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Full text of "Exeǵes̀e rabbinique et exeǵes̀e paulinienne [microform]"

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BIBMOTHÊQOE DE THÉOItOGIE lUSTOHlQDE 

PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DES PROFESSEURS DE THEOLOGIE 

A l'institut catholique de paris 



EXÉGÈSE RABBINIQUE 



ET 



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EXEGESE PAULINIENNE 



PAR 



Joseph BONSIRVEN, S. J. 




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Bibliothèque de Théologie historique 



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EXEGESE RABBiNIQUE 

ET 

EXÉGÈSE PAULINIENNE 



DU MEME AUTEUR : 

Chez Beauchesne et ses fils. 
Le Judaïsme Palestinien au Temps de Jésus-Christ. Sa théo- 
logie. 2 vol. 1935. 

Les Epitres de S. Jean, introduction, traduction et com- 
mentaire. (Collection Verbum salutis). 1936. 
Les Juifs et Jésus, attitudes nouvelles. 1937. 

Chez Grasset. 

Sur les Ruines du Temple, ou le Judaïsme après Jésus-Christ. 
1928. (Collection la Vie chrétienne). 

Chez Bloud et Gay. 

Les Idées Juives au Temps de Notre-Seigneur. (Collection 
catholique des Sciences religieuses). 1934. 

Chez Flammarion. 
Juifs et Chrétiens. 1936. 



BIBMOTHÈQDE DE THÉOIiOGIE HISTORIQUE 

PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DES PROFESSEURS DE THEOLOGIE 
A l'institut CATHOLIQUE DE PARIS 



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EXÉGÈSE RABBINIOUE 

ET 

EXÉGÈSE PAULINIENNE 



PAR 



Joseph BONSIRVEN, S. J. 




BEAUCHESNE ET SES FILS 

PARIS. RUE DE RENNES, 117 
MCMXXXIX 






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LIBBABIES 



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AT/if /L OBSTAT 

Jh. Demaux-Lagrange, S. J. 
Praep. Prov. Tolos. 



IMPRIMATUR 

Parisiis, die 1=> aprllis 1938. 
f Rogerius Beaussart 
Eps Elaten. 



Tous droits de reproduction, d'adaptation ou de traduction 
réservés pour tous pays. 



Copyright d938 by Beauchesne et ses Fils. 









ÀVÂNT-PROPOS 



« A ne tenir compte que de l'étymologie, [e^-qyriaiç, explica- 
tion), écrivait le P. Durand, le terme d'exégèse peut s'entendre 
de l'explication de n'importe quel texte; pratiquement, il ne 
se dit guère que de l'explication du texte biblique ^ ." » C'est 
dans ce sens restreint que le mot est employé ici. 

C'est à l'intention des exégètes et des théologiens chrétiens 
que nous avons entrepris cet ouvrage : ils se réfèrent volon- 
tiers à l'herméneutique rabbinique, dans leurs remarques 
sur les interprétations bibliques qu'ils rencontrent dans le 
Nouveau Testament ou chez les Pères de l'Église. Presque 
invariablement ils répètent les mêmes lieux communs : les 
rabbins se servaient dans l'explication de la Bible des sept 
règles d'HUlel, qui se sont ensuite dilatées dans les treize 
d'Ismaël; leurs méthodes herméneutiques comprenaient 
quatre gemmes indiqués par les quatre lettres PRDS (compo- 
sant le par dés, jardia) : le pesât, qui dégage le sens littéral, 
le rèmèz qui découvre les indications contenues dans le texte, 
le derûs, ou l'interprétation familière ethomilétique, le sâd, 
la science théosophique, l'invention des secrets mystiques 
cachés sous la lettre^. Nous avions le sentiment que la réalité 
est moins simple et qu'il était nécessaire de la faire con- 
naître d'une manière concrète : par des exemples et par un 
exposé systémati(jue des procédés exégétiques employés par 
les rabbins anciens. 



1. Dictionnaire d'Apologétique (A. d'Alès), 1. c. 1811 (Exégèse). 

2. Cf. ibid., c. 1812, sq, et J. Brierre-Narbonne, Exégèse talmudique 
des prophéties messianiques, Paris, 1934, p, 5-12. 

C'est le Zohar (xin« s.) qui appliqua le mot pardés aux quatre 
voies de l'interprétation biblique, par allusion aux rabbins qui 
s'étaient introduits dans le jardin de la théosophie {Hagiga 14 b). 






6 AVANT-PROPOS. 

Une étude comparative ne peut s'instituer que si l'on connaît 
suffisamment les deux termes à confronter. Nous livrons dans 
notre première partie le terme le moins connu de la com- 
paraison. 

La seconde partie est une application de la méthode 
comparative au cas le plus intéressant et le plus représen- 
tatif. 



PREMIÈRE PARTIE 

QUELQUES PARADIGMES 
DE L'EXÉGÈSE RABBINIQUE 

ANCIENNE 



AVERTISSEMENT 



Écrivant pour renseigner nos collègues chrétiens, nous 
avons pensé qu'il importait surtout de multiplier les exemples. 
Nous les avons classés méthodiquement suivant les divers 
types que présente l'exégèse des rabbins. Nous essayons 
en outre de définir les lois herméneutiques qu'applique cette 
exégèse. Nous laissons aux spécialistes, aux rabbins voués à 
l'étude du Talmud, le soin de dégager le mécanisme dialec- 
tique de ces méthodes, d'en discuter la valeur logique et 
juridique, de rechercher leurs origines historiques, d'en 
éclairer les procédés laborieux. 

Nous avons restreint notre champ aux rabbins tannaïtes 
(premier et deuxième siècles après Jésus-Christ). Ils vivaient 
à l'âge d'or de l'exégèse juive : par eux furent créées et 
développées les méthodes qui constituent le fonds et la base 
de l'herméneutique juive. Les plus anciens d'entre eux avaient 
été les condisciples de Paul à l'école de Rabban Gamaliel : 
nous familiarisant avec leurs sentences, nous prenons con- 
tact avec un milieu exégétique qui diffère assez peu de celui 
qui a vu surgir le message chrétien primitif. 



INDICATIONS BIBLIOGRAPHIQUES 



SOURCES 



Midrasim juridiques (tannaïtes). 

Mekhilta (Exode), édition H. S. Horovitz (Rabin), Frankfurt a. M. 1926. 

Siphra (Lévitique), édition Weiss, Wien, 1862. 

Siphré d'bé Rab (Nombres), édition Horovitz, Leipzig, 1937. 

Siphré d'bé Rab (Deutéronome) édition M. Friedmann. Wien, 1864. 
(édition Horovitz- Finkèlstein, Breslan, en cours de publication). 
Traduction de Siphré-N ombres par G. K. Kuhn (en cours de publi- 
cation), Stuttgart. 

Mekhilta de R. Siméon b, Yohai (Hoffmann), Frankfurt a M. 1906. 

Autres midrasim : 

Genèse rabba, édition Albeck-Theodor, Berlin, 1912, sqq. 
Midras rabba, édition Romm, Wilna, 1896. 
Tanfyuma, édit. Buber, Wilna, 1913. 
Pesiqta de Rab Kafiana, édit. Buber, Lyck, 1868. 
Seder 'Olam rabba, édit. B. Ratner. Wilna, 1897. 

Talmud. 

Misna, éditions Strack (Leipzig), Beer-Holtzmann (Giessen). Traduc- 
tion Danby, Oxford, 1933. 

Tosephta, édit. Zuckermandel, Pasewalk, 1880. 

Talmud palestinien (Jérusalem), édit. Krotoschin, 1866. 

Talmud babylonien, édit. Romm, Wilna, 1896. 
(Modes de citation : Misna (parfois précédée de M.) par chapitres et 

halakhot, le Babli par folio a et b, le Palestinien (indiqué par Pal.) 

par chapitre, halakha et folio abcd, la Tosephta (indiquée par Tos.) 

par chapitre et halakha). 

TERMINOLOGIE DE L'EXÉGÈSE JUIVE 

W. Bâcher, Die exegetische Terminologie der judisehen Traditions- 

literatur, I, (Tannaîten), Leipzig, 1899. 
Ch. Albeck, Einleitung und Register zum Bereschit iîaôôa, Berlin, 1931, 

p. 19-44. 
J. Vinter und Wuensche, Mechilta...ûber^ezt.., Leipzig, 1909, p. 377-390. 
A. Bâcher, Die Proômien der jiidischèn Homilie, Leipzig,. 191 3. 
W. Bâcher, Die Agada der Tannaiten, P, 1903, 11, 1890, Strasbourg. 



10 INDICATIONS BIBLIOGRAPHIQUES. 

OUVRAGES GÉNÉRAUX SUR L'EXÉGÈSE RABBINIQUE 

(RosENBLATT, op. laud. p. 2, déclare : « Une étude objective et cri1 

que de l'exégèse rabbinique de la Bible est encore un des 

deratum. >) 
W. Bâcher, Bible Exegesis, dans : the Jewish Encyclopedia, Ne 

York, 1906, III, p. 162-174. 
A. Kaminka, Bibelexegese, dans : Encyclopaedia judaica, Berlin, 192 

IV, c. 619-627. 
H. L. Strack, Einleitung in Talmud und Midras, Miinchen, 192 

p. 95-109. 
M. MiELZiNER, Introduction to the Talmud, New York,'-1925, p. 115-11 

(Légal hermeneutics of the Talmud). 
H. S. HiRSCHFELD, Holachische Exégèse, Berlin, 1840. 

— , Haggadische Exégèse, Berlin, 1847. 

L. WoGUÉ, Histoire de la Bible et de l'Exégèse biblique jusqu'à n 

jours, Paris, 1881 (p. 164-173, méthodes exégétiques, p. 1' 

367, histoire de l'Exégèse). 

OUVRAGES PARTICULIERS 

A. Berliner, Beitràge zur hebràischen Grammatik in Talmud m 

Midrasch, Berlin, 1879. 
Lieber Dobschuetz, Die einfache Bibelexegese der Tannaim, Halle 

S., 1893. 
H. L. Strack, Prolegomena critica in Vêtus Testamentum hebraicv 

(II. De textu bibliorum hebraicorum qualis jtalmudistarum tei 

poribus fuerit), Lipsiae, 1873. 
Samuel Landau, Ansichten des Talmuds und der Geonim ûber d 

exegetischen Wert des Midrasch, Halle, 1888. 
Ludwig Blau, Masoretische Unîersuchungen, Strassburg, 1891. 
Bernhard Koenigsberger, Aus Masorah und Talmudkrilik, Berlin, 18Ç 
Georg Aicher, Das Alte Testament in der Mischna, Freiburg i. B. 19C 
Samuel Rosenblatt, The Interprétation of the Bible in the Mishna 

Baltimore, 1935. 
Isaak Heinemann, Altjûdische Allegoristik, Breslau, 1936. 
Ed. BiBERFELD, Beitràge zur Méthodologie der halachishen Penl 

teuchexegese, Berlin, 1928. 
Adolf ScHWARTZ, Die Kontroversen der Schammaiten und Hillelite 

Karlsruhe, 1901. 

— Die hermeneutische Analogie in der talmudischen Literat't 

Wien, 1987. 

— Der hermeneutische Syllogismus in der talmudischen Literati 

Karlsruhe, 1901. 

— Die hermeneutische Induktion in d. t. Lit. Wien und Leipzig, I9( 

— Die hermeneutische Antinomie in d. t. L. ibid. 1913. 

— Die hermeneutische Quantitâtsrelation in d. t. L. Wien, 1916. 



CHAPITRE PREMIER 

1. — QUELQUES NOTIONS GÉNÉRALES. 

i° L'exégèse biblique dans le Judaïsme. 

Dans les siècles qui précèdent et suivent l'établissement du 
Christianisme, l'exégèse biblique, le Midrâs\ est une disci- 
pline activement exercée en Israël. Expliquer les Écritures, 
les scruter, dégager toutes leurs significations possibles, 
discuter les interprétations proposées : autant d'exercices aux- 
quels les rabbins des deux premiers siècles consacrent le 
meilleur de leur temps. Nous saisissons, en outre, dans leurs 
exégèses une évolution touchant les méthodes et les opinions, 
qui atteste une tradition déjà ancienne. Il est fait allusion 
aux interprétations singulières que soutenaient des interprètes 
antérieiu-s, les dôi'ëé résumai, ou dot'sé hamûrôt^. Ces 
indications permettent d'affirmer que les études exégétiques 
étaient une des principales fonctions de ces Scribes, dont 
les rabbins passaient pour être les héritiers et les con- 
tinuateurs. 

Cette induction est confirmée par les deux faits suivants. 
D'Esdras, le premier et le modèle des Scribes, il est dit 
(7, 10) « qu'il appliquait son cœur à scruter [derôs, étudier, 
interpréter) la Tôrâ d'Yhwh et à la pratiquer, ainsi qu'à 
enseigner en Israël préceptes et décrets ». Les écrits du même 



1. Dans l'hébreu postbiblique le verbe dâras est employé unique- 
ment dans un sens technique, qui apparaît déjà dans les derniers 
livres de l'Ancien Testament ; expliquer un texte biblique particulier, 
interpréter les Ecritures. Le substantif dérivé, midrds, aplusieurs sens, 
mais tous dans la même ligne ; recherche, étude; interprétation d'une 
écriture ou des Ecritures en général; les écrits qui contiennent ces 
interprétations. Voir Strack, îoc. cit., p. 4; Bâcher, Terminologie, 
p. 25, sqq., 103, sq. 

2. Sur ces mots voir infrà, p. 249-251. 



12 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

temps présentent l'étude [dâras] des commandements de Dieu 
comme une occupation qu'aiment les justes et que négligent 
les impies {Ps. 119, 45, 94, 155; 1 Chron. 28, 8). 

Et il était naturel, nécessaire, que cette période de l'histoire 
juive, qui se déroule sous le signe d'Esdras, fût marquée par 
une importance particulière donnée à l'étude des Ecritures. 
Israël ]3i'end de plus en plus la forme d'une communauté 
religieuse, vouée à l'établissement du règne de la Loi de 
Dieu : la Tora est le code unique et totalitaire, qui doit 
informer l'esprit et la conduite des fidèles, guider les com- 
portements de la nation : tout en elle, rien sans elle ou en 
dehors d'elle. Gomme le dira un contemporain de Jésus- 
Christ : (( Tourne-la (laTôrâ), retourne-la, car tout est en elle 
et toi aussi tu y es tout entier ; et ne t'en écarte pas, car tu ne 
trouveras rien de meilleur qu'elle ^ . » 

A l'ouverture de cette période, Esdras le Scribe, entouré et 
aidé de ses compagnons, lit et explique la Loi de Dieu au 
peuple [Néhem. 8, 1-8); aux termes d'une ancienne tradition 
il aurait préparé et publié une nouvelle édition des livres 
saints (4 Esd. 14, 37-48), Étudier la Tora, en instruire les 
fidèles, demeure la principale occupation des Scribes, qui, 
après Esdras, se font les instructeurs de la nation et ses guides 
spirituels. Jésus, fils de Sirach, un des leurs, écrit l'éloge de 
ces hommes qui renoncent aux métiers manuels pour se 
consacrer tout entiers à méditer la Loi du Très-Haut et qui 
méritent ainsi d'avoir une place distinguée dans les assem- 
blées, de pouvoir occuper le siège du juge, d'interpréter la 
justice et le droit [Eccli. 38, 24-39, 11). 

Ces études exégétiques poursuivent deux objectifs complé- 
mentaires : faire l'inventaire du dépôt des Ecritures; fonder 
sur la parole divine l'enseignement des docteurs. Nous voyons, 
dès la fin du premier siècle, les rabbins les plus réputés, 
Eliezer le grand, Josuében Hanania, pratiquer ces deux formes 
d'exégèse : celle qui n'a d'autre fin qu'elle-même, l'exégèse 
désintéressée; celle qui fournit une démonstration nécessaire, 

1. Pirqé Abat, 5, 22; sentence attribuée là à Ben Bag Bag, disciple 
de Hillel; dans Abôt de Rabbi Nathan. 12, 12, elle est mise dans 
la bouche de Hillel lui-même. 



l'exégèse dans le jodaïsme. 13 

l'exégèse intéressée, l'exégèse juridique. Il est probable que 
dès les origines les scribes se sont également engagés dans les 
deux directions ; divers indices semblent pourtant suggérer 
que l'on a scruté les Écritures avant tout pour en tirer un 
enseignement, pour y découvrir les lois qu'elles contiennent. 
C'est dans ce sens que Jésus, fils de Sirach, s'applique aux 
Écritures; c'est pour fonder sur elles sa jurisprudence 
qu'HiUel formule ses règles d'herméneutique. 

Les Maîtres en Israël devaient concilier deux obligations, en 
apparence contradictoires : d'une part l'interdiction soit 
d'ajouter à la Loi qui contient tout, soit d'en rien retrancher 
puisqu'elle est sacrée; d'autre part, la nécessité d'adapter 
cette Loi aux circonstances, d'édicter la Loi orale, dont quel- 
ques prescriptions éliminent pratiquement tels commande- 
ments anciens ou bien introduisent d'incontestables innova- 
tions. L'exégèse résout la difficulté : un raisonnement ingé- 
nieux déduit de la lettre divine les préceptes nouveaux. 
Notons dès maintenant que cette exégèse n'invente pas, mais 
seulement justifie, une loi qui tire toute sa valeur de la tradi- 
tion ; et c'est un principe reçu qu'un raisonnement ne peut 
fonder une loi si elle n'a déjà autorité i. Pour autant l'exégèse 
juridique pourra, impunément et sans crainte, se donner 
carrière, se permettre toutes les subtilités, tous les arbitraires : 
les conclusions qu'elle doit démontrer sont déjà acquises. 

Suivant ces deux directions nous avons deux espèces d'exé- 
gèse : l'exégèse qui est censée fonder le droit, les halâkôt, 
l'exégèse halakhique ; l'exégèse qui scrute les Écritures pour 
les mieux comprendre pour y découvrir des enseignements 
moraux ou religieux, l'exégèse haggadique. En théorie ces 
deux exégèses devraient suivre des voies différentes et telles 
règles herméneutiques sont plus propres à la halâkâ : en 
pratique l'une et l'autre procèdent à peu près de la même 

1. Cf. infrà, p. 88, 92 et Aicher, op. cit. p. 57-60 sur les prescriptions 
introduites sans aucun appui scripturaire. 

Le même Aicher, ibid. p. 154-156, s'efforce de démontrer que la 
forme Mischna, c'est-à-dire la prescription nue, sans fondement exé- 
gétique, a précédé le Midrasch, soit le commentaire scripturaire 
halakhique ; même si quelques-uns des arguments présentés sont con- 
testables, l'ensemble de la thèse paraît certain. 



14 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

manière. Il ne parait donc pas opportun de les exposer séparé- 
ment ; il suffira de signaler à l'occasion les procédés caracté- 
ristiques de l'une et de l'autre branche ^ 

2° Les sources : la littérature exégétique 

Où trouver nos exégèses? Nos sources sont de deux espèces, 
appartiennent à deux genres littéraires distincts. 

La littérature juridique. D'abord la Misnâ, rédigée par 
Juda le Prince vers la fin du second siècle ap. J,-G. ; il est 
remarqiiable que le plus souvent les halakhot sont rapportées 
simplement sans aucun souci de les fonder sur l'Écriture; 
plusieurs préceptes sont pourtant accompagnés soit de réfé- 
rences scripturaires, soit d'exégèses plus ou moins com- 
pliquées^. La Tosephta, recueil de lois parallèle à la Miéna 
et de peu postérieur est, au contraire, riche en midrasim de 
toute espèce. Cette différence trahit une diversité d'écoles et 
de tendances. Les deux commentaires de la Misna, le pales- 
tinien [Talmud de Jérusalem) et le babylonien [Talmud 
babylonien), font une très large place au midras, tant 
halakhique que haggadique. 

La littérature exégétique proprement dite, soit les commen- 



1. AicHER, op. cit., p. 152, note très justement que la distinction, 
ordinairement affirmée entre les méthodes herméneutiques suivies 
respectivement par la Halakha et la Haggada est imaginaire. Bâcher, 
die Agada der Tannaiten, I, p. 464 (appendice sur le mot Haggâdâ) 
écint : « En fait, à l'origine il n'y avait pas de différence formelle entre 
l'exégèse halakhique et l'exégèse haggadique, il serait faux de consi- 
dérer le midrasch halakhique et le midrasch haggadique comme deux 
domaines séparés dès le principe. Il suffit d'étudier les monuments qui 
nous ont été conservés de l'ancien midrasch pour s'en convaincre. Là, 
selon l'ordre des vei'sets du passage expliqué, les interprétations 
suivent les interprétations et ce n'est que le caractère intrinsèque du 
texte commenté qui conditionne la nature halakhique ou haggadique 
de l'exégèse ». 

Cf. aussi Strack, Einleitung in Talmud und Midras^, p, 96 : la 
haggada utilise les mêmes règles que la halakha, bien qu'elle en 
suive qui lui soient propres. 

2. Voir Strack, loc. cit., p. sqq. et H, Danby, The Mishna trans- 
lated... (Oxford, 1933), Introduction, p. xxiv, sq. : références aux textes 
de la Misna et de la Tosepha. On trouve environ 666 citations 
scripturaires dans la Misna: la Tosephta en contient beaucoup plus. 



OCCASIONS DES EXEGESES. 15 

taires rabbiniques sur les divers livres de la Bible, les midra- 
sim. Dans cette collection nous tiendrons compte tout parti- 
culièrement de ceux qu'on appelle les midrasim halakhiques, 
Mekhilta sur l'Exode, Siphra sur le Lévitique, Siphré sur les 
Nombres et le Deutéronome. Ces compilations, à peu près con- 
temporaines de la Misna, contiennent les exégèses des rabbins 
de l'âge tannaïte et aussi des exégèses plus anciennes ; bien 
que dénommés halakhiques, ces commentaires comportent en 
réalité quantité d'exégèses haggadiques ' . 

C'est dans cette littérature qu'on saisit comme sur le vif les 
habitudes et les traditions exégétiques des rabbins. Nous les 
entendons discuter les interprétations proposées par leurs 
collègues ou par leurs devanciers. Surtout nous voyons à 
l'œuvre des esprits subtils, insatiablement curieux, acharnés à 
chercher et à examiner tous les sens que peut revêtir un texte. 

3° Occasions des exégèses. 

Ce prurit de multipHer les interrogations, de tout mettre 
et remettre en question, d'ergoter sans fin et pour le plaisir, 
se manifeste par des formules caractéristiques qui amorcent 
les développements exégétiques. En voici quelques échan- 
tillons. 

Ce sont d'abord des questions sur tel ou tel texte qui 
soulève des problèmes. 

A propos des mots qui ouvrent le livre du Deutéronome : 
« Voici les paroles que dit Moïse, etc. )), le commentateur se 
demande : 

Moïse n' aurait-il fait que cette prophétie? N'a-t-il pas écrit la Tora 
tout entière, suivant qu'il est dit {Deut. 31, 9) : « Et Moïse écrivit (toute) 

1. Il serait intéressant d'étudier, comme témoins de l'exégèse 
rabbinique, les plus anciennes versions des Écritures : les diverses 
traductions grecques, les targums araméens; les deux targums pales- 
tiniens du Pentateuque abondent en traditions haggadiques. Ces 
recherches, fort délicates, donneraient des résultats moins sûrs et 
surtout beaucoup moins étendus que l'étude des écrits rabbiniques. 
Dans son travail Dobschutz a rapproché quelques exégèses rabbiniques 
des textes correspondants des anciennes versions. P. Churgin, Targum 
Jonatham to tke Prophets, New Haven, 1907, p. 80, 84, 87, 93, étudie 
les indications exégétiques que contient ce targum. 



16 EXÉGÈSE RA.BBINIQUE. 

cette Tora » ? Pourquoi est-il enseigné ^ en ces termes « voici les paro- 
les » ? Cela nous apprend que c'étaient des paroles de réprimande, sui- 
vant qu'il est dit (beut. 32, 15) : « Et Yeshurun est devenu gras et il a 
regimbé ». Et de la même manière tu dis {Amos, 1, 1) : « Paroles 
d'Amos qui fut parmi les bergers de Thecoa, ce qu'il a vu au sujet de 
Jérusalem. » Amos n'aurait-il fait que cette prophétie ? N'a-t-il pas pro- 
phétisé plus que ses compagnons? Pourquoi est-il enseigné en ces 
termes « paroles d'Amos »? Parce que ce furent des paroles de répri- 
mande, suivant qu'il est dit (Amos, 4, 1) : « Ecoutez cette parole, vaches 
de Basan, qui êtes sur la montagne de Samarie ». Cette expression 
désigne leurs tribunaux. Mêmes remarques sur Jérémie, David, Salomon 
(Ecclésiaste) ^. 

Le texte suivant nous fait assister à une scène d'école : un 
disciple interrogeant son maître sur un mot qui lui parait 
sans raison d'être, le maître lui répond en lui faisant observer 
que la syntaxe de la phrase est absolument régulière : 

« Et Moïse dit à son beau-père, etc. » {Ex. 18, 15) ; On dit : sur ce 
mot Juda de Kephar Ikos interrogea Rabban Gamaliel : « Pourquoi 
Moïse a-t-il dit : Quand le peuple vient vers moi » ? (Il s'étonne sans 
doute que Moïse se pose comme celui qu'on doit interroger.) Le maître 
lui répondit: « Si cela ne convient pas qu'aurait-il dû dire? » L'autre 
repartit: « Quand le peuple vient vers moi pour interroger Dieu » 
(texte biblique complet). Le maître répondit: « Puisqu'il a dit « pour 
interroger Dieu, » il a bien dit » 3. 

Ou bien question sur une allusion dont manque la réfé- 
rence : 

« Et il arrivera quand vous entrerez dans la terre que Yhwh vous 
donnera comme il l'a dit... » {Ex. 12, 25j. Mais où l'a-t-il dit? « Je vous 
introduirai dans la terre « {Ex. 6, 8). Pareillement tu peux citer 
{Ibid. 16, 23) : « C'est ce que Yhwh a appelé sabbaton ». Mais où l'a-t- 
il appelé? « Et il arriva au sixième jour » {Ibid., 16, 5)-*. 

Ou bien difficulté sur une expression métaphorique qui 
semble impliquer une impossibilité : 

« J'enivrerai mes flèches de sang » {Deut. 32, 42). Est-il possible que 
des flèches s'enivrent de sang? Mais voici que j'enivre d'autres êtres 

1. « Enseigner en ces termes », traduction littérale d'une formule, 
talmûd lômar, probablement la formule la plus employée dans cette 
litléraiure, pour indiquer une référence directe à un texte biblique. 

2. Siphré Deut. 1, 1, § 1, 64 a. 

3. Mekhilta in loc. p. 196. 

4. Mekhilta in ^c. p. 39. 



OCCASIONS DES EXÉGÈSES. 17 

de ce que font les flèches. « Et mon épée se repaîtra de chair. » Est-il 
possible à une épée de se repaître de chair? Mais je repaîtrai d'autres 
êtres de ce que fait mon épée. Et dans le même sens il est dit {Ezech. 
39, 17, 18): « Fils de l'homme, dis aux oiseaux de toute sorte et à tous 
les volatiles du ciel (citation libre) : Assemblez-vous et venez! 
Réunissez-vous des alentours à mon sacrifice que je fais pour vous... 
Et vous mangerez de la graisse à satiété et vous boirez du sang jusqu'à 
l'ivresse.,. » Et il dit encore (/s. 34, 6) : « L'épée de Yahwé est pleine 
de sang et ruisselante de graisse », Pourquoi? « Car Yahwé fait un 
sacrifice à Bosra et un grand carnage au pays d'Edom »*. 

Étonnement sur une indication historique, qui parait 
invraisemblable, et réponse : 

« Les enfants d'Israël partirent de Ramsès pour Sokoth » {Ex. 
12, 37). De Ramsès à Sokoth il y a cent vingt parasanges. Laparasange 
faisant quatre milles, la voix de Moïse aurait porté à quarante jours de 
marche? Ne t' étonne pas. Voici qu'il est écrit : {Ex. 9, 8, 9). « Yahwé 
dit à Moïse et à Âaron : Prenez une pleine poignée... qu'elle devienne 
une fine poussière sur toute la terre d'Egypte ». Voici qu'on peut 
raisonner a fortiori : si la fine poussière, qui n'a pas pour essence de 
s'étendre, s'étendit sur une surface de quarante jours de marche, à 
combien plus forte raison la voix qui a pour essence de s'étendre en 
un clin d'œiP. 

Ou bien une action divine paraît inadmissible moralement : 

« Yahwé frappa... jusqu'aux premier-nés des captifs » (Ex. 12,29). 
Est-ce que les captifs avaient péché? Non, mais uniquement pour que 
les captifs ne puissent pas dire : C'est notre crainte (notre religion, 
notre Dieu) qui a amené sur eux ces peines. Terrible est notre crainte 
qui peut subsister. Terrible est notre crainte, puisque les peines n'ont 
pas de prise sur nous. Autre explication: c'est pour t'apprendre que de 
tous les décrets (de persécution), que Pharaon avait décrétés contre 
Israël, les captifs s'étaient réjouis, suivant qu'il est dit (Prov. 17, 5) : 
« Qui se réjouit d'un malheur ne sera pas impuni » s. 

Ou bien un mot du texte parait superflu alors qu'il a une 
profonde signification : 

« Ecoute, Israël, Yahwé, notre Dieu » {Deut. 6, 4). Pourquoi 
ces termes? N'est-il pas dit encore : « un Yahwé unique? » Et pour- 

1. Siphré, Deut. in lac. § 332, 140 a. 

2. Mekhilta in lac. p. 47, sq. L'expression « s'étonner » employée 
ici sous forme négative, revient très souvent dans les Midrasim plus 
récents sous forme positive : « je m'étonne » . 

3. Mekhilta in loc. p. 43. 



18 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

quoi est-il enseigné en ces termes « notre Dieu » ? C'est sur" nous par 
excellence qu'il fait reposer son nom. Pareillement tu trouves dit (£"3!;. 
23, 17) : « Trois fois par an tous tes mâles se présenteront devant 
le Seigneur Yahwé, Dieu d'Israël (ce deux derniers mots ne figurent 
pas dans la Bible) ». Quel besoin de dire cela, n'est-il pas dit aussi 
« devant le Seigneur Yahwé » ? Pourquoi est-il enseigné en ces termes 
« Dieu d'Israël »? C'est sur Israël par excellence qu'il a fait reposer 
son nom! Même remarque sur Ps. 50, 7. Autre explication : « Yahwé, 
notre Dieu » : « un seul Yahwé », sur tous ceux qui entrent au siècle; 
« Yahwé notre Dieu », en ce monde ; « un Yahwé unique » pour le 
siècle qui vient ^. 

Enfin la question peut porter, soit sur une difficulté ou 
impossibilité historique, soit sur d'apparentes contradictions 
des Écritures : ce dernier cas est particulièrement fréquent. 
Moïse demande à Dieu de passer de l'autre côté du Jourdain 
et de voir le pays promis {Dent. 3, 25) : 

Est-il possible que Moïse ait demandé devant le Mâqôm (le Lieu = 
Dieu) d'entrer dans la terre (promise) ? N'est-il pas dit aussi [ibid. 
27 et Num. 27, 12, 13) : « Tu ne passeras pas ce Jourdain »? Parabole. 
La chose est semblable à un roi qui avait deux serviteurs. Il décréta 
que l'un d'entre eux ne boirait pas de vin pendant trente jours. 
Celui-ci dit : qu'a-t-il décrété à mon sujet ? que je ne boive pas de vin 
de trente jours ? Je n'en goûterai pas de toute une année, et 
même de deux années. Et tont cela pourquoi? Pour obtenir que soit 
annulé le décret de son maître. 

Celui-ci, à nouveau, décréta que le second serviteur ne boirait pas 
devin de trente jours. Ce dernier dit : Est-il possible que je vive même 
une heure sans vin? Et tout cela pourquoi? Pour témoigner son amour 
envers son maître. 

De même Moïse aimait les paroles du Mâqôm (le Lieu = Dieu) et il 
demandait devant lui (à Lui) d'entrer dans la Terre. C'est pourquoi i^ 
est dit : « Puissé-je entrer et voir ! » -. 

I 

Contradictions historiques ou juridiques flagrantes : 

« Il y a onze jours de marche de i'Horeb, par la montagne de Séir, 
jusqu'à Cadès-Barné » {Beut. 1, 2). Y a-t-il onze jours de marche jusqu'à 
Qibrot Hattawwa et de Qibrot Hattawwa jusqu'à Hasérot ? Voici qu'il 
n'y a que trois jours de marche, suivant qu'il est dit {Num. 10, 33) : « Ils 

1. Siphré, in Zoc, § 31, 73 a. 

2. Siphré Deut. 3, 25, § 28, 71 b. Mekhilta sur Ex, 13, 21, p. 82. 
Est-il possible que Dieu allât devant eux, lui qui remplit le ciel et 

la terre [Jér. 23, 2i)? 



OCCASIONS DES EXEGESES. 



19 



partirent de la montagne de Yahwé et ils firent trois jours de marche ». 
R. Juda dit : N'est-ce pas qu'en ces trois jours de marche les Israélites 
firent une marche de onze étapes? 

Ne peut-on pas dire qu'il y a quarante jours de marche suivant qu'il 
est dit d'Elie {1 Reg. 19, 8) : « Il se leva, mangea et but et par la force 
de cette nourriture il marcha pendant quarante jours et quarante 
nuits ». Si les Israélites l'avaient mérité, en onze jours ils seraient 
entrés dans la Terre. Mais de ce qu'ils avaient corrompu leurs actions 
le Maqom (Lieu = Dieu) leur imposa quarante années...^. 

« Marie et Aaron parlèrent contre Moïse au sujet de sa femme cous- 
hite » [Num. 12, 1). Etait-elle coushite? N'était-elle pas madianite, sui- 
vant qu'il est dit {Ex. 2, 16) : « Le prêtre de Madian avait sept filles ? » 
Et pourquoi est-il enseigné en ces termes « coushite »? Mais, de 
même que le coushite se distingue par sa peau, de même Séphora se 
distinguait de toutes les femmes par sa beauté. De même tu dis {Ps. 
7, 1) : « Shiggaion de David qu'il a chanté à l'occasion des paroles de 
Cush le benjaminite». Etait-il donc coushite? Mais de même que le 
Coushite se distingue par sa peau, de même Saul se distinguait par 
son apparence... 2. 

Nous trouvons enfin des questions qui introduisent des 
conjectures bizarres, très nombreuses dans la littérature 
exégétique rabbinique : 

« Et les eaux se divisèrent » {Ex. 14, 21). Toutes les eaux du monde 
se fendirent. D'où tires-tu que se fendirent même les eaux des puits, 
des citernes, des cavernes, des cruches, des coupes, des vases de 
verre, des tonneaux? De ce qu'il est dit « les eaux se fendirent ». De 
ce qu'il est écrit ailleurs « la mer se fendit » et qu'il est écrit ici « les 
eaux se fendirent », il enseigne que se fendirent toutes les eaux du 
monde. D'où tires-tu que se fendirent aussi les eaux supérieures et 
inférieures? De ce qu'il est dit {Ps. 77, 17) : « Les eaux t'ont vu, 
ô Dieu, les eaux t'ont vu; elles ont tremblé, bien plus, l'abîme s'est 
ému »... ^. 

Après ces problèmes d'ordre plutôt exégétique, les pro- 
blèmes juridiques : la portée juridique de textes, qui sem- 
blent superflus ou dont la raison d'être n'apparaît pas. 

« Mais si un homme agit méchamment (contre son prochain) » [Ex. 21, 
14). Pourquoi cette section est-elle dite? De ce qu'il dit {Lêv. 24, 17) : 

1. Siphré Deut. 1, 2, § 3, 65 ab. Dans le Siphré de Num. 10, 33, § 82, 
p. 77, est présentée une autre conciliation. 

2. Siphré Num. 12, 1, § 99, p. 98, sq. 

3. Mekhilta, Ex. 14, 21, p. 104. 



20 EXÉGÈSiE RABBINIQXJE. 

« Celui qui frappe un homme mortellement sera mis à mort », on 
pourrait entendre : tant celui qui frappe volontairement que celui 
qui frappe par mégarde, les étrangers, le médecin qui tue, celui qui 
frappe par l'ordre du tribunal, celui qui châtie son fils ou son disciple : 
il est enseigné en ces termes : « s'il agit méchamment », pour exclure 
celui qui agit par mégarde; « un homme », pour exclure l'enfant: 
« homme », pour inclure les étrangers; « son prochain », pour inclure 
les enfants ; « son prochain », pour exclure les étrangers ^. 

La formule précédente, propre à l'école d'Ismàël, est rem- 
placée souvent par une formule très usitée, destinée à mettre 
en relief la précision juridique contenue dans un texte parti- 
culier': « Pourquoi ces mots? De ce qu'il est dit ailleurs on 
pomTait déduire... Non! ces mots indiquent... » 

« Une même loi pour l'indigène {'ézrah)... » [Ex. 12, 49). Pour- 
quoi est-ce dit? N'est-il pas dit ailleurs (ibid. 12, 48) : « il sera comme 
l'indigène du pays »? Et pourquoi est-il enseigné en ces termes : 
« une seule loi pour l'indigène »? De ce qu'il est dit : « si un étranger 
séjournant chez toi veut faire la pâque » je pourrais dire : il n'y a que 
pour la pâque que l'étranger soit assimilé à l'indigène Cézrah); pour 
le reste des commandements de la loi, d'où le tire-t-on? « Une seule loi 
pour l'indigène et pour l'étranger » . La Loi assimile l'étranger à l'indi- 
gène en tous les commandements de la Loi 2. 

« Aucun étranger n'approchera de vous » {Num. 18, 4). Pourquoi est- 
ce dit? De ce qu'il (Dieu) dit {ibid. 18, 7) « l'étranger qui approchera 
sera mis à mort », nous entendons la punition (à infliger au crime) ; où 
trouver l'interdiction? De ce qu'il est enseigné en ces termes : 
« aucun étranger n'approchera de vous » ^. 

Parfois la précision ainsi dégagée est tout haggadique. 

a Et la colère de Yahwé s'enflamma contre eux; et il s'en alla » 
{Num. 12, 9). Après qu'il leur a fait connaître leur faute il décrète 
contre eux l'excommunication... Rabbi Nathan disait: pourquoi- leur 
fit-il connaître leur faute et après cela décréta-t-il contre eux l'excom- 
munication? Pour qu'ils ne disent pas comme Job (10, 2) : « Fais-moi 
connaître pourquoi tu me prends à partie? »''. 

Question fréquente : pourquoi tel mot, ou tel précepte, 
est-il répété? Ici encore nous aboutissons à des précisions, 
soit juridiques, soit haggadiques. 

1. Mekhilla, in loc, p. 263. 

2. Mekhilta, in Zoc, p. 57. 

3. Siphré Num, in loc, § 116, p. 132. 

4. Siphré Num, in loc,, § 104, p. 102. 



OCCASIONS t>ES EXÉGÈSES 21 

a Tout habitant pur de ta maison en mangera » {Num. 18, 13). 
Pourquoi est-ce dit? N'est-il pas dit aussi {ibid. 11) : « tout habitant pur 
de ta maison en mangera »? Pourquoi donc est-il enseigné en ces 
termes (13): « tout habitant pir de ta maison en mangera» ? Pour inclure 
la fille d'Israël fiancée à un prêtre. Que si nous cherchons si une 
femme peut manger de la terûmâ (prélèvement sacerdotal), nous 
trouvons désignée (11) la femme mariée à un prêtre. Pourquoi donc 
est-il enseigné en ces termes : « tout habitant pur de ta maison en 
mangera »? Pour inclure la fille d'Israël fiancée à un prêtre. Les 
termes incluent la fiancée et aussi l'hôte de passage {lôshâb) et le 
mercenaire : comment alors faire droit (accomplir, qaiièm) à l'écriture 
{Ex. 12, 45) : « L'hôte de passage ni le mercenaire n'y auront part »? 
L'hôte et le mercenaire qui sont en ton pouvoir en mangeront, mais 
l'hôte et le mercenaire qui ne sont pas en ton pouvoir n'en mangeront 
pas'. 

Dans la section sur les villes de refuge, il est dit trois fois 
« Ik-sammd » et trois fois « son compagnon » : pourquoi? 

Là (sam) il habitera, là il mourra, et là il sera enseveli. Son compa- 
gnon, sauf les étrangers; son compagnon, sauf l'hôte (prosélyte); son 
compagnon, voici que l'écriture le désigne ainsi en disant : « qui aura 
frappé son compagnon » sans le savoir 2. 

Il est d'autres questions qui ne sont pas suggérées par le 
texte, qui ne répondent donc pas à une préoccupation exégé- 
tique, mais qui, dictées par un souci juridique, provoquent 
aux recherches exégétiques : sur quelle écriture fonder telle 
prescription légale, que ne contient pas explicitement la 
lettre sacrée? Cette question, dans les temps les plus anciens, 
est formulée de manière très simple : « d'où » (minnain) 
(vient tel commandement) ? Cette interrogation conduit le plus 
ordinairement à des précisions juridiques, elle peut intro- 
duire aussi des précisions historiques ou haggadiques. 

« Il égorgera « (Lév. 1, 5). L'immolation est-elle valide, faite par des 
étrangers, des femmes, des esclaves ou des hommes impurs, même 
dans le sanctuaire, mais à condition que les impurs ne touchent pas 

1. Sipliré Num. in loc. § 117, p. 136, sq. Noter à la fin de ce pas- 
sage une autre formule intéressante, parce que rappelant beaucoup 
de textes du Nouveau Testament : comment accomplir? 

2. Siphré Deut. 19, 4, 5, 11, § 181, 108 a. Nous pourrions évidem- 
ment sans peine multiplier les exemples de cette calégorie, vg. 
pourquoi ce commandement {E.x. 12, 6) précède-t-il le suivant? 



22 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

les chairs, ou seulement faite par un prêtre? Et d'où viens-tu (à cette 
opinion)? Du principe (formulé) en ce qui est dit {Num. 18, 7) : « Toi 
et tes fils avec toi, vous garderez votre sacerdoce en tout ce qui regarde 
l'autel », on pourrait déduire : également pour l'immolation. Mais 
puisqu'il est dit [Lév. 1, 5) : « et les prêtres, fils d'Aaron, offriront le 
sang et l'aspergeront... », depuis ce point et plus loin c'est la loi du 
sacerdoce ; mais pour ce qui regarde l'immolation, elle est valide faite 
par tout homme ^. 

Voici un passage où abondent les minnain et souvent 
pour amorcer des précisions juridiques minimes. Dieu ordomie 
de ne pas brûler sur l'autel des mets fermentes ou du miel. 

o: Vous pourrez les présenter à Yahwé en offrandes de prémices » 
{Lév. 2, 12). « Offrande de prémices », en sorte qu'elle serve de pré- 
mices à toutes les oblations (non sanglantes); et c'est ainsi qu'il dit 
{Lév. 23; 16) : « Et vous offrirez à Yahwé une oblation nouvelle », afin 
qu'elle soit nouvelle (prémices) pour toutes les oblations. 11 n'est ques- 
tion que de l'oblation de froment; pour l'oblation d'orge d'où (le tire- 
t-on)? Quand il dit {Num. 28, 26) : « au jour des prémices, quand vous 
présenterez à Yahwé une oblation nouvelle,jà votre fête des semaines » , 
si le sujet du contexte ne peut être l'oblation de froment, accorde que 
le sujet est l'oblation d'orge. 

D'où (tires-tu) que (les prémices d'orge) précèdent les prémices? De 
ce qu'il est enseigné en ces termes {Ex. 34, 22) : « les prémices de la 
moisson du froment ». Il ne s'agit que de la moisson du froment, celle 
de l'orge, d'où ? De ce qu'il est enseigné en ces termes (Ex. 23, 16) : 
« de ce que tu auras semé ». Il ne s'agit que « de ce que tu auras 
semé », les feuilles qui en proviennent, d'où? De ce qu'il est enseigné 
en ces termes : « de ce que tu (auras semé) dans les champs ». Il ne 
s'agit que de ce qui a poussé dans les champs, ce qui a poussé 
sur les toits ou dans les demeures, ou dans le désert, d'où? De ce qu'il 
est enseigné en ces termes {Num. 18, 13) : « les prémices de toute leur 
terre » . Et d'où vient qu'elles précèdent les libations et les fruits des 
arbres? De ce qu'il est enseigné en ces termes {Ex. 23, 16) : « les pré- 
mices de ton travail » et qu'il dit : c quand tu recueilleras des champs 
le fruit de ton travail n^. 

1. Siphra Lév. 1, 5, 6 a. Nous avons choisi ce texte à cause de la 
forme singulière de l'expression : « d'où viens-tu? {Weki minnain 
bâ''tâ). Ordinairement nous avons seulement minnain (d'où). Quelque- 
fois se trouve la formule complète : « d'où dis-tu? » vg. Mekhilta, 
Ex. 14, 25, p. 109 : R. José disait : d'où dis-tu que les plaies dont 
ceux-ci furent frappés sur la mer étaient les mêmes dont les autres 
furent frappés en Egypte...? C'est pourquoi les Égyptiens disaient : 
« fuyons Israël, car Yahwé combat pour eux en Egypte ». 

2. Siphra Lév. 2, 12, 11 d, 12 a. 



OCCASIONS DES EXÉGÈSES. 23 

La même formule introduit aussi en divers cas des préci- 
sions d'ordre historique : 

« Et il arriva à la veille matutinale » (Ex. 14, 24). Tu trouves que 
les prières du juste sont exaucées au matin. Le matin d'Abraham, où 
(le trouver)? De ce qu'il est dit {Gen. 22, 3) : « Et Abraham se leva au 
matin ». Et le matin d'Isaac où? De ce qu'il est dit (ibid. 6) : « Et ils 
s'en allèrent tous deux ensemble ». Et des textes sont indiqués pour 
les matins de Jacob, de Moïse, de Josué, de Samuel, des prophètes 
futurs, du siècle qui vient : Gen. 28, 18; Ex. 34, 4; Jos. 3, 1 ; I Sam. 
15, 12; Ps. 5,4; iam. 3, 23 ^ 

La formule un peu trop elliptique est remplacée par une 
autre, qui finira par la supplanter : « quelle est la raison 
(quel texte fonde telle loi) de telle loi, ou de tel rabbin )> 
(dans l'opinion qu'il propose)? 

Sur l'offrande pour la femme soupçonnée d'adultère, « le prêtre ne 
versera pas d'huile ni ne mettra d'encens » [Num. 5, 15)... Quelle 
est la raison de cette chose? (L'Écriture) l'annonce (l'enseigne) : 
« car c'est une oblation de jalousie » ^. 

Nous laissons de côté des interrogations de forme très 
simple (comment? où?) qui introduisent tout autant des expli- 
cations historiques ou juridiques que des discussions exégé- 
tiques, pour en venir à une série de formules, encore plus 
caractéristiques de l'exégèse rabbinique. Elle se complaît à 
rechercher toutes les conjectures qu'on peut faire sur un 
texte, toutes les interprétations qu'on en peut donner, inter- 
prétations et conjectures souvent arbitraires, voire même gro- 
tesques, qui donnent lieu à une discussion plus oii moins 
longue. Nous saisissons encore là un trait, qui nous est déjà 
apparu dans les exemples précédents : le « caractère drama- 
tique », comme disent certains écrivains, de l'exégèse juive; 
elle semble toujours reproduire une discussion entre interlo- 
cuteurs réels ou supposés. 

De ces formules, la plus usitée est le sôméa' 'ani « j'en- 
tends », qui introduit toutes sortes de suppositions juridiques 

1. Mekhilta in loc, p. 107. 

2. Sipkré Num. in loc. § 8, p. 14. Celte formule ma ta'âm deviendra 
de plus en plus fréquente dans le Talmud et la littérature postérieure, 
voir Bâcher, Terminologie, I, p. 66. 



24 BXÉGÈSE RABBINIQUE. 

OU haggadiques. Divers auteurs juifs, et à leur suite des 
chrétiens, ont rapproché cette formule du « ego autem vobis 
dico » de Jésus dans le Sermon sur la Montagne ; les quelques 
exemples que nous transcrivons font saisir l'inconsistance de 
ce rapprochement. 

« Pendant sept jours tu mangeras des azymes :s>{Ex. 13, 6). J'entends: 
toute sorte d'azyme suivant le sens du mot. Il est enseigné en ces 
termes {Deut. 16, 3) : « Avec ces victimes tu ne mangeras pas de pain 
levé pendant sept jours, mais tu mangeras des azymes ». Je ne dis que 
des choses qui peuvent devenir des azymes et du pain fermenté ; et 
que sont-elles? Ce sont les cinq espèces de grains... ^. 

« Fais aussi approcher du sanctuaire tes autres frères, la tribu de 
Lévi, la tribu de ton père » [Num. 18, 2). J'entends suivant le sens des 
mots (frères) : également les Israélites ; il est enseigné en ces termes 
« la tribu de Lévi ». J'entends suivant le sens des mots : également les 
femmes ; il est enseigné en ces termes « la tribu de ton père > : Âmram 
a mérité que la tribu fut appelée de son nom. Rabbi dit : « la tribu de 
Lévi », j'entends suivant le sens des mots : également les femmes : il 
est enseigné en ces termes « tes frères », pour exclure les femmes 2. 

« Yahwé frappera tout premier-né » {Ex. 12, 29). J'entends : est-ce 
par l'intermédiaire d'un ange ou l'intermédiaire d'un messager? 11 est 
enseigné en ces termes {ibid. 12) : « et je frapperai tout premier-né des 
égyptiens », non par l'intermédiaire d'un ange ou d'un messager^. 

Voici une formule à peu près analogue, à la seule diffé- 
rence qu'elle met l'objection dans la bouche de l'interlocuteur, 
réel ou fictif. Ici encore apparaît le caractère dramatique de 
notre exégèse : 

« Tu garderas ce commandement » [Ex. 13, 10) : c'est le précepte 
sur les phylactères. Tu dis : est-ce le précepte des phylactères ou non, 
mais le précepte compris dans tout commandement? Tu diras : de 
quel sujet parle-t-il? Des phylactères ^. 

« Toi et tes fils avec toi vous porterez le péché de votre sacerdoce » 

1. Mekhilta, in loc, p. 64. Ici la prescription biblique est com- 
plétée par un principe juridique classique (les cinq espèces de 
céréales). 

2. Siphré Num., in loc, § 116, p. 131. La conjecture est repoussée par 
le rappel {talmûd lômâr) au sens rigoureux du texte. 

3. Mekhilta, in loc, p. 43. Nous ne citons que des exemples simples; 
souvent la discussion est autrement longue et compliquée, procédant 
à coups de raisonnements subtils ; nous aurons l'occasion de retrouver 
des textes de ce type. 

4. Mekhilta, in loc., p. 68. 



OCCASIONS DES EXÉGÈSES. 25 

{Num. 18, 1). Ce péché est une chose dont l'examen est commis au 
sacerdoce. Tu dis : ce péché est-il une chose commise au sacerdoce ou 
au tribunal? Comme il dit {ibid. !):.« toi et tes fils avec toi vous rem- 
plirez votre sacerdoce pour tout ce qui concerne l'autel » (le tribu- 
nal du Sanhédrin avait le contrôle du culte), ce péché est une chose 
livrée au tribunal. Dis ceci : pourquoi est-il enseigné en ces termes 
» vous porterez le péché de votre sacerdoce »? Ce péché est une 
chose commise au sacerdoce. Tu dis : les Israélites ne, portent pas le 
péché des prêtres, mais les lévites portent le péché des prêtres. Il est 
enseigné en ces termes {ibid. 23) : « Les lévites feront le travail de 
latente de réunion et ils. portent leur péché'' ». 

Tous ces exemples trahissent la même inclination : opposer 
une exégèse à celle que soutient son interlocuteur; dégager 
tous les sens que peut contenir la lettre détachée de son con- 
texte. Cette recherche de toutes les combinaisons possibles 
est exprimée par un terme très fréquent yâkôl (il est pos- 
sible) terme qui introduit souvent des conjectures plausibles, 
et tout aussi souvent des inventions ridicules, tant en matière 
juridique qu'en matière haggadique. 

A propos de l'imposition des mains sur la victime de l'holo- 
causte [Lev. 1, 4), le commentateur se demande : 

Il est possible que seul l'holocauste volontaire comporte l'imposi- 
tion des mains ; l'holocauste obligatoire d'où ? On peut raisonner ainsi : 
de l'un et de l'autre il est dit qu'on l'introduit (habâ'); de même que 
l'un comporte l'imposition des mains de même aussi l'autre. Après 
une controverse sur l'offrande obligatoire qui admet une substitution, 
on cite le texte « l'holocauste », soit l'holocauste volontaire, soit l'holo- 
causte obligatoire 2. 

Voici une suggestion vraiment puérile, qui ne s'explique 
que par un prurit incoercible de risquer des suppositions : 

Tu disposeras (les pains de proposition) en deux piles » (Lév. 24, 6). 
On pourrait les disposer huit et quatre . Il est enseigné en ces termes : 
« six et six ». Si la pile est de six on pourrait (imaginer) six, six et six ; 
il est enseigné en ces termes ; « douze ». Si c'est douze on pourrait 
(imaginer) quatre, quatre et quatre; il est enseigné en ces termes 

1. Siphré Num. in loc, § 116, p. 131. Rapprochons un terme 
destiné à avoir un grand succès dans la littérature talmudique et usité 
déjà quelque peu au temps des Tannas : « Penses-tu [sâbûr) que 
celui qui dit cela a dit aussi le reste ?» A propos des derniers mots de 
Num. 11, 6 : Siphré, in loc, §88, p. 87. 

2. Siphra, in loc, 5 d. 



26 EXÉGÈSE nABBINIQUE. 

« deux piles » et « six par pile » . Tant que ces trois textes scripturaires 
n'ont pas été prononcés, nous n'avons pas entendu (le sens de la loi) ^ • 

Le même terme peut introduire des conjectures et précisions 
historiques : ainsi à la discussion, qui ouvre le commentaire 
Sipkra, sur ce sujet : l'appel de Dieu devance-t-il toujours 
sa parole ? une autre controverse s'enchaîne : 

11 est possible que l'appel n'ait précédé que pour cet entretien; 
pour les autres entretiens de la Tora, d'où? Il est enseigné en ces 
termes « de la tente de réunion » : toutes les fois qu'il parle de la 
tente de réunion l'appel précède l'entretien. Il est possible que l'appel 
n'ait précédé que les entretiens (dâbâr); pour les paroles Çâmâr) et 
les ordonnances d'où? R. Siméon dit : il est enseigné en ces termes 
<r et il parla », ce qui inclut aussi les paroles et les ordonnances^. 

Souvent le terme « il est possible » est omis, mais on ne 
laisse pas de proposer des conjectures, fondées ordinairement 
sur un raisonnement, tant dans l'ordre juridique que dans 
le domaine historique. Quelques exemples : 

« Les premiers produits de leur terre seront pour toi » {Num. 18, 13). 
L'Écriture enseigne au sujet des premiers produits qu'ils sont sancti 
fiés du fait qu'ils sont adhérents à la terre ; d'où l'on peut raisonner 
ainsi : la teruma (redevance sacerdotale) et les premiers produits 
sont sanctifiés ; si j'apprends que la teruma n'est pas sanctifiée en 
raison de son adhérence à la terre, de même les premiers produits ne 
■ sont pas sanctifiés en raison de leur adhérence à la terre. Il est 
enseigné en ces termes : « les premiers produits de leur terre » : 
l'Écriture enseigne que les premiers produits sont sanctifiés en raison 
de leur adhérence à la terre 2. 

« Yahwé appela Moïse et lui parla » {Lèv. 1, 1). L'appel précède l'en- 
tretien. Ne peut-on raisonner : il est dit ici « entretien » {dibbûr), 
et il est dit dans (la section du) le buisson « entretien » ; de même que 
au buisson l'entretien suit l'appel, de même l'entretien dont il est 
question ici suit l'appel. Non : tu argues de l'entretien au buisson qui 
est le commencemment- de tous les entretiens, tu ne peux en conclure 
relativement à l'entretien de la tente de réunion qui n'est pas le com- 
mencement de tous les entretiens'''. 

1. Siphra, in loc, 104 a. Notons que le contexte complet est opposé 
aux textes morcelés exploités isolément. 

2. Siphra, in loc, 3 c. 

3. Siphré, in loc, § 117, p. 136. 

4. Siphra, in loc, 3 c. Dans la discussion sur le même sujet de 
Yoma 4 b, il est tiré argument de la coutume : l'homme appelle son 
compagnon avant de lui parler. 



FORMULES DES CITATIONS BIBLIQUES. 27 

Nombre de ces textes portent les traces de discussions 
exégétiques soutenues entre divers rabbins ; les commentaires 
et le Talmud relatent plusieurs de ces discussions, certaines 
sont restées fameuses, ainsi celles de Josué b. Hanania et 
de Eliezer b. Hyrkanos, celles de R. Juda b. liai et de R. Ne- 
hémia^ 

Dans ces controverses exégétiques apparaissent, en leur 
plein épanouissement, les qualités caractéristiques des com- 
mentateurs rabbiniques : fécondité, puissance dialectique, 
souple subtilité, ingéniosité inventrice, parfaite connaissance 
des Écritures qui permet d'en combiner et opposer les par- 
celles les plus minimes et de les exploiter dans un jeu indé- 
finiment prolongé^. 

4° Comment sont introduites les citations bibliques. 

. Il importe de savoir comment les rabbins introduisent les 
textes bibliques qu'ils utilisent : nous comprenons ainsi mieux 
qxielle valeur ils attribuent à la parole divine et quel rôle 
ils lui assignent dans la connaissance religieuse ; cette étude 
est indispensable à qui veut comparer l'exégèse rabbinique 
et celle des premiers prédicateurs chrétiens. 

Bien entendu, nous nous limitons à l'exégèse tannaïte. En 
raison de la fin pratique (permettre les comparaisons) de ce 
paragraphe, renonçant à considérer le vocabulaire des di- 
verses formes exégétiques, nous ordonnons nos indications 
suivant un ordre tout mécanique et matériel. 

A. — TEXTES CITÉS SANS AUCUNE FORMULE INTRODUCTRICE. 

Ce mode est le moins fréquent, les rabbins n'acceptant pas, 
probablement par respect, de recourir à l'Écriture, sans le 

1. RosENBLATT, The Interprétation of the Bible in the Mishna, p. 58- 
65, énumère et classe les discussions exégétiques contenues dans la 
Misna. 

2. W. Bâcher, Tradition und Tradenten in den Schulen Paldstinas 
und Babyloniens, Leipzig, 1934, p. 129-155, relève les controverses 
entre docteurs tannaïtes, dont la tradition a conservé le souvenir. 
Voir aussi son Agada der Tannaiten, I, p. 123-154, 196-211, 304- 
306; 225-574, etc. 



28 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

dire expressément. Quand ils joignent ensemble plusieurs 
textes, ils l'indiquent le plus souvent par un « et il dit » 
{we''ômér). 

Il était tout indiqué de transcrire simplement le texte 
sacré dans les livres destinés à le commenter, dans certains 
traités juridiques qui prennent l'allure d'un commentaire 
biblique, et pareillement au début de quelques halakhot, 
dans la Misna et la Tosephta. Il est vraisemblable qu'ainsi 
en usaient les rabbins qui traitaient des sujets se fondant 
directement sur la Loi écrite, ou. qui discutaient entre eux 
sur le sens d'une péricope scripturaire. Nous avons une trace 
de cet usage dans la formule classique, qui réintroduit un 
texte pour en proposer une nouvelle explication : ddbâr 'ahèr 
(autre discours, autre explication). Parfois aussi, mais rare- 
ment, dans les discussions, l'un des argumentateurs objecte 
un texte sans autre indication (vg. Tos. Sanhédrin, 3, 7, 
p. 419; 13, 6, p. 4.35...). Dans les homélies également les 
prédicateurs avançaient ordinairement, sans aucune formule, 
le verset par lequel ils ouvraient lem' exhortation; dans les 
transmissions écrites le verset est fréquemment précédé d'un 
pdtah (il ouvrit) ou d'un duras (il expliqua, il prêcha) ^ E est 
tout naturel que dans un récit historique soient récités, sans 
autre avertissement, les termes de la narration biblique 
(vg. Tos. Sota, 8, 7, 9, p. 311). Nous trouvons aussi, mais 
d'une manière extraordinaire, des citations implicites (vg. Tos. 
Soia, 14, 4, 7; 15, 3 : on rapporte des expressions consa- 
crées) . 

B. — FORMULES INTRODUCTRICES INDIRECTES. 

Nous pouvons rapprocher de l'usage précédent diverses 
formules qui annoncent le texte, mais sans l'introduire expres- 
sément : des textes discutés sont introduits par un dâras 
(il expliqua : vg. Sota 5, 2, 3; Makkot, 3, 15...) ; des textes 

1. Sur les usages homilétiques, sur l'emploi, relativement tardif, de 
pâta}}, voir : W. Bâcher, Die Proômien der alten jûdischen Homilie, 
Leipzig, 1913, surtout p. 17, sq., 21, 27, 33 ; Ch. âLBEcic, Einleitung 
und Register zum Bereschit Rabba, p. 11-19. 



FORMULES DES CITATIONS BIBLIQUES. 29 

invoqués comme argument sont introduits par : « quelle 
raison » {jnâ ta dm)! « on s'appuie sur une écriture » (vg. 
Tos. Ketuhôt, 12, 2, p. 274); « où ce sujet est-il exposé » 
[hékân pires) ? « sur ce point il est expliqué » (vg. Mekhilta 
sur Ex. 12, 6, p. 14); « car sur ce point l'Écriture explique » 
(vg. Tos. Zebahim, 11, 7, p. 496) ; « sur ce point il est expli- 
qué dans la qabbala » (tradition, c'est-à-dire les livres 
bibliques autres que le Pentateuque, vg. Siphré Num. 27, 16, 
§ 139, p. 186, citant Cant. 1, 7, 8). 

Pour indiqiier le sujet d'une transgression, ou la raison 
d'une punition, on dit : il pèche en raison du « tu ne pren- 
dras pas pour femme la sœur de ta femme » [Tos. Yebamot, 
5, 3, p. 345) ; « il s'agit là [yés bô) du « au jour voulu tu lui 
donneras son salaire » {Baba mesia\ 9, 12) ; « ils sont 
punis en raison du (missûm) ce tu ne porteras pas contre ton 
prochain de faux témoignage yy{Makkât, 1, 3...); on avertit 
l'homme sur le point de commettre un crime en lui rappelant 
le texte du commandement. 

Nous présenterons plus loin la formule « pareillement » 
(Kyâsé' bâ) introduisant un texte analogue à des textes précé- 
demment cités. 

C. — FORMULES INTRODUCTRICES mRECTES. 
a) Le verbe « dire » Çâmar). 

Incontestablement le mot qui sert le plus souvent à intro- 
duire une citation biblique, c'est le verbe 'âmar en ses 
diverses formes. Les commentateurs veulent-ils par là rappe- 
ler qu'ils se fondent sur une parole divine ? 

Ils emploient le verbe le plus fréqpiemment au passif 
niphal : nè^emar^ il est dit. Ce passif, qui laisse le sujet indéter- 
miné, doit-il suggérer que c'est Dieu qui parle ? Nous savons 
qpie les rabbins mettent au passif les verbes signifiant une 
action divine « il vous est pardonné », « il leur est fait 
miséricorde )>... 

La formule de beaucoup la plus courante est sènnè 'emar, 
composée du verbe et de cette conjonction relative (se) au sens 
très général, qui revient constamment dans le discours pour 



30 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

indiquer une subordination, une comparaison, une coordina- 
tion, une condition, un motif, une finalité... Nous traduisons : 
« suivant qu'il est dit », réservant ainsi le sens précis de la 
locution : elle annonce toujours la justification dune affirma- 
tion précédente, mais elle ne définit pas la nature de cette 
justification : argumentation véritable, simple rapproche- 
ment, exploitation accommodatice d'un texte... Cette intention 
justificatrice est supposée : par les autres formes que prend 
la locution : « c'est pourquoi il est dit », « en raison de ce qui 
est dit », « car déjà il est dit », « pour accomplir ce qui est 
dit », « sur ce sujet il est dit » ; par la question à laquelle 
parfois elle répond : « d'où tirer » ? « quand? pourquoi?... » 
Le verbe est aussi employé à l'actif, soit au parfait, soit 
au participe. En bien des cas le sujet en est exprimé, sujet 
créé : une écriture, la Tora, un auteur humain : Anne, David, 
Salomon... Souvent aussi le sujet n'est pas exprimé ou il 
est simplement indiqué par un mystérieux pronom : « lui, 
hû^ ». Ce « Lui » ne désigne-t-il pas Dieu? Il est difficile de 
l'entendre autrement dans des textes tels que les suivants : 

Au sujet de la mesure de miséricorde il dit [Ex. 20, 5) : « qui punis 
l'iniquité des pères sur les enfants « ; et au sujet de la mesure de la 
récompense, il dit (ibid.) : < et faisant miséricorde à mille générations'' »•. 

« Qu'il a juré à tes pères de leur donner » {Ex. 13,5) : où a-t-il juré 
à tes pères? Au sujet d'Abraham il dit {Gen. 15, 18) : « En ce jour 
Yahwé conclut une alliance avec Abraham ».... Et au sujet d'Isaac 
que dit-il? « Séjourne dans ce pays-ci » {Gen. 26, 3) 2. 

Dans d'autres cas « Lui » désigne l'Écriture et nous avons 
à noter des tournures singulières : 

En Abraham il dit [Gen. 18, 2) : < Ils adorèrent la face contre terre ^ ». 
Et c'est ainsi qu'il dit en Josaphat (2 Chron. 19, 6) : « Et il (Josa- 
phat) dit aux juges : Prenez garde à ce que vous ferez-^... )> 

1. Tos. Sota, 4, 1, p. 298. Bâcher, Terminologie, I, p. 5, 6, assure 
que ce pronom « Lui » remplace l'Ecriture; cela ne nous semble pas 
évident pour tous les cas. Cf. p. 19, 20, 25, 90, 173, etc. 

2. Mekhilta sur Ex. 13, 5, p. 64. 

3. Tos. Sota, 4, 2, 4, p. 298. 

4. Tos. Sanhédrin^ 1, 9, p. 416. Nous conservons la tournure archaï- 
que « en Abraham, en Josaphat » : elle suggère que le personnage 
nommé est, ou bien l'auteur des paroles citées, ou bien le héros au 
sujet duquel elles sont prononcées. 



FORMULAS DES CITATIONS BIBLIQUES. 31 

Voici quelques-uns des emplois du verbe « dire ». Pour 
introduire une interprétation ou la déduction d'une consé- 
quence : « voici qu'il dit » [Tos. Sanhédrin, 9, 11; 10, 3, 
p. 429, 430). Après une affirmation doctrinale, pour la con- 
firmer : « à ce sujet il dit », « à leur sujet une écriture dit » , 
« à leur sujet David dit », « à tel sujet que dit-il? », « c'est 
ce que dit l'Ecriture » ; « et c'est ainsi qu'il dit ». Nous avons 
déjà trouvé les formules interrogatives : « n'est-il pas déjà 
dit? pourquoi?... », « Pourquoi dit-il ainsi? » ; « de ce qu'il dit 
ainsi, ne pourrait-on pas conclure?... » « Pour quelle raison 
parle-t-il ainsi? », « s'il en est ainsi pourquoi est-il dit...? » 
Nous connaissons aussi la formule courante apportant la 
réponse à une question, éliminant une conjecture possible ou 
appelant l'attention sur la tournure particulière d'une phrase : 
talmûd lômar (il est enseigné en ces termes) : « il n'est pas 
enseigné en ces termes... mais... », « pourquoi est-il enseigné 
en ces termes? » Pour préciser la pensée : « je ne dis pas ainsi, 
mais... » 

Nous rencontrerons dans les raisonnements a pari : « il 
est dit ici... et il est dit là... » ; dans les discussions sur des 
textes en apparence opposés : « une écriture dit... et une 
autre écriture dit... » 

b) Verbes apparentés au verbe « dire ». 

Nous trouvons assez souvent le verbe qârâ' (lire) : dans 
les discussions pour préciser le sens d'un texte : «je lis... » ; 
ou bien : « ne lis pas ainsi, mais... »; « comment lis-tu? » ; 
« sur ce sujet Rabbi un tel lut telle écriture » . 

Pour attribuer au Saint Esprit un texte déterminé : dans 
les prescriptions sur la génisse au col rompu en expiation 
d'un homicide, on précise que les prêtres n'avaient pas be- 
soin d'ajouter les dernières paroles qui terminent leur prière: 
« et ce sang sera expié pour eux » ; mais c'est le Saint Esprit 
qpii les assurait [mebassér) : « Quand vous ferez ainsi, ce sang 
sera expié pour vous^ ». 

1. Sota 9, 6. Les paroles attribuées au Saint Esprit sont une com- 
binaison (avec de légères modifications) de Deut. 21, 8 et 21, 9. 



32 EXEGESE RABBINIQUE. 

Il est (ftt encore que le Saint Esprit criait [sawwahèt) tels , 
mots du texte sacré^. 

Ajoutons aussi une expression que nous expliquerons plus 
loin : pour résoudre une apparente contradiction entre deux 
textes, on produit un troisième texte qui résout l'antinomie, 
par ces mots : « il résout » [hikeria^). 

c) Le verbe « écrire ». 

Nous avons déjà transcrit l'expression assez fréquente : 
« l'Écriture dit ». Le verbe lui-même, mais uniquement au 
participe passif [kâtûb, ketîb), se rencontre également quoi- 
que moins fréquemment que chez les amoras : « il est écrit » , 
« suivant ce qui est écrit », « comme il est écrit dans la Tora 
de Moïse » ; « c'est ce qui est écrit » (pour introduire un 
texte en confirmation d'une affirmation); « ne t'étonne pas 
de ce qu'il est écrit » ; « à ce sujet l'Ecriture étonne » ; « dans 
le même sens il est écrit » ; « pourquoi est-ce écrit? », « que 
signifie ce qui est écrit? » 

d) Quelques autres expressions. 

Retenons, en vue du Nouveau Testament, les expressions 
comprenant le verbe « accomplir » [qayyém, au piel, ou à 
l'hitbpael) : « pour accomplir ce qui est dit » ; « si tu annules 
(ôz7.^a/^<i) tel texte, moi, j'accomplis tel autre »; « comment 
accomplir tel texte? » ; « comment est accompli tel texte ^ »? 

5° Les diverses méthodes exégétiques. Division du travail. 

Les textes déjà transcrits laissent entrevoir les diverses 
méthodes suivant lesquelles les interprètes élaborent les 
solutions aux problèmes qu'ils se sont posés. Nous pouvons 
ramener ces méthodes à quatre. 

1, Mekhilta sur Ex. 15, 2, p= 126 (des parties du cantique de Moïse) ; 
Siphré Deui. 33, 26, § 355, 148 a (autre cantique). 

2. On pourra trouver dans la Terminologie de Bâcher quelques 
expressions plus rares, ainsi que des références. Aussi bien avons- 
nous jugé expédient en ce paragraphe de ne pas multiplier les exemples 
ni les références ; on en trouve abondamment dans les autres pages 
de notre travail. 



LES DIVERSES MÉTHODES EXÉgÉTIQUES. 33 

En plusieurs discussions il est fait usage de raisonnements, 
argumentation a fortiori^ argumentation par analogie : c'est 
ce que nous appellerons la méthode dialectique. C'est ordi- 
nairement celle-là que présentent les historiens de l'exégèse 
juive : ils se contentent de transcrire les règles de Hillel et 
d'Ismaël, qui codifient les arguments types dont se sert 
l'exégèse juive. 

Nous avons constaté plus souvent encore que la démons- 
tration juridique ou que la déduction exégëtique procèdent 
simplement par une référence à un texte biblique, par la 
citation d'un mot biblique : c'est ce que nous appellerons 
V exégèse simple; nous dirions plus volontiers référentielle . 
Exégèse ne supposant aucune méthode; sim/ple en principe 
et comme par définition, mais pas toujours en réalité. 

Méthode directe, mais un peu moins immédiate et que nous 
n'avons pas encore rencontrée, bien qu'elle tienne ime place 
notable dans les commentaires rabbiniques, celle qui cherche 
à déterminer et mettre en valeur la signification précise des 
éléments du discours, en tenant compte, soit de la lexico- 
graphie, soit de la grammaire, soit des caractères linguistiques 
particuliers de la Bible : nous pouvons appeler cette méthode : 
philologique. 

Il faut joindre enfin la méthode allégorique ou symbolique. 
Pour reprendre le terme dont elle est désignée en gros dans 
les trente-deux règles d'Éliezer, nous proposerions de la 
nommer : méthode parabolique. 

Il est plus probable que la méthode le plus anciennement 
en usage fut la méthode directe : c'est celle que nous expo- 
serons en premier lieu. Nous présenterons ensuite la méthode 
dialectique, qui semble avoir été élaborée, développée et 
admise comme légitime dès avant l'ère chrétienne. Nous en 
viendrons enfin à la méthode philologique : elle nous parait 
s'être formée postérieurement à la précédente et probable- 
ment en concurrence, sinon en réaction; par ailleurs, mé- 
thode plus scientifique et de soi plus rigoureuse, elle a ren- 
contré moins de faveur. Nous terminerons par l'exégèse 
parabolique. 

EXÉGÈSE RABBINIQUE. 2 



34 EXÉGÈSE EABBINIQUE. 

6<* Exégèse littérale; sens simple. 

Avant d'entreprendre cet exposé, il convient de répondre à 
une question multiple. Dans les. traités courants d'exégèse 
et d'herméneutique une distinction capitale commande tous 
les développements : la distinction entre le sens littéral et 
les autres sens : pourquoi ne pas procéder de la même façon 
pour l'exégèse rabbinique? Mais d'abord quelle idée les rab- 
bins, et tout particulièrement les rabbins anciens, se fai- 
saient-ils du sens littéral? Dans quelle mesure en reconnais- 
saient-ils le primat? Quelle place tient-il dans l'exégèse 
rabbinique ancienne? 

La réponse à toutes ces questions semble être apportée 
par un dicton rabbinique, assez répandu, et que nous trou- 
vons pour la première fois dans la bouche d'un rabbin baby- 
lonien, Juda b. Yeqezh'el (220-299) : « L'Ecriture ne doit 
pas sortir de son sens simple' ». Ne nous laissons pas abu- 
ser par une belle formule : les historiens observent que le 
principe fut rappelé lorsqu'il n'était plus respecté, alors que 
la Bible était devenue un recueil de textes pouvant servir 
d'arguments dans les discussions d'école ; remarque illustrée 
très opportunément par l'aveu de Rab Kahana (mort en 410) : 
à son interlocuteur qui lui objecte le principe, il confesse : 
« quand j'eus dix-huit ans j'appris toutes les six sections (du 
Talmud), mais je ne savais pas jusqu'à maintenant que l'Ecri- 
ture ne doit pas sortir de son sens simple^ ». 

Au reste quel sens les rabbins donnaient-ils à ce moi pdsût, 
simple? Dans l'hébreu post-biblique le verbe pst est employé 
suivant la valeur primitive de la racine : étendre, tendre 
(dans la Bible, dépouiller, enlever un habit); il désigne 
dans le langage des tannas l'état d'une chose qui n'est ni 

1. Yebamot 11 b, ibid. 24 a le principe est rappelé par Raba' (baby 
Ionien, 299-352); sur le principe, sa portée, le sens de pâsat et ses 
dérivés voir : Bâcher, Terminologie, I, p. 162; II, p. 170, sqq, ; Dobs- 
CHUETz, op. cit. p. 11-15; Lakdau, op. cit., p. 47-55. 

2. Sabbat 63 a : sujet de discussion : les armes seront-elles con- 
servées aux jours du Messie à titre d'ornements? R. Eliezer le pré- 
tendait et on alléguait qu'il s'appuyait sur Ps. 45, 4; mais dans quel 
sens entendre ce texte? 



LE SENS SIMPLE. 35 

doublée, ni courbée; il veut dire ensuite dans le langage des 
amoras (après le m® siècle) : interpréter (un texte biblique), 
résoudre une question, un doute; le participe /?as^V [pesîtâ^ 
araméen) désignera une chose claire, évidente, aucunement 
douteuse ou contestable; enfin le sens simple d'un texte 
biblique : simple, c'est-à-dire obvie, évident, clair, naturel, 
et on l'oppose aux interprétations déduites à l'aide d'une 
exégèse plus ou moins laborieuse [dâras] ou d'un raisonne- 
ment [gâmar). « Simple », au point de vue exégétique, n'est 
donc pas entièrement équivalent à notre (c littéral ». Rap- 
pelons, au reste, que les rabbins tannaïtes n'ont jamais parlé 
du senspdsût, simple, de la Bible. 

Auraient-ils été, pour, autant, inattentifs et indifférents au 
sens simple de l'Ecriture? Certains indices permettent d'affir- 
mer qu'ils le discernaient parfaitement et l'appréciaient. 

Nous avons déjà vu que plusieurs rabbins prétendent 
interpréter un texte suivant le sens, prout sonat, kemuma ; 
ils parlent aussi du sens clairement manifesté, précis, pérâs, 
d'un texte ; ou bien ils allèguent les mots tels qu'ils sont écrits, 
kekitâbân; parfois aussi ils opposent à des interprétations 
symboliques' ou fantaisistes : le mammâ^^ la substance; le 
waddâi, clair, évident, par opposition au sens dérivé; la 
'èmè^^ la vérité, la réalité ^ Par ailleurs nous entendons R. 
Tarpbon reprocher à son ami Aqiba d'accumuler les argu- 
ments futiles^, son contradicteur R. Ismael repousser ses 

1. Sur ces expressions voir Dobschutz, loc. cit., p. 47 et Bâcher, 
Terminologie I, à chacune de ces expressions : l'un et l'autre donnent 
d'abondantes références. 

Le misma' a été longuement étudié par Ed. Biberfeld, Beitràge 
zur Méthodologie der halachischen Pentateuchexegese (Heft 1), Berlin 
1928. Il y montre que misma' désigne primitivement le sens littéral 
d'un mot ou d'une proposition, sens littéral qui est à la base dn pesât; 
toutefois ce sens littéral, étant apprécié subjectivement, ouvre le champ 
aux controverses; elles se traduisent souvent par une expression 
apparentée : sôméa" 'ani\ 

2. Yoma 76 a, sur la hauteur de la couche de manne qu' Aqiba veut 
déduire de Gen. 1, 20; Mekhilta sur Ex. 16, 14, p. 166, où les rabbins 
font assaut d'exagérations sur le même texte de Gen., ne cite, ni 
Aqiba, ni le reproche de Tarphoô. Siphra Lév. 1, 5, 6 b et Siphré 
Num. 10, 8, § 75, p. 70, en diverses discussions halàkhiques, Tarphon 
fait à Aqiba la même remontrance : jusques à quand, Aqiba, amas- 
ses-tu (de la paille), megabbéb, pour nous l'amener ! 



36 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

raisonnements, à la fois trop littéraux et trop subtils, pour 
lui rappeler que l'Ecriture parle le langage des hommes^ . 

Néanmoins nombre de rabbins tannaïtes n'ont pas résisté 
à la tentation « de sortir du sens simple » : les méthodes phi- 
lologiqiies çpii devaient enchaîner à la rigueur de la lettre, 
les méthodes dialectiques qui prétendaient à une logique 
rigide servaient pareillement à tourner la signification natu- 
relle des textes, à en tirer toutes les traditions et inventions 
juridiques, toutes les imaginations haggadiques. Et il le 
fallait bien puisque les enseignements, de quelque nature 
qu'ils soient, sont contenus dans la Tora et dans elle seule ; 
aucune doctrine ne vaut tant qu'elle n'est pas déduite de 
l'unique source de vérité : nous connaissons déjà la sentence 
de Hillel sur la Tora et tout ce qu'elle renferme. 

Il semble, en outre, que certains rabbins aient admis la 
multiplicité des sens dans la Bible : l'école d'Ismaël entendait 
ainsi le mot de Jérémie (23, 29) sur la parole de Dieu, qui 
est « comme un marteau qui brise le roc » : ce de même que 
le marteau fait jaillir une multitude d'étiacelles, de même 
chaque (une) écriture se divise en une multitude de sens^. » 

1. Siphré Num. 15, 31, § 112, p. 121 : Aqiba déduisait du redouble- 
ment du verbe {hikkârét tikkârét) que le coupable sera anéanti en ce 
siècle et dans le siècle qui vient ; Ismaël objecte qu'on pourrait déduire 
de « sera anéantie » (de 30) ti'ois anéantissements en trois siècles ; et 
il ajoute le principe : « l'Ecriture parle la langue des hommes », les 
mots n'y ont pas un autre sens que dans la conversation ordinaire. 
Sur cette opposition de Tarphon à Aqiba et sur ce principe, voir 
Bâcher, Die Àgada de?' Tannaiten, I, p. 236, sq.; le même Tarphon 
professai* aussi le principe : la loi parle suivant l'usage humain 
{dèrèk 'érès) : ibid., p. 238. H. Weiss, dans son ouvrage sur la tradition 
juive {Dor dor wedoriaw), II, p. 105, rassemble les critiques que ses 
contemporains faisaient à Aqiba, touchant sa halakha trop subtile et 
sa haggada audacieuse. 

Noter aussi le reproche que R. José de Damas fait à R. Juda qui 
tire de Eadrak (de Zach. 9, 1) des exégèses curieuses sur le nom et 
la mission du Messie : « Pourquoi nous pervertis-tu {m'awwét) les 
Ecritures ! J'en atteste le ciel et la terre que je suis de Damas et qu'il 
y a là un lieu nommé Hadrak. » Cf. Strack-Billerbeck, Zommen^ar zum 
N. T., III, p. 136, sqq'. 

2. Sanhédrin 34 a; quelques lignes plus haut R. Abbaie tire la même 
déduction dePs. 62, 12 : « Dieu a dit une chose et ces deux j'ai enten- 
dues... ». Dans le texte parallèle de Sabbat 88 b, il est dit que la parole 
de Dieu se divise en 70 langues. 



LE SENS SIMPLE. 37 

Et à Ismaël, qui lui reproche de trop tirer de l'Ecriture, 
Eliezer le grand répond : « et toi tu es un palmier de mon- 
tagne », qui porte des fruits rares et desséchés ^ Pareille 
conviction ne pouvait que stimuler l'imagination des exégètes; 
nous comprenons pourquoi la littérature rabbinique pré- 
sente sur le même pied les interprétations, diverses et parfois 
opposées, qui ont été données du même texte. 

1. Siphra Lév. 13, 47, 68 b. Sur cette vue des sens multiples de 
l'Écriture, voir Encyclopaedia judaica, III, c. 673, sq. 



CHAPITRE II 
l'exégèse simple ou reférentielle. 

De cette exégèse il nous parait plus aisé de donner une 
définition négative : tout usage des textes bibliques qui ne 
recourt, pour dégager le sens de la lettre, ni à des raison- 
nements, ni à des considérations philologiques, ni aux 
explications symboliques. C'est l'attitude la plus simple et, 
partant, très probablement la plus primitive à l'égard des 
Écritures. Il convient de remarquer qu'elle procède le plus 
souvent par une référence à une sentence biblique. 

Elle peut prendre plusieurs formes : les simples fidèles, 
qui, vivant leur religion, ne ressentent pas le besoin d'en faire 
la théorie, se contenteront de garder les commandements 
divins et de répéter des paroles sacrées, sans ^indiquer 
expressément qu'ils pratiquent ou qu'ils citent la loi de Dieu ; 
leur conduite et leurs citations implicites sont cependant une 
sorte d'exégèse implicite, elles attestent quels sens ils 
attribuent aux textes sacrés : exégèse virtuelle ou imvlicite. 
Les docteurs, ou les fidèles plus intellectuels, citent expressé- 
ment et commentent les textes bibliques : exégèse directe 
explicite. 

1. EXÉGÈSE IMPLICITE OU VIRTUELLE. 

L'étude de cette exégèse serait extrêmement instructive : 
elle nous révélerait comment les Écritures ont soutenu la vie 
religieuse des simples. Nous devons nous borner ici à donner 
quelques exemples; nous les prendrons d'abord dans les 
livres bibliqiies les plus récents, témoins irréfutables de la 
tradition que continuent les rabbins anciens. 

Dans les recommandations que Tobie fait à son fils, 
beaucoup rappellent diverses sentences bibliques; faisons 



EXÉGÈSE IMPLICITE OU VIRTUELLE. 39 

seulement deux rapprochements : « honore ta mère » (4, 3 
d'après S) reproduit Eûc. 20, 12 ; le texte de B, « ne méprise 
pas ta mère », se rapproche plutôt de Prov. 23, 22 ou 15, 20 ; 
« que le salaire de tout homme qui a travaillé (pour toi) ne 
passe pas la nuit chez toi (14) » reproduit en partie Lév. 19, 
13 et s'inspire aussi de Deut. 24, 12-15. 

Séchénias avouant à Esdras (10, 2) que les juifs ont péché 
en se mariant avec des femmes étrangères, Esdras reprochant 
au peuple ce même péché (10, 10), attestejit qu'ils compre- 
naient bien la portée des lois mosaïques à ce sujet ; le discours- 
prière d'Esdras (9, 10-12) suggère d'intéressantes réflexions: 

Maintenant, ô notre Dieu, que dirons-nous après cela? Car nous 
avons abandonné vos commandements que vous aviez prescrits par 
l'organe de vos serviteurs les prophètes, en disant : le pays dans lequel 
vous entrez, pour en prendre possession, est un pays d'impureté, 
souillé par les impuretés des peuples de ces contrées, par les abomina- 
tions dont ils l'ont rempli d'un bout à l'autre avec leurs impuretés. Et 
maintenant, ne donnez point vos filles à leurs fils et ne prenez point 
leurs filles pour vos fils, et n'ayez jamais souci de leur prospérité ni 
de leur bien-être, afin que vous deveniez forts et que vous mangiez 
les bons produits de ce pays et que vous le transmettiez pour toujours 
en héritage à vos enfants [ti^ad. Crampon). 

Remarquons d'abord cette référence générale : « com- 
mandements prescrits par les prophètes », alors que les 
citations proviennent des livres mosaïques. D'ailleurs les 
textes du Pentateuque sont rappelés plus suivant leur sens 
que dans leur teneur exacte ; mais presque tous les termes 
sont bibliques, sauf quelques modifications caractéristiques 
[niddâ pour désigner l'impureté des païens) : comparez 
Esd. 9, 11, 12 avec Lév. 18, 26, 27; Deut. 7, 1, 3; 18, 9, 12. 
Néh. 13, 1, 2 rappelle, avec quelques variantes, ce qui « se 
trouve dans le livre de Moïse », relativement aux Moabites et 
aux Ammonites [Deut. 23, 3-5). Néh. 8, 14, 15 rappelle 
aussi la loi de Moïse sur la fête des tentes en des termes qui 
se rapprochent de Lév. 23, 40-42. De même. Judas Macchabée 
(1 Mac. 3, 56) ordonne de garder les prescriptions de la loi 
[Deut. 20, 5-8), qu'il résume très brièvement. 

Cette même voie des références et citations implicites 
semble avoir été suivie par les rabbins anciens dans lem's 



40 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

exposés juridiques, tels que nous pouvons essayer de les 
imaginer à partir de la Misna. Le plus souvent les lois bibliques, 
dont les halakhot misniques ne sont que le développement 
ou le règlement d'application, ne sont pas citées; elles sont 
supposées connues. Ainsi pour le traité Pea, des lois régissant 
la matière ne sont cités mLév. 19, 9; 23, 22, mDeut. 24, 20; 
14, 28, 29 ; seuls sont cités explicitement : Beut. 24, 19, 21 
et Lèv. 19, 10 (6, 4; 7, 7). De même en Kilaim n'est cité que 
Deut. 22, 11 (9, 8) ; Lév. 19, 19 et Beut. 22, 9, 10 ne sont 
pas cités. Dans SebVit nous ne trouvons que Beut. 15, 2, 9, 
cité comme écriture (10, 8) ; aucune référence à Ex. 23, 10, 
sq. ; Lév. 25, 2-7, 20-22. Par contre, nous trouvons des 
allusions nettes, le plus souvent sans référence, à une loi 
biblique, aux obligations qu'elle entraine ou aux péchés qui 
résultent de sa violation : ainsi Terumot 6, 1, 4, pour la 
violation à& Lév. 5, 12; 22, 14 et Ex. 22, 4; ibid. 9, 3 con- 
tient une allusion à Beut. 25, 4. Ou bien le développement 
juridique se fonde sur un mot, une prescription de la Bible : 
ainsi les quatre modes de « sortie » décrits par *S«ô6<2^, 1, 4 
se réfèrent à la défense de sortir à' Ex. 16, 29. Le traité Y orna, 
dont le noyau est antérieur à la ruine du Temple, contient 
peu de références explicites, mais réglemente l'observation de 
la loi biblique, toujours présente à l'esprit des législateurs . 
De pieux Juifs, exacts à lire et relire les saints livres devaient 
inévitablement remplir leurs discours de sentences bibliques, 
quelquefois citées expressément, plus souvent incorporées à 
la phrase comme une parole familière. Nous faisons cette 
constatation en plusieurs hvres du Nouveau Testament. Les 
livres les plus récents de l'Ancien présentent le même 
fait. Les discours d'Esdras, de Tobie, des Macchabées sont 
pleins d'allusions à l'histoire sainte; leurs prières sont un 
écho continu du Psautier; dans leurs paroles nous retrou- 
vons des citations ou des réminiscences bibHques évidentes, 
citations et réminiscences qui sont une sorte de commentaire 
implicite. Ainsi Amos 8, 10 a, qui inspire l'auteur du premier 
livre des Macchabées (1, 41), est cité explicitement par Tobie 
(2, 6); l'abomination de la désolation de / Mac. 1, 57 vient 
évidemment de Baniel 12, 11 et en est une interprétation. 



EXÉGÈSE SIMPLE, EXPLICITE. 41 



Les apocryphes de l'Ancien Testament se conforment à la 
même loi ; l'écrit des sectaires de Damas est particulièrement 
riche en citations explicites, en citations implicites et en 
réminiscences de la Bible ; quelle que soit la date de ce docu- 
ment, ses affinités avec la littérature rabbinique nous laissent 
entrevoir ce que devait être la manière des rabbins. Il sem- 
ble à première vue qu'ils aient toujours muni leurs citations 
bibliques d'une référence expresse : il est dit, il est écrit; 
cette attitude s'imposait dans les développements juridiqiies 
ou même dans les développements haggadiques, dans lesquels 
les textes bibliques sont invoqués à titre d'arguments, et 
c'est presque uniquement dans ces développements que nous 
entendons les rabbins. Il en était sans doute autrement 

à. 

dans leurs prédications : leur vocabulaire s'apparentait au 
vocabulaire biblique ; très souvent ils s'inspiraient du texte 
sacré ou le citaient sans indiquer leur source. Plusieurs 
sentences de Hillel semblent se rattacher à un mot biblique ^ . 
Samuel le petit (fin du premier siècle) prend pour devise 
une maxime du livre des Proverbes (24, 17, sq.)^. 

II. — EXÉGÈSE SIMPLE, EXPLICITE. 

La littérature rabbinique, qui contient peu d'exégèses 
implicites, fait très large place à l'exégèse explicite. Celle-ci, 

1. « Si tu viens chez moi, je viendrai chez toi » [Tos. Sukka 2, 3, 
édit. Zuckermandel, p. 198) reprend Ex. 20, 24. « A Theure où on 
recueille, disperse, et à l'heure où on disperse, recueille » [Tos. Berakot, 
7, 24, p. 17) se rattache à Ps, 119, 126 et l'applique à l'étude de la Loi. 
Entendant le bruit d'une catastrophe il assure qu'elle n'a pas touché 
sa maison par ces mots : ab auditione mala non timuit {Palest. Berakot 
9, 5, 14 b citant Ps. 112, 7). Voir Bâcher, Die Agada der Tannaiten^ 
I, p. 5, sqq. 

2. ^èo^ 4, 19. Dans les chapitres suivants (mais de date plus récente) 
se trouvent des citations implicites : 5, 5 : « que personne ne dise à 
son compagnon : il y a trop peu de place pour moi (Js. 49, 20) pour 
que je séjourne à Jérusalem », 6, 4 : « Voici la voie (pour apprendre) 
la Tora ; un morceau de pain mangé avec du sel et de l'eau bue en 
petite quantité [Ez. k, 11)... si tu fais ainsi bienheureux es-tu et c^est 
bon pour toi [Ps. 128, 2) ». 

Levitas de Jabné (4, 4) prend pour maximO;, sans indiquer sa source, 
le mot à'Eccîi. 7, 17 : « Sois extrêmement humble d'esprit, car les 
hommes ont pour espérance les vers ». 



42 EXÉGÈSE BABBINIQUS. 

conformément aux deux fins de l'exégèse rabbinique, suit 
deux voies, théoriquement diverses mais en pratique souvent 
convergentes et confondues : expliquer un texte à fin immé- 
diate d'interprétation, exploiter un texte en vue d'en tirer un 
argument. 

1° Exégèse simple, explicite, interprétative. 

C'est celle que nous trouvons à toutes les pages des com- 
mentaires rabbiniques. Elle se présente sous deux formes : 
elle dégage le sens du texte, elle indique le rôle que joue le 
texte. Aicher la nomme : Schriftauslegung ; Rosenblatt : 
literal Exegesis. 

A. — EXPLIQUER LE SENS DU TEXTE. 

Dégager le sens d'un texte, les rabbins le font, soit tout 
simplement en disant ce que signifient les mots qu'ils viennent 
de réciter, soit en faisant précéder leur interprétation de 
formules indicatives {de là l'Écriture nous enseigne), soit 
en distribuant le passage en ses éléments, dont la significa- 
tion est indiquée par un démonstratif : ceci, ceux-ci (désigne), 
le hoc est de S. Paul [Rom. 10, 6,7)' [exégèse distributive). 

Ces divers procédés introduisent tout autant des exégèses 
naturelles et obvies que des exégèses fantaisistes. Ces der- 
nières proviennent de deux sources : une tradition juridique 
ou haggadique ajoutant au texte ou le modifiant, et aussi 
l'imagination inventive de l'interprète. Les exemples que 
nous transcrivons sont, presque tous, dés exégèses arbitrai- 
res; nous ne voulons pas insinuer par là que ce type soit 
prédominant, mais il était inutile de citer des exégèses obvies. 

Yoici, tirée d'une prescription matérielle, une indication 
sur le culte des Hébreux en Egypte : 

« On mettra du sang sur les deux montants et sur le linteau de la 
porte » {Ex. 12, 7); nous apprenons ainsi que nos pères en Egypte 
avaient trois autels : le linteau et les deux montants. R. Ismaël disait : 
quatre : le seuil, le linteau et les deux montants •* . 

1. Mekhilta in loc. p. 12. 



EXÉGÈSE EXPLICITE INTERPRÉTATIVE. 43 

Pour tii'er d'un texte, qui n'en peut mais, une prescription 
légale, déjà en vigueur. • 

« Le maître de la maison se présentera devant Dieu » {Ex. 22, 7) ; 
cela fait un; « la cause des deux parties ira jusqu'à Dieu » (8), cela 
fait deux; « celui que Dieu aura condamné », cela fait trois : de là on 
dit : les causes civiles doivent être jugées par trois juges : paroles de 
R. Josia. Deux autres rabbins contestent cette exégèse, mais par des 
combinaisons analogues ils arrivent aussi à trois ^ , 

Voici des précisions, dont quelques-unes sont contestables, 
ajoutées au texte dans une exégèse distributive : 

« Voici ce qui te viendra des choses très saintes... : toutes leurs 
offrandes », ce sont les deux pains et les pains de proposition; « en 
toutes leurs oblations », c'est l'oblation pour le péché et l'oblation 
volontaire; « en tous leurs sacrifices pour le péché », c'est le sacri- 
fice pour le péché, tant du particulier que de la communauté, con- 
sistant tant en oiseaux qu'en bétail; « en tous leurs sacrifices de 
réparation », c'est le sacrifice de réparation, soit évident, soit douteux, 
celui du nazir et celui du lépreux; « qu'ils me rendront », c'est le 
préjudice causé à un prosélyte; « comme choses très saintes », c'est 
la mesure d'huile pour le lépreux; « tout cela sera à toi et à tes fils », 
en raison de tes mérites et des mérites de tes fils ^. 

Quelquefois le commentateur ajoute au texte une précision, 
ou une restriction en accord avec l'esprit des lois : 

« Si une femme mariée se détourne » (Num. 5, 12), l'Écriture parle 
d'une femme qu'on peut épouser et elle exclut : pour le grand prê- 
tre une veuve, pour un prêtre ordinaire une répudiée... 3. 

Parfois le développement législatif amène l'interprète à 
donner, comme commentaire, exactement le contre-pied du 
texte ; et il le fait simplement, sans aucune excuse ni expli- 
cation, comme sïl se contentait de traduire ; nous saisissons 
très bien ce phénomène pour ce qui regarde le talion : l'exé- 
gète affirme le contraire de la lettre; il sent pourtant le 
besoin de discuter les objections que soulève sa version : 

1, Mekhitta in loc. p. 302. 

2, Siphré Num. in loc. 18, 9, § 117 p. 135. 

3, Siphré in loc. § 7, p. 11. Gette clause est souvent ajoutée : dâbâr 
re'ûy chose convenant à la fin, visée par le commandement : V. Aigher, 
op. cit. p. 73, 74. 



44 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

était-elle encore contestée par les Sadducéens ou par leurs 
héritiers? 



« Œil pour œil » {Ex. 21, 24); (il donnera) de l'argent. Dis-tu : de 
l'argent ou non, mais œil matériellement {mammâs = substantielle- 
ment, matériellement)? R. Ismaël disait : voici qu'il dit : « celui qui 
frappe un homme mourra» {Lév. 24, 21); l'Écriture assimile le tort 
fait à un homme au tort fait à une bête et le tort fait à une bête au 
tort fait à. un homme : de même que le tort fait à une bête est 
puni par une compensation pécuniaire, de même le tort fait à un 
homme est puni d'une compensation pécuniaire. R. Isaac disait : voici 
qu'il dit (Ex. 21, 30) : « si on impose au maître un prix pour le rachat 
de la vie (d'un homme tué par un bœuf) », et voici un raisonnement 
a fortiori : de même que dans un cas où l'Écriture stipule la peine de 
mort on n'impose qu'une peine pécuniaire, ici où elle ne stipule pas 
la peine de mort, il est logique qu'il ne soit puni que pécuniairement. 
R. Eliezer disait : « œil pour œil », j'entends : tant celui qui a frappé 
intentionnellement que celui qui n'a pas frappé intentionnellement ne 
donneront qu'une compensation pécuniaire. Et voici que l'Écriture 
exclut celui qui a fait intentionnellement une blessure pour l'astrein- 
dre à une compensation corporelle, suivant qu'il est dit {Lév. 24, 19) : 
« Et l'homme qui aura fait une blessure à son prochain » : principe 
général ; « œil pour œil » cas particulier : principe général et cas 
particulier, on ne doit mettre dans le général que ce qui est dans le 
particulier. Mais quand il dit {ibid. 20) : <t suivant qu'il a causé une 
blessure à un homme », de nouveau il formule un principe général, 
dans ce cas c'est le premier principe général qui vaut. Dis-tu : non ! 
mais c'est un cas de : général, particulier et général; en ce cas on 
s'en tient au particulier. Dans ce cas particulier évident, consistant 
en mutilations durables et en perte de l'extrémité des membres (qui 
entraînent l'affranchissement des esclaves), blessures apparentes et 
portées intentionnellement, il n'est tenu qu'à une compensation pécu- 
niaire, de même toute mutilation durable et toute perte des extrémités 
des membres, blessures apparentes et portées intentionnellement 
entraînent une compensation pécuniaire. Il est enseigné en ces termes : 
(c suivant qu'il a causé une blessure à un homme », pour autant 
qu'il avait l'intention de porter une blessure ^. 

1. Mekilta in loc. p, 277. Le recours à trois argumentations, la troi- 
sième particulièrement embarrassée, indique que la suppression du 
talion n'était pas encore chose acquise. 

Le passage parallèle de Siphra in Lév, 24, 20, 104 d, sq., montre la 
transition d'un état de législation à un autre : « On pourrait dire : 
« Il a aveuglé son œil : qu'on aveugle son œil à lui; il a coupé sa 
main, il a brisé son pied : qu'on brise son pied ». Mais on enseigne en 
ces termes : « qui frappe une bête... qui frappe un homme » ; de même 



EXÉGÈSE EXPLICITE INTERPRETATIVE. 45 

Aussi bien R. Ismaël pouvait-il déclarer : 

En trois endroits la halakha (loi orale) a supplanté l'Ecriture. L'Écri- 
ture dit {Lév. 17, 13) : (il couvrira le sang) « de poussière » ; et la 
halakha dit : de n'importe quoi .L'Écriture dit {Num. 6, 5) : « le rasoir « 
(ne passera pas sur la tête du nazir) ; la halakha dit : n'importe quoi 
(qui puisse arracher). L'Écriture dit {Deut. 24, 3) : « le libelle » (de 
divorce doit être un sèphèr, un rouleau) ; la halakha dit : n'importe 
quoi*. 

Ce n'est pas en trois endroits, mais en une multitude, 
que l'exégèse substitue au sens littéral un sens commandé par 
les traditions juridiques ou historiques. 

Cet arbitraire de l'exégèse directe, même en matière juri- 
dique, est illustré par un exemple fameux qu'a relevé Mai- 
monide : du même texte on déduit cinq prescriptions dif- 
férentes : 

D'où tire-t-on que celui qui mange de la viande d'une bête avant 
que soit sortie son âme pèche contre une interdiction? Il est enseigné 
en ces termes {Lév. 19, 26) : « Vous ne mangerez rien avec du sang ». 
Autre explication : « vous ne mangerez rien avec du sang », vous ne 
mangerez pas de la viande dont le sang est encore dans le bol à 
aspersion. Rabbi Dosa disait : d'où tire-t-on qu'on n'offre pas de repas 
(de deuil) aux parents d'un homme exécuté par le tribunal? Il est 
enseigné en ces termes : « vous ne mangerez... ». R. Aqiba disait : 
d'où (tire-t-on) qu'un tribunal qui a exécuté un homme ne doit pas 
manger de toute cette journée? Il est enseigné.. : « vous- ne man- 
gerez... ». R. Johanan disait : d'où vient l'avertissement pour le fils 
Tebelle? Il est enseigné... « vous ne mangerez pas^.... » 

que celui qui frappe une bête verse une compensation, de même celui 
qui frappe un homme verse une compensation pécuniaire. Si tu 
objectes en ces termes {Num. 35, 31) : « Vous n'accepterez pas de 
rançon pour la vie d'un meurtrier » : pour un meurtrier tu n'accep- 
teras pas de rançon, mais pour qui mutile un membre tu accepteras 
une rançon. 

1. Sota 17 a, rapporté par R. Johanan (250); dans le passage paral- 
lèle Pnlest. Qiddusin, 1, 59 d, les exemples sont un peu différents; le 
kôl dâbâr est précisé par une addition qui paraît un développement 
interpolé. Il ajoute que pour ce qui concerne les poils à raser dans le 
lépreux la halakha supplante le midras, l'interprétation. 

2. Sanhédrin 63 a. Maimonide allègue cet exemple dans son Livre 
des commandements, principe 9, où il a établi qu'on ne doit pas 
compter parmi les commandements toutes les espèces comprises dans 
le principe général. 



46 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

Si l'exégèse peut se permettre tant de fantaisie en matière 
juridique, que sera-ce dans la haggada? Ici innombrables 
sont les échantillons stupéfiants; nous prenons au hasard. 

« Et il arriva au terme de quatre cent trente ans » {Ex. 12, 41). II 
nous annonce que, dès qu'arrive le terme, le Maqom (Lieu = Dieu) ne 
les retarde pas d'un clin d'œil : au quinze nisan le Maqom s'entretint 
avec Abraham entre les pièces (du sacrifice, Gen. 15, 10, sqq.); au 
quinze nisan les anges du service vinrent vers Abraham pour lui 
apporter une bonne nouvelle ; au quinze nisan naquit Isaac ^ . 

(Servons d'autres dieux qui t'entourent) « d'un bout de la terre à 
l'autre » {Deut. 13, 8) : ce sont le soleil et la lune qui vont d'une extré- 
mité du monde à l'autre 2. 

B. — DÉFINIR LE RÔLE d'unE SENTENCE OU DE SES ÉLÉMENTS. 

L'interprète est obligé de freiner sa fantaisie quand il veut 
définir le rôle que joue un texte : indications qui révèlent 
à quelle analyse pénétrante étaient soumises les Écritures. 
Nous ne pouvons que mentionner les plus importantes de 
ces indications. 

Nous avons vu que les interprètes s'interrogent sur la 
raison d'être des péricopes ; parfois ils marquent la progres- 
sion de la pensée et la transition d'un sujet à un autre : 

« Tous les jours de sa séparation pour Yahwé (le nazir) ne s'ap- 
prochera d'aucun mort » {IVum. 6, 6). Voici que l'Écriture le fait 
sortir de la règle de l'interdiction de se raser et va l'instruire de l'im- 
pureté 3. 

Sous une forme un peu différente : 

« Afin que ton bœuf et ton âne se reposent » (Ex. 23, 12) : l'Écri- 
ture lui ajoute (l'ordre d') un repos, afin que les animaux puissent 
tondre la terre et manger''. 

1. Mekhilta in loc . p. 51. 

2. Siphré Deut. in loc. % 88, 92 b. Signalons un seul autre exemple 
curieux : au sujet de la querelle d'Aaron et Marie contre Moïse à 
cause de sa femme Sephora, [Num. 12, 1-10) le commentateur affirme 
et démontre par les textes que Moïse n'avait plus de relations avec 
sa femme, manquement à la loi de procréation que son frère et sa sœur 
avaient découvert... 

3. S. Num. in loc. § 26, p. 32. 

4. Mekhilta in loc. p. 331. 



EXÉGÈSE EXPLICITE INTERPRETATIVE. 47 

x4.vaTit d'expliquer Zew. 1, 10 le commentateur note : 

Et si ceci ajoute au premier sujet pourquoi cette division? Pour 
donaer à Moïse et Aaron la possibilité de réfléchir (et de distinguer) 
entre sujet et sujet, entre section et section. D'où raisonnement -a for- 
tiori : si celui qui a entendu de la bouche du Saint et qui a parlé en 
Esprit Saint est obligé de réfléchir entre section et section, entre sujet 
et sujet, à combien plus forte raison le simple (idiota) d'entre les 
simples M 

Le commentateur remarque une relation entre deux textes 
analogues : 

« Voici la bénédiction » (de Moïse) {Deut. 33, 1). Voici une addition 
à la bénédiction première dont le bénit son père Jacob ; « et c'est ainsi 
que leur parla leur père Jacob et il les bénit » (Gen. 49, 28). Nous nous 
trouvons apprendre que là où Jacob finit de bénir ses fils, là Moïse 
commença et le bénit, suivant qu'il est dit : « voici la bénédiction » . 

Autre explication. Voici une addition à la bénédiction première; et 
quelle est-elle? une prière, suivant qu'il est dit (Ps. 90, 1) : « Prière 
de Moïse homme de Dieu^ ». 

Signaler une correspondance [Kenègèd) entre deux textes 
projette une lumière sur le sens de l'un ou de l'autre. C'est 
une tradition que dans le décalogue les commandements de 
la première table correspondent à ceux de la deuxième et 
leur donnent ainsi un poids plus considérable, tout divin : 

Comment furent données les dix paroles? Cinq sur une table et 
cinq sur l'autre table. 11 est écrit : « Moi, Yahwé, ton Dieu > et lui 
correspondant : « tu ne tueras pas ». L'Ecriture nous révèle que qui 
conque verse le sang, l'Ecriture le lui impute comme s'il diminuait la 
ressemblance du roi (Parabole)... suivant qu'il est écrit [Gen. 9, 6) : 
« Qui verse le sang de l'homme... car à l'image de Dieu il fît l'homme ». 

11 est écrit : « tu n'auras pas (de faux dieux) », et lui correspondant : 
« tu ne seras pas adultère ». L'Écriture nous révèle que quiconque se 
livre à l'idolâtrie, l'Écriture le lui impute comme s'il était adultère à 
l'égard du Mâqôm (Lieu-Dieu), suivant qu'il est écrit {Ez. 16, 32) : 
« (tu étais) cette femme adultère, femme qui prend (pour amants) des 
étrangers » ; et il est écrit {Osée 3, 1) : « Et Yahwé me dit : « Va encore 
et aime une femme qui a des amants et qui est adultère ^ »... 

A propos de la loi qui ordonne de secourir le bœuf de son 
frère, les exégètes remarquent que la Tora parle ainsi uni- 

1. Siphra Lév. 1, 10, 7 c. 

2. SipJirê Deut. 33, 1, § 342, 142 a. 

3. Mekhilta in toc. Ex. 20, 2, 4, 13, 14, p. 233. 



48 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

quement par rapport au penchant (mauvais), pour indiquer 
que ce commandement est une occasion de réfréner son 
penchant mauvaise 

Remarque précieuse : signaler dans un texte le mot, ou le 
principe, qui commande tout le reste : 

« Si elle met au monde une fille elle sera impure » {Lèv. \2, 5) : la 
chose n'est su.spendae qu'à la mise au monde et l'impureté consiste 
en semaines : deux semaines ce qui fait quatorze jours. 

A propos du jubilé R. José observe qu'un texte le fait dépendre {Lév. 
25, 9) de la sonnerie de la trompette et qu'un autre le fait dépendre du 
renvoi des esclaves. Qu'est-ce qui est donc l'essentiel dans un jubilé 2? 

Note de même valeur : indiquer ce qui cause [gâram], ce 
qui conditionne une loi : 

Il est défendu de manger du sang : « car la vie (l'âme) de la chair est 
dans le sang » [Lèv. 17. 11) : ceci pour révéler ce qui est la cause^. 

« Car il n'a ni part ni portion avec toi » {Deut. 14, 27), pour révéler 
quelle est la cause (du devoir de secourir le lévite)'*. 

Il est important de pouvoir définir la portée démonstra- 
tive d'un texte : parfois il contiendra la démonstration incon- 
testable [raid) d'une prescription légale ou d'une idée, par- 
fois aussi il ne fournira qu'une indication, une allusion [zékér, 
souvenir), qui est un commencement ou un succédané de 
démonstration. 

Aussi, dans une discussion sur l'usage à faire des objets 
idolâtriques, les rabbins opposent aux textes allégués par 
R. José d'autres textes en les introduisant par cette formule : 
de là argument [raiâ)''^. 

La forme la plus fréquente est celle qui, à défaut d'argu- 
ment, fait état de l'allusion fournie par un texte, tout autant 
en matière juridique que dans la haggada; il est clair que 
ce procédé se prête à l'a peu près, à l'arbitraire. 

1. Siphré Deut. 22, 1, § 222, 115 a; Mekhilta Ex\ 23, 4, p. 324, sq. 

2. Siphra Lèv. in toc. 58 d et 107 a. 

3. Siphra Léo. 17, 11, 14, 84 cd. Siphré Deut. 12, 23, § 76, 90 b. 

4. Siphré Deut. in loc. § 108, 96 b. Remarquer que dans ces deux cas 
l'interprète tient compte de la valeur de la conjonction kî (carj, intro- 
duisant une proposition explicative, causale. 

5. Tos. Aboda Zara 3, 19, p. 465. 



EXÉGÈSE EXPLICITE INTERPRÉTATIVE. 49 

La tradition prescrit de lier les phylactères de la main à la 
main gauche : comment trouver cela dans le texte? 

« Et ils seront en signe pour toi sur ta main » {Ex. 13, 9). C'est la 
main gauche. Tu dis : est-ce la gauche ou non, mais la droite? Bien 
qu'il n'y ait pas d'argument pour la chose il y a une allusion, suivant 
qu'il est dit {Is. 48, 13) : « C'est aussi ma main qui a fondé la terre et 
ma droite qui a étendu lescieux «. Et il dit {Jug. 5, 26) : « D'une main 
elle saisit le pieu et de sa droite le marteau de l'ouvrier » : dans tous 
ces cas « la main » ne désigne que la gauche ^ 

On se demande combien d'écaillés doit avoir un poisson 
pour être interdit : 

R. Juda dit : deux suffisent. Bien qu'il n'y ait pas de preuve à la 
chose il y a une allusion, suivant qu'il est dit (/ Sam, 17, 5) : « Il por- 
tait une cuirasse à écailles^ ». 

Trait haggadique fondé sur ce procédé : on se demande 
ce qu'est cette hâte avec laquelle les Hébreux doivent manger 
la Pâque. 

R. Eliezer : C'est la hâte de la Sekhina; bien qu'il n'y ait pas de 
preuve de la chose il y a une allusion : « Voix de mon bien aimé, 
voici qu'il vient bondissant par-dessus les collines, franchissant les 
montagnes » {Canl. 2, 8). Et il dit : « Voici qu'il se tient derrière notre 
mur » {ibid. 9) 2. 

A peu près de même importance que le zékér est le rèmèz, 
ou indication fournie par un texte : 

« Les lévites n'entreront pas un seul instant pour voir les choses 
saintes » {Nwn. 4, 20) : R. Nathan disait : de là indication que le chant 
(des lévites) est prescrit par la Loi, mais cela n'a été défini clairement 
que par Esdras. R. Hanania, neveu de R. Josué, dit : ce n'est pas 
nécessaire, car déjà il est dit (Ex. 19, 19) : « Moïse parla et Dieu lui 
répondit par une voix » : de là indication que le chant vient de la Loi'*. 

Sur le mot : « moi, je suis celui qui fais mourir et qui fais 
vivre », le commentateur note : voilà un des passages qui 
leur donne une indication pour la résurrection des morts ^. 

1. Mekhilta in loc. p. 67. 

2. Siphra Lév. 11, 9, 49 d. qasqassim = 2 (!) 

3. Mekhilta Ex. 12, 11, p, 22, sq. 

4. Siphré Num. 18, 3, § 116, p. 132. 

5. Siphré Deut. 32, 39, § 329, 139 b- (« leur « désigne les négateurs 
de la résurrection). 



50 EXÉGÈSE RABBIJVIQtJE, 

Au point de vue juridique il est bon de savoir quelle sorte 
de prescription contient un texte. 

La tournure de la phrase indique si une pratique est laissée 
à la discrétion [resût, libre) des israélites ou est imposée 
comme une obligation [hébd); 0. faut convenir que dans bien 
des cas la teneur de la phrase laisse la liberté : d'où les 
discussions des rabbins : 

« Si le mari est saisi d'un esprit de jalousie et qu'il jalouse sa 
femme » [Num. 5, 14) : ad libitum, dit R. Ismaël; obligation, dit 
R. Eliezer^. 

Dans le droit criminel on distingue la 'azhârâ, l'interdit 
de commettre telle action, et le 'ânes, la punition dont sera 
frappée la violation de l'interdiction. Les exégètes marquent 
nettement dans les textes la promulgation de l'un et de 
l'autre : 

« Tu ne commettras pas d'adultère » {Ex. 20, 14). Pourquoi est-ce 
dit? Quand il dit {Lév. 20, 10) : « L'homme et la femme adultères seront 
mis à mort », nous entendons la punition, mais nous n'avons pas 
entendu l'interdiction : il est enseigné en ces termes : « tu ne com- 
mettras pas d'adultère ». 

« Tu ne voleras pas ». Pourquoi est-ce dit? Quant il dit {Ex. 21, 16) : 
« Celui qui vole un homme et le vend », nous entendons la punition, 
oii est l'interdiction? Il est enseigné en ces termes : « tu ne voleras 
pas ». Mais cela est l'interdiction de voler les âmes (de tromper). Dis- 
tu : est-ce l'interdiction de voler les âmes ou non, mais bien de voler 
des objets matériels {mammôn)'? Puisqu'il dit {Léo. 19, 11) : « Tu ne 
voleras pas », c'est l'interdiction de voler des objets... Ou bien l'un 
interdit de voler les âmes et l'autre de voler les biens 2... 

Terminons ce paragraphe sur une discussion subtile : 

« Le septième jour est sabbat (repos) pour Yahwé ton Dieu » {Ex. 
20, 10). Pourquoi est-ce dit? Quand il dit {Ex. 31, 15) : « Quiconque 
travaille au jour du sabbat qu'il meure », nous entendons la peine, 

1. Siphré Num. in loc. % 7, p. 12. En Som 3 a, à la place de R. Eliezer 
nous avons Aqiba et on ajoute deux textes {Lév. 21, 3; 25, 46) sur 
lesquels les deux rabbins tiennent des positions contradictoires : 
dans le premier cas la conjonction ^îm (si), semble laisser la liberté; 
mais R. Ismaël déclare que les textes commençant par « si » laissent 
la liberté sauf ces trois : Ex. 20, 25; 22, 24; Lév. 2, 14 {Mekldlta, 
p. 243). 

2. Mekhilta Ex. 20, 14, sq. p. 232, sq. 



EXÉGÈSE EXPLICITE DEMONSTRATIVE. 51 

l'interdiction d'où vient-elle? II est enseigné en ces termes : « le 
septième jour est sabbat pour Yahwé ton Dieu, tu ne feras aucun tra- 
vail » . Je ne trouve là que la peine et l'interdiction relativement au 
travail pendant le jour, la peine et l'interdiction pour le travail 
nocturne, où les trouver? Il est enseigné en ces termes : « ceux qui 
le profanent mourront ». Nous avons entendu la peine, mais pas 
l'interdiction : il est enseigné en ces termes : « le septième jour est 
sabbat poar Yahwé ton Dieu »; on n'enseigne « sabbat » que pour 
inclure la nuit dans la mention générale de l'interdiction '. 

Les catégories sont appliquées aussi à l'histoire : 

Dieu interdit à Âaron de s'approcher en n'importe quel temps de 
l'arche « de peur qu'il ne meure » (Lév. 16, 2) : voilà la peine. « Car 
j'apparais dans la nuée sur le propitiatoire » : voilà l'interdiction 2. 

2° Exégèse simple, explicite, démonstrative. 

Plus abondants que les effata et livres rabbiniques, qui 
instituent une vraie ou prétendue exégèse des textes bibliques, 
sont ceux qui se bornent à les utiKser ou exploiter. C'est ce que 
Aicber (p. 67, 107) appelle très heureusejneid Schfnftaniven- 
dung. Il ne s'agit plus d'interroger l'Écriture pour en définir 
le sens ou en déduire les lois qu'elle contient, on l'emploie 
ou l'exploite pour confirmer, se donner l'apparence de démon- 
trer, une conclusion déjà établie. 

Cette conclusion peut être d'ordre baggadique, maxime 
morale, vue historique; le plus souvent elle sera d'ordre juri- 
dique. 

Le plus ordinairement, surtout dans les compositions juri- 
diques les plus anciennes, tout particulièrement dans la Misna, 
la prescription juridique est d'abord présentée, comme étant 
en vigueur et universellement reconnue, puis la confirmation 
en est donnée par un texte biblique. Plus rarement on se 
demande : quel est le fondement de cette loi? Plus rarement 
encore, comme dans les commentaires, on commence par citer 
l'Écriture, pour en déduire la loi. 

Inutile de transcrire des exemples du premier mode : nous 
l'avons déjà abondamment rencontré, nous le retrouverons. 

1. Mekhilta in loc, p. 230. 

2. SiphraLév^ in loc.^ 80 b. 



52 EXÉGÈSE BABBINIQUE. 

Un exemple du second mode qui se trouve peu dans la 
Misna et deviendra courant dans les productions postérieures. 

R. Aqiba disait : d'où (prouve-t-on) qu'à la porter l'idole souille de 
la souillure de la menstruée? Suivant qu'il est dit {Is. 30, 22) : « Tu 
les rejetteras comme la menstruée ». Va lui dire : de même que la 
menstruée souille qui la porte, de même, l'idole^. 

Voici deux exemples du commentaire juridique, suivant 
la citation biblique. D'abord pour une loi biblique : 

« Le vœu d'une femme veuve et celui d'une répudiée... sont valables 
pour elle » {Num. 30, 10). Ainsi si elle dit : je serai nazaréenne après 
trente jours et qu'elle se marie avant ce terme, son mari ne peut pas 
annuler ce vœu... (autres applications) 2, 

Pour une loi, non seulement post-biblique, mais supplan- 
tant un commandement biblique (l'annulation des dettes à 
l'année sabbatique) : 

Le prosbul ne peut périmer. C'est une des lois qu'établit Hillel 
l'ancien. Comme il voyait que le peuple était empêché d'emprunter 
l'un à l'autre (par la crainte de voir la dette supprimée) et violait ainsi 
ce qui est écrit dans la Tora [Deut. 15, 9) : « Prends garde qu'il ne 
s'élève dans ton cœur cette pensée basse : « la septième année, l'année 
de rémission approche », et que ton œil soit mauvais envers ton frère 
pauvre, en sorte que tu ne lui donnes rien », il établit le prosbul^. 

Dans tous les cas la citation est introduite par les formules 
habituelles, supposant l'autorité divine de l'Écriture : 
(( comme il est dit, suivant qu'il est écrit; il est écrit; il est 
écrit d'un tel, (Dieu, l'Écriture) dit; pour accomplir ce qui est 
dit... » Très souvent on voit mal comment le texte invoqué 
démontre, ou même justifie, la conclusion alléguée : elle est 
moins une preuve qu'une confirmation verbale, une indication, 
une allusion. 

1. Sabbat, 9, 1 : la dâwâ d'Isaïe est entendue de cette impureté 
féminine. Ibid. 2-4 est conçu de la même façon : d'oîi?... pour trois 
autres questions qui n'ont rien à faire avec le sabbat et qui sont peut- 
être une interpolation dans ce traité. 

2. Nedarim, 11, 9. Cette halakha a tout l'air d'un fragment de midras 
introduit dans la Misna. 

3. Sebiit, 10, 3. Le prosbul est défini dans la halakha suivante : 
c'est une sorte de cédule créditaire ayant son effet en tout temps, 
sauf quelques réserves. ïl importe d'observer que la nouvelle loi, abo- 
lissant l'ancienne, se fonde sur une stipulation de cette loi, celle qui 
en définit l'esprit : l'obligation d'assister son concitoyen devenu pauvre. 



EXÉGÈSE EXPLICITE DÉMONSTRATIVE. 53 

A. — DÉMONSTRATIONS JURIDIQUES. 

Les prescriptions juridiques, pour lesqiielles il est fait 
appel à l'Écriture, se rangent en deux catégories : ou bien 
éUes sont une simple application du commandement biblique, 
ou bien elles dérivent du texte une pratique que celui-ci ne 
contient pas et qui peut être : soit la conséquence ou mise en 
œuvre d'une prescription biblique (par exemple comment 
rechercher les mets fermentes avant le jour des azymes, 
comment et au nom de qui immoler l'agneau pascal), soit 
une prescription nouvelle (vg. les ^erûbhîm pour l'extension 
du territoii'e sabbatique, l'ablution des mains), soit une pres- 
cription anti-biblique, tel le prosbul de HUlel. 

Dans le premier cas, c'est-à-dire quand nous demeurons 
dans la lettre et dans l'esprit de la législation biblique, le 
plus souvent la Misna se contente d'exposer, au concret, le 
texte biblique, en le supposant connu et sans le citer expli- 
citement : ainsi le traité Ma^asèrôt, qui traite d'une loi 
biblique, ne se réfère jamais aux prescriptions mosaïques sur 
les dîmes ; pareillement Sabbat n'invoque pas les prescriptions 
relatives au sujet... Quelquefois sont cités, mais très parcimo- 
nieusement, les textes bibliques se rapportant à la question 
traitée : Kilaim (9, 8) cite Deut. 22, 11 afin de construire 
un argument notarikon sur le mot èa'atnéz; SebVit (10, 8) 
cite une seule fois Deut. 15, 2; Pesahim contient six citations 
des lois de la Pâque (5, 3 : Ex. 12, 6; 6, 2 : Num. 9, 3 ; 9, 1 : 
Num. 9, 9, sq.; 9, 3 : Ex. 12, 19; 13, 7; 10, 4, 5; Ex. 13, 8); 
Nedainm présente trois citations bibliques sur les vœux (10, 
7; 11, 1, 9 : Num. 30, 13, 14, 9); Baba batra se réfère une 
seule fois à la législation sur les testaments (8,2: Num. 7,9). 
Parfois ces textes sont incorporés au développentent : ainsi 
Ma^aser seni (5, 10-13) cite la déclaration que doit faire 
celui qui remet la dime {Deut. 26, 13-15) ; plus souvent le 
texte est invoqué comme preuve de l'affirmation précédente : 

Si l'agneau pascal est immolé avant midi il est invalide, car il est 
écrit [Ex. 12, 6) : « Entre les deux soirs »^ 

1. Pesahim, 5/3. 



54 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

Formule pour indiquer que telle application rentre dans la 
loi générale : 

Si quelqu'un dit à sa femme : quônâm (formule de vœu) que je 
n'aurai pas de relations avec toi, c'est un cas où s'applique le « qu'il 
ne profane pas sa parole » {Num. 30, 3)^. 

Dans la seconde catégorie (prescriptions juridiques extra- 
bibliques) l'argument scripturaire parait plus difficile à 
administrer, et c'est, pourtant, là qu'il est le plus nécessaire. 
La plupart des 'lois contenues dans la Misna et commentées 
dans les Talmuds se rattachent à cette catégorie. Très souvent 
la seule justification invoquée est la halâkhâ, la prescription 
faisant autorité. C'est ainsi que nous ne trouvons pas une 
seule citation biblique dans les traités Demai (mets dont il est 
douteux que la dime ait été prélevée), Erubim (extension de 
territoire sabbatique), Oholot (impureté contractée au con- 
tact d'un cadavre ou dans son habitation), Tebul yom (impu- 
reté durant jusqu'au soir), Zabim (impurs par écoulement 
séminal)... Dans plusieurs autres les citations bibliques se 
réduisent à presque rien ou restent implicites. 

