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DE LA
FACULTÉ
DE
PHILOSOPHIE ET LETTRES
l'Université de Liège
FASCICULE XXI
LE CODEX FULDENSIS
DE TERTULLIEN
PAR
J. P. WALT2ING
Professeur d L'Université
Membre tUtUaire de iAeatlémie roijale de BeUjiqiie
191A-1S1T
Imp. H. VAILUNT-CARMANNE
SoiMolé Anonyme
4, Place St-Michel 4
LIÈGE
HONORE CHAMPION
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5, Quai Malaquais, 5
PARIS
BIBLIOTHEQUE
DE LA
FACULTE DE PHILOSOPHIE ET LETTRES
DE L'UNIVERSITÉ DE LIEGE
BIBLXCDTZ-IEiQ/'U'^
DE LA.
FACULTÉ
PHILOSOPHIE ET LETTRES
DE
l'Université de Liège
FASCICULE XXI
LE CODEX FULDENSIS
DE TERTULLIEN
J. P, VVALTZING
Professeur à l'Université
Membre titulaire de l'Académie royale de Belgique
1S14t-1S1T
Imp. H. VAILUNT-CARMANNE
Société Anonyme
4. Place St-Micheu 4
LIÈGE
HONORE CHAMPION
Libriure-Kdileur
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PARIS
AU MAÎTRE DE LA CRITIQUE DES TEXTES LATINS
MONSIEUR LOUIS HAVET
MEMBRE DE L INSTITUT
A LA MEMOIRE
DE
MES ÉLÈVES MORTS POUR LA PATRIE
Semen e$t sanguis foriium virorum
AVANT- PROPOS.
Par la vigueur de la pensée, par l'art de la composition ef
par Véloquence de son argumentation, /'Apologétique est le
chef-d'œuvre de l'apologie chrétienne des premiers siècles. Mais,
jusqu'ici, ce chef-d'œuvre se présente aux lecteurs modernes
sous une forme qui paraît hérissée de difficultés. Combien de
ses admirateurs, arrêtés par une phrase obscure, se sont doutés
que le texte de /'Apologétique nous a été transmis dans un état
très défectueux ? Deux traditions manuscrites, très différentes
et corrompues l'une et l'autre, nous font hésiter à chaque pas.
En préparant une Edition classique, nous nous sommes vite per-
suadé qu'il fallait commencer par mettre en œuvre tous les
moyens fournis par la critique pour retrouver la forme donnée
par Tertullien à sa pensée et pour rétablir sa pensée elle-même
dans son intégrité.
Ce volume devait servir d'introduction à notre texte de /'Apo-
logétique établi d'après le Codex Fuldensis {voL XXII de ce
recueil) ; les proportions qu'il a prises nous ont amené à le
publier séparément. Il devait paraître en igi4 ; l'impression,
commencée en fuillet igi4 et poursuivie au milieu de patrio-
tiques angoisses et dans un pénible isolement, a duré beaucoup
plus longtemps que nous n'aurions voulu.
Il est le résultat d'études commencées avec nos élèves du doc-
torat en philosophie et lettres. On y reconnaîtra sans doute les
minuties et les longueurs de l'enseignement oral et des exercices
pratiques: nous prions qu'on veuille bien les excuser. Nous
avons d'ailleurs entrepris de résoudre tant de problèmes, que
nous ne pouvons nous flatter d'avoir apporté toujours la solu-
tion définitive : nous serions satisfait si nous parvenions à
rallier les suffrages de nos lecteurs dans la plupart des cas.
VIII AVANT-PROPOS.
La critique des textes est en bonne partie une science conjec-
turale. Sans doute, elle atteint souvent à la certitude, mais plus
souvent, elle est forcée de s'arrêter à ce qu'on peut appeler la
plus grande vraisemblance. Pour chaque faute nous avons
proposé l'explication qui nous a paru la plus probable; plus
d'une fois, on découvrira peut-être une autre explication plus
probable encore. L'essentiel est d'établir l'existence de la faute
et de trouver l'émendation.
Nous croyons avoir lu tout ce qui a été écrit d'important
sur le sufet traité, mais nous avons évité de rappeler et de dis-
cuter les opinions émises par nos devanciers, quand la clarté
de l'exposition ou la justice ne l'exigeaient pas. Néanmoins
nous avons vu grossir le volume dans des proportions inatten-
dues. Et il n'aborde pas encore de front le problème de l'ori-
gine des deux traditions manuscrites et de la valeur de l'une et de
l'autre. A la solution de ce problème sera consacrée notre Etude
sur la double tradition manuscrite de l'Apologétique.
Afoutons enfin que nous aurions voulu attendre l'édition
critique qui doit paraître dans te Corpus scriptorum eccle-
siasticorum et qui fournira quelques matériaux, de second ordre,
que nous ne possédions pas. Mais, par suite de hasards mal-
heureux, cette publication a dû être ajournée plusieurs fois et
nous avons cru que nous pouvions faire œuvre utile, sinon
absolument définitive, avec les seuls moyens qui étaient à notre
disposition.
Elle est actuellement en bonnes mains (p. g, n. ï) et nous
ne désespérons pas de pouvoir nous en servir pour terminer
notre Edition critique {avec commentaire historique et gramma-
tical, étude sur les sources), qui attend des temps meilleurs pour
être mise sous presse.
INTRODUCTION
Ne quem varietaa eius in disperse reperta
confundat. Adv. Marc, 1,1.
I. Nécessité d'une édition d'après le Cod. Fuldensis.
V Apologétique de TertuUien nous met en présence d'un
cas très rare en paléographie latine : celui de deux traditions
manuscrites absolument différentes. On peut même dire que
le cas est unique. A la vérité, il y a d'autres écrivains dont les
manuscrits présentent des variations telles qu'on a pu conclure
à l'existence de deux éditions ou du moins d'une nouvelle
recension, c'est-à-dire, d'une revision d'ensemble avec correc-
tions conscientes (^), opérée par l'auteur lui-même ou par un
autre. Mais chez aucun écrivain latin on ne trouve, entre deux
traditions manuscrites, une différence aussi grande, aussi
profonde, aussi continue, au point de vue du style et même
de la pensée. Notre apparat critique le prouvera d'une manière
irréfutable (2).
On a naturellement recherché l'origine de cette double
tradition manuscrite et l'on en a proposé trois explications
différentes.
\° Dans son édition, publiée à Leyde en 1718, Sigebert
Havercamp a le premier exprimé l'opinion que TertuUien
Q) L. Havet, Manuel de critique verbale appliquée aux textes latins
(Paris, Hachette, 1911), p. 403, Voyez les pages 403-412 de ce
manuel, que nous nous plaisons à citer au début de cette étude.
(') C. Callewaert, dans l'article cité plus loin {Le Codex Fulden-
sis, etc.), p. 330-333, l'a montré pour le chap. 3.
2 INTRODUCTION
a donné deux éditions de V Apologétique. Il dit dans sa préface,
page?:
Id tamen sciri velim, magnam non modo curam in hoc Apologe-
tico a Tertulliano adhibitam, sed et bis idem iioc scriptum, hic illic
paullum in verbis et oratione immutatum, ab illo in publicum emis-
sum esse^ quod Lectori evidenter, ut putamus, apparebit, si conférât,
quae a nobis adferuntur paginisspz'J, 3 13", 409^ et praesertim 436"*^.
Dans ses notes, il revient à plusieurs reprises sur la même
idée. De ces deux éditions dérivent, suivant lui, les deux tra-
ditions manuscrites. La première édition aurait survécu
dans le seul Codex Fuldensis. La deuxième édition, l'édition
revue et corrigée, l'édition définitive serait représentée par
tous les autres manuscrits.
Ce serait la troisième fois que Tertullien aurait repris son
sujet, car, en beaucoup de ses parties, V Apologétique ■ n'ist
qu'un remaniement du traité Ad nationes (^). Disons, en
passant, qu'une revision complète de V Apologétique par Ter-
tullien n'aurait rien de bien étonnant en elle-même. Nous
savons qu'il donna une édition grecque de ses traités De
spectaculis, De baptismo, De virginibus velandis (2), et qu'il
remit jusque trois fois sur le métier son traité Adversus Mar-
cionem. Il s'en explique lui-même dans un curieux avant-
propos :
Si quid rétro geslum est nobis adversus Marcionem, iam hinc
viderit. Novam rem adgredimur ex vetere. Primum opusculum
quasi properatum pleniore postea compositione rescideram. Hanc
quoque nondum exemplariis sufFectam fraude tune fratris, dehinc
apostatae, amisi, qui forte descripserat quaedam mendosissime et
exhibuit frequentiae, Emendationis nécessitas facta est. Inno-
vationis eius occasio aliquid adicere persuasit (3). Ita stilus iste
(^) Voy. plus loin, le chap VI.
(2) O. Bardenhewer, Les Pères de l'Eglise, \, 328. Ad. Harnack,
Die Chronologie der altchristl, Litt,, 2, 267. 268. 275.
Q) Nous suivons la ponctuation vulgaire. Kroymann ponctue :
facta est innovationis, Eius... Tertullien avait mis trop de hâte à
INTRODUCTION 3
nunc de secundo tertius et de tertio iam hinc primus hune opusculi
sui exitum necessario praefatur, ne quem varietas eius in disperse
reperta confundat (').
Bien que \e Codex Fuldensisint connu, depuis 1597 et qu'une
collation complète, faite par Modius, eût été publiée par
Junius, aucun éditeur n'en fit usage jusque Rigaltius et
Havercamp : on paraissait l'ignorer ou plutôt se défier de
ces variantes si nombreuses et si différentes de la tradition
commune à tous les autres manuscrits ! Rigaltius en fit un
usage très modéré (1634. 1641). Par un manque de logique
étonnant, Havercamp, qui affirmait que le Codex Fuldensis
représente la première édition de Tertullien et tous les autres
manuscrits la seconde, puisa à pleines mains dans la collation
de Modius, n'hésitant pas à mêler ce qu'il regardait comme
deux éditions successives. C'était faire la leçon à Tertullien
lui-même, c'était lui reprocher d'avoir revu et modifié son
texte primitif !
Cet exemple ne fut pas suivi. Fr. Oehler se rallia, il est
vrai, à l'opinion de Havercamp sur l'origine du Codex Ful-
densis. L'examen des variantes suffit pour le convaincre que
ce manuscrit représente une tradition spéciale, plus ancienne
que celle des autres manuscrits :
Fuldensis libri alioquin optimi textum sequi diversam et antiquio-
rem, ni fallor, quam quae in ceteris quotquot innotuerunt libris
écrire la première édition. Il la retire et en rédige une seconde,
plus développée. Il n'a pas le temps de faire exécuter des exemplai-
res en nombre pour lancer cette seconde édition ; un « frère •&, devenu
depuis apostat (il renia le monlanisme sans doute)^ s'en empare
{^fraude) et fait des copies très fautives (au point de vue doctrinal
sans doute) en certains endroits {^quaedani) . Tertullien doit refaire
son ouvrage pour le corriger {emendationis) et saisit l'occasion de
cette nouvelle édition {innovatiojiis eius) pour développer certaines
parties et pour diviser l'ouvrage en cinq livres (cf. 2, 1). Cf. Aug.
Bill, Zur Erklaerimg des I. Bûches Tert. Adv. Marc.j p. 6 (dans
Texte und Untersuch., 38, 3. Leipzig, Hinrichs, 191 1).
(') Adv. Marc, i, i. Cf. 2, i : Occasio reformandi opusculi huius,
4 INTRODUCTION
manu scriptis obtinuit Apologetici recensionem sat multa extant
indicia (^).
Mais il conclut logiquement qu'il faut se garder de mêler
les variantes des deux traditions : ce serait faire une troisième
édition au moyen des deux premières, mais une édition que
Tertullien n'aurait certes pas reconnue.
2'^ En 1902, M. C. Callewaert, président du grand séminaire
de Bruges, comparant les deux traditions manuscrites, rejeta
l'opinion de Havercamp et d'Oehler. C'est une erreur, suivant
lui, de croire que Tertullien a donné une édition revue et
corrigée de son ouvrage. Ensuite, le Codex Fuldensis l'emporte
de loin, pour le fond et pour la forme, sur les autres manuscrits.
Seul, il a conservé fidèlement la pensée de Tertullien et la
forme que Tertullien a donnée à sa pensée. Il n'a pas subi
de remaniement intentionnel, tandis que, dans les autres
manuscrits, on peut reconnaître facilement la main d'un
correcteur. M. Callewaert conjecture donc qu'à l'époque caro-
lingienne, au moment de la renaissance littéraire, un théolo-
gien inconnu, voulant faciliter la lecture de V Apologétique,
a retouché le style du dur Africain et qu'il lui est arrivé de
toucher maladroitement aux idées. C'était le moment « où
l'estime des œuvres de Tertullien reprenait avec le goût des
études et l'on s'explique que la nouvelle recension ait eu tant
de succès, qu'elle ait été le point de départ de toutes les copies
cui quid accident primo libellulo praefati sumus... 3, i : Secundum
vestigia pristini operis, quod amissum reformare perseveramus, iam
hinc ordo de Christo.
(*) Fr. Oehler, Edition de 1849, p. vi. Edition de 1853, p. xix.
Woodham, p. 160, et Bindley, p. 143, expriment la même opinion.
— Fr. di Capua, Le clausuU metriche 7iel l' Apo/ogetico di'Tertulliano
e le variante del Codex Fuldettsis (Scuola Cattolica, 19 12, t. XXII,
p. 249 ss., 550SS. ; t. XXIII, p. 126 ss. et 130SS.) a repris cette thèse
récemment et a cherclié à la prouver par l'examen des clausules
métriques dans les deux traditions.
INTRODUCTION 5
qui nous ont été conservées, le Fuldensis seul excepté » (i).
L'opinion de M. Caiiewaert a rencontré des adliésions
précieuses {^), mais pas unanimes. L'auteur s'est efforcé de la
défendre récemment encore par l'examen détaillé du chapitre
48 f). Il a conclu très logiquement que le Codex Fuldensis
doit servir de base pour l'établissement du texte de l'Apolo-
gétique, et qu'on ne peut accueillir les variantes des autres
manuscrits qu'avec une très grande défiance.
3'^ En publiant l'Apologétique de Tertullien dans son excel-
lente petite collection, Florilegium patristicum, à l'usage des
élèves en théologie (l^e éd. en 1906, 2^ éd. en 1912), M. Gérard
Rauschen, professeur d'histoire ecclésiastique à l'Université
de Bonn, a dû se prononcer entre les opinions de Havercamp
et de Caiiewaert. Il ne s'est prononcé ni pour l'une, ni pour
l'autre. D'après lui, on ne peut pas distinguer une tradition
pure et une tradition remaniée, ni une première édition et
une édition définitive de Tertullien lui-même. Le Codex Ful-
densis a subi des retouches, aussi bien que les autres manus-
crits. Des deux côtés, le but des remanieurs a été de rendre
la langue plus facile à comprendre, le style plus clair, moins
recherché, les idées plus intelligibles pour le commun des
lecteurs. Telle serait donc l'origine des nombreuses addi-
tions, suppressions et substitutions que révèle la comparaison
(') C. Caiiewaert, Le Codex Fuldensis, le meilleur manuscrit de
Tertullien, dans la Revue d'hist. et de litt. religieuses, 7, 1902, pp.
322-353.
(^) Ad. Harnack^ Die Chronologie der aitchristl. Literatur, 2,
p. 226, n. 2. Adh. d'Alès, La théologie de Tertullieji (Paris^ 1905),
p. 6. M. Schanz, Gesch. der roem. Litt., 3, 2" éd., p. 350.
(^) C. Caiiewaert, La valeur du Codex Fuldensis pour le réta-
blissement du texte de V Apologeticum de Tertullien, dans les MÉLANGES
Charles Moelleu, I, p. 165-178 (Recueil de Travaux de la Fac.
de Phil. de Louvain, 40« l'asc. Louvain, Van Linthout, et Paris,
Picard, 1914),
6 INTRODUCTION
des deux traditions manuscrites {^). V Apologétique est un
des écrits les plus difficiles à comprendre que l'antiquité
latine, chrétienne et profane, nous ait laissé. La difficulté
vient surtout de la langue et de la manière de Tertullien.
C'était en même temps un des écrits les plus intéressants pour
le public chrétien de la fin de l'Empire et du haut moyen
âge, un de ceux qui trouvèrent le plus de lecteurs. Serait-il
étonnant qu'outre les accidents communs, les manuscrits
eussent subi, plus que ceux d'aucun auteur, les surcharges,
les corrections, les remaniements destinés à expliquer, à
compléter la pensée et l'expression ? (2),
M. Rauschen admet que la tradition du Codex Fuldensis
est restée plus pure que celle des autres manuscrits.
La critique est donc autorisée à chercher dans l'une et
dans l'autre tradition ce qui représente le plus fidèlement
la pensée et le style de Tertullien : mission malaisée et délicate,
travail si difficile, pensons-nous, que nul ne peut se flatter
d'y réussir jamais complètement : opus arduum profecto et
innumeris fere diffîcultatibus involutum I (^). Dans sa deuxième
édition, plus encore que dans la première, M. Rauschen a fait
place aux variantes du Codex Fuldensis, chaque fois qu'elles
lui paraissaient l'emporter sur celles des autres manuscrits.
L'exposé qui précède montre clairement combien il importe,
pour établir le texte de V Apologétique, de trancher d'abord
la question de l'origine des deux traditions. Viennent-elles
de deux éditions successives procurées par Tertullien lui-
(^) Voy. les ProUgonuiia de Rauschen, 2*éd.^ p. 7.
(^) Sur l'état des mss. de Tertullien, voy. les travaux d'E. Kroy-
mann, dans la Préface du vol. 47 du Corpus script. eccL, dans
Sitzungsberichti der Wiener Akademie, vol. 143 (1900), et Rhein.
Muséum, N. F., Bd 78, 1913, p. 128 et ss. Voy. surtout les conclu-
sions de ce dernier article, p. 151.
(3) C'est ainsi que W. Hartel et G. Wissowa qualifient la mission
confiée à Aug. Reiffercheid, de procurer l'édition de Tertullien dang
le Corpus script, eccl. (Préface du t. 20).
INTRODUCTION 7
même ? Si oui, est-ce F ou P qui représente l'édition défini-
tive ? Ou sommes-nous en présence de deux recensions dont
l'une procède de l'autre ? Ou les deux recensions procèdent-
elles l'une et l'autre d'un même texte primitif ? {^).
De la réponse que l'on donnera à ces questions dépendra
l'autorité de chacune des deux traditions.
Or, pour résoudre la question de l'origine, nous pensons
qu'il importe d'exécuter un travail préliminaire : c'est de
rétablir l'une et l'autre tradition dans son intégrité. Quand
ce travail sera fait, on verra clairement ce qui appartient en
propre à l'une et à l'autre, ce qui forme la marque distinctive
de chacune ; on pourra les comparer aisément et utilement
dans l'ensemble et dans les détails, et tirer des conclusions
de cette comparaison. Tant que ce travail n'est pas fait, tant
qu'on est réduit à comparer des fragments souvent fautifs,
on court le risque d'endosser aux deux traditions des lacunes,
des additions, des substitutions, des leçons fautives dont
elles ne sont pas responsables. Il est trop facile de dénigrer
l'une au profit de l'autre, si l'on ne commence pas par réparer
l'outrage des ans, si on ne les purge d'abord l'une et l'autre
des fautes accumulées par les accidents auxquels s'est trouvé
exposé tout texte transmis par l'écriture.
L'édition de Fr. Oehler, qui repousse en principe les leçons
du Codex Fuldensis, peut donner une idée approximative de
la tradition commune. Cependant elle est loin d'être à la
iiauteur de la critique actuelle et elle néglige aussi trop systé-
(1) Notons, pour mémoire, l'hypothèse de W. Hartel. En com-
parant le texte de V Apologétique à celui du traité Ad nationes, il a
cru remarquer que le Codex Fuldensis se rapproche souvent plus du
texte de ce traité que les autres manuscrits. Il en a conclu que le
Codex Fuldensis est issu d'une tradition revue et corrigée d'après
le traité Ad nationes. Une comparaison plus approfondie montre
que, dans d'autres passages, les autres manuscrits ressemblent plus
au traité Ad nationes que le Codex Fuldensis : une revision systéma-
tique est donc exclue. Patrist. Stud., II, p. 21. Voy. C. Callewaert,
Le Codex Fuldensis^ p. 228-229.
8 INTRODUCTION
matiquement le témoignage du Codex Fuldensis. En effet,
comme nous verrons, malgré la différence des traditions, l'une
peut et doit servir à corriger certaines fautes de l'autre.
Le Codex Fuldensis, au contraire, est resté une masse brute
{rudem adhuc massam), pour emprunter à Tertullien une
expression qui ne préjuge pas de la valeur de ce ms., une pierre
précieuse non taillée, comme dit Harnack, qui est disposé
à regarder ce ms. comme le meilleur, suivant l'opinion de
Callewaert (^).
Notre but unique, pour le moment, est de rétablir, autant
qu'il est possible, la tradition manuscrite dont le Codex
Fuldensis, collationné par Modius, est resté le seul témoin.
Nous nous réservons d'examiner dans une étude spéciale
{La double tradition manuscrite de l'Apologétique de Tertullien)
le problème de l'origine de la double tradition et d'exposer
notre opinion avec les arguments qui peuvent l'appuyer.
II. État de la tradition manuscrite.
C'est Sigebert Havercamp, comme nous venons de le dire,
qui a le premier reconnu et affirmé, dans son édition de 1718,
qu'il existe deux traditions manuscrites de V Apologétique.
L'une de ces traditions est représentée par une trentaine
de manuscrits (^) : elle est commune à tous les écrits de
Tertullien. Seule connue jusqu'en 1597, elle a servi jusque-là
et même jusque Rigaltius (1637) de base unique à toutes les
éditions de V Apologétique, et l'on peut dire que jusqu'à la
deuxième édition de Rauschen (1912), elle en est restée la
base principale. On peut l'appeler la tradition commune et
donner le nom de vulgate au texte qui est fondé sur elle.
L'autre tradition est propre à l'Apologétique : on peut donc
l'appeler la tradition spéciale. On peut aussi lui donner le nom
(^) Tert.,De an., 37, p. 364, 13. Ad. Harnack, Chron., 2, p. 226,
n. 2.
(^) H.Hoppe, dans Woçhejischr, fur hlass. Philologie, 1914, p. 462,
INTRODUCTION 9
de tradition de Fulda, parce qu'elle n'est représentée que
par un seul manuscrit connu, un Codex Fuldensis.
1 . La tradition commune. — Nous n'avons pas entrepris de
collationner tous les manuscrits qui représentent cette tradi-
tion. L'Académie de Vienne a confié cette mission à M. H.
Hoppe, professeur au Gymnase de Minden, qui aura l'hon-
neur de publier V Apologétique dans le Corpus scriptorum
ecclesiasticorum latinorum (i). Nous ne pouvons considérer
que deux manuscrits. Mais l'un est de beaucoup le plus
correct de tous : c'est le Codex Par isinus 1623, auquel nous
joignons le Codex Montispessulanus H, 54.
Le Codex Par isinus 1623, que nous désignons par P, ne
contient que l'Apologétique. Il est en parchemin et d'une belle
écriture du X^ siècle. Voyez la planche, à la fin de notre
édition. Sur la première page, on lit Claudii Puteani {^). Le
titre est Apologyticum f) Tertulliani de ignorantia in Christo
lesu.
(^) L'Académie de Vienne confia d'abord cette mission à Aug.
Reifferscheid, qui devait éditer toutes les œuvres de Tertullien, Il
vint à mourir en 1887 avant d'avoir publié le i" vol., qu'il avait
préparé. Ce volume parut en 1890, par les soins de G. Wissowa et
W. Hartel. G. Wissowa devait continuer la publication, mais, ab-
sorbé par d'autres travaux, il eut pour successeur E. Kroymann,
qui a publié le IIP volume en 1906 et prépare la publication du II®.
U Apologétique, qui est certes le morceau le plus difficile, a été
confié à H. Hoppe, connu par d'excellents travaux sur la langue de
Tertullien.
(^) Claude Dupuy^ mort en 1594^ avait réuni beaucoup de manus-
crits. Ses fils Pierre (1582-1651) et Jacques (1586-1656) furent
gardes de la bibliothèque du roi. Jacques légua 260 mss. à cette
bibliothèque.
(^) Apologyticum n'est pas une erreur de scribe, mais une défor-
mation de la basse latinité pour Apologeticum. Tel paraît être le
titre authentique. Il est vrai que S. Jérôme, parlant de Tertullien
{Epist., 70, 5)^ dit Apologeticus eius et qu'il appelle toujours (^/Jwj!.^
10 INTRODUCTION
A la même famille appartient le Codex Montispessulanus
H, 54 (M), en parchemin, d'une écriture très lisible, mais
beaucoup moins soignée, du XI® siècle. C'est un grand in-
folio à deux colonnes. Il reste 1213 colonnes. Après six autres
écrits de Tertullien, V Apologétique remplit les colonnes 1119
à 1213, mais la fin manque, depuis les mots inculcationibus
densamus du chap. 39,3. En tête du ms. on lit : Tertulliani
opéra ex libris collegii Oratorii Trecensis (Troyes) ; à la dernière
page, il porte ces mots : P. Pithoei. Il a donc appartenu à
Pierre Pithou et après la mort du célèbre jurisconsulte (1596)
il passa à la bibliothèque de la ville de Montpellier. En tête
de l'Apologétique, on lit : Apologiticum Tertulliani Cap{ut)
de ignorantia in Christo lesu.
Nous avons collationné ces deux manuscrits sur la première
édition de G. Rauschen (Bonn, 1906) et nous avons publié
cette collation dans le Musée Belge, XVI, 1912, p. 188-240 (i).
11 en résulte que M, qui est d'un siècle environ postérieur à P,
est aussi beaucoup moins correct {^). On y retrouve les va-
riantes distinctives de la tradition commune, mais le texte
est défiguré par de nombreuses fautes de copie. Cependant
jo, 4; 80, 2 ; 84, II) les ouvrages de ce genre Apologeticus (se. liber).
Mais Laclance^ parlant également de Tertullien {Div. inst., s, 4, 3),
Isidore de Séville^ qui a en vue l'ouvrage de Tertullien {Etym.j 6,
8, 6) et les bons manuscrits de Tertullien disent Apologeticum,
c'est-à-dire 'ATToXoy-fiTtxo'v, au neutre pris substantivement.
Les mots de ignorantia etc. sont précédés de Cap{ut) dans M :
ils forment le titre du chap. I. C'est un pieux scribe qui aura ajouté
in Christo lesu.
(') En 1910^ M. Hoppe avait eu l'amabilité de nous communi-
quer les principales variantes de P et de M, d'après la collation de
Reifferscheid. En collationnant nous-mème les deux manuscrits,
dont le gouvernement français avait bien voulu autoriser l'envoi à
l'Université de Liége^ nous n'avons pas manqué de tirer profit des
notes de M. Hoppe. Nous tenons à lui renouveler ici l'expression
de notre reconnaissance.
(^) Voyez aussi H. Hoppe, dans Woch.f. M. Philologie, l. c.
INTRODUCTION 11
il vient quelquefois appuyer heureusement les variantes de P
et il a même conservé l'une ou l'autre leçon meilleure que celles
de P. Nous n'avons pas cru nécessaire de le citer continuelle-
ment.
2. La tradition spéciale. Le Codex Fuldensis. — La tra-
dition propre à V Apologétique est représentée aujourd'hui par
un seul manuscrit que la bibliothèque du monastère bénédictin
de Fulda possédait encore en 1589 et qui contenait l'Apologé-
tique et le traité Contra ludaeos (i).
Dans la dispersion de la bibliothèque de Fulda au XV 11^
siècle, ce manuscrit s'est perdu. Il a fini par être mis en
pièces, car on en a retrouvé récemment dix feuillets dans la
Bibliothèque Nationale à Paris. Ces feuillets ne portent que
quatre chapitres (6 à 9) du traité Contra ludaeos. Ils ont été
examinés et collationnés par Aug. Reifferscheid. C'est E.
Kroymann qui a reconnu qu'ils viennent du Codex Ful-
densis (2).
(') Le catalogue des manuscrits de Fulda, dressé en 1589, a été
publié par C. Scherer, dans Centralblatt f. Bibliothekswesett, Beih. 26
(Leipzig, T912), à la suite des recherches de F. Falk sur la Biblio-
theca Fuidefisis. A la page 106, nous trouvons: Apologeticum Ter-
tullianiy contra ludaeos.
(^) E. Kroymann, Zur Ueherlieferungsgeschichte des Tertullian-
texttSj p. 130, n. I (Rhein. Mus., N.F., Bd. 78, 1913): « Jusqu'à
présent ce ms. a passé pour entièrement perdu et nous devions nous
contenter de la collation faite par Modius et publiée par Junius
(Franeker, 1597). Heureusement nous en avons conservé dix feuil-
lets {Adv. IndaeoSy cap. 6-9) dans le Parisinus 13047, qui est formé
de mss divers... Au sentiment de Reifferscheid, ces feuillets sont
du IX« siècle ou de la première moitié du X«. La comparaison entre
la collation de ces feuillets faite par Reifferscheid et la collation de
Modius ne laisse aucun doute sur l'identité et nous donne en même
temps l'assurance que la collation de Modius, bien que pas tout-à-
fait complète, mérite une confiance absolue » {zwar nicht ganz
VPllst^ndig, aber dufchaus zuverlàssig),
12 INTRODUCTION
Heureusement, si la partie du manuscrit qui contenait
V Apologétique, doit être regardée comme perdue à jamais,
nous en avons une collation très complète, faite en 1584 par
Modius et publiée en 1597 par Junius.
III. La collation du Codex Fuldensis par Modius.
L'humaniste François de Maulde, gentilhomme flamand,
naquit à Oudenbourg, en Flandre, le 4 août 1556. Après une
vie agitée, il obtint, en 1590, une prébende de chanoine « non
sujette au sacerdoce )\ à Aire (Pas de Calais), grâce à son ami
le comte Charles d'Egmont, Il mouiut à Aire, le 22 janvier
1597, à l'âge de 40 ans.
Modius était un ardent chercheur et collationneur de manus-
crits. Réagissant contre les excès de la critique conjecturale,
il fut un des premiers à voir clairement que c'est avant tout
par la comparaison des manuscrits qu'il faut rétablir le texte
des auteurs anciens. « On est frappé, dit son biographe (^), du
nombre considérable de manuscrits qu'il a pu collationner. Il
ne s'épargnait du reste ni le temps ni les peines pour aller les
étudier partout où il s'en trouvait, ni les instances pour en
demander l'envoi à ceux qui les possédaient, » Chassé par les
troubles qui agitaient son pays, il se rendit en Allemagne en
(') Alph. Roersch^ notice dans la Biographie Nationale, publiée
par l'Académie royale de Belgique, t. 14, col. 921-935 (1897). D"
même auteur: La bibliothèque de Fra7içois Modius (192* livraison du
Bull. hist. de la Société des Antiquaires de la Morinie, 1900) ; Les
aventures d'un gentilhomme flamund {Revue Générale, Bruxelles, mai-
juin 1907); Particularités concernayit Modius {Musée Belge, janvier
1908, avec portraitde Modius). Ce dernier article est un supplément
à l'ouvrage important de Paul Lehmann, Franciscus Modius als Hand-
schriftenforscher (Munich^ C, H. Beclc, 1908, 152 pp.), dans Quellen
und l/jitersuch. zur latein. Philologie des Miitelalters, herausg. von
L. Traube, III, i. Sur la date de la mort de Modius, voy. A.Roersch^
dans le Musée Belge, 1. c, p. 83, ,
INTRODUCTION 13
1580 et vécut à Cologne, à Francfort et à Wurzbourg, jusqu'en
1584. Partant de Wurzbourg, où il avait trouvé un asile pen-
dant trois ans, pour rentrer dans sa patrie, il s'arrêta à Fulda
du 13 septembre au 12 décembre 1584 (i), pour dépouiller la
riche bibliothèque de manuscrits du monastère bénédictin.
Parmi les manuscrits qu'il y découvrit et qu'il collationna
s'en trouvait un qui contenait V Apologetkum et le Contra
ludaeos de Tertullien. Il le collationna, avec grand soin, sur
l'édition que René Laurent De la Barre venait de publier à
Paris en 1580. Il dressa donc une liste de variantes, indiculus
variantium lectionum, comme l'appelle Junius, dans laquelle
il transcrivit les passages de René L. De la Barre, les faisant
suivre de la leçon du manuscrit.C'estdu moins sous cette forme
que son travail fut publié par Junius en 1597 (2).
1. Les destinées de la collation de Modius. — Grâce
à VAvis au lecteur dont Junius fit précéder sa publication et
à la biographie de Modius reconstituée par Alph. Roersch et
puis par P. Lehmann, nous pouvons suivre les destinées de la
collation de Modius jusqu'à sa publication. Il est utile de le
faire pour apprécier à sa juste valeur la publication faite par
Junius. Voici VAvis au lecteur :
CHRISTIANO LECTORI S.
Quum hoc Septimii Tertulliani opus totum iam adornatum esset,
commode scripsit e Noricis iuvenis eruditissimus et horum studio-
ru m amantissimus Gaspar Schoppius Francus ad me, et se instituto
meo faventem praebuit officiosissime. Misit eiiim opportune ac-
cessionem huius operis non contemnendam, quam cum mais notis
(') La Bibl. royale de Munich possède un manuscrit autographe
de Modius, qui contient notamment le journal de Modius pendant
les années 1581-1588. On y lit : Id. sept, veni Fuldam, ubi excussi
hihliothecam illam nohiUin usque 12 Decemhris 1584. Voy. P. Leh-
mann^ p. 66.
C) Le ms de Brème a la même forme. Voy. plus loin.
14 INTRODUCTIOM
et observationibus publico iuri addicerem. Est autem haec accessio^
variantium lectionum in Apologeticum et libruni ad versus ludaeos
jndiculus, quas ex MSS. meiiibranarum collatione ante complureis
annos praesertim ex MS. Fuldensis aujj.SoXfi^ vir doctissimus Fran-
ciscus Modius Brugensis observaverat. Habuerat eas apud se vir
amplissimus M. Velserus Augustanus Consularis et Annalium scrip-
tor accuratissimus perdiu. Et ne semper iacerent otiosae, cum
Schoppio antiquitatis scientissimo amice communicaverat. Horum
itaque fide, Chrisliane Lector^ visum est variantes lectiones illas
reliquo operi nostro adtexere^ et suo auctori reddere : quod officium
nec illis ingratum confido fore a quibus oblatum est, nec inutile
Reip. litterariae nostrae. Habet enim hic Indiculus variantes lectio-
nes sanequam optimas, et quae auctoris stilum tani sapiunt quani
quod maxime, Id quidem verum est collationem fuisse factam cum
eo exemplari quod Renatus Laurentius Lutetiae Parisiorum anno
MDLXXX Barraeo auclore ediderat. Quod exemplar multis modis
superavit Pamelianae editionis fides^ quae post biennium ferme
sequuta est. Atque hincfactum, ut auctoris verba, ad quae variae
lectiones adscribuntur, Parisiensi illi editioni respondeant. Sed haec
res adiumento potius Lectori diligenti, quam impedimento futura
est. Sic enim videtur magis publico commodatum esse^ quum et
Barreanae lectionis habentur rudera, et Pamelianae emendationes
(quarum multae praerogativo suftragio optimi illius MS Fuldensis et
auctoritate fîrmantur) ante oculos sunt^ et multae etiam longe me-
liores utraque illa ex ms. proferuntur. Nolui gravissimo auctori rem
suam, Schoppio nostro et aliis per quos res haec collata est laudem
suam^ pio Lectori fructum suum interverti : cum iuris praeceptum
commune sit, lUS suum cuique tribuere. Tu itaque^ Christiane
Lector, his féliciter utere et Vale.
Modius ne se servit jamais lui-même de sa précieuse liste de
variantes. En 1591 et 1592, il fit un séjour à Augsbourg (^)
et entra en relations avec le richissime et savant patricien Marc
Velser (2), à qui il fit cadeau de sa collation du Codex Fuldensis,
(') A. Roersch, Aventures, p. 20. P. Lehmann, p. 26.
Ç^) Marcus Velserus ou Marcus Welser (1558-16 14) appartenait à
une célèbre famille patricienne d'Augsbourg^ enrichie par le com-
INTRODUCTION 15
comme il lui fit don, plus tard, en 1596, d'une collation de ses
Panegyricae lediones, extraites d'un excellent manuscrit de
Saint-Omer (i). Voulait-il reconnaître un service rendu ?
Modius n'était d'ailleurs pas avare de ses trésors d'érudition.
Vers 1579, on le voit de même offrir à Pamelius la collation
d'un manuscrit de Tertullien, qu'il avait faite à Cologne {^).
Il avait sans nul doute renoncé à faire usage de sa collation
du Codex Fuldensis, car il en laissa la libre disposition à Velser.
Celui-ci, dit Junius, la conserva chez lui <» très longtemps »
{habuerat eas apud se... perdiu), ce qui signifie sans doute
« quelques années ». Puis, pour que la collation ne restât pas
inutile à jamais {ne semper lacèrent otiosae), il la remit à un
philologue très jeune encore, mais déjà très érudit, Gaspar
Schoppius f ). Ayant appris que Franciscus Junius (*) était
occupé à faire imprimer une nouvelle édition de Tertullien,
à Franeker, en Hollande, Schoppius lui envoya à son tour la
collation de Modius, pour qu'il la publiât avec les notes qui
devaient accompagner le texte. L'impression de Junius était
trop avancée pour qu'il piJt tirer profit de ce cadeau imprévu ;
mais il en apprécia tout de suite la valeur et il Imprima Vindi-
merce, qui fut, comme les Fugger^ créancière de Charles-Quint. Il
fut conseiller d'Augsbourg depuis 1592. Savant historien de sa ville
natale, il publia le premier la carte routière de l'Kmpire romain^
connue sous le nom de Tabula Petttingcriana (1598).
(^) A. Roersch, Biogr. nat., p- 934-935. P. Lehmann^ p. 115»
(^) P. Lehmann, p. 99-100 (lettre non datée).
(•^ Kaspar Schoppe^ né en 1576, à Neumarkt (Palatinat),avait
21 ans^ quand il envoya la collation à Junius. Il mourut le 19 nov.
1649, à Padoue. — De même, Velser abandonna à Livineius les
Panegyricae lediones reçues de Modius. Livineius s'en servit pour
son édition des XII Panegyrici veteres (Anvers, Plantin, 1599). A.
Roersch, Biogr. nat., p. 935; P, Lehman, p. 115.
("*) Franciscus Junius (François du Jon) naquit à Bourges en 1545.
II termina sa carrière comme professeur de théologie à Leyde et
mourut en 1602. Cf. F. W. Cuno, Franciscus Junius der Aeltere.
Amsterdam^ 1891.
16 INTRODUCTION
culas variantium lectionum tout entier, en appendice à son
deuxième volume, qui vit le jour l'année même de la mort
de Modius (Franekerae, 1597). C'est ainsi que le travail de
Modius nous a été conservé (*).
2. La copie de Brème. — Est-ce l'autographe de Modius
qui passa de main en main et qui fut enfin remis à Junius ?
Celui-ci ne le dit pas formellement. Ce qui est sûr, c'est que
Schoppius avait joint des notes personnelles à la collation,
comme on le verra plus loin, et qu'il existait plus d'un exem-
plaire de cette collation manuscrite, comme le prouve la copie
partielle conservée à Brème.
Nous devons à M. H. Hoppe la connaissance d'un manuscrit
de la Stadtbibliothek de Brème, C, 48 (Bh), qui contient (pp.
131-146) le début de la collation de Modius, du ch. I au ch. XV
fin (2). Or, la copie de Brème, que le bibliothécaire de la ville
de Brème a bien voulu nous envoyer à l'Université de Liège,
diffère de la publication de Junius en plusieurs points.
1) Elle contient, dans les deux premiers chapitres, quelques
variantes qui manquent dans Junius et elle donne souvent
les autres plus exactement.
2) Elle omet une grande partie des observations qui accom-
pagnent les variantes dans Junius.
3) Elle donne au moins une observation que Junius ne
connaît pas.
(^) Les schedae Schoppianae, comme on a appelé l'exemplaire
envoyé par Schoppius à Junius, sont perdues. Quant à l'édition de
Junius, elle est devenue assez rare. W. Hartel {Pairist. Slud.j IL
p. 2i) s'est contenté de ce qu'il appelle une collation très exacte du
Cod. Fulden&is faite par Reiiferscheid. Ce ne pouvaient être que des
extraits de la collation imprimée par Junius, que ReifFerscheid avait
faits en vue de l'édition de Tertullien qu'il préparait et qu'il n'a pu
achever. On en a conclu à tort que les schedae Schoppianae existent
encore.
(^) Ce ms. a 17 cm. de haut sur 10 de large. Il contient des va-
riantes de Paul Diacre, S. Cyprien, Tertullien, etc. 11 est d'une belle
écriture d'humaniste du XVP siècle.
ÎNTRODUCtlON 17
4) Enfin, elle s'arrête à la fin du chap. XV, par ces mots :
Cetera vide in editione luniana.
Quand l'auteur de la copie de Brème a commencé à trans-
crire les variantes, il ignorait sans doute que Junius les avait
imprimées. Après s'en être aperçu, il crut inutile de continuer
son travail (i).
D'où lui venait l'exemplaire sur lequel il copiait ? On n'en
sait rien, mais ce n'était certainement pas l'impression de
Junius ni l'exemplaire manuscrit que Junius avait reçu de
Schoppius : les différences sont trop grandes. Il résulte de là,
qu'on avait fait au moins une copie manuscrite de la collation
de Modius. On peut même supposer que l'un des détenteurs
successifs en avait fait faire plusieurs exemplaires.
Nous avons reproduit, dans le Musée Belge, 16, 1912, pp.
188-240, le texte de la collation de Modius, telle qu'elle a été
imprimée par Junius, avec les principales variantes de la copie
de Brème ; nous avons mis au bas des pages les variantes de
P et de M (2).
VI. La publication de la collation par Junius.
1. La collation, telle que Junius Va publiée, ne contient-elle
pas d'autres variantes que celles du Codex Fuldensis ? — Il
faut poser cette question ; en effet, dans son Avis au lecteur,
Junius appelle la liste de variantes qu'il avait reçue de Schop-
(^) Voyez plus loin. Le ms. de Brème ne peut pas être l'auto-
graphe de ModiuSj puisqu'il est resté incomplet.
(*) Nous prions le lecteur de bien vouloir corriger les fautes d'im-
pression suivantes : 4, 5 : ms. débet (pour de /éi). — 5, 7 : guos nullus
Vesp. — 6, 7 : ms. cum my. suis. — 6^ 11 : ms. ut (pour us). —
I4j 5 : ms. est etille de Lyr. — 19, i (p. 209, 1. 16-17) '• cecinit. —
ib. (p. 210,3) : ridetis. — 21, 6 : auctoris (pour auctioris). — 21,25 :
ms. d. verodiff, — 2\, 3 : ms. aut l. sanctaseic. — 22, 7 (p. 216, 1. 2):
dtvinatioms (pour divinitatis). — 23,3: gîilam (pour galam). —
24; 3 : peritiae et {t^out perttiae etc.). — 34, 2 : ms. ad. quod etc. -
18 ÎNTRODUCTION
pius : Variantiiim lectionum in Apologeticum et librum advenus
Judaeos indiculus, qiias ex MSS. membranarum collatione ante
complureis annos praesertim ex MS. Fuldensis (suiK^okri, vir
doctissimus Franciscus Modius Bmgensis observaverat.
S'il fallait en croire Junius, les variantes de Modius seraient
donc tirées de plusieurs manuscrits et principalement du Codex
Fuldensis. Ce serait un mélange de variantes puisées à des
souices diverses et inconnues, et l'on ne pourrait déterminer
ce qui appartient en propre au Codex Fuldensis. La complica-
tion serait bien embarrassante pour qui voudrait établir la
valeur de ce manuscrit.
F. Oehler ne s'est pas arrêté à l'affirmation de Junius. Un
examen approfondi de ces variantes avait suffi pour le con-
vaincre qu'elles venaient d'une seule et même source : esse
nias non ex compluribus, ut lunius censebat, variarum biblio-
thecarum codicibus collectas, sed de uno fonte petitas (^).
Après mûr examen, nous pensons que Junius doit s'être
trompé (2) : il aura mal compris ce que Schoppius lui avait
écrit. Il semble même se contredire vers la fin de son Avis au
35j 3 (p. 226^ 1. 5): a/ios dies et quae observant, — 37^ 2 : ms. ne m,
quidem. — 37^ 4 (p. 228^ 1. 4): ms, reliquimus t. — 38^ 5 : In quo
vos. — 39^2: preccitionibus — 39^3 (p. 238, \. \): voratrinis. —
40, 8 : ms. m. perfudit. 41^ 5 : nostri catissa. — 47^ i : in hac quoque.
— 47j 2 : (9w«««o abest. — 47^ 14 -.E.fi. suyit nostra. — 50, 12
(p. 239, 1. I d'en bas) : damnandam. — Nous reproduisons d'ailleurs
la collation de Modius à la fin de ce volume.
Dans P et M. 4^ I : suggillandam P. — 8^ 7 : virulentiam MP^. —
9^ 14 : boculos M. — 12,6 '. probetis] reprehendistis PM. — 25,2:
occurrit. — 25^ 3 (adde) : magis fatum voluisse quam suae P. —
32j I : degererare M. — 34, 3 : tamquam si iiabens PM. — 35, 7 :
inculta P'^. — 36, 3 : sed exceptione P. — 40, 15 : adorantur. —
\i, 4 : dispicitis P. — 44, i : corrumptor P. — 45,5: deliquendi P.
— 46, 1 3 : priennenses.
(^) Au tome I de son édition (1853), p. XIX,
{^) Nous avions jugé autrement dans le Musée Belge, art. cité^
p. 185.
INTRODUCTION 19
lecteur, où il ne parle plus que du manuscrit de Fulda (optimi
illias ms. Fuldensis).
On hésite à croire que Modius ait mêlé, sans aucune indi-
cation de source, des variantes d'origine diverse et par consé-
quent d'autorité et de valeur différentes. Lui, qui attachait
une si grande importance à la comparaison des manuscrits
pour l'établissement des textes, devait savoir que les manus-
crits n'ont pas une égale valeur. 11 devait comprendre que
les matériaux qu'il rassemblait seraient d'un usage difficile,
s'il les jetait pêle-mêle. A y bien réfléchir, on ne comprend
même pas comment il aurait procédé pour intercaler, dans la
liste dressée à Fulda, les variantes de plusieurs autres manus-
crits, inconnus d'ailleurs ; il faudrait admettre qu'il combina
plus tard des collations diverses. Remarquons que, pour chaque
passage, la collation ne donne jamais qu'une seule variante^
ce qui serait vraiment étonnant si Modius avait dépouillé plus
d'un manuscrit, et que la source indiquée est uniformément
ms., le manuscrit. Toutes portent d'ailleurs le même caractère,
comme Oehler l'a remarqué, celui d'une seule et même recen-
sion différente de P. Il en résulte que, si elles provenaient
même de plusieurs manuscrits, il faudrait admettre que ces
manuscrits appartiennent tous à la tradition spéciale de
V Apologétique Q).
Au surplus, puisqu'il faut choisir entre junius et Modius,
nous préférons prendre parti pour Modius, qui n'était pas
moins consciencieux qu'actif ; car Junius, comme nous allons
voir, s'est acquitté de sa tâche avec une certaine incurie, pro-
venant peut-être de la hâte qu'il avait de terminer l'impression '
de son ouvrage.
Enfin, nous pouvons opposer à son témoignage celui d'un
inconnu, mais d'un humaniste qui a fait preuve de plus de soin
que lui : c'est l'auteur de la copie de Brème, Cette copie porte
en tête (p. 131) : Variantes lediones in Teriulliani Apologe-
ticum adversus génies et Librum adversus ludaeos ex manus-
(^) Cf. C, Callewaert^ La valtur du Codex Fuldensis^ dans les
MÉLANGES Charles Moeller^ tome I, p, 177.
2Ô ÎMTRODUCtlOl^
cripto Fuldano longe optimo. Collatus est autem ille scriptus
codex cum editione Renati Laurentii Pans, a" (15)80. La copie
de Brème, nous l'avons vu, est indépendante de Junius et
des schedae Schoppianae. Elle a eu pour modèle, sinon l'auto-
graphe de Modius, du moins une copie faite sur cet autographe.
Or, l'auteur de la copie de Brème dit clairement que la colla-
tion n'est faite que sur le ms. de Fulda et nous préférons son
témoignage à celui de Junius, parce que sa copie est beaucoup
plus exacte que l'impression de Junius.
Il importe de le prouver, car il en résultera qu'on ne peut
accepter le texte de Junius qu'avec une certaine défiance.
2. Junius n'a pas reproduit exactement la collation de Modius.
— En premier lieu, nous ne retrouvons pas dans Junius un
certain nombre de variantes que nous lisons dans le ms. de
Brème.
1,3. Quid hinc dépérit] ms. quid hic dépérit.
1, 4. Civitatem etc.] ms. obsessam vociferantur civitatem.
Et dignitatem] ms. etiam dignitatem trans.
2, 4.. Confessio eo] ms. confesso eo nomen.
2, 15. Servire legem] ms. servate legem.
Ces omissions sont graves. Si elles étaient imputables à
Junius, elles prouveraient ou sa négligence ou les libertés qu'il
crut pouvoir se permettre. Mais il serait étonnant que Junius
eiàt omis ces variantes, s'il avait eu sous les yeux le même
exemplaire que le copiste de Brème ou un exemplaire tout à
fait semblable. Il est donc très probable que les schedae Schop-
pianae envoyées à Junius n'étaient ni l'autographe de Modius,
ni même une copie tout à fait complète.
En second lieu, Junius n'imprime pas exactement le texte
qu'il a reçu. Voici quelques exemples empruntés au texte de
De la Barre, que nous pouvons vérifier :
De la Barre a : Junius imprime :
I, I indiciis iudiciis
I, 8 propius proprius
1 , 1 1 deprehensi depraehensi
2, I deberet débet
2, 15 ad versus adversantur
INTRODUCTION 21
5, 7 leges istae leges ista
lO
5 coUigam collegam
12, 4 Cereri Caeteri
Dans tous ces cas, la copie de Brème est exacte. Voici quel-
ques cas curieux. Nous lisons dans Junius :
9, 15 Negandi, si non] ms. necandi, sinon.
La variante porte sur negandi ; or, comme De la Barre a
necandi, il faut lire sans aucun doute ;
10, 15 Necandi, si non] ms. negandi, si non (')
■ Junius imprime encore :
38, 4 Nihil est nobis dictum] ms. nihil n. d.
De la Barre a dictu et n. d. doit se lire nobis didu.
Au ch. 2, 1, De la Barre a deberet (Junius imprime débet) et
dans la variante d. doit se lire deberet, et non débet.
Au ch. 25,2, De la Barre a diligentissimae (Junius imprime
diligentissime) et la variante dit. doit se lire diligentissimae.
Au ch. 34,2, De la Barre a habens (Junius imprime haberï)
et dans la variante, h. doit se lire habens.
L'inexactitude a des conséquences plus graves encore,quand
elle affecte les variantes de F. Voici ce que nous relevons
dans les chap. 1-15 :
Junius
Bremensis
I,
12 Christianos
Christianus P
2,
6 atque
atqui (adquin P)
12 quasi
cum, quasi P P)
4,
10 licet et damnentur
licet et damnent (licet damnent
1 1 infanticidia P
infanticida
5,
2 sec(ulum)
i(n) s(eculum) P
3 maxime
cum m(axime) P
6,
4 à rino
a(deo) v(ino) P
7,
7 etiam ab arbitris
et ab arbitris (et arbitris P)
8 an quia velox
quia velox P {om. P)
16 quod dicitur semper est
quod dicitur semper, semper est
( ) Il nous est impossible de vérifier en ce moment ce que portç
ici la copie de Brêjne,
22 INTRODUCTION
9, 9 degustatum est P degust(atum)
10 de iugulo Q) P de rigulo
secator sang(uis) secatos (sacratus P) s.
11 ructatur (^) P ructuatur
1 5 quid qd (quidem P)
qui q(uemadmodum) P
i6 eXayyas aiebant [xtispoiv ÈÀayyae aiebant isten (= ekx'qv)
i8 spersum sparsum (asparsum P)
10, I desinimus P desivimus
cognorimus (cognoscimus P) cognovimus
3 sed apud vos sed apud nos (sed nobis P)
8 et imagine P et imagines
12, 4 glutini et corephos {^) glutin(um) et conphos
7 araneae P aranei (*)
14, 6 neque vero neque vera P
Dans presque tous ces passages, le copiste de Brème a raison
contre Junius. Il a conservé la vraie lecture de F d'après le ms.
de Modius, car c'est presque toujours celle qui convient le
mieux au texte de Tertullien. A supposer que certaines de ces
fautes soient attribuables aux schedae Schoppianae, il est pro-
bable que la plupart viennent dejunius, qui a mal lu le manus-
crit ou mal corrigé ses épreuves.
Nous concluons que dans d'autres passages, dont la lecture
paraît étrange, nous devons nous défier de Junius et que nous
pouvons soupçonner une erreur. Exemples :
5, I Dec. pour Deo
9, I ad ipsum manus » id ipsum munus
(}) Modius avait certainement écrit : de rigulo, car l'observation
ajoutée à la variante explique de rigulo et non de iugulo.
{^) Cf. 23,5 : ruciuatido ; 39, 15 (De la Barre a ructatitibus.
Modius ne dit rien).
('') glulinum et gomphos P. Il est évident qu'ici Junius a lu de
travers ou plutôt mal corrigé ses épreuves.
(*) Ici seulement le copiste de Brème semble avoir mal copié,
INTRODUCTION 23
9, 20 spe four spe. (= species) (i)
i8, 5 supernominan » supernominant
24, s alias hircum » alius hircum
30, 6 bonis » bovis
39, u Sed si » Sed st.
Il est probable que, dans ces passages et dans d'autres en-
core, les lectures fautives ne sont pas imputables au scribe
du Codex Fuldensis, ni à Modius, ni à Schoppius, mais à
Junius (2).
3. Quel est l'auteur des notes, qui accompagnent le texte des
variantes ? — Dans la publication de Junius, beaucoup de va-
riantes sont suivies d'une appréciation, d'une explication ou
d'une conjecture. De qui émanent ces notes, plus ou moins
longues ? Demandons-le à Junius, qui était tenu de nous le
dire, car il déclare expressément qu'il a voulu rendre à chacun
ce qui lui revient, ius suum cuique tribuere : « à Tertullien,
son bien ; à Schoppius et aux autres, leur mérite {Scfioppio
nostro et aliis per quos haec res collata est, laudem suam) ; au
lecteur, l'avantage qu'il y trouve ».
Qu'a-t-il reçu de Schoppius? Une liste de variantes,dressée
par Modius et rien d'autre, s'il faut l'en croire : variantium
lectionum indiculus, variantes lectionesillas. Il dit queSchoppius
lui a envoyé cette liste pour qu'il la publie avec ses propres
observations, et ces observations ne sont pas les notes qui
accompagnent les variantes, comme on pourrait le croire à
première vue : c'est le commentaire de Junius {castigationes
et notae), qui remplissent le deuxième volume (310 pages).
L'Avis au lecteur reste muet sur l'auteur des appréciations
ajoutées à beaucoup de variantes. Il ne peut être muet que
si les appréciations sont de Junius lui-même, puisque Junius
veut rendre à chacun ce qui lui revient. On devrait pouvoir
conclure que Junius est l'auteur des appréciations.
(') Malheureusement nous n'avons pas en ce moment la lecture
de Br sous les yeux.
(^) Encorç une fqute d'impression : i, i teraittur Tpour fur an tur.
24 INTRODUCTION
Mais avec un critique aussi peu sûr que Junius, la logique
perd ses droits. Examinons donc les notes. En voici une — et
il n'y en a qu'une — qui mentionne Schoppius :
39,19 Eruptiones lasciviarum] ms. inceptiones {}). Corrige inrep'
iionesj ait Schoppius.
Il faut en conclure que Schoppius avait fait une observation
sur cette variante et sans doute aussi sur d'autres. Mais ici
même, c'est Junius qui parle et qui cite Schoppius, et il ne le
cite qu'ici. C'est qu'ailleurs, dira-t-on, il ne donne pas l'avis
de Schoppius, mais le sien : car s'il reproduisait l'avis de
Schoppius, en le prenant à son propre compte, sans en dire
l'auteur, il ne rendrait plus à chacun ce qui lui revient, et
Schoppius aurait pu se plaindre d'une pareille indélicatesse.
On a appelé ces variantes scfiedae Schoppianae, ce qui est
admissible, en ce sens que Junius les tenait de Schoppius. On
a attribué aussi toutes les notes à Schoppius : cela paraît tout
à fait inadmissible.
Ailleurs encore, il est sûr que c'est Junius qui parle. Ainsi,
se souvenant de son propre commentaire, dont il vient de
corriger les épreuves, il lui arrive d'y renvoyer. 39,15 : sed de
utroque in notis diximus (= vol. II, p. 49). 40,3 : vide notas
(— vol. Il, p. 50), On voit qu'il a confronté le texte et les
notes qu'il venait d'imprimer, avec les variantes de Modius
qu'il avait d'ailleurs trouvées excellentes : habet enim hic
indiculus variantes lectiones sane quam optimas.
On estdonc tenté de lui attribuer au moins toutes ces courtes
appréciations qui sont à la première personne : Quod probo,
non probo, quod ab auctore putem, idque optime iudicio meo,
etc., etc. Elles sont si naturelles sous la plume de celui qui
vient d'étudier et d'annoter tout le texte de ['Apologétique !
(') Il est clair qu'il fallait : inceptiones lasciviarum. La variante
est mal reproduite. De même, au ch. 9, 10, De la Barre a : in pal-
viulam excepius. Junius imprime : palmulam exceptus et donne la
variante: palmula ex{ceptus). Cela veut-il dire in pahnuta exceptus?
Voy. encore 21,8 : lovis et ista sunt numina vestra] ms. ista sunf
/iumana v. C'est à dire : lovis et ista sunt humana vestra,
INTRODUCTION 25
Et pourquoi, dès lors, ne pas attribuer à Junius toutes les
notes qu'il ne met pas sur le compte d'un autre, c'est-à-dire
toutes, moins celle de Schoppius (39,19) ?
Une chose s'y oppose : c'est la copie de Brème. Elle repro-
duit un certain nombre de notes (i). Si nous avons eu raison
de faire dériver cette copie d'un exemplaire indépendant
de la copie envoyée par Schoppius à Junius, si le copiste
de Brème n'a pas connu Junius au moment où il écrivait, il
faut bien admettre que la collation était annotée avant d'être
envoyée à Junius. Ce qui est plus curieux encore, c'est que la
copie de Brème contient une observation à la première per-
sonne, qui est inconnue à Junius (2).
3, 1 Sed malus tantum quod Christianus] ms. illaduo, Sed malus,
omittit. Le ms. de Brème ajoute : Venustins, ut opinor.
Ce n'est donc pas Junius qui dit ici : ut opinor. C'est un
autre. Est-ce le copiste de Brème ? C'est peu probable. Il ne
fait que copier. Est-ce Schoppius ou Modius lui-même ? On
ne sait ; mais, puisque ce n'est pas Junius, on est amené à
croire qu'il se peut très bien que ce ne soit pas non plus
Junius qui dit : Probo, non probo, etc., qu'il n'a fait le plus
souvent, comme le copiste de Brème l'a évidemment tou-
jours fait, que copier des Jugements qui accompagnaient les
variantes quand il les a reçues.
Modius lui-même a pu fort bien écrire une partie de ces
courtes appréciations à la suite des variantes à mesure qu'il
les notait. Elles sont ordinairement sommaires et dépourvues
de cette érudition que les humanistes, travaillant à tète repo-
sée, aimaient à prodiguer. Il lisait deux fois le texte, dans
De la Barre et dans le manuscrit, et pouvait se faire immédia-
(*) Le copiste de Brème ne reproduit pas toutes les appréciations.
Il était sans doute pressé et il semble avoir négligé de parti pris
certaines appréciations, de même qu'il eii a abrégé d'autres.
(2) Ceci prouve à l'évidence que le copiste de Brème n'a pas copié
sur l'impressiop de Junius,
26 INTRODUCTION
tement une opinion. Nous savons, d'ailleurs, qu'il passa trois
mois à Fulda pour collationner quelques manuscrits (i).
Que conclure ? Que Junius nous présente une macédoine
d'observations, venant de Modius, de Schoppius, de lui-même,
qu'il les a toutes prises à son compte et qu'il a sans doute
donné à plusieurs leur forme définitive. Faudrait-il s'étonner de
ce procédé étrange de la part d'un critique qui nous présente,
sans sourciller, ce qu'il prend pour une macédoine devariantes
tirées de ms. divers, sans indication d'origine ? On n'était
pas fort pointilleux d'ailleurs sur la propriété littéraire.
En vérité, la question ne méritait pas en elle-même toute
cette recherche, car les observations imprimées par Junius
n'ont pas grande valeur. Mais la solution peut nous édifier
encore une fois sur Junius et sur le crédit que mérite sa publi-
cation des variantes de Modius,
V. La reconstitution du Codex Fuldensis.
Pour reconstituer le Corfex Fuldensis, nous disposons: 1" de
la collation de Modius, 2" de l'édition de René Laurent De la
Barre.
1. La MÉTHODE DE MoDius. — La collation de Modius
paraît faite avec un soin extrême: c'est l'impression qu'elle
produit sur celui qui l'examine de près : esse illas cum fide
summa ac diligentia ex veteribus membranis excerptas (Oehler,
(') Il y a quelques références: Pausanias in Arcadicis (3,3), vide
in lib. de pallio, cap. 2 (4,7), probat Eusebius (5, i), sic Pamelius
(7,9. Edition de 1579)^ Arnobius libro 6 (9, 10), ut Hesychius loqui-
tur(9, 16), Varro ("14,4), Adv. Marc, 4^ 12 (14, 8), Vegetius(i5,6),
Isidorus(23,6), Glossarium (25, 10). Ces références sont vraisem-
blablement de Junius.
Cependant, une des observations les plus longues (9, 10), où
Arnobe est cité, pourrait bien n'être pas de Junius. Elle porte sur
de rigulo et Junius a imprimé par mégarde de tugulo^ sans voir quç
c'est de rigulo qui est expliqué.
INTRODUCTION 27
p, XIX). La comparaison des feuillets du Contra ludaeos
conservés à Paris avec les variantes de ce traité, est venue con-
firmer cette impression (i).
Ce qui importe est de savoir si Modius a poussé l'exactitude
jusqu'à noter minutieusement toutes les différences que pré-
sentait F comparé à l'édition assez défectueuse de René L.
De la Barre P). En effet, si la collation de Modius était abso-
lument complète, il suffirait d'introduire les variantes de
Modius dans le texte de René L. De la Barre pour reconstituer
entièrement le Codex Fuldensis. Il faut donc rechercher com-
ment Modius a exécuté son travail.
Or, il est facile de voir que Modius ne s'est pas borné à faire
la chasse aux bonnes leçons, aux leçons meilleures que celles
que donnaient les autres manuscrits. Il note un grand nombre
de variantes qui sont manifestement fautives, telles que
animis pour nimis (1, 1) tanti quam pour tanti quanti (3,4),
et pour ut (4,3), quos pour quas (5,7), tôt pour quot (7,3), semel
pour simu/(9,17), nequis pour mque (9,18), militatior pour
militarior (11,16), fadum pour fatum (11,2), vilioris pour
viliores (13,6), vetustates pour venustates (15,1), infirmo pour
informi (16,6), aliquando pour aliquanto (21,1) et quando pour
quanto (39,9), etc., etc. II note les variétés orthographiques
(venefici pour benefici 22,1 1), celles des noms propres, qui sont
parfois très fantaisistes (21,29 ; 23,6 ; 24,8 ; 40,3 ; etc.). Les
feuillets de Paris contenant une partie du Contra ludaeos
viennent encore une fois confirmer les résultats de cet examen
et l'on peut dire qu'en principe, Modius a voulu relever toutes
les différences entre F et l'édition de Barraeus et que celles
qu'il n'a pas relevées lui ont échappé ou qu'il les a considérées
comme tout à fait négligeables {^).
(') Ci-dessus^ p. ii, n. 2. Kroymann dit que la collation mérite
toute confiance.
(^) Il arrive souvent que F est en désaccord avec Barraeus, mais
d'accord avec P.
(^) Voyez ci-dessus, p. ii, n. 2. Kroymann dit que la collation
n'est pas absolument complète,
28 INTRODUCTION
2. L'ÉDITION DE René L. de la Barre. — Cette édition
sera donc d'un précieux secours et fournira souvent les leçons
de F. En principe, le silence de Modius équivaut à l'affirmation
de la conformité entre F et De la Barre. Nous désignons par ""F
les leçons supposées de F que nous tirons de Barraeus.
On comprend qu'il subsiste toujours un certain doute sur
l'authenticité de ces leçons. On peut toujours se demander si
Modius, qui a relevé tant de variantes, n'a pas laissé échapper
celle dont il s'agit, ou s'il ne l'a pas négligée de propos déli-
béré, la trouvant insignifiante.
Quand Modius a relevé une variante dans le mot voisin,
il devient à peu près sûr qu'il n'y en avait pas à relever dans
le mot dont il s'agit. Ainsi, au ch. 40,14, Barraeus a : cauponis
et lupanaribus operati Q). Modius note : Lupanaribus operati]
ms /. operantibus. Si le Codex Fuldensis avait eu caiiponiis{P),
au lieu de cauponis, il est à peu près certain que Modius aurait
relevé cette variante. Au chap. 8,7, Barraeus a : item partis
qui sanguinis viruleniiam conligat. Modius relève la variante
sanguinis iurulentiam et ne touche pas à qui ... conligat. P a :
item panis, quo sanguinis iurulentiam conligas, ce qui convient
admirablement au contexte. Et pourtant nous tenons pour
certain que F avait qui ... conligat, parce que Modius relève
une variante entre ces deux mots. Les cas de ce genre sont très
nombreux.
Et cependant nous n'oserions pas pousser ce principe jus-
qu'au bout. En effet, nous avons un indice qui prouve que
Modius a considéré comme négligeables certaines différences,
peu importantes d'ailleurs. Au ch. 16,8, nous lisons : Omnibus
diis] ms. semper habet Deis, et Dei : non DU. Or, il aurait pu
faire cette observation plusieurs fois avant le ch. 16 ; il avait
négligé jusque-là de noter cette différence de forme. Il est
probable qu'il a cru pouvoir passer sur d'autres variantes.
(}) Cauponiis dans P, de la forme cauponium, qui serait unique
dans les auteurs (voy. le Thés. l. L, \\\, 657), peut être une faute de
copiste, comme naufragiis pour naufragis (39^ 6), et 3,\x contraire,
paedagogis pour paedagogiis (13^9), etc.
INTRODUCTION 29
comme il l'a fait dans le Contra ludaeos. Nous avons pris soin
de recueillir au bas des pages, en petits caractères, les leçons
de Barraeus non conformes à P, que Modius nous a paru avoir
négligées, comme insignifiantes. Dans un grand nombre, il
ne s'agit que de l'ordre des mots ; d'autres sont évidemment
fautives et P fournit la correction à faire.
VI. Reconstitution de la tradition spéciale.
Il ne suffit pas de reconstituer le Codex Fuldensis ; il faut
s'en servir pour reconstituer la tradition qu'il représente, en
d'autres termes, il faut le corriger. En effet, aussi bien que P,
F contient beaucoup de fautes.
1. Utilité de P pour corriger F. — Or, pour corriger F
nous pouvons avoir recours à P, mais seulement dans une
certaine mesure, car il est contraire à notre but de les fu-
sionner.
Nous avons admis que F et P représentent deux traditions
très différentes de V Apologétique, sans vouloir rechercher,
pour le moment, quelle est leur origine. Il a suffi, pour nous
en convaincre, de considérer les variantes nombreuses qui les
distinguent depuis le commencement jusqu'à la fin. Envi-
sagées de notre point de vue, ces variantes se divisent en deux
classes : les unes sont intentionnelles et les autres sont acci-
dentelles.
Variantes intentionnelles. — Ce sont en grande partie des .
leçons qui, tout en différant complètement sous le rapport
de l'expression et même de la pensée, sont admissibles les unes
et les autres ou dénotent une intention évidente de modifier
le texte : elles forment en quelque sorte des doublets. Chacune
des deux traditions a donc ses éléments propres qui la caracté-
risent, qui la distinguent de l'autre tradition et qui procèdent
non pas des accidents ordinaires auxquels tout texte est exposé
(distractions et erreurs des copistes successifs, etc.), mais d'une
intention bien arrêtée de remanier le texte, de lui donner une
forme nouvelle.
Si l'on veut — comme nous le faisons — réserver la question
30 INTRODUCTION
de l'origine (l'un des deux textes procède-t-il de l'autre, qui
serait le texte primitif, ou procèdent-ils tous les deux d'un
même texte primitif ?), si l'on veut se borner à rétablir, autanf
que possible, chacune des deux traditions dans son intégrité,
pour pouvoir ensuite les comparer l'une à l'autre, il faut
se garder de remplacer les éléments propres à l'une par les
éléments propres à l'autre. Certains vices de f5ensée et de
style peuvent trahir un remanieur trop peu familiarisé avec
les écrits de Tertullien ; ils peuvent être le signe d'un
remaniement maladroit, méconnaissant la pensée et le style
de l'auteur.
Ces éléments distinctifs sont des remaniements ou retouches
dans l'une des deux traditions, si l'une procède de l'autre.
Ils peuvent être des remaniements dans l'une et dans l'autre,
si toutes les deux procèdent d'un même texte primitif ; mais,
dans ce cas, il arrive plus souvent que l'une des deux ait con-
servé le texte primitif. On voit que nous ne pouvons pas y
toucher, même s'ils prêtent le flanc à la critique, puisque nous
ne voulons pas faire autre chose que reconstituer la tradition
de Fulda avec toutes ses particularités, avec ses qualités et
ses défauts.
Variantes accidentelles. — A côté de ces variantes qu'on
peut appeler intentionnelles, puisqu'elles procèdent de l'in-
tention de modifier le texte, il y a de nombreuses variantes
accidentelles. Ce sont les leçons entachées d'une faute, qui ont
pour cause les distractions et les erreurs des copistes succes-
sifs. Chose curieuse, soit dit dès maintenant, ces leçons fau-
tives ne sont que rarement communes à F et à P, et c'est
encore une preuve évidente que F et P représentent des tra-
ditions tout à fait distinctes.
Avant de mettre en parallèle les deux traditions, il faut
d'abord les purger l'une et l'autre de ces fautes que l'inatten-
tion ou l'ignorance des copistes successifs ont accumulées
dans F comme dans P ; car l'un et l'autre ont beaucoup souf-
fert de l'injure du temps ou des copistes.
Or, dans ce travail d'épurement, il y a plusieurs cas où P
peut et doit venir au secours de F, comme F peut et doit venir
en aide à P. La comparaison de l'un avec l'autre nous rendra
un double service : elle nous mettra souvent sur la voie
INTRODUCTION 31
pour découvrir une faute ou elle confirmera l'existence d'une
faute déjà découverte, et elle fournira l'émendation, la leçon
authentique.. Elle facilitera le diagnostic et elle indiquera le
remède.
C'est un travail très délicat de faire le départ entre les
variantes intentionnelles et les variantes accidentelles. Aussi
vaut-il mieux n'écarter du texte de chacune des deux tradi-
tions que les variantes qui sont évidemment fautives et qui
résultent sûrement d'un accident. Quand on peut hésiter sur
la cause et sur l'origine d'une variante, il est préférable de
ne pas la bannir du texte et de la réserver à l'étude compara-
tive des deux traditions considérées dans leur ensemble.
Mais ce n'est pas seulement P qui vient en aide pour corriger
F ; nous avons certains témoins indirects du texte de V Apolo-
gétique qui sont antérieurs à F et à P et que nous pouvons
interroger, pourvu que nous le fassions avec discrétion.
2. Utilité des témoins indirects pour corriger F. —
Dans les premiers mois de l'année où TertuUien écrivit son
Apologétique (an 197 après J.-C), il avait composé son traité
Ad nationes i^). Dans V Apologétique, adressé aux gouverneurs
des provinces, il reprend souvent les idées de ce traité, sous
une forme très peu différente. S'il était établi que F se rap-
proche plus du traité Ad nationes que P, on pourrait y voir
la preuve que F est antérieur à P, qu'il représente une tradi-
tion antérieure à celle de P, à moins qu'on n'admette que F
a été revisé après coup sur le traité Ad nationes. Mais pour
pouvoir raisonner de la sorte, il faut commencer par établir
le texte de F et celui de P.
Avons-nous donc à tenir compte ici du témoignage de VAd
nationes pour établir la tradition de Fulda ? — Non, certes ;
car nous ne voulons pas rétablir le texte le plus ancien (nous
ne sommes pas encore censé le connaître, nous ne savons pas
C) W. Hartel, Patrist. Stud., II, p. 15. A. Harnack, Chronologie,
n, p. 258. M. Schanz, Gesch. der roem. Litt., VIII, p. 286 et 289.
P. Monceaux, Hisi. litt. de r Afrique ehrétienne, I, p. 212-219.
32 INTRODUCTION
encore si c'est F ou si c'est P) ; nous voulons seulement réta-
blir la tradition de Fuida dans son intégrité, c'est-à-dire telle
qu'elle était dans les manuscrits non entachés de fautes acci-
dentelles.
Il faut en dire autant de la traduction grecque de V Apolo-
gétique, dont Eusèbe (i) nous a conservé cinq fragments (2),
des passages que Rufin a empruntés à l'original latin (^), de
ceux dont S. Cyprien (*), l'auteur du traité Qnod idola dii non
sini (S), et Lactance (^) ont fait leur profit, de celui que VAlter-
(^) Dans son Histoire ecclésiastique^ écrite sous Constantin et
arrêtée en l'an 323 CEd. E. Schwartz), Eusèbe cite cinq fois textuel-
lement une traduction grecque de l'Apologétique. Ceiie traduction
n'était pas d'Eusèbe, ni de Tertullien (qui donna une édition grecque
de trois de ses ouvrages). Harnack pense qu'elle fut publiée en
Orient, peu après la publication de l'original latin, avant le milieu
du III^ siècle. Ad. Harnack^ Die griech. Ueberseizung des Apol. Ter-
tullians (Texte und Untersuch., VIII, 4, 1892, p. 1-36).
(2) Voy. Apol., 2, 6-7 (Pline et Trajan) et 5, 1-7 (les empereurs
et le christianisme). Sur le premier passage, comparez aussi S. Jé-
rôme, Chronique d'Eusèbe, ad ann. 2134 (Ed. A. Schoene, 2, p, 165).
(3) Rufin, né vers 345, mort en 410, traduisit en latin l'ouvrage
d'Eusèbe. Il connaissait le texte latin de V Apologétique et tantôt il
reproduit l'original (2, 2, 5-6; 2,25, 4 ; 3, 20, 7), tantôt il suit la
paraphrase d'Eusèbe (2,2, 2-3), tantôt il se borne à renvoyer le
lecteur latin à Tertullien (3, 33, 3 ; 5, 5, 7).
(*) W. Hartel n'a malheureusement pas relevé les passages très
nombreux oii S. Cyprien s'inspire de Tertullien. S. Cyprien ne pas-
sait pas un jour, dit S. Jérôme (De vir. ill., 53) sans lire Tertullien,
et il disait à son secrétaire : Da mngistrum ! Les imitations de
Y Apol, sont surtout visibles dans le traité Ad Demetrianum.
(5) Edité avec S. Cyprien, par W. Hartel {Corpus scr. eccL, vol.
3, I, p. 19-31.
(6) Ed. Sam. Brandt, Index auctorum, p. 265 {Corpus scr. eccL,
vol. 27, 2).
INTRODUCTION 33
catio Heracliani O a presque textuellement reproduit, enfin
des emprunts d' Isidore de Séville (2),
Ce serait défigurer la tradition de Fulda que de la modifier
uniquement pour la rendre conforme à ces témoignages.
Au contraire, quand sera venu le moment de comparer F
et P, nous pourrons tirer argument de leur ressemblance plus
ou moins grande avec les témoins indirects du texte de V Apolo-
gétique.
A cette règle il y a une exception. Les témoins indirects,
de même que P, peuvent nous mettre sur la voie d'une faute
de F, et, dans une certaine mesure, confirmer l'existence d'une
faute constatée, appuyer la correction fournie par P ou
fournir la correction, si P ne la fournit pas.
Les exemples vont montrer clairement ce que nous venons
de dire.
Les fautes accidentelles dont P et les témoins antérieurs
nous aideront à débarrasser F peuvent être divisées en plu-
sieurs catégories :
1° Les omissions accidentelles ou lacunes ;
2° Les additions accidentelles ;
3° Les transpositions accidentelles ;
40 Les autres leçons fautives qui procèdent d'un accident.
Nous allons passer ces fautes en revue : nous laisserons de
côté tout ce qui peut être regardé comme une retouche faite
avec l'intention bien arrêtée de modifier le texte primitif ;
nous relèverons, au contraire, tout ce qui peut résulter
d'une distraction ou d'une méprise des scribes successifs,
tout ce qui peut être considéré comme accidentel.
(') Voy. ApoL, 2T, 12-14.
(^) Isidori Etymologiarum sive Originum libri XX. Ed. W. Lind-
say. Oxford, 1911. Cf. Max Klussmann, Excerpta Tertullianea in
Isidori Etymologiis. Hambourg, 1892. Voy. surtout : Apol. 6, 7 =
Etym., 5, 27, 35. Apol. 18, 5 = Etym., 6, 3, 5. Apol. 48, 14 =
Etym.,19,6,4. Klussmann a oublié Apol. 21, 8 = Etym. 8,11, 35.
34 INTRODUCTION
On comprend, qu'entre ce qui est certainement accidentel
et ce qui est sûrement intentionnel, il y a place pour des diffé-
rences de lecture dont l'origine est douteuse. Les variantes
de cette sorte sont très nombreuses. Nous le répétons, elles
ne pourront être utilement discutées que dans la comparaison
entre les deux traditions qui sera réservée à notre étude sur
la double tradition manuscrite.
EXAMEN DU CODEX FULDENSÏS
Quae a librariis dormitantibus aut addita sunt aut
mutata. Hikronymus, Epist. ad Damasum.
OMISSIONS ACCIDENTELLES OU LACUNES
VII. Lacunes de F.
Le Codex Fuldensis contient un certain nombre de
lacunes. Appelons ainsi les omissions qui ne procèdent
pas d'une intention de remanier le texte, mais d'un acci-
dent. Ce qui les trahit presque toujours, c'est un vide
manifeste et intolérable dans la pensée ou dans la forme.
Dans certains passages, on peut encore reconnaître
la cause évidente de l'erreur et voir comment l'accident
s'est produit. Le copiste a fait ce que L. Havet (§ 441)
appelle « un saut du même au même », c'est-à-dire d'une
lettre à la même lettre, d'une syllabe à la même syllabe
ou d'un mot au même mot. C'est une des variétés de
l'haplographie.
La chance d'omission est minima (§ 442), quand les
deux portions de textes semblables sont en contact.
Dans ce cas, on peut appeler « dédoublement » le saut du
même au même.
On trouve généralement dans P les éléments qui man-
quent dans F pour combler le vide.
N. B. Nous mettons entre crochets obtus ( ) les éléments
restitués. Nous les empruntons à P, sauf avis contraire.
36 LACUNES DE F
13,9 paedagogi<i>s
39,15 cenae Serapiac<ae>
41,6 maie <e>veniunt
Voici des passages où il y a omission de plusieurs mots :
30,1 et super omnes <deos. Quidni ? cum super omnes}
homines
37,6 subfudisset pudor<e> utique dominationem vestram
<tot taliumcumque civium amissio, immo etiam et ipsa destituti-
one punisset. Procul dubio expavisset ad solitudinem vestram},
ad silentium rerum etc.
— 13,9. Ici, le scribe a pu aussi confondre deux mots
différents.
— 39,15. Serapiae F. — Le scribe, lisant Serapiaeae,
n'aura écrit ae qu'une fois.
— 41,6. mala eveniunt P. — Cf. 40,9 : non ab his evenire.
Adv. Marc, 2,6, p. 343,7 : nihil a Deo malt evenire potuisse.
— 30,1. Le copiste a sauté du premier omnes au second.
La ressemblance entre omnes et homines a pu contribuer à le
troubler. — Les mots rétablis d'après F rendent le sens plus
clair. Quidni ? cum est une tournure familière à TertuUien.
Voy. 22,1 et 46,5. Cf. Hartel, Patrist. Stud., I II, p. 10.
— 37,6. Si les chrétiens avaient déserté l'Empire, dit
TertuUien, la perte de tant de citoyens aurait été pour les
Romains à la fois une honte et une punition. Les Romains
auraient été épouvantés de voir l'Empire désert et ils ne
seraient plus assez nombreux pour résister à leurs ennemis
(§ 7-8). Les mots omis par F sont nécessaires au sens : ils
annoncent le développement qui suit. — Pudore a perdu son e
final, peut-être parce que le scribe, trouvant la phrase déjà
mutilée dans son original, a voulu donner un sujet à subfu-
disset. Mais on ne dit pas pudor subfundit aliquem ; on dit :
subfundere aliquem pudore ou rubore ; de là : subfundi (pudore),
subfusus et subfusio. On dit aussi rubor subfunditur alicui
(Liv., 30, 15,1). Au ch. 4,9, il y a un jeu de mots. Hoppe,
Syntax, p. 139.
LACUNES DE F 37
39.6 et pueris ac <puellis re ac> parentibus destitutis
46,11 non posset <et doleret, si non esseV) potitus
Nous croyons qu'on peut ajouter :
14.7 qiiercum et (hircum et} canem
Pour comprendre que le scribe ait sauté du premier
vestram au second (37,6), bien que le second fût placé
à une telle distance du premier, on doit supposer que
vestram était deux fois en évidence au début ou à la fin
d'une ligne, ou encore que le deuxième vestram était
placé verticalement au-dessous du premier. Dans l'un
et l'autre cas, on peut mesurer la longueur des lignes
dans l'original. La lacune comprend 106 lettres, c'est-à-
dire quatre lignes de 26 ou 27 lettres ou deux lignes de
53 lettres. Il est plus probable que les lignes du modèle
étaient de 53 lettres environ ; car, plus le deuxième ves-
tram était rapproché du premier, plus facilement le saut
de l'un à l'autre pouvait se produire.
Ce calcul va nous expliquer peut-être l'omission invo-
lontaire de trois autres passages qui pouvaient former
le contenu d'une ou de deux lignes :
— 39,6, L'omission est évidente.
— 46,11. L'omission, conditionnée par la ressemblance
de posset et de esset, est hors de doute, parce qu'il est resté
un mot de la proposition conditionnelle, le mot potitus, dont
la présence ne s'explique pas autrement. Il est vrai que Modius
ne donne pas potitus (il s'arrête à esset). De la Barre a esset
potius au lieu de esset potitus, mais c'est sans doute une faute
d'impression, car depuis Rhenanus on imprimait esset potitus.
— 14,7. Ici les mots hircum et ne sont indispensables ni
au sens ni à la grammaire ; mais 1) ils sont dans ?;2)Ad nat.,
1, 10, p. 79,18, témoigne en leur faveur, et 3) la cause de la
méprise du copiste saute aux yeux.
38 LACUNES DE F
4,1 in Christianis non esse quae in se non nesciunt
<esse, simul uti erubescant accusantes, non dico pessimi
optimos), sed et iam ... (52 lettres)
15,1 et Dianam flagellatam <et lovis mortui testamen-
tum recitatum et très Hercules famelicos inrisos >.
{63 lettres)
21,19. Et tamen subfixus <multa mortis illius propria
ostendit insignia. Nam) spiritum
Voici maintenant des passages où l'existence d'un élé-
ment absent de F et d'ailleurs nécessaire au sens, est
attestée par une autorité plus ancienne que nos manus-
crits, par la traduction grecque de l'Apologétique, que
cite Eusèbe, et par Rufin :
5,1 iam <deo> propitius esse
5,3 nisi (grande) aliquod bonum
— 4,1. Junius dit déjà : Ubi versus omissus videtur. En
effet, sed et iam (ou sed iam P) demande un premier membre,
non dico (cf. 40,5 ; 43,2). Sur in se non nesciunt, voy. plus loin,
Appendice I.
— 15,1. C'est un quatrième et un cinquième titre de mimes.
Assurément, trois auraient suffi ; mais, si Tertullien n'en
avait mis que trois, on n'aurait guère songé à en ajouter deux
autres. Du reste, ces titres ne sont pas mentionnés ailleurs.
— 21,19. Ce passage est nécessaire pour expliquer la valeur
que Tert. attribue aux deux faits qui signalèrent {propria)
la mort du Christ, qui sont propres à cette mort, et qui sont
introduits par Nam. Il ne comprend que 43 lettres. Peut-être
le mot spiritum complétait-il la ligne. Sa ressemblance exté-
rieure avec subfixus a pu suffire pour tromper le scribe.
— 5,1. Eusèbe, 2, 2, 5 : 9e^, ['>v5u e^va'.. Rufin, ib. : iam
deo propitius esse. Le sens exige deo.
— 5,3. Eusèbe, 2, 25, 4 : e^ jj./; (Jiéya v. âyaOov r\y. Rufin, ib. :
non nisi grande aliquod bonum. Le texte de Junius n'est pas
LACUNES DE F 39
Malheureusement, il arrive souvent que la cause de
l'accident nous échappe, sans que nous soyons avertis
par un témoignage ancien. Cependant, dans beaucoup
d'autres passages, nous pouvons établir l'existence d'une
lacune avec certitude.
Si P possède un ou plusieurs mots qui manquent dans
F, c'est un indice qui ne peut nous fournir qu'une pré-
somption, mais une présomption qui n'est pas négligeable.
Si un indice interne, c'es-t-àdire un vice grave de sens
ou de syntaxe, vient confirmer cette présomption et s'il
suffit d'intercaler dans F les éléments fournis par P pour
porter remède au mal, l'existence d'une lacune devient
certaine.
Voici des passages qui nous paraissent être dans ce cas :
1,6 quanti <et> denotamur
1,9 malunt <nescire> qui<a>
— Adeo <quod nesciunt), praeiudicant
fort clair. Barraeus a : non nisi aliquid bonum grande. La
collation ne reproduit que aliquid grande et met à sa place
aliquod. F n'aurait donc pas grande. Mais il se peut qu'il y
ait une erreur de transcription et il est probable que la va-,
riante ne porte que sur aliquid.
— 1,6. Tertullien aime à joindre et à un corrélatif pour
insister sur le rapport qui existe entre les deux propositions.
Voy. P. Henen, Index verborum quae Tert. Apol. continentur,
p. 47.
— 1,9. Malunt reprend amant ignorare du § 8, qui est
trop loin pour qu'on puisse sous-entendre ici ignorare. Le sujet
de malunt est le même que celui de promovent, amant, gau-
deant {homines). Il faut donc quia et non (//) qui.
— Quod nesciunt est nécessaire pour former antithèse avec
51 sciant. P a : quod nesciant^ déjà corrigé par les premiers
éditeurs,
40 LACUNES DÉ F
2,12 ergo nos innocentissimos <iudicatis>
3,3 in suffragium <inpingunt> enarrantes : Quae
4,10 Quas neque annorum <numerus> neque condito-
rum dignitas
7,3 simul atque <adparuit>, inimica est
10,2 statim, ut <illos non esse) cognovimus
16,7 Sed et Victorias adoratis, cum trophaeis <cruces>
intestina sint.
— 2,12. Lacune évidente : ce verbe est indispensable.
— 3,3. F a enarrantes à la place de inpingunt. Il faut, en
tous cas, un verbe principal qui régisse in suffragium, et l'on
peut lire : in suffragium inpingunt enarrantes : « Quae mulier...
Cependant enarrantes paraît superflu et ressemble à une glose
complétive. Cf. De an., 47, p. 378, 34 : praeter enarrationem
facultatis.
— 4,10. On ne peut pas bien dire : annorum dignitas. —
Remarquons que le relatif quas désigne les lois en général
et non les lois à réformer. // est pris dans un sens plus étendu
que l'antécédent. Cette sorte de licence syntaxique n'est pas
rare. On la trouve dans Cicéron {Pro Mil., 26,69 ; De kg.,
3, 20, 47), Salluste {lug., 6,3), Sénèque {De otio, 3,1 ; 6,4.
Ep.43,3; 53,1 et 5; 59,6), Juvénal (5,43-45 ; 155), etc. Voy.
J. Vahlen, Opusc. acad., I, p. 67-68 ; R. Waltz, ad Sen., De
otio, 3,1 ; Paul Thomas, dans le Bull, de l'Acad. roy. de Belg.,
Classe des Lettres, 1914, p. 24.
— 7,3. Cette idée revient 14,7 et 46,6. Le verbe est indis-
pensable.
— 10,2. et statim cognorimus F; et statim cognovimus
Br ; ex quo illos non esse cognovimus P. — F est fort corrompu
ici : et (pour ut) a été mis avant statim ; de plus, illos non esse
a été omis.
— 16,7. cum in tropheis cruces intestina sint tropheorum
P. — Ad nat., 1, 12, p. 83,13 : Victorias (Victoria A) ut nu-
mina, et quidem augustiora, quanto laetiora, veneramini,
LACUNES DE F 41
17.4 vultis ex animae ipsius testimonio <comprobemus>
17.5 cum tamen resipiscit ... <et> sanitatem suam
patitur
18,5 grammaticorum <tunc> probatissimi
21,4 docebantur <de> promerendo Deo
21.10 Hune enim <Zeno> déterminât
21.11 propriam substantiam <spiritum> adscribimus
Constructione (con ione A) quo (quid A) melius extollant,
cruces erunt intestina quodammodo tropaeorum (...paeum
A). Itaque in Victoriis et cruces (cruce À) colitis (colit A).
Voy. Hartel, Patr.Stud., Il, p. 59, notes. Kroymann, Quaest.
Tert. ait., p. 40, et le chap. XIII: Transpositions. — Les
trophées les plus simples sont formés d'un pieu surmonté
d'une barre transversale (en forme de croix), auquel on
suspendait les armes des vaincus. Ces trois textes ne se com-
prennent que si les trophées, monuments des victoires,
portaient aussi le nom de Vidoriae. « Vous adorez aussi les
Victoires, bien que les trophées (c'est-à-dire les Victoires)
aient pour entrailles des croix ». S'il en est ainsi, le mot
cruces manque dans F. L'Agobardinus semble avoir le gén.
grec tropaeum (TpoTiaîwv).
— 17,4. Le sens et la construction exigent comprobemus.
— 17,5. 18,5. 21,4. 21,15. 24,8. L'omission en apparence
inconditionnée d'un mot court est fréquente. Elle a souvent
pour cause le voisinage du même mot ou d'un mot semblable.
L. Havet, § 420.
— 21.10. P a Zeno. De même au ch. 50,9. Il a Zenon au
ch. 46,13. Les deux formes sont fréquentes. Neue-Wagener,
Formenlehre, I, p. 246 et 249 (éd. 1, p. 158 et 160). Les noms
propres sont exposés à toutes sortes d'accidents. Voy. 46,15.
— 21,11. Spiritum nous paraît nécessaire à cause de nam
et Deus spiritus. Le sens est : Le Verbe est esprit ; il a été
proféré par Dieu... ; car Dieu aussi est Esprit. Nous main-
tenons adscribimus {inscribimus P), car Tert. aime à employer
adscribere avec deux accusatifs. Voy. l'Appendice I. Mais
42 LACUNES DE F
21,15 paternae potestatis acceptae <et> divinitatis
exsertae
22,6 pabula ... imaginibus <oblata>
23.6 medicinarum <demonstrator>
24,8 <per> ipsam quoque Italiam
31,3 ut <omnia> tranquilla sint vobis
35.7 sed <haec> Christianus
il dit aussi : adscribere ou inscribere aliquid alicui « attribuer,
assigner qqch. à qqn. » Adv. Marc, 1,7, p. 299,11 : id ergo
summum magnum, quod Deo adscribimus. Ibid., 1,3, p. 294,21 :
quam ut et illi proprium divinitatis adscripseris. Etc., etc. De
an. 19, 310, p. 15 : sed nos cor por aies quoque illi (se. animae)
inscribimus limas.
— 21,15. Les mots paternae potestatis acceptae et manquent
dans P. — Havercamp regarde paternae potestatis acceptae
comme une glose. Cependant ces mots paraissent être bien
à leur place ici et l'omission d'un mot court tel que et est
fréquente. Sur l'idée, voy. Psalm.,2,8. loann., 5,22. Act. apost.,
10,32. Ad Rom., 1,4. Ad Hebr., 1,5; 5,5. Apoc, 2,27: dabo illi
potestatem super gentes.
— 22,6. oblata est exigé par le sens et par la grammaire.
— 23,6. medicinarum ne peut être complément de sub-
ministrator, qui a pour complément vitae. Ici F et P ont des
lacunes différentes, car P n'a pas vitae. Voy. plus loin, chap,
IX sur 1,11.
— 31,3. Ce passage fait allusion à Paul, ad Tim., I, 2, 1-2,
qui recommande de prier pour les rois et pour toutes les auto-
rités, ut quietam et tranquillam vitam agamus. F a.: ut tran-
quillae sint vobis. On pourrait suppléer res. Sali., Cat., 16,5 :
tutae tranquillaeque res omnes. Liv., 38, 28, 1 : in ceteris pro-
vinciis tranquillae res fuerunt.
— 35,7. P a haec et F a sed. Haec est nécessaire et sed est
utile pour marquer l'opposition, Il faut donc lire ; Jiaec ou
Sed haec,
LACUNES DE F 43
39,6 <nec> potaculis nec ingratis voratrinis
45,1 ab m<con>temptibili doctore
46,15 quam <Plato> Dionysio
47.5 alii incorporalem adseverant, <alii corporalem)
47.6 alius <ex> igni
48,4 et <quod> omnino
49,3 inpunitis ut <in>noxiis
50,9 acerba<ta> tantum
Les lacunes que nous venons de constater dans F ne
peuvent pas être mises sur le compte de la tradition de
— 39,6. Nec est nécessaire ; l'asyndeton n'est pas de mise
ici.
— 45,1. F a intemtibili. Le signe abréviatif de con paraît
avoir été omis.
— 46,15. Voy. 21,10.
— 47,5. C'est l'opinion des Stoïciens qui manque. Elle est
nécessaire. Les opinions différentes sont d'abord groupées
deux à deux et puis une à une. De praescr., 7,4 : et ubi materia
cum deo aequatur, Zenonis disciplina est.
— 47,6. Il faut ex igni, comme ex atomis et ex numeris.
— 48,4. Sans quod, la phrase est boiteuse.
— 49,3. inpunitis exige innoxiis. Il faut traduire : « Car
nos croyances sont semblables à (celles de) beaucoup d'autres,
à qui vous n'infligez aucune peine quand ils sont accusés au
sujet de pareilles choses, (et qui sont) impunis parce qu'ils
sont inoffensifs ». Il semble que multis aliis soit le masc. (com-
paraison abrégée pour multomm aliorum opinionibus). Le
texte de P n'a pas cette comparaison abrégée. Accusare
aliquem in aligna re est déjà dans Cicéron. Thés. l. /., I, 351, 77.
— 50,9. La scribe de F n'a écrit qu'une fois les lettres ta. —
Acerbare, « rendre amer », et de là « aggraver » est employé
assez souvent depuis Virgile (Aen., 11, 407) par les imitateurs
de Virgile et en prose depuis TertuUien. Voy. le Thés. l. /.,
S. V. Ici acer bâta nous semble exigé par les mots intercalés
44 LACUNES DE P
Fulda : elles sont accidentelles. Elles sont assez nom-
breuses et quelques-unes sont assez importantes : ce qui
prouve combien la tradition spéciale a souffert du temps.
On peut même se demander s'il n'y a pas d'autres pas-
sages où F doit être complété par P et par les témoins
antérieurs à l'un et à l'autre, sans que la grammaire et le
sens trahissent l'omission.
VIII. Lacunes de P.
Comparé à P, F ne présente pas seulement des lacunes,
mais aussi de nombreuses additions et la question se pose
aussitôt si ces additions sont voulues ou si P a omis acci-
dentellement ces éléments. Dans le premier cas, elles
constituent des éléments distinctifs de F ; dans le second
cas, il faut les rétablir dans P et cette différence entre les
deux traditions disparaît.
Or, il en est de P comme de F : il contient des lacunes
nombreuses, dont une partie est certaiiPiement ou très
vraisemblablement imputable à des accidents.
N, B. Ici nous mettons entre crochets obtus <( )> les éléments
qui manquent dans P et qui sont fournis par F.
Voici d'abord des exemples où les deux portions de
textes semblables, dont l'une a été sautée, sont en contact.
entre flagella et acerbata : la flagellation des jeunes Spartia-
tes, cruelle par elle-même, est rendue plus cruelle, aggravée,
irritée, par la présence de leurs proches qui les exhortent
encore à les supporter courageusement,
LACUNES DE P 45
4,10 licet <et> damnent
7,7 et <ab> arbitris caveant
10,5 di<di>cit
19,5 subputa<to>riis
35,7 adpare<re>nt
38,5 noviss<im>e
42,5 ubi<ubi>
46,14 hos<pi>tibus
47,4 <in> incertum.
Voici deux exemples du « saut à distance », de finale
à finale ou d'un mot au même mot (Havet, § 456) :
21,19 non sclerunt : (ratione non deprehensa negave-
runt)
— 4,10. et = etiam. Junius a imprimé et damnentur, mais
Br a et damnent. Ce cas est douteux, car la répétition de la
syllabe et. dans F s'expliquerait par la raison inverse. Mais
le sens est mieux satisfait si l'on admet et.
— 10,5. didiscit F ; didicit M. Ici, M qui appartient à la
tradition commune, a mieux conservé le texte.
— 19,5. 38,5. 46,14. Dans ces passages, on peut admettre
que ce sont des mots semblables qui ont été confondus l'un
avec l'autre.
— 35,7. pareret F ; adparent P. L'indic. présent, au lieu
du mode de la non-réalité, ne paraît pas convenir ici. Oehler
compare 23,19, qui n'est pas semblable. F et P ont subi des
accidents différents. Dans F, on pourrait lire parèrent, car
Tertullien dit parère pour adparere. De resurr., 14, p. 44, 1 :
totumporro hominemex utriusque substantiae concretione parère.
— 42,5. ubiubi ou ubicumque, avec le sens du pronom
indéfini {ubivis, ubique) est nécessaire. F a ubicumque.
~ 47,4. Cf. Ad. nat., 2,2, p. 96,2 : per quod in incertum
abiit.
— 21,19. Ces mots sont nécessaires, car c'est negaverunt
46 LACUNES DE P
37,4 et <orbem iam et) vestra omnia implevimus
On trouve un autre exemple du même accident dans M
seulement, mais pas dans P, ni dans F :
32,3 : quod Deus volait, (ideoque et salvum volumus
esse quod Deus volait}, et pro magno...
L'omission peut s'expliquer par l'influence suggestive
d'une lettre, d'une syllabe voisine ou d'un mot voisin :
qui amène et tamen habetis. Il faut ponctuer comme nous
l'avons fait et traduire : « Ce prodige fut sans aucun doute
pris pour une éclipse du soleil par ceux qui ne surent pas qu'il
avait aussi été prédit au sujet de la mort du Christ : n'ayant
pas compris la raison du fait, ils la nièrent. Et pourtant vous
trouvez cet accident mondial consigné dans vos archives ».
c'est-à-dire que, dans vos archives, ce fait est consigné comme
un prodige observé sur la terre entière {super universam terram,
Matth.,27,5. Marc, 15,33. Luc, 23,44) et non comme un phé-
nomène naturel, comme une éclipse ordinaire, visible en cer-
tains lieux. De cultu fem., 1,3 : post eum casum orbis omnium
rerum abolitorem (se. cataclysmum, le déluge). L'abl. abs.
ratione non deprehensa, pour rationem non deprehensam, ne
doit pas étonner dans Tertullien. Cf. 34,4. Draeger, Hist. Synt.,
p. 808 ss. — Relatum est un terme technique : relatum in
tabulas publicas (Cic, Pro Sulla, 15,42). Tert. dit deux fois
que Pilate fit rapport sur les faits à Tibère et il suppose que
ces rapports sont conservés dans les archives de l'Empire
(ch. 5,2 et 21,24).
— 37,4. Les mots et orbem iam sont nécessaires. Tert.
vient de dire : quam totius orbis (se gens). Les chrétiens sont
déjà répandus sur la terre entière ; ils ne remplissent pas seu-
lement vestra omnia, c'est-à-dire le monde romain. Tert.
insiste souvent sur ce fait que le christianisme est devenu la
religion de tous les peuples, y compris les peuples barbares.
Adv. lud., 7 et 12. De cor., 12. Ad. nat, 1,8, p. 72,17 : si
quidem non uila gens non Christiana.
LACUNES DE P 47
9,18 uti asparsum genus P ; ut ita spersum genus F
24.2 <re ista> resultabit
42.3 navigamus et nos vobiscum et <vobiscum> mili-
tamus
Il y a plusieurs passages où l'on peut soupçonner
l'omission involontaire d'une ou de deux lignes. En
voici un (i) :
21,17 se esse <filiuni illum, et olim a Deo praedica-
tum, et ad omnium salutem naturn,) Verbum Dei illud
primordiale ... (54 lettres)
(^) Il y en a d'autres. Voyez 34,4 : Sdo ie isto noinine, etc. Il faut
lire probablement Sciio, comme esta et desine. Mais cette phrase
(103 lettres) ne fait que délayer, d'une manière peu conforme à la
concision ordinaire de Tertullien^ la phrase qui précède : Maleiic-
tuvi est... Voy. Appendice I. — 37; S : Possumus dinumerare , etc.
(58 lettres). Dans ces deux cas, on ne saurait dire s'il y a addition
intentionnelle dans F ou omission involontaire dans P. — Sur 7,13:
quod dicitur semper, etc., voy. plus loin.
— 9,18. Le sens exige: ut ita sparsum genus. En divi-
sant VTiTASPARSVM, le scrlbc de P aura trouvé deux mots :
uti asparsum, et il aura supprimé le T comme parasite. M
en a fait : uti aspersum.
— 24,2. Tert. préfère le neutre {isto) ; mais voy., par
exemple, Adv. Prax., 31 : Ceterum ludaicae fidei ista res,
sic unum Deum credere, ut...
— 42,3. Le deuxième vobiscum n'est pas indispensable,
car ie premier peut servir pour tous les verbes {duo xoivoù).
— 21,17. Junius donne : filium et illum, etc. — Ces mots
sont bien à leur place ici. Cf. § 7 : Christus ille filius Dei. Les
mots olim a Deo praedicatum renvoient également à a Deo
praenuntiabatur du § 7, déjà rappelé au § 14 : «/ rétro semper
praedicabatur. Les mots et ad omnium salutem natum rappellent
Huius igitur gratiae, etc., du § 7. Voy. § 16 : consecuturi
48 LACUNES DE P
L'omission des mots fournis par F paraît accidentelle
dans les passages de P qui suivent :
1,1 <in> ipso vertice civitatis
1,1 <os> obstruit defensioni
1,10 sed non ideo, inquit, bonum <praeiudicatur> quia
salutem. De carne Chr., 14 : Salas hominis fuit causa, scilicet
ad restituendum quod perierat. Homo perierat, hominem resti-
tui oportuerat. Etc. Les mots et olim a Deo praedicatum sont
repris par le traité Quod idola, 13, sous cette forme : Itaque
mm Christus lesus secundum a prophetis ante praedictum...
— 1,1. L'omission de in devant l'abl. de lieu semble con-
traire à l'usage de Tertullien. Cependant elle est moins dure
après in aperto et edito. Cf. 7,\ : et (de) pabulo inde.
— 1,1. os obstruit defensioni signifie «ferme la bouche à
la défense », c'est-à-dire à l'accusé qui veut se défendre ou à
son avocat ; obstruit defensioni signifierait « fait obstacle à la
défense «, c'est-à-dire, ne permet pas à l'accusé de se défendre.
On verra au ch. 2,2-3 que les gouverneurs ne permettaient
pas aux chrétiens de se défendre eux-mêmes ni par le ministère
d'un avocat : ils fermaient toujours la bouche à l'accusé et
mettaient toujours obstacle à la défense. Les deux leçons
conviennent donc en ce qui regarde le sens. Mais l'usage gram-
matical n'admet pas obstruit defensioni. Tert. emploie plu-
sieurs fois l'expression os obstruere alicui (Adv. Marc, 4,12,
p. 456,9 ; 5,13, p. 621, 19) et il ne dit jamais : obstruere alicui
ni alicui rei. Voy. 4,3; 21,21; 27,1. De virg. vel., 15, p. 906 0. :
si temptationibus gradum obstruxerit. De praescr., 15,3 : hune...
gradum obstruimus. De paen., 6, 19 : obstructi. Virgile avait
dit : obstruere aures alicuius (Aen., 4,40) et Tacite, obstruere
mentes consiliis (Hist., 3,21). — Sur domesticis iudiciis ou
indiciis et sur tout ce § 1, voy. Appendice I.
— 1,10. On pourrait sous-entendre est, car Tert. aime
l'ellipse. Mais l'objection est dirigée contre l'affirmation qui
précède : adeo, quod nesciunt, praeiudicant id esse... Le verbe
praeiudicare doit être répété, et Tert. le répète aussi dans le
passage correspondant de Ad nat., 1,1, p. 59, 22.
LACUNES DE P 49
3,1 Ego <miror Lucium) Titium
3,4 <eiecit filium iam> subiectum
4.1 quae in se <non> nesciunt esse
4,12 nulla lex <vetat> discuti
6,10 <ipsum> adhuc, quod
9.2 <vivos> exposuit
9,9 nescio quid et sub Catilina <tale>
— 3,1. La lacune de P est évidente. Elle est trahie par le
sens et attestée par Ad nat., 1,4, p. 64, 14 : Ego miror Gaium
Seium gravent virum fadum Christianum. Il manque un verbe
(miror) et Lucius est nécessaire à cause des mots prudens
Lucius, qui suivent.
— 3,4. Lacune évidente. F fournit ce qui manque.
— 4,1. non, qui est dans F, est nécessaire au sens. Voy.
App. I.
— 4,12. vetat est indispensable au sens.
— 6,10. La locution ipsum quod revient dans P au ch. 15, 3.
Elle est très familière à Tertullien ; ici ipsum est, de plus,
nécessaire devant adhuc. Ad nat., 1,10, p. 15, 1 : sed et ipsum
quod videmini... custodire et defendere. Cf. De an., 19, p. 331 , 12 :
hoc ipsum ... quod natus est. Ibid., 57, p. 392, 7 : nihil magis
curans quam hoc ipsum excludere quod praedicamus. Adv.
Marc, 1,9, p. 302, 23 : ex hoc ipso quod. 1,24, p. 324,7 : ipsum
quod. 1,25, p. 325,22 : hoc ipso quod. 326,4 : ipsum illud adver-
sus quod. 2,3, p. 336,17 : iam hoc ipsum quod. 2,9, p. 347,8 :
ipsum quod. De pud., 3,4 : hoc ipso quod. 14,3 : nam et hoc
ipsum ... an. Adv. Prax., 9, p. 240,10 : ipsum quod pater et
filius dicuntur, nonne alius ab alio (alius} est. Etc. etc. August.,
De virg., 1 : Neglecta decoris cura plus placet, et hoc ipsum,
quod nos non ornamus, ornatus est.
— 9,2. vivos n'est pas tout à fait nécessaire, mais peut
être tombé à cause du voisinage de votivis.
— 9,9. taie est nécessaire pour déterminer nescio quid.
De an., 6, p. 307,17 : taie aliquid, opinor, ei accidit.
4
5Ô LACUNES DÉ P
9,15 adpetendo <Christiani>
11,3 possidentes scilicet <apud se>
16,11 quam <de> religione solis
17,5 Deum nominat hoc solo <nomine>
— 9,15. probarentur pourrait se passer de l'attribut Chris-
tiani. Il signifierait : « ils seraient mis à l'épreuve » (cf. 30,6).
Mais probarentur est ici opposé à negandi, se. essent, qui exige
Christiani. Tert. aime cette construction personnelle. Cf.
Scorp., 1, p. 146,11 : alios ignis, alios gladius, alios bestiae
Christianos probaverunt.
— 11,3. apud se, qui correspond à qui proprie possidebat,
au § 2, est nécessaire à l'antithèse.
— 16,11. L'abl. de cause sans de ne convient pas ici.
— 17,5. Deum nominat hoc solo nomine, quia proprio
Dei veri F. — Il s'agit de prouver l'existence du Dieu unique
par le témoignage de l'âme. Dans ses cris naturels, l'âme ne
donne à Dieu que « le seul nom de Dieu », parce que ce nom
est le « nom propre » du vrai Dieu, c'est-à-dire du Dieu « qui
existe réellement ». De test, an., 2, p. 136,3 : Non placemus
Deum praedicantes hoc no[mine] unico [a«/]c«/n. Puis, s'adres-
sant à l'âme qui s'écrie naturellement : 5/ Deus voluerit, il
dit : Ea voce et aliquem esse significas et omnem illi confiteris
potestatem, ad cuius spectas voluntatem, [simul et ceter]os
negas deos esse, dum suis vocabulis nuncupas, Saturnum,
lovem, Martem, Minervam. Nam solum Deum confirmas
(eum), quem tantum (= tantummodo) Deum nominas, ut, cum
et illos interdum deos appellas, de alieno et quasi pro mutuo
usa videaris. Donc Deus est le « nom propre de Dieu » ; appli-
qué aux dieux païens, ce nom est emprunté, aUenum, et
c'est un nom commun, qui embrasse les noms propres aux
dieux {suis vocabulis). — Dans P, il y a une lacune : hoc solo
(nomine}, à moins que hoc solo ne soit le pron. neutre « par
cela seulement », comme au ch. 44, 3 : Nemo illic Christianus,
nisi hoc tantum F (nisi plane tantum Christianus P). Mais
proprio exige que nomine soit exprimé.
LACUNES DE P Ôl
22.6 simulacris <et> imaginibus
22.7 quam <ut> hominem <a r>ecogitatu ... avertant
22,12 edisseram, <dum oracula profitetur, dum mira-
cula exercet), phantasmata Castorum
23,6 <vitae> subministrator
23,10 <in> verum utrobique
25,12 <Auctis> âge iam rébus religio proficerit
25.14 <et> moenium et templorum
25.15 tôt <de> deis quot de gentibus
42,9 Sed <et> cetera vectigalia (laeduntur ! Sufficit
si cetera) gratias Christianis agunt ex fide dependentibus
debitum
— 22,6-7. Omission d'un mot court. Au lieu de quam ut,
F a nisi ut. — e cogitatu P. La préposition e ne convient pas
avec avertant.
— 22,12. Les accusatifs phantasmata, aquam, navem,
barbam sont apposés à miracula. Sans miracula, il faudrait
de phantasmatis, etc.
— 23,6. P a subministratur, erreur de copie évidente pour
subministrator (F), lequel exige le déterminatif vitae, fourni
par F. Voy. ci-dessus, p. 40.
— 23,10. in verum om. F, Cf. 24,2 : in verum.
— 25,12. Outre l'omission de auctis, qui rend la phrase
inintelligible, celle-ci a été transposée dans P. Voy. Trans-
positions.
— 25,14. Omission d'un mot court, attestée par F et par
Ad nat., 2,17, p, 132,18. Cependant et n'est pas indispensable.
— 25,15. Omission d'un mot court, exigé par la grammaire.
Un dv:o xoivoO nous paraît inadmissible, malgré les exemples
que cite W. A. Baehrens {Beitraege zur lat. Synt., dans Philo-
logus. Suppbd., 12, 1912, p. 235-259).
— 42,9. agent P. — L'omission semble conditionnée par
la répétition de cetera ; elle aura amené le changement de
agunt en agent. — Sed introduit une nouvelle accusation
62 LACUNES DÉ P
46,17 persévérant <apud vos)
47,4 per quod <in> incertum miscuerunt
48,11 <ex> aemulis substantiis
sous forme d'objection : Mais, dira-t-on, ce ne sont pas seule-
ment les revenus des temples qui sont en déficit. La stagna-
tion des affaires, causée par les chrétiens (ils sont accusés
d'être infruduosi negotiis), fait aussi tort aux autres revenus
de l'Etat. Réponse : Tandis que les païens fraudent l'impôt,
les chrétiens le paient consciencieusement ; et si l'on calcule
ce que les païens font perdre au trésor par leurs fraudes, on
verra que les chrétiens, en payant exactement l'impôt, com-
pensent ce qu'ils font perdre d'autre part. Facile ratio habetur
(= constat) « le compte est obtenu, s'équilibre facilement » :
c'est le compte des clîrétiens avec l'Etat. Unius speciei querela
« la plainte qui concerne une seule espèce », c'est-à-dire, qui
concerne l'espèce d'impôts que les chrétiens font diminuer.
Ceterarum rationum « tous les autres impôts » (payés par les
chrétiens), qui sont à l'abri de la fraude. — Tert. aime la
locution su^cit si. Adv. Marc, 2, 29, p. 361,1 : Sufficit enim
in praesenti, si ... obligabat. 2,29, p. 372,15 : Sed sufficit, si
et Moysi proprie donatus est populus ad praesens. 5, 17, p.
634,25 : sufficit igitur, si haec non cadunt in creatorem. 5, 18,
p. 641,9 : Sufficit intérim, ista si creatoris magna sunt apud
apostolum sacramenta, minima apud fiaereticos. Ad nat., 1, 5,
p. 65,13 : sufficit et hoc ... si non omnes (pessumi sumus), si
non plures.
A la fin, securitate donne un ditrochée, clausule fréquente,
tandis que ceterarum rationum donne une fin d'hexamètre.
— 46,17. apud vos paraît nécessaire pour l'antithèse: il
est opposé à pênes nos.
— 47,4. Cf. 10,10 : quorum genus in incerto est. Ad nat.,
2, 2, p. 96,2 : in incertum abiit. Adv. Marc, 1,9, p. 301,25 :
in incerto est.
— 48,11. ex est exprimé avec tous les autres compléments
de constarent.
LACUNES COMMUNES 53
Remarquons enfin que le pronom vestri manque plu-
sieurs fois dans P, là où il paraît exigé par le sens, par
exemple :
9,17 erroribus <vestris>
13,9 dei veteres <vestri>
15,5 Attin illum deum <vestrum> e Pessinunte
On voit que P n'a pas moins souffert que F et l'on com-
prend dès maintenant quelle grave erreur on commettrait
si l'on comparait F à P sans les corriger d'abord l'un et
l'autre.
IX. Lacunes communes à F et à P.
Nous venons d'étudier les passages où l'une des deux
traditions présente des lacunes que l'autre nous révèle
et nous permet de combler. Il faut rechercher maintenant
s'il n'y a pas de lacunes communes à F et à P. Nous
— 9,17. Il ne s'agit pas des erreurs en général, mais de
celles des païens, comme le prouve la suite : exponitis, etc.
— 13,9. 15,5. Suivant ses habitudes agressives, Tert.
aime à dire : « vos anciens dieux, ce fameux dieu que vous
êtes allés chercher à Pessinunte ». Le culte de Cybèle (12,4
et 25,4) et d'Attis avait été adopté par l'Etat romain dès
204 av. J. C. Sur l'adjectif vester, voy. in deum vestrum 41,2
deorum vestrorum 16,7 ; 23,18 ; 40,5 ; deis vestris 11,4 ; 6
12.1 ; 23,11 ; 42,8 ; deos vestros 6,7 ; 20,2 ; 3 ; 13,1 ; 15,1 ; 4
19.2 ; 25,10 ; 28,4 ; 46,4. 11 faut entendre de même : mor
tuorum {= deorum) vestrorum 1 2,7 (où P a : mortuorum suo-
rum, qui se comprend aussi). — Cependant vestrum manque
aussi clans Ad nat., 1, 10, p. 80,9: Attin, deum a Pessinunte.
54 LACUNES COMMUNES
n'avons, pour les découvrir, que les vices de pensée ou
d'expression et les témoins indirects.
— 11,1. Enumerant (dinumerant P) in semetipsos mentis
malae ignaviam (impetus P) vel fato vel astris imputant F
Voici le passage parallèle de Ad nat., 1,1, p, 60,8 : Expro-
brant etenim quod erant in semetipsos ; malae mentis ab
innocentia transitum <vel astris) vel fato imputant. E. Kluss-
mann ajoute vel astris d'après l'Apologétique, mais sans néces-
sité, car vel fato = etiam fato (Goth.).
Les malfaiteurs ne reconnaissent pas leur propre culpa-
bilité : ils attribuent leurs méfaits à des causes indépendantes
de leur volonté, à l'action irrésistible d'une puissance inté-
rieure ou extérieure {mala mens ou fatum vel astra) et Tertullien
dit formellement : Nolunt enim suum esse quod (quia P) malum
agnosmnt. Donc in semetipsos ne peut pas dépendre de enu-
merant (ni de imputant, comme le veut Kroymann, o, c, p. 32);
il peut être complément de malae mentis impetus, les assauts
de l'esprit mauvais contre eux-mêmes. En outre, enumerant
exige un complément désignant des choses qu'on peut compter
et la phrase semble irréprochable, si on lit :
Enumerant in semetipsos malae mentis (impetus), igna-
viam vel fato vel astris imputant.
C'est-à-dire ; ils énumèrent les assauts de l'esprit mauvais
contre eux-mêmes, ils imputent leur faiblesse morale au destin
ou aux astres.
Dans Ad nat., Hartel {Pair. Stud., II, 25) propose de lire :
exprobrant etenim quod (ou quot) erant in semetipsos malae
mentis (impetus) ; ab innocentia transitum vel fato impu-
tant. — Exprobrant = exprobrando enumerant. Cf. 2, 7, p. 1 07, 8.
Van der Vliet, p. 17, fait la même conjecture (il lit : quot
erant). Dans l'Apol., il lit : dinumerant in semetipsos malae
mentis impetus, (^ab innocentia transitum} vel fato vel astris
imputant. Il ne tient pas compte de F.
Il est plus simple de réunir F et P en empruntant à l'un
impetus et à l'autre ignaviam. Nous avons vu un cas semblable
LACUNES COMMUNES 55
au ch. 23,6 (ci-dessus, p. 42). — Après la résurrection, dit
ailleurs Tert,, les bienheureux n'auront plus à craindre les
assauts du démon, ni l'action du destin. De resurr., 58, p.
118,23 : Ubi incursus infesti apud Christum ? ubi daemonici
impetus apud Spiritum sanctum ... ? Ubi nécessitas et quod
dicitur fortuna vel fatum ? Ailleurs, parlant des influences
qui agissent diversement sur la nature de l'âme, Tert, cite
en dernier lieu les « puissances » extérieures qui la comman-
dent : pour les chrétiens, c'est Dieu et le démon ; pour les
païens, c'est le destin, la nécessité, etc. De an., 20, p. 333,8:
Enimvero praesunt (potestates) : secundum nos quidem Deus
dominus et diabolus aemulus ; secundum communem autem
opinionem et providentiae fatum et nécessitas et fortunae et
arbitrii libertas. Ici, il ajoute la mala mens. Sénèque (De
benef., 3,27) raconte que le sénateur Rufus qui avait offensé
Auguste par une parole imprudente, s'excusa en disant :
malam mentem habuisse se pridie. Cf. Sen,, Epist., 120,20:
malae mentis maximum indicium fluduatio. Acta Scil. (17 juill.
180) : Potestis indulgentiam domni nostri imperatoris prome-
reri, si ad bonam mentem redeatis.
— 36,2. quibus divinitas imperat <eam> tam vere, quam
circa omnes necesse habet, exhiberi.
Ce passage a fort tourmenté les critiques. Pour lui donner
un sens, Wowerus a lu : quibus civilitas tam vere in impera-
torem, quam. Havercamp : quibus civilitas in imperatorem
tam vere, quam. Rauschen change seulement imperat en
imperatori.
La civilitas n'a rien à voir ici : il s'agit d'un devoir imposé
par la divinité et d'un ordre formel {imperat), qui vient
d'être rappelé au ch. 31,3. Il faut donc conserver divinitas
et imperat. Ce qui manque, c'est le sujet de exhiberi, qui doit
être pietatem et religionem et fidem imperatoribus debitam.
Ces mots, exprimés plus haut au nominatif, sont trop loin
de exhiberi pour être sous-entendus ici à l'accusatif. Il faut
les représenter par eam {débita et consista sont au singulier),
56 LACUNES COMMUNES
qui peut s'être perdu devant tam, et nous traduirons : « mais
dans une conduite, par laquelle Dieu ordonne formellement
qu'elle (cette piété, cette religion, cette fidélité) leur soit
témoignée aussi sincèrement qu'elle doit l'être envers tous. »
Sur exhiberi «être témoigné» voy, Adv. Marc. 1,23,
p. 322, 5 et 6 : mm in rem sitam exhibetur (bonitas) ... qaae
(bonitas) non in omnibus exhibetur. Sur necesse habet = débet,
voy. Adv. Marc, 2,1, p. 333,11 : aliud subruere necesse habuit,
ut quod vellet exstrueret. Ibid., 3,5, p. 381, 25. De paen,, 6,11 :
quasi Deus necesse habeat praestare efiam indignis quod spo-
pondH. — Cicéron emploie necesse habeo dans le sens de necesse
arbitror ou puto. Part, or., 47. Ad. Att., 10, I, 4; 12, 39, 1.
De opt. gen., 14.
Dans sa remarquable étude sur le procès de saint
Apollonius, Th. Klette propose de lire :
2,8. in <nos> reos maiestatis
Th. Klette, Der Prozess und die Acta s. Apollonii {Texte
und Untersuch., 15,2), p. 58, n. 1. — L'insertion de nos pro-
duit un vrai contresens. En effet, Tert. critique ici le fameux
rescrit de Trajan à Pline le Jeune. Il oppose la procédure
prescrite par Trajan à l'égard des chrétiens, à la procédure
ordinairement suivie à l'égard des vrais criminels, brigands,
coupables de lèse-majesté, ennemis publics. Trajan, dit Tert,
défend de rechercher les chrétiens : solum Christianum inquiri
(= conquiri) non licet (§ 9), Au contraire, on met tout en
mouvement pour découvrir les brigands, les criminels de
lèse-majesté, les ennemis publics et même leurs complices.
Aux brigands, Tert. ajoute les rei maiestatis et publia hostes,
parce que de son temps, on qualifiait précisément les chré-
tiens d'ennemis publics, coupables de lèse-majesté. Voy.
App. I, au chap. 28,3.
Dans le passage que nous allons citer, Mommsen pro-
pose une addition qui défigure le sens ;
LACUNES COMMUNES 57
2,12. Sed, opinor, non vultis nos perire, quos pessimos
creditis. Sic enim soletis dicere homicidae : « nega »,
laniari iubere sacrilegum, si confiteri perseveraverit. —
Si non ita agitis circa nocentes, ergo nos innocentissimos
iudicatis, etc,
Tii. Mommsen, Ges. Schrift., III, p. 407, n. 3, propose de
lire : sic enim soletis dicere homicidae : nega <et laniabere,
nec) laniari iubere sacrilegum, si confiteri perseveraverit.
Après nec, il sous-entend soletis.
Le sens de ce passage, souvent mal compris, nous paraît
très simple et très clair. Tert. veut répondre à une objection
des juges et il énonce cette objection sous une forme ironique,
comme le prouve opinor. Vous me direz peut-être que c'est
par intérêt pour nous que, contrairement aux règles de la
procédure, vous essayez de nous arracher un désaveu : vous
ne voulez pas que nous périssions, vous voulez nous sauver,
nous que vous considérez comme de grands scélérats ! La
prop, relative quos pessimos creditis montre combien pareille
attitude des juges est absurde et contradictoire : ils voient
dans les chrétiens les plus grands des criminels et ils veulent
les sauver ! Cette contradiction est mise en lumière par ce
qui suit. Ainsi, vous avez coutume de dire à un homicide,
c'est-à-dire à ce chrétien présumé coupable d'homicide :
« Nie ! » (nega te esse Christianum) ; et un (chrétien) sacrilège,
vous le faites déchirer, s'il persiste à s'avouer chrétien. Ce
n'est pas ainsi que vous agissez envers les (vrais) criminels :
j'en conclus que vous nous considérez comme tout à fait
innocents. — Sur P, voy. p. 72.
Les additions suivantes, proposées par Van der Vliet,
nous paraissent tout au moins inutiles :
2,12 circa nos <ut circa) nocentes
— 2,12. Voy. ci-dessus et p. 72,
58 LACUNES COMMUNES
9,19 ab omni... excessu <abstinemiis,> tantum
24,4 alium praeter Caesarem (Caesarem) et dicere et
audire
25,2 adeo deos <gratos> esse
34,2 quod non potest credi <nisi> non modo
40,10 commenta (commentata P) <est>
48,1 et lapidibus magis, nec saltim <sibilis> coetibus a
populo exigetur.
— 9,19. Un seul verbe (tuti sumus) suffit.
— 24,4. On sous-entend Caesarem. Voy, 34,3 : si habens
imper atorem, aiterum adpeiles, se, imperatorem. 25,11 : ante-
quam isti dei inciderentur, se. dei. 34,2 : etiam familiae magis
patres quam domini vocantur. 40,12 : priusquam Christiani
nominarentur, se. Cliristioni. Adv. Marc., 4,17, p. 476,19 :
nec alium dominum adpellabant, quamquem solum norant.
— 25,2. adeo deos esse, il est si vrai que les dieux existent,
la meilleure preuve de l'existence des dieux est que ...
— 34,2. Déjà proposé par Havercamp. Voy. App. I.
— 40,10. L'ellipse de est est fréquente.
— 48,1. Voy. App. I.
59
ADDITIONS ACCIDENTELLES,
X. Additions accidentelles de F.
Il ne suffit pas de combler les lacunes du Codex Ful-
densis ; il faut aussi le débarrasser de tous les éléments
parasites qui peuvent s'y être glissés, c'est-à-dire des
additions accidentelles.
N. B. Nous mettons entre [ ] les éléments ajoutés accidentelle-
ment. Ils manquent dans P, sauf avis contraire.
Le scribe distrait trace deux fois la même lettre ou la
même syllabe ;
39,6 naufragi[i]s, pour naufragis P
On pourrait voir un exemple de cette sorte de méprise
dans
38,5 animae[ae]quitatem,
si l'on pouvait admettre que Tertullien a employé la
— 39,6. Le scribe peut aussi avoir confondu deux mots.
Tert. a dit ministeria pour ministri (11,4 ; 39,2), mais nau-
fragia pour naufragi paraît trop hardi, surtout à côté de
noms de personnes.
— 38,5. animi aequitatem P. — Tert. emploie aequani-
mitas (De an., 1, p. 299,18. De pat, 2, p. 2, 17 ; 3, p. 4,19).
L'adjectif animaequus est dans l'Itala et dans la Vulgate.
Thés, l. L, I, 1004,
60 ADDITIONS DE F
forme animaequitas pour aequanimitas ; mais on ne la
trouve dans aucun écrivain.
Par une sorte de suggestion, le scribe écrit par antici-
pation une syllabe ou un mot qui ne doit venir que plus
loin :
9,18 cuius[que] ubique F; cuius ubique P
18,3 [ediderit] iudicando ediderit
Dans ces cas, l'addition est inconsciente. Si le scribe
s'aperçoit ou croit s'apercevoir d'une omission, il lui
arrive d'ajouter quelque chose pour combler la lacune
supposée. Si le scribe prend une. glose marginale pour
une partie du texte à insérer, il l'insère, croyant rétablir
le texte de l'auteur. L'addition est consciente, mais a
pour cause première une erreur du scribe.
Conscientes ou non, ces additions n'ont pas pour but
de remanier le texte ; elles visent, au contraire, à lui
rendre sa pureté. En réalité, elles le défigurent et il faut
les élaguer.
Elles se révèlent par les rnêmes indices que les omis-
sions. La comparaison de F et de P nous met sur la voie
des additions fautives. Un témoignage antérieur aux
ms. les trahit quelquefois. L'examen du contexte explique
parfois leur origine. Au lieu de laisser un vide, l'addition
introduit dans le texte un élément qui vicie le sens ou
l'expression, qui donne naissance à un non-sens, à un
contresens ou à une faute de syntaxe ou de style, ou qui
constitue tout au moins une superfétation.
Voici un curieux exemple d'une addition faite pour
corriger une méprise de copiste et qui n'est qu'une « cor-
rection erronée » ;
ADDITIONS DE F 61
23,12 dicentib[us nobis] idem F
dicent ibidem P
La leçon de P convient au contexte : Les démons
« diront aussi à l'instant même quel est ce Christ...» Dicent
ibidem et quis ille Christus... La leçon de F est un contre-
sens ou un non-sens imputable au scribe. On comprendra
l'origine de la faute, si l'on remonte à un manuscrit où
les mots n'étaient pas séparés {scriptura continua) :
DICENTIBIDEM
En transcrivant, le copiste a divisé ainsi : dicentib.
idem, c'est-à-dire dicentib{us) idem ; puis il a donné un
sujet (nobis) à dicentibus. Le résultat, c'est l'addition
consciente de us nobis, dont l'origine est une erreur d'un
scribe.
Il est parfois très difficile de distinguer les additions
faites par les scribes successifs, des additions imputables
à un remanieur qui a voulu expliquer, compléter ou recti-
fier le texte. Voici des passages de F où l'on peut admettre
l'intrusion d'éléments étrangers par suite d'une dis-
traction ou d'une correction erronée ou de l'insertion
d'une glose :
1,1 ad hanc solam [tantum] speciem
2,5-6 comedisset. [Sed nec in isto ex forma malorum iudi-
candorum agitis.] Atqui
— 1,1. Superfétation. Glose de solam.
— 2,5-6. Les mots Sed nec etc. (44 lettres) forment le com-
mencement du § 10. Le scribe aura passé par distraction
du § 5 au § 10. Après avoir copié à peu près une ligne du
§ 10, il s'est aperçu de l'erreur, mais n'a pas effacé les mots
qu'il avait transcrits trop tôt.
62 ADDITIONS DE F
7,13 Christianorum. [Quod dicitur semper, semper <non>
est, quia quod est desinit dici.] Hanc indicem (51 lettres)
10,8 et imagme[s etj signatus nummus
— 7,13. Junius donne semper est, mais Br porte semper,
semper est. Rausciien a proposé d'ajouter non. Junius dit :
Argute dictum et iingue Tertulliani dignum. En effet, cette
distinction subtile entre esse et dici est conforme à la manière
de Tertullien. Elle se retrouve dans Ad nat., 1,5, p. 65,29:
nam et nomina sic sunt instituta, ut fines suos habeant inter
dici et esse. Et parlant des philosophes qui ne sont philosophes
que de nom : non statim sunt, quia dicuntur, sed quia non
sunt frustra dicuntur ... Cf. 7,2 : dicimur tamen semper, sed...
Mais à la place où F présente cette phrase, elle interrompt
la suite des idées, en séparant fama de Hanc indicem. Elle
a donc l'air d'une glose marginale insérée dans le texte. Ce
serait une glose des §§ 9-10, où l'idée de cette phrase a été
développée. Elle serait même à sa place au commencement
du § 10, où l'on pourrait lire :
7,10. Quod dicitur semper, semper (non) est, quia quod
est desinit dici. Nec quisquam dicit verbi gratia ...
Ce qu'on « dit » toujours, continue à ne pas « être » ; car
ce qui « est », cesse d' « être dit ». Puis Tert. donne deux exem-
ples de cette pensée générale. Il y aurait donc une transpo-
sition dans F et une omission dans P. On peut s'étonner
toutefois que ces deux fautes soient tombées sur la même
phrase ; c'est pourquoi nous préférons croire que c'est une
glose des §§ 9-10, insérée dans le texte par un scribe et four-
voyée, peut-être parce qu'elle était mise au bas de la page,
dont Christianorum était le dernier mot.
— 10,8. Junius a imagine et, mais Br a imagines et. On
ne sait pas quand fut introduite à Rome la coutume des
imagines, portraits des ancêtres (Mommsen, Droit public,
II, p. 84-89), mais on n'en attribue nulle part l'invention
à Saturne, Quant aux statues des dieux, elles étaient encore
inconnues à l'époque de Numa. Voy. 25,13. Dans les passages
ADDITIONS DE F 63
12,1 video [statuas]
16,10 et [certa] caelestia adorandi
16,13 et [a] planta et tergo alites deos
parallèles de Min. Félix, 21,5, et du traité Quod idola, 2, p.
20,5, il n'en est pas question. -^ Dans F, il y a peut-être ce
que Havet (§ 545) appelle répétition postérieure de et, puis
une correction erronée (addition de s à imagines, pour en
faire un compl. dir.).
— 12,1. Après avoir montré que les prétendus dieux ne
sont pas des dieux (quid non sint), Tertullien va le montrer
mieux encore en faisant voir ce qu'ils sont {quid sint). Que
sont les dieux ? a) Quantum igitur de deis istis. Cette phrase
résume ce qui précède : nous ne voyons jusqu'ici (ch. 10-11),
au lieu de dieux, que des noms, des légendes, des cultes basés
sur ces légendes, b) Quantum autem de simulacris. Ces mots
annoncent un développement nouveau et sont opposés à
quantum igitur de deis istis : les statues ne sont que matière
inerte. Donc statuas ne peut figurer dans la première énumé-
ration. C'est probablement une glose marginale de simulacris,
fourvoyée ici. Elle se trahit du reste par l'absence de la con-
jonction et. Même distinction dans De spect., 10, p. 13,4 :
scimus nifiil esse nomina mortuorum, sicut nec ipsa simu-
lacra eorum. Lact., Div. inst., 2, 2, 9 : et ideo simulacra cons-
tituunt, quae quia mortuorum sunt imagines, similia sunt
mortuis : omni enim sensu carent.
~ 16,10. Ad nat,, 1,13, p. 84,24: etiam caelestia.
— 16,13. P a : et planta vel tergo. Cf. Ad nat., 1,14, p.
84,25 : et alites planta, fronte et tergo. Dans F, a semble avoir
été ajouté par l'influence de a lumbis et a cruribus qui pré-
cèdent, mais qui ont un sens différent. Les païens ont accueilli
des dieux cornus à l'imitation du bouc et du bélier (de capro
et de ariete), des dieux qui sont boucs depuis les reins (a lumbis)
et serpents depuis les cuisses (a cruribus) ou enfin ailés quant
aux pieds et au dos {planta et tergo alites).
64 ADDITIONS DE F
18,3 [ediderit] iudicando ediderit
21,1 quam [scient] aliquando novellam. ut Tiberianis
temporibus ortam, plerique sciunt
21.7 ut erubescat de filii nomine, aut de patris semine,
[sicut de concubitu tauri]
21.8 nec de stupro filiae aut [de] coniugis alienae
23,12 dicent ib[us nobisjidem
25,1 sed ipsorum etiam testimoniis [de Romanis]
— 18,3. iudicantis ediderit P. — Dans F, on a un cas
curieux d'anticipation de mot ou de répétition antérieure
(Havet, § 1225). Havercamp propose: ediderit, iudicando
per imbres.
— 21,1. aliquando pour aliquanto P (confusion fréquente,
cf. 39,9 dans F, et 2,5 ; 8,8 dans P). C'est peut-être la graphie
fautive aliquando « un jour » qui a amené l'insertion du futur
scient. — On peut aussi supposer que sciunt, qui suit, était
au commencement d'une ligne et que Ife scribe avait commencé
à sauter une ligne (il y a 52 lettres de scient à sciunt).
— 21,7. Allusion à l'histoire d'Europe et à celle de Pasi-
phaé. Le Christ, dit Tert., n'a pas à rougir ni de son nom de
fils, ni de son origine paternelle. Havercamp montre la diffé-
rence : Videtur idem dicere, cum tamen minime sit idem.
De modo enim progenerationis iam loquitur, quae monstrosa
et pudenda in illis erat ... Inde patet lectionem, quae est
in Cod. Fuldano ex glossa marginali esse, de patris semine,
sicut de concubitu tauri, ex apta tamen et docta interpreta-
tione. L'allusion revient dans la phrase suivante (cornutum),
où elle a sa place marquée parmi toutes les aventures de Jupi-
ter qui expliquent in semine patris. Ici, il n'y a pas lieu de
citer à part l'histoire d'Europe ou de Pasiphaé. C'est une
glose insérée dans le texte.
— 21,8. Répétition d'un mot court déjà exprimé deux fois.
— 23,12. Ci-dessus, p. 61.
— 25,1. Les mots de Romanis étaient probablement mis
ADDITIONS DE F 65
23,10 neque a daemoniis adfectaretur [neque] in confes-
sione neque a deis negaretur
25,12 Nam etsi a Numa [Popilio]
29,3 cuius [et nunc] et toti sumus
32,1 pro imperatoribus et ita universo orbe et statu im-
perii rebusque Romanis
35,1 Christian!, [an] quia
en marge comme titre ou résumé de ce chapitre (cf. § 2 :
Romani nominis), où il est question de la protection accordée
aux Romains par les dieux. Le scribe les a insérés dans le
texte, où ils n'ont aucun sens.
— 23,10. neque^ répété par suggestion de neqm qui pré-
cède et qui suit, trouble le sens de la phrase.
— 25,12. Voy. cependant 21,29: homo fuit Pompilius
Numa.
— 29,3. P a : cuius et toti sunt. — Sumus pour sunt est
une correction erronée ou une distraction.
— 32,1. P a: pro imperatoribus, etiam pro omni statu
imperii rebusque Romanis. — Le texte de F est incorrect,
car la préposition pro devrait être répétée. En outre, les mots
ita universo orbe ne sont pas à leur place : c'est une glose
marginale insérée dans le texte. Tert. dit : « Nous prions pour
l'empereur et pour l'Empire, parce que nous savons que l'exis-
tence de l'Empire retarde la catastrophe qui menace la terre
entière » : universo orbi imminentem. Le glossateur en a
conclu que les chrétiens, en priant pour l'empereur, prient
aussi pour la terre entière, et ita universo orbe.
— 35,1. Le scribe semble avoir répété la syllabe an de
Christiani. Havercamp propose de ponctuer : Propterea
igitur publia hostes Christiani ! An quia ... P Et, en effet,
propterea pourrait se rapporter à ce qui précède, comme
aux ch. 16,3 et 50,4. Mais les mots neque vanos neque men-
tientes, etc., se rapportent aussi à ce qui précède et ne peuvent
suivre An. Voy. App. I.
66 ADDITIONS DE F
39,1 ostendam. [Si etiam veritatem revelaverim.] Corpus
sumus
39,6 iamque domesticis senibus [iam otiosis]
39,18 provocantur in médium [de] Deo canere
41,5 confirmamur, ut {lege : confirmantium) scilicet
fiduciam et fidem spei nostrae [agnoscentes]
— 39,1 Havercamp maintient ces mots et les explique :
nisi, inquit, alias testis mendare (= mendax ?) vobis reperiar.
Il compare Virgile, Aen., 2,161: si ver a feram, si magna repen-
dam. Mais ces mots ne peuvent guère avoir ce sens et pareille
réserve n'est pas conforme au ton de Tertullien. Ils paraissent
être plutôt une note marginale insérée dans le texte.
— 39,6. iam otiosis est évidemmicnt une glose explicative
de senibus. Ces mots n'ajoutent rien à senibus et Tert. n'aurait
pas employé iam dans deux sens différents. Domestiei senes,
ce sont les serviteurs devenus vieux, qu'il faut secourir parce
que, devenus vieux, ils ne travaillent plus {iam otiosis) et
ne gagnent plus leur vie. Les païens vendent les esclaves qui
ne sont plus bons à rien. Cato, De re rust., 2 ; Vendat ...
servum senem, servum morbosum. Cf. Plut., Cato, 5. On les
reléguait aussi dans l'île du Tibre. Suet., Claud., 25. Voy.
Wallon, Hist. de l'escL, II, p. 252. Ailleurs encore, Tert. dé-
signe par domestiei les serviteurs de la maison, les esclaves.
Il emploie ce mot pour désigner les esclaves restés païens, qui
trahissent leurs maîtres. Ch. 7, 3. Ad nat., 1,7, p. 68,28. Scorp.,
10, p. 168,15. Voy. App. I, ch. 1,1. — Ici, Tert. mentionne
lo les indigents, 2» les orphelins pauvres, 3° les vieux servi-
teurs, 4° les naufragés, etc. L'auteur de la glose et le scribe
n'ont pas vu que domesticis est substantif et senibus apposé
comme un adjectif (9,19 : senes pueri ; 21,12 : materia matrix ;
21,25 : magistri Dei) et ils ont ajouté une idée qui est suffi-
samment exprimée par senibus.
— 39,18. de ajouté par un scribe, qui n'a pas saisi le sens
du datif : « chanter en l'honneur de ». Voy. 2, 6.
— 41,5. confirmantium scilicet fiduciam et fidem spei
ADDITIONS DE F 67
42,7 venditantur [quod ego] si desideravero
— de suis [de propriis] locis sumam
45,1 ab in<con>teni<p>tibili [Deo] doctore praeceptam
46,18 et vitae [salutis]
47,5 inventum enim solummodo Deum [nostrum]
nostrae P. — Sur l'idée, voy. 39,3 : certe fidem sanctis vocîbus
pascimus, spem erigîmus, fiduciam figimus. — Confirmare
aliquem — confirmare animum alicuius (classique). Ut agnos-
centes, comme ut vobis cohaerentes, est conforme à l'usage
de TertuUien. Hoppe, Syntax, 58. Pour maintenir le texte
de F, il faudrait ajouter et devant confirmamur. Mais 1) agnos-
cere fiduciam et spem ne paraît guère latin ; 2) scilicet avec ut
et le participe paraît une superfétation ; 3) confirmantium
scilicet convient pour expliquer laetamur ..., et 4° fidem spei
nostrae forme la clausule fréquente d'un crétique et d'un
trochée. Après que confirmantium fut devenu confirmamur ut,
on a ajouté agnoscentes.
— 42,7. Quod (qui répète quae) est de trop ; ego peut être
conservé.
— de propriis, glose explicative de de suis, qui a ici un
sens spécial. Sur suus — proprius, voy, Hartel, Patr. Stud.,
I, p. 36-37. Hoppe, Syntax, p. 103. Peut-être : de suis propriis
locis. De an., 45, p. 375,1 : de suo proprio. Ad nat., 1,12, p.
81,25 : sicut vestrum humana figura est, ita et nostrum sua
propria. Clausule : crétique et trochée.
— 45, 1 . Deo, glose explicative de ab incontemptibili doctore.
— 46,18. salutis, glose de vitae, trahie par l'absence de et.
— 47,5, Deum nostrum paraît d'abord naturel, puisqu'il
s'agit de Dieu découvert par les philosophes dans l'Ecriture.
Mais 1) dans la suite de la phrase il s'agit de Dieu en général,
2) dans le passage correspondant de Ad nat., 2, 2, p. 96,4,
on lit : Invento enim solummodo Deo, non ut invenerunt expo-
suerunt, ut et de qualitate, etc. L'addition peut venir d'un
maladroit remanieur.
68 ADDITIONS DE F
47,14 ut de [projprioribus
48.1 ut etiam ab animalibus [sit] abstinendum propterea
persuasum quis habeat, ne...
48.2 id [est] esse quod fuerant
48,9 disce<n>s [deum],-dominus
— 47,14. ut de prioribus P. — Le scribe aura écrit deux
fois p avec l'abréviation de pro et avec celle de pri.
— 48,1. P n'a pas ut ni sit et il a abstinendi. — Si quelque
partisan de Pythagore, dit Tert., défendait devant vous la
métempsycose, en mettant en œuvre toutes les ressources de
son éloquence, il emporterait votre assentiment et ferait entrer
la foi dans votre esprit. La conséquence introduite parut «de
telle sorte que » n'est pas qu'on doit s'abstenir de la chair
des animaux, mais que quelque auditeur croirait qu'il faut
s'en abstenir. C'est donc persuasum quis habeat qui doit
dépendre de ut. La grammaire exige que le verbe qui dépend
de persuasum habeat, soit à l'infinitif : abstinendum, se. esse.
Le scribe aura ajouté sit, s'imaginant que abstinendum sit
dépend de ut. Il en est résulté que la suite de la phrase cloche
au point de vue de la grammaire et du sens. Propterea annonce
ne (= ideo ... ne), comme au ch. 9,13. — Il est curieux de
constater que Van der Vliet, p. 40, en corrigeant la lecture
de P, est arrivé au texte de F débarrassé de sit.
— 48,2. Le scribe a cru qu'il avait affaire à la formule
id est, qui introduit une explication. Hoc annonce la propo-
sition infinitive id esse quod fuerant.
— 48,9. Voy. App. I. Tert. parle ailleurs de l'inscription
de Delphes : FvwQi creauTùv, nosce te ipsum. De an., 17, p.
325,24 : Sed enim Plato ... ex Socratis persona negat se cognas-
cere posse semetipsum, ut monet Delphica inscriptio. — Tert.
ne peut avoir écrit : te ... disces deum, parce qu'il ne peut
pousser l'hyperbole jusqu'à assimiler l'homme à Dieu (surtout
au moment oix il parle de la mort), et parce que l'inscription
de Delphes ne dit rien de pareil : elle nous invite à nous con-
naître {si intellegas te). Les ms. confondent souvent deus et
ADDITIONS DE P 69
Mettons à part les passages suivants, où le doute
semble permis:
8,8 Quid denique sine pignore singulares Christiani ?
16,8 signa veneratur, signa adorât, signa iurat
XI. Additions accidentelles de P.
Pour rétablir F dans son intégrité, il faut le débarrasser
des éléments étrangers que nous venons d'énumèrer.
dominas, dont les abréviations se ressemblent. Voy. App. I,
ch. 13,4. Peut-être deum est-il une glose de dominus omnium
etc., un lecteur ayant cru par erreur que cette locution ne
pouvait désigner que Dieu. Introduite dans le texte, cette
glose a amené le changement de disces en discens.
— 8,8. Quod (= quoi) denique singulares Christiani ? P. —
On peut lire quid ou quoi : le sens sera différent, mais il con-
viendra au contexte. — Cette phrase explique si nullae fuerint
et montre que cette hypothèse peut se réaliser souvent. Sin-
gularis a ici im sens rare : « qui vit seul, isolé, seul de son
espèce » et de là « qui n'a pas de famille », qui n'a plus aucun
proche et, par conséquent, ni mère, ni sœur. 5m^ pignore
détermine donc le sens de singulares « seuls, parce qu'ils n'ont
pas de proches» et ressemble à une glose {glossam redolet,
dit Havercamp). Mais ce n'est pas une superfétation ; cette
tournure rappelle, en effet, Virg., Aen., 4, 588 : vacuos sensit
sine rémige portus. Cf. Hom., II. 21,50 : yùpivov axep xôpuQô;
Te xal àa-TriSoç. Il faut donc conserver sine pignore ; le revi-
seur de P aura trouvé ce déterminatif superflu.
