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Full text of "Abecedario de P. J. Mariette et autres notes inédites de cet amateur sur les arts et les artistes"

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ARCHIVES 



DE 



L'ART FRANÇAIS 



IV 



ARCHIVES 



DE 



L'ART FRANÇAIS 



IV 



IMPRIMERIE DE PIUET FILS AlNÉj RUE DES GEANDS-AUGUSTINS^ S. 



ABECEDARIO 



HZ 



p. J. MARIETTE 



ET ADTRES NOTES MÉDITES BE CET ilATEIl 



SDR 



LES ARTS ET LES ARTISTES 



OUVRAGE PUBLIÉ 

d'après les manuscrits autographes, conservés au cabinet DBS ESTAMPES 

DE LA BIBLIOTHÈQUE IMPÉRULE, ET ANNOTÉ 

PAR MM. 

Ph. de GHENNEVIÈRE8 et A. de M0NTAI8L0N 



TOME DEUXIÈME 



PARIS - 

J.-B. DUMOULIN, QUAI DES AUGUSTINS, 18 

1868— 186i 




AUG 1937 



*fi 



ABBCBDABIO 

DE P. J. MARIETTE 

ET 

ADTRIS NOTES INÉD1TK8 

SUR LBS 

m^ SI? \im mîmï^ 

TIRÉES DE SES PAPIERS 

Consenés à la BMollièipie Impériale. 



COLUN DE YERMONT (hyacinthe), mort à Paris, le f 6 fé- 
vrier 1761 . 11 étoit frère de Collin de Blamont , surintendant 
de la musique du roi. C'étoit un des plus honnêtes hommes 
qu'il fût possible de connoître , et qui ne manquoit pas de 
talent ; mais c'étoit un peintre froid et sans couleur, n in- 
Tentoit assez facilement ; mais quels que fussent les sujets 
qu'il entreprit de traiter, il n'en étoit aucun qui eût le pou- 
voir d'émouvoir et d'intéresser. Son dernier tableau a été la 
Présentation de la Vierge pour le mattre autel de la nouvelle 
église de Versailles ; et ce grand morceau, quoique bon dans 
plusieurs parties, porte avec lui la preuve de ce que je viens 
d'avancer. H. de Vermont étoit disciple de Jouvenet ; il ne 
s'en ressenloit guères. 11 avoit été tenu sur les fonds de bap- 
tême par M. Rigaud , qui ne cessa jamais de l'aimer et de le 
considérer ; il le lui fit connottre , en lui léguant , comme il 
fit, tous ses dessins, ses estampes et ses ustensiles de pein- 
ture. Il étoit né à Paris, en avril 1692, de sorte qu'il étoit ftgé, 
T. n. a 



2 

au jour de son décès, de 68 aûs et 10 mois. Il remplissoit 
akMTs dans FAcadéoiie de peinture la place d'adjoint à recr 
téttr, I la!^uélle fl dtoît ^rfeau en 1714. Il arot été Al f rt- 
iesseur en 1740, et académicien en 1725. 

COLOMBEL (NiGûiiAS^ Sta scritto nel catalogo degli Aca- 
demicl di S. Luca in Roma sotto Tanno 1686. 

GOMW ( J. ou jQiTsuf ) , grrr€«r au burin , «mm wédiocre , 
qui vivoit à Rome au mfliea du xviP siècle , et dont je ne 
coanois que peu de|teiicl)«9^ qui Imlb partie de celles de la 
galerie Justinienne. 

GOMMODI (ANDREA). Il eut à faire un des tableaux qui entrè- 
rent dans les décorations ^pou** VetiMe de la grande duchesse 
Christine de Lorraine à Florence , en 1588. L'auteur de la des- 
crifition dit , en parlant du peintre » que c*éleit^4n.iKi«t«» di 
buona $peranza. Iln'avoitpourlorsque28 an». Pietie^diCor- 
tone avoit travaillé sous lui, et le reconnoissoit pour son maî- 
tre. Il dessinoit volontiers au pastel et aux deux crayons, rouge 
et noir ; et , en cela , il se faisoit gloire d'imiter le Barocher, 
dont il étoit autant partisan qu'il l'étoit de la manière du 
Gorrège., Si l'on vouloit dmner un juste précis de sa vie,, il 
taudroit refaire celui-ci qui est trop peu exact, el, partir d'a- 
près ce qu'a écrit le Baklinuoci. Le Père Orlandi cite ce der- 
nier auteur, et par son extrait on voit qu'il ne l'a point lu. 
-* Le Commodi étoit du même âge que le Civoli, et )e suis 
très-assuré que tous deux étoieot condisciple^, qu'ils avoieot 
appris du môme mattre, qui étoit Alexandre AUori^ dit te 
Bronzin. Aussi les trouve-t-on tous deux employés aux pein- 
tures qui se faisoient sous la direction du ^onzia, pour 
l'entrée de Christine de Lorraine. Le Commodi aura seule- 
ment appris la perspectivo du Cigoli qui y étoii proioad , et 



yQOk c« qui aura brouillé le BalâimiCGi , et qui lui aura 
iait aifknner d'uaton tiop général qu'il éloil V&k^^ du Gigoli. 

CONCA (dl cavaubrs SEKà&TUNo)» di Gajetta, OKMri a di 
prima di Septem. 1764 in eta d'anni 88. Ceci m'a été adiifr* 
nistié par H. Natoire. — Sébastien Gonca, né à Gaëte, le 
8 janvier 1660. AJum écrit sur son portirm^dessiné» qui étoit 
dans la collection du sieufD Pio» et que j'aî vu dans ceUe de 
ML GtoasBL%é U est mort dans sa tille natale, où il s'éleit retké, 
le i^ septembre 1764. M. Natoire me marque qu'il étoit âgé 
de 88 ans» mais je crois qu'il se trompe. U dit cependant le 
tenir d'un disciple du Gonca qui s'est adressé, pour en être 
iiBttliuit, àGaëte mâme, où sont les porens du Gonca. Suivant 
le Domenico, il doit ëlre né ^ 1680; mais peutrètre n'a*t-il 
fait que copier le père Orlandi. — Il faut s'en tenir aux dates 
lQunue& par M. Natoire et reculer sa naissance de quatre 
annéea, la repoi ter eB 1676% 

GOPELLETI (PARiGi), reggiano, fu pittor molto pratico ed 
m fresoo. Si vedesula Giarra la faceiatadeU' Ooca^ in S«'Âgos- 
tino un 8. Nkcdo da Tolentino con un eoro d'angioU molto 
bdli. Rarim n^ ISOO^ Gius. Boizani, ÂBtiquarîum B^ 
Lepûii^ Msa. del Libreria Reale, à p. 96» 

GOBBELLINl (sBftàSfruNû). J'ay ^eu ^une estampe^ d^une 
assez belle composition, gravée, en 1695, par Robert Yan 
Audenaerd à Bome d'après ce peintre, qui ne me paroit pas 
sans mérite; c'étoit un sujet de thèse en hauteur où parois- 
soft le popet^ • . • • . • • assis dans son trône environné de 
figures allégoriques. 

COBDEGLIAGHf (GiorATOTro), que* Vasati ntaime eu un 
endroit Gianetto, est nommé GordeUa par le Boschuoi^ auteur 



de la description des peintures de Venise ; il le met au rang 
des disciples du Bellini , et le fait auteur entr*autres tableaux 
du portrait du cardinal Bessarion, qui est dans l'école de la 
la Charité à Venise, et dont on a une estampe gravée par Pe- 
trini. 

GORDIER (NICOLAS). Ce sculpteur a exécuté, étant à Rome, 
la statue de bronze de Henry IV, roi de France, qui est à 
Saint- Jean de Latran, et dont il y a une estampe gravée par 
Le Mercier. On voit aussi de lui, dans Téglise de la Minerve, 
et dans la chapelle de la famille Âldobrandine, une statue de 
marbre d'une Charité, qui est un beau morceau. H. Bouchar- 
don Ta trouvée si fort de son goût qu'il en a fait le dessin 
que j'ai. La composition m'en platt infiniment (1). 

CORlOLÂNi (jean-baptiste) est mort le 8 janvier 1649. 
Masini, t. I, p. 626. 11 étoit frère de Barthélémy aussi gra- 
veur. 

CORNEILLE (michel), né à Orléans, fit remarquer dès l'en- 
fance son inclination pour la peinture. Attiré à Paris par la 
réputation de Simon Vouet, qui étoit pour lors premier pein- 
tre du roy, il se mit sous sa conduite et devint un de ses 
meilleurs disciples; Vouet lui fit épouser une de ses nièces, 
pour se l'attacher davantage ; mais cependant il ne fut pas si 



(1) Le Baglione a consacré à cet intéressant artiste lorrain une 
biographie, p. 108 de rédition de Naples, 1733, in-4». Beyle, dans 
ses Promenades dans Borne (t. II, p. 195) parle avec quel (ue irré- 
vérence de la statue de Henri IV : « Eu sortant par la porte du 
a Nord, à Textrémité de la nef de dro\te, on passe devant la statue 
« de Henri IV, qui a Fair toute mélancolique de se voir en pareil 
<c lieu. Vous savez que le roi de France est chanoine de Saint-Jean 
<c de Latran. » 



scrupuleux imitajteur de la manière de cet habile mattre, 
quelquefois trop négligée et éloignée du naturel, qu'il ne 
chercha, en se proposant pour guides les ouvrages de Ra- 
phaël, à rendre la sienne plus sage et plus étudiée. Quelques- 
uns de ses plus beaux tableaux, et surtout celui où il a repré- 
senté S^ Paul et S^ Barnabe, à qui l'on veut oifrir un sacrifice 
dans la ville de Lystre, lequel a été si bien gravé par Fran- 
çois Poilly, en sont une preuve. Lorsque l'Académie de pein- 
ture et de sculpture prit son établissement, il fut un des prin- 
cipaux qui en composa le corps, et il y exerça depuis la charge 
de recteur. Ses deux fils furent ses élèves; Michel, qui étoit 
l'aisné, suivit de plus près sa manière, et fut de très bonne 
heure en estât de luy aider dans plusieurs de ses ouvrages. 
Il eut une extrême ardeur pour apprendre et un goût singu- 
lier pour le dessein qu'il eut occasion de satisfaire, en tra- 
vaillant dans sa jeunesse pour un fameux curieux, qui luy fit 
copier un grand nombre de desseins de grands maistres qu'il 
avoit rassemblés. Il conserva, jusques à la fin de sa vie, cette 
passion du dessein ; car quoi qu'il eût acquis de la réputa- 
tion dans la peinture, et que les ouvrages ne lui manquassent 
point, on le voyoit souvent quitter le pinceau pour prendre 
le crayon. 11 trouvoit le même plaisir à étudier les ouvrages 
de peinture des plus habiles peintres italiens ; il les copioit 
volontiers pour en mieux connoître les beautés et s'entrete- 
nir dans les bonnes manières : jamais peintre n'eut peut-être 
plus d'amour pour son art, et ne ménagea moins sa peine et 
son travail. Il ne lui coutoit rien de repasser plusieurs fois sur 
un même ouvrage , toujours mécontent de luy-mesme lor? 
que les autres en paroissoient les plus satisfaits; il travailloit, 
il retouchoit ses ouvrages, quelquefois jusqu'à les appesantir 
en voulant trop les perfectionner. Il en a gravé luy-même 
quelques-uns avec assez d'intelligence. Dans sa jeunesse, il 
avoit déjà été occupé à graver pour le sieur Jabach quelques- 



un» 4& ses itoiBeiiis cpii Mit présentomeottlMS le iaMmI ûm 
roy de France. leaii*BaptiBle GorneiHe, son ^re puîfté^'eD 
avoit aussy graré plusîeuis ; <eeluy««i manioit la poifite a^ec 
UDe«xtrtme fscililâtlbeaiieoup d-art, rtm m peut jager par 
ce qu*il a grnié {l): fia manière de desâner n*éloit pas meim 
facile; il eut été seulement à souhaiter tpi'elle «At élé plus 
légère, mais par malheur pour luy, Brrard, sonslequ^il 
atoit étudié à Rome pendant asset longtemps, luy atoit ins^ 
pire ce goût lourd et matériel vil n'y aToit de luy-naémeque 
trop de pendiant, et il ne luy fut pas possiMeée s'en deifatre. 
Pendant son séjour & Home, il aroit été employé par ordm 
du my son maître à mesurer a^ec exactitude les plus Mies 
statues antiques pour en connoistre les proportîoDS, et il y 
fit en même temps une étode particulière de ranatomîe ^ as 
laqudle il se rendit habile. 11 ëtoit memtyre de TAcadémie 
royale de peinture et de sculpture aussy bien que Michel' €!or« 
eetlle son ftère aisné. 

— L'ange annonçant à la S^ Yierge le misftre de Tincar* 
nation, inventé par Perin dél Yague, et graté p&t Corneille 
le père. C'est un des desseins de Jabach. 

— M. G. Sculpsit. C'est ainsi que s'est déâgné Michel Cor- 
neille sur quelques plandïes qu'il a grarées d'après des des- 
«einsde Haphaël d^rbin. 

COIWEILLE (jeàn-bawbte) le jeune, mort \ Paris, tm 
1695, âgé de 47 ans. Il avoît appris sous son père les pre- 
miers principes de la peinture; mais ayant ^é envoyé % 
Rome à la pension do roy, et y ayant trouvée Errard qui y 
étoït directeur , il s'abandonna trop è la manière lourde de 
ce peintre, et devint comme ilui un peintre extrêmement pe- 



(4 ) V^oyez ta wMe i , « ia pttge 534 éa 1. 1 de Til^M^tiaf^o. 



f''*\ 



sdnt dans son dessein. Cest domiâage, car il étoit ne avec du 
génie. H aroît épousé une des sœurs de mon père (1), et ce 
ftit sous lui que mon père apprit à dessiner; je lui ai tou- 
jours ouï dire que cf étoit pour son malheur. Avec cela I.-B. 
Corneille rfauroit pas laissé de passer loin ; îl savoit se pro- 
duire, et M. Mansard son parent et son protecteur lui vou- 
loit du bien. 

— Des squelettes soutenant un suaire, un cadarre, et les 
différents attributs de la mort, composant un tout ensemble, 
qui a la forme d'un écran, gravé d*api%s J.-B. Corneille. Gela 
avoît été fait pour mon grand père, et pour servir dans les 
retraites qui se font chez les jésuites; on avoit dessein d'en 
feire encore d'autres; mais cela n'eut point son effet, et la 
planche même, dont il y a ici une épreuve, a été effacée. 

OCANEILUS (MiCflïL') le ffls, naquît I Paris, en 1642, et se 
forma dans l'école de son père, qui étoit bien capable de 
l'instruire. Mais une des choses qui aidèrent davantage à lui 
former le goûi, et à lui faire accorder la préférence aux ou- 
vrages des meilleurs maîtres d'Italie, et surtout à ceux des 
Carraches et de leurs élèves, ïut Foccupation que lui fournit 
dans sa première jeunesse le sieur Jabach, qui avoit la plus 
belle collection de desseins qui lût alors, et qui f^mployoil te 
jeune Comeîîle et son frère Jean-Baptiste ainsi que plusieurs 
autres jeunes gens % en faire des copies, que souvent îl ven- 
doît pour des originaux. Celte supercherie étoit véritable- 
ment blâmable et honteuse; mais le jeune Comeîîle y trou- 
voit son profit , de façon qu'il se vit bientôt en état de passer 



(1) On coimaîssait déjà ce fait par le catalogue de Lorangëre, à la 
p. 26 de la table : « J.-B. Corneille, fils de Michel Corneille le 
fMeioir^, avait èpoiiâé la jsœyr 4e J^nn X^ieUç^ père d9 P.-^. Ma- 
rietle. » 



à Rome, y fiiire de meilteures études encore sous la protec- 
tion du roi dans rAcadémie que ce prince y avoit fondée. U 
n'y demeura pas cependant longtemps; le directeur Ch. Er- 
rardprétendoit le conduire, et ne vouloit pas qu'il eût un autre 
guide, et le goût lourd et pesant de ce peintre lui faisoit en- 
visager une perte certaine, s'il le prenoit pour modèle. Il se 
détermina donc à travailler en son particulier, et à ne con- 
sulter que les meilleures sources. Après quatre ou cinq ans 
de séjour, il repassa à Paris, et ne tarda pas à y jouir d'une 
réputation méritée. U eut des ouvrages à feire pour le roi ; 
mais s'étant mis mal dans l'esprit de H. Le Brun, jaloux de 
ce qu'il le voyoit se livrer à M. Mignard, dont Corneille avoit 
eu la folie de croire qu'il pourroit devenir le gendre, cela 
joint à sa façon de représenter, et encore la lenteur qu'il 
mettoit dans son travail, et une certaine irrésolution qui lui 
laisoit trop souvent recommencer des ouvrages qui ne pou- 
voient que lui faire honneur, renfermé chez lui, et ne com- 
muniquant point avec ses confrères, il fut oublié ; on le laissa 
mourir dans son logement des Gobelins, qui l'a fait appeler 
Corneille. des Gobelins, après avoir souffert l'extraction de la 
pierre, le 16 août 1708. Comme il revenoit trop souvent sur 
son ouvrage, et que, content de faire de l'effet pour le mo- 
ment, il se servoit trop inconsidérément d'huile grasse, pres- 
que tout ce qu'il a peint a péri. U ne restera de lui que des 
desseins qui sont en grand nombre, et qui montrent une 
grande science, mais qui, s'il en faut dire la vérité, pèchent 
par trop de pesanteur. 

GOBNEU (gorneuo). In un opéra rappresentante il bat- 
tesimo(?]con molti nudi grandi, di prima vista, v' a notato 
l'anno 1588. Abb. MaruUù 

CORNHEBT (théodore). Sandrart, cité par le P. Orlandi, dit 



9 

peu de choses de cet artiste ; encore se trompe-t-il sur le 
temps de sa naissance ; car il le fait mourir Agé de 78 ans, 
au lieu qu'il n'en avoit que 68 pour lors. Voicy un détail de 
sa yie plus circonstancié. Théodore Volcaert Gornhert, ou, 
comme il récrivit lui-même sur plusieurs de ses planches , 
Dirck Guereohert, nacquit à Amsterdam en 1522. De retour 
de ses voyages en Espagne et en Portugal, il s'établit à Har- 
lem où il s'occupa d'abord à graver pour gagner sa vie. Il y 
a apparence qu'il avoit appris cet art de Corneille Boys; du 
moins il suivoit la même manière de graver de celui-ci, qui 
lui étoit antérieur de quelques années, et pour lequel il grava 
quelques planches en 1555 ; c'étoit d'après les desseins de 
Martin Hemskerk, qui vivoit pour lors à Harlem avec la répu- 
tation d'un grand peintre. Cornhert avoit encore gravé beau- 
coup d'autres pièces d'après luy, depuis 1549, qui est à peu 
près le temps qu'il commença à graver. Il continua de le 
faire encore pendant quelque teipps ; mais d'autres occupa- 
tions plus sérieuses l'attachèrent dans la suite. Ayant du goût 
pour les lettres, il se mit à étudier. Si l'on en croit Bayle, il 
étoit Agé de 30 ans lorsqu'il apprit le latin ; Paul Golomiès, . 
dans s^ mélanges historiques, dit qu'il en avoit 40, et qu'il 
apprit de lui-mesme le grec et le latin avec tant de progrès 
qu'il n'y avoit point d'auteurs qu'il ne traduisoit facilement 
en flamand. En 1572 (je crois que c'est une faute du Moréri, 
et qu'il faut lire 1562) il fut élu secrétaire d'Harlem. On le 
députa plusieurs fois au prince d'Orange, gouverneur de Hol- 
lande, et ce furent ses conseils et ses sollicitations qui déter- 
minèrent le comte de Brederode à présenter à Marguerite, du- 
chesse de Parme, cette fameuse requête, qui donna naissance 
aux troubles des Pays-Bas, en 1566. Cornhert fut ensuite en- 
levé d'Harlem par les Espagnols, et retenu longtemps pri- 
sonnier à La Haye. On ne lui rendit la liberté qu'à la condi- 

• 

tion de demeurer dans cette ville; mais, craignant encore 



10 

quelque msatais traitement, il s'enftrit seci^ement à Rartem, 
et se retira eitsuite au pays de Clèves pour être plus en sûreté. 
B n'en rerînt qu'en 1S72, lorsque tes états de Hollande eu- 
rent secoué le joug des Espagnols. Alors Cornhert fut honoré 
de la charge de secrétaire des états de la province ; mais ayant 
été nommé pour examiner les désordres des gens de guerre , 
il leur devint si odieux qu'il flit obligé de se retirer à Embden. 
Cependant les choses étant pacifiées, il revînt à Harlem. Il 
composa pinceurs traités de politique et de religion ; il atta- 
qua Téglise romaine et la nouvelle réforme, voulant qu'on 
laîssAt UW5 entière liberté de conscience. H écrivit contre 
Luther, Calvin et Bèze sur la prédestination et le pécbé ori- 
ginel. Cîolomiès le représente comme un hérétique enttiou- 
siaslique qui avoit Tesprit aisé, et il ajoute qu'il composa 
plusieurs traités de théologie, qui hirent refutés par Calvin et 
par Daneau, et qu'il écriTit même contre Juste Lipse. Il mou- 
rut à Goude, 1629 novembre 1590, et ftit enterré à Tergou (1). 
On a ïâît une édition de tous ses ouvrages en 1680. Le 
célèbre Henry Goltzius étoit son disciple pour la gravure ; 
il étoit fort jeune lorsqu'il se mit pour la première fois sous 
sa conduite ; c*étoît dans le temps que Cornhert fat obligé de 
se retirer dans le pays de Clèves. Goltzius le retrouva depuis 
Iwsqtf il vint en Hollande en 1570. Comheit avoit une ma- 
nière de gravure très-légère et tr'ès-spirituelle , et il semble 
qtf on ne fart pas assez attention au mérite de ses estampes , 
ce qui vîent sans doute de ce qu'il n'a gravé que d'après 
Hemskerck , Pr. Flore et autres maîtres qui ne sont pas de 
premier ordre , et dont le goût trop sauvage n'est plus de 
mode. ïl seroit à souhaiter qu'il eût travaillé plus longtemps, 



(1) Postérieurement Mariette a a§ûuté : Goude et Tergou est la 
môme viUe qai s^appeTIe indiffërement de ces deux noms. 



tl 

({ii'il ni <»^Mt pas firré h Umt d'ieoctipaUoiis ditcrseiy et 
qu'il eût vu au moins l'Italie ; ç'auroit été un grand homme, 
fiieitfiait presque! tout eed de Bajrle el4e'P.€otomiès cités 
pnMùtérj.Le premwr é«rit Théodore Koorahett , et Vautre 
Théodo» de Vokœrt Oernhert. Outre eéte, Vasari qui en feit 
mention, p. 270, t. 3, l'appelle Dinick Volcaerts; il écrivoit 
%r les mëmoîf0& de Lampsonius, mais, commie il îgAOMit le 
fiaœand, il érriToitlMDick aulieu de Diridc, qui est !e' dimi- 
nutif de Dielerich, cfe^^è-'dire Théodore. Le pottrail de 
CkmiheH a été gravé par H. CMtzius *, <f est une e^mpe 
d'fme beauté singulière. Tl Ta a«sà été par Th. Satham ; et 
m portrait , accompagné de figures et d'écrits énîgmatkpaes, 
donneautont la représentation des traits qtfe la doetrifie île 
rhommesmgulier qui y-e^ représenté. 

dORNTA (AfïTOWD VfBUELM). ToyfZ ee'quî est i^pportfr dffis 
le livre intitulé : IwrteaUèSa FitiwrfiVtaAnt* Frmtehi, p. 89, 
au sujet d'une copie que "ce peintre avoit fiiit du tableau (le 
6. Jean de Ba[)haêI;Tes'plus grands pemtfes de Rome yfùrent 
trompés, 

GSRNO (yEXfr). te P. Oilandi, qui éerit Ccmmiidiepê , ne 
fint'jci qu'un «ecA ftiétde ce qm en doit eomposer trois, lean 
tjorauj'sculpléur, èfaris, étoit natif de IMc^ipe en Normandie. 
—Oomun-éloit point de Dieppe, il étoit décris; «late, boh 
père ayant "pris un -élaHigeement à Dieppe , il y passa sa jeu- 
nesse, etn» Wt % -qu'ayant ftéiMîsdiez un <nivrier en yvot», 
il y apprit les premiers élémens de la sculpture. C'est de son 
ffls «que je tiens ce fait. Oe fite , nommé Gabriel , s^^toît des- 
tiné à ta peinttrre , et avoit pour cela éttdié soets De Lat gir 
fière ; tnaîs , ne sans ie merindre *teteiït, et presqtfaveu^e , il 
esft ^demeuré dans la plus esirèfne tnédioctifé , yft i^fpendHtft 
ayant ia manie deToifioiî peindw dtes tableaux ddut iMfr- 



12 

sonne ne vouloit. H est mort fort Agé en octobre 1763. 

CORONARO (gicjuano) , peintre de Crémone, cité par Ant« 
Gampo , Histoire de Crémone, p. 54 ; peut-être est-ce le même 
que Giuliano de Capitani da Triokonte. V. 1. 1, p. 301. 

CORRADINI (AirroNio), mort à Naples en 1752, dans le pa- 
lais du prince de San Severo qui Tavoit appelé pour le faire 
travailler aux sculptures des mausolées dont ce prince a dé- 
coré la chapelle qui est contiguë à son palais. On vante sur- 
tout une figure qui représente la pudeur et qui se dessine , 
dit-on^ parfaitement, au travers d'une draperie légère dont 
elle est entièrement couverte. Cette idée singulière me rap* 
pelle un certain nombre de figures en marbre que fit faire 
autrefois au Corradini le feu roi de Pologne, Auguste, élec- 
teur de Saxe, dont on trouve les gravures dans le recueil des 
sculptures qui sont dans le palais de Dresde , qu'a publié en 
1733 le baron Le Plat. Ces figures sont singulièrement com- 
posées et n'ont rien du caractère mftle qui est si essentiel à 
la sculpture. Il y règne un sauvage qui blesse l'œil et qui ré- 
volte. On voit que l'artiste s'est voulu distinguer par un tra- 
vail forcé qui n'a d'autre mérite que d'avoir affronté des dif- 
ficultés. C'est ce qu'a fait le Bernin , mais en habile homme 
et avec un génie plein de goût, au lieu que le Corradini, dé- 
nué d'un vrai génie , n'affiche que de la petite manière. Je 
trouve dans ses ouvrages beaucoup de ressemblance avec ce 
que nous avons vu faire en France au sculpteur Adam. 

CORRÈGE. M. Zanetti prétend que le tableau de l'amour 
se faisant un arc, qu*on voit à Vienne, dans la galerie qu'on 
nomme le Trésor, n*est point du Corrège, et que c'est mal à 
propos qu'on a mis le nom du grand peintre sur l'estampe 
qui en a été gravée à Vienne par Van Steen. Il s'en tient au 



témoignage qu'en a rendu le Vasari, et il veut que le tableau 
appartienne au Parmesan. Il est vrai que le dessein ou pre- 
mière pensée que j'ai de ce tableau est incontestablement de 
ce dernier peintre ; et, s'il faut en croire H. Zanetli, la touche 
du pinceau et le caractère du dessin le manifestent encore 
davantage. Seroit-on actuellement dans la même persuasion 
à Vienne t car je trouve que M. Apost. Zeno , en parlant du 
trésor impérial, dans lequel il a été introduit, ne fait men- 
tion que de deux tableaux du Gorrège. Ils ne les désigne pas 
autrement ; mais il faut que ce soit Tlo et le Ganymède, tous 
deux incontestables.^ Zeno, lettercf, t. 2, no 163. 

— Qemente Ruta , auteur de la description des peintures 
de Parme , p. 31 et 43, prétend que le Gorrège n'avoit que 
26 ans lorsqu'il commença les peintures du dôme de Parme, 
et qu'il en avoit 32 lorsqu'il exécuta celles de l'église de 
S* Jean. Les dates lui ont , dit-il , été fournies par divers mss. 
authentiques qu'il a consultés. 

— On lit son épitaphe dans le cloître des Gordeliers de 
Corregio, et, suivant les dates qui y sont marquées , le Gor- 
rège est né en 1494 , et est mort le 5 mars 1534, âgé de 
40 ans. 

— La S** Vierge avec l'enfant Jésus, gravé par Cooper, d'a- 
près un tableau du Gorrège, de la collection du duc d'Or- 
mond, appartenant à sir John Buttle. La planche, gravée 
en 1764, est dédiée à la reyne d'Angleterre. 

— Il y a dans le recueil des tableaux du Gab. de Reinst 
une planche gravée par Holsteyn, qui est le portrait d'une 
dame assise^ et l'on en trouve des épreuves avec le nom du 
Gorrège, qui y a été mis mal i propos, car le tableau est de 
Jules Romain (1). 



(1) Sur le Gorrège on peut voir le beau travail spécial du Père 
Pungileoni, en 3 vol. in-S®. 



14 

GOBmSNZIO (ielisaeiq). Le caTiMer BAiflura, qûa bmh 
Goup peint dans les é^aes de Naftor à choiqr sa sépnllii» 
dans réglise de S^ Séverin des BéiiMktiDs de celte vîtte. On 
y lit cette inscnptioD me son tomi3eau : Belisarius OoraMi» 
ex aBti<|iio Arcadum^ geaere , D. GecN^equee» iaieF ngm 
sttpendasios Napoli à puem adsdtus, dq^to hoc l0in|iio, 
sîbi saiaqu& lecudu qaietia lâvens peratil 1616. Sam^ edi t 
de iOifotkp p. agi. 

CORT (0QiuiBnxF)> — Voyez sa yie dans le BagUeni. Dom 
le catalogue abrégé qu'il dooii& de ses ouvrages^ ikj mat 
eelujF-c;^ que je ne c(»tfU)is pas : U Bîsuscitainento dî Lazaro, 
opem dlFedericoZucchero* U y a une BésuriectioaduLasaiey 
d'apsès Frédéric Zuccaro» inaia eUe nfest certeiaeraenl poiitf 
de Coft. Le Baglioiii a. toet de kiy attiibun , ce ii!est Djr sa 
touche DjjT s(»i gottt de deasiaar. Il y a biea quelque chose âe 
sa graveureaussy . Peut-elle estre dequelqu'un desesdîseîflBSi; 
poiK iftoyje la crois d*Alipraiid Caprioli^ qui a. gravé plu- 
sieurs autfes ptàoes d'après leZuocaio dans celle maaiàceé J'ay 
veu, à qi9ek|ues pièces gravées par Hdodilia» une œarqtie) 
qui paroist estre une lampe, que j'ay remarquée de mesne 
dans le» estampes de Coix^. Qort : ceUe8> de Hondms, oùr j'ay 
TU cette macquey sont le portrait de Corneille Gort ei cetuj 
de J. Hacet» te poète, eH piusîeuvs paysages. Voiidont-il> dtas 
par là qu'il a gravé cee estampes (où lia mis cette marque)» 
le soirj à la lumière de^ la lampe; effectivement elUâs sont 
gravées aaBieai€$;efemeBâ et peu âfiies^ — €e n'est prânt une 
lampe ; c!est un instrument dont eeservent les orfèvres pour 
soudei?; ils renferment dedans la poîz résine pilée, et ils l'en 
font sortir en promenant l'ongle sur ces petits crans pour la 
faire tomber sur l'endroit qu!ils veulent souder à la lumière 
de la lampe; ils l'appellenl, unrochoir» — Marietttràewmt 
V inscription d'une pièce : Romae cum privilej^o-sufflfBi^poii^ 



15 

tificis etiam pro iœpressio&e argenti 1577» 4foide ; De là 
je coQclus que CL Gort étoU aussi graveur de moanoye ; d« 
moins ce roclioir, iostrameat propre aux orièvresy qu'il al^ 
fecte de BaeUfB sur plusieurs 4a sas pièoeik. C'est \m fort pr^ 
pjgé pour faire ^»loîr cette ^ojeeture,. 

.^Par les dattes, 4|aie ce giaveur a misea i prasqne toutet 
les pièges qu'il a gravées, -on voil qu'iA étoA escore 4ais Paj^ 
Bas en 1565, et que c'est vers la fin da œtte année qu'il en 
sortit» pour venir en Italie; il aboréa pi»i»iè«e«Mint à Venise, 
où. le Titien liyr £t gRa^er (c'est JUdolfi qui le di||pilufiîeur&<k 
ses tableaux ; il ne fît que deux planobes d«s le resliB de eettd 
année 15AJi , «e S. Hsùsm^ H l'Jbi^t^Qe tirée de l'Arioste, 
toutes deux gravées danti la Baèoae mftnitee, et iLit'jf naet paa 
smmmii l'année suis^aAle,^ il fit w» fàm gcand non^bre de» 
pièees, toi^ours.d'âfNrès^teËtiantqiti^Mwduiâ^^ 
aussi ces pièces deiiinrenlreUes ksineaUeures qu'ji.eftt f^neûce 
gra¥ées,<el, s'il en a lait depuiadlautres, qui sont graiiées «si* 
coie avec plus de liberté, il j a dans^ceUes-ey plus d'inteHh- 
genfie ; tes pièces iurant le Paradia^ la JH4i^[deh^ et unPso* 
méthée; il ne demeura pas davantage à Yenise, car celte 
mesDie année ilétoit.è Aorneiod U gravait plusieurs ylanehes 
d'après don Julio CtoviiD. Si Ridolfi dit^qu'il Tint à Yenise en 
tSTA, et (pjte le Titieaa le logea fobei kty,iil laut que ce âoitua 
second vc^age, qu'il n'aura mesnkepeut^tre fait qu'en 1S71, 
temps auquel ila gravé le S. Laurent et la itiicièee,. d'après 
le Titi^. 

— La sainte Vierge préseatant lofant Jésus au temple, 
gravé en 1568., je crois, d'aprèa Federigp Zueebavo. Sans 
nom de Gom. CorI, mais ette est bien de lui. Au bas de 
l'inscription : A. Siat.^ c'est l'abrégé du nom Achille Statius^ 
homme de lettres qui vivoit alors à Rome , et ce nom est au 
bas de Testampe pour montrer que Statius est auteur d^ 
ver&.latûia ^^l'ûii^ lit. J^iu dûis les xemarques de M« le 



16 

baron de la Bastie sur le livre du P. Joubert, que ce Statius 
étoit Portugais et savant antiquaire. Ce Tut lui qui publia, en 
1568, si je ne me trompe, les portraits des hommes illustres 
de l'antiquité, d'après les monuments qui se vojoient de son 
temps à Rome. — Je le fais homme de lettres sur la foy de 
H. de la Bastie. Peut-être n'étoit-ce qu'un de ces antiquaires 
qui se meslent de trafiquer ; car je vois sur certaines estampes 
de C. Gort : Staiii formis. 

— Jésus-Christ, nouvellement né , adoré par les pasteurs» 
gravé en 1567, d'après Thadée Zuccaro. J'en ay le dessein 
original, qui est très-beau. 

— J'ay veu une estampe représentant saint Nicolas qui 
jette de l'argent dans une maison où étoit enfermé un père 
qui, réduit à la dernière extrémité, méditoit de prostituer 
ses propres filles. Le dessein en paroist de Parmesan et plu- 
tôt de Salviati. Il y avoit au bas le nom du graveur C. Cari, 
ainsi que je l'ay remarqué dans le cours de ce catalogue ; à 
celle-cy, outre le nom du graveur, il y avoit celuy du mar- 
chand, Apud hœredes CUwdii Duchetii 1587, et ensuite, Julii 
Roscii Martini^ qui est peut-être un autre nom de mar- 
chand (1), car je ne trouve aucun peintre de ce nom. Mais 
ce qui mérite plus que tout le reste attention , est cette date 
de 1587, qui fait bien connoistre qu'il n'y a point de faute 
dans la manière dont le nom est écrit , et que c'est le nom 
d'un graveur différent de C. Cort, qui estoit mort en 1578. 
Il est peut-estre cependant un de ses disciples, car l'estampe 
tient de sa manière de graver. Mais, encore une fois, j'oserois 
comme asseurer que cette pièce cy et les autres qui sont dans 
le cours de l'œuvre avec ce mesme nom, C. Carij ne sont 



(1) Il y a, ce me semble, ud livre d*emblèmes de ce Roscius 
Hortinns, c'est-à-dire de la ville d'Ho'*ta, par Tempeste. 11 estoit 
prestre, autant qu'il m*en peut souvenir. {Note de MarietU.) 



17 

point du célèbre graveur C. Gort. Il n'a jamais rien fait en 
Italie de si roide pour la conduite des tailles, et voicy un 
nouveau graveur qui n'estoit pas connu, dont il me semble 
avoir fait la découverte. — J'ay trouvé une copie de l'es- 
tampe du cordon de saint François d'Auguste Carrache, faite 
par le mesme C. Gart, avec son nom. Or, l'originale ayant 
été gravée en 1586, il s'ensuit naturellement que G. Gort ne 
l'a pu faire , estant mort bien auparavant. Il y a donc un 
G. Gart, graveur au burin ; l'on ne peut plus après cecy en 
douter (1). — Ge mesme G. Gart a fait aussy une copie de la 
Vierge, accompagnée de saint Jérosme et de sainte Magde- 
laine, gravée par Aug. Garraclie, d'après le Gorrége; il y a 
mis son nom (2). — Malvasia a cru que ce G. Gart était Gor- 
neille Gort. Voyez ce que cette fausse supposition lui a fait 
dire, p. 362 de son premier volume. Il n'est pas surprenant 
que le Garrache lui écrivît avec aigreur. Gomment parler au- 
trement à un homme qui copie vos propres ouvrages. 

GORVINA (maddalena) vivoit à Rome, dans le temps que 
Mellan y faisoit son séjour. Elle peignoit en miniature, et 
même à l'huile. L'inscription qu'on lit autour de son por- 
trait, gravé par Mellan, en 1636, le dit, et c'est tout ce qu'on 
sait d'elle. Je la crois fille de Henri Gorvinus, qui jouissdt 
dans Rome de la réputation d'un excellent botaniste, et qui, 
étant âgé de 82 ans, a eu son portrait gravé à Rome par 
Jean Valdor, celui qui a publié les triomphes de Louis le 
Juste, d'après le tableau peint, sans doute en miniature, par 
ladite Madeleine Gorvina. 



(1) Barl8cb,n<» 109 ; il indique l'orthographe exacte, mais sans 
} commentaires. 

li (2) Barisch, n® 95, n'indique pas cette copie. 

T. n. . à 



18 

COSATTI (tEUo).LePavé de Sienne, de Beccafumi, gravé en 
1739, en trois grandes planches, par les soins de Lelio Cosaiti de 
Sienne, et dédié par lui au grand-duc. Voicy les termes de la 
dédicace : Francisco III Lotharingie Duci Marise Theresse Ar- 
chiduc! conjugi magnis Elrurse Ducibus — Quorum felix 
laustusque adventus publicis fert rébus praesidium bonis^ 
que artibus incrementum — Principis Senarum templi mar^ 
iporum pavimentum — a Domenico Beccafumi singulari mi* 
raque arle sacris distinctura hisloriis — Tribus œneis tabulis 
curft suA expressum, vulgata jam pridem ejusdem lempli 
orthographia, Lœlius Gosatti cum fratris filiis, D. D. D., 
Ijinno 1739. Ces trois planches sont assez mal gravées, et peu 
dans la manière de Tauteur, qui n*est cependant estimable 
que par son goût de des!»ein, qui donne dans le Michel Ange ; 
ce goût particulier ne se trouvant point dans ces estampes, 
elles n'ont de mérite que parce qu'elles conservent une idée 
de la disposition générale qu'on n'a pas autrement. 

COSSIN (louis). Son véritable nom étoit Coquin, et l'on a 
de ses gravures de l'an 1663, où il a écrit ainsi son nom ; 
mais comme ce nom sonnoit mal et lui attiroit des brocards, 
ij le changea en celui de Cossin, et depuis il a toujours été 
appelé de ce dernier nom. 

COSTA (lorenzo). Le Gigli, auteur du poëme Trionfo délia 
PUtura^ le range au nombre des peintres nés à Mantoue. 

COTELLE (jean) étoit de Meaux et peintre d'omemens. Il a 
beaucoup travaillé pour Vouet. G'étoit alors la mode de 
peindre tout Tinlérieur des maisons d'un peu d'importance, 
et d'en charger les plafonds, les lambris, les portes, etc., de 
compositions d'omemens. Quantité d'artisles s'éloient consa- 
crésà ce talent, qui n'étoit pas fait pour leur procurer up grand 



4? 

Dom I aussi sont-ils aujourd'hui presque tous oubliés. On a une 
suito c|e desseins de plafonds, gravée par Fr, de Poilljr, d'a^ 
près Jean Colelle, et Ton peut juger sur celte produetion de 
ce qu'il étoit capable de faire dans le genre qu'il avoit ^^t 
brassé. J'ai connu son fils, qui étoit un assez mauvais peintre. 
Sur la fin de sa vie, se trouvant sans ouvrage, il à'étoit nais k 
faire des desseins poux des graveurs, et mon père lui en f 
fait faire beaucoup, qui sont sans verve et d'une pes^pteur 
insupportable. Il étoit à Rome en 1670; il y peignoit le pON' 
trait de P. Sevin, qu'a gravé Vermeulen ; il y prend la qualité 
de Picior pariiiensis. 

C0TIGN0LA(aiBOLAMo).L'éditeurderÀbeGedariopittoricû, 
imprimé à Naples, en 1733, avec quelques additions, fait 
mention de ce peintre, qui étoit, dit-il, Napolitain, et floris^ 
soit en 1513, et il cite deux de ses tableaux, qui sont dans 
l'église du Mont-OUvet, et dans celle de S. Anello, à Naplei. 
C'est sans doute le même peintre dont Malvasia a fait n^ention, 
et dont il sera parlé ci-après (p. 856 de tAbeeedciriù du 
P. Orlandi) , à l'article Girolamo da Cotignola. Voir auquel 
des deux, du Malvasia ou de l'éditeur de l'Abecedario, iaut4i 
ajouter foi ? Le premier le fait originaire de Cotignola, le second 
le dit Napolitain ; ce dénier ne me parqit pas toujours exact. 

COUDftÂY (FRAKQoia). n y a de ses ouvrages à Dresden, oà 
il a travaillé pour le roi de Pologne^ électeur de Saxo. 

COURUN (mk»), peintre, né à Sens, mort à Paris, en 
1753» graveur. 

COURTOIS (aciLLAUifE), Guglielmo Corleso, suivant Tiib- 
scription, qui est an pied du portrait de ce peintre, que le 
sieur Pio avoit parmi ses dessins, et que j'ai retrouvé dans la 



20 

coUeelion de M. Grozat; il est né en Bourgogne, en 1625, et 
est mort à Rome, en 1686. — Ces dates sont fausses; Guil- 
laume Courtois est né en 1628, et mort en 1679 ; son épi- 
taphe, rapportée par le Pascoli, 1, 152, y est formelle. 

— La Résurrection de Lazare, gravé par Guil. Courtois, 
d'après le Tintoret. Ce Courtois est frère de celui que Ton ap- 
pelle le Bourguignon ; son nom n'est pas à cette pièce, mais 
on apprend qu'elle est de luy dans le catalogue de Rossi, 
p. 75. Gio. Giaeamo Rosri formis Romœ. 

COURTOIS (Jacques), Padre Giacomo Gortesi. M. Crozat 
avoit son portrait dessiné qui lui venoit du S' Pio, et suivant 
l'inscription qui y est jointe, ce fameux peintre de batailles est 
né en 1622 et est mort le ^ novembre 1683. — Il naquit 
en 1621 à Saint-Hippolyte , près de Besançon, et il mourut à 
Rome d'une attaque d'apoplexie, le 14 novembre 1676. Voyez 
sa vie dans le tome 3 du Recueil des Portraits des Peintres 
peints par eux-mêmes , de la galerie de Florence. Il s'en faut 
tenir à cette dernière date, elle est certaine. 

— Les soixante et douze petits dessins ci-dessus formoient 
un livret, dans lequel le Bourguignon disposoit les premières 
pensées de ses tableaux, avec un esprit et une intelligence 
dont il n'y a guèresque lui qui fût capable ;^ le Bellori l'acheta 
des pères jésuites du collège Romain, après la mort de l'au- 
teur, soixante et dix écus romains (Gat. Crozat, p. 29 ). 

— Outre quelques planches de bataille qu'a gravées le Bour- 
guignon, frère de Jacques Courtois, il y a dans le second vo- 
lume de l'Histoire des guerres des Pays-Bas de Fab. Strada 
quatre planches qu'il a gravées à l'eau-forte, sur ses dessins, 
et qui doivent avoir été exécutées par lui vers l'année 1647. 
Dans le même volume il s'en trouve deux qu'a gravées Coli- 
gnon sur les dessins de Michel-Ange Gerquozzi, surnommé 
des Batailles. 



Si 

COURTOIS ( PIERRE FRANÇOIS), graveuT, mort à Hochefort, 
a gravé d'après Ânnibal. 

COUSIN (jean], SénoDois, maître peintre à Paris ; ce sont 
les qualités qu'il prend à la tète de son livre de perspective, 
imprimé à Paris en 1560 in-t^ ; il devoit être suivi d'une 
seconde partie en laquelle auroient été représentées les figu- 
res de Ums corps, même personnages, arbres, paysages^ etc. 
Elle n'a jamais paru. J. Cousin étoit savant dans la science 
des raccourcis, il en avoit fait une étude particulière ; cela 
paroit par la planche gravée en bois qui sert de frontispice à 
son traité de perspective. On y voit des figures d'hommes vues 
en raccourci en diverses positions; le dessin en est correct, 
mais il y a de la sécheresse, et le goût n'en est pas exquis. 
On y peut prendre une idée fort juste de la manière de dessi- 
ner de ce peintre, qui, vivant aveclePrimatice, auroit dû, ce 
semble, sacrifier comme lui aux Grftceset mettre plus de sou- 
plesse dans ses figures. — Il faut s'en tenir à ce qu'a écrit Fé- 
libien sur l'flge et le temps de la mort de J. Cousin, qu'il vi- 
voit en 1589, et qu'il est mort fort ftgé. Les dates, données 
par Dandré Bardon, dans sa Notice des peintres françois, sont 
absolument fausses. 

COUSTOU (GUILLAUME], mort à Paris le 22 février 1746^ 
Agé de 69 ans. Il étoit habile homme ; mais il s'en falloit 
beaucoup, à mon avis, qu'il le fût autant que son frère atné. 
Son dernier ouvrage sont les deux chevaux qui se voyent à 
Marly . Sa statue d'Hyppomène et celle de Daphné dans les 
jardins de Marly faites en 1712 sont des plus belles choses 
que j'aye vues de Coustou le jeune. Quelques tracasseries 
l'empêchèrent de jouir d'une place de pensionnaire dans 
l'Académie que le roi entretient à Rome. Il fut donc obligé de 
travailler dans cette \ille pour y vivre, et, comme il se vit à 



Il 

Fttroit) il étôit fttif le pôM dé pAsàét I Gêfifttànttfléple et d*eii 
faire la folie, lorsque Frémin, son ami, viol à 8oa secoul^ et 
l'en détourna. Il entra chez M. Le Gros, et, pendant qu'il y 
fut, il tnàraillâ, sous sa conduite et d'après Bon tno4ële, hu 
bas-relief de saint Louis de Gonzagud, qui est dans t'église de 
Saitit-lgnftce. C'estôit une bontie éôole* M. Bouchafdon À itèi^ 
vaille sous lui , et il lui est fbrt honorable d'avoir contribué h 
former un tel bomme^ 

CSOUSTOU (mooLAft) est un des meilleurs sculpteurs que là 
France ait euSé II fut l'élève de Coyzevoz, son oncle « et ne le 
ftit Jamaisdu Bernir^ \ lorsqu'il vint h Rome, ce fiimeuï iculp^ 
teur n'j étoit plus» Coustou se contenta d'être l'admirateur 
de m^ ouvrages sand s'en rendre trop l'imitateur et l'esclavei 
Il se fit une mauifere qui ue sort point assez du goût français, 
et c'est un reproche à lui faire. Car avec du goût, de la cor-^ 
reetion et un beau faire, sa sculpture n'a rien de grand ni de 
piquàiit , aucune étincelle de ce leu qui caractérise le ciêeau 
italien^ On admire aved raison la figure d'un berger qui e»t 
dans le» jardina des TliuiUeries \ c'est un excellent morceau fhit 
en 1710. On trouvera le détail de seâ ouvrages dans sa vie 
qui a été écrite par M. de Contamine (1). J'ai moi-même écrit 
quelque part ce que je pensois des deux Qgures de chasseurs 
qui sont à Mâriy, et qui, faites en 1706^ servirent à établir la 
réputation de GoUstou. Son chef-d'œuvre est, à ce qu'on pré* 
tend, sô figure d'Apollon , qui ^si dé l'année 1714, et qui est 
est encore un dé^ ornementé des jardins de Marly. Je n'estime 
pas mtrins le beau groupe, où la Seine et la Marne sont repré^ 



(liEbjte historique âe il. eoiistdti^ Vmé.., auquel OA âjbiht 
(ies tfesofipUonl r^isonnées fia quelques ouvrages d^ peinture <^t 
4e3culplure (par M. Cousin de Cuntamine^, Paris, 1737, in-12 de 
i%è pages. Le3 dèSéripiioûs Àè rapportent à Bousseau et à Lancrét. 



seDlées avec deux enfants, un cygne et d'autres attributs mer- 
veilleusement bien exprimés. Je ne le vois point auxThuilleries 
sans en être frappé d'admiration. En 1687, au retour de 
Rome, où il demeura pensionnaire pendant trois ans à l'Aca-* 
demie que le roi y entretient, il s'arrêta pendant dix -huit 
mois à Lyon, et vint prendre un établissement à Paris et fill 
reçu académicien en 1693, el, après avoir passé par les prlû»' 
cipales places dans le corps académique et avoir fourni peu-» 
dant près de soixante ans un nombre infini d'ouvfages, il 
mourut le l^' may 1733, âgé de 75 arts et 4 mois. Il étoit né 
à Lyon le 9 janvier 1658. Il partagea assez souvent avec soû 
frère cadet les ouvrages qu'il avoit à faire pour le roi 5 maîi 
celui-ci lui demeura fort inférieur. Il profila, à la mort dô 
son irère> de ce que celui-ci avoit amassé à la sueuîf de son 
front, el ne dut point trouver mauvais qu'il ne se fût pas marié. 

COUVAY ( jEAîi )* Saint Pierre, se repentant d^avoir renié 
Jésus-Christ , d'après Cl. Vignott : dédié par Gouvay a ClaUdÔ 
Vignon; la dédicace est en italien. Vignon , Giartres el plu- 
sieurs autres de la même clique, qui avoient voyagé en Italie, 
avoiettt mi*i sur le pied de ne s'écrire qu'en italien, Gouvay 
n'avoit pourtant pas encore été em Italie* C'est une de ses 
meilleures pièces. 

COYPEL (noel). J'ay toujours ouy dire que Noël Goypel 
éloil d'Orléans; l'on m'avoil trompé; Goypel étoit de Paris; 
mais son père étant allé demeurer à Orléam, il y avoit été 
élevé. — Étant à Rome, il fut admis dans l'Académie de Baint- 
Luc , le 13 avril 1673. Son nom est inscrit dans le Catalogue 
des membres de cette Académie, mais mal orthographié; 
car on a assez de peine à le reconnoître sous ce nom, tel qu'il 
est imprimé, Natale Cohibel; et c'est ainsi que les Italiens dé- 
figurent les noms des étrangers qu*ils jont peine à proQOaeer.. 



2& 

— Noël Coypel , natif de Paris, après avoir peint pendant 
longtemps avec réputation dans les maisons royales, fut choisi 
par le roy de Franœ pour remplir la place de directeur de 
l'Académie royale de peinture établie à Rome. 11 soutint ce 
poste avec éclat ; et en étant de retour, il fut encore éleu di- 
recteur de l'Académie de Paris. Ses tableaux étoient dessinés 
avec correction ; c'étoit la partie de la peinture qu'il avoit le 
plus cultivée. Ceux qu'il fit pour le roy, étant à Rome, luy fi- 
rent honneur , et turent regardés avec estime par les Italiens 
mesmes , si réservés d'ailleurs sur les louanges. Il continua, 
le reste de sa vie, qui fut assez longue, à travailler presque 
toujours pour le roy, et à former dans la peinture son fils 
Antoine Coypel, qui y avoit d'heureuses dispositions, et il fi- 
nit sa carrière avec la réputation d'un homme qui joignoit à 
beaucoup de capacité des mœurs très-pures et une grande 
probité. 

« — Noël Coypel (1), le premier de tous ceux de ce nom 
a qui s'est adonné à la peinture, étoit fils de Guyon Coypel, 



(i) Cette notice, publiée dans le recueil des Amusements du 
cœur et de Tespril (XI, 448-55), n'est pas de Mariette ; mais elle a 
été copiée par lui avec le plus grand soin, pour figurer dans ses 
notes, et c'est à ce titre que nous pouvons donner ce document 
trés-curieux et peu connu. Le renvoi au 8" volume du môme re- 
cueil donne le nom de son auteur; car, en y recourant (p. 289-349), 
on trouve une lettre à M. P. (Philippe de Prétot),rédileur du recueil, 
signée Caresme et dalée aussi de Versailles, le 21 octobre 1740, 
par laquelle il lui envoie un dialogue de Coypel sur le coloris, en 
rappelant combien il serait coupable comme gendre de ce grand 
homme^ s'il gardait pour lui seul ce morceau. Cette phrase, rappro- 
chée des mots d'un préambule retranché par Mariette ; « Ma garan- 
tie en celte rencontre vaut bien celle d'un autre, ayant épousé une 
des tilles de l'illusire artiste dont il s'agit » monlVe bien que Ca- 
resme est l'auteur de celte vie de NoCl Coypel. — A la suite vient la 
conférence (p. 455 72), et à celle-là il faut lire : H. Teslelin et non pas 
de H. Sestelin^ le nom mis à la suite de la mention Prononcé par 
Jf. Coypel en l'assemblée du premier février 1670, qui accompagne 
la conférence de Coypel. 



25 

a cadet d'une famille de Cherbourg en Nonnandie. Il naquit 
a à Paris le 25 décembre 1628. Les grands talents qu'il de- 
« voit faire briller un jour étoient pour ainsi dire esquissés 
a en lui dès sa première jeunesse ; et, démêlant dans les com- 
tf positions de cet âge tendre la haute renommée où il devoit 
a atteindre dans la suite , ses parents le laissèrent se livrer à 
a son goût. Jl prit les éléments de son art chez un nommé 
a Guillerié, qui seroit peut-être moins connu, si l'élève n'eût 
a illustré le maître. Ses progrès furent rapides. Il n'avoil en- 
a core que dix -huit ans, lorsqu'en 1646 il fut agréé pour tra- 
a vailler, à la journée du roy, aux décorations qu'on prépa- 
« roit alors pour l'opéra d'Orphée. Depuis ce temps-là il fut 
« presque toujours employé aux ouvrages des maisons 
« royales. En 1655, il fit plusieurs tableaux au Louvre, dans 
a l'oratoire et dans la chambre de Sa Majesté. Il orna aussi de 
a ses ouvrages l'appartement de M. le cardinal Mazarin. Ce 
a fut encore lui qui, au temps du mariage de Louis XIV, 
c( peignit , dans le même château , tous les tableaux du pla- 
ce fond de l'appartement de la reyne, ceuî de la magnifique 
« salle des Machines du palais des Tuilleries, plusieurs mor- 
« ceaux de l'appartement de la reyne-mère à Fontainebleau 
a et chez Monsieur, frère unique du Roy. 

a Quoyqu'il se fût présenté , dès le 6 septembre 1659 , à 
a l'Académie de peinture, qui n'étoit établie quedepuis 1648, 
a comme il étoit alors très dignement occupé aux ouvrages 
a du roy, pour lequel il travailloit sans relâche , il différa sa 
a réception jusqu'au 31 mars 1663. Mais ce ne fut que long- 
« temps après qu'il offrit à cette célèbre compagnie son ta- 
a bleau du meurtre d'Abel par Gain, qui fut reçu avec de 
a grandes marques d'estime et de reoonnoissance; aussi n'é- 
a toit-ce point encore un tribut, c' étoit un présent qui avoit 
« tout le mérite de la générosité. En 1660, il fit orner, sur 
a ses desseins, l'appartement de Sa Majesté, aux Thuilleries. 



u 

€ Eq 1673 , et à l'Age de 49 ans , le roy, après lui avoir assi- 
« gDé un logement aux galeries du Louvre^ le nomma, sous 
« la sur-intendauce de M. Golbert , directeur de l'Académie 
ff de Rome , dont l'établissement, commencé par M. Errard, 
« n'étoit point encore à la perfection. Dans celte place il fit 
<» beaucoup d'honneur à la nation françoise, et il s'acquit 
« l'estime et l'affection des Italiens qui ne l'ont point encore 
« oublié. Pendant son directorat, il fit cinq tableaux, qui or- 
« nent la salle des gardes de la reyne à Versailles. Ce sont 
ot tous ouvrages d'une rare excellence, dignes des plus grands 
« maîtres et de l'admiration de la postérité. 

c Le 13 août 1605, après la mort de M. Mignard, le roy 
« (qui à cause des guerres avoit diminué plusieurs dépenses 
t et parmi cela retranché le titre de premier peintre), fit 
a l'honneur h Nuël Coypel de le nommer directeur perpétuel 
« de l'Académie, et de lui assigner la pension de mille écus. 
« L'Académie témoigna combien elle étoit satisfaite de ce 
<r choiipar une dépulation qu'elle fit faire au directeur, qui 
« remplit ce poste important avec une approbation unanime, 
or Enfin, Agé de 77 ans, il peignit deux grands morceaux qui 
« sont au-dessus de l'autel des Invalides, et qui représentent 
a l'Assomplion de la Vierge, et deux ans après, il mourut en 
é 1707, à pareil jour que celuy de sa nal>sance. 

« U avoit été marié deux fois , la première en 1657 avec 
ff Magdelaine Hérault, femme d'une grande piété et qui s'est 
a distinguée dans la peinture. Ils n'eurent d'enfantqu'Antoine 
<s Coypel , qui a été premier peintre du roy. Le dôme de la 
« Chapelle de Versailles et la galerie de l'Enéide au Palais- 
« Royal , qui sont de sa main » sans compter ses autres œu- 
« vres, luy ont acquis une réputation justement méritée. Ce 
« grand peintre épousa Jeanne Bidault dont il eut Charles- 
« Antoine et Philippe Coypel, tous les deux actuellement vi- 
« vants. Le premier, dont je ne tais les grands éloges qui luy 



17 

^ sont dus que par complaisanee pour sa modestie, a été 
« nommé, encore fort jeune, professeur de rAcadémie 
a royale , et soulient dignement la réputation de ses pères, 
à L'autre n'a point suivi cet art, et remplit une charge è la 
« cour. Apfèé ia mort de Madeleine Hérault, Noël Coypel se 
« remaria en 1686 à Anne Françoise Perrin , en qui les dons 
a de l'esprit égalolent les agrémens de la figure» Alliée de 
a près à la famille des Boulognes, et destinée à entrer dans 
cr celle des Coypels, la nature, attentive, Tavoit prudemment 
ff douée de talens qui pussent faire honneur à l'art dans le- 
« quel ces noms se sont rendus si fameut. Elle le cultivoit 
« avec succès. De ces secondes nopces naquirent quatre èfi- 
« fants, scavoir : 

« Anne-Françoise, maintenant veuve de François Dumont, 
« sculpteur du roy, mort à l'âge de 86 ans en réputation 
« d'un excellent artiste; 

a Noël-Nicolas, dont nous avoiis inséré un crayon de éa 
« vie dans le 8^ volume , et qui n'a pas moins travaillé pour 
« l'immortalité que tous les autres de son sang. 11 est taôrt 
« sans postérité } 

« Charlotte-Catherine , qui n'a point pris d'alliance , et 
« Françoise Eméë^ que j'ai épousée. 

« Celte nombreuse famille, non plus que le poids de l'âge, 
di n'avôit Hen altéré & la beauté du génie ni & l'eicellence du 
i pinceau de Noël Goypel ; c'est ce qu'on a remarqué dans 
é les lieuï saints^ dans les maisons royales, dans les cabinets 
a des personnes du premier rang et des connaisseurs les 
a plus délicats, où ses tableaut de tous les âges sont honora- 
« blement placés, et singulièrement , comme je Vay déjà dit, 
tf dans les deut morceaux à fresque qu'il a peints aux Inva- 
it lides deux ans avant sa mort, il a fait voir constamment 
a dans toutes ses eeuvres que l'histoire sacrée et profane lui 
a étoient également jfhmilières*, qd'il pessédôit «dans leur 



28 

« point de perfection la perspective et Tanatomie, et qu'il 
a avoit une correction de dessin toute particulière; aussi, 
a pour le distinguer de ses enfants, on le nommoit commu- 
« nément parmi les amateurs Coypel le Poussin. Mais qui 
a s'étonnera de cela après la lecture de ses Conférences, dans 
« lesquelles il n'est pas possible de prendre une autre idée 
a de lui que celle d'un des plus grands maîtres ? » 

COYPEL (ANTOINE) Comme FOrlandi imprime : Dipinse la 
wUa délia capella di Versailles e quella di Samam, Mariette 
ajoute : Il faut lire : E due quadri, cioe la Resurrectione al- 
l'altare maggiore et l'Ânnunciazione, nella capella del palazzo 
reale di Meudon. M. Coypel a peint encore plusieurs tableaux 
dans les appartements de cette maison royale, qui tous ont été 
gravés : Âlceste rendu à Âdmète , les Forges de Lemnos , Si- 
lène surpris par la nymphe Églé, et deux sujets de la fable 
de Psyché. — Mort en 1722 âgé de 61 ans. 

— Apollon sur le Parnasse au milieu des Muses, inventé 
par Ant. Coypel, et gravé à l'eau-forte par M. le duc de Bour- 
gogne. Je tiens cette particularité de M. Coypel. 

— Alexandre offrant sa couronne à la belle Roiane dont il 
est devenu amoureux, peint par Ant. Coypel, pour estre exé- 
cuté en tapisserie pour le roy, d'après les desseins de Raphaël 
d'Urbin , que ce scavant peintre avoit fait sur la description 
d'un tableau d'Aëtion donné par Lucien. Ant. Coypel, en 
suivant ce dessein de Raphaël y a adjouté de son invention 
divers ornements pour rendre la tapisserie plus riche. L'es- 
tampe a été gravée par F. la Cave , sous la conduitte de Ber- 
nard Picart. 

— Portraits des ambassadeurs du royaume de Maroc venus 
en France en 1689, en demy-corps, gravés par Ant. Trou- 
vain. Ils sont représentés dans une loge de l'Opéra ou de la 
Comédie. M. Coypel les y dessina pendant ce spectacle* 



29 

COYPEL (noel-nicolas), fils de Noël Coypel, d'un second 
lit , perdit son père dans un âge tendre ; mais l'amour qu'il 
avoit pour la peinture et les heureux talens qu'il avoit ap- 
portés en naissant suppléèrent en quelque façon aux instruc- 
tions utiles qu'il auroit pu espérer de la part de son père. Il 
étudia sa profession avec un zèle et une assiduité surprenan- 
tes, et dans tout le cours de sa vie il témoigna une grande 
ardeur pour le dessin. 11 n'est donc pas étonnant qu'ayant 
vécu dans ces principes, il se trouve dans ses ouvrages tant 
de sagesse et de correction. Loin de se laisser entraîner à un 
certain libertinage, dont le faux brillant séduit quelquefois et 
qu'il voyoil effectivement applaudi dans quelques-uns de ses 
contemporains, il fut toujours pour ainsi dire en garde de 
ce côté-là contre lui-même et ne laissa rien sortir de ses mains 
qui ne fût très-épuré. Un des premiers morceaux qui servit 
à le faire connoître fut un tableau représentant le Triomphe 
de Galathée ou d' Amphithrite ou la Naissance de Vénus, qu'il 
exposa dans la galerie du Louvre en 1727, à l'occasion d'une 
concurrence qui fut proposée aux principaux peintres de l'A- 
cadémie. M. Le Moine et M. de Troy eurent le prix, et l'on 
ne peut disconvenir qu'ils en étoient très-dignes. M. Charles 
Coypel reçut aussi une marque de distinction : le roy prit son 
tableau ; mais y avoit-il de la ju:>tico à laisser, comme on fit, 
l'ouvrage de M. Noël-Nicolas Coypel sans aucune récom- 
pense? Le public scut l'apprécier à sa juste valeur. N'ayant 
là-dessus qu'une seule voix, tout le monde le regarda avec 
une admiration mél(^e d'étonnement, et l'on plaignit l'auteur 
en secret de n'avoir personne auprès du ministre qui fit sen- 
tir la force de ses talents. M. Coypel ne se découragea pas 
pour cela; bien au contraire, il redoubla son travail, et 
comme il n'a voit rfeh plus à cœur que de se faire connoître 
par quelque ouvrage public, il saisit en 17.. l'occasion 
qui se présenta de peindre la chapelle de la sainte Vierge, 



dans l'église de Saint-Sauveur de Paris. Il convint avec les 
marguilliers d'un prix fort médiocre, sans quoi ils n'auroient 
pu se résoudre à lui laisser fournir une carrière si honorable. 
L'ouvrage augmenta sous sa main ; il devint plus considérable 
qu'il ne pensoit. Il crut par là ôtre autorisé à changer sea en<- 
gagements, ce qui lut la matière d'un procès qui fut d'autant 
plus chagrinant pour un artiste tel que luy, que la procédure 
pe marche guères volontiers avec les arts. Quoi qu'il en soit, 
ce morceau de peinture lui fit honneur , surtout le morceau 
peint dans la calotle de la voûte ; car Ton crut trouver à re-^ 
dire^ dans le reste^ de ce qu'il avoit marié avec la peinture 
plate des flgures de relief coloriées, et bien des gens se eniv- 
rent autorisés à le blâmer de cette Ucence, en même temps 
qu'ils lui rendoient cette justiccL qu'il y avoit dans tout ce 
morceau bien des grâces et beaucoup de justesse de dessin; 
car pour la partie du coloris, cen'étoitpasiapartiedela pein* 
ture qu'il possédoit dans un plus éminent degré, quoiqu'il eût 
un pi nceau très-agréable. 11 peignoit aussi parfaitement bien au 
pastel. Il a fait dans ce genre plusieurs portraits très-estimés. 
Il étoi t de l'Académie de peinture, ety exerçoit l'emploi d'adjoint 
à professeur, lorsqu'il mourut le 14 décembre 1734, âgé d'en- 
viron 43 ans. Il a été enterré dans Téglise Saint^^iermain- 
l'Auxerrois. — 11 étoit né en 1692. 

COYPEL (gbarles), fils d'Antoine Coypel, naquit à Parie en 
1694, et est mort de la petite vérole en 1752. — Il est fils et dis- 
ciple d'AntoineCoypel. Sesqualités du cxBuretde l'esprit le ren- 
dirent infiniment agréable et cher à ses amis. Il en avoit beau<- 
coup qui tous étoient des personnes distinguées, soit parleur 
naissance, soit par leurs talents ; on se réunissoit chez lui et 
l'on y trouvoit la meilleure compagnies H écrivoit fort bien, 
il faisoit joliment des vers. H a laissé un nombre de comédies 
dont les s\\|ets sont à lui, et qui pourroient ligurer avec ws 



Ji 

meilleures pièces, s'il y avoit plus d'intérêt, et si les caraotèr^ 
en étoient moins chargés. Ce défaut avoit passé jusque dans 
ses tableaui^; il le tenoit de son père, qui lui-même avoil 
outré les caractères qu'il avoit jugé à propos de donner à 809 
figures. Son fils renchérit sur lui ; il alla chercher des modèle» 
d'attitude et d'expression sur le théâtre, et il n'y trouvai 
même dans le jeu des meilleurs acteurs, que des grimacer, 
des attitudes forcées, des traits d*expression arrangés avec 
firt, et où les sentiments de l'âme n'ont jamais aucune part* 
Il en arriva que notre peintre ne put jamais mettre de paï* 
veté ni de naturel dans ses tableaux, et le malheur voviloit 
qu'ils en eussent plus besoin que ceux des autres peintroai 
car comme il ne manquoit ni d'esprit ni d'imagination, il ne 
ehoisissoit guère que des sujets chargés d'expressions, Ajo\)« 
tez à cela qu'applaudi de trop bonne heure sur des produe^ 
lions où le génie perçoit, il n'avoit pas assez connu la néoafr* 
site d'étudier d'après nature. 11 s'étoit fait une espèce de routine 
qui s'étoit convertie en manière, et qui lui iaisoit envisager 
tout sous le même point de vue. Lui falloit-il foire quelqu'é*- 
tude d'après le modèle, onauroit dit qu'il l'a voit faite d'ior 
vention ou d'après quelques données de son père. Il entroit 
fort souvent dans ses compositions des figures de femme tt 
des enfants; il n'en dessina jamais au naturels Son colons 
ne fut pas plus vrai ; il ne se soutint qu'à la faveur dee 
sujets qu'il ehoisissoit en homme d'esprit. Jaloux de se faire 
un nom dans un art qu'il aimoit véritablement et qu'il exerçoit 
noblement, il fit en 17.. un très-grand tableau représentant 
Jésus-Christ montré au peuple par Pilate, qui, pendant plu- 
sieurs années , a tapissé toute une face de l'église des Prêtres 
de l'Oratoire, rue Saint-Honoré, auxquels il en avoit fait pré- 
sent. 11 s'y donna beaucoup de peine, il y mit tout ce qu'il 
savoil faire 5 ce tableau n'eut cependant qu'une assez mé- 
diocre réussite, et lorsqu'on l'a ôté de l'église où, depuis a0& 



32 

achèvement, il n'y avoit plus de place pour le recevoir, on 
n'a pas paru être beaucoup inquiet sur ce qu'il deviendroit. 
Ses tableaux du roman de Don Quichotte mis en tapisseries 
eurent plus de succès; il étoil davantage à sa place en les fai- 
sant. Il a peint les portraits tant à Thuile qu'au pastel de 
beaucoup de ses amis. M. le duc d*Orléans, fils du régent, 
lui avoit accordé la place de son premier peintre, et il s'étoit 
fait son disciple. Lorsque M. deTournehem eut celle de direc- 
leur général des bâtiments, il se reposa sur M. Coypel de la 
partie qui regardoit la peinture ; et il faut lui rendre cette 
justice que personne ne s'en acquitta mieux que lui. Unique- 
ment occupé de faire le bien de ses confrères, il ne parla que 
pour eux. 11 n*en fut aucun auquel il ne rendît des services, 
quoiqu'il dût savoir que presqu'aucun ne Taimoit, et que tous 
le critiquoient et le regardoient comme un peintre assez mé- 
diocre. Ce fut lui qui imagina l'établissement de l'école aca- 
démique des élèves protégés par le roi. On ne peut que louer 
son zèle; mais dire que l'établissement soit utile et bon, c'est 
autre chose ; le temps l'apprendra. Il est mort premier pein- 
tre du Roi et directeur de l'Académie , qui avoit besoin qu'il 
se mît à sa tête pour la soutenir et y remettre l'ordre que la 
jalousie de certains membres commençoit à en bannir. — 
Voyez l'éloge quej'ai fait de son cabinet à la tête du cata- 
logue qui a en été imprimé en 1753, pour en indiquer la 
vente (1). 



(i)En voici le titre : « Catalogue des tableaux, desseins, marbres, 
bronzes, modèles, estampes et planches gravées, ainsi que des bi- 
joux, porcelaines et autres curiosités de prix, du cabinet de feu 
M. Coypel, premier peintre du Roi et de Monseigneur le duc d*0r- 
lèans, et directeur de TAcadémie royale de Peinture et de Sculp- 
ture. Paris, 1753. » — Nous en donnons C Avertissement où Ton 
trouve en effet sur le fils et héritier des titres dAntoine Coypel, 
d'intéressants détails pleins de cœur et de convenance. 



8S 

— Les cabinets de tableaux , de sculptures, de dessins, de 
toutes les curiosités de goût, que les gens de l'Art rassem- 
blent pour leur propre satisfaction et pour leur usage parti- 
culier, ne sont ordinairement ni les plus nombreux , ni les 
plus considérables, si l'on en juge par la valeur intrinsèque 
des choses qui les composent : mais ces collections ont aussi 
presque toujours l'avantage d'être les mieux choisies , et de 
ne présenter rien de trop foible ni de trop équivoque. Il est 
rare de s'égarer quand on se gouverne par de bons et de sûrs 
principes, et il seroit encore plus singulier que quelqu'un 
qui a fait sur l'art qu'il professe de sérieuses études , qui l'a 
médité , qui l'a approfondi , y fût moins versé qu'un simple 
amateur , et moins en état d'en goûter les productions et de 
les apprécier à leur juste valeur. Affranchis de la tyrannie 
qu'exercent sur la plupart des hommes la mode et le caprice, 
les artistes n'ont les yeux ouverts que pour ce qui porte avec 
soi le véritable caractère du beau ; ils méprisent ce qui n'en 
a que les dehors, et se gardent bien d'accorder leur suffrage 
à des ouvrages qui n'ont d'autre mérite que dans une opinion 
aussi peu durable qu'elle est arbitraire. 

Cette classe de curieux n'a point la folle vanité de concou- 
rir avec les Rois, ni avec les favoris de la fortune : les facultés 
des artistes ne leur permettent pas de prendre un si haut vol. 
On ne trouvera point chez eux de ces vastes et magnifiques 
galeries meublées d'une multitude innombrable de tableaux 
achetés des prix excessifs, ni de ces curiosités rares et uni- 
ques, à la possession desquelles les particuliers ne doivent 
point prétendre ; mais on verra entre leurs mains des mor- 
ceaux piquants pour l'effet, des morceaux étudiés et savants, 
des pièces de comparaison qui donnent le ton de la connois- 
sance, et qui apprennent à distinguer les manières et à ran- 
ger chaque chose dans la classe et dans le rang qui lui ap- 
partient. Qu'une honnête fortune seconde les vues de l'artiste, 
T. n. c 



sa collection s'enrichira de ce qu'il y a de meilleur : il y en 
aura peu d'aussi parfaite, ni d'aussi instructive. 

On ne se rappelle point le cabinet ques'étoit fait le célèbre 
Bubens , sans se former aussitôt l'idée du plus précieux as- 
semblage qui fût jamais , et du séjour le plus délicieux et le 
plus digne d'être occupé par un peintre et un homme de let- 
tres tel que lui. Nous ne faisons point cette réflexion dans la 
vue d'aucune application ni pour avoir occasion de mettre en 
parallèle ce grand homme avec feu M. Coypel; mais de la fa- 
çon toute naturelle dont les choses se présentent, pouvons- 
nous empêcher que le cabinet de l'un et de l'autre n'ait été 
également paré de tout ce que l'art offre de plus accompli, ni 
qu'il ait été le rendez-vous des personnes du premier rang, 
et d'une infinité de gens distingués par l'étendue de leur 
scavoir et de leurs connoissances? Interrogez-les sur les motifs 
de leurs fréquentes visites , ils diront qu'ils sont venus cher- 
cher l'homme de bien, l'homme d'esprit et de talents, s'ins- 
truire avec lui, apprendre à être vertueux comme lui. 

Avec quelle satisfaction ne se rassembloit-on pas, en effet, 
auprès de l'illustre mort que nous regrettons I soit qu'après 
avoir déployé ses propres richesses, il ouvrît les porte-feuilles 
de desseins, dont le roi lui avoit confié la garde, et que, les 
accompagnant de ses judicieuses observations, il fît naître 
dans les spectateurs l'estime et la vénération dont il étoit pé- 
nétré lui-même pour ces excellentes productions de l'art, 
soit qu'une autre société le retînt, et qu'il fît en sa présence 
la lecture touchante de ces aimables pièces de théâtre où les 
Grâces se montrent avec tant de décence , et où il est permis 
à la Sagesse de dicter d'utihis leçons ; ce n'étoit point sans 
violence qu'on s'arrachoit d'un lieu si charmant : on n'en 
sortoil qu'avec regret, et soutenu de l'espérance de voir re- 
nouveller bientôt le même plaisir. 

Pour lui, il ne perdoit rien à se retrouver seul, et le plus 



35 

tôt qu'il le pouvoit, il rentroit dans Texercice de ses fonctions, 
employant ses heures de loisirs à sacrifier aux Muses , et le 
temps que lui laissoient les devoirs indispensables de sa 
place, à penser et à exécuter des tableaux dont les sujets, 
toujours ingénieux et bien pris, étoient sûrs de plaire, et 
donnoient les preuves les plus compleltes de la lécondité et 
de la délicatesse de son heureux génie. En y travaillant, il y 
apporloit la même attention, la même crainte que s'il eût été 
véritablement traduit au tribunal déjuges sévères et inexora- 
bles qui, les yeux levés sur lui, ne dussent lui pardonner au- 
cune faute. Car c'étoit dans ce point de vue qu'il étoil accou- 
tumé de regarder les ouvrages des grands maîtres dont il étoit 
environné. C'étoient là ses oracles; il les consultoit à chaque 
instant, et, comme les demandes étoient sincères, les réponses 
étoient claires et favorables. 

Celte conduite étoit la même qu'a voit tenue autrefois 
M. Antoine Coypel, son illustre père. Ce peintre éclairé 
et d'une expérience consommée avoit éprouvé plus d'une fois 
qu'il n'en faut pas davantage pour animer et soutenir un 
beau génie ; et, lorsque la mort nous l'enleva, le digne héri- 
tier de ses sentiments ne désira rien avec plus d'ardeur que 
de pouvoir conserver en entier un cabinet si précieux et si 
abondant en ressources. Il lui donna la préférence sur d'au- 
tres biens plus fructueux et plus solides en apparence, mais 
incapables de lui causer le même plaisir, ni de lui procurer 
les mômes avantages. Il fit tomber cette portion de l'héritage 
dans son lot, et l'ayant considérablement accrue dans la suite, 
il l'a portée bien au delà de ses espérances. 

Nous en donnons une notice des plus succinctes, dans la- 
quelle nous nous contentons à chaque article d'exposer le su- 
jet, de donner des dimensions et de fixer le plus sincèrement 
qu'il nous a été possible le nom de l'auteur. Nous nous sommes 
appliqués surtout à y mettre de Tordre, et à lever par ce 



S6 

moyen tout obstacle qui auroit pu retarder la vente et dé- 
goûter les acheteurs. Nous leur ferons observer que presque 
tous les tableaux sont renfermés dans des bordures , que les 
mesures sont prises sur le tableau même, et que les morceaux 
sur lesquels on n'a rien spécifié sont peints sur toile. Nous 
nous croyons aussi obligés de prévenir ici la surprise oh Ton 
pourra être de ne trouver dans cette vente qu'un très-petit 
nombre de dessins de feu H. Goypel, et de ce que les estampes 
se réduisent presque aux seules œuvres de Bubens , de Rem- 
brandt et de Silvestre. Il y en devroit avoir beaucoup davan- 
tage ; mais ces estampes, ainsi que les livres de M. Goypel et 
les desseins de sa propre main, ont été légués par lui à des 
personnes qu'il aimoit, et auxquelles il a voulu laisser cette 
marque de tendresse. 

A due préface nous ajouterons une noie (Fune écriture con- 
temporaine gui se trouve sur f exemplaire du catalogue de cette 
vente conservé au cabinet des Estampes^ Yd, 20. 

a C'est M. Mariette qui a fait le catalogue. — Il n'y avoit 
a de vrais dessins de Raphaël dans cette vente que les deux 
« retenus par le roy, qui sont N.-S. qui présente ses clefs à 
a saint Pierre, et saint Paul préchant à la porte du temple, 
a On a demandé audit sieur Mariette pourquoi il avoit mis 
a dans son catalogue que tels ou tels dessins étoient de Ra- 
a phaël? il a répondu que, M. Goypel étant de ses amis, il n'a- 
a voit point voulu détruire les objets, dont il s'étoit chargé de 
a faire la description pour les faire valoir, d'autant plus que 
a ces desseins avoient toujours passé pour être des originaux 
a de Raphaël; que, n'ayant pas voulu faire du tort à sa suc- 
a cession, il avoit laissé subsister la bonne réputation qu'ils 
« avoient depuis longtemps. Je ne décide rien sur cette fa- 
a çon de penser de M. Mariette en faveur de M. Goypel. 
a Les amateurs feront là -dessus les commentaires qu'ils 
a jugeront à propos , ne pouvant cependant se dispenser 



S7 

de louer le zèle particulier dudit Mariette pour son ami. » 
— Minerve commandant à des Génies de dessécher les ma- 
rais et de cultiver des terres après les avoir rendues fertiles. 
Vignette du dessin de Charles-Nicolas Coypel, gravée par 
Nicolas Tardieu. Elle a été gravée pour M. Paris pour un ou- 
vrage sur la manière de dessécher certains marais, et n'a ja- 
mais paru. 

GOYZEVOX ( Aim)iNE ) mourut à Paris le !(>• octobre 1720, 
ayant travaillé jusques à Tàge de quatre-vingts ans, avec une 
ardeur qui montre l'amour qu'il avoit pour son art. Un de 
ses principaux ouvrages à Paris est le tombeau du cardinal 
Mazarin dans la chapelle du collège des Quatre-Nations. On 
voit aussi à Texlrémité du jardin des Thuilleries les deux ma- 
gnifiques groupes de Mercure et de la Renommée montés sur 
des chevaux ailés qui sont des morceaux admirables. Ils 
avoient été faits pour Marly ; c'est un miracle pour le travail 
du marbre ; c'étoit la partie de Coizevox. — La statue équestre 
de Louis XIY en bronze fut faite pour la ville de Rennes et 
fut ordonnée par les états de Bretagne en 1683 (i). 

GOXCIE (MICHEL). On le nomme, dans son pays, le Raphaël 
de la Flandre. G'est qu'il étoit grand sectateur de la manière 
de peindre et de composer de ce grand peintre. Cela alloit 
quelquefois plus loin qu'une simple imitation. Il transportoit 
sans scrupule dans ses tableaux des figures et des groupes en- 
tiers que ce grand peintre avoit mis dans les siens. Cela avoit 
tout l'air d'un plagiat; et cependant Rubens, admirateur de 
Goxde , avoit la complaisance de l'excuser et de répondre à 
ceux qui lui faisoient ce reproche par un proverbe flamand, 



(1) Elle ne fut placée qtt*en 1733. Voir l'ouvragt de Patte, p. 1 13, 



88 

dont le sens est qu'il est permis de piller quand ou le fait 
avec adresse. — Il est remarquable que le Vasari, en parlant 
de la suite d'estampes représentant la fable de Psyché, dont 
les dessins passent pour être de Raphaël , en fait honneur à 
Michel Coxcie, et lui en attribue l'invention. Voyez ce qu'il 
a dit à ce sujet dans la vie de Marc- Antoine. 

COZZÂ (gio-battista), né à Milan, se transféra à Ferrare 
où il a beaucoup peint. Il se vanloit d'être grand praticien, 
et quand on lui reprochoit trop de négligence dans les con- 
tours de ses figures, il répondoit que ce n'étoit ni un pied ni 
une main qui constituoient un tableau. Que pouvoit-on-at- 
tendre d'un peintre qui parloit ainsi ? Celui-ci est mort le 
11 février 1742, âgé de 66 ans. Il a pour élève Charles Cozza, 
son fils, mort au commencement de novembre 1769, et Fran- 
çois Pellegrini, actuellement vivant, et qui pareillement est 
né k Ferrare. PiUure di Ferraray p. 32. 

CRANACH (luc). Martin Luther, chef de la réforme en Alle- 
magne, portant encore l'habit des hermites de Saint-Augus- 
tin en 1520. Il est en buste, peint et gravé par Luc Cranach. 
Ce portrait est singulier et considérable, ayant été fait par 
un des meilleurs maîtres qui lussent pour lors en Allemagne 
et qui estoit à la cour de Télecteur de Saxe. Ce portrait est 
très-bien dessiné, et les tailles en sont bien prises; il ne mao- 
quoit à ce peintre qu'une plus grande pratique du burin. On 
y lit au bas ces deux vers latins : 

ifitfaema ipse su» mentis simulachra Lutherus 
Exprimit at vultus cera Lucas occiduos. 

MDXX 

et un serpent aislé et couronné, qui a un anneau passé dans 
la bouche. Voicy le sens de ces deux vers : Luther découvre 



3d 

hiy-même les talents de son esprit sur lequel le temps n'aura 
aucun pouvoir, et le tableau ou la planche (cera) de Lucas 
(c'est le nom de Luc Cranach) représente les traits de son vi- 
sage que ce même temps détruira. 

GRAYER (GASPARD de) ou Gaspard d'Anvers, Ce peintre 
est nommé par Sandrart Gaspard de Crayer. Il estoit élève 
du jeune Coxis, et l'on voit de ses ouvrages à Bruxelles et aux 
environs qui sont d'un bon goût de couleur, et dont Rubens 
faisoît mesme beaucoup de cas. Félibien dit qu'il avoit près 
de quatre-vingt-dix ans lorsqu'il mourut, vers Tan 1666. Fé- 
libien, T. II, p. 237. Il nacquit à Anvers en 1585, Voyez Ck)m, 
de Bie, p. 244. — Il y a beaucoup de ses ouvrages à Gand. 
n y est mort, et il y a reçu la sépulture dans l'église des Do- 
minicains. Le peintre amateur et curieux y t. II, p. 46. — Ru- 
bens ayant été consulté sur un tableau qu'avoit peint Crayer, 
et qu'il trouva très-beau, dit en flamand que le coq avoit iris^ 
bien chanté. Il faut scavoir, pour bien comprendre le fin de ce 
bon mot, que Crayer, dans la langue du pays, est uue exr 
pression particulière dont on se sert pour signifier le chant 
que fait le coq, et que le mot haan que Rubens employoit 
dans sa phrase a une double signification; que ce mot qui 
veut dire un coq signifie dans le figuré un homme qui prime 
sur les autres. L'on met au rang de ses plus beaux tableaux 
celui des Quatre saints couronnés, dans l'église de Sainte-Ca- 
therine à Bruxelles. On le regarde comme son chef-d'œuvre. 
Le Peintre amat., 1. 1, p. 24 et 154. 

CREARA (il). L'auteur du Poëme délia Pitfurairianfank 
(le Gigli) parle de lui en ces termes : 

Ecco il Greara là, pien dî giudicîo 

et le range au nombre des peintres de Vérone. U le joint à 



40 

rorbetto. J'ai quelques soupçons que Creara étoit le surnom 
de Pasquale Ottini. 

GRECCOLINI ( ANTONIO] , peintre romain, né le 16 jan- 
vier 1675, disciple de J. B. Lenardi, et, après la mort de ce 
peintre, de Benedetlo Lutli, travailla à Rome avec réputation. 
Ms. de Pio. — Ce même Pio avoit fait dessiner le portrait de 
ce peintre ; je l'ai vu dans la collection de M. Crozat. 

CREMONENSIS (antonius). Ce nom se trouve sur les es- 
tampes gravées en bois dans la manière du Parmesan. 

CREHONESE (gioseffo) , né à Ferrare au commencement 
du xvu* siècle, se fit peintre par goût et sans avoir étudié 
sous aucun mattre. Mais cherchant à se former d'après les 
ouvrages du Titien et des Dosses, ses compatriotes, il se fit 
une manière qui lui fut propre et qui ne fut pas sans mérite. 
On a des estampes de lui qu'il a gravées à l'eau-forte, et j'ai 
vu plusieurs curieux, faute d'en scavoir davantage, les ranger 
dans l'œuvre du Guerchin, quoyque Joseph Gremonese y eût 
mis son nom, ou seulement les premières lettres I. G. F. U 
est fait mention de cet artiste dans un discours préliminaire 
qui se trouve à la tête d'une description des peintures de Fer- 
rare , qui a paru en 1770. On lui donne un peu plus de cin- 
quante ans de vie, mais l'on n'a pu découvrir en quel en- 
droit il a fini ses jours. On dit seulement que ce fut vers l'an- 
née 1660, et on le représente comme un homme singulier, 
qui ne tint point école, et par conséquent qui ne fit aucun dis- 
ciple. Le peintre Ant. Ronda, Bolognois, fut le seul homme 
de sa profession avec lequel il fut en liaison. 

— Joseph Gremonese vivoit dans le xvu« siècle et étoit de 
Ferrare; il n'est point disciple du Guerchin, et, si l'on en croit 
l'auteur d'une description des peintures de Ferrrare publiée 



Ai 

en 1770 , il n'eut aucun mattre. On place sa mort vers l'an 
1660, et on le fait âgé d'environ 50 ans. 

GRESPI [ANTONIO maria) detto il Bustino. J. B. Coriolan 
a gravé d'après Antoine Crespi, qui sur la planche est nommé 
en latin Crispus , le portrait du R. P. dom Pio Rossi ou Ru-? 
beus , de Plaisance, ce qui servira à fixer le temps que vivoil 
ledit Crespi. G'étoit au milieu du xyu® siècle, et il parott par 
ce portrait qu'il entendoit parfaitement la charpente d'une 
tète. 

CRESPI (daniello). Lorsqu'il mourut de la peste en 1630, 
il estoit pour lors occupé à peindre la voûte du chœur de la 
chartreuse de Pavie : Torre , p. 138. C'est un bel ouvrage, et 
qui est composé avec beaucoup de génie. 

CRESPI (gioseffo) est mort à Bologne le 16 juillet 1747. 
Voyez sa vie fort détaillée dans le t. Il de la Storia dell'Acad. 
clementina. M. Zanetti qui est auteur de cet ouvrage, n'ayant 
pourtant suivi la vie de cet artiste que jusqu'en 1739, le fils 
du Crespi, chanoine à Bologne , y a suppléé et l'a continuée 
jusqu'à la mort de son père, dans une lettre adressée à M. Bot- 
tari , qui se trouve au tome III des Lettere su la pittura, 
p. 301. Il est né, non en 1666, mais le 16 mars 1665. 

— La sainte Vierge ayant entre ses bras l'enfant Jésus, et 
assise sur un piédestal aux côtés duquel sont d'un côlé un 
saint, peut-être S. Philippe de Néri, en chasuble et debout; 
de l'autre S. Cajetan, à genoux, tenant un livre; mauvaise 
gravure dédiée au marquis François-Jean Zampieri, par le 
graveur Gio. Fabri. J'en ai une épreuve sous les yeux qui 
vient du chanoine Crespi , qui a écrit au bas que c'étoit d'a- 
près un tableau peint par son père dans la chapelle Zampieri 
à Casalechia. 



&2 

— s. Antoine de Padoue, debout. J'en ai vu le dessin ori- 
ginal entre les mains de M. Tabbé de Tersan. 

— Alfonse d'Avalos, marquis du Guast, accompagné 
d'une femme qu'on dit être sa maîtresse (1), à qui Vénus et 
l'Amour viennent faire hommage, d'après un tableau du Ti- 
tien lequel est à Bologne, chez le marquis Orsi, gravé à l'eau- 
forte par Matloli, si l'on en croit l'inscription qui est au bas 
de la planche , mais qui est certainement de Joseph Crespi 
dit l'Espagnol, qui, toutes les fois qu'il a gravé, a emprunté 
le nom de Malioli, parce qu'il ne vouloit pas passer pour 
graveur. 

CRESPI (gio:batista), detto il Cerano. Il a eu la sépulture 
dans l'église de Saint-Celse à Milan, 

CRETEY ( ANDRÉ), peintre françois du xvii® siècle, dont le 
nom se trouve dans le catalogue d'estampes de l'abbé de Vil- 
leloin 8*", et qui sans doute est le même dont M. Boyer 
d'Aiguilles avoit un tableau représentant la Chute des Géants, 
qu'il a fait graver, et qui donne une fort bonne idée de la 
façon de composer du peintre. Il travailloit à Lyon, et il y 
est mort. 

— La Chute des Géants. Quelques-uns, peu touchés des dé- 
sastres de leurs compagnons qui sont terrassés, osent encore 
entasser rochers sur rochers pour pénétrer dans l'Olympe. 
Jupiter lance ses foudres sur ces téméraires. Dans un petit 
espace et avec peu de figures le peintre exprime un sujet im- 
mense. Ce ne sont point des hommes qu'il fait agir, ce sont 
des géants remplis d'audace. Si la correction du dessin, si la 



(1) G*estla femme du marquis del Vasto ou del Guast. Elle se nom- 
moit Marie d^Aragon, et c'étoit une beauté. (Note de Mariette.) 



48 

bonté du coloris répondoient à rexcellence de la composition, 
il semble qu'on ne pourroit ifen désirer dans ce tableau, et 
Cretey, qui n'a pas franchi les bornes de la médiocrité, méri- 
teroit d'avoir place auprès des peintres du premier ordre. 
( Cabinet Boyer d'Aiguilles, p. 17.) 

CRISTOFORO (GIOVANNI), scultore romano nel 1504. Son 
nom se trouve avec ceux des poëtes qui, comme ce sculp- 
teur, firent des vers sur la mort de Séraphin d'Aquilée, célè- 
bre peintre mort en 1500, qui furent recueillis et imprimés à 
Bologne en 1504 , par les soins de Jean Philothée Achil- 
lini. Voyez Cat. délia libreria Cappori, p.4. 

CROMA (giulio). Son vrai nom est Cr orner; Croma est un 
sobriquet. Il fut disciple de Dominique Mona, Ferrarois comme 
lui. Il mit beaucoup de soin dans ses tableauX; qui sont lé- 
gers d'ouvrage, ce qui les rend assez agréables. H enseigna 
son art à son fils César Croma et à Charles Pasti. Il mourut 
le 27 septembre 1632, âgé de soixante ans. Descriz. délie pit- 
ture di Ferrara, p. 20. 

CBOSATO (giô : batista), peintre vénitien qui a vécu dans 
ce 18® siècle , mais dont il n'est dit qu'un mot , qui pour- 
tant est à son avantage, dans le L. délia pitt. Venez., p. 434. 

GROZAT (nEBRE),le jeune. Morto nel 1740 a di 24del mese 
di maggio, nel eta di 75 anni e 2 mesi (1). 

— On ne doit pas attendre de moi que je donne ici une 
description complette du cabinet de M. Crozat (2) ; une telle 



(1) Ces dates ont été écrites par Mariette, sur le titre de YAbece- 
dariOf qui, comme on sait, est dédié à Crozat lui-même. 
(2j Ce long article est la préface mise par Mariette en télé du 



entreprise me conduiroit trop loin, et elle est au-dessus de 
mes forces. Ce célèbre curieux s'éloit borné , il est vrai, à ne 
placer dans son cabinet que des morceaux qui éloient du 
ressort du dessin ; et cependant le recueil qu'il avoit formé 
éloit devenu si immense , qu'une simple énumération de 
chaque chose composeroit seule un très-gros volume. Les 
tableaux des grands maîtres dont il avoit fait choix , et ce sont 
presque tous des tableaux du premier ordre, passent le nom- 
bre de quatre cenls, et les ouvrages de sculpture ne sont ni 
moins nombreux, ni moins considérables. Outre de précieuses 
statues de marbre et des bustes aussi rares, on admiroit dans 
ce cabinet des bronzes de toute espèce, et, ce qui mérite une 
attention encore plus particulière, de merveilleux modèles en 
terre cuite de Michel-Ange, de Paul Véronèse, de François 
Flamand, de l'Algarde, du Bernin, de Melchior Cassa, d'An- 
guier et de l'illustre Le Gros, de tous ceux, en un mot, qui 
se sont acquis un grand nom dans la sculpture. M. Crozat 
s'étoit fait encore un très grand recueil d'estampes de tous les 
maîtres, tant anciennes que modernes. Il ne lui manquoit au- 
cun des livres qui traitent des arts dépendants du dessein. Peu 
à peu il avoit formé la plus belle collection de pierres gravées 
qui fût jamais entre les mains d'aucun particulier; et quand 
on pense qu'il avoit rassemblé dix-neuf mille desseins, on se 
sent autant saisi de surprise que d'admiration. 

A l'exception des pierres gravées et des desseins, toutes ces 
curiosités sont passées, sans changer de place, entre les mains 
de M. le marquis du Chàtel, à qui M. Crozat les a léguées. 



Catalogue de Crozat. Paris, 1743, in-S"" de UO pages; les pierres 
gravées ont un catalogue séparé de 83 pages. Quand même nous 
n^aurions pas donné les remarques mises par Mariette dans le ca- 
talogue, nous aurions toujours donné cette préface si importante 
par ses détails d'ensemble sur des noms d'amateurs et des col* 
lections qui revienneiit incessamment dans ses notes inédites. 



Ub 

NoQ-seulement il en connoît le prix, mais il se fait encore un 
plaisir de les communiquer à ceux qui les aiment ; ainsi le pu- 
blic peut juger par lui-même toutes les fois qu'il le voudra 
du mérite de toutes ces singularités, et je crois par là être dis- 
pensé d'en parler plus au long. Je n'ai donc à faire connoître 
ici que la partie du cabinet de M. Grozat dont il a ordonné la 
vente par son testament, et dont il a voulu que le prix fût dis- 
tribué aux pauvres (1), c'est-à-dire les pierres gravées, les 
desseins et les planches et estampes qu'il avoit fait graver. 

Je devrois commencer par les pierres gravées; mais depuis 
que Monseigneur le duc d'Orléans en a fait l'acquisition en 
entier, ce soin appartient à des personnnes plus habiles, qui 
tôt ou tard ne manqueront pas de donner au public une ex- 
plication scavante de ces monuments singuliers de l'antiquité 
grecque et romaine. 

Je n'entreprendrai point non plus, en parlant des desseins, 
de montrer tous les avantages qu'on en peut tirer, et combien 
leur connoissance est propre et nécessaire pour former le 
goût; je me bornerai à faire l'histoire de c^tte portion du ca- 
binet de M. de Grozat, qui pendant toute sa vie avoit mérité 
tous ses soins. G'étoit celle sur laquelle il s'éloil le plus étendu, 
et avec quel bonheur n'y avoit-il pas réussi? 

Dès l'année J683,c'est-à-diredansle temps qu'ilétoitencore 
à Toulouse, il avoit commencé à acquérir des desseins delà 
Fage. Mais quand M. Grozat fut venu à Paris, et qu'il eût vu, 
entre les mains des principaux curieux, les desseins des grands 



(1) A. côté de cet acte de charilé posthume, il est honorable pour 
la mémoire de Grozat de mentionner une antre libéralité, parlica- 
lièrement grande et loiuîhanle, qui nous est conservée par Duolos, 
dans ses Mémoires se^ls, édit. de 1791 , t. I, p. 349 : « Massillon, 
« prêtre de rOratoird^ëlèbre par ses sermons et surtout par son 
« Petit-Carême, fut nommé à Tévéché de Clermont. Il n^aurait pas 
« été en état d*accepter, si Grozat le cadet n'eût payé le» bulles. » 



U6 

mattres d'Italie, alors il n'épargna ni peines ni dépenses 
pour se procurer des ouvrages de ces maîtres du dessein. 
M. Jabach, dont le nom subsistera pendant longtemps avec 
honneur dans la curiosité, en vendant au roi ses tableaux et ses 
desseins, s'étoit réservé uoe partie des desseins, et ce n'étoient 
pas certainement les moins beaux; M. Crozat les acquit de ses 
héritiers. Il eut encore une partie de ceux qui avoient appar- 
tenu à M. de la Noue, Tun des plus grands curieux que la 
France ait eu , et bientôt il réunit à son cabinet les desseins 
que l'illustre mademoiselle Stella a voit trouvés dans la succes- 
sion de M. Stella, son oncle, et qu'elle a voit conservés pré- 
cieusement toute sa vie. L'abbé Quesnel avoit acheté les des- 
seins de M. Dacquin, évêqué de Sées, parmi lesquels il y en 
avoit d'excellens de Jules Romain ; il avoit eu les débris de la 
fameuse collection de desseins du Vasari ; il céda l'un et Tautre 
à M. Crozat, qui acheta encore des héritiers de M. Pierre Mi- 
gnard deux volumes de desseins des Carraches, que cet habile 
peintre avoit apportés de Rome. Après la mort de M. Bourda- 
louë , de M, de Montarsis, de M. de Piles et de M. Girardon, 
tous noms célèbres dans la curiosité , M. Crozat choisit à 
leurs ventes ce qu'il y avoit de plus singulier en desseins dans 
leurs cabinets. S'il falloit suivre M. Crozat dans toutes les autres 
acquisitions de desseinsqu il fit en France, on ne finiroitpoint; 
car tout alloit à lui, et il ne laissoitrien échapper 

Le sieur Corneille Vermeulen, fameux graveur d'Anvers, 
faisoit assez réguUèrement tous les ans le voyage de Paris, 
et il ne manquoit guères d'apporter avec lui des desseins sin- 
guliers. Ces desseins étoient presque toujours pour M. Crozat; 
et c'est ainsi que sont entrés dans son cabinet plusieurs des- 
seins de Raphaël et d'autres grands maîtres, d'une singulière 
beauté, et tous ces grands et superbes desseins de Rubens qui 
sortoient du cabinet d'Antoine Triest, é>i4l|ue de Gand. 

Si quelque vente considérable de desseins étoit indiquée 



dans les pays étrangers, M. Crozat ne manquoit pas d'y en* 
Yoyer ses commissions. La vente du cabinet de milord Som* 
mers à Londres, et celle de M. Vander Schelling à Amster- 
dam ont augmenté son cabinet d'une infinité de desseins capi- 
taux. Avec quel regret ceux qui ont connu particulièrement 
H. Crozat ne lui ont-ils pas souvent entendu parler du célèbre 
cabinet de M. Flinck de Rotterdam , que milord duc de De- 
vonshire lui avoit enlevé ? Telles sont à peu près les acquisi- 
tions que M. Crozat a faites en France et dans les Pays-Bas; 
mais, toutes importantes qu'elles sont, elles ne paroissent pas 
cependant encore comparables à celles qu'il a faites en Italie. 
Dans le voyage qu'il y fit en 1714, il rapporta de ce pays-là 
des trésors en fait de desseins. En passant à Boulogne, il acheta 
des héritiers des sieurs Boschi leur cabinet tout entier, qui 
venoit originairement du comte Malvasia. 11 trouva à Venise, 
chez M. Ghelchelsberg des têtes en pastel, et d'autres desseins 
du Baroche qui sont sans prix. A Rome, il recueillit la collec- 
tion de desseins de Carie degli Occhiali, c^Ue d'Augustin Scilla, 
peintre sicilien, qui contenoit un grand nombre de desseins 
de Polidor de Garavage, et celle du chanoine Viltoria, Espa- 
gnol, élève et intime ami de Carie Maratte. Mais l'occasion, où 
il fut, ce semble, le mieux servi par la fortune, ce fut dans 
la découverte qu'il fit à Urbin d'une partie considérable de 
desseins de Raphaël, tous d'une conditioi\ parfaite , qui se 
trouvoient encore entre les mains d'un descendant de Timo- 
thée Viti, l'un des plus habiles disciples de ce grand peintre. 
J'ignore en quel temps M. Crozat vit passer dans son cabinet 
les desseins qui viennent des sieurs Mozelli de Vérone, et le 
recueil qu'avoit formé un cardinal de là maison de Santa 
Croce, qui vivoit à Rome dans le dernier siècle; mais, ce qui 
est certain, ces deux collections ne contenoient que des des- 
seins excellents. M. Crozat,de retour à Paris, continua d'en- 
tretenir des correspondances en Italie, et il en fit venir, en dif- 



us 

férents temps, la collection entière du sieur Pio de Rome, 
celle du sieur Lazari de Venise , du chevalier Ascagne délia 
Penna de Pérouse , dont il est parlé avec éloge dans la des- 
cription des peintures de cette ville par le père Moreliî, et 
enfin le beau choix de desseins que Laurent Pasinelli, fameux 
peintre de Boulogne , s'étoit fait pour lui-même avec un 
goût digne de son savoir; à quoi il faut ajouter les desseins 
de dom Livio Odescaichi, qui furent donnés à M. Grozat, 
lorsque S. A. R. Monseigneur le duc d^Orléans, régent, 
acheta les tableaux de ce prince. 

Ce ne sont pas, comme on le voit, des desseins achetés un 
à un , ce sont des cabinets entiers, et des cabinets de la pre- 
mière réputation, qui se sont réunis chez M. Crozat, et qui 
ont fait du sien le plus grand cabinet de dessins qui , on ose 
le dire, ait jamais été. 

Je me borne à cet éloge, et je pense que je ne puis aussi 
mieux louer celui qui a possédé de si belles choses. On ne se 
détermine à les rassembler qu'autant qu'on les aime, et qu'on 
en sçait connottre le prix. Mais, ce qui achève Téloge de 
H. Crozat et qui lui est infiniment boDorable , il n'aimoit 
point ses desseins pour lui seul ; il se faisoit, au contraire, un 
plaisir de les faire voir aux amateurs toutes les fois qu'ils le 
lui demandoient , et il ne refusoit pas même d'en aider les 
artistes. On tenoit assez régulièrement toutes les semaines 
des assemblées chez lui, où j'ai eu pendant longtemps le bon- 
heur de me trouver, et c'est autant aux ouvrages des grands 
maîtres qu'on y considéroit , qu'aux entretiens des habiles 
gens qui s'y réunissoient , que je dois le peu de connais- 
sances que j'ai acquises , et qui m'ont mis en état de dresser 
le catalogue que j'ose présenter au public. Je l'ai fait unique- 
ment pour guider ceux qui voudront acquérir des desseins 
dans la vente qui doit s'en faire en détail, et j'espère qu'on 
ne sera pas mécontent de la distribution que j'y ai observée. 



49 

n ne me reste qu'à demander quelque indulgenœ pour les 
réflexions que j'ai insérées dans ce catalogue. Je ne suis pas 
assez présomptueux pour les donner comme des décisions ; 
j'avoue même que je ne les aurois pas hasaidées> si je n'avois 
cru par là rendre la lecture de ce catalogue moins sèche et 
moins ennuyeuse ; et d'ailleurs je les soumets volontiers au 
jugement des personnes éclairées que je me ferai toujours un 
devoir de suivre. 

L'on trouvera, à la suite du Catalogue des desseins de H. Gro- 
zat, un détail des planches qu'il a fait graver et le nombre à 
peu près d'exemplaires qui restent de l'édition qu'il en avoit 
fait faire. Ce détail est pour ceux qui voudront faire l'acqui- 
sition de ces planches et de ces exemplaires (1). 