Néanmoins, le seul argument vraiment décisif étant la 
parole divine, il s'imposait de ramener toutes les lois à une 
origine scripturaire. Pour certaines prescriptions les rabbins 
se rendaient compte que leur fondement biblique était bien 
étroit et précaire : 

(Les halakhotsur) l'annulât ion des vœux volent en l'air et ne peuven 
s'appuyer sur aucune Écriture, mais le sage (rabbin) dispense suivant 
sa sagesse. Les halakhot sur le Sabbat, sur les fêtes et sur les profana- 
tions comportent peu d'Écritures et beaacoup de décisions (de halakhot); 
elles sont comme des montagnes suspendues à un cheveu et sans feou 
tien. De là R. Josué disait : un couple vient d'un couple, mais le pre- 
mier couple qu'est-il sinon une création? Mais les lois sur les juge- 
ments, sur les puretés et impuretés, sur les incestes, sur les estimations , 
les anathèmes, les terrains et la dîme seconde, ont sur quoi s'appuyer : 
Écriture abondante, interprétations et halakhot peu nombreuses. Abba 
José ben Hanin disait : ces huit (lois) sont l'arsenal de la Tora, le corps 
des halakhot-. 

1. Nedarini, 2, 1. 

2. Tos. Hagiga 1, 9; Misna Hagiga^ 1, 8; dans les passages corres- 
pondants du Taimud palestinien (76 c) et babylonien (10 a et 15 b) les 



EXÉGÈSE EXPLICITE DÉMONSTRATIVE. 55 

En effet, les textes invoqués peuvent se ranger en trois 
classes : des prescriptions juridiques dont on déduit une 
application ou une extension; des textes juridiques exploités 
dans une autre ligne que leur ligne propre ; enfin des textes 
empruntés aux livres historiques, prophétiques, sapientiaux, 
recueils de prières : textes inaptes à fonder une loi. Des textes 
hibliques mis en œuvre par la Misna, ceux qui viennent des 
livres législatifs (Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome) 
sont aux autres dans la proportion de onze à sept environ ; 
au surplus, quantité de ces sentences sont exploitées dans 
un tout autre sens que lem* sens primitif. 

Nous donnons quelques échantillons de ces exégèses 
directes : nous laissons pour plus tard toutes les interpréta- 
tions qui relèvent de la dialectique, de la philologie ou du 
symbolisme. Est-il nécessaire d'observer que très souvent 
les textes bibliques seront exploités sans tenir compte du 
contexte? 

a) Textes juridiques ayant un rapport réel avec 
la prescription à justifier. 

Excellente exégèse, ceEe qui applique aux cas particuliers 
un principe général, même si le principe est tout verbal : 

Pour les gerbes oubliées dans le champ, celles que le moissonneur 
laisse derrière lui sont tenues pour oubliées, mais non celles qu'il 
laisse devant lui : car là s'applique le « tu ne retourneras pas ». Voici 
le principe : toute gerbe à laquelle s'applique le « tu ne retourneras 
pas » est tenue pour oubliée, et celle à laquelle le terme ne s'applique 
pas n'est pas tenue pour oubliée ^ 

C'est encore une mention de la loi, entendue littéralement, 
qui appuie une application que le texte primitif n'envisageait 
pas : 

Les fruits de l'année sabbatique qui sont sortis de la terre (Palestine), 
on les détruit là où ils se trouvent : paroles de Rabbi (Juda). R Siméon 

rabbins essayent de montrer que -les halakhot suspendues en l'air ne 
manquent pas de fondements. 

1. Pea, 6, 4 citant Deiif, 24, 19, qui concerne bien les gerbes oubliées. 
L'accent est mis sur la verbe tâsûb, retourner en arrière, derrière 
soi. 



56 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

b. Eléazar disait : on les ramène dans la terre et on les y détruit 
suivant qu'il est dit {Lév. 25, 7) : « (à ton bétail qui est) dans ta terre 
tout son produit servira (de nourriture) » ^ . 

Parfois le texte invoqué prête à une double interprétation, 
d'où discussions : 

Si une vigne ne porte que des grappillons (raisins mal venus et 
tardifs). R. Eliezer estime que ces produits appartiennent au proprié- 
taire, R. Aqiba les adjuge aux pauvres. Le premier argue du texte 
{Deut. 2A, 21) : « Quand tu vendangeras tu ne grappilleras pas » : s'il 
n'y pas eu de vendange, pas de grappillage. Le second argue du texte 
parallèle {Lêv. 19, 10): « Tu ne grappilleras pas ta vigne », même si 
elle ne contient que des grappillons. Le premier mot (du Deut.) « tu ne 
vendangeras pas » indique que les pauvres ne peuvent pas commencer 
à grappiller avant les vendanges 2, 

Il convient également de tirer une déduction d'une loi 
apparentée à la loi discutée : 

Si l'on acquitte la teruma avant les prémices, la dîme première 
avant la teruma et la dîme seconde avant la dîme première, bien 
qu'on viole un interdit (précepte négatif), ce qu'on a fait est valide, 
suivant qu'il est dit : « Tu ne retarderas pas de m'oiîrir les prémices 
de ta moisson et de ton pressoir » [Ex: 22, 28)^. 

Nous avons vu fonder la loi, toute nouvelle, du Prosbul 
{SebVit^ 10, 3) sur l'esprit du commandement qu'elle 
supplante: devoir d'assister le prochain devenu pauvre. 

L'appui biblique peut être indirect, mais très légitime : si 
l'on sait que les travaux interdits au Sabbat sont ceux qui 
furent pratiqués pour l'édification du tabernacle, on ne 
s'étonnera pas de cette déduction : 

D'où prouve-t-on la culpabilité du teinturier en pourpre qui travaille 
au Sabbat? De ce qu'il est dit {Ex. 25, 5) « et des peaux de bélier teintes 

1. Tos Sebi'it, 5, 1, p. 67. 

2. Pea 7, 7. Evidemment l'interprétation d'Eliézer se fonde, en 
partie, sur le substantif néo-hébreu 'olélâ, (grappillon, raisin chétif 
et tardif) tandis qu'Aqiba argue du verbe te'ôlél, qui peut simplement 
signifier : vendanger à nouveau, après coup. 

3. Terumot^ 3, 6. Bien que le mot teruma figure dans la Bible, la pra- 
tique de la teruma (obiation faite aux prêtres sur toutes les récoltes, 
en plus des dîmes et prémices) est postbiblique ; il en est parlé environ 
600 fois dans la Misna ; elle ne peut se fonder que sur des textes 
relatifs aux auti'es redevances sacrées. 



EXÉGÈSE EXPLICITE DEMONSTRATIVE. 57 

en pourpre ». Cela désigne une blessure : tout ce qui en sort, et même 
ce qui ne peut pas en sortir, c'est du sang. D'oii montrer que le sang 
est un liquide? de ce qu'il est dit (Num. 23, 24) « et il boit le sang des 
blessés »^ 

Il est tout à fait dans l'esprit rabbinique de vouloir se tenir 
à la lettre, même si cela conduit à une absurdité : 

ce Tu rassembleras tout le butin (de la ville vouée à l'anathème) au 
milieu de la place pour le brûler » {Deut. 13, 17). S'il n'y a pas de place 
on en fait une ; et si la place est en dehors de la ville on l'introduit au 
milieu de la ville 2. 

Le texte de la loi étudiée fournit une base à la déduction, 
grâce à une modification introduite dans le sens, voire dans 
l'orthographe ou la coupe de la phrase ; nous verrons ces pro- 
cédés dans le chapitre de la philologie, ici un seul exemple : 

On démontre par une analogie que la femme refusée par son beau- 
frère dira son imprécation en hébreu. R. Juda arrive autrement à cette 
conclusion. « Elle répondra et dira ainsi » (Deut. 25, 9), en sorte qu'elle 
s'exprimera dans cette langue ^. 

Parfois toute l'argumentation repose sur un mot pris isolé- 
ment : dans la fameuse ^ discussion sur le divorce, Aqiba 
s'appuie sur dâbar (une chose), tandis que Sammai prend 
l'expression complète ^èrbat dâbâr : 

L'école de Shammai disait : un homme ne peut répudier sa femme 
que s'il trouve en elle ime chose repoussante suivant qu'il est dit 
[Deut. 24, 1) : « Car il a trouvé en elle une chose repoussante ». Et 
l'école de Hillel disait : (il peut la répudier) même si elle a brûlé son 
plat, suivant qu'il est dit : « Car il a trouvé en elle une chose 
repoussante ». R. Aquiba disait : (il peut la répudier) même s'il en a 

1. Tos Sabbat, 8, 23, p. 121. Pour le teinturier, le chef de preuve 
(sous-entendu) est que tous les travaux nécessaires à la confection du 
tabernacle d'alliance sont les types de travaux défendus au sabbat. 
Les versets suivants montrent que le vin, le miel, le lait, la rosée... 
sont aussi des liquides potables. 

2. Sanhédrin, 10, 6. 

3. Sota 7, 4. Le « ainsi » [kâkâ) est le premier mot de l'imprécation 
« qu'ainsi soit fait... ». Toute l'argumentation repose sur ce démons- 
tratif (ainsi) séparé de son contexte; il requiert l'autre démonstratif 
« cette langue ». 



58 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

trouvé une autre plus belle qu'elle, suivant qu'il est dit (ibid.) «:Et il 
arrivera qu'elle ne trouve pas grâce à ses yeux »^. 

Autre argument tout verbal fondé sur le mot dâbâr : 

Si à l'année sabbatique le débiteur veut payer sa dette et que le 
créancier lui dise : « je la remets » et que cependant le débiteur 
réplique : « mais mèirie malgré cela », on peut recevoir la dette, sui- 
vant qu'il est dit {Deut. 15, 2) : « Voici quelle est la parole {dâbâr ■= 
loi) de la rémission ». Pareillement l'homicide, exilé dans une ville de 
refuge et que les citoyens de la ville veulent honorer, s'il leur dit : je 
suis un homicide et qu'ils lui répondent : « mais même alors », il 
pourra recevoir ces honneurs, suivant qu'il est dit [Deut. 19, 4) : « Voici 
la parole (la loi) de l'homicide » 2. 

Nous sommes enfin au comble de la fantaisie quand la 
preuve est tirée du texte afférent au sujet, mais attribue aux 
mots un sens tout nouveau ; comme l'observent justement les 
rabbins, avec une méthode pareille on ne voit plus où s'arrê- 
teront les déductions : 

Dès huit jours avant la fête (de l'Expiation) on désigne un prêtre 
comme substitut du grand prêtre de peur qu'il ne lui arrive une 
impureté. R. Juda dit : on lui désignait aussi une autre femme de peur 
que la sienne ne meure, suivant qu'il est dit {Lév. 16, 6) : e II fera 
l'expiation pour lui et sa maison » : sa maison désigne sa femme. On 
lui dit : s'il en est ainsi les raisonnements seront sans fin^ 



b) Textes juridiques mais sans rapport avec la loi étudiée. 

Les rabbins percevaient que le lien entre la sentence 
scripturaire et l'affirmation démontrée était assez lâche : 
aussi dans certains cas les formules introduisant la citation 

1. Mima Gittin, 9, 5. Dans Siphré Deut. 24, 1, §269, 122 a, discussion 
entre les deux écoles sur ce point : pourquoi dans l'Ecriture les deux 
mots 'èri>â et dâbâr? Même discussion dans les commentaires des 
Talmuds; bab. Gittin 90 a, les rabbins postérieurs se demandent 
pourquoi les deux écoles diffèrent, bien que se fondant sur les mêmes 
mots : considérations verbales. 

2. Sebiit 10, 8. Dans les deux cas la parole [dâbâr) du coupable 
suffît à rétablir les droits. La seconde partie : Makkoth 2, 8. 

3. Yoma 1. 1. Le prêtre doit ^ être marié, 11 est courant d'appeler 
(( sa femme » : sa maison : R. José se vantait (comme d'un acte de 
modestie) d'avoir toujours appelé sa femme, non « ma femme », mais 
« ma maison » : Sabbat 118 b. 



EXÉGÈSE EXPLICITE DÉMONSTRATIVE. 59 

indiquent-elles une certaine hésitation : « c'est ainsi que 
nous trouvons », « à ce sujet l'Écriture dit », « à ce sujet il 
est dit ». Nous connaissons déjà l'expression : « ceci n'est 
pas une raison, mais une indication, une allusion^ ». 

Le rapport entre la législation justifiée et le texte invoqué 
est à peine oblique, quand on passe d'une loi à une autre 
loi fort apparentée, v. g. du sabbat à l'année sabbatique : 

Si un arbre seul peut produire une masse (gros comme un pain) de 
figues pressées et si deux ne ie peuvent pas, ou bien si deux les pro- 
duisent et un ne le peut pas, on laboure à leur pied (avant l'année sab- 
batique) autant qu'il est nécessaire; on procède ainsi pour trois arbres 
et jusqu'à neuf. Pour dix et au-dessus, qu'ils produisent ou non dans ces 
mesures, on laboure à cause d'eux l'espace d'un seâ qui les entoure, 
suivant qu'il est dit (Ex. 34, 21) : « Tu te reposeras le septième jour, 
même au temps de la moisson et du labourage ». Cela ne pouvant se 
rapporter à la moisson et au labourage de l'année sabbatique, cela 
concerne le labourage et la- moisson, soit de la sixième année qui pré- 
cède l'année sabbatique, soit de l'année qui la suit^. 

Aucune loi biblique ne prescrit la récitation biquotidienne 
du Chema, la forme de cette récitation ou la posture à y 
prendre ; pour ce dernier point on exploite le passage qui con- 
tient la prière, laquelle est aussi une profession de foi : 

L'école de Sammai dit : aa soir on doit se coucher (s'incliner) pour 
le réciter, et au matin on se lève (se met debout) pour le dire, suivant 
qu'il est dit [Beut. 6, 7) : « Tu parleras de ces commandements, 
quand tu te coucheras et quand tu te lèveras ». L'école d'Hillel dit : 
on les récite dans la posture où l'on se trouve [kedarkô) suivant qu'il 
est dit (ibid.) : « ... quand tu iras par le chemin (en voyage) baddè- 
rèk ». Si on suit cette interprétation pourquoi est-il dit « quand tu te 
coucheras et te lèveras » ? Pour indiquer qu'on le récite au moment où 
l'on a l'habitude (dèrèkh) de se lever et de se coucher^... 

Autre procédé courant, principalement dans les exégèses 

1. Cf. AiCHER, op. cit. p. 68, 103. 

2. La démonstration manque de clarté. Suivant les interprètes, 
l'argument scripturaire porte sur la pi^emière partie de la halakha 
limitant le labour d'un verger ne contenant pas plus de neuf arbres ; 
d'autre part le « pendant le labourag-e ou la moisson » étant superflu 
puisque tout travail est interdit au sabbat, il convient de rapportei!* 
le texte aux temps entourant l'année sabbatique. Sebi'it, 1, 4. 

3. Berakhot 1, 4. 



60 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

distributives : déclarer que tel texte se rapporte à telle pra- 
tique prescrite par la halakha : 

La bénédiction du repas vient de la Tora suivant qu'il est dit {Deut. 
8, 10) : « Tu mangeras, et tu te rassasieras et tu béniras », c'est la 
bénédiction du repas; « Yahwé ton Dieu », c'est la première bénédic- 
tion; « pour la terre », c'est la bénédiction de la terre; « bonne «, c'est 
Jérusalem et c'est ainsi qu'il dit {Deut. 3, 25) : « que je voie (paroles 
de Moïse) cette montagne bonne et ce Liban »; « qu'il t'a donnée », 
ce sont les mots « qui est bon et bienfaisant n^... 

c) Textes non-juridiques. 

Fonder une prescription jui^idique sur un texte qui revêt 
un tout autre sens doit évidemment conduire à faire abstrac- 
tion du contexte, à user et abuser de l'analogie, à passer du 
singulier au général, et même à modifier la teneur des 
passages exploités. 

D'où prouver que le grand Sanhédrin doit compter soixante-onze 
membres? Suivant qu'il est dit (Num. 11, 16) : « Assemble-moi soixante- 
dix d'entre les anciens d'Israël « ; et Moïse à leur tête, cela fait soixante- 
onze... D'où prouve-t-on que le petit sanhédrin doit compter vingt- 
trois membres? Suivant qu'il est dit {Num. 35, 24) : « Et l'assemblée 
jugera... (25) et l'assemblée délivrera », cela fait vingt. On montre 
qu'une assemblée {'édâ) compte dix personnes de ce qu'il est dit {Num. 
14, 27) : « Jusqu'à quand cette assemblée de méchants?... » retranche 
(des douze) Caleb et Josué, cela fait dix. Et d'où prouver qu'il faut 
encore ajouter trois? de ce qu'il est dit {Ex. 23, 2) : « Tu ne suivras 
point la multitude pour faire le mal »... On ne peut être entraîné au 
mal que par deux. Ajoute encore une unité pour départager le tribunal : 
cela fait vingt-trois 2. . . 

Voici encore comment par une déduction, tirée d'un fait 
historique, on justifie une opinion juridique. L'histoire des 
Sichémites égorgés par Siméon et Lévi le troisième jour après 

1. T'as Berakhot 7, 1, p. 14. La démonstration fait allusion aux 
trois parties de la bénédiction : 1° Béni sois-tu, Yhwh, notre Dieu, 
qui nourris le siècle ; 2° Nous te rendons grâce de ce que tu as donné 
à nos Pères une terre agréable, bonne et large; 3° Aie pitié d'Israël et 
de Jérusalem. Il est courant d'identifier au Liban (blanc) le Temple, 
parce qu'il blanchit les péchés. 

2. Sanhédrin 1, 6. Encore un point sur lequel la Bible n'a pas légi- 
féré. La première démonstration généralise une histoire ancienne; 
la seconde, plus compliquée, argue de quelques mots. 



EXÉGÈSE EXPLICITE DEMONSTRATIVE. 61 

leur circoncision semble indiquer que c'est à ce moment que 
la douleur consécutive à l'opération est à son paroxysme, ce 
qui permet de violer, pour l'apaiser, le repos sabbatique : 

R. Eleazar b. Âzaria disait : on peut baigner un enfant (nouveau-né) 
au troisième jour après sa naissance qui tombe un jour de sabbat 
suivant qu'il est écrit {Gén. 34. 25) : « Et le troisième jour comme ils 
étaient souffrants » ^ . 

Les saints personnages étant les modèles à imiter, on peut 
ériger leurs gestes en prescriptions à suivre : 

On établit (au iif s. av. J.-C. ?) qu'en saluant son prochain (en lui 
souhaitant la paix) on prononcerait le nom divin (ineffable), suivant 
qu'il est dit {Ruth 2, 4) : « Et voici que Booz venait de Bethléem et il dit 
aux moissonneurs : que Yhwh soit avec vous et ils lui répondirent : 
que Yhwh te bénisse !» Et il dit {Jug. 6, 12) : « Que Yhwh soit avec 
toi, guerrier! »2... 

Souvent, dans la Misna et autres recueils juridiques, sont 
invoqués les livres sapientiaux; il semble étrange qu'on 
puisse tirer une prescription juridique d'une maxime morale ; 
il est pourtant un cas où l'application est assez légitime : 
quand la maxime morale rappelle l'esprit de la loi consi- 
dérée : 

Celui qui ne permet pas aux pauvres de faire la cueillette (glaner 
ou grappiller), ou bien celui qui le permet à l'un et empêche l'autre, 
ou bien celui qui y favorise un seul d'entre eux, celui-là dépouille les 
pauvres et de lui il est dit (Prou. 22, 28 et 23, 10) : « Ne déplace pas 
la borne antique... et n'entre pas dans le champ des orphelins ^ ». 

Les proverbes peuvent fournir ces indications qui ne sont 
pas de vraies preuves : la loi sm* le fils rebelle indique parmi 
ses fautes les excès de table ; on veut prouver, tout au moins 
suggérer, que cette faute suffit par le Proverbe (23, 20) : a Ne 

1. Misna Sabbat 19, 3. Dans la gemara babylonienne 134 b, on 
reconnaît que ce n'est pas une vraie preuve mais une allusion [zèkèr) . 

2. Berakhoth 9, 5, Ailleurs on tire des indications juridiques des 
prières des patriarches. 

3. Pea 5, 6 et 7, 3. 

Nous retrouverons ailleurs le premier proverbe employé à d'autres 
fins (exégèse parabolique, p. 227), 

Le livre des Proverbes est abondamment usité pour appuyer des 
sentences morales : il est cité dix-neuf fois dans les Pirqé Ahot. 



62 



EXEGESE RABBINIQUE. 



sois pas parmi les buveurs de vin ni parmi ceiix qui se §or- 
gent de viande ^ » . 

Le recours aux Proverbes est encore plus justifié quand la 
halaklia prend la forme d'une exhortation morale. 

Dans l'avertissement adressé aux témoins en matière criminelle, pour 
les engager à peser la portée de leurs dépositions, on termine ainsi : 
Peut-être direz-vous : pourquoi nous mettre dans cet embarras? — 
N'est-il pas dit {Lév. 5. 1) : « Si quelqu'un pèche en se refusant à dire 
après l'avertissement du juge ce qu'il a vu ou ce qu'il sait, il portera 
son iniquité »? Peut-être direz-vous : pourquoi nous rendre coupables 
de son sang? N'est-il pas déjà dit {Prov. Il, 10) : « Quand les méchants 
périssent on pousse des cris de joie^ »? 

On n'hésite pas à fonder une prescription juridique sur un 
texte prophétique : 

Tout le monde (sauf esclaves et servantes de la coupable) peut assis- 
ter à l'ordalie de la sota (suspecte d'adultère). 11 est permis à toutes 
les femmes de la voir, suivant qu'il est dit [Ez. 23, 48) : « Je ferai 
cesser l'impureté dans le pays et toutes les femmes en recevront une 
leçon et elles ne commettront plus des impiétés pareilles aux vôtres^. 

Les rabbins défendent de porter (fardeaux) des armes au sabbat. 
R. Eliezer le permettait en disant que ce sont des ornements (donc 
permis à ce titre). Les rabbins lui opposent le texte d'Isaïe (2, 4) : 
« De leurs épées ils forgeront des charrues et de leurs lances des cou- 
teaux pour la vendange » : c'est donc qu'elles sont une honte et non 
un ornement''. 

Ce n'est plus pour fonder une loi, mais pour accréditer 
une tradition historique, qu'il est fait recours, en l'appliquant 
au temps présent, à une prophétie : 

D'où prouve-t-on qu'on liait une bandelette de couleur cramoisie sur 
la tête du bouc émissaire? Suivant qu'il est dit (/s. 1, 18) : « Si vos 
péchés sont comme l'écarlate^ ils deviendront blancs comme neige »'^. 

Est-ce ce texte qui a engendré une curieuse croyance tradi- 
tionnelle ? Était-elle déjà supposée par la halakha précédente? 

1. Sanhédrin 8, 1 ; le texte juridique est Deut. 21, 18-21. 

2. Sanhédrin 4, 5. Cf. aussi 3, 7 citant Prov. 11, 13 contre le juge 
qui diffame et charge ses collègues. 

3. Sota 1, 6. L'accent est mis sur l'instruction à recevoir par les 
autres femmes. 

4. Sahbat 6, 4. 

5. Sabbat 9, 3, 



EXÉGÈSE EXPLICITE DEMONSTRATIVE. 63 

Après avoir indiqué à quels signes on savait que le bouc avait atteint 
le désert, on continue {baraitha, tradition tannaïte) : R. Ismaël disait : 
n'avaient-ils pas un autre signe? Une autre bandelette rouge était liée 
au-dessus de la porte du Temple, et quand le bouc était parvenu au 
désert, la bandelette devenait blanche suivant qu'il est dit (/s. 1, 18) : 
« Si vos péchés sont comme l'écarlate ils deviendront blancs comme 
ileige^ », 

Notons enfin cet autre trait de la littéralité rabbinique : 
la métaphore doit se réaliser : 

Tout juge qui, à cause d'un présent reçu, fait dévier son jugement, 
aura, avant de mourir de vieillesse, ses yeux obscurcis, suivant qu'il 
est dit {Ex. 23, 8) : « Et n'accepte pas de présents, car le présent 
aveugle les yeux clairvoyants b^. 

B. — DÉMONSTRATIONS HAGGADIQUES. 

La hag-gada comprend deux grands domaines : les ensei- 
gnements religieux et moraux, l'exploitation de l'Écriture et 
de l'histoire sainte. En ces deux domaiiies les rabbins n'avan- 
cent rien qu'ils ne prétendent appuyer sur un argument 
scripturaire : nécessité qui ouvre largement le champ à la 
fantaisie... et aux discussions. 

Les exemples sont si nombreux et si variés qu'on peut pres- 
que puiser au hasard, ad aperturam libri. 

La foi en la résurrection des morts pouvait se fonder sur 
de clairs oracles prophétiques ; les Pharisiens voulaient la 
prouver d'une manière encore plus convaincante par divers 
témoignages, dont leurs adversaires, les Sadducéens, don- 
naient une autre interprétation : vers la fin du premier siècle 
Rabban Gamliel argumente : 

Des hérétiques interrogèrent Rabban Gamliel : d'où tire-t-on que le 
Saint, béni soit-il, vivifiera les morts? Il leur répondit : de la Tora, 

1. Yoma 6, 8. L'indication baraitha, assez étrange dans la Misna, 
se trouve chez peu de témoins. Dans le Talmud palestinien, 43 d, 
sont rapportées d'autres traditions sur cette bandelette, puis on cite 
diverses exégèses de la sentence prophétique. 

2. Pea 8, 9. Dans la même halakha on annonce aux mendiants, 
simulant la cécité, la claudication... pour obtenir l'aumône, qu'ils ne 
mourront pas sans avoir été frappés de cette même infirmité suivant 
Prov. 11, 27 : « Qui cherche le mal le verra venir sur lui ». 



\ 



64 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

des Prophètes et des Hagiographes : et ils ne voulurent pas accepter 
son argumentation. De la Tora, car il est écrit {Deut. 31, 16) : « Voici 
tu vas être couché avec tes pères, et il se lèvera ». Ils lui dirent : mais 
il est dit : « et se lèvera ce peuple et il se prostituera ». Des Prophètes, 
car il est écrit (/s. 26, 19) : « Tes morts vivront, mes cadavres ressus- 
citeront; réveillez- vous et chantez, vous qui êtes couchés dans la 
poussière, car votre rosée est une rosée de lumière et la terre rendra 
ses trépassés ». Ils lui dirent : mais peut-être s'agit-il des morts que 
vivifia Ezéchiel. Des Hagiographes, car il est écrit [Cant. 7, 10) : « Ton 
palais est un vin exquis, qui coule aisément pour mon bien-aimé; qui 
glisse sur les lèvres des endormis (=les morts) ». Ils lui dirent : peut- 
être ses lèvres s'agitent- elles, car on dit communément que les lèvres 
des rabbins, dont on cite sous leur nom une halakha, se mettent à 
murmurer dans leur tombeau, suivant qu'il est écrit : « Ton palais... » 
Ils contestèrent jusqu'à ce qu'il leur citât cette écriture {Deut. 11, 9) : 
« Yahwé a juré à vos pères de leur donner ». Il n'est pas dit « à vous », 
mais « à eux » : de là on montre que la viviflcation des morts est 
prouvée par la Tora. D'autres disent : il leur cita cet autre texte 
{Deut. 4, 4) : « Et vous, tant que vous êtes attachés à Yahwé, votre 
Dieu, vous êtes tous vivants anjourd'hui ». « Vous êtes tous vivants 
aujourd'hui », c'est clair, mais cela veut dire qu'au jour où tout le 
monde sera mort vous serez vivants. Ou bien : de même qu'aujour- 
d'hui vous êtes là, de même au siècle qui vient vous serez tous là^ 

La loi orale est une des pièces principales de la religion 
juive, sa légitimité ne se démontre pas et pourtant les rabbins 
ne laissent pas de la trouver dans les textes : 

« Ils enseignent ta loi (lu au pluriel = tes lois) à Israël » {Deut. 33, 
10). Cela enseigne que deux lois ont été données à Israël, une de vive 
voix, l'autre par écrit. Un officier, nommé Quintus (Agnitos) demanda 
à Rabban Gamliel : combien de lois ont été données à Israël? il lui 
répondit : deux, une de vive voix (la loi orale) et l'autre par écrit^. 

Les maximes morales prennent aussi leur appui dans 
l'Écriture. 

L'homme qui travaille nu doit se couvrir avant de prier, car on dit 
qu'il n'est pas honorable à l'homme d'être nu puisque Dieu, quand il 

1. Sanhédrin, 90 h. De tous ces arguments scripturaires le seul 
incontestable est le second; les autres supposent une argutie, un jeu 
sur un mot : artifice que les adversaires repoussent. 

2. Siphré in loc. § 351, 135 a. Bâcher, Tannaiten, I. p. 76, note que 
l'interprétation suppose qu'on lit le pluriel tôrôtéka. D'autres tirent la 
même conclusion du pluriel toroth de Léc 26, 46, ou du gladii anci- 
pites de Ps. 149, 6 : Siphra Lév. 112 c; Pesiqta de Rab Kahana, édit. 
Buber, 102 b. 



EXÉGÈSE EXPLICITE DEMONSTRATIVE. 65 

créa rhomme, ne le créa pas nu suivant qu'il est dit {Job, 38, 9) : 
« Quand je lui donnai la nue pour vêtement et la ténèbre pour langes ». 
La première proposition désigne la membrane qui enveloppe le fœtus, 
la seconde, le placenta ^ . 

Les exhortations morales se fortifient par la mention des 
récompenses et des punitions dont Dieu sanctionna les vertus 
et les vices des héros bibliques : thème passionnant^ les 
raisons pour lesqTielles le Temple fut ruiné : 

R. Johanan b. Torta disait : pourquoi Silo fut-il ruiné? Pour deux 
causes : parce qu'on y pratiquait la débauche et le mépris des choses 
saintes. La débauche, car il est écrit {i Sam. 2, 22) : « Héli était 
très vieux et il apprenait tout ce que ses fils faisaient aux Israélites et 
comment ils couchaient avec les femmes dé service à la porte de la 
tente de réunion »..,. Le premier temple a été ruiné parce qu'on y 
commettait l'idolâtrie, la débauche et l'homicide. L'idolâtrie suivant 
qu'il est écrit (/s. 28, 20) : « Le lit est trop court pour s'y étendre » 

Dans ces exégèses à fin édifiante les livres de Job et des 
Proverbes sont souvent invoqués; arguments qui n'ont rien 
d'apodictique puisque le même verset revêt plusieurs sens. 
Exemple : 

Celui qui laisse passer une fête de pèlerinage sans la fêter n'est pas 
tenu à compenser; de lui il est dit {Eccl. 1, 15) : « Ce qui est courbé 
ne peut se redresser » et (Ps. 37, 21) : « L'impie emprunte et ne rend 
pas ». R. Siméon b. Menasia disait : l'homme qui fait un vol ou une 
rapine peut restituer; qui souille une femme mariée et se retire avec 
confusion, de lui il est dit : « Ce qui est courbé ne peut être redressé »... 
« l'impie emprunte et ne rend pas ». R. Siméon b. Yohai disait : on ne 
dit pas ; ne visitez pas un chameau ou un porc pour voir s'il a un 
défaut (en vue des sacrifices), mais visitez des animaux sans défaut; 
et qui est-ce? Le disciple du sage (rabbin) qui s'est séparé de (l'étude de) 
la Loi : de lui il est dit : « ce qui est courbé »..., « l'impie em- 
prunte... » R. Juda b. Laqis disait : voici qu'on dit (Prov. 27, 8) : 
« Comme l'oiseau qui erre loin de son nid » et il dit {Jér. 2, 5) : 
« Quelle iniquité vos pères ont-ils trouvée en moi pour s'éloigner de 
moi^»?. 

1. Tos. Berakot 11. 14, p. 4. 

2. Yoma 9 ab; Dans le texte parallèle de Tos. Menahot, 13, 22, 
p. 533, sqq. manquent les preuves scripturaires. 

3. Tos. Èagîga 1, 7, 8, p. 233; texte redressé d'après bab. Hagiga 
9 b; dans la Misna correspondante [Hagiga 1, 7), les textes scriptu- 
raires sont réduits. 

EXÉGÈSE RABBINIQUE. 3 



66 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

La Haggada qui s'exerce sur l'histoire sainte poursuit 
plusieurs fins : d'abord enrichir le merveilleux traditionnel ; 
et ainsi se constitue un© lég-ende, souvent fantastique, mais 
qui prétend bien se fonder sur l'Écriture. Quelques exemples : 

« Et Yahwé allait devant eux pendant le jour » {Ex. 13, 21). Tu te 
trouves dire qu'il y avait sept nuées : « Et le Nom (Dieu) allait devant 
eux pendant le jour dans la colonne de nuée » ; « et ta nuée se tient 
sur eux et dans la colonne de nuée » {Num. 14, 14) ; « et quand la nuée 
restait longtemps » [Num. 9, 19) ; « et quand s'élevait la nuée... et si la 
nuée ne s'élevait pas... car la nuée de Yahwé était sur le camp » {Ex. 
40, 36-38). Cela fait sept nuées : quatre aux quatre vents, une au-dessus, 
une par-dessous et l'autre allait au-devant d'eux,... elle élevait les 
petits et abaissait les orgueilleux, suivant qu'il est dit {Is. 40, 4) : 
« Toute vallée s'élèvera, toute montagne et colline s'abaissera, les 
tortuosités se redresseront et les escarpements se feront vallées ». 
Cette nuée frappait les serpents et les scorpions, elle balayait et 
faisait la litière devant eux : il y avait treize nuées.... "i. 

Dans le légendaire juif, figure le ver Shamir, arraché 
par Salomon aux démons pour tailler sans peine les pierres 
du Temple; cette construction prodigieuse est attestée par 
les mots {i Rois 6, 7) : « Quand on bâtit la maison on la 
bâtit de pierres toutes préparées dans la carrière » ^. 

La Haggada se propose aussi d'éclairer l'histoire en sup- 
pléant par conjecture des traits que supposent les récits 
sacrés. 

Pourquoi est-il dit « eux et vous » (de peur que vous ne mouriez 
eux et vous, Num. 18, 3)? Parce que Koré était venu et avait excité à 
la révolte contre Aaron; l'Ecriture le dénonce dans tout ce contexte ^ 

Les conjectures haggadiques s'ingénient à donner un nom 
propre aux personnages anonymes. 

Les deux hébreux qui se querellent et qui s'insurgent contre l'inter- 
vention de Moïse, ce sont Dathan et Abiron ; eux aussi qui dirent 

1. Mekhilta in loc, p. 81 ; texte à peu près semblable dans Slphré 
Num. 10, 34, § 83, p. 79. 

2. Tos. Sota 15, 1, p. 321. 

3. Siphré Num. 18, 3, § 116, p. 132. Koré tient une grande place 
dans le légendaire juif. Un peu plus loin, 18, 8, § 117, p. 134, sqq., il 
est encore parlé de cette révolte de Koré et nous trouvons une autre 
explication de ces exégèses : cette péricope est voisine de la péri- 
cope de Koré et doit donc s'expliquer par elle. 



EXÉGÈSE EXPLICITE DEMONSTRATIVE. 67 

(Num. 14, 3) : « Ne vaut-il pas mieux pour nous retourner en Egypte? » 
Eux qui murmurèrent au moment de passer la Mer Rouge (Ex. 14, 10- 
12) ; eux qui gardèrent de la manne suivant qu'il est écrit {Ex. 16, 20) : 
« Et des gens d'entre eux en gardèrent jusqu'au matin » ; eux qui allè- 
rent (au sabbat) pour en cueillir et n'en trouvèrent pas {ibid. 27) ; eux 
qui prirent part à la révolte de Koré suivant qu'il est dit {Num. 16, 1) c 
« Lui, Dathan et Abiron ». Car ils furent dans l'impiété depuis le 
commencement jusqu'à la fin ^ . 

Là la conjecture se justifie par un besoin d'unification : 
attriJDuer aux mêmes pécheurs tous les actes d'impiété; ici 
elle se couvre d'un essai d'exégèse : 

« On trouva un homme qui ramassait du bois au jour du sabbat » 
{Num. 15, 32). Qui était-ce? Salphahad : paroles de R. Aqiba. Ici il est 
dit « désert », là (27, 3) il est dit « désert » : de même que le désert dont 
il est parlé là est (désigne) Salphahad, de même le désert dont il est 
parlé ici est Saphahad. R. Juda b. Bathyra dit : il rendra compte celui 
qui dit que l'homme qui ramassait du bois était Salphahad; si celui qui a 
dit et le monde fut a caché (sa faute), toi tu la révélerais! Mais d'où 
était-il? Il faisait partie des « obstinés » suivant qu'il est dit {Num. 14, 44) : 
« Et ils s'obstinèrent à vouloir monter au sommet de la montagne » ^. 

Procédé analogue : déclarer que telle maxime morale 
générale a été dite de tel héros historique : 

« Et Moïse dit au peuple : ne craignez point » {Ex. 20, 20). Voici que 
Moïse les encourage, pour t'apprendre la sagesse de Moïse, comme il 
s'appliquait à apaiser tous ces milliers et toutes ces myriades. De lui 
il est dit clairement dans la tradition {Qabbâlâ) {Eccl. 7, 19) : « La 
sagesse donne au sage plus de force que n'en ont dix princes^ ». 

Dernier service que l'exégèse doit rendre à l'Écriture : l'édul- 
corer, l'expurger. Bâcher le reconnaît : « C'est la principale 
préoccupation de la Agada : écarter des personnalités des âges 
saints les jugements défavorables '' ». Désespérément les rab- 

1. Tanhuma Semot 10 et Rabba sur Ex. 1, 12. Ces traditions ne 
doivent par être fort anciennes : nous n'en trouvons pas de trace dans 
les Midrasim halakhiques. Cf. Rosenblatt, op. cit., p. 24, sq. 

2. Siphré Num. in loc, § 112, p 122. Voir Encyclopaedia judaica, 
IV, c. 677, sq. sur ces identifications des anonymes. 

3. Mekhilta, in loc, p. 237. Il n'est pas étonnant que nos exégètes 
aient très souvent recours à ce procédé. 

4. Bâcher, Die Agada der Tannaiten 1, p. 217; voir aussi : Bloch. 
Israël und die Vôlker, p. 376. 



68 EXÉGÈSE KABBINIQUE. 

bins s'attachent à prouver l'innocence des hommes dont la 
Bible raconte les péchés : 

R. Samuel b. Nahmani disait : R. Jonathan disait : quiconque dit 
que Ruben a péché se trompe suivant qu'il est dit {Gen. 35, 22) : « Les 
fils de Jacob étaient au nombre de douze ». Cela nous enseigne qu'ils 
étaient tous égaux (en sainteté). Mais alors comment pourrai-je justi- 
fier {Gen. 35j 22) : « Et il coucha avec Bala, la concubine de son père » ? 
Cela nous apprend qu'il mit en désordre {bilbal, à rapprocher de Bala) 
la couche de son père et l'Écriture lui impute comme s'il avait couché 
avec elle. R. Samuel b. Eleazar dit^ suivant la tradition (tannaïte : 
haraitha) : ce juste doit avoir été préservé de ce péché et il ne commit 
pas ce fait : sinon sa descendance (semence) aurait-elle pu se tenir sur 
le mont Ebal et dire {Deut. 27, 20) : « Maudit qui couche avec la femme 
de son père »?... Discussions pareilles sur les fils de Héli, sur David 
sur Salomon, sur Josias...''. 

G. EXÉGÈSES PROPHÉTIQUES. 

En vue de la comparaison avec le Nouveau Testament il 
est intéressant de rechercher comment les rabbins ont déduit 
de textes bibliques des vues sur l'avenir. Ils découvraient 
dans les Écritures l'annonce, soit d'événements historiques 
déjà accomplis, soit la prédiction de faits encore à venir, 
telle l'histoire des temps messianiques, telle aussi la consom- 
mation finale. Ils sont parvenus à leurs conclusions par les 
deux voies ordinaires : ou bien ils commentent une parole 
divine concernant l'avenir, ou bien ils avancent leurs vues 
prophétiques et ils les fondent sur une Écriture. Nous n'aurons 
aucun étonnement à rencontrer le plus souvent ce dernier 
procédé. 

1. Sabbat 55 è, 56 ab. Voir Bâcher, ibid, p, 126, sq. Cette indul- 
gence à l'égard de Ruben se retrouve dans toute la haggada, même 
chez PhUon. 

N'y aurait-il pas déjà quelque essai de cette attitude dans la Bible? 
Le Ps. 106, 30 ne dit pas de Phinéas qu'il exécuta les deux cou- 
pables, mais qu'il donna une décision {wayephallél, cf. 1 Sam. 2, 25). 
La haggada profite de cette autre présentation de l'histoire : quand 
Phinéas voyait que l'ange exterminateur frappait plus qu'il ne con- 
venait il faisait coucher à terre les hébreux puis il se dressait et priait 
[pli signifie ordinaii'ement prier) : Siphré Num., 25, 5, § 131, p. 172. 



EXÉGÈSES PROPHÉTIQUES. 69 

a) Prophéties déjà, réalisées. 

Il était naturel de reconiialtre en certaines catastrophes 
nationales l'accomplissement d'oracles divins. 

Le massacre des Assidéens est donné (1 Mac. 7, 17, 18) 
comme réalisant un verset du Psaume (79, 2,3). 

Racontant la première ruine du Temple, l'auteur du Seder 
'Olam rabba^ se plaît à relever les accomplissements prophé- 
tiques : 

Coîiciliant les données divergentes de 2 Reg. 25, 8 et Jér, 52, 12, 
il explique que les nations entrèrent le septième jour dans le Temple 
et travaillèrent à le détruire les septième, huitième et neuvième jours, 
jusqu'à ce que se levât le jour (dixième), suivant qu'il est dit [Jér. 6, 
4) : « Consacrez contre elle le combat, levez-vous et allons en plein 
midi. Malheur à nous car le jour baisse, car s'allongent les ombres du 
soir ». A l'heure des ténèbres ils allumèrent l'incendie et le Temple 
fut brûlé le dixième du mois; et sur cette génération il dit {Deut. 31, 
21) : « Car je connais ses dispositions, etc. » ; et il dit {ibid. 27 et 29) : 
« Car je connais ton esprit rebelle, etc. Car je sais qu'après ma mort la 
corruption, etc. » Et c'est ainsi qu'il dit au sujet de Sédécias (2 Chron. 
.36, 13-17) : « Et même il se révolta contre le roi Nabuchodonosor... » 
« Et il brûla la maison de Yahwé et la maison du roi » {Jér. 52, 13). 
« Et il amena à Babel tout ce qu'avait épargné l'épée, etc., pour accom- 
plir la parole que Yahwé avait dite par la bouche de Jérémie » (2 Chron. 
36, 20, 21). R. José dit : pendant cinquante-deux ans personne ne passa 
en Judée, suivant qu'il est dit {Jér. 9, 9) : « Sur les montagnes je ferai 
entendre une plainte et une lamentation et sur les pâturages du 
désert... » R. José dit : pendant sept ans fut accomplie {nitqayyém) 
cette écriture sur la terre d'Israël {Deut. 29, 22) : «... de soufre et de 
sel sera consumée toute la terre... »... 

Conciliation entre les données numériques divergentes de 2 Reg. 25, 
27 et Jér. 52, 31 : la vingt-cinquième année mourut Nabuchodonosor, 
l'adversaire de Joachim, et il fut enseveli ; et la vingt-septième année 
Evil-Mérodach le fit sortir de son tombeau et l'en tira afin d'annuler ses 
décrets, pour accomplir [qayyém) ce qui est dit {Is. 14, 19) : « Mais toi, 
on t'a rejeté loin de ton sépulcre comme un rameau détesté, etc. » : 
et il l'en tira pour le déshonorer. Dans ce même temps mourut le roi 
Sédécias et on prit le deuil à son sujet : Hélas! voici qu'est mort le roi 
Sédécias qui a bu la lie de toutes les générations (expié leurs péchés), 
pour réaliser ce qui est dit {Jer. 34^ 5) : « Tu mourras en paix... » 

Après diverses considérations sur la Providence qui règle tout... 
C'est ainsi que Jérémie dit aux Israélites {Jér, 51, 46) : « Que votre 
cœur ne défaille pas, ne vous effrayez pas des bruits qui retentiront 
sur la terre » : c'est le bruit que fait Balthasar; « Car dans une année 



70 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

surviendra un bruit » : c'est celui que fera Darius. Et après cela dans 
cette année surviendra le bruit « et Babel, l'ornement (des royaumes)... 
sera détruite »... (Is. 13, 19). « Et il y aura violence dans le pays 
(de Jérusalem) » (JeV. 51, 46). Ce dominateur c'est Cyrus, le Perse. 
« Et moi dans la première année de Darius le Mède, je me tenais 
auprès de lui pour le soutenir et le fortifier. Maintenant je vais te 
déclarer la vérité. Voici que trois rois se lèveront encore pour la Perse » 
{Dan. 11, 1, 2). Ce sont Cyrus, Assuérus et Darius, qui a construit le 
Temple. Et pourquoi est-il dit en ces termes « le quatrième »? Le qua- 
trième est pour les Mèdes. « Et Daniel fat ainsi jusqu'à la première 
année, etc. ». {Dan. 1, 21). Et c'est dans ce temps qu'il lui fut dit (9, 23, 
24) : « Dès le commencement de la supplication un ordre est sorti, 
etc. Septante semaines, etc.. Sache donc et comprends, etc. ». Les 
sept semaines sont celles qu'ils ont passées dans la captivité; puis ils 
sont retournés de l'exil et les soixante-deux semaines sont celles qu'ils 
ont passées dans leur pays. Et la semaine unique, ils l'ont passée en 
partie dans leur pays et en partie au dehors. « Et après soixante-deux 
semaines sera retranché un oint, etc.. et il conclura une alliance 
ferme avec beaucoup, etc.... » {ibid. 26, 27). R. José dit : septante se- 
maines entre la ruine du premier Temple et celle du second; septante 
années pour le temps de sa ruine; et 410 pour sa reconstruction. Et 
pourquoi est-il dit en ces termes « septante semaines » ? C'est que le 
décret fut porté avant les septante années. Et c'est ainsi qu'il dit(Ge«. 
5, 32) : « Et il avait cent vingt ans ». Et il dit (Gen. 7, 11) : « L'an 
600 de la vie de Noé, etc. ». Il peut dire ainsi parce que le décret était 
porté avant les cent vingt ans. Et c'est ainsi qu'il dit {Is. 7, 8) : 
« Encore soixante-cinq ans et Ephraïm aura cessé d'être une nation. 
Et cette année-là était la quatrième d'Achaz ». Il ne pouvait parler ainsi 
que parce que le décret était porté deux ans avant le tremblement de 
terre, suivant ce qui est dit {Amos, 7, 11) : « Ainsi dit Amos : Jéroboam 
mourra par l'épée et Israël sera emmené captif hors de sa terre ». 

Plus loin Dan. 11, 3, 4, le roi vaillant, dont le royaume sera divisé, 
est entendu d'Alexandre ^... 

Ce document est particulièrement intéressant. Il atteste 
que les rabbins, suivant une voie frayée déjà dans la Bible, 
s'appliquaient à montrer dans les événements de l'histoire 
la réalisation de décrets divins, manifestés en grande partie 
par les Écritures. Nous trouvons en ces pages toutes les for- 
mules et tous les procédés de l'exégèse prophétique, 

1. Seder 'Olam rabba, 27, 28, 30, p. 122-131, 139. Nous renonçons à 
expliquer toutes les difficultés de ces pages, les déformations infligées 
parfois aux données numériques de la Bible. Il suffisait de montrer 
les interprétations prophétiques. 



EXÉGÈSES PROPHÉTIQUES. 71 . 

D'abord les expressions « accomplir » lemallô''th, biblique 
en ^ Chron. 36, 21, et surtout qayyém^ fréquent chez les 
rabbins. Les textes prophétiques sont empruntés aux livres 
prophétiques, mais aussi aux menaces de malédiction pro- 
férées par Moïse. Nous trouvons également des enchaînements 
de textes pris dans les divers prophètes. Nous voyons combien 
les commentateurs tiennent à entendre les indications con- 
crètes, surtout en Daniel, de personnages historiques connus. 

Il est vraisemblable que les prophéties de Daniel faisaient 
l'objet d'un enseignement particulier et de traditions qui se 
transmettaient dans les écoles : Josèphe assure que la dévas- 
tation du Temple par Antiochus Epiphane « se produisit 
suivant la prophétie de Daniel prononcée il y avait 408 ans 
et annonçant que les Macédoniens le détruiraient » ^ . 

Dans ce domaine des exégèses prophétiques s'exerce la 
fantaisie des rabbins qui s'amusent à découvrir dans l'Écri- 
ture la prédiction de tous les événements qui les frappent : 

Depuis que se sont multipliés les adultères furent abolies les eaux 
amères et Johanan b. Zakkai les abolit, suivant ce qui est dit {Os. 4, 
14) : « Je ne punirai pas vos filles parce qu'elles se sont prostituées, 
ni vos brus parce qu'elles ont commis l'adultère »... Depuis que sont 
morts José b. Joéser de Sereda et José b. Johanan de Jérusalem ont 
cessé les hommes (riches de doctrine comme des) grappes, suivant ce 
qu'il est dit (Mich. 7, 1) : « Pas une grappe à manger, pas une des 
figues-fleurs que désire mon âme ». 

Après la ruine du Temple... firent défaut les hommes fidèles, sui- 
vant ce qui est dit {Ps. 12, 2) : « A l'aide, Seigneur, car les hommes 
pieux s'en vont »... 

Depuis qu'a été supprimé le sanhédrin les chants ont cessé dans 
les maisons des banquets, suivant qu'il est dit [Is. 24, 9) : « Ils ne 
boivent plus de vin avec accompagnement de chants 2... » 

1. Antiquités, XII, 7, 6, § 322. Voir aussi ce qu'il dit sur les oracles 
de Daniel, avec des réticences indiquant qu'il tait des interprétations 
qui déplairaient aux Romains : ibid.,, X, 10; et 11, 7, § 239, sq., 281 : 
il avait foi en ces interprétations.' 

2. Sota, 9, 9, 11, 12, Nous pourrions rapprocher les textes sur la 
destruction des divers sanctuaires : Yoma 9 ab, plus réservé sur les 
indications prophétiques (cf. p. 65) et Sabhat li^h, où l'on voit les rab. 
bins pratiquer cet exercice scolastique : chercher dans l'Écriture une 
confirmation prophétique aux conjectures sur les péchés qui ont pro- 
voqué la ruine des Temples. 



72 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

En exégèse distributive, renforcée par divers artifices 
exégétiques, on s'efforce de prouver que Dieu a montré à 
divers personnages, Moïse, Abraham, David... l'histoire fu- 
ture d'Israël . 

Transcrivons, comme transition au paragraphe suivant : 

R, Aqiba, visitant les ruines du Temple, se réjouit alors que ses 
compagnons pleurent parce que se réalisent à leur sujet les versets des 
Lamentations (5, 17, 18); et il leur dit : quant à moi voici pourquoi je 
me réjouis, parce qu'il a dit ainsi {Is. 8, 2) : « Je pris avec moi des 
témoins fidèles, Urie, le prêtre, et Zacharie, fils de Jébarachie ». Mais 
quel rapport entre Urie et Zacharie? Que dit Zacharie? [Zach. 8, 4) : 
« Il y aura de nouveau des vieillards et des femmes âgées assis sur les 
places de Jérusalem, chacun son bâton à la main en raison de son 
grand âge ». Et que dit Urie? « C'est pourquoi à cause de vous Sion 
deviendra un champ qu'on laboure et Jérusalem un monceau de 
pierres et la montagne du Temple un haut lieu » {Michée, 3, 12 et Jér. 
26, 18 identiques). Le Saint, béni soit-il, lui dit : je prends ces deux 
témoins : si les paroles d'Urie se réalisent, celles de Zacharie se réali- 
seront et si celles d'Urie tombent [botlîm, sont annulées) tomberont 
aussi celles de Zacharie. Je me suis réjoui de ce que les paroles 
d'Urie se sont réalisées parce que celles de Zacharie finiront par se 
réaliser^. 

Laissons de côté tout ce que ces assurances d' Aqiba con- 
tiennent d'arbitraire et de fantaisie, ne retenons que la ten- 
dance à chercher dans les Écritures des lumières et des 
consolations relatives à l'avenir messianique^. 

1. A Moïse on applique les versets de Deui. 34, 1, sq. : Siphré in loc. 
% 357, 149 ab ; pour Adam, Genèse rahba, 39, 12, p. 377 ; pour Abraham, 
Pal. Moed qaton, 3, 5, 82 c; pour David, à l'aide du Psautier : Gittin, 
57 b. 

2. Siphré Deut. 11, 16, § 43, 81 ab. Reproduit dans Makkot 24 ab et 
dans Lamentation rabba 5, 19. Plusieurs étrangetés dans ces propos 
d' Aqiba. Les paroles attribuées à Urie se lisent dans le livre de Michée ; 
elles sont rapportées dans Jérémie comme ayant été prononcées au 
temps d'Ezéchias par un autre Michée, et aussitôt après (20) il est 
parlé d'un Urie qui prophétisa également contre Jérusalem : d'où le 
passage de Michée à Urie. Il suppose, en outre, que le prêtre Urie et 
le Zacharie, nommés dans Isaïe, s'identifient avec FUrie mentionné 
dans Jérémie et avec le prophète Zacharie, Exégèse prophétique, en 
vérité, bien laborieuse. 

3. Rappelons, en passant qu'Aqiba entendait Num. 24. 17 du faux- 
messie, Bar-Kokba : Pal. Taanit, 4, 8, 68 d; Johanan b. Torta, son 
collègue, repoussait cette interprétation. 



EXÉGÈSES PROPHÉTIQUES. 73 

h) Prophéties à réaliser. 

Les événements à venir qui passionnaient le plus intensé- 
ment les cœui'S juifs étaient évidemment avant tout les divers 
actes de la restauration messianique et, également, mais à 
un rang inférieur, la résurrection et la rétribution des justes 
à la fin du monde. Sur ces faits les Écritures fournissaient 
des indications plus ou moins claires et la spéculation théo- 
logique, des théories plus ou moins traditionnelles; il y avai 
donc place pour une double exploitation de la Bible : par 
interprétation directe des textes prophétiques, par recour s- 
aux Écritures pour fonder une opinion déjà admise. 

Lieu classique des exégèses directes, les Targums : ils ont 
incorporé des éléments anciens, mais leur date récente ne 
nous permet guère de les utiliser. Voici pourtant quelques 
exemples significatifs et dans lesquels nous retrouvons une 
tradition antique. 

Dans la traduction grecque des LXX de Nombres (24., 7) 
nous lisons : « un homme (de la race d'Israël) dominera sur 
de nombreuses nations; et sera élevé le royaume de Gog et 
son royaume s'accroîtra ». Le texte hébreu porte (trad. Cram- 
pon) : « sa race (de Jacob) croit sur des eaux abondantes, 
son roi s'élève au-dessus d' Agag et son royaume est exalté » ^ . 

On connaît la fameuse prophétie de Jacob (Gen. 49, 10) : « Le sceptre 
ne s'éloignera pas de Juda, ni le bâton de commandement d'entre ses 
pieds, jusqu'à ce que vienne Schiloh : c'est à lui que les peuples 
obéiront ». Voici comment traduisent les trois targums. 

Onqelos : « Celui qui exerce le pouvoir ne sortira pas de la maison de 
Juda, ni le scribe d'entre ses fils à jamais jusqu'à ce que vienne le 
Messie à qui appartient la royauté : c'est à lui que les nations obéi- 
ront. » 

Jerusalmi I : « Les rois ni les chefs ne cesseront pas de se trouver 
dans la maison de Juda, ni les scribes enseignant la Loi entre ses des- 
cendants, jusqu'au temos où viendra le roi Messie, le plus petit de ses 
fils, et par lui seront écrasées les nations. » 

1. Cette paraphrase qui introduit Gog à la place d'Agag est inspirée 
par le travail d'élaboration légendaire s'accoraplissant autour de Gog 
et Magog d'Ézéchiel (38 ; 39). Dans le targum fragmentaire nous trou- 
vons à la fin du verset cette précision : « et gi*andira le royaume du 
Messie ». Dans les LXX sur Amos. 7, 1 pareille intrusion de Gog. 



74 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

Jerusalmi II : « Ils ne cesseront pas les rois de la maison de Juda, 
ni d'entre ses fils les scribes enseignant la loi jusqu'au temps où 
viendra le roi Messie à qui appartient la royauté et à lui seront soumis 
tous les royaumes de la terre » ^ . 

Type d'exégèse directe, mais toute gratuite comme le 
montre l'objection d'un contradicteur : 

R, Juda interprétait (ou : prêchait, dâras) : « Oracle : parole d'Yahwé 
contre le pays de Hadrak et à Damas sera son séjour — car Yahwé a 
les yeux sur les hommes et sur toutes les tribus d'Israël » {Zachar., 
9, 1). C'est le Messie qui sera dur {had) pour les nations du siècle et 
tendre (rak) pour Israël, R. José, le fils de la Damasquine, lui dit : 
pourquoi nous troubler les Ecritures? J'en atteste contre toi les ci eux 
et la terre que je suis de Damas et qu'il y a là un lieu appelé Hadrak. 
Il lui répondit : comment fais-tu droit {qayyém) à « et à Damas sera 
son séjour »? De là suit que Jérusalem, à l'avenir, s'étendra jusqu'à 
Damas, suivant qu'il est dit « et Damas son séjour »; or, « son séjour » 
n'est pas autre chose que Jérusalem, suivant qu'il est dit {Ps. 132, 14) : 
« Voici mon séjour à jamais ». Il lui dit : comment fais- tu droit à Jéré- 
mie (30, 18) : « La ville sera rebâtie sur sa colline »? Il lui répondit : elle 
ne bougera pas de sa place. Suivent d'autres exégèses de cette espèce^. 

C'est bien de l'exégèse directe, mais fort peu littérale. 
Sont-elles plus littérales les interprétations d'apparente 
allure grammaticale? Par exemple : 

« Yahwé régnera à jamais et toujours » (Ex. 15, 18). R. José le 
galiléen disait : si les Israélites avaient dit dans leur cantique de la 
Mer rouge : « Yahwé règne à jamais », aucune nation ni langue n'aurait 
pu régner sur eux; mais ils ont dit « régnera à jamais », au futur à 
venir ^... 

Exégèses directes encore, mais avec l'appui de l'allégorie 
ou de l'interprétation symbolique, celles qui voient le Messie 
annoncé dans les présents que Booz fait à Ruth**. 

1. Sur les autres interprétations provoquées par ce verset, voir : 
A. PoSNANSKi, Schiloh, ein Beitrag zur Geschichte der Messiaslehre, 
Leipzig, 1904. 

2. Siphrê Deut. 1, 1, § 1, 65 a. Voir ce texte dans Pesiqta de R. 
Kahana^ ch. 20, 143 a, qui contient d'autres exégèses messianiques 
de forme analogue, 

3. Mekhilta in loc, p. 150. Autres exégèses prophétiques soi-disant 
grammaticales : infi^â, p. 147, 150, 151,. 

4. Voir infrà p. 239; p. 243 sur Is. 32, 20, 



EXÉGÈSES PROPHÉTIQUES. 75 

Intermédiaiï'e entre l'exégèse directe et l'exégèse référen- 
tielle : 

Dans la semaine où vient le fils de David, dans la première année 
s'accomplira cette écriture : « je ferai pleuvoir sur une ville et sur une 
autre ville je ne ferai pas pleuvoir » (Âmos, 4, 7)^... 

Innombrables sont les exégèses référentielles appuyant des 
déclarations sur l'avenir. Inévitablement, si certaines de ces 
exégèses se fondent sm' le sens littéral, la plupart recourent 
à des accommodations plus ou moins justifiées. Voici un 
exemple d'exégèse raisonnable : 

R. Eliezer disait : si les Israélites ne font pas pénitence ils ne seront 
jamais rachetés, suivant qu'il est dit (Is. 30, 15) : « C'est par la con- 
version et par une paisible attente que vous serez secourus ». R. Josué 
lui répliqua : est-il vrai que s'ils ne font pas pénitence, ils ne seront 
jamais rachetés? R. Eliézerlui répondit : le Saint, béni soit-il, suscitera 
contre eux un roi aussi cruel qu'Aman et aussitôt ils feront pénitence 
et seront rachetés. Quel est le fondement de cette affirmation? « C'est 
un temps d'angoisse pour Jacob, mais il en sera délivré » (Jër. 30, 7). 
R. Josué lui répliqua : mais il est écrit {Is. 52, 3) : « C'est gratuitement 
que vous avez été vendus et c'est saiis argent que vous serez rachetés ». 
Quelle réponse lui fit R. Eliézer? Suivant que tu dis {Prov. 7, 20) : 
« Il a pris en sa main le sac d'argent ». R. Josué lui dit : voici qu'il 
est écrit {Is. 60, 22) : « Moi, Yahwé, en son temps je hâterai cela ». 
R. Eliézer objecte {Deut. 10, 12) : « Et maintenant, Israël, que demande 
de toi Yahwé, ton Dieu, si ce n'est que tu craignes Yahwé...? »... Mais 
lorsque R. Josué lui eût dit {DqL7i. 12, 7) : « Il leva sa droite et sa gauche 
vers le ciel et il jura par celui qui vit éternellement que ce serait dans un 
temps, dans deux temps et une moitié de temps, et que, quand on 
aurait achevé de briser la force du peuple saint, alors s'accompliront 
toutes ces choses », R. Eliézer se tut 2. 

Dans cette discussion les rabbins utilisent à la fois des 
passages messianiques et des sentences de portée plus géné- 
rale; les livres les plus exploités sont les livres prophétiques 
et le Psautier. L'interprétation est parfois littérale, parfois de 

1. Attribué à R. Siméon b. Yohai dans Derek ''ères zutta, 10 (début), 
donné comme baraitha dans Sanhédrin 97 a et parallèles. Dans un 
autre passage sur la semaine des tribulations messianiques-est utilisé, 
presque comme citation implicite, le texte de Michée 7, 6 sur les divi- 
sions domestiques : Sota, 8, 9, 15. 

2. Pal. Taaniot, 1, 1, 63 d. Dialogue un peu différent dans Sanhédrin 
97 b, 98 a. W. Bâcher, Die Agada der Tannaiten, I, p. 138, sq. 



76 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

la plus haute fantaisie, ne reculant même pas devant des 

procédés tels que le notarikon. Inutile de citer d'autres 
exemples ^ 



* 



Cette première série de paradigmes nous laisse entrevoir 
les tendances de l'exégèse rabbinique : même directe, c'est- 
à-dire ne voulant pas se soustraire à la domination de la 
lettre, elle peut être simple et littérale, mais elle est tout 
autant arbitraire, iittéraliste à l'excès ou se dégageant de la 
lettre, ajoutant ou retranchant à son gré, fantaisiste, subtile, 
se pliant trop volontiers aux requêtes de la Halakha et de la 
Haggada. 

1. Voir p. 139 l'exégèse prophétique par notarikon de Uqsim, 2>, 12 : 
la récompense extraordinaire promise aux justes. 



CHAPITRE III 

MÉTHODES DIALECTIQUES d'eXÉGÈSE BIBLIQUE. 

Pour définir cette méthode et faire saisir la valeur que lui 
attribuaient les rabbins, rien n'est plus apte que l'histoire sui- 
vante : 

Voici les rites de la Pâque qui suspendent le sabbat. Cette halakha 
était ignorée des Bené (Fils de) Bathyra, Il arriva une fois que le 
quatorze nisan tomba un sabbat et ils ne savaient pas si la Pâque 
suspend le sabbat ou non. On leur dit ; il y a ici un babylonien appelé 
Hillel, qui a servi (comme disciple) Semaya et Abtalion (appelés grands 
rabbins et grands exégètes) : il sait si la Pâque suspend le sabbat ou 
non. Peut-être nous sera-t-il de quelque utilité. Ils le mandèrent et lui 
dirent : As-tu jamais appris si la Pâque, tombant le quatorze nisan, 
suspend le sabbat ou non? Il leur répondit : N'y a-t-il donc qu'une 
pâque par an qui suspende le sabbat? N'y en a-t-il pas des quantités? 
les uns disent : cent; les autres : deux cents; les autres trois cents... Ils 
lui répondirent : nous avons appris que tu pouvais être de quelque 
utilité. Il se mit à leur enseigner (son opinion) par assimilation, par a 
fortiori, et par analogie. Par assimilation (hèqqués) : le sacrifice perpé- 
tuel est un sacrifice de la communauté et la Pâque est aussi un sacri- 
fice de la communauté : de même que le premier suspend le sabbat, 
de même le second. Par a fortiori : si le sacrifice perpétuel dont l'obli- 
gation n'est pas sanctionnée par la peine de l'extermination suspend 
le sabbat, la Pâque, dont l'obligation est sanctionnée par la peine de 
l'extermination, n'est- il pas juste qu'elle suspende le sabbat? Par analo- 
gie : du sacrifice perpétuel et de la Pâque il est dit : « en son temps » ; 
de même que l'un suspend le sabbat, de même l'autre suspend le 
sabbat. Nous avions déjà dit^ lui répondirent-ils, q^ue tu peux être de 
quelque utilité. A l'assimilation que tu as proposée il y a une objec- 
tion : tu ne peux tirer argument du sacrifice perpétuel, dont la quantité 
est fixée, pour la Pâquè, dont la quantité n'est pas fixée. A l'argument 
par a fortiori que tu as proposé il y a une réponse : on ne peut arguer 
du sacrifice perpétuel, qui est une sainteté des saintetés, au sacrifice 
de la Pâque qui est une sainteté de rang inférieur. A ton argument 
par analogie nous opposons que personne ne peut proposer de lui- 
même (en dehors de la traditioii) une conclusion par analogie... Bien 
qu'il ait continué de disserter tout le jour ils refuserait d'accéder à 



78 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

son opinion, jusqu'à ce qu'il leur dit : quel malheur pour moi si je 
n'avais pas entendu (terme de tradition : transmission traditionnelle) 
d'Abtalion et de Semaya! Quand ils l'entendirent dire cela, aussitôt ils 
l'établirent leur prince ^. 

Cette anecdote suggère deux conclusions : les raisonne- 
ments en matière juridique et exégétique étaient déjà en 
usage dans les écoles au commencement du premier siècle 
avant J.-C. ; les écoles qui les repoussaient n'admettaient que 
l'autorité de la tradition. Les écoles opposées à cette méthode 
dialectique étaient-elles celle des Shammaïtes, ou plus géné- 
ralement le parti des Sadducéens^? Le relief donné dans 
cette histoire à la personne de Hillel, le fait qu'on lui attribue 
le premier catalogue de règles exégétiques semblent justifier 
cette conjecture. Il est possible que la réalité ait été plus 
simple. Il était tout natm'el que dans les discussions acadé- 
miques de jurisprudence on eût recours aux raisonnements, 
raisonnements qui comportaient à la fois des argumentations 
logiques sur les espèces juridiques et des déductions fondées 
sur le texte biblique. Ces procédés, d'abord élémentaires et de 
forme populaire, se sont de plus en plus perfectionnés ; on 
en a fait la théorie, on les a érigés en une sorte d'organon. 
Il est normal aussi que les rabbins se soient défiés de ces 
procédés d'argumentation : dans le texte cité, des docteurs 
montrent comment par ces méthodes on peut déclarer pm^ ce 
qui est évidemment impur. Néanmoins, en raison du dévelop- 
pement des études juridiques, ces méthodes ont fini par obte- 
nir droit de cité ; on les a déclarées le moyen authentique 
d'interpréter la Tora; on les a canonisées en les qualifiant 
« halakhot de Moïse reçues au Sinaï ». 

Toutes ces opérations dialectiques sont désignées par le 
verbe dan et ses dérivés : on appelle dîn^ ou bien l'opération 

1. PesaJjim palestinien, 6, 1, 33 a; récit moins complet dans le 
babli, 66 a. L'analogie, dont argue Hillel, repose sur l'emploi du 
même mol (en son temps) dans Num. 28, 2 et 9, 2 et 13. 

2. C'est la thèse que soutient Schvvarz dans son livre, Die Contro- 
i>ersen de?' Schammaiten und Hilleliten, Wien, 1893 ; thèse contestée 
par F£>ucHT\VAKGER dans Monatschrift fiir Geschichte und Wissenscha/t 
des Judentums, 1894, p. 370-379. H. VVeiss, Dor. dor wedorsaw, 
p. 145, admet cette opposition des Sadducéens, 



EXÉGÈSE DIALECTIQUE. 79 

exégétique qui consiste à dériver une conclusion d'un texte 
biblique, ou bien cette conclusion elle-même, qui se présente 
alors comme la sentence d'un juge; de là les expressions si 
fréquentes dans la littérature rabbinique : « je puis juger 
ainsi, on peut juger (raisonner) ainsi, tu juges (raisonnes) ainsi, 
tout jugement (conclusion exégétique) que tu établis »^.. 

Ces opérations dialectiques sont-elles, à proprement parler, 
de l'exégèse? Dans bien des cas il est évident que nous avons 
affaire à une argumentation juridique qui ne se fonde pas 
directement sm' la lettre sacrée; dans bien des cas aussi la 
lettre est un des éléments du raisonnement, mais l'argumen- 
tation vise beaucoup plus à justifier une opinion juridique 
qu'à déterminer le sens d'un passage biblique. De toute façon 
nous n'avons là qu'une exégèse indirecte, extrinsèque au 
texte. Ce sont pourtant ces procédés dialectiques qui sont 
présentés le plus ordinairement comme le type classique de 
l'exégèse rabbinique. 

Nous ne pouvons ici discuter un point de vue que beaucoup 
de savants juifs font valoir : les principales règles de la 
dialectique exégétique juive sont inspirées par l'exégèse des 
classiques grecs, pratiquée et codifiée par les alexandrins. 
Cette origine expliquerait qu'on puisse réduire les divers 
arguments de l'exégèse juive aux formes de la logique aris- 
totélicienne^. Nous verrons combien il est malaisé de ramener 
les raisonnements des rabbins à des. syllogismes réguliers : ils 
sont plus intuitifs que déductifs et analytiques ; ils sont plus 
près aussi des procédés populaires ; enfin la nécessité de reve- 
nir en dernier ressort à la lettre de la Tora et aussi le besoin 
d'aboutir à une conclusion déjà acquise étaient tout autant 

1. Bâcher, Terminologie , I, p. 20 sqq.; !e mot ta'âm (goût : raison) 
est employé par les tannas dans un sens plus restreint : le fondement 
biblique d'une opinion juridique : Bâcher, ibid., p. 66, sq. 

2. ScHWARZ, dans ses divers ouvrages sur l'exégèse rabbinique, 
s'attache à prouver combien les raisonnements rabbiniques sont 
conformes aux lois fixées par Aristote; pourtant il confesse que 
l'herméneutique rabbinique ne possède pas tous les caractères d'une 
discipline rigoureusement scientifique (Die hermeneutische Induktion, 
p. 2). 

Sur les dépendances à l'égard des Grecs, cf. Encyclopaedia ju- 
daica, VI, c. 622, sq. ; Blau, Revue des Etudes juives, 1936, p. 153-157. 



80 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

d'obstacles à la pratique régulière d'une logique inflexible. 

Dans la suite des temps les divers procédés de cette dialec- 
tique ont été ramenés à quelques types, qu'on appelle des 
middot. Le mot middâ, qui signifie primitivement mesure, 
prend aussi très souvent le sens de qualité, de propriété 
(propriétés, attributs de Dieu) ; c'est dans ces deux sens que 
doit être pris le mot middâ dans le vocabulaire de l'herméneu- 
tique juive ; ou bien : règles par lesquelles est interprétée 
(enseignée) la Tora ; ou bien : propriétés de la Tora [middâ 
battôrd) que dégage l'exégèse ou qui la fondent. En fait le mot 
en son sens le plus courant désigne les règles de l'hermé- 
neutique rabbinique^ 

La tradition rabbinique conserve plusieurs catalogues de 
règles heiunéneutiques : ce sont d'abord les sept de Hillel, 
puis les treize d'Ismaël (mort en 135)^. Il est possible que 
les règles attribuées à Hillel soient plus anciennes que lui, au 
moins dans lem' noyau substantiel : procédés de logique 
élémentaire dont se servaient déjà les Scribes 2. Les treize 
d'Ismaël peuvent être considérées comme un développement 
des sept plus anciennes, l'extension des principes généraux 
à des cas particuliers ; si elles ne remontent pas au début du 
second siècle, il est très vraisemblable qu'elles ne sont pas 
plus récentes que l'âge tannaïte^. 

1. Bachee, Terminologie, I, p. 100, sq. Le mot désigne aussi, plus 
rarement, l'exégèse donnée d'un texte. 

2. Les règles de Hillel sont énumérées dans Tos. Sanhedrinl, 11, 
p. 427; sous ce titre; « voici les sept choses que Hillel enseigna 
devant les Bené Bethyra » ; et avec cette conclusion : « voilà les sept 
règles que Hillel enseigna devant les Bené Bethyra »; voir aussi 
Abot de R. Nathan, 37, 10 (chapitres sur les six choses ou les sept). 

Les règles d'Ismaël sont transcrites dans la préface du Siphra sur 
le Lévitique avec cette introduction : « R. Ismaël disait : par treize 
règles la Tora est expliquée ». En fait ces treize sont plutôt seize, 
certains numéros contenant deux règles distinctes. 

Schwarz prétend que Hillel n'avait édicté que six règles ; il supprime 
la sixième et propose une formule différente pour la quatrième (deux 
écritures en contradiction, au lieu de: hinyanâb d'après deux écri- 
tures). 

3. C'est ce qu'affirme souvent Ç. Weiss, Dordor wedorëaw, I, p. 135, 
145, 155, sqq. II, p. 101, sq. 

4. On trouve une allusion aux règles d'Ismaël dans Mekhilta Ex, 
13, 2 et 20, 25, p. 57, 233. 



EXÉGÈSE DIALECTIQUE. 81 

A la même époque qu'Ismael et en opposition avec son 
école, Aqiba soutenait des principes herméneutiques qui, dans 
leur ensemble, relèvent davantage de la philologie et que nous 
exposerons, par conséquent, dans le paragraphe prochain. 
Ces règles plus philologiques, jointes aux règles dialectiques, 
sont exposées dans les trente-deux règles attribuées à R. 
EHézer fils de R. José le GaHléen (fin du second siècle). 
Celles-ci remontent probablement dans leur substance à 
Tâge tannaïte et visent l'exégèse haggadique^ 

Les règles d'Hillel. 

1. Qal wahômér ou a fortiori. 

2. Gezérâ ëâwâ ou assimilation. 

3. Binyan 'dé d'après une seule écriture (établissement d'un principe). 

4. Binyan ''âh d'après deux écritures. 

5. Kelâl ûpherât (général et singulier). 

6. Kyôsé' bô mimmâqôm ahér (pareillement d'après un autre texte). 

7. Dâbâr ha-lâméd méHnyânô (règle du contexte). 

Les règles d'Ismaël. 

1. Qal wâhômér. (Hillel I). 

2. Gezérâ ëâwâ (H. 2). 

3. Binyan 'âb. (H. 2 et 3). 

4. Kelâl ûpherât (général et singulier). 

5. Singulier et général (4-11 = Hillel 5). 

6. Général puis singulier puis général. 

7. 8, 9, 10, 11 : autres combinaisons de général et singulier. 

12. Règle du contexte et proposition déterminée par sa finale (H. 7). 

13. Deux écritures qui se contredisent l'une l'autre. 

Règles d'Eliézer ben José le galiléen. 

1, Ribbûy ou inclusion (règles d'Aquiba). 

2. Mi'ût ou exclusion. 



1. Ces règles ne sont pas mentionnées dans le Talmud ; le premier 
à les citer est Abulwalid ibn Ganah (xi« siècle). On les trouve dans les 
manuscrits sous le titre : Baraitha des 32 règles de R. Eliezer b. R. 
José galili. Elles figurent dans la préface du Midraé haggadol (édi- 
tion de ScHECHTER (Genèse) Cambridge, 1902, p. xvni-xxv. • Elles 
ont été plusieurs fois éditées à part, vg. par Buber dans ses Midrasim 
qeiannim, Wilna, 1925 et par H. C. Enelow, The Mishnah of R. Elie- 
zer, or the midrash of thirty-two hermeneutic rules, New York, 1933. 



82 EXÉGÈSE BABBINIQUE. 

3. Inclusion sur inclusion. 

4. Exclusion sur exclusion. 

Zt. Qal tnahômér exprimé (a fortiori) (Hillel 1). 

6. Qalwahômér implicite (a fortiori) (Hillel 1). 

7. Gezérâ sâwâ (assimilation; Hillel 2). 

8. Binyan 'àb (établissement d'un principe) (Hillel 3). 

9. Dèrèkh qesârâ (expression abrégée). 

10. Expression répétée. 

11. Division dans le contexte. 

12. Elément de comparaison éclairé par un autre élément. 

13. Histoire suivant un principe général à titre de cas particulier. 

14. Réalité inférieure commandant une supérieure afin de donner 
une explication opportune. 

15. Deux écritures qui se contredisent (Ismael 13). 

16. Usage singulier d'une expression. 

17. Idée expliquée en dehors de son contexte. 

18. Cas particulier exprimé afin d'expliquer le tout. 

19. Proposition qui éclaire une autre proposition. 

20. Proposition qui ne se rapporte pas à son contexte mais au 
contexte voisin. 

21. Objet éclairé par deux termes de comparaison. 

22. Proposition éclairée par la proposition voisine. 

23. Proposition éclairant la proposition voisine. 

24. Objet excepté d'un ensemble mais n'éclairant que lui-même. 

25. Objet excepté d'un ensemble pour éclairer un autre objet. 

26. Parabole. 

27. Correspondance. 

28. Paronomase. 

29. Grammateia (substitution de lettres). 

30. Nôtarîqôn (valeur numérique des lettres). 

31. Interversion des termes. 

32. Interversion des sections. 

Les rabbins tiennent que les exégèses déduites à l'aide des 
règles de Hillel et d'Ismael ont valeui* normative ; il y a pour- 
tant deux réserves à apporter à cette affirmation. Les docteurs 
se rendent bien compte que ces raisonnerûents sont loin d'être 
conclusifs : souvent ils les proposent comme une conjecture 
possible dialectiquement, mais en réalité inefficace, et ils s'at- 
tendent à voir les conclusions, ainsi laborieusement déduites, 
repoussées par un rappel à la lettre (il est enseigné en ces 
termes, talmûd lômâr)^ ou bien réfutées par une autre 
argumentation. Surtout, bien que les treize règles soient dites 



RAISONNEMENT A FORTIORI. 83 

halakhot mosaïques et sinaïtiques, on sait qu'elles ne peuvent 
prévaloir contre la tradition et qu'elles ne valent que pour 
confirmer une tradition déjà reconnue; nous avons entendu 
les adversaires de Hillel lui rappeler qu'on ne peut de soi- 
même proposer un raisonnement par analogie : c'est là un 
principe universellement admis. Autre principe pareillement 
reconnu : on ne peut fonder sur un raisonnement {dîn) une 
loi criminelle ^ 

Nous exposons les règles de l'exégèse dialectique, en suivant 
autant que possible, l'ordre du catalogue de Hillel, mais 
en les ramenant à leur type le plus général. 

I. — Raisonnement a fortiori. (Hillel 1 ; Ismaël, 1 ; Eliezer, 
5 et 6 : a fortiori explicite ou implicite) . 

La formule hébraïque de cette règle est qal ivahômèi\, 
expression grammaticalement anormale qui joint un adjectif 
et un substantif^. Qal dans l'hébreu récent signifie : léger; 
appliqué aux lois, aux obligations, il désigne un com- 
mandement moins grave, ou plus facile à garder. Rômèr, 
en hébreu récent, signifie : matière, chose lourde; et, 
dans l'ordre juridique : commandement lourd, grave, dif- 
ficile. La conjonction des deux vocables indique nettement 
le mécanisme de l'argument. On le décrit souvent comme 
pouvant revêtir deux formes : de minore ad majus^ passer 
d'une espèce moins importante aune espèce plus importante : 
des hommes à Dieu; etl 'inverse, de majore ad minus. Nous 
avons simplement ce raisonnement de forme très populaire 
que nous appelons raisonnement a fortiori et qui consiste 
à passer d'un état, où teUe obligation, qualité, disposition 

1. Voir Landau, op-. cit. p. 22, sqq. Nous reviendrons sur ces deux 
points. Siphré Deut. i2, 33, 90 b ; Siphra Lév. 20, 17, 92 q. 

2, Strack, Bâcher, Schwarz... reconnaissent qu'on devrait dire qôl 
(substantif aussi), mais on a préféré qal pour éviter toute con- 
fusion avec qôl. voix. 

Schwarz traite de cette rè^le dans son livre der hermeneutische 
Syllogismus in der talmudischen Literatur, Beitrag zur Gescliichte 
der Logik in Morgenlande, Karlsruhe i. B., 1901. Le titre montre bien 
dans quel sens l'auteur poursuit ses études sur l'herméneutique 
rabbinique. Strack-Billerbeck, Kommentar zum N. T., III, p, 224. 



84 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

est moins nécessaire ou justifiée, à un autre état où tout 
cela est plus évidemment requis. 

La baraitha d'Ismaël donne comme exemple de qal wa~ 
hâmer la parole de Dieu à Moïse au sujet de la séquestration 
de Marie, frappée de lèpre en punition de ses médisances : 
« Si son père lui avait craché au visage, ne serait-elle pas 
pendant sept jours couverte de honte? Qu'elle soit séqiiestrée 
sept jours hors du camp, après quoi elle y sera reçue )) 
[Num. 12, 14-). Un autre texte de la baraitha note que, 
d'après un propos [baraitha) attribué à R. Ismaël, il y a 
dans la Tora dix qal wahômèr'^ . Cette remarque nous suggère 
que nous devons voir dans cette forme de raisonnement 
moins un procédé exégétique qu'un type d'argumentation, 
et argumentation simple, populaire. 

D'après Schw^arz (p. 113) le raisonnement a fortiori, sous 
des formes diverses, plus ou moins complètes et explicites, 
se trouverait environ 900 fois dans la littérature tannaïte : 
Misna, Tosephta, Mekhilta, Siphra, Siphré et les baraithot 
des deux talmuds : c'est évidemment la règle herméneutique 
la plus appliquée. 

Mais est-ce de l'herméneutique et que vaut ce raisonne- 
ment? Schwarz répond : « C'est un syllogisme herméneu- 
tique ; syllogisme identique au syllogisme aristotélicien et n'en 
différant que par la forme », en ce qu'il conclut, non du 
général au particulier au point de vue de la compréhension, 
mais du particulier au général en extension. Par là d'un cer- 
tain côté il l'emporte : « car le qôl wahômèr n'est pas exposé 
à l'objection, faite depuis Sextus Empiricus au syllogisme, de 
contenir une pétition de principe ; notre raisonnement, en 
effet, même là où il n'est pas au service de l'herméneutique, 
ne veut pas démontrer, mais seulement manifester. Dans le 

1. Genèse rabba 92, 7 sur 44, 8, édition Theodor-Albegk, p. U45, 
sq. (voir là les parallèles). Les dix passages énumérés par Ismaël 
sont : Gen. 44, 8; Ex. 6, 12 ; Num. 12, 14; Deut. 31, 27 ; Jér. 12, 5 [bis] ; 
/ Sam. 23, 3; Prov. 11, 31 ; Est. 9, 12; Ezech. 15, 5. Les commentateurs 
de cette baraitha renchérissent : la Bible contient plus de dix a 
fortiori, à savoir 19 ou 31, sinon 40. Schwarz croit qu'Ismaël n'a compté 
que les raisonnements commençant par la conjonction hén [ibid., 
p. 85, sq.). 



RAISONNEMENT A FORTIORI. 85 

qôl waJjbomèr nous ne tirons pas la conclusion que, puisque 
tous les hommes sont mortels, Socrate aussi est mortel ; non ! 
le Qôl wahômèr veut démontrer tout plutôt que la mortalité de 
Socrate ; nous concluons de l'humanité que possède Socrate 
aux mortels auxquels il doit appartenir; le Qol wachomer 
nous manifeste simplement que Socrate, parce qu'il est com- 
pris dans l'espèce homme, doit aussi tomber dans le genre 
mortel \ » 

Il serait trop long- et fastidieux, pour définir le mécanisme 
logique du raisonnement, d'entrer dans d'abstruses consi- 
dérations de logique mineure. De toute façon il faut convenir 
que, si le Qal wahâmèr peut se réduire parfois à un syllo- 
gisme, il prend toujours la forme d'un enthymène dans lequel 
la majeure universelle disparait et il revêt un tour hypothé- 
tique inquiétant. Ce tour hypothétique indique, non que la 
conclusion demeure libre, mais que la vue de la conclusion 
dépend moins d'un jeu de concepts que du sentiment et des 
appréciations de l'argumentateur. C'est, du reste, ce que 
signifie notre (c à plus forte raison » , qui est senti plus que 
déduit. C'est aussi le caractère subjectif de ce raisonnement 
qui fait sa force et sa faiblesse : subjectif, il frappe plus 
vivement les esprits accordés au même diapason; subjectif, 
il ne s'impose pas. Et les innombrables qal wahômèr^ proposés 
pour appuyer une conjecture toute gratuite et réfutés par 
un simple rappel au texte [talmûd lômdr), montrent combien 
peu apodictique apparaissait cette argumentation. 

Par ailleurs, l'exemple de ce raisonnement déjà trouvé 
dans l'histoire d'HiUel nous fait prévoir que nous avons 
affaire là moins à un procédé exégétique qu'à un moyen 
de dialectique juridique; et l'examen des autres emplois 
du qal wahômèr confirment cette prévision. 

Nous avons déjà dit qu'il n'y a pas lieu de distinguer deux 
formes du raisonnement : de minore ad majus et de majore ad 
minus ; dans les deux cas c'est toujours le mécanisme de l'a 
fortiori. Les deux espèces distinguées dans les règles d'Eliézer, 

1. Ibid., p. 161, voir aussi p. 6, sq., 19, sq., 110, 157-191. Il reconnaît 
pourtant (p. 105) que dans ce raisonnement le mehr (le plus) est tout. 
Mais dans^le syllogisme tout se fonde sur l'identité. 



86 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

— explicite et implicite, — ne concernent que les textes 
bibliques ^ Peu importe la forme de l'articulation donnée 
au raisonnement : soit celle qui serait la plus ancienne : étant 
données la situation A et la situation B ne faut-il pas con- 
clure...? soit celle qui serait plus récente : si A s'est comporté 
ainsi, à combien plus forte raison B. (ou bien : il n'est pas 
besoiu de dire, cf. Q Cor. 9, 4). 

Pour illustrer ces considérations quelques paradigmes suf- 
firont. 

Pour établir que Dieu a parlé à Moïse hors des villes : 

« (Yahwé dit à Moïse et à Aaron) dans le pays d'Egypte » {Ex. 12, 1) : 
hors de la cité. Tu diras peut-être : est-ce hors de la cité ou non, mais 
à l'intérieur de la cité? Puisqu'il dit (Ex. 9, 29) : « Et Moïse lui dit : 
quand je sortirai (pour prier) de la ville »... ne peut-on raisonner qal 
wahômèr? Si la prière, qui est une chose moins importante, Moïse ne 
l'a priée que hors de la yille, l'entretien, qui est une chose plus 
importante, n'est-il pas juste (dîn) qu'il ne l'ait entretenu avec lui que 
hors de la ville ^? 

Les deux formes du qal wahômèr, en halakha et en hag- 
gada : 

« (Vous ne mangerez point la chair déchirée trouvée dans les 
champs) vous la jetterez aux chiens « [Ex. 22, 30) : au chien et à qui 
est comme un chien (l'esclave). Tu dis : au chien et à qui est comme 
un chien ou non, mais au chien suivant le sens du terme? Il est 
enseigné en ces termes (Deut. 14, 21) : « Vous ne mangerez d'aucune 

- bête morte {nebélâ, trouvée morte) ». Ne peut-on raisonner a fortiori? 
Si la bête morte {nebélâ) qui souille celui qui la porte est permise à 
l'usage (non à la manducation), la bête déchirée {teréphà, ou égorgée 

1. La sixième règle d'Eliézer donne comme type d'à fortiori implicite 
les deux propositions de Ps. 15, 4, 5 : « s'il a fait un serment à son 
préjudice il n'y change rien » : « et il n'accepte pas de présent contre 
l'innocent ». « Les conclusions sont évidentes : s'il garde un serment 
à son préjudice (par exemple de jeûner tout le temps qu'il est en mer) 
a fortiori si le serment est à son avantage : l'usage commun étant 
de recevoir des présents contre les justes, a fortiori n'en reçoit-il pas 
contx'e les impies ». 

2. Mekhilta Ex. 12, 1, p. 2. La suite montre que le raisonnement 
n'est pas tenu pour conclusif : « Pourquoi ne lui parla-t-il pas dans 
l'intérieur de la cité? Parce qu'elle était pleine d'idoles et d'abomi- 
nations. Mais tant que la terre d'Israël n'avait pas été choisie toutes 
les terres étaient aptes à recevoir les entretiens (divins) ; une fois que 
la terre d'Israël eut été choisie, les autres terres furent exclues... » 



RAISONNEiMENT A FORTIORI. 87 

non rituellement), qui ne souille pas celui qui la porte, n'est-il pas 
juste qu'elle soit permise à l'usage? Qu'est-il enseigné? « vous la 
jetterez aux chiens » : au chien et à qui est comme un chien, pour t'ap- 
prendre que le chien est plus honoré que l'esclave, car la teirèphâ est 
pour le chien et la nebélâ pour l'esclave. Cela pour t'apprendre que 
le Saint, béni soit-il, ne retient la récompense d'aucune créature, 
suivant qu'il est dit (£'a;. 11, 7) : « Personne parmi les Israélites, ni 
homme ni chien, ne remuera la langue ». Le Saint béni soit-il, dit : 
donne-lui sa récompense (les nourritures interdites à l'homme); et ne 
peut-on raisonner a fortiori? s'il en est ainsi pour une bête, pour 
l'homme à combien plus forte raison Dieu ne retiendra pas sa récom- 
pense, suivant qu'il est dit {Jér. 17, 11) : « Une perdrix couve des 
œufs qu'elle n'a pas pondus, tel celui qui s'enrichit injustement : au 
milieu de ses jours il quittera (ses richesses) et à sa lin il ne sera 
qu'un insensé «. Et il dit [Ihid. 12) : « Trône de gloire, hauteur 
éternelle, lieu de notre sanctuaire' ». 

Citons l'exemple utilisé par R. Ismaël et qui contient une 
clause intéressante : 

Par qal wahômèr, comment procède-t-on? « Yahwé dit à Moïse : si 
son père lui avait craché au visage ne resterait-elle pas sept jours dans 
sa honte? Qu'elle reste séquestrée sept jours! » (Num. 12, 14). Qal 
wahômèr pour la Sekhina (Dieu) : elle devrait rester séquestrée qua- 
torze jours, mais il suf&t à la conclusion de garder la quantité de la 
prémisse : Marie resta séquestrée sept jours hors du camp puis elle 
fut ramenée (dans le camp) 2, 

Forme encore plus condensée du raisonnement : après une 
discussion casuistique particulièrement compliquée, dans 
laquelle le maître et les élèves tiennent la même opinion, 
vient cette remarque : 

Là-dessus on disait : beau est le silence pour les sages, à combien 
plus forte raison (qal wahômèr) pour les stupides ; et c'est ainsi qu'il 
dit (Prov. 17, 28) : « L'insensé, lui-même, quand il se tait passe pour 
un sage » : et il n'est pas besoin de dire : « pour intelligent quand il 
ferme les lèvres » ^. 

1. Mekhilta in loc., p. 321. La seconde forme de l'a fortioi'i semble 
moins ancienne comme l'indique le vocable plus récent désignant 
Dieu : le Saint, béni soit-il ! 

Dans la Misna : Aicher., op. cit., p. 109-111. 

2. Siphra,! bc. La formule « il suffît »... est souvent employée; elle 
révèle qu'on tenait le raisonnement pour autre chose qu'un syllogisme, 
qui procède par identités, sinon la peine aurait dû être doublée. 

3. Tos.Pesahim, 9, 32, p. 170; le Babli, 99 a omet la dernière partie 



88 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

Nous ne transcrivons pas des sentences dans lesquelles 
les raisonnements par qal wahômèr sont repoussés, nous 
en avons suffisamment cité. Gomme le reconnaît très juste- 
ment Schwarz (p. 38, sqq.), le raisonnement ne vaut pas 
si l'analogie entre les deux termes rapprochés est insuffisante, 
si l'opposition sur un point capital empêche l'a fortiori. 
C'est confesser que ce raisonnement procède par analogie, 
ce qui ne rentre guère dans la dialectique syllogistique. 
InutEe de signaler que le qal wahômèr ne sert pas souvent 
à interpréter directement les textes bibliques. 

Enfin, indiquons les limites que la tradition impose aux 
conclusions à déduire par qal wahomer. C'est un principe 
plusiem's fois répété qu'on ne peut déduire par qal wahômèr, 
ni ' azhârâ^ interdit ou précepte négatif (surtout en matière 
criminelle), ni '^ônés, la peine dont serait frappée la transgres- 
sion de cet interdite 

Une autre règle : on ne peut déduire un qal wahômèr d'une 
halakha, c'est-à-dire qu'on ne peut prendre comme prémisse 
une prescription qui n'est pas formulée dans le texte sacré 2. 
Par là ce mode de raisonnement se rattache à l'exégèse. 

II. — Raisonnements par analogie. 

Dans l'histoire rapportée plus haut le vieil Hillel fonde son 
opinion sur une assimilation et sur une analogie. L'analogie 
est l'argument le plus employé dans les écoles de droit et 

de la sentence; le palestinien sur 9, 10 (37 a) attribue la sentence à 
Bar Qappara (fin du second siècle : baraitha) ; après avoir cité la pre- 
mière proposition de Salomon, il déduit : il n'est pas besoin de dire : 
le sage qui se tait. 

1. Schwarz, op. cit., p. 69-73, qui cite et discute les textes. 

2. Règle promulguée plus probablement par les amoras comme le 
montre la comparaison entre la Misna de Nazir, 7, 4 et sa gemara 
57 a qui ajoute cette explication au texte. Cf. Schwarz, loc. cit., 
p. 170. Cf. aussi Baba Qamma 24 b, 25 a : discussion entre R. Tar- 
phon et les rabbins. Rapprochons cette règle de la loi des conclusions 
théologiques : elles ne peuvent se déduire que de prémisses révélées. 

Il est reconnu également que les déductions obtenues par qal 
wahômèr n'ont pas valeur légale si elles concernent les choses saintes 
(ayant un rapport avec le Temple) : Sghwarz, op. cit. p., 22. La règle 
est formulée par R. Johanan (vers 250) : Zebah.im 49 b; Sebu 'ot 10 a... 



RAISONNEMENTS PAR JfcfALOGIE. 89 

dans les tribunaux : en effet, toutes les fois qu'un texte pré- 
cis ne détermine pas la conduite à tenir dans un cas donné 
on se réfère aux cas analogues déjà résolus. Les raison- 
nements par analogie tiennent une grande place dans la 
littérature rabbinique. 

1" L'assimilation, le Hèqqés. 

C'est le premier argument auquel recourt Hillel ; bien qu'il 
ne figuré, ni dans les sept règles de Hillel, ni dans les treize 
d'Ismael, nous le considérons d'abord, pour deux raisons : il 
semble comporter une analogie plus complète; les rabbins 
lui accordent une valeur supérieure : on ne peut réfuter un 
hèqqès, disent-ils ^ 

Hèqqès est le substantif dérivé du verbe qui signifie (en 
araméen) : rapprocher, heurter deux objets (faisant la paire, 
genoux, vg.) ; puis en langage technique : rapprocher, assi- 
miler deux idées, deux espèces juridiques. Le raisonnement 
consiste à assimiler deux objets, deux espèces juridiques, soit 
parce que l'Écriture les rapproche l'une de l'autre (analogie 
juxtapositionnelle), soit parce que l'une et l'autre ont divers 
points communs. Gomme dans toute analogie l'assimilation 
sera légitime dans la mesure où les points communs seront 
plus nombreux et plus essentiels. 

Assimilations venant de rapprochements verbaux dans 
l'Écriture : 

« Pendant sept jours on ne trouvera pas de levain..; quiconque 
mangera du pain levé » [Ex. 12, 19) : il assimile le levain au pain levé 
et le pain levé au levain : de même qu'il est prescrit au sujet du 
levain : « on n'en verra pas et on n'en trouvera pas « ; de même pour 
l'autre le voir et le trouver sont interdits ; de même que l'un peut être 
pétri des cinq espèces de céréales, de même l'autre^. 

1. Donné comme dicton Mena/ioi 82 b, Zebahim k^ a... 

Il est étonnant que ce procédé ne figure pas dans les règles de 
Hillel; peut-être est-il identique à la règle sixième, dont Schwarz nie 
l'authenticité : analogie tirée d'un autre passage biblique {kyôsé bô 
mimmâqôm ahér). Schwarz, Die hermeneutische. Induction^ p, 146, 
reconnaît qu'en certains cas le Aèg^és l'emporte sur la gezérasâivâ. 

2. Meknilta in loc, p. 35. L'assimilation est fondée sur le fait que les 
deux objets sont rapprochés dans le texte. 



90 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

« Yahwé parla à Moïse et à Aaron... « {Ex. 12, 1). Je trouve que seul 
Moïse fut juge de Pharaon, d'où aussi Aaron ? de ce qu'il est enseigné 
en ces termes : « à Moïse et à Aaron » ; il assimile Moïse à Aaron et 
Aaron à Moïse; de même que Moïse fut juge de Pharaon, de même 
Aaron fut juge de Pharaon ; de même que Moïse disait ses paroles sans 
avoir peur, de même Aaron disait ses paroles sans avoir peur^. 

C'est parfois l'Écriture elle-même qui fait l'assimilation : 

« Leur chair (des premiers-nés) sera pour toi, comme la poitrine 
qu'on balance et comme la cuisse droite » {Num. 18, 18) : l'Ecriture 
assimile les premiers-nés à la poitrine et à la cuisse des sacrifices 
pacifiques : de même que ceux-ci doivent être mangés dans les deux 
jours 2... 

Dans ces cas, où le point de départ est tout entier scrip- 
turaire, l'exégèse aide à comprendre le texte en le complé- 
tant en vue de son exploitation juridique. 

Parfois les rapprochements ne sont pas aussi matériels et 
l'assimilation, fondée sur un mot commun, est plus artifi- 
cielle. 

Un bel exemple : 

Rabbi disait : honorer son père et sa mère est cher devant (à) celui 
qui a dit et le monde fut, car il dit équivalents : leur honneur et son 
honneur; leur crainte et sa crainte; leur injure et son injure. Il est 
écrit {Ex. 20, 12) ; « Honore ton père et ta mère » ; et il est écrit lui 
correspondant {Prov. 3, 9) : « Honore Yahwé de ta substance » ; il 
assimile l'honneur dû au père et à la mère à l'honneur dû au Lieu 
(Dieu). 11 est écrit {Lév. 19, 3) : « Que chacun de vous craigne sa mère 
et son père » ; et, lui correspondant, il est écrit {Deut. 6, 13) : « Tu 
craindras Yahwé, ton Dieu » . 11 assimile craindre son père et sa mère 
à craindre le Lieu (Dieu). Il est écrit {Ex. 21, 17) : « Celui qui mau- 
dira son père et sa mère » ; et lui correspondant il est écrit {Lév. 24, 
15) : « Tout homme qui maudit son Dieu » . Il assimile maudire son 
père et sa mère à maudire Dieu^. 

2. Gezérâ sâwâ (Hillel, 2; Ismael, 2; Eliézer, 7) : Analogie. 

Cette expression si fréquente dans la littérature rabbi- 
nique signifie : décision (sentence judiciaire) égale. Elle 

1. Mekhilta in loc, p. 1. 

2. Siphré Num. in loc, § 118, p. 140 sq. 

3. Mekhilta sur Ex. 20, 12, p. 231. 



RAISONNEMENTS PAR ANALOGIE. 91 

désigne la forme la plus classique de l'analogie. Ces raison- 
nements par analogie très nombreux (plus de 600) ne sont 
pas toujours précédés de la désignation gezérâ Mwd\ 

Il semble inutile de distinguer entre analogies exégétiques 
et analogies juridiques : dans les deux cas l'analogie se 
fonde sur des termes bibliques et tend à suppléer ce qui 
manque, surtout au point de vue juridique, dans un passage. 

Schwarz a bien analysé le mécanisme de la gezérâ sâwâ : 
la véritable repose sur l'emploi du même mot exclusivement 
dans deux passages; c'est, ce qu'il appelle le otç X£y6[j-£vov de 
la logique grecque ; l'argument est-il pour autant irréfutable? 
Qu'on en juge sur cet exemple : 

«t Et il leur dit : soyez prêts pour le troisième jour » {Ex. 19, 15). 
Mais nous n'avons pas entendu que le Lieu leur ait dit de se séparer 
des femmes, il dit seulement {ibid. 11) « soyez prêts >. Soyez prêts (à 
juger) en gezérâ sâwâ (par analogie) : de même que le « soyez prêts » 
dit ici est pour la séparation des femmes, de même le « soyez prêts » 
dit là (11) est pour la séparation des femmes 2. 

Exemple haggadique : 

D'où montrer que celui qui détourne ses yeux de l'aumône, c'est 
comme s'il pratiquait l'idolâtrie? De ce qu'il est dit {Deut. 15, 9) : 
« Prends garde qu'il ne s'élève dans ton cœur cette pensée de Belial 
(contre le pauvre) ». Et là il dit {Deut. 13, 14) : « Des gens de Belial 
sont sortis du milieu de toi (pour entraîner à l'idolâtrie) ». De même 
que le Belial dit ici désigne l'idolâtrie, de même le Belial dit là 
désigne l'idolâtrie^. 

Forme moins rigom^euse de la gezérâ sâwâ, celle qui se 
fonde sur la présence dans deux passages de mots identiques, 
mais qui se retrouvent en d'autres contextes, le Tiepî ouotv 
X£YÔ[;-£va. La gezérâ sâwâ de Hillel fondée sur le bemâ'édo 
(en son temps) de Num. 28, 2 et 9, 2-13 est de cette forme. 

1. Schwarz étudie cette forme de raisonnement dans son livre : die 
hermeneutische Analogie in der talmudisehen Literatur, Wien, 1897. 
Dans laMisna: Rosenblatt, op. cit., p. 28, 29; Aicher, op. cit., p. 126, 
sq. 

2. Mekhilta in loc, p, 213. Inutile de souligner l'arbitraire de l'assi- 
milation. 

3. Tos Pea, 4, 20, p. 24. Schwarz note que le mot Belial, fréquent 
dans les autres livres, ne se trouve que deux fois dans la Pentateuque. 



92 EXÉGÈSE RABBINIQlîK. 

Nous donnons de cette espèce un exemple tout à la fois 

halakhique et haggadique : 

D'où montre-t-on que la circoncision doit se pratiquer dans l'organe 
reproducteur (le lieu du fruit)? R. José disait : il est dit là (Gen. 17, 
14) : « qui circoncit la chair de son prépuce »; et il est dit ici {Lév. 
19, 23) : « Vous tiendrez pour incirconcis le prépuce de leurs fruits ». 
De même qu'ici c'est dans le lieu du fruit, de même là dans le lieu du 
fruit''. 

Ces analogies établies entre deux espèces juridiques en 
raison, non de leurs ressemblances réelles, mais de quelques 
ressemblances verbales, doivent paraître à des esprits réflé- 
chis et exigeants assez peu fondées et ne pouvoir pas sup- 
porter les conclusions qu'on en tire; d'autant que les mots 
communs dont on argue sont parfois très peu topiques, par 
exemple des pronoms^. Les rabbins anciens avaient senti 
combien cette forme de raisonnement prête aux abus; ils 
avaient essayé d'y obvier. 

Ils urgeaient de plus en plus le principe que nous avons 
entendu opposer à Hillel : on ne peut établir de soi-même 
une gezérâ sâwâ; autant dire que ce raisonnement ne vaut 
que s'il prétend justifier une décision juridique déjà accré- 
ditée par la tradition ou l'autorité rabbinique. 

Autre exigence à l'égard de la gezérâ sâw^â : eUe ne doit 
utiliser comme fondant l'analogie, que des mots qui sont 
superflus {muphné, libres) tout au moins dans l'un des deux 
passages rapprochés. 

Cette exigence apparente la gezérâ sâwâ aux règles d'inclu- 
sion et d'exclusion de l'école d'Aqiba, qui tiennent compte 
des mots superflus. Voici un exemple clair de cette gezérâ 
sâvv^â plus rigoureuse : ^ 

Pourquoi est-il enseigné en ces termes {Deut. 23,. 4) : « (ils n'y entre- 
ront) jamais » et pourquoi « jusqu'à la dixième génération? » (cette 

1. Tos. Sabbat, 16, 9, p. 133; nous suivons la correction proposée 
par ScHWARz, op. cit., p. 104, le texte de Zuekermandel étant évidem- 
ment incohérent et corrompu. Inutile de noter que les mots qui fondent 
l'analogie ne se trouvent pas uniquement dans ces passages. 

2. On peut voir dans Schwhrz, p. 111-123 ce qu'il appelle les Sîî 
Xsydpva et les Tuspl Suoïv >.eYd[j.£va improprement nommés ainsi; dans 
MiLZiNER, Introduction to the Talmud, p. 148, sqq. des exemples de 
gezérâ sâwâ exorbitants. 



RAISONNEMENTS PAR ANALOGIE. 93 

econde précision parait en effet inutile). C'est pour laisser la liberté 
de faire l'assimilation et de raisonner en gezérâ sâwâ : il est dit là 
(pour les bâtards) « jusqu'à la dixième génération » et il est dit ici 
« jusqu'à la dixième génération » ; dé même que la dixième génération 
dont il est parlé ici signifie à jamais, de même la dixième génération 
dont il est parlé là signifie à jamais'. 

Voici un cas beaucoup moins net, ranalogie étant tirée 
d'un verbe plusieurs fois répété (« vous prélèverez )>) dans 
la péricope, mais jamais d'une manière explétive, à moins de 
voir dans l'apposition du verbe prélever au substantif prélève- 
ment [harmôtém terûmâ) une sorte de répétition explétive : 

« Vous en prélèverez » (Num. 18, 26). Il est libre d'assimiler, de rai- 
sonner gezérâ sâwâ (de la dîme payée par les Israélites à la dîme payée 
par les prêtres) : « vous en prélèverez », pour ne pas prélever des 
récoltes adhérentes à la terre au lieu de celles qui en ont été arrachées 
ou inversement; ou du nouveau au lieu du vieux ouréciproquement^... 

Malgré le caractère artificiel de nombre de gezérâ sâwâ, 
on ne les trouve guère contestées, surtout quand elles sont 
muphné; à ce raisonnement par . analogie sont juxtaposés 
d'autres raisonnements et les objections élevées contre cer- 
taines assimilations atteignent aussi diverses analogies ; mais 
n. est frappant de constater qu'on ne les refuse pas purement 
et simplement^. 

3° Autres raisonnements par analogie. 

A. ÉQUIVALENCES. 



Le 
le même 



rapprochement de plusieurs personnages ou objets dans 
ême texte permet de déduire qu'ils sont égaux [sâgûl, 

1. Siphré Deut. 23, 4, § 249, 120 a. Le muphné est artificiel : car 
le second « jusqu'à la dixième génération » n'est pas superflu, le « à 
jamais » étant purement explétif. 

2. Siphré Num. 18, 26, § 120, p. 147. Nous comprendrions une analo- 
logie fondée sur les ressemblances réelles entre les deux dîmes tandis 
que les conclusions fondées sur le mot « prélever » paraissent tout 
artificielles. 

3. Dans son ouvrage sur le sujet Schwarz étudie (p. 124-183) quinze 
isorrhemata (analogies fondées sur un mot superflu) soi-disant com- 
battues dans Mekliilta, Siphra, Siphré : nous y voyons que la gezérâ 
sâwâ est jointe à d'autres arguments, mais on n'objecte rien à la 
conclusion obtenue au moyen d'une analogie verbale. 



94 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

seqûlîm), équivalents, qu'on peut mettre l'un pour l'autre : 

« Si c'est un agneau qu'il amène pour le sacrifice pour le péché » 
{Lév. 4, 32). R. Siméon dit : partout les agneaux précèdent les chèvres : 
seraient-ils préférables ? Il est enseigné (5, 6) : « Il amènera une bre- 
bis ou une chèvre » : cela nous enseigne que les deux sont égaux. 
Raisonnement pareil sur les tourterelles qui précèdent les pigeons, sur 
le père qui précède la mère. 

« Et Moïse dit à Aaron » {Lév. 9, 7) : c'est ce que dit l'Ecriture {Ps. 
99, 6, 7) : « Moïse et Aaron sont entre ses prêtres et Samuel entre ceux 
qui invoquent son nom; ils invoquaient Yahwé et lui leur répondait 
dans la colonne de nuée. » Cela nous apprend que tous les trois sont 
égaux l'un à l'autre^- 

B. — TEXTES RAPPROCHÉS l'uN DE l'aUTRE. 

Nous avons déjà trouvé des textes correspondant l'un à 
l'autre [kenègedâ) : l'un explique l'autre, ainsi pour les com- 
mandements des deux tables, pour l'honneur dû à Dieu et 
l'honneur dû aux parents^. 

Usage très fréquent : rapprocher des textes qui contiennent 
des idées analogues ; ainsi : 

« Toutes les fois que Moïse élevait les mains, Israël avait l'avantage... » 
{Ex. 17, 11), Étaient-ce les mains de Moïse qui faisaient le combat ou 
qui le rompaient? Non, pour t' apprendre que toutes les fois que les 
Israélites levaient leurs yeux vers le Père des cieux et lui obéissaient 
ils avaient la victoire, et inversement. Et de même façon tu pourrais 
dire : « Fais un serpent et élève-le... » {Num. 21, 8). Un serpent peut- 
il donner la vie^?... 

C'est en raison d'une analogie supposée entre deux péri- 
copes que les rabbins admettent certaines règles de philo- 

1. Siphra Lév. in Joe, 22 ab; 43 d. Pour Aai'on et Moïse même con- 
sidération dans Mekhilta, 12, 1, p. 2. 

2. V. supra, p. 47. La règle 27 d'Eliezer, minnègèd, vise seulement 
les correspondances de nombres qui figurent dans la Bible : les 
quarante ans du désert correspondant aux quarante jours de l'explo- 
ration de la Palestine : Num. 14, 34; cf. I Rois, 11, 30. 

3. Misna Ros hassana, 3, 8. « De la même façon » {kyôsé bô) qui 
indique une association (Ps. 44, 16). La même expression est employée 
dans des textes juridiques pour dire qu'on ne peut inclure dans une 
généralisation que les objets de la même espèce, vg. pour les impure- 
tés (Siphra Lév. 5, 2,23 a), pour les sacrifices. Analogies entre espèces 
jointes dans une phrase : Rosenblatt, op. cit., 18. Même liberté pour 
les labours et pour la moisson suivant Ex. 34, 21 {Sebïit, 1, 4). 



BAISONNEMENTS PAR ANALOGIE. 95 

logie scripturaire que nous verrons dans le chapitre suivant : 
une section est dite en éclairer une autre et cependant aucun 
raisonnement ni aucune similitude de termes ne fondent cette 
analogie. 

G, — ARGUMENT TIRÉ d'uNE ESPÈCE ANALOGUE. 

Dans les discussions rabbiniques nous trouvons souvent 
un argument prétendu décisif introduit par ces mots : telle 
chose réfute ou apporte la décision {hâkiah = apporter une 
preuve judiciaire, convaincre son adversaire, d'avoir tort) : ici 
encore c'est l'analogie qui est le ressort de l'argumentation, 
mais une analogie réelle plus que verbale. Dans une longue 
discussion sur ce sujet : comment faire disparaître à la veille 
de la Pâque le levain? 

Rabbi José dit : « Vous supprimerez le levain de vos maisons » {Ex. 
12, 15) : par la combustion. Tu dis peut-être : par la combustion ou 
par tout autre moyen ? Tu peux raisonner ainsi : ce qui reste de la 
Pâque, il est interdit d'en manger, de même il est interdit de manger 
du pain fermenté ; si tu as appris que les restes doivent être brûlés, de 
même le pain fermenté. (L'adversaire reprend). Voici une réfutation 
tirée des viandes immolées irrégulièrement, qu'il est défendu de 
manger et que pourtant on n'est pas obligé de brûler : argument pour 
dire que le pain fermenté, qu'il est défendu de manger, ne doit pas 
disparaître par la combustion. 

(Le premier interlocuteur reprend) Tu as dit clairement qu'il est 
interdit de tirer parti tant des restes qae du pain fermenté : si tu as 
appris qu'on doit brûler les restes, de même le pain fermenté (Second 
interlocuteur) Voici une réfutation tirée du bœuf lapidé dont il est 
interdit de tirer parti et que pourtant on n'est pas obligé de brûler : 
arguments pour dire du pain fermenté : bien qu'il soit interdit d'en 
tirer parti, on n'est pas obligé de le brûler. La discussion se poursuit 
ainsi, le premier interlocuteur procédant par gezérâ sâwâ, le second 
par hôMah*. 

Exemple haggadique : dans un exposé juridique sur le sort 
fait aux personnes se trouvant dans une ville détruite par 
sentence judiciaire, et le sort fait à leurs biens : 

Les biens des justes qui se trouvent dans la ville périssent, mais ceux 
qui sont en dehors sont sauvés; les biens des impies, qu'ils soient au 

1. Mekhilta Ex. 12, 15, p, 28. Moins exégèse que discussion juri- 
dique. 



96 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

dehors ou au dedans, périssent. R. Eliezer (Hyrkanos) dit : réfu- 
tation par le cas de Loth : il n'était dans Sodome qu'à cause de 
ses richesses, lui aussi sortit avec uniquement ses mains sur sa 
tête (il ne sauva que sa personne) suivant qu'il est dit {Gen. 19, 22) : 
« Hâte-toi de te sauver là-bas... » Il te suffit de te sauver toi-même ^ 

De cette forme de raisonnement nous devons rapprocher 
une forme similaire : joindre deux sujets pour les éclairer 
l'un par l'autre. Dans la monition, qu'adresse le prêtre à 
l'homme venant l'informer que la lèpre s'est attaquée à sa 
maison, il doit lui dire : 

Les plaies de lèpre ne viennent qu'à cause de la médisance, sui 
vant qu'il est dit {De ut. 24, 8, 9) : « Prends garde à la plaie de la 
lèpre, en mettant en pratique et observant... Souviens-toi de ce que 
Yhwh fit à Marie ». Mais quelle relation ("inyân) y a-t-il entre l'un et 
l'autre? Ce n'est que pour nous apprendre qu'elle ne fut punie qu'à 
cause de sa mauvaise langue 2. 

Autre formule affirmant clairement la relation des deux 
sujets : 

Moïse dit à son beau-père de" vpnir avec lui, afin de lui faire du bien 
« nous allons dans le lieu que Yahvé a promis de nous donner » {Num. 
10, 29). Et les prosélytes n'y ont pas de part. Mais comment ferai-je 
droit (réaliser, meqaiyêm) au texte [Ezech. 47, 23) : « Dans la tribu où 
l'étranger (le prosélyte) est établi, là vous lui donnerez sa portion »? 
Que si cela n'a pas rapport {Hnyân) à l'héritage, fais-le rapporter à 

1. Tos Sanhédrin 14, 4, p. 436. Cette histoire ne se trouve que dans 
le passage correspondant du talmud palestinien, 10, fin, 29 d. 

Les règles 22 et 23 d'EIiezer qui contiennent le Hôkiah, se rattachent 
plutôt au hèqqés. 

Règle 22 : d'une chose qu'explique {môkiaj}) la chose voisine ; com- 
ment? « Un don fait en secret apaise la colère » {Proc. 21, 14). Cela 
signifie : celui qui donne en secret apaise la colère du Saint, béni soit- 
il! « Et un présent tiré du pli du manteau apaise la fureur violente ». 
Le premier « apaise » éclaire le second. 

Règle 23 : d'une chose qui explique la chose voisine; comment? « La 
voix de Dieu ébranle le désert. Yawhé ébranle le désert de Cadès » 
{Ps. 29, 8). N'ébranle-t-il que le désert de Cadès, n'ébranle-t-il pas les 
autres déserts? S'il en est ainsi, pourquoi dit-il « Cadès? » Pour 
éclairer au sujet des autres déserts qui sont ébranlés. Et pourquoi pré- 
cise-t-il celui-ci seul? Parce qu'il est le plus considérable de tous, à 
preuve : « Vous êtes restés de longs jours à Cadès » (Dent. 1, 46). 

2. Siphra Lév. 14, 35, 73 a. L'exégèse est, tout au moins, fort extrin- 
sèque. 



RAISONNEMENTS PAR ANALOGIE. 97 

l'expiation ; car s'il se trouve dans la tribu de Juda il trouvera expia- 
lion dans la tribu de Juda ; dans la tribu de Benjamin, il trouvera expia 
tien dans la tribu de Benjamin. Autre explication ; si cela n'a pas rap- 
port à l'héritage, fais-le rapporter à l'ensevelissement : aux prosélytes 
il est donné d'être ensevelis dans la terre d'Israël (gage de résurrec- 
tion) ^ 

Nous pouvons ranger dans cette catégorie une formule 
exégétique d'Aqiba : c'est aussi conclure d'une espèce à une 
autre. 

A propos de la poignée de fleur de farine à joindre à l'holocauste. 
Voyons à quoi cela ressemble : nous jugeons une chose qui est tout 
entière destinée à être brûlée d'après une chose qui est tout entière 
destinée à être brûlée et ne tirons pas argument de l'huile qui n'est 
pas tout entière destinée à être brûlée. Ou bien autre voie: nous jugeons 
une chose dont la moindre partie doit être jointe à la plus grande 
partie d'après une chose dont la plus petite partie doit être jointe à 
la plus grande et ne tirons pas argument de l'encens qui n'est pas 
soumis à cette condition^. 

4P Conclusions par analogies réelles. 

Les raisonnements par analogie étudiés jusqu'à maintenant 
se fondent ordinairement sur un rapprochement verbal et 
procèdent par un raisonnement explicite. Nous avons d'autres 
conclusions par analogie où le raisonnement est très réduit, 
mais où l'analogie est, ou prétend être, réelle : elle semble 

1. Siphré Num. in loc, § 78, p. 75. 

Nous exposerons plus loin les i^ègles 7 de Hillel et 12 à'Ismaël sur 
le 'inyân, qui relèvent plutôt de la philologie. 

Nous pouvons, par contre, rapprocher la règle 20 d'Eliezer, que 
Strack illustre par un exemple identique au précédent, tiré de Siphré 
Num. 18, 15, § 118, p. 138; voici le texte d'Eliezer : d'une chose 
dite dans un texte qui est sans rapport avec elle mais qui est en 
rapport avec une chose voisine ; et cela quand la chose voisine en a 
besoin alors que la première n'en a pas besoin : comment? « Et voici 
pour Juda » {Deut. 33,7). Cela est sans rapport avec Juda puisqu'il 
dit : « Écoute, ô Yhwh, la voix de Juda » ; fais-le rapporter à Siméon 
qui en a besoin, tandis que Juda n'en a pas besoin. Et tu peux dire : 
quand Moïse bénit Ruben il dit : « voici pour Juda », mais dans cette 
bénédiction il s'adressa à Siméon (omis dans la série). 

2. Siphra, Lép, 2, 2, 10 a. Ici encore déduction jiuûdique plutôt 
qu'exégèse. 

EXÉGÈSE RABBINIQUE. 4 



98 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

tirée des points communs qui rapprochent deux espèces juri- 
diques'. 

Il suffira de transcrire quelques exemples et de les com- 
menter brièvement. 

A. — ANALOGIE OU ASSIMILATION SIMPLEMENT AFFIRMÉES. 

On doit bénir pour le malheur comme pour le bonheur, suivant qu'il 
est dit {Deut. 6, 5) : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu... de toute 
ton âme » : même s'il prend l'âme. 

Dans une discussion sur ce sujet : à la fête des tentes quel est le 
nombre des branches qu'on doit porter? R. Aqiba dit : de même qu'il 
y a un seul lulab (palme) et un seul étrog (cédrat), ainsi il n'y a qu'une 
branche de myrthe et une seule branche de saule. 

De même que l'autel consacre ce qui lui convient, de même la rampe 
de l'autel consacre ; et de même que l'autel et sa rampe consacrent ce 
qui leur convient de même les vases du Temple consacrent (ce qui leur 
revient) 2. 

Ces conclusions procèdent par analogie ou par assimila- 
tion entre deux cas supposés semblables; parfois l'analogie 
peut paraître gratuite, plus souvent la logique populaire 
établit une analogie entre des espèces semblables. Le raisonne- 
ment est un enthymème, quelquefois réductible à un syllo- 
gisme vrai et légitime. La portée exégétique de ces consi- 
dérations est très contestable. 

B. — ANALOGIES RÉELLES CHERCHÉES ET MONTRÉES. 

Dans une discussion sur la formule de la bénédiction du repas : 
faut-il la modifier suivant le nombre des présents? R. José le galiléen 

1. Nous étudions ici les analogies que Schwarz {die hermeneutische 
Induktion, p. 77-136) donne comme les formes les plus simples et les 
plus anciennes du raisonnement par analogie, mais aboutissant aux 
formes plus récentes et plus compliquées de la gezérâ sâwâ et du 
hèqqés. Il nous apparaît bien aventureux en cette matière de tenter 
une histoire de l'évolution des formes de raisonnement. La principale 
différence nous paraît être dans le mode plus simple et aussi plus 
réel ; deux notes qui conviennent à la logique populaire. 

2. Misna Berakhot, 9, 5; Sukkot 3, 4; Zebahim 9, 4. Toutes ces 
analogies commencent par kesém (de même), sém, comme en bien 
d'autres cas prenant une valeur de conjonction (vg. au nom de = 
en raison de ce que); il est donc excessif de voir avec Schwarz 
dans cette formule le correspondant de Vanalogon grec, analogie. 



RAISONNEMENTS PAR ANALOGIE. 99 

est d'avis qu'il faut ia modifier suivant le nombre, car il est écrit 
{Ps. 68, 27) : « Dans les assemblées bénissez Yhwh... » (entendre, non 
et dans = M », mais « selon = M »). R. Aqiba dit : que trouvons-nous 
dans les synagogues? qu'ils soient nombreux, qu'ils soient peu nom- 
breux, on dit : bénissez Yhwh^ 

On prie pour les fortes pluies jusqu'à la fin de ^ nisan, suivant 
qu'il est dit {Joël 2, 23) : « il fera descendre sur vous l'ondée (forte 
pluie), pluie d'automne et pluie de printemps, comme jadis >■>. Paroles 
de R. Meïr. Et les sages disent : la pluie de printemps en nisan et 
la pluie d'automne en kisleu. R. Meïr leur dit : puisque les arbres 
mettent douze mois à donner leurs fruits et les moissons six mois, 
que trouvons-nous dans les arbres? Suivant qu'il est dit à leur sujet 
[Ez. 47, 12) : « Chaque mois ils produiront des fruits nouveaux ». 
Pareillement les moissons viendront en quinze jours : voici que tu 
apprends que la pluie de printemps et la pluie d'automne sont en 
nisan ^. 

Ici le raisonnement par analogie est plus explicite ; l'ana- 
logie est considérée entre les choses, non entre les termes ; 
elle est souvent gratuite. Considérations sans portée exégé- 
tique propre. 

G. RAISONNEMENTS PAR ANALOGIE COMPLÈTE. 

Schwarz compte plus de deux cents raisonnements de cette 
espèce dans la littérature tannaïte; nous retrouvons ici 
la forme habituelle du raisonnement par analogie. Quelques 
exemples : 

Si un sea de teruma (prélèvements sacerdotaux) impure tombe 
au milieu de cent seas de teruma pure, l'école de Sammai dit : 
le tout est interdit; l'école de Hillel le déclare permis. Les Hillélites 

V 

disaient aux Sammaïtes : puisque la teruma pure est interdite aux 
étrangers et que l'impure est interdite aux prêtres, de même que 
l'impure peut être neutralisée, de même aussi la pure. Les Sammaïtes 
répondirent : Non! Si les comestibles profanes qui sont permis aux 

1. Misna Berakhot 7, 3. La formule caractéristique est « que 
trouvons-nous? » C'est probablement ce mot qui explique le nom 
donné par Schwarz à cette catégorie : der zetistische Analogiescliluss 
[Zetistich de Çttcsïv, chercher?). 

2. Tos. Taanit, 1, 1, p. 214. Notre traduction rend le raisonnement 
absurde en sa forme : môrè désigne la pluie précoce, malqôs, la pluie 
tardive au temps de la récolte; mais suivant le point de vue on peut 
renverser l'ordre des termes. 