16,8. signa veneratur, signa iurat P. Adnat., 1, 13, p. 83,15,
signa adorât, signa deierat. — F réunit ici le texte de P et
celui de Ad nat. — Signa adorât a le même sens que signa
veneratur, dont il pourrait être une glose. En écrivant ici
signa veneratur, Tert. semble avoir voulu éviter la répétition
du verbe adorare, qu'il venait d'employer.
70 ADDITIONS DE P
P, de son côté, contient beaucoup d'éléments qui
manquent dans F, et nous avons déjà passé en revue
ceux qui peuvent servir à combler les lacunes de F. Mais
il y en a beaucoup d'autres et ils sont de deux sortes :
ceux qui viennent d'un accident et ceux qui procèdent
d'une intention. Les uns et les autres doivent être exclus
de F, les uns, parce qu'ils sont des fautes de scribes ;
les autres, parce qu'ils ont eu pour but de modifier le
texte primitif de P et forment les caractères distinctifs
de cette tradition. Essayons d'en faire le départ. Nous
n'avons à nous occuper ici que des additions accidentelles;
nous devons réserver les autres.
Il arrive au scribe de P, comme à celui de F, de tracer
deux fois la même lettre ou la même syllabe :
1,13 natura [a]lia, pour naturalia F
21,11 di[di]cimus
dicimus
21,26 edi[di]mus
edimus
23,14 rogi[i]s
rogis
39,6 ingrati[ijs
ingratis
— naufragifijs FP^
naufragis P^
40,2 leone[ne]m
leonem
ou de répéter un mot :
9,5 est [es
t] luppiter
— 39,6. ingratis voratrinis. Les chrétiens ne puisent pas
dans leur caisse commune, ni pour (organiser) des festins ni
pour (organiser) des beuveries, ni (pour bâtir et entretenir)
des lieux de stériles ripailles. Allusion aux banquets et aux
scholae des collèges païens. L'adverbe ingratis n'aurait pas
de sens ici.
ADDITIONS DE P 71
Citons un curieux exemple de glose grammaticale : .
23,7 magia ... fieri dicetis F
magia ... fieri [dictis non] dicetis P
Un lecteur, s'imaginant qu'il fallait lire dictis au lieu
de dicetis, aura mis en marge : dictis, non : dicetis, c'est-
à-dire : il faut lire dictis, et non dicetis. Le scribe a cru
qu'il devait insérer ces mots dans le texte.
Voici maintenant les passages de P où l'on peut ad-
mettre l'intrusion d'éléments étrangers, par suite d'une
distraction, d'une correction erronée ou de l'insertion
d'une glose :
1,1 Romani imperii antistites
1,6 quia ignorabant [quale sit quod oderant]
1,13 natura[a]lia
— 1,1. ajouté au-dessus de la ligne par un correcteur
qui a voulu indiquer que les mots suivants sont mis en apos-
trophe. On voit ici comment plus d'une addition a pu se
faire.
— 1,6. Ces mots, qui manquent ici dans F et dans Ad nat.,
1,1, p. 59,4, sont inutiles à la clarté et alourdissent le style.
Ils sont repris à peu près textuellement du § 5, où ils sont
nécessaires. Ici, c'est une glose marginale insérée dans le
texte. Un lecteur a voulu donner à ignorabant un complé-
ment, dont il n'a pas besoin. Dans Ad nat., /. c, scire et
ignorare sont l'un et l'autre mis absolument : quod omnes,
qui vobiscum rétro ignorabant et vobiscum oderant, simul eis
contigit scire, desinunt odisse quia desinunt ignorare.
— 1,13. Ad nat., 1,1, p. 60,15 : //i quo mali natura cessât.
De an., 20, p. 332,5, et 38, p. 365, 25 : omnia naturalia animae.
Ibid., 22, p. 335,14 : cetera animae naturalia. Ibid., 32, p.
355,10 : mollitia lanae, mollitia plumae : pariant naturalia
e rum, substantiva non pariant.
72 ADDITIONS DE P
2,12 si non ita agitis circa [nos] nocentes
4.2 quae [illos] palam admittentes invenimus
5.3 ferocisse. [Sed] tali dedicatore
6,3 [Nam] ne vel hieme
— 2,12. Le contresens est trop évident pour qu'on l'impute
à un remanieur intelligent. Voy. p. 57. Nocentes désigne les
criminels en général, opposés aux chrétiens. Nos est peut-être
dû à l'influence de nos innocentissimos, qui suit (anticipation).
— Van der Vliet, p. 33, a vu la faute ; mais, au lieu de suivre
F, il propose : circa nos <(ut circa) nocentes, ce qui ne convient
pas au contexte.
— 4,2. Il faut lire : quae palam admittentes invenimm. Sur
ce passage, voy. App. I,
— 5,3. La particule adversative sed est de trop. La série
FEROCISSETALI
peut avoir amené le scribe à écrire deux fois set (fréquent
pour sed ; cf. 45,5, où P a illa sed pour illas et). Sed n'est pas
dans F, ni dans Eusèbe (ïoioùx^y...), ni dans Rufin, Hist.
eccL, 2,25,4.
— 6,3. Havercamp trouve nam si peu supportable qu'il
le change en iam. L'intrusion de cette particule paraît venir
de ce qu'on a mal compris nuda. On a cru que les théâtres
ne sont « pas nus », parce que les spectateurs sont couverts
de la pénule ! Nuda signifie « simples, sans ornement », et
il n'y a aucun rapport de cause entre les deux phrases. Le
scribe (ou le remanieur) a eu tort de mettre nec nuda en rapport
avec odium paenulae. Les deux phrases sur les théâtres sont
opposées aux mots : quae theatra stuprandis moribus orientia
statim destruebant. 1) Autrefois le sénat faisait démolir les
théâtres et il n'y en avait pas (de permanents) ; maintenant
on ne se contente pas d'un seul théâtre par ville, ni d'un
théâtre tout nu, c'est-à-dire sans ornement ; il faut plusieurs
théâtres et des théâtres magnifiques, somptueux. Nudus
« sans ornement, simple, pauvre ». Ovid., Met., 4, 261 ; nudi
capilli. Voy. 16,8 : incultas et nudas cruces. Au figuré : De
ADDITIONS DE P 73
8,5 homo est enim et Christianus [et] quod et tu
9,5 est [est] luppiter
9,10 de iugulo decurrentem [exceptum]
14,4 Admeto [régi]
16,1 nam [et], ut quidam, somniastis
— etiam {lege: et tam) de ipsa [tam] origine ,
resurr., 3, p. 29,25 : nuda et aperta et omnibus nota. Voy. la
description de l'intérieur des théâtres dans Valère Maxime,
2, 4, 6 : secuta lautitia est. Voy. les lexiques. 2) Le sénat sup-
primait les théâtres, étant persuadé qu'ils corrompaient les
mœurs : aujourd'hui la volupté impudique a trouvé le
moyen de fréquenter les théâtres toute l'année, même l'hiver,
grâce à ce manteau lourd et incommode, inventé par les
Lacédémoniens ... pour les jeux. Le rapport de cause à effet
(nam) n'existe donc pas entre les deux phrases et nam est
de trop. — Primi ... excogitaverunt. Les Lacédémoniens ont
les premiers inventé l'odieuse (épaisse et lourde) pénule ...
pour qu'elle puisse nous servir au théâtre, dit spirituellement
Tert., comme si les Lacédémoniens avaient pensé au théâtre
et aux Romains ! — Le remanieur de P paraît ne pas avoir
compris l'abstrait odium paenulae, pour le concret odiosam
paenulum et il l'a remplacé par paenulam. Voy. Callewaert,
Le Cod. Fuld., p. 343.
— 8,5. L'addition de et peut avoir été suggérée par les
deux autres et.
— 9,5. Voy. ci-dessus, p. 70.
— 9,10. Havercamp conserve exceptum, tout en disant :
abesse potest. Le mot est superfétatoire et paraît repris de
palmula exceptus (deux lignes plus haut).
— 14,4. régi manque dans F et dans Ad nat., 2,17, p.
131,15.
— 16,1. et a été ajouté au-dessus de la ligne; il manque
dans M.
— F a : etiam {— et tam) de ipsa origine quam. Voy. App. I.
74 ADDITIONS DE P
16,8 religio [Romanorum] tota castrensis
18,8 monumenta [reliquit] hodie
— cum ipsis Hebraicis [litteris] exhibentur
21,5 ad declinandum [dérivantes] a disciplina
— quanta de[re]liquerint
21,11 di[dijcimus
— 16,8. Romanorum manque dans F et dans Ad nat., 1,12,
p. 83,15. Havercamp dit : Et hic supervacuam vocem Ro-
manorum intruserant scioli. C'est une glose, insérée dans
le texte (ou une addition d'un remanieur). Pour un lecteur
romain, castrensis religio a la clarté d'un terme consacré.
— 18,8. Il y a deux verbes dans la phrase. On pourrait
songer à couper ainsi : reliquit. Hodie ... Mais le sujet de
reliquit serait incertain.
— Dans P, litteris a été ajouté au-dessus de la ligne
par une seconde main ; on voit ici comment plus d'une addi-
tion a pu être faite.
~ 21.5, Voy. App.I.
— Le mot derelinquo est très fréquent dans TertuUien ;
il signifie « abandonner, délaisser, renoncer à » (deserere,
solum relinquere, neglegere). Quanta dereliquerint « quelles
grandes choses les Juifs ont négligées, délaissées » ne pourrait
désigner que la generis magnitudo et regni sublimitas, dont
Tert. vient de parler. Dire que leurs malheurs actuels prou-
veraient, à défaut de leur aveu, quelles grandes destinées
ils ont délaissées, cela n'a pas de sens. Ce qu'ils avouent et ce
que prouvent leurs malheurs, ce sont les prévarications qu'ils
ont commises: quanta deliquerint. Voy. § 16: meritum fuit
delictorum. — Sur l'ace, d'un pron. neutre avec delinquo,
voy. 20,5 : quid delinquimus ... ? De pud., 21,7 : ne et alla
délinquant. Adv. Marc, 5,7, p. 596,10 : iam si deliquero eadem,
quae et populus, eademne passurus sum an non ? Thés. l. /.,
V, 459, 64.
— 21,11. dicimus F. — Tert. rapproche Vaffirmation ou
la doctrine chrétienne sur le Verbe de celle des philosophes.
ADDITIONS DE P 75
21,12 sed extenditur. [Ita de spiritu spiritus et de Deo
Deus,] ut lumen
21,14 veritatis istius [modi]
21,17 ostendens se esse Verbum Dei [id est Xôyov] illud
primordiale
et il dit : adscribimus et dicimus. Il ne présente pas ici cette
doctrine comme un enseignement reçu. S. Justin, Apol.,
I, 46,2, dit : Tov Xptorxov -rïpwTOToxov toû 0eoO Eivat éSiBâ^-
— 21,12. Ces mots reviennent au § 13, où ils sont à leur
place, comme sujet de fecit. En effet, au § 12, Tert. expose
la comparaison du soleil et du rayon, de la lumière qui s'al-
lume à la lumière. C'est au § 13 que vient seulement l'appli-
cation et que Tert. explique 1) l'unité de substance et 2) la
distinction des personnes d'après cette comparaison. Au § 12,
la phrase interrompt donc malencontreusement l'exposé de
la comparaison. Elle n'est, à cet endroit, ni dans F, ni dans
VAltercatio. C'est une anticipation de scribe ou une glose
marginale, insérée dans le texte. Voy. App. I.
— 21,14. eiusmodi fabulas aemulas ad destructionem
veritatis istiusmodi P. — Sur l'idée, voy. 47, 11-14. S. Justin,
Apol., 1, 54, 2. S. Justin dit clairement que les démons ont
inventé les fils de Jupiter pour faire douter du Fils de Dieu :
les hommes diront que ce qu'on raconte du Christ (xà Tcepl
TÔv XpioTTÔv) ressemble à ce que les poètes racontent de Jupiter
(ô'jjioia Tor<; Ùtco twv itoiriTwv l£')(^^EÏ(7i). Chap. 47, 1 1 : fahulae
..., quae de similitudine fidem infirmarent veritatis. Tert., qui
s'inspire de S. Justin ici et au ch. 47, dit que les démons ont
inventé des fables du même genre que l'incarnation (fabulas
eiusmodi) pour détruire cette vérité bien déterminée (veritatis
istius) et non «une vérité de ce genre». — L'addition de
modi paraît conditionnée par eiusmodi qui précède. — Dans
cette phrase, aemulas a été transposé dans P. Voy. plus loin,
aux Transpositions.
— 21,17. Les mots id est Xdyov sont inutiles après le § 10.
76 ADDITIONS DE P
— fulturn, [eundem qui verbo omnia et faceret et
fecisset.]
21,18 in crucem [lesum] dedi
21,20 magna etiam militari <s> [manu] custodiae diligentia
22,7 Quas et ipsas quomodo [ut] operentur expediam
23,7 fieri [dictis non] dicetis
23,13 dicant hoc [pro] tribunali ... [hoc] esse sortitos
Ils séparent maladroitement Terôam Dei de illud. La formule
id est introduit souvent une glose. Voy. p. 83.
— Ces mots sont un souvenir de 17,1 ; 21,10 et 11.
L'idée est répétée maladroitement et faussement ici, car il
aurait fallu : per quod (ou per quem) Deus omnia et faceret
et fecisset. Remarquez : Verbum illud ... qui verbo. C'est Dieu
qui crée par son Verbe et non le Verbe qui crée par le Verbe.
Ces mots sont probablement une glose marginale. Ils détruisent
la clausule spiritu fultum (crétique et trochée).
— 21,18. Le sujet de dedi ressort de eius, ad eum, oblatum.
Le nom lesum, que Tert. évite dans VApoL, est tout à fait
inattendu ici. C'est une glose complétive. Havercamp dit
avec raison : Ita Rig. ex Cod. Fuld. Reliquae editiones inepte
vocem lesum intruserunt.
— 21,20. militaris custodiae F. — Ayant lu militari, le
scribe a pu ajouter manu, qui trouble le sens et la grammaire.
~ 22,7. Addition d'un mot court. Peut-être le scribe
a-t-il écrit ut pour et, qui conviendrait (= etiam) après quo-
modo.
— 23,7. Voy. ci-dessus, p. 71.
— 23,13. Fa : dicant hoc tribunali ... esse sortitos « qu'ils
disent que c'est Minos et Rhadamanthe qui ont obtenu ceci
(le droit de juger les morts) pour leur tribunal ». Le scribe
(ou un remanieur) a cru que hoc détermine tribunali et il a
corrigé en hoc pro tribunali, se souvenant des §§ 5 et 6 : edatur
hic, etc. « devant votre tribunal ». Peut-être a-t-il compris :
« à la place de ce tribunal » (de celui du Christ). Ayant donné
ce sens à hoc, il a cru un second hoc nécessaire devant esse
ADDITIONS DE P 77
23,19 vel ne a vobis quandoque [a] Christianis fugentur
24,3 prineipem mundi perfectae [peritiae] maiestatis
26,3 si [Deo] non deliquisset ultimo in Christum
27,5 licet subiecta sit nobis tota vis daemonum ..., ut
nequam tamen [et] servi
sortitos. Mais Tert. n'aurait pas ainsi répété hoc. — Tert. est
seul à dire que Minos et Rhadamanthe ont obtenu leurs
fonctions par le sort. Virgile, Aen., 6, 431, dit que Minos tire
au sort les juges qui doivent l'assister ; ce passage peut avoir
trompé Tert., qui écrit souvent de mémoire. Voy. App. I,
ad 46,13.
— 23,19. a n'est peut-être qu'une répétition inconsciente
de a qui précède. Peut-être aussi l'addition de a vient-elle
de ce qu'on n'a pas compris quandoque Christianis « devenus
chrétiens un jour ».
— 24,3. peritiae, dittographie de perfectae. Le mot serait
trop faible pour caractériser le Dieu suprême ; en outre, il
faudrait au moins supposer l'omission de et, car les génitifs
en cascade ne seraient guère supportables. L'absence de et
trahit l'insertion de peritiae.
— 26,3. On attendrait au moins in Deum, comme in
Christum. Avec delinquere, Tert. met toujours une préposition
{in, erga). Thés. 1. 1., V, 460, 18. Adv. Marc, 2,28, p. 375,25 :
utique periturum, nisi si nihil deliquit in Christum. De pat.,
5,9, p. 17 : Israhel ... in Deum deliquisse. — L'asyndeton
devant ultimo n'est guère admissible. Tertullien veut dire
que les Juifs seraient parvenus à secouer le joug des Romains,
s'ils n'avaient fini par pécher contre le Christ. Il ne fait pas
allusion ici aux péchés des Juifs envers Dieu (21,5), ni à la
première soumission de la Judée (16,3), qui est antérieure
à la naissance du Christ, mais aux révoltes qui eurent lieu
sous Vespasien et sous Hadrien : si les Juifs n'avaient pas
péché contre le Christ, Rome ne serait pas parvenue à leur
imposer définitivement sa domination.
— 27,5. et nequam tamen servi F. — Dans F, et est une
78 ADDITIONS DE P
30,6 ut mirer ... cum [quibus] praecordia ... examinantur
38,5 et ampla negotia Christianae {se. factionis)
39,2 ut ad Deum ... precationibus ambiamus [orantes]
40,2 ad leone[ne]m
faute pour ut, ce qui est fréquent. — Tert. compare l'attitude
des démons à celle de « méchants esclaves ». La condition
des démons est d'être esclaves des hommes (subiecta nobis) :
ils se révoltent « comme de méchants esclaves ». Tert. ne
compare pas les démons à tous les esclaves, bons ou mauvais
(servi doit donc avoir une épithète, qui est nequam), ni à des
malfaiteurs en général (nequam), car au § 7, il parle encore
d'esclaves de la peine {servi poenae). Donc et est de trop dans
P. Cf. Adv. Marc, 1,7, p. 298,27 : quanti {= quoi) nequam
servi regum nominibus insultant, Alexandri et Darii et Olo-
fernae.
— 30,6. cum, au lieu de cm (F), par suggestion de cum
qui précède ; quibus est une addition qui trouble la construc-
tion : on a voulu donner un complément à cum. Des éditeurs
modernes ont corrigé en cm quidem.
— 38,5. Ces mots terminent le chap. 38 dans P ; ils ne
sont pas dans F. C'est un fragment de résumé du chapitre
suivant où Tert, expose ce qu'il appelle les negotia Christianae
factionis. Ecrit en marge, ce résumé aura été malencontreuse-
ment inséré dans le texte par un scribe distrait. Voy. ci-après,
p. 83, sur 37,8.
— 39,2. orantes paraît superfétatoire après precationibus.
Sur ambire, voy. De pud., 5,14: eisdem precibus ambiunt.
Ibid., 22,1 : statim ambiunt moechi, statim adeunt fornicatores,
iam preces circumsonant. De ieiun., 7, p. 283,3 : Anna quoque
ambiens ... impetravit facile a Deo. On voit que ambire, assiéger
par ses prières, s'emploie sans compl. dir. de la personne,
dans le sens de « supplier ». Ad Deum = apud Deum. Thés.
l. L, I, 1850, 18.
— 40,2. Ci-dessus, p. 70.
— 40,2. rei « coupables de » est une glose de inlices, mot
archaïque et rare. Plaut., Poen., 745 : qui illi malae rei tantae
ADDITIONS DE P 79
41.1 VOS [rei] publicorum incommodorum inlices
41,6 debuerant [quos seperare deberent a meritis Chris-
tianorum]
44.2 fquis] idem etiam Christianus adscribltur
45.5 contingat [et] plerumque
45.6 recogitate [ea] etiam
45.7 ipse qui [timentes] iudicat
47.3 si quid in sanctis [scripturis] offenderunt digestis
fuimus inlices. ApuL, Apol., 41 : inlex animi Venus. Ibid.,
44 : inlices oculos, des yeux provocateurs. Tert., De paen.,
9,3 : conversationem iniungens miser icordiae inlicem. — Rei
est de trop, parce que inlices exige ici un complément.
— 41,6. Ces mots terminent le § 1 ; ils ont été répétés
ici par une distraction du scribe.
— 44,2. quis embarrasse la phrase. Quis illic sicarius ...
idem etiam Christianus adscribltur ? Quel est l'assassin accusé
devant vous qui soit en même temps (idem) qualifié « chré-
tien » ? L'intrusion du deuxième quis donne un contresens.
Sur adscribltur, voy. 21,11.
— 45,5. La phrase contient déjà deux et, qui unissent
evadere et contemnere.
— 45,6. Voyez" App. I.
— 45,7. ipse qui iudicat est une périphrase pour le pro-
consul. Nous craignons, dit Tert., Celui que devra craindre
celui-là même qui nous juge ; nous craignons Dieu et non le
proconsul. Que voudrait dire qui timentes iudicat ? Celui qui
juge les chrétiens qui le craignent ? Mais, ils ne craignent
que Dieu. Celui qui juge les chrétiens, qui craignent Dieu ?
Cela n'a pas de sens ici. En outre, timentes détruit la clausule
(double crétique).
— 47,3. Kroymann, Quaest. crit. Tert. (1893), p. 47, lit :
si quid in sanctis scripturis offenderunt digestum. Il nous paraît
plus probable que scripturis est une glose de digestis, mot
plus rare. Sur digesta appliqué aux Ecritures, voy. Hoppe,
Syntax, p. 121. Thés. l. /., V, 1 120, 67.
80 ADDITIONS DE P
47,3 [ex] pro instituto curiositatis
48,7 omnium [animarum] animatore
48,11 sub unitate [cum] constarent
— ita [destinata] distincta conditione
48,13. nec mors iam [nec] rursus, ac rursus resurrectio
— 47,3. Les philosophes sont de curieux chercheurs par
profession : c'est « à cause de leur habitude de curiosité »,
à cause de leur esprit curieux qu'ils ont cherché dans les
Ecritures et y ont fait des découvertes. Ex est une glose de
pro, car le mot proinstitutum n'existe pas. Hartel, Patr. Stad.,
II, p. 68,2, propose de lire: et pro instituto curiositatis ad
propria verterunt. C'est un contresens, car les mots pro instituto
curiositatis vont avec si quid offenderunt. Voy. App. I.
— 48,7. L'esprit (spiritus), par lequel Dieu a tiré l'univers
de la mort du néant, c'est son Verbe. Voy. ch. 21, 10-11. Il a
donné la vie à toutes choses {omnium animatore) ou du moins
une sorte de vie. Les exemples suivent ; la lumière, les astres,
les saisons, les fruits, tout enfin vit, périt et renaît : omnia
pereundo servantur, omnia de interitu rejormantur. Donc
omnium — omnium rerum, et non : omnium animarum, à
moins qu'on n'entende par animae « tout ce qui vit », même
de cette vie ou de cette sorte de vie dont Tert. parle ici. Il
est vraisemblable qu'un lecteur, qui n'a pas compris la pensée
de Tertullien, le sens de omnium, a ajouté animarum.
— 48,11. cum paraît être une répétition de la première
syllabe de constarent. Il trouble la construction de la phrase.
— destinata n'a pas de sens ici. C'est peut-être une répé-
tition antérieure de distincta. Il faut écrire : condicione.
— 48,13. Le sens est: «plus de mort nouvelle et plus de
nouvelle résurrection ». Le copiste a répété nec pour avoir
nec mors nec resurrectio, ne voyant pas qu'à une mort (nec
mors iam) il a opposé des résurrections successives {rursus
ac rursus resurrectio). C'est la réponse à l'objection du § 10 :
Ergo, inquitis, semper moriendum erit et semper resurgendum.
ADDITIONS COMMUNES A F ET A P 81
50,1 Plane volumus [pati], verum eo more, quo et bel-
lum [miles] nemo quidem libeiis patitur, cum ...
50,5 totum sese [Atheniensium] atheneis (in marg.
aethneis) incendils donavit
XII. Additions communes à F et à P.
Il n'y a pas un seul paragraphe où l'on puisse affirmer
catégoriquement qu'il y a addition à la fois dans F et
dans P. Nous allons examiner quelques passages où l'on
peut au moins conjecturer qu'une phrase ou un membre
de phrase a été ajouté au texte primitif.
— 50,1. F n'a ni pati ni miles. Après si pati vultis, il est
inutile d'exprimer pati avec volumus. Miles est une glose de
nemo, suggérée par bellum. En tous cas, on ne peut pas couper
la phrase devant Nemo quidem libens patitur, même si l'on
conserve miles ; car nemo serait trop général après miles et
patitur doit avoir pour complément bellum. Miles nemo
serait mis pour miles nullus. Cf. Ad martyr,, 3 : Nemo miles
ad bellum cum deliciis venit. Et plus loin : Etiam in pace labore
et incommodis bellum pati iam ediscunt (milites). — Tert.
compare souvent le chrétien à un soldat. Ici, il n'a pas exprimé
le mot miles et il dit en général nemo, comme il dit plus loin :
(/s) qui de proelio querebatur, et non miles qui. L'addition de
pati et celle de miles peuvent venir de gloses marginales ou
d'un remanieur, qui aura voulu préciser la comparaison.
Rigaltius et Havercamp rejettent aussi ces deux mots.
— 50,5. F a seulement Aetneis « aux feux de l'Etna ». Dans
P, atheneis a été corrigé, en marge, en aethneis (= Aetnaeis).
Depuis Rhenanus, on corrige Atheniensium en Catanensium ;
mais on voit facilement que ce n'est qu'une mauvaise glose
d'atheneis, mis pour Aetnaeis. Callewaert, La valeur du Cod.
Fuld., p. 167.
6
82 ADDITIONS COMMUNES A F ET A P
33,4. Minor erat, si tune deus diceretur, quia non vere
diceretur. FP
C'est à tort, croyons-nous, que cette phrase a paru suspecte
à Havercamp. Ce serait une glose explicative de Maior est ...
qui suit. Valde suspecta sunt mihi haec verba, dit Havercamp,
nec dubito quin sit glossema,quod ex or a libri alicuius irrepserit.
L'antithèse Minor erat et Maior est, ainsi que la répétition
de l'idée sous une autre forme, sont dans le gofàt de Tert.
34,3. quod non potest credi
Sorte de parenthèse placée après debeat dici dans P et après
adulatione dans F. Cette incertitude peut la rendre suspecte,
malgré sa forme rythmique, crétique et trochée.
On se demande si ce n'est pas une glose marginale, insérée
par les copistes à des places différentes. Rigaltius la supprime
simplement, satis imperiose, dit Havercamp, qui propose
de lire : quod non potest (scilicet dici), (nisi} non modo tur-
pissima etc. Van der Vliet, p. 39, conjecture : quod non potest
credi (nisi) non modo turpissima, etc.
La parenthèse est embarrassante : on ne sait à quoi il faut
la rapporter. Elle ne convient pas à ut imperator deus debeat
dici, car ce qui est « incroyable », ce n'est pas ut imperator
deus debeat dici, mais ut imperator deus sit. Elle ne convient
pas non plus à non modo turpissima ... adulatione, car le
flatteur ne croit pas {credi), il se borne à affirmer (dici). Voy.
App. I.
37,8. Paene omnes cives Christianos hostes habendo,
hostes maluissetis vocare generis humani potius quam
erroris humani F ; paene omnes cives Christianos haben-
dos et hostes maluistis vocare generis humani potius
quam erroris humani. P
Dans F, maluissetis est probablement une erreur du copiste,
pour maluistis. — Toute cette phrase ressemble à un résumé
ADDITIONS COMMUNES A F ET A P 83
assez maladroit des § 8-10. Tous les mots se retrouvent soit
dans le § 8, soit dans le § 10. Les uns {paene omnes cives Chris-
tianos) répètent inutilement ce qui précède ; les autres vien-
nent trop tôt et nuisent à l'effet de la phrase finale du
chapitre. Nous sommes disposé à croire que c'est un résumé
marginal, inséré dans le texte par un copiste. Nous avons vu
d'autres résumés qui ont passé de la marge dans le texte.
Cf. 25,1 : de Romanis F. 38,1 : et ampla negotia Cliristianae
(se. fadionis) P.
38,5. id est, animi aequitatem P; id est, animae aequi-
tatem F
Voy. ci-dessus, p. 59. — Rigaltius omet ces mots, les consi-
dérant comme une glose, et Havercamp le suit. La formule
id est introduit, en effet, souvent une glose (Havet, § 1107) ;
mais elle est très fréquente dans le texte authentique de Ter-
tullien (Apol., 2,1 ; 6,8 ; 14,7 ; 21,10 ; 17 ; 23,10 ; 32,3 ; 35,9 ;
38,5 ; 40,3 ; 48,4) comme dans celui de Minucius Félix (25,3 ;
5 ; 11 ; 26,12 ; 29,5 ; 30,5). Tertullien cite plus d'une fois
l'opinion d'Epicure sur le plaisir. De spect., 28, p. 27,10 :
philosophi quidam hoc nomen (se. voluptatis) quieti et tran-
quillitati dederunt. De pallie, 5, p. 951 0. : Certe cum ad Epi-
euros etZenonas ventum est, sapientes vocas totum quietis magis-
terium, qui eam summae atque unicae voluptatis nomine cotise-
cravere. Tamen propemodum mihi quoque licebit in publicum
prodesse. Ici il n'était pas nécessaire de définir aliam volup-
tatis veritatem, opposé à alias voluptates : l'opinion d'Epicure
était connue de tous et Tert. a l'habitude de supposer à ses
lecteurs une certaine érudition. On conçoit qu'un lecteur
des temps postérieurs ait voulu faire montre de science.
Cependant ces mots ne sont pas superfétatoires ni nuisibles
au style ; il faut donc les conserver.
45,7. Deum, non proconsulem, timentes. FP
Ces mots, qui terminent la phrase en mettant les points
sur les i, nous paraissent affaiblir plutôt l'effet de l'antithèse.
84 ADDITIONS COMMUNES A F ET A P
eum timentes, quem timere debebit ipse qui iudicat, qui est
suffisamment claire par elle-même. En outre, la répétition
de timentes est choquante. Ces quatre mots ressemblent beau-
coup à une glose explicative introduite dans le texte. Haver-
camp disait déjà : Suspecta haec mihi valde. Il trouvait timentes
intolérable : il proposait de faire une nouvelle phrase et
de lire : Deum, non proconsulem timemus. Il est plus probable
que ces mots sont une glose dans laquelle quelque lecteur
avait remplacé les périphrases du texte par les mots propres.
Dans un ouvrage qu'il venait d'écrire, Tert. se contente du
mot propre. Ad martyr., 2 : ludicia denique non proconsulis,
sed Dei sustinet {=exspectat, se. mundus).
49,3. proinde nec inepta esse possunt. P
Modius garde le silence sur ce membre de phrase, qui est
donné par De la Barre. Il nous paraît être une addition mal-
heureuse. Voy. App. I.
Observation. - Suivant notre plan, nous avons dû négliger
ici toute une catégorie d'additions et d'omissions qu'on peut appeler
littéraires ou stylistiques. Le style de Tertullien comme celui de
Tacite, se distingue par l'emploi fréquent de l'ellipse : il est concis
au point que parfois la clarté en souffre. Or, l'ellipse se trouve
tantôt dans F, tantôt dans P.
2,5. O quanta illius praesidis gloria fuisset... !
Ici,fuisset manque dans P. Dans F, la clausule est un crétique et
un trochée ; dans P, c'est un double crétique.
17,2. Ideo verus et tantus est !
Ici, est manque dans P. Dans F la clausule est un crétique et un
trochée ; dans P, c'est un double crétique.
Les passages où le verbe esse est ainsi soit omis soit ajouté sont
assez nombreux. Ailleurs, c'est un verbe déclaratif ou un verbe
analogue (9,20; 10,7; 19,5; 21,3, etc.) ou un autre verbe déjà
exprimé précédemment (8,8: venire F) ou un substantif (4,12:
lex P; 21,22: ludaeorum^ etc.) ou un pronom non requis par le
sens, qui ne se trouvent que dans l'une des deux traditions.
Ces différences sont surtout nombreuses en ce qui concerne les
particules de tout genre.
ADDITIONS COMMUNES A F ET A P 85
C'est tantôt dans F, tantôt dans P, que ces mots manquent et
aussi souvent dans l'un que dans l'autre. Il est ordinairement diffi-
cile de dire s'il y a omission ou addition, c'est-à-dire si le texte
authentique de Tertullien contenait le mot en litige.
Ce qui est certain, c'est que le plus souvent l'addition ne vient
Pas d'un scribe, mais d'un remanieur, qui a voulu rendre le texte
plus clair. C'est pourquoi nous avons réservé ces passages pour les
étudier dans leur ensemble.
86
TRANSPOSITIONS.
XIII. Transpositions dans F et dans P.
En comparant F à P, on rencontre des transpositions
assez nombreuses. Il y en a de deux sortes : c'est un mot,
ou un membre de phrase, ou même une phrase entière
qui a été transposé dans l'une des deux traditions.
10 Transposition d'un mot. C'est souvent le mot
déterminant qui suit le mot déterminé au lieu de le
précéder et vice versa. Dans ce cas, l'ordre des mots est
assez indifférent et il est difficile, le plus souvent, de don-
ner la préférence à l'une des deux traditions sur l'autre.
2,13 audire laboratis
2,18 aliter nos
7,3 etiam ipsi
9.7 de necis génère
9.8 homicidio semel
10,9 patrem aut matrem
11,3 melioris condicionis
11,13 homines illos
15,2 detractum de caelo
20.2 interna et externa
21,17 cum ... excuteret verbo
26.3 si non ultimo deliquisset
39,6 non epulis inde
44,1 tam verum, tam grande
50,15 ipsa illa
elaboratis audire
nos aliter
ipsi etiam
de génère necis
semel homicidio
matrem ac patrem {avec un
chiasme)
condicionis melioris
illos homines
de caelo iactalum
externa atque interna
cum verbo ... excuteret
si non deliquisset ultimo
inde non epulis
tam grande quam verum
illa ipsa
Ch. 2,13. La lecture de P, elaboratis audire donne une clau-
TRANSPOSITIONS DANS F ET DANS P 87
suie familière à Tertullien (crétique et trochée). (Dans notre
texte, nous avons imprimé elaboratis au lieu de laboratis.)
Ch. 9,7. de necis génère dlffert donne également un crétique
(avec la deuxième longue résolue) et un trochée.
Ch. 10,9. Cf. Ad nat., 2,19, p. 119, 23 : patrem ac matrem.
Dans P, il y a un chiasme : non caeliim ac terram matrem ac
patrem.
Au ch. 44,1, la leçon de F, tam verum, tam grande, pouvait
être conservée ; en effet, on peut la considérer comme un
asyndeton à deux membres : « une perte si vraie, si grande
pour la république », et le sens est à peu près le même que
celui de tam grande quam verum « une perte aussi grande que
réelle ». — Tert. aime à employer tam ((tellement, si » devant
un adjectif et devant un adverbe. La locution tam ... quam
pour non modo ... sed etiam lui est aussi familière (16 fois dans
V Apologétique). Voy. P. Henen, Index verborum, p. 153.
Mais il arrive aussi que la simple transposition d'un
mot devienne la cause d'un vice grammatical ou d'un
contresens : dans ce cas, on peut déterminer lequel des
deux manuscrits a conservé le texte authentique.
— 17,3. Hoc est, quod Deum aestimari facit, dum aesti-
mari non capit F ; hoc, quod est, dominum aestimari
facit, dum aestimari non capit. P
Dans P, dominum (dnm) est une faute fréquente pour
deum (dm). Ces deux abréviations sont souvent confondues.
Voy. Leçons fautives, (P), ch. 13,4.
Hoc est, quod est devenu dans P : hoc, quod est, c'est-à-dire
que est a été transposé.
Dans F, hoc annonce dum ; ailleurs sic joue le même rôle.
Voici donc l'idée : 1°) Dieu est si grand que, seul, il sait jus-
qu'où va sa grandeur, que, seul, il l'embrasse dans toute son
étendue ; 2)» ce qui donne une idée de sa grandeur à l'esprit
humain, c'est que, pour lui, cette grandeur est incommen-
surable ; 30) conclusion : ainsi, l'immensité de sa grandeur
b8 TRANSPOSITIONS DANS F ET DANS P
le cache et le dévoile à la fois aux hommes. Cette conclusion
contient à la fois le 1° et le 2°. Junius a ajouté cette observa-
tion : evidentius. — Tert. exprime ailleurs la même idée en
d'autres termes. Adv. Marc, 2,2, p. 334, 23 : Reddens nomen
un negas substantiam nominis, id est magnitudinem, non
tantam eam agnoscens, quantam si homo omnifariam nosse
potuisset, magnitudo non esset. La grandeur infinie de Dieu
ne mériterait pas le nom de grandeur, si un être fini et borné
pouvait la concevoir. L'homme comprend que Dieu est infini-
ment grand en constatant qu'il est incapable de concevoir
cette grandeur.
Tert. aime à annoncer dum par un pronom ou par sic. Voy.
Hoppe, Syntax, p. 79. Voici un exemple où l'on trouve l'un
et l'autre. Adv. Marc, 2,5, p. 339, 30 : Nam et si ex aligna
mater ia {facta sunt opéra creatoris), ut quidam volunt, hoc
IPSO tamen ex nihilo, dum non id fuerunt, quodjunt. Postremo,
vel SIC magna, dum bona, vel sic deus potens, dum omnia ipsius,
unde et omnipotens. Adv. Hermog., 5, p. 132,4 : {quia} et
EX HOC alius deus non possit admitti, dum nemini licet habere
de deo aliquid. Adv. Marc, 4,9, p. 441,12 : Hoc magis meo
Christo competere sic doceo, dum tuo non competere demonstro.
De exh. cast., 3 : dum melius illud facit, ita bonum haberi
cogit. Adv. Marc, 3,1, p. 377,19 : ut, dum Christum probamus
creatoris, sic quoque deus excludatur Marcionis. Ibid., 4,9,
p. 441,24 : quasi hoc modo melioris, dum ...
Dans P, est a été transposé. Que peut signifier, en effet :
Hoc, quod est, Deum aestimari facit, dum aestimari non capit.
1° Hoc, quod est peut signifier : « ce que Dieu est », c'est-
à-dire : « son essence, son infinie grandeur », nous donne une
idée de lui, de son infinie grandeur, ce qui ressemble
à une tautologie. Ce n'est pas la pensée de Tertullien, qui
veut dire que « l'impossibilité de concevoir Dieu tel qu'il
est nous donne une idée de sa grandeur incommensurable ».
2" Hoc, quod est peut signifier aussi : « ce qui existe, la
création, l'univers créé par lui, nous donne une idée de Dieu,
alors qu'il est impossible d'en avoir une idée ». C'est une
contradiction manifeste, qui ne correspond pas aux oxymora
précédents. Ensuite la locution hoc, quod est est obscure pour
TRANSPOSITIONS DANS P ET DANS F 89
désigner ce que Tert. appelle au § 4, opéra eius.Ce serait aussi
une anticipation malheureuse sur le § 4, oh les mots Vultis
etc. montrent que c'est pour la première fois que Tert. précise
les moyens de connaître Dieu. Ces moyens sont du reste au
nombre de trois : deux moyens naturels (la création et l'âme,
17,4) et un moyen surnaturel (la révélation, 18,1). Enfin la
conclusion Ita eum ne correspondrait plus aux prémisses :
c'est la grandeur incommensurable de Dieu, et non la création,
qui fait qu'il nous est à la fois connu et inconnu : a) cette
grandeur n'est connue tout entière que de Dieu ; b) l'impos-
sibilité pour nous de la concevoir nous en donne une idée.
Telle est la pensée de Tertullien et c'est aussi celle de Minu-
cius Félix, 18,8 : Nobis vero ad intelledum pedus angustum
est, et ideo sic eum digne aestimamus, dum inaestimabilem
dicimus. Le traité Quod idoia, 9, reproduit cette phrase.
— 16,7. Sed et Victorias adoratis, eum trophaeis intes-
tina sint F ; sed et Victorias adoratis, eum in tropheis
cruces intestina sint tropheorum. PM
Sur la lecture de F, voy. ci-dessus, p. 40-41. Ce passage
sera clair et correct si l'on transpose eum. On aura : Sed et
Victorias adoratis in tropaeis, eum cruces intestina sint tro-
paeorum. « Mais vous adorez aussi les victoires dans les
trophées, bien que les trophées aient des croix pour entrailles ».
On évite ainsi la tautologie intolérable qui résulte de in tro-
paeis et tropaeorum dans une seule et même proposition.
Dans P, eum a également été transposé au ch. 48,6. Voy. plus
loin, p. 93.
Cette transposition nous paraît préférable à celle que pro-
posait Kroymann : Quaest. Tert. crit., p. 40 : Sed et Victorias
eum adoratis in tropaeis, cruces intestina sunt tropaeorum. Il
est obligé de changer en outre sint en sunt ; or sint est la lec-
ture de FPM.
Dans F, ce passage a été fort maltraité : la conjonction
eum y a été également transposée et, outre cruces, qui est
indispensable (ci-dessus, p. 41), il est probable que in manque
devant tropaeis et que tropaeorum est tombé à la fin. Cf. Ad
90 TRANSPOSITIONS DANS F ET DANS P
nat., 1, 12, p. 83,13 : cmces erunt, intestîna quodammodo tro-
paeorum. Les mots sint tropaeorum forment une clausule
familière à Tertullien (crétique et trochée), tandis que intes-
tina sint est une clausule très rare (trochée ou spondée et
crétique).
— 19,8. ne vel minus *F ; vel ne minus P
Vel doit suivre ne, dont dépendent les deux propositions
unies par vel... vel.
— 21,14. et qui pênes vos eiusmodi fabulas ad destruc-
tionem veritatis istius aemulas praeministraverint. F
et qui pênes vos eiusmodi fabulas aemulas ad destruc-
tionem veritatis istiusmodi praeministraverint. P
Sur istiusmodi, pour istius, voy. ci-dessus, p. 75.
Tertullien vient d'exposer aux païens la nature du Verbe
et l'incarnation du Fils de Dieu. Il sait que les païens trai-
teront cette vérité {veritatis istius) de « fable » et il adopte
pour un instant (intérim) leur langage, comme il le fait ailleurs.
Voy. App. 1.
« Accueillez pour le moment cette « fable », continue-t-il
— elle est semblable aux vôtres — , jusqu'à ce que nous mon-
trions (au ch. 23, 12 : et quis ille Christus cum sua fabula)
comment le Christ est prouvé et qui a fourni d'avance chez
vous des fables rivales du même genre pour détruire cette
vérité ».
Les inventeurs de ces fables sont les démons. Au ch. 47,
11-14, Tert. montrera de même que les démons ont inspiré
aux poètes et aux philosophes des fables qui ressemblent aux
croyances chrétiennes sur le jugement dernier, sur l'enfer et
le paradis, pour enlever d'avance tout crédit à ces croyances :
ab his quaedam etiam fabulae immissae, quae de similitudine
fidem infirmarent veritatis.
Eiusmodi fabulas, ce sont « des fables du même genre » que
l'incarnation du Fils de Dieu, des fables relatives à des fils
TRANSPOSITIONS DANS F ET DANS P 91
de dieux (ôeôyovot.), et spécialement aux fils de Jupiter, comme
on le voit dans les § 7-9. Voy. ci-dessus, p. 75.
Aemulas veut dire que ces fables païennes imitent, contre-
font cette vérité chrétienne pour la détruire, qu'elles lui res-
semblent et lui font concurrence pour la ruiner. Les mots
ad destructionem veritatis istius, placés entre fabulas et aemulas
dans F sont donc complément de aemulas « rivales, concur-
rentes, semblables » (par contrefaçon). L'idée est la même
qu'au ch. 47,11 : fabulas ad destructionem veritatis istius
aemulas = fabulas quae de similitudine veritatem islam de-
struerent. Tacite construit aussi aemulus avec ad'Ann., 12,54:
aemulo ad teterrima Ventidio, Ventidius imitait Félix pour
commettre les excès les plus odieux.
Le reviseur de P a cru que le complément de but, ad des-
tructionem veritatis istius, se rapportait à praeministraverint
et il a placé aemulas à côté de eiusmodi fabulas, où cette
épithète paraît faire double emploi avec eiusmodi.
Sur aemulas = similes, pares, voy. Scorp. 5, p. 154, 27 :
quod ferme pares adliibet qualitates medellarum adversus qua-
litates querellarum. Ibid., 155, 22 : sed dominus ... paulatim
remédia composuit, omnes fidei disciplinas et ipsas aemulas
vitio. Tert. appelle le démon « contrefacteur de Dieu »,
diabolus divinorum aemulator (De ieiun., 16, p. 296, 1 1), aemu-
lus Dei interpolator naturae (De cultu fem., 1,8. Cf. De spect.,
2, p. 3,7).
Dans Ad nat., 3,13, p. 124,11, on peut restituer : fabulas
aemulas, au lieu de : fabulas similes, que propose Oehler et
que Reifferscheid a admis.
— 30,7. Hic erit crimen, ubi veritas est Dei et devotio F ;
hic erit crimen, ubi veritas et Dei devotio est. P
Sur la tournure, comp. De spect., 28, p. 27, 16 : hic voluptas
ubi et votum. — Veritas Dei « le vrai Dieu » et devotio Dei » la
fidélité, la piété, la dévotion envers Dieu » résument les § 5
et 6, où Tertullien a dit 1) que le vrai Dieu est le seul qui
puisse exaucer une prière et 2) que le chrétien seul rend à
Dieu le culte que Dieu désire et que, par conséquent, il mérite
seul d'être exaucé.
92 TRANSPOSITIONS DANS F ET DANS P
Veritas Dei = Deus ver us, le subst. abstrait est mis à la
place de l'adjectf. Le génitif est objectif : « la vérité sur Dieu ».
Cf. 38,5 : etiam voluptatis veritatem. 45,2 : ad innocentiae
veritatem. Minucius Félix, 38,7 : si veritas divinitatis nostri
temporis aetate maturuit. Dans S. Paul, Ad Rom., 1,25; 3,7 ;
15,8, veritas Dei, r\ àX-riOèia toû 0eoû, a un autre sens.
DevotioDei = devotio ergaDeum. Génitif objectif. Cf. Lact.,
Inst. div., 2,12,15 : ut Deo patri summa devotione serviret.
Dans P, on a transposé Dei et le verbe est, peut-être parce
qu'on n'a pas compris Dei veritas.
— 35,7. De nostris annis augeat tibi luppiter annos. F
C'est un hexamètre qu'on trouve dans les Actes des Arvales.
Voy. l'apparat critique. La métrique exige qu'on lise avec P :
De nostris annis tibi luppiter augeat annos.
— 43,2. non dico iam qui de vobis daemonia discutiant,
non dico iam qui pro vobis quoque vero Deo preces fun-
dant, sed a quibus nihil timere possitis? F
P, qui présente d'ailleurs ici d'autres différences avec F,
porte : non dico qui iam pro vobis. Il est évident que iam a été
transposé par le copiste distrait ; en effet, iam se rapporte
à dico et la transposition détruit l'anaphore oratoire non dico
iam (formule de prétérition). Voy. App. L
— 45,2. Quanta prudentia hominis ad demonstrandum
quid vere bonum, tanta auctoritas ad exigendum ; tam
illa falli facilis, quam ista contemni. F
P renverse l'ordre des corrélatifs : tanta prudentia ... quanta
auctoritas. Il a aussi bonum au lieu de quid vere bonum. Cf.
De spect., 20, p. 21,26 : Non potest aliud esse, quod vere quidem
est bonum seu malum.
Les corrélatifs tantus quantus (ici : « aussi petit que ») et tam
quam expriment une idée de proportion ou d'égalité et non
TRANSPOSITIONS DANS F ET DANS P 93
de causalité. Tert. ne veut pas dire ici que l'autorité de
l'homme est faible, parce que sa science est imparfaite ; il
constate seulement qu'elles sont également petites. La seconde
partie de la phrase le prouve à l'évidence : l'ordre des termes
y est renversé. La locution tam qmm a du reste généralement
le sens de et ... et ou non modo, sed etiam. Il en résulte que
Tert. pouvait dire ici quanta ... tanta ou tanta ... quanta, indif-
féremment. C'est dans les § 5-7 qu'il expliquera pourquoi
l'autorité de l'homme est inférieure à celle de Dieu et il ne
dira pas — ce qui d'ailleurs serait juste — que la faiblesse
de l'autorité humaine vient des défaillances de la sagesse
humaine : elle vient a) de ce que le criminel lui échappe sou-
vent et b) de ce qu'elle ne dispose pas d'une sanction efficace.
Voy. App. L
— 47,3. Dum ad nostra conantur sed (et P) homines
gloriae, ut diximus, et eloquentiae solius libidinosi F
Il faut lire probablement : homines et gloriae, ut diximus,
et eloquentiae solius libidinosi, car et gloriae correspond à et
eloquentiae (= non modo, sed etiam). S'il en est ainsi, nous
avons ici une transposition commune aux deux traditions.
Dans F, et est devenu, en outre, sed, ce qui s'explique une fois
qu'on avait écrit : conantur et homines ; en effet, un scribe
a pu écrire set (pour sed), en prenant l'r final de conantur pour
un s. Sur cette confusion, voy. 49,4 et 50,3 et 13, dans P.
— 48,6. qui non eras, factus es ; et iterum, cum non eris,
fies. F
Au lieu de : et iterum, cum, P a : cum iterum. — Iterum
doit précéder cum, car il se rapporte à fies. Parlant de la
résurrection des corps, Tertullien dit : « Il ne t'arrivera rien
d'extraordinaire : tu n'étais pas et tu as été fait ; quand tu
ne seras plus, tu seras fait de nouveau ». Cum non eris cor-
respond à qui non eras, et iterum fies à factus es. — Voy. ci-
dessus, p. 89, cum transposé dans F et dans P au ch. 16,7.
94 TRANSPOSITIONS DANS F ET DANS P
2° Transposition d'un membre de phrase ou d'une
phrase. — La transposition d'un membre de phrase peut
être indifférente au sens :
1.9 quod non poterant odisse, si sciant F
quod si sciant, odisse non poterant P
10,2 si eos non colerent, quia putarent non esse, quos constaret
esse F
si, quos non colerent, quia putarent non esse, constaret illos
deos esse P
34,2 quomodo qui pater patriae est, dominus est ? F
qui pater patriae est, quomodo dominus est ? P
41,4. a Deo obveniunt {lege : obveniant), vobis in castigationem F
vobis in castigationem a Deo obveniant P
La transposition d'un membre de phrase ou d'une pro-
position peut aussi modifier ou troubler le sens.
— 5,7. quas nullus Vespasianus, etc.
Dans F, les empereurs Vespasien, Hadrien, Antonin le
Pieux et Verus se succèdent dans l'ordre chronologique.
Dans P, Vespasien est placé après Hadrien, on ne voit pas
pourquoi. Il n'y a pas de gradation, ni ascendante, ni descen-
dante, qui puisse justifier la dérogation à l'ordre historique.
On peut conjecturer que la répétition de nullus a troublé
le scribe de P. Passant du premier nullus au second, il avait
omis le premier membre de phrase (quas nullus Vespasianus...),
qui comprend 48 lettres. Puis, s'étant aperçu de l'omission,
il l'a réparée en faisant suivre aussitôt ce qu'il avait omis.
Eusèbe, Hist. eccL, 5, 5, 7, a même mis Trajan à sa place
chronologique, bien qu'il cite la traduction grecque. Evidem-
ment, c'est le traducteur (ou Eusèbe) qui a volontairement
modifié le texte de Tert. Celui-ci a mis Trajan en tête, tout
simplement parce qu'il avait exposé longuement l'attitude
de Trajan au ch. 2, 6-8 : c'est un rappel de ce qu'il a déjà dit.
Ce qui prouve àl'évidence — on ne l'a pas remarqué jusqu'ici
— que Trajan a été mis à part et en tête, c'est qu'il n'entre
TRANSPOSITIONS DANS F ET DANS P 95
pas dans l'anaphore oratoire quas nullus. Dans Eusèbe, cette
anaphore (oûç ouxe) est interrompue maladroitement par
ou(; Tpaïavôç. Le traducteur n'a pas compris la raison pour
laquelle Tertullien n'a pas mis Trajan à sa place chronolo-
gique. Voyez aussi les observations de Harnack, Die grîech.
Uebersetz., p. 23 (158), et de Callewaert, Le Codex Fuld., p. 342.
— 16,8. Laudo diligentiam
F place ces deux mots avant siphara; P les place avant
noluistis. On les comprend à l'une et à l'autre place, comme
une approbation ironique. On aurait :
Omnes illi imaginum suggestus in signis monilia crucum
sunt : laudo diligentiam ! Siphara illa vexillorum et canta-
brorum stolae crucum sunt : noluistis incultas et nudas cruces
consecrare ! (F)
Ou bien : Omnes illi imaginum suggestus in signis monilia
crucum sunt ; siphara illa vexillorum et cantabrorum stolae
crucum sunt, Laudo diligentiam : noluistis incultas et nudas
cruces consecrare. (P)
La lecture de P est seule authentique ; en effet, la phrase
noluistis etc. est une approbation ironique à la fois de ces
colliers {monilia) et de ces robes (stolae), car incultas « non
parées » se rapporte aux colliers, qui sont une parure, et nudas
vise les robes, qui sont un vêtement. Dans Ad nat,, 1,12,
p. 83,19, il n'y a également qu'une seule approbation ironique
à la fin : Erubescitis, opinor, incultas et nudas cruces colère I
La transposition dans F est donc incontestable ; on ne
saurait dire si c'est une erreur de copiste ou une transposition
intentionnelle.
— 25,12. Auctis âge iam rébus religio profecerit. F
Placés au commencement du paragraphe, ces mots sont une
objection sous forme de concession, introduite par âge (cf. 8,9).
Tert. vient de montrer que les pauvres dieux romains de l'é-
poque primitive, Sterculus, Mutunus, Larentina, n'ont pu
donner l'empire à Rome. Mais on dira : quand Rome eut
96 TRANSPOSITIONS DANS F ET DANS P
grandi (auctis iam rébus), la religion a fait des progrès, Rorae
a eu des dieux puissants et un culte fastueux, preuves de sa
religiosité. Soit, dit TertUllien, admettons cela {profecerit,
subj. concessif). Mais comment attribuer la grandeur de
Rome à sa religion, si la religion n'a fait des progrès qu'après
l'accroissement de Vempire romain (ou du royaume, pour lui
donner le nom qu'il portait alors). Les mots auctis rébus et
post imperium désignent l'époque qui a suivi Numa, surtout
l'époque des Tarquins. Sous Numa, dit Tert., on ne trouve
pas encore ce progrès dans la religion : elle est encore simple
et pauvre. On ne le trouve que plus tard, quand Rome est déjà
devenue grande. La grandeur a précédé la religion, TertuUien
s'en tient aux termes de l'objection. Conformément à l'idée
romaine, il ne fait pas consister la religion romaine dans le
sentiment religieux, mais dans les cérémonies et les rites,
les temples et les statues {religione, id est cultu deorum, Cic,
De n. d., 2, 3, 8) : ce sont les manifestations extérieures, écla-
tantes de cette religiosité, qui, dit-on, aurait valu à Rome la
protection des dieux et l'empire. C'est avec les Tarquins et
les Grecs que le culte commence à devenir fastueux, que les
dieux ont des temples et des statues et que se montre la reli-
giosité romaine. Mais alors Rome est déjà grande, elle est
la cité maîtresse du Latium. Sa puissance (qu'on l'appelle
« empire » ou, comme on disait alors, «royaume») était déjà
fondée, Ergo non ante religiosi Romani quam magni.
L'expression auctis iam rébus est de TertuUien, car elle
est dans Ad nat,, 2,17, p, 132, 8, où Tert, dit: «Mais n'est-ce
pas après que Rome fut arrivée au sommet de la puissance
que la superstition romaine (le culte fastueux) fut cherché ? »
Atqui non post summum imperium auctis iam rébus superstitio
quaesita est ? Et il raisonne sur la pauvreté du culte de Numa,
comme ici, pour conclure : Ergo non ante religiosi quam
maiores, ( neque ideo maiores > quia religiosi. Cf. Hartel,
Patrist. Stud., II, p, 81,
Dans P, la phrase Auctis ,,, s'est fourvoyée et a subi une
mutilation : (^Auctis} âge iam rébus religio profecerit, placé
entre religio profecerit et Nam etsi. Sans auctis, elle n'a plus
aucun sens et, même complétée par auctis, elle est mal placée
1° parce que profecerit est répété à un trop court intervalle ;
TRANSPOSITIONS DANS F ET DANS P 97
20 parce que la concession vient après la réfutation {Sed
quam vanum ...), au lieu de venir avant. On ne peut faire que
des conjectures sur la cause de cette transposition. Le copiste
aura trouvé la phrase dans la marge, parce que son prédé-
cesseur l'avait d'abord oubliée. Comme âge iam commence
ordinairement la phrase, celui-ci avait omis auclis qui précède.
Sur âge ou âge iam, voy. 8,9 ; 48,1.
— 34,2. Quod non potest credi.
Placé après debeat dici (P) ou à la fin de la phrase (P). Voy.
ci-dessus, p. 82 et App. L
— 35,5. Quomodo celebranda occasio voluptatis etc.
L'ordre des mots diffère dans les deux traditions, mais
la construction de la phrase est différente aussi : il y a eu
probablement un remaniement intentionnel, qui ne doit pas
nous occuper ici.
— 38,5. Licuit Epicureis aliam decernere voluptatis
veritatem, id est, animae aequitatem : in que vos offen-
dimus, si alias praesumimus voluptates ? F
Sed licuit Epicureis aliquam decernere voluptatis
veritatem, id est, animi aequitatem, et ampla negotia
Christianae P
Dans F, il faut corriger : animi aequitatem. Voy. ci-dessus,
p. 59. — Sur les mots et ampla negotia Christianae, voy. ci-
dessus, p. 78.
Dans P, la phrase Sed licuit a été reléguée par erreur à la
fin du chapitre.
Traduisons : « Il fut bien permis aux Epicuriens de décréter
une nouvelle vérité sur le plaisir, à savoir l'égalité d'âme :
98 TRANSPOSITIONS DANS F ET. DANS P
en quoi vous offensons-nous, si nous admettons d'autres
plaisirs (que vous) ? ».
Dans ce qui précède, Tertullien a repoussé les jeux pour
deux raisons : les jeux tiennent au culte et ils sont immoraux ;
or, les chrétiens fuient l'idolâtrie et les plaisirs contraires
à la morale. Pour les païens, les jeux étaient surtout un
plaisir, auquel ils se livraient avec passion. Les chrétiens
faisaient scandale en s'en abstenant systématiquement ; leur
dédain irritait le peuple qui disait : les chrétiens méprisent
donc nos plaisirs ! C'est à ce reproche ou à cette objection
que Tert. répond, sans la formuler d'abord et même sans
transition. C'est que l'objection est dans tous les esprits. Ce
style décousu est dans la manière vive de Tertullien et il faut
se garder de croire qu'il y a une lacune devant Licuit Epicureis.
Voyez, par exemple, de quelle façon brusque il introduit
sa brillante tirade sur la fama au ch. 7, 8.
« Personne n'a trouvé à redire, dit-il, quand les Epicuriens
ont décrété que le vrai plaisir était dans l'égalité d'âme.
Personne n'a trouvé cela offensant. En quoi vous offensons-
nous ?... » On voit que ces deux phrases sont opposées l'une
à l'autre, mot pour mot : licuit à offendimus, decemere à prae-
sumere (se faire une idée préconçue, personnelle), aliam volup-
tatis veritatem à alias voluptates. Il en résulte que ces deux
phrases ne peuvent pas être séparées. Placée à la fin, la phrase
Sed licuit Epicureis aliquam decemere etc., serait séparée
de son antithèse. En effet, Tert. continue par des idées diffé-
rentes : 1° s'il nous plaît de ne pas prendre de plaisir du tout,
le dommage est pour nous ; 2" vous n'aimez pas ce que nous
aimons, comme nous n'aimons pas ce que vous aimez. Serf
reprobamus quae placent vobis ! Nec vos nostra délectant. Cette
phrase termine bien le chapitre, car, dans le chapitre suivant,
Tert. va parler des nostra, c'est-à-dire des negotia factionis
Christianae.
La transposition de la phrase Licuit Epicureis aliam a
amené l'addition de sed et le changement de aliam en aliquam,
qui est fautif. Voy. App. I. Cf. Heinze, p. 446, n. 2.
Tert. parle ailleurs de la doctrine d'Épicure sur la volupté.
De spect., 28. De pall., 5.
TRANSPOSITIONS DANS F ET DANS P 99
— 39,8. etsi vos parum homines, quia mali fratres FP.
Van der Vliet, p. 39, propose de lire : etsi vos mali fratres,
quia parum homines. Ce n'est pas l'idée de Tertullien. Les
chrétiens sont frères, les uns des autres, dit-il aux païens,
et ils sont aussi vos frères, parce que tous les hommes ont
pour mère la nature. Il ajoute une restriction : étant de mau-
vais frères (quia mali fratres), remplissant mal les devoirs
de frères qu'impose à tous les hommes leur communauté
d'origine, vous ne méritez guère le nom d'hommes.
100
LEÇONS FAUTIVES OU ERREURS PALÉOQRAPHIQUES.
Après avoir signalé les lacunes, les additions et les
transpositions qui sont certainement ou très probable-
ment dues à des accidents, nous arrivons aux fautes
paléographiques, c'est-à-dire aux mots ou passages défi-
gurés par les copistes successifs dans F et dans P. Les
deux traditions de V Apologétique ont subi le sort com-
mun à tous les manuscrits.
Un certain nombre des lacunes et des additions examinées plus
haut peuvent être rangées parmi ces altérations : ce sont celles qui
consistent dans l'omission ou dans la répétition d'une lettre ou d'une
syllabe dans un même mot ou au commencement ou à la fin d'un mot
(haphographie ou dittographie). Voy. ci dessus, p, 36, 45, 59-60,
69-70.
Nous allons examiner rapidement ces variantes pour
deux raisons :
10 Ces leçons fautives n'incombent ni à Tertullien
ni aux remanieurs, s'il y en a eu : ce sont des lapsus et
il faut en purger soigneusement le texte, si l'on veut
rétablir les deux traditions dans leur intégrité.
2° On verra clairement combien les deux traditions
sont différentes l'une de l'autre : chacune a ses fautes
propres et l'émendation de l'une est presque toujours
fournie par l'autre. Les fautes communes sont une rare
exception. Même dans les passages corrompus à la fois
dans F et dans P, les fautes diffèrent souvent de nature.
Les noms propres sont presque toujours défigurés dans
F et dans P, mais de façon différente. Les graphies fau-
LEÇONS FAUTIVES PROPRES A F 101
tives qui reviennent à plusieurs reprises dans l'un et
dans l'autre, ne sont pas les mêmes.
Il faut en conclure que, depuis une époque très reculée,
chacune des deux traditions a sa vie séparée, si je puis
ainsi dire : il n'y a plus eu de rapports entre elles.
XIV. Leçons fautives propres à F.
N. B. Quand la copie de Brème est correcte, nous ne tenons pas
compte des incorrections de Junius. Nous faisons suivre la leçon
fautive de F de l'émendation, presque toujours fournie par P.
— r I, I. animis F; nimis P. — Voy. App. I.
— I, 8. ex hoc ipso modo F ; hoc modo P; hoc ipso M. — On
peut lire : e.v hoc ipso ou hoc ipso modo. Voy, App. I.
— 1,9. gloriae F; auctoritate P. — Il faut un abl. de cause
{gloria). Voy. App. I.
— 2, 6. de ceteris F ; de cetero P. — Le scribe a opposé de ceteris
à quibusdam, qui précède, parce qu'il n'a pas compris de cetero. Voy.
App. I.
— 2, 8. timetipsum *F; temetipsam P. — Modius ne dit rien de
temetipswn, qui est une correction erronée, Tert. apostrophe la
sentence de Pline : O sententiam... ! Le mot senientia est sujet de
fiegatj mandat, eic, et l'apostrophe continue dans Quid temetipsam
censufa circumvenis? Si damnas, etc. C'est ce qu'on n'a pas compris
en mettant le masculin. Heraldus veut mettre censura en apos-
trophe : censura. Mais censura ne peut être sujet de damnas ni
à'inqtiiris. Le Thés. LL, III, 805, 2, a eu tort d'adopter cette inter-
prétation.
— 2, 12. erga nos F ; ergo nos P. — Le scribe a cru que nos
était pompl. de erga.
— 2, 15. apud vos solosquaestioniF; apud vossoliquaestioniP. —
Faux accord de soli avec le mot voisin vos. Voy. ci-après, au ch. XV.
— 2, 19. damnet F; damnetur P. — Signe de l'abréviation omis.
Clausule : crétique et trochée.
— 3, 4. quam odium F; quanti odium P.
— 4, 3. et cum tutoribus F; ut cum tutoribus P. — Et Qi ut
sont souvent confondus. Voy. 2, 6; \2, 2; 21, 12; 23, 12; 27, 5.
102 LEÇONS FAUTIVES PROPRES A F
^ - — 5/7- quos nullus Vespasianus F; quas nullus Vespasianus P.
— Le scribe s'est laissé tromper par le masculin Christianos, qui
précède immédiatement quns.
— 6, 7. specte F; prospecte P. — Le verbe simple s/>ecio est
archaïque. Le participe spectus et l'adverbe specte ne sont pas
attestés. Cependant Havercamp défend la lecture de F : Cum
antiqtia saepe rime tur, hoc verho uti potuit Tertullianns. Festus, p.
330 M : spectu, sine praepositione Pncuvius in Duloreste usus est,
cum ait : Amphis rubicundo colore et spectu protervo ferox (Ribb.
XXIII, p. 107). Cf. Varro, De l. L, 6, 82. De an.^ 24, p. 338, 23 :
satis inprospecte. — Il est plus probable que l'abréviation de pro a
été omise.
— 7, 3. tôt extranei F; quot extranei P. — Cf. 44^ i : tam verum
tam gravide.
— 9, 2. ad ipsum manus F ; id ipsummunus P. — Ci-dessus, p. 22.
— 9, 7. exponentes F ; exponitis P.
— 9, 8, conceptum uterum F; conceptum utero P. — La leçon de
P donne la locution ordinaire. Thés. L L, IV, 56, 71. Junius dit
(\nQ conceptum uterum est une locution juridique (ex iure phrasis).
Nous ne l'avons pas trouvée. Cf. Gell,, 3, 16, i : postquam mulieris
uterum semen conceperit. — Il est probable que le scribe a donné in-
consciemment la même désinence (-uvi) à deux mots voisins.
— ^,<). tragicis fabulis F; tragoecis ferculis P. — Ferculis, après
palulo, est évidemment ce que Tert. a écrit. Allusion au festin de
Thyeste, que le scribe n'aura pas saisie. Au surplus, /<r^c?//i5 est la
lectio difficilior.
— 9,10. rigulatorum et de rigulo F ; iugulatorum et de iugulo P. —
L'explication qu'on lit dans Junius ne repose sur rien. Il y a sim-
plement confusion de lettres dans rigulo pour iugulo. Ci-dessus,
p. 31.
— 9, II. in gladiatoris sanguinem iactavit F; in gladiatoris san-
guine iacuit. — Dans F, on peut lire : gladiatoris sanguinem iactavit,
ou : in gladiatoris sanguine se iactavit. Dans P, la fin n'est pas
métrique. Voy. App. I.
— 9, 15. Quem quid (qd Br) F; quem quidem P. — Signe de
l'abréviation mal compris.
— negandi. — Voy. ci-dessus, p. 20-21.
— 9, 17. materia F; materias P. — Le scribe a peut-être voulu
écrire materiam, mais a omis le signe de l'abréviation de vi.
— disperci F ; dissipari P. — Junius propose : dispergi.
LEÇONS FAUTIVES PROPRES A F 103
— et semel F; et simul P. — Voy. App. I.
— 9, i8. cuiusque ubique F; cuius ubique P. — Voy. ci-dessus,
p. 60. Influence du mot voisin.
. -^ concurrit F ; concurrat P. — Ce verbe dépend de ut.
— nequis F ; neque P.
— 9, 20. spe F ; species P. — Voy. ci-dessus, p. 22.
— 10, 6. certi F; certe P.
— 10, 8. et imagines F ; et imagine P. — Voy. ci-dessus, p, 62.
■'— 10, 9. e Caelo F ; de Caelo P. — 5 Caelo peut rester, comme
ex homme.
— Il, 16. militatiorF ; militarior P. — Confusion facile de ^ et /
dans l'écriture minuscule,
— 12, 2. factum F ; fatum P. — r Au ch. 25,3, P a fatum pour
factum.
— et rêvera F; ut rêvera. — Voy. 4, 3.
— ^^13, I. inluditis **F. — Voy. App. I.
— 13,6. vilioris F ; viliores P.
— 13,7. inhonorandos F ; honorandos P. — Inhonorandos est
une correction erronée. Le correcteur s'est dit que traiter les dieux
comme des morts, c'est plutôt les déshonorer. Il n'a pas saisi
l'ironie de Tert.
— abba F ; obba P. — Ohba est un mot rare, qui a peut-être fait
penser le pieux scribe au mot hébreu abba, père (Marc, 14, 56. Ad
Rom., 8, 15. Ad Gai., 4,6). Voy. 45, 7.
— 13,9. Larentiam -'F ; Larentinam P. — Cf. 25, 3 et 9.
— paedagogis *F ; paedagogiis P. — Voy. ci-dessus, p. 36.
— Phrynen *F ; Phrynem P. — Voy. 11, 15.
— Cinhothi F ; sinhodi P (= synodi). — Voy. App, I,
— 14, 4. Nuptuni F; neptuni P.
— 14, 6, proinde F ; prodi P.
— 14, 6, praeferantur F ; praefentur P. — Junius propose de
lire dans F : praefarentur. Voy, App. I.
— efBixerint F; afflixerint P. — Cf. Ad nat., i, 10, p. 79, 19 :
impenderint.
— 15, 1. Lentulos F ; Lentulorum P. — Lentulos pour Lentu/or.,
abréviation mal comprise.
— T vetustates F ; venustates P. — Le scribe n'a pas saisi le sens
concret de venustates « les élégances », c'est-à-dire « les élégantes
bouffonneries » des mimes.
— 153. arcem F ; artem P. — Confusion fréquente de c et /.
104 LEÇONS FAUTIVES PROPRES A F
— i6, 2. in qusrio (se. libro); in quarta (se. historia) Ad nat.,
I, II, p. 80, 25 ; in quinta PM. — Tert. s'est trompé dans Ad
nationes et dans V Apologétique^ car il s'agit du livre V des Histoires
de Tacite. L'erreur a été corrigée dans la tradition commune. Voy.
App. I, ch. 46, 13.
— j6,z. consimili bestiae super faciem F ; consimilis bestiae
superficiem P. — Le correcteur n'a pas compris superficiem et a fait
de bestiae un datif dépendant de consecrasse.
— ■ eodem simulacro F ; eidem simulacro P. — Cf. Ad nat., i, 1 1,
p. 81, 7 : nos quoque ... eidem simulacro initiari. C'est encore le mot
voisin qui a conditionné la faute du copiste.
— 16^ 7. infirmo ligno F; informi ligno P. — Même observation,
— 18, 3. restitutionem F ; retributionem P.
— 18, s. rexit omni F. — Corrigez : re.v et omfiis. Le scribe a mal
divisé en rexet omni, puis il a corrigé re.vet, qui n'est pas un mot
latin, en rexit, sans égard au sens. Dans P, la phrase est construite
autrement et rex manque.
— 18, 7. rescriptum est F ; subscriptum estP. — Le sens spécial
de subscriptum est (= concessum est) a échappé au scribe, qui aura
cru que c'était la réponse kpostulavit (§ 5). De pud., 1,13: «'«5-
modi maculis nullam suhscribere veniam.
— 19^ 2. substantiae omnesque materiae F; substantias omnesque
materias P. — Le scribe aura cru que ces mots placés au commen-
cement sont sujets de la phrase.
— stili nostri F ; stili vestri P. — Confusion fréquente entre
nostri et vestri, dont les abréviations ne diffèrent que par n et v.
Cf. 35,5-
— 19, 6. aliqui Manethos Aegyptius, et Hebraeus, et Chaldeus
F ; alioquin ( /. aliqui ) manethon aegyptius et berosus chaldeus
P. — Les noms propres sont souvent défigurés.
— losippus F ; iosephus P.
— 20, 2. vorarant^ fraudarent, dilaniarent F; vorant, fraudant,
dilaniant P. — Le présent de l'indic. est aussi nécessaire que dans
les verbes compulsatit, etc., qui suivent : c'est le développement de
quicqtdd agitur et quicquid videtur. — On peut soupçonner que
Junius a imprimé vorarant pour vorareni. — Voy. App. I.
— 20, 3. providentiae F; providenter P. — Le dativus auctoris
dans F est peut-être à conserver. Hoppe^ Syntax, p. 25.
— 20, 4. eadem litterae F ; eaedem litterae P.
LEÇONS FAUTIVES PROPRES A F 105
— 21, I. aliquando F ; aliquanto P. — De même : quando pour
quanto (39, 9) et, dans P, quod pour quoi (2, 5 et 8,8).
— 21, S- modis F ; modum P.
— 21, 6. auctoris F ; auctioris P.
— 21,12. expanditur F; extenditur P. — La leçon de P est
confirmée par VAUercatio. La leçon de F n'est peut-être qu'une
faute de transcription.
— 21,12. et lumen F ; ut lumen P. — h' Altercaiio a ut. La con-
fusion de ut et de et est fréquente. Voy. 4, 3. Sur ce passage> voy.
App. L
— 21, 16. nec intellexerunt F; ne enim intellegerent P. —
L'abréviation de enim a été mal comprise. Voy. App. L
— 21, 17. insequebantur F ; sequebatur P. — Insequeianiur « ils
le persécutaient » est une correction erronée du scribe ; il n'a pas vu
le sens de sequebatur uti, qui marque une conséquence naturelle,
inévitable, comme au § 31 et 7, 7 ; 10, i ; 40, 11 ; 41, 4 ; cf. 8,9 :
sequitur ne.
— 21, 18. ex parte Romanam F ; ex parte Romana P. — Faux
accord avec un mot voisin, Syriain. Le passage est correctement
reproduit par le traité Qtiod idola, 13. Voy. App. L
— 21, 19. dies média orbem F ; dies médium orbem P. — Faux
accord avec le mot voisin dies.
— 21, 22. familiarem sibi F; famularem sibi P. — Le mot plus
ordinaire a été mis à la place d'un mot plus rare ; mais il n'a pas de
sens ici.
— 21, 23. quinquaginta, pour quadraginta ne peut être ni de
Tertullien ni d'un reviseur. P a quadraginta.
— 21, 27. infamiam concutiat F; infamiam incutiat P. — Un
verbe composé pour un autre.
— 21, 30. quo Numa F ; quod Numa P.
— 22,2. adserunt F ; adsunt P.
— 22, 3. et quem diximus principem F ; et cum eo, quem dixi-
mus, principe P. — Dans F, on peut lire : et, quem dixivms, principe.
Il n'y a qu'une ellipse : et feoj, quem diximus principe . — Principem,
au lieu de pri7icipe , à cause du voisinage de l'accusatif ^?^<f;«. — Sur
l'omission fréquente du pronom antécédent, voy. App. I, ad 19, 16.
— aut litteras F ; apud litteras P.
— 22, 5. aurae latentis vitium F; aurae latensvitium P. — Le
génitif latentis peut venir d'un faux accord avec le mot précédent
aurae. Faute fréquente dans F.
106 LEÇONS FAUTIVES PROPRES A F
— 22,12. non quae efFecerint F ; non quaereretur P.
— 23,1, si pueros ... edunt F ; si pueros elidunt P. — Faute due
peut-être au souvenir du chap. 9 {edunt, mangent). Voy. App. I.
— 23, 2. pares angeli et daemones F; pares angelis et daemo-
nibus P.
— 23^ 5. aris inhalantibus F ; aris inhalantes P. — De Genoude
traduit : « ceux qui, la bouche béante sur l'autel ». L'abl. inhalan-
tibus vient d'un faux accord avec aris qui précède.
— 23, 6. Aescopius F; esculapius P.
— moriturus F ; morituris P.
— denatio F; tanatio P. — Peut-être: Thanatio. Nom propre
défiguré. Les trois personnages sont d'ailleurs inconnus.
— 23, 12. sine hune F; si nunc P. — Mauvaise division de sinvnc
{sin ?<«t devient sine hune).
— ocyius F ; potius P. — Ocyus est mis pour ocius (plus vite,
plus facilement). On a écrit pocius^ puis on a omis le / et l'on a
pris ce qui restait pour l'adverbe ocius, plus vite. Havercamp con-
serve ocius « assez vite, bientôt », et lit : si non in caelis, ocius et
inde venturus.
— ut ratio F ; et ratio P. — Il y a ici d'autres différences entre
E etP. Voy. App. I. — La répétition de ut se comprend dans ce pas-
sage, mais il faut lire : ut ^^Deiy ratio (car Dei est répété dans
cliaque membre) ou bien : nt Dei virius et Dei spiritus et ratio, ut
Deifilius et Dei omnia. Nous avons vu que ut et et sont souvent
confondus (ci-dessus, 4, 3). Ici la faute est conditionnée par tit qui
précède et qui suit. Cf. De oral., i, p. 180, 3 et 12 : Dei spiritus et
Dei sermo et Dei ratio. De carne Chr., 19 : qui verbuni Dei, et cum
verbo Dei spiritus^ et in spiritti Dei virtus, et quicquid Dei est Chris tus.
Ces derniers mots expliquent Dei omnia; ils sont fondés sur S. Jean,
16, 15 et 17, 10.
— 23,14. notant F ; notam P.
— 23, 15. dominatione F ; nominatione P.
— 24, 2. verae religiositatis E ; verae inreligiositatis P. — Le
correcteur n'a pas compris l'ironie.
— 24, 4. suspicari F ; suspici P. — Le sens spécial que suspici a
ici, bien que très classique (admirer, honorer), aura échappé au
scribe.
— capitalis F ; capitale P.
— 24, 5. ad aram Fidem F ; ad aram FidiaeP. — Dans F, la
LEÇONS FAUTIVES PROPRES A F 107
f^ute (Fidém par Fidet) paraît encore avoir été conditionnée par
l'ace, qui précède.
— alias hircum F ; alius hirci P. — Voy. App. I.
~ 24, 7-8. Noms propres défigurés. — Voy. l'app. critique.
— 24, 8. Chumis F; curris P. — Lisez : Curis ou Curris. Gar-
rucci pvoposQ : pairzae Curitis. Voy. App. I.
— 25,4. transferre F; transire P. — Transferre n'est pas fautif
et doit être conservé. Voy. App. I.
— 27, 5. et nequam F ; ut nequam P. — Voyez 4, 3.
— inspirât F ; spirat P. — Cf. 35, 8 : nihil hosHcum... spirat. —
Inspirât est plutôt un remaniement qu'une faute de copie. Voy.
App. I.
— 27,7. praeliantur F (manque dans P). — Lisez : proeliaturi
(Hav.). Voy. § 4 : adversus nos proeliatur. Dans proeliaturi in, le
scribe n'a écrit i qu'une fois. Ensuite, on a mis le pluriel à cause du
pluriel erumpunt.
— certi etiam périsse F ; certi et impares se esse P. — Lisez :
cerii etiam (se) périsse. Voy. App. L
— 29, I, quos in F ; quod in P.
— 2g, 3. itaque F ; ita qui P.
— cuius et nunc et toti sumus F; cuius et toti sunt P. — Voy.
p. 65.
— 30, 2. recogitent F ; recogitant P. — Le subj. recogitent exige-
rait intellegant et recognoscant, ou intellegent et recognoscent (Hav.).
Le copiste s'est laissé influencer par les subjonctifs qui suivent :
dehellet^ etc.
— 30, 6. bonis F ; bovis P. — Yoy. p. 22.
— 32, 2. sed et sic iuramus, non F ; sed et iuramus, sicut non P.
— 32, 3. adiuramento F ; id iuramento P. — Voy. App. L
— 34,3. cui deis opus est F ; cui Deo opus est P. — Voy. App. I.
— 34, 4. maie traditum F ; maledictum est P.
— scio (/. scito) F (manque dans P). — Sur vivejite adhuc impe-
ratore, voy. App. I. Cet abl. absolu peut se défendre, mais il se
peut que l'abréviation de m final ait été omise.
— mortuum accidit F ; manque dans P. — Junius corrige déjà :
mortuo accedit, — Voy. App. L
— 35, I. an quia F ; quia P. — Voy. p. 65.
— 35, 2. haec in (=haecineP) solemnes dixi (= dies P) prin-
cipum decernuntque (= décent quae P) alios dies non decet F. —
108 LEÇONS FAUTIVES PROPRES A F
P a conservé un texte correct. Dans F, le texte a été défiguré par
suite d'un accident quelconque qui l'avait rendu difficile à lire
(taches d'encre ?). Tertullien aime à introduire une interrogation par
haeccine et par «'c«'«<f. Voy. Scorp., p. i, 145, 16 et 17. Haeccine pati
homines innocentes? ... Siccine trac tari sectam nemini moles tam?
Aussi, dans la phrase précédente, Sic efiim est probablement une
faute pour Siccine CP). Le scribe a peut-être cru voir l'abréviation
de enif/i. ,
— 35 j 3- quae observant F ; qui observant P. — L'impression
de quae dans Junius est peu lisible.
— 35j S- voluntatis F; voluptatis P.
— veritatem nostram F ; veritatem vestram P. — Voy. 19, 2.
— 37i 7- quoddam F ; quandam P. — Havercamp : quondam.
— pareret F; adparent P. — lÀsez parèrent. Voy. p. 45 et App. L
— scena conceario F ; scenam congiario P. — Voy. App. \.
— quo reclamant ; qua adclamant P. — Quo est une faute pour
qua ; sur reclamant, voy. App. L
— sed Christianus F ; haec Christianus P. — Voy. p. 42.
— 35, 8. depopulatores F ; depostulatores P. — Voy. App. L
— - de aequitate F ; de équité P.
— 35,11. superestF; superstes P.
— 35, 13. de Caesaris F; de caris P. — de hominis F; de domi-
nis P. — L'antithèse de caris et de dominis est reprise par sajiguinis
et servitutis. Ayant écrit de Caesaris (sainte), le scribe a pensé que
de dominis ne s'opposait pas à Caesaris et il a changé de dominis en
de hominis. Quant à la faute initiale, de Caesaris pour de caris, elle
a été suggérée par les mots de Caesaris sainte, qui précèdent et qui
étaient restés dans l'esprit du scribe.
— 36^ 2. habent exhibere F; habet exhiberi P. — Sur cette
phrase^ voy. p. 55.
— 36, 3. indifferentia benignitatis F; indifferentis benignitatis
P. — Voy. App. L
— 37^ 2. de reliquiis sepulturae F ; de requie sepulturae P. —
De reliquiis sepulturae ... avellant n'a pas de sens et l'idée de reli-
quiae est exprimée par iam alios, iam nec totos.
— 37, 4. orbis externi sumus FM ; orbis. Hesterni sumus P. —
Voy. App. I.
— 37,S.uniusprovinciaeplureserunt. — Ces mots manquent dans
P : c'est une omission involontaire, que nous aurions dû signaler
LEÇONS FAUTIVES PROPRES A F 109
ci-dessus (p. 51), Ce membre de phrase est indispensable comme
contre-partie de Possumus dinumerare exerciius vestros. Dans la
phrase qui précède et dans celle qui suit, Tert. parle à la première
personne ; il faut donc lire : plures ertvius (ditrochée ; forme déri-
vée). Havercamp propose \ plures erunt C/ïm//rt«z (ditrochée).
— 37^ 6. pudor F (manque dans P). — Lisez : pudore ou sup-
primez le mot. Voy. ci-dessus, p. 36.
— 37, 8. maluissetis F ; maluistis P. — Voy. ci-dessus^ p. 81-82.
— 38,1. ne paulo F ; nec paulo P.
— 38^ 3. gloria F; gloriae P. — Le voisinage de ab omni a
trompé le scribe.
— id est animae aequitatem F ; id est animi aequitatem P. —
Voy. ci-dessus, p. 59 et 82.
— oblectare F ; oblectari P. — Au ch. 34^ \, nuncupare (F) et
mmcupari (P) conviennent également.
— 39^ I. quominus F ; ut qui P.
— divinitate F ; unitate P. — Havercamp maintient divinitate
et compare divinitas sectae (^11, i'). Mais ici, il faut un mot qui
exprime l'idée de communauté et d'union, comme conscientia et
foedus : l'unité de foi, de discipline et d'espérance sont les trois
liens qui unissent les chrétiens et en font un corps (corpus sumus).
— 39> 2. in coetu F ; in coetum P. — Voy. App. I.
— 39^3* in compulsationibus F; inculcationibus P. — Voy.
App. L
— 39^ 8. censemus F. — Lisez : cefisemur. Voy. App. L P a :
nos vocamus.
— 39> 9. quando F ; quantoP. — Confusion fréquente. Voy. 21,1.
— 39, 15. Serapiae F ; serapiacae P. — Voy. ci-dessus, p. 36.
— de loco triclinio F ; de solo triclinio P. — Au § 12, F a solo
et P loco.
— 39, 16. id vocatum quo F ; id vocatur quod P.
— 39, i8. de Deo F ; deo P. — Voy. ci-dessus, p. 66.
— 40, I. in primordio temporum F ; manque dans P. — Lisez :
a primordio temporum. Tertullien rappelle les catastrophes les plus
anciennes, dont les chrétiens, qui n'existaient pas, n'ont pu être la:
cause. Il remonte aux temps les plus reculés, jusqu'au déluge et
au-delà (§ 3-9),
— 40, 3. Hienarranda pênes Delon et Rhodon (F) et Coh ("^F) ;
hieran napean et delon et rhodon et cho P. — Lisez : Hièran,
110 LEÇONS FAUTIVES PROPRES A F
Anaphen, et Delon et Rhodon et Co. Tertullién a tiré ces rensei-
gnements de Pline, Hist. nat., 2,87; sa mémoire l'a du reste
trompé^ car Pline dit que ces îles sortirent de l'eau et Tert. dit au
contraire qu'elles furent submergées. Sur les erreurs de Tert., voy.
App. I ad 46, 13.
— 40, 4. inereptam F ; ereptam P.
— 40,6. neque enini illae F; neque enim alias P. — Alias
« autrement » annonce 7iisi (== non aliter ftist). Y oy. 39,8: non alias
çuam. Deidol., i, p. 31,10: sed etalias, citm,.. Thés. l.l.,\, 1550,43.
Cette locution ne paraît pas être antérieure à Tert. et aux juriscon-
sultes du Digeste, qui s'en servent souvent. Voy. Heumann-Seckel,
s. V. alias. — Dans le passage parallèle, le texte de Ad nat. con-
firme celui de P. Voy. Ad nat., 1,9, p. 73,26 : non alias enim super-
fuissenf ad hodiernum, nisi postumae cladis illius. — Illae se com-
prend, mais est inutile: c'est probablement le résultat d'une dis-
traction du scribe, influencé par illos qui précède et illius qui suit.
— 40, 7. cineres sunt F ; cinerescunt P.
— 40,13. adeo F ; a deo P.
— 40, 9. eadem clades F ; eaedem clades P. — Voy. 20, 4.
— 4ij 4. obveniunt F ; obveniant P.
— 4/, 6. molitis F; quos colitis P. — Opposé à cur eos colère.
— maie veniunt F ; mala eveniunt P. — Voy. p. 36.
— 42, 6. vos enim non novimus F ; nos coronam naribus novi-
mus P. — Le scribe paraît ne pas avoir compris la plaisanterie^
qui se trouve aussi dans Minucius Félix, 38, 2. Voy. App. I.
— 42, 9. compensato F ; compensata P.
— 43, I. quoniam F ; quinam P.
— harioli F ; aquarioli P. — Le mot aquarioli est très rare et
harioli revient un peu plus loin.
44, I. tam verum tam grande F ; tam grande quam verum P. —
Tert. aime à remplacer et ... et par tam ... quam ou par quam ...
quam, mais non par tavi ... tam. Voy. Hoppe, Syntax, 77. Ici, on
peut admettre un asyndeton « si vrai, si grand ».
• — 44,3. etiam bestiae F ; semper bestiae P. — Etiam com-
mence peut-être une deuxième série avec gradation ; mais l'ana-
phore de vestris semper serait interrompue.
— 45, I. a Deo doctore F ; a Deo edocti P. — Les mots a Deo
doctore n'auraient pas de fonction dans la phrase.
— intemtibili F ; incontemptibili P. — Voy. p, 43.
— mutatas F ; mutuatas P.
LEÇONS FAUTIVES PROPRES A F 111
' — 45,6. pro veritate F ; pro brevitate P.
— 4-5, 7- semper ternum Deum F ; sempiterni eum P. — Le
pieux scribe aura pensé au mystère de la Trinité. Cf. 13, 7.
— 46, I. renidi F ; mangue dans P. — Lisez ; reniti.
— 46, 2. existimatis F; existimat P. — Le scribe a perdude
vue que le sujet est incredulitas.
— 46, 3. diligentia F (lisez : de licentia, avec Junius) ; ad licen-
tiam P.
— 46, 3. cur et illud F ; cur et illi, ut P. — Le scribe a réuni
un ut en illud.
— 46, 9. neque inveniri facile et inventum enarrari in ornnes
difficile F. — P a facilem et difficilem. Le sujet de esse sous-ent, est
factitatoyem. Cf. 45, 2 : tam illafallifaciliSj quam ista contemni. Sur
l'infin. avec facilis et difficilis, voy. Hoppe, Synta.v, p. 49. — Le
scribe a omis le signe abréviatif de m final.
— 46, 10. foeminae F (femina Rauschen). — Voy. App. L
— 46, 12. decalcat F ; deculcat P.
— 46^15. régi F; regendo P. — Correction erronée, condi-
tionnée par Alexandre qui précède. Le scribe a pensé aAlexander rex.
— 47^ 3. sed homines F ; et homines P. — Sur sed, voy. ci-des-
sus, p. 71, ad 5, 3.
— 47, 6. et Platoni : et quidem F; et Platonici quidem P.
— Epicuri F ; Epicurei P.
— actorem rerum F. — Il faut lire : auctorem. Confusion fré-
quente. Voy. App. L
— 47, 9. variis quibusdam F ; viri quidam P. — Viri quidam est
nécessaire pour désigner les hérésiarques, opposés aux philosophes.
L'erreur du scribe est due à l'ablatif suis ojfiinionibus qui suit.
— 47,12. praeiudicantes F ; praedicantes P.
— gehennae F ; gehennam P.
— 47, 14. proprioribus F ; prioribus P. — Ci-dessus, p. 67.
— 48, 3. qui et pro quolibet F ; quemlibet pro quolibet P. — Il
faut un accusatif s'accordant avec hominem. La lecture de F n'est
ni grammaticale ni intelligible.
— in eadem F ; in eandem P. — Omission du signe abréviatif.
— 48, 9. resurgas F. — Il faut lire resttrges, comme le propose
déjà Junius.
— 48, II. conservatur F ; conseruit P. — Conservatur n'a pas
de sens ici. En effet, quae ratio a pour antécédent eadem {ratio).
Cf. § 2 : quaecumque ratio..., ipsa...
112 LEÇONS FAUTIVES PROPRES A P
— prima autem F ; prima haec P. — Le scribe aura confondu
l'abréviation de haec (une h barrée), avec l'abréviation irlandaise
ou anglo-saxonne de autem (qui est Va de l'alphabet tironien, sem-
blable à une K). Voy. Prou, Manuel de paléographie latine, p. 158.
— 48, 13. in poenam F ; in poena P. — Erimus exige l'abl.
avec in.
— 49, 3. in eiusmodis F. — Lisez : tri eiusmodi. Tert. emploie
eiusmodi et huiusmodi comme un substantif pluriel invariable, à tous
les cas (=:^ in ta/ibus feèits), Voy. 15,16. Le scribe aura cru que
modis dépend de in.
— 49, 3. ut noxiis F ; ut innoxiis P. — Ci-dessus, p. 43.
— inrisum F ; inrisui P. — ludicandum est est ici synonyme de
damnandum est, comme au ch. 4, 6. Cf. Scorp., 10, p. 166, 15 : ut
despectui iudtcata (vita).
— 50, 10, quia humana F ; quia liumanam P. — Voy. App. I.
— omnimodo F ; omnimodae P.
— 50, II. scribitis F; inscribitis P. — Voy. App. I, ad 21, 14.
XV. Leçons fautives propres à P.
NB. Nous faisons suivre la leçon fautive de P de l'émendation,
presque toujours fournie par F.
— I, 3. quo etiam P ; quod etiam *F. — Voy. App. I.
— 1,8. proprius P. — Lisez : propius. Il n'est pas certain que
propius manque dans F. Voy. App. IL
— 1,13. natura alia P ; naturalia F. — Ci-dessus, p. 6^.
— 2, 5. quod (bisJV; quot F. — Confusion fréquente, quia
trompé certains éditeurs. Cf. 8, 8. — De même: quando F (39, 9)
pour quanto, aliquando F (21, i) pour aliquanto.
— 2, 6. adquin P. — Graphie fautive pour atquin. Tert. dit le
plus souvent atquin, rarement atqui (atque F ; atqui Br.).
— 2,15. necessariam P; necessariis F. — Faux accord de
l'adjectif avec un mot voisin.
— 2, 20. valde incestum P ; valde ineptum *F. — Voy. App. I.
La faute du scribe a été conditionnée par incestum qui précède.
— 3> 3' quis iuvenis, quam lucius P ; qui iuvenis, quam lusius
F. — Le scribe n'a pas compris le mot archaïque lusius.
LEÇONS FAUTIVES PROPRES A P 113
— 3, 5. barbaram sonat P ; barbarum sonat *FM. — Barèarum
est voisin de mots féminins.
— 3, 7. transmissa P ; transmissi F. — Faux accord avec le mot
qui précède.
— 3, 7. probavit P. — Faute fréquenle, "ponvprobabit.Cï. 16, 14.;
21, 26 ; 24, 2.
— 4,9. prescriptio P; proscriptio F. — Confusion de mots
semblables.
— 4, II. infanticidia P ; infanticida Br. — Même observation.
— 5,2. adnuntiatum sibi ex Syria Palaestina, quae illic veritatem
ipsius divinitatis revelaverat P ; adnuntiata sibi ex Palestina,
quae illic veritatem istius divinitatis revelaverant F. — Dans P,
qùae est impossible (il faudrait quod) ; il vient d'un faux accord
avec Syria Palaestina. Le texte de F est confirmé par la traduction
grecque que cite Eusèbe, et Rufin le reproduit sans aucune variante
(^Hist. eccL, 2, 2, 6). Voy. l'apparat critique et App, I. Callewaert,
Le Cod. Fuld., p. 340.
— 6,2. quo (= quoniam) P; quoniam *F. — Abréviation mal
indiquée.
— dignitatem P ; dignitatum *F. — Le scribe a fait de digfii-
tatem un sujet de l'infinitif usurpari.
— 6, 6. quae per ânnos P ; qua perannos *F. — Erreur du même
genre.
— 6, 9. cumqueP; cum quae *F
— 6, 10. immolaretis P; immoletis F. — La concordance des
temps exige le subj. présent.
— 7, 8. quia non aliud P (mais i de quia est exponctué) ; qua
non aliud F. — C'est le vers de Virgile, Aen., IV, 174. Dans Ad
nat., 1,7, p. 67,6, on lit : quo. La citation y commence à malum ;
c'est pourquoi Tert. a fait accorder quo avec malum.
— 7,9. functa P ; functa *F.
— 7, 10. aut P ; aiunt F.
— 6, 12. ceterarum oris P ; cetera rumoris F. — Dans P, il y
a une fausse division des mots. Voy. App. L
— 8, 7. ti P; tibi F.
— virulentiam P* {y'xs.l. corr.) ; iurulentiam FP'. — Correction
erronée.
— 8, 8. quod P. — Il faut lire quot. Voy. 2,5.
— 9, I. haec quoque P; haec quo F*.
114 LEÇONS FAUTIVES PROPRES A P
— 9, 8. deliberatur P ; delibatur F, — Confusion fréquente. On
la retrouve De pat.^ 8, p. 13, 5. Voy, Oehler, I, p. 602.
— 9, 9. tragoecis P ; tragicis F.
— ex alterutro P ; et alterutro F.
— 9, 10. et sui datus P ; et usui dalus F ; et esui datus Rigalt.
Voy. App. I.
— 9, II. cruditantibus P ; cruditantes F. — Faux accord avec
devisceribus humanis, qui suit.
— 9, 14- distensos P ; distentos *F. — Distensus est très rare.
Neue-Wagener, Form., 3* éd., III, p. 555-556.
— 9,15. negandi P'M ; necandi P^. — Le correcteur n'a pas
compris que le sens est : alioquin Jiegandi (esseiit Christiani) ; il a
changé negandi en necandi, ce qui est un contresens. F avait très
probablement negandi. Voy. ci-dessus, p. 20-21.
— 9, 18. uti aspaisum P; ut ita sparsum Br. — Junius a im-
primé : ut ita spersum. Voy. ci-dessus, p. 47.
— 10,1. disperat P ; desperat *F.
— 10, 5. dicit P; didiscit * F; didicit M. — Confusion inverse
au ch. 21, II. Voy. ci-dessus, p. 45.
— 10, 6. certe P ; certi F.
— 10,7. actica P ; Attica *F.
— 1 1, I. paret (=par. Et) quoniam P ; par : sed quoniam F. —
Voy. App. I.
— lî, 2. possedebat P; possidebat -F.
— 11,12. ut... non possitis P; \i\... non poteslis F. — Le
scribe (ou le remanieur) a été trompé par ut, qu'il a fait suivre du
subj., ce qui donne un contresens. Voy. App. I.
— II, 14. in caelo P ; in caelum F. — Voy. App. I.
— 12, I. quod sint P ; quid sint *F.
— 12,2. nihil aliud reprehendo P ; niliil amplius deprehendo F.
— P a : aliud, et non : amplius. Sur amplius =:^ aliud, voy . Thés, 1,1,,
L 2016, 30. Le correcleur aura remplacé amplius i)ar le mot plus
ordinaire. Sur reprehendo , voy. App. I.
— 12, 5. religamur P ; relegamur *F. — Cf. 3, 4.
— 13,2. primo qui P ; primo quidem F. — Voy. ci-dessus,
p. 10, ad 9, 15.
— quem non colitis P^ ; quos non colitis F. — Dans P, quos
avait été omis par le scribe, qui a mis quem en marge. Après alios,
c'est quos qu'il fallait mettre.
— 13,4. ut quisque dominus P; ut quisque deum F. — Dans
LEÇONS FAUTIVES PROPRES A P 115
P, deus et dominus, dont les abréviations (ds dns) se ressemblent,
sont continuellement confondus. Voy. 17, 3 ; 21, 29 ; 23, 4 , 18 ;
39, 18, De spect., i, p. 2, 2. Cf. L. Traube, Noviina sacra, p. 146,
— Les dieux Lares ont vu que la nécessité domestique (les besoins
de la maison) était une divinité plus sainte qu'eux-mêmes. C'est du
persiflage. Le maso, deus est souvent appliqué à une déesse ; voy.
TIm. l. /., V, 889, 18 et 890, 16.
— 13, 6. agi P ; agri *F.
— 13, 9. adoretis P ; adoratis *F.
— 14, 3. cubantem P2 ; subantem *EP*. — Exemple de correc-
tion erronée : le correcteur n'a pas compris subantem, mot rare.
— 15,1. despicite P ; dispicite *F.
— 15, 2. pastorum P ; pastorem *F.
— 15, s. Pessinunta P, Pessinunte F.
— 15, 6. vestigia obsoletant P ; fastigium adsolant. — Ad nat.,
I, II, p. 80, 16 : si maiestatis fastigium adsolant. Adv. Marc, 2, 27,
p. 273, 4 : si eniin Deus tanta humilitate fastigium iiiaiestatis suae
stravit. Tert. emploie encore : adsolare «raser jusqu'au sol, détruire»
dans Ad nat., i, 10, p, 75, 28 : saepe censores {Serapidis aras vel
fana) adsolaverunt. Ibid.^ p. 80, 16. — Dans P, vestigia est peut-
être une faute de copie pour fastigium et cette faute aura fait
changer adsolajit en obsoletant. Voy. App. L
— 15,8. cessaverunt P ; cessaverint *F. — Ce^Qnàani cesuive-
runt, malgré no7t sint, est peut-être admissible, car Tert. varie
ailleurs le mode de la même façon. Voy. 39, 9 ; 41, i et App. I.
— 16,2. onagris... indicibus fontibus usos P ; onagris... indi-
cibus fontis usos F. — Cf. Ad nat., i, 11, p. 8r 4 : onagris... indi-
cibus fontibus usos. Oehler et Reifferscheid corrigent enfofitis. Il
est remarquable que fontibus se trouve à la fois dans P et dans
V Agobardinus . On peut expliquer: « ces ânes étant guides, ils trou-
vèrent des sources », ou, avec Hartel, Pair. Stud., I, p. 33, et II,
p, 57 : « s'étant servis d'ânes comme guides pour (trouver des)
sources, indicibus ad fontes inveniendos aptis. Tert. fait souvent
dépendre un datif d'un substantif. De orat., 22, p. 195, 4 : sibi
adiectionem. HarteL //. cc.^ et Hoppe, Syntax, p. 27, — Cependant
ces interprétations paraissent fort tourmentées, tandis que fontis
se comprend aisément.
— 16, 6. fariam P ; pharia F.
— 16, 7. prostrat P ; prostant F. — Le scribe a pris un h (peut-
être mis au-dessus de la ligne) pour un r. Le pluriel se comprend.
116 LEÇONS FAUTIVES PROPRES A P
puisque le relatif a logiquement pour antécédents Fa//as et Isis ;
mais l'accord grammatical avec le subst. le plus rapproché est
possible aussi, comme distinguitur dans la même phrase et comme
quae rej>raeseniatur dans le passage correspondant de Ad nat., i, 12,
p. 82, 1-2.
— i6, 8. insignes P ; in signis F.
— 16, 14. repurgavimus P; repurgabimus *F. — Voy. 3, 7.
— 17, 3, dominum P; deum F. — Voy. 13, 4.
— 18, 3. deseritis sed observantibus P ; et deseritis (/. desertis)
et obserratis F, — Sur sed, voy. ci-dessus, p, 71, ad 5, 3.
— recensetis P (/. recensitis) ; recensis F.
— 18, s. ptolomeorum P. Au § 7 : phtolomeo, et au § 8 : phto-
lomei. — Dans F : Ptolemeus (§5).
— pisistratarum P ; Pisistratum *F. — Influence de la désinence
du mot précédent (bihliothecarum) .
— demetri phalerii P; Demetri Phalerei *F.
— 18,8. ex aperto F ; ex aperta F (/. exaperta).
— 19, 4. reprehenduntur P ; deprehenduntur *F. — Cf. 12, 2.
— 19, 5. supputariis P ; subputatoriis F. — Ci-dessus, p, 45.
— reservanda P ; reseranda*F.
— 19,6. alioquin P ; aliqui F. — Les noms propres sont défi-
gurés dans ce qui suit. Voy. l'apparat critique.
— et si quis P ; et qui *F.
— 19, 7, aut P ; ut *F.
— quasi patrem P ; quasi partem *F.
— 21,2. agamus P ; agimus *F.
— 21,5. dereliquerint P; deliquerint *F. — Voy. ci-dessus,
p. 73.
— salutari P ; salutare *F.
— 21,7. praenuntiatur P ; praenuntiabatur *F.
— Danaidis P ; Danaes *F. — Voy. App. I.
— 21, 8. numina vestra P ; humana vestra F. — Voy. App. I.
— 21,12. materiae matrix P ; materia matrix F ; vna\ev'\& Alter-
catio. — Sur le subst. apposé à un autre subst., voy. ci-dessus,
p. (id. Le génitif donne un contresens. Voy. App. I.
— 21, 13. alternum P ; aller F. — Voy. App. I.
— 21,14. spiritu instructa P ; spiritu structa F et ^//^/ïrrt//o.—
Instructa est plutôt un remaniement qu'une faute de copie. Voy.
App. I.
— 21, 16. meritum fuit delictum eorum P; meritum fuit délie-
LEÇONS FAUTIVES PROPRES A P 117
torum *F. — La leçon de Barraeus, dont Modius ne dit rien, est
empruntée au Quod idolaj 12 : délie forum meritumfuit.
— 21, 17. uti magnum P j uti magum FM. — C'est peut-être
une correction faite avec intention. Cf. Act. Apost., 8^ 9 : Vir
aulem quidam noinine Sivton, qui ante fuerat iii civitatc magtiSj sedu-
cens getitem Samariae, dicens se esse aliquem magnum. Dans le rapport
apocryphe de Pilate à Claude (IV'' ou V" siècle), rédigé d'après le
chap. 21 de Tertullien, on lit : l'Xsyov jj.îtyov aÙTOv slvai. Voy. Har-
nack, Gesch, der altchristl, Litt., 3, p. 605 à 610. — Cependant la
faute est propre à P ; elle n'est pas dans M. Cf. 23, 12 : si magus :
Ce passage est un rappel de celui-ci.
— 21, 19. demisit P ; dimisit *FM.
— quid quoque P ; qui id quoque *F.
— 21, 20. militari manu P ; militaris F. — Voy. p, 75.
— 21,21. custodiae P ; custodia *F,
— 21, 23. de Romulo P ; deRomulis F. — Voy. App. I.
— 21, 26. monstravimus P (/. monstrabimus). — Cf. 3, 7.
— 21,27, transferet P ; transfert *F.
— 21, 29. et ipsi dominum P; et ipsi Deum F. — Voy. 13, 4.
— 21, 30. non quo P^ ; non qua FP^ — La correction de a en
dans P est faite supra lineam.
— 22, 2 exsacramenti P; execramenti F. — Voy. App. I.
— 22,7 quomodo ut operetur P ; quomodo operentur F. —
Dans P, on peut lire : quomodo et operentur. Après quomodo on
trouve souvent ^Z. Sur la confusion de et et ut, voy. ci-dessus, p.
loi, ad 4, 3.
— 21,9. excerpunt P ; exceperunt F.
— 23,3. prosectam P ; prosecat F. — La faute est conditionnée
par gulam qui précède,
— 23, 4. quam ostendemus P ; qua ostendemus *F. — Accord
fautif. Cf. Adv. Marc, i, 21, p, 318, 10 : probatio, qua ostendimus,
— dominum P ; deum F. — Voy. ad 13,4.
— 23,6. subminisiratur P ; subministrator F.
— 23,9. maiestatem superiore P ; maiestate superiorum F.
— 23, II. quid sit vere deus P ; qui sit vere Deus *F.
— 23,13. habebo P ; ab aevo F. — Adv. Marc, i, 22, p. 320, 18:
si ai aevo Deus et non a Tiherio,
— 23,14. renuntiant (sicj se P ; renuant se F.
— rogiis P ; rogis F. — Voy. p. 70.
118 LEÇONS FAUTIVES PROPRES A P
— 23, 18. in Christo domino P (cf. 13, 4); per Cliristum et
{=.citam) in Deum F. — Voy. App. I.
— 24, 2. resultavil P ; resultabit *F. — Voy. 3,7.
— 24,4. opéra P ; operam *F. — Confusion de deux mots.
— 24, 6. eologium P ; eulogium M ; elogium *F.
— 24, 7-8. Noms propres défigurés. Voy. l'apparat critique.
— 24, 8. per ipsam (corrigé en ipsum) quoque Italiam P.
— romanos deos P ; Romani dei F. — Influence de l'accusatif
qui précède.
— in honore patris P ; in honorem patris F. — Sur l'abl.j voy.
ci -dessus, ch. 11, 4.
— 25,2. propriae P ; proprie F. — Faux accord avec menti.
— 25,3. muthunusP; Mutunus F.
— fatum P. — Lisez : factum. Voy. App. I.
— 25, 4, quo sciebat P ; quos sciebat *F.
— debellatorem P ; debellatricem *F.
— apud Sermium P : apud Syrmium *F.
— 25, 7. facibus P ; fascibus *F.
— ydreum P ; Idaeum F.
— 25,10. quam coluerat P ; quem coluerat *F. — Influence
de eam gratiam qui précède.
— stercolum P ; Sterculum F.
— 25, 12. fastidium P ; fastigium F. — Cf. 15, 6 : vesiigia,
— 25, 13 ; ex illis P : exilis F. — Nidor doit avoir une épilhète
comme tous les autres substantifs (cf. frugi, paupertina, temcrarin,
sordidn). Dans Ad nat,, 2, 17, p, 132, 11, on lit : nidor ex illis.
L'épithète {parvuSj icnuis, modicus, cxiguus) est effacée. Dans F,
l'épitliète exilis convient. Dans P, exilis est devenu ex illis, par
une erreur du copiste, qui n'a pas compris le mot.
— 26,1. ne illa régna P ; ne ille régna *F. — Faux accord
avec le mot voisin.
— 26, 2. exstrueretur PM ; exstrueret *F, — Voy. App. I.
— 27, I. ledere etiam P {H est exponctué) ; laedere eam F.
— 28, 3. callidiore P ; calidiore F. — Voy. App. T.
— cuilibet P'' ; quilibet FP', — La correction est erronée. Voy.
Hoppe, Syntax, p. 27. Il faut entendre : « Quel vivant, quel qu'il
soit », Van der Vliet, p. 38, défend cuilibet.
— dominio PM ; domino F.
— 30, 6. cum quibus P (/. cur quidem ?) ; cur *F.
LEÇONS FAUTIVES PROPRES A P 119
• — 32, 2. suscipimus P ; suspicimus *FM. — SnsJ>icio a ici un
sens assez rare « admirer, respecter », qui a trompé le scribe.
— 34, 3. tamquam si habens P ; si h(abens) F. — Voy. p. 21.
— 35,7. insculta Pi ; inculta P^ ; insculpta F.
— 35, -fi. ediserent P ; ediscerent *F.
— 36, I. vocabantur P ; vocantur F. — Voy. App. I.
— 36,2. dedita P ; débita F.
— 36, 3. sed exceptione P ; sub exceptione *FM.
— 37,4. iudicesP; vindices *F,
— 37, 6, qualiumque P (/. qualiumcumque). Manque dans F.
— 37,7. urbis P ; orbis F.
— 37, 8. habendos et P (/. habendo. Sed). — Voy. p. 81-82.
— 38, I. inter licitas P; inter inlicitas F. — Voy. App. I. Le
correcteur a voulu opposer inier licitas factione& à de inliciiis factio-
nihus, qui suit.
— 38, 5. novisse P ; novissime F. — Voy. p. 45. De Cor., 11,
p. 444, 14 O : ac novissime (= deniqtiè).
— 39, 4. religetur P ; relegetur *F. — Cf. 3, 4.
— 39, 6. ingratiis P ; ingratis F. — L'adverbe ingratiis ou in-
graiis n'a pas de sens ici. Voy. p. 70.
— 39, 7- vel maximae P ; vel maxime "F.
— 39^ 9- biberint P ; biberunt *F. — expaverint P ; expave-
runt F. — Dans P, comme dans F, le premier verbe (agnoverimt) est
à l'indicatif. Cependant, sur la variation des modes, voy. 15, 8.
— 39j io- quia nulli P^ (/« marg, corr.) ; quia nulla *FP'.
— 39,13. lenonest P; leno est *F. — Havercamp propose:
lenones, se. sunt.
— 39,14. conviolatur P ; convivatur F.
— 39, 18. dominum P ; deum F. — Voy. 13, 4.
— 40, I. esse in causam P ; esse in causa F. — Voy. App. I.
— ad leonenem P ; ad leonem F. — Voy. p. 70.
— 40, 3. orbem (urbem P*) et urbes P; orbem et urbem *F.
— Voy. App. I.
— 40, 5. velud P; vel ut *F.
— 40, 6. nati mortuique sunt P ; nati moratique sunt F. — Cf.
Ad nat,, 1,9, p. 73, 25 : in quibiis 7iaii, morati, sepiilti sunt. Le
changement de inortui en morati, qui détruit la clausule (deux cré-
tiques), peut venir d'un scribe ou d'un remanieur.
— 40, 6. hodiernum P ; in hodiernum F. — Tert. dit ordinaire-
ment : ad hodiermim. Voy. 5, 10; 10, 4. Ad nat., i, 9, p. 73, 26
120 LEÇONS FAUTIVES PROPRES A P
(passage parallèle) : non alias enim superfuisseni ad hoditrnuni, nisi
postumae cladis illius. De an., 34, p. 358, 18. Scorp., 7, p. 160, 5.
De resurr., 22, p. 56, 14. Adv, Herm., i, p. 126, 8. Adv. Val., 4,
p. 181, 12. Avec inanere^ il préfère /«. De idol., 3, p. 32, 16: sicut
iti hodicrnum quibusdani locis veiustatis vestigia pertnanent. Adv. lud.,
I 3 : cuin iiulliis omnino sit illic in hodiernum derelicUis ex Israël.
— 40, 7. et quasi Pi ; et si qua *FP2.
— 40, 8. ulcinios P- ; ulsinios P' ; Vulsinios *F.
— 40,9. occupaverant P ; occupaverunt *F. — Depuis Rhena-
nus, on lit : occupavenmt, exigé par le sens et par la grammaire,
comme par le rythme (crétique et trochée). De même, De cor., 7,
V Agobardinus z procuraverant au lieu 6.Q procuraverunt.
— 41, 2. si quod et ipse patiatur P ; qui et ipse patitur F.
— 41, 4. dispicitis P ; despicitis *F.
— 42, 2. nec ultra P ; ne ultra *F.
— 42, 2, mutamur P ; utamur *F.
— 42, 4. rigere P ; frig^re F. — Voy. App. I.
— 42,5. ubi P; ubicumque *F. — Sens indéfini. Voy. ci-
dessus, p. 45.
— 42, 7. sumantur P ; sumam tura *F. — Division fautive,
puis suppression de a final.
— pluris et carioris P ; plures et chariores F.
— 43, I, secarii P; sicarii F.
— 45, 5. illa sed P ; illas et F. — Mots mal divisés ; on a pris
set pour sed. Voy. ci -dessus, p. 71, ad 5, 3.
— delitiscendi P ; delitescenti F.
— deliquendi P (/. delinquenti).
— 45,7. prospicientiae P^ ; prospientiae P' ; pro scienliae *F.
— Pro scientiae pleniUidine correspond kperfecte eam novitmis (§1).
On a corrigé moins bien &n pro sapientiae plenitudine.
— 46, 4. degerare P ; deierare *F.
— 46, 5. gallenatium P' ; gallinatium P^.
— ■ 46, 10. provocemus P; provocemur *F. — Tert. répond aux
païens qui provoquent ou défient les chrétiens. Dean., 19, p. 330,
\i: Et si ad arbores provocanmr, amplcctemtir exeviphim.... La con-
fusion de s avec r est fréquente.
— 46, 12. diogenis P; Diogenes *F.
— hostibus P ; hospitibus F. — Voy. ci-dessus, p. 45.
— 46,15. vestris P ; ventris*F.
— 46, 17. excedere P ; excidere F. — Cf. 49, 6. De an., 25, p.
LEÇONS FAUTIVES PROPRES A P 121
343, 13 : nescio de Pristina magis an de tsta senienlia sibi exiderit, se.
Plato. Ad Scap., 3 : a proposito suo excidere. Adv. Herraog., 39,
p. 169, 5 : hic a lineis inis excidisti. Adv. Marc, 3, 4, p. 381, 3 ;
excidens ab optimi Dei litulo. Sur excidere a Deo, voy. 49, 6.
— 46, i8. distructor P ;. destriiclor F.
— 47, 4. mutabat P; nutabat F. — Voy. Ad nat., 2, 2, p. ()(>^
I : nutat.
— 47, 7. quos regat P; quod regat *F.
— 47, 9. defensionum iudicet veritatem P; defectionem vindicet
veritatis F. — Voy. App. I.
— 47, 12. subterranea P; subterraneus *F. — De an., 55, p. 387,
22 : nobis inferi... creduniur... in ipsis visceribus eius (se. terme')
abstrusa proftmditas. Ibid., p. 388, 6 : habes et regionem inferuin sjib-
terraneam credere.
— 48, 3. restaurarelur P; restauretur F. — La coneordance du
temps exige le présent.
— 48, 9. adoleverit P ; absorpserit F. — Il faut lire, dans P :
abolcverit.
— 48, II. exspeclavimus P' ; exspectamus P^ *F.
— 48, 12. aulae P^; aulaei P' *F. — Le correcteur n'aura pas
compris le sens de aulaei. Cf. De an., 41, p. 369, 5 : detracto corrup-
tionis pristinae aulaco. Ibid., 53, p. 386, 23 : de obpanso corporis
eriimpit {aniina^ in aperlum ad nieram et puram et suain lucem.
— 48, 15. nutrientes P; nutrientis *F.
— 49, I. hae sunt, quae P; haec sunt, quae *F.
— 49, 2. quae tuentur P ; quae tuemur *F. — Cf. 6, 10 : quod
videmini tueri. Voy. App, I.
— 49, 3. falla P; falsa *F.
— 49, 4. captatus P; captatur *F. — Le scribe a confondu 5 et r.
Cf. 50, 3 et 13.
— 50, 3. exurimus P' ; exurimur P2*F. — Cf. 49, 4.
— 50, 4. in causa P; in causam F. — V03'. App. I.
— 50, 6. truces Pj cruces *F.
— 50, 9. zenocleates P; Zeno Eleates *F.
— 50, 13. efficimus P; efficimur F. — Cf. 49, 4.
— 50, 14. gallinicus P ; Calinicus *'F. — Lisez : Callinicus.
122 LEÇONS FAUTIVES COMMUNES A F ET A P
XVI. Leçons fautives communes à F et à P.
— 1,1. domesticis iudiciis FPM. — Lisez : domesticis indiciis,
Voy. App. I.
— 2, 6. ad canendum Christo et Deo *FP. — Il faut lire avec
Heraldus : ut deo. C'est un nouvel exemple de la confusion fréquente
de ut avec et. Voy. p. loi, ad 4, 3, et App. 1.
— prohibentes *FPM. — Avec Van der Vliet, p. 32-33, il faut
\\x& prohibentem, car ce participe ne peut s'accorder avec aucun autre
mot que disciplinam. Voy. App. I.
— 2, 15. apud vos solos quaestioni temperatur F; apud vos soli
quaestioni temperatur P. — La loi romaine ne permet d'employer
la torture que pour l'enquête judiciaire, pour arracher la vérité à
l'accusé. Il faut donc : soli quaestioni, et solos (F) vient d'un faux
accord avec vos. — Opposé ?l poena, quaestioni désigne l'instruction
judiciaire. C'est un datif de but, ad solavi qiiaestio7icm « uniquement
en vue de l'enquête ». Sur ce datif, voy. Hartel, Patr. Stud., III,
p. 81-82. Hoppe, Syntax, p. z6. Malgré l'accord de F et de P, tem-
peratur ne semble pas admissible, car le sujet est tonnenta. Avec
Latinius, il faut lire : temperantur {tonnenta^ « la torture est em-
ployée, appliquée (avec mesure) en vue de la seule enquête ».
— 2, 20. cur non et incestus FP. — Il faut lire : cur non et inces-
tum... ? Havercamp propose déjà de lire incesttivi, mais il opère une
transposition inutile. Voy. Gomperz, p. 79 ; Callewaert, Le Cod.
Fuld.., p. 335. Ad nat., i, 3, p. 62, 6 : ut ita pronuntiaretur in nos;
illuni homiciJam vel incestum vel quotcunque iactamur duci, siiffigi,
ad bestias dari piacct.
— 8, 4. vivis in aevum P, — C'est la lecture adoptée par De la
Barre et Modius ne donne aucune variante de F. Voici le passage
correspondant ÙlQ Ad nat., i, 7, p. 71, 6 : Haec cum cxpun.xeris,
vives in aevum. Le futur vives est plus conforme au sens et à la gram-
maire, bien qu'on puisse expliquer le présent. Cf. Min. Félix, 12,
6 : Ita nec resurgi tis miseri nec intérim vivitis. 38,6: Sic et beati
resurgimiis. Le présent exprime un fait général. Le texte de Ad nat.
n'est pas décisif non plus, car Tert. ne se copie pas toujours littéra-
lement. Mais vivis in aevum ne paraît pas admissible, parce que c'est
une fin d'hexamètre, tandis que vives in aevum donne comme clau-
sule un double trochée.
LEÇONS FAUTIVES COMMUNES A F ET A P 123
— 8, 7. describere *F ; discribere P. — Le verbe ne convient
pas au sens. Voy. App, I.
— 9, 2. usque ad proconsulatum Tiberii *FP. — Il y a peut-
être une faute dans le nom propre Tiberii.
— 10, I. eadeni ratione ... quia FF. — Il faut lire qua, au lieu
de qîiia. Van der Vliet, p. 35. Adv. Marc, 3, 8, p. 390, 3 : eadem
etiiin ratione non resurrexit, qua mortuus von est. Ibid., 3, 9, p. 391,
18 : certa ratiotie ... qua. De fuga, 8 : eadeni ration^, qua — Il
est à remarquer que, dans l'Agobardinus, qua devient souvent quia.
Hartel, Patrist. S/ud., III, p. 42.
— 16, 2. etiam de ipsa origine F ; etiam de ipsa tam origine
P. — La faute etiam pour et tam est commune à F et à P. Une fois
tam escamoté, P l'a inséré devant origine ; dans F, tam manque.
Voy. App. I.
— 16, 12. Onochoites is erat F; onochoitisis erat P. — Les
scribes n'ont pas compris le mot grec ONOKOITHS, « race d'âne».
Voy. H. Leclerq, Dtcl. des antiq. chrêt., s. v. Ane. Dans Ad nat.,
l'Agobardinus a deux fois Onochoites (p. 84, 15 et 18) et une fois
onochoetae (p. 85, 1).
— (8, 3. deseritis (/. desertis) FP. — Voy. p. 116.
— 20, 4. eadem voces (/. eaedem voces) FP. — Cf. 40, 9.
— praefanti FP ; praefandi M. — Ici^ M a conservé la bonne
leçon.
— z\, 30. nominum FP. — Lisez: numinum.
— 23,2. aut si eadem *FP. — La particule disjonclive aut ne
se comprend pas ici. Les démons, qui aident les magiciens à opérer
leurs prodiges, dit Tert., sont capables de les opérer pour leur
propre compte. Mais, conlinue-t-il, si les démons font les mêmes
prodiges que les dieux, ils sont égaux en puissance aux dieux, ce
qui est inadmissible. Plutôt que d'admettre cette égalité, il faut
croire que les dieux sont en réalité des démons qui se font passer
pour dieux et qu'il n'existe pas de dieux, mais uniquement des
démons. 11 faudrait ai ou sed.
— 23, 3. compara FP^M ; compar P-- — Il est curieux de
constater que les deux traditions ont l'impératif compara pour com-
Par, parce que la faute est raisonnée. Dans P, Va final a été
exponctué, il est resté dans M comme dans F.
— 24, 7, et capite damnandis, qui aliquem huiusmodi deum
occiderit FPM. — Le singulier occiderit après le pluriel damnandis
paraît étrange et nous ne connaissons aucun exemple analogue.
124 LEÇONS FAUTIVES DIFFÉRENTES DANS F ET DANS P
Peut-être faut-il lire, malgré l'accord des manuscrits : qui... occi-
derint, avec Junius, Rigaltius et Havercamp, ou si quis ... occident.
— 25,7. orbi terrae FPM. — Lisez : orbi terra. Voy. App. I.
— 25,9. Laurentinae FPM. — Lisez: Larentinae Cette con-
fusion çst fréquente. Voy. Minucius Félix, 25, 8. Cf. 13, 9 et 25, 3.
— 33, 8. spirant *FP. — Lisez : spirat.
— 39, 15. si aliis *FP. — Lisez : Saliis. Ad nat., 2, 12, p. 119,
13, A a : 5» alii pour Salii.
XVII. Leçons fautives différentes dans F et dans P.
— 4., 2. quae palam admittentes inveniuntur F (d'après le Cod,
Brem.)] quae illos palam admittentes invenimus P. — Il faut lire :
quae palam admittentes invenimur. Sur ce passage, voy. App. L
— 7, 6. dumdivinitas servatur F ; dum divina servantur P. —
Lisez ; dum divina servatur, se. animadversio . Voy. App. L
— 9, 16. Les mots grecs sont généralement défigurés dans F et
dans P, mais toujours de manière différente. Voy. l'apparat cri-
tique. Les mss. permettent de lire ici : è'Xauvô, impératif (voy.
Priorius) ou Tj^auvô, ificurre ou incurrebat in viatrem l Ad nat.^ i, 7,
p. 71, 5 : ut non erres extraneam incursans. Apul., Met., 10, 23 :
ne qUo casu... nescius fiesciam. sororein inciirrerct. Dans Ad nat., i,
16, p. 86, 23, l'Agob. a: elaune diccbatisten matera, et Rigaltius lit :
fJXauvs, dicebat, sk xt)v (j,T|xépa ((xarÉpa Oehler).
— 14, 8. cum paenitet F; cum paenitentia P. — Sur toute cette
phrase, voy. App. L
— 19, 6. et Proemis Phoenix, Tyriorum rex F; sed et hieronimus
foenix, tyrii rex P. — Lisez : et (ou sed et) Hieromus Phoenix,
Tyriorum rex. Voy. App. I.
— 20,5. futuro quoque F ; futura quoque P. — illisperduos
gradus credere *FM ; illi per duos gradus credere P. — App. L
— 21,29. Tryphonius F; trophenius P. — Lisez: Trophonitis.
Nom propre défiguré.
— 21,5. ad delirandum disciplinam F; ad declinandum déri-
vantes a disciplina P. — Yoy. App. I. Il faut lire : ad declinafidum
disciplinam (ou a disciplina') .
— 21, 30. sed quod F ; sed quia P. — Il faut lire : sed qua.
— 22, 10. fuerant habentes F ; fuerat habens P. — Il faut lire:
fuerat (se. Pythius). Habent (se. daemones). Voy. P. Henen, dans
\q Musée Belge, \\, 1910, p. 229.
LEÇONS FAUTIVES DIFFÉRENTES DANS F ET DANS P 125
— 24, 4. in aliquem principem *F ; in aliquam principe P. —
Lisez, avec Havercamp: in alio quam principe.
— 24,5. ad aram Fidem F; ad aram Fidiae P, — Lisez: ad
aram Fidei.
— 25,10. apud R.omam cum inditamentis suis F ; romam cum
indignis suis P. — Le mot rare indigitamentis a fait trébucher tous
les scribes. Lisez: apud Romani {se. fuit cum ifidigitameniis stiis),
ou bien : Romani (se. fuerunt, veneruni), etc.
— 39> 15- et polincto lucitorum F; et polinctorum P. —
Lisez : et polluctorum.
— 40, 3. Noms propres défigurés. Voy. l'apparat critique.
— 45, 4. de divina lege ut antiquiorem formam mutatas F ; de
divina lege ut antiquiore forma mutualas P. — Il faut lire : de
divina lege, ut antiquiore, formam mutuatas. Dans F, formam a
attiré antiquiorem à l'ace, et, dans P, antiquiore a attiré forma à
l'abl. Tertullien emploie souvent ut (en grec i5)i;) avec un participe
ou avec un adjectif (l'idée du part. prés, du verbe esse étant sous-
entendue). Voy. Hoppe, Syntax^ p. 58.
— \(i, 7, inimici F ; ininiice P. — Le cod. Gothanus^ suivant
Oehler, porte en marge ; mimice, que beaucoup d'éditeurs anciens
ont admis. Mimice « en mime, en comédien », est dans Catulle, 42,
8 : quam videtis turpe incedere mimice ac moleste ridentem. L'adjectif
mimicus « qui tient du mime, de la comédie» est dans Cic, De
orat., 239; 274, et dans Quint., Inst. or., 6, i, 47. Cf. Lucien,
Gallus, 26 : 6'(ji.otoi ji-âXiaxa (paîvovTat toÏ<; Tpay^xotç ÙTroxpixa'ïi;.
Mimice rend bien l'idée de Tertullien : les philosophes font parade
de la vérité, en vrais comédiens. Voy, Adh. d'Alès, Thêol. de Tert.,
p. 2. — Cf. Adv. Marc, i, 29, p. 331, 2 : txmc dcnique coniugium
exerte defendentes, cum inimice accusatur spurciliae nomine. Mais
ici inimice ou inimici ne convient guère à adfectant. La confusion
de mimice et inimice est d'ailleurs facile.
— 46, 10. Diogenis supra recumbentis ardore (ardori F ; ardo-
rem P) subantem. — Junius (Notae, p. 93) et Scaliger proposaient
de lire: ardore. Junius dit: legendum autem, ardore subantem.
Nam ardebat illa Diogenem et ex ardore eius supra recumbentis
subabat, opsytaxo, ÈOuaxo. Le datif ardori et l'ace, ardorem ne se
comprennent pas. Le sens de la phrase exige l'abl. de cause,
ardore = amore vehementi, tentigine. Le gén. Diogenis est un gén.
objectif. Val. Max., 9, 13 ext. 3 : infinito ardore coniugis... tene-
126 LEÇONS FAUTIVES DIFFÉRENTES DANS F ET DANS P
retur. Sen., Ag,, 177 : ardore sacrae virginis ... furens (ici suhans).
Thés. l. /., II, 491, 65-69.
— 46, 10. Speudipsuni F ; Psesippum P. — Lisez: Pseusippum.
— 49, 16. Ycthyas F; icthydias P. — Lisez : Hippias.
— 48^ I . copiis à populo exigetur P. — Au lieu de copiis, P a
coetibus. Ni l'un ni l'autre ne donnent un sens satisfaisant. Yoy.
App. 1.
— 48, 13. divina scilicet subministratione F; divinam scilicet
subministrationeni P, — Lisez : habentes et ipsa tiatura, divina
scilicet, submitiistraiionem incorruptibilitatis. Voy. App. I.
L'orthographe et la morphologie présentent certaines particula-
rités, propres soit à F, soit à P, ou communes à l'un et à l'autre.
Nous nous bornons à en rassembler quelques-unes.
Dans les désinences verbales, P change souvent b en v : probavit
■çonv probabit (3, 7), repurgavimus (16, 14), tnonstravimus (2r, 26),
resullavit (24, 2). Dans F, Modius ne signale que vetiefici ^o\xv bene-
fici (22, II).
P écrit parfois quod pour quot. Voy. 2, 5 (bis) ; 8, 8. Dans F,
Modius donne quando pour quanto (39, 9) et aliquando pour ali-
quanto (21^ 1).
Signalons encore : antestant F ; antistant P (29, i) ;
religavit (3, 4), religainur (12, 5), religetur (39, 4), dans P^ pour
relcgavit, etc.
despicile (15, r), dans P, pour dispicile )
dominus est fréquent dans P, pour deus. Voy. 13,4; 17^ 3 ; 21,
29 ; 23, 4 ; 18 ; 39, 18. Voy. ci-dessus, p. 114, ad 13, 4.
Dans F, et est souvent confondu avec ut. Voy. 2, 6 ; 4, 3 ; 21,
2 ; 12 ; 27, 5. Dans P, la même faute se trouve 2, 6.
Modius nous avertit (16, 8) que F écrit toujours dei et deis, tan-
dis que P écrit dii et diis.
P écrit idem pour iidein (6, 7 ; 9, 19 ; 12, 4 ; 48, 13) ; hisdevi
pour iisdem (12, 2 ; 15, 7 ; 28, 2).
Dans les déclinaisons de daemon, F maintient la forme grecque,
tandis que P préfère la forme latine ou la forme daemonium :
F P
22, I daemonas daemones
— daemonis daenionii
23, 6 daemonas daemones
— daemonas daemonia.
LEÇONS FAUTIVES DIFFÉRENTES DANS F ET DANS P 127
F écrit ructuare et eruciuare : ructuatur Br (9,11) ; ructatur P ;
ructuando F (23,5); ructando P ; ructuantibus *FP (39,15);
eructuans F (18, 14) : eructans P. Isidore, Etym., 19, 6, 2, imitant
ce passage, écrit : eriictuat. Cf. De resurr., 31, p. 70, 21 : eruc-
tuabunt F (= Florentinus Conv. suppr. VI, 10, saec, XV). Adv.
Prax,, II, p. 243, i : eructuavit MF ; eructavit P (= Paterniacensis
439, saec. XI).
Les fautes que nous venons de passer en revue ne sont,
pour la plupart, que des erreurs de transcription, des
méprises, dont l'origine est souvent aisée à découvrir.
Parmi les causes d'erreur, l'une des plus fréquentes
est l'influence du contexte, la suggestion des mots voisins:
c'est tantôt la forme d'un mot voisin (2,15 : apud vos solos
pour soli), tantôt l'idée voisine (2,6 : de ceteris) qui suggère
au scribe un faux accord, une modification de la dési-
nence. Ce genre de fautes est le résultat d'un raisonne-
ment sommaire du scribe, qui croit comprendre à la
première lecture et ne prend pas le temps d'approfondir
le sens de ce qu'il transcrit. La faute est donc consciente,
mais le scribe n'a nullement l'intention de porter atteinte
au texte authentique de Tertullien ; il s'imagine, au
contraire, qu'il le rétablit dans sa pureté.
Nous avons vu qu'il arrive aussi au copiste de se trom-
per sur la nature des abréviations ou de négliger celles-ci.
Très souvent, il ne commet qu'un lapsus, traçant une
lettre pour une autre, doublant ou dédoublant incon-
sciemment (dittographie ou haplographie) une lettre,
une syllabe ou un mot.
Il est remarquable que ces corruptèles soient à peu
près également nombreuses dans les deux traditions et
que les erreurs, si elles sont de même nature dans l'une
et dans l'autre (ce sont les fautes qu'on est habitué à
128 CONCLUSIONS
rencontrer dans les manuscrits), n'affectent pas les
mêmes mots dans F que dans P, et que les mots altérés
dans l'un soient restés intacts dans l'autre. Nous n'avons
compté que 22 passages où F et P présentent des fautes
différentes et seulement 22 fautes communes à F et à P,
Ces dernières sont très caractéristiques et l'on peut croire
qu'elles existaient avant la naissance des deux traditions.
Séparées de bonne heure, la tradition de Fulda et la
tradition commune ont eu chacune sa destinée parti-
culière.
XVIII. Conclusions.
Nous avons comparé minutieusement les deux tra-
ditions manuscrites de l'Apologétique représentées l'une
par F et l'autre par P. Parmi les très nombreuses diffé-
rences qui les séparent, nous avons essayé de démêler
celles qui sont dues à un accident.
La tâche était très épineuse et nous ne nous dissimu-
lons pas que peut-être le jugement de nos lecteurs ne
s'accordera pas toujours avec le nôtre. Cependant nous
nous plaisons à croire que, d'une manière générale, on
conviendra que les altérations relevées par nous ne
proviennent ni de l'auteur ni d'un remanieur qui s'ap-
plique à rendre le texte plus clair et plus facile, mais
que ce sont des inadvertances de scribe.
La langue et le style de Tertullien sont difficiles. Rien
d'étonnant, par conséquent, que son texte ait été défi-
guré par les scribes successifs. Le scribe qui copie sans
comprendre toute la pensée, se trompe facilement, parce
qu'il devient vite distrait. Sur les marges d'un texte
obscur, les gloses se multiplient et le scribe s'imagine
CONCLUSIONS 129
souvent qu'elles font partie du texte. De là, ces nom-
breuses omissions, additions, transpositions, graphies
fautives et incorrections de tout genre que nous avons
relevées.
Il résulte de notre étude que les deux traditions ont
été à peu près également maltraitées par le temps, mais
dans des passages différents.
Nous avons conclu que F et P représentent des tra-
ditions différentes et que la séparation entre les deux
traditions s'est faite de bonne heure : chacune a suivi
sa destinée sans être influencée par l'autre.
Si l'on corrige toutes les fautes accidentelles, une no-
table partie des différences disparaît. Mais ce travail
d'épurement ne suffit pas pour ramener les deux tra-
ditions à un texte unique, que l'on puisse regarder comme
l'original de l'une et de l'autre. Loin de là : il subsiste
un plus grand nombre de variantes, où l'on reconnaît
plus ou moins clairement une intention de corriger,
d'améliorer, de remanier, pour une raison souvent facile
à deviner, soit la pensée, soit le style.
C'est en grande partie par l'examen des différences
qui restent que nous chercherons à répondre aux questions
suivantes : A quand remonte la séparation entre les
deux traditions et quelle en est l'origine ? Est-elle due
à l'auteur lui-même, c'est-à-dire, Tertullien a-t-il publié
deux éditions de son Apologétique ? Ou plutôt est-elle
due à des remaniements intentionnels faits plus tard?
Et, dans ce cas, chacune des deux traditions a-t-elle subi
des retouches ou l'une des deux présente-t-elle un texte
authentique ? Si elles ont subi toutes les deux des retou-
ches, les ont-elles subies dans la même mesure, ou l'une
130 CONCLUSIONS
des deux doit-elle être regardée comme plus pure que
l'autre ? 0).
(') La réponse à ces questions, on peut le prévoir déjà, sera
celle-ci : Tertullien n'a donné qu'une seule édition de V Apologétique.
De bonne heure, il s'est formé deux traditions du texte de cet
ouvrage tant lu et tant admiré. Ces deux traditions n'ont plus eu
de rapports entre elles, c'est-à-dire que jamais personne ne s'est
efforcé de les mettre d'accord, n'a corrigé l'une d'après l'autre.
Mais chacune a subi, de son côté, la revision, souvent maladroite,
d'un ou de plusieurs remanieurs qui, pour rendre le texte plus
clair, plus facile à comprendre, ont méconnu souvent le style et la
pensée de l'auteur. Cependant ce travail de revision a été beaucoup
moins fatal à F qu'à P. C'est F qui nous a conservé le texte le
plus pur et c'est sur F que devra être fondée l'édition définitive ;
mais il faut se servir de F lui-même avec précaution.
131
APPENDICE I.
Examen des leçons de F. '"
Notes critiques et exégétiques.
Dans cet Appendice, nous nous proposons de justifier
l'adoption ou le rejet d'un certain nombre de leçons de
F. Nous essayerons aussi d'expliquer le sens de nombreux
passages de V Apologétique, qui sont encore controversés
ou qui nous paraissent avoir été mal compris par les tra-
ducteurs ou par les commentateurs.
Nous aurons l'occasion de revenir sur plus d'une va-
riante discutée plus haut et de compléter ce que nous
en avons dit. Nous préparerons aussi notre étude sur
La double tradition manuscrite de V Apologétique.
Les passages que nous examinerons sont assez nom-
breux pour que l'on puisse en tirer déjà des conclusions
générales au sujet de l'état et de la valeur de chacune
des deux traditions. Nous avons résumé ces conclusions,
ci-dessus, p. 130, n. 1.
Il faut dire un mot des principes qui doivent dominer
une pareille étude, des critères qui doivent nous guider.
Les auteurs que nous avons appelés (ci-dessus, p. 31)
les témoins indirects du texte de l'Apologétique ne peuvent
être allégués qu'avec une grande prudence. Nous avons
dit que le traité Aux nations, écrit avant l'Apologétique,
mais la même année 197, nous présente souvent les mêmes
idées sous la même forme ou sous une forme peu diffé-
132 APPENDICE I
rente. Nous verrons, dans notre étude sur La double tra-
dition manuscrite, que Tertullien, en reprenant sa pre-
mière rédaction, la modifie le plus souvent légèrement.
Il en résulte qu'on ne peut pas toujours corriger le texte
de l'Apologétique d'après celui de VAd nationes {^). Cepen-
dant, si l'une des deux traditions diffère de la première
rédaction et que l'autre la reproduise exactement, il est
au moins vraisemblable que celle-ci a conservé le texte
authentique {^).
Quant aux écrivains qui se sont inspirés de Tertullien,
la liberté qu'ils prennent avec sa pensée et avec son style
est ordinairement si grande, que chaque cas doit être
examiné en particulier et avec le plus grand soin. Il en
est de même du traducteur grec contemporain de Ter-
tullien, qui n'a pas toujours compris le texte latin, et
d'Eusèbe, qui a suivi ce traducteur sans vérifier l'original.
Il en est autrement de VAltercatio Heracliani, qui copie
textuellement un long passage du ch. 21, et de Rufin,
quand il reproduit le texte de V Apologétique d'après le
ms qu'il avait en sa possession {^). Ce sont des témoignages
d'autant plus précieux qu'ils sont datés.
Mais qu'il s'agisse de la langue, du style ou des idées,
Tertullien doit être expliqué surtout par lui-même.
(1) Voyez, dès maintenant, W, Hartel, Pair. Stud., II, p. 15-18.
(2) Hartel a soutenu que l'accord fréquent de F avec le texte du
traitera' nationes, alors que P en diffère, prouve que F a été revisé
d'après ce texte. Mais nous verrons que P n'est pas moins souvent
d'accord avec ce texte que F, dans des passages où F en diffère.
{^) S. Jérôme, Epist., 5, 2, ad Florentinum : Scripsit mihi et
quidam de patria supra dicli fratris Rufmi Paulus senex Terlullia?ii
suu/n codicein apud eutn esse, quein ve/iementer repoposcit.
APPENDICE I 133
Le grand Africain doit beaucoup à ses devanciers, les
apologistes grecs (i) ; j'oserai dire qu'il leur doit la plus
grande partie des idées de V Apologétique, les idées ro-
maines mises à part. Mais il a transformé tout ce qu'il a
emprunté, et, du bien d'autrui, il a vraiment fait son
bien propre par une mise en œuvre si originale, si per-
sonnelle, que toute trace d'emprunt disparaît. Sur plus
d'une idée, puisée ailleurs, celui que Bossuet appelle
souvent « le grand » ou « le grave Tertullien » ou « ce
grand homme » a mis son empreinte à jamais. Il a pu le
faire d'autant plus facilement, que parmi les Latins, il
a été le premier écrivain de génie.
Tertullien a sa façon de penser, sa façon d'argumenter
et de mettre les idées dans un puissant relief : théologien,
juriste, avocat, logicien, rhéteur, il est tout cela d'une
manière qui lui est propre et qu'un lecteur familiarisé
avec ses écrits reconnaît dès l'abord.
Il est aussi styliste dans toute la forcé du terme ; avec
Tacite, il est le plus personnel des écrivains latins. On
retrouve souvent sa langue dans les écrits du même temps,
chez Apulée, par exemple, mais son style lui appartient
tout entier {^).
S'il faut donc comparer Tertullien à ses contemporains,
// faut surtout expliquer Tertullien par Tertullien. Telle
est la grande règle à suivre pour établir son texte. Et s'il
(•) Nous nous réservons de traiter ailleurs la question de la
ressemblance de Tertullien avec Minucius Félix, que M. Ileinze
a renouvelée. Ses arguments sont ingénieux, mais ne nous parais-
sent pas convaincants.
(2) Sur la langue de Tertullien, V03^ H. Hoppe, Syndix und S/il
desTertullian. Teubner, 1903. Sur le style, voy. P. Monceaux, Hist.
lin, de l'Afrique chrétienne, tome I, p. 439-462 : L'écrivain.
134 APPENDICE I
faut chercher ses idées, sa langue et son style dans tous
les écrits qu'il nous a laissés, V Apologétique doit surtout
être expliqué par lui-même. Il faut se pénétrer de ses
sources d'invention si diverses et exploitées d'une manière
si originale, de son but qui n'est jamais perdu de vue, de
son plan, d'un dessin si net, si ferme, si logique jusque
dans les détails, de ses procédés spéciaux d'argumen-
tation à l'adresse des païens. {^) C'est là un critère infail-
lible, mais d'une application délicate.
Un mot sur un point spécial. Depuis Cicéron, la prose
littéraire est rythmique ; les phrases et les membres de
phrase finissent par une clausule métrique. Tertullien,
qui veut mettre au service de la foi nouvelle toutes les
ressources de l'art, ne néglige pas ce moyen de plaire.
Il en fait un usage si constant que la critique peut soup-
çonner d'altération toute fin non métrique ou d'un
rythme douteux. Cependant l'emploi de ce critère exige
une certaine réserve, comme nous le verrons en expo-
sant les règles suivies par Tertullien. Voy. à la fin de cet
Appendice.
Tertullien est actuellement en grande faveur parmi les
philologues comme parmi les théologiens : leurs efforts réunis
ne sont pas de trop pour débrouiller la question qui nous
occupe. Aux travaux critiques de Callewaert, di Capua, Hartel,
Heinze, Henen, Hoppe, Kroymann, Rauschen, Van der Vliet,
sont venues s'ajouter récemment la dissertation de Schrôrs,
avec la réplique de Rauschen, et l'étude de Lôfstedt {^).
(') Voyez surtout : R. Heinze, Tertullians Apologeticuin. Teubner,
1910. Ber. der saclis. Ges. der Wiss., 62, p. 279-490.
(^) H. Schrôrs, Zur Texlgeschichle und Erklàrxing vo7i Tertullians
APPENDICE I 135
Malheureusement, nous n'avons pas pu faire des trois der-
niers travaux tout l'usage que nous aurions voulu. Nous
avons reçu les deux premiers en novembre 1914 et le troi-
sième en juillet 1916. Notre ouvrage était rédigé en juin 1914
et l'impression a commencé en juillet 1914. En corrigeant
nos épreuves, nous avons parfois mis à profit la dissertation
de Schrôrs et souvent celle de Rauschen. Nous regrettons
de n'avoir pu nous servir dès le début de l'important travail
de Lôfstedt : fait avec méthode, il a résolu, à notre avis, plus
d'un problème difficile. Nous indiquerons en note ce que
nous avons pu lui emprunter.
Apologeticum. Leipzig, Hinrichs, 1914, 124 p. Texte und Unter-
such., 40, 4. Livre manqué et d'un ton trop personnel. Schrôrs a
repris la thèse jadis défendue par Havercamp et par Oehler. Voy.
ci-dessus, p. 1-3.
G. Rauschen, H. Schrôrs undmeine Ausgahe von Tertullians Apolo-
getikum. Bonn, Hanstein, 1914, 136 p. Réfutation de la thèse de
Schrôrs. Dans l'appendice, Rauschen donne des corrections à sa
20 édition.
E. Lôfstedt, Tertullians Apologeticum tcxtkritisch untersucht. Lund,
Gleerup. Leipzig, Harrassowitz, 1915, 123p. Lôfstedt admet comme
Rauschen, que F a été remanié, mais beaucoup moins que P. Voy.
ci-dessuS; p. 5-6.