— Il me manque (2), Monsieur, le !• et le 17* volumes 
in-4" de l'Histoire ecclésiastique. Je ne sçay si je ne vous les 
ay pas envoyés, afin que le relieur pût s'en servir pour relier 
la suite qui me manque, à commencer du 20* volume. Vous 
me ferés plaisir de m'envoyer, à votre commodité , ces 2 vo- 
lumes avec la suitte qui manque de cette histoire. J'ay laissé 
à Montmorency le P. Fabre en bonne santé. Je souhaite que 
la vôtre et celle de toute votre famille soit de même. Je suis 
de tout mon cœur, Monsieur, votre très humble et très obéis- 

« 

sant serviteur. 

GROZAT. 

8 juillet. 

— La Perspective , de Watteau, gravée par Crespy , le 
fils, d'après le tableau qui est dans le cabinet de H. Guenon, 



(i) Ces planches, qui passèrent entre les mains de Mariette, se 
trouvent encore dans le catalogue du fonds de Basan, en 1803. 

(2) Ce petit billet de Crozat, probablement adressé à Mariette lui- 
même, est conservé dans ses notes, parce que ce dernier en a écrit 
de Tautre côté. 

T. n. . d 



ipenuisier du roi; le fonds de ce tableau représente une veue 
du Jarjdin de ftl. Crozat à Montmorency, — Plus une vue du 
jardiq de K. Crozat à Montmorency, de$sin de Watteau gravé 
parM'deCaylus. 

— Vers le commencement de Tannée 1704 (1), Pierre Crozat 
le jeui^e, frèrie de celui qui est logé (ians la place de Louis le 
Grand, a fait construire de fond en comble une fort belle 
maison, dans un emplacement voisin, de neuf arpens de su- 
perficie. Un gros pavillon quarré et isolé forme le corps de 
oet^ maison, qui n'a qu'un étage, avec unattique au-dessus. 
Unq des faces occupe le fonds de la cour, laquelle est précé- 
dée 4'uQe avant-cour, où. sont logées les écuries et les re- 
mises. Les trois autres faces donneQt sur un jardin d'une 
b^lle étepduë, et dcmt les vues qui s'étendent sur la cam- 



(1) Cette description de la maison de Crozat se trouve dans la 
Description de Paris^ de Germain Brice, édition de i75â, 1. 1, p. 
378-82, et ne se trouvait pas dans la dernière édition publiée en 
1725 par Brice, deux ans avant sa mort, où la^maison de Crozat n'a 
que deux pages, 1. 1, p. 352. On sait que les trois premiers volumes 
de cette dernière édition, imprimés vers 1740 (Voir la préface, 
p. vn), passent pour avoir reçu des additions de Mariette. Notre 
article peut done être de Mariette ; dans tous les cas, il est curieux, 
et pour ainsi dire nécessaire, de le joindre à la préface du cata- 
logue ; Tune nous montre la collection elle-même, Tautre la belle 
demeure qui la contenait. Pour celle-ci, qui était au bout de la 
rue Richelieu, il en est question dans les curieux articles publiés 
par M. Edouard Foumier dans la Revue de Paris, sur la Grange- 
Batelière et réimprimés dans son Paris démoU, 1853^ iii-12, 
p. 223-312. 

— Les parties de la collection qui ne furent pas alors dispersées, 
le furent plus tard, et voici le titre des catalogues de ces ventes : 
Description sommaire des statues, figures, etc., provenant du ca- 
binet de M. Crozat, dont la vente se fera le 14 décembre 1750 et 
jours suivants en Tbôtel où est décédé le marquis du Cb^tel, rue 
de Richelieu; Paris, chez Louis-François Delatour, 17^P, ii^-^ 4^ 
46 pages. Une autre partie de la collection se trouve dans les 
mams du baron de Thiers, dont la vente eut lieu en 177^; ei le^ 
tableaux furent vendus en 1751 avec ceux du président de Tjyigny. 



51 

pagoe sont e^trâmeiueot variées. La (errasse au-dessus de 
roraugerie, qui borde le nouveau cours plaoté sur les rem- 
paiis de la ville, louroit elle seule une promenade des plus 
agrétfUes. Le jardin iruitier, qui est grand et régulier, est au- 
delà du cûur^, et l'on y arrive par un passage ^ulerrain 
penûé a¥QC beaucoup de dépenses dans le terre-plein du teiïi- 
pact. 

Lfs décorations extérieures de Ifi inai:^n soi)! fort sioiples 
mais de ton goût. Garlaut, ci-devant ardiitcctedu duc de 
Ber^ri, qui se distingue fort dans sa profession, a m^ la con- 
duite de ce bâtiment. L'aîle, qui règne sur un des cotez de la 
couiT, a'^ivoit autrefois qu'un seul âage. L'on j m 9, ajouté 
un second, qm parent, aui yeux de plusieurs personnes, écra- 
ser le principal corp^ du bâtiment; et Ton a encore doublé 
cette atie depuis, en s'élargissant sur un terrain voisin, ce qui 
a procuré à cette maison bien des Qommodilez qui y man- 
quaient. On a anssi bâti, en 1730, un nouveau corps de logis 
sur la rue, qui y étoit essentiellement nécessaire. Oppenort, 
dont on a déjà eu occasion de parler en plusieurs endroits de 
cet ouvritgej y est logé commodément ; c'est lui qui a eu la 
directiop de fous cas nouveaux travaux. Voilà pour ce qui 
concerne i'extérievir. 

La prodigieuse quantité decuriositez de toutes espèces, que 
reipjferme l'intérieur, est surtout ce qui rend cette maison 
considérable, e\ l'une de celles qui méritent le plus d'être vi- 
sitas. Deux grands appartements au rez-de-cbaussée, l'un à 
(fcroite, et l'autre à gauche , ornez ^'excellents tabjeaux , et 
dams l'un desquels on v^r^ une très-bdle statue antique d'un 
Baççhu§, ri^sjlaurée par François Flamand, condpi^nt à vme 
grande gi»lçrie qui aci)upe une des feces e|tti£res de l'édifice 
sujr Iç JArdin* disposition qui a été mise ici en pratique pour 
la premiiçiîe fois, et qui a été trouvée si beureuse, qu'elle 
^ ^ mUé» souvent depuis dans divers autres bâtiments. 



52 

Celte galerie, qui a dix toises de long sur vingt-deux pieds 
de large, est d'une très-belle proportion ; elle est richement 
décorée d'un goût mâle, et sans affectation d'aucun orne- 
ment superflu ; le plafond, qui est peint avec toute l'intelli- 
gence imaginable, est un des beaux ouvrages de Charles de 
la Fosse, qui y a mis la dernière main en 1707. Ce peintre y 
a représenté la naissance de Minerve, et l'on ne sçauroit assez 
admirer avec quel art il a sçu tirer avantage de la place qu'il 
a voit à peindre ; son ciel est peint avec tant de vériié et d'har- 
monie, que la voûte semble effectivement percée en cet en- 
droit-là. 

L'étage en attique est pareillement distribué en deux ap- 
partements séparez. L'un étoit occupé par Charles de la 
Fosse, qui y est mort en 1716, âgé de quatre-vingts ans, et 
il Test encore par sa veuve ; l'autre, qui est exposé au nord, 
consiste en une suite de pièces, accompagnées d'une galerie 
éclairée par les deux exlreraitez; et c'est ici que ceux qui 
sont amateurs d'ouvrages de peinture et de sculpture, trou- 
veront amplement de quoi satisfaire leur curiosité. Le maître 
de la maison se pique depuis longtemps d'aimer les belles 
choses, et il a eu le bonheur de voir passer successivement 
dans son cabinet une infinité d'autres cabipets fameux : c'est 
ce qui compose aujourd'hui l'ample collection de tableaux, 
de bustes, de bronzes, de modèles des plus excellents sculp- 
teurs, de pierres gravées en creux et en relief, d'estampes, et 
surtout de desseins des grands maîtres, dont il est posses- 
seur, et qu'il se fait un plaisir de faire voir aux amateurs de 
l'art qui viennent le visiler. Le lieu, oîi il conserve ce qu'il a 
de plus rare, est un cabinet octogone éclairé à l'italienne, 
dans la même disposition que ce fameux salon de la galerie 
du Grand Duc, à Florence, nommé la Tribune^ qui renferme 
de même un si grand nombre de morceaux précieux. Ce ca- 
binet est encore décoré dans tout son pourtour d'excellentes 



53 

sculptures en stuc, qui représentent les geoies des arts, exé- 
cutées par Pierre le Gros de Paris, dont la France a le mal- 
heur de ne posséder presque aucuns ouvrages, tandis que 
Rome, oh il est mort en 1719, âgé seulement de cinquante- 
trois ans, en peut montrer un si grand nombre, qui égalent 
cet artiste à tout ce qu'il y a eu de grand. Il étoit venu à 
Paris en 1775 pour se faire tailler, et ce fut dans cette con- 
joncture qu'il fit ces sculptures et quelques autres qui ne 
sont pas d'une moindre beauté, dans la chapelle de la mai- 
son de campagne de Pierre Grozat, située à Montmorenci. 

GRUGER (teodoro), Greuger, intagliatore. Il se nomraoit 
Gruger et non pas Greuger. Il étoit à Florence en 1617 et 1618, 
et il étoit, autant que je puis m'en souvenir, de Nurenberg. 
Il y a eu un vieux maître du même nom , qui pour se dési- 
gner mettoit un pot sur ses gravures, par allusion au nom 
qu'il portoit ; car cruger en allemand est le nom de cet usten- 
cile. 

GURÂBEL (JACQUES), architecte françois, est né en 1585. 
Il scavoil autant de géométrie qu'il est nécessaire pour un 
homme de sa profession , et c'étoit le meilleur appareilleur 
de son temps. Ge fut lui qui conduisit, sous Le Mercier, le 
bâtiment de là Sorbonne. Il n'approuvoit point la méthode 
de Desargues pour la coupe des pierres, et il écrivit contre cet' 
ouvrage un petit traité intitulé : Avis charitable, etc. J'ai trouvé 
au pied d'un de ses desseins un écrit de sa main qui m'a ins- 
truit de la datte de sa naissance, et le dessein m'a pareille- 
ment appris que Gurabel dessinoit bien l'architecture, et qu'il 
ne lui manquoit qu'un meilleur goût dans les ornements 
dont il chargeoit ses ordonnances. Gela lui étoit commun 
avec tous nos architectes qui vivoient alors. Leur goût d'or- 
nements n'est pas supportable. L'abbé de MaroUes, qui en a 



ftiit DËéMidiidâiissda Pttrts, dtflete dés atthltfectéS, m'ô 'dbbné 
son ndtn de baptême. 

€UYP (auéeét), né à Dbrdrécht en 1616, est, a» rapport 
de M. Ratpb, auteur Ses discours qui soni à là tête du Re- 
feueil d^ëst^mpés publié par Boyd'ell à Ldndteà, te Claude 
Lorrain des Hollaitdais. On ignore Tannée de sa nîort. It y a 
dans ce recuejl une pièce gravée d'après un de ses tableaux. 

DANDI (Gil«iANo); Au san Gimignan^, datis W Toscane. A 
en juger par quelques desseins de ce maître, que j'ay trouvés 
dans un livre de desseins, qui viennent tôt» tffei la fameuse 
collection rassemblée par le Vasari, ce sculpteur ëtbit un ar- 
tiste d'un grind niérite, et il est bien éttttthani que Je Tasarl, 
qui avoit de ses desseins, autqifôls il âirbit toi§ Tui-^même le 
ttottî du ïïiAître, fi'all feit aucune inentiott d'un hôrtttfee, qui 
le méritoit mieux que tant d'autres, aniquelià il â donné place 
dans ses Vies des Peintres. Si ce sculpteur n'est pas dis- 
ciple de Micbel-Ange, il en est du moins l'imitateur. Sa ma- 
lîi'èi'ê fient uh peu de ce&e dfe Mmo fiatiaiftèlli; ittiais il y a, 
dans s& façon de dessiner et dâhs les ptbp'ofrtlons dé ses fi- 
gfures, plus de grâce et de légèreté. J'a;^ un dessein d'un 
Christ poîlé ^\î tombèau; et presque tous ceux qui l'âvoient 
piôssëdé y avoienl écrit te nônï de Michel-Ange (1): Cepeh- 
dant, paT la confrontation (fue j'en ay faite avec ce ux qui me 
vîentfent du Vasari, j'ai trouvé qU'U étoit d^ Julien Bantfî', 
qui fait la matière de cet article. Sans doute que cet ârtilstè 
étciit Contemporain dïÉ Tasari, et qu'il n'aura été côrinli dfe 
ce dernier que depuis la publication de son ouvrage sûr lès 
Vies des Peintres; saiis celaf il n'y a aucun doute qu'il eti dtl^ 



(!) N* 380 do Catalogua âe ftarîèlfè. 



roit Mt Une nietition honorable, n y a eu un Jukê JMti/t, 
architecte et sculpteur, dont le Pascolî a écrit la vie ; |)elit- 
étre est-ce le même que le Julien Dandi, dont j*ay des des- 
seins. Ils étoierit certainement contemporains, et la différence 
Habs les noms n'est pas considérable. La plus grande diffi- 
culté consiste en ce que le Pascoli dit que Jules Danti étoit de 
Perugio, et que le Vasari fait originaire de San-Geminiàno 
Giuliano Dandi. Mais ces deux villes ne sont pas fort éloi- 
gnées Tune de l'autre, et il se peut que le Pascoli ait manqué 
des informations nécessaires, et qu'il ait pris sur lui de faire 
naître à Pérouse un artiste, qui y étoit mort, et (Jui y avoit 
pris un établissement qu'a voit suivi une postérité qui, à 
l'exemple de son chef, s'éloit distinguée dans l'exercice des 
arts. 

DANDRÉ-BARDON (Michel-François) est né à Aix, en Pro- 
vence, au mois de mai 1700. Destiné à fréquenter le barreau, 
ses parens l'envoyèrent à Paris pour y étudier le droit et y 
prendre ses degrés et s'y faire recevoir avocat. La peste, qui 
désoloit alors sa patrie, le retint à Paris plus longtemps qu'il 
l'avoit prévu, et, se trouvant sans occupation, n'y ayaiit rien 
qui pût servir de pâture à son génie bouillant et plein de feu, 
il se souvint qu'il étoit né avec du goût pour le dessein, et 
prit en main le crayon, se mit sous la direction de J.-B. Van- 
loo, son compatriote, et cet habile homme lui en donna les 
premières leçons. Il entra ensuite chez de Troy le fils, et y ap- 
prit à peindre; s' occupant encore davantage à jettersurle 
papier tout ce que son imagination lui suggéroit, il devint 
un compositeur fécond et facile. Celte occupation ne l'empê- 
choit pas cependant de suivre lès exercices ordinaires de l'A- 
cadémie. Il y étoit extrêmement assidu, et, ayant composé 
pour le prix de la composition, il le remporta avec distinc- 
tion. Alors il se crut en état de faire utilement le voyége de 



56 

Rome, et, pour ne point perdre de temps, il l'entreprit à ses 
dépens. On sca^oit déjà à Âix de quoi il étoit capable, et 
M. d'Albertas lui proposa, quand il y arriva, de peindre les 
tableaux qui dévoient décorer la chambre d'audience de la 
Chambre des Comptes de Provence, dont ce magistrat étoit 
premier Président. Sensible à T honneur qu'on lui faisoit, et 
voulant y répondre de son mieux, il accepta l'offre; mais ce 
lut à condition qu'il n'exéculeroit ce grand projet que lors- 
qu'il s'en seroit rendu digne par les études qu'il se proposoit 
de faire en Italie, et qui dévoient avoir principalement pour 
objet cet ouvrage important. A peine fut-il arrivé à Rome que 
M. d'Antin, sur le rapport qui lui fut fait des dispositions 
heureuses de notre jeune peintre, lui accorda un logement 
dans le Palais qu'occupe l'Académie Royale, et bientôt il fut 
admis au nombre de ceux qui y sont à la pension du Roi. 
Six années s'écoulèrent, après quoi il pensa à retourner dans 
sa patrie. Il parcourut en amateur instruit toutes les villes 
de l'Italie qui se trouvèrent sur son passage, et il y admira 
les productions des grands peintres qui s'y rencontrèrent. 
Mais Venise eut pour lui le plus grand attrait. Séduit par le 
brillant de la couleur et par la richesse et la nouveauté des 
c )mpositions des peintres de cette école, il ne pouvoil s'arra- 
cher de cette ville; il y séjourna six mois, après quoi il vint 
à Aix, et, sans perdre de temps, il se mit à l'ouvrage qui lui 
étoit destiné. Il ne l'avoit pas perdu de veùe pendant son sé- 
jour à Rome; il s'en étoit sufdsamment rempli, et même, 
pour agir avec plus sûreté, il avoit engagé Michel-Ange 
Slodlz, son ami, et élève comme lui de l'Académie, de mode- 
ler sur ses desseins quelques-unes des prioci pales figures qui 
dévoient entrer dans la composition du plus grand tableau 
qu'il alloit exécuter. Il y représenta l'Empereur Auguste, qui, 
se faisant rendre compte de Tadministralion de ses finances, 
fait punir de mort les comptables prévenus du crime de pé- 



57 

' culat, et les fait jetter dans le Tibre. Dans d'autres tableaux, 
qui dévoient occuper les espaces entre les croisées, furent 
représentées avec leurs attributs la Religion, TËquité et les 
autres vertus qui doivent habiter le sanctuaire de la Justice. 
Cet ouvrage, composé avec feu et exécuté avec une égale 
fougue, fut très-bien reçu, et attire encore les regards de ceux 
qui vont à Âix. Ce fut après lui avoir donné la dernière main 
que le Dandré fit le voyage de Paris. Son excellent caractère, 
ses mœurs douces, et un certain enjouement lui gagnèrent 
bientôt l'amitié de tous ceux qui le connurent. 11 se présenta 
pour être de l'Académie, et y fut admis avec distinction en 
1735. Son tableau de réception, qui représente la cruelle 
Tullie, qui fait passer son char sur le corps du roi son père, 
lui fit honneur et le distingua dans le nombre de ceux qui 
décorent les salles de l'Académie. J'ignore sur quel prétexte 
il retourna en Provence. Il éloit dans la persuasion qu'il y de- 
voit finir ses jours, et, dans cette intention, il sollicita la place 
de Controlleur des Peintures des vaisseaux et des galères du 
Roi, à Marseille, qu'avoit eu le peintre Serre. Une pension de 
900 liv. étoit attachée à cet emploi, et suffisoit, avec un bien 
de famille honnête, pour faire subsister un philosophe sans 
ambition et sans désirs. Mais, le roi ayant jugé à propos de 
transférer sa marine à Toulon, Dandré ne put se résoudre à 
abandonner Marseille, où il vivoit agréablement; il remit son 
emploi, sur lequel on lui réserva une pension, et, quelques 
années ensuite, on le vit reparoîlre à Paris. La mort de Lépi- 
cié, qui eierçoit l'emploi de professeur d'histoire dans l'école 
des élèves protégés par le Roi, fit vacquer cette place, et, per- 
sonne n'étant plus en état de la remplir que le Dandré, qui 
étoit homme de l'art et homme de lettres en même temps, il 
n'eut pas de peine à l'obtenir. De ce moment il se consacra 
tout entier à l'utilité des élèves, dont on lui avoit confié l'ins- 
truction, et, quittant pour toujours le pinceau, il ne laissa plus 



sôMii» là f)Iââi6 dé ses maiûs. Tôifâ se^ travaux se fiièrbnt à 
Igé (Jui pouvôit contribuer à rirlstruclion des jeunes peintres 
qui suivôifeiit ses leçons ; et ce qu'il crut poutoir leur être plus 
lîtiife, lut uiî cours complet de tous liée usages et coutumes 
des différents peuples, afin de les diriger dans ûîie observa- 
lion exacte des règles du costume. Il voùloit giussi leur ap- 
prendre à traiter convenablement chaque trait d'histoire, et 
. Touvrage, qu'il se promettoit de publier sur ce sujet et qui 
en auroil renfermé les règles diverses, avoit nombre de vo- 
lumes. Il n'a eu la satisfaction que d'en voir paroître Irois, 
qui satis doute n'auront point de suite. Pour y réussir, il au- 
rbi!, ce me Semble, dû être moins proUte et moins amou- 
reux de ses propres idées. Le délabrement de la santé de l'au- 
teur y apporte d'ailleurs un obstacle insurmontable. En 1770, 
il ô eu une attaque d'apof)lexie, qui, suivie d'une paralysie, 
le réduit à ne faire presque plus que végéter, quoique sa têle 
lui soit demeurée, et qu'il continue à être toujours le même 
à l'égard de ses amis. Son nom de famille est Dandré ; Bar- 
don est celui d'un oncle maternel qui, eh l'instituant son hé- 
ritier, lui a imposé de prendre son nom. 

DARET (hÈRRfe) de Piaris. S'il est vray, comme on le pré- 
fend, qùé Pierre Daret, avant qile d'eihbrasser la graveuro, 
eût étudié dans la veue de devenir peintre, et qu'il eût ac- 
quis là pratique du dessein avant que de commencer à ma- 
hier le biirin, il ne pouvoil prendre une route plus sûre. 
Tous ceux qui se soiit rendus habiles dans l'art de la gra- 
veure ont tous reconnu la nécessité de savoir bien dessiner. 
GA ne fes estime qu'autant qu'ils ont possédé cette partie do 
leut àrl dans un éminent degré. Il paroist, par tout ce que» 
Daret a gravé, que c'estoit à quoy il s'étoit le plus appliqué. 
Il s'étoit formé sur les maistres qui avoient le plus de répu- 
tation de son temps en France. La manière de Youet lui étoit 



59 

Siïrfcut devéïiiié familière. C'était la manifere dofninaiile et 
lâi Seule qui fut receùe. Darèl Ta rendue très heureusement 
datis tout ce qu'il a gravé d'après ce peintre. Le burin de Dâ- 
ret est assez beau, sa touche est artiste ; mais il lui manque 
une certaine mollesse, qui fait que ses ouvrages paroissent 
i&Ss, Ob lujr a l*6b%Jatiort d'avoir sçu former d'habiles élèves, 
fJaimi lesquels le célèb^e François Poilly tient le premier 
îdng. Daret fut i-eceu de l'Académie de peinture eu qualité de 
gra*éUr. SUr la fin de sa vie, il abandonna tout S fôîl èette 
profession pour se ifaellre à la peinture, qui âvoit été le pre- 
miéir objet de ses éludes (1). 

— Là sainte Vierge ayant sur ses genoux l'erifant Jésus 
assis; qui s'avance pour recevoir des fleurs qu'un ange lui 
ptésetite. C'est un pillage de la Charité de Blanchard, êl je 
crois cette pièce tout aii plus gravée sous la conduite de 
Daret. 

— dés anges supportant en l'air le portrait de la sainte 
tierce et des devises qui lui conviennent. Gravé en 1647, d'a- 
|j|*fes' Lhbin Bâugnî. Dans les premières épreuves, c'étoit, au 
Meii du pôrtrdil de la Vierge, celuy dil Prince de Gonty, élarlt 
abbé, et les devises étoient différentes (2). 



(1) Il existe de Direl un petit volume assez rare : Abrégô de la 
vie de Raphî^ôl Samio d'Urbin très-excellent peintre et architecte, 
où il est traité de ses œuvres, des stampes qui en ont esté gravées, 
taiit par Marc-Ântoine Eiolognois qu'autres excellents graveurs. Do 
rori]»liie de la gràveore en taille douce: avec une* adresse dès 
lieux où. les pr^incipapx peintres italiens, d'eserlts {sic) par Yasari 
ont travaillé. Traduit d^talien en françois par P. Daret, graveur. 
A Paris, chez Tautheur, sur le quai de Gesvre, au Rossignol, ICîil. 
Avec privilège du roy; très-petit in-12 de i 2 et 120 p. On pense 
bien que le volume est loin de contenir tout ce qui est sur le litre. 
Plus tard, en 1709, Bômbourg mit en tôle de sa description des 
peinttlres de Lyon cet abrégé du Yasari, par Daret, mais sans par- 
ler de ce dernier. 

(2) G*est la pièce, qui, dans Toeuvre de Lesueur de Latiddh dt de 



60 

— La Véronique, tenant la sainte face de J.-C. En demy 
corps, d'après Jacques Blanchard. Dédié à Jaques Goislard, 
secrétaire du roy et curieux de tableaux, par P. Mariette, mon 
bisayeul. 

DÂRGENVILLË (Antoine-Joseph-Dezalier), né à Paris, le 
15 juillet 1680, y est mort le 26 novembre 1765. Son père, 
Antoine Dezalier, avoit exercé la librairie dans c^lte ville avec 
distinction (1), ayant suaédé au commerce de Jean Dupuis, 
dont il avoit épousé la veuve, Marie Mariette. Le fils prit de 
bonne heure du goût pour les arts; il fit le voyage d'Italie en 
1714, et dans la suite celui de Londres, et il entreprit de for- 
mer une collection de tableaux, de desseins et d'estampes, à 
laquelle il en joignit une d'histoire naturelle, collection qui 
auroit pu passer pour belle, si le possesseur eût laissé le pu- 
blic maître d'en juger; mais, à force d'en vouloir relever lui- 
même le prix par des discours exagérés, il faisoit qu'on la 
réduisoit à sa juste valeur, et qu'on ne la trouvoit point faite 
avec autant de goût qu'il eût été à désirer. Il avoit commencé 
par se montrer grand partisan de Sébastien Leclerc, et l'œu- 
vre qu'il avoit rassemblée de ce graveur éloit très complète. 
Il prit des leçons de paysage de Chaufourier, et il se crut 
assez habile pour manier le crayon, et même le pinceau; 
mais l'un et l'autre lui réussirent fort mal. Il voulut aussi 
écrire; il donna deux volumes sur les coquilles et les fossiles; 
il en donna trois sur les Vies des Peintres, et, si le succès dé- 
cidoit de la bonté d'un ouvrage, les siens auroient été excel- 
lents. Il s'en laut pourtant beaucoup que les vrais con- 



Ghallamel, a été reproduite à torl comme étanl de lui, et qui, dans 
le catalogue des Arcniues de l'Art français (t. ii), n'avait éié rangée 
que dans les œuvres douteuses. 
(1) Il demeurait rue Saint-Jacques, à la Gouronne-d'Or. 



61 

naisseurs en portassent ce jugement. Il s'étoit fait recevoir 
secrétaire du Roi, et en 1733 il prit une charge de maître des 
comptes. L'Académie des sciences de Montpellier Tavoit ad- 
mis au nombre de ses honoraires, et il étoit aussi de la So- 
ciété de Londres. 

DASSIÉ (Adrien), peintre, dont il y a plusieurs tableaux 
dans les lieux publics de Lyon ; De Bombourg. Tourneyser a, 
ce me semble, gravé quelques morceaux d'après ses des- 
seins. 

DASSONVILLE (Giacomo) vivoit en 1658, et peignoit des fu- 
meurs et buveurs de bierre, dans le goût de Brauwer. Je n'ai 
point vu de ses tableaux; mais j'ai quantité de petites plan- 
ches qu'il a gravées d'après ses desseins, et qui ne me donnent 
pas une fort grande idée de ses talents. Je n'y trouve rien qui 
conduise à des effets capables de relever la bassesse des su« 
jets qu'il traite. Il y a apparence qu'il étoit établi à Anvers, 
puisque quelques unes de ses planches se vendoient chez 
Martin Vanden Enden. 

DATI (CosiMo), discepolo di Battista Naldini. Le Baldi- 
nucci le nomme Duli : dec. 1, p. 3 seculi, iv p. 180.— Cosimo 
Gamberucci, discepolo di Santi di Tito, e per qualche tempo 
lavcroappresso Battista Naldini. Bald. dec. 1 y part. 3 seculi iv, 
pages 180 et 182. 

Ces deux peintres étoient de l'académie de Florence, et ils 
eurent chacun à peindre un tableau dans les décorations pour 
l'entrée de Christine de Lorraine, grande duchesse de Flo- 
rence, en 1588. On les trouve gravés dans la description im- 
primée de cette fête. 

En un autre endroit, pag. 162 du môme vol., le même 
Baldinucci fait la vie de cet artiste, et le nomme Daddi. Il le 



62 

f^it natif de Florence, et Ty fait piourif de la pçste, en 163Q. 
H fait mçqtion au môme endroit du tableau fait pour l'entrée 
de ÇHristine de Lorraine^ et il dit qu'il étoit peint k fresque. 
Capainei^t cpnqUer ^el^ avec ce qui est rapporté h la J^g- J8Q- 
L'auteur y assure que tous les tableaux pour ç<ette eqlfée y 
furent peints à Tbuile. Ce peintre donna les premiers ensei- 
goemepts de la Peinture au fameux Balth. Franceschini» ^it 
le YoUeriano. C'est ce que remarque le Balcjinucci ai} çoifl- 
menceinent dp la vie de ce dernier peintre. 

DAULLÉ (Jean). La ville d'Abbeville, si léconde en bons gra- 
veurs, a yu naitre je^a Qaullé, ^n 17U, et lui a fpurni les 
premiers wpyens de s'instruire des principes dç T^rt de 14 
gravure, dopt il se proposiolt ^e laire ^0 iinique p^o^siçm^ 
11 ssavpit déjà assez passableineDt iqiinier le \>\xm iQrsqi^'il 
viftt à Paris, dans la vue cl'étendre ses connaissances, çt, aj Wt 
eu pour lors ^ graver d'assez grandes planches ^e thèses, 
d':a.p(f^. les de^^iqs des différents grands mattre.s (^e potrip 
école, pour M. Uecquet, son compatriote, qui le nourrit çke^ 
lui, et lui montra le peu qu'il savoit, il acquit çn fort rçu 
de temps une très grande facilité de couper le cuivre. Son 
burjn, conduit avec Irancbisc et pureté, produisait le? i{ps 
les plus doux et les plus agréables à l'œil. Il éloit net, s,am 
avoir rien de s^ec. La réputation du jeune artiste ne lard^ pas 
à se répandre, et le célèbre Rigavid ayant ^u l'ocxîa^ion de 
voir une épreuve du portrait de la comtesse de Fcuquièr^, 
fille de Pierre Mignard, le peintre, et fameuse par sa beauté, 
que yenoil de graver Daullé — ce fut M. Hecquet qui lui pro- 
cura cette oeuvre, — il résolut de se l'attacher et d'eç faire psour 
l'avenir spji graveur. Il s'étoit refroidi pour les Drevet, en qui 
il croyoit ne plus appercevoir le même zèle et les mêmes 
é^§r4s. 30US la conduite d'un peintre si intelligent, DauUéfit 
piJ[U!iieurs chefs d'cQuyre, qui lui méritèrent une place dani 



68 

l'Académie royale de peinture et de sculpture. 11 y fut admis 
en 1742. On met avec raison au rang de ce qu'il a fait de 
plus accompli, le portrait de Gendron, fameux oculiste; celui 
de la comtesse de Gaylus, et celui de Bigaud lui-même, qui, 
par un motif de tendresse pour une épouse qu'il avoit beau- 
coup aimée, et que la mort lui avoit epleyée, se représenta 
peignant le portrait de cette épouse chérie, di^ ou douze an-r 
nées avant sa mort, arrivée au mois d'avril 1743 (1). DauUé, 
qui étoit encore dans la fleur de l'âge, se dégoûta du g^nre 
des portrfiijts qyi lui paraissoit exiger trop de cootrainte, et il 
s'imagina que, s'il gr£ivoitpoi|rson propre compte des sujets 
agréables, il y trouveront mieux son compte ; il cboisjt quel* 
ques morceaux de Boucher, composés agréablement; il grava 
deu^ planches, d'après des dcsseips que U. Jeaurat avoit (ait 
de deux tableaux du Poussin; il se livra, comme b^ucoup 
d'autres, au torrent. Il s'exerça sur des tableau?: de JI. Yer- 
net; mais, pour dire la vérité, il s'y prenpit trop lard, et il 
sortoit de son genre; les planches ne lui firent pas beaucoup 
d'honneur; elles firent apercevoir que celui, des mains du- 
quel elles sortoient, pêchoit par le dessin, et queseul il ne pou- 
voit rien faire de bien ; il lui falloit un conducteur, et il n'en 
trouva point. Peut être même qu'une trop bonne opinion de 
lui-même s'y seroit opposée, car c'éloit le défaut de Daullé, 
cl il s'éloignoit de tous ceux qui eussent pu lui donner des 
avis salutaires. Ce qu'il a fait de mieux dans le genre de l'his- 
toire fait partie du recueil des tableaux de la galerie électo- 
rale de Dresde. J'en excepterai le portrait en pied de la reine 
de Pologne^ qui, mis en parallèle avec celui du roi, gravé par 
Balechou, pour le même ouvrage, paroît une gravure à denii- 



(1 ) MarieUe avait écrit par erreur 1763. — La planche est à la 
chjileoi;r»p]»iiB d^ L(00vr«, a^ 1614 an nouveau livret. 



64 

faite, et tout à fait insipide. Elle est cependant supérieure a 
celle du portrait de la princesse de Hesse Hom bourg, nc^e 
ïmbelski, que DauUé a gravée pour le général Betski, frèro 
de cette princesse, d'après un tableau de M. Roslin, où elle 
est représentée assise. C*est par où il a fini sa triste carrière ; 
car cet ouvrage, qu'il traîna et qu'il fit avec négligence, lui 
lit éprouver des désagréments, qui le durent beaucoup mor- 
tifier, quelques soins que j'eusse pris pour lui en épargner 
une partie. 

— Un enfant qui en caresse un autre, lequel tient une co- 
lombe, et a à ses pieds un carquois rempli de flèches, ce qui 
fait donner à cette pièce le titre de l'Enfant qui joue avec l'A- 
mour, gravé au burin, en 1750, par Jean DauUé, d'après un 
tableau d'Antoine Van Dyck, dont la composition, quoique 
différente, tient beaucoup de celle dont on a une estampe, 
gravée par Arnould de Jode, et qui a pour sujet l'enfant Jé- 
sus, recevant les actes de soumission du jeune saint Jean. 

DAUPHIN (Charles), disciple de Vouet, s'étoit étably à 
Turin, où il est mort, environ l'an 1677. Ce que Thourneyser 
a gravé d'après ce peintre, en donne une assez bonne idée. 
Felibien en a fait mention à larticle de Vouet, à l'endroit où il 
fait le dénombrement de ses disciples. Il en parle aussy dans 
le petit livre intitulé : Noms [des peintres les plus célèbres, p. 56. 

DAVID, Florentin, a fait, vers l'an 1489, un tableau de 
mosaïque, représentant la sainte Vierge, assise dans un trosne, 
qui est à Paris, dans l'église de S. Mederic; Mém, ms. de 
Felibien. Ce David est David Del Ghirlandaio, et Vasari fait 
mention, dans la vie de cet artiste, du tableau, qui est présen- 
tement à S. Mederic (1). 



(1) Il est maintenant au musée de l'hôtel Cluny. Voyez sur cet 



65 

D'AVILER (Charles-Augustin), né à Paris, en 1653, d'une 
famille qui y étoit établie depuis longtemps, et qui étoit ori- 
ginaire de Nancy, embrassa de bonne heure Tarchi lecture, 
pour laqueHe il avoit une forte inclination. Ayant été jugé 
capable d'être envoyé à l'académie de Rome, il partit de Pa- 
ris en septembre 1674, accompagné d'Antoine Degodetz, âgé 
pour lors de 20 ans, qui alloit à Rome dans la même veûe 
d'étu<iier. Ils s'embarquèrent à Marseille; des corsaires Al- 
gériens, qui rencontrèrent le bâtiment sur lequel ils étoient 
montés, l'attaquèrent, et firent esclaves tous ceux qui s'y trou- 
vèrent. M. Jean Foy Vaillant, le médecin (1), fut du nombre. 
Seize mois se passèrent sans que les Algériens voulussent en- 
tendre parler de leur rançon, quoy qu'on leur offrit des sommes 
considérables. Ils convinrent enfin de les échanger contre des 
Turcs, qui avoient été pris par les Français. Daviler et ses 
compagnons sortirent ainsy d'esclavage, le 22 février 1676. 
Il alla sur le champ à Rome, et, pendant cinq années qu'il y 
demeura, il étudia et fit ses remarques sur les plus beaux 
édifices antiques et modernes, qui rendent cette ville si re- 
commandable. De retour à Paris, M. Mansart le reçut au 
nombre de ceux qui travailloient sous luy dans le bureau 
d'architecture; il y demeura plus de huit ans, et ce fut pour 
lors que, mettant à profit le peu d'heures de loisir qui luy 
resloient, il entreprit son cours d'architecture, dans lequel il 
renferma tout ce qu'il est nécessaire de sçavoir pour avoir 
une notion complette de cet art. Il choisit Vignole comme le 
plus exact et le plus suivy des auteurs, et il adjouta à son 
texte d'excellens commentaires, qu'on doit regarder comme 
le fruict des études qu'il avoit faites jusqu'alors, et tout le 



ouvrage la note de Tun de nous, dans le premier volume des Ar^ 
chives de VArt français^ p. 97-9. 
(1) G*esi le fameux numismate. 

T. n. • 



66 

monde convient qu'il ne se peut rien désirer de plu* solide 
et de plus instructif. Daviler, en composant cet ouvrage, ne 
se fia pas tellement h ses lumières qu'il ne consultât ce qu'il 
y avoit de gens les plus éclairés. M. d'Orbay, dont le mérite 
est si connu, fut un de ceux qui lui donna les meilleurs avis. 
Il en ççut profiter. Tout ouvrage, qu'on assuj^tit à une judi-' 
cieuse critique avant que de le faire paroistre, est presquç 
sûr de réussir ; aussi n'y en a-t-il eu aucun en architecture 
•qui ait eu un sort plus heureux que celuy de Daviler, et, 
quoyque les étrangers fassent peu de cas de ce que nous pro- 
duirons en ce genre, ils ont sçu rendre à sop ouvrage la jus* 
tice qu'il méritoit. Avant que de donner spn cours d'archi- 
tecture, Daviler avoit fait paroistre une traduction du traité 
des cinq ordres de Scamozzi en un vol, ia-foUo, qui parut 
en 1685. Enfin, las de ne se pouvoir faire conuottre à Paris 
par quelque grand ouvrage de réputation, il accepta l'offre 
qu'on luy fit d'aller à Montpellier, y bâtir la porte du jPey^ 
rou, ou arc de triomphe que les États de Languedoc avoient 
résolu d*y faire construire sur les desseins du s, d'Orbay, On 
en fut si satisfait que, pour le retenir dans la province, le3 
États lui décernèrent le titre de leur architecte, au commen- 
cement de i693, et lui firent avoir en même temps le brevet 
d'architecte du Roy. Ils lui procurèrent d'autres ouvrages dans 
la Province, et M. Colbert, archevêque de Toulouse, persuadé 
de son habileté, fit rebâtir entièrement, sur ses desseins, son 
palais archiépiscopal, qu'il n'avoit eu dessein que de faire 
rétablir. Daviler, trouvant de l'emploi dans le Languedoc, 
s'établit et se maria à MontpelUer. Mais à peinecommençoilr 
il à s'y distinguer, qu'il y mourut à la fleur de son âge, en 
l'année 1700, n'étant âgé que de 47 ans. Mémoires cammuni" 
qués par M. son frère. 

— Il partit de Paris en 1691, et arriva à Montpellier «u 
cx)mmencement de juillet de oette année. Dans une de ses 



67 

lettres, datée du mois de septembre 1691, il se plaint amère- 
ment des procédés de H* Mansard, qui, loin de lui être favo- 
rable, le traversoit dans le dessein qu'il avoit formé de se 
faire recevoir dans l'Académie Royale d'architecture. Il se 
repent d'avoir perdu cinq années de son temps auprès de cet 
architecte. -«*I1 a construit le palais Épiscopal à Béziers, et a 
travaillé à Carcassonne, à S.-Ponset en divers autres endroits 
du Languedoc. 11 fut envoyé en 1699 au pont du Gard, 
pour projetter les réparations qui y éloient à faire. Mais 
comme il est mort en 1700, je ne crois pas qu'il ait eu part 
à cette entreprise, -t. n a bâti quelques maisons dans Mont- 
pellier» et a donné des desseins magnifiques pour la Versur^, 
maison de campagne des Évéques de Montpellier. (Extraits 
de ^s lettres écrites à M. Langlois.) 

DAVIS (Edouard le), né dans le pays de Galles, a appris 
à graver chez Loggan. U vint à Paris , et je connois deux 
planches qu'il a gravées : Tune est un Ecce hotm, d'après Aq- 
nibal Carrache ; l'autre une Sainte-Cécile, d'après Van Dyrk. 
Toutes deux portent l'adresse de François Chauveau, qui les lui 
acheva sans doute. Lorsqu'il repassa à Londres, il s'y fit mar- 
chand de tableaux, et il réussit dans ce commerce. Il pouvoit 
devenir un assez bon graveur ; car il coupoit bien le cuivre. 

DE LA JOUE (Jacques), peintre, de l'Académie Royale de 
Peinture et Sculpture, a eu pendant quelque temps de la 
vogue. Il peignoit l'architecture, et l'ex^lravagaoce de ses 
compositions trouva des partisans. C'étoient les mêmes qui 
admiroient les licences que se donnoit Meiâsanier, autre des- 
tructeur du bon goût. U fut décidé qu'il ne se ieroit rien qui 
ne fût de travers, et qui ne sortît des règles que prescrit la 
b^e et noble simplicité. En conséquence» la Joue se met à 
rai$e, et, laiss^At courir son pinceau sur la toile» il y multi- 



68 

plia les absurdités d'un faux génie; car il n'en avoit point. Il 
ne faisoit que se répéter. Heureusement, ce goût n'a pas duré. 
Depuis longtemps les ouvrages si estimés de de la Joue sont 
tombés dans l'oubli. Il étoit généralement méprisé et sans 
occupation, lorsqu'il est mort le 12 avril 1761, Agé de 74 ans 
ans et 5 mois. Il avoit été reçu de l'Académie en 1721. Il 
étoit né sur la fin de 1687. 

DELAULNAY (Noël), élève de Lempereur. 

DELLA BELLA (stefâno). Rien ne contribue davantage à 
faire fleurir les beaux artsque de les favoriser, et l'on n'auroil 
peut-être pas veu fleurir en France tant d'hommes habiles 
dans ces derniers siècles, s'il ne s'y étoit pas trouvé en même 
temps des personnes qui les aimoient et qui les protégeoient. 
Les honneurs et les récompenses, distribués abondamment à 
ceux qui s'y distinguèrent, eurent le double avantage de 
faire naîtje d'habiles maîtres et d'attirer en France d'excellens 
sujets. Parmi eux , il n'y en a guères qui ait acquis plus de 
réputation qu'Etienne délia Bella, ni qui, par rapport à la 
multitude et à la beauté des ouvrages qu'il a fait en France, 
mérite mieux d'être rangé parmi les François. Né à Florence, 
vers le commencement du dernier siècle, il témoigna dès ses 
plus tendres annét^s un amour tout singulier pour le dessein ; 
il fit apercevoir surtout un penchant naturel pour exprimer 
en petit tout ce qu'il voyoit. L'exemple vient de Callot , qui 
avoit travaillé dans ce genre avec tant de succès; ses ou- 
vrages, dont Florence étoit remplie, furent, et ce qui encou- 
ragea le plus délia Bella , et ce qui lui servit de guide dans 
ces commencemens. La peinture, qu'on voulut lui faire em- 
brasser, ne put le détourner de ses premières idées; mais ce 
qu'il en apprit ne contribua pas peu à luy former le goût, 
qu'il avoit naturellement excellent. Le séjour de Rome acheva 



69 

de le perfectionner. Il y alla dans la veue d'étudier sérieuse- 
ment d'après tout ce qui lui paroîtroit le plus propre pour 
annoblir sa manière, et il s'accoutuma tellement dès lors à 
étudier, qu'il avouoit sur la fin de sa vie que quand il auroit 
eu en veue de s'appliquer à la peinture , il ne lui auroit pas 
fallu plus d'études. L'on ne doit donc plus être étonné s'il se 
trouve dans tout ce qu'il a gravé , et jusque dans les plus 
petites choses, un goût si grand et si noble, s'il a si bien 
sceu composer et si richement , s'il a répandu tant de vie , 
tant de feu dans ses Ogures , si ses airs de testes sont si gra- 
cieux qu'il y en a qui ne seroient pas désavoués par le Par- 
mesan. En cela, Etienne délia Bella paroît fort supérieur à 
Callot, quy, quoyque plein d'esprit, dessine d'une petite ma- 
nière, et qui tombe souvent dans le style burleque; par là, 
aussy, Etienne délia Bella s'est rendu original et Tauleur de 
sa manière. La fermeté de pointe de Callot l'avoit ébloui 
dans ses commencements ; mais bientôt il abandonna cette 
manière, qui luy parut trop roide et trop comptée, pour en 
prendre une plus moelleuse et plus flexible, mais qui est 
pourtant devenue quelques fois trop lourde et trop confuse à 
force d'y mettre du travail et de vouloir laire de l'effet. Si c'est 
un défaut qu'on puisse reprocher à cet auteur, il ne se trouve 
pas toujours dans tout ce qu'il a gravé ; car ce qu'il a fait en 
petit est très-léger, et, pour ce qu'il a dessiné , personne ne 
l'a fait avec autant de légèreté et d'esprit. Il étoil tout à fait 
propre à représenter des actions militaires, des veuesde mer 
et des vaisseaux, des ruines, des animaux, des pastoralles, 
et surtout desfestes et des spectacles, qu'il représenloit dans 
toute leur magnificence. Il fut occupé à en dessiner plusieurs 
pendant le séjour qu'il fit en France, qui font présentement 
un des principaux ornemens du cabinet du roy, comme les 
desseins que l'on conserve de lui à Florence ne sont pas des 
moins précieuses parties de celuy du grand-duc. Etienne 



7* 

délia Bella atôit eu Thonneur de motitret à dessiner au grand-' 
duc Cosme IH , et , $'il eût voulu rester plus longtemps en 
France , on luy faisoit espérer le même honneur auprès du 
roy Louis XIV ; mais quoy qu'il fût chéry de toutes les per- 
sonnes de distinction , encore plus pour rexcellenoe de son 
caractère qu'à cause de son habileté, Tamour de sa profes* 
sion, joint à la délicatesse de son tempérament, lui faisant 
préférer la retraitte, lui fit aussy mépriser tous les offres 
avantageux qui pouvoient établir sa fortune (1). 



(1) Quand on connatt le catalogue de Fœuvre de la Belle, publié 
par Charles Antoine Jombert, Pans, 1 774, in-8«, de VIII et 230 pages, 
on s'èlonneraqu*on puisse autant lui ajouter que le fera ce que nous 
publions de Mariette, sans parler de ce ^ui est purement un ca- 
talogue, ce que nous sommes forcés de laisser* Ce qui Texplique, 
e*est que Mariette^ qui comptait faire quelque chose lui-même sur 
le suj«t, et qui élaii déjà vieux, et peut-être par fois fantasque, se 
refusa de communiquer à Jombert Tœuvre magnifique qu*il en pos- 
sédait» Nous apprenons ce fait de la préface de Jombert : 

« Un seul amateur, possesseur de Toeuvre de la Belle le plus com- 
(c plet qui existe aujourd'hui, étoit en état de me conduire et d*è- 
«( clairer mes pas dans ce labyrinthe de difficultés ; mais, loin de 
c me prêter un secours que j'avois lieu d'aUendre de lui, il m*a 
« refusé môme la permission de jetter un coup d'œil sur ce trésor 
«c unique qu'il possède, parce qu'il se propose de travailler aussi 
a sur le même sujet. En attendant donc que cet amateur, très* 
« éclairé et bien plus capable d'écrire sur tout ce qui concerne 
« les arts, veuille bien nous faire part de ses connoissances, et don- 
« ner au public un catalogue de Tœuvre de la Belle d'après celui 
a qui est entre ses mains, je prie le lecteur de jeter un coup d'œil 
« favorable sur cet essai, etc. (Avertissement, p. v-vi.) » Il revient 
encore sur ce refus dans la préface de son catalogue de Le Clerc : 
« J'ignore s'il se trouve un œuvre de Le Clerc dans le célèbre ca- 
t< binet de M. M***, et dans quel état 11 peut être. Le refus qu'il 
«t m'a fait de me laisser prendre connaissance de l'œuvre de la 
« Belle qu'il possède» dans le temps que je m'occupois du catalogue 
n des ouvrages de cet artiste, m^a rendu assez circonspect pour ne 
a pas me mettre dans le cas d'un nouveau refus à l'occasiOBi de 
« celui-ci (I, p. xxv). » — Nous ajouterons que les renseignements 
de Mariette seront a'autant plus nouveaux qu'ils n*ont pas été em- 
ployés par M. Le Blanc, pour son ManuH de l* Amateur d' Estampes^ 
dans la croyance où il étalt^ comme tout le monde» qu'il n'y 
avait rien à trouver au delà du catalogue de Jombert. 



71 

— Êtietine délia bellâ, étant encore fort jeune, grava les fi- 
gures qui se trouvent dans le livre intitulé : Oescrizion délie 
féste in Pirerizê per la can(miz%a%ione di santo Andréa Cor sini; 
in Fiorenza, nella stamperia di Zanobi Pignani, 1632, 4® (1). Ce 
litre fut mis au jour en 1632, il contient une description de 
la feste faitte à f lorence pour la canoni^lion d'André Cor- 
sini , ^e 1^' de juillet de Tan 1629. Il y a dedans vingt plan- 
ches représentant divers sujets de la vie du saint, et à la 
teste il y a un frontispice qui représente la décoration de la 
façade de ladite église et la procession solennelle oîi l'on 
porte Timage du saint. A toutes ces planches, il n'y a aucun 
nom ny marque de graveur ; elles sont à l'eau forte , mais 
Tôtt reconnoît facilement à la manière qu'elles sont deStefano 
délia Bella et de ses premiers ouvrages de gravure, car, quoi- 
que le livre ait été mis au jour en 1632, il ne faut pas inférer 
de là que les planches aient été gravées dans cette année. 11 y 
a apparence qu*elles l'ont été sur la fin de 1629. Le livre de- 
voit même être mis au jour dans cette année ; les approba- 
tions et permissions d'imprimer sont datées de la fin de no- 
Tembre et du commencement de décembre 1629, et le 
libraire, qui se doutoit bien que l'on trouveroit à redire qu'il 
eût si longtemps tardé à donner cette édition , se crut même 
obligé de rendre compte de la cause de ce retardement 
dans un avis au lecteur, oîi il en rejette la faute sur les cala- 
mités publiques qui avoient désolé l'Italie. Il adjouie que Ton 
peut juger, par les dates des permissions, que la composition 
de l'ouvrage étoit finie, il y avoit longtemps , et qu'aussitôt 
il l'avoit mis sous la presse , mais que d'autres 0(^})aliôns 
Tavoient détourné. Il y a donc grande apparence que les 
planches furent gravées presqu'aussitôt que la feslei la ma- 



■<!• I ■ 



(1) Jombert, u? 22. 



72 

nière dont elles sont exécutées en est une preuve. Baldinucci 
dit que la Belle ne resta à Florence que quelques mois après 
avoir gravé, en 1627, le repas donné par les Piacevoli (1), 
qu'ensuite il alla à Rome, où il resta pendant deux années, 
pendant lesquelles il grava l'entrée de l'ambassadeur polonois 
en 1633 (2). Il y a peu d'ordre dans tout ce récit; car la Belle 
s'arreste à Florence beaucoup plus de temps que ne le dit 
Baldinucci ; cette feste de Saint-André Corsini en est une 
preuve. Le titre du dialogue de Galilée (3) a été gravé en 1632, 
le livre ayant été imprimé à Florence, chez Jean-Baptiste 
Londi, en cette année. Ce qui est de certain, c'est qu'il devoit 
eslre à Rome en 1633, puisque ce fut cette année que Tam- 
bassadeur y fit son entrée. Mais qu'il Tait gravée cette année 
à Rome, c'est ce qu'il faut examiner. En 1633, il grava à 
Florence l'image miraculeuse de N.-D. de l'Imprunette (4), ce 
qui pourroit faire croire qu'il revint de Rome sur la fin de 
cette année 1633. Ce fut pour lors, au commencement de 1634, 
au plus tard, qu'il grava le titre de : Lactis Physica analy- 
sis[S), et peu après la suite des vaisseaux, dont il dédia les plan- 
ches à don Laurent de Médicis, son Mécène (6). il n'est point 
vray qu'il grava, étant à Rome la première fois, le CampoVac- 
cino (7), puisqu'elles n'ont pas été faites avant l'année 1650, 
et je croirois même assez Volontiers qu'elles n'ont pas été 
dessinées que dans son second voyage à Rome , et peut-être 
gravées ensuite à Florence, dont les planches furent envoyées 



(i) Jombert, no 4. 

(2) Jombert, n« 28. 

(3) Jombert, n» 24. 
(À) Jombert, n« 27. 

(5) Lactis phvsica analysis, auctore Jeanne Nardio philosopho, 
medico Florentino, Florentise, lypis Pétri Nestii, 1634, À'*. 

(6) Jombert, n'>31. 

(7) Jombert, n» 189. 



7a 

en France par la Belle à Israël; car, y étant retourné de 
France, il y grava plusieurs planches pour cet Israël. 11 n'est 
jjas vray non plus que la Belle soit venu en France précisé- 
ment au sortir de Rome , comme le dit Baldinucci , puisque 
Ton a de ses ouvrages gravés à Florence, en 1637 , et que le 
siège de Sainl-Omer, qui est asseu rément un des premiers 
ouvrages qu'il ait deu graver en France, est de 1638 (1). 11 se 
pourroit pourtant que cette planche eut été faitte en Italie , 
puisque la thèse du B. Soto , soutenue à Florence, et qui a 
deu par conséquent y être gravée, est de 1639. De là Ton pour- 
roit conclure que l'arrivée de la Belle en France a été en 1640, 
temps du siège d'Arras, et Baldinucci remarque, à ce sujet, 
que la Belle fut envoyé expressément bur le lieu pour le des- 
siner. Felibien dit que ce fut en 1642 ; tout ce qu'il dit de la 
vie de la Belle est à examiner; il faut aussy lire Sandrart, 
qui en a dit, ce me semble, quelque chose, et Corn, de Bie, 
p. 561 , et le Cabinet d'architecture (2). Mais je trouve 
dans des notes tenues par Langlois> dit Chartres, que la Belle, 
auquel il donne la qualité de peintre et de graveur du duc 
de Florence, étoit à Paris en 1640. Il y est lait mention d'un 
peintre florentin, camarade de la Belle; quel étoil-il? De plus, 
le litre des poésies de Desmarets (3) est gravé à Paris, en 1641, 
et c'est en 1641 qu*il grava la tragédie de Mirame (4) qu'avoit 
fait représenter le cardinal, mort le 4 décembre 1642, sur le 
théâtre du Palais-Cardinal ; il y a apparence qu'il estoit bien 
aupiès de luy. Quoiqu'il en soit, Baldinucci dit que la Belle 
vint en France avec le baron Alex, del Nero, ambassadeur du 
grand-duc ; peut-être trouvera-t-on Tannée de l'arrivée de 



(1) Jombert, n» 5 des batailles. 

(2) Pages 107-21, édit. de Paris, t. II, 2e partie. 

(3) Jombert, n« 81. 

(4) Jombert, n» 74. 



7ft 

cet ambassadeur en France* Baldinucci dit que la Belle resta 
onze années en France, ce que je croirois assez volontiers. 
Pendant son séjour en France, il voyage aux Pays-Bas et à Ams* 
terdam ; il y a une petite suitte de veues gravées en 1647 (1), 
où il se trouve quelques veues d'Amsterdam et de Calais ; donc 
il en estoit déjà de retour. Le Pont-Neul est gravé à Paris 
en 1646 [2]. La Belle étoit encore à Paris en 1648 ; La Colom- 
bière ^ qui s'en etoit servy pour les desseins de seâ quatre 
grandes tables du théâtre d'honneur, en parle ainsi , dans 
son livre , du théâtre d'honneur et de chevalerie, imprimé 
en 1648 : « La Belle est présentement à Paris, où il travaille, 
a avec applaudissement de tous les curieux et savans en ce 
a noble art (du dessein). » Il devoit estre de retour à Florence 
en 1650 , temps du siège de Piombino et de Porto Longone , 
gravés, le premier, par Livio Meus , et le second , par la 
Belle (8), sur les mémoires que leur foumissoit il Guerrîni; 
c'est ce que rapporte Baldinacci , mais ce qu'il faudra exa- 
miner avec attention; car pourquoy la Belle auroit-ilmisson 
nom à l'une et l'autre planche, s'il n'y en eût eu qu'une de 
gravée par luy? Ce qu'il y a de singulier, c'est que Baldi- 
nucci dit que la Belle estoit pour lors de retour de son 
deuxième voyage de Home, et cependant je suis comme as- 
seuré qu'il n'y avoit pas longtemps qu'il estoit arrivé de Pa- 
ris en Italie. 11 mourut en 1664. 

— Ciartres peut avoir connu la Belle en Italie, lors de son 
premier voyage.— 11 y alla en 1680, et je trouve qu'il y étoit 
encore en 1633. Ainsy, la Belle, qui estoit alots & Rome, 
avoit deu le connottre avant que de venir en France , et je ne 
m'étonne pas que ce graveur, arrivant à Paris, grava pour 



(1) Jombert, noi34. 

(2) Jombert, n» i 12. 

(3J Jombert, n? 48 des sièges. 



7S 

luy plusieurs planches, et mesme, autant que je le puis con- 
jecturer, luy en vendît quelques-unes qu'il avoit apportées avec 
luy, et qui avoient été gravées en Italie; car à qui pouvoit-il 
s'adresser qu'à ce marchand qui estoit celui qui faisoit le plus 
de commerce d'estampes, et qui , ayant voyagé en Italie, y 
avait contracté des habitudes, et s'éloit fait connottre. Il estoit 
bien naturel que la Belle, arrivant à Paris, s'adressa à lui pré- 
férablement à tout autre, et c'est aussi ce qui arriva. Je vois, 
par les notes tenues par Langlois, qu'ils étoient en relation et 
qu'ils se trou voient ensemble aux mêmes parties de plaisirs. 
Ce ne fut que quelques années après, et peut-être mesme 
après la mort de dartres, ce qu'il faudra vérifier , que , con- 
seillé par Collignon , ainsy que le dit Felibien — Collignon 
étoit à Paris avant la BeUe ; il y étoit en 1639 ; ce fut dans cette 
année qu'il vendit à Langlois la planche de marine qu'il avoit 
gravée d'après les originaux de la Belle— La Belle fît cbnnois- 
sance avec Israël qui avoit les planches de Callot, et se mit à 
graver entièrement pour luy. Je remarque cecy, parce que 
cela sert à rectifier une partie de ce que Felibien a écrit sur 
le chapitre de la Belle. Il faudra aussy examiner ce qu'il en- 
tend par cette suitte de marine , dont Ciarlres ne voulut pas 
s'accommoder, et qui fut le sujet qu'il alla chez Israël. 

— il est si vray que la Belle connoissoit particulièrement 
Langlois, dit Ciartres, avant que de venir en France, que j'ay 
veu plusieurs de ses lettres qu'il écriyoit à M. Langlois, de* 
puis son retour à Paris, c'est-à-dire depuis 1634— je me 
trompe, ces lettres sont adressées à mon grand-père Mariette, 
—où il luy fait mille protestations d'amitié, et luy fait part de 
tout ce qu'il gravoit. M. Langlois ayant mesme fait un recueil 
des ouvrages de la Belle, celuy-cy prit soin de ramasser tout 
ce qui pouvoit lui manquer de pièces rares, pour la rendre 
completle. Cette belle œuvre est encore entre nos mains. Il 
luy fit aussy présent d'un magnifique dessein de l'entrée de 



76 

TambassadeuT de Pologne à Rome , différent de ce qu'il a 
gravé; mais ce qui marque encore mieux la bonne intelli- 
gence qui régnoit entre eux, c'est que non-seulement les pre- 
miers ouvrages que la Belle fit à Paris furent sous Langlois , 
mais qu'il continua mesme de graver pour luy jusques à sa 
mort ; car les cartouches et le Pont-Neuf furent mis au jour 
par Ciartres, en 1646. Ainsy, tout ce qu'avance Felibien a 
grandement l'air de fable , et, s'il est vray, cela ne peut être 
arrivé tout au plus que depuis la mort de Langlois, arrivée 
en 1647, ne voyant pas effectivement que sa veuve ait rien 
mis au jour de nouveau de la Belle. Ce fut Israël qui eut pour 
lors généralement tout ce qu'il grava : peut-être même avoit- 
11 déjà eu quelqui'S planches de luy du vivant de M. Langlois; 
c'est ce qu'il faudra examiner. 

— 11 n'est pas ordinaire de trouver, dans les ouvrages des 
graveurs de profession, autant d'esprit et de goût qu'on en 
rencontre dans tout ce qui est sorti des mains de Le Belle ; 
mais aussi avoit-il étudié pour devenir peintre; il s'étoit 
formé sur les meilleures manières, et toute sa vie s'étoit pas- 
sée à dessiner. Sa plume, qui est d'une légèreté surprenante, 
exprime dans la plus grande justesse les plus petits objets; 
ils ne craignent point d'être regardés avec la louppe, ils y 
gagnent au contraiie beaucoup. (Catalogue Crozal, p. 6.) 

— Sa dernière manière plus large; apparemment qu'il 
n'avoit plus les mêmes yeux. 

— Une figure de jeune homme debout, a moitié vêtu, 
dans la manière du Parmesan; pièce en hauteur en clair- 
obscur. M. de Julienne en a eu le de>sein de la Belle, chez 
M. Boulle, qui le tenoit de Bérain, et celui-ci de M. Silvestre; 
preuves que la planche a été faite en France et emportée par 
la Belle en Italie. — Elle est au nombre de celles qui appar- 
tiennent au Grand Duc. 

— .4 la suite d'une énurnéralion des planches de la Belle, 



77 

qui appartenaient au Grand Duc, Mariette ajoute : Toutes 
ces pièces ont été envoyées de Florence à S. A. S. Mgr le 
prince Eugène de Savoye, en 1730, par le Grand Duc. Il luy 
avoit été pareillement envoyé de chez le Grand Duc la suilte 
des quatre planches de Bamboches, dont les planches sont 
aussi certainement chez le Grand Duc, et je ne crois pas qu'il 
en ait davantage; du moins, M. de Montarsis, qui avoit 
reçu, il y a longtemps, un semblable présent, dans un temps 
où toutes les planches de ce cabinet étoient dans un meil- 
leur ordre qu'à présent, n'en avoit pas receu un plus grand 
nombre. 

— J'ai vu vendre, chez M. Pottier, les quatre pièces de la 
Belle, qui sont indiquées dans le catalogue de ce curieux, 
sous le no 180; elles ont été payées quatre fois plus qu'elles 
ne valent. 

Le petit sujet au trait représentant un enfant qui, avec 
un masque, fait peur à ses camarades, est un petit morceau 
en travers d'environ 5° de large sur 3 pouces de haut, et je 
le crois bien de la Belle; il est dans la même manière que 
l'évantail au trait que j'ai dans mon œuvre. 

La petite pièce, aussi en travers, d'environ 3® de large 
sur deux pouces de haut, représentant trois mendians, est 
jolie; mais je garantis bien qu'elle n'est pas de la Belle; elle 
est de J. Le Pautre et d'une touche plus ferme que ne l'a eu 
la Belle. 

La figure polonaise est une copie d'une des figures du 
livre intitulé Varie figure, dont la première feuille représente 
la vue de la grande galerie du Louvre. Il ne faut que jeltet 
les yeux sur cette petite pièce pour reconnaître la vérité de ce 
que j'avance; celui qui l'a gravé y a mis sa marque sur la 
terrasse. 

Quant à la pièce représentant un paysan appuyé sur 
un bâton, laquelle est de même grandeur que la précédente 



78 

pièce, c'est environ 2° 6' de haut sur 2 pouces de large, et je . 
ne la révoque pas en doute, mais, pour pouvoir l'assurer plus 
positivement, je vôudrois l'avoir examinée avec plus d'atten- 
tion. En tout cas, si je Tavois, je ne ierois pas difficulté delà 
ranger dans mon œuvre. 

Cet article a été acheté par M. JouUain pour M. Paignon 
d'Ijonval. 

— Le ballet des autruches, des singes et des ours, et des 
perroquets, imaginé par J. B. Balbi, pour servir d'intermèdes 
à l'opéra de la Finta Pazza, qui fut représenté à Paris sur le 
théâtre du Petit-Bourbon, en 1645, fut dessiné avec beaucoup 
d'esprit par Etienne de la Belle (j'en ay veu la plus grande 
partie des desseins chez M. BouUe, en 1731), et gravé en- 
suite en 19 planches par Valejrio Spada. Ce Valerio Spada a 
été un des plus habiles maistres d'écriture qu'ait produit 
l'Italie. 11 en est fait une mention fort honorable dans la nou- 
velle édition du poëroe II Malmantile raçquistato di Lorenzo 
Lippi faite à Florence, en 1731. Paolo Minucci, qui a com- 
menté ce poème, y dit, dans une de ses notes, p. 458» que 
Spada excelloit non-seulement à bien écrire, mais qu'il des^ 
sinoit aussi bien des paysages à la plume, qu'il grava au bu- 
rin et à l'eau -forte, qu'il étoit intime amy de Lippi chez qui 
il avoit appris à dessiner, et qu'il vivoit en 1688, âgé de 
plus de 70 ans. Spada, selon Cinelli, dans son histoire Mss 
des écrivains de Florence, étoit de Colle di Yaldeja. Il mourut 
à Florence en 1688. 11 avoit été maître à écrire de Cosme III 
et des princes ses enfans, et étoit infatigable au travail, à 
quoy Antoine Maria Biscioni, éditeur de la nouvelle édition 
du Slalmanlile, ajoute que personne n'avoit encore autant 
perfectionné l'art de l'écriture. Il avoit commencé de graver 
quelques-uns de ses alphabets, mais cet ouvrage est demeuré 
imparfait, et est présentement entre les mains de M. l'abbé 
Gabriel Riccardi. Ce même Spada a gravé uue veue, eu veue 



7» 

d'oy$eau, de la \ille de Florence, prise del praio di S, Franr 
eetco à Mwik. Mais quoy qu'en disejdt tous ces messieurs, ce 
Spada n'est pas un grand Grec, ni pour la graveure, ni pour 
le dessein, à en juger par ce qu'il a gra>é d'après la Belle; il 
a horriblement altéré le goût du dessein ; on ne trouve dans 
tout ce qu'il a fait ni goût ni pratique. Reste à scavoir s'il a 
gravé cela à Paris, ce que je croirois assez. Du reste, je ne 
dispute pas qu'il n'ait pu ealre un très-habile écrivain. Mais 
pourquoy vouloir donner à un homme un mérite qu'il n'a 
pas) I^'étoit*ee pas asseï pour lui de s'être fait estimer dans 
la profusion d'écrivain qu'il exerçoit (1)? 

^ Dans Iç catalogue des livres de festes et spectacles, que 
le baron de Tessin a rassemblé à Stockholm, ces treize figures 
et la quatorzième, qui est le rocher, sont rapportées sous ce 
titre : Jja gara dette sê^gianij Ttnwo m eaudht rapprtseniato 
in Moden^ ful poMs^gio de' Ser. Arehiduehi Ferdinando^ 
CurlOf SigUmondOt Frwe$9oo d'Auitria, et Arehiduehesia di 
ToMoam; 1659, Ufigwre grandi da St. deUa Bella. Yoicy donc 
la véritable explication et le sujet de ces estampes. Ce n'est 
point, comme l'a prétendu Baldinuoci, un carrousel repré- 
senté à Vienne en présence de l'empereur. 

«— Les deux estampes de la Belle, qui sont intitulées par 
Baldinucd Giuochi dMa oontadina représentant une espèce 
de danse ou d'exercice qui est en usage en Italie dans le 
temps du carnaval, et qui est exécutée par des sauteurs. Voioy 
en quoy elle consiste ordinairement : Huit ou dix hommes, 
debout et fermes sur leurs jambes, forment un cercle, en se 
tenant tous les uns les autres fortement embrassés par la 
nuque du col. Quatre ou six autres montent sur les épaules 
d9 oeux-ei, to^iQurs dans la même posture et en portent trois 



(i) Jombert, n*" 103. 



80 

de la même manière, qui en soutiennent un dernier, lequel 
termine le groupe ; dans cette situation, ils marchent pen- 
dant quelque temps en cadence, et enfin celui qui est à la 
cime fait une culebute en Tair et saute à terre, oîi il esl 
leceu par deux de ses camarades, qui sont postés pour cela ; 
les trois d'ensuite en font autant, et tous les autres de même 
par ordre, ce qui s'appelle à Florence far la tombolata. J'ay 
veu cet exercice fort bien exécuté à Paris par des sauteurs. 
J'ai 'extrait cecy des notes de P. Minucci, qui accompagnent 
le poëme MalmantUe racquistato, et M. Salvini observe que ces 
danses s'appellent délia œntadina, comme les Anglois œun- 
try-dance les danses que nous avons pris d'eux et que nous 
appelions aussi contre-danse : Le mot anglois signifie danse 
du pays ou danse paysane. 

— Une pièce en hauteur (13*, h.; 9" tr.), gravée au burin 
assez mal par Valérien Regnart, qui y a tellement altéré la 
manière de la Belle qu'elle y devient presque méconnois- 
sable. Ce sont d'ailleurs de grosses figures, et l'on sait que 
ce n'étoit point le talent de la Belle de les bien faire. Ainsi 
on ne scauroit point qu'elle est d'après ce maître, si on n'y 
lisoit son nom au bas. Getle pièce représente St Dominique 
de Soriano à qui la Ste Vierge, accompagnée de Sle Cathe- 
rine et de Ste Madelaine, présente une image de St Domini- 
que. Voicy son titre : Vera effigies S. Dominici à Soriano^ 
au haut de la planche. La pièce a été dédiée au cardinal 
Alexandre Cesarini par frère Orsuccio, religieux domini- 
quain, et l'on y trouve au bas le nom du graveur, qui Ta 
gravée à Rome, et vis à vis : Delineami Sleph. délia BeUa 
inventer (1). 

— A la suite de P indication de quatorze sujets rehgieuœ^ qui 



(1) Jomberty n^* 40. 



81 

sont pour la plupart des mrges^ Mariette ajoute : Ces qua- 
torze pièces forment un mesme livre ; P. Mariette a les plan- 
ches de toutes (1). 

— La Ste Vierge à demy-corps, dans un rond, allaitant l'en- 
fant Jésus, d'après Louis Garache. Il y a une estampe de cette 
Vierge, figure entière, que je crois gravée d'après le Bricci (2). 

— S' Antoine de Padoue en demy corps, d'après Jean 
François da Cento, dit le Guerchin ; répétition, à ce qu'il me 
semble, de l'estampe originale du Guerchin. 

— Portrait sans nom, d'un auteur âgé de soixante et neuf 
ans, dans un ovale ; gravé au burin par Et. de la Belle dans 
ses comraencemens. A une autre épreuve, il y a LXXII ; on 
voit qu'il y a voit auparavant LXIX et que cette datte a été 
reformée depuis; le nom de la Belle, ou plutost son chiffre 
est au bas ; il y a les deux vers cy acostés au bas du portrait : 

Exprimit auctoris vultum pictura, sed auctor 
Ipse sui vires exprimit ingenii. 

C'est le portrait de Stephanus Roderkus Casirensis Lusi- 
tanus œtat. 78; j'en ay veu une épreuve avec cette inscrip- 
tion gravée autour du portrait; la planche étoit usée. J'en ay 
veu aussi une copie avec la môme inscription; cette copie a 
été faite pour estre mise à la tête d'un ouvrage de cet auteur, 
intitulé : Tractatus de naturâ muliebriy Hanoviœ, 1654, 4^; 
l'on avoit écrit au bas: Olim Magni DucisEtruriœ Consiliarius 
de sanitate et in Academiâ Pisanâ medidnam docens (3). 

— Représentation d'une feste donnée à Pise dans une place 
située près de l'Arno, d'après Ercole Bazzicaluva ; des pre- 
mières manières d'Etienne de la Belle. Je ne la crois point 



(i) Dans les n<» 148 à 163 de Jombert. 

(2) Jombert, n° 1S3. 

(3) Jombert, n» 60. 

T. n. / 



84 

vray qu'on y lit le nom de la Belle, et que cette pièce a beau- 
coup de sa manière; mais il est vray aussy que ce nom de la 
Belle n'est pas écrit de luy et peut avoir été mis après coup. 
D'ailleurs Livio Meus étoit disciple de la Belle, et, si l'on en 
croit Baldinucci, imitoit parfaitement sa manière. Si Ton 
examine bien cette pièce, l'on y trouvera des endroits qui ne 
sont pas tout à fait dans la manière que la Belle avoit pour 
lors. J'ay même une épreuve de la planche dans l'état qu'elle 
étoit sortie d'entre les mains de la Belle (1). 

— Décorations de théâtre et les principales scènes de la 
tragi-comédie de Mirame, représentée dans la salle du palais 
Cardinal, en 1641, au nombre de cinq pièces (2).— Il doit y 
en avoir six, scavoir le titre et les représentations des cinq 
actes. Celte pièce de théâtre est de la composition de Desma- 
rets, quoy qu'il soit vray que le cardinal de Richelieu y eut 
aussy grande part, et il l'affectionna même tellement que, 
pour en rendre la représentation plus magnifique, il fit bâtir 
exprès une salle de comédie dans son palais, où l'on repré- 
sente encore habituellement les opéras. M. Pelisson, dans son 
histoire de l'Académie (3), dit que la représentation de celle 
pièce coûta deux ou trois cent mille écus. — Ces estampes se 
trouvent originairement dans le livre intitulé : Ouverture du 
théâtre de la grande salle du Palais Cardinal ; Mirante^ Tragi- 
comédie, Paris, 1641, 8®. —Je remarque que presque tout 
ce qui paroissoit de Desmarets étoit presque toujours orné 
d'estampes de la Belle, dont le mérite étoit connu du cardi- 
nal de Richelieu. 

— Dans les triomphes de Louis le Juste (4), imprimés en 



(1) Jombert, n^ 49 des sièges. 

(2) Jombert, n<» 74. 

(3) Édit. de 1672, p. H3. 

(4) Jombert, n<> 166. 



85 

1649, la Belle a gravé les morceaux suivans, deux vignettes 
et deux lettres grises ; le monument à la gloire de Louis XIII, 
dont Tarchitecture est gravée par Jean Marot, deux batailles 
dont une navale, le fonds de la planche où est représenté le 
roy qui vient de faire la conqueste de la Rochelle ; lé fonds 
de celte pièce est la veue de la digue de la Rochelle. 

La pluspart des desseins des devises sont de la Belle, ceux 
surlout où il y a des animaux; j'en ay veu quelques-uns 
parmi les desseins de M. BouUe. Une partie de ces devises est 
gravée par Silvestre, Tautre par Richer. 

— Dans le catalogue des estampes du cabinet de M. d'Her- 
mand, est indiquée, dans son œuvre de la Belle, une suilte 
du jeu des Reynes renommées, très-rare et différente de celle 
qui a été gravée par la Belle pour Desmaretz (1). Mais il ne 
faut pas s'y laisser imposer ; cette suite n'est d'aucune consi- 
dération, ce sont des copies des planches de la Belle et d'assez 
mauvaises copies. 

DELOBEL (NICOLAS), né en 1693, est mort à Paris, le 
18 mars i763, âgé de 70 ans (2). Il avoit connu à Rome Bou- 
chardon, où ils avoient été pensionnaires du roi, et ce fut 
cfiez lui que cet excellent sculpteur débarqua lorsqu'il arriva 
à Paris. Delobel, disciple de M. BouUmgne le jeune, étoit un 
assez pauvre peintre. G'étoit un génie froid et il n'avoit au- 
cune couleur. Il prétendoit pourtant aux grandes machines, 
et il trouva peu d'occasions de s'exercer. Ce que j'ai vu de 
mieux sont des veues de Rome, qu'il avoit dessiné sur le lieu 
et dont il avoit un assez grand nombre dans ses portefeuilles. 
11 avoit été reçu dans l'Académie royale de peinture en 1737. 



(1) Jombert, n» 118. 

(2) M« Georges Duplessis vient d'insérer une petite note sur Delo- 



86 

DELORMB (philibebt), abbé d'Ivry, lut pouvvu sous la 
règne de Henri second de la charge de surintiBudant de tous 
les bâtimens du roi et, après la mort de Pierre des Autels, 
clerc des qeuvres du roi, qui depuis 1531 ayoit la charge de 
controUeur des b&timens, le rpi lui donna pour adjoint Jb^n 
de Vorme, son frère, avec faculté d^ordonner en son absence 
desdits bâtinriens et d-en tenir registre et controlle. 

C'est ce qu^on apprend des lettres patentes de Fran- 
çois H, données à Blois, en 1559, en faveur de François Sau- 
vai, pourvu de Vétat et office de pontroUeur général dps bâtir 
ments du roi, charge dans laquelle il reniplaçoit Jean Bullant, 
dernier titulaire. J'en ay la copie dans un pxlr^it des registres 
de la chambre des comptes concernant les bâtimens qq-avoit 
fait fam Cofbert et que je trquve chez M. Félibiisn, phargé 
par ce ministre de faire Fhistoire des bâtimens du roi. 

rrr Dans des lettres patentes de Henri II, du 12 juillet 15S8t 
concernant la création des nouveaux payeurs des baslimens 
de Fontainebleau et autres maisons royales, le roi le nomme 
ff^nsflUff ft fnqi^trç or^ijuairç çn fa chfijifipff des fgrfifilff à 
Parift ^W élWU^ «^ çQVl^wm^V^ qrdomé fifir §. jtf. f^ If 

ff^t^e fes fif4tmm ; (im]\\é^ que j? ne lui trquve 4o«pée§ m 
ppijB autj'p enfjrpit; car, dgns ses Qpvrages ipnprimiés, jl $§ 
(smaliflfi d'flHpjonief j^jj rpy, abbé de St-pioy dp Ifoyop p} d^ 
gtrSprge ri'Ang^r!5r ïl pst peppnd^pt pon^tjanf, p^r Ift pi^pp 
cjtép, qit'PB 15^8 il ^tpij nj^ffrp (}e^ eoniptes. 11 ^vpU été rer 
c^n pq cet(e cl^i^rge, ]^ ^ m^rs |^^6, e| dans ses lelti^eg! ^§ 
prpvision, }\ est q^alifié 4'ftfebé 4'ïyfy (et ïyry ^st une abbaye 
dfi b^n04iptips ^^ diflcè^e d'Evrew) p\ cpnaniis^irp d^s Wir 
ifieps du roy. Je§n MQriP Iiii Siwé4» dan§ rpffice ^ pfi^ttrp 



bel, àpropos de son tableau de la Réunion de la Lorcaios à la France, 
4aB8 fa dernier volume de la Société d'arcbéologie lorraine. 



(to iSQfPptQil, et tw\ reçu 1q 17 'mi\]e\ 15^9. Saps (loi^te qu8 
Philibert Delorme ne quitta la chambre des comptes que pour 
devenir ^umonjer fli; rpy. Q'éfoit açsez Tusage de ce temps- 
là, de doniipf 4^^ l^^néfice^ et ()es emplpys ecclé$i4S^iqi)e$ 
§ux )i4|]iles Ar(istp$. Le$ fmffpces étoieDt épujsées e( assez mal 
9fdojf)flées; pn pe scavoit poi]it Je^ rpcpnjpepspy autremeïjt, 
^t yqt^ s'pn^baprasspit peu ?i la bjeqçéanpq étpif gardée. C'es| 
aii)$i que le ftp§?o lut pourvy, au rapport de Vasari, (l'un cfir 
flQflicatcle la £Jainfp-G}iapeUp , le Prinjatice de Tabbaye dQ 
Sajf|t-Gernîain de Troyeç, etc. Je fais cette observation parc^ 
qwe Pli. Deloripe sçavpit k PPipe, dit-on, les principes du 
l^tii), et qu'il semble qu'un aumônier du roy auroit d^ estpq 
plus inslryit. Cette igporance reprochée ^ Ph. Delorme, e§| 
fondée suyiioe qvanfure qui luy e^t arrivée : voulant morti- 
fier un^ personne (le la cour, d'autres disent le poêle Ronsard, 
qui 4Yoit fait poqtre lui un sonnet où il se servoit de ce termQ 
injurjeijx la fruelh çro$sée, il luy fit fernipr la pprte des Tuil= 
J^ries, et celuy-ci, autant poifr plajsanter que pour sp vaij-r 
ger, écrivit dessus la porte en grands caractères FORT. BEVEt 
RENT. HÂRE. Delorme se crut offensé; il se plaignit haule- 
piept. L'affajre fut portép, dit-op , devant la reyne Catherine 
de ]JIé4icis, qui rit beaucoup lorsqu'on vint aijx éclairci^r 
mens. Celui dpnt pelorpfie se plaigpoit montra que ce que 
ppluy-ci prepoil ppur c|[^ françpis étoit du Igtin, et qu'il n'a-: 
ypitpy 4'autre inteptiop que d'écrire en abrégé cette sentencp 
tjrée d'i^psppe : f'ortunqfn feverenter habe : Delorme parqt 
satisfait; il n'en sçayojt pas çfjivanlage et ne voyoit pas 
q^e pe|te septenc,e étoit une leçon pour luy qui lui rap- 
peloit son ancien estât. Je ne scais où j'ay lu cecy. N'est- 
ce pas dans la vie de Ronsard par Binet (1)? Voyez la 



(i) Voyez celte vie de Ronsard dans Tèditioa in-folio de 162^, 



8S. 
critique de Bayle, par l'abbé Joly ; ce fait y est rapporté. 

DELYEN (jean), peintre, de T Académie royale de peinture, 
où il avoit été reçu en i725, étoit disciple de Largillière, et 
s'est pareillement consacré au genre des portraits. Il avoit un 
assez beau pinceau; mais avec cela il n'est point sorti de la 
sphère des peintres ordinaires. Il est mort à Paris, le 3 mars 
176J , âgé de 77 ans. Piqué de se voir dans l'oubli, regardant 
cela comme une injustice, il s'avisa de peindre un tableau 
où le public étoit représenté sous la figure d'un asne, qui, 
dans son atelier et vis-à-vis d'un des ouvrages de peinture de 
sa façon, osoit faire le métier de juge. Ses amis lui conseil- 
lèrent sagement de ne le point produire, ainsi qu'il. en avoit 
le dessein ; car il avoit fait le tableau pour être exposé à l'un 
des salons. Il ne put cependant se refuser tout à fait à mon- 
trer au public quelque chose de ses ressentimens; il le grava, 
et j'en ai une épreuve, aussi bien que d'tme autre planche 
de sa façon où il s'est représenté labourant dans le champ de 
la profession qu'il avoit embrassé. 

DENNER (balthazab) est né à Hambourg, le i5 janvier 
1685, et il est aisé de voir, par la façon dont il a peint ses 
tableaux, que sa première éducation a été mauvaise et qu'a- 
vant de se mettre à peindre à l'huille, il avoit fait son talent 
de la miniature : car, ostez-lui une tête, qu'il dessine encore 
d'assez mauvais goût, il ne sait pas mettre une figure en- 
semble, et, pour ce qui regarde son pinceau, le travail en 
est si fin qu'il échappe aux yeux les plus perçans. Il exprime 
de la chair la moindre ride; le plus petit poil, le pore le 



p. 1631. Binet indique la pièce comme une grande pièce au roi 
et non comme un sonnet. 



89 

plus imperceptible et le moins ouvert sont rendus dans un 
si grand détail qu'on est sûr qu'aucun de ceux que la na- 
ture a offert au peintre n'a été obmis. Ce qu'ont peint Van- 
derwerf et Gérard Dow n'approche point de ce terminé, et 
c'est pour se montrer encore plus singulier qu'il a fait choix 
par préférence des têtes de vieillards, de celles surtout qui, 
dans la décrépitude, avoient la peau la plus rude et la plus sil- 
lonnée. C'est alors que son pinceau triomphe. J'ai vu à Vienne 
cette fameuse tête de vieille, qui passe pour être son chef- 
d'œuvre, pour laquelle l'empereur avoit prodigué l'or, et 
qu'on tenoit renfermée sous la clef dans une boette, comme 
on auroit fait d'un trésor. L'exécution a quelque chose d'in- 
compréhensible; mais je n'en fus pas pour cela plus satis- 
fait. Je n'y crus voir que de la peine et rien de cette légèreté, 
de ce vague, avec lesquels la nature colore les objets. J'ai vu 
depuis h Paris deux autres têtes, l'une de vieille et l'autre de 
vieux, et ce défaut m'y a encore paru plus sensible. Seroit-ce 
que les tableaux auroient été faits dans les derniers temps 
de Denner? Je le crois, et il est vrai que c'est le vice de tous 
les artistes qui travaillent, comme a fait celui-ci, sur un mau- 
vais fond et qui n'ont que de la routine; l'esprit s'émousse, 
la main s'appesantit, et les ouvrages deviennent tout déglace 
et languissans. Notre artiste a joui pourtant jusqu'à la fin de 
sa vie d'une grande réputation^ et ses tableaux ont continué 
d'être payés au poids de l'or ; mais par qui? par des rois et 
des hommes riches et puissans, à qui les singularités en im- 
posent, et qui s'amusent volontiers de semblables minuties. 
Il est dit, dans la vie de Denner, qu'il a quelquefois peint des 
fleurs et d'autres objets inanimés et qu'il y a réussi. Il a 
mené une vie assez ambulante. Tantôt il sortit de sa patrie 
pour se transporter en Angleterre et en Hollande; d'autres 
fois il se rendoit en différentes cours du Nord où il étoit 
appelé, toujours occupé à peindre des têtes de fantaisie et des 



ea 

pertcaite qui lui valoieat beaucoup d'argent. Il est nort Iq 
H awil 1747 à Hambourg, et Ton a sa inë4aille qu'un de ses 
admirateurs a fait frapper en 1739. Descamps, traducteur de 
Van Ooûl, a donné sa vie en firaqçois, et 1-on trouve quelques 
particularités q|ii le concernent encore dans l'ouvrage du 
Ijaron de Hagedorn, Lettres à un amateur. — L'auteuf d\\ 
catalogue des tableau^ de Dresde le fait mourir à Rostock 
en 1749. 

DENTE (gibûiamo] di TitUno. Je crois que c'est |le lui dont 
il est fait mention dans le livre intitulé Catahgo di varie c^^p 
ap^parteneniif in Yinegia, appressQ GioMo, 1558, 8^, p. 498, 
sous le nofn de GirolftmQ Detite da Caneda, discepolQ di Ji- 
(imo da Çqdorç. — Le père Or)^pdi djt icy fort n)al à pror 
pos : J)i ç^i si vedanq çdfm9 carte <M$ §tampe* U y a dans 
Ridplfi, dont il fait l'e^tr^it : JH cui vanfw (ilcune opeft i^ 
vqllq ehep^^iqno pçf ffel ^m^ifrç* Cela es( toft 4ifférppt. 

DEftlJET (clappe) (}) . Le plan d'une bataille où sur le deyanJ 
e^f le 4hc fÏP Lorraine, CJiarles IV, armé à l'aptique et monté 
sur HP Pheval, soqs les pieds (luquel sont rpnyprsés ^ pnn^- 
piis, e\ au )]aut de I4 p)<|nche du mesjne côté esf une T^npmr 
fflép qHf tfefit d'une mfljp qpe tron^pet^e et de l'ftntre ijRparT 
tpucl)^ renferp)4n( 1^ §Jl^\^ de Lorraine. Ce(te pièce e$t | 



(t) Ppfir tout ce qui oopcern^ Peruet, nop« r^Dvoypn8 d^bqrd fi 
un premier travail, public par les deu)L éditeurs de ce livre, danj^ 
le second volume des Peintres provinciaux^ p. 267 à 3^6, et à la 
{)Q^v6U^ élude encore plus complète qu'en publiera biepfôt notrp 
correspondant 10. Meauiiap. Qéjà I4. Lepage, dans son excellente mo- 
nographie du palais ducal de Nancy, avait' tiré des comptes les 
mentions inédites les plus curieuses sur Peruet; le travail dp 
|[. Ileaume les réunira à ce qui était déjà reci|eilli, et en aipujer^ 
encore de nouvelles. Dés travaux de ce genre gagnent toujours à 
6tre refsitSf 



91 

Peau-ferte, gravée sans goût ; elle passe pouF estre de Galiot 
et de ses ppemièFes choses. Je n'en crois rien. Je crois mesoiQ 
que I'qb en a coupé un coin où san^ doute étoit écrit le non^ 
de celujF qui Ta iaif. 11 me semble avoir veu des pièces gra- 
vées dar^s la mesme manière daps une entrép faittp en Lor- 
raine, je crois du due d^Ëspemon. Les devans sont gravés 
d^une manière fort largp ; il y a des lettres pt dep chiffres dQ 
F^nvpy, ce qui fait GonnoistFe qu'il doit j avoir une explica* 
tion relative, -tt Me paroist di^ mesme qui a gr^vé la Aiite ep 
Egypte et la madone du refiige. — Revenant sur cfiie dernière 
Qpinion après avoir vu une épreuve entière, IfqrieHe a ajouté 
postérieurement : C'est l'endroit où étoit gravé le nopi de 
0. Bepuet; eat la pièce est de luy. 

rr: Le dijc de Lorraine, Charles iV, à cheval ; il est armé de 
toutes pièces, ayant pne échappe. D'une main il tient une 
masse d^armes, et de Vautre la foride de son cheval qui est 
presque vei} de profil et en action de cûuïir. A un des coins 
à& la planche est un génie qui présente un casque au duc, et 
d4^s le lointain la vaue de Nancy. Au bas, il y a ces quatre 
vers ffdO$ûis : 

Le Jourdein vit fleurir sur les bords de son pnde 
Les palme^ à foyspn de tes Jjraves ayeux ; 
Le ciel a réservé à ion bras glorieux 
Celle qu'on doit porter ayant vaincu le monde. 

Elle a^t à l'eaurforte, gravée légèrement et à peu d'our 
vFage; ^ns DQm. Pour moy, je ne la croy point de fallût. Je 
n'y vois tout au plus que le lointain qui pept estre de luy; 
encore es|-U bien négligé ; cependant l'écriture est de son ca- 
ractère , noais il faisoit bipn mieux en 1628 ; il pourrqit avoir 
retouché dans le portrait ; a quelque chose de la manière de 
Callot. — Je ne vois rien de Callot dans cette manière. — La 
suite est d'une écriture très-postérieure.. A régfeuv^fiUJ ^st 



92 

chez M. le Premier (1), et qui est d'une grande perfection, on 
y trouve au bas le nom de X Deruet^ qui estoit suivy de quel- 
que escriture que Ton a graté de dessus le papier, ce qui me 
fait appréhender que l'on ne l'ait fait que pour oster tout 
soupçon que la pièce ne fût pas de Callot. Peut-être y avoit- 
il après le nom de Deruet le mot invenit ou delineaut, comme 
je ne sache pas qu'il ait jamais fait que dessiner ou peindre. 
Il estoit intime amy de Callot qui grava son portrait. Quoy 
qu'il en soit, pour donner une plus grande apparence de vé- 
rité à cette pièce , on y avoit écrit le nom de Callot sur l'é- 
preuve qui appartenoit à M. le Premier, et Ton avoit bien 
réussy à contrefaire son escriture. Ce qui est de vray, c'est 
que l'ayant examiné de plus près sur cette épreuve qui est 
bien imprimée et conservée , j'y trouve une très-grande li- 
berté de pointe et des touches assez précises et spirituelles. 
Le fonds surtout paroist bien de Callot et incontestable. 
Du reste, tout y est assez négligé et gravé très-légèrement et 
à peu d'ouvrage, sans mesme en excepter le fonds, ce qui 
peut faire croire qu'elle est en effet de Callot, mais négligée. 
Il y a pourtant des endroits qui ne sont point touchés dans 
sa manière. J'en voudrois voir une épreuve où Ton n'eût rien 
altéré dans l'écriture : cela m'est suspect; on en oste une 
partie dans celle de M. le Premier, et on n'en laisse mesme 
rien dans celle de M. de Montarsis. — Le duc de Lorraine à 
cheval, etc. Je ne doutte plus présentement que cette pièce 
ne soit de Deruet> tant par l'invention que par la graveure, 
depuis qu'il m'est venu entre les mains une petite pièce 8®, 
en hauteur, représentant une amazone à cheval, armée d'une 
massue et d'un bouclier, gravée à l'eau-forle avec plus de li- 
berté qu'il n'appartient à un simple peintre et précisément 



(1) M. de BeringheD. 



9S 

dans le mesnie goût et la mesme manière que cette pièce du 
duc de Lorraine à cheval. Cependant cette pièce représentant 
une amazone est de Claude Deruet; on y lit au bas, gravé 
sur la planche et fort distinctement : X de Démet /*., ce que 
j'interprète : Claude chevalier de Deruet, car il esloit cheva- 
lier de Tordre du Christ ; son portrait, gravé par Callot en 
fait foy (1). Or, Deruet estoil contemporain de Callot et dis- 
ciple pour le dessein de Claude Henriet aussy bien que Cal- 
lot ; d'ailleurs la manière de graver de Callot estoit pour lors 
lort estimée et en grande réputation. Ainsi, il n'est pas si 
étonnant que Deruet s'attachât à sa suite, et que, sorty de la 
mesme école, il dessinât dans le mesme goût. D'ailleurs, 
quoy qu'il eût une grande liberté de pointe, il y a pourtant 
des endroits de ses ouvrages qui ne seroient pas assez libres 
pour estre de Callot. De tout cecy, je conclus que ce que l'on 
a effacé sur l'épreuve du duc de Lorraine à cheval, qui estoit 
chez M. le Premier, est le mot /cet/. Si cette autre petite pièce 
fût venue entre les mains de gens de mauvaise foy, ils n'au- 
roient pas manqué d'y faire la mesme altération, et, par cette 
supercherie, ils auroient imposé à tous les curieux et créé 
une nouvelle pièce de Callot, qui auroit passé d'autant plus 
incontestable qu'il n'y a aucun graveur à qui elle pût mieux 
convenir qu'à luy, et que l'on ne connoist point Deruet pour 
graveur. En effet, je suis persuadé qu'il a gravé fort peu de 
choses. Ce Deruet vivoit encore lorsque M. le Clerc com- 
mençoit à graver ; c'est sur ses desseins qu'il grava les figures 



(i) Il n*estpas besoin de cette interpré talion un peu forcée pour 
expliquer la présence du double G ; on sait que Tusage constant 
des monogrammes est de doubler une letlrc à volonté. Quant à 
FAmazone, M. Robert Dumesnii et nous-mêmes après lui, dans un 
travail spécial, avions laissé son existence dans le doute ; si la pièce 
ne se retrouvait pas, la mention de Mariette assure de sa réalité. 



9& 

dans des triangles et autres décoratiofls pour Tenttée de 
Charles IVj duc de Lorraine à Nancy en ;... • Félibien fait 
mention du Deruet dans la Vie de Gallot; il le nomme de 
Ruet; il falloil écrirei comme J'ay fditj Deruet. 

— Après Vindicatian dès planches fui composent h litre : 
Le trlotbphe de son altesse Charles llll, duo de Ltrrrdinei à 
son telour dans ses états à Nancy^ chez Dominique Foirât €?t 
Ant* et Claude Chariot seâ associés, ihip« de S. A. et qui smt 
gravées pdr Seb. Le Clerc j d'après Béruet^ Mariette ajoute : 
L'on m'a asseuré (}ue ce qui rendoit cette entrée dû duc de 
Lorraine si rare vient de ce que ce prince esli fit rechercher 
tous les eieniplaireset les supprima autant qu'il pUt, nepou- 
yailt supporter toutes les raillefrîes que l'on déWtdil sur tous 
les arcs de triomphe qui y atoient été faits; 11 arbit fait celte 
entrée au retour d'une expédition qu'il atoit faite eit Allema- 
gne où il avoit eu du dessous; Gependsint, il prétendoit y àtoir 
remporté de grands avantagési et sur ce pied il Se fit rëcetoir 
^ triomphateur à Nancy; mais il ne fut pas longtemps satis 
s'apercevoir de la fautte qu'il avoil faite. On l'en railla vite- 
itient, et ce fut pour en abolir la mémoire qd'il voulut sup- 
primer le litre qui pouvoit le mietii la Conserver (l)i 

DESCAMPS (j.-B.), né à Dunkerque, en 1717, a étudié à 
Anvers et ensuite à Paris sous Largillière; directeur de l'Aca- 
démie de Rouen. 

— J .-D. Descamps est né à Dunkerque en 1717. Après avoir 
pris les premiers principes du dessein et de la peinture à 
Anvers, il est venu à Paris, et s'est perfectionné sous M. de 
Largillière. 11 s'est depuis retiré à Rouen, où, sur un théâtre 



, (1) les planches du volume ^ longtemps introuvable^ ont été 
dernièrement retrouvées à Nancy» el il en a été tiré quelques 
épreuves. 



moins brillant et enTirOnné de coticurretices nloihs redoU* 
labiés , 11 a pu figurer plus aisément; il y a primé, et est par- 
Ifenu/ sans ayoir de talens bieil supérieurs, à devenir te direo 
tetit de l'Académie des arts, établie dans celte Tille< Il nfe 
s'est pas borné à faire des tableaux ^ il a youlu prendre aus^i 
la plutbe, et il tidus a donné quatre toltimes de Yies des 
peintres des Pays-^Bas, où l'on s'allendoit à trdutet plus de 
recherchés et plus de critique. Il fe'est bottlé à traduire en 
françois^ tant bied que mal, ce qùë Yan Mander, Houbtaken 
et les autres auteurs flamands avoiënt écrit en leur langue, 
et, s'il y a fait quelques additions^ elles ne regardent que des 
peinttes avec lesquels il a técuj et auxquels il prodigue des 
éloges peu mérités j il faut d'ailleurs le lire avec ijrécaution , 
car il à fait bien des fautes, et même d'assez lourdes mé- 
prises; un nouvel ouvrage qu'il a donné depuis p^ui et qtli 
est une notice des peintures les pllis considérables des Tilles 
des Pays-Bas, est encore plus chargé d'erreurs, et je n'en ré?- 
yiens pa6| tU ce qd'il hi'avoit prbmis d'user de la plUs grande 
exactildde et de la critique la pliis sévère. C'est^ du reste, un 
fort galant homme, et l'on y a eu égard lorsqu'on l'a admfe 
dans le fcorps de l'Académie royale en 1764. 

DESCHAMPS (FRANÇOISE), femme de Beauvarlet, morte en 
1769, âgée seiiîeniéill dé 3 . 

BÈSHAVS (jÈÀN-ÉAMsTE-tiMfti) dé tibllevillé, ftîdtl à 
Paris, te lO févrîet 1TB3, âg^ séulétilent de 35 atis à 2 tiidl§, 
est un des nieiliëùfê élëVes qu'ait fait M. Èolichéh Q\itj^ (JU*ll 
eût été à Rome, il n'en avoit" pas pris davantage le ^oûi itâ^ 
lien, ou, s'il s'élait touIu mouler sur quelque manière; c'é^ 
toit Seulement celle du Benedette dont il avoit paru alfeelé ; 
aussi cette màhiêrë libêttitieî rëft(fe-t-elld asèez datis dëllë db 
M. Boucher, dont s'étoit rempli Desbfl^sj et dont il né cW^ 



96 

cha jamais à se défaire. Il composoit bien, inventoit facile- 
ment et peignoit à plein pinceau; mais dans tout cela» il 
mettoit de la manière, et je doute qu'il fût devenu avec le 
temps plus habile qu'il n'étoit. On a vu de lui un grand ta- 
bleau du martyre de Saint-Barlhélemy, et un autre du ma- 
riage de la sainte Vierge qui lui ont fait honneur. Boucher 
en avoit fait son gendre et ne devoil pas être mécontent de 
ce choix, car Deshays lui éloit sincèrement attaché. Il est 
mort malheureusement d'une chute. S'élant retenu sur ses 
pieds, il en reçut une telle commotion sur tout son corps 
qu'il se fit un déchirement dans les parties du bas-ventre, 
lequel fut suivi d'une hernie des plus dangereuses : elle oc- 
casionna bientôt une opération qui, quoyque faite par le 
plus habile de nos chirurgiens, n'a }>u le sauver de la mort. 
Il avoit été admis dans l'Académie, en 1759, et fait adjoint à 
professeur en 1760; ses desseins et ses esquisses ont été ven- 
dus fort cher à son inventaire. 

— Il étoit né à Rouen en décembre 1729, et il éloit fils d'un 
peintre médiocre, qui après lui avoir mis le crayon à la main, 
l'envoya à Paris, et il entra pour lors dans l'école de M . Restout 
qu'il quitta dans la suite pour entrer dans celle de M. Boucher. 
— Voyez l'essai sur la vie de cet artiste, par N. Gochin (1). 

DESJÂRDINS. Il se nommoit Martin et non pas Marc. En 
s'établissant en France, il avoit francisé son nom. Son nom 
de famille étoit Vanden-Bogaert, mot hoUandois qui revient 
au mot François Des Jardins, Montagne, qui s'appeloit dans 
son pàysy àn-Plattenber g ^ avoit fait de mesme. C'étoit un ex- 
cellent artiste. 



(1) Dans sa 2« lettre aux auteurs de rAnnée littéraire, Paris, 
Jombert, 1765, in-l^. Voir aussi Tarticle de M. Fontaine dans le 
Néci'ologe de 1766, p. 163. Plusieurs de ses plus importants ta- 
bleaux sont conservés au Musée de Rouen. 



97 

DESPORTES (FRANÇOIS], mort à Paris le 20 avril (1)— c'est 
mal à propos qu'on nomme icy (2) M. Desportes Alexandre ; 
son véritable nom est François — d'une fluxion de poitrine, n 
étoit Agé de 82 ans, et dans un âge aussi avancé, il n'avoit rien 
perdu de sa première vigueur, ni du côté du corps ni du côté 
de l'esprit. Peu avant que de mourir, il travailloit avec le 
même succès et la même facilité que dans sa plus grande 
force. Il aimoit son talent et il s'y étoit entièrement consa- 
cré; et ce qui faisoit qu'il réussissoit si bien, c'est qu'il s'étoit 
fait une loy inviolable de ne rien représenter que d'après na- 
ture. Il paraissoit cependant qu'il auroit pu s'en exempter; 
car ayant travaillé pendant très-longtemps, presque toujours 
sur les mêmes sujets, il devoit ce semble les scavoirpour 
ainsi dire par cœur , et il pouvoit par conséquent se passer 
de la nature en une infinité d'occasions. Mais M. Desportes, 
accoutumé à travailler par règles et par principes, connois- 
soit la nécessité de consulter la nature, sans quoy il étoit 
convaincu qu'il falloit nécessairement devenir praticien, 
chose qui répugne à tout artiste qui a des idées distinctes du 
beau et du vray telles qu'il les avoit. Ainsi, il ne se refusoit 
point à l'étude, et dans ses derniers ans cx^mme dans sa jeu- 
nesse, il ne peignoit rien que d'après nature ; aussi faut-il 
convenir que personne ne s'est plus distingué que lui dans 
son talent. Il consistoit à représenter des animaux, des oy- 
seaux, des poissons, des fleurs, des frtiits, du paysage; quel- 
quefois il faisoit entrer dans ses compositions des vases d'or 
et d'argent et des ouvrages d'orfèvrerie, et l'on a vu de lui 
des bas-reliefs de bronze ou de marbre, dont l'imitation étoit 
séduisante. Ce n'est pas que dans ses ouvrages il mît ce 



(i) Dans YAbecedario du père Orlandi. 

(2) L*année non indiquée par Mariette est 1743 ; la note a dû être 
écrite au moment môme. 

T. n. g 



98 

môme uni qui se trouve dans ceux de Mignon, de J, Yen 
Huysum et des autres peintres flamands qui se sont distin- 
gués dans le môme talent. Les siens ne paraissent pour ainsi 
dire que des ébauches en comparaison de ceux*cy, et cepen* 
dant on y trouve encore plus de fratcbeur, plus de vérité et 
plus d'effet. C'est que H. Desportes avoit une très-graude in-* 
telligence, qu'il scavoit placer ses touches à propos, qu'il 
avoit l'art de caractériser chaque objet, suivant qu'il conve- 
ooit, que ses compositions étoient agencées de façon qu'un 
objet en faisoit valoir un autre. Enfin , toutes les règles, que 
les grands mattres ont observé dans l'ordonnance de leurs 
tableaux étoient observées dans les siens : et il est à présu* 
mer que, si cet habile homme ne se fût renfermé dans les 
bornes d'où il n'est jamais sorty, il auroit pu devenir un des 
grands peintres d'histoire de ce siècle. 11 a beaucoup tra- 
vaillé pour Louis XIY > et l'on trouve quantité de ses tableaux 
dans les mains royales. L'on reconnoit dans son maniement 
de pinceau le faire du célèbre Sneydre. Sans en estre le dis- 
ciple, H* Desportes pouvoit être agrégé à son école : car Ni-» 
casius, son maître, avoit été élève de Sneydre et travailloit 
dans les mêmes principes. 11 étoit conseiller dans l'Académie 
royale de peinture. U vint fort jeune à Paris et fut mis par 
un de ses oncles chez Nicasius qui, vieux et fort déchu de ce 
qu'il étoit autrefois, n'auroit rien appris à quelqu'un qui 
n'auroit pas apporté avec lui des talents naturels et supé- 
rieurs. 

— ^M. Desportes se maria en 1692, et, presque sur le champi 
il fit le voyage de Pologne, où il eut occasion de peindre le 
roi Jean Sobieski et toute la lamille royale. Le genre du por» 
trait faisoit alors sa principale occupation. Sobieski étant 
mort, Desporles fut rappelé en France et y reprit son premier 
talent, qui étoit celui de peindre des animaux, et comme il 
le fit avec le plus grand succès, il se vit presque continuelle- 



09 

méat occupé par Louis XIV. ]l passa, en 1719, à Loadres, à 
la suita du duc d'Aumont qui y alloit en ambassade, et il y 
fit plusieurs ouvrages. Les plus considérables qu'il ait faits 
sont à Marly, à Meudon : ils sont répandus dans presque 
toutes les maisons royales. Il peignit aussi beaucoup dp 
choses à la ménagerie dans les compositions d'omemens, 
dont le sf Audran a enrichi tous les appartemens de cette 
maison. Le tableau où il s'est représenté en obasseur est un 
de ceux qui lui font le plus d'honneur. U le donna k TAca* 
demie pour son morceau de réception , et 11 y e$t conservé 
avec grand soin (1). 