100 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

étrangers neutralisent ce qui est pur, est-ce que la teruma, défendue 
sub gravi et interdite aux étrangers pourra neutraliser la teruma 
impure? Après qu'ils se furent mis d'accord, R. Eliezer ordonna 
d'enlever la partie impure et de la brûler; mais les rabbins déclarèrent 
qu'on pouvait la considérer comme disparue en raison de sa petitesse ^. 
R. Siméon disait : il arriva une fois qu'on mesura le réservoir du 
Diskos à Yabné et qu'on le trouva insuffisant : R. Tarphon le déclara 
pur, mais R. Aqiba le dit impur. Après une première controverse sur 
la présomption de pureté, nouveau raisonnement. R, Tarphon dit : à quoi 
cela est-il semblable? à quelqu'un qui offrirait un sacrifice sur l'autel 
et on s'apercevrait qu'il est fils^ d'une répudiée ou d'une femme à qui 
on a refusé le mariage léviratique, et donc sacrifiant validement. 
R. Aqiba dit : à quoi la chose est-elle semblable? à quelqu'un qui offre 
un sacrifice à l'autel et on s'aperçoit qu'il a une tare corporelle 
et qu'ainsi sa liturgie est invalide. On se demande alors laquelle des 
deux comparaisons est juste. R. Aqiba dit : pour le bain les conditions 
d'invalidité sont en lui-même tout comme dans un prêtre ayant une 
tare elles sont dans son corps et on ne peut opposer le fils de la 
divorcée ou de la refusée dont les causes d'invalidité viennent d'autres 
que d'eux-mêmes ; pour le bain et le prêtre ayant une tare les causes 
d'invalidité sont du domaine du particulier, et on ne peut opposer 
le fils de la refusée : son invalidité vient du tribunal qui a fixé 
le prix du rachat et qui l'a déclaré impur. R. Tarphon, lui dit Aqiba, 
quiconque se sépare de toi se sépare de la vie 2. 

Nous avons dans ces deux cas, et nous les découvrirons 
dans les deux autres cas, des raisonnements par analogie : 
analogies non verbales mais réelles; analogies également 
qui ne sont pas évidentes et qui peuvent être repoussées 
par une autre argumentation. Ici, comme dans toutes les 
analogies, l'argumentateur s'efforce de montrer que l'ana- 
logie entre les deux espèces est aussi complète que possible 
et que les dissemblances ne sont pas exclusives de l'assimi- 
lation. Répétons encore que ces rapprochements contribuent 
très peu à éclairer le sens des textes et ne sont donc pas 
proprement exégétiques. 

III. — GÉNÉRALISATION d'uN CAS PARTICULIER OU d'uNE LOI. 

C'est encore un procédé de dialectique, à la fois populaire 
et juridique : étendre ce qui a été dit d'un seul cas aux cas 

1. Misna Terumot, 5, 4. 

2. Tos. Miqwa'ot, 1, 17-19, p. 653, sq. 



GÉNÉRALISATIONS. 101 

analogues : le ressort de rargumentation est toujours l'ana- 
logie. Ces généralisations sont proposées soit par le procédé 
du binyan âb, soit simplement. 

^ 1° Binyan âb (Hillel, 3 et 4; Ismaël, 3; Eliezer, 8). 

A. — BINYAN AB d'aPRÈS UNE SEULE ÉCRITURE'. 

En vue de définir plus clairement ce binyan âb, donnons-en 
deux exemples, l'un halakhique, l'autre haggadique : 

« S'il se trouve » {Deut. 17, 2) : ceci concerne les témoins, d'après le 
principe, car il est dit ici {ihid. 6) : « sur la parole de deux ou de trois 
témoins la chose sera établie » {19, 15). Voilà le binyan âb pour tout 
endroit où il est dit « il se trouve » [immâse) : l'écriture parle alors de 
deux et de trois témoins 2. 

« Tu as miontré ta grandeur » (Deut. 3, 24) : voici un binyan âb pour 
toute « ta grandeur » qui se trouve dans la Tora^. 

Ces deux exemples permettent de définir le binyan âb : 
d'un texte explicite on déduit comment on doit entendre, 
soit un mot pareil, soit une espèce juridique semblable. 
Nous pouvons également déterminer le sens à donner à 
l'expression hébraïque. Xous prenons âb au sens qii'il a 
souvent dans les passages juridiques : H désigne un principe : 
les abat des travaux serviles sont ceux qui ont été pratiqués 
à la construction de l'arche; dans un sens un peu différent 
on parle des impuretés [abat) primaires qui engendrent 
des impuretés secondaires; âb garderait un peu son sens 

1. Hillel doaaé dans sa liste : le binyan âb d'après une seule 
écriture et le binyan âb d'après deux écritures ; certains, suivant 
d'ailleurs des manuscrits anciens, proposent de lire simplement ; 
deux écritures et de voir là la règle de conciliation de deux écritures 
opposées : ainsi Schwarz, die hermeneutische Antinomie, p. 22, sq. 

ScHWARz traite du binyan d'après une seule écriture et des généra- 
lisations dans son livre : die hermeneutische Induktion in der talmu- 
dischen Literaîur, ein Beitrag zur Geschichte der Logik, Wien und 
Leipzig, 1909. 

2. Siphré Deut. 17, 2, g 148, 104 a. Évidemment le « se trouve » 
dont il s'agit concerne seulement les cas de faute tels que Deut. 
18, 10; 22, 22; 24, 7 : fautes où l'on ne peut punir que sur le témoi- 
gnage de deux et trois témoins. 

3. Siphré Deut. 3, 24, § 27, 71 a. Dans tous les textes qui mention- 
nent la grandeur de Dieu, on doit entendre comme ici : « ta main 
puissante, qui est Dieu en dehors de toi... » ? 



102 EXÉGÈSE BABBIKIQUE. 

original de père, ii constituerait des familles [béyt âb)\ cons- 
truire une famille consiste à dégager le cas-type qui donne 
leur forme à tous les autres. Le cas-type n'est pas celui 
qui, en soi, est le mieux déterminé, mais seulement celui 
dont l'Écriture définit clairement et exactement la nature'. 

Quel est le mécanisme de cet argument? Il nous semble 
que c'est une de ces analogies élémentaires si fréquentes 
dans les raisonnements populaires : d'un cas bien défini on 
passe aux autres cas plus ou moins indéterminés; un cas-type 
est érigé en principe^. 

La dialectique assez délicate de l'induction nous parait 
totalement absente d'exemples tels que celui-ci : 

« Si quelqu'un s'est rendu coupable, il confessera son péché » 
[Num. o, 6, 7). Pourquoi est-ce dit"? Comme il dit {Lév. 5, 5) : « Celui 
qui a péché confessera sa faute », je pourrais entendre uniquement 
les péchés qui impliquent l'obligation de la confession ; d'où prouver 
pour les sacrifices 'âsém? De ce qu'il est enseigné en ces termes « si 
quelqu'un s'est rendu coupable, il confessera ». R. Nathan disait : 
voilà qui construit un âb (principe) pour tous les mourants, pour 
prouver qu'ils sont tenus à faire une confession^. 

Peut-on dire que ce mode d'argumentation est plus logique 
qu'exégétique? Sa logique apparaît parfois quelque peu arbi- 
traire; dans l'exemple précédent on essaie de donner une 
base scripturaire à l'usage recommandé de la confession des 
mourants. Le côté exégétique serait plus nettement accusé si 
les mots qui servent à déterminer le binyan âb étaient, comme 
dans le muphné^ des mots superflus dans la phrase; nous 
avons étudié attentivement plusieurs de ces raisonnements, 
nous en avons découvert très peu comportant des mots super- 
flus, inutiles au contexte. Quoi qu'il en soit, le binyan âb 
aide à mieux comprendre certains passages et il a de ce 
chef une portée exégétique. 

1. ScHWARz, op. cit. p. 170-174 entend âh au sens d'espèce et binyan 
(synonyme de béyt) au sens de genre : ainsi l'opération serait une 
induction consistant à passer de l'espèce au genre : non « une argu- 
mentation généalogique, mais une opération strictement logique ». 

2. Le caractère de principe est marqué par cette qualification du 
binyan âb dans la liste d'Eliézer : « c'est un principe [yesôd, fonde- 
ment) qui instruit sur ce qui suit ». 

3. Siphré Num. in loc, § 2, p. 6. 



GÉNi;RALISATIONS. 103 

B. — BINYAN AB d'aPRÈS DEUX ÉCRITURES. 

Forme plus compliquée du binyan âb, intéressante parce 
qu'elle montre à quelles conditions doit répondre une ana- 
logie pouT' pouvoir fonder un raisonnement exégétique ou 
juridique. Donnons d'abord un exemple : 

« S'il fait tomber une dent à son serviteur » {Êx. 21, 27). J'entends 
une dent de lait aussi ; il est enseigné en ces termes « ou un oeil » : 
de même que l'œil nô peut repousser, dé même la dent stipulée ne 
peut répousser. Je ne vois que la dent et l'œil, l'extrémité des autres 
membres d'où? Voici que tu dis en raisonnant (jugeant) un binyan àb 
d'après les deux : la condition de la dent et celle de l'œil sont diffé- 
rentes; le côté égal entre les deux c'est que la mutilation de l'un et 
de l'autre cause une tare irréparable et la mutilation de l'extrémité 
de membres qui ne peuvent repousser, faite avec intention et ouver 
tement, procure l'affranchissement de la victime : de même la muti- 
lation de membres qui ne peuvent repousser procure l'affranchis- 
sement de la victime ^ 

Le procédé consiste à dégager ce qui est essentiel en deux 
espèces juridiques analogues, qui, par ailleurs, présentent 
des différences essentielles, et à étendfe la loi déterminée 
par ce point commun à une autre, ou à, d'autres espèces, 
possédant ce point commun. Ce n'est pas proprement de 
l'exégèse : ici aucun texte n'est éclairé par cette déductioïi 
juridique. 

Citons un cas un peu plus compliqué, mais construit 
suivant le même schéma : 

Il y a quatre principes (abôt) de dommages : le bœuf, la citerne, 
l'animal qui broute (les pâturages d'autrui), l'incendie. Ces espèces 
diffèrent entre elles : les unes ont l'esprit de vie en elles, le feu ne l'a 
pas; certaines ne se déplacent pas comme le bœuf pour causer un 
dommage. Lé côté égal entre ces quatre catégories c'est que toutes les 
quatre causent un dommage, que tu es obligé à veiller à cet endroit, 
et que, si elles causent un dommage, le propriétaire de la cause du 
dommage doit le réparer au mieux suivant les coutumes du pays 2. 

1. Mekhilta in loc, p. 279, sq. Dans la Bible n'est pas prévue la 
mutilation des autres membres, on la déduit de ces deux mutilations 
types. 

2. Misna, Baba qamma 1, 1 (le premier article du code criminel, de 



104 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

2« Autres formes de généralisation. 

Nous trouvons d'autres raisonnements de généralisation, 
dont certains sont identiques au procédé du binyan âb, avec 
cette seule différence qu'il n'est pas parlé de binyan âb. 
Quelques exemples, en Hag-gada : 

« Les Israélites campèrent là » {Ex. 19, 2) ; en tout endroit où il dit : 
« ils partirent et ils campèrent », leur départ se fait avec des querelles 
et leur campement avec des querelles, mais ici ils n'avaient qu'un 
cœur, c'est pourquoi il est dit : « les Israélites campèrent là en face de 
la montagne .... » « En face de la montagne », du côté oriental de la 
montagne : tout endroit où tu trouves « en face », leur face est vers 
l'Orient 1. 

Voici une généralisation juridique plus justifiée. 

« L'aigle » [Lev. 11, 14) : de même que l'aigle a pour particularité 
de n'avoir pas de doigt supplémentaire, ni de jabot, ni un gésier 
qu'on puisse peler, mais de lacérer avec ses pieds ce qu'il mange : 
est impur tout ce qui est pareil ^. 

Généralisation juridique par analogie : 

La loi ordonne de recueillir et de rendre entre autres « le manteau » 
[JDeut. 22, 4). Le manteau est compris aussi parmi ces choses. Pour- 
quoi cette mention spéciale? Pour servir à une assimilation; en te 
disant : de même que le manteau a pour particularité d'avoir dès 
marques et d'être réclamé, ainsi doit-on publier (pour les faire retrou- 
ver) tout ce qui a des marques et qu'on réclame 3. 

Généralisation juridique en raison de la précision apportée 
explicitement par la Tora : 

« Vous prendrez un bouquet d'hysope » {Eœ. 12, 22). De là tu 
apprends comment se pratique toute action de prendre, stipulée dans 
la Tora : puisqu'il est parlé en général d'actions de prendre et que 
l'Écriture précise pour l'une d'elles qu'elle ne se fait que par un bou- 
la section neziqin sur les dommages). Ces quatre types de dommages 
sont prévus|dans Ex. 21, 28-22, 5; de là on déduit toutes les lois 
essentielles des dommages. 

1. Mekhilta Ex. in loc, p. 206. Est-il besoin de faire observer com- 
bien gratuite est la conclusion? 

2. Babli Hullin, 61 a. Nous retrouvons une expression courante : 
kyôsé,fiô tout ce qui lui est pareil. 

3. Misna, Baba mesia\ 2, 5. 



GÉNÉRALISATIONS. 105 

quet, de même je précise pour toutes les actions de prendre qui sont 
dans la Tora qu'elles ne se font que sous forme de bouquets ^ 

Généralisation juridiqpie par extension d'un cas historique : 

Le roi ne peut épouser une veuve. R. Juda dit : il peut épouser la 
veuve d'un roi, car nous trouvons cela chez David, qui épousa la 
veuve de Saul suivant qu'il est dit (2 Sam. \2, 8) : « Je te donnerai la 
maison de ton maître et je mettrai ses femmes dans ton sein^ ». 

Faut-U encore noter que ces généralisations ont une 
valeur plus juridique qu'exégétique? elles tirent des 
déductions d'un texte donné, elles n'aident pas à le mieux 
comprendre. 

Cependant les commentateurs anciens voient là une indica- 
tion exégétique : ces précisions bibliques d'où l'on tire des 
généralisations montrent que la Tora parle de ce qui se fait 
d'ordinaire. 

« Vous ne mangerez point la chair déchirée qui se trouve dans les 
champs » [Ex. 22, 30). Je ne trouve que celle qui est dans les champs, 
celle qui est dans les maisons, d'où? Il est enseigné en ces termes 
[Léo. 17, 15) : « bête égorgée non rituellement et bête déchirée » ; il 
assimile l'une à l'autre. Pour la bête égorgée non rituellement il ne 
distingue pas entre la maison et les champs, de même pour la bête 
déchirée il ne distingue pas entre la maison et les champs. Mais alors 
pourquoi enseigne-t-il : « la chair déchirée qui se trouve dans les 
champs »? l'Écriture parle suivant ce qui arrive ordinairement (ce qui 
est = Adioé). Mêmes remarques sur Deut. 22, 27 ; 23, 11 ; 20, 6, introduites 
par kyôsé hô^. 

1. Mekhilta Ex. in loc, p. 37. La généralisation n'est-elle pas exces- 
sive? Certainement les « prises » sont limitées, bien qu'il n'en soit 
rien dit aux végétaux. 

Nous trouvons ici un procédé analogue, sinon identique, à un 
procédé que nous étudierons plus loin : général et singulier, mention 
sans précision {sâtûm) et mention précise, particulière (perât). 

2. Misna Sanhédrin 2, 2. Schwarz, op. cit. p. 162-170, cite treize 
exemples pareils pris dans la Misna et la Tosephta, tant pour la halakha 
que pour la haggada : formes élémentaires du binyan âb, qui attestent 
à la fois l'ingéniosité exégétique des rabbins et leur respect pour la 
Bible, dont tous les textes font loi. 

3. Mekhilta in loc. p. 320, sq. Cette propriété attribuée à l'Écriture 
rappelle celle que définit Ismaël et que nous avons déjà rapportée : 
l'Écriture parle suivant la coutume, suivant les mœurs humaines, 
kedèrèk 'ères. 

Dans la dix-huitième règle d'Eliézer, le premier exemple est ce 



106 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

IV. — GÉNÉRAL ET PARTICULIER. 

La cinquième règle de Hillel est ainsi formulée : « général 
et particulier, particulier et général » (Kelâl ûpherât, ûpherât 
ûkeldl)y ce que nous pouvons entendre en deux sens : ou bien 
les deux consécutions dans l'Écriture, général puis singulier, 
singulier puis général ; . ou bien, diverses combinaisons 
possibles entre le général et le singulier. Les règles 4-11 
d'Ismaël présentent huit combinaisons possibles entre le 
général et le singulier. 

Avant d'exposer ces règles il convient de définir les mots 
qu'elles emploient. Keldl (du verbe kàlal, à peine usité en 
hébreu biblique = embrasser, compléter) désigne la totalité, 
l'ensemble, le général, la somme des cas particuliers ; et aussi 
la règle, le principe ^ Son sens se précise par le perdt^ 
auquel on l'oppose : perât (du verbe jiârat = déchirer, 
arracher) désigne le particulier, le singuUer. Aurions-nous 
ici l'opposition classique du général et du singulier? En 
partie, mais pas toujours avec la rigueur de nos catégories 
logiques ; la valeur vraie du couple nous semble exprimée par 
les verbes correspondants, dont se sert le vocabulaire 
rabbinique : parler en général, exprimer une idée en forme 
générale ou en forme particulière^. 

Nous allons passer en revue les huit combinaisons de 

même texte ; la règle est ainsi formulée : d'une chose qui n'est dite 
que suivant une de ses parties et qui a une extension générale ; si 
c'est ainsi pourquoi est-elle dite seulement en partie? parce que 
l'Ecriture parle de ce qui arrive d'ordinaire. 

1. ScHWARZ étudie le sens du mot, très ancien et très usité dans la 
littérature rabbinique (plus de 100 fois dans la Misna et plus de 130 fois 
dans la Tosephta), dans son ouvrage : die hermeneudsche Quantitàts- 
relation in der talmudischen Literatur, Wien, 1916, p. 163-180 {die 
sopherische Bezeichnung des Allgemeinen und Besonderen) ; quel- 
quefois il laisse entendre que kelâL désignerait le genre. 

KeLâl au sens de principe dans celte sentence de R. Aqiba : « voici 
le plus grand principe de la Tora : aimer le prochain comme soi même » 
{Sip/ira Léc 19, 18, 89 b). 

2. Le rédacteur remarque au commencement de la parasa Ex. 12, 43 : 
il y a des sections où il formule le général (participe présent :,kôlél) au 
commencement et le particulier à la fin, et d'autres où il formule le 
particulier au commencement et le général à la fin {Mekhilta, p. 52). 



GÉNÉRAL ET PARTICULIER. 107 

général et particulier prévues dans les règles d'Ismaër ; sur 
ces exemples nous verrons quelle valeur logique et exégé- 
tique on peut attribuer à ces règles herméneutiques. 

1° Kelàl ûpherât, général et singulier: il n'y a dans 
le général que ce qui est dans le singulier. 

« Personne d'entre vous ('îs, 'îs, deux fois répété) ne s'approchera 
d'une femme sa proche parente pour découvrir sa nudité » (Lêv. 18, 6) : 
général; « tu ne découvriras pas la nudité de ton père ni de ta 
mère » (7) : particulier. Général et particulier, il n'y a dans le général 
([ue ce qui est dans le particulier. Car on pourrait raisonner ainsi : 
Puisqu'il est permis d'épouser la fille du frère de son père et que le 
frère du père peut épouser la fille de celai-ci, si j'apprends que lui est 
interdite la femme du frère de son père, pareillement le frère de son 
père ne peut épouser la femme de celui-ci. Puisqu'on peut épouser la 
femme de son beau-fils, le beau-fils peut épouser la femme de son 
beau-père, mais si j'apprends que lui est interdite la fille de son beau- 
fils il faut aussi que son beau-fils ne puisse épouser sa fille. Si tu parles 
ainsi tu déduis par raisonnement des interdits matrimoniaux; c'est 
pourquoi il est dit : «c Personne... » : général et particulier, il n'y a 
dans le général que ce qui est dans le particulier 2. 

Le cas est assez compliqué ; il montre que le général n'est 
pas à traiter comme un principe général dont on pourrait 
déduire, analytiquement ou par analogie, toutes sortes de 
conclusions ; l'extension du général est limitée par toutes les 

Perât indique parfois (dans l'école d'Aqîba) une exception : « la 
lèpre dans la maison de la terre que vous posséderez » (Léi>. 14, 34), 
sauf (cela excepté) une maison construite sur une barque ou dans une 
exèdre sur quatre poutres, avec inclusion de celle qui est bâtie sur des 
arbres (pilotis?) ou sur des colonnes Siphra, 73 a). 

Il y aurait lieu parfois de rapprocher sâtûm (indéterminé) de kelâl ; 
l'opposition entre sâtûm et mephôrâs correspond en certains cas à 
celle de kelâl et de perât. 

1. Schwarz assure que ces huit règles sont disposées suivant un 
ordre logique. Il les divise en deux catégories : les trois premières sont 
des relations quantitatives synechesischen^ qui font rentrer le particulier 
dans le général (de cuvsxstv); les cinq autres sont des relations quanti- 
tatives apochoristiques, qui font sortir le particulier du général (de 
ànoy^optÇsiv^. 

2.^ Siphra Lêv. 18, 6, 86 b. Remarquons la règle déjà mentionnée ; 
on ne peut fonder sur un raisonnement une prescription légale. Il est 
évident que les termes « la femme du frère de son père » et autres 
pareils désignent la veuve. 



108 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

précisions particulières qui suivent, elles le spécifient et 
empêchent, par conséqiient, qu'on ne l'étende à tous les cas 
particuliers ou à toutes les applications qu'il pourrait 
admettre. 

Voici un exemple plus clair : 

« (Vous offrirez) une corbeille d'azymes », général, « de fleur de 
farine, de gâteaux pétris dans l'huile et de galettes azymes » (N'uni. 
6, 15), particulier. Général et particulier, il n'y a dans le général que 
ce qui est dans le particulier. Car on pourrait raisonner ainsi : puisque 
le sacrifice d'action de grâces comprend du pain et qu'au bouc du 
nazir on doit joindre un pain, si j'apprends que le sacrifice d'action de 
grâces comporte les quatre espèces il faut aussi que le bouc du nazir 
comporte les quatre espèces; mais il est enseigné en ces termes : «une 
corbeille d'azymes » général, « de farine ».... particulier; il n'y a dans 
le général que ce qui est dans le parti culier"". 

Nous saisissons bien ici le mécanisme de la méthode. Ce 
qui est appelé général ne l'est que par une coupure arbi- 
traire dans la phrase : ce n'est donc, ni une analyse logique 
de la proposition, ni une opération de logique qui découvre 
ce général ; et il en est ainsi de maint autre keldlj point de 
départ pour un raisonnement analogue. Si la corbeille 
d'azymes est le général, son extension est déterminée par 
les mentions particulières qui suivent aussitôt. Il ne faut donc 
pas concevoir l'opposition entre le kelâl et le perât comme 
l'opposition entre nos deux catégories logiques du général 
et du particulier. La relation de l'un à l'autre n'est pas une 
relation logique permettant de conclure du général au par- 
ticulier ou de faire une induction du particulier au général : 
le rapport du général au particulier, ou plus exactement à 
ses points particuliers, est exclusivement déterminée par les 
termes du texte. De ce chef nous pouvons relever une grande 
parenté entre cette règle et celles du ribbûi et du mVût 
(inclusion et exclusion) que nous verrons plus loin : la seule 
différence est que dans ces dernières l'exclusion et l'inclusion 
sont déterminées par la teneur du texte sans l'intervention 
d'aucun raisonnement. 

1. Siphrê Num. 6, 15, ^ 34, p. 39. 



GÉNÉRALE PARTICULIER. 109 

Il y a lieu de rapprocher cette réaction du j^erât sur le 
kelâl de la réaction du perâf sur le sâtum (indéterminé) : 

« Quand des hommes se querellent » {Ex. 21, 18) : il n'est parlé que 
d'hommes, les femmes d'où (lés inclure?) R. Ismaël dit : puisque 
tous les dommages de la Tora sont présentés d'une manière indéter- 
minée et qu'une écriture précise pour l'un d'entre eux que les femmes 
sont sur le même pied que les hommes, je puis préciser aussi pour 
tous les dommages mentionnés dans la Tora que les femmes sont sur 
le même pied que les hommes. R. Josia dit : « un homme ou une 
femme » {Num. 5, 6) : pourquoi est-ce dit? Pour mettre sur le même 
pied (déclarer égaux) les femmes et les hommes en ce qui regarde les 
dommages mentionnés dans la Tora^. 

Le mot qui sert à préciser est pris dans un texte fort 
éloigné et qui n'a pas un rapport direct avec le texte com- 
menté; il est pourtant admis que ce mot suffît à déterminer 
GT sens de prescriptions indéterminées [sâtûm). 

3° Perât ûkelâl. Particulier et général : le général ajoute au 
particulier et nous comprenons (dans lô particulier) le tout 
(le contenu du général). 

Un exemple suffira à illustrer cette règle et permettra de 
la définir : 

« Si quelqu'un donne à garder à son prochain un âne, ou un bœuf 
ou une brebis » {Ex. 22, 9). Je ne trouve que «âne, bœuf et brebis», 
tous les autres animaux, d'où (les tirer)? Il est enseigné en ces termes 
{ibid.) « ou toute sorte de bétail ». Je lis « toute sorte de bétail » et 
pourquoi est-il enseigné en ces termes « âne, bœuf ou brebis »? Si les 
derniers mots étaient seuls dits, je pourrais entendre : je ne suis pas 
tenu tant qu'on ne m'a pas confié tout le bétail ; il est enseigné en ces 
termes « âne, bœuf ou brebis », pour obliger à l'égard de chacun. 
Pourquoi alors est-il enseigné « toute sorte de bétail »? C'est que 
l'Écriture t'apprend que si un général s'ajoute à un particulier, chaque 
particulier est à comprendre suivant la notion du général 2. 

Tout cela est de l'exégèse : expliquer la raison d'être de la 
mention générale d'animaux après l'indication de quelques 
animaux particuliers. Si la règle était l'inverse de la règle 
précédente on pourrait conclure que « tout bétail » comprend 

1. MekhiltaEx. 21, 18, p. 269. Perât, en ce sens de préciser, parti- 
culariser, est très fréquent dans les commentaires de l'école d'IsmaBl- 

2. Mekhilta in loc. p. 302, sq. 



ilO EXÉGÈSE RABBINIQTJE. 

uniquement les trois espèces mentionnées. Un exégète moderne 
l'entendrait ainsi : les trois animaux nommés d'abord le sont 
comme des exemples particuliers et l'addition « tout bétail » 
se rapporte à tout autre animal qui pourrait être pareillement 
confié en dépôt. Nous ne voyons pas, devons-nous confesser, 
le bien-fondé de l'exégèse rabbinique : on est responsable 
de chaque animal en particulier : n'est-ce pas évident? 

3° Kelâl ûpherât ûkelâl. Un singulier entre deux généraux : 
tu dois conclure d'après le singulier. 

Voici un premier exemple simple : 

« Quel que soit le corps du délit », général, « bœuf, âne, brebis ou 
vêtement », particulier, soit général et particulier; il n'y a dans le 
général que ce qui est dans le particulier. Mais comme il dit : « sur 
tout objet perdu dont on dira »... (Ex. 22, 8), de nouveau général. Ou 
bien est-ce que ce nouveau général est comme le premier? tu réponds : 
non, mais général, particulier et général, tu ne juges (conclus) que 
suivant le particulier : de même que le particulier précise : les biens 
mobiliers qui n'admettent pas de recours, de même j'étends (la pres- 
cription) uniquement aux biens mobiliers qui n'admettent pas de 
recours''. 

Cette exégèse veut justifier une prescription légale relative 
aux objets perdus, ou confiés, réclamés par deux plaignants. 
Est-elle fondée elle-même exégétiquement? Il semble que la 
distinction de deux affirmations générales soit presque uni- 
quement verbale : « tout corps de délit » {kôl dâbâr pesa') 
est lié grammaticalement à « au sujet duquel on dira » ; le 
second général « ou tout objet perdu » introduit une géné- 
ralisation du cas qui, en fait, s'identifie au « tout corps de 
délit » : la détermination de cette espèce générale se fait 
ingénieusement en réduisant au facteur commun les quatre 
exemples énumérés : objets mobiliers. 

Le procédé apparaît plus contestable quand le second géné- 

1. Mekhilta in loc. p. 300, sq. Recours {'aliariût)^ qu'on peut exer- 
cer contre l'acheteur d'un bien immeuble qui ne paye pas, mais non 
contre l'acheteur de biens meubles. C'est quelque peu l'équivalent de 
jios hypothèques pesant sur une propriété vendue, mais dont l'acte de 
vente ne porte pas quittance. 



GÉNÉRAL ET PARTICULIER. 111 

rai, comme il arrive souvent, est pris dans un autre texte 
que le texte commenté : 

« Quant au rachat, tu le rachèteras depuis l'âge d'un mois » général, 
« selon ton estimation contre cinq sicles d'argent » {Num. 18, 16), par- 
ticulier : soit général et particulier, il n'y a dans le général que ce 
qui est dans le particulier. « Et tout premier-né des hommes d'entre 
tes fils, tu le rachèteras » [Ex. 13, 13); de nouveau général. Est-ce que 
ce général est comme le premier? Tu dis : non ! mais général, parti- 
culier et général, tu ne juges (ne conclus) que d'après le particulier 
en ces termes : de même que le particulier précise des biens mobiliers 
pour lesquels il n'y a pas de recours, de même le général ne comprend 
que des biens mobiliers pour lesquels il n'y a pas de recours. D'où le 
dicton : on rachète les premiers-nés des hommes avec toute valeur, sauf 
avec des esclaves, des documents (lettres de change) et des terrains ^. 

4° Général qui a besoin du particulier (d'être précise, parti- 
cularisé) et particulier qui a besoin du général (d'être gé- 
néralisé). 

« Consacre-moi tout premier-né » (Ex. 13, 2). Voici une des treize 
règles au moyen desquelles la Tora est interprétée : du général qui a 
besoin de son particulier et du particulier qui a besoin de son général. 
« Consacre- moi tout premier-né, qui ouvre le sein » général : tout aussi 
bien les mâles que les femelles, suivant le sens. « Tout premier-né qui 
naît » {Deut. 15, 19), particulier : sont exclues les femelles suivant le 
sens (masculin). Si je ne lisais que le général et non le particulier, je 
pourrais entendre : quiconque naît le premier, soit mâle, soit femelle, 
est le premier-né (dont il s'agit) ; mais il est enseigné : « tout premier- 
né qui naît », tout mâle et non les femelles. Si je ne lisais que le singulier 
et non le général je pourrais entendre : tout mâle qui naît, qu'il ouvre 
ou non le sein, est premier-né; il est enseigné « consacre-moi tout pre- 
mier-né », à condition qu'il soit premier-né et qu'il ouvre le sein, pour 
réaliser ce qui est dit {Ex. 34, 19) : « Tout ce qui ouvre le sein est à 
moi et tout premier-né mâle de tes troupeaux »2, 

Dans le texte le mécanisme du raisonnement est assez indi- 
qué pour n'avoir pas besoin d'y revenir : c'est bien de l'exé- 
gèse, mais certainement inutile : évidemment le texte ne 
présente pas toutes les précisions qu'on lui ajoute d'ailleurs, 

1. Siphré Num. 18, 16, §118, p. 138, sq. Dans Mekhilta sur Ex. 13, 
13 nous retrouvons le même raisonnement avec seulement une addi- 
tion : biens mobiliers qui n'admettent pas de recours et dont la subs-^ 
tance est mammôn (bien matériel). 

2. Mekhilta in loc, p. 57. 



112 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

mais tout cela n'était-il pas connu ou sous-entendu? Remar- 
quons aussi que le particulier est puisé dans un texte fort 
éloigné : c'est de la jurisprudence correcte, est-ce de la bonne 
exégèse? 

5° D'un élément qui sort (fait exception) du général pour 
enseigner quelque chose : il en sort pour instruire, non à, son 
sujet, mais au sujet du général tout entier. 

(Cf. règle 25 d'EHézer.) 

Ce procédé se présente sous deux formes un peu diiférentes. 

« Tu ne te vêtiras pas » (d'un tissu mélangé de laine et de lin 
{Deut. 22, 11). Il ne s'agit que de se vêtir, d'où l'interdiction de 
se couvrir? Il est enseigné en ces termes {Léo. 19, 19) : « Un vête- 
ment fait de deux espèces ne montera pas sur toi ». On pourrait 
entendre : il est interdit de les rouler et lier sur son épaule. Il est 
enseigné en ces termes « tu ne te vêtiras pas » . Être vêtu était dans 
le général et en est sorti, pourquoi? Pour servir de point de com- 
paraison : de même que le vêtement a la particularité de servir au 
corps, de même le « ne montera pas^ ». 

Le terme générique est « monter sur le corps » , l'élément 
qui sort (fait exception) de ce général, mais dans un texte 
tout différent et fort éloigné, est « vêtir ■» , qui détermine le 
sens à donner dans le cas présent à « monter sur le corps ». 

« Dieu leur dit toutes ces paroles » (£"^1:. 20, 1). Il est possible 
qu'ils n'aient dit qu'à la lin (du décalogue) : nous acceptons. Il est 
enseigné en ces termes « moi Yahwé » : moi est dans le général 
et en est sorti pour instruire sur le général. De même que « moi » 
est une parole qui est pour elle-même et que l'acceptation est pour elle) 
même, chaque parole (du décalogue) fut dite pour elle-même et l'accep- 
tation fut prononcée pour chacune d'elles 2. 

Ici, dans le domaine de la haggada, l'exégèse est moins 
rigoui'euse ; cependant il est difficile de reconnaître de l'exé- 
gèse proprement dite; nous avons seulement la démonstra- 
tion, par un procédé qui semble logique, d'une tradition 
historique^ accréditée d'ailleurs. 

1. Siphré Deut. 22, 11. § 232, 117 a. 

2. Mekhilta de Siméon h, Yohai^ in loc, p. 103. Le commentaire 
rappelle que chaque commaadement était ponctué du « moi Yahwé » : 
d'où l'on déduit que chaque commandement du décalogue était accepté 
séparément pour lui-même, non tous en bloc après la pi-omulgation. 



GÉNÉRAL ET PARTICULIER. 113 

6" Tout élément, qui était dans le général et qui sort du général 
pour stipuler une condition de même espèce que le général, 
sort pour alléger et non pour aggraver. (Règle 9 d'Ismaël). 

Voici l'exemple proposé dans la baraitha d'Ismaël : 

« Une chair laquelle aura sur la peau un ulcère et lorsque cet 
ulcère sera guéri » (Lêv. 13, 18). Et il est écrit (ibid. 24) : « Une chair 
qui aura sur la peau une blessure faite par le feu ». Est-ce que 
l'ulcère et la brûlure ne sont pas dans la règle (le général) des plaies? 
Sortant de la règle pour une stipulation en harmonie avec la règlcj 
ils sortent pour alléger et non pour aggraver ; pour alléger, à savoir : 
on ne décide pas à leur sujet suivant la « reviviscence de la chair » 
{ibid. 10) et la sentence ne demande qu'une semaine. 

Nous avons là tout à la fois de l'exégèse et du droit : 
exégèse en ce qu'est ainsi expliqué pourquoi ces cas parti- 
culiers de la législation sur la lèpre reçoivent un traitement 
plus indulgent. 

1° Tout élément, qui est compris dans le général et qui en sort 
pour une stipulation d'un antre ordre que le général, en 
sort et pour alléger et pour aggraver. 

« Si le bœuf frappe un esclave ou une servante {Ex. 21, 32). 
« Esclave » était compris dans la règle générale {ibid. 28) « qu'il 
tue un homme ou une femme ». Or l'Écriture les fait sortir de la 
règle générale pour l'alléger et pour l'aggraver. Pour alléger : si 
l'un ou l'autre valait cent mines, il ne donne que trente sicles 
{ftélas); pour aggraver : s'ils ne valaient qu'un denier, il donne 
trente sicles ^. 

La portée de la règle est fort clairement indiquée dans 
cet exemple ; ici nous avons une exégèse, mais nous voudrions 
une exégèse historique et morale, expliquant pourquoi le 
meurtre d'un esclave par le bœuf méchant est moins grave- 
ment puni que celui d'une personne libre. De ce point de vue 
toutefois est bien vérifiée la condition de cette règle : l'excep- 
tion prévue déroge à la loi générale, 

1. Mekhiha Ex. in loc.,i^. 287. L'expression « qu'il tue » n'est pas 
textuellement dans le texte, mais équivalemment. 



114 EXÉGÈSE RABBINÏQUE, 

8" Si un élément qui est dans la règle générale en sort (en 
est excepté) pour une stipulation nouvelle, on ne peut pas 
le ramener à la règle générale tant qu'une écriture ne l'y a 
pas ramené expressément. 

Exemple donné dans la liste d'Ismaël : 

Dans une discussion sur les sacrifices notre règle est invoquée. 
« Il immolera l'agneau dans le lieu où l'on immole les victimes pour 
le péché et l'holocauste, à savoir dans le lieu saint » {Lév. 14, 13), 
puisque, comme le sacrifice pour le péché {halo'), il est sacrifice 
de réparation... Car il n'est pas dit « il est comme un sacrifice de 
péché de réparation », mais « comme le sacrifice de péché » est « le 
sacrifice de réparation [halat, 'asem) )>, parce qu'il est fait exception 
(il sort) pour le sacrifice de réparation pour le lépreux pour une 
stipulation nouvelle, à savoir que le prêtre met du sang du sacrifice 
de réparation sur le pouce de la main, sur le pouce du pied et sur 
le lobs de l'oreille droite {ibid. 14) : à cause de cela on pourrait croire 
que ce sacrifice n'oblige pas à offrir sur l'autel le sang et les portions 
à brûler (comme dans les sacrifices de réparation (Lév. 7, 2-5) ; aussi 
est-il enseigné en ces termes : « comme le sacrifice pour le péché 
ce sacrifice de réparation est pour le prêtre »; par là l'Écriture 
le ramène clairement à sa règle générale en te disant : de même 
que le sacrifice pour le péché comporte les offrandes sur l'autel, 
de même ce sacrifice de réparation comporte les ofirandes sur 
l'autel 1. 

Dans le sacrifice du nazir le prêtre prend pour lui « l'épaule du 
bélier quand elle est cuite... plus la poitrine balancée et la cuisse 
prélevée ». [Num. 6, 19, 20). Pourquoi est-ce dit? Comme il dit 
[Lév. 7, 34) : « Car j'ai pris (pour les prêtres) la poitrine balancée 
et la cuisse prélevée », on doit entendre aussi le sacrifice pacifique 
du nazir, mais l'écriture l'excepte de la règle générale dans le 
prélèvement de l'épaule. Je ne trouve que le prélèvement de l'épaule ; 
le prélèvement de la poitrine et de la cuisse, d'où ? Je puis raisonner 
ainsi : si le sacrifice pacifique du particulier qui ne comporte pas 
le prélèvement de Tépaule comporte le prélèvement de la poitrine 
et de la cuisse, n'est-il pas juste que le sacrifice pacifique du nazir, 
qui comporte le prélèvement de l'épaule, comporte aussi le prélève- 
ment de la cuisse et de la poitrine? Si mon raisonnement vaut, 
pourquoi est-il enseigné en ces termes : « il sera pour le prêtre outre 
la poitrine balancée et la cuisse prélevée »? C'est que toute chose 

qui est exceptée de la règle générale pour une prescription nouvelle, 

1. Zebaliim 49 ab, mais allégé par la baraitha d'Ismaël de consi- 
dérations formant remplissage. 



GÉNÉRAL ET PARTICULIER. 115 

ne peut être ramenée à la règle générale (restitutio in inlegnim 
que si une écriture la ramène à sa règle générale ^ . 

Ces deux exemples sont suffisamment clairs pour qui prend 
la peine de se référer aux textes bibliques : dans les deux 
cas nous trouvons une dérogation à une loi générale; la 
dérogation serait totale si une prescription expresse ne réin- 
tégrait ce cas particulier dans la loi générale. 



* '^ 



Ces diverses règles sur les combinaisons du général et du 
particulier manifestent au mieux les caractères essentiels de 
l'exégèse rabbinique : connaissance approfondie des Écri- 
tm'es, analyse pénétrante de leurs ressemblances et dif- 
férences, prurit de tout expliquer et démontrer même si c'est 
inutile. 

Appendice — Transcrivons ces deux règles d'Éliézer qui 
ressemblent aux règles précédentes, sans leur être iden- 
tiques : 

24. D'une chose qui est dans le général et qui en sort : elle en sort 
pour apprendre quelque chose sur elle-même. Comment? (Jos. 2, 11) 
« Josué envoya... pour voir le pays et Jéricho ». Jéricho n'est-il pas 
dans le général du pays? Il en sort pour apprendre sur lui-même 
qu'il est équivalent en force atout le pays... Autre exemple : 2 Sam. 2'â, 
24 : serviteurs de David et Asael, égal à tous. 

25. D'une chose qui est dans le général et qui en sort pour instruire 
sur son compagnon (le général) Comment? {Num. 35, 31) « Vous 
n'accepterez pas de rançon pour l'âme de l'homicide ». L'exécution 
de l'homicide n'est- elle pas dans le général de toutes les punitions? 
elle en sort pour enseigner : pour un homicide on n'accepte pas de 
rançon, mais on en accepte pour une dent, un œil, une main, un pied , 
pour une blessure et toutes les autres plaies. 

1. Siphré Num. 6. 20, § 37, p. 40. sq. Schwarz estime que le 
raisonnement a fortiori est une interpolation; il nous semble, au 
contraire, nécessaire : la restitutio in integrum, au terme de la 
règle, doit être prononcée, non par un raisonnement, mais expres- 
sément par une écriture. Kuhn, dans sa traduction, p. 115, ne jette 
aucune suspicion sur l'authenticité de ce raisonnement par a fortiori : 
il est bien dans la manière des exégètes rabbins, qui pensent pouvoir 
toujours raisonner. 



CHAPITRE IV 

EXÉGÈSE PHILOLOGIQUE. 

Il est évident que, poUr dégager la signification d'un texte, 
il importe de tenir compte de tous les éléments qui le compo- 
sent : établir une leçon exacte et correctement orthographiée, 
connaître le sens des mots employés, remarquer les particu- 
larités grammaticales et stylistiques, propres, soit à la langue, 
soit à l'auteur étudié, par conséquent ici les propriétés des 
écrits bibliques : c'est l'exégèse philologique, qui étudie les 
diverses composantes du discours. Cette sorte d'exégèse 
s'impose à quiconque veut déterminer objectivement le sens 
d'un écrit. Cependant bien que sa nécessité soit primordiale, 
il ne semble pas qu'elle ait été pratiquée dès l'abord, avant les 
exégèses directe et dialectique : elle suppose des habitudes 
plus scientifiques, moins primitives. 

Cette forme d'interprétation tient une g'rande place dans les 
travaux des scoliastes g-recs ; nous la trouvons aussi chez les 
commentateurs rabbiniques, moins abondamment que les 
autres formes d'exégèse et reléguée, semble-t-il, à un rang 
subalterne. 

Cette exégèse, intrinsèque au texte, dépendant de disciplines 
précises, telles que la lexicographie et la grammaire, devrait, 
croirait-on à première vue, être défendue contre tout 
arbitraire et toute fantaisie, et ne fournir jamais qu'un sens 
littéral indiscutable. Chez les rabbins elle aboutit souvent 
à ce précieux résultat, malheureusement trop souvent aussi 
l'ouvrier, pour fonder un argument scripturaire dont il a 
besoin, abuse de cet instrument de précision; déviations 
qui trouvent leur explication et leur excuse : l'exégèse n'est 
pas entreprise, dans un esprit désintéressé, pour découvrir 
le sens d'un texte, mais pour démontrer une thèse déjà ac- 
quise ; toutes les particules des livres sacrés ayant une valeur 



CRITIQUE TEXTUELLE. 117 

divine peuvent être exploitées de toutes les façons en vue d'y 
déceler les vérités divines qu'elles renferment. 

Nous divisons ce chapitre en quatre paragraphes, suivant 
les divers secours que peuvent apporter à l'intelligence du 
texte : l'étude du texte en lui-même (1), les considérations 
lexicog-raphiques (2), grammaticales (3) et stylistiques; à ces 
dernières se joignent les remarques sur les particularités du 
langage biblique (4). Nous ne nous dissimulons pas que cette 
division n'est pas absolument adéquate : certaines remarques 
de lexicographie et de style pourraient être rangées dans les 
propriétés de la littérature biblique et réciproquement. Par 
ailleurs, tel procédé herméneutique, que nous faisons rentrer 
dans la stylistique, pourrait trouver sa place dans l'exégèse 
dialectique. 

I. ÉTUDE DU TEXTE EN LUI-MÊME. 

1° Critique textuelle 

On sait tous les travaux des Massorètes pour assurer la 
transmission exacte des livres sacrés, défendre la lettre contre 
toute altération; ils continuaient une tradition qui remonte 
probablement aux anciens scribes ; nous trouvons déjà dans 
les écrits tannaïtes des remarques sur le texte biblique qui 
préludent aux statistiques des Massorètes : nombre de lettres 
et de mots, étendue des diverses sections, forme singulière de 
certaines lettres \.. 

Il n'est donc pas étonnant que dans leurs exégèses les doc- 
teurs anciens aient donné une attention particulière à l'état 
du texte qu'ils voulaient expliquer. 

Dans les commentaires tannaïtes nous trouvons déjà des 

1. Voir Blau, Masoretische Untersuchungen. 

L. Blau, Zur Einleitung in die Heilige Schrift, 1894. 

C. RoTHMUELLER, Masorstlche Eigentûmlichkeiten der Schrift, ihre 
Bedeutung und Behandlung im talmudischen Schriftum, Zagreb, 1927. 

L. DôBSCHUETZ, op. cit. p. 36, sq. 

H. L. Strack, Prolegomena critica in Vêtus Testamentum. hebraicum, 
Lipsiae, 1973, p. 66-94 

Bernhard Kœnigsberg, Aus Masorah und Talmudkritik, Berlin, 
1892. 



118 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

remarques de critique textuelle, la mention de variantes . 

Il se trouvait trois volumes (du Pentateuque) dans la cour (du 
Temple) : celui de me'ônîm, celui de hf hV et celui qui était appelé 
volume ze'atûUm. Dans l'un (des trois) était écrit {Deut. 33, 27) : m' on 
qdm et dans les deux autres : m'ona elhi qdm] les sages annulèrent 
(la leçon du premier) pour garder celle des autres. Dans l'un était écrit 
{Ex. 24, 5) : il envoya les ze'atutey, fils d'Israël, et dans les deux autres 
ils trouvèrent écrit : il envoya les jeunes gens fils d'Israël ; ils gar- 
dèrent la leçon des deux volumes et annulèrent celle du premier; dans 
un ils trouvèrent écrit onze fois hû" et dans lès deux autres onze 
fois hV; ils annulèrent les deux derniers pour ne garder que le 
premier ^. 

La mention de la variante écartée précise la valeur à 
donner au texte de Beut. 33, 27 : Dieu refuge pour ses fidèles- 

On oppose plusieurs fois à la leçon reçue la leçon que por- 
tait le Pentateuque de R. Meïr. Il est généralement admis ù, 
présent que ce n'étaient pas là de véritables variantes, mais 
seulement des développements liaggadiques, fondés sur des 
modifications orthographiques, procédé cher aux rabbins : 
ces indications, ou bien auraient été inscrites dans la marge 
de la Bible appartenant au célèbre docteur, ou bien auraient 
été retenues par ses élèves^. 

1. Sifré. Deut. 33, 27, § 355, 148 b. Ce texte ne contient que la 
première mention. Le reste vient du traité Sopherin, 6, 4 (édition 
Mûller, Leipzig, 1878, p. XII et 90-98) et du talmud palestinien, Ta'aniot, 
4,2, 68 a (dans ce dernier nous lisons : dans un neuf //£' et dans les deux 
autres onze M). 

L. Blau, Zum althebràhisclien Buchivesen, p. 101. sqq. assure que 
ces mentions reposent sur une confusion; le premier manuscrit est 
désigné, non pas d'après la variante qu'il soutient, mais d'après le 
lieu où on le conservait : Bet Maon, auprès de Tibériade ; R. José parle 
de ce manuscrit {Abot d. R. Nathan, édit. Schechter, cap. 46 fin). 

Pour ce qui regarde la seconde leçon notons ces trois faits : Me- 
gilla 9 a donne zà'tutei comme la leçon des LXX, pour Ex. 24. 5 (au 
lieu de na'arei) et 11 (au lieu de 'asilei); Sopherim. 1, 9, qui transcrit 
le texte de Megilla ne rapporte la variante que pour 24, 11 ; VAruc/i 
de Nathan b. Yehiel donne aussi la variante mais pour le Targum 
Yerusalmi (24, 11), variante disparue de notre texte, note Kohut, III, 
p. 309, mais qu'on peut voir encore dans la Massore du Targum; le 
mot se retrouve dans le Targum du Cant. 6, 5. 

Ces faits indiquent que les mentions de ces trois manuscrits, ou tout 
au moins des variantes, reposent sur un fonds historique séi'ieux. 

2. Haggada : certainement lire : il les revêtit de tuniques de lumière 



CRITIQUE TEXTUELLE. 119 

Les rabbins cultivés avaient aussi à leur disposition la tra- 
duction grecque des LXX ; en plusieurs endroits sont notées 
quelques-unes des variantes qu'elle présente ; le commentaire 
ancien de l'Exode adopte une de ces leçons : 

Et le séjour que les Israélites firent dans la terre d'Egypte, (et dans 
la terre deChanaan et dans la terre de Goshen) dura 435 ans. Et voilà 
une des leçons que (les interprètes grecs) écrivirent pour Ptolémée le 
roi. Et pareillement ils écrivirent pour lui : « Dieu créa au commen- 
cement.. J )). 

Il est une série de corrections textuelles que les anciens rab- 
bins acceptent et utilisent : ce qu'on appellera plus tard les 
tiqqûné sôpherim (corrections, ou amendements, des Scribes) ; 
ces modifications tendent à atténuer ou à supprimer le 
caractère anthropomorphique de certaines expressions. Voici 
l'énumération de ces corrections d'après un midrach tannaïte : 

A propos des ennemis de Dieu, on cite le texte de Zacharie (2, 12) : 
« Car qui vous touche touche à la prunelle de mon œil ». R, Juda (ben 
liai) dit : il ne dit pas : « à la prunelle de l'œil », mais il est écrit « à 
la prunelle de son œil » pour ainsi dire, à l'adresse (cela concerne) du 
Très-Haut; mais l'Écriture emploie une expression voilée {kinnâ). 
Pareillement {Mal. l, 13) : « Et vous dites ; quel ennui ! et vous le (me) 
méprisez! » C'est que l'Écriture emploie une expression voilée. Pareil- 
lement (1 Sam. 3, 13) : « A cause de la faute dont il avait connais- 
sance qu'ils outrageaient eux-mêmes (Dieu, leçon des LXX) » : Mais 
l'Écriture... Pareillement (Job, 7, 20) : « Pourquoi me prendre pour cible 
et me rendre à charge à moi-même (à toi-même, LXX )? » Mais l'Écri- 
ture... Pareillement {Ifab. 1, 12) : «N'es-tu pas dès le commencement 
Yahwé, le Dieu de ma sainteté ? Nous ne mourrons pas (tu ne mourras 
pas) ». L'Écriture... Pareillement (/er. 2, 11) : « Une nation change-t-elle 
de Dieu (et ce ne sont pas de (vrais) dieux) ? et mon peuple peut-il 
changer sa (ma) gloire? » L'Écriture... Pareillement (Ps. 106, 20) : 
« Et ils ont changé leur (sa gloire, LXX d'après A) en la ressemblance 

{■ôr')et non de peau {'or) {Gen. 3, 21); ou bien: tôb mût (la mort est 
bonne) au lieu de tôb me^od (était excellent) {Gen. 1, 31). 

Ces variantes ont été rapprochées de celles que contenait un manus- 
crit ancien conservé à Rome dans la Synagogue de Severus [Ency- 
clopaedia judaica, IV, c. 515, sq. qui transcrit toutes ces variantes). 

Sur la nature exacte de ces variantes, voir Bereschit rabba, édition 
Theodor-Albeck, p. 70, 196, 1181; Bâcher, die Agada der Tannaiten, 
11, p. 10, 37 

1. Mekliilta Ex. 12, 40, p. 50. Listes plus complètes des variantes des 
LXX dans : Megilia 9 a; Pal. Megilla, 1, 11 (71 d); Sôpherim, 1, 9 : 
au total quinze variantes. 



120 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

d'un bœuf. » L'Écriture... Pareillement {Num. W, 15) ; « Et que je ne 
voie pas mon malheur (ton mal; ou : leur mal) ». L'Écriture... Pareil- 
lement (2 Sam. 20, 1) : « Nous n'avons pas de part avec David; chacun 
à sa tente (son Dieu), Israélites! » L'Écriture... Pareillement (£'2;. 8, 17) : 
« Et voici qu'ils portent le rameau à leur (mon) nez! » L'Écriture... 
Pareillement {Num. 12, 12) : « Qu'elle ne soit pas comme le mort-né , 
sortant du sein de sa mère! » Il aurait dû dire : « du sein de notre 
mère », mais l'Écriture emploie une expression voilée '. 

Ces données traditionnelles sur la teneur primitive des 
textes aidaient singulièrement à déterminer leur sens véritable. 

2° Corrections textuelles à fin doctrinale ou exégétique. 

Dans les annotations de la Massore les combinaisons du 
Qeré et du Ketib tiennent une grande place : texte à lire 
autrement qu'il n'est écrit, texte lu et pas écrit ou inverse- 
ment. Ce genre de remarques textuelles commence à appa- 
raître dans la littérature talmudique, assez peu cependant 
dans les temps les plus anciens; même lorsque les exégèses 
pratiquées supposent une lecture différente de la lecture 
usuelle, ce n'est pas toujours dit explicitement^. 

Dans la littérature talmudique ces suggestions textuelles 
sont ordinairement introduites par l'expression 'al tiqrâ 
[tiqre]... èllâ (ne lis pas (ceci) mais...). Si le commentateur 
ose cette suggestion, ce n'est pas qu'il dispose d'un appareil 
critique contenant des variantes, mais uniquement parce 
qu'il croit que la leçon qu'il propose convient mieux, soit au 
contexte biblique, soit surtout à l'enseignement qu'il en veut 
dégager. Dans l'ensemble de la littérature talmudique on 
compte environ deux cents de ces suggestions, certaines pro- 

1. Mekhilta Ex. 15, 7, p. 135; abrégé dans Siphrê Num. 10, 35. § 84, 
p. 81, sq. Tanhuma besallah, 16 ajoute cinq autres exemples. Dans 
Semot rabba (13, 2 sur 10, 1) R. José cite la leçon de Zac. 2, 12 et la 
nomme tiqqûn sôpherim. Voir aussi Genèse rabba 41, 7, sur 18, 22, 
p. 505 (même désignation dans la bouche de R. Simon). La Massore 
compte 18 de ces corrections des Scribes. 

Sur le piel kînnâ et son sens technique, voir : Bâcher, Termino- 
logie, I, 83, sq. 

Voir : Bâcher, die Agada der Tannaiten, II, p. 205. 

Strack, op. cit., p. 86, sqq. 

Blau, op. cit., p. 49-52. * 

2. Voir Strack, op. cit. p. 80-86 : Blau, op. cit., p, 52-54. 



CRITIQUE TEXTUELLE. 121 

posées plusieurs fois en divers endroits ^ Un rapide coup 
d'œil sur cette liste montre que le procédé, relativement 
peu usité à l'âge tannaïte, rencontra dans les temps suivants 
une faveur considérable. 

Nous donnons quelques exemples, de ces suggestions 
textuelles^ en commençant par celles qui modifient très peu 
la lettre reçue. 

Certaines expressions, avec une vocalisation identique, peu- 
vent supporter deux sens : 

Les espions envoyés par Moïse disaient (Num. 13, 31) : « Nous ne pour 
rons monter contre ce peuple parce qu'il est plus fort que nous {mim' 
mènnû) ». R. Siméon b. Laqis estimait qu'ils entendaient le mimmênnû 
du Très-Haut, disant : pour ainsi dire, il ne peut prévaloir contre eux-. 

La vocalisation du texte biblique était traditionnellement 
fixée en grande partie dès le i^^' siècle^, cependant les rabbins 
proposent, en vue de l'interprétation préférée, des lectures 
nouvelles. 

En hébreu les mêmes consonnes peuvent supporter des 
sens différents, suivant qu'on les prononce de telle ou telle 
façon, en supposant une vocalisation différente ou des redou- 
blements de consonne. 

« Vous prendrez des branches de palmier » {Lév. 23, 40). R. Tarphon 
disait : kâphût (lié, au lieu de Kappôt, branches) et s'il (le rameau) 
est divisé, tu dois le lier''*. 

1. Nous nous fondons sur le tableau donné dans V Encyclopaedia 
judaica, II, c. 77-86, tableau tiré du livre de A. Rosenzweig, Die Al-tikre 
Deutungen, ein Beitrag zur Talmudischen Schriftdeutung, Breslau, 1911. 

2. Mimmênnû peut en effet signifier : « plus que lui » ou « plus que 
nous » : Pal. Ta^aniot, 4, 8, 68 d. Dans le passage parallèle Sota 35 a, 
R. Hanina b. Papa interprète : ne lis pas : plus que nous, mais plus 
que lui : pour ainsi dire le maître de la maison ne peut pas en chasser 
ses instruments. Item Arakinlh ^. 

Autre jeu de mots sur mimmênnû : « Lorsque vous recevrez la 
dîme, vous en (mimmênnû) prélèverez » {Num. 18, 26, Siphré, § 120, 
p. 147). D'une espèce {min] sur la même espèce {mînô) et non d'une 
espèce sur une autre. Interprétation qui corrobore un principe cou- 
rant dans la législation rabbinique. 

3. G. ROSENBLATT, op. cit. p. 6. 

4. Siphra Lêv. 23, 40, 102 d. Même exégèse attribuée à Tarphon par 
R. Juda dans une baraitha de Sukka 32 a (suivent des discussions 
d'amoras sur l'état des branches). 



122 EXÉGÈSE RABBINIQCE. 

« Vous observerez les azymes » (Ex. 12, 17)... R. Yoshia disait : ne 
lis pas ainsi mais « vous observerez les commandements » (misivôl au 
lieu de massôt) : de même que vous ne laissez pas devenir sûrs les 
azymes, de même vous ne laisserez pas devenir sûrs les commande- 
ments, mais si un commandement vient à ta portée accomplis-le aus- 
sitôt ^. 

Cette méthode est très propre à déduire des enseignemeiits 
haggadiques ; les rabbins s'en servent aussi pour fonder des 
opinions juridiques. 

Ce jour-là R. Aquiba expliquait (Lév. Il, 33) : « S'il tombe (quelque 
objet impur) au milieu d'un vase d'argile, tout ce qui est à l'intérieur 
de celui-ci sera impur ». 11 ne dit pas « impur », mais « rendra impur » 
(yatemi^j au lieu de la leçon biblique, itemcC), de manière à rendre 
impures les autres choses 2... 

« Si elle (la fille vendue pour être servante) déplaît à son maître . . . 
il ne pourra pas la vendre à des étrangers après lui avoir été infidèle 
(beèogedô-bâ) » (Ex. 21, 8). Après d'autres exégèses fondées sur la lettre, 
R. Aqibadit : « bebigedô bû », après qu'il a étendu son habit sur elle 2. 

Les Massorètes étaient attentifs à noter les cas dans les- 
quels la voyelle ô était écrite defective; les rabbins fondent 
des exégèses, soit balakhiques, soit haggadiques, sur ces 
écritures pleines ou défectives; l'usage semble postérieur à 
l'âge tannaïte : aucune de ces interprétations n'est attribuée 
à un tanna même si elle prétend justifier des opinions an- 
ciennes, des écoles d'Hillel ou de Shammai, ou bien d'Aqiba 
et autres*. 

1. Mekhïlta in Zoc. p. 33. 

2. Sota 5, 2 et Siphra Lév. 11, 33, 54 b. 

3. Mekhilta in loc. p. 257, sq. Qiddusin, 18 ab rapporte l'interpréta- 
tion d'Aqiba et l'autre, fondée sur la lettre, et ajoute : R. Eleazar (qui 
soutient l'opinion commune) pense que sa lecture se fonde sur une 
tradition ('é/re lammasorèt) et R. Aqiba pense que sa lecture se 
fonde sur l'Ecriture Cém lammiqrâ'). La leçon soutenue par R. Aqiba 
(bebigedô) est celle qui a été adoptée par les Massorètes. 

Le Targum d'Onqelos et le Yeruâalmi I donnent une interprétation 
conforme, à celle d'Aqiba : parce que son maître a marqué son pou- 
voir sur elle. 

On peut voir dans Siphra 92 b sur Lév. 20, 13 une exégèse d'Aqiba, 
lisant au lieu de iskâb le hiphil yaskîb. 

4. Voir dans Strack op. cit. p. 71, sq. plusieurs de ces exemples, 
mais tous provenant d'amoras ou non datés. Sanhédrin 3 b et 4 ab 



CAITIQUË TEXtXJBLLÈ. 123 

Modification textuelle légère celle qui lit une sifflante à la 
place de la chuintante et réciproquement : 

« Vous offrirez deux agneaux d'un an » [Num. 28 3). L'école de 
Shammai dit : kebâsim, agneaux, parce qu'ils foulent aux pieds {khê) les 
péchés d'Israël suivant qu'il est dit {Michée 7, 19) : « Il aura encore 
pitié de nous et il foulera aux pieds nos péchés »• Et l'école de Hillel 
disait : tout ce qui est foulé aux pieds finit par remonter. Mais kebàsim 
(comme dans le texte massorétique), parce qu'ils blanchissent les 
péchés d'Israël et le rendent pareil à un nourrisson d'un an qui est 
pur de tout péché'. 

Les interprètes rabbiniques se permettent aussi ces conjec- 
tures textuelles, auxquelles se complaisent les critiques 
modernes : une coupe différente, soit relativement à deux 
mots qui se suivent, soit pour un seul divisé en deux : 

« L'épée ravira... l'enfant à la mamelle comme le vieillard » Cis 
sébâ) {Deut. 32, 25). Ne lis pas Hs sébâ, mais Hs yesibâ, : cela nous 
apprend qu'ils étaient tous aptes à s'asseoir dans la yesibà (école rab- 
binique)2. 

R. Aqiba représente les nations disant à Israël : quel est ton bien- 
aimé, pour que vous mouriez pour lui et vous laissiez égorger pour 
lui suivant qu'il est dit {Cant. 1, 3) : « C'est pourquoi les jeunes filles 
t'aiment » ; elles t'aiment jusqu'à la mort ( 'alâmôt donne 'al mût ou 
'ad mût) 2 

« Les Israélites traversèrent la mer à pied sec » {Ex. 14, 22). R. Meïr 

contient plusieurs de ces interprétations halakhiques. Sukkôt est 
écrit plene dans Lép. 23, 34 et deux fois defective 23, 42; les rabbins 
prennent la leçon reçue et en déduisent que la Sukka doit avoir deux 
parois complètes, la troisième pouvant ne s'élever que d'une palme; 
Siméon lit les trois fois plene et en déduit la nécessité de trois parois 
complètes... (cf. Sukka 6 b). Pareille argumentation pour les asper- 
sions de sang d'après les écritures pleines ou défectives de Qarnôt 
dans Zéf. 4, 7, 18, 25, 30, 34. 

On remarque que tôledôt est écrit partout défectivement sauf Gen. 
2, 4 et Ruth 4, 18 (générations de Pères) : depuis le péché tout est 
réduit, mais le fils de Pères rendra les biens enlevés : Gen. rabba 
sur 4, 8, p. 101, sqq. Ruth rabba inloc... etc. 

1. Pesiqta d. R. Kahana, chap. 6, 61 b. Noter qu'ici encore R. 
Aqiba se fonde sur la lecture exacte du texte. Dans le Siphré 
nous ne trouvons pas cette exégèse : serait-elle postérieure? 

2. Siphré in toc. \ 321, 138 a. 

3. Mekhilta sur 15, 2, 127. 'alâmôt du Ps. 46 a souvent donné lieu 
à des exégèses accommodatices semblables : on l'entend au sens 
de choses cachées ou de siècles (des bons et des méchants) : commen- 
taire des Ps. soher tob, in loc. édit. Buber, p. 271, sq. 



124 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

disait : quand les tribus se tenaient devant la mer chacune disait : 
moi Je descendrai la première dans la mer. Pendant qu'elles étaient 
en train de se disputer, la tribu de Benjamin sauta et descendit la 
première dans la mer, suivant qu'il est dit (Ps. 68, 28) : « Là était 
Benjamin le plus petit d'entre eux et les dominant {rôdèm); voici les 
princes de Jula les lapidant... » Ne lis pas : rôdèm mais râd yâm. 
Les princes de Juda se mirent à les lapider avec des pierres suivant 
qu'il est dit : « Les princes de Juda les lapidaient » '. 

Modification encore assez légère celle qui consiste à pratiquer 
une métathèse, à permuter une consonne avec une autre 
dans le corps d'un mot : 

« Et il les (les cailles) étendirent pour eux tout autour du camp » 
{Num. 11; 32) R. Juda dit : ne lis pas wayystehû mais wayysJietû (ils 
sacrifièrent), cela nous enseigne qu'ils étaient obligés à les immoler 
rituellement. Rabbi dit : ce n'est pas nécessaire (de faire cette correc- 
tion) car déjà il est dit (Ps. 78, 27) : « Il fit pleuvoir sur eux la viande 
comme poussière, et les oiseaux ailés comme le sable de la mer » : 
cela nous apprend qu'ils étaient obligés à l'immolation (probablement 
parce que l'expression désigne des oiseaux propres à l'immolation). 
Mais pourquoi est-il enseigné en ces termes wayyshetu lahèm Mlôahl 
Cela nous apprend qu'ils faisaient des tas autour du camp 2. 

Métathèses encore plus considérables : suggérer que telle 
particule doit passer d'un mot au mot voisin, supportant 
ainsi un sens meilleur : 

Les rabbins ont enseigné {Lév . 4, 5) : « Le grand prêtre oint prendra 
du sang du taureau »... {Middam Happâr) : (lire) dâm méhappâr, il 
recevra le sang du taureau; car si tu objectes ; il faut lire middam 
happâr, comme il est écrit, du sang du taureau, même seulement une 
partie, voici que Rab assure : celui qui immole doit recevoir tout le 
sang du taureau suivant qu'il est dit [ibid. 7) : « il versera tout le sang 
du taureau ». Si on adopte la leçon proposée, on peut objecter le 

1. Mekhilta in loc. p. 104. Pour la seconde interprétation il lit, non 
pas riginâtâm (leur troupe), mais regâmûm (ils les ont lapidés). 
Meïr était célèbre pour ces modifications textuelles dont il appuyait 
ses exégèses haggadiques : Bâcher, Agada der Tannaiten, II 
p. 22, 37, sq., 50. 

2. Siphré in loc. % 98, p. 97. Il est curieux de voir dans le même 
contexte utilisées à la fois la leçon traditionnelle et la leçon conjecturale. 
Il est intéressant de voir les LXX mélanger les deux leçons, tout en se 
permettant une explication conjecturale : et ils en égorgèrent (métathèse) 
s'en faisant des tas pour les faire sécher autour du camp : -/.al 'éaçaÇav 
iautoïç (]'UYf/.ouç -/.\5xXw t% napsjJiSoX^î. 



CRITIQUE TEXTUELLE. 125 

principe ; les rabbias enlèvent et ajoutent au texte afin de pouvoir 
l'expliquer*. 

Dans une discussion sur le point de savoir si la femme peut 
hériter de son mari, les rabbins amoras utilisent le texte 
Num. 27, 11 : 

Abbaie lit : « vous donnerez sa portion à qui lui est le plus proche, 
à sa femme, et il la fera héritière ». Rabba lui reproche d'être un 
couteau acéré qui divise les écritures à son gré et il propose, lui, une 
lecture modifiant totalement le texte ; « vous lui donnerez la portion 
de sa chair (sa femme) ». Il a estimé qu'on peut ajouter et retrancher 
afin d'interpréter 2. 

Les rabbins sentaient parfois, comme l'indiquent les deux 
remarques précédentes, que ce découpage des mots est 
contraire au sens obvie, vrai; voici une autre expression de 
ce sentiment : • 

« Moïse avait dit : je suis un étranger sur une terre étrangère » 
{Ex. 18, 3). R. Josué disait : c'était pour lui, évidemment (réellement) 
\oaddâ'i, une terre étrangère. R. Eléazar de Modin disait : dans une 
terre étrangère nokhriâ soit nôkhér Yâ (étrangère à Dieu) : car Moïse 
disait : puisque le monde tout entier pratique l'idolâtrie je sers celui 
qui a dit et le monde fut... 3. 

Nous avons déjà rencontré des lectures suggérées qui 
changent l'état matériel du texte. Voici des suggestions encore 
plus hardies, comportant des changements délibérés dans les 
consonnes. Les Massorètes notent plusieurs fois que la néga- 
tion lé' a été remplacée, pour un meilleur sens, par la préposi- 
tion L avec le suffixe pronominal : là. Les rabbins ont parfois 
tiré parti pour leurs exégèses de ces suggestions ; en voici 
un exemple haggadique important : 

Le même jour R. Josué b. Horqanos prêchait : ce n'est que par 
amour que Job servait le Saint, béni soit-il, suivant qu'il est dit (Job . 

1. Zebahim 25 a. Bien que ce texte soit surtout amora, il semble 
reposer sur une tradition exégétique plus ancienne. 

Le principe, qui stigmatise l'arbitraire exégétique, est répété 
plusieurs fois; voir Bâcher, Terminologie, II, p. 35, 112. 

2. Baba hatra 111 b. 

3. Mekhilta Ex. in loc. p. 191. Dans la Mekhilta de Siméon b. Yohai 
voici comment est rapportée l'opinion de R. Eléazar : terre étrangère 
parce que le monde pratique l'idolâtrie et moi je sers celui qui a dit 
et le monde fut. (p. 86). 



126 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

13, 15) : « Même s'il me tuait j'espérerais en lui ». Il est encore indé- 
terminé si (il faut entendre) « j'espère en lui », ou « je n'espère pas en 
lui ». Il est enseigné en ces termes {Job, 27, 5) ; « Jusqu'à mon dernier 
soupir je conserverai mon innocence » : c'est bien par amour qu'il a 
agi. 

(La gemara commente ainsi). Il faut voir si ce lo est écrit par lamed 
waw ou par lamed aleph : lô" ou lô. Mais est-ce que toutes les fois que 
c'est écrit par lamed aleph on doit entendre la négation ? Juge d'après 
ce texte où il est écrit par lamed aleph (et entendu comme pronom) 
(/s. 63, 9) : « Dans toutes leurs angoisses il (Dieu) a été en angoisse » : 
ici également il faut entendre lô' de la même façon. Si tu objectes qu'il 
en est autrement, voici qu'il est écrit {ibid.) : « et l'ange de sa face les 
a sauvés ». C'est la même signification ici et là^. 

Les rabbins utilisent les leçons qeri adoptées plus tard 
par la mp^ssore et déjà proposées; un exemple : 

Les rabbins enseignent {Lév. 23, 13) : « son offrande sera de deux 
dixièmes ». Cela enseigne qu'on doit doubler Toffrande accompagnant 
l'agneau à immoler avec la gerbe. On pourrait croire aussi que le vin 
à offrir serait doublé, mais il est enseigné : « et vous offrirez comme 
libation devin un quart de hin... » R. Eléazar dit : il est écrit weniskâ 
et nous lisons weniskû: comment l'expliquer? La libation de l'offrande 
est comme la libation de vin : l'an et l'autre sont d'un quart 2. 

Le plus souvent c'est de leur cru, sans l'appui d'aucune 
tradition, que les rabbins exégètes se permettent de modifier 
une ou plusieurs lettres ; ordinairement en vue d'une inter- 
prétation hag-gadique. Deux exemples : 

« Vous avez servi des dieux que ne connaissaient pas (se'ârûm) vos 
pères » {^Deut. 32, 17) : parce que les cheveux de vos pères ne se 
dressaient pas devant eux. Autre explication : ne lis pas « lô''se'ârûm » 
mais « Zo"" sa'ûm » : bien qu'ils leur aient offert des sacrifices et de 
l'encens, ils n'avaient pas pour eux de la crainte (religion) et c'est ce 
qu'il dit {Gen. 4, 4) : « Dieu ne faisait pas attention {sâ'â) à Caïn ni 
à son offrande '^. 

R. Siméon b. Laqis disait ; quiconque répond amen de toutes ses 
forces, on lui ouvre les portes du Gan Eden, suivant qu'il est dit 

1. Sota 5, 5 et 31 a. Pour Job 13, 15 le qeri, les LXX, Aquiba, le 
syriaque, la vulgate et le targum ont lu : lô (en lui). 

Pour Isaïe le qeri et de nombreux manuscrits hébreux ont lô. La 
discussion enregistrée dans la gemara montre que cette lecture 
soulevait quelque contestation. 

2. Menahoth 89 b. Le qeri est, en effet, niskû. 

3. Siphré in loc. % 318, 136 b. Cf. Aicher, op. cit., p. 100. 



CRITIQUE TEXTUELLE. 127 

(Is. 26,2) : « Ouvrez les portes et qu'entre une nation juste, demeurant 
fidèle » ; ne lis pas « sômêr 'emûnîm » mais « sè'ômerîm 'amén » (qui 
disent amen)^. 

Ces libertés pouvaient aller fort loin, et même jusqu'à recom- 
poser tout un texte : 

R. Josué b. Qorha disait {Eecl. 1, 4) : « Une génération va et une 
autre génération vient mais la terre subsiste à jamais ». Ne lis pas 
ainsi, mais : « Une terre va et une autre terre vient, mais une généra- 
tion subsiste à jamais ». Et puisqu'ils ont modifié leurs œuvres, le Saint_, 
béni soit-il, a m^odifié à leur profit l'œuvre de la création et c'est ce 
qu'il dit {Os. 2, 1) : « Les enfants d'Israël deviendront nombreux 
comme le sable qui est sur le bord de la mer, qui ne peut se mesurer 
ni se compter » 2. 

Plus discrets, certains exégètes.se contentaient de noter 
que le sens exigerait une autre teneur du texte : 

« On prendra pour l'impur de la poussière de la victime consumée en 
sacrifice » [Num. 19, 17). Est-ce de la poussière Caphâr), ne faudrait-il 
pas (lire) : ''èphèr, cendre? Pourquoi l'Écriture a-t-elle changé sa teneur? 
Parce qu'elle assimile le cas présent à un autre (5, 17) : de même que la 
cendre dont il est parlé là doit être mise sur l'eau, de même la cendre 
dont il est parlé ici... 2. 

Ailleurs le commentateur est embarrassé par une précision 
temporelle que la forme négative absolue de la phrase rend 
inutile. 

« Et vous n'en laisserez rien jusqu'au matin » {Ex. 12, 10).... Je 
lirais : « ce qui en restera vous le brûlerez au feu » . Pourquoi est-il 
dit « ce qui en restera jusqu'au matin » ? C'est que l'Écriture veut fixer 
un terme au matin du matin (au vrai matin). 

Autre explication : pourquoi est-il enseigné en ces termes : « jusqu'au 
matin » ? Cela nous apprend qu'il n'est brûlé qu'au matin du seize 
nisan (le lendemain). R. Ismaël dit : ce n'est pas nécessaire (de 
préciser ainsi); il dit {ibid. 16) : « on ne fera aucun travail en ces 
jours », or, la combustion est une espèce de travail... Cela voudrait 
alors dire que si le seize est un sabbat on différera la combustion au 
dix-sept....^, 

1. Sabbat 119 b. Nous nous excusons de citer une sentence amora : 
la modification textuelle était trop jolie. 

2. Siphrê,^ Dt. 11, 21, § 47, 83 b. 

3. Siphré in loc, §128, p. 165. Dans le commentaire de l'autre passage 
(1 10, p. 16), on observe que la poussière dont il est question ici est 
appelée 'aphâr comme pour la cendre de la victime consumée. 

4. Mekliilta in loc. p. 21. sq. 



128 EXÉGÈSE BABBINIQUE. 

Les rabbins sentaient combien ces libertés dans la lecture 
de l'Écriture étaient préjudiciables; aussi recouraient-ils, 
soit pour défendre leur propre lecture, soit pour rejeter celle 
des adversaires, à la remarque : « cette lecture est fondée », 
formule qui remonte à l'âge tannaïte : 

« Si elle enfante une fille elle restera deux semaines (sebu'aim) dans 
son impureté » {Lêv. 12, 5). Ses disciples interrogèrent R. Judab. Ro'es : 
nous l'entendons ainsi : il est possible que cela signifie : elle restera 
impure pendant soixante-dix {sibeHm) jours. Il leur répondit : pour 
les garçons comme pour les filles nous trouvons des prescriptions pour 
l'impureté et pour la purification : de même que la purification pour 
l'enfantement d'une fille exige un terme double du terme prescrit pour 
les garçons, de même pour l'impureté. Quand ils eurent pris congé, il 
sortit, les rappela en leur disant : je n'avais pas besoin d'insister (par 
un raisonnement) auprès de vous, car il y a im fondement à la lecture 
(que je suis)''.... 

3° Ponctuation et division du texte. 

Les manuscrits anciens ne portent aucune ponctuation : 
d'où difficulté parfois de marquer la division des sections 
et des phrases, de savoir à quel verbe rapporter un mot; 
les rabbins avaient noté les hésitations que commandent cer- 
tains passages : 

Issi b. Juda disait : il y a cinq mots que la Tora laisse dans l'indé- 
termination {16'' hèkréa'); se'^ét dans Gen. 4, 7: «Si tu fais le bien 
ne seras-tu pas agréé? » ou bien : « tu es agréé même si tu ne fais pas 
le bien ». 'arùr dans Gen. 49, 7 : « Maudite leur colère parce que vio- 
lente » ou bien (6) : « Parce que dans leur colère ils ont égorgé des 
hommes et dans leur emportement ils ont coupé les jarrets des tau- 
reaux, maudite leur colère ». Mâhâr dans Èx. 17, 9 : « Demain je me 

1. Siphra in loc, 58 d. L'histoire est rapportée Sanh. 4 a : « vous 
n'avez pas besoin d'insister : la lecture sebu'aim est fondée ». Ibid., 
4ab on répète le principe à un objectant disant qu'on pouvait entendre 
Ex. 23, 19, « tu ne feras pas cuire un chevreau dans la graisse de sa 
mère (behèléb) » :1a leçon reçue behâlâb est fondée. 

La formule est yès-''ém lammiqrâ'' : « il y a une mère à la lecture » 
(Ecriture) : la lecture de l'Écriture est aussi attestée que la maternité 
d'un enfant. Ainsi est expliquée Texpression par Bâcher, Termino- 
logie, p. 120. Il croit que l'autre formule déjà rencontrée {yès-''ém 
lammasôrèth, « il y a un fondement traditionnel à cette orthographe ») 
ne remonte pas à l'âge tannaïte. 



CRITIQUE TEXTUELLE. 129 

tiendrai sur le sommet de la colline », ou bien : « Va demain com- 
battre Amaleq ». Mesuqqàdîm dans Ex. 25, 34 : « Des fleurs d'amandier 
avec leurs boutons et leurs fleurs » , ou bien : « A la tige du chandelier 
quatre calices en forme de fleurs d'amandier ». Dans Deut. 31, 16 : 
« Et ce peuple se lèvera et se prostituera », ou bien : « Voici que tu vas 
te coucher avec tes pères et restant debout » ^ . 

Le texte massorétique marque certains mots (10 dans le 
Pentateuque) d'un ou de plusieurs points; certaines de ces 
indications remontent à l'âge talmudique, quelques-unes 
même au temps des tannas. Bien entendu ces docteurs 
tiennent compte de ces signes dans leurs commentaires. Le 
plus souvent les points suggèrent que le texte requiert un 
autre sens que celui de la lettre. 

En matière halakhique : 

« Si quelqu'un (pour la Pâque) se trouve en chemin au loin » [Num. 
9, 10). Un point sur le hà (de rehôqhû) : même si dans son voyage il 
est proche, mais se trouve impur, il ne fera pas la Pâque avec eux. 
Puis on mentionne les passages avec points et l'interprétation spéciale 
qu'ils comportent : Gen. 16, 4; 18, 9; 19, 33; 33, 4; 36, 12; Num. 21, 
30; 29, 16; Deut. 29, 282. 

Nous pensons que c'est seulement plus tard que R. Siméon 
b. Eléazar a formulé la règle : 

Partout où tu trouves des lettres (non munies de points) plus nom- 
breuses que les lettres pointées tu interprètes d'après ces lettres ; si 
les lettres pointées l'emportent sur les autres tu interprètes d'après les 
lettres pointées 2. 

Le principe parait artificiel; il conduit à des exégèses fort 
sujettes à caution. Pour Gen. 18, 9, les uns en tirent : ils 

1. Mekhilta sur Ex. 17, 9, p. 179. Pour Deut. 31, 16 Gamaliel(6'an/i. 
90 b) adopte la deuxième lecture pour en tirer une preuve de la résur- 
rection; ses contradicteurs lui opposent la première {suprà^^. 64). Voir 
Bâcher, Agada der Tannaiten, II, p. 375, sq. ; et sur l'indentité de 
cetissi : Yoma 52 ab. Cf. Strack, op. cit., p. 79, sq. Sur les divergences 
entre la Misna et le texte massorétique relativement aux divisions du 
texte : Rosenblatt, op. cit., p. 20, sq. 

2. Siphi^é Num. 9, 10, § 69, p. 64, sq. Dans Pesaliim 9, 2. R. José 
note que le point signifie : ce n'est point pour indiquer proprement 
un éloignement; mais seulement celui qui est hors du seuil de son 
habitation et au dehors. L. Blau, Masoretische Untersuchungen, 
p. 6-40 sur ces points. 

3. Genèse rabba 48, 15 sur 18, 9, p. 492; et 78, 9, sur 33, 4, p. 926, sq. 
Voir Bâcher, Agada der Tannaiten, II, p. 431, 182 et 137. 

EXÉGÈSE RABBINIQUE. -J 



130 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

savaient déjà où elle (Sara) était; les autres : les anges 
demandèrent à Sara, suivant les lois de la politesse : où est 
Abraham. Pour Gen. 33, 4- interprétations diverses : il l'em- 
brassa de tout son cœur parce que ses sentiments (d'Esau) 
étaient cliangés ; il ne l'embrassa pas de tout son cœur, il 
aurait voulu le mordre. 

Voici un autre emploi des points : 

« Et il arrivera au départ de l'arche ». {Nuni. 10, 35). Point en avant 
(de 35) et point après (36) : parce que ce n'est pas là la place (de ces 
versets). Rabbi disait : parce que ces deux versets à eux seuls cons- 
tituent un volume (séphèr) : aussi dit-on : un rouleau (de* la Loi) qui 
a été effacé et dont il reste 85 lettres (comme dans ces deux ve/rsets) 
souille les mains. R. Siméon dit : les points indiquent que ce n'était 
pas sa place ; il convenait d'écrire à leur place : « Le peuple se mit 
à murmurer » (11, 1) < . 

Un des derniers tannaïtes, Bar Qappara, fondait une exé- 
gèse assez étrange sur une particularité du texte : 

« Pour étendre {le-marhé) son empire et pour une paix sans fin » 
(/s. 9, 6). R. Tanhum disait : Bar Qappara expliquait : pourquoi tous 
les mems qui sont à l'intérieur d'une lettre sont-ils ouverts et celui-ci 
fermé? Le Saint, béni soit-il, voulait faire d'Ezéchias le Messie et de 
SBnnachérib, Gog et Magog. L'attribut de justice lui dit : Maître du siècle, 
comment? de David qui a dit devant toi tant de cantiques et de psaumes 
tu ne fais pas le Messie et d'Ezéchias pour qui tu as fait tous ces pro- 
diges et qui ne t'a pas dit un cantique tu ferais le Messie? C'est pour- 
quoi elle (la lettre) fut fermée aussitôt 2. 

Ces quelques exemples montrent combien les rabbins 
étaient attentifs à tirer parti de toutes les particularités du 
texte sacré et de toutes les données de la tradition à son su- 
jet. On voit aussi qu'en matière de critiques et de conjec- 
tures textuelles leurs inventions préludent à celles de la 
critique moderne. Il est clair qu'ils connaissent à merveille 
l'Écriture tout entière, qu'Us ont la science de ses particula- 

1. Siphré in loc. § 84, p. 80. Dans le texte massorétique les points 
sont remplacés par des nuns renversés. Sabbat 115 b, 116 a signale 
aussi des signes mis par Dieu en haut et en bas de la section, pour 
indiquer que ce n'est pas sa place. Rabbi dit que cela indique seule- 
ment rimporlaDce de la section. Blau, op. cit., p. 40-45, pense que 
les points indiquent une variante. 

2. SanJiedrin, 94 a. 



LEXICOGRAPHIE. 131 

rites, la divinatioa des sens qu'elle peut supporter. Ces avan- 
tages précieux sont viciés par une excessive subtilité, une 
imagination débordante et inventive, le besoin de fonder, 
perfas et nefas^ sur une base biblique, leurs opinions juri- 
diques et leurs développements haggadiques. 

t 

II. — LEXICOGRAPHIE. 

Le premier souci d'un interprète est de déterminer le sens 
des mots qui composent le texte expliqué. 

Devant les libertés que prennent à l'égard des textes les 
rabbins exégètes, on pourrait se demander s'ils ont eu le 
sentiment que les mots ont une signification précise, sur 
laquelle il est interdit de jouer. Ce sont peut-être les abus 
exégétiques, qui leur ont fait sentir l'existence de ce sens 
unique et invariable des mots ; dans les controverses ils op- 
posent souvent ce sens vrai, évident, aux arguties de J' adver- 
saire. 

« Et toute l'assemblée d'Israël l'immolera (l'agneau pascal) entre les 
deux soirs » [Ex. 12, 6). J'entends : quand le soleil paraît suspendu; 
il est enseigné (à rencontre) : « au soir » {Dt 16, 6). Si c'est au soir 
on pourrait l'entendre : depuis que le soleil s'assombrit; mais il est 
enseigné : « au coucher du soleil » {ibid.\ Est-ce aussi au coucher du 
soleil qu'il faut « le cuire et le manger » ? Il est enseigné « au temps 
de ta sortie (d'Egypte) ». Est-ce que l'Ecriture divise (en deux) le même 
sujet? Comment faut-il entendre « Tu le cuiras et le mangeras »? 
depuis qu'il fait noir. Rabbi disait : voici qu'il dit : « là tu l'immoleras 
au soir ». Je puis l'entendre suivant le sens (à savoir : au soir en 
général) ; mais il est enseigné (à l'encontre) : « au temps de ta sortie 
d'Egypte ». Quand les Israélites sont-ils sortis d'Egypte? Depuis six 
heures et aux heures suivantes ^... 

Le rappel au sens évident a souvent pom^ but d'écarter un 
sens impropre donné à un mot : par exemple en halakha : 

<c Ne vous tournez pas vers les idoles » [Lév. 19, 4). Ne te tourne 

1. Mekhilta in loc. p. 17. « Suivant le sens », kisemâ'o, prout sonat. 
Nous avons déjà rencontré cette expression pour faire valoir le sens 
simple ou littéral contre tout sens dérivé ou artificiel. Sur ce mot et 
les autres composés de SM% voir Bâcher, Terminologie, I,p. 190, sqq. : 
ces formes sont très usitées. 



132 EXÉGÈSE BACGINIQUE. 

pas pour les adorer. R, Juda dit : ne te tourne pas pour les voir, évi 
demment (sens évident) ^ 

« Les officiers diront encore : qui a peur »? {Deut. 20, 8). C'est celui 
qui a peur en raison de la transgression dont il est coupable, suivant 
qu'il est dit {Ps. 49, 6) : « Pourquoi craindrai-je au jour du malheUr, 
quand l'iniquité de mes persécuteurs m'assaille » ? Ainsi l'expliquait 
R. José le galiléen. R. Aquiba disait celui qui craint, évidemment. Et 
pourquoi est-il enseigné en ces termes : « celui dont le cœur est amol- 
li »? Même le héros d'entre les héros, s'il est tendre, doit retourner 2. 

1° Usage biblique et usage courant. 

Nombreux et divers sont les moyens dont disposent les 
lexicographes et les exégètes pour déterminer le sens des 
mots ; les rabbins les mettent tous en œuvre. 

La principale source de la lexicographie rabbinique est 
la familiarité des docteurs avec le texte biblique : ils en reti- 
raient la connaissance précise du sens des racines hébraïques, 
de la valeur, ou des valeurs diverses, que revêtent les mots 
et les expressions^. 

Voie tout indiquée : se référer à l'usage ordinaire : 

« S'il y a du poil grêle (daq) » {Lév. 13, 30). R. Aqiba l'entend : 
malsain, court. R. Johanan b. Nuri l'entend : même s'il est long. 
Qu'entend-on dans le langage (ordinaire) quand on dit : ce bâton est 
daq, ce roseau est daq? qu'il est malsain et court? ou bien, qu'il est 
malsain et long? R. Aqiba lui répondit : nous n'avons pas à chercher 
d'indications dans les roseaux mais dans les cheveux. Le poil d'un 
tel est daq : cela signifie qu'il est malsain et court, et non malsain et 
long 3. 

1. Siphra Lév. 19, 4, 87 a. « Évidemment » rend l'expression (vaddcVi 
qui désigae ce qui est évident, explicite : Bâcher, Terminologie, I, 
p. 48, sq. 

2. Tosephta Sota, 7, 22, p. 309, 

3. RosENBLATT, op. cit., p. 7, 8, réunit plusieurs exemples de ces 
explications de termes : dâbâr signifie parole et chose (chose impor- 
tante ou n'importe quoi); sabbat signifie le dernier jour de la semaine 
ou toute la semaine... 

Toutefois dans ces remarques plusieurs des significations, indiquées 
par Rosenblatt, semblent moins le résultat d'une tradition lexico- 
graphique, que le produit d'une exégèse du texte, obtenue soit par 
l'étude du contexte, soit par le rapprochement des propositions voi- 
sines.... 

3. Siphra in lac. 65 c. Negaim 10, 1 utilise la même discussion. 



LEXICOGRAPHIE, 133 

Les rabbins s'étonnent de la mention de Gen. 37, 35 : 
« ses fils et ses filles vinrent (vers Jacob) pour le consoler » : 
il n'avait qu'une fille. R. Nehemia explique : on ne peut 
empêcher quelqu'un d'appeler son gendre « mon fils » et sa 
bru « ma fille » ^ . 

Ils expliquent plusieurs mots bibliques difficiles et devenus 
inintelligibles (vg. salseleha de Prov. 4, 8; matata dJIs. 14, 
23), en se référant à la langue parlée dans la maison de Rabbi 
Juda le saint, très zélé pour la pureté de l'hébreu^. 

Inévitablement, dans ce recours à l'usage actuel, les rab- 
bins n'ont pas échappé au défaut dans lequel sont tombés 
tant de traducteurs : entendre les mots bibliques au sens 
qu'ils prenaient de leur temps : ainsi gér est pris toujours au 
sens de prosélyte. Ainsi le « il n'y a plus de place » d'Is. 28, 8 
est entendu suivant l'habitude d'appeler Dieu le Màqôm (la 
place, le lieu) : Dieu n'est pas avec ceux qui, à table, oublient 
l'étude de la Loi^. 

Il était tout indiqué, — nous le faisons encore mais avec 
plus de précautions, — de recourir dans les cas difficiles, 
aux langues sœurs de l'hébreu, par exemple au syriaque ou 
à l'araméen, que plusieurs rabbins connaissaient. Ainsi pour 
le hapax legomenon à' Ex. 12, 4, îâkossû : R. Josia déclare 
que c'est un mot syrien (araméen), « comme lorsqu'un 
homme dit à son compagnon : égorge-moi cet agneau »^. 

1. Genèse rabba, in loc. 84, 21, p. 1026. D'autres explications sont 
données. Voir aussi Tanhuma B. wayyasob, 10, p. 182. 

2. Ros ha-sana 36 b. Là-même 36 ab sont expliqués des mots rares 
d'après les usages d'autres contrées. Ce sont les servantes de Rabbi 
qui se servaient de ces mots rares dans la conversation quotidienne. 
Sur cette coutume de Rabbi voir : Weiss, Dor dor wedorsaw, II, p. 159 
(plusieurs références rabbiniques). 

3. Aboth 3, 3 : Propos de Rabbi Siméon b. Yohai. 

Berît (alliance) est souvent entendu de la circoncision (signe de 
l'alliance). Voir Rosenblatt, op. cit. p. 9. 

4. Mekhilta in loc. p. 12 ; la même explication dans Pesahim 61 a. 
Le verbe est entendu en général : vous compterez pour chaque agneau. 
Dans le néo-hébreu et en araméen kâsas signifie : couper, mâcher. 

Rashi, dans son commentaire du Talmud, l'entend au sens d'égor- 
ger : l'auteur du Aruh et son éditeur moderne, Kohut, l'entendent 
aussi au même sens ; ils le rapprochent du syriaque nekas qui signifie 
égorger; le verbe est employé plusieurs fois en ce sens dans les 



134 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

8° Étymologies (notarikon). 

Les rabbins se devaient aussi de chercher des indications 
dans les étymologies, voie déjà frayée dans la Bible. Dans 
cette voie, où la fantaisie peut se donner libre carrière, ils 
ont risqué quelqiies conjectures un peu fondées ; mais aussi, 
comme nos étymologistes du Moyen Age, ils se sont livrés 
à des jeux de mots inattendus. 

Explication qui unit une description à une assonance : 

Le sisit est uniquement une chose qui sort (yôsé' du vêtement) et 
qui a la grandeur convenable ^ 

Recherche laborieuse sur le mé'onén de Deut. 18, 10. 

. R. Istnaël dit : c'est celui qui fait passer (des images fictives) devant 
les yeux. Les rabbins disent : ceux qui retiennent les yeux {'aîn) 
(pour les empêcher de voir la réalité). R. Aqiba disait : ce sont ceux 
qui prédisent les saisons, par exemple ils disent : dans l'année précé- 
dant l'année sabbatique les récoltes de céréales sont belles, mais les 
cultures de petites légumineuses sont mauvaises 2. 

« Le prêtre ayant revêtu sa tunique de lin » {Lév. Q, 3). Sa tunique, 
middo, suivant sa mesure, kemiddâtô. De lin bad (pour la tunique et les 
caleçons) : qu'ils soient de vrai lin; bad, qu'ils soient neufs; bad, 
qu'ils soient doublés (dans les coutures); bad, qa'il ne revête pas 



targums araméens. Quant au passage ea question, Onkelos l'entend 
au sens de compter ; Yerusalmi I s'étend sur le compte puis termine : 
vous égorgerez l'agneau. 

Ros ha-sana 26 a contient plusieurs de ces rapprochements : Aqiba 
dit que Yôbél signifie en arabe : bélier : affirmation confirmée par la 
linguistique moderne, cf. : Gesenius-Buhl, in verb. Bâcher, Agada der 
Tannaiten, \, p. 309. 

Dèma' de Ex. 22, 28 est défini dans la Mekhilta (p. 22) : prélèvement 
[teruma], ce qui correspond à l'équivalent du mot dans le samaritain : 
le Targum yerusalmi I le rend par prémices du vin : de même 
les LXX. 

1. Siphré Num. 15, 38, § 115, p. 124. 

2. Siphré Deut. in loc. § 170, 107 a. Siphra Lév. 19, 26, 90 c. (nous 
suivons le commentaire sur ce livre de R. Abraham b. David de 
Posquières) et Tos. Sabbat, 1, 14, p. 118 (là d'autres exemples des 
pronostics météorologiques). Aqiba donne son étymologie d'après 
'ônâ, qui signifie : laps de temps, saison. Gesemus-Buhl lait du mot 

ua participe poal de 'nn, dont on ignore le sens (prévoir d'après le 
nuages ?) 



LEXICOGRAPHIE, 135 

avec eux d'autres vêtements. Qu'il ne revête pas avec eux des vête- 
ments profanes . . J . 

Les noms propres, plus que tous autres, invitent aux exer- 
cices étymologiques. Sur les noms du beau-père de Moïse : 

R. Siinéon b. Menasia disait : son nom était Re'û^él, compagnon de 
Dieu suivant qu'il est dit {Ex. 18, 12) : « Aaron et tous les anciens 
d'Israël al'èrent manger avec le beaù-père de Moïse devant Dieu ». 
R, Dositai disait : il s'appelait qènî; pourquoi? Parce qu'il se séparait 
du commerce des Qenim, h savoir des choses par lesquelles ils exci- 
taient la jalousie {maqnâHm) du Lieu-(Dieu), suivant qu'il est dit {Deut. 
32, 21) : « Ils ont excité ma jalousie par ce qui n'est pas Dieu »... R. 
José l'explique ainsi : parce qu'il a acquis {rjânâ) le ciel et la terre et 
la Tora. R. Ismaël b. R. José dit que son nom était re'uél, parce qu'il 
était compagnon de Dieu, suivant qu'il est dit {Prov.27, 10) : « N'aban- 
donne pas ton compagnon, ni le compagnon de ton père » . R. Siméon 
b. Yohai disait : il avait deux noms : Yétrô et Hôbâb. Yélro parce qu'il 
ajouta (ùtér) une section à la Tora, suivant qu'il est dit {Ex. 18, 21) : 
«Et toi tu veilleras sur le peuple lui-même »... Hôbâb parce qu'il 
aimait {hibâb) la Tora et nous ne trouvons pas d'autre s prosélytes qui 
aient aimé la loi comme Yétro. Et de même que Yétro aimait la 
loi, de même ses fils ont aimé la Loi... 2. 

Ces exemples attestent l'impuissance des rabbins à utiliser 
judicieusement l'étymologie. En ce domaine ils se servent 
d'un procédé courant dans la période d'enfance de la philo- 
logie : proposer pour un mot un ou plusieurs sens en 
déformant son orthographe, en modifiant soit des voyelles, 
soit des consonnes ; nous avons vu dans le paragraphe pré- 
cédent quelles libertés à l'égard du texte biblique se per- 
mettaient les rabbins. C'est ainsi également qu'ils pratiquent 
les interprétations étymologiques. Quelques exemples : 

« Vous prendrez du fruit d'un arbre beau {hâdâr) » {Lév. 23, 40) Ben 
Azzai disait : haddâr, celui qui demeure {dâr) sur l'arbre d'une année 
à l'autre 2. 

1. Siphra in loc. 29 d. On peut voir des précisions pareilles dans 
Zebahim 18 b, toutes fondées sur le sens générique de bad, simple. 
Rachi, dans son commentaire, explique de même ces précisions. 

2. Siphré Num. 10, 29, § 78, p. 72, sq. 

3. Siphra in loc. 102 d. Dans Sukka 35 a cette exégèse est attribuée 
à Abbaie (amora) et on ajoute d'autres explications. Rabbi disait : ne 
lis pas hâdâr mais haddîr (l'étable) : de même qu'une étable contient 
des bêtes petites et grandes, parfaites et avec des tares, de même cet 
arbre... où les nouveaux fruits viennent alors que les anciens ne 



136 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

Voici comment à l'aide d'un double à-peu-près, ïl. Eléazar 
b. Simon explique le nèherèphèt de Lév. 19, 20 (femme 
appartenant à un titre quelconque à un homme), dont les 
lexicographes modernes confessent ne savoir ni le sens 
précis ni l'origine : 

R. Eleazar b. Simon expliquait ainsi nèherèphèt devant les rabbins : 
c'est une servante devenue le rebut de son mari, sous le pilon devant 
son mari, suivant que tu dis {Prov. 27, 22) « Si tu piles le fou dans un 
mortier au milieu des rebuts (de la balle du grain) sous le pilon »^, 

Par les mêmes procédés on explique sans peine tous les 
noms propres : ainsi les 'awwîm de Deui. 2, 23 : 

Suivant une baraitha (tradition tannaïte) le mot signifie ceux qui 
ruinent (Hwwû) leur pays; ou bien ceux qui désirent {'iwwû avec 
aleph) beaucoup de divinités ; ou bien, ceux dont la vue fait trembler 
{'awit)^. 

R. Eleazar b. Simon explique : ceux qui sont habiles à discerner, 
comme le serpent, les différentes espèces de terrain : car, en Galilée 
on appelle le serpent (hiwia) Hioya^. 

Nous savons que les étymologistes du Moyen Age expli- 
quaient le sens de certains mots en les coupant en plusieurs 
éléments : cadaver soïi cai^o data vermibus ; lapis s>Qii laedens 

sont pas encore cueillis... Ben Azzai disait : ne lis pas hâdâr mais 
"îdor, car c'est ainsi qu'en grec on appelle l'eau (38tDp) et cet arbre 
croît au bord des eaux. 

1. Pal. Qiddusin, 1, 1, 59 a. Nèherèphèt est rapproché (en changeant 
le heth en hé) de hâriphôt (dont le sens est fort incertain) de Prov. 
et le mot qui suit dans Prov. ba'elî (par le pilon) est réduit à un 
seul baalô (son mari). Auparavant est rapportée l'explication que le 
prosélyte Aquila avait donnée devant son maître Aqiba : c'est la 
même, mais appuyée d'un autre texte, où se retrouve hâriphôt (grains 
piles ou dépiqués) : 2 Sam. 17, 19. 

2. Hullin 60 b. 

3. Genèse rabba sur 6, 4 chap. 26, 7, p. 254. 

Nous avons là quatre étymologies pour le même mot. La première 
est rapportée aussi dans Genèse rabba et appuyée d'une référence à 
Ezéchiel (21, 32), où Dieu annonce qu'il enverra la ruine {'awivâ, 
répété trois fois). La troisième explication fait un rapprochement 
avec un mot 'awit, inconnu ; les commentateurs le donnent comme 
une désignation d'un tremblement de peur; Rachi dit que cela corres- 
pond au mot vulgaire crampe. La quatrième explication suppose 
une confusion des deux gutturales : les Galiléens confondaient toutes 
les gutturales. 



LEXICOGRAPHIE. 137 

pedem. Nous avons vu aussi nos rabbins découper certains 
mots en plusieurs parties, non sans modifier parfois l'ortho- 
graphe, pour faciliter leurs exégèses ; ils essaient par des 
procédés pareils d'en faire l'ètymologie : 

« Tu n'iras pas semant la diffamation dans ton peuple » {Lév. 19, 16). 
« Semant Ja diffamation, râkîl », que tu ne sois pas doux en paroles 
(ra^)pour celui-ci et dur pour celui-là Çail). Autre explication : que tu 
ne sois pas comme le colporteur fâkôl qui poi-te ses affaires de l'un 
à l'autre et s'en va^. 

Les lexicographes modernes rattachent le mot malqôs à 
une racine signifiant être tardif (pluie tardive) : voici les 
suggestions de plusieurs rabbins : 

Samuel l'entend : une chose qui circoncit imâl) la dureté (qâsiût) 
des Israélites (en les forçant à la pénitence). Dans l'école d'Ismaël 
on enseigne : une chose qui remplit {memallé') le grain dans sa paille 
{qâsô). On enseigne aussi : une Chose qui descend sur les épis (melîlôt) 
et sur les pailles {qâsin)^. 

Déjà vers la fin du premier siècle ce procédé était appelé 
notarikon; iï. rappelait les méthodes des tachygraphes {notarii) 
transcrivant les discours en abrégé : 

« Et Josué défit {iahalôs) Amaleq et son peuple » [Ex. 17, 13). 
Josué disait : il descendit et coupa les tètes des guerriers qui étaient 
avec lui dans les rangs de la bataille. R. Éléazar de Modin disait : 
il y a là un mot notarikon : il l'affaiblit {wayehal) et le brisa 
{wayesabbér)^. 

Le Notarikon est devenu la trentième règle d'Eliézer pour 
l'exégèse haggadique; en son application ordinaire elle 
consiste à prendre chaque lettre du mot comme l'initiale 
d'autant d'autres mots ; la méthode est déjà connue des 
tannas : 

« Vous ne souillerez pas le pays, le sang souille (yahanîph) le pays » 

1. Siphra in loc. 89 a; dans Pàl. Pea, 1, 1, 16 a, la Seconde expli- 
cation, plus détaillée et plus claire est attribuée à R. Nehemia. 

2. Taanit 6 a. Les étymologies de cette espèce abondent chez les 
rabbins postérieurs. V. Rosenblatt, op. cit. p. 6, 1, pour la Misna. 

3. Môkhilta in loc. p. 181. Nous suivons la leçon de Bâcher (Agada 
der Tanaiten, I, p. 198 et 205 mais nous ne traduisons pas avec lui : 
il pria. 



138 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

{Num. 35, 33) R. Josia disait : c'est un mot notarikon : car c'est le 
sang qui fait venir (hn) la colère ('âph) sur la terre. 

« La manne avait le goût d'un gâteau (lesad) à l'huile ». (Num. 
11, 8). C'est un mot notarikon tenant la place de trois mots : lawis, 
pâte, sèmèn, huile, dâbâs, miel : comme une pâte feuilletée à l'huile 
et enduite de miel^. 

Ce procédé permet des combinaisons infinies ; nous en avons 
un riche exemple pour le pahaz de Gen. 49, 4, à la significa- 
tion incertaine ; nous avons sur ce mot les exégèses notarikon 
de plusieurs rabbins : elles diffèrent entre elles, La plupart 
lisent le mot à l'endroit; l'un (R. Eleazar b. Modin ordinaire- 
ment) le lit à l'envers en commençant par la dernière lettre, 
afin d'en tirer un sens laudatif pour Ruben ; d'autres, enfin, 
complètent leurs interprétations en ajoutant aux verbes des 
compléments : 

Ph. : Pahazta, tu as été présomptueux (arrogant) 
posa" ta, tu as marché (contre la loi) 
parhâ, s'est envolée (ta force) (second mot heilka) 
Pârqqtâ, tu as rejeté (le joug de ton cou) 
pilaltâ, tu as prié 
paztâ, tu as été téméraire (ardent) 

H. Ilâtâ'tâ, tu as péché 

hâradtâ, tu as tremblé 

hallà, tu as été malade (faible moralement) 

hillaltâ, tu as profané (ma couche ; ou bien : ton droit d'aînesse) 

Ihabatâ, tu as péché (contre ta primogéniture) 

hâsaktû, tu as rejeté (le joug de ton cou) 

en lisant par hé : 

hislaktâ, tu as rejeté (le joug de ton cou) 

hirtaHâ, tu as été excité 

z. zûnitâ, tu as commis un inceste 
zaltâ, tu as été dissolu 
za'iâ, tu as tremblé (à cause du péché) 
zi'aza'ta, tu as tremblé 

zâr, étranger (tu es devenu; certains ajoutent : à tes dons) 
— étranger (es-tu devenu comme de l'eau) 
zârhâ s'est levée (ta prière) 

Lecture renversée : 
Zâ'ta, tu as tremblé (ou bien : ton instinct a tremblé) 

1. Siphré in loc. % 89, p. 89; § 161, p. 222. 



LEXICOGRAPHIE. 139 

liaJtâ, tu as eu peur 

pârah, s'est envolé ton péché) ^ 

Peu après la fin de l'âge tannaïte les rabbins perfectionnèrent 
la méthode du notarikon par celle de la gematria (règle 29 
d'Eliézer) qui comporte deux procédés : déduire une donnée 
numéri(jue de la valeur numérique d'un mot : la durée du 
naziréat est de trente jours suivant la valeur des consonnes 
du verbe yhyh de Num. 6, 5; un mot peut en signifier un 
autre si l'on suppose que Valeph correspond au taph, le beth 
au sin... (système athbash) : ainsi leléb qâmâi (cœur de ceux 
qui se soulèvent contre moi) de Jér, 51, 1 signifie kasdim, 
les Chaldéens^. 

R. Josué b. Levi disait : le Saint, béni soit-il, donnera à chaque 
saint 310 mondes en héritage, car il écrit {Prov. S, 21) : « Pour 
donner une portion à ceux qui m'aiment... ^ » 

Les jeux de mots de toute espèce peuvent aussi servir à l'in- 
terprétation. La règle 28 d'Eliézer [Mimma^dl) semble justifier 
ce procédé, en relevant le jeu de mots pratiqué par Jérémie 
(23, 2) : «Malheur aux pasteurs qui paissent mon peuple... »■'. 

1. Sabbat 55 b. Genèse rabba in loc. ch. 98, 4, p. 1253 ; cli. 99, 1, 
p. 1277 ; Tanhuma wayehi, 9 ; édition Buber (peu abondant) 12, p. 218. 

La plupart de ces exégèses sont de rabbins de la fin du premier 
siècle : Eliézer, Josué b. Hanania, Eléazar de Modin; voir Bâcher, 
Agada der Tannaiten, I, p. 126, sq. 

2. Le premier exemple est pris dans une leçon de Siphré Num. 6, 5, 
^ 25, transcrite par Friedmann 8 b et rejetée par Horovitz, p. 31. 
kraploi dans la Misna : Aicher, op. cit., p. 112-114. 

Le second exemple vient de la règle d'Eliézer : les LXX et le Tar- 
gum ont entendu suivant la gematria; la Vulgate traduit : qui cor 
suum levaverunt contra me. 

Sur le mot gematria (déformation de grammatia, plutôt que de 
geometria), voir Bâcher, Terminologie, I, p. 127. Le procédé est 
appliqué déjà par Rab, au commencement du troisième siècle : c'était 
un rabbin babylonien, mais formé en Palestine. 

3. Uqsin, 3, 12; le texte est évidemment une addition postérieure, 
H. Josué b. Levi étant un amora du troisième siècle. La démonstra- 
tion est tirée du yés, inséré à la fin de la proposition; il a pour 
valeur numérique 310. Les lexicographes donnent au mot le sens 
de possession, un peu comme dans les expressions : 'asèr yés là, 
ce qui lui appartient. 

4. Voir Bâcher Terminologie., I, 111, sq. sur le sens à donner à 
Ma'âl. L'exemple joue évidemment sur le mot : pasteurs {rô'îm) et 
sur l'adjectif : ra\ mauvais, méchant (pluriel ra'im). 



140 EXÉGÈSE RABBINÏQUE. 

Sorte de jeu de mots en ce texte juridique : 

Quiconque est apte à recevoir l'expiation (par un châtiment envoyé 
par Dieu) sauf ceux qui ont été fustigés, suivant qu'il est écrit 
{Deut. 25, 3) (on ne lui fera pas donner plus de quarante coups) « de 
peur que ton frère ne soit avili à tes yeux » : une fois fustigé il devient 
ton frère ^.. 

3° Recours aux langues étrangères. 

Les lexicologues du Moyen Age faisaient appel volontiers, 
pour expliquer le sens d'un mot latin, aune langue étrangère : 
les rabbins ont suivi la même voie, ramenant parfois un mot 
hébreu à un mot grec, qui n'avait rien de commun avec lui ; 
nous avons déjà vu hâdâr expliqué par hyclâr; voici un autre 
exemple : 

Le Lév. 20, 14 indique clairement la peine d'un inceste spécial : 
avoir des relations avec une femme et avec la mère de celle-ci : qu'on 
brûle l'homme et les deux femmes {'étèn), R. Ismaël l'entend : 
une seule femme. R. Âqiba : les deux femmes. Les rabbins postérieurs 
justifient l'opinion d'Ismaël : hèn en grec signifie une [hina, ?y.)2. 

4° Détermination du sens par les passages parallèles. 

Méthode excellente et proprement exégétique : si dans un 
passage la valeur d'un mot reste incertaine, la déterminer 
par le sens qu'il prend dans d'autres textes clairs. Cette 
méthode, les rabbins anciens l'ont abondamment pratiquée, 
mais pas toujours avec le même bonheur ou la même recti- 
tude. 

Elle convient et donne de bons résultats toutes les fois qu'elle 
est employée à définir la signification d'un mot de soi obscur : 

Quelques exemples entre des centaines : 

« Ils firent cuire en galettes {'ugôth) azymes... » {Ex. 12, 39) : 'ugûth 
n'est pas autre chose qu'un gâteau épais [hararà, non-biblique) sui' 
vant qu'il est dit [Ez. 4, 12) : « Tu mangeras cela sous la forme 

1. Makkot, 3, 15, Jeu de mots avec métathèse : avili, niqlâ; fus- 
tigé, nilqâ. 

2. Dans Siphra 92 c, l'opinion d'Ismaël n'est accompagnée d'aucune 
raison; dans Sanhédrin 76 b, c'est Abaie qui assure que tous les 
deux expliquent d'après le sens des mots [misma'oth). 



LEXICOGRAPHIE. 141 

de galettes d'orge » ; et il écrit (/ Reg. 17, 13) : « Fais-moi d'abord avec 
cela un petit gâteau ^. 

Nezîrâ signifie partout abstinence {perâsà) et c'est ainsi qu'il dit 
{Lév. 22, 2) : « ils s'abstiendront des choses saintes que m'offrent les fils 
d'Israël ». Et il dit {ibid. 25, 5) : « Tu ne moissonneras pas ce qui a 
germé des grains oubliés de ta moisson (précédente) et tu ne cueilleras 
pas les raisins de ta vigne non-taillée — nezirêka ». Et il dit {Os. 9, 10) : 
« Et ils sont allés à Baal Phegor et ils se sont consacrés (séparés, nzr) 
à la honte (idole) ». Et il dit [Zac. 7, 3) « Dois-je pleurer au cinquième 
. mois et faire abstinence? » C'est donc que nezîrâ signifie partout 
abstinence (ou : séparation) 2. 

Il faut joindre à cette détermination du sens général d'un 
mot, obtenue par le rapprochement de textes, la définition de 
certains mots et expressions, qui se fonde sur l'usage univer- 
sel et bien connu de l'Écriture : 

« Si tu viens dans la vigne de ton prochain {ré'èka) » {Dt. 23, 26. 
d'après le principe, suivant qu'il est dit : ton prochain, sauf les étrangers 3. 

La méthode, sûre quand il faut définir le sens d'un mot 
obscur, prête à toutes sortes d'arbitraires et de fantaisies, 
quand on veut par ce moyen préciser la valeur particulière, 
dans un contexte donné, d'un mot à signification précise. 

« Et Marie parla {tedabhèr) avec Aaron au sujet de Moïse » {Num 
12, 1). Dibhér, parler, signifie partout dureté : ainsi il dit {Gen. 42, 30) : 
« L'homme, maître du pays, nous a dit des choses dures «. [Num. 21, 5) ; 
« Et le peuple parla contre Dieu et contre Moïse ». AMU, dire, signifie 
partout miséricorde : ainsi il dit {Gen. 19, 7) : « Et il dit : je vous en 
prie, mes frères, ne faites pas le mal ». {Num. 12, G) : « Et il dit : 
écoutez, je vous en prie, mes paroles » 1 

Un des moindres inconvénients de ce procédé est d'attri- 
buer au même mot des significations assez différentes : 

« Et Juda s'approcha {waiggas) de lui » {Gen. 44, 18). Le mot waiggas 
ne signifie que la paix, suivant qu'il est dit (/ Sam. 30, 21) « David 

1. Mekhilta in loc. p, 49. 

2. Siphré Num. 6, 3, § 23, p. 28. Même explication dans Siphra 
Lév. 22, 3, 97 a. 

3. Siphré in loc. § 267, 122 a. Le principe général, kelâl, est appli- 
qué en plusieurs autres textes, vg. Siphré Dt. 19, 4, § 181, 108 a; Mekhilta 
21, 14, p. 263... Méthode dans la mishna : Rosenblatt, op. cit., p. 9, sq. 

4. Siphré in loc. § 99, p. 97, sq. Le dernier texte montre la futilité 
de cetle exégèse, puisque les deux racines y sont employées et avec 
la môme valeur. 



142 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

s'approcha du peuple et lui souhaita la paix ». R. Juda dit : cela signifie 
consolation {Gen. 21, 27) : « Il s'approcha de lui et le baisa ». R. Nehe- 
mia dit : cela signifie offrande [Lév. 8, 14) : « Il fit approcher le tau- 
reau pour le sacrifice du péché ». R. José dit : cela signifie excommu- 
nication, comme tu dis (Gen. 19, 9) : « Et ils lui dirent : loin de là ». 
R. Nathan dit : cela signifie toucher {Gen. 27, 21) : « Approche-toi (que 
je te palpe) que je te touche, mon fils »■•. 

La méthode permet de donner aux mots un sens métapho- 
rique, plus ou moins justifié. Voici une équivalence presque 
classique : Liban désigne le Temple bien qu'il puisse pren- 
dre une autre valeur : 

« Allez... au Liban » [Dt. I, 7). Il leur dit : quand vous entrerez dans 

la terre vous devrez vous constituer un roi et construire une maison 

d'élection. D'où Liban désigne-t-il uniquement le roi ? De ce qu'il est 

dit {Ez. 17, 3) : « Le grand aigle vint au Liban et il enleva la cime du 

cèdre ». Et il dit (2 Reg. 14, 9) : « L'épine du Liban envoya dire au 

cèdre du Liban : donne-nous ta fille pour femme à mon fils ; et les bètes 

sauvages du Liban passèrent et foulèrent aux pieds l'épine ». Et le 

Liban n'est pas autre chose que le Temple, suivant qu'il est dit {Jér. 

22, 6) : « Tu es pour moi un Galaad, la tête du Liban ». Et il dit {Is. 

10, 34) : « Et le Liban tombe sous les coups d'un paissant ». Pourquoi 

l'appelle-t-on (le Temple) Liban? parce qu'il blanchit les péchés d'Israël, 

suivant qu'il est dit (/s. 1, 18) : « Si vos péchés sont comme l'écarlate 

ils deviendront blancs comme neige » 2. 

5° Détermination du sens par le contexte. 

Méthode excellente aussi : déterminer le sens d'un mot 
par le contexte : 

Ainsi miksâ de Ex. 12, 4 ne peut signifier que le nombre (minyân) 
des âmes, puisqu'on devait égorger lapâque suivant leur nombre et qu'à 
ne pas tenir compte du nombre on aurait transgressé un commande- 
ment^. 

Dans les prescriptions sur la femme suspecte d'adultère, 
[Num. 5, 13) les deux conditions, se souiller et en secret, se 

1. Genèse rahba sur 44, 18, ch. 93, 7, p. 1166. 

2. Siphré in loc. § 6, 66 b. Item : ibid 3, 25, § 28, 71 b. Lévitique 
rabha, 1, 2 (R, Siméonb. Yohai). Ahot R. Nathank, 5 (R. Josué devant 
R. Johanaa b. Zakkai). Siphré Num. 27, 12, § 134, p. 181. 

3. Mekhilta in loc. p. 12. Le contexte dit : « si la maison est trop 
peu nombreuse... », tout suppose qu'on fait le compte des convives. 



LEXICOGRAPHIE. 143 

déterminent l'une l'autre : les témoins ne peuvent pas cons- 
tater qu'elle s'est souillée avec un homme, mais ils peuvent 
constater qu'elle s'est isolée avec lui assez longtemps pour 
se souillera 

Dans ce même passage il est parlé par deux fois de l'infi- 
délité de la femme [M'L) : ce verbe reçoit deux sens : 

L'infidélité peut porter sur les relations sexuelles ou sur les biens 
matériels. Puisqu'il dit ici : « et un autre homme a eu commerce avec 
elle » l'infidélité porte sur les relations sexuelles et non sur les biens. 

Me'îlâ désigne partout une tromperie et c'est ainsi qu'il dit {i Chron. 
5, 25) : « Ils furent infidèles au Dieu de leurs pères ». Et il dit {Jos. 
7, 1) : « Les Israélites furent infidèles au sujet de l'anathème ». Et il 
dit {1 Chron. 10, 13) : « Et Saul mourut dans son infidélité y>~ 

Autre exemple montrant les déviations que peut provoquer 
le procédé : la particule nd' est toujours entendue comme 
désignant une prière [bgs), mais dans le commentaire de 
Ea?. 12, 9, on lui donne le sens de « cru » {hay) parce que ce 
sens semble imposé par le contexte^. 

6° Lexique des rabbins. 

Ces études minutieuses du vocabulaire amènent les com- 
mentateurs à noter les nuances de sens entre des mots qui 
ont un sens identiqne ou fort approché : 

« Il s'abstiendra de vin et de boisson enivrante » {Num. 6, 3). Voici 
que le vin {yaln) est identique à la boisson enivrante {sékâr) et réci- 
proquement. C'est que la Tora se sert de deux mots. En voici d'autres 
exemples : sehîta est identique à zebîhâ; 'amûquâ à sephélâ, ''ôth à 
wo]3/ie^.. C'est que la Tora se sert de deux mots : pareillement ici... 
R. Eleazar Haqqapar dit : Yaîn désigne le vin coupé d'eau et sékâr le 
vin pur... On lui oppose la règle des libations {Niim. 28, 7) où l'on doit 
verser du vin pur^. 

1. Siphré in loc. § 7, p. 12. 

2. Siphré Num. 5, 12, §7, p. 11. Le second paragraphe répété dans 
5, 6, § 2, p. 5. Les textes invoqués accusent plutôt dans ?n7 l'infi- 
délité religieuse. 

3. Mekhilta in loc. p. 20. Sens donné par les LXX et la Vulgate et 
accepté par Gesenius. bur le contexte, voir p. 178-186. 

4. Siphré in loc. § 23, p. 27. 

R. Josué b. Qorha distingue la nuance de sens entre yâkôl et râs'âi, 



144 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

Ces analyses attentives permettent d'établir un lexique ; de 
réunir les listes de noms désignant le môme objet : ainsi les 
dix noms désignant la prière \ les dix noms désignant le 
pécheur^, les dix ou douze noms des faux-dieux^. 

Inversement les rabbins tentaient de définir les divers sens 
que le même mot revêtait dans la Bible; ainsi du Tesû'ôt^ 
obscur, de Is. 22, 2 (tu es remplie de tumulte?), R. Eliezer b. 
Jacob rapproche deux textes de Job. (39, 7 et 30, 3) et en 
déduit que le mot a trois sens; ici : tumulte, agitation; et 
dans Job : oppression (ou : coups) et obscurité^. 

Les rabbins distinguent aussi le sens propre et les sens 
figurés d'un mot : 

« Que les fleuves battent des mains {Kaph) » {Ps. 98, 8). Le mot 
est dit en trois endroits. {Ps. 47, 2) : « Vous tous, peuples, battez des 
mains » : une main contre l'autre pour la joie d'Israël : ce Kaph est 
au sens propre (mammâs). {ïs. 55, 12) « Et tous les arbres des champs 
battront des mains », ils heurteront une branche contre l'autre : ici 
kajjh signifie branche, suivant qu'il est dit {Lév. 23, 40) : « Vous pren- 
drez des branches {kappôt) de palmier ». {Ps. 98, 8) : « Que les fleuves 
battent les mains », sur les bords l'un de l'autre^. 



le premier indiquant une possibilité physique (cf. Josué 15, 63) et 
j^âsâ'i la licéité de l'action : Siphré Dt. 12, 17, § 72, 89 b. 

Les commentateurs se sont demandé aussi pourquoi, Dt. 32, 1, Moïse 
pour la même idée (écouter, entendre) emploie deux mots : ha'azînû 
et tisema\ et ils en donnent diverses explications : Moïse était plus 
près du ciel et plus loin de la terre (cf. en sens inverse, Is. 1, 2); le 
premier verbe est au pluriel parce que le ciel a un plus grand nombre 
de portes pour entendre, le second au singulier pour une raison in- 
verse (alors objection par le texte d'/s.).... : Siphré in loc. § 306, 131 a. 

1. Les dix noms de la prière : prière {tephillâ)^ cri, appel au secours, 
plainte, tribulation, jubilation, insistance, prostration, supplication, 
intercession, stadon (debout), imploration, demande de grâce : Siphré 
Dt. 3, 23, § 26, 70 b. En divers textes nous trouvons justifiées l'une 
ou l'autre de ces identifications. 

2. Siphré Deut. 17, 2, § 148, 104 a. Voir aussi Siphra 16, 6, 80 d... 

3. Siphra Lév. 19, 4, 87 a; 26, 1, 110 bc. Mekhilta Ex. 15, 11, p. 142. 
Siphré Deut. 11, 17, § 43, 81 b.... 

4. Laincnt. rahba, préface, 24. Dans Job nous n'avons que Mesô'â; 
en 30, 22 le ketib porte tesiVâ, procella. 

5. Midras des Psaumes, éd. Buber p. 422, sq. Dans le passage 
parallèle du Midras Hallel (Beit hariunidrasch de Jellinek, V, p. 79) 
le verbe MlV est assimilé au verbe M^if (frapper) : du reste dans tout 
le commentaire le second est substitué au premier. 



EXÉGÈSE GRAMMATICALE. 145 

Ou bien on remarque que certains mots ont un sens géné- 
rique : ainsi sèh peut se dire, soit d'un chevreau, soit d'un 
agneau, comme il est dit explicitement {Deut. 14, 4) : « sèh 
de brebis ou de cbèvres » ^ 

Pareillement, et non sans quelque exagération le sens 
métaphorique est donné pour le sens vrai ordinaire : 

De sa main (ou : dans sa main) signifie toujours son pouvoir, suivant 
qu'il est dit (A^Mm.21, 26) : « Et il prit de sa main toute sa terre ». Et 
il dit {Gen. 24, 10) : « Et le serviteur prit dix des chameaux de son 
maître et il s'en alla ayant en mains ce qui était le meilleur chez son 
maître » ^. 

De même (c agréable odeur » signifie « faire plaisir, con- 
tenter » : nahat 7'ûah^ (apaisement de l'esprit). 

Conséquence des notions lexicographiques, le sens spécial 
d'un mot peut suggérer une conclusion exégétique particu- 
lière : 

« Tu brûleras entièrement au feu la ville avec tout son butin, pour 
Yahwé, ton Dieu » (Deut. 13, 17) : R. Siméon disait : quand vous 
exécutez le jugement (d'anathème) contre une ville apostate, je vous 
l'impute comme si vous m'offriez un holocauste totaH. 