1,1. si denique, quod proxime accidit, domesticis indiciis
nimis (animis F) operata infestatio sectae liuius os ob-
struit (os om. PM) defensioni FPM
Sur os obstruit, voy. ci-dessus, p. 48, et Rauschen, p. 39. —
Sur domesticis iudiciis, les manuscrits sont d'accord, sauf
un Oxoniensis, dit Oehler, qui aurait domesticis indiciis.
Rlienanus et tous les premiers éditeurs ont imprimé domes-
ticis indiciis ; Heraldus le premier a attiré l'attention sur la
leçon domesticis indiciis sans la mettre dans son texte. Depuis,
elle a été accueillie par la plupart des éditeurs, mais on n'a
cessé d'en discuter le sens, ce qui prouve qu'elle est obscure.
Au point de vue paléographique, la confusion de indiciis et
de iudiciis est très facile.
Il nous semble qu'il faut revenir à domesticis indiciis, parce
que la leçon des mss ne satisfait ni le sens, ni la grammaire.
Tert. explique pourquoi il adresse aux gouverneurs un
plaidoyer écrit, une lettre ouverte : c'est que, devant leur
tribunal, les chrétiens ne peuvent pas parler. Le juge refuse
de faire une enquête publique ; il lui arrive même de fermer
la bouche à l'accusé. L'attitude du juge envers les chrétiens
est la même dans toutes les poursuites contre les chrétiens :
il n'y a aucune différence entre les audiences publiques et
les audiences privées. On en verra la preuve au ch. 2,1-5. Les
trois propositions conditionnelles expriment les motifs de
cette attitude ; ils sont repris sous une autre forme au chap.
37,2.
1° Si non licet vobis = partim legibus obsequentes : la loi ne
leur permet pas de faire une enquête sur les crimes qu'on
impute aux chrétiens ; en effet, la religion chrétienne est
prohibée, elle constitue par elle-même un crime punissable
de mort et, une fois que l'accusé a avoué être chrétien (Chris-
tianus sum), il ne reste au juge qu'à condamner. Voyez encore
CHAP. 1,1 137
tout le chap, 4, où Tertullien critique cette législation, qu'il
résume en ces termes : Non licet esse vos !
2° Si vestra auctoritas ... aut timet aut erubescit = quotiens
etiam praeteritis vobis suo iure nos inimimm vulgus invadit ?
Cette phrase du eh. 37,2, correspond à Si vestra auctoritas
etc., en ce sens au moins que, d'un côté comme de l'autre,
Tert. parle de l'intervention de la populace : l'autorité du
juge cède devant les clameurs de la foule, soit par crainte soit
par respect humain {timet aut erubescit). Cf. 49,4 : favor vulgi.
50,12 : apud poputum.
3° Enfin, 5/ denique ... infestatio sedae huius os obstruit
defensioni = partim animis propriis obsequentes : c'est la
haine personnelle du juge, trop empressée à accueillir les
délations domestiques,- qui ferme la bouche à la défense,
comme il est arrivé naguère.
C'est donc la loi, la populace ou l'animosité personnelle
qui dictent au gouverneur l'attitude qu'il observe envers
les chrétiens, quand il siège comme juge au sommet de la
cité, au Capitole provincial. Il n'y a pas lieu de parler ici
des audiences privées tenues dans le palais ou au greffe du
gouverneur : ces audiences exceptionnelles ne présentent,
en effet, rien de particulier au point de vue de l'attitude des
gouverneurs. Ce que Tert. met à part, c'est le cas du juge qui,
poussé par la haine, s'empresse d'accueillir les délations do-
mestiques et qui ferme la bouche à l'accusé, c'est-à-dire l'em-
pêche de répondre à ses délateurs. Il met ce cas à part, parce
qu'il est plus atroce que les autres et qu'on en avait vu récem-
ment un exemple, à Carthage sans doute.
Le témoignage des esclaves peut s'appeler domesticuin tes-
timonium ou indicium. Gains, 2, 105 : reprobatum est in ea
re domesticum testimonium. Cic, De or,, 2,1, 2 : quos tum ...
refutare domesticis testibus solebamus. Cod. lust., 4, 20, 3.
Souvent les chrétiens étaient dénoncés par leurs domesiici
ou « esclaves de la maison », bien qu'Athénagore (Suppl., 35)
assure le contraire en l'an 177.
S.Justin dit formellement qu'on allait jusqu'à forcer
les esclaves de témoigner contre leurs maîtres chrétiens, ce
qui était contraire à la loi. Apol. II, 24,4 : Kal e^; [jao-âvouç
138 APPENDICE I
eOxXUo-av oûéxaç twv 'h{Ji.eTépo)v, r\ izcf.îtac,, r\yùvc/xy., xal 8t yl-
xia-p.wv cpopepwv é^avayxàÇouor!. xaTe'.Tce^v xaûxa xà p.u9oAo-
yoùjji.£va.
En 177, sous Marc Aurèle, le légat de la Lyonnaise fit
arrêter à Lyon tous les chrétiens et l'on arrêta avec eux leurs
esclaves restés païens. Les esclaves, qui avaient peur de la
torture, obéissant aux exhortations des soldats, accusèrent
leurs maîtres de crimes abominables : festins de Thyeste,
incestes d'Oedipe et autres faits qu'on ne peut dire ni penser,
ni même croire, s'ils s'étaient passés, dit Eusèbe, Hist. eccl.,
5, 1, 14 : cruveXafjipàvovxo 8e xal éOvuo'! xiveç oixéxat. xwv
Tijjiexépwv, accidit autem etiam servos conprehendi quorundam
ex nostris paganos (Rufin). Un citoyen considéré et instruit,
Vettius Epagathus, se présente au juge pour plaider la cause
des chrétiens. Le légat refuse d'écouter son plaidoyer (xviç
xwv âSeXcpwv â7ToXoy{a<;) et lui demande seulement s'il est
aussi chrétien, Vettius répond à haute voix qu'en effet il est
chrétien. Le juge le fait arrêter.
Ce fait, qui ne se passe que vingt ans avant la rédaction
de V Apologétique, illustre admirablement le texte que nous
discutons.
Sous Commode, le martyr Apollonius est dénoncé à Rome
par un esclave : a servo proditus, quod esset Christianus. S.
Jérôme (De viris ill., 42) ne dit pas si c'était un esclave du
martyr, mais ce qui le fait croire, c'est que le préfet du pré-
toire Tigidius Perennis, qui était juge, lui appliqua la peine
du crurifragium, dont la loi menaçait les esclaves qui dénon-
çaient leurs maîtres. Cf. Eusèbe, Hist. eccl., 5, 21, 2-5. Th.
Klette, Der Prozess und die Acta Apollonii {Texte iind Unter-
such., 15, 2), p. 660. C. Callewaert, Le procès du martyr Apol-
lonius {Rev. des quest. hist., t. 77, 1905), p. 360. Th. Mommsen,
Droit pénal. H, p. 92.
Au ch. 7,3, Tertullien dit que les chrétiens sont dénoncés
surtout par les Juifs, par les soldats et par leurs propres servi-
teurs : ex natura etiam ipsi domestici nostri. Il s'agit bien ici
des esclaves, qui sont les ennemis naturels de leurs maîtres.
Sénèque (Epist., 47,5) protestait contre le proverbe : Toti-
dem liostes quoi servi ! Cf. Matth., 10,36 : Et inimici hominis
domestici eius. Ad nat., 1,7, p. 68,28 : at domesticorum curio-
CHAP. 1,1 139
sitas furata est per rimulas et cavernas ? Omnes a imllis magis
prodimur. Tert. revient sur ce point dans le Scorpiace, où
il distingue nettement les parents et les esclaves. Scorp., 10,
p. 168, 15 : Sed et fratres nostros et patres et filios et socrus et
nurus et domesticos nostros ibidem exliibere debetis, per quos
traditio disposita est. Sur domesticos senes au ch. 39,6, voy.
ci-dessus, p. 65. Ailleurs, Tert. appelle domestici des parents,
mais il ajoute un déterminatif. Adv, Marc, 2,18, p. 361, 11 :
domesticos seminis tui non despicere (— Isai,, 58,7 : et carnem
tuam ne despexeris) (i).
La loi interdisait la déposition, l'interrogatoire et la torture
de l'esclave au préjudice de son maître. Sous les empereurs,
cette loi fut souvent tournée, grâce au transfert qui consistait
à faire passer l'esclave dans la propriété de l'Etat. Sous Sep-
time Sévère, elle fut abolie pour les délits de lèse-majesté (^),
d'adultère, de fraude en matière d'impôts, etc. Cf. Dig., 1,12,
1,8. Cod. lust., 9, 41, 1, Voy. Mommsen, Droit pénal, II,
p. 91-92.
C'est peut-être à cette interdiction d'écouter les dénon-
ciations serviles que Tert. fait allusion quand il dit : domesticis
indiciis nimis operata infestatio huius sectae, si votre haine
personnelle contre notre secte, trop empressée à prêter l'oreille
aux dénonciations de nos esclaves, comme on l'a vu naguère,
ferme la bouche à la défense. La parenthèse ut proxime accidit
indique que Tertullien mentionne ici un fait récent relative-
ment rare et particulièrement odieux.
Si on lit domesticis iudiciis, on rencontre toutes sortes
de difficultés. On a donné jusque trois explications très diffé-
rentes de domestica iudicia.
(*) Dans le sens premier, le plus étendu, domestici désigne tous
ceux qui logent dans la maison. Adv. Marc, 4, 31, p. 528, 28 :
Dico primo extra7ieos et millius iuris adfines invitari ad cenavi non
solere, certefacilius solere domesticos ctfamiliarcs.
(^) Nous verrons plus loin que c'est à tort que Mommsen sou-
tient que les chrétiens comparaissaient comme coupables de lèse-
majesté; ils n'étaient jamais traduits en justice et condamnés que
pour le crime d'être chrétiens.
140 APPENDICE I
l" Jugements rendus par le gouverneur dans sa maison
(domi) contre des membres de sa famille (domus) devenus
chrétiens, contre sa femme, ses enfants, ses esclaves. La haine
contre les chrétiens, après s'être exercée avec une rigueur
excessive dans ces « jugements domestiques », empêche le
gouverneur d'être juste en public. Cf. AdScap., 3 (en l'an 212) :
Claudius Lucius Herminiaims in Cappadocia mm indigne
ferens iixorein suam ad hanc sectam transisse Christianos
crudeliter tradasset. Cf. 3,4 : uxorem maritus eiecit, etc. Ce cas
paraît trop rare pour que Tert. en parle ici et, s'il avait voulu
faire ce reproche au proconsul de Carthage, il se serait expri-
mé plus clairement ; il ne se serait pas contenté de dire : quod
proxime accidit {^).
2o Jugements prononcés dans le palais même du gouver-
neur, in secretario, au greffe. Mommsen, Droit pénal, II, 30.
Cf. Acta Scilit., en 180. Heinze, p. 292,2. Mais on ne voit pas
que dans ces audiences privées, le gouverneur agisse autrement
que dans les audiences publiques, que sa haine y soit plus
active {niniis operata), qu'il y ferme la bouche à la défense
plutôt que dans les audiences publiques. L'expression serait
d'ailleurs unique dans ce sens {^).
3° Préventions personnelles, préjugés du gouverneur.
Domesticus = privatus, intime, intérieur. Heraldus, qui pro-
pose cette interprétation, traduit : xà oi'xo^iz'^ TipoXr,cpBévTa
xod. xexp'.{ji.{jiéva. Cf. Clem. Alex., Strom., 4, 1 1 (79, 2) : 7i:po)vr|(|;Et.
Be a-uva7vàyeTai,xev^. Pour établir ce sens, on ne peut citer
qu'une phrase douteuse de César, De b. c, 2, 60, 2 : idque ita
esse ciim ex aliorum obiectationibus, tiim etiam ex domestico
iudicio atque animi conscientia iniellegebant.
(') Nous avions adopté cette explication dans la traduction pro-
visoire que nous avons publiée en 191 1 (Louvain, Ch. Peeters).
Dans une matière telle que celle que nous traitons, personne ne
s'étonnera de nous voir plus d'une fois modifier notre première
opinion.
(*) Cf. Cod. lust., 9, 41, 6 : domcsiica inicrrogaiio scrvoruvi.
CHAP. 1,1 141
Grammaticalement, domesticis iudiciis offre aussi de grandes
difficultés (1).
Est-ce un datif ? Mais que signifierait : Domesticis iudiciis
nimis operata infestatio ? On comprendrait operata {^), mais
non nimis operata, qui signifierait que le gouverneur, poussé
par la haine, tient trop d'audiences privées ou y met trop de
zèle ... Ce sens ne convient donc pas.
Est-ce un ablatif et nimis operata est-il employé absolu-
ment ? Mais il faudrait : {in} domesticis iudiciis ou domesticis
<(/n) iudiciis. A la vérité, nimis operata employé absolument
« trop active, trop zélée » n'est pas impossible {^). Mais il
s'explique mieux avec un datif : domesticis indiciis nimis
operata « accordant une attention excessive aux délations
domestiques ». Voilà le cas qui s'était présenté récemment
à Carthage et qui, sans être très fréquent, n'était pas unique :
le gouverneur, poussé par sa haine personnelle, avait ajouté
une foi entière aux dénonciations des esclaves que la loi pro-
hibait ; il avait fermé la bouche à l'accusé, qui avait voulu
répondre à ses dénonciateurs et se défendre (^).
11 nous semble que la lecture domesticis indiciis satisfait
à la fois le sens et la grammaire.
(') C'est pour des raisons grammaticales que Hartel, Pair, Stud.,
m, p. 10, lisait indiciis.
i^) De an., i8, p. 328, 25 : cwn suis muneribus operanhir,
lorsqu'ils vaquent à leurs fonctions. De carne Chr., 7 : ctim languo-
rihus et vitiis inedendis operaretur.
(3) En effet, operari « être en activité » peut s'employer absolu-
ment. 40, 14 : balneis operantibus. Adv. Marc, 2, 3, p. 336, 26 :
exinde^ quo coepit operari. Ibid., i, 23, p. 322, 25. Etc. Operatus
« actif » et inoperatus « inactif ». De an., 57, p, 392, 8 : non alia
falkciae vis est operatior. Adv. Marc, 2, 11, p. 350, 25 : inoperatam
honitatevi.
if) Acta Scil. (17 juill. 180). Speralus dixii ; Si tra^iquillas prae-
bueris aures tuas, dico niysteriuvi siniplicitatis. Saturninus refuse de
l'écouter : Inilianli tibi mala de sacris nos tris aures non pracbebo.
142 APPENDICE I
1.1. animis operata F ; nimis operata P
Animi, au pluriel, désigne souvent « l'orgueil, l'arrogance
ou la colère et la haine ». Tlies. l. /., II, 104, 46. De spect.,
16, p. 18, 5 : itur in furias, in animos et cliscordias. Passio
SS. Felic. et Perp., 5 : Depone animos. Au ch. 37, 2, Tert. dit
précisément, en parlant de l'animosité personnelle des juges :
partim animis propriis obsequentes. Mais ici, il faudrait : ani-
mis suis ou propriis et il faudrait aussi un nom de personne
comme sujet. Il faut donc regarder animis comme une faute
de scribe pour nimis.
1.2. Nihil de causa sua deprecatur P
De la Barre a : Nihil illa (se. veritas) de ... Le silence de
Modius peut faire croire que F avait illa. Havercamp a mis
illa dans son texte.
1.3. IIoc itiagis gloriabitur potestas earum, quod etiam
inaudilam damnabunt veritateni ? F
An hoc magis gloriabitur potestas earum, quo etiam
auditam damnabunt veritatem ? P
Quo est sujet à caution après hoc, car Tertullien dit : hoc
(ou eo) magis quod (ou quia). Voyez 9, 5 et 16,5. Ad nat.,
1,7, p. 69, 13 : quod plures, hoc pluribus odiosi. 1,4, p. 64, 1 1 :
apud vos eo minus sapiens, quia deos abnuens. 1,10, p. 76, 18 :
eo iam contumeliosiora, quod modica. 1,15, p. 85, 15 : hoc aspe-
rius, quod ... besliis obicitis. Hartel, Pair. Stud., 1, p. 55-56.
Modius, qui lisait quod dans Barraeus, n'a noté aucune va-
riante dans F.
Avec quo, il faudrait sous-entendre magis et l'on exprime-
rait une idée de proportion, qui ne convient pas ici. Cf. 21,1 :
aliquanto (magis) novellam. 34,2 : tanio (magis) abest. Voy.
Blokhuis, De latinitate Tert., p. 123,2.
Modius ne dit rien non plus de inauditam, qu'il lisait dans
Barraeus, bien qu'il ait noté, dans cette phrase, hoc magis,
au lieu de an hoc magis.
Si la phrase commence par Hoc magis, elle aura la forme
CHAP. 1,1-8 143
interrogative (à sens négatif) avec inauditam et la forme
affirmative avec auditam. Après Quid hic dépérit legibus, c'est
l'interrogation oratoire (ironique) qui convient le mieux ; elle
conserve au style son mouvement. Tertullien supprime sou-
vent la particule interrogative : « Leur pouvoir se glorifiera-
t-il peut-être plus, parce qu'elles condamneront la vérité
même sans l'entendre ?» — Evidemment non.
Auditam se comprend, si l'interrogation commence par
An. En effet, après une première interrogation, an introduit
souvent une interrogation oratoire qui a la valeur d'une affir-
mation : « Ou plutôt le pouvoir des lois ne se glorifiera-t-il
pas d'autant plus qu'elles condamneront la vérité après l'avoir
entendue ? » On trouvera an employé de même façon au ch,
9,5 : An hoc fur pins, quod mali hominis ? N'est-il pas encore
plus honteux que ce soit le sang d'un malfaiteur ? De idol.,
14, p. 46,6 : Nimirum- Saturnalia ... célébrons hominibus
placebat (se. apostolus) ? An modestia et patientia ? Ou n'est-ce
pas plutôt par la modestie et la patience ?
La gradation exprimée par etiam s'explique dans P comme
dans F. Si les lois condamnent la vérité, même après l'avoir
entendue (auditam), elles pourront se glorifier de leur pou-
voir : interrogation oratoire à se'ns affirmatif (An hoc magis).
Si elles condamnent la vérité, même sans l'entendre (in-
auditam), elles ne pourront pas se glorifier de leur pouvoir,
mais d'une tyrannie inique (voy. 4,4: inique ex arce domi-
nationem) : interrogation oratoire, ironique, à sens négatif
(Hoc magis).
Il faudra donc suivre la tradition qui sera reconnue la
meilleure, la plus pure.
1,6. Ex his fiunt Christiani
Ex his veut dire : ex lis, qui rétro oderant, quia ignorabant.
Cf. De pud., 7,7 : siquidem non aliter Christiani ex ethnicîs
fiunt, nisi prias perditi et a Deo requisiti.
1,8. Nec tamen ex hoc ipso modo aestimationem alicuius
latentis boni promovent animos. F
144 APPENDICE I
P a : nec tamen hoc iriodo. M est d'accord avec Ad nat., 1,1,
p. 59, 1 1 : nec tamen hoc ipso.
Les locutions hoc ipso, ex hoc ipso et hoc modo sont très
familières à Tertullien, mais on ne trouve nulle part ex hoc
modo ni ex hoc ipso modo, c'est-à-dire la préposition ex avec
modo.
Voici quelques exemples des locutions employées par Ter-
tullien.
Hoc ipso : De pud., 21,4. De an., 24, p. 337,8. De resurr.,
58, p. 119, 10. Adv. Marc, 1,11, p. 304, 28 ; 305,1 ; 1, 25, p.
325, 22 ; 324, 4 et 9 ; 2,2, p. 334, 19 ; 2, 5, p. 340, 1 ; 2,6,
p. 341, 17. Etc.
Ex hoc ipso: Apol. 3,3. De praescr., 21,1 (ex hoc) ; 5 {ex eo
quod) ; 11 (ex hoc). Adv. Marc, 1, 9, p. 302, 23 ; 1, 25, p. 325,
13 {ex hoc quoque) ; 1,11, p. 304,4 {ex hoc ... quia) ; 1, 20,
316, 12 (cfe hoc ipso).
Hoc modo: De spect., 17, p. 18, 19. De an., 17, p. 324, 26 ;
27, p. 345, 16 ; 30, p. 350, 23 ; 31, p. 350, 30 ; 32, p. 355, 17.
Adv. Marc, 1,9, p. 301, 19 (eisdem modis... quitus), etc., etc.
On peut donc lire ici : hoc ipso ou ex hoc ipso, ou hoc modo,
ou hoc ipso modo.
1,8. Quanto magis hos Anacharsis denotasset imprudentes
de prudentibus iudicantes ! F
P et M ajoutent à la fin : quam inmusicos de musicis. —
Ces mots sont une addition postérieure.
Sans complément, prudens signifie « celui qui sait, l'homme
éclairé » et imprudens « celui qui ne sait pas ». On peut tra-
duire le texte de F : « Combien plus Anacharsis aurait-il
blâmé ceux-ci, qui, sans savoir, jugent ceux qui savent ! »
Même idée. Ad nat., 1,20, p. 92, 25 : Haec est iniquitas, ut
gnari ab {ignaris), absoluti a reis iudicemur. Plus haut, Tert,
emploie absolument les verbes scire et ignorare, en parlant
de ceux qui sont initiés ou non au christianisme. 1,6 : cum
omnes, qui rétro oderant, quia ignorabant, simul desinunt igno-
rare, cessant et odisse. Ad nat., 1,1, p. 59, 4 : quod omnes qui
vobiscum rétro ignorabant et vobiscum oderant, simul eis con-
tigit scire, desinunt odisse quia desinunt ignorare. Julius Afri-
canus termine sa lettre à Origène (Ed. Routh, p. 228) par
CHAP. 1,8-9 145
ces mots : Se ol èTzi.i7xâ\j.tvo'. itàvxeç TzooaoLyopeùouuiv. Cf.
Harnack, Die griech. Uebers. des ApoL Tertullian's, p. 36.
Après quanto magis fios, il faut sous-entendre : quam Athe-
nienses. Tert. suppose souvent une certaine érudition à ses
lecteurs. Le mot d'Anacharsis était connu. Plutarch., Solon,
5 : "Ecp-^i 8è xàxÊVVo 9au{jiât^e!,v h ' Avô^yapoiK; éxxXriTia uapaye-
vô|ji.evo<;; OTi Xsyo'ja!. jjisv ol <70'fo\ Tiap' "EXkT[<y>., xpiyoucrL oh ol
âp-aOeiç. Diog. Laert., Vitae phil., 1,8, 5 : ©aupioé^eiv oè ecp-/i,
itwç Tïapà Toîç "EÀ)v'^(nv àyoivîî^ovTat p.sv ol xe'^vrra',, xpivouai
Ss ol [xYi xî.-'/ylioi.i. Le mot était devenu proverbial. Quintilien,
Inst. or., 12, 10, 50, dit, par exemple, qu'un discours écrit et
publié doit être plus soigné qu'un discours prononcé, qui
veniat in manus doctorum et indices artis liabeat artifices.
Le lecteur instruit complétait donc facilement l'exclama-
tion de Tertullien et les mots que P et M ajoutent ne sont
pas nécessaires. En outre, d'après Plutarque, Anacharsis
visait les ignorants et les experts en politique ; d'après Dio-
gène Laerce, les artistes et les non-artistes. Ici, nous aurions
une troisième catégorie. Dans le sens grec, les m«s/c/, |jt.ou(nxor!,
sont les lettrés, et les innmsici, ajjLOuaroi, les illettrés, ceux
qui sont étrangers aux Muses, artium litteranimque expertes.
Dans Aristophane, Equit., 188, le scholiaste explique : on
p.ou(nxr,v Tr,v iyxuxÀiov TuaiSeîav (pYjariv. L'adjectif inmiisi-
cus est régulièrement formé du latin musicus. Or, depuis
Cicéron musici ne désigne que les musiciens. Il faudrait donc
traduire : « les musiciens et les non-musiciens ». Cela nous
éloigne beaucoup de la tradition. Enfin, inmusicus n'est connu
que par ce passage. Rhenanus a même imprimé non musicos.
Au surplus, les mots qnam inmusicos de musicis ne forment
pas une clausule fréquente (voy. Di Capua, p. 35, n. 1), tandis
que la lecture de F donne un ditrochée précédé d'un dactyle.
Nous croyons que les mots quam inmusicos de musicis sont
une addition d'un lecteur qui a voulu compléter quanto magis
hos et n'a pas vu qu'il faut suppléer : quam Atlienienses.
Cf. Rauschen, p. 17,
1,9. si vero de merito (se. odii) constet, non modo nihil
odio detrahatur, sed amplius adquiratur ad perseveran-
tiam etiam iustitiae ipsius gloria. F
146 APPENDICE I
F a : gloriae, faute de copie pour gloria. P a : nihil odii detra-
hatiir et iustitiae ipsius audoritate.
La leçon : nihil odio detrahatur (F) est confirmée par Ad
nat,, 1, 1, p. 59,18 : sin vero causa constiterit, nihil odio detra-
hetur, quod adeo amplius iustitiae conscientia cumulabitur.
« Si l'on ne découvre aucun juste motif de haïr, dit Tert.,
le mieux est à coup sûr de renoncer à une haine injuste ; si,
au contraire, on acquiert la certitude que le juste motif (de
haïr) existe, non seulement rien n'est enlevé à la haine (c'est-
à-dire : la haine ne perd pas de sa force), mais on trouve une
raison de plus pour y persévérer, parce qu'on peut se glorifier
d'être juste ».
Le sujet 6'adquiratur est amplius : on acquiert plus, c'est-
à-dire, un nouveau motif {amplius = aliud ; voy. Thés. l. /,,
I, 2016, 30) pour persévérer dans la haine. Cf. De paen., 10, 3 :
ego rumori locum non facio, cum plus de detrimento eius ad-
quiro, parce qu'il m'est plus avantageux de fouler la renom-
mée aux pieds. Ad mart., 7 : si non plus in carcere spiritus
adquirit, quam caro amittit.
Ad perseverontiam, se. odii. De pud., 16,17 : aut viduitatis
perseverantiam ... procurât. De idol., 9, p. 38, 5 : defendens
sibi perseverantiam projessionis istius. On ne peut donc expli-
quer : amplius {odii), car on aurait une tautologie : amplius
{odii) adquiratur ad perseverantiam odii.
Dans le passage parallèle, Ad nat, 1,1, p. 59, 19 (ci-dessus),
amplius est adverbe et synonyme de praeterea, insuper. Voy.
Thés. l. /., I, 2014, 48.
On voit que les mots quod {odium) adeo amplius ... cumu-
labitur de la première rédaction ont été remplacés par quando
... amplius adquiratur ad perseverantiam {odii) et que iustitiae
conscientia a été remplacé par iustitiae gloria, qui exprime
la même idée avec plus de force : « on a la conscience d'être
juste dans sa haine » et « on se fait gloire d'être juste dans
sa haine ». Cf. De spcct, 16, p. 18, 6 : convicia sine iustitia
odii, etiam suffragia sine merito amoris.
La leçon de P, auctoritate, introduit une idée différente : on
peut alléguer l'autorité de la justice. C'est probablement
un remaniement.
CHAP. 1,10—2,1 147
La clausule est un double crétique dans F et un ditrochée
dans P.
Cf. Hartel, Pair. Stud., II, p. 23,1. Rauschen, p. 40.
1,10. Quanti enim ad malum reformantur ! F
P a: perjormantur. — Quanti == quani mulli (cf. 1,6; 50,
14). Il s'agit de conversion (REformari) et non d'éducation.
L'expression ad malum reformari est dans le goût de
Tertullien : c'est une alliance de mots piquante, car le verbe
reformare implique un changement en mieux ; il est syno-
nyme de corrigere et l'on dit ordinairement : in melius refor-
mari. Plin., Paneg., 53: reformet et corrigat. Ad nat., 1,4,
p. 64,30 : ipsi suam permisit in perversum demutare naturam,
mulieri non permisit in melius reformari. Adv. Hermog., 40,
p. 169, 20 : Dicis in melius reformaîam mater iarn. Sur le chap.
21, 31 (P), voy. plus loin. Min. Félix, 1,5 : ad veram religionem
reformavit. Ulpien, Dig., 49, 1,1, dit de même: Licet nonnun-
quam bene latas sententias in peius reformet. En effet, l'appel
a pour, but de faire corriger les arrêts rendus, mais il arrive
parfois, dit Ulpien, que le deuxième juge les gâte en les réfor-
mant. — F donne une clausule fréquente (crétique et tro
chée) ; P a une clausule plus rare (spondée et trochée).
2,1. cum eiusdem noxietatis eadem tractatio débet inter-
venire F
Au lieu de noxietatis, P a noxae, qui est le mot ordinaire
dans les jurisconsultes et ailleurs. Noxietas paraît être un
semel didum. Accius, Trag., 162, dit : noxitudo oblitteretur
Pelopidarum, où Nonius, 143, 21, explique : noxitudo pro
noxia. Noxietas, de noxius, est régulièrement formé comme
pietas, sobrielas, nimietas, medietas. C'est la ledio difficilior,
qu'un reviseur aura remplacée par une leçon plus ordinaire.
Au lieu de débet, P a deberet. Le subj. impart, deberet est
le mode de la non-réalité : « alors que, si la culpabilité était
la même (Tert. soutient qu'elle ne l'est pas), le traitement
devrait être le même ». Tert, dit de même, au § 5 : De nobis
nihil taie, cum aeque extorqueri oporteret quod de falso iactatur
« alors que, si l'on voulait être juste, il faudrait de même ... »
148 APPENDICE I
Il est vrai que Tert. met souvent l'indicatif avec cum causal
ou adversatif (voy. Hoppe, Syntax, p. 80), comme les auteurs
de son temps (Leky, De synt. Apuleiana, p. 50-51) ; mais ici,
l'idée conditionnelle n'admet pas l'indicatif.
2,4. Sed illud solum exspectatur ... confessio iiominis, etc.
Mommsen, Droit pénal, I, p. 438 (Trad. franc., II, p. 118,
et n. 6) ne paraît pas avoir saisi le raisonnement de Tertullien.
« Dans les délits d'opinion, dit-il, l'aveu rend en principe
toute prolongation du débat inutile et il suffit par lui-même
pour provoquer le jugement définitif », Cela est exact, mais
Mommsen ajoute en note : « Les écrivains chrétiens reprochent
à leurs adversaires de prononcer immédiatement la peine dès
que le chrétien a avoué, tandis qu'ils ne procèdent pas ainsi
d'emblée au regard des autres délinquants ». Il renvoie à ce
passage de Tertullien et à Lactance, De mort, pers., 15, et
aux Actes des Martyrs. Il continue : « On peut répondre au
point de vue juridique que dans le délit de religion, comme
pour tout procès d'opinion, il ne peut pour ainsi dire pas y
avoir d'aveu contraire à la vérité et qu'il faut aussi y tenir
moins de compte des modalités de l'aveu qu'en cas de viola-
tion matérielle d'une loi ».
Or, Tertullien ne reprocherait pas aux juges de prononcer
leur arrêt aussitôt qu'ils ont obtenu l'aveu de l'accusé {Chris-
tianus sum), si les juges se contentaient d'accuser les chrétiens
d'être chrétiens ; car la loi faisait du fait d'être chrétien un
crime capital. Il leur reproche d'imputer aux chrétiens tous
les crimes (homicide, inceste, sacrilège, lèse-majesté) et puis
d'agir comme si ces crimes n'existaient pas, c'est-à-dire de
ne pas informer sur ces crimes et d'empêcher les accusés de
se défendre contre ces calomnies. Il en conclut que les juges
ne croient pas à ces crimes, qu'ils ne poursuivent pas autre
chose que le nom chrétien, la religion chrétienne : Nominis
proelium est. Cf. De spect., 30, p. 28, 23 : item praesides
persecutores dominici nominis. Scorp., p. -108, 12: ipsum
nominis odium; p. 169, 6 : porro et odium nominis hic erit.
En d'autres termes, il veut montrer précisément, à ren-
contre de ce que les calomniateurs des chrétiens veulent
CHAP. 2,4-6 149
faire croire, que c'est un délit religieux, un délit d'opinion
qu'on poursuit, et non des crimes de droit commun, que les
clirétiens meurent pour leur foi et non pour expier des crimes.
La loi disait : Non licet esse vos ! (Ch. 4,2). Elle faisait
donc du christianisme même un délit et c'était un délit reli-
gieux ou un délit d'opinion, comme l'appelle Mommsen. Les
juges se faisaient scrupule d'appliquer une loi si simple, comme
le prouvent les questions posées par Pline à Trajan (Epist.,
10, 96). Ils justifiaient la peine de mort par les accusations
populaires qui étaient en-deliors de la loi : ils prétendaient
qu'un chrétien était un homme coupable de tous les crimes
(ch. 2,16) et que les chrétiens méritaient la mort pour ces
crimes, sur lesquels ils n'informaient même pas. Tertullien
remet les choses au point et, dans son exorde, il se borne à
montrer que ce n'est pas pour ces crimes inventés par la
calomnie que les juges condamnent, mais en haine du nom
chrétien, de la religion chrétienne et que cette haine est
inique, parce qu'elle est obstinément aveugle, chez les juges
comme chez tous les païens.
Mommsen renverse les idées et il rend tout le plaidoyer
de Tertullien inintelligible. Ce qui l'a induit en erreur, nous
le verrons plus loin (voy. 28,3), c'est qu'il prend dans leur
sens juridique toutes les métaphores que Tertullien aime à
emprunter à la langue du droit et du barreau.
2,4. numerum, locum, tempus. PM
Barraeus a numerum, locum, modum, tempus. Modius ne
dit rien. Ad nat., 1,2, p. 61, 4 : quotiens sceUis egerit (= nume-
rum), quibus telis (= modum), quibus in lacis (= locum) ...
Le témoignage de Ad nat. n'est pas décisif, parce que Tert.
s'écarte souvent de sa première rédaction ; mais modum se
lit dans quelques manuscrits de la tradition commune (cf.
Oehler), et, comme Modius est muet, on peut le conserver
avec Rhenanus, Heraldus et Rigaltius.
2,6. Atquin invenimus inquisitionem quoque in nos pro-
hibitam.
Adquin P ; atque F ; atqui Br. ; xat.To{ Euseb. — Ala forme
150 APPENDICE I
classique, atqui, Tert. préfère la forme postclassique atquin
Voy. Thés. l. /., s. v.
Tertullien déclare catégoriquement qu'il « trouve » la
recherche même des chrétiens interdite et il cite la lettre
et le rescrit de Trajan. Cf. De spect., 3, p. 4,23 : Plane nus-
quam invenimus ... ita exserte definitum : « Non ibis in cir-
cum )). Et cependant on a soutenu qu'il n'a pas lu la lettre
de Pline, ou qu'il ne l'a pas comprise ou même qu'il l'a fal-
sifiée ! Voy. en dernier lieu : Geffcken, Zwei griech. Apolo-
gcten, 1907, p. 284. Guignebert, Tert., p. 91 (1909). Merrill,
Wiener Studien, 31, 1909, p. 251. Heinze, Tertullians Apolo-
geticum, 1910, p. 301.
On allègue : 1° les mots de gradu pulsis, qu'on traduit par
« chassés de leur rang, déplacés », et l'on dit que Pline ne
parle nullement de chrétiens dégradés par lui. Nous allons
voir (voy. plus loin) que ces mots ont un autre sens et que
Tertullien désigne par là les accusés que Pline a pu décider
à renier la religion chrétienne.
2° Les mots adlegans nihil aliud se comperisse. Pline, dit-on,
parle de ce qui ressort des interrogatoires des accusés (adfir-
matant autem), tandis que Tertullien parle de ce que Pline
a constaté par lui-même. Or, Pline dit qu'il a interrogé les
accusés et ensuite qu'il a fait mettre à la torture deux femmes
esclaves, des diaconesses, pour s'assurer de la vérité des
réponses, et il ajoute : Nihil aliud inveni quam superstitio-
nem pravani, immodicam. Par quels autres moyens aurait-il
pu, d'ailleurs, « constater » les croyances et les pratiques
chrétiennes ?
3° Les mots inqiiirendos qiiidem non esse, qu'on prend
pour une déformation voulue (!) des mots de Trajan : Con-
quirendi non sunt. On a osé parler ici de « Umformung und
Verstummlung » (Geffcken, p. 284) {^), sans voir que Tert.
emploie dans tout ce passage le composé inquirere pour con-
quirere, comme synonyme de vestigare, requirere (§ 8-9 et 5,7),
(') Geffcken n'est pas tendre pour Tertullien ; il le traite à ce
propos de sophiste ! Il est vraiment dommage que Tert ne soit plus
CHAP. 2,6 151
comme il emploie inquisitionem dans le sens de « recherche «
(§ 6). De même, il dit offerre et oblatio pour déferre et delatio
(§9. 21,18; 44,1).
4° Le silence que Tertullien garderait sur le grand nombre
des chrétiens. — Quelle inadvertance ! Tertullien dit : ipsa
tamen multitudine perturbatus. Cela ne correspond-il pas aux
mots de Pline : propter periclitantiiim numerum. Quant au
développement : Multi enim omnis aetatis, omnis ordinis,
utriusque sexus etiam vocantur in periculum et vocabiintur,
n'est-ce pas un écho de ces doléances de Pline qu'on entend
dans une phrase du chap. 1,7 : omnem sexum, aetalem, con-
dicionem, etiam dignitatem transgredi ad hoc nomen quasi
detrimento maerent ? Tertullien semblait déjà se souvenir de
la lettre de Pline.
5° Le silence que Tert. garde ici sur le « nom » considéré
comme crime suffisant et unique. Or, Tert. dit que Pline ne
trouva aucun crime chez les chrétiens et que Trajan décida
que les chrétiens dénoncés comme chrétiens devaient être
punis. N'est-ce pas la solution de la question posée par Pline ?
6° Enfin, Heinze allègue une nouvelle raison pour montrer
que Tert. n'avait pas lu l'original de la lettre de Pline. Il dit :
« Le principe que le désaveu du christianisme exempte l'accusé
de toute peine était si courant à l'époque de Tert., que celui-ci
ne sent même pas combien ce principe est en contradiction
avec l'idée que le christianisme est par lui-même un crime.
là pour se défendre. Voici encore un faux raisonnement que GefFcken
prête gratuitement à Tertullien :
« Vous ne nous traitez pas, devant la justice, comme vous traitez
les autres criminels ; donc nous ne sommes pas des criminels ».
Tert. ne dit pas cela, mais il conclut logiquement : Ergo ftos tnno-
centissimos lUDiCAïis ! (2,12), Dans ce cli. 2, il ne veut du reste pas
« prouver l'innocence des chrétiens » au regard de la loi prohibitive
qui les proscrivait comme chrétiens. Il veut prouver que les juges
eux-mêmes les tiennent pour innocents des crimes abominables
qu'on leur impute et qu'ils les poursuivent uniquement en haine du
nom chrétien, en haine d'une religion que les juges s'obstinent à
ignorer.
152 APPENDICE I
La lecture de la lettre de Pline aurait peut-être attiré son
attention sur ce point ». En effet, Pline pose clairement la
question : le chrétien doit-il être condamné comme chrétien,
même s'il n'a commis aucun crime, ou sont-ce les crimes atta-
chés à son nom qu'il faut punir ? Il demande aussi : Un
chrétien, qui a cessé de l'être, doit-il obtenir son pardon ?
Mais Tertuliien avait-il à poser cette question ici ? 11 se borne
à discuter la procédure suivie contre des hommes dont le
nom implique, aux yeux des juges, tous les crimes. Il montre
que cette procédure est inique et contraire à la loi, qu'elle
prouve que les juges ne croient pas aux prétendus crimes
des chrétiens. Il ne discute pas ici la loi qui érige la profession
de christianisme elle-même en crime. Il réserve cette discus-
sion à la prémunition (ch. 4-6) : c'est là qu'il répond à ceux
qui disent : Non lied esse vos, c'est-à-dire : Vous avez beau
nier les crimes qu'on vous impute, la loi fait du christianisme
lui-même un crime, elle vous défend d'exister.
Nous croyons donc que les lettres de Pline et de Trajan
sont authentiques : !« elles sont contenues dans un recueil
authentique et 2^ aucune des raisons alléguées contre leur
authenticité ne tient debout. Où mènerait ce principe, si
on l'appliquait à la critique, comme fait Guignebert : « Ne
pas être en état de prouver qu'un homme est coupable d'un
crime ne constitue pas une démonstration suffisante de son
innocence ! » Sans cloute ; mais si, de plus, il n'existe pas
l'ombre d'un indice contre lui, il faut le tenir pour innocent.
Nous croyons aussi que Tertuliien avait lu les deux lettres
dans leur texte original : il les résume ici très exactement,
après s'en être inspiré très probablement au ch. 1,7. Il est
probable, comme le suppose Heinze, que Tert. les avait ren-
contrées (invenimus) en réunissant les matériaux pour son
chap. 5, où il parle de l'attitude des différents empereurs
envers le christianisme et où, considérant le rescrit modéré
de Pline d'un autre point de vue, il l'apprécie plus favora-
blement.
2,6. quibusdam de gradu pulsis F ; quibusdam gradu
pulsis F
CHAP. 2,6 153
On comprend ordinairement avec le traducteur grec :
« privés de leur rang, dégradés ». Eusèbe, Hist. eccl., 3, 33, 3 :
nvaç xal xr^i; dc^iaç ix[3â).wv. Et en effet, grada pelli ou
deici peut avoir ce sens. Dig., 49, 16, 3, 14 : Qui aliéna arma
subripit gradu militiae pellendus est. Ibid., §§ 1.5 et 20.
C'est en traduisant ainsi qu'on a pu faire état de ce passage
contre l'authenticité de la lettre de Pline à Trajan ou soutenir
que Tertullien n'avait pas lu cette lettre dans l'original. Voy.
Guignebert, Tertullien, p. 90. En effet, Pline ne parle pas de
dégradation. Il distingue, parmi les accusés, deux catégories :
les uns consentirent à l'apostasie et furent absous, les autres
restèrent inébranlables et furent condamnés. Ce sont les deux
catégories de Tertullien : damnatis quibusdam Christianis,
quibusdam de gradu pulsis. En effet, de gradu pellere est une
métaphore empruntée aux luttes de gladiateurs et signifie :
« déloger l'adversaire de sa position, lui faire lâcher pied » ;
de là, au figuré: «décontenancer» l'adversaire dans une
discussion, le démonter, et, dans le cas présent, « amener à
apostasier, à renier sa foi ». Voyez Heinze, Tertullians Apol.,
p. 301,1.
Cette métaphore était déjà courante à l'époque de Cicéron.
De off., 1,80 : fortis et constant is est non de gradu deici, ut
dicitur. L'addition ut dicitur montre que la tournure était
proverbiale. Pro Tull., 29 : me pudct tam cito de sententia esse
deiectum. in Verr., 2, 160 : milii videtur Stratylax ille deiectus
de gradu. Corn. Nep., Them., 5 : iterum ab eodem (Themistocle)
gradu pulsus est. Tertullien dit à Marcion, avec qui il discute
(Adv. Marc, 4,9, p. 444, 5) : dum te de gradu pellam. De
resurr., 2, p. 27, 19 : deiectus ... vel motus de gradu eius spei ...
Ailleurs, il emploie deicere sans complément, en parlant des
chrétiens qu'on veut forcer à l'apostasie {^). Ad Scap., 4 :
Asper, qui modice vexatum hominem et statim deiectum nec
sacrijicium compulit facere. Apol., 27, 3 : ad constantiam
nostram deiciendam. De spect,, 29, p. 28, 8 : impudicitiam
(') Le chrétien est le soldat du Christ, miles Christi ; devant le
juge, il livre un véritable combat, Voy. 50,1.
154 APPENDICE I
deiedam a castitate. De orat., 8, p.. 186, 15 : deicere (fidem
cuiusque). Cf. Passio SS. Felic. et Perp., 6 : pater ascendit
ad me ut me deiceret.
P a gradu, au lieu de de gradu, comme Cornélius Nepos.
Tertiillien aime à employer la préposition de, même là où
elle est inutile (Hoppe, Syntax, p. 33 ; Hartel, Patr. Stud.,
IV, p. 45) et il dit ailleurs (Adv. Marc, 4,9, ci-dessus) : de
gradu pellere.
— Tert. raffole des métaphores empruntées aux combats
de gladiateurs et l'on voit aisément, comme il le dit du reste
lui-même (ch. 15,5), que, dans sa jeunesse, il avait assidûment
fréquenté ces spectacles. Il a coutume de transformer la dis-
cussion en un véritable combat, où les adversaires, placés
l'un en face de l'autre, luttent pied à pied : toutes les expres-
sions de la langue des gladiateurs y passent.
Gradus désigne la position prise par les combattants pour
engager la lutte ou par les adversaires qui discutent. Le
gradus se modifie au cours du combat ou de la discussion.
Les adversaires prennent position, chacun sur sa ligne de
combat : âge, igitur, ad lineas rursum et in gradum, s'écrie
TertuUien (Adv. Marc, 1,9, p. 300, 28) ; in ipso gradu provo-
cabimus praescriptionis (Ibid., 5,1, p. 570, 20) ; eodem gradu
occurrere (Ibid., 4,29, p. 524, 16. Cf. 1,19, p.3 14,5). — Ils
commencent par préluder au combat : liis proluserim quasi
de gradu primo (Ibid., 3,5, p. 381, 20). — La lutte s'engage :
gradum conferre (Ad nat., 2,1, p. 94, 13) ; Adv. lud., 2, p.
703 0.), conserere (Adv. Marc, 3,2, p. 378,1 ; Adv. lud., 7,
p. 712 0.). — Les combattants se tiennent et se maintiennent
sur leur position : gradus stabit (De an., 6, p. 306, 24), susli-
nere gradum (Adv. Marc, 1,1, p. 292, 6) ; state in isto gradu
(De ieiun., 13, p. 291, 15) ; unum igitur gradum insistimus
(Scorp., 8, p. 160, 12) ; possem hic iam gradum jigere, je pour-
rais m'arrêter là (Adv. Marc, 4,2, p. 426, 21 ; 5,10, p. 605, 25 ;
De ieiun., 11, p. 289, 26 ; Adv. Prax., 8, p. 237, 25 ; 22, p.
270, 1 ; De virg. vel., 11, p. 898 0.). — Ils changent de posi-
tion : sed alium iam hinc inimus gradum (Adv. Marc, 4, 6,
p. 432, 12) ; in hune iam gradum decurram (De pud., 21, p.
268, 29). — Le combattant arrête l'adversaire, lui barre
le chemin : hune igitur potissimum gradum obstruimus non
CHAP. 2,6 155
admittendi eos (De praescr,, 15,3) ; si (virgo) temptotionibus
gradtim obstruxerit (De virg. vel., 15, p. 906 0.) ; si non
huius definitionis gradum exdusero, si je ne démontre pas
le vice de cette définition (De an., 6, p. 306, 11); obs-
truimus gradum (Apol., 27, 1, De praescr., 15). — Il culbute
l'adversaire : diim te de gradu pellam (Adv. Marc, 4,9, p.
444, 5) ; quibusdam de gradu pulsis (Apol., 2,6) ; cum Deuni
hoc gradu expellimus (Adv. Marc, 1,13, p. 306, 16). Voyez
ci-dessus. — L'adversaire cède, abandonne sa position, il
est culbuté, délogé : ut iani et Marcion de gradu cédai (Adv.
Marc, 5, 16, p. 631, 26). — Le combattant change de posi-
tion : cedo nunc sponte de gradu isto (De praescr., 9,1) ; dece-
dam nunc paulisper de gradu isto, quo magis eum etiam dece-
dendo commendeni (De pud., 7, p. 232, 12) ; movistis igitur
gradum excedendo iraditionem (De ieiun., 13, p. 291, 20). —
11 reprend sa position sur la ligne : in nostras iam lineas gra-
dum conligam (De an., 26, p. 343, 21).
Sur les métaphores empruntées à la lutte par Tertullien,
voy. Hoppe, Syniax, p. 206-212. H. F. Soveri, De ludorum
memoria Tertullianea (Helsingfors, 1912), p. 141.
2,6. quid de ceteris ageret F ; quid de cetero ageret P
Pline écrit à Trajan (Epist., 10, 96) que, n'ayant jamais
assisté aux procès contre les chrétiens, il se trouve dans
l'embarras. II consulte l'empereur sur ce qu'il doit faire « à
l'avenir» (Tert. dit: de cetero). En attendant le rescrit, il
raconte comment il a procédé.
De ceteris « concernant les autres » est une correction erro-
née d'un scribe (ou d'un remanieur) qui n'a pas compris de
cetero « à l'avenir » et qui a faussement opposé de ceteris à
quibusdam ... quibusdam. De ceteris ne peut pas être de Ter-
tullien et il est postérieur à la traduction grecque, car Eusèbc,
qui la reproduit (Hist. eccl., 3, 33, 3), donne : xl aÙT(J> Xoi-uôv
ei'^ Trpaxréov. — De pud., 13, 9 : ut ... nihil de postera sit
comminatus, nihil de cetero adlocutus. Ad Scap. 3 : Sed mé-
mento de cetero. Min. Félix, 16,4. Dig., 48,3, 10. Cod, lust.,
10, 49, 8 ; 12, 20, 1. Sénèque, Epist., 78, 16, dit : pax in cete-
rum parta. Thés. l. t., III, 975, 11.
156 APPENDICE I
2,6. de sacramento eorum F ; de sacramentis eorum P
Tertullien dit ailleurs : sacramenti nostri (15,8) ; totius
ludaici sacramenti et inde iam et nostri (19,2). Cf. De idol.,
6, p. 35, 24 : de ipso sacramento nostro. De pud., 9,9 : tota
suùstantia sacramenti. Voy. E. De Backer, Sacramentum. Le
mot et l'idée dans Tertullien. Louvain, 1911."
Sacramentum, désigne la religion et le culte. Le pluriel est
une correction erronée d'un lecteur qui a pensé aux « sacre-
ments ».
2,6. adlegans, praetcr obstinationem non sacrificandi,
nihil aliud se de sacramento eorum coniperisse, quam
coetus antelucanos ad canendum Christo et Deo *FP
Les mss sont d'accord. Heraldus corrige : ut deo. La con-
fusion de et avec ut est fréquente. Voy. ci-dessus, p. 101,
ad 4, 3.
Voici le passage de Pline que Tertullien a en vue : car-
menque Christo quasi deo dicere secum invicem (Epist., 10,
96, 7), Le traducteur grec, cité par Eusèbe, Hist. eccl., 3, 33, 3,
dit : xal tôv Xpiaràv 6eoCi Suriv b\iyv.v. Dans sa propre para-
phrase (§ 1), Eusèbe s'exprime dans les mêmes termes, et
Rufin, qui n'a pas eu recours ici au texte de Tertullien, retra-
duit : quod antelucanos liymnos Christo cuidam canerent deo. Dans
sa Chronique, ad ann. 2124 (Ed. Schoene, II, p. 164), Eusèbe
avait noté ces faits en se servant de la traduction grecque ;
il nous reste le résumé de Syncelius, p. 655,8, qui dit : xal oxi
XpicTTÔv (oç 9eôv êw9ev 6|j.voCiari.v àv'-aTap.evoi, Dans la Version
arménienne (Sciioene, /. c), nous lisons : diluculo surgere
Christianos et Christum deum glorificare. S. Jérôme, dans sa
traduction de la Chronique d' Eusèbe (Schoene, p. 165), a eu
recours, ici comme ailleurs (voy. Schoene, p. 173, ad ann.
2195), au texte de Tertullien, qu'il reproduit librement : et
antelucanos coetus ad canendum cuidam Christo ut deo.
Tous les témoins postérieurs, le traducteur grec, contem-
porain de Tertullien ou du moins antérieur à 250 (voy. Har-
nack. Die griechische Uebersetzung Tertullians. Leipzig, 1892.
Texte und Untersuch., 8,4), Eusèbe et ses traducteurs, con-
CHAP. 2,6 157
firment donc la correction proposée par Heraldus : ut deo,
au lieu de et deo.
La construction canere alicui « chanter en l'honneur de
qqn » revient plusieurs fois dans Tert. Au ch. 39,18, où il
parle des hymnes chantées par les chrétiens après leurs agapes
et où il ne rend pas l'idée de Pline, mais la sienne, il dit : ut
quisque de scripturis sanctis vel de proprio ingenio potest, pro-
vocatur in médium Deo canere. Cf. De orat., 24, p. 197, 11 :
et canebant Deo. Ad uxor., 2,9 : et mutuo provocant quis melius
Domino suo cantet. Adv. Marc, 5,18, p. 640, 9 : et psalmis
et hymnis Deo conerent. C'est dans un autre sens que Tert.
a dit. De spect., 25, p. 25, 18 : quale est ... eîç aîwva; âîc' aîwvoç
alii omnino dicere nisi Deo et Cliristo ? Mais on voit qu'il dit :
Deo et Christo, et non : Christo et Deo.
En présence de l'unanimité des mss de TertuUien qui ont
tous : Christo et Deo, Harnack {op. cit., p. 25) a soutenu que
Tert. n'a pas rendu exactement l'idée de Pline {Christo quasi
deo) en écrivant Christo et Deo, que le traducteur grec de V Apo-
logétique, cité par Eusèbe, a eu recours au texte de Pline,
comme S. Jérôme l'a fait, qu'il a corrigé TertuUien et que la
nouvelle version a passé dans Eusèbe {Hist. eccl. et Chron.).
Cela ne nous paraît pas vraisemblable. D'abord, TertuUien,
qui résume brièvement la lettre de Pline, en reproduit exacte-
ment les idées ; il faudrait s'étonner qu'il l'ait rendue inexac-
tement ici, sans aucune raison. Ensuite, le traducteur grec
n'a pas lu le texte de Pline, car il est plus près de TertuUien
que de Pline.
Sans doute, il a coupé en deux cette phrase de TertuUien,
2,6 : adlegans, praeter obstinationem non sacrijicandi, nihil
aliud se de sacramento eorum comperisse quam coetus
antelucanos, etc., en disant : ).evwv ... oùSev âvéaiov Iv
aÛTor? e6pv\xéva'., è[Ji'r\'vuev oè xal touto, dvii7X(/.<7^an. ew6ev toÙç
XpicTTLavoùç xal tôv Xpictôv 0eoù 8uy|v ùjxverv. Mais Harnack
a tort de croire que le but de cette construction est de distin-
guer, avec Pline, en deux phrases, l'innocence relative des
chrétiens et ce que Pline a pu savoir de leur culte. Pline,
lui-même, en réalité, ne fait pas cette distinction, 11 dit que
les renégats affirmaient {adfirmabant autem) que tout leur
crime consistait à se réunir avant le jour — c'était, en effet,
158 APPENDICE I
contraire à un édit récent de Pline sur les hétéries — pour
chanter des hymnes au Christ comme à un dieu, etc. Pline
veut savoir ce qui en est au juste et il fait mettre à la torture
deux diaconesses esclaves, et ce qu'il apprend d'elles lui fait
dire : Nihil aliud inveni quam superstttionem pravam, immo-
dicam. Tertullien combine les deux interrogatoires, celui des
renégats et celui des diaconesses et fait dire à Pline : nihil
aliud se de sacramento eorum comperisse, quam coetus anle-
lucanos, etc., en les interrogeant, « je n'ai rien pu découvrir
(de blâmable), si ce n'est des réunions tenues avant le lever
du jour pour chanter », etc. Comme Pline, il ne trouve de
blâmable que les réunions, qui étaient défendues en elles-
mêmes. Voyons comment opère le traducteur. Il coupe la
phrase en deux et adlegans devient Xivwv ... épivue Se. Ces
mots ne correspondent nullement à adfirmabant, comme le
croit Harnack, mais à adlegans. Le traducteur n'a pas com-
pris, qu'outre leur refus obstiné de sacrifier, les chrétiens
commettaient une faute en se réunissant malgré la loi, bien
que Pline le dise et que les renégats eux-mêmes se disculpent
en affirmant que, depuis l'édit, ils ne se sont plus assemblés.
Il fait connaître les deux actes du culte chrétien (hymnes et
serment) pour eux-mêmes, sans en faire le but des réunions.
Pline dit : ante lucem convenire. Tert. parle de coetus
anlelucani. Le traducteur et, après lui, Eusèbe, ne parlent
pas même de réunions (Trad. : àv{aTa(7Ôai ewOev. Syncellus :
â'wOev ... àvto-Tàfxevoi. Vers. arm. : diliculo sur gère. S. Jérôme,
qui a eu recours à Tertullien, dit : antelucanos coetus). On
ne voit plus pourquoi Pline avertit Trajan que les chrétiens
chantaient des hymnes au Christ comme à un dieu et s'enga-
geaient par serment à ne faire aucun mal. Le traducteur grec
n'a pas compris le texte de Tertullien, ce qui lui arrive encore
ailleurs, et il se tire d'affaire très maladroitement. Mais on
voit clairement qu'il a suivi le texte de Tertullien et qu'il est
plus près de lui que de Pline.
Il est donc inadmissible que le traducteur grec ait corrigé
le texte de Tert. d'après Pline, qu'il n'a pas lu. Il a lu dans
Tertullien : Christo ut deo, et la faute est postérieure. Comme
Eusèbe s'est servi uniquement de la traduction grecque et
que S. Jérôme s'est servi à la fois d' Eusèbe, de Tertullien et
CHAP. 2,6 159
de Pline (Harnack, p. 27), on ne peut pas affirmer que la faute
n'existait pas encore de leur temps.
Mais cela est probable. Il ne faut pas s'étonner d'ailleurs
que F et P contiennent la même faute, puisqu'ils ont d'autres
fautes communes. Il y a même une autre faute commune dans
cette phrase : proliibentes. On peut se poser la question : ces
fautes communes suffisent-elles pour prouver que F et P
remontent à un même archétype ? Sont-elles antérieures
à la naissance de deux traditions nettement séparées ?
2,6. ad confoederandam disciplinam, homicidium, adul-
terium, fraudem, perf idiam et cetera scelera prohibentes.
*FPM
Prohibentes ne s'accorde avec aucun mot de la phrase ;
il faut le rapporter à disciplinam et corriger en prohibentem.
Voy. Van der Vliet, p, 32-33. — Voici le passage de Pline que
Tertullien a en vue : quod essent soliti ... seque sacramento
non in scelus aliquod obstringere, sed ne furta, ne latrocinia,
ne adulteria committerent, ne fidem fallerent, ne depositum
adpellati abnegarent. Tert. rend les mots seque sacramento
obstringere par confoederare disciplinam, c'est-à-dire, foedere
sarcire disciplinam. Cf. S. Jérôme, Epist., 4,1 : nascentem
arnicitiam ut Dominus confoederare dignetur, precor. 5,1 :
quin potius foederemus eas {nascentes amicitias) reciprocis
epistulis. S. Augustin, Serm., éd. Mai, 31,1 : confoederata
ludaico mors furori. Amm. Marcell., 27,7 : foederata pace.
Thés. l. /., IV, 246,64. On voit que disciplinam n'aurait pas
besoin de déterminatif, mais prohibentes doit s'accorder avec
un mot de la phrase et il n'y en a pas d'autre que disciplinam.
Sur prohibere = vetare, voy. De spect., 2, p. 2,27 : aut iubeat
aut prohibeat. 16, p. 18,13 : Deus certe etiam cum causa pro-
hibet odisse. Adv. Marc, 26, p. 326, 27 ; 27, p. 328,5 et 16 ;
p. 329,8 et 10. Le traducteur grec, et d'après lui, Eusèbe (Hist.
eccl. et Chronique) ont modifié la construction de la phrase :
prohibentem est devenu un infinitif : xw)^ue(79at, (Trad. grec,
dans Eusèbe, Hist. eccl., 3, 33, 3), âuayopeuetv (Eusèbe, ibid.,
§ 1), arceri (Rufin), prohibere (Version arménienne de la
160 APPENDICE I
Chronique d'Eusèbe), vetari (S. Jérôme, Chronique). Voy,
Schoene, Eusebi Chron., 2, p. 163-165.
2.7. Tune Traianus rescripsit hoc genus inquirendos qui-
dem non esse, oblatos vero puniri oportere.
Tertullien dit hoc genus pour homines hoc genus, les hommes
de cette espèce. Il ne faut pas dire que homines est sous-en-
tendu. L'accusatif déterminatif ou limitatif hoc genus est
cristallisé pour ainsi dire et peut servir de sujet aux infinitifs.
L'accord des attributs inquirendos et celui de oblatos est
sylleptique. De idol., 12, p. 44,5 : modo per spectacula et hoc
genus, modo per festos aies. — Le cas est différent, quand
Tertullien dit : hoc genus hominum ... caeci ... norunt, où hoc
genus est au nominatif (De paen., 1,1), ou bien : id genus
lucrum exercere (De idol., 11, p. 42,8) ; quando et hominibus
hoc genus nomina inducuntur (Ibid., 20, p. 54,8), où le subs-
tantif déterminé par id genus ou hoc genus est exprimé. Voy.
notre article dans le Musée Belge, 15, 1911, p. 221-222.
De hoc genus, il faut rapprocher les génitifs eiusmodi et
huiusmodi (au lieu de homines eiusmodi et huiusmodi), qui
peuvent servir de sujet ou de complément. Ad uxor., 2,7 :
ita facilius huiusmodi lucro fiunt, in quos Dei gratia consuetu-
dinem fecit. Apol., 15,6 : qui eiusmodi factitant. 49,4 : in
eiusmodi. Cf. Hoppe, Syntax, p. 106. Blokhuis, De lut. Tert.,
p. 76-79. Schepss, Arch. /. lat. Lex., 3, p. 317.
2.8. Latronibus vestigandis per universas provincias
statio sortitur.
Sortitur est évidemment ici un passif, comme Ad uxor.,
1,6 : Achaeae lunoni apud Aegium oppidum virgo sortitur.
Sortir i est déponent au ch. 7,10 : sortitus est ille provinciam,
et 23,13 : sortitos esse = nanctos esse. Cf. 25,16 : rémunérasse,
et 46,4 : remunerantur (passif). Neue, Formenlehre, 3, p. 66
et 91. Hoppe, Syntax, p. 62. Rauschen, p. 86.
2,11. Quod perversius est (que perversius P), cum prae-
sumatis de sceleribus nostris ex nominis confessione,
cogitis tormentis de confessione decedere F
CHAP. 2,7-12 161
Quod perversius est est opposé à Sed nec in isto ex forma
malorum iudicandorum agitis erga nos quod ... Il y a deux
degrés dans l'irrégularité de la procédure commise par les
juges :
10 Aux chrétiens seuls ils appliquent la torture pour les
faire nier leur qualité de chrétiens, leur nom {ad negandum) :
cela est contraire aux règles de la procédure criminelle qui
ne permet la torture que pour arracher un aveu.
2° Ils appliquent la torture pour faire rétracter un aveu
{de confessione decedere) qui implique des crimes abominables :
c'est doublement contraire aux règles de la procédure crimi-
nelle, car, avec le nom, on fait nier des crimes déjà avoués.
Quod perversius est est apposition de cogitis tormentis de
confessione decedere. Les phrases solis Christianis {tormenta
adhibetis) ad negandum et cogitis tormentis de confessione
decedere sont opposées l'une à l'autre : elles expriment les
deux degrés de l'irrégularité.
Quo perversius ... cogitis « Et c'est avec une irrégularité
d'autant plus grande que vous forcez ... » ne paraît pas admis-
sible, car quo {= et eo) doit se rapporter à ce qui précède,
tandis qu'ici eo représenterait ce qui suit : cum praesumatis
de sceleribus nostris ex nominis confessione. En effet, ce qui
rend l'irrégularité plus grande, c'est la présomption tirée de
l'aveu du nom chrétien.
2,12. Sic enim soletis dicere homicidae : Nega, etc.
Nous avons expliqué ce passage plus haut, p. 57, — Le
juge insiste auprès du chrétien accusé pour qu'il ne s'obstine
pas dans son aveu et, bien qu'il regarde tout chrétien comme
un homicide, il lui dit : « Nie ». Et si l'accusé continue à
avouer, bien que l'aveu rende la torture inutile (et illégale),
il le fait déchirer. 11 n'agit pas ainsi envers les criminels ordi-
naires ; donc il juge les chrétiens innocents. En 212, Tertullien
répète au proconsul d'Afrique, Scapula : Quid enim amplius
tibi mandatur quam nocentes confessos damnare, negantes autem
ad tormenta revocare ? Videtis ergo, quomodo ipsi vos contra
mandata faciatis, ut confessos negare cogatis. Adeo confitemini
162 APPENDICE I
innocentes esse nos, quos damnare statim ex confessione non
vultis. Si autem contenditis ad elidendos nos, iam ergo inno-
centiam expugnatis (Ad Scap., 4).
2,18. de isto nomine F ; de eo nomine P
Le remanieur de P a méconnu l'emploi fréquent que Tert.
fait de iste pour hic, is, ille. Au cii. 5,2, le même remanieur
a remplacé istius par ipsius. Voy. P. Henen, Index verbo-
rum, p. 83.
2,20. Christianus si nullius criminis nomen est, valde
ineptum, si solius nominis crimen est F; Christianus si
nullius criminis nomine reus est, valde incestum, si solius
nominis crimen est. P
Rigaltius a le premier adopté la lecture de F, qui est la
seule acceptable.
Il faut remarquer que, contrairement à ce que l'on dit
généralement avec Oehler, P et M ont : nomine reus est. Dans
P, nomine est abrégé en nom. ; dans M, il est écrit en entier.
Quant à valde incestum, c'est une méprise du scribe, suggérée
par incestum, qui précède.
Au commencement du § 20, il faut lire: cur non et incestum,
correction évidente de Gomperz, déjà faite par Havercamp,
et il faut mettre un point d'interrogation après pronuntiare.
Tout ce § 20 a fort tourmenté les critiques. Il suffit de le
rattacher à ce qui précède pour qu'il prenne un sens très clair.
Les païens justifiaient le supplice des chrétiens en les accu-
sant de crimes abominables.
Dans tout le chapitre 2, Tert. s'est attaché à montrer, par
la procédure criminelle suivie contre les chrétiens, que les
chrétiens sont condamnés comme chrétiens uniquement, et
non comme infanticides, incestueux, sacrilèges, ennemis
publics. Notre seul crime, le seul qui nous fasse condamner,
conclut-il, est d'être chrétiens. Nominis proelium est (§ 19).
Dans le dernier paragraphe (20), il complète sa démonstra-
tion par le texte ou le libellé des jugements rendus.
S'il n'en est pas ainsi, si notre seul crime n'est pas d'être
CHAP. 2,18-20 163
chrétiens, expliquez-moi, je vous le demande, pourquoi vos
arrêts de condamnation ne portent pas d'autre qualification
criminelle que celle de Christianus. — C'est évidemment que
Cfiristianus seul désigne notre crime.
Est-ce que, pour nous seuls, les juges s'abstiennent, par honte
ou par dédain, de désigner nos crimes dans leurs arrêts ? —
Evidemment non, ils désignent notre crime et ce crime est
Christianus. L'interrogation est ironique ; Tert, supprime
souvent la particule interrogative. Voy. ci-dessus, 1,3.
Enfin, si — comme vous le prétendez — « chrétien » n'est
pas (pour vous) le nom d'un crime, si « chrétien » n'est donc
autre chose qu'un nom de secte, quelle absurdité de faire un
crime d'un nom seul, c'est-à-dire d'un nom qui ne désigne
pas autre chose qu'une secte et non un crime ? — On voit
pourquoi Christianus est mis en tête : c'est le mot principal.
L'idée finale revient au ch. 4,11, où Tert. dit : « Vos lois
contre nous sont iniques. Que dis-je ? iniques ? Bien plus, ehes
sont absurdes, si elles punissent un (simple) nom ». Itnmo,
si nomen puniunt, etiam stultas.
On voit qu'au ch. 2,20, Tert. joue sur les deux sens de no-
men : 1° le nom ou le titre {titulus, elogium) d'un crime (il vient
de dire : ipsis nominibus scelerum) ; 2° le nom de chrétien.
Par une antithèse subtile, qui est dans son goût, il oppose
le « nom d'un crime » et le « crime d'un nom ».
Tout ce raisonnement du § 20, y compris l'antithèse finale,
était peut-être exposé plus clairement dans Ad nat., 1,3,
p. 62, 4-10, parce qu'il n'y revêt pas la forme interrogative :
Adeo, si de criminum veritate constaret, ipsa criminum nomina
damnatis accommodarentur, ut ita pronuntiaretur in nos : illum
homicidam vel incestum vel quodmmque iadamur duci, suffigi,
ad bestias dari placet. Porro sententiae vestrae nihil nisi Chris-
tianum confessum notant. Nullum criminis nomen exstat, nisi
nominis crimen est. « Enfin, si nos crimes étaient établis, les
noms des crimes seraient appliqués aux condamnés, et l'arrêt
serait formulé en ces termes : Nous décidons qu'un tel, con-
vaincu d'homicide, ou d'inceste, ou de tout autre crime qu'on
nous impute vulgairement, soit conduit au supplice, mis en
croix, livré aux bêtes. Or, vos arrêts ne portent rien si ce n'est
164 APPENDICE I
qu'il s'est avoué chrétien. Il n'existe aucun nom de crime (dans
vos arrêts), à moins que ce ne soit le crime du nom ».
En rédigeant son plaidoyer, Tert. a voulu conserver le jeu
de mots et l'antithèse de la première rédaction.
Dans P, le jeu de mots et l'antithèse sont conservés aussi,
mais affaiblis par un remanieur maladroit, qui ne les a pas
bien compris. De plus, ce remanieur n'a pas vu que Chris-
tianus, placé en vedette, ne signifie pas « un chrétien » mais
le « mot chrétien ». Si l'on entend par Christianus « un
chrétien », millius criminis nomen ne convient plus comme
attribut ; pour avoir un adjectif attribut, le remanieur a
changé ces mots en : nullius criminis nomine reus » si un chré-
tien n'est coupable du nom d'aucun crime », ce qui n'est
guère compréhensible. En outre, si un chrétien n'est coupable
d'aucune espèce de crime, on ne peut pas dire qu'il n'est
coupable que du crime d'un nom. Le texte de F est clair ;
celui de P est embrouillé, inintelligible. Enfin, le texte de F
donne une clausule fréquente (double crétique : nominis
crimen est), tandis que celui de P {criminis nomine reus est)
n'est pas métrique. Voy. F. di Capua, p. 33.
Sur ce passage, voy. encore : Callewaert, Le Cod. Fuld.,
p. 15 (336), et, Heinze, p, 305, n. 1.
Au lieu de incestum de P, Hartel (Patr. Stud., II, p. 29,)
propose incertum, ce qui ne donne pas un sens convenable.
Hartel lisait aussi à tort, sur la foi d'Oehler : si nullius cri-
minis nomen reus est, faisant de nomen un ace. détenu, ou
grec, construit avec reus, ce qui est difficile à admettre. Tert.
met le génitif avec reus (2,8 ; 16 ; 6, 10 ; 10,1 ; 24,1).
3,3. ex hoc ipso (ex ipso P) dénotant, que (quod P) laudant.
F avait quo, car Modius lisait quo dans Barraeus et il se
tait, alors qu'il signale ex hoc ipso. Après une locution de
temps, p. ex., exinde (Adv. Marc, 2, 2, p. 336, 26-27, cité p.
141, n. 3) ou ex hoc ipso (p. 144), Tert. met quo pour ex quo
« depuis que ». Il oppose ici deux moments {rétro, etc., et ex hoc
ipso quo) et deux jugements. Les deux verbes ont le même
compl. dir. « Ceux qu'ils avaient connus libertins naguère
avant leur conversion, ils (ne) les blâment (que) le jour où ils
CHAP. 3,3-4 — 4,1 165
les louent. » Ils les louent de leur bonne conduite et ils les
blâment d'être chrétiens. Les § 2 et 3 sont une suite d'anti-
thèses concises, dans le goût de Tert. Le remanieur de P n'a
pas compris celle-ci. Cl. Henen, Musée belge, 14, p. 218.
3,4. Tanti non est bonum, quanti odium Christianorum. P
F a : quani odium. Mais tanti quam pour tanti quanti ne
semble pas être latin. On ne peut alléguer des phrases telles
que De idol., 24, p. 57,20 : Nemo dicat : quis tam tuto prae-
cavebit ? Exeundum de saeculo erit. Quasi non tanti sit exire,
quam idolatren in saeculo stare. Qu'on ne me dise pas : « Qui
donc parviendra à se préserver sûrement de l'idolâtrie ? Il
faudrait sortir du monde ». — Comme si ce n'était pas la
peine de sortir de ce monde, (plutôt) que de rester idolâtre
dans ce monde ! — Devant quam, Tert. sous-entend souvent
potius ou magis.
4,1. in Christianis non esse quae in se non nesciunt <esse>F
Dans P, non est omis devant nesciunt. — Sur la lacune de
F, voy. ci-dessus, p. 38.
Les litotes non nescio et non nescius sum peuvent avoir
deux sens : tantôt elles renforcent, tantôt elles atténuent :
« je sais parfaitement » ou, comme ici, « je ne suis pas sans
savoir, je sais au fond, après tout ». La réfutation montrera
que les chrétiens ne commettent pas les crimes qu'on leur
reproche (homicide, inceste, etc.) : in Christianis non esse.
La rétorsion, qui suivra la réfutation, ouvrira les yeux aux
païens sur « ce qu'ils savent au fond » : ils reconnaîtront leurs
propres crimes et y réfléchiront (ce qu'ils ne font pas mainte-
nant : si consideraretis, 9, 20) : alors ils rougiront de voir,
ne disons pas, que c'est le crime qui accuse la vertu, mais
qu'ils accusent des hommes qui, à les entendre (ut volunt)
seront {iam, après cette rétorsion) leurs égaux, leurs pareils.
Contra : R. Heinze, p. 308,1.
Tert. ne dira jamais que les païens ignorent absolument
les crimes qu'ils commettent. Dans Ad nat., 1,16, p. 86, 12,
c'est ironiquement qu'il dit : quodque felicius proveniat, cum
palam mîsceatis incesta toto conscio caelo, soli ipsi ignoratis ;
166 APPENDICE I
nos vero etiam in tenebris scelera nostra recognoscere possumus !
Ibid., 1,20, p. 92, 22 : Naturae vitio satisfacitis, ut, quae in
vobis non refutetis, in aliis damnetis, aiit quorum reatum in
voBis MEMiNERiTis, CŒ iu qUos ittctetis. Ibid., p. 93,4 : Discite
quid in nobis accusetis, et non accusabitis : recognoscite
quid in vobis non accusetis, et accusabitis, Ibid., 2,1, p. 93,15 :
an vere dei (se. sint), ut vultis, an falso, ut scire non vultis.
4,2. quae palam adinveniuntur F {d'après Junius) ; quae
palam ad(mittentes) inveniuntur Br ; quae illos palam
admittentes invenimus P
C'est un des passages les plus discutés jusqu'ici, mais nous
le croyons enfin établi définitivement (i). La lecture de F
a été défigurée par Junius, qui a réuni ad et inveniuntur en
un seul mot (2), mais elle a été exactement conservée par le
Codex Bremensis : quae palam ad. (= admittentes) inveniuntur.
Modius a l'habitude constante d'abréger ainsi les mots qui
n'offrent aucune variante dans F. Voy. l'App. II, dès le début.
Il est facile d'expliquer comment les lectures différentes
et fautives de F et de P viennent l'une et l'autre du texte
authentique de Tertullien. Voici ce texte :
Respondebimus ad singula, quae in occulto admittere dici-
mur, quae palam admittentes invenimur ; in quibus scelesti,
in quibus vani, in quibus damnandi, in quibus inridendi depu-
tamur.
« Nous répondrons successivement sur chacun des actes
qu'on nous accuse de commettre en secret, sur les actes qu'on
(') Le mérite en revient à Lôfstedt, p, 76-77. Nous avions publié
la lecture du Codex Bremensis dans le Musée BelgCj 1912, p. 193 ;
Lôfstedt a vu que ad. invejiiuntiir doit se lire ad{inittentes) inve^iitm-
iur (faute de scribe pour invenimur).
(2) Le composé adinvenire « inventer, trouver en outre » se ren-
contre ailleurs dansTert. (Scorp., i, p. 145,29. Deieiun., 11), mais
ne convient pas ici. Voy. Thés l. L, I, 688. En présence du texte
que fournit le Codex Bremensis, il paraît inutile d'insister sur les
défauts de celui de Junius : il détruit la lumineuse antithèse.
CHAP. 4,2 167
nous voit commettre en public : sur les actes à propos desquels
on nous fait passer pour criminels, pour extravagants, pour
punissables, pour ridicules »,
Ce passage contient la division du plaidoyer, celle que
Tertullien suivra scrupuleusement. Il divise les actes repro-
chés aux chrétiens en « actes commis en secret, dit-on » (ch. 7
à 9 : infanticide, repas de sang, festin incestueux) et « en
actes commis publiquement et constatés» (ch. 10-49 : sacri-
lège et lèse-majesté avec tout ce qui s'y rattache). Les termes
de l'antithèse se correspondent admirablement :
1) quae in occulto admittere dicimur,
2) quae palam admittentes invenimur.
On voit que palam est opposé à in occulto et invenimur
à dicimur.
Tertullien rappelle cette division au ch. 6,11, au moment
où il va aborder l'examen de la première catégorie : occulta
facinora et manifestiora. En passant aux actes publics, au
ch. 9,20, il dit : Nunc de manifestis dicam.
Suivons maintenant la destinée des mots : quae palam
admittentes invenimur. Dans P, le scribe a commencé par écrire
invenimus, confondant r final avec s final, ce qui lui est arrivé
plusieurs fois. Cf. 49,4 : captatus, pour captatur. 50,3 : exuri-
mus, ensuite corrigé en exurimur. 50,13 : efficimus, pour
efficimur. Ensuite, pour donner un sens à la phrase devenue
inintelligible, le scribe ou un reviseur a ajouté illos, qui désigne
les païens. Le maladroit correcteur n'a pas vu que la division
en deux catégories d'actes disparaissait du coup ; mais sa
maladresse s'explique. En effet, il aura constaté qu'au ch. 7,
Tertullien rétorque l'accusation et montre que les païens
commettent publiquement l'homicide et l'inceste ; il a intro-
duit cette idée ici, sans voir que les actes publics reprochés
aux chrétiens ne peuvent pas manquer dans la division du
plaidoyer et que d'ailleurs la rétorsion vient d'être annoncée
au § 1.
La lecture authentique de F {quae palam admittentes inve-
niuntur), fournie par le Codex Bremensis, contient une simple
faute de transcription. Le scribe a écrit : inveniuntur, pour
invenimur. Remarquez que la clausule régulière {invenimur,
168 APPENDICE I
double trochée) est ainsi transformée en fin d'hexamètre,
clausule proscrite en prose.
Les mots qui suivent n'ont Jamais été bien compris. L'asyn-
deton des propositions relatives continue : in quibus scelesti,
in quibus vani, in quibus damnandi, in quibus inridendi depu-
tamur. On n'a pas vu que ces quatre membres forment deux
groupes de deux :
1) in quibus scelesti, in quibus vani —
2) in quibus damnandi, in quibus inridendi.
Dans le premier groupe, les actes des chrétiens sont qua-
lifiés par leur nature. Les uns sont criminels : homicide,
inceste, sacrilège, lèse-majesté ; les autres sont vains ou
extravagants aux yeux des païens : les croyances des chré-
tiens, leur tentative chimérique de détruire les dieux et d'in
troduire une religion nouvelle.
Dans le deuxième groupe, les mêmes actes sont qualifiés
au point de vue du traitement qu'ils méritent : les uns sont
punissables, c'est-à-dire méritent la mort ; les autres en-
courent le ridicule. Voy. ch. 49.
4,3. Sed quoniam, cum ad omnia occurrit veritas nostra,
postremo legum obstruitur auctoritas adversus eam,
de legibus prius consistam (concurram P), et (ut P) cum
tutoribus legum. F
Ad omnia désigne les accusations que Tertullien réfutera
dans tout son plaidoyer (ch. 7-49) : on voit ici que ces accu-
sations ne reposent pas sur les lois.
Le procès et la condamnation pour crime de christianisme
sont fondés sur les lois, qui disent : Non licet esse vos ! Les
autres imputations (ad omnia) sont des calomnies populaires,
par lesquelles le public et les juges prétendaient justifier
les arrêts de mort ; elles ne sont pas la base juridique du pro-
cès criminel intenté aux chrétiens, ni de leur condamnation.
Le vrai débat juridique, c'est celui des chap. 4 à 6, où
Tertullien répond à ceux qui disent : Vous avez beau laver
les chrétiens de tous les crimes qu'on leur impute, la loi est
contre vous et elle vous défend d'exister : Non licet esse vos I
11 est clair, d'après cela, qu'il existait une loi spéciale qui
CHAP. 4,3 169
proscrivait le christianisme comme religion, qui punissait
les chrétiens pour un délit religieux. Les calomnies que Ter-
tullien réfutera dans son plaidoyer ne servaient qu'à justifier
une loi si odieuse. Voy. 28,3.
Tertullien discute donc les lois avec les gouverneurs, qui
sont les tuteurs des lois, qui sont chargés de les appliquer,
car ils ont la juridiction civile et criminelle : ut mm tutoribus
legum.
On a dit que Tertullien discute ici en révolutionnaire,
qu'il fait la conscience individuelle juge de la loi et revendique
le droit de lui désobéir. Voy. Heinze, p. 314. On a dit aussi
qu'il oppose ici la loi naturelle à la loi positive et qu'il déclare
que celle-ci doit céder devant celle-là. Voy. Monceaux, p. 225.
Ce n'est pas ainsi qu'il raisonne. Voici ce qu'il dit : 1° En
principe, la loi ne peut être l'expression du caprice du légis-
lateur, sinon elle est tyrannique (§ 4). La loi ne peut pas
défendre ce qui n'est pas mauvais, elle ne peut pas défendre
ce qui est bon ; sinon elle est mal faite, elle se trompe, ce qui
peut arriver, attendu qu'elle est l'œuvre des hommes (§ 5),
et elle doit être réformée. Les mots si bonum invenero esse
ne marquent pas un jugement personnel, comme on l'a cru.
Ils signifient : « si je constate, c'est-à-dire, si les justiciables
constatent que ce que la loi a défendu est bon », et non : « si
je trouve, si je juge personnellement que ... », La loi s'adresse
d'ailleurs à la conscience de tous ceux dont elle attend obéis-
sance, à la conscience publique. Si elle est réprouvée par la
conscience publique, elle est mauvaise et elle doit être réfor-
mée ; si elle s'impose malgré cette réprobation, elle est tyran-
nique (§ 13).
2° En fait, les Romains ont reconnu que beaucoup de leurs
lois étaient injustes et ils les ont réformées. La loi contre les
chrétiens est injuste et, de plus, absurde, puisqu'elle proscrit
un nom sans permettre de rechercher ce qui se cache sous
ce nom. Aussi les bons empereurs ne l'ont jamais appliquée.
Enfin, il y a une foule de lois que les Romains n'appliquent
plus, qu'ils ont laissé tomber en désuétude, La conclusion
est que, si les chrétiens sont innocents des crimes qu'on leur
impute pour justifier la loi de proscription, il faut réformer
celle-ci ou la laisser tomber dans l'oubli. Or, Tertullien va
170 APPENDICE I
le montrer, les chrétiens sont innocents, les accusations ne
sont que calomnies.
Dans F, et (devant cum tutoribus) est une faute de copie
pour ut. Voy. ci-dessus, p. 101. — Au lieu de consistam, P a :
concurram, qui est un remaniement maladroit. Tert. vient
de dire au § 1 : iam de causa innocentiae consistam. Après
avoir exposé son plan, il veut, avant d'aborder son sujet,
repousser une fin de non-recevoir (praescribitis) que les juges
peuvent opposer à la réfutation des accusations vulgaires,
et qui est fondée sur les lois qui disent : Votre existence même
est contraire aux lois ! C'est pourquoi il va, dans une sorte
de prémunition, discuter les lois avec les juges et il répète
le mot : de legibus prius consistam vobiscum.
Consistere est un terme de droit, emprunté à la langue
militaire ; en effet, il se dit du combattant qui prend position
pour attendre l'adversaire, pour lui faire face ; puis, du plai-
deur qui tient tête à la partie adverse. Cic, Pro Quinctio, 77,
dit déjà : Diffidebam satis animo certo et confirmato me posse
in hac causa consistere. De là, le mot a passé à la langue de
la discussion en général. On dit : consistere « être en instance,
plaider, discuter » ; consistere contra aliquem (Cic), adversus
aliquem (Digeste), cum aliquo (Sénèque, Digeste) et ici, « inten-
ter un procès à qqn », être en procès avec qqn, plaider contre
qqn, défendre contre qqn, et, en général « discuter avec qqn »,
Sen., Dial., 4, 7, 3 : Alius cum matre consistit. Dig., 48, 10, 7 :
Nullo modo servi cum dominis suis consistere possunt. Tert.
aime à construire ce verbe avec de « au sujet de » ; cf. 4,3 ;
46,1 et 15 (et les synonymes variés, 46, 10-14). De idol., 13,
p. 44, 12. De monog., 2. Voy. l'index d'Oehler, et sa note
De idol., 13. Roensch, Das neue Testament Tertullians, p. 612.
Blokhuis, p. 131. Heumann-Seckel, Quellen, s. v. Thés. l. t.,
IV, 465-466.
Concurrere cum aliquo « en venir aux mains avec qqn » est
aussi un terme militaire très connu ; mais, dans la langue
du droit, il a un autre sens. Il s'emploie aussi au figuré {Thés,
l. /., IV, 110, 50). Un remanieur, qui ne connaissait pas le
sens juridique de consistam, trouvant ce mot obscur, l'a rem-
placé par un terme moins précis, sans tenir compte de la
CHAP. 4,4 171
prédilection marquée de Tert. pour les termes juridiques.
Sur ce caractère du style de Tert., voy. ci-après, 28,3.
4,4. lam primum cum iure (dure P) definitis dicendo :
« Non licet esse vos ! » F
Tert. dit: 1° que c'est un principe posé par les juges (defi-
nitis) et 2° qu'ils opposent ce principe aux chrétiens comme
une fin de non-recevoir (praescribitis). La formule elle-même
est « dure » dans sa concision : Non licet esse vos ! La manière
dont on l'applique en opposant aux chrétiens une « fin de
non-recevoir », manque d'humanité. Il en résulte que sine
ullo retradatu humaniore ne serait pas une répétition inutile de
dure. Tert. dit à Scapula, proconsul d'Afrique : Potes et officio
iurisdictionis tuae fungi et humanitatis meminisse (ch. 4).
Tert. emploie souvent definire dans le sens d' « établir,
affirmer (un principe), poser en principe ». Adv. Marc, 1,18,
p. 313,12: Nos definimus Deam primo natura cognoscendum,
dehinc dodrina recognoscendum.'DQ an., 47, p. 378,5: Definimus
enim a daemoniis plmimum incuti somnia. De pud., 3,\ : ad
eam paenitentiae speciem, quam cum maxime definimus venia
carere. 11,2 : Hoc definimus nihil adversus nos praeiudicare.
Il l'emploie particulièrement en parlant d'une défense ex-
presse, d'une loi pénale. De spect., 3, p. 4, 23 : Plane nus-
quam invenimus, quemadmodum a perte positum est : « Non
occides ... », ita exserte definitum : « Non ibis in circum », etc.
Cf. Tlies. I.I., V, p, 344, 44 (où praescribo est pris à tort comme
synonyme de definio) et 62 ; 348, 1.
Il aime l'adverbe dure. De an., p. 17, p. 323, 11 : Horum
(se. quinque sensuum) fidem Academici durius damnant. De
bapt., 5, p. 205, 25 : ne quis durius credat ... De pud., 1, 20 :
durissime nos ... digamos foris sistimus. De resurr., 37, p.
79,2 : quia durum et intolerabilem existimaverunt sermonem
dus. Adv. Marc, 2,15, p. 355,22 : duritia legis. Ibid., 2,19,
p. 360,25.
Donc dure se comprend. Iure signifie « en vertu du droit,
de la loi ». Cod. lust., 6, 38,2 : iuris audoritate definitum. Ici,
iure marque d'une manière plus précise que la formule Non
licet esse vos ! est celle d'une loi prohibitive. Tert. fait allusion
172 APPENDICE I
à cette loi au ch. 1,1 : Si non licet vobis, et au ch. 37,2 : legibus
obseqmntes. Voy. ci-dessus, p. 136. Au § 3, il en parle comme
d'une loi {kguni audoritas, post leges) et dans les §§4 et 5,
il la combat comme une loi arbitraire,.comme une loi mauvaise,
une loi qui s'est trompée {si lex tua erravit).
En disant tantôt lex, tantôt leges, Tert. fait allusion aux
mesures législatives qui s'étaient succédées depuis Néron et
dont il résume la portée par cette formule : Non licet esse vos !
Il n'est pas impossible que cette formule était celle de l'édit
de Néron ou du sénatus-consulte rendu sur la proposition de
Néron. En effet, c'est à Néron que Tert. fait remonter la
législation persécutrice. Voy. 5,3 et Ad nat., 1,7, p. 68, 4 et
ss., où Tert. appelle Néron damnator et la loi de proscription
institutum Neronianum, ajoutant que c'est le seul des actes
de Néron qui ne fut pas aboli après sa mort.
4,7. Nonne et vos cottidie ... totam illam veterem et
squalentem silvam legum novis principalium rescrip-
torum et edictorum securibus ruspatis (truncatis P) et
caeditis ? P
Truncatis semble venir d'un scribe (ou d'un remanieur)
qui ne comprenait pas le vieux mot ruspatis. Sid. Apoll,,
Epist., 2, 2, 4 : si caedua silva truncetur. De pud., 16, 12 :
quanta secure censurae omnem silvam libidinum caedat et
eradicet et excaudicet.
Traduisez : « Et vous-mêmes, tous les jours, ... ne fouillez-
vous pas (ou : ne coupez-vous pas) et n'émondez-vous pas
toute cette vieille et confuse forêt de vos lois, en y portant
la hache des rescrits et des édits impériaux » ?
Ruspare ou ruspari est un mot archaïque qui signifie
« fouiller, scruter, rechercher ». Festus (Lindsay, p. 322 =
M 264) : Ruspari est quaerere crebro, ut hoc versu indicatur :
Et ego ibo ut latebrosa ruspans rimer... (Ribb., Trag. inc, 83).
Nonius, 166, 20, dit : Ruspari est scrutari, et il cite ce vers
d'Accius : Vagent ruspantes silvas, sectantes feras (Ribb., 441).
Min. Félix, 5,5 : ut neque ... aut scire sit datum aut ruspari
{stuprari P) religiosum.
Ailleurs, Tert. applique ruspare à la terre. De pall,, 2, p.
CHAP. 4,7-9 — 5,2 173
923 0. : runcare et ruspare consuluit, à sarcler et à défricher
les terres. Ruspare est donc aussi synonyme de caedere, émon-
der, couper. — La langue archaïque hésitait entre ruspare
et ruspari ; Tert. a préféré la forme active à la forme dépo-
nente. Voy. ci-dessus, ad 2,8.
4,9. rétro ... leges erant F
Rétro, qui manque dans P, est opposé à postea. Il peut avoir
été passé par le scribe de P. Tert. aime à employer rétro au
lieu de antea, olim, prius.
5,2. Tiberius ergo, cuius tempore nomen Christianum
in saeculum intravit (introivit P), adnuntiata (adnun-
tiatum P) sibi ex Syria Palaestina, quae illic veritatem
istius (ipsius P) divinitatis revelaverant (revelaverat P),
detulit ad senatum cum praerogativa suffragii sui. F
La lecture de F reçoit une éclatante confirmation de Rufin,
Hist. eccl., 2,2,6, qui la reproduit sans aucune variante d'après
son manuscrit de Tertullien.
La traduction grecque (voy. ci-dessus, p. 32), citée par
Eusèbe, Hist. eccl., 2, 2, 6, n'est pas tout à fait exacte, mais
elle confirme aussi ipsius en traduisant : toù h6y^c(.xo<; toutou,
car Tert. emploie iste pour hic. Voy. P. Henen, Index verbo-
rum, p. 83. Ipsius ne convient pas ici ; le correcteur a perdu
de vue le sens que Tert, donne à iste. La traduction grecque
rend intravit par Ei<yek'f\kuhv. Elle n'a "pas compris les mots
adnuntiata ... quae ... revelaverant. Voy. Harnack, Die griecli.
Uebersetzung, p. 19.
Dans P, quae (il fallait : quod) est un reste du texte primitif
ou plutôt vient d'un faux accord avec Syria Palaestina. Voy.
ci-dessus, p. 113.
Les mots cum praerogativa suffragii sui ont été souvent
mal compris.
Praerogativa est déjà employé par Cicéron (In Verr., 1,9),
par Caton d'Utique (ap. Cic, Ad fam., 15,5) et par Pline (Hist.
nat., 7, 16, 14) dans le sens dé « preuve anticipée, signe cer-
tain » d'une chose à venir. Ce sens vient de ce qu'on tirait
174 APPENDICE I
un présage (omen) du vote de la centurie prérogative. Tibère
consulte le sénat sur les faits que Pilate lui annonçait de
Palestine et qui prouvaient la divinité du Christ : ce sont
les faits relatés au ch. 21 (voy. 21, 18 et 24), les miracles et
la résurrection du Christ. Cela veut dire qu'il propose au
sénat de ranger le Christ parmi les dieux. En même temps,
il manifeste son sentiment favorable, il donne une « preuve
anticipée », un « signe certain » de son avis favorable, il ne
cache pas son approbation. C'est ainsi que. le traducteur grec
a entendu ce passage. Eusèbe, Hist. eccl., 2, 2, 4-6 : Trj
<TUYx)v7^T(j) (ivexo!.vw!7aT:o, hr\7.o<; wv éxe{vo^ç wç xC^ Séyf^aTi
dplo-xETau Le sénat fut mécontent de ce que l'affaire n'avait
pas été soumise d'abord à son examen ; d'après le vieux décret
du sénat que cite TertuUien, la consécration d'un dieu rele-
vait en effet du sénat. Tibère avait manqué d'égards à l'assem-
blée en lui soumettant une affaire qui ne paraissait plus
entière et elle repoussa la proposition.
Sur ce vieux sénatus-consulte, on cite toujours Cic, De
leg., 2,19 ; mais Cicéron, dans ce traité des lois, parle en
théoricien, bien qu'il s'inspire des lois romaines. C'est Tite-
Live, 9,46, qui nous fait connaître ce sénatus-consulte rendu
en 304 av. J. C. : Ex auctoritate senatus latum ad populum
est, ne quis templum aramve iniussu senatus aut tribunorum
plebei partis maioris dedicaret. Il faut remarquer aussi qu'il
ne s'agit que de la dedicatio faite au nom du peuple romain
et non, comme on l'a dit souvent, par des particuliers.
Subfragium a souvent le sens de « suffrage favorable, appro-
bation ». De spect., 16, p. 18,6: convicia sine iustitia odii,
etiam subfragia sine merito amoris.
5,4. sed quia liomo (sed qua et homo P), facile coeptum
répressif F
Eusèbe, Hist. eccl., 3, 20, 7 : axe e^^wv xi o-Kvio-ewç. Rufin,
Hist. eccl., 2, 25, 4 = 3, 20,7, dit : sed quasi homo. De an,,
55, p, 388,1 : quodsi Christus, quia et homo, mortuus secundum
scripturas et sepultus secundum easdem huic quoque legi satis-
fecit forma humanae mortis apud inferos functus. Tert, aime
à employer quia sans verbe. Hartel, Patr. Stud., III, p. 42.
Henen, Index verb., s, v. Hoppe, Syntax, 59 et 142-143.
CHAP. 5,4-7—6,2-8 175
Il emploie de la même manière qua. Cf. 30,1 : sciant, qua
homines. Hartel, /. c. Ici, il est donc difficile de décider entre
quia et qua.
Dans Eusèbe et Rufin, il ne reste pas de trace de et devant
homo : il semble donc que P ait subi une interpolation.
5.7. leges istae, quas adversus nos soli exsequuntur inpii
iniusti F
De pud., 14,18 : sententia, quam exsequebatur. Ad nat., 1,
6, p. 66, 16 : apud exsecutores quoque legum. La traduction
grecque, citée par Eusèbe, Hist. eccl, 5, 5, 7, dit : ol (/. oïç
Valois) xaO' vijJiwv ^àvdiv {[i.6vov A) eTcovrau C'est la
traduction ô' exsequuntur, que le reviseur de P a remplacé
par exercent. Sur soli, F et P sont d'accord avec le sens ; le
traducteur grec n'a pas pu lire nos solos dans son ms de Tert.,
et il devait traduire par (jlovoi. ou par (xovov, mais il lui arrive
souvent de faire des contresens, soit par inadvertance, soit
faute de comprendre. Voy. Harnack, Die griech. Uebersetz.,
p. 20 ss.
6.2, submoverunt F ; submovebant P
Les verbes iubebant, destruebant, sinebant marquent des
actions qui se répètent, tandis que submoverunt marque un
fait isolé. C'est ce que le correcteur de P n'a pas vu.
6.3. Ne vel hieme F ; nam ne vel hieme P.
Voyez ci-dessus, p, 71.
6.8. Capitolio prohibitos F ; Capitolio prohibitos inferri P
Havercamp dit : inferri abesse potest. Nous croyons que
inferri ne convient pas. A la vérité, prohibere est souvent
mis pour vetare (cf. 2, 6) et la construction est grammaticale-
ment correcte. Mais inferri manque aussi dans Ad nat., 1,10,
p. 76,3 : ceterum Serapem et Isidem ... prohibitos Capitolio
Varro commémorât, eorumque {aras} a senatu détectas nonnisi
per vim popularium restructas. Sed tamen et Gabinius consul
... aras institut prohibuit. En outre, inferri est inexact, car
176 APPENDICE I
les divinités égyptiennes avaient déjà des autels sur le Capi-
tule avant le consulat de Pison et de Gabinius (an 58), comme
on le voit par le passage de Ad nationes ci-dessus. On ne leur
défend donc pas d'entrer au Capitole, on les en fait sortir.
Dans les inscriptions républicaines on trouve une sacerdos
Isidis Capitolinae. CIL., IV 2247 (= I 1034. Dessau, Inscr.
sel., 4405) et 2248, Cf. 355 et 2246. Marquardt, Le Culte, 2,
p. 95. Drexler, dans Roscher, Lex. der Myth., 2\ 401-402.
Wissovva, Relig. und Kultus der Roemer, 2e éd., p. 351. —
Injerri paraît donc avoir été ajouté par un remanieur qui
ignorait l'histoire du culte d'Isis à Rome.
7,1. et post convivio incesto, quod eversores lumlnum
canes, lenones scilicet tenebrarum, in {om. P) libidinum
impiarum verecundiam (inverecundiam P) procurent. F
Quod ... procurent a pour antécédent convivio incesto : ce
sont les chiens qui procurent, qui organisent le banquet
incestueux : ces renverseurs de candélabres, ces entremetteurs
des ténèbres font la « nuit « pour la pudeur de ces débauches
impies », pour que les assistants n'aient pas à rougir de ces
débauches impies. Telle est bien l'idée de Tertullien, qui
dit dans Ad nat., 1, 16, p. 86, 5 : Verum iam laudate consilium
incesti verecundi, quod adulteram noctem commenti sumus,
ne aut lucem aut veram noctem contaminaremus, quod etiam
luminibus terrenis parcendum existimavimus, quod nostram
quoque conscientiam ludimus.
L'antithèse hardie libidinum impiarum verecundia est dans
le goût de Tertullien, mais elle a échappé au remanieur de
P. Il l'a remplacée par «l'impudeur de ces débauches impies »,
et il a fait boiter la phrase en prenant quod dans le sens de
« parce que » et clocher le sens en disant que les chiens ren-
versent les lumières et font la nuit pour procurer l'impudeur
de ces débauches impies.
Minucius Félix, 9,7, dit : Sic everso et extincto conscio lumine
inpudentibus tenebris nexus infandae cupiditatis involvunt ...
Son idée n'est pas différente de celle de Tertullien, comme
on l'a cru : en effet, il dit que les ténèbres sont impudentes,
c'est-à-dire qu'elles favorisent l'impudence et permettent
CHAP. 7,1-6 177
de ne pas rougir. Cvide (Am., 1, 6, 59) dit : lUa (se. nox)
pudore vacat. Liv., 39,8 : cum nox ... dlscrimen omne pudoris
exstinxisset. Voy. Callewaert, Le Cod. Fuld., p. 344.
7,6. cum vel ex forma omnium mystcriorum (omnibus
mysteriis P) silentii fides debeatur F
Qui a pu trahir nos crimes ? dit Tert, « En effet, ce ne sont
pas les coupables eux-mêmes, assurément, puisque la règle
formelle de tous les mystères impose un silence inviolable. »
Cf. Ad nat., 1, 7, p, 68, 21 : cum vel ex forma ac (Rig., a
A) lege omnium mysteriorum fides debeatur. En vertu de la
règle et de la loi de tous les mystères, le silence (ou le secret)
est dû (imposé à tous les initiés). Tert. emploie souvent forma
dans le sens de lex, modus, ratio (voy. Oehler, ad De idol.,
18, p. 52, 13). C'est le sens que ce mot a ici comme le prouve
le synonyme ac lege. Dans V Apologétique, Tert. n'a fait que
supprimer ce synonyme, parce qu'il recherche toujours une
énergique concision. Ex forma exige un déterminatif : « la
règle de tous les mystères». 2,10: ex forma malorum iudi-
candorum, d'après les règles de la procédure criminelle. 20, 3 :
naturalium forma, les lois de la nature. 46,1 : eadem forma
qua. 47, 14 : rerum forma. Ad nat., 1, 2, p. 60, 17 : contra for-
mam iudicandorum malorum. 1, 9, p. 73,1 : ex forma naturali.
2, 3, p. 98, 26 : secundum animalis formam. De test, an., 4,
p. 139, 24 : naturalem formam timendi mortem. De idol., 18,
p. 52, 13 : ex forma dominica, suivant la loi du Seigneur. Le
correcteur de P a voulu donner un complément (datif) à de-
beatur, qui n'en a pas besoin et il en a privé ex forma qui en
exige un. Cf. Callewaert, Le Cod. Fuld., p. 345.
7,6. quae prodita etiam humanam animadversionem
provocabunt, dum divinitas servatur. F
P a intérim etiam et dum divina servantur. — Le scribe de F
a oublié intérim. La fin de la phrase est fautive dans F et dans
P. Il faut lire : dum divina servatur.
Les mystères de Samothrace et d'Eleusis sont tenus secrets :
à combien plus forte raison le sont ceux dont la révélation
12
178 APPENDICE I
provoquerait la vengeance des hommes, en attendant celle
de Dieu.
Cf. Ad nat., 1,7, p. 68, 22 : quae prodita non vitarent intérim
de humana animadversione praesentaneum supplicium. Sur
ce texte, fort altéré dans VAgobardinus, voy. Hartel, Pair.
Stud., p. 38,2.
Tert. donne souvent à intérim le sens de « pour le moment,
provisoirement ». Voy. 8,1 ; 19,2 ; 3 ; 5 ; 21, 14 ; 26 ; 27,6 ;
41,3 ; 42,8. Au moyen de intérim, il annonce dum. Voy. 21,14 ;
46,2.
Junius dit (Notae, p. 27) : Lego cum Latinio : humanam
animadversionem provocabunt, dum divina servatiir, nempe
animadversio. L'antithèse humanam et divina, ainsi que le
rythme (crétique et trochée) recommandent cette lecture,
qui a été le plus généralement suivie. Servare est souvent
employé pour le composé reservare. De exh. cast., 7, p, 747,8
0. : sed Christo servabatur ... legis plenitudo. Le neutre pluriel
divina nuirait à la force de l'antithèse et le féminin divinae
(De la Barre) donne une clausule plus rare.
Il en est de même de divinitas de F et de divinitus (conjec-
ture d'Oehler). Divinitus (= a Dec) conviendrait au sens et
à la grammaire. Rauschen cite Cyprian,, Ad Demetr., 17 :
nec umquam impiorum scelere in nostrum nomen exsurgitur,
ut non statim divinitus vindicta comitetur. Cf. De pud., 18,2 :
quae ... antiquitus cauta sunt. De an. 44, p. 373, 19 : sane per-
suaderer divinitus jactum. 47, p. 378,15 : siquidem et Nabu-
chodonosor divinitus somniat.
L'altération est plus grande ici dans F que dans P.
7,7. cum semper etiam piae (impiae P) initiationes
arceant profanes F
Ad nat., 1,7, p. 68,26 : cum etiam (Rig. ; cum enim A) iusta
et licita mysteria. Les initiations pieuses elles-mêmes, dit
Tert., écartent les témoins ; ainsi en est-il à plus forte raison
des initiations impies (telles que sont à vos yeux celles des
chrétiens), lesquelles ont tout à craindre d'une dénonciation,
— à moins, ajoute ironiquementTert., que les initiations impies
ne craignent moins 1 Impiae est évidemment une distraction
CHAP. 7,7-12 179
du copiste ou plutôt une correction erronée d'un lecteur
chrétien, qui a cru que les mystères païens ne méritaient
en aucun cas l'épithète piae. Voy. Rausciien, p. 20.
7,12. Exinde in traduces linguarum et aurium serpit, et
ita modici seminis vitium cetera rumoris obscurat, ut
nemo recogitet, ne primum illud os mendacium semi-
naverit FP
Dans P, il y a une division fautive des mots : ceterarum
oris. — Voici le passage correspondant de Ad nat., 1,7, p.
67, 21 : serpit et modicum originum vitium rumoris obscurat,
ut nemo recogitet ... C'est la leçon de A (Agobardinus), Avec
Rigault, il faut lire rumores.
Dans l'Apol., cetera rumoris (== ceteros rumores) a pris la
place de rumores. Cetera avec le gén. partitif est très fréquent
dans Tert. De spect., 1, p. 1,2 : inter cetera saecularium erro-
rum. De idol., 11, p. 41,9 : si cetera delictorum recogites. Avec
un génitif singulier : De pud., 17 : cetera carnis. De cultu fem.,
2,9 : cetera corporis. De exh. cast., 1 1 : inter cetera bonae
mentis. Voy. H. Hoppe,Syn^ax, p. 20.
De même, seminis remplace originum, dont il est synonyme;
en effet, semen ou semina signifie « germe », de là « cause »
et « source, origine, commencement ». Quint., Inst. or.,
2, 20, 6 : initia quaedam ac semina. Tac, Orat., 33 : semina
veteris eloquentiae. Tert. aime à dire modicus pour parvus.
Ce passage a toujours été mal compris, depuis Gelenius,
qui le premier a changé obscurat en obscurant, sous prétexte
que ce sont les rumeurs postérieures qui obscurcissent l'ori-
gine et non inversement. Sur les autres conjectures, voy. la
note d'Oehler et Hartel, Pair. Stud., II, p. 36, note 2.
Remarquons que F et P sont d'accord avec Ad nat. D'après
Oehler, un ms (Erlangensis) a modicum dans VApot. Mais
Tert. a préféré dire la seconde fois modici seminis vitium, ce
qui est plus clair que modicum seminis vitium. Van der Vliet,
p. 21-22, a peut-être raison de proposer dans Ad nat. :
modic{aryum originum vitium. En effet, ce qui est modique,
humble et obscur, ce sont les origines de la renommée.
Le défaut (vitium) inhérent à cette humble origine ou.
180 APPENDICE I
comme Tert. dit dans VApoL, à cette humble semence, con-
siste précisément à être humble ou obscure ; et ce défaut a
pour effet de rendre obscures (obscurat) . les rumeurs qui
suivent la première rumeur et se répandent partout. Il les
rend si obscures qu'on ne songe plus à remonter à l'origine,
pour voir si la première bouche a semé le mensonge ou la
vérité. — On a eu tort de croire que, pour Tert., toute fama
est fausse dans son origine et dans son développement et
l'on a cru que vitium désigne la fausseté qui l'entache dès son
origine. Mais, si la fama ne mérite pas créance, c'est unique-
ment parce qu'elle est incertaine {qui sapiens est, non crédit
incerto) : on ne sait pas si elle est vraie ou non. On ne remonte
pas à l'origine des rumeurs, parce qu'elles sont obscures,
et cette obscurité vient de l'humilité, de l'obscurité de leur
origine.
Il ne faut donc rien changer dans le texte de VApol. Dans
Ad nat., il faut lire rumores avec Rigault (comme proditores
pour proditoris, p. 68,24) et probablement modicarum avec
Vander Vliet.
Il est difficile de rendre les métaphores traduces (sarment
qu'on fait passer d'un arbre à un autre pour former une nou-
velle vigne ; au fig., intermédiaire, canal, héritier), seminis,
seminaverunt. On peut traduire : « Ensuite, à mesure que
la renommée se glisse de bouche en bouche, d'oreille en oreille,
comme par autant de canaux (une métaphore remplacée
par une autre), le vice inhérent à l'humble semence (à ses
origines obscures) rend si obscures les rumeurs qui circulent
ensuite, que personne ne songe à se demander si ... ne ... pas ...)>
7,13. ex dispositione divinae naturae, quae ita ordinavit,
ut nihil diu lateat F
Dans P, divinae manque. — Tert. semble faire allusion
à Matth., 10,26 : Nihil enim opertum quod non revelabitur,
et occultum quod non scietur. Marc, 4,22. Luc, 8,17 et 12,2,
Tert. cite ces paroles ailleurs : De paen., 6,10 ; De virg. vel.,
14. — Naturae seul a paru trop général : c'est Dieu qui est
l'auteur de cet ordre. Tert. appelle Dieu, naturae auctor (De
an., 16, p. 322, 3) ; artifex et praeses naturae (Ad nat., 2,4,
CHAP. 7,13 — 8,5-6 181
p. 102,10). — Il en est autrement si le verbe est au passif,
comme Ad nat., 1,7, p. 67,26 : testibus sententiis et proverbiis
vestris ipsaque natura, quae sic ordinata est (se. a Deo), ut
nihil lateat. — Cf. De fuga, 12, p. 487,4 0. : Itaque qui eam
praemio paciscitur, dispositioni divinae adversatur.
8.5. Alii nos, opinor, natura.
Sur alius avec un abl. déterm., voy. Liv., 1, 56, 7 : iuvenis
longe alius ingenio. Sen., Contr., 10 pr. 4 : cum alius animo
esset. Tert., De an., 12, p. 317, 28 : non ut substantia alium
(animum). Thés. l. L, I, 1651, 37.
8.6. Sed ignorantibus subicitur et imponitur. Nihil enim,
etc.
Les traducteurs français se sont trompés sur le "sens de
cette phrase. M. de Genoude traduit : « Mais, nous dira-t-on,
on trompe, on surprend des ignorants ! Comme s'ils pou-
vaient ignorer les bruits qui courent à ce sujet, comme s'ils
n'avaient pas le plus grand intérêt à les approfondir et à
s'assurer de la vérité I » — Avec Rigaltius, on prend subicitur
et imponitur pour deux passifs impersonnels. En effet, im-
ponere alicui, en imposer à qqn, tromper qqn, est classique,
mais subicere ne se construit pas ainsi et n'a pas ce sens. Il
signifie : « glisser furtivement, supposer, substituer fraudu-
leusement ». Dans Ad nat., 1,7, p. 70,9, Tert. avait dit : Prius
fallaciae negotium perpetratur: ignaris et dapes et nuptiae subi-
ciuntur. On commence par une supercherie : sans que les
néophytes s'en doutent, on les trompe sur la nature des mets
(criminels) et des unions (incestueuses). De même ici, le sujet
ne peut être que id, res (voy. la suite : Nihil enim taie) : « Aux
néophytes ignorants, la chose est présentée d'une manière
frauduleuse et imposée », On les force de participer à ce
repas, à cette orgie, dont on leur cache la nature. — La réponse
commence par Nihil enim taie. Elle est ironique. « En effet,
ils ne savaient pas qu'on affirmait pareille chose des chré-
tiens », c'est-à-dire : ils savaient évidemment, comme tout
le monde, ce qu'on disait des chrétiens : voulant être initiés,
182 APPENDICE I
ils devaient naturellement y porter leur attention et s'en
assurer avec soin.
8.7. Atquin volentibus initiari moris est, opiner, prius
patrem illum sacrorum adiré, quae praeparanda sint
discribere.
C'est la lecture de P. Discribere n'est qu'une variante de
describere. De la Barre a ciescribere et Modius ne donne aucune
variante de F. Mais describere est sujet à caution.
Celui qui veut se faire initier aux mystères, dit Tert., va
trouver le pater sacrorum et fixe (avec lui) les préparatifs à
faire. Tert. présente le «père ou maître des mystères» comme
un personnage bien connu (illum) : c'est lui qui instruit le
néophyte des préparatifs à faire. Le néophyte ne fait que
l'écouter. Ad nat., 1,7, p. 69, 29 : Sine dubio etiam initiari vo-
lentibus mos est prius ad magistrum sacrorum vel patrem adiré.
Tum ille dicet, etc. Apul., Met., 11, 22-23 : Indidem mihi prae-
dicat {sacerdos praecipuus) quae forent ad usum teletae neces-
sario praeparanda. Et protinus naviter et aliquanto liberalius
partim ipse partim per socios coemenda procuro.
Ici describere doit avoir le même sujet que adiré, c'est-à-dire
le néophyte. Or, on vient de voir que le néophyte ne peut être
sujet de describere, parce qu'il ne fait que recevoir les instruc-
tions. Ce verbe, qui ne donne d'ailleurs pas une clausule or-
dinaire, paraît donc corrompu {^).
8.8. Quid si venire noluerint vel nullae fuerint ? Quid
denique sine pignore singulares Christiani ? F
Dans P, venire manque et il peut manquer après la phrase :
Ante omnia cum niatre et sorore tua venire debebis. Tout le
passage est rempli d'ellipses et venire est probablement une
glose complétive.
(') Pour ces raisons, Lôfstedt, p. 8i, propose de corriger discri-
bere- en disccrc, qui convient au sens et donne une fin métrique
(double crétique).
CHAP. 8,7-8—9,2-4 183
Au lieu de quid (*F), P a quod, pour quoi (voy. ci-dessus,
p. 113). Sur sine pignore, voy. ci-dessus, p. 69. (^).
9,2. usque ad proconsulatum Tiberii *FP
On ne connaît aucun proconsul d'Afrique du nom de Tibe-
rius. L'empereur Tibère ne fut jamais proconsul d'Afrique.
Jos. Scaliger (Epist. 66 ad Casaub. Cf. Casaub. ad Script.
Hist. Aug., p. 8 s.) explique : jusqu'à un proconsul (du règne)
de Tibère et il lit: usque ad proconsalem Tiberii. La correction
serait inutile, car usque ad proconsulatum Tiberii « jusqu'à
un proconsulat du règne de Tibère », aurait le même sens.
Mais Tertullien ajoute que la milice, les soldats que comman-
dait son père attestent le fait. Il s'agit donc d'un proconsul
du IJe siècle, dont le nom n'est pas autrement connu ou a
été altéré dans tous les mss.
9,2. teste militia patris nostri F ; teste militia patriae
nostrae P
S. Jérôme, De viris ill., 53, dit de Tertullien : pâtre centu-
rione proconsulari. S. Jérôme a probablement puisé son ren-
seignement dans ce passage de l'Apologétique. S'il en est
ainsi, il faut admettre qu'il lisait dans son exemplaire de
Tertullien : patris nostri, et non : patriae nostrae.
9,4. Cum propriis filiis Saturnus non pepercit, extraneis
(') Lôfstedt, p. 8t, cite d'autres exemples de cette tournure,
r.ucr., 5,841 : /nitia sine ore ctiaiii, sine voltit caeca reperta. Senec,
Quacst. nat., 6, 7, 5 : abstrasa enini ci sine posscssore déserta libcrius
undis vacant. De tranq. an., 12 : ne aut labor irritas sit sine cifcctii
(lut effectus labore indignas (Madvig propose de supprimer irritas
el Gertz, sine effectii). Petron., Sat., 137,10 : inanes scilicct ac sine
iiiedulla venlosas naces, Fortunat., Vita Palerni, 11,34 : offert et
ancillam saain sine officio lingaae matant. 11 renvoie à ses observa-
tions dans Berl. pliil. Woch.j 191 1, p. 1423, et à Vahlen^ Praef. de
l'édition des Dialogues de Sénèque par Koch.
184 APPENDICE I
utique non parcendo persévérasse!, sed quos quidem ipsi
parentes offerebant F
P n'a pas sed. Le sens est : sed {eis non parcendo perseve-
rasset), quos quidem... « oui, mais c'étaient des enfants que
leurs propres parents offraient à Saturne ». — Sed et tamen
sont ainsi employés avec l'ellipse du verbe de la principale,
pour introduire une correction. Tert. tient à insister sur ce
point : Saturne, qui dévorait ses enfants, aurait naturelle-
ment continué à ne pas épargner les enfants des autres, mais
— chose plus grave — c'étaient leurs propres parents qui les
lui offraient. Et il ajoute que ces parents ne commettaient
pas seulement un homicide, mais (ce qui est un plus grand
crime) un infanticide. Cf. 23, 13 : cum plandu omnium, sed
non Christianorum. 34,1 (dans P) : sed more communi. Scorp.,
11, p. 170, 12 : perdet autem eam (se. animam suam) ad prae-
sens, qui confessus occiditur, sed (se. perdet) et inventurus eam
in vitam aeternam. De an., 48, p. 380,1 : Daniel rursus ... aruit
victu, sed (se. aruit) ut Deum inliceret humiliationis officiis.
De pud., 7, p. 232, 15 : cum dico Christiarium iam peccatorem
in parabola utraque portendi, non tamen (se. dico) ideo eum
adfirmandum qui de facinore moechiae et fornicationis restitui
per paenitentiam possit. Ad nat., 1,4, p. 64,9 : confessus est
enim (Apollo) se deum non esse, sed (se. confessus est) eum
quoque sapientissimum adfirmans qui deos abnuebat. Voy.
Hartel, Patr. Stud., III, p. 5.
9,5. Maior aetas apud Galles Mercurio prosecabatur. F
P a le présent : prosecatur. Le culte barbare des Druides,
avec ses sacrifices humains à Mercure (Tentâtes), avait été
défendu aux citoyens par Auguste et aboli par Claude. Suet.,
Claud., 25. Plin., Hist. nat., 30,1, 4. Tert. a donc très pro-
bablement écrit prosecabatur. Minucius Félix, 30,4, met aussi
le passé : et Mercurio Gallis (se. ritus fuit) humanas vel inliu-
manas victimas caedere. Dans la phrase suivante, Tert. parle
aussi du passé (fabulas Tauricas).
CHAP. 9,5-10 185
9,6. Quot vultis ... ex ipsis etiam vobis... apud conscien-
tias pulsem ?
Pulsare signifie « heurter, frapper à coups redoublés » et
l'on dit : pulsare ianuam, fores, ostium. On a cru que c'est
à cette locution que Tert. emprunte sa métaphore et l'on
a cité De test, an., 1, p. 134, 20 : tanc philosophi duri, cum veri-
tatis fores puisant jï)t praescr.,i8: pulsate et aperietur. C'est une
erreur. Pulsare dans la langue du droit veut dire« accuser ».
Les exemples sont nombreux. Voy. Heumann-Seckel, Quellen
des roem. Rechts, s. v. Kalb, Roem. Juristen, p. 128. — Apud
conscientias peut signifier in conscientiis, comme le veut le
Thés. l. /,, II, 339, 39 ; mais nous croyons qu'il veut dire
plutôt : coram conscientiis. On dit accusare apud iudicem,
accuser devant le juge. Thés. L /., II, 341, 52. H. Goelzer,
Le latin de S. Avit, p. 581.
9,10. Bellonae secatos Br ; Bellonae secator F; Bellonae
sacratus P
Rigaltius corrigeait sacratus en sacrâtes. Secator est une
faute d'impression. Il faut maintenir secatos que donne la
copie de Brème et que Junius approuvait. C'est la lectio dif-
ficilior ; elle se comprend facilement et elle est dans le goût
de Tert. La forme secatus pour sectus ne fait aucune diffi-
culté. Voy. Neue-Wagner, Formenlelire, II F, 530.
Bellonae secati est un terme de mépris pour désigner les
prêtres de Bellone (bellonarii, fanatici, turba entheata Bello-
nae, comme dit Martial, 12, 57, 11), qui se tailladaient les
bras, « les cuisses », dit TertuUien avec la même note sati-
rique. Le mot secare est généralement employé pour désigner
ce rite. Tibulle, 1, 6, 43 :
Ipsa bipenne suos caedit violenta lacertos
Sanguineque elTuso spargit inulla deam.
Lucain, Phars., 1,565 : quos sectis Bellona lacertis Saeva
movet. Sen., De superst., p. 34 (ap. Aug., De civ. Dei, 6, 10):
nie, inquit (Seneca), viriles sibi partes amputât (ce sont les
186 APPENDICE I
Gain de Cybèle), ille lacertos secat (ce sont les bellonarii).
Sen., De vita beata, 26,8 : Cum aliquis secandi lacertos suos
artifex brachia atque humeros suspensa manu cruentat.
luv., 6, 105 : et secto requiem sperare lacerto. Lamprid., Vita
Comm., 9 : Bellonae servientes vere exsecare brachiiim prae-
cepit studio crudelitatis. Minucius Félix, 22,9 (24,4) : qui
sanguine suo libat et vulneribus suis supplicat. 30,5 : et Bello-
nam sacrum suum haustu cruoris imbuere, Lact., Inst. div.,
1,21, 16 : alla (sacra) Virtutis, quam eandem Bellonam vocant,
in quibus ipsi sacerdotes non alieno, sed suo cruore sacri-
ficant, Sectisque namque humeris ... currunt, ecferuntur,
insaniunt.
Tous ces auteurs disent que les bellonarii se tailladent
les bras ou les épaules; c'est à dessein que Tert, seul remplace
les bras par la cuisse. Les prêtres de Bellone, que Lampride
appelle Bellonae servientes, peuvent bien être appelés Bellonae
secati, toujours avec le même mépris « les entaillés de Bellone »,
les fidèles de Bellone aux cuisses tailladées, meurtries. S.
Augustin, De civ. Dei, 7,26, appelle de même abs'cisi (castrati)
les Galles de Cybèle : quod de abscisorum consecratione Mater
deum coli meruit.
Et usai datas signal peut être maintenu aussi. D'abord
esui ne se trouve pas dans P qui a sui, mutilé pour esui (Ri-
gault) ou usai. Cf. De resurr., 27, p. 65,1 : caro salita et iisui
reposito. Le sang versé est offert à Bellone (on en aspergeait
sa statue, dit Tibulle. Cf. Min. Félix, 22,9. Lact., Div. inst.,
I, 21, 16). Seuls, Tert. et Min. Félix (30,5) disent qu'il servait
aussi dans l'initiation. Tert. emploie signare et consignare
(littlt. mettre un sceau) pour désigner une cérémonie, une
consécration qui achève l'initiation. Apol. 8,4. Adv. Val., 1,
p. 176,8 : diutius initiant quam consignant. Cf. De Corona,
II. Adv. Marc, 1, 28, p. 330, 9. Adv. lud., 8. L'initié buvait
le sang (haustu humani cruoris, dit Min. Fel.) tiré de la cuisse
ouverte : on le recueillait dans la main et on le lui donnait
à boire, dit Tertullien. Il n'est nulle part question de sang
donné à la foule, comme le dit Procksch, ni de fidèles autres
que les prêtres.
Traduisons littéralement : « Aujourd'hui même, chez vous,
c'est le sang tiré d'une cuisse ouverte, recueilli dans la main.
CHAP. 9,11-17 — 10,2 187
et donné à boire, qui initie (ou qui consacre) les (serviteurs)
tailladés de Bellone », c'est-à-dire : « qu'on le leur donne à
boire pour les initier ». — Voyez les textes dans Marquardt,
Le Culte, I, 94. Roscher, Lexicon der Myth., s. v. Bellona
(Procl<sch). Pauly-Wissowa-Kroll, Realencyclopadie, s. v.
(Aust).
9,11. cervtis ille gladiatoris sanguinem iactavit F ; cervus
ille in gladiatoris sanguine iacuit. P
Junius imprime : Sanguine iactavit] ms. Sanguinem iactavit.
Or, de la Barre a : in gladiatoris sanguine iactavit. D'après
Junius, F aurait donc : in gladiatoris sanguinem iactavit, ce
qui est incorrect. Peut-être faut-il lire : gladiatoris sangui-
nem iactavit, il a remué, jeté çà et là le sang d'un gladiateur,
il s'y est roulé. Ou bien : in gladiatoris sanguine se iactavit.
Cf. Ovid., Met., 10, 721 : inque suo iactantem sangwne corpus.
9,17. et semel error impegerit F ; et simul errer impe-
gerit P
La lecture de F peut se défendre : impegerit, subj. marquant
la supposition : « supposez que » ou « si ». Hor., Sat., 2, 7, 32 :
iusserit ad se Maecenas ... venire. luv., 3,78 : in caelum, ius-
seris, ibit. Mais il nous paraît plus simple d'admettre que
Tert. a écrit simul (= simul ac, cf. 1, 6).
10,2. Deos vestros colère desivimus, ex quo illos non esse
cognovimus. F
C'est la lecture de F donnée par le Cod. Bremensis. Junius
a imprimé fautivement desinimus et cognorimus. P a
desinimus et cognoscimus. Ces fautes d'impression sont
accompagnées d'une autre qui devait faire croire que les mots
ex quo illos non esse manquent dans F,
Junius a imprimé :
Colère desinimus] desinimus et statim cognorimus.
Il fallait imprimer :
Colère desinimus] desivimus, et statim, cognovimus.
188 APPENDICE I
C'est-à-dire : F a desivimus au lieu de desinimus (^) et immé-
diatement après cognovimus. Les mots et statim annoncent
une autre variante de F {^). Modius ne dit donc rien des
mots placés entre les deux verbes.
10.5. Nunc ergo per singulos decurram, tôt ac tantes,
novos veteres, etc.
Tert. emploie souvent tanti dans le sens de tôt et quanti
dans le sens de quoi. Voy. 1,6 ; 40,2 ; 50, 14. Ici, tanti est
joint à toty et il en est synonyme. Pour faire ressortir l'idée
de nombre, Tert. dit tôt ac tanti « en si grand nombre ». En
effet, l'idée de grandeur (« si grands ») ne convient pas ici,
attendu qu'il s'agit de tous les dieux païens, petits et grands.
Voici un autre exemple de tôt ac tanti. De anima, 6, p. 307,5 :
quid autem facient tôt ac tantae animae rupicum et barbarorum,
quibus alimenta sapientiae desunt ... ?
10.6. Ut conligam in compendium
On ponctue toujours mal ce passage. On n'a pas songé
qu'avec ce genre de formules, il y a souvent ellipse de la pro-
position : « je dirai que » (^). Il faut donc comprendre : « Pour
résumer, (je dirai qu') avant Saturne ... ». De pat, 5, p. 9, 11 :
ut compendio dictum sit, omne peccatum impatientiae adscri-
bendum est. Parfois la prop. princ, est exprimée. Adv. Marc,
2, 27, p. 372, 21 : lam nunc, ut et cetera compendio absol-
vam, ... proponam. Voy. encore Ad nat., 1, 13, p. 84,6 : Quare,
ut ab excessu revertar (pour laisser là cette digression), agnos-
cite vicinitatem. Cf. P. Henen, dans le Musée Belge, vol. 14,
1910, p. 220.
(^) Dans Junius desinimus (donné comme une variante de desi-
nimus /) et cognorimus sont évidemment des fautes d'impression.
Ici encore, le Cod. Bremensis est plus correct.
(*) C'est ce que Lôfstedt a reconnu le premier, p, 82. Ailleurs
(12, 4 et 13, 9), Modius introduit une nouvelle leçon par et mox.
(^) Ce genre d'ellipses est fréquent dans la prose classique. Voy.
Kûhner, Ausf. Gramm., 11, 2^, p. 233 (§ 186, 2, rem. 2).
CHAP. 10,5-10 189
10,7. Saturnum itaque, quantum litterae, neque Diodorus
Graecus aut Thallus, neque Cassius Severus aut Cornélius
Nepos, neque ullus commentator eiusmodi antiquitatum
aliud quam hominem promulgaverunt ; si quantum
rerum argumenta, nusquam invenio fideliora, quam apud
ipsam Italiam ... F
PM ont : si quantum litterae docent, ... si quantum rerum
argumenta. — L'ellipse d'un verbe déclaratif {docent) est
familière à Tertullien. Voy. Hoppe, Syntax, p. 145-146. On
trouvera de mêrrie deux ellipses avec quantum au ch. 12, 1-2.
De orat., 3, p. 182, 26 : Hoc quantum ad gloriam Dei, se.
attinet. Hoppe, p. 146, n. 1. — Havercamp dit déjà : Docent
abest a coll. Mod. nec scripsit forte auctor. On comprend aussi
qu'un lecteur l'ait ajouté dans la tradition commune Q).
F n'a pas si devant quantum litterae ; en effet, De la Barre
ne l'a pas et Modius dit seulement : abest Tè docent. On peut
s'en passer. Celui qui a ajouté docent aura ajouté si, pour
l'opposer à si qui suit (eî (jiév... e^ oé;.
Avec si, on sous-entend l'idée de requirimus, recogitamus:
l'ellipse de si est plus hardie, mais n'étonne pas dans Ter-
tullien (2).
10,10. quorum genus in incerto est
P a : quorum genus incertum est. — Adv. Marc, 1, 9, p.
301, 26 : quod igitur quaeritur, quamdiu ignoratur, in incerto
est, quamdiu quaeritur, et potest non esse, quamdiu in incerto
est. Sali., lug., 46,8 : ut ... in incerto haberetur. Tacite n'em-
(^) Au ch. 40, 2 : si famés, si lues statim « Christianos ad Uonem ! •>->
inclamant (F ; adclamatur P), on peut conjecturer que inclamaiit
a été ajouté dans F et adclamatur dans P.
{}) Lôfstedt, p. 89, cite Saint Avit, Homil., 7 (éd. Peiper,
p. 117, 10) : si ad saccularem sapientiam, ecce lacrimas dignas rege
viundano. Et, à titre de comparaison, Plin., Epist., 5, 6 : similiter
nos, lit parva viagnis (se, confcravi).
190 APPENDICE 1
ploie pas moins de neuf fois la locution in incerto est. Voy.
Gerber et Greef, Lexicon Taciteum, p. 614. Les locutions
formées de in et d'un adj. neutre sont familières à Tertullien.
Voy. 23,4. La lecture de P gâte la clausule (un crétique avec
la première longue dissoute et un trochée).
10,10. luctu publiée hurnatos F
Il s'agit des empereurs consacrés (divi), qui ne sont jamais
inhumés, mais brûlés, ce que Tert. n'ignorait pas. Mais humare
signifie parfois, en général, « donner la sépulture» (9â7:Tet.v).
Corn, Nepos, Eum., 13: Militari honestoque funere humaverunt,
ossaque eius in Cappadociam deportanda curarunt.
P n'a pas hurnatos ; ce mot a pu être omis à cause de mor-
tuos qui suit et qui a la même terminaison.
11,1. Sed quoniam F ; et quoniam P
Dans PM, et est uni au dernier mot du ch. 10 : paret. Ter-
tullien aime à dire sed pour passer à une autre idée. Comme
set pour sed est assez fréquent dans les mss (voy. p. 71, ad
5,3), on peut supposer que l'initiale S avait été laissée en
blanc pour être tracée par le rubricator dans l'archétype de
PM.
11,3. Si nemo est (esset P), qui deos faceret F
P a : Si nemo esset. Tert. ne veut pas dire : « S'il n'existait
personne (maintenant) qui pût faire des dieux «, mais : S'il
n'existe personne qui pouvait (alors) faire des dieux ». L'action
de faceret dure dans le passé : c'est pourquoi, Tert. a dû
mettre l'imparf. du subj. en dépit de la règle de concordance.
Qui deos fecerit signifierait : qui ait fait les dieux (en une
fois). Il dira de même au § 4 : Primo indignum est, ut alicuius
opéra indigeret. Dans un cas semblable, Cicéron a dit : Cuius
rei (se. amoris patriae) est tanta vis ...ut Ithacam illam ...
sapientissimus vir immortalitoti anteponeret (De orat., 1, 44,
196). Voyez Riemann-Goelzer, Gramm. comp., II, p. 732-733.
Hoppe, Syntax, p. 67. Tertullianea, p. 6. En changeant est
en esset, l'interpolateur de P a commis un contresens.
CHAP. 10,10—11,1-8 191
11,5. cum omnis rationis gubernaculo F
Cf. De paen., 1,3: sine gubernaculo rationis.
11.5. Imperfectum non potuit esse, quod perfecit omnia.
FP
Par quod perfecit omnia, on entend ordinairement totum
hoc mundi corpus, l'univers qui a, dès le principe, rempli
toutes ses fonctions d'une manière parfaite (§ 9). Mais ces
mots ne peuvent guère avoir ce sens et, si l'univers a été
créé, on ne peut pas dire de lui qu'il a tout achevé. Pour Ter-
tullien, c'est le Dieu créateur qui a conçu le plan de l'univers
(disposuit) et qui l'a réalisé (perfecit) par l'intermédiaire de
son Verbe. Voy. 17,1 et 21,10-11. Ici, il s'exprime d'une ma-
nière plus générale, parce qu'il veut que son raisonnement
s'applique aux théories de tous les philosophes, soit qu'ils
tiennent le monde pour l'œuvre d'un créateur, soit qu'ils
le tiennent pour incréé, c'est-à-dire, sorti d'une matière éter-
nelle par la loi des nombres ou par le hasard, etc. Le principe,
dit-il, qui a réalisé toutes choses d'une manière parfaite ne
pouvait pas être imparfait ; il devait se suffire à lui-même
et n'avait pas besoin ni de Saturne ni des autres dieux. Dès
le début, il a organisé l'univers à la perfection, d'après des
lois immuables. Voy. le § 9.
11.6. ante illum aliquem principem hominum (hominem
P) F
De corona, 7 : si fuit aliqua Pandora, quam primam ferai-
narum memorat Hesiodus. Plus loin : principem feminam
Evam. De paen., 2,3 : delicta ... a principe generis Adam
auspicata.
11,8 qui primus cerasa Romanis ex Ponto Italiae pro-
mulgavit F.
P a : cerasia ex Ponto — Cf. Ad nat., 2, 16, p. 129, 9 : Cera-
sium Cn. Pompeius de Ponto {primus Itayiiae provolgavit.
Dans Ad nat., Tert. avait attribué l'importation des cerises
192 APPENDICE I
{cerasum ou cerasium) à Pompée. II se corrige ici. Cf. Plin.
Hist. nat., 15, 25 : Cerasi (les cerisiers) ante vidoriam Mi-
thridaticam L. Luculli non fuere in Italia ad urbis annum
DCLXXX ; is primum vexit e Ponto. Sur les erreurs com-
mises par Tert, voy. plus loin, au ch. 46,13. On voit que
Romanis manque dans P comme dans Ad nat., et, à première
vue, ce mot semble faire double emploi avec Italiae. Mais
Romanis est un datif d'avantage, tandis que Italiae est un
locatif, comme Pieriae et Boeotiae, au ch. 21,29. Hoppe,
Syntax, p. 21.
11,12. et quicumque .similes sunt alicuius dei vestri,
quem neminem integrum a crîmine aut vitio probare
poteritis, nisi hominem negaveritis. FP
La fin de ce passage est presque toujours mal comprise.
Il faut suppléer esse et non fuisse. Pour prouver que vos dieux
sont exempts de crimes ou de fautes, vous n'avez qu'un
moyen, c'est de dire : « Ce ne sont pas des hommes 1 Ce sont
des dieux ! Il ne faut pas les juger comme des hommes ! »
C'est ainsi que dans les Grenouilles (v. 634) d'Aristophane,
Xanthias dit de Dionysos, qui va être battu : eficep hh<; yàp
éffTiv, oûx at'çrGr.o-eTau Tert. répond : Atquin, ut homines
illos fuisse non potestisl{possitis P) negare, etiam istae notae
accedunt, quae nec deos postea fados credi permittunt. Vous
dites : Ce ne sont pas des hommes 1 Mais, d'une part, vous
ne pouvez pas nier que vos dieux ont été des hommes (je vous
l'ai prouvé au ch. 10) ; d'autre part, voici de plus des marques,
des caractères qui ne permettent pas de croire qu'ils soient
devenus dieux dans la suite. Si donc ils ont été des hommes
à l'origine et s'ils ne sont pas devenus dieux dans la suite,
vous ne pouvez pas dire : « Ce ne sont pas des hommes 1 »
et votre justification de leurs crimes tombe. C'est un vrai
syllogisme, Voy. la note de Woodham. Non poteritis, nisi
negaveritis. At non potestis negare ; nam, ut non dei fuerunt
ab initio (c. 10), ita ne postea quidem dei fadi sunt. Igitur non
poteritis ...
Les notae humanitatis (cf. 13,6 : nam hae sunt notae capti-
vitatis), ce sont les crimes et les infamies des dieux, que Tert.
CHAP. 11,12-15 193
vient d'énumérer. Il va prouver ce qu'il vient d'affirmer par
un argument ad hominem, il fait appel aux juges : 5/ enim ...
Si le Dieu suprême conférait la divinité à de pareils criminels,
vous ne condamneriez pas les hommes qui leur ressemblent !
— Il faut donc construire : Ut non potestis, ... (ita) accédant F.
Dans P, potestis est devenu possitis, par une erreur du scribe
(ou du remanieur), qui a pris ut dans le sens final ou consécutif
(« pour que » ou « de telle sorte que »), ou par une simple
faute de transcription. C'est un contresens manifeste et into-
lérable.
11.14. Suggillatio est in caelum (in caelo P) vestra iusti-
tia F
Le sens est clair : le Dieu suprême, suivant vous, s'est
associé des dieux qui sont de vrais criminels. Or, vous, juges,
vous condamnez les criminels. Votre justice est donc un ou-
trage au ciel 1 Au lieu de condamner les criminels, faites-en
plutôt des dieux ! La grammaire exige donc in caelum ; mais
Tert. met assez souvent l'abl. au lieu de l'ace. Cf. 21,8 : in
auro (FP) conversum Danaes. 12,5 : in insulis{ P; in insulas
F) relegamm. 33,1 : de religione atque pietate Christiana in
imperatore P {in imperatorem F). Voy. Hoppe, Syn/ax, p. 20-21.
L'abl. est la lectio difficilior. Il faut remarquer cependant
que m final se perd facilement : il suffit que le copiste ne voie
pas ou qu'il oublie le signe de l'abréviation. — Sur suggillo
et suggillatio, très fréquents dans Tert., voy. l'index d'Oehler.
11.15. Quot tamen pptiores viros apud inferos reliquistis :
aliquem de sapientia Socratem, etc.
On traduit souvent : « un Socrate quant à la sagesse » ou
« un Socrate par la sagesse ». On ne songe pas qu'il s'agit de
Socrate lui-même. On peut dire que Domitien était un petit
Néron par la cruauté (ch. 5, 4), mais non que Socrate était
un Socrate par la sagesse. Les compl. de sapientia, de iustitia,
de militia, etc., dépendent évidemment de potiorés «un Socrate,
(supérieur à vos dieux) par la sagesse » etc.
13
194 APPENDICE i
12.1. Cesso iam de istis *FM ; cesso iam de isto P
Barraeus a : Cesso iam de istis (se. deis loqui), comme M.
Modius ne relève pas de variante dans F. Isti (dei) est égale-
ment sujet de quid non sint et de quid sint, qui suivent. De
istis est donc préférable à de isto.
12.2. nihil amplius deprehendo F ; nihil aliud reprehendo
P
P a : aliud. — Cf. 19, 4 : retrossiores deprehenduntur *F ;
retrosiores reprehenduntur P. Ad nat., 2, 4, p. 100, 19 : quod
si nomen istud proprium divinitatis ... in illo deo reprehensum
(deprehensum corr. Goth.). Adv. Marc, 5, 12, p. 616, 8 : qui
in carne fuerint reprehensi a Deo hic M (yulgo deprehensi). —
Il faut admettre ou bien que Tert. donne parfois à reprehendo
le sens de deprehendo « prendre sur le fait, trouver », ou bien,
ce qui paraît plus probable, qu'il y a erreur de transcription.
Dans F, reprehendo pour deprehendo n'est pas attesté : dans
l'un des deux passages, Modius a noté formellement : depre-
hendo ; dans l'autre, il ne dit rien, et de la Barre a deprehen-
duntur. Cf. Van der Vliet, p. 28.
12,6. qui Senecam aliquem pluribus et amarioribus de
vestra superstitione peroraiitem probetis (reprehen-
dlstis PM). F
TertuUien met énergiquement les païens en contradiction
avec eux-mêmes : ils frémissent, ils écument de colère, quand
ils entendent les chrétiens dire que les dieux ne sont qu'une
matière inerte, et ils applaudissent un Sénèque, quand il
attaque avec violence les superstitions païennes ! C'est une
allusion au De superstitione de Sénèque. Au ch. 46,4, Tert.
dit la même chose des philosophes en général : Quin immo
et deos vestros palam destruunt et superstitiones publicas com-
mentariis quoque accusant laudantibus vobis ! Ces derniers
mots, laudantibus vobis, expriment la même idée que probetis.
Reprehendistis est une correction d'un lecteur distrait : elle
ne convient pas au sens de la phrase et elle est incompatible
CHAP. 12,1-7-13,1 195
avec le ch. 46,4. Il faudrait au moins lire : (non} reprehen-
distis, mais ce serait moins expressif que probetis. — Sur
reprehendistis = deprehendistis (crétique et trochée), voy. 12,2.
12,7. et imagines frigidas, mortuorum vestrorum (suo-
rum P) simillimas.F
Nous n'adorons pas les statues et les images glacées, sem-
blables à vos morts, qu'elles représentent. Ces morts des païens
sont leurs dieux, qui ne sont que des morts divinisés, comme
TertuUien vient de le montrer dans le ch. 10-11. Cf. § 1 :
nomina ... quorundam veterum mortuorum. 11,4: et quidem
mortui ... qui mortui erat operam desideratums. 21,31 : sub
nominibus et imaginibus mortuorum. Cf. 28,3; 29,1 ; 30,1. Ici,
mortuorum vestrorum = deorum vestrorum. D'autre part, mor-
tuorum suorum présente un sens très convenable : les statues
glacées sont semblables à leurs morts, aux morts qu'elles
représentent. TertuUien peut avoir écrit l'un et l'autre, mais
mortuorum suorum paraît mieux convenir au contexte (cf.
13,7); c'est aussi la lectio difficilior.
12,7. Quod non est, nihil ab eo patitur, qui est. F.
P a : Quod non est, nihil ab ullo patitur, quia non est. C'est
bien l'idée de TertuUien ; ce qui n'existe pas ne peut recevoir
d'injure de personne. Ad nat., 1, 10, p. 75, 8 : Quod omnino est,
id contemni potest ; quod nihil est, nihil patitur. Igiiur quibus
est, ab eis patiatur necesse est. Les païens méprisent les dieux
auxquels ils croient. Les chrétiens ne les méprisent pas, parce
qu'ils savent qu'ils n'existent pas : nos enim contemptores
deorum haberi nulla ratio es, quia nemo contemnit, quod sciât
omnino non esse (Ib., 1. 4). Tert. exprime ici brièvement ce
qu'il avait développé dans Ad nationes. — F n'a pas de sens,
13,1. ut (qui P), quos praesumitis esse, neglegatis (negle-
gitis P), quos timetis, destruatis (destruitis P), quos
etiam vindicatis inludatis (inluditis). F
Modius ne donne pas inludatis, parce qu'il n'a pas transcrit
la phrase jusque-là : il s'est arrêté à destruatis, sans doute
196 APPENDICE î
par inadvertance. Il est probable que F avait aussi inludatis ;
s'il avait eu inluditis, comme Barraeus, il faudrait le corriger.
Dans P, ut est remplacé par le relatif, qui peut être suivi de
l'indicatif, bien qu'il ait un sens causal. Hoppe, Syntax, p. 74.
P donne une clausule fréquente (double crétique) ; F donne
un spondée et un trochée (au lieu d'un ditrochée).
13,2. Praelatio alterius sine alterius contumelia non
potest esse. F
P a : non potest procedere. Cf. Ad nat., 1, 10, p. 75, 13 :
praelatio alterius sine alterius contumelia non potest. Ici,
potest est employé absolument, comme l'a déjà vu Goth, et
comme Hartel l'a montré dans ses Patrist. Stud., II, p. 46, 1.
Potest ayant pour sujet un nom de personne signifie valet ;
avec un nom de chose comme sujet, il signifie potest esse.
De idol., 10, p. 40, 16 : quomodo repudiamus saecularia studia,
sine qui bus divina non possunt {= esse non possunt)? Adv.
Marc, 1,25, p. 326, 16 : Non poterit ea bonitas (se. esse) sine
suis dotibus. De test, an., 5, p. 141,5 : sine quibus etiam hodie
beatior et locupletior et prudentior sermo non potest. De bapt.,
13, p. 212,29 : vestimentum quodammodo fidei, quae rétro erat
nuda nec potest iam sine sua lege. De pud., 5, p. 227, 8 : iam
nec ipsa (idololatria) sine nobis potest. De an., 18, p. 328, 14 :
ut probet alterum sine altero {sensum et intelledum) passe.
De pallio, 6, p. 995, 1 0. ; De resurr., 45, p. 524, 23 ; Adv.
Marc, 4,24, p. 223, 27. Dans plusieurs passages, des mss
où les éditeurs ont ajouté esse ou remplacé potest par une
autre tournure : c'est qu'on n'a pas compris le sens de potest
employé absolument. — On peut croire iqu'ici F a ajouté esse
et que P a ajouté procedere. L'addition différente dans les deux
traditions peut venir des copistes, qui ont inséré des gloses,
ou d'un remanieur. Il faut donc supprimer esse dans F et
procedere dans P. — Remarquons que la clausule sera un
double crétique. La lecture de F donne une clausule fréquente
(un crétique et un trochée) ; celle de P est douteuse.
13,3. Iam (iam ergo P) contemnitis quos reprobatis F.
Tert. emploie iam ergo ou iam seul « à présent » pour mar-
CHAP. 13,2-6 197
quer une conclusion qui se dégage naturellement de ce qui
précède. Voy. iam ergo 23, 8 ; 47,14 ; iam seul 5,1 ; 21,27 ;
48,2 ; 49,5, etc.
Ici, iam « et puis » correspond à primo. Tert. distingue
deux cas : 1° la préférence donnée à un dieu, qui est une
offense indirecte pour les autres ; 2° la réprobation formelle
d'un dieu par un vote du sénat, qui est un outrage direct pour
lui, parce que le status de ce dieu dépend des hommes.