DE TROY (FRANÇOIS), né le .. février 1646, mort le 1«' may 
1730* Peu de peintres ont travaillé aus^i longtemps, et aussi 
longtemps Uen que celui-ci. Il est mort presque le pinceau 
à la piain» J'ay vu de ses tabteauic, qu'il avoit peints à l'Agd 
de plus de 80 ans, et qui ne se ressentoient point du froid de 
la vieillesse. Us étoient aussi Irais de couleur et d'un pinceau 
aussi î&mù que tout ce qu'il avoit jamais ftit; ce qui vient 
noa-seulemenl de ce que la machine a resté longtemps cheat 
lui en bon estât, et qu'il s'est peu ressenti des incommodités 
de l'âge t mais au^i di^ ce qu'il travailloit sur d'excellens 
principes. Il avoit une manière de peindre extrêmement fon« 
due, un pinceau léger et facile et un coloris qui imite mer- 
veilleusement bien tous les tons de la eheif i J'ay veu de ses 
portraits dignes d'entrer en parallèle avae les ouvrages les 
plus fameui du Van Dyck et du Titien, Il avoit étudié sous le 



(i) Il est maintenant au Louvre, et a été gmvé par JoullMn auist 
pour sa réception à rAcadémie; la planche est conservée à là 
chalcographie du Louvre. — Dans les papiers de Mariette il existe 
de sa main une copie de rariicle trés-curicMic 4u Mercure de fran$0 
sur Desporles. C'est dans le volume do juio 1743, auquel noii§ 
Q0U8 cootantons de renvoyer. 




100 

célèbre M. Lefebvre, et il n'est pas étonnant qu'aiant goûté 
sa manière de peindre, il se la soit pour ainsi dire appro- 
priée. Car, si Ton y Tait attention, leurs manières ont beau- 
coup de conformité. Quoyque le caractère d'esprit soit en 
quelque façon indépendant du talent, on ne peut disconvenir 
qu'il ne le relève infiniment, surtout lorsqu'il se trouve aussi 
excellent que celui dont ce peintre étoit doué. 11 y joignoit 
une politesse qui n'avoit rien d'affecté et qui s'étoit perfec- 
tionnée par la fréquentation d'une cour telle que celle de 
Louis XIY, où l'on n'étoit admis qu'autant qu'on se distin- 
guoit par cette aimable qualité. Ce qui achève l'éloge de 
notre peintre, c'est la manière noble et généreuse avec la- 
quelle il a toujours vécu avec M. Rigaud et M. de Largillière 
qui couroient la même lice. 11 est rare de trouver trois per- 
sonnes de même talent vivre ensemble dans une union si par- 
faite. M. de Troy, comme le plus âgé et comme ayant paru 
le premier sur la scène, auroit, ce me semble, pu exiger une 
espèce de supériorité. Mai<^ on ne l'a jamais vu l'ambitionner; 
cependant, lorsqu'il a refusé de vouloir marcher le premier, 
il n'en a pas moins fait d'efforts pour aller toujours de pair 
avec ses émules et ne se point laisser surpasser, pensant qu'il 
lui étoit permis alors de laisser paroistre quelques sentimens 
de jalousie. 

DE TROY (jean). Son nom est Jean-François. — M. de Troy 
est né à Paris, en 1679, et mort à Rome, le mercredi 26 jan- 
vier 1752. (Ces dates sont plus sûres que celles données par 
le Dandré Bardon.) 

— 11 a demeuré deux années à Pise. Un gentilhomme de 
cette ville nommé Jean Grassulini, le logea et lui fournit les 
moyens d'étudier en lui procurant des ouvrages : on voit de 
lui dans l'église de Saint- Félix, à Pise, un tableau de Saint- 
Louis. (Voyez Guida di Foreslieri delPandolpho Titi, p. 132.) 



101 

— Il étoit &gé de 27 ans lorsqu'il revint d'Italie à Paris. Il 
y avoit fait un long séjour et s'y étoit fort réjoui, deux choses 
qui déplurent beaucoup à son père. 

— Après la mort de M. Vleughels, arrivée le 10 décembre 
1737, il a été nommé pour le remplacer dans l'employ de 
directeur de l'Académie royale de peinture et de sculpture à 
Rome. Le 25 may de l'année suivante le roy lui avoit accordé 
l'ordre de Saint-Michel. L'un et l'autre conviennent égale- 
ment à M. de Troy; c'est un homme du monde, qui en con- 
noist parfaitement les usages et qui scaura faire honneur à 
la nation dans le poste qu'il occupe. Un mariage avantageux, 
qu'il a fait avec la fille du commissaire Dei-landes, femme 
d'esprit, le met encore en estât de figurer, chose qui est fort 
de son goût; car il a toujours aimé à frayer avec les gens de 
finance, et ce qu'on appelle les gros riches. Quant à ses ta- 
lens, peu de peintres en ont autant receu que luy de natu- 
rels. L'exécution du pinceau ne lui coûte rien et ne manque 
pas de génie ; mais l'on dira toujours de luy que c'est un 
praticien, et comme il est fort éloigné de s'en apercevoir luy- 
même, et que, pour en sortir, il faudroit étudier, chose qui 
ne luy convient point, il ne deviendra jamais un peintre cor- 
rect, ni dont le coloris imite les vrays effets de la nature. Il 
a beaucoup plu à Paris par ses petits, tableaux de modes, qui 
sont en effet plus soignés que ses grands tableaux d'histoire ; 
mais je ne pense pas que ce soit sur ces ouvrages qu'il fonde 
sa réputation. 11 y avoit entre luy et le peintre Lemoyne une 
inimitié fondée sur la jalousie, et entretenue par l'ambition 
de l'un et de l'autre. 

— M. Jean-François de Troy, né à Paris, en 1679, est mort 
à Rome, le 26 janvier 1752. Il venoit d'être remplacé dans 
son employ de directeur de l'Académie royale de peinture, 
établie à Rome sous la protection de la France, par M. Na- 
toire. Il avoit demandé lui-même son rappel. Depuis plu- 



1*1 

Ueun tnhtfei H ^il p«rloil d&m toutes im lèUteéi ttiate bien 
des gens pensoteht qUô ^ dans la persuasion oU il éloit de la 
difficulté de lui trouver un successeur ^ il ne s'eîcprlmoit a)tl6i 
que parce qu'il espéroit de n'être pés écouté» et que tout se 
passemit eh compUmenSi J'ignore ce qui s'est passé entre lui 
et M* de Vandières; j'ai ouï dire que l'altercation avoitété 
Vive, et que» dans un moment de dépU, M. de Troy étoit re^ 
venu à la charge et que pour cette fois M. de Toumehem, 
directeur général des bâtimens, parut se rendre à ses désirs. 
Son rappel lui fut accordé, et M. Natoire nommé pour le 
remplacer. L'on ne coiUprend rien à cette conduite de Mé de 
Troy» Que prétendoit-il devenir à Paris? Auroit-il vU de bon 
œil M» Qoypel Remplissant la place de premier peintre du 
roi et à la tèie de l'Académie? Déchiré par son atnbitfon, il 
eût pu prendre des sentimens qui peut-être auroiént troublé 
le repoi des autres peintres et qui ne l'auroient pas rendu 
plus heureuti II poutoit former une brigue » el, à la Taveur 
de ses créatures^ caUser des mortifications et des chagrins aut 
perscMines qu'il n'éimoit pas, et, quoyque le supérieur n'eât 
pas été t^onteût d^ loules ces traioasseries, elles n'en auroîHit 
pas eai»é moins de maut. Cl est fâcheui qw Mi de Troy soit 
Ibort; c'est un habile artiste de moins, et Ton n'en a jamais 
de tropi Maté» pour le bien de l'Académie, c'est ce qui pour- 
voit êrriVer de lAus àvaolageux* 6es équipages étoient di^ 
expédiés et prêts A être embatqués à Givila Vecctiiai il allait 
mettre te pied dans sa chaise^ lonsqu'une esquinanctn l'^tta^ 
qua sUbitiiment^ l'obligea de resi^) et;, s'étant convertie en une 
fluxion de poitrine, M. de Troy fut emporté etl s^ jouts de 
leo»s. Le travail ne coAtoit rien è ce peintre» et quoy qu'il ait 
passé prestiue iouttg Sa vieavcc de§ geiis qui lui fliisoient petd r^ 
l^ien du tems^ il est étonnant combien il a fait d'ouvrages% Il 
1^ aurott été focile avec uo ^ heureux Ment de faim une 
fortune brillailte; maia il aimolt à vivre et è dépenser. BiGù 



i«8 

lui en a pris que les parens de sa femme en aye&t bien agi 
ayec lui ; car, après la mort de ses enfans, qui ne survécurent 
pas de beaucoup à leur mère, ils le laissèrent jouir de la plus 
grande parUe du bien que lui avoit apporté son épouse, et 
qui étoit considérable. G'étoit le seul qui lui restoit; car tout 
avoit été dépensé en meubles, en parures et en festins. Il 
avoit pris une charge de secrétaire du roi en 1737, avant que 
d'aller à Rome; c'étoit te prélude de la grAce que le roi lui 
devoit faire Tannée suivante en le créant chevalier de Saint* 
Michel, et je me souviens que sa réception dans la charge di 
secrétaire du roi souffrit quelques difficultés, mais qui, étant 
mauvaises, furent bien tost aplanies. La facilité qu'il eut à 
manier le pinceau lui fut nuisible ; elle l'empèchoit de mé- 
diter sur son ouvrage et do l'étudier ; et, ce qui doit être plus 
mortifiant, elle le brouilla avec tousses confrères. Jusques-lè 
les ouvrages qu'ils avoient faits pour le roi leur avoient éié 
payés sur un pied dont ils avoient lieu d'être contens. M. de 
Troy s'offrit de les faire à un prix plus modique de beaucou 
et, sans examiner ce qui l'y déterminoit, on ne fit qu'un prix 
pour tous les tableaux qui éioient de même grandeur. Il fal* 
lut en passer par là ou n'en point faire. Gela tit beaucoup 
crier; mais M. de Troy n'en alla pas moins son train, et, en 
peu d'années, il «ivoya en France des tableaux pour deux 
tentures de tapisseries, l'une représentant rhistoire d'Estber, 
et l'autre la fable de Thésée et la conquête de la Toison d'or. 
Tout y étoit fait de pratique, mais les compositions étoieai 
extrêmement riches et faites pour plaire. On fut plus content 
des tableaux d'Ëstber et l'on eut raison. Il ne les faut paséplu- 
dier; ils fourmillent de défauts, et avec cela on est forcé de 
les admirer. Qu'on dise que M. de Troy est lèche dans son 
dessein, qu'il ne scait pas oe que c'est qu'expression, que ses 
airs de têtes ont souvent qu^que chose d'igoobie, on en con- 
viendra, et oo demandeca quel est le peintre qui a mis plus 



de richesse dans ses compositions, qui a eu un pinceau plus 
flatteur et qui a rendu ses tableaux plus piquans par certains 
effets qui sont à lui. On n'en nommera pas beaucoup qui lui 
soient supérieurs. Il avoit passé une bonne partie de sa jeu- 
nesse en Italie, plus occupé des divertissements qu'il y pre- 
noit que de l'étude qu'il y devoit faire, et qui lui avoit été si 
fort recommandée par un père qui connoissoit la nécessité de 
consulter la nature et qui s'en est si bien trouvé. 

— La note précédente portait en marge la date de 1752; de- 
puis^ Mariette ayant eu des détails mr son rappel de Rome^ 
les consigna dans la suivante datée^ en marge^ de 1762. M. de 
Troy le fils a succédé à Yleugbels, dans la place de directeur 
de l'Académie de peinture que le roi entretient à Rome, en 
1738, et, pendant tout le tems de son directorat, il en a rem- 
pli les fonctions à l'honneur de la nation. Il a vécu noble- 
ment et s'est fait regarder, dans une ville où il faut figurer si 
l'on veut s'attirer de la considération. Tous les élèves qui ont 
vécu sous lui se louent de ses bonnes façons. Il a entretenu 
parmi eux l'émulation , mais peut-être leur a-t-il laissé voir 
de trop près et goûter les attraits de la vie somptueuse, que 
lui et sa femme ont mené. Il a admis quelques-uns des plus 
huppés dans ses parties de plaisir, et, comme c'est autant de 
tems pris sur l'étude, et que les momens sont précieux pour 
tout homme qui est dans le cas de s'instruire, je ne scais si 
M. de Troy n'en doit pas être responsable, et cela est bien 
pardonnable de sa part. Je crains d'ailleurs que par rapport 
à l'art sa façon de faire ne fût une occasion de chute pour des 
élèves qui, n'en sachant pas assez, se seroient imaginés qu'en 
l'imitant ils étoient dans le chemin qui conduit au but. M. de 
Troy se monlroit trop facile dans l'exécution de ses tableaux 
et si complaisant pour les productions de son génie que son 
indulgence ne lui permettoit pas de les épurer, ni de corriger 
les fautes qui pouvoient s'y être glissées, même lorsqu'il en 



105 

étoit frappé. 11 s'en faisoit un mérite et s'excusoit sur ce qu'il 
7 a toujours à perdre à déranger ce qui a esté fait dans un 
premier enthousiasme. 11 étoit convaincu que le feu du génie 
s'éteint pour peu qu'on le veuille contraindre. Cela pouvoit 
lui convenir, mais l'exemple étoit pernicieux. 11 ne pouvoit 
manquer d'occasionner des chutes. On l'a éprouvé en plus 
d'une occasion. 

M. de Marigny, ou, comme on l'appelloit alors, M. de Yan- 
dières, fit le voyage d'Italie dans le tems du directorat de 
M. de Troy. Il fut logé dans le palais de France. M. de Troy 
le reçut avec toute la distinction qui lui étoit due. Tout se 
passa dans les commencemens à la satisfaction de l'un et de 
l'autre. Il y eut des fêtes données. Les pensionnaires, firent 
les honneurs d'un bal où la principale noblesse de Rome fut 
invitée, et M. de Yandières sceut gré au directeur de toutes 
ses attentions. Malheureusement celui-ci avoit pris pour mat- 
tresse la femme d'un médecin extrêmement jolie. 11 en étoit 
amoureux à la folie. C'est le foible des vieillards de porter la 
passion à l'excès et d'être jaloux. M. de Troy se laissa gagner 
par cette maladie. Il crut appercevoir que son hôte s'étoit 
pris d'amitié pour la jolie femme; il ne put y tenir, et, ne se 
possédant point, il manqua à son supérieur ; il tint des dis- 
cours qui furent entendus et qui déplurent. Dès ce moment 
sa perte fut résolue. 11 y avoit du tems qu'il demandoit son 
rappel ; c'étoit peut-être un jeu : ce qu'il y a de sûr c'est 
qu'amoureux comme il l'étoit, il eût été trte-piqué si on 
l'eût pris au mot et que, ne recevant aucune réponse, il étoit 
persuadé que l'affaire étoit oubliée. 11 étoit dans l'erreur. On 
lui avoit nommé un successeur. Au moment qu'il s'y atten- 
doit le moins, il le vit arriver, sans aucune espérance de gar- 
der sa place. Il restoit à Rome , captif de celle dont il portoit 
les liens; il temporisoit ; mais enfin il fallut prendre son parti. 
M. de Nivernois, notre ambassadeur à Rome, avoit obtenu la 



106 

permission de revenir en France. Une frëgâte, équipée à MaN 
eeille, Tattendoit et étoit venue pour servir à son passage. 
M. de troy eut ordre de se préparer à partir et de profiter de 
roccASion» Le jour fut indiqué et rintimation lui en fut faite 
peu de tems auparavant à l*Opéra, où il assistoit avec sa mat- 
tresse. Ce fut un coup de foudre. Saisi et abbatu, faisant effort 
sur lui-raême pour ne rien laisser apercevoir de ce qui se 
passoit dans son intérieur, il rentre chez lui. La fièvre le sai- 
sit. Un mal de gorge, qu'-on attribue à l'air froid qu'il a res- 
piré à la sortie du spectacle, le menaça d'une esquinancie. 
Les médecins appelés le traitent en conséquence, et la mala- 
die dégénère bientost en une flution de poitrine^ qui le fait 
périr en peu de jours. 

DIÂMÂNTINI (giuseppe). Le chevalier Joseph Diamantini 
vivoit à Venise sur la fin du siècle dernier et au commence*- 
ment de celui-ci ; et, à en juger par une suite de planches 
qu'il a gravé lui-même à Teau^forte sur ses propres des- 
seins (1)^ c'étoit un peintre licencieux et d'un dessein fort pou 
correct. A sa façon de composer je serais assez porté à croire 
qu'il étoit disciple du cav. Liberi. Il cherchoit du moins à 
imiter sa manière* L'auteur de la nouvelle édition du Bos- 
ch ini PiUurt di Venetâa le tait nattre dans la Romagoe^ et 
lui donne te nom de /nem, mais c'est une erreur de sa pari; 
il vaut mieux s*eii rapporter au peintre lui-même, qui^ sur 
toutes ses planches, pnend le nom de J^teph. 

DIKFENBEKK (Abraham). Voicy l'inscription qui est au- 
dessous de sott portrail gravé chez J. Meyssens •. « Il est né h 
Bois4e-Ducq, ayant cy*devant exercé pour quelque temps 



(I) voir Baruch, XXI' vol., |i. M5aa. 



l'art de peitidte sur les vlites, ett quoy il surpasse tous œux 
de son temps, tuais à présent il s*est adonné à peindre toutes 
sortes de peintures, ttiesrue aux desseins Irès-curieusement, 
ayant êU pour tnaislre Pierre-Paul Rubens, tient sa résidence 
à ÂnvëtS. » Sandràrt dit à peu prî?s la même chose, et lait 
mention des desseins qu'il a donné pour le temple des Muses. 

— Abraham Diepenbeck étoit à Paris, selon que je puis 
le conjecturer, en 1632. M. Lasne a gravé, dans cette année, 
une grande thèse sUr ses desseins, et je pense que ce fut aussi 
alors qu'il fit pour M. Pavereau les desseins qui ont été gra- 
vés par Bloemaert et Matham, et qui enrichissent le livre des 
tableaux dU temple des Muses, mis seulement au jour en 1655. 
Il est à remarquer que dans cette même année, 1632, Van 
Thulden, condisciple de biepenbeck, travailloit à Paris. Les 
tableaux de ïa galerie du Luxembourg, peints par Rubens, 
auxquels ils avoienl eu part, leur âvoient acquis une certaine 
considération dans celte ville. 

— La facilité, avec laquelle Dîepétibeck invetitoit, lui a fait 
produire une prodigieuse quantité de desseins, qui sont faits 
sur de bons principes, pour ce qui concerne le clair-obscur. 
Ceux qui lui ont fait plus d'honneur sont les tableaux du 
temple des Muses, qui ont été gravés par Corneille BloemaerL 
(Cat. Croaat» p» 100.} 

— Un jeune paysan se reposant au pied d'un arbre, te- 
nant son asne par le licou. Cette petite pièce touchée avec 
beaucoup d'esprit a été gravée à l'eau- forte, en 1630» par 
Abraham Diepenbeck. Une autre, du mesme dessein, n'en est 
qu*une copie tournée de l'autre sens. — On y lit au haut le 
nom de l'auteur écrit à rebours. J'ay remarqué qu'il y écrit 
ainsy son nom A. van Diepenbeeck fe. Dans l'original, le 
paysan est assis du côté gauche de la planche. Le nom du 
peintre ne se trouve point dans la copie. 2° 3' h.; 5° trav. 

— Tous les saints de l'ordre des Carmes louans la sainte 



iOS 

Vierge dans le ciel, et invitans les princes et le peuple chres- 
tien à l'honorer en prenant le scapulaire. Grande pièce de 
deux planches assemblées, gravées par Pierre de Jode le jeune. 
Celle-cy est une épreuve sans lettre. La teste de Tarchiduc 
d'Autriche, qui n'y est pas encore gravée, est dessinée par 
Diepenbeke mesme. 

— Une suite de plusieurs sujets , tirés de l'Iliade et de 
l'Odyssée (au nombre de 36). Il n'y a de noms d'artiste qu*à la 
première pièce, et il y en a mesme quelques-uns dans la 
suite qui ne paroissent pas être du dessein de Diepenbeke. 
Cette suite est fort rare. Je ne sais pas si elle est œmplète, 
ou si, n'ayant jamais été finie, c'est là tout ce qui en a été 
fait. — A la pièce d* Achille pleurant la mort de Patrocle, lUor 
riette ajoute : A celle-cy, seulement, il y a au bas une dédi- 
cace à Edouard Bysshe de Smalfield, écuyer dans le comté de 
Surrey. — Toutes ces figures avoient été faites pour être 
incorporées dans une nouvelle édition des œuvres d'Homère, 
qui se devoit faire en Angleterre. Elles sont fort rares, l'édi- 
tion n'ayant jamais été donnée, que l'on sache. 

DIERICK (defrize). Un jeune homme, fils de Thiery 
Frisius, peintre hollandois, demeurant alors à Venise, repré- 
senté par H. Goltzius avec un chien de chasse et un oyseau 
deproyesur le poing. Cette pièce est datée de 1597, et tous 
les curieux en ont toujours attribué la gravure à Goltzius. 
Cependant , si on l'examine avec attention , l'on trouvera 
qu'elle est bien plus dans la manière de Jean Saenredam, et 
il y a grande apparence qu'elle a été exécutée par ce gra- 
veur, sous les yeux et la conduite de H. Goltzius et sur un 
dessin de ce dernier. — Les quatre vers qui sont au bas de 
la planche, et qui sont de P. Scriverius, sembleraient prouver 
que cette pièce est de H. Goltzius ; il y est dit : 



.. quos Goltzius apte 

Yivere Phidiacft fecit in œre manu. 



109 

Tout cela ne m'empêche pas cependant de croire que c'est 
Saenredam qui -en est le graveur. L'on voit bien d'autres 
pièces de lui où son nom n'est pas et où il n'y a que la 
marque de Goltzius, son maistre. Theodorico Frisio pictori 
egregioapud Yenetos amicitiaeet filiiabsentis reprœsantandi 
gratiâ D. D. — Van Mander fait mention de ce peintre, amy 
de Goltzius , dans la vie de ce graveur, p. 284. II l'avoit 
trouvé à Venise, à son retour d'Italie. Il en parle encore dans 
un autre endroit, p. 296, et il le nomme toujours Dierick de 
Vries, c'est-à-dire, en latin, Thedoricus Frisius, comme le 
nomme Goltzius. 

DIETERICH ( GHRÉTIEN-GUILLAUME-EBMEST ]. Il Uaqult à 

Weimar, en Saxe, le 30 novembre 1712. Son père, né à 
Weissensée, et mort à Dresde, en 1753, âgé de 68 ans, lui 
donna les premiers principes de l'art ; et lorsqu'il le vit en 
état de profiter des enseignements d'un meilleur maître, il le 
mit, en 1727, sous la direction d'Alexandre Tiiiele. Dieterich 
passa trois ans dans cette école. Il n'en avait que 18 lors- 
qu'une heureuse étoile le fit connaître de M. le comte de 
Brûhl, qui, charmé de ses belles dispositions, le mit sous 
sa protection et lui fournit les moyensde les faire valoir en lui 
accordant une pension de 1500 livres, l'entrée de son cabinet, 
meublé d'excellents tableaux ; Dieterich en sçut profiter ; il 
étudia avec ferveur. Les manières qui lui plurent davantage 
furent celles de Berchem, d'Ostade, de Poelembourg, de Du- 
jardin, de Claude le Lorrain. Il les apprit pour ainsi dire par 
cœur, et s'en rendit si bien le maître que, dans les tableaux 
qu'il fit dans la suite, on put reconnotlre une imitation par- 
faite de la manière de ces différents maistres. Mais ce fut 
Rembrandt qui fut principalement son héros. Il le regarda 
toujours comme sa boussole, et, cela alla quelquefois si 
loin, qu'au lieu d'un imitateur on le prendroit pour un 



liQ 

copiste de ce grand peintre. Après quatre années d'une étude 
assidue, le désir de voir de plus près les ouvrages des peintres 
qu*il se proposoit pour modèles, lui fit entreprendre le voyage 
de Hollande. Il le fit en 1734, et revint à Dresde Tannée sui- 
vante, U eut alors le bonheur d'entrer au service de son 
prince, qui lui Ut l'honneur de placer plusieurs de ses ta-> 
bleaux dans ses magnifiques galeries et qui l'occupa presque 
toujours depuis. Dieterich entreprit, en 1743, le voyage 
d'Italie. Il vit Rome ; mais, ayant d^à une manière décidée 
et qui ne tenoit rien du goût italien, ce voyage fut plus une 
affaire de curiosité qu'un objet d'utilité. Il n'en tira d'autre 
parti que d'avoir vu les beaux paysages de Salvator Rosa et 
d'avoir appris de ce grand maistre à former avec art des 
troncs d'arbres, un feuille léger et des roches sèches el 
arides. Ces nouvelles richesses se répandirent dans d'excel^ 
lents paysages où je le regarde comme supérieur à tout ce 
qu'il a fait. S'il y met des eaux, si ses terrains sont couverts 
d'une herbe et d'une mousse légère et douce, ils deviennent 
admirables. J'en ay vu quelques-uns à Paris, chez M. Ran*- 
don de Boisset, qui vont de pair avec tout ce qu'on trouve 
de plus beau dans ce genre, y m dirai autant de ses desseins; 
il m'en a envoyé quelques-uns, faits d'après nature, qui sont 
admirables. Dieterich ne brille pas moins dans ses gravurest 
Elles sont spirituelles et agréables. Il a eu la complaisance 
d'en rassembler pour moi près de 150, et il m'en manque 
encore. Mais où les trouver? Car, à l'exception de celles qu'il 
a gravé en dernier lieu et dont il a les planches, toutes ses 
autres sont de la dernière rareté. Il brisait les planches à 
mesure qu'il les gravoil, ne prévoyant pas que quelque jour 
elles mérileroieut les recherches des curieux, La dernière 
guerre, qui a ruiné tant de familles en Saxe, n'a pas été désa* 
vantageuse à notre peintre. Le roi de Prusso, le prince son 
frère, ses généraux, tous ont voulu avoir de ses ouvrages. 



m 

Sa réputation s'est accrue et répandue dans le reste de l'Eu-* 
rope. On lui a demandé de ses tableaux de toutes parts, et 
surtout la France les a reçus avec empressement. A peine 
a*t-il eu le temps de se reconnottre. On les lui a bien payés. 
Dieterich a fait avec cela un mariage avantageux, Il se trouve 
aujourd'hui dans une grande aisance. Il faut souhaiter que 
l'art n'en souffre point ; c'est assez ordinairement le terme 
fatal où viennent se briser et se perdent les talens. (Voyez 
le livre : IsUres d'un amateur avec d^$ éçlairciisemem hittU^ 
p. 300.) 

-—Dieterich a eu la manie de clianger de nom et de donner 
à celui qu'il avoit hérité de son père une terminaison ita« 
lienne en se faisant appeler Dietericy. Ce n'est pas qu'il eût 
dessein de se rapprocher par**là des italiens. Son goût natu- 
rel le porloit plutoél à imiter le faire des peintres des Pays- 
Bas, et Rembrandt fut son héros. Après être demeuré pen« 
dant près de dix ans chez le comte de Brûhl, qui lui fournit 
généreusement les moyens d'étudier et de se rendre habile 
dans son art, un beau matin, par un caprice qui n'a point de 
nom, il sortit brusquement de la ville de Dresde et se retira 
dans la ville où il étoit né ; mais bientost U revint à son pre«* 
mier poste, et le comte de Briihl songeant qu'il étoit temps 
de lui faire voir l'Italie, lui en proposa le voyage et se char-» 
gea d'en faire les frais. Dieterich débarqua à Venise, et pa-^ 
roissoit s'y plaire, mais c'étoit Rome qui lui étoit marquée 
pour la continuité de ses études ; il s'y transporta, mais tou^ 
jours livré à ses caprices, il prit cette ville en haine; il y se-» 
journa peu, repassa à Venise, et bientost il fut de retour à 
Dresde, où ses occupations se multiplièrent de bçon qu'il 
eut peine à y suffire. U se maria avantageusement* U fut 
choisi pour présider en qualité de peintre à la fabriques des 
porcelaines de Meyssens avec de gros appointemens. Mais il 
ne fut pas longtemps dans ce nouvel emploi sans éprouver 



112 

un dégoût qui avoit sa source daus son inconstance. Une 
attaque d'appopleiie à laquelle il a eu le bonheur de résister, 
Tacquisition d'un bien de campagne où il parait se plaire 
avec trop d'aisance, tout cela lui arrache trop souvent le pin- 
ceau des mains, et il est à craindre que ce ne soit plus le 
même qui ait fait tant de choses et jolies dans des tableaux 
qui dans leur genre le disputent à ceux des meilleurs maîtres ; 
témoin ceux qu'on voit de lui chez M. Randon de Boisset à 
Paris. M. de Heinecken, de qui je tiens tout ce que je viens 
d'écrire, me dit que le père de Dieterich, peintre en minia- 
ture, fit embrasser la peinture à son fils, malgré lui, et que, 
pour l'obliger à manier le pinceau, il usa souvent de violence. 

DIEU (ANTomE) éloit bourguignon et disciple de Le Brun. 

— ^ Antoine Dieu> né en Bourgogne, vivoit à Paris au com- 
mencement de ce siècle, et son extrême facilité de dessiner 
lui a mis presque continuellement la plume à la main. Il 
mettoit du feu dans ses compositions, mais, s'il faut dire la 
vérité, elles sembloient presque toutes être jettées dans le 
même moule; elles avoient un caractère de ressemblance qui 
ne montroit pas un génie bien fécond. Il avoit coutume de 
donner à ses figures des proportions fort allongées, et cela 
n'étoit pas un défaut lorsqu'il dessinoit en petit, mais il éten- 
doit celte règle aux plus grandes figures, et alors c'étoit un 
défaut dont il ne lui fut pas permis de se corriger, car il éloit 
devenu un praticien et rien davantage; c'étoit, du resle, un 
assez médiocre peintre. Je l'ai connu dans ma jeunesse; il 
venoit chez mon père, qui s'est souvent servi de lui. Il a dû 
mourir vers l'année 1720 : il tenoit une boutique de tableaux 
sur le petit-pont, et je crois me rappeler qu'il mourut de 
l'opération de la pierre : je n'ose pourtant l'assurer. 

DIEU (JEAN de) d'Arles, sculpteur du roy, a connu parti- 



113 

culièremenl M. Puget, mais n*a jamais été son élève. Quand 
M. Puget vint à Paris, et, lorsqu'il vit les ouvrages qui sont 
dans les jardins de Versailles, il en témoigna de la satisfac- 
tion. De Dieu avoit été fort lié d'amitié avec Roullct, graveur, 
son compatriote. Il avoit été pareillement grand amy de la 
Page, dont il possédoit une belle suite de desseins qu'a 
M. Ghubéré; entre autres, ce beau dessein de la chutte des 
anges, qui fît regarder dans Rome La Fage comme un nou- 
veau Michel-Ange. Au reste, de Dieu, que j'ay coimu, étoit 
un parfaitement honeste homme. 

DIZIANI (GASPARD), né à Belluno, en 1689, a fait son pre- 
mier cours d'étude sous Grégoire Lazarini à Venise, et est 
entré ensuite dans l'école de Sébastien Ricci, dont il étoit le 
compatriote, et dont il épousa la manière. 11 étoit né avec du 
génie; mais l'imagination prévaloit chez lui et ne lui per- 
mettoit pas de mettre beaucoup de correction dans ses ou- 
vrages. Il sortit de Venise et fut en Allemagne, où il étoit 
appelé, et dont il revint à Venise en 17 . Il y e^t mort en 
1767. 11 a laissé un fils nommé Joseph, qui exerce la pein- 
ture à Venise. 

DOBSON (gugliemo). 11 étoit gentilhomme et descendoit 
d'une très-bonne maison, anciennement établie à St-Albans, 
dans le comté d'Herford. Il nacquit sur la paroisse de St-An- 
dré, dans le quartier de Holbourn, à Londres, en 1610. Obligé 
par la nécessité de chercher une profession, il fît choix de la 
peinture, et y fit^ en peu de temps, de tels progrès que ses 
premiers ouvrages méritèrent les regards et l'approbation de 
Van Dyck. Ce grand peintre l'alla déterrer dans un misérable 
grenier où il travailloil, le présenta au roi Charles I«r, et lui 
fit accorder la protection de ce prince, grand ami de la pein- 
ture. Dobson a principalement réussi dans le genre des por- 
T. n. h 



114 

traits. On en voit quelques-uDS qui ne le cèdent point aux 
plus beaux de Van Dyck. 11 a peint aussi quelques tableaux 
d'histoire, mais il faut convenir qu'il étoit alors hors de sa 
sphère. Son goût pour le plaisir le jetta dans de folles dé- 
penses, qui le conduisirent en prison. Un ami vint à son se- 
cours et l'en fit sortir ; mais il ne jouit pas longtemps de la 
liberté qu'il venoit de recouvrer. Il mourut , âgé seulement 
de 36 ans, le 28 octobre 1646. Anecdotes sur la peinture par 
Vertue. — On a son portrait, gravé par lui-même à l'eau- 
iorte, qui est un beau morceau. 

DOFIN (olivier) est (à ce que j'ay appris de M. Vleughels) 
neveu de Jean Boulanger de Troyes, disciple du Guide. J'ay 
veu quelques pièces qu'il a gravé d'après ce peintre. 

— La Vierge, s'appuyant d'une main sur un livre, posé 
sur une table, et de l'autre sur un coussin sur lequel est 
assis Tenfant Jésus à qui St Jean montre un oiseau perché 
sur sa main ; en demy-corps, gravée à l'eau-forte, d'un assez 
bon goût de dessin, par Olivier Dofin, d'après Annibal Car- 
rache. 

DOLENDO (BARTHÉI.EMY]. Le saint Esprit descendant sur 
les apôtres le jour de la Pentecoste, gravé au burin, en 1629, 
d'après Martin Hemrskerk, par Barthélémy Dolendo. Bartho- 
Umeuê Dolendo fedt 1629. C. Yischer exe. 20» 6' haut. 14® 
9' trav. Ce peut estre une faute. Je ne sache pas que l'on con- 
noisse d'autre Dolendo que celuy qui se nomme Zacharie. Du 
moins celuy-cy, qui se nomme Barthélémy, a gravé dans la 
mesme manière, et c'est encore une des raisons qui me fe- 
roient soupçonner erreur, et qu'on devroit lire Zacharie au 
lieu de Barthélémy. 

DOLIVÂR {jeak), neveu de Jean Lepautre,. apprit à graver 



115 

sous luy; il promettoit beaucoup, mais il mourut jeune, en 
1692 (Extrait d'une lettre de d'Aviler.) 

DONATELLO. Vasari dit qu'il nacquit à Florence, en 1303, 
et qu'il j mourut, en 1466, âgé de 83 ans. Il y a Une erreur 
manifeste dans ces dattes ; car, s'il est constamment mort dans 
Tannée et à l'âge qu'il dit, il devoit eslre né en 1383 et non 
pas en 1303, ce que je croirais assez volontiers, et qui est 
constant. Voiez Bocchi, Tav. seconda. 

DORIGNY (louis). Après ax>oir copié le passage du Pozzo, 
Vite de* pittori Yeranesi, p. 176, Jâarietle ajoute : Mori negli 
ultimi del l'anno 1742, overo nei primi mesi del 1743. La 
partie de ce peintre étoit l'invention. Il avoit un génie extrê- 
mement facile, et il réussissoit principalement dans les 
grandes compositions. Ses tableaux de chevalet ne lui font 
pas le même honneur que ce qu'il a peint à fresque sur des 
murailles. C'est qu'il cherchoit plus tôt l'effet et les disposi- 
tions singulières et piquantes que la correction du dessein 
et la justesse des expressions. Il étoit devenu si grand prati- 
cien qu'il n' avoit presque jamais besoin de faire des desseins 
pour les ouvrages qu'il avoit à peindre, même ceux qui 
étoient les plus composés. La plus légère esquise lui sufBsolt. 
De là il partoit, et, le pinceau à la main, ilcomposoit et rédi- 
geoit sur le mur ce qu'il vouloit exprimer» Ce qu'il a peint 
à Vienne chez le prince Eugène n'est pas ce qu'il a fait de 
plus beau. Il y a toujours du feu, mais le ton de couleur 
en est d'une fadeur extrêmement supportable, et est entière- 
ment faux. 

DORIGNY (le chevalier Nicolas) de Paris, dessinateur et 
graveur à l'eau-forte, de l'Académie royale de peinture et de 
sculpture. — Celuy, dont on a recueilly icy les ouvrages, a\oit 



116 

de trop heureuses dispositions, et en même temps de trop 
illustres exemples dans la personne de son père et dans celle 
du fameux Youet, son ayeul, pour balancer un moment dans 
le choix de sa profession. Aucune ne luy convenoil mieux 
que celle du dessein. Beaucoup de goût, une grande facilité, 
mais par-dessus tout une vivacité de génie surprenante luy 
firent faire en peu de temps un progrèz si rapide que ses 
maistresen furent, pour ainsy dire, épouvantés. 11 ne luy fut 
presque pas nécessaire, comme aux autres, d'apprendre les 
premiers élémens de Tart. Dès les premiers momens, il fut 
en estai de dessiner des parties entières, et, ce que Ton n'ose 
espérer que des années et de la pratique acquise par une 
élude continue et suivie, on le vit, au bout d'un an, capable 
d'entreprendre le voyage d'Italie ; c'étoit ce qu'il désiroit le 
plus. Louis Dorigoy, son frère aîné, l'avoit déjà devancé, et, 
dans un séjour de plusieurs années, qu'il avoit fait dans di- 
verses parties de l'Italie, il s'étoit déjà acquis une partie de 
cette grande réputation , qu'il soutient encore si bien pré- 
sentement et qui Ta fait souhaiter par tant de grands sei- 
gneurs pour enrichir leurs palais de ses vastes idées. Le pro- 
jet de Nicolas Dorigny, en allant en Italie, éloit d'embrasser, 
comme son frère, la peinture. Par un pur hasard, et presque 
sans le vouloir, il devint graveur. La grande facilité qu'il 
avoit à dessiner l'y conduisit insensiblement et luy fit aisé- 
ment surmonter les difficultés qu'il auroil pu y rencontrer. 
Ce ne fut pas en cela seul qu'il luy fut utile d'être bon des- 
sinateur ; il devint en quelque façon par là le maître de son 
ouvrage , et il luy eût même autrement été difficile de se 
captiver à une manière étrangère. Comme ce graveur joint à 
beaucoup de goût une vaste connoissance des belles choses, 
il a sceu parfaitement choisir les tableaux qu'il a gravés, et 
c'est encore un nouveau mérite pour ses estampes de ce 
qu'elles représentent les plus beaux ouvrages des plus grands 



117 

maîtres. La feue reine d'Angleterre ayant souhaité de voir 
gravés les célèbres cartons de Raphaël, que Ton conserve 
dans le palais d'Hamptoncourt, elle fit proposer à Dorigny de 
passer à Londres. 11 exécuta ce que souhaitoit Sa Majesté ; et, 
en récompense d'un si grand travail, Ton pourroit adjouter 
en faveur de son mérite personnel, le roy d'Angleterre, à 
présent régnant (1), luy fit l'honneur de le créer chevalier. 

— Jésus-Christ descendu de la croix par ses disciples. Ce 
tableau passe pour un des plus beaux de la ville de Rome, 
où Daniel de Volterre l'a peint dans l'église de la Trinité du 
Mont. L'estampe, dessinée d'après le tableau, gravée à Teau- 
forte et terminée ensuite au burin, par N. Dorigny, en 1710, 
est très-bien dessinée et donne une grande idée de l'original. 
— Il l'a rachevée en France, lorsqu'il y vint pour la première 
fois avant que passer en Angleterre. 

— Les sept pièces de la suite des Actes des apôtres, inven- 
tés par Raphaël d'Urbin et peints par luy-mesme à détrempe 
sur des cartons, pour servir de modèles aux tapisseries, qui 
furent exécutées pour le pape Léon X (ces fameux cartons, 
dont Rubens fit faire l'acquisition à Charles I®' , roy d'Angle- 
terre, se conservent dans le palais d'Hamptoncourt), ont été 
gravées par le chevalier Dorigny pendant son séjour à Londres. 

— St Etienne, abbé de Cisteaux, recevant St Bernard qui 
arrive à Cisteaux avec ses compagnons pour y prendre l'habit 
religieux, gravé d'après le dessein de Joseph Passari. — J'ay 
veu le tableau original dans l'église de Cisteaux. Le R. P. 
Etienne Prinstet, qui estoit alors procureur général de l'ordre 
de Cisteaux en cour de Rome, le fit faire au Passari, et fit en- 



(1) Comme ce fut de Georges W que Nicolas Dorigny reçut 
cette distinction, en 1719, époque de son retour en France, la 
note est antérieure à 1727, époque de la mort du roi. Dorigny ne 
mourut qu'en 1746. 



148 

suitte graver la planche au ch®' Dorigny . Il s'y est fait repré- 
senter sous la figure d'un des religieux de St Bernard, qui est 
sur le devant de la coinpositioa et qui regarde en face ; la 
teste est le portrait du père Prinstet qui, s'étant retiré à Cis- 
leaux» y est mort en 1727, âgé de 77 ans, — M. Dorigny m'a 
asseuré que ce n'est point le portrait du père Prinstet^ mais 
celuy du père Raydelet son compagnon. 

DOSI (610. AHTomo). n donna les desseins de plusieurs 
décorations pour l'entrée de la grande-ducbesse, Christine de 
Lorraine, à Florence, en 1588. C'éloit précisément le temps 
qu'il travailloit à décorer la belle et riche chapelle de la fa- 
mille Nicolini, dans l'église Ste-Croix de Florence, dont le 
Borghini a fait une si exacte description. 

DOSSIER (mighel]. Une femme dessinant des figures d'op- 
tique, demie figure gravé par Dossier, d'après le s' Allou qui 
y a, à ce qu'on prétend, représenté le portrait de sa femme. 

DOSSO DA FERRÂRA. L'auteur de la descriptton des peiâ- 
ture» qui se vojent à Ferrare, ne le nomme point autrement 
que Dosso Dossi, et le fait mourir en 1560. Si cela est vrai, le 
Dosso dut avoir le chagrin de voir parler de lui avec un in- 
fini mépris par le Dolce dans son dialogue sur la peinture, 
imprimé à Venise, en 1557. Gel écrivain (page 10) trouve 
très-mauYais que fArioste ait donné au Dosso et à son frère 
une place honorable dans son poème (f ), et les ait mis au rang 



(1) E quel, che furo a uostri di, o sonVa, 
Leonardo, Aodrea Mantegna, &)an BelHao, 
Due Dossi, e quel, ch*a par sculpe, e colora, 
Midiel, pia ehe Monal, AD^el divino, 
Batliaao, Baiael, Tizùui, ch'oBora 
Mon meD Cador, cke qnei Yeuezia, t Urlniio : 
£ gli altri, di cui tal Topra si vede, 
Quai de la prisca età si legge e crede. (Ganto 33«, st. 3.) 



119 

des peintres les plus illustres, tandis qu'ils n'ont lait, à son 
avis, que des ouvrages grossiers et nullement dignes des 
éloges que ce fameux poëte leur a prodigués. S'il en faut 
croire le Dolce, l'un des deux Dosso avoit étudié à Venise 
pendant quelque temps sous le Titien. Son frère a vu Rome, 
et avoit été disciple de Raphaël; mais j'apréhende qu'il 
n'entre un peu d'humeur dans ce jugement, d'autant que le 
critique n'épargne pas Fra Bastîano del Piombo, et trouve 
pareillement mauvais de le voir placé à la suite de Raphaël 
et de Michel- Ange, dans le même endroit où l'Arioste parle si 
avantageusement des deux Dosso. Le Rosetti, Descrip. dette 
pitture di Padoua, page 168, sur la foi d'un ancien Ms. donne 
au Dosso le nom de Bernard, mais il me faudroit d'autres 
preuves pour être persuadé de la vérité de celle assertion. 
Les auteurs des discours, qui accompagnent les gravures des 
portraits des peintres peints par eux-mêmes, qui sont dans 
la galerie de Florence, ne sont pas favorables aux Dosso; et 
le Rossetti, auteur de la nouvelle Description des peintures 
de Ferrare, les accuse de partialité et d'avoir parlé sans con- 
noissance d'ouvrages qu'ils n'ont jamais vus; autrement ils 
en auroient fait l'éloge. 

Le jugement du Dolce, porté en 1557, me feroit croire que 
les Dosso n'étoient plus lorsqu'il fit paroître son livre. Il 
n'éloit pas naturel qu'il se bazardât de parler si désavanta- 
geusement de peintres vivants, et qui jouissoient d'une répu- 
tation à la cc^T d'un prince qui avoit ses étals si près de Ve- 
nise, et qui n'avoit pas dédaigné de faire travailler dans son 
palais le Dosso en même temps qu'il y employoit le Titien. 

D0U («ÉMU) (1). Sur le pa$$age o& Htmirakm diê que 



(1) Les notes de Mariette contiennent suf MrardDwi fuslie gram- 
des pages tirées d'un passage de Houbraken ; comme elles ne sont 



120 

Jlf • Spiering payait à Gérard Dou ses tatkaiLX la valeur de 
leur poids en argent^ Mariette ajoute : Apparemment que 
c'étoit en or; car le plus considérable tableau de Gérard Dou 
ne pèse pas plus de deux ou trois livres, et ce poids en argent 
n'auroit pas fait une fort grosse somme. 

^ Houbraken parlant du tableau représentant un intérieur 
de chambre avec une femme donnant à téter à un enfant, le 
plus considérable qu^il connût de ce maître, Mariette remarque : 
Apparemment par rapport à la grandeur; il avait 3p.de 
haut sur 2 p. 6 p. de large — et ajoute la suite de Vhistoire 
du tableau : C'est le même tableau qui vient d'être exposé en 
vente, en 1754, après la mort de M. Bernard, maître des re- 
quêtes, fils de Samuel Bernard. Il a été porté jusqu'à 29,050 
livres et retiré à ce prix par les héritiers qui ne veulent point 
le donner à moins de 30,000. Us disent que c'est un présent 
fait à leur père par les états généraux, et j'ay ouy dire que 
MM. Pils d'Amsterdam avoient ici un homme qui éloit chargé 
de leur commission, et qui l'a fait monter au prix excessif 
où il a été porté. Nos connoisseurs ne conviennent point que 
ce soit le plus beau morceau de Gérard Dou. Ils trouvent les 
figures et surtout l'enfant mal dessiné, et en général la com- 
position peu intéressante. Ce qui est de beaucoup le meil- 
leur est le sujet représenté dans le fond, celui où est le chi- 
rurgien et les deux tables, qui sont peints dans la manière de 
Schalcken, ou noire. 

DOUET. La Ste Vierge assise et veue par le dos, ayant au- 



qu'une traduction et même assez inexacte, nous dit-on, nous n*a- 
vons point à les donner, mais seulement les notes ajoutées par 
Mariette. — Dans son catalogue de Técole flamande, M. Yillot, 
d'après Tannée de son âge mise par Gérard Dou dans la signature 
de sa femme hydropique, a rectifié la date de sa naissance, qui 
se trouve reportée à 1598. 



121 

près d'elle Tenfant Jésus qui se jette entre ses bras en la re- 
gardant avec amour. Cette figure est en demy corps ; elle 
est du dessin d'André del Sarto et gravée en clair-obscur de 
deux couleurs, par un anonyme. En jaune; n'est pas de 
bonne qualité. Le trait est contourné et les principales ombres 
remplies d'hacbeures. Au bas le nom d'Andréa del Sarto. 
Sans autre marque, S*» 9' haut. ; 6° 6' trav. — J'en ay veu des 
épreuves avec le nom du graveur qui me semble françois : 
Douet f. Telle est celle qui se trouve chez le roy. Aux épreu- 
ves oîi se trouve le nom de Douet /"., il y a eu une planche 
d'ajoutée, de sorte que le clair-obscur est pour lors composé 
de trois planches. 

DREBBEL (corneille). Les sept arts libéraux, représentés 
par des femmes en demy corps, en sept pièces, gravées par 
Corneille Drebbel, d'après les dessins de H, Goltzius. Ce gra- 
veur me paroist disciple de*Saenredam ; peut-être est-ce ce 
Cornélius quidam, dont Sandrart fait mention à la fin de la 
vie de Gheyn, et alors il seroit disciple de ce dernier. 

DREVET. Les Drevet sont au nombre des maîtres qui ont 
exercé la graveure au burin avec le plus de succès. L'ému- 
lation, que dut naturellement produire l'exemple de ces ha- 
biles artistes, a sans doute empêché que cette pratique de 
graveure, autrefois la seule en usage et si nécessaire pour 
certains genres, ne tombât et ne pérît entièrement. Pierre 
Drevet le père, en possession de graver tout ce qui de son 
temps s'est fait de plus considérable en France, en matière 
de portraits, s'y est acquis une très-grande réputation par le 
nombre de beaux ouvrages qu'il a mis au jour. Les deux 
grands portraits de Louis XIV et de Louis XV, qu'il a gravés 
pour sa majesté très-chrétienne et par son ordre, sont exé- 
cutés avec un soin et dans un détail dont peu de maîtres au- 



122 

roienl été capables. Aussy cet artiste étoil-il doué d'une pa- 
tience infinie, et, pourveu qu'il parvienne au but qu'il s'estoit 
proposé, il se mettoit peu en peinne du temps qu'il lui en 
coûtoit et du travail souvent rebutant qu'il lui falloit es- 
suyer (1). 

Son fds, élevé dans la même protession, ne s'y est pas 
rendu moins recommandable. Il a paru sur les rangs de très- 
bonne heure, et dans un âge où la plupart des autres ne font 
que cx)mmencer à se faire connottre. 11 a débuté par des ou- 
vrages de maislre, si accomplis dans toutes leurs parties, que 
l'on n'y peut rien désirer, et qu'il luy auroit peut-être été 
difficile à lui-même de rien faire de plus parfait dans la suite. 
Son burin est d'une couleur extrêmement douce et brillante, 
et l'on ne peut regarder sans étonnement les recherches dans 
lesquelles il est entré, et avec quelle légèreté, quelle préci- 
sion, il a exécuté chaque objet suivant le caractère qui lui 
convenoil. Peu de graveurs eussent osé entreprendre un tra- 
vail aussi épineux ; c'est qu'il en est peu qui ayent assez de 
dextérité, de patience et d'amour pour le travail. Pierre Bre- 
vet, en élevant son fils dans la graveure, y a en même temps 
instruit un de ses neveux qui commence à donner des espé- 
rances. Tout ce qui est sorti de la main de ces graveurs 
est dans ce recueil. On a cru pouvoir y joindre à la lin 



(1 ) « La générosité de H. Goustard, eontrôleur général à la grande 
« ehancelUrie, el celle de M. son fils, coBseiUer au parleme»! de 
« Paris, doit avoir ici sa place. Ils ont fait peindre, par le fameux 
c Bigaud, les portrairs de la Fontaine, de Santeul et de Despréan. 
« Le poFtrait de ce dernier a été gravé à leurs frais par l>cyrel et 
n distribué gratuitement à toutes les personnes de distinction et de 
« belles-lettres quile leur ont demandé ! » Titon du Tillet. Essais 
ftur lies honneurs et sur les monuments accordés aux illustres sa- 
vants pendant la suite des siècles. Paris, 1634, in-12, p. 447. — Ce 
portrait, par Pierre Drevet, porte bien en bas le nom de M. Cous- 
tordy mais oa ne savfttt pa» (lue rodgiika]: a^ait été fait aussi à tes 
frais. 



123 

ce qui a été gravé par Simon Vallée, disciple de Bre- 
vet, et par les deux Chéreau, dont Taisné a travaillé chez 
Drevet pendant quelque temps. Tous ces graveurs sont ac- 
tuellement vivants, et les deux derniers sont presque les seuls 
qui partagent avec les sieurs Drevet la réputation de bien 
graver au burin. François Ghéreau a gravé de fort beaux 
portraits; son frère, qui a appris sous lui, a aussi beaucoup 
de talent. Pour Vallée, il avoit commencé à se donner en- 
tièrement à la graveure au burin, et il y avoit assez bien 
réussi ; mais il l'a abandonné depuis et a préféré l'usage 
de l'eau-forte. — Pierre Drevet, le fils, mort en 1739. 

DROUÀIS (HUBERT), peintre en miniature, reçu académi- 
cien en 1730, est mort à Paris, le 9 février 1767, âgé de 
68 ans. Sou fils, qui est de la même Académie, se distingue 
dans le genre du portrait et est en vogue. 

DUBOIS (ambroise), mourut le 27 décembre 1615. Il est 
enterré dans l'église d'Avon , près de Fontainebleau. — Tré- 
sor des merveilles de Fontainebleau, p. 338. 

Il a peint son portrait dans un des tableaux de l'histoire de 
Gariclée qui sont dans la chambre de l'ovale à Fontainebleau. 

L'abbé de Villeloin» dans son catalogue d'estampes, 
page 91» nomme un Elle Dubois qui fit le portrait du duc de 
Sully, en 1614. 

DUBREUIL (TOUSSAINT) Toussaint de' Srevil. Il faut lire 
Toussaint Dubreuil. Il ne remplaça point le Primatice. Ce ne 
fut que plusieurs années après la mort de ce grand artiste, 
que le roi Henri 111 le déclara son peintre. 

a Dubreuil, peintre du roy, singulier en son art, et qui avoit 
fait et divisé tous ses beaux tableaux de St Germain, reve- 
nant dudit St Germain à Paris sur un cheval rétif et qui al- 



loil fort dur, fut à son retour surpris d'une colique de mwe- 
rere qui l'emporta en moins de 24 heures, le 22 novembre 
1602. » Journal du règne de Henri IV, par de L'Estoille, t. J, 
p. 214. 

DUGHANGE (gaspard), mort le 6 janvier 1757, âgé de 
près de 96 ans. 

DU CHÂTEL (FRANÇOIS), né à Bruxelles en 1616. Il avoit 
pris dans sa jeunesse le parti des armes, et il étoit parvenu 
au grade de cornette, lorsque un de ses amis ayant été [tué) à 
ses côtés dans une bataille, il se dégoûta du service et se 
donna à la peinture. G'étoit en 1640. Il y fit en peu de temps 
beaucoup de progrès. Il embrassa le même genre que Gon- 
zales Gocques. Il peignit comme lui des portraits. Il rassem- 
bla dans un même tableau toute une famille ; il en fit dont 
les compositions étoient extrêmement agréables. D'autres 
fois il peignit à l'imitation de Brauwer des assemblées et des 
débauches de paysans. Il avoit un pinceau soigné et fait pour 
plaire. Ge qu'il a fait de plus beau, et ce qu'on regarde comme 
son chef-d'œuvre, est la cérémonie de l'inauguration de 
Charles II, roi d'Espagne, faite à Gand , en 1666, en sa qua- 
lité de duc de Brabant et de comte de Flandre : l'on y voit 
une multitude prodigieuse de figures. Ce beau morceau est 
dans une des chambres de l'Hôtel- de-Ville à Gand. On ne lui 
fait qu'un reproche, c'est d'avoir trop négligé ses drapperies 
et d'en avoir souvent abandonné le détail à ses disciples. 11 
mourut à Bruxelles, en 1694, âgé de 78 ans. Voyez le Peintre 
Amateur, t. II, p. 51. Corn.de Bie fait aussi mention de ce 
peintre, p. 399. Descamps en fait le disciple chéri de David 
Teniers, t. H, p. 370. 

DUFLOS (CLAUDE), de Soissons. Une extrême propreté dans 



125 

la conduite de la graveure, une grande netteté, un arrange- 
ment de tailles, égales entre elles et bien suivies, une atten- 
tion toute singulière à terminer ses ouvrages et à leur donner 
une couleur douce et agréable ; voilà ce qui fait le principal 
mérite de Claude du Flos et ce qui a toujours été l'objet de 
ses études. Non content d'exprimer chaque objet par le moyen 
ordinaire des tailles, il a fait revivre la manière de Boulan- 
ger, qui consiste à exprimer les chairs par une multitude in- 
nombrable de points approchés Tun auprès de l'autre ; il a 
perfectionné celte manière et est arrivé au point que plusieurs 
de ses ouvrages semblent plus tost lavés au pinceau que 
gravés, tant ils sont terminés avec soin. Il n'a pas fallu 
moins de patience que de veue pour venir à bout d'un travail 
aussy pénible. 

— La Résurrection de Lazare, d'après Seb. Bourdon ; la 
pièce n'est pas de luy, il n'a fait que la retoucher. 

— Duflos a gravé dans les portraits des Illustres de Per- 
rault le portrait de Blondel et du maréchal de la Meilleraye; 
mais il n'y a que les testes de Duflos; les habillemens et les 
fonds sont d'une autre main. 

— C'est aussy Duflos qui a gravé les habillemens du por- 
trait du premier président de Harlay qui se trouve dans le 
livre susdit. Van Schuppen avoit gravé la teste, et la planche 
estoit demeurée en cet estât à sa mort. — C'est Duflos luy- 
mesme qui me l'a fait remarquer. 

DUFOUR (NICOLAS) d'Abbeville, graveur. 

DUFRESNY ( charles-riviére ) , valet de chambre de 
Louis XIV et controlleur de ses jardins, n'a guère eu d'égal 
pour la vivacité de son imagination, et peu de gens se sont 
montrés aussi singuliers que lui. Je ne parlerai point ici de 
tout ce qu'il a écrit, ni de ses talents pour le jardinage. Cela 



126 

a été dit dans son éloge, qui se trouve imprimé à la tête de 
ses œuvres ; mais je ne laisserai pas passer sous silence la 
façon dont il formoit ses compositions à Taide de différentes 
estampes qu'il découpoil et dont il prenoit ce qui lui conve- 
noit dans chacune. Il avoit une armoire distribuée en un 
nombre de tiroirs ou de cases, chacuns étiquetés de ce qu'elle 
conlenoit. Dans celle-ci il y avoit des pieds, dans une autre 
des bras, des mains, des têtes, des nés, des yeui, des bou- 
ches, etc. En puisant dans chaque tiroir, et en tirant ce qui 
con venoit à ses desseins, il avoit Tart de l'arranger et d'en faire 
une combinaison, qui quelquefois formoit assez heureuse- 
ment un sujet. J'ay vu une de ces ordonnances fort plaisante ; 
c'étoit une assemblée d'y vrognes, et ce qui faisoit le fonds 
éloit un assemblage de figures et parties de figures, qu'il 
avoit empruntées d'une estampe représentant la Cène. Du- 
fresny ne se contentoit pas de former ainsi des compositions 
qui tenoient lieu d'estampes, il les faisoit souvent peindre par 
des artistes médiocres dont il empruntoit la main, espérant 
les vendre avantageusement, et, comme cela ne lui arriva ja- 
mais, il se plaignoit qu'on achettatdes sommes immenses un 
tableau de Raphaël et d'autres maîtres qui avoient acquis la 
même célébrité, tandis qu'on avoit peine à tirer de sa bourse 
cent misérables pistoles pour une de ses peintures. Voilà 
jusqu'où il poussoit l'extravagance, et l'on cessera d'en 
être surpris quand je dirai que, pour subvenir aux frais 
d'un déjeuner qu'il s'étoit engagé de donner à ses amis, 
oti il ne devoit y avoir que des langues de carpes de Seine, 
et des noix d'épaules de veau de rivière, il vendit le 
fond d'une rente viagère que lui faisoient, par ordre du roi, 
les entrepreneurs de la manufacture des glaces, auxquels il 
en avoit cédé le privilège, qui, s'il l'eût conservé, devoit 
faire sa fortune. Mais il étoit bien loin de s'en occuper. 11 
aimoil bien ûiieux satisfaire ses caprices. Il étoit né en 1648, 



127 

et il mourut à Paris, le 16 octobre 1724, âgé de 76 ans. 

DUFRESNOY (gharles-alphonse], garçon ,. âgé d'environ 
56 ans, est décédé le 16 janvier 1668, et a été inhumé dans 
la nef de Téglise de Villiers-le-Bel, le 17, son frère Antoine 
Dufresnoy, établi dans cette paroisse, l'ayant amené de Paris 
chez lui, malade d'une paralysie et faible d'esprit. Extrait 
des registres de la Paroisse de Yilliers-le'BeLYo'ûhqui rectifie 
la daltede la mort de Dufresnoy, qu'a donnée M. de Piles, et 
sur laquelle il s'est trompé, ce qui doit paroître bien singu- 
lier, lui qui avoit connu si particulièrement Dufresnoy. 
Voyez la première édition du poème de Dufresnoy. Le pri- 
vilège qui s'y trouve à la fin est en son nom, il est de 1667. 
Ce peintre n'étoit donc pas mort en 1665. Félibien s'est ex- 
primé plus exactement, mais pas encore avec précision. 11 y 
a une estampe de l'entrevue de S* Nil et de l'empereur Othon, 
d'après le Dominiquain , dessinée et gravée à Venise par 
Charles Dufresne : c'est certainement Dufresnoy, qui n'a pas 
fait difficulté d'altérer ainsi son nom ; il a bien osé le tra- 
duire en latin par Frexinetus sur une estampe gravée par 
Fr. Poilly. 

DUGHET. Le Guaspre ne se contentoit pas de dessiner et 
de faire ses études d'après nature, comme le font la plupart 
des peintres de paysages. Il peignoit aussy d'après nature 
une bonne partie de ses tableaux. Un petit asne qu'il nour- 
rissoil à la maison , et qui estoit son unique domestique, luy 
servoit à porter tout son attirail de peinture, sa provision et 
une lente pour pouvoir peindre à Tombre et à l'abri du vent : 
on l'a veu souvent passer ainsy des journées entières aux en- 
virons de Rome. Des gens dignes de foy me l'ont racconlé à 
Rome. 11 étoit né en 1621, et mourut en 1684; selon Pascoli, 
il est né en 1613, et mort en 1676. L'inscription au bas de 






sîaaJêr^ i Jv-'^iai: ât Eissi*. jftOTâ !TG>:à«:«-: ux ^^ac sur 
éOL xf, r. 'îiniDt j? îi?. M^-I Jr^-isr « C:*:ç«fr- L iesE2ii>::t 
î««3!Ocr hjî*:! ^ if cziiLi im^ zsiîàJlt ;*Bgg.r^arg a ses 

■^^r^^s iviSu ^ :;i^ z/^yy^ ri lanifîzifiL: ^ lt::œ&« qui fui 



fe: >: --«t ^ se r^-rjrr *a A^eirr:^. cc^ peur 5uhà?îer, îl 
iDiciîr:-.: te îA:^je& C:^»: de rfVcr «a Fiaari?, il se ressou- 
Titl ~iî'^ =• '£\ùC. i.n pea desâLDer. et H sie 1; peintie eo mî- 
Bjat::re. ^iCi^Hl i Fiwis, rt t êccosa Xirîe Dotna, fille 

a!:*é. eiL^niàa le mèsne Uj>rc; £ftule ^ n^iremei û t excella. 
U ara; p^^U iàns «ies B^ars. q:*? ie d je de Guise emporta 
en Italie, !:<aUs les p'.js teHies àan^es ôe la cour sous la fi- 
gure de sai&tes. Il oe iai»a qu'un ^ de soq mariage, qui a 
été f^re de M. CLaiîHo^. De ses deux frères Aleiis peignoît 
le pajsa^ et Pierre des portraits, t« -us deux e» miniature. 
Sa sœur, qui desânoit assez bien. aToit êpoosé en secondes 
nwn Bourdon i . Du^uemier aToît de Fesprit, parloit bien, 
ainKMt la mu5î<que et toucfaoït le théorbe en perfection. Il fut 
f{u professeur de FAcadémie en 1656. 

DCJÂRDIN 'cHABLEs\ né à Amsterdam, en IfriO. Cest de 



(1) Ten Fan 1648. Toîr la vie de Bovrdoo, par Goîllet de Saint- 
Georfcs, dans les Hèmoires inédits sor les Aca tèmiciens. I, 91 . 



129 

tous les élèves de Berchera celui qui lui a lait le plus d'hon- 
neur. Il n'a pas peint aussi agréablement que son maître. Sa 
touche est plus lourde et ses tons de couleur moins lumi- 
neux; mais il a très-bien dessiné les animaux ainsi que le 
paysage, et ses compositions sont heureuses. Il avoit une 
très-belle pointe. Ce qu'il a gravé est excellent dans son genre. 
Il s'en occupoit en 1652 et en 1657. Il voyagea assez jeune en 
Italie, et les tableaux qu'il y ût furent estimés. 11 retourna 
pourtant dans sa patrie, mais accoutumé à vivre gayement 
avec ses amis, et, ne trouvant que peines et tristesse avec une 
vieille femme que la nécessité de ses affaires lui avoit fait 
épouser à Lyon, à son retour d'Italie, et qu'il avoit conduite 
avec lui en Hollande, un beau matin, il la quitta sans rien 
dire et passa, pour la seconde fois> à Rome où il reprit ses 
exercices ordinaires et son ancien train de vie. Il alla ensuite 
à Venise, où il devoit espérer la meilleure réception, car la 
réputation l'y avoit devancé, lorsqu'il y tomba malade peu 
de temps après son arrivée et qu'il y mourut, le 20 novembre 
1678. Descamps, t. III, p. 3. Houbraken, t, III, p. 56. 

— Différentes laçons dont Charles Dujardin a écrit son nom 
sur une suite de planches d'un excellent goût, représentant 
des paysages et des animaux : K dv Jardin f. 1658. — K Dv 
jf.— KQV j fe. 

DUMÉE (GUILLAUME). Il étoit contemporain d'Ambroise 
Dubois et de Toussaint Dubreuil, et travailloit conjointement 
avec eux dans la même manière. 

DUMONSTIER (geoffroy), ayeul de Daniel, étoit peintre 
en miniature, et je ne scais s'il ne peignoit pas aussi sur 
verre. Lorsque maître Rous vint en France, il l'employa dans 
plusieurs de ses ouvrages, et Dumonstier devint un parfait 
imitateur de la manière austère et sauvage de ce peintre ila- 
T. n. 



128 

son portrait, que M.Grozat a voit eu de la collection de Pio, le 
fait mourir en 1686. Félibien nomme les tableaux du Guas- 
pre les restes des festins du Poussin. 

DUGUERNIER (louis) travailloit de miniature, mais d une 
manière différente de Hanse, lequel couchoit du blanc sur 
son vélin, comme le faisoient Olivier et Cooper. Il dessinoit 
beaucoup mieux et donnoit une parfaite ressemblance à ses 
portraits. 11 fut ancien dans l'Académie de peinture; il se 
maria en 1648, et cet officier du parlement de Rouen, qui fut 
tué dans les guerres de la religion, étoit son grand-père. Son 
père se nommoit Alexandre qui, ayant perdu tous ses biens, 
fut obligé de se réfugier en Angleterre, où, pour subsister, il 
montroit les langues. Étant de retour en France, il se ressou- 
vint qu'il scavoit un peu dessiner, et il se fit peintre en mi- 
niature , s'établit à Paris , et y épousa Marie Dof fin , fille 
d'un peintre de Troyes, mais il mourut jeune. Louis, son fils 
aîné, embrassa le même talent faute de mieux et il y excella. 
11 avoil peint, dans des Heures, que le duc de Guise emporta 
en Italie, toutes les plus belles dames de la cour sous la fi- 
gure de saintes. Il ne laissa qu'un fils de son mariage, qui a 
été élève de H. Chatillon. De ses deux frères Alexis peignoit 
le paysage et Pierre des portraits, tous deux en miniature. 
Sa sœur, qui dessinoit assez bien, avoit épousé en secondes 
noces Bourdon (1). Duguernier avoil de l'esprit, parloit bien, 
aimoit la musique et touchoit le théorbe en perfection. Il fut 
élu professeur de l'Académie en 1656. 

DUJARDIN [CHARLES], né à Amsterdam, en 1640. C'est de 



(1) Vers Tan 1648. Voir la vie de Bourdon, par Guillet de Saint- 
Georges, dans les Hémoires inédits sur les Acalémiciens. I, 91. 



.1 



129 

tous les élèves de Berchera celui qui lui a lait le plus d'hon- 
neur. Il n'a pas peint aussi agréablement que son maître. Sa 
touche est plus lourde et ses tons de couleur moins lumi- 
neux; mais il a très-bien dessiné les animaux ainsi que le 
paysage, et ses compositions sont heureuses. Il avoit une 
très-belle pointe. Ce qu'il a gravé est excellent dans son genre. 
Il s'en occupoit en 1652 et en 1657. Il voyagea assez jeune en 
Italie, et les tableaux qu'il y fll furent estimés. Il retourna 
pourtant dans sa patrie, mais accoutumé à vivre gayement 
avec ses amis, et, ne trouvant que peines et tristesse avec une 
vieille femme que la nécessité de ses affaires lui avoit fait 
épouser à Lyon, à son retour d'Italie, et qu'il avoit conduite 
avec lui en Hollande, un beau matin, il la quitta sans rien 
dire et passa, pour la seconde fois> à Rome où il reprit ses 
exercices ordinaires et son ancien train de vie. Il alla ensuite 

à Venise, où il devoit espérer la meilleure réception, car la 

réputation l'y avoit devancé, lorsqu'il y tomba malade peu 
' ' ' de temps après son arrivée et qu'il y mourut, le 20 novembre 

1678. Descamps, t. III, p. 3. Houbraken, t, III, p. 56. 
'"- 1' ■ — Différentes laçons dont Charles Dujardin a écrit son nom 

' • ' sur une suite de planches d'un excellent goût, représentant 
' -^ '\ des paysages et des animaux : K dv Jardin f. 1658. — K Dv 

jf.— KQVjfe. 



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DUMÉE (GUILLAUME). Il étoit contemporain d'Ambroise 
Dubois et de Toussaint Dubreuil, et travailloit conjointement 
avec eux dans la même manière. 

DUMONSTIER (Geoffroy), ayeul de Daniel > étoit peintre 
en miniature, et je ne scais s'il ne peignoit pas aussi sur 
verre. Lorsque maître Rous vint en France, il l'employa dans 
plusieurs de ses ouvrages, et Dumonstier devint un parfait 
imitateur de la manière austère et sauvage de ce peintre ita- 
T. n. 



iSO 

lien. Cela se voit sur divers morceaux qu'il a gravés à Teau* 
forte, et dont je possède une suite assez eomplette, qui est 
fort curieuse, surtout pour un Français qui est bien aise de 
voir ce que la peinture et la gravure étoient en France lor» 
de son enfance. Deux de ces pièces portent la datte de 1543 
et 154T. Geoffroy eut une nombreuse lignée, et l'un de ses 
fils, nommé Cosme, fut» comme son père, peintre en minia- 
ture , et fort considéré du roi, qui en avoit lait son valet de 
chambre et qui, se confiant en sa prudence, l'envoya en plu- 
sieurs cours chargé de commissions importantes. C'est ce 
que j'ai lu dans un Ms. de Sauvai. L'abbé de Villeloin dans 
son Paris (p. 11) nomme Geoffroy Dumonstier. 

— L'Éloquence repréisentée par une reyne assise au-dessus 
d'un piédestal et ayant un aigle près d'elle. Cette pièce gra- 
vée à l'eau-forte a de la manière du Primatice et de celle de 
maistre Rous. — Elle est dç Geoffroi Dumonstier de qui nous 
avons plusieurs morceaux gravés. 11 travailloit en 1547; une 
de ses planches porte cette date. 

DUMONSTIER (côme), père de Daniel, étoit peintre et oc- 
cupoit avec son fils un logement aux galeries du Louvre. 
Voyez l'article de Daniel. MaroUes en parle dans son Paris, 
p. 54. 

DUMONSTIER (daniel), étoit de race de peintres. Son père, 
nommé Cosme, et son ayeul, nommé Geoffroy, avoient manié 
dans leur temps le pinceau avec quelque réputation; mai» 
Daniel s'en fit une bien plus considérable par sa facilité à 
faire des portraits qui ne sortoient jamais de ses mains sans 
être très-ressemblans. Il les faisoit aux trois crayons ou au 
pastel. 11 est étonnant le nombre qu'il en a fait. 11 avoit cou- 
tume d'en garder pour lui des copies , ce qui les a encore 
multipliés et ce qui fait que les cabinets en sont remplis : il 



131 

a 

n'y faut chercher ni touche scavante, ni art, ni couleur, mais 
de Texactitude et de la vérité. 11 avoit coutume de mettre sur 
ses portraits Tannée et le jour qu'il les avoit faits. Il seroit à 
souhaiter qu'il eût écrit de même le nom des personnes ; ses 
portraits en seroient plus inléressans, mais c'est ce qui ne 
lui arrive presque jamais. 11 étoit très-curieux et d'une mé- 
moire prodigieuse. Il n'avoit rien oublié de ce qu'il ayoit lu. 
Son cabinet de livres étoit fameux et sa maison étoit le ren- 
dez-vous de la meilleure compagnie. Il étoit très-considéré è 
la cour. Il nacquit à Paris en 1575 ; il y mourut en 1646, 
d'une colique de miserere. Il occupoit un logement aux gale- 
ries du Louvre. (Sauvai, Ms.) 

DUMONSTlER (pierre). J'ignore s'il étoit le frère ou le fils 
de Daniel Dumonstier. 11 dessinoit comme lui des portraits 
en pastel, et j'en ay vu où il a écrit son nom et la datte 1626, 
et où l'on apprend qu'il étoit alors à Turin. Si l'on en doit 
juger sur cet ouvrage, il avoit une touche plus lourde que 
c^Ue de Daniel. Il lui étoit inférieur. Je ne fais mention de 
lui que pour ne rien obmettre (1). 

DUMONT (FRANÇOIS). Ce n'étoit pas un artiste sans métite. 
Les deux figures en pierre de St Joseph et de 6t Jean-*Baptiste, 
qu'on voit au portail de St Sulpice qui regarde le Midi, font 
connottre de quoi il étoit capable. Il mettoit de l'ftme et de 



(i> Il serait heureux que Ton eut, sur nos anciens artistes, autant 
que sur les Dumonstier,* rhi$toriette de Tallemant, I^ qootrat de 
mariage de Daniel donné dans les Archives, rarticle de M. de La- 
horde dans sa Renaissance des Arts, le catalogue de Geoffroy, par 
M. Robert Dumesnil, la pièce récemment puhliée par M. Fillon 
dans la Revue de TOuest et encore relative à Daniel, composent 
un ensemhla qu'il serait facile d'augmenter aacora par les men- 
tions éparses dans les poëtes et les polygraphes du 17* siècle. 



132 

l'esprit dans son ouvrage. Il auroit élé seulement à souhaiter 
qu'il en eût banni le goût françois qui y domina trop. Il ne 
survécut pas longtemps à ces deux morceaux de sculpture 
qui lui firent honneur dans le temps. Étant allé à Lille pour 
j poser un de ses ouvrages, il tomba de dessus un éithafaud 
et se tua; c'étoit en 1726. Il comptoit alors 39 ans, à ce que 
m'assure son frère le peintre. Son morceau de réception à 
l'Académie est un titan foudroyé. Dans un mémoire sur la 
vie de Noël Coypel , Dumont, qui avoit épousé une des filles 
de ce peintre, n'avoit, dit-on, que 36 ans lorsqu'il mourut. 
Cela se trouve dans le Xl« vol. des Amusemens du cœur et 
de l'esprit (i\ 

DUMONT (JACQUES], qui s'est |sumommé le Romain^ pour 
se distinguer d'un autre peintre de notre académie qui se 
nomme Dumont, est né à Paris et est frère du sculpteur Fran- 
çois Dumont. Dans sa jeunesse, il alla ce qu'on appelle courir 
la Calabre , et s'étant arrêté à Rome> il y étudia la peinture 
sous Benedetto Gastiglione, et y fit assez de progrès pour se 
faire distinguer lorsqu'il repassa en France, en 1725. Un peu 
avant que son frère mourut, il s'en fit reconnoîlre à peu près 
de la même manière que l'Enfant prodigue, lorsque celui-ci 
revint trouver son père. La scène fut touchante. Il se présenta 
pour être reçu de l'Académie et le fut en 1728; il a passé par 
tous les emplois qu'on y distribue, et actuellement il en est 
recteur et ancien directeur. On ne voit pas beaucoup de ses 
ouvrages. Il en a été retenu par le peu de goût qu'il a pour 
le travail et peut-être encore davantage par la difBculté qu'il 
a d'inventer. Il a beau vouloir couvrir ce défaut ; il perce 



(1) Voyez, dans ce second volume, à la page 27 et la note de la 
page 24. 



dans ses ouvrages, où Ton voit souvent des figures prises 
toutes entières dans des compositions de grands maîtres. 
Avec cela il a de la dureté dans son dessein quoyque correct, 
et peu de finesse dans les expressions. Sa couleur n'est pas 
mauvaise, et c'est ce qui me plaît davantage dans ses ta- 
bleaux. Son caractère caustique et sauvage n'étoit pas fait 
pour la société. Il n'a pu le rompre et tout le monde Ta craint 
et Ta lui; c'est dommage, car il a du sens. Il y auroit bien 
des choses à dire sur cela et sur la conduite qu'il a tenue avec 
M. Goypel, lorsque ce dernier le fit nommer à la place de di- 
recteur de récole des élèves protégés par le roi lors de cet 
établissement. Il remit presque sur le champ sa place, et, fai- 
sant de M. Ck)ypel le portrait le plus désavantageux, il oublia 
cette équité et ces sentimens chrétiens dont il ne cessa de 
faire parade. Suivant ce qu'il me dit, il doit être né en 1700 
ou 1701. 

DUNCKËR (balthazar) de Stralsun, peintre de paysages 
et qui en a gravé quelques-uns. 

DUNZ (jean), né à Berne, en 1645, avoit un assez beau 
pinceau, et a réussi à peindre des fleurs. U jouissoit d'une 
fortune considérable, et il étoit plus aisé d'avoir en présent 
de ses tableaux que d'en obtenir à prix d'argent. U est mort 
âgé de 92 ans, le 10 octobre 1736. Fuessli, Vies des peintres 
suisses, t. II, p. 96. 

DUPËRÂC (Etienne). Illustrations des fragmens antiques 
(divisé en trois livres). 

Livre premier contenant diverses figures et testes de 
femmes, tirées des marbres antiques et bustes qui sont à 
Rome et autres lieux d'Italie, par Raphaël d'Urbin (ce qui 
est faux). Ces bustes sont dessinés avec beaucoup de propreté, 



iSik 

mais sans beaucoup de goût. Je ne les crois cependant paa 
de Duperac de qui sont tous les autres desseins de la même 
collection. 

Livre second contenant plusieurs figures d'idoles, d'obé» 
lisques, lettres hiérogliphyques des Egyptiens, retirées et 
recueillies des marbres antiques qui se trouvent à Rome et 
autres lieux d'Italie, par Estienne Duperac. 

Livre troisième contenant plusieurs temples, faux dieuii 
autels, sacrifices, inscriptions, épitaphes et cérémonies ob^ 
servées en la religion des ancien^ Romains, retirés des tùat^ 
bres antiques qui sont è Rome et autres lieux d'Italie, par 
Estienne Dupérac, l'an 1575. 

Il se trouve dans le même livre plusieurs autres desseins, 
la plupart d'après des bas^reliefs, statues et autres monu- 
mens antiques, dessinés par différens maistres, lesquels y 
ont été adjoints après coup et à différentes reprises. Ce livre 
de desseins, in-folio, est dans le cabinet de M. Falconnet, 
médecin» en 1736 (1]. 

11 s'en trouve un presque semblable chez le roy [(2) ; ce qui 
fait voir que Dupérac en laisoit des copies pour ceux qui les 
lui demandoient. 

M. Grozat a deux desseins de paysages de Dupérac faits en 
Italie en 1670 et 1580. On prétend que la plus grande partie 
des paysages qu'il a gravés le sont d'après des desseins du 
Titien. On veut qu'il ait été le disciple de ce grand peintre ; 
j'ay peine à le croire. 



(1) Ne se trouve pas dans le catalogue de sa bibliolbèque, ïm* 
primé, après sa mort, en 1763. 

(2) Département des manuscrits, n"* 6990, éollection Dupuy. 
Voir sur ce volume la note de M. Raoul Rochette dans les Manuê" 
crits français de la bibliothèQue du roy^ par H. Paulin Paris. III, 
p. 270-3. — Dans le titre du volume, le nom de Dupérac ne man- 
que pas d'y être suivi de sa qualification de Parisien. 



1S5 

Où cet auteur a-t-il trouvé que Dupérac est mort âgé de 
Wans?Baldlnucci, qu'il cite, dit simplement, d'après Féli- 
bien, qu'il mourut vers l'an 1601, et qu'il étoit à Rome en 
1669, où 11 mit au jour dans cette année une suite de veues 
des fiffitiquités romaines (1). 

LepèreOrlandi, toujours négligent et écrivant trop à la 
hâte sur des matières qu'il n'entend point , prend cette datte 
1569 pour celle de la naissance de Dupérac, et quoyque les 
auteurs s'expliquent là-dessus trè&-clairement, il tombe dans 
un anachronisme qui n'est pas pardonnable (2). 

DUPRÉ (GUILLAUME), gravcur de monnoyes, sous Henri IV 
et Louis Xin, a été un excellent homme. Il étoit de Troyes 
en Champagne, et est mort à Paris vers l'année 1625. 

DUQUESNOY (henry) (3), père de François Quesnoy, dit le 
Flamand , n'étoit pas un sculpteur du dernier ordre. Sans 
avoir une grande pureté de dessein , ni cette noble simplicité 
qui a fait de son illustre fils un des premiers sculpteurs des 
derniers siècles, il manioit bien le marbre et donnoit à ses 



(1) On en peut voir le détail dans le Peintre-Graveur français 
de M. Robert-Dumesnil.TonieVlII,p. 89-117. 

(3) Félilien nous dit que Dupérac laissa une fille, Arthémise Du- 
pérac, qui se maria à un certain Bourdin qui, dans le Baldinucci, 
éd. de Florence, 4770, t. VII!, 266, est imprimé par erreur Baur- 
(Un. Serait*ce le sculpteur Bourdin, d'Orléans, do qui Ton connaît 
le Louis XI de Cléry et d'autres ouvrages, et qui fut père de Gilles 
Bourdin, aussi sculpteur ? 

(3) On verra que Mariette n'a pas toujours eu, sur les noms des 
trois Duquesnoy, que nous laissons à cette place parce qu'on les 
appelle toujours ainsi, et non Quesnoy comme on le devrait, une 
opinion dift'érejiite de celle à laquelle il s'est arrêté. Il en résuite 
quelques contradictions ; il en a corrigé quelques-unes; mais nous 
n'aurions pu les faire disparaître sans toucher au texte de Mariette, 
ce qu'il aurait fait, mais ce qu'il ne nous appartient pas dé faire. 



156 

figures des tours agréables. On trouve beaucoup de ses ou- 
vrages à Bruxelles, où il s'étoit établi et où il est mort. L'on y 
fait remarquer entre autres choses, sur une fontaine pu- 
blique, une petite figure en bronze d'un enfant qui pisse, la- 
quelle mérite d'être vue. On y montre aussi, sur le frontispice 
de la chapelle de S**-Anne , dans la rue de la Madelaine, une 
statue de cette sainte, qui est un beau morceau. Mille gens 
vous diront à Bruxelles, pour en relever le prix, que c'est un 
ouvrage de François Flamand , avant qu'il fût sorti de leur 
ville. Mais on sçait le contraire, et il est même fort douteux 
que le Flamand ait laissé dans sa ville natale aucune sculp- 
ture avérée de sa façon. 11 aura pu travailler sur celles de son 
père, car il a appris sous lui sa profession , et lorsqu'il passa 
en Italie, il y étoit déjà plus qu'initié. 11 est honorable pour le 
père d'avoir commencé à former un si grand homme; mais 
il est d'un autre côté bien triste pour lui d'avoir en même 
temps donné la naissance à un second fils que ses crimes 
rendront éternellement odieux. Il a pu être, comme il l'étoit 
en effet, un très-bon sculpteur, mais ses vices ont tellement 
obscurci ses talents, qu'on se fait une peine de le nommer et 
de songer que cet homme abhominable est le même qui a 
fait dans la cathédrale de Gand, en 1654, le superbe tombeau 
de l'évêque de celte ville, Antoine Triest, ouvrage où le 
marbre , devenu en quelque façon flexible sous le ciseau de 
l'artiste, est, à ce que j'ai entendu dire, manié comme si c'é- 
tait de la cire. On en a une estampe gravée par Van Cauc- 
kercken. — Ce frère de François Flamand s'appelait Jé- 
rôme, c'est un fait certain. — Antoine Triest fit faire son 
tombeau de son vivant en 1654, et, comme il était grand 
amateurs des arts et qu'il avait la réputation de s'y con- 
naître, c'est un grand préjugé en faveur du sculpteur qu'il y 
employa. 
— Le père du Quesnoy s'appeloit Henry; Bellori s'est mé- 



1S7 

pris de nom. C'éloil le frère de François qui portoit le nom 
de Jérôme. Gela été vérifié sur les lieux et m'a été assuré par 
des personnes digues de foi. 

DUQUESNOY (francesco). Sa mort arriva à Livoume le 
12 juillet 1643. 

— Bacchus, dans cette aimable fleur de Tâge, où le corps, 
ayant achevé de se former, a acquis son entière perfection. La 
figure est debout, son bras appuyé sur un tronc d'arbre, et 
elle tient de la main gauche une coupe qu'elle semble vou- 
loir porter à sa bouche. Cette statue, qui est de marbre blanc, 
a4 pieds de haut ; elle est antique, et a appartenu au S' Girar- 
don, sculpteur célèbre. Il la regardoit comme l'un des plus 
beaux morceaux de son cabinet ; l'on ne peut assez priser la 
justesse de ses contours et l'élégance de ses proportions. Il ne 
restoit d'entiers que la tête et le corps ; les bras, les cuisses et 
les jambes manquoient, et ont été ajoutés par François Fla- 
mand. Quel restaurateur 1 Y eut-il jamais homme qui sut 
mieux manier le marbre , et mettre dans l'expression de la 
chair plus de vérité et plus de souplesse ? Et cependant son 
travail paroît sec en comparaison de celui du sculpteur grec, 
n en faut convenir, et être en cela de bonne foi, la sculpture 
moderne risque trop d'être mise en parallèle avec la sculpture 
ancienne. [Catcdogue des statues y etc. , du cabinet de feu M. Cro- 
xaty marquis de Châtel, 1750, x^^'i.Et catalogue desesiampeSy 
vases , figures , bas-reliefs de feu M. Crozat, baron de Thiers, 
1772, no 940.) 

— Le portrait de Fran. du Quesnoy, dit le Flamand, fa- 
meux sculpteur, demie figure gravée par P. van Bleech, en 
1751, en manière noire ; il tient des deux mains une tête de 
Taune en sculpture. 

DUQUESNOY (jérome). J'ai écrit, sur la foi de H. Eydama, 



1S8 

que le irère de François Flamand portoit le nom de Jérôme (1). 
ndit avoir lu les pleins du procès qui lui f ut fait à Gand, etla 
sentence qui le condamna à être brûlé, et qu'il se nommoit 
Jérôme. Je crains que sa mémoire ne Tait mal servi et que ce 
soit le père à qui le nom de Jérôme appartenoit. Le Bellorî, 
qui a écrit la vie de François Flamand et qui parott avoir eu 
de bons mémoires, le dit bien formellement, et, dans la des- 
cription nouvelle que le S' Mensaert a donné des peintures et 
des sculptures qui se voyent à Bruxelles , il dit qu'elles sont 
de H. QUesnoy^ et Ton sçait qu'il n'y en a aucune qui ne soit 
du père de François Flamand , qui étoit habile. Celle qui est 
sur le frontispice.de la chapelle S*»-Anne tient le premier 
rang, et l'on doute à Bruxelles si ce n'est pas un ouvrage où 
le fils auroit mis la main avant que de passer en Italie. Outre 
cela, le même auteur, en parlant des tombeaux des évèques 
de Gand qui se voyent dans la cathédrale de cette ville, quand 
il vient à nommer le sculpteur qui a exécuté celui d'Ant. 
Triest, il dit qu'il est de /. Quesnoy^ ce qu'il faut expli- 
quer par Jean Quemay. Or, il est notoire que les belles sculp- 
tures qui oment ce tombeau sont du frère de François qui, 
dans certaines parties, et surtout dans celle de manier le 
marbre, marchoit de fort près sur les traces de son frère (3). 
J'ajouterai que j'ai vu deux petits enfants d'y voire qui sont, à 
n'en pas douter, eiécutés sur le modèle de François où l'on 
voit ces initiales J. Q., ce qui achève de montrer que le 
frère cadet qui s'y est ainsi désigné s'appelloit Jean et non 
Jérôme. 



(1) Cette phrase était d'abord écrite de cette façon : J'ai écrit sur 
la foi de M. Eydama que le père de François Flamand se nom- 
moit Jérosme, et que son frère portait le nom de Jean. 

(2) Cette note est, comme on voit, antérieure à celles qu'on a 
lues plus haut sur le père, et par lesquelles Mariette reconnaît 
qu*II taut lui conserverie nom d'Henri. 



1S9 

•^ Void la Miré que M. Eydama éeritnt à Marieite pùur 
àbnipléiereÉ confirtnef lêë renêeignerMntB qu*il lui amii donnée 
dêDif^toidù : 

Monsieur, 

<K J'avois eu l'honneur de vous promettre un eitrait da 
procès de Jérôme Quesnoy; le voici, tel que je Tai traduit du 
flamand. 

<x Le 31 août 1654 Jérôme Quesnoy , sculpteur et arohi-* 
« tecte de S. M. catholique» subit, au Ghàtelet de Gand, son 
a premier interrogatoire sur le crime de sodomie, qu'il étoit 
a accusé d'avoir commis la veille avec un enfant de -chœur, 
« dant l'église de S.^Bavon, ainsi qu'ailleurs et en différentes 
c fois, avec le fils d'un cordonnier de la même ville, ftgé de 8 
a à ans. Quesnoy répondit d'abord , et selon les formalités 
c ordinaires, qu'il estoit àGand depuis deux mois, où il étoit 
a venu de Bruxelles , sa résidence , pour asseud)ler les pièces 
a du tombeau de l'évéque Triest, et nia le fait dont il étoit ao- 
a cusé. Il le nia de même au second interrogatoire qu'il subit 
« le lendemain. Mais, à la première confrontation des té- 
c moins, il confessa tout, et réclama sa qualité d'architecte du 
« roy d'Espagne pour être renvoyé à Bruxelles, par devant 
c ses ji^ies naturels. L'on écrivit en cette cour, et MM. du 
a Ghàtelet de Gand reçurent ordre de passer outre. Le procès 
« de Jérôme Quesnoy fut donc continué, et, par sentence du 
« 38 septembre suivant, il fut omdamné à être attaché à un 
ff poteau, sur le marché aux grains de cette ville, à y être 
a préalablement étranglé, ensuite brûlé, et ses cendres jetées 
a au vent, ce qui lut exécuté (1). » 



^««iMMai«HH.*iMMiMk«^MBa*MBMMi«**«*BMiHMwaii.dAA 



(1) Dans le Messûffer dès Sciences et des Arts et de lu Belgique^ 
publié à Gand, iti-a«, année 1633 , p. 463^, M. A. V. Lokerea, à 
propos d*«ne soto de M. Dieriex dans mê Mémdiret lar la villo do 



l&O 

a Malgré le crime abominable dont Jérôme Quesnoy fiit con- 
vaincu, révoque Tries^t fit son possible pour lui conserver la 
vie. II tâcha d'obtenir qu'on le condamnât à une prison per- 
pétuelle pour y travailler le reste de ses jours au profit des 
pauvres. Une telle démarche, qui auroit été une preuve de 
l'humanité de cet évèque en tout autre occasion, étoit, dans 
celle-ci, une marque bien convaincante de son amour pour 
les beaux-arts. Mais son crédit fut impuissant, et ses sollicita- 
tions inutiles. Le crime et le scandale étoient énormes ; il ial- 
loit un exemple et une réparation proportionnés à l'un et à 
l'autre. 

a Comme Jérôme Quesnoy attendoit que le tombeau fut as- 
semblé pour donner les derniers traits de ressemblance à la 
tête de l'évêque, celte tête est demeurée sans avoir reçu ce 
qu'on appelle le dernier fini ; les environs du nez, des yeux, 
sont durs et raboteux. 11 est étonnant que quelque sculpteur 
n'y ait point mis la dernière main du vivant de M. Triest. 
Quant aux enfants qui sont au bas de ce tombeau, ils sont cer- 
tainement de François Quesnoy. 

« M. Triest avoit envoyé son portrait à cet artiste célèbre, en 
1642, en le priant d'exécuter ce monument, dont il vouloit 
décorer sa cathédrale, ainsi qu'il avoit déjà iait par la conver- 
sion de S.-Bavon, que Rubens avoit peinte à sa sollicitation et 
à ses frais. La satisfaction d'obliger un compatriote et la gé- 
nérosité avec laquelle Triest récompensoit les talents détermi- 
nèrent bientôt le Quesnoy à entreprendre cet ouvrage. Mais la 
proposition de passer en France, que M. de Ghantelou lui fit de 



Gand, a publié le texte flamand de la sentence de Jérôme Duque»- 
noy, et, dans la note qu'il y a jointe, il indique avec plus de détails 
et en ajoutant les dates, les diverses phases du procès et les noms 
des parties. Son article, très-curieux, se termine par des détails 
tout nouveaux sur la fin très-tardive, arrivée en 1671, du payement 
du tombeau de Tëvôque Triest, qui fut payé en tout 8,000 florins. 



i&l 

la part de M. DesDoyers, el la lettre qu'il reçut enfio de M. Des- 
ûoyers même, qui lui annonçoil la pension que le Roi luiac- 
cordoit, et les prérogatives honorables dont il vouloit qu'il 
joutt dans son royaume, déterminèrent cet excellent homme à 
suivre la fortune qui lui tendoit les bras pour la première 
fois. Le portrait de M. Triest et le plan de son tombeau furent 
donc renvoyés en Flandres. Mais ils étoient accompagnés de 
deux petits enfants destinés à orner ce tombeau, s'il venoit à 
être exécuté par un autre sculpteur. Triest eut beaucoup 
moins de chagrin de recevoir ce plan qu'il ne ressentit de joie 
en apprenant l'heureuse destinée d'un homme que sa vertu 
et ses talents n'avoient pu garantir ni de l'oppression de ses 
concurrents, Tii de la situation la plus triste, ni de l'injustice 
de ceux qui, par état, doivent protéger le mérite et encoura- 
ger les arts. 11 écrivit mille félicitations au Quesnoy, et accom- 
pagna sa lettre de cent pistoles d'Espagne, pour les deux en- 
fants qu'il avoit reçus. 

a Après la mort de François Quesnoy, Jérôme, qui étoit pour 
lors en Italie, retourna à Bruxelles, et Triest lui proposa d'exé- 
cuter son tombeau, ce qu'il accepta. Mais comme il étoit aussi 
débauché que son illustre frère étoit sobre et vertueux, et que 
d'ailleurs il étoit accablé par une infinité d'ouvrages moins 
considérables que le tombeau de l'évêque, et qui, par consé- 
quent, lui apportoient plus tôt de l'argent, l'exécution de ce 
tombeau traîna en longueur, et ne fut fini qu'en 1654. 

«c Je ne sais par quelle fatalité Sanderus, qui estoit à Gand 
même, curé aux environs de cette ville dans le temps de l'exé- 
cution de Jérôme Quesnoy, et ami de Triest , ait pu avancer 
que ce fut François qui commit le crime dont il est question 
et qui en subit la punition. Je ne m'étonne donc plus que 
tant de compilateurs, tels que Florent le Comte, Audibert, 
Alstein, Royer, etc. aient répété la même chose, ni que les 
trois quarts des Flamands et des HoUandois, la moitié des 



142 

Frangois tieaoeQt le fait pour certain. Je sais bien que plu<- 
sieurs auteurs ont parlé pertinemment de la mort de Frao<- 
çois Quesnoy ; mais tout le monde ne possède pas ces auteur», 
ett de ceux qui les- possèdent ou qui les ont lus, la plupart 
n'en croient pas moins le contraire de ce qu'ils contiennenti 
parce que , n'ayant jamais rien vu de détaillé sur la vie et I9 
mort de ce Jérôme Quesnoy, ils confondent sans cesse spn 
irère avec lui. Ils savent en gros que François a eu un frère, 
qui étoit un très-habile homme ; mais chez eux , pour tous 
les ouvrages dont l'auteur est un Quesnoy, ce Quesnoy était 
François, et ce malheureux François étoit un scélérat qui a 
été brûlé* Ne se trouvera-*t-il jamais quelque honnête 
homme qui désabusera entièrement le public sur cet article, 
et tous les honnêtes gens ne pourront-Ils enfin adr^irer les 
ouvrages d'un artiste célèbre, sans ressentir l'horreur qu'ins- 
pirent les abominations prétendues de leur auteur. 

J'ai l'honneur d'être avec respect, Monsieur, 
Votre très-humble et très-obéissant serviteur, 

Pariv, ce S7 Juin 1706. 

a P. S* Vous trouverez cy*joint, Monsieur, le reste des etr^ 
traits que j'ai faits du manuscrit dont M. Basan vous a parlé* 
Je vous ai prié de les parcourir ; mais je doute fort cpie vous 
puissiez décider de tous ces articles sans être à Paris. Si vos 
affaires vous appdlent bientôt en cette ville , nous serions 
charmé que vous voulussiez faire cet examen dans votre 
cabinet. Il y a bien des choses apocryphes et d'autres dou- 
teuses ; mais il y en a qui méritent d'entrer dans le catalo- 
gue. D 

— M. Eydama persiste à soutenir ]^ vérité de l'extrait df 



la sentence qui condamna au feu le malheureux frère de 
François Flamand , et dans laquelle il est nommé Jérôme. 
Pour tout concilier, il faut croire que le nom de Jérôme lui 
étoit commun avec son père, et qu'il n'y a poiDt eu de Jean 
Quesnoy ; il n'y a là rien que de très-vraisemblable. M. Ve^ 
camps, qui a compulsé les registres où se trouve la seo-* 
tence qui condamne à la mort le frère de François Quesnoy, 
y a lu, ainsi que M. Eydama, le nom de Jérôme Quesnoy, 
et il ne faut plus douter que ce ne fût là le véritable nom de 
cet indigne frère. QuaDt à leur père, il m'assure qu'il se 
nommoit Henry. Je lui ai objecté l'autorité de Beilori, qui 
, paraît n'avoir rien écrit que sur des mémoires authentiques, 
cela n'a point été capable de lui faire changer de sentiment, 
il s'en tient à ce qu'il en a recueilli sur les Ueux, et il regarde 
comme un fait incontestable que le père s'appeloit Henry, 
l'atné de ses deux fils, François, et le plus jeune, Jérôme. 

DURANTE (geobges] de Bresse, peintre d'animaux. Jl pre- 
noit la qualité de chevalier. Il est nommé dans la description 
des peintres de Padoue par le Rosetti, p. 03. 

DURANTINO (guido). C'est le nom d'un de ces ouvriers 
qui travailloient à ces ouvrages de fayence, qu'on a voulu at-* 
tribuer à Raphaël, parce qu'il y en a plusieurs qui ont été 
exécutés d'après ses desseins, et qu'une des principales fa-^ 
briques étoit établie à Urbin. C'étoit celle de Guido Duran-* 
tino, qui, si l'on en croit la tradition, étoit beau frère de 
Raphaël. J'ay veu quelques uns de ses ouvrages chez M. Cro- 
zat, entre autres des plats ou assietes qui avoient été faites 
pour une personne de la famille de Montmorency, au revers 
desquels il y avoit écrit : In Botega di M, Guido DuranêinQ 
in Urbino^ 1535. Les sujets qui y sont peints sont d'après 
Raphaël, ou de ses élèves, ou d'autres maistres; car ces ou-- 



1&4 

vriers prenoient tout ce qui leur tomboit entre les mains. Ils 
étoient bien mauvais dessinateurs et alléroient fort ce qu'ils 
avoient à imiter. 

— Voici f article de Mariette en tête de tindication de 
fayences de Durantino, qui se trouvaient dans le catalogue de 
Crozat Du Chatel, rédigé par Mariette (1750, p. 43) : La ville 
d'Urbin ayant donné naissance à Raphaël, et, la fabrique de 
fayences qui y étoit établie ayant été gouvernée longtemps 
par un des parens de ce grand peintre, il n'en a pas fallu da- 
vantage pour faire dire avec assurance qu'il y avoit travaillé 
dans sa jeunesse; et, sur cette supposition, ces ouvrages ont 
acquis une assez grande considération. Ils le méritent à quel- 
ques égards; les émaux qui les embellissent ont de l'éclat; 
l'apprêt n'en est pas mauvais. Mais c'est faire trop de tort à 
Raphaël que de mettre sur son compte des peintures qui 
pèchent autant que celles-ci par le dessein. Aussi est-il vrai 
que, si elles représentent quelquefois des sujets dont on ne 
peut lui contester l'invention, il est facile de s'apercevoir 
qu'elles ont été exécutées non par lui, mais seulement d'après 
quelques unes de ses estampes. Il ne faut donc pas donner à 
ces faïences plus qu'il ne leur appartient. Mais cela n'empêche 
pas qu'elles n'ayent été et qu'elles ne doivent être encore es- 
timées. Elles ont été dans leur tems ce que sont aujourd'hui 
nos belles porcdaines. Les buffets des rois et des plus grands 
seigneurs en étoient chargés, et encore aujourd'hui elles 
peuvent obtenir une place dans les meilleurs cabinets. Quel- 
ques-unes de celles qu'on voit ici ont été faites pour des sei- 
gneurs de l'illustre maison de Montmorency. 

DURER (Albert). Le portrait d'A. Durer peint par luy en 
1498, pour lors âgé, suivant une inscription vulgaire alle- 
mande qu'on lit sur le tableau, de vingt six ans, — faute qui 
s'est glissée dans cette date, car il devoit avoir pour lors 



145 

27 ans; cela peut venir aussi de la façon de compter Tannée 
qui commençoil alors au mois de mars, — gravé à Veau 
forte en 1645 par W. Hollar, d'après le tableau qui estoit 
pour lors dans le cabinet du comte d'Arondel à Londres, et 
qui se trouve présentement à Florence, dans celuy du grand 
duc. — Il vient d*être gravé dans la suite des portraits des 
peintres peints par eux-mêmes dans la galerie de Florence (1). 
— Le portrait d'Albert Durer, gravé au burin par André 
Stock, d'après celui qu'avoit peint, à Anvers, en 1520, Tho- 
mas Vincidor de Boulogne, suivant cette inscription gravée 
au bas de la planche : Effigies Alberti Dureri Norici pictoris 
et sculptoris hactenus excellentissimi delineata ad imaginem 
^us quam Thomas Vincidor de Boloignia ad mvum depinxit 
Antuerpiœ, 1520. And. Stock, sctdp. H. Hondius excudit 
1639. Aux 2" épreuves, J. de Wit, exe. — Je n'ai pu encore 
rien découvrir de certain sur ce peintre de Bologne, de qui 



(1) On connail les sources principales sur Durer, le catalogue 
de Barlsch, dans son Peintre graveur, le livre spécial de Heller, 
Leipzig, 1831, in-8, second volume en trois parties d'un ouvrage 
sur la vie et Tœuvre de l'artiste, dont le premier n'a jamais été 
publié. M. Passavant pense, dit-on, après l'édition française de 
son Raphaël dont il s'occupe, à faire la môme chose pour Durer ; 
rien ne serait plus heureux pour tous ceux qui s'intéressent à l'his- 
toire des arts. Dans le cabinet de l'amateur et de l'antiquaire, 
tome III, on a traduit, p. 306-23, la généalogie de sa famille écrite 
par Durer et publiée par Sandrart (édition latine, p. 215-7), et les 
lettres de Durer à Pirckheimer données dans le Journal de de 
Hurr. Dans le môme volume, pages 414-23, 455-64 et 487-507, on 
a traduit aussi le Journal du voyage de Durer en Flandres et en 
Hollande, fort curieux à tous égards, et môme pour nous, à cause 
de la mention de quelques artistes français et de quelques autres 
ayant travaillé pour la France, comme ce maître Conrad, sculp- 
teur, qui n*est autre que le Conrad Meyt que Marguerite d'Autriche 
a fait travailler pour Téglise de Brou. — Nous ferons remarquer 
que quelques passages que nous donnons avaient été barrés par 
Mariette, ainsi les détails très-curieux sur la généalogie de son 
œuvre de Durer, et la discussion relative à la matière sur laquelle 
ont été gravées certaines pièces. Quoique les conclasions actuelles 

T. n. I 



1&6 

Von a une estampe avec son nom gravée par Corn. Gort ; et, m 
qui est d'autant plus singulier, c'est que cette estampe, quoi- 
que ce peintre s'en donne pour en être Fauteur, est un des 
morceaux que le Primatice avoit peint dans le plafond de la 
galerie d'Ulisse, à Fontainebleau. — Quoy qu'il en soit, il 
paroît que œ portrait, quiconque l'ait peint, étoit en grande 
estime, puisque, lorsqu'Ortelius forma l'œuvre d'Albert que 
j'ai, il le fit dessiner et le mit à la tête de son recueil en l'acr 
compagnant de cette inscription : Alberti Dureri Narici effigiu 
excepta ex eâ quam ad vivum delineab» Thomas Vincidor quem 
de Bolaniâ cognaminam. Antuerpiœ^ anno M.CIOdO.XX. 

— Le portrait d'Albert Durer vu de profil, dessiné et gravé 
par luy mesme en 1527. Au haut de la planche sonUes armes 
d'Albert, qui sont parlantes; c'est une porte, dans l'ouverture 
de laquelle est la marque de ce peintre et la date. Elles furent 



ne soient plus les mêmes , comme nous ne pouvions savoir si Ma- 
riette avait effacé ce passage parce qu'il avait changé d'opinion 
ou parce qu'il avait remis cette discussion au net dans un autre 
endroit, ce qui lui est arrivé plus d'une fois, nous avons, dans le 
doute, cru devoir les reproduire. 

