textes par la for-
mule peu commune )v£y£i. ou e'ip-^xév tcou (Ep.aux Hébr.2, 6; 4, 4;
comp. Clément, i Cor. 15,2; 26,2; 28,3) Il dit quelque part,
et cet il c'est Dieu, ou la parole de Dieu, qui sont tout un.
Clément de Rome, comme l'auteur de l'épître aux Hébreux
attribue des paroles des prophètes ou des Psaumes au
Saint-Esprit (ép. aux Hébr. 3,7; 10, 15; voir Cl, de Rome,
I Cor. 13,1; 14,2; 14,15; 22,1). L'auteur de l'épître aux Hébreux
attribue le même texte tantôt à Dieu et tantôt au Saint-Esprit
(comp. ép. aux Hébr. 3,7 à 3,15; 8, 8 à 10, 15 , l'épître de
Clément aussi attribue un texte du livre des Prov. à Dieu,
(i Cor. 21, 2) tandis qu'il attribue un autre texte de ce même
livre au Saint-Esprit (i Cor. 22, i)-
Cependant il y a des différences bien caractéristiques dans
leur manière de citer. Clément attribue des paroles de Dieu
au ayioq lôyoq (i Cor. 13, 4 ; 56, 3 S. s.) Cette formule est absente
dans l'épître aux Hébreux.
- 114 -
Clément d-^ Rome cite les paroles de Jésus avec les formules
qu'il emploie par les paroles de l'Ancien Testament (i Cor.
13, 2; 46, 8). L'évangile est mis sur le même niveau que
l'Ancien Testament et il jouit de la même autorité.
L'auteur de l'épître aux Hébreux connaît aussi un évangile,
{ch. 2,3-4) mais il ne le cite pas. Il cite bien des textes comme
paroles de Jésus (ch. 2, ir ; 10, 5), mais ce sont des textes des
Psaumes qu'il met dans sa bouche (Ps. 22,22 et Ps. 40,6).
L'auteur de Tépître dispose d'une grande variété des formules
de citation dérivées de -iû«Jtî' (voir p. iio). Il ne connaît pas
la formule iTiDl =réypa'n:Ta'., et ne mentionne jamais le nom de
l'auteur ou du livre qu'il cite. Clément de Rome, au contraire
n'a pas plus de trois formules qui se rattachent à nû«ja> Xlye'.,
cp/jo-lv, èXàV/icrev, mais il les supplée avec la formule ysypauxa!. :
Clément i cor. ^6, 3 ysypaTiTat. yàp
» » 48, 2 xaGojç ysypaTTTa!.
» » 50» 4 yéypaTTxai, yàp
Clément a souvent souvent soin d'indiquer la source à
laquelle il a puisé la citation, et de donner le nom présumé,
d© l'auteur, du livre qu'il cite : —
Clément i cor. 26, 3 'Icb(S Xéyet.
28, 2 Xéyei yàp tzou to ypaœeiov
34, 6 léyei yàp r, ypatpri
35, 7 'i » »
42, 5 » » »
52, 2 coTio-lv yàp . . . Aaut8
Ps. 104,4 ^ui se trouve cité dans l'épître aux Hébreux et
dans l'épître de Clément, l'épître aux Hébreux se sert de
Xeyet, (Hebr. ch, 1,7) tandis que Clément l'introduit avec
yéypauTati.
Les différences entre ces deux auteurs sont donc bien
nettes et bien prononcées. L auteur de l'épître aux Hébreux
n'aurait pas pu écrire l'épître de Clément, pas plus que
Clément n'aurait pu écrire l'épître aux Hébreux
115 -
L'AUTEUR DE L'EPITIIE AUX HÉBREUX
ET L'ÉPITRE DITE DE BARNABAS
Les formules de citation dans l'épître de Barnabas ex-
priment la même conception de l'Écriture Sainte que celle de
l'auteur de l'épître aux Hébreux. Les citations sont généra-
lement faites d'une manière anonyme. (Ep. de Barn. ch 2,5;
2,7: 3, I.) Dieu est celui qui parle à travers les écrits de
l'Ancien Testament, aussi l'auteur introduit-il des citations
par la formule Xé-jei. xûpi.oç ev xw TcpocpTir/i (i). (ch. 9, i) tandis que
dans le contexte de la citation il ne s'agit nullement de Dieu,
mais de TEbed-Jalivé, ou d'un roi d'Israël, (voir ép. de Barn.
ch. 9,1; Ps. 18.45), Mais ici s'arrête toute analogie entre
l'épître aux Hébreux et l'épître de Barnabas.