Mais le deuxième point, introduit par iam, est aussi une con-
séquence du premier : puisque la préférence donnée à un
dieu est un outrage pour les autres, il s'en suit qu'on méprise
ceux qu'on réprouve.
Tert. peut donc avoir écrit : iam ou iam ergo.
13,6. Maiestas quaestuaria efficitur : circuit cauponas
religio mendicans ; exigitis mercedem pro solo templi,
pro aditu sacrarii (sacri P). Non licet deos gratis nosse,
vénales sunt. FP
C'est ainsi qu'il faut ponctuer cette phrase. « La majesté
des dieux devient un objet de trafic : la religion fait le tour
des cabarets en mendiant ; vous percevez des droits, tant
pour entrer dans l'enceinte du temple, tant pour avoir accès
au sanctuaire. On ne peut pas connaître les dieux pour rien,
ils sont à vendre ». Le trafic est donc de deux sortes : 1° les
ïsiaci ou prêtres d' Isis et hsGalli ou prêtres de Cybèle portent
leur déesse de rue en rue (vicatim, dit Min. Félix, 22,5 = 24,3 ;
de cabaret en cabaret, dit spirituellement Tert.) et font une
collecte en mendiant {stipem colligere) ; 2° pour avoir accès
au temple d'un dieu de l'Etat, il faut payer un prix perçu
par les publicains. Conclusion : Non licet ... Tertullien parle
dans les §§ 5-6 des publia dei et il ne faut pas oublier que
depuis longtemps (voy. ch. 6,8 et 25,4), Cybèle et Isis avaient
été adoptées par l'Etat romain. Sur les Galli mendiants, voy.
Phèdre, 1, 2, 4-7 ; S. Augustin, De civ. Dei, 7, 26 (à Carthage).
Apulée, Met,, 8, 27-28, met en scène les Isiaques.
13,6. pro aditu sacrarii F ; pro aditu sacri P
Ad nat., 1,10, p. 77,5 : pro aditu sacri. Ulpien distingue entre
198 APPENDICE 1
locus sacer et sacrarium. Dig., 1, 8, 9, 2 : Illud noiandum est
aliud esse sacrum locum, aliud sacrarium. Sacer locus est locus
consecratus, sacrarium est locus, in que sacra reponuntur,
quod etiam in aedificio privato esse potest. Sacrarium désigne
donc un temple, un sanctuaire, et Tert. distingue ici « l'accès
de l'enceinte du temple » (pro solo templi) et « l'accès
de l'intérieur du temple » {pro aditu sacrarii). Le sacrifice
fait à l'intérieur du temple s'appelle penetrale sacrificium.
Festus, p. 250 M, p. 297 Lindsay : Penetrale sacrificium
dicitur, quod interiore parte sacrari conficitur. Au ch. 16,4, Tert.
dit : in sacrario suo, en parlant de la partie secrète du temple
de Jérusalem. On dit : sacrarium Bonae Deae (Cic, Pro Mil.,
31), Fidei, Vestae, etc. Voy. le Dict. de Freund. — Sacrum
désigne un objet du culte ou une cérémonie religieuse ; il
s'emploie surtout au pluriel, sacra, objets du culte ou le culte
lui-même. Sacrum et sacra sont rares pour désigner un lieu
consacré, un sanctuaire. Dig., 48, 13, 11, 1 (Paulus) : Sacrilegi
capite puniuntur. Sunt autem sacrilegi, qui publica sacra
compilaverunt. At qui privata sacra vel aediculas incustoditas
temptaverunt, amplius quam jures, minus quam sacrilegi me-
rentur. Quare quod sacrum quodve admissum in sacrilegii
crimen cadat, diligenter considerandum est.
Il résulte de là que sacrum est beaucoup plus rare que
sacrarii. 11 se peut que Tert. ait écrit sacri dans Ad nat. et
que, dans VApoL, il ait préféré le mot plus ordinaire, sacrarii,
qu'il emploie aussi au ch. 16,4.
13,7. Ut aetas, ut ars, ut negotium mortui fuit, ita deus
est.
Mortui désigne le dieu qui est mort. Ad nat., 1,10, p. 77,14 :
easdem statuts inducitis formas, ut cuique ars aut negotium
aut aetas fuit : senex de Saturno, imberhis de Apolline, virgo
de Diana figuratur et miles in Marte et in Vulcano faber ferri
consecratur. Tert. dit que les dieux, qui ne sont que des morts,
sont représentés, par leurs statues, tels qu'ils étaient vivants,
tout comme les hommes. De spect., 13, p. 15, 22 : dum mortui
et dei unum sunt. Voy. ci-dessus, ch. 12,7.
CHAP. 13,7-9—14,1 199
13,9. inter lunones et Cereres adoratis F ; inter lunones
et Cereres et Dlanas adoratis. P
Vous adorez Larentina, une prostituée, parmi les Junons,
les Cerès et les Dianes ! Tert. clioisit les déesses les plus nobles,
les plus dignes, les plus pures. Diane est à sa place dans cette
énumération. Dans la tradition de Fulda, Dianas est peut-
être tombé par une inadvertance du scribe. Cependant il
n'est pas indispensable. Havercamp dit : Abest a coUatione
Mod. utpote morosa virgo. Sed tamen nec-pudicam Endymionis
somnus facit. Il se peut donc aussi que Dianas soit une glose
insérée dans P.
13,9. de paedagogiis aulicis nescio quem P
F a : de paedagogis, ce qui n'a pas de sens. Voy. ci-dessus,
p. 36. — Le neutre paedagogium « école d'esclaves » est sou-
vent employé pour désigner les esclaves (pueri) qui fréquentent
le paedagogium. Sen., Epist., 123, 7 : omnium paedagogia
oblita fade vehuntur. De vita beata, 17, 2 : quare paedago-
gium pretiosa veste cingitur? De tranq. an., 1,8 : praestringit
animum adparatus alicuius paedagogii. Antinous, dit Tert.,
est un esclave des écoles de la cour impériale.
13,9. synodi deum facitis
F a Cinhothi. P a conservé la bonne leçon : sinhodi. Le
sens est : in deorum synodum (= collegium) coopîatis. Nous
avons vu plus haut : curia deorum (6,8). De spect., 7, p. 8,28 :
illius urbis (se. Romae), in qua daemoniorum (== deorum) con-
ventus consedit. Ibid., 12, p. 15, 11 : omnium deorum templum
est (Capitolium). CIL., III, 1061, à Apulum, en Dacie : I(ovi)
O(ptimo) M(aximo) et consessui deorum dearumque ... Anti-
nous n'a pas seulement été divinisé : on l'a fait entrer dans
le conseil des dieux. En Egypte, il siège avec les dieux égyp-
tiens. Kaibel, Inscr. Gr. Ital., 960-961 : 'Avt'.votj) cruvôpdvw
Twv 8v AtyuTrTO) Oewv.
14,1. Voie et ritus vestros recensere. Non dico quales
sitis in sacrificando, cum enecta et tabidosa quaeque
200 APPENDICE I
(tabidosa et scabiosa quaeque P) mactatis ... : laudo
(laudabo P) magis sapientiam, quod de perdito aliquid
eripite. F
« Je veux considérer aussi vos rites. Je ne dis pas de quelle
avarice vous faites preuve dans vos sacrifices, quand vous
n'immolez que des bêtes à demi mortes et pourries ... : je
loue plutôt le bon sens que vous montrez en sauvant au moins
une partie de ce qui est perdu ».
Voilà le sens de ce paragraphe. A non dico est opposé laudo :
Tert, dit ironiquement qu'il ne veut pas mettre en lumière
la ladrerie des païens envers les dieux, mais qu'il loue plutôt
{magis = potius) leur bon sens (i). De la Barre a laudo et Mo-
dius garde le silence : le présent laudo est naturel après le
présent non dico. La tournure ironique avec laudo revient
au ch; 16,8 : laudo diligentiam. Cf. Juv., 4,18 : consilium
laudo artificis. là., 12,21 : laudo meum civem. — Le futur
laudabo, dans P vient d'un remanieur.
On a fait remarquer que Tertullien ne parle ici des rites
que d'une manière générale et qu'il ne les «passe pas en revue».
De même au ch, 11,11, il avait dit : volo igitur mérita (se.
deorum) recensere, et il n'avait pas non plus énuméré les
« mérites », les flagitia, des dieux ; il s'était borné à les con-
sidérer en général et à les apprécier.
On a beaucoup discuté sur ces deux passages et l'on a
inventé toutes sortes d'explications. On a dit que volo équi-
vaut à velim, ou l'on a proposé de changer volo en nolo (Haver-
camp et Hartel, Pair. Stud., Il, p. 50,\. Zeitschr. /. oest. Gymn.,
1869, p. 366). On n'a pas vu que recensere n'a pas ici son sens
premier et signifie simplement « parcourir ou repasser dans
son esprit » et de là « se rappeler, considérer, examiner ». Ce
qui a trompé, c'est que Tertullien donne pour complément
à recensere un nom plur. de choses qu'on peut énumérer. Mi-
(') Au § 2, Sed cofiversîis ad litteras vestras, vient un autre sujet
et sed sert à passer à ce nouveau sujet : « Mais (laissons ce sujet et)
tournons-nous vers votre littérature ».
CHAP. 14,2 201
nucius Félix, 1,1 : Cogitanti mihi et cum animo meo Odavl
boni et fidelissimi. contubernalis memoriam recensenti. Stat.,
Silv., 5, 3, 20 : At tu, seu ... fulgentesque plagas remmque
elementa recenses ... — Min. Félix, 22,8 (24,3), qui passe les
rites en revue, dit : Quorum ritus si percenseas, ridenda quam
multa, etiam miseranda sunt !
P a un troisième adjectif, scabiosa, que Rigaltius supprime
avec raison. Cet adjectif n'est pas dans Ad nat., 1,10, p. 78,15 :
quod enecta et tabida quaeque mactatis. Il n'a pas son pen-
dant plus loin : cum de opimis (opposé à enecta) et integris
(opposé à tabidosa). Il trouble le parallélisme et n'ajoute rien
à tabidosa, car tabidosa est plus fort que scabiosa. — Cf. De
pud., 14,16 : cadaver ... tabiosum.
14,2. cum filium suum Aeneam, ne interimeretur, rapere
voluisset F ; quod filium suum Aenean paene interfec-
tum ab eodem Diomede rappere vellet P
En disant dans ce qui précède, Venerem humana sagifta
vulneratam, Tert. commet une faute de mémoire. Homère (II.,
5, 336) dit qu'Aphrodite fut blessée à la main par la lance
pointue du fils de Tydée, c'est-à-dire de Diomède. Minucius
Félix, 24 (23), 3, dit : (Homerus) sauciavit Venerem. Tert.
ne nomme pas Diomède et les mots ab eodem Diomede, dans
P, ressemblent à une glose insérée dans le texte : eodem ne
se rapporte à rien de ce qui précède. Le glossateur fait montre
d'érudition, comme au ch. 1,8 ; il veut expliquer humana
sagitta en rappelant que Vénus fut blessée par Diomède.
Tertullien, comme Minucius Félix, expose les fictions d'Ho-
mère, très rapidement, et il évite les noms et les détails.
L'insertion de ab eodem Diomede aura amené les autres
changements dans P.
La clausule rapere voluisset (crétique et trochée) fournit
un exemple du crétique dont les deux longues sont résolues ;
Diomede rapere vellet donnerait trois trochées, avec résolution
de la longue du deuxième.
Dans son chap. 24 (22 dans P, 23 dans Halm et Boenig),
Minucius Félix énumère, comme Tertullien le fait dans son
chap. 14,2-6, les fables inventées par les poètes, M. Heinze
202 APPENDICE I
pense que c'est un des passages les plus instructifs pour éta-
blir la priorité de Tertullien. Nous croyons que c'est un de
ceux qui montrent le mieux comment M. Heinze défigure
les idées de Minucius Félix pour prouver qu'il est un mala-
droit compilateur, chaque fois qu'il se rencontre avec Ter-
tullien.
Le but de Tertullien, dit-il, est clairement indiqué et de
ce but se dégage le principe du choix qu'il a fait parmi les
fables : il veut montrer que les païens eux-mêmes ne res-
pectent pas leurs dieux. Après avoir ënuméré les outrages
qu'ils infligent aux dieux, il se tourne vers la littérature :
Sed conversas ad litteras vestras ..., quanta invenio ludibria !
Et il choisit dans Homère et dans les poètes lyriques et tra-
giques les fables où les dieux sont présentés sous un aspect
ridicule Q).
« Quel est le point de vue de Minucius ? dit M. Heinze.
On est embarrassé de le préciser 1 » — Et il cherche ce point
de vue dans la phrase qui, dans l'édition Halm, suit ce déve-
loppement 1 (2)
(•) S'il s'agissait de Minucius Félix, M. Heinze n'aurait pas
manqué de faire remarquer que Jupiter qui a foudroyé son fils
Esculape et les dieux des poètes dramatiques qui ont causé les mal-
heurs de tant de nobles familles, sont plus odieux que ridicules.
Il aurait dit que l'auteur perd de vue le principe de son choix
(ludibria).
(2) Nous croyons avoir Tprouvé (Musée Belge, lo, 1906, p. 83-
100 = Studia Minuciana, p. 19-36 ; voyez notre édition classique
et l'édit. critique publiée par Teubner) qu'il y a ici une interversion
de deux feuillets dans l'unique ms. M. Heinze n'a tenu aucun
compte de notre article et de nos éditions. En 191 2, W. A. Baeh-
rens a tenté {M. Minucii Felicis Octavius, éd. W. A. Baehrens,
Leyde) de défendre l'ordre suivi dans le ms, mais ses arguments
(Praefatio, p. VI) nous paraissent prouver le contraire de sa thèse.
C. M. Buizer se rallie à notre thèse de la transposition de deux
feuillets ijQuid Minucius Félix in conscribendo dialogo Octavio sibi
proposuerit, Amsterdam, 1915, p. 43-44), mais il n'a pas vu que
Heinze interprète mal tout ce passage de V Octavius.
CHAP. 14,2 203
Or, Minucius indique nettement son point de vue dans sa
première phrase et dans la dernière. Après avoir justifié la
croyance chrétienne en un Dieu unique, créateur de l'univers
et Providence (ch. 17-19), Minucius prouve que la religion
païenne est un tissu de fables invraisemblables et d'erreurs
ridicules (ch. 20-24). Les dieux sont des hommes divinisés
(ch. 20-21). Leurs statues ne sont que matière inerte (ch. 22,
1-7). Leurs rites excitent le rire ou la pitié (ch. 22, 8-10). Leur
culte et leurs mystères sont ridicules ou odieux (ch. 23, 1-4).
Les formes et les attitudes des dieux sont grotesques (ch. 23,
5-7).
Cela prouvé, il se demande pourquoi ces fables et ces erreurs
ont la vie si dure. Ce sont d'abord nos parents qui en sont
cause, car ils nous les inculquent dès notre enfance ; puis
ce sont les poètes, qui revêtent toutes ces fables et ces erreurs
des charmes de leur art. Plus grande est leur autorité, plus
ils ont nui à la vérité. Aussi Platon a-t-il eu raison d'exclure
de sa république Homère, le prince de ces menteurs, tout en
reconnaissant son génie : Has fabulas et errores et ab imperitis
parentibus discimus, et ... carminibus poetarum ... Minucius
n'insiste pas sur l'influence des parents ; mais il s'arrête
longuement aux fictions des poètes. Il en rappelle un certain
nombre (i) ; puis il conclut, au § 8 : His atque fiuiusniGdi
figmentis et mendaciis dulcioribus corrumpuntur ingénia
puerorum et isdem fabulis inhaerentibus adusque summae
aetatisrobur adolescunt et in isdem opinionibus miseri consenes-
cunt ... Il termine par ce trait : cuni sit veritas obvia, sed requi-
(') Minucius Félix, 24(23), i : Hic cnim praeciptius bello Troico
deos vestros, etsi ludos facit, tainen m hominum rébus et actibus mis-
cuit, etc. Il est vrai qu'Homère se joue, se livre aux jeux de l'ima-
gination (car ce ne sont que poétiques mensonges, voy. § 8 : his
atque huiusmodi figmentis et mendaciis') ; mais enfin, il prête aux dieux
un rôle indigne : il les mêle aux choses et aux actes des hommes,
etc. Dans notre édition classique, nous avons donné deux inter-
prétations différentes de ludos facit. Cf. Phèdre, I, Prol., 7 : fictis
iocari nos meminerit fabulis.
204 APPENDICE I
rentibus, alors que la vérité (opposée à mendaciis) s'offre d'elle-
même, mais... à ceux qui la cherchent ! Nous ne la cherchons
pas, aveuglés que nous sommes par l'enseignement de nos pa-
rents et des poètes et nous restons empêtrés dans le mensonge.
Ces idées se suivent et se lient admirablement. Après avoir
méconnu la suite des idées et le but de Minucius Félix, M.
Heinze a beau jeu de critiquer le choix fait parmi les fables
d'Homère et des autres poètes. Il trouve étrange que Minu-
cius ne choisisse dans les poètes que des fables qui mettent
les dieux dans une posture ridicule, grotesque ou odieuse !
Mais Minucius n'a-t-il pas fait de même dans tout ce qui
précède ? Octavius ne veut-il pas montrer, dans toute cette
partie de son discours, que la religion païenne est un tissu
de fables et d'erreurs ridicules, grotesques, odieuses et invrai-
semblables ? Et ce caractère ridicule, grotesque, odieux des
fables divines ne montre-t-il pas que ces fables ne sont que
fictions, erreurs et poétiques mensonges ? Car qui ne voit que
tout cela est invraisemblable chez la divinité ?
Il arrive à Minucius de faire observer que l'histoire de la
foudre de Jupiter forgée par le Cyclope est invraisemblable,
attendu que la foudre a existé avant que Jupiter naquît
en Crète, etc. Cette observation choque M. Heinze. Mais ne
concourt-elle pas au but, qui est de montrer que toutes les
fables des poètes ne sont que mensonge ? Parmi ces fables,
Minucius Félix en a cité de scandaleuses et il se permet de
dire : Quae omnia in hoc prodita, ut vitiis liominum quaedam
audoritas pararetur. M. Heinze trouve que cette réflexion
n'est pas à sa place (^) ! Ses autres critiques sont encore moins
pertinentes.
(') Si nous voulions raisonner contre Tertullien, à la manière
de M. Heinze, nous pourrions demander: Pourquoi, ayant annoncé
les hidibria deorum, mêle-t-il aux fables ridicules, des fables odieu-
ses .'' N'est-ce pas parce qu'il imite Minucius Félix, qui, conformé-
ment à son but, avait choisi des fables ridicules, grotesques ou
odieuses, c'est-à-dire indignes des dieux, et par conséquent invrai-
semblables et mensongères? Mais nous nous gardons de raisonner
de la sorte.
CHAP. 14,3-6 205
"M. Heinze a le tort de ne pas considérer Minucius Félix
en lui-même et il lui endosse continuellement des idées qui
ne sont pas à lui ; puis, il déclare que ces idées ne sont pas
à leur place et que cette maladresse de l'écrivain trahit le
compilateur, qui ne sait pas faire un emploi judicieux de ce
qu'il emprunte !
Minucius a eu le malheur de rencontrer deux hypercritiques:
Aem. Baehrens, qui a maltraité son texte, et R. Heinze, qui
a défiguré ses idées.
14,3. sub commemoratione non ita dilectarum amicarum
(non ita dilectarum iampridem amicarum P). F
Allusion à Homère, 11., 14, 312 et ss. Zeus y parle de ses
amantes d'autrefois : où yàp TcwitoTe |j.' w5s Ôeàç è'poç oùos
yùvauoç ... é8à|j.a(7a-ev. Iampridem, donné par P, exprime
le passé. Mais, dans Ad Nat., 2,10, p. 79, 9, cette idée du passé
manque aussi : aut luxuriantem cum lunone foedissime inducit
commendato libidinis desiderio per commemorationem et enu-
merationem amicarum. Cf. Min. Félix, 22 (23), 4 : et loro Veneris
inledum flagrantius, quam in adultéras soleat, cum lunone
uxore concumbere. — Iampridem semble être une addition
d'un lecteur qui a voulu préciser le temps de dilectarum. La
clausule (crétique et trochée) reste la même.
14,6. Ne (nec P) tragici quidem aut comici parcunt, ut
non aerumnas vel errores domus alicuius dei praefe-
rantur (praefentur P). F
Praeferantur, dans F, n'est sans doute qu'une faute de copie
pour praefarentur, que nous lisons dans le passage parallèle.
Ad nat., 1,10, p. 79, 13 : Et tragici quidem aut comici pe-
percerunt, ut non aerumnas ac poenas dei praefarentur ? Après
un présent, surtout après un présent historique (non parcunt),
Tert. met souvent l'imparf. du subj. Cf. Hoppe, Syntax, p. 67.
Le passage a été presque toujours mal compris. La Cerda
prend alicuius dei pour un génitif complément de domus :
quid dicam de tragicis, quid de comicis, qui vix incipiunt opus
absque praefatu alicuius calamitatis quae deo accidit. Oehler
206 APPENDICE 1
prend praefari dans le sens de audorem esse et tamquam caput ;
alors dei devient sujet : les dieux, par leurs crimes et leurs que-
relles, « préludent » aux malheurs des hommes, en font en
quelque sorte la préface. Mais c'est donner à praefari un sens
bien recherché.
Praefari aliquid, c'est « dire qqch. en guise de préface »,
au début d'un ouvrage. Voy. 4,1. La praefatio d'un auteur
tragique ou comique ne peut être que le prologue (depuis
Euripide), où les origines de l'action sont expliquées. Or,
dans les prologues, on voit souvent que les infortunes (aerum-
nas) ou les égarements (errores) ou les souffrances (poenae)
d'une illustre maison remontent à un dieu [dei, se. esse, gén.
d'appartenance). Le jugement de Paris a pour suite la haine
de Junon contre les Troyens et les malheurs des Atrides ; la
rivalité de Junon est cause des fureurs d'Hercule ; Aphrodite
se venge d'Hippolyte, etc. Pour la comédie, voyez l'Amphi-
tryon.
Grammaticalement dei ne peut être sujet ; car avec non
parco = non abstineo, non omitto, le verbe subordonné doit
avoir le même sujet que le verbe principal. Le contexte montre,
du reste, que les poètes tragiques et comiques sont sujets :
dans V Apologétique, comme dans Ad nationes, Tertullien
énumère les actes ridicules ou indignes que les poètes épiques,
lyriques et dramatiques prêtent aux dieux. Il n'accuse pas
les dieux, mais les poètes. Il est vrai que c'est souvent un
dieu qui joue le personnage du prologue (Apollon dans VAlceste
d'Euripide, Aphrodite dans VHippolyte, Poséidon dans les
Troyennes, Dionysos dans les Bacchantes, Hermès dans V Ion),
de sorte que l'on peut dire que c'est le dieu qui annonce dans
le prologue (praefatur) les malheurs d'une maison. Mais
annoncer les malheurs d'une maison n'est pas une chose
ridicule ni indigne. Ce qui est indigne, c'est de causer ces
malheurs. De même que Tert. vient d'accuser Pindare d'avoir
dit que Jupiter causa le malheur de son fils Esculape, il re-
proche aux poètes dramatiques d'attribuer aux dieux, dans
leurs prologues, les infortunes ou les égarements des hommes.
14,8. Tamen cum paenitet sententiae Athenienses, ut
criminatores Socratis postea efflixerint et imaginem eius
CHAP. 14,8 207
auream in templo conlocarint, rescissa damnatione
testimonium Socrati reddiderunt. F
La lecture de P est différente : Tamen mm paenitentia
sententiae Athenknses, ut criminatores Socratis postea affii-
xerint (affluxerint M) ..., rescissa damnât io testimonium Socrati
reddit. PM.
Voici le passage parallèle de Ad nat., 1,10, p. 79, 19 : Nam
etsi idcirco damnatus est, cum paenituerit Athenienses dam-
nationis, ut criminatores quoque impenderint, restit(uituyr
testimonium Socrati, et possum retorquere probatum esse in illo
(quod} nunc reprobatur in nobis.
L'idée de Tert. est claire : Socrate, dit-il, montrait qu'il
méprisait les dieux en jurant par le chêne, par le bouc et par
le chien. On peut objecter, pour écarter le témoignage de
Socrate contre les dieux, que Socrate fut condamné à cause
de son mépris pour les dieux. Tert. répond : 1) sa condamna-
tion prouve qu'il était dans la vérité, car la vérité a toujours
rencontré la haine ; 2) d'ailleurs, les Athéniens ont réhabilité
sa mémoire et, en le faisant, ils lui ont restitué (restituitur)
le témoignage que leur sentence lui avait enlevé, c'est-à-dire
qu'ils ont donné leur approbation à ses idées sur les dieux
{probatum esse in illo quod ...). Testimonium désigne le témoi-
gnage favorable rendu par celui qui juge, qui fait subir une
épreuve. Voy. 39,4.
Dans PM, on lit : ut criminatores (et non : et criminatores)
et reddit (et non : reddidit).
Dans Ad nat., les mots ut criminatores sont une correction
d'Oehler pour discriminatores (A) ; inpenderint est de Goth.
pour inpenderit (A). Après ces corrections, qui paraissent
s'imposer, le texte de Ad nat. devient irréprochable.
Le texte de F présente la même construction que celui de
Ad nat., mais il n'est pas parfait. L'indicatif avec cum causal
est assez fréquent dans Tert. (Hoppe, Syntax, p. 80. Blokhuis,
p. 19), mais le présent historique, qui se rencontre souvent
après les conjonctions temporelles (Kuhner, Ausf. Gramm.,
II, p. 87), est étrange après une conjonction causale. Il
faut lire probablement avec Ad nat. : cum paenituerit.
Le scribe de P semble avoir trébuché sur le même mot :
^08 APPENDICE 1
il a écrit paenitentia sententiae, ce qui se comprend à la vérité
en soi-même (cf. Quint,, Inst. or., 12, 5, 3 : paenitentia coepti.
9, 2, 60 : paenitentia dicti. Plin., Hist. nat., 17, 12, 19 : pae-
nitentia gestae rei) ; mais, pour obtenir une construction
régulière, il eût fallu changer ut en et {et ... afflixerint, et ...
conlocarint = non modo ... sed etiam). Ut, qui est resté dans P
et dans M, trahit la faute de paenitentia, qui a remplacé pae-
nituerit.
Efflixerint et afflixerint présentent la même image («abattre»)
et conviennent l'un et l'autre ; mais affligere se disait préci-
sément d'une condamnation judiciaire qui « frappe « qqn.
Thés. L t., I, 1236, 35.
La fin de la phrase se rapproche plus du texte de Ad nat.
dans P que dans F. Tert. n'avait pas dit : Athenienses testimo-
nium Socrati restituerunt, mais impersonnellement : resti-
tuitur testimonium Socrati. De même, P dit : rescissa damnatio
■reddit. Il se peut que le scribe, ayant écrit : rescissa dam-
natione, ait changé reddit en reddiderunt.
Mais Tert. modifie souvent la rédaction du traité Ad natio-
nes et il est probable qu'il a écrit ici : rescissa damnatione testi-
monium Socrati reddiderunt, ce qui donne une de ses clausules
favorites (double trochée, précédé d'un crétique) et une
construction plus régulière {afflixerint, conlocarint, reddide-
runt).
Les clausules Socrati reddit (crétique et trochée) et Socrati
reddidit (deux crétiques) sont d'ailleurs aussi très fréquentes.
Cf. Hartel, Pair. Stud., Il, p. 52,2.
14,8. Varro trecentos loves, sive luppiteros dicendum,
sine capitibus inducit.
lupiteros F ; dicendum *F ; lupitros dicendos PM. — Ad
nat., 1,10, p. 79, 24: seu Iuppi(teros d}icendum est, où Ootho-
fredus et Reifferscheid ont mis à tort: Iuppi(teres}. Cf. Hartel,
Pair. Stud., m, 7\.
On retrouve la construction impersonnelle dans De idol.,
50, p. 54, 15 : Quodsi deos dicendum erit, s'il nous faut nommer
les dieux. De pallio, 3 : multa dicendum fuit. Ibid., 4 : Sarda-
napalum tacendum est. De praescr., 23,1 : ad suggillandum
CHAP. 14,8—15,3 209
ignorantiam aliquam apostolorum. Voy. plus loin, ad 21,5.
Cf. Hoppe, Syntax, p. 57,5. Avec l'ellipse du verbe es/, l'at-
traction est plus fréquente : sive luppiteros dicendos. Voy.
Hoppe, Sy/2/ax, p. 143.
La forme plaisante luppiteros est sans doute tirée des
Satires Ménippées de Varron ; en effet, Tertullien appelle
ici Varron « le cynique romain », comme Arnobe, 6, 17, l'ap-
pelle Menippeus. Le point, de départ de la plaisanterie des
« Jupiters sans tête » est évidemment l'idée des Stoïciens,
qui donnaient au monde, c'est-à-dire à leur dieu, la forme
d'une boule. Sen., Epist., 113, 22: 5/ rotundam (figuram)
mis, qualem deo dederint.
Dans VApokol., 8, Sénèque fait aussi allusion au passage
de Varron. Quel dieu faut il faire de Claude ? Un dieu stoïcien?
Stoicus ? quomodo potest rotundus esse, ut ait Varro, sine
capite, sine praeputio ? Est aliquid in illo Stoici dei, iam
video : nec cor nec caput liabet. Varron, voulant faire rire des
300 Jupiters, les avait sans nul doute « mis en scène » sous la
forme d'une sphère, donc sans tête. Le nombre déterminé
(300) est mis pour le nombre indéterminé. On distinguait
une foule de Jupiters: Capitolinus, Latiaris, Feretrius, Creticus,
Dictaeus, etc. Min. Félix, 23 (22), 6 : Ne longius multos loves
obeam, tôt sunt lovis monstra quoi numina. Thebphil., Ad
Autol., 1,10 : 7Lauop.a!. Se crou xàyw txcJo-O!, Zr^veç sûpîo-xovTat..
C'est Havercamp qui a le premier rapproché le passage
de Sénèque.
15,3. Quid quod (*F) imago dei vestri ignominiosissimum
(*F) caput et famosum vestit ... ? Nonne violatur maies-
tas et divinitas constupratur, plaudentibus vobis ? F
Ipsum quod imago dei vestri ignominiosum caput et
famosum vestit ..., nonne violatur maiestas et divinitas
constupratur laudantibus vobis. P
Modius, qui relève deux variantes dans cette phrase, n'en
donne pas pour Quid quod, qu'il lisait dans De la Barre. Nous
avons cru pouvoir conclure que F avait Quid quod, mais il
reste un doute.
14
210 APPENDICE 1
lî y a une gradation du § 2 au § 3 : quid quod et ipsum quod
conviennent donc également. Tert. vient de dire que, dans
les pantomimes, les dieux jouent un rôle indigne. Il ajoute
une circonstance aggravante : c'est que l'acteur, qui prend
la figure d'un dieu, est un être ignominieux et infâme et que,
par ce fait, la majesté divine est violée et souillée, au milieu
des applaudissements 1
Tert. aime la locution ipsum quod (ch. 6, 10), qui rempla-
cerait ici ea ipsa re quod. Il en est de même dans Adv. Prax.,
9, p. 240, 10 : Ipsum, quod Pater et Filius dicuntur, nonne
alius ab alio (alius) est ? De anima, 32, p. 355, 14 : Ipsum
enim quod hominem similem bestiae iudicas, confiteris ani-
mam non eandem similem dicendo, non ipsam.
Avec ipsum quod = eo ipso quod, qui est conforme à l'usage
de Tert., la période n'est pas coupée après repraesentat et le
rapport entre ses deux parties est clairement exprimé.
Avec quid quod, la période est disloquée et l'on attendrait :
Nonne eo violatur ... ? Sans eo, l'interrogation finale (Nonne
violaiur) devient générale et se rapporte aussi bien au rôle
indigne joué par les dieux (§ 2) qu'au fait qu'ils sont figurés
par des infâmes (§ 3). Or, ce n'est pas l'idée que Tert. veut
exprimer. Il est donc probable que quid quod est une inven-
tion de Rhenanus, qui a échappé à Modius.
15,4. Plane religiosiores estis in cavea, ubi super sangui-
nem humanum, super inquinamenta poenarum proinde
saltant dei vestri, argumenta et historias noxiis minis-
trantes, nisi quod et ipsos deos vestros saepe noxii in-
duunt. FP
Adv. nat., 1, 11, p. 80, 5 : Plane religiosiores estis in gla-
diatorum cavea ubi super proinde saltant dei vestri
argumenta et historias nocentibus erogandis, aut in ipsis deis
nocentes puniuntur.
Avec Hartel, Pair. Stud., II, p. 54, note 1, nous conservons
dans Ad nat., proinde {perinde Reiff.) « de même », comme
dans les pantomimes, et aut puniuntur (ut puniantur Reiff.).
CHAP. 15,4 211
Il s'agit de scènes mythologiques qu'on force les condamnés
à mort {noxii ou nocenies) de jouer dans l'amphithéâtre et
qui se terminent par une mort affreuse de ces condamnés :
Hercule périssant dans les flammes, Attis mutilé, Orphée
déchiré par les bêtes. Tert. en cite deux. On en trouvera
d'autres dans Martial {Lib. spect., 5. 7. 8.), qui dit (7, 12) :
in quo, quae fuerat fabula, poena erit.
Dans l'ApoL, comme dans Ad nat., Tert. distingue deux
sortes de représentations :
10 La mythologie ne fournit que les sujets : argumenta et
historias noxiis minisirantes. Les noxii ne jouent pas le rôle
de dieux : ils empruntent l'action à la légende mythologique
et substituent des rôles humains aux rôles divins. On trouvera
un exemple de ce cas dans Apulée, Met., 10, 23 (Pasiphaé,
mentionnée aussi par Martial, Lib. sped., 5).
2° Les noxii prennent la figure des dieux, ils les incarnent
pour ainsi dire (induunt) et ils jouent leur rôle : c'est dans
la personne des dieux {in ipsis deis) qu'ils sont punis.
En d'autres termes, l'acteur joue, par exemple, le rôle
d'un homme qui monte sur le bûcher (comme Hercule) ou
il joue le rôle d'Hercule lui-même montant sur le bûcher.
Van der Vliet, p. 36, propose de lire noxiis (erogandis)
minisirantes dans VApoL, et nocentibus erogandis {minis-
irantes} dans Ad nationes. L'idée est ingénieuse ; mais Tert.
varie souvent l'expression de l'idée d'un ouvrage à l'autre.
Dans Ad nat., argumenta et liistorias sont compléments de
saltant, et nocentibus erogandis (datif) équivaut à ad nocentes
erogandos. Voy. Arnob., Adv, nat., 4, 35, p. 170, 7 : saltatur
Venus ; 1. 9 : saltatur et Magna Mater ; 7, 33, p. 266, 24 : si
Ganymedes fuerit saltatus. — Dans l'un, comme dans l'autre
cas, on peut dire : ubi ... saltant dei vestri, parce que, sous la
figure des noxii, les spectateurs reconnaissent les dieux ;
même quand les noxii ne jouent pas le rôle de dieux et se
bornent à emprunter l'action à une légende divine, on recon-
naît et l'on dit qu'ils jouent la légende du dieu. Voy. Apulée,
/. c.
Le mot liistoriae est employé pour désigner les fables mytho-
logiques, les histoires des dieux. De spect., 10, p. 13, 17 : in
quorum nominibus et imaginibus et historiis fallaciam con-
212 APPENDICE i
secrationis sibi negotiiim aduri constituer unt. Voy. Dombart,
dans VArchiv fur lat. Lex., 3, p. 230.
15,6. Singula ista quaeque adhuc investigare quis possit,
si honorem inquiétant divinitatis, si maiestatis fasti-
gium adsolant (yestigia obsoletant P) F
« Tous ces spectacles et ceux qu'on pourrait trouver encore,
s'ils compromettent l'honneur de la divinité, s'ils jettent bas
le faîte de la majesté divine, tirent leur origine des acteurs
qui les jouent et des spectateurs pour qui ils les jouent ».
Modius ne dit rien du commencement de cette phrase.
Elle est reprise de Ad nat., 1, 10, p. 80, 14, où il faut lire :
Singula ista quàeque adhuc investigare quis possit, si hono-
rem inquiétant divinitatis, si maiestatis fastigium adsolant,
de contemptu utique censentur tam {quam A) eorum qui eius-
modi factitant, quam éorum qui ista suscipiunt. Relit, ponctue
mal et intercale à tort di. Il faut comprendre quaeque == et
quae (cf. P. Henen, Musée Belge, 1910, p. 220) et traduire :
« Toutes ces choses et celles que l'on pourrait trouver ».
Adhuc = insuper, praeterea, comme au ch. 42,1.
Sur si maiestatis fastigium adsolant, voy. Adv. Marc, 2,
27, p. 373, 4 : si enim Deus ... tanta humilitate fastigium maies-
tatis suae stravit. Adsolare « raser jusqu'au sol, jeter bas,
détruire » est employé au propre dans Ad nat., 1, 10, p. 75, 28 :
Saepe censores inconsulto populo (aras} (vel fana, se. Sera-
pidis; deos Reiff. ; aedes Hartel, III, 20) adsolaverunt. Et
au figuré, ibid., p. 80, 16 (ci-dessus) : si maiestatis fastigium
adsolant, etc.
Le Thés. l. l. ne cite aucun exemple d'un autre auteur.
L'expression fastigium maiestatis sternere ou adsolare et le
verbe adsolare lui-même sont donc propres à Tertullien. Le
remanieur de P ne les a pas compris et a remplacé adsolant
par un verbe ordinaire, ce qui l'a amené à changer fastigium
en vestigia Q),
(}) Lôfstedt, q. 88-89, conjecture que le scribe avait écrit ^«//^w
pour fasiigium et que cette erreur a fait ensuite remplacer adsolant
par ohsoletant.
CHAP. 15,6-8—16,1 213
15.7. Certe sacrilegi de vestris semper adprehendun-
tur FP
Il faut traduire sacrilegi par « voleurs de temples publics »,
comme le prouvent les mots qui suivent : spoliarent forsitan
ea et ipsi (Christiani), etc. Voy. 44,2.
15.8. lam quidem intellegi subiacet, veritatis esse cul-
tores qui mendacii non sint, nec errare amplius in eo,
in quo errasse se recognoscendo cessaverint. *F
P a cessaverunt. Nous avons suivi De la Barre, qui a imprimé
cessaverint. Modius ne dit rien, mais la différence a pu lui
échapper. Tertullien met plus d'une fois l'indicatif après avoir
commencé par le subjonctif. Voy. 41,1. Ce phénomène gram-
matical est fréquent dans les prosateurs de l'époque impériale.
Voy. les nombreux exemples réunis par W. A. Baehrèns,
Beitrâge zur latein. Syntax, p. 5\6 et ss,.
16,1. Nam, ut quidam, somniastis caput asininum esse
deum nostrum. F
Il faut sous-entendre : ut quidam {dixit ou dixerunt). Même
ellipse. De cor., 10, p. 442, 10 0. : sicut et quidam. — Dans
P, un correcteur a ajouté et au-dessus de la ligne : et ut quidam.
Il aurait fallu au moins : ut et quidam.
16,1. Hanc Cornélius Tacitus suspicionem huiusmodi
(eiusmodi P) inseruit FP
Oehler propose de lire : eiusmodi dei « d'un pareil dieu ».
Mais huiusmodi exprime sur quoi porte le soupçon : suspi-
cionem capitis asinini a nobis adorati. Tert. ajoute hanc pour
renvoyer à ce qui précède : « ce soupçon d'un culte rendu
à une tête d'âne par les chrétiens, ce soupçon d'un pareil
culte » Q).
(') Min. Félix aime aussi à mettre ensemble deux démonstra-
tifs, 1,5: in illo sermone eius. 2,2: quo in adventu eitts. Voy. notre
Lang2ce et syntaxe de M. F., dans notre édition classique, Partie du
maître, p. 126, § 163 (Bruges, Desçlée, 1909).
214 APPENDICE I
16,2. Is enim, in quarto (in quinta P) Historiarum sua-
rum de bello ludaico (bellum ludaicum P) exorsus ab
origine gentis ... ludaeos refert F
Sur in quarto, voy. ci-dessus, p. 104. — Le remanieur de P
a mis i'acc. bellum ludaicum exorsus, qui est la construction
ordinaire. L'ablatif est la lectio difftcilior. Au lieu de l'ace,
complément direct, Tert. met souvent de avec l'abl. « au
sujet de ». Voy. 22,4 : de operatione eorum exponere. 25,1 :
satis probasse de falsa et vera divinitate. 45,3 : de maleficio ...
interdicere. Ad nat., 1, 11, p. 80, 26 : ubi de bello ludaico
digerit, ab origine gentis exorsus. 1,9, p. 74, 5 : de nostra era-
dicatione neglegitis. 1, 19, p. 92, 1 : philosophi de animarum
reciprocatione et iudicii distributione confirmant. 2,12, p. 120,
12 : de cuius vocabulo daemoniorum vatibus induistis. 2, 14,
p. 125, 5 : de ista quoque specie adiciam. 2, 15, p. 127, 12 :
recenser e etiam de illis. De orat., 8, p. 186, 17 : Abraham
sacrificare de filio iusserat (Deus). Ad uxor., 1,3 : ideo prae-
miserim de libertate vetustatis. Adv. Marc, 5, 11, p. 614, 11 :
praetereo hic et de alla epistula. (Ici, on peut sous-entendre :
loqui). Hartel, Pair. Stud., Il, p. 15, 1 ; îli, p. 31 ; IV, p. 65.
Tertullien avait déjà écrit dans Ad nat. (ci-dessus) : de
bello ludaico digerit, ab origine gentis exorsus. Ici, il a con-
densé la construction en n'employant qu'un seul verbe,
exorsus, dans un sens prégnant : « raconter la guerre des
Juifs en commençant à partir de ... » Le remanieur de P
a méconnu à la fois l'usage grammatical de Tertullien et la
concision un peu obscure de son style.
16,2. etiam de ipsa origine (de ipsa tam origine P) quam
de nomine et religione gentis quae voluit argumentatus F
Modius dit seulement : ms deest xi tam. Il nous paraît
évident qu'il faut lire : et tam de ipsa origine quam. En effet,
etiam n'est pas nécessaire et tam ne peut pas manquer. Le
correcteur de P ayant lu etiam pour et tam, a cru que tam
avait été oublié et il l'a ajouté après de ipsa. Le passage
parallèle de Ad nat., \, \\, p. S\, \ : et tam de ipsa origine
CHAP. 16,2-11 215
quant de nomine regionis ut voluit argumentatus, vient con-
firmer notre conjecture.
16,6. quando materiae qualitas eadem est F.
P a sit, et, en effet, Tertuliien construit toujours quando
« puisque » avec le subjonctif. Hoppe, Syntax, p. 78. Ici, il a
mis aussi le subj, avec dum = cum causal. Hoppe, ib., p. 79.
16.10. Sed et plerique vestrum, adfectatione aliquando
et certa caelestia adorandi, ad solis ortum labra vibratis. F
Certa, qui manque dans P, est une addition de F, Voy.
ci-dessus, p. 68. — Il s'agit des Romains judaïsants, comme
au § suivant. Plerique = multi. Aliquando = aliquoties.
Caelestia adorandi, d'adorer les choses célestes, le ciel. Les
païens disaient que leSjJuifs adoraient le ciel. Juvénal, 14, 96:
Nil praeter nubes et caeli numen adorant. L'imputation n'était
pas nouvelle. Voy. Hécatée d'Abdère, ap. Diod. Sic, 40, p. 5.
Strabon, 16, 35. Celse, apud Orig., c. Cels., 5, 6. Petron., 37.
Voy. Jean Juster, Les Juifs dans l'Empire romain (Paris,
Geuthner, 1914), p. 175, n. 3 ; p. 244, n. 3.
16.11. qui diem Saturni otio et victui décernant, exor-
bitantes et ipsi a ludaico more, quem ignorant. FP
Maranus, dans son édit. de Théophile (voy. Caillau et
Guillon, Collectio selecta SS. Patrum, t. II. Paris et Leipzig,
1829. Milan, 1830), propose de lire : ad ludaicum morem.
Hartel, Patrist. Stud., II, p. 61, conjecture : et ipsi a {sua
ad} ludaicum morem, quem ignorant.
Ils veulent mettre le passage d'accord avec Ad nat., 1,13,
p. 84,3 : quo die ... otium et prandium curetis. Quod quidem
facitis exorbitantes et ipsi a vestris ad aliénas religiones. Ici,
en effet, Tert. avait reproché aux Romains judaïsants de
s'écarter de la religion païenne, comme les chrétiens (et ipsi),
pour adopter une religion étrangère.
Dans le passage de VApoL, Gothofredus proposait, pour la
même raison, de supprimer simplement a devant ludaico
more, qui signifierait alors « déviant (de leur religion) suivant
la coutume juive ».
216 VPPENDICE I
Mais il arrive plus d'une fois que V Apologétique exprime
une autre idée que Ad nationes.
En ce passage, Tertullien fait d'abord remarquer avec
esprit que beaucoup de Romains agissent à peu près comme
les chrétiens. Ceux-ci fêtent le dimanche, ceux-là fêtent le
samedi avec les Juifs: ils sont «voisins «. Puis il ajoute, en
passant, une malicieuse critique à l'adresse de ces judaïsants :
ils ne savent pas même observer exactement la coutume
juive, ils l'ignorent. Les mots quem ignorant prouvent que
c'est une critique.
Hartel traduit : « dont ils ne veulent rien savoir ». Mais,
1° quem ignorant ne peut avoir ce sens, et 2° c'est de la cou-
tume chrétienne et non de la coutume juive que ces judaïsants
ne veulent rien savoir. Les mots et ipsi « vous aussi », comme
les chrétiens, signifient que les Romains judaïsants s'écartent
de la coutume juive comme on reprochait aux chrétiens de
s'en écarter. Voy. 21, 1-3. Ils s'en écartent, parce qu'ils ne
comprennent pas le sabbat, qui est institué pour le repos
iptium) et non pour la bonne chère (victui). — Les mots quem
ignorant, qui manquent dans Ad nationes, prouvent que l'idée
est différente dans l'Apologétique.
Sur les Romains judaïsants, voy. l'excellent article de Paul
Lejay, Le sabbat juif et les poètes latins, dans la Rev. d'iiist.
et de litt relig., 8, 1903, p. 305-335.
17,1. Quod colimus, Deus unus est, qui totam molem
istam cum omni instrumente elementorum, corporum,
spirituum verbo que iussit, ratione qua disposuit, vir-
tute qua potuit, de nihilo expressit in ornamentum
maiestatis suae, etc.
Dieu a tiré le monde du néant par l'intermédiaire de son
Verbe, « par lequel il a commandé (d'exister), de sa Raison,
par laquelle il a mis en ordre et de sa Vertu, par laquelle il
a pu ». Voy. S. Jean, 1, 1-3. Cf. 21,10 : Deum universitatem
liane mundi verbo et ratione et virtute molitum. 21,11 : spiri-
tum, oui et sermo insit pronuntianti et ratio adsit disponenti,
et virtus praesit perficienti. 21,17 : Verbum Dei ... virtute et
ratione comitatum et spiritu fulfum.
CHAP. 17,1 217
Tert., on le voit, se plaît à répéter cette formule à trois
termes : verbwn {senno), ratio, virtus. Quand il parle de la
création, il répète aussi les trois termes iubere (pronuntiare),
disponere, posse (perficere).
Minucius Félix, 18,7, parlant de Dieu, Père de toutes choses,
créateur du monde, dit également : qui universa, quaecumque
sunt, verbo iubet, ratione dispensât, virtute consummat.
Il faut remarquer que M. F., qui évite toujours de parler
des dogmes chrétiens, ne s'explique pas clairement sur le
Verbe créateur ; il ne dit pas qu'il est le Fils de Dieu et une
personne distincte du Père. Il ne parle ni du Verbe créateur,
ni du Verbe révélateur, ni du Verbe rédempteur. Ici, son
langage n'est pleinement intelligible que pour un chrétien.
Il fait de même quand il parle du Christ (29,3) et, chez lui,
ce langage énigmatique pour les païens ne peut étonner
personne. C'est de parti pris qu'il se contente d'exposer les
grandes vérités générales sur l'unité de Dieu, sur la Provi-
dence, sur la résurrection en vue de la récompense des bons
et du châtiment des méchants. Cela lui paraît suffire aux
lecteurs éclairés pour répudier le polythéisme et pour se rallier
au christianisme. Dans son épilogue, il promet des éclaircisse-
ments, dans un autre ouvrage, sur les dogmes proprement
chrétiens.
Au ch. 17,1, Tert. parlant de la création, n'est pas plus
clair que M. F. C'est plus tard, au ch. 21 (voy. plus loin) qu'il
explique le Verbe aux païens : il y est obligé, parce qu'il veut
leur faire comprendre le Christ révélateur, qui a fait mieux
connaître Dieu aux hommes, et sa formule de la foi chrétienne :
Deum colimus per Christum.
Il y reviendra longuement dans son traité spécial sur la
Trinité {Adv. Praxean), mais il ne reproduira pas une seule
fois la formule tripartite de V Apologétique. 11 expliquera que
le Verbe (kéyoq) est à la fois la raison {ratio, sopliia) et la
parole intérieure de Dieu {sermo, verbum), que Dieu avait
en lui jusqu'au moment où il l'a engendré en le proférant
(génération temporelle du Verbe) pour créer par lui le monde.
Il dira que le Fils est sophia et virtus Dei, ou encore : et sermo
autem, virtus et sophia Dei, ipse erit Filius. Voy. surtout les
chap. 2 ; 5 ; 10 ; 12-13 ; 19. Cf. De carne Christi 19 : verbum
218 APPENDICE I
Dei et cum verbo spiritus, et in spiritu Dei virtus et quidquid
Del est Christus. De orat., 1, p. 180, 3 et 12. Adv. Marc, 2,27,
p. 373, 11 ; 5,14, p. 622, 22. De paen., 1,2. Adv. Hermog., 18.
La double formule tripartite de la création, avec les trois
substantifs et les trois verbes,, est propre à V Apologétique (17,1
et 21,11) et à Minucius Félix.
Qui en est l'auteur ? — Les trois termes, pris séparément,
sont dans les apologistes grecs. S. Justin les place même dans
l'ordre où les présentent Minucius Félix et Tertullien. Dial.
c. Tryph., 61 : xal Xoyoç, xai (TOifioc xal Sùvapiiç mi 8o^à toû
yevvVavTOç ÙTràp^j^wv. Les apologistes expliquent, eux aussi,
que c'est le Fils de Dieu qui créa l'univers, accomplissant la
volonté du Père, que la raison ou sagesse de Dieu conçoit le
plan de la création ou « dispose », que la parole ou le verbe
« ordonne » {fiât lux), que la vertu de Dieu produit et « achève »
les choses créées. S. Justin, /. c. Tatien, Ad Graec, 5 et 7.
Athénagore, Suppl., 10. Theoph., Ad Autol., 1, 3 ; 2, 10. Il ne
restait plus qu'à réunir les termes pour obtenir la double
formule tripartite. Tous les éléments en étaient donnés.
Minucius Félix, qui a certainement lu les apologistes grecs,
n'a-t-il pas pu la trouver le premier ?
Il faut rappeler d'abord que Tertullien, comme Minucius
Félix, emprunte constamment ses idées. Il en emprunte beau-
coup à S. Justin, à Tatien, à Athénagore et à Théophile, mais
il les met en valeur d'une manière si originale que le lecteur
ne se doute pas de l'emprunt. En lisant l'exorde de V Apolo-
gétique, on ne soupçonne pas que le grief fait aux juges, de ne
poursuivre qu'un nom, est tiré de S. Justin, Apol. I, 4. Cf.
Tatian., Ad Graec, 27 ; Athenag., Suppl., 2. Le nomlnis
odium est tiré des apologistes grecs ; pour Tertullien, il devient
un cheval de bataille dont il se servira chaque fois qu'il en
aura l'occasion. Voy. De spect., 30, p. 28, 23 : Item praesldes
persecutores dominicl nomlnis. Scorp., 10, p. 168, 12 : Ipsum
nomlnis odlum. Ibid., p. 169, 6 : porro et odium nomlnis
hic erli.
Il serait très utile de réunir tous les emprunts faits par
Tertullien aux apologistes grecs : on se rendrait mieux compte
du développement de sa pensée, de son talent d'appropria-
tion, du parti merveilleux qu'il sait tirer du bien d'autrui.
CHAP. 17,1 219
M, Heinze a fourni une contribution très importante à l'étude
de ce problème littéraire, mais il a négligé ce qui lui a paru
étranger à la démonstration de sa thèse. Il a montré fort
bien que Tertullien emprunte continuellement et qu'il fait
sien ce qu'il emprunte ... aux Grecs. Et cela lui paraît natu-
rel ; mais, quand Tert. se rencontre avec Minucius Félix,
il lui paraît inadmissible qu'il ait agi de même.
Citons deux exemples tirés de ce chapitre 17.
1° Le témoignage de l'âme en faveur de l'existence de
Dieu est une idée fameuse de Tertullien (ch. 17, 4-6) : elle
lui a plu tellement qu'il lui a consacré un petit traité spécial,
aussitôt après avoir rédigé son Apologétique.
Or, Minucius Félix allègue, de son côté, « le langage naturel
du vulgaire » pour prouver que tous les hommes croient en un
Dieu unique ; et les cris du vulgaire (Deus tnagnus est ! etc.)
qu'il cite, sont précisément ceux que Tert. attribue à l'âme.
Pourquoi le passage de Minucius Félix n'aurait-il pas inspiré
à Tertullien l'idée de cet argument fameux ? Remarquez
que Tert. lui donne une forme plus précise, plus nette, plus
profonde et plus saisissante que Minucius Félix. Du langage
du vulgaire, des cris qui sortent naturellement de la bouche
populaire, il a fait le langage de l'âme vulgaire, les cris de
l'âme qui ne connaît pas les préventions de l'éducation, du
vice, de la passion. Si Minucius Félix était venu après lui et
lui avait emprunté un argument si frappant, l'aurait-il modi-
fié et affaibli ? N'est-il pas plus naturel de croire que Tert.
a donné plus de force à un argument qu'il a trouvé chez
Minucius Félix et n'est-ce pas ainsi qu'il agit constamment
à l'égard des apologistes grecs ? Si la date des apologistes
grecs était incertaine, M. Heinze ne les mettrait-il pas après
Tertullien ?
2° De même, voulant prouver l'unité de Dieu, Minucius
Félix allègue que Dieu est le Père de toutes choses, seul éter-
nel, antérieur à toutes les créatures.
« 11 est évident, dit-il, que Dieu, Père de toutes choses, n'a
ni commencement ni fin ; à tout, il donne la naissance ; à
lui-même, l'éternité ; avant le monde, il tenait lieu de monde
à lui-même ; par sa parole, il appelle à l'existence tout ce qui
est ; par sa raison, il dispose tout ; par sa puissance, il achève
220 APPENDICE I
tout». Il s'agit bien ici de la création de toutes choses, pré-
sentée comme se continuant dans le présent, et non de la
conservation et du gouvernement du monde (comme l'a cru
Heinze), bien que les verbes soient au présent.
La formule à trois termes verbum, ratio, virtus, revient
trois fois dans l'Apologétique (17,1 ; 21,10 et 17) ; elle n'est
pas reprise dans l'Adv. Praxean, ni ailleurs. Pourquoi est-il
inadmissible qu'en 197, Tert. l'ait trouvée dans Minucius
Félix et qu'il l'ait faite sienne, en lui donnant un sens plus
profond, en l'adaptant à sa théorie du Verbe créateur, dont
il a tiré les éléments de S. Jean, 1, et des apologistes grecs ?
Mais, dit M. Heinze, Minucius Félix a l'habitude d'affaiblir
et de gâter ce qu'il emprunte. C'est précisément la thèse
que nous combattons et nous croyons que les autres passages
que M. Heinze a minutieusement comparés ne sont pas plus
probants que ceux que nous venons d'examiner {^).
17,2. Ceterum quod videri (quod videri communiter P),
quod comprehendi, quod aestimari potest, minus est
et oculis quibus occupatur, et manibus quibus conta-
minatur, et sensibus quibus invenitur. F
Ceterum est ici l'adjectif neutre et il est opposé à ce qui
suit. En effet, il y a opposition entre ceterum, quod videri ...
potest, minus est oculis, etc., « le reste, les autres choses qu'on
peut voir », d'une part, et quod vero immensum est, soli sibi
notum est, d'autre part. Le singulier ceterum « le reste « est
rare, tandis que le pluriel cetera est fréquent. Plaute, Men.,
234 : ceterum cura. Rud., 1224 : adorna ceterum quod opus est.
Cic, De leg., 2, 45 : color albus praecipue decorus deo est cum
(') La thèse de M. Heinze a trouvé un partisan dans C. M. Bui-
zer, Quid Minucius Félix in conscribendo dialogo Octavio sibi propo-
suerit. Diss. inaug., Amsterdam, Kruyt^ 1915. L'auteur de cette
très estimable dissertation résume les arguments de M. Heinze et,
sous cette forme résumée, leur faiblesse nous paraît se montrer
encore plus clairement.
CHAP. 17,2 22i
in cetera, tum in textili. Thés. /. /., III, p. 967, 54. Dans cette
phrase de Cicéron, ceterum est opposé à ce qui suit, comme ici.
Les autres choses que les yeux du corps peuvent voir
(videri = cerni), que les mains peuvent toucher (comprehendi
= prefiendi, tangi), que les sens corporels perçoivent . (aes//-
mari), ce sont les choses corporelles, matérielles. L'objet maté-
riel de la connaissance est bonne : les yeux l'embrassent tout
entier, les mains le touchent tout entier, les sens le découvrent
tout entier : il est moins grand (minus, neutre de minor) que les
organes qui opèrent sa connaissance adéquate, car ces or-
ganes sont en état de percevoir quelque chose de plus grand,
pourvu que ce soit quelque chose de corporel et de borné.
Parlant de Dieu, Minucius Félix dit au contraire ... visu
clarior est, tactu purior, sensibus maior (18,8).
Tertullien continue : Mais ce qui (o oé; est incommensu-
rable, infini, n'est connu que de soi-même. Nous avons une
certaine connaissance de l'être infini (Paul., Ad Cor., 1, 13, 12 :
Nunc cognosco ex parte), mais pas une connaissance adéquate,
parce que nous sommes bornés.
L'adverbe communiter = solito more « à la manière com-
mune, ordinaire » conviendrait au sens.
Mais cette signification est rare {Thés. l. /., III, 1984, 19)
et Tertullien semble employer toujours communiter comme
syn. de simul, similiter, pariter ou de generaliter « tous en-
semble, les uns comme les autres ». De virg. vel., 5 : mulieris
nomen ... quo communiter etiam virgines censeantur. Ad nat.,
2,4, p. 100, 14 : cum etiam universos deos vestros ... Oéou; com-
muniter adpelletis. (Dans le Thés. l. /., cette phrase ne paraît
pas être à sa place.) Ibid., 2,8, p. 108, 12 : quos {deos) totus
orbis communiter colit. Adv. Val., 18, p. 197, 20 : Regem autem
communiter in universitatem {nominent). Cf. Dig., 50, 16,
163, 1 : Graece TzaïUov communiter appellatur {et puer et
puella).
Ici, le contexte {ceterum quod) et l'antithèse {quod vero)
montrent clairement que videri, conprehendi et aestimari
expriment les opérations des sens. Pour qu'on ne s'y trompe
pas, un lecteur paraît avoir ajouté communiter, en donnant
à ce mot un sens inconnu de Tertullien. Voyez une addition
analogue au ch. 34,1.
222 APPENDICE î
17,5. Deum nominal hoc solo nomine, quia proprio Dei
veri.
Tert. emploie souvent quia avec l'ellipse du verbe ; dans
ce cas, l'attribut est attiré au cas du substantif de la prop.
principale. Voy. 30,4 : quia innocuis = quia innocuae sunt.
50,10 : quia humana(my. Voy, ci-dessus, ad 5,4. — Sur l'idée,
voy. Adv. Hermog., 3, p, 128, 21 : scilicet Deus substantiae
ipsius nomen, id est divinitatis.
18,5. Ptolemaeus, quem Philadelphum supemominant,
eruditissimus rex et omnis litteraturae sagacissimus F;
Ptolemaeorum eruditissimus, quem Philadelphum super-
nominant, et omnis litteraturae sagacissimus P
Sur rex et omnis, voy. ci-dessus, p. 104. — Callewaert, Le
Cod. Fuld., p. 350, cite l'emprunt fait à Tert. par Isidore,
Etym., 6, 3, 5 : Maxime Ptolemaeus, cognomento Philadel-
phus, omnis litteraturae sagacissimus, cum studio bibliothe-
carum Pisistratum aemularetur, non solum gentium scripturas,
sed etiam et divinas litteras in bibliothecam suam contulit. La
construction de la phrase ressemble plus à F qu'à P dans
Isidore, parce que Ptolemaeus est sujet. D'autre part, Isidore
n'a pas rex qui manque aussi dans P Q) ; mais Isidore imite
librement et, dans P, rex a dû disparaître avec la nouvelle
construction.
18,5. oui praefecturam mandaverat, libros a ludaeis
quoque postulavit, proprias atque vernaculas litteras,
quas soli habebant *FP
(^) Lôfstedt, p. 92, pense que le pédant remanieur de P a voulu
faire dire à Tert. que Philadelphe n'est pas erîtdiiissimus rex en
général, mais seulement^ PtoUmaeoncm eruditissimus. De même, il
pense que l'interpolateur de P a ajouté Umc plus loin pour diminuer
le mérite de Démétrius de Phalères, qu'il appelle grammaticoruni
tune probatissimus . L'idée est ingénieuse, mais il reste un doute.
Voy. ci-dessus, p. 41.
CMAP. 17,5—18,5—19,1-10 223
Wendland, Aristeae epist., p. 126, propose de lire : cui
praefeduram mandaverat libroram, a ludaeis quoque postu-
lavit proprias, etc. La conjecture est ingénieuse, mais ne s'im-
pose pas. Avec praefeduram, on supplée facilement biblio-
thecae d'après ce qui précède.
*19,1. Primus enim prophètes Moyses ... superior inve-
nitur annis circiter trecentis, quam ille antiquissimus
pênes vos Danaus in Argo<s> transvenisset. F
Il faut lire : annis drciter quadringentis. — Le nombre des
années qui s'écoulent entre la sortie d'Egypte et la migration
de Danaus à Argos est donné par Josèphe, Contra Apion.,
1,16 : Towl xal évev/ixovTa xal i:ptaxofftot,ç (393) upouOev
eTso'i.v... 'f\ Aàvaov eiç "Apyoç âcpuéa-èai., Theoph., Ad Autol.,
3,21, répète d'après Josèpne : upo éxwv yàp Tpiaxoo-tMV 8exa-
Tpiwv (313) ... Trpo Toù xal /iiavaov eiç "Apyo; àcpixéaOai..
On a conjecturé avec raison que les mss de Théophile sont
fautifs et qu'il faut lire Tpt.axoo'iwv évev/.xovTa Tpttov. C'est
ce qu'ont lu encore l'auteur du fragment et Tertullien, qui
dit au ch. 19,3 : quadringentis paene annis (nam septem minus).
Tert. a certainement consulté Théophile en ce passage et
l'auteur du fragment a fait comme lui. Cf. Heinze, p. 386-7.
Il n'a pu écrire annis drdter CCC, mais il a dû écrire annis
drciter CCCC, se contentant d'un chiffre rond, comme le
prouve drdter. Le scribe a écrit CCC pour CCCC.
*19,9. Ita omnia, quae supersunt, improbata sunt nobis,
quia cum illis quae probata sunt, tune futuris, praedi-
cabantur. F
Avec Junius, il faut corriger improbata sunt en iam probata
sunt. P. de Lagarde corrigeait ingénieusement, mais inutile-
ment, en improbata, iam probata. Cf. Scorp., 11, p. 172, 3 :
Ita haeretid, quae praedicantur, non ut probata sunt credendo,
ea quae nec praedicata sunt, credunt.
*19,10. Habetis, quod sciam, et nos (/. vos) Sibyllam,
quatinus appellatio ista vera vates (/. verae vatis) Dei
224 APPENDICE i
veri passim super ceteros qui vaticinari videbantur,
usurpata est ; sicut (/. sunt) vestrae Sibyllae nomeii de
veritate mentitae, quemadmodum et Dei nostri.
Ad nat. 2,12, p. 120, 10 : Ante enim Sibylla quam omnis
litteratura (extitit), illa scilicet Sibylla <Dei> veri vera vates
de cuius vocabulo daemo<(nio>rum vatibus induistis. Ea sena-
rio versu in hune sensum de Saturni prosapia et rébus eius
exponit : Décima, inquit, genitura hominum, etc.
Voy. Oracula SibylL, III, 108 s. Cf. Hartel, Patrist. Sîucl.,
II, 75, Kroymann, Quaest. Tert., p. 58, propose vestra, au
lieu de exstitit (Goth.) ; il ne manque que trois lettres {vra).
Il intercale aussi Dei, d'après le Cod. Fuldensis.
Le nom de la Sibylle chrétienne, « cette véridique prophé-
tesse du vrai Dieu », a été donné aussi à la Sibylle païenne,
c'est-à-dire «à tous ceux qui paraissaient prophétiser». Il
y a donc, chez les païens, plusieurs prophètes ou prophétesses
qui ont reçu le nom de Sibylle, Mais ces Sibylles ont pris
mensongèrement le nom de la vraie Sibylle, de la Sibylle
chrétienne, de même que les démons se cachent sous les dieux.
Il faut donc lire : Habetis, quod sciam, et vos Sibyllam (sin-
gulier collectif), quatenus appellatio ista verae vatis Dei veri,
etc. Hartel veut que vera votes soit apposé à adpellatio ; mais
adpellatio ista désigne Sibylla et non vera vates : le nom de
la vraie prophétesse du vrai Dieu, c'est-à-dire le nom de
Sibylle, a été appliqué, etc.
Sicut ne donne pas de sens convenable, car il y aurait com-
paraison des Sibylles païennes avec elles-mêmes, Oehler con-
jecture : sunt, qui convient.
— Il ne faut pas changer Sibyllam en Sibyllas. Le singu-
lier Sibylla désigne collectivement les Sibylles, comme l'ex-
plique Lactance, qui cite très souvent les chants sibyllins
(Voy. V Index nominum et rerum de Brandt, s. v. Sibyllae).
Div. inst., 1, 21, 7 : Sibyllinos libros ait (Varro) non fuisse
unius Sibyllae, sed appellari uno nomine Sibyllinos, quod
omnes feminae vates Sibyllae sint a veteribus nuncupatae.
Puis, après avoir énuméré dix Sibylles d'après Varron, il dit
au § 13 : E/ sunt singularum {Sibyllarum) singuli libri : quos.
CHAP. 19,2-6 225
quia Sibyllae nomine inscribuntiir, uniits esse credunt, suntque
confusi nec discerni ac suum calque adsignari potest nisi
Erythraeae ... Sed et nos confuse Sibyllam dicemus, sicubi
testimoniis eorum fuerit abutendum.
Super ceteros = de céleris. Suivant Tertiillien, ce sont des
devins (et pas seulement des devineresses) qui se cachent
sous le nom de Sibylles.
19,2. et urbes insignes historiarum FP
Insignis a pour complément un génitif. Voy. De pall., 4 :
insignes llbldlnum {àcyik^ziuiv irdty^xoi). Cf. 39,14 : scelerls
Infâmes. Hoppe, Syntax, p. 23.
19.5. Haec quibus ordinibus probari possint, non tam
difficile est nobis exponere, quam énorme, nec arduum,
sed intérim longum dinumerare F.
P n'a pas dinumerare. Di Capua, p. 35, regarde dinumerare
comme formant un ditrochée, clausule moins fréquente que
Intérim longum (crétique et trochée) Q). — Le verbe exponere
suffit et tous les attributs lui conviennent. L'adjectif longum
a pu suggérer l'idée d'ajouter dinumerare.
19.6. advocandi municipes eorum, per quos notltia sub-
ministrata est P
Les mots municipes eorum, qui manquent dans F, ne sont
ni nécessaires ni superfétatoires. Tert. sous-entend souvent
l'antécédent du relatif. Cf. 5,4 : restitutls etlam (Ils) ; 22,3 :
cum generls auctorlbus et (eo), quem dlxlmus, principe. Voy,
ci-dessus, p. 105. 24,7 : et caplte damnandls {Us), qui ... 29,5 :
Insuper debellatls (eos). qui ... 46,3 (F) : cur ergo quibus com-
paramur de disciplina, non proInde adaequamur de llcentla
et Immunltate dlsclpllnae. Voy. plus loin. Cf. Henen, Index
verborum, p. 125. Au ch. 23,3, P omet le pronom antécédent
(1) LôfstecU, p. 69, condamne dinuinernye comme formant une
fin d'hexamètre. Voy. à la lin de cet Appendice.
15
226 APPENDICE 1
précédé d'une préposition : et alla vis pronuntietur in eo qui
genitalia vel lacertos, alia, qui sibi gulam prosecat. Dans F,
on lit : alia in eo, qui, peut-être avec raison, parce que le
pron. antécédent dépend d'une préposition Q).
On peut conjecturer que les mots municipes eorum sont
une note marginale d'un lecteur de P, qui avait remarqué
que Tertullien cite un Egyptien, un Chaldéen et un Phé-
nicien. Mais il se peut aussi que ces mots soient tombés
dans F.
19,6. et Proemis Phoenix Tyriorum rex F ; sed et hie-
ronimus foenix, tyrii rex P
Le nom du roi de Tyr, Hiram, est défiguré dans les deux
traditions. P semble l'avoir confondu avec l'Egyptien Hiero-
nymus, auteur de *o',vua (Joseph., Ant. lud., 1, 95, 107).
Hiram, appelé Hiromos par Josèphe (Contra Apion., 1, 106)
et Hieromos par Théophile (Ad Autol., 3,22), était ami de
Salomon. Il lui envoya de l'or et des matériaux pour la cons-
truction du temple de Jérusalem. Josèphe rapporte que,
pour cette raison, les Tyriens avaient consigné la construction
du temple dans leurs propres archives. D'après cela, Théo-
phile dit que ces documents relatifs à la date de la construc-
tion furent rédigés par le roi Hieromos. Voilà pourquoi Tert.,
qui avait lu Théophile, range ce roi de Tyr parmi ceux qui
peuvent fournir des renseignements sur l'antiquité du peuple
juif. Voy. Heinze, p. 382,3. Il n'en fait pas cependant un
historien tel que Manéthon et Bérose, et c'est ce qui peut
expliquer qu'il l'introduise par sed et (P) et pas simplement
par et (F). Cependant sed n'est pas nécessaire et peut être
une répétition de set dans le groupe : chaldaevsethieromvs.
Voy., p. 71, ad 5,3.
Q) L'ellipse du pronom antécédent n'est pas moins fréquente
dans Minucius Félix. Voy. 27,2: ftisj reinissis q7iae constrinxcrant ,
Voy. noire Langue et syntaxe de M. F., dans notre édition classique^
Partie du maître, p. 148, § 195 (Bruges, Desclée, 1909).
CHAP. 19,6—20,1-2 227
20.1. coram sunt quae docebunt : mundus et saeculum
et exitus rerum F.
P n'a pas rerum. Exitus rerum désigne « les événements »
prédits, qui se réalisent. Heraldus, qui lit exitus, explique
bien (p. 93) : eventus eorum quae praedicta fuerant. Mais, dans
ce sens, exitus est toujours déterminé. Voy. 18,2 ; 21,5 ; 23,3 ;
50,6. Di Capua, p. 33, fait remarquer que exitus rerum donne
une bonne clausule (crétique et trochée), et il pense que
saeculum et exitus n'en donne pas. Voy. à la fin de l'App. I.
20.2. quod terrae vorarant (vorant P) urbes, quod insulas
maria fraudarent (fraudant P), quod interna et externa
(externa atque interna P) bella dilaniarent (dilaniant P) F
Dans vorarant, on pourrait croire qu'il y a eu dédouble-
ment de la syllabe ra ; mais fraudarent et dilaniarent font
plutôt supposer que Junius a imprimé par erreur vorarant
au lieu de vorarent.
Quoi qu'il en soit, ces imparfaits du subj. ne conviennent
pas ici. Tous les verbes subordonnés à quod sont au présent
de l'indicatif. Tous les faits sont présents, non pour Tert. et
ses contemporains, mais pour tout observateur contempo-
rain de ces faits : au moment où on les observe, où ils s'accom-
plissent, on constate qu'ils ont été prédits, on peut les lire
dans l'Ecriture. Les deux premiers faits sont certainement
passés depuis longtemps (voy. 40, 3-8) et le troisième vient
d'avoir lieu (voy. 35, 11) ; mais si Tert. avait voulu exprimer
qu'ils sont passés, il aurait écrit : voraverunt, fraudaverunt,
dilaniaverunt, ou bien quod voraturae essent ou bien encore
voraturas esse, etc. Adv. lud., 8 : omnes prophetae nuntiabant
de illo (se. de Christo), quod esset venturus et pati deberet. Ibid.,
3 : providens Deus quod ... non ... esset daturus. Mais ce ne
serait plus l'idée qu'il veut exprimer ici, à savoir qu'au mo-
ment même où l'on assiste à ces faits, on les lit dans l'Ecriture.
Vorarent n'est ni grammatical ni logique. — S. Cyprien déve-
loppe la même idée, Ad Demetr., 2-5, et il semble imiter l'ana-
phore de quod (aux ch. 2 et 5).
228 APPENDICE I
20,3. qtiod etiam officia temporum et elementorum munia
exorbitant FP
Tempora désigne les saisons et elementa les corps célestes,
le soleil, la lune, les astres, dont les révolutions divisent le
temps en années, saisons, mois et jours. Voy. ch. 18,2. Genèse,
1,4. De ieiunio, 10 : iUa die ... qua ipsis elementis (se. soli et
lunae) stationem imper avit (losue, 10,7 ss.). Ad nai, 2,3, p.
98,21 : itaque quod mundi erit, hoc elementis adscribetur, caelo
dico et terrae et sideribiis et igni, quae deos et deorum parentes ...
frustra vobis credi proposait Varro ... Ibid., 2,5 p. 102,15 :
elementorum divinitatem. L. 18 : sine elementorum tempera-
menîo ... ; pr opter eaque deos credi solem, qui dies de suo cumu-
let, fruges caloribus expédiât et annum stationibus servet ;
lunam ..., item sidéra ..., ipsum denique caelum ..., terram ...
De pat., 2 : temporum officia, elementorum servitia. Lact., Div.
inst., 2,5. En grec, les corps célestes sont appelés de même
(jxoiyzia. S. Justin, Apol. II, 5. Athenag., Suppl., 16 : tov
oùpavov xal xà (xxoLyeïa.. Theoph., Ad Autol., 1,4-6. Cf. H.
Dieïs.- Elementum, p.*44 ss. F. Cumont, Religions orientales,
p. 248 et notes, P. Batiffol, L'Eglise naissante, p. 118, n. 3.
20,3. providentiae (providenter p) scripta sunt. F
Tous ces faits ont été écrits par la Providence divine, Provi-
dentiae = a provident ia, a Deo. C'est le dafivus auctoris. Ter-
tullien dit providentia, pour providentia Dei. Cf. 18,7 : pro-
videntiae vindex. Sur le datif, voy. Hoppe, Syntax, p. 25. —
Providenter, pris dans le sens étymologique, convient égale-
ment. Son sens ordinaire est « avec prévoyance, avec sagesse ».
20,5. Quid delinquimus, oro vos, futuro quoque credentes,
qui iam didicimus illi per duos gradus credere ?
futuro F ; futura P. — illi P ; illis *FM. — Modius donne
futuro et ne dit rien de illis.
Traduisons littéralement : « Quel tort avons-nous, je vous
le demande, de croire aussi à l'avenir, puisque nous avons
appris à croire au temps dans ses deux premières périodes » ?
CHAP. 20,3-5—21,1 229
Le singulier futuro est nécessaire, car il s'agit de l'une des
trois périodes du temps, que Tert. vient de distinguer : futu-
rum, praesens et praeteritum. Plus haut, il avait dit en parlant
des faits passés : futur orum quoque fides et futur a praefanti,
ce qui aura fait changer ici futuro en futura. Il faut d'ailleurs
le datif avec credentes, comme avec credere. — Le singulier
illi veut dire tempori. Voy. plus haut : Unum tempus est ..
Le temps vient d'être divisé en trois gradus ou périodes, dont
deux sont réalisées : le passé et le présent {per duos gradus).
Le pluriel illis, auquel Modius n'a pas touché, représenterait
le présent, le passé et le futur ; or le présent et le passé sont
exclus.
21,1. Sed qiioniam edidimus, antiquissimis ludaeorum
instrumentis sectam istani esse siibfultam.
Le chap. 21 offre un assez grand nombre de variantes et,
pour les apprécier convenablement, il faut se rendre compte
de la suite des idées.
Au polythéisme qu'il a longuement réfuté (ch. 10-15), Ter-
tullien oppose la religion chrétienne (ch. 17-24). Il établit
d'abord l'existence d'un Dieu unique, créateur de l'univers :
Quod colimus, Deus unus est ... (17,1). C'est le- monothéisme
juif et chrétien, opposé aux païens (ch. 17-20). Tertullien
en donne rapidement deux preuves naturelles : nous connais-
sons Dieu par l'univers qu'il a créé et par le témoignage de
l'âme (17, 4-6). Puis, il insiste sur une preuve surnaturelle :
les prophéties contenues dans les Livres sacrés des Juifs (ch.
18-20).
Jusqu'ici les chrétiens, en désaccord avec les païens poly-
théistes, sont d'accord avec les Juifs monothéistes. Mais,
leur dira-t-on, en vous appuyant sur les Livres des Juifs,
vous trompez le public, car vous êtes en désaccord avec les
Juifs : votre secte est toute récente, vos pratiques religieuses
sont différentes. Par conséquent, vous ne pouvez adorer le
même Dieu, et tout le monde sait d'ailleurs que vous adorez
un homme, le Christ. Sous le couvert d'une religion vénérable
par son antiquité et tolérée, vous introduisez donc des nou-
veautés inavouables.
230 APPENDICE I
Oui, dit Tcrtullien, nous adorons le Christ, mais sans penser
autrement sur Dieu que les Juifs. La doctrine chrétienne
n'est pas toute entière dans la formule : Quod colimus, Deiis
unus est. Il faut compléter cette formule ainsi : Deum colimus
per Christum (21, 28). Ici donc les chrétiens se séparent des
Juifs : tout en maintenant avec eux l'unité de Dieu, les chré-
tiens croient au Christ, Fils de Dieu et Dieu lui-même. Il n'y
a rien d'incompatible dans cette double croyance : c'est ce
que TertuUien va montrer : Necesse est igitur pauca dicamus
de Cliristo ut Deo (21,3). Ce chap. 21 est une sorte de traité
Adversus ludaeos adressé aux païens.
Le Christ est Dieu et sa divinité se concilie avec l'unité
de Dieu : telle est la thèse que défend TertuUien.
Il en résulte qu'il ne s'efforce nullement de donner un exposé
complet de sa christologie, comme il pourrait le faire, s'il
parlait aux chrétiens. Le Christ est à la fois Rédempteur et
Révélateur : ici, le Christ Rédempteur reste dans l'ombre ;
c'est le Christ Révélateur que Tert. fait connaître.
Dieu avait donné sa loi au peuple élu, par la bouche des
prophètes. Mais les Juifs ont prévariqué et Dieu à promulgué
une loi nouvelle, plus parfaite, destinée à tous les hommes.
Le Christ est venu pour apporter la loi nouvelle, pour éclairer
et guider le genre humain, pour lui faire mieux connaître
Dieu.
Pour comprendre la venue du Christ, sa nativité, il faut
comprendre son essence. Le Christ est le Verbe de Dieu, par
lequel il a créé le monde. 11 procède de Dieu, il est le Fils de
Dieu. Le Fils est une personne distincte du Père, mais ne
forme qu'un avec lui par la substance.
Pour illuminer le genre humain, le Verbe de Dieu s'est
incarné, il s'est fait homme. Les Juifs l'ont méconnu, bien
que, par ses miracles, il se soit révélé Verbe et Fils de Dieu.
Ils l'ont persécuté et attaché à la croix. Mais sa vie, sa passion,
sa résurrection, son ascension révèlent sa mission divine et
sa divinité. Pilate a rendu témoignage au Christ par son rap-
port à Tibère. Les apôtres, qu'il a envoyés « pour enseigner
ce qu'il leur avait enseigné », ont scellé leur témoignage de
leur sang. Ils sont les vrais témoins ((^âpTupsç) du Christ,
CHAP. 21,1 231
S'adressant toujours aux païens, Tertullien continue : Tout
à l'heure, je produirai devant vous (ch. 22-23) d'autres témoins
de la divinité du Christ, des témoins irrécusables pour vous :
ce sont vos dieux, c'est-à-dire les démons et leurs aveux. Et
tirant les conclusions de son exposé, il continue : Pour le
moment, je n'ai voulu que vous faire comprendre l'économie
de notre religion et je la résume dans cette formule : Deum
colimus per Christum. Arrière donc ceux qui prétendent que
nous mettons en avant la croyance en un Dieu unique pour
cacher des croyances inavouables. Il faut nous croire quand
nous l'affirmons : car qui ment sur sa religion la renie et, loin
de renier notre religion, nous sommes prêts à sceller de notre
sang ce que nous disons, Dicimus et palam dicimus et vohis
torquentibus lacerati et cnientati vociferamur : Deum colimus
per Christum (21,28). Croyez même un instant, si vous le
voulez, que le Christ est un homme : c'est par lui que Dieu
a voulu être connu et adoré,
A cela, vous n'avez rien à redire, vous autres, Juifs et païens.
En effet, c'est par un homme. Moïse, que les Juifs ont appris
à honorer Dieu, c'est à Orphée, à Musée, à Mélampe, à Tro-
phonius, c'est à Numa que les Grecs doivent leurs mystères
et les Romains leur culte si minutieux.
On dira peut-être que le Christ a aussi inventé la divinité
qui lui a servi à ouvrir nos yeux à la vérité. Il vous reste donc
à rechercher si la divinité du Christ est vraie et la preuve
que je vais vous en donner — preuve irrécusable pour vous —
c'est le témoignage de vos dieux, des démons.
Les chapitres 22-23, où Tert. expose sa théorie sur les dé-
mons, forment donc une suite de sa christologie. Tertullien
sait que les païens hésitent à admettre l'autorité des Ecritures,
d'où il a tiré ses autres preuves ; c'est pourquoi il leur four-
nira une preuve qu'ils ne pourront pas récuser (^).
(^) Tert. suit souvent S. Justin. Cette preuve même de la divinité
du Christ, qui doit convaincre les païens, c'est-à-dire le témoignage
des démons, S. .Tustin l'avait donnée aux Juifs comme un argument
irréfutable. Dialog. cum Tryphone, 85 : Kaxà yàp toû ovoixa-uoc;
aùtoù.,..
232 APPENDICE I
21.3. Veriim neqtie de Christo erubescimus, ut quos sub
nomine eiiis deputari et damiiari iuvat, neqtie de Deo
aliter stimus (neque de Deo aliter praesumimus P). F
Tertullien veut dire : Nous ne rougissons pas du Christ,
pour qui nous mourons, et, d'autre part, nous n'avons pas un
autre sentiment sur Dieu que les Juifs. Notre croyance au
Christ ne nous empêche pas de rester d'accord avec les Juifs
sur le Dieu unique. — Les auteurs archaïques disent aliter
esse (de), pour aliter sentire (de), être d'un autre avis (sur).
Plaut., Trin., 47 : s in aliter es. Ter., Phorm., 529 : ego hune
esse aliter credidi. Adelph., 492 : sin aliter animas noster est.
597 : munquani te aliter atque es esse ammum induxi meuni.
515 : sin aliter de hac re est eius sententia. Thés. l. /., I, 1654,
10 ss. ; II, 1080, 36. Sur de, voy. ib., V, 777, 10.
21.4. Totum ludaeis erat apud Deum praerogativa ob
insignem iustitiam et fidem originalium auctorum F
Tous les ms ont totum. La locution in tètum (= omnino) est
très fréquente dans Tertullien. Hoppe, Tertullianea, p. 11-12,
a réuni tous les passages, très nombreux. Elle se rencontre,
avant Tert., dans Pline l'Ancien, qui l'emploie souvent, et
dans Columelle (voy, les dict. de Forcellini et de Freund).
De même, dans Minucius Félix, 22,8 (24,3) ; 28,3.
Dans trois des passages de Tertullien cités par Hoppe (Adv.
Marc, 1,29, p. 332, 11. Adv. Prax. 5 in, et ici), les mss ont
totum. On s'est demandé si l'on peut admettre totum pour
in totum. Hoppe pense qu'il faut changer totum en in totum
dans les deux premiers passages et en tantum ici (avec Haver-
camp).
Si on lit tout ce § d'après F, en ajoutant de devant pro-
merendo, on obtient un texte irréprochable, dans lequel tan-
tum n'aurait aucun sens. Au contraire, totum, pour in totum,
omnino, prorsus, utique, ôXw<;, nous paraît convenir. Cet ad-
verbe modifie le verbe esse « exister «. Hoppe cite lui-même
des passages analogues avec in totum. De resurr., 39, p. 82,15 :
in totum esse noluerant {resurrectionem). Ibid., 55, p. 114, 10 :
périsse enim est in totum non esse quod fuerit. Il faut donc
CHAP. 21,3-5 233
traduire littéralement : Une prérogative (une préférence,
un privilège) existait tout-à-fait pour les Juifs auprès de Dieu,
ou : les Juifs jouissaient d'un privilège complet, exclusif,
auprès de Dieu.
Outre les deux passages précités de Tert. (Adv. Marc, 1,29.
Adv. Prax., 5), où les manuscrits donnent totum, on peut
citer encore : Ad nat,, 1,18, p. 90, 9 : totum eradicatae con-
fessionis. Lamprid., Heliog., 32 : Habiiit etiam istam consueiii-
dinem, ut cenas sibi exhiberet taies, ut una die nonnisi de fasanis
totum ederet, ... item alla die de pullis, alia de pisce illo et item
illo, etc. Priscill., Tract., 1,7, p. 8,18 : sed totum Christi Dei
teneat {nos) disciplina. Lucif., p. 38, 14 : quia ille sit Deus
totum potens, qui ... Lucifer dit souvent totum potens, au lieu
de omnipotens (voy. l'index, p. 352, à la fin de l'art, accusa-
tivus). Voy. Hoppe, Syntax, p. lGO-101. Tertullianea, p. 11-12.
Woelfflin, Archiv, IV, p. 144.
— Au lieu de praerogativa, P a gratta. Ici, il s'agit des
Juifs, le peuple privilégié de Dieu. Tert. répète le mot praero-
gativa en parlant des Romains, au ch. 25,3, et il est intéres-
sant de remarquer que, là encore, praerogativa est remplacé
dans P par gratta. Tert. emploie d'ailleurs gratta dans le même
sens (21,6 ; 27,4), mais il affectionne le mot praerogativa,
beaucoup plus rare. Voy. 5,2.
— P a enfin : ubi et insignis iustitia et fides. Ces mots dis-
loquent et gâtent la construction de la phrase. Ils prouvent
que celle-ci a subi une modification profonde dans P. C'est
une raison de plus pour préférer praerogativa.
21,4. unde illis et generis magnitude et regni sublimitas
floruit et tanta félicitas de Dei vocibus adfuit (ut de Dei
vocibus P) F
P n'a pas adfuit, mot général, qui paraît avoir été ajouté
dans F, parce que le verbe floruit précède le troisième sujet,
de sorte que ce troisième sujet pouvait paraître manquer de
verbe. Adjuit trouble du reste la clausule de Dei vocibus
(double crétique). Voy. à la fin de cet Appendice. — Dans P,
ut (unde M) devant de Dei est évidemment interpolé.
234 APPENDICE I
21,5. ex fiducia patrum inflati ad delirandum discipli-
nam (ad declinandtim dérivantes a disciplina P) in pro-
fanum modis (modum P) F
Dans F, modis est une faute de copiste pour modum.
« Les Juifs, dit Tert., enflés par la confiance dans (les mé-
rites de) leurs pères, s'écartèrent de la loi d'une manière im-
pie ». Ils ont été conduits par un fol orgueil à s'écarter de la
loi de Dieu. Inflati ad contient l'idée de addudi ad.
Delirare, sortir du sillon, et puis, de la droite voie. Non.,
p. 17 : delirare est de recto decedere. Vel., Gramm., 7,73 : gui
a recta via vitae ad pravam déclinant ... delirare existimantur.
Avec l'ace, delirare aliquid veut dire inepte dicere, facere,
scribere, et ne convient pas avec disciplinam, à moins qu'on
ne fasse de disciplinam un ace, grec « quant à la discipline »,
ce qui est peu admissible.
Dans P, dérivantes paraît être une addition oiseuse, con-
traire au style concis de Tertullien, De plus, derivare est ordi-
nairement transitif ; pris intransitivement, il se dit des choses.
Voy. Thés. l.L, V, 638, 47. De pud., 21,9 : ad te dérivasse sol-
vendi et adligandi potesîatem.
Dans Cicéron, declinare est construit absolument ou tran-
sitif. De nat. deor., 3,33 : appetuntur, quae secundum naturam
sunt, declinantur contraria. Il dit : declinare minas, impetam,
urbem. Voy. Merguet, s. v. Tert. dit : declinare ab, mais aussi
declinare aliquid. Adv.Marc, 2,19, p, 361, 12 : declinare amalo
et facere bonum. De pat., 4, p. 5,12 : cui severitati declinandae
vel liberalitati invitandae tanta obsequii diligentia opus est.
On peut donc lire : ad declinandum disciplinam. Sur le
gérondif au lieu de l'adj. verbal en -ndus, voy. ad 14,8,
21,5. probaret exitus hodiernus ipsorum. FP
Exitus signifie «issue, événement». De pud., 21,11 : Sic
enim et exitus docet. Avec le génitif d'un nom de personne,
il est souvent synonyme de exitium, mors, interitus. Ch. 50,6 :
qui de tali suo exitu etiam iocabatur. Depuis la prise de Jéru-
salem par Titus en l'an 70, les Juifs n'existaient plus comme
nation. Depuis la révolte de Barchocheba, sous Hadrien,
CHAP. 21,5-8 235
l'accès de la colonie d'Aelia Capitolina, bâtie sur les ruines
de Jérusalem, leur est interdite : un jour par an, celui de la
destruction de la ville sainte, il leur est permis de venir pleurer
sur ses ruines. Voy. Adv. lud,, 3, p. 706 0,, et 13. De pud.,
8,7. Euseb., Hist. eccl., 4, 6, 3. Dio Cass., 69, 14,
21,8. amatorem in auro conversum Danaes. *F
P a Danaidis, avec tous les mss de la tradition commune.
Nous n'hésitons pas à attribuer Danaes à F, parce que De la
Barre a Danaes et que Modius ne dit rien, alors qu'il donne
une variante des mots qui suivent immédiatement. Voyez
Ad nat., 2, 13, p. 124, 4, où Tert. explique le sens de cette
légende : c'est à prix d'or que Jupiter a eu accès auprès de
Danaé : et imbrem aiireum pergiilis {immiserit, id est} aditum
pecunia ruperit. Là, il ne prononce pas le nom de Danaé.
Mais Isidore (Etym., 8, II, 35), qui reproduit d'après Tert.
l'explication de toutes ces légendes, dit : modo Danaes (T^)
per imbrem appetisse concubitum ; ubi intellegitur pudicitiam
mulieris ab auro fuisse corruptam.
Havercamp pensait que Danaidis est une glose, parce que
les autres amantes de Jupiter ne sont pas nommées ; mais
amatorem exige un complément déterminatif.
21,8. lovis et ista sunt humana vestra F ; lovis ista sunt
numina vestra. P
Tertullien montre que le Christ est Fils de Dieu, mais qu'il
fut engendré de telle façon qu'il n'a pas à rougir de son
nom de fils ni de sa filiation paternelle. Il pense à l'objection
païenne dont il parle ailleurs : les démons ont inventé les fils
de Jupiter pour discréditer la croyance chrétienne de l'incar-
nation. Voy. 21,14 et 47,11-14. La naissance du Christ n'a
rien de commun avec tous ces crimes que vous commettez
{humana vestra) et que vous attribuez à Jupiter.
Tertullien a expliqué lui-même ailleurs les mots humana
vestra ; en effet, ces mots résument avec concision ce qu'il
dit dans Ad nat., 2,7 et 2,13. Vos dieux sont incestueux, adul-
tères, ravisseurs, parricides. Et il continue : Ride(nduin an
i)rascendum sit taies deos credi quales homines esse non debeant?
236 APPENDICE I
(2,7, p, 107, 4). Quid ergo novi si, qui homines fuerint, humanis
aut casibus aut crimi(nibusy aut fabulis polluuniur ? {Ibid.,
1, 21). Ces Immani casas, ces humana crimina sont appelés ici
liumana vestra. Ce ne sont pas les métamorphoses de Jupiter
en serpent, en taureau, en cygne, en or ; ce sont les crimes
que Tert. vient de mentionner : de sororis incesto, de stupro
filiae, etc. Au chap. 9 déjà, Tert. a montré que les païens s'en
rendent coupables et il peut dire : humana vestra « ces choses
humaines qui vous sont propres, ces crimes que vous commet-
tez, vous qui êtes des hommes, Jupiter les commet aussi, lui
qui est dieu, qui est le maître des dieux ! ».
Cf. Adv. Marc, 2, 16, p. 357, 10 : Satis perversum est, ut in
Deo poîius humana constituas, quam in homine divina.
Rauschen explique donc bien : lovem humano more haec
fecisse fingitis.
Rigaltius lisait : crimina vestri (se. lovis), ce qui est fort
ingénieux, mais contraire à l'idée de Tertuliien. C'est une
de ces corrections qui rendent la pensée plus facile à com-
prendre, mais qui la défigurent. Elle était plutôt digne du
remanieur de P que de Rigaltius.
Après avoir reproduit presque textuellement l'explication
que Tert. (Ad nat., 2,13, p. 124, 1. 4-7) donne de ces légendes,
Isidore (Etym., 8, 11, 25) ajoute : Et ideo non figurae istae
sunt, sed plane de veritate scelera. Unde turpe erat taies deos
credi, quales Jiomines non esse debeant. On voit qu'il combine
deux passages de Tertuliien : Ad nat., 2,7 (ci-dessus) et 2,13,
et qu'il a bien compris humana vestra.
Numina vestra est un non-sens. Les scribes confondent
facilement numina et humana. De plus, c'est une fin d'hexa-
mètre, que les prosateurs évitent, tandis que humana vestra
donne comme clausule un ditrochée. Di Capua, p. 35.
21,9. non nupserat.
De pud., 6, p. 230, 3 : At ubi sermo Dei descendit in carnem
ne nuptiis quidem resignatam et sermo caro factus est ne nuptiis
quidem resignanda ... Sur resignari avec le datif, voy. Hartel,
Patr. St., m, p. 7.
21,11. Et nos autem sermonem atque rationem, itemque
CHAP. 21,9-12 237
virtutem, per quae omnia molitum Deum ediximus,
propriam substantiam spiritum adscribimus.
Sur spiritum, qui manque dans F, voy. p. 41. F a : asscri-
bimus, tandis que P a inscribimus. Tertullien construit ad-
scribere, inscribere, proscribere avec un double accusatif (compl,
direct et compl. attributif). Ch. 44,2 : Quis illic sicarius ...
idem eiiam Christianus adscribitur ? Scorp.,7, p. 159, 16:
Scit et apostolus qualem Deum adscripserit, cum scribit ... De
an., 24, p. 337,7 : quid amplius proscriberet animam, si eam
deum nuncuparet ? Quelle autre qualité assignerait-il à l'âme ?
Sen., De brev. vitae, 16,5: quid aliud est vitia nostra incendere,
quam auctores illis inscribere deos ? Le sens d' inscribere avec
deux accusatifs dérive de celui qu'il a dans les phrases sui-
vantes de Cicéron : eosque (libros) rhetoricos inscribunt (De
orat., 3, 122) ; in eo libro qui Oeconomicus inscribitur (De off.,
2,87).
Adscribere exprime que le nom donné s'ajoute à un autre.
Au nom du « Verbe « (sermo) vient s'ajouter celui de spiritus.
L'accusé qui est qualifié de sicarius, n'est jamais « qualifié
en outre » de chrétien.
21,12. Et cum radius ex sole porrigitur, portio ex summa ;
sed sol erit in radio, nec separatur substantia, sed expan-
ditur, et (sic) lumen de lumine accensum. Manet intégra
et indefecta materia matrix, etsi plures inde traduces
qualitatis mutueris. F
P a: sed extenditur. Ha de spiritu spiritus et de Deo Deus ut
lumen de lumine accensum. — Sur expanditur, pour extenditur,
voy. p. 105. — Sur et pour ut, voy. p. 101, ad 4,3. — Sur les
mots interpolés ici, dans P, ita de spiritu spiritus et de Deo
Deus, voy. p. 74.
Nous croyons que les mots ut lumen de lumine accensum
sont aussi interpolés et peut-être ont-ils amené, dans P, l'in-
sertion des mots Ita de spiritu spiritus et de Deo Deus. Les
uns et les autres nuisent à la suite des idées.
En effet, dans les §§ 11-13, Tertullien essaie de faire com-
238 APPENDICE I
prendre aux païens, la substance du Christ ou le Logos chré-
tien.
Verbe et raison de Dieu, par qui Dieu a tout créé, il est
esprit, car il a été engendré par Dieu, qui est esprit. Fils de
Dieu, il est Dieu lui-même (§ 11). Le Père et le Fils sont un
seul Dieu à cause de l'unité de substance, mais sont deux
personnes distinctes.
Le but de la comparaison qui suit (le soleil et les rayons)
est de faire comprendre 1) l'unité de substance et 2) la dis-
tinction des personnes.
Ailleurs, Tert. se sert de trois comparaisons empruntées
au monde physique. Adv. Prax., 8, p. 238, 25 : nec frutex
tamen a radice, nec fluvius a fonte, nec radius a sole discernitur.
Ibid., 8, p. 239, 8 ; 13, p. 249, 25. Ici, il choisit la troisième :
le rayon qui part du soleil a la même substance que le soleil,
mais il est distinct du soleil (§ 12). Il paraît l'avoir prise à
Athénagore, Suppl., 10 : wç à/nva r^dou.
Les deux phrases qui exposent cette comparaison {Etiam
cum radius, etc., et Manet indefecta, etc.) sont malencontreu-
sement séparées dans P par Ita de spiritu spiritus et de Deo
Deus, qui sont à leur place plus loin, et, en outre, dans F
comme dans P, par une autre comparaison : ut lumen de
lumine accensum.
Cette comparaison de « la lumière allumée à la lumière » (i)
est dans S. Justin, Dial. c. Tryph., 61,2 et 128 : ôttolov i-ni
uupôç ôpwp.ev aXXo y!,vôjJievov. Voy. l'éd. Archambault, p. 286,
note. Elle a été reprise par Tatien, qui imite S. Justin. Adv.
Graec, 5 : wo-Trep yàp duo p.t.à(; BaSoç àvàuTSTaL [i.ev Tiupà
TToXXà. Elle est critiquée par S. Irénée, Adv. haer., 2,4 : si
auteni velut a lumine lumina incensa sunt. S. Irénée ne veut
d'aucune de ces comparaisons empruntées au monde phy-
sique, parce que les Gnostiques en avaient tiré argument.
Celle de la lumière a cependant été reprise par le Symbole
de Nicée : 0£Ôv èx 0eoù, cpwç èx 'fbnôq.
(') Cf. Ennius (Cic, Deofif., i, 51. Ribb., Fragm. scaen.^ Ed. 3,
p. 78, 366) ; q/itist lumcti de suo lumine acccndat. Ovide, cité par
llav. : qiiisvetat accenso luineti de lumine siuni? Thcs. l. /., I, 274, 78.
CHAP. 21,12 239
Ici, elle s'ajoute mal à propos à la comparaison du soleil
et du rayon. Elle ne se rencontre pas dans l'ouvrage Adversiis
Praxean, où Tert. traite longuement du mystère de la Tri-
nité, Lactance, qui s'inspire de Tert., ne la connaît pas non
plus, mais reprend celles de la source et du fleuve, du soleil
et du rayon. Div. inst., 4, 29, 4 : Sed ille quasi exuberans fons
est, hic tamquam defluens ex eo rivus ; ille tamquam sol, hic
quasi radius ex sole porrectus.
C'est donc probablement une addition et elle aura été faite
après la publication du Symbole de Nicée, dans les mss de
Tert., car elle est, connue de VAltercatio dès 366 (i).
Dans F, il reste peut-être un indice de l'addition : c'est et
(qui ne serait pas une faute de copiste pour ut). Dans la tra-
dition commune, on a lu ut et l'on a ajouté un premier terme
de la comparaison : Ita de spiritu spiritus et de Deo Deus.
Havercamp fait aller ces mots avec ce qui suit : Ut lumen
de lumine accensum, manet ... Mais la materia matrix n'est
pas la lumière allumée à la lumière ; c'est la lumière à laquelle
s'allume la lumière.
— P a : materiae matrix. VAltercatio a seulement materia.
(') Altercatio Heracliani laici ctim Germinio episcopo Sirmiejisi. Cet
écrit anonyme a été édité par Caspari, Kirchengeschichtliche Anecdota,
1883, p. 133 et ss. Le laïque orthodoxe Heraclianus tire sa profes-
sion de foi presque littéralement de Tertullien (21, 12-14), sans
nommer celui-ci. Voici le passage (p. 143), d'après W'àva&ck, lier,
der Berl. Ahid., 1895, 11^ p. 565 :
Cum radius ex sole porrigitur, portio ex summa est ; sed sol erit
in radio, quia solis est radius, nec separatur substantia, sed extendi-
tur, ut lumen de lumine accensum. Manet intégra, indefecta mate-
ria, etsi plures inde traduces qualitatum mutueris. Ita et quod de
Deo profectum est, Deus est et Dei Filius, et unum ambo. Ita et de
Spiritu sancto et de Deo modulo. Allerum ergo gradum, non statum
fecit, exinde non discessit, sed excessit. Iste igitur Dei Filius, ut
rétro semper praedicabatur, delapsus in virginem quandam et in
utero eius caro figuratus, nascitur homo Deo mixtus. Caro spiritu
structa nascitur, adolescit, aiïatur et Christus est. Haec mea fîdes.
Cf. Calluwaert, Le Cad. Fuld., p. 348-349.
240 APPENDICE I
Il faut lire avec F : materia matrix. Matrix est très souvent
employé par Tert. dans le sens de « source ijons), origine
{origo), cause ». Ici, Tert. parle du soleil, foyer des rayons
et il l'appelle la « matière-source », la « matière-foyer » (et
non le foyer de la matière). Il aime à apposer un substantif
à un autre, comme un adjectif. Voy. 9, 19 : virgine continentia
et senes pueri ; 21,25 : magistri Dei ; 39,6 : domesticis senibiis.
De praescr., 17 : corruptor stilus. Adv. Hermog., 16, p. 143,
15 : videbitur materia etiam boni matrix. Adv. Marc, 4,35,
p. 541, 19 : matricem religionis et fontem. Ibid., 2, 16, p. 357,
17 : lenitatem dico, patientiam, misericordiam ipsamque matri-
cem earum bonitatem. De praescr., 21 : quae {dodrina) mm
ipsis ecclesiis apostolicis matricibus et originalibus fidei con-
spiret. De resurr., 6, p. 34, 11. De pat., 5, p. 8, 22. De virg. vel.,
5. Adv. lud., 2. Adv. Valent., 7, p. 185, 7. Voy. l' Index d'Oeh-
1er, s. V. matrix.
Traduisons ce § 12 : « Quand un rayon est lancé hors du
soleil, c'est une partie qui part du tout ; mais le soleil est dans
le rayon, parce que c'est un rayon du soleil et que la substance
n'est pas divisée, mais étendue. [Ainsi l'esprit vient de l'es-
prit, comme la lumière qui s'allume à la lumière.] La matière-
source demeure entière et ne perd rien, même si elle commu-
nique sa nature par plusieurs canaux ».
21,13. Ita et quod de Deo profectum est, Deus est et
Dei Filius et unus ambo. Ita de spiritu spiritus et de
Deo Deus, module alter, numerum gradu, non statu
fecit et a matrice non recessit, sed excessit. F
Les mss sont d'accord, excepté : alter F ; alternum P ; alte-
rum Altercatio. — Il faut lire et ponctuer comme nous l'avons
fait. Traduisons littéralement: « Ainsi ce qui est sorti de Dieu
est Dieu et Fils de Dieu, et les deux ne font qu'un. Ainsi
l'esprit qui vient de l'esprit et Dieu qui vient de Dieu, autre
par la mesure, est second quant au rang, non quant à l'état,
et il est sorti de sa source sans s'en être détaché. »
Ce passage important a été généralement mal interprété Q).
(1) H. Schrôrs, p. 1 11-113, a contribué à l'élucider au point de
CHAP. 21,13 241
Nous venons de voir que dans les §§ 11-13, Tert. s'efforce
d'expliquer aux païens la substance du Christ (§ 10) ou le
Logos chrétien et qu'il se sert d'une comparaison pour leur
faire comprendre 1) l'unité de substance et 2) la distinction
des personnes : le rayon qui part du soleil est distinct du
soleil, mais il a la même substance que le soleil (§ 12).
Au § 13 vient l'application de cette comparaison à Dieu
et à son Verbe, à deux points de vue :
1) Ita et quocl ... Unité de substance : ainsi Dieu et le Verbe
proféré par lui sont un quant à la substance, ils sont Dieu,
l'un et l'autre O,
2) Ita de spiritu. Distinction des personnes : ainsi le Verbe
vient au second rang ; le Fils est une deuxième personne,
distincte du Père.
Voilà la suite des idées. Presque tous les mots de la dernière
phrase méritent une explication.
Le sujet de fecit est de spiritu spiritus et de Deo Deus, l'esprit
(qui vient) de l'esprit. Dieu (qui vient) de Dieu. Tert. aime
à déterminer un substantif par un autre substantif précédé
d'une préposition. Ici, le grec pourrait ajouter le participe
présent wv.
Numemm fecit. Pour Tert., numerus (âp'.Qf/o;) est le nombre
supérieur à « un », le pluriel opposé à l'unité : post unum enim
numerus, dit Tert,, Adv. Marc, 1,5, p. 296, 17. De exhort.
cast., 7 : quod non unum est, numerus est. Denique post unum
incipit numerus. Numerum facere, constituer un nombre,
c'est donc « être un second », distinct du premier : una enim
res est, quae eadem in duobus est, dit encore Tert., ib., 1, 26.
Le Fils est « numériquement » distinct du Père, il est une
deuxième personne distincte de la première. Le saint Esprit,
dont Tert. n'avait pas à parler ici, est une troisième personne,
distincte des deux autres. Il y a une hiérarchie des trois per-
vue Ihcologique, mais il a le tort de s'en tenir invariablement à la
lecture de P.
(') Cf. Adv. Hermog., 3, p. 128, 21: scilicet Deus suhstanliae
ipsiiis nomen estj id est difinilalis.
16
242 APPENDICE I
sonnes. Adv. Prax., 13, p. 249, 5 : At ubi venit Christus et
cognitiis est a nobis, qiiod ipse, qui niimerum rétro fecerat,
foetus secundus a Pâtre, et eum Spiritu tcrtius. Ibid,, p. 248,
15 : secundum rationem oeconomiae, quae facit numerum. Tert.
emploie la même expression en parlant des deux dieux de
Marcion, qui sont égaux. Adv. Marc, 1,5, p. 297, 2 : nullam
iam rationem sut numeri ostendunt praestantiam non habentes.
Numerus autem divinitatis summa ratione constare deberet (^).
S. Justin avait déjà vivement insisté sur cette distinction
dans des termes que Tert. semble reprendre. Dial. c. Tryph.,
56, 1 1 : 0eoç êrepôç èo-xi. toÙ xà Tiàvra Tror/ia-avroç Oeoù, âpt,8[/.w
Xéyo), àXXà où yvo){jiri, il est autre (alter) que le Dieu qui a
fait toutes choses, j'entends pour le nombre {numéro dico)
et non pas pour la pensée. Ibid., 62,2 : xal âp'Jfjiw ov-a exepov
xal XoyLxov ÛTcàpyovxa. Ibid., 128 C : oùy^ wç to toù r)).{ou
cpwç dvdp,aT!. p.ôvov àp!.0[j(.erTa!., àXkà xal àpLGp.w hepâv xi è(jxi.
Modulo alter. Le Fils est donc distinct du Père, il est « autre
par la mesure », dit Tertullien. En effet, comme le rayon du
soleil, il est portio ex summa. Adv. Prax., 9, p. 239, 24 : Ecce
enim dico olium esse Potrem et alium Filium et alium Spiri-
tum ..., non tamen diversitate alium Filium a Pâtre, sed dis-
tributione, nec divisione alium, sed distinctione, quia non sint
idem Pater et Filius, vel modulo alius ab alio (alii). Pater
enim tota substantia est, Filius vero derivatio totius et portio,
sicut ipse projitctur : quia Pater maior me est (loh., 14, 28).
A que et minoratus canitur in psalmo (Psalm., 8,6) modicum
quid citra angelos. Sic et Pater alius a Filio, dum Filio maior,
dum alius qui gênerai, alius qui generatur, dum alius qui
mittit, alius qui mittitur, dum alius qui facit, alius per quem fit.
Ibid., 14, p. 250, 24 : et consequens erit, ut invisibilem Patrem
intcllegamus pro plenitudine maiestatis, visibilem vero Fi-
lium agnoscamus pro modulo derivationis, sicut nec solem
nobis contemplari licet, quantum ad ipsam substantiam sum-
(^) Dans un autre ordre d'idées, Tert. (De an., 6, p. 307^ 25)
dit : Secundum sit necesse est quod c.v alio est. Nihil porro ex alio est
7iisi dum gignitur j sed tune duo sunt.
CHAP. 21,13 243
mam, quae est in caelis, radium auiem eius toleramus oculis
pro temperatura portionis, quae in teiram inde porrigitur.
Adv. Marc, 3,6, p. 385, 1 1 : Concédas necesse est, qui Patrem
non agnoverint, nec Filium agnoscere potuisse per eiusdem
substantiae condicionem, cuius si plenitudo intellecta non est,
multo magis portio certe, qua plenitudinis consors.
Modulus désigne une unité de mesure, ce qui sert de mesure.
Il est diminutif de modus et synonyme de modus et de men-
sura « mesure, dimensions », De an,, 32, p. 354, 9, Tert. admet
que l'âme a une sorte de corps, une figure (effigies) et des di-
mensions et il oppose cette conception aux théories de la
migration de l'âme dans des corps d'animaux qui sont, dit-il,
trop grands ou trop petits pour la contenir : ipsius animae
humanae quisquis modus, quaecumque mensura, quid faciet
in amplioribus longe vel minutioribus animalibus ? Ibid,,
1, 16: si nulla ratione capax est luiiusnwdi translationis in
animalia nec modulis corporuni nec ceteris natwae suae legibus
adaequantia. De an,, 37, p, 364, 7 (dans l'homme, l'âme et
le corps se développent en même temps) : crescunt caro mo-
dulo (en volume ou en dimensions), anima ingénia. L, 11 :
salvo substantiae module, la mesure, la quantité de substance
que l'âme possède dès l'origine, demeure la même, — Prenez
une masse d'or brut : elle contient, dans les limites de ses
dimensions, tout ce qui est la nature de l'or, Ibid,, 1, 14 :
continens intra lineam moduli totum quod natura est auri. En
travaillant cette masse d'or, on n'ajoute pas à sa mesure,
on lui donne une forme : nihii conferens modulo nisi effigiem.
Au figuré, permittente modulo delicti (De pud,, 14, 26), le peu
de gravité de la faute permettant (le pardon).
Le Verbe est donc « un autre » que le Père, une seconde
personne distincte de la première, et il est « autre par la me-
sure » (moindre que celle du Père), Cette façon de parler,
suggérée par la comparaison du soleil et du rayon, les mots
portio et modulus surtout, ont fait accuser Tert. de subordi-
nationisme (i), Voy, J, Tixeront, Hist. des dogmes, I, p, 337,
(') Au ch, 23, 12, Tert. dit que le Fils de Dieu est JJei onmia,
suivant S. Jean, 16, 15 : omnia quaecumque habet Pater, mea sunt,
244 APPENDICE I
Adh. d'Alès, Théologie de Tert., p. 69. Freppel, Tert., II,
p. 288-313.
Gradu, non statu. Le Fils est donc autre que le Père par
la mesure et il est second. A quel point de vue ? A quoi s'ap-
plique cette mesure ? Gradu, non statu « au point de vue du
rang, de l'ordre de succession, non au point de vue de l'état ».
Quant à l'état, comme quant à la substance et quant au
pouvoir, il est l'égal du Père (et du Saint-Esprit) ; quant au
rang, comme quant à la forme et à l'espèce, il lui est inférieur.
En effet, il vient au second rang (gradu), puisqu'il procède
du Père, (et l'Esprit saint vient au troisième rang, puisqu'il
procède du Père et du Fils). Adv. Prax., 4, p. 232, 5 : in ter-
tium gradum. Ibid., 30, p. 288, 9 : tertium nomen divinitatis
et gradum maiestatis. Ce n'est pas autre chose que la hiérar-
chie des personnes divines, c'est l'ordre des processions. Adv.
Prax., 2, p. 230, 1 : très autem non statu, sed gradu, nec subs-
tantia (t-?, oùgU], sed forma (ttj UTïoo-Tâa-eO, nec potestate, sed
specie, — unius autem substantiae, et unius status, et unius
potestatis, quia unus Deus, ex quo et gradus isti et Jormae et
species in nomine Patris et Filii et Spiritus Sancti deputantur.
{Qui} quomodo numerum sine divisione patiuntur, procedentes
tractatus demonstrabunt. Cf. Athenag., Suppl., 10 ; 12 ; 24 :
TYjV èv T'^ svoWs'. oûvaiji'.v xal Tr,v èv tt] Ta^e». o'.aipeo-'.v.
La leçon de P et celle de V Aller catio ne se comprennent pas ;
c'est parce qu'on les a suivies qu'on a eu de la peine à com-
prendre ce passage capital.
21,14. Caro spiritu structa (instructa P) nutritur, ado-
lescit, adfatur, docet, operatur et Christus est. Recipite
et i2j lo: et mea omnia tua sunt. Cf. Adv. Prax., 2, p. 229, 3 :
quasi 71011 sic quoqiie unus si/ omnia, duni ex u7io omnia, per suh-
sta7itiae scilicet unitateiii.Yb'xù.., 17, p. 239, 3 : 07imia, i7iqtiitj Patris
7ncasuut. De carne Chr., 19, p. 456 O. : Dierilo, quia Vcrbu7/i Dei.,
et cum Verho Dci SpiritiiSj et in Spiritu Dei Virlus, et quidquid Dei
est Christus. Dans ces passages et ailleurs, Tert. proclame l'égalité
complète des personnes divines et il semble que les comparaisons
dont S. Irônée se défiait, aient parfois enlevé sa précision à la pensée
et à l'expression de TertuUien.
CHAP. 21,14 245
intérim haiic fabulam — similis est vestris, — dum osten-
dimtis, quomodo Christus probetur, etc. F
F et- P sont d'accord, excepté que F a stnida et P, instruda.
— Stnida est confirmé par VAltercatio. Instruda est une cor-
rection erronée d'un remanieur, qui ne savait pas que Tert.
a l'habitude d'employer stntdiis clans le sens cVinstrudus {^).
11 a fait comme certains éditeurs modernes dans les passages
que nous allons citer. Caro désigne la nature humaine et spi-
ritiis, la nature divine, qui sont unies dans le Verbe incarné.
Cf. § 1 1 : nani et Deus spiritus.
Voici des exemples de strudus. Adv. Prax., 8, p. 238, 10 :
Quis autem scit qiiae sint in Deo, nisi spiritus, qui in ipso est ?
Sernio (= Verbunï) autem spiritu strudus est et, ut ita dixerini,
sermonis corpus est spiritus. De carne Chr., 8 : caro igitur
Ctiristi de caelestibus struda. Ibid. : ipswn diani Cliristwn
in carne terrena fuisse caelestem. De resurr., 61, p. 123, 7 :
quoi stériles utriusque naturae injruduosis genitalibus strudi.
De an., 10, p. 312, 23 : honio, si pulmonibus et arteriis strudus
est. De an., 10, p. 313, 26 : et idcirco ea spiritu carere, quia
de flaturalibus artibus struda non sint. Dans le passage suivant,
Oehler propose de lire instrudae. De virg. vel., 9 : scilicet ut
experimentis omnium adfeduum strudae {maires). Dans celui-
ci, Kroymann conjecture instruxerat. Adv. Marc, 4, 24, p.
500, 7 : sicut et egituram {expeditionem suorum) per solitu-
dinem struxerat. Voy. Oehler, Index verb., s. v. strudus et struo.
Le traité Quod idola, 11, qui copie Tert., dit : carnem Spi-
ritus sandus induit ur.
— Hanc fabulam. Tert. emprunte le langage des païens :
cette « fable », comme vous dites. On n'a pas assez remarqué
que Tert. adopte parfois le langage de ses adversaires, sans
nous en avertir. Au ch. 23, 12, il reprendra l'expression : et
(•) Lôfstedt, p. 33, fait remarquer que la faute pourrait venir
d'un i prosthétique. W. Liiidsay, Die latein. Sprache, p. 120. Lach-
mann, Lucretius, 4, 283. 11 fait la même observation ?,uv inspirât (F)
pour spiral {V) au ch. 27, 5. Au cliap. 50, w, \^ a au contraire
scribitis pour inscribitis.
246 APPENDICE I
guis ille Christus cum sua fabula. Au ch. 39, 1, il dira factio
Christiana, ce que vous appelez la faction chrétienne.
— Eiusmodi fabulas ad destructionein veritatis aemulas.
L'idée que les démons ont inspiré aux poètes et aux philo-
sophes des fables analogues aux mystères chrétiens pour
discréditer ceux-ci, a été empruntée par Tert. à S. Justin, son
maître. Adv. Valent., 5. 11 y reviendra au ch. 47, 11-14. Voy.
S. Justin, Apol. I, 54, 2. Dial. c. Tryph., 69-70.
21.16. Ne enim intellegerent pristinum... nieritum fuit
delictum eorum P ; nec intellexerunt pristinum... meri-
tum fuit delictorum F
Le texte de F est corrompu. Cf. Quod idola dii non sint, 12 :
quod autem hoc ludaeorum populus intellegere non potuit,
delictorum meriium fuit. L'auteur de cet écrit (S. Cyprien ?)
suit de très près tout ce chapitre de Tertullien. — Dans F,
les mots nec intellexerunt pristinum ne font que répéter ce
que Tert. a dit dans la phrase précédente : primum non intel-
legendo. En outre, les mots meritum fuit delictorum exigent une
proposition complétive : ne intellegerent. Le § 16 explique
la cause de l'aveuglement qui a empêché les Juifs de compren-
dre la première venue du Christ. Enim introduit bien cette
explication.
P. a : meritum fuit delictum eorum, leur péché a mérité que
... Meritum fuit = meritum est. Barraeus a imprimé : meri-
tum fuit delictorum, et il allègue le Quod idola, 12 (voy. ci-
dessus) ; Modius ne donne pas de variante. Il est donc pro-
bable que F était d'accord avec le Quod idola, ce qui plaide
en sa faveur. Il donne d'ailleurs une bonne clausule (un dis-
pondée précédé d'un crétique),
21.17. inluminaret caecos *F ; reluminaret caecos P
Le traité Quod idola, 13, dit : inluminaret caecos. En effet,
S. Jean, 9, 1, dit : Vidit hominem caecum a nativitate. On ne
rend pas la vue à un aveugle-né. Dans les autres guérisons
d'un aveugle, il est dit : caecus et Domine, ut aperiantur oculi
nostri (Mattli., 20, 33), Rabboni, ut videam (Marc, 10, 51).
Cf. Marc, 8, 22-26 ; Luc, 18, 35-43. En parlant de Stésichore,
CHAP. 21,16-19 247
qui recouvre la vue, Tert. devait dire reluminare. De an,, 34,
p. 359, 14 : qiiem excaecasset ..., deliinc reluminasset ... — Cf.
De carne Chr., 4, p. 448 0. : caecam (carnem) reluminat (Chris-
tus). C'est la leçon de A ; les autres mss ont perluminat, d'après
Oehler.
21.18. Syriam tune ex parte Romanam procurant! F ;
Syriam tune ex parte Romana proeuranti P
Ce passage a été correctement reproduit par le traité Quod
idola, 13, p. 30,3 : qui tune ex parte Romana Syriam procu-
rabat.
Ponce Pilate était procurateur de la Judée, mais Tert.
donne à la Judée le nom qu'elle portait de son temps ; il
l'appelle tantôt Syria Palaesiina (5,2), tantôt Syria (21,18).
Lactance, Div. inst., 4,18, dit de Ponce Pilate : qui tune legatus
Syriam regebat. C'est également un anachronisme ; en effet,
c'est seulement depuis la prise de Jérusalem par Titus (an 70),
que la Judée eut pour gouverneur un legatus Augusti pro
praetore provinciae Syriae Palaestinae.
Les mots Syriam tune ex parte Romanam ne pourraient
signifier autre chose que « la Syrie qui était alors romaine
en partie », ce qui est faux et ne convient pas ici. Si l'on cons-
truit : Syriam Romanam tune ex parte proeuranti, on ne voit
pas pourquoi Tert. dirait Syriam Romanam, car il n'y avait
pas de Syrie non romaine. En outre, la place de Romanam
serait étrange. C'est pourquoi nous avons admis que le scribe
de F a fait faussement accorder Romanam avec Syriam et
qu'il faut lire : ex parte Romana (= ex parte Romanorum) « au
nom des Romains )\ Tertullien dit ex parte alieuius au lieu
de ab parte alieuius. Voy. Heumann-Seckel, Handlcxikon,
406.
21.19. Ratione non deprehensa, negaverunt F
Sur cette phrase, voy. ci-dessus, p. 45. — Sur l'abl. abs., com-
parez encore Ad nat., 2,2, p. 96,4 : Inventa enim solummodo
Deo, non ut invenerunt exposuerunt. Cf. 47,5 : Inventum enim
solummodo Deuni non ut invenerant disputaverunt.
248 APPENDICE I
21,21. Sed ad tertium diem F ; sed ecce tertia die P
A la question quando, on trouve ad avec l'ace. De orat,,
25, p. 197, 20 : ad nonam. Voyez d'autres exemples dans le
Thés. l. L, II, 556, 48, Comme cette construction est beaucoup
plus rare que l'abl,, le remanieur de P l'aura remplacée par
la construction ordinaire en ajoutant ecce. Il est peu probable
qu'il eût fait l'inverse.
21.21. nihil in sepulcro repertum est praeter exuvias
sepulturae F
P a : praelerquam exuviae sepulti. Cf. Luc, 24, 12 : Petriis
... vidit linteamina sola posita. Ce sont les dépouilles de celui
qui a été enseveli {sepulti). Sepulturae est l'abstrait, que Tert.
met souvent pour le concret. Le remanieur de P l'aura trouvé
obscur. S'il avait trouvé le concret dans le texte de Tert., il
ne l'aurait pas remplacé par l'abstrait (i),
21.22. et populum vectigalem et famularem sibi a fide
avocare F
P a revocare, ce qui donne une fin d'hexamètre, tandis que
avocare donne un ditrocliée. Le remanieur de P se sera rappelé
le § 18, où Tert. a dit qu'une multitude immense affluait vers
le Christ : maxime quod ingens ad eum multitudo conflueret
et il aura cru qu'il fallait dire ici revocare.
Au même § 18, Tert. a dit : niagistri primoresque ludaeo-
rum ; ici, il répète : Nihilominus tamen primores ludaeorum
(F), Dans P, ludaeorum est tombé, peut-être à cause du mot
suivant {quorum) qui a la même désinence.
21.23. in caelum est ereptus F ; in caelum est receptus P
(') H. Sjôgren (^ynnos, 13, 1913,15. 140-141), a défendu la leçon :
maiorum nosirortim sepulturae contre la vulgate : sepultae reliquiae,
dans Ps.-Cic, Epist. ad Octavianum, 9, en montrant que sepulturae
et sep7ilcra peuvent être mis pour homines s<:/?f//2, Catulle, 96, i.
Ovide, Fast., 2, 33, Cf, Lôfstedt, p. 95-96.
CHAP. 21,21-27 249
Adv. Marc, 5, 8, p. 589, 19 : t7 Christo in caeluin recepto
De pud., 11,3 : Nenio Cliristianus ante Cliristum caelo resump-
tuni. De virg. vel,, 1 : receptum in caelis. Ad nat., 1,10, p.
78,1 : (alicuiyus in caelum recepti. Adv. Prax., 2 : in caelo
resuniptum sedere ad dexteram patris. De praescr., 13,4 : in
caelos creptuni sedisse ad dexteram patris. De bapt., 19 : tune
in caelos recuperato eo. Ibid, : in caelos conscendit. De rcsiirr.,
50, p. 105, 7, et Adv. Prax., 30 : ascendit.De an., 55, p. 388,15 :
nondum illis, quosDomini adventus in saeculo invenerit, obviam
ei ereptis in aerem.
Marc, 16, 19 : adsiimpfus est in caelum. Act. apost., 1,9 :
elevatus est et in caelum euntem illum.
21,23. multo verius quam apud vos adseverare de Romii-
lis Proctili (de Romulo Proculi P) soient. F
A chaque apothéose impériale, quelqu'un jouait le rôle
de Proculus. De même que les empereurs divinisés sont des
Romulus, qui s'élèvent du bûcher vers le ciel, de même les
témoins qui viennent jurer au sénat qu'ils les ont vus s'élever,
sont des Proculus. De spect., 30, p. 28,21 : tôt spectans reges
... cum love ipso et ipsis suis testibus in imis tenebris conge-
mescentes. S. Justin, Apol. I, 21, 3 : xal -ri yàp ()iYop.ev) xoùç
àTroGv/ia-xovraç iiap' 'jjj!.!^v aÙTOxpaTopaÇ; ouç àel à-Ka^ayaxi-
^eo-Sa'. à^ioôvzec, xal ôj^-viivra T'.và TpoàysTS éwpaxévat êx Tviç
Tcupâç àvepyo[j.evov £''<; tov oÙ^o.vov tov xaTaxaévra Kaia-aoa ;
Le pluriel de Romulis est donc nécessaire et ce n'est pas
le pluriel pour le singulier, car Tert. ne parle pas de Romulus
et de Proculus, mais des empereurs et de ceux qui jouent
le rôle de Proculus.
21,25. a ludaeis persequentibus F
P a : insequentibus. Tertullien dit insequi « persécuter »
(2,18 ; 50,1), insectatores veritatis (46,6) et perseculores nostri
(31,2). Dans V Apologétique, il n'emploie pas le verbe persequi
dans le sens de « persécuter ».
21,27. et honorem F ; et culturam et honorem.
Et culturam semble être une glose de et honorem, amenée
par le verbe coli et colit, répété quatre fois.
250 APPENDICE I
21.28. per eum se cognosci et coli Deiis voluit F ; per
eum et in eo se cognosci et coli Deus vult. P
Per eum exprime l'idée que Tert. a développée dans tout
ce chapitre et qu'il vient de formuler : Deum colimus per
Cliristum. Voy. ci-dessus, p. 231. C'est sur per eum et non sur
in eo qu'il va raisonner au § 29 : et ipsi Deum per Moysen
colère didicerunt. Cf. 23, 18: per Christum et (= etiam),in
Deum credimus, où P porte faussement : in Christo domino
credimus. Voy. ci-dessus, p. 118.
In eo exprime une autre idée : c'est une addition malen-
contreuse. Cf. 23, 15 : Christum timentes in Deo et Deum in
Christo, subiciuntur (daemones) servis Dei et Christi.
Le parfait voluit (double crétique) vise les desseins de Dieu
réalisés historiquement. Vult exprime une volonté qui dure
toujours. Ici, Tertullien envisage la manière dont Dieu s'est
fait connaître aux hommes, par le Christ, comme il s'est fait
connaître aux Juifs par Moïse, comme les Grecs ont connu
leurs dieux par Orphée, etc.
21.29. et ipsi Deum per Moysen (per hominem Moysen P)
colère didicerunt F
Hominem convient au contexte : si le Christ, qui nous a
fait mieux connaître Dieu, est un homme, les Juifs n'ont
rien à nous reprocher ; car c'est un homme, Moïse, qui leur
a appris à adorer Dieu. — Mais tout le monde sait que Moïse
est un homme et il n'est pas besoin de le dire. Tert. ne prend
pas non plus soin de dire qu'Orphée, Musée, Mélampe, Tro-
phonius et Numa étaient des hommes. Hominem paraît donc
être une addition d'un lecteur, qui a voulu mettre les points
sur les i. 11 en est de même de rem propriam au § 30. Haver-
camp disait déjà : glossam puto.
21,29. qui Romanes operosissimis superstitionibus one-
ravit. FP
Operosus est synonyme de negotiosus, qui donne beaucoup
d'ouvrage, de peine et de gêne {molesius). Tert. applique ces
CHAP. 21,28-30 251
deux mots aux rites multipliés et fatigants de Numa et des
Juifs. Adv. Marc, 2,18, p. 360, \\ : et oblatioimm negotio-
tiosas scnipulositates. Ibid., 2,19, p. 360, 28 : et rude m obseqiiio
fidem operosis officiis dedolantis. Adv. Marc, 2,29, p. 375,28 :
si operosiore destructione earum egeret dejensio creatoris. 1,29,
p. 331, 7: cibi ... operosiiis exquisiti. De an,, 2, p. 302, 18:
operositas suadendi. De virg. vel., 16 : niliil est illi carias hiimi-
litate, nifiil acceptius modestia, nihil operosius gloria et studio
liominibus placendi. Ad nat., 1, 4, p. 63, 29 : Sed veritatem
saeculo operosissiinam philosophi quidcm adfectant, possident
autem Christiani. De praescr., 40, p. 38, 10 0. : Ceterum si
Numae Pompilii superstitiones revolvamus, si sacerdotalia
officia et insignia et privilégia, si sacrificalia niinisteria et
instrumenta et vasa ipsorum sacrificiorum ac piaculoruni et
votorum curiositates considercmus, nonne manifeste diabolus
morositatem illam ludaicae legis imitatus est ? De cultu fem.,
2, 10 : operositas.
21,30. LicLierit et Christo commentari divinitatem (rem
propriam addit P), non qua rudes (rupices P) et adhuc
feros iiomines multitudini tôt nominum (/. numinum)
demerendorum adtonitos efficiendo ad humanitatem
temperaret, quod Numa, sed quod (quia P ; lege : qua)
... ocularet. F
Rupices (P) doit être préféré à rudes (F), comme étant la
lectio difficilior. Tort, emploie ailleurs le mot rare et archaïque
rupex. De an., 6, p. 307, 5 : quid autem facient tôt ac tantae
animae rupicum et barbarorum, quibus alimenta sapientiae
desunt ? De pallio, 4, p. 934 0. : ille apud rupicem et silvi-
colam et monstrum eruditorem (se Chironem Centaurum),
Ibid., p. 941 0. : rupices in urbanis.
Rem propriam est une addition du remanieur de P.
Orphée, Musée, Mélampe, Trophonius et Numa ont appris
aux Grecs et aux Romains à adorer les dieux grecs et romains.
Le Christ s'est présenté aux hommes comme Dieu : il a, disent
les païens, inventé sa propre divinité (§ 31 : ista divinitas
Cliristi). Un lecteur aura voulu marquer cette différence en
252 APPENDICE I
ajoutant rem propriam, ce qui est exact, mais ne convient
pas ici. En effet, divinitatem est déterminé autrement et suf-
fisamment par non qua ... sed qiia — non ut ea ..., sed ut ea ...
Le sens est donc : « Il a pu être permis de même au Christ
d'inventer la divinité qui lui a servi non pas à tirer les hommes
de la barbarie, mais à ouvrir leurs yeux à la vérité ». Sed qua
est devenu sed quod par l'influence de quod Nwna, qui pré-
cède.
Licuerit est un subjonctif suppositif : « qu'il ait été permis »,
il est possible que le Christ ait pu, vous pouvez croire que le
Christ a pu...
Tert. emploie souvent licet dans un sens particulier: « il m'est
permis, il m'est donné de, j'ai l'avantage ou le privilège de ... »
Voy. 38, 5 : Licuit Epicureis aliam décerner e voluptatis veri-
tatem, les Epicuriens ont pu (ont eu le privilège de) décréter
une nouvelle vérité sur le plaisir. 9, 17 : quantum liceat erro-
ribus vestris. 22, 5 : Multum licet ... De pat., 15, p. 22, 17 :
Quantum patientiae licet, ut Deum liabeat debitorem I Admi-
rable privilège de la patience d'avoir Dieu pour débiteur 1
Adv. iud., 9 : Licuit ergo et Christo Dei ... ense sermonis Dei
praecingi figurato.
Sur commentari, inventer, voy. 40, 10 : et alios deos sibi
commenta. Ce sens est archaïque (Plante). Sur le sens ordi-
naire, voy. 10, 7.
Sur adtonitos efficiendo, voy. De spect., 25, p. 25, 3 : pacem,
opinor, habebit in animo contendens pro auriga, pudicitiam
ediscet attonitus in mimas. — Attonitus, avec l'abl. de cause
ou avec le datif, ou avec in et l'ace, signifie « étonné devant
une chose » et de là « attentif à une chose ». C'est un sens
affaibli. Apulée, Met., 4,22 : Huic me operi attonitum clara
luce oppressa. 11 est aussi employé sans complément. De
praescr., 43 : diligentia attonita et cura sollicita. Thés. l. /.,
II, 1157, 40.
21,31. Quaerite ergo si vera sit ista divinitas Christi, si ea
est, qua cognita sequittir ut falsae renuntietur F
Quaerite igitur si vera est ista divinitas Christi. Si ea
est, qua cognita ad bonum quis reformatur, sequitur ut
falsae renuntietur P
CHAP. 21,31 253
Ici, les différences sont importantes et nous croyons que
dans P il y a des additions qui défigurent le sens.
Tertullien vient de dire aux païens : Notre religion est telle
que je viens de l'exposer. Nous croyons en Dieu par le Christ.
Môme si vous regardez le Christ comme un homme,vous n'avez
rien à nous reprocher. En effet, il a fait comme Moïse, Orphée,
et Numa qui vous ont fait croire aux dieux pour vous tirer
de la barbarie. Mais vous pouvez croire qu'il a été permis
au Christ aussi d'inventer la divinité par laquelle il a ouvert
nos yeux à la vérité.
Par conséquent, il ne vous reste qu'une chose à faire : cher-
chez si cette divinité du Christ est vraie, cherchez « si cette
divinité est celle dont la connaissance a pour conséquence
qu'on renonce à la fausse divinité », ou « celle qu'il suffit de
connaître pour renoncer à la fausse divinité ».
Tert. introduit souvent l'interrog. indirecte par si. Voy.
6,1 ; 8,4 ; 13,2 ; 23,12 ; 25,4 ; 29,1. Il aime aussi l'anaphore
oratoire de 5/, comme aux ch. 6,1 ; 23,12 et 29,1. Il met le
verbe subordonné à si plus souvent à l'indicatif qu'au sub-
jonctif. Hoppe, Syntax, p. 73. Ici, le premier verbe est au
subj. {si ver a sit F; si ver a est P), mais le deuxième est à l'in-
dicatif (si ea est), pour appuyer sur la réalité du fait : « si elle
est (réellement) celle...
Si ea est, qua cognita sequitur ut ... Sequitur ut marque, une
conséquence logique, nécessaire, naturelle et l'on peut le
traduire par « nécessairement, naturellement ». La connais-
sance de la divinité, dont le nom a le pouvoir de faire fuir
les démons, de leur arracher l'aveu de leurs mensonges (voy.
ch. 23) a pour suite nécessaire qu'on renonce aux faux dieux
qui ne sont que des démons. Si ea est qua cognita ne veut pas
dire : si ea est, ut ea cognita ... Le verbe de la prop. relative
(sequitur) n'est pas au subjonctif, parce que cette proposition
ne marque pas la conséquence, mais seulement un fait réel.
Cic, Ad fam., 15, 4, W : tu es is, qui me tuis sententiis sae-
pissime ornasti, tu es celui, tu es l'homme qui m'a souvent
honoré de son suffrage. Kiihner, Ausf. Gramm., 2, p. 856,
A. 5. Tert. dit donc : Cherchez si la divinité du Christ est celle
(est la divinité) qu'il suffit de connaître pour qu'on renonce
254 APPENDICE I
à la fausse (divinité), surtout quand on a reconnu que ces
faux dieux ne sont que des démons.
nia onini ratione, désigne les démons. Voy. 2, 18. Quand
on saura que les démons se font passer pour des dieux et qu'il
n'y a pas d'autres dieux (23, 11), on renoncera à ces faux dieux.
Or, c'est le nom du Christ qui a le pouvoir de leur arracher
ces aveux (23,15).
— Dans P, ce passage a été embrouillé par un remanieur
qui y a introduit une idée étrangère.
C'est par les aveux des démons que Tert. veut montrer aux
païens que le Christ est Dieu : il l'a annoncé au § 26, il le
répète ici et il va le faire dans les ch. 22-23. Ce n'est pas par
l'efficacité morale du christianisme qu'il va démontrer la
divinité du Christ : si ea est, qiia cognita ad bonum quis refor-
matiir. Le remanieur s'est souvenu des ch. 3,1-3 et 49,2, où
il est question de l'effet moral que produisent les conversions.
L'expression elle-même semble formée d'après 1,10: Quanti
enim ad malum reformantur ! Les mots in agnitionem veri-
tatis ont pu suggérer l'idée.
22,1. Socrate ipso ad daemonis (daemonii P) arbitrium
exspectante. Quidni ? cum ipsi (et ipsi P) daemonium
a pueritia adhaesisse dicatur, dehortatorium plane a
bono. F
On traduit presque toujours : Socrate lui-même attendait
la volonté de son démon (pour s'y conformer) «. La grammaire
et le sens exigent qu'on traduise : « Socrate attendait, c'est-
à-dire, s'abstenait d'agir, obéissant à la volonté d'un démon,
si telle était la volonté d'un démon » (i). On sait que la voix
intérieure, l'inspiration divine, dont les écrivains postérieurs
ont fait un démon, ne se faisait entendre que pour détourner
(') Il faut rectifier d'après ceci ce que nous avons dit de ce pas-
sage dans le Bu//, de /'Acad. roy. de Be/g., Classe des Lettres, mai
1912, p. 387.
CHAP. 22,1 255
Socrate de ce qu'il avait résolu Q). S'il pouvait agir, la voix
se taisait. Ici, cette phrase amène la plaisanterie dehoriato-
rium plane a bono, que Tertullien reprend ailleurs. De an.,
1, p. 299,23 : Sam Sacrâtes facilius diverso spiritu agebatur,
siquidem aiunt daemonium illi a puero adhaesisse, pessimum
rêvera paedagogum, etsi post deos et cum deis daetnonia depu-
tantur pênes poetas et philosophas. « Détestable maître, s'il
en fut, pour un enfant «. La voix se faisait entendre depuis
l'enfance de Socrate. De an., 39, p. 366, 29 : Sic igitur et
Socraten pnerum adhuc spiritus daemonicus invenit. Chap.
46,5 : Socratis vox est : « Si daemonium permittat ».
Exspectare est donc employé absolument, « rester dans
l'expectative, s'abstenir d'agir, suspendre son activité »,
comme dans Cicéron, Pro Cluentio, 90 : paucos dies exspec-
tasset Quinctius. Apud Non., 498, 30 = Fragm. phil., F, V,
83 : et qui exspectat, pendet animi.
Ad signifie secundum a suivant, conformément à » et l'on
dit : ad auctoritatem, ad arbitrium, ad nutum, ad voluntatem
alicuius agere aliquid. Thés. l. /., I, 549, 69 ss. et II, 413, 66.
C'est à tort qu'on a accusé Minucius d'avoir altéré la tra-
dition (2) en disant : Eos spiritus daemonas esse poetae sciunt,
philosophi disserunt, Sacrâtes novit, qui ad nutum et arbitrium
adsidentis sibi daemonis vel declinabat negotia vel petebat (26,9).
On lui a reproché de croire à une intervention directe du
démon de Socrate, aussi bien pour conseiller d'agir que pour
détourner.
(') Platon, Apol., 19, fait dire à Socrate : àel à-oxçinzi \i.z tou-
tou, o av jxÉXXfo TrpaTTstv, TrpoTpsTrôi oï outtots. Cicéron, De Div.,
1,122: Hoc 7iiinirum est illud, quod de Socrate acccpimus, quoique
ah ipso in lihris Socraticorum saepc dicitar, esse divitium quiddanii
quod ô«t[/.o'v'.ov appellat, ctii semper ipse partierii numquam impellenti,
saepe revocanti.
(^) R. Heinze, p. 407-408. Nous avons commis nous-même cette
erreur après d'autres dans notre édition classique de Minucius Félix
(Bruges, Desclée). Nous l'avons corrigée dans le mémoire cité plus
haut, p. 254, n. I.
256 APPENDICE I
Lactance, Div, inst., 2, 14, 9, semble avoir repris exacte-
ment l'idée de Minucius Félix, en disant : et Socrates esse circa
se adsiduum daemona loquebatur, qui puero sibi adhaesisset,
cuius nutu et arbitrio sua vita regeretur.
Quand le démon juge que Socrate ne doit pas agir, il fait
entendre sa voix pour le détourner ; quand il veut le laisser
agir, il se tait. Dans l'un et l'autre cas, Socrate reconnaît la
volonté de son démon et c'est sur cette volonté qu'il règle
sa vie, dit Lactance ; c'est à cette volonté qu'il obéit quand
il entreprend une affaire ou quand il y renonce, dit Minucius
Félix (1). Ce langage nous paraît se concilier entièrement avec
la tradition. Minucius Félix et Lactance négligent une dis-
tinction qui n'avait pas d'importance pour eux. Tertullien
ne la rappelle pas d'une manière précise, mais y fait allusion.
L'histoire était connue de tous les gens instruits et tous les
lecteurs comprenaient. Il serait bien téméraire de conclure
de ces passages que Minucius Félix s'est inspiré de Tertullien
ou vice-versa, comme l'a fait Heinze, p. 407-408. .
Il faut noter que les apologistes reconnaissent dans le dé-
mon de Socrate et dans tous les démons dont parlent les
poètes et les philosophes, des esprits du mal, dans le sens
chrétien.
M. Heinze s'est trompé aussi, à notre avis, sur le sens des
mots : Eos spiritus daemonas esse poetae sciunt.
A l'époque de Minucius Félix, de Tertullien et d'Apulée,
les auteurs païens appellent démons des êtres spirituels infé-
rieurs aux dieux, mais supérieurs aux hommes, ayant leur
demeure entre le ciel et la terre. Apulée, De deo Socr., 6 ; 13.
De Platone, 1,11. Apol, 43. Maxime de Tyr, 14,6 ; 15. C'est
l'idée de Platon. Tim., p. 48 de. Phaedr., p. 246 e. Symp.,
p. 202 E. Epinom., p. 984 de. En outre, ils reconnaissaient
ces démons dans tous les passages des poètes et des philo-
(') Nous venons de voir que Cicéron fait dire aussi à Socrate
qu'il a toujours obéi à son démon. Puis il ajoute, en précisant, que
ce démon ne l'a jamais poussé à agir et qu'il l'a souvent détourné
d'agir.
CHAP. 22,1 257
sophes antérieurs, où ils trouvaient le mot démon, par ex,,
dans Homère et dans Platon. Ils ne prenaient pas garde que
l'idée exprimée par ce mot a varié depuis Homère jusqu'à eux.
Les auteurs chrétiens adoptent ces idées de leurs contem-
porains et partout où les païens parlaient de démons, ils
voyaient des esprits du mal dans le sens chrétien.
Minucius Félix affirme d'abord l'existence d'esprits impurs,
déchus de leur force céleste, qui cherchent à perdre les hom-
mes. Il n'hésite pas à reconnaître ces esprits dans les démons
des poètes, des philosophes, dans le démon de Socrate, dans
les démons des mages et dans ceux de Platon. Suivant les
idées de son temps, il va jusqu'à dire : « Que ces esprits soient
les démons, les poètes le savent, » etc., comme si les poètes
donnaient ce sens au mot démon.
M. Heinze (p. 407) s'en étonne et il dit : « Ici on demeure
interdit. S'agit-il donc de définir ce que sont les démons ? 11
fallait dire : Ces esprits méc'''qnts, nous les appelons « démons»,
et vos poètes, vos philosophes et vos mages connaissent aussi
ce nom de démons. Minucius ne pouvait pas invoquer sérieu-
sement l'autorité des poètes, des philosophes et des mages
en faveur de la nature des esprits qu'il vient de dépeindre ». —
Nous répondons : c'est pourtant bien sur l'existence et la
nature des esprits impurs et pervers, dont il vient de parler,
que M. F. allègue l'autorité des poètes, des philosophes et
des mages : Eos spiritus daemonas esse poetae sciant, pliilo-
soplu disserunt ... « Que ces esprits impurs soient les démons,
les poètes le savent (sciunt), les philosophes l'enseignent
(disserunt) (^), Socrate ne l'ignore pas ... » (-). Et, n'en dé-
plaise à M. Heinze, il pouvait invoquer cette autorité devant
ses contemporains, parce que tous croyaient qu'Homère,
(') Remarquez que les philosophes ne disserient pas sur le nom,
mais sur la nature des démons, sur leur action.
C^) 11 se résume lui-même au commencement du ch. 27,1 : Isii
igitur impuri spirilus, dneinones, ut ostensuin magis ac philosophis {ma-
gis a philosopliis et a Platone P). « Donc ces esprits impurs, les dé
mons, comme l'ont montré les pliilosophes et les mages... »
17
258 APPENDICE I
Hésiode, Platon, etc., avaient employé le mot « démon »
dans le sens qu'on lui donnait à l'époque d'Apulée, de Minu-
cius Félix et de Tertullien.
M. Heinze veut que M. F, parle comme Tertullien, qui se
borne à dire, avec plus de réserve, que les philosophes, les
poètes, le vulgaire même et les mages connaissent le nom
des démons, c'est-à-dire des puissances spirituelles : Nec
novum nomen est : sciunt daemonas philosophi, etc. Mais,
tout en parlant du nom des démons, Tert. lui-même fait déjà
entendre que ces esprits sont pervertis et méchants : il fait
observer en passant, que le démon de Socrate détournait
celui-ci du bien, que le vulgaire désigne Satan, quand il dit,
en guise d'imprécation : malum ! ô malheur ! Cela ne concerne
plus le nom des démons, mais cela est parfait .. chez Tertullien.