» 

III. — EXÉGÈSE GRAMMATICALE. 

Pour comprendre le sens d'une phrase, d'un texte, la con- 
dition préalable et élémentaire est d'en faire l'analyse gram- 
maticale et l'analyse logique : les rabbins anciens n'y ont 
pas manqué. Dans le présent paragraphe nous étudions leurs 
notations proprement grammaticales, réservant pour le para- 
graphe suivant tout ce qui regarde le style. 

Les rabbins distinguent nettement les diverses parties du 
discours et désignent la plupart d'entre elles par des termes 
techniques. 

1. MekhiltaEx. 12, 4, p. 11. 

2. Siphré Num. 31, 6, § 157, p. 210 et Mekhilta Ex. 21, 16, p. 267. 

3. Siphré Num. 15, 7, § 107, p. 109 : lié à : « vous ferez ce qui m'est 
agréable ». 

4. Sanhédrin 10, 6. L' « entièrement » du texte est kâlîl, qui désigne 
parfois un holocauste ou un sacrifice total : d'où l'assimilation. 



146 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

1° Substantif et adjectif. 

Le substantif, le sém, se distingue du mot en général, lâsôn\ 
l'adjectif est le nom qui en accompagne un autre, sém lewâwy, 
expression qui désigne aussi le complément déterminatif^ 

Zâkâr et neqâbâj joints à lâsôn, désignent le masculin et 
le féminin. Des considérations sur le genre fondent des exé- 
gèses, soit halakhiques soit haggadiques : 

a Ammonites ni Moabites n'entreront dans la communauté du Sei- 
gneur » [Dt. 23, 4). R. Juda dit : l'Écriture parle des mâles et non des 
femmes : ammônî et môâbi, au masculin, et non : ammônit ni môâhît, 
au féminin 2. 

« L'indigène d'entre les enfants d'Israël « {Num. 15, 29). Pourquoi 
cette précision? Comme il est dit {Lèv. 23, 42) : « Tout indigène en 
Israël habitera dans les cabanes », je pourrais entendre que les femmes 
sont aussi comprises dans le mot. Il est enseigné en ces termes 
« ha'èzràh d'entre les enfants d'Israël » : ceci sert de principe [hinian 
"âb) : toutes les fois qu'il est question à'èzî'âh l'Écriture parle des 
mâles 2. 

« Le champ consacré (non racheté, ou vendu), à sa libération au 
jubilé, sera saint (consacré) au Seigneur » {Lév. 27, 21); cela nous 
indique que le champ est appelé d'un nom masculin' par le mot qôdès 
(saint) : de même que le qôdès, dont il est parlé plus haut {ibid. 14), ne 
peut être libéré que par un rachat, ainsi le qôdès, dont il est parlé ici, 
ne peut être libéré que par un rachat''. 

Voici une haggada supportée à la fois par une remarque 
grammaticale et par un raisonnement inattendu : 

Le dixième cantique sera chanté au futur à venir, suivant qu'il est 
dit (/s. 42, 10) : « Chantez au Seigneur un cantique (Br) nouveau, sa 

1. Adjectif : la seule hyssope permise pour l'aspersion est celle qui 
n'est désignée par aucun qualificatif (grecque, romaine,.,.) : Siphré 
Num. 19, 6, § 124, p. 156; 19, 18, § 129, p. 166. 

Celui qui a fait vœu de ne pas manger de légumes peut manger 
des légumes des champs (hassâdé) parce que le vocable est accom- 
pagné d'un sém lewâwy : Nedarim, 5, 9. 

2. Siphré in loc. § 249, 120 a. Par un raisonnement sur les bâtards, 
on essaie d'inclure aussi les femmes; le raisonnement est repoussé 
par la remarque grammaticale. 

3. Siphré in loc. % 112, p. 119. 

4. Siphra Lév. in loc. 114 b. .Dans Arakin 25 b 26 a on explique de 
la même façon cette opinion, que la Misna attribue à R. Juda. Noter 
comment le genre de sâdé est établi :. par son attribut; cela suffit à 
établir une analogie avec la consécration de la maison. 



EXÉGÈSE GRAMMATICALE. 147 

louange des extrémités de la terre ». Et il dit {Ps. 149, 1) : « un can- 
tique nouveau, sa louange dans l'assemblée des pieux ». Tous les 
cantiques du passé sont désignés par un mot féminin : de même que la 
femme enfante, ainsi les saints dans le passé ont été suivis de nouvelles 
servitudes, mais le salut futur ne sera pas suivi d'une autre servitude. 
C'est pourquoi ce cantique est désigné par un nom masculin, suivant 
qu'il est dit {Jér. 30, 6) : « Demandez, je vous en prie, et voyez si un 
mâle enfante; pourquoi vois-je tous les hommes avec les mains sur 
les reins » (comme une femme qui enfante) ? Car de même que le mâle 
n'enfante pas, ainsi le salut à venir ne sera pas suivi d'une servitude, 
suivant qu'il est dit (/s. 45, 17) : « Israël est sauvé par le Seigneur d'un 
salut éternel, vous n'aurez ni honte ni confusion dans les siècles futurs » •• •' 

Le singulier est désigné par Idsân yâhid (mot d'un unique) 
et le pluriel, par lâsôn rabbîm (mot de plusieurs). Les rab- 
bins, dans leurs exégèses tiennent compte du nombre. 

Abba Hanin déduit du singulier 'issè (sacrifice par le feu) de Num, 
15, 3, mis en apposition avec divers noms de sacrifices ; bien que les 
vases du Temple soient plus nombreux que ceux de la Tente du 
témoignage, l'Ecriture ne multiplie pas les libations^. 

D'où déduit-on qu'une plate-bande (de jardin) a six palmes carrées ? 
Parce qu'on y peut semer cinq semences, une à chaque côté et une au 
milieu, suivant qu'il est dit (Is. 6l, 11) : « Car comme la terre produit 
sa germination et comme le jardin fait germer ses semences ». 11 n'est 
pas dit « sa seiaence-zàrè'â », mais « ses semences zèru'èâ^ ». 

Sur les psaumes de David, les rabbins enseignent (baraitha) : les 
uns ont été dits au nom de l'assemblée, les autres en son nom personnel ; 
ceux qui sont dits au singulier sont dits en son nom, ceux qui sont dits 
au pluriel le sont au nom de l'assemblée''. 

Nous pourrions signaler beaucoup de haggadas basées sur 
des considérations de nombre ; bornons-nous à cette remarque 
sur les usages bibliques: entre plusieurs indications sur la 
façon de lire les textes bibliques : 

Au siège de Samarie « ie quart de qab de fiente de pigeon valait 
cinq sicles d'argent » (2, Reg. 6, 25). Les habitants de Jérusalem 
assiégée par Sennachérib sont menacés « d'avoir à manger leurs 
excréments et à boire leur urine » {Is. 36, 12). On lit ces passages tels 
qu'ils sont écrits, parce qu'ils sont ignominieux pour l'idolâtrie. Dans 

1. Mekhilta sur Ex. 15, 1, p. 118. 

2. Siphré Num. § 107, p. 106. 

3. Sabbat, 9, 2, probablement sentence de R. Aqiba. 

4. Pesahim 117 a. 



148 EXÉGÈSE RABBINIQUË. 

ce cas si l'Écriture s'exprime au singulier on la met au pluriel ; mais si 
elle s'exprime au pluriel on ne la met pas au singulier *. 

Précision numérique que veulent fixer les interprètes, 
touchant les noms collectifs ou les pluriels indéterminés : 
un premier principe, souvent invoqué, c'est qu'on doit compter 
deux pour le minimum {rnVût ou mu'at) et deux aussi pour 
le maximum [merubbe) : 

« Des hommes pervers sont sortis de toi » {Dt. 13, 14) : pas moins de 
deux 2. 

« Vous le célébrerez dans vos générations » {Ex. 12, 14)... : je pourrais 
l'entendre (deux) : le minimum de générations est deux ; mais il est 
enseigné : c'est un précepte perpétuel ^. 

« Si le poil (du lépreux examiné) »... {Lèv. 13^3) : le minimum pour 
le poil est deux-*. 

« Qu'il n'y ait pas parmi vous de sorcier adonné aux sorcelleries 
{qâsèm qesâmîm) « {Dt. 18, 10). Sorcier, un au minimum et un au 
maximum; qesâmim de manière à condamner toutes sortes de 
sorcellerie **. 

Enfin, sur le même sujet, règle sage formuléepar R, Aqiba : 

A propos des jours (yârnîm) pendant lesquels une femme peut avoir, 
en dehors de ses périodes, des écoulements {Lév. 15, 25), on se 
demande combien il faut compter de jours : deux ou plus? R. Aqiba 
dit : Toutes les fois que le terme comporte dans sa signification un 
maximum et un minimum, si tu prends le maximum tu n'as rien fait, 
si tu prends le minimum tu as bien agi''. 

Les interprètes, pour s'opposer à une exégèse dissociant 
les deux éléments de l'expression, font valoir que celle-ci est 
à l'état construit : 

« Il prendra un encensoir plein de charbons ardents {gahalé 'es » 
{Lév. 16, 12). On pourrait entendre : des charbons éteints; il est 

1. Tos. Megilla 4, 41, p. 228. 

Noter la remarque de Sanh. 4, 5 : dans Gen. 4, 10, il est dit « les 
sangs de ton frère » et non « le sang », parce que cela désigne toutes 
les générations qui seraient sorties de lui. 

2. Siphré in loc. § 93, 93 a. 

3. Mekhilta in loc. p. 26. 

4. Siphra in loc. 60 c. 

5. Siphré in loc. § 171 a. Ici la règle paraît violée; mais on veut 
indiquer qu'on ne doit pas laisser subsister un seul sorcier. 

6. Siphra in loc. 79 a. Voir Bâcher, Terminologie^ p. 111, qui donne 
d'autres références et des sentences analogues. 



EXÉGÈSE GRAMMATICALE. 149 

enseigné : gahalé 'es (charbons de feu). Puisqu'il s'agit de feu on pourrait 
entendre « des charbons enflammés (en flammes) » : il est enseigné 
gahalé 'es (charbons ardents). Comment? en soufflant. Et d'où tirer que 
le feu (flamme) cesse sur les charbons? II est enseigné : « charbons 
ardents »^. 

Voici la déduction tirée d'une apposition : 

« Cet objet revient au Seigneur, au prêtre » {Num. 5, 8): le Nom, 
(Dieu) l'acquiert et le donne aux prêtres 2, 

Quelques remarques pertinentes sur les pronoms : le 
singulier du pronom accusatif [âta et hé'emidd) de Num. 
5, 16 (le prêtre fera approcher la femme) exclut deux inter- 
prétations possibles : pratiquer plusieurs ordalies de Sota 
ensemble, introduire avec la femme présumée coupable ses 
esclaves ou ses servantes^. 

Une réflexion d'ordre tout concret précise la valeur du 
démonstratif : commentaire vivant illustrant la parole du 
geste qui l'accompagne: hazzé: ce qu'on montre du doigt''. 

2° Le verbe. 

Le verbe se prête à des analyses nombreuses, diverses et 
pénétrantes. 

Nous avons déjà trouvé des remarques sur le nombre et 
le genre. Le genre peut toutefois être déterminé autrement 
que par les désinences ou les préformantes : on note que 
dans la question des estimations et des échanges [Lév. 27, 10) 
tout est dit au masculin : comment inclure les femmes dans 
la législation? R. Juda le tire de l'expression intensive et 
donc plus générale 'îm hâmér yâmîr (s'il change). R. Meïr 

1. Siphra in loc. 81 a. Explications longuement délayées dans 
Pesahim 75 b. Valeurs, du génitif: Rosenblatt, op. cit. p. 13, 14. 

2. Siphré in loc. § 4, p. 7. 

3. Siphré Num. in loc. % 9, p. 15. Même raisonnement (une seule) sur 
le yeîhVénnâ de Lév. 4, 32, Siphra, 22 b : et sur le ya'arkènnu de 
Lév. 24, 8: Siphra 104, b Cf. Rosenblatt, op. cit. p. 15. 

4. Mekhilta Ex. 12, 2, p. 6 (R. Aqiba) ; Siphra Lév. 11, 2, 47 q : 
Moïse prenait l'objet et le montrait à Isi-aël en disant : ceci... 

Évi dément cette définition ne s'appliqne pas à tous les emplois du 
démonstratif. 



150 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

le déduit de l'emploi de la conjonction 'îm (si, général) i. 
Déduction fondée sur un singulier anormal : 

« Voici les Égyptiens en marche derrière eux » (Ex. 14, 10). Il n'est 
pas écrit (au pluriel) nôseHm, mais (au singulier) nôséa" : cela nous 
enseigne qu'ils se formèrent par bataillons {turmae) comme un seul 
homme : c'est de là que l'empire (Rome) apprit la coutume de la forma- 
tion en bataillons 2. 

A. — TEMPS ET MODES. 

Étant donnée (( la nature complexe des deux temps finis de 
l'hébreu ->->, le parfait et l'imparfait ou futur ^, il est souvent 
malaisé de déterminer la valeur temporelle des formes 
verbales; les rabbins, se rendant compte de ce fait, tentent 
par divers moyens d'obtenir les précisions que les conjugai- 
sons elles-mêmes ne donnent pas. 

Voici toute une série de remarques suggestives : 

« Alors Moïse chanta » {Ex. 15, 1). Il y a des « alors » {'ûz) qui dési- 
gnent le passé {Gen. 4, 26; Ex. 4, 26 ; Num. 21, 17 (cas identique au cas 
présent); Jos. 10, 12 ; 2 Chron. 16, 1 ; 1 Beg. 8, 12) et d'autres qui dési- 
gnent l'avenir (/s. 60, 5 ; 58, 8 ; 35, 5, 6; Jér. 31, 13; Ps. 126, 2). Autre 
explication : il n'est pas écrit ici ^âz sâr (alors il chanta) mais alors 
yâsîr (chantera) Moïse : nous apprenons de la Tora la résurrection des 
morts-'*. 

Ce texte permet plusieurs constatations. Les verbes indiquant 
le passé avec 'dz sont, soit au parfait, soit à l'imparfait; les 
verbes indiquant le futur sont tous à l'imparfait et pris dans 
des textes prédisant l'avenir. La dernière explication (mise en 
Sanhédrin 91 b dans la bouche de R. Meïr) montre la tendance, 
déjà marquée, à entendre le parfait du passé et l'imparfait 
du futur. 

Le parfait prophétique, au sens futur : 

Après avoir parlé des lamentations, mais quant au futur à venir, il dit 
(Is. 25, 8) : « 11 engloutira la mort à jamais... » ^' 

1. Temura 2 b. La première raison est invoquée dans Siphra, Lév, 
27, 10, 113 b. 

2. Mekhilta in loc. p. 91. 

3. JoiioN, Grammaire de Vhébreu biblique, Rome, 1923, p. 290, sq., 93, 

4. Mekhilta in loc. p. 116. 

5. Moed Qaton 3, 9. 



EXÉGÈSE GRAMMATICALE. 151 

Les commentateurs tendent de déterminer le sens de ce si 
fréquent et si vague wayehi : 

« Le peuple se mit à murinurer » [Num. II, 1). Wayehi signifie 
simplement que ce fait ne se produisit pas pour la première fois : cela 
nous apprend qu'ils s'étaient déjà mal comportés et qu'ils recommencent 
leur premier désordre ^ 

« Et il arriva au jour où Moïse acheva de dresser la Tente... » {Num. 
1, 1). Rabbi dit : wayehi indique une chose nouvelle; R, Siméon b. 
Yohai dit : cela indique une chose qui avait existé mais qui avait cessé 
depuis longtemps et qui recommence d'exister dans son état ancien; 
c'est ce qu'il dit (Cant. 5, 1) : « Je suis venu à mon jardin » : depuis 
que Dieu créa le siècle il désirait y (sur terre) avoir comme dans le ciel 
une demeure de grâce : il essaya avec Adam mais le péché fit remonter 
la Sekhina. Les divers péchés provoquent des remontées de plus en plus 
lointaines delà âekhina. Elle se met à redescendre depuis Abraham ; puis 
elle retrouve son habitation de grâce avec Moïse dans le Tabernacle 2. 

Les. rabbins pensaient donc que l'expression mystérieuse 
peut revêtir deux sens opposés. 

De plus en plus, semble-t-il, l'imparfait est entendu comme 
un futur : 

« Tu renverses tes adversaires » {Ex. 15, 7). Il n'est pas écrit : 
tu as renversé {hârastâ), mais tu renverseras {taharôs) : au futur 
à venir (eschatologique ?) suivant qu'il est dit {Ps. 58, 7) : « Dieu, 
brise leurs dents dans leurs bouches »... 

« Tu déchaines ta colère » {ibid.). Il n'est pas écrit « tu as déchaîné 
{salahtâ) mais « tu déchaîneras {tiselah) » au futur à venir, suivant 
qu'il est écrit {Ps. 69, 25) : « Déverse sur eux ta colère ^ »... 

Ailleurs le commentateur insiste : l'imparfait indique une 
activité qui doit se continuer et non un acte transitoire accom- 
pagnant un autre acte; les traducteurs modernes, suivant 
les LXX et les Targums, traduisent ainsi Num, 25, 13 : « Ce 
sera pom^" lui et pour sa postérité (de Phinéès) après lui, 
l'alliance d'un sacerdoce perpétuel parce qu'il a été jaloux 
pour son Dieu et qu'il a fait l'expiation pour les enfants 
d'Israël ». La dernière proposition est prise au passé, parce 

1. Siphré in loc. § 85, p. 84. Nous suivons la leçon négative, donnée 
dans les variantes : elle correspond à la suite du développement et 
c'est celle qui est reproduite dans Siphré zutta {ibid. p. 267) et là on 
cite Job 1, 3 ; 1 Sam. 1, 1. 

2. Tankuma naso 24 (édit. Buber, p. 39, sq.). 

3. Mekhilta in loc. p. 136. 



152 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

qu'équivalente à la précédente laquelle est éAddemment au 
passé. Un rabbin veut l'entendre au futur permansif : 

« Et il fera l'expiation pour les enfants d'Israël ». Il n'est pas dit 
ici lekappér (gérondif : tout en faisant l'expiation) mais wayekappér : 
car jusqu'à présent il ne cesse pas d'exister et d'expier jusqu'à ce que 
les morts revivent^. 

Nuance que les rabbins s'appliquent à marquer dans le 
futur (exprimé par l'imparfait ou par le parfait) ; implique-t-il 
une obligation? L'imparfait hébreu (surtout avec la négation) 
peut avoir cette valeur. 

Entre beaucoup d'autres, deux exemples plus signifiants : 

De la jalousie du mari relativement à sa femme suspecte, R. Ismaël 
pense qu'elle n'est pas une obligation, R. Aqiba estime qu'elle est une 
obligation. A ce sujet on produit deux autres exemples. « Le prêtre 
peut se rendre impur pour sa sœur vierge morte » {Lév. 2\, 3); 
R. Ismaël : chose libre; R. Aqiba : obligation. « Ils seront vos 
esclaves à jamais » {Lév. 25, 46) : R. Ismaël : chose libre ; R. Aqiba : 
obligation. Les rabbins postérieurs tentent en diverses manières 
d'expliquer les divergences des deux maîtres, soit en rapprochant 
des textes analogues, soit en invoquant, pour justifier Ismaël, le prin- 
cipe : l'Écriture revient sur un sujet pour modifier la loi... 2. 

A propos de la prescription : « Tu circonciras tout esclave acquis 
à prix d'argent et alors il mangera de la Pâque » {Ex. 12, 44)... 
R. Ismaël en déduit qu'il est licite au maître de circoncire son 
esclave pour le faire participer à la Pâqae et que pareillement 
il est licite de conserver des esclaves incirconcis (puisqu'ils étaient 
auparavant dans la maison) suivant qu'il est dit {Ex. 23, 12) : « Tu- 
feras le sabbat afin que le fils de ta servante et le gèr (étranger-hôte) 
se reposent ». R. Éliézer dit i ce n'est pas licite de les conserver 
incirconcis puisqu'il est dit .' « et tu le circonciras » ^. 

Ces discussions et les procédés d'une dialectique subtile 
amenaient à mettre en doute la valeur obligatoire de futurs 
nettement équivalents à des impératifs : 

.« Vous en prélèverez un prélèvement pour le Seigneur » {Num. 
15, 19)... R. Jonathan dit : comme il dit aussi {Deut. 18, 4) : « Tu 

1. Siihré Num. 25, 13, g 131, p. 173. 

2. Sota 3 a. Pour la loi de la Sota (libre ou nécessaire) voir Siphré 
Num. 5, 14 § 7, p. 12. Siphra Lév. 1, 2, 4 c {gezéra opposé à resât.) 

3. Mekhilta in loc. p. 53. Ici l'opposition n'est pas entre obligation 
et liberté, mais entre licéité et obligation. Noter que la discussion 
porte sur un parfait à sens de futur. 



EXÉGÈSE GRAMMATICALE. 153 

donneras au prêtre les prémices de ton blé, de ton moût et de ton 
huile t, je pourrais me demander si la première indication prescrit 
une obligatioii ou laisse la liberté ; il est enseigné en ces termes : 
« tu prélèveras un prélèvement » : c'est une obligation non une 
chose libres 

Les rabbins sentent la valeur exacte des participes 

« Si tu vois l'âne de ton adversaire succombant sous la charge » 
{Ex. 23, 5). Il est dit rôbés succombant (une fois en passant) et non 
rabsân (habituellement défaillant) 2. 

Des doutes sont émis sur la valeur temporelle du participe 
bâré' (créant) qui entre dans plusieurs bénédictions, par 
exemple dans celle-ci : « Formant la lumière et créant les 
ténèbres » {Is. 4-5, 7). 

Rabba (amora) disait : tout le monde s'accorde à reconnaître 
que bârâ' (au parfait) a le sens de « il a créé » ; on se divise sur la 
signification de èdre" (participe) : l'école de Sammai pense que cela 
signifie : il créera; et l'école d'Hillel pense : cela signifie : qui a déjà 
créé 3 ». 

Explication judicieuse suggérée par vu participe : 

« Les Israélites virent l'égyptien mort... » {Ex. 14, 30). Mort, met : 
étaient-ils donc morts? Non! mourants et non pas morts, de la même 
façon qu'il est dit {Gen. 35, 18) : « Et il arriva quand sortait son âme, 
car elle était mourante ». Était-elle donc morte? Non ! mourante, mais 
pas morte'*. 

Pour l'infinitif absolu, mis devant le verbe au mode person- 
nel, nous verrons plus loin que R. Ismaël lui attribue, très 

1. Siphré Num. 15, 19, § 110, p. 113 et 18, 29, § 121, p. 149. 

Pour des rabbins le sens impératif est plus marqué parce qu'en 
néo-hébreu s'est formé un verbe dénominatif de teruma : tarant^ 

2. Mekhilta in loc. p. 325 et Baba Mesia 33 a. 

3. Berakot 53 b : les explications attribuées aux écoles classiques 
sont-elles du premier siècle? Il y a beaucoup d'araméen dans ces 
propos. La Misna (8, 1) rapporte que dans les bénédictions les 
Sammaïtes disaient : sèbbârâ (qui a créé) la lumière, tandis que les 
Hillélites disaient : bôré' (créant). Dans son commentaire, Rachi voit 
dans le participe l'indication d'une action qui dure. 

4. Mekhilta in loc. p. 113; même explication, un peu plus appuyée 
dans la Mekhilta de R. Siméon b. Yohai, p. 54, sq. Evidemment on 
entend met, participe (action qui dure) et non met, parfait (action déjà 
passée). Ces verbes n'ont pas de pai'ticipe passif. 



154 EXÉGÈSE BABBINIQUE. 

justement, une simple valeur intensive, alors que R. Aqiba 
y voit une indication particulière. 

Nous verrons aussi quelle portée mystérieuse divers rabbins 
donnent à l'infinitif d'dmar construit avec la préposition L 

B. — LES CONJUGAISONS. 

Les exégètes tiennent un compte exact de la valeur des 
diverses conjugaisons hébraïques. 

Qal distinct du hîphil et du niphal : 

« Si un bœuf frappe de sa corne » {Ex. 21, 28) : cela ne concerne pas 
les bœufs du stade, car il est dit : « s'il frappe » {qal) et non : si on le 
fait frapper {hiphil)^. 

« Aucun travail n'y sera fait » {Ex. 12, 16) : tu ne le feras pas, 
toi, ni ne le fera ton prochain, ni un goy (gentil); l'objection tirée 
de Ex. 35, 2, ou le raisonnement sur la nécessité d'une précision, 
ne prévalent pas contre le niphal, passif, donc général : aucun... 
ne sera fait {yé'âsè}^. 

Le hitpael est entendu dans un cas particulier comme un 
passif général : il se fera raser, non seulement au rasoir, 
mais de toute façon possible^. 

Discussion entre rabbins sur le sens précis du hiphil de 
^Y, suivant de près le qal dans Ex. 12, 35, 36 : 

« Ils demandèrent aux Égyptiens de leur prêter... Et le Seigneur 
fit trouver grâce au peuple aux yeux des Égyptiens et ils leur 
prêtèrent... » Ils leur prêtèrent, suivant le sens du mot : l'hébreu 
n'avait pas fini de dire « prête-moi » qu'il tirait les choses et les lui 
donnait : paroles de R. Ismaël. R. José le galiléen disait : ils crurent 

1. Dans Sebuot 3, 5, R. Ismaël attribue, indûment semble-t-il, une 
valeur future aux infinitifs avec lamed de Lév. 5, 4 : « Si on jure 
de faire le mal ou le bien » ; il en déduit que les serments vains ne 
sont coupables que s'ils ont trait à l'avenir. 

2. Baba qamma k, 4. 

Sur la valeur attribuée aux diverses conjugaisons : Rosenblaït, 
op. cit., p. 10, 11. 

3. Mekhilta in loc. p. 30, sq. Pesahim 86 ab contient de pareilles 
conclusions sur le passif à'Ex. 12, 46. Cf. Mekhilta p, 54. Siphra 109 c 
tire du niphal de Lév. 25, 39 qu'on ne peut se vendre soi-même 
comme esclave. 

4. Siphra Lév. 13, 33, 66 b. 



EXÉGÈSE GRAMMATICALE. 155 

en eux pendant les trois jours de ténèbres dont les hébreux n'avaient 
pas profité contre eux. R. Éliézer b. Jacob disait : l'Esprit de sainteté 
fut sur eux et ils dirent : prête-moi cet ustensile que tu caches en tel 
endroit... R. Nathan disait : il n'est pas nécessaire de dire « ils leur 
prêtèrent », mais même les choses qu'ils ne leur demandaient pas, 
ils les leur donnaient ; si un hébreu disait : donne-moi tel article? 
il lui répondait ; prends-le et encore cet autre ^. 

C. — QUELQUES NOTES SUR LA SYNTAXE ÉLÉMENTAIRE DU VERBE. 

Les rabbins remarquent que les deux mots réunis dans un 
zeugma ne font qu'une seule expression : 

« Souviens-toi et garde » {Ex. 20, 8). Les deux choses sont dites en 
une seule expression. On rapproche : Ex 31, 16; Num. 28, 19; Lév. 15, 
16: Deut. 25, 5, 11, 12. Dieu seul peut ainsi dire deux choses en une 
seule parole suivant Ps. 62, 12 ; Jér. 23, 29. 

« Souviens-toi et garde » : souviens-toi- avant le sabbat et observe 
après le sabbat. De là les sages disent : on joint le profane au saint, tel 
le loup qui se garde (ou bien — autre lecture : saisit sa proie) par devant 
et par derrière. R. Eléazar b. Ezéchias b. Hananiab. Garon disait : sou- 
viens-toi... dès le premier jour de la semaine, de sorte que si tu ren- 
contres dès lors un bon morceau, tu le réserves pour le jour du sabbat 
(pour le repas plus choisi du sabbat) ... 2, 

Comment déterminer le sujet et le complément dans une 
phrase obscure comme Num. 5, 10 et dont la teneur parait 
contredire aux directions juridiques communes ? Les dialec- 
ticiens ont beau jeu pour user des raisonnements par analogie, 
sans arriver pourtant à faire une lumière parfaite^. 

1. Mekhilta in loc. p. 46, sq. et parallèles. En français le rapport 
de sa' al {qal) et de hise''îl {hiphil) est peu sensible. 

2. Mekhilta in loc. p. 229. Le premier paragraphe se trouve aussi 
Siphré Deut. 22, 11, § 233, 117 a. Le second paragraphe montre que 
certains essayaient de donner un sens séparé à chaque partie de 
l'expression. 

Gomme l'observe Bâcher, Terminologie, I, p. 18 (note), si l'on 
signale que Dieu fait une chose impossible aux hommes, c'est qu'on 
pense qu'il a dit à la fois les deux mots et que les auditeurs les ont 
perçus (trait fréquent dans le folklore juif). 

3. Siphré in loc. § 6, p. 9, 10. A la fin R. Josué sur Lév. 19, 24, 25, 
contre l'évidence, affirme que les fruits de la quatrième année revien- 
nent au propriétaire : il est dit ensuite : « vous les mangerez et 
l'arbre vous continuera son produit »; il ne peut le continuer qu'à 
ceux à qui on l'a d'abord donné. 



156 EXÉGÈSE RABBÏNIQÛE. 

Gomment expliquer que dans Num. 12, 1, alors que Marie 
et Aaron ont tous deux parlé contre Aaron, le verbe soit au 
singulier féminin, comme s'il avait pour sujet uniquement 
Marie? 

C'est que Marie commença à parler, car elle n'était pas habituée à 
parler devant Aaron à moins d'une nécessité. Et pareillement tu dis 
{Jér. 36, 6) : « Tu iras et tu liras dans le rouleau que tu as écrit sous ma 
dictée ». C'est que Baruch ne parlait devant Jérémie que par nécessité V 

3° Les particules. 

C'est encore à la syntaxe élémentaire que se rattache la 
détermination de la valeur des particules. D'abord les con- 
jonctions qui gouvernent les verbes. 

A. — LES CONJONCTIONS. 

im : si. 

R. Ismael disait : tous les Hm de la Tora ont un sens hypothétique 
(libre, ne comportant pas une obligation) sauf trois {Lèv. 2, 14) : « Et si 
tu offres l'offrande des prémices », obligation... [Ex. 22, 24. « Si tu 
prêtes de l'argent à mon peuple », obligation (devoir de prêter d'après 
Deut. 15, 8), {Ex. 20, 25). « Si tu m'élèves un autel de pierres » obliga- 
tion suivant 27, 6... Pourquoi le « si »? S'il veut faire un autel de 
pierres qu'il le fasse ; de briques, qu'il le fasse : d'où règle a fortiori 
pour tous les autres objets ^. 

Si optatif : 

« Si vous suivez mes ordonnances » (Lév. 26, 3). Cela nous apprend 
que le Mâqôm (Lieu = Dieu) désire qu'Israël peine sur la Tora. Et il 
dit (Ps. 81, 14, 15) : « Ah! si mon peuple m'écoutait..! » {Is. 48, 18, 19) 
Et il dit aussi {Deut. 5, 29) : « Qui fera que leur cœur ...! n^. 

De M, aux fonctions variées, un amora du m* siècle, 
R. Siméon b.Laquis dit qu'il a quatre sens; il équivaut à : si, 
peut-être, si ce n'est (s'opposant à ce qui précède), puisque 
(exposant la raison de l'afjfirmation) ^. 

1. Siphré Num. 12, 1, § 99, p. 98. 

2, Mekhilta Ex. 20, 25, p. 243 et nombreux parallèles. 

3. Siphra in loc. 00. 

4, Ros ha-sana, 3 a; les parenthèses viennent du commentaire de 
Râsi. 



EXÉGÈSE GRAMMATICALE. 157 

Nous trouvons dans les commentaires tannaïtes quel(jues 
applications de cette définition : du M conditionnel : 

« Si l'un d'entre vous fait une offrande » {Lèv. \, 2). On pourrait 
l'entendre au sens d'un décret (obligatoire); non! il est enseigné 
ki yaqeribh : c'est libre (sacrifice qui reste libre) ^. 

Kî causal, Voir (suprà, p. 48) sur Veut. 14, 27 : c'est l'in- 
dication de la cause. 
M au sens temporel : 

« Et il arrivera quand vous entrerez dans la terre, ... vous observerez 
ce rite... » [Ex. 12, 25) : l'Écriture fait dépendre ce rite (du culte) de 
l'entrée dans la terre (la prescription ne vaut que pour les temps qui 
suivront) 2. 

Discussion intéressante sur la valeur de ki 'im :'sur la 
question de savoir si on commémorera aux jours du Messie 
la sortie d'Egypte. Ben Zoma cite {Jér. 23, 7, 8) : 

« C'est pourquoi voici que dès jours viennent, où on ne dira plus : 
Yhwh est vivant qui a fait sortir de la terre d'Egypte les enfants 
d'Israël, mais (ki 'im) Yhwh est vivant, qui a fait monter et fait venir 
delà terre du Septentrion la race de la maison d'Israël... » Les rabbins 
lui dirent : Non ! ce n'est pas que tu exceptes (du nombre des empires 
oppresseurs) l'Egypte, mais que tu ajoutes l'Egypte aux empires; les 
empires sont l'essentiel et l'Egypte le secondaire (accessoire). Et pareille- 
ment il est 6SX{Gen. 35, 10) ; «Ton nom ne sera plus appelé Jacob, mais 
[ki Hm) ton nom sera Israël » : tu ne lui enlèves pas le nom de Jacob, 
mais tu l'ajoutes à celui d'Israël, Israël étant le principal et Jacob le 
secondaire... Pareillement pour le changement de nom de Sara [Gen. 
i, 15). Item pour le nom d'Abraham (17, 5). Jadis tu étais père d'Aram, 
et maintenant te voici père de tous les hommes (tous ceux qui viennent 
au siècle) 3... 

Au contraire la valeur adversative de kî 'im est bien accusée : 

« Vous n'en mangerez rien de bouilli., mais seulement {kî 'im) rôti au 
feu » (Ex. 12, 9) : cela condamne même la manducation d'une petite 

1. Siplira in loc. 4 c. ; item 2, 1, 4, c; 2, 4, 10 c : kî taqerîbh, 
pour rendre la chose libre. Dans la Misna : Rosenblatt, op. cit. p, 19. 

2. Mekhilta in loc. p. 39. Remarque fréquente^ cf. Siphré Num. 35, 
9 § 159, p. 215 qui cite comme analogue Deut. 19, 1 (après la 
conquête). 

3. Tos. Berakhoth 1, 10-14, p. 2, sq. Ben Zama prend kî ''im au 
sens adversatif; les rabbins — et c'est le sens qui prévaut dans tout 
le passage, — au sens uniquement précisif. 



158 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

partie crue ou bouillie... On pourrait ainsi interpréter : qu'on cuise à 
l'étouffée ce qui est meilleur ainsi et qu'on rôtisse ce qui est meilleur 
ainsi; Non ! il est enseigné en ces termes : « mais uniquement rôti au 
feu^ ». 

Les rabbins distinguent les valeurs diverses que peut 
prendre la conjonction coordinative, si abondamment em- 
ployée en hébreu, le waw. Règle générale, formulée par 
R. Ismael, le waw a pour objet de joindre ce qui suit à ce qui 
précède ^ ; il arrive aussi que la particule ait un rôle disjonç- 
tif, équivalent alors k a ou :»^. 

Les rabbins sentaient parfaitement que la conjonction copu- 
lative peut avoir pour effet, soit de joindre deux propositions, 
coordonnées, soit de joindre une proposition subordonnée à 
une proposition principale : témoin ces deux interprétations 
du même texte : 

« Qu'il (le roi) n'ait pas beaucoup de femmes et que son cœur ne se 
détourne » {Deut. 17, 17). R. Juda : il peut en prendi'e beaucoup, mais 
à condition qu'elles ne détournent pas son cœur. R. Siméon : s'il n'en 
prend qu'une et qu'elle doive détourner son cœur, il ne doit pas l'épouser ' . 

Le sens disjonctif de 'd est nettement affirmé : 

« Il apportera deux tourterelles ou deux pigeons » (Num. 6, 10). De l;ï 
on dit : on n'apporte pas les tourterelles comme équivalentes aux 
pigeons ni réciproquement^. 

1. Mekhilta Ex. 12, 9, p. 20 sq. 

2. Zebahim 107 a, baraitha de R. Ismael dans une discussion sur 
Lév. 17, 8 : le waiv a pour effet d'unir {'arab) les sections et non 
de les opposer. Ou bien il est dit qu'il a pour effet d'ajouter ce qui 
suit à ce qui précède : vg. Hullin, 78 a; Mekhilta Ex. 21, 1, p. 247 
(R. Ismael); Siphra Lév. 1, 10, 7 c; Siphré Deut. 33, 1, 142 a (cela 
ajoute à une bénédiction antérieure). 

3. « Frapper son père et sa mère », maudire son père et sa mère » 
{Ex. 21, 15, 17) : le et équivaut à ou et on doit traduire, ou bien l'un 
d'eux, ou bien, soit tous les deux ensemble, soit chacun d'eux 
{Mekhilta p. 265, 267, sq.). Dans la dernière explication le waw est 
pris, tantôt au sens conjonctif, tantôt au sens disjonctif. Item : Siphra 
Lév. 22, 9, 92 a; Hullin 78 a sur Lév. 22, 28, 21. ■ 

4. Sanhédrin 2, 4 : dans le premier cas le waw est pris comme 
indiquant une subordination (de condition); dans le second cas une 
coordination (précisant et restreignant le sens du premier verbe, sans 
tenir compte du « beaucoup »). 

Voir sur les divers rôles du waw dans la Misna, Rosenblatt, op. 
cit., p. 17, sqq. 

5. Siphré Num. in loc. § 29, p. 36. 



EXÉGÈSE GRAMMATICALE. 159 

B. — LES PRÉPOSITIONS 

Les rabbins déterminent le sens précis des prépositions. 
''ad (jusque), dans certains cas, est équivalent à het (dans) : 

Jusqu'au matin signifie « au matin » : c'est l'usage des patriarches 
et des prophètes de se lever « au matin, » [Bahhôqèr, se lever de grand 
matin) : Gm. 22, 3; 28, 18; Ex. 34, 4; Jos. 3, 1; i Sam. 15, 12)^ 

Nuance de sens peut-être trop subtile : 

« A votre entrée {bebô'akèm dans la terre » [Nmn. 15, 18). L'Ecri 
ture désigne cette entrée par une expression particulière; pour les 
autres il est dit : « quand vous entrerez, quand Dieu vous fera entrer » ; 
ici il est dit bebô'akèm, pour t'apprendre que dès que les Israélites 
pénétreront dans la terre, ils seront tenus à la loi du prélèvement de la 
hallû (gâteau) 2. 

L'expression si fréquente Vémôr (en disant) a exercé aussi 
la sagacité et l'imagination des rabbins : 

R. Ismaël : va et dis-leur tout de suite, suivant qu'il est dit {Ex. 
34, 34) : « Puis il sortait et disait ». R. Éliézer : va, dis-leur et rapporte- 
moi la chose, suivant qu'il est dit {Ex. 19, 8) : « Et Moïse rapporta 
les paroles du Seigneur »; cf. aussi : Ez. 9, 11. R. Aqiba : va et dis- 
leur que c'est à cause de leur mérite qu'il parle avec moi. Siméon b. 
Azzai : les termes que tu entends sont ceux que tu apprends '. 

R. Aqiba : tout endroit où il est dit W mor a besoin d'être inter- 
prété''. 

R. Nehemia explique la valeur à la fois du hâ locatif et de 
la préposition lamed : 

« Ils allèrent à Sukkot » {Ex. 12, 37) ; en opposition à des interpréta- 
tions figurées, Nehemia dit : alors qu'il aurait fallu mettre un lamed 
avant le mot on met un hâ à la fin ^. 

La préposition 'e7 donne occasion à des confusions puis- 
qu'elle peut, ou bien signifier avec, ou bien introduire un 

1. Mekhilta Ex. 12, 22 p. 38. Prépositions dans la Misna : Rosen- 
BLATT, op. cit. p. 16, sq. 

2. Siphré Num. in loc. § 110, p. 113. 

3. Mekhilta 5, 1, p. 2-4; le second sens (dis et rapporte) détaillé 
dans Siphré Num. 12, 13, § 105 p. 104. 

4. Siphré Num. 5, 6, § 2, p. 5. 

5. Mekhilta in loc. p. 48. 



160 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

accusatif : confusions dont on trouve des traces dans la Bible. 
D'autre part, les théories de Nahum de Gimzo, vulgarisées 
par Aqiba sur la portée, exclusive ou inclusive, des particules 
ouvraient la voie à d'autres discussions. Exemple représentatif 
de ce sens inclusif attribué à 'et (le faisant équivalent de 
avec) : 

« Tu craindras Yahwé, ton Dieu » {Lèv. 6, 13) : le 'et signifie : Dieu 
et sa loi, (ou bien : Dieu et les rabbins) ^. 

Au sens réfléchi : 

« Voici la loi du nazaréen : le jour où il a accompli le temps de sa 
séparation il (on) le conduit {yahV) » {Num. 6, 13). Est-ce que d'autres 
le conduisent; n'est-ce pas lui qui se présente (conduit) lui-même? C'est 
un des trois 'eï qu'expliquait (au sens réfléchi) R. Ismaël. Pareille- 
ment tu dis {Lév. 22, 16) : « On ne leur fera pas porter le poids de leur 
faute » ; est-ce que d'autres leur feraient porter ce poids? N'est-ce pas 
eux qui se l'imposent à eux-mêmes? Pareillement tu dis {Deut. 34, 6) : 
« Et il s'enterra dans la vallée ». Est-ce que d'autres l'enterrèrent? 
n'est-ce pas lui qui s'est enterré lui-même? Pareillement c'est lui qui 
se présente lui-même et non d'autres qui l'amènent 2. 

Il est rapporté que sur trois textes R. Ismaël demanda à 
Aqiba, élève de Nahum de Gimzo, et tenant comme lui que 
'et signifie une inclusion, quelle est la portée de la particule : 
pour Gen. 1, 1 (le ciel) Aqiba répond que sans cela on pour- 
rait croire que le ciel et la terre sont des divinités à côté de 
Dieu; pour Gen. 4, 1 et 21, 20, il répond que sans cela le 
texte serait trop difficile^. 

Pour les prépositions, il est ordinairement assuré qu'elles 

1. Pal. Berakhot 9, 7, 14 b et Babil Pesahim 22 b et parallèles. La 
parenthèse vient du Babli, qui transcrit d'ailleurs une leçon assez 
différente quant aux circonstances de l'histoire. 

2. Siphré Num in loc. § 32, p. 38, sq. Ces exégèses, dans le premier 
et le troisième cas, sont provoquées par le verbe au singulier, non 
par l'incertitude de la ponctuation du "et; dans le second cas par la 
présence de deux accusatifs. 

3. Genèse rabba, 1, 14, p. 12 (là même on joint l'exégèse, pour 
inclure dans la terre et le ciel, la lune et le soleil, les étoiles et les 
planètes), 22, 2, p. 206; 53, 15, p. 574. Voir p. 190. 

Cette valeur inclusive (équivalent à aoec) du ""et semble avoir été 
admise par beaucoup, témoin la traduction qu'Aquila donne ordi- 
nairement de la particule, ainsi Gen. 1, 1 : èv -/.sçaXat'w exticev ôsbç oby 
Tov oùpavbv y.cà auv xrjv y^v. 



EXÉGÈSE GRAMMA.TICA.LE. 161 

réfèrent le complément qu'elles régissent à ce qui précède 
immédiatement : 

« Vous serez purs de tous vos péchés devant le Seigneur » {Lév. 
16, 30). R. Éléazar b. Azaria l'entend uniquement des péchés commis 
contre Dieu (hattôtékèm liphnè Yhwh)^ non des péchés commis contre 
son prochain que le jour de l'Expiation n'efface pas, tant qu'ils ne sont 
pas réparés ^... 

C. — LES ADVERBES. 

Les rabbins s'appliqpient également à définir le sens exact 
des adverbes. Nous savons les deux sens qu'ils attribuent à 
'âz (alors), ^ôd (ne plus) s'applique à une réalité qui s'est 
déjà produite^. Mâhâr (demain) peut signifier le temps pré- 
sent ou un temps fort éloigné^ . D'après R. José le galiléen 'ak 
(seulement) a pour effet de préciser, de distinguer (de limiter 
une prescription aux objets énumérés dans le texte)''. 

APPENDICE 

Le besoin de justifier une exégèse fera quelquefois passer 
par-dessus les règles do la grammaire : 

Pour ne pas se laisser tromper par un escroc demandant un objet 
qui ne lui appartient pas, on entend ainsi Deut. 22, 2 : « tu garderas 
chez toi l'animal trouvé jusqu'à ce que ton frère le réclame (jusqu'au 
chercher de ton frère lui, derôs âhîkâ ôtô) » : jusqu'à ce que tu aies 
interrogé ton frère pour voir s'il est trompeur ou non^. 

1. Yoma, 8, 9. 

2. Siphré Num. 18, 5, § 116, p. 133; on cite comme autres exemples : 
Gen. 9, 11; Lév. 17, 7; Deut. 11, 22 (on ne fera plus). 

3. Mekhilta Ex. 13, 14, p. 73 (demain proche); autres exemples : 
Ex. 8, 19; Jos. 22, 24 (demain éloigné). 

4. Mekhilta Ex. 12, 15, p. 28 (ce jour même et pas d'autres); 12^ 
16, p. 32 (vous et pas d'autres, ni les animaux); 21, 21, p. 274. 

Siphré Num. 18, 14, 15, § 117, p. 137; 18, 15, § 118, p. 138; 26, 55, 
§132, p. 175. 

5. Baba Mesia 2, 7 : cette traduction est impossible dans l'état 
actuel du texte; il faudrait lire : derôskâ. 



EXEGESE RABBINIQUE. 



lY 



CONSIDERATIONS STYLISTIQUES. 
PARTICULARITÉS DU LANGAGE BIBLIQUE. 

Dans leurs remarques exégétiques, les rabbins disent fré- 
quemment : l'Écriture parle de telle ou telle façon; cette 
rubrique introduit souvent des observations justes sur les 
particularités de la langue biblique, souvent aussi des consi- 
dérations sur le style, qui conviennent à la langue hébraïque 
en général. Nous renonçons à séparer ces deux points de 
vue, trop étroitement liés. 

Dans le présent paragraphe nous passons en revue succes- 
sivement les exégèses qui notent la forme singulière de tel 
mot, de telle expression, de telle phrase, puis celles qui étu- 
dient les rapports des propositions entre elles. Inévitablement 
l'une ou l'autre de ces études paraîtra faire double emploi 
avec quelques-unes des précédentes sur le vocabulaire et la 
grammaire. 

1° Principes généraux. Formes du langage biblique. 

Toutes les recherches sur le style biblique s'inspirent de 
deux principes : la langue parlée dans la Bible est la langue 
que parlent ordinairement les hommes ; elle comporte cepen- 
dant quelques particularités. 

« L'Écriture parle la langue des hommes », nous avons 
déjà rencontré et nous trouverons encore plusieurs fois ce 
principe, par lequel R. Ismaël rejette les interprétations 
subtiles et artificielles de R. Aqiba. 

Conséquence de ce principe, l'Écriture, pour s'accommoder 
à l'entendement humain, emploie des comparaisons : 

« La montagne du Sinaï était toute fumante... et la fumée s'élevait 
comme la fumée d'une fournaise » (Ex. 19, 18)... Pourquoi dit-on 
« une fournaise » ? Pour mettre dans l'oreille ce qu'elle est capable 
d'entendre. Pareillement (Am. 3, 8) : « Le lion rugit, qui ne crain- 
drait? » Qui a mis force et puissance dans le lion? N'est-ce pas Lui? 
Et voici que nous, nous Le représentons d'après ses créatures, pour 



considér^lTions stylistiques. 163 

mettre dans l'oreille ce qu'elle est capable d'entendre. Et pareillement 
Ez. 43, 2 (Dieii a donné force aux eaux qui le représentent) ^. 

Ce texte est intéressant : il montre comment on passe 
naturellement de la comparaison à la métaphore et il présent© 
la métaphore, donc le langage figuré, comme une des formes 
ordinaires du langage humain. 

Dans ce même sens sont expliquées certaines formules : 

« En sacrifice d'agréable odeur » {Num. 28, 8) : pour m'être agréable 
à moi qui ai dit et est accompli mon bon plaisir^. 

« Je lui parle bouche à bouche en vision » (Num. 12, 8) : cela signifie : 
dans une parole, car personne ne peut voir Dieu et vivre ^. 

La règle 21 d'ÉUézer explique pourquoi l'Écriture emploie 
pour le même objet deux métaphores : (c Le juste fleurira 
comme le palmier, il s'élèvera comme le cèdre du Liban » 
[Ps. 92, 13), Si l'on ne prenait que le premier terme on 
pourrait croire que, comme le palmier, il n'a pas d'ombre et ne 
peut pas être utilisé en menuiserie, aussi ajoute-t-on : comme 
le cèdre. Si on ne prenait que le second terme on pourrait 
croire qu'il ne porte pas de fruits ; il faut appliquer à l'objet 
ce qui est le meilleur dans les deux termes de la comparaison. 
On peut raisonner de même sur l' eau , le yin et le lait d'/s .55,1, 
symboles de la loi. 

L'hyperbole est aussi une figure de langage : aurait-elle 
place dans l'Écriture? 

« Ce sont de grandes villes et des forteresses s'élevant dans les 
cieux » {Deut. 1, 28). R. Siméon b. Gamaliel disait : l'Écriture peut-elle 
employer des expressions hyperboliques, suivant qu'il est dit {Deut. 
9, 1) : « Écoute, Israël, tu vas passer aujourd'hui le Jourdain » (Impos- 

1. Mehhilta in loc. p. 215. Éliézer a tiré de là sa règle 14 : 
expliquer uae chose grande par une petite qui dépend d'elle (ainsi 
la pluie de Deut. 32, 2, symbole de la Loi; le lion d'Amps symbole 
de Dieu), afin de faire entendre à l'oreille ce qu'elle est capable 
d'entendre. Dans Siphré Deut. 32, 2, §306, 131 b, les comparaisons 
sont développées, mais on cherche également à expliquer par le 
phénicien le verbe 'âraph. 

Voir aussi Siphré Deut. 33, 2, § 343, 143 a. Cf. Mek/iilia E^. 19, 5, 
p. 5, sous une forme un peu différente : pour que l'oreille soit 
ouverte. 

2. Siphré in loc. § 143, p. 191. 

3. Siphré in loc. § 103, p. 101. 



164 EXÉGÈSE RABBINI(^X3E. 

sible à cette multitude en un seul jour)? Mais qu'a dit le Saint, 
béni soit-il, à notre Père Abraham? (Gew. 26, 4) « Je multiplierai 
ta postérité comme les étoiles du ciel » et aussi (Gen. 13, 16) : « Je 
rendrai ta postérité nombreuse comme la poussière de la terre : si 
l'on peut compter la poussière de la terre, ainsi pourra-t-on compter 
ta postérité ». Elle n'emploie pas d'expressions hyperboliques ^ 

Il semble que le rabbin ait admis dans certains cas 
l'existence d'hyperboles dans l'Écriture, mais pas dans les 
deux derniers textes cités. Un amora du iv^ siècle, R. Ammi, 
déclare que la Tora {Deut. 1, 28), les prophètes (/ Reg. 1, 40 ; 
une clameur qui fend la terre) et les rabbins se servent 
d'expressions hyperboliques^. 

A l'opposé de l'hyperbole, la litote, qui atténue la force de 
l'expression : ainsi, dire de la terre qu'elle baille (ouvre sa 
bouche, pasa) et non qu'elle se fend *, 

Ces figures de style sont courantes dans toutes les littéra- 
tures. Quelques formes surprenantes, les rabbins les excusent 
et expliquent en disant : ainsi s'exprime l'Écriture^. 

Particularité très caractéristique de l'Écriture : afin d'évi- 
ter soit des anthropomorphismes, soit des expressions indé- 

1. Siphré in loc. § 25, 70 a. Hyperbole rend l'hébreu hâha'y, équi- 
valent probablement au hâwâ'y de Hullin 90 b. Le même mot dans 
Nedarim, 3, 1 désigne les vœux vains. 

2. Hullin 90 b et Tamid 29 b, 30 a : on disait : le tas de cendres 
sur l'autel mesure 300 cors (plus de trente mètres cubes); on se servait 
d'une coupe d'or pour les libations du sacrifice perpétuel; voir aussi 
les racontars sur la vigne d'or à laquelle chacun pouvait contribuer, 
et peut-être également sur l'épaisseur du rideau du Temple et la 
quantité des prêtres qui y travaillaient. 

3. R. Siméon b. Gamaliel dans Genèse rabha sur 4, 11, eh. 22, 
10, p. 217. Les trois textes avec expression atténuante (memu'ât, 
opposé à merahbé dans Pal. Yoma, 2, 5, 40 a) sont : Gen. 4, 11; 
Num. 16, 30; Deut. 11, 6. Nous suivons Bâcher, Agada der Tannai- 
îen, II, p. 331, qui entend l'atténuation de pâsâ, et substitue le 
texte du Deut. à Jug. 11, 35 indiqué par Genèse rabba. Theodor, 
dans son édition de Gen. rabba, repousse cette façon de voir et 
entend l'atténuation des expressions mentionnées : plus maudit que 
la terre; Dieu capable de créer; ouvrir la bouche pour un vœu. 

Dans un sens un peu différent Aqiba parle [Pal. Yoma, 2, 5, 40 a) 
d'expressions admettant un sens fort et un sens faible), vg. Lép. 1, 8, 
les fils d'Aaron (combien en compter?) 

4. 'ista'i : Sanhédrin 38 b, dans une sentence amora, mais d'un 
disciple de Meïr. Cf. Bâcher, Terminologie, II, p. 17. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 165 

centes ou injurieuses pour Israël, on emploie des tournures 
voilées, ou bien on modifie la teneur du texte. Nous avons 
déjà vu ces corrections de scribes, introduisant souvent un 
mot impropre, ou un pronom ne correspondant pas à l'objet 
véritable du discours, par respect pour Dieu ou pour Moïse. 
Tel terme décent remplace dans la Bible un autre terme, 
qui aurait pu choquer : principe illustré de quelques 
exemples : 

Les rabbins enseignent : tous les termes de la Tora qui seraient tels 
quels (tels qu'ils devraient être écrits) choquants (honteux ligena'y) 
sont remplacés à la lecture par des termes honorables {lesèbah), par 
exemple : isgalènnâ (un autre la possédera) de Deut. 28, 30 par iskabènnâ 
(aura commerce avec elle); ba'éphôlim (Dieu te frappera d'hémorroïdes) 
de Deut. 28, 27 par baUehôrîm (même sens, mais expression crue) ; 
hiryyônim (fiente de pigeon) de 2 Reg. 6, 25, par clibyônim (mot 
de même sens); manger hara^yhèm (leur boue) d'/s. 36, 12 par 
sô''âtham (leurs excréments) et sënehèm (leur urine) par même ragh- 
léhèm (eaux de leurs pieds, urines); ils firent du temple de Baal 
maharâ 'ôth (latrines) de 2 Reg. 10, 27 par Môsa''ôth (même sens, mais 
plus réaliste) ^ 

2° Usages bibliques particuliers. 

Certaines expressions ont un sens consacré, constant : 

Un précepte éternel est obligatoire pour toutes les générations, et 
non pas seulement pour celles qui le reçoivent^. 

1. Megilla 25 b; Tos. Megilla 4, 39-41, p. 228. 

La leçon honnête est celle du Ketib massorétique et l'autre celle 
du Qeri : la Massore a donc pris le contre-pied des rabbins, en 
ordonnant de lire le terme le plus choquant, mais probablement pour 
mieux accentuer la leçon morale et la honte de l'idolâtrie (cf. Tos. 
Megilla, 4, 41, cité p. 147, sq., qui ordonne de lire tel quel ce qui est 
ignominieux pour l'idolâtrie). 

R. Juda b. liai dit pareillement qu'on ne doit pas interpréter le 
Cantique en mauvaise part, mais à la louange d'Israël {Cant. rabba 
sur 1, 12 et 2, 4). 

Dans le même sens les rabbins veulent que dans certaines discus- 
sions juridiques, on se serve de termes purs (nâqî) : Pal. Moed 
qafon, 1, 4, 80 d et Ketubôt 30 b sur la Misna 5, 13 ; cf. Bâcher, 
Terminologie, II, p. 128. 

2. Mekhilta Ex. 12, 14, p. 26; Siphra Zép. 3, 17, 15 a; Siphrè 
Num. 18, 8, § 117, p. 135. 



166 liXÉGÈSE EABBINIQUE. 

Bénir quelqu'un signifie « prier pour lui «^'. 
(Une fiile) dans la maison de son père signifie : étant encore 
sous l'autorité de son père^. 

« Sacrifice au Seigneur » [Lév. 1, 2) : le substantif précède afin que 
!a sanctification soit antérieure à l'offrande; d'où l'obligation de dire 
« holocauste pour Ya » et non inversement^. 

Pour une maison lépreuse un rabbin compétent dira, non pas « il 
m'est apparu une plaie » même si elle est évidente, mais « il m'est 
apparu comme une plaie » ^. 

On explique tel terme extraordinaire, parfois d'une façon 
étonnante, mais que justifie le caractère divin de la Bible : 

« Sortez, vous trois » {Num. 12, 4) : cela enseigne que tous les trois 
furent appelés par un seul mot, ce qu'une bouche (humaine) ne peut 
dire ni une oreille entendre^... 

Certains usages bibliques sont expliqués. 

Pour illustrer ou préciser une prescription, on indique la 
circonstance la plus ordinaire : ainsi il est défendu en général 
de manger d'une bête trouvée morte ; et il est précisé « dans 
les champs », car c'est là que le fait se produit le plus 
souvent®. 

Quand Dieu dit à Moïse : « parle aux prêtres », ou «parle 
aux Israélites » , il lui donne une loi concernant la catégorie 
à laquelle il lui commande de s'adresser''^. 

Les lois commençant et se terminant par (( moi Yahw^é » 
sont plus graves^. 

Les rabbins expliquent pourquoi telle forme particulière : 

Dans Num. 26, 53 l'ordre de partage (suivant les noms des tribus) 

1. Mekhilta Ex. 12, 32, p. 45. 

2. Sip.'iré Num. 30, 4, § 153, p. 201. 

3. Siphra in loc. 4 c. 

4. Siphra Lév. 14, 35, 73 b. Pour rester fidèle aux termes de 
l'Écriture. 

5. Siphré in loc. § 102, p. 100. 

6. Mekhilta Ex. 22, 30, p. 321; c'est la règle 18 d'Éliézer qui 
donne en premier lieu cet exemple, puis Deut. 23, 11 (accident 
séminal qui se produit le plus souvent la nuit, cf. Siphré in loc. § 255, 
120 b)... Voir suprà, p. 106. 

7. Siphré Num. 6, 23, § 39, p. 42; cf. 18, 1 § 116, p. 130. 

8. Siphra Lév. 18, 2, 85 d. Affirmation de R. Ismael; R. Siméon 
b. Yohai donne une autre explication. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 167 

diffère des ordres semblables, parce que dans les autres les vivants 
héritent des morts et ici les morts héritent des vivants ^. 



30 L'ordre des termes. 

Dans les propositions Tordre des termes a son importance ; 
en général, les disciples d'Ismaël estiment qu'il faut s'en tenir 
à l'ordre du discours : 

« Pendant sept jours vous mangerez des azymes » [Ex. 12, 15) : de 
telle sorte que le premier jour sera obligatoire et les autres libres. 
Tu contestes cela et dis le contraire en t'appuyant sur un verset 
suivant (18) « le premier jour du mois au soir vous mangerez des 
azymes jusqu'au vingt et unième jour », tu dis que l'Écriture fixe 
l'obligatoire pour les autres jours. Cependant tu ne dois pas suivre la 
dernière expression mais la première, de manière à rendre le pre- 
mier jour obligatoire et les autres libres 2. 

On se demande comment la fille, vendue par son père 
pour être servante et qui doit obtenir sa liberté autrement 
que les servitem's {Ex. 21, 7), peut être libérée. La discus- 
sion ne devrait pas pouvoir surgir puisque la suite du texte 
prévoit le mode de libération; mais les écoles sont faites 
pour discuter. Doit-elle être libérée comme les esclaves 
chananéens par la mutilation d'un membre, ou bien à la 
faveur de l'année sabbatique ou jubilaire comme les serviteurs 
Israélites? « Tu dois t'en tenir à la première expression, non 
à la dernière : elle n'est libérée ni comme les esclaves Israé- 
lites, ni comme les chananéens w^. 

« Les lévites t'accompagneront et te serviront » {Num. 18, 2), par 
leur ministère et tu en feras dés trésoriers et des officiers ; faut-il dire 
au contraire « ils te serviront dans ton ministère » comme il est dit 
plus loin (3) « ils rempliront ton ministère et le ministère de la tente » ? 
Je lis aussitôt : « Voici que j'ai pris tes frères, les lévites, du milieu des 
enfants d'Israël; ils sont donnés à Yahwé.. » Ils sont donc livrés au 

1. Siphré in loc. § 132, p. 174. Cf. règle 16 d'Eliezer. 

2. Mekhilta in loc. p. 27 Discussion purement formelle; aucun ne 
conteste que les pains levés soient interdits pendant sept jours; la 
discussion porte sur ce seul point : quelle est la portée directe de 
chaque prescription si on l'abstrait du texte? 

3. Mekhilta Ex. 21, 3, p. 249. 



168 EXÉGÈSE BABBIîSilQUE. 

Nom (Dieu), non aux prêtres. Tu dois donc suivre le premier terme 
non le dernier*. 

Le principe est explicitemeiit formulé surtout dans des 
discussions subtiles et oiseuses ; il est souvent appliqué sans 
être rappelé : 

« L'étranger séjournant chez toi... devra être d'abord circoncis et 
alors il s'approchera pour faire la Pâque » {Ex. 12, 48). Que signifient 
ces deux prescriptions ? Voici que tu as devant toi deux commandements : 
celui de la Pâque et celui de la circoncision; je ne sais pas lequel des 
deux doit précéder. Puisqu'il dit « il doit être circoncis, puis s'appro- 
cher », le commandement de la circoncision doit précéder celui de la 
Pâque 2. 

Il est toutefois quelques cas où l'ordre des termes ne corres- 
pond pas à leur importance ou à leur place chronologique : 

Les filles de Salphahad ne sont pas énumérées suivant leur ordre de 
dignité; puisque les énumérations diffèrent, elles sont toutes égales 
entre elles 2. 

Dans l'énumération des objets demandés aux Égyptiens par 
les Hébreux, les vêtements viennent en dernière ligne parce 
qu'ils leur étaient plus chers (précieux) que l'or et l'argent^*. 

Ces exégèses sont en accord avec un principe formulé 
d'abord par R, Ismaël, puis repris par Rabbi Juda le saint : 
il n'y a pas d'ordre chronologique dans la Tora (ni d'avant 
ni d'après); de deux événements mentionnés l'un après 
l'autre le premier dans l'ordre des temps peut être rapporté 
en dernier lieu : 

« L'ennemi disait « [Ex. 15, 9) : ceci devrait être au commence- 
ment de la section et pourquoi est-ce écrit ici? Parce qu'il n'y a pas 
d'avant ni d'après dans la Tora. Pareillement pour Lév. 9, 1 ; Is. 6, 1 
(qui devrait commencer le livre du prophète); ^2. 2, 1; ou bien 17, 2 
(qui devraient ouvrir le livre); Jer. 2, 2; Os. 10, 1 ; Eccl. 1, 12^. 

1. Siphré Num. 18, 2, § 116, p. 131. Voir aussi ibicl. 18, 18, § 118, 
p. 141 ; 28, 26, § 148, p. 194 (controverse entre Sadducéens et Phari- 
siens sur le compte de la gerbe et le jour de la Pentecôte). Mekhilta 
Ex. 12, 2, 3, p. 8, 10. 

2. Mekhilta in loc. p. 56. Ibid. sur Ex. 12, 12, p. 23 : on mentionne 
en premier lieu les plus coupables. 

3. Siphré Num. 27, 1, § 133, p. 176 comparé à Num. 36, 11. 

4. Mekhilta Ex. 12, 35; la leçon de Mekh. Siméon h. Yohai, p. 24 
est plus claire. 

5. Mekhilta in loc. p. 139. Dans le i^abba sur Eccl. 1, 12 l'amora R. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 169 

Si ce principe vaut, à quoi bon l'ordre des termes? Deux 
réponses : 

« Dieu parla à Moïse et à Aaron » {Ex. 12, 1). Je pourrais croire 
que tout ce qui précède dans l'Écriture a précédé dans la réalité ; mais 
puisqu'il dit {Ex. 6, 26) « Aaron et Moïse », il nous enseigne qu'ils 
étaient égaux entre eux. Autres exemples : Gen. 1, 1 comparé avec 
2, 4; Ex. 3, 6 comparé avec Lév. 26, 42 (égalité des patriarches); Ex. 
20, 12 comparé avec Lév. 19, 3 (égalité du père et de la mère, relati- 
vement à l'honneur dû par les enfants) ; Num. 14, 6, comparé avec 32, 
12 (Josué et Caleb égaux) ^ 

De Num. 10, 3, 4 on pourrait induire (d'après le principe que ce 
qui précède dans l'Ecriture précède dans la réalité) que les princes 
d'Israël sont inférieurs à la communauté; mais il est enseigné {ibid. 
30, 2) : « il parla aux chefs des tribus » ; puisque nous avons des pres- 
criptions générales et aussi la précision que les princes précèdent la 
communauté, j'en déduis que dans tous les cas les princes précèdent 
la communauté. R. Jonathan cite Ex. 34, 31, sq., encore plus décisif 
et permettant d'introduire la précision là où elle n'est pas formulée 2. 

Ce second principe de solution est codifié dans la règle 
treizième d'Éliézer : un fait est mentionné après un principe 
général pour apporter une précision sur celui-ci. Ainsi est-il 
dit que Dieu créa l'homme à sa ressemblance [Gen. 1, 27); 
principe général, après lequel vient la précision concrète : 
« Dieu forma l'homme... et il fit tomber un profond som- 
meil » [Gen. 2, 7, 21). Celui qui entend pourrait supposer 
que c'est un autre fait, alors que ce n'est que la précision 

Samuel b. Isaac dit : ceci aurait dû être au commencement du livre... 
puis on transcrit le passage antérieur de Mekhilta en l'attribuant à 
R. Ismaël (d'autres exemples sont cités). Cf. Bâcher Agada der 
Tannaiten, I, p. 240. 

La règle 32 d'Éliézer est ainsi formulée : « de l'ordre (de l'avant et 
de l'après) des sections »; il montre que l'événement raconté Gen. 
15, 9 a précédé la guerre contre les rois, racontée auparavant, et de 
cinq ans la sortie de,5aran; de même l'édification de la tente, men- 
tionnée Num. 7, 1, a précédé l'entretien avec Dieu raconté en 1, 1. 

Le principe est rappelé Siphré Num. 9, 1, § 64, p. 61, illustré 
par le heurt entre Num. 1, 1 et 9, 1 ; puis Rabbi donne comme 
exemple Ex. 16, 35 (il est dit : les Israélites ont mangé de la manne 
pendant quarante ans, alors qu'ils n'en avaient pas encore mangé). 
Cf. Bâcher, Agada der Tannaiten, II, p. 473. 

1. Mekhilta, in loc. p. 1, 2. Cf. plus haut, p. 168, pour les filles de 
Salphahiad. 

2. Siphré Num. 30, 2, § 153, p. 198. 



170 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

du premier ^ Ces remarques attestent l'existence chez les 
rabbins d'un esprit observateur et sagace ainsi que d'un 
sens critique, mais timide encore, comme il convient à des 
débutants. 

4° Caractère elliptique de la Bible. Suggestions textuelles. 

Principe codifié dans la neuvième règle d'Éliézer : l'Écri- 
ture emploie (parfois) des expressions concises (elliptiques, 
dèrèk qesdrâ, voie abrégée) , omettant un mot que le con- 
texte exigerait^. 

Conséquence de ce caractère parfois elliptique de l'Écriture, 
les rabbins se demandent si elle a laissé quelque chose sans 
l'exprimer, ou bien ils se préoccupent d'expliquer les pas- 
sages trop concis et de combler leurs lacunes : 

« Vous ne suivrez pas leurs lois » (Lêv. 18, 3) : l'Écriture a-t-elle 
laissé quelque chose qu'elle n'ait pas dite? N'est-il pas déjà dit (Deut. 
18, 10) : « Qu'il ne se trouve chez toi personne faisant passer son 
fils ou sa fille par le feu... »? Pourquoi « vous n'irez pas dans leurs 
lois » ? Vous ne suivrez pas leurs coutumes ni les choses reçues chez 
eux, telles que les théâtres, les cirques et les amphithéâtres 2. 

1. Il donne encore comme exemple : Is. 1, 1, affirmation générale, 
avec la précision concrète en 6, 1; 14, 28 et 36, 1. 

On peut rapprocher la règle 12 : une chose qui vient renseigner 
sur une autre et qui est illustrée par elle. « Gomme un feu qui 
embrase un bois sec » (/s, 64, 1). Nous n'avons pas encore appris 
dans l'histoire de la création que le feu ait enflammé la face du 
firmament. Mais quand il vient pour donner la loi il dit [ibid.) : « Si 
tu déchirais les cieux et si tu descendais! »; de même que tu as 
fait à la création. A l'heure où le Saint, béni soit-il, dit {Gen. 1, 6) : 
« Qu'il y ait un firmament », il était déjà créé depuis le premier 
jour, mais il n'était pas brillant, tant que le feu d'en haut n'était 
pas venu l'enflammer. C'est ainsi que l'histoire de la création vient 
pour éclairer l'histoire du don de la loi et qu'elle se trouve illustrée 
par elle. Autre exemple : Jér. 46, 22 : la voix du serpent se fît 
entendre d'un bout du monde à l'autre quand les anges du service, 
pour accomplir la condamnation divine {Gen. 3, 14), lui coupèrent 
bras et jambes. 

2. On donne deux exemples : 1 Chron. 17, 5 : « J'ai été de tente 
en tente et de demeure » (en demeure) ; 2 Sara. 13, 39 : « et (l'âme 
de) David cessa de poursuivre » (l'addition est exigée par le verbe 
au féminin, cf. Ps. 84, 3). 

3. Siphra in loc. 86 a. Siphré Num. 6, 3, § 23, p. 28 : jus de raisin 
pour indiquer tout ce qui peut provenir du raisin. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 171 

« Tu ne sacrifieras pas sur le pain levé le sang de mon sacrifice » 
{Ex. 23, 18) est ainsi paraphrasé : n'immole pas la Pâque tant qu'il 
reste du levain, paroles de R. Ismaël. L'aspersion du sang est aussi 
comprise dans le terme « sacrifier». R. Juda explique : mon sacrifice 
désigne celui qui est tout entier mien, à savoir le sacrifice perpétuel ^. 

Parfois le besoin de compléter et de paraphraser se 
déploie en tonte liberté et fantaisie : 

« Choisissez (tirez) et prenez pour vous un agneau » {Mœ. 12, 21) : 
que tire celui qui en a et que prenne celui qui n'en à pas. 
R. Josué le galiléen : tirez vos mains de l'idolâtrie et attachez-vôûs au 
commandement. R. Ismaël : la Tora vient t' enseigner qu'à jamais on 
doit se compter pour la Pâque et qu'on en doit retirer lès mains pour 
l'immoler, mais qu'on laisse une victime convenable. R. Isaac : la 
Tora vient t'enseigner au sujet des animaux petits qu'on acquiert en 
les enlevant^. 

« Et je frapperai tout premier-né « {Ex. 12, 12) : les Égyptiens en 
Égygte et aussi au-dehors suivant Ps. 136, 10, ainsi que les premiers- 
nés de Cham, Kus et Lud et Phut suivant Ps. 78, 51 ^. 

« Dieu ne conduisit pas le peuple par le chemin des Philistins, 
cependant tout proche » {Ex. 13, 17). Toute proche est la chose que lé 
Saint, béni soit-il, avait dite à Moïse {Ex. 3, 12) ; « quand tu feras sortir 
le peuple de l'Egypte vous adorerez Dieu sur cette montagne ». Autre 
explication : proche est le chemin pour retourner en Egypte suivant 
qu'il est dit (8, 23) : « Nous irons à trois journées de marche dans le 
désert». Autre explication : proche est (le résultat du) serment qu'Abra- 
ham fît à Abimelech, suivant qu'il est dit {Gen. 21, 23) t « Et mainte- 
nant jure-moi par Dieu que tu ne tromperas ni moi, ni mes enfants, 
ni mes petits-enfants », car ses petits-enfants étaient encore vivants. 
Autre explication : proche de la seconde est la première guerre. Autre 
explication : proche est le moment où les Ghananéens vous mettront 
en possession du pays, suivant qu'il est dit {Gen. 15, 16) : « La qua- 
trième génération retournera ici ». Autre exphcatiôn : Dieu leur fît 
suivre le chemin le plus long pour leur donner le temps d'étudier la 
Loi...-' 

1. Mekhilta in loe. p. 334. Paraphrase analogue pour Êx. 20, 18, 
{ibid. p. 235) : « Et tout le peuple voyait les tonnerres » ; il voyait 
ce qu'on peut voir et entendait ce qu'ôa peut entendre : paroles de 
R. Ismael. R. Aqiba : ils voyaient et entendaient ce qui est visible ; 
ils voyaient la parole de feu sortant de la bouche de la Puissance 
et se gravant sur les tables (de Moïse) suivant qu'il est dit {Ps. 29. 
7) : « La voix de Dieu imprime des flammes de feu ». Cf. Mek- 
hilta sur Ex. 12, 17 (garder les azymes). 

2. Mekhilta, p. 36. 

3. Mekhilta, p. 23 et p. 43 sur 12, 29. 

4. Mekhilta, p. 75, 76. 



172 EXÉGÈSE KABBINIQUE. 

Inversement certaines redondances sont expliquées comme 
une façon de parler de l'Écriture : « Yaliwé fit pleuvoir... 
d'auprès de Yahwé » (Gen. 19, 24) alors qu'il faudrait « d'au- 
près de lui » ; « Lamecli dit à ses femmes : écoutez ma voix, 
femmes de Lamech » [Gen. 4, 23) pour « mes femmes w\ 

Juda de Kephr Akko interrogea Rabban Gamaliel sur la parole de 
Moïse (Ex. Ï8, 15) : Pourquoi dire :quand le peuple vient vers moi ! — 
Il lui répondit : sinon qu'aurait-il dû dire ? — Il aurait dû dire : quand 
le peuple vient pour consulter Dieu. — Puisqu'il a dit : il vient vers 
moi pour consulter Dieu, il a bien dit 2. 

Répondant à ces mêmes préoccupations, l'avant-dernière 
règle d'Éiiézer stipule que dans certains cas il faut intervertir 
l'ordre des propositions^. 

5° Déterminer les sujets des verbes. 

Il est important également de remarquer les changements 
de sujet qui se produisent, soit dans la même phrase, soit 
d'une phrase à l'autre. Les rabbins n'ont pas négligé ce moyen 
d'explication. Voici des analyses attentives, voire subtiles et 
artificielles : 

Penses-tu que celui qui a dit une partie de Num. 11, 6 a dit l'autre 
partie? Non ! celui qui a dit une partie n'a pas dit l'autre. C'est Israël 
qui dit : « Plus rien, de la manne nous avons plein les yeux ». Et c'est 
le Lieu (Dieu) qui, pour apaiser tous ceux qui entrent dans le monde, 
dit : « x\llons voir à quel sujet ils murmurent contre moi (ajouté au 
texte) ; et la manne était comme de la graine de coriandre et elle avait 
l'apparence du bdellium », suivant qu'il est dit {Gen. 2, 12) : « L'or de 
ce pays est bon et là est le bdellium ». Pareillement : c'est Juda qui 

1. Sanhédrin 38 b; question posée à R. Ismaël et à laquelle répond 
un foulon, suivant une tradition qui lui venait de Meïr. 

2. Mekhilta p. 196. Rabban Gamaliel lui donne une leçon de gram- 
maire : la proposition subordonnée apporte la précision désirée, tout 
en montrant que c'est par Moïse que Dieu donne ses consultations. 

Les expressions fréquentes et un peu similaires « l'Écriture devait 
dire ainsi » Justifient la teneur du texte biblique : voir Bâcher, 
Terminologie, I, p. 164, sq. 

3. Règle 31 : 1 Sam. 3, 3 est à lire : « Avant que la lampe de Dieu 
s'éteignît dans le Temple, Samuel était couché » (hors du Temple). 
Il faut lire ainsiPs. 34, 16, 18, 17. 

Notons au passage combien judicieuses sont parfois ces remarques 
sur ce qui devrait précéder dans l'Écriture. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 173 

dit : « Elle est plus juste que moi » et le Lieu (Dieu) éerit à son en- 
droit : a Et il ne la connût pas de nouveau » {Geii. 38, 26) ; quand il 
apprit qu'elle était sa bru il ne la connût pas de nouveau. Pareillement 
{Deut. 25, 18) : « Toi, tu étais fatigué et épuisé » : est dit d'Israël ; « et 
ne craignant pas Dieu » est dit d'Amaleq. 

Pareillement Jug. 5, 28-30 : « Pourquoi son char tarde-t-il à venir ? » 
est dit par la mère de Sisara. Les plus avisées de ses dames lui 
répondent et elle-même se répète ces paroles. « N'ont-ils pas trouvé et 
ne se partagent-ils pas le butin » est dit par sa femme. Débora eut révé- 
lation par le Saint-Esprit des paroles de la mère de Sisara et elle-même 
disait à son endroit : « N'attends pas ton fils, Sisara (ajouté au texte), 
qu'ainsi périssent tous tes ennemis, ô Yahwé (31) », Pareillement 1 Sam. 
4, 8 : « Qui nous délivrera de la main de ces dieux puissants? » est dit 
par les justes ; mais les impies disent : .« Ce sont les dieux qui ont 
frappé les Egyptiens de toute sorte de plaie dans le désert » . Et ils 
disaient : « Il avait dix plaies et il les a envoyées sur les Égyptiens, il 
ne nous frappera pas à notre tour » (ajouté au texte). Aussi le Lieu leur 
dit : « Vous dites que je n'ai plus de plaie à envoyer sur vous ; aussi en- 
voyé-je sur vous une plaie qui n'a jamais été : alors qu'un d'entre vous 
sera assis dans un endroit pur, une souris sortira de l'abîme, relâ- 
chera ses intestins et retournera à l'abîme » ; aussi bien dit-il : « Et la 
main de Yahwé s'appesantit sur les habitants d'Asdod ». Pareillement 
Jér. 26, 16, 17 fut dit par les justes, 20-23 fut dit par les impies. Pareil- 
lement {Ruth, 3, 13) : « Reste couchée jusqu'au matin »; la mauvaise 
nature de Booz le tenant pendant toute la nuit, il lui fait ce ser- 
ment : « Dieu vivant, si je la toucherai » et à la femme il dit : « Reste 
couchée jusqu'au matin »*. 

Ces analyses, qui distribuent les discours entre plusieurs 
sujets, sont pour la plupart injustifiées; cependant elles met- 
tent en œuvre un principe légitime : il est certain que divers 
psaumes, le Cantique, ne se comprennent que si on distingue 
plusieurs sujets, que si on restitue l'élément dramatique que 
comporte ce genre littéraire. 

1. Siphré Num. 11, 6, § 88, p. 87, sq. Tos. Sota 9, 2-9, p. 312-313. 
analyse quelques-uns des textes ci-dessus et en étudie d'autres : 
Deut. 21, 7, 8; Num. 13, 26, 27, 28, 29, 30, 31; Nahum, 1, 1, 3, 4; Ps. 
56, 1, 2; Cant. 8, 5, 6. Dans Tosephta la formule est : dans cette 
section les sujets sont mêlés, ce que dit l'un n'est pas dit par l'autre; 
ou bien : il y a là trois sujets, l'un à côté de l'autre. 

La règle vingtième d'Eliézer prescrit d'entendre certains textes 
d'un autre destinataire que celui qui est indiqué explicitement, parce 
que ces textes ne leur conviennent pas : ainsi Deut. 33, 7 se rapporte 
à Siméon; dans Jér. 33, 26, au lieu de Jacob, lire Aaron (qui a donné 
des chefs au peuple, cf. ibid. 24). 



174 EXÉGÈSE RABBINlQtJE. 

6° Écritures pauvres et riches. 

Principe que, sous diverses formes, invoquent et appliquent 
les rabbins : un texte incomplet ou obscur doit être expliqué 
par un autre. R. Nehemia donne la formule la plus large du 
principe : 

Les termes de la Loi sont pauvres en certains endroits et riches en 
un autre. (Il faut leur trouver explication ou justification dans les 
autres endroits). Aussi bien disait-il : « Elle est comme le navire du 
commerçant qui de loin porte son pain » (Prov. 31, 14) ^ 

C'est conformément à ce principe que le compagnon de 
R. Nehemia, R. Juda b. liai, déclare au sujet à!Ex. 15, 3 : 
« Yahwé est un homme de guerre » : 

Cette écriture est riche (éclairant) beaucoup de passages ; elle nous 
apprend que le Saint, béni soit-il, se révéla aux israélites muni de toutes 
les sortes d'armes : i'épée [Ps. 45, 4), cavalier [Ps. 18, 11), la cuirasse 
et le casque {Is. 59, 17), la lance {Hab. 3, 11 et Ps. 35, 3), l'arc et lès 
flèches {Hah.2,,^eiPs. 18, 15)le bouclier etlarondache(Ps.91, 4; 35,2)2. 

Autre formule du même principe : « Paroles incomplètes ici 
que l'Écriture dit (complète) là » (et réciproquement) ^. 

1. Donné comme baraitha de R. Nehemia dans Pal. Ros ha-sana, 2, 
5, 58 d. Rapporté à la fin de la règle quinzième d'Èliézer relative aux 
textes contradictoires et à leur accord; nous suivons ce texte plus 
clair; de là aussi vient la phrase entre parenthèses. 

2. Mekhilta Ex. 15, 3, p. 129; item Ex. 14, 19, p. 101. 

Dans le même sens on trouve les formules suivantes : « ce n'est 
pas dans un seul endroit ou dans deux qu'il fait telle chose « (honore 
les anciens) et « dans tout endroit où tu trouves telle chose » (la 
mention des anciens. Dieu les honore) », Siphré Num. il, 16, § 92, p. 92 
(voir autres références dans Bâcher, Terminologie, I, p. 116, sq.); 
c'est dire équivalemment que cet endroit (et les similaires) doit 
éclairer les endroits moins clairs. 

3. Siphra 13 a et 101 b sur Lév. 2, 14 et 23, 17, sq. que l'on oppose 
l'un à l'autre dans une discussion (les prémices à offrir doivent-elles 
être fournies par les individus ou par la communauté?) Dans Mek- 
hilta, p. 53 sur Ex. 12, 43, formule analogue : l'Écriture nous apprend 
par là qu'il y a là des paroles incomplètes. Cette déclaration vient 
après une discussion : R. Jonathan rapporte Ex. 12, 43 à la Pâque 
faite en Egypte et il trouve la Pâque pratiquée dans les générations 
en Num, 9, 3; R. Josia assure que le premier texte se rapporte aux 
deux Pâques et que le second texte marque que certaines paroles de 
la Loi sont incomplètes 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 175 

Principe analogue exprimé dans le Midras tannaïte par un 
qualificatif singulier : cette écriture est (c eunuque » et doit 
être expliquée : 

« Les hommes impurs se présentèrent à Moïse et à Aaron » {Num. 
9, 6). Si Moïse ne savait pas, Aaron aurait-il su? Mais l'Écriture est eu- 
nuque, explique-la : paroles de R. Josia. R. Hanan au nom de R. Élié- 
zer dit : ils étaient assis à l'académie juridique et ils vinrent se pré- 
senter devanteux^. „ 

L'essentiel de ces principes c'est qu'une écriture doit être 
expliquée par une autre : ce qui ailleurs est exprimé direc- 
tement et sans figure; « une chose qui n'est pas élairement 
exposée dans le passage où elle est présentée est expliquée 
dans un autre passage » ^. 

On dit parfois que tel énoncé, historique ou juridique, 
« bouché », sâtûm (implicite, obscur, incomplet), est expliqué 
dans un autre endroit : 

« Aaron, les bénit « {Lév. 9, 22) cette bénédiction n'est pas précisée, 
de telle sorte que tu ne sais pas quelle fut sa formule. Mais l'Écriture 
ailleurs explique le passage présent {Num. 6, 24) : « Que Yahwé te 
bénisse et te garde. . . qu'il te donne la paix » ^. 

Dans une discussion sur « tu ne déroberas pas » {Ex. 20, 15) : con- 
tient-elle seulement l'interdiction de voler des biens, défend-elle de 
voler les personnes? ne serait-elle que l'avertissement à joindre à l'in- 
terdiction formulée en Lèv. 19, 16? tandis que Lév. 19, 11 ne se rappor- 
terait qu'au vol des biens matériels? Puisqu'elle suit les deux autres 
interdits, de l'homicide et de l'adultère, elle concerne les personnes. Et 
on peut encore dire : trois lois ont été énoncées dans ce texte, deux 
claires et une bouchée ; nous expliquons la loi bouchée par les lois 
claires : de même que celles-ci entraînent la mort par sentence du tri- 
bunal, de même l'autre^. 

« Il a précipité dans la mer cheval et cavalier » {Ex. 15, 1). Issi b. 

1. Siphrê in lac. § 68, p. 63; les deux considérations sont répétées 
identiquement : sur 15, 33 et 27, 2, § 113 p. 123, § 133, p. 177. 

Même remarque en Mekhilta p. 167 sur Ex. 16, 20 qu'il faut lire : 
tout devint infect, puis s'y mirent les vers. Item Siphra sur 10, 7, 45 
b (à propos de Lév. 9, 22). 

2. Nous transcrivons la dix-septième règle d'Eliézer; les exemples 
qu'il donne sont de la haggada la plus légendaire, nous ne les rap- 
portons pas. Néanmoins la règle ne fait que codifier des méthodes 
pratiquées abondamment dans la littérature tannaïte. 

3. Siphra Lév. 10, 7, 45 b. 

4. Mekhilta Ex. 20, 15, p. 232, sq. Cf. Sanhédrin 86 a. 



176 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

Sammai dit : ici il est dit, sans autre précision, « cheval » et là le 
cheval trouve toutes les précisions, suivant qu'il est dit {Zac. 12, 4) : 
« En ce jour-là, oracle de Yahwé, je frapperai de terreur tous les 
chevaux et de délire leurs cavaliers ; et sur la maison de Juda j'aurai 
les yeux ouverts et tous les chevaux des nations, je les frapperai d'aveu- 
glement » et il ajoute encore (ibid. 14, 12, 15) : « telle sera la plaie des 
chevaux, des mulets, des chameaux et des ânes » . Le passage clair vient 
éclairer le passage bouché : de même que celui-là comporte cinquante 
fléaux, de même celui-ci ^. 

Formule équivalente : 

« Et Amaleq vint « (Ex. 17, 8). R. Josué et Éléazar l'aveugle disent : 
cette écriture ne contient qu'une indication (râsûm) et elle est expliquée 
en Job, suivant qu'il est dit {Job 8, 11) : « Le papyrus croît-il hors des 
marais, le jonc s'élève-t-il sans eau? » De même que ces plantes ne 
peuvent pousser sans eau, de même Israël ne peut vivre sans la Tora 
et s'il s'en sépare, vient sur lui l'ennemi : en effet l'ennemi ne vient 
que pour punir le péché et la transgression ^. 

Ce procédé est abondamment pratiqué et souvent introduit 
par la formule : l'Écriture explique (illustre) ce sujet dans la 
tradition {qabbâld, toute l'Écriture hormis le Pentateuque) . De 
cette manière est affirmée et montrée l'unité des Écritures et, 
d'autre part, le sens symbolique de quelques livres, tels le 
Cantique ou les Psaumes, est mis en valeur : 

« Les Hébreux se tenaient au pied de la montagne » (Ex. 19, 17)... 
à ce sujet il est expliqué dans la tradition (Cant. 2, 14) : « Ma colombe, 
qui te tiens dans la fente du rocher, dans l'abri des parois escarpées, 
montre-moi ton visage, fais-moi entendre ta voix, car ta voix est douce 
et ton visage beau ». « Montre-moi ton visage «, ce sont les douze stèles 
dressées suivant les douze tribus d'Israël; « fais-moi entendre ta voix » 
ce sont les dix commandements ; « car ta voix est douce », c'est ce qu'ils 
dirent après (avoir entendu) les commandements ; « et ton visage est 
beau » correspond à Lév. 9, 5 : « Et toute l'assemblée s'approcha et 
se tint devant Yhwh » ^. 

On dit aussi que telle écriture exprime clairement ce qui 
ailleurs n'est pas exprimé ou explicitement affirmé : 

' 1. Mek/tilta p. 125. Dicton courant : « toute peine de mort dite 
sans précision {seiûmâ) dans la Tora est toujours la plus légère, 
l'étrang^lement » : Siphra Léc, 20, 10, 92 a. 

2. Mekhilta in loc. p. 176. 

3. Mekhilta p, 214, sq. Voir autres exemples dans Bâcher, Termi- 
nologie, I, p. 155, 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 177 

Dans un développement juridique, incidemment est rapporté (en résu- 
mant 2 Chron. 35, 21-24) le conflit du roi Josias avec le Pharaon Néchao ; 
il tombe blessé dans le combat et se fait emporter à Jérusalem par ses 
serviteurs; le texte spécifie qu'il y mourut; cependant on se pose la 
question : où la chose est-elle clairement exposée ? « Le soufQe de nos 
narines, l'oint de Yahwé a été pris dans leurs fosses » {Lam. 4, 20) '. 

Inversement on dit : voilà une des écritures qui ont besoin 
d'explication^. 

L'explication qui manque, on peut la chercher dans des 
textes parallèles au moyen d'un raisonnement par analogie; 
nous connaissons cette exégèse dialectique. La lumière peut 
être fournie par des textes apparentés. 

Dans certains cas il est tout indiqué de rapprocher deux 
textes pour les expliquer l'un par l'autre : ainsi / Sam. 25, 
kk (et 18, 19) par 5 Sam. 21, 8, sur les flUes de Saul devenues 
les épouses de David ^. Il est naturel également de rechercher 
le texte auquel fait allusion un autre texte ^. 

Nous avons déjà vu (p. 47) la méthode qui consiste à 
rapprocher deux textes qui se correspondent (^enè^èc?). Procédé 
semblable : citer des textes contenant une idée pareille à celle 
du texte interprété (pareillement, kyôsé bô) : 

«Il m'appartient (le nouveau-né) » {Ex. 13, 2). Consacre-moi, afin 

1. Tos Taaniot, 2, 10, p. 218. Tos. Zebahim, 11, 7, p. 496 expose com- 
ment les dépouilles des victimes sont partagées entre Dieu et les 
prêtres, sauf pour l'holocauste où l'jticriture précise {Lév. 7, 8). 

2. Siphra 43 c sur 9, 1 : s'agit-il du huitième jour du mois, ou 
du jour qui suivit les sept jours de la consécration des prêtres (8, 33- 
35)? La suite du texte montre que le huitième jour désigne cela; mais 
le prurit rabbinique de poser des problèmes ! 

3. Ces deux textes sont rapprochés par R. José b. ^alaphta, dont 
on rapporte qu'il interprétait des écritures mélangées (me'ôrâbin), 
dans une discussion sur Merab et Michel (David aurait-il pu épouser 
ensemble les deux soeurs?) : Sanhédrin 19 b. Sur ce procédé dans 
la Misna : Aicher, op. cit., p. 118-120. 

4. Mekhilta p. 39, sq. sur Ex. 12, 25 donne toute une série de textes 
où il est fait allusion à un fait rapporté ailleurs dans un autre texte : 
Ex. 12, 25 à compléter par 6. 8 ; 16, 23 par 22 ; Lév. 10, 3 par Ex. 
29, 43; Dent. 11, 25 par Ex. 23, 23; Deut. 12, 20 par Ex. 34, 24 et 23, 
31; Is. 1, 2 par Deat. 32, 1; /s. 40, 5 par Deut. 32, 39-, Is. 1, 19, sq. 
par Lév. 26, 25..,. 

Quelques-uns de ces rapprochements sont factices ou purement 
verbaux; d'autres montrent quelle parenté on établissait entre divers 
passages poétiques. 



178 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

d'en recevoir la récompense. Discussion qui amène la répétition de 
cette motivation. Pareillement « le prêtre y allumera du bois » (Lév. 
6, 5) afin d'en recevoir la récompense. Pareillement Bx. 25, 8... ^. 

Souvent la formule (pareillement) sert à ranger des textes 
de teneur analogue (cf. plus haut, p. 9k) 

Formule équivalente : « et ainsi dit-il » ; par exemple : « ils 
ne s'approcheront pas des ustensiles du' sanctuaire » est 
rapproché de Num. 4, 20 : « ils n'entreront pas un seul ins- 
tant pour voir les choses saintes » ^. 

7° utilisation du conteste. 

Principe auquel les exégètes modernes ne cessent de se 
référer : tenir compte du contexte. Les rabbins anciens avaient 
une conscience non moins vive de cette nécessité. Tant dans 
le catalogue de Hillel que dans ceux d'Ismael et d'Éliézer 
nous trouvons des règles relatives au contexte^. 

A. — DÉTERMINATION DU CONTEXTE. 

Le terme dont les rabbins se servent pour désigner le 
contexte, par son sens multiple, montre bien toute la portée 
compréhensive de leur méthode. Vnyaw, qui dans l'Ecclésiaste 
désigne une affaire pénible, est pris dans la littérature 
rabbinique à la fois pour la chose, l'espèce, le sujet dont il 
s'agit et pour le texte traitant d'un sujet déterminé. 

L'importance attribuée au ^inyân explique le soin que mettent 
les commentateurs à déterminer exactement, d'une part le 
sujet dont il est question dans un passage, d'autre part les 
limites du texte relatif au même sujet : 

« Vous vous souviendrez ainsi de tous mes commandements et les 
mettrez en pratique et vous serez saints à votre Dieu» {Num. 15, 40). 

1. Mekhilta Ex. 13, 2, p. 58. Siphré Num. 18, 5, § 116, p. 133, pour 
expliquer la valeur de 'od. 

2. Siphré Num. 18, 3, § 116, p. 131, sq. Formule et procédé constants. 

3. Septième règle de Hillel : une chose s'éclaire par son contexte 
ijiallâméd mé'inyânô). La douzième d'Ismael reprend cette formule 
et la complète par celle-ci : une chose s'éclaire par sa fin. 

Les règles d'Éliézer 19, 20-23 se rattachent à la méthode du con- 
texte. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 179 

Il s'agit ici de là sainteté que procurent les commandements considérés 
dans leur collectivité et non de la sainteté qui provient de l'observance 
des franges : de quel sujet parle-t-il? de la sainteté des commande- 
ments ^ 

Ou bien en insistant encore plus fort : 

Dieu ordonne aux Hébreux de choisir l'agneau pascal quatre jours 
avant son immolation, parce qu'en Egypte ils avaient été contaminés 
par l'idolâtrie ; or, le péché d'idolâtrie équivaut aux péchés qui provien- 
draient de la violation de tous les commandements ensemble suivant 
qu'il est dit {Num. 15, 24) : « Si l'on a péché par inadvertance à l'insu 
de la communauté ». L'Ecriture particularise ce commandement et sti- 
pule le sujet pour lui-même (pour lui tout seul), à savoir l'idolâtrie.... 2. 

On note aussi que plusieurs passages traitent lé même 
sujet : 

« Moïse exposa (ainsi) les fêtés dé Yahwé aux Israélites » {Lêv. 23j 44). 
Nous apprenons que Moïse exposa les lois de la Pâquè au moment de la 
Pâque et les lois de la Pentecôte en son tèmpSj et les lois de la fête 
(des Tentes) en son temps : les termes qu'il avait entendus, il les 
rapportait à Israël. Et toutes ces sections oiit été dites dans un seul 
'inyân ^. 

On Ée demande pourquoi deux textes sont voisins, s'ils 
ont un même sujet : 

Le prêtre, purifiant un lépreux^ devait lui dire déâ paroles d'exhorta- 
tion, par exemple : mon fils, la lèpre vient uniquement comme peine 
de la mauvaise langue, suivant qu'il est dit : « Prends garde à là plaie 
de la lèpre, observant bien et accomplissant.... » et « Sôuviens-toi de 
ce que Yahwé fit à Marie » {Dèut. 24, 8, 9). Quel rapport {'inyân) y a- 

1. Siphré Num. 15, 40^ § 115, p. 127. La section 3^-40 traite dès 
franges, mais le verset commenté met au premier plan les com- 
mandements. Rabbi y voit la sainteté des franges, « qui ajouté à la 
sainteté d'Israël ». 

2. Mekhilta sur Ex. 12, 6, p. 15 ; item dans Siphré sur Num. 15, 24, 
§ 111, p. 117, à la seule différence : ce commandement est dit pour 
lui-même, ce qui montre l'équivalence des deux substantifs; le sujet 
['inyân) est un commandement. 

3. Siphra Lév, in loc. 103 b. En effet la législation de chaque fête a déjà 
fait l'objet de paragraphes spéciaux : Moïse a réuni les lois du sab- 
bat et des fêtes dans un chapitre d'ensemble en raison du sujet 
commun qui permet de les grouper dans un seul discours. 

C'est ainsi qu'Abraham de Posquîères explique la raison de cette 
écriture qui parait superflue. 



180 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

t-il entre les deux textes ? Cela nous apprend que la lèpre est la puni- 
tion de la mauvaise langue ^. 

Les rabbins sont attentifs à marqu.er les bornes du passage 
["inyân), traitant le même sujet, passage souvent très court. 

D'aucun animal on ne devra immoler la mère et le petit le même 
jour. R. Siméon b. Azzai entend ce jour du jour qui s'étend jusqu'au 
matin (qui comprend la nuit) : puisque le commencement et la fin de 
texte (Hnyân) concernent les choses saintes et que relativement aux 
choses saintes le jour est le jour qui comprend aussi la nuit^. 

Le passage peut aussi être fort long et pas très un : 

On se demande ce que Moïse lût au peuple dans le livre de l'alliance 
{Ex. 24, 7). R. Ismael dit: au commencement du passage {Hnyàn) que 
dit-il? {Lév. 25, 2) « La terre fera son sabbat... pendant six ans tu 
sèmeras ton champ »; puis viennent les années sabbatiques et les 
jubilés, les bénédictions et les malédictions. Et à la fin du passage 
que dit-il? [Lév. 26, 46) « Tels sont les statuts, lois et ordonnances ». 
Ils dirent {Ex. 24, 7): « Nous les acceptons... »3, 

Afin de prévenir les confusions il importe de couper et 
diviser le texte suivant la diversité des sujets : 

Dans une discussion sur l'heure de l'immolation et de la manducation 
de l'agneau pascal. De Deut. 16, 6 on déduit que l'heure de l'immolation 
est au soir, quand le soleil décline. On ne peut tirer du même texte 
qu'on peut le cuire et le manger au soir, car il est enseigné en ces 
termes : « Immoler... au temps de la sortie d'Egypte ». C'est ainsi que 
l'Écriture coupe le texte {Hnyân). Alors comment? « Tu le cuiras et 
mangeras » quand il fera nuit-*. 

« Si son offrande... » {Lév. 1, 10), Voici qui ajoute au Hnyân (texte 
ou sujet) antérieur et pourquoi coupe-t-il ainsi ? Pour donner aisance à 
Moïse de distinguer entre les diverses sections {parâsâ) et les divers 

1. Siphra Lév. 14, 35, 73 a. Même question sur Deut. 33, 5 et 6 : 
les tribus d'Israël intercèdent pour Ruban : Siphré § 346, 144 a. 

2. Siphra Lév. 22, 28, 99 c. Le texte traitant le même sujet ne 
comprend que 22, 26-28. Cf. Hullin 83 a; là Rasi justifie cette déduc- 
tion par Lév. 1, 15. On ajoute : quant au sujet « lui et son petit » on 
peut entendre ainsi le jour par rapprochement avec les jours de 
Genèse 1. 

3. Mekhilta Ex. 19, 10, p. 211. On ne voit pas bien la raison de 
l'opinion d'Ismael, sauf que les bénédictions et malédictions pou- 
vaient passer pour le résumé de toute la Loi. Il faut noter qu'ici 
'■inyân désigne une section assez longue et pas du tout une. 

4. Mekhilta Ex. 12, 6, p. 17. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 181 

sujets. D'où raisonnement a fortiori : Si celui qui entendait de la 
bouche de celui qui a dit et le inonde fut et qui parlait en Esprit saint 
aYait„besoin de distinguer entre les diverses sections et les divers sujets, 
à combien plus forte raison un illettré d'entre les illettrés (idiota) ' ! 

Pour dégager l'unité d'une péricope il est bon de tenir 
compte des parenthèses qu'elle peut comporter : 

« Aaron entrera dans la tente de réunion « {Lév. 16, 23). Toute la 
section est dite dans un ordre parfait sauf ce passage 2. 

La règle onzième d'Eliézer touche un point analogue : 
une mauvaise division du texte ^. 

B. — USAGE DU CONTEXTE. 

Voici comment, dans la Baraitha des treize règles d'Ismael, 
est appliquée la règle du contexte : 

Une chose qui apprend (s'éclaire) par son contexte : comment? 
« Lorsqu'un homme a perdu ses cheveux sur la tète, il est chauve, 
mais il est pur » (Lév. 13, 40). On pourrait croire qu'il est pur de toute 
impureté; mais il est enseigné en ces termes {ibid. 42) « mais si dans 
sa calvitie antérieure ou postérieure apparaît une plaie d'un blanc 
rougeâtre... « La chose apprend de son contexte qu'il n'est pas pur de 
toute impureté, mais seulement de l'impureté d'impétigo (ou maladie 
de peau autre que la lèpre)'*. 

Voici un exemple plus court et où la règle est invoquée par 
R. Ismael lui-même : 

Dans une discussion sur Nadab et Âbiu, fils d' Aaron, frappés par Dieu 
pour avoir offert un feu étranger, R. José assure que, suivant le texte, 

1. Remarques identiques dans Siphra 7 c et 3 c sur Lév. 1, 1 et 10- 
la première partie de la remarque dans 19 a sur Léc. 4, 13. 

2. Siphra in loc. 82 b. Tout le chapitre décrit les rites de la fête 
de l'expiatioa ; seuls ces deux versets (23, 24) mentionnent le bain et 
la purification du grand-prêtre. 

3. Un ensemble complet {siddâr, ou ensemble bien ordonné) qui a 
été divisé. Il donne trois exemples : 2 Chron. 30, 18 à ne pas séparer 
de 19 pour avoir un sens convenable ; Joh 17, 4, 5 et Prov. 23, 31 et 
32 qu'il croit rendre plus clairs en ajoutant quelques mots explicatifs. 
Ces deux derniers exemples ne supposent pas une parenthèse. 

4. Le texte de cet exemple et l'emploi de la formule talmûcl lômar 
(il est enseigné eij ces termes) indiquent que la règle du contexte est 
appliquée très souvent, mais sans qu'elle soit mentionnée, en bien 
des cas où on profère le talmûd lômar. 



182 EXÉGÈSE BABBINIOtE. 

ils moururent devant Yahwé (dans le sanctuaire) mais qu'ils tombèrent 
au dehors, parce que Tange les tira dehors en les soutenant, suivant 
qu'il est dit {Lëv. 10, 4, 5) « Moïse appela Misaêl et Elisaphon.. et il 
leur dit ; Approchez-vous et enlevez vos frères loin du sanctuaire » . Il 
n'est pas dit « loin de la face de Yahwé » mais « loin du sanctuaire ». 
R. ismaël dit : la chose est éclairée par son contexte, car il est dit 
(10, 2) : « Et ils moururent devant Yahwé ». Ils moururent et tombèrent 
devant lui. Comment sortirent-ils? On les tira avec des crocs de fer ^. 

La seconde partie de la règle du contexte est ainsi formulée 
et illustrée : 

Une chose apprend de sa fin (de la fin du contexte); comment? 
« Une plaie de lèpre dans une maison du pays que vous posséderez » 
{Lév. 14, 34). Une maison signifie une chose qui contient des pierres, 
des bois et du mortier (de la poussière) qui peuvent recevoir l'impureté. 
On pourrait dire qu'il s'agit aussi de maisons ne comportant ni pierres, 
ni bois, ni poussière pouvant recevoir l'impureté. Il est enseigné en 
ces termes (ibid. 45) : « On démolira la maison, ses pierres, ses bois 
et sa poussière « . La chose est éclairée par sa fin : la maison ne peut 
devenir impure par la lèpre que si elle comprend des pierres, des bois 
et de la poussière. 

Ces deux exemples montrent que le contexte doit être 
entendu dans un sens assez large : c'est tout le passage 
traitant du même sujet, ou aussi les versets voisins, même 
traitant d'autres sujets; ce dernier point est supposé parla 
règle du sâmûk. 

Dans le catalogue d'Éliézer la méthode de l'interprétation 
parle contexte est exposée en plusieurs règles. 

, Règle 19 : d'une chose dite ici et déterminant le texte voisin : 
comment ? « Il fondit les deux colonnes : la hauteur d'une colonne 
était dé dix coudées « {i Reg. 1, 15). Cette introduction marque en 
termes symboliques, que ce qui est dit d'Une chose est dit de l'autre. 
Pareillement {Ps. 97, 11) : « La lumière est semée pour le juste et la 
joie pour ceux qui ont le cœur droit ». Il n'est pas possible de dire que 
les" justes possèdent la lumière sans la joie ou qu'il y ait des justes 

1. Siphré Num. 7, 1^ § 44, p. 49, Sq. 

Nous avons trouvé (p. 173) la mention de la règle du contexte 
dans le commentaire sur l'interdiction du vol, spécifié par son 
contexte : Mekhilta Ex. 20, 15, p. 233 : « apprends la chose d'après 
les treize règles, d'après le contexte ». Cf. Sanhédrin 86 a. 

Voir aussi Mek/iilta, p. 12 sur Ex. 12, 4 : miksâ désigne le nombre 
des participants à la Pâque, dont il est question là-même. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 183 

ayant la joie sans la lumière. Mais « lumière pour les justes » est à 
appliquer aux cœurs droits ; « joie pour les cœurs droits » est à 
appliquer aux justes. Pourquoi appliquer l'un à l'autre ? parce qu'ils 
sont tous deux égaux et ne font qu'un. 

L'exemple est très bien choisi ; la justice et le cœur droit 
sont identiques : la récompense de l'un est aussi celle de 
l'autre 

Règle 20 : une chose dite de celui-ci et ne lui convenant pas (son 
Hnyân n'est pas pour lui) mais convenant à son compagnon : et quand 
convient-elle à son compagnon? quand elle est nécessaire au second 
et pas au premier. Comment? « Ceci est pour Juda »... (Deut. 33, 7) 
et cela ne convient pas à Juda, puisqu'il dit « écoute, ô Y., la voix de 
Juda ». Applique-le àSiméon qui en a besoin, tandis que Juda n'en a 
pas besoin. Tu te trouves dire : quand Moïse bénit Ruben et dit « ceci 
est pour Juda » il voulut dire cette bénédiction pour Siméon. 

Pareillement (Jér. 33, 26) : « je rejetterai aussi la postérité de Jacob 
et de David, mon serviteur... » La chose ne convient pas à Jacob, parce 
que tout aussitôt il dit (26) : « au point de ne plus prendre de la pos- 
térité des chefs... » Applique la chose à Aaron, ce qui se justifie en ce 
qu'il dit : « au point de ne plus prendre la postérité des chefs ». Quels 
étaient les chefs dans le peuple? Dis : les rois et les grands prêtres, les 
fils d' Aaron et les fils de David. A leur sujet cela est dit : « Et ainsi dit-il 
(24) : « N'as-tu pas vu ce que ce peuple dit : Yahvé a rejeté les deux 
familles qu'il avait choisies ». De même ici il dit : « aussi la postérité 
de Jacob et de David ». 

Là la considération du contexte n'intervient pas seule, c'est 
un raisonnement qui modifie le contexte et y introduit le 
« compagnon » auquel l'interprète veut rapporter une affir- 
mation qui le gêne dans ses conceptions religieuses ou qui 
choque son goût littéraire. 

Hègle 21 : Un objet à qui sont attribuées deux qualités séparément 
et dont l'essence exige l'attribution des deux qualités ensemble : 
comment? « Le juste croît comme le palmier » (Ps. 92, 13). On pour- 
rait ainsi l'entendre : de même que le palmier n'a pas d'ombre et qu'on 
n'en peut tirer du bois pour la menuiserie, ainsi les justes. Mais il est 
enseigné en ces termes (ibid) : « comme le cèdre » : de même que le 
cèdre fait de l'ombre et donne du bois de menuiserie, ainsi les justes. 
Mais on pourrait dire aussi : de même que le cèdre ne produit pas de 
fruits... mais il est enseigné en ces termes : « comme le palmier ». 
Tu te trouves dire : le juste possède les propriétés excellentes qui sont 
dans les deux. Pareillement : « vous, les altérés, allez aux eaux»... 



184 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

(Is. 55, 1). On pourrait dire : de même que les eaux ne réjouissent pas, 
ainsi en est-il des voies de l'étude de la Tora; il est enseigné en ces 
termes : « du vin et du lait ». On pourrait dire : de même que le vin 
ni le lait ne fortifient pas ceux qui grandissent, de même les paroles 
(étude) de la- Loi ; il est enseigné en ces termes : « allez aux eaux » . Tu 
te trouves attribuer à l'étude de la Loi les propriétés excellentes qui 
sont dans les deux termes de comparaison. 

Là le raisonnement porte bien sur le contexte, non pas 
toutefois pour interpréter une de ses parties par une autre 
ou par l'ensemble des parties, mais pour dégager le sens 
complet du passage et appliquer correctement une double 
comparaison. 

Bègle 22. Un texte éclairé par son voisin : comment? « Un don 
fait en secret apaise la colère » (Prov. 21, 14). Cela signifie : celui 
qui donne en secret apaise la colère du Saint, béni soit-il. « Un présent 
mis dans le pli du manteau apaise la fureur violente ». Le premier 
« apaise » éclaire le second. Pareillement : « Ce n'est pas avec le traî- 
neau qu'on foule la neige, pas plus que la roue du char ne passe sur 
le cummin » (/s. 28, 27) : le premier Zd' (négation) éclaire le second 
membre (qui n'a pas de négation dans l'hébreu). Pareillement : « Ne 
me réprimande pas dans ta colère ni ne xae châtie dans ton irrita- 
tion » {Ps. 38, 2). Le premier 'aZ (négation) éclaire le second membre 
(sans négation). 

Les deux derniers exemples appliquent la méthode d'in- 
terprétation par le contexte en étendant la négation du 
premier membre du parallélisme au second; dans le premier 
exemple on entend les deux membres de la colère divine 
qui se laisse apaiser par l'aumône. 

Règle 23. Un texte qui éclaire son voisin : comment? « La voix 
de Yahvé ébranle le désert, Yahwé ébranle le désert de Kadès » {Ps. 
29, 8). Ebranle-t-il seulement le désert de Qadès ou aussi tous les 
déserts? Et alors pourquoi « Qadès »? Pour instruire au sujet de ces 
déserts qui sont ébranlés. Pourquoi spécifie-t-il ce désert seulement? 
Parce qu'il est le plus important de tous, comme le prouve Deut. l, 46 : 
« Vous restâtes de longs jours à Qadès ». 

Pareillement c( La voix de Yahwé fait enfanter les biches »... (Ps. 
29, 9) : même raisonnement que ci-dessus. Pourquoi est-il dit « les 
biches »? parce qu'elles sont les plus légères parmi les animaux 
coureurs, comme le prouve Ps. 18, 34 « qui rends mes pieds sem- 
blables à ceux de la biche ». 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 185 

Nous retournons là à la méthode dialectique (exposée dans 
la règle 24) du particulier et du général, le particulier 
venant illustrer le général. 

Autre principe pour l'utilisation du contexte : 

Dans une discussion sur le côté par lequel le prêtre sacrificateur 
doit aborder l'autel, toutes les opinions se fondant sur Lév. 6, 7 : <i Les 
fils d'Aaron la présenteront devant Yahwé, devant l'autel ».R. Eliezer 
disait : est-ce à l'ouest de la corne de l'autel ou au sud? Tu dis : toutes 
les fois qu'on dispose de deux écritures, que l'une peut être accomplie 
en même temps que l'autre, et que l'une ne peut être accomplie qu'en 
annulant l'autre, on laisse la seconde pour prendre la première. Si 
tu entends « devant Yahwé », à l'occident, tu annules « devant Yahwé, 
devant l'autel », soit au sud; si tu dis « devant l'autel » soit au sud, 
tu accomplis aussi « devant Yahwé », soit à l'occident. Le prêtre s'ap- 
proche donc par le sud de la corne •• . 

Rosenblatt a très minutieusement analysé tous les moyens 
par lesquels le contexte détermine le sens d'une expression. 
Le parallélisme des membres : 

« Les impies ne resteront pas debout au jugement, ni lés pécheurs 
dans l'assemblée des justes » {P&. \, 5). R. Eliezer en déduit que les 
gens de Sodome ne participeront pas au jugement (dernier) 2. 

Identification de deux expressions mises en apposition : 

Les bénédictions et malédictions devaient être prononcées près de 
Sichem, à côté du chêne de Mamré, situé en cet endroit, suivant qu'i 1 
est écrit : « Abraham traversa le pays jusqu'au lieu nommé Sichem, 
jusqu'au chêne de Mamré » {Gen. 12, 6)3... 

Un qualificatif ajouté à un terme et g-énéralisé : 

Faire vœu de n'avoir pas de relation avec un incirconcis n'oblige 
qu'à l'égard des étrangers, non à l'égard des Israélites non-circoncis, 
parce que circoncis est synonyme d'étrangers [goym) suivant qu'il est 
écrit {Jèr. 9, 25) : « Car toutes les nations sont incirconcises et toute 

1. Sota 14 b et ZebaJiim 63 b, Menahot 19 b. Pour comprendre la 
discussioa, il faut se représenter l'autel des holocaustes, à l'orient 
du sanctuaire (de Yahwé) avec sa rampe d'accès au sud. 

2. Sanhédrin, 10, 3. D'autres leur refusent uniquement la participa- 
tion au siècle à venir. 

3. Sota, 7, 5. 



186 EXÉGÈSE RABBBINIQUE. 

la maison d'Israël est incirconcise de cœur » et encore (1 Sam. 
17, 36) : tf ce philistin, cet incirconcis » ^. 



8° Principe du sâmûk (section expliquée par la section voisine). 

Il est tout indiqué d'expliquer une phrase par son con- 
texte immédiat, c'est-à-dire par le développement bien déli- 
mité, portant sur un seul sujet, dont elle fait partie. Divers 
rabbins, suivant un principe d'Aqiba, pensaient que deux 
sections voisines, concernant des sujets différents, peuvent 
s'éclairer l'une l'autre. 

« Pendant qu'Israël demeurait à Sittim le peuple se mit à forniquer » 
{Nuïti. 25, 1).... R. Âqiba disait : toute section appuyée (semûkâ) k la 
voisine s'éclaire par elle. (C'est Balaam, de la section précédente, qui 
donna le conseil aux prostituées de tenter les Israélites). Rabbi (Meïr?) 
disait ; il y a beaucoup de sections appuyées l'une à l'autre et qui 
sont aussi éloignées l'une de l'autre que l'Orient l'est du Couchant. 
Pareillement Ex, 6, 12 à rapprocher de 3, 18; Lèv. 21, 9 de 10 (point, 
'inyân, commun entre les deux : la peine du feu) ; Os. 1, 9 de 2, 1 
(point commun établi par une parabole); Os. 14, 1 de 2 (point comijaun 
établi par une parabole) 2. 

On comprend que Rabbi (ou R. Meïr) ait contesté la légi- 
timité de la méthode. Les rabbins n'ont pas laissé de l'ap- 
pliquer, soit dans la halakha, soit surtout dans la haggada; 
ils ont même prétendu en fonder la légitimité sur l'Écriture : 

R. Eléazar disait : le (procédé) semûkim vient de la Tora, comme 
le montre le Ps. 111, 8 : « Affermis, semûhîm, pour l'éternité, accom- 
plis en justice et vérité ». Rab Seâet disait : R. Eleazar disait au nom 

1. Nedarim, 3, 11. Dans le premier cas l'attribut est générique; dans 
le second « Philistin » et « incirconcis » sont tenus pour équivalents. 

2. Siphré Num. 25, 1, g 131, p. 169, sq. Le mot section, pârâsâ, 
désigne parfois les sections établies par les massorètes, mais souvent 
aussi des textes comptant à peine quelques versets. 

Appuyer, du verbe s/nÂ:, « appuyer, soutenir », puis « être proche ». 
Le verbe est employé aussi dans un autre sens : sur quel texte scrip- 
turaire s'appuie telle opinion? De là le xaoi assmakhtâ, plus tard très 
usité pour désigner une opinion fondée uniquement sur un argument 
scripturaire, parfois très léger : Bâcher, Terminologie II, p. 13, sq. 
Dans la Mishna, Rosexblatt, op. cit., p. 4, 57, 28; Aichek, op. cit., 
p. 115-117. M. GuTTMANN, Asmakhta, Breslau, 1924. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 187 

de R. Eleazar b. Azaria : d'où tire-t-on qu'une yebâmâ (femme soumise au 
mariage léviratique) qui échoit à un lépreux, ne peut être contrainte 
(à épouser le lépreux)? De ce qu'il est dit {Deut. 25, 4) : « Tu ne 
muselleras pas le bœuf qui foule le grain » et aussitôt après (appuyé 
à lui, sâmûkh) : « Quand des frères demeurent ensemble ».■ (loi du 
lévirat). R. Joseph disait : même celui qui n'admet pas la méthode du 
sàmûk peut ainsi entendre le Deutéronome. R. Juda n'admettait pas 
en général cette méthode et cependant il expliquait le Deutéronome 
dans ce sens. D'où montre-t-on qu'il n'admettait pas cette méthode? 
Il est enseigné : Ben Azzai disait : il est dit [Ex. 22, 17) : « Tu ne 
laisseras pas vivre une magicienne »; et il est dit (18) : « Quiconque 
couchera avec une bête sera lapidé ». Si çelui-çi doit être lapidé, de 
même la magicienne. R. Juda lui dit : est-ce parce que ce texte est 
proche de l'autre que celui-ci doit être frappé de lapidation? Mais 
le devin et le nécromancien sont dans la catégorie générale des 
sorciers et pourquoi? Pour leur assimiler le sorcier et te dire : de même 
que les sorciers sont devins et passibles de la lapidation, de même 
aussi le sorcier nécromancien^... 

Autre application de la méthode, pour rendre compte de 
certaines consécutions du texte biblique : 

Il est enseigné : pourquoi la section du nazaréen est-elle appuyée à 
la section de la Sota {Num. 6, 1-21 et 5, 11-31)? Pour te dire : quiconque 
voit la Sota dans sa punition dégradante se voue lui-même (yazzir) à 
l'abstention du vin. R. Ezechias b. R. Parnach disait : R. Johanan 
disait : pourquoi la section de la sota est-elle appuyée à celle du pré- 
lèvement sacerdotal et des dîmes? [Num. 5, 9, 10), Pour te' dire : 
celui qui ne donne pas les prélèvements et les dîmes, qu'il doit aux 
prêtres, finira par les leur donner par le moyen de sa femme 2... 

1. Yebamot 4 a; suivent d'autres discussions sur ces démonstra- 
tions scripturaires. Item (pour la sorcière) : Sanhédrin 67 b. Tehamot 
63 b, l'obligation de procréer est ainsi démontrée : il est dit [Gen. 
9, 6) : « Quiconque aura versé le sang d'un homme, son sang sera 
versé » et aussitôt après (7) : « quant à vous, croissez et multipliez- 
vous » ; par conséquent quiconque viole la loi de la procréation, c'est 
comme s'il versait le sang : baraitha de R. Eliezer. 

2. Berakot 63 a. Siphré Num. 18, 8, § 117, p. 135; cette section (des 
droits sacerdotaux) est appuyée à celle de Qoré (16 et 17) à cause des 
murmures de Qoré et sa bande contre Aaron. 

C'est à une préoccupation de même ordre que répondent les ques- 
tions assez souvent posées : « pourquoi cette section? » 11 y est répondu 
n montrant qu'elle apporte, par exeoaple, à l'ensemble du développe- 
meut une précision {Mekhilta Ex. 21, 14, p. 265). Cf. Bâcher, Termi- 
nologie, I, p. 160, sq. 



188 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

9° Inclusions et exclusions; règles d'Aqiba. 

Aux méthodes d'Ismael, estimant que la parole de Dieu eg 
suit pas d'autres voies que la parole humaine, s'opposent les 
méthodes d'Aqiba, assurant que chaque élément du texte 
sacré possède une valeur et une signification propres, dont on 
doit tenir compte dans l'exégèse. C'est pour cela, sans doute, 
qu'il attribue un sens à la succession des péricopes. Le carac- 
tère singulier des principes d'Aqiba se manifeste particulière- 
ment dans les principes relatifs aux inclusions et exclusions, 
d'une part, et dans ceux sur les répétitions d'autre part. 

« Si quelqu'un touche une chose impure » (Lév. 5, 2). Au sujet de 
l'impureté pourquoi est-il enseigné en ces termes « une chose » (dâh- 
âr = chose et parole)? R. Aqiba disait : pour inclure {lehâbi^) les 
plaies qui ne deviennent impures que par une parole (sur le prononcé 
de la sentence}. Car R. Aqiba n'interprétait pas suivant la règle du 
« général, particulier et de nouveau général », mais il interprétait 
suivant la règle des inclusions et des exclusions, parce qu'il avait 
a]^pris cela de Nahum Gimzo (qu'il avait servi et qui interprétait toute 
l'Ecriture par la voie de l'inclusion et de l'exclusion)*. 

Ce texte fait remonter l'origine de la règle herméneutique 
des exclusions et inclusions à Nahum de Gimzo et sa vulgari- 
sation à son élève Aqiba'^. En fait la méthode est très large- 
ment appliquée par nombre de rabbins. 

Le texte cité à l'instant laisse voir en quoi consiste cette 
méthode des inclusions et exclusions et ses rapports avec les 
méthodes fondées sur les combinaisons possibles des expres- 
sions générales et singulières. Son mécanisme est indiqué par 
les expressions dont elle se sert. Pour inclure on emploie le 
plus souvent le piel de râbdh {ribbd, ribbôt, d'où le substantii 
ribbily)^ au sens, non d'accroître, mais d'ajouter, de com- 
prendre dans l'extension du terme interprété; on se serl 
aussi du hiphil de 6d' (surtout lehâbi), au sens de : faire 
entrer, comprendre, inclure, dans le sens d'un terme. Poui 

1. Tos. Sebu'oth, 1, 7, p. 446. La parenthèse vient de Sebuoth 26 a. 
plus complet : là R. Johanan explique que R. Ismael suivait Ig 
méthode de son maître, R. Nehonia b. Haqqane, qui interprétai' 
l'Ecriture suivant les règles du général et du particulier. 

2. Voir Bâcher, Agada der Tannaiten, I, p. 57, sqq. et 301. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 189 

rexclusion on emploie surtout lepiel de m't [mi'^dt), au sens, 
non de diminuer, mais de restreindre, enlever, exclure; on se 
sert aussi de ys' (au qal et surtout au hiphil, particulièrement 
lehôsî\ au sens de faire sortir de l'extension du terme). La 
méthode consiste essentiellement à déclarer quels sont les 
objets inclus dans un mot, ou une tournure, ou inversement 
quels sont ceux qui sont exclus. 

Si par là elle s'apparente à la régie du général et du 
particulier, les différences demeurent pourtant plus consi- 
dérables que les ressemblances. Le particulier est plutôt 
une précision et non un terme destiné à exclure. Les règles 
du général et du singulier considèrent les combinaisons pos- 
sibles des deux, tandis que la méthode des inclusions et 
exclusions les étudie ordinairement chacune isolément et 
n'argue que très rarement de la succession dans un même 
texte des inclusions et exclusions. Au surplus, l'esprit qui 
anime chacune des méthodes s'inspire de points de vue très 
différents, sinon opposés. Les règles du général et du singu- 
lier procèdent par raisonnement, leur dialectique est beau- 
coup plus exposée au danger du subjectivisme. La méthode 
des exclusions et des inclusions, au contraire, prétend tenir 
uniquement compte des éléments matériels du texte ; en fait, 
d'ailleurs, cet objectivisme de principe est [souvent entamé 
et dévié par les tendances fantaisistes et arbitraires de l'exé- 
gèse rabbinique désireuse de prouver à tout prix les thèses à 
démontrer. Cette méthode est usitée tant dans la halakha 
que dans la haggada. 

A. — PARTICULES INCLUSIVES ET EXCLUSIVES. 

A première vue la méthode des inclusions et des exclusions 
se présente comme fondant ses interprétations sur la présence 
dans le texte de particules ayant une portée ampliative ou 
exclusive. Cette opinion est accréditée par deux séries de 
textes. 

On rapporte plusieurs fois cette question qu'Ismaël faisait 
à Aqiba : 

Toi qui as servi Nahum de Gimzo pendant vingt-deux ans, tu tiens 



190 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

que les ""ak et les raq ont une valeur d'exclusion et que les 'éth et les 
gam ont une valeur d'inclusion, que signifie donc cet ^éth^t 

De plus les quatre premières règles d'Éliézer, exposant 
la métîiode des inclusions et des exclusions, ne présentent 
que des exégèses fondées sur l'emploi des particules. 