— Un de nos amis nous donne la copie, prise par lui dans le ci- 
metière de Nuremberg, de Tépilaphe de Durer; c'est à ce titre, et 
comme reproduisant l'original sans intermédiaire, que nous le re« 
produisons ici : 

Die ruhe Kanstler Fûrst du mehr als grosser manu 
In Vielkunst hat es dir noch keiatr glcich getban 
Die Erd ward auegemalt der Himmel dich jetzt hat 
Du maltcst {makêt) Heilig pum dort an def Gottt s etodt 
Die Bau-Bild-MalerkuDst die neppen Dich Patron 
Und eetzen dir nun auf im Tod die Lorbeerkron. 

En voici la traduction : 

Repose ici, prince des artistes, toi plus que grand homme. 
Dans plus d'un art nul ne t*a encore égalé; 
Tu avais peint la terre, et maintenant le ciel te possède; 
Devenu saint, tu peins là haut dans la cité de Dieu. 
L'arohiteeture,!» Sculpture, la Peinture to nomment leur j^atroa 
Sk maintenant dana la mort te couronnent de lanriera» 



1^7 

supprimées dans la suite et ne paroissent point aux 2fi* épreu- 
ves, auxquelles en ont succédé d'autres, au pied desquelles sont 
24 vers allemands en trois colonnes à la louange du peintre > 
suivis de l'adresse du marchand : In Nurnberg by Hans 
Wolf Glasen. — Il y a une copie de ce portrait, fort exacte, 
tournée du même sens et de même grandeur, qui a été gra- 
vée sur bois par André Andreini de Manloue, en 1588, étant 
à Sienne, et dédiée par lui à un peintre romain nommé Jean- 
Pierre Tranquilli. Il s*y trouve, dans le haut, deux ^cussons, 
l'un aux armes d'Albert, l'autre renfermant son mono- 
gramme. 

— Portrait de Durer en demy corps, gravé au burin, en 
1608, par Luc Kilian, d'après une copie d'un tableau de ce 
fameux peintre, faite par Jean Rotenhamer. Ornatissimis 
viris Dçm* Custodi vitrico^ Jacobo Mullero socero^ Chariss» 

suis offert Lucas Kilianus, anno 1608; ce qui nous ap^ 

prend que Dom* Custos étoit son beau-père, mari en secondes 
noces de sa mère, et que Jac. MuUer étoit le père de sa 
femme. 

— La belle œuvre d'Albert Durer, reliée en velours bleu, 
que mon père possède, luy vient de Hollande, oii elle avoit 
été achetée en 173., à la vente du bourguemestreSix, Je n'en 
ay point encore vu d'aussi parfaite pour les épreuves ni 
d'aussi suivie ; aussi avoit-elle été rassemblée avec de grands 
soins et beaucoup de dépenses par le célèbre Ortelius. Après 
sa mort, cette œuvre passa à son neveu et son héritier Col- 
lius; on y lit au commencement cette inscription : Jacobi 
Coin Orteliani, 1598. 

— M. le baron de Heinecken a vu à Nuremberg deux 
œuvres d'Albert Durer qui, recueillis anciennement, se con- 
servent dans des maisons patriciennes, et û assure qu'on 
n'en peut pas désirer de plus complets. L'un est dans la fa- 
mille Furleger et l'autre chez M. Martin Charles Scbweyger. 



IftS 

— Jamais il n'y eut peut-être un génie plus universel que 
celui d'Albert Durer. Successivement orfèvre, peintre à huile, 
en détrempe et en émail, sculpteur, graveur, architecte, in- 
génieur, il exerça ave^^éclat tous ces divers talents. 

Raphaël lui-même, tout partisan qu'il étoit de l'antique, 
ne put s'empêcher d'admirer les ouvrages de cet excellent 
homme, et, afin que les louanges qu'il leur donnoit parussent 
plus sincères, il exposa dans son propre cabinet les estampes 
gravées par Albert. Le travail en est, en effet, merveilleux; 
mais il semble qu'il y a encore plus d'esprit, et que la touche 
est plus légère dans les desseins de ce grand artiste, quoique 
le faire soit le même. 

Si les formes en étoient pures, mais il auroit fallu pour 
cela qu'Albert eût vu les sculptures antiques, ses desseins 
iroient de pair avec ceux des plus grands dessinateurs de l'I- 
talie. Presque tous ceux, ;qui sont dans la collection de M. Cro- 
zat, viennent de M. Jabach, qui les avoit fait venir de Flan- 
dres, avec de grandes dépenses; car ces desseins y étoient 
pour lors sans prix. (Gat. Crozal, page 88.) 

— Sandrart est un de ceux qui a écrit la vie d'Albert Du- 
rer avec le plus d'exactitude, et qui y a inséré le plus de 
nouvelles recherches. Une des plus curieuses est certaine- 
ment la vie d'Albert Durer, le père, écritte par son propre fils ; 
c'est un excellent morceau pour décider sur le temps de la 
naissance de nostre graveur, sur son éducation, ses maistres, 
et plusieurs autres circonstances. Vasari a encore parlé d'Al- 
bert avec éloge, et même assez au long, et Baldinucci nous 
en a donné la vie qui n'est proprement qu'une traduction 
de celle que Charles Van Mander avoit auparavant écrite 
en flamand. Baldinucci n'a fait qu'y ajouter quelques re- 
marques. Avec celles que j'ay faittes dans le cours de ce ca- 
talogue, et tout ce que ces auteurs ont dit, on pourroit faire 
une vie fort suivie d'Albert. 



i/i9 

Dans le catalogue, que Sandrart a douné des ouvrages gra- 
vés par Albert, j'en trouve quelques uns qui ne me sont pas 
connus, entr'autres un Christ montré au peuple par Pilate^ 
gravé à r eau for te, en 1515 (Sandrart, p. 207) (l).Ceraesme au- 
teur fait un dénombrement général des Estampes d'Albert, et 
en compte près de quatre cents, ou en bois, ou en cuivre, 
outre le grand arc de l'empereur Maximilien. Il en compte 
quatre gravées à l'eau forte sur le fer, ferra eroso, trois sur 
l'étain, Stanno Cœlator. Ainsy, adjoute-t-il, en comptant le 
Grand-Crucifix (2), le Petit-Crucifix (3) et le Saint- Jérosme, 
les pièces sur le cuivre, l'étain et le fer, se montent en tout 
à cent quatre, le Petit-Crucifix et le Saint-Jérosme dans le dé- 
sert étant de forme ronde. Ce Saint-Jérosme dont il parle icy 
m'est une pièce inconnue, de mesme que le portrait d^ Albert, 
gravé en cuivre par luy-mesme, dont parle Baldinucci, p. 4, 
et un Christ nud, avec les mistères de la passion à Fentour, 
petite pièce gravée en bois, doni le mesme auteur fait mention 
à la page 5 de son livre sur la graveure. L'abbé de Villeloin, 
Marolles, dans son catalogue d'Estampes, en 1666, compte^ 
de mesme que Sandrart, trois pièces gravées sur l'étain, et 
six gravées à l'eau-forte ; mais j'appréhende que lui et l'autre 
ne se soient mépris, car je ne trouve icy que trois pièces 
gravées à l'eau-forte sur le fer, et j'en trouve, au contraire, 
six gravées sur l'étain. Le nombre des pièces gravées en 
cuivre est icy de quatre-vingt-treize, sans y comprendre les 
neuf gravées sur le fer ou sur l'étain, ce qui fait en tout cent 
deux pièces ; c'est-à-dire deux de moins que n'en rapporte 



(1) Seroit-ce de TEcce homo assis, gravé sur du fer, en 1515, 
dont il entendroit parler? — 11 faut que ce soit cela. {MarietteA 

(2) Apparemment celuy en hauleur, gravé en 1508. (Mariette,) 

(3) C'est celuy qui est à ce que l'on prétend, gravé sur le pom- 
meau de l'empereur Maximilien. {Mariette.) 



18» 

Sandrart, el c'est apparemment le Saint-Jérosmê et le Christ 
mmtriy dont il fait mention, et que je ne connais pas. 

L'âbbé de MaroUes, dans son second catalogue d'estampes, 
fait en 1672, p. 12 (1), parle d une Vierge^ tenant son enfant, 
assise stnr le croissant, laquelle est gravée en cuivre, et est, 
dit-il, une pièce si rare, qu'il ne l'a jamais veuë ailleurs. En 
effet, mon père ne se souvient pas de l'avoir jamais veuë, ny 
d'en avoir mesme entendu parler. Il y a une Vierge de ce 
mesme sujet gravée par un anonyme, avec la marque d'Al- 
bert et l'année 1515, et peut-être est-ce la copie de celle que 
possédoit l'abbé de MaroUes; car, comme cette copie est 
commune, et qu'il est fort facile de voir qu'elle n'est pas d'Al- 
bert, je ne peux pas m'imaginer que l'abbé de MaroUes se 
soit trompé assez lourdement pour la donner à cet exceUent 
graveur, et il me paroist bien mieux de croire qu'il en avoit 
effectivement l'original, comme il le dit. 

Il me reste à parler icy du petit Crucifix en rond, qui est 
dans cette collection à la page 9, et que l'on dit avoir été 
gravé sur le pommeau de l'épée de l'empereur Maximilien; 
l'abbé de MaroUes l'a écrit ainsy dans son catalogue. Il m'est 
passé par les mains une collection des pièces d'Albert, qui 
avoit été faitte en Allemagne, et où se trouvoit cette petite 
pièce. Celuy qui avoit rassemblé celte collection, connoissoit 
tout le mérite de cette petite estampe, et il avoit mesme eu 
le soin d'écrire au bas ce qu'il en sçavoit. Le discours en Alle- 
mand étoit fort ample et signé de sa main. Et au dessus il 



(1) L'abbé de MaroUes s'est trompé en ret endroit, comme il Ta 
fait en une infiailé d'autres; cette vierge si rare, qu'il disoil pos- 
séder dans son œuvre d'Albert, n*en a jamais été. C'est la mesme 
pièce que celle dont il se trouve cy-après une épreuve. J*ay veu celle 
qui avoit apartenu à cet abbé, et nous l'avons mesme encore dans 
notre collection ; ainsy il est facile de se convaincre de sa mé- 
prise; il avoit écrit au derrière le mot, rare. (Mariette,) 



avoit fait le mesmô en françoid tort mauvaU^ éi tel que 1^ 
pouToit faire un Allemand, qui en sçavoit peu la langue. U 
voicy tel que je l'ay copié t Ce Crucifia: est aimy imprimé^ 
06 saint Jean est au côté droit, on doit entendre qu'il ri a pas 
été contre ftchere. (Je crois qu'il veut dire contrefait.) (1) Quand 
on Fa gravé la première fois, on ta gravé en pur or, p^r 
mettre dans le trésor de f empereur Maximilien, premier de ce 
nom, et Je Tay veu au trésor à Inspruch, Pan 1556. Signé Da^ 
niel SpecMé (S). 

Il me semble que Ton doit entendre par là, que le Gruciflix, 
où saint Jean est au côté droit (et c'est, pour le dire en pas- 
sant, celui qui est dans cette collection, et le seul d'Albert, 
original, dont on connoisse des épreuves), n'est pas une co- 
pie, mais qu'il a été gravé par Albert mesme sur de l'or, et 
qu'on en conserve la planche dans le trésor d'Inspruck. En 
effet, si Ton en examine les épreuves, on verra bien qu'Al- 
bert avolt plustost eu en vue, en gravant la planche, la per- 
fection de la planche mesme que des épreuves qui en pou- 
TOient provenir; car le soldat qui est derrière le saint Jean a 
son bouclier passé dans le bras droit, et il le doit avoir natu- 
rellement passé dans le bras gauche, car on le portoit ainsy, 
et l'inscription qui est placée au dessus de la croix, lUNI dans 
les épreuves imprimées, au lieu qu'elle est gravée sur la 



' *■• m^'f^g^i^m 



(1) Comme il y a des copies de cette pièee assez bien faites 
pour en imposer, Tauleur de cet avis fait observer que Tesiampe 
originale du petit crucifix est celle où le Saiot^Jean e$t au côté 
droit de la croix, et cela est ovale. (Mariette.) 

(2) Daniel Specklè ou Hpecklin ëtoit arcbilecte de la vUte de 
Stratibourg, où il est mort on iS89. Il a écrit une chronique qui se 
conserve Mss. dans les archives de Strasbourg. Elle est citée par 
M. Sehoepflin dans son Vindiciœ typograptiieiBi imprimé en 1760, 
p« 37, et Ton voit par le passage cité que SpeckUn éioit un homme 
curieux, et qui étoit affecté de ce qui éloit du ressortdes arts. (JUa' 
fieUe.) 



153 

planche, dans le sens naturel. Ce seroient là des négligences 
pour Albert, qui ne luy sont pas ordinairement échappées, 
et Ton en peut tirer une conséquence, que la planche, en- 
core une fois, n'a pas été faite dans l'intention d'en tirer des 
épreuves, mais qu'elle l'ait été pour mettre sur le pommeau de 
l'épée de l'empereur Maximilien. C'est ce dont je n'ay d'autre 
certitude que la tradition; la manière, dont sont faites à pré- 
sent nos gardes d'épées, feroit croire que cela ne peut pas 
être, si l'on ne sçavoit (jue celles des épées ou espadons, telles 
qu'on les portoit alors, avoient à l'extrémité un pommeau qui 
étoit plat dans deux de ses superficies, lesquelles pouvoient 
recevoir une petitte plaque ronde pour ornement, telle que 
l'est celle sur laquelle est gravé ce petit crucifix. Mais le si- 
lence de Sandrart, qui parle de cette petitte pièce, sans en 
dire autre chose, sinon qu'elle est gravée sur de l'or, et qu'il 
Ta veuë, me feroit presque croire que ceux qui disent qu'elle 
fut gravée sur le pomeau d'épée ne sont pas bien fondés. 

L'on doit prendre garde qu'il y a plusieurs estampes in- 
ventées et gravées par H. Gollzius, dans la manière d'Albert, 
aui^quelles on pouroit se tromper en les rangeant au nom- 
bre des ouvrages de ce peintre, d'autant plus que Goltzius, 
pour mieux imposer par ces pastiches, y avoit mis la marque 
d'Albert. On les trouvera dans le recueil des ouvrages de 
Goltzius. 

Jl me reste à remarquer qu'Albert a eu plusieurs manières 
de graver; je ne parle pas de la !'•, car c'est celle précisé- 
ment d'Israël Van Mecken, ou plustost de Martin Schoen ;car 
je remarque une plus grande conformité de manière entre 
celle dont Albert s'est servy dans ses commencemens, et celle 
de Martin Schoen, que je n'en trouve avec les ouvrages d'Is- 
raël Van Mecken, et je remarqueray en passant queceluy-cy 
avoit luy-mesme copié beaucoup de pièces de M.Schoen,qui 
estoit beaucoup plus habile que luy dans le dessein et dans 



153 

la science de conduire ses tailles avec art et intelligence, dont 
il copioit les ouvrages; la 2® en tient encore beaucoup, c'est 
celle qu'il avoit dans le temps qu'il gravoit l'Enfant Pro- 
digue, etc. ; la 3^, et celle dans laquelle il a gravé le plus de 
pièces, est dans le goût delà Passion, et la dernière est la plus 
Unie et plus moelleuse, et celle où l'on s'aperçoit qu'il avoit 
veu et profitté des ouvrages de Lucas. La Mélancolie , les 
Apostres, et plusieurs Vierges sont gravées dans cette ma- 
nière, que j'estime infmimept. 

— A propos des premières pièces de Durer ^ comme ÏAdam et 
rÊve, r Enfant Prodigm^ Mariette ajoute : On ne peut rien 
gravé plus arlistement. A l'égard de la manière de graver, 
ce sont des tailles sans beaucoup de suite, tantôt prises d'un 
sens et tantôt d'un autre, suivant qu'il le falloit pour expri- 
mer les muscles ou les plis des draperies. 11 y a quelquefois 
jusques à trois tailles dans les ombres, et elles viennent s'é- 
largir sur les jours, avec quelques joints pour faire le pas- 
sage. Cette manière de graver étoit particulière à Israël Mec- 
kenen, et plutost encore à Martin Schoen. Albert se l'est 
appropriée, et na fait que la perfectionner; ses dernières 
pièces, qui sont les plus terminées, en tiennent encore beau- 
coup. 

— Je suis comme assuré qu'Albert n'a jamais gravé en 
bois. Il se contentoit de dessiner sur le bois ce que son génie 
lui dictoit, et, quitte de cette opération, il remettoit la planche 
de bois entre les mains d'un de ces tailleurs de bois, dont 
l'Allemngne étoit alors bien fournie, et qui y étoient connus 
sous le nom de Formschneider. Il y en avoit dans le nombre 
plusieurs qui étoient d'une dextérité merveilleuse, et qui sça- 
voient épargner sur le bois des tailles qui le disputoient en 
ûnesse à ce que le burin tcaçoit sur le cuivre. Albert a eu le 
bonheur de faire passer plusieurs desseins par des mains si 
habiles, et il y a telle de ses estampes en bois, qui, véritable- 



i6& 

ment, sont des chefs-d'œuvres. On dit en AUemagDe qu'il te- 
nolt dans sa maison un de ces ouvriers à ses gages. 

— Je ne connois rien de si parfaitement exécuté, dans le 
genre de la graveure en bois, que ce qui Ta été du vivant 
d* Albert Durer, sur les dessins de ce grand artiste. II eut l'a- 
vantage de trouver, pour ainsi dire sous sa main, des gra- 
veurs, ou, pour parler avec les Allemands, des tailleurs de 
bois, Formsekneider, qui avoient acquis la pratique de tran- 
cher le bois (1) avec une grande facilité, et pour lesquels 
les traits les plus déliés, et ceux qui éloient les plus isolés, 
n'avoient rien de difficile. C'étoit sur le bois que ceux qui les 
premiers avoient donné des estampes, s'étoient exercés; c'é- 
toit sur cette même matière qu'a voient formé leurs caractères 
les artistes industrieux, qui donnèrent naissance à Timpri- 
merie des livres. L'usage et l'expérience n'avoient pas man- 
qué d'en perfectionner la pratique, et notre Albert Durer sçut 
profiler d'un moyen facile et prompt, qui, en multipliant les 
dessins, lui faisoit une réputation qui se répandoit de toutes 
parts, et lui acquéroit une gloire immortelle. 11 pouvoit des- 
siner à la plume, sur le bois, ses pensées, et il étoit sAr que 
le graveur ne laisseroil pas passer un seul trait, qu'il les ren- 
droit de leur épaisseur, et qu'ainsi rien ne seroit perdu de son 
travail, et que chaque estampe, qui donneroit l'impression 
de la gravure, seroit une copie fidèle de ce qu'il auroit des- 
siné, avantage qui ne se rencontre point dans les autres genres 
de gravure, où celui qui fait agir son burin et sa pointe ne 
peut jamais suivre si exactement les contours du dessein qu'il 
imite, qu'il ne s'en écarte, et qu'il ne le réduise même pres- 



(1) Ils employoient le bois de poirier, et, dans les ouvrafres les 
plus recherchés, celui de buis qui, éiaDt plus dur et plus compacte, 
conserve mieux ses arêtes. (Note de Mariette; il a écrit eu haut de 
la page la date de 4767.) 



155 

que toujours dans une manière qu'il aura contractée, et qui 
lui sera devenue familière. 

Ces considérations m'ont souvent fait faire un retour sur 
moi-même, et m'ont jette dans Tétonnement, quand je me 
suis représenté l'espèce de discrédit, où il me sembloit voir 
tombé tout ce qui a été gravé autrefois en bois. On en est 
venu à ce point d'indifférence, que les graveurs en bois, 
manquant de travail, ou ont embrassé d'autres professions, 
ou n'ont point fait d'élèves qui puissent les remplacer. A 
peine s'en trouve-t-il aujourd'hui, et ceux qui taillent le bois, 
comment s'en acquittent-il? Il est déplorable qu'on ait ainsi 
laissé échapper une branche de la gravure, qui, si elle n'é- 
toit pas faite pour rendre les effets de clair obscur, ni pour 
flatter la vue, avoit d'un autre côré le mérite de pouvoir con- 
server avec plus de précision le vrai caractère du maître, et 
tenir lieu de ses dessins. 

C'est dans cet unique point de vue qu'on doit envisager 
ces estampes; et, quand on les rencontre bien conditionnées 
et de bonne impression, il faut n'avoir point de goût, si Ton 
n'en est point affecté. Mais, autant que ces sortes d'estampes 
sont déplaisantes lorsqu'elles sont mal imprimées, ou que la 
gravure en a été faite par un mauvais ouvrier, autant sont- 
elles rares et estimables quand on les a des premières édi- 
tions ; celles-ci sont reconnaissables en ce que les traits en 
sont tins, déliés, et que la netteté des traits fait paroltre l'es- 
tampe douce à l'œil. Mais la planche de bois ne peut pas tou- 
jours demeurer dans ce premier état de fraîcheur. L'effort de 
la presse et la compression écrasent en assez peu de temps 
le bois qui lui est soumis; les vives arêtes s'en émoussent, les 
traits deviennent pla^ gros, des parties de bois s'écornent, 
surtout dans les endroits qui manquent de support et qui 
sont trop isolés ; les vers s'en mêlent quelquefois, et la plan- 
che de bois ne fournit plus à l'impression qu'un travail rude 



156 

et gi*ossier, au lieu de cette légèreté qu'elle avoit donnée lors- 
qu'elle avoit passé pour la première fois sous la presse. 

On voit donc combien ces sortes d'estampes demandent 
qu'on y apporte de choix. Comme on néglige de les recher- 
cher, cela ne s'aperçoit point. Mais, si jamais elles repre- 
noient faveur, à peine s'en trou veroit-il pour satisfaire àTem- 
pressement des curieux, tant la disette en seroit grande. 11 
m'est passé bien des estampes par les mains, et j'en ai beau- 
coup vu de celles d'Albert Durer, gravées en bois ; mais c'é- 
toit un pur hazard si elles se trouvoient de bonne qualité. 11 
en est arrivé de même à mon père, qui en a manié encore plus 
que moi, et jamais je ne le vis plus content que lorsqu'il eût 
fait l'acquisition d'un beau recueil de ces estampes, qui fait 
aujourd'hui le fond de celui que je possède, et que je mets au 
rang de ce que j'ai de plus rare. Toutes les fois que je le par- 
cours, je me sens pénétré d'un plaisir nouveau, qu'égale ma 
surprise de trouver rassemblées un si grand nombre de pièces 
d'une date si ancienne, et de les voir d'une condition si par- 
faite. Toutes ont leur première fraîcheur ; et la netteté, la 
pureté des tailles en est telle, qu'on a peine à se persuader 
que ce ïie soit pas une opération du burin faite sur le cuivre. 
Ce recueil est devenu d'un prix inestimable, depuis que j'ai 
eu le bonheur d'y joindre un exemplaire de cet ouvrage 
unique, que Maximilien i iaisoit préparer, et que la mort de 
ce prince a interrompu. C'est une comparse, une marche 
triomphale de tous les officiers qui composoient sa cour, et 
Albert Durer, qui partagea cet ouvrage avec son disciple 
Jean Burgmayr, y montre la même étendue de génie que 
dans ses autres productions. Je ne puis m'empêcher de dire 
à sa louange qu'il est peu de peintres qui ayent eu une plus 
belle imagination, ni qui ayent autant varié leurs composi- 
tions. Olez-lui ce qu'on peut appeler le goût de terroir, un 
goût sauvage, aride et sec, qui tient du gothique, et qui, 



157 

étant celui dans lequel il avoit été élevé, n'avoil pu se perfec- 
tionner par une étude de l'antique qui lui manquoit, vous 
trouverez, dans ses ouvrages, de la noblesse, des caractères 
variés et bien saisis, une grande richesse de composition, 
chaque figure sur son plan, l'observation la plus exacte des 
règles de la perspective, des reclierches savantes, des drape- 
ries souvent très-heureusement jetées, et où il ne fautqu'a- 
balre et simplifier des plis trop minutieux pour en former 
des jets de draperies de la plus grande manière. C'est ce qu'a 
très-bien compris le Guide, et avant lui André del Sarte et le 
Pontorme. Ces grands peintres n'ont point eu honte de pui- 
ser dans les ouvrages d'Albert. Us s'en sont quelques fois ap- 
proprié des parties qui n'ont pas peu contribué à embellir 
leurs tableaux, et, si Raphaël lui-même a fait hommage aux 
productions de notre habile peintre, en plaçant de ses gra- 
vures dans son cabinet, afin de les avoir continuellement 
sous les yeux, ay-je tort de les présenter sous un point aussi 
avantageux que je viens de le faire, et ne dois-je pas, au con- 
traire, espérer que les curieux reviendront enfin de leur as- 
soupissement, et qu'ils regarderont les ouvrages d'Albert 
Durer avec toute la vénération qui leur est due. Heureux si, 
par tout ce que je viens de dire, je pouvois avoir opéré ce 
miracle. 

— Moyse recevant les tables de la loy sur le mont Sinaï, 
gravé à l'eau forte par un anonyme moderne , d'après un 
dessin d'Albert, de l'an 1524. — On tient à Nuremberg que 
cet anonyme est Laurent Strauch , peintre à Nuremberg , et 
que la planche a été gravée d'après un dessin d'Albert Du- 
rer, qui se trouvoit dans un livre de prières à l'usage du 
docteur Gartner, et je le crois volontiers. 

— Vierge assise, dans un paysage où l'on découvre la mer 
dans le lointain, et ayant entre ses bras l'enfant Jésus qu'elle 
caresse, pendant que saint Joseph est endormy. Cette pièce, 



158 

grtvée par Albert Durer, est singulière en ce que c'est une 
copie de l'estampe originale de Israël van Mecken, un des 
plus anciens graveurs qui ayent paru en Allemagne, et c'est 
en même temps un des premiers ouvrages d'Alt)ert. L'on ne 
peut pas dire précisément le temps qu'il a été fait ; ce ne peut 
guerre estre que vers l'année 1497 (j'en ay eu une épreuve avec 
la date 1491 écrite à la main) , car ce fut pour lors qu'il com- 
mença à s'appliquer à la graveure. Gomme l'on n'a aucune 
connaissance de celuy qui donna les premières leçons de cet 
art à Albert , il y a lieu de croire que sa seule industrie lui 
tint lieu de maître. Les copies, que l'on a de luy d'après plu^ 
sieurs estampes d'Israël van Mecken, sont sans doute ses coups 
d'essai. Ce sont là les leçons qu'il se donnoit à lui-mesme, 
c'est sur quoy il se formoit ; mais ce qui doit encore faire es- 
timer davantage ce grand homme, c'e^t de le voir, dès le com- 
mencement, faire des copies beaucoup plus belles que ses 
originaux. La force de son génie étoit telle qu'elle le portoit à 
perfectionner ce qu'il n'avoit dessein que d'imiter. 

— Suite de sujets de la passion de J.-C, en treize pièces, 
dont il y en a six qui sont du meilleur temps d'Albert, c'est- 
à-dire des années 1510 et 1511 ; les autres avoient précédé et 
doivent être de même époque que les figures de l'Apocalypse, 
et l'on y trouve le monogramme d'Albert à toutes. «^ Je les 
crois présentement toutes de l'invention et de la gravure 
d'Albert, mais faites en différents temps. Les moins bien ont 
été gravées vers le mesme temps que l'Apocalypse. C'est la 
mesme manière de dessiner et de graver, et les planches de 
l'Apocalypse sont, à n'en point .douter, d'Albert, mais de ses 
premiers ouvrages. Depuis, dans le temps de sa plus grande 
force, c'est-à-dire en 1510 et 1511, il aura fait les cinq sujets 
qui manquoient pour parfaire la suite qu'il avoit commencée 
cy-devaot. A ces six , il a mis la date et la marque. Aux 
autres, il n'a mis que sa marque sans la date, coutume qu'il 



I«9 

a observée dans tous les autres ouvrages en bois qu'il a gra- 
vés dans ses premières et dans ses bonnes manières. 

— La Sainte Vierge, la sainte femme et saint Jean au pied 
de la croix, sur laquelle est attaché Jésus«Christ. Cette 
pièce, dont il n'y a que le trait de gravé , et où il y a même 
un groupe qui n'est pas encore achevé, est attribuée par 
quelques-uns à Albert; elle n'est cependant que de son des«* 
sin ; l'on ignore même le nom de celuy par qui elle a été exé* 
cutée à l'eau forte. — Il se peut fort bien que ce trait soit 
d'Albert, et que c'est ainsi qu'il préparoit ses planches. — 
On n'en doute point à Nuremberg, 

— Saint Euslache rencontrant à la chasse un cerf ayant 
entre ses bois l'image de J.-G. crucifié. Cette admirable pièce 
est une des plus considérables et des plus parfaites de 
l'œuvre d*Albert ; elle est terminée avec un grand soin ; les 
terrasses, les fabriques, les plantes, les troncs d'arbres, tout 
y est traité avec un art merveilleux , surtout le cheval et les 
chiens de chasse qui sont sur le devant, et qui occupent la 
principale partie de la composition. Une seule chose que l'on 
y pourroit désirer, seroit moins de travail, et que ce qui est 
dans le lointain ne fut pas ouvragé de mesme que ce qui est 
sur le premier plan ; mais ce défaut est assez ordinaire à Al- 
bert, et il ne paroit pas qu'il ait jamais bien connu les règles 
de la perspective aérienne. Au reste, cette épreuve est si par- 
faite qu'il semble qu'elle ne vienne que de sortir de dessous 
la presse; il est bien singulier de trouver des estampes aussy 
anciennes aussy bien conditionnées. — On raconte que lors* 
qu'Albert eut achevé celte planche, il en fit voir une épreuve 
à son ami Pirckmeyer, qui lui fit apercevoir que les étriers 
n'éloient pas suffisamment grands, et que le pied du cavalier 
n'y pourroit jamais entrer, faute qu'Albert corrigea sur-le- 
champ. L'on veut aussi que la tête du saint soit celle d'un 
certain Rieter, ami d'Albert; cela peut être; mais, quand à 



160 

autre anecdote, l'on voit bien que la critique de Pirckeimer 
étoit fondée ; mais il ne paroit pas qu'Albert en ait jan^ais 
profilé. Ainsi, ce sera là une de ces histoires auxquelles il ne 
faut point s'arrêter. 

— Le martyre des dix mille vierges, grande pièce compo- 
sée de quatre planches qui, de même que le tableau, se con- 
serve dans le trésor du Palais Impérial. On y lit au bas cette 
anscription : Hanc ab Alberto Durero olim depositam et | 

martyrum passionemet mortem exprimantem labulam Aug. 
Cœsaressuodignam thesauro censuerunt. Invictiss. Impera- 
lor Leopoldus I ad prototypi proportionem à Nicolas van 
Hoye suo pictore delineari ac à Franc, vanden Steen suo cœ- 
latore sculp. jussit anno 1661. 11 y avoit trois ans qu'il étoit 
empereur ; il fut élu en 1658. J'ai fait faire des recherches à 
Vienne ; on y a en effet trouvé cette planche dans le trésor, 
mais en si mauvais état qu'elle ne peut plus donner d'é- 
preuves. Ainsi il faut regarder celles qui sont dans le public 
comme des morceaux très-rares, et d'autant plus que la 
planche est très-bien gravée et rend parfaitement ce tableau, 
l'un des plus parfaits qu'ait fait Alber Durer. Il le peignit en 
1508, ainsi qu'il paroit par cette inscription , qui se lit sur 
une banderole que tient dans ce tableau le peintre, qui s'y 
est représenté accompagné de son ami Bilibald Pyrckheimer, 
et qui est conçue en ces termes : Iste faciebat anno Domini 
1508 Albertus Durerus Alemanus. 11 ne faut pas qu'il ait mis 
plus d'un an à faire ce tableau ; car l'année précédente, 1507, 
il en avoit jeté sur le papier la première esquisse. M. Grozat 
avoit ce dessein légèrement fait à la plume avec cette date ; 
on en a l'estampe gravée par le comte de Caylus. Quant au 
dessin, il fut acheté par le comte deTessin(l),et il appartient 

(1) N*" 784, composé de quatre dessins capitaux; vendu 20 liv. 
10 sous. 



161 

présentement au prince Royal de Suède. — L'auteur du 
livre intitulé : Il Figino, p. 250, fait mention du tableau 
d'Albert, dont Albert, duc de Saxe, fit présent, dit cet écri- 
vain , au feu cardinal de^Granvelle , et il y a toute apparence 
que cette Eminence en fit à son tour un cadeau à l'empereu r 
son maître, et que c'est ainsi qu'il est entré dans la collection 
impériale, dont il fit un des principaux ornements. 

— M. Boyet m'écrivoit en 1723 que toutes les démarches 
qu'il avoit laites, ainsi que M. Bertoli et M. Herrens, anti- 
quaire de. S. M. I. pour tâcher de me procurer une estampe 
du martyre des dix mille martyres d'après Albert Durer, 
avoient esté jusqu'alors infructueuses, que c^tte estampe étoit 
d'une rareté étonnante à Vienne, qu'il étoit certain que la 
planche devoit estre dans le trésor de l'empereur, mais qu'on 
ne l'y trouvoit plus, et que cependant on avoit fait pour cela 
bien des perquisitions à la sollicitation du prince Eugène. 
— Jen ay^eu depuis une épreuve que M. Le Fort m'a pro- 
curée, et que je regarde comme un morceau unique. — Elle 
m'a coûté 4 florins d'Allemagne, qui font environ 10 livres, 

— A propos du n° 132, du cat. TcUlard : Un prêtre disant la 
messe en présence d'un empereur qui se voit, sur la gauche du ta- 
bleau, à genoux devant un prie Dieu. Vendu 184 liv. Ce mor- 
ceau, peint avec soin, n'est point d'Albert, qui dessinoit et 
composoit.de meilleure manière. Je l'estime de quelque an- 
cien peintre des Pays-Bas, et peut-estre a-t-il esté peint pour 
le dernier duc de Bourgogne, Charles ; car, dans un papier que 
tient un petit ange, on lit en latin : Seigneur, conservez 
Charles. 

— Une femme ailée représentant la fortune ; d une main 
elle porte un vase précieux, de l'autre, une bride, ce qui 
marque la dépendance où elle tient les hommes par l'appât 
des richesses, de même que ses ailes et le globe sur lequel 
elle est élevée dénotent son inconstance. Cette explication pa- 

T. H. k 



162 

roit plus naturelle que celle que luy donnent plusieurs autres 
personnes qui ont prétendu que cette Ggure représentoit la 
tempérance. La ^eue du pays qui^est au-dessous est celle du 
village d*Eytar, situé près de Waradin, dans la Haute-Hon- 
grie ; c'est la patrie du père d'Albert Durer et le lieu d'où sa 
famille tiroit son origine. — Depuis, ayant lu la vie du père 
d'Albert Durer, écrite par son fils, et y ayant trouvé que des 
trois enfants qu'avoit eus son ayeul , l'atné , qui se nommoit 
Albert, et qui est le père du peintre, avoit embrassé l'orfè- 
vrerie, et que le cadet, qui se nommoit Ladislas, faisoit des 
brides de chevaux, j'ay pensé qu'Albert avoit voulu expri- 
mer icy la fortune de sa famille, qui, par le moyen de Forfè- 
vrerie, figurée par un beau vase, et de l'art de faire des freins, 
exprimé par une bride, avoit tiré ses parents du village d'Ey- 
tar, où ils vivoient sans aucun renom, et les avoit élevés, pour 
ainsy dire, jusques dans les cieux. Cette pensée ne me déplatt 
pas. 

— Quatre femmes nues, dont l'une couronnée de lauriers 
et vue par le dos aussi bien qu'une autre qui est coiffée à 
l'allemande, et les deux auties vues par devant. Elles sont re- 
présentées debout et dans une chambre où l'on voit à terre 
une teste de mort et d'autres ossemens ; dans le fond, le dé- 
mon paroit sortir de l'enfer. Circonstances qui font connoitre 
visiblement l'erreur de ceux qui ont cru que ce sujet repré- 
sentoit les trois grâces. Suivant Sandrart, ce n'est autre chose 
qu'une assemblée de sorcières, et en effet, ce qui est écrit sur 
ce globe, qui pend au-dessus de leurs testes, sont les lettres 
initiales de cette prière allemande : Gott Hùte, qui, étant 
rendue en nostre langue, signifie : Seigneur, deffendez- 
nous, Deus deffende, sous entendu, suivant ujon explication, 
à demone, à morte, à muliere. L'invention n'en est point 
d'Albert Durer, car ce n*est qu'une copie qu'il a faite d'après 
une estampe d'Israël van Meckenen. Il la grava en l-an- 



163 

ni'^e 1497, étant pour lors âgé de 26 ans. Comme l'on ne voit 
aucune pièce de luy avec une date antérieure, Ton préjuge 
que c'est vers ce temps-là qu'il commença à s'appliquer à la 
gravure. — Au lieu des trois lettres 0. G. H. qui se trouvent 
sur l'estampe d'Albert , il y a sur le même globe , dans l'es- 
tampe d'Israël van Mecken, les trois autres lettres G. 6. A., 
qui renferment le même sens que celles d'Albert, puisque 
ces trois lettres sont les lettres initiales de ces trois mots alle- 
mands : Gott Behutt Aile, qui signifient : Deus preservet om- 
nes. J'imagine que l'inventeur de cette estampe y a voulu fi- 
gurer les dangers attachés à la fréquentation des femmes, 
puisque c'est par elles et le démon, représenté dans la même 
composition, qu'est entrée dans le monde la mort, exprimée 
par celte teste de mort et ces ossements qui sont à terre. Si ce 
n'en est pas là le sujet, il iaut avoir recours à l'explication de 
Sandrart. 

— Albert Durer a gravé en bois une longue Irise, composée 
de trois planches, dont le sujet est une allégorie sur l'emploi 
de la fraude parmi les hommes. Voici l'explication des ins- 
criptions allemandes : « Celte figure et les inscriptions en 
vers allemands qu'on y lit ont été dessinées et copiées exac- 
tement d'après une ancienne tapisserie qui étoit faite il y 
avoit environ cent ans, lorsqu'on en fit la découverte' vers le 
milieu du carême de l'an 1524 dans le château de Michel 
Feldtsur le Rhin, et l'on y apprend que nos ancêtres ne pen- 
soient pas bien différemment de nous sur les choses qui ar- 
rivent journellement. » 

— Un emblème sur les souffrances qu'ont fait endurer 
dans tous les tems au pauvre peuple, figuré par un asne, la 
tyrannie des grands et l'avarice insatiable des juifs roturiers 
qui l'écorchent tout vif. La basse flatterie a voulu lui persua- 
der qu'il lui étoit utile de souffrir et de vuider sa bourse, et 
fasne indigné lui lance une ruade et le renverse à terre ; d'un 



autre côté, la ioible raison vient à sa rencontre et lui pré- 
sente un voile propre à Téblouir et à leur faire oublier ses 
malheurs. La justice, retenue captive, pleure et gémit de ce 
qu'elle ne peut lui être d'aucun secours, et la Parole Divine, 
dans laquelle il doit trouver son unique consolation, se montre 
sous la jQgure d'une femme qui tient d'une main Tépée ven- 
geresse, et de l'autre le livre sur lequel doivent estre jugés tous 
les hommes. Ce sujet est traité dans le goût des anciens ta- 
bleaux où chaque figure est toujours accompagnée d'un écrit 
qui en donne l'explication. Il en est de même de tout ce qui 
entre dans celte composition ; il y a autant d'écrileaux que de 
figures. Les explications sont en vers allemands, et il y a, 
outre cela, au pied de l'estampe, une longue pièce de vers 
allemands, disposés sur cinq colonnes, qui donne une inter- 
prétation encore plus étendue de tout ce qui y est exprimé. 
La gravure, qui est au burin et assez mauvaise, porte la date 
1647. Elle est d'un anonyme. Elle vient d'après un dessein 
d'Albert Durer, qui y a apposé sa marque et l'année dans la- 
quelle il l'a fait, qui est 1522. L'estampe porte T^et, y compris 
la pièce de vers, 10® 5' de haut sur 14° 9' de large. Aux se- 
condes épreuves, on trouve le nom de Keyser, qui est, je 
pense, celui de l'éditeur. 

— Une femme nourrissant son enfant dans un désert où 
Ton découvre, dans le fonds, un saint vieillard qui, par un 
motif de pénitence, se réduit à marcher à la manière des 
bestes. — Il faudra s'informer de l'histoire que représente 
cette estampe. Il n'y a point de date; elle est gravée dans la 
manière de l'enfant prodigue et paroit du mesme temps. Je 
croy que le sujet est tiré de la vie de saint Barlaam. — Non. 
— Je crois que cette histoire a été rapportée par saint Jean 
Chrisostome dans ses livres de la défense de la vie monas- 
tique. 

— A propos de la pièce de la Mélancolie^ Mariette ajoute : 



165 

Contre le mur est une table renaplie de chiffres depuis 1 à 
16, disposés de telle sorte que, de quelque sens qu'on les 
prenne et qu'on les additionne, la somme totale est tou- 
jours 44. — C'est ce qu'on appelle un quarré ou table ma- 
gique. 

— L'empereur Maximilien 1, accompagné de la sainte 
Vierge, de saint André, de saint Georges et des autres saints* 
qu'il a pris pour ses patrons, se présentent à genoux devant 
le Sauveur du monde dont il implore le secours. Sans mar- 
que; seulement l'on aperçoit, sur le devant du socle où pose 
la figure du Christ, les armoiries de Jean Stabius, qui fit faire 
cette gravure sur le dessein d'Albert vers l'an 1519, qui est 
celle de la mort de Maximilien, et il paroit, en effet, que cette 
pièce étoit destinée à lui servir comme de monument sépul- 
cral. Une longue inscription, qui se lit au pied de l'estampe, 
fait mention de la mort de ce prince à la suite de tous 
ses titres, et finit par des vers latins, où, persuadé qu'il 
jouit de la félicité éternelle, on lui demande son intercession 
pour les peuples qu'il a gouvernés. La pièce est singulière et 
rare. 

— Le triomphe de l'empereur Maximilien premier, ce 
prince y paroissant assis dans un char conduit par les vertus. 
La pensée en est du fameux Bilibald Pirckheimer, et c'est 
une des plus belles pièces que Ton connoisse d'Albert. Il en 
fit le dessin en 1518 et en publia à Nuremberg, en l'année 
1523, la planche composée de huit planches qui s'assem- 
blent. — La première édition, où les explications sont en al- 
lemand, a été faite en 1522. '— La lettre de l'empereur à Bi- 
libald Pirckheimer est une bonne preuve de la satisfaction 
que luy donne ce travail d'Albert ; elle est imprimée à la fin 
de l'explication latine du sujet. — Remarquez que, dans la 
lettre de l'empereur et dans l'inscription de l'édition alle- 
mande de 1522, Albert écrit son nom par un Th., Thûrer^ au 



t66 

lieu de Durer, C'est le seul endroit où je l'aye vu écrit de 
cette manière. 

— Portrait de Daujien de Goes, savant Portugais, de qui 
Ton a plusieurs ouvrages, entr'autres un qui traite de la re- 
ligion et des mœurs des Éthiopiens. Albert eut occasion de le 
voir et de le connottre dans le voyage qu'il fil aux Pays-Bas 
en 1520» et peignit son portrait, qui est le même qu'a gravé 
Philippe Galle, et qui est le 42<^ dans la suite des hommes il- 
lustres que ce graveur a publiée. On trouve au haut de la 
planche, aur la gauche, le monogramme d'Albert; mais il n'y 
a pas de nom de graveur. 

— » Portrait du fameux Erasme de Rotterdam, représenté 
en demy corps dans son cabinet, où il est occupé à écrire une 
lettre, dessiné et gravé en 1526. U est exécuté avec grand 
soin, et l'on n'en trouve que difficilement des épreuves bien 
imprimées. Celle qui est icy est de la meilleure qualité. Gé- 
néralement tous les portraits qu'a fait Albert sont très-esti- 
més ; ils sont gravés sçavamment, et l'on y trouve un arc qui 
fait bien connoistre qu'il étoit pour lors dans sa plus grande 
force. — J'en ai une épreuve sur laquelle un Polonois a écrit 
qu'il étoit présent, lorsqu' Albert peignit ce portrait d'Erasme 
à Bruxelles, en 1530. 

•^ Portrait de Frédéric troisième, surnommé le Sage, élec- 
teur et duc de Saxe, en buste, dessiné et gravé en 1524. Il 
mourut l'année suivante, le 5 mai. Charles Y lui devoit la 
couronne impériale; il l'eût pu placer sur sa tête, s'il l'eût 
voulu, et il fut un des premiers protecteurs de Luther. Albert 
n'a rien fait de plus parfait; les yeux sont pleins de vie. L'in- 
scription gravée au bas insinue que la planche fut gravée 
après la mort de ce prince. Albertus Durer, Nur. faciebat, 
B. M. F. V. V. Que signifient ces initiales^ 

-^ Il y a deux sentiments sur cette pièce, où Ton voit un 
homme fort gras qui a tout l'air d'être un cuisinier et qui est 



167 

becqueté par un pigeon, etc. Les uns veulent que ce soit un 
Jurian Penz et sa femme, apparemment quelque aubergiste 
de Nuremberg, autre que le peintre George Penz, qui a gravé 
de si jolies petites pièces ; d'autres prétendent que c'est Ma- 
homet et sa maîtresse, et cela parce qu'il est dit que ce faux 
prophète tenoit volontiers un pigeon sur son épaule, qui lui 
révéloit les volontés de Dieu. Si j'avois à opter, je donnerois 
la préférence au premier sentiment. 

— Portrait d'un homme dont on ignore le nom. C'est celuy 
de Joachim Patenier, de Dinant» peintre de paysages. Il a été 
gravé par un graveur anonyme des Pays-Bas, d'après un 
dessein d'Albert, que ce peintre avoit fait en 1521, lorsqu'il 
vint aux Pays-Bas ; car j'appelle dessein ce qui est tracé avec 
un poinçon d'argent sur une ardoise ou tablette, et c'est ainsy 
qu'Albert aura fait ce portrait. Dom. Lampsonius nous a 
transmis cette anecdote dans les vers latins qu'il a mis au 
bas du portrait de Joachim Patenier, qui se trouve dans la 
suite des portraits des anciens peintres flamands mis au jour 
à Anvers par la veuve de Jérosme Gock, en 1572 ; les voicy : 

Joachimo Dionantensi Pîctori. 

Bas inter omnes nulla qaodvivadus, 

Joachime, imago cernitur 
Expressa, quam vultus tui ; non hinc modo 

Factum est, quod illam (1) Gurtii 
In aère dextra incidit, alteram (2) sibi 

Quae non timet nunc aemulam. 



(1) C'est que Corn. Cort a gravé celte planche, au bas de laquelle 
sont ces vers de Lampsonius, d'après celle qui est dans notre 
œuvre d'Albert. (Mariette.) 

(2) En 1572, Corn. Cort s'estoit déjà fait une grande réputation, 
puisqu'il ne se trouvoit aucun graveur qui luy fut égal pour lors. 
{MarietU.) 



168 

Sed quod tuam, Durerus, admirans manum, 

Dum rura pingis et casas, 
Olim exaravit in palimpsesto (1) tuos 

Yultus aliéna cuspide. 
Quas semulatus lineas se (2) Guriîus 

Nedum praeivil caeteros. 

— Portrait de Bilibalde Pirkeymher, ou, comme il écrivoit 
lui-mesme son nom, Pircliheiraer, fort en réputation de son 
temps, et l'un des amis intimes d'Albert Durer. Il nacquit en 
1470 et mourut le 22 décembre 1530. En buste, dessiné et 
gravé en 1524. Cette pièce originale est suivie de deux autres, 
dont la première en est une épreuve après que la planche 
eut été retouchée, et l'autre, une copie qui est tournée du 
même sens et assez exactement imitée. — L'original est gravé 
avec un burin plus fin et la copie est moins empâtée; du 
reste, il est bien aisé de s'y tromper lorsqu'on ne les a pas 
l'une et l'autre devant les yeux. — On dit qu'aux épreuves 
postérieures la date MDiXXIV est ainsi figurée, au lieu qu'aux 
premières épreuves il y avoit M.DXX.IV. Mais je crains qu'on 
n'ait pris cette différence sur la copie qui, ainsi que je l'ai 
remarqué, est assez ressemblante à l'original. — Cette copie 
a été fdite pour être mise dans l'édition des œuvres de Pirck- 
heymer, faite à Francfort, en 1610. 

— Planisphère céleste de deux grandes planches : Joannes 
Slabius ordinavit, Conradus Heinfogel Stellas posuit, Albertus 
Durer imaginibus circumscripsit. Au bas, leurs trois armoi- 
ries. Cette pièce, dédiée à Mathieu Lang, cardinal de Saint- 



(1) Palimpsesto, c'est une ardoise, tablette à écnre ou autre ma- 
tière, sur laquelle on peut écrire et l'effacer ensuite pour y écrire 
de nouveau (Mariette,), — Ce pourrait tout aussi bien être de la 
peau d'âne. 

(2) Supple praebuit. {Marielte,) Le prœivit suffit au sens. 



169 

Ange, coadjuleur de Saisbourg — il étoit chancelier de 
l'empereur Maximilien — avec le privilège de l'empereur 
Maximilien pour tous les ouvrages de Stabius, en 1515. 

— Il y a une médaille de Jean Stabius, la tête couronnée 
de laurier; il porte une barbe; au revers, ses armoiries, qui 
sont une aigle éployée avec cette légende : Imp. divi Maxi- 
miliani P. F. Aug. ab historiis Joannes Stabius poeta Laurea- 
tus. M. Mâzzuchelli, qui a rapporté le type de cette médaille 
dans son livre Muséum Mazzuchellianum, pa. 38, observe, 
dans l'explication qu'il en donne, que Stabius cultivoit l'as- 
tronomie, et qu'il est le premier qui ait fait une horloge so- 
laire. Ce planisphère céleste, qui est son ouvrage, en est la 
preuve. 

— J'ai vu une copie de ce planisphère céleste gravée en 
bois, et publiée à Venise, en 1630. On y lisoit ces deux in- 
scriptions qui Qi'ont paru assez curieuses pour être copiées» 
D'un coté : Magnifico et excellentissimo Jurisconsulto domino 
Bartolomeo de Gualtarottis Patricio Florentino et apud illus- 
trissimos Dnos Venelos pro Republicâ Florentinâ oratori 
dignissimo dicalum. De l'autre coté, vis à vis : Conradus 
Heinfogel stellas posuit, Albertus Durer imagines circum- 
scripsit, Euphronius autem Yulparius Florentinus iterum 
excudit additisque novo que quidem sunt notatu dignissima. 
Venetiis, anno MDXXX. Cette partie du planisphère céleste 
en est la partie méridionale : Imagines cœli meridionalis. 
Dans la partje supérieure et aux deux angles qui correspon- 
dent avec les susdites inscriptions, sont, à droite, le portrait 
de Luc Gauric Neapolitanus; à gauche, celui de Laurent 
Yulparius Florentin, et au milieu, on lit par observation : 
*Omnes hujus formœ stellœ antiquis incognitœ. 

— Dans le livre intitulé: Hrosvithae monialis Germ. opéra 
Norimb. imp. anno 1501 . Il y a au commencement une épi- 
gramme latine de ce Jean Stabius, où il prend la qualité de 



170 

mathématicien et se dit d'ingolstadt, je crois en Autriche : 
Joannfê Stabius mathe. Ingolstadien (1). 

— Le frontispice du livre intitulé: BartholomsBiÂnglieide 
rerum proprietatibus, imprimé à Nuremberg, en 1519, par 
Frédéric Pjfus, aux dépens de Jean Goberger; ce dernier 
étoit le parrain d'Albert ou d'un de ses frères, ce qui, indé- 
pendamment de ce que la manière d'Albert est fort recon- 
noissable, sert à montrer que notre peintre a dû, plus qu'un 
autre, avoir été choisi pour donner le dessin de ce frontis- 
pice, qui n'est autre chose qu'un cadre où, dans le haut, est 
saint Jean dans l'Ile de Pathmos; dans le bas, le baptême de 
N. S., et dans les côtés, le triomphe de la mort. La planche 
est gravée avec tout le soin possible. 

— Une suite de dix pièces de différentes grandeurs, quatre 
en hauteur et six moins grandes en travers, de desseins d'or- 
nements d'orfèvrerie pour des boucles et des guaines, etc., 
gravées avec beaucoup de fermeté, je crois, mais je n'en suis 
pas sûr, par Blondus, d'après des desseins d'Albert à la 
plume. A toutes, la marque de ce peintre. Je les ay vues dans 
l'œuvre de ce mattre qu'a M. d'ArgenviUe, et je les ai actuel- 
lement. Je les crois gravées d'après des gravures d'Albert 
Durer exéculées sur de l'argent, et que c'est la raison pour 
laquelle, outre sa marque, l'on voit sur ces planches un 
croissant qui est, en chymie, la marque de ce mélail. U y a 
dans le nombre un morceau avec une ligure de lyon se ter- 
minant en queue de poisson, telle que le portent dans leurs 
armoiries les Imboff, famille patricienne de Nuremberg. 

DUSART (corneille), Hollandais et peintre de buveurs et 



(1) Les belles gravures en bois de cette édition ont été réduites 
avec soin, pour l'excellente traduction de tbéàtre de Hrosvitha, 
par M. Magnin, 1845, iii-8«'. 



174 

autres sujets grotesques , dans la mamère d' AdriejQ van Os- 
tade, dont il est peut-estre Télève; Ton voit quelques e^ 
tanapes de luy qu'il a gravées à Teau-forte , en 1685 et 1695, 
et d'autre» qu'il a exécutées en manière noire , et qui out éié 
terminées par Jean Gole. 

-^ ÏHj trouvé écrit en hollandais, sur une pièce gravée 
par C«Dusart, qu'il étoit élève d'Ostade et qu'il étoit mort 
en 1693. Mais cela ne peut être, puisqu'il j a des pièces de 
luy gravées en 1695. 

DUVAL (marc), surnommé Berlhin , un des excellents 
hommes de son siècle, tant pour le burin que pour le 
crayon et la peinture, mourut le 13 de septembre de l'an 
1581, au jour et à l'heure qu'il avoit prédit. Histoire des 
évêques du Mans par Antoine le Courvaisier de Courteilles ; 
Paris ; Gramoisy, 1648 ; in-4o, p. 838 (1). 

DUVAL (MARTIN), peintre, dont il y a des morceaux dans 
le cabinet d'Aiguilles. Reste à savoir où M. Heinecken a vu 
qu'il se nommoit Martin. — Vous verrez qu'il a voulu parler 
de Marc Duval. 

DDVAL (PHILIPPE). M. Boyer d'Aiguilles avoit dans son ca- 
binet deux tableaux d'un peintre nommé Duval qu'il a fait 
graver, et je ne doute nullement que l'un et l'autre ne soient 
l'ouvrage de Philippe Duval, peintre français qui, après avoir 
étudié sous Ch. Lebrun, étoit passé à Venise, où il avoit 
cherché à se perfectionner dans la couleur. Il y a grande ap- 
parence que ce fut à son retour d'Italie et à son passage par 



(1) Lacroix du Haine a sur Marc Duval et sa fille un article plus 
important auquel nous renvoyons. — M. Rob. Dumes'nil a catalo- 
gué son œuvre gravé, tome V, p. 1^. 



«72 

la Provence, que M. Boyer le fit travailler. De là il alla en An- 
gleterre où il peignit, en 1672, un tableau pour la duchesse 
de Richemond et il ne sortit plus de Londres. Son goût pour 
la chimie le réduisit à une espèce de misère à laquelle il au- 
roit succombé sans l'assistance que lui prêta M. Boyer; mais, 
celui-ci étant mort, et notre peintre se trouvant sans res- 
source et dans la plus grande indigence , il finit par devenir 
fouet mourut à Londres Tannée 1709. Anecdotes sur la pein- 
ture en Angleterre, t. IJJ, p. 49. 

DUVET (jean), étoit orfeure des roys François I et Henry 11, 
ainsy qu'on l'apprend dans la bibliothèque de du Verdier, 
pag. 688, où il est fait mention de cette suitte de figures 
qui furent imprimées, avec le texte de l'Apocalypse, à Lyon 
par J. de Tournes en 1561. Il a mis son nom à toutes les 
planches. Une des premières représente Saint Michel au milieu 
de deux anges dont l'un porte un écusson aux armes de 
France, et l'autre l'oriflamme ; ils soutiennent aussy un crois- 
sant sur le devant duquel il y a un H , devise de Henri II. La 
dernière planche de la suitte est la plus singulière. C'est une 
allégorie qui a rapport à l'auteur, il s'y est représenté assis et 
pensif, appuyé sur une table, ayant vis-à-vis de luy le livre 
de l'Apocalypse, et auprès une table sur laquelle on lit Joh. 
Duvet Aurifab^ Lingon. annor.lo has hist. perfecil, 1555. 
D'un autre côté, on lit ce distique qui donne l'intelligence de 
toute l'allégorie : 

Fata premunt trepidantque manus ; jam lumina fallunt. 
Mens restât victrix grandeque suadet opus. 

Au reste, ces estampes sont fort mal gravées et surtout fort 
pesamment ; le dessein ny la composition n'en sont meilleures. 
J'ay souvent entendu nommer le maître à la licorne celuy 



173 

qui a gravé les quatre pièces cy à côté (t) apparement parce 
qu'il n'y a aucun nom et qu'on n'en connoissoit pas le 
maistre; cependant il est certain qu'elles sont aussy de Jean 
Duvet, et ne sont pas mieux exécutées que celles de l'Apoca- 
lypse. L'abbé de MaroUes, dans son premier catalogue, fait 
mention de Jean Duvet ou du maître à la Licorne. 

DU VIGEOiN (BERNARD), peintre en miniature, né à Paris, 
mort le 11 avril 1760, âgé de 77 ans. Il est auteur d'une pe- 
tite comédie intitulée : « La partie de campagne, » qui a été 
imprimée en 1738 (1). Et je ne crois pas que ni celte pièce, ni 
les ouvrages de son pinceau lui fissent jamais un grand nom. 

DUVIVIER (JEAN), est né à Liège le 7 février 1687 : son 
père, graveur de la monnoie du prince, avoit dessein de l'éle- 
ver dans la même profession ; mais, aûn qu'il s'y distingua, 
il le mit chez un peintre du pays, où Duvivier prit tant de 
goût pour le dessein qu'il prit la résolution de se faire peintre 
et d'aller en Italie pour y acquérir toutes les connaissances 
nécessaires à cet art. Il vint à Paris n'ayant encore que 23 ans. 
Il ne vouloit que le traverser et il s'y fixa. Il y trouva l'élec- 
teur de Cologne, son souverain, dont il grava la mMaille qui 
commença sa réputation. Il fit celle du maréchal de Villars, 
iuq ne parut pas moins admirable. Il exécuta nombre de 
portraits du Roi , et, comme il dessinoit assez bien, tout cela 
fut fait sur ses desseins. Pendant longtemps il fut employé à 
faire les portraits, que les doyens de la Faculté de Médecine 
sont dans l'usage de faire mettre sur leurs jettons dans le 



(1) Ce sont les n°* 54, 55, 58, 59 du catal. Rob. Dum., t. Y du 
Peint, grav. franç,^ p. 28-29. 

(2) Représentée le 5 juin 1738 sur le Théâtre- Italien. La pièce 
n*est pas de Du Yigeon seul; Antonio Romagnesi y a aussi travaillé. 
(Léris, Dict, des Théâtres.) 



174 

temps de leur décanat. Depuis Varin , aucun artiste ne s'étoît 
autant distingué que lui dans ce talent. Il Tobscurcissoit par 
un caractère dur et peu traitable, qui lui faisoit trouver de 
Tamerlume jusque dans les choses qui dévoient lui faire le 
plus de plaisir. Dans le nombre de ses enfants, qui étoit grand, 
il s'en trouvoit un qui promettoit de le remplacer. Il n'y eut 
rien qu'il ne fît pour y mettre obstacle. Sa réception dans 
l'Académie de 1718, fut suivie de traits de mauvaise humeur 
qui pensèrent l'en faire exclure. 11 osa dire en face à M. Bou- 
chardon, chez M. de Cotte, qui lui présentoit un dessin de 
cet habile homme pour être gravé, qu'il ne le feroit point, et 
qu'il ne feroit rien de bon d'après cela ; c'étoit une politesse 
liégeoise. 

DYGK (ANTONIO van). On dit à Anvers que van Dyck entre- 
prit son voyage d'Italie vers l'année 1621, et cela paroit très- 
vraisemblable (1). 

— Antonio van Dyck étoit en France en 1641 (l'année de 
sa mort). Bellori fait mention de ce voyage et dit jqu'il y étoit 
venu dans le dessein de peindre la grande gallerie du Louvre ; 
mais il ne marque pas précisément l'année. J'ay trouvé une 



(1) On connatt sur Vandyek le catalogue de ses tableaux dans 
Touvrage anglais de Smith, et le beau catalogue des gravures exè^ 
cutées par lui, publié par M. Carpenler, chef de la Print-room, au 
British muséum, sous le titre de Pictorial notices of Van Dyek, tra-* 
duiten français en Belgique, en un vol. in-8°. — Le musée du Louvre 
a acquis à la vente de M. Goddé une collection très-importante de 
notes sur Van Dyck, en flamand et en français, évidemment prises 
par un homme qui avait Fintention d'écrire sur Van Dyck une mo- 
nographie complète, et qui avait extrait des comptes et des pièces 
manuscrites. Ce qui est en français n'est qu'une traduction d'une 
très-mince partie des notes flamandes, dont la seule vue montre 
qu'avec beaucoup de désordres et de répétitions, elles sont trop 
importantes pour ne pas être consultées avec fruit par un futur 
historien de Van Dyck. 



175 

lettre de Vignon à M. F. Langlois dit Giartres, du mois de 
janvier 1641, où il l'invite à le conduire chez van Dyck , qui 
étoit pour lors à Paris. Vignon ne pouvoit avoir un meilleur 
introducteur, car Langlois était intime ami de van Dyck. 

J'ai trouvé ceci écrit à la marge d'un exemplaire de l'Aca- 
démie des Sciences et des Arts de BuUart, lequel exemplaire 
a appartenu à Bachelier, celui de la bibliothèque duquel on 
a un catalogue. 

« J'ai oui dire à feu M. Bordone , peintre génois, que van 
a Dyck, dans le temps de la peste qui régnoit en Sicile et qui 
« l'obligea d'abandonner Palerme, passant sur les frontières 
« du royaume de Naples sans bulletin de santé, y fut arrêté 
(( et condamné aux galères, où étant, il fit quelques portraits 
(c pour le capitaine de la galère, qui en fit un présent au vice- 
« roi de Naples, qui les trouva si beaux qu'il le fit retirer des 
« galères, et le fil travailler à Naples, d'où il vint à Gesnes. » 

— M. Edelinck raconloit ce qu'il avoit ouï dire dans sa jeu- 
nesse, à Anvers, que van Dyck, étant fort jeune et étant entré 
dans le lieu où Rubens peignoit, un jour que ce peintre étoit 
sorti de chez lui , ses camarades se mirent à jouer avec lui, 
ils lui prirent son bonnet, le jettèrent en l'air et le firent mal- 
heureusement tomber sur une peinture de Rubens, encore 
toute fraîche. C'étoit le tableau qui est au maître-autel de 
l'église des Auguslins à Anvers, et l'endroit où porta le bon- 
net étoit le devant du corps de Saint Sébastien. Étourdis d'un 
pareil malheur, et ne sachant comment y remédier, l'un 
d'eux ouvrit l'avis que, puisque c'éloit le bonnet de van 
Dyck qui avoit fait le mal, c'étoit à lui a qui il appartenoit à 
le réparer. Les voilà donc occupés à charger une palette de 
couleurs, on la remet à van Dyck ; on l'oblige de repeindre 
ce qui a été effacé; il le fait avec fermeté, et Rubens, qui s'en 
aperçoit le lendemain et qui se fait dire la vérité, conçoit, dès 
ce moment, les plus grandes espérances de son disciple, et 



176 

lui fait Thonneur de laisser subsister ce qu'il a peint sur son 
tableau. Voilà ce qui m'a été raconté plus d'une fois, et ce 
qui est fort différent de ce qui a élé écrit sur le même sujet 
par M. Descamps. J'avois toujours douté de la fidélité de son 
récit, et je suis présentement convaincu que c'est à celui d'E- 
delinck qu'il faut s'en tenir. L'auteur du nouvel ouvrage in- 
titulé le Peintre amateur et curieux, 1. 1. p. 186, dit précisé- 
ment la même chose. 

— Si l'on excepte les portraits de van Dyck et ses études 
particulières de têtes, ou d'aulres parties, dans lesquelles ce 
peintre est fort correct et fort précis , presque tous ses autres 
desseins de compositions se réduisent à de légères esquisses, 
que l'auteur semble n'avoir fait que pour être entendu de lui 
seul. 11 y cherche à développer sa pensée, se mettant peu r^n 
peine de paraître correct. A travers cependant de ces espèces 
de nuages, l'homme de génie se découvre, et l'on y démêle, 
quand on y veut prêter attention, des pensées neuves et tout 
à fait sublimes. Tel est à peu près le caractère des desseins de 
van Dyck ; ce n'est pas cependant qu'il n'en ait fait aussi 
quelques fois de très-terminés ; la collection de M. Grozat en 
fournit des exemples , et l'on voit même par ses paysages 
qu'il étoit capable, lorsqu'il vouloit s'y assujétir, de dessiner 
avec soin ; mais ses desseins finis sont fort rares. Ceux que 
M. Grozat a tirés de Flandres, et singulièrement du cabinet 
d'Antoine Triest, évêque de Gand, tiennent le premier rang 
dans sa collection. [Catalogm Crozat, pag. 99.) 

— Les Philistins, se saisissant de Samson, à qui Dalila 
vient de couper les cheveux, et qu'elle rejette avec mépris. 
Gravé au burin par Henry Snyers, sous la conduite d'Abra- 
ham Diepenbeke, d'après le tableau de Van Dyck, qui est pré- 
sentement dans la galerie de l'empereur, à Vienne. Abr. à 
Diepenbeck excudit Antuerpiae. — Bellori, p. 462, dit que ce 
beau tableau fut donné h l'archiduc Léopold Guillaume, gou- 



177 

verneur des Pays-Bas, par van Woonsel. — C'est un beau 
morceau; Ton voit que le graveur a été conduit par un 
homme intelligent ; Teslampe fait de l'effet. 

— Le même tableau, gravé en manière noire, à Vienne, 
par Jacob Mannl, sur un dessin fait d'après le tableau par 
Ghristoph Lauch, garde des tableaux de l'empereur. 

— Vierge, en demi-figure, ayant sur ses genoux l'enfant 
Jésus, à qui elle donne à têter, gravé au burin par Pierre 
Glouwet, d'une belle coupe de burin, mais sans esprit. Jean 
Ueyssens pictor ex. Anttierpiœy et dédié par lui au R. P. Phi- 
lippe Voeck ou Foxius, prieur Gommend. de saint Antoine. 
Ce prieur étoit ami de Meyssens. Celui-ci lui a pareillement 
dédié une estampe, d'après Rubens, représentant sainte Ca- 
therine, couronnée par l'enfant Jésus, que tient la Vierge. 

— Vierge en demy corps, considérant son divin fils, qui 
est étendu sur ses genoux, et qui lui tend les bras pour la 
caresser. Gravé au burin, par Henri Snyers, sous la conduite 
d'Abraham Diepenbeke, et mal gravé, mais assez bien con- 
duit. — Un de mes amis, M. Baudouin, capitaine des gardes, 
en a, en 1767, le tableau, qui étoit à l'hôtel de Lassay. 

— La sainte Vierge, tournant les yeux vers le ciel, et te- 
nant sur ses genoux l'enfant Jésus, qui porte la main au 
menton de saint Joseph, et qui le caresse ; demie figure. Gra- 
vé en manière noire, par Jacob Mannl, sur un dessein fait 
par Christophe Lauch, garde des tableaux de l'empereur, 
d'après un très beau tableau de Van Dyck de cette magni- 
fique collection. La suite d'estampes, dont celle-ci fait partie, 
est très rare à trouver. 

— Saint Jean-Baptiste adorant l'enfant Jésus, qui le ca- 
resse. Gravé au burin, à Londres, en 1666, l'année que cette 
ville fut presque entièrement consumée par les flammes, 
d'après le tableau de Van Dyck, qui estoit pour lors dans le 
cabinet de Pierre Lely, à qui la planche a été dédiée, par 

T. II. / 



178 

Richard Thomson. AtTuMui de Joie. eoAp. Londini iempore 
inctndii maximi 1666. Bien exécutée et gravée d'une manière 
fort moelleuse, et n'est pas commune. 

— La sainte Vierge, accompagnée de saint Joseph» auprès 
duquel elle est assise, et ayant entre ses bras l'enfant Jésus 
endormy , figures en demy corps. Gravé au burin» par Schelte 
à Bolswert ; c'est un de ses chefs d'œuvres. *- Dédiée par A. 
Yan Dyck à Theod. Wattmann Yan Dyck, son irère, cha« 
noine Prémontré à| Saint-Michel d'An vers. —Excellente pièce, 
et je préjuge que, pour la gravure, il aura fait un dessein ter- 
miné, ainsi qu'il en avoit agi pour cette belle autre estampe 
de Yierge, gravée par le même Bolswert. 

-^ La sainte Yierge, en demi corps, adorant l'enfant Jésus, 
qui dort couché sur ses genoux, tableaja de Yan Dyck, qui a 
été apporté de Flandres à Rome, dans l'an 1753, et qui est 
actuellement dans le palais du cardinal Neri Corsini, qui en 
a fait graver la planche à Florence, par un peintre nommé 
A. Pazzi, sur un dessein de Jean Dominique Campiglia ; mais 
l'estampe n'est point du tout dans le goût de Yan Dyck. C'est 
dommage; le tableau est, dit-on, très beau, et le parott. 

— La sainte Yierge, regardant son divin fils, qui dort assis 
sur ses genoux, et la tête appuyée sur le bras droit de sa 
mère ; figure dans un ovale. La composition en est agréable 
et me parait appartenir à Yan Dyck ; mais, pour le graveur, je 
n'en puis rien dire. Il y a apparence qu'il n'avoit jamais ma- 
nié le burin lorsqu'il grava c«tte petite planche, tant elle est 
grossièrement gravée. C'est un morceau rare. L'épreuve que 
j'ai a été tirée avant que la planche fut entièrement achevée. 
On n'y trouve gravés aucuns noms d'artistes; elle est, je crois, 
unique. 

— De jeunes anges formant entre eux une danse, à dessein 
de réjouir l'enfant Jésus, qui est entre les bras de sa sainte 
Mère, assise dans un paysage près de saint Joseph. Gravé 



179 

au burin par Schelte à Bolswert: — Le tableau est eu An- 
gleterre; voyez ce qu'en a dit M. Walpole. — Van Dyck Ta- 
voit peint pour un prince d'Orange, et le tableau étoil en- 
core dans le château de Loo lorsqu'on le vendit à l'encan, 
vers Tan 

— Une autre estampe, de la même composition, gravé au 
burin, à Aix, l'an 1698, par Jacques Coelemans, d'après un 
petit tableau du cabinet de M. Boyer d'Aiguille, de l'authen- 
ticité duquel on pourroit douter. 

— Vierge dans le ciel, aidant à l'enfant Jésus à se tenir 
debout sur le globe terrestre, au milieu de deux anges jouant 
des instruments; figures en demy corps, gravé au burin, par 
Pierre de Balliu. Le Bellori fait mention de ce tableau dans la 
vie de Van Dyck, 

— L'enfant Jésus, écrasant sous ses pieds le serpent, et 
ayant derrière lui le globe de la terre renversé, gravé à Lon- 
dres, en 1754, en manière noire, par P. V. B, — Pierre Van 
Bleeck, mort à Londres depuis 1760 — d'après un tableau 
appartenant à A. Vander Gucht. — C'est un extrait du tableau 
précédent. 

— Une estampe d'un tableau, peu différent de ce dernier 
(une Vierge à my corps, regardant le ciel et soutenant entre 
ses bras l'enfant Jésus , est de Paul Pontius , dédiée par Van 
Dyck à Ant. Triest, évèque de Gand), lequel appartient à H. le 
comte de Vence, et est très beau. Il a été gravé au burin, en 
1757, par Emmanuel Salvador Garmona, Espagnol, qui a 
appris à graver chez M. Dupuis. M. de Vence fit la décou- 
verte du tableau chez M. le Camus, ancien président de la 
cour des aydes, et en mourant il l'a légué à M. de Voyer. 

— L'enfant Jésus écrasant le serpent, et s'appuyant sur le 
globe terrestre, auquel il donne sa bénédiction; gravé au 
burin par P. de Jode le jeune, en 1661. Des bonnes choses 
du graveur, mais n'est pourtant pas de sa meilleure manière. 



180 

Dédié par Pierre-Paul Borrekens à sa sœur Claire Christo- 
phorine, religieuse à Lyre. 

— L'enrant Jésus, ayant sous ses pieds le serpent, et s'ap- 
puyant de la mfiin droite sur le globe. Très mal graré à Feau 
forte par G. P. Mensaert, auteur du livre intitulé le Peintre 
iimaletir, et mauvais peintre, d*après un tableau de Van 
Dyck, différent de celui qu'a gravé en manière noire Yander 
Gucht. 

— Jésus-Christ, après avoir guéri le paralytique, luy or- 
donne d'emporter son lit. Les figures qui entrent dans la 
composition de ce sujet sont en demy corps ; il est gravé au 
burin par Pierre de Jode le jeune. — N'est pas de la meilleure 
manière de P. de Jode le jeune. Le tableau actuellement est 
chez le ch*' de Yerhulst, à Bruxelles. Yoy. le Peintre Ama- 
teur, tom. I, p. 62. Dédiée par J. Meyssens à Philippe Toeux 
ou Fox, supérieur de la maison de S. Antoine, à Anvers. 

— Judas trahissant Jésus-Christ, en lui donnant un baiser, 
gravé au burin, avec très-peu de succès, par Adrien Lomme- 
lin. — Ne seroit-ce pas le tableau dont Yan Dyck fit présent 
à Rubens, lorsqu'il partit pour l'Italie ? 

— Jésus^hrist, insulté par un de ses bourreaux, qui lui 
présente un roseau, en demy corps, gravé à l'eau forte, par 
Ant. Yan Dyck qui en est l'inventeur, et terminé au burin, 
par Luc Yorsterman, autant que je le puis préjuger. Ant. Van 
Dyck, invent., sans autre nom de graveur. Autant qu'on peut 
le voir, la planche avoit manqué à l'eau forte. Elle étoit 
trouée, et il a fallu presque l'effacer et la refaire presque toute 
entière au burin, ce qui a demandé de la part du graveur 
restaurateur bien de l'habileté et de la patience. — Quelqu'un 
m'a assuré d'en avoir une épreuve d'eau forte (1). 

(I) La planche est à la calcographie du Louvre, n° 368; elle 
vient de 1 ancienne Académie. 



181 

— Les soldats couronnant d'épines J.-C; d'une compoà- 
tion Irès-riche. Elle est gravée au burin, par Schelte à Bols- 
west ; c'est une des plus parfaites qui ayent été exécutées par 
cet excellent graveur, et c'est en même temps une des plus 
considérables et des plus recherchées de l'œuvre de Van 
Dyck ; mais il faut l'avoir bien imprimée. Il s'en trouve des 
contr'épreuves très bien faites, et c'est une singularité qui 
n'est pas à rejeter; j'en ay une dont je fais cas. Martinus van 
den Enden excudit et Pau'o Halmalio Antuerpiano dicavit.— 
Ce tableau, qui étoit dans l'Âbbaye des Dames, et sur lequel 
il y a un conte qu'a rapporté Descamps dans la vie de Van 
Dyck, mais dont je ne garantirois pas la vérité, a été acheté 
en 1755 par le roi de Prusse, avec deux autres de Van Dyck, 
dont il a payé 20,000 florins. La Pentecôte, qu'a gravée Cauc- 
kercken, en étoit un. Voyez le Peintre curieux, tome IT, 
p- 63. 

— Jésus-Christ portant sa croix au Calvaire. Gravé au bu- 
rin, à Anvers, par Corneille Galle le vieux, dans les dernières 
années de sa vie. — C'est des moindres choses de Corn. Galle, 
et où l'on aperçoit sensiblement de sa décadence; c'est un 
fruit de sa vieillesse.— Le tableau, qui est renommé, est dans 
l'église des Dominicains, à Anvers. Voy. le Peintre curieux, 
tom. I, p. 202. — Ce tableau a été peint par Van Dyck au 
sortir de l'école de Rubens, et tient beaucoup de la manière 
de ce dernier. 

— J.-C. portant sa croix. Gravé par le comte de Caylus, 
d'après un dessein de Van Dyck, qui appartenoit à M. Coy- 
pel. — C* sculpt. Le N<> 99, au haut de la planche, est mis 
pour indiquer que c'est la 99* pièce qu'a gravée le comte de 
Caylus. 

— Les bourreaux élevatnt la croix sur laquelle est attaché 
Jésus-Christ. Gravé au burin, par Schelte de Bolswert. — Ce 
n'est pas une des meilleures choses de Bolswert, quoique d'à- 



182 

près un excellent tableau à Gourtrai, dans l'église de Notre- 
Dame. Voy. le Peintre curieux, tome II, p. 66. 

— Quelqu'un m'assure avoir vu une première épreuve du 
Crucifix de Van Dyck, gravé par Bolswert, où le saint Jean 
pose la main sur l'épaule de la sainte Vierge, que, cette atti- 
tude ayant paru peu décente à des personnes pieuses, celte 
main avoit été effacée, et que cela s'étoit fait très-peu de 
temps après que la planche eut été mise au jour et après 
qu'elle eut tiré un très-petit nombre d'épreuves qui sont de- 
venues très-rares; et il faut que cela soit ainsi, car les 
épreuves que j*ai sous la main sont des plus brillantes et sont 
elles-mêmes rares ; elles portent une dédicace à François de 
Honcade, qui fût supprimée lorsqu'on remit la planche dans 
son premier état, c'est-à-dire lorsqu'on rétablit la main telle 
qu'elle éloit dans Torigine. Dans la suite, sur ce que le mar- 
chand, qui avoit celte planche, vit qu'on recherchoit par 
préférence les épreuves sans la main, il l'effaça sur la plan- 
che, et l'on s'apperçoit très-aisément de la reprise. Voilà ce 
qui m'a été dit ; reste à savoir si cela est vrai (t). J'avois tou- 
jours cru que la planche n'avoit souffert que deux change- 
ments, et que les premières épreuves étoient sans la main, 
ou bien que, sur le rapport qui m'en a été fait, il y auroit eu 
trois changemenls, et qu'on en devroit trouver des épreuves 
de quatre façons. — M. Huquier, qu'on faisoit auteur de cette 
anecdote, m'a dit qu'il ne voudroit pas en être caution. Il 
l'avoit ouy raconter au vieux Eisen ; mais il n'en éloit pas 
beaucoup persuadé, ni moi non plus, et je commence à 
croire que les premières et meilleures épreuves sont celles 
sans la main, avec la dédicace au marquis d'Aytona; que, 



(1) si cela étoit vrai, l*on s'apercévroil des reprises sur la plan- 
che où il n'y a pas la main, et c^est ce qui ne s'y voit pas. (Note 
de MaiieiU de la même écriture que la seconde partie de cet article,) 



183 

peu après, on mit la main et que Ton supprima la dédicace, 
et qu'après on supprima la main , et la dédicace fut remise 
de nouveau; je crois tout le reste une histoire faite à plaisir 
pour la rendre plus intéressante. On dit même que la planche 
fut traduite au tribunal de l'inquisition, et que le graveur 
auroit mal passé son temps s'il ne se fût accommodé aux cir- 
constances en supprimant la main. — Je crois que M. Gayeux 
m'a dit que ce tableau étoit dans l'église de Saint-Michel, à 
Gand. — Cela est vrai ; voyez le Peintre curieux, tom. II, 
p. 39. — Le tableau commence à pâtir ; l'humidité du lieu 
le fera p^rir. Un maladroit a voulu nétoyer ce beau tableau 
et lui a fait pefdre toute sa fleur. Quelle perte et quel dom- 
mage I 

— Jésus-Christ attaché en croix sur le calvaire, au milieu 
des deux larrons; il y a nombre de figures sur la terre, et, 
entre autres, un bourreau qui tient la barre de fer dont il 
s'est servi pour briser les jambes des deux malfaiteurs. C*est 
un des moindres ouvrages de Bolswert. Le tableau est dan* 
l'église des Récollets, à Malines. V. le Peintre curieux, tome I, 
p. 173; leBellori, p. 258, appelle cette église l'église de Saint- 
Fraûçois, mais mal. 

— Des anges recueillant dans des calices le sang de Jésus» 
Christ attaché sur la croix, gravé en manière noire par 
Is. Beckelt. Diaprés le tableau qui est dans la chapelle de Ca- 
therine, reyne d'Angleterre, veuve de Charles second, ainsi 
que le porte une inscription latine au bas de la planche. ~- 
Le Christ est une répétition de celui qui est à Gand, en l'é- 
glise de Saint-Michel. 

— Le corps mort de J. C. détaché de dessus la croix, d'où 
ses disciples le descendent pour le mettre dans le tombeau. La 
sainte Vierge, évanouie, est soutenue par sainte Madelaine. 
Gravée à Dresde, par Laurent Zucchi, d'après un tableau, 
de la même grandeur de l'estampe, qui est dans la galerie 



18& 

du roi de Pologne, électeur de Saxe. Cette planche fut trou- 
vée, par Sa Majesté Polonoise, si mal exécutée, qu'il n*a pas 
voulu permettre qu'elle parût. On m'en a pourtant fait avoir 
une épreuve à cause de sa singularité. Les noms des artistes 
y sont au bas, ainsi que les armes de Sa Majesté Polonoise. 
— Je ne sais trop si le tableau est de Van Dyck, je n'y trouve 
point son caractère, ni sa façon de composer. 

— Les anges pleurant k la vue du corps mort de J. G. des- 
cendu de la croix, et étendu sur les genoux de la Sainte 
Vierge, gravé au burin par Luc Vorsterman avec cette dédi- 
cace : Georgio Gagi Anglo muluœ consueludinis olim in urbe 
(in urbe, se. Romœ.) contractas nunc perpetuum ejus amoris 
argumentum D. C. Q. Ant. van Dyck. Belle pièce. — J'en ai 
vu des épreuves avant la dédicace qui n'a pas tardé à y être 
mise, et aussi avant que le nom excudit fut mis à la suite de 
$culp. 

— Une autre estampe du mesme sujet traité différemment, 
gravé au burin par Schelte de Bolswert. Tableau que l'on dit 
peint dans les principes du Titien. Il est dans l'église des 
Récollets à Anvers. Voy. le Peintre curieux, tora. 1, p. 206. 
Le Bellori en donne la description dans la vie de van Dyck. 
p. 157. 

— Ce mesme tableau gravé à Teau-forte, d'une manière 
fort croquée, par un peintre anonyme et qui n'est pas sans 
mérite. Peut-être L. Françoys. Je l'ai, épreuve et contre 
épreuve. 

— Jésus-Christ porté au tombeau, gravé à l'eau- forte 
par M. Lempereur, le père, d'après un tableau esquisse de 
van Dyck du cabinet du comte de Vence. Mais il est fort dou- 
teux que cette esquisse soit de van Dyck» 

— Le corps mort de J.-C., soutenu par la Sainte Vierge et 
par Saint Jean dans le sépulcre, gravé au burin par C. van 
Caukercken. Une des belles pièces de l'œuvre, dédiée par 



185 

Pbil. vanderMeere» à Josse vander Meere, son oncle, chanoine 
de Tournay. — Ces vander Meere sont sans doute parenls du 
moine Augustin vander Meere, qui procura à van Dyck le ta- 
bleau du Saint Augustin en extase. 

— La Sainte Vierge offrant à Dieu le père le corps mort de 
son fils, qui est couché à l'entrée du sépulcre, et est adoré par 
sainte Magdelaine. Religiosx duœ Annœ van Dyck monasterii 
Facontini Germanae suae ponebat Anl. van Dyck. — Belle 
pièce de P. Pontius, conduite par le peintre même, et gravée 
sur une peinture à huile en blanc et noir, préparée à cet effet 
par le peintre, qui en cela a suivi la méthode de Rubens, son 
maître. — Le tableau, Tun des plus beaux que van Dyck ait 
peint, est au mattre-autel de l'église de Béguinage, à Anvers. 
Voy. le Peintre curieux, tom. I^ p. 22, et la description du 
tableau dans la vie de van Dyck par Bellori, pag. 257. Ce 
dernier prétend que la Magdelaine est un portrait de la sœur 
de van Dyck, qui étoit religieuse dans le Béguinage d'Anvers. 
Hensaert avance que le tableau a été peint peu avant que van 
Dyck passât en Angleterre. — Ces religieuses suivent la règle 
de Saint-Augustin, et leur monastère est à Anvers, peu éloi- 
gné de la maison des Oosterlings. On les nommé Façontines. 

— Le Saint-Esprit descendant sur les apôtres assemblés 
dans le cénacle le jour de la Pentecôte, passablement gravé au 
burin par C. van Caukercken. Dédié à Gérard de Bare, abbé 
de Dunes par Adrien Posseniers. Secundum archetypum ex- 
stans in abbatiâ Dunensi ordinis Cisterciensis in Belgio. — 
Il y a longtemps, comme on voit, que ce tableau étoit dans 
l'abbaye des Dunes, et cela me feroit assez volontiers mettre 
au nombre des fables l'histoire que Descamps a rapportée 
dans la vie de van Dyck touchant ce tableau et celui du cou- 
ronnement d'épines du même peintre. — ^Le roi de Prusse en a 
lait l'acquisition en 1755; voy. le Peintre curieux, t. Il, p. 63. 

— Le Saint-Esprit descendant sur les apôtres; sans nom de 



peiQtre ni de graveur. Gravé au burin par Jacques Lubin, 
d'après un dessin fait sur l'estampe précédente pour un cours 
de bréviaire ^ que mon père a fait graver. 

— Le Saint-Esprit descendant sur les apôtres en forme de 
langues de feu, composition qui, pour le fond, est la même 
que celle du tableau qu'a gravé Cauckercken; il s'y trouve quel- 
ques changements ; mais je les soupçonne avoir été faits par 
celui qui a gravé cette planche au burin. La différence dans la 
manière le décèle , et c'est aussi ce qui fait que cette pièce, 
qui a servi en thèse, ne mérite presqu'aucune considération ; 
elle est gravée au burin. Je pense que c'est mon père qui la 
fit graver. 

— Un groupe de huit personnages, dont deux sont à ge* 
nout et que Ton présume être des disciples de J.-C., se pré- 
sentent devant une femme vêtue d'un long manteau qui lui 
couvre la tête, laquelle peut être la Sainte Vierge. Gravé en 
1782, à Londres, par M. W. Ryland, d'après un dessein de 
van Dyck de la collection de Milord comte de Ghelmondeley, 
par les soins de M. Rogers, amateur anglais, qui a entrepris 
de faire graver, dans le goût du dessein, un nombre de des* 
seins choisis, et cette suite doit parattre incessamment. 1767. 

— J. G. et les apôtres, suite de quatorze pièces, gravées 
au burin par Corneille van Gaukerken. On y trouve assez 
ordinairement les planches de Gaukerken environnées d'une 
bordure d'ornement en forme de passe-partout, gravée sous la 
conduite de Corn. Galle le jeune. — Ces tableaux, suivant B^- 
lori, p. 262, ont été faits pour Charles Bosch, évêque de Gand. 

— St Antoine de Padoue adorant l'enfant Jésus entre les 
bras de la Ste Vierge ; gravé au burin par Gilles Rousselel, 
d'après le tableau qui est au cabinet du roy de France (1). — 



(1) Calcographle du Louvre, nfi 309. 



187 

Rousselet n'étoit pas fait pour graver des tableaux de mattres 
flamands; aussi son estampe ne rend- elle que bien impar- 
faitement les beautés du tableau qu'il a gravé. — Voir récrit 
qui donne la description du tableau dans le livre des tableaux 
du cabinet du roi ; on y apprend, ce me semble, comment le 
tableau est passé en France. 

— St Augustin, évêque d'Hippone, accompagné de Ste Mo- 
nique et d'un religieux augustin, qui considèrent avec luyla 
grandeur de la sainte Trinité et qui s'y perdent. Gravé au bu- 
rin par Pierre de Jode le jeune, d'après le tableau de van 
Dyck , qui est dans l'église des Augustins, à Anvers. C'est un 
de ses plus beaux ouvrages, et l'estampe la mieux exécutée de 
toute son œuvre. — Elle est dédiée par van Dyck à Suzanne 
van Dyck, sa sœur, béguine à Anvers. A . Bonenfant exe. J'en 
ay une superbe épreuve avant le nom de Bonenfant. C'est 
une excellente estampe ; elle est gravée avec un grand art et 
beaucoup d'intelligence, et tout à fait dans la manière de 
Vorsterman. J'ay remarqué déjà quelques pièces dans cette 
mesme manière, où P. de Jode met après son nom ;un., et 
j'ay trouvé qu'elles étoient gravées du vivant de son père, 
qui étoit habile, et qui sans doute dirigeoit le travail de son 
fils ; car toutes les pièces, que je vois gravées depuis sa mort, 
sont bien inférieures à celles-là, et dégénèrent dans une ma- 
nière plus roide ; je ne vois pas qu'il s'y désigne par P. de Jode 
jun., mais seulement par son nom P. de Jode. C'est un fait 
à examiner, car peut-être y auroit-il trois Pierre de Jode ? — 
Non ; il n'y en a eu que deux. — Ant. mn Dyck intj., ce qui 
me persuade qu'elle a été gravée sur un dessin fait par van 
Dyck et non sur son tableau. — L'auteur du livre le Peintre 
amateur prétend que van Dyck avoit peint en blanc la tu- 
nique du saint, et que, pour complaire au moine, il la repei- 
gnit en noir. Si cela est, il auroit suivi dans son estampe sa 
première idée.— Van Dyck, en peignant le S. Nicolas de To- 



188 

lentin, a fait le portrait d'un religieux augustin qui lui avoit 
procuré le tableau. G'estoit le R. P. Vander Meeren, dont le 
nez étoit fait comme une courge — à ce que me disoit 
Yleugheb, qui Tavoit ouy dire mille fois de son père, peintre 
flamand. — J'en ai le dessein original. — Cet excellent ta- 
bleau , que je ne fais point difficulté de mettre à la tète de 
tous ceux qu'a peints van Dyck, fut très-critiqué lorsqu'on le 
vit pour la première fois ; les moines lurent prêts de le reje- 
ter. Ils disoient que leur saint avoit Tair d'un ivrogne, que 
van Dyck lui en avoit donné l'attitude. Il avoit peint sa tu- 
nique en blanc; autre sujet de plainte ; ils la vouloient noire, 
comme celle qu'ils portoient ; van Dyck fut obligé d'y con- 
descendre. Ce ne fut pas tout. Ils firent les gueux, et quoyque 
van Dyck demandât peu, ils trouvèrent que c'estoit encore 
trop cher pour eux. 11 iallut, pour terminer l'affaire, qu'il fît 
présent d'un petit tableau d'un crucifix, qui vaut plus que ce 
qu'il reçut ; il est gardé dans la chambre du prieur. 

— Le même tableau, gravé au burin par Amould Loe- 
mans, en 1642, d'après l'estampe précédente. Dans cette copie, 
qui n'est pas fort excellente, le graveur a tenu noirs les habits 
de St Augustin, de Ste Monique, et du moine à genoux, dont 
il a fait un St Nicolas de Tolentin, et il a dédié la planche au 
P. Jean Martens, prieur du couvent des Âugustins d'Anvers. 

— St Bonaventure recevant la sainte communion qui lui 
est administrée par les anges, gravé au burin par un ano- 
nyme qui a beaucoup de la manière de P. de Balliu. Fr. van- 
den Wyngarde, exe. et le nom du peintre. — Tableau dans 
l'église des Récollets, à Malines. Il en est fait mention dans 
la vie de van Dyck par Bellori , p. 258, et dans le Peintre cu~ 
rieux, tom. I, p. 173. 

— St I>ominique considérant J.-C. crucifié, et Ste Cathe- 
rine de Sienne embrassant le pied de la croix ; gravé au bu- 
rin par Schelte de Bolswert sur un dessein d'Erasme Quelli- 



189 

nus, fait d'après le tableau d'Antoine van Dyck, qui est placé 
à An\ers, dans le lieu où le père de cet habile artiste a reçu la 
sépulture. — Dédié par les religieux dominicains d'Anvers, 
en 1653, au R. P. Norbert van Couwerwen, nouvellement élu 
abbé de St Michel d'Anvers. Il fut élu en 1652 ; voyez Sande- 
rus, Brabantia illustrata. — J'en ai vu une, épreuve sans 
lettres, et ce n'est pas la seule fois que je l'ai vue ainsi. — Ce 
beau tableau se voit dans l'église des religieuses dominicaines 
à Anvers. Van Dyck fit ce tableau et le donna à cette église, 
en reconnaissance de ce qu'on y avoit accordé la sépulture à 
son père. Les mêmes religieuses possèdent l'esquisse de ce 
tableau qui est d'une beauté singulière. Voyez le Peintre cu- 
rieux, tom. I, pag. 198 ; La sainte étant au pied de la croix 
est nommée dans ce livre une Ste Rosalie ; on a voulu dire 
sainte Rose ; mais c'est une faute, il est incontestable que 
c'est une Ste Catherine de Sienne. 

— St François d'Assise, à genoux devant Jésus-Christ, qui, 
de dessus la croix, recommande sa sainte mère à son disciple 
bien aimé. Gravé au burin par Pierre de Balliu, en 1643. Le 
tableau est dans l'église des religieux cordeliers de Lille, à ce 
que m'assuroit M. Cayeux, mais il se trompe ; c'est un ta- 
bleau fameux de van Dyck, dans l'église des capucins de Ter- 
monde. V. le Peintre curieux, tom II, p. 17. L'estampe est 
dédiée par Jean de Heem à J. Caspeels, serrurier, son ami, et 
amateur de tableaux, à Anvers. 

— St François d'Assise debout, considérant dans le ciel une 
croix de lumière qui imprime sur son corps les stigmates. 
St Antoine de Padoue, aussi debout et tenant entre ses mains 
l'enfant Jésus; il fait pendant è la figure précédente. D'après 
les tableaux peints par van Dyck, chez les capucins, à 
Bruxelles. Gravé à Bruxelles par J. L. Kraft, sur le dessin de 
Zorst, en 1758. — J'en ai fait venir d'Anvers des épreuves 
que j'ai payées 10 livres à cause de la rareté. — Les planches 



190 

ont été achetées par le prince Charles de Lorraine, et les 
épreuves n'en deviendront pas plus communes. 

— Le martyre de SI Georges -* le saint, à genoux au 
pied d'un autel sur lequel est la statue d'une fausse divinité 
qui s'écroule, est lié par les bourreaux pour être conduit au 
supplice — représenté dans un tableau placé sur un autel 
décoré d'un ordre d'architecture, gravé au burin par Pierre 
Glouet. — Les noms des artistes y sont gravés ; très-mal exé- 
cuté, et si mal, qu'on ne peut rien de pire. — Je pense que 
c'est le tableau dont il est fait mention dans le Voyageur eu- 
rieux^ tom. I, p. 270, et qui est attribué à Rubens par l'au- 
teur de ce livre et placé dans l'église de StGommaire à Lierre. 
Si cela est, il s'est trompé ; car la composition est dans le style 
de van Dyck. 

-— Le bienheureux Herman Joseph, de l'ordre de PrémoD- 
tré, jouissant de la vue de la Ste Viei^e, qui le choisit pour 
son époux. Gravé au burin par Paul Pontius, d'après le ta- 
bleau qui est dans la chapelle de la congrégation de la 
Ste Vierge dans la maison professe des jésuites, à Anvers. — 
Bellori met ce tableau dans le monastère de St Michel, à An- 
vers ; c'est une faute qui lui est échappée et qu'il iaut corri- 
ger. — Je ne crois pas qu'il soit possible de voir un plus 
beau tableau ni une meilleure estampe. — Ce beau tableau 
est du même temps que celui de St Augustin ; il le ût peu de 
temps après son arrivée d'Italie. — Excellente pièce dédiée 
par van Dyck à Jean Chrysostome vander Steen, abbé de 
St Michel d'Anvers. — 11 venoit d'être élu abbé en 1629. 
Voilà donc le temps où ce beau morceau a été gravé et 
peut-être peint. — J'en ai vu une épreuve postérieure avec 
une inscription différente, la planche étant alors entre les 
mains de Michel Hage, et dédiée par ce marchand d'Anvers à 
Macarius Simeon, abbé de St Michel d'Anvers, les armes de 
ce prélat y étant au bas. 



191 

— SI Martin coupant la moitié de son manteau pour le 
donner à deux pauvres qui le reçoivent à genoux. Dessiné et 
gravé trèsHQQial par J, L. Kraft le fils, et dédié par lui au ba* 
ron de WiUbroeck d'après le tableau de van Djck, le même, 
à ce que je crois, qu'on voit à Salvelthen, près de Bruxelles. 
— Je n'en doute pas , et comme ce tableau est fameux , l'es- 
tampe, toute mauvaise qu'elle est, devient curieuse ; elle est 
rare. 

— J. Boydell a inséré dans le 1" volume de son recueil 
une estampe qu'a gravée Th. Chambars en 1766 et qui vient 
d'après un tableau qui appartient à la princesse royale de 
Galles, et qui lui a été vendu pour être de Rubens. Mais on l'a 
trompé. Ce n'est qu'une copie ou une répétition du tableau 
de van Dyck qui est à Salveltbem et qui représente St Martin cou* 
pant son manteau et en donnant la moitié à un pauvre. On y a 
seulement ajouté une pauvre femme qui tend la main pour de- 
mander l'aumône et qui a entre ses bras un enfant. Du reste, 
il n'y a rien de changé à la composition. Je la restitue icy à 
son véritable auteur. — Salvelthen est marqué sur la carte de 
Robert sur la gauche de la chaussée qui va de Bruxelles à 
Louvain (!].— Le groupe de St Martin et du pauvre a été gravé 
avec très-peu de différence par Corn. Vischerr dans la suite 
des saints de la Hollande publiés par Soulman, et ce dernier, 
en s'en attribuant l'invention, a commis un plagiat qui ne 
lui fait pas honneur. 

— L'apMre St Paul représenté en buste , excellenunent 
gravé en manière noire par A. Blootelingh. La touche du 
pinceau ne peut être mieux exprimée. 11 y a un St Pierre, 
qui fait le pendant du St Paul, et qui n'est pas moins bien 



(1) Voir sur ce tableau, le Musée de Bruxelles j par Fun de nous, 
p. 34-8, et les addilions en tête. Paris, numouiin, 1850, in*8<' de 
52 pages. 



jaune, et dédié par lui à Jean Philippe Happart, chanoine de 
la cathédrale d'Anters. Pièce assez médiocre, mais curieuse ; 
o*est la partie supérieure du tableau que Van Dyck a peint 
pour Palerme en Sicile. Voyez Bellori, p. 357. 

— Une sainte martyre qui tient une palme, et qui, croisant 
les mains sur sa poitrine, adore l'enfant Jésus couché sur les 
genoui de la sainte Vierge; en demy-corps, gravé au burin 
par Schelte de Bolswert.— Moyen tableau, dans une chapelle 
de réglise des Récollets, à Anvers. Voy. le Peintre curieux^ 
tom. I, p. 905. — Excellent morceau ; les premières épreuves 
avant Bon-Enfant exe. — La planche a été gravée sur un dessin 
très-terminé, fait par Van Dyck et qui rappelle ceux que Ru* 
benslui faisoit faire d'après ses tableaux pour les faire graver. 
Il est précisément du même faire ; il appartenoit à M. Grozat, et 
aujourd'hui il est à M. de Julienne (1). — Je l'ai vu avec regret 
passer en Russie. — Dédié à Gaspard Vander Meeren, reli- 
gieux augustin, par Ant. van Dyck, amieiiiœ er§o^ le même 
dont on voit le portrait dans le tableau de St Augustin. Ce fut 
lui qui procura à Van Dyck revenu d'Italie ce beau tableau du 
St Augustin, qui, tant qu'il subsistera, fera l'admiration des 
connoisseurs. 

— L'ange gardien accompagnant un jeune enfant auqutf 
il montre et fait envisager la gloire du Paradis. Au burin par 
un anonyme d'après la planche de Corneille OflUe le jeune. 
De peu de mérite. 11 y a dans la gloire deux têtes de cliéru- 
bins de plus que dans l'original, et toutes deux sont tournées 
différemment. 

— La charité représentée par une femme en demi^^orps, 
qui est environnée de plusieurs enfants dont elle reçoit les ca« 
resses ; gravé au burin par G. van Gaukerken sous la con- 



(i) Qtlftlogue de la vente de M. de Julienne, n* 534. 



195 

duite d*Abmbâiii Diepenbeke. Au bas douze yen flamands. 
Biw eiécuté. *^ J'en ai le dessein. -^ CTest un tableau de 
toute beauté. Le roi Louis XV, étant à Anvers dans le temps 
de la dernière guerre, le vit cbez M« Goubouw avec un tableau 
de Rubens représentant TenlèYeroent des Sabines, qui est au- 
jourd'hui dans le cabinet de M. Boschaert , et en fit ofMr, 
pour les deui, 60,000 liv. Mais la proposition ne fut point 
éooutéei le propriétaire en vouloit avoir 36, 000 fl., argent 
de change de Brabant, en argent de France, 72, 000 liv. ; mi- 
lord Malborough les avoit, dil-il, offerts autrefois. — n a été 
vendu depuis, en may 1764, avec un tableau de sainte Fa^ 
mille de Rubens, 19, 500 fl., argent de change, qui sont près 
de 40, 000 florins de Brabant. 

"*- Une Bacchanale ; on j voit représenté un enfant yvre, 
monté sur uniigre et conduit en triomphe par d'autres en- 
fants qui célèbrent les festes de Bacchus ; gravé au burin à 
Gennes, en 1628, par D. Brunn de Strasbourg, sous la con- 
duite de Corn, de Wael. — Francisco Griroaldo patritio Ge- 
nuenso Picturœ amiratori banc Sileni historiam aeri incisam 
ieni(rii ergo D. dedicatq. Genu», Nov^ 1628. Le nom de 
Van Dy4k tm. sur la terrasse, en place du nom du graveur 
2>. Brunn Àrf^* seul. , qui ne se trouve que sur les premières 
épreuves. Assez passablement exécuté. 

— Une letnme et un jeune homme de la suite de Bacchus 
aidant au père Silène à se soutenir ; figures en demy-corps, 
sans, dans le fonds, le paysage du tableau ; gravé au burin par 
François vander Steen, qui, dans cette première estampe de 
sa façon — - Gonzalo Coques, pictori eximio, devoti sui styli 
pfimiHas D. D. Fr. vander Steen — gravé dans la manière 
de Van Kessel, ce qui pourroit faire croire qu'il en est le dis- 
ciple, d'autant plus que, dans ses autres gravures postérieures 
à celle-ci, ce n'est plus la même manière. 

— Le Temps rognant les ailes de l'Amour, gravé en ma- 



196 

nière noire par quelqu'un qui n'en avoit pas la pratique. On 
trouve à un coin de la planche la marque A Y D [en monogr.) 
qui est celle du peintre , suivie de celle-cy : T V [aussi m 
mon.) que je ne connois pas. Je n'ai encore rencontré cette 
pièce qu'une seule fois. Seroit-ce la marque d'un des Vail- 
lants t Us étoient plusieurs. 

— Le Temps domptant l'Amour et lui rognant les ailes, 
gravé en manière noire par Pierre Schenck, à Amsterdam. 
Mal exécuté, d'après un tableau qui parott être d'une grande 
beauté. — Une estampe du même, qui est présentement chez 
le duc de Malborough à Blanheim, gravé en manière noire 
avec grand soin par Jacques Mac Ardell. 

— Bélisaire réduit à demander l'aumône , tableau qui est 
en Angleterre, et qui appartient aux héritiers de milord Bur* 
lington, qui en fit l'emplette à Paris, et l'acheta prodigieuse- 
ment cher. On peut cependant douter que ce soit un ouvrage 
de Van Dyck. L'estampe a été gravée à Londres par G. Sco- 
tin sur le dessin de J. Goupy, et n'est pas des plus excel- 
lentes. 

— Renaud couché entre les bras d'Armide, au milieu des 
amours, dont quelques-uns jouent avec son épée, et d'autres pré- 
sentenl un miroir à Armide et développent sa toilette ; gravé 
au burin à Anvers, en 1644, par Pierre de Jode le jeune (1). 
Riche ordonnance. Une des bonnes choses de ce graveur, 
mais qui n'approche pas de celles qu*il faisoit dans son pre- 
mier temps. — Joan Caspeel exe. Antuerpiœ et les noms des 
artistes. La qualité A'eques donnée au peintre fait connaître 
que le tableau a été peint depuis que le roi d'Angleterre l'avoit 
fait chevalier. — Ce Gaspel étoit un serrurier d'Anvers qui 



(i) Au Musée du Louvre, n« 44i du catalogue de Fécole flamande, 
par M. Villot. 



197 

avoit un cabinet , et auquel a été dédiée , par Jean de Steen, 
la planche du crucifix. 

— Des soldats jouant aux cartes dans une masure. Ils ont 
en leur compagnie deux paysans. Une vieille femme leur ap- 
porte des pipes, etc. Mauvaise pièce, gravée au burin par 
J. Richer, à Paris. On n'y trouve point le nom de Van Dyck ; 
au bas, huit vers françois. M. de Julienne en a le tableau de 
Van Dyck, qui est très-beau. — M. Walpole a un semblable 
tableau qu'il compte être original. 

— Un ofTicier-général à cheval, courant à toute bride. 
Gravé par le comte de Caylus d'après un dessin du cabinet de 
M. Goypel; n** 81. — J'ai vu un dessein de cavalier, acheté 
très-cher à la vente de Goypel, et encore plus cher à celle du 
duc de Tallard, le tout par caprice. 

— Des têtes, gravées par M. de Caylus, le plus grand 
nombre est mal à propos donné à Van Dyckl J'ai les desseins 
originaux, qui sont de Rubens pour la plus grande partie (1). 