Au contraire, quand M. F., qui identifie les démons des poètes,
des philosophes et des mages aux esprits impurs, consacre
quelques lignes à l'opinion de Socrate, d'Hostanès et de
Platon sur les démons, M. Heinze se récrie : Minucius Félix
s'écarte du sujet! Et pourtant cela n'est-il pas tout à fait
conforme à son but et cela ne montre-t-il pas mieux encore
que les philosophes, les poètes et les mages connaissaient les
démons ? (i)
Le point de départ de M. Heinze est faux : il veut que M.
F. pense et parle comme Tertullien, au lieu de le considérer
en lui-même, de chercher ce qu'il entend dire et d'examiner
s'il est logique avec lui-même.
Il suffit de bien interpréter le passage de M. F. (ch. 26-27) (2)
pour faire tomber toutes les critiques de M. Heinze.
Q) Remarquez la gradation : Magi quoque non taniutn sciunt dae-
monas, sed etiam quicquid miracuU ludtcnt, per datmonas efficiunt.
(2) Voici la suite des idées de Minucius Félix :
But: Pour faire comprendre la fausse divination, les mensonges
des auspices et des oracles, M. F. annonce qu'il va remonter à la
source et parler des démons en général (ch. 26,7).
I. Existence d'esprits impurs et but de leur activité : perdre les
hommes et les éloigner de Dieu en introduisant de fausses religions
(26,8).
Ces esprits impurs sont les dénions, comme le savent les philo-
CHAP. 22,1 259
Et si l'on compare ce passage avec celui de Tertullien, on
constatera aussitôt que les points de vue diffèrent, mais que
les développements se ressemblent, et l'impression qui se
dégage de prime abord de cette comparaison est que Tert.
résume ce que M. F. développe. Voyez ce que Tert. dit de Pla-
ton et des mages : Angeles qiwque etiam Plato non negavit.
Utriusque nominis testes esse vel magi adsunt. Ces deux phrases
n'ont-elles pas l'air d'un résumé des §§ 10-12 de Minucius
Félix ? Il serait sans doute téméraire (^) de conclure que c'est
Tert. qui a lu M. F. et qu'il en a tiré ces deux faits, qui suffi-
saient pour confirmer sa thèse : Nec novum nomen est. Mais
cela nous paraît au moins aussi vraisemblable que la thèse
inverse.
sophes (Socrate), les poètes, les mages (Hostanès) et Platon (36,
9-12).
IL' Comment s'e.verce l'activité des démons. i° Par la divination^
presque toujours trompeuse, ils éloignent les hommes de Dieu
(27,1). 2" Par les tortures physiques et morales, ils amènent les
hommes à offrir des sacrifices aux dieux, c'est-à-dire à eux-mêmes
(27,2). j*» C'est à leur influence que sont dus les extravagances
des possédés et les miracles cités par Cécilius (27,3-4).
III. Témoignages des démons sur eux-mêmes dans les exorcismes
(27,5-7). Dans les exorcismes, ils avouent que ce sont eux qui
agissent dans tous les cas énumérés dans lech. 26 (27,5). Ainsi, les
dieux avouent qu'ils sont des démons, bien que ces aveux tournent
à leur honte (27,6). Il faut croire ces aveux forcés, car les démons
fuient devant l'exorciste (27,7).
IV. Ils fuient donc les chrétiens, mais de loin ils les persécutent
et sèment la haine du nom chrétien (27, 8). C'est la transition au
ch. 28, où M, F. parle des persécutions.
(*) Cf. Apulée, De deo Socr., 6 : Per hos eosdem {daemonas'), ut
Plato in Symposio autumat, cuncta denwitiata et magortim varia mira-
cula omnesque praesagiorum species reguntur. Apol., 43 (encore d'après
Platon) : easque (potestates) divinationes cunctas et magortim miracula
gubernare. Platon attribue aux démons (jj-exa^ù OvrjTou xat àGavocTou)
la divination. Suivant les idées de son temps, Apulée ajoute les
miracles des mages.
260 APPENDICE 1
22,2. in usum maledicti fréquentât *FM ; in usu male-
dicti fréquentât P.
Barraeus a: in usum makdictis. Modius donne la variante
maledicti et ne parle pas de in usum, ce qui prouve que c'était
la lecture du Fuldensis. Le vulgaire ignorant se sert du mot
« démon « en guise d'injure. Les Romains appelaient « démon »
un homme méchant et pervers. Tertullien le dit expressément.
De test, an., 3, p. 137,23: Daemonium vocas hominem aut
immunditia aut malitia ... importumim. Ibid., 6, p. 142, 16
et 29. — In usum = ad usum. Frequentare = fréquenter usur-
pare. De orat., 22, p. 194, 2 : Igitur si pro sexus nomine voca-
bulum istud (se, mulier) frequentatur.
22,2. Nam et Satanan, principem huius mali generis ,,.
eadem exsecramenti voce pronuntiat F,
P a : exsacramenfi, ce qui n'est pas latin. — Le vulgaire
connaît les démons, dit Tertullien, car 1° il se sert souvent
du nom du « démon » pour lancer une imprécation. Nous
venons de voir que les Romains appelaient « démon » un
homme méchant et pervers.
2° Nam et ... Le vulgaire prononce avec les mêmes accents
de malédiction l'interjection : malum ! ô malheur ! Or, malus
est le nom de Satan. De idol., 21, p. 54, 30 : Cur non agnos-
camus versutias Satanae ... ? Un peu plus loin (p. 55, 4) :
per quem te malus honori idolorum ... quaerebat adnedere. De
paen,, 5,7 : ut denuo malus recuperata praeda sua adversus
dominum gaudeat. De pat., 14, p. 22,4 : quid dissecabatur
malus ? Ibid,, 11, p, 17, 17 : mali insidiis. De carne Chr,, 8 :
igneus ille praeses mali. Tert. ne veut pas dire ici que les Ro-
mains prononcent le nom même de Satan, mais qu'ils le dé-
signent quand ils disent : malum ! C'est ce que Rigaltius a
vu le premier. Dans le traité De test, an., 3, Tert. s'explique
plus clairement, S'adressant à l'âme du vulgaire, il lui dit :
(( Dans les malédictions, tu prononces le nom de Satan, que
tu hais naturellement, sans pourtant connaître son vrai nom
(celui de Satan), que les chrétiens seuls connaissent ». Sata-
nan denique in omni vexatione et aspernatione et dctestatione
CHAP. 22,2 261
pronuntias, quem nos dicimus malitiae angelum, totius erroris
artificem, totius saeculi interpolatorem, pcr quem lioino a pri-
mordio circwnventus, ut praeceptum Dei excederet ... Sentis
igitur perditoreni tuum, et licet sali illum nover'nt Cliristiani
vel quaecumque apud dominum secta, et tu tamen ewn nosti,
dum odisti.
22,2. Angeles quoque etiam Plato non negavit. FP
Quant aux anges, Platon lui-même n'a pas contesté leur
existence. Cf. Minucius Félix, 16,12 : Plato et angelos sine
negotio narrât et daemonas. 11 faut remarquer les expressions
peu précises non negavit et sine negotio narrât. Ni Tert., ni
M. F. ne disent expressément que Platon se sert du mot aYYe>.o<;
(nuntius) et, en réalité, il ne s'en sert pas ; mais, clans le
Symp., p. 202 de, il dit que les démons transmettent aux
dieux les prières des hommes et aux hommes les réponses
des dieux : ils font donc office de « messagers », d'angeli. Tert.,
comme M. F., interprète la pensée de Platon. Cf. Apul., De
Plat., 1,12: Daemonas vero, quos Genios et Lares possunius
nuncupare, ministros deorum arbitratur (Plato) custodesque
Iwniimini et interprètes, si quid a deis vclint. S. Augustin, De
civ. Dei, 15,23: Qui enim Graece dicitur àyyeloq, quod nonien
Latina declinatione angélus perhibetur, Latina lingua nuntius
interpretatur.
M. F. distingue les anges des démons et pour lui les anges
sont les bons anges, messagers de Dieu. « Hostanès, dit-il, sait
que les « anges », c'est-à-dire des ministres et des messagers,
gardent le trône de Dieu, etc., et il a déclaré que les démons
sont des êtres terrestres, errants, ennemis de l'humanité ».
M. F. peut donc reconnaître sans difficulté les anges dans les
démons-messagers de Platon.
Pour Tertullien, le mot angeli désigne les anges corrompus,
déchus, qui donnèrent naissance aux démons plus corrompus
encore (d'après la Genèse, 6,2, mal interprétée). Voy. le § 3.
Dans l'Apologétique, angeli désigne toujours ces mauvais
anges. Voy. 22,6; 8; 23, 1 ; 2; 9 ; 29,1 ; 35,12. De idol., 9,
p. 38, 10 : angelos esse illos descrtores Dei, anudores (eniina-
rum, etc. De cultu fem., 1,2; 2,10. De virg. vel., 7, p. 893. Adv.
262 APPENDICE I
Marc, 5,18. Ces anges pervertis n'ont rien de commun avec
les « messagers » de Platon, ce qui n'empêche pas Tertullien
de dire que Platon ne conteste pas l'existence des anges. Pour-
quoi le fait-il ? En raisonnant comme le fait M. Heinze, nous
pourrions soupçonner que c'est parce que Minucius Félix,
pour qui les anges sont les messagers de Dieu, avait dit avant
lui : Plato et angelos sine negotio narrât, et que non negavit
est une variante de sine negotio narrât. Mais nous n'oserions
pas conclure si vite. Nous venons de voir que les contempo-
rains de Tert. n'y regardaient pas de si près : ils reconnais-
saient facilement dans les anges et les démons qu'ils ren-
contraient chez les auteurs antérieurs, les anges et les démons
tels qu'ils les imaginaient eux-mêmes,
22,4. mira subtilitas et tenuitas sua F.
L'épithète mira, qui manque dans P, ajoute à l'idée. Sans
être nécessaire, elle est utile au sens.
22,6. quo deos istos captis et circumscriptis mentibus
commendat F
P a : homimim mentibus. — Captis et circumscriptis sont
synonymes. Tertullien aime à employer circumscribere dans
le sens de « circonvenir, tromper », decipere, fallere, et les
dérivés circumscriptor pour fraudator, circumscriptio pour
fraudatio. Voy. 17,5 : licet institutionibtis pravis circum-
scripta. De an., 57, p. 392, 20 : nec magnum illi (se. daemoni)
exteriores oculos circumscribere, cui interiorem mentis aciem
excaecare facile est. Ad uxor., 2,2, p. 685 0. : qui ita inter-
pretatur, absit ut sciens se circumscribat. De pat., 5, p. 7, 22 :
circa diaboli circumscriptionem. Adv. Marc, 1,27, p. 328, 7 :
deum veritatis praevaricatorem, sententiae suae circumscrip-
torem ! 2,7, p. 344, 1 : dum ipsum circumscriptorem colubrum
a congressu feminae arcet.
Le sens premier est « tracer autour de qqn un cercle «, dont
on l'empêche de sortir. — Hominum ne paraît pas nécessaire.
23,1. si pueros in eloquium oraculi edunt F
Edunt est évidemment une faute du copiste, pour elidunt,
CHAP. 22,4-6—23,1-4 263
que fournit P. — Junius et Oehler, qui expliquent elidunt par
necant, n'ont pas pris garde qu'on veut faire parler l'enfant,
qu'on veut faire prédire l'avenir, in eloquium oraculi. La pré-
position in avec un nom abstrait marque le but : ut eloquatur
oraculum. Elidunt désigne l'état où l'enfant est mis par les
enchantements. Apulée, Apol., 42-43, décrit une scène de ce
genre : l'enfant soumis aux enchantements « s'écroule par
terre » (corruit) et perd connaissance {sui nesciens) ; on peut
dire qu'il est elisus. Revenu à lui, il se met à prophétiser, Tert,
emploie souvent elidere dans le sens de « terrasser » et il
l'oppose à erigere et à relevare. Cf. De resurr., 18, p. 50,1 :
ostendit enim cuius sit dirui, cuius elidi, cuius iacere, cuius
et relevari et resuscitari. Ibid., 34, p. 74,3 : Diabolus invalidior
in hominis iniuriam intellegetur, totum eum elidens ? Deus
infirmier renuntiabitur, non totum eum relevans ? Ibid., 36,
p. 77,24 : elidens opposé à erexerit. Voy. encore Hoppe, Syn-
tax, p. 182.
23,4. Edatur hic <aliqui> ibidem sub tribunali vestro,
quem daemone agi constet.
P a aliqui et Barraeus a imprimé aliquis. Modius dit expres-
sément que le mot manque dans F. Au § 5, aliquis est absolu-
ment nécessaire à cause de ex fiis : Aeque producatur aliquis
ex his, qui ... Bien que is, antécédent du relatif soit souvent
sous-entendu (voy. 19,6), aliqui ou aliquis nous paraît égale-
ment nécessaire ici, parce que (/s) qui désignerait une personne
déterminée et qu'il s'agit, non pas de « celui qui est possédé
du démon », mais d' « un homme possédé du démon ».
Sur hic ibidem « ici, à l'instant », voy. Apul., Apol., 44,
p. 52, 5 (Helm) : hic ibidem pro tribunali oculos truces in te
invertisset. Sur cet emploi de ibidem, voy. 2,17 ; 23,6 et 12 ;
50, 16;Scorp., 10 (cité ci-dessus, p. 139). Cicéron dit déjà,
Pro Roscio Amer., 5,13 : ne hic ibidem ante oculos vestros
trucidetm. — Ibidem « à cette place même » équivaut à illico,
statim «à l'instant même ». Tert. dit aussi: statiin illic (48,1).
Sur aliqui, pour aliquis, voy. 3,7 : si qui probet. 18,1 : si
qui velit.
P a : sub tribunali bus vestris. Le correcteur aura mis le
264 APPENDICE I
pluriel, en pensant aux gouverneurs des provinces. Voy. 2,17 :
post tribunal vestrum. Sans déterminatif, le pluriel sera néces-
saire. 50,2 : quod provocamiir ad tribunalia.
23,4. spiritus ille tam se daemonem confitebitur, <quod>
in vero est, quam alibi deum, quod in falso est. F
spiritus ille tam se daemonem confitebitur de vero
quam alibi dominum de falso. P
Junius ne donne pas le premier quod ; il semble que Modius
ait oublié de le copier ou que Junius ait oublié de l'imprimer.
Avec l'addition de ce quod, la lecture de F est très satisfai-
sante et fournit une clausule fréquente (crétique et trochée).
Tert. s'exprime de la même manière, De an., 57, p. 392,15 :
et tamen ille daemon, posfquain^ circumstantes circumvenire
temptavit, instantia divinae gratiae victus, id quod in vero est,
invitus confitetur. De test, an., 1, p. 135,3 : lam igitur niliil
nobis ertt cum litteris et doctrina pervcrsae felicitatis, cui in
falso potius creditur quam in vero.
In vero « en toute vérité, en réalité » et in falso « menson-
gèrement » sont des locutions adverbiales que Tert. affec-
tionne à l'exemple de Tite-Live, Sénèque et Tacite. Il dit
aussi: in occulto, secrètement (2,14; 4,2; 9,1 ; 3), in aperto,
ouvertement (9,1) ; in incerto est (10,10 ; voy. ci-dessus, p.
139); in continenti (23,11). Voyez de nombreux exemples
dans Hoppe, Synfax, p. 100. De resurr., 11, p. 40,9 : et si ita
in vero haberet. Adv. lud., 8: animadvertanms termimun quo-
modo in vero praedicit (Daniel). De resurr., 19, p. 51,14 : non
enim liane (se. mortem) esse in vero quae sit in medio, discidium
Garnis atque animae, sed ignorantiani Dei. Lact., Div. inst.,
1,11, 31 : ergo illud in vero est. 1, 17, 1 : quid sit in vero.
Dans P, on lit, comme souvent, dominum au lieu de Deum.
Voy. ci-dessus, p. 114, ad 13,4. Pour le reste, la lecture de
P est correcte, mais fournit une clausule assez défectueuse.
Tert. dit de falso (2,5) et ex falso. De an., 28, p. 347,21 : quidni
falsum, cuius testimoniuni quoque ex falso est ? Voy. Hoppe,
Syntax, p. 101-102.
23,8. quae subdita est homini et, si quid ad dedecus facit,
aemulo suo. F
CHAP. 23,4-12 265
P a : aemulis suis, ce qui est une correction erronée. Il faut
ponctuer comme nous venons de le faire et traduire : « Assu-
rément il ne faut pas regarder comme une divinité celle qui
est soumise à l'homme et — si cela contribue en quelque
chose au déshonneur — à son ennemi ». il s'agit du démon.
Ce qui augmente le déshonneur de sa soumission forcée à
l'homme, ce qui la rend plus humiliante encore, c'est que
l'homme est l'ennemi du démon. Ce sens est de loin préférable
à celui-ci : « Assurément il ne faut pas regarder comme une
divinité celle qui est soumise à l'homme, son ennemi, même
quand celui-ci fait quelque chose pour la déshonorer». Dans
ce cas, aemulo suo serait d'ailleurs placé à côté de liomini.
Facere ad signifie « contribuer à, favoriser». Voy. 5,1 et 29,3. On
trouvera la même tournure dans De idol, 1, p. 30,8: quaeris
quem occiderit (idolâtres)? Si quid ad elogii ambitionem facit,
non extraneum, nec inimicutn, sed ipsum se. Cf. De spect., 5,
p. 7,15 : Facit enim et hoc ad originis maculam, ne bonum
existimes, quod initium a malo accepit. — Le pluriel aemulis
suis (P), après homini au singulier, nous paraît être une cor-
rection erronée. Il est surtout mauvais, s'il est apposé à homini.
23,12. Dicent ibidem et quis ille Christus cum sua fabula,
si homo communis condicionis, si magus, si post crucem
(post mortem P) de sepulcro a discipulis subreptus, si
nunc deniquc pênes inferos, si non in caelis potius et inde
venturus ... ut Dei virtus et Dei spiritus, ut <Dei> ratio,
ut Dei Filius et Dei omnia. F
A la fin P a : «/ Dei virtus et Dei spiritus et sermo et sapientia
et ratio et Dei Filius. — Sur Dicent ibidem, voy. ci-dessus,
p. 61. — Ille Christus cum sua fabula, comme disaient les
païens. Voy. 21,14. — 5/ liomo ..., si magus, si post crucem ...
subreptus, comme les Juifs et, avec eux, les païens le préten-
daient. Voy. 21,3 ; 17 ; 22. — Post crucem = post crucis mor-
tem. C'est la lectio diffîcilior, l'expression choisie, remplacée
dans P par l'expression ordinaire. C'est à dessein que Tert.
prête aux juifs ce langage méprisant. Havercamp dit avec
raison : Ita malo cum Cod. Fuld. quam post mortem. Est enim
266 APPENDICE I
magis ignominiosum, quod hic captabatur. De resurr., 47, p
95,22: nec crucem (= mortem) Christi caro nostra perpessa est
Adv. Marc, 5,5, p. 587,3 : crux et mors Dei. Ibid., 2,27, p
373,6 : ut morti subiceretur et morti crucis (cf. Paul., Ad Phil.
2,8). — F a : ut ratio. Sur la conjecture ut (ou et) Dei ratio
voy. ci-dessus, p. 106 (i). Sur l'expression Dei omnia, voy
ci-dessus, p. 106 et 243, n. 1. L'interpolateur de P n'aura pas
compris Dei omnia : il l'a supprimé et il a ajouté et sermo et
sapientia. Voy. ci-dessus, p. 217.
Il faut ponctuer la phrase comme nous l'avons fait ci-dessus.
Tertullien vient de dire que les démons, interrogés par l'exor-
ciste, seront forcés de dire qui ils sont et quel est le vrai Dieu,
qui sit vere Deus. Il ajoute maintenant : Ils diront aussi (et)
quel est ce Christ avec sa fable, s'il est un homme, etc. (comme
le disent Juifs et païens), s'il n'est pas dans les cieux plutôt,
etc. (comme le disent les chrétiens).
Sur ibidem, voy. ci-dessus, 23,4. — Si est ici particule inter-
rogative (= num). — Voy. Mangers, Musée Belge, 14, 1910,
p. 222.
23,13. dicant hoc tribunali, si forte, Minoen et Rhada-
manthum secundum consensum Platonis et poetarum
esse sortitos. F
P a : hoc pro tribunali et hoc esse sortitos. Voyez ci-dessus,
p. 76 (2).
Secundum consensum Platonis et poetarum. Platon, Gorg.,
79, p. 523 E. Hom., Od., 11, 567-571. Virg., Aen., 6,432. Pla-
ton cite trois juges : Minos, Rhadamanthe et Eaque. — Tert.
(') Lôfstedt, p. 35, lit ; ei ratio et Deifilius et Dei omnia.
(*) Lôfstedt, p. loo, conjecture : hoc iribunalis {s tombée devant
5/), gén. partitif pour hoc tribunal, et supprime le deuxième hoc de
P. Cette conjecture nous paraît hardie. Hoppe, Synta.v, p. 20, cite
une série d'exemples de cette construction, mais le génitif exprime
une idée abstraite: id mali, hoc sceleris, in hoce.vitiis.^ id temporis, Qic,
ou bien il est au pluriel : quantuin urbium ?
CHAP. 23,13-16 267
défie les démons de déclarer que ce ne sera pas le Christ, mais
Minos et Rhadamanthe, qui présideront au jugement dernier.
Il répète cette antithèse dans De spect., 30, p. 29,5 : etiam
poetas non ad Rhadamanthi, nec ad Minois, sed ad inopinali
Christi tribunal palpitantes. Même antithèse dans S. Justin,
Apol. I, 8, qui cite Platon, mais ne nomme que Minos et
Rhadamanthe, et deux fois dans Tatien, Oratio ad Gr., 6 et
25, qui néglige également Eaque, sans citer Platon, Tatien
suit souvent S. Justin. C'est d'après S. Justin que Tertullien
parle ici : il lui emprunte le nom de Platon, les noms des deux
juges à l'exclusion du troisième et l'antithèse.
23,14, praedamnatos se in eundem iudicii diem cum
omnibus cultoribus et operatoribus suis.
C'est la lecture de Barraeus et Modius ne donne aucune
variante. P a : operationibus suis. Ce mot abstrait ne paraît
pas convenir à côté de cultoribus. Les démons sont condamnés
d'avance pour le jour du jugement avec tous leurs adorateurs
et leurs serviteurs (et non : leurs œuvres). Minucius Félix,
35,2 : destinatam enim sibi cum suis cultoribus poenam prae-
scius perhorrescit. — Operatoribus suis = qui eis operati sunt,
ceux qui les ont honorés par des sacrifices. Ovide dit à Vesta :
tibi nunc operata resolvimus ora (Fast., 6,249). Nonius, p. 523,
9 : operari est deos religiose et cum summa veneratione sacri-
fiais litare. Ce sens d'operator est peut-être unique. Voy. la
note de Woodham. On trouve operator avec le sens ordinaire
« celui qui fait, qui produit » et suivi d'un génitif, verborum
et factorum operator (46,18). De même, operatrix. De an., 11
et 52.
23,16. Crédite illis, cum verum de se loquuntur, qui
mentientibus creditis.
Minucius Félix, 27, 6 : victi dolore quod sunt eloquuntur.
Ibid,, § 7: Ipsis testibus, esse eos daemonas, de se verum
confitentibus crédite.
M. Heinze a soutenu que, suivant Tert., les démons inter-
rogés sur ce qu'ils sont et mis en demeure de répondre, ne
268 APPENDICE I
répondent pas formellement à l'exorciste, que leur fuite consti-
tue leur aveu. Il croit pouvoir expliquer par ce îestimonium
ex silentio les nombreux passages des apologistes où il est
question de réponses et â\( aveux » {23,\0 : in confessione
et in confessionem ; 24,1 : omnis ista confessio istorum ; 46,1 :
item ex confessione spiritualium potestatum ; 23,6 : nisi se
daemonas confessi fuerint ; 23,17 : adversus semetipsos confia
tentes ; 23,4: se daemonem confitebitur), de « témoignages »
des démons (21,26 :. idoneos testes Christi ; 23,18 : haec denique
iestimonia deorum vestrorum).
C'est évidemment une erreur. Il arrive sans doute que le
démon obéisse tout de suite aux injonctions de l'exorciste,
qui le somme de déguerpir en prononçant le nom du Christ
et en le menaçant du châtiment qui l'attend après le jugement
dernier (23,15). En ce cas, sa fuite constitue un aveu. Mais
le plus souvent, le démon cherche à donner le change, il
répond et il discute, il implore sa grâce et il finit par avouer
formellement qu'il est un esprit immonde, un démon qu'on
adore dans les temples sous le nom d'un dieu. 11 reconnaît
aussi formellement que le Christ est Dieu, que son nom le fait
trembler et fuir.
Les démons parlent donc, par la bouche du possédé, natu-
rellement, dans le corps duquel ils sont cachés ; et, quoi qu'en
dise M. Heinze, p. 404, n. 2, nous en trouvons des preuves
multiples dans Tert. et dans les autres apologistes.
Tert. dit expressément que l'exorciste pose des questions
précises au démon et le somme de parler : iussus a quolibet
Cliristiano loqui spiritus ille tam se daemonem confitebitur,
quod in vero est, quam alibi deum, quod in jalso est (23,4) ;
DicENT ibidem et quis ille Cliristus mm sua fabula (§ 12) (^) ;
(^) Origène, Contra Cels., i, 6, nous dit que dans les formules
d'exorcisme, on ne se bornait pas à invoquer le nom du Christ,
mais qu'on rappelait des faits de sa vie : Où yàp x.atay.riXrjaîo-'.v
ta^'jctv ooXvoOo-iv, àXXà xi]) ovo'[j.ax'. 'l-f)ao5 [j-stà ir]ç àT:(xyyz)d'^<; tdjv
TîEpl auTÔv tatopuTiv. C'est sans doute avec raison qu'on a reconnu
une formule d'exorcisme dans cette phrase de S.. Justin, Dial. c.
CHAP. 23,16 269
mm veriim de se loquuntur (§16); omnis illa confessio eontm,
qua se deos negant esse (24,1).
Pour affaiblir le sens de textes si clairs, il faudrait avoir
des raisons ; et nous avons des raisons, au contraire, pour les
prendre dans leur sens littéral.
Tert. cite ailleurs des textes de l'Ecriture où Jésus ou les
Apôtres interrogent le démon et où le démon répond. Adv.
Marc, 1,7, p. 436, 6: Exclamant ibidem spiritus daemonis :
Qiiid nobis et tibi est, lesu ? Venisti perdere nos. Scio qui sis,
Sandus Dei (= Luc, 4,34). Ibid., 1,8, p. 438, 27: Itaque
spiritus nequam ... cum testimonio excedebant vociférantes :
Tu es filiusDei ... (= Luc, 4,31). Voy. encore : Matth., 8,29 ;
Marc, 1,24 ; 3,11 ; 5,7. Luc, 8,28. Actus apost., 16,16 ss. ;
19,13 ss. Dans tous ces passages, le démon parle : il répond
aux questions précises qui lui sont posées, il formule des
prières, il demande grâce, il reconnaît que le Christ est Dieu,
etc.
En serait-il autrement à l'époque de Tertullien ? Non.
Tert. rapporte, par exemple, que parfois les démons entrent
Tryph., 85 (Otto, p. 293) : Kaxà yàp tou 6v6]xuioc, «ùtoû to-jtûu
Tou wj"j toÙ Wsoij xal upojToxo'xou Trâa-fji; •/.xtascoç, xat oià Trapûs'vou
YEvvriOsvToç xal TraOï^TOU •'(Vi0[}.vir^<^ àvOpioirou, xal axauptoOévxoç ètïi
llovxîou HiXâxou u-rj xou )>aou uji.wv xal aTioOavovxoi;, xat àvaaxâv-
xoç £x vExpùiv xat àvapâvxo; elç xov oùpavov, ttôcv ôai(i.oviov s^opxt-
Çrj[x£vov v'.xaxat xal ÛTroxâaarsxau Cf. S. Justin, Apol., II, 6, 6 ; Èiiopxî-
Çovxeç xaxà xoîi rh6\x(x.'zoç, 'lïjaou Xpiaxoû xou axauptoOÉvxoç ettI
llovxt'o'j IhXâxou. La formule du Dialogue ressemble au § 12 de
Tertullien : Dicent ibidem... Tertullien rappelle ici le chap. 21. Cf.
21,14 : Recipite intérim hanc fahilam. §17: quem igitnr hominem
solnmmodo praesumpserant. Ibid.: tii magum existimarent, §19: et
tamc7i subfixus. § 22 : subreptum a discipulis. § 23 : iti caehim est
creptus, etc. Mais il fait aussi allusion aux formules d'exorcisme.
Le démon ne répète pas tout cela, mais il rend témoignage de tout
cela en avouant, tantôt directement et formellement, tantôt indi-
rectement, que le Christ est Dieu. Actus apost., 19,15 : Respondens
aiitem spiritus 7iequam dixit eis : lesuin novi et Pauluin scio.
270 APPENDICE I
dans les âmes des morts et que, dans la magie, on les voit se
faire passer pour des défunts, comme dans le culte idolâtrique
ils se font passer pour des dieux (De an., 57, p. 391, 25). Dans
ce cas, on les a vus essayer de donner le change à l'exorciste :
ils affirment tantôt qu'ils sont un des parents du défunt,
tantôt qu'ils sont un gladiateur ou un bestiaire, comme
ailleurs ils affirment qu'ils sont un dieu. De an., 57, p. 392,
9 : cum in exorcismis interdum aliquem se ex parentibus homi-
nis suî affirmât {spiritus nequam), interdum gladiatorem vel
bestiarium, sicut et alibi deum. L'exorciste finit par lui faire
avouer la vérité. Ibid., 1. 14 : Et tamen ille daemon, postquam
circumstantes circumvenire temptavit, instant ia divinae gra-
tiae vidus, id quod in vero est, confitetur. Quand le démon
cherche à tromper sur son identité, il est évident qu'il parle :
sa déclaration ne saurait ressortir de sa fuite.
Voyez aussi l'anecdote que Tert, raconte dans son De
spectaculis, 26, p. 25, 24. Une femme fréquente le théâtre
et en revient possédée par le démon. Itaque in exorcisme cum
oneraretur inmundus spiritus, quod ausus esset fidelem aggredi,
constanter : « Et iustissime quidem, inquit, feci : in meo eam
inveni ».
Les autres écrivains chrétiens ne sont pas moins clairs,
quoi qu'en dise M. Heinze, p. 404,2. S. Cyprien, Epist., 69,15,
dit : et cum exire se et homines dimittere saepe dicat (diabolus),
in eo tamen quod dixerit fallat ... Le démon annonce donc qu'il
va quitter le corps du possédé, mais il ne le fait pas {^). Epist.,
75,10 : qui {spiritus nequam) subtili fallacia etiam hoc paulo
ante praedixerat venturum quendam aversum et temptatorem
infidelem. Cf. Quod idola, 7, p. 25, 5-8.
Lactance, Div. inst., 2,15, 3, dit à son tour : lustos autem,
id est cultores Dei, metuunt, cuius nomine adiurati de corpo-
ribus excedunt : quorum verbis tamquam flagris verberati,
(') Cf. Lactant, Div. inst., 2, 45, 4 : verherari se et ardere et iam
iamque exire proclamant. 52, 1,5 : et uri se verherariquc testantur et
mterrogati qui sifit, qiiando venerini, qnomodo in hominem inrepseririt,
confitentur.
CHAP. 23,16 271
non modo daemonas se esse confitentur, sed etiam nomina sua
EDUNT illa, quae in îemplis adorantur. Cf. 4, 27, 14. 5, 21, 5 ;
22, 23. Epit., 46,7.
Ces derniers mots de Lactance expliquent ceux-ci de Minu-
cius Félix (27, 6), qui semblent les avoir inspirés : Ipse Satur-
nus et Serapis et luppiter et quidquid daemonum colitis, victi
dolore quod sunt eloquuntur, nec utique in turpitudinem sui,
nonnuûis praesertim vestrum adsistentibus mentiuntur.
A la question de l'exorciste : Qui es-tu ? le démon répond
(par la bouche, du possédé, naturellement): Je suis Saturne,
etc.
M. Heinze dit (p. 403-404) queTertullien, payant d'audace,
veut donner l'impression que les démons affirment formelle-
ment que le Christ est Dieu, qu'ils reconnaissent formelle-
ment qu'eux-mêmes sont des esprits immondes, tandis qu'en
réalité le témoignage des démons est un testimonium ex silen-
tio. Il ne trouve rien à redire à cette rhétorique, qu'il prête
gratuitement à TertuUien, — mais elle lui fournit un argument
contre Minucius Félix.
Celui-ci dit que Saturne, Sérapis et Jupiter, forcés par
l'exorciste, déclarent ce qu'ils sont, c'est-à-dire des démons.
Voilà des aveux directs. Or, Minucius vient d'insinuer, selon
M. Heinze, que les aveux des démons sont indirects et résultent
de la fuite des démons : Haec omnia sciant pleraque pars
vestrum ipsos daemonas de semetipsis confiteri, quotiens a
nobis ... exiguntur. Qu'est-ce qui prouve que M. F. parle ici
d'aveux indirects ? Selon Heinze, ce sont les mots : quotiens
... de corporibus exiguntur, « que nous ne prendrions probable-
ment pas dans leur sens véritable, dit-il, si nous n'avions pas
lu TertuUien » ! C'est, au contraire, parce que Heinze les veut
expliquer par Tert., mal interprété par lui, qu'il les comprend
mal. Ces mots doivent être pris dans leur sens littéral et obvie ;
ils signifient simplement : « dans les exorcismes », in exor-
cismis, comme aurait dit TertuUien. Quant aux mots : Haec
(') Voy. J. Tambornino, De nntiquoruin daemonismo (Giessen,
'909)1 P- 107-108.
272 APPENDICE I
omnia ... (i) ipsos daemonas de semetipsis confiteri, ils sont
clairement expliqués par Ipse Saturnus et Serapis ... quod
sunt eloquuntur ... i^). Comme Tertullien, comme S. Cyprien,
comme Lactance, Minucius Félix, dans les trois §§ 5-7, a en
vue un aveu direct et formel des démons interrogés par l'exor-
ciste : victi dolore quod sunt eloquuntur.
Forcés par l'exorciste, dit-il, les démons avouent que ce
sont eux qui font tout cela (§ 5) : vaincus par la douleur,
Saturne, Sérapis, Jupiter et tous ces démons que vous hono-
rez sous le nom des autres dieux, déclarent qu'ils sont des
démons (§ 6). Il faut les croire quand ils avouent, car cet aveu,
d'autant plus honteux qu'ils sont forcés de le faire devant
leurs adorateurs, est confirmé par leur fuite.
Telle est la suite des idées, tel est le raisonnement, clair et
logique, de Minucius Félix.
Voilà quelques-unes des subtilités par lesquelles M. Heinze
a cherché à démolir les deux chapitres consacrés à la démo-
nologie par M. F., pour conclure qu'il a imité Tert. de tra-
vers !
(') Haec omnia choque aussi M. Heinze. Ces deux mots résument
le chap. précédent, où M. F. a montré que ce ne sont pas les dieux
qui annoncent l'avenir et président aux prodiges de toute espèce,
mais les démons; que les devins et les possédés ne sont pas sous
l'influence des dieux, mais sous celle des démons cachés sous leurs
statues pour tromper les hommes, etc. Interrogés et forcés par
l'exorciste, ils avouent tout cela, c'est-à-dire qu'ils sont des démons
et non des dieux.
(2) On peut mettre deux points après exiguntur. La phrase Ipse
Saturnus inspire à M. Heinze une autre critique: c'est que M. F.
parle ici des OîoXott-îO'. pour parler ensuite des adjurations en général,
tandis que Tert. nous fait assister à une scène d'adjuration, d'abord
d'un oai[jtovto'X-ri7rxo<;, puis d'un Oso'X-fjTtto?. Mais pour M. F., tous les
possédés sont des oai[j.ov'.o)>Tj'n:xot, attendu que les dieux sont des
démons! Cela est naturel et la distinction lui paraissait inutile.
Heinze veut toujours imposer à M. F. les idées de Tert., parce
qu'il part toujours de Tertullien !
CHAP. 23,16 273
M. Heinze part de cette idée fausse que la démonologie
(ch. 26 et 27) de Minucius Félix n'a pas d'autre but que d'ex-
pliquer la vérité de certains oracles et de certains auspices.
C'est de là, en effet, que part M. F. (26,7), mais dès le début
il élargit son sujet et il annonce qu'il va remonter jusqu'à
la source même d'erreur et de perversion d'où sont sorties
ces ténèbres et qu'il la mettra en pleine lumière : adgrediar
iamen fontem ipsum erroris et pravitatis, unde omnis caligo
ista manavit, et altius eruere et aperire manifestius (26,7). Ces
mots n'annoncent-ils pas une étude générale sur les démons ?
Pour répondre à l'objection que les oracles et les auspices
ont parfois rencontré la vérité, M. F. dit d'abord, avec Cicéron,
que le hasard eut quelquefois les apparences d'une volonté
réfléchie ; puis il ajoute que l'action des démons fournira la
réponse à l'objection. Voilà deux explications différentes et
même contradictoires, s'écrie M. Heinze. Il ne voit pas que
M. F. dit : Quamquam inter multa mendacia videri possit indus-
triam casus imitatus, c'est-à-dire : les auspices et les oracles
ne sont en général que mensonges ; s'ils sont parfois vrais,
c'est l'effet du hasard. Les mensonges sont dus aux démons
qui se font passer pour des dieux et trompent les hommes.
Nous allons expliquer en détail la nature et l'action de ces
démons. Où est la contradiction ?
En expliquant l'action des démons, Minucius Félix a l'oc-
casion d'insister sur la divination (ch. 27, 1-2), mais ce n'est
pas son seul but. Les démons, qui se font passer pour dieux,
font autre chose qu'inspirer les oracles et Minucius Félix
tient à le montrer. Ils persécutent les chrétiens et c'est ce
qui amène le ch. 28.
Tert., lui, a un autre but : les démons ou les dieux attestent
la divinité du Christ. Pour le prouver, il parle, lui aussi, longue-
ment de la nature et de l'action multiple des démons.
M. Heinze a accumulé tant de subtilités sur le texte de M.
F. et spécialement sur sa démonologie (ch. 26 et 27), qu'il
faudrait beaucoup de temps et de place pour les mettre à nu :
non tam difficile, quam énorme, nec arduum, sed intérim lon-
giim. Mais nous comptons traiter ailleurs ce problème dans
son ensemble.
274 APPENDICE I
23,18. quam plurimum illis credencio per Christum et
in Deum credimus. F
P a : in Christo domino credimus. — Tertullien veut dire
que très souvent, grâce aux témoignages des démons, nous
devenons chrétiens, et, en croyant au Ciirist (dont les démons
attestent la divinité), nous croyons aussi {et) en Dieu. C'est
la formule qui résume le ch. 21,28 : Deum colimus per Chris-
tum, confirmée par les aveux forcés des démons. Voy. ci-dessus
p. 231. C'est aussi le résumé des §§ 11-12 du chap. 23: cognos-
cetis qui sit vere Deus... Dicent ibidem et guis ille Cliristus ...
La lecture de P n'exprime plus cette idée. Elle contient
de plus une faute de copie : domino pour Deo (voy. ci-dessus,
p. 113, ad 4,3) et la construction credere in avec l'abl. paraît
étrangère à l'usage de Tert. Voy. Tlies. l. /., IV, 1149, 28.
Hoppe, Syntax, p. 40. Quant à la clausule, elle sera la même
dans F et dans P après correction : et in Deum credimus et in
Christo Deo credimus (double crétique).
Quam plurimum « très souvent, dans un très grand nombre
de cas » a un sens temporel, comme au ch. 7,4. Il exprime la
même idée que consuerunt.
24,1. satis idonea est ad depellendum crimen laesae
publicae et maxime Romanae religionis F
Dans P, publicae et manque. Les chrétiens sont accusés
d'apostasie du polythéisme, c'est-à-dire de mépriser et de
nier les dieux païens en général. On leur reproche surtout de
répudier les dieux « publics », c'est-à-dire les dieux adorés
par les peuples, les provinces, les cités, et l'on regarde
comme plus grave encore le mépris qu'ils affichent pour les
dieux officiels de Rome. Dans sa réfutation de l'accusation
de sacrilège (ch. 10-16 et 24,1-8), Tertullien parle toujours
des dieux en général, aussi bien de Caelestis, protectrice de
Carthage (12,4 ; 23,6 ; 24,7) et des autres divinités provin-
ciales et municipales (24,7-8), que de Jupiter Capitolin. C'est
seulement au ch. 24,9 et dans tout le ch. 25, avant de ter-
miner la réfutation de l'accusation de sacrilège, qu'il examine
à part le grief spécial de mépriser les dieux romains, et il
CHAP. 23,18—24,1-5 275
justifie cette partie spéciale de sa réfutation en disant : Quon-
iam tamen Romani nominis proprie intercedit auctoritas (25,2).
Voy. plus loin, ad 28,3. Les mots publicae et sont donc
nécessaires, car les mots crimen laesae maxime Romanae reli-
gionis ne rendraient pas exactement l'idée de Tertullien.
24.3. Nunc ut constaret deos esse, nonne concederetis
de aestimatione communi aliquem esse sublimiorem et
potentiorem F
P a : nonne conceditis ; mais, après ut constaret « à supposer
qu'il fût établi que vos dieux sont des dieux » (supposition
non réelle), la logique et la symétrie de la construction exigent
concederetis. Le remanieur de P aura perdu de vue ut constaret
et il aura pensé au ch. 11, où cette concession est déclarée
nécessaire. Voy. 1 1,2 : necesse est concedatis, esse aliquem subli-
miorem Deum, etc. Ibid., § \0 : Et hinc concedetis, opinor,
illum Deum deificum iustitia praecellere. — Sur la fin de la
phrase {perfectae maiestatis), voy. ci-dessus, p. 77.
24,5. alius, si hoc putatis, nubes numeret orans, alius
lacunaria P
Les mots si hoc putatis manquent dans F. — Les chrétiens,
comme les Juifs, prient en levant les yeux vers le ciel. Voy.
30.4. Les païens disaient, par moquerie, qu'ils comptaient
les nuages, juvénal, Sat., 14,96, avait déjà dit des Romains
judaïsants :
Quidam sortiti metuentem sabbala patrem
Nil praeter nubes et caeli numen adorant.
Cf. 16, 10 : adfectatione aliquando et caetestia adorandi, ad
solis ortum labia vibratis. Ad nat., 1, 13, p. 83, 23.
La plaisanterie nubes numeret était comprise de tous les
lecteurs. Tert, répond par une autre plaisanterie à l'adresse
des païens : alius lacunaria {numeret), qu'un autre compte
les panneaux des plafonds (des temples).
La parenthèse si hoc putatis, qui est une allusion à cette
plaisanterie populaire, était inutile pour un lecteur romain
276 APPENDICE I
Au ch. 43,2, P a une parenthèse du même genre {quia forte
non creditis), qui manque clans F. Ce sont probablement des
gloses marginales, insérées dans le texte.
24,5. alius suam animam Dec suo voveat, alius hircum
(hirci P). F
La leçon de P est la meilleure : suam animam demande
l'antithèse: /zi'rci (anî'mam), la vie d'un bouc, Tertullien reprend
cette antithèse dans De idol, 6, p. 36,4. Il dit au chrétien,
fabricant d'idoles : Immo tu colis (falsos deos), qui facis, ut
coli possint. Colis autem non spiritu vilissimi nidoris alicuius,
sed tiw proprio, nec anima pecoris ùnpensa, sed anima tua.
L'ace, hircum dans F a été suggéré au scribe ou au cor-
recteur par l'acc. animam qui précède. Cette sorte d'assimi-
lation est fréquente.
24,8. Aesculanorum Ancharia *FP
Dans Ad nat., 2,10, p. 108, 20, A porte aussi Aesculano-
rum, qui est fautif, parce qu'aucune ville ne porte le nom
d'Aesculum. On corrige en Asculanorum (Junius). Il y avait
deux villes du nom d'Asculum, dans le Picenum et en Apulie,
auj. Ascoli. — Le nom de la déesse, Ancharia est étrusque,
suivant Muller-Deecke, Etrusker, 2, p. 62, r. 86. C'est pourquoi
Roscher (Lexikon der Myth., s. v. Ancharia) a adopté la con-
jecture de Reinesius (Inscr., 2, 23) : Faesulanorum. La dédi-
cace à Ancharia (Orelli, 1844), qu'on dit avoir été trouvée à
Fésules, est suspecte.
24,8. Sutrinorum Hostia F ; Sutrinorum Norcia P
Sutrium, auj. Sutri, ville d'Etrurie. Norcia est une mé-
prise du copiste : il a répété Nortia qui précède et qui est
connue comme déesse de Volsinii. — Dans Ad nat., 2, 10,
Tert. ne cite aucune divinité de Sutrium. Si Hostia est exact,
c'est un nom étrusque latinisé. Otf. Muller proposait de lire :
Horta. Voy. Deccke, dans Roscher, Lexikon der Myth., s. v.
Horta et Hostia. Dans Ad nat., 2, 10, p. 108, 19, Tert. dit.
qu'il emprunte tous ces noms de dieux municipaux à Varron.
CHAP. 24,5-10 277
24,8. Faliscorum in honorem patris Curis et accepit
cognomen luno.
in honorem patris Chumis F ; in honore patris curris PM. —
Traduisons : « Pour faire honneur au vénérable Curis, Junon
a aussi reçu son surnom «, c'est-à-dire : le surnom qu'elle
porte. Ce surnom est Quiritis (CIL. 1547 = Dessau 3096,
à Bénévent. XI 3125 = Dessau 3111, à Falerii) ou Ciirritis
(XI 3126 = Dessau 5374, à Falerii. Cf. CIL. I, éd. 2, p. 331 :
lunoni Curriti). Junon Quiritis est représentée sur un char,
armée du bouclier et de la lance. Voy. Ihm, dans Roscher,
Lexikon der Myth., vol. II, p. 588 et 596. Son surnom vient
du sabin quiris ou curis, lance. Cf. Ernoult, Elém. dialectaux
dans le vocabulaire latin, pp. 148-149. — Tertullien donne
une autre étymologie ; le surnom de luno Quiritis ou Curritis
serait emprunté au pater Curis ou Curris de Falerii, en Etru-
rie. Il veut dire que les Falisques adorent le dieu Curis, à qui
Junon a emprunté son surnom (de Quiritis). Pater a le même
sens que dans Liber pater. Ce dieu Curis est inconnu. Comme
les inscriptions donnent luno Quiritis ou Curritis, le dieu s'ap-
pelait Quiris ou Curris.
24,10. velimus nolimus *F ; velimus ac noiimus P
L'asyndète est constant dans cette locution à l'époque
classique. Cic, De nat. deor., 1, 17 : ut niihi, velim nolim, sit
certa quaedam tuenda sententia. Min. Félix, 29, 4 : At ille, qui
ceteris deus, sibi certe homo est, velit nolit. Cependant Tert.,
De an., 58, p. 394, 9, dit : velis ac nolis. Comme la lecture de
F n'est pas formellement attestée, il vaut mieux adopter
celle de P, qui est conforme à l'usage de Tertullien.
24,10. Sed apud vos quodvis colère ius est praeter Deum
verum, quasi non hic magis omnium sit, cuius omnes
sumus. F
Après omnium, P ajoute deus qui ressort suffisamment
du contexte pour être sous-entendu. — On a souvent mal
compris le passage, parce qu'on n'a pas vu que magis signifie
278 APPENDICE I
potius et se rapporte à hic. Le vrai Dieu, plutôt que tout ce
que les Romains adorent, est le Dieu de tous et par conséquent
aussi le Dieu des Romains. C'est donc à tort qu'on dit aux
chrétiens : Vous n'êtes pas des Romains, parce que vous
adorez un Dieu qui n'est pas un dieu des Romains. Nec Roma-
norum = et non-Romanorum. Et, après quia ou un relatif,
est familier à Tert. pour marquer la relation logique entre
la subord. et la principale. Non ne fait qu'un avec Romanoram
(per hyphen), comme ailleurs non-Christianus (2,18 ; 35,9 ;
44,3). — On a donc eu tort de vouloir changer magis omnium
en magis Romanorum.
Bossuet, lecteur assidu de Tertullien, qu'il se plaît à qua-
lifier « le grand Tertullien, le grave Tertullien », a tiré de ce
passage un de ses mots fameux. Disc, sur l'Iiist. univ., II, 3 :
Tout était Dieu, excepté Dieu lui-même.
25,2. Romanes pro mérite religionis diligentissimae in
tantum sublimitatis elates et inpesites, ut orbem occu-
parint F
P a : reiigiositatis, au lieu de religionis. Mais religio a sou-
vent le sens de religiositas. Cicéron, qui ne connaît pas le mot
religiositas, dit : hominem plénum religionis (Pro Font., 40),
c'est-à-dire, liominem religiosum. Liv., 1,18: incluta iustitia
et religio ... Numae Pompili erat. Nous disons d'un homme
qu'il a de la religion. Tert. dit, en ce sens, religio ou religio-
sitas. 35,1 : verae religionis homines, des hommes vraiment,
sincèrement religieux (et non : les adeptes de la vraie reli-
gion ). 33,1 : sed quid ego amplius de religione atque pietate
Cliristiana in imperatorem (dicam) ? De spect., 1, p. 1, 17 :
quemadmodum ista non competant verae religioni et vero obse-
quio erga verum Deum. L'interpolateur de P paraît n'avoir
pas compris ce sens de religio.
Dans P, et impositos manque et la concision y gagne. Mais
ces mots renforcent le sens : les Romains ont été élevés et
solidement établis au faîte de la grandeur. Cf. Liv., 37,25 ;
Masinissam in Syphacis regnum inposuisse. Chap. 48,7 : qui
tantum corpus hoc nuindi ... inposuit.
CHAP. 25,2-3 279
La clausule est la même clans P (crétique et trochée) que
dans F (où la longue du trochée est résolue).
25,3. Scilicet ista merces Romano nomini a deis (a Ro-
manis deis P) praerogativa (pro gratia P) expensa est. F
Le mot Romanis nous paraît inutile et même nuisible. Tert.
dit ironiquement : « Eh oui ! sans doute, cette récompense
(l'empire du monde) a été accordée au nom romain par les
dieux comme un privilège 1 » Et aussitôt il conclut ironique-
ment : « C'est un Sterculus, un Mutunus et une Larentina
(divinités considérées comme ridicules ou peu recomman-
dables par Tertullien) qui ont étendu au loin son empire !
(Je cite ces dieux romains), car les dieux étrangers n'ont pas
voulu, je suppose, favoriser une nation étrangère plutôt que
la leur ... »
Tert. reprend donc d'abord ironiquement l'affirmation des
Romains : ce sont les dieux en général {adeo deos esse : ils ne
disent pas les dieux romains) qui ont fait la grandeur de Rome.
Il en conclut : c'est un Sterculus, etc., c'est-à-dire : « ce sont
évidemment les dieux nationaux, ceux de la Rome primitive,
qui ont étendu l'empire. Car ce ne sont certes pas les dieux
étrangers. »
Un lecteur a maladroitement introduit Romanis pour l'op-
poser à peregrinos dès le début, sans voir qu'il détruit toute
l'élégance et la finesse du langage.
Tert. appelle praerogativa la faveur spéciale faite par Dieu
aux Juifs (21,4) et la faveur spéciale accordée aux Romains
par les dieux. Cette faveur spéciale est un « privilège ». Ter-
tullien affectionne le mot praerogativa, auquel il donne encore
un autre sens. Voy. 5,2 et 21,4.
25,3. Peregrinos enim deos non putem extraneae genti
potius quam suae maluisse nec (magis fatum voluisse
quam suae et PM) patrium solum, in que nati, adulti,
nobilitati sepultique sunt, transfretaneis (transfretanis
PM) dédisse. F
On ne peut pas recourir au passage parallèle. Ad nat., 2,17,
p. 130,1 1, où il y a une lacune ; il ne reste que extraneo potius ...
280 APPENDICE 1
Tertullien dit ailleurs encore malo alicui, je prends le parti
de qqn, je favorise qqn. De pall., 1, p. 916 0. : At cum sae-
cularium sortium varia\>it urna et Romanis Deus maluit. La
tournure est différente, ib., 3, p. 929 0. : Sed vos omnem
lanicii dispensationem siruduramque telartim Minervae ma-
luistis, où maluistis a un compl. direct. Il en est de même dans
Cicéron, Pro Plancio, 59 : ego vero quamquam illi omnia malo
quam mihi. Ad Att., 2, 16, 4: ego satisfaciam publicanis,
d 8e \x-r\ — vere tecum loquar — in hac re malo universae
Asiae et negotiatoribus (se. satisfacere). La locution malo
alicui, sans compl. dir., semble donc propre à Tertullien.
Quant à la leçon de PM, il faut corriger fatum, qui n'a pas
de sens, en fautum (Hartel, Patr. Stud., II, p. 78) avec la plu-
part des éditeurs, ou plutôt en factum, avec Meursius et Oehler
(I, p. 394, note aa, et 916, note q). Factum explique mieux
l'erreur du copiste. La locution factum alicui velle « être favo-
rable à qqn » est assez fréquente, peut-être depuis l'époque
archaïque Q). Gellius, Noct., Att., 6 (7), 3, 25 (résumant
Caton) : quod cum et utile lis esset et vellent régi esse factum,
nihil tamen adiuvandi eius gratia fecerint. Apul., Apol., 61 :
Sicinium Pontianum, privignum meum, qui mihi factum
volebat. Symm., Epist., 1,27 : tibi cui factum semper volo. 1,60 :
cui ego propterea factum volo. 1 ,66 : Gelasius, cui factum volo.
On comprend qu'un remanieur ait eu l'idée de remplacer
la locution malle alicui, propre à Tert., par une locution
fréquente, fautum ou factum velle alicui ; on ne comprendrait
guère l'inverse.
On peut objecter que le passage parallèle de Ad nat. ne se
complète pas bien au moyen de F : extraneo potins {populo
quam suo maluisse}. On aurait six lettres trop peu. Si l'on
complète d'après P, la lacune est remplie : extraneo potius
(populo factum voluisse quam suo}, ut fièrent desertores et
destitutores. Mais cette observation n'est pas décisive, car
(') Lôfstedtj p. 42, compare Térence, Ad., 919 : /(? video nostrae
faviiliae latn e.v a?iùno factum velle. Pour expliquer l'origine de l'ex-
pression, il cite Plaute, Baccli., 778 : ei facta cupiajn qtiae is velii .
CHAP. 25,3-5 281
Tert. modifie souvent sa rédaction première. On peut même
supposer que c'est dans Ad nat. que le remanieur a trouvé
fadum voluisse.
25,3. Viderit Cybele, si ad ultores transferre (transira P)
prospexit, quod sciebat Graeciam Phrygiae debellatricem
(debellatorem PM) subacturos. F
Cybèle prévoit que les Romains vengeront les Troyens en
soumettant la Grèce et elle prend soin d'avance de se faire
transporter à Rome. La Grèce fut conquise en 146 ; Cybèle
fut transportée à Rome dès 204. Voy. 22,12. Or, continue
Tert., cette déesse si prévoyante ne savait pas encore le 24
mars 180 que Marc Aurèle était mort le 17 mars 180!
Rauschen a changé transferre en transferri, ce qui est inutile
et nuit au rythme. Di Capua, p. 35, n. 1. Transferre s'emploie
dans le sens intransitif de transir e {^). Comme transir e, il donne
ici une bonne clausule (un crétique et un trochée). Etant la
lectio difficilior, il doit être préféré à transir e. Le reviseur de P,
ne connaissant pas l'emploi intransitif de transferre, l'aura
remplacé par le mot ordinaire, transire i^).
Debellatorem est évidemment fautif, pour debellatricem.
25,5. M. Aurelio apud Sirmium subito interempto F
Au lieu de subito interempto, P a : reipublicae exempto. —
Suivant Capitolin, Vita M. Ant., 28, Marc Aurèle mourut de
(') Lôfstedtj p. 40-41, a montré que, sous \'Km\y\vQ, transferre
est assez souvent employé dans le sens intransitif de se tra7isfcrrc,
transferri on tra?isire. Citons seulement, avec lui, Cic. Or. Scliol.,
P- 329, 17 (Stangl) : ad Sullanas transtulit (=-transiit) parles. Amm.
Marc, 21,12,8: ad instrumenta obsidionaliuin artiuni transttilerunt
f= transiverunt) . Pline, Paneg., 81, dit déjà : remisque transferre
(traiccre, trans7nitterej oèstantia fréta. lui. Valer,, 2, 15 : ad eiusmodi
responstini re^is henevolentia proliiuis transfort. Tous ces passages
ont été modifiés par les éditeurs. Voy. encore Lôfstedt, Beitràgc zur
Ke7intnis der spàteten Latinitàt, p. 85 et s. (Stockholm, 1907).
282 APPENDICE I
la peste, après sept jours de maladie ; mais Dion Cassius,
71,33, assure (wç éyw tracpwç vîxouora), qu'à l'instigation de
Commode, il fut empoisonné par ses médecins. Interempto, qui
se dit d'une mort violente, montre que Tertullien a suivi la
tradition recueillie par Dion Cassius, La leçon de P semble
d'ailleurs peu conforme à la grammaire, car eximere avec le
datif signifie « délivrer » d'un mal, « arracher » à un mal
{morti, poenae, supplicio) et ne convient pas à reipublicae.
25,5. archigallus ille impurissimus F.
L'épithète est dans le goût de Tert., qui aime à frapper
fort. Voy. au § 9 : prostratissimae lupae Larentinae. Ailleurs
(De resurr., 16, p. 46,7), il met l'archigalle sur le même rang
que les frictrices, les gladiateurs et les bourreaux. Ici, les mots
quo sanguinem impur um lacertos quoque castrando libabat
justifient l'épithète impurissimus.
P a sanctissimus, ce qui est d'une amère ironie. Un lecteur
n'aurait guère eu l'idée de changer impurissimus en sanc-
tissimus, mais il a pu écrire impurissimus en marge de sanctissi-
mus, pour expliquer l'ironie. Un remanieur n'aurait pas non
plus remplacé impurissimus, qui est le mot propre, par sanctis-
simus, qui est ironique. Mais il a pu faire l'inverse, à cause
des mots sanguinem impurum ... libabat, qui suivent. Il est
donc probable que Tert. a écrit sanctissimus.
25,7. ut ea potius orbi terrae (/. terra) praecelleret, quae
cineres lovis texit FPM.
Un seul ms inférieur (Erlang., d'après Oehler) a : terra. —
Ea quae texit pourrait être une périphrase pour désigner la
Crète {Cretam suam). Cicéron dit orbis terrarum ou orbis terrae.
Mais voy. Ad nat., 2, 17, p. 131, 3 : uf illa potius terra regna-
ret ... (le reste est effacé). Tert. a modifié sa première rédaction,
comme il le fait souvent. L'emploi de praecelleret, au lieu de
regnaret, a amené le datif orbi. Terra est placé après orbi à
cause du rythme (double crétique). — C'est le voisinage des
deux mots qui a fait croire au scribe qu'il avait affaire à la
locution orbis terrae.
CHAP. 25,5-7 283
25,7 Vellet et luno F ; vellet luno P
Ces mots sont effacés dans Ad nat., 2, 17, p. 131, 4. Il est
possible que et soit tombé par haplographie après vellet.
— Tert. réfute l'allégation que les Romains doivent l'em-
pire du monde aux dieux. Après avoir écarté ironiquement
les anciens dieux romains, Sterculus, etc., il dit que les Ro-
mains n'ont pas non plus reçu le pouvoir des dieux étrangers,
et il cite Cybèle, Jupiter et Junon, Junon de Samos, dit-il,
aurait défendu Carthage plutôt que Rome, puisqu'elle pré-
férait même Carthage à Samos, suivant Virgile.
Dans un raisonnement semblable, Minucius Félix, 25, 9 :
dit : Neque enim eos (se, Romanos) adversus suos homines vel
Mars Thracius, vel luppiter Creticus, vel luno nunc Argiva,
nunc Samia, nunc Poena, vel Diana Taurica, vel mater Idaea,
vel Aegyptia illa non numina, sed portenta iuverunt.
La liste de Minucius est plus longue que celle de Tert. qui
ne cite que trois divinités.
Hartel {Zeitschr. fur ôsterr. Gymn., 20, 1869, p. 350) a sup-
posé que Tert. a fait un choix dans la liste de Minucius Félix.
M. Heinze (p. 431) soutient, au contraire, que c'est Minu-
cius Félix qui a allongé la liste de Tertullien.
N'est-il pas aussi vraisemblable que, parmi les divinités
que nomme Minucius Félix, Tertullien ait choisi les trois qui
lui fournissent des développements conformes à son but. Il
vient de railler les dieux primitifs de Rome, Sterculus, Mutu-
nus et Larentina, et il continue sur le même ton à parler des
divinités venues de l'étranger. 11 commence par Cybèle, dont
le manque de clairvoyance fournit ample matière à raillerie.
Puis il parle de Jupiter, qui devait préférer à tous les Capi-
tules du monde la terre qui couvrait ses cendres, et enfin
de Junon, la malheureuse épouse et sœur de Jupiter, qui a dû
assister, impuissante, à la ruine de Carthage, sa ville préférée.
Ni Cybèle, la peu clairvoyante, ni Jupiter, qui a son tombeau
en Crète, ni Junon, qui n'a pu sauver la ville de son choix,
n'ont pu donner l'empire à Rome.
Cela est parfait, mais le passage de Minucius Félix ne l'est
pas moins. Qui osera décider où est l'original et où est la
copie ?
284 APPENDICE I
C'est M. Heinze, et voici son raisonnement. Minucius Félix
veut montrer que les dieux qu'il énumère n'auraient jamais
aidé les Romains contre leurs concitoyens et il nomme trois
pays préférés par Junon. Cela n'a pas de sens (sinnlos), dit
M. Heinze, et c'est même directement contraire au but, car
on ne voit plus où sont les concitoyens de Junon ! Il nous
semble, au contraire, que c'est conforme au but de Minucius
Félix, car les mots luno nunc Argiva, nunc Poena, nunc Samia
veulent dire que Junon n'avait pas, elle, à protéger un seul
pays, mais trois, plutôt que les Romains. Il y a là une pointe
d'ironie ou de persiflage. Chez Minucius Félix, la raillerie
est ordinairement contenue ; chez Tertullien, elle se donne
libre carrière.
C'est en accumulant de pareilles critiques que M. Heinze
essaie de faire passer Minucius Félix pour un imitateur mala-
droit, dont la gaucherie et le manque de sens, de logique ou
de goût trahirait les larcins !
25,9. quantum prostratissimae lupae Larentinae F.
Les deux traditions (FPM) ont Laurentinae. Dans Minu-
cius Félix, 25, 8, le Parisinus a également Acca Laurentia.
Cette faute paraît fréquente pour Larentia et Larentina.
Au lieu de prostratissimae, P a prostitutissimae. Ici, comme
ailleurs, le remanieur de P paraît avoir remplacé le mot rare
par le terme ordinaire, pour rendre le texte plus clair. Le super-
latif prostratissimae est dans le goût de Tertullien, qui aime
à frapper fort. Prosternere est employé pour prostituere depuis
Suétone (Calig., 24,3. Arnob., Adv. gent., 2,42, p. 82, 19),
qui emploie aussi prostratus pour prostitutus, mais ne l'applique
pas à une personne. Div, Jul., 2 : non sine rumore prostratae
régi pudicitiae. Tib., 35 : matronas prostratae pudicitiae. Justin,
12, 7, 11 : Cleophis regina propter prostratam pudicitiam
scortum regium ab Indis exinde appellata est. Tert. est peut-
être le premier qui applique cette épithète à un nom de per-
sonne.
25,11. antequam isti dei inciderentur. FP
Sous-entendez dei avec inciderentur, et traduisez : « avant
CHAP. 25,9-13—26,2 285
que vos dieux fussent considérés comme dieux, prissent rang
parmi les dieux». Cf. 40,12 : priusquam Christiani nomina-
rentur, se. Christiani. 24,4 : alium praeter Caesarem et dicere
et audire, se. Caesarem (où Van der Viiet, p. 38, propose à
tort d'ajouter Caesarem avant et dicere). 34,2 : etiam familiae
(se. patres) magis patres quam domini vocantur. 34,3 : si
habens imper atorem alterum adpelles, se. imper atorem..
Incidere aliquem = titulum incidere alicui. Ch. 50,11 : illis
titulos inciditis in aeternitatem. Adv. Marc, 1,9, p. 301,3 :
Quem titulum incidemus ex duobis deo Marcionis ? Utrumque,
opinor, et nunc incerto et rétro ignoto. De pud., 10, 12 : si
scriptura « Pastoris » ... divino instrumenta meruisset incidi,
si l'écrit du « Pasteur » avait mérité de prendre place parmi
les Livres saints. De resurr., 16, p. 47,3: ille scilicet limus,
qui prior titulo hominis incisus est, non calicis aut gladii aut
vasculi ullius. De là, incidi = haberi. Peut-être Tertullien
fait-il aussi allusion au livre d'Evhémère, ('lepà âvaycpacp'/i),
qui raconte qu'il a vu les noms des rois morts, devenus dieux,
gravés sur des stèles.
25,13. ideoque non propterea magni, quia religiosi. F
Au lieu de propterea, F a: ob hoc. C'est le seul passage de
VApol., où l'on trouverait ob hoc ... quia, tandis que propterea
quia (1,5 ; 11,8 ; 14,7) ou quod (11,8) ou ne (9,13 ; 48,1) est
fréquent. Le remanieur de P paraît donc avoir méconnu
l'usage de Tertullien.
26,2. Prior est quibusdam deis suis Roma F
Dans PM : silvestris Roma. — Tert. parle 1) de la Rome
primitive, qui naquit avant beaucoup de ses dieux ; 2) de la
Rome des Tarquins, déjà maîtresse du Latium, avant que
le temple de Jupiter fût bâti sur le Capitule. L'épithète 5//-
vestris, pour désigner la Rome primitive, est une réminiscence
des poètes. Virgile, Aen., 8, 347 :
Hinc ad Tarpeiam sedem et Capitolia ducit
Aurea nunc, olim silvestribus horrida dumis.
286 APPENDICE I
Properce, 4, 1 :
Hoc, quodcumque vides, hospes, qua maxima Roma est,
Ante Phrygem Aenean, collis et herba fuit.
Mais les poètes parlent de l'époque antérieure à la fondation
de Rome ; ils décrivent l'emplacement de la Rome future.
Ici, l'épithète, appliquée à la ville elle-même, paraît hardie.
Même à cette époque primitive, la ville était-elle c couverte
de forêts »? — Voy. encore Ovide, Fast., 6,401,
26,2. quart! tantum ambitum Capitolii exstrueret *F ;
quam tantum ambitum Capitolii exstrueretur. P
Il paraît peu vraisemblable que Tert. ait employé tantum
ambitum comme un nominatif neutre, ainsi que le supposent
Junius (dans son propre commentaire, p. 45) et le Thés. l. /.,
I, 1858, 2. D'après Oehler, deux mss inférieurs ont tantus
ambitus ... exstrueretur. La lecture de Barraeus, confirmée par
le silence de Modius, convient le mieux : Roma est sujet de
regnavit et (\' exstrueret. La clausule sera un crétique et un
trochée (avec la longue résolue) ; exstrueretur est une fin
d'hexamètre, clausule évitée généralement en prose.
26,2. virgines Vestae F ; virgines Vestales P.
Le nom officiel et ordinaire est virgines Vestales. Mais on
trouve aussi virgines Vestae, qui donne ici une clausule fré-
quente (crétique et trochée). Liv., 1, 20 : virginesque Vestae
legit. Tacit., Ann., 1, 8, 2 : cuius (Augusti) testamentum, inla-
tum per virgines Vestae, Tiberium et Liviam heredes habuit.
Ulpian., Fragm., 10,5 : quae virgines Vestae capiuntur. Riese,
Geogr. lat. min., p. 120 : et vocantur virgines Vestae. L'inter-
polateur de P a donc mis le nom officiel.
27,1. Satis haec ad versus intentationem laesae religionis
ac divinitatis (laesae religionis PM) : quo non videamur
iaedere eam, (quam add. P) ostendimus non esse. F
Tertullien se résume ici. Les chrétiens sont accusés de léser
la divinité, c'est-à-dire les dieux {Iaedere deos, 12,7 ; 25, 16-17)
CHAP. 26,2—27,1-4 287
et de léser aussi la religion : ils sont rei laesae religionis (24,1)
et encourent le crimen laesae publicae et maxime Romanae
religionis (24,1), Les démons, a dit Tert. (24,1), en attestant
par leurs aveux que les dieux n'existent pas, nous lavent de
l'accusation de lèse-religion ; car, sans dieux, il n'y a pas
de religion et le crime de lèse-religion ne se conçoit pas : si
religio non est, quia nec dei, pro certo, nec nos pro certo rei
sumus laesae religionis. En se résumant ici, il réunit les deux
termes du crime de sacrilège (ci-après, 28,3), le mépris des
dieux et le mépris de la religion, et il répète l'idée du ch. 24,1,
en disant : quo non videamur laedere eam, ostendimus non
esse. — Eam représente religionis ac divinitatis. — Non esse,
se. eam. Sur cet accord, voy. 36,2 : Adeo pietas et religio et
(ides imperaforibus débita ... consistit. Voy. ci-dessus, p. 55.
L'interpolateur de P, qui a oublié tout cela, a supprimé
religionis ac, sans voir qu'il mutilait la pensée de Tert.
11 n'a pas compris non plus quo (= ut eo), qui se rapporte
à ce qui suit : « pour montrer (par là) que nous ne la lésons
pas, nous avons montré qu'elle n'existe pas «, et il a ajouté
quam. Sur quo sans comparatif, voy. 47,1 : quo facile credatur.
Ad nat., 1,1 1, p. 81, 13 : quo non vererentur extraneum. 1,18,
p. 90, 12 : Destruite nunc gloriam maiorum, quo nos quoaue
destruatis. Ovid., Her., 18, 203 :
Sed, quo mare finiat iram,
Accédant, quaeso, fac tua vota meis.
27,3-4. Sed agnoscimus ... quis .. operetur : ille scilicet
spiritus daemonicae et angelicae paraturae, qui noster
ob divortium aemulus et ob gratiam Dei invidus, de
mentibus vestris adversus nos proeliatur F
Il faut ponctuer comme nous venons de le faire, car ille
scilicet spiritus est apposé à quis, sujet de agitet et de operetur.
— Daemonicae PM ; daemoniacae *F. Modius paraît ne pas
avoir remarqué la variante ; en effet, Tert. emploie toujours
la forme daemonicus. Oehler lit à tort daemoniacus dans De
resurr., 58, p. 118,23 ; dans De carne Christi, 4, M a : dac-
monicam.
288 APPENDICE I
Tert. appelle le démon un esprit de nature démoniaque et
angélique ; il distingue, en effet, deux générations d'esprits
du mal : les anges déchus {angeli) et les démons, nés de ces
anges. Voy. 22,3 et 35,12. Cf. De an., 40, p. 377, 22 : daemo-
nicam esse rationem eorutn spirituum ...
L'esprit du mal, dit Tert, est notre ennemi à cause de sa
révolte contre Dieu et il est jaloux de nous à cause de la faveur
que Dieu nous a accordée. Tert. montre ailleurs que son inimitié
et sa jalousie remontent à la création : en révolte contre Dieu,
il en veut à la créature privilégiée de Dieu, à l'homme fait à
l'image de Dieu, à qui Dieu a soumis toute la création. Voy.
De pat., 5.
Invidus est ici substantif, comme aemulus, et noster se rap-
porte à l'un et l'autre. Cicéron dit déjà : a tuis invidis et
obtredatoribus (Epist., 1, 4, 2).
27,5-6. praeterquam et desperata condicio eorum.
Praeterquam ne commence jamais une phrase avec le sens
de praeterea ; il est toujours en rapport avec ce qui précède
ou avec ce qui suit dans la même phrase. Il faut donc ponc-
tuer :
5. Nam, licet subiecta sit nobis tota vis daemonum et
eiusmodi spirituum, ut nequam tamen servi, metum non-
numquam contumaciae miscent et laedere gestiunt, quos
alias verentur (odium enim etiam timor spirat) (i), praeter-
quam et desperata condicio eorum ... de poenae mora. 6, Et
tamen ...
Les démons ont deux raisons de faire la guerre aux hommes :
la crainte mêlée à l'esprit de révolte, «sans compter que »
c'est aussi une consolation, une satisfaction pour eux de
mettre en œuvre leur malignité, en attendant leur châtiment,
qui est ajourné jusqu'au jugement dernier. La première
raison est mise en évidence, parce que la comparaison avec
de méchants esclaves {ut nequam servi) ne porte que sur elle.
(1) spirat P; inspirât F. Voy. ci-dessus, p. 107 et 245, note.
CHAP. 27,5-7 289
Tert. ajoute la deuxième raison accessoirement : « outre
que, sans compter que ».
27,6. Et tamen adprehcnsi subiciuntur F
P a SLibiguniar. Tert. emploie siibici en parlant des dé-
mons. Cf. 23,8 : subiecta est, et plus loin, subdita est. 27,5 :
licel subiecta sit.
27.6. Et condicioni suœ parent et succédant F ; et con-
dicioni suae succidunt PM
La condition des démons est l'esclavage ; ils sont esclaves
des chrétiens. Comme de méchants esclaves (§ 5), ils se
révoltent ; mais subjugués par l'exorciste, ils se soumettent
et se résignent à leur condition. On dit parère necessitati
(Cic, Or., 60) et Justin, 8,2, a dit : Thebani Thessaliqiie ...
externae dominaiioni, quam in suis timuerunt, sponte succe-
dunt.
Succidere est très fréquent dans Tert., mais signifie « suc-
comber à )) : succidere vanitati (De cor., 6), necessitati (De
resurr., 62), inpatientiae (De pat, 5), quieti (De an., 43, p.
370,26), humanae (ormae (Ibid., 34, p. 359, 10), moecJiiae et
fornicationi (De pud., 1,15), diabolo (Adv. Marc, 1, 10, p.
350, 5), et « tomber sous » : tactui (Adv. Marc, 4, 8, p. 438,
15). Voy. l'index d'Oehler et Hoppe, Syntax, p. 30.
27.7. Itaque dum (cum P) vice repugnantium vel rebel-
lantium {liaec duo verba oni. P) crgastulorum sivc car-
ccrum vel mctallorum vel hoc genus poenalis servitutis
erumpunt adversus nos praeliaturi (oni. P), in quorum
potestate sunt, certi et iam périsse (et inpares se esse P)
et hoc magis perditos, ingratis resistimus ut aequales F
« Aussi, semblables à ces esclaves qui résistent et se révol-
tent dans les ergastules, dans les prisons, dans les mines ou
dans une autre servitude pénale du même genre, ils s'élancent
contre nous, pour nous livrer bataille, à nous qui les avons
sous notre puissance, sachant qu'ils sont perdus déjà et que
19
290 APPENDICE I
leur fureur ne peut qu'ajouter à leur perte : alors nous sommes
forcés de leur tenir tête comme s'ils étaient nos égaux ... »
Tertullien répond à ceux qui disent aux chrétiens : Il vous
serait facile de vous sauver en sacrifiant. Cette formalité
matérielle ne vous empêcherait pas de penser ce que vous
voulez. C'est pure démence de préférer l'entêtement au salut.
— Nous ne pouvons pas sacrifier pour nous sauver, réplique
Tert., parce que vous agissez à l'instigation des démons : ce
sont eux qui nous font la guerre, embusqués dans vos esprits :
ille scilicet spiritus ...de mentibus vestris adversus nos proe-
liatur... Céder à vos sommations, ce serait céder aux démons !
En refusant obstinément, nous triomphons d'eux.
Tert. explique pourquoi les démons, qui sont assujettis
aux chrétiens {licet subieda sit nobis Ma vis daemonum, § 5),
qui sont sous la puissance des chrétiens {in quorum potestate
sunt, § 7), comme on l'a vu au ch. 23, leur font cependant
la guerre.
Il se sert d'une comparaison : la révolte des démons contre
les hommes, leurs maîtres, est comparable à la révolte des
méchants esclaves contre leurs maîtres légitimes. Ils ont deux
raisons de faire la guerre aux hommes : la crainte mêlée à
l'esprit de révolte, sans compter que c'est une satisfaction
pour eux, dans leur situation désespérée, de donner libre
cours à leur malignité, en attendant leur châtiment, qui est
ajourné à la fin du monde. Voy. ci-dessus, p. 288.
Ils se révoltent donc contre leurs maîtres, comme de mé-
chants esclaves. Dans les guerres serviles, il y a deux armées
en présence et les maîtres doivent combattre leurs esclaves
à armes égales : de même, les chrétiens, « sont forcés de com-
battre » {ingratis resistimus) les démons, leurs esclaves, comme
des égaux {ut aequaies) et c'est en résistant à leurs suggestions,
en mourant pour la foi, qu'ils triomphent d'eux.
P a Itaque mm, au lieu de Itaque dum. De même, au ch.
29,5 : dum sciunt petere F ; cum sciunt petere P. Le reviseur
de P semble avoir méconnu l'usage, très fréquent dans Tert.,
de dum pour cum. Hoppe, Syntax, p. 79.
P n'a pas les mots vei rebellantium. Les deux verbes sont
synonymes, mais le second est plus fort que le premier. Repu-
gnare « opposer de la résistance » se dit de l'esclave désobéis-
CHAP. 27,7 291
sant ; rebellare « se révolter » se dit de l'esclave qui essaie de
reconquérir sa liberté. Aliud est repugnare, aliud rebellare,
quorum prius indicat inoboedientiam servorum In mandatis
exsequendis, flagris castigandam, posterius conatum libertatis
adipiscendae, gladlo coercendam (Hav.). Au ch. 25,2, F a aussi
deux participes synonymes : elatos et impositos.
F n'a pas proeliaturi, mais praeliantur. Ce mot manque dans
P. — Proeliatur n'a pas de sens. Havercamp a déjà conjec-
turé : proeliaturi, qui convient admirablement au sens et
aussi au rythme (un crétique et un trochée). Devant in,
praeliaturi a pu devenir praeliatur par haplographie de i ;
le scribe l'a mis au pluriel, comme erumpunt. Le scribe ou le
remanieur de P a omis ce praeliatur, qui n'avait pas de sens.
Au lieu de certi etiam (= et iam) périsse et hoc magis per-
ditos, P a : certi et inpares se esse et fioc magis perditos. Dans
P, le sens de et hoc magis perditos n'est pas clair. Si cela signi-
fie : « ils sont certains de nous être inférieurs en force et ils
n'en sont que plus désespérés », il faudrait : perditi (conjec-
ture d'Oehler) et le premier et serait de trop. Et ... et prouve
que nous avons deux infinitifs dépendant de certi.
Mais et hoc magis perditos peut signifier aussi : certains
qu'ils sont plus perdus encore par ce fait, à cause de la guerre
(qu'ils nous font), que leur fureur contre nous ne fait qu'ajou-
ter à leur perte. Dans ce cas, et lioc magis perditos marque
une gradation sur le premier membre.
Cette gradation n'existe pas, si on lit, avec P : et impares
se esse. Elle existe, au contraire, si on lit, avec F : et iam {se)
périsse et Iwc magis perditos (se esse). L'ellipse de se et de se
esse est fréquente dans Tertullien (i). Hoppe, Syntax, p. 144.
11 y a gradation entre (se) périsse {= se perditos esse, âuoXw-
"kévaC) et magis perditos (se esse) : les démons savent 1) qu'ils
sont déjà perdus et 2) qu'à cause de ceci, de cette guerre faite
aux hommes, ils sont plus perdus encore. Voy. § 6 : desperata
condicio eorum ex praedamnatione. C'est la fureur du déses-
poir qui les inspire, comme elle inspire les mauvais esclaves.
(^) Voyez notre Langue et Syntaxe de Minucms Félix, dans notre
édition classique, Partie du maître, p. 150, § 200.
292 APPENDICE I
En temps ordinaire, les maîtres châtient les mauvais es-
claves ; mais quand ceux-ci parviennent à se révolter et à
prendre les armes, dans les guerres serviles, les maîtres doivent
les combattre comme des égaux, comme des gens de même
condition. De même, les chrétiens sont obligés (ingrotis) de
tenir tête aux démons comme à des égaux (ut aequales), bien
que les démons soient leurs esclaves. C'est pour en triompher
qu'ils résistent à leurs suggestions, aux sommations des juges
inspirés par eux.
Ut aequales ne signifie donc pas : « comme s'ils étaient nos
égaux en force » (pares), ainsi qu'on l'a cru souvent, mais :
aequalis conclicionis (Heraldus). Le correcteur de P paraît
l'avoir pris dans le sens de pares, car c'est cette erreur qui
lui aura fait changer et iam périsse en et inpares se esse, qui ne
s'oppose pas à et hoc magis perditos (voy. ci-dessus). La clau-
sule iam périsse forme un ditrochée.
28,1. Sed quoniam facile iniquum videretur F ; quoniam
autem facile iniquum videretur P
Les §§ 1 et 2 ne forment qu'une seule et même période.
Voy. Heinze, p. 434. Le verbe principal est formati estis. Au
milieu de la période, Tertullien a intercalé un discours direct.
Il faut donc traduire : « Comme il paraîtrait facilement inique
de ..., que (d'autre part) on trouverait ridicule de ..., vous
avez été dressés par ces mêmes esprits à nous forcer de ... ».
Voici le sens. Si vous pressiez des hommes libres d'offrir
un sacrifice simplement aux dieux {od sacrificanduni), cela
paraîtrait facilement inique ; car on exige la bonne volonté
de celui qui sacrifie et il s'en suit que chacun doit être libre
de sacrifier ou de ne pas sacrifier. Si vous forciez un homme
d'offrir un sacrifice dans son propre intérêt à des dieux qu'il
est intéressé à honorer, cela passerait certainement pour
ridicule ; car chacun est juge de son intérêt et peut s'arranger
avec les dieux comme il lui plaît. Cela étant, ces mêmes dé-
mons — ce sont eux à coup sûr (utique) — ont inventé un
moyen détourné : ce n'est pas un sacrifice quelconque ni un
sacrifice intéressé qu'ils vous ont appris à nous imposer (ce
serait inique ou absurde), mais un sacrifice pro sainte impera-
CHAP. 28,1 293
toris, c'est-à-dire un sacrifice qui constitue un acte de loya-
lisme, auquel un vrai Romain ne peut se dérober. Un homme
libre ne peut s'y soustraire ni alléguer qu'il sacrifie malgré
lui, car le libens animas est ici de rigueur; d'autre part, il ne
peut alléguer qu'il est seul juge de ses intérêts, car ce n'est
pas son intérêt personnel, mais le salut de l'empereur qui
est en cause.
Tert. parle ici de la liberté religieuse comme étant reconnue
des Romains ; il dit qu'il paraîtrait à tout le monde inique
ou absurde de la violer. Cette liberté est fondée sur deux
principes admis par les Romains :
10 Sur la religion elle-même, qui veut que tout hommage
rendu aux dieux soit volontaire sous peine de ne pas être
agréée par les dieux (cf. 8,7 ; 9,4 ; 24,6) (i).
2° Sur le droit naturel, qui donne à chacun pleine liberté
d'agir dans la limite de ses droits et qui le fait juge de ses
intérêts, spécialement à l'égard des dieux. Ad Scap., 2. Les
simples citoyens n'ont aucune obligation de participer aux
actes du culte et aucun homme n'a qualité pour venger les
dieux offensés par un autre: deorum iniuriae diis cwae, disait
Tibère (Tac, Ann., 1,73). Cf. Mommscn, Droit pénal, p. 568 =
Trad., II, p. 270. Marquardt, Le Culte, I, p. 253 et ss.
11 en est autrement si un citoyen refuse de prendre part
aux actes habituels de la religion impériale : on peut le faire
(*) Ad Scapulam, 2: Tamen /mmuni iuris et naturalis potestatis
est unicuique quod putaverit colère, nec alii obest aut prodest
alterius religio. Sed 7icc rehgiotiis est cogère religionenij quae sponle
suscipi debeat, non vi, cum et hostiae ab animo libenii exposlulenlur,
Ita elsi nos compuleritis ad sacrificandum, nihil praeslabitis diis
vestris. Ab invilis enim sacrificia non desiderabunt, nisi si conten-
tiosi sunt: contentiosus autem Deus non est. Denique qui est verus,
omnia sua ex aequo et profanis et suis praestat, ideoque et iudicium
constituit aeternum de gratis et ingratis. Tamen nos, quos sacrilegos
exislimatis, nec in furlo unquam deprelienditis, nedum in sacri-
legio. Omnes autem qui tcmpla dispoliant et per deos iurant et
eosdem colunt, et Christiani non sunt et sacrilegi tamen deprehen-
duntur.
294 APPENDICE I
passer pour ennemi de l'empereur ; on peut le déclarer cou-
pable d'impiété envers le prince et (improprement) de lèse-
majesté ! Voy. ad 28,3,
28,3. Ventum est igitur ad secundum titulum laesae
augustioris maiestatis, siquidem maiore formidine et
calidiore timiditate Caesarem observatis quam ipsum de
Olympe lovem F
P a : callidiore. — Les païens servent l'empereur avec une
crainte plus vive que Jupiter de l'Olympe lui-même. Calidus,
chaud, prend le sens de vehemens. S. Augustin, De civ. Dei,
16,2, p. 124, 24 D. : calicla inquietudine. Thés. l. /., III, 154, 26.
Les mots calidiore timiditate font pendant à maiore formidine.
La leçon de P veut dire : « avec une crainte plus avisée »,
c'est-à-dire une crainte intéressée, inspirée par le désir d'évi-
ter la vengeance impériale, plus prompte que la vengeance
divine. Mais cette idée, qui vient au § 4, est prématurée ici.
C'est ce que le scribe ou le correcteur n'a pas vu.
— Cette phrase fournit un exemple probant d'un des
caractères les plus remarquables, mais trop peu remarqués
jusqu'ici, de la langue de Tertullien. L'apologiste de Carthage
était certainement juriste : ce qui le prouve, c'est son habi-
tude constante de faire servir les termes de la langue juridique
à l'expression de ses idées, même des idées non juridiques.
Il aime, si je puis ainsi dire, à revêtir sa pensée d'une forme
juridique ; il se complaît à emprunter le langage consacré
du droit ou il crée des expressions nouvelles sur le modèle
de la langue du droit, pour exprimer des idées non juri-
diques (1).
(') P, de Labriolle, Tertullien jurisconsulte (Nouv. Revue liist.
de droit franc, et étranger, 1906, p. 28), dit très bien: « On verra
quelle quantité d'expressions juridiques se glissent dans la trame
du style de Tertullien. C'est le droit romain qui compose en
quelque sorte l'atmosplière dans laquelle sa discussion se déroule.
Faute de s'en aviser, on ne prendrait qu'une idée tout à fait insuf-
CHAP. 28,3 295
Il serait utile de faire une étude d'ensemble sur la langue
de Tertullien considérée de ce point de vue, particulièrement
dans l'Apologétique. En effet, pour saisir toujours exactement
la pensée de l'apologiste, il importe au plus haut point de ne
pas oublier cette habitude, cette manie de l'écrivain. Tertullien,
si j'ose dire, jongle véritablement avec la langue juridique
et il a donné le change aux plus savants et aux plus habiles,
comme nous allons voir.
Les païens reprochaient aux chrétiens de ne pas honorer
les dieux (10,1 : deos non colitis), de ne pas leur offrir des sacri-
fices {ut non sacrificemus, ibid.), de ne pas leur adresser les
hommages de respect et de piété qui sont dus à leur majesté
auguste, c'est-à-dire sacrée, et de nier même leur existence.
C'était offenser ou léser les dieux {laedere deos 12,7 ; 25,16),
c'était léser leur divinité (27,1) ou leur majesté divine (28,3;
35,5). Sur la majesté des dieux, voy. 6,8; 15,6; 23,9 ; 25,5.
C'était aussi léser la religion, qui prescrit d'honorer les dieux
(24,1 ; 25,17 ; 27,1).
Pour toutes ces raisons, les païens traitaient les chrétiens
«de sacrilèges, d'impies et d'irréligieux», ou encore « d'athées ».
En 155, à Smyrne, le peuple crie : Afpe toÙç dcGéou;* J^-rixeio-Bw
DoXuxapTcoc;. Toile impios, Polycarpus requiratur. Le juge dit
à Polycarpe : Efrcov afpe toÙç âOéouç. Conclama etiam tu :
Toile sacrilegos ! (Eusèbe et Rufin, Hist. eccL, 4, 15, 18).
Le nom de « sacrilèges » ou d '« athées » était une injure
(convicium), comme ceux d'homicides et d'incestueux. Minu-
cius Félix, 31,2 : Sed de isto et tuus Fronto, non ut adfiimator
testimonium fecit, sed convicium ut oraior aspersit. Arnobe le
dit en termes exprès. Adv. nat., 1,29 : ut convicio utar vestro,
infausti et athei nuncupamur. 5,30 : (niiror) audere vos dicere
quemquam ex his atheum, inreligiosuni, sacrilegum. 1,32 :
fisante de sa tactique et de ses intentions. » Page 30 : « Les concep-
tions-maîtresses de Tertullien, celles qui constituent en quelque
sorte l'armature de son œuvre, ont reçu leur forme du droit
romain ». Nous souscrivons à ce jugement, qui se vérifie à mer-
veille, on va le voir, dans tout V Apologétique.
296 APPENDICE I
quaiitumlibd nos impios, inrdigiosos vocctis aut allieos. 6,27 :
consucstis nos appellare aiheos. S. Justin, Apol., I, 6,1: evOev
xal aOeo!. y.ex7vr)jji.£8a- xai 6}ji.oXoYoûp.£v rwv Totoûxwv vo\ixï^o[xi-
vwv 6ewv aQeo'- eiva'.... L'athéisme, reproché aux chrétiens,
est donc le mépris ou la négation des dieux reconnus par les
nations.
Dans V Apologétique, le qualificatif ordinaire est sacrikgi,
qui a pour synonymes inpii et inreligiosi. 2,4 : nomen ... sacri-
kgi. 2,12 : laniari iabere sacrikgum. 13,1 : impii et sacrilegl
et inreligiosi erga deos vestros. 12,6 : o inpiae voces, o sacrikga
convicia ! Le crime lui-même d'impiété, le mépris des dieux
est appelé sacrikgium. Au ch. 10,1, en commençant la réfu-
tation de ce crime, Tertuliien le définit clairement. Les païens
disent : deos non colitis, et Tertuliien conclut : itaque sacrikgii
... rei convenimur. On nous accuse de sacrilège, parce que nous
n'honorons pas les dieux. Le mot reparaît dans le même sens,
25,15 et 35,5.
Or, dans le sens d' « impie » et d' « impiété », le code pénal
romain ignore les mots sacrikgus et sacrikgium. Il les ignore,
parce qu'il ignore le crime d'impiété ou de sacrilège. En effet,
aucun acte du culte romain n'était obligatoire pour les parti-
culiers et, à l'égard des offenses directes faites aux dieux,
l'Etat romain restait passif, ayant pour maxime : deorum
iniuriae diis curae (Tac, Ann., 1,73). Voy. Mommsen, Droit pé-
nal, p. 568 = Trad., Il, p. 270. Voy. ci-dessus, p. 293, ad 28,1.
Le code pénal romain appelait sacrikgus le voleur d'objets
sacrés et sacrikgium le vol commis dans un temple public.
Ch. 15,7 : certe sacrikgi (les spoliateurs des temples) de vestris
semper deprehenduntur ! Voyez ci-après, 44,2.
Mais dans la langue ordinaire, sacrikgus avait pris, après
Auguste, le sens d' « impie » en général, et sacrikgium, celui
d'impiété ou mépris des dieux, d'acte offensant pour les dieux.
Corn. Nepos, Aie, 6,4 : proinde ac si alius populus .. eum
sacrikgii damnasset. Sen,, De vita beata, 27,1 : nam cum in
coclum insanitis, non dico sacrikgium jacitis, sed opcram per-
dais. De benef., 1, 4, 4 : verendum esse ne, quia Charités lovis
jiliae suni, parum se grate gerere sacrikgium sit. Florus, 2, 17,
12 (1,33) : D. Brutus ... non prius signa convertit quam caden-
tem in maria solem ... non sine quodam sacrikgii metu et hor-
CHAP. 28,3 297
rore deprehendit. Apulée, Asclep., 41 : Hoc enim sacrikgii
siniile est, cuin Deum rages, tus ceteraqiie incendere. Niliil enim
deest ei, qui ipse est oinnia aut in eo sunt omnia.
On comprend que, pour désigner une accusation populaire»
Tertullien emploie un mot du langage courant, celui-là même
que la populace lançait à la face des chrétiens : Toile sacri-
legos ! On remarquera que Tert. lui donne l'air d'un terme
juridique en l'accolant à des termes juridiques : sacrilegii ...
rei convenimur. Ces termes eux-mêmes ne sont ici qu'emprun-
tés à la langue du droit et ont le sens vulgaire qu'ils ont
dans la langue courante.
Les synonymes de sacrilège que Tert. emploie, inreligiosi
et inreligiositas, sont également inconnus du droit pénal.
Tertullien dit que les païens les appliquent aux chrétiens,
et lui-même, en rétorquant l'accusation, les applique aux
païens (13,1 ; 24,2 ; 6 ; 25,14 ; 28,4). 11 leur donne une cou-
leur juridique en disant : in verum committitis crimen verae
inreligiositatis (24,2) ; ne et hoc ad inreligiositatis elogium
concurrat (24,6).
Voici maintenant où se révèle mieux encore le juriste,
habitué à emprunter le langage du droit. L'imputation popu-
laire, le cri de haine retentit jusque dans le prétoire : le juge
fait un grief aux chrétiens (nous verrons tout à l'heure com-
ment) de mépriser les dieux, de leur faire injure, et Tertul-
lien qui plaide en avocat, nous parlera (.Vintentatio laesae
religionis ac divinitatis (27,1) : c'est une accusation de «lèse-
religion et de lèse-divinité » qui est « intentée « aux chrétiens !
Il parlera du crimen publicae et maxime Romanae religionis,
se. laesae (24,1), de l'accusation d'avoir lésé la religion pu-
blique et surtout la religion romaine ! Il dira que les chrétiens
sont rei laesae religionis (24,1), coupables de lèse-religion.
Voilà des locutions qui ont tout à fait un air juridique, comme
crimen laesae maiestatis, mais que la langue juridique ne con-
naît pas. L'expression laesa rcligio est une création do Ter-
tullien (1) ; elle est formée sur le modèle d'une expression
(') Au moins dans le sens qu'il lui donne. On trouve une fois
298 APPENDICE I
juridique (laesa maiestas), mais elle n'est pas tirée du code,
elle n'a pas même une forme arrêtée, elle varie chaque fois
qu'elle revient sous la plume de Tertullien. Elle est syno-
nyme des expressions courantes sacrilegium, inreligiositas :
elle désigne le mépris des dieux, que Tert. définit par cette
formule : deos non colitis, et qui se manifeste par le refus de
leur offrir des sacrifices et de reconnaître leur existence. Elle
ne se distingue des expressions courantes que par un faux
air juridique.
Pas plus que sacriïegium et inreligiositas, la locution laesa
religio ne désigne un crime prévu et puni par la loi ; elle n'est
qu'une formule créée par Tert. pour désigner une accusation
extra-judiciaire, une imputation vulgaire. Elle ne constitue
pas et elle ne saurait pas constituer le fondement juridique
d'un procès criminel.
C'est ce que Mommsen a perdu de vue en faisant du crimen
laesae religionis une catégorie du crime de lèse-majesté, qu'il
appelle l'apostasie de la religion nationale. Nous verrons tout
à l'heure les deux passages qui l'ont induit en erreur, parce
qu'il leur a attribué une valeur et une précision juridiques
qu'ils n'ont pas. Ici, nous ferons remarquer qu'il est faux
de prêter à Tertullien l'idée d'un crime d'apostasie du culte
national.
Ce que les païens reprochent aux chrétiens d'après Ter-
tullien, c'est le rejet ou l'apostasie du polythéisme, c'est le
mépris de tous les dieux païens et en cela il est d'ailleurs d'ac-
cord avec tous les apologistes : deos non colimus, nous n'ho-
norons pas les dieux païens. S. Justin, dont Tertullien se
déclare l'émule (Adv. Valent., 5), dit : « Les hommes ont
appelé dieux les démons ... Nous disons que les démons sont
les génies du mal et de l'impiété ... Voilà pourquoi on nous
appelle athées. Oui, certes, nous sommes les athées de ces
prétendus dieux, mais nous croyons au Dieu très vrai, père
(Cod. lust., 9, i6,i, en 240^ Gordien): laesae religionis in criineti
inciderunt, mais il s'agit du sacrilège proi)rement dit, c'est-à-dire
de la profanation de rcs rcligioni desiinatae. Cf. Tac. Ann., 3-24.
CHAP. 28,3 299
de la justice ... » (Apol. I, 5-6). Sous Commode (180-185), le
préfet du prétoire, Tigidius Perennius, conseille au martyr
Apollonius de vénérer et d'adorer les dieux que tous les hommes
vénèrent et adorent (Acta Apoll., 13). Apollonius refuse et,
comme le juge, très bienveillant à son égard, lui permet, par
exception, de s'expliquer, il montre longuement combien
sont blâmables ceux qui adorent des êtres sans vie (§ 16-20),
des plantes et des animaux (§ 21) ou des hommes morts et
divinisés (§ 22). Tertullien ne distingue pas non plus entre
les dieux : dieux des Romains, dieux des peuples étrangers,
des provinces et des cités, dieux officiels et dieux privés.
Sans doute, pour un citoyen romain, le mépris des dieux
romains (24,1) est particulièrement grave : mépriser et nier
ces dieux qui ont donné l'empire à Rome (ch. 25) et qui
veillent toujours sur l'Etat romain, adorer un dieu non-romain
à l'exclusion des dieux romains, c'était oublier ses devoirs
de vrai Romain, c'était s'exclure soi-même du nombre des
Romains, c'était se mettre au ban de l'Empire! Et les païens
ne manquaient pas de dire aux chrétiens : Vous rejetez les
dieux romains, pour adorer un dieu que les Romains ne con-
naissent pas, donc vous ne méritez plus le nom de Romains :
laedimus Ronmnos nec Romani habemm, quia nec Romano-
rum deum colimus (24,9). Sur le sens de nec-Romanorum, voy.
ci-dessus, p. 278. C'était là un convicium qui venait s'ajouter
à celui de « sacrilèges », quand il s'agissait des dieux romains.
Mais le mépris des dieux nationaux n'est qu'un aspect parti-
culier du sacrilège ou du crime de lèse-religion ; ce qui le
prouve à l'évidence, c'est que Tertullien a rejeté tout ce qui
concerne cet aspect particulier du crime de lèse-religion
dans un chapitre spécial, placé à la fin (ch. 25) de son argu-
mentation et qui commence ainsi : Quoniam tamen Romani
nominis proprie intercedit auctoritas (25,2) (i). N'est-il pas
(') Mommsen cite le langage des conseillers de Dioclétien : Qut-
dain proprio adversus Cliristianos odio inhnicos dcoruiii et hostes reli-
gionum publicarum tollendos esse censuemnt (Lactance, De mort,
pers., II). Même à cette époque, les termes inimici deorum et hostes
300 APPENDICE I
évident que dans tout ce qui précède (excepté la fin du ch.
24, qui prépare le ch. 25), il a parlé du polythéisme en général ?
Au surplus, comment peut-on parler d'un crime d'apos-
tasie de la religion nationale, alors que les citoyens romains
n'étaient pas obligatoirement tenus de participer au culte
public ? On conçoit, d'autre part, que le refus des chrétiens
de sacrifier aux dieux, que leur abstention complète de tout
acte d'idolâtrie, ait suffi pour faire scandale, pour provoquer
la fureur populaire et donner lieu à ces cris de haine : sacri-
lèges, gens impies, contempteurs des dieux, mauvais Ro-
mains !
En résumé, c'est le sacrilège, l'impiété envers tous les
dieux païens et particulièrement envers les dieux romains,
qu'on reprochait aux chrétiens : on les accusait d'apostasie
du polythéisme et naturellement les Romains s'irritaient
surtout de voir mépriser les dieux romains. C'est ce qui va
être confirmé par ce que Tertullien dit de l'imputation de
lèse-majesté.
C'est au chap. 28,3 que Tertullien aborde cette accusation
nouvelle : Ventum est igitur ad secundum titulum laesae aiigus-
tioris maiestatis. Cette phrase annonce le nouveau sujet et
sert de transition. La transition est faite par la comparaison
entre les deux majestés qu'offensent les chrétiens : celle des
dieux et celle de l'empereur, que Tert. appelle « la plus auguste
des deux », Cette comparaison est présentée de telle façon
qu'elle prépare toute une série de sarcasmes sur l'attitude
des païens envers leurs dieux. Tertullien appelle le crime de
lèse-majesté secundum titulum laesae augustioris maiestatis.
11 faut conclure que, dans son idée, le sacrilège, dont il a parlé
jusqu'ici, est un primus titulus laesae maiestatis. Qu'est-ce
à dire ? Tertullien compare deux griefs qui consistent l'un
et l'autre dans l'offense d'une majesté : 1) le sacrilège, qui
religio7ium publicamm n'étaient pas le titre d'un crime prévu par
la loi et, d'ailleurs, depuis Dèce surtout, la situation des chrétiens
était changée. On ne peut appliquer des textes du IV'^ siècle à la
fin du II«.
CHAP. 28,3 301
lèse la majesté des dieux (cf. 15,3 : nonne violatur maiestas,
se. deoruni), la première (35,5), mais qu'il appelle ironique-
ment la moins auguste des deux majestés ; 2) le crime qu'il
aborde maintenant, qui lèse la majesté de l'empereur, la
seconde majesté (35,5), mais plus auguste que celle des dieux.
Qu'est-ce qui fait dire à Tert. que la majesté de César est plus
auguste aux yeux des païens ? C'est tout simplement qu'ils
la redoutent plus que celle de Jupiter de l'Olympe lui-même !
Voilà le sarcasme qui commence. Et vous avez raison, ajoute
ironiquement Tertullien, parce que cette majesté est toujours
présente, prête à punir ceux qui l'offensent ! Et il continue :
Mais c'est là une nouvelle preuve de votre irréligiosité envers
les dieux : vous les craignez moins que ce maître humain !
Vous hésitez moins à vous parjurer par tous les dieux de
l'Olympe qu'à prêter un faux serment par le Génie de César !
C'est la comparaison entre le sacrilège et la lèse-majesté
qui fournit la transition et qui amène ces sarcasmes.
De même que Tertullien fait entendre ici que le sacrilège
ou mépris des dieux constitue « un crime de lèse-majesté
divine » {titulus laesae maiestatis, se. divinae ou deonim), il
dira plus loin que le crime de lèse-majesté impériale est « un
autre sacrilège » :
Chap, 35,5 : Velim tamen in hac quoque religione secundae
maiestatis, de qua in secundum sacrilegium convenimur Chris-
tiani non celebrando vobiscum solemnia Caesarum ... jidem
et veritatem vestram demonstrare ...
On voit que c'est encore une simple comparaison [in hac
quoque). Tertullien a montré plus haut que les Romains
manquent de sincérité envers leurs dieux (ch. 6, 9-10), qu'ils
les maltraitent et les bafouent (ch. 13-15) ; il va prouver ici
qu'ils ne sont pas plus sincères envers l'empereur-dieu, qu'ils
ne lui rendent que des hommages hypocrites, que dans leur
for intérieur beaucoup souhaitent sa mort, que beaucoup
ont même attenté à sa vie. Voilà les vrais coupables de lèse-
majesté. Et ce sont eux qui accusent les chrétiens de sacri-
lège envers l'empereur, comme ils les accusent de sacrilège
envers les dieux ! Ce qualificatif de sacrilegium appliqué à
la lèse-majesté impériale ne se trouve qu'ici : on voit qu'il
est amené par la comparaison. 11 s'explique naturellement.
302 APPENDICE I
L'empereur est revêtu d'une majesté quasi-divine, d'une
majesté auguste ou sacrée comme celle des dieux, que Tert.
appelle secunda maiestas, parce qu'elle vient après celle des
dieux. Sans prendre officiellement le titre de « dieu », il reçoit
des honneurs qui l'assimilent aux dieux. Ce fut, d'ailleurs,
dès Auguste, un usage constant, entretenu par l'adulation,
d'appeler dieu l'empereur vivant. Voy. 34,3. L'ensemble des
hommages habituellement rendus à cette majesté impériale
constitua une sorte de « religion de la majesté impériale »,
une « seconde religion » venant après la religion des dieux :
in hac quoque religione secundae maiestatis. Ad nat., 1,17,
p. 88, 25 : Prima obstinatio est (quia {^) secunda a deis religio
constituitur Caesarianae maiestatis), quod inreligiosi dicamur
in Caesares, neque imagines eorum tare propitiando neque
Genios deierando. Au ch. 36,2, Tertullien appelle la religion
impériale : pietas et religio et fides imper atoribus débita. Cf.
35,3 : pietas, religio. Ad Scap., 2. Les chrétiens s'abstiennent
de ces hommages qui sont idolâtriques : ils ne sacrifient pas
pour le salut de l'empereur, ils n'offrent pas d'encens à ses
images, ils ne jurent pas par son Génie, ils ne participent pas
aux fêtes impériales, ils ne peuvent donner à l'empereur les
titres de dieu ou de seigneur (2). C'est pourquoi ils sont accusés
d'être inreligiosi in Caesares (Ad nat., /. c.), d'offenser l'empe-
reur : in Caesares aliquid committo (4,11), d'offenser la
majesté impériale: conimittimus in maiestatem imperatorum
(29,4). Cette offense est une injure à l'empereur ; elle est à la
fois une marque de déloyauté, d'hostilité envers le chef de
l'Etat et une impiété envers l'empercur-dieu. Suivant le
point de vue, on pourra la qualifier ou de lèse-majesté ou de
O quae A ; qua Hartel.
(2) Ch. 30-35. Tert. formule ailleurs la règle qui s'impose aux chré-
tiens. De idol., 15, p. 48, 27 : Igilur, quod attinent ad honores reguvi
vel imperatorum, satis praescriptum habemus in omni obsequio esse nos
oportere secundum apostoli praeceptum subditos magistratibus et prin-
cipibus et potestatibus (V&nW Ep. ad Rom,, 13, 1), sed intra limites
disciplinae, quousqtie ab idololatria separainur.
CHAP. 28,3 303
sacrilège. Léser la majesté des dieux, c'est un crime de sacri-
lège, mais il arrive une fois à Tertullien,dans une comparaison
(28,3), d'appeler ce sacrilège « lèse-majesté » (divine). Léser
la majesté impériale, c'est le crime de lèse-majesté (impé-
riale), mais Tertullien l'appelle une fois (35,5), par compa-
raison, « un autre sacrilège ».
Le terme par lequel il désigne ordinairement ce crime est
emprunté à la langue juridique, à la lex Iulia de maiestate,
Ch. 10,1 : maiestatis laesae rei convenimur. 28,3 : ad secun-
dum titulum laesae augusiioris maiestatis. 29,1 : ita nos cri-
mini maiestatis addicite, si ... 29,4 : committimus in maies-
tatem imperatorum. Tertullien se sert encore d'une expression
du droit criminel quand il dit que les chrétiens sont traités,
comme les coupables de lèse-majesté, de publici hostes (2,4 ;
35,1 ; 35,10 ; 36,1 ; 37,8 et 10) ou de hostes principiim Roma-
norum (35,5).
L'accusation de sacrilège ou d'impiété envers l'empereur
et celle de lèse-majesté impériale se confondent : elles sont
basées sur le même grief envisagé tantôt comme une atteinte
à la majesté, à la dignité du chef de l'Etat, tantôt comme une
atteinte portée à son caractère divin.
La loi pénale ne connaissait pas plus le crime de sacrilège
envers la divinité impériale que le crime de sacrilège envers
les dieux. Quant à la lèse-majesté, la loi pénale prévoyait
sans doute un crime de ce nom ; mais à l'égard des chrétiens,
ce n'est qu'une imputation injurieuse, un cri de haine, qui
retentit dans la rue, dans l'amphithéâtre et jusque dans le
prétoire, nous allons voir comment. Ce n'est pas le fondement
juridique des procès contre les chrétiens.
Aux chrétiens accusés d'homicide, d'inceste, de sacrilège
et de lèse-majesté par la voix populaire et par les juges eux-
mêmes au cours de leurs interrogatoires, Tertullien oppose
les vrais homicides, les vrais incestueux, les vrais sacrilèges
et les vrais ennemis publics. Ad Scap., 4: Pro Dec vivo crema-
mur, quod nec sacrilegi nec hostes publici veri nec tôt maiestatis
rei pati soient. Les vrais hostes publici n'étaient pas ceux qui
s'abstenaient de participer aux hommages publics rendus
à l'empereur, mais ceux qui par leurs paroles, leurs actes
304 APPENDICE I
OU leurs écrits, attentaient effectivement et directement à
sa dignité ou à sa sécurité {^).
Tert. emprunte le langage du moment, les vrais liostes
publici étaient alors nombreux: c'étaient les partisans d'Albi-
nus et de Niger, que Sévère continuait à poursuivre (35,1 1) (2).
Ceux-là, dit Tert., sont traités autrement devant le tribunal
que les chrétiens. Aux chrétiens, on ne permet pas même de
se défendre : In deos, in Caesares aliquid committo, car non
audior qui habeo qiw purger ? (4,11). On les condamne dès
qu'ils avouent qu'ils sont ... chrétiens (2,2 et 12). Quand il
s'agit d'un vrai criminel, le juge fait une enquête minutieuse
sur son crime avant de prononcer (2,4). C'est que les chrétiens
ne sont pas poursuivis pour ces crimes et, dit Tertullien (2, 12),
que les juges ne les en croient pas même coupables.
Parmi les crimes que les païens imputent aux chrétiens,
Tertullien range aussi celui de hostes generis humani ; c'est
après l'avoir réfuté (ch. 37-45) que Tertullien conclut : Consti-
iimus, ut opinor, odversus omnium criminuni intentationem,
quae Cliristianorum sanguinem fiagitat (46,6). On remarquera
la forme juridique de ce langage {constitimus, criminum, inten-
tationem) et pourtant ce crime nouveau qui vient s'ajouter
aux autres, sans que Tert. établisse aucune distinction, n'est
certes pas prévu par le code pénal (^). Il en est de même des
(') Arnobe, Adv. nat., 4, 34, p. 169, 8, définit le crime de lèse-
majesté: Maiestaiis sunt apudvos rei, qui de vestris sequius obnmrmu-
raverint aliquid regibus. La simple abstention du culte impérial
paraissait sans doute à tous contraire au loyalisme, mais ne pouvait
donner lieu à un procès pour lèse-majesté.
C^) Voy. encore Ad Scap.^ 2 : Sic et circa maies tatein imperatoris
i7ifamamur , tamen 7iU7iquain Albiniani nec Nigriani nec Cassianiinve-
iiiri potueruni Christiani , sed idem ipsi qui per Genios eorum inpridie
usque iuraverantj qui pro sainte eorum hostias et fecerant et voverant,
qui Christianos saepe damnaverant , hostes eorum su?it reperti.
(3) Au ch. 42, Tert. réfute l'accusation d'être des gens inutiles
à la société, de faire tort à la prospérité matérielle, économique.
Et voici comment il introduit cette accusation : Sed alio adhuc itiiu-
CHAP. 28,3 305
croyances chrétiennes (ch. 45-49) que les païens ne déclarent
pas seulement ineptes et risibles, mais punissables {puniendi)
et dignes de la mort par le glaive, le feu, les croix, les bêtes
(49,1 ; 4). Ne faut-il pas conclure qu'aucune de ces accusa-
tions que Tertullien énumère sans les distinguer, ne constitue
le fondement juridique des poursuites contre les chrétiens ?
Mommsen en a jugé autrement. Parmi ces crimes imputés
aux chrétiens, il en choisit deux : le sacrilège, dont il fait
l'apostasie de la religion nationale, et la lèse-majesté impériale.
Pourquoi ce choix, alors que Tertullien ne distingue pas ?
De ces deux crimes, Mommsen fait deux catégories d'un
même crime, celui de lèse-majesté.
Il s'appuie sur les deux passages (28,3 et 35,3) que nous
avons expliqués, perdant de vue la tournure d'esprit de Ter-
tullien et ses habitudes de langage, ne s'apercevant pas que
les qua'ificatifs appliqués par l'apologiste à deux crimes diffé-
rents Csacrilège ou impiété envers les dieux et lèse-majesté
impériale) viennent tout simplement d'une comparaison,
qui sert de transition et prépare des réflexions sarcastiques.
D'après Mommsen {Der Religionsfrevel, p. 396 = Ges.
Schriften, III, p. 395. Droit pénal, p. 569, n. 1 = Trad., II,
p. 272, n. 1), Tertullien, parlant des chrétiens, « distingue
une double catégorie de crimes de lèse-majesté : la plus légère
est le refus des honneurs dus aux dieux ; la plus grave est
l'offense de la majesté impériale » {Ges. Schrijt., III, p. 395).
Et il ajoute : « A côté de la conception de la maiestas populi
Romani qui ne faisait pas entrer le délit religieux dans la
notion de la lèse-majesté, il y en avait une autre, plus stricte,
qui concevait l'offense des dii populi Romani comme une
offense faite au peuple romain et la punissait de la peine capi-
tale ».
Autant de mots, autant d'erreurs. Le mépris des dieux,
qui vaut aux chrétiens les noms d'athei ou de sacrilcgi, qui
r'uirum tilulo poslulamur , et infructuosi negotiis dicimur. C'est certes
le langage juridique et cependant il ne viendra à l'esprit de per-
sonne de dire qu'on intentait aux ciirétiens une actio itiinriaruin.
20
306 APPENDICE I
les fait accuser du crime de laesa religio ac divinitas, n'est
pas l'apostasie de la religion romaine, mais l'apostasie du
polythéisme. Voy. 24,1.
Quand Tertullien, dans une comparaison, fait entendre
(28,3) que ce même crime est un crimen laesae maiestatis, il
veut dire : laesae maiestatis deorum Q), et non : laesae maies-
tatis Caesaris ou populi Romani. C'est la majesté des dieux
qui est lésée par le refus d'honorer les dieux, et non celle de
l'empereur ni celle du peuple romain.
D'autre part, quand Tertullien, dans une autre compa-
raison, appelle sacrilegium le refus de rendre au prince des
honneurs religieux ou même divins, il ne fait que considérer
sous son aspect religieux le crime de lèse-majesté impériale.
Nulle part, Tertullien ne considère le sacrilège ou mépris
des dieux comme une catégorie de la lèse-majesté. Or, c'est
sur Tertullien seul que Mommsen fonde son affirmation.
Mommsen ajoute : « Le fondement juridique des procès
chrétiens n'est exprimé nulle part d'une manière aussi nette
que chez Tertullien {Droit pénal, M, p. 272, n. 1). La dis-
tinction établie par Tertullien entre les deux catégories de
lèse-majesté ne se trouve nulle part ailleurs et elle dénote le
juriste » {Ges. Sclinften, III, p. 394, n. 4).
Ce qui dénote le juriste, c'est l'emploi constant qu'il fait
du langage juridique, pour exprimer des idées iion juridiques.
En réalité, Tertullien n'a pas songé ici à exprimer le fonde-
ment juridique des procès contre les chrétiens et ce fonde-
ment n'est pas la lèse-majesté. La loi détermine toujours le
titre du crime qu'elle punit (2). Le titre du crime des chrétiens,
c'est Cliristiamis. Ci. 44,2: mm Christiani sua titiilo obferuntur,
quand les chrétiens sont déférés au juge avec le titre du crime
qui leur est propre, c'est-à-dire, comme chrétiens. Ce titre
ressort clairement de l'exorde (ch. 1-3) et de la prémunition
(') Cf. Ad nat., i, lo, p. 79, 3 : qui divinam maieslatem huntana
condiciojie tractavii.
(2) Cf. De idol., i, p. 30, 4 : Nam etsi suam specievi tenet nnum-
qnodque delictum, etsi suo quodque 7iomitie iiidicio destinatur.
CHAP. 28,3 307
(ch. 4) : là, le débat est juridique ; là, Tert. discute la pro-
cédure et les lois. Ici, il fait comme tous les apologistes : il
réfute les imputations vulgaires, les convicia, les cris de haine.
Au chapitre 4, Tertullien engage un débat juridique, qu'il
croit nécessaire avant de commencer sa réfutation des calom-
nies païennes. « Quand la vérité chrétienne, dit-il, a réfuté
toutes les accusations, on lui oppose l'autorité des lois ». Donc
la loi défend autre chose que ces prétendus crimes des chré-
tiens. Et Tertullien met cette objection dans la bouche des
païens : « Vous aurez beau réfuter toutes nos accusations
et prouver votre innocence. Il restera la loi, qui est contre
vous, car elle dit : Non licet esse vos ! On ne discute pas la loi,
on lui obéit ! »
N'est-il pas clair que voilà le fondement juridique des
procès contre les chrétiens : la loi leur défend d'exister, elle
fait ainsi du christianisme lui-même un crime capital. Voy.
ci-dessus, 4,4. Si les chrétiens réfutent même les accusations
d'homicide, d'inceste, de sacrilège, de lèse-majesté, il restera
la loi. Ne ressort-il pas de là que ces accusations ne sont pas
fondées sur la loi, que les procès intentés aux chrétiens ont
une autre base que ces accusations, qu'elles ne sont que des
imputations populaires, des cris de haine, d'odieuses calom-
nies, destinées à rendre les chrétiens haïssables, à justifier
les cruelles rigueurs de la loi. Dès Néron, c'est par des calom-
nies, vagues encore, que l'on justifie le supplice infligé à tous
ceux qui portent le nom de chrétiens. Peu à peu, ces calomnies
se sont précisées ; avec le temps, elles ont changé de nature,
mais leur but est resté le même : faire paraître justes une loi
d'exception, une loi de proscription religieuse, des persécu-
tions dirigées contre une religion, et faire croire que les chré-
tiens, qui sont en réalité des martyrs de leur foi, ne sont que
des hommes chargés de tous les crimes (ch. 2,6), justement
livrés au plus cruel supplice.
Voilà ce qu'étaient ces calomnies pour le peuple et pour
les juges, et l'on supposait que c'étaient ces mômes crimes
qui avaient provoque l'intervention du législateur et la pros-
cription du christianisme lui-même. « Chaque fois que votre
conscience, témoin de sa secrète ignorance, est poussée à bout
308 APPENDICE I
par nos réponses, vous vous réfugiez tout hors d'haleine auprès
d'un autel, je veux dire, l'autorité des lois, et vous dites: Les
législateurs n'auraient pas frappé la secte chrétienne, s'ils
n'avaient eu la preuve de leurs crimes », Ad nat., 1,6, p. 66, 11.
Pour les juges, ces accusations étaient encore autre chose :
elles fournissaient un moyen de constater le seul crime que
la loi punissait, c'est-à-dire la profession de la religion chré-
tienne'.
Le refus obstiné d'offrir un sacrifice, de jurer par. le Génie
de l'empereur, etc., était la preuve évidente du crime puni
par la loi. Voy. 9,15. Ordinairement l'accusé rendait cette
épreuve inutile, car dès le début, il confessait sa foi et son
crime : Christionus sum ! Et cette « confession » {h^okoyicC)
suffisait au juge pour condamner 1 Comme l'apostasie, prouvée
par un acte d'idolâtrie, suffisait, depuis Trajan, pour faire
acquitter séance tenante, l'injonction de sacrifier ou d'accom-
plir un autre acte d'idolâtrie envers les dieux et l'empereur,
était devenu le moyen ordinaire de constater l'apostasie.
Il faut donc retourner la phrase de Mommsen : « Logique-
ment, la déclaration de christianisme faite devant le tribunal
était considérée comme un crime de lèse-majesté ». Il faut
dire : « Le refus de sacrifier aux dieux (qualifié vulgairement
de sacrilège) ou de rendre à l'empereur un hommage religieux
(qualifié improprement de lèse-majesté par Tert.) était consi-
déré comme un aveu du crime de christianisme, et comme
une preuve de l'obstination dans ce crime, qui était puni de
mort par la loi, mais dont le désaveu suffisait, depuis le rescrit
de Trajan à Pline, pour faire acquitter l'accusé.
Voilà le rôle véritable des accusations que Tert. réfute après
avoir montré que la loi de proscription est à la fois absurde
et injuste (ch.4-6): dans la bouche du peuple, ce sont des cris
de haine (^) ; pour les juges, elles sont un moyen de constater
le crime puni par la loi ou de faire consommer l'apostasie ;
{}) Ou des injures, convicta, comme nous avons vu à la p. 295.
Voy. encore Lactance, Div. inst., 5, 9, 13 : et rétorquent in homincs
iiistos convicia siH congruentia : hipios eniin vocant, ipsi scilicet inpH...
CHAP. 28,3 309
aux yeux des législateurs, des juges et de la populace, elles
sont une justification de la loi de proscription et du supplice
le plus cruel infligé pour un délit religieux.
Il ressort du ch. 2 de Tertullien que jamais un chrétien
n'est attrait devant le tribunal ni pour homicide, ni pour
inceste (i), ni pour sacrilège ou impiété envers les dieux, ni
pour lèse-majesté, c'est-à-dire pour hostilité ou impiété envers
le prince (2). Les chrétiens sont attraits et condamnés comme
chrétiens. Scorpiace, 11, p. 171,7 : Ecce autem et odio habe-
mur ab omnibus hominibus nominis causa, quomodo et scrip-
tum est (Matth., 10,32), et tradimur etiam a proximis, quo-
modo et scriptum est, et perducimur ad potestates et interro-
gamur et torquemur et confitemur et tmcidamur quomodo et
scriptum est. Sic Dominus edixit. C'est sur la religion de l'ac-
cusé que porte l'enquête du juge, c'est-à-dire l'interrogatoire,
la torture, l'épreuve du sacrifice. L'aveu que le juge veut
arracher (confessio nominis), c'est : Christianus sum, et pour
le chrétien le procès est une « confession « [biKokofia). Le
désaveu que le juge essaie de lui arracher pour le sauver, c'est
le désaveu du nom chrétien. Le chrétien lui oppose une invin-
cible persévérance (èv:iix6Yr\). Jamais le juge ne cherche à
établir le crime de lèse-majesté : quand l'accusé refuse de
sacrifier aux dieux pour le salut du prince ou d'offrir de
l'encens aux images impériales, le juge ne conclut pas qu'il
mérite la mort comme coupable de lèse-majesté, mais comme
(') En 177, à Lyon, des esclaves païens, menacés de la torture,
accusent leurs maîtres chrétiens de festins semblables à ceux de
Thyeste et d'incestes semblables h ceux d'Oedipe. Le légat de la
Lyonnaise paraît tenir compte de ces accusations; mais l'empereur
lui rappelle la loi et ordonne de faire relâcher les accusés qui
renient le christianisme et de ne pas tenir compte des crimes qu'on
leur impute. Ce cas, sans doute unique^ vient donc confirmer ce
que nous disons. Eusèbe, Hist, eccl., 5, i, 14 et ss.
(^) Tertullien rétorque chacune de ces imputations et montre que
les païens se rendent véritablement coupables de ces crimes :
jamais il ne dit qu'ils s'exposent par là à des poursuites criminelles.
310 APPENDICE
chrétien. Et, en effet, la sentence de mort ne mentionne
jamais aucun autre titre du crime que celui de chrétien (^).
Telle était la loi (ou les lois, si l'on considère les rescrits suc-
cessifs qui avaient modifié les lois de Tibère et de Domitien),
telle était la procédure à l'époque de Tertullien. Il en résultait
pour les chrétiens une iniquité manifeste et révoltante : fiers
et joyeux de mourir pour leur foi (pour ce que Mommsen
appelle un délit d'opinion), ils étaient censés mourir pour
des crimes abominables. C'est précisément contre cette révol-
tante iniquité, qui ne condamne pas seulement des innocents,
mais les déshonore et les flétrit, que Tertullien proteste dans
son exorde (ch. 1-3) : « La vérité, dit-il, ne demande qu'une
chose : c'est de ne pas être condamnée sans être entendue. »
Si l'on suit la théorie de Mommsen, qui prétend que le titre
du crime des chrétiens était la lèse-majesté (comprenant à
la fois l'offense des dieux nationaux et l'offense de l'empereur),
l'exorde de Tertullien (ch. 1-3), la discussion juridique de la
loi (ch. 4-6), enfin tout le plaidoyer de Tertullien devient
une énigme insoluble.
Voici, en effet, l'idée générale et le plan de V Apologétique.
Dans l'exorde, Tertullien proteste avec une véhémente élo-
quence contre la haine inique qui poursuit le nom de chré-
tien, sans même rechercher si ce nom désigne des crimes :
Nominis proelium est. Les chrétiens sont fiers de mourir pour
leur foi, mais ils revendiquent le droit de se défendre contre
cette odieuse calomnie qui fait d'eux, non des martyrs, mais
des scélérats justement livrés à la mort : Unum gestit inter-
diiin (veritas), ne ignorata damnetur. (Ch. 1-3.)
Ensuite, avant d'aborder son sujet, il prévient l'objection
juridique : « Vous avez beau réfuter toutes les accusations :
la loi défend aux chrétiens d'exister. Le fait d'être chrétien
est un crime punissable de mort ».
(') 2,19: quza nominis proelium est. z, 20 : Dcnique quid de
tahella rccitatis illum « Cliristimium » ? Cur 7ion et « homicidani »^ 5/
homicida Chrisiia7ius ? Etc. Ad Nat., 1,3, p. 62,4 : Adeo si de cri-
minum verilate co7istaret, ipsa criininum noinina danmatis accoinnio-
darc7itur... Porro se7ite7iiiae vestrae 7iihil nisi « ChristiaTium confes-
SU771 » 7l0ta7lt.
CHAP. 28,3 311
Tertullien répond : Si une loi est injuste et absurde, elle
doit être abrogée ou rester lettre morte (i). Exemples pris
dans le passé. La loi de proscription est injuste et absurde,
parce qu'elle ne condamne qu'un nom, c'est-à-dire parce que
les crimes imputés à ceux qui portent ce nom et par lesquels
on prétend justifier la loi ne sont que calomnies. (Ch. 4-6.)
Et c'est l'objet de tout le plaidoyer de prouver que les
chrétiens sont innocents des crimes qu'on leur reproche de
commettre soit en secret (ch. 7-9), soit en public (ch. 10-45)
et que leurs croyances ne méritent pas non plus la mort (ch.
46-49). Tertullien pourrait conclure : Abrogez donc une loi
si inique, que rien ne justifie, ou du moins fermez les yeux.
Mais il sait qu'il ne serait pas écouté et il termine par un défi
lancé aux juges : « Continuez donc, dit-il, à nous persécuter
injustement et cruellement : notre sang est une semence et
le martyre nous donne la vie éternelle >;. Le ton de l'exorde
et de tout son plaidoyer (1,2 : nihil de sua causa deprecatur)
prépare cette fière conclusion.
Faute de comprendre la langue et les habitudes littéraires
de Tertullien et de considérer le contexte, Mommsen em-
brouille à plaisir la question du fondement juridique des
persécutions. Son autorité a malheureusement jeté le désarroi
dans les esprits. Aujourd'hui, il y a une tendance à revenir
à la thèse si simple et si claire, que Paul Allard a eu raison
de maintenir et qui peut se résumer ainsi : c'est une loi spé-
ciale (sénatus-consulte ou édit), portée sous Néron, qui a fait
du christianisme lui-même un crime capital, punissable de
mort (2j.
(•) Dans sa lettre Ad Scapulam, 4, Tert. cite des gouverneurs
qui avaient fermé les yeux : Quanti auteni praesides et constantiorcs
et crudeliores dissimulaverunt ah huiusmod'i causis ? Etc.
(') Dans une série d'articles remarquables, M. Callewaert a porté
les coups les plus sensibles à la théorie de Mommsen, donnant ainsi
une force nouvelle h celle de Paul Allard. Nous citons ici les ar-
ticles de Callewaert, parce qu'ils sont trop peu connus à l'étranger :
Revue d'hist. eccl. (Louvain), t. 2 (1901), p. 771-797 ; t. 3 (1902),
312 APPENDICE I
29,1. Constet igitur prius, si isti, quibus sacrificatur,
salutem imperatori (imperator F ; imperatoribus P) vel
cuilibet homini inpertire possunt : et ita nos crimini
addicite si angeli aut daemones, substantia pessimi spi-
ritus, beneficium aliquod operanttir, si perditi conser-
vant, si damnati libérant, si deniqtie, quod (P ; quos F)
in consdentia vestra est, mortui vives tuentur.
Imperator (F) pourrait être une faute d'impression de
Junius pour imperatori. Tert. vient d'employer le singulier
au ch. 28,2 : ut nos pro salute imperatoris sacrificare cogatis.
On somme les chrétiens de sacrifier pour l'empereur régnant.
— Quos, pour quod, n'est qu'une erreur de copiste.
Dans cette phrase, le premier si, qui dépend de constet, est
interrogatif. Les autres dépendent de ita nos ... addicite et
marquent une condition ou une restriction « à cette condition
que ». Cicéron emploie ita ... si ... ou ita tamen ... si ... dans
ses lettres (Ad fam., 5, 19, 2 ; 15, 4, 14. Ad Att., 13, 12, 3). Cf.
De spect., 2, p. 3,5 : ita enim adparebit, cui usui sint instituta,
si adpareat, cui non.
Si tous les 5/ étaient interrogatifs et dépendaient de constet,
la proposition et ita nos ... addicite devrait se trouver à la fin
de la phrase.
La première proposition commençant par si a un sujet
général, isti, quibus sacrificatur, qui est précisé par les sujets
des quatre suivantes : angeli aut daemones — perditi —damnati
— mortui ; et ces quatre sujets contiennent une contradiction
P- 5-15 i 324-368 ; 601-614; t. 12 (1911), p. 16 61633-651. Revue
des Ouest, hist., t. 74 (1903), p. 28-55 J t. 76 (1904), p. 5-28 ; t. 77
(1905), p. 349-375; t. 82 (1907), p. 5-19. Revue d'hist. et de litt.
relig.,\. 8 (1903), p. 152-159. — Voy. aussi P. Baliflbl, La pai.x
constantiniennc (Paris, 191 4), p. i ss. En France, la thèse de
Mommsen n'a guère eu de succès; en Allemagne, elle règne tou-
jours en maîtresse, malgré les contradictions qu'elle a rencontrées.
Récemment, elle a été combattue par R. Heinze, p. 292. 433 ss.
CHAP. 29,1-5—30,4 313
avec leurs verbes : des esprits méchants ne peuvent être bien-
faisants, des êtres perdus ne peuvent sauver, etc. Ces quatre
prop. sont donc bien amenées par ita nos addicite.
29.4. Ideo enim F ; ideo ergo P.
Enim ne signifie pas ici « car », mais « en vérité », comme
enimvero. C'est ce que n'a pas compris celui qui l'a remplacé
par ergo.
29.5. Sed vos religiosi (inreligiosi P), qui eam quaeritis
ubi non est, petitis a quibus dari non potest, praeteritis
eum (praeterito eo P), in cuius est potestate, insuper
debellatis (eos debellatis P), qui eam sciunt petere, qui
etiam possunt impetrare, dum (cum P) sciunt petere. F
Le remanieur de P n'a pas vu l'ironie amère de Sed vos
religiosi (estis), qui est habituelle à Tert. Voy. 6,1 : Nunc
religiosissimi legum et paternorum Institutorum protedores
et ultores respondeant velim de sua fide, etc. 15,4 : Plane reli
giosiores estis in cavea. 35,8 : Plane ceteri ordines pro aucto-
ritate religiosi ex fide. Ici, Tert. dit : Nous manquons à la
majesté impériale, nous qui ..., tandis que vous êtes religieux,
vous qui... L'antithèse ironique exige religiosi.
Le relatif qui est sujet de quaeritis, petitis, praeteritis et
debellatis. Avec debellatis, le démonstratif eos, antécédent
de qui eam sciunt petere est sous-entendu. Sur cette ellipse
fréquente, voy. ad 19,6 : advocandi {il), per quos. L'interpo-
lateur de P semble avoir changé praeteritis eum en praeterito
eo, pour mieux marquer l'opposition avec petitis, etc. Il a ainsi
dérangé l'ordre et le développement harmonieux de la pé-
riode. A la fin, il paraît avoir préféré cum à dum. Voy. ci-dessus
p. 290.
30,4. Illuc sursum {om. P) suspicientes Christiani — pre-
cantes sumus semper pro omnibus imperatoribus, etc.
Tertullien veut insister sur ce fait que les chrétiens lèvent
les yeux vers le ciel, et non vers l'image du dieu ou vers le
plafond du temple, comme il a dit plus haut (16,9 et 24,5) :
314 APPENDICE I
il ajoute smsum « vers le haut « à suspicientes. C'est un pléo-
nasme, familier à Plaute, qui dit smsum escendere (Amph.,
1000 ; 1007 ; Mil., 1150). Cist., 622 : quid nunc supina smsum
coelum conspicis.
Les éditeurs ont toujours mal ponctué cette phrase. Chris-
tiani est sujet de precantes sumus semper « nous autres chré-
tiens, nous ne cessons de prier pour ... »
Cette périphrase pour precamm marque une action qui
dure ou un état habituel. De resurr., 1 : Fiducia Christiano-
rum resmrectio mortuorum. îllam credentes sumus. De an., 23,
p. 336, 18 : quod animae hinc euntes sint illuc et Inde hue.
On trouvera d'autres exemples de Tertullien dans Hoppe,
Syntax, p. 59-60. Selon J.-H. Schmalz, Syntax, 4® éd., p. 459,
cette périphrase appartient à la langue populaire et au latin
biblique. Cf. Goelzer, Latinité de S. Jérôme, p. 389. Bayard,
Le latin de S. Cyprien, p. 243. E. Lôfstedt, Philolog. Kom-
mentar zur Peregrinatio Aetheriae, p. 180.
31,1. Adulati nunc sumus imperatori et mentiti vota,
quae diximus, ad evadendam scilicet vim ? Tamen (F ;
plane P) proficit illa fallacia : admittitis nos enim (ad-
mittis enim nos *F) probare quodcumque defendimus !
(( En parlant ainsi, avons-nous flatté l'empereur, et les
prières, dont je viens de parler, ne sont-elles que mensonges,
pour éviter vos rigueurs ? »
Il faut mettre un point interrogatif après cette phrase, car
c'est une objection sous forme interrogative, une subiectio.
Ad Herenn., 4,33 : Subiectio est cum interrogamus adversarios
aut quaerimus ipsi, quid ab illis aut quid contra nos dici possit,
deinde subicimus id, quod oportet dici aut non oportet, etc. La
subjection est souvent accompagnée d'un scilicet ou videlicet
ironique. Cf. Juvénal, Sat., 6, 634 :
Fingimus haec altum satura sumente cothurnum
Scilicet.... !
De cultu fem., 2,8: Videlicet nunc vir, ut sexu aemulus, femi-
nas a suis depello ?
CHAP. 31,1-3 315
La réponse commence par tamen {plane dans P) et elle est
ironique : « Mais (en vérité) elle nous sert à merveille, cette
supercherie 1 Car vous admettez que nous prouvions tout
ce que nous avançons pour notre défense ! « C'est-à-dire :
I! serait bien vain d'user d'un pareil artifice, comme si vous
écoutiez n'importe quel argument inventé par nous pour
nous défendre 1 Après cette observation ironique, qui montre
combien l'objection est peu vraisemblable, vient la réfutation
directe par les Livres saints, qui prescrivent formellement
de prier pour l'empereur.
Sur le mot fallacia, « un moyen de tromper, un artifice »,
voy. 23,12 : magia aut aliqua eiusmodi fallacia. De an,, 57,
p. 392,7 : hanc quoque fallaciam spiritus nequam. Cyprian.,
Epist., 75,10 : qui subtili fallacia etiam hoc paulo ante prae-
dixerat ... Ad Demetr,, 15 : praestigias illas et fallacias suas.
31,3. utique et nos licet extranei a turbis (a turbis aesti-
memur P), in aliquo loco casus invenimur. F
Quand l'Empire tout entier est ébranlé {cum concutitur
imperiwn), dit Tert., les chrétiens ont leur part de la catas-
trophe, bien qu'ils se tiennent à l'écart des troubles.
Extraneus ab = alienus ab. De idol., 13, p. 44, 28 : tu
extraneus ab omni eorum vaniiate. De an., 16, p. 322,6 : extra-
neum a Deo. De resurr,, 61, p. 46, 24 : extranea omnino mate-
ria a substantia hominis. Hoppe, Syntax, p. 22 et 36.
Les malheurs qui ébranlent l'Empire ne peuvent être que
les guerres civiles et Tert. pense sans doute à la lutte de
Septime Sévère contre ses rivaux, qui venait de se terminer.
Les mots licet extranei a turbis sont expliqués par le cli. 35,9 :
Unde Cassii et Nigri et Albini ? ... De Romanis, nisi fallor,
id est de non-Christianis. Les chrétiens étaient restés étrangers
à ces troubles.
C'est ce que n'a pas compris celui qui a ajouté aestimemur
dans P. Le texte de P signifierait : « quoique les foules nous
regardent comme étrangers (à l'Empire) », ou bien : « quoi-
qu'on nous regarde comme étrangers aux foules » ; mais ce
ne sont pas les foules plutôt que les gouverneurs qui regardent
les chrétiens comme liostes publici, et on ne regarde pas les
316 APPENDICE I
chrétiens comme étrangers aux foules, mais comme étrangers
à l'Empire romain.
C'est évidemment la lecture de F qu'il faut adopter.
32,3. et pro magno adiuramento (id iuramento P) habe-
mus F
« Nous regardons cela comme un grand serment ; c'est,
à nos yeux, un solennel serment ». Adiuramento, adjuration,
prière, exorcisme, ne convient pas ici. Le scribe s'est laissé
tromper par id placé devant iuramento. luramentum, pour
iusiurandum, est d'ailleurs assez rare. Dig., 12,2,34,5; 22,3,
25,3. Cod. lust., 2, 58, 1 pr.
33,1. Sed quid ego amplius de religione atque pietate
Christiana in imperatorem, quem necesse est suspicia-
mus ut eum quem Dominus noster elegit, ut mérite
dixerim
P a : in imperatore. De la Barre a in imperatorem et Modius
ne dit rien. II est vrai que Tertullien confond parfois l'accu-
satif et l'ablatif. Voy. chap. 21,8 : in auro conversum. Parmi
les exemples cités par Hoppe (Syntax, p. 40 ; Tertullianea,
p. 7), aucun ne ressemble à in imperatore « envers l'empereur ».
Les exemples semblables sont nombreux, il est vrai, dans les
inscriptions sépulcrales, et nous y lisons souvent : pius in
suis, pour in suos. Mais Tertullien dit : inpii quique in parentes
(11,12), incesti in sorores (11,12), inpius in nepotem, invidus
in artificem (14,5), religiosus in Deum (34,3), iustissimis et
severissimis in nos (9,6).
Outre le silence de Modius, il faut remarquer que les scribes
confondent souvent l'acc. avec l'abl., parce qu'ils oublient
le signe de l'abréviation des syllabes terminées en m.
— Ut merito dixerim. Le subj. potentiel dixerim « je pour-
rais dire » est ici subordonné à ut « de sorte que ». Cf. 9,1 :
liaec quo magis refutaverim. 39,1 : si etiam veritatem revela-
verim (F). Cette construction est fréquente depuis Tacite.
— Tert. dit : quem necesse est suspiciamus ut eum, quem
Dominus noster elegit, nous devons respecter l'empereur,
CHAP. 32,3—33,1—34,1 317
parce qu'il est l'élu de Dieu. Dans un autre ordre d'idées,
Minucius Félix, 29,5, dit : Etiam principibus et regibus, non
ut magnis et electis viris, sicut fas est, sed ut deis turpiter adu-
lât io blanditur, cum et praeclaro viro lionor vertus et optimo
anior dulcîus praebeatur. Sic eoruni numen vocant. Etc. « Les
princes et les rois aussi, on ne les honore pas comme des grands
hommes et comme des hommes supérieurs, ce qui est permis,
mais on les flatte par une honteuse et fausse adulation, comme
des dieux ». Le mot electis a frappé M. Heinze (p. 440, n. 1),
qui le croit emprunté par M. F. à elegit de Tert. et qui pose
la question : electis par qui ? Il suppose donc M. F. assez
maladroit pour écrire : electis viris « des hommes élus ». sans
faire comprendre par qui ils sont élus, et cela, uniquement
parce que Tert. avait dit : quem Dominus noster elegit. Mais
M. F. ne pense ici à aucune élection, mais à des viri electi,
à des hommes d'élite, comme le prouve la suite : et praeclaro
viro (qui correspond à magnis viris) et optimo (qui correspond
à electis). Depuis Cicéron, electus vir signifie « un homme
choisi, d'élite, supérieur ». Pro Quinctio, 5 : in ils, quos tibi
advocasti, viris electissimis civitatis. Cicéron dit de même :
electissimis verbis, en termes très choisis (De fin., 3,26). Suet.,
Calig., 18 : pugilum ex utraque regione electissimorum. Ibid.,
49 : interempto prius utriusque ordinis electissimo quoque.
Petron., 85,6 : electumque par columbarum attuli.
34,1. Dicam plane imperatorem dominum, sed more com-
muni, sed quando non cogor, ut dominum dei vice dicam.
On disait par déférence : Domine « seigneur », comme nous
disons : « Monsieur ». C'est le sens reçu, ordinaire, banal
{communis, publicus). Dans ce sens, Tert. veut bien donner
à l'empereur le nom de « seigneur » ou « maître », mais il ne
veut pas le reconnaître pour son « maître », comme s'il était
dieu.
Les mots sed more communi expliquent d'avance sed quando-
non cogor, etc. Ils sont inutiles sans être nuisibles. Ils font
la même impression que communiter au ch. 17,2.
Cf. Cic, Orat., 11, 36 : Ennio delector, ait quispiam, quod
non disceclit a communi more verborum. Sen., Epist., 3,1 :
318 APPENDICE I
qiwmodo obvios, si nomen non succurrit, dominos salutamus.
Ibid. : si proprio illo vcrbo quasi publico usns es. Ovid., Am.,
3, 7, 1 1 : dominiimque vocavit et quae praetereo publica vcrba
iuvant.
34.2. Sed et gratius est nomen pietatis quam potestatis.
« Mais, de plus, un nom tiré de la piété filiale est bien plus
doux que celui qui désigne le pouvoir. «
Même idée, Adv. Marc., 2,13, p. 353,18 : Deum perfectiim,
et patrem et dominum, patreni clenientia, domlniim disciplina,
et patrem potestate Manda, dominum severa, patrem diligcn-
dum pie, dominum timendum necessarie. De orat., 2, p. 182,2 :
Dicendo autem patrem Deum quoque cognominamus. Appellatio
ista et pietatis et potestatis est. Pline (Paneg., 2) dit de Trajan:
non de domino, sed de parente loquimur.
34.3. Tante abest, ut imperator deus debeat dici, non
modo turpissima sed et perniciosa adulatione, quod non
potest credi. F
L'alinéa et le § 3 doivent commencer à Tanto abest et non
à Si habens. Tert. vient de dire pourquoi il ne convient pas
d'appeler l'empereur « maître n. A plus forte raison, continuc-
t-il, en passant à une nouvelle idée, ne doit-on pas l'appeler
« dieu », par une flatterie, (qui n'est) pas seulement honteuse,
mais aussi pernicieuse. » Ce double abl. de manière se rapporte
donc à deus dici. Cette flatterie est vile, comme celle qui con-
siste à reconnaître dans l'empereur un « maître»; elle est, de
plus, pernicieuse, dangereuse pour le flatteur et pour l'em-
pereur lui-même, car elle peut attirer sur eux la colère divine.
Tert. aime la locution tanto abest ut, dans laquelle il sous-
entend toujours magis. Il lui donne la forme exclamative.
Voy, De test, an., 1, p. 135, 9 : Tanto abest ut nostris litteris
annuant liomines, ad quas nemo venit nisi iam Christianus !
Adv. Marc, 1,23, p. 321, 21. De fuga, 2, p. 467 0. ; De pud.,
13,6 et 17,16.
Sur l'ellipse de magis, voy. Oehler ad De test, an., 1, p. 401.
Les auteurs classiques disent : tantum abest ut.
CHAP. 34,2-4 319
Nous devons revenir encore une fois sur la prop. relative,
qiwd non potest credi, que P intercale avant debeat dici. Voy.
ci-dessus, p. 82. On pourrait la comprendre, si l'on supprimait
credi et si l'on ajoutait nisi, avec Havercamp : Tanto obesl,
ut iniperofor deiis debcot dici, quod non potest (se. dici) (nisi}
non modo turpissinia sed et perniciosa adulatione. Cf. Van der
Vliet, p. 39.
Mais il est possible que Tcrt. ait écrit simplement : quod
non potest, non modo, etc. « ce qui n'est pas possible, par une
flatterie non seulement honteuse, mais aussi pernicieuse ». Cet
emploi de potest (voy. ci-dessus, p. 196, ad 13,2) a souvent
induit en erreur et fait ajouter un infinitif (ici, credi).
34.3. Desinc allum deum credere atque ita et hune deum
dicere, cui Dec (deis F) opus est. P
Tcrtullien vient de dire : Esto religiosus in Deum, qui vis
ILLUM propitium Caesari. C'est ce qu'a perdu de vue le scribe
ou l'interpolateur de F, qui a changé Deo en deis.
34.4. Scito te isto nomine maie velle et maie abominari,
ut, vivente adhuc imperatore, deum adpelles, quod no-
men illi mortuo accedit.
Cette phrase ne se trouve que dans F. Junius a probable-
ment imprimé Scio, pour scito (voy. ci-dessus, p. 47). A la
fin, il donne : mortuum accidit, qu'il corrige bien en mortuo
accedit. Cf. De cultu fem., 1,2 : ut haec quoque ignominia
feminae accédât. « Sache que tu veux du mal à l'empereur et
que tu lui souhaites du mal en lui donnant ce nom, en l'appe-
lant dieu de son vivant, car il ne reçoit ce nom que quand
il est mort ».
Maie velle et maie abominari, se. imperatori. Cf. 36,4 : maie
enim velle. De spect., 16, p. 18, 11 : quicquid optant, quicquid
abominantur. Apul., Met., 9,23 : crurum ei fragium abominata.