En fait, le plus souvent l'inclusion ou l'exclusion sont 
prononcées uniquement en raison de la teneur du texte, et pas 
du tout parce qu'il contient une particule significative. 

Nous donnons cependant quelques exemples d'exégèses de 
cette espèce fondées sur l'usage des particules : très souvent 
l'inclusion ou l'exclusion est inspirée par une tradition juri- 
dique ou haggadique. 

Sens inclusifs de 'et : 

« Tu craindras ton Dieu » (Beut. 10, 20) le 'e7 inclut la Loi (étude 
de la Loi, et donc aussi les rabbins) ^. 

Dans Gen. l, 1 le 'ei inclut le soleil, la lune, les étoiles et les 
comètes. Dans Gen. 4, 1, il signifie : jadis le premier homme a été 
créé de la terre et Eve formée d'Adam ; à l'avenir ils seront « à notre 
image et ressemblance » par le moyen de la femme et de l'homme 
agissant de concert et aussi par le moyen dé la Sekhina (Dieu). Dans 
Gen. 21, 20 il inclut, avec le garçon, ses âniers, ses chameliers et les 
gens de sa maison (qui ont eu part à sa prospérité)^. 

Dans Ex. 21, 28 « on n'en mangera pas la chair >■> le 'et 
inclut le sang, la graisse et la peau^. 

Dans les règles d'Éliézer le premier exemple est celui-ci : 

« Dieu visita Sara « {Gen. 21, 1) : 'ei signifie que toutes les femmes 
stériles furent visitées avec elle ». 

1. Genèse rahba sur 1, 1; 4, 1; 21, 20; chap. 1, 14, p. 12; 22, 2, 
p. 206; 53, 13, p. 574. 

2. PesaJdm 22 b et parallèles. 

3. Références comme note 1. Le sens inclusif de 'éf dans les deux 
derniers cas semblait requis, puisque là la particule signifie : avec, 

4. Mekhilta in loc, p. 283. Auparavant longue discussion par ana- 
logie pour aboutir à la même conclusion, 

5. Dans la Pesiqta rahhati, ch. 42, 177 b, cette exégèse est attri- 
buée à R. Samuel b. Isaac; il ajoute que toutes ces femmes enfan- 
tèrent en même temps que Sara. 

Autres exemples dans la baraitha des 32 règles. 
Voir aussi plus haut, p. 159, 160, 



CONSID£RATJOJ!«S STYLISTIQUES. 191 

Gam. 

« lis croiront aussi en toi à jamais » [Ex. 19, 9). « Aussi » {gam) soit 
en toi, soit dans les prophètes qui surgiront après toi^. 

« Tu succomberas certainement, soit toi, soit ce peuple qui est avec 
toi » {Ex. 18, 18). « Toi », c'est Moïse, gam c'est Aaron, gam c'est Nadab 
et Abiuh, « le peuple qui est avec toi », ce sont les soixante-dix vieil- 
lards 2, 

'aph. 

« Il prit le manteau d'Élie... il frappa les eaux... lui aussi frappa 
les eaux » (2 Reg. 2, 14). Cela nous apprend que, en fendant les eaux 
du Jourdain, Elisée obtint beaucoup plus de miracles qu'Elie... ^. 

Particules indiquant une exclusion : 
'ak. 

« Il ne resta que Noé » {Gen. 7, 23). Le ^ak enseigne que, tout en 
étant dans l'arche, Noé rendit du sang à cause du froid-'. 

« Egalement ^ak) au dixième jour du mois... » {Lév. 23, 27). Le ''ak 
restreint l'expiation à ceux qui se convertissent^, 

Raq. 

« Et Abraham dit : je me disais : il n'y a, sans aucun doute (raq), 
aucune crainte de Dieu dans ce pays » {Gen. 20, 11). Le raq limite le 
^éyn (négation) et signifie : il n'y aura de crainte que lorsqu'ils vous 
entendront suivant qu'il est dit {ibid. 8) : « Abiméléch se leva de 
grand matin, raconta ces choses et ils eurent de la crainte w^. 

Min. 

« Vous ferez vos offrandes de bétail, bovin ou ovin » {Lév. 1, 2). Min 
habbehémâ (de bétail) pour exclure le bétail qui a servi à la bestialité 

1. Mekhiha in loc. p. 211. 

2. Mekhilta Ex. in loc. p. 197. 

3. Baraitha des 32 règles. Il est à noter que "aph ne figure pas dans 
la liste ancienne des particules inclusives. 

4. Baraitha des 32 règles. Genèse rabba in loc. ch. 32, 11, p. 298 
donne la même exégèse, mais en la faisant précéder de la remarque : 
'aA- mVat, exclut... Tanhuma B., Noé, 3 et 14, p. 30 et 38 sur cette 
diminution de Noé (blessé par le lion). 

R. José le Galiléen ac(iordait à 'ak une valeur spéciale : il intro- 
duit une distinction {halaq) : « Surtout (^ak) gardez mes sabbats » 
{Ex. 31, 13) : 'ak divise, il est des sabbats que tu peux suspendre, 
il en est que tu dois chômer {Mekhilta, p. 341). It^n sur Ex. 21, 21, 
p. 274, seulement un jour (non pas deux). 

5. Baraitha des 32 règles et aussi Siphra in loc. 102 a. 

6. Baraitha des 32 règles. 



192 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

min h'abbâqâr (depuis le bovin) pour exclure celui qui a été adoré'. 
« Et le peuple se tint devant Moïse depuis le matin jusqu'au soir » 
{Ex. 18, 13). On pourrait croire qu'il jugea tout le jour; mais alors 
quand les disciples ont-ils reçu leur enseignement? Il est enseigné 
« depuis le matin », exclusif, cela nous apprend qu'il ne siégeait pas 
tout le jour mais les rabbins donnent comme mesure (de la séance) 
six heures 2. 

B. — INCLUSIONS ET EXCLUSIONS CONTENUES DANS LE TEXTE. 

Le plus ordinairement les inclusions et exclusions sont 
prononcées, non en raion des particules employées, mais 
uniquement en raison du texte lui-même ; ici encore les exé- 
gèses pratiquées sont imposées par des opinions déjà reçues. 

« Le premier jour... jusqu'au vingt et unième » {Ex, 12, 18) : pour- 
quoi? pour inclure les nuits 3. 

« Les fautes commises dans les choses saintes » {Ex. 28, 38) inclut 
femmes, prosélytes et esclaves''. 

« Quiconque, Israélite ou prosélyte séjournant en Israël, qui pré- 
sente son offrande, soit pour l'accomplissement d'un vœu, soit comme 
don volontaire... » {Lév. 22, 18). « Israélite », ce sont les Israélites; 
« prosélyte », ce sont les prosélytes; « séjournant », pour inclure les 
femmes des prosélytes; « en Israël », pour inclure femmes et esclaves. 
S'il en est ainsi pourquoi est-il enseigné en ces termes « quiconque »? 
pour inclure les gentils qui offrent des vœux et des dons volontaires 
comme les Israélites... « Leurs vœux » inclut les dons pacifiques...^ 

« Et vous observerez cela » (Ex. 12, 24), pour inclure la Pâque 
que pratiqueront les générations suivantes, laquelle comporte aussi 
agneaux ou chevreaux : paroles de R. Éliézer^. 

La méthode semble facile et fermée à toute contestation; 
pourtant les discussions s'élèvent : tel objet parait à l'un 
inclus et à l'autre exclu par le même mot : 

« Un homme pur recueillera... » {Num. 19, 9). Le mot, d'après le 
sens, exclut les enfants et les femmes ; mais « pur » inclut les femmes : 

1. Siphra in loc. 4 d, complété par Temura 28 b. 

2. Baraitha des 32 règles, règle 2. Cf. Sabbat 10 a, où l'on affirme 
que l'on doit aller jusqu'au repas (six heures pour les rabbins). Mek- 
Mita in loc. p. 196 assure qu'il siégeait seulement jusqu'au repas. 

3. Mekhilta in loc. p. 33. 

4. Siphra sur 1, 4, 6 a. Ce livre utilise abondamment la méthode. 

5. Siphra in loc. 98 a. 

6. Mekhilta in loc. p. 39. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 193 

paroles de R. Ismaël. R, Aqlba dit : le texte exclut les femmes et inclut 
les enfants ^... 

« On Cîs, un homme) le prendra en. commun suivant le nombre des 
personnes » (Ex. 12, 4). Les femmes, les gens de sexe incertain et les 
androgynes sont compris dans l'expression « suivant le nombre des 
personnes (âmes) » ; mais l'expression pourrait inclure aussi les 
malades et les enfants qui ne pourraient pas manger de l'agneau gros 
comme une olive; mais alors il est enseigné « d'après ce que chacun 
peut manger », ce qui exclut les enfants et les malades qui ne peuvent 
pas en manger gros comme une olive 2. 

Cet exemple montre que la méthode des inclusions et 
exclusions est souvent mise au service de données juridiques 
déjà admises et déterminant l'extension des termes. 

En dépendance de cette méthode apparaît Tusag-e, constant 
dans les commentaires rabbiniques, de préciser la portée 
exacte d'un mot, d'une expression, avec une rigueur souvent 
excessive. 

« Voici l'offrande que feront Aaron et ses fils le jour où ils recevront 
l'onction » {Lév. 6, 13j : le jour (dans le jour), ils ne peuvent recevoir 
l'onction que pendant le jour 3. 

Voici une exclusion et spécification que rien dans le texte 
ne suggère : 

« Il brûle son butin » (Deut. 13, 17), mais non celui du Ciel (celui 
qui revient à Dieu) 3. 

« Tout vase découvert sur lequel il n'y a pas de couvercle attaché 
sera impur » [Num. 19, 15). De là on déduit : tout tonneau dont la 
bonde est enduite d'argile de tous les côtés est impur, car il est dit 
« couvercle attaché sur lui » et non « couvercle attaché sur sa surface 
supérieure'' ». 

Cet exemple, comme tant d'autres qu'on pourrait lui 
adjoindre, fait toucher du doigt combien étroitement 
littérale, jusqu'au ridicule, est souvent l'exégèse rabbinique. 

1. Siphré Num. in loc. § 124, p. 157. 

2. Mekhîlta in loc. p. 12. 

3. Siphra in loc. 31 b; même précision 40 c sur 7, 37; 48 b sur 12, 
3. Valeur stricte des mots dans la Mishna : Rosenblatt, op. cit., 
p. 53, 55. 

3. Sanhédrin, 10, 6. 

4. Siphré Num. in loc. § 126, p. 163. 

EXÉGÈSE RABBINIQUE. 7 



194 EXÉGÈSE RABBt NIQUE. 

G. — COMBINAISONS d'iNCLUSIONS ET d'eXCLUSIONS. 

Jusqu'ici nous avons vu chaque inclusion et chaque exclu- 
sion considérée isolément; les espèces peuvent se combiner 
et donner occasion à des discussions sur la portée de la 
consécution : discussions qui attestent à quel arbitraire peut 
se prêter le procédé. 

Ribbûy après ribbûy : 

« Les nations livrent au feu leurs fils et leurs filles en l'honneur de 
leurs dieux » {Deut. 12, 31). Le double ribbûy {gam et ''et) inclut, avec 
les fils et les filles, les pères et les mères''. 

Autre valeur donnée au ribbûy après ribbûy : 

Dans une discussion sur les gâteaux de fleur de farine et les galettes 
sans levain arrosées d'huile {Lév. 2, 4). La loi traditionnelle stipule que 
les gâteaux doivent subir une triple opération dans l'huile : en est-il 
de même pour les galettes ? On essaie d'abord de le prouver par une 
analogie, qui se heurte aux termes « pétris à l'huile, arrosés d'huile », 
Mais (autre raisonnement) pourquoi est-il dit des uns et des autres « dans 
l'huile »? N'est-ce pas pour astreindre les galettes à la triple opération 
dans l'huile? R. Éliézer b. Jacob dit : on arrose (on oint) (d'huile) les 
galettes en forme de ki (grec), parce qu'un ribbûy (inclusion, indiquée 
par l'expression « dans l'huile ») après un autre ribbûy signifie une 
exclusion 2, 

Ribbûy suivi de mVût : 

« Lorsque quelqu'un d'entre vous fera une offrande » (Zeu. 1, 2). 
« Quelqu'un (homme) » pour inclure les prosélytes; « d'entre vous », 
pour exclure les apostats. Pourquoi dis-tu ainsi? Dis : « quelqu'un », 
pour inclure les apostats ; « d'entre vous », pour inclure les prosélytes. 
Après avoir fait une inclusion l'Écriture fait une exclusion. Il est 
enseigné en ces termes : « Dis aux enfants d'Israël » : de même que les 
enfants d'Israël acceptent l'alliance, de même les prosélytes; sont 
exclus les apostats qui ne reçoivent pas l'alliance. Mais on peut dire 

1. Baraitha des 32 règles, règle 3, citant presque textuellement 
Siphré Deut. in loc. § 81, 91 b. 

Nous omettons le mVût après mi'ût de la règle 4 : de Num. 12, 2 
« Dieu a-t-il seulement {'ak, raq) parlé avec Moïse? n'a-t-il pas parlé 
avec nous » on tire que Aaron et Marie ont prophétisé avant Moïse. 

2. Siphra Lév. 2, 4, 10 d. Pour bien comprendre lire Menaîiot 74 b, 
75 a. Il est clair que cette exégèse est commandée par une tradition 
rituelle. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 195 

aussi : de même que les Israélites sont les fils de ceux qui ont reçu 
l'alliance, de même les apostats sont les fils de ceux qui ont reçu 
l'alliance et ainsi sont exclus les prosélytes qui ne sont pas les fils de 
ceux qui ont reçu l'alliance * 

Cette affirmation tend à insinuer que l'Écriture, après une 
affirmation générale, introduit toujours une spécification et 
une limitation. 

Combinaison plus complexe : ribhûy^ mVût et ribbûy : dans 
la discussion restée traditionnelle entre Ismaël et Aqiba, les 
rabbins postérieurs proposent ainsi les raisonnements de l'un 
et de l'autre : 

(c Si quelqu'un, parlant à la légère, jure de faire du mal ou du.bien, 
quoi que ce soit qu'il affirme ainsi par un serment inconsidéré... il 
aura contracté une faute » {Lév. 5, 4). R. Aqiba interprète ainsi : « si 
quelqu'un jure «, inclusion, « en mal ou en bien », exclusion, « quoi 
que ce soit qu'il affirme par un serment inconsidéré », inclusion de nou- 
veau : exclusion, inclusion et exclusion, il inclut le tout : il inclut toutes 
les paroles et exclut toute parole nécessaire (sur laquelleion réfléchit). 
R. Ismaël explique ainsi : « si quelqu'un, parlant à la légère, jure », 
général; « en mal ou en bien », 'particulier; « quoi que ce soit qu'il 
affirme par serment inconsidéré », de nouveau général : général, 
particulier et général, tu juges d'après le particulier; et le particulier 
c'est toute parole se rapportaiit à l'avenir (promesse) 2.... 

Ainsi les règles herméneutiques fondées sur les exclusions 
et les inclusions s'opposent à la dialectique basée sur l'emploi 
de termes généraux et particuliers. Nous renonçons à recher- 
cher lequel des deux systèmes est le plus logique et surtout 
lequel ferme le mieux la voie aux exégèses fantaisistes ou 
tendancieuses. 



1. Siphra 4 c. Ce principe (exclusion après inclusion) est invoqué 
assez souvent, comme traduisant une des façons de parler de 
l'Ecriture : Siphra 11 a sur 2, 6 ; 13 a sur 2, 15. 

2. àebu'oth 26 a. Ce ne sont pas Aqiba ni Ismaël qui font ces 
raisonnements, mais des rabbins amoras, suivant leurs principes. 
A. ScHWA.uz, die hermeneutische Quantitàtsrelation, p, 111, 138-163, 
étudie plusieurs autres combinaisons de ribbûy et mVût, qui remon- 
tent quelques-unes aux temps tannaïtes. Il condamne les principes 
fondés sur ces combinaisons, comme contraires à la logique; les 
règles d'Ismaël, basées sur les lois du langage humain, sont, d'après 
lui, seules logiques. 



196 EXÉGÈSE RÀBBINIQUE. 

10° Redoublements et répétitions. 
A. — REDOUBLEMENTS. 

Croyant à la valeur de tous les éléments dans les Écritures, 
Aqiha attachait une signification aux redoublements de toute 
espèce : principe que contestait Jsmaël, mais que quantité 
de rabbins ont admis et suivi. Aqiba, en particulier, tirait 
parti, pour appuyer des traditions juridiques ou haggadiques 
déjà admises, de la tournure, si fréquente en hébreu, qui 
consiste à placer devant un verbe au mode personnel le 
même verbe à l'infinitif : 

« Cet homme sera retranché {hikkârét tikkârèt) » (Num. 15, 31). 
Hikkârêt, retranchement dans ce monde, tikkârèt, sera retranché au 
monde à venir : paroles de R. Aqiba. R. Ismaël lui dit : puisqu'il est 
dit (30) « (cette âme) sera retranchée » j'entends trois retranchements : 
en trois mondes. Mais pourquoi est-il enseigné en ces termes « il sera 
retranché »? La Tora parle suivant la langue des hommes^. 

« Que soit circoncis [himmôl immôl » {Gen. 17, 13). De là on déduit 
deux circoncisions : l'une, la circoncision proprement dite (excision 
du prépuce), l'autre, le déchirement (dénudement du gland). Ou bien : 
l'une pour circoncire, l'autre pour enlever les filaments : ainsi suivant 
R. Aqiba puisqu'il dit : ce sont des paroles abondantes (ribbûîm). Gom- 
ment fonder les deux circoncisions d'après R. Ismaël qui dit : ce sont 
des paroles redoublées ? Car la Tora, dans sa langue, redouble suivant 
l'usage : « allant tu iras « {Gen. 31, 30); « languissant tu languissais »... ; 
« d'un vol j'ai été volé » {Gen. 40. 15). R. Juda b. Pazzi le tire de 
Ex. 4, 25 : tu m'es un époux de sangs (au pluriel)... ^ 

Tout redoublement revêt une signification : 

Après une discussion sur le passage du Jourdain et les pierres dres- 
sées en autel {Jos. A, 2, sqq.) où il est dit « un homme par tribu », 
(pareillement) « Un homme (dit deux fois) par tribu » {Num. 13, 2). Au 
sentiment de R. Aqiba qui dit : ce sont des mots ribbûim (inclusifs), ils 
étaient douze, huit pour la grappe et quatre pour les figues et les gre- 

1. Siphré Num. in loc. § 112, p. 121. Cf. Sanhédrin 64 b et 90 b. 

2. Pal. Sabbat 19, 2, 17 a. On pourrait citer nombre d'autres 
exemples : yg. pour Ex. 12, 9, Aqiba tire qu'il est défendu de faire 
bouillir l'agneau pascal, non seulement dans de l'eau, mais dans 
tout autre liquide, du redoublement du verbe, taudis que l'autre le 
tire d'un raisonnement par analogie, Mekhilta, p. 20, sq. Voir Bâcher, 
Agada dcr Tannaiten, I, p. 236, sqq. Aicher, op. cit., p. 125. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 197 

nades; au sentiment de R. Siméon qui disait : ce sont des mots redou- 
blés, ils étaient yiHgt-quatre, seize pour la grappe, huit pour les figues, 
les raisins et pour porter les ustensiles; au sentiment de R. Ismaël 
ils étaient divisés en groupes de deux porteurs (pour des brancards 
ou des perches); au sentiment de R. Aqiba trois groupes de porteurs ^... 

Cette méthode peut conduire à des résultats inattendus, 
sinon étranges : 

« Il sera égorgé par toute l'assemblée de la communauté {Qehal 
'adath Israël) d'Israël « (Ex. 12, 6) : en conséquence on dit : la Pâque 
est immolée selon trois groupes : la communauté, l'assemblée et 
Israël 2. 

c(, Moïse s'enquit (dârôs dàraë) » (Lév. 10, 16). Pourquoi ce dârôs 
dâras (au sens d'enseigner, prêcher)? Moïse leur donna deux ensei- 
gnements : il leur enseigna pourquoi celui-ci (bouc) était brûlé et 
pourquoi les autres étaient' mangés'^... 

Aqiba voyait dans le lé'môr, si fréquent dans la Bible, une 
invitation à chercher un sens profond et il émettait le prin- 
cipe : Tout endroit où 0. est dit Wmôr (en ces termes) 
demande à être expliqué'*... 

B. — REDITES ET REPRISES. 

Tout autant que les expressions redoublées, les redites, les 
reprises du même sujet, doivent avoir un sens. On attribue 
à R. Ismaël cette règle qui ne figure pas dans la série des 
treize : 

On enseigne dans l'école de R. Ismaël : toute section, dite une fois 

1. Pal. Sota 7, 5, 21 d. Voir encore les mêmes principes, ibid. 8, 1, 
22 b... Dans Siphra 84 a sur Lév. 17, 8 on déduit que la répétition 
de '«s implique qu'ils étaient deux à offrir l'holocauste (sentiment de 
R. Siméon, contre un raisonnement par analogie). 

2. Mekhilta in loc. p. 17. Dans la Misna de Pesahim 5, 5 on 
établit, en se fondant sur le même texte, que l'immolation des agneaux 
dans le Temple se faisait en trois séances... Pesah. 64 b. 

3. Siphra 47 b. Zebaliim 101 b. 

4. Siphré Num. 5, 5, § 2, p. 5. Certains voient là une indication que 
Moïse n'a rien dit de son propre fonds. Sur leWmôr d'Ex. 12, 1 
voir dans Mekhilta, p, 4, 5, quatre explications : R. Ismaël : dis- 
leur tout de suite; R. Eliézer : dis-leur et rapporte-moi la réponse, 
R. Siméon b. Azzai : dis-leur suivant ce que tu as entendu; R. Aqiba 
dis-leur : c'est par leur mérite qu'il parle avec moi... Voir aussi 
Siphra, 4 ab sur Lévit. 1, 1. Cf. p. 159. 



l98 EXÉGÈSE RABBINIQUË. 

puis répétée, n'est réoétée que parce qu'il y est enseigné une chose 
nouvelle '. 

Autre règle sur le même fait : 

Voici une règle de la Tora : si dans une pârâsâ (section) dite une 
fois il manque quelque chose, elle est reprise ailleurs ; elle n'est reprise 
(répétée) que parce qu'il y manque quelque chose : règle formulée à 
propos de Num. 5, 6 complété par Lév. 5, 20, 21, qui y introduit le tort 
fait au prosélyte (implicitement contenu dans le tort fait au prochain) -. 

Ailleurs est indiquée la raison des reprises : 

En trois endroits il rappelle la section des temps sacrés : dans la loi 
des prêtres en raison de leur ordre (Lév. 23) ; dans un cinquième des 
ordonnances {Num. 28, 29) en raison des sacrifices qu'ils comportent ; 
dans la répétition de la Tora en raison de la communauté [Deut. 16, 
1-17). Autre explication « gardez le mois d'Abib » : pour t'enseigner que 
Moïse ordonna les temps sacrés d'après le Sinaï (d'après ce qu'il enten- 
dit au Sinaï ; ou : dès le Sinaï) et les enseigna à Israël, puis de nouveau 
il les leur répéta (enseigna) au moment de l'accomplissement ; Moïse 
leur disait : soyez attentifs à apprendre (répéter) le sujet et à l'expli- 
quer 3. 

Dans le catalogue d'Éliézer la règle des répétitions fig;ure, 
mais pour fonder une haggadà fantaisiste : 

R. Josa b. Hanina disait : la famine en Egypte devait durer quarante- 
deux ans : le Pharaon vit sept épis et sept vaches : cela fait quatorze ans ; 
il les énuméra à Joseph, encore quatorze ans; Joseph parla aussi des 
sept épis et des sept vaches, de nouveau quatorze ans ; soit quarante- 
deux ans [Gen. 41, 1-29), Mais la famine ne dura que deux ans : car 
lorsque notre père Jacob descendit en Egypte, il la bénit et la famine 
cessa, mais les quarante années revinrent au temps d'Ezéchiel, suivant 
qu'il est dit (29, 12) : « Je rendrai stérile la terre d'Egypte », de façon 
qu'elle ne produise que le nécessaire. 

Pareillement {Jér. 7, 4) : « Ne vous fiez pas... Temple du Seigneur, 
Temple du Seigneur, Temple du Seigneur... » Pourquoi est-ce dit trois 
fois ? C'est qu'il leur dit : ne vous confiez pas dans les trois fêtes de 
pèlerinage que vous célébrez chaque année ; tant que vous ne faites 

1. Sota^ a : discussion entre Aqiba et Ismael au sujet de la loi 
de la Sota (son mari est-il obligé de la jalouser?) et sur l'impureté 
de Lév. 21, 3; cf. Num. 5, 13. Répétitions de la Mishna : Rosenblatt, 
op. cit., p. 4, 46. 

2. Siphré Num. 5, 6, § 2, p. 4, 5. 

3. Siphré Num, 16, 1, § 127, 100 b. A cause de la communauté : 
le Deutéronome fut prononcé devant la communauté. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 199 

pas sa volonté, vos fêtes ne comptent pour rien devant lui : voici ce 
qui est écrit {Am. 5, 21) : « Je hais et je déteste vos fêtes ». Autre expli- 
cation : voyez les trois sanctuaires qui ont été détruits : Nob, Silo et 
Gabaon; prenez garde que celui-ci ne soit détruit ^. 

Cette façon de tirer parti des reprises bibliques est classique 
dans l'exégèse rabbinique : nous avons vu sur quelle base on 
fonde la pratique d'égorger les agneaux de la Pâque en trois 
séances. Autre raison scripturaire d'une pratique tradi- 
tionnelle : 

« Moïse leur dit : mangez-en en ce jour, car ce jour est pour Yahwé 
sabbat, en ce jour vous n'en trouverez pas » {Ex. 16, 25), Rabbi Zeriqa 
disait : de là (on tire) les trois repas du sabbat. Car ils étaient habitués 
à sortir dès le matin, ils lui dirent donc : Moïse, notre Maître, sortirons- 
nous ce matin? — « Mangez-en aujourd'hui ». — Puisque nous ne 
sommes pas sortis le matin, sortirons-nous entre les deux soirs ? — 
(( Car c'est le jour de sabbat pour Yahwé. » Et pourquoi est-il dit : 
« aujourd'hui vous n'en trouverez pas dans les champs »? On dit : le 
cœur de notre père se fendit quand ils dirent : puisque nous n'en 
avons pas trouvé aujourd'hui, peut-être n'en trouverons-nous pas 
demain? 11 leur répondit : « aujourd'hui vous n'en trouverez pas, mais 
demain vous en trouverez » 2. 

Ce procédé, apte à fonder, au moins en apparence, une 
halakha, est surtout très propre à légitimer une baggada : 
inutile de citer des exemples. 

Les répétitions ont encore une autre raison d'être; R. Meïr 
formulait le principe : toute condition pour être valable doit 
être formulée deux fois, comme le furent les stipulations des 
fils de Gad et des fils de Ruben avec Moïse {Num. 32, 29, 30)'. 

1. La première tradition et l'exégèse qui la fonde sont rapportées 
dans Gen. rabba sur 41, 26 (ch. 89, 9, p. 1098) : R. Juda dit 14 ans 
de famine; Nehemia, 28; et les rabbins, 42, avec le reste de l'histoire. 
Il est piquant de voir un rabbin sérieux et appliqué comme Rasi 
s'efforcer de concilier cette tradition et lés données, absolument 
opposées, de la Genèse. 

2. Mekhilta in loc. p. 168, sq. 

3. Qiddusin 3, 5 expliqué dans la Gemara 61 ab, 62 a Dans la 
Tosephta 3, 2, p. 338, Rabban Siraéon b. Gamaliel en tire le prin- 
cipe de droit : il n'y a pas dans l'Ecriture de condition qui ne soit 
redoublée. La Gemara donne d'autres exemples : Num. 32, 20, 23; 
Gen. 4, 7 et 24, 3-9; Lév, 26, 3, 15; Num. 5, 19 et 20; 19, 12; 7s. 1, 
19, 20, 



200 EXÉGÈSE KABBI NIQUE. 

11°. Conciliations de textes bibliques opposés. 

Une préoccupation des rabbins, et une de leurs occupations 
les plus fréquentes, étaient de concilier les textes bibliques 
qui leur paraissaient opposés, sinon contradictoires : et cela, 
soit dans une intention apologétique, soit en vertu de leurs 
études personnelles. En effet, de très bonne heure, les adver- 
saires de la religion d'Israël, païens ou sceptiques, faisaient 
remarquer aux fidèles de la Parole divine les contradictions 
et les difficultés qu'elle recèle : témoins le Contre Apion de 
Josèphe, le Contre Celse d'Origène. D'autre part, appliqués 
constamment à scruter les Écritures, les rabbins ne pouvaient 
manquer de remarquer les problèmes que soulèvent certains 
passages. 

Les oppositions entre les textes bibliques, que considèrent 
les rabbins, se rangent en deux catégories : les oppositions 
objectives, les oppositions subjectives \ Les premières viennent 
de ce que deux textes paraissent difficilement conciLiables ; les 
secondes apparaissent comme conséquence des opinions et 
traditions reçues chez les rabbins : en matière juridique les 
écoles rivales, prétendant fonder également sur la Bible leurs 
décisions, devaient voir des contradictions entre les versets 
invoqués de part et d'autre. En matière haggadique telles 
représentations historiques reçues s'accordent mal avec quel- 
ques passages bibliques. Enfin l'esprit chercheur et subtil des 
rabbins découvre parfois des difficultés et des oppositions là 
où le lecteur naïf passe sans s'inquiéter ; et par ailleurs ces 
questions posées à plaisir sur la lettre sacrée fournissent 
occasion à dissertations, discussions et conjectures. 

Les rabbins concilient les textes, réellement ou apparem- 
ment opposés, par deux voies : voie logique^ par une distinc- 



1. Expressions et remarques de A. Schwarz, qui a consacré à la 
question un volume : die liermeneutische Antinomie in der talmudis- 
chen Literatur^ Wien und Leipzig, 1913. 

Voir aussi un article de A. Marmorstein, der Midrasch von den 
Widersprilchen in der Bibel, Monatschrift fiir Geschichte und Wis- 
senschaft des Judentums, 1929, p. 281-292 (étude sur des fragments 
d'un Midrasch « des deux écritures)»^ séné ketûbîm, disparu). 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 201 

tien réelle ou verbale, montrer que les textes ne s'opposent 
pas, mais concernent des objets différents ou supposent des 
circonstances différentes ; voie d'autorité, ou de compromis, 
résoudre l'antinomie par un troisième texte qui les accorde 
ou qui suggère un autre point de vue. A. Schvs^arz s'applique 
à montrer comment les deux méthodes répondent à des ten- 
dances bien distinctes. La première serait la plus ancienne et 
la plus traditionnelle, pratiquée déjà par Hillel et indiquée 
par la formule que certains documents donnent de sa qua- 
trième règle : deux écritures; c'est cette méthode qui est le 
plus ordinairement suivie par les rabbins. L'autre méthode, 
moins conforme aux exigences de la logique, aurait été mise 
en honneur au début du second siècle : c'est celle qui est 
formulée dans la treizième règle d'Ismaël et dans la quinzième 
d'Éliézer : « deux écritures qui se contredisent (se nient) l'une 
l'autre jusqu'à ce qu'intervienne une troisième qui décide 
(fasse pencher la balance) entre les deux )> ^ . 

Nous avons dans la littérature rabbinique plusieurs recueils 
de ces exercices scolastiques consistant à résoudre de préten- 
dues antinomies bibliques : la section 42 de Siphré sur les 
'Nombres étudie huit (ou treize) de ces difficultés^, intro- 
duites la plupart par les formules : « une écriture dit... une 
autre écriture dit... comment ces deux textes peuvent-ils sub- 
sister (se réaliser) ? ». La solution est ordinairement une distinc- 
tion réelle ou verbale. Dans la Tosephta de Sota, qui contient 
tant de haggadot curieuses, nous avons (ch. il, 11-18; ch. 12, 
1-5, p. 318, sqq.) l'étude de plusieurs difficultés historiques, 
introduites par la formule : « comment peut-on affirmer cela 
alors que...? il n'est pas possible ». Dans le Seder 'Olam sont 

1, Aqiba formule aussi cette règle d'une manière peut-être diffé- 
rente et dans un autre sens qu'Ismaël, cf. Bâcher, Agada der Tannai- 
ten, I, p. 302, sq. : deux écritures qui se correspondent [kenègèd) 
et qui se contredisent (sôterin) l'une l'autre jusqu'à ce qu'une 
troisième décide... Mekhilta, p. 13 sur Ex. 12, 5 : contradiction arti- 
ficielle dans Deut. 16, 2 : « Tu immoleras la Pâque à Yahwé, ton 
Dieu, les brebis et les bœufs, au lieu que Yahwé, ton Dieu, aura 
choisi » ; d'autres rabbins peinent à résoudre ce problème d'une 
prétendue contradiction qu'ils ont forgée à plaisir. 

2. Siphré, p. 45-48 : les cinq dernières difficultés sont présentées 
à la fin de la section ; Horovitz en conteste l'authenticité. 



202 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

résolues plusieurs antinomies chronologiques. Le midras 
(perdu) : séné Ketûbîm (deux écritures) est un recueil de ces 
exercices ^ Et en bien des endroits nous rencontrons des ques- 
tions de cet ordre^ chez les docteurs tannas, et encore plus 
chez les amoras. 

A. — CONCILIATIONS AU MOYEN d'uNE DISTINCTION. 

Quelques exemples suffir ont à donner l'idée du genre : 

R, Ismaël dit : une écriture dit : « Tu consacreras tout animal pre- 
mier-né » {Deut. 15, 19) ; et une autre dit : « Tu ne consacreras pas un 
premier-né » {Lév. 27, 26). On ne peut dire les deux choses en même 
temps. Dis donc : tu le consacreras d'une consécration d'évaluation 
(pour payer au Templ e le prix de son évaluation) ; tu ne le consacreras 
pas d'une consécration pour l'autel (pour le sacrifier, puisqu'il appar- 
tient à Dieu) 2. 

Les Lévites n'entraient au parvis pour le culte qu'après avoir étudié 
pendant cinq ans, suivant qu'il est dit {Num, 8, 24) : « Depuis vingt- 
cinq ans et au-dessus le lévite entrera au service... »; mais ailleurs il 
dit (Num. 4, 30) : « Tu recenseras les lévites depuis l'âge de trente 
ans » . Pourquoi ces deux données ? C'est que pendant les cinq ans qui 
séparent les deux âges, il (le lévite) étudiait; ensuite on l'appliquait 
au service du Temple^... 

Type de pseudo-contradiction et de solution gratuite : 

Une écriture dit {Deut. 7, 25) : « Tu ne convoiteras pas l'argent ni 
l'or qui est sur les idoles et tu ne le prendras pas... »; et une autre dit 
(ibid. 29, 16) : « Vous avez vu leurs idoles, bois, pierre et argent qui 
sont chez elles (les nations)... ». Comment peuvent subsister ces deux 
écritures (sur elles, 'alèhém, et chez elles, Hmmahèm)1 « Sur elles » : 
tant les choses qui servent à vêtir le corps que les autres sont inter- 

1. EiSENSTEiN. O&ai^ midrashim, p. 559-561 (le premier fragment 
transcrit n'appartient pas à ce midrash). 

2, Arakin Misna, 8, 7. La contradiction n'est qu'apparente, puisqu'il 
s'agit de consécrations d'ordre différent. Dans la gemara 29 a, les 
rabbins montrent combien s'imposait la formule de l'interdiction, puis 
celle du commandement. 

Dans Sipliré Deut. % 124, 100 a, la distinction est attribuée à 
R. Siméon. Antinomies conciliées dans la Mishna : Rosenblatt, op. 
cit., p. 51, 30, sq. ; Aicher, op. cit., p. 49, 53. 

ri 3. Tos. Seqalim, 3, 26, p. 179. La contradiction entre les deux 
textes n'est pas évidente; la conjecture conciliatrice est bien dans 
l'esprit rabbinique. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 203 

dites ; « chez elles » : ce qui sert à vêtir le corps est interdit; ce qui ne 
sert pas à vêtir le corps est permis ^..., 

Une écriture dit (Lév. 25, 3) : « Pendant six ans tu ensemenceras 
ton champ », et une autre écriture dit {Ex. 23, 10) : « Pendant six ans 
tu ensemenceras ta terre ». Comment peuvent subsister ces deux 
écritures? L'une se réalise quand les Israélites entreront dans la terre; 
l'autre quand ils retourneront de la captivité^. 

Désaccord chronologique : 

Une écriture dit {Ex. 12, 40) : « Le séjour des Israélites en Egypte 
fut de 430 ans » et une autre écriture dit {Gen. 15, 13) : « Ils y seront 
en servitude et y seront affligés pendant 400 ans ». Comment peuvent 
subsister ces deux écritures? C'est avant la naissance d'Isaac que fut 
arrêté le décret entre les pièces du sacrifice. Rabbi dit : une écriture 
dit : « Us y seront opprimés pendant 400 ans » et une autre dit {ibid. 16) : 
« A la quatrième génération ils reviendront ici ». Comment...? Le 
Saint, béni soit-il, dit : s'ils font pénitence je les rachèterai suivant 
le compte des générations, sinon, suivant le compte des années^. 

« La trente-sixième année du règne d'Asa, Baasa, roi d'Israël monta 
contre Juda... » {2 Chron. 16, I). Est-il possible de dire ainsi? Asa 
n'a-t-il pas enterré Baasa la vingt-sixième année de son règne? (i Reg. 
15, 33)? Mais c'est pour répondre aux 36 ans à cause desquels fut 
porté le décret suivant lequel le royaume de la maison de David 
serait divisé, pour leur revenir ensuite; et aussi pour répondre aux 
36 ans suivant lesquels fut porté le décret d'après lequel les rois de 
Syrie seraient des satans pour Israël et finiraient par tomber sous les 
coups de la maison de David''... 

1. Tos. Aboda zara, 6, 13, p. 470; cf. parallèles dans les Talmuds. 

2. Mekhilta Siméon h. Yohai, in loc. p. 156, Sentence de R. Nathan 
b. Joseph, L'éditeur Hoffmann note : quand les Israélites entrèrent 
avec Josué en Ghanaan la terre était à eux : donc « ta terre » ; quand 
ils retournèrent de captivité, le pays appartenant au roi de Perse, on 
ne pouvait dire que « ton champ ». Contradiction toute vei^bale, sup- 
posant un littéralisme étroit; solution bien spécieuse. 

3. Mekhilta Ex. 12, 40, p. 50; Seder 'Olam rabba, ch. 3, p. 14-17 
discute sérieusement toutes les données chronologiques relatives à 
Abraham, leur point de départ, les séjours en Egypte. 

Le premier désaccord est réel, mais trouve une îiutre explication 
qu'un point de départ différent dans le comput. La solution de la 
seconde antinomie est du type courant. 

4. Tos. Sota 12, 1, 2, p. 316, sq. Nous éclairons les termes du texte 
par le passage correspondant du Seder 'Olam, ch. 16, p. 68, sq. : 
la division du royaume est la punition des 36 ans pendant lesquels 
Salomon est resté marié à la fille du Pharaon qui le fit tomber dans 
ridolâtrie. Autre explication ; Baasa attaqua Asa 36 ans après la 
mox't de Salomon (?), 



204 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

Opposition purement matérielle et fictive : 

Une écriture dit : « Que Yahwé lève sa face vers toi » (Num. 6, 26) 
et une autre dit {Deut. 10, 17) : « Dieu, qui ne fait pas acception de 
personne » (qui ne lève pas la face). Comment peuvent subsister (se 
réaliser) ces deux écritures? Quand les Israélites font la volonté du 
Lieu (Dieu), il lève la face vers toi; et quand ils ne font pas sa volonté, 
il ne lève pas sa face. Autre explication : tant que le décret (de con- 
damnation) n'a pas été scellé, Yahwé lève sa face vers toi, quand il a 
été scellé il ne lève pas sa face''. 

Nous avons dans cet exemple une manifestation représen- 
tative de l'esprit rabbinique, qui se plait à multiplier et à 
créer des difficultés pour se donner la récréation de les 
discuter et résoudre; expression aussi d'un littéralisme qui 
s'arrête à peser les syllabes sans considérer les idées qu'elles 
expriment. 

Ici l'opposition établie entre les textes couvre, en réalité, 
une difficulté tbéologique : 

Il est rapporté que Johanan (le grand-prêtre) fit taire les éveilleurs 
(ceux qui prétendaient éveiller Dieu). D'oii la question : Qu'était-ce 
que ces éveilleurs? Rehaba dit : chaque jour les lévites montaient à 
l'estrade (dans le Temple) et disaient {Ps. 44, 24) : « Réveille-toi, 
pourquoi dormir, Yahwé? » Il leur dit : y a-t-il sommeil devant le 
Lieu (Dieu dort-il)? N'est-il pas déjà (ailleurs) dit? {Ps. 121,4) : « Voici 
qu'il ne dort, ni ne sommeille, le gardien d'Israël »? Mais pourquoi 
est-il enseigné en ces termes {Ps, 78, 65) : « Yahwé se réveilla, comme 

1. Siphré Num. 6, 26, § 42, p. 45. Comme le note justement Scliwarz, 
op. cit., p. 126 : « Si cette antinomie haggadique, qui prend la forme 
d'une antinomie objective, ne nous était connue que par Siphré, nous 
pourrions la prendre pour un pur jeu, puisque personne ne peut 
méconnaître la grande différence qui sépare les deux affirmations, 
et le sens très divers de l'expression employée dans les deux pas- 
sages nôsé' phânîm. » Il invoque, comme circonstance atténuante, 
que primitivement la difficulté avait été proposée par Veluria, la 
prosélyte romaine : pouvait-on répondre par des explications philo- 
logiques à cette femme qui savait juste assez d'hébreu pour lire la 
Bible dans l'original? En efPet cette Romaine pose la question à Rab- 
ban Gamaliel; R. José le prêtre lui répond par une parabole qui 
veut inculquer cette idée : pour les fautes contre le prochain. 
Dieu ne peut les pardonner tant que le coupable n'a pas réparé son 
tort; R. Aqiba propose la seconde explication (les décrets); et R. Meïr 
explique aussi par là (avant ou après l'établissement définitif du 
décret) pourquoi une prière est exaucée et l'autre pas : Ros hasana, 
17 b, sq. 



CONSIDÉRATIONS STYLISTIQUES. 205 

un homme ivre (ou : dormant) »? C'est que, pour ainsi parler, c'est 
comme s'il y avait sommeil devant lui : à l'heure où Israël est dans 
la détresse et les nations du siècle dans la prospérité ; aussi bien dit-il 
{Job, 17, 2) : « Mon œil veille au milieu de leurs outrages »*. 

B. — CONCILIATION PAR UN AUTRE TEXTE. 

Donnons un exemple de cette méthode, plus rarement 
pratiquée, mais répondant aux lois posées par la règle trei- 
zième d'Ismaël et parla quinzième d'Éliézer : 

« Quand Moïse venait à la tente du témoignage pour parler avec 
lui » {Num. 7, 89). Pourquoi est-ce dit? Comme il dit aussi {Lév. 1,1): 
« Et Yahwé lui parla de la tente du témoignage », e pourrais entendre 
qu'il lui parla de la tente elle-même. Mais il est enseigné en ces ter- 
mes {Ex. 25, 22) : « Là je me rencontrerai avec toi, et là je parlerai 
avec toi du haut du propitiatoire ». II ne peut pas dire « de la tente 
du témoignage », puisqu'il dit ailleurs « du haut du propitiatoire ». 
Comment se réalisent ces deux écritures? C'est une règle de la Tora : 
quand deux écritures se correspondent et se contredisent l'une l'autre, 
toutes les deux subsistent en leur place jusqu'à ce qu'intervienne une 
autre écriture qui décide entre elles. Pourquoi est-il enseigné en ces 
termes « quand Moïse venait à la tente du témoignage pour parler 
avec lui » ? L'Ecriture nous enseigne que Moïse entrait et se tenait dans 
la tente du témoignage et la voix descendait des cieux entre les 
deux chérubins et lui entendait, la voix qui lui parlait de l'inté- 
rieur 2. 

Plus intéressante pour nos esprits critiques la première 
antinomie étudiée dans les règles d'Éliézer : 

Une écriture dit {2 Sam. 24, 9) : « Il y avait en Israël huit cent mille 
hommes d'armes » et une autre dit {i Chron. 21, 5) : « Il y avait en 
Israël onze cent mille hommes d'armes ». Il y a entre les deux une 
différence de 300.000; et que faire de ces 300.000? Une troisième 

1. Misna 9, 10 de .Sofa; nous' suivons la g'emara palestinienne, 24 a; 
voir aussi Ton. 13, 9, p. 319, sq. ; bahli 48 a. 

2. Siphré Num. 7, 89, § 58, p. 55, sq. Pour voir une contradiction 
entre les deux textes, il faut supposer que les mots du Léo. signifient 
que Dieu se faisait entendre à Moïse, soit en dehors du Saint des 
Saints, soit en dehors de la tente elle-même (le min étant entendu 
au sens local). De toute façon il faut reconnaître avec Schwarz, op. 
cit., p. 198, qu'il s'agit ici d'une antinomie subjective. 

Dans la règle 13 d'Ismael est résolue par Ps. 18, 10 l'imaginaire 
antinomie entre Ex. 19, 20 et 20, 22: Mekhiha p. 216. 



206 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

écriture intervient et résout la difficulté (^ Chron. 27, 1) : « Les enfants 
d'Israël, suivant leur nombre, et suivant leurs divisions... chaque 
division étant de 24.000 ». Nous apprenons que les 300.000 étaient 
inscrits sur les rôles du roi et ne devaient pas être comptés... 

L'explication est plausible. Elle témoigne en même temps 
du soin avec lequel les rabbins confrontaient entre eux tous 
les versets de l'Écriture; mais leur souci d'éliminer toute 
contradiction avait pour effet, à côté d'observations très 
judicieuses, de produire aussi des distinctions artificielles, 
purement littérales et matérielles : souvent jeux d'enfants 
ou de dialecticiens fonctionnant à vide. 

12° Statistiques bibliques. 

La connaissance approfondie que lés rabbins possédaient 
de la Bible apparaît encore en ce que nous pouvons appeler 
leurs statistiques bibliques, classifications de faits du même 
ordre : 

Nous en mentionnons quelques-unes : les changements de nom [Mek- 
hilta, p. 59 sur Ex. 13, 2) et les additions de lettres aux noms propres 
(p. 189, sur 18, 1); la section des tephillin est rappelée en trois endroits 
(p. 74 sur 13, 16); Dieu a donné trois avertissements à Israël (p. 95 sur 

14, 13) ; actions faites par le vent d'est (p. 103 sur 14, 21) et autres 
punitions par divers moyens (p. 134, sqq. sur 15, 7); emploi métapho- 
rique du mot cœur (p. 128 sur 15, 8); les dix cantiques (p. 116, sq. sur 

15, 1), les trois propriétés de Dieu (p. 148 sur 15, 16); ses quatre por- 
tions {nahala, p. 149 sur 15, 17); trois choses données à Israël sous 
condition (p. 201, sur 18, 27).... 

Treize paroles desquelles est exclu Âaron [Siphra 3 d sur Lév. 1, 1), 
qui est celui à qui Dieu parle d'abord (46 a sur 10, 6). 

Évidemment plusieurs de ces rapprochements sont artificiels, 
mais dans l'ensemble ils peuvent aider à mieux comprendre 
par analogie certains passages ; de toute façon ils mettent en 
relief les usages de la Parole divine. 



CHAPITRE V 

EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 

Règle vingt-sixième d'Éliézer : 

Par mâsàl (parabole) : comment ? (c Les arbres se mirent en chemin 
pour se choisir et oindre un roi: ils dirent à l'olivier..., puis au 
figuier... » {Jiig. 9, 8-15). Est-ce que les arbres ont l'habitude de se 
choisir un roi? Non, mais ce sont les Israélites qui demandèrent à 
Othoniel fils de Qenaz, à Débora et à Gédéon d'exercer la souveraineté 
sur Israël et ces héros refusèrent. Pareillement : « L'épine du Liban... » 
(2 Heg. 14, 9). Epine et cèdre ont-ils l'habitude de contracter mariage 
entre eux ? Non, mais cela se rapporte à Sichem et à Jacob, notre père. 
C'est ainsi que tu trouves des prophètes et des hagiographes qui ont 
proféré des paraboles. En quelles matières peut-on parler ainsi? En 
tout ce qui touche à la qabbâlà (livres autres que le Pentateuque) ; 
quant à la Tôrâ et aux commandements, tu ne peux pas les interpréter 
par mode de mâsàl. On excepte trois textes que R. Ismaël interprétait 
par mode de mâsâl ; pour deux d'entre eux, la halakha (décision officielle) 
se conforme à ses paroles : « S'il en relève et peut se promener au 
dehors avec son bâton » {Exode, 21, 19). (Cela signifie :) en bonne santé : 
car tu ne peux pas parler du bâton du malade; mais cela nous laisse 
entendre que l'écriture fait allusion à l'appui (bon état) de son corps, 
tout comme s'il s'appuyait sur son bâton. Pareillement « si le soleil 
est levé sur lui » (voleur par effraction) [Exode, 22, 2) : le soleil se 
lèverait-il pour lui seul? Mais (cela veut dire :) de même que le soleil 
(symbolise) la paix du monde, ainsi du voleur, s'il est connu qu'il ne 
vient que dans une intention pacifique, le propriétaire sera responsable 
s'il répand son sang. Pour ces deux textes, la halakha est suivant 
R. Ismaël. Voici le troisième: « Et ils déploieront son vêtement » 
(Deut.y 22, 17, sur la nouvelle mariée accusée de n'être pas vierge). 
Cela signifie que la chose est aussi évidente qu'un vêtemenf. 

1. Nous traduisons le texte de Einhorn (Wilua, 1925); le texte donné 
par ScHECHTER daos l'introduction à son édition du Midrash hag~ga- 
dol (Cambridge, 1902, p. xxiv), ne contient pas le troisième exemple, 
mais il est plus clair pour l'explication du premier : « Si tu dis « sur 
son bâton », c'est qu'il est encore malade; mais cela laisse entendre 
que l'écriture veut indiquer que son corps se soutient. » Ces exégèses 
d'Ismaël sont rapportées plusieurs fois (ordinairement toutes les trois 
ensemble) : Mekhilta Ex. 21, 19; 22, 2, p. 270, 293; Siphré Deut., 22 



208 EXÉGÈSE RABBINIQTJE. 

Cette règle admet, tout au moins pour la haggada. un 
genre spécial d'exégèse : celle qui n'utilise pas le sens des 
mots, mais qui procède par métaphores ; procédé populaire, 
mais apte, sous la plume d'un philosophe ou d'un artiste, à 
prendre les formes les plus raffinées et à tirer des doc- 
trines révélées des déductions quintessenciées. 

Cette espèce d'exégèse, nous l'appelons : parabolique ; nous 
aimerions mieux dire : machalique. Nous ne disons pas 
exégèse allégorique, comme on fait si souvent. La désigna- 
tion tirée du vocable hébreu nous parait convenir davantage. 
Nous demeurons ainsi dans la ligne de l'esprit juif ; il nous est 
permis de ranger sous ce vocable diverses interprétations, qui 
se rattachent au genre Httéraire du mâsâl ; nous évitons d'iden- 
tifier cette méthode exégétique avec l'exégèse allégorique. 

Nous laissons pendant aussi, nous réservant de l'étudier au 
cours du chapitre, le problème : les anciens rabbins ont-ils 
pratiqué cette exégèse allégorique qui, chez Philon,. intervient 
si souvent comme son procédé favori d'exposition? Nombre 
d'historiens, surtout parmi les chrétiens, n'hésitent pas à 
répondre catégoriquement : oui, et à mettre sur le même pied 
le Judaïsme palestinien et le Judaïsme alexandrin. Voici ce 
qu'écrivait John Massie : 

La méthode allégorique était pratiquée tout autant par les Juifs que 
par les Grecs, tout autant par les Juifs palestiniens que par les Juifs 
hellénistes... Les Juifs palestiniens allégorisaient l'Ancien Testament, 
y découvrant dans les phrases, les mots, les lettres, et (dans les siècles 
qui ont suivi le christianisme) même dans les points-voyelles un sens 
caché, en vue de se donner un apaisement de conscience relativement 
à l'abandon de certaines lois devenues impraticables, ou bien en vue 
de justifier des accroissements traditionnels et souvent grossiers, ou 
bien pour défendre Dieu de tomber en d'apparentes incohérences, ou 
bien pour laver les écrivains historiques des accusations d'impiété ou 
d'immoralité; ou bien, généralement, pour des fins homilétiques... 
L'allégorie constituait un élément considérable de la Haggada (interpré- 
tation) palestinienne, et des lois définies réglementaient son usagée 

17 § 237, 117 b. sqq.; Sanhédrin palest. 8, 26 c (développe le second 
cas, omet le troisième) ; Ketuhot palest. 4, 4, 28 c, 

1. Diciionary of the Bible de Hasti.xgs, 1900, I, p. 65, Nous pour- 
rions sans peine joindre d'autres citatioijs de même sens, prises chez 
des historiens chrétiens de l'exégèse biblique. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 209 

Il nous semble que cette affirmation, et tant d'autres 
pareilles, aussi peu dénuées de réserves, sont provoquées par 
deux ordres de faits: les nombreuses équivalences que, 
principalement dans les exégèses distributives, l'exégèse 
rabbinique établit entre des faits historiques ou des sentences 
bibliques d'une part et des idées ou des grandeurs religieuses 
(Loi, culte, Israël...) d'autre part; la mention fréquente dans 
les textes des dârsé 7'ekimât ou dôrsé hamûrôt^ les « inter- 
prètes allégoriques », comme on traduit volontiers. 

Les écrivains juifs, au contraire, restreignent considérable- 
ment la part de l'allégorie dans l'exégèse rabbinique. Michael 
Guttmann, expert en littérature talmudique, écrit : « Le 
Judaïsme authentique ou rabbinique n'a jamais vu dans 
l'allégorie une vraie méthode d'exégèse. Les mots de l'Écriture 
ne peuvent pas perdre leur sens primitif ^ » 

E. Stein déclare : <( En terre palestinienne, nous ne rencon- 
trons que peu de traces d'une interprétation allégorique; là 
où elle apparaît, elle a été provoquée par la spiritualisation 
de la religion juive ». Et un peu plus loin, il écrit : 

L'exégèse biblique palestinienne primitive, à l'opposé de l'alexandrine, 
ne montrait pas de tendances allégoriques ; font exception la Sagesse 
de Salomon qui trahit des influences hellénistiques^ les LXX et aussi la 
doctrine d'Aqiba. Spécifiquement palestinienne est la limitation imposée 
à l'interprétation allégorique par la règle : on ne doit pas sortir du 
sens simple de l'Écriture 2. 

* 

1. Das Judentum und seine Umwelt, Berlin, 1927, p. 250, sq. Il y 
montre tout ce qui différencie l'interprétation rabbinique de celle 
des Pères de l'Église et de celle de Philon, combien celui-ci reste 
juif par son souci de sauvegarder le sens littéral. 

2. Encyclopaedia j'udaica, Berlin, 1928, II, c. 338, 341. Il se réfère à 
Bergmann, /Mc?jsc/?e Apologetik im neutestamentlichen Zeitalter, Berlin, 
1908, p. 44, 45, qui oppose l'usage modéré que faisait de l'allégorie 
l'école palestinienne à l'usage de l'école hellénistique. De même, Stein, 
dans ses ouvrages sur Philon, voit dans la Haggada palestinienne un 
des facteurs qui ont préparé l'allégorie alexandrine et lui ont fourni 
ses matériaux : Die allegorische Exégèse des Philo, Giessen, p. 15, 
sqq.; Philo und der Midrasch, Giessen, 1931, p. 50, sq. (conclusions). 

Le grand rabbin Israël Lévy montre que l'allégorie des soi-disant 
interprètes allégoristes n'est pas une véritable allégorie, qu'elle 
diffère considérablement des exégèses allégoriques de Philon, de 
Joséphe et de S. Paul, appartenant à des écoles toutes en marge 
du Judaïsme palestinien : Revue des études juives^ 1910, lx, p. 24-31. 



210 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

Ces divergences de vues s'expliqueat, ea partie, par des 
notions, divergentes et surtout vagues, sur l'exégèse allégo- 
rique, ce qu'elle est, ce qu'elle doit être. Il paraît donc indis- 
pensable, avant d'étudier les diverses productions, en ce 
domaine, de l'exégèse rabbinique, de procéder rapidement à 
quelques considérations préliminaires. 

I. EXÉGÈSE ALLÉGORIQUE, EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 

Il serait trop long d'exposer ce qu'est l'allégorie, soit en 
elle-même, soit dans ses formes élémentaires ou préliminaires 
(métaphore, symbole, analogie)^ et ce qu'est l'exégèse 
aRégorique. Nous voulons noter uniquement cette loi essen- 
(tielle : l'interprétation allégorique, dans une littérature 
j donnée, se présente comme l'extension et l'application do 
genres spéciaux pratiqués en cette littérature. 

La littérature grecque comprend des mythes, des récits 
mythiques, des épopées. Platon se sert volontiers des mythes, 
pour exprimer, sous une forme qui ne relève pas de la 
dialectique, des conceptions plus profondes, difficiles à 
décrire clairement et à démontrer rigoureusement : les Idées 
et le mythe de la caverne! Quant aux antiques narrations 
populaires ou homériques, soit qu'ils rejettent leur vérité 
historique, soit qu'ils les trouvent trop matérielles, les Stoï- 
ciens les utilisent comme des symboles, ou bien des éléments 
du monde (allégorie cosmique), ou bien des lois morales 
(allégorie morale). 

C'est cette méthode que Pbilon applique au Pentateuque, 
tout autant à ses parties historiques qu'à ses parties législa- 
tives. Il y est conduit, semble-t-il, par sa double éducation: 

Ibid. 1898, XL, p. 108, Ludwig Blau déclare qu'il y a très peu d'inter- 
prétations allégoriques dans les midraschim des Tannaïtes; les 
règles allégoriques n'apparaissent que vers 200. 

Bréhier, Les idées philosophiques et religieuses de Philon, Paris, 
1908 : «... les rares allégories des livres rabbiniques, si hostiles 
d'ailleurs en principe à l'esprit allégorique... » (p. 61). 

1. Isaac HEI^{EMAN>f, dans son tout récent Altjûdische Allegoristik, 
Breslau, 1936, a consacré des pages denses (p. 5-25) à étudier les 
diverses formes d'allégorie, tant chez l'écrivain que chez l'interprète, 
ainsi que le vocabulaire de l'allégorie et de l'allégoristique, tant chez 
les rabbins que chez les grecs. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 211 

de ses maîtres hellènes il a reçu un système philosophique, 
principalement une haute doctrine de vie morale , de sa foi 
juive il garde le respect pour la Bible, parole de Dieu. Pour 
faire dire à cette dernière, et rendre recevables à ses com- 
patriotes ses convictions philosophiques, il les fait appa- 
raître sous la lettre des Écritures, entendues allégoriquement. 
Voici comment il expose la première partie de la Loi : 

La Genèse dans son ensemble, jusqu'à l'apparition de Moïse, repré- 
sente la transformation de l'âme humaine d'abord moralement indiffé- 
rente, puis se tournant vers le vice, et enfin, quand le vice n'est pas 
inguérissable, revenant par degré jusqu'à la vertu. Dans cette histoire, 
chaque étape est représentée par un personnage. Adam "(l'âme neutre) 
est attiré par la sensation (Eve). Elle-même est séduite par le plaisir 
(serpent) ; par là l'âme engendre en elle l'orgueil (Caïn) avec toute la 
suite des maux; le bien (Abel) en est exclu, et elle meurt à la vie 
morale. Mais, quand le mal n'est pas incurable, les germes de bien 
qui sont en elle peuvent se développer par l'espoir (Enos), le repentir 
(Enoch), pour aboutir à la justice (Noé), puis, malgré des rechutes (le 
déluge, Sodome), à la sainteté définitive. Telle est la trame du Com- 
mentaire allégorique de la Genèse; l'allégorie morale y est, on le voit, 
l'essentiel; et si l'allégorie physique y joue un rôle, elle est seulement 
auxiliaire et subordonnée^. 

De cet exemple nous pouvons dégager les lois de l'inter- 
prétation allégorique ; première loi essentielle : donner à 
un texte un autre sens {allegoria^ déclarer autre chose, 
aXXo âYopsuw) que son sens historique obvie, que l'on en 
vienne ou non à nier, comme fait parfois Origène, la réalité 
historique du récit.; loi secondaire : entendre allégorique- 
ment tout un ensemble, et non pas seulement un détail isolé, 
ce qui est, dans ce dernier cas, prendre un texte, non au sens 
littéral, mais au sens métaphorique : pareillement en litté- 
rature l'allégorie, continue et bien construite, s'oppose à la 
métaphore employée en passant. 

La même méthode peut être appliquée à dès passages légis- 
latifs ; en voici un exemple, emprunté non à Philon, mais à 
un auteur notablement plus ancien, le Pseudo-Aristée : 

Bien que toutes les choses administrées par une seule puissance 
soient semblables dans leur nature, chacune a son caractère particu- 

1. BRÉmER, op. cit, p. 42, sq. 



212 EXÉGÈSE RABBINIQCE. 

lier, et des unes nous nous abstenons, des autres nous usons... Ce 
n'est pas par curiosité des rats ou des belettes que Moïse a porté cette 
législation, mais dans une intention de pureté et de bonne tenue, en 
vue de la justice. Les animaux dont nous mangeons se font remarquer 
par leur douceur et par leur pureté dans leurs nourritures. Les autres 
sont sauvages, rapaces, mangeant les chairs... Il signifie par là, en les 
appelant impurs, qu'il s'impose à ceux qui ont reçu la loi de pratiquer 
la justice de toute leur âme et de ne faire de tort à, personne, de ne 
rien ravir comme ces oiseaux impurs^ de diriger leur vie suivant la 
justice... Voilà donc toutes nos lois relatives aux-lanimaux ; la division 
des ongles et le pied fourchu sont le symbole que nous devons 
ordonner au bien chacune de nos actions : car toute la force des corps 
dépend des épaules et des jambes : cette distinction nous force à 
nous séparer des hommes injustes... La rumination est le symbole du 
souvenir qu'on doit garder de la loi... Donc, l'ongle fendu et la rumi- 
nation ne sont pas vains, mais ont en vue l'âme pour l'engager à la 
droiture. De même pour les rats qui dévastent tout et pour la belette 
qui conçoit par les oreilles et qui met bas par la bouche : impur est ce 
genre d'hommes qui donnent corps par leur parole à tout ce qu'ils 
reçoivent par l'ouïe et qui par là enveloppent les autres dans les maux, 
accomplissant une impureté, corrompus qu'ils sont par la souillure de 
l'impiété. Votre loi a bien fait en supprimant de pareilles gens 
(les dénonciateurs) ^ 

Nous saisissons dans cette page tous les mobiles de l'inter- 
prète : il ne laisse supposer en aucune manière que les obser- 
vances religieuses qu'il justifie soient ou doivent être aban- 
données, mais il sent qu'elles paraissent étranges à ses 
lecteurs non-juifs et qu'il importe de leur en montrer les rai- 
sons d'être d'ordre tout moral, raisons qu'ils pourront com- 
prendre ; par ailleurs il découvre des analogies entre les ani- 
maux permis ou défendus et les vertus et vices; il présente 
donc ces rites juifs bizarres comme des avertissements sym- 
boliques invitant les fidèles à la vie parfaite. 

Ces divers mobiles qui poussaient le Pseudo-Aristée et 
Philon à allégoriser la Bible ne pouvaient toucher les rab- 
bins palestiniens : ils devaient donc pour eux rester inopé- 
rants. 

Les lois positives, est-il besoin de les justifier humaine- 

1. Lettre d'Aristée, 143-167, édition Tramontane, Napoli, 193l\ 
p. 142-158. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 213 

ment? On les reçoit parce que tel est le bon plaisir de Dieu; 
à peine un rabbin se risque-t-il à observer que les oiseaux 
interdits par la Loi sont aussi les plus rares ^; R. Johanan 
b. Zakkai rapproche le rite de la vache rousse des remèdes 
contre l'épilepsie^. Dans les histoires bibliques, pensent-ils, 
rien qui sente la légende, rien de choquant : nous savons 
comment les scandales donnés par les héros du passé sont, 
ou bien excusés, ou bien hardiment liquidés. 

Cependant les rabbins se sont appliqués volontiers à l'exé- 
gèse parabolique; ils y ont été conduits par deux biais : 
leur goût et leur recherche des analogies, même purement 
matérielles et extérieures, joints au désir de découvrir dans 
les textes les grandeurs spirituelles révérées : Loi, Israël, le 
Culte, le Messie...; ils étaient, en outre, encouragés à cette 
forme d'interprétation par la place considérable que tient 
dans la littérature biblique le mdsâl, sous toutes ses formes 
et sous les espèces apparentées. 

Dans la Bible et dans la littérature postérieure le mot 
mâsâl revêt plusieurs sens : propos moqueur, dicton popu- 
laire, proverbe à forme brève et ayant besoin d'une explica- 
tion, parabole ou allégorie. C'est du nom de mâsâl, qu'Ezé- 
chiel désigne la parabole de l'aigle, symbole de Babylone, 
et du cèdre, symbole de Sion (17, 2-24); il appelle pareille- 
ment parabole le signe de la chaudière (réelle ou figurative?) 
qui représente Jérusalem (24, 3). C'est surtout ce sens de 
parabole, comparaison, allégorie, voire même fable, que 
garde le mot dans la littérature rabbinique. Innombrables les 
textes ainsi conçus : « parabole, à quoi cette chose est-elle 
semblable? » et suit la parabole qui illustre une idée morale, 
dogmatique ou juridique ou bien une vue historique. Il est 
parlé des paraboles (fables) tirées de divers animaux : d'après 
R. Johanan, R. Meïr racontait 300 fables sur le renard^. Le 
mot est employé pour désigner un récit d'apparence his- 

1. Siphré Deut. 14, 15, § 103, 95 a. 

2. Pesiqta d. R. Kahana 40 ab. 

3. Sanhédrin 38 b. Dans le Aruh completum (sub verbo, V, p. 274), 
sont mentionnées des fables tirées de divers animaux (poule, lion). 
Sur R. Meïr et ses fables : Bâcher, Agada der Tannaiten, II, p. 7. 



214 EXÉGÈSE RABBINIQTJE. 

torique, mais n'ayant qu'une portée symbolique : R. Juda 
et R. Nehemia discutent sur la vision des os desséchés 
(Ezéchiel, 37) : est-ce une parabole ou une histoire réelle 
(une vérité) ^ ? Un rabbin assure devant Samuel b. Nalimani que 
Job n'a jamais existé mais n'est qu'une parabole tout comme 
le pauvre (2 Sam. 12, 3) possesseur de la petite brebis, qui 
lui fut injustement enlevée^. 

En somme, se rattachant au mâSâl, les rabbins connais- 
saient dans la Bible : des sentences énigmatiques, appelant 
une solution; des récits, paraboles ou allégories, à portée 
doctrinale; des gestes symboliques. Ils y joignaient néces- 
sairement des métaphores, raccourcis d'allégorie, ou même 
les comparaisons, donnant naissance à ces métaphores. La 
même idée pouvait être exprimée par toute la série de ces 
expressions maâahques : la nation d'Israël, comparée à une 
prostituée, appelée une prostituée, son histoire racontée sous 
la figure d'Oolla et Oohba [Ez. 23); son infidélité signifiée 
par la femme de prostitution qu'Osée reçoit l'ordre d'épouser 
[Os. 1, 2). Les rabbins avaient l'habitude, tout au moins 
depuis Aqiba, d'entendre le Cantique comme un écrit allé- 
gorique, de le prendre lui-même comme une allégorie; ils 
tenaient la même attitude à l'égard de l'épithalame du 
psaume 45 et à l'égard de pièces analogues. Par contre, 
comme nous venons de le voir, ils étaient très peu inclinés 
à voir une allégorie dans l'histoire de Job ou dans celle de 
Jonas^. Bien plus, certains rabbins assuraient que les ressus- 
cites, surgis à la voix d'Ezéchiel des ossements desséchés, 
étaient des hommes réels : 

A propos de la résurrection et des morts ressuscites par Ezéchiel, 
on rappelle le propos traditionnel : cette parabole était une réalité 

1. Sanhédrin 92 b : reproduite plus bas. 

2. Baba batra 15 a. L'histoire, qui remonte à la seconde moitié du 
Hi^ s., se relie-t-elle à une tradition plus ancienne? Cf. Bâcher, 
Agada derpalest. Amorder, I, p. 501. Samuel démontre la réalité histo- 
rique de Job par les paroles du texte, il donne son nom et sa patrie. 

3. Dans le midrach l'odyssée de Jonas est enrichie d'abondantes 
broderies. Dans un passage du Zohar [wajakhel, 397) son sort est 
donné comme la figure des relations entre l'âme et le corps (d'après 
Encyclopaedia judaica, IX, c. 274). 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 215 

{èmèt), car Z. Eliezer disait que les morts ressuscites par Ézéchiel 
se tinrent sur leurs pieds, chantèrent un cantique, puis moururent... 
R. Juda disait : ce fut une réalité (vérité = èmèt) parabolique 
(màsâl). R. Nehemia lui objecta : si c'était une réalité, pourquoi para- 
bole; et si c'était une parabole, comment réalité? Mais ce fut en réalité 
une parabole. R. Eliezer, fils de R. José le galiléen, disait : les morts 
que vivifia Ézéchiel allèrent dans la terre d'Israël, y prirent femme 
et engendrèrent des fils et des filles. Et R. Juda b. Bathyra (vers 110) 
se dressa et dit : « Je suis dés fils de leurs fils et voici les tephillin 
que me laissa mon père, qui était l'un d'entre eux^ » 

Etant données les convictions des rabbins sur la valeur 
historique des livres bibliques, on se demande comment ils 
ont pu, sauf pour le Cantique et pour les compositions 
similaires, les soumettre à une exégèse parabolique, quasi 
allégorique. C'est le sujet de notre étude dans ce chapitre. 

Nous commencerons par exposer les diverses exégèses 
données du Cantique : elles nous feront saisir les procédés 
auxquels recom't cette intei'prétation allégorique et aussi 
quels sont ses flottements, ses déficiences. Nous étudierons 
ensuite les interprétations de forme allégorique que des 
rabbins ont proposées pour des textes juridiques, histo- 
riques et géographiques, gnomiques. Nous examinerons 
dans quelle mesure ces exégèses peuvent être appelées allé- 
goriques. Nous considérerons tout particulièrement les exé- 
gèses attribuées aux fameux dâ7'sé résumât [hamûrôt), les 
soi-disant interprètes allégoriques : relèvent-elles de l' allé- 
gorie? 

Si notre étude né se limitait pas aux rabbins tannaïtes, 
,nous rencontrerions dans les écrits postérieurs au début 
du IIP s., surtout dans les midrasim, des interprétations 
paraboliques plus abondantes et plus variées. 

II. — l'interprétation du cantique. 

Nous abordons cette interprétation comme le type de 
l'exégèse allégorique juive. En effet, tous les commenta- 

1. Sanhédrin 92 b; Bâcher, Die Agada der Tannaiten, II, p. 242, 
traduit ainsi les paroles de R. Nehemia : « Wenn Wahrheit, wozu 
Gleichniss? Wenn Gleichniss wozu Wahrheit? Sagen wir : In Wah- 
rheit, es war ein Gleichniss ». 



216 EXÉGÈSE RABBIN1QÏ3E. 

teurs anciens s'accordent sur ce point commun : ils ne 
traitent jamais la brûlante poésie comme une série de chants 
de noces, ou comme la glorification d'un amour charnel, 
qu'il ait pour scène le palais de Salomon ou un foyer cham- 
pêtre ; mais ils prennent toutes ses énonciations comme des 
symboles représentant divers objets. Trouverons-nous en 
ces exégèses une véritable allégorisation? 

Au moment de l'avènement du christianisme, la tradition 
paraît universellement accréditée qui voit, décrits dans le 
poème, l'amom' de Dieu pour Israël et les relations entre le 
Seigneur et son peuple. On fait souvent à R. Aqiba l'hon- 
neur d'avoir découvert et fait admettre cette interprétation : 
ainsi, aurait-il pu défendre le Cantique contre ceux qui vou- 
laient l'exclure du Canon des Écritures. Mais d'autres doc- 
teurs, avant lui, avaient proclamé la sublimité et l'excellence 
du Cantique^ ; et comme l'observe très justement M. Vul- 
liaud, R. Aqiba n'aurait pas « imposé une toute nouvelle 
manière de voir à ses adversaires ^ » : c'est donc que l'inter- 
prétation mystique avait déjà cours. Elle est, en effet, sup- 
posée dans une sentence attribuée à Rabban Johanan b. 
Zakkai : 

Peu après 70, voyant la descendante d'une noble famille de Jéru 
salem recueillir, pour s'en nourrir, les grains d'orge contenus dans le 
crottin d'un cheval arabe, il disait : toute ma vie je me suis tourmenté 
sur ce verset, ne sachant ce qu'il signifie : « si tu ne le sais pas, ô la 
plus belle des femmes » {Cant. 1, 8) : si vous ne voulez pas vous 
soumettre au Ciel, vous serez soumis aux plus viles des nations 
arabes... ; en punition de ce que tu n'as pas servi ton Dieu par amour 
tu serviras tes ennemis dans la haine 2. 

Ce rabbin voyait donc dans la bien-aimée la figure d'Israël. 

1. Ainsi Rabban Gamliel II et R. Eleazar b. Azaria : Cantique Rab- 
ba 1, 1, 2 (parag. 11 et 12, édition Wilna, 1896). 

2. Le Cantique des Cantiques d'après la tradition Juive, Paris, 
1925, p. 141-145. 

3. Mekhilta sur 19, 1, p. 204 sq. Histoire très souvent répétée, voir 
dans Horovitz l'indication des nombreux parallèles. Dans Tosephta 
Ketubot, 5, 9, p. 267, l'histoire est racontée très brièvement, ne 
donnant plus que la référence au texte du Cantique, et le tout attri- 
bué à R. Eleazar b. Sadoq qui avait aussi vu le second Temple. 
On peut donc croire à l'antiquité du propos. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 217 

Et quand, vers le même temps, le pseudo-Esdras écrivait : 

Doininator Domine, elegisti... ex omnibus floribus orbis lilium, 
imiim... et ex omnibus creatis volatilibus, nominasti tibi columbam 
unam... 

on peut voir là une allusion à des expressions du Cantique 
et une preuve qu'on les appliqpiait à Israël^ . 

Comment les interprètes juifs ont-ils exploité cette allégorie 
si belle, et par ailleurs depuis Osée si traditionnelle? Pour 
en juger tout au long, j'ai voulu relire le Targum du Cantique^ 
et aussi le midras rabba sur ce même livre. Je dois confes- 
ser que cette lecture, surtout celle du dernier ouvrage, m'a 
laissé nne impression de malaise et de désenchantement : 
pourquoi? D'abord c'est que, dans ce recueil, comme, du 
reste, dans toutes les compositions de même espèce, le com- 
pilateur a rassemblé des sentences et des développements 
qui n'ont rien à voir avec le texte à commenter ou ne lui 
sont rattachés que par un lien tout matériel et extérieur : 
ainsi, les sermons prononcés à Uéa en remerciement de l'hos- 
pitalité accordée aux rabbins, ou bien, à propos de la myrrhe, 
les histoires sur la famille d'Euthymos, qui détenait la 
recette incommunicable des parfums du Temple ; non seule- 
ment ces associations disparates étonnent et agacent, elles 
suggèrent aussi le sentiment que les esprits n'étaient pas 
tellement préoccupés par l'allégorie qui aurait dû, seule, 
les captiver et les retenir. Cette impression s'accroît quand 
on vient au détail des exégèses : sans doute, en général et en 
gros, il est toujours question de Dieu et d'Israël; mais nous 
retrouvons presque partout le procédé classique qui découvre 
en chaque image et en chaque objet un symbole des grandes 
réalités spirituelles, principalement de la Tôrâ et du culte 
du Temple : rapprochements tout mécaniques, matériels et 
extrinsèques, sous lesquels disparaît le sens profond de 
l'allégorie nuptiale; H est vrai pourtant, que ces interpré- 
tations symboliques sont plus abondantes dans le commen- 

1. IF Esdras, 5, 24, 26. Charles, dans les Pseudepigrapha, p. 571, 
rappelle Cant. 2, 2, 14; 4, 15 et 1, 15. 

2. On en trouvera une traduction française dans l'ouvrage déjà 
cité de M. Vulliaud, p. 67-103. 



218 EXÉGÈSE RABBINIQUE, 

taire du Cantique que dans les commentaires des autres 
livres : de ces deux faits nous devons inférer que le Cantique 
était tenu, plus que tout autre écrit sacré, pour un recueil 
de symboles, mais que ces symboles ne comportaient pas, 
en général, une interprétation particulière bien définie et 
uniquement propre au Cantique ^ 

Autre constatation que nous avons faite à la lecture du 
midras, c'est que les rabbins, dont les sentences sont citées, 
sont, en grande majorité, des amoras : cela ne nous étonne 
pas, l'exégèse allégorique, et surtout l'exégèse allégorique du 
Cantique, n'ayant cessé de progresser et de s'enrichir, jusqu'au 
moment où elle a trouvé dans le Zobar son épanouissement 
le plus luxuriant^. 

Cependant, l'usage était déjà fort répandu, à l'âge tannaïte, 
d'interpréter allégoriquement le Cantique et il est significatif 
de le voir dans la Mekhilta aussi souvent cité que le livre de 
Job et presque autant que les Proverbes. 

Il est temps de transcrire, afin de pouvoir apprécier leur 
caractère, quelques-unes de ces exégèses tannaïtes du Can- 
tique. Donnons d'abord la règle d'interprétation du Cantique : 

R. Juda (b. liai) fait taire R. Meïr qui entendait 1, 12 de l'idolâtrie 
d'Israël : Assez, Meïr, on n'interprète pas le Cantique à la honte, mais 
à la louange d'Israël : car il (Dieu) n'a donné le Cantique des Can- 
tiques que pour la louange d'Israël 2. 

C'est donc que le Cantique a été écrit en vue d'Israël. 
Et un amora du milieu du troisième siècle, R. José b. 
Hanina, nous donne la clé de quelques symboles : 

« Mon bien-aimé est descendu dans son jardin, au parterre des 
baumiers » (6, 2) :... « mon bien-aimé », c'est le Saint, béni soit-il; 

1. Le P. Jouoîv, Cantique des Cantiques, commentaire philologique 
et exégêiique, Paris, 1909, p. 30, définit le caractère de ce midrash et 
note qu'il « existait un fonds d'idées traditionnelles qui s'imposait 
aux prédicateurs »; p. 16, il dit très justement : « Si la tradition 
juive avait présenté un système uniqure et rigoureux d'interprétation, 
au lieu d'offrir seulement des éléments épars et souvent dénaturés... ». 

2. Le Zohar pourrait passer tout autant pour un commentaire du 
Cantique que pour un commentaire du Pentateuque; cf. VutiiAuo, op. 
cit., p. 116-133. 

3. Cantique rabba sur 1, 12 (parag. 55). Malgré cette règle, dans le 
Targum, 2, 2, 17 et 5, 2 sont entendus de fautes du peuple. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 219 

« dans son jardin », c'est le monde; « au parterre des baumiers », 
c'est Israël; « pour paître dans les jardins », ce sont les synagogues 
et les académies; « pour cueillir des lis », c'est pour faire monter (par 
la mort) les justes qui sont en Israël ^. 

Quant aux exégèses allégoriques du Cantique, nous les 
répartissons en trois catégories. 

1° Dieu et Israël. 

Dans la première catégorie nou,s rangeons les interpréta- 
tions qui concernent l'amour de Dieu pour Israël et l'amour 
d'Israël pour son Dieu : confessons que les exégètes n'ont 
guère développé ce thème et qu'ils sont restés dans les géné- 
ralités; nous transcrivons sans commenter : 

R. Aqiba disait : je parlerai des embellissements et des louanges 
(qu'Israël peut procurer) à la face des nations du siècle à celui qui a 
dit et le monde fut : car voici que les nations du siècle interrogent 
Israël en ces termes : En quoi ton bien-aimé se distingue-t-il des 
autres (bien-aimés) que tu nous adjures ainsi? (5, 9), pour que vous 
acceptiez de mourir pour lui et ainsi êtes-vous égorgés pour lui, 
suivant qu'il est dit : « aussi les jeunes filles t'aiment » (1, 3); elles 
t'aiment jusqu'à la mort (jeu de mots : 'ad mût et 'alâmôi); et il est 
écrit : « pour toi nous sommes égorgés tout le jour » {Ps. 44, 23). 
Voici que vous êtes beaux, que -^ vous êtes puissants (des héros); 
venez, alliez- vous avec nous ! Et Israël répond aux nations du 
siècle : vous le connaissez, mais il ne vous a été dit qu'une partie de 
sa louange ; « mon bien-aimé est frais et vermeil, on le distinguerait 
entre mille » (5, 10). Entendant ainsi sa louange, les nations disent 
à Israël : nous viendrons avec vous, car il est dit : « Où est allé ton 
bien-aimé, ô la plus belle des femmes? De quel côté s'est dirigé 
ton bien aimé, pour que nous le cherchions avec toi? » (6, 1). Et 
Israël leur répond : « Vous n'avez pas de part avec lui », mais « mon 
bien-aimé est à moi et moi à lui » (2, 16) ; « je suis à mon bien-aimé 
et mon bien-aimé est à moi, lui qui paît entre les lis » (6, 3). Et les 

1. Ibid. sur 6, 2 (6). Sur 1, 2, divers rabbins indiquent pour objet 
du Cantique : le Sinaï (R. Johanan •}• 279), le tabernacle de réunion 
(R. Meïr); le Temple (suivant les rabbins [contemporains de Meïr?] 
et suivant R. Aha vers 320), le passage de la mer (R. Hanina b. 
Papa, vers 300); et la suite du verset (le baiser de la bouche) est 
entendu du don de la loi au Sinaï, où les anges venaient baiser les 
Israélites fidèles, ce qui donne lieu à des digressions sur la parole 
de Dieu... 



220 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

rabbins disent : je l'attendrai pendant la nuit jusqu'à ce qu'il vienne 
avec moi à l'académie (le bêt hammidrâs). Parabole d'un roi qui suit 
son fils dans ses voyages à l'étranger : ainsi Dieu suit partout Israël, 
jusqu'à ce qu'il vienne avec moi à l'académie et c'est ce qu'il dit : 
« à peine les avais-je passés que j'ai trouvé celui que mon cœur 
aime » (3, A)K 

« Mon bien-aimé est à moi et moi je suis à lui » (2, 16) : il m'a 
chantée et je l'ai chanté; il m'a glorifiée et je l'ai glorifié; il m'a 
appelée ma sœur, mon amie, ma colombe, ma toute belle; et moi je 
lui ai dit : celui-ci est mon bien-aimé et celui-ci est mon ami. Il m'a 
dit : voici que tu es belle, mon amie; et moi, je lui ai dit : voici que 
tu es beau, mon bien-aimé, bien plus, délicieux... Le dialogue con- 
tinue, utilisant d'autres textes scripturaires, exprimant la louange 
d'Israël, les attributs de Dieu et ce que son peuple a fait pour lui 2... 

« De la couronne dont sa mère l'a couronné » (3, 11). R. Johanan 
disait : R. Siméon b. Yohai interrogea R. Eliézer b. R. José : Aurais-tu 
entendu ton père expliquer ce que signifie « de la couronne dont sa 
mère l'a couronné »? — Oui. — Comment? — 11 en est comme d'un roi 
qui avait une fille unique, qu'il aimait excessivement; il l'appelait ma 
fille; et il l'aima encore plus jusqu'à l'appeler ma sœur; et il l'aima 
encore plus jusqu'à l'appeler ma mers. Ainsi le Saint, béni soit-il! aima 
excessivement Israël et l'appela ma fille {Ps. 45, 11) ; et il l'aima encore 
plus jusqu'à l'appeler ma sœur [ibid.), et il l'aima encore plus jusqu'à 
l'appeler ma mère, suivant qu'il est dit : « sois attentif à ma voix, ô mon 
peuple, ô ma nation, prête l'oreille » [h., 51, 4) ; et il est écrit « ma 
mère » le 'immi (au lieu de le''ûmî du texte). Et R. Siméon b. Yohai 
se levant le baisa sur la tète, en lui disant : si je n'étais venu que 
pour entendre de ta bouche cette explication, c'eût été suffisant^. 

2° L'Exode. 

Dans la seconde catégorie, nous rangeons toutes les exégèses 
qui voient dans le Cantique le récit symbolique de la sortie 

1. Mekhilta sur 15, 2, p. 127 sq. Une partie du dialogue dans 
Siphre Dent. 33, 2, § 343, 143 a et aussi Cant. rabba, 5, 9, etc. 

2. Cant. rabba, 2, 16. « Avec moi du Liban, mon épouse « est 
entendu de Dieu et Israël : Mekhilta sur Exode, 12, 41, p. 52 (Dieu 
émigré avec Israël) et 15, 1, p. 115. 

3. Cant. rabba in loc. Indiquons des exégèses très plates qui 
voient Israël dans la bien-aimée de 1, 9 (R. Éliézer : parabole sur la 
délivrance d'Israël) de 4, 7 (amoras et tannas); « Mets-moi comme 
un sceau sur ton cœur » (8, 6) est entendu par R. Juda b. liai de 
l'acceptation de la loi au Sinaï; le même sur 3, 9 compare Israël à 
une fille de roi que son père ne craint pas d'interpeller en public : 
ces exégèses sont tirées du Rabba in loc. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 221 

d'Egypte : des rabbins entendent nombre de versets des divers 
événements, soit de la première rédemption, soit de la marcbe 
dans le désert, soit du don de la Loi au Sinaï ; si bien que cer- 
tains commentateurs présentent le poème comme un récit 
allégorique de ce moment capital de l'histoire d'Israël, Nous 
transcrivons quelques spécimens de ces interprétations. 

« Ma colombe dans l'excavation du rocher » (2, 14). R. Johanan : le 
Saint, béni soit-il! appelle Israël « colombe » suivant Os., 7, 11 
(Ephraïm)... R, IsmaeH : quand les Israélites sortirent d'Egypte, à 
quoi ressemblaient-ils? A une colombe qui fuit devant le rets, entre 
dans la fente d'un rocher et y trouve un serpent faisant son nid. Cris 
au secours. Dieu exauce. R. Juda au nom de R. Hamade Kepher Téhu- 
mim (iii^ s.) : cris des Israélites, souffrant en Egypte; à cela se rapporte 
« ma colombe.... » R. Éléazar l'entendait d'Israël au moment où ils 
étaient dans la mer : « ma colombe dans l'excavation du rocher )>, car 
ils étaient cachés dans les profondeurs de la mer; « montre-moi 
ton visage », c'est ce qui est dit : « restez en place et regardez le salut 
de Ya » {Ex. 14, 13) ; « fais-moi entendre ta voix », c'est le Cantique ; 
car « ta voix est douce », c'est le chant; « et ton visage aimable », 
car les Israélites montraient du doigt en disant : « celui-cï est 
mon Dieu et je le glorifierai » (Ex., 15, 2). R. Aqiba l'entendait 
des Israélites quand ils étaient devant le mont Sinaï : « ma colombe 
dans l'excavation du rocher », car ils se réfugiaient dans les 
cachettes du Sinaï ; « montre-moi ta face », car il est dit : « et tout le 
peuple voyait les tonnerres » {Exod., 20, 18); « fais-moi entendre ta 
voix », c'est leur voix au sujet des commandements, car il est dit : 
« tout ce que Ya a dit nous le ferons et nous l'écouterons » (24, 3)... 
R. José de Galilée l'entendait (de la servitude) des empires : « ma 
colombe dans l'excavation du rocher », car ils étaient cachés dans les 
cachettes des empires; « montre-moi ton visage », c'est le Talmud 
(étude) ; « fais-moi entendre ta voix », c'est le bien agir (suit la discus- 
sion : qui est supérieur, savoir la loi ou la pratiquer'?)... R. Meïr l'en- 
tendait du tabernacle (suivent les exégèses selon le mode habituel)... 
D'autres rabbins l'entendent du Temple ou des fêtes de pèlerinage-. 
« Il m'a introduite à la salle du festin (du vin) » (2, 4). R. Meïr ; la 
communauté d'Israël dit : la nature mauvaise a pris empire sur moi 
par le moyen du vin et j'ai dit au veau : « voici ton Dieu, Israël » 
(^a;. 32, 4), R. Juda le fait taire... Israël dit : le Saint, béni soit-il! m'a 
introduit dans le grand cellier du vin, c'est le Sinaï ; et là il m'a donné 

1. Donné comme baraitha; figure dans Mekhilta Ex, 14, 13, p. 94, 

2. Rabba in loc. Allusions à la colombe dans Mekhilta Fx. 15, 13, 
p. 146, et 19, 6, p. 208. 



222 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

son armée (magnificavit), c'est la Tôrâ et les commandements et les 
bonnes œuvres ; « et en grand amour » je les ai reçus ^... 

« Je suis blessée (malade) d'amour » (2, 5). R. Siméon b. Yohai compare 
Israël sortant d'Egypte à un fils de roi que son père veut ménager tout 
le temps qu'il est malade; ainsi Dieu attend de donner la loi à son 
peuple, fatigué par les souffrances égyptiennes ^. 

« J'entends mon bien-aimé, le voici qui vient, sautant sur les mon - 
tagnes, bondissant sur les collines » (2, 8). R. Éliézer voit en ce verset 
une allusion — et non une démonstration — à la hâte de Dieu (la 
Sekhinâ) venant sauver Israël ^. 

Les reines sont soixante, les concubines quatre-vingts, et les jeunes 
iilles sans nombre (6, 8) ; on a vu là une allusion au peuple sortant 
d'Egypte; « les soixante reines «, ce sont les soixante myriades 
de guerriers; « les quatre-vingts concubines «, ce sont les hommes de 
vingt ans et ^'au-dessus; « les jeunes filles sans nombre », ce sont les 
enfants qu'on ne peut compter; et pourtant « unique est ma colombe, 
ma toute belle », voilà la parabole {mâsâl) qui répond au tout (Israël est 
cette unique colombe) ''*. 

3» Symbolismes divers. 

Enfin, une troisième catégorie réunit toutes les exégèses, 
— et elles sont très nombreuses, — qui appliquent les images 
du Cantique, soit aux institutions théocratiques, soit à des 
doctrines traditionnelles : quelques exemples ; 

« Les soixante guerriers qui entourent la litière de Salomon » (3, 7). 
R. Éliézer b. R. José : « la litière », ce sont les tribus d'Israël; « du 
roi Salomon », du roi à qui appartient la paix (= Dieu); « soixante 
guerriers », ce sont les lettres de la bénédiction sacerdotale; « l'élite 
des guerriers », car ils sont la force d'Israël... R. Simlai (vers 260) 
l'entend des vingt-quatre classes de prêtres et de lévites; R. Johanan 
(t 279) l'entend des sanhédrins ; les rabbins l'entendent des soixante 
myriades qui sortirent d'Egypte ^. 

Le pavillon nuptial serait le Tabernacle ou le Temple et 

1. Rabba in loc. Suivent d'autres exégèses assez différentes. 

2. Rabba in loc. Suivent les discours de remerciement pour l'hospi- 
talité d'Usa. 

3. Mekhilta Ex. 12, 11, p. 22, Cf. Rabba in loc. R. Éliézer b. Jacob 
l'entend du Messie (allusion, zékèr; démonstration, raison ra'aia). 

4. Mekhilta Ex. 15, 13, p. 144 sq. et Siphré Dent. 32, 8, § 311, 134 
b. Ibid. sur 33, 13, § 355, 146 b, les patriarches et les mères sont 
figurés par la montagne de myrrhe et la colline de l'encens (4, 6). 

5. Rabba in loc. et Mekhilta Ex. 12, 37, p. 48 (les rabbins). 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 223 

tout l'ensemble pourrait désigner la résidence de la Sekhinâ 
(Dieu)'. 

« Tes deux seins sont les faons jumeaux d'une gazelle » (4, 5); les 
rabbins y voient ordinairement un symbole de Moïse et d'Aaron^. 
D'autres : une allusion aux deux tables de la loi ^. 

« Tu es un jardin fermé, ma sœur épouse, une source fermée, une. 
fontaine scellée » (4, 12). L'expression est tenue par une tradition 
ancienne pour un éloge d'Israëlj qui ne peut pas être suspect de péchés 
odieux; mais les rabbins veulent préciser : le jardin fermé, ce sont 
les hommes, et la fontaine scellée, les femmes; ou bien, suivant 
R. Nathan (vers 160), les femmes mariées et les vierges fiancées ; ou 
encore, duomodi coUusK 

Voilà, certes, des exégèses étranges et des assimilations 
saugrenues, dont le réalisme est tout rabbinique. Nous pour- 
rions ajouter d'autres échantillons aussi étonnants : les fils de 
ma mère seraient, ou bien Dathan et Abiron^, ou bien les 
explorateurs®; mon bien-aimé (2, 8), Moïse '^; notre sœur 
encore petite, Abraham^; les reines et les concubines sont le 
symbole des justes qui seront à l'Eden sous l'arbre de vie^ ; 
les compagnons, qui veulent entendre la voix de la bien-aimée, 
ce sont les anges ^°... Nous retrouvons là cette liberté et cette 
fantaisie de l'exégèse rabbinique qui lui permettent de 
découvrir en chaque mot tout ce qui lui plaît. 

1. Gant, rabba sur 3, 9, 10 : sentences de R. Siméon et de R. Juda 
b. liai; les textes plus récents donnent d'autres applications et aussi 
des détails sur les orfèvreries de Salomon. 

2. Ainsi dans le Rahba : traditions du second siècle. 

3. Mekhilta Exode, 20, 16, p. 234. 

4. Mekhilta Ex. 12, 6, p. 14. Le Rabba rapporte ces exégèses, le 
sens traditionnel (éloge d'Israël) et des paraboles sur les Égyptiens 
qui regrettent de laisser partir Israël, dont ils avaient méconnu la 
valeur : tel un particulier qui vend son champ, dont le nouveau pro- 
priétaire tire de magnifiques récoltes. 

5. R. Meïr : Rabba, in loc. 

6. R. José : Rabba sur 1, 6; le commentaire contient d'autres 
applications, mais nous ne rapportons ordinairement que les exégèses 
tannaïtes. 

7. RR. Juda et Néhémia et les rabbins; R. Eliezer b. Éliézer b. 
Jacob (nous l'avons déjà dit) l'entend du Messie. 

8. Rabba, 8, 8 (R. Berekia vers 340); 6, 9, ma colombe ma toute- 
belle est entendu d'Abraham, « lunique » suivant Ez.^ 33, 24. 

9. Rabba, sur 6, 9 (R. Juda b. liai). 

10. Rabba, 8, 13 (R. Aha vers 320 et autres rabbins). 



224 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

Y trouvons-nous une allég-orisation véritable? A lire succes- 
sivement le rabba sur le cantique et un ouvrage quelconque 
de Pbilon, on a l'impression d'être devant deux genres 
différents. 

L'interprétation allégorique du philosophe constitue un 
tout systématique, ordonnant' tous les éléments du livre 
biblique à l'exposition et au développement d'une doctrine 
liée et cohérente. Le recueil rabbinique, florilège de sentences 
de tous les temps et de tous les auteurs, mosaïque de maximes 
suggérées par les mots du texte, ne peut aucunement prétendre 
à l'unité ^ . 

Défaut d'unité plus sensible encore par la multiplicité des 
objets dont les divers traits du Cantique deviennent les 
symboles. Ainsi que le remarque Heinemann (p. 61), l'amour 
de Dieu, la Loi de Dieu, Dieu dirigeant l'histoire d'Israël, ne 
sont pas pour les Juifs trois objets séparés: il est vrai. 
Cependant si l'ouvrage est une allégorie consciemment voulue 
par son auteur, il est étrange qTi'il puisse revêtir plusieurs 
significations, dont quelques-unes paraissent fort excentriques 
au thème principal : l'amour qui unit Dieu et son peuple 
Israël. Tout au contraire, ce motif capital est souvent éclipsé 
par les autres moins importants, au point de disparaître de 
l'attention et de l'esprit. 

La forme dramatique, le dialogue échangé entre les acteurs 
de premier plan et les comparses, ne laissent aucune trace 
dans les interprétations, malgré tous les appuis précieux que 
l'interprétation allégorique peut en retirer : une lecture des 
commentaires mystiques chrétiens, décrivant, avec les mots 
du Cantique, les relations de l'âme avec son Dieu, font 
ressortir péniblement ce déficit. 

1. Ces notes « florilège, mosaïque » sont empruntées à Heinemann, 
op. cit., p. 62-64. Il note par ailleurs que le Targum présente quelque 
effort vers l'unité : 1, 2-3, 6 est presque entièrement consacré à 
l'histoire de l'Exode; 3, 7-5, 1, avec quelques digressions, à la 
construction du Temple ; 5, 2-7 à la ruine du royaume ; 6, 7-12 et 7, 
10-13 au temps de l'exil et à la période post-exilique. Il affirme aussi 
que l'exégèse du Moyen Age manifeste quelque recherche de l'unité, 
mais elle est empêchée d'y atteindre par les matériaux qu'elle utilise 
et par sa dépendance à l'égard du Midrash. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 225 

Enfin, les interprétations se ramènent, dans la mesure où ; 
l'on peut distinguer les deux genres l'un de l'autre, plutôt au [ 
symbole qu'à l'allégorie. Dans une allégorie bien conduite, 
chacun des termes ne représente qu'un objet, toujours le 
même, dont il est le substitut métaphorique, et l'ensemble 
des termes compose une histoire ou bien une thèse idéo- 
logique ; à cette même loi doit se soumettre l'interprétation 
de l'allégorie. Il en est tout autrement dans les exégèses 
transcrites : chaque trait, isolé du tout organique dont il est 
un membre, reçoit souvent plusieurs significations, qui n'ont 
avec l'image qu'une relation plus ou moins lointaine, si bien 
qu'à peine peut-on parler de symbole. Identifier le bien-aimé 
avec Dieu lui-même est demeurer dans la ligne de l'allégorie ; 
l'identifier avec Moïse, ce n'est même plus du symbohsme. Et 
que dire quand on voit la bien-aimée devenir Abraham, ses 
deux seins représenter Moïse et Aaron, le jardin fermé 
entendu des hommes ou des femmes mariées? 

Cette corruption de l'allégorie, dégénérant en simple 
symbolisme, sinon en pseudo-symbolisme, nous prépare à 
mieux comprendre les autres applications de l'exégèse 
paraboKque. 

III. — EXÉGÈSE PARABOLIQUE DE TEXTES NON-ALLÉGORIQUES. 

Il convient d'interpréter allégoriquement les passages qui 
ont une teneur allégorique : de quel droit et comment entendre 
des textes juridiques, historiques ou gnomiques autrement 
qu'au sens littéral? 

1° Textes juridiques. 

Gomment des docteurs, qui croyaient à la pérennité de la 
Loi divine, pouvaient-ils appliquer à ces lois une méthode 
exégétique qui aurait pu les faire prendre, non pour des 
obligations réellement observées, mais pour de purs sym- 
boles? Il est constant que les lois bibliques, pour être 
continuellement adaptées aux exigences de la vie, devaient 
être soit modifiées, soit abrogées : entorse à la lettre qu'il 

EXÉGÈSE RABBINIQUE. 8 



226 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

était nécessaire d'appuyer sur une exégèse : exégèse le plus 
souvent dialectique, — (ainsi pour justifier l'abandon du 
talion), — parfois aussi allégorique. En outre diverses consi- 
dérations accessoires sur les lois pouvaient faire appel à des 
exégèses symboliques. 

Nous avons déjà transcrit la vingt-sixième règle d'Éliézer 
et les explications paraboliques qu'elle propose de trois lois. 
Les deux premières sont généralement admises ; elles consis- 
tent à ramener un trait concret à la disposition qu'il traduit 
symboliquement : « se promener avec une canne » suppose le 
retour à la santé, état physique, le seul qu'il importe de con- 
sidérer; « si le soleil est levé », même suivant la jurispru- 
dence moderne on estime qu'un voleur opérant en plein jour 
n'a pas d'intention homicide et à son égard le droit de juste 
défense ne va pas jusqu'à excuser l'homicide. Pour le troi- 
sième cas l'interprétation métaphorique est refusée parce 
qu'elle tend à supprimer une pratique matérielle ancienne'. 

Exemple indiscutable, semble-t-il, d'une prescription juri- 
dique remplacée par une autre prescription :. 

« La captive, qu'on veut prendre pour femme, pleurera pendant 
un mois son père et sa mère » (Deut. 21, 13) ; Eliezer l'entend au sens 
littéral {mammâs); R. Âqiba dit : son père et sa mère ne sont pas autre 
chose que les idoles, suivant qu'il est dit : « Ils disent au bois : tu es 
mon père « {Jér. 2, 27) 2. 

Aqiba veut-il dire que la captive doit abjurer son idolâ- 
trie? Il donnerait ainsi une nouvelle signification à la pres- 
cription mosaïque. Notons surtout l'opposition que marque 
le texte entre l'interprétation figurée de R. Aqiba et l'inter- 
prétation de R. Eliézer qui prend les mots suivant leur sens 

1. Voir Midras Tannaùn in loc. p. 140 (R. Éliézer b. Jacob) on 
déploie le manteau lui-même suivant qu'il est écrit. Item : Ketu- 
bot 46 a. Autres explications métaphoriques : expression décente 
pour dire qu'on discute la chose en secret; les témoins de l'un et 
de l'autre exposeront la chose devant les anciens de la ville. 

2. Siphréin loc. § 213, 113 a. Aussitôt après, discussion entre les 
deux rabbins sur le sens à donner à « un mois » : Aqiba entend trois 
mois (suffisamment pour qu'elle puisse prendre des habits de fête et 
pour qu'on puisse juger si elle est enceinte) ; R. Eliezer l'entend prout 
sonat. Le Targum du pseudo-Jonathan (ou Jerusalmi I) paraphrase le 
texte suivant l'interprétation d' Aqiba. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 227 

littéral : « Son père et sa mère, mâmmâs « (la réalité, le 
sens obvie) ^ ; les docteurs distinguaient parfaitement entre 
le sens littéral et le sens figuré. 

Ordinairement les interprétations de cette espèce tendent, 
sous le couvert d'une autre loi qu'on ne veut pas éliminer, 
à introduire ou à justifier une loi particulière ; souvent une 
analogie réelle ou métaphorique explique cette exégèse : 

« Tu ne déplaceras pas la borne de ton prochain » [Deut, 19, 14). 
Dans le Deutéronome la loi parle des tombeaux des rois et des pro- 
phètes. R. Aqiba : l'Ecriture parle de celui qui épouse, soit la femme 
enceinte de son prochain, soit une femme qui allaite l'enfant de son 
prochain, suivant qu'il est dit {Prov. 23, 10) : « Tu ne déplaceras pas 
les bornes éternelles et tu n'entreras pas dans le champ des orphe- 
lins ». Pourquoi? Parce que le Seigneur assure leur vengeance 2. 

L'exemple suivant veut justifier une coutume établie par 
une analogie métaphorique : le contact avec le sang dans 
les deux situations : 

« Vous ne mangerez rien avec du sang » {Lev., 19, 26). Après les 
interprétations littérales, R. Dosa (plus probablement fin du premier 
siècle : Dosa I) dit : on ne sert pas de repas de deuil pour les con- 
damnés mis à mort par le Sanhédrin, car il est dit... R. Aqiba en 
déduit que les membres d'un Sanhédrin qui ont condamné à mort ne 
doivent rien prendre ce jour-là. R. José b. Hannia y voit un avertisse- 
ment concernant le fils rebelle ^. 

Voici encore une autre exégèse juridique allégorique, inté- 
ressante à un double titre : elle donne un sens tout particu- 
lier à une loi, et cela en lui appliquant, mais entendue allé- 
goriquement, la loi suivante : ce second procédé utOise la 
méthode semûkîm (la section doit être expliquée d'après la 

1. Bâcher, Die exegetische Terminologie der jûdischen Traditions- 
Uteraiur, Leipzig, 1899, I, p. 105 : mammâs signifie : das Greifbare, 
Wesenhafte, Wirkliche, le sens obvie. 

2. Midras Tannaim, in loc. p. 115. La première interprétation se 
relie au texte de Tos. Baba hatra 1, 11, p. 399, défendant de dépla- 
cer les tombeaux de rois ou de prophètes. La seconde, à l'interdiction 
d'épouser les femmes ayant cette charge : Yebamot 42 a et Pal. Sota 
4, 4, p. 19 c (ce texte se réfère à la sentence des Prov.). Cf. p. 61. 

3. Siphra in loc. 90 b et Sanhédrin 63 a {Semahot 2, 8, anonyme). 
Noter l'expression « avertissement = 'azhârâ », le texte qui contient 
l'interdiction de faire une action. 



228 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

section voisine); en outre, nous avons la surprise de ren- 
contrer là l'exploitation d'une prescription mosaïque, que 
saint Paul interprète allégoriquement aussi de son côté^ : 

Rab Seset (fin du iii^ s.) disait : R. Eleasar (mort en 279) a dit au 
nom de R. Eleazar b. Azaria : D'où tire-t-on que si une femme soumise 
au lévirat échoit à un homme souffrant d'ulcères (de la lèpre), on ne 
la muselle (contraint) pas? De ce qu'il est dit : « Tu ne muselleras 
pas le bœuf quand il foule le grain » {Deut., 25, 4) et aussitôt'après : 
« Si deux frères demeurent ensemble... » (législation du léYirat)^, 

Citons encore une exégèse de même espèce : 

« Et il aura autorité sur toi » [Gen. 3, 16) ; R. José de Galilée disait : 
on pourrait croire : de toute sorte d'autorité; non, car il est enseigné 
en ces termes : « On ne prendra pas en gage les deux meules ni la 
meule du dessus {Deut., 24, 6)3. « 

Le targum palestinien relie ce même verset au précédent (devoir 
pour le nouveau mari de réjouir sa femme) et en tire cette prescrip- 
tion bizarre (contre la pratique de sorcellerie qu'on appelait au Moyen 
âge « nouer l'aiguillette ») : et que personne ne lie gendres ou brus 
par des sorts, car l'âme qui doit sortir d'eux serait ainsi perdue (ou 
blessée)^. 

C'est encore par analogie et par le rapport métaphorique 
des deux situations qu'une loi de portée matérielle est trans- 
formée en prescription morale : 

« Tu ne mettras pas devant un aveugle un objet d'achoppement « 
{Lév. 19, 14). « Devant l'aveugle », en paroles. Quelqu'un vient te 
demander : la fille d'un tel peut-elle épouser un prêtre? Ne lui réponds 
pas qu'elle est apte si elle ne l'est pas. On vient te demander conseil, 
ne donne pas un conseil qui ne convient pas ^... 

1. 1 Cor., 8, 9, 10; l'exégèse de saint Paul se fonde sur la remarque 
que le texte doit être entendu au sens figuré. Voir infrà p. 310. 

2. Yehamot 4 a. 

3. Genèse rabba in loc. 20, 7, p. 191. Bâcher, Die Agada der Tan- 
naiten, I, p. 363, observe que José avait d'autant plus de mérite à 
donner cette interprétation qu'il était en possession d'une femme 
insupportable. 

4. Nous citons le Jerusalmi I; le Jerusalmi II, ou targum fragmen- 
taire, dit que ceux qui agissent ainsi nient le siècle à venir (qui ne 
peut arriver tarit que les âmes à naître ne sont pas A'^enues au monde). 
Ibn Ezra, dans son commentaire, proteste contre cette interprétation 
dérivée du contexte immédiat : il n'admet que le sens littéral. 

5. Siphra in loco, 88 d. Le texte ajoute que ce sont là des choses 
laissées au cœur, au sentiment de vraie religion. Il est à noter que 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 229 

Passage de la peur physique d'un danger corporel à la 
peur morale du péché : 

« Les ofQciers diront (avant le combat) : qui est-ce qui a peur et qui 
sent son cœur faiblir? qu'il s'en aille »... {Deut. 20, 8). R: Aqiba : celui 
qui a peur et dont le cœur est tremblant, suivant le sens. R. José le 
galiléen : celui qui a peur à cause des transgressions qu'il a commises ; 
c'est pourquoi la Loi a mis tous les autres avec lui afin qu'il puisse 
revenir avec eux^. 

Analogie à la fois verbale (obtenue par une modification 
orthographique) et métaphorique : 

« Tu auras une pelle avec laquelle tu iras hors du camp faire un trou 
et recouvrir ensuite tes excréments » (Deut. 23, 14). Bar Qappara 
expliquait ainsi ce texte : ne dis pas : 'aznèkâ (tes armes, ou : ton 
bagage) mais ''ôznèkâ (ton oreille), de telle sorte que si quelqu'un 
entend une chose inconvenante il mette son doigt dans -ses oreilles ; 
c'est ce que disait R. Eleazar : c'est pour cela que les doigts sont sem- 
blables à des chevilles 2... 

Plus encore qu'à modifier les lois ou introduire de nouvelles 
coutumes, l'interprétation parabolique sert à justifier la 
forme ou la raison d'être des lois bibliques, en relevant une 
analogie ou un rapport métaphorique entre la forme de 
l'action prescrite et sa fin ou son objet : 

« L'autel de pierres sur lesquelles tu n'agiteras pas le fer » (Dt., 
27, 5). Pour quelle raison le fer est-il interdit de préférence à tous les 
autres métaux? Parce qu'on peut en faire des épées. Or, l'épée est le 
symbole du châtiment, et l'autel, le symbole de la propitiation : on 
éloigne donc la chose qui est symbole du châtiment de la chose qui 
est symbole de la propitiation. Et voici un raisonnement de minori ad 
maj'us : si au sujet des pierres, qui ne voient, ni n'entendent, ni ne 
parlent, en raison de ce qu'elles procurent la propitiation entre les 
Israélites et leur Père qui est au ciel, l'Écriture dit : « Sur elles tu 
n'agiteras pas le fer », les fils de la Tôrâ, qui procurent aussi la pro 
pitiation au siècle, à combien plus forte raison convient-il que ne les 
atteigne aucun de ceux qui causent un dommage^! Voici encore ce 

déjà dans la Bible le mot miksôl (achoppement) est pris au sens 
moral de scandale : Ez. 7, 19; 14, 4, 7. 

1. Sota 8, 5; plus bref dans Siphré in loco. §197, 110 b. Dans Tos. 
Sota 7, 22, p. 309, R. José fonde son opinion sur Ps. 49, 6. 

2. Ketuhot 5 ab. 

3. Ce texte s'éclaire si on le rapproche d'une autre version de la 
même sentence : * Si les pierres qui procurent la paix entre les Israè- 



230 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

qu'il disait : « C'est de pierres brutes (entières, parfaites,- selémôl) 
que tu construiras l'autel de Ya, ton Dieu « ; des pierres qui produisent 
la paix entre les Israélites et leur Père qui est au ciel. Dieu (leMâqôm) 
dit : qu'elles soient parfaites devant moi; des fils de la Tôrâ qui sont 
parfaits (ou = pacifiques) pour le siècle, à combien plus forte raison 
importe-t-il qu'ils soient parfaits devant le Mâqôm (Dieu) M 

Quand un Hébreu veut devenir esclave perpétuel, c'est son oreille 
qui est percée, et non un autre membre, parce qu'elle n'a pas gardé 
ce qu'elle a entendu au Sinaï et ce qui affranchissait Israël de toute 
servitude terrestre : « C'est de moi que les fils d'Israël sont les escla- 
ves, ils sont mes esclaves » {Lév., 25, 55) 2. 

Le mari présente pour sa femme qu'il soupçonne d'adultère un 
dixième d'epha de farine d'orge : de même qu'elle s'est comportée 
comme une bête, de même son offrande est composée de l'aliment des 
bestiaux 3. 

Les prêtr'es perçoivent sur les victimes l'épaule, les mâchoires et 
l'estomac parce que Phinéès à Béeiphégor avait pris une lance en sa 
main et percé la femme jusqu'au ventre, tandis que la mâchoire 
rappelle sa prière-^. 

La loi ordonne de. renverser les autels des nations idolâtres : ce 

lites et leur Père qui est au ciel... à combien plus forte raison con- 
vient-il que l'homme qui procure la paix entre le mari et sa femme... 
ne soit pas atteint par le châtiment » {Siphra sur Lev., 20, 16_, 92 c; 
Mekhilta sur Ex., 20, 25, p. 244). 

1. Cette interprétation est de Rabban Johanan b. Zakkai; ce grand 
rabbin n'est pas donné comme un dôrès hamûrôt, mais cette exégèse, 
comme les autres transcrites au même endroit, sont rapportées comme 
des interprétations par mode {kemîn) de hômèr, rentrant dans la caté- 
gorie de ces exégèses : Tosephta Baba qamma, 8, 6, 7, p. 358. 

2. DeR. Johanan b. Zakkai {kemin hômèr) : Tosephta Baba qamma, 
7, 5, 6 p. 358 et Mekh. Ex. 21, 6, p. 253 (plus bref et assez différent). 
Nous pouvons rapprocher deux autres exégèses du même : celui qui 
vole en secret doit rendre plus que celui qui vole ouvertement, parce 
qu'il outrage son Créateur en agissant comme si le Très-Haut ne le 
voyait pas {Toseph. Baba Qamma, 1, 2, p. 357 et parallèles) ; celui 
qui vole un bœuf qui marche rend cinq bœufs et celui qui vole un 
agneau ne rend que quatre agneaux, parce qu'il a dû le porter [Tos. 
Baba Qamma, 7, 10, p. 359 (R. Meïr présente là d'autres considéra- 
tions) et Mekh. Ex. 21, 7, 37, p. 291 sq.). 

3. Siphre sur Num., 5, 15 § 8, p. 14 et Sota 15 a : de Rabban Gama- 
liel sous forme de hômèr. 

4. Siphre Deut. 18, 3, § 165,^106 b {dôrsé reëCunôt) et Hullin 134 b 
{Dôrsé hamurôt) et Yalqut Simeoni in loc. (915) {dôrsé hamûrôt) : 
leur propos est rapporté par R. Juda; le Yalqut mentionne la variante 
R. Josué. L'analogie s'appuie sur Num., 25, 7, 8 et Ps. 106, 30 où 
yephallél est entendu au sens de « prier » : nous avons là un de ces 
à-peu-près sémantiques si fréquents dans l'exégèse rabbinique. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 231 

n'est pas que le bois ou les pierres aient péché, mais ils sont pour 
l'homme une occasion de malédiction; d'où a fortiori pour l'homme 
qui fait pécher son prochain et le détourne de la voie de la vie^. 

Toutes ces exégèses sont-elles vraiment allégoriques? Il 
nous semble que non : en aucun des cas cités le texte n'est 
pris au sens figuré. Il est vrai que toutes ces interprétations 
font état de symboles et d'allégories ; mais ces allégories ne 
visent pas à faire sortir du sens littéral ; au contraire, elles 
le confirment. Néanmoins, nous sommes ici sur la voie de 
l'exégèse allégorique, et de deux façons. L'application morale, 
qui est greffée sur la première et sur la dernière de ces inter- 
prétations, pourrait conduire à voir aussi dans ces préceptes 
des maximes morales. En second lieu, le symbolisme, qui 
est relevé dans les actes prescrits par Icb lois, pourrait 
sans peine aboutir à des explications symboliques des lois 
positives, telles que nous les lisons chez Philon, Josèphe et 
le Pseudo-Aristée. Voici une considération de R. Meïr qui 
se rapproche singulièrement de ces développements, chers 
aux Juifs hellénistes : 

Sur le commandement d'insérer dans les vêtements des franges 
avec un cordon de pourpre violette, R. Meïr disait : Il n'est pas dit ici 
« vous Zes verrez », mais « vous le verrez »; l'Ecriture nous avertit que 
quiconque accomplit le commandement des franges, on le lui impute 
comme s'il recevait la face de la Sekhînâ, : car la poui-pre violette 
ressemble à la mer, et la mer ressemble au firmament et le firmament 
ressemble au siège de la gloire, suivant qu'il est dit : « et au-dessus 
du firmament qui était sur leurs têtes, on voyait comme une pierre de 
saphir en ressemblance de trône {Ezech., 1, 26)2. » 

Le besoin de rendre raison d'une loi pousse parfois à 
instituer des rapprochements contestables : 

Pourquoi la loi de la niddâ est-elle imposée à la femme (impureté 
menstruelle)? Parce qu'elle a versé le sang du premier homme. La 
loi de la hallâ (du prélèvement sur les pâtes) lui a été imposée parce 

1. Semahôt (traité sur le deuil), ch. 8 vers la fin : des dôrsé hamû- 
roth sur Ex. 34, 13. 

2. Siphre Num., 15, 38, § 115, p. 126; Berakot palestinien 1, 5, 3 a 
(forme plus développée); Menahot 43 b et Sota 17 contiennent les 
mêmes idées pour montrer combien le violet diffère du blanc.' 



232 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

qu'elle a corrompu le premier homme dont la ^allâ (gâteau) devait 
rester (pure) à jamais. Elle a reçu le commandement d'allumer la 
lampe du sabbat parce q'uelle a éteint l'âme du premier homme ^ 

Des rapprochements tout extérieurs et entièrement artifi- 
ciels, que ne soutient aucune espèce de relation, voilà ce que 
nous lisons en de nombreuses interprétations qui se donnent 
un air allégorique : 

« Quand tu achèteras un esclave hébreu, il servira six années, la 
septième il sortira libre sans rien payer » {Ex. 21, 2). Les dôrêé 
resûmot disent : avant que les Israélites n'aient reçu à Mara les 
commandements sur les jugements et avant que ne leur fussent 
donnés les dix commandements, Moïse dit : Maître du siècle, peut- 
être la mauvaise nature égarera tes enfants en sorte qu'ils violeront 
les commandements et que tu les exileras loin de toi et que tu les 
vendras comme esclaves. Aussi bien ouvrit-il (la section) par ces mots : 
« quand tu achèteras un esclave hébreu... » En effet, si tu les livres 
aux empires (impies) qu'ils ne soient pas soumis à plus de six empires : 
« il servira six ans » : ce sont Babel, les Mèdes, les Perses, les Grecs, 
Assur et les Romains. « Et qu'à la septième il sorte libre sans rien 
payer». Il dit devant le Maître du siècle : qu'ils ne soient pas anéan- 
tis par les Romains, mais fais-leur la grâce gratuitement : « la septième 
année il sortira libre gratuitement ». « S'il est venu avec son corps 
(uniquement) il sortira avec son corps »; l'Écriture aurait dû dire : 
« s'il est entré seul il sortira seul » ; que signifie cet « avec son corps » ? 
Il dit : plaise à Dieu que cela n'arrive pas, mais si les péchés des 
ennemis leur procurent des ailes comme aux aigles pour voler dans 
les cieux, suivant qu'il est écrit {Lam. 4, 19)- : « IVos persécuteurs 
ont été plus légers que les aigles des cieux », Maître du siècle, donne- 
leur des ailes assurées. Que sont-elles ? « Qui sont ceux-là qui volent 
comme des nuées ainsi que des colombes vers leur colombier »? {Is. 
60,2. 

1. Genèse rabba ch. 17, 8 sur 2, 21 p. 160. Ces explications sont 
attribuées à R. Josué. Elles sont beaucoup plus longuement exposées 
avec citations à l'appui dans Pal. Sabbat, 2, 3, 5 b. 

2. Mekhilta Sim. b. Yohai, in loco. p. 117, sq. 

Nous avons là un type de ces exégèses qui greffent sur un texte 
quelconque des allusions d'allure prophétique. Thème que ces inter- 
prétations prennent de plus en plus volontiers, celui des empires : 
ainsi les planches du Tabernacle et leur revêtement d'or, d'argent, et 
d'airain symbolisent Babel, les Mèdes et les Grecs; l'argent est omis 
parce que symbole de Rome {Exode raba 35, 5). Voir sur ces exé- 
gèses, la plupart assez tardives, Heinemann, loc. cit., p. 43, sq. ; Strack 
-BiLLERBECK, Kommentar zum N. T. aus Talmud und Midrasch> 
III, p. 388-399. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 233 

Inutile d'apporter encore de ces interprétations : si elles 
nous éclairent sur la mentalité des exégètes rabbiniques, 
elles ne nous apprennent pas grand chose sur l'allégorisme 
juif. 

2° Textes historiques. 

Les rabbins ne nourrissaient pas le moindre doute sur 
l'historicité rigoureuse des narrations bibliques, ils étaient 
plutôt enclins à prendre les visions et les paraboles pour 
des histoires vraies : comment donc pouvaient-ils allégoriser 
l'histoire sainte? IcijençoreJ/allég;orisation_vraie-irouv 
de place ; nous remarquons_S€ailem.eni-^uneJ.end^ 
quente à découvrir dans un trait historique un symhple, un 
enseignement. 

Néanm oins certains rabbi ns ont essayé d'entendre quelques 
indications historiques en un sens métaphorique : l es protes- 
tations de leurs interlocuteurs montrent que ceux-ci voyaient 
en ces interprétations une négation inadmissible du sens 
historiqiie : 

« Amaleq vint attaquer Israël à Rephidim » {Exode, 17, 8). R. Hana- 
nia dit : sur ce mot nous interrogeâmes R. Eliézer, comme il siégeait 
dans la grande académie : que signifie Rephidim ? Il nous répondit : 
suivant le sens des mots (prout sonat). Les dôrsé resûmôt disaient : 
Rephidim n'est pas autre chose que « relâchement des mains » 
{ripheyôn yâdaim); c'est parce que les Israélites avaient négligé 
(relâché leurs mains de) la loi que l'ennemi est venu sur eux; car 
l'ennemi ne vient que contre le péché et contre la transgression 
comme il apparaît dans l'histoire de Roboam (2 Chron 12, 1)^. 

Texte particulièrement intéressant. Les interrogations des 
disciples nous laissent supposer qu'on avait l'habitude d'allé- 
goriser ainsi certains noms de lieux ; mais les docteurs tra- 
ditionnels ne voulaient pas s'écarter du sens littéral. L'al- 
légorisation est ici très marquée, ne s'attachant qu'au sens 

1. Mekkilta de Simeon b. Yohai in Ioc.t^. 83; la Mekhîlta courante 
contient cette exégèse, mais elle l'attribue à d'autres (ahérîm) p. 177, 
saq. Bâcher, Die Agada der Tannaiten I, p. 145, sqq. identifie le 
Hanania du texte à R. Hanîna b. Gamliel II. 



234 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

figuré; il n'est pas probable, cependant, qu'on ait sacrifié 
le sens littéral historique. Le procédé, la paronomase, _gui 
cqndjiil^^ sensa^^ lit- 

térature rabbinique . 

Citons quelques autres exemples d'allégorisation d'un nom 
de lieu : 

« Elle s'assit à l'entrée d'Enaïm (pétah 'énaym) » (Gen., 38, 14) : 
Rabbi disait : nous avons parcouru toute l'écriture et nous n'avons pas 
trouvé de lieu appelé pétah 'énaym; qu'est-ce donc que pétah 'énaym ? 
Cela nous enseigne qu'elle suspendit ses yeux à la porte à laquelle sont 
suspendus tous les yeux (= 'énaym) et qu'elle disait : plaise (à Dieu) 
que je ne sorte pas en vain de ma maison*... 

Rabbi essaye de justifier son interprétation en assurant 
que le terme à interpréter n'est pas un nom de lieu; son 
exégèse a, en outre, l'avantage de réhabiliter Thamar en lui 
prêtant des sentiments pleins de religion. 

Les deux exégèses suivantes ne veulent pas rejeter l'histo- 
ricité des données bibliques, mais uniquement rappeler deux 
idées chères à la tradition et à la religion d'Israël : les nuées 
dont Dieu a couvert et couvrira dans l'au delà son peuple ; la 
puissance des mérites des patriarches et des mères : 

« Ils partirent pour Sukkotli » {Exode, 12, 37) : Sukkoth littéralement 
(mammâs) comme il est écrit: « Et Jacob partit pour Sukkoth » {Gen., 
33, 17), ainsi parlait R. Éliézer, et les rabbins disaient : « Sukkoth n'est 
pas autre chose qu'un lieu », comme il est dit: « Et ils partirent de 
Sukkoth et ils campèrent à Ethan » {Num., 33, 6) ; de même qu'Ethan 
est un lieu, de même aussi Sukkoth. R. Aqiba disait: Sukkoth n'est pas 
autre chose que les nuées de gloire, suivant qu'il est dit : « Et Ya 
créera sur le lieu de la montagne de Sion et sur toutes ses assemblées 
une nuée durant le jour et une fumée et l'éclat d'une flamme 
ardente pendant la nuit; car sur toute sa gloire il y aura un dais » {h., 
4, 5, 6). Cela concerne le passé et pour l'avenir il est enseigné : « Et il 
y aura une tente pour protéger de la chaleur' pendant le jour » {ibid). 
et « les rachetés de Ya reviendront »... (/s., 35, 10)^. 

« Demain je me tiendrai sur le sommet de la colline, le bâton de 

1. Genèse rahha 85, 7 sur 38, 14, p. 1041 (et parallèles). 

2. Mekhilta in loc, p. 48. Cette exégèse métaphorique devint de 
bonne heure traditionnelle : il y est fait allusion dans le commentaire 
tannaïte sur le Lévit. {Siphra, Lev. 23, 43, 103 b) et dans le talmud 
babli, Sukka 11 b. 