— Ma collection est de plus de 320 portraits sans les 
doubles. 

— J'ai vu un recueil de portraits de Van Dyck de l'édition 
de Martin vanden Enden ; il étoit composé de 83 morceaux; 
je doute qu'il y en ait davantage de cette édition. Il est certain 
que le recueil devint plus nombreux dans la suite, et que ja- 
mais il n'a monté à 100 dans le temps que Vanden Enden la 
publia. — Sur nombre des planches de l'édition de Vanden En- 
den, le nom du graveur n'est pas encore mis ; le même nom se 



(1) « Vîn^t-sept têtes de différents caractères de vieillards et autres, 
trèiB-biep distribuées sur quatre feuilles; elles sont d'une plume 
savante et pleine d'esprit : on les connott gravées par le G. de 
Caylus, sous le nom de Van Dyck ; mais c'est une erreur. » Cat. Ma- 
riette, n^ 1024. Vendues en deux lots; douze furent achetées par 
M. Hall, peut-être le peintre, pour 240 iiv. i sou, et les 15 autres 
299 Iiv. 19 sous, par Boileau. 



IM 

trouve cependant gravé sur d'autres épreuves de ladite édition 
de Vanden Enden, preuve qu'il n'a pas tardé à y être gravé; 
aussi n'y a-t-il aucune différence pour la qualité d'épreuves 
entre les unes et les autres. — Tous les portraits marqués 
V, E., je les ai de l'édition de Martin vanden Enden» et ils sont 
au nombre de 81. 11 y en a, outre cela, 18 gravés par Van 
Dyck à l'eau-forte, qui n'ont jamais été publiés par Vanden 
Enden» mais bien par S. Hendrick ; on y joignoit le portrait 
de Nie. Rococx, et cela faisoit le nombre de 100. 

— Albert, comte d'Aremberg, à cheval, armé de toutes 
pièces, gravé au burin par P. de Balliu. Le tableau, qui est 
un des plus parfaits de Van Dyck, est en Angleterre ; M* Wal- 
pole en parle. 

— La famille entière de Thomas Howard, comte d'Arundel, 
tableau que ce fameux protecteur des arts fit peindre pendant 
son séjour à Anvers en 1643, d'après le dessein qu'en avoit 
préparé Van Dyck, par Ph. Fruitiers , et que le vieux duc 
Edouard de Norfolk, actuellement vivant, a fait graver par 
G. Yertue en 1743. 11 en garde la planche dans un de ses 
châteaux situés loin de Londres, et, comme l'estampe n'a ja- 
mais été rendue publique et qu'il en faut tenir de lui les 
épreuves, elles sont très-rares. C'est un tableau curieux et in- 
téressant. 

— Gui Bentivoglio, cardinal, en buste, peint en 1623, et 
gravé à l'eau forte par Jean Morin (1), — Dans le tableau, qui 
est chez le grand duc, la figure est entière ; Horin n'a gravé 
que le buste, sans doute d'après un tableau. -— Le tableau 
du grand duc se trouve gravé par Picchianti à Florence, et 
c'est peut-être ce que Van Dyik a jamais toit de plus par- 
fait. 



(1) Robe'*t Dumesnil, H, n« 43. 



199 

-— Frère Lelio Blancatcio» commandeur de Halthe, mares- 
chal de camp général dans l'armée d'Espagne; gravé au bu- 
rin par Nie. Lauwers (1). Je pense qu'il faut lire Brancaccio. 
Les noms de plusieurs personnes sont défigurés dans les ins- 
criptions que Van Dyck a fait mettre au bas de leurs portraits. 
Il les a écrits comme il les entendoit prononcer; il iaudra 
faire attention à cela. 

— Henry du Boys et Hélène-Éléonore deSieveri, sa lemme. 
Ces deux portraits, gravés au burin par Corneille Visscber, 
sont fort rares. — Les tableaux ont passé dans ces demie» 
temps, avec les planches, en Angleterre. Hilord Somm^rs les 
acheta» et fit graver au bas des planches que oes deux por- 
traits faisoient partie de sa collection. A sa vente, les plan- 
ches furent achetées par Cooper, marchand d'estampes à 
Londres, qui les a et les vend ; ainsi ces deux pièces, de rares 
qu'elles étoient, sont devenues communes; mais les premi^ 
res épreuves avant le nom de Cooper seront toujours rares et 
recherchées. 

— Jean Breughel d'Anvers, peintre de fleurs et de paysa- 
ges, gravé par Van Dyck lui-mesme (2)« Ce portrait, peint par 
Van Dyck et l'un de ses meilleurs ouvrages, est placé au- 
dessus de l'épitaphe de J. Breughel, dans l'église de Saint- 
George à Anvers. Voyez Descamps, Voyage pittoresque. 

— Jacques de Cachopin, curieux de tableaux à AnvMS, 
gravé par L. Vosterman (3). J'ai le dessein original d'après 
lequel a été gravé ce portrait de Cachopin ; il a été fait ra 
1634, et c'est un chef-d'œuvre. 

-^ Portrait de François-Thomas de Savoye, prince de Cari- 



Ci) Calcographie du Louvre, n» iOQ5. 
(2] Calcographie du Louvre, n* 4020. 
(3) Calcographie du Louvre, n® 4034. 






^m1% 



200 

gnan, gravé par Paul Pontius (1). Le tableau est chez S. A. le 
prince Eugène de Savoye à Vienne. 

— Charles !•' représenté debout et revêtu de l'habit et du 
manteau royal. La planche, gravée avec tout le soin possible 
en 1T70 par Robert Strange (2), vient d'après un petit tableau 
de Van Dyck qui lui appartient, qu'il a découvert à Rome, et 
qui est en petit la même chose que ce qui a été peint en 
grand par le même Van Dyck, et dont on voit le tableau à 
Hamptoncourt. 

— Le roi d'Angleterre Charles l« en armure et monté sur 
un beau cheval blanc. Il est accompagné d'une personne à 
pied qui porte son casque. L'inscription au bas de la planche 
dit que c'est le duc d'Espernon, et en effet on lui voit un 
ordre qui parott celui du Saint-Esprit. Cependant M. Walpole, 
dans ses Mémoires sur la vie de Van Dyck, dit que c'est un 
écuyer du roi, et il le nomme M. de Saint-Antoioe, ce qui me 
parott plus vraisemblable; car comment un homme aussi fier 
que M. d'Espernon auroit-il souffert de se voir peint, même 
auprès d'un roi, dans la posture d'un domestique? Ce tableau 
est encore dans le palais de Kensington. L'estampe en a été 
gravée par R. Raron en 1741 • — Le même tableau avoit été 
gravé par Lombart, qui depuis l'a fait servir à Cromwell, et 
il faudra faire connottre tous les changements qu'a éprouvés 
cette planche. 

— La Famille du roi Charles I«. — Le tableau original de 
Van Dyck, qui est dans le palais de Kensington, a été gravé 
pour la première fois par Rob. Strange à Londres en 
1758 (3). C'est dommage que le travail du graveur, qui est 



(i) Calcographie du Louvre, n® 4099. 

(2) N» 46 du catalogue spécial de Slrange, par M. Ch. Le Blanc. 
Leipsic, VITeigel, 1848; in-8. 

(3) M*» 49 du catalogue de Strange, par M. Ch. Le Blanc. 









/ . 



J 



204 

d'un froid à glacer, rende si mal la touche spirituelle du 
peintre. — Le même tableau a été gravé depuis en manière 
noire, mais l'estampe de Strange est préférable. 

— Don Charles Goloma, mestre de camp général dans les 
Pays-Bas, au service de l'empereur, gravé par Corn. Galle le 
jeune. C'est ainsi qu'il feut écrire le nom de cet officier géné- 
ral, et, non ainsi qu'il est gravé sur la planche, de Columna (1). 
Il n'étoit point de la famille des Colonnes. C'étoit un Espagnol 
qui a figuré dans le xvi® siècle, et qui allioit à la science des 
armes celle du cabinet et celle des lettres. On a de lui une 
histoire des guerres du Pays-Bas, que cite Fem. Strada dans 
la sienne, et dont il s'est beaucoup aidé. Il fut aussi envoyé 
en Angleterre pour y signer le traité de paix en 1630. 

— Kenelrae Digby, chevalier, un des premiers courtisans 
de Charles I«'; gravé au burin par Rob. van Voerst (2), La 
lettre de Van Dyck, écrite h F. Junius, qui se trouve imprimée 
dans le livre De ptctarâ veterum (3), nous apprend que Van 
Dyck venoit de faire graver le portrait de Digby, et qu'il étoit 
prêt de le rendre public en aoust 1636. Le mot de la devise : 
ImpaxAdum ferient est, suivant toutes les apparences, de la 
composition dudit Junius ; du moins Van Dyck lui en fait la 
demande dans sa lettre. Je fais cette remarque pour montrer 
que la suite des cent portraits de Van Dyck a été gravée de 
son vivant, et que, lorsqu'on les gravoit à Anvers, il étoit à 
Londres, d'où il envoyoit les desseins de ses tableaux ; car, 
c'est encore une observation à faire, presque tous ces por- 
traits n*ont été gravés que sur des desseins ou des grisailles. 



(i) Si Mariette ne parie pas de la planche de Pontius (Calcof^ra- 
pbie du Louvre, n^' 4100) la même observation 8*y applique. 

(2) Galcographie du Louvre, n" 4100 bis. 

(3) La lettre est en flamand. Ed. in-f« de Rotterdam, 1694, feuil- 
let 17. Elle est datée de Desen, 14 août 1636. 



lOf 

— 1£$ portraits de Van Dyck et de Rubens dans la même 
planche, gravés par Pontius; les accompagnements, qui sont 
du dessein d'Erasme Quellinus, me paroisseot gravés par 
Lauwers* 

— Portrail de ce célèbre peintre (Van Dyck), qui s'y est re- 
présenté en demy corps, montrant d*une main une chaisne 
d'or, et de l'autre un tournesol ; gravé à l'eau forte à Londres en 
1644 par W, Hollar. Le tableau est chez 8. A. le prince Eu-*- 
gène à Vienne; il est d'une grande beauté. 

— Corneille Vander Geest, curieux de tableaux à Anvers, 
gravé par Pontius (1). M. Crozat avoit le dessein sur lequel ce 
portrait de Vander Geest a été gravé \ M. de Tessin l'a em- 
porté en Suède. 

— La Famille du chevalier Balthazar Gerbier, gravé en 
1766 par GuilL Walker pour le premier vol. du Recueil de 
BoydelU d'après un tableau qui est attribué à Ant. van DydK, 
et qui appartient à la princesse douairière de Galles. Il s'est 
élevé bien des disputes à Londres par rapport à ce tableau» 
non-seulement pour déterminer quelle pouvoitétre la famille 
qui y étoit représentée, mais encore pour s'assurer s'il étoît 
véritablement de Van Dyck, d'autant plus qu'il y avoit un 
autre tableau dont on a une estampe de Mac Ardell, qu'on 
sçavoit être iDcootestablement de Rubens, et dans lequel on 
voyoit la femme et les quatre enfants qui font le groupe 
principal du tableau de la princesse de Galles. 11 ne fut pas 
difficile de décider que c'étoit la famille de Gerbier ; il y avoit 
des preuves de reste, et, si l'on vouloit être de bonne loi, on 
ne s'obstineroit pas à mettre sur le compte de Van Dyck un 
tableau qui n'en est pas digne; car, de l'aveu même de ceux 
qui en sont les plus grands partisans, tout ce qui s'y trouve 



(1) Caicographie du Louvf^» n*' 4047. 



20S 

de plus que dans le lableau de Rubens, c'esl^-<liTe la figure 
de Gerbier et celle des cinq enfans qui remplissent le côté 
gauche du tableau, sont mauvaises» et n'ont jamais pu appar- 
tenir à Van Dyck. Mon sentiment est que le tableau est de 
Gerbier ou de quelque peintre médiocre qu'il auroit employé 
pour peindre toute sa lamille, et que celui-ci, trouvant le 
grouppe de Rubens tout à fait propre à entrer dans sa com- 
position, s'en sera servi sans difficulté, et, dans ce cas là, ce 
n'est qu'un mauvais tableau qu'on a fait achetter cher à la 
princesse auquel il appartient, et c'est ainsi que les princes, 
qui ne sont pas obligés de s'7 connottre, sont trompés si sou- 
vent. Il iaut voir ce que M. R. Walpole a écrit au sujet de ce 
tableau dans ses anecdotes de la peinture, etc. 

— Le portrait d'un homme de guerre en armure avec 
l'ordre de la Jarretière pendu à une chaîne et attaché à son 
col. 11 a de longs cheveux plats, est de trois quarts, en demie 
Qgure, et la main appuyée sur un bâton de commandement. 
Gravé à l'eau-forte par L. de Châtillon. L'épreuve que j'ai est 
sans nom, et je ne puis dire de qui est ce portrait, que je 
n'ai vu qu'une fois. — Seroit-ce le prince Robert dans sa 
vieillesse? — Non. — Il m'en est passé par les mains une 
épreuve où l'on avoit fait écrire au bas par une fort belle 
main : a Jacques, duc d'Hamilton, chevalier de l'ordre de la 
Jarretière, général de la cavalerie de Charles !•', décapité à 
Londres en 1646. » Voilà une confirmation de ce qui m'avoit 
été dit autrefois, et qui m'avoit fait écrire la même chose sur 
mon épreuve. — Cela n'est pourtant pas vrai. Après un très- 
mur examen j'ai reconnu que c'étoit le portrait de Guillaume, 
duc d'Hamilton, né en 1616$ qui, ayant suivi le parti de 
Charles P', reçut à la bataille de Worcester des blessiiïes 
dont il mourut le lendemain ^ en 1652. Le portrait du même 
seigneur, avec ses cheveux plats, se trouve gravé par R. 
White. 



20& 

— Guillaume Hondius, graveur à La Haye, gravé par luy- 
mesme (1). Ge portrait foit regretter qu'il y ait si peu d'ou- 
vrages de lui ; est-ce qu'il seroit mort Jeune? — Je pense que 
c'est lui qui a gravé en Pologne» où il avoit été attiré, et où 
je crois qu'il est mort. 

— Christophe vander Lamen, d'Anvers, peintre, gravé par 
Pierre Glouwet (2). De Bie, qui lui donne place dans son Ca- 
binet doré, le nomme Vander Laenen, et le qualifie de peintre 
de sujets de conversations; il est ici désigné ^rconsortisju- 
vmxlispictcr. 

— François Langlois, dit de Ghartres, parce qu'il y esloit 
né, marchand libraire et d'estampes à Paris, en 1645, con- 
temporain et ami de Van Dyck, représenté en demy corps 
avec une cornemuse, dont il avoit le talent de jouer dans la 
dernière perfection ; gravé à Teau-lorte par Jean Pesne (3). 
— Le tableau original est chez M. le président de Maisons, 
1730. — Portrait différent de celui du même libraire, gravé 
par Nie. Poilly, d'après un petit portrait de boette de poche 
qu'avoit M. Grozat (4). 

— Philippe le Roy, seigneur de Ravels, curieux de ta- 
bleaux; les draperies sont gravées au burin par L.Yosterman 
et la teste par Paul Pontius. — J'en ai nombre d'épreuves 
sur lesquelles il faudra faire des observations. — La planche 
estoit originairement gravée par Vosterman; sa marque pa- 
roist encore dans le fonds au-dessus de l'épaule gauche, 
quoi qu'un peu effacée, et Ton remarque aisément dans les 



(i) Calcograpbie du Louvre, n* 4,0i9. 

(2) Calcographie du Louvre, n*" 4,056. 

(3) Robert Dumesnil, tome III, n^ 97. 

(4) Robert Dumesnil, t. II, p. 245, n» 34. — Immédiatement 
au-dessus de cette note, Mariette avait écrit dans Fentreligne, et en- 
suite efface celle mention : « Le portrait de mon bisayeul, P. Ma- 
riette ce qui ferait supposer qu'il avait été peint par Van Dyck. » 



205 

premières épreuves la place de ce qui a été eflacé, c'est-A-dire 
la teste et le rabat ; cela n'est pas si sensible dans les secondes 
épreuves que Paul Pontius a retouchées, et repassé les tailles 
pour accorder : apparemment que le portrait qu'avoit gravé 
Yosterman ne s'estoit pas trouvé ressemblant et qu'on le fit 
refaire par Pontius (1). 

— Marc-Antoine Lumague, banquier et curieux de pein- 
tures à Paris, en demy corps, gravé au burin par Michel 
Lasne. Le tableau est chez M. Crozat le jeune, à Paris. — La 
tête séparément gravée par Suzanne Silvestre. 

— Lazare Maharkysus, médecin d'Anvers, figure assise 
gravée en manière noire, très^bien, par Seb. Barras (2). M. Cro- 
zat avoit ce tableau. 

— Jean Malder, évesque d'Anvers, en demy corps, gravé 
à Teau forte à Anvers en 1645 par Wenceslas HoUar (3). Le 
tableau est à Paris chez M. Crozat le jeune, — et à présent 
chez M. de Thiers. 

— JUonêieur de Nys — je crois François de Nys, peintre 
de portraits, dont quelques-uns ont été gravés par Paul Pon- 
lius — amateur, inscription manuscrite que j'ay trouvée au 
bas d'un portrait en manière noire; gravé par Walerant 
Vaillant, d'après Van Dyck, lequel représente un homme 
en demie figure dans son cabinet. De la main gauche il s'ap- 
puye sur le bras de sa chaise, et tient de Tautre un compas 
qu'il a posé sur une table chargée d'estampes, d'instruments 
de musique, d'un buste, etc. 

— Anthonius van Opstal, Bruxellensis, pictor iconum, et, 
au bas : Anthonius van Dyck pinxit. Sans nom de gra- 



(1 } Mariette avait un croquis de la tête, à la pierre noire, n^ 905 
de son catalogue, acheté 48 liv. par S. Hubert. 

(2) Robert Dumesnil, t. IV, n^U, p. 245. 

(3) Calcographie du Louvre, n<> 4,117. 



206 

veur (1) I ell0 est assez bien exécutée, et peut être d'un pein- 
tre nommé Slooade. 

•— La Famille de Philippe, comte de Pembroke, qui passe 
pour le plus beau tableau de ce genre qu'ait peint Van Dyck. 
11 se Toit à Wilton, château appartenant à la famille de 
Pembroke (2). Le comte et son épouse, assis sur une estrade, 
sont environnés de tous leurs enflins ; on ne peut désirer rien 
de plus riche pour la composition. Le tableau a été gravé en 
1746 par Bern. Baron, mais pas aussi bien qu'il le mérite, n 
y en a un tableau en petit chez M. le baron de Thiers, qu*on 
estime estre une copie faite par Pietro Lely. 

— Philippe IV, roi d'Espagne, représenté armé de toutes 
pièces et à cheval, sous l'arcade d'un arc-de-triomphe, à la 
clef de laquelle arcade est le portrait de l'empereur Charles V, 
dans une bordure ovale portée par deux lyoos. Gravé par 
Pierre de Jode en 1660, à l'occasion de la paix des Pyrénées. 
Le cheval est précisément le même que monte Charles 1^ 
dans le tableau qu'a gravé Lombart; mais la figure du roi 
n^est pas la même. Les accompagmmens, qui sont assez 
mauvais, n'appartiennent pas à Van Dyck; ils sont d*un 
nommé Pet. Cocus, qui s'en dit Tauteur. La gravure est de 
Pierre de Jode le jeune. 

*- Le même portrait de Pontius, gravé par Van Dyck (3), 
a été gravé en manière noire, d'après le tableau qui est en 
Angleterre, par Jacques Warton, en 1764. 



(1) Calcographie du Louvre, n» 5063. Antoine Van Opstal est 
le père de Gérard, sculpteur, qui a été de rAcadémie en 1648, et 
qui a tant travaillé en France. 

(2) Pour les noms des différents personnages, représentés dans 
ce tableau, voyez Aides Pembrochianas, a new account and des- 
cription of the statues. . . . paintings. . . . aud other antiquities 
and curiosities in Wilton House, 1784; in-8<», 10« édition, p. 69. 

(3) Calcographie du Louvre, n° 403 t. 



Jd7 

— Nicolas Rockox, conseiller de la ville (TAïivers, en demy 
eorps et assis dans son cabinet ; gravé au burin par Luc Vos- 
terman. Le tableau est chez M. Watelet [i). 

— Nicolas Roekox, ancien bourguemestre d'Anvers, en 
boste dans une forme ovale; gravé au burin par Pontius en 
1639 (2). — Il y en a des premières épreuves sans nom de 
peintre. -^ 11 passe pour estre de Vaii Dyck ; mais d'autres 
le croyait de Rubens et avec plus d'apparence. Les premières 
épreuves B. de Neyt eœc. portent le nom de Rubens ; à celles 
où n'est plus le nom de Neyt on trouve le nom de Van Dyck. 

— Conrad Ruten, chevalier écossois, surnommé le Roux, 
en demie figure. Gravé par Jacques Coelemans d'après un ta- 
bleau du cabinet de Boyer d'Aiguilles. Le nom de Van Dyck, 
qui se lisoit sur cette planche, quand elle a été mise au jour, 
a depuis été effâcé ; l'on y a substitué celui de Bronchorst, et 
je crois qu'on l'a fait avec connoissance de cause. 

— Corneille Sachtlaven, peintre hollandois, gravé par Luc 
Voslerman (3). J'ai le dessein original de toute beauté sur le- 
quel la planche a été gravée ; ce n'est pas un ouvrage qui 
lasse honneur à Vosterman, surtout ayant sous les yeui un 
aussi beau dessein que celui-ci à imiter. 

-T Jean Snellincx, peintre de cartons pour tapisseries à An- 
vers; gravé par Van Dyck (4). On voit son épitaphe daqs l'é- 
glise de Saint-George à Anvers, dans laquelle on lui donne la 
qualité de peintre de l'archiduc Albert et de l'infante Isabelle, 
et ce momiment est accompagné du portrait de SneUincx 
peint par Van Dyck, le même qu'il a gravé. 



1 ■ "> ' 



(i) Ne figure pas dans le catalogue de la vente faite eu 1796 par 
Paîllet. 



(9) Galcographie du Louvre, n° 4127. 
(a) Galcographie du Louvre, n'' 4091. 
(4) Galcographie du Louvre, &<" 4079. 



208 

— Diodore Tulden, professeur de jurisprudence dans TU- 
niversité de Louvain, graté par P. de Jode le jeune (1). J'en 
ai le dessein, qui est bien beau (2). 

— Robert Yan Yoerst, graveur à Londres, gravé au burin 
par luy-mesme. J'en ai le dessein, qui est une merveille 
d*art (3). 

— Paul de Vos, peintre de chasses à Anvers, il y en a ici 
trois épreuves, dont la première est telle que la planche est 
sortie des mains de Van Dyck ; la seconde est racbevée à l'eau- 
forte par Jean Meyssens, et la troisième est entièrement ter- 
minée au burin par Schelte à Bolswert. J*en ai le dessein de 
Van Dyck (4). 

— Jean Vander Wouwer, du conseil de guerre et des fi- 
nances des Pays-Bas, gravé au burin par Paul Pontius (5). 
Il y en a deux tableaux à Paris, qu'on prétend estre tous deux 
originaux : l'un chez H. de Julienne (6), que je crois l'origi- 
nal ; l'autre chez M. de Massé. 

«^Petit portrait d'une dame en corset, ovale; buste sans 
nom ; sur mon épreuve étoit écrit de la main même de P. Pon- 
tius : M^ Elisabeik BUmde; A. Van Dyck, pin.; P. Pmaiu$, 
seulp. C'est peut-être la femme ou la fille de Biichel Le Blond. 



(1) Galcographie du Louvre, n* 4,136. 

(2) N*» 903 de son catalogue. Vandu 445 livres. Maintenant au 
Louvre ; il a été grave de nouveau en fac-dmile, par Alph. Mas- 
son, n? 371 de la calcographie. 

(3) N° 907 de son catalogue. Vendu 176 livres. Gravé de nou- 
veau en fac simile, par Alpnonse Leroy. H^ 373 du catalogue de 
la calcographie. 

(4) N<* 905 de son catalogue ; acheté 24 livres par Tersan. 

(5) 4,138 du catalogue de la calcographie. 

(6) N«> 123 du catalogue de la vente faite en 1767 : a Un portrait à 
mi-corps, que Ton croit être celui d'un baron allemand; sa tête 
est nue, garnie de petits cheveux; il porte à son col un rabat et 
un manteau un peu ouvert qui laisse voir un rouleau de papier 
dans sa main droite. Ce tableau, peint avec vigueur, est d*un 
beau fini ; on le cite au rang des bons portraits de ce mattre. » 



209 

— Portrait anonyme d'une dame, en buste, gravé à l'eau- 
forte par L. Ferdinand. J'ai vu entre les mains de M. R. Wal- 
pole le tableau d'après lequel cette pièce a été gravée. M. le 
prince de Valentinois venoit de lui en faire présent. On croit 
que c'est une des filles de Charles !•'. 

— La comtesse douairière d'Exeter, gravée au burin par 
GuiUaume Falthome, d'après le tableau qui est dans le cabi- 
net de M. Richardson, en Angleterre; il en fait une très- 
ample description dans son traité de la science de la criti- 
que (1). — L'estampe est rare, même en Angleterre. — 
Comme cette dame manquoit de sourcils, ce qui faisoit une 
difformité, Van Dyck, pour la sauver, a fait tomber son voile 
jusques sur les yeux. M. Walpole m'a appris cette particula- 
rité. — M. Walpole a le tableau, qu'il a eu à la vente de 
Richardson. 

— Marguerite Lemon, angloise, célèbre par ses aventures 
de galanterie, en demy corps ; gravé à l'eau-forte par Wen- 
ceslas HoUar en 1646. Cette femme fut maîtresse de Van 
Dyck, et si passionnée dans ses amours, qu'ayant appris le 
mariage de Van Dyck avec Marie Ruten, elle prit la résolu- 
tion, pour se venger de Tinfidélité de son amant, de lui cou- 
per le poignet, afin qu'il ne pût plus exercer son art. Mais, ce 
dessein ayant avorté, elle passa en Flandre avec un nouvel 
amant, qui, ayant péri à l'armée, elle se tua elle-même de 
désespoir d'un coup de pistolet. Il faut être instruit de ces 
faits pour bien entendre le sens des vers françois qui sont au 
bas de son portrait gravé par HoUar. 

DYCK (DANIEL van) ou plus tost Van den Dyck, car c'est 



(i) Voir rëdilion des œuvres de Richardson. Amslcrdam, 1728 ; 
in-8, tome II, p. 30-41. 

T. II. n 



110 

ainsi qu'il écrit lui-inéme son nom au pied d'une ésset belle 
estampe qu'il a gravée; il avoit épousé une des filles de Ni- 
colas Renieri, peintre flamand, éiably à Venise. Mal à pro- 
pos le P. Otlfludi en fail-il un François. Il étoit Flamand; son 
nom seul le dit, et ne permet pas d'en douten 11-étoit à Man^ 
toue en 1660. 

— La Ste Vierge tenant l'enfent Jésus qui se jette à son col*. 
La Vierge tourne la léle d'un autre c6lé, et l'enfant test à peu 
près dans la même intention que dans le tableau, dont il 7 a 
une estampe gravée par Waumans. Je ne voudrois pourtant 
pas assurer que celte petite pièce, qui est très-joliment gra- 
vée à l'eau-forte, fût d'Ant. van Dyck. On y lit sur la plan- 
che : D. F. Dyck in. et fe (1). Cela voudroit dire que c'est un 
ouvrage de Daniel van Dyck qui a demeuré à Venise, et qm 
n'éloit rien au chevalier Antoine. Le morceau est rare, et 
tient beaucoup, par rapport à la touche et au maniement de 
la pointe, d'utoe autre petite vierge gravée à Teau-forte. — 
La pièce à lagueile MaritUe fait allusion est ainsi décrite par 
lui : La Ste Vierge présentant à tetter à l'enfant Jésus qui est 
couché sur ses genoux. Elle est en demy corps, et derrière est 
St Joseph qui lit dans un livre; gravé à l'eau-forte par un 
anonyme, avec esprit. Antoine van Dyck inv. Gravé d'une 
pointe légère et spirituelle. C'est en tout la même composi- 
tion que ce qui a été gravé par P. Clouvet avec cette diffé- 
rence que les testes ne sont pas des portraits comme dans 
cette dernière. 

DYCK (floris van) de Harlem, n'est connu que par le 



(1) N<> 2 du catalogue de Tœuvre de Daniel Vanden Dyck dans 
M. Robert Dumesnil, t. III, p. 16-8. Il n'a pas compris la pièce sui- 
Vunle; et d après la description même de Mariette, il est évident 
qu'elle ne se rapporte pas à Dan. Van Dyck; 



Mi 
pe^k qu*ft dît à sa louange Scriverius, historien de Harlem, et 
n6n Schrevelius, ainsi que l'a écrit Descamps. Il y a a|>pa- 
rence que ses talents le rendoient digne de l'éloge qu'en a fait 
60Û compatriote. Josepin, avec lequel il étoit lié d'amitié, en 
faisoit un si grand cas qu'il lui envoya en présent son por^ 
traita et par un retour de reconnoissanee le peintre h<dlan- 
dois prit soin de le faire graver par J. Maiham, et d'y ajouter 
des vers latins qui nous apprennent toutes ces particularités. 
Voyet Dn^scampsi 1. 1, p. 46» 

EDELINCE (gérabd). Quoyque Gérard et Jean Edelinck 
soient nés à Anvers^ dans les Pays-Bas, qu'ils y ayent appris 
les premiers éléments de leur art, et qu'ainsy ils semblent 
devoir estre mis au nombre des graveurs flamands, la France 
a pourtant droit de se les approprier, et ce seroit même luy 
faire une espèce de larcin que de les luy vouloir enlever. 
Lorsque ces deui artistes vinrent s'y établir, ils étoient fort 
jeunes $ h peine étoient-ils connus par leurs ouvrages. Il y a 
mesme apparence que, s'ils fussent demeurés plus longtemps 
dans leur patrie, les occasions d'exercer leurs talents leur au- 
roient pu manquer, au lieu que la France leur en préseoloit 
de très-favorables. Les arts y florissoient alors avec éclat. 
Jean-Baptiste Golbert, ministre d'état, à qui le roy en avoit 
confié l'intendance et celle des manufactures^ recherchoit 
avec soin ceux qui se distinguoient dans leurs professions; il 
répandoit abondamment sur eux les récompenses et les hon- 
neurs, et les pays voisins se dépeuploient tous les jours d'ar- 
tistes qui venoient chercher auprès de luy une fortune et 
plus solide et plus brillante. Ce fût dans ces heureuses cir- 
constances que les deux frères Edelinck arrivèrent à Paris. 
Jean Edelinck y vint le premier. Gérard, son frère, qui estoit 
son aisné, l'y suivit de près, et l'on peut remarquer comme 
une drconstance toute singulière qu'il eut à travailler dès le 



212 

jour mesme de son arrivée; mais, lorsqu'il eut trouvé le 
moyen de se faire connotlre de Charles Le Brun, premier 
peintre du roy, il eut alors de quoy satisfaire abondamment 
le désir qui le possédoit d'acquérir de la gloire. Il étoit déjà 
très-habile dans son art, et ce célèbre peintre, très-bon con- 
noisseur en fait de mérite, n'eut pas de peine à s'en asseurer. 
Pouvoit-il luy donner des signes moins équivoques de son 
estime qu'en luy proposant de graver pour le roy la famille 
de Darius aux pieds d'Alexandre, tableau où il avoit déployé 
tout son sçavoir et qui avoit été si fort goûté de toute la cour? 
La grandeur de l'entreprise, la difDcuUé de bien exprimer 
sur chaque visage les expressions que l'on admiroit dans l'o- 
riginal, n'arresièrent point Edelinck; elles ne servirent qu'à 
l'exciter davantage, et en effet le désir de réussir luy Ut ap- 
porter tant de soins dans son ouvrage que cette estampe suffit 
seule pour Ifaire juger de sa capacité. Rien n'y est négligé; 
chaque objet y est traitté de la manière et dans le goût qui 
luy convient, et il y règne une suavité de tons soutenue par 
une couleur brillante , que l'on ne rencontre point ailleurs. 
C'est que Gérard Edelinck travailloit avec tant d'aisance, que 
ce qu'il gravoit il le faisoit presque toujours au premier coup, 
sans être obligé d'y revenir comme la pluspart des autres 
graveurs. G'étoit un don de la nature , et ceux qui l'ont yen 
travailler étoient surpris de la facilité avec laquelle il prome- 
noit son burin sur le cuivre. De là le grand nombre de pièces 
que l'on voit de luy, dont il n'y en a aucune qui ne soittrès- 
terminée, et qui toutes cependant sont gravées au burin, 
manière qui est d'ailleurs si peu expéditive. Une bonne par* 
tie consiste en portraits d'hommes illustres parmi lesquels il 
s'en trouva d'une beauté singulière. Gérard Edelinck avoit 
succédé aux biens de Nanteuil, dont il avoit épousé la niepce, 
et il avoit en mesme temps hérité de la réputation que celuy- 
cy avoit acquise dans ce genre d'ouvrages. Le roy de France 



213 

luy avoit accordé la qualité de son premier graveur, et, le 
jour qu'il fut reoeu de TAcadémie royale de peinture, on luy 
décerna dans la mesme séance le titre de conseiller de cette 
Académie, honneur que Ton n'avoit encore fait à personne (1). 
Gérard et Jean Edelinck avoient un troisième frère à qui ils 
avoient appris la graveure; mais, comme il y faisoit peu de 
progrès et qu'il luy survint d'autres occupations, il l'aban- 
donna de bonne heure. 

Il est à propos de remarquer que, pour éviter les redites, 
les pièces où l'on ne spécifiera pas le nom du graveur seront 
celles gravées par Gérard Edelinck, et l'on observera le con- 
traire à l'égard de celles qui le sont par son frère. 

— Le Déluge, gravé d'après Alex. Veronèse. Des tableaux 
du roy. Ce fut Gérard Edelinck qui le fit faire sous ses yeux 
par ses frères, et il l'a retouché en plusieurs endroits. — Jean 
Edelinck avoit entrepris de graver cette planche du Déluge; il 
mourut en y travaiUant et la laissa imparfaitte. Gérard Ede- 
linck se chargea de la faire rachever sous ses yeux par son 
plus jeune Irère, et il y donna ensuite luy-méme la dernière 
main (2). 

— La Ste Famille de Jésus-Christ, d'après le tableau de 
Raphaël d'Urbin, qui est dans le cabinet du roy. Gérard Ede- 
linck ne grava pas cette planche pour le roy, mais pour 
M. Colbert, et pour servir à une thèse soutenue par un de 
ses enfants; depuis M. Colbert la donna au roy et l'on effaça 
ses noms qui étoient au bas de la planche (3). 

— Jésus attaché sur l'arbre de la croix. Inventé et gravé 
par Fr. de Poilly. Gérard Edelinck travailloit pour lors auprès 



m M. 
(2) Cal 



Robert DumesDil a donné son œuvre, t. VII, p. 169-335. 
Calcographie du Louvre, n® 2. 
(3) Robert Dumesnil, n<» 4; calcographie du Louvre, n<> i90; 



il* 

de luy , el ee Ait sous ^ canduite cpiMl |i«y« in» wlto id«iH 
êha les terrasse^ le eiel et le loiDlain. 

•^ St Ambrobe, pciur le livre intitulé : Vie de SI Ambreise, 
par Herman, 4"^, Deialier, 1679. St Bazito le grand et St 6ré- 
ffoire de Nazianae, St Athanaae en demy corps, d'après 
Jl.-B. de Champagne. — Pour les Vies de ces saints docteurs, 
imprimés chez mon oncle Dupuis, en 16..; c^ libraire le^ 
vouloit faire graver à Pitau ; mais, n'étant paa eoBvenu de 
prix avec luy, Edelinck les grava (1), 

— St Etienne lapidé par les Juife. dette planche est gravée 
par P. Brissart, et il n'y a que la teste où 6. Edelînék ait tra- 
vaillé. 

^— St François Xavier annonçant la foy aui Indiens, d'a- 
près Jéroaroe Sourley, La meame pièce avee écriture; la 
mesme pièce avec dédicace où Ton a effacé le nom d'Eder 
linck. Les deux dernières ont cel4 de difiérence avec la pre* 
mière que la tèle du saint est gravée par Pr. PoiUy qui vef» 
fB{a celle qu'Edelinck avoit fait auparavant, parce qu'elle 
n'ealoit pas assez gracieuses on a aase? de peine è en trouver 
de cette pièce sans lettre et où la teste du saint soil gravée par 
Bdelinck. 

r- La bienheureuse Catherine Adome de Gènes, à demj 
eerps tenant un crucifix. Très^rare; mon père l'avoit eu de 
Tœuvre de M. Edelinck mesme (2). 

•*- Alexandre, ayant vaincu Darius, vient rendre visite à la 
famille de ce prince accompagné de Parmenion, d'après Hi«- 
gnard- — Pierre Mignard, premier peintre du roy après la 
mort de Charles Le Brun, jaloux de la réputation que le tar 
bleau avoit acquise à Le Brun son prédécesseur, voulut mon- 



(1) Robert Dumesnil, n» 23-9. 
(i) Robert Dumesnil, n« 967. 



tyer en peignant eeluy-cy qu'il étoit capable de travailler^ sut 
le mesme sujet avec autant de succès, et, pour que rien ne 
manqu&t au parrallèle, il entreprit de faire aussy graver son 
tableau par Gérard Edelinek; mais, celui -ci étant mort, la 
planche demeura imparfaite jusqu'à ce que Pierre Drev^t 
l'eût rachevée dans Testât qu'elle est présentement (1). 

— Combat de quatre cavaliers, des premières manièreSt 
d'après L. de la Pinse. — Je préjuge que cette inscription, qui 
est au bas de la planche, se doit écrire L. de Vinci, et qa« 
ç^est une faute de l'écrivain qui a corrompu le nom du pehir 
tre. Ce sera assurément le tableau , dont il e^t h\\ inention 
dans la Vie de L. da Vinci, écrite par Trichet du Fre$ne, le* 
quel estoit pour lors aux Thuilleries. La description qu'il eo 
donne est fort conforme à ce qui est représenté icy (2). 

— Statues de Versailles sur des piédestaux; gravées par 
G. Edelini!k. — Ces statues sont présentement fort rares; il 
doit y en avoir, pour estre complexes, quatorze. — Toutes 
ces statues sur des piédestaux sont gravées d'après Chaufour 
rier. Ce sont des derniers ouvrages du sieur G. Edelinek ; 
il s'en trouva à sa mort douze de gravées entièrement, et 
deux dont il n'a jamais été tiré une seule épreuve, et qui 
mesme n'estoient pas encore achevées de graver. Je scay cela 
de M. Chaufourier qui est son gendre. Ces planches sont rarfisf 
présentement, mais dans la suitle elles ne le seront pas selon 
toutes apparances. On les ipettra au jour, elles sont au bureau 
chez K. de Coite, premier architecte du roy (3). 

— Casparus Bartholimus, fils de Thomas, Agé de 22 an^ 



(1) Robert Dumesn il, n» 43. 

(2) Robert numesnil, n° 44. — Voir sur u^ dessein de Rubens, 
qui a servi de premier lype à la gravure d*Ëdeliqç]^, le JQurual la 
Li/mtére, n« dii 18 décembre, i852. 

(3) Rot)ert numesnil, n«* 49-33. Calcogr^phie du Louvre, 
n« m9, ii73-4, Mîo, im tâsa, l?a7-9, JJIÇ, <3i«. 



216 

en 1676, anatoroes professer, gravé en 1676 par J. Edelinck. 
Je crois y reiîonnoUre du travail de Gérard Edelinck. Pour 
un livre intitulé : Caspari Bartolin Tbon). f. diaphragmalis 
structura nova, Romœ 1676. Bartholini étoit à Paris pendant 
qu*on imprimoit son livre à Rome ; Téptlre dédicatoire adres- 
sée à Gosme III, grand duc, est datée de Paris, Galendas Fe- 
bruarii, anno 1676. 

— La Peinture et la Sculpture, accompagnées de leurs gé- 
nies soutenant le portrait de Pierre-Vincent Bertin, trésorier 
général de la chancellerie de France. Le portrait est d'après 
N. Largillière, et le reste des accompagnements d'après Ant. 
Goypel le fils. — Il résigna celte charge en 1687, et fut de- 
puis, à ce que je crois, trésorier des parties casuelles (1). 

— Jean-Paul Bignon, abbé de Saint-Quentin, à demy 
corps, d'après Lucrèce Catherine de la Roue. G'est M. Anisson 
qui l'a fait graver en 1700 (2). — Autre du mesrae à my-corps 
dans un ovale, d'après Vivien. Gette épreuve est retouchée 
par J. Audran; l'on en trouve qui sont pures d'Edelinck; ce 
fut Monbard qui fit retoucher cette planche par J. Audran (3). 

— Emmanuel de la Tour d'Auvergne» cardinal de Bouil- 
lon (4), Charles-Maurice le Tellier (5), archevesquedeHheims, 
grands portraits gravés par Nanteuil et retouchés par G. Ede- 
linck. Ces planches tombèrent à Edelinck dans la succession 
qu'il eut de Nanteuil, et, pour les faire servir, il les retoucha. 

— Portrait de , femme de M. Nicolas Chauvin, maistre 

des comptes, à demy corps, dans un ovale; représentée en 
Ste Elisabeth. — Elisabeth Guillois, fille de Michel GuiUois, 



(1) Robert Dumesnil, n* 149. 
if) Robert Dumesnil, n* 151. 
h) Robert Dumesnil, n<> 150. 

(4) Robert Dumesnil, catalogue de Nauteuil, t. IV, n^ 51 ou 52. 

(5) Robert Dumesnil, catalogue de Nanteuil, n» 137. 



217 

doyen du Chastelet et femme de .... Chauvin, mattre des 
comptes. La planche est restée dans la famille ; ce petit por- 
trait est rare (1). 

— L'Histoire occupée à escrire les actions héroïques de 
Louis XIV, accompagnée du Temps qui luy ayde à supporter 
le portrait de ce prince. Il n'y a que le portrait du roy et la 
teste de l'Histoire, qui est celuy de madame de Beaulieu, qui 
soient gravées par Edelinck, le reste l'étant par Loisel d'après 
Desmarets. — C'est la dédicace du Beaulieu; Reine de Beau- 
lieu, nièce du chevalier de Beaulieu et épouse de M. Des 
Roches, ingénieur du roy. 

— Philippe Evrard, avocat au parlement de Paris, d'après 
Tortebat ; dans un ovale; très-rare. On ne sçait ce qu'est de- 
venue la planche; c'estoit le chevalier Simon qui l'avoit fait 
graver; mais jamais de son vivant il ne la put trouver chez 
luy, et après sa mort on ne la put pas non plus trouver ; on 
n'en connolt que trois ou quatre épreuves. — Elle est présen- 
tement retrouvée; M. Drevel l'a achetée (2). 

— Portrait de Régnier deGraef, médecin hollandois, gravé 
en 1666, d'après H. Watelé. — C'est le premier ouvrage 
que le sieur G. Edelinck ait fait à Paris. Voici l'anecdote 
telle que me l'a racontée M. Chaufourier son gendre. Lorsque 
M. Edelinck arriva à Paris, il alla sur-le-champ chez son 
frère qui y étoit déjà, et, luy ayant demandé quels étoient les 
ouvrages qu'il avoit à faire, il luy montra ce portrait qu'il 
alloit graver. Gérard luy dit d'aller faire préparer le souper 
et que pendant ce temps il travailleroit à sa planche , ce qu'il 
fit, car, pendant le temps que Jean apprètoi t le souper, il grava 
entièrement la teste de ce portrait. Il avoit pour lors 26 ans. 



(1) Robert Dumesnil, n<» 167. 

(2) Robert Dumesnil, n"* 198. 



tu 

s H. Bdelittek ta Us et M. Wta«igli«$h OGAvieBmDl fiw 
M. pdeliock, arrivant à Paris, trouva soa frèra pccupé à gra- 
ver des testes dans une planche, et que, ayant sçu qu'il en 
ivoit itn écM de chacune, il en grava de^x dans le jour même 
âe 809 arrivéOf peadan^ qqe son frère étoit occupé à donner 
^rdre ^ sa réception, el l'uç et Tautre in'as3?urent que ce fait 
leur a été raconté squv^^nt par H. Edelinçk même. Au res^te, 
ce petit portrait de De Graef se trouve dans ^n livre de iQé- 
decine de cet auteur, je pense imprimé à Paris (1). 

— Portrait d*lnnocent ]!^U, dont il n'y a que la teste où 
Edelinck ait retouché. — M. Chaufaurier m'a dit qu'à Télec- 
tioA du pape Innocent XI) H. Edelinck trouva cette petite 
planche qui tratnoit chez luy ; il y donna quatre coups et la 
donnoit à vendre à ses enfants; il ne veut pas que cette pièce 
soit dans son œuvre. — M. Edelinck le fils m'a dit que son 
père, ayant appris sur les dix heures du matin la nouvelle de 
l'élection du pape Innocent XII, remonta après le déjeuner 
dans sa chambre, et qu'il se mit sur-l^'hamp à graver en 
quatre coups, le portrait qui fut achevé j^ midi, et je tiens cela 
pour vray. 

rr- Jean de la Fontaine de TAc^démie française, d'après 
H. Rigaud. Le tableau original, qui est d'une grande beauté, 
est cl)e2 M. Goustard* conseiller au parlement, en 1730 (2). 

-r Le baron del Kink, Holandois, d'après Â. Booqen. {1 y 
en a des épreuves avec l'inscription. — C'est Gerbran^ Yafl 



(1 ) Robert Bumesni), n^ 319. Nous n^avons pu trouver de ce mèr 
decin qu*un livre imprimé i^ Paris, inlilulô : TrijtHé ^e la nature 
dû suc pancréatique,., parRèjfnier de Graef, médecin Hollandais. 
Paris, Olivior de Varcnnes, 1666, in-18. L'exemplaire que nous 
avons vn n'avait pas de oorlrail; mais il peul ne pas avoir éïè mis 
à louic Tédilion. 

(2) Robert Dumesnil, n^" 230. — V^y^^ PIH^ ^^M\ la p^te sur 
Drevet, p. 123. - t 



L«euweB, minblre de la R. P. R. à ÂBasIefdam el tien pas le 
baron del K'mk (1). Voyez le portrait de ee mesme homme, 
gravé par P. 8chenck, d'après le mesme peintre, Ânt. Boo- 
nen. J. Gole Ta aussy gravé. 

*^ Un homme d*épée, ohevalier de la Jarretière, dans un 
ovale, accompagné de trophées. Vignette avec celte inscrip- 
tion : Mars in pr^lio. Cette pièce est attribuée par quelques* 
uns au sieur Edelinck ; mais elle n'en est pas sûrement ; ell^ 
esit de L. Cossin. G^est Jean-Gaspard-Ferdinand, comte de 
Marchin, Cette vignette se trouve à la teste du livre intitulé 2 
le Miroir des nobles de Hasbaye (2). 

•—Thomas Atexandre Morant, conseiller d'estat, maistre 
des requestes et intendant en Provence (Gallo-Provincia); 
gfavé en 1685, diaprés de Largilière. Ce portriait est rare ; la 
planche en est gâtée et ne peut plus imprimer. M. Brevet en 
est certain et me Ta asseuré (3). 

— Jean Mouton, célèbre joueur, jouant de la guitare — 
est-ce un luth ou une guitare (4) — c'est un luth — à demy 
corps, diaprés Fr. de Troyes.— D'après un des plus beaux 
tableaux qu'ait peints M. de Troyes. Il a été peint en 1690, 
Mouton étant pour lors âgé de 64 ans. J'ai vu ce tableau en 
1T55, et j'ose dire que le plus beau tableau de Van Dyck ne 
me parott pas supérieur. 

— Philippe de France, frère unique du rpy, duc d'Orléans, 
buste dans un ovale, armé d'une cuirasse, avec une écharpe 
passée par dessus et un rabat de point; quatre fleurs de lys 



(1) Robert Dumçsnil, n» 239. 

(â( Miroir des nobles de Hasbaye, par Jacques de Hemricourt, 
mis du vieux en nouveau langage, par le siçur de Sal|).rfty, Bruxel- 
les, Henri Frirx, 1673, in-f«. 

(3) Boben Qume&nil, n? 379. 

(4) VarieUe pap surcpoU d'oxaclitude avait desiioè a» marge 
rinsirument. — Robert QumaaiiU» u» 181 . 



220 

disposées aux quatre coins de Toyale. Ce portrait en petit, 
auquel on ne trouve aucuns noms d'artistes, est, à n'en point 
douter, de Gérard Edelinck qui le fit dans les premières anr 
nées de son arrivée à Paris^ pour estre mis à la teste d'un 
petit livre de morale intitulé : La belle amitié ou le véritable 
amy (par P. Dalicourt). Paris, 1688, in-12. Ce petit ouvrage 
est dédié audit duc d'Orléans ; or, cet ouvrage qui est de très- 
peu d'importance, n'ayant pas été fort recherché, le petit 
portrait, qui estoit à la teste, est demeuré aussi dans l'oubly, 
et il est si rare que je ne l'avois veu ni n'en avois entendu 
parler jusqu'en 1733 (1). 

— Nie. Pinette, conseiller du roy en ses conseils et direc- 
teur de l'hôpital général de Paris, d'après Quenel. — J'en 
suis asseuré présentement; c'est l'abbé Quesnel que j'ay 
connu qui brocantoit des tableaux ; il estoit frère du père 
Quesnel (2). 

EDELINCK (jean). âu bas du portrait de Nie. Samson, 
gravé par Jean Edelinck, qui est chez le roy, M. Clément a 
écrit la datte 1679, et je crois que la cause qu'il n'a pas été 
tout à fait fini, est la mort de J. Edelinclc survenue dans le 
temps qu'il y travailloit. Je suis présentement asseuré que 
J. Edelinck mourut en 1680. 

— La Ste Vierge montrant la tunique de son fils, gravé par 
Jean Edelinck d'après J. B. de Champagne. Pour le livre : 
l'Histoire de la robe sans couture de N. S. qui est révérée 
dans l'église des Bénédictins à Argenteuil, imprimé à Paris 
en 1677. 

EDELINCK (NICOLAS), le seul qui reste des enfans de Gé- 



(1) Robert Dumesnil, n? 286, qui le considère comme douteux. 

(2) Robert Dumesnil, n<» 296, qui n*a pas pu indiquer le nom de 
Quesnel. — Voir dans ce môme volume, p. 46. 



221 

rard Edelinck est né à Paris en 1681. Une indolence impar- 
donnable Ta empêché d'exercer un art pour lequel il avoit 
d'heureuses dispositions. Son père croyant qu'en changeant 
de climat, il pourroit montrer plus d*ardeur pour la gravure, 
à laquelle il le destinoit, l'envoya jeune à Munich, chez Am- 
ling, qui lui mit le burin à la main, et qui lui fit exécuter 
diverses planches. De là il passa à Venise, y fit connoissance 
avec le peintre Vleughels, et contracta avec lui une amitié 
qui ne s'est point démentie; ils restèrent unis; mais cela ne 
changea rien à la façon d'agir d'Ëdelinck pendant son séjour 
à Venise qui fut assez long. 11 ne grava que deux planches. 
11 vint ensuite à Rome où il travailla encore moins, et enfin 
à Paris où il ne fit plus lien du tout. 11 y est mort d'une chute 
au mois de mars 1768, ayant 87 ans accomplis. 

— La Ste Vierge è demy corps tenant l'enfant Jésus en- 
dormi entre ses bras, gravé en 1708 par N. Edelinck, fils de 
Gérard ; il étoit pour lors à Venise, d'où il vint à Rome en 
1709 à la pension du roy ; il fit cette planche d'après un ta- 
bleau que l'on prétendoit être du Corrége, mais qui n'en 
estoit certainement point. Elle est fondue et assez bien. 

EGMONT (juste yerus d') d'Anvers ; ce peintre, qui estoit 
excellent pour peindre les portraits, vint à Paris sous le règne 
de Louis XIII et y acquit une grande réputation. En ef fect per- 
sonne n'estoit plus capable que luy de bien peindre une teste. 
J'en ai veu qui sont dignes de Van Dyck, tant elles sont pein- 
tes avec fraîcheur. Pour faire la cour au roy on asseure qu'il 
prit le nom de Juste, et depuis on ne le connut plus que sous 
ce nom là. 11 fut un des anciens conseillers professeurs de 
l'Académie, et, étant retourné à Anvers, il y mourut le 8 jan- 
vier 1674, âgé de 72 ans; car Corneille de Bie le fait naîfre à 
Leyde en 1602 ; il avoit étudié sous Ruben's, qui, dans un 
acte juridique» du 19 août 1628, le fait servir de témoin avec 



ifii 

Gttiltaume Pamiellst aussi son diseipte^ Voir €k>tmlte de Me, 
p. 135. Il n'avoii donc pts encore mis te pied ta France, 
en 1^8. 

Bombourgv dans sa deseripiion sommaire des peintures 
qui sont à Lyon^ dit que te tabteaû du grand aillel des ^laco^- 
bins de cette ville-, représentant te èaptdme de N. S., est de 
Juste, peintre du grand Duc. 

EICHLER (gottfried ou GODEFiiOi)t peintre de pcMiraits 
et d'histoire à ÀugslK)urg, né en 1677, mort en 1759. Inscrip- 
tion qui se lit au bas du portrait de cet artiste, qu*a grevé 
en 1772 G^ P. Kilian. 

ELHZEIMER (adamo) étoit fils d'un tailleur de Francfort. Il 
seroit bon de traduire le peu que Van Mander en a écrit à la 
page 296 de ses Vies de peintres. Il y dit entre autres choses 
qu'Elbzeimer estoit à Rome en 1604, Agé pour lors de 28 ou 
30 ans, ce qui confirme l'époque de sa naissance rapportée 
par Sandrart. Descamps, i.], p. 283, a écrit sa vie, et le fait 
mourir à Rome en 1620, Agé de 56 ans; il a voulu dire 46 ans. 
Je ne scais qui lui a fourni cette datte. Le Baglioni dit sim- 
plement qu'il mourut jeune sous le pontificat de Paul V^ qui 
a fini en 1621. La femme qu'il avoit épousée à Rome étoit 
une Écossoise. Sendrart la trouva encore à Rome en 1632, et 
aehetta d*elle un tableau de son mary. Ses ouvrages srat 
rares et se payent au poids de l'or. 

— Comme le père Orlandi tippt^e tei ariiêie Marco ifA- 
iamo JElzheimer, Mariefle €^0Hie ; Autant de iaules que de 
mots. Cette marque ||, que voici mieux figurée, se trouve bien 
sur ttombre de planches qui ont été gravées à Anvers, d'a- 
près le vieux Breugel. Mais ce n'est point celle d'Atlana Hs- 
heimer qui n'a jamais rien fait de isemblable. On croit que 
c'est la marque d'un nerarcband d'Anvers, qui avoit les plan- 



ches e& ^ trouve la rriarqiie ëà question, q^i se livom&ieit 
P, Miricenys eœc, qui lui-même a pu les graver. Je ne sefcHS 
^s éloigné de le croire ; d'autres la donnent è un P. ilfor- 
fthff marchand d'estampes à Anvers; 

-^ L'ange Raphaël cbnduisanl le jeune Tobie, et traversant 
avee luj une rivière; gravé au founn à Rome» eii 1606, |)ar 
Henrj Goudt. Sandrarl fait mention de ce tableau dans la vie 
d'Elsheimer. 

— St Ghrislbphe traversant une rivière et portant sur ses 
épaules l'enfant Jt^us^ gravé à l'eau-forle par i. V. Nôordt. 
6e graveur n'y a pas mis son nom ; mais elle est tellement 
semblable, pour la manière, à un paysage qu'il a gravé dia- 
prés Lastman, et où Ton trouve son nom^ que je ne lais point 
de difficulté de la luy donner. 

-^ St Laurent dépouillé de ses habits de diacre pour estre 
martyrisé. Gravé à l'eau-forte par un maislre qui ne s'y est 
pas nommé, et que Ton croit estre Pierre NolJ>e. Adam F«h 
Frankfort inv. Je suis comme assuré qu'elle est de P-. Nolpè ; 
c'est sa touche et sa manière. Ce tableau est cité par San- 
drart, vie d'Elsheimer, 

— Géphale ramassant des simples pour tâcher de guéHrla 
malheureuse Procris qu'il vient de blesser. Gravé au burin 
par Magdelaine de Pass, et dédié par elle à Riibens. San- 
drart fait encore mention de ce tableau. 

— Latone insultée par les paysans de Lytâe qui sont méta- 
morphosés en grenouilles; gravé par la mémev et dédiée plar 
elle à Nicolas van Fouckhorst , qui en avoit pour lors le ta- 
bleau. Sandrart en parle. 

— Deux petits paysages-, où dans l'un est repilésentée une 
femme qui danse au son du tambour de basque, en présence 
de quelques satyres, et, dans le second, une aulre ïemme as- 
sise écoute un satyre qui joue de la flûte. Sans nom ni 
marque. Ce sont deux petits morceèut fort jolis. Sandrart en 



22& 

parle, et c'est luy qui dit qu'elles sont gravées par Elsheimer 
même* 

ELLE (ferdinahd) de Malines, l'un des plus excellents 
peintres de portraits qui ayent paru en France , vint s'établir 
à Paris et laissa deux fils» Louis et Pierre, qui suivirent sa 
même profession ; comme leur père avoit acquis une grande 
réputation sous le nom de Ferdinand, ils se firent pareille- 

^ ment nommer Ferdinand, préférablement à leur nom de fa- 

mille. Louis EUe Ferdinand l'aisné naquit en 1612 et mourut 
en 1689. Il étoit de l'Académie et l'un des premiers qui en 
avoit été receu. C'est de luy que l'on voit plusieurs pièces 
qu'il a gravées à Teau-forte, la plus grande partie d'après Tes- 
telin. L'on trouve de ses ouvrages de graveure avec la dalle 
1644 et 1656. Il gravoit d'une manière assez moelleuse. 11 
avoit été de la religion^ et par conséquent obligé de se retirer 
de l'Académie où il fut rétably après son abjuration. Son 

, frère, Pierre Ferdinand, étoit aussy peintre ; il avoit le fonds 

de planches de son frère ; Louis eut un fils qui peignit aussi 
des portraits, et qui, s'étant retiré en Bretagne, est mort à 

i Rennes le. • • (1). Il étoit comme son père de l'Académie. 

ELLE (louis). L'un des plus habiles peintres de portraits, 

' qui aient paru en France, a été Ferdinand Elle. Il étoit de Ma- 

Unes, et s'étant venu établir à Paris, il se fît appeller par son 

I nom de baptême, préférablement à celuy de sa famille. Delà 

^ vint que ses enfants prirent aussy le nom de Ferdinand. 

^ Ayant embrassé la peinture, il leur étoit avantageux de pro- 

fiter du grand nom que leur père s'y étoit fait. L'aisné, qui 

^ se nommoit Louis, se distingua dans sa profession. Il entre- 

prit aussi de graver, et il le fit d'une manière assez moelleuse. 



(1) A Soixante-neuf ans, le 5 septembre 1717. Liste des acadé- 
miciens. Archives, 1. 1, p. 370. 



âS5 

Outre ce qu'il grava d'après Testelin , qui est son plus consi- 
dérable ouvrage, il fit encore quelques planches d'après le 
Primatice, et d'après d'autres maistres. A son exemple, Sa- 
muel Bernard, qui étoit son parent, devint aussy graveur. 
Ferdinand luy en avoit montré la pratique, c'est ce qui 
fait que leurs manières ont une si grande conformité. Bernard 
excelloit à peindre en miniature, et il avoit un goût si excel- 
lent, que, lorsqu'il entreprenoitde copier à détrempe les ou- 
vrages des plus grands maîtres, il en rendoit parfaitement 
toutes les beautés. Ces deux maistres étoient de l'Académie 
royale de peinture, et du nombre de ceux qui en avoient 
commencé l'établissement. 

EMPOLl (JAGOPO da). En 1588, lorsque la grande-duchesse 
Christine de Lorraine fit son entrée à Florence , on lui fit une 
magnifique réception et tous les peintres travaillèrent à l'envi 
pour enrichir de leurs peintures les décorations, qui furent 
placées en divers endroits de la ville. Jac. da Empoli fit aussi 
son tableau dont on voit l'estampe dans la description impri- 
mée de cette fête. 

ËNGELBRECHT (Christian), graveur et marchand d'es* 
tampes à Âusbourg, y naquit en 1672 et y est mort en 1735. 
Son portrait gravé par S. Cb. Kilian, en 1772. 

ERRARD (CHARLES), nacquit à Nantes en 1606. G'estoit un 
des peintres les plus employés de son temps, à cause de la ré- 
putation dont il jouissoit ; cependant il avoit un goût extrê- 
mement lourd et pesant, qu'il avoit contracté en étudiant d'a- 
près les bas-reliefs antiques. Il fut un des premiers membres 
de l'Académie de peinture établie à Paris, et le Roi le choisit 
en 1666 pour eslre directeur de l'Académie françoise établie à 
Rome. Cependant il ne paroissoit pas y être propre. De 

T.. II. • 



jeunes disciples ne pouvoient recevoir une bonne éducatioti 
sous sa discipline, car l'on doit éviter surtout de tomber dans 
le lourd , lorsque l'on commence à s'adonner à la peinture. 
Quoy qu'il en soit, Errard eut la direction de cette Académie 
jusques en 1671 qu'il revint en France. Il retourna une se- 
conde ibis à Rome en la mesme qualité en 1677» et il y mourut 
le M may 1069» âgé de 88 ans. Il y avoit longtemps qu'il es- 
loil directeur de l'Académie de Paris. M. Poussin neFestimoit 
tms, ainsy qu'on le peut voir par la lettre qu'il écrivoit à 
Abraham Bosse au sujet des figures qu'il avoit dessinées dans 
le traité de peinture de Léonard de Vinci de l'édition de Pa- 
ris et qui estoient attribuées par quelques-uns au Poussin. 
Cette lettre se trouve dans un traité de Bosse intitulé.... (1). 

Gh. Errard s'estoit particulièrement attaché à peindre des 
ornements et il en avoit feit son principal talent. Le goût qui 
régnoit pour lors étoit d'en peindre dans tous les plafonds et 
les lambris des appartements, et il s^estoit enrichy à conduire 
de ces sortes d'atteliers lorsqu'il ftit à Rome en qualité de di^- 
recteur de l'Académie françoise. Il dessina tout ce qu'il put 
trouver d'ornements antiques, et il en rassembla la plus ample 
collection qu'on eut jamais veue. Au lieu de former ces jeunes 
gens, dont il avoit la conduite, sur les ouvrages des meilleurs 
dessinateurs et des meilleurs coloristes, il les assujetit trop à 
ce que l'anatomie, les proportions et les régies de l'art ont de 
plus servile, et il captiva ainsy tellement leur génie que ceux 
qui suivirent ses leçons ne purent jamais depuis se défaire 
de la mauvaise éducation qu'il leur avoit donnée. 

— Recueil des plus beaux vases antiques qui sont à Rome 
ou aux environs, au nombre de douze, dessinés par Charles 



(1) Dans : Traité dei pratiquée §éométrales el perspectivei ensei- 
gnées dans l'enseignement royal de peinture, Paris, i66S, in-8'', 
p. 128. 



227 

Ërrard, lequel est aussy l'inventeur du sujet qui sert de fron- 
tispice à cette suite ; le tout est gravé au burin par G. Tour* 
nier. La première feuille représente une femme assise dans 
un jardin orné de vases ; elle est appuyée sur un médaillon 
dans lequel est figuré le chiffre de la Reyne Christine de 
Suède, cette suite luy ayant été présentée par Errard, aux 
dépens de qui elle fut gravée. Aussy y met-il C. Errard 
del. et exe. 

ERTINGER (françois), étoit peintre en miniature et gra- 
veur. 

— Epitaphe de l'épouse de Paul Sevin, dans l'égUse de St- 
André-des-Arcs, à Paris; le génie de Paul Sevin, peintre à 
Paris, représenté dans un médaillon ; gravé en 1688 d'après 
P. Sevin. 

ESPINOSA (gébosue), peintre de Valence, en Espagne, sur 
la fin du dernier siècle. D. Joseph. Garcia. 

ËYERDINGEN (aixart van). Les fables du Renard, en 56 
pièces, inventées et gravées à l'eau-forte par AUart Van Ever- 
dingen. Il y en a parmy sept ou huit où la graveure à l'eau- 
forte est alliée avec la grateure en manière noire ; ce sont des 
sujets de nuits, et cette manière fait un fort bon effet. Les 
sujets de la plus grande partie de ces fables sont tirés d'un 
livre allemand dont il y a une traduction latine sous ce titre : 
De admirabili fallada et astutia Yulpecula Reinikes, auctore 
Hartmanno Schoppero, Francofurti ad Menum, 1567, 8o. 
C'est une satyre, faite par un protestant, où les prestres ca- 
tholiques ne sont pas espargnés. On l'estime fort en Alle- 
magne. Je dis que les sujets de la plupart des fables gravées 
par Everdingen sont tirés de ce livre ; c'est qu'effectivement 
il s'en trouve quelques-unes dans la suite qui sont tirées d'É- 



328 

sppe. n y a au bas de la première dix Ters boUandois ; mais 
Fauteur n'a mis ni son nom ni sa marque à aucune friancfae. 
Nous en avons une suite avant que les planches eussent été 
retouchées au burin , c'est-à-dire telles qu'elles sont sorties 
de l'eau-forte. Elles ont été retravaillées depuis au burin pour 
y mettre plus de propreté et même pour y dcxmer plus d'in- 
telligence ; car ce qui y a été fait parott l'avoir été sous les 
yeux de l'auteur. 11 Haut même avouer que les sujets de nuit 
en manière noire sont mieux traités. Hais aussi perdent-elles 
l)eaucoup de leur premier esprit, le travail au burin qui a été 
mis étant un peu froid. C'est ce qui fait que j'estime bien da- 
vantage la suite que nous avons. Elle est moins nombreuse 
que celle que l'on débite actuellement en Hollande. Gelles-cy 
sont, comme je l'ay remarqué , composées de 56 planches ; 
nous n'en avons que 53; encore dans ce nombre y a*t-il deux 
planches qui n'ont point servi. Il y en a en place deux autres 
qui ont été recommencées et qui représentent les mêmes su- 
jets. Ce sont celle du titre, qui dans notre suite est d'une 
forme un peu plus petite que toutes les autres planches de 
la suite , et la seconde, le renard chassé par des chiens et le 
chat monté sur un arbre. Les trois planches qui nous man- 
quent sont le lyon, l'ours et le renard, la danse de l'ours, le 
cheval qui, pour se venger du cerf, se laisse mettre un mors. 
— Elles me sont venues depuis. 

— Il y a du même auteur une suite de cent paysages de di- 
verses formes, les uns plus grands, les autres plus petits, tous 
gravés par lui-même d'après des desseins qu'il avoit faits 
d'après nature, la plus grande partie en Norwége. Aussi les 
sites et les fabriques en sont-ils fort extraordinaires et ne 
tiennent rien de tous les autres paysages que l'on a. Ce 
sont des roches couvertes de forêts et de mauvaises maisons 
bftties de bois. Il a mis à presque toutes les planches la 
marque A. V. E., et à quelques-unes son nom tout au long. 



229 

Il y en a, dans le cours de ces planches, qui sont d'une ma- 
nière assez différente, et quelques-unes qui, ayant manqué 
h Teau-forte, ont été retouchées assez mal au burin, n 
paroist même que ces planches ont été négligées dans la 
suite, et il seroit à souhaiter que les épreuves qu'on en a 
fait tirer, lorsqu'on les a reproduites, eussent été mieux im- 
primées. Ce sont, à ce qu'on m'a assuré, les héritiers d'Ever- 
dingen qui les ont, de même que celles des fables, et ils les 
tiennent, dit-on, assez chères. La suite que j'ay veue n'étoit 
composée que de 97 planches ; on m'a assuré que pour que 
la suite fût plus complète, il falloit qu'elle fût composée de 
cent planches. — Huquier en avoit rassemblé 105, et dans ce 
nombre, il y en a quatre qui sont curieuses, ce sont des vues 
des eaux, je crois, de Spa (1). 

EVERDEYCK (corneille), peintre hoUandois du dernier 
siècle, a réussi à représenter, ainsi que l'a fait Sneydre, des 
viandes, des poissons, des légumes et des meubles de cui- 
sine. C'est apparemment faute d'avoir vu de ses ouvrages que 
Descamps en a fait un peintre d'histoire. Il lui donne ime 
naissance illustre de parents originaires de Tergou; je ne 
scais s'il est mieux fondé. 

FACCHETI (piETRo). Il en est fait mention dans le livre in- 
titulé : Origine e progresso dell' Ac-ademia del disegno di 
Roma, p. 55; où il est nommé Pietro Facchetti Mantouano. 
Nous avons de ce peintre un portrait du pape Sixte V assis 
dans la chaire pontificale, gravé à l'eau-forte, tellement dans 
la manière de Bern. Passari que je l'aurois cru de sa gra- 
veure, si on n'y lisoit cette inscription : Pietro Fachetto For. 



(1) Voyez le catalogue de son œuvre dans Bartsch, t. II, p. 155. 



sso 

Fec. Mais que signifie cette première siUabe Far^ s'il est vrai 
que cet artiste fût de Mautouet 

FAGCINI (barthelemi), disciple de Sébastien Filippi,àqui 
le P. Orlandi a donné une place parmi les peintres de Fer- 
rare, d-après, p. 97, mourut en 1577, le 22 juillet, d'une 
chute qu'il fit de dessus i'échafaud qui lui aroit servi pour 
peindre en clair-obscur les portraits des princes de la famille 
d'Est, jusques et y compris Alphonse n dernier duc de Fer- 
rare, sur les murailles des bfttiments qui entourent la grande 
cour du chiteau de Ferrare. n étoit disciple de Sebastien Fi- 
lippi, au rapport du P. Orlandi. Cependant l'auteur de la 
description des peintures de Ferrare ne le dit point (p. 187), 
et c'est le seul endroit où il soit fait mention de cet artiste. 

FACGlNi (puETRo). La Vertu, représentée par une femme 
assise qui a près d'elle une trompette, soutenant en l'air les 
armes du pape Clément YIII de la famille Aldobrandine. 
Cette pièce, gravée par Fr. YiUamena, est de l'invention de 
Pierre Faccini, élève des Carracbes ; j'en ay vu le dessein ori- 
ginal chez M. Crozat. 

— Tout incorrects et tout incertains que sont les desseins 
de ce maître, on ne laisse pas que d'y apercevoir une idée 
du beau et un goût, qui ont mérité les éloges des Carracbes. 
(Catalogue Crozat, p. 61.] 

FACHINETTI (joseph) de Ferrare, disciple d'Antoine-Félix 
Ferrari, et actuellement vivant, est, comme son maître, un 
peintre Quadrarista et rien de plus. 11 est fait mention de ses 
ouvrages, dont sont ornées les églises de Ferrare, dans la 
description des tableaux de cette ville, et de lui en particu- 
lier, p. 31. 



3âi 

FÂISTENBËRGËR (ANtoms:), né à Inspruck, selon quelquesr 
uns en 1678, et selon d'autres deux knnéei» plus tard, s'est 
formé sur les tableaux de paysage de Gaspre Poussin et sur 
ceux de Glauber. Il les enrichissoit volontiers de labriques 
dans le goût antique, et quelquefois il y introduisoit des 
chutes d'eau. Comme il ne scavoit pas faire la figure, lors- 
qu'il en vouloit introduire dans ses ordonnances, il emprun* 
toit une main étrangère, et il a eu souvent recours à celle du 
yieux Bredal, peintre flamand. Il a eu pour disciple un Iràre 
cadet nommé Joseph, qui comme lui s'étoit établi h Vienne 
en Autriche, où Antoine est mort en 1720 ou 1733» E^ir^ 
cissements historiques, p. 197. 

FÂLGE (jérémie), qui, sur plusieurs de ses gravures, se dit 
Polonois, est pourtant regardé par les Suédois comme un de 
leurs compatriotes, et ils se fondent non<-seulement sur ce 
qu'il a beaucoup travaillé à Stockholm que sur ce que son 
nom est suédois. Il signifie dans la langue de ce pays un 
faucon. Ils disent au moins que, sll est Polonois de nais* 
sance, il est guédois d'origine. 

FALGONE (aniello), peintre napolitain, a eu la gloire non* 
seulement d'avoir servi de maître au célèbre Salvator Rosa, 
mais de s'être lui-même infiniment distingué dans le gepre des 
batailles, et d'en avoir peint qui ne le cèdent point en beauté à 
tout ce qu'a fait de mieux le François Bourguignon» Il regut les 
premiers renseignements de la peinture de l'Ëspagnolet, dans 
l'école duquel il fut admis dans son jeune âge, et ce fut par 
ses conseils qu'il se consacra à la représentation d'actions 
militaires, pour lesquelles son maître lui trouvoit d'hea» 
reuses dispositions. Quelques tableaux qu'il fit dans ses com- 
mencements furent vus par le ch>^ Josepio, qui voulut con- 
noître l'auteur, et qui, l'ayant aidé de ses conseils, l'encou- 



232 

ragea à continuer de s'y exercer, prit de ses ouvrages et 
commença sa réputation. Le Falcone, spadassin de profes- 
sion, se distingua dans la révolution de Naples, où Maso 
Âniello fut déclaré chef du peuple. Animé contre les Espa- 
gnols, dont il avoit reçu une injure, il associa à sa querelle 
ses disciples et plusieurs peintres, dont il forma une compa- 
gnie, qui prit le nom terrible de celle de la Mort. Pendant 
plusieurs jours, ils firent un horrible massacre de tous les 
Espagnols qu'ils rencontrèrent. L'émeute finie, ils sentirent 
leur tort, et la crainte d'être recherchés leur fit prendre à 
tous la fuite. Falcone se réfugia avec son disciple Salvator 
Rosa à Rome, d'où peu de temps après il passa en France. Il 
vint à Paris, où il fut accueilli, et trouva de fréquentes occa- 
sions d'exercer son talent. On prétend que M. Golbert s'en- 
tremit pour lui faire obtenir sa grftce, et que ce fut aux sol- 
licitations de ce généreux ministre qu'il dut la permission de 
retourner à Naples mener une vie plus tranquille, où il con- 
tinua de travailler avec distinction jusqu'à sa mort, arrivée 
en 1665. 11 étoit né en cette ville en 1600. J'ai eu occasion de 
voir chez M. de Galvière et chez M. Lempereur quelques-uns 
des tableaux que le Falcone a dû faire dans le temps de son 
séjour à Paris, et j'avoue que, si je n'eusse pas été prévenu, 
je les aurois pris volontiers pour des productions de Sal- 
vator Rosa, tant j'y ai trouvé de sa manière. C'est la même 
pâte de couleur, c'est la même finesse de touche, et je sous- 
cris volontiers à l'éloge qu'en a fait le Domenici, auteur de la 
Vie des Peintres napolitains, t. III, p, 70, et ne suis nulle- 
ment surpris qu'on Tait surnommé dans son pays XoracU des 
batailles^ et qu'il y tienne un des premiers rangs parmi les 
peintres de cette nation. 

FALENS (CHARLES van), né à Anvers en 1682, étoit venu 
s'établir à Paris, où il est mort en 1733. Il peignoit dans la 



233 

manière de Wouwerman, et imitoil jusqu'à ses compositions. 
Ses tableaux ne sont pas sans mérite, mais ils se ressentent 
trop d'une imitation servile. Un des principaux talents de cet 
artiste étoit de copier à tromper les tableaux des peintres de 
son pays, et surtout o^ux du maître dont il s'étoit rendu le 
sectateur. Il étoit aussi fort expert à raccommoder les ta- 
bleaux qui avoient souffert. Le duc d'Orléans, régent, lui fit 
faire la reveue des siens, et principalement de ceux qu'il 
avoit acquis de don Livio Odescalchi, et je mets cela au nom- 
bre des malheurs qu'a éprouvés la peinture; car cela ne s'est 
pu faire qu'en écurant les tableaux et aux dépens des glacis 
et des dernières touches qui, dans cette opération pressée, 
sont nécessairement obligés de disparoître. 

FARELU (jACOPo). Le chevalier Jacques Farelli, peintre 
napolitain, a dû naître à Rome, et l'on n'en doit pas douter, 
puisque celui qui lui a dédié le Guida di Forestière per^ 
PuteolOy de l'édition de 1697, le lui dit à lui-même dans l'é- 
pître dédicatoire qu'on lit à la tête du livre. Elève d'André 
Vaccaro, il fit, dans sa jeunesse et en concurrence avec Lucas 
Giordano, des tableaux qui étonnèrent et lui firent dans Na- 
ples un grand nom. Mais s'étant trop livré dans la suitte à 
une pratique vicieuse et toujours dangereuse pour ceux qui 
s'y laissent entraîner, et ayant eu, outre cela, la manie de 
vouloir peindre dans la manière pure et sage de Dominiquin, 
qui étoit diamétralement opposée à la sienne, il perdit ce 
qu'il avoit pu acquérir de réputation, et ne fut plus compté 
que parmi les peintres médiocres. Il avoit fait autrefois un 
voyage en Toscane, et le grand-duc Ferdinand 11, qui régnoit 
alors, lui avoit fait un accueil des plus favorables. Il lui avoit 
fait peindre, dans le palais des Prieurs, à Pise, deux grands 
tableaux qu'on y voit. On compte, entre ce qu'il a fait de 
plus considérable, son tableau du Massacre deslnnocens, que 



M4 

pottède le duc de Stigliano, et les peintures dont il a enrichi 
la magnifique galerie du duc d'Atri, à Atri, dans les Abruz* 
zes. G'étoit son principal protecteur ; il lui fut redevable de 
la croix de Malthe, que lui conféra, en qualité de cb^^^ de 
grâce, le grand-mattre Grégoire Caraffa, et ce fut sans doute 
aussi au crédit de ce seigneur qu'il dut le gouvernement de 
plusieurs villes du royaume, et surtout celui d'Aquila, dans 
l'administration desquels il fitparottre beaucoup de prudence 
et de vigueur. Il laissa une fille peu avantagée des biens de 
la fortune, à qui il a voit mis le pinceau à la main, mais qui 
se distingua bien davantage par la beauté de sa voix. Le Fa- 
relli, chargé d'années, mourut à Naples en 1706, &gé de 82 
ans. J'ai un dessein d'étude d'enfant fait à la sanguine telle- 
ment dans la manière du cb^r Mathias, que je n'ai pas hésité 
de le lui attribuer. Quelqu'un qui vient de Naples ma voulu 
persuader qu'il éloit du Farelli ; si cela est, il faut le regar- 
der comme un des plus fins dessinateurs, ce qui ne s'accorde 
guère avec ce qu'on lui connott de penchant pour la pratique 
licencieuse de son art, à laquelle on est obligé de convenir 
qu'il s'éloit livré à corps perdu. Voy, le Domenici, t. 111, 
p« 457, et l'épttre dédicatoire à la tête du Guida di Farestieri 
cité au commencement de cet article. 

FABINATI (PAOLo), de Vérone, a fleuri dans le xvi« siècle, 
et, comme il avoit un génie des plus abondons, et qu'il ne 
cherchoit pas à épurer ses premières idées, il a rempli de ses 
ouvrages une infinité de lieux de l'état vénifien, et surtout sa 
patrie; sans avoir été le disciple de Paul Véronèse, sa ma- 
nière de dessiner et de composer tient beaucoup de celle de 
ce grand artiste, mais elle n'en a pas la finesse. 

— Ce maître a une plume fort légère, et il y a peu de 
peintres qui aient dessiné autant que lui, mais on voit qu'il 
ne peut rien faire que de pratique. Il est parmi les Italiens 



SS5 
ce que La Page est entre les François. (Cat. Grozat, p. 78.) 

FASOLO (gio.-ant.). 11 faut écrire Fasuolo. 11 est fait men- 
tion de lui dans THisloire de Vicence de Jacques Marzari, 
page 193, et Ton y apprend que sa mort arriva en 1572. Ses 
ouvrages sont tout à fait dans le style de Paul Yéronëse. Le 
Boschini, dans la description des peintures de Vicence, 
nomme tous les ouvrages de peinture que le Fasuolo a peints 
dans les lieux publics de cette ville. Il l'appelle en plus d'un 
endroit singuîare pittore. 

Il a reçu la sépulture dans le couvent des Augustins à Vi- 
cence. L'on y lit dans le chapitre son épitaphe, que voici ; 
Joannis Antonii Fasoli pictoris eximii — Haeredumque suo* 
rum, — vixit an. 44 — obiit x Kalend. Septembris — annis 
1572. •*-* in sepultura posito — in Gapitulo sancti Michaelis 
Vicentiœ, 

FALBE (joaghim-martin]. J S F, marque dont se sert, pour 
se désigner sur plusieurs de ses planches, Joachim-Martin 
Falbe, peintre allemand, établi, ce me semble, à Berlin. 

FAUGUS (george), de Ghâteaudun, peintre de paysage de 
l'Académie royale, mort fou le 27 février 1708, renfermé aux 
petites maisons. J'ay vu un recueil de desseins qu'il avoit fait 
dans les accès de sa folie ou parmi mille extravagances. Il y 
avoit des morceaux de paysage dessinés d'assez bon goût ; c'é- 
toit en 1694. Ge recueil, tronqué de toutes les obscénités dont il 
étoit rempli, est passé en Prusse, et il n'y a pas grande perte. 

FA VANNE (HENRI de) est mort à Paris le 27 avril 1752, âgé 
d'environ 83 ans. 11 avoit été reçu dans l'Académie royale de 
peinture en 1704, et il en étoit recteur depuis 1748. Jao 
ques II, roi d'Angleterre, l'avoit fait son premier veneur. 



G'étoit un peintre qui n'étoit pas sans génie, mais qui n'a 
rien fait de piquant (1). 

FÂVRÂY (ANTOINE), né à Bagnolet, près Paris, en 1710, esl 
élève de M. de Troy le fils, qui le conduisit avec lui à Rome, 
lorsqu'il y fut envoyé directeur de l'Académie de Rome. Il 
lui fit avoir une place de pensionnaire dans cette académie, 
et pendant ce temps-là, Favray, dont le caractère est très- 
sociable, fit connoissance avec des chevaliers de Malthe, qui 
l'engagèrent à passer avec eux dans cette isle, et cela fit sa 
fortune. 11 s'y fit aimer, ses ouvrages plurent, et le grand- 
maître l'a fait chevalier magistral. En cette qualité, il a fail 
ses caravanes sur le vaisseau que M. le cher de Breteuil, au- 
jourd'buy ambassadeur de la religion à Rome, avoit équipé 
pour faire les siennes. Il peint le portrait, et il réussit princi- 
palement dans de petits tableaux où il représente des usages 
et des modes malthoises. La coeffure et T habit des dames de 
cette isle a quelque chose de singulier, et qui ne contribue pas 
peu à rendre ces petits tableaux agréables. On y reconnott la 
façon de peindre de M. de Troy le fils, mais pourtant un pin- 
ceau plus lourd et qui n'a pas la même grâce ni le même 
attrait. 11 en a fait présenter quelques-uns à l'Académie pour 



(1) Il existe sur cet artiste une monographie particulière et très- 
curieuse, dont voici le iiive : Mémoire pour servira la vie de M» de 
Favanne^ peintre ordinaire du Roy, et recteur de V Académie royale 
de peinture et de sculpture, Paris, chez la veuve de D. A. Pierres, 
1753, in-li de 34 et 2 p. Elle est dédiée par un anonyme à 
M. Hulst; nos lecteurs trouveront d'ailleurs, dans les Mémoires 
inédits des Académiciens, une notice sur Defavanne, provenant des 
papiers de Tancienne Académie, et qui n'est pas étrangère au mé- 
moire imprimé dont nous venons de citer le titre. Le Musée d'Or- 
léans conserve Tesquisse d'un de ses sujets pour la galerie de 
Chanteloup, et l'Hôtel-de-Ville de Versailles, jadis hôtel du Grand- 
Maître, montre aussi de Defavanne une composition gracieuse. 



257 

y être reçu avec un autre plus grand tableau, dont le sujet est 
la cérémonie qui se célèbre annuellement dans l'église de 
Saint-Jean à Malthe, pour remercier Dieu de la délivrance de 
rile et de la levée du siège que lès Turcs avoient mis devant 
la ville. L'on y voit une assemblée nombreuse et fort bien 
ordonnée; l'intérieur de l'église, décorée de peintures du 
c«<' Mathieu, est exprimé avec vérité. Le tableau a plu, et 
Favray a été unanimement agréé et receû académicien sur 
les ouvrages qu'il a produits, le 30 octobre 1762. — Actuelle- 
ment (1762), il est à Constantinople ; curieux de^ voir cette 
fameuse ville, il a profité de l'occasion que lui a fourni le 
renvoi du vaisseau appartenant au 'grand seigneur, dont 
la chiourme révoltée s'étoit emparé et qu'elle avoit conduit 
à Malthe. 11 étoit pourtant arrêté qu'aucun chevalier de 
Malthe ne monleroit sur ce bâtiment, que la France faisoit 
reconduire à Constantinople. Favray a si bien fait qu'il a été 
excepté, et que M. le chevalier de Vergennes, notre ambas- 
sadeur à la Porte, s'est saisi de Favray et l'a retenu, se char- 
geant de le faire trouver bon au grand maître. Favray a des- 
sein de faire à Constantinople ce qu'il a fait à Malthe, d'y 
peindre les usages du pays, de faire ce qu'a fait avant lui 
dans cette ville Van Mours, et, comme il le surpasse de beau- 
coup en talents et que les sujets sont intéressants, il ne peut 
manquer de faire des ouvrages qui plairont. 

— La guerre qui s'est allumée entre la Porte-Ottomane et la 
Russie a déterminé Favray de quitter Constantinople, et dans 
cette année 1771 il se trouve à Marseille, d'où il compte se 
rendre à Malthe pour y passer le reste de ses jours. 

FEDINI (gio). Ce peintre florentin n'est connu que par une 
comédie de sa façon, qui a été imprimée sous ce titre : Le 
due Persilie, comedia [in prosa] da Gio : Fedini, Piltor Fio- 
rentino, in Firenze, Giunti, 1583, in-S® coll' ritratto dell' au- 



2S8 

tore. Celte comédie fut représentée à Floreiice en 158S, eo 
présence de la cour, et elle a été dédiée par l'auteur à Pkne 
Gonti f secrétaire du grand-duc. U étoit contemporain du 
Vasari, et il faut croire qu'il ne s'étoit pas illustré par ses 
ouvrages de peinture, puisque cet auteur n'en a fait aucune 
mention. 11 n'a pourtant oublié presqu'aucun artiste florentin. 

FELIBIEN (audré), sieur des Avaux, historiographe de 
France, garde des antiques du roi, et de TAcadânie des ins- 
criptions, est connu par beaucoup d'ouvrages qui sont sortis 
de sa plume, et qui lui ont lait une réputation. Un des prin- 
cipaux, qui lui donne droit dans celui-ci, sont ses Entretiens 
sur les vies des Peintres. Il le conçut étant à Rome, où il avoit 
accompagné en 16.. H. de Fontenay-Mareuil, ambassadeur de 
France auprès du saint-siége, et de retour à Paris il y donna 
la dernière main : j'ai son premier canevas qui prouve ce que 
j'avance. Pendant son séjour à Rome il connut le Poussin, se 
lia d'amitié avec lui, et devint de ses grands admirateurs. Son 
livre sur les Vies des Peintres est en quelque façon un monu- 
ment élevé à la gloire de ce tameux artiste, et cela l'engagea 
dans des querelles avec les fauteurs de la couleur, et princi- 
palement avec M. de Piles, qui, zélé partisan de Rubens, 
portoit peut-être un peu trop loin cet enthousiasme à cet 
égard. M. Felibien, né à Chartres et concitoyen de M. Ni- 
cole, pensant comme lui, étoit un de ceux qui formoient Id 
bande de ce qu'on appeloit les messieurs de Port-Royal. Gela 
a fait croire que ses entreliens avoient été revus pour le style 
par M. Nicole, ce qui n'est pas un fait hors de vraisemblance. 
On les trouve un peu diffus, et les écrits de Nicole ne sont pas 
exempts de ce défaut. Felibien, que M. Golbert employa 
toutes les fois qu'il étoit question d'écrire quelqu'ouvrage de 
l'art ou de donner la description de quelque fête royale, n 
lait presque tout ce qui a paru dans ce genre sous cet heu- 



289 

reux ministère. M. Colbert avoit jette les yeux sur lui pour 
faire l'histoire des bâtiments royaux, et Felibien commença 
par ceux qui sont aux environs de la Loire. Je Tai en ms., et 
ne crois pas que l'ouvrage ait été porté plus loin (1). Son 
fils, Felibien des Avaux, devoit le continuer, mais c'étoit la 
paresse même, et il n'y songea jamais. Il le pouvoit d'autant 
plus aisément qu'il étoit dépositaire de tous les matériaux 
que son père avoit rassemblés, et en particulier de tous les 
extraits concernant les dépenses des bâtimens du roi, qu'il 
avoit fait extraire des comptes étant à la chambre des comptes 
de Paris, et c'est encore un ms. en plusieurs vol. que j'ai eus 
après sa mort. Felibien le père, qui étoit né à Chartres en 
1619, est mort à Paris le 11 juin 1695. 

FENZONI (ferau). Feraù Fanzone, o da Faenza. Son nom 
étoit Fenzoni, et sa patrie la ville de Faenza dans la Romagne. 
G'étoit un assez beau génie, et qui tire au grand dans ses or* 
donnances. Sa manière a beaucoup de celle du cavalier 



(1) Cet ouvrage de Felibien existe aux manuscrits de la Biblio- 
thèque impériale ; l'un des exemplaires, plus beau et orné de 
quelques dessins lavés, portait le no 8427 * ; 1 autre, avec le même 
numéro, quoique faisant partie du fonds de Baluze,est plus simple, 
mais identique quant au texte ; c'est un in-8^ de 64 feuilles, avec 
la date de i 681» Les châteaux, dont parle Fauteur, sont Bloîs, les 
Montilz, Ghambord, Hontfraud, Chenonceaux, Chaumont-sur- 
Loire, Monlricbard, Gheverny, Ménars. A la fin est un mémoire 
sur les carrières des environs de Blois, et la qualité des pierres 
employées dans les bâtiments dont il est ci-devant parlé, mémoire 
dans lequel se trouve une dissertation sur la pierre employée dans 
le clocher de Chartres. Quoique très-insuffisant, comme tout livre 
d'archéologie écrit à cette époque, il n'en offre pas moins des 
documents nouveaux et précieux en assez grand nombre pour 
mériter d'être publié, et il le sera prochainement par l'un de 
nous, qui en a déjà exécuté la copie. On peut voir un extrait de 
l'article de Gheverny dans les Peintres provinciaux^ 2« vol., article 
de Jean Mosnier, de Blois. 



2&0 

Vaoni, mais elle n'est ni si gracieuse, ni si naturelle. Yaoni 
dans sa simplicité ne laisse pas d'être fort maniéré, celui-ci 
Test bien davantage; sa manière de drapper est sèche et sent 
le carton, ses figures nues tombent pareillement dans une 
extrême sécheresse ; mais ses compositions sont riches et 
neuves, elles sont remplies de verve, et, en général, le Fen- 
zoni n'est pas un peintre à mépriser. Il y avoit, dans les des- 
s^eins de M. Grozat, les deux desseins du serpent d'airain et 
du St François aux pieds de la Ste Vierge, dont on a des es- 
tampes gravées par Villamena. La manière spirituelle avec 
laquelle ils sont exécutés m'a laissé une idée fort avantageuse 
de ce peintre. Ces deux desseins étoient assez conformes pour 
l'exécution à ceux que l'on connoist du cavalier Vanni, et 
qui sont au crayon. Au reste, je suis étonné qu'aucun auteur 
n'ait fait mention de ce peintre. Il n'en est parlé que dans le 
Scanelli, encore assez succinctement. Cet auteur fait mention 
des différents ouvrages que Fenzoni a faits à Rome, à Todi, 
à Césène, à Forli, à Ravenne, et surtout à Faenza qui est le 
lieu où il a le plus opéré. Comme il avoit une grande faci- 
lité, il a produit quantité de grands ouvrages, et il y a appa- 
rence, puisqu'on n'en voit point dans les cabinets, qu'il a 
toujours été occupé à travailler en grand et pour des églises. 
Il étoit outre cela fort laborieux, et sa vie a été très-longue 
puisqu'il s'en est peu fallu qu'il n'ait vécu un siècle. Dans 
ses derniers jours, accablé de vieillesse, et ne pouvant plus 
soutenir le pinceau, on le trouvoit continuellement occupé à 
dessiner, tant son amour pour la peinture étoit grand. 11 sou- 
tenoit aussi son état avec noblesse, et c'est un des peintres qui a 
fait le plus d'honneur à sa profession. Voy. Scanelli, p. 202. 

FERABOSGO (jérome). L'auteur de la description des pein- 
tures de Padoue revendique ce peintre, et veut qu'il soit né 
à Padoue. 



2^1 

PËRG (FRANÇOIS), peintre allemand, qui étoit établi en 
Angleterre. Son talent leportoit à peindre de petites figures, 
et il a gravé quatre planches de caprices où l'on trouve la 
marque F. F. 

FERGIONI (bernardino) est né à Rome, en 1675. Il passa 
toute sa jeunesse dans Tétude des belles-lettres, et ne com- 
mença à se donner à la peinture qu'à l'âge de vingt ans. Il 
fit quelques copies d'après des tableaux du Guerchin, duCa- 
labrèse et de l'Espagnolet, dont la manière luy plaisoit, qui 
furent veues par Roos, peintre d'animaux, et sur cet échan- 
tillon ce dernier lui conseilla de s'attacher au même talent 
que lui, sûr d'y réussir. Un voyage, qu'il fit en Toscane, le 
conduisit à Livourne, oîi il se lia d'amitié avec M. Atto, ex- 
cellent peintre de marines; les tableaux de ce peintre firent 
une si forte impression sur lui, qu'il résolut dès lors de pein- 
dre de semblables sujets ; il se mit pour cela à faire des études 
particulières de vaisseaux et de toutes sortes de bâtiments, 
et, étant revenu à Rome, il y a paru avec éclat, et s'est telle- 
ment distingué que ses tableaux de marines ont été mis au 
rang de ceux de Salvator Roza et de M. Atto. Il vivoit encore 
en 1717. Mss. de Pio, Il se nomme Bernardin-Vincent Fer- 
gioni, suivant l'inscription de son portrait dessiné qu'avoit 
&I. Crozat, et qu'avoit fait faire le s' Pio. 

FËRl (gio-battista). M. Strange parle fort avantageuse- 
ment de trois tableaux de paysages qu'il a rapportés de son. 
voyage d'Italie, et qui sont peints, à ce qu'il prétend, dans 
le style de Claude le Lorrain. Les sites en sont pris dans le 
royaume de Naples, et le peintre est lui-même Napolitain. 
Voyez la description des tableaux appartenant à M. Strange, 
page 39. 

T. n. p 



FERNANDO (fbancbsco) de Milan a peint des animaui et 
des paysages, et, comme il étoit attaché au cardinal Imperiali, 
qui lui avoit accordé un logement dans ses palais, il substitua 
à son nom celui de cette éminence, et ne fut plus connu que 
sous le nom de Francesco Imperiali. Il nacquit en 1679, sui- 
vant Tinscription qui accompagnoit son portrait, dans le re- 
cueil de desseins qu'avoit formé à Rome Nie. Pio, et qui a 
passé depuis entre les mains de H. Crozat. 

« 

PERRÂND (jagques-phiuppe), peintre en émail, né à Joi- 
gny en 1651, élève de iP. Hignard et de Samuel Bernard; 
mort à Paris en 1732. 

FERRARI (ANTOimB-FÉLix), né à Ferrare en 1667, s*est dis- 
tingué, de même que François Ferrari son père, dans le talent 
de peindre Tarehitecture et les omemens. On peut même dire 
qu'il le surpassa, et il ne faut pour s'en assurer qu'entrer 
dans l'église de Saint-George aux faubourgs de Ferrare. L'in- 
térieur en est peint par lui, et la décoration d'architecture, 
dont il l'a embeUi, parott être réellement de relief. Il faut y 
mettre la main pour se convaincre du contraire. Venise, 
Udine, Padoue et Ferrare sont les villes où l'on voit le plus 
grand nombre de ses ouvrages. Il est mort dans sa patrie, en 
1720, Agé de 52 ans. — Deicri. dette pill. da Ferrara^ p. 81 . 

FERRARI (fbançois), né à Ferrare, le 25 janvier 1634, est 
le premier qui ait apporté dans Ferrare l'art de peindre de 
l'architecture et des ornemens sur les murailles de façon è 
faire illusion ; c'est ce que les Italiens appellent pitiore di 
quadraturaf genre de peinture dont les Bolognois sont en 
possession, et dans lequel il a paru parmi eux des hommes 
excellents» Il faut croire qu'avec ce talent il avoit celui de 
peindre supérieurement des scènes de thé&tre, et c'est ce qui 



343 

le fit appeler à Vienne par l'empereur Léopold, à Voocaaion 
du mariage de Tarehiduc Josepb. Sun ouvrage terminé^ il 
reçut des mains de sa majesté Joseph une médaille d'or «t. 
une récompense proportionnée à ses travaux. On ne (ut pas 
moins content de lui à Venise, h Ravenne et à Forli, où il eut 
occasion de s'exercer. Retourné dans sa patrie, il y mourut 
le 83 décembre 1708, âgé de 74 ans. Descri. deU$ pitu di 
Ferrant^ p. 30. 

FERRARI (luc), plus connu sous le nom de Luc de Reggio, 
ville qui lui a donné la naissance, a beaucoup travaillé à Pa<^ 
doue ; les églises sont remplies de ses ouvrages, où Ton re- 
connoit, dit-on, le caractère du Guide, dont il étoit l'élève. Il 
ilorissoit au milieu du xvu® siècle. Le Rosetti, Pitture di Pa- 
dova, p. 61, en parle avec éloge. Il avoit, s'il faut l'en croire, 
un dessein correct ; il drappoit bien ses figures et leur don- 
noit de l'expression. 

FËRRÀTÂ (ergole), né h Pelsotto, dans le diocèse de Come» 
en 1610, mourut à Rome, le 11 juillet 1686. Il avoit été en- 
voyé dans sa première jeunesse à Gennes, où on lui apprit 
seulement à tailler le marbre. Il s'en dégoûta, passa à Naples ; 
il y trouva de meilleures occasions de s'exercer, mais, cela ne 
le satisfaisant pas encore assez, il vint à Rome, et, y travaillant 
sous lé Bernin et sous l'Algarde, il devint un des plus habiles 
sculpteurs et des plus employés qui fussent alors. Il coupoit 
très>bien le marbre, mais il n'avoit presque aucune pratique 
du dessein, peu d'invention surtout, de sorte que, lorsqu'il 
commençoit quelque ouvrage, il eu faisoit assez ordinaire- 
ment faire la première pensée par quelqu'un de ses disciples, 
se réservant d'y faire pour l'améliorer les changemens qu'il 
y jugeoit nécessaires, et cette pratique lui a souvent réussi. 
Il n'auroit pas eu besoin d'aller ainsi à l'emprunt, s'il avoit 



2&& 

reçu une meiUeure éducation, et Ton TOit par cet exemple 
combien il est nécessaire de faire de bonne heure de bonnes 
études. Voyez ce que Pascoli a écrit. Il a donné la vie de ce 
sculpteur et le détail de ses principaux ouvrages. Peu de 
gens ont eu plus de talent pour bien restaurer les statues an- 
tiques. Le grand duc Gosme 111 se servit de lui et lui en a 
lait restaurer plusieurs, entre autres une statue de Vénus 
qu'on s'imagine être un ouvrage de Phidias. Il n'y avoit que 
le torse. Ferrata a suppléé ce qui y manquoit, et son ciseau 
s'assortit fort bien avec celui du sculpteur grec. Voyez la pré- 
face, p. XI et Texplication des statues de Florence, p. 38, où 
il est Ceiit mention de cette restauration. 

FERRERI (Ain>RÉ), né à Milan, le 28 février 1673, s'est con- 
sacré à la sculpture qu'il a appris sous Joseph Hazza, célèbre 
sculpteur de Bologne. Étant venu à Ferrare pour y exécuter 
les sculptures qui décorent la façade de l'église de Saint-Do- 
minique, il y fut si bien reçu, et les ouvrages lui vinrent en 
si grande abondance qu'il se fixa pour toujours dans cette 
ville, où il est mort le 13 juin 1741. S'il n'a pas surpassé le 
Hazza son mattre, il l'a presque égalé, et, pour le prouver» il 
ne faut que jetter les yeux sur les sculptures qu'il a faites en 
concurrence dudlt Mazza dans l'église de Sainte-Marie-de*la- 
ConsolaUon. Le marbre, le stuc, la terre, le bois, toutes ces 
matières ont été employées par lui, et avec un égal succès. 
Il a laissé un fils nommé Joseph, qui montroit d'heureuses 
dispositions, mais qui n'a pas voulu les mettre à profit, et un 
élève nommé Pierre turchi, actuellement vivant. PiUure di 
Ferrara^ p. 34. 

FERRETTI (Dominique), peintre florentin qui est mort de- 
puis peu de temps (j'écris ceci en 1769), étoit en réputation 
d'un habile artiste. Il avoit étudié sous FéUx Torelli à Bolo- 



245 

gne, et la femme de ce dernier, Lueia Gasalini Torelli, a peint 
son portrait. Voyez le supplément au livre : Felsina piltrice, 
dal can~ Crespi, p. 247. Il a fourni les desseins de quelques- 
unes des planches qui ont été gravées pour une édition du 
bréviaire lait à Florence, et les compositions en sont heu- 
reuses. Le Ferretti ne se nommoit point Vincent^ mais Jean- 
Dominique. C'est ainsi qu'il est nommé au pied des deux 
morceaux qui ont été gravés sur ses desseins pour le bré- 
viaire imprimé à Florence. Il n'est pas nommé autrement 
sur son portrait et dans l'abrégé de sa vie, qui vient de pa- 
roître dans la première partie du 2® volume des portraits des 
peintres peints par eux-mêmes, qu'a publié en 1766, l'abbé 
et graveur Ant. Pazzi. On y apprend que le Ferretti, né à Flo- 
rence, le 15 juin 1692, étoit vivant lorsqu'on écrivoit sa vie. 
Le chan" Crespi annonce sa mort, arrivée depuis assez peu 
de temps à Florence, et,comme son ouvrage est postérieur de 
trois années à celui de Pazzi, il se peut faire que le Ferretti 
soit mort dans cet intervalle ; mais il n'en faut pas moins cor- 
riger la faute qui est échappée à l'auteur bolognois au sujet 
du nom de baptême de notre artiste. 

FERRONI (jébome] a été un des disciples de Carie Maratte, 
mais qui, au sortir d'une aussi bonne école, est demeuré un 
peintre fort médiocre. C. Maratte lui fit graver plusieurs de 
ses desseins, et ne dut pas en être fort content. II se retira à 
Uilan, qui, je crois, étoit sa patrie. M. Crozatavoiteu dessein 
de l'employer à graver les plus beaux tableaux de cette ville, 
et il débuta par le St Paul du Gaudenzio ; mais il en fit une 
planche si mauvaise que, tout prévenu qu'étoit M. Crozat 
pour les Italiens, après avoir reçu deux ou trois autres plan- 
ches tout aussi mal exécutées, il renonça à son entreprise et 
ne voulut plus le faire travailler. 11 avoit le défaut de mettre 
dans son travail une pesanteur insuportable. 



FETI (DOBfEHico). La sœur du Feti se nommoit Lucrina et 
se fit religieuse dans le monastère de Sainte-Ursule à Han- 
toue. L'on y voit plusieurs de ses tableaux, sur quelques-uns 
desquels son habile frère n*a pas dédaigné de mettre la main. 
Voyez Cadioli , descriz. délie Pitture di Hantova , p. 71 et suiv. 

— Dan$ le catalogue Tallari^ Mariette a ajouté au fi« 26 : la 
«te ehampétrej earaetirisée par une femme aêsise fUant sa que- 
nouille^ et accompagnée de deux enfanêy etc.^ achetée 1310 it«« 
par M. Stogenoff, la note suivante : J'ay trouvé un homme à 
la vente, qui se disoit a^oir esté grand ami de M. de C!ormery, 
et qui prétendoit que ce tableau n'est qu'une copie, que Van 
Pallens avoit laite pour ce curieux avec toutes les précautions 
de quelqu'un qui veut imposer. Je ne veux pas assurer que 
cela soit vray ; mais il est constant que le tableau est d'une 
touche bien molle pour estre du Feti. 

FIALETTl (oDOARDo). On voit beaucoup de desseins d'O- 
doard Fialetti, faits avec la plume de roseau. 

FIDANZA (paul). Le cardinal Silvio Valent! vouloit lait» 
graver de nouveau les peintures de Raphaël au Vatican, et il 
avoit lait choix pour cette entreprise d'un nommé Paul Fi- 
danza, qui a commencé par graver le Parnasse et la messe de 
Bolsene. 11 a fait très-sagement de ne pas aller plus loin. Ce 
qu'Âquila nous a donné est bien mauvais; les nouvelles plan* 
ches sont encore pires. On ne peut pas plus mal dessiner, et 
la gravure est d'un homme qui n'en a pas la moindre prati- 
que, ni qui puisse jamais l'acquérir. 

Ces deux planches ont paru à Rome, en 1763, sous les 
auspices du cardinal Valenti auquel elles sont dédiées, et se 
vendent à la calcographie de la chambre apostolique. Elles 
sont à peu près de même grandeur que celles d'Aquila. Qut 
le sort de Raphaël est malheureux ! faut-il que ce qu'il a fait 



247 

de plus beau, et ce qui méritoit le plus d'être conservé à la 
postérité, tombe deux fois de suite entre les mains de gra- 
veurs ignorans, et que les habiles graveurs s'endorment et 
laissent périr des morceaux qu'ils regretteront, lorsqu'il n'en 
sera plus temps, d'avoir trop négligé I 

FIGINO (ambrogio) a été disciple de Paul Lomazzo, et, à 
l'imitation de son mattre, il s'est plu à cultiver les muses, et 
a mérité d'occuper une place sur le Parnasse. C'est ce qu'a 
fait remarquer le Gigli dans son poëme délia Piîtura trUm^ 
fonte. 