Isto nomine annonce ut deum adpelles. L'ablatif absolu
vivente adhuc imperatore est irrégulier, mais pas rare. Voy,
ci-dessus, p. 247, ad 21,19. Il se peut, du reste, que le scribe
ait omis les abréviations de m final et qu'il faille lire : viven-
tem adhuc imperatorem.
320 APPENDICE I
Cette phrase développe celle qui précède : Maledidiim est
ante apotlieosin deum Caesarem imncupare. Appeler l'empe-
reur dieu avant son apothéose, donc avant sa mort, de son
vivant, c'est un outrage, car c'est lui vouloir du mal, c'est
appeler un malheur sur lui ; en d'autres termes, c'est souhaiter
sa mort, puisqu'il ne peut devenir dieu qu'après sa mort,
Maledictum ne veut pas dire autre chose ici que « injure,
outrage ». Suet., Aug., 53 : domini adpellationem ut maledic-
tum et opprobrium semper exhorruit. C'est à la fois une moque-
rie et un outrage, dit Tert. dans Ad nat., 1, 17, p. 89, 20 :
Immo qui deum Caesarem dicitis, et deridetis dicendo quod non
est, et makdicitis, quia non vult esse quod dicitis. Mavult enim
vivere quam deus fieri. Pourquoi est-ce un outrage ? Les mots
timeat saltim de infausto le disent assez clairement, et les
mots ante apotlieosin le répètent : c'est outrager l'empereur
que de souhaiter sa mort.
La longue explication qui suit dans. F a paru superflue et
même peu conforme à l'énergique concision de Tertullien.
Cependant, dans Ad nat., l. c, Tert. explique également
maledicitis.
Au surplus, les clausules abominari (ditrochée), imperatore
(crétique et trochée) et mortuo accedit (crétique et trochée,
avec élision) sont régulières.
Minucius Félix, 21,10, dit également : Invitis Iiis (se. regi-
bus) denique lioc nomen adscribitur : optant in homine perse-
verare, fieri se deos metuunt, etsi iam senes nolunt. M. Heinze
(p. 440, n. 2) dit naturellement que M. F. s'inspire de Ter-
tullien. On comprend, dit-il, que Tert. parle ainsi des empe-
reurs vivants ; mais M. F. parle des empereurs consacrés,
des divi, et cela ne peut se dire aussi bien des empereurs qui
sont morts ! — Il va de soi que, dans l'idée de M. F., invitis
liis s'applique aux empereurs avant leur mort et qu'ils ne
sont pas encore morts ni consacrés, quand ils souhaitent de
rester hommes, quand ils craignent de devenir dieux ! Le
langage de M. F. ne permet pas de comprendre autrement
et c'est lui prêter une absurdité par trop grande que de lui
faire dire que c'est après leur mort qu'ils reçoivent malgré
eux le nom de divus, etc. Qui veut trop prouver ...
CHAP. 35,1-2 321
35.1. Propterea igitur publici hostcs Christiani, quia (an
quia F) imperatoribus neque vanos nequc mcnticntcs
neque temerarios honores dicant, quia verae rcligionis
homines etiam soleninia corum conscicntia potius quam
lascivia célébrant. P
La lecture de F {an quia) n'est pas admissible.
Havercamp propose de ponctuer : Propterea igitur publici
hostes Christiani ! An quia ... célébrant ? « Voilà donc pour-
quoi les chrétiens sont traités d'ennemis publics ! Ou bien
est-ce parce que ... ? » Et en effet, propterea peut se rappor-
ter à ce qui précède, comme au ch. 16,3 et 50,4 : propterea
enim desperati et perditi existimamur. Mais la disjonction
marquée par an est ici un contresens, car les motifs introduits
par le premier quia sont précisément, en résumé, ceux que
Tert. a développés précédemment. Les chrétiens sont appelés
hostes publici, parce qu'ils ne vouent pas à l'empereur des
honneurs vains (sacrifices à des dieux impuissants, ch. 29),
mensongers (les titres de « dieu » et de « maître », ch. 33-34!
et téméraires (ch. 34, 3-4), et aussi {quia ... etiam), ajoute
Tert,, parce qu'ils ne célèbrent pas les fêtes impériales suivant
la coutume païenne. Ce second motif est développé dans ce
qui suit. La phrase tout entière résume donc ce qui précède
et elle annonce ce qui suit. Tertullien aime à dire propterea
quia (1,5 ; 11,8 ; 14,7) ou quod (11,8).
Sur verae religionis homines, voy. ci-dessus, p. 278, ad 25,2.
35.2. civitatem in tabernae habitum demutare, vinu-
lentiam facere F ; civitatem tabernae habitu abolefacere,
vino lutum cogère P
P présente ici des locutions si spéciales qu'on ne peut les
attribuer à un remanieur. On comprend, au contraire, qu'on
les ait remplacées par les leçons de F, qui appartiennent à la
langue ordinaire. C'est Tert. qui a inventé civitatem tabernae
habitu abolefacere = civitatem nmtando in tabernam quasi
abolere {Thés. L /., I, 118, 27), détruire la ville en lui faisant
prendre l'aspect d'une taverne, changer l'aspect de la ville
322 APPENDICE I
au point qu'elle cesse d'être une ville pour devenir une taverne.
Le remanieur dit simplement : « changer l'aspect de la ville
en celui d'une taverne », L'image est déjà dans Martial, 7,60 :
Nunc Roma est, nuper magna taberna fuit.
Tert. emploie abolejoccre ailleurs encore. De cultu fem.,
1,3 : periude potiiit abolefaclam cam (scripturam) violent ia
cataclysmi in spiriiu rwsiis reformare. Au figuré. De exhort,
cast,, 6 : obolefccit « crescite illiid et multiplicaniini », Après
lui, le mot ne se trouve plus que dans S. Ambroise. Voy.
Thcs. l. /,, s. V,
De même, c'est Tert, qui a trouvé l'expression vino liituni
cogère = cogendo facere, former de la boue en versant du vin
sur le sol, en coagulant le vin mêlé de poussière. On dit : loc
coacium (Ovid,, Met,, 8, 666, Plin,, Hist. nat., 23, 7, 64), Virg,,
Georg., 4,35 : frigore niella cogit Iiiemps. Sur le vin répandu
à terre pendant les orgies, voy. Hor., Od., 2, 14, 26 : et mero
tinget pavimentum siiperbis pontificum potiore cents. Cic, Phil.,
2, 105 : uatabant pavimenta vino. Le remanieur a remplacé
l'expression imagée par une locution sans couleur : vimilen-
tiam facere, se livrer à l'ivresse, à l'ivrognerie. De an., 40,
p. 368, 3 : in operatione libidinis, gulae, vinukntiae.
35,7, lam si pectoribus humanis ad transducendum (ad
translucendum P) quoddam (quondam Hav. ; quandam
P) specLiIarem materiam natura obduxisset F
Le sens n'est pas douteux : « Et si la nature avait mis
devant les cœurs une matière diaphane pour laisser trans-
paraître les pensées, pour trahir les pensées », La leçon de P,
quandam specularem materiam est irréprochable. Celle de F,
quoddam, est évidemment fautive, car elle n'a pas de sens.
Havercamp conjecture quondam « autrefois », c'est-à-dire,
quand l'homme fut créé, Tert, met quelquefois la nature
pour Dieu, auteur de la nature. Voy. 7,13 : ex dispositione
divinae naturae. Quondam est plus près de quoddam que quan-
dam.
La leçon ad transducendum (= ad traducendum) de F est
admissible ; en effet, Tert, emploie très souvent traduccre
CHAP. 35,7 323
dans le sens de « produire au jour, révéler » une chose cachée
«trahir». De an., 15, p. 320, 18 : occulta cordis troducendo.
De pud., 22,8 : ut traduceret cogitatus. Adv. lud., 9, p. 724 0. :
minantes tradudionein uniuscuiiisque cordis. Ad iiat., 1,4,
p. 65,2 : nam et ipsa per se traducitur disciplina nec aliunde
prodinmr quani de bono nostro. Ad Scap., 2,11 : daemones ...
cottidie traducimus et de lioniinibus expelliinus. Adv. Marc,
2,20, p. 362, \3 : ut traductionem sut sentiunt, qu'ils vont être
pris. Voy. encore: De an., 1, p. 299, 28. De fuga, 2, p. 465, 2 0.
Ibid., 12, p. 485, 1-4. De praescr., 22. Voy. l'index d'Oehler,
s. V. iraducoQt traductio. Déjà dans Pétrone, Sat., 17 : peto
et oro, ne traducere velitis tôt annorum sécréta.
La forme transducuntur est dans De spect., 17, p. 19,5.
35,7. ciiius non praecordia insculpta adparerent novi ac
novi Caesaris scaenam congiario dividundo praesidentis.
Voici le sens : « Quel est le Romain dans le cœur duquel
n'apparaîtrait pas gravée la scène d'un César toujours nou-
veau, présidant à la distribution du congiaire ? » La cons-
truction de l'accusatif insculpta scaenam est la même que
celle de Virgile, Ed., 3, 106 : quibus in terris inscripti nomina
regum nascantur flores {}).
Le texte de P est le mieux conservé. Deux mots ont souf-
fert : insculpta est devenu insculta, puis inculta ; adparerent
est devenu adparent. Voy. ci-dessus, p. 45.
Voici le texte de F, tel que le donne Junius : cuius non
praecordia insculpta pareret novum ac novum Caesarem scena
conceario (legendum congiario) dividundo praesidentem.
Si l'on corrige insculpta pareret en insculpta parèrent (cré-
tique et trochée), conceario en congiario, et si l'on supprime
scaena, ce texte deviendra correct. Mais comme scaena (abi.)
ou scaenam est dans les mss, il est plus probable que l'ace.
(^) Minucius Félix offre trois exemples de cette construction.
Voyez notre Langue et Syntaxe de M. F. (citée ci-dessus, p. 109),
P- 91, § 47-
324 APPENDICE I
novuin ac noviim Caesarem ... praesidentem est une correction
erronée ; il y a tant de fautes dans le passage que le scribe
paraît ne pas l'avoir compris.
On pourrait lire : novi ac novi Caesaris scaena (abl.) con-
giario dividiindo praesidentis ; mais Tertullien paraît avoir
imité la construction du vers de Virgile cité plus haut. Les
réminiscences vu-giliennes ne sont pas rares chez lui. Voy.
7,8 ; 25, 8 et 16. Il faut donc lire : scaenam.
Ce passage si défiguré de F se corrigera donc facilement au
moyen de P. Cependant pareret doit être corrigé en parèrent,
car Tert. emploie souvent parère dans le sens â'adparere. Voy.
ci-dessus, p. 45, et l'index d'Oehler au mot parère. Roensch,
Itala iind Vulgata, p. 374-375. E. Lôfstedt, Peregrinatio Aetlie-
riae, p. 58. Apulée, Met., 5,3 : quamvis hominum nemo pareret.
La clausule sera formée par un crétique et un trochée.
Le remanieur de P semble avoir perdu de vue, ici comme
ailleurs, l'usage de Tert. et il a remplacé le verbe simple par
son composé adparere, qui s'emploie plus souvent dans ce sens.
35.7, etiam illa hora, quo reclamant (qua adclamant P) F
Quo est une faute pour qua. — Adclamare est le terme ordi-
naire pour désigner les « acclamations » en l'honneur du
prince, pendant les jeux. Mais, comme ces acclamations sont
toujours répétées, Tert. a mis réclamant, qui signifie « ils
crient à plusieurs reprises ». Val. Flaccus, Argon., 3, 596 :
Rursus Hylan et rursus Hylan per longa réclamât avia.
8,172 : dominamque reclamant nomine. Cf. De pud., 5,9 : et si
qua vox fuerit, reclamabunt : noster hic cuneus est, nostra
compago ! Etc. De resurr., 22, p. 56,9 : omni adhuc popularium
coetu reclamante : Christianos ad leonem ! Sur les adclamatio-
nes, voy. 0. Hirschfeld, Kleine Scliriften, p. 682 et ss.
35.8. depopulatores (depostulatores P) Christianorum F
Depopulari et depopulatores « dévastateurs, massacreurs »
peuvent avoir pour complément un nom d'être animé. Thés,
l. /., s. v., V, 586. On sait aussi que la populace hostile atta-
quait souvent les chrétiens et les massacrait. Voy. 37,2. Mais
Tert., qui vient de parler des acclamations populaires du
CHAP. 35,7-12 325
cirque et de l'amphithéâtre, semble avoir en vue le cri : Cliris-
tianos ad leoncm ! Voy. 40,2. 49,4. 50,12. De rcsurr., 22, p.
56, 9 (cite ci-dessus, p. 324). Euseb., Hist. eccl., 3,32 ; 5, 1,7;
6,32. C'est donc P qui a conservé la leçon authentique.
35.11, quam elatissimis et clarissimis lucernis vestibula
nubilabant (nebulabant P) F
« Ils enfumaient leurs vestibules par les lampes les plus
haut pendues et les plus brillantes ». Les lampes, même les
plus brillantes, répandaient de la fumée.
Nubilare est plus fréquent que nebulare, que nous ne trou-
vons que dans Victor Vitensis au propre et au figuré. 3,56 :
quia pulverea tempestas ... omnein nebulaverat locum. Ibid.,
3,62 : semper cupiunt splendorem et geniis Romani nominis
nebulare. Le même auteur emploie nubilare au figuré, 2,51 :
quia oppressi confusione lumen non poterant nubilare. Tert.
dit aussi enubilare. Adv. Marc, 4,36, p. 546, 12 : ut non prias
hanc caecitatem hominis illius enubilasset. C'est donc nubi-
labant qu'il faut adopter. Ce mot forme un ditrochée ; vesti-
bula nebulabant formerait un crétique (avec les deux longues
résolues) et un trochée,
35.12. Quas artes, ut ab angelis desertoribus proditas et
a Dec interdictas, ne suis quidem causis adhibent Chris-
tiani.
Les mss sont d'accord. Dans V Apologétique, angeli désigne
toujours les mauvais anges ; d'eux sont issus les démons,
dit Tertullien au ch. 22,3, plus corrompus encore que les
anges. Ce sont ces anges qui ont inventé la divination, l'as-
trologie et la magie. Voy. 27,4. De idol., 9, p. 98,10 : angelos
esse illos desertores Dei, amatores feminarum, proditores etiani
Imius curiositatis (se. magiae). Cf. De cultu fem., 1,2 ; 2,9.
Le passage De spect., 2, p. 3, 10 : Vides liomicidium ferro,
veneno, magicis devinctionibus perfici : tam ferrum Dei res
est quam lierbae, quam angeli, est donc correct. Dieu, dit Tert.,
est l'auteur de toutes choses, et toutes choses sont bonnes
en elles-mêmes ; elles ne deviennent mauvaises que par l'abus
326 APPENDICE I
qu'on en fait. Ainsi le fer, les herbes, les anges, qui tuent, ont
été créés par Dieu. On voit que angcli correspond à magicis
devinciionibus. Voy. Aug. Audollent, Dejixionuin tabellae
(Paris, 1904), p. 465-470, et les nos 156, 157, 162b à i64, 168 et
187 (p. 467, li'e col). Arnobe, Adv. nat., 1,43: mogiis fuit
(Cliristus), ... Aeoyptionim ex adytis ongelorum potentium
iiomina et remotas furatiis est disciplinas.
Reiffersclieid a donc eu tort de vouloir changer angeli en
anclli dans ce passage du traité De spectaculis.
36,1. Si haec ita sunt, ut hostes deprehendantur qui Ro-
mani vocantur (vocabantur P), cur nos, qui hostes existi-
niamur, Romani negamur ? Non possumus et Romani (i)
non esse et hostes esse,cum hostes reperiantur qui Romani
habeantur (*F ; habebantur P). FP
Modius donne vocantur et ne dit rien de habeantur, qu'il
lisait dans De la Barre.
Tertullien vient de prouver (35, 5-13) que c'est parmi les
Romains, et non parmi les chrétiens, que se rencontrent tous
les ennemis de l'empereur et de l'empire, tous les hostes publia.
35,9 : De Romanis, nisi fallor, id est de non-Christianis {^). Tert.
tire de là une conclusion sarcastique. Si les chrétiens sont
des hostes publici, comme on le prétend, peut-on leur refuser
sous ce prétexte, le nom de Romains ? Pouvons-nous être
vos ennemis, sans être Romains, puisque vos ennemis sont
tous Romains ? Voici son raisonnement sous forme de syllo-
gisme :
Les ennemis publics sont tous Romains ;
or, vous nous traitez d'ennemis publics ;
donc, vous devez reconnaître que nous sommes Romains.
La logique de ce raisonnement sarcastique exige que les
(') F et P ont l'un et l'autre : ût Rotnani non esse et hostes esse.
C^) Les hoslcs publici sont les citoyens coupables de lèse-majesté,
les ennemis du prince ou du peuple romain. Voy. ad 28, 3. Tert,
ne parle pas ici des ennemis extérieurs (hostes).
ci-iAP. 36,1-4 327
Romains, ennemis secrets ou connus do l'empereur et de
l'empire, ne cessent pas pour cela d'être appelés Romains
(qui Romani vocantur, et non vocabantur), ni d'être regardés
comme Romains (qui Romani liabeantur, et non liabebantur).
La leçon vocantur (F) et la correction liabeantur (Rhenanus)
sont donc justifiées. De la Barre a d'ailleurs liabeantur et
Modius ne relève pas de variante dans F, bien qu'il en
relève deux dans cette phrase.
En réalité, la majeure du syllogisme de Tert. est viciée
par une inexactitude voulue, par un oubli intentiomiel ; car,
tout citoyen romain déclaré liostis publicus est mis au ban
de l'Empire et perd la civitas Roinana. Dig., 4, 5, 5,1 (Paulus) :
capife mimmntur et lii, quos senatus liostes iudicavit vel iege
lata : utique usque eo, ut civitateni ami^.tant. Cf. Dig., 48,4,11 ;
48, 19, 8, 2.
36.3. sed a Dec, exactore et remuneratore indifferentis
benignitatis.
C'est le texte de P. Dans F, on lisait : indifferentia beni-
gnitatis. Junius dit : quod est Tertullianeum. Nous ne sommes
pas de son avis. Tertullien explique pourquoi les chrétiens
font le bien sans acception de personnes. « Ce n'est pas d'un
homme, dit-il, que nous attendons d'être payés par des lou-
anges ou par une récompense, mais de Dieu, juge et rémuné-
rateur d'une bonté qui ne fait pas de distinction ». Tert. fait
suivre exactor « vérificateur, juge » d'un génitif. 40,10 : nocen-
tiae itidicem et exadorem. De spect., 2, p. 4, 4 : Deus exactor
innocentiae. De cuit, fem., 2, 4 : omnis maritus castitatis
exactor est. Au ch. 45,3 : ad exigendum bonum.
L'abl. indifferentia benignitatis signifierait indifferenti
benignitate. Si on le rapporte à captamus (dont il est d'ailleurs
trop éloigné), il ne ferait que répéter le commencement de la
phrase : Nullwn bonum sub exceptione personarum adminis-
tramus. Si on le rapporte à exactore et remuneratore, on aura
une construction peu latine et un sens peu admissible.
36.4, lidem sumus imperatoribus ex ipso, qui et vieillis
nostris. F
328 APPENDICE I
Ex ipso, qui manque dans P, veut dire « à cause de lui
(de Dieu), à cause de ses commandements », comme la suite
le montre {maie enini velle... vetamur). Cf. 41,4 : apud ipsum,
se. Deum. 48,7 : per Ipsum, se. Daim. — Havercamp a tort
de lire : ^x ipso, quia.
37,2. Quotiens etiam praeteritis vobis suo iure nos ini-
micum vulgus invadit ? F
« Que de fois la populace, sans votre permission, de son
propre mouvement, ne se rue-t-elle pas sur nous ? »
A la fin, P ajoute : lapidibus et incendiis. Ces trois mots
précisent bien invadit. En effet, la populace avait l'habitude
de lapider ou de brûler ceux qui lui déplaisaient. Voy. 48,1 :
lapidibus a populo exigetur. Suet., Calig., 5 : lapidata sunt
templa. Pétrone, Sat., 90,1 : lapides in Eumolpium miserunt,
90,3 : non miror si te populus lapidibus persequitur. Apul.,
Met., 2, 27 : Saevire vulgus interdum ... Conclamant ignem,
rcquirunt saxa. loh., 8,59 ; 10, 31 • 11,8. Luc, 20,6. Act. apost.,
5,26 ; 14,19 Dans une de ses lettres, S. Cyprien raconte
une scène de ce genre. Epist., 40 : Qui (se. Numidicus pres-
byier) hortatu suo gloriosum martyrum numerum lapidibus
ET FI.AMMIS NECATUM o/î/c se misit qulquc ad uxorem haeren-
tem lateri suo igné crematam cum ceteris, sed conservatam magis
dixerim, laetus aspexit. Ipse semiustulatus et lapidibus
OBRUTUs et pro mortuo derelictus ... semianimis inventus ...
On pourrait donc supposer que le scribe de F a sauté les
trois mots et qu'il a été trompé par la ressemblance des mots
{invadit et incendiis) ou par les nombreuses finales en is.
D'autre part, ces trois mots ne sont pas nécessaires. Cf. Apul.,
Met., 8,18 : Quid miseras homines ... tam crudelibus animis
invaditis atque obteritis ?
Vulgus invadit (crétique et trochée) et lapidibus et incendiis
(double crétique avec la première longue résolue) donnent
des clausules fréquentes.
37,2. Ipsis Bacchanalium furiis ne mortuis quidem (nec
mortuis P) parcunt Christianis, quin illos de reliquiis
CHAP. 37,2 329
(de requie P) sepulturae, de asylo quodam mortis, iam
alios, iam nec totos avellant, dissipent (dissecent P),
distrahant. F
Tertullien remplace ordinairement ne ... quidem par nec ;
il dit ne quidem aux ch. 1,10 ; 11 et 35,12. Le rcmanieur de F
aura remplacé nec par la forme classique ne ... quidem ; un
interpolateur n'aurait probablement pas fait l'inverse.
De reliquiis semble être une faute de transcription pour
de requie. Voy. ci-dessus, p. 108. — Avellere, dissipare et
distraliere forment gradation. Dissipare se dit des membres
ou des ossements des morts qu'« on met en pièces » et qu' « on
disperse ». Cic, Pro Sulla, 59 : ut ab eis membra citius divelli
ac distrahi posse diceres. Phil., 7,15 : C. Marii sitas reliquias
apud Anienem dissipari iussit Sulla victor. Pro lege Man., 9 :
Medea dicitur in juga fratris sui membra ... dissipavisse.
Horat., Epod., 16,11 :
Barbarus, heu ! cineres insistet viator et urbem
Eques soiiante verberabit ungula,
Quaeque carent ventis et solibus ossa Quirini
(Nefas videre!) dissipabit insolens.
Tert. aime à employer dissipare en parlant des corps dé-
chirés par les bêtes. De spect., 12, p. 14,22 : nisi et feris hu-
mana corpora dissiparentur. Ibid., 21, p. 22,11 : in amphi-
theatro derosa et dissipata et in suo sanguine squalentia corpora.
De an., 33, p. 356, 22 : namque illa sicarium variis ... feris
dissipant et quidem viventem. Arnob., Adv. nat., 5, 19, p. 190,
20 (parlant des Bacchanales, comme Tert.) : caprorum recla-
mantium viscera cruentatis oribus dissipata.
L'interpolateur de P semble avoir perdu de vue ce sens
et cet emploi de dissipare et il l'aura remplacé par dissecare,
croyant rendre la gradation plus sensible : avellant, dissecent,
distrahant.
Ipsis Bacchanalium furiis veut dire « avec la furie même
des Bacchanales », c'est-à-dire avec une furie qui ne diffère
en rien de celle des Bacchanales.
330 APPENDICE I
37,3. Quid tamen de tam conspiratis umquam denotatis,
de tam animatis ad mortem usque pro iniuria repensatis ?
*FP
» Cependant, qu'avez-vous jamais à reprocher à ces hommes
si unis, et ces hommes si courageux jusqu'à la mort, que
vous font-ils payer pour l'injustice (qu'ils subissent )? ». —
Pensare ou repensare aliqmd pro aliqua re, c'est payer qqch.
pour dédommager d'une chose. Adv. Marc, 3,19. p. 409, 26 :
ostensa enim causa gratine huiiis, pro iniuria scilicet mortis
repensandae ..., de cette grâce, qui devait être le dédommage-
ment de ses outrages et de sa mort. De an., 58, p. 395, 27 :
nemo dubitabit animam aliquid pensare pênes inferos salva
resurrectionis plenitudine per carnem quoque. Ad nat., 1,18,
p. 90, 2 : haec omnia ... etiam magna laude pensari a virtute
didicerunt.
Le nom de personne qui devait être au datif est ici mis à
l'abl. avec de « du fait de, à cause de ces hommes si courageux ».
Remarquez les homoeotéleutes : de tam conspiratis ... deno-
tatis et de tam animatis ... repensatis, qui sont certainement
voulus par Tertullien, — Les corrections repensatum (se. esse)
ou repensait détruisent la symétrie; en outre, le génitif repen-
sait serait trop éloigné de quid.
37,3. Sed absit, ut aut igiii humano vindicetur divinitas
sectae, aut ut (divina secta, aut P) doleat pati, in que
probatur 1 F
Divinitas sectae (crétique et trochée) est l'abstrait pour le
concret ; ce tour fait ressortir la qualité et n'étonne pas chez
Tertullien. Un remanieur aurait plutôt changé ici l'abstrait
en concret.
Le remanieur a aussi touché au texte en supprimant le
deuxième ut. (i)
(^) Sur u( aut... aut ni, au lieu de ut aut... aut, voy. Lôfstedt,
p. io8, qui renvoie lui-même à Sjôgren, Commeyitationcs Tnllianac,
p. 136 et s. Cic, Or., 44,149: ut aut... aut ut... aut ut. Pro
CHAP. 37,3-5 331
Sur l'idée, comparez Ad Scap., 2 : Absit enini, ut indigne
fcramus eu nos pati qiiae optannis, aut iiltioneni a nobis ali-
qiiam niacliincmur, qiiam a Deo exspedamus.
37.4. Externi sumus, et orbcm iam et vestra omnia im-
plevimus F ; hesterni sumus, et vestra omnia imple-
vimus P
Hesternus « d'hier, de la veille » s'emploie souvent dans un
sens étendu « très récent ». Martial., 2,29. Pcrs., 3, 106 : hes-
terni Qiiirites. Adv. Prax., 2 : ante Praxean liesternuni ...
ipsa novellitas Praxeae hesterni.
La confusion entre hesternus et externus est très facile et
elle est fréquente dans les mss. Voy. Drakenborch ad Liv.,
40, 12, 2.
Hesterni sumus « nous ne sommes que d'hier », forme anti-
thèse avec la suite de la phrase et cette antithèse est soulignée
par iam.
Externi voudrait dire « étrangers au monde et à l'Empire».
Voy. 1,2 : scit se peregrinam in terris agere. loh., 15,19 : Si
de mundo fuissetis, etc. La Cerda explique autrement : quia
ex una ludaea exierunt Christiam, nous venons de l'extérieur.
Hesterni, mot plus rare que externi, est la lectio difflcilior
et celle qui donne le sens le plus convenable.
Sur et orbem iam, qui nous paraît nécessaire, voy. p. 46.
37.5. Possumus dinumerare exercitus vestros : unius
provinciae plures erunt F.
Ces mots ne se lisent que dans F. — Exercitus vestros, cré-
tique et trochée. Unius provinciae, se. Christiani, les chrétiens
Roscio Amer,, 29, 82 : vereor ne aut... au i fie. Ad Att., i, 5, 4 :
ui et... et ut. Cicéron dit aussi : quod aut... aut quod et quain aut...
aut quam. Tite-Live^ 2, 27, 2 : ut aut referret ad senatum, aut ut
auxilio essct consul civibus suis. Dans presque tous ces passages, les
éditeurs modifient le texte des mss., et dans le passage de Tite-
Live, Madvig faisait comme notre remanieur : il supprimait ut.
332 APPENDICE 1
d'une seule province seront plus nombreux (que vos armées).
Havercamp lit : plures erunt (ChristianC), ce qui donne un
ditrochée (précédé d'un crétique).
Dans la phrase qui suit, comme dans celle qui précède,
Tert. parle à la première personne : c'est pourquoi nous
avons écrit erimus au lieu de erunt (double spondée avec la
longue du deuxième résolue), ou peut-être double trochée,
avec I long. Voy. à la fin de cet appendice.
Ce membre de phrase nous paraît nécessaire : il forme la
contre-partie de Possumus clinumerare exercitus vestros.
Tcrtullien exprime deux idées avec une double antithèse.
1) Vos armées sont nombreuses : les chrétiens sont plus nom-
breux. 2) Fussions-nous même moins nombreux que vos
soldats (etiam impares copiis), nous aurions eu la force et le
courage de vous combattre, étant toujours prêts à mourir,
si notre loi ne nous permettait pas plutôt de nous faire tuer
que de tuer. Voy. ci-dessus, p. 47.
37,6. subfudisset pudor utique dominationem vestram F.
Sur la lacune qui suit ces mots dans F, voy. p. 36. — P n'a
pas pudor. Nous avons conjecturé qu'il faut lire pudore, car
le sujet de subfudisset suit et l'on ne dit pas : pudor subfundit
aliquem, mais on dit : pudore subfunditur aliquis. 11 est vrai
que Tcrtullien dit toujours : subfunditur aliquis, sans le compl.
pudore (i).
38,1. Proinde ne<c> (nec P) paulo lenius inter inlicitas
(licitas P) factiones sectam istam deputari oportcbat,
a qua nihil taie committitur, quale de inlicitis factio-
nilus praecavetur (timeri solet P). F
Il faut lire nec et traduire littéralement le texte de F :
(') Lôfstedtj p. 110, conjecture avec beaucoup de vraisemblance
que/>Jidor a été ajouté après la chute de la ligne suivante, pour que
subjudissei ait un sujet. On n'a pas vu que le sujet qu'on lui a donné
ne convient pas.
CHAP. 37,6—38,1 333
« Pareillement, il ne fallait pas non plus, bien que ce soit
user d'un peu plus de douceur, ranger parmi les factions
illicites une secte qui ne commet aucun des actes contre les-
quels la loi prend des précautions de la part des factions
illicites ».
Dans le chapitre précédent, Tert. a protesté contre les
noms de hostes publia et de hostes generis humani qu'on donne
aux chrétiens. Il continue : Pareillement, il ne fallait pas
nous ranger parmi lesu factions illicites ». Proinde peut signi-
fier 10 igitur, ergo, et 2° pariter. Il est employé 17 fois dans
V Apologétique (voy. P. Henen, Index verborum, p. 119), tou-
jours dans le sens de « pareillement, de même », qui convient
ici.
Quant à nec, Tert, lui donne très souvent le sens de ne ...
quidem « pas non plus ». Nec se rapporte ici à toute la pro-
position infinitive : voilà pourquoi il est mis en tête. Cf. 11,13 :
quae nec deos postea factos credi permittunt. 21,5 : quibus nec
advenarum iure terrain patriam saltim vestigio salutare con-
ceditur.
Paulo lem'us « d'une manière un peu plus douce ». Le
qualificatif factio inlicita est plus doux, moins dur, moins
violent et moins odieux que .celui de hostes publia. Bien que
ce qualificatif soit moins dur, il ne fallait pas l'appliquer
aux chrétiens.
Inter inlicitas factiones, qui correspond à de inlicitis fac-
tionibus, doit être maintenu, à l'exclusion de inter licitas
factiones. En effet, on ne peut pas dire licita factio, parce
qu'une « faction » est toujours illicite. Dans le langage du
droit criminel, le mot factio a toujours un sens péjoratif et
désigne une association séditieuse et illicite. L'expression
factio inlicita est une expression consacrée, comme celle de
hostes publia. Voyez notre Etude sur les Corporations profes-
sionnelles des Romains, I, p. 135, et notre article Collegium,
dans le Dict. d'archéologie chrétienne et de liturgie de Cabrol
et Leclercq, III, p. 2119-2123. Voy. aussi la conclusion de
l'argumentation de Tertullien au ch. 39, 20-21 et 40,1. Plus
loin, Christiana factio (39,1) et haec coitio Christianorum
(39,20) sont empruntés au langage des païens : « ce que vous
334 APPENDICE I
appelez la faction chrétienne ». 11 en est de même de fabula
au ch. 21,14 et 23,12 : « ce que vous appelez une fable, une
légende )\
11 n'est, du reste, pas possible de donner la forme interro-
gative à la phrase, en lisant licitas ; au lieu de nec, il aurait
fallu non {= nonne). Voy. notre Tertullien, Apologétique.
Traduction (Louvain, Peeters, 1910), p. 264 et R. Heinzc,
p. 444 et s.
La lecture timeri solet (P) est plus facile pour un lecteur
ordinaire que praecavetur, mais elle est moins précise, et elle
ne rend pas l'idée de Tert. L'interpolateur n'a pas vu que
Tert. vise directement les lois prohibitives, édictées depuis
l'époque du tribun Clodius contre les collegia illicita (voy.
notre Etude sur les Corporat. prof, des Romains, l, p. 90-154),
c'est-à-dire les précautions prises contre les associations dan-
gereuses pour l'ordre public, qu'il appelle fadiones inlicitae
et qui troublaient précisément les comices et les réunions
populaires. Tert. le dit clairement dans la phrase suivante :
proliibendarum facîionum causa ..., qua facile comitia, concilia
... inquietarent, etc. Sur praecavere, voy. De idol, 2, p. 31,20 :
quoi modis nobis praecavenda sit idololatriae latitudo.
Au § 2, qua ... inquietarentfa a. été remplacé par quae res
inquietaret dans P. L'interpolateur a perdu de vue le sens
que Tert. donne souvent à qua = qua ratione. Voy. 39,16 ;
47,6. Après ce changement, il a fallu donner un sujet à coepis-
sent et l'interpolateur à intercalé liomines devant violentiae
suae (1).
Remarquez que la proposition principale (constat) équivaut
à celle-ci : prohibitae sunt fadiones publicae propter modes-
tiani publicam ; de là, l'imparfait du subjonctif : ne civitas
in partes scinderetur.
Il ressort des §§ 1-2 du ch. 38 que les païens lançaient aux
chrétiens le reproche général de constituer des associations
illicites, prohibées par les lois sur les associations. Pline le
Jeune, gouverneur de Bithynie en 111 et 112, avait interdit
(}) Cf. Lofstedt, p. 47-
CHAP. 38,1 335
les hétéries dans sa province et les chrétiens n'osaient plus
se réunir. Tout ce qu'il trouvait de blâmable dans leur culte,
c'étaient Igs réunions matinales. Voy, ci dessus, p. 158. Celsc
n'était pas moins précis que Tert. Origen., Contra Cels., 1,1 :
wç cruvG'/ixaç xpu^S'^v Tcpoç àX)â\koi)i; TroLOUfJiévwv Xpt.(7T!.av(7)v
uapà xà vevo[i.(,a-p.éva. Minucius Félix, 7,1 : plebem profanae
coniurationis institinmt. On retrouve encore ce reproche dans
a sentence rendue, en 258, contre S. Cyprien. Acta proc, 4,
p. ex III : diu sacrikga mente vixisti et plurimos nejariae
tibi conspirationis homines adgregasti. Rappelons que les
lois frappaient le plus sévèrement les auteurs des collèges
illicites. Voy. notre Etude sur les Corp. prof, des Rom., I, p.
136-138.
Au reproche de former des associations illicites, Tert.
répond 1° que les chrétiens n'ont besoin ni de clubs politiques
ni de factions du cirque (ch. 38) ; 2" que, sans doute, ils s'unis-
sent et forment un corpus, mais le but de cette union est
religieux et charitable, absolument inoffensif pour l'ordre
public (ch. 39). Donc les lois qui interdisent les factions n'at-
teignent pas la communauté chrétienne ; l'Etat n'a donc
aucune raison de s'en inquiéter, d'en prendre ombrage.
Tert. ne pose pas la question de savoir si les communautés
chrétiennes sont légales et il évite même le nom légal, qui
était collegium. Il eût été très maladroit de poser cette ques-
tion, car il eût fallu de toute évidence répondre catégorique-
ment non. La loi était sévère : pour être légale, toute asso-
ciation devait avoir reçu une autorisation spéciale (sauf les
collèges funéraires autorisés en bloc). Mais dans la pratique,
l'Etat était satisfait, si le but de ces prescriptions rigoureuses
était atteint, c'est-à-dire, si elles empêchaient la formation
de collèges séditieux ou factions, et il s'abstenait de pour-
suivre les collèges non autorisés qui étaient sans danger pour
l'ordre public. Sur ces collèges qui n'étaient ni autorisés, ni
factieux, l'Etat fermait les yeux ; il agissait comme s'il igno-
rait leur existence. Tert. veut évidemment montrer que les
chrétiens méritent d'être traités ainsi. La loi veut empêcher
les « factions » dangereuses pour l'ordre public ; nous ne for-
mons pas des « factions » dangereuses ; donc la loi ne nous
atteint pas et cette accusation tombe comme les autres.
336 APPENDICE I
Fermez les yeux et laissez vivre et se réunir en paix des
gens si paisibles. C'est aussi la conclusion du débat juridique
des chap. 4-6 (voy. ci-dessus, p. 169) et ce sera le conseil que
Tert, donnera, vers 212, au proconsul Scapula, dans une
lettre qui résume souvent les idées de V Apologétique. Ad Scap,,
4 : Potes et officio imisdictionis tuae fungi et humanitatis me-
minisse ... Quanti (= quoi) autem praesides et constantiores
et crudeliores dissimulaverunt ab liuiusmodi causis ? Com-
bien de gouverneurs, plus fermes et plus inhumains que
toi, ont fermé les yeux et n'ont pas donné suite à des
procès de ce genre (aux procès contre des chrétiens) ? Et il
cite Cincius Severus, qui suggérait aux chrétiens de Thysdrus
des réponses évasives pour les soustraire à la mort, et plu-
sieurs autres gouverneurs, qui avaient trouvé le moyen de
ne pas poursuivre les chrétiens accusés. Laisser dormir une
loi injuste et absurde, voilà ce que Tert. demande toujours
aux juges.
J.-B. de Rossi a soutenu que les chrétiens avaient trouvé
dans la loi même un moyen de constituer des collèges légaux,
qu'ils formaient dans chaque ville un ou plusieurs de ces
collèges funéraires qu'un sénatus-consulte avait autorisés
en bloc. Cette thèse a longtemps paru séduisante, mais elle
a été reconnue fausse. Elle s'appuyait en partie sur Tertullien,
dont le texte prouve le contraire. Voyez notre art. Collegium,
dans le Dict. d'arch. chrét. de Cabrol et Leclercq, avec la
bibliographie. Voyez encore maintenant : R. Saleilles, L'or-
ganisation juridique des premières communautés chrétiennes,
dans les Mélanges P. F. Girard (1902). P. Batiffol, L'Eglise
naissante et le catholicisme, Paris, 1911. Le même, La Paix
constantinienne, Paris, 1914.
38,5. Licuit Epicureis aliam décernera voluptatis veri-
tatem, id est, animae {lege : animi) aequitatem. In quo
vos offendimus, si alias praesumimus voluptates ? F
Sur la transposition qui se trouve dans P et sur le sens de
ce § , voy, ci-dessus, p. 97. Sur id est, voy. ci-dessus, p. 83. —
Aliam « une autre vérité sur la volupté » (que celle qui éta
généralement admise), c'est-à-dire, une vérité nouvelle su
CHAP. 38,5 337
la volupté. De même, si alias praesiimimiis volaptates, si
nous admettons d'autres voluptés (que celles qu'on recherche
généralement), c'est-à-dire d'autres voluptés que les vôtres.
Cf. Ad nat., 2,3, p. 99, 24 : Et hoc alla sane vanitate Aegyptiis
licet. Sur le sens de praesiiinere, voy, ci-dessus, p. 98,
Dans P, on lit : Licuit Epicureis aliquam decernere volup-
tatis veritatem, de décréter une vérité sur la volupté. Ce n'est
pas l'idée que Tertullien veut exprimer. Aliqiiis ne se met
pas pour alius quis, comme on le dit souvent. Tlies. /. /., I,
1608, 73 : Aliquis cum aliqiia vi opponendi, ita tamen ut nus-
quam aliquis sit i. q. alius quis ; immo hoc aut ipsum ponitur
aut alius aliquis.
Remarquez encore que voluptates était le terme propre
pour désigner les jeux et les réjouissances publiques.
Sur l'idée, comparez De cultu fem., 2,4 : quia non isdem
bonis quae gentiles bona putant, capimur.
39,1. Edam iam nunc ego ipse negotia Christianae fac-
tionis, ut, qui mala refutaverim, bona ostendam.
C'est la leçon de P. Au lieu de ut qui, F a : quominus, ce
qui ne se comprend pas et qui vient peut-être d'une abré-
viation mal résolue.
Jusqu'ici, Tertullien n'a parlé que des occupations que les
païens prêtent à ce qu'ils appellent la faction chrétienne
(infanticide, repas de sang, inceste, etc.) et il s'est borné à
réfuter ces accusations. Maintenant, il va lui-même (ipse)
exposer ces occupations, telles qu'elles sont en réalité, pour
montrer qu'elles sont « bonnes », après avoir prouvé qu'elles
ne sont pas « mauvaises ». Il faut donc comprendre : ut, qui
mala {ea negotia esse) refutaverim, bona {ea esse) ostendam.
Refutare avec l'ace, et l'inf. veut dire « nier que, prouver
que ne pas ». Construction rare et d'abord poétique. Lucrèce,
3, 350 : si quis corpus sent ire réfutât (= negat) atque ... crédit. —
L'ellipse de esse et du pronom sujet de esse est fréquente dans
Tertullien. 21,22 : {eum esse) subreptum. Al, 2 : alii incorpo-
ralem {eum esse) adseverant. Hoppe, Syntax, p. 49-50,
La clausule refutave]rim bon{a) ostendam forme un crétique
et un trochée. F ajoute les mots : si etiam veritatem révéla-
338 APPENDICE 1
verim, qui donnent une bonne clausule (double crétique).
Nous les avons condamnés plus haut (p. 66) comme une addi-
tion. Peut-être faut-il les conserver : ils exprimeraient la
répugnance de Tertullien à révéler aux païens la vérité sur
les assemblées chrétiennes. « Je vais exposer les occupations
de la faction chrétienne ..., même si je révèle ainsi la vérité. »
On sait que les apologistes évitent le plus possible de parler
devant les païens de ce qui se passe dans les assemblées chré-
tiennes. — Sur le subj. potentiel subordonné à ut, voy. ci-
dessus, p. 316.
39.2. Coimiis in coetu<m> et congregationem facimus. F
P a : coetiim et il omet focimus. — Cf. 7,4 : in ipsis etiam
plurinmm coetibus et congregationibus nostris. 39,21 : cum
boni coeiint, cum pii, cum casti congregantur. Lact., Div. inst.,
6, 10, 26 : liumanitatis causa facta est liominum congregatio.
On peut donc dire : congregationem facimus. Voy. Thés. l. /.,
IV, 288, 35-46. Mais la clausule laisse à désirer (Di Capua,
p. 35), tandis que congregationem donne une clausulp. fré-
quente (ditrochée).
39.3. Certe fidem sanctis vocibus pascimus, spem erigi-
mus, fiduciam figimus, disciplinam praeceptorum nihi-
lominus inculcationibus densamus. P
«Au moins, par ces saintes paroles, nous nourrissons notre
foi, nous relevons notre espérance, nous affermissons notre
confiance, nous resserrons également notre discipline morale
en inculquant les préceptes. »
Au lieu de inculcationibus, F a in compulsationibus, ce qui
paraît être une méprise du copiste. Lesgroupes incvlcationib.
et iNCPVLSATiONiB- se ressemblent assez pour tromper un
scribe distrait. — In compulsationibus « dans les chocs, les ren-
contres, les luttes, les conflits », Ce mot, qui se trouve pour
la première fois dans Tertullien, exige un complément indi-
quant les parties qui sont aux prises. Voy. 21,15 : me alla
magis inter nos et illos compulsatio est ; 38,2 : studiorum com-
pulsationibus. Cf. 20,2 : regnis régna compulsant. Ce complé-
CHAP. 39,2-8 339
ment manque ici, Compulsationes ne peut d'ailleurs designer
les persécutions, qui ne sont pas des « conflits ». Enfin, les
accusatifs fidem, spein et jiduciam n'ont pas de complément
et il en est de même de disciplinam ; il en résulte que le géni-
tif proeceptonun doit être complément cVun autre mot, tel
que inciilcatiombas (= praeceptis inaïkandis, abl. de moyen).
La lecture des Livres saints a pour but : 1) d'y chercher l'expli-
cation des événements présents ou des avertissements pour
l'avenir ; 2) au moins {certe) de nourrir la foi, de relever
l'espérance, d'affermir la confiance, de resserrer la discipline
en inculquant les préceptes (de l'Ecriture). Cf. Paul., Ad Tim.,
2, 3, 16. Origène, Contra Cels., 3,50, p. 246, 16 ss.
39,6. et si qui in metallis et si qui in insulis vel in custo-
diis, dumtaxat ex causa Dei sectae, conflictatur, alumni
confessionis suae fiunt. F
« Et si des chrétiens souffrent dans les mines, dans les îles,
dans les prisons, uniquement à cause de la religion de Dieu,
ils deviennent les nourrissons de leur confession (de la religion
qu'ils ont confessée), » Sur confcssio (ôpoXoyia), voy, ci-dessus,
p. 309.
Conflictatur manque dans P, où il suffit de sous-entendre
est ou sunt. — Tert. dit souvent si qui pour si quis, 3,7 : si qui
probet. 18,1 : si qui velit. Et ici : si qui conflictatur « si qqn
souffre ». Confiictari (= adflictari, vexari), employé absolu-
ment, appartient à la langue de Tertullien. De spect., 28,
p, 27,4 : nunc illi laetantur, nos conflictamur. Saeculum, inquit,
gaudebit, vos tristes eritis (loh., 16,20). De orat., 5, p. 184, 17 :
propter quod conflictamur. Adv, Marc, 4,37, p. 548, 7 : dimit-
tens confiictatos in laxamentum. Déjà dans Cicéron, Ad Att.,
11,25, 3. T/zes. /. /., IV, 236, 84.
39,8 quod fratrum adpellatione censemus. F
Il faut lire : censemur. P a : nos vocamus.
Censeri signifie : adpellari, vocari ; il est souvent accom-
pagné de adpellatione, titulo (Adv. Marc, 4, 10, p. 446, 30),
vocabulo (De monog., 8. De pat., 11, p. 17, 26), noniine (Apul.,
340 APPENDICE I
Met., 8,25. Arnob., Adv. nat., 1,3). Dans ce sens, ccnseri est
d'un usage courant à l'époque de Tertullicn ; il n'en est pas
ainsi de l'actif ceiisere, qui devrait du reste être accompagné
de nos. Voy. Tlies. l. /., 1 i i, 789, 60.
Dans P, le mot rare a été remplacé par le mot ordinaire.
39,9. qui uiuim patrem Deum agnovcrunt, qui unum
spiritum biberunt sanctitatis, qui de uno utero ignoran-
tiae eiusdem ad unam lucem expaverunt veritatis.
Modius donne seulement: expaverunt veritatis. De la Barre
lit : exspiravenmt pietatis. Comme De la Barre a les deux
premiers verbes à l'indicatif, on peut admettre, à cause du
silence de Modius, que F les avait aussi à l'indicatif. Dans P,
on lit : agnoverunt, biberint, expaverint. Ces trois prop. rela-
tives sont causales et le subj. était de mise. Mais Tert. emploie
souvent l'indicatif (Hoppe, Syntax, p. 74) et il lui arrive
aussi de mêler les modes. Voy. 41,1. Dans P, le même phéno-
mène se présente aux ch. 8,9 et 30,1. Scorp., 10, p. 166, 20 :
Vide an servaverit genus, a quibus et testinwniwn sui exspectet,
et in quos iustitiae viceni mandat. De spect., 21, p. 22, 3 : et qui
levet, et qui tuetur, et qui aut compescit aut detestatur, et qui
exhorret, ininw qui veniat, et qui poscit. Même variété après
cum. De spect., 2, p. 4, 10. Hoppe, Syntax, p. 80.
Sur la métaphore biberunt, voy. De pud., 16,12 : si vis
oninem notitiam Apostoti ebibcre. Hoppe, Syntax, p. 181.
Sur expaverunt == expavescentes venerunt, voy. Ad martyr.,
3. De spect., 17, p, 19,8. Au ch. 37,7, expavescere ad, être épou-
vanté à la vue de, a un autre sens. Cf. De orat., 22, p. 196, 14.
Tert. dit aussi : expavescere aliquid. De an., 30, p. 350, 16 :
numquam restitutionem eius (se. generis humanï) vivos ex
mortuis reducentem post mille annos semel orbis expavit. Sur
expavescere avec l'infinitif (De praescr., 2 et 4), voy. Hoppe,
Syntax, p. 47.
39,12. in isto solo (in isto loco P) consortium solvimus,
in quo solo ceteri homines consortium exercent F
Cf. De an., 5, p. 304, 8 : accerserint Eubulum ... et isto in
CHAP. 39,9-18 341
loco amiciim Platonis Aristokkm. — In isto loco « en cette
matière » n'a pas été compris par le correcteur, qui l'a rem-
placé par in isto solo, peut-être à cause de in quo solo, qui suit.
Il est probable qu'il n'aurait pas fait l'inverse.
Salvien s'est souvenu des §§ 12-13. De gubcrn. Del, 7, 102 :
Nec suffecit sapientissinio, ut quidam aiunt, pJùlosopiio (se.
Socrati) doccre Iwc, nisi ipse fecissd : uxorcm enim suani alieri
viro tradidit, scilicet, siait etiam Ronmmis Cato, id est alius
Italiae Socrates. Ecce quae sunt et Romanac et Atticae sapien-
tiae exempta : omnes penitus ma rit os, quantum in ipsis fuit,
lenones uxorum suarum esse fecerunt.
39.17. Non prius discumbitur, quam oratio ad Deum
praegustetur.
« On ne se met à table qu'après avoir goûté d'une prière
à Dieu )); La prière est une nourriture spirituelle, que les
chrétiens prennent avant les autres mets, en guise de pro-
mulsis ou gustatio. — Sur la métaphore, voy. De cor., 3, p.
421, 8 0. : inde suscepti lactis et mellis concordiam praegus-
tamus. Scorp., 1, p. 146, 13 : ungulis insuper degustato mar-
tyrio, où Hartel lit : ungulis insuperati post degustata mar-
tyr ia. Hoppe, Syntax, p. 181.
39.18. Ita saturantur, ut (ut qui P) nieminerint etiam
per noctem adorandum sibi Deum esse ; ita fabulantur,
ut qui sciant Deum audire. F
Ut qui est nécessaire devant fabulantur : ils parlent en gens
qui savent que Dieu les entend et qu'ils auront à rendre
compte à Dieu des paroles inutiles, suivant Matth., 12,36 ;
Ad Ephes., 4, 29-30 ; Ad Coloss., 4-6.
Au contraire, qui n'est pas nécessaire dans la première
phrase : « ils se rassasient (c'est-à-dire : ils mangent et ils
boivent) de telle façon qu'ils se souviennent (ils ne font pas
d'excès, de telle sorte qu'ils se souviennent), Sen., Fragm. 39 :
Omnem istam ignobilem deorum turbam ... sic adorabimus ut
mcminerimus cultum eius niagis ad moreni quam ad rem per-
tinere (apud Augustin., De civ. Dei, 6, 10).
342 APPENDICE I
Sur les prières nocturnes, voy. Ad uxor., 2,4 : nodurnis
convocationibus. 2,5 : mm etiam per noctem exsurgis oratum.
39,19. nec in inceptiones lasciviarum F ; nec in erup-
tiones lasciviarum P.
« Après le repas, chacun va de son côté, non pour se livrer
à la débauche ... » — Inceptio « entreprise « est très classique,
quoique rare. Ter., Andr., 218 : nam inceptiost amentium,
liaud amantiiim. Cic, Acad., 2, 119: qiiod niilla fuerit tam
proeclari open's inceptio. Adv. Hermog., 19, p. 147, 6 : ita
principiiim sive initium incepiionis esse verbum.
Lasciviae « des actes de dévergondage ». De idol., 1, p. 31,5 :
in illa (se. idololalria) lasciviae et ebrietates, cum plurimum
vicias et ventris et libidinis causa frequententw. In Val., 12,
p. 119,19: videmiis cottidie nauticorum lascivias gaiidiorum.
40,1. quod existiment omnis publicae cladis, omnis
popularis incommodi in primordio temporum Christia-
nos esse in causa. F
Dans F, il faut lire : a primordio temporum. P n'a pas ces
trois mots. Voy. ci-dessus, p. 109.
P a : esse in causam, qui est ici fautif. En effet, il ne faut
pas confondre la locution très fréquente esse in causa avec
l'expression rare, mais attestée : esse in causam.
1° La locution esse in causa « être en cause » et, avec un
génitif «être la cause de», est très employée depuis Cicéron.
Thés. l. /., III, 670, 60. Voy. ch. 2,18 : non scelus aliquod in
causa esse,sed nomen. Ad nat., 1,3, p. 62, 11 : nomen in causa
est. De an., 17, p. 324, 13 : aqua in causa est. Ibid., 24, p. 338,
29 : 5/ tempus in causa est oblivionis. Ibid., p. 339, 16 : ergo
non erit corporalitas in causa exiius uniformis. De pud., 14,25 :
in causa eius « à cause de lui », et in eadem causa « pour le
même motif ».
Esse in causa alicuius rei veut donc dire : esse causam
alicuiusrei, être la cause d'une chose. Cf. Ad nat., 1, 9, p. 73,5:
qui omnis cladis publicae vel iniuriae nos causas esse vultis.
2° Les mss de Tert. ont parfois in causam avec un génitif.
CHAP. 39,19—40,1 343
Ainsi, parlant des hommages idolâtriques rendus aux empe-
reurs (des portes ornées de lauriers et de lampes), Tcrtuilien,
dit. De idol., 15, p. 47, 15 : Si idoli Iwnor est, sine diibio idoli
fionor idololatria est. Si hominis causa est, recogitemus omnem
idololatriam in Iwminis caiisam esse. « S'agit-il d'un honneur
rendu à une idole (aux dieux qui gardent les portes, ib., p.
48,7) ? Certes l'honneur rendu à une idole constitue l'ido-
lâtrie. Un homme est-il en cause ? Songeons que toute ido-
lâtrie existe pour un homme, c'est-à-dire « a pour but d'ho-
norer un homme ». Tert. explique son idée, en ajoutant :
Recogitemus omnem idololatriam in homines esse culturam,
cum ipsos deos nationum Iwmines rétro fuisse etiam apud suos
constat. On voit que in causam marque le but. Cf. De an., 51,
p. 383, 22 : sed non in causam orationis « pour prier ». Apol.,
50, 4 : in causam (F ; in causa P) gloriae et famae vexillum
virtutis extollunt « ils lèvent l'étendard du courage pour at-
teindre à la gloire et à la renommée ».
Ici (40,1), esse in causam (P) ne s'explique pas par cette
nuance et il faut lire esse in causa (F), — sinon, on sera obligé
d'admettre qu'il y a confusion de l'ace, et de l'abl. Hoppe,
Syntax, 41.
— Les chrétiens sont la cause de tous les désastres publics,
de toutes les calamités nationales ! Tertullien avait déjà
consacré tout un chapitre de son traité Aux nations à la réfu-
tation de ce grief (Ad nat., 1,9). Il lui était sans doute arrivé
plus d'une fois d'assister aux explosions de la fureur popu-
laire, car ce sont des scènes vécues qu'il décrit au § 2 : 5/
Tiberis ascendit in moenia ...
On voit que cette accusation était courante à la fin du IIi^
siècle, qu'elle surgissait à toute occasion. Sans doute, de tout
temps, les chrétiens furent accusés d'exciter le courroux des
dieux par leur impiété, mais le grief précis dont Tert. parle
ici, ne pouvait devenir général, populaire et habituel, que le
jour où le nombre des chrétiens fut tel qu'on pouvait leur
attribuer une influence sur les destinées de l'Empire et où
des calamités incessantes fondirent sur Rome et sur les pro-
vinces. Or, Tertullien nous répète que les chrétiens sont nom-
breux partout et il écrivait au moment où les guerres de
344 APPENDICE 1
Septime Sévère, avec leur cortège de calamités, venait de
ravager l'Orient et l'Occident (i).
Chose remarquable : aucun des apologistes antérieurs à
Tert. ne connaît cette accusation, que Tert. nous représente
comme habituelle à son époque et qu'il regarde comme assez
sérieuse pour la réfuter longuement à deux reprises : ni les
Grecs, ni Minucius Félix n'y font allusion.
Au contraire, les auteurs qui suivirent Tertullieia, ceux
du nie et cju jve siècle, la connaissent et s'y arrêtent. Origène
en parle vers le milieu du III^ siècle {^). A la même époque,
S. Cyprien raconte que des persécutions furent occasionnées,
en Cappadoce et dans le Pont, par des tremblements de terre.
Dans sa lettre à Demetrianus, il réfute ceux qui accusaient les
chrétiens de provoquer la colère des dieux et de causer tous
les malheurs publics (^). En 305, Arnobe écrit presque tout
son premier livre pour réfuter ce grief (^). Dans les premières
(^) Cf. 20^ 2 : quod faînes et lues et locales quaeqiic clades ci fre.
queiiliae pierumque inortiitin vastant.
C^) Contra Cels, 3,15 (en 248): s-àv TrâA'.v ol TravTt too-w ota-
pâXÀovusi; TGV Xo'yov ^r^v aî-t'av -zr^c, i-t toctouto vCiv ataffîtoç £v
TïX-ôOs'. Twv 7ï'.aTsuo'v-(i)v vo[j.ia(o(TLv sTva'.. Comm. in Matth., 39: Fré-
quenter eiiiin FAiris causa Christianos culparunt geniilesj scd et
PES'riLENTiARU:M causas ad Christi ecclesiam retulcrunt. Scimus auicin
et apud nos terrae '^IO'I'UM fncluiii. in locis quihisdam et factas fuisse
quasdam ruinas, ita ut, qui crant impii extra fidein, causant terrae
■motus dicerent Christianos, propter quod et pcrsecutiones passac sufit
ccclesiae et incensae sunt ; non soluni auteni illiy scd et qui videbantur
prîtdentcsj talia in publico dicerent quia propter Christiaiios fièrent
gravissimi terrae motus.
(■') Epist., 75, 10: Terrae etiam nioius plurimi et frequeiites exsti-
terunt, ut et per Cappadociam et per Pontu-m -multa suhruerent..., ut
ex hoc pcrsecutio quoque gravis adversu-m nos nominis fieret. Etc. Ad
Démet r., 8 : Dixisti per nosfieri et quod nohis debcant iniputari omnia
ista quibus nunc niundus quatiiur et urguctur, quod di vestri a nobis
non colantur.. Etc.
(■') Arnobe, Adv., nat., 1,13; Christianorum, iiiquitis, causa
mala oinnia di ingeruftt, etc.
CHAP. 40.1 345
années du V<^ siècle, les païens rejetaient encore les malheurs
de l'Empire romain sur la religion chrétienne, parce qu'elle
défendait de sacrifier aux dieux. Au début de la Cité de Dieu,
S. Augustin croit nécessaire de montrer l'inanité de ce reproche
populaire et il y revient à. plusieurs reprises au cours de son
ouvrage (i). C'était alors un proverbe populaire : « 11 ne pleut
pas, la faute en est aux chrétiens ! » {^). Les gens instruits,
dit S. Augustin, savent bien ce qu'il faut en penser ; mais
pour soulever la multitude ignorante contre nous, ils tâchent
de persuader au peuple que ces désastres qui, dans l'ordre
de la nature, affligent les hommes de temps en temps et en
certains lieux, n'ont d'autre cause que le nom chrétien, qui
se répand partout et tend à détruire leurs dieux.
Il résulte de là que, dès le temps de Tertullien, depuis la
fin du IlG siècle jusqu'au V^, cette accusation est fréquente
et générale : Tertullien et ses successeurs sont forcés de la
combattre. Avant lui, au contraire, on l'ignore. Est-il vrai-
semblable, dès lors, que Minucius Félix, qui a collectionné
avec tant de soin les calomnies païennes, ne connaisse pas
celle-ci, s'il est venu après Tertullien et surtout s'il a pillé
V Apologétique, comme on le dit ? {^). Cela nous paraît tout-à-
(') S. Augustin, De civ. Dei, i, 36 : Sed adlinc mihi quaedam
diecnda sunl advcrsus nos, qui Romanae reipuhlicae cladcs in religionem
noslriDU rcferunl, qua dis suis sacrificarc prohihentur. 2, 3. 3, 31,
5, 22 ss. Il réfute l'accusation par des arguments semblables à ceux
de Tertullien. Voy. i, 8-1 1.
(-) Ibid., 2, 3 : McDicnio nute»i me ista coiiiineinorajitem adhnc
contra impcriios agorCj ex quorum, imperitia illud quoquc orlum est
vulgarc provcrhiuni : Piuvia dcfiL, causa Christiaiii sunt.
(•^) Il ne sait rien non plus du crime de lèse-majesté et les apolo-
gistes grecs n'en parlent pas plus que lui. Avant Tertullien, les convicia
d'ennemis de l'Etat (hostcs publiai) , d'ennemis des empereurs (liostes
priiicipum RomanorumJ et du genre iiumain (hostcs gencris humani)
sont inconnus. Ce sont là des expressions empruntées par Tert. au
droit public, au code criminel ou calquées par lui stir la langue
du droit. Voy. ad 28, 3, Au moment où il écrivait^ on les entendait
346 APPENDICE I
fait incroyable. Evidemment, Minucius Félix a écrit en un
temps où cette accusation n'avait pas encore pris corps, parce
que l'Empire était heureux et prospère, malgré des calamités
passagères. Il a écrit avant Tertullien et avant Septime
Sévère, sous le règne duquel les guerres civiles décimèrent
l'Empire ; il a écrit avant le Ille siècle, qui amena la ruine
et la misère générales ; il a écrit avant que le grief dont nous
parlons fût couramment imputé aux chrétiens Q).
On n'a pas remarqué jusqu'ici ce silence significatif de
Minucius Félix, silence qui serait inexplicable, si M. F. avait
vécu au nie siècle. Ajoutons une autre observation. On a
soutenu que Minucius Félix a publié son Odavius dans le
deuxième quart du IIl^ siècle. S'il en était ainsi, on ne com-
prendrait pas non plus que, dans un petit ouvrage, il se soit
arrêté si longtemps aux accusations d'infanticide, de repas
de Thyeste et d'incestes d'Oedipe. Ces calomnies prirent
naissance au temps de Néron {^), mais c'est au 11^ siècle
qu'elles se précisèrent et qu'elles reçurent la forme qu'elles
ont dans Minucius Félix (^) et dans Tertullien (*). Pline le
Jeune y fait allusion (^), et les apologistes grecs, depuis Aristide
proférer tous les jours à l'adresse des adversaires vaincus de Septime
Sévère. Dans Minucius Félix, on ne trouve ni les termes ni l'idée;
Tert. donnera à ce grief une forme si précise qu'il n'aurait pas pu
échapper h un imitateur aussi persévérant que celui qu'on veut nous
faire voir dans Minucius Félix.
(') Vo}'. notre Edition classique de Minucius Félix, Introd.,
p. XXV, et notre Etude sur la langue et la syfitaxe de Minucius Félix
(Bruges, Desclée), § 222, p. 156.
(2) Tac, Ann.j 15, 44 : per flagitia invisos. C'est aux Juifs que
S. Justin (Dial. c. Tryph., 17, i) et Origène (Contra Celsum, 6, 27)
attribuent l'origine de cette calomnie ; elle était tirée de l'Eucha-
ristie faussement interprétée.
(3) Octavius, 9, 5-7 ; 30, 1-2.
(■^) Ad nat., i, 7 et 13. Ad uxor., 2, 4-5. De ieiun, 17, p. 266, 25.
(^) Pline, Rpist. ad Trai., ()Ç)^ 2 : flagitia cohaerentia nomi^ii.
§ 7 : ad capie7idtim cihum promiscuum tamen et innoxium.
CHAP. 40,1 347
et S. Justin jusque Théophile, ne cessent d'en parler (i).
Minucius Félix rappelle que Fronton (mort vers 178) s'en
était fait une arme clans un discours contre les chrétiens.
En 177, à Lyon, des esclaves païens, forcés par les menaces
de la torture la formulent contre leurs maîtres chrétiens et
le légat de la Lyonnaise, aussi peu au courant de la loi et de
la procédure que Pline le Jeune, l'accueille, mais Marc Aurèle
lui rappelle qu'il ne doit poursuivre rien d'autre chez les
accusés chrétiens que l'aveu obstiné dû christianisme {^).
V Apologétique de Tertullien (en 197) marque l'apogée de
cette calomnie, qui appartient au 11^ siècle. Au III^ siècle,
elle ira diminuant et disparaîtra : elle ne comptera plus parmi
les griefs imputés aux chrétiens. Les auteurs, les juges, le
peuple lui-même cesseront de la répéter. En 248, Origène
déclare qu'autrefois tout le monde y croyait, mais que, de
son temps, elle ne trompait plus que peu de gens (^). Si M. F.
y attache une si grande importance, c'est parce qu'elle était
encore générale et parce qu'un rhéteur célèbre, Fronton,
venait de lui donner le patronage de son autorité. Entre les
années 220 et 250, il en aurait parlé autrement. VOdavius
porte la marque de son temps ; c'est celle de la seconde moitié
du 11^ siècle.
(^) Aristides, 9, 8-9; 27, 2 (ed, GefFcken). Méliton dans Eusèbe
Hist, eccl., 4, 2, 9. S. Justin, Apol., I^ 26, 7 ; 27, 5. Il, 12,2.
DiaL c. Tryph., lo, 1-2; 17, 1-3. Tatien, Ad Graec, 25. Athé-
nagore, Suppl., 3 et 31-36. Théophile, Ad Autol., 3, 4; 6;
8; 15.
(2) Eusèbe, Hist. eccl , 5, i, 14 et 26. Cf. 4, 7, 11.
(^) Origène, Contra Cels., 6, 27 : ri-tc O'jacp'OjJLÎa -apaAdywc -âXai
[j.£v — Xewtiov oacov ÈxpocTî'. TTStOo'jcra toùç àÀ^o-ptouç toû Xcîyo'j o-t
xoiouzoi îlatv XpLax'.avoi, y.al vuv oè i~>. àizaza Tivaç, y.xot., Salvien,
De gub. Dei, 4, 85, rappellera encore cette calomnie d'après Ter-
tullien, dont il se souvient souvent, mais il en parlera comme d'une
chose depuis longtemps passée. Comparez: Tert.^ Apol., 8,4: si
tanti aeteniitas, et Salvien, p. g6 : quasi vero... tanti essct ad eain
(se. vitam aeternam) per scclera tain immania pet vejiire.
348 APPENDICE I
40.2. ascendit in rtira F ; ascendit in arva P
La leçon de F donne une clausiile régulière (crétique et
trochée) ; celle de P donne une fin d'hexamètre.
Sur inclamant (F) et adclamotur (P), peut-être ajoutés l'un
et l'autre à la fin de la même phrase, voy. ci-dessus, p. 189,
n. 1, Havercamp supprimait déjà l'un et l'autre, en disant :
non est opus. La clausule Christianos ad leonem sera un ditro-
chée.
Tertullien parlera trois fois encore du cri populaire : Chris-
tianos ad leonem. De spect., 27, p, 26, 6. De exhort. cast., 12,
p. 754 0. De resurr., 22, p. 56, 9.
40.3. Oro vos, ante Tiberium, id est ante Christi adven-
tum, quantae clades orbem et urbem ceciderunt ? '*'F
P a : orbem (urbem pi) et urbes. Modius ne dit rien ; la
lecture de De la Barre était donc celle de F : orbem et urbem.
Le rapprochement célèbre orbem et urbem apparaît ici pour
la première fois. Cf. De an., 1, p. 300, 7 : ideoque non unius
urbis, sed universi orbis iniquam sententiam sustinens.
Tert. commence par énumérer les désastres qui ont frappé
les pays (orôem) : îles et terres submergées, déluge, Sodome
et Gomorrhe, villes détruites par le feu du ciel ou d'un volcan.
Il termine par deux désastres qui ont frappé Rome (urbem) :
la défaite de Cannes et la prise de Rome par les Gaulois.
Orbem et urbes semble exprimer deux fois la même chose.
Le passage parallèle dé Ad nat., 1, 9, p. 73, 12, qui pourrait,
à première vue, être allégué en faveur de P, est rédigé autre-
ment : Quantae clades ante id spatium supra univcrsum or-
bem ad singulas urbes et provincias ceciderunt ?
40,6. neque enim illae (alias P) in {om. P) hodiernum ma-
nerent, nisi et ipsae postumae cladis illius.F
Illae est probablement une correction intentionnelle. On
n'a pas compris non alias ... nisi — non aliter nisi, locution
nouvelle à l'époque de Tertullien, fréquente dans les juris-
consultes, dans Tertullien et après lui. Il dit aussi non alias
quam (39,8). Voy. Thés. l. /., I, 1547, 24, et surtout 1 150, 43-69.
CHAP. 40,2-16 349
Dans le passage parallèle de Ad nat., 1,9, p. 73, 26, on lit :
non alias enim superfuissent (oppida) ad liodierniun, nisi pus-
tuma dadis illhis, ce qui confirme la lecture de P, qui est,
au surplus, la ledio dijfîdlior.
Sur in liodiernum, voy, ci-dessus, p. 119.
Dans la même phrase, P a : mortuiqm siint, au lieu de mora-
tiqiie siint F. Voy, ci-dessus, p. 119-120,
40,8, cum ... Pompeios de sua monte perfudit ignis. FP
Voici le passage parallèle de Ad nat., 1,7, p. 73,20 : Ubi
tune Chnstiani ... cum Vulsinios de cado, Pompeios de sua
monte perfudit ignis ? Au lieu de Pompeios, V Agobardinus a
Tarpeios, localité inconnue. Oehler et Reifferscheid ont cor-
rigé avec raison en Pompeios. Certains éditeurs pensent qu'il
ne peut s'agir de Pompéi, attendu qu'en l'an 79, les chrétiens
existaient déjà et que Tert. ne pouvait pas dire : Ubi tune
Christiani ... ? L'observation est juste et l'on a trouvé des
traces de christianisme à Pompéi même. Voy. H, Leclercq,
dans le Dict. d'arch. dirét. de Cabrol et Leclercq, t, I, p. 2046-
2047. Mais il faut admettre que Tertullien avait commis une
bévue dans Ad nationes. Comme il l'a fait plus d'une fois
(voy. 11,8 et 46,13), il a corrigé sa méprise dans V Apologé-
tique, où il dit : Sed nec Tuscia iam atque Campania de Chris-
tianis querebantur, cum, etc., ce qui paraît irréprochable.
40,10, quem cum intellegeret ex parte, non solum non
requisivit timendum, sed et alios sibi citius commenta,
quos coleret. F
quem cum intellegeret ex parte, non requisivit, sed et
alios insuper sibi commentata, quos coleret. P
Les hommes qui ont de Dieu une connaissance naturelle
(voy, 17, 4-5), mais partielle (Adv, Marc, 2,1, p. 334, 20:
quem non scias nisi ex parte qua voluit), doivent le rechercher
pour le craindre ; ils ne l'ont pas fait, mais ils ont préféré
inventer d'autres dieux pour les adorer. Timendum est opposé
à quos coleret.
Une fois qu'on a reconnu Dieu, il faut l'adorer et non le
350 APPENDICE I
discuter : c'est une idée que Tert. exprime ailleurs. Adv,
Marc, 2,1, p. 333 : qiiem quanto constaret esse ..., tanto qualem-
cumque sine controversia haberi deceret, adorandum potius
quam iudicandwn et demerendum magis quam retractandum.
Dieu est pour nous un père et un maître, un père qu'il faut
aimer et un maître qu'il faut craindre. Ibid., 2, 13, p. 353, 20 :
patrem diligendum pie, dominum timendum necessarie, dili-
gendum quia malit misericordiam quam sacrificium, et timen
dum quia nolit peccatum, diligendum, quia malit paeniten-
tiam peccatoris quam mortem, et timendum quia nolit pecca-
tores sui iam non paenitentes. Ideo lex utrumque définit :
« Diliges Deum » et : « Timebis Deum » (Lev., 19, 14 ; 32),
C'est l'idée qu'exprime ici timendum et cette idée est déve-
loppée dans ce qui suit. Si les hommes avaient cherché Dieu,
le vengeur du crime {nocentiae iudicem), ils l'auraient craint
et ils auraient éprouvé les effets de sa clémence plutôt que
de sa colère. — La clausule est un ditrochée,
Citius, suivi ou non de quam, dans le sens de potius, facilius
est déjà classique et très fréquent dans Tertullien. Voy. le
ch. 28,4. De pud., 1,9 ; 10,7 ; 15,11. De an,, 3, p, 303, 10 ;
Scorp,, 5, p, 154, 14, Adv, Marc, 2,14, p. 355, 1. Tlies. l. /.,
III, 1212, 15.
Commenta, se est. Tert. dit commentatus ou commentus.
Ad nat., 2,9, p. 111, 12 : quos (se deos) ipsi (se. Romani) sunt
commenti. Ibid., 1, 16, p, 86, 6 : quod adulteram nodem com-
menti sumus. Ibid,, 2, 14, p, 126, 12 : pauca experientiae
ingénia commentus. De an,, 28, p, 347, 32 : qui talem commen-
tus est stropham. Adv. Val., 27, p, 203, 9 : fartilia nescio quae
commenti et hominum et deorum suorum. Thés. l. L, III, 1887,
23.
Pourquoi P a-t-il modifié le texte ? peut-être parce qu'il
n'a pas compris timendum ni citius. Il a remplacé citius par
insuper, qui fait double emploi avec et {— etiam), et commenta
par la forme plus fréquente commentata.
40,12. Illius rea est, cuius bonis ingrata est F ; illius rea
est, cuius et ingrata P.
Tertullien dit : « Le genre humain est l'accusé de celui,
CHAP. 40,12-15 351
est poursuivi par celui, envers les bienfaits duquel il est ingrat.»
Sur reus avec le génitif d'une personne, voy. ch, 8,2 : nullius
reiim. Cic, Pro Mil., 35 : reus Milonis lege Plautia luit Clo-
dius. Ailleurs (Adv. Marc, 4,25, p. 504, 12), Tert. dit : reos
habuit (Deus) sapientes atque prudentes.
Cuius et ingrata, se. est, ne paraît pas être latin. Le nom
de la personne se met au datif ayec gratus, ingratus. Le nom
de la chose se met aussi au datif. Il est vrai qu'en poésie et
dans la prose postclassique, le nom de la chose est parfois
mis au génitif, mais pas le nom de la personne. Virg., Aen., 10,
666 : ingratusque salutis. Adv. Marc, 2, 24, p. 367, 1 1 : bene-
ficii ingratus. 3,24, p. 422, 2 : ob utriusque promissionis ingra-
tos. Hoppe, Syntax, 23, ne cite aucun autre exemple du nom
de la personne au génitif.
Dans F, la clausule est un double spondée, précédé d'un
trochée. Dans P, la clausule est irrégulière (i).
40.14. cauponis *F ; cauponiis P.
Tertullien dit cauponas, au ch. 13,6. Le neutre cauponium
(de l'adjectif cauponius), pour caupona, ■KaTZ'f\lÙQy « auberge,
cabaret », n'est attesté d'une manière certaine que par les
glossaires. Tlies. l. /., I, p. 657. — Sur ce passage, voy. ci-
dessus, p. 27.
40.15. in sacco et cinere volutantes invidia caelum tun-
dimus FP
« Nous lassons le ciel par notre importunité ». — On a rare-
ment bien compris cette locution. Caelum = Deum, comme,
au ch. 30,2. Tundere n'est pas la même chose que pulsare,
frapper à la porte. Tundere aliquem, c'est importuner, fatiguer
(très familièrement : assommer, raser) qqn par ses discours et
ses prières. Plaut., Poen., 434. Ter., Hecyr., 123. Virg., Aen.,
4, 448. De même extundere aliquid signifie « arracher qqch.
Q-) Lôfstedt^ p. 68, regarde botiis et est comme interpolés dans
F et propose de lire : cuius ingrata (crétique et trochée), ce qui
nous paraît peu grammatical.
352 APPENDICE I
par ses prières ». Plaut., Most., 221. Suet., Vesp., 2. Son., De
benef., 1, 3, 1. Ce sont des tournures de la langue courante.
Il en est de môme de invidia qui désigne « la manière d'agir
insupportable «, les importunités par lesquelles le suppliant
finit par arracher (extorserimus) ce qu'il désire. Tércnce em-
ploie odiiim dans ce sens. Hecyr., 123 : tiindendo aiqiie odio
denique effecit senex. On trouve invidia ainsi employé dans
Stace, Theb., 9, 722 ; Silv., 5, 5, 77. Lucain, Phars., 2,36. Tert.,
De orat., 5. De ieiun., 16. De même, invidiosus, dans Tert.,
De pud., 22. S. Cyprien, De mort., 10, p. 302, 15. Cf. Hoppe,
Syntax, p. 122. Les chrétiens suivent les conseils du Maître.
Matth., 7,7 : Petite et accipietis. 11,12 : regmim caelonim viin
potitur et violenti rapiiint illiid. Luc, 11, 5-13 : parabole de
de l'homme {nocturnus illc pulsator, dit Tert., De orat., 6),
à qui le maître de la maison finit par ouvrir propter impro-
bitatcm, oià ye t7|V àvaioeiav.
Hartel, Pair. Stud., IV, p. 43, traduit invidio par stiinnisches
Verlangen. Cette traduction, que nous avions admise, ne
nous paraît plus exacte.
40,15. et, cLim niisericordiam extorserimus, luppiter
honoratur a vobis, Deus neglegitur. F
Les mots Deus neglegitur ne sont pas dans P. Ils ont l'air
d'une glose explicative de l'antithèse qui précède. Ils ne sont
pas exigés par le sens, car l'antithèse entre Deum tanginms
et luppiter honoratur se comprend facilement : nous désar-
mons Dieu et c'est ... Jupiter qu'on honore. En outre, ils
donnent une clausule irrégulière à la fin du chapitre (double
crétique avec la dernière longue résolue).
L'idée revient, sous une autre forme, dans Ad Scap., 4 :
Quando non geniculationibus et ieiunationibus nostris etiam
siccitates sunt depulsae ? Tune et populus adclamans deo deo-
rum, qui solus potens, in lovis nom' ne Deo nostro testimonium
reddidit.
41,1. Sed (aut P) ne iili iniquissimi, qui (si P) propter
Christianos etiam cultores suos laedunt F
« Mais, en vérité, ils sont injustes au suprême degré, ces
CHAP. 40,15—41,1 353
dieux qui, à cause des chrétiens, font souffrir même leurs
adorateurs ».
Le chap. 41 doit être divisé comme suit: § 1. Vos igitiir.
Conclusion du chap. précédent. Secl ne illi. Idée nouvelle de
ce chapitre : vos dieux sont injustes, puisqu'ils punissent
leurs adorateurs à cause des chrétiens. § 2. Objection : on
peut en dire autant du Dieu des chrétiens. § 3. Admittite. C'est
la première réponse à l'objection : le plan de Dieu. § 4. Qui
autem. Suite de cette réponse. § 5. Deuxième réponse : les
chrétiens ne souffrent pas des plaies envoyées par Dieu ; au
contraire, ils s'en réjouissent. § 6. Conclusion sarcastique.
Vous adorez des dieux ingrats et injustes et vous ne devriez
plus les honorer !
Tertullien commence par tirer la conclusion du chap. 40.
Ce sont les païens qui attirent les malheurs sur l'Empire ;
en effet, ce ne sont pas leurs dieux qui sont irrités, c'est le
Dieu des chrétiens, parce que celui-ci seul a des raisons d'être
irrité, tandis que ceux-là n'en ont pas.
Puis brusquement il suppose la thèse contraire admise :
ce sont les dieux païens qui sont irrités et qui punissent les
hommes à cause des chrétiens. En ce cas, ils sont injustes
de ne pas distinguer entre leurs fidèles et leurs contempteurs.
C'est la thèse de ce chapitre. Après avoir réfuté une grave
objection, Tertullien revient à cette thèse au § 6 en concluant.
L'idée est clairement exprimée dans P : « Ou bien (s'il n'en
est pas ainsi), s'ils font souffrir leurs adorateurs à cause des
chrétiens (comme vous le dites), ils sont très injustes en
vérité ... ».
Mais le texte de F a le même sens : « Mais, en vérité, ces
dieux (////, qui coluntiir) sont très injustes, eux qui (comme
vous le prétendez) font souffrir leurs adorateurs à cause des
chrétiens ... »
Nous avons vu que le remanieur de P paraît quelquefois
remplacer le relatif (qui) par une conjonction (si), qui précise
le sens. Voy. p, 366.
Sed est une formule de transition fréquente dans Tertullien,
qui sert à passer à une idée différente : Mais (laissons cela) ...
Voy. P, Henen, Index verbonwi, p. 139.
23
354 APPENDICE I
41,3. Aequalis est intérim super omne hominum genus,
et indulgens et incessens (iiicrepans P). F
« En attendant (le jugement dernier), Dieu se montre égal
pour tous les hommes, dans ses faveurs et dans ses rigueurs ».
Sur intérim « pour le moment, provisoirement », voy. ci-dessus,
p. 178. Super, avec l'ace, signifie « à l'égard de ». Luc, 5, 35 :
quia ipse benignm est super ingrates et malos. kwtz l'abl., il
veut dire « au sujet de » (21, 19). Aequalis est est construit
avec un participe présent ; c'est peut-être un hellénisme pour
aeque indulget et incessit « il se montre également indulgent
et rigoureux pour tout le genre humain ».
P semble avoir remplacé un mot choisi (incessens) par un
mot plus vulgaire. F donne d'ailleurs une clausule très fré-
quente (crétique et trochée) ; celle de P (trochée et crétiquc)
est rare, mais elle est régulière.
41,6. lam vero si ab his molitis omnia vobis maie <(e>ve-
niunt nostri causa F ; sin vero ab eis, quos colitis, omnia
vobis mala eveniunt nostri causa P
lam vero. Formule de transition, comme iam nunc (9,17 ;
39,1). Tert. vient de soutenir que c'est le Dieu des chrétiens
qui envoie les calamités comme un châtiment. Maintenant
il revient à la thèse païenne : les calamités sont envoyées par
les dieux, à cause des chrétiens.
Ab his molitis pourrait signifier ab his molientibus « grâce
aux efforts, aux agissements, aux manœuvres de vos dieux ».
Moliri s'emploie sans compl. direct. Cod. lust., 9, 18, 4 : moliri
contra salutem hominum. Cic, Ad fam., 6, 10 : agam per me
ipse et moliar. Ter., Heaut., 240 : nosti mores mulierum :
dum moliuntur, dum comuntur, annus est. Cf. Rauschen, p. 69.
Sur eveniunt, voy. ci -dessus, p. 36. Adv. Marc, 2,5, p. 340,
9 : nihil mali evenire homini.
Les mots cur colère eos perseveratis prouvent que Tert. a
écrit : ab eis, quos colitis. Il est probable dès lors, qu'il faut
lire aussi avec P ; sin vero et mala eveniunt. C'est F qui paraît
avoir été remanié en cet endroit.
CHAP. 41,3-6—42,1-3 355
42.1. Sed alio adhuc (quoque P) iniuriarum titulo postu-
lamur et infructuosi negotiis (in negotiis P) dicimur. F
« Mais on nous accuse de vous causer d'autres dommages
encore : on dit que nous sommes des gens improductifs pour
les affaires ». Voy, ci-dessus, p. 304, n. 3.
Adhuc veut dire « en outre, encore », insuper, praeterea,
comme au ch. 16,1. Voy. Har M, Patrist., Stud., 111, 24. Thés,
l. L, I, 662, 18 (depuis Sénèque). Sen., Epist., 5,42: praeter
haec adhuc inventes genus aliud. Tert., De spect., 19, p. 21,3 :
qui adhuc spécial . Ad nat., 1, 10, p. 79, 2. Scorp., 2,7, p. 158, 24.
De pud., 2, p. 222,29. De ieiun., 4, p. 278, 20. De an., 21,
p. 333, 24 ; 32, p. 354, 26.
Tertullien construit plus loin infructuosus avec le datif.
42,3 : infructuosi negotiis veslris. 43,2 : his infructuosos esse.
L'abl. avec in aurait un autre sens : on ne reprociie pas aux
chrétiens d'être « improductifs dans les affaires », c'est-à-dire,
de ne pas s'enrichir eux-mêmes, mais de ne rien produire pour
la richesse générale, de vivre aux dépens de la société, de
s'abstenir du commerce et de l'industrie, en un mot, de faire
tort aux affaires. Iniuriae — damnum.
C'est donc P qui est interpolé : quoque est le mot ordinaire ;
l'interpolateur l'a mis pour adhuc, qui est pris dans un sens
assez rare ; in negotiis vient d'un interpolateur qui n'a pas
compris le datif.
42.2. cohabitamus hoc saeculum F ; cohabitamus in hoc
saeculo. P
« Nous habitons ce monde avec vous ». Cohabitore apparaît
ici pour la première fois. Tert. le construit ici avec l'ace. ; de
même, habitare est parfois transitif. Cic, Verr., 4, 1 19 : colilur
ea pars (urbis) et habitatur frequenlissime. Comme l'un et
et l'autre sont ordinairement intransitifs, le remanieur de P
aura mis : in lioc saeculo. L'inverse est moins vraisemblable.
La clausule de F est fréquente (double crétique) ; celle
de P est défectueuse.
42.3. Navigamus et nos vobiscum et vobiscum {cm. P)
militamus et rusticamur et mercamur : proinde (et mer-
356 APPENDICE I
catus proinde P) miscemus artes, opéras nostras (opéra
nostra P) publicamus tisui vestro. *F
Mercamur est le texte de De la Barre et Modius ne donne au-
cune variante, bien qu'il donne le commencement de la phrase
jusque militamus. Remarquez qu'il ajoute : etc., marquant
expressément que la suite est conforme à De la Barre. A moins
que mercamur ne lui ait échappé, il faut admettre que c'est
la lecture de F. — Proinde signifie toujours « pareillement,
de même », dans l'Apologétique. Voy. 9,15 : proinde ... ut
et proinde quemadmodum. Il y a un chiasme dans ce qui suit.
Artes miscere « échanger les produits de ses arts, de son indus-
trie » va mieux que mercatus miscere, surtout qu'à l'époque
de Tert., mercatus signifie « lieu où l'on vend, foire, marché »,
et non « commerce, négoce ».
Au lieu de opéras nostras, P a : opéra nostra. — Operae
désigne le « travail » et les « produits du travail ». Voy. 14,4 :
structorias opéras. Adv. Marc, 2, 20, p, 363, 9 : ludaeorum
vero reposcentium opéras suas. Ibid., 1. 12 : operae. De an.,
58, p. 394, 17 : tum quia et carnis opperienda est restitutio ut
consortis operarum atque mercedum.
Le deuxième vobiscum a été probablement omis dans P.
42.3. Qiiomodo infructuosi videamur (videmtir P) negotiis
vestris, cum quibus et de quibus vivimus, nescio (non
scio P). F
Modius a noté nescio, au lieu de non scio. A la fin de la
phrase précédente, il a noté opéras nostras publicamus, au
lieu de opéra nostra publicamus. Entre les deux, l'édition
De la Barre a videamur {videnmr P) et Modius n'a noté aucune
variante de F ; il faut en conclure que F avait videamur ou
que l'attention de Modius s'est trouvée en défaut. — Sur
l'indicatif dans l'interrog. indirecte, voy. 30,6 : examinantur.
Cf. 43, 1. Hoppe, Syntax, p. 72.
42.4. Non lavo sub noctem (non lavor diliculo P) Satur-
nalibus, ne et noctem et diem perdam ; sed lavo et débita
(attamen lavor honesta P) hora et salubri, quae mihi et
CHAP. 42,3-4 357
colorem et sanguinem servet : frigere (rigerc P) et pallere
post lavacrum mortuus possum ! F
Sur la forme lavo — lavor, voy. Neue-Wagner, Formenlehre,
33, p. 125-126. De an., 50, p. 381, 22 : (balneum), quo paucis-
simi lavant. P a remplacé lavo par la forme plus ordinaire
lavor.
Sub nociem peut signifier : u aussitôt avant » ou « aussitôt
après la nuit » et peut donc être synonyme de diliculo, vers
l'aube. Suet., Aug., 16 : sub liorain pugnae, après le combat.
Voy. Kuhner, Aiisf. Gramin., II, p. 415 -= 2^ éd., II, 1, p. 571.
Le remanieur de P a perdu de vue cet emploi de sub et a rem-
placé sub nocteni par diliculo.
En temps ordinaire, le bain se prenait avant le dîner (cena)
vers la huitième heure. Aux Saturnales, on se baignait dès
l'aube, parce qu'on n'aurait pas eu le temps de le faire pendant
le jour. Marquardt, Le Culte, 2, p. 383. Vie privée, 1, p. 348.
Sénèque (Ep., 122,9) parle de ceux qui font tout contraire-
ment à l'ordre de la nature. Ils dînent dès l'aube : lain lux
propius accedit, tenipus est cenae. Aussi, ces hommes qui font
de la nuit le jour (lucifugae), comme Sp. Papinius, prennent-
ils leur bain au lever du jour. Ibid., 16 : Circa lucem discur-
ritur ... Quaero quid sit : dicitur mulsum et olicam poposcisse,
a balneo exisse. Extendebat, inquit, coena eius diem minime ...
Pendant les Saturnales, on perdait naturellement la nuit ;
en commençant dès l'aube, dit Tert., on perd aussi le jour
{et ... et = non solum ... sed etiam).
Et débita hora et salubri, à l'heure qui est fixée par l'usage
et qui est aussi la plus favorable à la santé. P a remplacé sed
par attamen ; en supprimant le premier et, il a détruit le rap-
port entre les deux adjectifs ; enfin, il a remplacé débita par
honesta. Il a aussi changé frigere en rigere ; en effet, frigere
« être glacé » correspond mieux à calorem, comme pallere
correspond à sanguinem. On a perdu de vue que sanguis
désigne la couleur du visage (rubor). Sen., Epist., 106,5 : vide
an {adfectus) ruborem evocent, an fugent sanguinem. Plin.,
Epist., 1, 14, 8 : est illi faciès liberalis, multo sanguine, multo
ru bore.
358 APPENDICE I
42,6. nos coronam naribus novimus : viderint qui per
capilltim odorantur ! P.
« C'est avec )e nez que nous respirons le parfum de la cou-
ronne ; quant à ceux qui sentent par la chevelure, c'est leur
affaire ! ».
Ici F a : nos enim non novimus, au lieu de : nos coronam
naribus novinms.
Tert. répète cette plaisanterie, De corona, 5 : Tam contra
naturam est ftorem capite sectari, quam cibum aure, quam
sonum nare. Elle n'était pas nouvelle, comme on pourrait
le croire. Lucien, Nigrinus, 32 (74), dit que Nigrinus blâmait
ceux qui portent une couronne, de ne pas savoir la place qui
convient à une couronne : £•' yàp -zo'., l'fi\, t-^ ttvo-^ tiÔv '!wv
TE xal pôowv yaipouo-'.v, 6tco xr\ pwl ij.àÀ'.TTa iy^~r\V a.ù'ïobc,
arTécpefrOat, Trap' y.ùxiy wç owv te tyjv àvaTcvo'rjV, Cv' wç TcXe^aTOv
Minucius Félix, 38, 2-3 : auram bonam floris auribus ducere,
non occipitio capillisve solemus haurire.
La lecture de F n'a pas de sens ; elle peut résulter d'une
série d'erreurs. Si l'on suppose que naribus était tombé, le
copiste a pu prendre coronam pour enim non, grâce aux signes
abréviatifs.
43,1. Plane confitebor, quoniam (quinam P), si forte,
vere de sterilitate Christianorum conqueri possunt (pos-
sint P). F
Quoniam est une erreur de transcription, pour quinam. Il
est vrai qu'après un verbe déclaratif, Tert. met parfois quo-
niam avec l'indicatif ou avec le subj., au lieu de l'ace, avec
l'infinitif. Hoppe, Syntax, p. 76, cite cinq exemples. Mais
ici le sens exige l'interrogatif indirect quinam.
L'indicatif possunt dans l'interrogation indirecte peut se
défendre. Voy. 42,3. Cf. Ulpian., Edict., 26, 10, 1,5 : Osten-
dimus, qui possunt de suspecto cognoscere : nunc videamus,
etc. Kalb, Roms Juristen, p. 75.
CHAP. 42,6—43,1-2 359
43,2. Quanti habetis, non dico iam qui pro vobis quoque
vero Deo preces fundant, sed a quibus nihil timere pos-
sitis F
Au lieu de fundant, P a fundant, quia forte non crediiis.
La tournure non dico iam ... sed ne sert pas à exclure le pre-
mier membre. Non dico iam introduit, sous forme de prété-
rition, le premier membre d'une gradation et la tournure non
dico iam ..., sed marque que, pour le moment, l'auteur attache
moins d'importance au premier membre qu'au second. Voy.
4,1 : non dico pessimi optimos, sed et iam, ut volunt, compares
suos. 40,5 : non dicam ,,., sed.
Sous forme de prétérition, Tertullien rappelle les exor-
cismes (37,9) et les prières des chrétiens pour l'empereur et
pour l'empire (ch. 30-32), mais il veut surtout faire état ici
de leur esprit pacifique (ch. 37,3-8). Les chrétiens, dit-il, sont
accusés d'être « improductifs » pour la société. Si cela était
vrai, ils compenseraient le dommage par la protection qu'ils
procurent à l'Empire : « Ne parlons plus, dit-il, des démons
que nous chassons, ni des prières que nous adressons à Dieu
pour vous (P ajoute : parce que vous n'y croyez peut-être
pas) ; j'en ai assez parlé plus haut ; mais disons que vous n'avez
rien à craindre de nous ». C'est la transition aux ch, 44-45,
où Tert. montre que les chrétiens sont incapables de faire
du mal à personne {innocentes) et pourquoi il en est ainsi.
Si Tert. met en relief le second membre par la formule non
dico iam ... sed, c'est donc qu'il se propose de développer ici
le second membre, comme il a développé le premier plus haut.
Ce n'est pas parce que les païens « ne croient peut-être pas »
au premier des deux services rendus par les chrétiens.
Un lecteur qui se demandait pourquoi Tert. a dit non dicam
iam ..., pourquoi il ne parle pas ici des démons chassés et des
prières chrétiennes, s'est souvenu que les païens traitent
d'hypocrisie les prières pour l'empereur (ch. 31,1) et il a mis
en marge : quia forte non creditis. Cette note s'est glissée
ensuite dans le texte. Mais Tertullien n'est pas homme à
affaiblir, par une parenthèse de ce genre, l'effet d'une démons-
tration antérieure.
360 APPENDICE I
Faisons remarquer que, dans la fameuse phrase de Bossuet :
« Versez des larmes avec des prières », où l'on voit toujours
un zeugma, il y a un latinisme : Bossuet a transporté en fran-
çais l'expression latine preces fundere.
44,2. Quis illic sicarius, quis manticularius, quis sacri-
Icgus aut corruptor aut lavantiuni pracdo idem (quis
idem P) etiam Christianus adscribitur ? F
Sur le deuxième quis ajouté dans P, voy. p. 79. — Ici,
comme au cli. 15,7, sacrilegus désigne un « voleur de choses
sacrées dans un temple public ». De même, sacrilegium désigne
le vol commis dans un temple public. C'est la définition que
donne Paul, Dig., 13, 11, 1 (ci-dessus, au ch. 13,6). Voy.
Mommsen, Droit pénal, il, p. 272 et 279. Ges. Schriften, III,
p. 394, 4 ; 407, 3. Le droit pénal ne donne jamais un autre
sens à ces deux mots ; il ne connaît pas le crime d' « impiété »
ou de « lèse-religion » et il n'emploie pas le mot sacrilegium
dans ce sens. Mais la langue courante désignait par le mot
sacrilegium, l'impiété ou le mépris des dieux. C'est dans ce
sens que la populace qualifiait les chrétiens de « sacrilèges »
et criait : Toile sacrilegos ! Alpe toùç àOsouç, Chose curieuse !
Tertullien, qui emploie souvent sacrilegium et sacrilegus dans
ce sens général, quand il réfute l'accusation populaire, pro-
teste une fois contre l'emploi abusif, non juridique, de ce
terme. « Vous nous appelez sacrilèges », dit-il (c'est-à-dire
«voleurs d'objets sacrés»), et pourtant, loin de nous prendre
en flagrant délit de vol d'objets sacrés, jamais vous ne nous
avez pris en flagrant délit de vol ordinaire ! » Ad Scap., 2 :
Tamen nos, quos sacrilegos existimatis, nec in furto umquam
deprehendistis, nedum in sacrikgio. Voy. la note sur 28,3,
ci-dessus, p. 296.
Ici, Tertullien emploie sacrilegus dans son sens juridique
de « voleur d'objets sacrés » ; en effet, il énumère les délits
les plus communs, les plus vulgaires contre les personnes et les
propriétés, délits dont on ne pouvait pas accuser les chrétiens.
44,2. Proinde, cum Christian! suc titulo obferuntur, quis
ex illis talis, qualis etiam notatur noinine ?
CHAP. 44,2-3 361
Tertullien vient de dire aux juges : Les malfaiteurs que
vous condamnez tous les jours, ne sont jamais accusés en
même temps (idem) d'être chrétiens. Il ajoute : De même, les
chrétiens qui vous sont déférés comme chrétiens (suo titulo),
ne sont jamais trouvés coupables des crimes de droit commun
qu'on leur reproche sous ce nom. — Les crimes de droit com-
mun qu'implique le nom de chrétien, aux yeux des païens,
sont l'infanticide, le repas de sang et l'inceste.
Sur proinde, voy, 49,3, note, — Suo titulo. Chaque délit
ou crime est déféré au juge sous son «titre » , titulus, nomen.
De idol., 1, p. 30,5 : etsi suo quodque {delidum) nomine iudicio
destinatur. Le titre du crime des chrétiens est Cliristianus.
Voy, 2, 20 : quid de tabelta recitatis illum « Chnstiamim « ?
Ibid. : ipsis nominibus scelerum. Ad Scap.., 4 : Quis denique
de nobis alio nomine queritur ?
Le titre du crime est toujours repris dans le libellé des
jugements. Ad nat., 1, 3, p. 62, 8: Porro sententioe vestrae nihil
nisi Christianum confessum notant. 1, 2, p. 61, 7: Porro de
nobis, quos atrocioribus ac pluribus criminibus deputatis,
breviora ac leviora elogia conficitis. Voy. ch. 2, 16 et 20.
Qualis etiam notatur nomine. Le nom de chrétien, qui est
celui du crime, implique encore, pour les païens, toutes sortes
de crimes de droit commun, l'homicide, l'inceste, etc. Pline
écrit àTrajan, 96: Nec mediocriter haesitavi... nomen tpsum,
si flagitiis careot, an flagitia coliaerentia nomini punianiur.
Donc, la sentence du juge, en «notant» le crime de la con-
fessio nominis, note en outre (etiam), mais tacitement, les
crimes que le nom implique. Sur le sens de notare, voy. Ad
nat., 1,3, p. 62,8 (ci-dessus).
P a : quis ex illis etiam talis (est) qualis lot nocentes (sunt) ?
Cela paraît plus compréhensible à première vue pour les
lecteurs : c'est une raison de soupçonner un remaniement,
fait pour eux, mais ce remaniement défigure l'idée de Ter-
tullien.
44,3. Nemo illic Christianus, nisi hoc tantum (nisi plane
tantum Christianus P) ; aut, si et aliud, iam non Chris-
tianus. F
362 APPENDICE 1
Dans vos prisons, dit Tertullien, on ne trouve aucun chré-
tien, à moins qu'il ne soit que chrétien, c'est-à-dire, à moins
qu'il n'y soit enfermé pour ce seul motif qu'il est chrétien ;
ou bien, s'il est encore autre chose, s'il a commis un autre
crime, il n'est plus chrétien, il est excommunié, retranché
de notre communauté.
La lecture de P ressemble à une explication de hoc, qui
aura paru obscur à l'interpolateur, et la répétition de Chris-
tianus alourdit le style. Tertullien reprend souvent, au moyen
de Iwc, un mot qui vient d'être exprimé (ici Cliristiaims). Voy.
9,5 : Hoc opinor, minus {est). 12,5 : hoc et illi (faciunt). ici,
il dit de même : si et oliiid (est).
45,1. et fideliter custodimus, ut ab in<con>temptibili
deo doctore praeceptam F ; et fideliter custodimus, ut
ab incontemptibili dispectore mandatam. P
L'innocence, dit Tert., nous l'avons apprise de Dieu même :
d'une part, nous la connaissons parfaitement, révélée qu'elle
est par un Maître parfait, et, d'autre part, nous la gardons
fidèlement, ordonnée qu'elle est par un juge que nul ne peut
braver. Cf. De spect., 21, p. 21, 27 : Ethnici, quos pênes nulla
est veritatis plenitudo, quia nec doctor veritatis Deus. — F a été
maltraité, comme le prouvent déjà intenitibili et l'insertion
de la glose Deo. Voy. ci-dessus, p. 67. Mais il paraît avoir
subi des remaniements intentionnels ; en effet, doctor ne
s'oppose pas bien à magister, dont il est synonyme. Dispector,
mot plus rare, convient mieux pour désigner Dieu comme
Juge. De an. 51, p. 320, M : si enim scrutatorem et dispecto-
rem cordis Deum leginms. De test, an., 2, p. 136, 23 : sunt
qui, etsi Deum non negent, dispectorem plane et arbitrum et
iudicem non putent. Ad uxor., 2,8 : quasi rêvera dispectores
divinarum sententiarum. De même, mandatam exprime mieux
que praeceptam que la doctrine est imposée. Voy. au § 2 :
impcravit. Enfin, au § 2, dans P, humana aestinmtio (= opinio,
iudicium) est un terme plus rare et plus choisi que humana
doctrina (F).
45,6. Recogitate etiam pro brevitate supplicii cuiuslibet,
non tantum ultra mortem remansuri. F
CHAP. 45,1-6—46,1 363
Dans P, recogitate est suivi de ea. Quand recogitare est
accompagné d'un complément, celui-ci se met à l'abl. avec
de ; mais, si c'est un pronom neutre, il peut se mettre à l'ace.
Cf. De idol.. 11, p. 41, 9 : si cetera delictorum recogitatis. Il en
résulte que ea est grammaticalement correct. Mais Tertul-
lien n'invite pas à réfléchir « aux choses » qui précèdent ; il
passe à un nouveau motif du manque d'autorité des lois
humaines : la brièveté du châtiment qu'elles peuvent in-
fliger.
Le scribe ou le remanieur de P aura cru que recogitate avait
besoin d'un complément ; mais ce verbe est souvent employé
absolument, dans le sens de considerate, deliberate, cogitate
vobiscum. 48,5 : Recogita, quid fueris, antequam esses.
46,1. ostendimiis totum statum nostrum, et quibus (qui-
bus modis P) probare possimus F
De spect., 24, p. 24, 9 : Quoi adimc modis probabimus niliil
ex fiis qiiae spectaculis deputantiir piacitum Dec esse ... ! Adv.
Marc, 1, 9, p. 301, 19 : non eis modis ... tibi examinandum,
quibus ... didicisti. — Tert. emploie aussi le pronom neutre
seul, aux cas indirects.
46,1. Exsistat qui nos revincere audebit: non arte ver-
borum, sed eadem forma qua probationem constitui-
mus, de veritate, debebit reniti. F
Qui nos revincere audebit, non arte verborum, sed
eadem forma qua probationem constituimus ? P
Sur forma = modus, voy. p. 177. — Au commencement,
P a qui, qui peut être mis pour quis. Hoppe, Syntax, p.\05, 1.
— A la fin, F a renidi, pour reniti.
Tert. résume d'abord son argumentation : « Nous avons
tenu tête, pensons-nous, à toutes les accusations formulées
par ceux qui réclament le sang des chrétiens », etc. Puis, il
lance ce défi : « Qu'il se lève celui qui osera nous réfuter 1 Ce
n'est pas par les artifices du langage ... qu'il devra nous com-
battre 1 » Dans les prop. relatives qui marquent la consé-
quence {qui audebit), il met souvent l'indicatif. De spect..
364 APPENDICE I
1, p. 1, 18 : sLint qui existimant. De pud., 9,1 : stint aiitem ...
quae posita siint. Hoppe, Syntax, p. 74. Tert. aime aussi à
donner à sa pensée la forme d'un défi. Voy. 23, 4-5. 50, 12.
Le remanieur de P semble avoir simplifié la phrase.
46,2-18, Sed dum tameii unicuique, etc.
Division du chapitre.
Objection : le christianisme n'est qu'une sorte de philo-
sophie (§ 2).
RÉFUTATION : 1° S'i[ en est ainsi, quelle inconséquence
de nous traiter autrement que les philosophes ! (§ 3-4). Mais
cette inconséquence ne s'explique que trop bien par l'atti-
tude des philosophes envers les démons et envers la vérité
(§ 5-7).
2o Mais il n'en est pas ainsi : pour la science, comme pour
la morale, les chrétiens diffèrent des philosophes : a) pour
la science (§ 8-9) ; b) pour la morale (§ 10-16).
Objection à ce dernier point : certains chrétiens s'écartent
des règles de la discipline. Réponse ; nous les excluons de
nos rangs, tandis que les philosophes qui vivent dans l'immo-
ralité, n'en sont pas moins honorés comme philosophes (§ 17).
Conclusion. Parallèle entre le philosophe et le chrétien
(§ 18).
11 en résulte qu'il faut des alinéas aux §§ 3, Set 18, et
pas d'alinéa au § 7.
46,3. Cur ergo qtiibus comparamur de disciplina, non
proinde adaequamur diligentia (/. de licentia) et immu-
nitate disciplinae ? F
Sur de licentia, voy. ci-dessus, p. 111. — P a ajouté l'anté-
cédent illis devant adaequamur. Voy. ci-dessus, ad 19,6. —
A la fin, il a : orf licentiam impunitatemque disciplinae. — Com-
porare (= parem jacere) est ici synonyme de adaequare. Voy.
plus loin, ut pares nostri. Tert. joint souvent de à l'abl. déter-
minatif ; il emploie souvent aussi ad dans le sens de « concer-
nant, quant à». Voy. 1,1 : ad liane solam speciem. 4,3: ad omnia.
25,1 : ad liane causam. 45, 2 : ad innocentiae veritatem. 46,10 :
CHAP. 46,2-5 365
ad sexiim. 48,3 : ad liane partein. Henen, Index verborum, p. 8.
Ici, la répétition de de rend plus sensible l'antithèse de disei-
plina et de licentia et ininiiinitate disciplinae. — Aux philo-
sophes, il est permis d'attaquer librement les dieux et les
superstitions {licentia) et ils sont à l'abri de toute persécution
(inimunitas). Ovid., Met., 8, 691 : immunes niali. ibid., 9,
253 : immunes necis. Virg., Aen., 12, 559 : urbem immiinem
tanti belli atque impune quietem. — Ici, immunitas et impa-
nitas conviennent également. Cicéron (Pro Mil., 31, 84 ; Brut.,
91, 316) et Tacite (Ann., 3, 60) joignent aussi licentia et impu-
nitas. Si l'on admet que P a ajouté illis et remplacé de par
ad, il sera vraisemblable qu'il a aussi remplacé immunitas
par impunitas.
46,5. Nomen hoc philosophorum daemonia non fugiunt
(fugant P). Quidni ? ciim secundum deos philosophi
daemonia députent ? Socratis vox est : « Si daemonium
permittat ». Idem et qui (et ciim P) aliquid de veritate
sapiebat deos negans, Aesculapio tamen gallinaceum
prosecarl iam in fine mandabat (iubebat P). F
Fugant (P), au lieu de fugiunt (F), est contraire au sens de
ce passage. On traite les philosophes avec faveur et l'on per-
sécute les chrétiens. Pourquoi cette différence ? C'est que
les démons, qui craignent les chrétiens et les haïssent, excitent
secrètement les païens contre eux (2,14 et 27,4-5). Au con-
traire, les démons n'ont pas peur des philosophes, ils ne les
fuient pas {non fugiunt) et ils ne songent pas à exciter quel-
qu'un contre eux, à leur faire la guerre secrètement. Cela n'est
pas étonnant, continue Tert., car les démons sont traités avec
honneur par les philosophes qui les rangent immédiatement
après les dieux. S'il avait dit : les philosophes ne mettent pas
les démons en fuite, c'est-à-dire, les philosophes n'ont pas,
comme les chrétiens, le pouvoir de chasser les démons, il
aurait continué en montrant pourquoi ils n'ont pas ce pou-
voir. Voy. Rauschen, p. 71.
Sur Si daemonium permittat, voy. ci-dessus, p. 255, ad 22,1.
Et qui ... sapiebat. Cette prop. relative marque ici une idée
366 APPENDICE I
adversative : « bien qu'il eût compris une partie de la vérité »,
L'interpolateur de P semble remplacer souvent le relatif par
une conjonction qui lui paraît nécessaire pour préciser le sens.
21,3 : ut qiios ... iiivat F ; cum ... iiivoi P, 28,3 : (jiil (ciim P)
plus timoris humano domino dicatis F. 37,10 : qui sumus F ;
quia sumus P. 41,1 : qui ... laedunt ; si loedunt P. 11 est vrai
qu'on trouve aussi l'inverse, 4,13 : si F ; qui P. 11,10 : quod
F ; qui P. 24,9 : quia F ; qui P.
Quant à iubebai, il est dans le passage correspondant de
Ad nat,, 2, 2, p. 96, 18 : gallinacewn prosecari quasi certus
iubebat. Mais il arrive souvent à Tert, de changer un mot
dans sa seconde rédaction, beaucoup plus soignée au point
de vue littéraire et rythmique.
In fine iubebat aurait donné une fin d'hexamètre, proscrite
en prose. In fine mandabat donne un crétique et un trochée,
clausule familière à Tertullien. Ayant écrit in fine, il a été
forcé de changer iubebat en mandabat, qui est ordinairement
suivi du ut, mais que l'on trouve, ailleurs encore, construit
avec l'infinitif seul ou avec l'ace, et l'inf. Martial, 1, 88, 10 :
Non aliter cineres mando iacere meos. Tacite, Ann., 15, 2, 16.
P a remplacé le mot choisi, construit poétiquement, par le
mot ordinaire, Hartel a cru que F avait été revisé d'après
V Ad nationes ; ici, on pourrait présumer que c'est P qui a été
revisé d'après ce traité,
46,10. Christianus ad sexum nec foeminae mutât F ;
sexum nec femiueum mutât Christianus P.
Rauschen corrige foeminae en femina, ce qui suffit pour
donner un sens convenable. A Socrate, corrupteur des jeunes
gens (1), Tert. oppose le chrétien qui ne change pas même
de femme (ne femina quidem), c'est-à-dire, qui observe la
fidélité dans le mariage. Cf. Paul., Ad Rom., 1,27. Mutât,
a ici le sens intransitif, mutatur ou se mutât, ce qui est très
(') De anima, i, p. 300, 6 : nec adnilescontiam vitians (comme
Socrate).
CHAP. 46,10-12 367
fréquent clans Tert, Hoppc, Syntax, p. 63. Hartcl, Pair.
Stiid., 111, 17. Dans ce sens, mutare se construit avec l'abl.
comme miitari ou se mutare. Cic, Pro Baibo, 13 : ne qiiis
invitiis civitate miitetiir. Hor., Sat., 2, 7, 64 : illa iamen se non
habiiii mutatve loco. Ars poet., 60 : ut silvae joliis ... nmtantur.
Tert., De paen., 6,7 : quis enim servus, postea quam liberfate
mutât us est ...
Ad sexuni a en ce qui concerne le sexe ». Tert. emploie
souvent sexus pour désigner ce qu'il appelle officia sexus (Ad
uxor., 2, 3). De resurr., 61, p. 122, 20 : pigrior sexus. Adv.
Val., 32, p. 209, 2 : despolior sexui meo (post morteni). De exh.
cast., 1 : cum post matrimonium unum interceptum exinde
sexui renuntiatur. Ad uxor., 1,6 : ut cuius maritus de rébus
abiit, exinde requiem sexui suo nubendi abstinentia iniungat.
Dans P, sexuni femineum équivaut à jeminam et le sens
est le même ; mais un correcteur semble avoir voulu donner
à l'idée une forme plus simple et plus claire.
46,12. Si de probitate defendam FP
Tert. cite un trait d'insolence de Diogène le cynique à
l'égard de Platon et il lui oppose le chrétien qui n'est jamais
orgueilleux, même envers le pauvre. Improbitas a souvent
le sens d' « insolence, impudence, effronterie ». Ce sens d'/m-
probus, improbe, improbitas est classique. Voy. 4,13. De
même probus et probitas ont pris le sens de « douceur, mo-
destie, humilité ». Paul., Ad Phil., 4,5 : Tô ê7t!.e'//.e; ûj^lwv
yvwa-Qr'iTw Tcàa-'.v àvSpcô-KO'.ç. Vulgate : Modestia vestra nota
sit omnibus Iwminibus. Tert., De cultu fem., 2, 13 : Probum
vestrum coram Iwminibus adpareat. Dans De anima, 32, p.
355, 3, Tert. repousse l'idée qu'après la mort, l'âme humaine
passe dans des bêtes et que, par exemple, les voleurs devien-
nent des vautours, les impudiques des chiens, les violents
des panthères, les doux des brebis, non fient ... pantherae ex
acerbis aut oves ex probis. De même, Tertullien emploie ici
le mot probitas pour désigner la douceur ou l'humilité, vertu
chrétienne, opposée à l'orgueil, que le latin chrétien appela
Inimilitas.
368 APPENDICE I
46.12. Christianus contumeliosus nec in pauperem su-
perbit, F
Contumeliosus manque dans P, Avec superbit, cet adjectif
remplace un adverbe « insolemment ». En effet, contume-
liosus veut dire « qui outrage, qui injurie, insolent ». Ad nat.,
1,10, p. 75, 25, et p. 76, 18 et 20. De pat., 3, p. 3, 12 : contu-
meliosus insuper sibi est. Ibid., p, 4, 4 : tam contumelioso
oppido.
46.13. Ecce Pythagoras apud Thurios, Zenon apud Prie-
nenses tyrannidem adfectant ; Christianus vero nec
aedilitatem. *FP
La lecture Priennenses (*FP) est une graphie fautive pour
Prienenses. — Aucun auteur ne rapporte qu'un des trois
philosophes appelés Zenon brigua la tyrannie à Priène ; mais
Zenon d'Elée essaya de délivrer sa patrie du joug d'un tyran.
Voy. Cic, Tusc, 2, 22, 52. Val. Max., 3,3, ext. 2. Les lectures
de Tertullien étaient immenses, mais il écrit presque toujours
de mémoire et il s'appelle lui-même (De idol., 4, p. 34,8) :
modicae memoriae homo : aussi commet- il des erreurs. Au
ch. 4, 6, il dit que Lycurgue se laissa mourir de faim, parce
que ses concitoyens avaient changé ses lois ; il se souvient
mal de la légende rapportée par Plutarque, Lycurg., 46,
Au ch. 1 1,8, il corrige une erreur qu'il avait commise dans Ad
nat. 2, 16, p. 129, 9, où il avait mis Pompée pour LucuUus,
Au ch. 16,2, il cite le 4^ livre des Histoires de Tacite, au lieu
du 5e ; il avait commis la même faute dans Ad nat., 1,11,
p. 80, 26. Elle a été conservée dans F, mais corrigée dans P.
Au ch. 40,3, les renseignements sur les îles englouties dans
la mer sont tirés de Pline (Hist. nat., 2,87), qui dit, au con-
traire, que ces îles sortirent de la mer à la suite d'un trem-
blement de terre: Tert. a mal retenu ce qu'il a lu. Au ch. 40,4,
il fait dire à Platon que l'Atlantide fut arrachée au continent,
ce que Platon (Timée, 24 e) ne dit pas ; Tert. n'a pas lu
Paton et il a mal compris Pline (Hist. nat., 2,90). Au même
ch. 40,8, il a corrigé ce qu'il avait dit de Vulsinii et de Pom-
pci. Au chap. 46,8, il attribue à Thaïes et à Crésus une anec-
CHAP. 46,12-18 369
dote que Cicéron (De iiat. deor., 1,22,60) et Minucius Félix
(13,4) attribuent à Hiéron et à Simonide, Au cli. 46,12, il con-
fond Thurii avec Crotone, patrie adoptive de Pythagore. Au
ch. 46,16, il confond le philosophe Hippias avec le fils de
Pisistrate. Voy. encore p. 201, ad 14,2.
C'est aussi par erreur sans aucun doute qu'il nomme ici
un Zenon. Il ne distingue d'ailleurs pas entre les philosophes
de ce nom. On a pu voir qu'il cite également Caton et Scipion
sans distinguer entre ceux qui portèrent ces noms. Voy. 11,16
et 39,12.
46,18. Adeo quid simile philosophus et Christianus,
Graeciae discipulus et caeli, famae negotiator et [salutis]
vitae, verborum et factorum operator, et rerum aedifi-
cator et destructor, et interpolator [erroris] et integrator
veritatis, furator élus et custos F.
Sur la glose salutis, voy. ci-dessus, p. 67.
L'expression interpolator erroris ne peut être de TertuUien,
parce qu'elle n'est pas latine. Interpolator veut dire corruptor,
celui qui gâte, qui altère, qui falsifie, et Tert. dit ailleurs: inter-
polator veritatis (De praescr., 7,8), segetis (De an., 16), natiirae
(De cultu fem., 2,8), totius saeculi (De test, an., 3). Il dit :
inter polar e evangelium (Adv. Marc, 4,1), occasionem gravi-
totis (De cultu fem., 2,6). Min. Félix, 34,5 : interpolatae veri-
tatis. Le génitif, complément d' interpolator, désigne toujours
la chose gâtée, altérée, falsifiée : ici, c'est veritatis. TertuUien
dit : artifex erroris (De test, an., 3).
Erroris a été ajouté maladroitement pour faire antithèse
à veritatis ; mais 1 interpolateur n'a pas vu avec quel art la
phrase est construite.
Dans les trois premiers membres, l'antithèse est dans les
génitifs :
Graeciae discipulus et caeli, crétique et trocliée
famae negotiator et vitae, id.
verborum et factorum operator, dactyle et trocliée
24
370 APPENDICE I
Dans les trois derniers, l'antithèse est dans les sbtistantifs
en ior :
et rerum aedificator et destructor ditrochée
et interpolator et inlegrator veritatis, id.
furator eiiis et custos. crétique et trochée
A la fin, P a : distnictor, amiais et inimiciis erroris, veri-
tafis interpolator et integrator et exprcssor, et furator eiiis ci
custos.
Les mots amicus et inimicus erroris frappent par leur
banalité au milieu de ces épithètes recherchées : c'est pro-
bablement une addition d'un interpolateur ou une glose. Et
exprcssor détruit la symétrie (ailleurs il n'y a que deux termes)
et ne donne pas une clausule régulière : c'est peut-être une
glose 6'intcgrator, mot propre à Tertullien. Nous pensons
donc que c'est P qui est interpolé.
47,2. Quis poetaruni, quis sophistarum, qui non de pro-
phetarum fonte potaverit ? hide igitur et philosophi
sitim ingenii sui rigaverunt. F
Dans P, on lit: qui non omnino, au lieu de qui non, et phi-
losoplii, au lieu de et philosophi. — L'idée est exprimée par
S. Justin, Apol. I, 60, 10. Elle a été développée par Tert., De
anima, 2. Les §§ 2-3 sont empruntés à Tatien, Orat. ad Graec,
40, qui se sert aussi de la métaphore de fonte ... potaverit.
Tatien parle de Moïse : Kal ypr^ toj Tipea-jBeûovTi. xaxà r>|V
TiAixîav 7c^a■TeÛ£'.v, Y,7r8p ToiTç c/.Txô TC'/^y^iÇ àpuo-ajjisvo'-ç "EXlrio-Lv.
Tatien appelle, lui aussi, les philosophes grecs, ol xar' aÛToùç
(TO(Ç!.a-ra'! et Tert. l'imite, car ce sont bien les philosophes (Pla-
ton, etc.) et non la sophistique ancienne (Protagoras, Gorgias,
Prodicus, etc.) qu'il a en vue. — Il emploie le terme de
sophistes, quand il parle des philosophes avec mépris. De
idol., 9, p. 39, 13.
On ne peut pas objecter que et philosophi est opposé à sophis-
tarum ; en effet, inde et philosophi ne veut pas dire « les philo-
sophes aussi )), mais inde et correspond à inde et qui suit (et ...
et = non modo, sed etiam, p.év, li).
CHAP. 47,2 371
La métaphore rigaverunt s'explique parce que sitim ingenii
sui équivaut à ingeniiim simm sitienlem (l'abstrait pour le
concret). En français, si l'on conserve sitiin, il faut traduire :
« ils ont étanché la soif de leur génie ». Cf. De paen., 6,1 : qui
mm maxime incipiunt divinis sermonibus aures rigare. Cornif.
Ad Herenn., 4,6 : ei omnium rigare debeant ingénia.
Al, 2. Num, quia quaedam de nostris habent, eapropter
nos comparent illis ? F ; ut, quae de nostris habent, ea
nos comparent illis P.
Dans les chap. 46 et 47, Tert. trace un parallèle entre les
chrétiens et les philosophes pour réfuter ceux qui disent :
la religion chrétienne est excellente, mais elle n'est pas divine ;
elle n'est qu'une sorte de philosophie comme les autres. Tert.
a montré que, ni pour la doctrine, ni pour la morale, les chré-
tiens ne peuvent être mis sur le même rang que les philosophes.
Il continue : Les philosophes ont puisé dans nos Livres saints,
qui sont plus anciens qu'eux. C'est là que les philosophes ont
étanché la soif de leur génie : s'ils ont quelques vérités {quae-
dam = nonnulla; cf. Ad nat., 2, 2, p. 95, 22: et inde nonnulla
dempsisse), empruntées aux nôtres, serait-ce une raison pour
nous mettre de pair avec eux ? Littlt : Est-ce que, pour cette
raison, on nous mettrait de pair avec eux ? Le sujet de com-
parent est homines ou nationes. Cf. Ovide, Met., 13, 338 : Et
se milii comparct Aiax ? Comparare = parem facere, adae-
quare. Cf. 46,3.
Dans P, le sujet de comparent est ea : « de sorte que les
choses qu'ils ont empruntées aux nôtres, les mettent de pair
avec nous » Q.
47,2. hide, opinor, et a quibusdam philosophia legibus
quoque eiecta est F
Legibus manque dans P.
(') Rausclien, p. 83, et Lôfstedt, p. 71, rejettent la lecture de F
comme interpolée et adoptent celle de P.
372 APPENDICE I
Dans F, quoque marque une gradation comme etiam : cer-
tains Etats sont allés jusqu'à porter des lois d'exil contre les
philosophes, parce que ceux-ci ont des parcelles de vérité
qu'ils nous ont empruntées ; car la vérité est toujours persé-
cutée.
Legibus quoque se comprend donc, mais philosophia quoque
satisfait beaucoup mieux le sens. Tert. soutient que les phi-
losophes ont emprunté certaines vérités aux chrétiens : c'est
pourquoi eux aussi ont été proscrits, comme les chrétiens.
Pour obtenir ce sens, il suffit d'intervertir l'ordre des mots
et de lire : philosophia quoque legibus eiecta est.
47,3. si qiiid in sanctis offenderunt digestis pro instituto
curiositatis, ad propria opéra verterunt F ; si quid in
sanctis scripturis offenderunt digestis ex pro instituto
curiositatis, ad propria opéra verterunt P
Sur les additions scripturis et ex dans P, voy. ci-dessus,
p. 79-80. — On ponctue généralement mal cette phrase. En
effet, les mots pro instituto curiositatis se rapportent à si quid
in sanctis offenderunt digestis : c'est « à cause de leur habi-
tude de curiosité », de vouloir tout savoir, que les philosophes
ont lu les Ecritures et y ont fait des découvertes. Dans le
passage imité par Tert., Tatien (Ad Graec, 40) dit : ^zollri...
x£'/pr,|^£vo'. rcep'-spyia. . . s'yvcoo-av. Ad nat., 2, 2, p. 95, 23 :
licet enim per curiositatem omnimodae litteraturae inspiciendae
divinis quoque scripturis, ut antiquioribus, possint videri incur-
sasse et inde nonnulla dempsisse ... De anima, 2, p. 301, 18 :
si etiam ad ipsos prophetas adisse credibile est indagatorem
quemque sapientiae ex negotio curiositatis. Ici ex negotio rem-
place pro instituto. Clem. Alex., Strom., 1, 17, 2 : onb ueptep-
yîaç 11 faut donc mettre la virgule après curiositatis, et non
après digestis comme on le fait ordinairement.
Ad propria opéra est la lecture de P et de De la Barre.
Modius ne dit rien ; il faut donc conserver opéra, que Haver-
camp et d'autres rejettent. Ad nat., 2,2, p. 96, 1, confirme
cette lecture : et ita accedente libidine gloriae ad proprii ingenii
opéra mutasse.
CHAP. 47,3-5 373
47,5. Inventum enim solum modo Deum nostrum, non
ut invenerant disputaverunt, etc.
Tout ce passage (§ 5-7) a subi des altérations, soit inten-
tionnelles, soit accidentelles dans F, qui présente, d'autre
part, certaines lectures meilleures que celles de P.
Sur nostrum, ajouté à Deum (par F), voy. ci-dessus, p. 67.
Sur l'omission accidentelle alii corporalem (haplographie)
et sur celle de ex devant igni (dans F), voy. ci-dessus, p. 43.
Au § 6 : qua Platonici et Stoici F ; ut tam Platonici quam
Stoici P. — La leçon de P, qui attribue aux Platoniciens et
aux Stoïciens une seule et même opinion, n'est pas admissible.
Celle de F est confirmée par qua Epicurus et Pythagoras.
Dans tous ses écrits. Tert. aime à employer qua (= qua ratione)
dans le sens de « comme » ou « parce que ». Voy. 5,4 ; 30,1 ;
38,2 ; 39,16. Henen, Index verborum, p. 121.
Au même § 6 : ^/ Platoni quidem curantem rerum, factorem
et adorem rerum F ; et Platonici quidem curantem rerum P, —
Dans F, Platoni et actorem sont des fautes de copiste pour
Platonici et auctorem. Tert. applique souvent à Dieu les mots
fador et auctor. Thés. l. /., II, 1205, 58 ; V, 140, 80. Sur auctor,
voy. Hartel, Patr. Stud., I, 9. — Les mots factorem et aucto-
rem rerum ressemblent à une glose et la répétition de rerum
paraît choquante'; mais, si on les supprime, la construction
perd sa symétrie. Suivant les Platoniciens, Dieu est l'auteur
et le conservateur du monde ; suivant les Epicuriens, il n'a
pas créé le monde {otiosum, etc.) et il ne s'en occupe pas {nemi-
nem, etc.). Cf. Ad nat., 2, 2, p. 96, 7 : Platonici quidem curantem
rerum et arbitrum et iudicem, Epicurei otiosum et inexercitum,
et, ut ita dixerim, neminem.
Ce texte de VAd nat. plaide aussi en faveur de inexercitum
(P). Il est vrai que ce mot ne donne pas une fin rythmique,
tandis que inexercitatum (F) donne un ditrochée, mais il ne
s'agit pas d'une fin de phrase.
Et, ut ita dixerim, neminem in rébus Inwmnis F. — P a :
neminem humants rébus, ce qui est moins rythmique. On peut
supposer qu'il y a ici une transposition, pour neminem rébus
humants, ce qui donne un crétique et un trochée. Sur l'emploi
374 APPENDICE I
de nemo, voy. De pud., 7,3 : non de Christiano qui adimc nemo
« qui n'existait pas encore )>. Ad nat., 2,2, p. 96, 8 : et, ut ita
dixerim, neminem (deum). Adv. Marc, 1,8, p. 300, 6 : tantis
rétro saeculis neminem {Deum). Cf. Cic, Ad Att., 7, 3, 8 : sed
nie moverat nemo magis quam is quem tu neminem putas. De
resurr,, 13, p. 42, 8: iterum plioenix, ubi nemo içim. — Minu-
cius Félix, 19,8, dit : Epicurus ille qui deos aut otiosos fingit
aut nullos. — Le datif est préférable à in rébus humanis.
Hartel, Pair. Stud., III, p. 60 et 87.
47,7. positum vero extra niundum Stoici, qui figuli modo
extrinsecLis torqueat molem hanc ; intra mundum Pla-
tonici, qui gubernatoris exemple intra id maneat, quod
(quos P) regat. F
On est tenté de mettre : extra mundum Platonici et intra
mundum Stoici. En effet, pour les Stoïciens, Dieu est l'âme
du monde, répandue partout. Cf. Ad nat., 2, 2, p. 98, 12 :
Unde et Varro ignem mundi animum facit, ut perinde in mundo
ignis omnia gubernet sicut animus in nobis.
D'après Platon, Dieu a créé l'univers pour réaliser hors de
lui-même les splendeurs du monde des idées, il en est l'archi-
tecte, le démiurge ou l'artisan. En outre, il attribue au monde
une forme ronde (Ad nat., 2,4, p. 101, 16 : rotunda mundi
Platonica forma), ce qui convient à la comparaison du potier
faisant tourner sa roue.
Le passage parallèle de Ad nat., 2,2, p. 96, 8, contient une
faute, que Rigaltius a corrigée d'après l'Apologétique : posi-
tum vero extra mundum Stoici, extra (A ; intra Rigalt.) mun-
dum Platonici. Ce passage ne prouve donc rien, car on aurait
pu aussi bien remplacer le premier extra par intra.
Dans l'Apologétique, les mss. sont d'accord et il faut remar-
quer que Tertullien, parlant de la place où les philosophes
mettent Dieu (de sede Dei) par rapport au monde, n'a pas en
vue le moment où Dieu forme le monde, mais le moment où
il gouverne le monde, après l'avoir formé. Pour gouverner
le monde. Dieu se place « hors du monde » ou « à l'intérieur
du monde ». Or, Dieu gouvernant le monde est comparé par
CHAP. 47,7-9 375
Platon à un pilote. Politicus, p. 272 e : To-re o->i xoù Tzcf.v-zhq
b [ûv xo^epYriT'/]q, owv 7r-/)oaX'!ojv oî'axoç àcp£p.svo(;, eiq Tr^v
av-zov uspuoTC'/|V âTréa-T'/], Ibid., p. 273 D : xal tots r\ô-r\ Oeoç b
xo(7jjt.T,a-ai; auTov ... tcocX'.v è'cpeopoç aÙToù twv <x7i5a)v(wv v.yvÔ-
f/evo; (1). Tertullien aura conclu de cette métaphore que
le dieu de Platon a son siège intra mundiim. Où a-t-il trouvé
la métaphore du figiilus, d'où il a conclu que les Stoïciens
placent Dieu extra mundiim ?
— Salvien, voulant montrer que les philosophes ont connu
Dieu qui gouverne le monde, a repris à Tertullien la méta-
phore du pilote, mais il a pensé qu'elle s'appliquait mieux
aux Stoïciens. De gub. Dei, 1, 1, 3 : Plato et omnes Platoni-
corum scholae moderatorem rerum omnium confitentur Deiim.
Stoici eum gubernatoris vice intra id quod regat semper manere
testantur.
Harnack, qui a relevé les emprunts faits à Tertullien par
ses successeurs {Sitzungsber. der Berl. Alwd., 1895, p. 545-
579), ne cite pas Salvien parmi ceux-ci. Il serait facile de
démontrer que Salvien était un lecteur assidu de l'apologiste
de Carthage, dont l'éloquence devait lui plaire. Il ne le cite
jamais, mais il lui emprunte des idées. Quand il parle des
accusations d'homicide et d'inceste formulées autrefois contre
les premiers chrétiens (4,85), il emprunte une phrase au ch.
8,4 : quasi vero, etiamsi possit liis rébus accipi (yita aeterna),
tanti esset ad eam per scelera tam immania pervenire. Comparez
encore 7, 100 = 46, 10. 7, 103 = 39,12 (Socrate et Caton), etc.
Voy. ci-dessus, p. 341.
47,9. et de una via obliques multos et inexplicabiles tra-
mites exciderunt (scideruntP). F
Rauschen conjecture exsciderunt, ce qui ne paraît pas
nécessaire. La voie de la vérité est une : en s'en écartant
chacun de son côté, les hérétiques ont coupé cette grande voie
(') Notre attention a été attirée sur ce passage par notre savant
collègue et confrère, M. Léon Parmentier.
376 APPENDICE I
(via) en une foule de sentiers (tromltes) obliques et inextri-
cables. De una via ... exciderunt = ex una via ... exciderunt.
Cf. Adv, Val., 4, p. 181, 9 : Deduxit et Heracleon inde tramites
quosdam et Secundiis et magus Marcm.
47,9. Quod ideo suggerimus (suggesserim P), ne cui nota
varietas sectae huius in hoc quoqtie nos philosophis
aequare videatur, et ex varietate defectionem vindicet
veritatis (et ex varietate defensionum iiidicet veritatem
P). F
La leçon de P est évidemment fautive, car Tert, ne parle
pas ici de la « diversité des moyens de défense » de la vérité,
ou des manières diverses de défendre la vérité. Il parle de la
variété des sectes hérétiques, semblable à la variété des sectes
philosophiques : cette variété pourrait, dit-il, faire comparer
les chrétiens aux philosophes et faire conclure à une défaillance
de la vérité chrétienne, comme il vient lui-même d'alléguer les
multiples contradictions des écoles philosophiques. Le texte
de F exprime clairement cette idée. Celui de P paraît être
le résultat de l'inattention d'un copiste qui a lu defensio-
NVM au lieu de defectionem et ivdicet au lieu de vindicet.
Après cela est venue la correction erronée veritatem pour
veritatis.
47,13. Et si paradisum nominemus, locum divinae amoe-
nitatis recipiendis sanctorum spiritibus destinatum, etc.
Il faut mettre une virgule après nominemus ; en effet,
locum, etc., signifie: qui est locus..!destinatus. Plus haut, Tert.
a dit plus clairement : Et gehennam si comminemur, quae est
ignis arcani ... thésaurus. Paradisus veut dire « jardin » ; il
suffit que les chrétiens le nomment (nominemus) pour faire
naître l'idée des Champs-Elysées, qui sont aussi un merveilleux
jardin. Voy, Virg., Aen., 6, 638 ss, : Devenere locos laetos et
amoena vireta, etc.
47,13. (paradisum) maceria quadam igneae illius zonae
a notitia orbis communis segrcgatum FP.
CHAP. 47,9-13—48,1 377
On a beaucoup discuté sur cette zone de feu. Le doute ne
paraît pas possible, si l'on considère : 1" que Tcrt. place le
paradis dans les deux (De an., 55, p. 388, 3. Ibld., 1. 18 et 23.
Adv. Marc, 4, 34, p. 537, 21. Etc.) ; 2" que la zone ou ceinture
de feu sépare le paradis de la terre, empêche les habitants
du paradis de communiquer avec la terre (a notifia orbis
communis). 11 en résulte que la zone de feu est piacée entre
la terre et le ciel ; elle ne peut être que l'éther, que Lucrèce
(8, 499) appelle aether ignifer. Cf. Cic, De nat. deor., 2,40,
101.
48,1. At enim, Christianus si de homine hominem ipsum-
que de Gaio Gaium reducem repromittat, statim illic
vesica quaeritur F
P n'a pas la proposition : statim illic vesica quaeritur. —
La locution vesica quaeritur, qui ne se trouve que dans F,
est autrement inconnue. Elle doit être de Tertullien, car
aucun remanieur ne l'aurait inventée. C'est sans doute une
expression proverbiale, qui appartient à la langue triviale.
Tert. ne recule pas, à l'occasion, devant le langage familier
et même bas. Ici, le sens général de l'expression ressort du
contexte. Quand un chrétien parle de la résurrection des
corps, les païens l'accueillent par des éclats de rire et par des
actes de violence, ou bien ils le traitent d'impertinent et
lui jettent des pierres. On dit en français : crever de rire, rire
à ventre déboutonné, se tenir les côtes de rire ; en allemand,
se tenir le ventre de rire (sicli vor Lachen den Bauch fialten).
On a cru qu'il y a quelque chose de semblable dans l'expres-
sion de Tertullien.
10 junius, en publiant pour la première fois cette lecture,
a cherché dans cette direction et Havercamp l'a suivi. L'un
et l'autre proposent de lire queritur.
Junius dit : kgendum vesica queritur, id est, quasi ventis
distenditur cruciaturque pectus illorum vehemcntissime.
Havercamp, après avoir cité Junius, ajoute : Sed milii pro-
verbium hoc videtur dcsumptum a pueris, qui mingendi neces-
sitatem ultra ferre non passant, vesica lotio impleta, adeoque
saepe virgam metuentes exclamant. Sic illi audita liac Cliristia-
378 APPENDICE I
nonim oraîione , statim egrcdiiintur auditorio, quasi mingmdi
nécessitas iirgeret. Non absimile nobis est proverbiuni de re
ingrata : Men zou er de koiide pis van krygen.
C'est-à-dire : ils sont tellement irrités que la vessie leur
en fait mal. Havercamp dit à tort : statim egrediiuitur audi-
torio, car ce sont eux, au contraire, qui chassent les chrétiens.
C'est dans la même voie que Forcellini a cherché. D'après
lui aussi, vesica queritur se dirait d'un effet produit par le
rire : Proverbium est, que significatur illud, quod Itali dicunt
scompisciarsi dalle risa. Et il explique notre passage : quisque
sibi manu vesicam premit, ut soient pueri, qui mingendi neces-
sitatem ulterius ferre nequeant.
En admettant qu'il s'agit d'un effet produit par le rire, on
peut conserver quaeritur. En effet, quaerere vesicam pourrait
signifier manu premere vesicam, c'est-à-dire « se tenir le ventre
de rire ».
S. Jérôme (Epist., 84, 5, 3) dit : Dicentibusque nobis, utrum
capillos et dentés... ex intégra resurrectio exliibeat, tune vero
se tenere non possunt cachinnoque ora solventes tonsores nobis
necessarios ... ingerunt.
Mais quand on rit on ne se livre pas aux actes de violence,
tels que ceux qui suivent : lapidibus ... exigetur.
2^ Oehler rejette les explications de ce genre. Il propose
d'abord de lire saevitia ou saevitiae causa au lieu de vesica,
et, si cette conjecture ne paraît pas admissible, il explique
vesica par vaniloquentia et tumor, enflure, bouffissure (Martial.,
Epigr., 4, 49, 4), c'est-à-dire : « vous cherchez aussitôt des
grands mots, vous nous jetez à la tête des phrases ronflantes ».
3" Rauschen pense que quderitur doit avoir le même sujet
que exigetur, c'est-à-dire Christianus, et il suppose que le
latin possédait une expression proverbiale semblable à celle
du français « donner d'une vessie par le nez à qqn », c'est-à-
dire « châtier qqn en le frappant au visage », ou au figuré
(( rabrouer qqn pour son impertinence ». Littré cite Madame
de Sévigné, 7 août 1675: « Il y a de petits messieurs à la messe,
à qui l'on voudrait bien donner d'une vessie de cochon par
le nez ». Existait-il en latin une expression semblable ? Raus-
chen cite un passage de Sénèque, Nat. Quaest., 2,27, qui dit
CHAP. 48,1 379
que certains coups de tonnerre produisent le son que nous
entendons quand une vessie éclate sur notre tête, quolcin
amlire solemiis, cuin super capiit dirupta vesica est. On peut
conclure de là qu'on se servait de vessies gonflées d'air pour
qhasser les impertinents, qu'on les en frappait sur la tête.
Attaquer au moyen d'une vessie, c'est donc, au figure, traiter
d'impertinent, rabrouer. Mais il faudrait petitur (attaquer), au
lieu de quaeritiir (rechercher). Il semble que vesica peut être
sujet : on cherche une vessie (pour en frapper), c'est-à-dire,
on déclare que celui qui parle ainsi mérite qu'on le frappe
d'une vessie, châtiment ridicule, on le déclare ridicule et
digne de mauvais traitements.
Au lieu de statim illic, Tert. aime à dire : ibidem. Voy. 23,4.
48,1. et lapidibus magis, nec saltem copiis a populo exi-
getur. F
Variantes et conjectures : copiis F ; coetibus P ; caedibus
Parisinus 2616 et Gothanus ; caestibiis Rigalt. (et non : Heral-
dus) ; calcibus Fulv. Ursinus ; saevitia vel saevitioe causa
Oehler ; (sibilis} coetibus Van der Vliet, p. 41.
Magis = potius, ce qui est très fréquent dans Tert. — Nec
saltem = nec ... quidem « et pas même, et pas seulement ».
Hoppe, Syntax, p. 107. Le sens est donc : ne copiis quidem,
lapidibus magis — non copiis solum, sed potius lapidibus.
Le peuple ne se contentera pas de le chasser par des .... ; il le
chassera à coups de pierres.
Ni copiis ni coetibus ne semblent convenir comme premier
terme de l'antithèse ; ni l'un ni l'autre ne s'opposent ici à
lapidibus.
Il faut remarquer : 1» que la lapidation, si souvent mention-
née dans les descriptions de violences populaires, n'est ici
qu'un moyen d'exprimer l'exaspération causée par des discours
qu'on tient pour absurdes et impertinents. C'était une habi-
tude populaire. Dans Pétrone, Sat., 90, Eumolpe, qui a la
manie de parler en vers, irrite les passants par une longue
tirade sur une fresque représentant la guerre de Troie : les
promeneurs lui jettent des pierres. Sat., 90,1 : qui in porti-
cibus spatiabanUir, lapides in Eumolpum recitantem miserunt.
380 APPENDICE I
90,3 : non miror si te populiis lapidibus persequitur. Alexandre,
le faux prophète, ordonne de chasser à coups de pierres
u les athées et les chrétiens » qui menaçaient de percer à jour
son charlatanisme. Lucien, Pseudomantis, 25 : oui; èxileue
lidioïc, éXauvetv (= lapidibus exigere). Suet., Calig., 5 : Quo
defunctus est die (Germanicus), tapidata sunttenipla, subversae
deum arae. Ce sont des manifestations de la colère populaire.
La lapidation à mort et le feu sont aussi des supplices que
la justice sommaire du peuple infligeait souvent aux chré-
tiens. Ch. 37,2 : nos inimiciim viilgus invadit {lapidibus et
incendiis P). S. Cyprien décrit une scène de ce genre. Epist.,
40 : lapidibus et flammis necatum ... Ipse semustulatus et lapi-
dibus obrutus et pro mortuo derelictus ... Même description
dans la lettre des chrétiens de Lyon. Eusèbe, Hist. eccl., 5,
1,7: è-',^o-/,a-e'.ç xal Tc\-ri'vy.^ ... '/.al )j!8wv {jo)vâ<; xTa. Rufin
traduit : Sed et verberari se ab eis ac lapidari ... patienter
accipiebant. Ici, les émeutes populaires sont le signal d'une
terrible persécution. Cf. Apulée, Met., 2,27 : Conclamant
ignem, requirunt saxa. Chez les Hébreux, la lapidation à mort
était le supplice légal des blasphémateurs et des sacrilèges ;
Jésus et les apôtres en sont souvent menacés. loh.. 8, 59 ;
10, 31-33 ; 11,8. Luc, 20,6. Act. apost., 5,26 ; 14,5 et 19. Paul.,
Ad Cor., 2,11, 25. Ad Hebr., 11, 37.
En résumé, il faut distinguer le jet de pierres, moyen de
se débarrasser d'un impertinent particulièrement odieux,
expression d'une exaspération passagère, et la lapidation à
mort, supplice légal (chez les Hébreux) ou exécution sommaire
par l'émeute populaire, comme le feu. Il ressort du contexte
qu'il s'agit ici du jet de pierres, qui remplace la discussion :
on accueille avec faveur la doctrine de la métempsycose et
le peuple chasse à coups de pierres {a populo exigetur) le chré-
tien qui prêche la résurrection corporelle.
2° que exigere signifie « pousser dehors, chasser » èXcùve'.y,
dit Lucien, et qu'on ne peut songer à traduire copiis exigere
par « faire sortir, reconduire avec une escorte honorable ».
3° que le terme opposé à lapidibus, abl. de moyen, doit
aussi exprimer le moyen ou la manière.
4" que ce terme doit être moins fort que lapidibus, comme
l'indique nec saltem = nec ... quidem.
CHAP. 48,1 381
Les termes copiis (des troupes, une escorte, des attroupe-
ments ou la force armée) et coetibus (des réunions, des rassem-
blements) ne conviennent donc nullement, et ils conviennent
d'autant moins comme abl. de moyen que le sujet logique
est populus.
La conjecture de Van der Vliet est ingénieuse : les sifflets
étaient une manière aussi générale qu'inoffensive de marquer
le mécontentement du public, au théâtre et ailleurs. On pour-
rait songer aussi à {clamoribus} coetibus, par des clameurs,
des huées, ir^i^or.fjzi^ (Eusèbe). L'homoeotéleute explique-
rait plus facilement l'omission du mot. Cependant l'omission
du même mot dans l'une et dans l'autre tradition nous semble
moins probable que la corruption ou la correction intention-
nelle du même mot, surtout dans un texte qui a subi beaucoup
de corruptions accidentelles ou de remaniements volontaires.
Voyons donc quel mot doit être mis à la place de copiis et
de coetibus.
Rigaltius est convaincu que c'est caestibus.
Caestus désigne le gantelet de cuir des lutteurs et Rigaltius
veut faire croire que Tert. appelle ainsi les poings de la popu-
lace, pugnos vilis plebeculae callosos, ce qui paraît peu admis-
sible. Cf. De spect., 23, p. 24, 4 : taies enim cicatrices caestuum
et cailos pugnorum ... accepit.
Junius, Heraldus et Rauschen (l^e et 2^ éd.) ont adopté
caedibus, des coups (de poing).
En effet, caedes, au sing. et au plur,, est employé dans le
sens de verbera, ictus, depuis l'époque de Tertuilien (Papinien)
et surtout plus tard. Voy. Tlies. l. /., III, 52, 16. Comme
caedibus est donné par deux mss (selon Oehler), cette lecture
n'est pas à dédaigner, car les coups (de poing) sont moins
terribles que la lapidation.