EXÉGÈSE PABABOLIQUE. 235 

Dieu dans ma main » {Ex., 17, 9) : demain nous serons avec vous, 
nous tenant debout sur le sommet de la colline, prout sonat, disait R. 
Josué. R. Éleazar de Modin disait : demain nous prescrirons un jeûne 
et nous nous tiendrons sur les actions des pères : le sommet, ce sont les 
actions (mérites) des pères ; et la colline ce sont les actions des mères ^. 

Nous pouvons ramener à ce premier type — allég-orisation 
de données géographiques — une espèce toute voisine et 
d'ailleurs très peu représentée : l'allégorisation de données 
historiques. En voici un exemple très significatif : sur le texte 
« il descendit sur le mont Sinaï )> : 

Est-il possible que la gloire soit réellement [mammâs) descendue et 
se soit déployée sur la montagne du Sinaï? (Non) il est enseigné en ces 
termes!: « C'est du ciel que je vous^^ai parlé. » Nous apprenons que le 
Saint, béni soit-il, inclina les cieux inférieurs et les cieux des cieux 
supérieurs sur le sommet de la montagne et que la gloire descendit et 
se déploya sur la montagne du Sinaï, tout comme un homme qui étend 
un coussin sur le sommet d'un lit, ou comme un homme qui parle du 
haut d'un coussin; suivant Is. 64, 1 et 2. Et Rabbi José (b. Halaphta) 
disait : voici ce qu'il dit : « Quant aux cieux, les cieux sont à Ya, pour 
la terre, il l'a' donnée aux fils d'homme « {Ps. 115. 16) ; pas plus que 
Moïse ou Elie ne sont montés en haut, pas plus la gloire n'est descendue 
en bas; mais nous apprenons que le Mâqôm (Dieu) dit à Moïse : voici 
que je t'appelle du sommet de la montagne, et toi, tu monteras, suivant 
qu'il est dit : « et Ya appela Moïse » ^. 

Observons que l'interprétation allégorique revient à rejeter 
le sens littéral du texte, car il est admis que le ciel est 
l'habitat de Dieu qu'il ne quitte pas. Voici, par contre, une 
exégèse qui permet de rétrouver dans une indication his- 
torique, dont la réaKté n'est pas contestée, une allusion à l'un 
des biens spirituels que la piété juive se complait si souvent 
à mentionner; reconnaissons que l'allégorisation est bien 
indigente, l'analogie entre le fait matériel et la réalité spiri- 
tuelle signifiée étant si légère et extérieure : 

« Au matin monta une couche de rosée » {Ex., 16, 14) : R. Éléazar 
de Modin disait : alors monta l'intercession de la prière des pères qui 

1. Mekhilta in loc. p. 79. Autres textes ideatifiaat des lieux aux 
mérites des pères : Mekhilta sur 1-6, 10, p. 163 et 17, 12, p. 180; (14, 
29, p, 112 : autres mérites). 

2. Mekhilta sur Exode, 19, 20, p. 216 s^. 



236 EXÉGÈSE RABBINIQUE, 

étaient couchés, pareils à une couche de rosée, sur la surface de la 
terre ^. 

Cette dernière interprétation introduit une catégorie extrê- 
mement abondante : un trait historique est présenté comme 
signifiant la Loi ou quelqu'autre des valeurs spirituelles, qui 
sont la vie d'Israël. Nous sommes ici à la limite de l'exégèse 
allégorique. ïl y a encore quelque peu allégorie, puisqu'on 
fait dire au texte ce qu'il n'exprime pas directement, sans que^ 
pour autant, son sens premier soit aucunement repoussé. 
Mais le rapprochement institué mérite à peine le titre de sym- 
bolique ou d'aKégorique, parce que fort souvent le rapport 
entre le terme signifiant et l'objet signifié ne se fonde sur 
aucune analogie vraie, soit réelle, soit métaphorique. Quel- 
ques exemples de ces exégèses innombrables : 

« Que je voie cette belle montagne et le Liban » {BeuL, 3, 25) : 
c'est le Temple, suivant qu'il est dit : « tu es pour moi un Galaad, 
le sommet du Liban » {Jér. 22, 6) ; et aussi : « et le Liban tombe 
sous les coups d'un puissant » (/s., 10, 34). Et pourquoi l'appelle-t-on 
Liban? Parce qu'il blanchit les péchés des Israélites suivant qu'il' 
est dit : « Si Vos péchés sont comme l'écarlate, ils deviendront blancs 
comme neige » {Is., 1, 18)2. 

Les dôrse resûmôî dirent : « Ils ne trouvèrent pas d'eau » : (ce sont) 
les paroles (commandements) de la loi qui sont assimilées à l'eau. 
Et d'où tire-t-on qu'elles sont assimilées à l'eau? De ce qu'il est dit : 
« Quiconque a soif, qu'il vienne à l'eau! « [Is., 55. 1). C'est parce 
qu'ils s'étaient séparés pendant trois jours des paroles de la loi 
qu'ils se révoltèrent et c'est pour cela que les prophètes et les 
anciens leur prescrivirent de lire dans la Tora au sabbat, au second 
et au cinquième joiir^. 

1. Mekhilta in lac. p. 165. 

HEmEMA^'N, op. cit., p. 29 sq., rapporte d'autres allégorisations de 
cette espèce. 

Eleazar de Modin était célèbre pour ses interprétations ingénieuses : 
on recourait à lui pour mettre fia aux controverses exégétiques. 

2. Siphre Deut. 3, 25, § 28, 71 b. Cette même assimilation au 
Liban : ibid., 66 b. R. José (b. Halaphta) entend Is., 5, 2 symbolique- 
ment : la tour est le Temple; le pressoir, l'autel (Tosephta Sukka, 3, 
15, p. 197). 

3. Mek/i. sur Ex., 15, 22, p. 154; version presque identique dans 
Mekh. de Siméon b. Yohai in loc, p. 72. Noter d'abord la référence à 
Isaïe, entendu, non du salut, mais de la Loi (toujours à l'horizon), et 
aussi cette base, prétendue historique; donnée à une prescription 
juridique fort postérieure. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 237 

Après une discussion sur la nature du bois qui adoucit les eaux 
de Mara... les dôrse résumât dirent : « Il lui fit voir » les paroles 
de la loi qui sont assimilées au bois, suivant qu'il est dit : « Elle est 
arbre (bois) de vie pour ceux qui la saisissent » {Prov., 3, 18)'. 

c De sa droite jaillissaient pour eux des jets de lumière » [Dent., 
33, 2) : l'Écriture nous avertit que les paroles de la Tôrâ sont assimilées 
à la lumière ; de même que la lumière a été donnée du ciel, de même 
les paroles de la Tôrâ ont été données du ciel, suivant qu'il est dit : 
« Vous avez vu que c'est du ciel que je vous ai parlé » {Exode, 20, 22). 
De même que la lumière est vie pour le monde, de même les paroles 
de la Tôrâ sont vie pour le monde; la lumière (<^s=f eu), ceux qui s'en 
approchent se brûlent et ceux qui s'en éloignent sont glacés, de même 
pour les paroles de la Tôrâ : tout le temps que l'homme s'y applique, 
elles sont vie pour lui, s'il s'en écarte elles le tuent; de même qu'on 
use du feu en ce monde et dans le monde à venir, de même on use des 
paroles de la Tôrâ en ce monde et dans le monde à venir ; de même 
que le feu imprime une marque dans le corps de qui s'en sert, de 
même la Tôrâ imprime une marque en tous ceux qui s'en servent; 
de même que tous les fils d'homme travaillant sur le feu se distinguent 
entre les créatures, de même les disciples des sages (rabbins) se dis- 
tinguent, sur les places, par leurs façons de marcher, de parler et de 
s'envelopper dans leur manteau 2. 

« Si Dieu me donne du pain pour manger et des habits pour me 
vêtir » {Gen. 28, 20); R. Josué expliqua au prosélyte Aquila que le pain, 
c'est la Tôrâ, suivant qu'il est dit : « Venez, mangez de mon pain » ; 
les habits, c'est le manteau de prières (que mettent les fidèles) : si 
l'on obtient la Tôrâ, on obtient aussi le manteau^. 

1. Mekh. sur Exode, 15, 25, p. 155 sq. et dans la Mekh. Sim. b. 
Yohai, in loc, p. 73. Dans la première recension (plus complète), 
R. Siméon b. Yohai dit qu'il s'agit d'une parole de la loi, car il est 
dit : non pas « il lui montra », mais il l'instruisit, tout comme il est 
dit : « Il m'instruisait et il me disait : que ton cœur retienne mes 
paroles » {Prov., 4, 4). Notons dans les deux textes exploités l'assi- 
milation de la Tôrâ à la Sagesse. 

2. Siphre sur Deut. 33, 2 § 343, 143 ah. Siphre sur Num., 6, 25 § 41, 
p. 44, voit encore l'illumination de la Loi dans une partie de la 
bénédiction sacerdotale. Cette assimilation de la Loi à la lumière, qui 
est aussi feu, est très fréquente : cf. Philon De decalogo, \\ (46-49), 
édit. Gohn. IV, p. 279. 

3. Genèse rabha 70, 5, p. 802 (Josué veut consoler le prosélyte et 
lui promettre la participation au culte). R. Nehemia entend le « navis 
institoris de longe portans panem suura y> {Prov., 31, 14) des paroles 
de la loi, qui, parfois pauvres en elles-mêmes, doivent être expliquées 
par un autre texte {Ros hassana palest., 2, 5, 58 d). 

Nous pourrions transcrire d'autres textes dans lesquels la loi est 
assimilée à l'huile, au miel, à un remède de vie. 



238 EXÉGÈSE RABRINIQUE. 

Le symbolisme peut aussi s'exercer en diverses manières 
sur une narration. Premièrement en découvrant dans tel trait 
une portée symbolique; ainsi pour le buisson du désert : 

Pourquoi Dieu apparaît-il dans un buisson? demande un gentil 
à R. Josué b. Qorha. Pour t'enseigner qu'il n'y a pas d'endroit du inonde 
vide de la Sekhina (Dieu)... R. Éliézer : de même que le buisson est 
le plus petit des arbres de l'univers^ de même Israël était tout petit 
et il descendit en Egypte; c'est pourquoi le Saint, béni soit-il, se révéla 
à son peuple pour le délivrer, suivant qu'il est dit {Ex. 3, 8) : « Je suis 
descendu pour le délivrer de la main des Égyptiens ». R, Josué : de 
môme que le buisson est le plus rude de tous les arbres, si bien que 
les oiseaux qui pénètrent en lui n'en sortent pas en paix, de même 
l'esclavage en Egypte parut au Saint, béni soit-il, le plus dur des escla- 
vages de l'univers, suivant qu'il est dit {ibid.) : « Et Yahwé dit : j'ai vu 
longuement la misère de mon peuple... » R. Johanan : de même que 
des buissons on fait des haies aux jardins, de même Israël est une 
haie pour le monde. Autre explication : de même que les buissons 
ne croissent que le long des eaux, de même Israël ne croît que par 
le mérite delà Tora qui est appelée eau, suivant qu'il est dit {Is. 55, 1) : 
« Vous tous, les assoiffés, allez aux eaux... » De même que le buisson 
produit des épines et des roses, de même Israël comprend des justes 
et des impies. R. Pinhas le prêtre, fils de R. Hama : de même que 
lorsqu'on met sa main dans un buisson, on ne sent inen, mais quand 
on la retire elle est toute déchirée, de même quand Israël descendit en 
Egypte personne ne fit attention à lui, mais quand il en sortit, il en 
sortit au milieu de signes, de prodiges et de guerres...''. 

Enseignement symbolique tiré d'un geste : 

« Toute l'assemblée des enfants d'Israël partit du désert de Sin » 
{Ex. 17, 1) : c'est parce qu'Israël se sépare de la Tora que son adversaire 
fond sur lui, car l'adversaire n'a pouvoir sur lui qu'en raison du péché 
et de la transgression^. 



^&^ 



Interprétation morale d'une histoire ; l'analogie y joue un 
certain rôle mais tout symbolisme a disparu : 

Dans la mesure où l'on mesure on est mesuré. Abraham courut par 
trois fois au-devant des anges {Gen. 18, 2, 6, 7) ; de même le Lieu (Dieu) 

1. Exode rabba, 2, 9, sur 3, 2. Inépuisables, les symboles du buis- 
son. 

2. Mekhilia in loco, p. 173. 

Heiin'emann, op. cit. p. 30, sq. rapporte les exégèses symboliques 
(tardives pour la plupart) de gestes symboliques : monter, des- 
cendre, sortir (Dieu conduit dehors Abraham {Gen. 15, 5), pour le 
faire sortir de son astrologie : Nedarim 32 a). 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. , 239 

courut par trois fois au-devant de ses fils (Deut. 33, 2). Abraham salua 
Dieu la face contre terre {Gen- 18, 2); de ce même mot il annonce à 
ses enfants pour le siècle à venir (/s. 49, 23) : « Des rois seront tes 
nourriciers... ». Abraham lui offrit un peu d'eau, Dieu ménage à ses 
enfants dans le désert une source intarissable... Joseph ensevelit son 
père et il mérite lui aussi d'être enseveli par Moïse... ' . 

C'est encore une analogie, mais dépourvue de toute portée 
symbolique, que certains commentateurs découvrent entre 
les actes des Patriarches et ceux de quelques-uns de leurs 
descendants : Abraham va à Sichem pour y obtenir dans sa 
prière la victoire des fils de Jacob ; il voit de là l'Ebal et le 
Garizim où Israël s'obligera à garder la loi; il construit un 
autel à Ai, afin d'intercéder pour les fautes d'Acham^. 

Plus impressionnantes sont ces anticipations quand elles 
se tournent en prophéties messianiques : 

« Booz dit à Ruth au moment du repas : approche ici {hoÀom) » 
[Ruth 2, 14). R. Éléazar dit : voilà une indication (rèmèz), indication 
que la royauté de la maison de David sortira d'elle, car cette maison 
est appelée du titre de halôm, suivant qu'il est dit (2 Sam. 1, 18) : 
« Le roi David vint et demeura devant Yahwé et dit : qui suis-je, mon 
Seigneur Yahwé, et qu'est ma maison pour que tu m'aies fait venir 
jusqu'ici [halôm] i>°> <s. Trempe ton morceau (de pain) dans le vinai- 
gre » [Rulh, ibid.)... R. Samuel b. Nahmani : voilà une indication, 
indication qu'elle aura un fils dont les actes seront pour lui aussi âpres 
que le vinaigre; qui? Manassé. 

R. Johanan voit là un symbole des souffrances du Messie suivant 
qu'il est dit {Is. 53, 5) : « Mais lui a été transpercé à cause de nos 
péchés ))3. 

Volontiers aussi les rabbins trouvent dans certains traits 
une allusion aux grands empires : ce n'est plus du symbo- 
lisme et c'est très peu une analogie. On les découvre dans les 
quatre rois que combat Abraham [Ge7i. 14, 1); les quatre 
mots de Gen. 15, 12, en vertu de rapprochements scriptu- 

1. Tos. Sota 4, 1-7, p. 298, sq. Cette loi du talion fait l'objet de 
la seconde partie de la règle 28 [Mimma'âl) d'Eliézer : « Et vous avez 
dit : Non ! mais nous fuyons sur des chevaux n [Is. 30, 16) : par un 
mot ils ont péché, par ce même mot ils sont punis. 

2. D'après Heinemann, op. cit., p. 27, résumant le commentaire de 
Raschî, qui rapporte les midraschim anciens. 

3. Sabbat 11^ b. La dernière exégèse sur le Messie souffrant est 
dans Ruth rabba 5, 6 sur 2, 14. Cf. Heijvemaivn, op. cit., p. 27. 



240 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

raires, désignent Babel (terreur), les Mèdes (obscurité), les 
Grecs (profonde), Edom (tomba) ^.. 

La curiosité toute scolastique des rabbins les porte à cher- 
cher la raison d'être de tel fait historique : Us la découvrent 
dans une analogie plus ou moins obvie : 

Pourquoi les Israélites ont-ils été exilés en Babylonie de préférence 
aux autres pays ? Parce que la famille d'Abraham en venait. On l'expli- 
que ainsi en parabole : à quoi la chose est-elle semblable? A une femme 
qui a déshonoré son mari : où l'enverra-t-on? On l'enverra à la maison 
de son père 2. 

Les premières tables de la loi étaient entièrement l'œuvre de Dieu, 
les secondes, l'œuvre de Moïse, mais l'écriture était encore de Dieuj 
parabole : un roi épousant sa femme, apporte chez lui tout ce qu^ 
est nécessaire au contrat; quand il renvoie sa femme infidèle, c'est 
elle qui apporte tout le nécessaire à l'acte de répudiation, mais c'est 
le roi qui écrit et on reconnaît sa main^. 

« Il conduisit le troupeau vers le désert » ; R, Josué b. Qorlj.a : 
il lui annonçait que son troupeau périrait dans le désert et lui aussi. 
« Et il conduisait le troupeau » : il lui signifiait qu'il conduirait 
Israël pendant quarante années •'. 

Rabban Siméon b. Gamliel disait : il y avait des mulets au temps de 
^Ana, suivant qu'il est dit : « C'est ce 'Ana qui trouva les sources d'eau 
chaude dans le désert (en faisant paître les ânesses de Sébèon son 
père) » {Gen,, 36, 24). Les dorée hamûrôt (variante : resûmôt) 
disaient : 'Ana était un homme interdit, c'est pourquoi il introduisit 
dans le monde un être interdit, suivant qu'il est dit : « voici les fils de 
Seïr le Hori « ; et il est écrit aussi : « voici les fils de Sébéon, 'Aya et 
'Ana ». Ce qui apprend que Sébéon eut des relations avec sa mère et 
engendra 'Ana. Mais peut-être y eut-il deux "Ana^. 

1. Genèse rabba in loc. eh. 41, 2, p. 39.9; ch. 44, 17, p. 439, sq. Cf. 
Heinemajxn, op. cit., p. 34. 

2. De K. Johanan b. Zakkai, par mode de îiômèr : Tosephta Baba 
qamma, 7, 3, p. 357. 

3. Du même : Tosephta Baba qamma, 7, 4, p. 358; éclairé par Veut, 
rabba sur 1, 1 (3, 16, lin de la section), où la parabole et son expli- 
cation sont fort développées. 

4. 1 anliuma (version Buber), semôt, 12,11, p. 7; à éclairer par 
Exode rabba, 2, 9, sur 3, 1. Relevons dans ce texte le « il lui signi- 
fiait )), qui traduit i' expression râmaz iô, laquelle prélude au rèrnez, 
appelé a jouer un si giand rôle dans l'exégèse : le remèz dégage 
dans un texte une allusion plus ou moins claire : Bachek, Die lermi- 
noLogie, i, p. 182. 

5. Fesakimbk a. R. Siméon b. Gamliel appuie son affirmation (que 
'Ana a inventé les mulets) sur une tradition et une exégèse provenant 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 241 

Devons-nous rattacher à l'exégèse Mstorique les explica- 
tions diverses que les commentateurs donnent d'un songe, 
songe possédant une signification bien déterminée, mais 
offrant matière aux rapprochements usuels? Ainsi des songes 
du Pharaon : 

Sur la vigne que vit en songe l'échanson de Pharaon (Gen. 40, 9, 
sqq.), Rab (un des premiers chefs de l'école babylonienne, formé en 
Palestine à la fin du second siècle) déclare que les trois branches 
signifient les trois princes d'Israël pleins d'orgueil qui se trouvent en 
chaque génération. R. Éliézer dit : la vigne, c'est le monde; « les trois 
branches », ce sont Abraham, Isaac et Jacob; « celle qui bourgeonne 
et fleurit », ce sont les mères; « ses grappes donnèrent des raisins 
mûrs », ce sont les tribus (ou : les douze patriarches). R. Josué lui dit : 
montre-t-on à un homm.e autre chose que ce qui doit arriver'? « La 
vigne », c'est la Tôrà; « les trois branches », ce sont Moïse, Aaron et 
Marie; « et elle bourgeonna et fleurit », ce sont les sanhédrins; « ses 
grappes donnèrent des raisins mûrs », ce sont les justes qui se 
trouvent en chaque génération. Rabban Gamliel dit : voici que nous 
avons encore besoin du Modiite qui expliquera le tout d'une seule expli- 
cation. Et R. Éléazar de Modin dit : « la vigne », c'est Jérusalem; 
« les trois branches », c'est le Temple, le roi et le grand prêtre; « et 
elle bourgeonna et fleurit », ce sont les jeunes prêtres; « ses grappes 
donnèrent des raisins mûrs », ce sont les libations ^ ... 

3° Prières et littérature gnomique. 

Dans cette littérature il est une première série de textes qui 
appellent une interprétation allégorique : tous ceux qui sont 
eux-mêmes de teneur métaphorique ; rares toutefois sont les 
sentences métaphoriques auxquelles n'est pas jointe la signi- 
fication morale. Voici l'interprétation d'une métaphore qui 
reste inexpliquée dans la Bible : 

« Jette ton pain sur la face des eaux, car après beaucoup de jours 
tu le retrouveras » (Eccl. 11, 1). R. Bibi : fais Faumône avec ceux qui 

des interprètes fameux. L'élevage du mulet étant interdit suivant Lév. 
19, 19, il ne peut être qu'un animal pâsûl, interdit, impropre; "Ana le 
créa, étant lui aussi un homme pâsûl^ en raison ue son origine, ce 
qu'on déduit des deux textes qui présentent 'Ana : l'un, comme le frère 
de Sébéon, l'autre, comme son fils. 

1. HuUin 92 a. Les songes, considérés comme des oracles^ se 
prêtaient normalement à ces interprétations ; il serait intéressant de 
transcrire les interprétations qui ont été données dju songe de Jacob : 



242 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

peinent sur la Tora, symbolisée par les eaux. R. Aqiba raconte l'his- 
toire d'un disciple de rabbin sauvé d'un naufrage parce qu'il avait 
fait la charité avant de s'embarquer, l'aumône étant signifiée par le 
pain jeté sur les eaux. Autres histoires dans le même esprit ^. 

et Donnes-en (de ton pain) une part à sept et même à huit » {Eccl., 
II, 2). R. Eliézer dit ; « Donnes-en une part à sept », ce sont les 
sept jours de la semaine, suivant qu'il est dit « à la septième fois » 
(I Reg., 18, 44), c'est-à-dire au sabbat. « Et même à huit », ce sont les 
huit jours de la circoncision suivant qu'il est écrit : « et il mit son 
visage entre ses genoux » (ibid.); « entre ses deux genoux », cela 
signifie qu'Elie dit à Dieu : Maître des siècles, même si tes fils ne 
possédaient que les mérites de ces deux commandements, le sabbat et 
la circoncision, ce serait assez pour que tu aies pitié d'eux, R. Josué 
voyait dans le premier les sept jours de la Pâque et dans le second les 
huit jours de la fête des Tabernacles 2. 

Nous avons là de l'exégèse allégorique du meilleur aloi. Le 
plus souvent, dans l'Écriture, le sens de la métaphore est 
indiqué, soit par le contexte, soit explicitement. Les rabbins 
ne laissent pas de donner une interprétation de leur cru, 
le plus ordinairement en référant le symbole aux grands 
objets de la piété juive : 

« Une mouche morte infecte et^ corrompt l'huile du parfumeur » 
(EccL, 10, 1). Ben Âzzai disait : une seule mouche morte ne peut pas 
infecter et corrompre l'huile du parfumeur ; mais cela signifie que par 
un seul péché le pécheur perd de grands biens. R. Aqiba interprétait 
ainsi : « C'est pourquoi le schéol se dilate et ouvre sa bouche sans 
mesure » {Is. 5, 14) ; « sans mesure {li beli hôq ; hôq = précepte) » 

on y a vu les divers éléments de la liturgie du Temple ou les 
grands personnages d'Israël; citons les dernières lignes : R. Siméon 
b. Yohai dit : il lui montra le Sinaï ; en voici le signe : le samedi (de 
Sinaï) vaut (numériquement) soixante; le yod, dix; le nùn, cinquante^ 
et le dernier yod, dix, soit cent trente : or « et l'échelle )> [wesôlèm) 
vaut aussi cent trente {Tanhiima B wayyésé, 7, i, p. 149) : bel échan- 
tillon de cette mystique alphabético-arithmétique qui triomphe dans 
la Kabbale; mais rien d'allégorique. 

1. Eccl. rabha in loco. Le propos est-il d' Aqiba? le vocabulaire 
dénoterait une autre provenance. 

7. Ecclésiastç. rahba in Loc. et Pesiqta R. Kahana 192 a et Eriibin 
40 b (plus bref, il supprime les démonstrations scripturaires et Eliézer 
assimile les sept aux jours de la création). La première assimilation 
était connue de S. Jérôme : Hebraei ita hune locum intellegunt : et 
sabbatum et circumcisionem serva, ne si hoc foiie non feceris inopi- 
natum tibi superveniat malum )> . Un peu plus haut, lui-même entend 
les « huit » de la résurrection (In Eccl. 11, i, P. L. 23, c. 1101, sq.). 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 243 

cela signifie : celui qui n'a pas assez (de pratiques) de commande- 
ments pour incliner (la balance au jugement) du côté des mérites. 
Les rfdrse resûmôt disaient : l'homme est jugé suivant la majorité 
(de ses actes, mérites ou démérites) ; qu'il tâche donc toujours d'équi- 
librer les mérites et [les démérites ; heureux s'il fait une bonne action, 
car il a incliné sa balance du côté des mérites ; malheur s'il commet 
un seul péché, car il a incliné sa balance du côté de la condamnation ^. 

Nous avons là une véritable exégèse allégorique ; le Qohe- 
leth avait voulu symbçliser par l'image de la mouche morte 
qui corrompt l'huile parfumée l'idée qu' « un peu de folie 
l'emporte sur la sagesse et la gloire » ; ses commentateurs 
rabbiniques ont vu dans cette image une allusion à l'un des 
points de la doctrine classique de la rétribution. Nous trou- 
vons chez les rabbins d'autres exégèses de cette espèce. 

Le texte qui fait l'objet de l'interprétation suivante se rap- 
porte à la prospérité des temps messianiques, mais il est assez 
indéterminé et assez imagé pour supporter une interpré- 
tation allégorique qui découvre dans ces traits divers sym- 
boles : 

R. Johanan disait au nom de R. Siméon b. Yohai : que signifie le 
texte : « Heureux, vous qui semez partout près des eaux et qui laissez 
en liberté le pied de l'âne et du bœuf! » (7s. 32, 20)? Quiconque 
s'occupe à l'étude de la Tôrâ et à la pratique des œuvres de charité 
[sedâqâ) obtiendra la portion de deux tribus, suivant qu'il est dit : 
« heureux qui semez » et semer n'est pas autre chose que l'aumône 
{sedâqâ) suivant qu'il est dit : « faites vos semences dans la justice 
{sedâqâ = aumône) et moissonnez selon la charité » {Os., 10, 12). 
Et l'eau n'est pas autre chose que la Tôrâ, suivant qu'il est dit : « tous 
les assoiffés, venez vers les eaux » {Is., 55, 1). Il obtient la portion de 
deux tribus, à savoir : une tenture comme Joseph, suivant qu'il est dit : 
« Joseph est un rejeton fertile, ses branches s'élancent au-dessus de la 
muraille » (ce qui fait une tenture, dit Rachi) {Gen. 49, 22) ; il obtient 
la portion d'Issachar, suivant qu'il est écrit : « Issachar est un âne 
robuste » {ibid. 14)2. 

Nous retrouvons le procédé courant des équivalences éta- 
blies par des interprétations qui s'apparentent à la charade. 

< 

1. Eccl. rabba in loco. Les deux exégèses supposent la lecture au 
singulier zebûb. Nous trouvons des pensées analogues, fondées sur 
Eccl. 9, 18 b (qui précède immédiatement notre texte) dans Qidduèin 
40 b (baraitha et sentences de tannas), 

2. Baba qamma 17 a. 



244 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

Nous pouvons joindre aux sentences métaphoriques les pas- 
sages énigmatiques, qui ne peuvent que stimuler l'ingéniosité 
des commentateurs : voici ce que les rabbins tirent d'un verset 
des Psaumes, irrémédiablement altéré et d'autant plus riche 
en suggestions diverses pour quelques-uns de nos prédi- 
cateurs : 

Après avoir rappelé qu'Israël « a été esclave en Egypte et que Dieu 
l'a paré des dépouilles des Égyptiens », et .c'est ce qu'il (Dieu) dit : 
« quand vous étiez couchés au milieu des bercails, ailes de la colombe 
recouvertes d'argent » (Ps. 68, 14), c'est la dépouille de l'Egypte; « et 
ses plumes brillantes de l'éclat de l'or », ce sont les dépouilles de la 
mer (recueillies après que les Égyptiens furent engloutis dans la mer), 
(i Nous te ferons des colliers d'or » {Canl. \, 11), ce sont les dépouilles 
de la mer; «pointillés d'argent », c'est la dépouille de l'Egypte ••. 

En outre certaines maximes de sagesse pratique sont enten- 
dues en un sens religieux : les rabbins trouvaient-ils que leur 
portée première était trop terre à terre? 

« Dès le matin sème ta semence » {Eccl. 11, 6). R. Éliézer inter- 
prète littéralement. R. Josue (b. Hanania) dit : si la femme que tu as 
prise en ta jeunesse meurt, tu te marieras en ta vieillesse ; aie des 
enfants en ta jeunesse et aussi en ta vieillesse suivant qu'il est dit : 
« Dès le matin sème ta semence et au soir ne laisse pas reposer ta 
main. » R. Ismael : si tu as appris de la Tôrâ en ta jeunesse apprends 
aussi dans ta vieillesse, car tu ne sais laquelle des deux se conservera 
et si toutes les deux seront pareillement bonnes. R. Âqiba : j'avais 
douze mille disciples entre Gabbat et Ântipatris ; ils moururent entre 
Pâque et Pentecôte, et j'ai fini par en prendre sept, qui sont... 2. 

« Celui qui cultive la terre se rassasiera de pain » (Prov., 28, 19) : 
les disciples de R. José (b. Hanania) l'entendaient au sens littéral agri- 
cole; mais leur maître l'interprétait (dârâs) ainsi : qui cultive (culte reli- 
gieux) Dieu et sa terre se rassasiera du pain du siècle à venir; « mais 
celui qui poursuit des choses vaines se rassasiera de pauvreté » : ce sont 
les nations du siècle qui poursuivent en vain (stupidement) leurs idoles ^. 

1. Siphre sur Deut.^ 15, 15 § 120, 99 a. Cette interprétation du Ps. 
68 est alléguée aussi dans Mekhilta sur Exode, 12, 36, p. 47 (les 
dépouilles enlevées aux Égyptiens, les richesses englouties avec 
l'armée égyptienne dans la mer Rouge et que la mer rejette et livre 
aux Hébreux). . 

2. Eccl. rabha in loco. 

3. Genèse rabba. eh. 82, 8, p. 986. Cette exégèse de Josué aurait été 
rappelée à ses disciples par un officier romain ; cf. Bâcher, Agada der 
Tannaiten, 1, p. 1&3. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 245 

Pareillement le midrasi des Proverbes applique d'une part 
le poème de la femme forte (31,10-31) à la Tora et à son étude, 
et d'autre part il y trouve toutes les femmes remarquables 
mentionnées dans la Bible. 

Illustration significative de ce principe qui commande 
d'entendre des réalités spirituelles, de la Loi en particulier, 
toutes les sentences concernant la vie matérielle : 

« J'ai loué la joie, parce qu'il n'y a de bonheur pour l'homme qu'à 
manger, boire et se réjouir » {Eccl. 8, 15). Divers amoras disent : toutes 
les sentences sur le manger et le boire qui se trouvent dans ce volume, 
l'Écriture les prononce relativement à la Tora et aux bonnes œuvres. 
R. Jonas disait : c'est un principe général [binyan 'âô) dans toutes ces 
choses suivant qu'il est dit (ibid.) : « C'est ce qui l'accompagne dans 
son siècle ». Son siècle c'est le siècle présent dans lequel sa vie le 
conduit au tombeau. Le tombeau est-ce un lieu pour manger et boire? 
Mais ce qui l'y accompagne ce sont la Tora et les bonnes œuvres qu'il a 
faites ^ 

Nous retrouvons, naturellement, dans les commentaires des 
textes poétiques les rapprochements coutumiers ; il est intéres- 
sant, et attristant, de voir ce que devient sous un pareil traite- 
ment le magnifique psaume de la création (104). 

« Dieu dans les eaux du ciel et dans les nuées » (3) rappelle les 
nuées de l'Exode. « Les sources envoyées par Dieu » (10) désignent les 
bains rituels ; « les oiseaux du ciel qui nichent sur leurs bords » (12) ce 
sont, ou bien les anges du service (Aqiba), ou bien les nations du siècle. 
« Il fait croître les plantes » (14) le lin qui sert au culte divin. Les cèdres 
du Liban » (16) ont été créés pour la construction du Temple et non 
pour des usages humains. « Là les oiseaux font leurs nids » (17) : ce 
sont les lévites. « Les lionceaux qui rugissent après leur proie » (21 ) 
sont les nations du siècle. « La mer large » (25) est le royaume impie 
d'Edom, ou bien la Tora, à moins que ce ne soit la géhenne... 2. 

De pareilles interprétations, innombrables, n'ont rien à voir 
avec l'allégorisation et très peu avec l'exégèse. 

Dernier effort des commentateurs baggadiques sur les 
textes poétiques : rapporter une affirmation générale à un 

1. Eccl. rabba in loco. Cf. Bâcher, Agada der Palest. Amoràer, III, 
p. 50 (Samuel b. Isaac) et 230 (R. Jona). 

2. Midras des Psaumes, p. 442-446. 



246 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

héros connu : de qui l'auteur parle-t-il? Règle pour l'inter- 
prétation du Psautier : 

R. Juda dit : tout ce que David dit dans son volume, il le dit, soit rela- 
tivement à lui-même, soit relativement à tout Israël, soit relativement 
à tous les temps K 

Le commentaire applique à des personnes les divers versets 
du Psaume : 

(c Qui montera à la montagne de Dieu? » c'est Moïse {Ex. 19, 3). « Qui 
se tiendra dans son lieu saint? » c'est Moïse {Deut. 5, 28). Moïse est 
encore l'homme aux mains innocentes et au cœur pur... Dans les 
paragraphes suivants, tous ces versets (3-5) sont dits d'Abraham, puis 
de Jacob . . . ^. 

Encore un exemple de ces interprétations, celle-ci conçue 
dans une fin apologétique, pour démontrer que les quatre 
rois et les trois particuliers, voués ordinairement à la damna- 
tion, auront part au siècle à venir : 

Ils viendront au siècle à venir, suivant qu'il est dit : « à moi 
Galaad... » {Ps. 60, 9, 10); « à moi Galaad », cela désigne Achab qui 
tomba à Ramôth Galaad; « Manassé », à entendre prout sonat; 
« Ephraïm est l'armure de ma tête », cela désigne Jéroboam qui est 
sorti d'Ephraïm; « Juda mon sceptre », cela désigne Ahitophel qui 
est sorti de Juda ; « Moab le bassin où je me lave », cela désigne 
Gehazi qui fut puni à l'occasion d'un bain; « sur Edom je jette ma 
sandale », cela désigne Doég l'édomite^... 

Inutile de multiplier les paradigmes de cette espèce; les 
rapprochements pratiqués ne se fondent sur aucune analogie 
perceptible : c'est le procédé courant dans tout son arbi- 
traire. 

IV. — CARACTÈRES DE l'eXÉGÈSE PARABOLIQUE. 
LES INTERPRÈTES ALLÉGORIQUES. 

Une première conclusion s'impose : chez les rabbins tan- 
naïtes, les interprétations allégoriques, ou soi-disant telles, 

1. Midras du Ps. p. 135. 

2. Midras du Ps. 24, § 7-9, p. 206, sq. 

3. Cette assertion figure dans la misna Sanhédrin 11 (ou 10), 2. 
Nous transcrivons la gemara babylonienne, 104 b sç. : dans le talmud 
palestinien (10, 2, 29 b), le texte n'est pas attribué aux interprètes des 
resûmôt. Même texte dans Num., rabba 14, 1 sur 7, 48, 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 247 

sont très peu nombreuses, soit absolument si l'on fait leur 
somme, soit relativement si on les compare aux autres formes 
d'interprétation^ . 

Conclusion et constatation plus graves : les exégèses vrai- 
ment allégoriques manifestent un sens allégorique étroit et 
pauvre. 

Pas de grande allégorie, c'est-à-dire d'interprétation con- 
tinue, systématique, poursuivie tout au ,long d'un commen- 
taire et se tenant à un thème unique ; ce déficit ne provient 
pas uniquement de ce que nos midrasim ne sont que des 
compilations réunissant des productions très diverses, il tient 
à la mentalité rabbinique elle-même, peu portée à allégo- 
riser. 

En outre l'allégorisation n'est jamais poussée suffisamment, 
même quand le sujet, comme dans le Cantique, est parti- 
culièrement riche et facile à exploiter. 

Ce qui fait figure d'allégorie se réduit le plus souvent aux 
formes élémentaires de l'allégorie : interprétations métapho- 
riques ou symboliques^. 

En ce genre, le cercle dans lequel se meuvent nos inter- 
prètes est fort resserré ; et les objets auxquels ils appliquent 
les textes sacrés, très peu nombreux et peu propres à exciter 
l'imagination : avant tout la Tora, considérée soit en général, 
soit en quelques prescriptions particulières ou dans son étude, 
la liturgie du Temple, l'histoire d'Israël, quelques directions 
morales. 

Enfin les interprétations que beaucoup disent allégoriques 
ne contiennent, pour la plupart, que des assimilations souvent 
injustifiées, des analogies arbitraires, extrinsèques et artifi- 
cielles ; ou bien encore elles fondent des rapprochements 



1. Il est difficile de chiffrer cette proportion : dans le Siphre sur le 
Deut. nous découvrons environ une exégèse allégorique toutes les 
dix pages; dans le Rabba sur le Gant., elles sont naturellement plus 
abondantes, mais moins que ne le comporterait le sujet. 

2, Heinemann, op. cit. passim ne se lasse pas de montrer que l'exé- 
gèse rabbinique comprend surtout les Vorstufen, les formes élémen- 
taires, les degrés primaires et préparatoires de la véritable 
Allegoristik. 



248 EXÉGÈSE BABBINIQUE. 

sur des exégèses, ordinairement laborieuses et contestables, 
qui fatiguent et suffiraient à mettre en fuite l'esprit poé- 
tique, inhérent et nécessaire au genre allégorique. 

D'où proviennent chez les rabbins cette indigence de l'exé- 
gèse allégorique et cette sorte d'impuissance du sens allégo- 
rique? D'abord et avant tout, de ce que chez eux l'exégèse 
allégorique est, et ne peut être, qu'occasionnelle et exception- 
nelle. Us ne cherchent pas à dégager de la Bible un système 
de sagesse, qui lui est étranger; ils étudient les Livres saints 
uniquement à deux fins : en déduire toutes les prescriptions 
juridiques qu'ils recèlent, justifier les préceptes de la loi orale 
et, secondement, acquérir la science et la connaissance de la 
Parole divine. A cet effet, ils pratiquent une herméneutique 
très développée, habUe et empressée à analyser toutes les 
particularités des textes, à déterminer les rapports entre 
leurs diverses parties, à découvrir la portée et la significa- 
tion des moindres particules. Dans leurs investigations 
exégétiques, l'aUégorisation ne jouera qu'un rôle d'appoint 
fort secondaire; à vrai dire, cette exégèse allégorique se 
ramène aux formes ordinaires de l'exégèse traditionnelle et 
se traite suivant les mêmes procédés : identifications et 
rapprochements, recours à des exégèses auxiliaires, paro- 
nomases, équivalences numériques... 

De l'emploi de ces procédés, de ces abus d'une exégèse 
trop facile et complaisante, provient le caractère superficiel 
et si peu pénétrant de leurs allégories; ces exégètes, si 
accoutumés à se contenter de rapprochements tout extérieurs 
et matériels, comment pourraient-Us s'appliquer à creuser 
des analogies, à établir des rapports plus profonds entre 
des objets concrets et des réalités spirituelles? Ajoutons à 
cela la prédominance croissante de l'esprit juridique : les 
rabbins s'entraînent à découvrir partout des allusions aux 
lois, aux divers objets de ces lois, qui sont l'unique sujet de 
leur étude : tendance qui ne pouvait que paralyser, si elle 
existait déjà, la veine poétique et la faculté d'allégorisation 
qui en provient; dans une histoire d'amour, un juriste ne 
verra guère qu'une matière à contrats, un temps et des 
circonstances où doivent être observées certaines prescriptions 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 249 

légales. N'avons-nous pas une autre illustration de cette 
tendance et de ses effets dessécliants dans les innombrables 
paraboles que contient la littérature rabbinique? Beaucoup 
ont trait aux relations entre Dieu et Israël, son fils ou son 
épouse; mais, au lieu d'insister sur leur amour mutuel, 
la parabole veut uniquement figurer les relations, en quelque 
^orte juridiques, entre le Seigneur et son peuple : la rédemp- 
tion, la protection divine, le don de la Loi, la perversion 
et la pénitence de la nation ... ; et, d'autre part, l'élément 
allégorique se réduit et disparaît presque entièrement pour 
laisser toute la place au genre parabolique plus sec et plus 
extérieur. Quelle diiférence, à cet égard, entre les para- 
boles rabbiniques et les allégories prophétiques sur les 
bontés de Dieu pour Israël et les égarements de cette fiancée 
infidèle ! 

En somme, chez les rabbins des premières générations, 
nous ne découvrons que très peu d'interprétations allégo- 
riqiies, et elles n'ont elles-mêmes qu'une valeur allégorique 
inférieure ; double phénomène qui trouve son explication dans 
les fins et la nature de l'exégèse rabbinique comme dans le 
tour d'esprit des docteurs. Gardons-nous de regarder cette 
absence d'allégorisme comme un déficit; elle préservait, au 
contraire, les rabbins de la tentation de ne voir en certaines 
histoires que des mythes symboliques et en quelques lois 
que des exhortations morales; et, par ailleurs, leur arsenal 
herméneutique leur fournissait tous les instruments néces- 
saires pour scruter le sens des Écritures. 

Il nous reste à déterminer la signification des noms 
appliqués à nos prétendus interprètes allégoriques : dâi'sé 
hamûrôt et dôréé resûmôt. 

Notons d'abord que les deux expressions sont mises souvent 
l'une pour l'autre comme s'il s'agissait d'une unique caté- 
gorie. Nous pouvons voir dans les dôrsé hamûrôt ceux 
qui interprétaient l'Écriture en forme de hômèr; on a attribué 
à ce mot bien des significations : faisceau de perles ou 
de parfums, bouton précieux servant à attacher les vête- 
ments, le mode d'agir (la punition correspond au mode 



250 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

d'agir : Saadia), un calcul, une analogie ^ Il nous semble 
plus sur d'entendre le mot A^mèr en son sens ordinaire : lourd, 
important, par opposition à qal^ léger, moindre. Le sens 
homèr serait le sens plus profond et caché, parfois allégorique 
et symbolique ^. 

Les dôrëé reêûmât sont évidemment ceux qui dégagent la 
signification raktm des textes; le mot peut être entendu en 
deux sens : marque, signe, symbole ^, ou bien chose obscure, 
s'opposant à chose claire et pleinement manifeste ^ Nous pré- 
férons ce second sens ; il semble mieux fondé en lexicogra- 
phie et répondre davantage à la réalité ; ces interprètes sont 
ceux qui dégagent certains sens cachés et extraordinaires, et, 
entre autres, les sens symboliques et allégoriques. 

Les deux expressions auraient donc à peu près le même sens. 
Il nous semble que ces appellations, ainsi comprises, corres- 
pondent aux tendances foncières des exégètes juifs pales- 
tiniens. Ils ne distinguent pas dans les Écritures un corps et 
une âme, un sens littéral et un sens spirituel, ce dernier mani- 
festant une sagesse étrangère. Ils ne voient dans les Écritures 

1. Il faut alors dériver le mot de la racine hmr (avec un hé), ainsi 
Ariich completum, III, p. 218; Perles, dans la Revue des Etudes juives, 
1881, III, p. 109-118; voit ibid., 1910, LX, p. 24-31 (Isr. LÉvi); Biller- 
BECK, Kommentar zum N. T., III, p. 388. 

Bâcher, Terminologie, p. 62 et Die Agada der Tannaiten, I, p. 29 sq. 
penche pour l'objet précieux. 

2. Lauterbach, Ancient allegorists : Jewish quarterly Review, 1910- 
1911, p. 503-511 : exégètes des côtés importants et significatifs de la 
loi. Il les distingue des dôrsé résumât. 

3. C'est le sens que préfère Lauterbach, Jewish quarterly Review, 
1910-1911, p. 291-333, ce qui confirme son titre : The ancient jewish 
Allegorists. 

4. Tandis que rsm à l'actif signifie « marquer » le participe passif 
râsûm a plusieurs fois un sens équivalent à saZwm (bouché) : Mekhilta 
Ex. 17, 8, p. 176 ; « cette écriture est ici râsûm et elle devient claire 
(mephôrâs) par Job »; Baba Mesia 23 b (sur le bouchage des bou- 
teilles); sur Daniel 10, 21, les disciples de Rabbi se demandent com- 
ment une chose peut être à la fois claire (vérité) ou arrêtée et encore 
râsûm [Genèse rahba 81, 2, édit. Theodor, p, 970 et Yehamot palesti- 
nien, xii, 13 a). Cf. KoHUT, Aruch, vu, p. 308; Bâcher, Terminologie, 
p. 183. Rachi (R. oelomo b. Isaac) entend ainsi le mot : sur Pesahim 
53 a, il définit les dôrsé resûmôt : (interprètes) d'écritures bouchées 
(setûmim) ; sur Berakot 24 a : liées et bouchées. Lauterbach, art. cité : 
râsûm signifie : chose à interpréter, et non : obscur. 



EXÉGÈSE PARABOLIQUE. 251 

sacrées qu'un sens et contenu unique, qui est Dieu, Israël, son 
histoire et les institutions théocratiques ; ces objets peuvent 
être exprimés par tous les mots inspirés : l'art des exégètes 
supérieurs consiste à dégager ces significations à l'aide, soit 
de rapprochements subtUs et difficilement perceptibles, soit 
d'interprétations ingénieuses, soit de traditions exégétiques. 



CHAPITRE VI 

GONCIiUSION 

PRINCIPAUX CARACTÈRES DE L EXÉGÈSE RABRINIQUE. 

Le Judaïsme est la Religion de la Tora, comportant pour la 
Loi divine un culte savant et pieux : de cette propriété fonda- 
mentale dérivent tous les caractères de l'exégèse juive. 

Cependant la Tora est double : la Tora écrite et la Tora orale. 
En principe ces « deux tranchants de l'unique glaive divin » 
auraient droit à la même autorité, en fait une incontestable 
primauté est reconnue à la Loi écrite, tout entière Parole de 
Dieu, renfermant à elle seule le dépôt complet delà Révélation ; 
aux sentences de la dictée diviue doivent pouvoir se ramener 
les stipulations de la Loi orale, promulguée dans le temps 
par les Rabbins. 

De là les deux directions que suit l'exégèse juive : suivant 
une de ces voies, probablement la plus primitive, elle se livre 
à l'étude directe et désintéressée du texte sacré afin d'en 
dégager la signification ; dans l'autre voie elle s'applique à 
justifier la Loi orale en la déduisant de la Bible ou en l'y 
rattachant par des procédés dialectiques. Inévitables étaient le 
mélange et la confusion des deux genres ; l'exploitation juri- 
dique s'introduit dans l'interprétation pratiquée pour elle- 
même et ceUe-ci se laisse souvent influencer par les traditions 
halakhiques ou haggadiques courantes. 

On peut dire également en gros que c'est de cette double 
fin, de cette double visée, interprétation désintéressée et 
exploitation juridique, que découlent les qualités et les défauts 
de l'exégèse rabbinique, les qualités se rattachant plutôt à 
la fin désintéressée, à l'exégèse pure, les défauts provenant 
en grande partie de la fin intéressée, de l'exégèse tendant à 
justifier la Loi. Ne convient-il pas de rappeler ici les diffé- 



PRINCIPAUX CARACTÈRES DE l'exÉGÈSE RABBOIQUE. 253 

rences qui distinguent et opposent l'histoire pure et l'histoire 
adprobandum? 

Avant d'exposer les propriétés de l'exégèse rabbinique, 
notons qu'elle se manifeste sous deux formes, l'une directe, 
l'autre indirecte, la première prenant la forme d'une inter- 
prétation, la seconde se contentant de citer un texte biblique, 
en confirmation d'une affirmation juridique, religieuse, 
morale ou historique. C'est cette forme indirecte qui est la 
plus fréquente, la plus abondamment pratiquée, celle que 
nous rencontrons presque toujours dans les Talmuds. Nous 
avons déjà observé que ces références au texte sacré (« sui- 
vant qu'il est dit ») prennent rarement la valeur d'un véri- 
table argument scripturaire ; le plus souvent nous n'y décou- 
vrons qu'un confîrmatur verbal, l'expression hiératique d'une 
pensée déjà établie par ailleurs, une vague allusion, utilisant 
les saintes Lettres dans un sens nettement accommodatice. 

Dans la mesure où ces citations comportent un véritable 
argument, elles supposent une exégèse, évidemment celle-là 
même que présentent, mais clairement définie, les interpréta- 
tions directes et expresses. Il est naturel que ces exégèses 
iûdirectes et équivalentes accusent beaucoup plus volontiers 
la tendance à s'évader du sens littéral, à solliciter le texte en 
vue de la thèse à démontrer, à se permettre toutes les libertés 
à l'égard d'une Écriture, réduite au rang d'un simple moyen 
d'expression littéraire, d'artifice rhétorique. 

Les qualités et défauts qui affectent l'exégèse rabbinique 
s'expliquent encore par l'éducation que recevaient les rabbins, 
par les dispositions qu'exigeaient leurs activités diverses. Ces 
qualités et défauts, nous les ramenons à trois; d'abord et 
avant tout, pénétration profonde de la lettre sacrée par un 
interprète sagace et croyant ; faculté juridique fort déliée du 
juriste; fonction fabulatrice très inventive du prédicateur 
populaire, de l'haggadiste. Il convient d'exposer séparément 
et successivement les manifestations de ces qualités et défauts, 
sans oublier toutefois que souvent ils jouent de concert pour 
j)roduire un résultat d'ensemble. 

Pénétration profonde de la lettre sacrée par un intei^ 
prête sagace et croyant. 



254 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

Ce don s'enracine dans une foi consciente et convaincue en 
la nature divine des Écritures : œuvre de Dieu, prononcées 
par son Esprit Saint, toutes ces paroles sont vérité ; non seule- 
ment elles excluent toute erreur ou contradiction interne, 
mais encore chacune d'elles est riche d'enseignements, de 
prophéties et de symboles. Contrepartie de cette conviction, 
l'inclination à prendre isolément chaque sentence, à la traiter 
comme un oracle divin qui se suffît à lui-même, indépendam- 
ment de son contexte. 

Conséquence immédiate de ce culte pour la Bible, le devoir 
de l'étudier. Ce devoir primordial, les pieux Israélites le rem- 
plissent avec joie. Ils ne se contentent pas des lectures scriptu- 
raires faites dans les synagogues : au foyer domestique ils se 
plaisent à lire les Écritures ; les entendre commenter par les 
docteurs est leur plus consolante récréation. 

Il s'ensuit, principalement chbz les lettrés, cette connais- 
sance familière, vivante, approfondie, précise et minutieuse, 
que vaut le commerce assidu, pieux, d'un texte aimé. La répé- 
tition inlassable des mêmes livres, la nécessité de suppléer 
par la mémoire au défaut des manuscrits, valent à beaucoup 
de savoir par cœur de nombreux et longs passages des Écri- 
tures. Indéfiniment redites, quotidiennement rabâchées, les 
phrases sacrées s'incorporent à la substance de l'esprit, 
modèlent les conceptions courantes, enrichissent le vocabu- 
laire usuel. Alors comme aujourd'hui se rencontraient abon- 
damment ces rabbins qui apparaissent comme des concor- 
dances vivantes et articulées : une maxime bibHque réveille 
automatiquement le souvenir de toutes les autres sentences 
contenant les mêmes mots ou exprimant les mêmes idées, ce 
qui permet des rapprochements lumineux et instructifs. Par 
ailleurs à écouter les leçons d'un maître érudit eV tradition- 
nel, on est informé des traditions exégétiques qui recèlent le 
sens authentique des Écritures, mais infecté aussi, par contre, 
d'opinions et de préjugés reçus et admis dans les écoles. 

Ces études scripturaires ne se bornent pas à l'intelligence 
nue des textes, à l'établissement d'une traduction en langue 
vulgaire. Les docteurs, entraînés et assouplis par leurs dis- 
cussions juridiques, apportent à scruter (Ipauvav) les Écritures 



SES PRINCIPAUX CARACTERES. 255 



leur curiosité insatiable, leur souplesse dialectique, leur péné- 
tration subtile de casuistes. Ils s'impatientent de ne pas 
déchiffrer la moindre des significations que peut revêtir un 
mot ou une proposition; ils s'acharnent à rechercher et peser 
toutes les difficultés, historiques, morales, doctrinales qu'op- 
pose une phrase. 

Ces efforts aboutissent à une connaissance de la Bible, éten- 
due et fort substantielle. 

Ancêtres et précurseurs des Massorètes, les rabbins anciens 
possèdent une science solide et judicieuse de la « Lettre ». 

Le texte dont ils se servent n'est pas un texte quelconque, 
mais un texte fixé par la tradition, même dans ses éléments 
non-écrits, telles la prononciation et la ponctuation. Diverses 
conjectures textuelles, telles leçons proposées, le choix entre 
les variantes connues, dénotent un sens critique judicieux. Des 
analyses pénétrantes du texte, des remarques pertinentes sur 
le rôle que jouent ses diverses parties, sur les interversions 
qu'ont subies certaines autres, témoignent d'une étude intel- 
hgente et fort attentive. Le plus ordinairement ils transcrivent 
scrupuleusement le texte reçu; quand ils joignent ensembles 
dans leui's références, plusieurs sentences ils ne manquent, 
pas de le signaler par une conjonction. 

Pour l'intelligence de la Lettre ils mettent en œuvre les 
sciences auxiliaires dont se servent les interprètes modernes. 

Les rabbins anciens auraient pu dresser ce lexique, VAruck 
de Nathan b. Yechiel, qui est au point de départ de nos dic- 
tionnaires modernes. L'usage de l'hébreu comme langue sco- 
lastique, la pratique de l'araméen, un commerce constant et 
familier avec les Écritures, provoquant aux rapprochements 
révélateurs, la science des traditions lexicographiques, un 
sens congénital et très affiné de la langue bibhque, leur 
permettaient de déterminer avec précision le sens exact des 
mots, de définir les nuances de Sens qui séparent des vocables 
à peu près synonymes, la distinction entre le sens littéral 
d'un terme et son sens métaphorique; tout cela, bien entendu, 
nonobstant les gaucheries et les naïvetés que comporte toute 
science dans sa période d'enfance ; étymologies puériles, subs- 
tituer au sens primitif d'un terme son sens moderne. . . 



256 EXÉGÈSE RABBXNIQUE. 

Les rabbins anciens connaissent également la grammaire 
de l'hébreu biblique, non point avec cet appareil et cette 
phraséologie scientifiques dont s'enorgueillissent les moder- 
nes, mais d'une manière empirique, vivante et pratique. Cette 
science leur venait de leur usage quotidien de l'hébreu et des 
langues-sœurs, des traditions qui se transmettaient dans les 
écoles, d'un sens héréditaire du génie de leur langue natio- 
nale... Cette science grammaticale est attestée par diverses, 
manifestations : une analyse grammaticale et logique du dis- 
cours, supposant la connaissance exacte de la valeur des par- 
ticules et des formes verbales, en bref de la morphologie et 
de la syntaxe; un sens très averti du style biblique... 

Ainsi équipés, les rabbins se mettent à l'interprétation du 
texte : en plus de leurs dons philologiques, ils y apportent la 
sagacité du juriste qui ne veut laisser inexploité aucun terme 
d'une loi. Ils recherchent donc tous les sens que peut receler 
une phrase, ils s'interrogent sur la raison d'être de chaque 
élément du discours et du rôle qu'il remplit, sur les progres- 
sions de la pensée, sur la portée juridique, doctrinale ou histo- 
rique d'une assertion. Ils sont attentifs à tirer parti de toutes 
les singularités matérielles du texte. Philologues et juristes, 
ils tiennent souvent compte du contexte. Nous articulerons 
tout à l'heure les travers de cette exégèse ; nous pouvons dès 
maintenant conjecturer qu'elle sacrifiera à un culte exagéré 
de la lettre, au littéralisme. 

C'est le juriste plus que le philologue qui applique la 
méthode dialectique à l'interprétation des textes : méthode 
légitime et féconde tant qu'elle se borne à dégager la dia- 
lectique de l'auteur expliqué, tant qu'elle demeure intrinsèque 
au texte ; méthode rapidement exorbitante et ne pouvant que 
conduire à de fausses exégèses dès qu'elle devient extrinsèque, 
introduisant dans le texte des argumentations qu'il ne com- 
prend ni ne suppose; nous pouvons penser que les rabbins, 
juristes de tempérament, n'ont pas manqué de succomber à ce 
défaut. Néanmoins, l'emploi combiné des deux méthodes, 
philologique et juridique, leur a permis en bien des cas de 
définir toutes les applications juridiques d'une loi biblique, de 
dégager la physionomie vraie de l'histoire sainte, d'en resti- 



SES PRINCIPAUX CARACTÈRES. 257 

tuer souvent la chronologie exacte, de résoudre les apparentes 
contradictions qui opposent entre elles certaines énonciations, 
d'établir des statistiques historiques; tout cela, évidem- 
ment, compte-tenu du défaut de rigueur et de l'habituelle 
négligence de la couleur locale, défaut commun à tous les 
historiens anciens. 

Après les qualités, les défauts; nous les ramenons tous à 
.ces deux travers : une excessive faculté dialectique, qui est 
le pi?opre du juriste et du casuiste (la part de la halakha) ; 
une fonction fabulatrice exubérante^ qui sert avantageuse- 
ment au prédicateur populaire (la part de la haggada). Ces 
deux travers, produisant soit un culte idolâtrique de la lettre, 
soit une liberté illimitée à son égard, exercent leurs effets, 
ou séparément, ou souvent aussi de conserve. 

Le résultat le plus marqué est certainement un littéralisme 
parfois ridicule et inintelligent : dans une déduction juridique 
ou dans un jugement historique prendre une expression en 
sa signification la plus étroite, sans tenir compte du contexte 
m des circonstances; accorder à une particule donnée la 
même portée invariable, inclusive ou exclusive; traiter une 
phrase isolée de son contexte comme un oracle divin ou 
comme un précepte singulier, tel un article de code ; prendre 
à la lettre une expression évidemment métaphorique ; l'exé- 
gèse qui confine au calembour, l'abus du sens accommoda- 
tice, sont les derniers fruits du littéralisme. 

Licences à fin intéressée : modifier arbitrairement le texte, 
soit dans ses termes, soit dans son orthographe ou sa ponctua- 
tion, afin d'en tirer la conclusion juridique ou haggadique 
souhaitée ; ajouter aux déclarations bibliques telle précision, 
tel complément, suggérés par les traditions courantes en hala- 
kha ou en haggada; modifier le sens d'un terme en vue 
d'une thèse à démontrer ou à justifier; prêter à l'auteur 
sacré les arguments élaborés par les créateurs de la Loi 
orale ; instituer entre les affirmations ou les faits bibliques des 
analogies, des rapprochements tout mécaniques et artificiels, 
afin de pouvoir conclure à des identifications gratuites : ce 
travers exerce sa malfaisance principalement dans les exégèses 
distributives, qui consistent à découvrir dans les différentes 

EXÉGÈSE RABBINIQUE. 9 



258 EXÉGÈSE UABBINIQUE. 

parties d'un texte des références à des- réalités spirituelles, 
parfois absolument étrangères au texte. 

Les excès de la faculté dialectique et les déviations de 
l'esprit juridique conduisent aux résultats suivants : par- 
ticulièrement et par-dessus tout introduire dans le com- 
mentaire des raisonnements extrinsèques au texte, substituer 
ainsi à l'exégèse une dissertation juridique; d'autant que 
souvent ces argumentations, se greffant sur un élément 
matériel du texte, ne se basent que sur un fondement tout 
verbal : par ailleurs ces considérations laborieuses apparais- 
sent fréquemment inutiles, jeu de dialecticien qui se donne' 
le plaisir de démontrer pesamment des principes évidents, 
d'enfoncer suivant toutes les règles des portes ouvertes : tous 
procédés qui entraînent subtilités et ergotages infinis sur 
une lettre ou un trait. Le ressort commun à la plupart de 
ces argumentations est l'analogie, voie plus ouverte que tout 
autre à l'arbitraire et à la fantaisie; les rapprocbements, base 
de l'analogie, sont souvent factices et gratuits ; on se permet 
de rapprocher l'une de l'autre les espèces les plus disparates, 
de voir tout en tout, de dire équivalentes toutes les réalités qu'il 
plait de comparer. De ce biais on est amené à fonder une 
prescription juridique sur la conduite d'un personnage histo- 
rique, à ériger en principe et cas-type [binyân âb) une articu- 
lation quelconque de l'Écriture, à se contenter pour étayer 
une affirmation d'une simple allusion, d'une légère indication 
[zèkèr, rèmèz)^ à arguer de la section voisine {semûkhîm). 
Il est inévitable, surtout dans les exégèses référentielles, de 
remplacer l'argument scripturaire par une citation plus ou 
moins adéquate, ne comportant avec l'affirmation à démon- 
trer qu'une association purement verbale, voire moins appa- 
rente encore. 

A la fonction fabulatrice, aux développements haggadiques 
nous rattachons les broderies luxuriantes appliquées sur les 
narrations bibliques, les inventions historiques destinées à 
expliquer ou à embeUir l'histoire de tel personnage, les 
efforts méritoires en vue d'édulcorer un récit peu édifiant ou 
de blanchir tel héros Israélite ; l'habitude de donner un nom 
aux personnages anonymes, de voir dans une maxime morale 



SES PRINCIPAUX CARACTÈRES. 259 

l'éloge d'un saint personnage, surtout de Moïse et Abraham ; 
les libertés chronologiques, ou autres, en vue d'éliminer une 
contradiction; l'élaboration d'étymologies fantaisistes, sinon 
grotesques. Il est étrange, en effet, de constater que l'exégèse 
rabbinique ne recule pas devant le caractère bizarre, ridicule 
ou choquant de certaines inventions, surtout quand elles 
paraissent se fonder sur une base philologique, particularité 
du texte, singularité grammaticale, emploi d'une particule 
limitative ou ampliative. 

Ce sont, nous semble-t-il, ces défauts et qualités qui expli- 
quent la place restreinte que tient l'allégorisation dans l'exé- 
gèse juive et la forme qu'elle y revêt. D'une part, le littéralisme 
interdisait d'interpréter allégoriquement des textes juridiques, 
historiques ou gnomiques; d'autre part, là où un écrit allé- 
gorique ou bien un développement allégorique appelait l'exé- 
gèse allégorique, l'abus ordinaire de l'analogie, la tendance à 
retrouver partout l'indication des grandes réalités spirituelles 
de la religion Israélite, poussaient à délaisser les longues 
allégorisations, et à découvrir en tout élément symbolique 
la représentation de la Loi, du Temple, de Moïse, de l'al- 
liance... ; au surplus cette dernière tendance amène à décou- 
vrir en toute énonciation, même la plus dénuée de symbo- 
lisme, et en toute chose, la désignation voilée de ces grandes 
réalités : procédé qui peut donner l'illusion de l'allégorisation 
habituelle et de parti-pris. 

Au terme de cette conclusion quel jugement d'ensemble 
porter sur l'exégèse rabbinique? Nous croyons qu'elle met en 
œuvre les méthodes excellentes auxquelles recourent encore 
les meilleurs exégètes, qu'elle professe des principes très sûrs 
et que, par cette voie, elle est parvenue à des résulats appré- 
ciables et qui auront toujours valeur. Malheureusement, en 
bien des cas, méthodes et principes ont été mis en échec 
par les travers de l'esprit rabbinique, littéralisme, asservis- 
sement à la Loi orale, abus de la Haggada. Malgré tout on 
ne lira jamais sans profit les commentaires rabbiniques, tout 
particulièrement ceux des tannas, que déparent beaucoup 
moins les tares que nous venons de relever. 



DEUXIÈME PARTIE 



r X 



L'EXEGESE BIBLIQUE DE SAINT PAUL 



AYERTISSEMENT 



L'objet précis de cette partie n'est pas d'étudier tout ce qui 
concerne S. Paul dans ses rapports avec l'Ancien Testament, 
sujet très vaste qui a donné lieu à de nombreux travaux; elle 
se borne à considérer les différents usages que l'Apôtre fait 
des Écritures juives, à déterminer et apprécier les procédés 
exégétiques auxquels il recourt explicitement ou que suppo- 
sent ses utilisations de la Bible. 

Nous nous proposons aussi de répondre à la question : dans 
son exégèse Paul se montre-t-il, et dans quelle mesure, un 
vrai disciple de Gamaliel, plié et asservi aux méthodes rabbi- 
niques? A cette question bien rares ceux qui répondent néga- 
tivement, et c'est en pleine opposition à l'opinion courante 
que Kaufmann Kohler écrivait : <( Il faut n'avoir aucune fami- 
liarité avec la théologie rabbinique, — comme il arrive à la 
plupart des écrivains chrétiens, — pour trouver dans les écrits 
de Paul des traces de son passage dans les écoles rabbini- 
ques \ » Un autre savant juif, Klausner, déclare à plusieurs 
reprises que Paul interprétait l'Écriture suivant la méthode 
rabbinique typique, qu'il recourait au pilpul talmudique pour 
des fins antitalmudiques^. Les auteurs chrétiens volontiers 
parlent du rabbin Paul, et ils qualifient de rabbiniques nombre 
de ses méthodes dialectiques et exégétiques^. 

De notre côté nous ne voulons avancer notre solution du 



1. The Origins of Synagogue and Church, New York, 1929, p. :261. 

2. Historia israélit. Jérusalem. 1925, IV, p. 78, 96, (paragraphe 
sur l'exégèse de Paul), 102 (Paul rabbin). 

3. Relevons une note plus discrète chez M. Venard : il déclare qu'il 
« ne faut pas exagérer les ressemblances entre la forme de l'exégèse 
des écrivains du Nouveau Testament et certains procédés rabbini^ 
ques... » (Citations de l'A. T. dans le N. T., Dictionnaire delà Bible, 
Supplément. II, c. 48.) 



264 EXÉGÈSE RABBINIQUE. 

problème qu'après un examen attentif des procédés exégé- 
tiques employés par S. Paul et de son vocabulaire technique. 
Cependant, nous ne pouvons juger à leur valeur exacte ses 
méthodes herméneutiques et en estimer tout le bien-fondé 
qu'après avoir réalisé les conceptions que l'Apôtre se fait de 
l'Écriture et du message qu'elle contient. 

Bien entendu, nous faisons porter notre étude, non seule- 
ment sur les épitres dont certains critiques radicaux rejettent 
l'authenticité, telles les épltres pastorales etl'épitre auxÉphé- 
siens, mais aussi sur l'épitre aux Hébreux. Suivant les direc- 
tions que nous intime un décret de la Commission biblique 
(24 juin 1914)\ nous constaterons qu'en cette dernière épltre 
« la façon de citer l'Ancien Testament et d'en tirer argu- 
ment ne s'oppose pas à une origiae paulinienne. . . , mais qu'elle 
suggère que l'Apôtre Paul n'a pas donné à cette lettre sa 
forme actuelle ». 

QUELQUES INDICATIONS BIBLIOGRAPHIQUES. 

(Le sujet ayant été abondamment traité, nous ne donnons 
ici que les indications utiles et nous ne mentionnons que les 
ouvrages récents.) 

A. E. Kautzsch, De Veteris Testamenti locis a Paulo apostolo alle- 
gatis Leipzig, 1869. 

J. Monnet, Les citations de VA. T. dans les êpîtres de S. Paul, Lau- 
sanne, 1874. 

BoEHL, Diealttestamentlichen Citaten in N. T. Wien, 1878. 

G. ToY, Quotations in the N. T. New York. 1884. 

A. Clemen, Der Gebrauch des A. T. in den N. T. Schrifen, Gutersloh. 
1895. 

H. VoLLMER, Die alttestamentlichen Citatebei Paulus, Leipzig. 1895. 

Johnson, the Quotations of the N. T. from the Old, Philadelphia, 1896. 

Glemen. op. cit. p. 158. « Chez Paul, qui avait reçu une éducation 
rabbinique et qui disposait de si grandes facultés dialectiques et spé- 
culatives on peut s'attendre à voir plus largement (que dans le reste 
du N. T.) utililisé l'A. T. ». Un des derniers à étudier la question. 
PuuKKO, Paulus und das Judentum, 1928, p. 29, sqq., 86, affirme avec 
insistance le rabbinisme de l'Apôtre. 

1. F. Gavallera, Thésaurus doctrinae cathoUcae, 2« édit., Paris, 1936, 
p. 68. 



EXÉGÈSE PAULINIENNE. 265 

P. w. E. HtiEHN, Die altlestamentlichen Citate und Reminiscenzen in 
iV. T. Tiibingen, 1900. 

"W. DiTTMAR, Velus Testamentum in Novo, Gôttingen, 1903. 

A. von Harnack, Das A. T. in den paulinischen Brie f en und in den 
paulinischen Gemeinden, Sitzungsberichte der Preus. Akademie der 
Wissenschaften, 1928; p. 124, sqq. 

Michel, Paulus und seine Bibel, Gutersloh, 1929. 

A. F. PuuKKO, Paulus und das Judentum, Helsinki, Societas orienta- 
lis Fennica, Studia orientalia, II, 1928, p. 1-87. 

Hans WiNDiscH, Paulus und das Judentum, Stuttgart, 1935. 

L. Venard, Citations de l'A. T. dans le N. T. : Supplément au Dic- 
tionnaire de la Bible, II, c. 23-51, Paris, 1934. 

H. B. SwEHEjntroduction to the 0. oT. in Greek, p. 381-405, Cambridge, 
1900. 

W. Sanday-A. C. Headlam, the Epistle to the Romans, Edinburgh, 1900, 
p. 302-307 (St Paul's use of the Old Testament). 

B. F. Westcott, The epistle to the ffebrews , London, 1903, p. 471-497 
(on the use of 0. T. in the Epistle). 

M.-J. Lagrange, Saint Paul, épître aux Romains, Paris. 1918, p. lxix- 
Lxxvm (le thème positif de l'épître et l'argumentation). 

E.-B. Allô, Saint Paul, Première èpitre aux Corinthiens, Paris, 1935 
p. Lxxii-Lxxiv (citations et réminiscences de l'A. T.). 

F- Prat, Théologie de S. Paul (7° édit.) Paris, 1920, I, p. 486-492, 
1555, sq. 

H. L. STRACat und Paul Billerbeck, Kommentar zum Neuen Testa- 
ment aus Talmud und Midrasch, III, Miinchen, 1926. 



CHAPITRE I 



CONCEPTIONS DE SAINT PAUL SUR l'aNCIEN TESTAMENT. 



Saul, se faisant chrétien, n'avait pas à exorciser les croyances 
juives traditionnelles et fondamentales, basées sur la révé- 
lation divine ; il lui suffisait demies purifier des gauchissements 
qu'elles avaient pu subir, de les éclairer par la lumière de sa 
nouvelle foi, de les sublimer en les intégrant dans la pléni- 
tude du mystère chrétien. Ainsi de son culte pour la Parole de 
Dieu, pour ces Écritures saintes, dont il était tout imprégné et 
qui lui avaient procuré un premier et authentique « accès » à 
Dieu. Tout au contraire, la vertu d'édification des Livres 
saints et leur autorité se trouvent renforcées^ puisque le voile 
est enlevé qui empêchait d'en pénétrer la signification 
plénière\ Bien plus, illuminés par le Christ et par l'Esprit,^ 
les chrétiens s'ouvrent à une intelligence de la Bible, fermée 
aux Juifs. 

A cette conception chrétienne de l'Ancien Testament la 
conception juive de Paul et ses habitudes bibliques doivent se 
subordonner et s'incorporer, déterminant une conception par- 
ticulière, une attitude singulière, à la fois juive et chrétienne, 
mais moins juive que chrétienne. Cette conception singulière, 
nous la connaissons tant par les déclarations explicites de 
l'Apôtre que par sa pratique. Elle dépend des idées qu'il 
professe sur Israël et sur son rapport au Christ et à l'Église. 

Il est d'abord convaincu que les chrétiens sont, non les suc- 
cesseurs ou les héritiers des Israélites, mais le véritable Israël, 
l'Israël de Dieu [Galates^ 6, 16), l'Israël suivant l'esprit (1 Cor. 



1. Remarque très juste d'A. von Harnack : dasAlte Testament in den 
pauliniscJien Briefen und in den paulinischen Gemeinden, Sitzungsbe- 
frichte der Preussischen Akademie der Wissenschaften, Berlin, 1928, 
p. 124. 

O. Michel, Pnulus und seine Bibel, Gilterslo/i, 1929, p. 129. 



EXÉGÈSE PAULINIENNE. 267 

10, 18; Rom. 9, 6); à l'Église revient donc la légitime pro- 
priété des biens divins impérissables, détenus jusqu'alors par 
la Synagogue : avant tout les Livres saints. D'où la coutume, 
d'abord de laisser aux mains des chrétiens venus du Judaïsme 
la Bible, mais aussi de la remettre aux convertis du Paganisme, 
comme un instrument d'édification et d'instruction. Sinon, 
comment comprendre qu'en des communautés, ne comptant 
qu'une minorité de Juifs, à Gorinthe, en Galatie, à Rome. 
Paul fasse appel dans son argumentation, portant cependant 
sur des sujets exclusivement chrétiens, à des preuves scrip- 
turaires ^ ? Par ce moyen également la nouvelle religion, ne 
possédant encore que la parole transmise oralement du Maître, 
pouvait faire état d'une collection d'oracles divins, d'archives 
vénérables, remontant à une antiquité insondable; les écrits 
des Pères apo&toKques attestent que l'Église primitive, même 
munie du Nouveau Testament, ne consentit pas à reléguer 
dans un respectueux oubli le trésor des Écritures anciennes et 
à ne plus les utiliser. 

Autre conséquence pratique de cette unité du peuple de 
Dieu : les paroles que Dieu lui adresse^ si elles ne sont pas 
accomplies dans l'histoire ancienne, visent les chrétiens et en 
eux se réahseront [Héb. 4, 8, 9). 

Bien plus, c'est dans l'Église que les oracles divins parvien- 
nent à leur parfait accomplissement. En effet la promesse faite 
à Abraham, Vè'izo^-^ysXioc, qui est au principe de l'interférence 
historique du surnaturel dans le monde, ne se réalise vrai- 
ment qu'en Jésus-Christ et dans les chrétiens qui composent 
soncorps(Ac^e5,13, 32; 26, 6; G«/.3, 16, 22; 4,28; H^eô. 9, 
15). Sans doute Israël a part à la promesse (iîom. 4, 16; 9, 8; 
Eph. 2, 12) et on peut le dire en une certaine mesure son 
détenteur [Rom. 9, 4). Toutefois la Loi apparaît comme un 
rétrécissement de la promesse, presque comme son antago- 
niste, parce qu'elle en compromet l'accomplissement complet et 
universel (G«/. 3, 17, 18, 21 ; Rom. 4, 13, 14). Dans l'ère de la 

1. O. Michel, op. laud. p. 5, sqq., 114-134, prouve contre Harnack que 
Paul s'est servi de l'Ancien Testament même dans ses missions auprès 
des Gentils, qu'il a communiqué à ceux-ci son culte pour la Bible et 
les a accoutumés à y découvrir des preuves de leur foi chrétienne. 



268 EXÉGÈSE PAULINIENNE, 

promesse l'histoire d'Israël prend donc la forme d'une période 
intermédiaire et préparatoire. La Loi n'est pas une fin en 
elle-même; dans le Christ elle parvient à son terme, à celui 
qui met fin à cette disposition transitoire parce qu'il en est 
le but {Rom. 10, k) et parce qu'il accompMt ce qu'elle était 
impuissante à produire [Rom. 8, 3 ; 3, 31). Pédagogue chargé 
de conduire des enfants mineurs au Christ {Gai. 3, 24, 25) 
tout entière orientée vers lui, la Loi et son économie, l'an- 
cienne alliance, ne deviennent intelligibles que dans la 
mesure où elles sont référées à leur centre d'attraction, au 
stade de leur consommation. 

Les jugeant suivant ces principes, le juif, devenu chrétien, 
déchiifre dans son histoire sainte et dans ses Écritures sacrées 
un sens nouveau qui dissipe quantité de ténèbres énigmatil 
ques. Dans l'histoire du peuple élu un croyant comme Pau- 
adorait à tous les instants l'intervention miraculeuse d'un 
Père veillant sur ses fils : il y reconnaît maintenant une autre 
intervention paternelle, il y voit à l'œuvre le Dieu tout-puis- 
sant préparant l'avènement en chair de son Fils, Jésus-Christ. 

Contemplées dans cette perspective, l'histoire et les institu- 
tions juives revêtent une tout autre couleur. La lumière dans 
laquelle on avait coutume de les voir se modifie de manière 
à mettre en relief les lignes essentielles de toutes les réalités 
passées et à dégager leur valeur substantielle. Histoire et 
institutions anciennes a]3paraissent comme des ombres portées 
produites par le Christ et par son économie {Col. 2, 17) : elles 
sont donc déjà une première manifestation de toutes ces grâces 
surnaturelles;, et, quoique reléguées au rôle de reflet, elles 
n'en sont pas pour autant mutilées et dépouillées de toute 
consistance propre, mais, au contraire, elles sont comme 
ennoblies et promues à une dignité supérieure ; elles devien- 
nent l'expression et le gage des mystères divins qu'elles 
préparent ^ . 

1. Dans l'épître aux Hébreux (10, 1) axfa a aussi ce même sens : les 
« biens futurs », dont les institutions mosaïques sont l'ombre, désignent 
les actes divers du drame rédempteur, mais envisagés dans le passé, 
du point de vue des Juifs. La précision suivante ajoute une nuance péjo- 
rative : l'ombre est une reproduction de la réalité inférieure à l'image. 



EXÉGÈSE PAULINIENNE. 269 

Expression et notion analogues : celles du « type », delà 
« figure ». Typos désigne d'abord l'empreinte laissée par un 
corps, une figure dessinée, un modèle qu'on doit ou peut 
imiter. S. Paul emploie le mot dans une acception particulière. 
Après avoir rappelé quelques faits de l'histoire des Hébreux, 
il ajoute : « Or, ces choses sont devenues des types (qui se 
rapportent) à nous, pour que nous n'ayons pas de convoitise 
des choses mauvaises^ à la façon dont ceux-ci convoitèrent. . . 
Or, toutes ces choses arrivaient à ceux-là en événements typi- 
ques, mais ont été écrites pour éveiller notre attention, 
nous sur qui les accomplissements des âges sont arrivés ^ . » 
S. Paul distingue deux périodes dans la série des siècles : 
l'histoire d'Israël puis les temps chrétiens, qui sont l'âge de la 
consommation messianique, le nouvel éon, et à ce titre la fin 
des temps, l'âge du monde dernier et définitif. Hommes et 
choses de la première période correspondent à ceux de la 
seconde, comme leur projection décolorée et réduite, comme 
leur préfiguration, comme les présages s'ordonnant aux 
accomphssements. Qui possède cette clé peut déjà deviner 
dans les ébauches de l'Ancien Testament les figures plus riches 
du Nouveau, fortifier ainsi sa foi chrétienne de tous les appels 
de son espérance juive. Cette lecture du palimpseste biblique 
n'est accessible qu'aux chrétiens, à ceux qui ont dépassé le 
stade des ombres, qui vivent en la saison des épanouisse- 
ments. Mais ne peut-on conjecturer que les Juifs croyants 
étaient acheminés déjà par ces ombres vers les réalités 
qu'elles attestaient et révélaient? 

Dans ses épltres S. Paul ne commente que quelques-uns de 
ces types. Le plus saisissant, le plus instructif est celui d'Adam, 
le « type de celui qui doit venir » [Rom. 5, 14.), à savoir le 
Christ. La considération de la correspondance et de l'opposi- 



Dans Héb. 8, 5, intervient une autre idée et un autre système : la litur- 
gie mosaïque est une imag-e, une représentation figurative de la litur- 
gie céleste (cf. 9, 23, 24). 

1. 1 Cor. 10, 6, 11. Traduction du P. Allô dans son Commentaire, 
Paris, 1935, p. 233, 234, sq. Nous exploitons ses explications relatives 
au typos. Même sens aussi dans laTtapaSoXT} d'Héb. 9, 9; et 6toS£lyh-« de 



270 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

tion signalée entre les deux figures nous éclaire sur la concep- 
tion typologique de l'Apôtre. Parallélisme par ressemblance 
entre les deux Adam : tous deux sont à leur façon des chefs 
de l'humanité, tous deux ont reçu de Dieu la prérogative de 
déterminer la destinée de leur lignée, tous deux impriment 
leur image en leur descendance. Mais aussi parallélisme par 
antithèse : le type est déficient, inférieur; ses fautes avec les 
ruines qu'elle entraine appellent l'intervention réparatrice de 
son antitype {Rom. 5, 12-21 ; 1 Cor, 15, 45-49). Autre propriété 
de l'antitype ou du prototype, c'est qu'il est l'expression la 
plus haute et la plus parfaite de l'espèce dont il est le som- 
met : il est l'exemplaire suprême dont les analogues ne pré- 
sentent que des approximations de plus en plus dégradées. 

Ceci est beaucoup plus énergiquement marqué dans l'épitre 
aux Hébreux qui met en jeu, comme nous le verrous, une 
typologie plus complexe. Non seulement Israël est une ombre 
de l'économie chrétienne, mais sa liturgie est une image 
appauvrie de la liturgie céleste et même, tout comme le 
repos promis aux élus est analogue au repos dont jouit 
Dieu, les divers actes du salut correspondent aux actes et aux 
attributs divins ^ Cela constitue une riche typologie à plusieurs 
degrés qui peut supporter une opulente doctrine ^. 

Conséquence de ces sens voilés que recèlent certains élé- 
ments de l'économie ancienne, celle-ci comporte de ce fait 
des mystères, soit des « vérités ou des choses précédemment 
cachées » et qui requièrent, pour être comprises, l'intervention 
d'un voyant qui les révèle ; ainsi l'union matrimoniale dont 
la Genèse livre la formule : cette « union de l'homme et de la 
femme dans le mariage, telle que Dieu l'a établie, est le symbole 
de l'union du Christ et de son Église ; cette seconde union est 
le type parfait, dont la première est la figure et l'imitation^. » 

1. C'est là surtout que se trahit la saveur alexandrins de l'Épître, 
question que nous ne pouvons aborder ici. 

2. Nous commenterons plus loin le principal texte où s'exerce cette 
typologie complexe (3, 7-4, 13). On trouvera dans B. F. Westcott, the 
Épistle to the Hebrews, London, 1903, p. 482-491, une étude complète 
sur toutes ces correspondances, sur ces « signs ». 

3. J. HuBY, Saint Paul, les épures de la captivité, sur Ephésiens, 
5, 32, p. 232, sq. Le mystère que dévoile S. Paul est tout à la fois dans 



EXÉGÈSE PAULINIENNE. 271 

Ces principes sur la signification profonde de l'ancienne 
économie et de son expression scripturaire devaient engendrer 
une herméneutique spéciale, spécifiquement chrétienne. Les 
règles essentielles de la méthode sont formulées dans les deux 
textes suivants. 

Dans ses conseils à Timothée, S. Paul l'engage à suivre une 
voie tout opposée à celle des ouvriers d'erreur : 

Quant à toi, retiens les doctrines que tu as apprises et dont tu as 
éprouvé la vérité sachant de qui tu les as reçues : car depuis ta prime 
enfance tu connais les saintes lettres, qui, par le moyen de la foi dans 
le Christ Jésus, peuvent te communiquer la sagesse qui conduit au 
salut. Toute écriture est inspirée de Dieu et elle peut beaucoup servir 
pour les ministères, soit d'enseignement, soit de correction, soit de 
redressement, pour donner l'éducation qui conduit à la justice, afin 
que l'homme de Dieu soit bien prêt pour sa tâche, et complètement 
équipé pour travailler à toute œuvre bonne {2 Tim. 3, 14-17). 

Ajoutons cette remarque dont S. Paul souligne l'applica- 
tion qu'il vient de faire au Christ d'un verset des Psaumes, 
application qui peut étonner ses lecteurs : 

Car toutes les Écritures antérieures ont été écrites pour nous ins- 
truire, afin que par la patience et par la consolation que communi- 
quent les Écritures nous ayons l'espérance {Rom. 15, 4). 

Ces deux passages permettent plusieurs conclusions. 

Pour les chrétiens, comme pour les Juifs, les Écritures 
demeurent la grande autorité, la source qui nous transmet 
les révélations divines et qui nous fait entendre des paroles 
d'édification. Il est vrai que les chrétiens possèdent la parole 
de Jésus, oracle divin suprême, qui est plusieurs fois invoqué 
(/ Thés, h, 15; / Cor, 7, 10, 12; / Tim. 6, 3...). Mais la parole 
du Fils n'abolit pas et ne rend pas caduque la parole du 
Père, enregistrée dans les Livres saints ; au contraire, elle la 

le mariage et dans le récit biblique de son institution; il est dit 
« grand » parce qu'il « y a dans le mariage plus qu'il ne paraît au 
premier abord, il recèle une signification de plus haute importance. 
Divergences des interprètes sur le terme auquel se réfère le mystère : 
est-ce le mariage ou le texte de la Genèse? Le P. Huby reconnaît 
qu'affirmer le sens typologique du récit de la Genèse revient à dire 
que l'union de l'homme et de la femme, exprimée par le texte sacré, 
symbolise l'union du Christ et de l'Eglise ». ' 



272 EXÉGÈSE PACLINIENNE. 

confirme, elle l'éciaii'e ; et jointes ensemble, toutes les deux 
constituent un irrésistible instrument de démonstration. C'est 
pour cela que S, Paul, lui aussi familier depuis l'enfance avec 
l'Ancien Testament, l'invoque là où il pourrait produire un 
mot de Jésus \ et qu'il emprunte aux Écritures la démonstra- 
tion de la résurrection du Seigneur (/ Cor. 15, k; Actes, 13, 
34-37; 26, 23...) : ces arguments bibliques s'avéraient pour 
ses interlocuteurs juifs plus saisissants ; pour les autres de ses 
auditeurs, ils manifestaient l'harmonie des deux Testaments, 
enrichissaient et fortifiaient leur foi. 

Toutefois sur un point capital l'exégèse chrétienne diffère 
de l'exégèse juive : elle estime que la Bible ne peut être 
comprise que <( par le moyen de la foi au Christ Jésus » ; 
c'est laisser entendre que les chrétiens seuls comprennent 
pleinement l'Ancien Testament. S. Paul, d'aUleurs, affirme 
que les Juifs ne peuvent apercevoir la lumière divine dans 
la Bible, tant que leurs yeux sont couverts, comme d'un 
voile, par leur refus de la foi chrétienne [S Cor. 3, 13-16). 

Relevons le mot didaskalia dans les passages transcrits 
plus haut. Ailleurs S. Paul fait de la didaskalia un charisme 
[Rom. 12, 7; / Cor. 12, 28, 29; Eph. 4, 11) : le porteur de 
ce charisme, le docteur, « avait pour mission d'instruire... 
C'était un catéchiste inspiré ou, du moins, suscité providen- 
tiellement et doué du discours de science, tout comme le dis- 
cours de sagesse était l'apanage habituel du prophète (/ Cor, 
12, 8) »^. Ne sommes-nous pas autorisés à induire quel'inter- 



1. Michel, op. cit. p. 162-172, étudie les divers chefs de preuves 
auxquels recourt l'Apôtre : arguments scripturaires, preuves de 
raison, paroles du Seigneur ; il conclut que Paul connaissait quantité 
de paroles du Seigneur, qu'il possédait peut-être un recueil de ces 
paroles à l'usage des missionnaires, mais qu'il évite de les citer là où 
l'on serait en droit de les attendre. Cependant la révélation chrétienne 
est en train de transformer la portée des arguments bibliques : les 
textes bibliques ont besoin d'être commentés tandis que les paroles 
du Seigneur s'imposent en leur teneur directe; par ailleurs lAncien 
Testament doit être compris à la lumière du Nouveau, v 

2. F. Prat, Théologie de S. Paul, I, p. 500. Huby, sur les Éphésiens, 
p. 204, donne une détinition analogue. Lagrange, Epitre aux Romains^ 
p. 300, Allô, Première épitre aux Corinthiens, p. 336, sq. accordent 
aux didascales un « charisme » au sens large, les « grâces d'état » . 



EXÉGÈSE PAULINIENNE, 273 

prétation des Écritures, qui constituait une partie considé- 
rable de la catéchèse chrétienne, rentrait dans la catégorie 
des charismes^? De toute façon Paul, conscient de posséder 
les dons du prophète et de l'évangéliste, avait la certitude 
d'être divinement inspiré quand il commentait les Saints 
Livres ; ce n'est point sur l'histoire, sur la philologie ou sur la 
logique qu'il fonde les sens qu'il y découvre, mais sur les 
intuitions de sa foi, sur les enseignements intérieurs de 
l'Esprit^. 

Lès doctrines qu'il déduit des Écritures sont de deux 
ordres : exhortations d'ordre moral et directions prâ,tiques 
de conduite d'abord, mais ensuit^ et surtout preuves et illus- 
trations de la dogmatique chrétienne. Dans les deux domaines 
il procède à la manière des rabbins, prenant isolément un 
verset, une phrase, les tenant pour des oracles, des « dits » 
divins, qu'on peut considérer et exploiter indépendamment 
de leur contexte. Nous pouvons imaginer combien la médita- 
tion portant sur une sentence extraite de son contexte, la 
répétition de mémoire de quelques mots détachés, favori- 
sent cette interprétation « non historique au sens moderne 
du mot »^. 

Toutefois, dans la première série, à savoir quand les textes 
sont cités « pour fonder des principes moraux, des idées 
spirituelles ou pour illustrer les méthodes du gouvernement 
divin... ils sont entendus le plus ordinairement dans nn sens 
correspondant à celui de l'Ancien Testament »'*. Ici le rab- 



1. Michel, op. oit. le pense, en accord avec Weizsâcker et J. Weiss : 
il rapproche ce charisme du « discours de sagesse » et du « discours 
de gnose » (i Cor. 12, 8). 

2. Gf cette appréciation de Clemen, der Gebrauck des Alten in den 
N. T., p. 12 : « Les écrivains du N. T. qui interprètent l'Ancien ne 
se demandent pas comment les auteurs de l'A. T, ont compris leurs 
paroles et comment les contemporains les comprenaient. Ce qui 
leur importe, c'est seulement ce que l'Esprit de Dieu leur enseigne 
à eux-mêmes, ainsi qu'à leurs contemporains et à tous les temps... » 

3. Sanday and Headlam, Romans, p. 303. Ils ajoutent que cette 
indépendance du contexte peut aller jusqu'à entendre des textes dans 
un sens entièremeut opposé au sens original. Nous verrons com- 
ment se justifie cette inversion des rapports. 

4. Sanday-Headlam, op. cit. p. 303. 



274 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

bin ne sortait guère du cercle de ses pensées ou de ses 
habitudes anciennes. 

Il en va tout autrement dans la proposition des thèses 
chrétiennes proprement dites, quand il faut montrer qu'elles 
sont « attestées par la Loi et les Prophètes » {Rom. 3, 21; 
16," 26). Cette attestation revêt deux formes : l'Ancien Testa- 
ment contient la prophétie des événements chrétiens essen- 
tiels {Rom. 1, 2; Gai. 3, 8); les principes mis en lumière par 
l'Évangile, par exemple celui de la justification par la foi, sont 
déjà contenus dans les enseignements bibliques. D'où la 
double tâche du didascale chrétien : montrer comment et 
en quoi les anciens voyants annonçaient les mystères du 
Christ et de l'Église; dégager les affirmations doctrinales 
renfermées plus ou moins implicitement dans leurs écrits. 

En cette double tâche les catéchistes étaient opportunément 
aidés parleurs vues sur les Écritures. Ils étaient convaincus 
qu'elles avaient toutes une portée prophétique et que, d'autre 
part, toutes les prophéties se rapportent au Christ. Ce 
second principe fut explicitement professé par les rabbins 
et quant au premier ils le tenaient pratiquement aussi puis- 
qu'ils ont vu des prédictions dans presque toutes les parties 
de la Bible \ S. Augustru, pareillement, estimait que l'unique 
objet des Psaumes est le Christ^. 

Pour dégager, soit les sens prophétiques de la Bible, soit 
sa théologie implicite, les mystères qui se cachent sous la 
lettre, l'évangéHste dispose de plusieurs méthodes exégéti- 
ques. D'abord de tous les procédés rabbiniques : déduction, 
opérations dialectiques, considérations philologiques, rap- 
prochements du genre parabolique. Si l'une ou l'autre de ses 
explications paraît forcée, si l'on conteste ses <( allégories », 
par exemple celle qui voit dans les trois binaires « Sara et 
Agar )), (c Jérusalem et Sinaï », « liberté et servitude », des 



1. La sentence « toutes les prophéties des prophètes n'ont trait 
qu'aux jours du Messie » est attribuée à un rabbin du ni'^ siècle ap. 
J.-C, R. Johanan; en réalité elle exprime une opinion courante et 
traditionnelle {SanJiedrin 99 a et parallèles). 

2. Principe constamment appliqué dans les Enarrationes in 
Psalmos. 



EXÉGÈSE PATJLINIENNE. 275 

symboles [Galates, 4, 21-31), il peut répondre en opposant 
son inspiration, les divinations de sa foi, qui discernent dans 
« les paroles que jadis Dieu adressait aux Pères, des fragments 
et des aspects divers de la parole qu'il nous adresse mainte- 
nant par son FUs » [Heb. 1, 1). L'exégète chrétien applique 
également la méthode typologique qui découvre dans l'an- 
cienne économie des préformations de la nouvelle. 

Gardons -nous toutefois d'être dupes des apparences. 
Comme le note Windisch, un lecteur naïf de l'Épltre aux 
Romains pourrait voir dans Paul lin scribe chrétien, un 
théologien chrétien, qui prouve la vérité et la légitimité de 
sa nouvelle doctrine uniquement à l'aide de Moïse, des Pro- 
phètes et des Psaumes..., un homme chez qui l'influence de 
Gamaliel se fait sentir plus fortement que celle de Jésus. 
En réalité son esprit est tout entier déterminé par le Christ. 
C'est un scribe chrétien qui se sert de l'Ancien Testament 
pour instruire et édifier les communautés venues de la Gen- 
tilité..., un scribe qui interprète chrétiennement l'Ancien 
Testament, c'est-à-dire qu'il découvre dans l'Ancien Testa- 
ment l'évangile du Christ. Il utilise la connaissance de la 
Bible et les méthodes exégétiques qu'il doit, en grande partie, 
aux écoles rabbiniques, mais les thèses qu'il démontre par 
là lui viennent d'ailleurs et c'est sa foi chrétienne qui lui a 
ouvert l'intelligence des Écritures et lui a fait reconnaître dans 
ces lettres, jusqu'alors voilées pour lui, les textes décisifs qui 
portent témoignage en faveur du Christ et de l'Église ^ . 

1. Dans Windisch, Paulus und das Judenium, Stuttgart, 1935, p. 66- 
73. Voir aussi dans Michel op. laud. p. 134-159 des pages sugges- 
tives sur l'Ancien Testament envisagé comme lettre, ypa[j.fjLa, comme 
écriture, YpaçTinj, comme loi, vofioç, et comme esprit, nveujxa. 



CHAPITRE II 

UTILISATION DE L ANCIEN TESTAMENT. 

Dans les épitres de S. Paul, assez diverses sont les formes 
sous lesquelles l'Ancien Testament est exploité. Parfois le 
texte sacré est transcrit et accompagné d'un commentaire 
ou de remarqpies plus ou moins considérables : ainsi procé- 
daient les prédicateurs juifs, puis les chrétiens, dans leurs 
homélies bibliques ; ce type se rencontre plus abondamment 
dans l'épltre aux Hébreux. Plus souvent la sentence bibhque 
est allég-uée pour appuyer ou illustrer une considération, — 
exégèse référentielle : citation formelle accompagnée d'une 
formule, le plus ordinairement placée avant le texte. Quel- 
quefois la formule introductrice manque, il est pourtant 
clair que l'auteur se réfère volontairement à la Bible : cita- 
tion virtuelle. En plusieurs cas les développements se fondent 
sur une histoire biblique sans que pourtant la lettre elle- 
même soit transcrite : ainsi dans le discours de S. Etienne, 
dans celui de S. Paul à Antioche de Pisidie [Actes^ 7, 2-52; 
13, 17-22), dans l'étude sur Abraham justifié par sa foi 
{Rom. 4) , dans les exemples de foi abondamment accumulés 
dans l'épître aux Hébreux (11, 3-4.0). Très souvent encore 
nous n'avons affaire qu'à des citations implicites : ou bien 
des expressions scripturaires, incorporées depuis des années 
au langage de l'écrivahi, réapparaissent sous sa plume, sans 
aucune référence à la Bible ; ou bien des réminiscences plus 
développées indiquent que sa pensée se rattache à une page 
de l'Écriture. Dans cette dernière catégorie il est parfois 
difficile de discerner entre les rencontres verbales acciden- 
telles et le rappel volontaire et exprès de la lettre sacrée. 

Afin de supporter des conclusions plus larges et plus 
variées, nous donnons deux séries de listes des citations 
bibliques : la première suivant l'ordre des épitres, la seconde 
suivant l'ordre des livres bibUques. 



EXEGESE PAULINIENNE. 



277 



I. TEXTES PAULINIENS ET CITATIONS DE l'a. T. 

1° Citations formelles (introduites par une formule) 
Discours des Actes, 



13, 22 


1 Samuel 13,14; Ps. 89, 21 


13, 33 


Ps. 2, 7. 


13, 34 


Is. 55, 3. 


, 13, 35 


Ps. 16, 10. 


13, 40, 41 


Hab. 1, 5. 


13, 47 


Is. 49, 6. 


23, 5 


Ex. 22, 28. 


28, 26, 27 


Is. 6, 9, 10. 


Romains. 




1, 17 


Hab. 2, 4. 


2, 24 


Is. 52, 5. 


3,4 


Ps. 51, 6 (+ 116, 11). 


3, 10-12 


Ps. 14, 1-3. 


3, 13=^ 


Ps. 5, 10. 


3, IZ^ 


Ps. 140, 4. 


3,14 


Ps. 10, 7 (LXX : 9, 28). 


3, 15-17 


Is. 59, 7, 8. 


3, 18 


Ps. 36, 2. 


4, 3 (9 et 22) 


Gen. 15, 6. 


4, 7, 8 


Ps. 32, 1, 2. 


4,17 


Gen. 17, 5. 


4, 18 


Gen. 15, 5. 


7,7 


Ex. 20, 17 (Deut. 5, 18). 


8, 36 


Ps. 44, 23. 


9,9 


Gen. 18, 10, 14. 


9, 12 


Gen. 25, 23. 


9, 13 


Mal. 1, 2, 3. 


9,15 , 


Ex. 33, 19. 


9, 17 


Ex. 9, 16 


9, 25, 26 


Os. 2, 23 ; 1, 10. 


9, 27, 28 


Is. 10, 22, 23. 


9, 29 


Is. 1, 9. 


9, 33 


Is. 8, 14; 28, 16. 


10, 5 


Lev. 18, 5. 


10, 6-8 


Deut. 30, 12-14. 


10,11 


Is. 28, 16. 


10,15 


Is. 52, 7. 


10, 16 


Is. 53, 1. 



278 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 





Romains. 






10, 19 




Deut. 32, 21. 




10, 20 




Is. 65, 1. 




10, 21 




Is. 65, 2. 




11, 3 




1 Reg. 19, 10 (14). 




11, 4 




1 Reg. 19, 18. 




11, 8 




Is. 29, 10 4- Deut. 29, 4. 




11, 9, 10 




Ps. 69, 23, 24. 




11, 26, 27 




Is. 59. 20 +27, 9. 




12, 19 




Deut. 32, 35. 




12, 20 




Prov. 25, 21, 22. 




13,9 




Ex. 20, 13-15 4- Deut. 5, 17-19 
Lev. 19, 18. 


+ 


14, 11 




Is. 45, 23 + 49, 18. 




15, 3 




Ps. 69, 10. 




15, 9 




Ps. 18, 50 (2 Sam. 22, 50). 




15, 10 




Deut. 32, 43. 




15, 11 




Ps. 117, 1. 




15,12 




Is, 11, 10. 




15, 21 




Is. 52, 15. 




1 Corinthiens. 






1, 19 




Is. 29, 14. 




1, 31 




Jér. 9, 22, 23. 




2,9 




Is. 64, 4 + 65, 17. 




3, 19 




Job. 5, 12, 13. 




3, 20 




Ps. 94, 11. 




6, 16 




Gen. 2, 24. 




9,9 




Deut. 25, 4. 




10, 7 


■• 


Ex. 32, 6. 




14, 21 




Is. 28, 11, 12. 




15, 45 




Gen. 2, 7. 




15, 54, 55 




Is. 25, 8 -1- Os. 13, 14. 




2 Corinthiens. 






4,13 




Ps. 116, 1. 




6,2 




Is. 49, 8. 




6, 16 




Lév. 26, 11 ; Ez. 37, 27. 




6,17 




Is, 52, 11, 12. 




6, 18 




2 Sam. 7, 14. 




8, 15 




Ex. 16, 18. 




9,9 




Ps. 112, 9. 





Galates. 
3, 8 Gen. 12, 3 (18, 18). 

3, 10 Deut. 27, 26. 



UTILISATION DE LA. T. 279 

Galates. 



3, 13 


Deut. 21, 23. 


4,22 


Gen. 16, 15. 


4, 27 


Is. 54, 1. 


4, 30 


Gen. 21, 10. 


5, 14 


Lev. 19, 18. 


Ephésiens. 




4,8. 


Ps. 68, 19. 


6,2,3 


Ex. 20, 12 (Deut. 5, 16). 


1 Timothée. 




5, 18 > 


Deut. 25, 4. 


2 Timothée. 




2, 19 


Num. 16, 5. 


Hébreux. 




1, 5» 


Ps. 2, 7. 


1, 5b 


2 Sam. 7, 14. 


1,6 


Deut. 32, 43 (LXX). 


1,7 


Ps. 104, 4. 


1, 8. 9. 


Ps. 45, 7, 8, 


1, 10-12 


Ps. 102, 26-28. 


1, 13 


Ps, 110, 1. 


2, 6-8 


Ps. 8, 5-7. 


2, 12 


Ps. 22, 23. 


2, 13=1 


2 Sam, 22, 3. 


2, 13^ 


Is. 8, 17, 18. 


3, 7-11 


Ps. 95, 7-11. 


4, 3, 5, 7 


Ps. 95, 11, 7, 8. 


4,4 


Gen. 2, 2. 


5, 5 


Ps. 2, 7. 


5, 6 


Ps. 110, 4. 


6, 13, 14 


Gen. 22, 16, 17. 


8, 5 


Ex. 25, 40. 


8, 8-12 


Jér. 31, 31-34. 


9, 20 


Ex. 24, 6-8. 


10, 5-7 


Ps. 40, 7-9. 


10, 15, 16 


Jér. 31, 33, 34. 


10, 30^ 


Deut. 32, 35. 


10, 30f 


Deut. 32, 36. 


10, 37, 38 


HaJ). 2, 3, 4. 


11, 18 


Gen. 21, 12. 


12, 5 -• ' ■ 


* Prov. 3, 11, 12. 


12, 15 


Deut. 29, 18. 



280 EXÉGÈSE PA1ILINi;|SNNE. 





Hébreux. 




12, 20 




Ex. 19, 13. 


12, 21 




Deut. 9, 19. 


12, 26 




Aggée, 2, 6. 


13, 5 




Deut. 31, 6, 8. 



2° Citations virtuelles (marquées souvent par une conjonc- 
tion, vg-. Y«p). 





Romains. 




3, 20 




Ps. 143, 2. 


9,7 




Gen. 21, 12. 


10,13 




Joël, 3, 5. 


10, 18 




Ps. 19, 5. 


11, 34 


1 Corinthiens. 


Is. 40, 13 4- Job, 41, 3. 


2, 16 




Is. 40, 13. 


10, 26 




Ps. 24, 1. 


15, 27 




Ps. 8, 1. 


15, 32 


2 Corinthiens. 


Is. 22. 13. 


8, 21 




Prov. 3, 4 (LXX). 


9,7 


« 


Prov. 22, 8 (LXX). 


10, 17 




Jér. 9, 22. 


13, 1 


Galates. 


Deut. 19, 15. 


2, 16 




Ps. 143, 2. 


3,6 




Gen. 15, 6. 


3, 11 


Ephêsiens. 


Hab. 2, 4. 


4, 25 




Zach. 8, 16. 


4, 26 




Ps. 4, 5. 


5, 31 


Hébreux. 


Gen. 2, 24. 


^^,1 




Gen. 14, 17-20. 


12, 12 




Is. 35, 3, 


13, 6 




Ps. 118, 6. 



3° Citations imvlicites [réminiscences) nettes (ne sont pas 
mentionnées les expressions bibliques courantes). 

Actes, 

lit, 15 Ex. 20, 11. 

17, 24, 25 1 Reg. 8, 27; Is, 42, 5. 

17, 31 Ps. 9, 9. 



UTILISATION DE l'A. T. 281 





Romains. 




1, 20-32 


Sap. 13, 1 (?). 


1, 23 




Ps. 106, 20 (Sap. 12, 24?). 


2,6 




Ps. 62, 13. 


2, 11 




2 Ghron. 19, 7. 


3, 4» 




Ps. 116, 11. 


chap. 4 étudie le cas d'Abraham. 




4, 11 




Gen. 17, 10, 11. 


4, 25 




Is. 53, 4, 5. 


5,5 




Ps. 22, 6. 


5, 12 ra 


ppelle l'histoire d'Adam. 




8, 33 




Is. 50, 8, 9. 


9, 4 résume la doctrine courante 


sur les prérogatives d'Israël 


9, 7-11 histoire d'Isaac. 




9, 18 




Ex. 4, 22 ; 7, 3 (expression cou 


9, 20 




Is. 45, 9 (29, 16). 


9,21 




Sap. 11, 23 (?). 


9, 22 




Jér. 50, 25. 


11,1 




Ps. 94, 14(95, 4; 1 Sam. 12, 


11, 11 




Deut. 32, 21. 


12, 16, 


17 ' 


Prov. 3, 7, 4 (LXX). 


14,13 


1 Corinthiens. 


Lev. 19, 14 (Deut. 27, 18). 


1, 20 




Is. 33, 18 (19, 11, 12). 


5,7 




Ex. 12, 15, 19 (13, 7). 


5, 13 




Deut. 22, 24 (13, 6). 


10, 1-4 allusions à l'Exode des Hébreux. 


10, 5 




Num. 14, 16. 


10, 6 




Num. 11, 4, 34. 


10, 20 




Deut. 32, 17. 


10,26 




Ps. 24, 1. 


11,3 




Gen. 3, 16. 


11, 7 




Gen. 1, 27 (5, 1). 


11,25 




Ex. 24, 8 (Zach. 9, 11). 


13, 5 




Zach. 8, 17 (LXX). 


14, 25 




Is. 45, 14. 


15, 25 




Ps. 110, 1. 


15,27 


2 Corinthiens, 


Ps. 8, 7. 


3, 3 




Ez. 11, 19; 26. 


3, 7-9 




(Ex. 34, 30). 


3, 13 




Ex. 34, 33, 35. 


3, 16 




Ex. 34, 34. 


5,10 




Eccl. 12, 14. 



282 ■ EXÉGÈSE PAULINIENNE. 





2 Corinthiens. 




6, 9 




Ps. 118, 17, 18. 


6, 11 




Ps. 119, 32 (LXX). 


9,10 




Is. 55, 10 + Os. 10, 12 


11, 3 


Galates. 


Gen. 3, 4, 13, 


1, 15, 16 




Jér. 1, 5 4- Is. 49, 1. 


3, 12 




Lev. 18, 5. 


3, 16 




Gen. 12, 7. 


6, 16 


Ephésiens. 


Ps. 125, 5. 


1, 20 




Ps. 110, 1. 


1, 22 




Ps. 8, 7. 


2, 13,17 




Is. 57, 19 (52, 7). 


2, 20 




Is. 28, 16. 


5,2 




Ps. 40, 7 (Ez. 20, 41). 


5, 18 




Prov. 23, 31 (LXX). 


6, 14, 15 




Is. 11, 5; 59, 17. 


6,17 


Philippiens. 


Is. 49, 2. 


1, 19 




Job, 13, 16 (LXX). 


2, 10, 11 




Is. 45, 23. 


2,15 




Deut. 32, 5 (LXX). 


2, 16 




Is. 65, 23 (49, 4). 


4,3 




Ps. 69, 29. 


4,18 


Colossiens. 


Ps. 40, 7 (Ez. 20, 41). 


1, 12 




Deut. 10, 9. 


2,3 




Is. 45, 3. 


2, 22 




Is. 29, 13. 


3, 1 




Ps, 110, 1. 


3, 10 




Gen. 1, 27. 


1 


Thessaloniciens. 




2, 4 




Jér. 11, 20. 


4,5 




Ps. 79, 6 (Jér. 10, 25). 


4, 6 




Ps. 94, 2. 


5, 8 




Is. 59, 17. 


5, 22 




Job. 1, 1, 8; 2, 3. 


2 Thessaloniciens. 




1,8 




Is. 66, 15. 


1, 9, 10 




Is. 2, 10, 11, 19, 21. 



UTILISATION DE LA. T, 



283 



2 Thessaïoniciens. 



1, 12 




Is. 66, 5. 


2,4 




Dan. 11. 36 (Ez. 28, 2), 


2,8 




Is. 11, 4. 


2, 13 


i Timothée 


Deut. 33, 12. 


2,6 




Is. 53, 11, 12. 


2, 12-14 




Gen, 3, 16; 2, 7. 


5, 18 




Deut. 19, 15. 


6, 15 


2 Timothée. 


Deut. 10, 17; Dan. 2, 47 


2, 19 




Num. 16, 5. 


4, 14 


Tite. 


Ps. 62, 13 (Prov. 24, 12) 


2, 14 


Hébreux. 


Ps. 130, 8. 


1,3a 




Sap. 7, 26. 


1, 2,^ 




Ps". 110, 1 (8, 1). 


2, 16 




Is. 41, 8. 


3,2,5 




Num. 12, 7. 


3, 17 




Num. 14, 29. 


5, 9 




Is. 45, 17. 


6, 8 




Gen, 3, 17, 18. 


6, 19 




Lév. 16, 12. 


6,20 


_ 


Ps. 110, 4. 


7, 28 




Ps. 2, 7 ; 110, 4. 


8,2 




Num. 24, 6 (LXX). 


9 décrit le culte ancien, 




9, 28 


* 


Is. 53, 12. 


10 résume l'histoire sainte. 




10, 12, 13 


Ps.. 110, 1. 


10, 27 




Is. 26, 11 (LXX). 


10, 28 




Deut. 17, 6. 


11 résume I*histoire d'Israël. 




11, 4 




Gen. 4, 4, 5. 


11, 5 




Gen. 6, 24. 


11, 8, 9 




Gen. 12, 1 ; 23, 4. 


11,12 




Gen. 22, 17. 


11, 13 




Gen. 23, 4. 


11, 17 




Gen. 22, 1, 4. 


11,21 




Gen. 47, 31. 


11, 23 




Ex. 2, 2. 


11,26 


. 


Ps. 69, 10. 



284 EXEGESE PAULINIENNE. 



Hébreux. 




11,28 


Ex. 12, 12, sq., 21, sq. 


12, 3 


Num. 16, 37 (LXX). 


12, 18-20 


Ex. 19, 12, 16, 18. 


13,11 


Lév. 16, 27. 


13,15 


Lév. 7, 12; Os. 14, 3. 


13,20 


Bz. 37, 26; 2ach. 9,11. 



IL Textes de l'ancien testament cités par S. Paul. 

(Les citations implicites sont signalées par une -j-) (entre parenthèses 
sont mentionnés les autres endroits du Nouveau Testament où les 
textes sont également cités.) 

Genèse. 

1, 27 4-1 Cor. 11, 7 ; + Col. 3, 10 (Mt. 

19, 4; Me. 10, 6). 

2, 7 1 Cor. 15, 45. 

2, 24 1 Cor. 6, 16; Eph. 5, 81 (Mt. 19, 5, 

sq. ; Me. 10, 7, sq.). 

3, 16 +1 Cor. 11, 3. -i- 1 Tim. 2, 12-14. 

3, 17, 18 + Héb. 6, 8. 

4, 4, 5 + Héb. 11, 4. 

5, 24 + Héb. 11, 5. 

12, 1 + Héb. 11, 8 (Acl. 7, 3). 

12, 31» Gai. 3, 8. 

12, 7 + Gai. 3, 16 (Act. 3, 25). 

14, 17-20 ' Heb. 7, 1-10. 

15, 5 Rom, 4, 18. 

15, 6 Gai. 3, 6 ; Rom. 4, 3 (Jac* 2, 23). 

17, 5 Rom. 4, 17. 

17, 10, 11 -}- Rom. 4, 11. 

18, 10, 14 Rom. 9, 9. 
21, 10, 12 Gai. 4, 30. 

21, 12 Rom. 9, 7; Héb. 11, 18. 

22, 1 -f- Héb. 11, 17. 

22, 16, sq. Héb. 6,13, sq.; -f 11, 12. 

23, 4 4- Héb. 11, 13. 
25, 23 Rom. 9, 12. 
47, 31 + Héb. 11, 21. 

Exode. 

2, 2 -}- Héb. 11, 23. 

4, 22 4- Rom. 9, 18. 

7, 3 4- Rom. 9, 18. 



UTILISATION DE l'a. T. 285 







Exode. 




9, 16 






Rom. 9, 17. 


12, 12, 


sq. 




+ Héb. 11, 28. 


12, 15, 


19 




+ 1 Cor. 5, 7. 


12, 21, 


sq. 




+ Héb, 11, 28. 


16, 18 






2 Cor. 8, 15. 


19, 12, 


16 




+ Héb. 12, 18-20. 


19, 13 






Héb. 12, 20. 


20, 11 






+ Act. 14, 15. 


20, 12- 


17 




Rom. 7, 7; 13, 9; Eph. 6, 2, sq. 
(Jac. 2, 11; Mt. 5, 21....). 


22, 28 






Act. 23, 5. 


24, 8 






+ 1 Cor. 11, 25; Héb. 9, 19, sq. 


25, 40 






Héb. 8, 5. 


32, 6 






1 Cor. 10, 7. 


33, 19 






Rom. 9, 15. 


34, 33, 


34 


Lévitique. 


+ 2 Cor. 3, 13, 16. 


7, 12 






4- Héb. 13, 15. 


16, 12 






+ Héb. 6, 19. 


16, 27 






+ Héb. 13. 11. 


18, 5 






Rom. 10, 5 ; + Gai. 3, 12. 


19, 14 






+ Rom- 14, 13. 


19, 18 






Rom. 13, 9 ; Gai. 5, 14 (Mt. 5, 43 ; 
19, 19; 22, 39; Me, 12, 31; Le. 10, 
27; Jae. 2, 8). 


26, 11 




Nombres. 


2 Cor. 6, 16. 


11, 4, ; 


34 




+ 1 Cor. 10, 6. 


12, 7 






4- Héb. 3, 2, 5. 


14, 16 






+ 1 Cor. 10, 5. 


14, 29 






4- Héb. 3, 17. 


16, 5 






+ 2 Tim. 2, 19. 


16, 37 






+ Héb. 12, 3. 


24, 6 






+ Héb. 8, 6. 




Deutéronome. 




9,19 






Héb. 12, 21. 


10, 9 






+ Col. 1, 12. 


10, 17 






+ 1 Tim. 6, 15. 


13, 6 






+ 1 Cor. 5, 13. 


17, 6 






4- Héb. 10, 28. 


19,15 






2 Cor. 13, 1; 4- 1 Tim. 5, 18 (Mt. 
18, 16; Joan. 8. 17). 



286 EXÉGÈSE PATJLINIENNE. 

Deutéronome. 

21, 23 Gai. 3, 13. 

22, 24 +1 Cor. 5, 13. 

25, 4 1 Cor. 9, 9; 1 Tim. 5, 18. 

27, 18 -f Rom. 14, 13. 

27, 26 Gai. 3, 10. 

29, 4 Rom. 11, 8. 

29, 18 Héb. 12, 15. 

.30, 12-14 Rom. 10, 6-8. 

31, 6, 8 Héb. 13, 5. 

32, 5 + Phil. 2, 15. 
32, 17 -1-1 Cor. 10, 20. 

32, 21 Rom. 10, 19; -|- 11, 11. 

32, 35 Rom. 12, 19; Héb. 10, 30". 

32, 36 Héb. 10, 30b. 

32, 43 Héb. 1, 6. 

33, 12 4-2 Thés. 2, 13. 

1 Samuel. 

13, 14 Act. 13, 22. 

2 Samuel. 

7,8 2 Cor. 6, 18. 

7,14 Héb. 1, 5; 2 Cor. 6, 18. 

1 Rois. 

8, 27 + Act. 17, 24, 25. 



19, 10, 14, 18 


Rom. 11, 3, sq. 


2 Chroniques. 




19, 7 


-(- Rom. 2, 11. 


Psaumes. 


«t 
^ 


2,7 


Act. 13, 33; Héb. 1,5; 5, 5; -|-7,28. 


4,5 


Eph. 4, 26. 


5, 10 


Rom. 3, 13». 


8,1 


4- Héb. 1, Sb. 


8, 5-7 


1 Cor. 15, 27; Héb. 2, 6-8 (Mt. 21, 




16). 


8, 7 


-H Eph. 1, 22. 


9,9 


-1- Act. 17, 31. 


10, 7 (9, 28) 


Rom. 3, 14. 


14, 1-3 


Rom. 3, 10-12. 


16, 10 


Act. 13, 35. 


18, 50 


Rom. 15, 9. 


19, 5 


Rom. 10, 18. 


22, 6 


-f Rom. 5, 5. 



UTILISATION DE l'a. T. 287 

Psaumes. 

22, 23 Héb. 2, 12. 

24, 1 1 Cor. 10, 26. 

32, 1, sq. Rom. 4, 6-8. ' 

36, 2 Rom. 3, 18. 

40, 7 + Eph. 5, 2; + Phil. 4, 18. 

40, 7-9 Héb. 10, 5-7. 

44, 23 Rom. 8, 36. 

45, 7, sq. Héb. 1, 8, sq. 
51,6 Rom. 3, 4. 

62, 13 -f- Rom. 2, 6 ; 4- 2 Tim. 4, 14. 

68, 19 Eph. 4, 8. 

Rom, 15, 3; + Héb. 11, 26. (Jo. 2, 

69, 10 17). 

69, 23, sq. Rom. 11, 9, 10. 

69, 29 + Phil. 4, 3. 

89, 21 Act. 13, 22. 

94, 2 +1 Thés. 4, 6. 
94,11 1 Cor. 3, 20. 

95, 4 + Rom. 11, 1. 
95, 8-11 Héb. 3, 7-11. 
102, 26-28 Héb. 1, 10-12. 
104, 4 Héb. 1, 7. 
106, 20 -f Rom. 1, 23. 

110,1 Héb. 1, 13;-l-lGor. 15, 25; -j-Eph. 

1, 20; -I- Col. 3, 1; -f- Héb. 1, 3 ; 
-f 10, 12 (Mt. 22, 44; et parai.; 
Act. 2, 34, sq.). 

Héb. 5, 6; -f- 6, 20; + 7, 17, 21. 
2 Cor. 9, 9. 
2 Cor. 4, 13. 
+ Rom. 3, 4». 
Rom. 15, 11. 
Héb. 13, 6. 
4- 2 Cor. 6, 9. 
+ 2 Cor. 6, 11, 
+ Gai, 6, 16. 
+ Tit. 2, 14. 
Rom. 3, 13b. ^ 
Rom. 3, 20; Gai. 2, 16. 



2 Cor. 8, 21. 

4- Rom. 12, 16, sq. 

Héb, 12, 5, sq. 



110, 


4 


113, 


9 


lié, 


1 


116, 


11 


117, 


1 


118, 


6 


118, 


17 


119, 


32 


125, 


5 


130, 


8 


140, 


4 


143, 


2 




Proverbes. 


3,4 




3,7, 


4 


3, 11, 12 



58 


EXEGESE 


PAULINIENNE , 




Proverbes. 




22, 8 




2 Cor. 9, 7, 


23, 31 




+ Eph. 5, 18. 


24, 12 


■9 


+ 2 Tim. 4, 14. 


25, 21, sq. 


Rom. 12, 20. 




Ecclésiaste, 




12, 14 


Job. 


4- 2 Cor. 5, 10. 


1,1,8 




-f 1 Thés. 5, 22. 


2,3 




+ 1 Thés. 5, 22. 


5,13 




1 Cor. 3, 19. 


13, 16 




+ Phil. 1, 19. 


41, 3 


Sagesse. 


-{- Rom. 11, 34. 


7, 26 




Héb. 1, 3a, 


11, 23 




+ Rom. 9, 21 (?). 


13, 1, sqq. 


+ Rom. 1, 20-32 (?). 




Osée. 




1, 10 




Rom, 9, 26. 


2, 23 




Rom. 9, 25. 


10, 12 




+ 2 Cor. 9, 10. 


13, 14 




1 Cor. 15, 55, sq. 


14, 3 


Hahacuc. 

1 


+ Héb. 13, 15. 


1,5 




Act. 13, 41. 


2, 3, sq. 


JoeL 


Rom. 1, 17; Gai. 3, 11; Héb, 10, 
37, sq. 


3, 5 


Aggée. 


Rom. 10, 13. 


2,6 


Zacharie^ 


Héb. 12, 26. 


8, 16 




Eph. 4, 25. 


8, 17 




4-1 Cor. 13, 5. 


9, 11 


Malachie. 


-f- 1 Cor. 11, 25; 4- Héb. 13, 20J 


1, 2, sq 


. 


Rom. 9, 13. 



UTILISATION DE l'a. T. 289 

Isaïe. 



1,9 


Rom. 9, 29. 


2, 10, 11, 19, 21 


+ 2 Thés. 1, 9, 10. 


6, 9, sq. 


Act. 28, 26, 27 (Mt. 13, 14, sq. et 




parai. : Jo. 12, 40, sq.). 


8, 14 


Rom. 9, 33 (1 Pet. 2, 8). 


8, 17 


Héb. 2, 13, 


10, 22, sq. 


Rom. 9, 27, sq. 


11, 4 


+ 2 Thés. 2, 8. 


11, 5 


4- Eph. 6, 14, 15. 


11, 10 


Rom. 15, 12. 


19, 11, 12 


+ 1 Cor. 1, 20. 


22, 13 


1 Cor. 15, 32. 


25, 8 


1 ,Gor. 15, 54. 


26, 11 


+ Héb. 10, 27. 


28, 11, sq. 


1 Cor. 14, 21. 


28, 16 


Rom. 9, 33; 10, 11; + Eph. 2, 20; 




(1 Pet. 2, 6).. 


29, 10 


Rom. 11, 8. 


29, 13 


+ Col. 2, 22. 


29, 14 


1 Cor. 1, 19. 


29, 16 


+ Rom. 9, 20. 


33,18 


4- 1 Cor. 1, 20. 


35, 3 


Héb. 12, 12. 


40, 13, sq. 


Rom. 11, 34, sq. ; 1 Cor. 2, 16. 


41, 8 


+ Héb. 2, 16. 


42, 5 


+ Act. 17, 24, 25. 


45, 3 


+ Col. 2, 3. 


45, 9 


4- Rom. 9, 20. 


45, 14 


+ 1 Cor. 14, 25. 


45, 17 


+ Héb. 5, 9. 


45, 23 


Rom. 14, 11; + Phil.,2, 10, sq. 


49, 1 


4- Gai. 1, 15, 16. 


49, 2 


4- Eph. 6, 17. 


49, 4 


4- Phil. 2, 16. 


49, 6 


Act. 13, 47. 


49, 8 


2 Cor, 6, 2. 


50, 8, 9 . 


4- Rom. 8, 33. 


52, 5 


Rom. 2, 24. 


52, 7 


Rom. 10, 15 ; 4- Eph. 2, 13-17. 


52, 11 


2 Cor. 6, 17. 


52, 15 


Rom. 15, 21. 


53, 1 


Rom. 10, 16 (Jo. 12, 38). 


53, 4, 5 


4- Rom. 4, 25. 


53, 11 


-f 1 Tim. 2, 6. 


EXKGÈSE UABBINIQUE. 


10 



290 EXÉGÈSK PAULINIENNE. 

I&aïe. 

53, 12 +1 Tim. 2, 6 ; (+ Héb. 9, 28). 

54, 1 Gai. k, 27. 
55 3 Act. 13, 34. 
55' 10 +2 Cor. 9, 10. 
57, 19 + Eph. 2, 13-17. 

59^ 17 + Eph. 6, 14, 15 ; +1 Thés. 5, 8. 

59, 20, sq. Rom. 11, 26, sq. 



64, 4 



11, 19, 26, 30 
28, 2 
37, 26 

37, 27 



Daniel. 



2,47 
11, 36 



1 Cor. 2, 9. 



65, 1, sq. Rom. , :0, sq. 