FIGURINO da Faenza, peintre, disciple de Jules Romain. 
Vasari en fait mention dans la vie de ce dernier , t. Il, p. 342, 
eiiz. di Bolog., et dans la première édition faite à Florence 
en 1550, p. 893, t. IT, et dit que Figurino mourut avant Jules 
Romain, et que sans cela, il auroit fait revivre son maistre 
par ses excellens ouvrages, aussi bien que Rinaldo de Man- 
toue qui mourut jeune, et aussi avant Jules Romain. Je ne 
sais pourquoy Yasari a supprimé cette particularité dans sa 
seconde édition. 

FILIPPI (JACQUES) de Perrare, peintre d'architecture et 
d'ornement, et disciple d'Ant«-Pélix Ferrari, vit dans sa patrie* 
L'Italie, et surtout la Lombardie, regorge de ces sortes At 
peintres qui trouvent de l'ouvrage, et qui n'en sont pas pour 
cela plus dignes qu*on en fasse mention. Peint, de Ferrare, 
p. 31. 

FILIPPI (césar) de Ferrare, fils de Camille et son élève, n'a 
guère été occupé qu'à peindre des omemens appelles gra^ 
teêche par les Italiens, et les tètes d'enfans qu'il j introdui* 
soit étoient supérieurement belles. Voilà tout ce qu'on peut 



248 

dire à son avantage; car, du reste, c*étoit un pauvre peintre; 
c'est ainsi qu'en jugeoit le Bononi, habile peintre et son com- 
patriote. Descriz. délie pitture di Ferrara, p. 16. 

FILIPPI (bastiano), surnommé Basiianino, né à Ferrare 
en 1532, fut initié dans les premiers principes de son art par 
Clément Filippi son père. 11 n'étoit âgé que de 18 ans lors- 
qu'il entreprit le voyage de Rome, et Michel-Ange Buonarota 
le reçut dans son école. Il devint l'imitateur de la terrible 
manière de dessiner de ce grand artiste ; mais il la sçut adou- 
cir dans ses tableaux, et il mit un tel accord dans ses teintes 
que ses figures neuës semblent peintes d'un seul coup de pin- 
ceau. Il étoit dans l'usage de couvrir ses figures de draperies 
si légères qu'elles laissoient voir le nud comme s'il fût de- 
meuré à découvert. Il mourut le 26 août 1662, et il fut in- 
humé dans l'église de Sainte-Marie in Vado, dans le même 
tombeau qui renfermoit les cendres de son père. Le Bononi 
le met au-dessous de Camille, et lui reproche d'avoir fait des 
figures qui n'avoient aucune consistance, et qu'on peut défi* 
nir de vrais transparens. — Descriz. délie pitture di Ferrara, 
p. 5. — Il étoit dans toute sa force en 1577; ce fut dans cette 
année qu'il peignit à fresque, au fond du chœur de l'église 
cathédrale de Ferrare, un jugement universel, ouvrage qui a 
presque disparu par la malhabileté des peintres qui, sous 
prétexte de le netoyer et s'imaginant que la peinture étoit à 
Thuile, l'ont presque entièrement eflacé.— Ibid., p. 40. 

FILLOEUL (pierre), fils de Gilbert. 

FINELLl (julien), sculpteur, a travaillé sous le cavalier 
Bernin ; il manioit le marbre avec une liberté surprenante ; 
une grande partie des statues de bronze, qui sont dans la 
chapelle de Saint-Janvier ou du Trésor, à Naples, sont de luy • 



249 

Les deux lions de marbre blanc, qui soutiennent le rétable 
d*autel de la chapelle Filamarini, dans Téglise des SS. Apos- 
très à Naples, sont encore un de ses ouvrages, et le travail en 
est d'une beauté singulière, de mesme que le buste de Michel 
Ange Buonaroti le jeune, qui se conserve à Florence dans la 
maison de sa famille. Il y a aussy plusieurs de ses ouvrages 
à Rome, rapportés par Tabbé Titi, qui apprend dans la table 
de son livre que Julien Finelli étoit de Carrare. Baldinucci le 
met au nombre des élèves du cav Bemin. — Yita del cav. Ber- 
nino, p. 81. — Le Domenid, auteur des Vies des peintres na- 
politains, a écrit celle de Finelli. 

FINIGUERRÂ (maso). Cette marque Z. A. se voit sur une 
estampe ancienne, gravée dans la manière de celles qui l'ont 
été par le Pollajolo^ et, s'il falloit s'en rapporter à ce que m'a 
écrit autrefois le chevalier Gaburri, ce seroit un ouvrage de 
Maso Finiguerra ; car il vouloit me persuader que, sur plu- 
sieurs desseins dudit Finiguerra, qui se trouvent dans la col- 
lection du grand Duc, il y avoit ce même chiffrez. Je le veux 
croire ; mais je n'en suis pas pour cela plus convaincu que le 
morceau, quoyqu'une des premières productions de la gra- 
vure en Italie, appartienne au Finiguerra. Le père Orlandi 
donne cette marque à un Zazingeri ou Martin Zinkius, et y 
rapporte la marque (n* 10 de sa tav. A) ; mais c'est une con- 
jecture hazardée, et à laquelle je n'ajoute aucune foi. — Le 
signe qui précède la lettre A est un Z, cela est indubitable. Il 
m'est passé entre les mains une autre pièce du même mattre 
qui est une Judith où la marque étoit ainsi figurée Z. A. 

FINSONIUS, né dans les Pays-Bas, fleurissoit au commen» 
cément du dernier siècle. Portrait de François de Malherbe, 
gentilhomme ordinaire du roy , et le plus grand poète de son 
siècle, peint en 1613 par Finsonius, peintre flamand, peu 



SftO 

eoQoa hors de la ProTenœ, où il avoit établi son séjour, mais 
qui cependant a fait, dii«-on, des portraits qui peuvent aller 
de pair avec ceux de Van Dyck (1). C2elui«ci, qui est un de ses 
plus beaux, est passé à titre d'héritage dans la famille de 
MM. Boyer, avec les livres et les manuscrits de Malherbe. 
Jean^-Baptiste Boyer, un de leurs ancêtres, étoit beau-frère de 
ce restaurateur de la poésie f rançoise. Ils avoient épousé les 
deux sœurs. Les plus grandes alliances n'ont rien de préfé* 
rable à celle d'un homme aussi rare quecelui-ei.— Descrip* 
tion du cabinet de H. Boyer d'Aguilles, p. 11. 

FISCHER (iSAAc) le père, et Isaac son fils, tous deux pein- 
tres d'histoire et de portraits à Augsbourg ; le premier, né 
en 1688, et mort en 1706 ; le second, né en 1677, mort en 
1705, âgé de 28 ans. Leurs portraits, gravés en 1772 par 
G. C, Kilian, m'ont donné ces dattes. 

FLORE (frangesgo). Son épitaphe dans le cloître de S.-Jean 
et Paul à Venise, dont voici la teneur, apprend que sa mort 
arriva en 1433. Ridolfi s'étoit mépris dans la copie qu'il en 
avolt prise : 

Fert perteulpta virum magna virtutis imago. 
Urbe satum Veneta dédit ars pictoria summum. 
Franciseum de Flore vocant, patrem JacobelU : 
Hujus et uxori» Luci® membra quiescunt. 
Hic exlremasuos beredes Cala recundent. 
M. GCGG. XXXUI. die XXI julii. 

POLLER (ANTOINE). Son nom vrai étoit Antoine de Ferrari. 



(i) Sur Finsonîus, voyez Tétude spéciale qui fait partie du pre- 
mier volume des PHrUres provinciaux^ p. i-40. 



251 

PoUero étoit un surnom. C'est ce que nous apprend le Gîgli 
dans son poëme délia Pittura trùmfante. 

POCUS (george), peintre de TAcadémie royale de peinture» 
ayant pris le Guaspre pour modèle, a laissé de très^beaux 
paysages qui font regretter qu'il n'en ait pas eiécuté un plus 
grand nombre (1). Jacques Rousseau, qui étoit de la même 
Académie, réussissoit surtout à peindre des morceaux d'archi- 
tecture. On ne peut rien de plus parfait que ses perspectives. 
On estime aussy les paysages de Charles Hérault, Imitateur 
de la manière de Porest. 

FOLLI (sEBASTUNo), mourut en 1620, ftgé de 52 ans. Ins- 
cription autour de son portrait, gravé par B. Capitelli en 1634. 

FONBONNE (quirin), graveur en 1720. 

FONDULO (jean-paul), de Crémone, disciple d'Antoine 
Gampo, qui, ayant été conduit en Sicile par le marquis de 
Pescaire, s'y est fait une bonne réputation. Hist. de Crémone, 
du Campo, p. 54. 

FONTAINE (éloy), peintre. 

FONTANA (annibale) mourut à Milan, en 1587, Agé de 
47 ans. Lisez son épitaphe qui est dans l'église de S. Celse, 
et qui a été rapportée dans le Ritratto di Milano, p. 74. 

FONTANA (noMEmco). Son frère ahié Jean Pontana, ex* 



(i) M. Robert Dumesnil a catalogue son œuvre gravé, 1. 1, 235-42. 
Voyez pittt haut dans ce volume même, p. 236. 



2&S 

cellent architecte et ingémeur, et qui étoit profond dans la 
conduite des eaux, étoit né en 1540, et mourut à Rome, en 
1514. Voyez ce qu'en a écrit le Bottari à la suite de la vie de 
Dominique. On lit cet épitaphe dans l'église de Sainte-Marie 
du Peuple, à Rome : 

Joanni Fontanœ e pago Galmerii Gomensis, spectatae indo- 
lis adolescentulo, immatura morte perempto ; vixit an. 17. 
mens. 7. obiit 6. Kal. Februarii 1591 . — Franciscus pater 
filio dulcissimo mœstissimus posuit, monumentumque sibi 
ac posteris suis elegit. 

Je préjuge que c'est un neveu de Dominique Fontana. Ce 
dernier avoit iait venir à Rome toute sa famille, car le cava- 
lier Mademe étoit aussi un de ses neveux. Le bourg de Mili, 
où le Fontana avoit pris naissance, est ici appelé Galmerium. 
J'ai tiré cet épitaphe du livre Origine del Tempio consecrato 
alla madonna del popolo, p. 194. 

FONTANA (gio-battista), peintre et graveur de Vérone. 
Voyez Giulio Fontana. Le Gigli lui a donné place dans son 
poëme delld Pitlura trionfante, et nous apprend que cet ar- 
tiste avoit passé la plus grande partie de sa vie en Allemagne, 
et qu'il s'y étoit fait une réputation. 

FONTANA (giuuo) et Jean-Baptiste, son frère, de Vérone, 
peintres établis à Venise, ont gravé plusieurs pièces, entre 
autres quelques paysages, la plupart de leur invention ; ils 
ont aussy gravé quelques morceaux d'après le Titien ; l'un et 
l'autre ont eu à peu près la même manière, qui est un peu 
sèche et petitte. Le premier grava , en 1568, les figures d'es- 
crime pour le livre de Gamille Agrippa. Son frère grava dans 
le mesme temps celles qui sont dans le livre de l'exercice des 
armes d'Achilles Marezzo, l'un et l'autre imprimés à Venise, 
en 1568, et dédiés par Jules Fontana à un seigneur de la 



253 

cour de l'empereur. C'est dans une de ces épttres dédica- 
toires que j'apprends que Jean-Baptiste étoit frère de Jules (1). 
Le comte dell Pozzo, auteur des Vies des peintres de Vérone, 
fait mention de Jules Fontana, et dit qu'il mourut au service 
de l'empereur, et qu'il travailla presque toujours hors de sa 
patrie* 

FONTANA (la vinia) n'est point venue à Rome sous le pon- 
tificat de Grégoire XIII. Ce souverain pontife étoit, il est vrai, 
un de ses principaux admirateurs. Elle en reçut une infinité 
de bienfaits; mais c'étoit dans le temps qu'il étoit archevêque 
de Bologne, et avant que d'être élu pape. Elle étoit encore à 
Bologne en 1601. On n'en peut pas douter. Le Malvasia fait 
mention d'un tableau, qui se voit dans l'église de S. Michel in 
Bosco, lequel porte cette datte. Aussi le Baglione ne la fait 
venir à Rome que sous le pontificat de Clément YIII, qui 
a commencé avec l'année 1592 et a fini en 1605. Le car- 
dinal d'Ascoli fut un de ceux qui contribua davantage à 
lui faire une réputation dans Rome, et, s'il est vrai qu'elle 
soit née à Bologne, ainsi que l'assure Malvasia, en 1552, et 
qu'elle soit morte à Rome, sous le pontificat de Paul V, qui 
n'a été élu pape qu'en 1605, il faut de toute nécessité que le 
Baglione se soit trompé en ne lui donnant que 50 ans de vie. 
Elle en avoit au moins 60; pour lors sa mort seroit arrivée 
en 1612, et j'en suis comme persuadé, d'autant que le Ba- 
glione range assez volontiers ceux dont il écrit la vie, selon 
les années dans lesquelles ils sont morts, et que Lod. Lioni, 
qui dans son livre est placé immédiatement après Lavinia 



(1) Barlsch a donné le catalogue des pièces gravées par Jean- 
Baptiste, tome XYI, p. 209-239, mais sans parler du livre de 
Texereice des armes. 



S54 

Ponlana, e^l mort, suivant mon calcul, que je crois juste, en 
cette même année 1612. Je pourrois prouver queLavinia, qui 
avoit épousé un Zappi d'Imola, étoit vivante en 1608. Une lettre 
de Zuccari, écrite en cette année et imprimée dans son livre 
intitulé Passagio per l'Italia, est mon garant* Il y est fait men- 
tion d'elle et de son mari. 

FONTANA [oRAZio), célèbre lavoratore di vasi di terra coita 
e porcellane, in tempi di Guidobaldo da Urbino, che, per 
la bianchezza délie vernici e periezione délia pitlura, sono 
riguardevoli. BaUti, tnemorie concernante la citta dCVrbino, 
p. 34. 

FONTEBASSO (fhançois] , né à Venise au commencement 
du xvin* siècle, s'est distingué dans le nombre des disciples 
qui sont sortis de l'école de Bap. Ricci, dont il a gravé avec 
esprit quelques tableaux. Quelques-uns des siens ont été pa- 
reillement gravés par lui, et l'on y remarque un fond de gé- 
nie et des toui's de figures agréables. Il a fait un voyage à 
Rome qui ne lui a pas été infructueux. Le palais d'Uoro à 
Venise est rempli de ses peintures, et c'est là, dit-on, où il 
triompha. Sur la fin de ses jours , il a été appelé à St-Péters- 
bourg, où Tattendoient de grands ouvrages que la Czarine lui 
avoit destinés. 11 y est passé en 1761, el, peu de temps après, 
j'ai apprisqu'il y avoit terminé ses jours. Voy. Longhi, Vit. di. 
pitt. Venet.,et l'Abeced. de l'edit. du Guarrienti. Sa mort est 
arrivée en 1769; il étoit âgé de 60 ans : Délia Pitt. Veneta, 
p. 445. 

FOREST (jean-baptiste), né à Paris en 1635, mort dans 
U même ville en 1712, disciple du Mole , avoit mis à profit 
les leçons qu'il avoit reçu de cet excellent peintre, et, coflome 



S55 

lui, il étoit sensible aux effets piquants de la couleur (1). 
(Description des tableaux du cabinet de M. Boyer d'Aguilles, 
p. 19.) 

FORNÂRJ (simonb), pittor da Reggio molto stimato, dipinse 
il paradiso, che si vede nella chiesa délia Misericordia di Reg- 
gio, et una imagine di nostra Sig*, col bambino sopra la porta 
di S. Zenone; fioriva nel 1546. — Borxani^ nd 8Uo Aniiqua'- 
riumRegii Lepidif mi$. nélla lÀbreria Bmky p..90. 

FOUABD (iiotse). Grand paysage, où l'on aperçoit dans le 
lointain une ville bfttie dans des montagnes, et sur le devant 
un vieux pastre s'entretenant avec une femme qui garde des 
chèvres; gravé à Teau-forte par Moyse Fouard, d'après un 
dessein qui paroist plustost estre du Gampagnole que du tW 
tien. Les noms du graveur ny du peintre n'y sont pas; mais 
pour celuy du graveur, il est certain; c'est mon ayeul qui luy 
tit graver la planche, que nous avons encoreé 

-*• Autre paysage de même grandeur, dans lequel est repré- 
sentée la sainte Vierge fuyant en Egypte, précédée de saint 
Joseph qui conduit l'asne au passage d'une rivière ; gravé à 
Teau-iorte par le mesme Moyse Fouard, d'après le Titien.-^ 
Les figures sont des premières choses qui ayent été gravées 
par mon père. 

FOUQUIER (jACQUBs). Voicy un autre extrait de sa vie plus 
circonstancié. Jacques Fouquier, né dans la Flandre occiden- 
tale, alla à Anvers, où il apprit à peindre le paysage de Josse 
de Homper, suivant de Piles, ou du Breughel de VelourSi il 
l'on en croit Félibien : mais (te fut Rul^ens qui lui enseigna 



(1) Voir sur Foreat la note I, p. 33, dtt premier volume. 



les principes les plus essentiels de l'art. Ge lurent les excel- 
lent<% préceptes de ce grand mattre, qui le rendirent un des 
meilleurs paysagistes qui eussent encore paru. Il exœlloit à 
représenter des enfoncements de forets, où il faisoit régner un 
sombre et une fraîcheur merveilleuse; il entendoit très-bien 
les lointains, touchoit les plantes, les pierres, les roches et 
les montagnes dans leur véritable caractère, et peignoit avec 
beaucoup de vérité les eaux dormantes. Les figures cham- 
pêtres qu'il introduisoit dans ses tableaux s'y trouvent pla- 
cées à propos, et avec toute la grAce et la vraysemblance pos- 
sible; de Piles ne craint pas de le mettre en parallèle avec le 
Titien. 11 faut pourtant avouer que, s'il a fait d'excellents ta- 
bleaux où le bon goût de couleur et l'intelligence des lu- 
mières sont poussés à un haut degré, il en a peint d'autres 
où un mesme verd domine trop, et que, s'il a eu une bonne 
manière de toucher les arbres, les touffes en sont aussy quel- 
quefois découppées avec sécheresse. Au reste, il avoit une 
grande pratique de peindre en grand, et Rubens l'employa 
plusieurs années dans les grands ouvrages qu'il étoit obligé 
de faire. Fouquier le quitta pour s'en aller en Allemagne, où 
il travailla pour l'électeur palatin ; mais c'est en France où il 
a lait un plus long séjour. Félibien asseure qu'il y vint en 
1621. Ge qui est vray, c'est qu'il existoit fort considéré, lors- 
que le Poussin y vint en 1641. Ils eurent mesme ensemble 
quelques contestations au sujet des peintures de la grande 
gallerie du Louvre. Foucquier prétendoit que le travail qu'il 
y devoit faire étoit assez considérable pour que ce fût à luy à 
ordonner toutes les autres peintures qui dévoient orner celte 
galtorie, et trouvoit fort mauvais que le Poussin eût com- 
mencé les desseins de la voûte, sans les lui avoir communi- 
qués. Il lui en parla avec sa hauteur ordinaire, et c'est œ qui 
fait que M. Poussin, dans une lettre à M. de Chantelou, son 
amy, le nomme le baron de Fouquier, qualité qu'il n'a ja- 



257 

mais eu. Il se croyoit issu d'une bonne maison, et il en étoit 
si fier, et étoit si entêté de sa noblesse, qu'il aimoit mieux 
souvent ne point travailler et se voir réduit à toutes sortes 
d'incommodités, que de n'estre pas considéré comme il le 
prétendoit. On le voyoit toujours une longue épée à son côté, 
qu'il ne quittoit point en travaillant ; il eût cru dégénérer s'il 
eût fait autrement. Cependant Félibien croit qu'il étoit né de 
parens d'une condition médiocre, et que ce fut Louis XIII qui 
luy accorda la noblesse. Ce prince luy avoit ordonné de pein- 
dre des veues de toutes les principales villes de son royaume, 
pour estre placées dans les trumeaux de la grande gallerie 
du Louvre, mais celte entreprise n'eut point son effect. Fou- 
quier, ayant été en Provence, s'y amusa pendant longtemps à 
boire au lieu de travailler, et ayant été rappelle à Paris, il n'y 
rapporta que quelques desseins. Depuis son retour, il tra- 
vailla pour M. de la Vrillière et pour M. d'Émery. Il fit quan- 
tité d'autres ouvrages dans cette ville ; il se les faisoit payer 
extrêmement cher. Cependant sa conduite fut telle qu'il mou- 
rut, sans laisserde bien , vers l'année 1660. Il laissa deux élèves, 
qui se sont attaché à suivre sa manière, Bellin et Rendu. Ce 
dernier a copié beaucoup de tableaux de son mattre. On a 
gravé quelques paysages d'après Fouquier. J. Morin est sur- 
tout parfaitement bien entré dans sa manière (1). Sandrart, 
p. 305. Félibien, t. II, p. 335 et 660. De Piles, p. 414 et Cours 
de peinture, p. 229 et 241 . Corn, de Bie en a aussy écrit quel- 
que chose en flamand, p. 168. 

— M. Vleughels m'a dit qu'il avoit souvent ouï dire à son 
père, qui étoit Flamand, ami de Fouquier et de sa même pro* 
lession, que, bien loin d'être né gentilhomme, ilétoit d'une 
fort médiocre condition, et que Juste d'Ëgmont ne le morti- 



(1} Catalogués dans M, Robert Dumesnil, l. II, n** 95 à 98. 
T. u. q 



S58 

tioit jamais tant que lorsqu'il lui reprochoit d'être fils d'un 
charroQ et de n'être riche que de nom. C'est que les Puggers, 
ou, comme on les appelle en Flandres, les Fokkiers, ont formé 
une maison puissamment riche, et que, lorsqu'on veut dési- 
gner dans ce pay&-là un homme qui jouit d'une grande for- 
tune, on dit assez volontiers c'eit un Fokkiers. 

Fouquier a été ami de M. Montagne, et celui-ci dessina son 
portrait après sa mort. Je l'ai vu entre les mains des enfans 
de Montagne avec plusieurs desseins de Fouquier. J'appré- 
hende que tout cela n'ait été dispersé. Ceux qui avoient ces 
desseins sont tous morts. C'étoient de vrais ours, qui ne com- 
muniquoient avec personne, et qui auroient laissé périr dans 
la poussière des morceaux qui méritoient d'être mieux con- 
servés. Je regrette entre autres choses le portrait de Fouquier. 

11 dessinoit volontiers et s'en acqpittoit très-bien. 11 manioit 
parfaitement bien la plume. Je n'en connois point de plus 
moelleuse. Personne, que je pense^ n'a dessiné des broussailles 
dans un plus grand détail et avec plus d'intelligence. Quoyque 
faits à peu d'ouvrage, ce n'en sont pas moins des portraits 
de la nature rendus dans une fidélité surprenante. Il y règae 
une telle variété dans le port des branches, les feuilles et les 
fleurs prennent des tours si heureux et des formes si justes, 
que chaque genre de plantes se reconnoît aisément. Les om- 
bres sont avec cela distribuées avec tant d'intelligence que 
chaque objet avance ou recule suivant qu'il est nécessaire. Il 
ne se sert pourtant, pour faire agir sa machine, que d'un lavis 
assez léger, sans trait ; quelquefois il y mesle quelques cou- 
leurs fort légères et mises à propos. Ce qui me charme dans 
ce mattre, c'est qu'il est expressif, et qu'il entre merveilleu- 
sement dans le détail des formes ; il n'oublie rien. 11 y a dans 
la pluspart de ses desseins des effets de lumière étonnans. Sa 
manière de dessiner favorite est le lavis sur un trait extrême- 
ment léger fait au crayon noir, seulement pour arrêter sa 



S59 

première idée. Mais son lavis est heurté et est bien éloigné 
d'estre mol. M. de Piles a grande raison de regarder Fouquier 
comme le Titien des Flamands. Je suis sur cela entièrement 
de son avis. 

— Fouquier étoità Marseille en septembre 1629. Extrait 
d'une lettre écrite à M. Langlois, dit Ciartres, par une per- 
sonne de Marseille. 

— Jacques Foucquier, né dans la Flandre occidentale, 
mort à Paris vers Tan 1660. Ce peintre est un de ceux qui 
ont mis le plus de fraîcheur dans leurs tableaux, et peu de 
gens de sa profession ont autant étudié la nature que lui. Le 
dessein, lavé à l'encre de Chine, d'après lequel cette estampe 
a été gravée, est une de ses études. (Description des tableaux 
du cabinet de M. Boyer d'Aguilles, p. 13.) 

— L'on ne connott aucun peintre flamand qui ait mis dans 
ses paysages plus de fraîcheur que Foucquier, ni qui ait ex- 
primé avec plus de précision et d'intelligence la diversité des 
objets qui se présentent dans les campagnes. Ses desseins ne 
le cèdent point en cette partie à ses tableaux. Les dégrada- 
tions et les différens plans y sont merveilleusement bien ob*^ 
serves, et il s'y trouve, sur les devants, des plantes ou des 
broussailles ; elles sont traitées avec une vérité qu'on ne voit 
presque jamais dans les desseins des autres paysagistes. Un 
peu moins de manière dans la façon de feuiller les arbres, 
qui parott un peu trop découpée, les desseins des paysages 
de ce maître ne laisseroient, ce semble, rien à désirer. (Cata- 
logue Grozat, p. 110.) 

FOUQUET (le surintendant) (1). m. Fouquet le sîirinten- 



(1) Nous mettons sous ce nom, comme celui d*un de ses pos- 
sesseurs, la note de cette statue antique que nous ne pouvons pla- 
cer à aucun nom d'artiste, puisque Fauteur en est inconnu. Elle 
représente un Antinous, à en croire la description et explication 



260 

dant avoit fait venir d'Italie celte belle statue de bronze, 
qui n'est que de moyenne nature, puisqu'elle ne porte guère 
que quatre pieds de haut, et c'étoit, à ce que j'ai ouï dire, 
M. Le Brun qui la lui avoit indiquée. Elle étoit à Vaux-le- 
Yicomte dans le temps de sa disgrâce. Un vieux domestique 
s'imagina que non-seulement on avoit résolu la perte de son 
mattre, mais qu'on avoit aussi dessein de s'emparer de tout 
ce qui lui appartenoit. Et, comme il avoit entendu beaucoup 
priser cette statue, elle lui parut perdue pour les enfants de 
M. Foucquet, s'il ne la cachoit, et là-dessus il l'enterra dans 
une cave, d'où elle ne sortit que lorsque l'orage fut tout à 
fait appaisé. M. le marquis de Belle Isle, fils du surintendant, 
en connoissoit le prix ; mais, comme il n'étoit pas riche, et 
que la fortune de son fils, que nous avons vu maréchal de 
France, commençoit et l'engageoit à des dépenses au-dessus 
de ses forces, il chercha les moyens de s'en défaire utile- 
ment, d'autant plus qu'il manquoit de pldce pour la mettre. 
U sçut que mon père étoit en correspondance avec M. le prince 
Eugène et que ce prince étoit curieux des belles choses. U 
engagea donc mon père d'en proposer au prince l'acquisi- 
tion, qui n'eut pas lieu pour lors, parce que cela ne s'arran- 
geoit pas avec les finances du prince destinées à des dépenses 
plus urgentes. La figure demeura donc à Paris jusqu'en 1717 
que le marché se renoua. Mon père fit alors passer la figure 
à Vienne, oîi jel'ai veue et ob. elle est demeurée dans le palais 



des groupes, slatues, etc., qui forment la collection de S. M. le roi 
de Prusse, par Mathias Oesterreich. Berlin, 1774. — Voici ce qu^il 
en dit, différent de ce qu*en dit Mariette : a Cette belle statue est 
de bronze de 4 pies 2 pouces. Elle a appartenu au prince Eugène 
de Savoie, auquel le pape Clément XI en fit pr^nt. Ses héritiers 
Tont vendue après sa mort au roi de Prusse qui Ta fait transporter 
de vienne à Sans-Souci, p. 14-5. » La gravure dont Oesterreich 
parle à la table, dessinée par Daniel Gran à Vienne, et pavée à 
Venise par Giuseppe Gamerata, est celle dont parle Manette à la 
fin de son article. 



261 

du prince jusqu'à sa mort. Zanetti, qui vint à peu près dans 
ce temps là à Vienne, la fit entrer dans un marché de tableaux 
et de pierres gravées que lui vendit le prince Eugène, et dont 
il fit le partage avec M. le prince de Licbtenstein, ainsi qu'ils 
en étoient convenu. Il comptoit que la statue lui demeureroit, 
et la tète lui en toumoit. Mais il ne put résister aux prières 
que lui fit le prince de Lichtenstein pour l'engager à la lui 
céder. 11 lui en fit le sacrifice ; c'étoit le sort de cette figure, 
de ne pouvoir demeurer entre les mains de œux qui la pri* 
soient le plus, et bientôt celui qui en étoit possesseur se vit 
lui-même obligé de s'en priver pour en faire présent au roi 
de Prusse et se captiver sans doute la bienveillance de ce 
prince, qui, dans la guerre qu'il faisoit à la reyne d'Hongrie, 
au sujet de la Silésie, s'étoit rendu maître des états que le 
prince de Lichtenstein y possède. Ils lui furent en effet resti- 
tués, et la statue de bronze fut mise dans le palais de Sans- 
Souci, où elle est gardée avec le soin qu'elle mérite. Le prince 
de Lichtenstein eut cependant, avant que de la laisser partir, 
la précaution de la faire mouler, et d'en faire ensuite jetter 
en bronze une semblable dans le creux que ce moule lui con- 
servoit. J'ignore si cette copie a été regravée par un habile 
homme; ce que je sçais, c'est qu'elle fait aujourd'hui l'orne- 
ment d'une des chambres du palais de Lichtenstein à Vienne, 
et qu'il 7 en a une estampe qu'a fait graver ce prince, et dont 
il m'a fait la grftce de me faire présent. 

FRAGÂNZANI (iughel-angelo), fils de César Fracansani, 
peintre napolitain, qui avoit été élève de l'Espagnolet, fut 
élevé par son père, dans sa môme profession. Mais il ne s'y 
appliqua que foiblement, et, se laissant entraîner au goût qu'il 
avoit pour le théâtre, il ne s'occupa plus qu'à réjouir ses 
spectateurs par ses boufonneries et le naturel qu'il mettoit 
dans la représentation du roUe de Polichinelle, dans lequel il 



ses 

exoelloit. Le roi Louis XIY, sur ce qu'il entendit dire, le fit 
venir en France ; mais le comédien n'y fut pas beaucoup goûté 
parce qu'il s'énonçoit en langage napolitain, et que, pour ju- 
ger de la naïveté de ses plaisanteries, il auroit fallu être au 
fait de ce jargon; ce qu'on ne devoit point attendre d'une na- 
tion peu curieuse des langues étrangères et encore moins de 
leurs différents dialectes. Le séjour de Paris se trouva cepen- 
dant si bien du goût de notre acteur, qu'il résolut de s'établir 
dans cette ville, il y prit femme, et y attira son père. Il avoit 
pris auprès de celui-ci du goût pour les livres, les estampes 
et les curiosités du même genre. Il y écrivoit ordinairement 
son nom, et j'ai un des livres qui lui a appartenu et qui, 
signé de sa main, porte la datte 1687. Par conséquent sa 
mort est arrivée plus tard que ne le marque le Dominici, 
t. lU, p. 87. Je crois même qu'il ne la faut placer que dans 
les dernières années du siècle précédent. 

•«- A propoi du dair-obtewr^ TanUdê iourmmié de la faim 
dans Ui Enfen, diaprés h Titien^ Mariette tffoute : Je Tay 
veu chez M. Crozat et chez un fondeur qui demeure dans le 
faubourg Saint-Germain. J'ay eu ce clair-obscur et tous ceux 
qui appartenoient à ce fondeur en 1728. Il les avoit eu d'un 
de ses oncles orfèvre, et celuy-cy les tenoit du sieur Fracan- 
zani, comédien italien, jouant le roUe de Polichinelle, qui en 
avoit rassemblé une des plus amples collections qu'on puisse 
désirer. Il aimoit singulièrement cette sorte d'estampes; il en 
avoit apporté de belles d'Italie, et, pendant son séjour en 
France, il n'épargna rien pour en ramasser. Fracanzani étoit 
Napolitain et assez proche parent de SaJvator Rosa. il étoit 
bon curieux et se méloit de dessiner et même de génie, mais 
d'un goût lourd et fort mauvais (1). 



(1) C'est ce Fracanzani qui réunit les études dessinées de 



26a 

PRÂGONÂRD (honobé), jeune élève qui, en cette année, 
1761, revient de Rome, où il étoit à la pension du roi. L'abbé 
de Saint-Non Ta ramené, avec quantité de desseins qu'il lui a 
fait iaire, et parmi lesquels j'en ai vu plusieurs représentant 
des veues de Borne, dont la touche et le faire m'ont beaucoup 
plu. Il est disciple du sieur Boucher. Je lui souhaite un aussi 
bon pinceau que celui de son maître. Je doute qu'il l'ait ja« 
mais. — Le tableau (1) qu'il a présenté pour être reçu dans 
l'Âcadëmie, et sur lequel il a été agréé tout d'une voix, ce 
31 mars 1765, me le fait craindre; il est agréablement com* 
posé , mais il paraît peint avec peinne. L'ordonnance a géné- 
ralement plu. J'y trouve en général un faire qui vise à la ma- 
nière de Bourdon. La timidité, qui règne dans le caractère de 
cet artiste, lui retient la main, et, jamais content de ses pro- 
ductions, il efface et revient sur lui-même, ce qui est une 
n^éthode qui nuit au talent, et qui peut faire tort à ce jeune 
peintre. J'en serois fftché, les efforts qu'il fait pour bien faire 
oaéritent un meilleur succès. U est né à Gr&ce en Provence. 

FRÂNGESGÂ (PiETRO della). Le père Orlandi le fait mou- 
rir vers l'an 1460. Le Vasari, qu'il cite, ne le dit point, mais 
seulement qu'il vécut 86 ans, après avoir perdu la veueà 60. 
Il vivoit encore en 1494 et 1509. Frère Luc Pacioli, son dis- 
ciple, en fait mention, comme d'un homme vivant, dans un 
Traité de géométrie qu'il fit imprimer à Venise en 1494. Il y 
parle avec éloge d'un ouvrage sur la peinture, que le P. Della 



Le Sueur pour ses tableaux de Saint-Bruno, maintenant conservées 
au Louvre; voyez Archives de l'Art français j t. II, p. 01. 

(1) Il a pris pour sujet de son tableau le Sacrifice de Callirhoë; 
je n*ai guère vu de crayons plus flatteur que le sien. Étant à Rome, 
il a fait quantité de veues, et surtout celles des jardins de la Vigne 
d'Est à Tivoli, qui sont spirituellement faites, et où il règne une 
grande intelligence. {Note de Mariette,) 



26& 

Francesca avoit composé, et qui étoit dans la bibliothèque 
des ducs d'Urbin. Ce que le même auteur dit dans son livre 
sur les proportions, imprimé à Venise en 1509, peut faire 
croire que Pierre délia Francesca n'opéroit plus, et effective- 
ment il étoit aveugle ; mais ce qui le disculpe de la fausse 
imputation que lui fait le Yasari de s'être approprié les écrits 
de son maître et de les avoir fait passer sous son nom , c'est 
que dans c>e même livre des proportions, il promet de donner 
bientôt un traité de perspective, qui sera, dit-il, un abrégé 
du traité complet que son mattre avoit composé sur cette ma* 
tière. On ignore même s'il l'a lait imprimer. Au reste, Pierre 
délia Francesca peut être regardé comme le premier d'entre 
les modernes qui ait réduit en règles la science de la perspec- 
tive. Daniel Barbaro, qui avoit eu communication de son ma- 
nuscrit, s'en étoit utilement servi pour son traité de perspec- 
tive. Balthazar de Sienne, Serlio et Daniel de Yolterre n'eu- 
rent point d'autre méthode que la sienne, et Vignole n'a fait 
que la perfectionner, et lui donner la dernière main. Voyez 
la Perspective de Vignole, publiée par Ignatio Danti, p. fâ, 
et le sénateur Buonaroti, dans les Osservationisopra i medagli 
del Carpagna, p. 2S6. 

FRANCESCHINI (balthasar), né à Volterre en 1611. J'ai 
des desseins de lui qui sont tellement dans la manière de 
Pietro de Gortonne, qu'on le croiroit disciple de ce grand 
peintre. Sa manière lui avoit plu, et il en étoit devenu le par- 
tisan et le sectateur. On peut adjouter qu'il ne s'en étoit pas 
mal trouvé. 

FRÂNCESI (alessandro) de Naples. L'abbé Titi en parle, 
comme d'un jeune homme dont on devoit concevoir les plus 
grandes espérances, et cela à l'occasion des peintures que cet 
artiste devoit exécuter à fresque dans une chapelle de l'église 



265 

de Sainte-Marie in Transpontîna, et dont il avoit fait voir les 
cartons à celui qui, par reconnoissance, a tiré son nom de 
Toubbi. Domenici, qui a écrit les vies des peintres napolitains» 
et qui a fait sur cela d'amples recherches, a donné place à ce 
peintre dans son ouvrage, mais il ne dit rien de plus que 
rabbé Titi. 

FRANGIA (jAGOPo). Une femme représentant la ville de 
Boulogne tenant un tableau, où est représentée la sainte Vierge 
avec cette inscription à Tentoiir : Tuumpoptdum ah wnni malo 
défende. Celte femme est au milieu des quatre saints protec- 
teurs de la ville de Boulogne, S. Petronne, S. Procolo, S. Fran- 
çois et S. Dominique (1). Celte pièce a certainement été faite à 
Bologne; Ton n'en connoît pas le graveur, qui s'y est dési- 
gné par cette marque I. F. J'ay veu plusieurs autres pièces 
du mesme maistre avec la même marque. On avoit essayé de 
les faire passer pour estre de Marc Antoine, en corrompant 
la marque ainsy : W. En effect elles sont assez dans la ma- 
nière de Francia, qui est celle que Marc Antoine a imité dans 
ses premières manières, et, s'il étoit vray que Jacques Francia, 
fils de François Francia, maistre de Marc Antoine, eût gravé, 
comme je l'ay ouy dire à quelques-uns, il seroit fort possible 
que ces pièces fussent de luy. 

— Un portrait de femme en buste, dont les cheveux ras- 
semblés dans une espèce de coiffure (cufOa en italien) tom- 
bent en boucles sur le devant et accompagnent le visage; un 
cordon étroit qui est autour de la teste attache, sur le devant 
du front, un ornement de pierreries ; elle est vêtue d'une robe 
à bandes de différentes étoôes, et il paroist un bout de la main 



(1) Bartscb, différents graveurs du temps de Marc-Antoine» 
t. XIV, p. 456, nM. 



966 

gauche. Ge portrait est gravé au burin et assez mal , je crois 
par cet ancien graveur bolognois qui s'est distingué par cette 
marque L F. Je ne puis sçavoir de qui est ce portrait, qui est 
fort rare. Je l'ay veu chez le roy dans son œuvre de Raphaël. 
^ La Charité représentée par une femme qui est assise sur 
des nuées, et qui donne à teUer à un enfant (1). L'on ne voit 
point de graveur, à qui on puisse mieux attribuer cette pièce 
qu'à Marc Antoine, eUe est dans le goût de ses premières ma* 
nières, et cependant l'on y trouve en bas une marque qui 
n'est pas la sienne, L F. Je ne connois pas ce graveur, ni 
à qui cette marque peut convenir. Ce qui est de certain, c'est 
que les pièces avec cette marque ont dû être gravées à Bo- 
logne. J'en ay veu une, où une femme, .qui tient un tableau 
de la sainte Vierge, est environnée de saints parmy lesquels 
est St Pétrone, évoque, et les patrons de Bologne ; ces pièces 
sont assez dans la manière de Francia ; seroit-il impossible 
qu'elles fussent de Jacques Francia, qui, comme Fr. Francia, 
son père, étoit peintre et oriévre? 

FRANCE (aubroise), ou Francken, peintre d'Anvers. On 
le dit frère de Jérôme et de François Franck le vieux, et l'on 
prétend qu'il étoit le plus habile des trois frères. On cite, pour 
le prouver, un de ses tableaux dans l'église cathédrale d'An- 
vers à la chapelle des cordonniers, lequel représente les 
saints Crespin et Crépinien. On a quelques morceaux gravés 
sur ses desseins par les Wierx. Mais ces estampes ne remplis- 
sent pas ridée qu'on en donne ici. Quelques-unes portent la 
datte 1578, et fixent le temps où il florissoit. 

FRANCK (FRANÇOIS) le vieux, né à Leventals près d'Anvers, 



(1) Bartscb, différents graveurs du temps de Haro-Antoine, 

t. xnr, n« a. 



267 

fut reçu dans la communauté des peintres d'Anvers en 1561. 
On le croit flls de Nicolas Franck l'ancien, frère de Jérôme et 
d'Ambroise Franck. 

FRANCK (FRANÇOIS) le jeune, celui de qui l'on a le portrait 
dans la suite des cent portraits de Van Dyck, nacquit, dit-on, 
à Anvers en 1580, et mourut en 1642. MM. d'Argenville et 
Descamps ont parlé assez amplement de tous les peintres de 
la famille Franck ; mais je trouve qu'ils ont embrouillé la 
matière au lieu de l'éclaircir. Je ne l'entreprendrai pas, tant 
j'y trouve de difficultés. Corn, de Bie parle de Fr. Franck le 
jeune. 11 ne peignoit guère que de petites figures; il a voit été 
en Italie et avoit demeuré à Venise. 

FRANCK (jean-ulkich), peintre d'histoire à Augsbourg, 
né en 1603, mort en 1680. Ce nom d'artiste et ces dates nous 
sont donnés par l'inscription qui se lit au bas du portrait 
dudit peintre qu'a gravé en 1772 G. C. Kihan. 

FRANCK (jérome), de qui est le tableau de l'Adoration des 
bergers au maître-autel de l'église des Cordeliers à Paris, 
peint en 1585, y étoit venu d'Anvers, où il avoit appris son art 
sous le vieux Nicolas Franck dont il étoit le fils. 11 peignoit bien 
le portrait, et c'est ce qui engagea Henri III de l'appeler dans 
son royaume et de lui accorder le titre de son peintre. C'est 
ainsi qu'il est nommé dans l'inscription qu'on lit au bas de son 
portrait qu'a gravé J. Morin (1). Il demeuroit à Anvers en 1596. 
On en a la preuve dans un tableau de sa main, qui est dans 
l'église cathédrale de celte ville, et sur lequel on trouve cette 
date et sa marque. Sans doute que la mort funeste de Henri III 



(i) Robert Dumesnil, t. H, n» 52. 



268 

et les troubles, dont la France se vit agitée, lui firent prendre 
le parti de s'en retourner dans son pays. On dit qu'il y mou- 
rut fort Agé. Â en juger par le tableau qui est à Paris, Jérôme 
Franck semble avoir voulu imiter la manière de dessiner et 
de composer de Fr. Floris, qui, toute sauvage qu'elle étoit, 
étoit alors en estime auprès de bien des gens. Dans un livre 
de la description des tableaux d'Anvers, on fait Jérôme Franck 
fils de François dit le vieux. Je crois plus vraisemblable de le 
lui donner pour son frère. Sans cela les dattes, qui regardent 
ces deux peintres, auroient peine à se concilier. 

FRANCK (niqolas), né à Lerentals près d'Anvers, est, dit- 
on, la souche d'où sont sortis tous les peintres du nom de 
Franck. 11 mourut, dit-on, dans cette ville en 1596. On le fait 
père de Jérôme qui a travaillé à Paris, de François Franck, 
dit le vieux Franck, et d'Ambroise. 

FRANCK (Sébastien) ou Vrank, vivoit à Anvers en même 
temps que Yan Dyck, qui fit son portrait et qui l'inséra dans 
la suite des cent Portraits. Il y est qualifié de peintre de ba- 
tailles en petit. Je ne le crois pas de la même famille que les 
autres Franck, puisqu'on lui donne un nom écrit différem- 
ment ; mais il est pourtant vrai que Franck ou Yranck se pro- 
noncent de même. Descamps le fait aussi peintre de paysage, 
et place sa naissance en 1573. Il y a dans le cabinet de l'em- 
pereur à Vienne des tableaux (t. II, p. 27) qui représentent 
des veues intérieures d'église dans la manière de Steenvyck, 
qu'on donne à Sébastien Franck. Corn, de Rie, p. 100, l'ap- 
pelle, ce me semble, Frandc. 

FRANCO (battista). Depuis que j'ai vu, chez M. le duc de 
Tallard, un tableau d*un portement de croix qui est indubi- 
tablement de Rattista Franco, j'ai conçu de ce peintre une 



269 

beaucoup plus grande idée que j'en avois eu jusqu'alors. Ce 
tableau est peiot dans les bons principes, et ne fait point tort 
à récole vénitienne dont il est sorti. On y reconnoit aussi un 
peintre qui a étudié à Rome sous Périn del Vague, et qui, 
tout maniéré qu'il est, plaist par des tours agréables et heu- 
reux qu'il a sçu donner à ses figures. La composition est riche 
et bien ordonnée. Tout cela avoit fait croire à ceux qui ont 
vendu le tableau à M. de Tallard qu'il falloit lui chercher un 
nom parmi les peintres qui s'étoient distingués dans l'école 
romaine, et ils n'hésitèrent point de lui imposer celui de Da- 
niel de Yolterre, sous lequel ce tableau a été acheté et sous 
lequel il s'est montré. 11 est pourtant vrai qu'il est de Franco. 
C'est sa manière, laquelle est très-reconnoissable, et, de plus, 
l'on en a l'estampe gravée par lui-même (1). Ce peintre a 
gravé, et, si l'on y prend garde, le paysage du Titien, où 
est un homme conduisant par la bride un cheval, est un de 
ses ouvrages. 

— A propos du Déluge universel^ gravé par Baptiste 
Franco (2), Mariette ajoute : Cette pièce est certainement de 
l'invention de Polidore de Carravage. M. Crozat en a le des- 
sein original fait par ce fameux peintre. 

FRANÇOIS (jEAN-CHARLEs), graveur des desseins du cabi- 
net du roy, est né à Nancy, le 4 mars 1717, et il est mort à 
Paris, le 21 mars 1769. Il est un des premiers qui ait essayé 
à graver dans une manière qui rend à l'impression le grain 
des crayons. D'autres ont sans doute perfectionné cette mé- 
thode et ont pu imaginer d'autres moyens que le sien; mais 
il faut lui rendre justice, il leur a ouvert la porte, et c'est 



(1) Bartsch, vol. XVI, p. 123, n<» il ; il ne parle pas du paysage 
d'après le Titien. 

(2) Bartsch, appendice, n« 3, t. XVI, p. 158. 



870 

beaucoup que d'avoir le mérite de Tinvention. Il commença 
ses opérationsen 1740; de nouveaux essais, qu'il produisit en 
1753, reçurent des applaudissements qui l'encouragèrent à 
continuer son travail, et il se vit en état de présenter à l'Aca- 
démie royale de peinture quelques morceaux, dont la com- 
pagnie crut reconnoître l'utilité et auxquels elle ne fit point 
difficulté de donner son approbation , ce qui valut à l'auteur 
le titre de graveur des desseins du cabinet du roi et une pen- 
sion, dont M. le marquis de Marigny lui fit délivrer le brevet 
en 1758. Il jouissoit des mêmes avantages auprès du roi de 
Pologne, duc de Lorraine, toutes choses que j'ai extrait d'une 
lettre qu'il écrivit à M. Savérien sur l'utilité du dessein, etc., 
imprimée en 1760et depuis augmentée en 1767. On aquelques 
portraits qu'il a gravés au burin, et plusieurs autres planches 
dans différents genres, dans toutes lesquelles il ne s'est mon- 
tré qu'un artiste assez médiocre. 

FRANÇOIS (sihon) s'étoit consacré à Dieu dès sa plus ten- 
dre jeunesse, et n'avoit encore pris aucun parti, lorsqu'ayant 
veu par hazard un tableau de la Nativité de Notre-Se^neur, 
dont il fut sensiblement touché, il iorma sur-le-champ, mal- 
gré ses parents, le dessein de se faire peintre. Ainsy ce ne fut 
point une inclination naturelle ni l'envie d'acquérir une 
grande réputation, qui luy fit choisir cette profession ; il ne 
l'embrassa que dans la veue de s'entretenir dans la piété en 
peignant des tableaux où il luy fût permis de produire les 
idées saintes qu'il nourrissoit dans le cœur. Toute sa vie se 
passa dans la pratique de la vertu, et par là il mérita une 
gloire beaucoup plus durable que s'il s'étoit distingué par ses 
ouvrages au-dessus de tous les autres peintres ; son principal 
mérite étoit d'être gracieux. Il cherchoit à imiter la manière 
du Guide, qu'il avoit connu en Ilalie, et avec lequel il avoit 
contracté amitié. 



271 

— S. F. en monogramme^ c'est la marque de Simon Fran^ 
çoisy peintre, natif de Tours. Elle se trouve sur une estampe 
d'un saint Sébastien en demi-figure qu'il a inventée et gra- 
vée. Il a pareillement gravé une sainte Madeleine lisant et 
couchée dans sa grotte avec cette marque S. F. (!)• 

FRÂNCUGC] (iHNOGENzio). Oq lit sur un de ses tableaux , 
je crois que c'est celuy de M. ie duc d'Orléans : Innocentitu 
Franchutius Imdensii fadAat. 

FRANQUEVILLE (piETao de), sculpteur, cela est vray, mais 
ce qui suit est un barbouillage digne du père Orlandi; ilfal- 
loit qu'il dit que M. Girardon avoitdans son cabinet plusieurs 
modèles de ce sculpteur, mais il pouvoit encore adjouter 
plusieurs circonstances qui regardent cet artiste et qu'il au- 
roit apprises dans Baldinucci, à l'article de Jean de Bologne, 
dont Franqueville étoit le diciple, s'il eût voulu se donner la 
peine de les y chercher. Voyez plus bas à l'article de Pietro 
Francavilla ; c'est un double employ de celui-cy. 

— Suivant l'inscription qui est au bas de son portrait, gravé 
par P. de Jode, d'après J. Bunel, il devoit estre né en 
1553 et non en 1548; voicy comme elle est conçue : Petrm a 
Francavilla Cameracensis GalL et Navar. Régis Christianise^ 
architect, etproto sculpter, academicus Florentintis, et obegre- 
gia artis opéra civitate Pisana donatus, M. VI^. XIII JE. 60. 
Cependant il y a un portrait de ce sculpteur, peint par le 
Paggi, avec une inscription qui le lait né en 1548; voy. Bal- 
dinucci ; peut-être est-ce une faute de gravure et qu'au lieu 



(1) M. Robert Dumesnil a catalogué les deux pièces gravées par 
lui, tome III, p. 20. — Dans Tégiise des Incurables se trouve sur 
Tau tel de la Vierge, dans la croisée de droite, en face du tombetu 
du cardinal de la RochefoucauU, un tableau de la Fuite en Egypte 
de la composition de Simon François; mais le mauvais état ne 
permet pas de dire si c'est Toriginal ou une bonne copie du temps. 



272 

de VIU on a mis XIII. En 1548 il étoit encore à Florence ; il j 
fit dans cette année deux statues pour la magnifique entrée 
de Christine de Lorraine dans cette ville. 

FREDEÂU (ambroise). On le regarde à Toulouse comme 
un grand peintre et un grand sculpteur; il s'étoit fait augus- 
tin, et l'on voit dans Téglise de ces religieux, à Toulouse, 
plusieurs autels dont les tableaux, les sculptures et l'archi- 
tecture ont été exécutés par lui et méritent d*étre vus. U a 
servi de maître à Jean-Pierre Rivais ; on juge par là qu'il 
travailloit dans le milieu du 17* siècle. 

FREHIN (RENÉ), n passa en Espagne en 1721, et, pendant 
tout le temps qu'il y a demeuré, il a partagé avec M. Thierry 
tous les ouvrages de sculpture qui se sont faits pour le roy 
d'Espagne , tant à Madrid qu'au ch&teau de S.-Udefonse et 
dans les autresmaisonsroyales. Sa Majesté Catholique lui ac- 
corda le titrede son premier sculpteur et des lettres de noblesse, 
et le récompensa si dignement de ses ouvrages que, lorsqu'il 
est revenu en France en 1738 , il y étoit d'une richesse im- 
mense ; il se fit secrétaire du roy , fit pourvoir un de ses fils 
d'une charge de mattre des comptes, le maria richement avec 
la fille du sieur Rondet, marchand de bijoux , et vécut dans 
l'opulence , car il n'a plus manié depuis le ciseau. Il ne faut 
pas croire au reste que ce soit l'habileté qui ait fait la for- 
tune de M. Fremin; il avoit du talent, mais il s'en falloit de 
beaucoup que ce fût un homme de la première volée; un peu 
de manigance a suppléé à ce qui lui manquoit du côté de l'art 
et en a fait un sculpteur heureux. Il e^t mort à Paris le 17 
février 1744; il étoit pour lors directeur de l'Académie de 
Peinture et Sculpture (1). 



(i) Voyez sur Fremin la notice de M. de Yalory, qui se ttx>uvera 



273 

FREUINËT (hartin) étoit de Paris ; on apprend cette par- 
ticularité d'une estampe, représentant la sainte famille , gra- 
vée à Rome, d'après ce peintre, par Ph. Thomassin qui a en- 
core gravé quelques autres morceaux d'après Freminel en 
1589, 1591 et 1592 ; c'étoit le temps que Freminet étoit à 
Rome ; il n'avoit que 20 aos en 1589 , supposé iqu'il ne fût 
âgé à sa mort que de 52 ans. M. Dargenville a écrit, peut-être 
un peu trop légèrement, que Freminet est mort à Paris; je 
croirais plustost que ce fut à Fontainebleau, et encore plustost 
à l'abbaye de Barbeaux, à trois lieues deMelun, où il est pos- 
sible qu'il se fût retiré pour s'édifier et songer à son talent, 
car il y est enterré et on y lit son épitaphe. 11 est mort en 
1619, âgé de 52 ans. Abrégé de la vie des peintres par Dar- 
genville. 

— D. O^M.S--SJste sis (hic ?) viator, etperlege. Jacet hicFre- 
minetus cujus penicillo debemus quod Gallia jam suo gloriatur 
Apelle, quem nasci voluerant oculorum deliciae ; rex , aula , 
virtus, (si per lata liceret) voluissent immortalem, postquam 
artis suse nobilitavit lumen et umbrasistas hic reliquet illud 
venus obtinet. Obiit anno S. R. M. D. C. XIX. die XVillS 
mensis junii. 

Je vous envoyé, mon cher ami, l'épitaphe de Freminet 
que vous m'aviés demandée il y a longtemps, et qu'on a co- 
piée fidellement sur le tombeau ; je vous embrasse bien ten- 
drement, L'abbé Barthélémy. 
Lundi 25 mars, rue Golbert. 

FREY (gugouo). U est né à Lucerne en 1681 et est mort à 
Rome le 11 janvier 1752. Voyez sa vie dans le second vol. des 
Vies des Peintres suisses par Fusslin, p. 232. 



dans le second volume des Mémoires inédits sur les académiciens^ 
p. âOl-0. 

T. n. r 



274 

FDHIANI (a!Itoinb), peintre véoitieD, florissoit au commen- 
cement du xviii* siècle et visoit» dit le Guarienti , à la ma-^ 
Qière de Paul Veronèse ; il ne manquoit pas de génie, mais je 
trouve qu'il avoit bien du chemin à faire avant que d'arriver 
au but qu'il se proposolt. L'auteur de la nouvdle description 
des peintures de Venise, 1753, se contente d'en dire un mot; 
mais, dans son ouvrage intitulé : délie Pitt. Venez, p. 4-11, il 
nous apprend qu'il avoit eu pour maître à Bologne Domini* 
que degli Ambrogi, et qu'il est mort à Venise en 1710 &gé de 
67 ans ; il se nomme Jean-Antoine. 

FUSLI (nATHiAs), né à Zurich en 1671* Un penchant natu- 
rel le portoit à être peintre de portraits ; mais il lui fut de né- 
cessité de se conformer aux volontés de son père qui voulut 
en faire un peintre d'histoire, et qui n'en fit qu'un peintre 
médiocre. Il l'envoya à Rome à l'école de Benedetto Luti, qui^ 
charmé de sa docilité, de son application au travail et de sa 
bonne conduite, lui accorda son amitié; il l'envoya dessiner 
d'après Raphaël, au Vatican, et, comme il manquoit de voca- 
tion, ce fut sans succès; il n'en fut pas de même de la beauté 
de son ftme, elle se montroit et prenoit de nouvelles forces à 
chaque instant. Kupetzki étoit alors à Rome sans occupation, 
mourant presque de faim ; Fûsli le rencontre^ le fixe, lui de- 
mande la cause de son abattement, partage sondtner avec lui, 
lui cherche et lui procure de l'ouvrage, et telle fut la source 
de cette amitié intime qui régna entre les deux artistes durant 
toute leur vie. Fûsli demeura à Rome pendant neuf ans , et 
n'en sortit que lorsqu'il plut à son père de le rappeler ; il re- 
vint à Zurich , y fit peu d'ouvrages et menoil une vie tran- 
quille ; il y mourut en 1736. Fusli, vie des P. suisses, t. II 
de la nouvelle édition. 

N. B. Il ne faut pas confondre cet artiste avec celui du 
même nom, dont Sandrart a fait mention; ce sont deux bom- 



275 

mes différents, et celui de SsDdrart est fort antérieur, M. Fûsli 
le in te pareillement dans son livre au 1. 1. 

GABBUBRI (paANçois^HAAiE-NiGOLÀs], d'une famille noble 
de Florence, étoit passionné pour Tart de la peinture, et je 
me loue beaucoup de sa correspondance. Si ses facultés 
avoiçnt pu répondre à son zèle, sa collection d'estampes et 
de desseins seroit devenue une des plus considérables qu'on 
eût vue en Italie. Mais obligé dejestreindre ses dépenses et à 
se contenter de ce qui se présentoit à achetter à Florence, 
n'étant pas d'ailleurs assez difticile sur le choix des objets 
qu'il recueilloit, sa collection fut trouvée à sa mort plus nom- 
breuse que belle. Telle qu'elle étoit, elle a été acbettée de ses 
héritiers par un Anglois nommé Kent, en 17..,, et exposée en 
vente à Londres; elle n'y a pas eu beaucoup de faveur, chose 
assez singulière, car tout ce qui vient d'Italie est réputé bon 
pour les Anglois. M. Gabburri est louable, en ce qu'il a sauvé 
de l'oubli nombre de belles peintures^ que le temps, joint au 
peu de soin qu'on en prenoit, a été sur le point d'anéantir. 
Nous lui devons aussi la publication de plusieurs ouvrages 
sur la peinture, entr'-autres ce qui restoit à imprimer de l'ou- 
vrage de Baldinucci, ainsi qu'on nous l'apprend dans l'avis 
aux lecteurs, à la tête du vol. qui contient les vies des artistes 
des nie et IV® siècles depuis le renouvellement de la peinture, 
et une réimpression de l'excellent Riposo del Borghini^ qui 
étoit devenu un livre très rare. Pendant longtemps il a sou- 
tenu la mourante Académie de dessin à Florence,dont il étoit 
le lieutenant ou plutost le représentant du grand Duc. Il est 
mort à Florence en 1742. Sa vie, écrite par le Verai, a été im- 
primée dans le I^'vol. du livre intitulé : Memorabilia Florent, 
erudit. prœstantium, publié par le docteur Lami. Il dessinoit 
passablement; Onorio Marinari lui en avoit enseigné la pra- 
tique. 



276 

GABRIEL [JACQUES jtles), chevalier de l'ordre de Saint 
Hichelt premier architecte du roy , charge dans laquelle il 
avoit succédé à H. de Cotte en 1736, et premier ingénieur des 
ponts et chaussées, mort à Fontainebleau le 23 avril 1742, 
âgé de 76 ans. Ange-Jacques, son fils , a été nommé par le 
roy à la place de premier architecte dans le mois suivant. Le 
père étoit expert dans la conduite du bfttiment, mais il n'au- 
roit pas pu dessiner le moindre bout d'ornement. Est-ce là être 
architecte?Et comment un piemierarchilecte peut-il bazarder 
de juger sur les ouvrages des artistes qui lui sont soumis , 
quand il est lui-même dépourvu de connoissances qui sont 
si nécessaires pour diriger ses décisions. Son père, nommé 
Jacques, avoit été employé h la construction du Pont RoyaL 
Le fils a beaucoup bâty dans Paris. Il étoit parent de Jules- 
Hardouin Hansart et il lui devoit sa fortune. 
• 

6ABRIELLI (oNOFRio) de Messine, a peint à fresque dans le 
palaisde Sermeola, appartenant aux comtes Borromée de Pa- 
doue, pour lesquels il a beaucoup travaillé ; il demeuroit 
chez eux. Le Rossetti, Pitt. di Padova p. 314, fait mention de 
ce peintre et de quelques-uns de ses ouvrages, mais ne dit 
point le temps qu'il vivoit. 

GAETANO (gio-battista). J'ai vu une suite de 34 petites 
planches, grandeur d'un in-24o , qui représentent la vie du 
B. H. Toribio, arch. de Lima, gravées à Rome par B. Thi- 
boust sur des desseins de ce peintre que je ne vois point 
nommé ailleurs. Sa manière a du grand, et je ne la puis com- 
parer à celle d'aucun peintre moderne dans un petit espace. 
Dans un petit espace il fait avec peu de figures paroistre un 
grand sujet. Je pense que cette suite, dédiée à la reyne d'Es- 
pagne, Marie-Louise de Bourbon, par Jean François de Valla- 
dolid, chapelain de S. M., est rare, car elle ne m'est encore 



177 

tombée sousla main qu'une seule fois; les planches en seront 
passées en Espagne. 

GÀGINI (ANTOINE), sculpteur de Palerme et contemporain 
de Michel-Ange, qui faisoit grand cas de sa façon de drap- 
per. Voy. p. 181 de l'Abeced. 

GAGLiARDl (Philippe], Romain, peintre de perspectives, 
a fait les desseins de toutes les veues qui se trouvent dans le 
livre des Hesperides du F. Ferrari jésuite. Cet auteur fait 
beaucoup valoir les talents de son peintre (pag. 133), et je ne 
doute pas qu'il n'ait dit vrai. 11 écrivoit vers l'année 1640 (1). 

GAJETANO (sopione). C'est ainsi que se trouve son nom, 



(1) C'est à la suite d'une vue d'un casin au milieu d'un jar- 
din, gravée par Cl. Goyrand : a Et hac pagina horteusis optices, 
aliisque consimilibus à te adjungendis tuae prospicis gloriae, Phi- 
lippe ; brevibusgue lineis longo prospeclu fallentibus longissimam 
tibi lineam ducis memorabilis aeternitatis. Fuerint alia tua opéra 
sane praeclara , quibus amplissima spatia in angusto splendide 
mentiris, mundumque amplificas in arcto. Sed opus hoc cedro dig- 
num, oui laborasti ; ea, inquam, cedro, cujus aurum, quam cedri 
alterius su cous, efiicacius, optime de se meritis insignibus viris 
allinit famae immortalitatem. Denique in hac aureà seenâ medica- 
rum arborum, te arma putatoria resecandis vitiis ministrante, pe- 
rennantium, spectaeulum exhibes perpetuo virentis nominis tui. » 
Hesperides, sive de malorum aureorum culturâ et usu libri qua- 
tuor, J.-B. Ferrarii Seneusis soc. Jesu. Romae. 1646, in-f», p. 133. 
Les autres planches, d'après le Gagliardi, sont p. 147, 153, 457. 
Outre les planches de botanique, et quelques statues antiques, il 
y a dans le môme volume des planches de Greuter d'après Piètre 
de Gortone (front.), de Bloemart d'après Albane, p. 51, d'après 
Sacchi, p. 87; d'après Poussin, p. 97 — le musée des dessins du 
Louvre en possède l'admirable dessin — d'après Romanelli, p. 277 ; 
de Greuter, d'après le Guide, p. 343; de Bioemaert, d'après le 
Bominiquin, p. 417 ; de Greuter, d'après Lanfranc, p. 447 ; à côté 
de ces planches le texte offre sur tous ces peintres un passage 
élogieux que devront reprendre ceux qui pourraient s'en occuper. 



in 

m 

écrit par lui-même, sur un tableau qu'il a peiût et) 1576; il 
mourut à Rome sous le pontificat de Sixte V, c'est-à-dire entre 
les années 1585 et 1590, d'une colique deïniserere. Ses portraits 
sontdu dernier fini ; dans celui que j'ai sous les yeux, et qui est 
celui d'un cardinal, il y a une barbe dont on peut compter 
tous les poils. On vante beaucoup le pinceau de Gérard Dou, 
dans ces sortes de détails ; celui de Gaetano n'est pas moins 
surprenant; tous deux vont de pair. 

GÂLÂNINO (baltuasar). Je connais deux portraits gravés 
d'après ce peintre par Luc Ciamberlan ; l'un est celui d'un 
musicien, Barthélémy Grassi de Luques, et celui de Jean 
Guillaume de Colle, dont les poésies ont été mises en chant 
par le susdit Grassi ; apparemment que ces deux portraits 
ont été faits pour être mis dans le même livre. Je ne crois 
pas qu'il y ait eu d'autres pièces gravées d'après ce peintre, 
qui a peint des portraits dignes des Carraches. 

GÂLEOTTI (bastiano) est mort à Parme vers l'année 1735. 
A en juger par ses desseins, dont j'ai quelques-uns, c'étoit un 
grand praticien dont le génie étoit facile, mais qui ne s'occu- 
poit guère de mettre de la correction dans les choses qui sor- 
toient de ses mains. Il est fait mention de lui dans la des- 
cription des peintures de Crémone par Panni. Voyez sa vie et 
son portrait dans la première partie du second vol. des Por- 
traits des Peintres, peints par eux-mêmes, publié par Ant. 
Pazzi; il y est dit qu'il est mort plus que septuagénaire dans 
le territoire de Gennes, et, comme on place sa naissance dans 
ceUe ville en 1676 , il faut que celui qui m'a vendu les des- 
seins de Galeotti et qui m'a donné la datte de sa mort, se soit 
trompé, et qu'a(U lieu de 1735 il n'ait voulu 4ire 1745 ou 
peut^tre 1746. 



V 



279 

GâLESTRUZZI (ôio-battista), diciple de François Furini, 
excellent peintre florentin. BcMinwxi.Part. 1. secy., p. 264. 

GALETTI (filippo-biaria), frère théatin,étoit de Florence, 
où il naquit en 1636 et il y mourut le 23 février 1714. 
Voyez sa vie et le détail de ses ouvrages dans le tome III du 
recueil des portraits de peintres de la galerie de Florence, 
page 275. Il étoit disciple de Dandini. 

GÂLILEI (alessandre), Florentin, architecte, qui a bâti le 
portail de l'église de Saint-Jean de Latran à Rome, mort en 
cette viUe le 23 décembre 1737. Il étoit né en 1691. 11 étoit 
bon mathématicien. L'auteur de la Vie des architectes lui a 
donné place dans son ouvrage. 

GALLE (corneille] le vieux. L'Église romaine, soutenant le 
chapeau de prélat au-dessus de l'écusson des armes d'un sei- 
gneur flamand, de sable au chef d'argent, placé au milieu de 
la Religion et de laNoblesse, celle-cyfoulantà ses pieds l'Envie 
et l'autre l'Hérésie ; gravée en 1648 par Corneille le vieux. 
L'inscription qui est au bas est remarquable : C Galle sculp. 
œtat. 72> 1648 , d'où l'on apprend l'âge du vieux G. Galle ; 
cette pièce se sent bien de la vieillesse de cet excellent gra- 
veur. 11 y a encore un' reste de l'intelligence, mais plus de 
maniement de burin. 

GALLE (piuppo). Vasari en fait mention, t. III, p. 270, en 
parlant de quelques graveurs qui vivoient dans les Pays-Bas 
en mesme temps que Lambert Suavius. Il le fait natif d'Har- 
lem. En effect, Philippe Galle a gravé une grande quantité 
de pièces, dans sa jeunesse, d'après les desseins de Martin 
Heemskerck, qui vivoit pour lors à Harlem. Il y en a, parmy, 
plusieurs qui tiennent de la manière de graver de ThéodofB 
Goomhert, qui travailloit aussy dans le mesme temps à Har- 



280 

lem, d'apiès Heemskerk, ce qui me fait croire que Philippe 
Galle étoit son disciple, d'autant plus volontiers que Coorn- 
hert estoit plus âgé et que Ton trouve de ses estampes dès 
Tannée 1549, au lieu que Ton n'en connott point de Philippe 
GaUe avant l'année 1556, et il n'esloit même pour lors âgé 
que de 19 ans, car il étoit né en 1537. Dans la suitte il vint 
s'établir à Anvers, et y continua dans l'exercice de son art. n 
y mit au jour quantité de desseins de J. Stradan, que celui-cy 
lui envoyoit d'Italie ; il en grava luy-raesme une partie et se 
fit aider par ses deux enfans, Théodore et Corneille Galle, 
qui avoient appris sous luy la graveure. Philippe Galle avoit 
aussy une fille nommée Juste, qu'il maria à Adrien CoUaert. 
Il mourut à Anvers en 1612, âgé de 75 ans. Voicy l'inscrip- 
tion qui est sur sa tombe dans l'église cathédrale d'Anvers : 
Philippus GoIUbus fnortuus anno 1612, œtatis 75. Philippe 
Galle n'a rien gravé qu'au burin ; sa manière étoit sèche, 
mais artiste ; sur la fin, c'est-à-dire vers l'an 1586, elle estoit 
plus libre qu'auparavant. 11 dessinoit assez correctement, 
quoyque de petitte manière ; il a gravé plusieurs morceaux 
de son invention, et plusieurs autres, aussy de son dessein, 
ont été gravés par Théodore Galle, son fils. H. Goltzius a 
gravé son portrait. 

— Par Tinscription sur la tombe de Philippe Galle dans 
l'église cathédrale d'Anvers, où je l'ay leu, l'on trouve que ce 
graveur est né en 1537 et qu'il est mort en 1612, âgé de 75 ans. 

— M. S. I. et G. 1. se trouvent sur une très-belle pièce 
exécutée en clair-obscur, où l'on a représenté une nymphe 
vue par le dos. Les lettres sont les initiales de Mareus Senen- 
M invenU^ et de Gallus incidiL 

GALLOCHE (u>uis) est mort à Paris le 21 juillet 1761. U 
étoit depuis 1754 chancelier de l'Académie Royale de pein- 
ture. G'étoit un homme qui connoissoit parfoitement la théo- 



281 

rie de son art, et qui étoit recommandable par la douceur de 
son caractère et par la pureté de ses mœurs. Il aimoit la mu- 
sique^ et je me souviens d'un discours qu'il lut à l'Académie, 
et dans lequel il fit entendre que la peinture, ainsi que la mu- 
sique, étoient soumises aux lois de l'harmonie, et que c'étoit 
de là que l'une et l'autre tiroient leur principale beauté. 11 
avoit été admis dans l'Académie en 1711, et il étoit flgé de 
91 ans moins un mois au jour de son décès. Il a eu la gloire 
d'avoir servi de mattre au célèbre Le Moyne. Si tous les ta- 
bleaux qu'il a fait avoient ressemblé à celui qu'on voit aux 
Petits-Pères de la place des Victoires, dans leur réfectoire, 
nous n'aurions guères eu de plus grand peintre. Né le 24 
août 1670 à Paris. 

6ÂMBÂRÂ (lattanzio). S'il faut en croire knX^ Campo, 
historien de Crémone, Lattanzio de Bresse, surnommé il 
Gambara, étoit disciple de Giulio Campo, frère d'Antoine ; 
c'est donc mal à propos^qu'on le iait icy disciple d'Antoine. 
Il prise beaucoup ses peintures faites dans le dôme ou église 
cathédrale de Parme. — Campo, Storia di Cremona^ p. 51. 

6AMBÂR1NI (gioseffo). Sa vie, écrite par le Zanetti, son 
ami, se trouve dans l'histoire de l'Académie Clémentine, et 
l'on y remarque qu'il a iort bien réussi dans les sujets de 
bambochades. J'en ay vu deux, qu'un de ses amis a apporté 
de Boulogne. L'un représente des femmes qui font la lessive; 
l'autre un enfant qui joue dans son berceau, accompagné de 
sa mère et de son père. On ne peut disconvenir qu'il n'y ait 
de la naïveté ; mais ils ne sont ni peints ni dessinés dans la 
grande manière ; la touche du pinceau est molle, et le des- 
sein est aussi foible. Cependant ces tableaux ont de quoi 
plaire; mais ils ont en même temps de quoi faire regretter 
ce goût mâle dont les Carraches avoient enrichi l'école de 



282 

Boulogne, et dont il ne reste pas le moindre vestige dans 
cette école, quoyque protégée, quoyque cultivée autant 

nii'ann 1a fut înmiiia 



qu'elle le fut jamais. 



GAMBELLO (vETroB). Eneas Yicus en fait mention dans 
son livre intitulé : Discorsi sopra le medaglie di gli antichi, 
p« 67. 11 le met au nombre de ceux qui ont excellé de son 
temps dans l'art de graver en creux des coins de médailles et 
de contrefaire celles des anciens. — Il est nommé, dans une 
dissertation sur les pierres gravées insérée dans le Mercure 
de février 1783, Victor Camelius; l'on y dit qu'il a gravé 
lui-même son portrait, avec la date 1508, et que c'est un 
fort beau morceau. Cela est vrai, et j'ai cette médaille. 

GANDINI (AirroiNE). Averoldi, dans la description des 
peintures de la ville de Bresse, asseure en plusieurs endroits 
que ce peintre ^toit disciple du jeune Palme et qu'il pei- 
gnoit dans le même caractère ; il convient qu'avant de tra- 
vailler sous le Palme il avoit travaillé sous Paul Véronèse, 
mais qu'il étoit resté peu de temps sous ce grand maistre. Il 
ne dit pas un mot du goût que le Gandini avoit pris pour la 
manière du Yanni. Le Gigli le fait naître à Trente, et, comme 
il vivoil avec lui, que l'un et l'autre habitoient la même ville 
de Brescia, il faut s'en rapporter à ce qu'il écrit. Gandini 
s'éloit venu établir à Bresse; il en avoit fait son domicile, et 
cela lui avoit fait acquérir le droit de bourgeoisie dans cette 
ville. 

GAROFALO (benveiiuto tisio da), dans le Ferrarois. 
Hasini, 1. 1, p. 616, est d'accord avec le Yasari sur l'année de 
sa mort; mais il lui donne deux années de vie de moins. Il 
n'étoity selon lui, Agé que de 78 ans lorsqu'il cessa de vivre» 
et c'est à quoi il s'en &ut .tenir; car, selon l'auteur de la des* 



I 



283 

criplion des Peintures de Ferrare, p. 10, le Garofalo nacquit 
en 1481 . Son premier maître fut à Ferrare Dominique Pa- 
nelli. En 1498, il se transporta à Crémone. Il s'y mit sous la 
direction du Boccacino. Il fit ensuite un voyage à Rome, qui 
ne fut que de quelques mois. Il en partit le 7 avril 1500 pour 
se rendre à Mantoue, où il entra dans l'école de Laurent 
Costa, et, en 1505, il revint à Rome et y travailla pendant 
deux ans sous Raphaël, dont il se rendit le sectateur, de ma- 
nière qu'on voit souvent de ses tableaux qu'on ne fait pas 
difficulté d'attribuer à ce grand homme. De retour à Ferrare, 
il s'y fixa et continua d'y opérer avec succès. En 1530, il 
perdit un œil, et vingt ans après, en 1550, il fut entièrement 
privé de la veuë. Il cessa de vivre le 6 septembre 1559, et il 
fut inhumé dans l'église de S*«-Marie in Vado, où il s'étoit 
préparé une sépulture. Il avoit de la couleur ; ses tableaux 
sont bien empâtés; ils sont vigoureux de couleur. Il a peint 
nombre de petits tableaux, et cependant il s'en trouve quel- 
ques-uns à Ferrare où les figures sont plus grandes que le 
naturel. Ses ouvrages en détrempe ou à la fresque parois- 
sent peints à fhuile. Tout ce qui est sorti de sa main montre 
une grande intelligence du clair-obscur. Sur un tableau dans 
l'église de S^François, à Ferrare, dont il est fait mention 
dans la description des peintures de cette ville, p. 125, il a 
écrit son nom ainsi ortographié : BENVENUTUS GAROPHO- 
NIUS MOXXrV PINXIT, ce qui pourroit faire douter que le 
sobriquet de Garafolo ne lui ait été appliqué, ou à cause que 
sa coutume étoit de peindre un œillet dans ses tableaux; 
aussi n'en est-il rien dit dans ladite Description des Pein- 
tures de Ferrare, où l'on trouve une notice assez exacte 
concernant ce peintre habile. Vous verrez que le nom de 
Garofalo est celui du lieu où le peintre a pris naissance, et 
qu'au lieu de Garofalo il falloit écrire Garofano. J'observerai 
cependant que sur ces tableaux^ dans l'église des Religieuses 



28A 

de S. Bernard à Ferrare, l'un qui porte la datte de MDXXXI, 
et l'autre MDXXXVIU, on Ut : GRATIS PINXIT BEVENUTUS 
DE GÂROFOLO. Cette différente façon d*ortographier son 
nom est une singularité (1). 

GARRl (luigi). Avant que d'entrer chez André Sacchi, il 
avoit commencé à apprendre à dessiner chez Salomon Bac- 
cali, peintre de paysages. Sa grande facilité lui a fait pro- 
duire une très-grande quantité d'ouvrages considérables. 
Pendant qu'il fut à Naples, il a peint avec une célérité mer- 
veilleuse le plafond de l'église de S^ Catherine de Formelio, 
la galerie du prince de Cellamare, et plusieurs pièces dans le 
palais. Depuis son retour à Rome, il a continué d'enrichir 
les églises de cette ville de ses ouvrages, et son ftge, quoy- 
qu'avancé, ne l'empêcha point d'opérer avec la même viva- 
cité. — Mss. du S. Pio en 1716. 

GASCAR (henry). Il étoit né à Paris, et il est mort à Rome 
le 18 janvier 1701, âgé de 56 ans. Liste des membres de 
l'Académie royale de peinture, dressée par Reynez. Gascar y 
avoit été admis. — Graham a fait observer que Gascar, qui 
commençoit à s'apercevoir qu'il ne jouiroit pas toujours de 
sa réputation en Angleterre» et qu'on reviendroit bientôt de 
la faveur dans laqueUe étoient ses ouvrages, quitta le pays 
et passa en Italie, où heureusement pour lui il trouva encore 
de nouveaux partisans. On a le portrait de Lafond, gazetier 
hollandois, qu'a gravé P. Lombart d'après le tableau de 
H. Gascar, peint en 1667, et l'on peut assurer que, si ce 
peintre avoit toujours composé ses portraits comme il a fait 



(!) Voyez Vita di Benvenuto Tisio da Garofolo e di Giovan Fran- 
eesco Barbieri traite da an codice délia Marciana. Venezia, Per 
le nozze Saggini^];roiDer, 1842, iu-a», 100 exemplaires. 



285 

celui-ci, on pourroit le ranger parmi les meilleurs peintres 
du genre. Il ne devoit pourtant avoir alors que vingt-trois 
ans, supposé que les dates que Reynez m'a fourni soient 
exactes; mais je commence à en douter (1). (Notes sur Wal- 
pôle.) 

6ÂSPÂR1 (jean-baptiste) , d'Anvers. Ce Baptiste Gaspari 
étoit peintre de fleurs, et voilà pourquoi H. Walpole avertit 
qu'il ne le iaut pas confondre avec Baptiste Honnoyer. (Notes 
sur Walpole.) 

6ASSEL (luc), de Helmont. Son portrait fut gravé en 1529 
par Binck, et depuis par Jean Wierx, dans la suitte des poi;- 
traits des peintres flamands morts avant Tannée 1572, mise 
au jour à Anvers chez la veuve de Jérosme Cock. Lampso- 
nius loue surtout sa probité dans les huit vers latins qu'il a 
mis au bas de ce portrait ; et comme 11 l'appelle du nom de 



(i) Le département des manuscrits de la Bibliothèque impériale 
possède, sous le n» 1846 du supplément français, un manuscrit en 
3 volumes in-4<>, de la main de Mariette, qui sont une traduction de 
la première édition des Anecdotes ofpainting de Walpole. Elle se- 
rait, comme traduction, inutile maintenant pour puolier le Wal- 
pole en français, car il y faudrait suivre la dernière édition de Wal- 
pole, et joindre les notes, rectifications et les additions de nallaway 
et de Warnum. La publication en France de Walpole serai ttrès-heu- 
reuse, car il est très-curieux, non pas seulement pour ce qui est 
de Tart de son pays, mais pour les artistes étrangers, Italiens, 
Allemands ou Français qui y sont venus, et sur lesquels on trouve 
là précisément les renseignements qui manquent aux écrivains de 
leur propre nation. Par là c'est un livre général, et qui mériterait 
d'être plus employé qu'il ne Test. En même temps qu'il le tradui- 
sait, Mariette l'annotait et abondamment. Ce sont ces notes, en 
tant qu'elles se peuvent détacher du texte, que nous donnons dans 
cette publication, en les distribuant d'après l'ordre alphabétique. 
Nous regrettons de ne pas avoir connu ces volumes plus tôt ; car 
quelques notes eussent déjà trouvé place; mais elles se retrouve- 
ront au supplément. 



286 

Sinsoit il est à préjuger qu'il mourut dans un âge avancé» 
«— Uae suite de sept paysages où sont représentés des su- 
jets de l'histoire sainte, savoir : Abraham adorant les trois 
anges ; Jonas pleurant la perte de Ninive ; S. Jean-Baptiste 
baptisant Jésus ; S. Jérosme et S. Antoine. Ils sont gravés à 
l'eau-forte par un ancien maistre, dont on igDore le nom, et 
qui vivoit du temps de Jérosme Goek ; on les croit de l'in- 
vention de Luc Gassel. H, Coch eœcudii, et cette marque L G 
[en manog,) , que je présume être celle de Luc Gassel^ qui 
vivoit pour lors et qui estoit en réputation de bien peindre 
le paysage. Mais, à en juger par ces pièces, il avoit un goût 
bien gothique; les figures tiennent de la nmnière du Breu- 
gbel. 

GATT! (aursuo de'), frère du Soiaro.— Gigli est le seul 
qui en fasse mention dans ces vers : 

Et il Paveso Soiar, felice e degno, 
Con Aurelio suc fratel de* Gatti. 

GATTl (ouviee) , était né à Plaisance, et non à Parme. 

GATTO (geevasio), de Crémone, excelloit à faire des por- 
traits. Antonio Gampo, dans son histoire de Crémone, p»54, 
le met au nombre des peintres ses contemporains. 

GAULI (batista). — Le Bachiche avoit une intelligence 
merveilleuse, et son génie le portoit à exécuter de grandes 
machines. Il faut croire cependant que ce génie avoit besoin 
d'être aidé ; car ce peintre, tout habile qu'il est, n'a paru 
grand et très-grand que lorsqu'il a été soutenu par leBernio. 
Son beau plafond de Véglise de Jésus, ses angles en pendentifs 
du dôme de Ste^Agnès en place Navonne, furent, à ce qu'on 
prétend, autant l'ouvrage du Bernin que le sien ; et si quel- 



287 

qu*un le conteste, il ne pourra disconvenir que, lorsque le 
Bernin fut mort, il sembla que le génie du Bacbiche avoit 
été mis avec celui du Bernin dans le même tombeau. Non 
seulement ses ordonnances n'avoient plus la même beauté ni 
le même enthousiasme; mais on ne vit plus dans son pin- 
ceau ni la même suavité ni la même vagbezze. Il crut avoir 
jusqu'alors péché par défaut de couleur ; il voulut changer 
ses teintes et donner à ce qu'il peignoit plus de vigueur. Il 
n'y eut plus d'harmonie dans ses tableaux; ils parurent durs 
et secs, et ne présentèrent plus rien d'agréable; témoin ce 
qu'il a fait aux SS. Âpostres. Le Bacbiche étoit la main, dont 
le Bernin se servoit pour exprimer en peinture ses pensées 
neuves et piquantes. Cette obéissante main se ployoit à tout 
ce que le sculpteur vouloit; elle ne cherchoit point à épurer, 
ni à rendre cette manière plus correcte : elle y eût perdu. 
Chaque manière demande à être donnée dans son véritable 
caractère ; sans cela elle dégénère et n'est pas supportable. 
Le Bacbiche est né en 1639, et non en 1658. L'inscription au 
bas du portrait de ce peintre, que M. Crozat avoit eu de la 
collection Pio, le dit, et le Pascoli le confirme. 

GAULTIER (Léonard]. Divers sujets de la vie de Jésus- 
Christ, représentés en uue suite de cent quatre petites pièces. 
Il y a à toutes la marque du graveur, et à quelques-unes des 
dattes par où l'on coonoist celles qui ont été gravées en 
1576, 1577, 78, 79 et 80. Ce qui est remarquable, c'est qu'il 
y en a une de celle dernière année où l'on trouve écrit : 
Cum pri. reg. achevé le XX octob. œtatis XIX. 1580., d'où 
l'on apprend le temps précis de la naissance de notre gra- 
veur, que je croirois assez volontiers disciple de mattra 
Etienne de Laulne. 

GEERÂBT. Q y a eu deux peintres du nom de Mare Gai-* 



288 

rard, ou plutôt Geerart, ainsi que le nom s'écrit en flamand, 
tous deux nés à Bruges dans les PaysrBas, et tous deux morts 
en Angleterre. Une Inscription, qui se trouve au pied du 
portrait du fils, gravé par HoUar, nous l'apprend^ et l'on ne 
comprend pas comment M. Walpole a pu l'ignorer, lui qui 
a fait copier ce portrait pour en enrichir son ouvrage. Il n'est 
pas moins surprenant de lui voir mettre sur le compte du 
iils, né en 1561, les gravures des fables d'Ésope, qui, selon 
Van Mander, que M. Walpole traduit, ont paru à Bruges en 
1566, et sont par conséquent un ouvrage qui ne peut appar- 
tenir qu'au père. Celui-ci, que le manque d'occupations et 
les troubles excités par les disputes de religion avoient 
chassé de son pays, se réfugia en Angleterre avec son fils. 
M. Walpole le fait arriver à Londres aux environs de 1580, 
ce qui est très-vraisemblable. Ce que Marc Geerart le père 
faisoit le mieux étoit le paysage ; mais il y mettoit dans la 
touche un soin qui le rendoit d'assez petite manière. Les 
fables d'Ésope, dont il y a eu une seconde édition sous le 
nom de G. Sadeler, qui en a les planches et qui les a retou- 
chées, en donnent cette idée et nous font voir, dans ce qu'il 
y entre de figures, que Geerart les dessinoit dans le goût de 
Franc Flore, le maître qui pour lors étoit le plus en crédit 
dans les Pays-Bas. Je n'ai rien vu du fils; mais, à s'en tenir à 
ce qu'en dit M. Walpole, il paroîl que le genre du portrait 
étoit celui qu'il avoit embrassé par préférence, et c'étoit en 
efTet le seul dont il pût tirer quelque avantage dans le pays 
dont il avoit fait sa patrie. (Notes sur Walpole.) 

GEFFELIN (paul). L'inscription : «Ces pièces sont de Paul 
Geffelin, le rubis des peintres de son temps, x> étoit au bas de 
la première pièce de la suite des triomphes attribués à George 
Pencz. Elle est écrite par un nommé Théodecte Tabourot, 
chanoine de Langres, qui vivoit au commencement de 1600, 



S89 

et qui avoit un cabine t d'estampes dont nous en avons eu quel* 
ques-unes; comme il approche du temps, son témoignage doit 
estre de quelque poids (1) ; en effect, plus je lesconsidère, plus 
je suis porté à ne point croire ces estampes de George Pencz. 

6EPFELS (FRANÇOIS), peintre flamand, étoit à Mantoue 

en 1659. Il y grava la vue de , maison de plaisance dit 

duc de Mantoue, située sur les bords du lac de Garde. 11 en 
avoit fait le dessein sur les lieux, où le prince lui avoit 
pennis de se retirer pour se rétablir «d'une maladie. Cette 
pièce, qui est assez grande, est exécutée avec goût et avec 
esprit. C'est de l'instription qui est au bas que j'ai extrait 
toutes les particularités que je remarque icy. On peut juger 
par cette pièce qu'il étoit peintre de paysage et habile. 

GELDORP (George). Il faut voir ce qu'a écrit Sandrart sur 
la profonde ignorance de Geldorp dans la partie du dessein. 
Il étoit si peu exercé, que, toutes les fois qu'il avoit à peindre 
une tète> il étoit obligé, pour la mettre ensemble, de s'aider 
de poncis dont il avoit provision, ses portefeuilles étant rem- 
plis d'un nombre de tètes dans différentes positions que 
d'autres peintres lui avoient dessinées. Son trait, ainsi placé 
sur la toile, lui étoit un acheminement pour peindre d'après 
nature ses ix)rtraits, qu'il faisoit ainsi à tâtons; et je laisse à 
penser ce que devenoit son travail, et s'il pouvoit sortir de 
son pinceau de fort bonnes choses. Aussi suis-je très-per- 
suadé que c'est uniquement la singularité de la pratique dont 
laisoit usage Geldorp qui lui avoit fait obtenir une place dans 
le livre de Sandrart, quoyque celui-ci ajoute qu'il ne laissoit 



(!) Il était frère d'Et. Tabourot. Voyez les Bigarrures^ èdit. de 
1661, p. 335; en télé se trouve une pièce de vers de Théodecte au 
seigneur des Accords, dans laquelle on retrouve Famaleur. 



T. II. 



190 

pas que de mettre de la ressemblance dans ses portrails et 
qti'il avoit grande vogué. (Notes sur Walpole.) 

GELÉE (cXiAudb). De tous les paysagistes, Claude le Lorrain 
est celui qui a misle plus d'air et de fraîcheur dans ses paysa- 
ges) c'est par où il s'est distingué; car il n'a été heureux ni 
4âDS lé choix des formes ni dans celui des sites ^ qui parais^ 
«mt trop uniformes et trop répétés dans ses compositions. 6e 
Aéfaut est une preuve de son peu de génie; mais, comme il y 
fttppléoit par une conliaissance parfaite de la partie de Thar» 
âSônle, ses desseins, autant que ses tableaux, qui, quoiqu'uti 
peu trop chargés d'ouvrage , font un grand elfet , mériteront 
toujours une place distinguée dans les cabinets. Il en avoit 
formé un volume pour son propre usage, dans lequel il avoit 
rangé lesdesseins de tous les tableaux qu'il avoit peints ; cette 
côUeclion étant passée, toute entière et sans aucun démembre- 
ment, en les mains de milord duc de Devonshire, on ne doit 
plus être surpris si les desseins de ce mattre sont si rares (1). 

— Claude Gelée, dit le Lorrain , étoit commun dans ses sites, 
mais il les rendoit piquans par des effets de lumières qui ne 
sont qu'àlui... De Piles, Cours de Peinture.ll estmort àRome 
en 1682, âgé de 82 ans. 

— Claude le Lorrain a été un parfaiti mitateur de la nature, 
etiln'yaguère eu de peintre qui aitmis plus d'air dans ses ta- 
bleaux; la même intelligence règne dans tout ce qu'il a gravé. 

-^Lr départ de sainte 17riwfe(187deR. D.) (2). Ce tableau se 
cdtiserve dans le palais du cardinal Barberini, et a été fait 
pour le cardinal Paul Barberini. — (188 deR. D.) Claude a fait 



(1) Voirie détail de ce recueil dans le précieux article de M. de 
Laborde, Archives de tArt [français, lome I, pages 435-55. 

<2) Ces iiumëroà ênire parenthèses se rapportent à l*œuvre de 
Barfièré donuè par M. Robert numesnil. Les notes de Mariette àofit 
au bas ilès plèetes tneuieà lui ayant appartenu. 



291 

ce tableau en 1668 pour le cardinal Rospigliosi, qui fut pape 
sous le nom de Clément IX. — Criseis. (186 R. D.) M. de 
Fontenay fit faire ce tableau à Rome pour M. de Liancourt. 
— A la suite de cette note détachée et sans le nom de celui 
auquel elle se rapporte : a J'ai vu toutes ces pièces dans TœuTre 
de Huquier avec plus d'attention que la première fois ; elles 
m'ont paru avoir été iraîchement imprimées, et de là je pré- 
juge que ce seront des planches qu'on aura retrouvées, qu'on 
les aura fait imprimer , chose qu'on avoit négligé de faire, 
parce qu*on ne croyoit pas qu'elles en valussent la peine, et 
je crois aussi qu'on les vend actuellement à Rome avec tout 
le reste de la suite. Huquier , à qui j'en ai fait l'observation ^ 
n'en est pas autrement disconvenu ; il est facile d'éclaircir la 
chose, — Je l'ai fait, et ces estampes me sont arrivées. » Mariette 
ajoute : 11 en est arrivé autant des paysages de Claude le Lor-- 
rain ; on n'en coonaissoit qu'un certain nombre , et il en a 
paru depuis de nouveaux, qui se sont trouvés gravés au dos 
des anciennes planches. 

6EHINIÂN1 (giâginto) de Pistoie, né en 1611, vint extrê- 
mement jeune à Rome et entra chezPietro de Cortone; il de- 
vint un de ses meilleurs élèves; mais, comme c'étoit un 
homme timide et qui neconnaissoitpas toute l'étendue de ses 
talents, il passa toute sa vie peu favorisé des biens de la 
fortune. 

6ENGA (GmoLAMo). Il laissa un fils , nommé Barthélémy , 
qui cultiva pareillement l'architecture, et dont se servit Fran- 
çois Marin , duc d'Urbin, pour les additions que ce prince fit 
faire à son palais. Baldi, nella descritt. del pal. d'Urbino, 
cap XI. 

6ENNARI (bennâto). L'auteur de la description des Pein- 



2S2 

tares de Ferrare , p. 26» place sa mon en 1658 et ne le iait 
flgé que de 25 ans ; c'est une faute, et l'on ne doit avoir aucun 
égard à ces dates. 

GENOELS (ABRAHAM) d'Anvers, peintre de paysage, travail- 
loit à Paris du temps de M. Vandermeulen , qui l'employcit 
dans ses ouvragesde même que M. Le Brun ; il étoitde l'Acadé- 
mie. Lesordonnancesdesespaysagesnesontpas fortnaturelles 
et la touche en est maniérée, mais il ne laisse pas d'y avoir du 
bon dans ce qu'il a foit. Il a gravé quelques paysages à l'eau- 
forto qui sont assez bien touchés , et l'on en a quelques-uns 
de lui, gravés d'une manière assez singulière , qui imite le 
dessein et qui a été pratiqué avant lui par La Belle. Genoels, 
s'étant retiré à Anvers et étant devenu vieux, quitta la pein- 
ture, et, par une bizarrerie qui marquoit la chute de son es* 
prit, il voulut qu'on le nommât ArcAtinMe, et en cette qualité 
il enseignoit gratuitement aux jeunes gens la perspective. Il 
mourut h Anvers le 10 may 1723, âgé de 83 ans moins 
15 jours; il étoit né le 25 may 1640. Communiqué par 
U. Reynex. 

— Cinq paysages en rond, inventés et gravés à l'eau forte 
par A. Genoels d'une manière plus terminée, mais moins ar- 
tiste et moins spirituelle que tout le reste de ce qu'il a gravé. 
Ils ont été gravés par Chatillon , d'après Genoels, et non pas 
par Genoels; ils sont mal exécutés et appesantis d'ouvrage. 

— Le S^ Vandermeulen, que le roy Louis XIV avoit fait 
venir en France pour peindre ses conquestes, ne pouvant suf- 
fire seul à la quantité d'ouvrages qui luy étoient ordonnés » 
on fut obligé d'appeler encore d'autres peintres flamands pour 
travailler sous luy ; Abraham Genoels, d'Anvers, habile pein- 
tre de paysages, vint en France à ce dessein, et, comme il 
remplit parfaitement les veues qu'on avoit eu sur luy , il fut 
employé dans beaucoup d'ouvrages qui se faisoient pour le 



29S 

roy, et ensuite admis dans l'Académie royale de Peinture. 

GENTIL (FRANÇOIS), tailleur d'images, qui a beaucoup tra- 
vaillé à Troy es, dont on le croit originaire, a fait en 1579 le ta- 
bleau en bas-relief de la Vierge, qui est dans la nei de l'église de 
S.-Pierre. On le croit contem porain de Dominique del Barbiere, 
et peut-être son disciple, ou, ce qui me paroistplus exact, tous 
deux étoient élèves de Primatice, qui, comme l'on sçait, étoit 
abbé de Saint-Martin de Troyes, 

GENTILESCHI (orazio). Sa manière de peindre est large et 
vigoureuse et son ton de couleurs ne peut guère être meilleur ; 
quant à son go&t de dessin, il est pauvre. Le peintre imite la 
nature telle qu'il la voit , il ne s'élève pas plus haut; il n'en 
sçait pas corriger les défauts; j'en juge ainsi sur un de ses 
plus beaux tableaux qui est chez le roi et qui représente un repos 
en Egypte ; on le voit dans l'antichambre du roi à Versailles, 
qu'on appelle TCSilil-de-bœuf ; c'est le même que décrit San- 
drart dans la vie de Gentileschi ; il a été peint en Angleterre, 
pour le roi Charles P', après la mort duquel il est passé en 
France (1). Gentileschi, étant à Rome, s'éloitlié d'amitié avec 
Augustin Tassi, et avoit, pour ainsi dire, formé une société avec 
lui ; ils entreprenoient ensemble des ouvrages , tels que des 
plafonds, des frises, etc., où le Gentileschi peignoit les Qgures, 
et le Tassi l'architecture et les ornements. C'est ainsi qu'a été 
exécutée celle grande frise, qui est dans la salle du Consistoire, 
au palais de Montecavallo; j'en ai le dessin qui est très-beau. 
11 reste encore plusieurs peintures de Gentileschi, faites pen- 
dant son séjour en Angleterre. Le duc de Marlboroug a, dans 
son hôtel à Londres, les plafonds qu'il avoit peints pour le 



(i) Livret du Musée du Louvre, école italienne, 5* édit., n? 295. 



2M 

pilais de Grenwich. Le ptee Orlandi se trompe lourdement 
sur son âge. Le Baglioni, qu'il cite, le fait mourir âgé d'envi- 
n» 70 ans; mais M. Walpole- a écrit en dernier lieu, qu'il 
étoit âgé de 84 ans lorsqu'il cessa de vivre. 11 reçut la sépul* 
ture, comme catholique, dans la chapelle de l'hôtel de Som- 
merset. Il étoit depuis 42 ans en Angleterre, Yan Dick Vj 
trouva et peignit son portrait, qui se trouve gravé dans la 
suite des cent portraits. On en peut conclure que sa mort ar- 
riva aux environs de 1635, etcela ne s'éloigne pas du calcul de 
Baglioni,qui, par rapport aux mœurs, ne fait pas une pein* 
ture tortavantageusedecellesde notre Horace ; il le représente 
comme une mauvaise langue, et laisse entrevoir du libertinage 
dans toute sa conduite. Je suis donc fort porté à croire que 
M. Walpole s'est trompé dans son calcul. 

—Je suis comme assuré que M. Walpole fait le Gentilesehi 
beaucoup plus vieux qu'il n'étoit lorsqu'il cessa de vivre; il 
le iait âgé de 84 ans, tandis que le Bagliooi, auteur contem- 
porain, ne lui donne qu'environ 70 années de vie, et, comme 
il le place dans le rang des artistes qui moururent en f année 
1640, il s'en suivroit que sa naissance seroit de l'année 1570, 
ce qui s'accorde assez bien avec les différentes époques de sa 
vie, écrite par ledit Bagliooi. Il le fait venir fort jeune à Borne 
sous le pontiticat de Sixte V, qui a siégé depuis 1585 jusqu'en 
1590, et, si c'est en 1588, qui est le temps auquel on Iravail- 
loit à peindre la bibiotlièque du Vatican, odle Gentilesehi fut 
effectivement employé, on pouvoit dire de lui que c'étmt un 
très-jeune homme, puisqu'il n'avoit pas encore atteint sa 
vingtième année; tandis qu'en adoptant la date de M. Wal- 
pole, c'eût été un homme qui, à cette époque , passoit les 
trente années. La salle du Consistoire à Montecavallo fut em- 
bellie de peintures sous le pontificat ^du pape Paul V, en 
1616, et le Gentilesehi y a travaillé conjointement avec Agos- 
tioo Tassi, dont il lui arrivoit assez souv^œt de partager les 



991 

tf'ftvaux; il étpit homme tAÎt et pQuvoit 9Vpir ^u p}m I9 ||B|. 
Lf dessein que je possède, et qiii a été fait pour cçt w^rig», 
que je n'hésite point de donner au Gentileschi, est ^dit iiv^e 
une fermeté et une légèreté de plume qui convient à un ar- 
tiste de cet ftge. On ne s'engage guère à de longs voyages 
quand on passe la soixantaine, et , s'il est vrai qu'il ne $pi| 
sorti de Rome qu'en 1621 , ainsi que l'a écrit le P. Orlundi, 
et qu'il se soit écoulé deux années jusqu'à ce qu'il ait entre-r 
pris le voyage de Londres, ce sera en 1623, à l'âgç de 53 ^os, 
que ce dernier voyage aura eu lieu. Mais je le reporte un peu 
plus tard; je ne le mets qu'en 1625, ce à quoi, ajoutant les 
douze années de séjour à Londres, je placerai ^ mort en 
1637 ou 1638, et il se peut que le Baglioni n'en ait fias été 
informé sur-le-champ , vu l'éloignement des lieux , et Alors« 
il n'aura rangé que par estime la mort de Gentileschi m. 
1640, dans ce cas-là, plus vieux de quelques années qu'il m 
le fait; aussi a-t-il eu la précaution d'ajouter le mot de «n<»V 
ron à la date qu'il donne. (Noies sur Walpole.) 

-^ Walpole regardant comme une méprise la qv^aUficaiion de 
civis romanus, donnée au Gentileschi au bas d'une planché de 
Lolh et ses filles^ graf)ée par Vorsterman^ Mariette ajoute i 
M. Walpole ne peut pas ignorer qu'il n'est rien de si commun 
que de voir les gens, qui se sont distingués à Rome par leurs 
talents, y acquérir la qualité de citoyen romain ; on en peur» 
roit citer mille exemples, et par conséquent Gentileschi, à qui 
ses beaux ouvrages de peinture avoient fait un grand nçm 
dans Rome, a pu y obtenir c«ite distinction ; si cela n'a pas 
été remarqué, c'est que personne n'a fait son histoire ; maif 
Fiaseription que Vorsterman a mise au bas de sa planche, 
supplée à cette omission et est un témoignage d'autant moins 
récusable, que le peintre vivoit quand l'estampe a paru. 

GENTILESCHI (artemisia). Son portrait assez mal gravé 



S96 

par H. David, lui donne le titre de Ramana, etde là je préjuge 
qu'elle est née à Rome, où son père a passé une bonne partie 
de sa vie. (Notes sur Walpole). 

GEOF (. . . . DE), natif d'Anvers, sculpteur en chef de 
S. A. E.de Bavière, a fait en 1737, la slatuedu prince électo- 
ral en argent, de grandeur naturelle et pesant autant que ce 
prince.G'est un vœu fait par l'électeur à N.-D. d'AUhemsteiD, 
qui y a été porté le 10 aoust de ladite année. Ce sculpteur a 
beaucoup travaillé pour le même électeur. MercuredeFrance. 

6E0R61(JEAN), assez médiocre graveur, dont on a plusieurs 
portraits, vivoit à Venise, dans le milieu du dernier siècle; il 
étoit Allemand de nation, ainsi qu'on nous apprend dans un 
avertissement, qui a été mis au commencement de la descrip- 
tion de l'opéra de Bellerophon , dont les figures des scènes 
sont gravées par lui, et publiées avec le livre en 1644. 

GEORGION. Sandrart , page 397 , rapporte que Pierre de 
Vecc^bia, peintre vénitien, avoit un talent singulier pour con- 
trefaire la manière de Georgion, et qu'il a fait dans ce genre 
des tableaux oïl les meilleurs connoisseurs peuvent se mé- 
prendre ; il a fait mention de quelques-uns, et entr'autres 
de oeluy où il avoit représenté un jeune soldat, dans une ac- 
tion de repos, revêtu d'une cuirasse et tenant à la main une 
pique , tableau qui, à cause de l'intelligence qui y régnoit, 
avoit plu si fort au prince Robert, comte palatin du Rhin, 
qu'il l'avoit gravé luy-même, en manière noire, avec un soin 
infiny . Je crois pourtant lire sur la planche , dans le fond au 
burin^ le nom de Georgion. 