L'épître de Barnabas ne possède pas la grande variété des
formules de citation dont use l'auteur de l'épître aux Hébreux,
(voir p. iio. ) Elle ne dispose d'une manière générale
que de trois formules ; T^lyei,, eItov et «p-rio-lv.
L'épître de Barnabas cite un texte de l'évangile avec la
formule w; ysypauTat. ( ép. de Barn. 4,14; Matth. 22,14),
L'épître aux Hébreux n'emploie jamais cette formule, ne cite
jamais l'évangile oral et ne semble pas avoir connaissance
d'un évangile écrit.
L'épître de Barnabas indique souvent la source et l'auteur
des paroles qu il cite :
Ép de Barn. ch. 4, 5 liysi àavir{k,
ch. 4, 7 Xè'yet, T, ypacpri.
ch. lO, T Mtoiiar-?;; sItcîv,
(i) Nous avons, dans l'ép. aux Hébr., une formule oorrespondante à celle-là
£v AauîiS )iy&jv (ép. aux Hébr. 4,7), et elle ne se trouve qu'une seule fois dans l'épître.
— 116 —
L'auteur de l'épître aux Hébreux ne fait jamais mention
de l'auteur du livre ni de la source du texte de la citation.
Ce sont deux écrits qui accusent des caractères différents
et qui semblent avoir été composés à des époques et dans
des écoles différentes.
117 —
DE LA LANGUE DANS LAQUELLE L'EPITRE
A DU ÊTRE ÉCRITE.
Avant de poser la question de savoir dans quelle langue
l'épître a été écrite, nous désirons attirer l'attention des
théologiens sur les plus importants aramaïsmes ou expres-
sions courantes de la terminologie thélogique palestinienne,
aussi bien que sur les connaissances des spéculations rabbi-
niques de l'auteur.
£7z" hy^âioo Tcôv Y)[j.£pcov (ch. I, 2) pQ\n pp fin des jours. Dan.
12, 13.- D^û\n nnri«5 Michée 4, 1,4.
Toù; alwva; (ch. I, 2). ii'^ûhv /DID^^lî;»!. (voir Delitzsch, ép. aux
Hébr. p. 4).
à7T:a'jyao-ij.a = inr. (i, 3). C'est un mot très usité chez les
cabbalistes. On connaît le livre qui a pour titre «Zohar)).
à-a'jya-ij.a r^? oôlr^q {i , 3) rinp' iinn. Targoum Onkelos à
Deut 33, 2.
cpspwv rà Tcàv-ra (i, 3) h:)r\ ^310. Zohar Chaddash f. 9; Midr.
Schmoth R. 133, 1 ; Bereshith R. 23.2 (voir M'Caul, ép, aux
Hébr. p. II).
T^ p-ri^y.v. (i, 3) n''"iD''DJ:. La Mémrah joue un rôle très impor-
tant dans la création et dans la révélation chez les Targoumis-
tes. Au fond, l'idée se trouve aussi dans les Psaumes. « Parla
parole de Jehovah les cieux ont été faits et par le souffle de
sa bouche, toutes leurs armées ». (Ps. 33, 6).