65, 23 + Phil. 2, 16. 

66, 5 +2 Thés. 1, 12. 
66, 15 +2 Thés. 1, 8. 

Jérémie. 

1 5 

9, 22, sq. 1 Cor. 1,31; 2 Cor. 10, 17. 

11, 20 
31, 31-34 

50, 25 

51, 45 

Ezéchiel. 



4- Gai. 1, 15, 16. 




1 Cor. 1, 31; 2 Cor. 


10, 


4- 1 Thés. 2, 4. . 




Héb. 8, 8-12 ; 10, 15-18. 


4- Rom. 9, 22. 




2 Cor. 6, 17. 




-1- 2 Cor. 3, 3. 




-1- 2 Thes. 2, 4. 




4- Héb. 13, 20. 




2 Cor. 6, 16. 




-{- 1 Tim. 6, 15. 




+ 2 Thes. 2, 4, 





UTILISATION DE l'a. T. 291 

Cette dernière liste ne doit pas donner le change : des textes 
mentionnés beaucoup ne sont cités qu'implicitement ; le plus 
souvent il est impossible de penser que l'auteur avait en vue 
le passage indiqué., surtout quand il se sert d'expressions cou- 
rantes, venues de la Bible, mais dégagées par l'usage de toute 
attaché avec leur origine, telles que : « en bonne odeur », 
« ne pas faire acception de personne ))... 

Un rapide coup d'œil suffit pour constater que les livres 
les plus familiers à S. Paul sont d'abord Isaïe, puis le Psautier, 
les livres de l'espérance et de la prière ; le Pentateuque (la 
Genèse, puis le Deutéronome) ne vient qu'au second rang, 
mais tenant toujours la place considérable qui appartient à 
la Tora, à la Loi. Dans l'épltre aux Hébreux les citations du 
Pentateuque sont proportionnellement plus nombreuses. 

Dans cette répartition de ses textes bibliques S. Paul se dis- 
tingue des rabbins palestiniens, moins en s'opposant à leur 
usage qu'en le développant : si ces derniers exploitent avant 
tout le Pentateuque, ils se servent abondamment du Psautier 
et aussi d'Isaïe et des Prophètes. Si l'Apôtre réserve une place 
prépondérante au grand Prophète c'est qu'il trouve davan- 
tage chez lui la vision de l'économie chrétienne; s'il redit 
souvent les sentences des Psaumes c'est qu'elles lui sont très 
chères et qu'il y voit aussi un recueil de prophéties. 

Notre liste comprend trois citations du livre de la Sagesse; 
nous aurions pu en joindre plusieurs autres. Certains savants 
(Grafe, Norden, Puukko) estiment que plusieurs textes et 
diverses conceptions théologiques de S. Paul montrent qu'il 
a subi l'influence du livre alexandrin. Après examen attentif 
des textes considérés, nous pensons avec Michel qu'il est fort 
douteux que l'Apôtre ait beaucoup étudié et utilisé la 
Sagesse ^ 

On a voulu aussi découvrir dans les épltres pauliniennes 
des citations des apocryphes juifs, en particulier dans / Cor. 



1. Voir Puukko, op. cit., p. 41-45 et Michel., op. cit. p. 14-18 : bien des 
ressemblances sont purement formelles et telle maxime paulinienne 
se rattache plus nettement à d'autres textes de la Bible hébraïque 
qu'au texte allégué de la Sagesse. 



292 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

15, 4-5 b et 2, 9 (monter au cœur) : là aussi les rapproche- 
ments ne permettent aucune conclusion fermée 

Nous ne voulons pas aborder le problème soulevé par 
divers auteurs : Paul s'est- il servi de florilèges, soit préchré- 
tiens, soit chrétiens et rédigés en vue de la controverse 
juive ^? Nous nous contenterons d'une remarque obvie : un 
juif, sachant par cœur de longs passages des Écritures, les 
redisant et les méditant, avait-il besoin de recourir à des 
recueils méthodiques? Il aurait pu, cependant, subir l'in- 
fluence de ces recueils, revêtus d'une certaine autorité, s'ils 
existaient. 

De la première hste il appert que les citations explicites, 
c'est-à-dire les sentences bibliques, invoquées comme preuve 
ou illustration de certaines affirmations, font totalement dé- 
faut dans quelques épîtres : 1 et 2 aux Thessaloniciens, Phi- 
lippiens, Golossiens, Philémon, Tite; et presque entièrement 
dans 1 et 2 à Timothée. On ne doit pas pour autant conclure 
que l'Apôtre n'utilisait pas l'Ancien Testament dans ses prédi- 
cations aux Gentils ou dans ses instructions aux communautés 
pagano-chrétiennes : les églises de Rome, de Gorinthe et de 
Galatie comprenaient certainement une grosse majorité de 
convertis venus du paganisme ; et d'ailleurs dans ces épitres 
où manquent les arguments scripturaires, S. Paul ne laisse 
pas de parsemer son discours de sentences bibliques. Les 
différences doivent donc s'expliquer, non par la qualité des 
destinataires, mais par la nature des sujets abordés. 

Induction confirmée par le fait que les chapitres 6-8 de 
l'épltre aux Romains n'arguent pas de l'Écriture (5 développe 
le parallélisme entre les deux Adam), tandis que les chap. 9- 
11 contiennent, à eux trois, autant de citations explicites que 
le reste de la lettre. L'épître aux Galates est proportionnelle- 
ment très riche en arguments scripturaires ; dans la première 
-aux Corinthiens, ils sont plus abondants dans les trois premiers 

1. Voir PuuKKo, op. cit., p. 45-51 ; il reconnaît que le résultat est néga- 
tif. Cf. Allô, loc. cit. I. p. 43, sq. et 426, sq. 

2. Michel, op. laud. p. 3, 37 sq., 52, sqq., 87, sq. expose et rejette 
les hypothèses, tant de Hatch et Vollmer pour les florilèg^es préchré- 
tiens, que de Rendel Harris pour les recueils compilés par des chré- 
tiens. Cf. aussi PuuKKo, op. cit., p. 53, sq. 



UTILISATION DE l'a. T. 293 

chapitres traitant de la sagesse de la Croix; et dans la 
deuxième il faut noter le passage (3, 7-18) sur le voile symbo- 
lique de Moïse. De ce fait nous pouvons conclure que l'Apôtre 
utilise l'argument scripturaire avant tout dans ce que nous 
appellerons les expositions ou les démonstrations conten- 
tieuses, celles où il établit une doctrine qui s'oppose aux pré- 
tentions juives ou qui parait en désaccord avec l'Ancien 
Testament : il fallait prévenir à la fois les contradictions de la 
part des Juifs et les objections que les chrétiens, lisant souvent 
la Bible, auraient pu,, de leur côté, soulever. Dans les dévelop- 
pements christologiques et ecclésiologiques des épltres de la 
captivité, il n'a pas paru opportun de s'appuyer sur l'Écri- 
ture, parce qu'on demeurait là sur un terrain spécifiquement 
chrétien. Si sur des sujets analogues l'épitre aux Hébreux 
multiplie les citations explicites, c'est qu'il s'agit encore 
d'opposer l'économie nouvelle à l'ancienne. Par ailleurs le 
rédacteur de cet écrit aime les développements homilétiques 
qui commentent de longs passages bibliques ; nous trouvons 
des développements semblables ou leurs amorces dans 
'2 Cor. 6, 16-18; 8, 15; 9, 9; Eph. 6, 14-18... 

Nous avons maintenant à examiner quelle fin poursuivent 
ces citations formelles : une véritable démonstration, ou une 
simple illustration? 



CHAPITRE III 

LES EXÉGÈSES DE S. PAUL. 

« Exégèses », parce que S. Paul pratique plusieurs formes 
d'exégèse. Elles pourraient se classer suivant les objets que 
l'Apôtre entreprend de démontrer ou d'exposer ; cela ne 
nous ferait pas connaître les méthodes exégétiques employées 
et entraînerait des confusions, des objets différents se trou- 
vant traités par des procédés identiques et inversement. 
Notre fin nous impose de déterminer les moyens divers selon 
lesquels les textes sont exploités et de ranger les exégèses 
sous ces différents chefs. 

L'exégèse de S. Paul se présente sous des espèces et à 
des degrés divers. Exégèse directe et expresse quand le texte 
biblique invoqué est commenté ou accompagné d'une remar- 
que ; exégèse indirecte quand untexfce est cité à l'appui d'une 
affirmation, sans que soit indiqué le rapport de l'un à l'autre ; 
exégèse encore plus indirecte dans les citations implicites. Il a 
paru plus méthodique d'étudier d'abord les exégèses directes 
qui nous livrent en clair les méthodes exégétiques de S. Paul; 
nous posséderons alors un fil conducteur qui nous guidera 
dans la considération des exégèses indirectes. 

1. — EXÉGÈSES DIRECTES ET EXPRESSES. 

S. Paul est un écrivain composant ses lettres à la hâte, dans 
la fièvre de l'action, en vue d'un résultat urgent à obtenir ; 
il dicte avec la même exaltation oratoire qui le possède quand 
H prêche ou qu'il discute : rien ne refrène son esprit intui- 
tif; tout, au contraire, le stimule et le porte à proférer, 
sans autre addition, la sentence décisive. D'autant plus pré- 
cieux et révélateurs de sa dialectique sont ses commentaires, 
même quand ils se réduisent à un mot. 



EXÉGÈSE PAULINIENNE. 295 

Viennent d'abord les exégèses sans portée démonstrative; 
nous groupons ensemble toutes les exégèses typologiques et 
symboliques. 

1° Simple remarque pour éviter une confusion. 

/ Cor. 15, 27*, il ne faut pas entendre en un sens absolu le 
« tout » du Psaume (8, 7), cité pour affirmer que l'ennemie 
suprême, la mort, est aussi défaite dans le triomphe du 
Christ : il est évident que le Père, qui soumet toutes choses 
à son Fils, ne se soumet pas pour autant à lui. S. Paul aime 
ces parenthèses, qui précisent le sens d'une proposition, 
dissipent une équivoque^. 

2° Application homilétique d'une sentence d'ordre moral. 

Les rabbins, et encore aujourd'hui les prédicateurs ecclé- 
siastiques, aiment à renforcer leurs exhortations d'une 
sentence biblique, qui exprime leur sentiment, même si 
originairement elle avait un autre destinataire et se rappor- 
tait à d'autres circonstances. Pour les chrétiens ces applica- 
tions, plus otÎ moins accommodatices, trouvent, en outre, 
cette excuse et cette justification que presque tous les per- 
sonnages de l'Ancien Testament peuvent être considérés 
comme des figures du Christ et de ses fidèles. 

Pour engager ses Corinthiens à ne pas laisser stériles les 
grâces divines, S. Paul reprend une promesse de secours faite 
au Serviteur de Yahwé {h. 49, 8) et il assure qu'elle s'ap- 
plique parfaitement à ses lecteurs, en raison du parallé- 
lisme exact des circonstances : « temps propice », « jour du 
salut » {^ Cor. 6, 2). 

Un peu plus loin, dans son sermon de charité, il les invite 
à ne pas craindre que leur générosité épuise leurs ressources ; 
il évoque l'exemple du juste idéal qui donne largement aux 
pauvres et qui, pourtant, demeure toujours en état de mani- 



1. Cf. Rom. 5, 1^; 1 Cor. 3, 8^; 4, 20; 10, 29; 15, 10î>, 44^ 46, 52i'; 
2 Cor. 2, 16; 5, 3, 7 ; .12, 2, 3; 13, 4»; Gai. l, 7; 5, 13^.. Cf. Béb. 
6, 13. 



296 EXÉGÈSE PAXJLINIENNE. 

f ester sa « justice », sa philanthropie, par sa bienfaisance 
(Ps. 113, 9). Pour eux, tout pareillement (application), Dieu 
les récompensera en accroissant leurs récoltes et, partant, 
leur puissance charitable (J^ Co7\ 9, 9-11). 

Il est naturel de trouver des applications de ce genre dans 
l'épltre aux Hébreux, si riche en développements homiléti- 
ques. Nous laissons, pour y revenir, la longue homélie de 3, 
7-4., 11. Dans la transition qui conduit au chapitre sur la 
foi, l'auteur exhorte ses lecteurs à une patiente et courageuse 
persévérance (10, 37-39). Pour cela il prend, dans le texte 
d'Habacuc^, devenu un des Keux classiques de la doctrine 
chrétienne sur la foi {Rom. 1, 17; Gai. 3, 11), trois vers, 
mais tournés et adaptés à la fin recherchée. Les paroles prophé- 
tiques ne sont pas introduites par une formule de citation, 
mais par quelques mots, une locution adverbiale, prise dans 
Isaïe (26, 20) et destinée à corser l'effet à produire : la proxi- 
mité de l'avènement du Seigneur. Une conjonction, yocp, peut 
suggérer que les termes suivants sont décisifs, sont un oracle 
divin. Le premier vers d'Habacuc(2, 3, 4), suivant la mau- 
vaise traduction des LXX, laisse entendre que tout proche est 
l'avènement, non de la vision attendue, mais du Christ, le 
èp)joîj,£voç. Aussitôt après, par une interversion hardie, est 
transcrit le dernier vers sur la foi, source de vie, avec les 
modifications de teneur et de sens courantes chez les chré- 

1. Pour donner plus de clarté à nos remarques, nous transcrivons 
en entier la périocope d'Habacuc (traduction Crampon) : 
2, 2. Et lahwé me répondit et dit : 

Écris la vision et grave-la sur les tables, 

afin qu'on y lise couramment. 

3 Car il y a encore une vision pour un temps fixé ; 
elle se hâte vers son terme et ne mentira pas ; 
si elle tarde, attends-la, 

car elle arrivera certainement, elle ne manquera pas. a 

4 Celui dont l'âme s'enfle au-dedans de lui n'est pas dans 

le droit chemin; b 

mais le juste vivra par sa foi. c 

Voici ce que deviennent dans le grec des LXX a, b, c : 
(transcrits dans notre épître suivant l'ordre a, C, b) 

Stt £p)(^6[jisvo$ vîÇêt -/.où où [à\ y^povtUT], (Heb. où ypoviet). 
sàv unoa-X£tXY]Tat, oùr. sùooy.si y) J'oy^ïj p-ou ly aÙTw. 
ô Bl otxatoç £/. TitaTEciç ^o'j Çrîcexai . 



EXÉGÈSES EXPRESSES. 297 

tiens. Enfin vient l'avant-dernier vers, si obscur dans l'origi- 
nal : en sa nouvelle place, il ne peut désigner qu'un retard, 
une défection du juste; d'où l'antithèse que reprend un 
rapide commentaire : les chrétiens sont les hommes, « non 
de la défection, mais de la foi ». Il est évident que cette 
utilisation du texte prophétique, avec le commentaire qui la 
souligne, ne prend que la matière de la lettre pour lui insuf- 
fler un sens nouveau. Il est difficile de ne pas qualifier 
d'accommodatice ce sens-là. 

Plus loin, à propos des persécutions et de la lutte contre 
les péchés, il recommande le courage en rappelant, comme 
une exhortation divine, les sentences des Proverbes (3, 11,12) 
sur les corrections paternelles, et il les commente très heureu- 
sement en assurant que les châtiments envoyés par Dieu 
sont une preuve qu'il nous traite comme ses enfants et en 
ajoutant des considérations opportunes sur les comporte- 
ments des pères terrestres à l'égard de leurs fils (12, 5-11)'. 

3° Sens déduit d'un texte biblique. 

Une conj onction, conclusive, venant après un texte invoqué, 
indique qu'il fournit une base à une déduction. 

A propos de la glossolalie, charisme inférieur, S. Paul 
rappelle, en la paraphrasant très librement, la parole d'Isaïe 
(28, 11, 12), menaçant ses auditeurs, qui se moquent de sa 
prononciation, de l'invasion des Assyriens, dont ils ne com- 
prendront pas la langue, langue de barbares pour eux. Et il 
conclut : « en sorte que (wate) les langues doivent servir de 
signe, non aux croyants, mais aux infidèles ». Une langue 
inintelligible est un signe de défaveur pour des sujets 
désobéissants, qui ne méritent pas des dons plus élevés; il 
ne convient doilc pas de la rechercher avec tant d'avidité et 
encore moins de s'en glorifier (/ Cor. 14, 21, 22) : plutôt 
déduction un peu laborieuse qu'application typologique. 

1. Plusieurs rabbins anciens utilisent ce même texte des Proverbes 
pour prouver combien précieuses sont les épreuves, les corrections, 
infligées par Dieu. Voir notre Judaïsme palestinien au temps de J.-C, 
Paris, 1935, II, p. 97. Voir aussi Strack-Billerbeck, Kommentar zum 
N. T. aus Talmud und Midrasch, II, p. 193, sqq., III, p. 747. 



298 EXÉGÈSE PATJLINIENNE. 

Pour S. Paul la justification par la foi se trouve prédite 
dans la promesse faite à Abraham : « en toi seront bénies 
toutes les nations de la terre » (amalgame de Gen. 18, 18 et 
12, 3); et il en tire la conclusion ((Sgxe) que « les croyants sont 
bénis avec Abraham le fidèle » [Gai. 3, 8, 9). Cette conclusion 
est la résultante d'un raisonnement complexe qu'il serait 
peut-être difficile de mettre en forme comme le font certains 
commentateurs. Toute bénédiction est une participation à la 
bénédiction principieUe promise à Abraham ; elle n'est accor- 
dée qu'à ceux qui sont les fils d'Abraham par la foi [Rom. 4, 
11, 12). Il importe de comprendre que la dialectique de 
l'Apôtre relève plus de l'intuition que de la syllogistique 
aristotélicienne. 

Pour conclure son développement contre les faux apôtres, 
qui s'enorgueillissent de titres de gloire usurpés (5 Cor. 
10, 17), S. Paul rappelle, le principe aimé (ju'il tire, par une 
simplification réductrice, deJérémie (9, 23; cf. / Cor. 1, 31) : 
(( Celui qui se glorifie dans le Seigneur » ; et il en tire (^ap) 
une conséquense que supportent à la fois le texte complet du 
Prophète (9, 22) et la conduite de ses adversaires : toute 
recommandation est vaine si elle ne vient pas de Dieu; 
déduction simple, par conversion négative, dirait-on en 
logique mineure. 

4» Conclusion fondée sur le sens strict d*un terme; 

L'élève de Gamaliel n'a pas oublié le littéralisme rabbinique 
(jui autorise à prendre un mot suivant son sens le plus 
strict. 

Rigueur philologique et exégèse de forme toute rabbinique. 
Dans la considération [Gai. 3, 16) sur la pî'omesse faite à 
Abraham, que la Loi ne peut rendre caduque, un mot bibli- 
que suggère une remarque lumineuse, une doctrine centrale, 
dont le rappel fortifie l'argumentation. Ces promesses sont 
adressées aussi à la descendance (à la semence) d'Abraham 
[Gen. 13, 15 et 17, 8); sur quoi se greffe l'exégèse de forme 
bien rabbinique : « Il (Dieu ou l'Écriture) ne dit pas « aux 
semences » au pluriel, mais au singulier « à la semence »j 



EXÉGÈSES EXPRESSES. 299 

ce qui est le Christ ». N'avons-nous pas une de ces identi- 
fications, (exégèses distributives) si fréquentes chez les 
rabbins? Ici S. Paul fonde l'identification à la fois sur le 
singulier et sur la conviction que le Christ est par excellence 
la descendance d'Abraham, celle en qui s'accomplissent les 
divines promesses. Scribe? Oui! mais plus encore chrétien. 

Philologie précise par l'analyse grammaticale exacte de la 
phrase, citée presque textuellement {Gen. 15, 6) : « Abraham 
crut en Dieu et cela lui fut compté comme justice «. « Être 
compté » ne peut avoir que deux sujets (dilemme) : ou bien 
un travail pour lequel on est convenu d'un salaire, ou bien tout 
autre acte ne comportant pas de salaire mais en considération 
duquel on reçoit une faveur gratuite ; dans le premier cas on 
a quelque titre de gloire. Ici l'acte exprimé parle sujet est la 
foi, qui s'oppose aux œuvres productrices de salaire : donc 
justice gratuite, dont il ne peut se glorifier [Rom. 4, 3-5). 

Conclusions fondées sur un mot du texte sacré [Rom. 9, 
15-18). Notons les formules introduisant les citations : « Car 
il (Dieu) dit à Moïse », pour bien affirmer qu'il s'agit d'une 
parole divine expresse ; « car l'Écriture dit au Pharaon » : il 
s'agit encore d'une parole divine et, d'ailleurs, il semble que 
parfois « Dieu » et « Écriture » sont mis l'un pour l'autre. Le 
premier texte est extrait de la version grecque des LXX de 
l'Exode (33, 19) : le mot essentiel en est « je fais miséricorde », 
d'où la double conclusion (16 et 18) : l'obtention des grâces 
divines dépend, non des activités humaines mais uniquement 
de la miséricorde divine et Dieu l'accorde à qui il veut. Le 
second texte est pris aussi dans l'Exode (9, 16) mais avec des 
modifications qui mettent davantage en relief l'absolu de l'ini- 
tiative divine; d'autre part, l'auteur suppose connu de ses 
lecteurs un mot qui se trouve en d'autres passages et que le 
passage allégué suppose et résume [h, 21; 7, 3; 9, 12; 
14, 4, 17) « Dieu endurcit le cœur du Pharaon »^ : d'où la 
conclusion : «il endurcit qui il veut ». 

Autre conclusion fondée sur le sens complet d'un mot. Pro- 



1. Il arrive aussi que les rabbins citant un texte, ne transcrivent 
pas le mot topique. 



300 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

position à prouver : l'ancienne alliance, n'étant pas irrépro- 
chable, fait place à une nouvelle. La formule d'introduction de 
l'oracle prophétique le présente comme un reproche prononcé 
par Dieu, Puis vient le texte assez long [Jér. 31, 31-34), sui- 
vant l'usage de l'épitre aux Hébreux de ne pas se contenter 
d'un verset, abondance qui est déjà une démonstration. 
Enfin déduction tirée du mot caractéristique « nouveau » : par 
là est rendue caduque la première alliance {Héb. 8, 8-13). 

Dans la remarque exégétique de même portée (sur Ps. 40, 
7-9) faite un peu plus loin touchant les sacrifices (10, 8, 9), on 
est incliné à voir un souvenir d'une expression rabbinique : 
« il supprime le premier terme pour établir le second » ; les 
rabbins parlaient tout pareillement du premier et du dernier 
mot. 

5° Conclusion fondée sur l'analyse historique 
d'un texte ou d'une situation. 

Type classique de ce moyen de preuve : la démonstration 
de la résurrection de Jésus par une phrase des Psaumes. 
Notons combien l'emploi de cet argument atteste la valeur que 
les Juifs attribuaient à la démonstration scripturaire,| même 
pour un fait dont, normalement, la réalité doit être prouvée 
par le témoignage. S. Paul recourt le premier à cette démons- 
tration dans son discours de la Pentecôte {Act. 2, 24-31). Il 
cite plusieurs versets du Psaume (16, 8-11), comme pour faire 
juger de sa saveur messianique et pour ne pas isoler de son 
contexte la proposition exploitée. Il y voit tine prophétie et, 
en particulier, la prédiction que le sujet à qui se rapporte 
l'oracle sera préservé de la mort. Il était ensuite facile 
d'observer que, David étant mort, cette assurance ne le concer- 
nait pas. De qui l'entendre? Evidemment du Messie, de la 
descendance royale ininterrompue promise par Dieu à David, 
suivant une proposition des Psaumes (132^ 11) dont le sens 
général est rappelé de mémoire. S. Pierre ne prouve pas que 
Jésus est ce Messie attendu : il le croit et la résurrection, 
affirmée d'ailleurs par les témoins oculaires, en est le témoi- 
gnage péremptoire. Démonstration dont le raccourci intuitif 
pourrait inquiéter des logiciens trop analytiques. 



EXÉGÈSES EXPRESSES. 301 

S. Paul, dans son discours d'Antioche de Pisidie [Act. 13, 
34-37), s'adressant à des Juifs, emploie un argument de 
forme semblable, mais encore plus condensé, pour prouver 
la résurrection de Jésus. Le raisonnement semble d'abord 
devoir prendre la forme d'un syllogisme. Majeure tirée d'un 
mot emprunté à Isaïe (55, 3, LXX) : Dieu accomplira dans 
son peuple les grâces promises à David. Mineure : une des 
grâces promises est qu'il sera préservé de la corruption [Ps. 
16, 10). Or David a subi la corruption : d'où la conclusion 
qui condense probablement tout un développement : (c mais 
celui que Dieu a ressuscité n'a pas subi la corruption ». 
L'orateur ne sent pas le besoin de préciser que ce privilégié 
est Jésus. ' 

Par une analyse de la succession des événements S. Paul 
affirme que la justice fut accordée à Abraham indépendam- 
ment de la' circoncision, puisque ce n'est qu'ensuite qu'il 
reçut ce signe {Rom. 4, 11). La considération des événements, 
considération éclairée par un mot de la Genèse (21, 12), 
lui permet d'assurer que la vraie descendance d'Abraham 
comprend, non tous ses enfants suivant la cha^r, mais 
uniquement Isaac et ses autres descendants, héritiers de la 
promesse et enfants de Dieu [Rom. 9, 6-9). 

Nous trouverons tout à l'heure pareille analyse historique 
dans l'homélie de l'épltre aux Hébreux (4, 8) sur le repos pro- 
mis à Israël. Autre conclusion de même ordre [Héb. 10, 18) : 
la nouvelle alBcince que Dieu conclura avec son peuple, com- 
portant la rémission des péchés (/e>. 31, .^4), ne laisse 'plus 
de place aux sacrifices pour le péché. 

60 Eségèses typologiques. 

L'abondance de ces exégèses atteste le goût qu'y trouvait 
la première génération chrétienne. On peut les ranger en plu- 
sieurs espèces en raison des objets considérés et aussi en raison 
des sens divers donnés à « typos ». Le type peut être : un 
modèle de conduite à imiter ou à ne pas imiter ; un exemplaire 
qu'on reproduit, à la vertu et la nature duquel on participe 
(Abraham et le Christ) ; une préfiguration de l'ordre futur 



302 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

(les figures du Christ et de l'économie chrétienne). Nous 
rangeons sous ce chef ce qui est encore une sorte de type : le 
symbole qui conduit à l'exégèse symbolique ou allégorique. 
Nous présentons en premier lieu une exégèse de typologie 
complexe. 

A. — TYPOLOGIE COMPLEXE [Héb, 3, 7-4, 11). 

La deuxième partie de l'épître aux Hébreux, après le 
parallèle entre Moïse et le Christ, se clôt sur une exhortation 
qui prend la forme d'une homéhe, développant quatre versets 
d'un psaume (95, 7-11) transcrits d'après les LXX, avec de 
légères variantes. Le texte à commenter est introduit par un 
« c'est pourquoi suivant ce que dit l'Esprit Saint » : l'écri- 
vain prend le texte à son compte (même si le 3i5 se relie gram- 
maticalement au verset 3, 12). 

Le psaume rappelle la promesse faite par Dieu à Israël : lui 
octroyer une participation au repos dans lequel Dieu est entré 
après la création, à savoir la jouissance de la terre promise. 
Puisque la promesse n'a pas sorti ses effets au bénéfice de la 
génération du désert, Josué ne l'ayant pas introduite en Pales- 
tine, la parole de Dieu s'adresse maintenant aux chrétiens, le 
véritable Israël. Le repos sabbatique qui leur est offert est la 
grâce chrétienne s' épanouissant dans le salut éternel, le 
sabbat divin. 

Jadis il fut « un jour » où Dieu s'adressa à son peuple 
par le moyen de Moïse; il est maintenant un autre « jour «, 
la période de la rédemption, dans laquelle Dieu promulgue 
une révélation nouvelle par l'intermédiaire de son Fils. L'in- 
crédulité des Hébreux, leur désobéissance, les frustra des 
biens promis par le Seigneur ; loin de les imiter, les chrétiens 
se doivent de répondre à l'invitation divine par la foi et par 
l'espérance. 

On voit toute la richesse typologique de cette exégèse. Dieu 
apparaît en premier lieu comme la perfection qui s'offre à la 
fois à notre imitation et à notre participation. Tous les élé- 
ments de l'histoire d'Israël devaient être une ombre des acti^^ 
vités divines, prérogative transférée au Christianisme ; par 



EXÉGÈSES EXPRESSES. 303 

ailleurs tous les détails de l'histoire sainte sont d'abord une 
préfiguration de l'histoire chrétienne, nous livrant à cet égard 
des lumières et des assurances, et ensuite une série d'exemples 
typiques à ne pas imiter, racontés pour notre instruction. 

B. — EXEMPLARISME ET PARTICIPATION. 

Pour démontrer sa thèse de la justification parla foi, S. Paul 
avance, comme argument scripturaire , l'analyse du cas 
d'Abraham. Cas privilégié : la première manifestation histo- 
rique de la justification par la foi, le modèle que doivent imiter 
tous ceux qui veulent être sauvés, le Père des croyants dans 
la lignée de qui s'inscrivent tous les fidèles, acquérant ainsi 
la faculté de participer à la « promesse « qu'il a reçue {Rom. 
ch. k, surtout 4, 23). Il a été justifié par sa foi héroïque en 
Dieu, de même que les chrétiens le sont par leur foi en celui 
qui a ressuscité Jésus (4, 23, 24; Gai. 3, 8); il a été justifié 
avant d'avoir reçu la circoncision afin de pouvoir devenir le 
Père de tous les croyants, circoncis et incirconcis. 

Adam est présenté également comme un principe qu'on 
imite par le péché [Rom. 5, 14) et qui exerce son influence 
sur tous ceux qui lui sont unis [Rom. 5, 12-19; / Cor. 15, 
45-49). 

A plus forte raison et par excellence le second Adam est-il 
celui que nous devons imiter (/ Thés. 1, 6 ; / Cor. 11. 1), à 
qui nous devons ressembler dans une conformité, qui est aussi 
une communion et un gage de participation à tous ses états et 
à toutes ses grâces [Rom. 6, 5). 

G. — LES ISRAÉLITES, TYPES DES CHRÉTIENS. 

C'est dans une exhortation aux Corinthiens (/ Cor. 10, 
6, 11) que S. Paul affirme la portée typique de l'histoire sainte. 
EUe était une préfiguration de l'histoire chrétienne, compor- 
tant déjà une anticipation du baptême et de TEucharistie et 
une présence voilée du Christ (10, 1-4)* ; elle était encore le 

1. Inutile d'aborder ici la fameuse remarque « Petra autem erat 
Christus » qui n'est pas proprement exégétique. 



304 EXÉGÈSE PAULmiENNE. 

temps de la préparation, la période des imperfections, alors 
que l'âge chrétien est celui des « accomplissements des 
âges «. Aussi bien tous les faits de cette histoire nous sont- 
ils rapportés à titre d'avertissement et d'admonestation; 
dans le cas présent pour nous détourner d'imiter la convoi- 
tise des choses mauvaises, illustrée de quelques souvenirs 
concrets. 

Ces types, ces exemples peuvent aussi contenir un encou- 
ragement : ainsi les sept mille hommes qui, au temps d'Elie, 
ne fléchirent pas le genou devant Baal, sont une figure de 
l'Israël fidèle, du petit reste que Dieu toujours se réserve 
{Rom. 11, 2-5). 

Dans ce même sens tout un long chapitre de l'épltre aux 
Hébreux est consacré à rappeler les actes de foi dont est 
remplie l'histoire du monde et d'Israël (ch.li) : non seule- 
ment exemples à suivre tout en les illuminant de la lumière 
du Christ (12, 1, 2), mais préparation de la cité chrétienne 
(11, 10) et épopée inachevée puisqu'elle ne trouve son plein 
accomplissement que dans l'économie chrétienne (11, 39_, 40). 
En outre, plusieurs de ces histoires sont des figures des mys- 
tères chrétiens : le sacrifice d'Isaac (TcapaèoX'/i) préfigure, 
annonce et atteste, le sacrifice du Christ, sa mort et sa 
résurrection (11, 17-19). 

D. — FIGURES DU CHRIST. 

Ce dernier trait nous introduit dans le chapitre, que la 
réflexion chrétienne ne cessera d'enrichir, celui des figures 
du Christ. Des héros et des institutions de l'Ancien Testament 
peuvent être pris comme des préfigurations du Christ, le 
faisant mieux connaître dans sa personne et dans ses activi- 
tés rédemptrices. C'est le grand mérite de S. Paul d'avoir 
révélé ce foyer de connaissance que la tradition ecclésiastique 
ne cessera de scruter pour y puiser de nouvelles instructions. 

Ce sont d'abord les deux Adam qui se correspondent dans 
un parallélisme capital, comportant ressemblances, contraste 
et inégalités, qui font éclater la surabondance de la grâce 
chrétienne {Ro7n. 5, 12-19; / Cor. 15, 44-49). 



EXÉGÈSES EXPRESSES. 305 

L'union matrimoniale instituée pour le premier homme et 
la première femme [Gen. 2, 24) doit être prise comme un 
symbole de l'union qui joint le Christ et son Église {Eph. 5, 
31, 32). 

L'épltre aux Hébreux aifectionne les figures qui révèlent le 
mystère du sacerdoce et du sacrifice rédempteur de Jésus. 
Nous avons rencontré àlmstant la « parabole » d'Isaac (il, 
17-19). En Melchisédech, en sa destinée singulière, se révèle 
une ébauche du Christ, grand-prêtre de la nouvelle alliance, 
ébauche qui manifeste certains côtés du ministère de Jésus 
qu'aucun autre document ne nous enseigne. Deux passages 
nous instruisent sur cette figure sacerdotale du Christ. Un 
mot d'un grand psaume messianique (110, 4) nous fait savoir 
que le Messie est prêtre, appartenant, non à une des vingt- 
quatre classes lévitiques, mais à l'ordre de Melchisédech, et 
qu'il l'est à jamais; la narration de la Genèse (14, 17-20) 
nous livre d'autres détails significatifs [Héb. 5, 6, 10; 6, 
20 ; 7, 1-10). Tous les termes de ces deux textes sont abondam- 
ment exploités, en exégèse, non allégorique^, mais typique. 

Cette exégèse typologique mérite d'être étudiée de près : 
elle est une des plus réussies et achevées, elle présente nette- 
ment les deux espèces d'enseignements que peuvent suggérer 
les figures. 

Enseignements déduits de la lettre, qu'un Juif attentif aurait 
pu découvrir et qui font progresser notre théologie. L'institu- 
tion prédite d'un autre sacerdoce, pris en dehors de la tribu 
de Lévi, annonce l'abolition future du sacerdoce lévitique 
et aussi de la loi ancienne, tous deux incapables de conduire 
à la consommation parfaite, l'économie Israélite ayant pour 
seul rôle d'introduire à l'espérance véritable. Le nouveau 
sacerdoce est supérieur à l'autre parce qu'il n'est pas charnel 
et provisoire, mais ininterrompu ; supériorité marquée aussi 

1. Westcott, dans son commentaire sur ce chapitre, observe que 
« l'épître ne contient pas d'interprétation allég-orique : entre le type 
et l'antitype existe une correspondance réelle, historique, tandis 
qu'entre l'allégorie et son application la correspondance se trouve 
seulement entre quelques points pris arbitrairement pour représenter 
des faits ou des idées d'une autre espèce » (p. 202). Affirmation 
probablement trop générale. 



306 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

en ce que Melchisédech a reçu des dîmes d'Abraham et l'a 
béni. 

Données que seul un chrétien peut dégager, qui consistent 
dans une correspondance entre la figure et son antitype ; 
elles n'enrichissent pas la doctrine chrétienne mais lui appor- 
tent quelque lumière et confirmation. Melchisédech, roi de 
paix et de justice, ne se rattachant à aucune généalogie 
humaine, préfigure celui qui n'a pas de père terrestre, le 
Fils de Dieu. 

C'est de cette dernière espèce que sont les développements 
tirés de la liturgie mosaïque [Héb. 8-10, 18; 13, 11) : au 
croyant, déjà avancé dans la science de sa foi, ils dévoilent 
des préformations saisissantes du sacrifice de la croix et du 
sacerdoce céleste exercé par Jésus glorieux. 

De même la remarque qui applique à la passion du Christ 
(2, 9), par là abaissé pendant quelque temps au-dessous des 
anges, un verset (entendu suivant la teneur de la version 
grecque) du psaume huitième, déjà pris ailleurs par S. Paul 
comme un oracle messianique : le Seigneur est bien l'homme- 
type, l'homme parfait. 

E. — l'économie de la loi figurant l'économie de la foi. 

Voici des exégèses qui, à première vue, paraissent inadmis- 
sibles et ne relever que du sens accommodatice. Pour les 
comprendre il faut tenir compte des grands principes qui 
dirigent les méditations de S. Paul : les traits de l'ordre 
ancien sont des types de l'ordre nouveau et les fins divines 
ne trouvent qu'en celui-ci leur pleine réalisation ; tout dans 
l'Ancien Testament est prédiction et prédiction du Christ; 
les chrétiens, même venus de la gentilité, continuent le véri- 
table Israël et étaient préfigurés par lui. 

S. Paul veut montrer que les conditions actuelles de 
justification n'imposent pas des obligations surhumaines 
{Rom. 10, 6-9); pour cela il recourt aux mots de Moïse, 
assurant que la Loi est facile [Dent. 30, 11-14). Ces expres- 
sions étaient devenues courantes dans la littérature juive 
post-bibHque, tant palestinienne qu'alexandrine, pour signi- 



EXÉGÈSES EXPRESSES. 307 

fier la facilité d'une entreprise. S. Paul se contente-t-il de 
reprendre des locutions usuelles, sans vouloir procéder à 
une exégèse véritable? Dans une prosopopée de style il 
met les mots caractéristiques dans la bouche de la justice 
de la foi : est-ce pour ne pas se référer à l'Écriture ? Mais les 
rencontres avec la lettre sacrée sont trop nombreuses pour ne 
pas trahir une référence voulue ; d'autre part, le hoc est qui 
définit le sens des trois propositions alléguées rappelle trop 
les procédés de l'exégèse distributive des rabbins. Il n'en reste 
pas moins que l'interprète traite son texte avec une singu- 
lière liberté : c'est qu'il sait ce qu'il en doit tirer. La troisième 
proposition ne fait pas difficulté : les paroles de Moïse repro- 
duites assez fidèlement désignent la prédication évangélique, 
qui conduit à la foi [Rom. 10, 8). Mais la foi est inefficace et 
la doctrine évangélique ne prend un sens et n'a valeur que si 
deux conditions sont réalisées, qui dépassent les forces 
humaines : l'Incarnation du Christ et sa résurrection (10, 9). 
Ce sont ces deux faits que l'Apôtre voit indiqués dans les 
deux autres assertions de Moïse, rapportées suivant leur sens 
général mais accommodées aux résultats à trouver. Si le trésor 
à conquérir était retenu dans le Ciel ou caché au profond de 
l'abime (mis ici pour la mer), comment surmonter ces obsta- 
cles? Comment monter au ciel? Comment descendre dans 
l'abime? Tout cela est accompli : « monter au ciel » signifie 
en faire venir le Christ par l'Incarnation (cf. Je. 3, 13); « des- 
cendre à l'abime » désigne le Christ ressuscitant d'entre les 
morts. 

Evidemment de pareilles exégèses ne découlent pas du texte ; 
ne peut les proposer qu'un croyant célestement inspiré dans 
ses intuitions divinatoires et créatrices ; elles ne semblent pas 
sortir de la typologie. Le plus étrange pour nous c'est qu'elles 
prennent la forme d'une démonstration. 

Non plus démonstration, cette fois, mais simple ex'posé greffé 
sur un verset des psaumes [Eph. 4, 8-li citant Ps. 68, 19). 
Ce texte décrivant un triomphe de Dieu, peut s'appliquer au 
Christ, suivant la règle constante permettant de substituer à 
l'Adonai de la Bible le Seigneur des chrétiens. Le texte célèbre 
la montée, l'ascension du triomphateur : usant d'une formule 



308 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

très rabbiniqiie (Qu'est-ce... si ce n'est?), S. Paul voit là une 
allusion à l'Incarnation du Fils de Dieu récompensée par son 
exaltation au-dessus de tous les cieux. Cette glorification lui 
vaut la puissance de combler les siens de ses faveurs (cf. Act. 
2, 33); le prédicateur chrétien reconnaît cette idée dans la 
seconde proposition du psalmiste qu'il transforme radicale- 
ment pour l'effet à obtenir (impossible d'expliquer cette modi- 
fication par une autre version grecque, ou par un targum, ou 
par une métathèse des lettres du mot hébreu) : le triompha- 
teur divin veut, non pas « recevoir des présents des hommes », 
mais « donner des présents aux hommes » ; ce « don de pré- 
sents » désigne l'octroi des divers charismes. Typologie forcée 
et poussant jusqu'à l'extrême limite la loi du genre. 

L'analogie par opposition entre les deux économies ouvre 
un jour sur la grandeur nonpareille de la seconde. La pre- 
mière, la révélation du Sinaï, fut marquée par un ébranle- 
ment de la terre. [Héb. 12, 26-28), Sur la nature de la seconde 
nous sommes instruits par les prophéties d'Aggée, relatives 
au second Temple et au descendant de David, Zorobabel 
(2, 3-9, et 21-23), mais qu'il est loisible d'entendre comme des 
oracles messianiques. Dieu annonce que, comme prélude de 
ces restaurations extraordinaires, il ébranlera cieux et terre 
(6 et 21). L'auteur de l'épitre cite le texte (2, 6) en le paraphra- 
sant un peu : « non seulement... mais aussi », et en renver- 
sant l'ordre des termes, pour marquer que le second ébranle- 
, ment sera universel. Il s'arrête ensuite au « encore une fois » 
pour en tirer l'idée que l'ébranlement signifie la substitution 
d'un ordre immuable, inébranlable, à savoir le royaume de 
Dieu, à l'ordre précédent composé d'éléments créés et péris- 
sables : l'Église envisagée dans son éternité, tout autant 
dans son épanouissement céleste que dans sa période tempo- 
relle (cf. aussi 12, 18-24). 

F. — EXÉGÈSES PARABOLIQUES. 

De même que les rabbins voyaient dans divers objets et faits 
présentés par l'Écriture des symboles de la Loi, d'Israël et des 
autres entités de leur religion, de même S. Paul découvre 



EXÉGÈSES EXPRESSES. 309 

dans différents traits de l'histoire sainte des symboles de 
Féconomie chrétienne; nous arrivons ici à l'exégèse allégo- 
rique : sans dépouiller les récits bibhques de leur valeur his- 
torique, elle y découvre une signification que d'eux-mêmes 
ils ne possèdent pas. 

Symboliques plus encore qu'allégoriques, les enseigne- 
ments que S. Paul déduit du voile de Moïse {2 Cor. 3, 13-4, 6 
utilisant Exode 34, 29-35) ; ils concernent : d'une part tous 
ceux qui sont infidèles au message chrétien, qui ne s'attachent 
qu'à la lettre ; et, d'autre part, tous les croyants qui perçoivent 
l'esprit. Le voile empêchait les Israélites de comprendre que 
l'Ancien Testament était une illumination provisoire, vouée à 
faire place à la lumière véritable ; il signifie aussi l'aveugle- 
ment des Juifs qui leur interdit de pénétrer le sens véritable 
de la lettre bibhque, aveuglement qui cesse dès qu'ils se tour- 
nent vers le Seigneur. Pour les judaïsants l'évangile est 
pareillement recouvert. Quant aux croyants, dégagés de tout 
voile, ils contemplent à découvert la gloire de Dieu, la reflètent 
toujours davantage dans une transfiguration croissante ; ils sont 
ainsi capables de la communiquer aux autres en toute liberté, 
ne dissimulant et ne frelatant rien de la vérité chrétienne. 

L'interprétation pourrait paraître peu systématique et cohé- 
rente, en raison des sens divers donnés au même symbole : 
il ne faut pas oubher le génie intuitif de l'écrivain inspiré, qui 
contemple les aspects multiples de la réahté historique et les 
ramène à une image unique. 

Très allégoriques les considérations que S. Paul greffe 
sur l'antithèse Agar et Sara [Gai. 4, 21-31). Il ne veut pas 
simplement illustrer des thèses prouvées par ailleurs : la 
Nouvelle AUiance groupe des enfants, des hommes libres, 
tandis que l'Ancienne s'adressait à des esclaves ; la Nouvelle 
rend caduque l'Ancienne; il prétend tirer de la Loi une véri- 
table démonstration (21), démonstration capable de convaincre 
ses fidèles qui tiennent ces deux croyances : l'ancienne écono- 
mie est une préfiguration de la nouvelle, une allégorie (âXÀv)- 
Yopou[jt.£va), inculquant un autre sens que le sens historique ; les 
chrétiens sont les vrais fils d'Abraham, parce que les héritiers 
de la promesse. 



310 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

Par un renversement des valeurs, scandaleux et blessant 
pour les Juifs, la lignée servile d'Agar et de ses descendants 
devient le symbole des Israélites, qui, repoussant l'Égiise, 
dépositaire de la promesse, se rangent dans la postérité 
charnelle d'Abraham, celle qui s'oppose à la postérité spiri- 
tuelle, postérité de la promesse; derrière ce chef de file 
s'alignent les autres valeurs caduques : la Loi, représentée 
par le mont Sinaï (mont arabe comme Ismaël), et la Jérusalem 
terrestre, siège de l'économie périmée. S, Paul n'énumère pas 
tous les termes de l'autre ligne, dérivant de Sara, la mère 
des enfants libres ; il se contente de lui donner pour expression 
la Jérusalem d'en-haut, cité spirituelle, cité des hommes libres, 
mère féconde, comme Sara [Is. 54, 1), de nombreux enfants. 
Voici la pointe et la conclusion de l'allégorie ; aujourd'hui, 
comme jadis, le fils de l'esclave persécute le fils suivant 
l'esprit (allusion aux querelles entre les Israélites et les Aga- 
réniens), mais maintenant encore se réalisera l'ordre divin, 
intimé à Sara, de chasser l'esclave avec son fils [Gen. 21., 10, 
12) : cela signifie que les tenants de l'ancienne économie sont 
forclos de l'héritage d'Abraham, de l'héritage de la promesse, 

Comment qualifier l'exégèse, donnée comme démonstrative 
(/ Co7\ 9, 8-10), par laquelle S. Paul tire de l'interdiction de 
museler le bœuf qui foule le grain [Deut. 25, 4) le droit pour 
le prédicateur d'être entretenu par ses fidèles? Le R. P. Allô 
ne voit là qu'un raisonnement à fortiori ; et de fait des rabbins 
ont tiré du texte une conclusion semblable par voie d'assimi- 
lation^ . Nous savons déjà que ce texte avait reçu une interpré- 
tation symbolique, mais justifiée, en outre, par semukin^. 
La remarque « cela a été écrit pour nous », qui rappelle celle 
de 1 Cor. 10, 11, semble indiquer plutôt une interprétation 
de forme typologique; et de même la première remarque, 

1, Baba mesia 88 b, 89 a : l'extension du précepte aux ouvriers, qui 
ont le droit de manger des produits des champs dans lesquels ils 
travaillent, est donnée comme une baraitha. 

Allô, Première épitre aux Corinthiens p. 217, sq. 

2. Voir plus haut p. 228. Voir aussi Stuacr-Billerbeck, Kommentar 
zum N. T., III, p. 286, spp., diverses interprétations symboliques des 
commandements, tant chez les juifs alexandrins que chez les Pales- 
tiniens. 



EXÉGÈSES IMPLICITES. 311 

qui cependant ne vise pas à rejeter l'historicité ou la valeur 
obligatoire du précepte : « Est-ce des bœufs que Dieu se pré- 
occupe? )) / Tim. 5, 17, 18 rappelle et résume cette argumen- 
tation complexe, 

7° Remarque sur ces exégèses. 

Une seule remarque sur ces exégèses explicites, qui manifes- 
tent au mieux quel parti S. Paul veut tirer de ses citations 
bibliques. Les interprétations typologiques sont proportionnel- 
lement les plus abondantes. Si beaucoup de ces exégèses sont 
entreprises poiir justifier une proposition, d'autres le sont 
simplement pour illustrer une considération religieuse, illus- 
tration qui éclaire, qui confirme, mais qui ne prétend pas 
démontrer. S'il en est ainsi dans les exégèses directes, à 
combien plus forte raison devons-nous nous attendre à trouver 
dans les autres citations tout autant des illustrations que des 
démonstrations scripturaires. 

IL — EXÉGÈSES SUPPOSÉES PAR LES CITATIONS EXPLICITES. 

Par citations explicites nous entendons les citations formel- 
les et les citations virtuelles et équivalentes. 

Dans certaÏQS cas ces citations visent à introduire un argu- 
ment scripturaire, dans d'autres elles ne font qu'appliquer 
à un personnage ou à une situation une sentence biblique, 
ce qui est encore une forme de démonstration, souvent aussi 
elles ne veulent que formuler, en termes sacrés, une pensée 
de l'auteur, ce qui en est une sorte de confirmation ; parfois, 
enfin, la citation n'a que la valeur d'une simple allégation. 
C'est suivant ces quatre chefs que nous rangeons les citations 
explicites. Nous confessons qu'il est difficile pour certaines de 
discerner si elles sont vraiment démonstratives ou simple- 
ment confirmatives. 

1" Citations supportant une démonstration. 

Parfois le rapport du texte à la proposition à justifier est 
simple et direct, parfois aussi il implique tout un raisonne- 
ment ; nous irons dans notre exposé du plus simple au plus 
composé. 



312 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

A. DÉMONSTRATION PAR APPLICATION DIRECTE d'uN TEXTE. 

a. APPLICATIONS ÉVIDENTES. . 

Cas le plus simple : les textes de l'Écriture (de la Loi) s'ap- 
pliquant aux Juifs {Rom. 3, 19), les sentences affirmant le 
règne universel du péché attestent que tous les Juifs sont 
pécheurs, non moins que les Gentils [Rom. 3, 10-18). 

L'infériorité des anges est démontrée par les mots qui les 
concernent, tout au moins dans la tradition des LXX 
i^Réh. 1,7, citant Ps. 104., 4). La supériorité du Fils, de Jésus, 
du Messie, est prouvée par les textes qui se rapportent à lui, 
soit parce que tirés de Psaumes messianiques [Réh. 1, 5, 8; 
2, 5-8, citant Ps. 2, 7; 4-5, 7, 8; 8, 5-7 entendu déjà messiani- 
quement dans Mt. 21, 16 et / Cor. 1, 27; 15, 27; Eéh. 1, 13 
citant P5. 110, 1), soit parce que dits d'une figure du Messie, 
Salomon {Héb. 1, 5^ citant 5 Sam. 7, 14) ^ soit parce que 
concernant le Seigneur, qui est aussi le Christ [Eéh. 1, 6, 
citant Ps. 97, 7, appliqué au moment de llncarnation; 1, 10- 
12 citant Ps. 102, 26-28, qui décrit l'action créatrice de Dieu). 
De même ordre est la preuve que Dieu a suscité Jésus [Act. 
13, 33, citant Ps. 2, 7, formule de l'investiture messianique), 
et l'affirmation que Jésus n'a pas usurpé le sacerdoce suprême 
[Eéh. 5, 5, 6, citant Ps. 2, 7 et 110, h). 

h. APPLICATIONS DE PROPHÉTIES DÉJÀ RÉALISÉES. 

Sur ce point triple difficulté. L'auteur fait-il à un événe- 
ment actuel l'application simple d'un texte biblique? Veut- 
il démontrer que cet événement a été prédit et donc voulu 
par Dieu? Veut-il prouver par un texte ancien le sens qu'il 
donne à une réahté présente ? Souvent ces trois points de vue 
paraissent confondus. Au surplus, l'écrivain inspiré ne juge 
pas des prophéties comme nous : non seulement il utilise 
les oracles clairement messianiques, mais encore il entend 

1. S. Augustin, de Civitate Dei, XVII, '8, dit que Salomon « prae- 
nuntiabat Christum ». 



EXÉGÈSES IMPLICITES. 313 

au sens messianique des messages dans lesquels les Prophètes 
décrivaient à l'avance tel épisode de l'histoire d'Israël, 
épisode qui pour nous et pour lui appartient au passé; il 
voit dans les dits et les gestes des personnages figuratifs tout 
autant de prédictions ; enfin il n'hésite pas à prendre isolé- 
ment de son contexte une sentence qui convient à son dessein. 
Il faut tenu* compte de toutes ces considérations pour appré- 
cier équitablement les développements de S. Paul sur l'infi- 
délité d'Israël [Rom. 9-11). 

Les seules prophéties citées au sens littéral sont : la plainte 
d'Isaïe au sujet du serviteur de Yahwé [Is. 53, 1 cité 10, 16), 
la menace divine rapportée par Moïse {Deut. 32, 21 cité 10, 
19), la prophétie d'Isaïe, mais entendue seulement de l'Israël 
idéal, à savoir de ceux qui répondent au message divin, 
même s'ils sont d'origine païenne [Is. 65, 1, 2 cité 10, 20, 21), 
et, avec les mêmes précisions, celle d'Osée (2, 23; 1, 10, 
cité 9, 25, 26). 

Les autres textes venus d'Isaïe, se rapportent à un moment 
déjà dépassé de l'histoire d'Israël, d'un Israël typique; ces 
prophéties, visant un avenir national, sont aussi, à certains 
égards, messianiques (7^. 10, 22, 24, et 1, 9, cités 9, 27, 29 ; Is. 
8, 14 et 28, 16 cités 9, 33; h. 52, 7 cité 10, 15; Is. 29, 10 
et 6, 9 cités en 11, 8). Les imprécations de David contre les 
impies, ennemis du juste, peuvent être prises prophétique- 
ment, comme dirigées contre les pécheurs par excellence [Ps. 
69, 23, 24 cité 11, 9, 10). Est-ce sortir de l'exégèse typolo- 
gique prophétique que de voir dans l'hommage que les 
cieux rendent à Dieu une figure, « un pressentiment » de la 
diffusion universelle du message évangélique [Ps. 19, 5 cité 
10, 18)? Gomme le dit si justement le R, P. Lagrange : 

...Quand les auteurs sacrés sont cités c'est moins une exégèse du 
sens propre et historique de 1 eur oracle qu'un appel à l'autorité de la 
parole de Dieu qui domine tous les temps. Ce qui a été dit autrefois 
trouve dans l'Évangile une véritable réalisation, parce que les ancien- 
nes paroles comme les anciens faits étaient des figures dont le Christ 
donnait le sens. Il n'y a pas pure accommodation, ni prophétie exclu- 
sivement propre à l'Évangile, mais emploi d'une parole ancienne appli- 
cable au temps présent d'après la portée qu'il avait plu à Dieu de lui 
donner, sans même que l'objet direct de cette parole soit le type précis 



314 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

de l'objet qu'elle atteint; par exemple les cieux ne sont pas le type des 
Apôtres.. Paul admet que l'Écriture était figurative et l'allègue dans ce 
sens. On peut donc qualifier .cette manière de citer : accommodation 
figurative. Elle n'exclut pas naturellement dans d'autres textes une 
argumentation plus stricte ^. 

Application prophétique littérale : de l'oracle sur le Servi- 
teur de Yahwé {Is. 52, 15 cité Ro7n. 15, 21) aux prédicateurs 
de l'Évangile; de la prédiction sur la Jérusalem nouvelle (/s. 
54, 1) à l'Église, mère, contre toute attente, féconde [Gai. 
4, 27) ; et du triomphe du fils de Jessé {Is. 11, 10) à la conver- 
sion des gentils [Rom. 15, 12). 

Illustration et peut-être aussi définition typologique du 
Christ, pendu au bois : le condamné à mort exposé sur le 
gibet, et dont l'état est une malédiction au regard de Dieu 
[Dent. 21, 23, cité dans Gai. 3, 13). Figure encore plus exacte 
des savants de ce siècle qui se confient en leur prétendue 
sagesse, ces sages de Jérusalem, qui aveuglent le peuple 
[h. 29, 14 cité dans / Cor. 1, 19). 

C. PROPHÉTIES A RÉALISER DANS l' AVENIR. 

Les prédictions des anciens Prophètes concernaient aussi 
l'histoire de l'Église ; elles peuvent donc, soit prises directe- 
ment en elles-mêmes, soit prolongées par une déduction 
simple et comme automatique, renseigner sur l'avenir. Les 
cris victorieux sur la défaite de la mort en Isaïe (25, 8) et en 
Osée (13, 14, un peu modifié) nous assurent qu'elle finira 
par être vaiacue (/ Cor. 15, 55); conclusion que suggèrent 
aussi les oracles sur le triomphe total du Messie [Ps. 110, 1 
et 8, 7 cités / Cor. 15, 25, 26). Est-il besoin d'un raisonne- 
ment pour voir annoncée la conversion future d'Israël dans 
les prophéties, prédisant que ses péchés seront enlevés [Is. 
59, 20 et 27, 9, groupés de mémoire et cités Rom. 11, 26, 27)? 
Application littérale d'un mot [tous] et quelque peu déduc- 
tion, l'opération qui découvre une énonciation du jugement 
universel [Rom. 14, 11) dans l'oracle [Is. 45, 23) sur le règne 
universel de Dieu. 

1. Epitre aux Romains, p, 265. 



EXÉGÈSES IMPLICITES. 315 



B. — JUSTIFICATION d'uNE AFFIRMATION HISTORIQUE. 

Pour justijBer l'affirniatioii d'un fait il suffit souvent de 
rappeler le récit biblique qui le rapporte : ainsi pour justifier 
le titre «. notre père » donné à Abraham (titre d'ailleurs 
courant dans la littérature juive) et montrer l'héroïcité de sa 
foi {Rom. 4, 16-22 citant Gen. 17, 5; 15, 5; 17, 17). Il résulte 
aussi d'une simple analyse de l'histoire d'Isaac [Gen. 21, 12) 
que la filiation véritable d'Abraham est la filiation suivant 
l'esprit et que l'élection divine est entièrement libre et gra- 
tuite [Rom. 9, 7-13). 

G. — DÉMONSTRATION PAR EXPLOITATION DU SENS STRICT d'uN MOT. 

Nous retrouvons les procédés httéralistes qui exploitent un 
mot, même détaché de son contexte. Le Seigneur étant aussi 
le Christ, on peut entendre de ce dernier l'assurance donnée 
à quiconque l'invoque {Rom, 10, 13 citant Joe/ 3, 5); il était 
permis également d'appliquer à la foi au Christ {Rom. 10, 11) 
la confiance dans la pierre d'angle qui le figure {Is. 28, 16) 
{quiconque croit : efficacité de la foi). Les termes du récit de 
la création attestent la réalité du « corps psychique » (/ Co7\ 
15, 45, citant Gen. 2, 7). La définition exacte de la justice de 
la Loi résulte du mot {faire) employé par Moïse {Lév. 18, 5 
cité virtuellement dans Rom. 10, 5 et Gai. 3, 12). Le début 
des menaces proférées par Moïse {Deut. 27, ^6) contre les 
violateurs de la loi, montre bien que ceux qui ne veulent 
s'appuyer que sur elle courent le risque de la malédiction et 
l'encourent s'ils n'ont pas la foi {GaL d, 10). Frères de Jésus 
sont tous les chrétiens, comme le prouve directement le 
mot du Psaume mis dans la bouche du Sauveur (P^. 22, 23), 
tandis que la même conclusion ne résulte qu'indirectement 
et typologiquement de la parole d'Isaïe (8, 17, 18), figure du 
Christ, sur les enfants que Dieu lui a donnés {He'b. 2, 12, 13). 
Le mot {typos^ modèle) qu'emploie Dieu, ordonnant à Moïse 
la construction du sanctuaire, est Un indice que le sanc- 
tuaire terrestre est une image assombrie du sanctuaire céleste 



316 EXÉGÈSE PA.XJLINIENNE. 

[Ex. 25, 40 utilisé dans Héb. 8, 5). Enfin les termes de Job 
(5, 12, 13) et du Psaume (94, 11) sur les sages, astucieux 
et vains, proclament la vanité de la sagesse humaine (/ Cor. 
3, 19, 20). 

D. ASSIMILATIONS JURIDIQUES. 

Il est courant de déterminer une espèce juridique par 
assimilation avec un autre commandement. Ainsi S. Paul 
déduit l'interdiction de maudire le grand-prêtre de la défense 
de maudire un prince du peuple, le prêtre étant assimilé à 
un prince {Act. 23, 5 citant Ex. 22, 27). Il n'est pas excessif 
d'assimiler l'union que constituent deux fornicateurs à celle 
que réalisent les deux époux légitimes {i Cor. 6, 17 citant 
Ge7i. 2, 24). Assimilation encore : tout comme les Hébreux 
qui recueillaient la manne n'avaient pas plus l'un que l'autre, 
ainsi faut-il que le chrétien qui fait l'aumône et celui qui la 
reçoit ne soient ni plus riches ni plus pauvres l'un que l'autre 
(5 Cor. 8, 15 citant Exod. 16, 18). 

Il était classique également de fonder un précepte moral 
sur des textes poétiques et gnomiques, usage que suit S. Paul 
dans son avertissement sur la vengeance [Rom. 12, 19, 20 
citant Deut. 32, 35 assez modifié et Prov. 25, 21, sq.); et 
aussi dans l'injonction de 2 Cor. 6, 17, 18 (citant divers textes 
amalgamés : Is. 52, 11 ; Jér. 51, 45, etc.). 

E. — DÉDUCTIONS. 

Souvent les textes allégués ne justifient la proposition à 
laquelle ils se rapportent que par le moyen d'un raisonne- 
ment plus ou moins simple et obvie. 



a. EXCLUSION DE LA CONTRADICTOIRE PAR l'aFFIRMATION 
DU PRINCIPE OPPOSÉ*. 

Pour s. Paul on ne peut concevoir que deux principes de 
justice : la foi ou les œuvres de la Loi. Il tient comme affirmé 

1. Sur ce procédé chez les rabbins (plutôt récents) voir Biberfeld, 
op. cit. p. 43. 



EXÉGÈSES IMPLICITES. 317 

par l'Écriture [Habaciic 2, k) que la foi (seule) procure la jus- 
tice (majeure), or il est affirmé également (mineure dans 
Lév. 18, 3) que la Loi ne contient que des oeuvres, non la foi : 
elle ne peut donc justifier ( (î«/. 3, 11, 12). 

Dans leurs contestations avec Dieu les hommes toujours 
ont tort, sont menteurs, puisque Dieu est toujours justifié 
[Ps. 51, 6 cité Rom. 3, k). 

b. A FORTIORI. 

Dans la dialectique paulinienne l'argument à fortiori tient 
une grande place et souvent avec la même formule que chez 
les rabbins (vg. Rom. 5, 9, 10, 17, 15; 11, 12; / Cor. 9, 12; 
^ Cor. 3, 8, etc.) Cet à fortiori peut se réclamer d'une confir- 
mation scripturaire (vg. Héb. 10, 27-30, 31 s 'appuyant sur 
Beut. 32, 35, 36 un peu adapté). Il se fonde exégétiquemen!). 
dans le développement sur le voile de Moïse (^ Cor. 3, 11) et 
peut-être dans / Cor. 9, 9. 

C. CONSÉQUENCE. 

Puisque Dieu est le Maître de tout (Ps. 24, 1), tout ce qu'il a 
créé est bon et permis à l'usage (/ Cor 10, 26; cf. Rom. 14, 3, 
14). De la promesse prophétique faite par Dieu d'habiter à 
l'avenir au milieu de son peuple (citation composite de Lév. 26, 
11, 12 et Ez. 37, 27) on peut induire que les chrétiens consti- 
tuent son Temple (2 Cor. 6, 1 6). De ce qu'il accepte les outrages 
de ceux qui outragent Dieu (d'après le Ps. 69, 10, entendu 
messianiquement), il s'ensuit que Jésus ne s'est point complu 
en lui-même {Rom. 15, 3). Le chrétien ne doit pas cherchera 
thésauriser, mais se confier en Dieu (exprimé par Ps. 118, 6) 
puisque le Seigneur, suivant qu'ilTa souvent assuré [Gen. 28, 
15 ou Deut. 31, 6, sqq,), ne l'abandonnera pas [Héb. 13, 5, 
6). La loi prescrit à la femme la soumission, assure S. Paul 
/ Cor. 14, 34), mais il ne fonde cette affirmation sur aucun 
texte précis ; il estime, probablement, que cette infério- 
rité résulte de tout ce que le Pentateuque raconte sur la 
création et la faute d'Eve (cf. / Tim. 2, 11-14 et / Cor. 
11, 2, 3). 



318 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

2° Textes appliqués à divers personnages 
pour illustrer une thèse. 

Nous avons déjà trouvé plusieurs de ces applications dans 
des arguments typologiques ; elles sont également pratiquées 
pour illustrer une proposition, illustration qui est une sorte 
de confirmation. Ces applications supposent ordinairement 
un rapport typologique; S. Paul en formule le principe à 
propos de la foi d'Abraham, type et principe de notre foi 
[Rom. 4, 23). 

En tant que ministres et représentants du Christ, les apôtres 
s'attribuent l'assurance donnée par Dieu à son serviteur [Is. 
49, 6, repris par S. Paul : Act. 13, 47). Comme de bons 
ouvriers, ils s'apphquent les prescriptions de l'Ancien Tes- 
tament sur la subsistance des travailleurs (■/ Co7\ 9, 7-10). 

S. Paul étend aux chrétiens ce que le Psalmiste dit des justes 
persécutés [Ps. 44, 23 cité Rom. 8, 36); et au temps présent, 
les faveurs promises au Serviteur de Yahwé [Is. 49, 8, cité 
5 Cor. 6, 2). 

Inversement, aux Juifs repoussant le message évangélique 
il applique, reproduisant un propos de son Maître [Marc 4,12), 
la malédiction proférée par Isaïe (6, 9, 10) contre les Israélites 
qui seront rebelles à la parole du Prophète [Act. 28, 26). Il les 
menace [Act. 13, 41) avec les mots d'Habacuc (1, 5) annonçant 
l'invasion des Chaldéens. Comme leurs ancêtres repris par 
Isaïe (52, 5 cf. Ez. 36, 20), les Juifs contemporains provoquent 
les blasphèmes des nations contre Dieu [Rom. 2, 24). 

L'écrivain inspiré pouvait mettre dans la bouche du Fils de 
Dieu, au moment de son Incarnation, la prière du juste, 
cherchant ce qui agrée davantage à Dieu [Ps. 40, 7-9 cité 
Héb. 10, 5-7), de même qu'il avait rapporté à ce même instant 
[Héb. 1, 6) l'adjuration de Dieu à ses anges [Ps. 97, 7 d'après 
les LXX). 

3° Textes allégués comme formule sacrée d'une pensée. 

L'Écriture peut être considérée comme un recueil d'énon- 
ciations inspirées exprimant toutes les réalités divines et 



EXÉGÈSES IMPLICITES. 319 

humaines : il convient donc, pour formuler une thèse, une 
vue sur Dieu ou simplement un sentiment personnel, de lui 
emprunter des termes consacrés par leur origine divine; 
ainsi le discours revêt une valeur plus haute, les proposi- 
tions avancées se trouvent confirmées, sinon démontrées, 
puisque prononcées par Dieu lui-même. 

A. — FORMULÉS DE THÈSES THÉOLOGÏQUES. 

Pour formuler sa thèse sur la justification par la foi, S. Paul 
se sert des deux sentences de l'Écriture qui expriment le, 
principe, au concret pour Abraham [Gen. 15, 6 : Gai. 3,6; 
Rom. k, 3), et dans l'abstrait et en général {Hab. 2, 4 quel- 
que peu schématisé : Rom. 1, 17; Gai. 3, 11; Héb. 10, 38). 
Il emprunte à Jérémie (9, 22, 23), en l'adaptant et simplifiant, 
la formule de la vraie gloire qui n'est que dans le Seigneur 
(/ Cor. 1, 31; S Cor. 10, 17). 

Formule de thèse, plus développée et introduite avec des 
termes qui rappellent une locution rabbinique [Kyôsé bô, 
pareillement), demandée à un psaume (32, 1, 2) qui célèbre 
le bonheur du pécheur pardonné, justifié, par grâce [Rom. 
4, 6, 7). Le rejet d'Esati prouvé par ailleurs (jRom. 9, 10-12) 
est affirmé par Malachie (1, 2 : Rom. 9, 13). 

B. FORMULES d'attitudes MORALES. 

Il est bon de prendre dans les Écritures l'expression de 
certaines exhortations : par exemple donner avec le sourire 
[Prov. 22, 8 : ^ Cor. 9, 7) ; ne pas nourru* en soi la colère 
[Ps. 4, 5 : Eph. 4, 26) ; réconforter les découragés [h. 35, 3 
et Prov. 4, 26 : Héb. 12, 12, 13). Inversement, Isaïe (22, 13) 
fournit la formule de l'attitude des impies devant la mort 
[i Cor. 15, 32). 

Nous pouvons rapprocher le principe du double ou triple 
témoignage rappelé à propos d'une triple visite (5 Cor. 
13, 1 citant Deut. 19, 15). 

Les louanges que les nations rendent à Dieu à cause de sa 
miséricorde, S. Paul les voit indiquées dans divers textes [Ps. 



320 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

18, 50; 117, 1; Deut. 32, 43 : Rom. 15, 9-12) qui ont trait 
aux rapports des gentils avec Dieu, mais peuvent aussi être 
considérés comme des prophéties, ainsi que le suggère l'oracle 
messianique [Is. 11,-10) allégué en dernier lieu. 

G. — MENTION DES ATTRIBUTS DIVINS. 

Pour mettre en relief l'impénétrabilité de la science divine 
qu'est-ce qui convient mieux qu'un mot d'Isaïe (40, 13 : cita- 
tion formelle en Rom. 11, 34 et / Cor. 2, 16 qui condense) 
complété par une proposition de Job (41, 3 d'après les LXX : 
Rom. 11, 35)? 

De même pour affirmer l'inattendu des révélations divines 
sont citées à dessein des maximes bibliques (/ Cor. 2, 9 citant 
Is. 64, 4 un peu modifié et peut-être aussi 65, 17 ou Eccli. 
1, 9). La formule d'introduction montre bien que l'Apôtre 
veut exprimer sa pensée en termes sacrés. 

D, — EXPRESSION DE SENTIMENTS PERSONNELS. 

Sentant en lui l'esprit de foi que le psalmiste (116, 10 sui- 
vant la lettre des LXX) assure posséder, S. Paul réclame 
(^ Cor. 4, 13) pareillement le droit de parler hardiment. Il 
affirme le souci de sa réputation (j? Cor. 8, 21) en des termes 
empruntés aux Proverbes (3, 4 d'après les LXX). 

Il est à remarquer que, dans tous ces emprunts soit expli- 
cites soit implicites, faits aux Écritures, S. Paul reste fidèle au 
sens général du texte, tout au moins tel qu'il le lisait dans la 
version grecque dont il se servait le plus ordinairement. 

4° Simples allégations de textes. 

« On accomplit la loi en un seul précepte [Lév. 19, 18) : 
« Tu aimeras ton prochain comme toi-même » {Gai. 5, 14). 
Le texte n'est cité ni en vue d'une démonstration, ni comme 
illustration, il fait partie de l'énoncé d'une thèse. De même : 
Rom. 13, 9, citant Deut. 5, 17, sq. (ou Ex. 20, 13, sq.) et 
Lév. 19, 18; Rom. 7, 7, rappelant Deut. 5, 21 (ou Exode ^ 20, 
17); ou Eph. 6, 2, 3, mentionnant Deut. 5, 16 [Ex. 20, 12). 



EXÉGÈSES IMPLICITES. 321 

Simples allégations : les rappels des narrations bibliques : 
Rom. 11, ^-k citant / Reg. 19, 10, 14; / Cor. 10, 1-3, 7-10 
résumant E^. 13, 21; 14, 22; 32, 6 ; Nu?n. 25, 1, 9; 21, 5, 6; 
14, 2, 21-23, 29, 36 ; Héb. 9, 20, citant expressément Ex. 24, 8. 

Ce n'est pas dans ces citations-allégations que nous pouvons 
découvrir les méthodes de l'exégèse paulinienne : elles ne 
supposent aucune exégèse. 

III. — EXÉGÈSES SUPPOSÉES PAR LES CITATIONS IMPLICITES. 

Nous ne considérons ici, ni les citations virtuelles dans 
lesquelles l'auteur montre bien qu'il veut se référer à un 
texte, ni les expressions courantes, venues de l'Écriture et 
qui se retrouvent dans plusieurs contextes, telles que : « Dieu 
qui a fait le ciel et la terre, sacrifice de bonne odeur, imiter 
Dieu, gloire de Dieu, livre de vie, Dieu rend suivant les 
œuvres »... Nous n'étudions que les réminiscences qu'on 
pourrait appeler formelles, qui se rattachent à un contexte 
déterminé ; on peut penser ordinairement que l'écrivain, 
en transcrivant ces mots, se rendait compte qu'il citait 
l'Écriture. 

L'examen de ces citations est intéressant. Tout d'abord 
il trahit le culte de S. Paul pour la parole de Dieu, sa 
volonté de donner plus de poids à sa propre parole en la 
tissant de locutions déjà consacrées. Surtout nous pouvons 
voir là si l'Apôtre usait volontiers, ou~non, du sens accom- 
modatice : prenait-il les locutions employées dans le sens 
tant du texte (tel qu'il le lisait dans les LXX) que du contexte 
général? Ou bien utilisait-il les mots bibliques, comme un 
ouvrier ferait d'une pierre arrachée à un monument, sans se 
préoccuper ni de leur sens dans les phrases qu'ils consti- 
tuaient, ni de leur portée dans le passage auquel ils apparte- 
naient? D'autre part, nous découvrons là quels sont les 
thèmes les plus familiers à sa pensée, les aspects qu'il aime 
le plus dans la révélation. 



EXÉGÈSE RABBINIQUE. 11 



322 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 



±° Dieu et son activité. 

Les mots sur l'action créatrice de Dieu {Act. 14,15) repro- 
duisent les paroles de Moïse sur le même sujet {Ex. 20, 11). 
Les interventions fécondantes de la Providence sont assimilées 
à celles de la pluie (5 Co?\ 9, 10 : Is, 55, 10). Le terme àxau- 
Ya(T[Aa, dit du Fils de Dieu {Hed. 1, 2). est trop caractéristique 
pour ne pas venir du livre de la Sagesse (7, 26). 

L'exhortation à la fermeté devant les dissidents (^ Tim. 
2, 19) rappelle, peut-être intentionnellement, les assurances 
de Moïse au sujet de Qoré [Num. 16, 5, 26). 

Les hommages rendus au Christ (PhiL 2, 10) sont exprimés 
avec des mots empruntés à l'oracle (Is. 45, 23) dans lequel 
Dieu annonce que tous l'adoreront. 

Sur le thème du jugement divin nous retrouvons les expres- 
sions par lesquelles les psalmistes et les prophètes décri- 
vent les jugements divins actuels ou futurs : Act. 17, 31 [Ps. 
9, 9); Rom. 2, 6 {Ps. 62, 13 [Prov. 24, 12]); 2 Thés. 1, 8, 9 
{Is. 66, 15; Jér. 10, 25; Is. 2, 10); Héb. 10, 27 {Is. 26, 11). 

Les égarements des idolâtres sont désignés des termes 
bibliques : Rom, 1, 23 et Ps, 106, 20; / Cor. 10, 20 et 
Deut. 32, 17. 

2° Israël et son histoire. 

Il est tout naturel que, rappelant divers traits de l'histoire 
sainte, S, Paul reprenne souvent des termes bibliques et 
dans leur sens premier : ainsi Act. 13, 17-19 ; Rom. 9, 4 
(prérogatives d'Israël) ; S Cor. 3, 3, 7-9, 13, 16 {Exode, 34, 30, 
33, 34; Ez. il, 19); Héb. 3, 2, 5, 17 {Num. 12, 7; 14, 29); 
8. 2 {Num. 24, 6); les ch. 9 et 11 sont remplis de réminis- 
cences verbales précises (l'écrivain suivait de près les livres 
saints); 12, 18-20 {Exode, 19, 12-16). Les qualificatifs donnés 
au premier homme « de la terre, fait de poussière » (/ Cor. 
15, 47) viennent du récit delà Genèse (2, 7). 



EXÉGÈSES IMPLICITES. 323 



3° Prophéties messianiques. 

Les psaumes messianiques (2, 8, 110...) et la prophétie du 
Serviteur de Yawhé qui fournissent tant de thèmes de 
développement à l'épître aux Hébreux sont également à la 
base du vocabulaire (vg. 9, 28, citant Is. 53, 12; cf. 6 20; 
7, 28; 8, 1; 10, 12, 13). 

4° Thèses théologiques. 

Volontiers quelques-uns de leurs termes seront empruntés 
à l'Ecriture : ainsi pour nier la justification par les œuvres 
de la Loi [Rom. 3, 20 : Ps. 143, 2 ; cf. Gai. 2, 16). 

5° Propositions d'ordre moral. 

Nous retrouvons encore des termes bibliques dans des vues 
générales sur la nature de Thomme : menteur (Rom. 3, 4 : 
Ps. 116, 11) ; il n'a pas plus le droit de critiquer son Créateur 
que le vase, le potier qui l'a modelé {Rom. 9, 20, 21 : Is. 45, 
9; 29,16). 

De même, dans des directives morales : Rom. 12, 16, 17 : 
Prov. 3, 7, 4 ; / Cor. 5, 13 : Deut. 17, 7 (13, 6) ; Eph. 4, 25 : 
Zach. 8, 16; Col. 2, 22 : Is. 29, 13. Les développements sur 
la panoplie spirituelle [Eph. 6, 14, 15 et / Thés. 5, 8) sont 
manifestement inspirés d'Isaïe (11, 5 ; 59, 17; 52, 7; 40, 3, 9). 

Les impies sont stigmatisés avec des expressions consacrées : 
Phil. 2, 15 : Deut. 32, 5. 

Enfin, même les sentiments personnels d'espérance {Phil. 
1, 19) empruntent à Job quelques mots, caractéristiques 
(13, 16LXX). 

6° Remarques sur les citations implicites. 

Dans toutes ces citations nous constatons qu'elles sont 
fidèles au sens immédiat du texte d'où elles proviennent. 
Gela montre que S. Paul, utilisant l'Écriture, s'en sert avec 
respect, sans détourner violemment ses expressions de leur 



324 EXÉGÈSE PAULINIEANE. 

sens premier. Là où l'on pourrait dénoncer quelque accommo- 
dation, faisant fi de la portée originale des textes, on ne 
trouve ordinairement que des locutions courantes, qui n'ont 
plus aucune attache avec les passag'es bibliques où elles 
figurent (vg. Rom. 9, 22 rapproché de Jér. 50, 25). 

IV. — CONCLUSION : EXÉGÈSE PAULINIENNE ET EXÉGÈSE RABBINIQUE . 

A comparer les deux exégèses on relève entre elles des 
ressemblances nombreuses, mais aussi des différences radi- 
cales. 

Ressemblances dans les procédés, dans le mécanisme : 
développements homilétiques, exégèses distributives, consi- 
dérations philologiques, raisonnements exprimés ou sous- 
entendus reliant le texte invoqué à la proposition à justifier, 
analyses historiques des faits tenant compte des successions 
chronologiques, exégèses paraboliques, illustrations et con- 
firmations d'une pensée par une maxime scripturaire... Cer- 
tains de ces procédés, Paul les tient de sa formation rabbini- 
que ; tels autres, qui ne relèvent que de la forme générale de 
l'esprit, qu'avait-il besoin de les apprendre? Cependant, même 
rabbinisant, l'Apôtre ne tombe jamais dans l'arbitraire, dans 
le verbiage vide, sinon bizarre et saugrenu. 

Mais sa conception typologique est ce qui le distingue le 
plus profondément des prédicateurs synagogaux. Seule, sa 
foi chrétienne lui révéla toute la signification profonde de 
l'Ancien Testament, sa portée figurative. Les inventions de 
l'exégèse symbolique l'aidèrent à mieux comprendre et expri- 
mer les « types » que l'inspiration divine lui découvrait sous 
la lettre, à percevoir la lumière spirituelle qui la transfigu- 
rait tout entière'. 



CHAPITRE IV 

LES CITATIONS BIBLIQUES CONSIDÉRÉES DANS LEUR MATÉRIEL. 

Après l'étude de l'exégèse paulinienne nous sommes en état 
de mieux comprendre, et nous pouvons donc aborder, deux 
points, qu'il est nécessaire de considérer si nous voulons 
définir complètement l'exégèse paulinienne : sa fidélité au 
sens et à la lettre des écritures citées, comment il introduit 
ses citations. 

I. FIDÉLITÉ AU SENS ET A LA LETTRE DES ÉCRITURES. 

Nous ne considérons ici que les citations explicites. 

Avant d'enquêter sur le sujet, deux remarques prélimi- 
naires s'imposent. 

Sans entrer dans la question, encore fort débattue, du texte 
biblique suivi par S. Paul, on peut retenir, comme solide- 
ment établies par les recherches de Kautzsch, de Vollmer, de 
Bôhl et de Deismann, les conclusions suivantes. S. Paul 
lisait la Bible dans une version grecque fort apparentée aux 
LXX que nous connaissons; son intime familiarité avec ce 
texte se trahit dans son vocabulaire et aussi dans ses concep- 
tions théologiques. Il est impossible de déterminer quelle 
recension des LXX il utilisait. Ordinairement il suit le texte 
grec, même quand il diffère gravement du texte massoréti- 
que. Dans certaines leçons où il s'écarte des LX X(vg./ Cor. 
14-, 21 ; 15, 54i), il s'accorde avec d'autres versions grecques, 
par exemple avec celles de Théodotion, ou d'Aquila, versions 
qui reposaient sur une autre version grecque plus ancienne ^ . 
Dans quelques cas où il semble corriger les LXX d'après 
l'hébreu, par exemple pour Job. 41, 3 et 5, 13 [Rom. 11, 35 

1. Voir PuuKKo, op. cit. p. 55, 199. 



326 BXÉGÈSfi PAULINIENNE, 

et / Cor. 3, 19) d'excellents auteurs, tel Kautzsch, pensent 
qu'on pourrait supposer à la base une autre version grecque ^ . 

Deux conséquences résultent de ces données. Nous ne 
pouvons accuser S. Paul d'être infidèle à la lettre quand il 
prend le parti des LXX contre le texte hébreu : il suit son 
texte habituel. Nous ne pouvons l'incriminer de mal transcrire 
son texte si sa leçon diffère légèrement des leçons des LXX 
que nous transmettent les manuscrits les plus autorisés : sa 
version n'était pas identique aux nôtres. Il n'est pas encore 
établi qu'il ait pris ses citations dans un recueil de textes 
bibliques, où la lettre aurait déjà subi quelques modifica- 
tions. 

Signalons la difficulté, relative à l'Inspiration, que soulè- 
vent les cas où S. Paul reproduit le grec là où il contredit l'hé- 
breu massorétique. « Certains êxégètes, tels que Gornely, esti- 
ment que la leçon des LXX, suivie par l'écrivain du Nouveau 
Testament, doit représenter le véritable texte original, qui 
aurait été altéré dans l'hébreu actuel. D'autres commentateurs 
jugent au contraire que les auteurs sacrés ont pu tirer argu- 
ment d'un passage biblique, cité d'après les LXX, même 
lorsque le sens n'était pas d'accord avec l'hébreu primitif, 
parce que la version alexandrine était reconnue comme texte 
officiel, un peu à la façon dont aujourd'hui il est permis de 
baser un argument théologique sur un texte emprunté à la 
Vulgate latine, même aux endroits où cette version ne rend 
pas exactement le sens de l'original, en raison de l'authenti- 
cité générale de la Vulgate définie par l'Église^. « 

En outre, avant de porter un jugement quelconque sur la 
fidélité au sens original des textes cités, il faut tenir compte 

1. BôHL. op. cit. p. V-VII, croit que circulait en Palestine une édi- 
tion populaire des LXX, que S. Paul aurait parfois modifié son texte 
grec d'après une Volksbihel en araméen (?). 

2. Venard, op. laud. c. 42, 43, Si l'Eglise chrétienne a reçu les 
écritures de l'ancien Testament suivant la forme et dans l'étendue du 
texte des LXX, c'est que cette version jouissait dans une partie du 
Judaïsme d'une autorité incontestable. On sait que la légende mise en 
circulation par la lettre du Pseudo-Aristée a trouvé crédit auprès de 
Philon, de Josèphe et de nombreux écrivains ecclésiastiques. S. Augus- 
tin, en son de Cwitate Dei, reconnaît dans les LXX un texte faisant 
autorité. 



FIDÉLITÉ AU SENS DE L ÉCRITURE. 327 

de deux caractères de l'exégèse paulinienne : parfois elle 
s'appuie sur une sentence scripturaire pour en déduire une 
conséquence plus ou moins obvie ; mais souvent elle procède 
typologiqnement, par « accommodation figurative », méthode 
qui peut conduire à des résultats imprévus. 

On est infidèle à un texte exploité, soit en le prenant dans 
un sens contraire à celui de l'original, soit en modifiant la 
lettre, qu'on respecte ou non le sens. 

1<> Fidélité ou infidélité au sens de l'Écriture. 

Nous ne considérons que les infidélités apparentes, d'abord 
celles qui semblent peu excusables, ensuite celles que justifie 
l'intervention de la typologie. 

A, — INFIDÉLITÉS MATÉRIELLES AU SENS PRIMITIF. 

Nous avons signalé déjà les transformations que subit dans 
l'épltre aux Hébreux (10, 37-39) un petit passage d'Habacuc 
(2, 3, 4) ; on entend du Christ ce qui est dit de la vision pro- 
chaine ; en vertu d'une interversion des vers (et de la forme 
spéciale en grec) les mots obscurs de 4* prennent un sens 
précis, fournissant matière à une exhortation morale : somme 
toute, une de ces accommodations inoffensives que se permet- 
tent les prédicateurs. 

Le défi triomphal « mort, où est ta victoire...? » {i Cor. 15, 
55) prendrait le contre-pied de la déclaration prophétique 
[Os. 13, 14) d'où il est tiré, si celle-ci, suivant l'accent du 
contexte, est une menace ; mais certains exégètes y voient 
un mot d'espérance. Pourquoi S. Paul n'aurait-il pas eu licence 
de suivre cette interprétation? 

La formule de teneur générale sur la gloire véritable qui 
vient de Dieu est une proposition universelle et abstraite 
[1 Cor. 1, 31; S Cor. 10, 17), extraite de tout un développe- 
ment de même sens, mais concret et particulier [Jér. 9, 22, 
23) : opération légitime. 

Le verset d'Habacuc (2,4), devenu une des formules maîtres- 
ses de la doctrine de la justification [Rom. 1,17; Gai. 3, 11; 



328 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

Héb. 10, 39), prend le mot foi et l'idée de vivre avec toute la 
richesse de sens qu'ils revêtent dans le système chrétien. 

Il est évident que « donner des présents » est tout le con- 
traire de « recevoir des présents » [Eph. 4, 8 citant Ps. 68, 19) : 
ne peut-on excuser ce renversement des valeurs par une con- 
sidération de typologie? Le triomphe de Dieu devenant celui 
de son Christ, on conçoit que ce dernier, à l'inverse des triom- 
phateurs antiques, se montre généreux, aimant mieux donner 
que recevoir (cf. Act. 20, 35). 

Cette excuse nous introduit aux cas très nombreux dans les- 
quels des modifications de sens s'expliquent par des vues 
figuratives. 

B. — EXÉ&ÈSES TYPOLOGIQUES. 

La fascination de la figure peut conduire à donner à une 
proposition un sens exactement contraire au sens original. 
Ainsi la Loi [Deut. 30, 12-14.) vient témoigner contre elle- 
même en faveur de la Foi, parce que l'ancienne économie est 
figure de la nouvelle {Rom. 10, 6-9). Les Juifs, descendants 
naturels de Sara, sont rattachés à Agar (G«/.'4, 21-31), parce 
que Sara est la mère des enfants spirituels d'Abraham, de la 
lignée spirituelle qui est celle des chrétiens. Pour des raisons 
analogues, des textes concernant les Juifs [Ts. 65, 1, 2 et Osée 
2, 23) sont dits exclusivement des chrétiens [Rom. 10, 20, 21; 
9, 25). Pareillement, les chrétiens diminués dans leur foi sont 
assimilés (/ Cor. 14, 21) aux Israélites rebelles à Dieu à qui 
Isaïe (28, 11, 12) annonce, comme une punition, la venue de 
barbares dont ils ne comprendront pas la langue. Transfert 
d'image : le voile de Moïse symbolise l'aveuglement des Juifs , 
qui leur cache le sens spirituel des Écritures (^ Cor. 3, 14-16). 

Le plus souvent l'exégèse figurative amène à donner aux 
textes un sens plus haut, contenu virtuellement dans le sens 
littéral ou historique. 

Il était légitime de voir dans l'homme-type du Psaume 8 
le Christ, le véritable Adam (/ Cor. 15, 27, 28; Eph. 1, 22; 
Héb. 2, 6-9), de découvrir le mystère de son Église dans 
l'Union matrimoniale des premiers époux [Eph. 5, 32). Un 



FIDÉLITÉ AU SENS DE l'ÉCRITURE. 329 

voyant, divinement inspiré, contemplait dans Saiomon une 
figure du Christ et entendait de ce dernier {Héh. 1, 5) les 
paroles que Dieu adressait au roi israélite [S Sam. 7, 14). 
C'est encore un inspiré qui mettait dans la bouche du Fils de 
Dieu, venant en ce monde, la prière d'un juste [Héb. 10, 5-7 
citant Ps. 40, 7-9). Il est conforme aux lois de l'exégèse 
messianique d'appliquer au Christ ce qu'Isaïe (28, 16) disait 
de la pierre établie par Dieu en Sion [Rom. 10, 11; cf. 
/ Coi\ 10, 4). Inversement la théologie de la Rédemption 
par le sang permettait de reconnaître dans le condamné 
maudit une figure de Jésus pendu au bois [Gai. 3, 13, citant 
Deut. 21, 23). 

Ce n'est plus en vertu d'une exégèse typologique, mais en 
vertu du principe qui reconnaît dans le Seigneur de l'Ancien 
Testament le Seigneur Jésus-Christ, que divers passages con- 
cernant Dieu sont appliqués à Jésus : Ps. 97, 7 [Héb. 1,6); 
Ps. 102, 26-28 [Héb. 1, 10-12); Joël, 3, 5 [Rom. 10, 13); P5. 
44, 23 [Rom. 8, 36) : Is. 40, 13 (/ Cor. 2, 16) : Ps. 68, 19 
[Eph. 4, 8). 

Sont prises comme oracles messianiques les prophéties qui 
annonçaient un événement décisif de l'histoire israélite, figure 
par conséquent de son âge définitif, de l'âge messianique : 
Aet. 28, 26 (/5. 6, 9, iO); Rom. 9, 25-29, 32, 33; 10, 15; j 1,8 
(05.2,23; 1, 10; 2, l;Js. 10,22,23; 1, 9; 28, 16; 8, 14; 52, 
7; 29, 10). Les savants actuels qui se complaisent dans leur 
vaine sagesse (/ Cor. 1, 19) sont préfigurés par les sages que 
reprend Isaïe (29, 14) ; les Apôtres prennent à leur compte 
[Act. J3, 47) ce que Dieu disait à son Serviteur [Is. 49, 6). Les 
Juifs rebelles à la prédication chrétienne sont assimilés à 
leurs ancêtres dont la mauvaise conduite tirait aux Gentils 
des blasphèmes contre Dieu [Rom. 2, 24 citant Is. 52, 5); et 
d'autre part, [Rom. 11, 9, 10) aux impies sur qui David [Ps. 
69, 23, 24 et 35, 8) appelle les punitions divines. 

Figure encore que de comparer l'égalité que réalise l'au- 
mône à celle qui régnait entre les Hébreux qui recueillaient 
la manne [3 Cor. 8, 15 citant Ex. J6, 18). Il convient de faire 
de la pluie qui féconde [Is. 55, 10) l'image de la Providence 
qui donne l'accroissement aux récoltes [3 Cor. 9, 10). Nous 



330 BXÉGÈSE PAULIMENNE. 

arrivons aux limites extrêmes de la typologie quand nous 
assimilons à l'hymne universel des créatures [Ps. 19, 5) la 
prédication apostolique s'étendant au monde entier {Rom. 10, 
18), ou lorsque nous appliquons aux ouvriers apostoliques 
(/ Cor. 9, 9) l'interdiction de museler le bœuf qui foule la 
moisson {Deut. 25, 4). 

G. — Conclusion. 

c( Accommodation figurative », teUe est la qualification, 
et aussi la justification, qu'on peut décerner à la plupart des 
exégèses que nous venons de mentionner. « Accommodation 
figurative » n'équivaut aucunement à « sens accommodatice ». 
Celui-ci ne prend que la matière des mots et leur infuse une 
âme nouvelle, souvent sans aucune relation avec l'ancienne. 
Dans l'autre forme d'interprétation, ce que voit avant tout le 
commentateur inspiré, c'est une image, un signe, un pressen- 
timent des diverses réalités qui composent le mystère chré- 
tien. Un lecteur non averti ne découvrirait pas ce rapport entre 
les éléments de l'économie ancienne et ceux de la nouvelle ; 
mais il peut avouer que ce rapport n'est pas arbitraire ou 
imaginaire : réelles, quoique souvent fort légères, les ombres 
par lesquelles l'Ancien Testament manifeste le Nouveau. 

2° Fidélité ou infidélités à la lettre? 

Nous ne retenons ici que les désaccords entre le texte des 
LXX et les citations bibliques faites par S. Paul. 

On pourrait les classer suivant les formes des variantes : 
interversions, formes différentes, omissions ou additions de 
termes, résumés... Nous préférons suivre une autre classi- 
fication, qui met davantage en relief l'importance des diver- 
gences et leurs raisons possibles. 

A. — DIVERGENCES GRAVES, INTÉRESSANT LE SENS. 

Nous ne voyons, répondant pleinement à ce signalement, 
que la citation du psaume (68, 19) dans Evh. 4, 8, et, quelque 
peu, l'interversion pratiquée dans Habacuc 2, â, 4 (Héb. 10, 



FIDÉLITÉ A LA LETTRE BIBLIQUE. 331 

37-39). La variante numérique (24, pour 23) de / Cor. 10, 8 
s'explique probablement par une différence de recension. 

La réduction en sentence gnomique de Detit. 32, 35, qui 
joint si heureusement la leçon de l'hébreu et la version grecque 
(hébreu : à moi la vengeance et la rétribution ; grec : Iv 'hi[>.épcx 
èxSa-^CTEuç àvTaTCoâcocw) ne change pas substantiellement la 
teneur de l'original {Rom. 12, 19; Héb. 10, 30). Et guère 
plus l'opération qui tire d'un développement concret (Je>. 9, 
22, 23) une proposition générale et abstraite (/ Co7\ 1, 31; 
2 Cor. 10, 17). 

B. MODIFICATIONS INTROD-UITES EN VUE 

DE LA DÉMONSTRATION. 

Modifications presque toutes assez légères qui ne corrom- 
pent pas le sens du texte biblique. 

La plus accusée est l'exploitation de Deut. 30, 12-14 sur la 
facilité de la justification par la foi [Rom. 10, 6-9); mais 
« descendre dans l'abîme » , qui amorce l'exégèse sur la résur- 
rection du Christ, n'est pas ti'ès différent de « passer la mer » 
et reste dans la ligne générale du passage. 

Est-ce pour mieux marquer qu'Abraham est le destinataire 
unique de la promesse [Héb. 6, 14) que le pronom « toi », 
remplace le complément « ta semence » [Gen. 22, 17)? 

Additions de mots qui ne changent pas le sens, mais le 
précisent dans la ligne de la thèse chrétienne : è-j^'aÙTÛ ajouté 
[Is. 28, 16) pour marquer l'objet de la foi [Rom. 10, 11). 

Substitutions d'un mot à un autre pour mieux marquer la 
portée démonstrative de la citation. « Le fils de la femme 
libre » {Gai. 4, 30) au lieu de « mon fils Isaac » {Gen. 21, 10). 
(( Les raisonnements des sages » (/ Co7\ 3, 20) au lieu de 
« raisonnements des hommes » [Ps. 94, 11) pour rester dans 
la note du développement. 'E^ri-{eipà o-c {Rom. 9, 17) au lieu du 
heTqp-q^q de l'original {Ex. 9, 16) accuse mieux la souverai- 
neté de l'initiative divine. Intentionnel probablement aussi le 
changement de « il viendj^a à cause de Sion {Is. 59, 20) en 
«il viendra de Sion» {Rom. 11, 26). 'AOeTT^aw (/ Cor. 1, 19) au 
lieu de xpùdito {Is. 29, 14) accuse l'intention divine de rejeter 



332 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

la fausse sagesse. Et ùtco Geou de Deut. 21, 23 a peut-être été 
omis [Gai. 3, 13) par respect pour la personne du Christ. 

C'est probablement pour mettre en relief la part faite aux 
œuvres que S. Paul supprime le complément dans la devise 
de la prétendue justice de la Loi (c celui qui accomplira )) 
[Rom. 10, 5 citant Lév. 18, 5). Pareille suppression de complé- 
ment détermiaatif donne une physionomie plus chrétienne à 
la maxime d'Habacuc (2, k) : « le juste par la foi vivra » 
[Rom. 1, 17; Gai. 3, 11 ; Héb. 10, 38) au lieu de iv. icfaxswç jjlou 
(l'hébreu porte : par sa foi). 

C'est aussi pour mieux faire ressortir le sens idoine à la 
thèse que des citations sont légèrement paraphrasées ; i Cor. 
15, 45 {Gen. 2, 7) ; Héb. 12, 26 [Aggée, 2, 6). 

C. — MODIFICATIONS STYLISTIQUES. 

Nous appelons ainsi des modifications qui ont pour objet 
de rendre un texte plus clair, ou bien de l'adapter au mouve- 
ment général du contexte nouveau auquel il est incorporé. 

Ainsi les deux propositions d'Osée (2, 23) sont unifiées 
sous un seul verbe (j'appellerai : Rom. 9, 25). Un peu plus 
loin dire, au lieu de « si le peuple d'Israël » (7^. 10, 22), « si le 
nombre des enfants d'Israël » [Rom. 9, 27) rend la phrase 
plus cohérente. Kyî[ji.(0(7£iç (/ Cor. 9, 9 et / Tim. 5, 18) au 
lieu de (Di\)Maziq, un peu impropre [Deut. 25, 4), rend mieux 
le terme hébreu correspondant et éclaire la pensée. 

Parfois le développement appelle le remplacement d'un- 
pronom par le substantif qu'il représente : (( le nom de Dieu » 
[Rom. 2, 24) au lieu de « mon nom » [Is. 52, 5); u les anges 
de Dieu » [Héb. 1, 7) au lieu de « ses anges » [Ps. 97, 7) ; 
la substitution d'un pronom à un autre : « son règne » [Héb. 
1, 8) au lieu de « ton règne » [Ps. 45, 7) ; une modification 
de nombre : « leurs yeux » (des impies, Rom. 3, 18) au 
lieu de « ses yeux » [Ps. 36, 2), Exprimer le nom sous- 
entendu [Héb. 4, 4) éclaire la phrase citée [Gen, 2, 2). 

D. — TEXTE CONTAMINÉ PAR UN AUTRE TEXTE. 

Parfois des termes étrangers au texte cité lui sont incorpo- 
rés, provenant d'un autre passage que l'écrivain récite soit 



FIDÉLITÉ A LA LETTRE BIBIJQUE. 333 

par association verbale, soit parce que ce nouveau pas- 
sage complète le précédent. « Le roc d'achoppement et la 
pierre de scandale » [Rom. 9, 33), qui viennent d'Isaïe(8, 14), 
sont introduits dans une autre citation d'Isaïe (28, 16). 
« L'esprit d'égarement » [Rom. 11, 8), inséré dans un texte 
du Deutéronome (29, 4), vient d'Isaïe (29, 10). Un peu plus 
loin (11, 9, 10) sont mélangés intimement deux Versets des 
Psaumes (69, 23, 24 avec 35, 8 et 28, 4). La phrase d'Isaïe 
(45, 23) citée Rom. 14, 11 est introduite par un mot biblique 
courant {Is. 49, 18 ou Jér. 22, 24...) Mélange semblable en 
i Cor. 2, 9 [Is. 64, 3 et 65, 16) et 3, 19 [Job. 5, 12 et 13 
amalgamés); S Cor. 6, 16 {Lév. 26, 12 et Ez. 37, 27) ; 5 Cor. 
6, 18 [3 Sam. 7, 8, 27 déjà fort modifié dans la personne 
des pronoms, complété par « et en filles » venant peut-être 
d'/5. 43, 6). 

Contaminations qu'on peut appeler chrétiennes : vlY.oç{i Cor. 
15, 55), pour âtV/j, introduit dans le mot d'Osée (13, 14) cité 
pour exprimer la victoire du Christ sur la mort (affirmée 
aussi en Is. 25, 8 dans la traduction utihsée); touto [Héb. 9, 
20), au lieu de Idoù {Ex. 24, 8), par souvenir de l'institution 
de l'Eucharistie {Marc. 14, 24). 

E. — MODIFICATIONS SANS MOTIF APPARENT, 

Interversions qui ne modifient pas le sens : Rojn. 10, 20 
{Is. 65, 1) ; 9, 13 {Mal. 1, 2 verbe et complément dii'ect) ; 10, 
21 {Is. 65, 2, item); 15, 11 {Ps. 117, 1, le complément avant 
le vocatif) ; 15, 21 {Is. 52, 15) ; Héb. 12, 26, 27 {Aggée, 2, 6). 

Mots remplacés par des mots équivalents : ':éQeiv.<x{Act. 13, 
47) pour âéSwxa (/s. 49, 6); âwjw {Act. 13, 34) pour ^l<x^<7oy.o:l 
{Ts. 55, 3); oXCvov (5 Cor. 8, 15) pour aocTtov {Ex. 16. 18); 
à'Kxy^zkiù {Héb. 2, 12) -pour hi'fiyri<so[).(xi {Ps. 22, 23); àvop6wGa-£ 
{Héb. 12, 12) pour \ayuaocxs. {Is. 35, 3), etc. 

Suppression de mots insignifiants ou redondants et addition 
de mots explétifs : %ai kiziBKéC^axs. supprimé et Ip^ov ajouté dans 
Act. 13, 41 à Hab. 1, 5; Act. 13, 47 supprime dans Is. 49, 6 
e'iç Siaô'/^xvjv y^vouç ici superflu; dans Rom. 9, 26, le redondant 
■/.ixKxbxoi de Osée 2, 1 est omis. 



334 EXÉGÈSE PAULINIBNNE. 

Ce sont des variantes de ces espèces qu'on découvre dans 
les textes suivants, variantes diplomatiques courantes : Héb. 
3, 7-11 [Ps. 95, 7-11, variantes plus accusées quand ces mots 
sont repris dans les élaborations homilétiques) ; 8, 8-12 [Jer. 
31, 31,-34, texte encore plus modifié quand il est repris 10, 
16, 17); 10, 5-7, 8-14- (homélie) citant Ps. 40, 7-9; 12, 5-11 
[Prov. 3, 11, 12). 

Variantes encore plus importantes quand les passages tirés 
de l'Ancien Testament sont remplacés par des adaptations 
plus ou moins condensées : Rom. 11, 34 et / Cor. 2, 16 [Is. 
40, 13); Rom. 9, 25 [Os. 2, 23); 9, 9 [Gen. 18, 10-14); 9, 
27, 28 [Is. 10, 22, 23); 10, 15 [Is. 52, 7); 11, 3, 4 (/ Reg. 19, 

10, 14, 18); Gai. 3, 10 [Deut. 27, 26); Héb. 12, 20 {Ex. 19, 
13). Des six textes transcrits en Rom. 3, 10-18, deux seuls le 
sont assez librement [Ps. 14, 1-3; Is. 59, 7, 8). 

Nous laissons de côté les variantes minimes : un pluriel 
pour un singulier [Rom. 10, 5, 15), un o-ci pour un Sioti [Act. 
13, 41), un oTCwç pour un i'va [Rom. 9, 17). 

3° Séries, amalgames et combinaisons de textes. 

Pour connaître complètement la méthode exégétique de 
S. Paul, il convient de considérer les différentes manières 
dont il groupe ensemble plusieurs textes. 

A. — SÉRIES DE TEXTES. 

Textes distincts cités l'un après l'autre et introduits cha- 
cun par une formule de citation formelle ou virtuelle : Rom,. 
9, 12, 13, 15, 17 [Gen. 25, 23 ; Mal. 1,2,3; Ex. 33, 19 ; 9,16); 
9, 25-29(0^.2,25; 1,10; /s. 10, 22, 23; 1,9); 10, 19-21 (Z)ez</. 
32, 21; h. 65, 1; 65, 2); 10, 11, 13 [Is. 28, 16; Joël, 3, 9); 

11, 8-10 [Deut. 29, 4 contaminé par /s. 29, 10; Ps. 69, 23, 24); 
15, 9-12 [Ps. 18, 50; Deut. 32, 43; Ps. 117, 1; Is. 11, 10); 
j Cor. 3, 19, 20 [Job. 5, 12, 13; Ps. 94, 11); 2 Cor. 6, 16-18 
[Lév. 26, 11, 12; Is. 52, 4, ii\ Ez. 20, 34; ^ Sam. 7, 14, 
27 avec contaminations); Héb. 1, 5-13 (jP^. 2, 7 ; 2 Sam. 7, 14; 
/>s. 97, 7; 104,4; 45,7,8; 102, 26-28; 110, 1); 2, 12, 13(^5. 



FIDÉLITÉ A LA LETTRE BIBLIQUE. 335 

22, 23; h. 8, 17, 18); 5, 5, 6(P5. 2, 7; 110, k) ; 13, 5, ^{Deiit. 
31, 6, 8; Ps. 118, 6). Cf. Gai, 4, 21-30 (allusions à Gen. 17, 
16; h. 54, 1; Gen. 21, 10, 12). Dans un discours de S. Paul 
[Act, 13, 34, 35) nous trouvons la majeure [Is. 55, 3) et la 
mineure [Ps, 16, 10) d'un argument. 

B. COMBINAISONS DE TEXTES. 

D'autres disent : « textes composites », (( conflation )>, (c enfi- 
lade », pour désigner plusieurs textes cités bout à bout mais 
sous une seule formule d'introduction : Rom. 3, 10-18 {Ps. 
14, 1-3; 5, 10; 140, 4; 10, 7; Is. 59, 7, 8; Ps, 36, 2); 12, 19, 
20 {Beut. 32, 35; Prov. 25, 21, 22); / Cor. 15, 54, 55 [Is, 25, 
8; Os. 13, 14) ; ^ Cor. 9, 9, 10 [Ps. 112, 9; h. 55, 10; Os, 10, 
12); Héb. 10, 37, 38 [Is, 26, 20; Hab. 2, 3, 4). Dans Rom. 
11, 26, 27, un premier texte d'Isaïe (59, 20, 21) est complété 
par un second (27, 9) qui présente l'objet de l'alliance nou- 
velle accordée par Dieu à son peuple. 

D. — CONTAMINATIONS DE TEXTES. 

Nous avons relevé plus haut plusieurs textes bibliques, dans 
lesquels ont été incorporés des mots venant d'autres textes. 
C'est une aggravation de la combinaison ou de l'amalgame des 
textes. Ces contaminations et ces amalgames sont plus 
abondants dans les citations implicites. 

4° Conclusion de ces diverses constatations. 

Pour ce qui regarde la fidélité littérale nous pouvons assu- 
rer, après tant d'autres (Kautzscb, Swete, Clemen, Vollmér...j : 
d'une part, S. Paul est fidèle à la lettre puisque plus de la 
moitié de ses citations sont littéralement conformes au texte 
des LXX et que dans les autres les variantes sont relativement 
légères; d'autre part, il manifeste une assez grande liberté à 
l'égard de la lettre biblique (un peu moins dans l'épltre aux 
Hébreux). 

Cette liberté est-elle rabbinique? Nous savons que les rab- 
bins se permettaient à l'occasion de modifier la teneur des 



336 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

passages bibliques qu'ils utilisaient, mais qu'ils indiquaient 
ordinairement cette licence par la formule al tiqré et, d'ail- 
leurs, leurs contradicteurs réprouvaient ces détorsions 
infligées aux Écritures. Pour le reste, habituellement, ils se 
tiennent rigoureusement à la leçon reçue et consacrée par 
la tradition ^ 

Il est donc certain que S. Paul, dans l'ensemble, est moins 
respectueux de la lettre que les rabbins. Nous pouvons suppo- 
ser qu'il fut induit à prendre les libertés qu'il se permettait 
par les déformations qu'il avait vu pratiquer autour de lui. 

On a voulu, en particulier, expliquer sa méthode dans les 
enchainements de textes par son éducation rabbinique. Propos 
classique chez quantité de savants chrétiens : les citations 
composites pauliniennes sont une forme du haraz, de ce pro- 
cédé qui consistait à accoler ensemble des textes, telles les 
perles d'un collier. Fréquemment, il est vrai, les rabbins 
utilisent plusieurs textes pour prouver une thèse, mais alors 
ils introduisent chaque texte par une formule (ordinairement : 
« il dit ») ; il est rare de les voir amalgamer plusieurs sen- 
tences bibliques^. Des rabbins on disait qu'ils enchaînaient 
[hôrezîn] des textes de la Tora^ des Nebiin et des Hagio- 
graphes, soit pour commenter un texte du Pentateuque, soit 
pour enrichir leurs commentaires homilétiques^. 

1. On signale peu de dérogationsà cette pratique : ainsi Siphrê DeuL 
6, 4, §31, 73 a (addition à Ex. 23, 17) ; ibid. 32, 42, § 332, 140 a (modi- 
fication dans Ez. 39, 17, 18, 73). Mek/iilta Exode, 21, 32, p. 75 (addi 

tions au texte). Tos, Sota, 8, 6, p. 510 (modifications et paraphrase 
libre). M. Sota, 9, 6. 
Cf. supra, p. 120-128. 

Une enquête sur ce point serait peu fructueuse : nous avons peu 
. d'éditions vraiment critiques des documents rabbiniques ; par ailleurs 
dans les manuscrits actuels, de beaucoup postérieurs à l'âg-e des sen- 
tences qu'ils rapportent, les copistes ont rétabli dans les citations 
bibliques la leçon massorétique. 

2. WiNDFUHR cité par Michel, op. cit. p. 84, donne des exemples de 
preuves faites par plusieurs textes, vg. Berakot, 6 a, 58 a; mais cha- 
que texte est introduit par une formule (« comme il est écrit »). Item 
Pesahim 7 b, 8 a qui cite : Ex. 12, 18; Gen. 44, 12 ; Sopli. 1, 12 

3. Bâcher, Terminologie, I, p. 65; Die Proômien der judischen Ho- 
milie, Leipzig, 1913, p. 8 sqq. On peut rapprocher aussi le procédé 
habituel aux homélistes d'amorcer leur exposé par un texte quel 
conque. 



FIDÉLITÉ A. LA LETTRE BIBLIQUE. 337 

. Les libertés que S. Paul prend à l'égard de ses citations ne 
sont donc pas rabbiniques. Gomment les expliquer? 

Par des défaillances de mémoire? Infirmité humaine fort 
possible. Cependant cette explication est insuffisante à con- 
vaincre ceux qui ont vu des rabbins à l'ancienne mode réci- 
tant des livres entiers de la Bible et devenus de vivantes con- 
cordances de l'Ancien Testament. Si cette solution se vérifiait 
toujours, pourquoi, par exemple, un verset de Jérémie (31, 33) 
est-il plus librement cité quand il est invoqué une seconde fois 
dans l'épître aux Hébreux (10, 16, 17 après 8, 10)? Pourquoi 
aussi dans les commentaires, un texte, produit d'abord rigou- 
reusement, est-il allégué ensuite plus librement? 

Cette imperturbable ténacité de la mémoire rabbinique 
rend inutile le recours aux florilèges juifs ou chrétiens, s'ils 
ont existé. 

Les variantes s'expliquent encore, soit par les particularités 
de la recension des LXX lue par l'Apôtre, soit aussi par ce 
médiocre souci de la rigueur verbale que S. Jérôme attribue 
aux apôtres et aux évangélistes ^ Nous ne pensons pas que 
S. Paul, en certains cas, dépende d'une version populaire en 
langue syro-palestinienne^. 

Cependant les libertés textuelles les plus importantes ont 
leur principale racine dans la volonté de l'Apôtre : leur examen 
montre qu'elles sont souvent délibérément pratiquées en vue 
de la démonstration en cours. 

Cette liberté, souveraine et respectueuse, à l'égard de l'Écri- 
ture se manifeste encore plus nettement en ce qui touche la 
fidélité au sens de la lettre biblique. Nous ne rencontrons 
jamais chez S, Paul cet arbitraire déconcertant des rabbins, 
qui arrivent à trouver tout en tout. Si l'on tient compte de sa 
conception typologique, on doit reconnaître qu'il n'utilise pas 
l'Écriture au rebours ou en dépit de son sens littéral. 



1. « Perspicuum estapostolos et evangelistas in interprétation e vete- 
rum scripturarum sensum quaesisse, non verba, nec magnopere de 
ordinatione sermonibusque curasse, cum intellectui res paterent » 
(epist. 57, 10, à propos de là prophétie de Michée, 5, 2 citée par Mat. 
2, 6) d'après Venard, op, cit. c. 42. 

2. Cf. PuuKKO, op. cit. p. 53. Bôhl, op. cit., p. vu, sq. 



338 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

Nous ponvons maintenant nous représenter assez exacte- 
ment ce qui différenciait l'attitude de S. Paul de celle des rab- 
bins à l'ég-ard de la Bible. 

Ces derniers, adorateurs de la lettre, avaient à justifier par 
les Écritures une tradition qui, souvent, ne dérivait de la Loi 
écrite que par des canaux très obliques et resserrés, quand 
elle ne suivait pas une direction réellement divergente : d'où 
leur habituelle fidélité servile à l'endroit de la lettre et leur 
méconnaissance de l'esprit. 

S. Paul reçoit le dépôt de l'Ancien Testament avec la respec- 
tueuse liberté du fils de la maison, maitre de l'héritage de 
ses pères. Il voit en lui, non la règle de sa foi, qui lui vient 
du Christ, mais le pédagogue qui a préparé le règne de la 
Sagesse diviae, et le témoin fidèle chargé d'attester la vérité 
chrétienne. Quand il expose le message évangélique, sa 
mémoire, nourrie des Saintes Lettres, lui fournit en foule, sur- 
tout aux points les plus litigieux, les dépositions de l'ancien 
témoin qui viennent illustrer et confirmer sa parole. Il en use 
libéralement, substituant, s'il le faut,^ aux mots traditionnels 
des termes équivalents qui mettent en plus haut relief la signi- 
fication profonde du document sacré, amalgamant sans hésiter 
des textes dont la portée testimoniale s'accorde et se renforce. 

Pour terminer en style rabbinique : Parabole : à quoi la 
chose est-elle semblable? A un fils de famiUe qui reçut, en 
héritage de son père, des monceaux d'or et de pierreries; 
il ne voulut pas enfermer ces trésors dans des coffres, mais 
il les fit valoir, n'hésitant pas aies transformer pour accroître 
sa fortune personnelte et enrichir de son opulence tous les 
fils de Dieu, ses frères. 



FORMULES INTRODUISANT LES CITATIONS. 339 
II. — FORMULES INTRODUISANT LES CITATIONS. 

EUes nous dévoilent quelques conceptions de l'auteur sur 
la composition des Écritures et elles nous permettent d'insti- 
tuer des rapprochements avec les rabbins. 

1° Formules employant le verbe « écrire » (ypoccpsiv). 

A, au parfait : yéyp<x'!:':oii 

1) wç YSYpaTCTai (ev xô (|;aX[AÔ tô osuTépw). . . Act. 13, 33. 

2) wffTCsp ysypaTûTai 1 Cor. 10, 7. 

3) %aôwç yé-^pa-K'zai. .......' Rom. 1, 17. 

— (mis après le texte invoqué 2, 24. 

— (avec on et long texte composite)] 3, 10. 

— (avec oTi) 4,17. 

— (avec on) 8, 36. 

— 9,33. 

— 11, 26. 

— 15, 3. 

— 15, 9. 

— 15, 21. 

_ 1 Cor. 1, 31, 

— 2, 9. 

_ 2 Cor. 8, 15. 

_ 9, 9. 

h) xaôâxep '^é'-fpy.'^^ioi.i Rom. 3, 4. 

_ 9, 13. 

_ ' 10, 15. 

_ 11, 8. 

5) -/eYpaicTat vap Act. 23, 5. 

_ Rom. 12, 19. 

_ 14, 11. 

_ 1 Cor. 1, 19. 

_ 3, 19. 

— (avec 'ôtO - Gai. 3, 10. 

— (sans texte cité) 4, 22. 

_ ...; 4, 27. 



340 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

6) £v vàp xw Mwûcréwç vop-o) •\'éypa'::i:ai 1 Cor. 9,9. 

èv TÔ vô[/.o) Y«? '■{i-{poi%':ai o-ci (ici voixoç désigne 

Isaïe) 1 Cor. 14, 21. 

7) ouTWç yàp Y^TP*'''^''^*^^ 1 Cor. 15, 45. 

8) ÔTt veYpawTai Gai. 3, 13. 

B. autres formes 

9) xaTK xb yB-xpa]J'\i'évo-^ 2 Cor. 4, 13. 

tôts Y^^'OO'S'f'^' ô 7v6yoç ô Y^YP*H'l^^^oç • 1 Cor. 15, 54 

10) M(i)u(7ï]ç Y^P "^pixcozi... oTi Rom. 10, 5. 

2° Formules employant le verbe « dire » (XIysiv et autres). 

A. Dieu sujet (exprimé) de la phrase 

11) %a6à)ç ekev b Geoç 2 Cor. 6, 16. 

12) xaSwç XeY£t to xveu[j.a à'Ywv (psaume) .... Héb. 3,7. 

13) t{ X^Y^i ô )jpY)f,a-ci(7i;.6ç ; Rom. 11,4. 

B. Dieu sujet (sous-entendu) de la phrase.. . 

14) Tô Mwuffei yccp Xéyei Rom. 9, 15. 

Uyzi tap 2 Cor. 6, 2. 

iirpbç [JLèv Toùç àYYs^owÇ >^éY^^ Héb. 1, 7. 

(puis en sous -entendant lé-^ei) 1, 8. 

{ji,£{x©6[Ji.£Voç Y^^P aùxoùç XeYS' 8, 8. 

15) Sib X£Y£i Eph. 4, 8. 

— (cite un hymne chrétien?) 5, 14. 

16) oiô-ri y.al Iv kxéput léyzi Act. 13, 35. 

y.a8o)ç Héb. 5, 6. 

ô)ç xal âv 'QaY)è X^yei Rom.9,25,26. 

Bià xou XeYOVTOç Tcpbç aùxov Héb. 7, 21. 

17) y,ai '::àXtv asy^^ Rom. 15, 10. 

18) où U^ti. . .éCkXu Gai. 3, 16. 

19) interrogatif 

xm Y»? s'i^s^- ; ^^^- ^' ^• 

tCvi Y«? £'i'P''3''^^''- ' 1,13. 

àXXà tC XéYEu • ; î^oin- !<>' 8. 

20) ouTw; efpïjy.ev Act. 13, 34. 

Ttaewç £l'pir]V.ev Héb. 4, 3. 

(xhxoq Y^P • • s^P"»!^^^ 13, 5. 

£'{pr,y,£v Y'î'? T^o'J • • •o^'^t'iÇ *> ^' 



FORMULES INTRODUISANT LES CITATIONS. 341 

21) w y,al sItcsv [xapxup-i^aaç Act. 13, 22. 

22) Xéywv (cf. l'hébreu /e'm^îr) 

3i£[i.apTup£T0 . . .XsYwv Héb. 2, 6. 

(2, 11). 

'^t/.oas X 6, 13. 

k%-fiyyzXxM. ..X 12, 26. 

aaXvj(T£v . . .X Act. 28, 26. 

ù (î^ç èppàvTWEV XsYwv ' Héb. 9, 20. 

C) 23) Jésus-Christ, sujet (sous-entendu) du 

verbe £t(7epx6[Ji.£voç . . . èî'pvjxsv . Héb. 10, 5. 

— 2, 11. 

D) 24) au passif. 

èppéÔYj aÙTV) oTt Rom. 9, 12. 

ko' ov XÉYExai Héb. 7, 13. 

-/.a Ta To EtprjjjLEVov Rom. 4, 18. 

pXsTCExe p//] èîcéXôv; to EÎpyjfxÉvov Act. 13, 40. 

£V Tw X£Y£a6ai Héb. 3, 15. 

E) Sujet : l'Écriture (-/j ypat^-q) 

25) X£Y£t Y) Ypa?^ 1 Tim. 5, 18. 

Xê'YÊi Y°=P 'h TPO'ÇiQ • Rom. 10. 11. 

Xé-^ti il ypoif'}] Tw $apaw 9, 17. 

(ici l'Écriture = Dieu) 

26) interrogatif : 

Tt yap "fi YP'*?''5 ^éT^^' Rom. 4,3. 

âXX« Ti X. Y) Y Gai. 4, 30. 

£v 'HX£(a Ti X. ■») Y- î I^om. J 1 , 2. 

F) Sujet : la Loi (è voixoç) 

27) v6{i.oç XIy£^ Rom. 7, 7. 

y,a6œç y.ai ô v6[/.oç Xéyei 1 Cor. 14, 34. 

G) 28) Divers sujets humains. 

MwUaîjç £k£v Héb. 12, 21. 

TcpÔTOç Mwuaîjç "kéyBi Rom. 10, 19. 

'Haataç Y^'P ^^T^i Rom. 10, 16. 

7,al TiâXtv 'Haataç Xeyei 15, 12. 

H. âicoToXfJLa xai X^Y^t 10, 20. 

%po<; Se Tov 'lapaYjX Xéyei 10, 21. 

ïial AauiB X£Y£t Rom. 11, 9. 

xaôa^ep y.al AauEtS X£Y£t t^ov (;.ay.7ptG[xcv 4,6. 



342 EXÉGÈSE PAULINIENKE. 

'/) ly, irbretoç owaiwaûvvj \é-^ei Rom. 40, 6. 

29) Pour argumenter 

XéYoi/,£v ^àp ôti Rom. 4, 9. 

wffTe ôappouvTaç ifjixaç Xéyzv* Héb. 13, 6. 

30) Verbes signifiant « dire » 

oGtwç yocp èvTETaXTat '^[aîv ô Kupwç Act, 13, 47. 

'ji;po£UY37Ye)vt(7aTO tw 'Aêpaà^;. ^ ÏP^^c?**^ (Dieu), . . Gai. 3, 8. 

Y^Tiç ujjLîv (i)ç uloïç oKxké-xeTQci . : Héb. 12, 5. 

■AaXwç To •j:vEU[ji,a to aytov èXaXvjaev X£Y<*>v .... Act. 28, 26. 

{xap-copet TOTiv. ayiov. . .\).exa yap xb elpr,v.évai. . Héb. 10, 15. 

xaôwç x£5(P'']H''2''ïi<î''^a'' Mwiia^ç . Héb. 8, 5, 

xa6à)ç Tupoeiprjxat 4> 7, 

vuv §s èx'iQYYs^'ï'''^ Xèywv Héb. 12, 26. 

âi£(ji,apTijp£To {Xéyiùv) . 2, 6. 

(p'*ja(v. (au milieu du texte cité) 1 Cor. 6, 16 

et Héb. 8, 5. 

oÙT. sçepov Yocp To âiaorTeXXojAevov Héb, 12, 20. 

oïoat;.£v XQV eÎTCOVxa Héb. 10, 30. 

XaXv^aaç ■xpbç aÙTOV Héb. 5, 5. 

%pQç ov ekocMBri oti Héb. 11, 18. 

•/.aôwç xpoètpYjxev ^Htraîaç Rom. 9, 29. 

31) Autres expressions 

'Haaiaç y.pàÇ£i Rom. 9, 27. 

k%(f^-^ekia.q ykp b Xé^oç oStoç. Rom. 9, 9. 

î'va 7.otJi.(ar;(T9£ t;y;v ÏTzcf^yzkia-^ Héb. 10, 36. 

6£{ji,£>.ioç Tou G£Ou £^o>v Tf^v cTçpaYÎoa taÛTVjv. . . 2 Tjm, 2, 19. 

32) Pour la mention des commandements. 

TO yàp où [KQiy^EÙaeiç... àvaxaçaXawuxat, èv tû. . Rom. 13, 9. 

à yap Traç vo[j.oç. . .xETCAvjpwTat Iv toj Gai, 5, 14. 

après citation d'Exode, 6,2: -^'tiç èffxlv àvxoXr; 

xpwTiQ £v âxaYYEXia Eph. 6, 2. 

3° Conjonctions introduisant les citations. 

33) Y«p dans l'intérieur du texte cité Rom. 10, 13, 

— ,/ 11, 34. 

— 1 Cor. 2, 16, 

— 10, 26. 



FORMULES INTRODUISANT LES CITATIONS, 343 

— • 15, 27. 

— 2 Cor. 8, 21. 

— 9,7. 

34) oiô Héb. 12, 12. 

— 2 Cor. 6, 17. 

oib xaî Rom. 4, 22. 

35) Sxt (récitatif) Gai. 2, 16. 

— 3, 11. 

StoTt Rom. 3, 20. 

o^Xov ÔTt Gai. 3,11. 

ixevouvYE Rom. 10, 18. 

36) ocXXa (adversatif) Rom. 9, 7. 

— (opposé à Yé^paTCTai. ^àp) 12, 20, 

— Gai. 3, 12. 