GRRBIER (balthazab). G. Walker vient de graver à Lon- 
dres, pour J. Boydell, un tableau qui n'est point sorti du pa- 



J97 

lais qu'habite encore la princesse de Galles douairière, et, 
quoyque l'estampe, assez mal exécutée, porte le niom de Van 
Dvck,plus j'eu considère la composition, plus je suis porté à 
«louterque ce peintre soit véritablement l'auteur du tableau (1). 
Le principal groupe, c'est-à-dire la femme assise, qui porte 
un enfant nouveau né entre ses bras, et les trois enfans, de 
difTérens âges, qui l'environnent, ne diffèrent en rien des 
mêmes figures qui entrent dans la composition du tableau 
qu'a gravé Mac Ârdell, et qui passe avec raison pour être de 
Hubens. Est-il vraysemblable que Van Dyck, quelque respect 
qu'on lui suppose avoir eu pour son maître, se soit réduit à 
être à ce point son copiste, et que, pour les augmentations 
qu'il y avoità faire dans son tableau, il en ait abandonné le 
soin à des mains étrangères; car on convient que les autres 
enfants qui sont dans le même tableau ne sont pas dignes de 
lui, et qu'il n'y a même pas mis la main. S'il m'est permis 
de dire ce que j'en pense, je ne suis pas éloigné de croire que 
le tableau eo question a pu appartenir à Balthazar Gerbier, 
et que c'est la raison qui y a fait apposer ses armes. Mais 
cela ne prouve point que ce soit sa femme et ses enfans qui 
y soient Représentés. Si cela étoit, l'homme qui est debout, 
derrière la chaise de la femme assise, devroit lui ressembler, 
et cependant on ne lui trouve aucun des traits que Van Dyck 
a employés dans le portrait dudit Gerbier, qu'a gravé Paul 
Pontius. 11 étoit, comme l'on sçait, singulièrement attaché à 
la personne du duc de Buckingham,et, ayant vu le tableau de 
Rubens qui, suivant la tradition, a été peint pour ce duc, il 
en aura été touché, et il en aura fait faire une copie pour lui 
par quelque peintre de l'école de Rubens, auquel il aura fait 



'1) Cette note revient en la confirmant sur un point déjà exa- 
miné par Mariette. Voir dans ce volume, p. 202-3. 



i$m Im «ligiwiilatioiis qu*U y jggeoit otoasaires pour m4f^ 
!• Dii^eetu complet Le copiste, soutenu par l'eioeUeiiea da 
son original, en aura laissé assez passer dans sa peinture peur 
en imposer, tandis que, obligé, pour œ qui lui restoit à faire, 
de le puiser dans son propre fond, il se sera dévoilé malgré 
lui. Je crains donc que ce tableau ne soit apocryphe et que 
le prince de Galles n*ait été trompé. Gela n*arriye que trop 
fréquemment aux personnes de son rang. (Noies sur Walpole.) 

GERMAIN (THOMAS). Le 14 août 1748, est mort à Paris, 
âgé de 75 ans, à la suite d'une léthargie , H. Thomas Ger- 
main, qui, depuis le célèbre Ballin, est à mon avis, le plus 
excellent orfèvre que la France ait eu. Ce n'est pas que 
M. Meyssonier ne puisse le lui disputer en certaines parties, 
mais, à tous égardS; je trouve M, Germain supérieur. Son 
goût d'ornement est plus sage, ses compositions moins fan- 
tasques, et, quant à l'exécution, la sienne n'est pas moins 
briltante. Si M. Germain ne copie pas tout juste l'antique, et 
si pour se prêter au goût régnant, il se livre à des formes 
singulières, il ne donne jamais dans des écarts blâmables, et 
autant qu'il le peut, il emprunte de l'antique et des bons 
maîtres ce qu'ils ont de beau, et il en embellit sa manière. On 
voit plusieurs de ses ouvrages, où il a représenté des légumes, 
des fruits, des animaux et même des figures, qui sont mer- 
veilleusement bien touchés et ciselés avec art. Tout cela s'est 
fait sur ses detôeins et sur ses modèles, et dans les morceaux 
d'une plus grande importance on peut compter qu'il y a 
donné les derniers coups et qu'il y a mis TAme. Gela se re- 
marque principalement dans cette superbe vaisselle d'or qu'il 
a fait pour le roy, et dont il étoit dans l'usage depuis plu- 
sieurs années de fournir à S. M. une pièce au jour de l'an. 11 
commença par une écuelle couverte, et il a fini par deux ma- 
gnifiques chandeliers ornés de guirlandes. 11 sembloit que ce 



I0> 

dernier m^reeau devoit couronner tout ce qu'il aypH toit ^ 
beau jusqu'alors, H y mit toute squ application, et le roy en 
les recevant ne put s*empécher de lui en marquer ^ satisfoo- 
Uon. Il y avoit longtemps qu'il lui avoit accordé un logement 
dans les galeries du Louvre, et le titre de son orfèvre ordi« 
naire. M. Germain, supérieur à son art, pouvoit non-^seule* 
ment bien modeler une Ggure, et disposer en mattre un 
grouppe d'ornement; il enlendoit aussi très-bien l'architec- 
ture, et c'est sur ses desseins et sous sa conduite qu'a été 
bâtie depuis peu l'église de Saint*Louis^du-Louvre, où il 
avoit marqué sa sépulture, et où il a été inhumé le 15 aouisl. 
11 avoit été élu échevin en 1738» 

GEROLA (6io). Je trouve son épitaphe dans un Hs. de la 
bibliothèque du roy, m 10103, intitulé Antiquarium Begii 
Lepidi ; autore Julio Borzani Reg : — D. 0. M. — Joanni Geroli 
qui-^adeo excellentem — piogendi artem doc— ^ tus iuerat 
ut alter •— Apeles vocaretur — cum satis vix. est — peremp* 
eoa. mesiiss. — ce (id est e&njux) MDCVil. gi Ton en croit li 
Ms. de Borzani, le vrai nom de ce peintre est Jean Glarola* 
Les endroits où il a travaillé le plus sont les villes de Reggio 
et de Parme. On parle de luy avec éloge dans le Ms. que je 
cite; mais on n'y dit point qu'il eût été élève du Gorrége.<-*- 
Le même auteur, dont j'emprunte tout ce que je rapporte ici, 
appelle ce peintre, dans l'endroit où il feit la description de 
l'église de Saint-Prosper-de-Reggio : Gio, Garuolo^ et il fait 
mention de quelques peintures à fresque qu'il a exécuté dans 
une église où sont les chapelles du saint Sacrement et de 
Sainte- Joconde. — Le chanoine Grespi , dans le 3* vol. de Fel* 
sina Pittrice, p. 50, fait mention de ce peintre, et en foit un 
des disciples duGolonna. 

GHEDIW (/œEPH), peintnBdeFerrare,aetueUeffleiitvivajit, 




800 

peut être regardé comme un des disciples de Jacques Paro- 
lini, quoy qu'il n'ait pas fréquenté pendant longtemps cette 
école, n a terminé en 1755 un grand tableau représentant la 
multiplication des pains, lequel occupe toute la iaçade du 
fond du réfectoire du coûtent de Sainte-Marie-des-Anges à 
Ferrare. Descri. délie pitture di Ferrara, p. 80. 11 y est parlé 
de ce morceau de peinture avec éloge. 

GHERARDl (artonio). Il a peint le plafond d'une église 
voisine de la fontaine de Trévi à Rome, qui est celle de Sainte- 
Marie-de-Trivio-de-Crocifori, et c'est un très-bel ouvrage; la 
composition en est neuve et tout à fait pittoresque, et, autant 
qu'il m'en souvient, le ton de couleur en est très-vigoureux ; 
Pascoli, qui a écrit sa vie, le fait nattre en 1644 et mourir à 
Rome en 1702. 

GHERARDINI (gio), peintre, que le ducdeNevers Qt venir 
en France sur la 6n du siècle dernier. 11 l'avoit connu en 
Italie, et avoit cru voir en lui de grands talens. Ce n'étoit ce- 
pendant qu'un de ces praticiens dont l'Italie fourmille. Il co- 
lorioit mal; il dessinoil encore plus mal; tout son mérite 
consistoit à entendre assez bien la perspective. Ce qu'il a fait 
de plus considérable en France est le plafond de l'église des 
Jésuites de Nevers. 11 achevoit ce dernier ouvrage, lorsque le 
R. P. Bouvet, jésuite, que l'empereur de la Chine avoit en- 
voyé en Europe pour faire une recrue de gens habiles dans 
tous les arts, arriva à Paris; il lui persuada de le suivre en 
Chine; ils partirent ensemble sur le vaisseau du roy, l'Am- 
phitrite, en mars 1698, et ils arrivèrent à Canton le 2 no- 
vembre de la même année. Ce fut de cette dernière ville que 
notre peintre écrivit à M. le duc de Nevers, son Mécène, 
une lettre, dans laquelle il luy faisoit une relation de son 
voyage, dans un stile oii l'on a voulu imiter celui de Bachau- 



SOI 

mont et de Chapelle; c'est un badioage continuel, semé de 
vers italiens empruntés de TArioste, du Tasse, et pris dans 
d'autres pareilles sources, et accompagnés de vers françois 
qui les expliquent. Il n'est pas difficile de s'appercevoir que 
quelque jésuite a prêté sa plume ; un Italien, peu versé dans 
notre langue, étoit incapable de faire un pareil ouvrage, qui 
dans le fond n'apprend rien du tout ; sunt verba et voces. Un 
endroit de cette relation, où l'auteur, parlant de Canton, dit 
que certaines choses, qu'on y voit et qu'il décrit, ne sont 
guère de Vair de Paris ni de Turin^ peut faire croire qu'il 
étoit réellement Piémonlois et peut-être de Turin même. 
Après être demeuré près d'un an à la Chine, s'être ennuyé et 
avoir sans doute déplu aux gens du pays, Gherardini revint 
en France, et y mourut peu de temps après son arrivée dans 
un état assez misérable. La relation de son voyage à la Chine 
a été imprimée à Paris chez Petit en 1700; c'est une bro- 
chure 12*. — Il a habité Bourges, et y a peint beaucoup de 
choses; il y est connu sous le nom de Baptiste ; apparemment 
que son nom étoit Jean-Baptiste. 

-« Les auteurs des mémoires de Trévoux, en annonçant la 
vie du ch' Cignani dédiée à M. Tardini, ajoutent que Girar- 
dini, qui s'est fait connoistre en France par de beaux ou- 
vrages et qui a peint à fresque l'église des Jésuites à Nevers 
et la bibliothèque de leur maison professe à Paris, étoit un 
des élèves du Cignani. Mem. de Trévoux, juillet 1726. Je ne 
le trouve pas cependant nommé parmi les élèves du Cignani 
dans la vie de ce peintre, et cependant l'on a eu attention de 
parler de tous ceux qui ont eu quelque réputation. Ces au- 
teurs étoient mal instruits. Le peintre, dont ils parlent, étoit 
disciple du Colonna et non du Cignani. 

GHERARDINI (melchiore). Comme le P. Orlandi {appelle 
Gilardino, Mariette ajoute : Le chanoine Torre, dans son Ri- 



SOS 

tratto di Hilano, ne le nomme jamais autrement que Melchior 
Gherardini, et ce doit être là son nom yéritable. 

GHEZZl (gioseffo] mort nel 1721, d'anni 87. Yedi la sua 
Tita scritia dal Pascolii t. n. 

GHEZZl (Il caif«<' pietro Leone). Pio, dans son Mss., le fait 
naistre à Arcoli, et dit que son père ne vouloit point en faire 
un peintre, mais qu'il y fut forcé par le goût naturel que son 
fils témoignoit pour cet art. Il a un talent merveilleux pour 
faire des caricatures. Il les dessine à la plume au premier 
coup, pratique qu'il s'est rendue familière dès ses plus ten- 
dres années, parce que son père exigea de lui, lorsqu'il lui 
témoigna vouloir estre peintre, qu'il ne vouloit point qu'il 
dessinât autrement qu'à la plume, et sans jamais se servir de 
mie de pain. C^est le duc de Parme qui l'a fait chevalier, et il 
est extrêmement attaché à la maison Âlbani. 11 est mort à 
Rome, le 5 mars 1755, âgé de 81 ans. 

GHIGI (teoddho). Le Gigli lui donne le surnom del T. 

6HISI (les). L'on ne voit des estampes de Jean^BaptisIe 
que de ces années : 1536, 37, 38, 39. 

De celles de Georges Mantuan il s'en trouve dattées de 1540, 
43, 61, 53, 54, 55, 56, 58, 60, 61, 67, 74, 75, 76, et celles dft 
cea dernières années sont les moindres. 

Diane a toujours mis son nom sur ses estampes, et quel* 
quefois seulement Diana. On ne voit aucuoe de ses estampe! 
datées, qui ne le soient de Rome en ces années : 1675,76,77, 
T8, 81, 85, 86, 88. Les meilleures sont celles où elle n'i 
point mis de date, et qui auront sans doute esté gravées i 
Mantoue sous la conduite de son père ou de ses frères, en- 
suite celles de 75, 76, 77; les autres sont fort inférieures, sur- 
tout plus elles s'éloignent de ces trois années. 



Adam Mantuan a ordinairement mis sa marque à ses es- 
tampes, mais ne les a jamais datées. Je le crois frère de 
Georges et fils de J.-B., car Vasari dit formellement, 1. 111, 
p. 13 : a Gio. Battista Mantuano, intagliator di stampe, âcultore 
eccellente, haveva d l'anno 1566, che Vasari passo per Mao^ 
tua a due figlioli che intagliavano stampe di rame divlnita* 
mente et una flgliuola cli' è chiamata Diana; » questa è molto 
lodata dal Yasari per il suo sâpere. En examinant de près les 
ouvrages de J.-B. Mantuan, il ma paru qu'il pouvoit estre 
disciple de Georges Pencz. 

Je vois, sur plusieurs estampes de Georges, son nom Ghisl> 
mais je n'ay veu à aucune de celles de J.-B. que J. Bap. Man* 
tuan; cependant je ne doute pas qu*il ne soit père de l'autre, 
et que par conséquent son nom soit aussi Ghisi. 

— Jean-Baptiste de Mantoue prend la qualité de sculpior^ 
et Vasari le nomme intagliator di stampe et scultor eccellente; 
de là j'infère que sa profession, de même que celle de Domi- 
nique del Barbiere étoit d'estre stucateur. Reste à savoir éi 
c'est le même que Jean-Baptiste Bertano. . 

— Les estampes de Georges sont beaucoup mieux gravées 
et plus finies; mais son père dessinoit mieux. J.-B., plus sça- 
vant que Georges, ne gravoit pas si agréablement. G. M. fi- 
nissoit beaucoup; dans les estampes de son invention, il y à 
bien de la science, quoyque le goût en soit particulier. Quand 
Georges a gravé légèrement, il a beaucoup mieux réuàsy 
que lorsqu'il a chargé et appesanti son ouvrage ; gravoit les 
fonds et lointains avec un grand soin, mais de petite ma- 
nière; lorsqu'il finit trop ses ouvrages, il les rend secs et pe- 
sants. 

— Z. B. M. Je crois que par ces trois lettres, que j*ài vu 
sur une pièce gravée en Italie, Jean-Baptiste Mantouan s'est 
voulu désigner; Zuan ou Giovanni est le même nom en deux 
dialectes. 



304 

— Le roy, dans son œuvie des Mantouâos, a un sujet de 
crucifiement, gravé à Veau forte assez mal, j'ignore par qui; 
on y lit au bas : Adam sculptor Mantuanus eic. Romae 
1577. Cette inscription est remarquable; elle fixe le temps 
qu Adam vivoit, et fait connoistre qu'il demeuroit à Rome, 
ce que je n'a j encore veu spécifié nulle part. 

— Un pliilosopbe, appuyé contre un rocher stérile envi- 
ronné de toutes parts de bestes féroces et d'une mer orageuse 
remplie de monstres et d'écueils, ce qu'il regarde sans s'é- 
mouvoir, tandis que d'un autre côté une nymphe armée d'un 
dard , représentant la Gloire, sort d'un bocage et luy promet 
la félicité s'il surmonte par sa patience toutes ces difficultés. 
L'on nomme ordinairement cette pièce le songe de Raphaël; 
mais il est bien plus raisonnable de croire que ce savant 
peintre, qui en est l'inventeur, y a voulu représenter les tra- 
verses auxquelles le sage est exposé pendant sa vie. Georges 
Ghisi Hantuan l'a gravée avec un grand soin en 1561 [1]. — Je 
doute très-fort que cette pièce ait été gravée sur un dessein 
de Raphaël; on n'y reconnoit sa manière en aucun endroit, 
et ce n'est pas même sa façon de composer. Peut-être avoil-il 
laissé quelque légère idée de cette pensée qui, étant tombée 
entre les mains de Philippe Datus, qui a fait graver la plan- 
che, il l'aura fait mettre en estât par quelque peintre, peut- 
estre par Luc Penni. Je croirois pourtant assez que ce seroit 
quelque maître des Pays-Bas ; le paysage, qui en fait la plus 
considérable partie, a de la manière de Luc Gassel ou le Ci- 
vetta , et en effet on y trouve, comme dans tous ses paysages, 
un hibou. Cecy mérite quelqu'attention. 

GHlSl (dianâ). — Diana Mantuana estoit fille de Jean-Bap- 



(1) Bartsch, tome XY, n» 67, p. 41 S, qui s'y est servi de la des- 
cription de Mariette. 



305 

tisie Mantuan, disciple de Jules Romain, et je la croy sœur de 
Georges et Adam Mantuaus aussy graveurs ; elle vint à Rome et y 
grava plusieurs pièces depuis Tannée 1575. Elle avoit épousé 
dès l'année 1576 un nommé François de Yolterre, architecte ; 
c'est ce qui Tait qu'on trouve son portrait avec cette inscription : 
Diana Mantovana civis Volaterrana. Il est gravé par Chérubin 
Albert. Voyez dans le catalogue de Harolles, de 1666, p. 112. 

— L'ange Gabriel annonçant à la sainte Vierge le mistère 
de l'incarnation, gravé à Rome, en 1585, par Diane, d'après 
le tableau de Luc Signorelli de Cortone, qui est à Volterre ; 
cette pièce n'est ni bien dessinée, ni bien gravée, mais elle 
est rare (1). — Lucas Gortonensis pinxit Volaterris. Diana ejus- 
dem civitatis civis incidebat Romœ 1585. Voicy une diffi- 
culté qui me paroist assez difficile à résoudre. Elle se dit ci- 
toyenne de Volterre, et son portrait gravé par Ch. Albert le 
dit aussy, et cependant la guérison du boiteux, gravée par 
la mesme Diane à Rome en 1575, porte une dédicace où elle 
dit formellement qu'elle est de Mantoue et qu'elle y a pris sa 
naissance. Je ne sçais comment résoudre ce problème; je ne 
puis me résoudre à faire deux personnes de ce mesme nom 
de Diane qui ayent gravé en mesme temps à Rome, et peut> 
être me dira-t-on qu'elle aura peut-être acquis le droit de 
bourgeoisie à Volterre ; je ne vois point d'autre raison proba- 
ble. — G'est que , par son mariage avec , de Vol- 
terre, célèbre architecte, elle est devenue citoyenne de Volterre. 

— La résurrection de J.-G., d'après Jules Romain; c'est 
une copie qu'on croit gravée par Diane de Mantoue ou par 
quelqu'autre habile graveur; quoiqu'il y ait moins d'es- 
prit que dans l'original de J.-R. Mantuan, elle ne laisse pas 
que d'être exécutée avec art et propreté. — Julius Mantuanus 



(1) Bartsch, t. XY, n« 1« p. 432. 

T. n. I 



soc 

inve. MDS autre marque ; sans doute une faute (1) ; Jules étoit 
Roin«iD« mais on le nomme icy Hantuan, sans doute paroe 
qu'il y a été longtemps. *-<- Je la croiroisiort volontiers gradée 
en Flandres par le graveur Karolus. — La mesme faute a été 
laitaaur l'eatampede Niobé, mise au jour par H.Goek, preuve 
qua cette réaurreotion doit avoir été aussi gravée en Flandrea. 

6IAQUINZI0 (coBiADo) est appelé en Espagne et y occupe 
la place da premier peintre du roi, qu'avoit Louis*Michel 
Vanloo, qui revient en 17... Riposta aile refilessioni del 
Marcb. d'Argens, p. 8. Ce fut, dit-on, une affaire de brigues, 
et ^ana laquelle le crédit du musicien Farinelli influa pour 
beaucoup. M. Cochin, dans son Voyage d'Italie, le fait au- 
teur de plusieurs plafonds dans le palais du roi de Sardaigne 
à Turin, et le fait tout de suite chevalier et disciple de Soli- 
mène. Hais je crois qu'il se trompé', et qu'il met sur le 
compte de Corrado ce qui appartient à Francesoo délie Mura, 
qui, dans la vérité, a peint nombre de plafonds dans ce palais; 
voyez son article à la fin de la vie du Solimène dans le livre 
des Vies des peintres napolitains par Domenici. 

6IGLI (coumuo), peintre de Vicenoe, se trouve nommé 
dans le poëme Pittura trionfanu del Gigli. Il y est mis au 
rang des meilleurs peintres qui ont illustré Yicence, et, par 
le rang qu'il occupe dans le poëme, on juge qu'il étoit con- 
temporain de Malombra, 

6ILL0T (ci^ude]. Le triomphe d'Arlequin Dieu Pan, su* 
jet comique, gravé en manière noire par Jacques Sarabati 
diaprés le tableau de Claude Gillot. C'est un des premieis 



(I) BarUcb, t. XY, n* 10, p. 4^7. 



807 

tableaux faits dans ce stile, et qui, ayant trouvé une infinité 
d'approbateurs, a donné naissance à tant d'autres qui sont 
faits depuis dans le même genre, par Yateau, etc. 

*^ Dessein d'habillemens à l'usage des ballets, opéras et 
comédies, en une suite de 85 planches y compris le frontis- 
pice, gravées par Joullain d'après le dessein de Gillot. Ce 
peintre eut pendant un temps la conduite des décorations, 
machines et habits de l'Opéra, et ce fut pour lors qu'il inventa 
cette suite de desseins (1). 

GIORDANO (hcc). Il est né à Naples en 1632, et sa mort est 
arrivée dans cette ville en 1705. On a deux vies différentes 
de ce fameux artiste, toutes deux écrites par le Domenici, et 
l'une et l'autre fort détaillées. Ces dattes doivent être sûres. 
Le Domenici les tenoit de la veuve même de Luc Giordano. 

— Joseph s'échappant d'entre les bras de la femme de Pu- 
tipbar> gravé par Louis Desplaces, en 1731, d'après le tableau 
de Luc Jordane, qui estoit pour lors dans le cabinet de M. de 
la Paye à Paris; — à présent chez M. de Lassai avec la Danaë 
de G. Maratte^ qu'il a fait couvrir de drapperies. 

—Un Saint-Thomas de Villeneuve iaisant l'aumône, grande 
pièce assez spirituellement gravée à l'eau-forte, par Philibert 
Bonnet, y compris le blanc laissé au bas de la planche pour 
recevoir l'inscription, qui n'est pas encore gravée à l'épreuve 
que j'ai. C'est un des beaux tableaux de Luc Jordane, qui est 
à Naples dans l'église des Augustins déchaussés, près les 
écoles royales. 

— Le plafond de la chapelle de Sainte-Restitute dans l'é- 
glise cathédrale de Naples, l'un des beaux ouvrages de L. Jor- 
dane, et qui représente cette sainte moribonde conduite mi- 



Ci) Voyez sur Gillot le catalogue Quentin de Lorangôro, et la no- 
tfce par M. Aman ton, dans le Magasin encyclopédique, 1808, t. YI. 



d08 

raculeusement à Naples dans une barque par les anges» a été 
gravée à Teau-forte par Fr. Aquila, mais pas aussi bien que 
le méritoit une peinture de celte importance. — L'estampe de 
sainte Restitute est dédiée au cardinal Cantelmi, arcbevéque 
de Naples, par un chanoine de l'église cathédrale nommé 
François Xavier Comas, et parott avoir été faite à ses dépens : 
Bmi*^ ac Rev^ Principi Jacobo S. R. E. cardinali Cantelmo, 
Arcbiepiscopo Neapolitano Ecclesiasticœ libcrtati vindid in- 
tegerrimo Pauperum sospitori prsesentissimo, Patrise patri 
dulcissimo quod inclytoScotorumregali sanguine natusRes- 
titutœ numini templum quod FI. Constantinus Csesarum op- 
timus Helena Gœl inter Britaniae R^ulos facile principis filia, 
in Britanniîs natus extruxit et opibus muoificentissime orna- 
vit, jure quasi gentilitio summa relligione nec vulgari studio 
prosequitur quidem S"^ Virginis et prœclarissimœ Xpi mar- 
tyris effigiem nunc primum typis prodeuntem Franciscus 
Xaverius Comas sanctœ Neapolitans ecclesi» canonicus ejus- 
que capituU aerario tertium prsefectus vel obsequii sui ergo 
lubenti animo D. D. D. Lucas Jordanus Neapolitanus pinxit. 
Francis Aquila del. et se. Cette dédicace se lisoit au pied de la 
planche qu'a gravée à Naples François Aquila, d'après le ta- 
bleau de Luc Jordane, qui représente le transport miracu- 
leux du corps de sainte Restitute dans ladite ville de Naples. 
Le cardinal Cantelmi, auquel elle est adressée, mourut en 
1702. Il eut pour successeur dans l'archevêché de Naples le 
cardinal Pignatelli, et le chanoine, qui avoit fait graver la 
planche, prit occasion d'en changer la destination, et il y 
fit graver au bas une autre adresse au nouvel archevêque, 
et c'est celle qu'on y lit actuellement. 11 est aisé de voir que 
la planche avoit alors toute sa fratcheur. Les épreuves avec 
la nouvelle dédicace sont même plus fortes que les premières 
tirées, quoyque les unes et les autres soient assez faibles de 
couleur, ce qui vient de la façon dont la gravure a été traitée. 



509 

GIOVANE (FRANÇOIS), peintre romain, nacquit en 1611, et, 
étant entré dans Técole d'André Sacchi, il y fut condisciple 
de Carie Maratte, de qui il a gravé le tableau de l'Adoration 
des bergers à Monte Cavallo, et, je pense, quelques autres 
desseins. A en juger par ces estampes, il dessinoit assez bien, 
n quitta son premier maître pour venir travailler sous Pierre 
François Mola, et, tant que celui-ci vécut, il ne le quitta poiut ; 
il devint même un si parlait imitateur de sa manière, que 
ses tableaux furent souvent confondus avec ceux de Mola. La 
mort vint le ravir au milieu de ses travaux et de sa course en 
1669^ M. Crozat avoit son portrait dessiné, qu'il avoit trouvé 
dans la collection de desseins du sieur Pio. 

GIRARDON (FRANÇOIS), naquit à Troyes, le jeudy 16 mars 
1628, de Nicolas Girardon, fondeur de métaux, et d'Anne 
Saingevin. On en avoit voulu faire un homme de pratique, 
mais la nature s'y opposa ; elle le conduisit, sans presque qu*il 
s'en apperçût lui-même et contre l'intention de ses parens, 
dans la voye du dessein. Celui qui prit le soin de l'y con- 
duire se nommoit Baudesson et étoit père du peintre de fleurs ; 
il étoit menuisier et sculpteur en bois; il ne cacha rien de ce 
qu'il scavoit au jeune Girardon, mais celui-ci reconnut bien- 
tôt qu'il lui falloit un autre mattre. Il ne lui falloit pas sortir 
de sa patrie pour en trouver de tels qu'il les desiroit. Les ou- 
vrages de sculpture de François Gentil et de Domenko, Ita- 
lien, qu'on conjecture à sa manière avoir été un des élèves du 
Primatice, qui sont en grand nombre à Troyes, furent les 
modèles sur lesquels il se forma. Ces deux grands artistes vi- 
voient dans le même tems, et l'on assure qu'ils travailloient 
souvent ensemble aux mêmes ouvrages. Ils avpient un goût 
simple et noble qui tient beaucoup de l'antique. Ce fut à peu 
près dans ce temps-là que Girardon commença à se hasarder 
de travailler en public; il n'étoit pas encore décidé qu'il se- 



SI» 

roit iculpteur; U manioit le pinceau avant le oiseau, et Ton 
voit de lui une chapelle» près de la porte septentrionale de 
Troyes,où il a peint à détrempe la vie de sainte Jules. G*étoit 
l'ouvrage d'un enfant de 15 ans; mais, tout médiocre qu'il 
est, Girardonle vit avec quelque complaisance ( Mariette awit 
écrit au-dessous tendresse) lorsqu'il fit son dernier voyage 
dans sa patrie. Ce fut cependant le seul ouvrage de peinture 
qu'il fit; la sculpture se l'attacha pour toujours* Travaillant 
encore pour Baudesson, il eut occasion d'accompagner ce 
mattre, qui avoit des ouvrages à faire dans le château de 
S. Liebaut, à 4 lieues de Troyes, appartenant à M. Seguier, 
et l'on peut regarder cette époque comme celle de sa fortune. 
Car le chancelier Sf^guier, qui aimoit les arts, lé prit alors 
sous sa protection, et ne discontinua point de lui fournir les 
secours nécessaires pour son avancement dans l'état. Girar- 
don obtint d'aller à Rome, et il en étoit de retour en 1662. n 
revint alors à Troyes et y travailla pour le sieur Quinot, grand 
curieux, que Girardon regardoit comme un des principaux 
auteurs de sa fortune, et dont il fit le buste en 1691. Je ne 
parlerai point ici de tous les ouvrages qu'il a faits à Paris ou 
dans les maisons royales; je me bornerai à ceux que l'amour 
de sa patrie lui a fait faire pour la ville de Troyes. En 1687, 
il y porta lui-même un grand médaillon de Louis XIV, en 
marbre, qui fut reçu avec de grandes cérémonies et placé de- 
puis dans la grande salle de l'Hôtel-de-Ville en 1690. Il fit 
fermer d'une grille de fer le devant du chœur de l'église de 
Saint-Remy, où il avoit été baptisé, et, le 30 mars 1690, il 
vint lui-même placer au-dessus de cette grille un Christ de 
bronze, qui passe pour un de ses meilleurs ouvrages. Le 
mattre-autel de Téglise de Saint-Jean, ainsi que l'autel de la 
cpmmunion dans la même église, ont été décorés et enrichis 
de sculptures sur ses desseins. Par respect pour les ouvrages 
de Fr. Gentil, il conserva dans le retable du dernier autel un 



su 

bas-relièfd'albfttre, et dansla décotation de l'autel même deiii 
statues du même artiste, dont il ne pouvoil se lasser d'admi- 
rer les ouvrages. Le tombeau, qui est à Saint-Landry, à Paris, 
étoit destiné pour l'église de Saint-Remy de TroyeS, son an- 
cienne paroisse. Aimé de tous les grands hommes de son 
siècle, il eul surtout ce bonheur d'êlre estimé du grand Condé, 
dont il fit la teste en médaillon de marbre blanc sur un fond 
noir. C'est le même qui estoit dans le cabinet du P. Tourne- 
mine, célèbre jésuite ; Henry* Jules, prince de Gondé, en lui en 
faisant présent, lui dit plaisament que pour que la ressem- 
blance iût parfaite, il n'y manquoit qu'un peu de tabac au 
bout du nez. Extrait d'un mémoire Mss. envoyé de Troyes, 
et qui a été écrit presque sous la dictée d'un neveu de M. Gi- 
rardon, chefcier de Saint-Élienne à Troyes. Il senommoit 
Claude, et il est mort en novembre 1742 (1). . 

— Une tête de femme en bronze, plus grande que le natu- 
rel, et qui doit être celle de la ville de Paris, puisque, de même 
que toutes les têtes de villes personnifiées, celle-ci est cou- 
ronnée de tours, et que, de plus, c'est dans les décembres d'tmé 
ancienne tour, qui pouvoit faire partie des murs de Paris, que 
cette tête a été trouvée, vers Tannée 1680, par un particulier 
quifeisoilcreuserun terrain près de l'élise de Saint-Euslache, 
pour établir les fondements d'une maison qu'il falsoit édifier. 
Dans la persuasion où l'on étoit alors qu'Isis avoit été âingu*^ 
lièrement honorée par les habitans de l'ancienne ville de 
Lutèce, et qu'elle y avoit un temple et des autels, on ne fit 
point difficulté de dire que c'étoit une image de cette déesse, 
et ce lut sur ce pied-là que le R. P. du MouUnet en parla 



(1) Voyez sur ûirardon la notice spéciale de M. Corrard de 
Brèban, Troyes et Paris» 1850, 2e édition, in-8^ de 80 pages, et le 
travail de Grosley dans le premier volume des MêtaOireâ inédite 
des aeadémicieuSi p. 291-306. Paris, Dumoulin, 1854. 



312 

dans une dissertation particulière, et, depuis, dans sa descrip- 
tion du cabinet de Sainte-Geneviève (1); idée qui parott cepen- 
dant moins simple et moins vraisemblable que celle qu'on 
ose présenter ici. Sans être d'un travail extrêmement fin, ni 
trop recherché, celte tête offre cependant quelque chose de 
très-imposant, et cela vient, sans doute, de ses formes et de 
sa proportion. Le célèbre Girardon a possédé pendant long- 
temps ce rare monument, et c'est de son cabinet qu'il est 
passé dans celui de M. Crozat. La conservation est parfaite; 
la tête a 22 pouces de haut, sans le pied, qui est de marbre 
ndr antique. (Cataloguie de Jf. Crozat^ marquis du Châtd, 
1750, pages 25-6.) 

— Divers morceaux de sculpture antique et moderne, qui 
composoient le cabinet de François Girardon, et en faisoleot 
un des plus sinj^lieis qu'il y eût à Paris, représentés eo six 
grandes planches, où chaque chose est disposée avec ordre et 
avec simétrie, et forme une décoration magnifique dont le 
dessein est du sieur Oppenord. L'on trouve au bord de chaque 
planche une explication détaillée de ce qui y est contenu ; 
elles ont toutes été gravées par Nicolas Chevalier sur les des- 
seins de René Charpentier, sculpteur, disciple de François 
Girardon. — La suite du cabinet du sieur Girardon , conte- 
nant diverses statues antiques et modernes, et surtout plusieurs 
excellents modèles de terre cuite, de François du Quesnoy, dit 
le Flamand, représentée en sept planches, gravées la plus 
grande partie par Nicolas Chevalier, quelques-unes par 
François Ertinger, et d'autres par René Charpentier qui a 
donné les desseins de toutes. 



(1) Le cabinet de la bibliothèque Sainte-Geneviève. Paris, Dezai- 
lier, 1692, in-folio avec figures. Quant à la têle de Gybèle, elle est 
arrivée au cabinet des médailles de la Bibliothèque impériale, où 
on la peut voir. 



31S 

GIRÂRDONl (jEAH-AifDRÉ), dont le P. Orlandi place la 
mort en 1628 (p. 97), n'a point trouvé place parmi les pein- 
tres de Ferrare, dans la notice qui précède la nouvelle des- 
cription des peintures de Ferrare. On s'y est contenté de faire 
ojention des tableaux de cet artiste, qui se voyenl dans les 
églises de cetle ville, d'où je conjecture que c'étoit un artiste 
médiocre. On ignore de qui il est disciple. 

6ISSEY (HENRI), dessinateur ordinaire du cabinet du roi 
(Louis XIV), s'est fait admirer par la richesse et la nouveauté 
des habits des différents acteurs qui figuroient dans ses bal- 
lets. Ce fut lui qui donna les desseins de ceux des chevaliers 
et de leur suite qui, avec le roi, coururent la bague dans le 
fameux carousel de 1662, et jamais fête n'égala celle-ci pour 
la magnificence, il eut pour successeur dans le même em- 
ploi Jean Berain qui eut pareillement le génie de ces sortes 
de spectacles. Mais il parott que celui de son prédécesseur 
étoit encore plus parfait. Gissej étoit né à Paris, et il y mou- 
rut le 4 février 1673, âgé de 65 ans. Il avoit été admis dans 
l'Académie royale de peinture et prenoit la qualité de dessi- 
nateur ingénieur pour les divertissements, fêtes et plaisirs du 
roi (1). 

GLOCKENDON (albert). J'ay veu une estampe en bois où 
Albert Glockendon prend la qualité d'illuminist. il est éton- 
nant combien il y a eu d'estampes gravées en bois par les Al- 
lemands, dans le commencement du xw siècle, et la plu- 
part d'une grandeur prodigieuse. Il y en avoit un grand nom- 
bre chez M. Colbert. 



(1) L'un de noos a écrit sur ce curieux artiste une notice spé- 
ciale. Paris, Dumoulin, 1854, in-S». 



GODEFROY, né au Bois-Guillaume, près de Aoueû, grave 
à Paris actuellement. 

GCKBOUW (ANTOINE), qui se prononce en françois Gôubau, 
étoit d'Anvers et y exerçoit la peinture dans le milieu du 
17« siècle. Il peignoit des tabagies et des bambochades dans 
le goût d'Adr. Brauwer et de Van Ostade,ses contemporains, 
mais son pinceau ne put jamais avoir la même Gnesse. Des- 
camps (t. I, p. 360] en fait un peintre d'histoire , bon dessi- 
nateur et grand coloriste. C'est une exagération de sa part, et 
je doute aussi que, dans sa jeunesse, il ait fait, comme il le 
dit, le voyage de Rome et qu'il y ait fait un si long séjour, 
se perfectionnant par l'étude des ouvrages des grands maî- 
tres. Il vivoit encore lorsque De Bie publia son ouvrage, en 
1662. M. de Largillière m'a dit plus d'une fois que c'étoit 
sous Goubau qu'il a voit pris les premières leçons de son 
art, et je crois avoir vu chez lui quelques petits tableaux qu'il 
conservoit en mémoire de ce service. 

GOLTZIUS (HBNRY).--Mort en 1617, âgé de 59 ans. Voyez 
son portrait, gravé en 1630, par Jacques Matham. II s'étoit 
établi à Harlem, et je le crois disciple de Ph. Galle pour la 
graveure. — Il s'y étoit fixé dès 1582. Voyez l'estampe de la 
fuite de Loth, d'après Bloclandt. 

~ Le portrait de Henry Goltzius dans un ovale plaoé sur 
un fonds décoré d'architecture et de figures qui représentent 
d'une manière simbolique les grâces, l'esprit et la précision 
du dessein, toutes parties de la peinture dans lesqu^les ce 
maistre s'est distingué. C'étoit du moins l'idée que s'en éUÀeai 
faits ses contemporains; la postérité, sans rien diminuer de 
son admiration sur la valeur de Goltzius, en a jugé bien dif- 
féremment. Gravé en 1617 par Jacques Hatbam, son beau- 
fils et son disciple. 



315 

— Jésus-Christ assistant aux noces de Cana, gravé conjoin- 
tement par H. Goltzius et par J. Hatham, d'après François 
Salviati. Cette grande pièce est composée de deux planches. 
Celle à droite, où est sur le devant un homme qui verse du 
vin dans des cruches, est entièrement gravée par J. Matham. 
n y a mis son nom au bas Matham sculptor excudU ; l'autre, 
au contraire, où sur le devant est une femme, est gravée par 
H. Goltzius, à l'exception cependant des quelques figures dans 
le fond qui sont de Matham, et au bas de la planche ce der- 
nier a fait graver le nom de H. Goltzius, sculptor. Je juge de 
tout cecy que H. Goltzius aura laissé la planche imparfaite et 
qu'elle aura été terminée par son beau-fils. Peu de gens, ce me 
semble, y ont pris garde. La dédicace est faite par Matham. 

— Une suite de six sujets de la vie de Jésus-Christ, dédiée 
à Guillaume V, roi de Bavière, par H. Goltzius, qui les a in- 
ventés et gravés en 1593 et 1594. Ce sont, sans contredit, 
des plus beaux ouvrages de cet artiste, et d'autant plus esti- 
mables qu'ayant eu dessein d'imiter les manières de plusieurs 
grands mattres, il a réussi dans quelques-unes au point de 
tromper. Les deux premiers surtout, qui sont dans la ma- 
nière d'Albert et de Lucas de Leyde, sont des chefs-d'œuvre 
de l'art. L'on rapporte que Goltzius, après avoir mis au jour 
celle d'Albert, en fit tirer quelques exemplaires sur du papier 
qui, par sa couleur enfumée, avoit un air d'ancienneté capa- 
ble de faire illusion, et que, les ayant envoyés en Italie, on les 
y acheta fort cher, croyant que c'étoil un original d'Albert; 
on y débita même que ce peintre allemand avoit ordonné par 
son testament que celte planche ne verroit le jour que cent 
années après sa mort, dans le cas où ses ouvrages continue- 
roienl à être recherchés. L'on eut même bien de la peine à se 
désabuser dans la suite de cette fable ; l'on ne pouvoit croire 
que Goltzius eût su si bien imiter la manière du maître qu*tt 
n'y parût rien de celle qui lui étoit propre ; une telle méte- 



S16 

morpbose paasoii pour impossible dans l'esprit de bien des 
gens. Mais ils vouloient être trompés ; ils ne l'auroient pas 
été, s'ils y eussent feit plus d'attention. — C'est dans le Jé- 
sus-Christ circoncis dans le temple que Goltzius a si bien 
imité la manière d'Albert qu'il est facile de s'y méprendre ; 
il l'a fait en 1594 et y a mis son portrait ; c'est celui qui pa- 
rott derrière le vieillard qui tient l'enfant Jésus. Comment 
donc étoit-il possible qu'on prit le change? Ilfaut croire que, 
dans les premières épreuves que Goltzius envoya en Italie, 
son portrait n'étoit pas encore gravé sur la planche. — L'on 
trouve à ces six pièces la marque ordinaire de H. Goltzius et 
l'année de la gravure ; la première est celle où se trouve la 
dédicace remarquable; la voicy : Ser. prin. etc. Guillelmo V, 
Comiti pal.Rh. utriusque Bavariœ duci, etc. 

Ut mediis Proleus se transi ormabat in undis 
Formosse cupido PomonsB captus amore 
Sic varia, princeps, tibi nunc se Goltzius arte 
Commutât, sculpter mirabilis atque repertor. 

C. Scbonœus. 

Les quatre pièces, où il a voulu imiter les manières d'Ita- 
lie, ne sont pas ce qu'il y a de plus beau dans la suite ; car, 
quoique très-bien gravées, elles ne sont point dans le goûl 
des auteurs. Il est mesme assez difficile de oonnoistre ceux que 
Goltzius s'y est proposé pour modèles, et je ne voudrois pas 
asseurer que ce fussent ceux-là mêmes que je dis ici, Raphaël, 
le Parmesan, Bassan ou plutôt le Titien, et^Frédéric Baroche. 
Pour les deux pièces dans le goût d'Albert et de Lucas, on ne 
pouvoit mieux faire. Celle de Lucas surtout est, à mon gré, une 
pièce inimitable. Sa manière, plus d'art, plus aisée et moins 
terminée que celle d'Albert, étoit bien plus difficile à être imi- 
tée, et il faut avouer qu'il faut être un grand homme pour se 
transformer de la sorte. 



âi7 

— Le corps mort de Jésus-Christ étendu sur les genoux de 
la sainte Vierge, qui le considère en pleurant et les mains 
jointes ; pièce qui porte le monogramme de Henry Goltzius 
et la date A* 96, c'est-à-dire 1596. Comme cette pièce est tout à 
fait dans la manière d'Albert, bien des gens crojent qu*elle a été 
gravée d'après lui; mais l'on sçait que Goltzius a quelquefois 
entrepris d'imiter si bien la manière d'Albert qu'il est parvenu 
i\ en imposer à ses contemporains dans celle qui représente la 
Circoncision, et il y a grande apparence que celle-ci a été faite 
dans la même intention, etque Goltzius l'a exécutée sur un des- 
sein de sa propre invention. C'est un chef-d'œuvre de gravure. 

— Statues d'Hercule, du palais Famèse, de Commode en 
Hercule et d'Apollon Pythien, du palais du Belvédère au Va- 
tican. A toutes : Opus posthumum H. Goltzii nunc primum 
divulgatum, A*» 1617. Elles sont très-bien gravées et avec 
beaucoup de liberté, mais nullement dans le goût antique. 
Herman Adol& exe. Harlem. — J'ai un pressentiment que cet 
Herman, fils d'Adolphe, est Herman Muller. 

— Portrait d'un homme, dont la devise est : Toujours ou ja- 
mais, et que l'on sçait se nommer Amoud Berestein ; il est 
en buste dans un ovale. 11 estoit gendre de Jean Zurenus, 
dont il avoit épousé la GUe, et comme lui de Harlem. San- 
drart, p. 212, 1^* colonne, fait mention d'un Ainoud de Be- 
renstein, qui vivoit à Harlem, en 1526, et qui étoit curieux 
de tableaux; mais ce ne peut être celui-ci, qui est né en 1557. 

— Un écusson dans lequel est représenté un cochon, devise 
d' Arnoud Berestein ; la planche de forme ovale et gravée en 
1580. Le nom de Goltzius n'y est pas; elle est cependant 
de iuy et de ses plus jolies choses. On lit autour et à rebours : 

Très et vicenos vitse cum carperet annos 
Amoldus facie sic Berestenius erat. 

Les lettres numérales marquent l'année 1580. 



318 

— Jean BoU, peintre de Malines, en buste, dans un cartou- 
che ovale, au-dessus duquel sont deux génies occupés à des- 
siner, gravé en 1593, avec la marque de Goltzius; la dédicace 
porte aussy le nom de Goltzius, et œpenddUt il me semble 
encore que cette pièce n'est pas gravée par Goltzius, mais par 
Saenredam sur son dessein. 

Cœlatam vitrici effigiem, Francisée, tuera, 
Virtutem spectato magis vitamque probatam ; 
Pictricem admirare roanum, qu& ilorida Tempe 
Et nemus AlciDoi penicillo aequavit amœnum. 
Dedicat hanc grato tibi pectore Goltzius; at tu 
Pignus amicitiœ Iseta cape mente manuque. 

Joannes Bollius Mechliniensis pictor^ 8B(at. 59, a. 1593. 
Ce François, à qui Goltziuâ dédie ce portrait, est François 
Boels, beau'fUs et disciple de Jean Bol ; il peignoit comme 
luy des paysages en miniature. Sa mort suivit de près celle 
de son père, qui mourut en 1593. La mère de François Boels, 
étant veuve, s'étoit remariée en secondes nopces à Jean Bol. 
Van Mander fait mention de ce portrait de Goltzius à la fin de 
la Vie de Jean Bol. Voyez cet endroit, p. 260 v.; Sandrart. 
p. 264, l'a traduit en latin , mais il se trompe sur le nom du 
beau-fils, qu'il écrit Boets au lieu de Boels. 

— Théodore Comhert, d'Amsterdam , peintre et graveur, 
matlre en fait d'armes et auteur de plusieurs traités de poé* 
Âe et de controverse, représenté en buste dans un ovale ; 
c'est un des plus beaux ouvrages de graveure de H. Goltzius ; 
il semble que, par un motif de reconnoissance, il ait voulu 
montrer tout ce qu'il étoit cap:^ble de faire, dans le portrait 
de celuy de qui il avoit appris l'art de la graveure. — Ad 
vivum depictus et œre iocisus ab. H. Goltzio. L'on apprend 
en même temps que Gornbert étoit né h Amsterdam, en 1522, 
et qu'il mourut à Goude, en 1590, et, par les vers qui s(»il en 



il9 

bas, Von apprend encore que Gornhert avoit beaucoup écrit 
contre les nouveaux réformateurs. — G'étoit, du reste, un 
visionnaire et même un enthousiaste (1). 

— Nicolas Pierre de Daventer, mathématicien, représenté 
en demy corps et mesurant avec le compas un globe terrestre, 
gravé en 1583. — Un autre, du mesme, dans une attitude 
pareille, mais toutefois avec des changements considérables, 
celuy-cy ayant été gra\é en 1595. -** Il n'y a à aucun de 
nom» seulement la devise du mathématicien : L'homme pro- 
pose, et Dieu dispose. Mais j'ay veu des épreuves où le nom 
est manuscrit ; c'est de là que je Tay tiré. 

— Portrait d'une dame flamande ou hoUandoise, ayant 
sur sa tête un chaperon, et vêtue d'un habit à bandes de ve- 
lours noir ; elle est assise dans un fauteuil au-devant d'une 
table, sur laquelle est un livre ; elle joint les mains, et dans 
le fond, est la veue de son château. Au bas, cette strophe des 
odes d'Horace ; 

Damnosa quid non imminuit diu? 

C'est un portrait rare et des meilleurs de Goltzlus. J'en ay 
vu une épreuve, la planche n'étant pas encore finie, puisque 
ni le fond, ni la table n'étoient encore gravés, où la teste étoit 
absolument différente. Elle est coiffée d'un bonnet de toile de 
baptiste au lieu de chaperon, et la fraise autour du col, qui 
n'est pas tout à fait si grande, pose sur le collet de la robe 
qui est doublé de fourrure. Cette teste fut apparemment effacée 
promplement, parce qu'on ne la trouva pas assez ressem- 
blante, et en effet elle paroist changée et n'est pas ensemble. 
A une épreuve que j'ai, il y a derrière écrit le nom de Cathe- 
rine Decher. 



(i) V^«B daa» M volwie rartide spMal de CornheH, p. 8«li. 



320 

— Le portrait d'un aDOoyme, vestu à la mode d'alors, en 
buste dans une forme ovale, autour de laquelle on Ut cette 
devise : Moderata durant ; il est gravé en 1580 ; la teste est 
veue de trois quarts, et il a une fraise à Tentour du col ; l'é- 
criture se lit à rebours. — Gatberinot, dans la Vie de M Cu- 
jas, fait mention d'un Durant! Salvi, Italien, secrétaire du 
connestable de Bourbon, qui, en 1515, fit bâtir à Bourges un 
h6tel qui depuis a appartenu à Gujas, et dans lequel ce célè- 
bre jurisconsulte est mort. Ce Duranti avoit pour sa devise ;une 
feuille de sauge avec ces mots : Moderata durant. Je préjuge 
que c'est icy le portrait de quelqu'un de ses descendants ou 
peut-être d'un homme qui se nommoit pareillement Duranti 
et qui aura usé du même rébus. 

— Gérard de Jode, marchand d'estampes, représenté en 
demy-corps et ayant entre les mains un recueil d'estampes. 
On attribue ordinairement ce portrait à Henry Goltzius; 
peut-être n'est-il que de son dessein? — Sans nom, mais 
l'on sait par tradition que c'est le portrait de G. de Jode; il y 
a au bout de la planche ses armoiries, ce sont trois chapeaux ; 
la marque de Goltzius est au bas de la planche, mais la gra- 
veure ne me paroist pas de luy. 

— N. de la Faille, gentilhomme des Pays-Bas, représenlé 
s'appuyant d'une main sur son épée et de l'autre sur son cas- 
que, en demy-corps dans une forme ovale, environnée de 
trophées d'armes. A ce portrait il n'y a pas de nom, mais 
seulement des armes qui m'ont fait connoistre que c'est le 
portrait d'une personne de la famille de la Faille, établie 
aux Pays-Bas ; il y a autour des vers ïambes qui commen- 
cent : 

Leges tueri et patriam devendere («îe), etc. 
Aux bonnes épreuves, au lieu du nom du marchand Bar- 



221 

man Adolfz, on lit ces mots : Jamais Faille. — Au portrait 
de la femme, il n'y a pas encore de nom, seulement quatre 
vers latins ïambes à l'entour : 

Sequi parata, sive te bello ducem, etc. 

et des armes que je ne connois pas ; c'est un mouton passant, 
sur un champ d'azur. 

— Robert , comte de Leycestre , lieutenant-général des 
troupes de la reyne d'Angleterre aux Pays-Bas , en buste 
dans un ovale, gravé en 1586 ; on prétend que cette petite 
pièce, qui a été gravée avec grand soin, est exécutée sur de 
l'argent. La marque de Goltzius se trouve sur la cuirasse, à 
l'endroit de l'épaule droite ; c'est une de ses plus jolies cho- 
ses ; l'écriture revient à gauche, ayant été gravée à droite sur 
la planche ; peut-être ce petit portrait a-t-il été fait pour quel- 
que bijou? — On laisoit alors graver de petits portraits, dont 
on faisoit le même usage que nous faisons des portraits peints 
en miniature; quelques-uns des plus curieux les faisoient 
même graver sur de l'argent. 

— Parmi les pièces de Goltzius, il y en a une, dans laquelle 
il a représenté un homme debout qui tient de la main droite 
deux fleurs; elle est gravée en 1582, et au bas sont plusieurs 
vers hollandois, dont le premier commence par ces mots 
Oughelyk, etc. J'en ay veu une épreuve, au bas de laquelle 
on avoit écrit le nom de celuy qui représente ce portrait, qui 
est Theodorus Mol, Harlemensis. 

— Portrait d'Erasme Pleiobius ; c'est un buste veu de lace 
dans une forme ronde. Des plus belles choses de Goltzius; avec 
cette inscription autour : 

PLelobIVS pVLCre sIC ora ferebat ErasMVs 
YlCenls très adIlGIens nataUBVs annos. 
T. n. u 



S2S 

et lé bôm Gk>ltzius en bas. Les lettres numérales expriibeilt 
fénhèe 1(UU. 

— Adrien Van Westcappellè, &gti de is ans, en là84, ta 
buste dans une forme ronde. L'écriture est à rebours, et au 
baut de la planclië est tlil petit troti ; ùû en trouve de même 
à plusieurs autres de ces petits portraits, ce qui me fait croire 
qUMlâ t)ilt dû estl-é faits pour estré miâ dans des bijoux cônltilé 
bracelets, etc. Cette écriture, qui se trouvoit eh boii sens stlr 
Icd plabches et qui devient à gauche sur les épreuves, m'en 
j^rOtt encore une preuve. 

^ Jean Zurenus, HoUandois, eti démy-corps, dessiné et 
gfravé en 1588. — Une épreuve de ce niestne porttait avec 
des armoiries qui y ont été àdjoutées, pài- H. Gôltiius. ^ 
Jean Van Zuyten, en latin Zurenus, mort le 10 maj 1391, 
âgé de m ans, fut un des magistrats principaux de là ville 
d'HAriem, et, de société avec Cidrnhert, il leva Une imprimerie 
i fiariem, d'où sont sortis divers ouvrages dô la composition 
dé sOd associé, entré autres une ^traduction en flamand des 
Officeé de Cicéton, en ISAl. Voyez Heennan, t. !, p. 64. -^ 
Amould Berenstein avoit épousé sa fille. Dans les vers, dU bas 
du portrait, il est pàtlé d'un portrait de ZUi^nUs, peint par 
fiemskerk ; mais ce portrait n'a rien de cdtnmun avec te- 
lui-ci, que âôltzius a dessiné et gravé d'après nature. Celui 
d'fiemskerk avoit été fait longtemps auparavant. On trouve 
<tUel(tueiôis joint à ce portrait une pièce de vers latins dé là 
conipositlon de Berenstein, à Ui gloire de son béàû-pètie; je 
l'ai dans mon œuvre. 

éOLtÉttâ (HtBERt). — il faut réformer toutes ëes dàtteâ; 
la plupart fort fausses. — Le premier ouvtâgé d'Ëubért 
Goltzius qui ait vu le jour est son livre de portraits des empe- 
reurs, accompagnés de leurs éloges» U y a eu plusieurs édi- 
tions, l'une en latin, en Irançois, en italien et en espagnoL 



323 

Il n'en a paru que la première partie; les deuxième et troi- 
sième que l'auteur promettoit sont demeurées en arrière. Je 
ii'ai point vu l'édition latine qui sans doute a précédé. Je 
sçais seulement que celle en langue italienne fut faite à An- 
vers, et est de Tannée 1557, la françoise, de 1559, et l'espa- 
gnole, de 1560. Chaque té(e d'empereur est représentée dans 
une médaille, et, comme ces médailles sont impritnées en 
clair-obscur dans la couleur du bronze, cela a fait donner & 
Fouvrage le nom de Jaunes de Cdtzius. Van Mander nommé 
le peintre natif de Courtray qui aida Goltzius dans la gra- 
vure de ces planches, ou plustAt, ainsi que je le crois, dans lA 
façon de les imprimer, car, pour ce qui est du trait qui est 
gravé à l'eau-forte sur le cuivre, j'y reconnois la main de 
Goltzius, et ne doute point qu'il ne Tait gravé lui-même. 

S'étant transféré à Bruges, et y ayant sans doute été attiré 
par un savant antiquaire de cette ville, Marc Laurin de Wa- 
tervliet, qui lui ouvrit ses trésors et lui fit part de toutes ses 
connoissances, il entreprit de donner les vies des empereurs 
par les médailles, et il débuta par son Jules César qui fut im- 
primé à Bruges, en 1563. Ses fastes furent publiées dans la 
même ville, en 1566, son Auguste, en 1574, et sa Sicile et sa 
Grande-Grèce, en 1576. Tous ouvrages qui ont été réimprimés, 
avec des augmentations, en 5 vol. in-folio, à Anvers, chet 
Moretus. 

GONTIËR [LÉONARD et jean). JPeintres sur verre, qui étoieni 
en grande réputation sur la fin du xvi« et au commenceinent 
du suivant. On vante les vitrages des églises de Saint-Etienne 
et de Sainl-Martin-ès- Vignes de Troyes, leur patrie, qu'ils 
ont peints. Mim. mu. eniûoyis de Troyes. 

GOUAZ (yves), élève d'Aliamet, né à Brest, en 1747; éta- 
bli à Paris. 



32^ 

GOUBEAU (francesoo). Cet article est très-fautif. GoAow, 
qui se prononce en françois Gaubeau^ n'a pas été le disciple 
de G. Baur ; il^ se nommoit Antoine et non François. Voyez 
son article purgé de fautes ci-dessus, p. 314. 

GOUDET [(pibrrb), peintre parisien, a dessiné d'après le 
naturel presque tous les oyseaux qui se trouvent dans le livre 
de l'Histoire de la nature des Oyseaux, par Pierre Bellon, im- 
primé à Paris, en 1555, in-folio. Ces oyseaux sont dessinés 
assez correctement. Ils ont été gravés en bois par des Fran- 
çois dont on ne sçaitpas les noms; ils s'y sont seulement dé- 
signés par ces deux marques (une flèche et une croix]. Peut- 
être est-c^ une allusion à leurs noms et qu'ils s'appelaient 
l'un, la Flèche, et l'autre, la Croix. Préface de Belon. 

GOUDT (HEiniT), d'Utrecht, comte palatin, ayant un amour 
singulier pour la peinture, étoit venu à Rome dans le des- 
sein de s'y perfectionner. Il y trouva Adam Elsheimer, qui 
peignoit excellement bien en petit et dont la manière se trouva 
si fort de son goût qu'il luy fit faire plusieurs tableaux qu'il 
grava ensuite luy-mesme au burin pour les rendre publics. 
L'on peut dire à sa louange que l'on ne pouvoit mieux rendre 
qu'il l'a fait la manière de ses originaux, très^iflficiles d'ail- 
leurs à être imités en graveure ; car ce sont presque tous des 
sujets de nuits, où les figures sont éclairées de la lumière de 
la lune, ou de celles de quelques flambeaux. Personne n'a- 
voit traité avant luy de ces sortes de sujets avec quelque sorte 
de vérité ; il a fallu qu'il imaginât une nouvelle manière de 
graver qui fût propre à les exprimer, et c'est en quoy il a 
très -bien réussi. Le peu de pièces qu'il a mises au jour sont 
toutes d'après Elsheimer. 

GOUJON (JEAN), habile s(*.ulpteur à Paris (je crois vers la 



325 

fin du xvi^ siècle), étoit d'autant plus estimable que, succé- 
dant aux gothiques, il ne tenoit rien de leur goût ; ses ouvra- 
ges sont, au contraire, fort légers, et sa manière de dessiner 
fort svelte. Les sculptures de la fontaine des Saints-Innocens, 
à Paris, sont de luy, et celles de la façade du vieux Louvre, 
en dedans la cour. Il a fait encore plusieurs autres ouvrages 
considérables dans cette ville, surtout ce beau groupe de 
marbre représentant les trois Grâces qui portent une urne 
sur leurs testes, qui est aux Célestins (1). L'on trouvera dans la 
Description de Paris, de Brice, un plus grand détail de ses 
ouvrages. Il avoit été architecte du connestable de Montmo- 
rency, et il le fut depuis de Henry second, roy de France. — 
Extrait de la Dédicace à la tête du Yitruve, traduit par Jean 
Martin. Les flgures qui sont dans ce livre sont du dessein de 
cet habile architecte et sculpteur, et il y a grande apparence 
que celle qui sont dans le Poliphile sont aussi de son inven- 
tion. 

GOUPY (JOSEPH). Xeuxis prenant pour modèle du tableau, 
qu'il devoit peindre pour les Agrigentins, cinq de leurs plus 
belles fllles, gravé à Londres à l'eau-forte, par Joseph Goupy, 
peintre en miniature, d'après le tableau de François Solimène, 



(i) On peut voir sur Goujon, Tappréciation artistique de M. Gus- 
tave Planche, imprimée aabord dans la Revue des Deux Mondes 
et réimprimée dans ses Portraits d'artistes, et la nolice de M. de 
Longperier dans le Plutarque français (II, 1846, p. 17-24); il y 
conteste la mort de Jean Goujon dans la $aint-Bartbélemy, et Tab- 
sence de son nom des Martyrologes protestants publiés alors, pour 
être une raison négative, n'en est pas moins une excellente raison. 
— Nous n*avous pas besoin de dire que Mariette se trompe en at- 
tribuant à Goujon les trois Grâces qui sont si évidemment de Pilon, 
que pour les lui donner il ne serait pas môme besoin des mentions 
qui en sont faites dans les comptes publiés par M. de Laborde 
(Benaissance desarU^ 1, 494-5, 500, 506, 518). 



S9( 

qui est dans ^ cabinet dn duc de Devonsliiie, -rC'e^GQ^ipj 
qui ep a la pli^ncbe à Londres, 

GOUBMQNT (iG^B n«), 11 y a, dap« U chapelle du cbAtem 
d'pscouen, un petit tableau représentant Jésus-Gbrist, nou- 
veUemept né, coucbé dans la CTècbe et adoré par la sainte 
Vierge, qui est peint par le même maître, d'aprës lequel sont 
gravées les différentes pièces qui sont marquées du mono- 
gramme J. Q. 11 est composé précisément de la même façon; 
même fond d'architecture, mêmes intentions de figures, et, 
si J. Gourmont, qui a fait les estampes, a jait aussi des ta- 
bleaux, celui du château d'Escouen est son ouvrage (1). 

— J, G. (en monog.). Q'estla marque de h Gounnont,qui 
vivoit en 1557, U grava dans cette anné^le portrait de Cbar* 
les, cardinal de Çourbqn, pour lors &gé de 28 ans ; ce cardinal, 
représenté eu figure entière, assis pr^ d'une table. C'est \^ 
que j'ay appris le nom de cet artiste. 

— Ce graveur manioit le burin très-proprement, mais sans 
intelligence, et son goût de dessein et de composer es( fort 
mesquin ; il se piquoit de sçavoir la perspective *, car il n'y a 
aucune de ses pièces qu'il n'ait enrichie par de grandes [com- 
positions d'architecture. Il y a aussy apparence qu'il estoit 
orfèvre ; il a gravé quelques pièces où il a représenté des ate- 
liers d'orfèvre, et il y en a une surtout où tous les outils y 
sont exprimés avec assez de détail ; c'est celle où deux jeunes 



(1) Le tableau dont parle XarieUe est maintenant au Louvre, où 
il a été longtemps sous le faux nom de Van Mander; pu y retrouve 
toujours cette prédominance de Tarchitecture qui paratt être un 
des caractères de Gourmont. Le charmant dessin du cabinet des 
estampes, dans lequel le massacre d*aussi peu d*innocents qu'il 
est possible d^en mettre, du moment qu*on en met, est le prétexte 
d*une délicate perspective de constructions élégantes, doit aussi 
être de lui. 



m 

4ppr?iit\l^ 9e battent et se tie^n^t im^. cheveux. Au reste, j^ 

ne le crois que du milieu du xyj^. 

— Le songe de Raphaël, gravé par Georges Mantuan. Aux 
mauvaises épreuves : Jean de GMirponI eûMuiU. 

QOY (jEAi^-JBAPTisTi:), prêtre, doci^u^ en théologie da U 
fl^çulté de P^ris, premier curé de VégUse S^nte-yai^[vierita 
AU faubourg Saint-Antoine, à Paris, avoit été sculpteur deç^ 
s{| jeunesse, et il subsiste encore de ses ouvrage^. Il se dé* 
goûta de sa profession et embrassa Testât ecclésiastique d^of 
lequel il s'est rendu recommandable par la charité de ses 
œceurs. Sa sœur, Marguerite-Gatherine Goy, avoit épousé 
M. Errard, directeur de l'Âcadéinie royale de peinture, éta* 
blie à Rome. J.-B. Goy avoit été à Rome et parloit assez bien 
des arts. Il est mort le 13 janvier 1738, d'une fluxion de poi- 
trine, âgé de 70 ans (1). 

60YRÂN (CLAUDE). Un paysage où sont des gens qui consi- 
dèrent un tombeau antique ; un autre où Ton voit au bord 
d*une rivière un pêcheur qui va jetter son filet ; chez P. Ma~ 
rietle qui y a fait mettre au bas : Jf. Swaneveliut. in. ei smlp.^ 
ccnune s ils étoient de la graveure de Herman. Cependant ils 
sont certainement de Goyran. 

GRANDI (ergolb), plus connu sous le nom d'Hercule de 
Ferrare. Le Yolateran (li. 2, p. 193) en parle avantageusement 
et fait mention, non-seulement de ce qu'il avoit peint à Bou- 
logne, mais encore des ouvrages dont il avoit enrichi la Hon- 
grie, in Pannonia nonnuUa quo fuit accersitus. L'auteur de 
la Description des peintures de Ferrare (p. 9), qui me fournit 



»i I — »— — .^— i^— ^— ^— — ^i^^— ^MB^a^iM^ 



(1) r^yM sur lui Piganiol, V, 139 et sviv., oi ta deteriptioa de 

Versailles, 1751,11, 183 et 330. 



528 

cette anecdote, prétend que ce peintre a vu la fin du uv« siè- 
cle et le commencement du xv*. 

6RASSI(gregoek>) d'AquilaX'abbéTiti,danssa Descriptioa 
des peintures des églises de Rome, p. 449, le fait élève du 
Guide. Je connois une estampe, gravée d'après lui, par 
Th. Matham, qui représente Alexandre coupant le nœud 
gordien. Elle peut servir à donner une idée de sa manière de 
composer, qui ne tient rien de celle du mattre qu'on lui 
donne. 

GRAYIO (gio.*andrea). Son nom allemand est Graff. Il est 
disciple de Jacob Murel, qui avoit épousé à Francfort la veuve 
de Mathieu Merian le jeune. 

GRAZINI (jeam-^aul). Le P. Orlandi, dans son énumération 
des peintres de Ferrare (Abec. Piit.j 1719, p. 97)^ fait mention 
de cet artiste qui mourut, dit-il, en 1690. J'ai peine è croire 
qu'il mérite la place que cet écrivain lui adjuge ; car il n'en est 
foit aucune mention dans la Description des peintures de 
Ferrare, qui ne laisse rien échapper de tout ce qui peut faire 
honneur à cette ville. 

GRBCCHi (MABœ-AMTONio). La sainte Vierge tombant éva- 
nouie entre les bras des saintes femmes, à la veue du corps 
mort de J.-C. que saint Jean étend sur un linceul dans le sé- 
pulcre, gravé à Sienne, en 1598, par Mare.-Ant. Grecchi, d'a- 
près Alexandre Casolini ; au burin et médiocre. Les noms des 
artistes y sont ; on y voit aussi la marque de Jean Antoine 
de Paulis qui est le marchand. Je ne doute point que ce gra- 
veur ne soit le même qui ait gravé plusieurs pièces où il s'est 
contenté de se désigner par un M. et un G., et que ce ne soit 
ui pareillement qui ait gravé la chute des géants attribuée à 
Callot. 



329 

GREGO (âlessandro). Eoeas Yicus le met au rang de ceux 
qui ont excellé à contrefaire les médailles antiques. Disœrti 
sopra la medaglia degli antichidi Enea Ftco, ^ 67. Seroit-ce 
ici l'associé du Padouan, qui, sur la médaille où il est repré- 
senté avec J. Gaviaus, est nommé AUxander B<issianu$. 
Voyez le Gabinet de Sainte-Geneviève, p. 113. Alexandre Ge- 
sari, fameux graveur de pierres gravées et de médailles, étoit 
aussi surnommé le Grec. 

GREENHILL (jean). Le portrait de son frère Henry, mar- 
chand à Salisbury, gravé en 1677, et au pied duquel est une 
longue inscription en latin, où il est dit que lui-même a ma- 
nié quelquefois le burin, ne peut être l'ouvrage de Greenhill, 
quant à la gravure, puisqu'il mourut en 1676 ; dans les mé- 
moires étant à la suite de M^« Beal, la mort de Greenhill est 
marquée au 19 may 1676. (Notes sur Walpole.) 

GREUTER [JOSEPH-FRÉDÉRic). Piètre de Gortonne, homme 
bien capable d'en juger, estimoit ce graveur. Voici comment 
il en parle dans une lettre qu'il écrivoit de Florence à un de 
ses amis à Rome, en 1641, et qui se trouve dans un recueil 
de lettres écrites par des peintres, qui a été publié en 1754. 
G'est à l'occasion des planches qui dévoient entrer dans le 
livre de Girol. Terio, intitulé : JEdes Barberinœ : « 11 sig. 
Gir. Terio m'ha mandati alcuni disegni délia salla del card. 
BarberinifChefaintagliare. Ho inteso che uno ne fà ilGreuter, 
U quale è bumo. Gli altri non so come li habbia spartiti, etc. » 

GREUTER (Mathieu), né à Strasbourg, est mort^à Rome, 
en 1638; étoit âgé de 72 ans, ainsi que nous l'apprend le Ba» 
glioni, p. 398. 

GREUZE (jean-baptiste), né à Toumus, en 1728, travaille 
à Paris et s'y distingue par un excellent goût de couleur. 11 a 



G^ioisî fiûur scm genre c$lui d« ba^boc^d^s, «( tft^lw 4'y 
mett^ de rialérdt, ce q^i foi^ q^e ses ta)[^ai: soQt fp^ goû- 
tés. Les connoisgeurs Irouveot leur co^ipte dans la la{QQ dcmt 
ils sont peioU. La multitude est touchée du cboii; du siiget 
qui se rapproche de nos mœurs, et qui lui sert d'entreti?a. 
n a fait le voyage d'Italie eo VJSfit voyage qui lui étoit assez 
inutile, et où la vanité dut avoir la principale part. 

— Quoique ce qui euit ne sait que le denier feuilkf (Ttin or- 
iicte spécial^ nous le donnons^ et pour sa curiosité, et parce 
que, em te signalant,ilenrésuUerapeuféir€ te ^Uramrlsihme 
autre copie :.••• la touche et la beauté de la couleur, et, sans 
s'arrêter au jugement que Oreuze en partait lui-même, la 
palme est demeurée au piemief de ces tableaux, juateqie&t 
refardé comme le chef-d'œuvre de pe peintre, et que M, de 
Marigoy a mis dans son cabinet et payé 3,000 liv. (1). Je Wh 
haite me tromper, mais je crois que ce peintre ne lera jamais 
rien de plus accompli. Le second tableau attend un acheteur; 
mais, pour le trouver, il laudroit que Greuze rabbatte beau- 
coup de ses prétentions. Il en a refusé un gros prix, et je 
crains qu'il ne s^en repente. Le sujet qu'il a choisi est tiiste ; 
il feut pour l'acquisition de ce morceau un homme riche, et 
ces sortes de gens n'aiment à repaître leurs yeux que d'ob- 
jets agréables. Greuze a fait plusieurs portraits qui portent 
un caractère de vérité qui les doit faire priser. Biais c'est 
peut-être par cela même qu'ils ne feroient pas fortune. Trop 
de simplicité et de naïveté déplairoient à bien des gens. Ainsi, 
le portrait qu'il a fait de M. le Dauphin, ceux du duc de 
Chartres et de mademoiselle d'Orléans, sa sœur, ont-i^éiiçQuvé 
de rudes (Critiques. J'ai vu celui qu'il a fait d'une jeune QUç du 



(1) G*est rAcccordée de village, n« 42 de la vente de M. le W^ de 
tténars (M. de Harigny), février 4791, aobetéa pour )e roi iia,a80 

livrçs et mfi(iiate|Laa^ au toMvra- 



«91 

(jeriiiçr açibassa^çur (Jç Rvs?tei ç'e?t, si j'qpe I9 4w^ m ebef- 
d'cçuvre ; Rubenç ni Y4Q P^cl( oe Tauroleat désavoué ; loais 
c'est que, de la façon dpat il est coipposé, c'est qioins ui| 
portr^iit qu'une tête de carsictère. Qreuze m a fait beiiucoup 
^aps ce dernier gen^e, et it s'en trpuve parmi qui sont admi* 
râbles. 11 a fait aussi nombre de desseins, qui, d^ns le corn* 
ipencement, li|i ont été payés prodigieusement par quelque 
curieux ; mais je ne crois pas qu'on y mette aiyourd'bui la 
mèo^e presse. Il pie parott au contraire que les derniers 
qu'a faits Greqze, font et feront epçoTe loogtepips l'orne- 
ment de son appartement. Il n'en pst pas de même des es-r 
tampes qui ont été gravées d'aprèsi lui. Elles ont f^it 1^ for- 
tune des graveurs et la sienne. Si l'on s'en souvient, il en fut 
ainsi 4^s estampes qui furept grs\yée$ d'après ^estableaw de 
Chardin. Pes eurept up débit prodigieux. Les s^iets y opt 
pli^s coptribué que toute autr^ chose, La vérité historique 
pous force de rapporter un trait qui caractérise l'hop^pie, et 
qui montre combien Grepze ayoit peu l'usage 4u monde. Il 
lut mandé à Versailles pour le portrait de Monseigneur le 
Dauphin ; après avoir exécuté le tableau de Sfpns^gi^eQr le 
Dauphin, ce prince, qui étoit la bonté mémPi crut ne pou- 
voir lui proposer rien cie plus flatteur ni de plus ol^ttg^nt 
que de lui demander le portrait de Ma4a^e la Dauphine. 
Elle étoit présente, et, sans songer dp ce qu'il alloit dirp, 
Greuze répliqua qu'il pnoit d'en être dispensé, parcp que, 
adjouta-t-il, je pe sçais point peindre de pareilles tôtps. U 
vouloit critiquer le rouge qui déQguroit Ips joues dP l^ prip- 
cesse; mais étoit-il permis de manquer d*unp manière aus^i 
ignoble au respect et aux convepances (!]? Chacun haussa les 
épaules et regarda le peintre en pitié. 



(i) Mariette avait d'abord écrit : Mais cela étoit dit en sabotier. 



332 

6REVENBR0ECK (chables-léopold] , qui se prononce 
Grevenbrouck, peintre flamand, que nous avons vu à Paris, 
qui peignoit le paysage, mais principalement des voues d'é- 
difices telle que sont celles de plusieurs maisons royales, qui 
furent exposées au sallon du Louvre, en 1738. Il représentoit 
les objets qu'il vouloit rendre avec assez de fidélité, mais son 
pinceau étoit lourd, et sa couleur peu harmonieuse. Il s'étoit 
présenté à l'Académie, et y avoit été agréé. Comme il mou- 
roit de iaim à Paris, il en sortit pour aller chercher fortune 
ailleurs ; il ne la rencontra jamais, et, comme il ne fournit 
point son morceau de réception, il fut rayé. J'apprends qu'il 
est mort h Naples, en 1758 ou 1759. 

GRËVILLE (lady louise), fille du comte de Warwick, a 
gravé à Londres, en 1760, un paysage du Carrache et un — 
mesme peut-être quelques autres encore — d'après Salvator 
Rosa, qui ne sont pas sans mérite. Elle s'y est désignée par 
ce monogramme (L A G, en lettres italiques). 

GRIGNON (JACQUES). Jamais la graveure au burin n'a été 
cultivée en France avec plus de succès que dans le temps que 
vivoient les deux graveurs dont on a recueilly ici les ou- 
vrages. 11 s'étoit formé à Paris un nombre d'excellents ar- 
tistes qui travailloient à l'envie l'un de l'autre à se surpasser 
pour la parfaite exécution de la graveure, dont ils faisoient 
leur principale étude. Jacques Grignon se distinguoit parmy 
eux. La couleur de son burin étoit extrêmement douce, et il 
possédoit luie égalité de tailles qui n'étoit qu'à luy. La pa- 
tience, avec laquelle il conduisoit son ouvrage, y contribuoit 
beaucoup. Pierre Landry, qui étoit son contemporain, n'a- 
voit pas une moins belle couleur de burin ; il avoit une grande 
facilité à couper le cuivre, et sa gravure étoit pure et bril- 
lante ; il ne luy manquoit que d'estre plus harmonieuse et 



plus flexible. Ce que ces deux graveurs ont exécuté de plus 
considérable, sont des portraits. 

GBIMÂLDI (gio. frângesgo], que Ton nomme en France 
Jean Francesque Bolognese, vint à Paris en 1648 ; mais, n*y 
trouvant pas de l'employ, comme il Tespéroit, à cause des 
troubles qui agitèrent pour ^lors TEstat, il s'en retourna à 
Rome, après avoir peint les plafonds du palais Mazarin, à 
Paris. Felibien, t. Il, p. 299. — Ce peintre naquit à Bologne, 
en 1606. Il apprit son art dans Técole des Carraches; étant 
venu à Rome, il peignit plusieurs choses dans Fintérieur du 
palais Vatican, et, sous le pontificat d'Innocent X, plusieurs 
frises dans des chambres du palais de Monte-Gavallo. Le prince 
Camille Pamphile, neveu de S. S., Testimoit beaucoup, et lui 
fit laire plusieurs ouvrages dans la vigne Pamphile. Les prin- 
cipaux ouvrages publics, qu'il a faits dans les églises de Rome, 
sont quelques portraits dans l'église de S. Alarie in Publicolis, 
deux grands paysages dans l'église de S.-Martin des Monts, 
en concurrence du Guaspre, les fresques d'une chapelle dans 
l'église de la Madona délia Yittoria, etc. Le cardinal Mazarin 
le fit venir en France pour peindre dans son palais et dans 
celuy du roy, et, pendant deux années et demie qu'il de- 
meura à Paris, il peignit quantité de beaux ouvrages. Il en 
auroit fait davantage s'il y eût pu demeurer plus tranquille. 
Mais, l'attachement, qu'il avoit au cardinal Mazarin, lui faisant 
craindre d'-estre enveloppé dans sa disgrâce, lui fit prendre 
le party de se retirer chez les Jésuites, pour attendre un temps 
plus calme, et ce fut alors qu'il peignit dans cette église une 
magnifique décoration pour l'exposition du S. Sacrement, 
telle qu'on les pratique à Rome, laquelle attira tout Paris 
dans cette église, et fiit tellement au goût de S. M., qui vint 
deux fois pour la voir, qu'il lui en ordonna une pour la cha- 
pelle de son Palais, à l'occasion du sépulcre de N. S. dans la 



iih 

semaine sainte, ff ajrant plus d'occupation à Paris, Grimâldi 
s'en retourna à Rome, où le pape Alexandre YD, et depuis 
le pape Clément IX, lui firent peindre , le premier la galerie, 
et le second plusieurs chambres du palais de Monte-Cavallo. U 
peignit aussi plusieurs scènes de thé&tre pour les neveux de 
Sa Sttinteté, et quantité d'ounages dans les palais de ftome. 
11 étoit aussi beaucoup occupé à peinàre des tableaux de che- 
valet, Surtout pour la France. Le marc^iiis del Carpîô, am- 
bassadeur d'Espagne, étoit un de ses principaux protecteurs, 
et (}ui lui faisoit Thonneur de venir le visiter presque tous 
les jours. Il est étonnant la quantité de desseins qu'on voit de 
lui. Enfin, après avoir été deux fois prince de rÂcadémie de 
S.^Luc, il mourut à Rome, Agé de 74 ans, en 1680, et fut en- 
terré dans rÉglise de S.-Laurent in Lucina, jour malheureux 
pour les beaux arts, puisque, dans le même temps qu'on 
voyoit le corps de Grimâldi exposé dans cette église, on 
voyoit, exposé dans celle de S*^Marie Majeure, celui du fa- 
meux cavalier Bernin. 

'^Ala âuHe tune énutnéraiion de ses paysages gravis^ Mor 
fiette ajoute : tous les paysages ci-dessus, à l'exception du der- 
nier, sont de Tinvention de Jean Frâticisque fiolognese, et gra- 
vés à l'eau'forte par luy itiesme. Cet habile artiste s'estoit fait 
une excellente manière de dessiner le paysage. U y a peu de 
maisttes qui Tayent gravé avec (abt de légèreté, et c'est le 
meilleur modèle que puissent choisir ceux qui veulent des- 
sinef de bon goût. — A une suite de quatre paysages : II n'a 
gravé son nom à aucun de ses paysages, quoyque ce fût sa 
coutume ; il y en a seulemén( ud où il a gravé la date 1643. 

— J'ay recueilli tout ce que Malvasia dit de Jean-François 
(îrimaldi : 

Gio. t''rancesco6rimaldi Bolognese viveva nel 167 â ; era bravo 
pittor de paesi, publico il funerale del sig. t^'acbenetti, am- 
basciator di Bologna iù Homa, intaglio da lui alT âcqua forte 



una sUita di sei paesi sul glisto Carracesco ed altri pensiëfi. 
Malvasiâ, p. 2, p. 130. 

Gran virtuoso in arcbitettura, prospettira, disègno, e taùtô 
pîU del Viola bravo paesesta, p. 4, p. 430. S'è ttovato a Pariai 
a servigi dd È\g. data. Mazzatini, p. 133. 

âavevà sp6sato una figlia di Baltliatat Galanlno ; poâsedeta 
uti tômo del Yasâti tùtto po^tillato ûel liiârgitië dàl dottb 
Agostino Cai'aGCi, p. 135. 

J'adjôutérai c^uë Sean Franéêsqué Bàlognéèe, car c'est ainsi 
qu'on le nomme en France, a voulu imiter quelquefois lés 
sites du Titien et la touche des Carraches , ïnais qu'il est fort 
éloigné de ces deux grands hommes. Tous ses paysages pa- 
foissèht faite dans son cabinet ; c'est la même manière dada 
tous, un premier de ses paysages plaist, parce que la touché 
eh est légère ; mais plusieurs de suite rebutent, parce qu'il n'y 
â point de vatiété, ni dans la composition^ ni dans la touche, 
tous ses pa jrsagés sont faits au premier coup, ainsi il né faut 
y chercher aucune rechetthe. Ceux qui sont faits d'aptes na- 
tUtë Ont lé même défaut que ceux qui sont d'invention, ce 
(iUi motitre peu de génie. 

GRIHMER (UCQUEs) estoit peintre de paysagi^, ainsi que 
le dit Sandrart après Van Mander, mais il ne dit pas un mot 
de cette facilité de peindre à fresque, que luy attribue le 
f. Orlandi; il mourUt à Anvers. 

GAlMOUX (iËÀH), tié & FHboUrg, en Suisse, ou plutôt h 
Aoinont, dans le catitôh de Pribourg, vers l'année 1680, est 
mort ft PariSî aux édVirofis de 1740. il a peint des tètes avec 
une force de couleur qui lui a mérité d'être regardé comme 
Un second Rembratidt, nlMs il n'a pa^ été plUs loin, et sa mau- 
vaise conduite, car ce fut un franc y vrogne, l'a laissé croupir 
dans la miûte. Où tA'i rftCtiBte ùû trait de âà irie, dont je tae 



556 

garantis pas la vérité. On a voulu m'assurer qu'ayant épousé 
une femme coquette, cette femme, pour vivre avec plus de 
libecté avec son amant, qui étoit unofGcierdelapolice, pré- 
texta la vie peu réguli^ de son mari, et eut le crédit, sans 
autre forme de procès, de le foire renfermer à Bicêtre. Gri- 
moux ne sçavoit ce qui pouvoit lui avoir attiré cette disgrâce. 
n cria à l'injustice. Ses plaintes parvinrent aux oreilles de l'é- 
conome de ce lieu de force. U fut interrogé, il s'avoua pour 
être peintre, et ne dissimula pas qu'il étoit un yvrogne. On 
voulut s'en assurer, et voir ce qu'il sçavoit faire. L'économe 
avoit une bonne amie, il proposa d'en faire le portrait. On 
lui fournit tout ce qui étoit nécessaire. Il se mit à l'ouvrage 
et le termina non sans peine. L'horreur de la prison avoit af- 
faibli sa veue, mais sa peinture n'en fut pas moins parfaite, 
et celui, pour lequel elle étoit faite, en fut tellement frappé, 
qu'il commença à prêter l'oreille à ce que le peintre avoit à 
dire pour sa justiQcation. 11 en fit son rapport au magistrat; 
on reconnut qu'on avoit agi trop légèrement sur de faux rap- 
ports, GrimQux fut élargi. Je ne sçais si la femme fut punie, 
ainsi qu'elle le méritoit. Mais cette avanture ne rendit pas 
Grimoux plus sage. U continua à vivre comme auparavant, 
dans la crapule, et, s'il ne cessa de produire des ouvrages ex- 
cellents, il n'en devint pas plus riche, ni plus fêté. Ses ta- 
bleaux, même après sa mort, n'ont pas monté de prix, et 
cela vient encore de ce que la magie de sa couleur n'a agi que 
sur de simples tètes, presque toutes sans caractères, et par 
cela même peu intéressantes. La vie de Grimoux se trouve 
dans le 1^ vol. des Vies des Peintres suisses en allemand, 
pag. 15 (1). 11 étoit fils d'un Cent-Suisse de la garde du Roi. 

GRONl (jean-baptiste), Vénitien, peintre d'architecture, 



(i) Et dans les Anecdotes des Beaux-Arts, t. U, p. 229 . 



et ce que les Italiens appellent quadrarista, est mort h 
Dresden, en 1748. 

GRUENINGEN (jean de), peintre, vivoit à Strasbourg, en 
1442. Il est employé dans un rôle conœmant une taxe im- 
posée dans cette année sur les habitants de cette yille, dans 
le livre de M. Schœpflin, intitulé Vind. typogr. p. 92. 

GRUNEWALD(hâns balde]. Le clair obscur, qui représente 
un sabbat, dont l'invention est de Hans Balde Gninewald, 
porte la datte 1510, et cette datte ne peut estre révoquée en 
doute. C'est une époque certaine du temps que cette estampe 
en clair obscur a paru ; car, aux épreuves de la planche qui 
exprime le trait, et qui ont été imprimées avant qu'elle fût 
mise en clair obscur, on ne trouve point encore de datte. 
Elle a donc été adjoutée depuis, lorsqu'il fut question d'en 
faire un clair obscur. Je ne fais cette remarque que pour faire 
connaître qu'il est constant que, dès 1510, l'art des dair-obs- 
curs étoit connu en Allemagne, et l'on n'a rien qui prouve 
qu'il le fAt déjà en Italie. 

GUÂRANA (JACQUES), né à Venise, le 28 octobre 1720, a 
commencé ses premières études de peinture sous Sebast. 
Ricci, et les a terminées sous le Tiepolo. Il a pris, comme ses 
mattres, une manière fort expéditive, et, soit qu'il peignit à 
l'huile ou à fresque, les plus grands espaces qu'il faut cou- 
vrir de couleurs ne l'étonnoient point. On vante un plafond 
qu'il a peint à Venise, dans le palais Rezzonico, et un autre 
dans l'élise de S. Moyse. La Czarine lui a fait faire un grand 
nombre d'ouvrages, dont elle a paru satisfaite; quelques- 
unes de ses peintures ont été gravées; on lui trouve, dit-on, 
un ton de couleur qui vise à c^lui du Gignani. Longhi, Vit. de 
Pitt. Venez. 

T. n. V 



6UARINETT0. Le Rossettii Descrizione délie pitture di Pa- 
dova, De le nomme jamais autrement que Guariento, et il 
nous apprend, p. 101, que ce peintre a reçu la sépulture 
dam régliie de S. Bernardin, à Padoue. 

6UERARD (NICOLAS), de la Brie, mort à Paris, âgé d'envi- 
ron 71 ans, en 1719, en caresme ; il avoit été disciple de 
Ghauveau, avoit aussi travaillé chez M. Le Pautre et chez 
Yander Gabel, dont il a gravé plusieurs paysages ; il en avoit 
beaucoup pris la manière, n avoit du génie, et composoit 
assez facilement sur-le-champ; il n'avoit aucune propreté 
dans sa graveure. 

GUERIN (GILLES), n ne s'appelloit point Louis, son nom 
de baptême étoit Gilles; c'est une faute qui est échappée 
à Felibien, et qui mérite correction. Ce sculpteur est mort le 
96 février 1678, âgé de 58 ans, ainsi qu'il est marqué dans la 
liste des membres de FAcadémie royale, dressée par Reynez, 
qui en étoit le concierge, et qui étoit l'exactitude même. 

GUESUN (CH. ETIENNE), mort à Paris, le 16 février 1765, 
âgé d'environ 80 ans, est fils d'un peintre qui a fait des testes 
dana le goût de Rembrandt, et quelquefois il y a passable- 
ment réussi. Elles font de l'efiet, mais elles pèchent par le 
dessein* H connoissoit son faible ; aussi, après en avoir ensei* 
gné les premiers éléments à ce fils qu'il destinoit à la pein* 
ture, il crut devoir le placer dans une meilleure école , et 
pour cela il l'envoya chez M. Jouvenet; le jeune GuesUn n'y 
fit pas cependant de grands progrès. U n'étoiC point né pour 
l'art auquel on le destinoit. Quelques tètes passablement bien 
peintes firent penser favorablement de ce qu'il pourroit fairs 
par la suite. Elle lui méritèrent d*étre admis dans l'Académie 
royale de peinture en 1723. Mais il en demeura là ; il ne fit 
plus rien depuis de passable. 



dS9 

GUGLIELMI (GBEGOBio), né à Rome, le 13 décembre 1714. 
Il est disciple du Trevisani, et il y a beaucoup de ses ouvrages 
à Yienne. Je l'ai vu à Paris en 1770, et ce fut M. Yemet, son 
ami, qui nous le présenta. Il revenoit d'Allemagne, où, dans 
ko différentes cours qu'il avoit fréquentées, et surtout dans 
celle de Saxe, il avoit fait de très-grands ouvrages. Les princes 
aiment à être servis promptement dans leurs goûts, et cet ar- 
tiste, toujours prêt à laire marcher les pinceaux, n'attendoit 
que des ordres pour les exécuter sur-le-champ. C'étoit un 
de ces peintres praticiens, qui, nés avec de Hmagination, ne 
demandent qu'à s'exercer sur de grands espaces. Il ne faut 
pas leur demander de la correction dans le dessein, ni de la 
sagesse dans la composition, lis y mettent du feu, ils y em- 
ployent des couleurs brillantes, et l'œil peu connoisseur en 
est satisfait, et cela suiQt. C'est le jugement que j'ai entendu 
former des ouvrages de ce peintre par des connoisseurs. Son 
portrait, gravé en manière noire par Haid, à Augsboutg, m'a 
donné la date de sa naissance. 

6UIARD (louis), de Chaumont, en Bassigiïy, a appris la 
profession de sculpteur chez Bouchardon, et, lorsqu'il est parti 
pour Rome, oîi il a été reçu à la pension du Roi, il donnoit 
les plus grandes espérances. Il y a du temps qu'il est à Rome. 
Ce n'est pas un pays où les François trouvent aisément des 
occasions d'exercer leur talent, surtout aujourd'hui que les 
arts y languissent, et c'en est assez pour arrêter dans sa course 
un talent naissant. Au mois de juillet 1768, Guiard est entré 
dans sa quarantième année. Il est revenu à Paris dans le des- 
sein de s'y fixer, en 1768 ; et depuis qu'il y est, il a fait le mo- 
dèle du tombeau de la princesse de Saxe-Gotha, qui lui 
été demandé d'Allemagne ; mais il faut attendre l'effet que 
ce modèle aura produit sur ceux qui l'ont ordonné. Jusqu'à 
ce moment il est incertain si l'exécution aura Ifeu. Il est corn-' 



poséavecgéaie. — * Au commencemenl de Taimée 1769, il a élé 
appelé à Parme par le prince, qui s'esl eogagé de lui faire 
une pension de 3,000 livres, avec la liberté de travailler pour 
d'autres que pour lui. C'est une fortune pour Guiard qui n'a- 
voit jamais rien fait à Paris, et qui s'y seroit ruiné, oonune 
il a fait à Rome. Je souhaite qu'il en profite. 

GUIDl (DomiaQiTB). Au bas de l'estampe, représentant sainte 
Apolline, gravée par Farjat, d'après ce sculpteur, oa lit une 
inscription qui apprend que D. Guidi avoit été baptisé dans 
réglise paroissiale de S. Maria de gli abandonati de Torano, 
dans le duché de Carrara; ainsi, il n'est donc pas de Massa 
même ; qui pouvoit estre mieux instruit que lui sur le nom 
de l'endroit où il étoit net L'abbé Pascoli le &it mourir ea 
1701 ; mais je ne puis convenir de tout ce qu'il dit de désavan- 
tageux sur le compte de ce sculpteur, qui certainement passe 
les bornes de la médiocrité. J'ay veu de belles choses de lui (1). 

GUIDI (JEAN THYsmio). On a quelques estampes gravées à 
l'eau-forte par cet artiste, qui ne sont pas sans mérite, et qui 
laissent entrevoir qu'il avoit étudié en bonne école, peut-être 
étoit-ce sous le Guide, et que c'est ce qui lui avoit fait ajouter 
à son nom celui de ce grand peintre, n fut employé par le 
marquis Vincent Justinien à dessiner une partie des statues, 
bustes et bas-reliefs antiques, qu'il avoit recueillis, ce qui 
nous fiait connottre qu'il vivoit à Rome vers le milieu du 
XYii* siècle. 

GUIDI (rafpaeixo) era Fiorentino; cosi si trova scritto nella 



(1) L'un de nous possède deux lettres autographes et une note, 
tontes trois en italien, relatives au payement ae son groupe de 
Versailles, qu'on lui avait fait attendre. Voyez aussi deux lettres de 
Guidi, Archives de VArt français^ 1. 1, p. 60-3. 



3fti 

carta del Dedalo intagliata da lui col disegno del cavalier 
Gioseffo d*Ârpino. 

GUIDOTTI (PAOLo). Voyez Baillet, Poëtes modernes, arti- 
cle 1355. — G'étoitun mattre fou. Il se mit dans la teste qu'à 
rimitation de Dédale, il pourroit voler dans les airs. Q com- 
posa pour cela, eo cachette, une machine, et, lorsqu'il se crut 
asseuré du succès, on dit qu'en présence du pape et de quan- 
tité de monde, il osa vouloir s'élever en l'air, mais que, la 
teste luy ayant tourné, il tomba heureusement dans une 
masse de chaux détrempée, ce qui lui sauva la vie. Ce fait a 
été rapporté par Pader dans son Poëme de la peinture par- 
lante, mais je n'en garantis pas la vérité. Il me parott trop 
hors de vraysemblance. Il se peut fort bien que cette idée 
bizarre, soit venue au Guidotti, mais qu*il l'ait exécutée, c'est 
ce que je ne puis croire. En tout cas, qu'on simplifie tant 
qu'on voudra, c'est toujours une idée bien folle. 

GUILLÂIN (SIMON). C'est à cet habile sculpteur et à H. Sar- 
rasin auxquels on est redevable en France du rétablissement 
du bon goût dans la sculpture, ainsi que Simon Vouet pour 
la peinture. Simon Guillain avoit marié une de ses filles au 
fameux Ballin, orfèvre. Le monument, érigé à la gloire de 
Louis XIV à la teste du pont au Change , est de ce Guillain. 
Sarrazin avoit entrepris cet ouvrage, et en auroit déjà fait le 
modèle qui avoit été approuvé par MM. de la Ville. Ballin, 
gendre de Guillain, trouva moyen de le voir; il en fit la des- 
cription à son beau-père, et, sur sa description, GuiUain fit un 
nouveau modèle dans la même intention que celui de Sarra- 
zin ; il le présenta à MM. de la Ville, et, leur aiant fait un party 
plus avantageux, l'ouvrage lui fut adjugé (1). Simon avoit un 

(1) Ce détail est d^autant plus curieax, Mariette le tenant de 



su 

fils» sculpteur comme lui, qui mourut jeune ; il l'atoit envoyé 
à Rome où il éloit entré chez TAlgarde, et ce fut pour lors 
qu'il grava les peintures du Garrache de la chapelle de Saint- 
Diegue dans Téglise des Espagnols, et la suite des Cris de Bo- 
logne, d'après les desseins du même peintre (en 1646). M. Van- 
dève, de qui je tiens toutes ces particularités, veut qu'il ait 
aussi gravé les quatre statues qui sont dans le dôme de Saint- 
Pierre de Rome. Tous les apostres, qui soot à main gauche 
dans l'église de Sorbonne, en entrant par la place, sont de 
Simon Guillain ; les autres sont d'un nommé Bertelot. Ce 
Guillain avoit un frère nommé Augustin qui étoit architecte 
de la ville. Simon Guillain le père fut reçu dans la commu- 
nauté des mattres peintres» en 1607, et passa dans les charges 
en 1619, c'est-à-dire bachelier. 

— ce que l'auteur (c'est-à-dire le P. Orlandi) dit ici que 
les Cris de Bologne, gravés par Simon Guillain, sur les des- 
seins des Carraches, ont été regravés à Bologne par Joseph- 
Marie Mitelli,est laux.Mitelli a gravé, il est vrai, une suite de 
Cris de Bologne, mais sur d'autres desseins, que quelques- 
uns attribuent au Carache, mais que je croirois plus volon- 
tiers être de l'invention de Mitelli. Il faudra voir si, dans la 
vie de ce dernier, qui se trouve dans un des volumes de l'his- 
toire de l'Académie Clémentine, il n'en est pas dit quelque 
chose. 

GUTTEMBERG (ghari^s gottueb], né à Nuremberg, en 

1749, qui est à Paris dans l'école de et y apprend 

à graver. 



Van Gléve, que Guillet de Saint-Georges, dans son éloge de Gnil- 
lain, parie longuement du monumenl, mais sans dire un mot de 
Sarrazia ; Mémoires inédits des académicieus. Paris, 1854, in-8<», 
I, 187-9. On y peut voir tout le détail des figures de la Sorbonoe, 
169.9i. 



HAECHT (GUILLAUME van), peintre d'Anvers, a fait le voyage 
d'Italie, et, dans le séjour qu'il fit à Boulogne, il y dessina et 
grava deux des plus beaux tableaux de Louis Carrache, la 
Prédication de saint Jean-Batiste et le Martyre de sainte Ur- 
sule. Il étoit contemporain de Guillaume Pannels et son ami. 
Celui-ci lui a dédié, en 1630, utie de ces petites pifeces qu'il a 
gravées d'après Rubens. 

HAESE (maxibolien de), élève et héritier de Jean Van,Or- 
ley, son oncle, s'est formé sous lui et s'est perfectionné pen- 
dant sept années de séjour à Rome. Il vit à Bruxelles. — Le 
Peintre amat., 1. 1., p. 37 et 39. 

lIACKERT (jean), peintre des Pays-Bas, a gravé six paysa- 
ges de son invention, dans la manière de Waterloo, n étoit, à 
ce qu'on m'assure, Suisse d'origine. 

« 

HALLE (CLAUDE gui), né à Paris en 1651, joignit à la dou- 
ceur de ses mœurs et à une conduite irréprochable, des ta- 
lents pour la peinture, dans laquelle il s'étoit formé sous son 
père, nommé Daniel, qui l'ont fait estimer et lui ont acquis, 
pendant sa vie, beaucoup de considération, n dessinoit avec 
sagesse, il composoit avec grâce. 11 ne faisoit rien qui ne fût 
très-étudié ; avec cela, on ne peut pas dire qu'il ait jamais pro- 
duit rien de bien piquant. Sa manière étoit froide etmanquoit 
de ce feu qu'on ne puise guère qu'en Italie. On ne s'apperoe- 
voit que trop dans ses tableaux," qu'il n'avoit pas fait ce voyage, 
et qu'il avoit eu trop longtemps devant les yeux les bons ou- 
vrages des peintres de notre école. H se maria assez ftgé, en 
1697, et mourut à Paris, encore plus vieux, en 1796, âgé de 
85 ans, et jouissant de la plus belle santé. Il a laissé un fils 
qui a embrassé la même profession, et qui s'y distingue. 11 se 
nomme Noël. 



346 
HALLE (hobl), disciple et fils de Claude Gui Halle. 

HAMILTON (cHARLES-«mLLAiniE de), peintre d'animaux, 
étott d'une famille écossoise, qui, dans les temps des troubles, 
étoit venue se réfugier aux Pays-Bas, et qui a produit plusieurs 
peintres, dont on trouve une notice, écrite en allemand, dans 
Touvrage que M. de Heinecken a donné au public, sous le titre 
de : Mémoires concernant l'art du dessein, 1. 1, p. 112. Il y fait 
mention decelui^i, qui s'est surtout distingué par l'extrême 
terminé de son pinceau, et peut-être étoit-ce sur cela seul 
qu'étoit fondée sa réputation,et qui lui mérita le titrede peintre 
du cabinet de l'évêque d'Âugsbourg (Âlexandre-Sigismond, 
de la maison Palatine). — 11 étoit né à Bruxelles, en 1668, et 
il est mort à Augsbourg en i7S4, Agé de 86 ans. Son portrait, 
gravé au simple trait, par G. C. Kilian, en 1772, me fournit 
ces dates. Je trouve qu'il est fait mention de ce peintre dans 
les Éclaircissements historiques de H. Hagedom, p. 198. 

HAMILTON (phiuppe-ferducand), né à Bruxelles, est mort 
à Vienne, sous le règne de Charles VI, qui Tavoit pris à son 
service. Il réussissoit à peindre des chevaux en grand. Voyez 
Mémoires concernant l'art du dessein de M. Heinecken» 1. 1, 
p. 112, et Hagedom, p. 198. 

HAMILTON (jean-<ieorges), frère de Philippe-Ferdinand, a 
été un peintre dont on estime beaucoup les ouvrages en Alle- 
magne^ et dont le talent étoit de peindre des animaux, des in- 
sectes et des fleurs. U mettoit un grand fini dans son travail , 
et il n'en falloit pas davantage pour établir sa fortune. — U 
mourut Agé de 64 ans. Voy. ce qu'en a écrit, en allemand, 
M. de Heinecken dans le tome I de ses Mémoires, concernant 
l'art du dessein, p. 112, et consultez aussi les Éclaircissements 
historiques de M. de Hagedom, p. 198. 



HAUTEFEUILLË (Etienne texier d'), grand prieur d'Aqui- 
taine et ambassadeur extraordinaire de la religion de Mallhe 
CD France, mort à Paris^ le 3 mai 1703. G'étoitun très-grand 
curieux de tableaux et qui avoit de très-belles choses. On le 
nommoit le commandant de Hautefeuille. 

HEARLEMÂN (garlo), qui se prononce Herleman, Suédois, 
surintendant des bastimens du roy de Suède. Il étoit à Rome 
dans le même temps que M. Bouchardon y étoit. Je l'avois 
connu précédemment à Paris. Il y étoit venu dans le dessein 
d*étudier pour se mettre en état de succéder à H. le comte de 
Tessin. lia commencé par être premier architecte et ensuite 
il a eu la place de surintendant. Je lui connois du goût, mais 

c'est un homme vif et trop entier. Il est mort en et 

M. Gronestel a eu sa place. 11 étoit né à Stockholm en 1700, 
ainsi qu'il est écrit sur son portrait, gravé en manière noire, 
par Haid, à Augsbourg. 

HEEM(jEANDAyu)K,c*estàdire/!/« de DaiM), né à Utrecht 
en 1600, d'un père nommé David, qui peignoit passablement 
des fleurs et des iruicts, et sous qui le fils apprit les éléments 
de son art ; mais il ne fut pas longtemps sans montrer sa 
grande supériorité.Ses tableaux prirent une telle faveur qu'ils 
effacèrent tout ce qui avoit encore paru dans ce genre.Le beau 
fini de son pinceau ne sent point le travail, sa touche est large, 
ses teintes d'une fraîcheur admirable. L'imitation est parfaite 
et portée jusqu'à l'illusion. — Quoique Van Huysum paroisse 
l'avoir effacé, ses tableaux occupent cependant encore une 
place distinguée dans les cabinets. La guerre, que Louis XIY 
porta en Hollande, l'obligea de se r^rer à Anvers pour y goû- 
ter la tranquilité qui, jusques-là, avoit fait le bonheur de sa 
vie ; mais il n'en jouit pas longtemps. 11 y mourut en 1674, 
laissant pour élèves Mignon, H. Schook et deux fils, dont celui 



qui porte le nom de ComeiOe, a fait honneur à son école. — 
Descamps, t. Il, p. 37. 

HEEU (corneille de]. Il peignoitavec un soin infini, et sa 
touche est des plus précieuses ; mais je trouve dans ses fleurs 
un peu de sécheresse, ses fruits ne me paroissent point avoir 
ce défaut. Il a fait surtout des raisins de toute beauté et d'une 
fratcheur merveilleuse. Je lui trouve une grande conformité 
de manière avec le Père Seghers. 

HEERE (lucde). Luc deHeerefaisoit des vers danssa langue, 
qui étoit, cela n'est point douteux, le flamand ; mais il n*est 
dit nulle part qu'il en sçût composer en latin. Rien ne prouve 
qu'il soit auteur de ceux-ci : 

Juno potens sceptrîs et mentis acumine Pallas 

Et roseo Yeneris fulget in ore decus ; 
Adfuit Elizabetb ; Juno perpulsa refugit, 

Obstupuit Pallas erubuitque Venus (i). 

(Notes sur Walpole.) 

HEINTZ (joseph]. Je n'ai point vu à Vienne, et je ne sache 
point qu'on y voie cette copie de la Leda duCorrège, par Jo- 
seph Heintz, mais bien une copie du tableau de l'Amour se 
faisant un arc, du même Gorrège, ou plus tôt du Parmesan, 



(i) Ces vers sont sur la bordure d*un mècbant tableau qui est 
encore à Hampton court, dans la grande salle des portraits et non 
loin d*un des plus délicîeiix et des plus attlheatiques Jftoet (foi 
soient, un homme en buste et tenant un Pétrarque, qui est, bien 
entendu, sous le nom d'HoIbein ; car, à Hamptoncourt, tout est sous 
le nom d'Holbein, le bon et le mauvais, el il n*y a peut^ètr* délai 
que le n« S8î, une charmante Elisabeth jeune dans le goût de noire 
Anne de Clèves. 



Sft7 

qui est assurément une trës-belle chose, et qui me saisit au 
point que, croyant voir l'original, je reslai dans l'admiration. 
Il est vrai pourtant que cet étonnement cessa, lorsqu'après 
avoir bien considéré cette copie de Joseph Heintz, on me fit 
voir l'original du Corrège, que cette copie couvre comme un 
volet couvre une croisée ; alors je reslay dans une surprise qui 
dure encore quand j'y pense, car je ne crois pas en effet qu'il 
y ait un tableau plus séduisant que celui-là. Quelqu'un avoit 
commencé à le nettoyer, et, autant que je puis m'en souvenir, 
on en voit une marque sur le dos de l'Amour. On dit que Jo- 
seph Heintz empêcha qu'on allât plus loin, et, si cela est vrai, 
on lui a l'obligation d'avoir conservé dans sa pureté un mor- 
ceau unique, qui autrement auroit eu le sort de tous les ta- 
bleaux qu'on nettoyé, c'est dire d'être gâté. 