£V .b'ir.lol;; (.1 3) D^Ûllû::
• AeiTOUpy.xà TTVcùjAa'ra (i, 14) mtyn ''D«'?tt/
■ . . .Âôyoq kyivz^o (âsj^aio; (2, 2) ù'p) inîî'. C'est la formule avec
- 118 -
laquelle on confirmait un contrat. On la trouve plusieurs
fois dans le traité Gittin, etTargoum à Prov. 9, 7.
olxo'Jijivri iilAlouaa (2, 5) "^mi HJ^hv.M^in ùh^V*
ye'j(7£Ta', 9avà-ou (2, 9) NDirT'û dî;îû (aram.) nn^û nv'ô (hébr.) (voir
Delitzsch ép. aux Hébr. p. 66).
aïfj-a xai cràp^ (2, 14) DU "".tî'a, voir le texte du traité Sabbath,
f. 88, 2 cité dans notre étude p. 48. Cette locution se trouve
fréquemment dans les écrits rabbiniques.
To Tîvsup-aTo aytov (3. 7; lo, 15) milp ti)'i, Targoum à Ps. 137, 5.
Le Targoum l'emploie aussi avec le casus constr. KtympT «nn
l'esprit de sainteté.
6 Xôyoq xo'j 8coù (4, 12) ""n «lû""» si fréquent dans les Tar-
goumim.
Ikà'/aXpy. oicr-oixoq (4, 12) nrfi£3 ^in, (Ps. 1496); pÛlS pm «Ô''D/
voir Targoum, à Prov, 5, 4; KitSDin Kfl^d à Ps. 149,5.
^pôvo; T'ôs 7_âp'.Toç (4, 16) iDnn XDD, Es. 16.5 Targoum et Hébr.
X^piv sùpôTv (4.16) |n KVû voir Gen. 68, Hébr. et Targoum.
Ge-/îo-£'.s îtaL Lx£T£p[aç (5, 7) ni''jni n'?''finy Dàtl. 9. 3-
xaAov p-ô[;.a (6, 5) ilîa "lin Jos. 21. 43, Zach 3, 13.
alwv pLÉW.wv (6, 5) '•mn «û'?ï;/ «in D^^iv. Plus haut l'auteur a dit
olxou[jL£v/i (2, 5). Il connait donc le double sens de l'hébreu
ùb)lf, ou chaldéen «d'?ï^ ; ùh'iV dans le sens de monde habité,
univers, oi.xup.svri; et D^piv dans le sens d'époque, économie,
dispensation alwv.
Melyi^toky., dit l'auteur (ch. 7, 2) signifie, roi de justice.
SaX-/][jL, veut dire paix. Salem n'est pas, pour l'auteur, un mot
hébreu où il est toujours un adj. ou un adv., mais substari-
tif araméen. (voir plus haut, p. 72).
UpaxeLav Xap-^âvôlv (ch. 75) HJina tl)pbi
Le subst. olc(.^y.'f\ dont l'auteur se sert avec le double sens
de testament et d'alliance (ch. 9, 15 ss.) se trouve également
dans la langue courante de la Palestine, aux environs de
l'ère chrétienne. A la suite des influences hellénistes ce sub-
stantif a pénétré dans la littérature palestinienne avec une foule
d'autres. On l'écrivait '•piiT'l/ ipT)'''''! et aussi "pTi'"'! ; on le pronon-
çait daïthikou, daïthiki et diathiki. Nous le trouvons dans
- 119 —
la Mishnah, traité Moed Katone f. i8, 2 ; Baba Bathra 1. 18, i ;
Baba Meziah f. 135, 2 ; et dans le talmud, traité Baba Bathra,
f. 13, I ; Gittin 28,1. Le Nouveau Testament syriaque poite
pour titre «mn «pWl. L'origine grecque de ce mot a été vite
oubliée, néanmoins, le mot a conservé son double sens
jusqu'à la fin. Les talmudistes se posent la question: qu'est
ce qu'un daithiki? et ils répondent ipTi"''''! veut dire ûp \in NT
« ceci restera convenu, conclu * (i). Pour les talmudistes, daï-
thikou est un mot d'origine hébraïque, dont les consonnes,
ainsi pDl, constituent un anagramme représentant trois autrts
mots. C'est un procédé philologique digne de Rabelais (2)
mais ils nons montrent à nouveau, que bien qu'on ignorât
l'origine du mot, il avait - néanmoins conservé son sens
primitif. La langue palestinienne, à l'époque de l'ère chré-
tienne, possédait encore deiix synonymes à Daïthiki: i) «û^p
dans le sens exclusif de (( Alliance », et 2) n«1î^ dont le sens