Calcibus, « par des coups de pied » conviendrait aussi. —
Apulée, décrivant une scène de violences populaires, dit dans
les Met., 2, 26 : pugnis ille matas offendere, scapulas alius
cubitis inpingere, palmis infestis liic latera suffodere, calcibus
insuitare, capillo distrafiere, vestem discindere ... Ac dum ...
dignum me pluribus etiam verberibus fuisse merito consentio.
Ibid., 2, 27 : Conclamant ignem, requirnnt saxa. Cic, In Verr.,
382 APPENDICE I
3,56 : ciim pugnis et calcibus concisus esset. Tusc, 5,77 : ci-
tantes piignis, calcibus, unguibus, morsii dcniqiie. Hor., Sat.,
2, 1, 55 : neqiie cake lupus petit quemquam.
On trouvera peut-être que caedibus, des coups, et calcibus,
des coups de pied, sont des ternies trop forts et que c'est cla-
moribus, des huées, qui s'oppose le mieux à lapidibus : ce
sont les deux moyens extrêmes de repousser une opinion qui
paraît absurde, impertinente, insupportable. On accueille
avec faveur le philosophe qui défend la métempsycose et l'on
refuse d'écouter le chrétien qui prêche la résurrection cor-
porelle ; le peuple ne se borne pas à le chasser par des huées,
il le chasse à coups de pierres.
48,2. Quasi non, quaecumque ratio praeest animarum
humanarum in corpora reciprocandarum, ipsa exigat
illas in eadem corpora revocari, etc. F
La rédaction de tout ce § est très différente dans les deux
traditions et nous nous réservons d'y revenir. Nous ne nous
occuperons ici que de F, pour compléter ce que nous avons
dit ci-dessus, p. 68,
Tert. commence souvent une réfutation par Quasi ou
Quasi non, placé au début de la phrase. De spect., 14, p. 16,9.
De idol., 24, p. 57, 20. Traduisons :
« Comme si, quel que soit la raison de faire retourner les
âmes humaines dans des corps, cette même raison n'exigeait
pas que les âmes soient rappelées dans les mêmes corps ! En
effet, être rappelées, c'est être ce qu'elles ont été. Car, si elles
ne sont pas ce qu'elles ont été, à savoir, si elles ne sont pas
revêtues d'un corps humain et du même corps, elles ne seront
pas les mêmes qu'elles ont été. Et les âmes qui ne seront pas
les mêmes, comment pourra-t-on dire qu'elles sont revenues ?
De deux choses l'une : ou devenues autres, elles ne seront plus
elles-mêmes, ou restant les mêmes, elles ne viendront pas
d'ailleurs. »
Praeest signifie ici praesto est « existe ». C'est un emploi très
rare. Voici deux autres exemples de Tertullien. De resurr.,
14, p. 42, 26 : etsi caro capax restitui, etsi divinitas idonea
restituendi, et sic (même dans ce cas) causa restitutionis praeesse
CHAP. 48,2-3 383
debebit. Il ne suffit pas que la chair soit capable de ressusciter,
que Dieu soit en état de faire ressusciter : niêiiie s'il en est
ainsi, il faut qu'il existe encore une cause qui justifie la résur-
rection, et cette cause est le jugement dernier. De carne Clir.,
17 : aiite omnia aiiiem commemlanda eril ratio, qiiac praejiiit,
ut Dei filins de virgine iiosceretur.
Quant au génitif animanim reciprocandarum, il équivaut
à rcciprocationis aniinarum, la migration des âmes humaines,
qui vont perpétuellement de corps en corps, la p.eTev(TWfji.âTOj-
(nç de Pythagore et de Platon. Ad nat., 1,9, p. 92, 1: sed et plii-
losoplii de animarum reciprocatione ... coiilinnant. Cette reci-
procatio, ces allées et venues sont décrites dans le De an., 28,
p. 346, 22 : de animarum reciproco discursu, quod hinc abeuntes
eant illuc, et rursus Inic ventant et vivant, et deliinc e vita abeant
... August., De civ. Dei, 12,21 : de illis circuitibus et sine
cessatione alternantibus itionibus et reditionibus animarum.
48,3, Multis etiam locis ex otio opus erit, si velimus ad
hanc partem lascivire, quis in quam bestiam reformari
videretur.
Ce serait s'écarter du sujet (lascivire) que d'examiner les
théories de Pythagore et de Platon sur la métempsycose et
il faudrait rassembler à loisir (ex otio) et citer beaucoup de
passages (locis), si nous voulions nous étendre sur ce point
en recherchant en quelle bête chacun (leur) paraissait renaître.
En effet, Pythagore et Platon expliquaient dans quelle
sorte de bêtes l'âme humaine devait entrer, suivant que la
vie antérieure avait été bonne ou mauvaise. Tert. voudrait
s'arrêter à cette doctrine pour en montrer l'absurdité ; mais
ce serait trop long. Il l'a fait plus tard. Voy. De anima, 32
et 33, et le passage cité ci-dessus, p. 367, ad 46,12. Athéna-
gore. De resurr., 36, avait allégué le même motif pour passer
outre.
On voit que l'imparf. du subj. videretur, au lieu de visus sit,
est mis, contrairement à la concordance, pour exprimer une
action qui dure dans le passé. Voy. ci-dessus, p. 190, ad 11,3 :
ut indigeret. Dans l'interrog. directe, on aurait : quis in quam
bestiam reformari videbatur ? — Ici, videretur donne aussi
384 APPENDICE I
une clausule fréquente (crétique et trochée), que h'aurait
pas donnée visas sit.
48.5. Considéra temetipsum, homo es, fidem rei inve-
nies. F
Au lieu de Iwmo es, P a : o liomo, et. — La lecture de F se
traduira : « Jette les yeux sur toi-même, tu es un homme et
(comme il s'agit de l'homme) tu trouveras en toi la preuve
de la chose, une raison de croire la chose ». L'apostrophe
liomo exprime la même idée. Cf. Ad Hermog., 12, p. 139, 19 :
temere ad isto exempla respicies, o liomo. De resurr., 61, p.
1 22, 8 : Sed accepisti, homo, os ad vorandum atque potandum :
cur non potius ad eloguendum ... ? Adv, Marc, 2,2, p. 334, 1 1 :
Unicus sol est, o Iwmo, qui mundum hune tempérât.
48.6. Et tamen facilius utique fies qtiod fuisti aliquando,
quia aeque non difficile factus es, quod numquam fuisti
aliquando. FP
Tertullien affirme que le corps humain, dissous par la mort,
retombe dans le néant : niliil foetus, cum esse desieris (§ 5).
La volonté toute-puissante de Dieu le tirera une seconde fois
du néant : rursus esse de nihilo (§ 5). C'est une nouvelle créa-
tion ex nihilo d'un corps qui avait été créé une première fois
ex nihilo. On conçoit que l'une soit aussi facile à Dieu tout-
puissant que l'autre ; on ne conçoit pas que la seconde lui
soit plus facile que la première, comme le dit Tertullien, sans
donner aucune raison de cette affirmation. Applique-t-il à
Dieu une vérité d'expérience humaine et parle-t-il du Créa-
teur tout-puissant comme il parlerait d'un artiste qui recons-
titue son œuvre détruite, une statue, par exemple, ou un
tableau, ou un édifice ?
Dans le traité De resurr., 11, Tert. reprend son raisonne-
ment, et il envisage deux opinions sur la création. Soit que
Dieu ait tiré le monde (et l'homme) du néant, soit qu'il l'ait
tiré d'une matière préexistante (comme le prétendent cer-
tains philosophes et certains hérétiques), on peut dire qu'il
l'a tiré de rien : non minus defenderem ex nihilo eum proîu-
CHAP. 48,5-6 385
lisse, si ea protulerat, qiiae omnino non j aérant. Qiw enim
interest ex niliilo quid proferri on ex aliqiio, diim qiwd non
jiiit fiot, quando etiam non fuisse niliil sit fuisse ? Sic et fuisse
e contrario non niliil est fuisse. Quoi qu'il en soit, dit-il ensuite,
néant ou matière préexistante vont également à ma thèse.
Si Dieu a tout créé ex niliilo, il pourra tirer la chair du néant
où elle est retournée. Si Dieu a tiré toutes choses d'une ma-
tière préexistante, il pourra rappeler la chair, quel que soit
l'abîme qui l'aura engloutie, poterit et carneni quocunque
dehaustam evocare de alio. Et puis il continue : Et utiqiie
idoneus est reficere qui fecit : quanto plus est fecisse quoni refe-
cisse, initiiim dédisse quain reddidisse, Ha restitutioneni carnis
facilioreni credas institutione.
On voit qu'ici encore Tert. invoque une vérité d'expérience
humaine ; il ne songe pas que cette vérité ne convient pas
à un être infini, tout-puissant, qui n'a pas plus de peine à
concevoir une première fois l'objet de sa création qu'à le
reconstituer, s'il est retourné à rien,
Minucius Félix (34, 9-10) raisonne autrement. 11 commence
aussi par dire qu'il est possible à Dieu de reformer l'homme
qu'il a formé une première fois, que l'homme, sorti du néant,
peut en être tiré une seconde fois. Il n'y a personne qui soit
assez sot, assez borné pour le contester, 11 n'affirme donc pas
que l'homme retombe réellement dans le néant (i). 11 se borne
à affirmer la possibilité {potuisse, liccre) pour Dieu de tirer
l'homme du néant une seconde fois.
Puis, continuant son raisonnement (porro), il énonce ce
principe : « En outre, il est plus difficile de donner l'existence
(^) Ce serait en contradiction avec le paragraphe suivant, où
M. F. soutient que le corps dissous est conservé pour Dieu, sous
la garde des éléments. On ne peut pas prêter à M. F. pareille
contradiction, surtout entre deux paragraphes qui se suivent. Aussi
pensons-nous que les mots ni/iii esse post obitiun, et ante oytum nihil
fuisse, sont interpolés, comme le soutenait déjà Heumann. Ils
offrent d'ailleurs une construction grammaticale défectueuse, qui
suffit pour les rendre suspects. Le § lo doit commencer à Porro.
25
386 APPENDICE I
à ce qui n'est pas que de reproduire ce qui a existé », et il
montre que, dans le cas présent, c'est ce principe qui est appli-
cable. L'homme n'est pas réduit au néant par la mort : son
corps dissous échappe à nos sens, mais il est conservé dans
les éléments (terre, eau, air, feu), d'où Dieu pourra le tirer.
Minucius Félix a suivi ici S. Justin (De resurr., 6), Tatien
(Or, ad Or., 6) et Athénagore (De resurr., 2 et 8).
Tertullien, lui, a abandonné ses sources et il s'en est tenu
à l'affirmation que l'homme, dissous par la mort, retombe
dans le néant. Toute son argumentation (§ 2-9) est fondée
sur cette affirmation, mais il a conservé quelque chose de la
thèse soutenue par les Orecs et par Minucius Félix : c'est que
la reconstitution de l'homme est plus facile que la création
ex nihilo. On ne voit pas pour quelle raison. De même au § 9 ;
voy. plus loin Q).
48,7. signatum et per ipsum humanae resurrectionis exem-
plum in testimonium nobis. F
P a : signatum et ipsum. — Per ipsum, se. Deum, comme
au ch. 36,4 ; ex ipso, se. Deo. 41,4 : apud ipsum, se. Deum.
Tcrt. renforce souvent ipse au moyen de quoque (2, 14 ; 24,8 ;
45,4) ou etiam (6,7 ; 7,3 ; 7,4 ; 9,6 ; 16,2 ; 25,1 ; 34,3 ; 47,3 ;
48,12) ou et = etiam (37,6 : immo etiam et ipsa destitutione
punisset). Par le renouvellement périodique des êtres et des
phénomènes, par les résurrections qui s'opèrent dans la na-
ture, le monde est c un exemple de la résurrection des hommes,
marqué clairement par le Créateur lui-même, pour nous servir
de témoignage », Tert. développe cette idée dans le traité
De resurr., 12, p. 41, 20. Après avoir décrit poétiquement le
renouvellement périodique de l'univers, où la vie sort de la
mort, il continue ;
Totus igitur hic ordo revolubilis rerum testatio resurrec-
tionis mortuorum. Operibus eam praescripsit Deus ante quam
(') Ici, M. Heinze serait obligé par la logique de conclure que
l'original est Minucius Félix.
CHAP. 48,7-9 387
litteris, viribus praeclicavit ante quam vocibiis. Pracniisit
tibi naturam magistram, summissurus et prophctiani, quo
facilius credas prophetiae discipulus naturae, quo statini
admittas, cum audieris qiiod ubiqiie iani videris, ncc dubitcs
Deum carnis etiam resuscitatorcm, qiieni omnium noris
restitu'torem.
Dans la nature, Dieu a donc voulu donner à l'homme un
exemple de sa résurrection future, et il a clairement marque
lui-même cet exemple, qui doit nous servir de témoignage.
Cf. De resurr., 13, p. 42, 1 : Si parum universitas resuirec-
tionem figurât, si nihil tôle conditio (la création, le monde)
signât ... Ibid., 1. 10 : Quid cxpressius atque signatius {quam
plioenix) in liane causam ? Aut cul alii rei taie documentum ?
L'idée première de cette argumentation se trouve dans une
comparaison de S. Paul (Ad Cor., 1, 15, 33-42) et de S. Jean
(12,24). Elle a été développée par S. Clément Romain (Ad
Cor., 24-26), et à deux reprises par Théophile d'Antioche (Ad
Autol., 1,13 et 2,14), puis par Minucius Félix (34,11). Ter-
tullien semble avoir lu S. Clément, à qui il emprunte le phénix
(voy. l'éd. Hemmer, notes des p. 56-57), mais il suit surtout
Théophile. Comme celui-ci, il dit que Dieu a voulu donner
à l'homme une raison de croire. Ad Autol., 1,13; '0 {/kv oOv
Bsôç (701 7to).)và X s. y. u y, p ', a s - '. o s { y.VJ n <. v e''ç to ~',;-
TEUS'.V a'JTo) ... TaO-ra oi Trâvta èvspys'^ ï, Qzo\J arys^iy., zic,
tÔ s tû t s Î ç a ', y.yX o'.à to'jtwv ot', o'jvy.xôq so-t'.v b Bso;
rco'.riTy-'. ~r|V X7.')oX'//.t,v àvâo-TXT'.v â-âv7wv àvOoco-wv. 2,14:
àvOow— cov.
Exemplwn n'est pas une image ni un symbole, mais un
exemple et une preuve.
Signatum et ipsuni exemplwn signifierait que le monde est
« aussi » un exemple éclatant ; or, Tert. ne produit pas d'autre
exemple. Signatus est employé comme adjectif; voy. De
resurr., 13, p. 42,10 (ci-dessus).
48,9. Tu homo, tantiim nomcu, si intcllegas te vel de
titulo Pythiae discens, dominas omnium morientium
et resiirgentium, ad hoc morieris, ut perças ? P
388 APPENDICE I
Au lieu de discens, F a : disces deum. Voy. ci-dessus, p. 68.
— La phrase interrogative contient un raisonnement à for-
tiori, que Tert. a repris dans De resurr., 12-13, Si toutes les
choses énumérées plus haut meurent pour revivre, il ne se
peut pas que l'homme, qui est le maître de ces choses, meure
pour périr à jamais. Tert, développe ce raisonnement dans
De resurr., 12, p. 41, 27 ; 13, p. 42, 14. Dominus — qui es
dominus. La prop. si intellegas te vel de titulo Pythiae discens
est souvent mal comprise. Elle dépend de tantum nomen. « Toi,
(qui es) un homme, un si grand nom, si tu savais ce que tu
es {si intellegas te), t'efforçant de l'apprendre quand ce ne
serait qu'en suivant (le conseil de) l'inscription de la Pythie. »
Allusion à la maxime de Thaïes, gravée sur le temple de
Delphes : TycoOi. o-eàurôv (nosce te ipsum). Cette inscription
ne nous dit pas ce que nous sommes ; elle nous exhorte à nous
connaître. De ne signifie donc pas « par », mais « suivant,
conformément à, en obéissant à ». Parlant à des païens, Tert.
les exhorte à suivre au moins {vel) cette prescription. Les
chrétiens ont d'autres prescriptions à suivre.
48,9. Resurges {corr. lunius ; resurgas F), ubicumque re-
solutus fueris : quaecumque te materia destruxerit, hau-
serit, absorpserit, in nihilum redegerit, reddet. F
P a : hamerit, adoleverit (1, aboleverit), in nihilum prode-
gerit, reddet te. — Le sujet de reddet est materia. La matière
(terre, eau, air, feu) qui aura absorbé le corps, le rendra, par
la toute-puissance de Dieu. Cela fait supposer que les élé-
ments du corps dissous par la mort, se sont mêlés à la matière
et y ont été conservés. Dieu saura rassembler ces éléments
épars. C'est ainsi que raisonnent S. Justin, Tatien, Athéna-
gore et Minucius Félix. Voy. au § 6. Tert. lui-même, parlant
du phénix qui renaît de ses cendres (De resurr., 13, p. 42, 11),
dira : Deus enim in scripturis suis : Et florebis enim, inquit,
velut phoenix (Psalm., 91, 13), id est de morte, de funere, uti
credas de ignibus quoque substantiam corporis exigi posse,
afin que tu croies que la substance du corps peut être tirée
même hors des flammes ou plutôt être redemandée aux flam-
mes. De ignibus = ex ignibus. C'est toujours la même idée,
CHAP. 48,9-13 389
empruntée à Tatien et à Athénagore (et c'est à cette idée
que Tert. s'arrêtera dans la conclusion de son De resurr., 63 :
in deposito est (caro) apiici Deiim, etc.). D'autre part, Tert.
déclare que le corps, une fois dissous par la mort, retombe
dans le néant (§ 5-6 'et ici : in nihilum redegerit ... Eiiis est
niliiluni). Il y a contradiction, Voy. ci-dessus, au § 6.
A la fin, P a répété inutilement te, pour la clarté. La clau-
sule (crétique et trochée) devient moins bonne (double spon-
dée). — Aboleverit (P) convient pour préparer in nihilum
redegerit. Adv. Marc, 5,19, p. 601,14 : ceterum corpora aut
ignibus statim aut feris aut, etiam diligentissime condita, teni-
poribus tamen aboleri manifesfum est. Commod., Apol., 704 :
ut possis abolitus resurgere saeclo novato. — Absorpserit (F)
est synonyme de hauserit et convient aussi.
48,13. Dei quidem cultores apud Deum semper, super-
induti substantia propria aeternitatis P
F n'a pas semper, qui a pu tomber devant super et qui donne
la clausule fréquente d'un crétique et d'un trochée. La clau-
sule cultores apud Deum est d'ailleurs admissible, quoique
rare, mais semper paraît aussi indispensable au sens, car il est
oppose à aeque iugis ignis.
48,13. habentes ex ipsa natura eius, divina scilicet submi-
nistratione (divinam scilicet subministrationem P) incor-
ruptibilitatis. F
Lisez : habentes ex ipsa natura eius, divina scilicet, submi-
nistrationem incorruptibilitatis. — Les impies « subiront la
peine d'un feu également éternel, possédant une incorrupti-
bilité procurée par la nature même de ce feu, qui est divine ».
Scilicet introduit l'explication de ex ipsa natura eius, se. ignis,
« grâce à la nature de ce feu, qui est divine ». Cf. Passio Phi-
lippi, Acta Sanctorum, Oct. IX, p. 546 : Hic erit ignis ille
divinus, iustus factorum onmium et optinnis index, qui ad ter-
ram defluens quodcumque inutile invcnit, exnrit (cité par Stach-
lin, éd. de S. Clément d'Alexandrie, Protrept., 4, 53, 2-3 :
Trûp «Twcppovoûv, d'après Fuehrer, dans Mitt. des deutsch. arch.
Inst., Rocm. Abt., 7, 1892, p. 158).
390 APPENDICE I
48,15. et qui de caelo tangitur, salvus est, ut luillo iam
igni decinerescat FP
« L'homme frappe de la foudre reste intact et désormais
aucun feu ne peut plus le réduire en cendres. »
Le feu des volcans et la foudre, ont, comme le feu dont
Dieu se sert pour punir les damnés, la propriété de brûler
sans consumer. Cette idée est connuunc à Tertullien et à
Minucius Félix, mais Tertullien assimile la foudre et le feu
des volcans {sive ... stringens, sive ... eructiians) au feu ven-
geur, tandis que Minucius Félix se borne à comparer (Siciit
... si eut ..., ita).
Minucius Félix dit clairement : Siciit ignés julinimiin cor-
poro timgunt nec absutmint, la foudre touche les corps sans
les consumer. Dans Tert., salvus est ne peut pas signifier : que
le corps du foudroyé reste « sain et sauf », que l'honnnc fou-
droyé conserve la vie, mais seulement : qu'il n'est pas consu-
mé par le feu céleste, qu'il reste intact.
Tert. seul ajoute que, par là, ce même corps acquiert la
propriété d'être désormais à l'épreuve du feu, de ne pouvoir
être réduit en cendres par aucun feu. il n'y a aucune trace
ailleurs d'une pareille croyance. C'est sans doute une inter-
prétation personnelle d'une loi religieuse de Numa, qui défen-
dait de brûler un homme tué par la foudre. Festus, s. v. occi-
sum : Homo si fulmine occisus est, ei iusta milla jieri oportet.
Pline, Hist. nat., 2, 54, 145 : Hominem ita exanimatum crc-
mare fas non est, eomii terra religio tradidit. Cette interpréta-
tion de la loi ou cette conclusion forcée que Tert. tire de la
loi lui permet d'attribuer à la foudre une propriété qui l'assi-
mile au feu vengeur : elle frappe, mais elle conserve, dam
erogat, réparât.
49,2. Falsa nunc siiit quae tuemur et merito praesumptio,
attamcn necessaria F
P a : tuentur. Ce serait le passif : « les croyances qui sont
défendues (par nous) ». Mais le complément a nobis serait
indispensable. — L'actif tueo est archaïque et postclassique.
Cic, De leg., 3, 3, 7 (texte de loi). Orelli, Inscr., 4788. Lucrèce
ciiAP. 48,15—49,2-3 391
emploie le passif. Les auteurs classiques n'ont que le déponent.
Le passif reparaît plus tard, par ex., dans les jurisconsultes.
Dig., 27, 10, 7 ; 28,3,17 ; 37,5, 25,2 ; 40, 12, 30. Etc. Le par-
ticipe tutus, au sens passif, est devenu adjectif. Georges, Wort-
jormen, p. 706. Neue, Formenle/ire, 3, p. 96. — Tuentur est
ici une faute de copiste pour tuemur. Cf. Adv. Marc, 6,9,
p. 601,17 : utique aciversus illos tuetur (aposiolus) quod illi
negabont, carnis scilicet rcsurrectionem.
49,3. In vobis itaque praesumptio est liaec ipsa, quae
damnât utilia ; proinde nec inepta esse possunt, *FP
Le silence de Modius fait croire que F était ici d'accord
avec P ; et pourtant le dernier membre de phrase {proinde,
etc.) nous paraît être une glose marginale insérée dans le
texte. Il faudrait traduire : « Pareillement, ces croyances
ne peuvent pas non plus être ineptes » (i). Or, Tert. ne soutient
nullement ici que ces croyances chrétiennes ne sont pas ineptes.
11 répond aux païens qui déclarent que les croyances chré-
tiennes sur la résurrection, le jugement et l'autre vie 1" sont
des préjugés et des inepties, 2" qu'elles sont dignes de châti-
ment, sans prendre la peine de les examiner. Et il dit : Sup-
posons que ces croyances soient fausses (que ce soient des
préjugés) et ineptes : incontestablement, elles sont nécessaires
et utiles, car elles nous obligent de devenir meilleurs. Con-
clusion : 1" 11 est expédient de les présumer vraies (et d'y
conformer sa vie) ; donc il n'est pas expédient de les déclarer
fausses et de les tenir pour ineptes. 2" De même (proinde),
il n'est pas permis aux juges de condamner en tout état de
cause, en principe, des croyances qui sont utiles. Et rétorquant
l'accusation suivant son habitude, Tert. ajoute : Si préjugé
il y a, c'est chez vous qu'il existe, car c'est par préjugé que
vous condamnez des croyances utiles.
Le raisonnement de Tertullien est fini. On peut le résumer
ainsi : Attendu que ces croyances sont incontestablement
(') Dans l'Apol., proinde se rencontre 17 fois et toujours C(jniine
synonyme de /rw/Vt'?'. Voy. Henen, Index vcrh,,?>. s.
392 APPENDICE I
bienfaisantes : 1" il est expédient de les présumer vraies ;
2" il n'est pas permis de les condamner sans examen (omnino) ;
3" le vrai préjugé consiste à les condamner sans les connaître.
Que viennent faire après cela les mots : Proinde nec inepta
esse possunt. Ils sont superflus, parce que falsa et inepta sont
toujours réunis dans ce qui précède. Ils sont, de plus, con-
traires à l'idée de Tert., qui ne veut nullement démontrer
dans ce chapitre que les croyances sur la vie future ne sont
pas ineptes ni fausses.
Il continue, en répétant la même concession : Assurément,
même si elles sont fausses et ineptes, elles ne sont nuisibles
pour personne, et si vous voulez les condamner, c'est au ridi-
cule et non à la mort que vous devez les vouer. Enfin, il montre
aux juges que leur triomphe est vain et à la populace que
sa joie est vaine.
Il résulte de là, que le § 3 ne doit commencer qu'à Certe
ctsi falsa, et le § 4, à De qua iniquitate.
Enfin, quasi ... sit arbitrium doit être rattaché à ce qui pré-
cède et le § 5 doit commencer à Certe, si velim.
49,3. Certe etsi falsa et inepta, iiulli tamen noxia : nam
et multis aliis similia, quibus nullas poenas inrogatis in
eiusmodis (sic) accusatis et inpunitis ut noxiis (sic).
Aeque enim, si utique, inrisum (sic) iudicandum est, non
gladiis, etc. F
P a : inrogatis, vanis et fabulosis, inaccusatis et inpunitis,
ut innoxiis. Sed in eiusmodi enim, si utique, inrisui iudican-
dum est, non gladiis, etc.
Le texte de F, tel que nous l'avons donne dans notre édi-
tion (eiusmodi pour eiusmodis ; innoxiis pour noxiis ; inrisui
pour inrisum; voy. ci-dessus, p. 43 et 112) ne paraît guère
satisfaisant,
La lecture de P est meilleure. Les croyances païennes, sem-
blables aux croyances chrétiennes sur le jugement, le paradis
et l'enfer, ne sont jamais ni accusées devant le tribunal, ni
punies (inaccusatis et inpunitis), parce qu'on les regarde
comme ne causant aucun mal (ut innoxiis).
CHAP. 49,3 — 50,3 393
La transition Sed in eiusmodi enim marque une opposition :
« Mais en vérité, quand il s'agit de pareilles choses, si tant est
qu'il faille les condamner, c'est au ridicule qu'il faut les
condamner ». Tertullien vient de dire qu'on ne condamne
pas de pareilles choses. Il continue : Mais, si on les condamne,
c'est au ridicule qu'il faut les condamner.
Dans F, in eiusmodi paraît s'être fourvoyé dans la phrase
précédente et son voisinage aura amené le changement iVinac-
cusatis en accusatis. Quant à inpunitis ut noxiis, le remanieur
semble avoir compris qu'on ne punit pas ces choses comme
(on punit) les choses nuisibles, ce qui est peu conforme à la
grammaire comme à l'idée de Tert.
Aeque « De même » paraît être un remaniement intention-
nel : on a cru que Tert. comparait le traitement dont sont
l'objet les croyances païennes (l'abstention) et celui qu'il
serait raisonnable d'infliger aux croyances chrétiennes, s'il
fallait les condamner (la condamnation au ridicule). Mais il
n'y a pas comparaison, il y a opposition entre ce qu'on fait
et ce qu'on doit faire (i).
Sur inrisum pour inrisui, voy. ci-dessus, p. 112.
F est donc devenu incorrect et inintelligible, tandis que P
paraît irréprochable. Les mots vanis et fabulosis, que l'on a
jugés déplacés ici, marquent bien l'opposition entre les
croyances chrétiennes qu'on traite de fausses et d'ineptes,
et les croyances païennes, qui sont réellement extravagantes
et fabuleuses.
50,3. Sed occidimur. — Certo, cum obtinuimus F ; Sed
obducimur, — Certe, cum obtinuimus. P
La lecture de P paraît préférable. Obducimur est la lectio
difflcilior et Tert. affectionne obducere « convaincre d'erreur »
(1) Autrement, Lôfstedt, p. i2o, qui combine F et P et conjec-
ture : Aiguë in eiusmodi enim, ce qui conviendrait au sens : «Et en
vérité, quand il s'agit de pareilles choses, c'est au ridicule », etc.
Cf. Rauschen, p. 77.
394 APPENDICE I
et obdiici « succomber, être battu daus une discussion ou
dans une lutte ». Ici, tous les termes se rapportent à la dis-
cussion ou à la lutte que les chrétiens sont forces de soutenir
devant les tribunaux {provocamiir ad tribiinalia, ut ... cer-
temiis). Voy. 46,2 : obducitur — convincitiir. De resurr., 2,
p. 27, 2 : obdiicti deliinc et de Deo caniis aiidore et de Christo
carnis redemptore, ioin et de resurrectione carnis revinceniur.
De ieiun., 11, p. 289, 14 : oljdiicitur. Adv. Marc, 1,21, p. 318, 7 :
obduxeris. 3,16, p. 404, 3 : obduximiis. 5,10, p. 606, 5 : obdii-
citiir. De pud., 7, p. 232, 14 : cuni sic qiwqiie obdiixero diversae
partis praesiimptionem. De resurr., 2, p. 26, 27 : obducimiis.
Adv. Hermog., 38, p. 168, 16 : et obdiiceris. Adv. Prax., 27,
p. 279, 19 : umiiqiie enim obdiicti. Le sens premier paraît
être « recouvrir, fermer la bouche, forcer au silence >'. — Ici,
obducimiir, terme de la discussion, s'oppose bien à obtinuimiis,
terme juridique fréquent « gagner sa cause ». Vincinuis s'op-
pose bien à occidinnir. Pour résumer, pour tout dire en un
mot {deniquc), Tert. reprend le terme de l'objection, obdu-
cimiir.
Ccrto ne se trouve pas ailleurs dans V Apologétique. Les co-
pistes confondent souvent certo et certe. Certe est employé
18 fois dans {'Apologétique, et plusieurs fois dans le sens res-
trictif qu'il a ici : « Oui, sans doute, mais après avoir fait
triompher notre cause ». Voy. 12,4 : Ad bestias iinpellimur. —
Certe, qiias Libero ... adplicatis. Certo s'emploie pour affirmer
(i assurément » et très rarement pour restreindre. Voy. Tlies.
l. /., 1 1 1, 942,23 (Plante et Paneg.).
50,4. Sed haec despcratio et (atque P) perditio pênes
vos in causam gloriae et famae vexilluni virtutis extol-
lunt. F
P a : in causa. — In causam avec un gén. veut dire « en vue
de, pour » ; in causa avec un gén. veut dire « à cause de ».
Cf. Ad nat., 1,18, p. 90, 1 : liaec omnia ... magna laude pensari
a virtute. Sur ces locutions, voy. 40,1. Ici, c'est in causam qui
convient le mieux ; car les héros païens se sont sacrifiés « à
cause de » leur patrie, de la liberté, etc., et « en vue de » la
gloire et de la renommée. — Sur atque, voy. p. 402, n. 2.
CHAP. 50,4-5 395
50,5. Enipedocles totiim sese Aetnaeis inccncliis donat :
vigor mentis ! Aliqua Carthaginis conditrix rogo secun-
dum matrinionium evadi't : o praeconium castitatis et
pudicitiae ! F
Au lieu de Aetnaeis, P a : AiheniensUim atheneis (in iiiarg. :
aethneis). Voy. ci-dessus, p. 81.
Au lieu de donat, P a mis donavit, peut-être parce que le
parf. rcliquit précède ; mais les verbes suivants, cvadit et
patitur sont au présent, Donat donne un crétique et un tro-
chée, tandis que donavit donne un spondée et un trochée,
clausule moins fréquente {^).
Plus loin, P a : ro»o se secundum matrinionium dédit, ce qui
est inintelligible. La seconde main a ajouté ob devant secun-
dum pour donner un sens à la phrase. — ici encore, le rema-
nieur a mis le parfait dédit. Prenant secundum pour une pré-
position, il a ajouté un complément {se) au verbe, ce qui n'a
pas suffi pour donner un sens à la phrase. Peut-être ne con-
naissait-il pas l'histoire de Didon, qui, pour rester fidèle au
souvenir de Sichée, son premier mari, préfère monter sur
un bûcher que d'épouser Hiarbas, roi des Maures. Voy. Justin,
18,6.
Tertullien aime à citer Didon. De exhort. cast., 13: aliqua
Dido, quae projuga in aliéna solo, ubi nuptias refais ultro optasse
debuerat, ne tamen secundas experiretur, maluit e contrario
uri quam nubere. Ad mart., 4 : cum feminae quoque contemp-
serint ignes, Dido, cum post virum dilectissimum nubere coge-
retur ... Ad nat., 1,18, p. 90, 7 : ignés ... docuerat invadere Dido.
Et pudicitiae (crétique et trochée, avec la longue du trochée
résolue) manque dans P. La clausule ne prouve rien, car casti-
tatis donne une fin convenable (ditrochée). Plus haut, Tert.
n'a mis qu'un seul substantif : o sublimitas animi ! o vigor
mentis ! Mais plus loin, il allonge aussi ses exclamations : o
(') Lôfstedt, p. 74, fait observer avec raison ciue Terlullien,
comme tous les auteurs qui écrivent en prose rvtiimique, accom-
mode souvent le temps du verbe au rythme. Voy. notre édition
classique de Minucius B'elix, p. 193 lin.
396 APPENDICE I
virum fortem ... ! o philosophi magnimitatcm, qui ... ! II est
possible que le remanieur de P n'ait envisagé que les excla-
mations qui précèdent Q).
50.9. Certe Laconum flagella sub oculis etiam hortan-
tium propinquorum acerbata (acerba P) tantuni honoris
(honorem P) tolerantiae doniui conferunt, quantum san-
guinis fuderint. F
Il faut lire acerbata. Voy. ci-dessus, p. 43. — Quantum
sanguinis fuderint. Sur le subj. après tantum ... quantum, voy.
W. A. Baehrens, Philologus, Supplbd. 12 (1912), p. 512. Min.
Félix, 6,3 : quantum adstruxerit vetustatis.
50.10. gloriam licitam, quia humanam P
F a : humana. — Tert. omet souvent le verbe est dans la
prop. qui commence par quia ; dans ce cas, il fait accorder
l'adjectif ou le subst. attribut avec un mot de la proposition
principale. Cf. 17,5 : quia proprio (F) = quia proprium est.
30,4 : • quia innocuis = quia innocuae sunt. De an., 26, p.
344, 10 : infanteni et aemulum et validum et olim contentio-
sum, quia vivum. Voy. Hartel, Pair. Stud., III, p. 70. Hoppe,
Syntax, pp. 59 et 143.
50.1 1. Et tamen illis omnibus et statuas decernitis (defun-
ditis P) et imagines scribitis (inscribitis P) et titulos
inciditis in aeternitatem ! F
Decerncre est un mot général, qui convient à la fois à sta-
tuas, à imagines et à titulos : vous leur décrétez des statues,
des bustes et des inscriptions honorifiques.
Comme Tert. a mis le terme spécial avec imagines inscri-
bitis et avec titulos inciditis, il est vraisemblable qu'il avait
écrit aussi : statuas defunditis, vous fondez, vous coulez des
statues de bronze. Le scribe, ne comprenant pas defunditis,
aura mis decernitis. L'inverse est beaucoup moins probable.
(') Surtout ce passage, voy, Lôfstedt, p, 53-56.
CHAP. 50,9-12 397
Cf. De pat., 5 : cutn in idoUttn aiiri sut collât iones defundit.
Ad nat,, 1,12, p. 82,9 : omne simulacrum seu ligno seii lapide
descLilpitur, seu aère defunditur. Scorp., 3, p. 151,9 : sapiens
ignis effigiem vituli defundit.
Sur inscribitis, voy. ci-dessus, p. 245, note.
50,12. Nam et proxime ad lenonem damnando (dam-
nandam F) Christianam potius quam ad leonem (putas-
tis et add. F), confessi estis, labem pudicitiae apud nos
atrociorem omni poena et omni morte reputari. P
Dans F, damnando est devenu damnandam à cause du
voisinage de Christianam : c'est ce qui aura amené l'addition
de putastis et. Tert. fait un emploi très étendu de l'abl. du
gérondif (abl. de manière) mis au lieu du participe présent
{damnando), qui lui fournit des constructions concises, tandis
que putastis et confessi estis paraît peu conforme à sa con-
cision habituelle. Voy. 9,11 : conluctando detersit. 10,1 : semel
deos non colendo. 11,3 : auferendo factorem. 13,3 : reprobando,
nolendo. Etc., etc. Voy. Blokhuis, p. 29. Hoppe, p. 56-57.
398
LES CLAUSULES MÉTRIQUES.
Dans la discussion des variantes de F et de P, nous avons
allégué à plusieurs reprises les clausules métriques. Pour que
le lecteur ne se méprenne pas sur le sens de nos observations,
nous devons donner ici quelques précisions sur l'idée que
Tert. s'est faite du rythme de la prose. On verra que, si l'on
ne peut tirer argument des clausules qu'avec une certaine
circonspection, elles peuvent cependant servir de guide à la
critique.
Sous tous les rapports, l'Apologétique est celui de ses ou-
vrages auquel Tertullien a donné le plus de soins. Il en a
recueilli les idées dans son expérience personnelle, dans sa
vaste érudition et surtout dans les écrits des apologistes
antérieurs ; il les a classées minutieusement, il leur a donné
un tour personnel et il les a présentées sous le jour qu'il croyait
le plus favorable à sa cause ; enfin, il a travaillé avec amour
la forme dont il les a revêtues, comme le prouve à suffisance
la comparaison avec le traité Ad nationes. Rompu aux exer-
cices de l'école, il prodigue tout naturellement les artifices
recommandés par les rhéteurs. Il manie sans effort les figures
de construction qui balancent les périodes et qui mettent
les idées en relief : parallélismes (parisa) avec homœotéleutcs
et antithèses {^) semblent naître sous sa plume ; mais son
style ne perd rien de son naturel ni de sa vigueur, parce que,
pour lui, l'art reste toujours le serviteur de l'idée.
Nul doute qu'il n'ait donné le même soin au rythme, car,
depuis Cicéron, tous les ouvrages en style élevé (éloquence
et histoire) sont soumis aux lois de la prose métrique. S'adres-
sant au public instruit, il a compris, comme tous les auteurs
(') Voyez, par exemple, lescli. i, 12 et 2,8-9. H. Hoppe, Syfitax
und Slil des Tcriullian (1903), p. 158-168.
LES CLAUSULES MÉTRIQUES 399
chrétiens, la nécessité de mettre au service de la foi toutes
les ressources de l'art {^).
Pour l'établissement du texte de Tertullicn, il serait utile
de fixer, d'une manière précise, les règles qu'il a suivies. Et
il ne suffit pas de connaître ses clausules préférées ; il n'im-
porte pas moins de savoir quelles sont les clausules qu'il
tolère. En effet, une fois qu'il est constaté qu'une clausule,
même rare, se rencontre sous sa plume, la critique n'a pas
le droit de la rejeter systématiquement, parce que sa mission
n'est pas d'améliorer le rythme, des périodes de Tertullien,
mais simplement de restituer ce qu'il a écrit. Tertullien avait
ses raisons de ne pas amener toujours une de ses clausules
favorites : sans compter la variété du style, qu'il recherche,
l'idée et la grammaire ont leurs exigences. S. Augustin {^)
dira qu'il faut se garder de perdre en poids ce qu'on gagne en
nombre : dam additar numenis, pondus detraliatur. Sans doute,
il arrive à Tertullien, comme à Minucius Félix (^), comme à
tous les auteurs, de régler sur le rythme le choix et l'ordre
des mots C*) et parfois môme la syntaxe ; mais, aux clausules
qu'il affectionne, il ne sacrifie pas la pleine expression de
sa pensée.
Il n'existe aucun travail complet sur les clausules de V Apo-
logétique et nous ne pouvons pas entreprendre ce travail ici.
(') S.Augustin, De doctr. Christ., 4, 20 : Cwn pcr artcm rheto-
ricniii. et vera suadciitur et falsa, quis audct diccrc adversiis ))iendacinm
m defensoribus suis itierincm debcrc consistereverilatein. Cf. Lactant.,
Div. inst., 5,1 et 6,20. Arnob., 1,58. Hieronyni., Epist., 53,9.
C') De doctr. Christ., 4,20.
('^) A. Ausserer, De clausulis Minucituiis. Comm. Aenipontanae,
I. Innsbriick^ 1906. Voy. notre Edit. classique de Minucius Félix j
(Bruges, Desclée), p. 193-194.
(*) Quint., Inst. orat., 8, 6, 64 : nihil aliud potest servionemfacere
numcrosmn quaiii opportuna ordinis perinutatio. Cf. 9, 4, 28 et i i2ss.
S. Augustin, De doctr. Christ., 4,20 : quod facillime fit inutaiis qui-
busdain verbis quae tantundein significatione valent inutato eoruin quac
invenerit ordinc. . .
400 APPENDICE I
Nous devons nous contenter, pour le moment, de tirer quel-
ques conclusions des études que nous allons citer et de nos
observations personnelles.
Nous possédons deux statistiques des clausules de Ter-
tullien. Hoppe a publié le relevé des fins de chapitres (873)
dans tous les écrits de Tertullien ; Di Capua a dressé la liste
des fins de phrases (un bon millier) dans V Apologétique, d'après
la première édition de Rauschen. Ce sont des travaux très
utiles, mais ils n'ont pas l'ambition d'épuiser le sujet (i).
Ce n'est pas seulement la fin des chapitres et des périodes
qui est rythmée ; la fin des membres de phrase (membra,
xw)>a, cf. Cic, Orat., 211), suivis d'un repos, ont aussi une
forme rythmique. Il serait utile de rechercher si Tertullien
applique les mêmes règles, avec la même rigueur, dans l'in-
térieur d'une période qu'à la fin de ses périodes et de ses
chapitres et si l'alternance ou la répétition des clausules dans
la même période n'est pas soumise à certaines lois.
Le rythme de la prose métrique, différent de celui de la
poésie, est obtenu par une combinaison de crétiques et de
trochées. Les clausules préférées par Tertullien et par ses
contemporains sont, d'une manière générale, celles qu'affec-
tionnait déjà Cicéron (2). Les voici, d'après les statistiques
de Di Capua et de Hoppe. Nous indiquons les chiffres de
Di Capua et nous ferons suivre, entre parenthèses, ceux de
Hoppe. Nous citerons comme exemples des passages non
contestés ; sinon, nous aurons soin d'indiquer s'ils sont em-
pruntés à F ou à P.
(') H. Hoppe, Spiia.v nnd Siil des Tertullian (1903), p. 154-158.
F. Di Capua, Le Clausule uietriche neW Apolo^ctico (1912). Monza^
Tip. editr. Artigianelli, p. 17-37. Nous leur emprunterons la
stalislique des clausules, ainsi que plusieurs observations intéres-
santes.
(2) Th. Zielinski, Dus Clauselgeselz in Ciceros Redcn. Leipzig^
1904 (Philologus, Supplbd. 9, p. 589-875).
CLAUSULES NORMALES 401
Glausules normales ou fréquentes.
A. Un crétique et un trochée.
436 fois ou 42,5 0/0 (247 fois ou 29 %).
Forme pure, 302 fois ;
éssë dè\bébït 5^1
Chrlstïâ\7i(}rûin 1,1
nU7i creâs\sstïs (') 11^9
ne ïgnoraiâ dam\mtûr i;2
cum tutûrïbns | legûm 4^3
et nolsndO (2) dam\nasset 13^3
Formes dérivées par la résolution des longues, 134 fois
a") i""^ 1. résolue, 46 fois (9) q7iïâ revin\amhir 3,8
^eà pôiïits er\rons 37,10
a'^) 2® 1. résolue, 24 f. posse vïde\(mlu.r 29,3
\wQ.oxruptiMlï\laiis 48, 13
A*') !'■* et 2"^ 1. résolues, 10 f. sctlcra prohipéntem 2,6
vïlïa cohi\bentes 6,8
iltïque ptjtï\oriim il, 16
qiiui rehgi\psi 25,13
A^^) 3® 1. résolue, 54 f. (51) \^) promoveiit j aiiÎDtos t ,8
nomen m\}i6cî'mvi 2,5
diim sciimt [ pïiere 29,5
(') Le rythme amène souvent les formes contractes des verbes :
f{\de ne\garit 2,17; iudi\carit 4,6; comparasse 9, g; immolasse g ^i s .
Zielinski, p. 173-175. Di Oapua, p. 30.
(2) O final et i final sont parfois aitrégés pour le rythme : aufe'\rendo
fac\torem 11,3; o))î\nino da}ii\nare 2,2. Sur etsi vide\alur 17,2 (A''j,
voy. plus loin, p. 416,
(•^) Hoppe a compté cette clausule 33 fois avec la dernière syllabe
brève et 18 fois avec la dernière syllabe longue. Dans toute clausule,
la quantité de la syllabey?;/^/^' est indillérente, comme la syllabe
finale d'un vers.
26
402 APPENDICE 1
B. Deux crétiques.
142 fois ou 14 0/0 (108 fois ou 13 "/o)-
Forme pure, 98 fois :
cogéiur èt\ créderè 18,9
exnbsscïi ln\quirerc \, i
nûmïnïs \ crïmen-ësi (^) 2^20
proverbiis nique {^) ssn\iêntïïs 7^ 13
Formes dérivées, par la résolution des longues ou par
l'allongement de la brève du premier crétique, 44 fois :
b") i''^ longue résolue^ 9 fois mstîùa de\fendiiur 1^5
aut caiilhus ex\pomtis 9^7
b'^) 2'^ longue résolue^ 5 f. cttennï\tas sua 22, \
cuique sapï\cfitiae ^'j ,i
B") la i'"^ brève allongée^ 27 f. nisi inctsiuni \feceris 8^3
si tanti ae\ternitas 8^4
De/ (^) Ht de\votio 30^7 F
b'*) la !'"« 1. résolue et la i""* b. allongée^ 3 f.
C. Un double trochée.
340 fois ou 33 "/o (277 fois ou 32,5 <7o).
Forme pure, 256 fois :
obstruit de_/i//5?|rj«î!' i^i
dignitatem in cz.q.Iîs hà\bsrc 1,2
hominem wegâve\rTtïs (■*) 11,12
(^) Les formes m()aos3'llabiques du verbe smn s'attachent au mot
précédent.
(*) On a remarqué que que et ntque sont souvent emplo^'és pour
former la clausule. Ci. 7,13; 12,2; 13,4; 18,5; 21,11; 25,9; 31,3;
32,1; 39,11; 40,14; 45,6; 47, H-
(3) Sans èlision de Dei. Cf. 48,15 : et Dei \ hostes (A).
(*) La voyelle i reprend souvent sa quantité archaïque dans la
désinence du futur passé et du subj. parf. Cf. 50,12: immo\lave\-
ritis. l'eut-être, 37,5 : plu\res e\riinus. Zielinski, p. 184.
CLAUSULES NORMALES 403
Forme dérivée, 84 fois :
a) double spondée quasi detv\ménfô\maér(Jiil j^y
gaudeant crjg'fio\vïssc i,y
D. Un trochée suivi d'un crétique.
17 fois ou I '/a (').
Forme pure, 17 fois :
ut volunt cbmpa\rés sfios 4,1
alicuius ctmscï\énliat 1,3
damnatus f^rattfis agil 1,12
quod pQi-fscïl \ Ginn^a ii;5
nihil ûniBf'ê \ pûssïtis 43^2
l)oterant odïssë | sï scïânt 1^9
])at\nnf/}.r | nt fïant 12^2
Observations. 1° La statistique prouve que les ciausules
favorites de Tertullien sont 1) A, 2) C, 3) B. Ensemble, ces
trois ciausules forment 89,5 % des fins de phrase de l'Apolo-
gétique. Tert. n'aime pas autant la clausule D et il est parfois
facile de voir qu'il l'a évitée. Au ch. 1,8, l'ordre grammatical
aurait donné : cogno]visse \ gaudeant (D) ; il a préféré dire :
gaudeant] cogno\visse (C). Cependant la clausule D est attestée
assez souvent pour qu'on puisse la regarder comme normale
ou régulière, et, pour suspecter les passages qui la présentent,
il faut d'autres raisons {^).
C) Hoppe ne signale cette clausule que 7 fois et la scande comme
un crétique suivi d'un trocliée avec brQv^e irrationnelle (= A). Voy.
Syiitax und Stil, p. 157.
(-) On pourra comparer les proportions suivantes:
Discours de Cicéron Minucius Félix Apologétique
A
38°/o
48
42;5
B
21
27
14
C
35.5
22
33
D
1,5
2
1;5
96^/0 99 "/o 91 °/o
404 APPENDICE I
2° Les formes pures sont de beaucoup les plus fréquentes.
Sur 937 fins de périodes, on les rencontre 673 fois, soit 72 %
(ou 784 fois, soit 76,5 %, si l'on tient compte de B« et C").
3° Uélision ou synalèphe n'est pas rare dans la clausule :
A ojdisse d(um) i|giiorant 1^5
quod mal(am) a|gnoscat 1,11
poste(a) e|rasast 4^7
nominis | proeliumst 2^19
B se de(um) ex|istimat 30^7
a De(o) abjsolvimur 50,1 6
C de conscienti|a pro|bandast 1^5
re|gnasse ) certumst 25,10
Cependant, l'hiatus est également fréquent :
quia] iara o|derunt 1,9
dorai]nati|o est 2^14
40 Toute clausule comprend deux temps forts. Les plus
harmonieuses sont celles où la césure ou coupe des mots
fait concorder les deux temps forts avec l'accent tonique.
A necessi/r7/^ côn\fnsâin 5,<^
v&nisse non (')| creduni 21,15
B non reqxiiréndfis m\vè7itûs-tst (') 2,9
o-çtraitir ct\Christus-esi {^) 21,14
D \\')nérc\pbssHis 43,2
On peut appeler normale, la césure qui produit cette coïn-
cidence. Comme la plupart des auteurs (2), TertuUien néglige
souvent la césure normale ; il ne se soucie pas de faire coïn-
cider toujours le temps fort avec l'accent tonique.
(') Les formes monosyllabiques du verbe est, la négation non, etc.,
sont enclitiques ou proclitiques et s'attachent à un autre mot.
(2) S. Cyprien est plus soigneux. Dans son ix?à\h Ad Donatum,
Di Capua a compté 96 °/o de césures normales. Dans les premiers
chapitres de X Apologétique , il n'a trouvé que 64 °/o de césures nor-
males. Cf. E. De Jonge, Les clausules métriques de S. Cyprien (Lou-
vain, 1905), p. 60-71.
CLAUSULES NORMALES 405
A cessant cl o\disse 1,6
infan/és come\dissel 2^5
B maii/ô irii.ci\data sil 6;4
séd magis \ pubères 9^12
Les finales -sani, -tes et -to ont l'ictus sans avoir l'accent
tonique, et, dans magis, la syllabe accentuée n'a pas l'ictus.
La critique ne peut donc pas rejeter une clausule pour la
seule raison que l'ictus tombe sur une syllabe non accentuée,
même sur la syllabe finale.
50 La clausule C a aussi deux temps forts, mais elle doit
être étudiée à part : n'ayant que quatre syllabes, elle a rare-
ment deux accents toniques. Zielinski a cherché à prouver
qu'elle est précédée régulièrement d'un crétique qui lui ser-
virait de base, S. Cyprien aime à la compléter par l'accent
tonique du mot pénultième {^). Tertullien fait souvent de
même, sans s'astreindre à une règle.
Sous sa forme la plus harmonieuse, la plus parfaite, le
ditrochée (ou dispondée) est précédé d'un crétique :
gand^rin{\ cogno\visse 1^8
de ^xwdBnlïbns\ tiidi\cantes, 1,8
éi q7tïdeni\ taétrï\bre 5,5
Mais on le trouve aussi précédé
d'un dactyle quod xevï?icërïs] igno\rare 1,13
d'un spondée quantf\ dcnb\taimi.r ï,b F
d'un molosse dcimnribûnt\ veri\tatem i;3
d'un choriambe aemu]ati6?ie ïiëmm] Christi\aîius 2,17
d'un dispondée 2ià anrss\vBstras'\ perve\nirc 1,1
d'un trochée vevecniidï\am pro\ciirent j,!
pÔssu]mus vi\deri \o,<^
m d(f\os con\secreiit 10,10. Etc.
d'un ditrochée de cènscïé?iiï\a pro\bandast i,S
(^) Ed. De ionge, Les clausules /néinques de S. Cyprien, p. 68.
406 APPENDICE I
Clausules anormales ou tolérées ou rares.
Nous venons de voir que les clausules, que nous avons
appelées normales ou régulières, forment 91 % des fins des
phrases de V Apologétique. Il reste 9 % de clausules qui ne
sont pas toutes fausses, mais exceptionnelles ou anormales
ou tolérées. La clausule n'est fausse que s'il y a absence com-
plète de rythme ; en ce cas, il y a une évidente altération du
iQ.xiQ.. Les clausules anormales sont celles que Tertullien ne
recherche pas, qu'il évite le plus souvent, mais qu'il tolère
parfois. La critique ne peut pas les condamner en principe,
sans une antre raison que leur rareté. Il importe donc de
rechercher quelles sont les clausules irrégulières que Tert.
a tolérées. 11 faudrait une étude complète des périodes de
V Apologétique et de leurs membres pour résoudre cette ques-
tion définitivement. Nous devons nous borner à quelques
observations, qu'une étude approfondie viendra probable-
ment confirmer.
Les clausules anormales ne sont que des formes rares,
exceptionnelles, des quatre clausules normales. Tert. en use
rarement, parce qu'il les trouve imparfaites, inférieures,
mauvaises. Elles sont moins harmonieuses, parce que l'oreille
a plus de peine à percevoir leur rythme compliqué. En effet,
l'irrégularité peut venir I) de la résolution anormale d'une
longue et II) de la quantité irrationnelle.
I. Résolution. Aux formes dérivées que nous avons citées
plus haut et que leur fréquence fait regarder comme nor-
males, on peut ajouter les suivantes, qui sont plus rares, mais
que Tertullien paraît avoir tolérées :
A. Un crétique et un trochée (3 longues).
A'') i^^ et 3^1. résolues (4 f.) ghitre aim j sccUre 9^7
alïqicid e\rïpïtis 14^ i
dae[///o«z« non \fngïnnt 46^5 F
A*) 2<= et 3M. résolues lex hùi prô\Mbrnt 4;5 P
CLAUSULES ANORMALES 407
B. Deux crétiques (4 longues).
b") 1"^ et 2'- I. résolues :\h'io\\7J^i'c iiisï iic\g((ven'l 2,\(i
isto tjpijre in(mï\feslius 22^7
li') 4" longue résolue a vohis, Dens \ ncglcgUûr 40, 15 F
15-) 3*-' longue résolue morluo \pt)tïoy est 28^3 F
C. Un ditrocliée ou dispondée.
Ditroclice (2 lonj;an3s) :
c'') 1'" longue résolue malcrïâ \ matrix 21,12 F
râpcrc I vcllct 14,2 P
simulacro tniiï\ari 16,3
Romanae rclîgi\onis 24,1
religion is pruprïc\ taie 24, 9
C') 2® longue résolue si res n\&rétur\ odïum 1,4
\\\ nbs pro\1iihïtam 2,6
Dispondée (4 longues) :
c^) i*"" longue résolue audir^ Iâbo\râiis 2,13 F
s^iwguïnïs a\guoscai 9,1 S
c") 2^ longue résolue (dactyle et spondée ou fin d'hexamètre) :
(in merc\âlfir 1,4 (voy. p. 416)
c^) 3" longue résolue congxGg^t\ônsm\fàcïm7is 39,2 F
D. Un trochée et un crétique.
d") spondée et crétique vel âstris \ imputant \,\i
censura? cïi'\cnmvenis 2,8
prô csr\t0 sciant 2, 18
pmdBns I Et hônns 2,, i
ds cnu\/0 rnit 4,5
d'') dactyle et crétique de praét^rï^tu rSuin 2,17
d'issÔ/vcrS I nÔ7i licèt 9,8
^(int dtjmini sut 1 3, 8 .
medici;/r75 valciudininn 22,11
])voh<it\On'S fi deliiis 23,7
II, Quantité irrationnelle. Au temps fort, une syllabe brève
joue quelquefois le rôle d'une longue ; au temps faible, une
408 APPENDICE I
longue joue quelquefois le rôle d'une brève. Voici des cas
signalés par Hoppe, p. 157-158:
A« l'c 1. (6 fois) no/ïlra \ care/iiDe idol., 17, p. 128^66
A'' i^e et 3*^ 1, (4 f.) cum domino \ trïiiiiis De res ; 4I; p. 86; 1 1
B'' 1'" et 3^1. ornrimcn\ia {}) strnii De cuit, feni.; 1,6
B' la 2"''l. (7 f.) ïgnonmiià (') | scilicct \,\
sanguine (-) | prolunnt 9^5
Voilà les faits, dont il faut tirer des règles pour la critique
du texte. Il y a certaines clausules que Tert. recherche et il
y en a d'autres qu'il tolère. On peut dire que les unes sont
fréquentes et que les autres sont rares ou même très rares.
On peut dire aussi que les unes sont excellentes ou bonnes et
les autres inférieures ou défectueuses ou mauvaises, au juge-
ment même de Tertullien ; mais, comme il est prouvé qu'il
a toléré les mauvaises, on ne peut pas les rejeter en principe,
quand les manuscrits sont d'accord.
« Rare )>et même « mauvais » dans le sens que nous venons
de dire, ne signifie pas « inadmissible, inacceptable ».
11 en va autrement quand les manuscrits sont en désaccord
et qu'il faut choisir entre les variantes qu'ils présentent.
Pour nous, la question se pose ordinairement ainsi : Quand
F et P nous offrent des clausules différentes, peut-on décider
lequel des deux a conservé le texte authentique ?
Quatre cas peuvent se présenter :
1» Les clausules de F et de P sont équivalentes.
a) Elles sont normales, régulières l'une et l'autre. Alors, il n'y
a pas de conclusion possible (nous négligeons, pour le moment,
les arguments tirés du sens et de la grammaire). Ainsi, im-
nw\letis 6,10 F (C) et immola\retis P (A) donnent des clausules
équivalentes. 11 y a évidemment des degrés dans la valeur
des clausules normales (l'une est plus fréquente que l'autre),
mais il serait imprudent d'en tenir compte.
b) Elles sont l'une et l'autre irrégulières et rares, c'est-à-
(') a final allongé devant si et se, Zielinski, p. 175.
(2) £ final allongé devant J>r. Id., p. 174.
CLAUSULES ANORMALES 409
dire, mauvaises. Dans ce cas, elles sont suspectes l'une et
l'autre, mais ne peuvent être rejetées parla seule raison qu'elles
sont rares ou très rares. On sera tenté de préférer la moins
rare, mais la rareté plus ou moins grande ne sera pas un argu-
ment décisif,
2» Les clausules de F et de P ne sont pas équivalentes.
a) L'une est normale, régulière et fréquente, tandis que
l'autre est anormale et rare. On est tenté de préférer la pre-
mière et s'il n'intervient aucune autre raison (de sens ou de
grammaire ou de supériorité générale d'un ms sur l'autre),
le calcul de probabilité plaidera évidemment en faveur de
la clausule normale (91 % contre 9 %), mais il ne donnera
pas de certitude absolue, La statistique montre, d'une part,
que, plus une clausule est fréquente et parfaite, plus elle a
de chance d'être authentique ; mais, d'autre part, il se peut
que, dans le cas en litige, TertuUien ait préféré une clausule
de valeur inférieure.
b) L'une des deux traditions (F ou P) donne une clausule
normale ou même une clausule ano'male et rare, mais attes-
tée ; l'autre donne une clausule fausse, c'est-à-dire manque
absolument de rythme. Ce cas est rare, mais c'est le seul qui
permette une conclusion tout à fait ferme.
Quand nous avons le choix entre deux clausules et que la
métrique seule peut guider notre choix, nous aurons neuf chances
sur dix d'être dans le vrai en nous prononçant pour celle qui
est la plus parfaite. En cas d'équivalence absolue, on pré-
férera celle que fournit la tradition reconnue la plus pure
dans toute son étendue ou dans le contexte. F nous paraît
généralement beaucoup mieux conservé que P ; mais, dans
certains passages, F est altéré, tandis que P est pur ou du
moins plus pur que F.
Heureusement, quand la clausule paraît suspecte soit
dans P, soit dans F ou dans tous les deux, les arguments tirés
du sens et de la grammaire viennent presque toujours con-
firmer les présomptions tirées de la métrique. Dans ce cas,
la métrique, le sens et la grammaire fournissent ensemble
un faisceau de preuves capables de donner la certitude et
d'emporter la conviction.
410 APPENDICE I
Le problème à résoudre peut se poser autrement : ni F
ni P ne fournissent une clausule acceptable, c'est-à-dire qui
réponde à la fois aux exigences de la métrique, du sens et
de la grammaire, il ne s'agit plus de choisir, mais de trouver
l'émendation. C'est l'affaire de la critique conjecturale. 11 est
clair que l'émendation doit fournir une des clausules dont
Tert. a fait usage. De plus, comme on compte dans V Apolo-
gétique 91 % de clausules normales, plus la clausule propo-
sée sera régulière, plus elle paraîtra vraisemblable. Toute
conjecture qui donnera une clausule suspecte sera suspecte
elle-même.
Passons à l'application.
Clausules fausses.
Voici un exemple de F et un de P :
16,14 adiré licitum erat F; a]dire |]icitum P (O'). — Tertullien
aime l'ellipse, mais il sous-entend rarement l'imparfait du verbe
cssc. Ici, l'ellipse peut être due aux exigences du rythme.
2,20 si nullius criminis nomine reus est PM ; si nullius] cri-
minisl nomen est F (B). Voy, p. 162.
Clausules équivalentes.
Comme nous venons de voir, l'équivalence est rarement
complète. Généralement, le choix sera dicté par le sens ou
par la grammaire.
Nous renvoyons aux pages où les leçons ont été discutées. Nous
imprimons en italique l'initiale du ms qui nous paraît donner la
meilleure {F on P).
1,3 damjnare non | polerant F (A''); damjnare non | possint P
(A). — Le sens est : quod si ajidtsseiit (ni auciiaiil, davinarc 11071
potcrant (= poiuissciil) ou possint. Nous préférons no7i polerant.,
qui insiste sur la non-réalité. C'est la lectio difficilior, que P aura
remplacée ])ar possint.
1,10 ad majlum refor|mantiir 7^ (A): ad majlum ])erjformantur P
(O'); p. 147 •
CLAUSULES ÉQUIVALENTES 411
2,5 gloria fu|isset F (A'') ; praesidis | gloria P (13). L'amour de Icrl.
pour l'ellipse et pour la concision n'est pas une raison décisive
de préférer P, Voy. p. 85.
2,19 confessijone damnet F (C) ; confessijone dam|netur P (A) ;
p. 101.
3.3 in sufiVagiJum enarjrantes F (O') ; in suf]fragiuni in|pingunl P
(A); p. 40.
4.4 licejre quia non | vultis /^(A''); li]c.ere cpiia | vultis P (A'').
4.5 noluisjlis li|cere F (C) ; non vul]tis li|cereP (C).
4.5 esse, quod] lex pro|iiibuit F (C'') ; quod] lex tua pro]liibuit P
(A').
5;7 so]li exse|quuntur F {C)) soli exjercent P (O'); P- î75-
6, 10 vestras] immo|letis F (C) ; immola|retis P (A) ; p. 113.
7.6 divinijtas ser|vatur F (C"); di]vina ser|vantur 7-" (A); p. 117.
9,5 proseca|batur /''(A); Mercurio] prose|catur P (C) ; p. 184.
9.7 de ne]cis génère | dilTert 7^ (A''); de ge]nere necis | dillert P
(A");p". 87.
9,9 fabulis I legite F (A''); ferculis | legite /"(A''); p. 102.
10,2 esse co|gnovinius 7^(13) ; esse co|gnoscimus P (B); p. 187. I,e
passé va mieux avec colère debuisseiil.
10.2 quos conjstaret | esse F{C); constaret il]los deos | esse P (A).
Le mot deos est de trop, car il s'agit de la non-existence des dieux
{quia putarent non esse) et non de leur qualité de dieux.
10.3 provo|camus a] vobis | ipsis F (O^) ; provojcamus a | vobis P
(A).
11,13 ^on potes]tis ne|gare F (C) ; non possijiis ne|gare P (C) ;
p. 192.
13.1 esse] negle|galis (C) — timetis] destru|atis (C) — vindicalis]
in]u|datis (C") F; esse ne|glegitis (A'') — time]tis de|slruitis
(C') — vindi]catis, in|luditis (B) P; p. 195. F donne trois fois
la clausule C.
13,9 Cerejres ado|ratis F (A); Diajnas adojratis P (A); p. 199.
14.2 râpera volu|isset F (A'-); Diomede] rapere | vellet P (C');
p. 201.
14.3 dilec|tarum ami|carum F (A) ; iamjpridem ami|carum P (A) ;
p. 205.
14,6 alicuius Dei] praefa|rentur F (O^) ; alicuius De]i praejfentur P
(O') ; p. 205. Dans F, le dispondée est précédé d'un crétique
(p. 405).
412 APPENDICE I
14,8 Socrati] reddi|derunt -^(C); Socrati | reddit P (A); p. 206.
Même observation.
14,8 capitijbus in|ducit F(A'^); capilibus] inlro|ducit P (C); p. 208.
15.6 fa]stigium | adsolant F (B'j; vestigija obsu|letant P (C). La
leçon de F, qui a pour elle le sens et la grammaire (p. 2 1 2), peut
se scander sans élision avec une longue in'ationnelle. Avec élision,
elle donnerait la clausule D.
16,2 putavit ex]termi|natos F (C) ; pu]tavit ex|torres P (A).
20.1 exitus I rerum F (A); saeculum et | exitus P (B); p. 227.
20.2 terrae vo]rarent | urbes F (O') ; insulas] maria fraujdarenl F
(A"); bella] dilani|arent F (C<i). — terjrae vorant | urbes P (A) ;
insujlas maria | fraudant F (A^^); bella di|laniant Z' (A*') ; p. 227.
1' a trois formes régulières de A.
21,4 de Dei] vocibus | adfuit F (B'); de Dei | vocibus P (B); p. 233.
21,14 spiritu I structa /^ (A) ; spiritu in|structa P (A); p. 244,
21.16 meri|tum fuit] delic|torum i^ (C») ; fuit de]lictum e|orum P
(C); p. 246.
21.17 spiritu I fultum F(A); et l'aceret] et fe|cisset P(C'''); p. 246.
21. 18 multijtudo con|flueret F{A^); mu]ti]tudo delflecteret P(B);
p. 247.
21,21 exuvijas sepul|lurae i^ (A) ; exuvijas se|pulti P (C) ; p. 248.
21.28 et co]li Deus| voluit7^(A'i); et co]li De|us-vult P (C); p. 250.
21.29 gentijum con|vertar 7^(0") ; gentium a|spiciam P (A^').
22.7 falsae divi]nati|onis F (C) ; prae]stigiis falsis P (A). Tert.
insiste sur la fausse divination que l'on prête aux démons et qui
leur sert à attirer les hommes à eux. Il y a antithèse entre divi-
ni/a/is et divinationis, comme au chap. 20,3 : tcstimoniuin divini-
tiitis Veritas divinationis.
23,2 potes]tate crejdenda est F (A): potes]tate cre|dendum est
P (A).
23,4 sub tribujnali | vestro F (C") ; sub tribujnalibus | vestris P
(A); p. 263.
23,4 de]um quod in | falso est 7^ (A) ; alibi de]um de | falso P(O');
p. 264.
23,12 et Dei | omnia 7^(B); et Dei | filius P (B) ; p. 265.
25,2 ela|tos et im|positos F (A''); sublimijtatis e|latos P (A);
p. 278.
26.2 virgines Vestae /^ (A) ; viroijnes Ves|tales P (C^'); p. 286.
26.3 deli]quisset in | Christum F (A) ; ultimo in | Christum P
(A); p. 77-
CLAUSULES ÉQUIVALENTES 413
27.6 parent] et suc|cedunt i^ (C") ; parent et | succidunt P (B") ;
p. 289.
27.7 praelia|turi F (corrigé) (A) ; erumpunt] adver|sus nos P (Cn);
p. 289.
27,7 iam per|isse 7^ (C) ; impares j se esse P (A); p. 291.
28,3 non omni] mortuo | potior est F (B-) ; non] mortuo | potier
P (Art); p. 84.
30,1 ceteros | mallent F (A); ceteros j malunt P (A). — Tert.
affirme catégoriquement que les empereurs préfèrent que le Dieu
suprême leur soit propice, plutôt que les autres, La suite le
prouve : Sciant quis illis dedcrtt impcruiin , etc. Mallent est une
correction erronée d'un chrétien, qui s'est dit que Dieu ne peut
pas être propice aux empereurs.
35,11 vestibula] nubi|]abant F (C); ves]tibula nebu|labant P (A"),
p. 325.
36,1 Roma]ni vojcantur 7^(C); R()ma]ni voca|bantur P (A); p. 326.
37.3 di]vinitas | sectae F (A); vindicetur di]vina 1 secta P (C) ;
P- 330.
38,1 racti|onibus] praeca'vetur F (C) ; factioni]bus time|ri solet
P(B); p. 332.
39.1 verita]tem reve|laverim F (B) ; refutave]rim, bona os|tendam
P(A); p. 337.
39.2 precationibus] ambi|amus /<' (C) ; ambi]amus o|rantes P (A);
p. 78.
39.6 ex causa Dei sectae] conflic|tatur F (C"') ; ex cau]sa Dei |
sectae P (A) ; p. 339.
39.7 alterutrum pa]rati|ores F (C) ; par]atio|res erunt P (B),
40,6 najti mora|tique sunt /'' (B) ; mortu|ique sunt P (D) ; p. 119.
40,10 requisi]vit ti|mendum F (C) ; non requi|sivit P (A) ; p. 349.
41.4 in casti]gati|onem F (C); a Deo ob'|Veniant P (A^') ; p. 110.
45,1 doc]tore prae|ceptam F (A); dispec]tore man|datam P (A) ;
p. I 10.
45.4 for]mam mu|tatas F (C") ; formam] mutu|atas P (C) ; p. 125.
46.5 dae]monia non | fugiunt /'' (Ae); daemonia | non fugat P (B'^);
p. 365.
46.17 perseve]rant a|pud vos F{C)', sapientiae] persejverant P (C) ;
p. 52.
46.18 negotiator] et sa]lutis [vitae] F (C) ; iiegoti]ator et [ vitae P
(A). Dans F, salutis est une glose; voy. p. 67.
47,9 vindicet] verijlatis i'' (C); iudicet] verijlatem P(C); p. 376,
414 APPENDICE I
47.10 deprehen|duiîtur F (A); commentatojres probajbuntur P
(A).
47.11 sibi poti]us fidem | râpèrent F(A'^); eam sibi] polius e|viii-
cerenl P (B-'')-
47,14 quoque fi]dem inve|nerunt F (C") ; qiioque fidem in|ve-
niunt P (A'").
48,9 re]degcrit, | rcddet F(A); redegejrit, redjdet teP((/'); p. 388.
49,3 et impuni]tis ut | noxiis F (D'') ; et impuni]tis ut in[noxiis
/'(B);p. 392.
50,5 in]cendiis | donat F (A); incendijis do|navit P (O') ; p. 393.
50,5 castitatis] et pudilcitiae F (A'^) ; praeconium] casti|tatis P
(C) ; p. 393.
50,8 saevijentis | exspuit F (D); saevijentis ex|pellit P (A).
50.12 ad leojnem pu|tastis F (C) ; polius] quani ad le[onem P
(Q; P- 397.
La liste qui précède comprend 76 passages répartis sur
toutes les parties de V Apologétique. Nous avons adopté la
leçon de F dans 53 cas, celle de P dans 10; dans 13 cas, on
peut hésiter entre F et P.
De ces chiffres, on peut tirer deux conclusions intéressantes.
La première est que F est de beaucoup moins altéré que P.
La deuxième est relative à l'âge des interpolateurs de F et
de P ; en effet, la plupart de ces variantes viennent d'un rema-
niement intentionnel. Celles qu'on peut imputer à la dis-
traction des scribes sont peu nombreuses. Le rcmanieur de
P, comme celui de F, paraissent avoir eu le souci d'amener une
clausule équivalente ou à peu près équivalente à celle qu'ils
trouvaient dans le texte. Ils auraient donc opéré à une époque
oii les écoles de rhétorique existaient encore, c'est-à-dire, bien
avant l'époque où F (IX^ à X^ siècle) (^) et P (X'' siècle)
furent écrits.
Clausules non équivalentes.
A une clausule normale de F vient s'opposer une clausule
anormale ou très rare de P ou inversement. Les listes que
(') Voy. ci-dessus, p. 11, n. 2.
CLAUSULES NON ÉQUIVALENTES 415
nous allons dresser niontreroiit que l'on ne se trompera pas
souvent en donnant la préférence à la clausule régulière. Nos
exemples concernent les clausules C et D.
C.
Prenons C^, le double spondée, a) La première loiif^iie peui-
elle être résolue (Cd) ?
2.10 exquijritis ad|missi F (O') ; exiorjquetis admissi P(A). Dans
tout ce passage (2,10-15), il s'agit de l'emploi légal de la torture
judiciaire pour arracher un aveu à l'accusé fe.xtorquerej et pas
seulement de l'enquête (exquirere) .
2,13 audi]re labojratis F (O'j ; elabojratis aujdire P (A). Peut-être
faut-il lire: audire elahoralis (haplographie de c), Voy. p. 86.
3,7 et malam | sectam F (A) ; et ita] malum et auc|torem P (C).
Si Vautcnr d'une secte est mauvais, la secte est mauvaise et son
iioin est mauvais. L'interpolateur part de la secte.
4,5 quia non dejbet li|cere F {C) ; quia non | débet P (C). Tert.
répète à dessein licerc dans tout ce passage, parce qu'il réfute la
fin de non-recevoir tirée de la loi : Non licci esse vos ! Voy. p. 171.
4.11 damnantur] licet et | damnent F (C) ; damnan]tur licet|dam-
nent P (A). Et peut venir d'une dittographie.
10,10 quorum] genus in in|certost F (A") ; quorum genus in|cer-
tumst P (C), p. 189.
12.6 peroranjtem pro|betis 7^(C) ; perorantem] reprehen|distis P
(C). On pourrait comprendre depre/icn\distis {A), ^'oy. p. 194.
21.7 de conjcubitu | tauri F (O'). Glose propre à F (p. 64).
2 1,12 majteria | matrix F (C^) ; majteriae | matrix P (Q') ; p, 239.
27,5 etiam] timor in|spirat F (O') ; etijam timor | spiral /-• (A)
p. 245, n.
39,18 scijant Deum au|dire F (A); sciant] dominum au|dire P (Q')
p. 119.
40,12 cuius bojnis in|grata est 7^ (C^) ; cu|ius et ingrata P (C')
p. 350.
46,18 integrator] veri|tatis F(C); integrajtor et ex|pressor P (C'^')
p. 369.
On voit tjue de ces 13 exemples de Cd, aucun ne peut être
maintenu : le sens et la grammaire confirment les suspicions
que cette clausule suscite par sa rareté.
416 APPENDICE I
b) Le deuxième trochée peut-il devenir tribraque (Cd) ? Voici
deux exemples :
37,5 provinciae] plures | erinius F (Cf) (i).
39,2 congregatijonem | facimus F (C^); congre]gati|onem P (C).
Ces exemples sont incertains. Dans le premier, F, qui a
seul conservé la phrase, n'a pas erimus, mais erunt. Voy. p. 331.
Dans le second, facimus ressemble à une cheville. Voy. p. 338.
c) La deuxième longue peut-elle être dissoute (C^), de sorte
qu'on aurait un dactyle et un spondée (ou trochée), c'est-à-
dire une fin d'hexamètre (clausula heroica) ?
Les auteurs proscrivent cette clausule, parce que le rythme
de la prose doit différer de celui des vers. On la rencontre
107 fois (6 %) dans les discours de Cicéron (Zielinski, p. 163-
167), mais Quintilien, Inst. or., 9, 4, 102, dit expressément :
Ne dactylus quidem spondeo bene praeponitur, quia finem
versus damnamus in fine orationis.
Hoppe (p. 158) l'a trouvée 20 fois à la fin des chapitres de
Tertullien et Di Capua (p. 30) assure qu'il l'a rencontrée dix
fois à la fin d'une période. L'un et l'autre nous avertissent
que, parmi ces passages, il y en a de contestés. Mais il semble
certain que Tert. a toléré la clausula heroica, et, à l'intérieur
de ses périodes, il a pu se montrer plus accueillant encore
pour cette proscrite qu'à la fin des chapitres ou des phrases.
Nous trouvons, en effet, le dactyle suivi d'un spondée dans
des passages siàrs :
1,4 cognoscitur] an inere|atur
4,6 resipuisjse in repro|banda
8,4 vivis in | aevuni (2)
17.2 et]si vide|atur {^)
27.3 deici]endam opejretur
39,14 crastina di]e morilturi
— quasi nun]quam mon|turi P
— quasi nunjquam mori|antur F
48,2 non ejrunt alijunde F
C) Il faut peut-être scander : plii\rês erimus. Voy. p. 402, n. 4.
(") A la page 122, nous avons été trop sévère pour cette clausule.
("*) Ui Capua, p. 31, scande : etsi vide\atur(^h}^). Ci-dessus, p. 401.
CLAUSULES NON ÉQUIVALENTES 417
Il est remarquable que toutes ces clausules, attestées par
l'accord des niss, aient une césure après la première longue,
ce qui est contraire à la structure de l'hexamètre classique.
Il est probable que Tert. regardait cette clausule comme une
variété du ditrochée ou dispondée. Sans la rechercher, il ne
se faisait pas scrupule de l'employer.
Nous la rencontrons dans beaucoup de passages où F et
P diffèrent. Il serait aventureux de la rejeter en principe.
Heureusement, le sens et la grammaire nous viennent en
aide.
Passages où F a une fin d'hexamètre :
4,2 admittentes] inveni|untur. — Lisez : inve\7iiinnr {^. 167).
9,20 nunc] de niani|festis. — P a : de manifesti]oribus dicàm (A).
Cf. 6,11.
19,5 longum] dinume|rare. — Voy. p. 225.
20,2 bella] dilam'larent. — Voy. p. 227.
33.4 hominem] te esse me|niento. — Esse manque dans P.
46,18 fac]loruin ()pe|ra(or. — Voy. p. 369.
48,2 cei'te] condicilonem. — etsi] non ef|figieni P (O-).
Deux de ces passages (4,2 et 20,2) sont certainement cor-
rompus.
Passages où P a une fin d'hexamètre :
7,13 ex dispositi]one najturae. — Voy. p. 180.
12.7 patijtur quia | non est. — Voy. p. 195.
16,2 indicibus] fontibus | usos. — Voy. p. 115. ¥ a. : in\didbus']
fontis I usos (C).
21.8 sunt] numina | vestra. — F a : Jm'\inana \ ves ira (C). Y oy. p. 235.
21,22 afijde revo|care. — Fa : a fi\de avo\care (C). Voy. p. 248.
26,2 exstrue|retur. — Fa : exsiruerct. Voy. p. 286.
40,2 a|scendit in | arva. — F a : asccnditin riira. Voy. p. 348.
42.9 ceterajrum rati|onum. — Fa: rationum se\curi\tate (C). Voy.
p. 52.
46.5 in] fine iu|bebat. — F a : in fine miuidabat . Yoy. p. 365.
Sont certainement ou probablement altérés : 7,13; 16,2; 21,8;
21,22, 26,2; 42,9. En revanche, au ch. 12,7, le sens confirme la
leçon de P. Aux ch. 40,2 et 46,5, on peut hésiter.
Il résulte de là qu'il faut se défier des variantes qui donnent
une fin d'hexamètre, mais qu'on ne peut pas proscrire cette
27
418 APPENDICE I
clausule systématiquement. Voici un passage, où la correc-
tion, qui nous paraît nécessaire (voy. p. 326) amène une fin
d'hexamètre : 36,1 : qui Romà\ni habe\antur {habebantm FP).
D.
a) Crétique final précédé d'un trochée (D) :
15,6 fa]stigi|um adsolant i^(D); vesligia] obso|letant P(C); p. 212.
Sur une autre scansion possible, voy. p. 412.
17.4 ipsius] testi|monio F (D]; testi|monio] coniprojbemus P (C) ;
p. 41.
40,9 Senones] occupa|verunt *F(A); Senones] occu|paverant P(D);
p. 120.
41.3 indul]gens et in|cessens F (A); induljgens et | increpans P
(D); p. 354.
48,13 cultojres a|pud Deum F (D); a]pud Deuni | semper P (A)
p. 389.
50.5 matrijmonium e|vadit F (A); matri]moni|um dédit P (D)
P- 393.
Il ne subsiste qu'un seul exemple de cette clausule (15,6)
encore la scansion n'est pas sûre. On voit que, bien qu'elle
soit régulière, elle doit être suspecte en cas de concurrence
à cause de sa rareté, elle doit céder le pas à A, B et C.
b) Crétique final précédé d'un spondée (C^).
1,8 quam inmusijcos de | musicis P (D''') ; de pru|dentibus] iudi|can-
tes F (C) ; p. 144. F donne la forme la plus parfaite de C : un
ditrochée précédé d'un crétique (et non d'un dactyle, comme
nous avons dit à la p. 145).
8,7 praeparanda] sint di|scribere FPM (D'»); p. 183. Douteux.
11.4 in Tartajrum de|merserint F (D») ; in] Tartarum | merserint
P(B).
13.2 non potest | esse F (A); non pot]est pro|cedere P (D»); p. 196.
Lisez : non potest. Voy. p. 196.
13.6 pro adijtu sa|crarii F (D") ; pro aditu | sacri P (C'i) ; p. 197.
16,8 intesltinasint F (D"); intestina]sint tropae|orum P(A); p. 89.
20.3 provijdentiae I scripta-sunt /''(H); provijdenter | scripta sunt
P (D'O; p. 228.
21,3 de] Christo ut | de Deo *F (D"); de Chi-is|to ut Deo P (D'').
21,3 de Deo alijter sumus /''(B'>) ; ali]ter praeisumimus (D"); p. 232.
CLAUSULES NON ÉQUIVALENTES 419
27.6 parent] et suc|cedunt i^(C'''); pa]rent et | succidunt P (D");
p, 289.
29,3 cuius et nunc] et tolti sumus F (D») ; cuius] et tojti-sunt P
(C»);p. 65.
45.7 ipse qui | iudicat F {II)) ipse qui ti]mentes | iudicat P (D") ;
p. 79.
Voilà 12 passages qui donnent D", soit dans F, soit dans P.
Dans aucun, cette clausule ne s'impose ; dans la plupart,
elle est contraire au sens et à la grammaire.
c) Crétiqiie final précédé d'un anapeste (D^) :
23,18 per Christum et] in Deuni | credimus i^ (B); in Cliristo]
domino | credimus P (D''); p. 274.
42^,2 cohabi]tamus hoc | saeculum F{B); cohabita]mus in hoc |saeculo
P(D«);p. 355.
La clausule D^ ne peut se défendre dans aucun de ces deux
passages.
On voit que, dans la plupart des cas douteux, le sens et
la grammaire plaident en faveur de la clausule normale et
confirment les conclusions que nous avons tirées de la sta-
tistique : en cas de concurrence, les leçons qui offrent des
clausules rares, anormales, doivent être regardées comme
suspectes.
420
APPENDICE IL
Collation de Modius.
Modius reproduit souvent des phrases entières ou des
parties de phrases du Codex Fuldensis. Un apparat cri-
tique, qui n'a d'autre but que de relever les différences
des manuscrits, ne saurait donner une idée exacte et
complète de ce que sa collation nous a conservé du pré-
cieux manuscrit de Fulda.
D'autre part, l'impression de Junius doit exciter notre
défiance : nous croyons l'avoir prouvé dans notre intro-
duction. Elle ne donne exactement ni le texte de De la
Barre, ni les variantes de Modius. Enfin, Modius lui-
même présente parfois ses variantes de telle façon qu'elles
peuvent induire en erreur. Pour mettre le lecteur en
garde contre Junius et contre Modius lui-même, nous
avons jugé nécessaire d'annoter la collation du Codex
Fuldensis.
Pour ces raisons, nous avons cru rendre service en
réimprimant ici toute cette collation, telle que Junius
l'a publiée, mais confrontée avec la copie de Brème (Br.)
et avec le texte de De la Barre (Barr.), et accompagnée
d'un commentaire. Voy. ci-dessus, p. 17.
COLLATION DE MODIUS : I 421
In TertuUiani Apologeticum
Lectioues varia e
CAP. I.
1. [Cap. I. Pag. IX] (i) Et aedito ipso fere vertice] Ms.
Et edito, in ipso fere vert, quod probo.
Palam describerc] ms. Palain dispicere.
Ad hanc solam speciem] ms. ad hanc solam tantum sp. non
probo.
ludicijs (1) nimis operata] ms. iudicijs animis operata infes-
tatio sectae huiiis os obstruit defensioni, liceat. etc. Illud, ani-
mis, non probo : caetera per me terantur (2) licet.
Ici, Br a cette variaiite :
Quid hinc dépérit] ms. quid hic dep.
3. [Pag. X] An hoc magis] ms. deest to An.
Damnare non possint] ms. d. n. poterant. fortasse poterunt.
4. Hanc itaque primam] ms. hanc igitur pr.
Odium erga nomen Christianum] ms. odij erga nomen
Christianonwi.
5. Propterea oderint homines, quia] ms. propterea oderunt,
quia, non maie.
6. Quia ignorabant quale esset, quod oderant, simul ut
desinant ignorare cessent et odisse] ms. quia ignorabant,
simul desinunt ignorare, cessant et odisse.
Quanti et denotantur] ms. quanti denotamur.
(^) Chapitre et page de l'édition de Junius.
Cap. I. (i) hiJiciis Barr. Br. — (2) Faute d'impression pouv/eran-
422 APPENDICE II
Ici, Br a ces deux variantes :
Civitatem etc ] ms, obsessam vociferantnr civitatem.
Et dignitatem] ms. etiam dignitatem trans.
8. [Pag. XI] Nec tamen hoc ipso modo] ms. nec tamen ex
hoc ipso m.
Proprius (3) expediri] ms. experiri.
Urbana curiositas] ms. curiositas liitmana.
Denotasset imprudentes de prudentibus] ms, denotasset.
Imprudentes de prudentibus iudicantes nialunt qui iam oderunt.
Adeo praeiudicant id esse quod non poterant odisse si sciant,
quando si nullum odii merituni deprehendatur, optimum utique
etc. mutilum.
9. Odii detrahatur] ms. odio detrali.
lustitiae ipsiiis auctoritate (4)] m. iustitiae ipsius gloriae.
Sed non ideo, inquit, bonum praeiudicatur, quia multos, etc.
10. Malum praeformantur] ms. m. reformantur.
11. Trépidant depraehensi (5)] ms. trep. adprehensi.
Condemnati moerent, dinum. etc.] ms. damnati m. enu-
merant in semetipsos mentis malae ignaviam, vel fato.
Quia malum agnoscunt] ms. quod m. ag. rectissime.
12. Christianis vero etc.] ms. Christianos (6) vero nihil
simile.
13. Naturam mali non] ms. naturalia mali non.
Et poena félicitas] ms. et p. Victoria, eleganter.
Qui revinceris] ms. quod revinceris.
CAP. II.
1. [Cap. II. Pag. XII]. Eiusdem noxae eadem débet trac-
tatio (1) provenire] ms. eiusdem noxietatis ead. tr. d. intervenire.
2. Et proprio ore et mercenarij advocatione utuntur] ms.
et proprio et mercenario ore utuntur.
iur. — (3) propins Barr. Br. La correction porte seulement sur
expediri. Modius a néglige de ré])cter propius. 11 lui arrive souvent
de ne pas répéter les mots qui n'oirrent pas de variante. — (4) au-
thorHale Barr. — gloriae, faute de copie ou d'impression, suggérée
par iustitiae. — (5) deprehensi Barr, Br. — (6) Christianus Br,
Cap, II (1) tractatio deheret Barr, Par conséquent, tr. d, = trac-
tio deheret, Modius abrège très souvent les mots de De la Barre
COLLATION DE MODIUS : II 423
Ici, Br a cette varintite :
4, confessio eo] ms. confesso co nomen.
5. Quodcumque falso] nis. qiiod de falso.
Gloria, si eruisset] ms. gloria juisset, si ends.
Comedisset. Atque (2) etc.] ms. Comedisset. sed nec in isto
ex forma malonim iudicandorum agitis. Atque (3).
[Pag. XIII]. Quibusdam gradu pulsis] ms. quibasdam de
gradu pulsis.
De cetero (4) ageret] ms. de ceteris ag.
De sacris eorum] ms. de sacramento eorum. i. (5) coniu-
ratione.
9. Quam oblatio. Damnatis ergo] quam oblationem. Damn.
itaque.
10. [Pag. XIV]. Extorquetis admissi] ms. exquiritis admiss.
11. Quo perversius cum] ms. quod perversius est, cum.
12. Laniari iubere] ms. lan. debere.
Circa nos nocentes] ms. circa nocentes, erga nos innocen-
tissimos, quasi (6).
A vobis sciatis] ms. a vobis putatis.
13. Elaboratis audire] ms. audire laboratis.
14. Suspecta sit nobis] ms. S. s. vobis.
Quae nos adversantur (7)] ms. quae vos ad. (8)
Dominatio vestra est] ms. abest t6 Vestra. et recte.
15. Soli quaestioni temperantur] ms. solos quaestioni tem-
peratur.
Ici, Br a cette note :
Servire legem] ms. servate legem.
Necessarium et si confessione] ms. necessarijs etiam si con-
fessione praeveniantur. Vacabunl sententiae : ceditur debito
poenae, nocens expnngendus. etc.
16. [Pag. XV]. Nobis non licet iioc velle] to Nobis abest
a ms.
qu'il vieni de transcrire et qui n'ollVenl pas de variante. — (2) ntqi/i
Barr. — (3) atgui Barr. — (4) de cactero Barr. — (5) Pour id est. —
(6) cum gutisi, e\c. Br. ~ (7) adversus Barr. Br. — (8) quae vos
424 APPENDICE II
Negare ut solvas] nis. n. ut absolvas.
17. Vis ergo ncget] ms. vis ut neget.
Invitum, nec de praeterito reum] ms. Invitum jam, nec
de praeterito reum.
Tribunal de vestra] ms. tribunal vestrum de vestra.
18. Cum igitur] ms. Cur ig. in omnibus aliter nos dispo-
nitis, quam ceteros nocentes, ad unum contentendo, ut de isto.
[Pag. XVI]. Illius aemulationis inimicum] ms. Illius
aemulae operationis inim.
19. Damnetur] ms. damnet.
20. Sed homicida Christianus] ms. si hom. Chr.
Si nullius criminis reus est] ms. 5/ nullius criminis nonien est,
valde ineptum, si solius nominis crimen est. Elegantissime. (9)
videndus Riienanus in notis ad librum de patientia.
CAP. III.
1. Sed malus tantum quod Christianus] ms. illa duo, Scd
malus, omittit (1).
Ego Lucium sapientem] ms. Ego miror Lucium Titium
sapientem virum repente fadum Cliristianum. nemo. etc. Placet.
2. Ignorant corrumpunt] ms. ign. inrumpunt.
3. Ex ipso dénotant (2)] m. ex hoc ipso d.
In suffragium] ms. in suffragium enarrantes, quae mulier,
quam lasciva, quam festiva ! qui iuvenis, quam Lusius, quam
amasius, focti sunt Chr. Est autem Lusius elegantissime forma
proverbiali dictum, pro eo quod est, iucundissimae utilitatis
administer et artifex salutaris. sumptum a Lusis Arcadiae,
ubi Proeti filias curavisse Melampus dicitur in aede Dianae.
Auctor Pausanias in Arcadicis.
[Pag. XVII]. 4, Zelotypus, filium] ms. Zelotypus eiecit,
filium iam subiectum.
Tanti non est bonum esse, quanti odium Ciiristianorum]
m s. tanti non est bonum, quam odium Chr.
adv.{= adi'ûrsiis)Br. — (q) Dans Br.^ celte appréciation a été ajoutée
en marge.
Cap. III. (i) Br, ajoute cette observation: Vnnus/ùiSj ut opinor. —
(2) ex ipso denoia7it qiio (M; quod P) Itiudanl Barr.
COLLATION DE MODIUS : III, IV 425
5. Nunc igitur si] ms. abest to nunc.
[Pag. XVIII]. 6, Atque niedici] ms. aeque medici.
7. Institutione transmissa] ms. inst. transmissL
Probat malam sectam] ms. probet malum audorem et malain
sectam, is probabit. etc. quod germanum auctoris putem.
CAP. IV.
1. Omnes in ciiristianis non esse, quae in se ncsciunt] ms.
Iwmines in Chr. non esse, quae in se non nesciunt, sed etiam ut
volunt (1). ubi versus omissus videtur : caetera ûyiéTTara.
2. Qua illos palam admittentes invenimus] ms. quae palam
adinveniuntur (2).
3. Concurram vobiscum, ut cum] consistam vobiscum (3)
et cum. quod certe gravius.
4. [Cap. IV], lam primum quam dure] ms. lampr. cum iure
definitis dicendo, Non licet esse vos, et hoc sine ullo retractatu. etc.
Quia vultis] ms quia non vultis. optime.
[Pag. XIX]. 4. Exercetis] ms. ex arce.
5. Delet (4), ideo non vultis licere] ms. débet licere, ideo no-
luistis licere.
Lex tua proliibuit] ms. delet xô tua.
7. Truncatis et caeditis] ms. ruspatis et caeditis. vide in
lib. de pallio, cap. 2.
ludicatos in partes] ms. judicatos rétro in partes, optime.
9. Proscriptionesuffundere[ ms. proscriptio suffundere. quod
est verissimum.
10. [Pag. XX] Vos repurgandae] ms. vobis repwg.
Annorum numerus] ms, abest "cb numerus.
Licet non damnentur, cum iniquos (5)] ms, licet et damnentur
(6) quomodo.
Cap, IV. (i) Br. semble avoir «o/?/^/. — {z) ad, i)ivciiiimtHr {=
admittentes invcnhuitur) Br. Modiiis abrège souvent les mots qui
n'ollVent aucune variante. Voy, ch. z, n. i. 11 laut corriger: quae
palam admittcjites invenhnur. Voy. p. 165. — (3) nobiscitin Br. —
(4) débet Barr. — (5) iniquas Barr, — (6) licet et damnent Br. —
426 APPENDICE II
11, Incestum cur non requirunt. Infanticidia cur] ms. In-
cestiis sum, cur non requirunt ? Infanticidia (!) cur.
Qiiid habeo qiiod purger] ms, qui habco quo purger.
12, Neque quis fideliter] ms, neque civis fidel.
Quod ulciscitur )ex] ms, abest to lex.
13, Quae probari se non] ms, si prob. se non v.
Non probata dominetur] ms, non prob. dominatur.
CAP, V.
1, Senatu probaretur ut] ms, sen. probatus (l).
lam deo propitius] ms. abest xo Dec (2). probat Eusebius.
[Pag, XXI]. 2, In seculum introivit] ms, sec. (3) intravit,
annunciata sibi.
Ipsius divinitatis] ms. istius divin.
Revelarat (4)] ms. revelaverant.
3. Tum maxime Romae] ms. maxime Romae (5).
Sed tali] ms. abest to, sed. accrevit ex sequente syll.
Aliquid grande (6)] ms. aliquod (7).
4. Sed quia et homo] ms, sed quia honio.
Et a quibus damnatos] ms. abest tô Et.
6. Accusatoribus damnatione] ms. accusatorum dam.
7. [Cap. VI]. Truces leges ista (8)] ms. abest xô Truces.
Exercent impij] ms. exsequuntur impij.
Turpes, démentes, vani] ms. turpes, truces, vani, démentes.
Paullo post exemplum Vespasiani ante Adriani in ms.
(7) znfajiiicida Br.
Cap. V. (i) Modius ne dit rien de «/. De la Barre a : msi a
senalu probaretur, ui AI. Aeiiiilius de deo suo Alburno. Au lieu de ?</,
PM ont ; Scît. Rufin (Hist. eccL; 2, 2^ 5) a : Scit. Eusèbe dit :
(j'JiMc, TïZTzoir^y.vj. Modius a-t-il lu sd( et a-t-il oublié de relever
cette variante, ou Junius l'a-t-il omise par niégarde ? — (2) Faute
d'impression pour Deo. Voy, ci-dessus, p, 22. — (3) t. s. (== hi
sectiluni) Br. — (4) revetavcrat Barr. — (5) cum iiifaximcj R(omae)
\\\\ — (6) a/iquid bon ii-in grande Barr. Modius n'a voulu relever que
]a variante aliquod pour aliquid. Voy. ci-dessus, p. 38. — (7) Dans
Br., cette note est placée avant la précédente. — (8) istae Barr, Br,
COLLATION DE MODIUS : V, VI 427
legitur. qiios (9) nitllus Vesp. q. I. d. nullus Adrianus. idque
optime iudicio meo.
CAP. VI.
1. [Pag. XXII]. Protectores et cultores] ms. et ultores (1).
2. Senatu submovebant (2)] ms. sen. submoverunt. illud
adiunctis respondet magis.
3. Nam ne vel hieme (3)] ms. abest to Nam.
Lacedaemonij penulam nudis (4)] ms. Lac. odium penulae
lud. eleganter.
4. Adeo vino abstinerent] ms, à vino (5) abstinerentur.
Trucidata est] ms. trucidata sit.
5. Offerre nécessitas erat ut spiritu iudicarentur (6)] ms.
off. etiam nécessitas erat, ut sp. dijudicarentur.
7. [Pag. XXIII]. Quae perspecte] ms. quae specte.
Cum mysteriis consules] ms. cum my. suis.
3. Capitolio prohibitos inferri] ms. abest to inferri.
9. Et instructu] tô Et ms. abest.
Antiquitatem, et nove de die] ms. antiquos, sed nove de
die V.
Non custodistis (7)] ms. non custodistis. Ipsum adhuc quod
vidcmini. etc.
10. Christianos destinastis] ms. Chr. destinatis.
Vestras immolaretis (8)] ms. Vestras immoletis.
11. Ut iam Inde ad manifestiora pergam] ms. utviani mihi
ad inan. purgem.
(9) quas Br. ; quos est une faute d'impression de Junius.
Cap. VI. (i) F avait sans aucun doute protectores et ultores.
Modius n'a pas répété le mot qui n'offrait aucune variante. Vovez
ci-dessus, ad 1,3. — (2) su mm oveda n t liarv. — (3) hyeme Barr. —
(4) ludis Barr. — (5) a. d. = ndco vino Jîr. — (6) iudicarentur Barr.
— (7) custodilis Barr. — (8) immolaritis Barr.
428 APPENDICE II
CAP. VU.
1. [Pag. XXIV]. Pabulo crudae] ms. pabulo inde.
Et libidinum] ms. in libidimim. accrevit ex praeced,
Inverecundiam] ms. verecundiam.
Qui non eruistis] ms. qui non eruitis. melius.
2. De vestra nobis] ms, de v. vobis.
3. Atque apparuit inimica esse] ms. atque inimica est.
Quot extranei] ms. tôt ext.
Ex natura ipsi] ms. ex natura etiam ipsi dom. nostri. Cotidie.
etc.
4. In ipsis plurimum] ms. in ipsis etiam pi.
5. ludici reseravit] ms. lud. reservavit.
[Pag, XXV]. Uxoribus aliqua immunda] ms, Uxorib. un-
quam immunda. quod est verissimum,
6. Omnibus mysteriis] ms. omnium mysteriorum.
Fides adhibeatur] ms. fides debeatur.
Prodita intérim etiam humanam] ms. quae prodita etiam
fium. recte.
Quam dum divinae servantur] ms. dum divinitas servatur.
7. Ipsi proditores sui] ms. ipsi sunt pro. s.
Etiam impiae] ms, etiam piae. quod ab auctore putem.
Et arbitris caveant] ms. etiam ab arbitris c. (1).
Nisi si impii] to Si, ms. abest.
8. Quo non aliud] ms, qua non al.
Quia velox ? an quia] ms. an quia velox ? quia index ? (2),
Veri affert] ms, v, defert.
9. Rem tradit et exinde] ms, abest to Et.
Fama est hoc Romae factum] ms, hoc Romae aiunt factum.
sic Pamelius,
11, Fama incerti est, locum non habet] ms, fama nomen
incerti, locum non habet ubi certum est. an famae credat, nisi
si inconsideratus ? qui sapiens est non crédit. In certo omnium
est aestimare, quantacunque illa ambitione diffusa est, quan-
tacunque.
Cap, VII. (i) eiab arbilris cav(ciint) Br, — (2) ms. quia velox?
COLLATION DE MODIUS : VII, VIII, IX 429
12. Cetera rumoris obscurant] ms. cetera rum. obscmat.
13. [Pag. XXVI]. Dispositione natiirae] ms. disp. divinae
naf. quod profecto gravius, et verbis Christi conveniens.
Cliristianorum hanc] ms. Christian, quod dicitur semper
est, quia quad est desinit dici. Hanc. Argute dictum et ungue
Tertulliani dignum (3).
Tantoque spatio in opinionem] ms. tantoque temporis spatio
in op.
CAP. VIII.
1. Credideris, tanti habeas] ms. crediderit, tanti liabeat.
3. PiacLiIum n. (1) admiseris] ms. piaculum enim feceris.
5. Alia nos opinor natura, Cyclopes] ms. alij nos op. n.
Cynopenae aut Sciapodes.
7. [Pag. XXVII]. Sanguinis virulentiam] ms, iurulentiam.
8. Quid si noluerint] ms. quid si ventre noluerint.
Denique singulares Christiani] ms. denique sine pignore
singulares C/i. non eris (2) opinor.
9. Quin etiam ultro perire malint] ms. qui et. ul. per. malunt.
CAP. IX.
2. Eosdem sacerdotes] ms. ipsos. sac.
Crucibus exposuit] ms. crucibus vivos exposait.
Militia patriae nostrae] ms. m. patris nostri. quod est veris-
simum. Nam Proconsul fuerat Tertulliani pater, in cuius
militia veterani exstiterant, qui Tiberiani illius facti me-
minissent.
Id ipsum manus (1)] ms. ad ipsum man. (2) opinor, recte.
quia index ? an quia Br. — (3)ms. Christ, quod dicitur semper j semper
est, quia quod est desinit dici. Hanc Br. Voy. ci-dessus, p. 62.
Cap. VIII, (i) enim Barr. — (2) De la Barre a : erit, comme
PM.
Cap IX. (i) munus Barr. — (2) man., comme manus, est une
faute d'impression de Junius ; si Modius, qui lisait munus dans De
430 APPENDICE II
3. Scelus in perpetuum] ms. facinus in perp.
Aliqui deus mutât] ms. aliguis deus m.
4. Perseverabat quos quidem] ms. perseverasset, sed quos
quidem.
Libentes exponebant] ms. lib. respondebant, puta sacer-
dotibus sacrificaturis. Verbum in sacris receptum.
5. Mercurio prosecatur] ms. Mer. prosecabatur.
Ecce in iiia] ms. sed et in illa.
Bestiariorum, inquitis] ms. bestiarij.
6. [Pag. XXVIII]. Arbitrio perpetretur] ms. arbitrio pa-
tretur.
Licet parricidio (3) homicidio intersit] ms. licet de parri-
cidio intersit.
Sanguinem hiantibus] ms. s. inhiantib. quod verius putem.
7. Siquidem et de génère] ms. Siquid et de necis génère
disert, utique crudelius in aqua spiritum torquetis, aut frigori,
aut fami, aut canibus exponentes. f. e. m. ae. q. maior optaverit.
8. Nobis V. homicidio semper] ms. n. v. hom. semel.
Conceptum utero] ms. con. uterum. ex iure phrasis.
9. Tragicis ferculis] ms. tr. fabulis.
Est apud Herodotum] to Est ms. abest.
[Pag, XXIX]. Ex alterutro] ms. et alterutro.
Catilina degustatum (4)J ms. Cat. taie degustatum est (5).
optime.
Aiunt apud] ms. aiunt et apud q.
10. Saccatus (6) sanguis] ms. secator sang. (7) legendum
putem : vide isthic Bellonae secatos : sanguis de femore pros-
cisso palmula exceptus usui datur signatis : id est, ijs qui
Bellonae initiari volunt, et acceperunt professionis signum,
ut vocatur vulgo.
la Barre, avait voulu donner la variante manus^ il aurait écrit ce
mot en entier, car il n'abrège que les mots sans variante, — {l) par-
ricidiunt Barr, — (4) degustatum est Barr. — (5) ms Cat. taie dcgust.
Br. La variante porte sur taie. — (6) sacratus lîarr, — (7) ms seca-
tos s. Br. — Secator n'est certainement qu'une faute d'impression
de j uni us, car, dans sa note, Junius lit lui-même secatos, comme
COLLATION DE MODIUS : IX 431
Palmulam (8) exceptus et suis datus signatis] ms. palmula
ex. et usai datus signât.
Noxiorum iugulatorum] ms. nox. rigulatorum.
De iugulo decurrentem] ms. de iugulo (9) decurrentem avida
siti comitiali morbo medentes hauserunt. Nec improbo. Nam
rica, ricula, ricum, riculum, rigum, rigulum, a re, id est,
rétro agendo dicebatur primum strophium capitis (a quo et
recinatus lupiter Arnobio libro 6.) deinde vero sudarium, ut
exponit Nonius, et involucrum linteum. Arenarij autem non
solum armis instructi, sed et spongia sistendo sanguini, et
rigulo sive riculo ad obliganda vulnera procedebant. Hinc
riculati vel rigulati dicti, rigulo obligati vulnus.
11. Luctando detersit] ms. Conluctando detersit.'
Sanguine (10) iactavit] ms. Sanguinem iadavit.
Ursorum alvei] ms. ipsorum Ursor. a.
Trucidantibus adhuc se visceribus] ms. cruditantes adhuc
de vis.
Ructatur proinde ab homine] ms. ructatur (11) ab hom.
quod est Tertullianeum.
14. Inter tentamenta Ciiristianorum botulos cruore] ms.
in tormenta chr. bot. etiam c. recte.
Sanguinem pecoris] ms. sa. pecudis.
Experti quem] ms. experti esîis : Quem quid (12) et ipsum,
etc. èpwT'/\x!.xw<;.
15. [Pag. XXX]. Appetcndo quemadmodum] ms. app.
Christian!, qui (13). et recte.
Br. Voy. ci-dessus, p. 185. — (8) iii palmulam Barr. Modius n'a
pas transcrit, in. Il en résulte que F aurait eu : in palmula exceptus.
Or, on dit : in palmulam exceptus, ou : palmula exceptus, Cic. Brut.,
II, 43 : excepit sangiùncm patera. Cyprian., De spect., 5 ; dum
cruor cliam de iugulo calidus acceptus spumanti patera... propinatur.
— (9) ms de rigulo Br. Junius a imprimé par erreur de iugulOj
car la note explique de rigulo — (10) in gladiatoris sanguine Barr.
Voy. ci-dessus, p. 187. — (11) ms r?ictuatur Br. Voy. p. 127. —
(12) çuem qd. Br. — (13) ms. ap. Christiani q. Br. On voit que
q. est la première lettre de quemadmodum. Junius a donc imprime
432 APPENDICE II
Negandi (14), si non] ms. necandi, si non.
16. |J.é|i.-/]ve dicebant] ms. èXayyae aiebani [j-STspav (15).
17. Age iam recogitate. forte legendumfuerit, sÀâyyas, aic-
bant, de, t7,v |j.-oT£pa. lUis enim Xàyya dicebatur, 'f\ ~?j tgc^Ô)
oLoop-évifi fAspiç, ut Hcsychius loquitur. sic homines impij
dicebant : refudit matri quod ab ipsa acceperat : ideo ne
quiritandum ?
17. Erroribus ad incesta] ms. en. vestris ad inc.
Suppeditante materias] ms. suppedit. materia. ut sit sup-
peditante verbuni àf/erâiSaTov.
Praetereunte matre extranea] ms. praeiere. misericordia
ext :
Memoriam dissipari et simui] ms. mémo, disperci, et semel.
forte dispergi.
18. Cuius ubique] ms. cuinsque iibique.
Uti aspersum genus] ut ita spersum (16) gcnus p. c. h. con-
cwrit i. m. s. nequis eas caecus. etc.
19. Senes, pueri] ms. senes piieri.
20. [Pag. XXXI]. Species concurrunt] ms. spe (17) facile
concwnint.
Sic per omnia. Nunc de manifestioribus dicam] ms. sic per
omnia ostendam. mine de manifestis.
CAP. X.
1. Ipsis : scimus Deos non colendos] ms. ipsis. semel Deos
non colendo.
2. Colère desinimus] ms. desinimus (1) et statim (2) cogno-
rimus (3).
qui par erreur. Du reste, si Modius avait donné qui, l'observation :
et recle, serait étonnante. — (14) necatidi Barr. Donc la lecture de F
devait être ncgtifidt. Voy, p. 21. — (15) z'5 /<?«(= ttç xrjv) [j.£T£pav
Br. — (16) ut ita sparsum Br. — (17) Probablement: spe.., pour
species.
Cap. X. (1) desivimus Br. — (2) C'est par erreur que Junius a
imprimé les mots et statim en italiques^ car et statim veut dire et
COLLATION DE MODIUS : X 433
Debuissent. tune et] ms. deb. si dei fuissent. Tune. ete.
Si quos non eolerent] ms. si eos non cotèrent, quia putarent
non esse, quos constaret esse. Sed apud vos (4), inquitts, constat
Deos esse illos. Appellamus. etc.
3. A vobis ad conseientiam] ms. a vobis ipsis ad c.
Illa non (5) damnet] ms. ilta condemnet.
4. [Pag. XXXII]. Sed et ipsa inficias si ierit] ms. s/ etipsa
injicias (6) ierit.
5. Veteres serves, barbaros] to servos ms. abest.
Est etiam titulos perseqiii collegam (7)] ms. est enim etiam
tit. pers. ut coll. (8)
Quo cognoscatis sed cognoscatis] ms. ut cognoscatis, sed ut
recognoscatis : certi enim. etc.
7. Literae docent] ms. abest to docent (9).
Taillis] ms. Thallus.
Si quaeras rerum] ms. Si quantum rerum.
8. Quem coluerat] ms. quem incoluerat.
Civitas quam debellaverat] ms. et Civitas quam depala-
verat.
Et imagine signatus] ms. et imagine (10) et signatus n.
9. De caelo et terra] ms. e caelo et ter.
Et terram matrem ac patrem] ms. aut terram patrem aut
matrem.
10. [Pag. XXXIII]. Genus incertum est] ms. genus in
incerto est.
Adhuc homines] ms. tune hom.
Publico mortuos] ms. puhl. humatosmort.
11. Generis examen] ms. gen. ipsius examen.
Sui par est : quoniam] ms. sui par : [XI, 1] sed quon.
vio.v « et immédiatement après » (F a) cog7iovhnus. — (3) cognovimus
Br. Junius devait donc imprimer : dcsivitmis, et statim, cognovimus.
Voy. ci-dessus, p. 187. — (4) Sed apud nos Br. — (5) illa nos Harr.
— (6) in inficias Br . — {']) col li gain Barr. Br. — (8) colligam Br,
— (9) De la Barre a : quantum liilcrae docent. F avait donc : quan-
tum litterae (sans si'). — (10) imagines Br.
28
434 APPENDICE H
CAP. XI.
2. Mancipem quidem] ms. mancipem qmmdam.
3. Caeterum si nemo esset] ms, Caet. si nemo est.
Scilicet melioris] ms. scilicet apucl se melio.
5. In hac constructione dispositum] ms. in ipsa concep-
tione disp. quod puto necessarium.
Omni rationis] ms. omnis rationis.
6. Manu (1) eius ponitis] ms. manu eius imponitis.
Principem hominem] ms. princip. Iiominum.
Continendo et sustinendo] ms. condendo et sust.
Potuit inferri] ms. pot. inveniri.
8. Cerasa ex Pontoj ms. cerasa Romanis ex P.
10. Qui nec temere] ms.. quod non temere.
11. Tartarum merserinti ms. tar. demerserint.
12. [Pag. XXXIV]. Negaveritis] ms. notam interroga-
tionis non habet.
13. Sequitur in ms. Atquin ut Iwmines illos fuisse non po-
testis negare.
Suae consortio adstruit] ms. suae co. adscivit.
14. Est in caeio vestra] ms. est in caelum vestra.
15. Indignitatis tractatum (2)] ms. ind. retractatum.
16. Militarior] ms. militatior.
CAP. XII.
1. Igitur de dijs vestris] ms. ig. de deis istis.
Video, quorundam veterum] ms. video statuas quor.
2. Aliud deprehendo] ms. amplius depreli.
Materias esse vasculorum] materias sorores vasculorum.
Rectissime ms.
Fatum consecratione] ms. jactum cons.
Ut re vera] ms, et re vera.
4. [Pag, XXXV] . Deraditis] ms. eraditis.
Cap. XI. (i) in manu Barr. Donc F avait également: in mamt.
— (2) retractatum.
COLLATION DE MODIUS I XI, XII, XIII 435
Et mox. propter istos Deos (1) glutinum et gomphos] ms.
glati ni et corephos.
Ceteri (2) adplicatis] ms. caelesti appl.
5. In insulis relegamur] ms. in insulas rel. melius.
6. Insputate] ms. inspumate.
Perorantem reprehenditis (3)] ms. perorantem probetis.
7. Mortuorum suorum simillimas] ms. mortuorum vestro-
ram sim. quod ép-epaTixojTepov.
Araneae intelligunt] ms. araneoe (4) intellegunt.
Possiimus enim] ms. pos. autem videri laedere eos, quos.
Nihil ab ullo patitur, quia non est] ms. nihil ab eo patitur,
qui est. Atque hoc verissimum.
CAP. XIII.
1. [Pag. XXXVI]. Deos vestros deprehendimini ? qui
quos] ms. illos (1) depr ? ut quos pr. e. neglegatis ; q. t. des-
trnatis. (2) venustius.
2. Si mentiar] ms. si mentior.
Primo quia cum alij] ms. primo quidem cum alij.
Non potest procedere] ms. non pot. esse, quod verius.
3. lam ergo contemnitis] ms. abest to Ergo.
4. Cacabulum] ms. caccabalum.
Concussus est] ms. contusus est. convenientius.
Ut quisque dominus] ms. ut q. deum.
Cap. XII. (i) Il aurait fallu imprimer ;
Deraditis] ms. eradiiis. Et mox, propter istos Deos.
Glutinum et gomphos] ms. gltiiinnvi et conphos.
¥a\ effet, et inox veut dire qu'un peu plus loin, F a ; propter istos
Deos. De la Barre a : in Deos vestros, ce qui est la lecture de P, la
seule convenable.
— (2) ms. gltitin. et conphos Br. — (3) Cereri Barr. Br. — {l)repre'
htndistis Barr. — (4) aranei Br.
Cap. XIII. (i) Modius veut dire : deos illos. Voy. 21,27. —
(2 j Modius ne va pas jusqu'au bout de la phrase. 11 est probable que
F avait aussi : inliidatis. Voy. ci-dessus, p. 195.
436 APPENDICE II
6. .Onust. viliores] ms. on. vilioris.
Haec sunt notae] ms. hae sunt notae.
Religio mendicas] ms. rell. mendicans.
Pro aditu sacri] ms. pro aciitu sacrarij.
7. [Pag. XXXVII]. Omnino ad honorandos] ms. om. ad
inlionorandos.
ObbaJ ms. abba..
9. Ac dianas] in ms. haec absunt.
Paedagogijs aut aulicis] ms. paedagogis aulicis. liaud scio
an . melius.
, Cinaedum deum] ms. Cinhothi deiim.
Dij veteres tamen] ms. dei vet. vestri, tomen. Et mox. Hoc
et alij licuisse, quod soli ab antiquitate praeceperant.
CAP. XIV.
1. Et scabiosa] ms. abest.
2. [Cap. XIV] Quod filium suum] cum filium suiim Ae-
neam, ne interimeretur, rapere voliiisset. ms. habet.
3. Sarpedonis casiim] ms. Sarp. causa.
lampridem amicarum] to jampridem, in ms. abest.
4. Admeto régi] ms. to régi, abest.
Ille Neptuni] ms. ille Nuptuni. Sic enim Latini prisci, qui
a nubcndo dictum volunt, ut coniugavit Varro.
5. Est et de Lyricis] ms. est et ille de Lyr.
Fulmine vindicatum] ms. /«/. iudicatwn.
6. Neque vera prodi] ms. neque vero (1) proinde.
[Pag. XXXVI II]. NecTragici] ms. ne Tragici.
Dei praeferant] ms. dei praeferantur. puto. praefarentiir.
7. Et hircum] ms. abest.
8. Paenitentia sententiae] ms. paenitet sententiae Athe-
nienses, ut criminatores Socratis postea efflixerint, et imaginem
eius auream in templo collocarint, rescissa damnatione testi-
moniuni Socrati reddiderunt. Sic usurpatur effligendi verbum
lib. 4. adversus Marcion cap. 12. (2)
Cap. XIV. (i) v. (= vera) Br. — (2) Adv. Marc, 4,12, p. 454,3 :.
COLLATION DE MODIUS : XIV, XV, XVI 437
Sive lupiteres] ms. sive lupiteros.
Introduxit] ms. indacit.
CAP. XV.
1. Lentulorum et Hostiliorum venustates] ms, Lentulos
et H. vetustates.
Et lovis mortui testamentum recitatum, et très Hercules
famelicos irrisos] haec desunt in ms.
2. lactatum de caelo] ms. detradum de caelo.
3. [Pag. XXX IX]. Artem effaeminatione] ms. arcem eff.
Laudantibus vobis] ms. plaudentibiis vobis. ,
5. Deum ex PessinunteJ ms. deiim vestrum e Pess.
6. Vestigia obsoletant] ms. fastigium adsolant. id est,
deijciunt eo ut a cultonbus reddantur solitarij. Quid si autem,
adsellant ? hoc enim Végetio significat in secessum cogère.
7. Ciiristiani templa] ms. Chr. enim tetnpla.
8. Repercussis tamen] ms. repercussis ante tamen (1).
CAP. XVI.
1. Nam quidam] ms. Nam ut quidam.
Eiusmodi inseruit] ms. huiusmodi.
2. Quinto historiarum] ms, quarto liist.
Bellum ludaicum] ms. de betlo îudaico.
De ipsa tam origine] ms. deest xo tam.
Putavit extorres] ms. put. exterminatos.
Locis aquarum egentissimos] ms. toc. et aquarum egentissi-
mis.
Petituri aestimabantur] ms, petit, aestimarentur.
Fontibus usos] ms. fontis usos.
spicas decerplas manibus efllixerant. Cette note est probablement de
Junius, comme celles qui renvoient à son commentaire. Voy. ci-
dessus, p. 24.
Cap. XV. ( i) Ici finit la copie de Brème par ces mots : Cetera vide
in cdilione Juniana.
438 APPENDICE II
Consimilis bestiae superficiein (1)] ms. consimili bestiae
super faciem.
3. [Pag. XL], Eidem simulachro] eodem sim. ms.
4. Licitum, et conspectus] ms. /. erat, etiam conspedui
caeter.
5. Hippona] ms, Epona.
Forsitan improbandum] ms. fors, improbamur.
6. Habitus cum materiaej ms. ha. quando materiae qualiias
eadem est.
Ceres farrea] ms. Ceres pliaria.
Informi ligno prostat] ms. infirmo ligno prostant.
7. Nos sic forte] ms. nos, si for.
De cruce induci] ms. in cr. induci.
Cum in trophaeis cruces intestinà] ms. cuni tropiiaeis intes-
tina sint.
8. Religio Romanorum totaj ms. to Romanorum abest.
Signa veneratur, signa iurat] ms. Sign. ven. signa adorai,
signa jurai.
Omnibus dijs] ms. semper habet Deis, et Dei : non Dij.
Insignes, monilia crucium sunt Sypara] ms. in signis mon.
crucum sunt. Laudo diligentiam. Syphara.
Et labarorum] ms. et cantabrorum.
Stolae crucium] ms. sto. crucum.
10. [Pag. XLI]. Et caelestia] ms. et certa caei.
1 1 . Quam religione solis] ms. quam de rel. sol.
12. In frustrandis] ms. xh, In, abest.
Deus Christianorum Ononychites] ms. devs christia-
NORVM Onochoites is erat.
13. Debebant adorare] ms. debuerant ad.
Et planta vel tergo] ms. et a planta et tergo.
CAP. XVII.
2. Et tantus est] ms. tô est, non habet.
Quod videri communiter] deest in ms. vox, communiter.
3. Hoc quod est deum] ms. fioc est quod deum. evidentius.
Cap. XVI. (i) De la Barre a effigieni dans le texte et supcrficicvi en
marge.
COLLATION DE MODIUS : XVII, XVIII 439
[Pag. XLII]. Ita enim vis] ms. ita eum vis.
4, Testimonio comprobemus] ms. abest tô comprobemus.
■ 5. Et sanitatem suam] xo Et in ms. non comparet.
Et deum nominat solum] ms. deum nominat hoc solo nomine,
quia proprio dei veri. Deus magnus, Deus bonus, et quod. atque
iiaec perplacent.
CAP. XVI n.
1. Si quid velit] ms. si qui velit.
2. Et viros enim] ms. to et ms. abest.
Divino mundatos] ms. div. inundaios.
Humo instruxerit] ms. humo struxerit.
3. Maiestati suae vindicandae aediderit] ms. maiestatis
suae ediderit, judicando ediderit.
Et desertis et observandis] ms. et deseritis et observatis.
Et qui producto] ms. ut qui perncto.
Aeternae retributionem] ms. aet. restitutionem.
Perpetem suscitatis] ms. perpetem et iugem sus.
Et recensitis] ms. et recensis.
5. Ptolomeorum (1) eruditissimtis, quem] ms. Ptolemeus,
quem.
Supernominant et omnis] ms. supernoininan (sic) erudi-
tissimus rexit omni. Legendum, rex et omnis l.
Grammaticorum tune] abest ms. xo Tune.
Proprias sciiicet] xb scilicet abest in ms. et accessisse vide-
tur ex sequente ver.
7. Subscriptum est] ms. rescriptuni est.
Aristeas] ms. Aristaeus.
8. Ex aperto monimento rcliquit. Hodie] ms. ex aperia
mommenta hodie. legendum voce unica, exapertam. id est,
apcrta vaide.
Litcris exhibentur] ms. abest tô literis.
Cap. XVIII. (i) Plolemaeorum Haïr. — Cf. Isidorus, Elyni., 6,
3, 5. Voy. ci-dessus, p. 104 et 222. Lofsledt, p. 92.
440 APPENDICE II
CAP. XIX.
XIX, 1. Primam instrumentis] ms. primam igiiw in.
De teniporibus asserere. omnes itaque substantias, om-
nesque materias, origines, ordines, venas veterani cuiusque
stili vestri] ms, de tempore adserere. auctoritatem literis
praestat antiquitas summa. Primus enim Prophètes Moyses,
qui mundi conditionem et generis humani pullatione {corri-
gendiim pullulationem) et mox tiltricem iniquitatis illius aevi
vim cataclysmi de praeterito exorsus est, per vaticinationem
usque ad suam aetatem et deinceps per res suas futurorum
imagines edidit, Pênes quem et temporum ordo digestus ab
initio supputationem seculi praestitit, Superior invenitur
annis circiter trecentis quam, ille antiquissimus pênes nos
Danaus in Argo transvenisset, Troiano denique praelio ad
mille annos ante est : unde et ipso Saturno. Secundum enim
historiam Thalli, qua relatum est bellum Assyriorum, et
Saturnum Titanorum reges cum love dimicasse, ostenditur
bellum CCCXX. et duobus annis lliacum exitum anteces-
sisse, Per hune Moysen etiam illa lex propria ludaeis a Deo
missa est. Deinceps multa et alij Prophetae, vetustiores literis
vestris. Nam et qui ultimo cecinit, aut aliquantulo praecu-
currit, aut certe concurrit aetate sapientiae auctoribus, etiam
latoribus legis. Cyri enim et Darij regno fuit Zacharias, quo
in tempore Thaïes Physicorum princeps sciscitanti Cyro
(legendum Croeso) nihil certum de divinitate respondit :
Turbatus scilicet vocibus Prophetarum. Solon eidem régi
finem longae vitae intuendum praedicavit non aliter, quam
Prophetae. adeo respici potest tam iura vestra, quam studia
de lege, deque divina doctrina concepisse. Quod prius est,
hos [à la page 7-8 hoc] sit semen necesse est. Inde quaedam
nobiscum, vel prope nos habetis. de Sophia, amor eius Phi-
losophia vocitatus est : de Prophetia, affectatio eius poeti-
cam vaticinationem deputavit. gloriae homines, si quid inve-
nerant, ut proprium facerent, adulteraverunt : etiam fruc-
tibus a semine degenerare contigit. Multis adhuc de vetus-
tate modis consisterem divinarum literarum si non maior
auctoritas illis ad fidem de veritatis suae viribus, quam de
COLLATION DE MODIUS : XIX 441
aetatis annalibus suppetisset. Quid enim potentius patro-
cinabitur testimonio earum, nisi dispunctio cotidiana seculi
totiiis cum dispositione regnorum ? cum casus urbium, cum
exitus gentium cum status temporum ita omnibus respon-
dent, quemadmodum ante milia annorum praenunciabantur ?
Unde et spes nostra, quam ridetis, animatur ; et fiducia,
quam praesumptionem vocatis, corroboratur. Idonea est
enim recognitio praeteritorum ad disponendam fiduciam
futurorum : eadem voces praedicaverunt, utramque partem,
eadem literae notaverunt. Unum est tempus apud illas, quod
apud nos separari videtur. Ita omnia, quae supersunt impro-
bata sunt {lego, iam probata sunt) nobis, quia cum iliis quae
probata sunt, tune futuris praedicabantur. Habétis, quod
sciam, et nos Sibyllam, quatinus appellatio ista vera vates
Dei veri passim super ceteros qui vaticinari videbantur,
usurpata est, sicut vestrae Sibyllae nomen de veritate men-
titae, quemadmodum et Dei nostri. Omnes itaque substan-
tiae, omnesque materiae, origines, ordines venas veterani
cuiusque stili nostri. etc.
2. [Pag. XL IV]. Historias et causas memoriarumj ms.
historiarum et arcana mem.
Inde etiam nostri] ms. inde jam et nost.
3. Siquidem audistis] ms. si quem audistis.
Inacho parem aetate octingentis] ms. Inacho pariter aetate
est CCCC. pêne annis : Nam septem minus Danaiim et ipsum
apud vos vetustissinmm praevenit. Mille circiter cladem Pria-
mi antecedit. possum dicere etiam quingentis.
4. Retrosiores] ms. retrossiores.
Sapientibus legiferis] ms. sap. et legiferis.
5. Et arduum. Sed intérim longum. Muictis (1)] ms. nec
arduum, sed intérim longum dinumerare. Muictis.
Supputarijs] ms. subputatorijs gesticulis asserendum est.
non assidendum est. hoc enim longe mclius.
6. Eorum municipes] haec in ms. absunt.
Cap. XIX. ( i ) /mi/iis Barr.
442 APPENDICE II
Aliqui Manethon] ms. aliqui Manetlios Aegyptiiis, et He-
braeus, et Chaldaeiis, et Proemis Plioenix Tyriorum Rex.
ludaeus losephus] ms. ludaeus loslppus.
CAP. XX.
1. Vetustatem : divinas probamus, si dubitatur antiqiias]
ms. vetustate divinas probamus, si dubitatur antiquitas.
2. Exitus. Qiiicquid] ms. cxitus reruin. Quicquid ag.
Vorant urbes] ms. vorarant (1) iirbes.
Fraudant] ms. fraudarent.
Externa atque interna (2)] ms. interna et externa bella
dilaniarent.
Efferventium plerumque (3) montium] ms. et frequentiae
pi. inortium.
3. Et iniquitas] to et in ms. abest.
Exorbitantur] ms. exorbitant.
Providenter scripta sunt] ms. providentiae scrip. sunt.
Veritatem divinationis] ms. veritas divinationis.
4. Praedicebantur. Eaedem voces sonant, eacdem literae]
m s. praedicabantur. Eadem V. S. eadem literae.
|j Praefari] ms. praefandi.
5. Futura quoque] ms. juturo quoque.
CAP. XXI.
1. [Pag. XLV]. Quam aliquando noveilam] ms. quam scient
ali. n. ut Tiberianis teinporibus ortani pleriq. sciant.
Cortae licentiae aliquid et propriac] ms. certe licitae, ali-
quid propriae pr.
3. Scit Christum] ms. sciant Christum hominem utique
aliquem, qualein ludaei.
Cum sub nomine] ms. Ut quos sub no.
Cap. XX. (i) 11 semble que Jiinius a imprimé vorarant au lieu de
vorarcnt. Voy. ci-dessus, p. 227. — (2) quod externa atque interna
bella dilaniant Barr. — {i) plerunqitc Barr.
COLLATION DE MODIUS : XX, XXI 443
De Deo aliquid praesumimus aliter] ms. de deo aliter sutmis.
Pauca de Christo] ms. p. dicamus de Clir.
4. Apud Deum gratia] ms. apud Deiim praerogativa ob
insignem iusticiam et fidem originalium audorum. Unde
mis. etc.
Ut de Dei vocibus] ms. de Dei vocibus affuit, quibus et doce-
bantur promerendo Deo, et non offendendo praemonebantur.
5. Fiducia patrum inflati] ms. ex fiducia pair, inflaîi ad
delirandum disciplinam in profanum modis.
6. Pleniorem quidem ob disciplinae altioris] ms. pi. ob
disciplinae audoris.
7. [Pag. XLVl]. Disciplinaque arbiter] ms. disciplinaegue
arb.
In filij nomine] ms. de filij n.
8. Semine non de sororisj ms. semine, sicut de concubitu
tauri, non de sororis.
Aut coniugis] ms. aut de con.
lovis et ista sunt numina vestra] ms. ista (1) sunt Immana v.
9. Habere nupserat] ms. habere, non nupserat.
Et iam nativitatis] ms. et ita nat.
10. Iam ediximus] ms. jam dixinnis.
Hune enim Zenon] ms. tô Zenon, abest.
11. Sermoni atque] ms. sermonem, atque rationem, itemque
virtutem, per quae omnia molitum Deum ediximus, propriam
substantiam asscribimus, oui et sermo insit pronuncionti.
Prolatum didicimiis] ms. prol. dicinms.
12. Sed extenditur] ms. sed expanditur.
ita de spiritu spiritus et de Deo deus] ms. haec omnia
absunt, et incommode videntur dissecare sententiam auc-
toris. sed ex tertio post versu imprudens librarius intulerit. (2)
Ut lumen] ms. et lumen.
Materiae matrix] ms. materia matrix.
Traduces qualitatum] ms. trod. qualitatis.
13. Alternum numerum] ms. alter numerum.
14. [Pag. XLVH]. Spiritu instructa] ms. spiritu struda.
Cap. XXI. (i) Modius n'a pas répété lovis el, qui n'offrait pas de
variante. Voy. ci-dessus, ch. 3, n. i. — (2) Celte observation est
444 APPENDICE II
Fabulas aemulas] ms. fabulas ad destrudiomm veritatis
istiiis aemulas praeministraverint.
15. Sublimitate divinitatis exertae] ms. sublimitate pater-
nae potestatis acceptae, divinitatis exertae.
Praedicatum sperant] ms. praed. sperabant.
16. Nec. n. (3) intelligerent] ms. nec intellexerunt.
17. [Pag, XLVIII]. De humilitate sequebatiir] ms. de liu.
insequebantm.
Aestimarent] ms. existimarent.
Excuteret, caecos] ms. excuteret verbo caecos.
Ostendens se esse verbiim Dei, i. (4) logon] ms. ostendens
se esse filium, et illum olim a Deo praedicatum, et ad omnium,
salutem natum, verbum Dei illud primordiale.
Spiritu instructum] ms. spiritu fultum.
Eundem qui verbo omnia faceret (5) et fecisset] haec in
ms. non exstant.
18. Quia revincebantur] ms. qua revincebantur.
Multitude deflecteret] ms. multitude conflueret.
Ex parte Romana percuranti] ms. ex parte Ronmnam pro-
curanti.
Crucem lesum dedi] ms. abest lesuni.
19. Tamen suffixus] ms. et tamen suff.
Multa mortis illius propria ostendit insignia. Nam] haec
in ms. absunt.
Dies médium] ms. dies média.
Scierunt. Et tamen eum mundi] ms. scierunt, ratione non
deprehensa negaverunt, et tamen. etc.
Archivis vestris] ms. arcanis vestris.
20. Militari manu custodiae] ms. militaris custodiae.
21. Sed ecce die tertia] ms. sed ad tertium diem.
Praeterquam exuviae sepulti] ms. praeter exuvias sepul-
turae.
22. Primores quorum] ms. pr. ludaeorum q.
évideinmenf tout entière de Modius. — (3I Ne enini inielligere^it
BaiT. — (4.) id est, krr/rr/ Barr. — (5) él faceret Barr. — (6) Coeluvi
Barr. — (7) aedidliniis Barr. — (8) Modius a négligé de répéter
iain. Voy. ch. 3, n. 3. La variante ne porte que sur incutlat. —
(9J Moysem Barr. — (ro) aspiciam Barr. — {\i)falsae Barr.
COLLATION DE MODIUS : XXII 445
Et famularem sibi ad fidem revocare] ms. familiarem sibi
a fide avocate.
Ut et fides] ms. sed ut fides.
23. ludaeae regionem] ms. /. regionis.
Quadraginta] ms. quinquaglnta.
Caelum (6) est rcceptiis] ms. in caeliim est ereptus.
De Romulo] ms. de Ronmlis.
24. [Pag. XL IX]. Aut si et Christiani] xo. 5/ in m. non
exstat.
25. Discipuli quoque diffiisi] ms. d. vero diff.
ludaeis insequentibus] ms. Judaeis persequentibiis.
26. Hune edidimus (7)] ms. hune edimus.
27. lam infamiam incutiat.] ms. injamiam concutiat (8).
Ex eo enim] ms. xb ex, non habet.
Et cuituram] in ms. abest.
28. Cruenti vociferamur] ms. cruentati vocif.
Per eum et in eo se cognosci vult Deus et coii] ms. per eum
se cognosci et coli Deus voluit.
29. ludaeis respondeamus] ms. ludaeis respondeam.
Per hominem Moysen (9)] ms. abest honiinem.
Trophonius] ms. Tryphonius sed vitiose.
Gentium adspiciam (10)] gentium convertar. quod haud scio
an melius,
30. Rem propriam] in ms. abest.
Non qui rupices et adhuc feros] ms. non qiia rudes et adhuc
feras liomines multitudini tôt noniinum demerendorum atto-
nitos efficiendo ad humanitatem temperaret, quo Numa, sed
quod iam. etc.
[Pag. XL]. Si vera ista] ms. Si vera sit ista.
2>\. Qua cognita quis reformetur ad bonum, sequitur ut
false (11) renunciet] ms. qua cognita sequitur, ut falsae renun-
cietur.
CAP. XXII.
1. Sciunt daemones] ms. sciunt daenionas.
A daemonio arbitrium] ms. ad daemonis arb.
Cum et ipsi] ms. to Et, non habetur.
Dehortando plane] ms. deiiortatoriuni plane.
446 APPENDICE H
2. Maledictis (1) fréquentât] ms. maledidi fr.
Eadcm ex sacramenti] ms. eadem execramenti. quod est
verissimum.
Vel niagos asseriint] ms. vel magi adserunt.
3. Et cum eo quem diximus principe] ms. et quem diximus
principem.
Apud literas] ms. aut l. sanctas ordo cognoscitur.
4. (Pag. LI]. Laedendam subtiiitas] ms. adeundam mira
subt.
5. Et invisibiles] ms. ut invisib.
Latens vitium] ms. latentis v.
6. Agit furoris (2)] ms. agit furoribus et amentiis foedis,
aut saevis libidinibus, et erroribus varijs : quorum iste potissi-
mus, quo Deos istos captis et circumscriptis mentibus commendat,
ut et sibi. etc. haec genuina lectio.
Procuret, simulacris] ms. curet, sim. et imaginibus. et quae
mis accuratior pascua est, nisi ut hominem a recogitatu verae
diviniiatis avertant praestigiis falsae divinationis ? quas et
ipsas quomodo operentur expediam. optime sane.
8. Hoc angeii] ms. fioc et an.
Quid ubique geratur] ms. quid ubi ger.
Qiiam enunciant] ms. quam adnun.
9. Et nunc Proplietis] ms. et tune pr.
Excerpunt] ms. exceperunt. recte.
10. in eventus, sciunt] ms. in eventum, sciunt.
Carnibus pecudis] ms. carnibus pecoris.
Fuerat Habent de incolatu] ms. fuerant, liabentes de inc.
11. Benefici plane et circa curas valetudinum] ms. Venefici
plane et circa medicinas val.
12. Edisseram phantasmata] ms. edisseram, dnm oracula
profitetur, dum miracula exercet, phantasmata.
Ut et numina] ms. to Et, non habetur.
Non quaereretur] ms. non quae ejjecerint.
Cap. XXII. (i) in usum maledictis Barr. — {2) furoribus Barr.
COLLATION DE MODIUS : XXHI 447
CAP. XX m.
1. [Pag. LU.] Defunctoruni inclamant animas] ms. def.
infamant animas.
Oraculi eliciunt] ms. oraculi edunt.
2. Quam utique superiorem] ms. quae utiquc superior omni
potestate credenda est?
Angelis et daemonibus] ms. angeli et daemones.
3. DistingLiitur opiiior ut a templis] ms. distingua, opinor,
ut in t.
Dementare] ms. démentir e.
Alia qui sibi] ms. alia in eo qui sibi gulam prosecat:
Cum per (1) exitus furoris] ms. compara exit. fur.
4. Edatur (2) hic aliquis sub] ms. edatur hic ibidem sub
tribunali vestro.
De vero quam alibi] ms. in vero est (3), quam alibi Deum,
quod in falso est.
5. Qui aëris maleficum numen] ms. qui aris inlialantibus
nunien de nidore concipiunt, qui ructuando curantur, qui anhe-
lando praefantur.
6. Aesculapius] ms. Aescopius. et sic apud Isidorum alios-
que in ms. semper invcnitur.
Medicinarum demonstrator alias demorituris] ms. med. (4)
alia die moriturus socordio et tanatio et asclcpiodoto vitae sub-
ministrator, nisi se daemonas confessi fuerint. Atque haec
proba lectio : sed legendum thanatio.
7. Licebit magia aut] ms. licebit. Magia aut aliqua eius-
modi fallacia fieri dicetis, si oculi vestri et awes, etc.
8. [Pag. LUI]. Daemonia mentiuntur] ms. daemonas m.
Subiecta Christianis] ms. s. est Clir.
Nec divinitas] ms. nec utique di.
Facit aemulis suis] ms. facii, aemulo suo.
Cap. XXUL (i) par Barr. — (2) Aedatur Barr. — (3) II fallait :
ms. quod 171 vero est, etc. Voy. ci-dessus, p. 264. — {\) di'fno>isir<itor
a été omis par mégarde. — {s) p>'<^^^it'>^psi'ratis Barr. — (6) hoc pro
tribtmali Barr. Donc F avait : hoc tribimali. — (6) vos Barr.
448 APPENDICE II
9. Maiestate superiore] ms. ma. superiorum.
10. Affectaretur in confessione] ms. aff. neque in conf.
Deos esse negans] ms, D. esse se neg.
Verum utrobique] ms. verwn non est,
11. Praesumseratis (5) daemonas] ms. praesuins. deos esse,
jam daemonas.
Continent! agnoscitisj ms. cont. cognoscetis.
Ut fides, ut] ms. ut fides et d.
12. Dicent ibidem, ecquis ille] ms. dicentibus nabis idem,
et quis ille.
Si post mortem] ms. si post crucem.
Si nunc denique pênes] ms. sine hune denique paenes infé-
ras, si non in caelis, ocyus et inde venturus, cum totius mundi
motu, cum orbis honore, cum planctu omnium, sed non Chris-
tianorum, ut Dei virtus et Dei spiritus, ut ratio, ut Dei filius,
et Dei omnia. Quodcunque ridetis.
13. Pro tribunali (6)] ms. pro abest.
Hoc esse sortitos] ms. Hoc non exstat.
14. Damnationis notam réfutent, Renuncient si immundos]
ms, damn. notant. Réfutent, renuant se imm.
15. De nomine Christi] ms. de dominatione Christi.
17. Quin potius ad] ms. sed p. ad.
18. In Christo domino credimus] ms. per Christum et in
Deum cr.
19. [Pag. LIV]. Nollent itaque nos (7)] ms. noll. ubique vos.
CAP. XXIV.
1. Laesae maxime Romanae] ms. laesae publiée, et maxime
Rom.
Quia nec Dii, nec pro certo] ms. quia nec Dei pro certo, nec
nos pro certo. optime.
2. Exprobratio resultabit] ms. exprobratio re ista resuit.
Expugnando Deum verum] ms. expugn. in verum.
Verae irreligiositatis] ms, Verae religios.
3. Conceditis de aestimatione] ms. concederetis de aesti-
matione.
Perfectae peritiae et maiestatis] Illa verba, peritiae et in
ms. absunt, et abesse melius.
COLLATION DE MODIUS : XXIV, XXV 449
Officia eius pênes multos velint] ms, officia vero eiusp. m. (1)
quae lectio proba.
4. Pariter suscipi] ms. p. suspicari.
Cum capitale] ms. ciim capitalis.
5. Ad aram fidei nianus, aiius si hoc putatis nubes nu-
meret] ms. alius ad œ\ Fidem (2) mamis, alîiis nubes num.
Aiius hirci] ms. alias (3) hircum.
6. Interdicere optionem] ms. interd. optione.
Invito coli vellet] ms. inv. col. volet.
7. Capite damnandi] ms. cap. damnandis.
Astartis] ms. Adargatis.
Diasares] ms. Duzares.
Norico Tibilenus] ms. Noricis Belienus.
Africae caelestus (4)] ms. Af. caelestis.
8. [Pag. LV]. Nec tamen Romanos dominos earum] ms.
n. tamen Romani dei earum.
Per ipsam quoque Italia (5)] to per abest in ms.
Crustuminiensium] ms. Casiniensium.
Nursia] ms. Nortia.
Otriculanorum] ms. Ocriculanorum.
Nortia Faliscorum] ms. hostia, Falisc. in honorem patris
Chumis, et accepit cognomen luno. sed nos soli arcemur.
9. Quia non Romanorum] ms. quia nec Rom.
10. Hic magnus omnium sit Deus, cuius] ms. hic magis
omnium sit, cuius.
CAP. XXV.
1. Testimoniis quos] ms. test, de Romanis, quos d.
2. Proprie mentio occurrit, non omittam] ms. pr. iniercedit
auctoritas, non omitto.
Cap. XXIV. (i) C'esf-à-dire : m. velint (I, n. 3). — (2) Fidem
est peut-être une faute d'impression pour Fidei. — (3) Môme obser-
vation sur alias, pour alius. — (4) Cocleslis Barr. — (5) Italiam
Barr.
29
450 APPENDICE II
Religiositatis diligentissime (1)] ms. religionis dit.
Elatos ut orbem] ms. elatos et in positos, ut orbem. Fortean,
et dispositos.
3. Si ista merces Romanis] ms. scilicet i. m. Romano no-
mini a Deis praerogativa expensa est. Sterculus, et Mutunus,
etc. quod est elegantissimum.
Genti magis fautum] ms. genti potius quam suae maluisse,
nec patrium solum, in quo nati, adulti, nobilitati sepultique
sunt transjretaneis dédisse.
4. Ut memoriam] ms. ob memoriam. quod malim.
Si uitro ad eos transire] ms. si ad ultores transferre.
5. Nostrae etiam aetati proposuit] ms. nostra etiam aetate
proposait.
Reip. exempto] ms. subito interemto die i8 Kal. Aprilium,
Archigallus ille impur issimus, etc.
Imperatoris Marci] to împ. in ms. abest.
7. [Pag. LVI]. Orbi terra praecelieret] ms. orbi terrae praec.
8. Vellet luno] ms. vellet et luno.
Génère deleri. Quod si hoc illius (2)] ms. gente deleri. Quod
sciam, hic illius.
lam tum] ms. iam tune.
9. Prostitutissimae lupae Laurentiae (3)] ms. prostratis-
simae lup. Laurentinae.
10. Sterculium] ms. Sterculum.
Sed Romae postea cum indigenis cultoribus suis] ms. sed
postea apud Romam cum inditamentis suis. \ego, indigitamentis,
id est, libris Pontificalibus suis qui Sterculo serviant : false
dictum. Glossarium, Indigitamenta, BipAia lepaTixà.
11. Regnabatur ab alijs] ms. regnabantur ab al.
Inciderentur. Sed] ms. inci. Auctis, âge, iam rébus religio
profecerit. Sed quam vanum est fastigium Romani nominis
religiositatis meritis deputare, cum post imperium sive hoc
regnum religio profecerit. Nam etsi a Numa Popilio concepta,
longe melius.
13. Temeraria de cespite] ms. temporaria de cespite.
Cap. XXV. ( i ) diligentisstmae Barr. — (2) quod si hic illius Barr. —
(3) Larentiae Barr.
COLLATION DE MODIUS : XXVI, XXVII 451
Nidor ex illis] ms. nidor exilis.
Ob hoc magni] ms. propterea magni.
14. Caedes strages moenium] ms. eadem strages et moe-
nium.
16. Hostibus ergo suis] ms. abest tô ergo.
17. Non potest fidei convenire] ms. non potest fides c.
CAP. XXVI.
1. [Pag. LVII]. Ipsis temporibus] to ipsis in ms. abest.
Et seculum corpus] qui sec. corp.
2. Diis suis syivestris Roma] ms. deis suis Roma.
Virgines vestales] ms. virgines Vestae.
3. Si Deo non deliquîssent (1) ultimo in Ciiristum] ms. si
non ultimo deliquisset in Christum. evidentius,
CAP. XXVII.
1. Laesae divinitatis] ms. laesae religionis ac divinitatis,
que non videamur laedere, eam ostendimus non esse.