37) -/ai (reliant deux textes) 2 Cor. 6, 17. 

— 6, 18. 

— Héb. 1,8. 

— 1, 10. 

— 12, 13. 

38) xal '7:<zAiv (introduisant un autre texte). . Rom. 15, 11. 

— 1 Cor. 3, 20. 

— Héb. 1, 5 (6). 

— ': 2, 13. 

— 10, 30. 

xaC èv Touxw -ÂiaXiv (nouveau texte) 4, 5. 

(cf. Rom, 15, 10, 12) 

4°. 39) Citations littérales sans formules d'introduction mais 
intentionnelles (citations virtuelles) : 1 Cor. 15, 32 ; 2 Cor. 

10, 17; 13, 1 (1 Tim. 5, 19); Gai. 3, 6 ; Epb. 4, 25; 5, 31. 



344 EXÉGÈSE PAULINIBNNE. 

Y' Remarques sur ces formules de citations. 
A. — COMPARAISON AVEC LES FORMULES RABBINIQUES. 

Un premier point qui frappe, c'est la variété des formules 
pauliniennes contrastant avec la monotonie des formules rab- 
biniques. Cependant presque toutes les expressions pauli- 
niennes ont leur pendant ou leur antécédent chez les rabbins. 
Venons au détail. 

La locution de beaucoup la plus fréquente chez S. Paul 
(32 fois, mais inexistante dans l'épltre aux Hébreux) est y^y- 
paTc-rat, surtout précédée d'une conjonction comparative. Nous 
avons rencontré son équivalent chez les rabbins anciens ; mais 
il saute aux yeux que chez S. Paul le xaSàç yéypocKxui tient 
la place du sènnéemar des rabbins. 

Par contre, cette dernière formule disparaît presque chez 
S. Paul, elle ne revient un peu que dans le xatà to £tpyîpt,£vov de 
Rom. 4, 18. Plus fréquemment que les rabbins, mais à peu 
près de la même façon, S, Paul use du verbe « dire » aux 
formes actives (à l'affirmatif et à l'interrogatif). Comme eux 
il indique volontiers le sujet humain de la parole; plus 
souvent encore c'est Dieu « qui dit », usag-e peu attesté chez 
les rabbins. 

Nous trouvons également chez les rabbias : quelques 
verbes signifiant « annoncer, promettre, témoigner, crier » ; 
la pratique de faire précéder la mention d'une loi de l'ar- 
ticle (cf. ici, 32) ; la citation d'un texte sans aucune formule 
d'introduction (39). 

Nous pouvons donc conclure que dans ses formules de cita- 
tion, si S. Paul se rattache aux rabbins, il se montre en posses- 
sion d'une manière personnelle ^ 

1. Michel, op. laud. p. 70, montre que certaines formules, par exemple 
le <pT]oiv, se retrouvent dans la littérature hellénistique, en particulier 
chez Philon. La diatribe aimait également invoquer les textes d'au- 
teurs célèbres. Il ne semble pourtant pas que les usages de S. Paul 
s'expliquent par une influence hellénistique. 



FORMULES INTRODUISANT LES CITATIONS. 345 

B. — l'épitre aux hébreux et les autres 

ÉPITRES PAULINIENNES. 

Il est frappant que dans l'épitre aux Hébreux les citations 
ne soient jamais introduites par le verbe « écrire », si fréquent 
dans les autres épltres pauliniennes et caractéristique de leur 
manière. Le verbe le plus employé à cette fin dans les 
Hébreux est le verbe \é-^zv4. (particulièrement dans la forme 
Xs^wv) ; nous y rencontrons aussi plus abondamment qu'ailleurs 
d'autres désignations de la parole divine : là encore rien 
d'absolument singulier; donc assez de ressemblances pour 
ne pas sortir de l'école, et assez de particularités pour dénoter 
l'intervention d'un rédacteur possédant son style propre. 

C. — IDÉES QUE TRAHISSENT CES FORMULES.., 

Elles attestent la foi profonde de l'auteur dans l'origine 
divine de l'Écriture, parole de Dieu, de l'Esprit Saint; peut-être 
le passif véYpaTc-uai veut-il suggérer la même inîpression. Si 
S. Paul invoque fréquemment les Écritures, c'est qu'il entend 
puiser sa sagesse à une source céleste. Il a pourtant cons- 
cience que Dieu s'est servi d'instruments humains pour la 
transmission de son message. Le relief donné à (( l'Écriture » 
et à « la Loi » marquent un culte profond pour ces auto- 
rités. 

L'emploi abondant de conjonctions démonstratives (ydcp, Si6) 
indique l'intention de chercher dans ces citations un appui : 
lequel peut être tout autant une illustration qu'une preuve 
formelle. Les conjonctions comparatives (xaôwç, -AaôaTCsp) 
introduisent non moins de simples références que de vrais 
arguments scripturaires. 



CHAPITRE V 

CONCLUSIONS «ÉNËRÂLES. 

Après avoir récapitulé les conclusions déjà déduites, 
touchant certains points de vue particuliers, nous essaierons 
de déterminer quelle est la valeur permanente de l'exégèse 
pauiinienne. 

I. — l'ÉPITRE aux hébreux et les autres ÉPITRES 

PAULINIENNES. 

Il semble qu'actuellement les critiques sont moins radicaux 
qu'un Bernhard Weiss^ ou qu'un H. J. floltzmann^, se refu- 
sant à reconnaître dans l'auteur de l'épître un disciple de 
S. Paul. Trof) optimiste, par ailleurs, apparaît M. Rolir, quand 
il déclare : « Aujourd'hui la plupart des exégètes se rappro- 
chent des vues d'Origène et reconnaissent que l'auteur de 
l'épître, se trouvant en connexion avec la personne ou tout 
au moins avec la pensée de l'Apôtre Paul, est à chercher dans 
son entourage^. » Cependant, sans entrer dans la question 
d'authenticité, Michel confesse que l'épître aux Hébreux atteste 
la profonde influence qu'a exercée l'argumentation scriptu- 
raire pauiinienne . Mais ensuite gratuitement il avance que les 
accords entre l'épître et les autres écrits pauliniens s'explique- 
raient par une source commune''. Ces ressemblances dûment 
constatées permettent de voir dans le rédacteur de l'épître 
un authentique disciple du grand Apôtre exprimant, dans 
une forme personnelle, la doctrine du Maître ^. 

1. Der Brie fan die Hebràer (Meyer-Koramentar), Gôttingen, 1897, 

p. 11. 

2. Hand-Commentar zum N. T. Freiburg i. B. 1892, p. 6. 

3. Die heilige Schrift des N, T., Bonn, 1924, p. 4. 

4. Op. laud. p. 195, sq. 

5. J. Lebreton, Histoire du dogme de la. Trinité, 7« édit, Paris, 1927, 
écrit : « L'épître aux Hébreux est attachée aux lettres de saint Paul, et 



EXÉGÈSE PAULINIENNE. 347 

Le disciple fait pareiUement servir la parole de Dieu, con- 
signée dans l'Ancien Testament, à exposer le mystère chrétien 
et, en particulier, le mystère du Christ. Il se laisse aller plus 
entièrement à ce genre homilé tique, à ces commentaires spiri- 
tuels de l'Écriture, que l'Apôtre pratiquait dans ses discours et 
dont ses lettres gardent de nombreux échos. Gomme lui, il lit 
la Bible dans la version des LXX, mais il se montre plus Scru- 
puleux à l'égard de la lettre. Et cependant tout son discours 
est imprégné, à lui aussi, de termes et de conceptions bibli- 
ques : ils constituent son horizon intellectuel. C'est au Hvre 
sacré qu'il emprunte tous ses arguments : citations qu'il intro- 
duit à sa manière ; s'il conserve nombre des formules intro- 
ductrices pauliniennes, il leur imprime un tour particuKer ; 
il omet même totalement le « comme il est écrit » si pau- 
hnien : est-ce pour mieux accuser le « dire » divin? Dans 
l'épitre aux Hébreux et dans les épitres pauliniennes anté- 
rieures nous retrouvons utilisés certains textes caractéristi- 
ques {Ps. 2; 8; 110; Habac. 2, 4; Dent. 32, 35; Gen. 21, 12) 
et dans le même sens. C'est aussi la même conception typo- 
logique : toute l'histoire ancienne est une préfiguration du 
Christianisme, mais le disciple développe le système à l'aide 
des méthodes alexandriaes, il ne semble pourtant pas avoir 
poussé l'allégorisme aussi loin que le Maître l'a fait dans ses 
considérations sur Sara et Agar. Tous les deux identifient le 
Christ avec le Seigneur qu'adoraient les Hébreux. 

Nous pouvons reprendre les réflexions d'Origène sur l'au- 
teur de l'épitre : « ... La phrase et la composition sont de quel- 
qu'un qui rapporte les enseignements de l'Apôtre et pour ainsi 
dire d'un écolier qui écrit les choses dites parle maître... Mais 
qui a rédigé la lettre? Dieu sait la vérité »^ 

elle est en effet une expression fidèle de sa doctrine... elle présente la 
doctrine de saint Paul sous un aspect qui lui est particulier, sous une 
forme moins mystique et plus spéculative » (p. 443, sq.). 

1. Rapporté par Eusèbe, Histoire ecclésiastique, VI, 25, 13, 14 (tra- 
duction Grapin). 



348 EXÉGÈSE PAULINIËNNE. 



IL — s. PAUL ET LES RABBINS BANS LEUR USAGE 
DE l'écriture. 

Le philologue qui, étudiant d'un point de vue tout formel 
les écrits rabbiniques et les épltres pauliniennes, s'attacherait 
uniquement à relever les formes d'exposition, les mécanismes 
dialectiques, les structures de rhétorique, classerait sans hési- 
ter dans le même genre exégétique les deux littératures. Et 
cependant l'honnête homme, qui lit simplement les unes 
après les autres plusieurs pages de ces productions d'un 
esprit si différent, a le sentiment qu'il se heurte, non seule- 
ment à deux doctrines opposées et irréconciliables, mais aussi 
à deux formes de pensée et de composition et à deux usages 
de l'Écriture spécifiquement distincts. Comment expliquer la 
coexistence légitime de ces deux impressions? S. Paul est un 
rabbin^ devenu évangéliste chrétien. 

A l'école de Gamaliel le jeune Saul a contracté des convic- 
tions et des tournures intellectuelles, d'ailleurs louables, qui 
constituent le fonds de l'éducation rabbinique. Il croit que 
l'Écriture, parole de Dieu, renferme toute la vérité. Il a donc 
nourri son esprit de ces lettres sacrées, mais lues dans une 
version grecque ; elles se sont incorporées à son intelligence 
dont elles sont devenues comme la moelle : son discours est 
tramé de leurs expressions. Il ne conçoit pas qu'en un exposé 
doctrinal on puisse se passer de leur appui, de leur lumière : 
d'où les nombreux arguments qu'il leur emprunte surtout 
dans ses démonstrations contentieuses, pouvant soulever 
les contestations des Juifs. Gomme ses anciens confrères, il 
recourt volontiers au Pentateuque; plus abondamment que 
les rabbins il puise dans Isaïe et dans les Psaumes, où se 
complaît davantage sa contemplation mystique. 

On retrouve chez lui, mais avec beaucoup plus de variété 
et fort enrichies de formules personnelles, les expressions tra- 
ditionnelles qui servent à introduire les citations bibliques. 

Le docteur chrétien accuse plus énergiquement l'origine 
divine des Écritures. Ses argumentations et illustrations scrip- 
turaires mettent enjeu presque tous les procédés classiques : 



EXÉGÈSE PAUHNIENNE. 349 

applications morales, développements homilétiques, assimi- 
lations juridiques, considérations philologiques, exploita- 
tions de la lettre, analyses chronologiques, interprétation 
dialectique, accommodations.,., et ordinairement sans trop 
tenir compte du contexte. 

A tout cela, appareil et matière, l'évangéliste chrétien infuse 
une âme nouvelle. Il a dépouillé la mentalité rabbinique ; 
comment s'amuser encore à ces controverses scolastiques, 
où l'on s'ingéniait à disputer subtilement sur les divers 
sens que peut revêtir une sentence biblique? où l'on devait 
étayer ses vues juridiques, produit d'une tradition extrabi- 
blique, de preuves bibliques, nécessairement extrinsèques, 
gratuites et arbitraires, sinon bizarres et ridicules? Comment 
encore s'attarder à des prédications qui trop souvent avaient 
pour fin de flatter et stimuler l'imagination du populaire? 

L'Apôtre chrétien se sent investi d'une charge plus haute 
et redoutable : héraut de l'évangile du Christ, économe du 
mystère chrétien, qu'il doit dispenser, non plus en des dis- 
cours de sagesse humaine si souvent frelatée, mais en simples 
énonciations de sagesse divine. Cette sagesse, ce « sens du 
Christ », il les a reçus directement de Dieu, quand il lui a 
jîlu de lui révéler son Fils. Dans ses méditations inspirées il 
s'est rendu compte que la Loi, dont il était jadis le jaloux 
sectateur, rendait le même son que la science du Christ 
crucifié, que cette économie, maintenant périmée, était une 
ombre, une figure de l'économie nouvelle et pouvait lui servir 
de pédagogue. Il doit donc, dans son message, projeter la 
grande lumière du Christ sur ces lueurs prémonitrices, qui 
l'attestent et la font valoir. 

Voici à l'œuvre l'évangéliste chrétien, maniant l'antique 
instrument de la Loi, mais avec une gravité et une liberté 
toutes nouvelles. Grave ^ celui qui sait que le Christ crucifié 
ne va pas perdre son temps à des virtuosités exégétiques, il 
ne peut pas exposer l'enjeu vital qu'il dispute : le salut des 
âmes pour lesquelles son Maître a versé son sang ; donc pas 
de dialectique à vide, pas d'ergotages infinis, pas de verbiage 
déplacé. Si nous tenons compte de sa conception typologique, 
nous ne découvrons pas chez S. Paul de ces références scrip- 



350 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

turaires qui n'ont aucun rapport avec le sens vrai du texte, 
quand elles ne le méconnaissent pas totalement. Souveraine- 
ment libre, l'évangéliste, dirigé par l'Esprit de Dieu, dispose 
ses moyens de preuve en vue de la fin qu'il poursuit : soilvent 
il se contentera d'une fidélité générale à la lettre et il a 
toujours en vue la portée figurative de l'histoire sainte et de 
l'Ancien Testament ; il n'hésite pas à tourner contre la Loi les 
éloges de la Loi, à refuser à l'Israël charnel, pour les conférer 
à l'Israël spirituel, les promesses et les prérogatives octroyées 
au peuple élu. Dans ses interprétations typiques et symbo- 
liques il met en œuvre les méthodes d'exégèse parabolique 
apprises jadis et il les pousse jusqu'à leur extrême limite, pour 
mieux extraire de la lettre qui tue l'esprit qui vivifie. 

III. — VALEUR PERMANENTE DE L 'EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

A étudier les exégèses de S. Paul, uniquement au point de 
vue rationnel et logique, on ne peut qu'être choqué. Bien des 
critiques expriment à ce sujet dos appréciations, auxquelles 
M. Loisy a donné une formule incisive : 

Ce n'est pas pour rien que Paul est visionnaire; il l'a été dans sa 
conversion, il n'a pas cessé de l'être, il l'est en quelque façon jusque 
dans ses raisonnements... Sa théorie de l'économie salutaire inaugurée 
en Abraham et accomplie dans le Christ n'est aussi qu'une vision gran- 
diose, dont les éléments ont bien pu lui être fournis d'un côté par les 
spéculations juives sur Abraham, et d'un autre, côté par la mystique 
païenne et les morts divines, qui s'est élaborée spontanément dans- son 
esprit et s'est imposée à lui comme une réalité. C'est pourquoi il a 
poussé jusqu'aux dernières limites possibles le génie du contresens. 
Les passages bibliques qu'il utilise ne sont pas que des sentences isolées 
de leur contexte et qui peuvent être appliquées à un autre objet par 
un simple artifice d'exégèse, ils sont comme le support d'une vision 
indépendante que son imagination y a rattachée. Aussi bien, à pro- 
prement parler, ne prouve-t-il pas ses thèses par l'Écriture, il les voit 
dans l'Écriture... Vision sublime, mais pure vision, car les textes bibli- 
ques ne suggèrent point ce que Paul y trouve, si ce n'est que la ren- 
contre d'un mot éveille en lui la perspective de tout un mystère^ ... 

1. LoiSY, L'épître aux Galates, Paris, 1916, p. 44, sqq. 
Cf. Michel, op. cit. p. 133 : « Paul ne déduit pas de l'Écriture, mais 
démontre par elle son opinion... ». 
Cf. aussi WiNDiscH, 0/?. cit. p. 71, 73... 



EXÉGÈSE PAULINIENNE. 351 

Au fond Paul n'aurait pas dépouillé son rabbinisme : ses 
anciens collègues s'acharnaient à voir dans les Écritures, et à 
les y découvrir par une exégèse arbitraire, leurs conceptions 
haggadiques ou halakhiques, lui y retrouve ses propres 
visions. 

Est-il besoin d'assurer que ces vues sont inacceptables pour 
un croyant? Nous tenons que la révélation judéo-chrétienne 
constitue un tout organique intimement lié. L'Ancien Testa- 
ment, partie de cet ensemble, n'est pas une unité isolable et 
séparable qui trouve son explication en elle-même. C'est un 
stade préparatoire, un moment de l'éducation de l'humanité : 
le pédagogue forme les enfants mineurs et les achemine vers 
le Christ. De même que dans une relation de termes inégaux, 
l'inférieur appelle le supérieur et ne devient intelligible que 
par lui, de même l'Ancien Testament, dans son histoire, dans 
ses institutions et dans le livre qui le représente, ne prend 
toute sa valeur qpie référé au Christ et à son Église. 

Évidemment ce n'est que la foi chrétienne qui livre le 
secret de ces perspectives mystérieuses, qui illumine les 
ombres incertaines de ce clair-obscur sur lequel rayonne la 
figure attirante du Sauveur. De ce chef l'Ancien Testament 
devient plus pénétrablè, plus compréhensible au chrétien 
qu'au juif. Actuellement nous saisissons beaucoup mieux 
tout l'esprit qui anime la longue attente : le sens profond de 
l'espérance messianique, la raison des épreuves purificatrices 
auxquelles Dieu soumet son peuple, le constant souci pro- 
videntiel de détacher Israël de ses ambitions politiques, do 
son orgueil national, afin de le conserver intégralement pour 
sa mission religieuse. 

Ce n'est donc pas une âme étrangère, une signification 
extrinsèque que S. Paul impose violemment aux textes qu'il 
exploite : il en dégage le sens profond, celui que le Saint Esprit 
destinait à notre instruction et consolation^ 

Nous avons vu qu'en une certaine mesure cette signification 

1. Contre Sanday-Headlam, epistle to the Romans, p. 305, sq. : ils 
estiment que S. Paul a bien compris l'esprit de l'Ancien Testament, 
mais que les exégèses qu'il produit pour soutenir ou exposer ses vues 
sont sans valeur et à rejeter. 



352 EXÉGÈSE PATJLINIENNE. 

spirituelle était accessible aux Juifs et pouvait les orienter, 
tant intellectuellement que pratiquement, vers le Messie véri- 
table, vers le Rédempteur des âmes. Les oracles messianiques, 
les prédictions relatives à la nouvelle alliance, à la Loi divine 
inscrite dans les cœurs, devaient ouvrir les yeux sur la vraie 
portée de l'élection, relative et conditionnelle, sur son 
caractère supra-national. Les directions morales tendaient à 
créer dans les cœurs une disponibilité totale, à les dégager de 
tout particularisme, de toute confiance orgueilleuse dans la 
vertu sanctificatrice des institutions mosaïques : ce ne sont i 
pas les œuvres humaines qui sauvent, mais la grâce de Dieu. 
L'Israélite de bonne volonté, qui vivait de cette manière sa 
religion, se tournait comme d'instinct vers le temps de l'ac- 
complissement, de la perfection, que l'heure présente pré- 
parait et faisait pressentir. Pour ce fidèle les exégèses de saint 
Paul n'avaient rien de rebutant ni d'absolument inattendu : 
elles répondaient à ses propres aspirations : tels étaient les 
Juifs qui par myriades accueillirent le message apostolique. 
Ce rôle préparateur de l'Ancien Testament, M. P. Claudel 
l'a présenté dans une page magistrale : 

D'Adam jusqu'à Noé, et de Noé jusqu'à Abraham, et d'Abraham 
jusqu'à Moïse, et de Moïse jusqu'à David, et de David jusqu'à Jean- 
Baptiste, il y a une promesse qui est à l'œuvre. Dieu est à l'œuvre à 
travers le temps, et son instrument, en tant que Père par excellence, 
est la génération qui a pour sacrement la circoncision. 

L'Ancien Testament n'est pas autre chose qu'une relation de l'opéra- 
tion de cette promesse à travers les siècles. 

Le problème qui se posait au poète et ingénieur divin était de pré- 
parer les âmes, et je dirai les corps, de les aiguillonner du côté d'une 
réalité qui surpasse infiniment les forces de l'intelligence et de l'ima- 
gination, et pour cela, de s'adresser au-dessus de toutes nos facultés 
à l'être, d'adapter en nous peu à peu une certaine capacité, non pas 
de conception, mais d'appréhension, au moyen inouï d'intervention 
qu'il se réservait, à un miracle capable de faire chanceler la nature 
sur ses bases. 

L'exploit divin était de faire préférer à l'homme Y Autre, et, pour ce qui 
est du présent, l'inconnu au connu, le futur à l'immédiat, la foi à l'in- 
telligence, la parole de Dieu à la satisfaction de l'instinct. A une telle 
tâche tous les moyens en apparence étaient inadéquats, toutes les expli- 
cations comme toutes les injonctions, déficientes, toutes les paroles et 
toutes les invitations sans portée. Le seul procédé était d'utiliser cette 



EXÉGÈSE PAULIN4ENNE. 353 

disproportion elle-même, de fournir un vocabulaire à notre balbutie- 
ment, un appoint à ce faible désir, de suggérer par la voie de l'insuf- 
fisance, d'apporter les clefs qui ne valent que parce qu'elles ouvrent. 
Le sens de l'Écriture, c'est sa direction^ 

Pour nous aussi les interprétations pauliniennes gardent 
leur prix. Aujourd'hui, devant les attaques de la nouvelle 
religion germanique, le chrétien comprend qu'il ne peut 
purger sa religion de son substrat juif sans la ruiner. 

Par ailleurs nous ne voulons pas lire l'Ancien Testament 
uniquement dans un intérêt historique et archéologique : 
comment pourra-t-il nous dispenser encore instruction et 
édification? A deux conditions. 

La première condition est de savoir utiliser l'instrument de 
la révélation biblique, d'y reconnaître en tous ses linéaments 
la divine figure de Jésus, tout comme des ombres laissent 
deviner les réalités dont elles sont la projection, ainsi que la 
source lumineuse qui les éclaire. 

L'Ancien Testament, écrit M. P. Claudel, l'Ancien Testament, poésie 
lyrique et dévotionnelle, prescriptions morales et rituelles, est incom- 
présensible sans cette présence invisible et future qui le dispose et 
l'oriente tout entier, jusqu'aux moindres nuances, jusqu'aux plus sour- 
des intonations, et crée de toutes parts autour de lui une espèce de 
champ prophétique. 

L'Ancien Testament est incompréhensible sans le Nouveau, qui vient 
tout remplir, justifier et expliquer. Je ne suis pas venu, dit Notre- 
Seigneur. dissoudre, mais remplir. Pas un iota de la loi ne passera et 
pas un point sur Vi (Matthieu, 5, 18). Et, comme en réalité toute la lettre 
a passé, il faut bien admettre, si quelque chose subsiste, que ce quel- 
que chose est le sens spirituel inhérant jusqu'aux moindres détails du 
texte premier.,. 

Le verbe fait chair, qu'il agisse ou prêche, pendant les trois années 
de sa mission, n'a pas fait autre chose que parler, que se montrer lui- 
même à la place de la figure. Dès l'enfance, quand ses parents lui 
reprochent de les avoir quittés pour se proposer aux docteurs, il répond : 
Ne savez-vous pas que dans ces choses qui sont de mon Père, c'est-à-dire 
dans ces mots, dans ces réalités concrètes, qui annoncent que je suis 
son Fils, il faut Moi être"} Et plus tard, quand il accomplit le tour des 
synagogues, que fait-il que se produire au milieu de la loi et des 
prophètes comme une référence vivante? Ecce venio (Psaume, 39, 8). 
On vous a dit telle et telle chose, déclare-t-il sur la montagne, mais 

1. VAVhChAw^h, Introduction au v. Livre de Ruth. » Paris, 1938, p. 81, sq. 

EXÉGÈSE RABBINIQUE. . 1^ 



354 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

moi-même, me voici là, écoutez ! pour vous dire telle autre. A chaque 
instant reviennent dans l'Évangile, ces mots : lU adimpleantur 
Scripturae. Quand ses disciples veulent le détourner d'accepter la 
Passion, sa réponse est : quomodo adimplebuntur Scripturae ? Il ne fait 
qu'un avec elles... Et quand, après la Résurrection, il rencontre les 
deux disciples sur le chemin d'Emmaus, toute son instruction consiste 
à leur ouvrir les Écritures qui le contiennent. Il est dedans. Quand il 
apparaît aux deux apôtres sur le Thabor, il veut que ce soit entre Moïse 
et Elle et sa manifestation est une transfiguration, la clarification, 
l'illumination extérieure d'un texte opaque. 

Tout l'Ancien Testament ne fait que balbutier la première lettre du 
nom sacré (qui est aussi la première de l'alphabet) : .4 a a et c'est le 
Fils seul qui a été rendu capable de l'achever et de la mettre dans 
notre bouche sous sa forme parfaite : Abba Pater \ Notre Père qui êtps 
aux ci eux ' ! 

La seconde condition est de conjuguer étroitement les 
deux parties, si intimement liées et cohérentes, de la Révéla- 
tion totale, afin de comprendre mieux le sens plein de l'Évan- 
gile, en le situant à son rang dans la perspective complète de 
l'économie divine, et aussi de pénétrer quelque peu le 
mystère de l'histoire que dirige, en ses inflexions les plus 
déconcertantes, la main paternelle de Dieu. Ainsi notre foi se 
trouve éclairée et fortifiée, la dispensation judéo-chrétienne 
n'étant intelligible que si l'on considère conjointement les 
deux termes. Par ailleurs, à remarquer les attitudes prises 
par Dieu dans l'éducation de son peuple, nous comprenons 
mieux certains moments obscurs et angoissants de l'histoire 
chrétienne. 

Écoutons encore M. Claudel : il discerne admirablement, 
dans son déroulement séculaii'e, l'unité substantielle que 
manifeste le « fleuve des Écritures, le fleuve de la Révélation » : 

Un fleuve! le fleuve de la Révélation, qu'est-ce à dire? Il y a 
différentes sortes de révélation. La première est comme si on était 
un voile de devant une statue, et la seconde est comme im rais de 
soleil dans une chambre obscure, qui détermine différentes zones de 
visibilité. Et la troisième, enfin, est quelque chose d'actif et de vivi- 
fiant qui nourrit, amène à maturité et manifestation le germe inclus 
dans le sol. Ainsi dans la continuité de sa marche majestueuse, le 
fleuve de vérité que je viens de décrire et dont Israël fut le véhicule à 

1. P. Claudelj op. laud, p, 87-90. 



EXÉGÈSK PAUMNIENXE. 355 

travers les peuples et les siècles. Tout ce qu'il touche, tout ce à quoi 
il apporte le nom de Jéhowa, tout ce qu'il imprègne de cet esprit qui 
est essence, tout: cela prend forme, ordre, vie et sens et le désert irri- 
gué assume espèce, et vigueur, à perte de vue, de vocabulaire de 
l'éternité <. 

Cette intelligence ne peut être acquise que si nous avons 
appris, à l'école de saint Paul, à déchiffrer le sens figuratif 
des Écritures. L'Apôtre nous enseigne également cet art 
infini et parfois si secourable : exploiter toutes les ressources 
qu'offrent à notre foi et à notre piété les Écritures entendues 
allégoriquement et symboliquement. De ce biais, comme 
l'écrit M. Claudel, « il n'y a parlage ou discours^ dit le 
Psaume 18, 4, dont la voix ne se fasse entendre. Tout devient 
par rapport à Dieu. Tout ce qui passe est promu à la dignité 
d'expression, tout ce qui se passe est promu à la dignité de 
signification. Tout est symbole et parabole. Tout est figure, 
ou bien, comme disaient nos ancêtres, moralité^ un drame 
comportant une morale, une application et une explication 
]3ratique au moyen de la réalité d'un enseignement, un fait 
relatif à Dieu, la mise en scène et en acte, sous la forme d'une 
histoire, d'une intention de notre régisseur ^ ». 

C'est par cette double voie, du sens typologique et du sens 
figuré, que les vieilles Écritures ont fourni de riches aliments 
spirituels aux saints de tous les temps qui étudient la parole 
de Dieu, non pour satisfaire de vaines curiosités historiques 
et critiques, mais pour nourrir leurs âmes. Et nous voyons 
que ces esprits, ardemment appliqués à scruter les filigranes 
de figures que recèle la lettre biblique, ne sont pas des reve- 
nants de l'antiquité ou des simples, ignorant la science et la 
philosophie. Au surplus, ils peuvent se réclamer d'un patro- 
nage glorieux : Pascal estimait que l'Écriture n'est qu'un tissu 
de contradictions si l'on n'y voit pas une série de figures : 

Pour entendre l'Écriture, il faut avoir un sens dans lequel tous les 
passages contraires s'accordent... Tout auteur a un sens auquel tous les 
passages contraires s'accordent, ou il n'a point de sens du tout. On ne 
peut pas dire cela de l'Écriture et des prophètes : ils avaient assuré- 

1. Op. laud. p. 58. 

2. Op. laud. p. 58. 



356 EXÉGÈSE PAULINIENNE. 

ment trop bon sens. Il faut donc en chercher un qui accorde toutes les 
les contrariétés. 

Le véritable sens n'est donc pas celui des Juifs : mais en Jésus- 
Christ toutes les contrariétés sont accordées. 

Les Juifs ne sauraient accorder la cessation de la royauté et prin- 
cipauté prédite par Osée (3, 4) avec la prophétie de Jacob {Gen. 49, 10). 
Si on prend la loi, les sacrifices et le royaume pour réalités on ne peut 
accorder tous les passages. Il faut donc par nécessité qu'ils ne soient 
que figures. On ne saurait pas même accorder les passages d'un même 
livre, ni quelquefois d'un même chapitre, ce qui marque trop quel 
était le sens de l'auteur : comme quand Ézéchiel (20) dit qu'on vivra 
dans les commandements de Dieu et qu'on n'y vivra pas. 

Jésus-Christ leur ouvrit l'esprit pour entendre les Écritures. Deux 
grandes ouvertures sont celles-là : 1° Toutes choses leur arrivaient en 
figures : vere Israelitae vere liber i, vrai pain du ciel ; 2° un Dieu humilié 
jusqu'à à la Croix : il a fallu que le Christ ait souffert pour entrer dans 
la gloire : « qu'il vaincrait la mort par sa mort » {fféb. 2, 14). 

Dès qu'une fois on a ouvert ce secret, il est impossible de ne pas le 
voir. Qu'on lise le vieux Testament en cette vue, et qu'on voie si les 
sacrifices étaient vrais, si la parenté d'Abraham était la vraie cause de 
l'amitié de Dieu, si la terre promise était le véritable lieu de repos ? 
Non ! donc c'étaient des figures. Qu'on voie de même toutes les céré- 
monies ordonnées, tous les commandements qui ne sont pas pour la 
charité, on verra que c'en sont les figures. 

Tous ces sacrifices et cérémonies étaient donc figures ou sottises. 
Or il y a des choses claires, trop hautes, pour les estimer des sottises ^. 

1. Édition Brunschvicg, 684, 679, 680. On ne sait, en vérité, parmi les 
nombreuses pensées relatives à cette théorie des figures, qui semble 
avoir obsédé Pascal, faire un choix : il y a là tant de lumières. Voir 
encore : 576, 643, 648, 659, 670, 673, 675, 677, 678, 683, 68^, 687, 692, 
750... 



TABLES 



I. TABLE DES CITATIONS 



1° Ancien Testament. 



Agé 


jée. 






6 


222 


2, 3-9, 


21-23 


308 




7 


220 


6 




288, 308, 


332, 333 


12 
15 


223 

217 


Amos. 






5,1 


151 


1,1 




16 




2 


218 


3,8 




162 




9, 10 


219 


4,1, 




16 




6,1 


219 


7 




75 




2 


218 


5, 21 




199 




3 


219 


7,1 




79 




8 


222 


11 




70 




9 


223 


8, 10» 




40 




7, 10 


64 


Cantique. 






8,5 


173 


1, 3 




123, 219 




6 


173, 220 


6 




223 




8, 13 


223 


7 




29 




1 Chroniques. 




8 




29, 216 




5, 25 


143 


9 




220 




10, 13 


143 


11 




244 




12, 1 


233 


12 




218 




17,5 


170 


15 




217 




21, 5 


205 


2,2 


^ 


217, sq. 




27, 1 


206 


4 




221 




28, 8 


12 


5 




222 




36, 13-17 


69 


8 




49, 222, 223 


2 Chroniques. 




9 




49 




16, 1 


150, 203 


14 




176, 217, 


221 


19, 6 


30 


16 




219, 220 




7 


286 


3,4 




220 




30, 18, 19 


181 


7 




222 




35, 21-24 


177 


9 




220 




36, 13-17 


69 


11 




220 




20 


69 


4,5 




223 




21 


69, 71 



358 



TABLE DES CITATIONS. 



Daniel. 




17 


145, 193 


1, 21 


70 


14, 4 


145 


2, 47 


290 


21 


86 


9, 23, 24, 26, 




27 


48, 157 


7 i * ' 

27 


70 


28, 29 


40 


11, 1-4 


70 


15, 2 


40, 53, 58 


36 


290 


8 


156 


12, 7 


75 


9 


40, 52, 91 


11 


40 


19 


111, 202 






16, 1-17 


198 


Deutéronome. 




2 


201 


1,2 


18 


3 


24 


28 


163, sq. 


6 


131, 180 


46 


96, 184 


17,2 


101 


2,23 


136 


6 


101, 285 


3,24 


101 




323 


25 


18, 60, 236 


17 


158 


27 


18 


18, 4 


152 


4,4 


64 


9 


39 


5, 16-18 


320 


10 


101, 134, 148, 170 


21 


320 


12 


39 


28 


246 


19, 1 


157 


29 


156 


4 


58 


6,4 


17 


5 


101 


5 


98 


14 


227 


7 


59 


15 


285, 319 


13 


90 


20, 5-8 


39 


7,1,3 


39 


6 


105 


25 


202 


8 


132, 229 


8, 10 


60 


15 


179 


9,1 


163 


21, 7 


173 


19 


285 


8 


31, 173 


10, 9 


285 


9 


31 


12 


75 


13 


226 


17 


204, 285 


18-21 


62 


20 


190 


22 


101 


11, 6 


164 


23 


286, 314, 329, 332 


9 


64 


22, 2 


161 


22 


161 


4 


104 


25 


177 


9, 10 


40 


12, 20 


177 


11 


40, 53, 112 


31 


194 


17 


207 


13, 6 


285, 323 


24 


286 


8 


46 


27 


105 


14 


91, 148 


23, 3-5 


39 



TAr.LTS 1>ES CITATIONS. 



359 



4 


92, 146 




36 


286, 317 


11 


105, 


166 




39 


49 


14 


229 






42 


16 


26 


141 






43 


286, 320, 334 


24, 1 


57 






33, 1 


47 


3 


45 






2 


237, 239 


6 


228 






5,6 


180 


7 


101 






7 


97, 173, 286 


8,9 


96, 179 




10 


64 


12, 15 


39 






27 


118 


19 


40, { 


55 




34, 1, sq. 


72 


20 


40 






6 


160 


21 


40, l 


56 




Ecclésîaste. 




25, 3 


140 










4 


40, 


187, 


228, 286, 


1,4 


127 






310, 


330, 332 


12 


168 


5 


155 




7 


15 


65 


9 


57 






7, 19 


67 


11, 12 


155 






8, 3 


245 


18 


173 






9, 18 


243 


26, 13-16 


53 






10, 1 


242 


27, 5 


229 






11, 1 


241 


18 


286 






2 


242 


20 


68 






6 


244 


26 


286, 


315, 


334 


12, 14 


288 


28, 27, 30 


165 






Ecclésiastique 


29, 4 


333, 


334 




1,9 


320 


16 


202 






7, 17 


41 


22 


69 






38-39, 11 


12 


28 


129 










30, 12-14. 


286, 


306, 


328, 331 


Esdras. 




31, 6-8 


317, 


335 




9, 10-12 


39 


9 


15 






10, 2, 10 


39 


16 


64, 


129 




4 Esdras. 




21 


69 










27 


69, 


84 




5, 24, 26 


217 


29 


69 






14, 37-48 


12 


32, 1 


144, 


177 




Esther 




2 


163 






9, 12 


84 


5 


323 










15 


16 






Exode. 




17 


126, 


286, 


322 


2,2 


284 


21 


135, 


286, 


313, 334 


^ 16 


19 


25 


123, 


147 




3, 8 


186, 238 


35 


286,316,317,331,335 


12 


179 



360 



TABLE DES CITATIONS. 



4, 21 


299 




48 


20, 168 




22 


284 




49 


20 




25 


196 




13, 2 


111, 177 




26 


150 




5 


30 




6,8 


16, 177 




6 


24 




12 


84, 186 




7,8 


53 




7,3 


284, 299 




9 


49 




8,19 


161 




13 


111 




23 


171 




14 


161 




9,8,9 


17 




17 


171 




12 


299 




21 


66, 321 




16 


285, 299, 331, 


334 


14, 3 


67 




20 


86 




4 


229 




11, 7 


87 




10 


150 




12, 1 


86, 90, 197 




10-12 


67 




2 


149 




13 


221 




4 


133, 142, 182, 


193 


17 


299 




6 


21, 53, 131, 


179, 


21 


19 






197 




22 


123, 321 




7 


42 




24 


23 




9 


143, 157, 196 




30 


153 




12 


24, 171 




15, 1 


150, 175 




13 


285 




2 


221 




14 


148 




3 


174 




15 


95, 161, 167, ! 


>85 


7 


151 




16 


127, 154, 161 




9 


168 




17 


122 




18 


74 




18 


167, 192 




16, 5 


16 




19 


53, 89, 285 




14 


235 




20 


127 




18 


285/ 316, 329, 333 


21 


171, 285 




20 


67, 175 




22 


285 




22, 23 


16, 177 




24 


192 




25 


199 




25 


16, 157, 177 




27 


67 




28 


104 




29 


40 




29 


17, 24 




17, 1 


238 




30 


140 




8 


176, 233 




35 


154, 168 




9 


128, 235 




36 


154 




11 


94 




37 


17, 159, 234 




13 


137 




40 


203 




18, 3 


125 




41 


46 




12 


135 




43 


174 




13 


132 




44 


152 




15 


16, 172 




45 


21 




18 


191 





TABLE DES CITATIONS, 



361 



21 


135 


19, 2 


104 


3 


246 


8 


159 


9 


191 


11 


9d 


12-16 


285 


13 


285, 334 


15 


91 


16 


285 


17 


176 


18 


162 


19 


49 


20 


205 


20, 1 


112 


5 


30 


8 


155, 221 


10 


50 


11 


285, 322 


12 


90, 320 


12-17 


285 


13, sq. 


320 


14 


50 


17 


320 


18 


171 


20 


67 


22 


205, 237 


25 


50, 156 


21,2 


232 


7 


167 


8 


122 


14 


19, 187 


15 


158 


16 


50 


17 


90, 158 


18 


109 


19 


207 


21 


161, 191 


24 


44 


27 


103 


28 


113, 154, 190 


30 


44 


32 


113 


22, 2 


207 


7,8 


43 



8 

9 

17, 18 

24 

27 

28 

30 

23, 2 
5 
8 

10 
12 
16 
17 
18 
19 
23 
31 

24, 3 
5 
7 
8 
11 

25, 5 
8 

22 
34 
40 

27,6 
28, 38 

31, 13 
15 
16 

32, 4 
6 

33, 19 

34, 4 
18 
19 
21 
22 

29-35 
30 
33, 34 

85, 2 



110 

109 

187 

50, 156 

316 

56, 134, 285 

86, 105, 166 

60 

153 

63 

40, 203 

46, 152 

22 

18 

171 

128 

177 

177 

221 

118 

180 

285, 321, 333 

118 

56 

178 

205 

129 

285, 316 

156 

192 

191 

50 

155 

221 

285, 321 

285, 299, 334 

23, 159 

231 

111 

59,94 

22, 177 

309 

322 

285, 322 

154 



362 



TABLE DES CITATIONS. 



40, 36-38 


66 


21 




119 


Ezécliiel. 




4,1 

4 




160, 190 
126 


1, 26 


231 


5 




284 


2,1 


168 


7 




128, 199 


47 , 


290 ' 


10 




148 


4, 11 


41 


11 




164 


12 


140 


23 




171 


8, 17 


120 


26 




150 


9, 11 


159 


5, 24 




284 


il, 19 


322 


7 










32 




70 


36 


290 


7, 11 




70 


15, 5 


84 


20 




35 


17, 2 


168 


23 




191 


2-24 


213 


9, 6 




47, 187 


18, 32 


47 


7 

7 




7 

187 


20, 34 


334 


11 




161 


21, 32 


136 


12, 1 




284 


23 


214 


3 




284, 298 


23, 48 


62 


6 




7 

185 


24, 3 


213 


7 




284 


29, 12 


198 


13, 15 




298 


33, 24 


223 


7 

16 




164 


36, 20 


318 


14, 1 




129 


37 


214 sq. 


17-20 


284, 305 


37, 27 


317, 333 


15, 5 




238, 284, 315 


39, 17, 18 


17 


6 




284. 299, 319 


43, 2 


163 


10, 


sqq. 


46 


47, 12 


99 


12 


X A 


239 


23 


96 


13 




203 


Genèse. 




16 




171, 203 


1,1 


160, 190 


18 




30 


6 


170 


16, 4 




129 


27 


284 


17,5 




157, 284, 315 


31 


119 


8 




298 


2,2 


332 


10, 


11 


284 


4 


123 


13 




196 


7 


284, 315, 322, 332 


14 




92 


12 


.172 


15 




157 


24 


270, 271, 284, 305, 


16 




335 




316 


17 




315 


.3,6 


284 


18, 2 




30, 238, 239 


. 14 


270 


6, 


7 


238 


16 


228 


9 




129, 130 


17, 18 


234 


10, 


14 


284, 334 



18 

19, 7 
9 

22 
24 
33 

20, 8, 11 
21,1 

10 

10, 12 
12 
20 
23 

22, 1 
3 
6 

16, 17 

23, 4 

24, 3-9 
10 

25, 23 

26, 3 
4 

27, 21 
27 

28, 18 
20 

31, 30 

33, 4 
17 

34, 26 

35, 10 
18 
22 

36, 12 
24 

37, 35 

38, 14 
26 

40, 8 
15 

41, 1-29 

42, 30 
44, 8 

18 



298 

141 

142 

96 

171 

129 

191 

190 

381 

284, 310, 335 

284, 301, 315, 347 

160, 190 

171 

284 

23, 159 

23 

284, 331 

284 

199 

145 

284, 334 
30 

164 
142 
142 

23, 159 

237 

196 

129, sq. 

234 

61 

157 

153 

68 

129 

240 

133 

234 

173 

241 

196 

198 

141 

84 

141 



CITATIONS. 




3G3 


47, '31 


284 




49, 4 


138 




6,7 


128 




10 


73, 74, 356 




14 


243 




22 


243 




28 


47 




Habacuc. 






1,5 


288, 318, 333 




12 


119 




2, 2-4 


296, 297 




3, sq. 


288, 327, 330, 


335 


4 


317, 319, 327, 
347 


332, 


3,9 


174 




11 


174 




Isaie. 






1, 2 


144, 177 




9 


289, 313, 329, 


334 


18 sq. 


62, 236 




19 sq. 


177, 199 




2,4 


62, 63 




10 


289, 322 




11, 19, 21 


289 




4,5,6 


234 




5, 2 


236 




14 


242 




6,1 


168 




9 sq. 


289, 313, 318, 


329 


7,8 


70 




8,2 


72 




14 


289, 313, 329, 


333 


17 


289, 315, 335 




18 


315, 335 




9,6 


130 




10, 22 sq. 


289, 313, 329 
334 


, 332, 


34 


236 




11, 4 


289 




5 


289, 323 




10 


289, 314, 320, 


332 


13, 19 


70. 




14, 19 


69 




23 


133 





364 



TABLE DBS CITATION'?. 



19, 11, 12 


289 




17 


147, 289 


22, 2 


144 




23 


289, 314, 322, 333 


13 


289, 319 




48, 13 


49 


24,9 


71 




18, 19 


156 


25, 8 


150, 289, 314, 


333, 


49, 1, 2, 4 


289- 




335 




6 


289, 313, 329, 333 


26, 2 


127 




8 


289, 295, 318 


11 


289, 322 




18 


333 


19 


64 




20 


41 


20 


296, 335 




23 


239 


27, 9 


314, 335 




50, 8, 9 


289 


28, 7 


184 




51, 4 


220 


8 


133 




52, 3 


75 


.11, sq. 


289, 297, 328 




4 


334 


16 


289, 313, 315, 


329 


5 


289, 318, 329, 332 




333, 334 




7 


289, 313, 323, 329, 


20 


65 






334 


29, 10 


289, 313, 329, 


333, 


11 


289, 316, 334 


*■ 7 


334 




15 


289, 314, 333 


13 


289 




53, 1 


289, 313 


14 


289, 314, 329, 


331 


4 


289 


16 


289, 323 




5 


239, 289 


30, 15 


75 




11 


289 


16 


239 




12 


290, 323 


22 


52 




54, 1 


290, 310, 314, 335 


32, 20 


74, 243 




55, 1 


163,184,230,237,243 


33, 18 


289 




3 


290, 301, 333, 335 


34, 6 


17 




10 


290, 322, 329, 335 


35, 3 


289, 333 




12 


144 


5, 6 


150, 319 




57, 19 


290 


10 


234 




58, 8 


150 


36, 12 


147, 165 




59, 7, 8 


334, 335 


40, 3 


323 




17 


174, 290 


4 


66 




20 sq. 


290, 314, 331, 335 


5 


177 




60, 5 


150 


9 


323 




8 


232 


13 sq. 


289, 320, 329 


334 


22 


75 


41, 8 


289 




61, 1 


170 


42, 5 


289 




11 


147 


10 


146 




63, 9 


126 


43, 6 


333 




64, 1 


235 


45, 3 


289 




3 


333 


7 


153 




4 


290, 320 


9 


289, 323 




65, 1 


333 


14 


289 




1,2 


313, 328, 334 



TABLE DES CITATIONS. 



365 



2 


333 




43 


70 




16 


333 




45 


290, 316 




17 


320 




46 


69 




29 


290 




52, 12, 13 


69 




66,5 


290 




31 


69 




15 


290, 


322 


Job, 






Jérémîe, 






1, 1-8 


288 




1, 5 


290 




3 


151 




2, 2 


168 




2,3 


288 




7 

5 


65 




5,12 


316, 333, 


334 


11 


119 




13 


288, '316, 


325, 333, 


27 


226 








334 


6, 4 


69 




7, 20 


119 




7, 4 


198 




8, 11 


176 




9, 9 


69 




10, 2 


20 




7 

22, sq. 
25 


290, 


298, 319, 327 


13,15 


125, 126 




185 


7 / 


16 


288, 323 










17, 2 


205 




10, 25 


322 




*' 5 ■" 












4, 5 


181 




11, 20 


290 




J.J V 












27, 5 


126 




12, 5 


84 




7 






> 






30, 3 


144 




17, 11, 22 


87 




7 












22 


144 




22, 6 


236 










^^7 






38, 9 


65 




24 


333 




5 

39, 7 


144 




23, 2 


139 




7 






7,8 


157 




41, 3 


288, 320, 


325 


24 


18 




Joël 






29 


36, 155 


2, 23 


99 




26, 16, 17 


173 




3,5 


288, 315, 


329 


18 


72 




9 


334 




20-23 


173 










30, 6 


147 




Josué 






7 


73 




2, 11 


115 




18 


74 




3,1 


23, 159 




31, 13 


150 




4, 2 sqq. 


196 




31-34 


290, 


300, 334 


7,1 


143 




33 


337 




10, 12 


150 




34 


301 




15, 63 


144 




33,24 


183 




22, 24 


161 




26 


173, 


183 


Juges. 






34, 5 


69 










36, 6 


156 




5, 26 


49 




46, 22 


170 




28-31 


173 




50, 25 


290, 


324 


6, 12 


61 




51, 1 


139 




9, 8-15 


?07 





366 



TABLE DES CITATIONS. 











10, 2 


182 


lamentations 








3 


177 


3, 23 

4, 19 
20 

5, 17, 18 


23 
232 

177 
72 






4, 5 
6 

16 
11, 2 
14 


182 

58 

197 

149 

104 


Lévitique. 








33 
12, 5 


122 

48, 128, 193 


1,1 


26, 197, 


205 


13, 3 


148 


2 


157, 


166, 


191, 194 


10, 18, 24 


113 


4 


25 






30 


132 


5 


21, 22 




40, 42 


181 


8 


164 






14, 13, 14 


114 


10 


47, 180 




21 


19 


2,4 


194 






34, 45 


182 


12 


22 






15, 16 


155 


14 


50, 156, 


174 


16, 2 


51 


20 


198 






12 


285 


4,5 


124 






23, 24 


181 


7, 18,25,30 


,123 






27 


285 


32 


94, ' 


149 




3 


161 


34 


123 






17, 7 


161 


5, 1 


62 \ 






8 


158 


2 


188 






11 


48 


4 


154, 


195 




13 


45 


5 


102 






15 


105 


6 


94 






18, 3 


170, 317 


12 


40 






5 


285, 315, 332 


6,3 


134 






6,7 


107 


5 


178 






26, 27 


39 


7 


185 






19, 4 


131 


13 


160, 


193 




9 


40 


7, 2-5 


114 






10 


40, 56 


8 


177 






11 


50, 175 


12 


285 






13 


39,90 


15 


180 






14 


228, 285 


34 


114 






16 


137, 175 


37 


193 






18 


285, 320 


8, 14 


142 






19 


40, 112, 241 


33-35 


177 






20 


136 


9, 1 


168, 


177 




23 


92 


5 


176 






24, 25 


155 


7 


94 






26 


45, 227 


22 


175 






20, 10 


50 



TABLE DES CITATIONS 



367 



13 


122 


14 


140 


21,3 


50, 152, 198 


9, 10 


186 


22, 2 


141 


4 


40 


6 


160 


18 


192 


21 


158 


26-28 


180 


28 


158, 180 


23 


198 


23, 13 


126 


16 


22 


17 


174 


22 


40 


34 


123 


40 


121, 135, 144 


40-42 


39 


42 


123, 146 


44 


179 


24, 6 


25 


8 


149 


15 


90 


19, 20 


44 


21 


44 


25, 2 


180 


2-7 


40 


3 


203 


5 


141 


7 


56 


9 


48 


20-22 


40 


46 


50, 152 


55 


250 


26,3 


156, 199 


11 


285, 317, 334 


12 


317, 333, 334 


15 


199 


25 


177 


46 


64, 180 


27, 10 


146 


21 


146 


26 


202 



I Macchabées 


. 


1, 41, 57 


40 


3, 56 


39 


7, 17, 18 


69 


Malachie. 




1,2 


319, 333 


2 sq. 


288, 334 


13 


119 


Michée. 




3, 12 


72 


7,1 


71 


6 


75 


Nahum. 




1, 1, 3, 4 


173 


Néhémie. 




8, 1-8 


12 


14, 15 


39 


13, 1, 2 


39 


Nombres. 




4, 20 


49, 178 


30 


202 


5,5 


197 


6 


102, 109, 198 


7 


102 


8 


149 


10 


155 


11-31 


187 


12 


43 


13 


142, 198 


14 


50 


15 


23 


16 


149 


17 


127 


20 


199 


6,3 


143 


5 


45, 139 


6 


46 


9, 10 


187 


10 


158 


13 


160 


15 


108 


19, 20 


114 



368 



TABLE DES CITATIONS 



24 


175 




15,3 


147 




26 


204 




18 


159 




7,1 


151 




19 


152 




9 


53 




24 


179 




89 


205 




29 


146 




8,24 


202 




30, 31 


36,' 


196 


9, 2-13 


91 




32 


67 




3 


53, 174 


37-40 


179 




6 


175 




38 


134 




9, sq. 


53 




40 


178 




10 


129 




16, 1 


67 




19 


66 




5 


285, 


322 


10, 29 


96 




26 


322 




33 


18,' 


19 


30 


164 




35, 36 


130 




37 


285 




11, 1 


130, 


151 


18, 1 


24,5 


25 


4 


285 




2 


24, 


167 


6 


60, i 


172 


3 


66, ' 


167, 178 


8 


138 




4 


20 




15 


120 




5 


161 




32 


124 




7 


20,: 


22, 25 


34 


285 




9 


43 




12, 1 


19,' 


141 


11 


21 




1-10 


46 




13 


21, 


22, 26 


2 


194 




14, 15 


161 




4 


156, 


166 


16 


90, 


111 


6 


141 




23 


25 




7 


285, 


322 


26 


93, 


121 


8 


163 




21, 5 


141, 


321 


9 


20 




6 


321 




12 


120 




8 


94 




14 


84, 


87 


17 


150 




13, 2 


196 




26 


145 




26-31 


173 




30 


129 




31 


121 




23, 24 


57 




14, 2 


321 




24, 6 


285, 


322 


3 


67 




7 


73 




14 


66 




17 


72 




16 


285 




25, 1 


186, 


321 


21-23 


321 




7 


230 




27 


60 




9 


321 




29 


285, 


321, 322 


13 


151 




34 


94 




26, 53 


166 




36 


321 




55 


161 




44 


67 




27, 1 


168 





TABLE DES CITATIONS 



369 



3 




67 




18 


237 


11 




125 




4. 4 


237 


12, 


13 


18 




8 


133 


28, 2 




78, 91 




26 


319 


7 




143 




7, 20 


75 


8 




163 




11, 10 


62 


19 




155 




13 


62 


26 




22 




27 


63 


29 




198 




31 


84 


29, 16 




129 




13, 14 


174 


30, 3 




54 " 




15, 20 


39 


9 




53 




17, 5 


17 


10 




52 




2.8 


87 


13, 


14 


53 




21, 14 


96, 184 


32, 20, 


23 


199 




22, 8 


288, 319 


29, 


30 


199 




28 


61 


33, 6 
35, 24 




234 
60 




23, 10 
20 


61, 227 
61 


31 




45, 115 




22 


39 


33 




138 




31 


181, 288 


36, 1 




168 




24, 12 


288, 322 


Osée. 






17, sq. 


41 


1, 2 




214 




25, 21, sq. 


288, 316, 335 


J 

9 




186 




27, 8 


65 


10 




188, 313 




10 


135 


2, 1 




127, 186, 


333 


22 


136 


23 




288, 313, 


328, 332, 


28, 19 


244 






/ 7 


7 ^^ ) 

334 


31, 14 


237 


3,1 




47 




31, 10-31, 1 


245 


4 




356 




Psaumes. 




4, 14 




71 








7,11 




221 




1,5 


185 


9, 10 




Ul 




2 


347 


10, 1 




168 




2, 7 


277, 286, 312, 


12 




243, 288, 


335 


4, 5 


286, 319 


13, 14 




288, 314, 


327, 333, 


5, 4 


23 








335 


10 


286, 335 


14, 1, 2 




186 




7,1 


19 


3 




288 




8 


328, 347 


Proverbes. 






8,1 

5-7 


286 
286, 312 


3,4 




287, 320, 


323 


7 


286, 295, 314 


7 




287, 323 




9,9 


322 


9 




90 




28 


286 


11, 12 


287, 297, 


334 


10, 7 


286. 335 



370 



TABLE DES CITATIONS 



12, 2 


71 


62, 12 


14, 1-3 


286, 334, 335 


13 


4,5 


86 


68, 14 


16, 10 


286, 300, 335 


19 


8-11 


300 




18, 10 


205 


27 


11, 15 


174 


28 


34 


184 


69, 10 


50 


286, 320, 334 


23, 24 


19, 4 


355 




5 


313, 329 


25 


22, 6 


286 


29 


23 


287, 315, 333, 335 


77, 17 


24,1 


287, 317 


78, 27 


7-9 


246 


51 


28, 4 


333 


65 


29, 7 


171 


79, 2, 3 


8 


96, 184 


81, 14, 15 


9 


184 


84,3 


32, 1, 2 


287, 319 


89,21 


34, 16-18 


172 


90, 1 


35, 2, 3 


174 


91, 4 


8 


329, 333 


92, 13 


36, 2 


287, 332, 335 


94, 2 


37, 21 


65 


11 


38, 2 


184 


95,4 


40, 7 


287 


8-11 


7-9 


287, 300, 318, 329, 
334 


97, 7 


44, 16 


94 


11 


23 


219, 287, 318, 329 


98, 8 


24 


204 


99, 6, 7 


45 


214 


102, 26-28 


45, 4 


174 


104, 4 


7 


287, 332 


3-25 


7,8 


312, 334 


106, 20 


11 


220 


30 


46, titre 


123 


110 


47, 2 


144 


110,1 


49, 6 


132j 229 


4 


50, 8 


18 


111, 8 


51, 6 


287,317 


112, 7 


56, 1, 2 


173 


9 


58, 7 


151 


113, 9 


60. 9, 10 


246 


115, 16 



36, 155 
287, 322 
244 

287, 307, 308, 328, 
329, 330 
99 
124 

287, 317 
287, 313, 329, 333, 

334 
151 
287 
19 
124 
171 
204 
69 
156 
170 

277, 287 
47 
174 

163, 183 
287 
287, 316, 331, 334 

287 

287, 302, 303, 334 

312, 1318, 329, 332, 
334 

182 

144 

94 

287, 312, 329, 334 

287, 312, 334 

245 

119, 287, 322 

68, 230 

347 

287, 312, 314, 334 

287, 305, 312, 335 

186 

41 

287, 335 

296 

235 



TABLE DES CITATIONS 



371 



116, 1 


287 


Sagesse. 






10 


320 


7, 26 


288, 322 




11 


287, 323 


11, 23 


288 




117, 1 


287, 320, 333, 334 


13, 1, sqq. 


288 




118, 6 


287, 335 


1 Samuel. 






17 


287 


1,1 


151 




119, 45, 94 


12 


2, 22 


65 




126 


41 


25 


68 




155 


12 


3, 3 


172 




121, 4 


204 


13 


119 




125, 5 


287 


4,8 


173 




126, 2 


150 


13, 14 


277, 286 




128, 2 


41 


15, 12 


23, 159 




130-, 8 


287 


17, 5 


49 




132, 11 


300 


36 


186 




14 


74 


18,19 


177 




136, 10 


171 


23, 3 


84 




140, 4 


287, 335 


25,44 


. 177 




143, 2 


287, 32 


30, 21 


141 




149, 1 


147 - 


2 Samuel. 






6 


64 


7,8 


286, 333 




1 Rois. 




14 


286, 312, 328, 


334 


1, 40 


164 


18 


239 




6, 7 


66 


27 


333, 334 




7, 15 


182 


12, 3 


214 




8, 12 


150 


8 


105 




27 


286 


13, 39 


170 




H, 3 


94 


17, 19 


136 




15, 33 


203 


20, 1 


120 




17, 13 


141 


21, 8 


177 




18, 44 


242 


23, 24 


115 




19, 8 


19 


24, 9 


205 




10, 14, 18 


286, 321, 334 


Tobie. 






7 7 


7 7 


2, 6 


40 




2 Rois. 




7 

4, 3-20 


39 




2, 14 


191 


Zacharie. 






6, 25 


147, 165 


2, 12 


119 




10, 27 


165 


7, 3 


141 




14, 29 


207 


8, 4 


72 




25, 8, 27 


69 


16 


288, 323 




Ruth. 




17 


288 




2,4 


61 


9,1 


36, 74 




14 


239 


11 


288 




3, 13 


173 


12, 14 


176 




4,18 


123 


14, 12. 15 


176 





372 



TABLE DES CITATIONS 



2° Nouveau Testament. 



A. Textes patjuniens. 



Actes. 








31 


278, 298, 


319, 327, 


2, 24 31 


300 










331, 339 


32 


308 






2,9 


278, 292, 


334, 333, 


34, sq. 


287 










339 


3, 25 


284 






16 


280, 320, 


329, 334> 


7, 2-52 


276 










342 


3 


284 






3,8 


295 




13, 17-19 


322 






19 


278, 316, 


326, 333, 


14, 15 


280, 322 










334, 389 


17, 22 


276 






20 


278, 316, 


331, 334, 


22 


277, 341 










343 


24, 25 


280 






4, 20 


295 




31 


280, 322 






5, 7 


281 




32 


267 






13 


281, 323 




33 


277, 312, 


339 




6, 16 


278, 342 




34 


277, 333, 


335, 340 


17 


316 




34-37 


272, 301 






7, 10, 12 


271 




35 


277, 335, 


340 




8, 9, 10 


228 




40 


277, 341 






9, 8-10 


310 




41 


277, 318, 


333, 


334 


9 


278, 317, 


330, 332, 


47 


277, 318, 


329, 
342 


333, 


12 


317 


340 


20, 35 


328 






10, 1-4 


281, 303, 


321 


23, 5 


277, 316, 


339 




4 


329 




26, 6 


267 






5 


281 




23 


272 






6 


269, 281, 


303 


28, 26, 27 


277, 318 


, 329, 
342 


341, 


7 
7-10 


278, 939 
321 




Colossiens. 

1,12 

2, 3 
17 
22 

3, 1, 10 


282 
282 
268 
282 
282 






7-16 
-8 
11 
18 
20 
26 
29 


318 
331 

269, 303, 
267 

281, 322 
280, 281, 
295 


310 
317, 342 


1 Corinthiens. 






11, 1 


303 




1, 19 


278, 314 


, 329, 
339 


331, 


2 
3 


317 

281, 317 




20 


281 






7 


281 




27 


312 






25 


281 





TABLE DBS CITATIONS 



373 



12, 8 


272, 273 




17 


278, 316, 343 


28, 29 


272 




18 


278, 316, 333, 343 


13, 5 


281 




16-18 


293, 334, 340 


14, 21 


278, 297, 325, 
340 


328, 


8, 15 


278, 293, 316, 329, 
333, 339 


22 


297 




21 


280, 320, 343 


25 


281 




9,7 


280, 319, 343 


34 


317, 341 




9 


278, 293, 335, 339 


15, 4 


272 




9-11 


296 


10 


295 




10 


282, 322, 329, 339 


25 


281, 314 




10,17 


280, 298, 319, 327, 


26 


314 






331, 343 


27 


280, 281, 295, 


328, 


11, 3 


282 




342 




12, 2, 3 


295 


28 


328 




13, 1 


280, 319, 343 


32 


280, 319, 343 




4 


295 


44 


295 




Ephésiens, 




45 


278, 292, 315, 


332, 






340 




1, 20 


282 


45-49 


270, 303, 304 




22 


282, 328 


46 


295 




2, 12 


267 


47 


322 




13, 17 


282 


52 


295 




20 


282 


54 


278, 325, 335, 339 


4,8 


278, 328, 329, 330, 


55 


278, 314, 327, 


333, 




340 




335 




8-11 
11 


307 
272 


2 Corinthiens 


• 




25 


280, 323, 343 


2, 16 


295 




26 


280, 319 


3,3 


281, 322 




5, 2 


282 


7-9 


281, 322 




14 


340 


7-18 


293 




18 


282 


8 


278, 317 




31 


280, 305, 343 


10 


278 




32 


270, 271, 305, 328 


11 


317 




6,2 


342 


13 


278, 281 




2,3 • 


278, 320 


14-16 


272, 281, 328 




14, 15 


282, 323 


16 


322 




14-18 


293 


3, 13-4, 6 


309, 322 




17 


282 


4, 13 


278, 320, 340 




Galates, 




5, 3, 7 


295 








10 


281 




1,7 


295 


6, 2 


278, 295, 318, 340 


15, 16 


292 


9, 11 


282 




2, 16 


280, 323, 343 


16 


278, 317, 333 




3,6 


280, 319, 343 



374 



TABLE DBS CITATIONS 



8 


274, 278, 303, 342 ] 


12' 


279, 315, 333, 334 


8, 9 


298 




13 


279, 315, 334, 343 


10 


278, 315, 334, 339 


16 


283 


11 


280, 296, 317, 


319, 


3,2, 5 


283, 322 




327, 332 


, 343 


7-11 


279, 334 


12 


282, 315, 317, 343 


12 


302 


13 


279, 314, 329, 


332, 


15 


341 




340 




17 


283, 322 


16 


267, 282, 298, 340 


3, 7-4, 11 


302, 303, 340 


17, 18 


267 




4,3 


279, 340 


21, 22 


267 




4 


279, 332, 340 


24,25 


268 




5 


279, 343 


4, 21-31 


275, 309, 310, 


328, 


7 


279, 342 


■^î — 


335 




8 


267, 301 


22 


279, 339 




9 


267 


27 


279, 314, 339 




11 


269 


28 


267 




5,5 


279, 312, 335, 342 


30 


279, 331, 341 






279, 305, 312, 335 


5, 13 


295 




6 


340 


14 


279, 320, 342 




9 


283 


6, 16 


266, 282 




10 
6, 8 


305 
283 


Hébreux. 






^7 

13 


279, 295, 341 


1, 1 


275 




14 


279, 331 


2 


322 




19 


283 


3 


283 




20 


^83, 305 


5 


279, 312, 328, 


340, 


7,1 


280 




343 




1-10 


305 • 


5-13 


334 




13 


341 


6 


279, 312, 318, 


329, 


21 


340 




341 




28 


283, 323 


7 


279, 312, 332, 


340 


8,1 


323 


8 


279, 312, 332, 


340, 


2 


283, 322 




343 




5 


269, 279, 316, 342 


9 


279 




8 


340 


10 


279, 343 




8-12 


279, 300, 334 


10-12 


312, 329 




10 


337 


11 


279, 341 




8-10, 18 


306 


12 


279 




9 


283, 322 


13 


279, 312, 340 




9,9 


269 


2, 5-8 


312 




15 


267 


6 


342 




20 


279, 321, 333, 341 


6-8 


279 




23, 24 


269 


9 


306 




28 


283, 323 


11 


341 




10 


283 



TABLE DES CITATIONS 



375 



10, 1 


268 




6 


280, 317, 339, 342 


5 


341 




11 


284, 306 


5-7 


279, 318, 329, 


334 


15, 20 


284 


7-9 


300 








8-14 


334 




Philippiens. 




12, 13 


283, 323 




1, 19 


232, 323 


15 


279 




2, 10 


322, 282 


16 


279, 334, 337 




11 


282 


17 


334, 337 




15 


282, 323 


18 


301 




16 


282 


27 


283 




4, 3, 18 


282 


27-30 


317 








28 


283 




Romains. 




30 


279, 331, 342, 


343 


1,2 


274 


36 


342 




17 


277, 296, 319, 327, 


37 


279, 335 






332, 339 


37-39 


296, 327, 330 




20-32 


281 


38 


279, 319, 332, 


335 


23 


281, 322 


39 


328 




2,6 


281, 322 


11 


283, 304, 322 




11 


281 


11, 3-40 


276 




24 


277, 318, 329, 332, 


4,5 


283 






339 


8,9 


283 




3,4 


277, 281, 317, 323, 


10 


304 






339 


12, 13 


283 




10 


339 


17 


283 




10-12 


27-7 


17-19 


304, 305 




10-19 


312, 334, 335 


18 


279, 342 




13-17 , 


277 


21, 23 


283 




18 


277, 332 


26 


283 




20 


280, 323, 343 


28 


284 




21 


274 


39, 40 


304 




31 


268 




304 




4 


276, 281, 303 


3 . 


284 




4,3 


277, 319, 341 


5 


279, 342 




3-5 


299 


5-11 


297, 334 




6 


319, 341 


12 


280, 319, 333, 


343 


7 


277, 319 


13 


319, 343 




8 


277 


15 


279 




9 


277, 342 


18-20 


284, 322 




11 


281, 298, 301 


20 


280, 334, 342 




12 


298 


21 


280, 341 




13, 14, 16 


267 


26 


;280, 332, 334i 


342 


17 


277, 339 


26-28. - 


308, 333 




16-22 


315 


13, 5 ' 


240, 280, 317, 


335 


18 


277, 341, 344 



376 



TABtË DÈS CtTAtlONS 



22 


277, 343 




32 


329 


23 


303, 318 




33 


277,313,329,333,339 


24 


303 




10, 4 


268 


25 


281 




5 


277, 315, 332, 334, 


5 


292 






340 


5,5 


281 




6 


42, 341 


7 


295 




6-8 


277 


9, 10 


317 




6-9 


306, 328, 3gl 


12 


281 




7 


42 


12-19 


303, 304 




8 


307, 340 


12-21 


270 




9 


307 


14 


269, 303 




11 


277,315, 329, 331, 


15, 17 


317 






341 


6,5 


303 




13 


280, 315, 329, 342 


6-8 


292 




15 


277, 313, 329, 334, 


7,7 


277, 320, 341 






339 


8, 3 


268 




16 


277, 313, 341 


33 


281 




18 


280, 313, 330, 343 


36 


277, 318, 329, 339 


19 


278, 313, 341 


9-11 


292, 313 




20 


278, 313, 328, 333, 


9,4 


267, 281, 322 






334 


6 


267 




21 


278, 313, .328, 333, 


6-9 


301 






341 


7 


280, 343 




11, 1 


281 


7-11 


281 




2 


341 


7-13 


315 




2-4 


321 


8 


267 




2-5 


304 


9 


277, 334, 342 




3 


278, 334 


10-12 


319 




4 


278, 334, 340 


12 


277, 334, 341 




8 


278, 313, 329, 333, 


13 


277, 319, 333, 334 




339 


15 


277, 334, 340 




9 


278, 313, 329, 333, 


15-18 


299 






341 


17 


277, 331, 334, 341 


10 


278, 313, 329, 333 


18 


281 




11 


281 


20, 21 


281, 323 




12 


317 


22 


281, 324 




26 


278, 314, 331, 335, 


25 


277, 313, 328, 


332, 




339 




334, 


340 


27 


278, 314. 335 


25-29 


329, 334 




34 


280, 320, 334, 342 


26 


277, 313, 333 




35 


320, 325 


27 


277, 313, 332, 


334, 


12, 7 


272 




342 




16,17 


281, 323 


28 


277, 334 




19 


278, 316, 335, 339, 


29 


277, 313, 342 






\ 331 



TABLE DES CITATIONS 



377 



20 

13, 9 

14, 3 
11 
13 
14 

15, 3 
4 
9 

9-12 
10 
11 

10-12 
12 
21 

16, 26 

1 Thessaloniciens. 



278, 316, 335, 343 

278, 320, 342 

317 

278, 314, 339 

281 

317 

278, 317, 339 

271 

278, 339 

320, 334 



278, 340 

278, 333, 343 

343 

278, 314, 341 

278, 314, 333, 339 

274 



1,6 
2,4 
4,5,6 

15 
5, 8 

22 



303 

282 

282 

271 

282, 323 

282 



2 Thessaloniciens. 

1, 8, 9 282, 322 
10 282 

12 283 

2, 4, 8, 13 283 

1 Timothée. 

2, 6 283 

12-14 283, 317 

5, 17 311 

18 278, 283, 311, 332, 

341 

19 343 

6, 3 271 
15 283 



2 Timothée 

2, 19 

3, 14-17 

4, 14 

Tite. 

2, 14 283 

Autres écrits, 

Jacques. 

2, 8, 11 285 

23 284 

Jean (évangile). 

2, 17 287 

3, 13 307 
8, 17 285 

12, 40 sq. 289 

Luc. 

10, 27 285 

Marc. 

4, 12 318 
10, 6, sqq. 284 

12, 31 285 
14, 24 333 

Matthieu. 

5, 18 353 
21, 43 285 

13, 14, 15 289 

18, 16 285 

19, 4, 5 284 
19 285 

21, 16 286, 312 

22, 39 285 
40 286 

1 Pierre. 

2, 6, 8 289 



278, 283, 322, 342 

271 
283 



378 



TABLE DES CrTATIONS. 



3° Littérature rabbinique. 



MiDRASIM TAKNAÏTES. 





Mekhilta, Exode. 




14 


161 


2, 1 


86, 90, 179 




16. 


206 


2 


149, 168 






17 


171 


"3 


168 






21 


18, 66 


4 


133,142,145,182, 193 


14, 10 


150 


5 


201 






13 


206, 221 


6 


29, 131, 


179, 


180, 


19 


174 






197, 


223 


21 


19, 206 


7 


42 






24 


23 


9 


143, 158, 


196 




25 


22 


10 


127 






29 


235 


11 


49, 222 






30 


153 


12 


168, 171 






15, 1 


147, 150, 206, 220 


14 


148, 165 






2 


32, 123, 220 


15 


95, 161, 167 




3 


174 


16 


154, 161 






7 


120, 151, 206 


17 


122, 171 






8 


168, 206 


18 


192 






11 


144 


19 


89 






13 


221, 222 


21 


171 






16, 17 


206 


22 


159 






18 


74 


24 


192 






22 


236 


25 


16, 155, ' 


177 




25 


237 


29 


17, 24 






16, 10 


235 


30 


141 






14 


35, 236 


32 


166 






20 


175 


35 


155, 168, 


244 




25 


199 


36 


155, 168 






17, 1 


238 


37 


17, 159, 


222, : 


234 


8 


176 


40 


119, 203 






9 


129, 235 


41 


46, 220 






12 


235 


43 


174 






13 


137 


44 


152 






18, 1 


206 


46 


154 






3 


125 


48 


168 






13 


192 


49 


20 






15 


16, 172 


13, 2 


111, 178 


, 206 




18 


191 


5 


30 






27 


206 


6 


24 






19, 1 


216 


9 


49 






2 


104 


10 


24 . 






5 


163 



TABLE DES CITATIONS. 



379 



6 

8 
9 


221 
163 
191 






Mekhilta de Siméon ben Yohaî. 






12, 35 


168 


10 
15 
17 
20 

20, 2, 4 
6 
8 
10 


\.%S Si. 

180 
91 

176 

205, 

47 

223 

155 

50, , 


235 
51 




14, 30 

15, 22 
25 

17, 8 

18, 3 

20, 1 

21, 2 
23, 10 


153 
236 
237 
233 
125 
112 
232 
203 


12 


90 






Siphra 


sur Lévi tique. 


13 


47 






1,1 


26, 181, 197, 206 


14 


47,, 


50 




2 


152, 156, 166, 192, 


15 


50, ' 


175, 


176, 182 




194 


18 


171 






4 


.25, 192 


25 


50, ' 


156, 


230 


5 


22, 35 


21, 1 


158 






10 


47, 158, 181 


3 


167 






2,1 


156 


6 


230 






2 


97 


7 


230 






4 


194 


8 


122 






6 


195 


9 


207 






12 


22 


14 


20,'. 


L41, 


187 


14 


174 


15 


158 




f 


15 


194 


16 


145 






17 


165 


17 


158 






4, 13 


181 


18 


109 






32 


94, 149 


21 


161, 


191 




5,2 


94 


24 


44 






6, 3 


135 


27 


103 






13 


193 


28 


190 






7, 37 


193 


32 


113, 


336 




9,1 


177 


22,2 


207 






7 


94 


4 


104 






10, 6 


206 


1 


43 






7 


175 


8 


110 






16 


197 


9 


109 






11, 2 


149 


28 


134 






9 


49 


30 


86, i 


Î7, 105, 166 


33 


122 


23,4 


48 






12, 3 


193 


5 


153 






5 


48, 128 


12 


46 






13, 3 


148 


18 


171 






30 


132 


31, 13 


191 






33 


154 



380 



ÏAfiLE DÈS CITATIONS. 



14, 35 


96, 166, 180 


14 (7) 


50, 152 


15, 25 


148 


15(8) 


250 


16, 2 


51 


16(9) 


149 


6 


144 


6, 3 (23) 


141, 143, 170 


12 


149 


5(25) 


139 


23 


181 


6(26) 


46 


17, 8 


197 


10 (29) 


158 


11, 14 


48 


13 (32) 


160 


18, 2 


166 


15 (34) 


108 


3 


170 


20 (37) 


115 


6 


107 


23 (39) 


166 


19, 4 


132, 144 


25 (41) 


237 


14 


228 


26 (42) 


201, 204 


16 


137, 227 


7, 1 (44) 


182 


26 


134 


89 (58) 


205 


20, 13 


222 


9, 10 (69) 


129, 175 


14 


240 


10, 8 (75) 


35 


16 


230 


29 (78) 


97, 135 


17 


83 


33 (82) 


19 


22, 3 


141 


34 (83) 


66 


9 


158 


' 35 (84) 


120, 130 


18 


192 


11, 1 (85) 


151 


28 


180 


6(88) 


25, 173 


23, 17 


174 


8 (89) 


138 


27 


191 


* 16 (92) 


174 


40 


121, 135 


32 (98) 


124 


43 


234 


12, 1 (99) 


19, 141, 156 


44 


179 


4 (102) 


166 


24, 8 


149 


8 (103) 


163 


29 


44, 45 


9 (104) 


20 


25, 9 


48 


13 (105) 


159 


39 


154 


15, 3 (107) 


147 


26,1 


144 


7 (107) 


145 


3 


156 


18 (110) 


159 


46 


64 


19 (110) 


153 


27, 10 


150 


24 (111) 


179 


21 


146 


29 (112) 


146 


Siphi 


•é Nombres. 


31 (112) 


36, 196 




32 (112) 


67 


5,5(2) 


197 


33 (113) 


175 


6(2) 


102, 143, 159, 198 


38 (115) 


134, 231 


7(2) 


102 


40 (115) 


127 


10(6) 


155 


16, 1 (127) 


198 


12(7) 


43, 143 


18, 1 (116) 


25, 166 


13(7) 


143 


2 (116) 


24, 168 







TABLE DES 


CITATIONS. 


38i 


3 (116) 


49, 66, 178 1 


13, 8 (88) 


46 


4 (116) 


20 




14 (93) 


148 


5 (116) 


161, 178 




14, 15 (103) 


213 


8 (117) 


66, 165, 


187 


27 (108) 


48 


9 (117) 


43 




15, 15 (120) 


244 


13 (117) 


21, 26 




19 (124) 


202 


14 (117) 


161 




17, 2 (148) 


101, 144 


15 (118) 


97, 161 




18, 3 (165) 


250 


16 (118) 


111, 161 




10(170,171 


) 144, 148 


18 (118) 


90, 168 




19, 4 (181) 


21, 141 


26 (120) 


93, 121 




5, 11 (181) 


21 


29 (121) 


153 




20, 8 (197) 


229 


19, 6 (124) 


146 




21, 13 (213) 


226 


9 (124) 


193 




22, 1 (222) 


48 


. 15 (126) 


193 , 




11 (233) 


112, 155 


17 (128) 


127 




17 (237) 


207 


18 (129) 


146 




23, 4 (249) 


93, 146 


25, 1 (131) 


186 




11 (255) 


156 


5 (131) 


68 




26 (267) 


141 


13 (131) 


152 




24, 1 (269) 


58 


26, 53 (132) 


167 




32, 1 (306) 


144 


55 (132) 


161 




2 (306) 


163 


27, 1 (133) 


168 




8 (311) 


222 


3 (133) 


175 




17 (318) 


126 


12 (134) 


142 




25 (321) 


123 


16 (139) 


29 




39 (329) 


49 


28, 8 (143) 


163 




42 (332) 


11, 17, 336 


30, 4 (153) 


166 




33, 1 (342) 


47, 158 


31, 6 (157) 


145 




2 (343) 


220, 237 


35, 33 (161) 


138 




5, 6 (346) 


180 


Siphré 


Deutéronome. 


10 (351) 


64 


1, 1 (1) 


16, 74 




13 (355) 


222 


2(3) 


19 




26 (355) 


32 


7(6) 


142 




27 (356) 


118 


28 (25) 


164 




34, 1 (357) 


72 


3, 23 (26) 


144 




Midras Tannaim sur le 


24 (27) 


101 




Deutéronome. 


25 (28) 


18, 142. 


236 


19, 4 


227 


6, 4 (31) 


17, 18, 


336 


-, j * 

22, 17 


226 


11, 16 (43) 


72 








17 (43) 


144 




Midras Rabba sur Genèse. 


21 (47) 


127 




1, 1 (1, 14) 


160, 190 


12, 17 (72) 


144 




2, 21 (17, 8) 


232 


31 (81) 


194 




3, 16 (20, 7) 


228 


33 (81) 


83 




4, 1 (22, 2) 


160, 190 



382 



TABLE DES CITATIONS. 



11 (22, 10) 
18 (23, 2) 

6, 4 (26, 7) 

7, 23 (32, 11) 
12, 3 (39, 12) 

14, 1 (41, 2) 

15, 12 (44, 17) 
18, 9 (48, 15) 
21, 20 (53, 15) 
28, 20 (70, 5) 
33, 4 (78, 9) 
35, 17 '(82, 8) 
37, 35 (84, 21) 
38,14(85,7) 
41,26(89,9) 
44, 8 (92, 7) 
49, 4 (98, 4) 



1, 21 
2,9 
3, 2 



10, 1 



1,2 



7, 48 



1,1 



1,1 

2 

6 
9 

12 
2,4 
5 
8 

14 
16 



164 

123 

136 

191 

72 

239 

240 

129 

160, 190 

237 

129 

244 

133 

234 

199 

84 

139 

Exode. 

67 
240 
238 
120 



Lévitîque. 
142 

Nombres. 
246 
Deutéronome. 
240 

Cantique. 

216 

216, 219 
223 
220 

165, 218 
165, 222 
222 

222, 223 
221 

220 
■}•)') 



9 


220, 221 


10 


221 


11 


220 


4,5 


223 


7 


220 


12 


223 


5, 9 


220 


6,2 


219 


8,6 


220 


8 


223 


13 


223 




Ecclésiaste 


1, 12 


168 


8, 15 


245 


10, 1 


243 


11, 1 


242 


2 


243 


6 


244 



2, 14 
4, 18 



Ruth. 

239 
123 

Lamentations. 



préface, 24 



5, 19 



144 
72 



Pesiqta R. Kahana. 



ch. 6 
12 
20 
30, 192 a 



123 

64 

74 
242 



Tanhuma (entre parenthèses 
édit. Buber). 

besaliah, 16 120 

Noé (3, 14) 191 

Naso, 24 (25) 151 

Semot(5) 240 

(10) 67 

(12) 240 

wayehi, 9 (12) 139 

wayassob 10 133 

wayese (7) 242 



TABLE DES CITATIONS. 



383 



Targum, 


Genèse, 49,10 


73, 74 


Exode 12, 4 


134 


21, 8 


122 


22, 28 


134 


24, 5 


118 


Nombres, 24,7 


73 


Deutéronome, 




24, 6 


228 


Cantique 


217 et 224 


Talmud et traités annexes 


Abot. 




3,3 


133 


4,4 


41 


19 


41 


5,5 


41 


22 


12 


6,4 


41 


Abot R. Nathan. 


4,5 


142 


12, 12 


12 


37, 10 


80 


Arakin. 




M. 8, 7 


202 


Bab. 15 a 


129 


25 b, 26 a 146 


29 a 


202 


Aboda Zara. 




Tos. 3, 19 


48 


6, 13 


203 


Baba batra. 




M. 8, 2 


53 


T. 1, 11 


227 


B. 15a 


214 


111 b 


125 


Baba mesia. 




M. 2, 5 


104 


7 


161 


9, 12 


29 


B. 33a 


153 



Baba qamma. 




M. 1, 1 


103 


4,4 


154 


T. 7, 2 


230 


3,4 


240 


5,6 


230 


10 


230 


8, 6, 7 


230 


B. 17 a 


243 


24b, 25 a 


88 


88 b, 89a 


310 


Berakot. 




M. 1, 4 


59 


7,3,4 


99 


8,1 


153 


9,5 


98 


Tos. 1, 10-14 


157 


7,1 


60 


24 


41 


11, 14 


65 


Pal. 1, 5, 3 a 


231 


9, 5, 14 a 


41 


7, 14 b 


160 


B. Sa 


336 


53 b 


153 


58 a 


336 


63 a 


187 


Derek 


ères zutta 


ch. 10 


75 


Erubin. 




B. 40 b 


242 


Gittin. 




M. 9, 5 


58 


B. 57 b 


72 


90 a 


58 


Hagiga. 




M. 1, 7 


65 


8 


54 


T. 1, 9 


54 


P. 1, 8, 76 b 


54 - 


B. 9 b 


65 


10 a 


54 


15 b 


54 



384 



TABLlî DES CITATIONS. 



HuUin. 




Nazir. 




B. 60 b 


136 


M. 7, 4 


88 


61a 


104 


B. 57 a 


88 


78 a 


158 


Nedarira. 




83 a 


180 










M, 2, 1 


54 


90 b 


164 










3, 1 


164 


92 a 


241 


vj * 








11 


186 


134 b 


230 










5, 9 


146 


Ketubot. 




10, 7 


53 


T. 5,9 


216 


11, 1 


53 


12, 2 


2,9 


9 


52, 53 


P. 4, 4, 28 c 


208 


B. 32 a 


238 


5, 13, 30 b 


165 






B. 5ab 


229 


Negaim. 




46 a 


226 


M. 10, 2 


132 


Kilaim. 




Pea. 




M. 9, 8 


40, 53 


M. 5, 6 


61 


Maaserot seni 


. 


6,4 


40, 55 


M. 5, 10, 13 


53 


7,3 


61 


Makkot. 




7 


40, 56 






8, 9 


63 


M. 1, 3 


29 


> 








T. 4, 20 


91 


2, 8 


58 






? 




P. 1, 1, 16 a 


137 


3, 15 


28, 140 






B. 29 ab 


72 


Pesahim. 




Megilla. 




M. 5, 3 


53 


T. 4, 39-41 


165 


5 


197 


41 


148, 165 


6,2 


53 


B. 9 a 


118, 119 


9,1 


53 


25 b 


165 


2 


129 


P. 1, 11, 71 d 


119 


3 


53 


Menahot. 




10, 4, 5 


53 


T. 13, 22 


65 


T. 9, 32 


87 


B. 19 b 


185 


P. 6, 1, 33 a 


78 


43 b 


231 


9, 10, 37 a 


88 


74 b, 75 a 


194 


B. 7 b, 8 a 


336 


82 b 


89 


22 b 


160, 190 


89 b 


126 


33 a 


78 






54 a 


240 


Miqwaot. 




61 a 


133 


T. 1,17,19 


100 


64 b 


197 


Moed qaton. 




75 b 


149 


M. 3,9 


150 


86 ab 


154 


P. 1, 4, 80 d 


165 


99 a 


87 


3, 5, 82 c 


72 


117 a 


147 



TABLE DES CITATIONS. 



385 



Qiddusim. 



M. 3, 5 


199 


T. 3, 2 


199 


P. 1, 1, 59 a 


136 


2, 59 d 


45 


B. 18 ab 


122 


40 b 


243 


61 ab, 62 a 


199 


Ros ha-sana. 


P. 2, 5, 58 d 


174, 237 


B. 3 a 


156 


17 b, sq. 


204 


26 a 


134 


36 ab 


133 


Sabbat. 




M. 1, 1 


40 


6,4 


62 


9, 1-4 


52 


2 


147 


3 


62 


19, 3 


61 


T. 7, 14 


134 


8, 23 


57 


16, 9 


92 


P. 2, 3, 5 b 


232 


19, 2, 17 a 


196 


B. 10 a 


192 


55 a 


139 


55 b, 56 a 


68 


63 a 


34 


88 b 


36 


113 b 


239 


115 b, 116 


a 130 


118 b 


58 


119 b 


71, 127 


134 b 


61 


Sanhédrin. 


M. 1, 6 


60 


, 2 


105 


3,7 


62 


4,5 


62 


8,1 


62 


10, 3 


185 



6 


57, 145, 193 


11 (10), 2 


246 


T. 1, 9 


30 


2,4 


158 


3,7 


28 


4,5 


148 


7, 11 


80 


9, 11 


31 


10, 3 


31 


13, 6 


28 


14, 4 


96 


P. 8, 8, 26 c 


208 


10, 2, 29 b 


246 


9, 29 d 


96 


B. 3 b 


122 


4a 


128 


4 ab 


122 


19 b 


177 


34 a 


36 


38 b 


164, 172, 213 


63 a 


45, 227 


64 b 


196 


67 b 


187 


76 b 


140 


86 a 


.182 


90 b 


64, 129, 196 


91 b 


150 


92 b 


214, sqq. 


94 a 


130 


97 a 


75 


97 b, 98 a 


75 


99 a 


274 


104 b, sq. 


246 


Sebiit. 




M. 1, 4 


59, 94 


10, 3 


52 


8 


40, 53, 58 


T. 5, 1 


56 


Sebuot. 




M. 3, 4 


154 


T. 1, 7 


188 


B. 10 a 


88 


26 a 


188, 195 



EXEGESE RABBINIQUE. 



13 



386 



TABLE DES CITATIONS. 



Seder Olam rabba. 


ch. 3 


203 


16 


203 


27, 28, 30 


69 


Semahot. 




2,8 


227 


8 (fin) 


231 


Seqalim. 




T. 3, 26 


202 


Sopherim. 




1,9 


118, 119 


6,4 


118 


Sota. 




M. 1, 6 


62 


5,2 


28, 122 


3 


28 


7,5 


185 


8,5 


229 


9, 15 


75 


9, 6 


31, 336 


9 


71 


10 


205 


11, 12 


71 


T. 4,1 


30 


1-7 


239 


2,4 


30 


7,9 


28 


22 


132, 229 


8, 5 


229 


6 


336 


9, 15 


75 


9,2-9 


173 


6 


31 


9 


71 


10 


205 


11, 12 


71 


11, 11-18 


201 


12, 1, 2 


203 


1-5 


201 


13,9 


205 


14, 4, 7 


28 


15, 1 


66 . 



3 


28 


P. 4, 4, 19 c 


227 


7, 5, 21 d 


197 


8, 1, 22 b 


197 


9, 10, 24 a 


205 


B. 3 a 


50, 152, 19g 


14 b 


185 


15 a 


250 


17 a 


45 


35 a 


121 


48 a 


205 


Sukka. 




M. 3, 4 


98 


T. 2, 3 


41 


3, 15 


236 


B. 11 b 


234 


32 a 


121 


35 a 


135 


Taanil. 




T. 1, 1 


99 


2, 10 


177 


P. 1, 1, 63 d 


75 


4, 2, 68 a 


118 


8, 68 d 


121 


B. 6 a 


137 


Tamîd. 




B. 28 b, 30 a 


164 


Teraura. 




B. 2 b 


150 


28 b 


192 


Terumot. 




M. 3, 6 


56 


6,1,4 


40 


9,3 


40 


'Uqsim. 




M. 3, 13 


76, 139^ 


Yebamot. 




T. 5, 3 


29 


B. 4 a 


187, 228 


11 b 


34 


24 a 


34 


42 a 


227 


63 b 


187 



EXPRESSIONS EXÉGÉTIQES. 387 



Yoma. 




Zebahim . 




M. 1, 1 


58 


M. 9, 4 


98 


5,8 


63 


T. 11, 7 


29, 177 


8,9 


161 


B. 18 b- 


135 


P. 2, 5, 40 a 


164 


25 a 


125 


6, 8, 43 d 


36 


49 a 


89, 114 


B. 9 ab 


54, 71 


49 b 


88, 114 


52 ab 


129 


63 b 


185 


76 a 


35 


101 b 


197 



II. Termes et expressions exégétiques. 

3K, chef, principe, 101-103. 
1K, divers sens, 158. 
TK, sens passé ou futur, 150, 161. 
mmN, texte interdisant une action, 50, 88, 227. 
□•ïî*, conjonction, divers sens, 50, 150, 156. 
'^^, adverbe indiquant une exclusion, 161, 190, 191, 194, 
Kipn hn, pour introduire une modification textuelle, 120, 
121, 122, 127. 
n*l*lDaS DK, texte fondé en tradition, 122, 128, 
KipaS DN, texte fondé sur l'Écriture, 122, 128. 
OQMB^) lUa, introduisant une citation, 29, 30, 135, 145, etc. 

ViDii, sens simple opposé à un sens déduit ou para- 
bolique, 35, 215. 
><nDODN, exégèse arlilicielle, 188. 

ïjî*, adverbe à sens inclusif, 191. 

T\ii, conjonction revêlant divers sens, 159, 161, 190, 
194. 

U^l, indique "une inclusion, 188, sqq. 
Siai, ne pas tenir compte d'un texte, 32, 72. 
3î< pas., introduit une généralisation, 101-103, 146, 245 
(voir : principe et généralisation). 
1U?1, introduit quelques citations, 31, 

mu? mu, titre de certaines analogies, 90, 91. 

Da, adverbe à sens inclusif, 190, 191, 194. 
î^lTûDa, exégèse alphabético-numérique, 139. 

"iDi, raisonner, opiner (opposé à sens simple), 35. 
Dia, principe commandant une énonciation, 48. 

*inî< in, autre explication, 28, 45, etc. 
^1i<"1 13ÏÏ, chose qui convient à la fia cherchée, 43. 
ilT, n, raisonnement exégétique, 78, 79. 



388 EXPRESSIONS EXÉGÉTIQUES. 

Y^K TJ*1T, usage commun que suit la lettre biblique, 105. 
msp ^îTî, forme elliptique de quelques textes, 170. 

U?n, interpréter l'Écriture, prêcher, déduire un sens, 
(opposé au sens simple), 5, 11, 12, 28, 74, 
122, 35. 
(mDT5Z7l) nllion ''U^ITT, exégètes anciens, appelés parfois allégori- 
ques, 11, 209, 230, 232, 233, 236, 240, 249-251. 

iKin, hyperbole, 164. 

n, locatif, sa valeur, 159. 
nin, ce qui se produit ordinairement, 105, 166. 
n''3in, pour réfuter une exégèse donnée, 95. 
yllDn, résout une opposition, 32, 201, 205, (128). 
•jH, indiquant un a fortiori, 84. 
^pn, assimilation, 77, 89. 

\ ses divers sens, 158. 
iKTl, sens évident, simple, 35, 125, 132, 
\Ti1, quels sens? 151. 

I^T, masculin, 146. 

*13î, allusion (opposé à preuve), 48, 61, 222, (voir : al- 
lusion, indication). 

niin, obligation, 50. 

IDin, lourd, grave (raisonnement et exégèse), 83, 230, 
240, 249, 250. 
pSn, distinguer, 191. 

DÎTD, raison, fondement exégétique, 23, 29. 79. 

bl3t, introduit une conjecture exégétique, 25. 
'^*1D^ principe, 102. 

Kï"», pour exclure un sens, 189, sqq. (voir : exclusions). 
11 ^"î, cas où s'applique un précepte, 29. 

13, ses valeurs, 48, 156-158. 
*Q N3?1"i3, pareillement, cas ou textes analogues, 29, 44, 
104, 105, 177, 178. 
"an33, suivant la lettre, (sens simple), 35. 
SS3, principe, 55, 106, 141. 
yDtZ^Ol, comme on l'entend (sens simple), 24, 35, 86, 111, 
131, 140, 154, 233, 234, 246, etc. 
1333, textes ou objets correspondants, 47, 90, 94, 201. 
nj3, employer un terme décent, 119, 120. 
nri3, il est écrit, introduit citations, 32. 



EXPRESSOINS EXÉGÉTIQBES. 389 

'^a^JS, sens mystérieux, divers, 154, 159, 197. 
nS, iS, négation ou pronom, 125, 126. 
p^b, mot, 146. 
Dm, 'Tin\ tllb, ymh, adjectif, singulier, pluriel, 146, 147. 

nTTD, mQ, attribut, règle herméneutique, 80. 

tL'TTD, interprétation (opposé à la prescription tradition- 
^ nelle), 11. 
"ina, demain, divers sens, 161. 
pD, préposition exclusive, 191, 192. 
ITInSd, accomplir une écriture, 71. 
WDD, substance, sens propre, simple, 35, 44, 144, 227- 

234, 235. 
■j^JD, d'où tirer telle affirmation? 20, 21, 22, 25 (voir : d'où). 
ûlXnD, tsîna, exclure, exclusion, 189-191, 194. 
bya, paronomase, 139, sq. 
niSC, terme superflu, base de raisonnement, 92. 
U?T!90, sens évident, explicite, 107. 
StZHD, parabole, 208, 213-215, 222. 

n;3p3, féminin, 146. 
^"02, terme convenable, 165. 

11"TD, ordre et succession du discours, 181. 
T!D, sens théosophique, 5. 
"IIOD, sens déterminé par la section voisine, 182, 186, 

187, 227, 228. 
DlnD, sens non-défini, 105, 107, 109, 175, 176, 250, 

lï, sens de la particule, 159. 
ITjr, sens de l'adverbe, 161, 178. 
tt7Jiy, peine prononcée contre un délit, 50, 88. 
"Çi^V, divers sens; passage biblique, son objet, 47, 96, 

97, 178, 186... 
■QlS, particulier, faisant exception, 105-107, 109. 
t^lS, sens, simple, 35. 
nt27"l9, section biblique (sens divers), 186. 
"QXÎJS, sens simple, 5, 34, 35. 
nns, prendi'e un texte pour un discours, 28. 

n*lï, crier, pour introduire une citation, 32. 
nbap, toute écriture autre que le Pentateuque, 176. 
D''''p, accomplir un texte (lui faire droit), 21, 32, 69^ 
71, 74, 96, 111, 202, 203, 204, 205... (voir i 
accomplir). 
IDim Sp, raisonnement a fortiori, 83. 
N1v3, introduit citations, 31. 



390 INDEX ANALYTIQUE. 

'tTi, texte écrit et non lu, 120, 126. 

•T'K*!, argument, preuve, 48, 222. 
■liai, n3,l, inclure, inclusion, 188, sqq., 194, 196. 

TDI, allusion, indication (et non preuve), 5, 49, 239, 
240. 
pi, adverbe, exclusif, 190, 191, 194. 
Dltt^l, sens indéterminé, 176, 250. 
m^"l, chose libre, 50 (opposé à obligation). 

"'3i< S?D*1ÏJ7, j'entends (introduit une conjecture exégétique), 
23, 24, 35, 44, 103, 131. 
□^, substantif, 146. 
Slpt2?> équivalent, égal. 93, 94. 

IDtS "laSn, enseigné en ces termes (oppose le texte à une 
conjecture), 16, 31, 82, 85... (voir : j'entends..). 

0*1-1310 "lûlpri, corrections des Scribes, 119, 120. 

Ilï. Index analytique. 

(Les expressions exégétiques sont indiquées par des italiques), 

Abraham, type du croyant, 303. 

Accommodatice (sons), 295, 297, 306, 321, 327, 330. 

Accommodation figurative, 313, 314, 327, 330. 

AccompUr une écriture, 21, 32, 69, 71, 72, 74, 96, 111, 342, etc. Voir : 
qayt/ém. 

Adam, type du Christ, 269, 270, 303, 304, 305. 

Adaptation, de textes, 334. 

Addition de termes (pour démontrer), 47, 60, 64, 66, 

Adjectif (rôle exégétique), 146, 185. 

A fortiori (règle herméneutique), 44, 47, 76, 83-88, 114, 229, 231; 
ses limites, 88; chez S. Paul, 310, 317. 

Allégations simples de textes, 320, 321. 

Allégories, 210-212; allégorisalion, ibid.; exégèse allégorique, 208; 
211, 241, 242, 243, 259; allégorisation de textes historiques, 233, sqq., 
rabbins peu allégoriques, 231. Chez S. Paul, 309-311, 305. 

Allusions simples, 48, 49, 61, 222, 240. 

Amalgames de textes, 298, 316. 

Analogies (exégèses par), 77, 88-100, 177; elles valent avec la tra- 
dition, 77, 92; goût rabbinique pour VA. 213, 258. Conduit au symbo- 
lisme, 238-240. 

Analyses (historiques), 309, 301, 315; de textes, 46. 

Anonymes identifiés, 66, 67, 246. 

S'applique ici telle loi, 54, 55, 342. 



INDEX ANALYTIQUE. 391 

Application simple d'un texte, 312-315, 318. 

Apocryphes (cités par S. P.?), 291, 292, 

Apposition (base exégé tique), 149, 185. 

Aqiba : contre le sens simple, 35, 201; ses principes herméneu- 
tiques, 81, 160, 186, 188-199; son interprétation symbolique du 
Cantique, 216. 

Assimilations juridiques, 25, 26, 44, 97, 98, 100, 104, 105, 107, 108, 
112, 127, 146, 187, 318, etc.; Iièqqés, 77, 89, 90, 145; historiques, 67. 

Atti'ibut (exégèse grammaticale), 146. 

Autre explication, dâbâr ahér, 28, 45, 47, 150, etc. 

Cantique : allégorie, 215-219; son exégèse allégorique, 215-225. 

Caractères généraux de l'exégèse rabbinique, 15, 27, 115, 130, 131, 
204, 206, 223, 252-259; de l'exégèse paulinienne, 273-275, 291-293, 311, 
321, 324, 335-338, 344, 345, 348-350. 

Cause (d'une prescription), 48. 

Chrétiens : ont un sens particulier de l'Ancien Testament, 266-269, 
271, 272, 351. 

Chronologie biblique, 168-170. 

Citations bibliques chez les rabbins : modes et formules d'intro- 
duction, 29-32; chez S. P. : introduction, |339-343; explicites, vir- 
tuelles, implicites, 38-40, 277-291. 

Comparaisons nécessaires, 162, sq. 

Complètent (rabbins) textes concis, 170-172, 174. 

Composites (citations), 317. 

Conciliation de textes opposés, 200-206. 

Condition valide : doit être répétée, 199. 

Conjectures exégétiques, 19, 20, 22, 23, 25, 102, 107, 108, 114, 146, 
153, 157, 169, 181, 193, 205, etc. 

Conjugaisons (exég. grammaticale), 154, sq. 

Conséquence d'un texte, 317. 

Contaminations textuelles, 332, 333, 335. 

Contentieuses (considérations) plus riches en exégèses, 292, 293. 

Contexte : sa détermination, 178; son emploi exégétique, 24-26, 66, 
142, 143, 181-186, etc. ; parfois négligé, 55, 57, 60, 349. 

Contradictions, 18, 19; à résoudre, 200. . 

Conti-adictoire exclue, 316, sq. 

Controverses et discussions exégétiques, 23, 27, 56, 57, 59, 62, 63, 
64, 74, 75, 95, 99, 100, 132, 152, 153, 157, 167, 168, 174, 187, 193, 196, 
197, 198, 226, etc. 

Corrections textuelles : des Scribes, 119, 120; intentionnelles, 
120-128. 

Correspondant (textes se), kenègèd, 47, 90, 176. 

Coupe arbitraire d'un texte à fin exégétique, 57, 64. 

Critique textuelle, 117-120. 

Décents {termes), kinnâ, nâqi, 165, 226. 

Déductions exégétiques, 56, 57, 59-62, 297-298, 314, 316-318. 



392 INDEX ANALYTIQUE. 

Démonstrations exégétiques, 51-68, 311-315 ; parfois peu distinctes 
d'une simple illustration, 48, 49, 311, 318. 

Destinataires d'une parole (déterminés), 178. 

Dialectique (exégèse), 33, 36, 77-115, 257, 258; faculté dialectique 
des rabbins, 257; dialectique paulinienne, 298, 300, 301, 317. 

Difficultés historiques, 17, 19; théologiques, 17. 

Dire (et verbes apparentés) introduisant citations, 30, 340-342. 

Distinction {particule indiquant une), hâlaq, 191. 

Distributives (exégèses), 18, 42, 43, 60, 69, 70, 72, 176, 191, 192, 209^ 
218, 219, 221, 222, 234, 236, 244, 246, 299, 307, etc. 

Diviser un texte (comment), 128-129, 181, 

Donnée historique fondant une loi, 60, sq. 

D'où (tirer telle conclusions?), minnain, 20, 21, 22, 23, 25, 26, 30,^ 
45, 51, 52, 60, 90, 91, 92, 102, 105, 109, 112, 114, 236, etc. 

Dramatique (forme) de l'exégèse rabbinique, 23-25 

Eclairant (écrit) un autre écrit, 176, sq. 

Écrire (dans les formules introduisant les citations bibliques), 32,. 
339, 340. 

Écritures, leur autorité, 271, 272. 

Eliezer, ses règles, 33, 81, 82; Règle 1 : 190, sq.; R. 2 : 191; R. 3 : 
194 , R. 4 : 195 ; R. 5 : 83-88 ; R. 6 : 86, 92 ; R. 7 : 90-92 ; R. 8 : 101-103 ; 
R. 9 : 170; R. 10 : 198, sq. ; R. 11 : 181; R. 12 : 170; R. 13 : 169, 170; 
R. 14 : 163; R. 15 : 174, 201, 205, sq. ; R. 16 : 157; R. 17 : 175; R. 18 : 
105, sq., 166; R. 19 : 178, 182, 183; R. 20 : 97, 173, 178, 183; R. 21 : 
163, 178, 183, sq. ; R. 22 et 23 : 96, 178, 184; R. 24 : 115, 184; R. 25 : 
112, 115; R. 26 : 207, sq., 227; R. 27 : 94; R. 28 : 139, 140, 239; R. 29 : 
139; R. 30 : 137-139 ; R. 31 : 172; R. 32 : 169. 

Elliptique (langage biblique), 170-172. 

En Abraham (l'Écriture, dit), 30. 

Enseigner en ces termes, talmûd lomar, 16, 18, 19, 20,22,24, 25, 26, 
31, 44, 45, 82, 90, 102, 103, 112, 114, 126, 131, 132, 157, 181, 188, etc> 

Je puis entendre ainsi, sôméa' 'ani, 20,23, 24, 35, 44, 103, 131. 

Equivalences (raisonnements par), 93, 94, 109, 183. 

Esdras, scribe, exégète, 11, 12. 

Espèces juridiques : différentes empêchent l'assimilation, 26, 77^ 
doivent être semblables dans les analogies, 88, 89, 94, 97, 99, 100, 
103, 104. Arguments tirés d'espèces analogues, 95, 96. 

Esprit contre la lettre, 52, 56. 

Essentiel d'un texte, 48. 

Etat construit (exég. grammat.), 148, 149. 

S'étonner, 17. 

Etymologies, 134-137 ; doublées d'allégories, 233. 

Eunuques (textes : à expliquer), 175. 

Exclusions, 20, 21, 24, 43, 44, 108, 111, 149; combinées avec inclu- 
sions, 188-195. 



INDEX ANALYTIQUE. 393 

Exégèse juive : notions historiques, 5, 11-14 ; désintéressée et inter- 
prétative ou intéressée et démonstrative, 12 ; en halakha et en .hag- 
gada, 13, 14, ses sources, 14, sq. Voir : explicite et implicite. 
Exemplarisme et participation (typologie), 303. 
Explicites (exégèses), 41-76, 276, 294-311. 

^j^/j^Me (l'Ecriture), 29. Textes à expliquer par d'autres, 174-178. 
Fabulatrice (fonction) chez les rabbins, 257, 258. 
Fidélité ou infidélité au sens, 43-45, 52, 54, 62, 96, 97, et passim, 
323-330; à la lettre, 330-338; voir : modifications. 
Figure, voir : type. Figures de l'économie chrétiennes, 269. 
Figuré (sens), 144. 
Florilèges bibliques, 292, 326, 337. 

Formules bibliques de thèses et pensées personnelles... 318-320. 
Futur (exég. grammat.) 150-152. 
Gematria, 139, 242. 

Général et particulier (diverses combinaisons), 44, 106-115, 189, 195. 
Généralisations, 100-105, 146. 
Générique (sens) d'un mot, 145. 
Genre (exég. grammat,), 111, 146, 149, 150. 
Grammaticale (exégèse), 145-161 ; analyse, 299. 
Haggada, 13,14; ses fondements et démonstrations, 62-68; hagga- 
dique (exégèse), 258. 
Halakha, 13, 14; sa valeur, 45, 54 ; voir : Tradition. 
Haraz, 336. 

Hébreux (épître aux), 264; sa typologie, 270; ses développements 
homilétiques, 293, 295, 296; formules introduisant citations, 345; 
le sacerdoce de Jésus, 305, 306; comparée aux autres épîtres pauli- 
niennes, 346, 347. 

Hillel, 12, 13; ses règles herméneutiques, 33, 77, 78, 80. Règle 1 : 
83-88 ; R. 2 : 90-92 ; R. 3 : 101, 102 ; R. 4 : 103 (201) ; R. 5 : 106-113 ; R. 6 : 
89 (?) ; R. 7 : 178-186. 
Histoire : fondement de lois, 61; embellie, expurgée, 66-68. 
Homélies dans les épîtres pauliniennes, 293, 295-297. 
Hyperboles, hâbâ^y, 163, 164. 
Identifications, 74, 299. 

Il n est pas besoin de dire {a fortiori), 86, 87. 

Illustratives (exégèses purement), 311, 318. Voir : démonstrations. 
Image (distinct de : ombre), 268. 
Imparfait (exég. grammat.), 150, 151. 

Implicites, citations, 321-324; exégèses, 38-41, 276, 311-323. 
Imputer à... ma'alé, 47, 68, 145, 231. 

Inclusions, 20, 21, 51, 107, 108, 149, 160; et exclusions (combi- 
naisons), 188-193. 

Indications, 48, 49, 61, 239. 

Infinitif (exég. grammat.), 154, 159, 160. 



394 INDEX ANALYTIQUE. 

Interdiction, ^azhârâ, 20, 45, 50, 51. 

Interprétation simple, 42-51. 

Interprétation (charisme d'), 272, 273. 

Isaïe, figure de Jésus, 315. 

Ismaël : défend le sens simple, 35-37, 188, 196; admet les son 
multiples, 35, 37; sur le sens parabolique, 207; ses règles, 33, 80, 
197, R. 1 : 83-88; R. 2 : 90-92; R. 3 : 101-103; R. 4-11 : 106-113; 
R. 12 : 178-185; R. 13 : 201-206. 

Israélites, types des chrétiens, 303, 304, 313. 

S. Jérôme, 242, 337. 

Jésus : terme de la promesse, 267 ; ses figures, 304-306, 315, 329 ; 
autorité de ses paroles, 271, 272. 

Jeux de mots, 139, 140. 

Josèphe (son exégèse prophétique), 71. 

Langage biblique (ses particularités), 162-174, 172. 

Langue des hommes (parlée par l'Écriture), 36, 162, 163. 

Leçon fondée^ textuellement ou traditionnellement, 128, 

Lexicographie, 131-145. 

Lexique des rabbins, 143, 144. 

Libertés textuelles, 125, 335-338. 

Lire (introduisant citations), 31. 

Litote, 164. 

Littéral (sens) : estimé, défendu, 5, 24, 74, 125, 131, 132, 144, 227, 



^'», 



Littéralisme servile, 55, 56, 57, 58, 63, 193, 203, 257. 

Loi, figure de la Foi, 306-308, 328. 

Loi orale, 64, 65; déduite de l'Ecriture, 55-63, contre l'Écriture, 
45, 52, 53. 

Maximes morales, fondent lois, 61, 62 ; déduites, 64, 65 ; exprimées en 
termes bibliques, 319, 323. 

Maximum et minimum, 148. 

Meïr (ses variantes bibliques), 118. 

Melchisédech, figure de Jésus, 305. 

Métaphores, 16, sq., 163. 

Métaphorique (sens), 144, 145; exégèse, 247 (voir : parabolique). 

Méthodes exégétiques, 32, 33. 

Midras, 11, 13. 

Midrasim (leur exégèse), 15. 

Misna : l'orme législative simple, 13; son exégèse, 14. 

Modifications : du sens (pour démontrer), 58, 125, 257...; du texte 
99, 118, 123-128, 220, 229, 308, 320, 327, 330-336. 

Morale (pour fonder la loi), 61, 62. 

Multiples (sens) d'un mot, 36, 37, 45, 65, 141, 142, 144, 171. 

Mystère (dans l'A. T.), 270. 

Nahum de Gimzo, ses méthodes exégétiques, 160, 188-192. 



INDEX ANALYTIQUE. 395 

Narrations bibliques rappelées, 321, 322. 

Nehonia haqqané, ses règles herméneutiques, 188. 

Nombre (exég. grammat.), 64, 147, 148, 196, 231, 298, 299. 

Notarikon, 76, 137-139. 

Objet d'un passage (déterminé), 178, 179. 

Obligation (imposée par un texte, ou liberté), 50, 152, 153, 156. 

Obscur, bouché, sâtûm, (texte), à éclairer, 175, 176. 

Ombres du N. T. dans l'A., 268. 

Oppositions entre passages bibliques, 200, sqq. 

Ordinaire (ce qui arrive d'), objet habituel de l'Ecriture, 105. 

Ordinaire (sens) d'une expression, 145, 165, 166. 

Paraboles, 18, 213-215 ; appuyant une interprétation, 240, 249. 

Parabolique (exégèse), 33, sq., 207-251, portant sur toutes sortes 
de textes; rabbins peu allégoriques, 247-249; chez S. P. 308-311. 

Paraphrases, 308, 332. 

Pareillement, kyôsé'' bô, 18,94, 104, 156, 160, 162, 163,;i73, 177, 178. 

Pardés (les quatre règles herméneutiques), 5. 

Parenthèses, marquées, 181. 

Participes, 153. 

Particules (exég. grammatic), 156-161; valeur inclusive ou exclu- 
sive, 188-192. 

Particulier, voir : général. 

Paul : sa conception de la Bible, 266-275, 345, 348 ; son usage de 
VA. T., 267; interprète autorisé de l'Écriture, 273, 275; livres qui lui 
sont le plus familiers, 291; thèmes favoris, 321-324, 345; comparé 
aux rabbins dans ses procédés exégétiques, 263, 264, 348-350, 324, 
338. 

Pauvres ou riches (termes), 174, sqq. 

Peine, 'onés (sanction d'une interdiction), 20, 50, 51. 

Philologique (exégèse), 33, 36, 116-206, 298-301. 

Points dans le texte, 129, 130. 

Possibles (sens), yâkôl. 25, 26. 

Pourquoi tel texte''^. 15, 16, 30, 92, etc. 

Précisions i*elevées, 21, 22, 23, 24, 104, 109, 146; ajoutées aux textes, 
43, 46, 49, 56, 60, 86, 87, 93, 95, 134, 135, 161, 167, 169, 170, 171. 179, 
193, 228, 242. 

Principe général appliqué, 55, lOi, 102, 103, 141, 146, 245. 

Progression du texte (iodiquée), 46. 

Pronoms, 149. 

Prophétiques (exégèses), 68-76, 146, 147, 274, 312-315. 

Propre (sens), 144. 

Psaumes (leur interprétation), 246. 

Quelle est la raison (fondement)? ma ta'am, 23, 29. 

Raisonnements en exégèse, leur valeur limitée, 78, 79, 82, 83, 92, 
107. 



396 INDEX ANALYTIQUE. 

Rapporter un texte à un sujet autre, 96, 97. 
Rapprochements (démonstration par), 60, 96, 177, 178, 227, 239. 
Redondances (expliquées), 172. , 
Redoublements (leur portée exégétique), 196, 197. 
Redressement de la lettre, 170-172. 
Références (complétées), 16, 
Référentielle (exégèse), 33, 38-76, 253, 276. 

Règles herméneutiques, 80; voir : Aqiba, Éliezer, Hillel, Ismaël. 
Remarques explicatives sur un texte, 295. 

Répétitions : leur raison, 20, |21, 197, 198; leur valeur exégétique,, 
36, 93, 107, 149, 196, 197-199. 
Restitutio in integrum (exégétique), 114, sq. 
Résurrection de Jésus, démontrée exégétiquement, 300, 301. 
Révélation judéo-chrétienne, son unité, 350-353. 
Riches (textes), en éclairant d'autres, 174. 
Sacerdoce de Jésus figuré, 305, 306. 
Sagesse (livre de la), 291. 
Salomon, type de Jésus, 329. 

Science des Écritures chez les rabbins, 12, 27, 130, 131, 208, 253- 
256. 

Scribes, 12. 

Sections dans le texte, 47, 180, 181, 186. 

Septante (version des) : utilisée par les rabbins; 73, 118, 119, 124, 
126, 139, 143; suivie par S. Paul, 296, 301, 302, 312, 318, 320, 321» 
323, 325, 326, 330, 335, 337, 347. 

Si (conjonction, ses divers sens), 40. 

Simple (sens), 34-37, 74; exégèse, 33, 38-76. 

Statistiques bibliques , 206. 

Strict (sens) d'un terme, fondant exégèses (inclusions et exclusions) > 
56, 57, 157, 158, 192, 193, 321, 357, 298-300, 314, 315, 316. 

Style biblique, 162-206. 

Substantif, 146-149. 

Suivant qu'il est dit, sènnéemar, 30 et partout. 

Sujet d'un verbe (déterminé), 155, 156, 172, 173, d'un passage, 
178-181; sujets confondus, 173. 

Superflus (mots, expliqués), 17, 18-20 

Symboles, 245 (voir : allégorie). 

Symboliques (écritures), 176, 245; exégèses, 236, 238, 245, 247. 

Synonymes (mots), 143, 185. 

Syntaxe, 16, 

Targums (leurs exégèses), voir : tables. 

Temps et modes du verbe (exég. grammat.), 150-154, 

Théosophiques (sens), 5. 

Thèses théologiques, formulées en termes bibliques, 319, 323. 

Tosephta, plus riche en exégèses que la Misna, 14, 



INDEX ANALYTIQUE. 397 

Tradition: fondement vrai des lois, 13, 24, 42, 43, 45, 52, 77, 83, 
92; son autorité, 78, 83, 54; textuelles et exégétiques, 128, 131. 

Type, tupos, 269; ses diverses formes, 301, 302; typologie, 275; 
chez S. Paul, place prépondérante, conclusions déduites, 287, 270, 
275, 301-308, 311, 324, 327; justifie modifications du sens biblique, 
328-330; actualité de la typologie, 353, 356. 

Valeur permanente de l'exégèse paulinienne, 350-356. 

Variantes étudiées, 118, 119. 

Verbe (exég. grammat.), 149-156. 

Vérité : sens simple, 35, 215. 

Virtuelles : citations, 280; exégèses, 38-41. 

Fomn.(texte) explique, sâmûk, 66, 186, 187, 227, 228. 

Zeugma, 155. 






TABLE DES MATIÈRES 



AVANT-PROPOS 

PARTIE I 

EXÉGÈSE RABB INIQUE. 
Quelques paradigmes de l'exégèse rabbinique ancienne. 

Pages 

Indications bibliographiques 9 

CHAPITRE PREMIER. 

QUELQUES NOTIONS GÉNÉRALES 

1° L'exégèse biblique dans le Judaïsme 11 

2° Les sources : la littérature exégétique 14 

3° Occasions des exégèses 15 

4° Comment sont introduites les citations bibliques 27 

A. Textes cités sans formule introductrice 27 

B. Formules introductrices indirectes 28 

C. Formules introductrices directes 29 

a. Le verbe « dire » 29 

b. Verbes apparentés au verbe « dire » 31 

c. Le verbe « écrire » 32 

d. Autres expressions 32 

5° Les diverses méthodes exégétiques. Division du travail 32 

6° Exégèse littérale : sens simple 34 

CHAPITRE II. 

L'EXÉGÈSE SIMPLE 

I. Exégèse implicite 38 

IL Exégèse explicite simple 41 

10 Exégèse explicite simple interprétative 42 

A. Ex^plr ^ ' H^sens du texte 42 



400 TABLE DES MATIÈRES. 

Pages. 

B. Définir le rôle d'une sentence ou de ses éléments 46 

2° Exégèse simple explicite démonstrative 51 

A. Démonstrations juridiques 53 

a. Textes juridiques ayant un rapport réel avec la prescrip- 
tion à justifier 55 

b. Textes juridiques sans rapport avec la loi étudiée 58 

c. Textes non-juridiques 60 

B. Démonstrations haggadiques 63 

G . Exégèses prophétiques 68 

a. Prophéties déjà réalisées 69 

b. Prophéties à réaliser 73 

CHAPITRE III. 

MÉTHODES DIALECTIQUES D'EXÉGÈSE BIBLIQUE 

Méthodes et règles 11 

I. Raisonnement a fortiori 83 

II. Raisonnement par analogie 88 

1° L'assimilation : le hèqqés 89 

2° Gezérâ sâwâ : analogie 90 

3° Autres raisonnements par analogie 93 

A. Equivalences 93 

B. Textes rapprochés l'un de l'-autre 94 

G. Argument tiré d'une espèce analogue 95 

4° Conclusions par analogies réelles 97 

A. Analogie ou assimilation simplement affirmées 98 

A. Analogies réelles cherchées et montrées 98 

C. Raisonnements par analogie complète 99 

III. Généralisation d'un cas particulier ou d'une loi. 100 

1° Binyan âb 101 

A. Binyan âb fondé sur une seule écriture , 101 

B. Binyan âb fondé sur deux écritures 103 

2° Autres formes de généralisation 104 

IV. Général et particulier 106 

1° Général et singulier 107 

2° Singulier, puis général 109 

3° Un singulier entre deux généraux 110 

4° Général qui a besoin du particulier et particulier qui a besoin 

du général 111 

5° Élément qui fait exception pour expliquer l'ensemble 112 

6° Élément qui fait exception pour alléger les obligations. 113 

7° Élément qui fait exception pour atténuer et aggraver 113 

8° Réduction ad integrum d'une exception , 114 

Appendice, règles 24 et 26 d'Éliezer , ,: 115 



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CHEZ BEAUCHESNE ET SES FILS 

LE LIVRE DES PSAUMES 

TRADUIT ET COMMENTÉ 

par J. Calés» S« J* 

Tome I. — Introduction. — Psaumes I^LXXII (Vulgate : I-LXXI). 
Tome IL - Psaumes LXXHI-CL (Vulgate : LXXII-CL). Tables. 

■X volumes iii-8 raisin (vin-700 pages et 688 pages) . 120 fr. 

« Parmi les innotribrables ouvrages qu'a suscités le Livre des Psaumes, il est certain 
que le commentaire du P. Calés se place, et pour toujours, dans les premiers rangs. » 

L. Mariés (Études.) 

« L'on ne peut que remercier le R. P. Calés d'avoir mis à la portée d'iin cercle relative- 
ment étendu de lecteurs le f^^it de longues- et laborieuses années de travail érudit, et 
souhaiter à cet ouvrage une large diffusion. » (Revue Thomiste.) 

« Œuvre magnifique qui doit trouver sa place dans la bibliothèque de tous les prêtres 
désireux de se former une âme religieuse suivant le modèle de celle réalisée par Dieu 
lui-même dans le psalmiste. » J. Coppens (Ephemerides Theologicae Lovaniences.) 

« Ces deux forts volumes élégants et bien proportionnés offrent, dans un ordre clair et 
commode, un ensemble précieux dénotions qui se complètent et s'éclairent mutuellement. 
C'est une Somme sur le Psautier, qui rendra de grands services aux étudiants des Sémi- 
naires, aux prêtres dans la récitation du bréviaire, aux laïques cultivés. Félicitons 
l'auteur : comme le Juste de Psaume 1, il a réussi dans son œuvre. > 

A. CONDAMiN (Revue Apologétique.) 



LES POÈMES DE LA BIBLE 

Avec une introduction sur la strophique hébraïque 
par A. Condamin, S. J. 

I volume in-8 raisin (vni-aSg pages) . 36 fr. 

Cinquante-trois poèmes tirés d'Amos, Osée, Michée, Abdias, Joël, Ezéchiel, Isaïe, 
Psaumes, Proverbes, Job, Ecclésiastique, sont autant de nouveaux exemples de la 
théorie strophique appliquée par l'auteur dans ses commentaires d'Isaïe et de Jérémie. 
Mais cette fois, le P. Condamin expose en dix chapitres les lois de la strophique hébraïque; 
il répond aux objections rencontrées çà et là depuis 28 ans. 

Intéressante surtout pour les spécialistes, l'introduction est lisible pour tous. Sans 
irriter personne, elle prépare à mieux comprendre les poèmes qui suivent et les strophes 
magnifiques du livre de la Sagesse, qui suivront bientôt dans le savant commentaire du 
P. Mariés. 

Ces Poèmes de la Bible sont éminemment propres, du point de vue de la littérature 
comparée, à mettre en relief certaines ressemblances et différences que présente le lyrisme 
dans îalittérature sémitique d'une part, et les littératures classiques, grecque et latine 
d'autre part. 

Les éloges généralement donnés aux traductions d'Isaïe et de Jérémie, du même auteur, 
permettent d'espérer que l'on goûtera aussi celles de ce recueil. 



AU DIEU INCONNU 

par V. Dillard, S. J. 

I volume in-8 couronne (284 pages) 22 fr. 

Le Dieu Inconnu dont il s'agit est le Saint Esprit, dont nous ignorons trop le rôle essen- 
tiel dans notre vie de tous les jours. L'auteur s'attache à préciser ce rôle visible et 
invisible, à le concrétiser au maximum dans le présent et l'humain qui nous entourent. 

L'ouvrage est destiné surtout aux laïques, jeunes gens, hommes d'affaires, qui veulent 
trouver le lien entre leur vie active de tous les jours et leur vie spirituelle. 



A toute commande, ajouter, ]^our le port et l'emballage 
dO% (France et Colonies); 15% (Étranger) 



Imprimé en France 



typographie FIRMIN-DIDOT et C'«. — MESNIL (EURE) — 1939. 



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