exclusif est <» testament», mais c'est le subst. daïthiki qui
cumulait le double sens de testament et d'alliance. Dans le
Nouveau Testament syriaque, on se sert tantôt de «Dp et
tantôt de «pTi'iii. Le jeu de mot sur sur oia^-riy.'ri = ''p'^n'^'^i dans
le double sens de Testament et d'Alliance pouvait donc se
faire aussi bien dans la langue palestinienne de l'époque, qu'en
grec, et l'épître aux Hébreux aurait pu être écrite, d'après ce
que nous venons de dire, en araroéen, en syriaque, ou dans
l'idiome particulier de la Mishnah. Le traducteur n'avait qu'à
donner le mot grec qui se rapproche le plus et qui se propose
iiaturellement, oia8-/,xT, pour '•pin*'!. La Septante, donne ■/.ffakiç
pour bS)p c-à-d. l'équivalent dont l'original n'existe pas dans le
texte. Ps. 40, 8. dit-i£3DnSijioa, mais, comme Megillah et Kephal
disent tous les deux : rouleau (de parchemin), la Septante,
ayant Kephal dans là pensée, traduit : h xecpaydi J3 (voir
(i) Traité Baba Meziah, f. 19, i ; Baba Bathra 135, 2.
(2) Rabelais. Vie dé Gargantua et de Pantagruel.
. . . Quoy voyant Gargantua y print plaisir bien grand, sans aultrement s'en vanter
et dist à ses gents : je trouve beau ce ; dont fçut depuis appelle ce pays la Beauce.
— 120 —
p. p. 84, 85). 11 est évident que le traducteur aurait donné,
StaOriXT, pour ""pTin, si répître eût été écrite dans la langue de
la Mishnah.
Outre son vocabulaire, et saterminologie palestinienne, l'au-
teur montre une grande connaissance des spéculations talmu-
diques des écoles de son temps. Nous les avons constatés à
chaqae citation. Il faut encore passer en revue quelques-unes
de ces idées dont le. fond rabbmique ne saurait-être contesté.
A travers tout son écrit et surtout au ch. 9, l'auteur semble
confondre le tabernacle du désert avec le temple de Jérusalem.
Ces deux sanctuaires, qui pour nous représentent deux institu-
tions distinctes, se confondent au point de n'en faire qu'une
Seule pour l'auteur. Cela provient de ce qu'il a devant l'esprit
l'unité du commandement, ou de la révélation, touchant le
sanctuaire. Le sanctuaire est un, il est organe de l'ancienne
Alliance ou de la révélation patriarcale et prophétique; et, en
tant qu'organe, il reste toujours le même dans son essence,
malgré les transformations historiques qu'il subit. Le Temple
et le tabernacle sont deux expressions successives de la
même révélation. Ce sont deux institutions qui se super-
posent et se confondent. Tabernacle et temple sont une seule
et même chose, C'est un sanctuaire qui préfigure le vrai
sanctuaire où le Christ grand-Prêtre est entré. Cette vue de
l'auteur sur l'immutabilité et 1 unité du sanctuaire est essen-
tiellement rabbinique. La Mishnah et le Talmud confondent
aussi le Tabernacle et le temple, si bien qu'ils arrivent à dire :
tyipû np^Ki pîyf^i \y^ti "'ip^a.i tî^npD ]n:3tyx, «Nous trouvons que le
temple est appelé Tabernacle et que le Tabernacle est appelé
temple » (traité Eroubin f. i, 2, et2, i ).
La Jérusalem céleste, considérée comme un lieu de réunion
de fidèles, (ch. 12,22; 13, 14), le Sabbat, type allégorique du
Sabbat éternel, (ch.4, 9) sont des conceptions purement rabbi-
niques, (voir Ménégoz, Théoi. de l'ép. aux Hébr. p. 217).