3. Astutia sua dandi] ms. a. suadendi.
5. [Pag. LVIII]. Et eiusmodi spiritus] ms. eiusm. spiri-
tuum, et nequam tamen servi metum nonnunquam contumaciae
miscent.
Timor spirat] ms. tim. inspirai.
6. Appraehensi (1) subiguntur] ms, appr. subijciuntur.
Condltioni suae succidunt] ms. con. s. parent, et succedunt,
et quos. gravius sane, et accuratius.
7. Itaque cum vice repellantium (2)] ms //. dum v. repu-
gnantium vel rebellantium.
Adversum nos, in quorum] ms. adversus nos praeliantur,
in q.
Certi impares se esse, et hoc magis perditos] ms. certi etiam
périsse, et hoc m. p.
Cap. XXVI, (i) deliquisset Barr.
Cap. XXVII. (i) apprehensi Barr. — (2) rebellantium Barr,
452 APPENDICE II
CAP. XXVIII.
1. Quoniam autem facile iniquum videretur] ms. sed quo-
niam fac. in. vid.
Ex qua velit fronte] ms. ex abest.
2. Informati estis ab ijsdem] ms. formati est. ab eisd.
3. Callidiore timiditate] ms. calidiore tim, Caesarem.
Etiam merito] ms. et m. si.
Non cuilibet mortuo potior ?] ms. quilibet non omni mor-
tuo potior est.
4. Cum plus timoris humano domino (1) dicatis] ms. qui
pi. tim. hum. domino dicatis.
CAP. XXIX.
1. [Pag. LIX], Salutem Imperatoribus] ms. sal. Impera-
tor. (1)
Denique in conscientia] ms. den. quos in con.
2. Aedes tuerentur, ut opinor] ms. AE. vindicarent, quae
ut op.
Autem hae ipsae] ms, autem et hae i.
3. Aliquid liberalitatis] ms. aliquid aut lib.
Ita qui sunt (2)] ms. Itaque sunt.
Cuius et toti sunt] ms, cuius et nunc et toti sumus.
4. Ideo ergo rerum (2)] ms. ideo enim. Notae quoque inter-
rogationis in ms. absunt.
5. Sed vos irreligiosi] ms. sed vos religiosi.
Praeterito eo, in cuius] ms. praeteritis eum, in c.
Tos (3) debellatis] to tôt non est in ms.
Dum sciunt petere] ms. cum s. pet.
Cap. XXVIII. (i) dominio Barr.
Cap. XXIX. (i)Mot abrégé par Modius, pour iinperatorihus. —
(2) qui sunt (sans ita) Barr. — (2) rerum manque dans Barr. —
(3) De la Barre a eos (et non tos ni tôt'). Fautes d'impression de
Junius. Modius avait probablement écrit : Eos debellatis] xo eos
non est in ms.
COLLATION DE MODIUS: XXVni-XXXH 453
CAP. XXX.
1. Deum vocamus aeternum] ms. Deum invocamiis ae.
Et Deum vivum] ms. abest to et.
Ceteros malunt] ms. C. mallent.
Sciunt qui homines, qui et animam (1)] ms. sciiint qua
homines, guis et animam.
Super omnes Deos. quidni ? (2) cum super omnes] ms.
super omnes homines, qui utique viventcs mortuis antestant.
Recogitent quousque vires imperij sui valeant.
4. [Pag. LX]. Illuc suspicientes] ms. ilUic sursum suspi-
cientes.
Capite nudo] ms. cap. nudato.
Sumus omnes semper] ms. to Omnes non legitur.
5. Propter disciplinam eius] ms. pro disciplina eius.
6. Non Arabicae arboris.] to Non in ms. non est.
Reprobi hominis] ms. rep. bonis (3).
7. Veritas et Dei devotio est] ms. V. est Dei et dev.
CAP. XXXI.
1. Plane proficit ista] ms. Tamen prof. ist.
3. [Pag. LXI]. Ut omnia tranquilla] ms, ut tranquillae
sint vobis. Cum enim concutitur.
Turbis aestimemur] ms, to AEstimemur, non est.
CAP. XXXII.
1. Etiam pro omni statu imperij] ms, et ita universo orbe
et statu imp.
Quod vim maximam] ms. qui vim max.
2. Sed et iuramus sicut non per genios] ms, sedet sic iura-
mus, non per genios C.
Cap. XXX. (i) ajiiinas Barr. — (2) De la Barre a : quid ni (sans
l)oint d'interrogation). — (3) bonis, pour bovis, est une faute d'im-
pression de Junius.
454 APPENDICE II
3. Voluit, et pro magno id iuramento] ms. V. ideoque et
salvum volumus, quod Deus voluit, et pro magno adiuramento.
Honiinibus exigamus] ms, hominibiis expellamus.
CAP. XXX III.
1. Quam necesse est] ms. queni n. e.
Siquidem non solum ab eo postulo, qui eam potest (1)] ms.
Non solum quod eam ab eo postulo, qui potest.
Soli subijcio] ms. soli eum sub.
3, Satis habeat] ms. 5. habet.
4. [Pag. LXII]. Respice te] ms. respice post te, hominem
te esse mémento, et utique hoc magis.
Admonitio conditionis] ms. monitio c.
CAP. XXXIV.
1. Sed more communi] haec absunt in ms.
2. Qui pater patriae est, quomodo dominus est ?] ms.
quomodo qui p. p. est dominus est ?
Quod non potest credi] haec in ms. absunt, traiecta in
sequentem versum.
Adulatione. Tanquam si haberi (1) Imperatorem] ms. ad.
quod non potest credi, si h. Imp.
3. Cui Deo opus est] ms. cui Deis opus est.
4. Maledictum est ante] ms. maie traditum ante.
Caesarem nuncupare] ms. Caesarem nun. scio te isto nomine
maie velle et maie abominari. Ut vivente adhuc Imperatore
Deum appelles, quod nomen illi mortuum accidit. forte, mortuo
accedit. quod est évapyéo-Tepov. (2)
Cap. XXXIII. (i) eam qui potest Barr.
Cap. XXXIV. (i) Imhcns Barr. Donc F avait : habem. — (2) Voy.
p. 319.
COLLATION DE MODIUS : XXXIII-XXXV 455
CAP. XXXV.
1. Christiani, quia imperatores (1)] ms. Ch. an quia Imp.
2. Choros in pubiicum educere] ms. ioros in piiblimm ded.
Civitatem tabernae habitu] ms. Civitafem in tabernae habi-
tum demutare, vinulentiam facere, catervatim cursitare, ad
iniurias, ad impudicitias, ad libidinum ludibria. Sic enim
exprimitur pubiicum gaudium per dedecus pubiicum, Haec
in solemnes dixi principum, decernuntque alios dies non decet.
Quae (2) observant.
4. [Pag. LXIII]. Diem infringimus] ms. cf. effring.
Domi tuae] ms. domui t.
5. Quo more celebrari nec modestia, nec verecundia, nec
pudicitia permitttint, sed occasio voluptatisj ms. quomodo
celebranda occasio voluntatis magis quam digna ratio persuasit,
si nec modestia, nec verecundia, nec pudicitia permittunt fidem
et veritatem nostram.
Sed iiostes principum] ms. s. ut h. p.
6. Ipsam vernaculam] ms. ipsamque vernac.
Testis et Tyberis] ms. test, est Tyb.
7. Si pectoribus ad translucendum] ms. si pect. humants
ad transducendum quoddam specularem materiam natura obdu-
xisset, cuius non praecordia insculpta pareret novum ac novum
Caesarem scena conceario (legendum congiario) dividundo
praesidentem, etiam illa hora, quo reclamant, de nostris annis
augeat tibi luppiter annos. Sed Christianus tam pronunciare
non novit, quam novum Caesarem optarc.
8. Depostulatores Christianorum] ms. depopulatores Ch.
De équité] ms. de aequitate. melius, de equitatu. sed mendum
est, ut adiuncta docent.
9. Inter duas lauros] ms. inter duas laurus.
Omnibus Steplianis (3) atque Partiieniis] omnibus, Sigeriis
atque Partheniis.
10. Sub ipsa usque impietatis] tô Usque in ms. abest.
Cap. XXXV. (i) impcratorih. Barr. — (2) quae (impression peu
lisible dans Junius). — (3) Steph. Barr. — (4) siiperstes Barr.
456 APPENDICE II
U. [Pag. LXIV]. Racematio superst (4)] ms. rac. superest.
Vestibula enubilant] ms. vest. nubilabant.
Vota propria iam] ms. v. publica pr. i.
12. Capite consulant] ms, c. consultant.
13. Non ea mente de charis] ms. non enim ea m. de Caesaris
consul itur, qua de hominis. Aliter.
CAP. XXXVI.
1. Qui Romani vocabantur] ms. qui R. vocantur.
Et Romani esse, et hostes non] ms. et Rom. (1) non esse,
et II. esse.
2. Imperatoribus dedita non] ms, Imp. débita non.
Necesse habet exhibere (2)] ms, n. habent exhibere.
3. Indifferentis benignitatis] ms. indifferentia benig. quod
est Tertullianeum.
4. Imperatoribus qui et] ms, imp. ex ipso, qui et v.
[Pag. LXV]. Nec in ipsum, qui per Deum] ms. nec in ipsum
Imperatorem, qui p. D.
CAP. XXXVII,
1. Habebimus odisse] ms. habemus odisse.
Possimus laedere] ms, possumus laed.
2. Item si laesi] ms, item si ijdem l.
Praeteritos a vobis] ms, praeteritis vobis.
Lapidibus et incendijs] haec in ms, absunt.
Nec mortuis parcunt] ms. ne m. quidem par.
De requie sepulturae] ms. de reliquiis sepult.
Dissecent, distraiiant] ms. dissipent, d.
3. Largitatem ultionis posset] ms, largiter ultionis possit.
Hellenismus elegans.
Divina secta aut doleat] ms. divinitas sectae, aut ut d.
4. Si enim hostes extraneos] ms. si enim et hostes exertos.
Cap. XXXVI. (i) C'est-à-dire : Romani, — (2) exhiberiVtZXX.
COLLATION DE MODIUS : XXXVI-XXXVIll 457
Orbis ? Externi sumus] ms. orbis externi sumiis, et orbem
iam et vestra omnia. legendum, orbis ? Orbis iam etc.
Relinquimus templa, cui (1) bello non] ms. reliquimus t.
Possumus dinumerare excrcitus vestros : unius provinciae
plures erunt. Cui bello non.
6. In aliquem orbis remoti, etc.] ms. in aliqiiem anguliim
orbis remotissimum abrupissenms a vobis, siiffiidisset pudor
uiique dominationem vestram : ad silentium reriim, et stupo-
rem quendam quasi mortui orbis qaaesissetis, quibus impera-
retis. Plures hostes quam.
8. Christianos habendo. Sed hostes maluistis] ms. Chris-
tianos hostes habendo. Hostes maluissetis vocare generis hu-
mant potius, quam erroris humant. Quis autem.
9. Spiritibus pateret] ms. sp. pateretis. elegantius.
10. Cogitantes non modo] ms. recogitantes non m.
Quia sumus plane] ms. qui s. pi. non generis humant hostes,
sed potius erroris. rectissime.
CAP. XXXVI H.
1. [Pag. LXVI]. Nec paulo levius inter licitas] ms. ne p.
lenius inter illicitas.
Factionibus timeri solet] ms. fact. praecavetur.
2. Constat ac modestia publica] ms. constat modestiae^
publicae. quae proba lectio.
Quae res facile] ms. qua facile.
Inquietaret] ms. inquietarent.
Mercenariam homines violentiae] xb Homines in ms. non
exstat.
3. Omni gloriae] ms. ab omni gloria.
Cognoscimus mundum] ms. agnoscimus m. atque adeo
spectaculis.
4. De quibus exiguntur] ms. de quibus transiguntur.
Praeterimus] ms. praetersumus.
Nihil est nobis dictum (1)] ms. nihil enim n. d.
Cap. XXXVII. (i) tctnpla. Cui Barr.
Cap. XXXVIII. (i) dictu Barr.
458 APPENDICE II
5. Vanitate : quo vos] ms. V. Licuit Epicureis aliam decer-
nere voluptatis veritatem, id est, animae aeqiiitatem. In quo
vos. quae alii in finem cap. traiecerunt, Sed hoc melius,
Oblcctari novisse nolumus] ms. obkdare novissime nol.
Sed licuit Epicureis etc. usque ad finem capitis] in ms.
absunt.
CAP. XXXIX.
1. [Pag. LXVII]. lam nunc ipse negotia] ms. jam nunc
ego ipse n.
Factionis, ut qui mala] /. quo minus mala refutaverim bona
ostendam, Si etiam veritatem revelaverim. Corpus.
Disciplinae veritate] ms. divinitate.
2. Coimus in coetum] ms. coimus in coetu, et congrega-
tionem facimus, ut ad Deum quasi manu facta precationibus
ambiamus. Haec vis.
Pro ministris deorum ac] ms. pro ministerijs eorum, etc.
3. Cogimur ad literarum] ms. coimus ad literarum.
Inculcationibus densamus] ms. in compulsationibus dens.
6. Nam inde non epulis] ms. quippe non epulis inde, pota-
culis, nec ingratis voratrinis dispensatur, sed egenis alendis
liumandisque, et pueris ac parentibus destitutis, iamque domes-
ticis senibus, iam otiosis. Item naufragijs, et si qui in metallis,
et si qui in insulis vel in custodijs duntaxat ex caussa dei sectae
conflictatur, alumni confessionis suae fiunt. Sed eiusmodi etc.
8. Erunt. Sed et quod fratres nos vocamus] ms. erunt
abest. Sed et quod fratrum appellatione censemus.
Affectatione] ms. affectione.
Fratres etiam vestri] ms. //'. autem etiam vest.
9. At quanto dignius] ms. quando nunc dignius.
Expiraverunt pietatis] ms. expaveruni veritatis.
12. In illo loco consortium] ms. in isto solo con.
[Pag. LXVIIIj. Et sapientissimorum disciplina] ms. Et
sopientiorum suorum dise.
14. Charitas con viol atur] ms. cil. convivatur ? recte, nam
transit ad sequentia.
Prodigas suggillatis] ms. prod. quoque sug.
COLLATION DE MODIUS .* XXXIX, XL 459
Morituri. Sed stipulam] ms. morituri : aedificant vero quasi
nunqiiam moriantur. Sed si. (1)
15. Decurijs et ructantibus] to Et in ms. non est.
Aer. Alijs] ms. aër. si alijs.
Pollinctorum sumtus] ms. Et polincto lucitonim sumptus.
antique. Sed de utroque in notis diximus (2).
Coenae Serapicae] ms. coenae Serapiae.
De solo triclinio] ms. de loco t.
16. [Pag. LXIX]. Rationem suam ostendit] ms. rationem
sui ost. id vocatum quo dilectio pênes graecos. Quantiscimque
sumptibus.
18. Ut qui meminerunt (3)] ms. tô Qui, non legitur.
Ut qui sciunt dominum] ms. ut qui sciant Deum.
Deo canere] ms. de Deo can.
19. Eruptiones lasciviarum] ms, inceptiones (4). Corrige
inreptiones, ait Schoppius (5).
20. Damnanda, si quis de ea queritur] ms, d. si non dissi-
milis damnandis, si quis de ea queritur.
CAP. XL.
1. Christianus esse caussam (1)] ms. in primordio tempo-
rum Christianos esse in causa.
2. Ascendit in arva] ms. a. in rura.
Ad leonem acclamatur] ms. ad leonem inclamant.
3. [Pag. LXX]. Legimus Hieropolin (2)] ms. legimus Hie-
narranda pênes Delon et Rliodon. vide notas (3).
4. Mari ereptam] ms. mari inereptam.
Cap. XXXIX. (i) Faute d'impression, pour : Sed sL {= Sed
stipulant). — (2) Voyez les Notae de Junius, vol. II, p. 49, et ci-
dessus, p. 24. — (3) meminerint Barr. — (4) C'est-à-dire ; inceptiones
lasciviarum. Modius ne répète pas toujours les mots qui n'offrent
pas de variante. Voy. I, n. 3, — (5) C'est la seule fois que Junius
cite un autre savant. Voy. ci-dessus, p. 24.
Cap. XL. (i) C/tn'stianos esse causaiiiBAVV. — (2) ffierapolim Barr.
— (3) Voyez les Notae de Junius, vol. II, p. 50, et ci-dessus, p. 24.
— (4) abscissam Barr.
460 APPENDICE II
Italiae abscisam (4)] ms. abest vox, Italiae.
6. Nati niortuique sunt] ms. nati moratique sunt.
Neque enim alias in hodiernum] ms. neqiie enim illae in
hodier.
7. ludaeum ab Aegypto] ms. ludaeorum ab Aegyp.
Regiones ac fines eiiis] ms. reg. affines e.
Poma oriantur] ms. pom. conantiir.
Cinerescunt] ms. cineres sunt.
8. Tuscia iam tune] ms. abest to Tune.
Monte profudit ignis] ms. m. perfuditignis.
Per Romanos annulos] ms. Romanos annulas cacde sua
modio metiebatur. rectissime.
9. Aedium clades templorumque] ms. eadem cl. templo-
rum, quae et moenium fuerunt ; ut iam et hoc revineani, non
ab his evenire, quae et ipsis similia evenerunt. semper hu-
mana gens.
10. Non requisivit sed] ms. non solum non req. timendum,
sed et alios sibi citius commenta quos coleret.
Omnibus se vitijs et cerimonijs involvit] ms. omnibus
vitiis et criminibus inolevit.
12. Cuius et ingrata. Etiam tamen si pristinas] ms. cuius
bonis ingrata est, et tamen si pristinas.
13. [Pag. LXXI]. Christianos a Deo orbis accepit. Ex eo
enim] ms. Christianos adeo or. ac. Exinde enim.
14. Lupanaribus operati] ms. /. operantibus.
15. Continentia aspersi] ms. cont. expressi.
lupiter honoratur] ms. lup. hon. a vobis, Deus negligitur.
CAP. XLl.
1. Vos rei publicorum] ms. Vos publicorum incommodo-
rum inlices semper, apud quos Deus spernitur, statuae ado-
rantur. U tique enim credibilius.
An ne iili iniquissimi, si] ms. sed ne illi in. qui. sublata nota
interrogationis.
2. Si quidem et ipse patiatur] ms. qui et ipse patitur.
3. Et indulgens et increpans] ms. et ind. et incessens.
COLLATION DE MODIUS : XLI, XLII 461
Esse commoda prophanis (1)] ms. esse et commoda p.
4. Qui aequitatem didicimus] ms. qui autem ita discimus.
Etiam sequitur] ms. et sequitur.
Nobis forte in] ms. nobis, si forte, in admonitionem a Deo
obveniunt, vobis in castigationem.
5. [Pag. LXXII], Vestris meritis] ms. vestris id mer.
Confirmantium scilicet fiduciam] ms. confirmamur : ut
scilicet fiduciam et fidem spei nostrae agnoscentes. lam vero
si ab his molitis, omnia vobis mate veniunt nostri caussa, cur
colère eos perseveratis. Est autem molitis, mola et ritu divino
cuitis. antique.
6. Quos separare deberent a meritis Cliristianorum] haec
absunt in ms. et videntur ex superioribus repetita.
CAP. XLII.
1. Sed aiio quoque] ms. sed alio ad hue.
In negocijs (1) dicimur] ms. abest tô in.
2. Cohabitamus in hoc seculo] ms. coliabitamus. Hoc
seculum navigamus et nos vobiscum, et vobiscum miliiamus,
etc. (2).
3. Opéra nostra pubii camus] ms. opéras nostras p.
4. Non scio. Sed cerimonias] ms. Nescio, etsi cer.
Attamen illa die] ms. att. et illa d.
Non lavor diluculo] ms. non lavo sub noctem.
Attamen lavor honesta hora] ms. sed lavo et débita h.
Rigere et pallere] ms. frigere et pallere.
5. Ubi de copijs tuis] ms. Ubicunque de cop. t.
6. Esse iiberis et solutis] ms. tô Esse, non comparet.
Non coronam naribus admovimus] ms. Vos enim non novi-
mus.
Cap. XLI. {\) profnnis Barr.
Cap. XLIL (i) negotiis Barr. — (2) De la Barre continue : et rus-
iicaniur et mercamar ; proinde... F avait-il : vicrcamurl 1? a : et
mercatiis proinde. Voy. ci-dessus, p. 355 — (3) carioris Barr.
462 APPENDICE II
7. Venditantur, si desideravero] ms. Yen. quod ego si d.
liberius de suis, de propriis locis sumam.
Pluris et charioris (3)] ms. plures et chariores.
8. Non SLifficimus] ms. non enim sufflcimus.
9. Sed cetera vectigalia] ms. sed et cet. vect. laeduntur-
sujficit, si cetera grattas Christianis agunt ex fide dependen-
tibus debitum, cum alieno fraudando abstinenms : ut si ineatur,
quantum publico pereat et fraude et mendacio vestrarum pro-
fessionum, facile ratio haberi possit unius speciei querela com-
pensato pro ceterarum rationum securitate.
CAP. XLIII.
1. [Pag. LXXIII], Plane confitebor] ms, pi. con. quoniam,
si forte, vere de sterilifate, Christianorum conqueri possunt.
Primi erunt, etc.
Aquarioli] ms. Harioli.
2. Cum aliquo praesidio] ms. cum aliquo utique praesidio
compensari potest. Quanti habetis, non dico iam qui de vobis
daemonia discutiant, non dico jam qui pro vobis quoque vero
Deo preces fundant, sed a quibus nihil timere possitis.
CAP. XLIV.
1. [Pag. LXXIV]. Tam verum, quam grande (1)] ms. tam
veruni, tam grande.
2. Tôt a vobis nocentes] ms. quoi a vobis n.
Qiiis ex illis etiam Christianus] ms. idem etiam Christianus
adscribitur ? Proinde cum Christiani suo titulo offeruntur, etc.
Talis, quales tôt nocentes ?] ms. talis, qualis etiam notatur
nomine ?
3. De vestris semper bestiae] ms. de vest. etiam bestiae.
Nemo illic Christianus, nisi plane] ms. n. illic Ch. n. hoc
tantum, aut si et aliud, iam non Christianus. Optime.
Cap. XLIV. (i) inm grande quam verum Barr.
COLLATION DE MODIUS : XLIII-XLVI 463
CAP. XLV.
1. Adeo edocti (1)] ms. a deo doctore.
Incomptibili (2) dispensatore mandatam] ms. intemtibili
deo doctore praeceptam.
2. Humana aestimatio] ms. h. doctrina.
Tanta est prudentia] ms. quanta pr. hominis ad demons-
trandum quid vere bonum, tanta auctoritas ad exigendnm.
3. Quid plenius dicere] ms. quid pi. dicfum est, non occides,
an vero ne irascaris quidem ?
Oculis solitariam arcere concupiscentiam] ms. oculorum
solitaria concupiscentia arcere?
4. Antiquioris formae mutuatas] ms. antiquiorem , formam
mutatas.
Moysis (3)] ms. Moysi.
5. Cum istas evadere] ms. cum illas et e.
Et plerunque (4) in admissis delitescere] ms. pi. in ad.
delitescenti, et aliquando contemnere ex voluntate vel necessi-
tate. Recogitate etiam pro veritate supplicii cuius libet.
7. Verum sempiterni, eum etc.] ms. Verumtamen semper
ternum deum timentes, quem timere debebit ipse, qui iudicat :
Deum non. etc.
CAP. XLVI.
1. [Pag. LXXV]. Constituimus, ut opinor] ms. Constiti-
mm, ut op.
Quibus modis probare] ms. to Modis non legitur.
Potestatum. Quis nos] ms. P. Existai qui nos.
2. De veritate ? Sed dum] ms. d. v. debebit renidi, sed dum
tanien, id est, renidentia et risu excipi.
Quod usu iam et] ms. quod usui iam et.
Negotium existimat] ms, negotium existimatis.
3. Proinde iliis non adaequamur] ms. Non proinde adae-
Cap. XLV. (i) a deo edocti Barr, — (2) incontemptihili Bair.
(3) Mosis Barr. — (^\) plerumque Barr.
464 APPENDICE II
quamiir diligentia (Forte de licentia) et immunitate disciplinae ?
vel cur et illud pares nostri non urgentm ad officia, quae nos
non obeuntes periclitamur ?
4. Proferre compellit ?] ms. Prostituere com.
Superstitiones vestras commentarijs] ms. Sup. publicas
com.
5. Philosophi non enim] ms. Phil. enim, non.
Daemonia non fugat] ms. daem. non fugiunt.
Idem et cum aliquid] ms. Idem et qui aliquid.
In fine iubebat] ms. in fine mandatât.
6. [Pag. LXXVI]. In quantum odio] ms. 'in quantum
odium.
7. lilusores et corruptores, inimice (1) Philosophi] ms. et
illusores et contemptores. inimici Philosophi.
8. Neque de conscientia neque disciplina] ms. Neque de
scientia, neque de d.
9. Inveniri facilem] ms. in. facile.
Difficilem] ms. difficile.
10. Corruptorem adolescentium] ms. Corruptor adules-
centium pronunciatur. Chnstianus ad sexum nec foeminae
mutât.
Ardorem subantem] ms. ardori sub.
Speusippum] ms. Speudipsum, mendose.
11. Et dolere (2), si non esset] haec in ms. absunt.
12. [Pao. LXXVII]. Faeminam (3) videt] ms. faeminas
non V.
13. Superbia deculcat] ms. sup. decalcat.
Christianus nec] ms. Ch. contumeliosus nec.
14. Aequanimitate] ms. animi aequitate.
Lacones emendassent] ms. L. emendarint.
Hostibus denegavit] ms. hospitibus den.
15. Idem Aristoteles tam turpiter] ms. Idem A. t. indecore
Alexandro régi potius adulatur quam Dionysio etc.
Cap. XLVI. (i) inimice Barr. — (2) et doleret, si non esset Rotins
Barr. Potius est une faute d'impression pour />otiti(s. — (i)foeminain
Barr. — (4) qtiosdain Barr.
COLLATION DE MODIUS : XLVIl 465
16. Et Hippias] ms. Ydhyas mendose,
17. Excedere quaedam (4)] ms, Qxcidere q.
Sapientiae persévèrent] ms. S. persévérant apud vos. Adeo
etc.
18. Graeciae discipulus] ms. G. d. et caeli, famae nego-
iiator et salutis vitae : verborum et factonim operator, et rerum
aedificator et destrudor, et interpolator erroris et inlegrator
veritatis, fiirator eius et custos. [XLVIl, 1]. Adfmc enim mihi
proficit.
CAP. XLVIl.
1. Quo facile credam] ms. q. f. credatur.
Etiam excurrerem (1)] ms. Excucurrissem in hac qitoque.
2. Omnino de prophetarum] ms. Omnino abest.
Igitur (2) Philosophi] ms. Igitur et Philosophi.
Ut quae de nostris habent, ea nos comparent illis, etc.]
ms. Num quia quaedam de nostris habent, eapropter nos com-
parent illis ? inde opiner, et a quibusdam Philosophia legibus
quoque eiecta est : a Thebaeis dico, et ab Spartanis, et Argaeis,
dum ad nostra conantur. sed liomines gloriae.
3. Scripturis offuderunt (3)] ms. Scripturis non habet.
Sub nubilo] ms. subnubila.
4. Aspernata mutabat] ms. a. nutabat.
Incertum miscuerunt] ms. in incertum mise
5. Deum non ut] ms. D. nostrum non ut.
6. Asseverant, aiij corporalem] ms. As. qua Platonici et
Stoici, alij ex atomis, alij ex numeris, qua Epicurus et Pytha-
goras, alius igni, qua Heracleto visum et Platoni : et quidem
curantem rerum facforem, et actorem rerum contra Èpicuri
otiosum et inexercitotum et {ut ita dixerim) neminem in rébus
liumanis.
Cap. XLVIL (i) etiam excurrerem in hanc quoque prohationem
Barr. Il semble que la variante porte seulement sur e.vcurreretn :
hac est une faute d'impression pour hanc et Modius a négligé de
zo-ç'xQV prohationem. — (2) Inde igitur Barr. F avait donc aussi : Inde
igitur. — (3) offenderunt Barr. — (4) scinderunt Barr. — (5) et ex
30
466 APPENDICE II
8. Ita intulit aut reformavit] ms. ita aut intul. qiiicl, aut.
9. Paraturam viri quidam] ms. p. variis quibusdam. recte,
Sciderunt (4). Quod ideo suggesserim] ms. Exciderunt.
q. i. suggerimus.
Adaequare videatur] ms. Aequare videatiir.
Defensionum vindicet veritate (5)] ms. Defectionem v.
veritatis. quae lectio rectissima,
10. [Pag. LXXVIII]. Commentatores probabuntur] ms.
Comm. depre/ienduntur.
11. Disciplinae suborta] ms. dis, subornata.
Quae dissimilitudine fidem] ms. quae de similitudine fidem
injirmarent veritatis, vel eadem sibi potius fidem râpèrent :
ut quis ideo non putet Christianis credendum, quia nec poetis
nec Philosophis.
12. Et ridemus (6) Deum praedicantes] ms. Ridemur
praeiudicantes Deum, fortasse praeindicantes D.
Si gehennam] ms. et gehennae, si comminemur.
Apud mortuos] ms. ad m.
14. Sacramentis ut de prioribus. Ergo fideliora] ms. si de
nostris sacramentis, ut de proprioribus, E. fi. sunt nostra, ma-
gisque credenda, quorum imagines quoque fidem invenerunt.
si de suis sensibus, iam ergo sacramenta.
CAP. XLVIII.
1. [Pag. LXXIX]. Colubrum] ms. colubram.
Argumenta eloquij] ms. argumenta eloq. sui virtute dis-
torserit, nonne consensum movebit, et fidem infiget, ut etiam
ab animalibus sit abstinendum ?
Reducere repromittat] ms. reducem r. statim illic vesica
quaeritur (legendum vesica queritur, id est, quasi ventis
distenditur cruciaturque pectus illorum vehementissime)
et lapidibus ma gis, nec saliem copijs (1) a populo exigetur :
varietate defensionum vindicet veyitatem Barr. — (6) ridemur Harr.
Cap. XLVIII. (i) coelihus P. Voy. ci-dessus, p. 379.
COLLATION DE MODIUS i XLVIH 467
2, quasi non quaecumque ratio praeest animamm humanarum
in corpora reciprocandarwn, ipsa exigat illas in eadem corpora
revocari : Quia hoc sit revocari, id est, esse quodfuerant. Na{m)
si non id sunt quod fuerant, id est, liumanum et idipsum corpus
indutae, iam non ipsae erunt quae fuerant. Porro quae iam
non erunt ipsae, quomodo redisse dicentur ? Aut aliud factae
non erunt ipsae, aut manentes ipsae, non erunt aliunde. 3.
Multis etiam locis ex otio opus erit, etc.
3. Reformari vidit] ms. r. videretur. et perplacet, si ita
coniunxeris, lascivire, quis in quam bcstiam reformari videretur.
Quemlibet pro quolibet] ms. qui et pro q.
In eandem restauretur] ms. in eadem restauretur, et si non
effigiem, certe conditionem. 4, sed quia ratio restitutionis.
4. Eo quod omnino] ms. Et omnino.
5. iiomo, et fidem] ms. homo es, fidem.
6. [Pag. LXXX], Quid novi tibi eveniet] ms. Nihil ergo
novi ti. e. quod germanum putem.
Cum iterum non eris] ms. Et iterum cum non eris.
Et tune requires qua] ms. et tune require qua.
7. Omnium animarum animatore] ms. omnium animatore
signatum, et per ipsum humanae.
8. Fructus consumuntur] ms. //'. consummantur.
9. Discens, dominus omnium] ms. disces deum, dominus om.
Ut pereas ubicunque] ms. ut pereas, resurgas ub, melius,
ut pereas, resurges ub.
Hauserit, aboieverit] ms. h. absorpserit.
In niiiilum prodegerit, reddet te] ms, in nili. redegerit,
reddet.
11. Omnia aemulis substantiis] ms. omnia ex ae. S. sub
unitate constarent.
Et ipsa vita et morte] ms. ipsa v. et m. eadem. Aevum quoque
ita distincta conditione conservatur, ut prima autem pars ab
exordio, etc.
12. Omne humanum genus] ms. omnium hominum genus.
Immensam aeternitatis] ms. in immensam aeiernitatis.
13. Nec mors iam, nec rursus] ms, nec mors iam rursus.
Apud Deum semper] ms. abest to semper. et redundat.
In poena aeque] ms, in paenam aeque.
468 APPENDICE II
Divinam scilicet subministrationem] ms. divina scilket
subministratione.
14. Alius est qui usui] ms. alius est ignis qui us.
Eructans] ms. eructuans.
15. Et hoc erit testimonium] ms. to Et, abest : nec vero
opus.
CAP. XLIX.
2. [Pag. LXXXI]. Nullo titulo damnari] ms. proinde
nullo t. d.
3. Nam et multis et aliis] ms. nam et mult. al.
Vanis et fabulosis inaccusatis et impunitis, ut] ms. in eius
modis accusatis et impunitis, ut noxiis : aeque enim, si utique
inrisum, iudicandum est, non gladiis, et ignibus, etc.
5. Nisi velim, non potest] ms. nisi velim, non posses.
CAP. L.
1. Plane volumus pati verum] ms. to Pati in ms. non com-
paret.
Et bellum miles] ms. abest xb Miles.
3. Sed obducimur certe] ms. sed occidimur certo, cum obti-
nuimus : ergo vincinius.
Sarmentitios (1) et semissios] ms. et sarmentarios et semia-
xios appelletis, quia ad stipitem dimidii axis revincti, etc.
4. [Pag. LXXXII]. Propterea enim desperati] ms. merito
desp.
In causa gloriae] ms. in causani gloriae.
5. Catanensium Aetnaeis] ms. to Catanensium, non legitur.
Donavit] ms. donat.
Rogo se secundum matrimonium dédit] ms. Rogo secun-
dum matr. evadit. Optime id quidem.
Praeconium castitatis] ms. praecon. castitatis et pudicitiae.
6. Et in captivitate] ms. etiam in cap.
Cap. L. (i) sarmeiiticios Barr. — {2) ptissmiae Barr. — (3) con-
te)nptum Barr.
COLLATION DE MODIUS : XLIX, L 469
Cum in exitium Ptisanae (2)] ms. cum in exemplum Ptis-
sanae.
8. Attica meretrix] ms. AU. quaedam mer.
Ut expueret et vocem] ms. ut expelleret et v.
Si etiam victaj ms. etiamsi victa.
9. Contemtum (3) mortis, impassibilibus flagellis] ms.
impassibilem fieri ; flagellis tyranni siibiedus.
Propinquorum acerbata] ms. Propinquonim acerba.
Tantum iionorem tolerantiae] ms. tantum honoris toll.
10. Quia humanam] ms. quia humana.
Omnimodo animi tantum pro patria] ms. omni modo : mi
tantum pro patria, pro agro, pro imperio, pro amicitia per-
missum est, quantum, etc.
11. Statuas diffunditis] ms. statuas decernitis, et imagines
scribitis.
Inciditis aeternitatem] ms. inciditis in aeternitatem.
12. Ad lenonem damnando] ms. ad len. damnandam Chris-
tianam potius, quam ad leonem putastis, et confessi.
13. Nec quidquam tamen profuit] ms. nec quicquam tamen
proficit exquisitior quaeque.
Plures efficimur] ms, etiam plures ef.
15. Illa ipsa obstinatio] ms. ipsa illa obsi.
470
APPENDICE III
Le fragment de Fulda.
Publié en 1597 par Franciscus Junius dans la collation
de Modius, ce fragment important (chap. *19) fut négligé
par Desiderius Heraldus (1613), par J. Lud. de la Cerda (1624-
1630) et même par Nie. Rigaltius (1634), qui fut le premier
à introduire des variantes de Modius dans le texte de V Apo-
logétique.
En 1718, Havercamp publia le fragment de Fulda à la
suite de son édition (p. 439-443), avec un commentaire. Depuis,
il a été repris dans les éditions d'Oehler, Léopold, Woodham,
Kayser, Bindley et Rauschen. Paul de Lagarde lui a consacré
une étude dans les Abh.der Ges. der Wiss. zu Gôtt., 37, 1891,
p. 77-84. Voyez encore A. Harnack, Gesch. der altchristl.
Lin., II, 2, p. 266, n. 2. M. Schanz, Gesch. der rôm. Litt., 3^
p. 290. R. Heinze, Tertullians Apolog., p. 385-387. Rauschen,
Meine Ausgabe, p. 84-85.
Sur l'origine ou l'auteur de ce fragment, les opinions dif-
fèrent. Suivant Havercamp (p. 435) et Oehler (éd. min.,
p. 105), qui admettent que Tertullien lui-même a donné deux
éditions de son ouvrage, ce fragment serait un reste de la
première édition. Dans la deuxième édition, Tertullien aurait
remplacé cette rédaction assez pâle par les brillantes périodes
,des chap. 19-20. Harnack a également exprimé l'avis que le
fragment de Fulda fit à l'origine partie de V Apologétique.
Comme il fait double emploi avec les chap. 19-20, nul ne
peut supposer que Tert. ait songé à le mettre à côté de ces
chapitres et Harnack semble avoir voulu dire que le fragment
est une première rédaction des chap. 19-20. Comment ce reste
de la première édition ou cette esquisse provisoire a-t-elle
survécu dans F à côté des chapitres destinés à prendre sa
place ? C'est ce que personne n'a essayé d'expliquer jusqu'ici.
LE FRAGMENT DE FULDA 471
D'autres critiques ont Soutenu que le fragment de Fulcia
n'est pas de Tertullien. P. de Lagarde y voit un reste d'une
source commune à Tertullien et à Minucius Félix et il con-
jecture que cette source est une apologie du pape S, Victor,
qui avait écrit, peu avant Tertullien, mediocria de religione
volumina (S. Jérôme, Chronique d'Eusèbe, éd. Schoene, II,
p. 175, ann. 2209 = 195 après J. C.) ; mais cette thèse d'une
source commune des deux apologistes a paru invraisemblable.
0. Bardenhewer a supposé (Gescli. der altclir. Litt., 2, p. 355)
que le fragment vient d'une autre apologie perdue et inconnue.
J. Geffcken pense (Zwei griecli. Apologeten, p. 286) qu'il fut
composé après Tertullien pour munir l'Apologétique des armes
de la chronologie ; mais le fragment donne autre chose que
de la chronologie et celle-ci ne manque pas dans les chap.
19-20. Enfin, R. Heinze, rejetant toutes ces opinions, est
d'avis que le fragment fut composé, pour remplacer les chap.
19-20, par un éditeur de V Apologétique, qui jugeait incomplet
ce que Tert. dit de Moïse et des prophètes et qui trouvait
quelques-uns des autres développements trop longs. Il com-
pare d'autres additions propres à F ; mais la comparaison
est peu probante, car, dans ces passages, il n'y a pas double
emploi ; il n'y a qu'une très courte paraphrase (34,4) ou une
rédaction différente d'un paragraphe (48,2).
Nous ne croyons pas que le fragment de Fulda puisse être
l'œuvre d'un autre que Tertullien, mais nous n'admettons
pas que Tertullien ait donné deux éditions de V Apologétique.
Le fragment de Fulda est bien de Tertullien, mais il n'a jamais
pris place dans l'Apologétique.
I. // est de Tertullien, car 1» les idées sont exactement celles
de Tertullien. On les retrouve dans les chap. 19-20 {^). Quel-
ques-unes sont un peu plus développées, soit dans ces deux
chapitres, soit dans le fragment {^). D'autres ont trouvé place
(^) C'est ce que P. de Lagarde a fait ressortir en juxtaposant les
phrases du fragment et les paragraphes des chap. 19-20.
('■^) Moïse et les prophètes (§ 1-4). La chronologie de l'histoire
de l'humanité (§ i). L'époque de Saturne, d'après Thallus (§ 2).
472 APPENDICE m
ailleurs, soit dans V Apologétique, soit dans le traité Ad na-
tiones {^).
2° La Langue est celle de Tertullien, Nous ne pensons pas
qu'on puisse y relever des expressions qui soient contraires
à son usage. Voyez le commentaire.
3° Ce qui est remarquable, c'est que les phrases sont
rythmées comme celles de Tertullien : Di Capua (p. 33, n. 2)
en conclut que ce fragment est antérieur au IV^ ou V^ siècle,
où apparaît la clausule basée sur l'accent tonique, et tient
même pour certain qu'il remonte au 11^ ou II I^ siècle.
4° L'auteur du fragment a certainement puisé directement
aux mêmes sources que Tertullien et il a utilisé ces sources
de la même manière que lui. Un fait digne d'être noté, c'est
que tous les détails que le fragment a de plus que les chap.
19-20, viennent des sources d'oii dérive la rédaction de ces
chapitres. C'est Théophile surtout que l'un et l'autre ont
utilisé (2). Si l'auteur du fragment n'était pas Tertullien, il
faudrait admettre qu'il a découvert la source de Tertullien
et qu'il l'a consultée lui-même pour ajouter certains détails.
Cela n'est pas impossible, mais c'est peu vraisemblable. Il
(') Chap. 46, 8 : l'histoire de Thaïes (§ 4). Chap. 47^ 3 : les
philosophes ont puisé dans les Ecritures (§ 6). Chap. 39, 3 et 41, 5 :
les prédictions déjà réalisées confirment notre espérance (§ 8).
Chap. 49, I : praesumptionem (§ 8). Ad nat., 2, 12, p. 120, 10 : la
Sib)'^lle (§ 10) ; voy. ci-dessus, p. 223-224. L'idée finale (quem-
admodum et dei vestri) est développée dans les chap. 23, 4 et 9.
(2) Voyez notre commentaire et Heinze, p. 386-387. Sur Moïse
(§ i), voy. Tlieoph., Ad Autol.^ 2, 10 et ss. ; 3, 18. Sur l'intervalle
entre Moïse, Danaus et la guerre de Troie (§ 2), voy. Theoph. , 3,21.
La phrase de Thallus sur Belus et Saturne ne se trouve que dans
Theoph., 3, 29, et Tertullien copie dans Théophile une erreur de
chiffres (322, au lieu de 922). Sur la loi donnée par Moïse, voy.
Theoph., 3, 23. Sur la date de Zacharie (§ 3-4), voy. Theoph.,
3,23. La philosophie dérive de la sophia divine et la divination
poétique dérive du don prophétique (§ 5-6), voy. Theoph., 2, 9.
La Sibylle païenne (§ 10), Theoph., 2, 9.
LE FRAGMENT DE FULDA 473
est beaucoup plus probable que Tertullien a écrit les deux
rédactions d'après ses sources, comme nous le dirons tout
à l'heure.
50 On ne voit guère quel aurait été le but d'un autre que
Tertullien, Aurait-il voulu insérer le fragment de Fulda à
côté des chap. 19-20 ? Non, certes ; car le fragment aurait
fait double emploi. Aurait-il voulu remplacer les deux cha-
pitres par le fragment ? Mais le fragment contient des idées
reprises dans d'autres chapitres et il ne contient rien d'essen-
tiel qui ne soit dit dans les chap. 19-20.
11. Si nous reconnaissons dans le fragment de Fulda la
langue et les idées de Tertullien, nous y retrouvons moins
son style : il manque la flamme, la verve, la vigueur, l'origi-
nalité. C'est pourquoi, nous ne croyons pas qu'il vienne d'une
première édition de l'Apologétique. Si F représentait une
première édition, le fragment de Fulda y détonnerait par
la faiblesse du style.
Voici ce qu'on peut conjecturer. Quand Tertullien a rédigé
ce fragment d'après les sources qu'il a consultées pour pré-
parer son traité Ad nationes et puis son Apologétique, le plan
des chap. 19-20 n'était pas entièrement fixé dans son esprit.
Il avait pris des notes et il leur avait donné une rédaction
provisoire. Le moment venu, il en a tiré ce qui lui a paru
utile à son sujet et il a laissé tomber le reste ou il l'a réservé
pour une autre partie de son ouvrage, suivant le précepte
d'Horace :
Ordinis haec virlus erit et venus, aut ego fallor,
Ut iam nunc dicat iam nunc debentia dici,
Pleraque différât et praesens in tempus omittat.
Comment cette esquisse provisoire s'est-elle introduite dans
la tradition de Fulda, et comment fut-elle conservée à côté
de la rédaction définitive ? C'est ce que l'on ne saura sans
doute jamais.
Nous faisons suivre la première traduction du fragment,
avec un commentaire, qui confirmera ce que nous venons
d'avancer.
474
TRADUCTION LITTERALE ET COMMENTAIRE.
I. Ancienneté des Écritures.
*19,1. Ce qui donne l'autorité aux Ecritures, c'est leur
antiquité très haute {^). En effet, le premier prophète. Moïse (2)
qui a raconté la création du monde (^) et la multiplication
du genre humain C*), et puis l'effroyable déluge, vengeur de
§ I (') Afitiquitas stimma. Idée reprise au ch. 19, i. Cf. 47, i.
De test, an., 5^ p. 141, 21. Ad nat., 2, 12, p. 120, 9.
(^) Prinius... S. Justin, Apol. I, 59, i : Scà Mcouo-e'wç, xou Tupo-
0£8ï)Xw[/.£vou Tîpcôxou TcpoorjTOu, Coliort. ad Gr., 9 : àito tou Trpcoxou
Tiap' TJijTiv irpocp-fÎTou xi xaî vo|j.oOi'uo'j jMtoua-éwç. Tous ces détails sur
l'œuvre de Moïse manquent au ch. 19, 3, où Tert. se borne à
prouver l'antériorité de Moïse sur Inachus (qui manque ici), Danaus,
Priam et Homère. Une seule chose importe : établir la haute anti-
quité de ses écrits. Tert. reviendra sur Moïse, sur ses écrits et son
ancienneté, De an.^ 28, p. 346, 28. Adv. Marc, i, 10, p. 303, i.
Ici, il divise l'œuvre de Moïse en deux parties: i« les événements
passés, depuis la création, que son don prophétique lui permet de
connaître ; 2" les événements contemporains. 11 ajoute que Moïse
seul fournit les éléments d'une chronologie du monde depuis la
création. C'est déjà une preuve de son ancienneté. Tert. puise ses
détails dans le Peutateuque même, qu'il nomme ailleurs (Adv.
Marc, 1, 10, p. 303, 1), en exposant les mêmes idées. 11 les trou-
vait aussi dans sa source (Théophile, Ad Autol., 2, 10 ss.; 3, 18).
(^) Mundi cfluditionem, xoa[j.o'j y.Tt'a'.v. Condïiio, pour creatio, appa-
raît pour la première fois dans la traduction de la Bible citée par
Tert.j Dean., 18, p. 329, zi : a conditio7ie mundi, aTTÔ xxtae'toi; xoa(i.ou
(Paul., Ad Rom., 1, 20) La Vulgate dit : a creatura mwidi. Tert.
emploie souvent ce mot. Voy. 48, 10. De spect., 2, p. 2, 10. De
corona, 6, 10. De cuit, fem., \, 8. De resurr., 11, 26. Adv. Marc.^
I, 14. 2, 26. 5, 19. Dean., 6. De pud., 8. Adv. Hermog., 11. Vojf.
l'index d'OehIer et Thés. l. /., IV, 145.
(•) PullulatioJiem. On trouve pullulare, De paen., 5. Adv. Val., 3.
Adv, lud., 2,
LE FRAGMENT DE FULDA 475
l'iniquité de cet âge lointain (i), commençant par le passé O
grâce à son esprit prophétique (^), et poursuivant son récit,
jusqu'à son temps ; qui a ensuite, par ses propres actes, mis
au jour les figures des événements futurs (*) ; Moïse, chez {^)
qui la succession des temps, mise en ordre depuis les origines,
a fourni la chronologie du monde ("), est trouvé antérieur
d'environ quatre cents ans (') à l'époque où le fameux Da-
naus, le plus ancien chez vous, émigrait à Argos (^). *2. Il est
(^) l/ltricem... vtm caùic/ysmi, la. violence vengeresse du déluge.
Tert. aime l'abstrait pour le concret. Il aime aussi à apposer les
subst. en tor, trix à un autre subst., comme des adjectifs. Voy. 9, 2 :
obumbratricibiis.
(2) De praeterito exorsus est. Cf. \û, 2 ; de bello ludaico {--- bellmn
ludaicum) exorsus ab origine gentis. Theoph., Adv. Autol.^ 2, 9 ;
~i. iz Tcpo aù~wv Y£YiVf)|j.£va.
(3) Per r'aticinatio?iem, grâce au don prophétique, à l'inspiration
divine. Theoph., Ad Autol., 2, 10 (cité au § 6).
(*) Moïse raconte ses propres actes dans l'Exode. Ce sont des
figures des événements futurs, par ex., la Pâque, le serpent d'airain,
etc. Paul., Ad Cor., 10, 6. Cf. De idol., p. 35, 15 : dummodo apos-
tolus affirmet omnia tmic Jiguraie populo accidisse. Ibid., 1. 4 : Jigîtrae
quae dispositioni alicui arcanae praestrnehantur.
(">) Pe7ies quem et (= eiiam) = apud quem. Voy. plus loin, pênes
vos et ch. 3,5.9, 14. 10, 6, 21, 14. 30,6. 37>3- 39» 7; 10; 16. 46, 17;
50, 4-
(^) Même idée. De an., 28, p. 346, 29 : [MoysesJ decursus generis
humani ab exordio mundi per singulas nativitates nominaiim tevtpora-
timque digessit, satis probans divinitatem operis ex divinatione vocis. —
Saeculum désigne souvent dans Tert. le temps opposé à l'éternité,
la durée du monde. Cf. 26, i : qui saeculum corpus temporwnfecit.
(^) Au ch. 19, 3, Tert. dit : 393 années. Il faut lire ici CCCC.
Le renseignement est emprunté directement à Theoph., Ad Autol.,
3,21, qui le tenait de .Tosèphe, Contra Apion., i, 16. Voy. ci-dessus,
p. 223.
(8) In Argos. Cf. Prop., 2, 26,47 '• "^ Argis. .Toseph., Contra
Apion. (Cassiod.), i, 103 : quam Danaus ad Argos accederet. Thés,
l. l.j II, 532, 60 et 62, Theopli., Ad Autol., 3,21: sli; "Apyoi;
àcoix.éffOat (= Joseph., c. Apion., j, i6); voy, ci-dessus, p. 223,
476 APPENDICE m
antérieur (i) enfin d'environ mille ans {^) à la guerre de Troie
et, par conséquent, à Saturne lui-même (^). Car, d'après
l'histoire de Thallus (*), qui rapporte que Belus, roi des Assy-
§ 2 (^) AnU est, avec le datif, comme ajiteit, antecedit, est peut-être
unique ; mais c'est une locution semblable à Argivo Inaclio pariter
aetate est (19, 3). Tert. emploie souvent esse avec un adverbe.
(2) Ad mille annos. Voy. 19, 3. Theoph., Ad A u toi., 3, 21 :
Trpoyevéatepov îTvai xov Mtoaîîv v.a.\ toÙç aùv aÙTcjJ èvaxocrioui; i^ xocl
ytXîouc; èvtauToùi; Tïpô -cou 'IXtaxoD 7roX£|j.ou (d'après Manethon). Cf,
Tatian,, Or. ad Gr., 31,
(3) Unde et ipso Saturno. De an., 28, p. 346, 29 : Multo antiquior
Moyses etiam Sattirno nongentis circiter anriis. Adv. Marc, i, 10,
P- 303, I.
(*) Secundum enim historiam Thnlli. Les Xpovf/.dc de Thallus,
historien grec contemporain d'Auguste et de Tibère, faisaient com-
mencer l'histoire à Belus, roi d'Assyrie. Voy. Fragm. hist. gr.,
éd. Millier, II, 517-519. De pallio, 2: ah Assyriis, si forte aevi
historiae patescunt. Tert. cite Thallus au ch. 10, 7 ; 19, 6, et il
ne le connaît que par Théophile, qui nous a conservé le passage
de Thallus auquel il est fait allusion au ch. 19, 7 et ici (et dans
Minucius Félix, 21, 4. Lactance, Div. inst,, 1,13,8; 23, 2). Ad
Autol., 3, 29 : Kal yàp B'/^Xo'j xoû 'Aaaupîtov pacnXsûaavxoi; x.al
Kpo'vou Tou TiTavoç BdcXXot; (j.£'(j.vT|TaL, tiâaxiov tov BïjAov ttettoXe-
(Jirjxévat aùv xo'ïç Tixacjt Trpof; xov At'a x.al xoùç aùv aùxtjj Gsoùç X£YO|j.é-
vo'jç... Kaxà yàp x'rjv 0âXXou laxopfav ô B-îjXof; Tcpoysvéaxspoç sùpîa-
xsxai xou 'IXiaxoij 7roXé[j.ou Éxsat xxjB' (322). "Oxi os Tcpôt; ttou exeai
ivaxoai'oiç (900) \ xal ^a(iooo) TTpoâye'. 6 Mo^a?i<; x-qç xou 'IXîou àXio-
aîO)ç, £v xô<A ÈTzdtvo) (3,21) 0î8-f)Xa)xap.£v. Lact., Div. inst., 1, 23, 2 :
Tkeophilus in libro de temporibtis ad Aulolycuni scripto ait in historia
sua Thallum dicere quod Belus, quein Bahylonii et Assyrii colunt,
antiquior Troia^io bello fuisse inveiiiatur annis trecentis viginti duo-
bus {122), Belum autem Saturni aeqicalein fuisse et utrwnque U7io
tempore adolevisse. Cf. Euseb. Chron., éd. Schoene, I, p. 54, 34 :
Belus, inquitj rex erat Assyrioruin. Les mss de Théophile conte-
naient une erreur de chronologie (322), qQe l'auteur du fragment
et Lactance ont reprise. Eusèbe place le commencement de la guerre
de Troie en l'an 825 d'Abraham; Abraham naquit la 43"^ année du
LE FRAGMENT DE FULDA 477
riens, et Saturne, roi des Titans, firent la guerre à Jupiter,
il apparaît que Belus précéda de 322 ans la ruine de Troie,
C'est par ce Moïse aussi que Dieu envoya aux Juifs la loi
qui leur est propre (i). *3. Ensuite, d'autres prophètes ont
annoncé beaucoup de choses {^) et ils sont aussi plus anciens
que votre littérature ; en effet, même celui qui prophétisa
le dernier a précédé par le temps les auteurs de la sagesse (^)
et même les législateurs (^), ou du moins il a été leur cont m-
porain, *4. En effet, c'est sous le règne de Cyrus et de Darius
que vécut Zacharie {^), à l'époque où Thaïes (^), le premier
règne de Ninus, fils de Belus. Belus régna 25 ans. On arrive ainsi
(824 -f- 43 -1- 55) au chiffre 922 (tiv-P'), qui était probablement
celui de Thallus. Voy. la note d'Otto au passage de Théophile
(p. 271, 1''® col.) — Cf. De idol., 18, p. 51^ 20 : Belem. Au lieu de
Belum, F a : hélium. C'est P. de Lagarde (p. 79) qui a vu qu'il
faut lire : Belum.
(1) Lex propria, comme proprias litteras. Le Décalogue (Exod., 20)
et le Livre de l'Alliance (Exod., 21-23). Theoph., Ad Autol., 3, 23 :
Ta Ypâ|j.[j,x-a tou Ost'ou vo'jxou tou 8cà Mcoffc'co<; tjj/.w SsSofjiévou.
§ 3 (2) Deincepsmulta et aliiprophttae, se. cecinermit ,praedixerunt .
Tert. sous-entend souvent le verbe déclaratif. 16, i : sicut quidam.
Voy. ci-dessus, p. 213. — Sur deinceps, voy. 10^ 11 et *ïç), i.
Théophile^ Ad Autol., 3, 23, parle aussi des autres prophètes et il
est seul à le faire : rà xcuv Xot-ûoiv CTUYYpâ(jL(ji.aTa kaya.'za slvai axov 8ià
McoffÉox; -fi^v 5eoo|X£V(i)v Ypa|J.(j.âtcov, kz'. \xr\\ xai twv (jleth^ù irpocpï)-
xwv. Dans ce passage, (j-exaçô = k^f^^, deinceps. 3^29; "Oxi [i.r,v ouv
àpyatoTspoç Mco<iï)<; OEtV.vuxai àitavTwv auYYpî^^swv (oùx auTÔç 8è
jjLdvoç, àXXà xal ol ttÀsiouç [j.st' auTÔv Trpocpri'rai y^'^'^V^'^^O '^'^"' Kpo'vou
xai B-qXou xat TO'j 'IXiaxoîJ T:oX£[j.ou,orjXov ècrxiv. Cecitiit = prophetavit .
De idol., 9, p. 36, 19 ; praecanit. Ad uxor., 2^ 2 : Spiritus cecinii.
Voy. 14, 5 et 46, 5.
('^) Sapientiae auctorihus =. primorihus vestris sapientibus (19,4).
(') Latoribus legis, au heu de legis/aioribus, pour terminer par la
clausule A. Vo}^ 19, 14 : et legiferis et historicis.
§ 4. (^) Fuit Zacharias. Theoph., Ad Autol., 3, 23 : ô Y«p uaxepo<;
xiov 7îpo«pT(T(ov Y'vo'p.£voi; Za'/apîac ovoi^axi -/jxixaaîv y.axà xrjv Aapeîo'j
PaaiXst'av. Lactant,, Div. inst., 4, 5, 8 : quorum (prophelaruvi) sane
478 APPENDICE ni
des physiciens, interrogé par Crésus, n'eut rien de positif à
répondre sur la divinité, troublé qu'il était par les voix des
prophètes. Solon {^) prédit au même roi qu'il devait envi-
sager la fin de sa longue vie, tout comme les prophètes ont
fait (2).
*5. On peut donc voir (^) que vos lois, comme votre phi-
ultlmus Zacharias fuit, quem constat sub Dario rege, secundo tuiiio
regni eius ociavo Diejise cecinisse. Adeo antiquiorcs ctiam Graecis scrip-
torihus prophetae reperiujitur . Aggée (2, 10) et Zacharie (i, i) nom-
ment Darius. Le plus récent des douze petits prophètes est Malachie
(vers 432 av. J. C). L'auteur du fragment est d'accord avec Théo-
phile pour placer Zacharie le dernier. Cf. P. de Lagarde, p. 89, n.
49. Théophile (3, 23) dit aussi que Zacharie fut contemporain de
Cyrus, de Darius et de Solon.
(*^) Thaïes. Thaïes mourut en 547 et Crésus en 548 av. J. C. Cf.
46^ 8 : Quid enim Thaïes, ille princeps physicorunij sciscitanti Croeso
de divinitate certum respondit... ? Ad nat., z, 2^ p. 96, 15 : Thaïes
Milesius Croeso sciscitantij quid de deis arbiirarelur, post aliquot deli-
berandi commealus nihil respondit. Tert. écrit de mémoire et se
trompe sur les noms ; en effet, Cicéron (De nat. deor., \, 22, 60)
et Minucius Félix (13, 4) attribuent cette histoire au tyran Hiéron
et au poète Simonide.
(') Solo7i.,. praedicavit =■ praedixit. Solon prédit à Crésus sa fin
malheureuse. Ce sens de praedicare {=. praedicere) est fréquent dans
Tert. Voy. notre article du Musée Belge, \\^ 1910, p. 60 Théophile.
323, dit que Solon était contemporain de Cyrus et (ce qui est
inexact) de Darius ; mais il ne parle pas de cette histoire, racontée
par Hérodote (i, 32) et par Plutarque (Solon, 27).
C"^) Non aliter quain prophetae. C'est le pluriel pour le singulier,
car il s'agit de David. Psalm., 38, 5 : I^ocutus sum in lingua mea :
Notum fac mihi, Domine, finem meum, et numerum dierum meo-
rum qui est, ut sciam quid desit mihi.
§ 5. (^) Adeo respicipotest, on peut donc voir que... Cet emploi de
adeo est fréquent dans les écrits de Tert. — C'est une thèse fami-
liaire à Tert. que les philosophes et les législateurs païens ont puisé
dans les Ecritures. Voy. 47, 1-3. Ad nat., 2,2, p. 95, 20 ss. De an., 2,
LE FRAGMENT DE FULDA 479
losophie, ont tiré leurs commencements {^) de la loi et de la
doctrine divines. Ce qui a existé d'abord est nécessairement
l'origine (2) de ce qui a suivi. Et voilà pourquoi vous avez des
choses communes avec nous ou qui se rapprochent des nôtres C').
*6. C'est de sophia (la sagesse) (^) que l'amour de la sagesse
fut appelé philosophie ; c'est du don prophétique {^) que la
simulation ('') de ce don fit dériver (') la divination poétique.
p. 300-301. Elle est d'ailleurs tirée des apologistes grecs. S. Justin,
Apol. I, 44, 8-9 et 54 ; llj 8, I. Tatien, Ad Gr., 40. Théoph,, Ad
Autol., 1,4; 2, 8 et 37. Min. Félix, 34, 5. — lura vestra se
l'apporte à latorihus. legtim, tandis que stiidia répond à sapientiae auc-
toribus.
(') Concepisse = incephse. Thés. l. /. , IV, 57, 3. De bapt., 4, p.
204, 5 : et ipsa sancliiicare coyicepit. De pud., 18 : p. 260, 23 : si et
hic respondere concipias. De resurr., 52, p. 109, 15 : /«'«c et apostolus
concepit seminari eam dicere. Cf. Hoppe, Syiitax, p. 45.
(*) Semeri =.itii(iuin, origo, comme 7, 12. Voy. p. 179.
(^) Inde quaednm tiobiscum. C'est encore une idée favorite de
Tertullien. Vo3^ 47, 2. De an., 2, p. 300, 20 : plane non negaèimus
aliquando philosophas iuxta nostra sensisse, et tout ce chapitre.
§ 6 (^) De sophia. Les prophètes ont reçu la sagesse (o-ocpt'a) de
Dieu^ dit Théoph., Ad Autol., 2,9; ywp/iaavcs; aocpi'av -ï)V Trap'
aù-QU, 0'.' Tji; aociîaç ô^îïov xat -% Ttgpi tr,; xTidscot; -uo'j Koa[;.0'j xat tiov
XoiTTcov àTîâv-îcov. 2, 10 : Outoc oùv, wv Tcv£Ujj.a Bîou xal v-^y^f\ xat
ao'Zi'.% xal 0'jva|j.'.<; u'|/tcrTO'j, y.%~f^ç,ytzo ûc, -roù;; —poteri-cai; xat oC
aû-tov ÈÀctXs'. Ta ttsoI ~r^c, T^vJ^rstMC, -o'j xo'(7p.o'j xtX. Sur les philo-
sophes et les prophètes, voy. De orat.. i, Adv. Hermog.^ 18. De
ieiun., 9. Scorp., 7. De an., 23, p. 336, 14.
(•') De prophetia. Ce mot grec (-po(po~'îa) est propre au latin
ecclésiastique et fréquent dans Tert. Voy. l'index d'Oehler. Théo-
phile, 3, 17, dit des poètes : stpanav lautoùi; xttô OEt'a<; Trpovotaç [j.sjJLa-
Or)xévat, ...
('') Adfectatio eius^ se. prophetiae. Voy. i6, 10 ; 23, to ; 39, 16 ;
46, 6; 7 ; 13.
(^) Depniavit « hoc est abscidit, decerpsit, ut surculum de
arbore » (Oehler). Deputare, couper, se trouve : Exhort. cast.j 6 :
480 APPENDICE ni
Les hommes de gloire 0), pour s'approprier (^) ce qu'ils
avaient trouvé chez nous (^), l'ont dénaturé (*). Aux fruits
il arrive {^) aussi de dégénérer de leur semence.
II. Autorité des Écritures.
*7. Je pourrais apporter encore beaucoup d'autres
preuves C) de l'ancienneté des divines Ecritures, si elles ne
tiraient pas une plus grande autorité, pour s'imposer à notre
foi ('), de la force de leur vérité que des annales du temps.
Quel plus puissant patronage {^), en effet, en faveur de leur
si/va erai vêtus disposiiio, quae iîi Evangelio novo deputatitr. Adv.
Prax., 2, p. 230, 3 (cité ci-dessus, p. 244).
(*) Gloriae homines. Norj. 46, 7 : ut qtii gloriani captant {%z. philo-
sophi), 47, 3 : homines gloriae libidznosi. De an.^ i, p. 299, 10 : philo-
sophos, gloriae animal. S. Jérôme a repris ce dernier mot deux fois
(Epist., 118, 5. 123^ 15) et^ par imitation, il a dit : ventris animalia
(Epist., 43, 2).
(^) Ut proprium facerent. 47, 3 : ad propria opéra verterunt. Ad
nat., 2, 2, p. 96^ 2 : ad proprii ingenii opéra imitasse.
(3) Si quid invetiera?it. Voy. 47, 3-4 : si qtcid in sanctis offenderttnt
digestis. Ad nat., 2, 2, p. 95, 20-96, 4 : etiam quod invenerunt.
(*) Adulteraverunt. Voy. 46, 6 ; 47^ 9. Cf. 47, 3 : quomintts inter-
polarent. Ad nat., 2,2, p. 95, 22 : ctmi tainen interpolartmt. Tatien,
Or. ad Gr., 40: Tiapa^apàTTSiv £7T£tpâO-no-av.
(ii) Contigit = evefiit. Parfait gnomique. Sur l'infin., au lieu du
subj. avec ut, voy. 10, 10 ; 45, 5.
§ 7. (^) Multis adhuc modis. Cf. Adv. Marc, 1,9, p. 301, 19 : non
eisdemmodis . . . scias tihi examitianduin. — Adhtcc ■= praeterea. Voy.
15, 6. 42, I. — Sur co7isistere de, voy. ci-dessus, p. 170.
(') Adfidem, se. facieiidarn. Cf. 18, 5 : adfidem divinitatis. 19, i :
Jidem de tempore adscrere. — Subpetisset est construit comme au ch.
22, 4.
(**) Quid... nisi = quid aliud nisi. De idol.^ 20, p. 54, 22 : quid
erit deieratio quant praevaricatio? Ad uxor., 1,4: nihil... quant per-
severare. — Patrocinahitur . Voy. 6, 4 ; 18, 5.
LE FRAGMENT DE FULDA 481
témoignage que l'accomplissement {^) journalier des événe-
ments du monde entier, quand nous voyons la succession des
empires, la ruine des villes, la chute des nations P), l'état
des temps répondre entièrement aux prédictions faites depuis
des milliers d'années ?(^) *8. C'est aussi ce qui vivifie notre
espérance (*), dont vous riez, et c'est ce qui fortifie notre
confiance, que vous appelez présomption (^). L'accomplisse-
ment des événements passés constaté par nousC) est propre ('),
en effet, à inspirer la confiance dans les événements futurs (^) :
ce sont les mêmes voix (") qui les ont prédits de part et
d'autre (i°); ce sont les mêmes Ecritures qui les ont consignés.
(0 Dispunctio. Tert. aime dispungere et dispunctio. Voy. i8, 3 ;
20, 4 ; 37) 3 ; 44. 2 ; 45. 7- Sur saeculum, voy. p. 475.
(°) Exiius gentium. Voy. 21,5 (ci-dessus, p. 233).
(^) Anteiniliaannomm. Hyperbole.
§ 8. (*) Unde et spes nostra. Cette idée est reprise au ch. 39, 3
et 41, 5.
(^) PraesumpHonem. 49, i : Hacc sunt, quae iti nobis solis prae-
sumptiojies vocantur, 50, 10.
C") Recognitio praeteritorum, littlt « l'action de reconnaître », de
constater la réalisation des événements passés, tels qu'ils étaient
prédits. Voy. 20, 3 : dum recognoscimus, probanttiy. 39, 3 : si qiiid
praeseiitium temporum qualitas aut praeinonere cogit nul recognoscere .
41,5; laetaifiur magis recognitione divinanun praedicationum.
(') Idonea. Voy. 20, 3.
{^) Fiduciam futtirorum, la confiance dans la réalisation des
événements futurs^ tels qu'ils ont été prédils. C'est le raisonne-
ment de S. Justin (Apol. I, 52, i ; II, 8, 4. Dial. c. Tryph., 35),
d'Athénagore (Ad Autol., 1, 14; 2^ 9), d'Origène (Contra Cels., 6),
de Clément d'Alex. (Strom., 4, n), de S. Cyprien (De mort., 2).
Athénagore, 2, 9, dit : wj xal 7rîTi£tajj.£0a xal Trspt xwv (xsXXo'vtcov
o'j-dK l'ffÊffOa'., xaOùjc; xal xà Ttpw-ra à-^-f\Çix\a'zy.i.
('•') Eaedetn voces. Voy. 18, 5. 20, 4.
('") Utramque parlcm. Ace. déterm. : quant au passé et quant
au futur.
31
482 APPENDICE m
*9. Chez elles, il n'y a qu'un temps {^), qui paraît divisé pour
nous. Ainsi, tous les événements qui sont encore à venir,
sont déjà vérifiés pour nous {^), puisqu'ils étaient prédits en
même temps que ceux qui se sont vérifiés et qui étaient alors
futurs. *10. Vous avez, vous aussi, autant que je sache {^),
une Sibylle (*), puisque ce nom de la vraie prophétesse du
vrai Dieu (°) a été usurpé généralement pour désigner tous
les autres (<') qui paraissaient prophétiser. Vos Sibylles ont
emprunté mensongèrement leur nom à la vérité, comme ont
fait vos dieux C).
§9. (') Unum est tempns. V03'. 20, 5 : Utiîwt tempus est divina-
tio7ii fuiiira praefanti.
(2) lam probata su7it tiobis. Voy. ci-dessus, p. 223. Theoph., Ad
Autol., 2,9: Ta xaO' •fjjj.at; vuvl T£)iS'.oûjj.sva. 20, 3 : duin recognos-
citniis, probantur. 20, 4 : quia cuin illis, quae cottidie probanttir,
praedicabantur . Scorp., 11, p. 172, 3 : non ut probata sunt credcndo.
§ 10. (•^) Qiiod sciam- Voy. 23, 19.
(*) Sibyllam. Ce passage est repris de Ad nat., 2, 12, p 120,10.
Voy. ci-dessus, p. 224. Athenag., Suppl., 29. Theoph., Ad Autol.,
2, 9 : àXÀà [j.f(V xal Tiapà "EXXr,(Tt St'jBuXXa. Ibid., 36 et 38,
(^) Verne vatis Dei veri. Cf. 24, 2 : veram religionem vert Dei,
(^) Super ce teros = de ceteris. Avec l'abl. ou avec l'acc. Hoppe,
Syfita.v, p. 41-42. Voy. 41, 3 : super oinne homiiiuin genus.
(~) Et dei vestri. Cf. 23,4: ta>n se daemonem confitebiiur , quod in
vero est, quant alibi deum, quod iti faiso est. 23,9: non auderent
(daemones) alibi pro deis agere, si aliqui om?iino dei essent, quorum
nominibus utu?itur.
APPENDICE IV.
Un Fragment de la tradition de Fulda (ch. 38-40)
dans un Codex Rhenaugiensis (X^ s.).
La bibliothèque cantonale de Zurich possède un manuscrit
(XCV) originaire de l'ancienne abbaye de Rheinau, sorte
de florilège, qui contient des extraits de différents auteurs
latins, parmi lesquels on trouve (p. 175-184) les chap. 38, 39
et 40 (jusque tantos ad unum) de V Apologétique. Nous dési-
gnerons ce ms. par R.
Alex. Souter a publié une très soigneuse collation de ce
passage, faite sur le texte d'Oehler (1853, t. I, p. 252-267) et
il l'a comparé avec la collation de Modius {Journal of theolo-
gical Studies, 8, 1907, p. 297-300).
Il résulte de cette comparaison que le texte de R est étroi-
tement apparenté à celui du Codex Fuldensis. Nous aurons
donc désormais, du moins pour les chap. 38-40 deux manu-
scrits de la tradition spéciale, et c'est ce qui fait le prix de
ce fragment. Voy. ci-dessus, p. 11.
Alex. Souter l'attribue au X^ siècle, sans nul doute pour
des raisons paléographiques. Il dit aussi que tout le ms. se
compose d'extraits choisis suivant les goûts du compilateur ;
il ne s'agit donc pas de feuillets détachés de divers mss et
reliés en un volume.
N'ayant pu voir le ms, nous devons nous contenter de la
collation de Souter, qui paraît d'ailleurs très complète. Nous
donnons d'abord la leçon d'Oehler, puis celle de R, que nous
marquons d'un F, si elle est conforme à celle du Codex Ful-
densis.
Rappelons qu'Oehler a écarté systématiquement les leçons
de F pour adopter celles de P (vulgate). Voy. ci-dessus, p.
3-4 et 7.
484
APPENDICE IV.
Avant le crochet: Oeliler = P
Après le crucliet : R (ou R et F)
XXXVIll, I. nec] ne F
licitas] inlicitas F
timeri solet] praecavetur F
2. constat] costat
quae res] qua F
concilia curias] curias concilia
contiones] conditiones
inquietaret] inquietareni F
quaestu] questum
coepissent] coepisse
homines] om. F
3. nobis] vobis
gloriae] gloria F
unam] un a
4. aeque] atque adeo F
renuntiamus] renuntiavimus
eorum] illorum
est] enim F
dictu] dictum
5. vanitate. Quo vos ofFendi-
mus] vanitate. Licuit Epicu-
reis aliam decernere volup-
tatis veritatem, id est anima
equitatem (animae aequita-
tem F). In quo vos ofFendi-
mus F
novisse] novissime F
reprobamus] probamus
Sed licuit Epicureis aliquam
decernere voluptatis verita-
tem id est animi aequitatem
et ampla negotia Christianae]
om. F
XXXIX, r. ut qui] quominus F
ostendam] ostendam si etiam
revelaverim veritatem (veri-
tatem revelaverim F) F
2, coetum] coetu F
congregationem] congregatio-
nem facimus F
orantes] om. F
ministris] ministeriis F
3. pascimus] poscimus
praeceptorum nihilominus] ni-
hilominus praeceptorum
inculcationibus] in conpulsa-
tionibus F
4 futuri iudicii] iudicii futari
5. honoraria] oneraria
conpellitur] conpellitus
conferl] confret
6. nam inde] quippe F
ingratiis] ingratis F
ac puellis re] om. F
destilutis] destitus
senibus] senibus iam otiosis F
sectae] sectae conflictantur
(conflictatur F)
7. nobis inurit] vobis inurit
et ut F] et
enim] enim sunt
alterutrum] alterutro
erunt] om. ¥
8. fratres nos vocamus] fratrum
appellatione censemur F (5^1^
F habet censemus)
opinor] opinior
quam quod] quam cum
9. At quanto] quanto nunc F
{sed F habet quando nunc)
patrem deum] deum patrem
spiritum biberint sanctitatis]
sanctitatis spiritum biberunt.
Vide supra, p. 340
CODEX RHENAUGIENSIS
485
10. exclamât] exclamant
ex] om. ?
12. loco] solo F
maiorum et sapientissimorum]
malorum et suorum sapien-
tiorum (maiorum et sapien-
tiorum suorum F)
13. quam F] quas
donaverant F] donaverunt
lenones (lenonest P)] leno est F
philosophus] philosopus
14. conviolatur] convivatur F
coenulas] caenula
numquam morituri] numquam
moriantur F
15. saliis] si aliis FP
Herculanarum] herculanorum
poUuctorum (polinctorum P)]
polincto lucitorum F
Apaturiis (appaturiis P)] appa-
raturis
Dionysiis] aconisi
delectus] dilectus
indicitur] inducitur
Serapiacae (serapiaciae P)] se
arapia ae (Serapiae F)
sparteoli] spartioli
de solo] doloso (de loco F)
16. vocatur quod] vocatum quo
(vocatum quo F)
refrigerio] refrigiorio
parasiti] parasli
saginandi] sagenandi
qua] quia
17. est convivii] convivii est
t8. ut qui meminerint] ut me-
minerint F
deum sibi] sibi deum
dominum] deum F
sanctis] divinis
provocatur in médium deo ca-
ncre] de deo canere (F) pro-
vocatur in médium
19. in eruptiones] ad inreptio-
nes (ad inceptiones F)
ut] et
20. damnanda] sane damnanda,
si non dissimilis damnandis
F {}iisi quod non habet sane)
de ea queritur] deaquaeritur
quo] quo
21 . cuiusj civius
neminem laedentes] ont.
accommodandum] adcommo-
dandum
XL, 1. qui adversum] quid ad-
versus
sane] plane
omnis publicae cladis, omnis
popularis incommodi] omnis
popularis omnis publicae cla-
dis incommodi in primordio
temporum (F habet tria lUti-
iiia verhd)
2 arva] rura F.
stetit] non sletit
adclamatur] om. (F hahei incla-
mant
Il résulte de cette comparaison d'Oehler (= P) avec R et
avec F que le fragment de Rheinau est à peu près toujours
d'accord avec F, quand F diffère de P. 11 vient confirmer
les nombreuses leçons de F que nous avons discutées (voy.
486 APPENDICE IV.
p. 39, 43, 66, 73, 119, 332-342) et que nous avons trouvées
préférables à celles de P.
Mais R a aussi les fautes évidentes de F : gloria pour gloriae
(38,3), quominus pour ut qui (39,1), coetu pour coetwn (39,2),
in conpulsationibus pour inculcationibus (39,3), si aliis (FPM)
pour Saliis (39,15), polindo lucitorum pour polluctorum (39,5),
vocatum pour vocatur (v39,16). Voy. p. 109-110.
11 a la même lacune évidente que F : ac puellis re (39,6 ;
voy. p. 37) et une addition que nous avons regardée comme
une glose insérée dans le texte de F : iam otiosis (39,6). Voy.
p. 66.
Au ch. 38,5, les phrases se suivent dans le même ordre que
dans F. Nous avons vu que dans F, l'ordre a été troublé
Voy. p. 97.
Enfin, R a les mots si etiam revelaverim veritatem (ch. 39,1),
facimus (39,2), conflidantur (39,6), 5/ non clissiniilis damnan-
dis (39,20), in primordio temporum (40,1), qui sont dans F,
tandis qu'ils manquent dans P. Voy. p. 337-342.
La parenté de R avec F est donc incontestable et elle est
très étroite.
La plupart des leçons où R diffère à la fois de P et de F
ne sont que des erreurs de copistes, faciles à corriger (costat
pour constat, conditiones pour contiones, etc.) ou de simples
transpositions de mots (curias concilia pour concilia curias,
etc.). C'est sans doute par mégarde que R a omis les mots
neminem laedentes (39,21).
Au ch. 39,13, la leçon : quas niariti tam facile donaverunt,
au lieu de : quam mariti tam facile donaverant FP, est une
correction erronée. Elle est contraire à l'accord de F et de P
et elle gâte la clausule (B ). Le correcteur n'a probablement
pas compris le sens peu ordinaire de donare aliquid alicui
« faire l'abandon, le sacrifice d'une chose à quelqu'un ». Cic,
Ad fam., 5, 4, 2, : tu, tuas inimicitias ut rei publicae donares,
te vicisti.
Au ch. 39,7, R est également en désaccord avec FP : il a et
au lieu de et ut.
Au même §, on a ;
CODEX RHENAUGIENSIS 487
ipsi enim ad occidendum alterutrum paraliores F ;
ipsi enim » » paratiores erunt P ;
ipsi enim sunt » » paratiores R.
La com)3araison est intéressante. Il semble que P et R
aient trouvé l'ellipse de la copule peu claire et que l'un ait
ajouté erunt à la fin et l'autre, sunt au commencement. Sur
laclausule, voy. p. 413.
Au chap. 39,16, R a changé qua (FP) en quia, perdant de
vue l'emploi fréquent que Tertullien fait de qua pour quia.
Voy. 5,4 (p. 174). Il a aussi changé sanctis en divinis (39,18)
et ajouté sane (39,20).
D'autre part, il est remarquable que parfois le texte de R
paraît mieux conservé que celui de F.
Ainsi, si etiam revelaverim veritatem (39,1) donne une aussi
bonne clausule (C) que si etiam veritatem revelaverim (B) et
évite la rime choquante avec refutaverim. Voy. p. 338.
Au ch. 39,6, le pluriel conflictantur vaut mieux que le sin-
gulier conflictatur, Voy. p. 339. Sur conflictari, voy. encore
Hoppe, Syntax, p. 120.
Au ch. 39,8, R a conservé censemur, tandis que F a la leçon
fautive censemus. Au ch. 39,9, R écrit correctement quanto
nunc, tandis que F a quando nunc. Au même §, il a l'indicatif
biberunt, ce que Modius a omis de noter. Voy. p. 340.
Enfin, au ch. 40,2, il n'a ni inclamant de F, ni adclamatur
de P et nous avons conjecturé que l'un et l'autre sont des
additions. Voy. p. 189, n. 1.
Sur 38,5, où R a : animaequitatem, voy. p. 59.
En résumé, le fragment de Rheinau (X^ s.) est si souvent
d'accord avec F seul (IX^ s.) que, s'il n'en différait que par
ses fautes de transcription, quelque nombreuses qu'elles
soient, on pourrait admettre qu'il en dérive directement
ou indirectement. Mais, comme il a conservé des leçons plus
correctes que celles de F, cette opinion devient insoutenable
et il faut croire qu'il dérive d'un autre manuscrit de la même
famille. Au X^ siècle, la tradition spéciale de V Apologétique
était donc encore représentée par plus d'un manuscrit.
BIBLIOGRAPHIE
Nous avons dressé une bibliographie à la suite de notre traduction de Y Apo-
logétique (Pavis, Champion et Louvain, Ch. Peeters, 1911), p. 336-356. Ici, nous
donnons la liste des éditions et celle des principaux ouvrages consultés pour
cette étude.
ÉDITIONS SPÉCIALES DE l'aPOLOGÉTIQUE.
Edilio prlnceps, pei* Beriiarilinuni Benaliuin (Venise, i483).
Réimiîressioii à Venise, en i5oa (à la suite Liictance) et en
i5i5, pai" Aide; à Bâle, en i528. D. Hebai-UUS (Paris, Plantin,
i6i3), S. IIavercamp (Leyde, 1718). W. A. Woooham (Cam-
bridge, 1843). Fil. Oehler (Halle, Anton. 1849). J. Kayseu
(Paderborn, i8G5), F. Léonaud (Edition classique. Naniur,
1881), T. H. Bindley (Oxford, 1889). G. Rauschen (Bonn,
Ilanstein, igoG et 191a). Toutes ces éditions sont commentées,
excepté la première.
ÉDITIONS SPÉCIALES DU TRAITÉ AD NATIONES.
.T. GOTHOFREDUS (Genève, iGa5). Fn. Oeuler (Halle, Anton,
1849).
ÉDITIONS COMPLÈTES DE TERTULLIEN.
Editio princeps : B. Rhenanus (Bâle, Froben, i5ai ; S^ éd.
1539). J. Gangneius (Martin Mesnart. Paris, i545). S. Gelenius
(Bâle, i55o). J. Pamelius (Paris, 1579). René Laurent de la
Barre ou Barraeus (Paris, i58o). Fr. JiiNius(Franeker, 1597).
JOH. A WouWEii (Fi'ancfort, lUia). J. L. de la Cerda (Paris,
1624). N. RiGALTius (Paris, i634). J. S. Semler (Halle, 1769-
1776). Leopold (Leipzig, iSSg). Fr. Oehler (3 vol. Leipzig,
1853-4).
Tertulliani opéra. Pars I, ex i-ecensione AuG. Reieferscheid
et G. WissoWA, 1890, Pars III, ex recensione Akai. Kroymann,
1906. Vienne, Tempsky {Corpus script. eccL, vol. ao et 47).
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roy. de Belg., mai 1914- i^^ PP-
INDEX RERUM ET VERBORUM.
N. B. L'astérisque précède les leçons apocryphes ; l'italique indique les mots
qui ne sont pas tirés de \' Apologétique. Les chiilres précédés d'un astérisque
se rapportent au fragment de Fulda.
?i final 4o8,i
a primordio temporum io<)
ab aevo 117
ablatif confondu avec Vacc.
193. 235. 3i6
abl. avec de au lien d'un compl.
dir. 214. *475
abl. absolu ivréguliev 45. ^^.
107. 247. 319.
abl. du gérondif Zc^'j
abolefacei-e 32 1
abolere 389
abomhuu'i (maie) 3i9
absit lit 33o
abstrait pour le concret 33o
*475
accedere alicui 819
accord sylleptique 55. iGo. 287
accord avec le subst. le plus
rapproché iiO
accusatif grec 828
ace. attributif s.-e. 58. 285
aec. confondu avec l'abl. Voy.
ablatif,
accusations populaires. Voj'.
convicia et calomnies
acerbare 43
accusare in aligna re 43
Acta Arvalium 92
ad = secundum 255 .
ad {concernant) 364
ad Deum ambire 78
ad fidem *479
ad hodierniim 119
ad leoiiem 325. 348. 897
ad perseverantiam (odii) i46
ad sexum 867
ad tertium diem = tertio die
248
Ad nationes. Date 3i
adclamare 824
adclamatur 348
additions accidentelles 59-85
additions stylistiques 84
adeo *478
adfectatio '*479
adhuc=:msnjoer 212. 355, *479
*adinveinre i()6
adjectif verbal en dus (constr.
impersonnelle) et gérondif
208. 234.
adscribere 41 ■ 79. 287
adsolare ii5. 212
adsumptus in caelum 249
adtonitus datif aSa
adulterare *479
496
INDEX RERUM ET VERBORUM
Ado, [iidaeos. Codex Fiilden-
sis II, 11. a
Adv. Marcioiiem. Editions u
aemulus 75. 90. a(55; aeiuuliis
ad 91
aeqiiales 2912
aequalis est et iudiilgens et
iiicessens 354
aequaiiimitas 59
aestimai'i 1221
aestimatio = indicinm 3G2
Aetiiaea incendia 81
affligei'e 208
îige gv''. 97
Albinus 804. 3i5,
non alias (= aliier).., uisi
(quam) 11 o
aliquaudo poiw aliquanto G4
aliquaudo = aliqiwties 2i5
aliqui =: aliqiiis 2G3
aliquis igi ; pour aliiis quis
337
aliter esse de 282
alius 83. 33(>; avec VabL 181
Allard, p. 3ii, 11. I
alliance de mots piquante i47
Altevcatio Heracliani 33. 182.
289
ambire ad Deum 78
ambitus Cai)itolii 28(5
amphithéâtre 210-21 1
ampli us = aliud 114. i4^) =
insuper 1^6
an 142-143; an quia G3. 821
Anacharsis i44-i4^
anachronisme 247
anaphore q5. iio; de qnod
228 ; de si 253
Aiichai'ia 27G
angeli 259. 2G1. 288. 325
aniinae testiinonium 219 ;
anima hirci 276
animaequus 5[)
animalia oc'ntris *479
tam animati 33o
animatoi" omnium 80
animi 142
ante esse alicni *47^
antécédent sous-ent. io5. 128-
124. 218. 225. 2G3. 818
antelnoani coetus i57-i58
Antinous 199
anilquitus 178
antithèse 164. i65. 17G. 178.
370
aTîô xotvoîj 5i
Apollonius martyr 56. i38.
299
Apologeticum , Apologyti -
cum, et Apologeticus 9, n. 3
apologis tes grecs 188.218. 288,
242. 24G. *478
apostasie du polythéisme 274.
298 ; de la religion nationale
298-800
apostrophe (sententia) 10 1
apotheosis 820. Ci'. 249
apud conscientias i85
Apuleius 124. i33. 148. 182.
257. 259, n. 1. 2G1. u63. 828,
araneus 22, n. i (v. Add.)
ai'cliigallus sanctissimus 282.
archives de VEmpire 4G
ardore subantem i25
Aristides 84"
Arnobius 344
arva 848
Asculani 27G
association (droit d') i58.
334-5
INDEX RERUM ET VERBORUM
497
asyndelon 77. 87. 168
athei 296. 298
Athenagoras 187. 218. 2118.
238, 244. 347. 38G
atque SgG. 402, 1». 2
atquî, atquin i49
attribut s.-e, 58. 285
auctis iam rébus 96
auutores sapientiao *477
audiences privées i3C-i4o
Augustinus 261, 294. 345
aulaeum 121
ut aut, aut ut 33o (cf. si aut,
aut si 21, 24 t*)
autem (abréviation de) 112
aveux des chrétiens, voy. cou-
lessio
avocare 248
b pour V ii3
b devenant v 11 3. 12G
ipsis Hacchanaliuin furiis 828
Bardenhewer, O. 471
BoUonae secati (*saiîrati)
i85
bellonarii i85
Belus *477
bibere 340
Boeotiae locatif 191
boiia Christianorum 887
BossuET i38. 278, 8G0.
BuiZER, C. M. 202, n. 2. 220,
n. I.
caelestia adorare 2i5
caestibus 881
ealcibus 38 1
ealidîoi'e timiditate 294
CALIiEWAERT 4- 3l I, U. 2. pas-
sim
calomnies populaires iGB. 807-
811. Voy. conoicia
eatiere Deo GG. 167 ; canere
Christo ut Deo 122. 107
canere =: praediccre *477
Capitale provincial 187; ro-
main 175. 28G
Cartilage i4i
castrousis religio 74
casus orbis éclipse du soleil 4G
*Cataneiises (glose moderne)
81
caupoua et *caupoiiiuin 85i
in causa et in causaui 342.
895
causes d'erreurs paléograplxi-
ques lii"]
eenseri = oocari 889
censura loi
Cereres 199
certe 888. 895
certi et iam (se) périsse 107
cetera runioris 179
cetorum adj. n. 220
de cetero = in posterum loi.
255
Cliristianus sum j48- 808-809
Clmstianos ud leonem 325.
348. 897
Christianisme : sa diffusion,
le nombre des chrétiens 4*J-
l5i ; la loi dé feiut d'être chré-
tien 187. 148. i52. i63. 1G8.
172. 807 ; à quelle époque les
chrétiens sont accusés d'être
cause des malheurs publics
344"5 ; de lèse-majesté 845,
n. 3; de crimes secrets 84G.
Voy. coul'essio
chrislologie 280-282
32
498
INDEX RERUM ET VERBORUM
cii'cumscribo, circnmscriplio,
circiimscriplor izOa
citiiis = jyoliiis 35o
cioilas liomann 3a7
clades i)ublicae S^a
chiusnhi heroicii ^i6. 5aa
clausules mélritiiieti i34. ^(jS-
419. 47is, 480
Codex Bremensia iG. ii)-i>2
Codex Fnidensis 8. 11. 483
Codex Monti.-ipessiiliimis 10
Codex Parisiniis 3
Codex Rhenauffiensis 483
cogère lutiim vino 3-22
cohabitamnshoc saecnluni 335
coitio 333
coUulion de Modiiis i3. 17-29
coUeginin 335 ; collèges funé-
raires 33G
coininoiiLari noa; coininouLu-
tus, coinmentus 35o
*cominmiitei' = gcnerttUter
comparaisons (Verbiim Doi)
75. 238
comparaison abrégée 4'^ (c/".
1>. 392).
compararo =: adaeqnare 3154.
compl. attributif s. -e. 58. 280
compulsa tiones 338
concoi)tiiin utero 102
coiicipero := incipere *47S
coucuri'oro do, eu m 170
conditio = crentio *474
confossio (Cliristiaiiorum),
confessio nominis 148. iGi.
3o8-3o9 339
confessio daejnouuni 23 1. 268
confirmare uliquem G7
couflictari = adflictari 339
conl'oedcraro disciplliiain 159
cougregationem facere 338.
416. 488
coiii>reheiuli = tungi 221
consessus deorum 199
consiguare 18G
consistero de, cuin, contra
170. *479
tam eonspirali 33o
contigit = euenit *479
coiitumeliosus 3G8
conoeiitiis deorum 199
conoicia 1G8. 295.299. 807, 3o8
coron ae 358
credere dat. 229 ; in 274
crinieu juiblicae et maxime
Romanaereligionis 274. 297
crimes secrets : origine et fin
de ce grief 34G-347
critique (principe de) i3i
Croesus *477
crurifrngium i38
culte impérial 293. 3oa
cultura 249
cum causal ou udoersatif avec
Vindicatif i^S ; cum anec le
prés. hist. 207 ; cum trans-
posé 93
curia deorum 199
curiositas 372
Curis (pa(er) 277
Cybele 197. 281
Cyprianus 82. 227. 270. 344«
*48o
d final pour t 112
daemon(<iécZ.) 226; daemones
75. 90. 23i, 235. 246. 253-
274. 287. 288-294
INDEX RERUM ET VERBORUM
499
(laemon, injure 2G0
(laemoii Socratis 254-^50
daotnuuicus 387
damnutor l'ja
Daiiae 235
date de Z'Octavius 343-7
dations anctoris 104. 228
dnlif dépendant d'nii siiltst. 1 15
(lo 00. G3. 214. 1232. 3(!4
(le cetoro 10 1. a55
de falso 2G4
do gradu pellere i5o. i53
de nihilo esso 384
de titiilo P^'thiae disceiis 388
débat Juridique tG8. 307. 3 10
débita liora 357
decliuare aliqiiid 234
defectio veritatis 37G
défi oratoire 3i i . 3G4
del'inire 171
derundere statuas 3<)G
dehortatoi'ius 255
dei et deis dans ¥ ; dii et diis
dans P 12G
dei publici 197 ; dei Romani
279. 283. 299 ; dei i)ere-
griiii 279. 283.
deicere de grada i53
doinceps 477
De liA Bauuk, R. L. i3. 20. 28.
■420. passim
DE Labrioli.r, p. 295, n. I.
DE Lagarue, p. 47<^
delibatui* confondu aoec deli-
beratur ii4
deliiiqueroa/ig'iiu/74; in, ei'ga
aliquem 77
*delirare, 234
délit religieux i49
démon de Sacrale 254-25G
deux démonstratifs 2i3
deinoustratio, qna ostonde-
mus 117
deprecari de 142
De Rossi, J. lî. 33G
deiiique 395
*depopuUitores 324
depostulatores 324
deprehoiidore 194
deimtare = nbscidere *479
*derivare 234
descrJbere, *discribere i23.
182
désastres publics reprochés
aux chrétiens 343
detrahere datif 14G
dovotio Dei 92
deus pour dea 11 5; deorum
initiriae deis curae 293
Diaiiae 199
Di Capua 400. *472. passim
Dido 394
dieux romaias 90. 299
digesta sai»cta = scrijiturae
79. 372
*discribere 182
dispector 3G2
dispergi 102
disponei'e 191. 217
dispunclio, dispuiigero *48o
*dissecar6 329
dissipare 329
distensus, disteiitus 114
dittoffrapJiie 59-Go. 70. 77
diviuitas sectae 33o
*divinitus 178
division de l'Apolog. 1G7-8
ob divortium 287-288
*docior 3G2
domesticus t=z pi ituilus 140
500
INDEX RERUM ET VERBORUM
(loniestica iiulicia vel iudicia
i3G-i4i
domestica testimonia 187
(lomestici iiostri GG. 137-9
(lomestici seiies GO
domiuus, sens viilg-uire 817
domiuus écrit pour deus 87.
n8. ii5. 117. ia6. 2G4. ^74
douaro JiUquid u lie ai 48G
droit naturel 298
dum noec le subj. 210 ; hoc...
dum et sic... dum 88
dure 171
e final 408,1
eadem ratioiie qua 1 28
*effligere 208. 487
eiusinodi sujet ou compl. nu,
iGo. 898
elaboi'atis 80. ^i5
sXauvî 124
electi viri 817
elementa, axot^sfa 228
elidere 268
ellipse fréquente 84; de verbes
déclaratifs 189, 218 ; de di-
cani entre In proj>. i>rinc. et
la subord, 188 ; de esse 192;
de se esso 291 ; de ea esse
887 ; avec si (s. e. X'equiri-
mus) 189
elogium iG3
eloquiuin 2G8
*euaiTantes 40
eiiiin = enimvero 3i3
Epicurus,E])icui'ei83. 97. 38G.
374
ereptus in caeluiu 248 ;
erreurs de mémoire 77. 201.
368-3G0. *477
erreurs paléographiques 100-
127
evuctiiare 127
*erui)iiones 342
esclaves délateurs 187; témoi-
gnage des esclaves 189
esse s.-e. 84
esui dare 186
et confondu avec ut loi. laG.
170
et après un corrélatif 89
et... et 357
Euhemerus 285
Europe 64
Eusebius 82. i56. ^']^. passim
ex l'also 2G4
ex forma 177
ex lioc ii)so 144
ex ipso, se. Deo 828
ex otio 383
ex parte, partiellement 349
ex parte llomaiia io5. 247
exactor 827
exapertus iiG
excidere ab, de lai
excidere tramites 876
exhiberi oG
ex i gère 3 80
exilis nidor 118
*eximere datif 282
exitus =^ exitium 284. *48o ;
exitus rerum 227
oxorbitare ab 2i5
exorcismus 268-272
exoi'diri de 214. "475
*expaudifcur io5
expavescere 34o
*expressor veritatis 870
exprobrare aliquid 54
exsequi leges 176
INDEX RERUM ET VERBORUM
501
exspectare absoll 255
*extenii suiniis 33i
extranoHS oh = nlienns ab 335
extitndere allquid 35 1
evenire 3(5. 354
fabula 75. 90. 245. 2(55. 334
facilis iïxveniri, falli m
facit ad 265
faetio, factio Christiana, fac-
tiones illicitao 333
factor et auctoi' reruui 378
factinn uUcui velle 280
Falisoi 277
fallacia, f.illaciae 3i5
fainularis aliciii io5
fastigimnmaiestatismlsolai'e,
stevaeve ii5. 212
feu (supplice dn) 328; feu de la
foudre 890
fiducia futurorum *^8o
flammis invadere 828
fondement juridique des persé-
cutions 1G8. 3o6
forma = lex, modus 177. 363
formes contractes des verbes
401, n. 1
Fragment de Fulda 470
froquentare allquid 2G0
frigere 120. 357
Fronio 347
fulmlnum ignés 090
fundere pi'eces 3Go
Galli 186. 197
Gkffckkn, J. i5o. *47t
génitif déterminant le pronom
sujet sous-enl. 108. 33 1. Cf.
Musée Belge, i5, 191 1, p.
22 1 , et notre Langue et Synt.
de Min. Félix, § 5i, p. 92.
gén. mis pour un adjectif Suj
gén. partitif adij, 11.
gloriae lioininos *479
yvcoOt asautov 68
gouverneurs -juges 1 36 - 1 4 1 .
169
gradu, non statu 244
gradus (teniporis) 229
gradus, terme de la lutte i54;
de gradu pellere, deicero
i5o. i53. 022
gratia 288
gubornuouluiu rationis 191
GUIGNICBEKT, Ch. l5o.l58
liaec (abréviation de) 1 J2
haeccine 108
hauc suspicioneni huiusinodi
218
haplograpbie 35-38. 45. «07.
373
TiARNACK, Ad. 32. i56-i59.
375. passim
IlAKTKL, W. 3r, u. I. i52. 164
224. passim
ITaveucamp ï. passim
IIavet, L. I
Hein'zl;, 11. i33, u. i. 184. i5i.
219. 228. 226. Voy. Minu-
ciius Félix, dans l'Index lo-
corum,
Henen, p. 39. 124. 188. 212.
passim
liesternus 33i
liic ibidem 268
Hleronymus i5G-i59. i 83 ,
Hieronius, Iliram 124. 226
historiae = fabulae 21 1
hoc remplaçant un moi 5o. 862
hoc ... dum 88
hoc genus (ace.) 160
502
INDEX RERUM ET VERBORUM
hoc ipso i44
hoc maj^is ... quod (quia) 142
hoc modo i44
lioc solo iiomine 5o
*hoc iribunah's uG6, n.
Ilomerns aoi-ao5, 207. 2(56
houio es, hoiuo 384; l»omi-
mines gloriao *479
HOPPE 9. 10, li. 2. 1(3. 400.
passim
Hostanes 261
hostes generis luunani 3o4
hostes princii»uin llomaiio-
rum 3o3
hostes i>ublici 56. 3o3-3o4.
3a 1. 32G. 345
Hostia 276
huiusmodi. Voy. eiusmodi
humana vestra 235
i final 4oi, 2
1 du futur passé 402, 3
iactare, se iactare 187
iara i9G;îam ergo 196; iam
nuuc 354; iampridom 2o5 ;
iam vero 354
ibidem 263. 266
id est 68. 76. 83. 336
idem 79
lesus 83
iguis arcanus, aeternns 389-
390
imagines 62
immunis gén., iminunitas 365
imparf. du subj. {concordance)
190, 334. 383; non-rénliié
147. 275
impetus malae mentis in se-
metipsos 54
impii 295
impiiigere 40. 187
inipoiiere 181 ; inipositus 278
impi'obus, improbiias^ impro-
be 367
improbata 223
impriideiis = ignartis i44
*impiiiiilas 365
*impurissimus archigallus
282
in aperto, in continenti, in
i'also, in incerlo, in occulto,
in vero 264 ; in incerto est
Sa. 189
in Argos *475
in causa, in causam esse 34^.
395
in cetera m i55
in Deo, in Christo 260
in eiusmodi 112. 393
in eloquium oraculi 263
in hodiernum 120. 349
in incertum 43, Sa
in isto loco 341
in totum 232
in usum maledicti 260
in vereciiudiam 176
inceptiones 342
incidi = liabevi 280
inclamant 348
inculcationes 338
incuUas et nudas criices gS
incuvverc, incuvsave aliquam
124
inilic. et subj. mêlés n5. 21 3
indic. après is sum qui 253 ;
après qui adversatif 366 ;
après cum i48 ; dans l'in-
ierr. indir. 356. 358
indicia domestica j36
indifferens benignitas 327
INDEX RERUM ET VERBORUM
503
iiuligitameuta ia5
induere 21 1
iiiexeroitus, iuoxercitatns 37;}
inferi 121
infinitif uoec facilis m ; auuc
maiidare 3GG; avec conti-
git *479
inflati ad 284
iiifnictuosus dat. 355
ingratis 290. 292
ingratus è'e'ii. 35]
iuhalave avis io(5
*iuhonorandos 1 o3
inimice i25
iiiitiare 18C
iniuria = dtimnum 355
inlicos gén, 78
inlicitae l'actiones 333
inlumiuare 240
*iuimisiei i45
innocentes 359; (^f- i5i, 11.
iuquii'ere = co/jry////'(?/'e 56. i5o
inqviisitio i5i
inreligiositas 297
iureligiosi 295-297 ; in Cae-
sares 802
inrisui iudicare 112. 898
insci'ibere 4'-- 287. 245. 897
insciilpta praeoordia scaeuam
828
insectatores vei'itatis 249
iusequi 249
insignis ^'•é/i. 226
*luspirat 107. 245 n.
institutum Neroniunum 17a
'•insti'uctus iiG. 245
integrator veritatis 870
intentatio 297. 804
intérim 90. 178.354; intei'ini,..
dum 178
interpoluteuvs pédiinla 83. i45.
201. 222, n. 1
inlorpolatoi" veritatis 869.
*47î)
invadere iiliquem 828
iiiveniiuus i5o. i52
invidia, iiividios(Js 352
invidus iiostor 288
losephiis 223. 22G
ipso, se. Deiis 828; por ij)suni,
se. Deinn 38G
ipso et, ipse etiam, ipso quo-
que 88G
ipsma quod 49 ! = <^o ipso
quod 210
Irenueiia 288
ironie iG5. 178. 282. 8i3. 3i5.
is qui nvec rindicuUf zoS
Isiaci 197 ; Isis Cupitolinu 17G
IsidoriLs 38. 222, 235. 23G
iste = hic 1G2. 178; ista res 47
ita (lumen)... si 812
ita.,. lit sul)j. 341 ; ita... ut
qui 341
Ttaliae Joculif 191
iul)ere 217
ludaei 77. 188. 229. 282-234.
24G. 248. 275; ludaicîo moro
'2i6;Juduïs{in(s 2x0-216. 275
iudicari = danmari 112
*iudicia domestica 137. 140
iugulati 3i, 102
luno (Quii'itis) 277 ; lunones
J99. 284
luppiteri 208
iuramentum 81G
iure 171 ; suo iure 828
Iiistiniis 3/iir{yr 187. 218. 228.
238. 242. 24G. 249. 2G7. 2G8.
n. I. 296^ 347. 370. 88G. *474
504
INDEX REKUM ET VERBORUM
j'en de mots iG3
jugenmnis domestiques i4o
.TuNlUS i3-25. 4^0. piissim.
Klktte, Th. 5 g
kuoymann, e. ii
Lnctantiiis 32. 224. 289. 25(5.
270. 3o8, I. *47G. *477
laciinariîi nuiiieraro 275
laedere deos 28G. 290
laesà religio 274. 286. 287.
290-298 ; ]aesa publica et
maxime Romauai'eligio 287
laesa religio ac divinitas 286.
287. 295
laesa maiostas 3oo. 3o3
laesa maiestas deormn 296.
3oi. 3o6
laesa augustlor maiestas 3oo
langue etstylede Tert. 128. 1 33
langue juridique 149. 170. 292-
3ii
lapidation : lapidibus iiiva-
dero 328 ; exigere 379-880
Larentiiia 124. a84
lasciviae 342; lascivire383
laudo ironique 200
lave, lavor 357
leges 1G8. 172. Voy. christia-
nisme
Lkhmann, p. 12, 11. I
lenius 333
libellé des jugements 122. 162.
3io. 36i
libens animus 292-298
liberté religieuse 298
liceiitia 365
licet i36. 252 ; licuerit 262
*licitae factiones 333
litote i65
locatif d'un nom de pays J92
loci 383 ; in isto loco 34i
Lôi-STEDT, E. 134. Voy. les
notes de rA])p. I
Xdyoç 217. 288-244
loi naturelle et loi positive 169
Lucullus 191
ludi 98
Indos faeere{M'm. F., 24,1)208
*inmen de linnine accensum
287. 289
lu.siiis 112
Lyon (chrétiens de) i38. 809,
n. 1. 347
magicae deoinctiones 32(>
mugis sous-ent. 142. i65. 3i8;
= j)otius 200. 379
magus 117 ; magi 207
maiestas deorum 197, 296.
3or ; imperatorum 802. 3o6;
populi Rom. 3o5 ; laesa 3oo-
3o6 ; maiestatis rei 56
mala mens 55
maie abominavi 819
maledictum Sac
mali frati'es g»)
malle alicui 280
malum interj. 258. 260
malus = Satanas 260
mandare avec l'inftn. 366
Marcus Aureliiis 281-282
materia mati'ix 289-240
malrix 289-240
JMenippeus (== Varro) 209
Meliton 847
mens mala 55
mercari, mercatus 806
*meritum fuit (= est) 246
INDEX RERUM ET VERBORUM
505
métaphores cnUnnives 34o, 34 1
métaphores juridiques \\^. 292
métaphores militaires i5.'î-i55
miles (comparaison) 81. i53,
11. I ; milites délateurs i38
militia patris nostri i83
mimes 38
mimicc, inimicus i25
minisloria = ministri 5;)
Minos 7G. aGy
minus 221
miscere artes 356
modes mêlés (ind, et sulyj.) 3^o
mo(licusi79; modicae memo-
riae ho ma 3G8
MoDius, Fr. 12-29 4'-20- />«•''■-
sim
modulus 242 243
modus 243. 303. *479; ^^^' s«e-
lei'is 149
molii'i 354
Moyses 23 1. 25o. *474
MoMiMSKN 57. 148. 3o5-3ix
Monceaux, P. 3i. i33. 1G9
monothéisme 227
morati siuifc 119. 349
*more coinmuni 317. 522
mortiii vesti'i = dei 190. 198
*musici 145
mutare ablat. 366
mysteria 177-179
natura divliia 180
iiaturalia mali 71
*naufragia = naufragi 59
ne 352
*ne,.. quidem Sag
ne vel... vel 90
*nebulare 325
nec=/je.,. quidem Suq. 333
iiec-llomanonim 278, 299
necesso habet = dcl>et 50
nefïari 20. 5o. 1 14
iiegotia Chrislianao factlonis
337
neminem rébus huiiianis 373
neino miles =/t«//«s milesSi
nequam servi 78
Nero 172. 307
Niger 3o4.3i5
iiiliilum 389
nocentes 72. 211
noctar/iae convocationes 34 1-
342
nomeu Christianum 309 ; do-
minicnm 148
nomina scok'rum i()3
iiominis odium 148. i5i. 218.
309
nominisproolium 148. iG3. 3io
non aliiis... nisi 348
non-Clirisiiaiius 278
non dico iam... sed 92. 359
non licet esse vos 137. i49-
i52, 1G8. 172. 307
non «escio, non nescitis siim
iG5
non parco... ut non 20G
iiotae huinanitatis 192
notari 3Gi
notes de la collation de Modiiis
23
noxietas = noxa 147
noxii 211
nubes numerare 275
nubilare 320
nudae cruces, nuda t]ieatra72
Numa 9G. 23r. 201
numeinim iacere 241
nul are 121
506
INDEX RERUM ET VERBORUM
o final 401, a.
*ol) hoc... quia a85
obba io3
obducere, obduui 896
oblatio = (lelatio 101
^obsoletare 212
obstruere os ulicni 48 (v.
Add.); obstruere advei'sus
i«8
obtinere = vincere 896
odiura paenulae = odiosa
paennla 78
Oehlkr, F. 3. 18. 87. 162.
passini.
of ferre = déferre i5i
omissions accidentelles 35-58
omissions stylistiques 84
omnia Dei loG. u^3 n. i.
Onokoites 128
operae nostrae 856
operari, oj^ei'atus 141-2G7
*operatioiies 2G7
operatores 2C7
operosus 200
oi'betn et urbem 348. 022
orbis terrae 282
Ori-renes 2G8, u. i. 389. 344.
347
paedagogia = paeri 199
*paenitentia soutentiae 208
paenulae odiuin 78
pantomimes 210
paradisus 37G, 877
non parce. . ut non 20G
l^arere = appnrere ^o, 824
parfait gaomiqne *479
parlter aotate esso af/cni "47^
participe présent 3i4. 354
Pasiphae G4
pater sacrorum 182
patrocinari *479
pellere (de gradu) i53. 522
pênes = apud *475
penetrale sacrificitim 198
per Christum, per eum 25o
l)erditi, perditio 291. 896
perficei'e 191. 217
performari (ad malum; 147
persecutores nostri i^S.n^'j
*persequi 249
philosophes 80. I25. 364-365.
370.*478
Pieriae locatif 191
Pilaie : rapport à Tibère 46.
280, 247 ; rapport apocry-
phe ù Claude 1 17
plan de l'Apolog-étique 167.
3io-3ii
Platon 2o3. 257. 261. 266
Platonici 378-375
plerique = multi 2i5
Pline et Tvajan 82. 94. i49-
i5o-i6o. 334. 36i
pluriinum (quam) = saepis-
sime 274
Polycarpus 295
})olylhéisme 298
Pom])eii 849
Pompeius 192
populace (clameurs de la) 187.
828
porro 385
possum 217 ; potest =7Jo/es^
esse 19O. 819
l)ost crucem 2G5
potior do sapientia 198
potiu.s loG
praecnnere = praedicere *477
praecavetur 334
INDEX RERUM ET VERBORUM
507
praodicare = iiniedicere 22v3.
l)raeest = praesfo est 382
praefari (prologue drama-
tique) 20<i
praefectura bibîiothecae 228
praogustatnr oralio 341
praerogativa 178. 233. 279
praeseribero, praescriptio
170. 171
praesiiinei'o 98. 887 ; j)ra6-
siimptio *48o
praeteivjuam et 288
precantes suinus 3i4
préposition non répétée 48
présent mnrquajit un fait géné-
ral 122
^'présent historien avec cum
207
a primordio teinporinn 109.
342, 486
I)riiiccps lioinimim 191
l)ro instituto 80. 872
pi'obareSo; pi-obari 223.*48i
l)robitas = humilitas 3G7
*l)roco(lere 196
procédure criminelle i48- iSa.
161
proconsulatus Tiberii i83
Proculi 249
prociirare 17G
prohibei'e = vetare 159. 175
proinde 210 333. 356. 861.891
prologues dramatiques 2o5
pronom antécédent sous eut.
io5, 2l3. 225. 268
pronuiitiare 217
pï'ophetia *479
propositions relatives à l'indi-
catif (exsiaiat qui audebit)
363
l)roprius : de suis propriis
67 ; lex i)ropria, i)roi)riae
litterae *477 ! pi'oprium la-
cère *47!)
propterea 821 ; p. ne 68 ; p.
quia, quod 285. 821
prosrribere 287
]n'os«care 184
prosteniero = prostituere ;
prostralissima =■ prostitu-
lissima 2S4
l)i*ovi(len(er 228
provideutia 228
provocnri ad 120
prudeus ::= gnarus i44
Ptolemaous IMiiladelplius 222
l)ullulare, pullulatio *474
])ulBare = accusare i85
Pytlingoras 368
Pythiae titulus 388
qua = qua ratioiie 384. ^73.
407; qua sans verbe 175
quaedam = nnnnulla 871
quaiido avec le subj. 21 5
quaiidoque Chrisliani 77
quanti = ({uot 78. i47- 188.
886
quiinto niagis i45
quantum et le subJ. 896
quantum litterae, se. docenl
189
quasi non 882
-que 402, n. 2
is sum qui avec Vindic. 258 ;
qui adversatif avec Vindic.
86(5; eadem ratione qua 128
qui = ([uis 363
quiaA'a/j.s verbe 174. aiiii- 896
quibus modis 868
quid quod ? 209
508
INDEX RERUM ET VERBORUM
qxiidni ? cum 36
quid.., nisi ==: (jiiid iiliini iiisi?
*48o. 522
quo (= et eo) i)ei*versitis iGi
quo = lit eo, sans comparatif
287
quo = ex qno, depuis que 164
quod poJir quot (59. 112. 12G
qiiod : hoc magis.., quod 142 ;
nuniiare, prooidere qnod
227 ; annphore de quod 227
quod non potest, se esse 819
quod sciain *48i
Quod idola dii non sintSç) io5.
117. 246
quomodo et 76. 117
quoiiiam 358
quoque 872
qiiot /iOH/' quod 126
r final devenant s 98, 121. 167
ratio (Dei) 106. 217
ratio (omnis illa) = daemones
254
ratio liabetur = ratio constat
52
l'atioues, impôts Sa
llAUSCHKN, G. 5. 134. Jiassini
l'ebellare 291
receusere = considerare 200;
recensitus e^ recensas uG
l'eeeptuB in caeluiu 248
reclamare == ilerum atqne ite-
rum clamare 824
reciprocatio animarnm 383
recogilare 363
recognitio, recognoscere *48o
referre in tabulas 46
reformari ad malum, ad bo-
nuin 147. 254
refutare avec Vacc. et Vinf. =
negare 887. 622
relatif pris dans un sens plus
étendu que V antécédent ^o ;
accord sylleptique 128. Voy.
indicatif
religio = cultus deorum 96
religio = relig-iositas 278; ve-
rae religionis homines 821
religio castrensis 74
religio laesa 274. 286. 287.
297 ; crimen i)ublicae et
maxime llomanae religio-
nis 274. 297
religio mendicans 197
religio llomana 274. 298-800
religio secundae maiestalis
3oi-3o2
religiosi 96; ironique 3i3
*reliquiae sei)ulturae 108. 829
reluminare 246
remunerari passif 260
renouvellement de VuniversSSd
répétition d'une idée 82
repensare de aliqiio 33o
*repï'ehendere pour depre-
hendere 194. 196
repugnare 291
res tranquillae 4'-2
rescril de Trajan 160
resignari datif 286
resumpius in caelum 249
rétro = antea 178
reus 78 ; reus alicuius 85i ;
alicuius rei 164
revocare 248
Illiadamanlluis 76. 267
RiGAi/nuK 3. 470. passim
ri gare sitini 871
*riirere 120. 357
INDEX RERUM ET VERBORUM
509
llOKllSCIi, A. 12, i». I
llomnli = divi a49
ructuaro 127
Riifîmis 3a. ii3. 182. ]5G
i'ui)ex = *ru(lis 25 1
rura 348
ruspai'e et l'uspari 17a
s final pour r q3. lai. 1G7
saci-ameiituin uostrum i56.
i58
sacrai'ium, sacrum 197
*saci"ati Bellonae i85
sacrificium pro salute imi)e-
ratoris 292
sacrilegium, vol d'objets sa-
crés 21 3. 3 60
sacrilegium = impietas 287.
295-297
sacrilegium = laesa inalestas
3oi. 3o6
sacrilegus, voleur d'objets sa-
crés 2i3. 36o
sacrilegus = implus 198. 2i3.
295. 296
saeculum *475
Salvlanus 34 1. 847. 870
salvus est (qui de caelo tan-
gitur) 390
saltari 211
sanctissimus archigallus 282
sanguis = rubor 357
Satanas 260
Saturnalia 337
scabiosus 201
scènes mythologiques 211
scliedae Sclwppianae i(î. 20
scholae collegiorum 70
SCHRORS, IT. 134. 240
scilicet 814. 889
ScHOPPius i5. 23
socati liolloiiae i85
sed 5i. 190. aoo, 1». 853
sed et 22G
sod quosquidom avec un verbe
s.-e. 184
seineu = origo 179. *478
senatns consuUum a. So/f. a.
Ch. 174
Seneca, Apokol., 8. 209 ; De
superst., 194
Septime Sévère 3o4. 3i5
sepultura=7jo/;jo sepnltus 248
se(iuitur ut io5. 253
Serapis 175
sermo (Dei) 217
servare = reservare 178
servi poenae 78. Voy. esclaves
set pour sed 71. lao. 190
*sexusfemineus=/e//j//ia 867
si interrogatlf Indirect 258.
265. 2GG. 3i2 ; anaphore de
si 253; ita(tameii)... si 3i2
si conditionnel (^ellipse du verbe
avec) 189
si qui = si quis 889
Sibyllasi/i^-. collectif '2-2^. *48i
sic. dum 88
sieclne 108
signare 186
siguatus adj. 887
*sîlvestris Roma 285
simul = slmul ac 187
sine pignore siugulares 69.
i83
sitis ingenii 871
Socrates 207. 254. 8G5
Solon *478--
sophla, saj>ienlla Del 217. 2GG.
*478
510
INDEX RERUM ET VERBORUM
sophistao = philosophi 870
sortiri déponent 76. 2GG ; j)as-
sif iGo
sources de Tertullien 184. 218.
='•■472
SOUTER, A. 483
*si)ecte, pi*oBj)ecte 102
spirat 107. 1J45, 11.
spiritus(Dei) 4i • loO. iîi8. 287
spiritus oiniiluin aiiimalui* 80
status 244
sternere 212
slipem collig-ere 197
Stoici 874-875
aTotysTa, eleinonla 228
stvuctiis 116. 245
siib iioctem = dilicnlo 357
subare i25
siibdlta est 289
siiblundere, snhfnndi, snbfa-
sns, snbfnsio 36. 882
subjonctif concessif 9G
siibj. potentiel snbord. 3i0. 888
snbj. suppositif 187. 252
subj, après (luaiitiiiii 8;)(]
subj. impiirf. (non rénlilé) 147.
270 ; concordance 190. 834.
883
siibluero 181 ; siiltici 2S9
stdyicctio 3i4
snbordiniilionisme 248
siibscribcîre = coacedere 104
subsluntif npposé comme un
adjectif iJC). 11 G. 240. *475
snbst. déterminé par nn siibst.
nuec nue prép. a^i
succedore comlioioni siiae 289
*succi(lero 289 ; onnitnti '28^
sufficit si 52
suffragiuiu 52. 174
suggillare, suggillatio 198
suyyerimus 37G
super ceteros (= de ceteris)
225. *48i
sui)er, à Végurd de 354
superficies 104
supplice dn feu 38o
sujiputatorius iiG
sursum suspicio 3i3
suspicere = admiruri loG.
119
Sutrini 27G
do suis = (ife propriis 67
Syncellus i5G
synodus deorum 199
Syria Palaestina 247
t devenant d 12G
tabernae liabitus 821
labidosus, tabiosus 201
7'^jr.v7//6- (Ilist,, 5) 104. 3G8.
tain... quam 78. 87. 98. 214
tani aniinati, taui coiispirati
33o ; tam verum 87
tau tus (:= tantulus) quantus
!)2
tauti quanti un gén. i(j5
tantuui iiomeu, si 388
tnuli = qitot 188
tauto abest ut 3 18
Tarijuins 9G. 280
Tatianus 218. 288. 2G7. 847.
370. 3-2. 3HG
téinoinn indirects dn texte 3i.
i3i
tejni)erari dat. 122
tenipora, saisons 228
Tertullien, sur lui-même i54.
188. 3(i8 ; ne discute pas en
révolutionnaire 1G9; juriste
INDEX RERUM ET VERBORUM
511
294 : les fnihiesses de son
ériidilion 3G8 (cl". 77. uoi);
su répagiimice ù révéler ce
qui se j)ii!ise duns les réu-
nions des chrétiens 338
testimonium 207
testimouium animao 21g
Thaïes *477
Thalhis *47'-*' *47^î
theafcra uuda 72 ; théâtres 78
Theophilns 2a3. 228, 347. 387.
*472-48i
Tibère 4G. 173-174. i83. 298.
3io. 348
Tiberii pvoconsulatus I23
l^ig'idins Perennis i38
timeudus (Deiis) 35o
litre on résumé murg-innl 05.
78. 83
tifculus, chef d'accusation 294;
titre du crime des chrétiens
i63. 3o6. 3Gi
(le titulo Pythiao discore 388
torinenta, torture 122
tôt ac taiiti (pléonasme) 188
tutuiu = in totnm 282
traduction grecque 32. ir3.
i55. i5G. 159. 178-175
traduceve, traductio'iaa. 828
tradux 180
Trajan et Pline, voy. Pline
trausducei'e 822
transferre = transferri, tran-
sir e 281
transitions brusques 98
transpositions G2. 8G-99. 48G
ti'oi)aea 41-89
truncare 17a
ttiei'i, tiiere 121 . 890
tuudcre uliquem 35i
ubicumque indéfini 120
imitas disciidinae 109
uaiiis provinciae i)luros ori-
mus 108. 83i. Voy. génitif
ui'bem (orboin et) 348. 522
usai dare 18G
lit confondu anec et loi. 122
ut aut. . . aut ut 83o (cf. si «ut. . .
aut si 21,24 1^)
ut .. ita 193
ut aaec un partie, ou un adj.
G7. 125
ut dixei'im 3iG
isto uouiino, ut 819
utramquo parteni *48o
V pour h 118. 12G
Van mai Vmkt, .1. 57. 08. 194.
'^79
variantes accidentelles 80; i/t-
ientionnclles 29. 129
vaticinatio *475
Varro 175. 208-209
vel = etiam 54
volimus ac noiimus 277
niale voile 819
VKIiSKRUS i5
veuerari = adorare G9
vemistates concret io3
vorae religionis homiiies 821
verbe déclaratif sous-ent. 84.
*477
Verbum (Dei) 76. 90. 191.
21O-217. 280. 288-244
voritas Dei, iimoeentiae, vo-
luptatis 88. 92
vesioa quaeritur 877
vestri omis 53 ; dei vestri 58
Vettius Epagathus i38
uicatim 197
512
INDEX RERUM ET VERBORUM
Victor *470
Victoriae = tropaea 4i. 8j)
vuleri =cei'iii 221
*vimileiitiae Saa
Vivgiliiis 77. ii3. h66. 3^4
virgiiies Vostae ou Vestales
28G
vii'tus (Dei) 106. 217
volo 200
voluptates 887
voratriiiae ingratao 70
vulgiis iniiuicum 187. 828
Vulshiii 349
Zacîharias *477
Zeno, Zenon 41. 8G8 ; Zenones
88
zeugma 3Go
ZiicraNSKi 400
zona ignea 877
INDEX LOGORUM
1,1
48. Gi. 71. i3G.
i4a. 52 1
3
loi. r2G. iG8
a
i4u
4
171. 411
3
j4ii- 41^
5
41 1. 4^5
4
408
7
172
G
39.71. 143
9
II 3. 173
8
101. 143. i44' 4
18. 422
10
40. 45
9
3f), 94- 101. 14^
II
I i3. 4i5
lO
48. 147. 4'"
12
49. H
i3
ï3. 70. 71
5,1
38. 42G
'-i,'
147. 412a
2
ii3. 173
4
148. 149
3
38. 72. 42G
5
Gi. 84. lia. 127.
411
4
174
G
loi. 112. 122. 12G. 149.
n
94. 102. 175. 4' I
i55-iGo. 522
7
iGo
G,2
1x3. 175
8
5G. loi. 160
3
72, 175
10
4i5
G
ii3
12
40. 5G. 72. roi. I
61
7
427
i3
8G. 4i5
8
175
i5
101. 112. 122
10
49. ii3. 4ii
i8
8G. 1G2
19
loi. 41 1
7,1
17G
20
112. 122. 1G2
3
G
40. 8G
124. 17G. 41 I
3,1
49
7
45. 178
3
40. 112. 1G4. 41 1
.422
8
G2. ii3
4
49. 12G. iG5
12
II 3. 179
5
ii3
i3
Ga. 180. 417
7
ii3. 126. 4i5
8,4
122. 41G
4,1
38. 49. iG5
5
73. 181
a
72.84. 124. 16G.
417.425
G
181
33
514
INDEX LOCORUM
7 28. ii3. 122. 182. 4iB i5 193
8 6.9,84.118.127.182 iG io3
9,2 22. 49. iii2. i83. 429
4 i83
5 70. 73. 184.408. 411.
6 i85
7 8(3.411
8 86. 102. 114
9 49- 102. 411
10 24. 26, 73. 102. i85. 4i5.
430. 43 r
11 102. 1 14. 187. 431
14 114
i5 21. 5o. 102. 114. 4^1- 4^'-
iG 124
17 53. 102. 187
18 47- ^o. io3. 114
19 58
20 22. 84. 4^7
10,1 123
2 4o- 94- 187. 4ii' 432
3 411
5 45. 114. 188
6 188
7 84. 189. 433
8 62
9 86. io3
10 189. 190. 4i5
11,1 54. ii4- ^90
3 5o. 86. 190
4 418
5 191
6 191
8 191
12 114. 192
i3 86. 192. 41X
14 193
12,1 63. 194. 435
2 io3. 11 4- 194
5 I r4- 126. 021
6 194. 4^^"^
7 195-417
i3,i 195. 4ii
2 114.196.418.435
3 19G
4 ii4' 126
6 197. 418
7 io3. 198
9 28. 36. io3. 199. 41 1
14, î 199
2 201. 4ii
3 1 14. 2o5. 411
4 73
6 io3. 2o5. 4ti
7 37
8 124. 206. 209. 4i2
i5,i 38. io3. 126
2 86
4 210
5 53
6 1 15. 212. 412. 418
7 2l3
8 ii5. 2i3
16.1 73. 2l3
2 104. ii5. 123. 214. 412.
417
4 126
6 2i5
7 104. ii5
8 40.69.74.89.95.418
INDEX LOCORUM
515
10
63. 2i5
8
24. 04. 235. 4ï7. 443
II
5o. 2iv5
9
230
X'2
12. 123
10
41
i3
03
II
41. 70. 74. 230. 522
12
75, To5. iiG. 12O. 237.415
17,1
216
i3
240
2
84. 220. 401. 41^
14
75. 90. T iG. 244- 4i'-
3
87. 116. 12(5
i5
42
4
41. 418
iG
io5. iiG. 24(1. 412
5
41. 5o. 222
17
47. 70. 80. io5. 1 17. 240.
412
18,3
Go. 04. iKi. 123
18
7G. io5. 247. 412
5
41. 104. uO. 222. 439
J9
38. io5. 247
7
104
20
7O. 117
8
74
21
248. 412
22
io5. 248. 4^7
■'19
470-484
23
io5. 248. 249
T
223
25
249
9
223
2G
70. 117. 12G
10
223
27
io5. 249
28
25o. 4 12
i9,i^
104. 220
29
I 17. 124. I2O. 25o. 4l2
4
iiG
3o
1 17. 123. 231
5
45. 84- 225. 417
3i
a52
6
104. 124. 225. 22G
8
90
22,1
254
2
2 Go. 2Gr
20,1
227. di2
3
io5
2
8G. 104. 227. ^1-2. 417-
4
2O2
44a
5
io5
3
104. 227. 418
G
42. 5i. 2G2
4
104. 123
7
5i. 7G. 1 17. 4ï2
5
124. 227
10
124
12
5i
21,1
04. lOa. 12G. 229
2
12G
23,1
loO. 2G2
3
84. 232. 418
2
123. 412
4
41.232. 233.412
3
117. iu3
5
74. 1 iG. 124. 234
4
117. 12G. 2G3. 2G4. 412.
7
G4. 4i5
44-
516
INDEX LOCORUM
5 io6
6 42. 5i. loG. 447
7 71. 7G
8 264
10 5i. G5
12 Gi. G4. ToG. 2G5. 412
i3 7G. 117. 2GG. 448
14 70. 2G7
16 2G7
18 118. 126. 274. 4^9
19 77
24,1 274. 449
2 47- loG. 118. 12G
3 77. 275
4 58. io(>. 118. 124
5 loG. 275. 27G. 449
7 123
8 ^'2. 107. 118. 27G. 277
10 277
25, ï G4
2 58. 118. 278. 412
3 279
4 107. 281
5 281. 282
7 124. 282. 283
9 i-*'4- 284
10 118. 125
11 284
12 5j. G5. 95. 118
i3 118. 285
14 5i
i5 5i
2G,i 118
2 285. 28G. 412. 417
3 77. 8G. 412
27,1 a8G
3 416
4 287
5 77. 107. 126. 4i5
G 288. 289. 4i3. 419
7 107. 289. 4i3
28,1 292
3 118. 294. 4i3
29,1 3i2. 452
3 G5. 419
4 3i3
5 452
3o,i 3G. 4i3
2 107
G 22. 78. 118
7 91
3i,i 3i4
3 42. 3i5
32,1 G5
2 119
3 4G. 3iG
33,1 3iG
4 82.417
34,1 317. 522
2 21. 58. 94. 97. 3i8. 454
3 21. 82. 3i8. 3i9
4 47. 107. 3i9
35,1 G5. 321
2 107. 321
5 97
7 4-- 45. 92. 108. 322-324
8 124, 324
Il 325. 4i3
INDEX LOCORUM 517
la
325
19
24. 34iî. 459
i3
io8
20
486
36,1
3a6. 4i3
40
483-486
2
55
I
70, 109. 343. 486
3
327
2
78. 348.417. 487
4
327
3
109. 348. 522
6
iio. 119. 348. 4i3
37,2
io8. 328
8
349
3
33o, 4i3
9
no. 120. 418
4
46. 33i
10
58. 349. 4i3
5
47. 108. 33i. 402. 416
12
35o. 4^5
6
36. 332
14
28. 35i
8
82. 119
i5
35i. 352
38
483-486
41,1
79.353
1
£19. 333. 4i3. 486. 487.
2
94
3
109, 486
3
354. 418
5
45. 59. 78. 83. 97. 109.
4
4i3
119. 336. 486. 487
5
66
6
36. 79. 110. 354
39
483-486
I
66. 109.337.413,486.522
42,1
355
2
78.338.413.416. 486
2
355. 419- 4^1
3
338. 486
3
47. 355. 356
4
119. 126
4
356
5
486
5
45. 120
6
28. 37. 43. 59. 66. 70.
6
iio. 358
119. 339. 4i3. 486.
7
67. 120
487
9
51.417
7
4i3. 486
8
99. 339. 487
43,1
110. 358
9
109. 119. 126. 340. 487
2
9a
12
340
i3
119. 486
44,1
86. 110
i4
416
2
79. 359. 36o
i5
36. 109. 124. 125. 486
3
110. 36i
i6
109. 486. 487
17
341
45,1
43. 67. 110. 362. 4i3
i8
66. 119. 126. 341. 4i5
2
92
518
INDEX LOCORUM
4
125. 4i3
i3
37G
5
79. 120
i4
68. 4i4
G
79. 362
7
79. 83. 111. 120. 4'
9
48,1
58. 68. 377. 379
2
68. 382. 417
46,1
363
3
III. 121. 383
•i
111. 364
4
43
3
m. 364
5
384
5
365. 4i3. 417
G
93. 384
1
125. 364
7
80. 384
8
364
9
68. III. 121. 387.
388.
9
m
4i4
lO
120. 125. 366
II
52. 80. III. 112
11
37. 464
12
121
12
367. 368
i3
80. 112. 389. 418
i3
41. 368
i5
390. 402
i4
45
i5
43. III
49,2
121. 390
17
52. 120. 4i3
3
84. 112. 391. 362,
414
i8
67. 364. 369.
417
413.4
i5.
4
5o,i
121
81
47,1
465
3
121. 393
2
370.371. 465
4
393
3
79. 80. 93. III
.372
5
81. 395. 414. 418
4
45. Zm. 121
8
414
5
67.373
9
41. 43.396
6
43. m
10
112. 396
7
374
II
112. 396
9
m. 375. 37G.
4i3
12
397. 4i4
10
4i4
i3
121
II
414
14
121
12
121
i5
86
Ad liât., T, I, p. Go,
8
54
I, 10
, p. 75, 28
212
I, 7.
p. 67, 21
ii3.
179
P- 79, 24
208
p. 78, 20
349
p. 80, 14
212
INDEX LOCORUM
519
I, II, p. 80,
5
211
23, 14
2G7
1,12, p. 83,
i3
40
23 (22), 6
209
I, 17, p. 88, 25
302
25, 9
283
2, 2, p. ()G, 8
374
26-27
258
2, 4, p. 100,
19
194
26,9
255
a, 12, p. 120,
10
224
26, 12
261
2, i3, p. 124,
II
91
27, 2
22G
2, 17, p. i3o,
II
279
1-280
27, (5-7
267. 271
Despectaoul
is,2,p. 3,
1 10
325
29, 5
30, 1-2
3x7
346
De vii'g. vel.
,9
245
3o, 4
i84
Adv. Marc,
I, I
2
3o, 5
18G
4, 24, p. 5oo,
7-
245
34,9-10
35,3
385
390
Miuuttius Félix, i, i
201
38, 2-3
iio. 358
9, 5-7
34G
38, G
122
9,7
176
12, G
122
Salvianus,
De gub. Dei,
i3,4
»477
I, 1,3
375
i8, 7
21:
f-220
4, 85
347
18,8
89.
, 221
7, 100
375
18, II
219
102
341
19,8
374
io3
375
21, 10
320
22, 8 (24, 3)
197
Theophilus
, Ad Aut.,
22,9 (24,4)
186
3,21
223.*475
24 (23)
201
3,29
*476
24 (23), 4
205
ADDENDA ET GORRIGENDA.
P, 8, n. a, et p. lo, ii. a, Usez : Berl. phil. Woch.
P. 17, dans le titre, Usez : IV.
P. 17, n. 2, Usez: aa,3 (au lieu de: 21, 3); 89,6, p. 23o,i (au lieu
de: 39,3, j). 238, i); 32,3 (au lieu de: 82,1). — Corrigez;
encore :
7,1 : inverecuudiani, ini Ueii de: inreverecundiam
7,3 : ex natura « et natura
7,6: (xuani dum » quae dum
8,8 : quid si y quod si
i2,G : insputate n iusputare
22,11 : et circa curas » et curas
38,5 : que vos » quos vos
P. 22, n. 4- C'est encore lir qui paraît avoir raison contre F.
En effet, l'araignée s'ai)poIIe nraneiis, tandis que aranea
désigne la toile d'araignée et ne se trouve pas en prose
avant Fronton pour désigner l'araignée. Le Thés. l. l., I,
3i)4-895, ne cite i)as Tertullien, qui dit ailleurs araneus.
Adv. Marc.,i, i4, p. 3o8, 10: apisaedificia,formicaestubula,
araiiei retiu, bombycis stamina. De jjallio, 3, p, 981 O. : ara-
neoriim lioroscopis (= leUs). Ici F «avait ])robablement
iwaiiei, car la variante porte sur les deux mots : araiieae
inteUigunt.
P. 40, ch. 10,2 : statim, etc. A supprimer (voy. p. 187).
Ibid., au lieu de : 1(5,7, Usez : 16,8.
P. 43, » 47,5 )) 47,6.
P. 45^ 1- 8, au lieu de: 10, 5, Usez: 10,4.
P. 47» sur 37,5 (note i), voy. p. 108 et 33i.
P. 48. Sur os obstruU, voy. encore De Orat., 29, p. 199,11 ; nec
ora leonibiis obsb'iiit (oratio ChrisUana).
P. 54, 1. 3, au lieu de: ri,i, Usez: i,ii.
P. G5, mettez 28,10 avant 28,12.
P. 89, au lieu de : iG,7, Usez : 16,8.
518
INDEX LOCORUM
4
125. 4i3
i3
376
5
79- i^o
^4
68. 44
G
79. 362
7
79. 83. m. I
20. 4'9
48,1
58. 68. 377. 379
2
68. 382. 417
46,1
363
3
III. 121. 383
2
m. 364
4
43
3
m. 364
5
384
5
365. 4i3. 417
6
93. 384
7
T25. 364
7
80. 384
8
364
9
68. 111. 121. 387.
388.
9
m
414
lO
120. 125. 366
1 1
52. 80. III. 112
11
37. 464
12
lai
12
367. 368
i3
80. 112.389.418
i3
4i. 368
i5
390. 40a
i4
45
i5
43. m
49,2
121. 390
17
52. 120. 4i3
3
84. IT2. 391.362.
4i4
i8
67. 364. 369.
417
4i3. 4:
i5.
4
5o, I
121
81
47,1
465
3
121. 393
2
370. 371. 465
4
393
3
79. 80. 93. III
[.372
5
81. 395. 414. 418
4
45. ^2. 121
8
414
5
67. 373
9
41. 43.396
6
43. III
10
112. 396
7
374
II
112. 396
9
III. 375. 376.
, 4i3
12
397. 414
lO
4i4
i3
121
II
414
14
121
12
121
i5
86
Ad 11
at., T, I, p. 60,
8
54
I, 10
, p. 70, 28
212
I, 7.
p. 67, 21
ii3.
179
P- 79, 24
208
p. 78, 20
349
p. 80, 14
212
INDEX LOCORUM
519
I, II, p. 80, 5 211
I, 12, p. 83, i3 40
1, 17, j). 88, 25 3o2
2, 2, p. ()(), 8 374
2, 4, p. 100, 19 194
2, 12, i>. 120, 10 224
2, i3, p. 124, II 91
2, 17, p. i3o, II 279-280
Despectaculis, 2,1). 3, 10 325
De virg, vel., 9 245
A<lv. Marc, 1,1 2
4, 24, p. 5oo, 7 245
Miuticius Félix, i, i aoi
9, 5-7 34(j
9, 7 ^1^
12, G 122
i3, 4 *477
18, 7 217-220
18,8 89.221
18, II 219
19,8 374
21, 10 320
22, 8 (24, 3) 197
22, 9 (24, 4) 186
24 (23) 201
24 (23), 4 205
23, 14
23 (22), G
25, 9
2G-27
2G, 9
2G, 12
27, 2
27, G-7
29,5
3o, 1-2
3o, 4
3o, 5
34, 9-10
35,3
38, 2-3
38, G
267
209
283
258
255
2G1
22G
271
3i7
34G
184
18G
385
390
110. 358
122
2G7.
Salvianus, De gub. Dei,
1, 1, 3 375
4, 85 347
7, 100 375
102 341
io3 375
Tlieophilus, Ad Aut.,
3, 21 223.*475
3, 29 *476
ADDENDA ET CORRIGENDA.
p. 8, n. 2, et p. lo, n. a, lisez : Berl. phil. Woch.
P. 17, clans le titre, lisez : IV.
P. 17, n. 2, lisez: •22,3 (au lieu de: 21, 3); 89,6, p. 280,1 (au lieu
de: 89,8, p. 288,1); 82,3 (au lieu de: 82,1), — Corrigez
encore :
7,1 : inverecundîani, iiu lieu de: iureverecundiam
7,3 : ex natura » et natura
7,6: quam dum » quae dum
8,8 : quid si >» quod si
12,6 : insputate » iusputare
22,11 : et ciroa curas » et curas
38,5 : quo vos » quos vos
P. 22, n. 4- C'est encore Br qui paraît avoir raison contre F.
En effet, rai'aignée s'api)elle avanens, tandis que aranea
désigne la toile d'araignée et ne se trouve pas en prose
avant Fronton pour désigner l'araignée. Le Thés. l. /., I,
394-895, ne cite pas Tertullien, qui dit ailleurs araneus.
Adv. Mai'C, I, i4, p. 808, 10 : apis aedificia,formicae stabitla,
aranei relia, bombycis stamina. De pallio, 3, p, 981 O. : ara-
neorum lioroscopis (= telis). Ici F avait probablement
ai-auei, car la variante porte sur les deux mots : araneae
iiitelligunt,
P. 4O) tîli. 10,2 : statim, etc. A supprimer (\oy. p. 187).
Ibid., au lieu de : 16,7, lisez : 16,8.
P. 48, » 47,5 » 47, G.
P. 45, 1. 3, au lieu de; 10, 5, lisez: 10^4-
P. 47» sur 37,5 (note i), voy. p. 108 et 33i.
P. 48- Sur os obstrnit, voy. encore Do Orat., 29, p. 199,11 : nec
ora leonibns obslruH (oratio Christiana).
P. 54, 1. 3, au lieu de: ri,T, lisez: i,ii.
P. 65, mettez 28,10 avant 28, 12.
P. 89, au lieu de : 16,7, lisez : j6,8.
522 ADDENDA ET CORRIGENDA
00, 1. i3, lisez : haplographie.
01, ch. 2,i5, lisez : Voy. au ch. XVI, p. 12a.
02, ch. 5,7. Sur quos, voy. p. 427, n. 9.
08, ch. 37,7, lisez : 35,7.
09, devant la 1. 12, mettez : 38,5.
i3, 1. 7 d'en bas, lisez : 7,12.
20, devant la 1. 3 d'en bas, mettez : 46, 1 4-
21,1. I, lisez : exciderit.
24, 1. 4i fisez : 35,9.
25, 1. 7 d'en bas, lisez : Notao, p. 53.
26, 1. 9, lisez : habentes ex ipsa natura.
3(), 1. I, lisez : iudiciis (leçon de tous les mss).
45, 1. 8, d'en bas, lisez : précédé d'un crétique.
47, ch. 2,1. F avait : deberet. Voy. p. 422.
48, 1. 5, Usez: 2,3.
53, ch. 2, G. Cf. Ilieronymus, Epist., 14,8 : Sed de hoc gi-adu
puisas provocabis ad clericos.
P. i59, 1. 16 d'en bas, lisez : sancire.
P. 176. Ch. 7,1, Usez : et post convivium.
P. 189, 1. 17 d'eu bas, lisez : l'ellipse du verbe avec si.
P. 2o5, 1. 18, lisez : Min. Félix, 24 (23) 4.
P. 240, 1. 17 d'en bas, mettez caecos auanl le verbe.
P. 261, 1. 9, lisez : 2G,i2.
P. 281, 1. 4, lisez: 25,4- Cf. Adv. lud., 9: Romanae urbis... sanc-
torum debellatricein.
P. 3r2, 1. 2, lisez : iniperatoi'(ibus) F. Voy. ]>. 4^2.
P. 3 17, 1. 5, d'en bas. Cf. De bapt., 11, p. 210, 11 : sed simpli-
cité!' dictum more communi.
P. 328, 1. i4, lisez : Eumolpum.
P. 332, 1. 2-3 d'en bas, lisez : factionibus.
P. 337. Sui' refuiare = uegare, vo^'. encore Adv. lud., 7 : Ven-
turuin enini Christum et ludaeos non rofutare scinius.
P. 342, 1. 3, lisez : Adv. Valent., 12, p. 191,9.
P. 348. Sur 40,3, cf. Ovid., Fast., 2,684 :
Gentibns est aliis tellus data limite certo :
Romanae spatium est Urbis et orbis idem.
Rutilius Numatianus, Itiner., 1.62, s'adressant à Rome :
Fecisti patriam diversis {jjentibus unam :
Urbem fecisti quod prius orbis erat.
ADDENDA ET CORRIGËNDA 523
Voy. Wôlfflin, Archio fur lat. Lex., i, 388, qui cite : Corn.
Nepos (Atlicus, 2o,5j ; Velleius Pat., 2,44)i ; Orosius, i,i,
i4 ; Sidon. Apoll., Cai-m., 4»557 ; Venant. Fort,, Oarm., 8,
1,14. Etc. On voit que l'antithèse était déjà banale.
P. 365. Chap. 4^,5, lisez : daemonas députent.
P, 4i7i !• 4- Au chap. 21,11, la clausule /jer/zcj|e«// (find'hexa-
mètre) correspond à deux autres clausules C. Cf. Hoppe,
Synt., p. iGo.
P. 427, n. 7. Br. a copié exactement la lecture de Barr : casto-
dilis .
P. 434* En note, après veiractatum, ajoutez: Barr.
P. 458. 39,2. De la Barre a : pro minislrin eorum.
P. 4C1. 4^î4' " quia aequitaiem.
P. 468, (39,5. » Nisi uelim, non potes.
P. 480, n. 8. Sur qnid nisi ou quam, voy. Hoppe, Synt., p. 77.
TABLE DES MATIÈRES
Introduotiox. I Nécessité d'une édition d'api'ès le Codex
Fiildensis, p i . II Etat de la tradition manuscrite, \). 8. III La
collation du Codex Fuldensis i)ar Modius, ]). lu. IV La publi-
cation de la. collation par Juuius, p. 17. V Reconstitution du
Codex Fiihlensis, p 2(5. VI Reconstitution de la tradition spé-
ciale, j). ii<).
EXAMKN DU CoDKX Fui.DKNSiS. Oininsioiis iiceideiitelles on
lucnnefi. VII Dans F, ]>. 35. V^III Dans P, p. 44- ï^ Coniniunus
à 1'' et à P, p. 53.
Additions accidentelles. X Dans F, ]). 59. XI Dans P, p. (ij).
XII Communes à F et à P, p. 81.
Transposilionn. XIII Dans F et dans P, ]>. 8G,
Lei;on.s /'anlines on errenrti pnléographiqnes. XIV Propres i\.
F, p. ICI. XV Propres à P, j). 112. XVI Communes à F et à P,
p. laa. XVll Dirierentes dans F et dans P, j». 124.
XVIII Conclusions, \t. ii>8.
Appendick I. Examen des lei^'ons de F. Notes criti(iues et
exégéticpies, p. i3i. Clausules métriques, j). 3()8.
Api'kndice II. Collation de Modius annotée, ]), 4^0.
Appendice III. Fraj^ment de Fulda, traduit et annoté, p. 470.
Appendice IV. \5n fragment de la tradition de Fulda (ch. 38-
40) dans nu Codex Rhenaiiyiensis, p. 483.
Bibliographie, p. 48;)- Index l'erum et verborum, j». 4î)5-
Index locorum, p. 5i3.
Addenda et Corrigenda, p. Sai.
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