D'un autre côté, il nous est impossible de trouver, et nous
ne pensons pas que personne puisse trouver, des m-ots
hébreux ou aràméens qui correspondent, en un seul mot.
- 121 -
comme en grec, à des expressions, telles que TioXup.spwç,
TcoXuTooTtOs (r, i) p-s-p'-oTûaTsw (5, 2) cÙTreploTTaTo; (12, I) ou. des locu-
tions équivalentes à yapaxTTip Tr\ç uiroa-Tacrsoj;; (l) il , 2) , i]J.a^ev
àcp'tov STraBsv (5, 8).
La dépendance de l'auteur à l'égard de Philon, ou du moins
la communauté d'esprit et de langue entre ces deux auteurs
ne saurait-être contestée. Nous renvoyons le lecteur à l'étude
de M. Ménégoz sur l'auteur et Philon dans son livre^ La Théo-
logle de VEpître aux Hébreux, p -p. 197-217.
L'auteur est à la fois, et 'par sa terminologie et par ses
idées, Palestinien et Alexandrin. C'est un rabbin-apôtre
Philonien. Nous avons donc le droit de nous demander, en
présence de sa double éducation, dans quelle langue l'auteur
a écrit son épître?
D'après la forme de l'épître, il semble probable qu'elle a été
écrite en grec. La langue et le style de l'auteur plaident en
faveur d'une composition originale et non d'une traduction.
Toute l'épître paraît être écrite au courant de la plume, et
porte UD cachet primesautier. 11 est vrai qu'il y a des traduc-
teurs émérites sous la plume desquels l'original s'efface à un
tel point- qu'on ne peut le reconnaître. Voyez le Macbeth de
Schiller et le Macjieth de Shakespeare. ^L'allemand de Luther
dans sa traduction du Nouveau Testament est supérieur au
grec de l'original » (Ménégoz). Qui peut nous assurer, à ne
regarder que la forme, que l'épître aux Hébreux n'est pas
sortie de la main d'un traducteur de génie? La forme plaide
en faveur d'une composition originale grecque, mais elle ne
nous la garantit pas.
Les citations seules peuvent décider dans quelle langue
l'épître a été écrite.
Toutes les citations, sans exception accusent des coïnci-
dences très prononcées avec le texte des Septante. Nous avons
(i) Nous n'avons pas pu trouver unt phrase hébraïque ou chaldéenne correspon-
dante à cette locution, mais au fond l'idée est purement talmudique ; ainsi les tal-
niudistes connaissent « les âmes des saints," qui planent immédiatement au dessous
du trône de la gloire ».
- 122 -
démontré presque à chaque citation que l'auteur ne se pré-
occupe pas du texte hébreu, et ne traduit pas lui-même de
l'hébreu, c'est ce que nous avons également constaté que l'au-
teur suit la Septante jusque dans ses lectures fautives et ses
versions manquées inclusivement. Voir cit. ^ (p. p. 30, 31,
32), où au lieu du texte de la Septante :
Réjouissez-vous, cieux, avec lui (c.àd. avec Dieu).
Et que tous les anges de Dieu se prosternent devant lui
(c.àd. devant Dieu); il faut lire d'après le texte original
hébreu :
Chantez, cieux, (avec) son peuple.
Et que tous les Elohim se prosternent devant lui (c.àd. devant
son peuple).
Dans la cit. 8 (Hébr. 2, 6) l'auteur fait ses spéculations sur
le texte grec, le texte hébreu s'y prêterait beaucoup moins
bien.
Des vingt-neuf textes différents que l'auteur emploie dans
l'épître quatre seulement, traduisent exactement l'hébreu,
(mais ils sont aussi mot à mot dans la Septante). Tous les
autres diffèrent notablement du texte hébreu, mais ils s'ac-
cordent avec un des manuscrits de la Septante. L'auteur
ne peut pas avoir écrit en hébreu et citer le grec de la Sep-
tante.
L'auteur n'a pas écrit son épître en hébreu, car il n'aurait
pas pu se servir de la citation 10 (ch. 2 13). Il n'aurait pas pu
introduire une citation d'un mothûiN' ou tout au plus de deux
mots 1:3 noriN. Cela n'est pas dans les habitudes de son temps.
On donne du moins une phrase entière et précise.
L'auteur ne pouvait avoir écrit l'épître en hébreu, car outre
qu'il nous manque une des formules des citations hébraïques
consacrée, (STiDn car il est écrit) une formule que l'auteur
semble ignorer, il a une très grande variété des formules
(voir p. no), qui, non seulement ne se trouvent pas chez les
rabbins de son temps, mais ne se rencontrent nulle part dans
les écrits hébraïques. Quelques-unes de ses formules, telle que
Suptapr^paTO Se ttou t!.ç "kiyoiy (ch. 2, 6), vluç StaXéyetai. (ch. 12,5),
ne pouvaient pas avoir pour modèle une formule hébraïque,
- 123 -
car on ne peut pas les traduire convenablement en hébreu.
D'après ce que nous venons de dire, il est également
impossible que les citations aient été rectifiées par le traduc-
teur, ou à une époque postérieure, d'après une des formes de
la Septante. L'auteur fait ses spéculations sur un texte grec et
non hébreu. Ses formules de citation n'ont aucun rapport avec
celles de la Mishnah. Elles sont personnelles, spontanées et
grecques. L'épître a donc été écrite en grec et non en hébreu.
— 124
LA DATE
La citation 13, (ép. aux Hébr. 3, 7-9) : «Aujourd'hui si vous
entendez ma voix... et ils ont vus mes œuvres quarante
ans 7/, peut nous fournir une indication très précieuse pour
dater l'épître. L'auteur, à la suite de cette citation, invite
ses lecteurs à la repentance, aux exhortations mutuelles et
journalières, et ceci pendant qu'il est encore dit (appelé)
« Aujourd'hui. ». a-^ptÇ ou xb crri^epov xaXs'ÏTaf, (ch. 3, 13). Au
ch. 10, 25, nous avons, en substance, la même exhortation
pressante : «. . . mais exhortons-nous les uns les autres, et cela
d'autant plus que vous voyez que le jour approche ». Cette
insistance de l'auteur, auprès de sa communauté, sur une
repentance immédiate, faite pendant que « l' Aujourd'hui »
existe encore, est très caractéristique, et nous devons nous
demander quelle durée de temps l'auteur a compris par
To a-/-j|j.£pov ? Étant donné que son exhortation fait pen_
dant au texte de la citation, que Ps. 95,7-11 lui fournit le
canevas et le modèle de son pressant appel, ce sont donc
les « quarante ans » du texte qu'il a devant sa pensée, et la
durée de -zo <y/iij.tooy, l'espace de temps qui est appelé » Aujour-
d'hui » est par conséquent de 40 ans.
Au ch, 4,8, l'auteur compare la communauté chrétienne
sous la conduite du christ, au peuple d'Israël sous la conduite
de Josué. Si le parallèle existe entièrement dans la pensée
de l'auteur, le Christ devra faire entrer la communauté des
croyants dans le repos idéal, comme Josué à fait entrer le
peuple d'Israël dans un repos relatif, après quarante ans de
séjour dans le désert, — et, par conséquent, le to (7'/]|ji.£pov aune
durée de quarante ans.
- 125
L'auteur, dans les spéculations da ch. 4, se meut entiè-
rement, dans l'atmosphère des spéculations rabbiniques (voir
cit. 13 et 14, p. 54 à 6^). Mais comme les rabbins connaissent
les jours du Messie de 40 ans » (i), il n'y a rien d'étonnant à
ce que l'auteur les connaisse aussi. Ainsi l'épitre a dû être
écrite, au plus tard, quarante ans après la scène de la passion,
ou avant, et non bien distant de l'an 70. Ceci concorde admi-
rablement bien avec les résultats de nos meilleurs critiques
et exégètes, qui placent sa rédaction entre 64 et 68. (voir
Ménégoz. La TliéoL de l'Ép. aiixHébr. p. p. 35-44).
(i) Synh. i. <)(.), i; où il est dit: mw d^î)'i'^^< ri'tî'on fiW» « les jours du Messie
sont quarante ans », nous nous demandons s'il n'y a pas dans notre texte une méprise
d'un 1 pour un ) et qu'il l^iliaitlire rùl^i^ « et la mort du Messie est quarante ans ».
126
L'AUTEUR
Les Citations nous ont permis de voir que l'épître n'a rien
de commun avec les quatre auteurs à qui la tradition, d'après
Origène, (i) a tour à tour, attribué cet écrit. Elle ne peut pas
être de Saint Paul, ni de Luc, ni de Clément de Rome, ni de
l'écrivain auquel nous devons l'épître de Barnabas. Les cita-
tions nous ont également permis de connaître l'auteur, son
Philonisme, son Rabbinisme et son Christianisme. Mais si
nous avons pu pénétrer dans l'âme de l'auteur et percer à jour
ses pensées, son individualité, il reste néanmoins, pour nous,
un génie mystérieux que la brume impénétrable des siècles
voile à notre regaid intellectuel. Nous ignorons tout de lui;
sa carrière, son rôle dans l'église, sa date et lieu de naissance,
et jusqu'à son nom; et nous ne pouvons mieux faire que de
répéter les paroles d'Origène : tU oh 6 ypàtj/aç r^v £7zi<jxokriy ,
To [iiv àl-r^Uq Gsoç olBtv (2) qui a écrit l'épître, Dieu seul le sait.
La vérité ' là-dessus : « Mieux vaut, dit M. Ménégoz, rester
dans l'incertitude que d'émettre des affirmations contes-
tables )). Il nous suffit de savoir qu'à part son rôle sociale et
sa biographie, le génie de l'auteur s'est parfaitement révélé
à nous (3).
(i) Cité par Eus. Hist. Eccl. VI. 25.
(2) id.
(3) Théol. de l'ép. aux Hébreux, p. 65,
TABLE DE MATIÈRES
Bibliographie p.
introduction
Préliminaires
Des livres que tout maître était censé connaitrc
Les Versioiis de l'Ancien Testament ......
La Peshiithô
La Version des Septante
La Mishnah, le Talmud et le Midrash
L'herméneutique et ses règles
Les Citations de l'A. T. dans l'épitre aux Hébreux
Plan de l'Epître . . '
Passages des livres Saints cités par l'auteur
[ Citation 1 (Ep. aux Hébreux 1, 5)
- 1, 5
- 1, 6
1, 7
1,8
- 1,10
- 1,13
2, 6
- 2,12
- 2,13
- 2,13
3,2-6
3,7-11
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64
65
69
71
73
73
74
76
81
82
86
Citation 26 Ep. aux Hébreux 10,30
2-
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.... 88
27 . — • 10,30 ... . 89
28" - 10,37-38 .... .90
29 — 11,1^ . . . . 92
30 — 12,5-6 .... 93
31 - 12,21 . . . .• 94
32 - 12,26 .... 94
33 — 13,5 .... 96
34 — 13,6 .... 97
CONCLUSIONS (a) 99
De la manière dont l'auteur traite les textes de l'A. T. 102
L'auteur et Saint-Paul 103
L'auteur et Luc 104
L'auteur et Clément de Rome 105
Leurs biblicismes . . . . . . . . . . . . 106
Leur manière d'enûisager tes textes sacrés et leur Remez . 107
L'auteur de l'épître aux Hébreux et Barnabas. . . 108
CONCLUSION (b)
Les formules de citation 110
L'auteur et St-Paul 111
L'auteur et Luc 111
L'auteur et Clément de Rome 113
L'auteur et Barnabas. 115
DE LA LANGUE DANS LAQUELLE l'ÉPITRE A DU ÊTRE ÉCRITE 117
LA DATE 124
l'auteur • 126
11,3.11
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