— Le fils de Joseph Heintz, qui se nommoit Joseph comme 
son père, et qui s'étoit établi à Venise, où l'on voit dans l'é- 
glise d'Ogni Santi un tableau de sa façon, qui porte son nom 
et la datte 1655, ne s'occupoit pas tellement de sujets chimé- 
riques, dans le goût du vieux Breughel, qu'il ne fît aussi quel- 
quefois des sujets sérieux. Et, s'il en faut croire le Boschini, 
son contemporain, il s'y est distingué. Aussi en parle-t-il avec 
éloge dans plusieurs endroits de son Navegar pittorico. — Il 
a laissé un fils nommé Daniel, dont il est fait mention dans la 
nouvelle description des peintures de Venise, p. 510. 

— Pièce représentant d'une manière allégorique la Justice 
qui récompense ceux qui ne se laissant point entratner aux 
mœurs du vulgaire, cherchent à acquérir la science par le 
moyen du temps, de l'amour et du travail, gravée à Venise 
en 1603, par Luc Kilian, d'après Joseph Heintz. D. Custos exe. 
et d. d. an. 1603. On apprend par cette pièce que Joseph 
Heintz avoit un frère, je rends ainsi le mot germanuB, qui se 
nommoit Daniel Heintz et étoit architecte de la république de 
Berne, 



su 

HELMBilEGKER(THÉODOiis).«— Lesieur Pio,dansson Hssiles 
vies despeintres, IefaitnaistreeDl630. Baldinucci, qui Cen- 
dant connaissoil ce peintre particulièrement, dit, ainsi que le 
P. Orlandi, qu'il naquit en 1633. n le fait aussi disciple de 
Grebber. Pio dit, au contraire, qu'après avoir appris à dessiner 
à Harlem, sous Georges Stnidel, il se forma de lui-même, en 
copiant des tableaux de Teniers. Ce peintre mourut à Rome 
d'une pleurésie, en 1700, et fut enterré dans l'église de Sainte- 
Marie du Peuple. Mss. de Pio. 

HELMONT (JACQUES van), contemporain de Victor Jansens 
et de Jean Van Orley. L'auteur du livre, intitulé le Peintre 
amateur, cite en plusieurs endroits de cet ouvrage des tableaux 
de ce peintre qui sont dans les églises et autres lieux publics 
de Bruxelles. Il naquit dans cette ville, le 17 avril 1683, et y 
est mort le 21 aoust 1736. Au rapport de Descamps, qui a 
écrit sa vie, dans son vol. rv, p. 236, ce peintre n'est pas sans 
mérite. 

HEMSKERCK (mabtdc)^ ainsi nommé, pour estre né daos le 
village d'Heemskercken, en Hollande, peintre, disciple de Jean 
Schorel, né en 1498, mort en 1574. La facilité avec laquelle 
ce peintre produisoitses pensées, et la quantité prodigieuse de 
desseins qui sont sortis de ses mains, luy ont acquislesumom 
de père de l'invention et l'ont fait même appeler parquelques- 
unsle Raphaëldela Hollande. Quoyqu'ilen soit, à en juger par 
ses estampes, l'on reconnott que ce peintre avoit été en Italie, 
et qu'il y avoit étudié le dessein d'après les statues et les autres 
excellens morceaux qui y sont ; quoique son goût de dessein 
soit extravagant, les contours ne laissent pasd'estre prononcés 
avec assez de science et de fermeté, et les estampes à l'eau- 
forte, que l'on croit estre gravées par luy-mème, sont tou- 
chées avec beaucoup d'esprit. Sandrart, qui a donné la vie de 



2&9 

ce peiatre, fait mention de quelques pièfces gravées de sa main, 
et Ton n'en voit aucune dans son œuvre qui puissent lui con- 
venir que celles qui sontà Teau-forte. La plupart des autres, qui 
sont au burin, sont exécutées par Théodore Gornhert, Phi- 
lippe Galle et Herman Muller ; mais celles de Comhert l'em- 
portent sur toutes les autres, et Ton ne fait pas même assez 
d'attention à ces estampes ; il y a certainement peu de gra- 
veurs, qui ayent touché avec tant d'esprit et de légèreté que 
celuy-cy ; sa manière de conduire ses tailles luy est particu- 
lière, et n'est pas moins moelleuse et artiste. Enfin, il est entré 
tout à fait dans le goût des originaux qu'il copioit, ce qui est 
fort estimable et rare, et cela seul doit taire regretter qu'il 
n'ait pas gravé d'après des desseins de meilleurs maistres. Si 
un tel graveur eût été en Italie, comme Corneille Cort, quel 
succès n'en auroit-on pas pu attendre? En faisant ce catalogue, 
j*ai remarqué plusieurs pièces de Ph. Galle, gravées d'une 
manière moins roide qu'à l'ordinaire et même assez conforme 
à celle de Comhert. Seroit-ce qu'il seroit son diciple ? Quoy- 
que ses œuvres soient fort nombreuses, il est pourtant certain 
qu'il y manque encore un bon nombre de pièces, surtout 
parmy celles àl'eau-forte, que l'on croit gravées par M. Hems- 
kerk; ces estampes, n'ayant pas été goûtées de beaucoup de 
gens, parce qu'elles ne sont pas gravées gracieusement, n'ont 
pas été recherchées, du moins dans nos quartiers ; j'ai pour- 
tant rencontré des gens en Italie, qui en faisoient cas, et qui 
ramassoient avec soin le peu qu'ils en pouvoient découvrir. 

— Il y a grande apparence que c'est de ce peintre dont 
Vasari veut parler au commencement de la vie de Battista 
Franco, par. 3, t. Il, p. 39. Voicy un extrait de ce qu'il y dit : 
L'on prépara à Rome, en 1536, un somptueux appareil pour 
y recevoir l'empereut Charles V à son retour d'Afrique. 
Comme l'ouvi^ge étoit considérable, l'on y employa tout ce 
qui se trouva pour lors d^artistes à Rome. Un certain Martin 



350 

et d'autres jeunes gens Allemands, qui y étoi^t venus pour 
étudier, furent choisis pour peindre quelques sujets histori- 
ques dans l'arc que l'on avoit dressé près de Saint-Marc, et 
ils le firent avec succès* Yasari adjoute que ce peintre aile* 
mand, nommé Martin, peignoit parfiutement bien en clair- 
obscur ou grisaille, et que les sujets de batailles qu'il avoit 
peint de cetle manière, dans l'arc dont on vient de parler, 
éioient touchés avec tant de fermeté et de résolution qu'il 
n'estoit pas possible de mieux faire. Comme l'ouvrage pres- 
soit extrêmement, ces peintres allemands y travaiUoient sans 
relAche, et ne le quittoient point; on leur apportdt souvent 
à boire et du meilleur grec, de sorte qu'étant échauffés par 
le vin, et ayant d'ailleurs une grande pratique de faire, il 
n'estoit pas surprenant que leurs ouvrages se ressentissent du 
feu dont ils étoient animés... Yasari finit en cet endroit, et je 
ne vois rien qui puisse faire douter que ce ne soit de Martin 
Hemskerck dont il entend parler; car c'est précisément le 
temps qu'il étoit à Rome, il estoit dessinateur, inventoit fa*» 
cilement, mais il éloit surtout grand praticien. Tout s'accorde 
avec ce que dit Yasari... Il faudra refaire l'extrait que le 
P. Orlandi donne icy de la vie de ce peintre. Jamais il n'a 
gravé, que je sache, à Rome ; et Sandrart, qu'il rapporte, n'en 
dit rien ; mais c'est sa coutume , il ne fait jamais un extrait 
fidèle. 

— La réputation de Martin Hemskerck a été autrefois si 
grande qu'on lui donna dans son pays le surnom du Raphaël 
des Pays-Bas. Cette dénomination lui convenoit cependant 
très*-mal; car, loin d'6tre gracieux comme Raphaël, il est tout 
à fait sauvage. On auroit pu, avec plus de vérité, l'appeler le 
Michel-Ânge de son pays, car il est vrai qu'il dessine à la 
plume avec beaucoup de fermeté et de science. (Catalogue 
Grozat, p. 91.) 

««- A fropoê éFî4ne Annonciaiion : Cette pièce est cotée S) 



»5i 

a 

apparemment qu'elle2est d'une suite, où il y en a deux qui 
précèdent et qui ne sont pas icy. On y voit au bas M. Hemê^ 
kerck, sans s*y nommer comme peintre et graveur. On la 
tient de luy cependant, parce que l'on apprend dans Sandrart 
qu'il a graté à Teau-forte, et cette pièce est touchée avec tant 
d'art qu'on la donne à luy préférablement à d'autres, au lieu 
que la pièce des Pasteurs adorant l'enfant Jésus, gravé à 
l'eau'forte, où il y a au bas la meime inscription, paroist 
plus tost de Comhert, quoyqu'il n'y ait pas mis son nom« 

•*^£n catalogtiant une suite nonUnreuee de 26 etgets du 
Nouveau Testament, Mariette fait la remarque suivaniei à 
propos d*une pièce représentant Jésus-Christ guérissant Thé^ 
moruïssê : On trouve au bas de cette pièce le nom seul de 
M. Hemskerck; à d'autres : Hart. Hemskerck inventor; eUes 
sont touchées avec tant d'art que l'on les croit gravées par luy. 
Ce sont ceUes apparemment dont Sandrart a voulu parler; 
mais je doute que la suite soit icy complète, la croyant plus 
nombreuse. 

— Les Orgies, ou Festes de Bacchus, gravé au burin, en 
1543,' par CoroeiUe Bos; cette estampe est beaucoup plus 
fidèle et dessinée de meilleur goût que celle de Ghauveau.-*^ 
L'invention de o«tte pièce n'est point asseurém^t de Jules 
Romain ; elle doit estre de Martin Hemskerck, d'après lequel 
Corn. Bos a gravé. L'empereur a, dans sa galerie, un tableau 
d'Hemskerck du même sujet, moins chargé de figures que 
cette composition, mais où se trouvent la pluspart des mêmes 
figures, et dont la composition est en général la mesme. 

HENIN (m.). Une suite de figures de modes françoises en 
huit planches, précédées d'un frontispice ; elles sont dessi- 
nées et gravées à l'eau-forte par Watteau, et terminées au 
burin par H. Simon Thomassin le fils, à Texception de celle 
qui est au milieu de la dernière rangée, laquelle e&i gravée 



352 

par M. Henin. Celle de M. Henia n'est pas de la suitie, el je 
doute qu'elle soit d'après Watteau. 

HERLUYSON (lovis), peintre, disciple de Goypel le père, 
étoit de Troyes, où il est mort le 13 février 1706, Agé de 
trente-huit ans. 

HEBRERA (don François de), peintre de Charles 11, roy 
d'Espagne, et intendant des ouvrages laits pour œ prince. ^ 
Cité par D. Joseph Garcia dans la préface d'un livre de prin- 
cipes du dessein. 

HESCLER (david). Il étoit contemporain de Sandrart. — 
Voyez Sandrart, fol. 352. 

HEUYEL (ANTOINE van) de Gand, disciple de Gaspard de 
Crayer. L'auteur du Peintre amateur fait mention d'un de ses 
tableaux dans l'église des Capucins de Bruxelles, 1. 1, p. 49. 

HEYDEN (JEAN van), en latin Joannes ab Heyden, peintre 
de Strasbourg; il avoit été disciple de François Floris, et il a 
eu un fils graveur au burin, qui portoit le même nom. Tiré 
d'une inscription autour de son portrait dessiné. * 

HEYLMAN (jean-gaspard), né à Mulhausen, en Alsace, 
ville libre et alliée des Suisses, en 1718. Après avoir appris à 
dessiner et à peindre d'un mattre établi à Schaffouse, il pro- 
posa à ses parens de lui faire faire le voyage d'Italie, et, n'ayant 
pu les y faire consentir, quelque chose qu'il leur pût dire 
pour leur en faire connaître la nécessité, il se vit obligé d'en 
faire lui-même les frais, et pour cela il s'introduisit chez l'é- 
vesque de Basle, et y peignit divers portraits, et, se trouvant 
bientost assez riche pour se satisfaire, il passa à Rome, y fil 



i 



358 

la oonnoissance de M. de Troj, alors directeur de rÂcadémie 
de France, et celui-ci le proposa au cardinal de Tencin, qui, 
avant de quitter Rome, vouloit avoir des copies de tableaux 
qui lui avoient plu. Heylman j réussit; son Eminence le prit 
en affection, et, lorsqu'il quitta Rome, où notre artiste séjour- 
noit depuis quatre ans, il lui fit la proposition de le conduire 
en France. Heylman l'accepta bien volontiers, et, durant tout 
le temps que le cardinal se fixa à Paris, il demeura constam- 
ment attaché à Son Eminence. Il ne se sépara de lui que 
quand le cardinal alla résider à Lyon, dont il étoit arche- 
vêque. Heylman devint l'ami de Wille. Ils alloient dessiner 
ensemble, aux environs de Paris, des veues d'après nature. 
Sa principale occupation étoit cependant de peindre des por- 
traits et des paysages, et, après un séjour de seize années à 
Paris, il y est mort en 1760. On a sa vie dans le ^^ volume 
des Vies des peintres suisses par Fuessli. 

— Jean-Gaspard Heilman, peintre, néen 1718,à Mûlhausen, 
en Alsace, mort à Paris en 1760, âgé de 42 ans, a gravé pour 
son amusement. 

HICEMÂN. H. Hickman m'a dit qu'on faisoit usage en Ita- 
lie d'un vernis nouveau qui n'a ni le défaut du vernis ordi- 
naire, qui est de s'attacher sur la peinture sans qu*on puisse 
l'enlever aisément lorsqu'il a jauni, ni les incommodités du 
blanc d'œuf qui fait gripper la couleur. Ce nouveau vernis 
est transparent, il a de l'éclat, et on l'ôte sans peine avec de 
Teau. Il n'y a pas beaucoup de temps qu'on s'en sert en Ita- 
lie. Ce n'est autre chose que de la gomme Jacamahacca, 
dissoute dans de l'eau chaude, 

— Dans les notes de Mariette^ notM trouvons ia lettre sut* 
vante: 

a Les estampes ci-dessous ne se trouvent pas dans le catalo- 
gue que M. Mariette nous a envoyé, et je crois pourtant qu'elles 
T. n. a 



fODt toutes ou de Parmesan ou de Meldola. Le Mariage de 
sainte Catherine, Testampe qui éloit au chevalier Lély ; la 
Vierge et reniant Jésus se courlMUt en ayant; il x a derrière 
on Joseph et une femme ; on voit dans l'air an ange avec 
une guirlande. Il y a une autre estampe de la même gran- 
deur et peu diilérente, et cela dans la manière qu'on nomme 
la seconde planche, et il y a une copie marquée M A (en mo- 
nog.). Une de ces estampes est dans le catalogue de M. Ma- 
riette, qug je m'imagine être la mf me que nous appelons \cy 
la seconde planche. Si ce qu'on voit écrit en bas de l'estampe 
est vrai, on n'en a jamais tiré que cinq à sii. 11 me semble 
que ce sont deux différentes planches, et toutes deux de Par- 
mesan luy-mesme. Àffris une énumération d^autre$ planehes, 
la ÏMre $e termine airni : Voici, Monsieur, le détail de ce que 
M. Pond m'a écrit que vous aurés la bonté d'examiner 1 
votre loisir. 11 n'y a qu'à Monsieur votre père et à vous que 
nous pouvons avoir recours, parce que la dédsion d'un autre 
ne sufBroit pas dans cette occasion. Vous aurés la bonté de 
m'excuser et de me croire parfaitement, Monsieur, votre tiès- 
humble et très-obéissant serviteur. 

HlCKMAN. 

Rue de Clèry, vendredy. 

HILÂIRE (p.), graveur, élève de Le Prince, actuellement 
(1769) vivant à Paris. 

HOET (GuisARD]. Les paysages de Francisque ont été gra- 
vés, è ce qu'assure M. Descamps, par Guérard Hoet, dans le 
temps de son séjour à Paris. Voyez le 3* vol. de Descamps, 
p. S35. Il me semble l'avoir aussi ouï dire au fils de 6. Hoet, 
que j'ai vu à Paris à la vente de M. de Tallard. 

HOY (iQGOiiO m BOn, ou plutôt mcotàê taiO « àmtuà 



pluiieurs des tableaux de la gallerie de rarchiduc IJéopold 
Guillaume, et il en a gravé luy-mespe quelque$*uj». Gabi* 
net de Tarcbiduc mis au jour par D» Teniers, 

HOGÀRTH (GuatAUHE), peintre angloJ9, né en 1698 à 
Londres, a gravé çur se$ desseins une suite nombreuse de 
planches qui sont autant de satyres de tous les ridicules de 
son pays. Personne n'y est épargné, et personne n'a osé s'en 
plaindre, parce qu'on aime mieux souifrir en Angleterre que 
de rien faire qui puisse offenser la liberté dont on y prétend 
jouir. Voilà ce qui a fait la loriune d'Hogartb dans soo pays» 
Il est à présumer qu'elle n'eût pas été si grande ailleurs, sur»- 
tout dans les pays où Ton est sensible au vrai beau, et où 
Ton méprise tout ce qui est offert sous des traits trop ridi- 
cules et trop grossiers , capables seuls d'affecter le peuple» 
Hogartb est mort à la fin de 1760, à Londres. On le met en 
Angleterre auprès de Butler, auteur fameux du ropaan sa^*^ 
rique et comique intitulé Hudibras (1)» 

^ Hogarth est un peintre qui est mort à Londres depuis 
peu de temps, et qui s'y est fait une grande réputation en 
traitant des sujets burlesques et satyriques tout ensemble* 
Elle égale presque celle du fameux Butler, auteur du poëme 
intitulé Hudibras, lequel est un peintre burlesque des mœurs 
de son siècle. {Notes sur Walpole.) 

HOGENBERG [nicoi.as] a dessiné et gravé la pompe de 
Ventrée triomphante de l'empereur Cbarles^uint î Bologne» 
en 38 feuilles. Les figures y sont dessinées dans le goOl du 
Titien ou du Giorgion. 11 y a mis sa marque N. H. à la der- 



(i) Mariette a de plus mis dans ses notes une copie de Tartiole 
du Mercurôf u^ de janvier 1770. 



356 

Dière feuille. La graveure en est à l'eau-forte ; mais il est 
assez difficile d'en trouver des épreuves sans être retouchées 
au burin et avant que les planches fussent passées entre les 
mains d*Hondius. 

— Le Nicolas Hogenberg, qui a gravé l'entrée de Charles V 
à Bologne, étoit de Munich. Il y a une première édition de 
cette suite d'estampes, où, au bas de la planche, qui repré* 
sente le pape et l'empereur sous le dais, on trouve écrit 
NICOLAYS HOGENBERGYS MONACHENSIS : F. Mais je doute 
que cet artiste soit le même qui a gravé les faits de Frédéric 
second, roy de Danemarck. Ce dernier est, je pense, l'auteur 
du Léo Belgicui^ et se nommoit François. 

— François Hogenberg grava, en 1589, par ordre de Henry 
Rantzau, les belles actions de Frédéric II, roi de Danemarck. 
Ces planches sont au nombre de XYI, y compris le titre et le 
portrait du prince. 11 en est fait mention dans la liste des ou- 
vrages d'Henry Rantzau, à la page 76 du livre intitulé : Hypo- 
typosis arcium, palatiorum, librorum et aliorum monumen- 
torum ab Henrico Ranzovio conditorum, conscripta a Petro 
Lindebergio, Francofurti 1592. — La dédicace, faite aux en- 
fans d'Adolphe de Holstein, est au nom de Franciscus Hogen- 
bergius et Simon Novellanus. 

— Il y a plusieurs graveurs du nom d'Hogenberg , il ne 
faut pas s'y méprendre. 

HOLBEIN (jean) de Basle. La vie et le catalogue de ses ou- 
vrages inter Erasmi opéra. Lugd. Bat. 1703, fol. tom. IV, 
p. 389-395 (1). 



(1) On la trouve auparavant dans rédition de VEncomium MorUt^ 
d*Eraàn)e, Basileae, 1676, dans laquelle elle occupe 16 pages delà 
partie préliminaire non chiffrée. 



357 

— Ce n'est pas pour prendre la défense de de Piles (je n'ai 
jamaispu goûter sa balance des peintres), mais il m'est impos- 
sible de ne pas remarquer que M. Walpole raisonne ici fort 
mal, et n'a point du tout compris le système de de Piles. 
Celui-ti prend les différentes parties de la peinture et exa- 
mine sur chacune en quoi un maître a été supérieur à un 
autre. Quand il en vient à la couleur, il met Holbein au-des- 
sus de Raphaël, et peut-être en cela n'a-t-il pas tout à fait 
tort. Mais cela n'emporte pas une préférence totale , ainsi 
que paroît l'avoir entendu notre critique. (Notes sur Wal- 
pole.) 

— Tous les tableaux cités jusqu'ici par M. Walpole, à com- 
mencer à celui de THÔtel-de-Ville de Basle, sont indiqués 
conformément au catalogue dressé par Patin en 1676 ; mais, 
comme il est à présumer que, depuis près d'un siècle, ces 
tableaux auront plus d'une fois changé de main^ et qu'on 
courroit risque de ne les plus trouver aux endroits indiqués 
si on le5 y alloit chercher, il me semble que M. Walpole ne 
pouvoit guère se dispenser d'en faire l'observation. (Notes 
sur Walpole.) 

— L'ouvrage (Icônes historiarum Yeteris Testamenit) est im- 
primé à Lyon et non à Leyde; c'est une inattention delà part 
de M. Walpole; c'est un petit in-quarto. Les planches sont 
gravées en bois et sont au nombre de quatre-vingt-quatorze, 
en y comprenant quatre sujets de l'histoire de la création, 
qui ne sont pas de même format que les autres, et qui avoient 
déjà paru dans le livre des Images de la mort, publié pareil- 
lement à Lyon, presque dans le même temps et chez le même 
imprimeur. La pièce de vers qui se trouve au commence- 
ment du livre est intitulée : Carmen Nie. Borbonii Vandepe- 
rani poetœ Lingonentis. Suivant toutes les apparences, c'est 
que le poète étoit né à Vandeuvre près de Langres, et ce qui 
l'engageoit à chanter les louanges d'Holbein, c'est qu'il étoit 



S5é 

lié d'amitié avec Erasme, n s'etprime ainsi en pariant de 
l'ouvrage du peintre qu'il célèbre : 

Hoc cpus Hùlbinœ nobiU cerne manuê. 

Mais cet éloge ne doit tomber que sur les desseins faits par 
Hûlbein, car il est certain que les gravures ont été faites en 
France et qu*iln'j a jamais mis la main. (Notes sur Walpole.) 

— Adam et Eve en demie-figures. Il n'est point dit dans 
le catalogue de Patin que ces deux figures fussent en demi- 
corps, mais on y remarque que le tableau est de l'an 151"/, 
et qu'on y trouve la marque du peintre H. H. (Notes sur 

Walpole.) 

— Sandrart, que M. Walpole traduit, distingue le tableau 
de rAnnonciation, qui étoit dans le monastère de Sainte-Ca- 
iherine, d'avec celui dont le seigneur de Walberg, célèbre 
curieux, fit l'acquisition, et dont il donna, non pas cent, mais 
mille florins. (Notes sur Walpole.) 

— La passion de Notre-Seigneur Jésus-Gbrist, représentée 
d'une manière satyrique et burlesque. Ce sont le pape, lés 
cardinaux et les moynes, qui y tiennent la place des juifs et 
qui y font l'office de bourreau. J.Holbein, qui en est l'inven- 
teur, en a fait les desseins, et, comme il vivoit en Angleterre 
du mesme temps et à la cour de Henrjr ym, peut-être les a-t-il 
fait pour plaire à ce prince irrité contre la cour romaine. 
Sandrart fait mention, dans la vie de Holbein, de ces desseins 
qui estoient de son temps dans la collection du duc d'Ârondel. 
Ces seize pièces sont, au reste, d'une rareté extraordinaire. 

— Sandrart ne lait monter qu'à vingt le nombre de ces 
desseins (1); encore en met-il quatre de plusqu'il n'y enavoit. 



(1) Ceux de la Passion où Jèsus-Christ est tourmenté par des 
moines et des prêtres. 



La suite, qu'A gravée Hollar/et qax est fort rare, n'est coiupo* 
sée que de seize pièces. Le même artiste a gravé, étant chez 
le comte d'Arondel^ une assez grande quantité des desseina 
que ce fameux curieux conservoit dans sou cabinet, un entre 
autre», représentant la reyne de Saba visitant Salomon, qui, 
pour la richesse de l'ordonnance^ va de pair avec tout ce que 
les maistres de premier ordre ont produit de plus accompli» 
(Notes sur Walpole.) 

— Huit taMeaux en un seul , dont chacun a pour stget 
un trait de la Passion de Jésus-Christ. Ce fut sur le récit avan- 
tageux que Sandrart en fit à l'électeur, en 1644, que ce prince» 
désireux d'avoir ce beau tableau dans sa galerie, fit iaire aux 
magistrats de Basle des propositions que ceux-ci eurent le 
courage de refuser. (Notes sur Walpole.) 

— M. Walpole n'a pas bien saisi le sens des paroles de San*- 
drart, qui pourtant s'explique assez clairement, et qui dit que 
les figures que le père d'Holbein avoit employées dans le 
grand tableau, où il avoit représenté la vie de saint Paul, 
étoient de demi-nature ; ce qui veut dire qu'elles avoient 
au plus deux pieds et demi de proportion, mais non que ce 
fussent des demi-figures. L'inscription mise sur ce tableau 
n^étoit pas non plus suivie d'une datte. Celle que rapporte 
Sandrart étoit sur un autre tableau du vieux Holbein; tout 
ceci n'est pas fort important, et je me serois abstenu d'en faire 
l'observation si je n'avois cru nécessaire de montrer à M. Wal* 
pôle qu'il n^est pas toujours aussi exact qu'il voudroit que 
tous les autres le fussent, et surtout nous autres François, 
avec lesquels il est là-dessus inexorable. (Notes sur Walpole.) 

— Le goût d'Holbein est plus épuré que celui d'Albert ; sa 
manière tient davantage de celle d*Italie« Ce maître fut regardé 
dans son temps comme un prodige, et, aujourd'hui même, sa 
réputation n^ést point diminuée. Le Zueoaro, avide de dessiner ^ 
dans le cours de ses voyages, tous les tableaux du pttaûlêî 



S60 

ordre, n*a pas oublié ceux du Triomphe de laRichesse et de la 
Pauvreté, par Holbeiu, qui étoient alors à Londres, d*où Ton 
dit, que, dans les temps de troubles, ils ont été transférés en 
Hollande. (Catalogue Grozat, pag. 89.) 

— Les desseins de Zucchero que j'ai veu chez M. Grozat 
(dans le n® 979, les deux fammx sujets du Triomphe de la Ri- 
chesse et de la Pauvreté), et qui \enoient originairement de 
Jabach, ne sont point tels que M. Walpole les annonce ; ils 
sont à la sanguine mêlée de crayon noir. — On lit, sur la plan- 
che de Yorsterman, des vers latins, dans lesquels Morus a 
voulu célébrer le triomphe de la Pauvreté ; c'est une manière 
d'ode, composée de trois strophes, d'un style assez plat et qui 
répond à la faiblesse de sa pensée. Desc^mps ne le dit point. 
Félibien est le seul qui l'ait remarqué ; il a écrit dans la Vie 
de Holbein que ces deux tableaux avoient été vus à Paris, de- 
puis quelques années, ce qui doit être aux environs de 1650, 
et qu'ils y avoient été envoyés de Flandres. Le fait ne me pa- 
rott point douteux ; sans doute qu'ils auront été transférés ail- 
leurs, car on ne les trouve point dans aucuns de nos cabinets. 
Sandrart a remarqué que les figures, qui entrent dans là com- 
position de ces deux tableaux, sont de grandeur naturelle. 
(Notes de Walpole.) 

— J*ai vu ces desseins (1) dans la collection de M. Grozat. Ils 
ont véritablement appartenu à Rubens, mais ils ne sont point 
de lui. Ils ont été faits par un peintre hollandais, nommé Jean 
Boeckhorèt, qui y a mis beaucoup d'esprit, et ne sont guère 
plosgrands que ce qui a été gravé. Mais, sans s'arrêter à cette 
preuve de l'estime que Rubens laisoit des ouvrages d'Holbein, 



(i) Ceux du Triomphe de la Mort. Dans le catalogue Grozat, 
n" 79A, MarieUe avait dit seulement qu'ils avaient appartenu à 
Bœckborst. 



861 

j'en puis administrer une autre, non moinsconcluante ; c'est un 
petit portrait colorié, que j'ai, d'un orfèvre allemand, nommé 
Jérôme, fait par Holbein, que Rubens a trouvé tellement de 
bon goût, qu'il a voulu y ajouter quelques touches à la plume 
et quelques coups de pinceaux, qui y ont mis la vie et en ont 
fait un morceau de toute beauté. (Notes sur Walpole.) 

— J'ai l'édition en français des Simulacres de la mort, faite 
à Lyon en 1538, par les frères Melchior et Gas|>ard Trechsel ; 
elle n'est que de 41 planches. Il est remarquable que, dans le 
morceau qui représente un roi à table, auquel la Mort verse 
un poison meurtrier , ce roi est François P', qui occupoit alors 
le trône de France. L'empereur, dans une autre estampe, a 
beaucoupde ressemblance avecMaximilien 1^'. On n'oseroii pas 
en agir ainsi aujourd'hui. Cette édition forme un petit volume 
in-4o. L'épttre dédicaloire mérite d'être lue avec attention; on 
y dit expressément que la mort avoit ravi Tauteur des des- 
seins, avant qu^il eût pu les achever, et au moment qu'il met- 
toit la main à l'un de ces desseins, qui devoit représenter un 
charretier écrasé sous sa voilure. On ajouta que personne n'â- 
voit osé donner l'achèvement à l'ouvrage. Notez que cela 
s'imprimoit en 1538, et qu'Holbein n'est mort qu'en 1554; 
par conséquent, les desseins des planches qui ont été em- 
ployées dans ce livre ne sont point de lui. — Mais l'édition 
latine est de 1542, l'italienne est de 1545 ; elle est composée 
de 53 planches, et dans le nombre est celle qui représente le 
charretier accablé sous sa voiture. Ufaudra relire cette épître 
dédicaloire. Sans doute que celui, dont on annonce la mort, 
étoit le graveur, et non le peintre, auteur des desseins; car, en 
vérité, ces desseins ont tellement le goût et la manière de 
Holbein, qu'on n'imagine pas que d'autres que lui lésaient pu 
faire; c'est à quoi je pense qu'il faut s'en tenir. (Notes sur 
Walpole.) 

— Il y a eu plusieurs éditions des Simulacres de la mort, 



Ml 

toutes làitM àLyon dans le milieu du XYI* ntetei et^ jusquei 
à présent^ les planches gravées eu bois, qui accompagiienl 
cet ouvrage , passent pour être du desseis et de riaventiOQ 
d'Holbein. Elles sont eu eliet tellement dans sa manière qu'on 
ne peut, au premier coup d'œil^ se défendre de lés lui attri- 
buer. Mais comment accorder cela avec ce qui se lit dans Vé^ 
ptlre dédicatoire, qui se trouveàla tAte de la première édition 
qui a été laite à Lyon en J538f chez les frères Melcbior et 
Gaspard Trechsell On nous 7 apprend que l'auteur de ces 
planches ne vivoit plus lorsque le livre parût, et il est constant 
qu'Holbein n'a cessé de vivre qu'en 1554. Voici comme l'au«* 
leur de l'épître dédies toire s'exprime à ce sujet: « Donc vient 
grandement à regretter la mort de celui qui nous a ici ima- 
giné si élégantes figures..* Il lésa si très-mortement repré- 
sentées, quels mort, craignant que ràteiceltent peintre ne la 
peigntt tant vive qu'elle ne fût plus crainte pour mort^ e 
que lui-même n'en devint immortel, qu'elle accéléra si fort 
ses jours qu'il ne put parachever plusieurs autres figures, jk 
par lui tracées, telles que celles du chartier froissé et espaulti 
sous son ruioé chariots etc., auxquelles imparfaites histoires 
personne n'a osé imposer l'extrême main^* s Hais il laut biétt 
que les desseins de ces planches qui manquoient fussent prépa- 
rées; car, dans l'édition italienne, faite che2 Jean Frekeni en 
i549,ellesy ont étéajoutées« Mais il est aisé de voir, par la ta- 
çondont elles sont gravées, qu'elles sont d'une autre main que 
tes premières ; et cela me feroit penser que tout ce qu'on lit 
dans l'édit. de 1538 regarde uniquement le graveur^ dont on 
ne peut trop admirer la délicatesse du travail et la touche flèrè 
etspirituelle. J'imagine que les desseinsd'Holbein , qui n'étoient 
pas fort terminés, avoient eu besoin d'un si excellent artlstei 
pour y mettre la fini qui y étoit nécessaire, et que cô travail 
avoit mérité que l'éditeur de Lyon lui en flt honneur 1^ l'en 
regardât eomme le pèie.Son nom n\à méritoit de passer à la 



86S 

postérité, est demeuré dans l'oubli ; mais il y a apparence que 
le monogramme HL, qui se voit sur le soubassement du litott 
est couchée une jeune personne que la mort attire à elle, 
donne les premières lettres de son nom (1). Du reste, ce petit 
ouvrage eut beaucoup de vogue lorsqu'il parut ; il s'en fit 
nombre d'éditions en françois, en latin, en allemand, en ita- 
lien. La plus ample est celle de 1549 ; les douze derniferes 
planches y paroissént pour la première fois, et, indépendam- 
ment des bonnes éditions faites à Lyon, il en parut une con- 
trefaçon dans le pays étranger. 

— A propos de la Danse des maris, gravée par Hollar, Ma^ 
nette ajoute : M. Walpole auroit dû plustost citer les planches, 
gravées en bois, qui ont été exécutées du vivant même de Hôl- 
bein, et certainement sur ses propres desseins. Ce qu'HoUar 
a gravé est moins nombreux, et n'est pas tout à fait si bien 
dans la manière du peintre. Il n'a donné que 80 morceaux, 
et la suite des planches gravées en bols, dans les éditions les 
plus amples, est de 53 des bonnes éditions; il y en a eu plu- 



(1) On sait main tenant qu'il s'appelle Lutzclbnrffer. Voyez stii* lui 
Ift publication récente de M. Renouvier, d^ types et des Maniérés 
des maîtres graveurs^ 2e partie, xvi» siècle, Montpellier, 1854 » 
in-4<*, p. 103, que nous sommes heureux d'avoir à citer; car, dô* 
puis lon|(temps, il n'a paru sur ces questions d*arl un ouvragé 
aussi remarquable. Une recherche patiente et vraiment critique, 
une érudition sobre et nerveuse, un vif sentiment des manières 
diverses et de leur génération successive, le bonheur d'expression 
aveo laquelle elles sont earactérisées , Vesprit philosophique vrai- 
ment haut, qui élève en même temps le fond et la forme, et donne 
à l'ensemble uno forte cohésion, assignent h ce livre une place tout 
à fait distinguée, et où, dans cette partie particulière de rhistoirè, 
il en est trop peu qui méritent d'être placés. L'ouvrage ancien de 
M. ftf^nouvicr, les Maîtres de pieire, très-important comme faits, 
n'était que des recherches et une publication de pièces ; les 
Types et les Manières des maîtres graveurs sont un Uvré^ dans le 
meilleur sens du mot, et c'est un éloge qu'on voudrait n'avoir pas à 
appliquer*! rarement* 



S6& 

sieurs qui ont paru à Lyon, chez Jean Frillon, en un petit 
TOlume in-12, avec des discours tantost en latin, tantosl en 
françois ou en d'autres langues. Celle que j*ai est en italien, 
imprimée en 1549, et cette édition est augmentée de plusieurs 
planches qui n'avoient pas encore paru. Ces planches, par 
rapport à Texécution qui a été faite à Lyon de la gravure, 
sont autant de chefs-d'œuvre. Il ; en a une dans le nombre, 
c*est celle d'une dame de condition que la mort ravit dans 
son lit, oCl est cette marque H, sur le soubassement du lit, 
qui est à ce qu'il parott celle du peintre Holbein. Le livre est 
intitulé : Simoiaeri^ istarie e figure délia mor/e; c'est impro- 
prement qu'on lui donne le nom de Danse de la mort. Il n'y 
est pas dit un mot d'Holbein. Rubens, au rapportde Sandrart, 
en faisoit un cas singulier et admiroit la fécondité du génie 
de l'auteur. (Notes sur Walpole.) 

— M. Walpole ne pouvoit guère se dispenser, à ce qu'il me 
semble, de dire en quoi consistoient ces peintures, et cela lui 
étoit facile^car Patin les décrit et nousapprend qu'on y voyoit 
d'une part, dans une composition d'architecture, Q. Cur- 
tius se dévouant à sa patrie, et de l'autre, une danse de pay- 
sans. Cette maison est située dans une rue, ou, si l'on veut, sur 
une petite place, et dans le voisinage du marché au poisson, 
peu éloignée du pont du Rhin. Quant au prix, on n'en donna 
point à Holbein soixante florins, mais seulement quarante. 
(Notes sur Walpole.) 

— Un miîlre et une miîtresse d'école enseignant des enfants; 
peut-être fait pour servir d'enseigne à quelque maison privée. 
Le catalogue des ouvrages d'Holbein, qu'a donné Patin, et 
dont ceci n'est qu'une traduction, entre par rapport à ce ta- 
bleau, dans de beaucoup plus grands détails, et l'accompagne 
d'une inscription en langue allemande, qui est jointe au ta- 
bleau et qui ne permet pas de douter de sa véritable destina- 
tion. M. Walpole, en syncopant ainsi tous les articles de ce 



S65 

catalogue, nous prive de plusieurs remarques qui le rendent 
curieux, et j'en suis d'autant plus surpris que, bien loin d'en 
être ménager dans ses propres notes, il en devient par fois 
trop minutieux. (Notes sur Walpole.) 

— Sandrarl nous a conservé les inscriptions qu'il a trouvées 
sur ces deux desseins; sur l'un étoit écrit : Effigies Joh. Hol- 
bein senioris pictaris , et sur l'autre : Sigismondus Holbein 
pictor et senioris frater^ 1512. Mais est-il bien sûr que ces 
desseins fussent du jeune Holbein? l'on y voyoit, dil-on, sa 
marque ; mais celte preuve ne me paroît pas trop convain- 
quante; le père et le fils s'appeloient du même nom, et la 
même marque pouvoit convenir à l'un comme à l'aigre; 
ainsi, les desseins pouvoient appartenir au père tout aussi 
bien qu'à son fils, et même encore mieux; car, ainsi que l'a 
très-bien observé M. Walpole, le travail de ces desseins pa- 
roît au-dessus de la portée d'un enfant de 14 ans. (Notes sur 
Walpole.) 

— Ls portrait de Jean Holbein, je ne sais si c'est du pire ou 
du fils. 11 étoit facile à M. Walpole de s'en assurer. 11 ne s'a- 
gissoit que de feuilleter le livre qui lui fournissoitle catalogue 
qu'il produit. Il y auroit trouvé, au commencement de la vie 
d'Holbein, une estampe gravée d'après ce portrait, et elle lui 
auroit appris que c'étoit celui de Holbein le fils, peint par 
lui-même dans son jeune âge. (Notes sur Walpole.) 

— Portrait de Boniface Amerbach. — Patin nous ap- 
prend qu'il étoit jurisconsulte et professeur en droit, et il 
rapporte quatre vers latins, qui sont sur le tableau, et qui 
sont suivis de ces mots : BONIF. AMERBACHIUM JOH. HOL- 
BEIN DEPINGEBAT A. M. D. XIX E. I. D. OGTOBR. (Notes 
sur Walpole.) 

— Christine, fille de Chrétien, Roy de Danemark, Le lord 

Herbert a prétendu gu* Holbein n'employa gue trois heures pour 
faire ce portrait, p. 496. Elle étoit niepce de Charles Y, par 



S«6 

Si mto> et mourut eu Italie, oti elle s'étoit retlréet apiè» la 
(Dort du duc de Lorraioe, sga second époux. Je serois teaté 
de croire que le portrait de cette princesse, qui, eu 1585, se 
trouvoit à Milan entre les mains du président don Ant» Lon- 
donioi et dont il y a une gravure faite par Augustin Carraçbe, 
daoe l'Histoire de Crémone d'Ant. Campo, étoit celui qu*avoit 
peint Holbein ; l'habillement tient beaucoup de sa manière. 
(Notes sur Walpole.] 

— WaljHjle parlant de Vinventaire des tableaux et meublée 
du palais de Westminster, dont on charge le chevalier Antoine 
Jkmny, maître de la garde-robe, lequel était au dépôt du bureau 
appelé Augmentation-office, Mariette ajoute : Je ne SQ^is trop 
si M. Walpole a raison de s'autoriser, comme il fait, des dé- 
fauts d'expression qui se rencontrent dans la liste de tableaux 
qu'il produit, pour montrer qu'au commencement du r^goe 
de Henri VllI on sçavoit à peine ce que c'éloit que peinture 
en Angleterre. Cet inventaire doit être très-postérieur h la 
date .qu'il lui assigne ; on n'en peut pas douter, puisqu'il y 
est parlé de la reine Jeanne Seymour, qui n'est parvenue à 
la couronne qu'en 1536, et qu'il est certain, ainsi que je le 
ferai voir dans la note suivante, que le portrait du jeune 
prince, dont il y est fait mention, est celui d'Edouard VI, 
ifait en 1540 par Holbein* Ce qui le blesse vient moins 
d'un manque d'expressions dans la langue que de la mal- 
babileté de ceux qui ont dressé l'inventaire, (Notes sur Wal- 
pole.) 

— Le portrait du prince Edouard, fils de Henry VUl, à l'âge 
de trois ou quatre ans, peiot en détrempe sur une toille 
écrue, vers l'année 1540, étoit à Paris, chez H. Crozat, qui 
l'estimoit un ouvrage d'Holbein ; le prince y est représenté 
debout en jaquette et bonnet d'enfant, et ce qui ne laisse au- 
cun lieu de douter que ce ne soit le même tableau indiqué 

dans le présent inventaire, c'est qu'on y voit aussi un rideau, 



S«7 

et que la toile n'est proprement que teinte, tant les couleurs 
qui ont été appliquées dessus ont peu d'épaisseur. M. le ba- 
ron de Thiers, héritier des tableaux de M. Grozat, son oncle, 
ne s'en souciant pas, le fit exposer en vente en 1751, et le 
tableau fut vendu à vil prix. Que n'y avolt-il pour lors I Pa- 
ris quelqu'Ânglois curieux, il auroit fait un bon coup ; car, 
de retour en son pays, il auroit certainement trouvé à s'en 
défaire très-avantageusement, au lieu qu'ici on ne tient au- 
cun compte des vieilleries ; on ne veut que des choses qui 
flattent la veue, et par là tout se perd. Voyez pour ce ta- 
bleau (1) le catalogue des peintures et sculptures provenant 
des cabinets de M. le président de Tugny et de H. Grozat, 
publié en 1761, 8% pag. 41. (Notes sur Walpole.) 

— Un portrait d'Érasme, à Vienne. Il est représenté vêtu 
d'une robe fourrée, et tenant entre ses mains un livre ouvert. 
Voyez-en la gravure dans le Prodramus des tableaux de la ga- 
lerie Impériale, publié par Stampart et Prenner k Vienne, en 
1735. On voit dans le même livre, la représentation^ en petit, 
de quantité d'autres tableaux d'Holbein, qui sont dans la 
même galerie. (Noies sur Walpole.) 

— Je ne connois point de portrait d'Erasme, gravé par 
Vischer, et je soupçonne que Patin, qui Ta avancé et qui peut- 
être n'écrivoit que de mémoire, aura mis le nom de ce gra* 
veur au lieu de celui de Vorsterman, qui en effet, a gravé 
le portrait d'Erasme, d*après Holbein. Celui de Froben l'a été 
par L. Vischer. (Notes sur Walpole.) 

— George Gyêein. G'est le portrait d'un négociant assis à 
son bureau, dans son cabinet. On y lit sa devise, 5mem«rore 



(1) Catalogue de Crozal et Tugny, p. 41. Portrait d'Edouard VI, 
roi (I*Aofflfterre» daos son enfonce» peint 4 détrempe nar Jean 
Holbein (la figure est entière), haut de 4 pieds, large de 3 pieds 4 
peuees. 



368 

voiuptoi^ et son nom, avec la date 1512. Ge tableau, qui est 
sur bois> à S"" de haut sur ^ 8* de large, n y a sur une table 
des fleurs dans une fiole. (Notes sur Walpok]. 

— Un grand tableau^ conienani <tun Mé^ les portraits du 
bourgmestre Meier et de ses enfants, et de Vautre côté ceux de sa 
femme et de ses filles, tous à genoux devant un autel. Ge tableau 
est, à n'en point douter, le même qu'a fait acheter à Venise, 
en 1741, le roi de Pologne, électeur de Saxe. M. Walpole en 
parlera encore dans la suite, ce que je remarque, pour éviter 
les doubles emplois. Le Blond le tira de Basle et le porta en 
Hollande. Patin s'est mal exprimé, dans la description qu'il en 
fait, lorsqu'il dit que les figures sont à genoux devant un au- 
tel; il devoit dire aux pieds de la Sainte-Vierge. 11 ne me pa- 
rott point non plus douteux que c'est le même tableau, qu'a- 
voit vu en Hollande Sandrart entre les mains du greffier 
Loffert, qui l'avoit payé 3,000 florins, et cela me paroît plus 
à sa place que d'en faire faire l'acquisition à la rejne Marie 
de Médicis, qui, fugitive du royaume et retirée aux Pays- 
Bas^ n'éloit guère alors en état de faire une pareille dépense. 
(Notes sur Walpole.) 

— MichelLeblond^ commissionnai re du d uc de Buckingham, 
est le même que celui dont parle Sandrart^ et dont M. Wal- 
pole fera mention dans la vie de Van Dick. Le tableau qu'il 
vendit à Loffert^ me parott^ par la description qu'en fait San- 
drart, être celui qu'a acheté, depuis quelques années, le roi de 
Pologne, électeur de Saxe, et qui représente la famille du 
bougmestre Meier, aux pieds de la Vierge. M. Walpole ne le 
fait acheter que 300 florins par l'amateur Lofiert, qu'il qua- 
lifie assez mal à propos de peintre ; et en cela il se trompe 
lourdement, car Sandrart dit qu'il en donna 3,000 florins. 
(Notes sur Walpole.) 

— Les portraits de Jacques Meier ^ bourgmestre de Basle^ et de 
sa femme^ peints en 1516. De la façon dont s'exprime Patin, 



269 

tes deux têtes sont dans le même tableau. Celui & qui il ap- 
partenoit^ dans le temps qu'on rédigeoit le catalogue^ demeu- 
Toit à Basle. (Notes sur Walpole.) 

— Puisque M. Walpole avoit résolu de passer en revue tous 
les tableaux de Holbein, qui se trouvoient dans les principaux 
cabinets des princes, il n'auroit pas dû obmettre ceux qu'on 
conserve àFlorence, dans le cabinet de S. A. R. le grand-duc ; 
il lui étoit aisé d'en être pleinement instruit, il n'avoit qu'à 
ouvrir le livre de Baldinucci ; il y auroit trouvé une ample 
description de ces tableaux dans la Vie d'Holbein,que cet au- 
teur italien acomposée. Le principal est le portrait du chevalier 
Richard Southwell, conseiller privéde Henri VIiI,peint enl528, 
ainsi qu'on l'apprend de l'inscription, mise anciennement sur 
le tableau. Le grand-duc Cosme II en fit l'acquisition en 1621, 
et, pour montrer le cas qu'il en faisoit,il lui fit faire une riche 
bordure et le fit placer dans le sallon appelé la Tribune, où 
s'est rassemblé tout ce que la galerie offre de plus rare et de 
plus précieux. On voit dans la même galerie, un portrait de 
femme, coiffée d'un linge blanc, à la manière allemande, et, 
parmi les portraits des peintres peints par eux-mêmes, celui 
d'Holbein, fait à l'âge de 44 ans. On y lit son nom Joannes 
Holpenius. Cette variété dans l'orlographe, vient de ce que le 
B et le P ont le même son dans la langue allemande. (Notes 
sur Walpole.) 

— Ce qui fait présumer à Patin qu*un portrait est celui d'un 
grand maître de Jérusalem, est une croix de Jérusalem, qui 
pend au col de ce vieillard; mais, outre que je ne crois point 
que les chevaliers de Rhodes ni leur grand maître en ayent 
jamais porté de semblables. Ton sçait que les personnes^ qui 
faisoienl les voyages de la Terre-Sainte, étoienl, dans le temps 
que vivoit Holbein, dans l'usage de porter de ces espèces de 
croix, et ce portrait sera pour lors celui d'un tel voyageur, et 
pas davantage. (Notes sur Walpole.) 

T. n. V 



870 

— le poriraii d'une dame par Holbeki. Elle est en haUt 
noir, assise dans un fauteuil et tenant de la main gauche un 
gland, pendant à une chaîne d'or qui lui sert de ceinture. Le 
tableau a S"" 6' de haut sur 1« 7' de large ; il est sur bois. 
(Notes sur Walpole.) 

— J'ai parmi mes desseins un très-joli petit morceau qui 
vient de la collection de Jabach» et qui représente un bracelet 
avec les symboles de l'amour conjugal. Je possède aussi un 
fort beau dessein d*une horloge de sable, qui, suivant une 
inscription latine qu'on y lit, a été fait pour être présentée à 
Henry Vlil, le premier jour de l'an 1545, par Anloine D^y, 
son chambellan. Le trait en est à la plume, et d'une netteté 
qui feroit soupçonner, au premier aspect, qu'il a été gravé; 
les ombres sont données avec un lavis d'encre de la Chine. 
CTest ainsi que sont exécutés tous les desseins de Holbein qui 
me sont passés par les mains^ et voici une copie fidèle deFins- 
jcription : Slrena faeta pro Anthony Deny [camerario BegU 
fuod iniiio novi anni 1545 Régi dédit. (Notes sur Walpole.) 

— Dans les nombreux tableaux étant à Greenwich , et vendus 
par la république, il est fait mention d'une pièce d'écriture, 
faite par Holbein, vendue 10 livres. H. Walpole avoue qu'il 
n'entend pas ce que cela peut signifier. Je pense pour md, 
et ne doute nullement qu'il est question d'un dessem d'HoI- 
bein, fait à la plume. (Notes sur Walpole.) 

«— Ce^ n'est pas pour grossir la liste des ouvrages d'Holbein 
que je vais donner la description d'un morceau curieux, qui 
étoit autrefois dans la bibliothèque de la maison professe des 
Jésuites, et que j'ai retrouvé dans Paris, entre les mains d'un 
de mes amis, M. Brotier. Quoyque travaillé avec toute la dé- 
licatesse imaginable, je ne le trouve pas assez digne d'appar- 
tmir à un aussi habile homme que l'étoit Holbein ; mais j'ai 
poisé, que, si M. Walpole en avoit eu communication, il n'au- 
roit pas manqué d'en faire mention, ne fût-ce que itour suivre 



S71 

le fil de l'histoire de Tart, et faire mieux oonnottre les modes 
et les usages de son pays ; car voilà le plan qu'il s'est traeé et 
auquel j'ai voulu me conformer, dette curiosité est le chape- 
let de Henri VIU, roi d'Angleterre, il n'est pas permis d'en 
douter. Non-seulement on trouve sur un anneau, qui s^rvoit 
à le porter pendu à la ceinture, deui jarretières sur lesquelles 
sont gravées en relief , d'un côté : Posui tkum aâjutorium mciiffi, 
et de l'autre côté: Hony mt quimatypin$e.Mah on y remar- 
que encore ces armes écartellées d'Angleterre et de France, et, 
dans un cartouche particulier, les premières lettres du nom 
de Sa Majesté ainsi figurées ^l. Le chapelet est eompesé 
d'un crucifix, suivi de onze grains ou petits globes, dont dix 
plus petits pour les Ave Maria et le dernier plus gros pour le 
Pater. Sa longueur totale est de 21 pouces; il est travaille en 
bois, et chaque grain, d'environ un pouce de diamètre, porte 
sur la surface, cinq petits bas-reliefs en rond, où sont repré- 
sentés les mystères de notre religion, énoncés dans les artleles 
du symbole, et les histoires qui, dans l'Ancien Testament, en 
étoient la figure, les images des apôtres et prophètes, et 
les paroles du symbole, ainsi que les passages de l'ÉeritUfe 
sainte qui y répondent ; le tout taillé dans le bois atec un 
soin extrême. Le plus gros grain est environné d'un plus 
grand nombre de bas-reliefs, et est singulier en ce qu'il s'ou- 
vre en deux parties, qui jouent sur des charnières, et que 
dans le cœur, il renferme, entre autres choses, une petite cha- 
pelle où, dans un enfoncement de près d'un demi-pmiee de 
profondeur, on voit un prêtre à l'autel, des ministres qui le 
servent, des évêques et des cardinaux qui assistent au sacri- 
fice de la messe ; tout cela est isolé et de ronde bosse, et d'une 
exécution qui a demandé toute la patience et la dextérité de 
quelques-uns de ces anciens artistes allemands, auxqueH il 
ne manquoit, pour faire des chefs-d'œuvre, qu'un melUenr 
goût de dessein^ et qui se ressentit moins de gothique. 



872 

On ne peut pas douter que l'ouvrage n'ait été fait, avant 
qu'Hairi VIO se fût séparé de la communion de TÉs^ ro« 
maine. (Notes sur Walpole.) 

BOLLÂB (VBNCflSLAs), gentilhomme bohémien, naquit à 
Prague, en 1607. Ayant perdu tous ses biens, et se voyant 
dans la nécessité de chercher une profession qui le fît sub- 
sister, il commença par peindre à gouazze, et bientôt, sous la 
direction de Mat. Mérian , il prit la pointe et se hasarda 
de graver quelques petites planches, qui lui firent con- 
nottre que la nature l'appeloit à la gravure. Il en fit donc 
sa principale occupation, et, ayant suivi le comte d'A- 
rundel en Angleterre, et ensuite à Anvers, il mit au jour 
cette prodigieuse quantité de planches qui composent 
son œuvre, et qui font un des principaux objets des re- 
cherches des Anglois. Vertue en a fait imprimer un ca- 
talogue, que Ton pourroit rendre plus parfait, et il y a 
joint une vie de cet artiste, où l'on apprend qu'il est mort à 
Londres, en 16T7. Le peu qu'en dit le P. Orlandi est rempli 
de fautes. Il cite Sandrart, et il parotl qu'il ne l'a pas lu. 

— Hollar à Lewenguen etBareyt ; ce sont apparemment les 
lieux dont il ^toit seigneur, car je crois qu'il étoit gentQ- 
homme. 

— Wenceslas Hollar, dans un ovale au milieu d'un car- 
touche, dessiné et gravé par luy-méme, en 1647, étant pour 
lors Agé de quarante ans. Son nom n'y est pas; mais ses 
armes le font reconnaître; elles sont à quatre quartiers, et 
sur le tout un écusson, où est une montagne, surmontée de 
deux fleurs de lys. 

—Apparemment que la dédicace par Hollar à François 
Woulen, peintre de paysages, de la grande estampe du Christ 
montré au peuple, gravée en 1650, d'après le Titien, n'y fût 
pas mise sur-le-champ ; car, sur l'épreuve que j'ai, il n'y a 



878 

aueuDe dédicace, n y est seulement fait mention du chanoine 
François Hilwerwe ; or, le tableau se trouvoit alors à Anvers. 
(Notes sur Walpole.) 

— Image miraculeuse de la sainte Vierge, honorée dans 
réglise cathédrale de Gambray, gravée à Anvers. Cette pièce 
a été faite à l'occasion de la levée du siège de Gambray par 
les François, et des actions de grâces, qui en furent rendues, 
le 4 juillet 1649, par l'archiduc Léopold-Guillaume, qui re- 
connoissoit devoir cet événement à la protection de la sainte 
Vierge, dont on honore cette image miraculeuse à Gam- 
bray. 

— Suite des veues de Strasbourg et de quelques villes de 
Souabe, en douze pièces, par HoUar, et gravée en 1665, 
et dessinées en divers temps. On voit par là qu'il étoit à Stras- 
bourg en 1629 et 1630, oîi il a apparemment gravé les douze 
mois et les quatre saisons, aussy bien que l'éléphant. 

— The antiquities of Warwick-Shire illustrated by Wil- 
liam Dugdale, London, 1656, f"". Il y a quantité de planches 
d'HoUar dans ce livre, qui est fort rare. Il a été vendu 70 livres 
chezM.d*Estrée, pour M. Buirette.Ellei?représententquelque&- 
unes des veues de villes et de châteaux, mais la plus grande 
partie des tombeaux, des vitrages et des armoiries, servant à 
l'illustration de la noblesse de celle province. On y trouve 
aussi le portrait de Dugdale, le même qui est à la teste de la 
description de l'église de Saint-Paul de Londres, et plusieurs 
planches d'habillement des ordres religieux; mais je pense 
que ces dernières pièces ont été empruntées au Monasticon 
Anglicanum. 11 y a dans ce livre deux planches gravées par 
Lombart, d'après d'anciennes miniatures (1). 



(1) Voir sur Hollar Touvrage spécial, très-supérieur au catalogue 
de Vertue, composé par M. G.Parthey sur son œuvre : V^enzel Hol- 



tu 

. H0ND1U8 (ABRAHAM) . Descamps plaoe sa Daissance en 1658, 
et ne dit point qui lui a fourni cette date. Je la crois de sa 
pure imagination. Ni Houbraken, ni Weyerman^ les seuls 
auteurs hollandais qui ont parlé de ee peintre, ne Tont point 
dODQée. Le premier se contente de dire qu* Abraham Hondius 
Yivoit k Londres en 1665. J'ignore dans quelle source Yertue 
a prise la sienne (1638) } mais j'y trouye au moins plus de 
¥faisemblance, et je Tadopte trè»-TOlontiers. (Notes sur Wal- 
pôle.) 

<-« On a son portrait peint par lui*méme et gravé en ma* 
nière noire par J. Smith ; celui que M. Walpole a inséré dans 
ses Anecdotes en est une copie. (Notes sur Walpole.) 

HONDIUS (JossE, HKKRY et Guillaume). Il ne faut pas ajou* 
ter ioi à tout ee que M. Walpole raconte ici d'après les Mé* 
moires de Yertue concernant les artistes qui ont porté le nom 
de llondius, ni leur tiiiation telle qu'il a jugé à propos de ré- 
tablir. On va voir que les faits sur lesquels il se fonde sont ou 
incertains ou absolument faux : premièrement^ile&tfortdou^ 
teui que Josse Hondius ait gravé à Londres les cartes géogra- 
phiques qui sont indiquées par M. Walpole. Il étoit établi aux 
Pays-Bas, et il est assez difficile de croire qu'il se soit déplacé 
pour aller ftdre en Angleterre un travail dont il pouvait s'ac^ 
quitter chez lui avec beaucoup de facilité et beaucoup mieux, 
soutenu par Gérard Mercator,qui lui servit de guide dans une 
sciencequine faisoit pour ainsi dire que d'éclore. 11 n'est point 
vrai, en second lieu , que Henry Hondius soit né è Londres, 
ni qu'il soit le fils de Josse Hondius. La note, qui se lit au bas 



lar beschreibendes verzeichniss sein Kupfersticke. Berlin, 1853, 
{;rand in-8**. On en prépare en Angleterre un catalogue encore plus 
complet); pour les Allemands, e^est un compatriote; pour les An- 
glais, il a tout Tintérôt de Thistoire et de la topographie. 



11$ 

de son portrait, dans la suite mise au jour par Meyssens eB 
1649, ce qu'en a écrit Sandrart, ainsi que Corneille de Bie, 
tous s'accordent à le faire nattre en Brai^int dans un Ueu 
nommé Duffel, en 1573, d'un père qui, noble d'extraction, se 
nommait Guillaume. Dans la suite, il vint s'établir à La Haye, 
s'étant attaché à la famille des princes d'Orange, qui le con- 
sidéroient par rapport à la diversité de ses talens, et peut-être 
aussi eu égard à son caractère, qui lui concilioit l'amitié de 
tous ceux qui le connaissoient. La date de sa naissance est, de 
plus, conQrmée par une de ses gravures, qui est un paysage 
dont je pense que Breughel a donné le dessein ; elle est de 
l'année 1639, et il y est marqué qu'Henry Hondius étoit pour 
lors âgé de 66 ans. H avoit appris à graver de Jean Wierx ; 
mais il ne fut jamais qu'un graveur médiocre. Lorsque Van 
Dyck fit le voyage de Hollande, il y trouva à La Haye un 
graveur nommé Guillaume Hondius, dont il fit le portrait ; 
ayant été gravé par celui qui y étoit représenté, il fut jugédi- 
gne d'occuper une place dans la suite des cent portraits que 
Van Dyck publia dans la suite, et c'est, en effet, un trè&-beau 
morceau. On ignore quelles furent les raisons qui lui firent 
quitter La Haye, lieu de sa naissance, pour se retirer à Dant^- 
zick, où il est mort et où il alla enfouir ses heureux talens. 
C'est ce qu'il fit depuis 1637 jusqu'en 1645, qui est la dernière 
de ses pièces avec une date ; elle est, il est vrai, assez médio* 
cre. Je ne l'en crois pas moins lils de Henry Hondius. Il avoit 
embrassé la même profession ; il étoit né à La Haye, où Henry 
faisoit sa ré^dence ; il portoit le nom de Guillaume, qui étoit 
celui de son ayeul. Si tout cela ne forme pas de preuves, ce 
sont pour le moins des présomptions dont il est permis de ti- 
rer avantage. Rien de pareil ne milite pour Abraham Hon- 
dius, et j'ay peine à croire qu'il ait été effectivement fils de 
Henry. S'il l'eût été, les auteurs hollandais, qui ont parié de 
lui, en auroient eertainement fait la remarque ; leur silence 



376 

sur un fait qui tourneroit autant à la gloire d'Abraham qu'à 
celle de Henry, prouve, ce me semble, qu'il ne lui éloilde 
rien. Il pouvoit porterie même nom sans être de sa famille, 
le nom de Hondius ou de Hondt, qui répond au mot françois 
chien, étant très-commun aux Pays Bas. (Notes sur Walpole.) 
IlONDT (JEAN de), fils de Gui de Hondt, étoit, dit-on, élève 
de Rubens, et réussissoit dans le genre des batailles; il est 
mort fort jeune. 11 promettoit beaucoup. Sa trop grande ap- 
plication au travail le fit périr. Il tomba dans rélbisie. Il étoit 
principalement occupé à peindre des cartons pour les tapis- 
siers des Pays-Bas. Le PeintreAmat., 1. 1, p. 33. 

HOOGHE (romain de) — Extrait d'une lettre qui m'a été 
écrite de la Haye, au sujet de Romain de Hooghe. On assure 
en Hollande que cet artiste fut banni d'Amsterdam, pour 
avoir gravé les figures de l'Arétin, que de là il fut demeurer 
à Harlem; que ses sentiments n'ont été rien moins qu'ortho- 
doxes, menant une vie fort débordée, jusqu'au point de ré- 
pondre à un homme qui vouloit faire la cour à sa fille, que ce 
seroit bien lui-même qui auroit soin de cueillir cette rose, et 
Ton dit même qu'il grava sa fille aux susdites figures obscènes. 
On dit encore qu'il croyoit la métempsycose, et qu'un mi- 
nistre, qui étoit venu pour l'exhorter, quand il fut au lit de 
la mort, lui reprochant l'énormité de cette opinion, et lui 
demandant en quelle sorte d'animal il croyoit qu'il seroit 
changé : « Je n'en saisrien, » lui dit-il ; « mais pour vous, savez- 
vous ce que vous serez après votre mort? Une cigogne, » ajou- 
ta-t-il, a parce qu'ayant trompé durant votre vie l'Église en 
dedans, vous pou rrezy chier dessus après votre mort.ûComme 
il n'étoit pas du parti du prince d'Orange, il s'avisa de faire 
des satyres sur les affaires de ce temps-là, entre autres la 
iwiche hoUandoise, le mors aux dents. Mais ce prince, voyant 
que les satyres de cette nature lui faisoient du tort dans le 



877 

public, eut la prudence de gagner R. de Hoogbe par des bien- 
faits, et lui donna des appointements. C'est tout ce qu'on 
a pu me dire sur ce graveur. On m*avoit tait espérer de 
plus grands détails; mais Ton n'a pas tenu parole; l'on 
s'est excusé sur l'énormité des mœurs de celui qu'il falloit 
iaire connottre, et qui auroit formé un trop vilain tableau. 

— Romain de Hooglie, dessinateur et graveur d'Amster- 
dam. Ce que nous connoissons d'estampes gravées par Ro- 
main de Hoogbe, en françois le Grand, no fait point soup- 
çonner qu'il ait jamais manié le pinceau, ou, si cela lui est 
arrivé, ainsi qu il est écrit par Houbraken, il a dû faire de 
bien mauvais tableaux. Pour peu que les figures qui entrent 
dans ses gravures soient un peu grandes et dans le genre de 
celles que les peintres d'histoire employent dans leurs com- 
positions, elles sont mal ensemble» pauvrement drappées, 
sans caractère, et d'un goût de dessein si pitoyable, qu'il 
n'est guères possible de faire pis. 11 n'en est pas ainsi des su- 
jets qui n'admettent que des petites figures. Romain de 
Hoogbe, n'ayant pas besoin d'y mettre de la correction, se 
contente de leur donner de l'action, et presque toujours il le 
fait avec un esprit et un feu qui lui sont particuliers, et qui 
lui ont acquis une réputation méritée. S'il a connu la juste 
mesure de ses talents, il a dû se borner à la gravure, qui le 
mettoit à portée de les exercer avec le plus grand avantage. 
Sans être obligé de faire des études, pour lesquelles il n'é- 
toit point né, il se vit maître, la pointe à la main, de graver 
sur le cuivre ce qu'une imagination extrêmement féconde et 
brillante lui faisoit concevoir sur-le-champ. L'exécution sui- 
voit de près la pensée, et celle-ci, nullement affaiblie, pou- 
voit se montrer telle qu'elle a voit été conçue. J'ai toujours 
ouï dire que sa pointe lui tenoit lieu de plume et de crayon, 
et que, sans presqu'aucune préparation, sans être obligé de 
se recueillir et de méditer sur ce qu'il avoit à produire, il 



S7ft 

IriQoil du ^^femier coup sor sod caivre tout oe qui lui tenmt 
dans l'espril. Il étoît surtout exGellent dans les sujets eik il 
étoit question d'exprimer le trouble, de mettre beaucoup de 
figures en action et de jeter de la terreur et de la surprise 
dans r&me des spectateurs. Voilà pourquoi il a si bien réussi 
de présenter des sièges, des batailles, des fêtes et des réjouis- 
sances publiques. Mais je le trouve encore supérieur quand 
il se charge de mettre sous les yeux des sujets sanglants el 
remplis d'horreur. Tel est celui qui représente, dans une de 
ses estampes, la rupture de la digue de Goeverd^, en 167S, 
et les ravages qu'elle entraîne avec ^le. Telles sont les plan- 
ches où, pour rendre à jamais les François odieux & ses com- 
patriotes, Romain de Hooghe leur fait exercer les plus 
horribles cruautés dans les villages de Bodgrave et de Swa« 
merdam, et fait de leur irruption en Hollande, en 1679, le 
tableau le plus horrible. On frémit à la seule veue de ces 
estampes $ il reste un noir dans l'Ame, qui y demeure impri- 
mé pendant longtemps. Je ne doute point que l'auteur, en 
les composant, n'ait reçu la même impression, et que ce ne 
soit une des causes de son inimitié contre la France, et de 
son acharnement à répandre sur elle, toutes les fois qu'il le 
peut, son fiel amer. 

L'on a prétendu que, dans cette conduite, son principal 
objet étoit de faire sa cour au prince d'Orange et de servir 
son ressentiment ; et, en effet, lorsque ce prince fut monté 
sur le trône de la Grande-Bretagne, et qu'il en eut chassé 
son beau-père, l'on vit Romain de Hooghe multiplier ses sa- 
tyres, publier une infinité de pièces plus insultantes les unes 
que les autres, et où, sans respect pour le caractère sacré de 
la royauté, il s'étudioit à tourner en ridicule Louis XIV, 
l'infortuné Jaoque second et tous les ministres de leurs vo- 
lontés. Mais il s'y prit presque toujours si grossièrement qu'il 
ne parott pas vraysemUaMe qu'un prince grand et généreux, 



S7§ 

tel (fu'étoit Guillaume III, ait pu voir sans dégoût ces misé«- 
rables pasquinades et les autoriser en honorant l'auteur de 
sa protection et le mettant au nombre de ses pensionnaires. 
Il est plus probable qu'il ne lui accorda de pareilles grâces, 
qu'en considération de ce qu'il avoit gravé quelques-uns de 
ses exploits militaires, les principaux événements de son 
avènement à la couronne, les veues de ses maisons de plai* 
sance, et d'autres morceaux qui pouvoient le flatter et tfof- 
fensoient personne. C'est à quoi il eut été à désirer que Ro* 
main de Hooghe eût employé ses talens, qu'il se fût unique- 
ment occupé à enrichir rhistoire moderne des représenta- 
tions fidèles de tout ce qu'elle juge digne d'entrer dans ses 
fastes. Mais pouvoit-on l'attendre d'un homme sans pudeur 
et sans retenue, qui, après avoir déchiré la France, osa saty- 
riser encore le gouvernement hollandois, et attaqua jusqu'à 
son propre bienfaiteur dans une gravure qui parut en 1690, 
et qui étoit intitulée : la Vache hollwidùiUyh mors aux dents. 
Il la désavoua ; sans cela il étoit perdu (1] . Mais ce ne fut pas 
là le plus grand mal qu'on ait à lui reprocher. Il fut accusé 
d'avoir gravé des images obscènes, de les avoir répandues 
dans le public, et d'avoir, à l'imitation de l'Arétin, donné à 
la jeunesse des leçons de débauche dignes de la plus grande 
repréhension. Ses mœurs perverses ne réalisoient que trop 
de tels bruits; le magistrat en prit connoissance et ordonna 
que l'accusé quitteroit Amsterdam, et que, banni pour tou«- 
jours, il chercheroit ailleurs un autre domicile. Il se trans- 
porta à Harlem, dont il nous a donné, en 1688, de si belles 



(1) Quelques-uns prétendent que le roi Guillaume craignant que 




16 persuAder. (Nat# de UoiHUU.) 



880 

yeues et un si beau plan. 11 j étoit en 1691, lorsque le roi 
Guillaume III passa d'Angleterre en Hollande et vint à La 
Haye, où les états-généraux lui firent une magnîGque récep- 
tion. Ronoain de Hoogbe, qui avoit trouvé le secret de s'insi- 
nuer dans la faveur du prince, fut chargé de donner les des- 
seins des décorations et des arcs de triomphe qui furent em- 
ployt^s dans celte iéte. 11 en fournit les sujets; il les anima 
d'inscriptions latines de sa composition , et, lorsqu'il les grava 
pour être insérées dans la description imprimée qui les de- 
voit accompagner, il apprit par une inscription particulière, 
étant au commencement du livre, qu'il étoit employé au ser- 
vice de Sa Majesté britannique en qualité de commissaire, et 
il se para en mesme temps de la qualité de docteur en droit. 
Cela suppose qu'il avoit des lettres; aussi lit-on sur quelques- 
unes de ses pièces des vers latins tirés de son cerveau qui ne 
sont pas trop mal tournés. 

Il vivoit en 1705 et peut-être encore plus tard ; mais il étoit 
pour lors extrêmement déchu. Ce n'étoit plus cet artiste qui 
avoit gravé avec tant de goût, en 1667, la paix de Bréda, e(, 
dans une autre planche, l'expédition des HoUandois dans la 
rivière de Rochester ; qui, étant en France, car il y étoit venu 
dans sa jeunesse, avoit exécuté si excellemment pour Yander- 
meulen l'entrée de Louis XIY dans Dunkerque, et, sur son 
propre dessein, la cérémonie du baptême du Dauphin, ûlsde 
Louis XIV; qui s'étoit faite à Saint-Germain-en-Laye, en 
1668, et dont il avoit été le témoin ; qui avoit donné, en 1673, 
une image si frappante de la digue de Coeverden ; qui avoit 
représenté d'une façon si riche et si vraye les différentes oc- 
cupations de ceux qu'attire la foire d'Anhem ; de qui sont en- 
fin une infinité d'autres morceaux de la mesme force, qu'on 
ne voit point sans s'y intéresser ni sans y prendre à chaque 
fois un nouveau plaisir. 

Ceux qui aiment la belle graveure et qui cherchent dans 



881 

un arraDgement régulier de tailles ces tons doux et harmo- 
nieux, si propres à fasciner les yeux, je les avertis que les es- 
tampes de Romain de Hooghe seront fort peu de leur goût. 
Elles leur parottront gravées grossièrement et sans effet. Sa 
pointe est trop égale, et c'est un défaut ; si elle étoit plus lé- 
gère et que le travail en fût plus varié, avec ce qu'elle est 
expressive et spirituelle, il n'y auroit rien à y désirer; mais 
cela auroit demandé plus de temps et plus de soins, et l'hu- 
meur bouillante du graveur n'auroit pu y fournir, il ne pou- 
voit se résoudre à terminer ses planches; il les faisoit paroître 
telles à peu près qu'elles étoient sorties de l'eau-forte. S'il y 
donnoit quelques coups de burin, c'étoit uniquement pour 
suppléer à des manques d'eau-forte et nullement pour ap- 
proprier son travail et y mettre une intelligence de clair-obs- 
cur qu'il n'a jamais connu. Il a très-bien traité les terrains, 
les fabriques et les paysages, et, à en juger par quelques ani- 
maux qui accompagnent une suite de figures vêtues à la 
mode de son temps, lesquelles ont été gravées dans sa plus 
grande force, on regrette qu'il n'en ait pas fait son talent. 
On y voit surtout une chose qu'on croiroit gravée par Ber- 
chem. A la tète de cette suite de modes^ R. de Hooghe a mis 
une planche où il s'est représenté lui-même ayant une pa- 
lette à la main, n paroît dans cette gravure un homme de 
25 à 30 ans, et, comme ces planches ont paru vers l'an 1667, 
on peut fixer la naissance de notre artiste aux environs de 
1640. Quelques perquisitions que j'aye faites en Hollande, je 
n'ai pu être informé du temps de sa mort. Je n'ai rien appris 
non plus sur les circonstances d'une vie qui, se trouvant liée 
avec les principaux événements du siècle, pouvoit devenir cu- 
rieuse. J'ai cru entrevoir qu'on se faisoit un scrupule de ser- 
vir à perpétuer la mémoire d'un homme qui, par sa vie 
scandaleuse, s'en étoit rendu indigne, que ses mœurs licen- 
tieuses avoient fait bannir de sa patrie , qu'on pouvoit soup- 



MS 

Qooner des défloidres les plus atroces» qui ne ciaignoit ni 
Diett ni les hommes, et qui» en conséquence, ne lenoit à au- 
orne iriigion. On assure qu'il avoit poussé TextraTaganop 
jusqu'à donner dans les erreurs de la métempâcose, et que 
le ministre^ qui l'exhortoit au lit de la mort, tâchant de lui 
représenter l'ahsurdité de cette opinion, et lui demandant en 
quelle sorte d'animal il croyoit qu'il seroit diaogé : c Je l'i* 
goore, D lui répondit le mourant ; a mais pour tous, sayezrTOus 
ce qui vous est destiné? tous passerez dans le corps d'une ci- 
gogne, et rien ne vous convient mieux, car ayant empesté 
l'intérieur des églises durant votre vie, il est juste que vous 
ayez la liberté d'y déposer sur le toit vos ordures après votre 
mort. » 

Il ne fit jamais une tète gracieuse en sa vie. En qualité de 
poète, il se permettoit les allégories et il s'y perdoit; les 
siennes sont obscures et trop compliquées, témoin celles qu'il 
a insérées dans un livre hollandois de sa composition, où il 
a prétendu faire le tableau de l'état où se trouvoit la HoUande 
en lâf72, etc. — n a eu pour disciple A. Schoenbeck^ et je 
crois encore Harrewyn et Decker. 

HOPFFER. Marques diverses dont se sont servis les Hopf- 
fer. 0. H. Je Tinterprète Dieterich Hopffer, au lieu que Le 
Comte veut que ce graveur se nomme Ddvid Hopffer. Je 
trouve la date à deux de ses estampes; l'une de 1527, l'autre 
de 1534. 

I. H. est celle de Jérosme; son nom se trouve écrit tout au 
long sur trois de ces pièces en cette manière : Hierunimus 
Hopffer, et j'en ay veu une avec la date 1523. 

L. H. ou H. qui est celle de Lambert Hopffer. Celuy-cy a 
encore écrit son nom tout au long sur une de ses pièces, de 
cette manière : Lambrecht Hopier. Le Comte dit que c'es- 
toient trois frères et qu'ils estoieiU d'Ausbourg. Je le crois 



888 

comme luy, mais j'en Youdrois pourtant des preuves. 

G B 1581 ou G B {en monogramme avec la figure que le$ Hopf^ 
fer ajoutent à la marque). Je ne conçois point le nom du gi»- 
yeur de cette marque; il fout pourtant que ce soit celle d^uii 
Hopffer. 

L'abbé de MaroUes et les curieux les nomment tous indif- 
féremment les maistres aux chandeliers fleuris, prenant la 
marque^ qui accompagne les premières lettres de leurs noms, 
pour un chandelier y mais ce n'en a pourtant jamais été un. 
Ces graveurs ont voulu figurer un pied d'où sort du hou- 
blon pour faire allusion à leurs noms; car Hopffer en alle- 
mand sigaifie du houblon, et j'ay remarqué que la pluspart 
de ces vieux maistres se soot souvent désignés par des choses 
dont le nom avoit de la conformité avec le leur. Au reste, ces 
graveurs sont fort peu habiles et n'ont fait presque autre 
chose que copier les estampes des bons maistres; encore les 
ont-ils furieusement déguisés. Ils n'ont jamais mis de noms 
de peintres sur leurs estampes, et n'ont jamais manqué à y 
mettre leur marque; quelquefois ils ont substitué leur nom 
à la place de celuy des auteurs originaux qu'ils copioient; 
entre ce qu'ils ont fait de meilleur^ ce que j'estime le plus 
sont les portraits et quelques morceaux d'ornements qu'ils ont 
fait en manière de clair-obscur ; ils méritent qu'on y fasse 
attention et qu'on les examine. 

HOPFFER (baetheleiiy), peintre de portraits à Augsbourg ; 
l'inscription au bas de son portrait, gravé par 6«-G. Kilian, 
n'en dit pas davantage. 

HOPFFER (jébome). L'armée de France, rangée en bataille, 
en présence de celle des princes confédérés, gravé par Jérôme 
Hopifer, d'après le maître à la Ratière. J'avais cru que ce 
pouvoit être la fameuse journée de Fornoue* MaiSi quand je 



38& 

suis venu à examiner la pièce de plus près, et que j'ai remar- 
qué, sur les étendards de l'armée italienne, les armes de Bor- 
gia, celles du roi de Naples, celles de la Rovère, et celles 
d'Espagne, j'ai reconnu que je me trompois. il faut donc 
chercher un autre instant où les armes de France ont eu à se 
montrer en Italie avec celles de ces différentes puissances , et 
c'est ce que je n'ai pu trouver encore, La même composition 
a non-seulement été gravée en 1530 par le maître à la Ra- 
tière, elle l'avoit été dès 1528 par Augustin Venilen, et c'est 
cette dernière estampe qui doit être regardée comme l'ori- 
ginale. 

HOPFFER (THIERRY). Divers desseins d'ornements pour des 
Irises ou pour des panneaux en travers, en huit planches, 
gravées par Thierry Hoplfer; il y en a une parmy qui repré- 
sente la sainte face de Jésus-Christ, soutenue par deux anges ; 
elle est imprimée en clair-obscur. Le fonds ou les tailles sont 
gravés à l'eau-forte; les dernières teintes sont de la même 
couleur que l'encre de l'impression, mais un peu plus pâle, 
et elles laissent paroistre les rehauts de blanc fort éclatants, 
d'autant que c'est le papier qui les exprime. Le travail est ex- 
traordinaire et mérite d'estre examiné. Car il y a grande ap« 
parence que, le cuivre ayant été saly, à peu près comme on 
le fait pour graver en manière noire, on a bruny les endroits 
que Von vouloit qui restassent blancs et qui exprimassent les 
rehauts. Il est certain que les hacheures et les demies teintes 
sont exprimées par une seule planche; j'auroiscru, par la 
difficulté qui se trouve à avoir épargné, en taillant le cuivre, 
tous ces rehauts, que les demies teintes avoient été données 
depuis au pinceau; mais je Tay examiné avec un grand soin 
et reconfronté ces épreuves avec de semblables qui nous sont 
restées, je ne peux plus douter que ces demies teintes ne 
soient imprimées et qu'elles ne se trouvent sur la planche. Il 



385 

y a encore deux pièces traitées de la même manière, et ce 
sont celles qui nous restent. 

HORREBOUT (susanne). Le Vasari, que cite M. Walpole, 
parle d'elle à la fin de son ouvrage dans l'endroit où il a re- 
cueilli tout ce qu'il avoit pu apprendre au sujet des artistes 
des Pays-Bas, et il nomme le frère de Suzanne, Luc Urem- 
bout de Gand. Cette observation a échappé à M. Walpole. 
(Notes sur Walpole.) 

HORTEMELS ( marie-madeleine ] , femme de Cochin le 
père. 

HOUASSE (mighel-ange), Michel-Angelo Ouasse (il falloit 
écrire Houasse). Après avoir demeuré assez longtemps en Es- 
pagne, il vint à Paris avec la permission du roi, en 1730, 
pour y régler quelques affaires de famille, et dans la même 
année il mourut en s'en retournant à Madrid. G'étoit un 
homme de bien et de fort bon sens. Je n'ay jamais veu de ses 
tableaux, j'ay seulement eu occasion de voir un de ses des- 
seins, qui m'a beaucoup plu ; il l'avoit fait pour M. Crozat, 
d'après un excellent tableau du Corrége, qui est à l'Escurial, 
et qui représente un Noli me tangere. 

HODEL (jk^n) est de Rouen et a appris les éléments du 
dessein chez Descamps; depuis, étant venu à Paris, il s'est 
perfectionné sous Casanove. Il s'est fait connoître, et Dazin- 
court l'a reçu chez lui, et il a fait nombre de desseins qui ont 
lait parler de lui. M. le duc de Ghoiseul l'a fait veniràGhan- 
telou où il a peint des veues de ce château (1), et cela n'a pas 



(1) Ces vues, qui sont de charmants tableaux du pinceau le plus 
fin, font aujourd'hui partie du musée de Tours, où ils ont été ap- 

T. U. Z 



886 

peu contribué à lui ménager un logement dans le palais de 
l'Académie de France à Rome où il ne pouvoit pas avoir de 
place en qualité de pensionnaire ; c'étoit, je pense, en 1769. 
n a trouvé à Rome des Anglois qui lui ont fait faire le voyage 
de Naples, et d'autres qui tout de suite l'ont conduit en Si- 
cile, et, dans ces contrées, il a fait, à ce que j'entends, quan- 
tité d'études qui servirent à améliorer sa manière qui est 
agréable, et qui rend assez parfaitement les effets de la na- 
ture. Car c'est au genre de paysage qu'il s'est consacré. En 
1770, il m'a envoyé de Rome un morceau de sa façon, peint 
à gouazze, qui a reçu des éloges de tous ceux à qui je l'ai 
fait voir. 11 est de retour à Paris au commencement de 1773. 

HOirr, amateur, commissionnaire du prince Guiïl, de Cas- 
ulàla vente TaUard. — N» 574. Quatre dessins'de Carie Ma- 
ratte, dont F Alliance de Bacchus, Vénus et Céris. 90 liv. 
Bout. Excellent et plus parfait que celui du même sujet que 
j*ay eu. Ce M. Hout, qui a achepté ce lot-ci, a de bons yeux, 
et je ne le vois se tromper sur rien. (Catalogue Tallard.) 

HOWARD (uoo). Ce peintre s'étoit acquis en Angleterre la 
réputation d'un excellent connoisseur de tableaux, de des- 



portès du oh&teau de M, de Gboiseul par la révolution. L'un repré- 
sente la vue de Paradis près Ghanteloup; un autre, la vue de St- 
Ouen près Ghanteloup ; un troisième, la vue de l'entrée du petit 
bois nommé le Ghatelier, près deHontiouis; un autre encore, une 
vue de Paris. Tous $ont signés : /, Houel f. 1769. Ge ne serait donc 
pas cette année-là, mais peut-être la suivante, que Mariette eût 
dû fixer comme date de Farrivée de Houel dans le palais de TAca- 
demie de France à Rome. Voyez, au reste, sur Jean-Pierre -Louis- 
Laurent Houel, né à Rouen en juin 1735, et mort le H novembre 
1813, la notice lue par G. Lecarpentier, le 1«' décembre 1813, à la 
Société libre d'émulation de Rouen. (Rouen, impr. Baudry, 1813, 
in-8o.) M. Houel, mort récemment et qui avait fait sur la famille 
des Jônvenet ces belles recherches dont tout le monde a profité» 
était neveu de inhabile paysagiste. 



887 

seins et de médailles. Le duc de Devonshire et le comte de 
Pembroke, qui avoient beaucoup de goût pour ces sortes de 
curiosités, avoient souvent recours à lui; c'étoit leur conseil. 
Ils le récompensèrent bien noblement de ses soins, car ils lui 
firent avoir deux employs considérables , celui de garde des 
archives et de trésorier général des bâtiments du roy, qui le 
mirent en estât de faire une très-grosse fortune; et de ras-i 
sembler pour lui-même une très-belle suite de livres, de des- 
seins, d'estampes et de médailles qui, à sa mort, ont passé 
avec sa succession, montant à 80,000 livres sterling, à son 
frère unique, le D' Robert Howard, évêque d'Eiphin en Irlande. 
Les vingt dernières années de sa vie Howard ne s'occupa guère 
de la peinture, et il fit bien, car il n'en savoit pas assez pour 
y briller. Il avoit cependant voyagé comme la pluspart de ses 
compatriotes en Italie. Mais ce voyage, si utile pour ceux qui 
sont nés avec des talents, ne profite point à ceux à qui la na- 
ture en a refusé ; notre peintre s'y rendit seulement habile 
dans la connoissance des tableaux, etc. Il partit de Londres, en 
1697, avec le comte de Pembroke, qui alloit en Hollande en 
qualité de ministre plénipotentiaire à la paix de Ryswick ; de 
Hollande, il alla en Italie et repassa par la France, où il étoit 
en 1700. Il est mort à Londres, le 17 mars 1737, âgé de 
63 ans, étant né à Dublin, le 7 février 1675, de Ralph Howard, 
D' en médecine. Son principal talent étoit, ce me semble, de 
pândre des portraits, qui est à Londres un moyen sûr et 
prompt de s'enrichir. — Mémoires Mss. communiqués par 
M. son frère. 

HUBBR (jbân*rodolphe], né à Basle, en 1668, se fit peintre 
en dépit de sa famille, qui, étant patricienne, s'imaginoit qu'il 
dérogeoit en embrassant cette profession. 11 se mit sous la 
conduite de Joseph Werner, et, étant parvenu à l'âge de dix- 
neuf ans, il entreprit le voyage d'Italie, s'arrêta à Mantoue, 



888 

où il étudia d'après les ouvrages de Jules Romain, et à Venise 
d'après ceux du Titien, n devint en même temps un par&iit 
imitateur du Tintoret et de Michel-Ânge Caravage, dont le 
bire le séduisit, n fit connaissance avec Pierre Tempesta qui 
le prit chez lui , et qui souvent l'employa à meubler de figures 
ses tableaux de paysage. Après six années de séjour eu Italie, 
il revit sa patrie et passa auparavant par Paris. G'étoit aux 
environs de 1692. Peu après, il peignit dans un même tableau 
la famille entière du margrave de Bade-Dourlach, et, en 1696, 
le duc de Wurtemberg le déclara son peintre, le fit travail- 
ler et tflcha de le retenir à son service ; mais il ne put l'obte- 
nir. Huber mourut à Basle, en 1700. Fort occupé à peindre 
les portraits de personnes distinguées, le comte de Luc, am- 
bassadeur de France en Suède, lui fit peindre, dans un même 
tableau, tous les ministres plénipotentiaires au congrès qui 
se tint pour la paix à Baden. 11 fut élu membre du petit con- 
seil en 1740, et huit années après, en 1748, il cessa de vivre. 
Un de ses talents c'étoit encore de dessiner toutes sortes d'a- 
nimaux dans la plus grande perfection, et surtout des che- 
vaux dans la manière de Rugendas. — Fuessli, Vies des Pein- 
tres suisses, t. II, p. 212. 

HUBERT, élève de Beauvarlet, né à Abbeville. 

HUBERTI (ADRIEN). AH (en monog.] exc^ marque de Adrien 
Huberti, marchand d'estampes, qui avoit sa boutique à An- 
vers, et y vivoit dans le xvp siècle. 

HULSDONCE (j.), médiocre peintre de fleurs, des Pays-Bas, 
dont tout le mérite consiste dans un grand fini , mais qui 
peint sec et n'a pas la moindre intelligence. 

HUMBELOT (omiER). Jésus-Christ, l'homme de douleurs, 



289 
vêtu d'uD manteau de pourpre, et la sainte Vierge en regard ; 
ces deux pièces gravées au^burin, par Gilles Rousselet, sur 
des desseins de Laurent de la Hyre, faits par ce peintre d'a- 
près des tableaux exécutés par Didier Humbelot. Sans le nom 
du peintre ; seulement à PEcce homo : Desiderius Humbelot 
invenit. P. Mariette, ex (1). 

— Jésus-Christ , l'homme de douleurs , vêtu d'un man- 
teau de pourpre, et la sainte Vierge en regard. Dédiée par 
Charles Humbelot au cardinal de la Rochefoucauld. Â 
ÏEcce homo, il y a : Desiderius Humbelot invenit; mais il 



(i) A cette note de Mariette, uous joindrons Pindication d'une 
plaquette, certainement rarissime, relative à Didier Humbelot, et 
dont voici le titre : Mélange de poésie sur le chef-d'œuvre de feu 
Didier Humbelot, maître peintre et sculpteur à PariSy représentant 
en bosse la figure d'un Ecce UomOj et présenté à Mgr léminentis- 
time cardinal de la Rochefoucauld (François), A PaiHs^ de l'impri^ 
mené de Jean Laquehay, contre le collège de Boncoury devant la rue 
des Prestres. 1636, in-^^" de 20 pages. L*éditeur de ce fatras, est 
Charles Humblot, son neveu, c|ui a signé de ce titre une pièce de 
vers latins. On met la pièce principale dans la bouche de ses en- 
fants: 

Le plus précieux héritage 

Que vous nous laissez en partage 

(0 ! père très-cher) en mourant. 

Est celte figure admirable. 

Et le tout a certainement été fait pour que le cardinal, qui paraît 
avoir été le protecteur de Humbelot, achetât cette figure admirable. 
A la suite, dans Fexemplaire inséré à la Bibliothèque impériale, se 
trouvent huit ff. sans titre : Sur un portrait du cardinal en bosse et 
entasse taille par le même. Les autres vers sont d*un C. Humbelot, 
qui paraît avoir été le frère de Didier ; car, dans la pièce qui ter- 
mine, on voit ces vers : 

Combien vos œuyres sont artistes 
(Mon frère) en la dévotion ; 
Les quatre saints évan^élistes, 
Que l'immortelle affection 
De mon grand cardinal tous commanda de faire, etc. 

Ces évan£[élistes et deux anges de tabernacle étaient, d'après le 
titre de la pièce, à St-Etienne-du-Mont, et ne sont pas cités dans 
les descriptions de cette église. 



590 

est pourtant sûr que c'est de la Hyre qui en a donné le des- 
sein (1). 

HURET (GRÉGOIRE]. Lorsque Grégoire Huret vint s'établir 
à Paris, il y avoit déjà du temps qu'il exerçoit la gravure à 
LjOD, Ueu de sa naissance. L'on ignore le nom de celuy qui 
luy en donna les principes; l'on sçait seulement qu'il avoit 
commencé dès sa plus tendre jeunesse à embrasser cette pro- 
fession. 11 s'étoit aussy particulièrement appliqué au dessein, 
et il se vit par là dans la suite toujours en estât d'inventer et 
de faire luy-même les desseins des morceaux qu'il devoit gra- 
ver, qualité si peu ordinaire dans ceux de sa profession. Aussy 
avoit-il plus tost étudié en peintre qu'en graveur; il n'avoit 
négligé aucune des parties de la peinture ; la composition, 
rintelligence de clair-obscur, la perspective, l'architecture 
lurent celles où il réussit le mieux; l'on peut dire même qu'il 
y fut très-étendu. Il avoit le génie facile et assez orné, ce qui 
paroist surtout par la suite de sujets de la passion de Nostre- 
Seigneur, et dans la pluspart des pièces allégoriques qu'il a 
faites pour des conclusions.Gar^ pour les autres sujets de piété, 
ils sont presque tous composés avec trop de simplicité, ce 
qu'il affectoit de faire pour se conformer au goût des person- 
nes pieuses qui le faisoient travailler. C'étoit dans cette mesme 
veue qu'il avoit si fort recherché de rendre ses airs de testes 
gracieux et de répandre sur ses images un caractère de dou-* 
ceur et de modestie, si propre à entretenir la piété, mais qui 
avoit dégénéré chez luy en une habitude vicieuse, qui luy 
faisoit répéter partout les mesmes airs de testes, sans qu'il 



(1) On sait que le père de Laurent de la Hyre atait épousé « une 
fille très-estimable , nommée Philippe Humblct, » dit Guillet de 
Saint-Georges (Mémoires inédits des académiciens, I, 104), saoa 
doute la parente, sinon môme la sœur de Didier Humbelot. 



S91 

luy fût en quelque fagon possible de les varier; À Tégaid de 
sa manière de graver, elle luy est propre et tout à fait nou- 
velle; elle est harmonieuse et sans roideur; elle fait de ref- 
let; l'on pourroit seulement y trouver à redire d'estre presque 
toujours trop ouvragée et toujours du mesme travail. Huret 
étoit de FAcadémie royale de peinture et de sculpture; il se 
figuroit d*estre savant dans la perspective et dans la géomé- 
trie sur laquelle est fondée cette autre science ; mais ce qu'il 
en a écrit fait connoistre que, quand ses sentiments auroient 
été excellents, il n'avoit pas l'esprit assez net pour les expli- 
quer et se faire entendre. Il n'y a guère eu de graveur au 
burin qui aye autant travaillé d'après ses propres desseins, 
A l'exception de quelques portraits, l'on ne sache pas mesme 
qu'il aye rien gravé d'après d'autres desseins que les siens. 

— La passion de Jésus-Christ, représentée en 32 sujets, in- 
ventés et gravés par Grégoire Huret, en 1664 ; cette suite est 
parfaitement bien gravée, et les compositions en sont aussy 
belles qu'elles sont nouvelles. L'on conjecture que l'autheur 
y a représenté son portrait dans la trente et unième pièce 
dont le sujet est l'Ascension de *J.-G. — J'y trouve bien de 
l'apparence, et cela est exactement vrai. J'ai son portrait des- 
siné par lui-même dans un Age moins avancé et où il s'est 
représenté dessinant, qui réalise ma conjecture. 

HDRTREL (smon), et non pas Hurtrelle. Il fut admis dans 
l'Académie de Saint-Luc, le 9 juillet 1678. Son nom est ins- 
crit dans le catalogue imprimé des membres de cette acadé- 
mie, depuis son institution jusqu'en 16 • 

HUnN (CHABLES), directeur de l'Académie de Dresde, né à 
Paris en 1715 (1). 

Ï) y. sur Charles Hutin, les Artistes français à l'étranger, par 
. Bussiaaz (Paris, 1852), p. iO. 



89S 
HUTIN (pierre) son frère, mort en Saxe, en 1763. 

HUYSM ANS (corneille) d'Anvers, peintre établi à Malines, 
qui touche très-bien le paysage et peint les chevaux dans la 
manière de Wauvermans. il étoit à Malines, en 1721, lorsque 
M. Crozat y passa allant en Hollande, et il donna à ce curieux 
deux de ses desseins qui m'ont appris à connoître plusieurs 
desseins de ce maître que j'ai. M. Crozat le vit le 8 mars 1721. 
Huysmans étoit alors Agé de 66 ans. Dans la table, qui se 
trouve à la fln du catalogue des tableaux de la galerie de 
Dresde, il est nommé Nicolas ; mais c'est une faute à rectifier. 
Il est fait mention de ce peintre dans Touvrage de Descamps. 

— Comme Walpole parle d'un peintre de paysages qu'il 
appelle Michel Buysman^ de Malines^ Mariette ajoute : Il y 
a eu de nos jours un peintre de paysages établi à Malines, 
qui est mort en 1727. âgé de 79 ans. Il se nommoit Cor- 
eille et étoit né à Anvers en 1648. Il faut croire que c'est de 
lui qu'on a voulu parler ici, et qu'on s'est trompé sur son 
nom de baptême et sur le temps de sa mort. Il étoit disciple 
de Jacques Van Artois. Voyez ce qu'en a écrit Descamps, 
t. III, p. 241. M. Crozat, qui l'avoit vu à Malines, en disoit 
beaucoup de bien. 

HUYSUM (jEAN van), excellent peintre de fleurs est mort à 
Amsterdam, le 8 février en 1749. 11 étoit né le 5 avril 1682. 
Il est, dans les fleurs, ce que Vanderwerlf a été dans la figure. 
L'un et l'autre se sont signalés par le plus grand terminé, et 
l'un et l'autre ont eu la satisfaction de voir vendre leurs ta- 
bleaux de leur vivant des prix excessifs. On a pourtant beau 
dire ; le plus parfait tableau de fleurs de Van Huysum n'ap- 
proche jamais de ce que Baptiste a fait dans son meilleur 
temps. Van Huysum avoil, dit-on, la folie de peindre des 
paysages, et, quand ses occupations le lui permettoient, il y 



393 

sacrifioit volontiers son temps. C'étoit bien de pure perte, car 
il ne faisoit alors rien que de mauvais. M. de Voyer a apporté 
de son voyage de Hollande quelques desseins de ce peintre , 
et entre autres des études de fleurs coloriées légèrement avec 
des couleurs à l'eau. J'y trouve plus de vérité que dans ses 
tableaux. Il y a moins d'ouvrage et de peine, deux choses qui 
m'ont engagé à donner la préférence à Baptiste, indépendam- 
ment de ce que ce dernier compose en plus grand maître, et 
met plus d'intelligence dans son clair-obscur et dans la dis- 
tribution de ses masses. Les deux tableaux de fleurs, que M. de 
Morville avoit apportés en France au retour de son ambassade 
en Hollande,etqui sont des plus beaux de Van Huysum, sont 
présentement chez M. le marquis de Gouvemet. Il étoit fils 
d'un peintre médiocre, nommé Juste Van Huysum, qui lui- 
même peignoit des fleurs, et qui mourut en 1716, âgé de 
57 ans. 

IGNACIO (don FRANÇOIS], peintre qui travailloit à la cour 
de Charles U, roy d'Espagne, et dans le même temps que 
François Ribalta, François Ricci et François de Herrera. Joseph 
Garcia en fait mention, dans la préface, à la tête d'un livrede 
principes du dessein. 

IMBERT (Frère jdseph-gabriel) naquit à Marseille en mars 
1666, et après avoir reçu dans sa patrie les premiers élémens 
du dessein et de la peinture, il fut envoyé à Paris, où, de l'é- 
cole de Vandermeulen, dans laquelle il s'exerça pendant 
quelque temps, il passa dans celle de Le Brun ; il ne s'y Qtpas 
regarder comme un de ses moindres disciples. M. le duc de 
Nevers ayant désiré un peintre qui lui fût attaché, Imbert 
lui fut donné par Le Brun, et il demeura constamment au- 
près de ce seigneur, jusqu'au moment que, se sentant appelé 
à Dieu, et voulant lui consacrer dans la retraite et la péni- 



80» 

tance le reeie de ses jours, il prit la résolution de retourner 
dans sa patrie. Là, après s'être suffisamment éprouvé, il de- 
manda à être reçu frère chartreux , et il le fut dans la char- 
treuse de YilleneuTe, où il fit sa profession et ses vœux le SB 
septembre 1708. Il croyoit, en prenant l'habit religieux, 
faire pour toujours divorce avec la peinture; mais ses supé- 
rieurs en disposèrent autrement. Ils ne lui permirent pas de 
quitter le pinceau, et, sentant au contraire combien il leur 
étoit avantageux de le tenir oontinueUement occupé, ils lui 
firent faire pour leurs maisons quantité d'ouvrages dont les 
principaux sont à la grande chartreuse et à celles de Ville- 
neuve et de Marseille. Un voyage qu'il fit à Rome , à la suite 
de dom Berger, son prieur , lui fit connaître les plus ha- 
biles peintres qui fussent alors en Italie, et sa manière ne fit 
que se bonnifier. Il revit la France, et ce fut alors qu'il fit, 
pour l'église de la chartreuse de Marseille , ce grand tableau 
qui en occupe tout le fond du sanctuaire, et qui représente la 
mort de Jésus-€hrist avec toutes les circonstances effrayantes 
qui l'accompagnèrent. Ce fut son chef-d'œuvre. Le frère Im- 
bert joignoit à ses heureux talents une politesse , une pureté 
de mœurs, et une exactitude h remplir les devoirs austères et 
les plus pénibles de son état, qui l'ont rendu respectable et 
qui en ont fait un saint. Il mourut à Villeneuve, le 25 avril 
1749, chargé d'années et le corps épuisé de pénitence. Etienne 
Parroœl, peintre d'histoire, et Manglard, peintre de marines, 
ont été ses principaux disciples. 

*^ Cette note n'est que le rimmé d'un excellent mémoire iur 
la vie de frère Imbert, peintre et rdigieux chartreux, ouerage 
de M. de JUoulinneuf^ auteur de la notice mr Michel Serre^ 
mise par nous dans le second iootume des Mémoires inédits mr 
lesmemkres de V Académie de peinture^ II, 243-9, «/ copiée aum 
par MarieUê. Nous sommes heureux de publier id cdle d^Im* 
berif en marge de lofuelle Mariette a mie la wâe eiwMo^ ; 



8M 

tr Dressé par M. MouUnnêuf^ sêcritairs de TAmUmie des 
« Arts réUUifs m dessein eê communiqué par M. Dandré* 
a Bardon. b 

Joseph-Gabriel Imbert naquit à Marseille au mois de mars 
1666. Son père étoit tailleur d'habits de femmes. Il donna 
une bonne éducation à son fils. Lui ayant remarqué du goût 
pour la peinture, il le mit chez un peintre du pays, sous le- 
quel il fit quelques progrès dans le dessein et dans la pein'*' 
ture. Mais, non content de ce premier succès, son père crut 
devoir l'envoyer à Paris pour qu'il se perfectionnAt dans un 
art dont il ne connaissoit que les premiers principes. Imbert 
travailla pendant quelque temps dans l'atelier de M. Vander-* 
meulen, et ensuite sous le fameux Le Brun, qui le plaça bien*- 
tôt auprès de M. le duc de Nevers, qui le reçut en qualité de 
son peintre. Il demeura assez longtemps dans la maison de ce 
seigneur. Mais, désabusé du monde et ne pouvant souffrir la 
vue de ses déréglemens, le jeune Imbert songea sérieusement 
à travailler à son salut et à se retirer, pour cela, dans quelque 
solitude. Il prit le parti de regagner la maison paternelle, et, 
rendu à Marseille, il crut devoir consulter quelqu'habile di« 
recteur pour lui indiquer la route qu'il devoit tenir. Le reli-^ 
gieux, auquel il s'adressa, voulant peut-être éprouver sa vo- 
cation, fit tout ce qu'il put pour lui inspirer une horreur ex- 
trême de la vie des chartreux, dans laquelle le jeune homme 
s'étoit déterminé de consacrer à Dieu le reste de ses jours. 
Mais, plus on vouloit l'en éloigner, plus le jeune Imbert de» 
meuroit persuadé que le désir qu'il avoit d'embrasser cet étal 
étoit une inspiration qui lui venoit du ciel. Il eut recours à 
un autre directeur, qui, plus éclairé, examina de plus près 
les dispositions du jeune postulant, et qui, ayant remarqué 
en lui une vocation solide, des intentions pures et une bonne 
volonté» lui déclara sans balancer qu'il croyoit que Dieu Tap- 
peloit véritablematit à l'état de cbûtreui. U lui fit même une 



396 

peinture assez vive de riDStitution de oe saint ordre, et des 
charmes qu'une Ame pure et maîtresse de ses passions y goù- 
toit; de sorte, qu'encouragé par les conseils et la décision de 
son directeur, notre jeune peintre ne pensa plus qu'à exécu- 
ter incessamment son pieux dessein. 11 apprit que dom Ber- 
ger, alors prieur de la chartreuse de Villeneuve, se rencon- 
troit à Marseille; il fut le voir et lui demanda une place en 
qualité de simple irère. Dom Bei^er, l'un des plus grands 
hommes que l'ordre des Chartreux ait produit, l'interrogea 
sur sa vocation et sur ses talens, et, ayant sçu qu'il étoit pein- 
tre, il demanda à voir de ses ouvrages, et, comme il ne man- 
quoit pas de connoissances, il lui fut aisé de découvrir, dans 
les morceaux de peinture qui lui furent présentés, un fond de 
sçavoir qui montroit dans le postulant de grandes disposi- 
tions pour devenir, dans la suite, un excellent artiste; et, 
charmé d'en faire l'acquisition, il lui promit de le recevoir , 
ce qu'il fit, en effet, peu de temps après, à la chartreuse de 
Villeneuve, où il eut ordre de se rendre et où il passa par 
toutes les épreuves qui sont en usage dans cet ordre; ensuite 
de quoi il fit sa profession le 29 septembre 1703, et, ce qui 
le surprit extrêmement, ainsi qu'il l'a avoué lui-même dans 
la suite, ce fut l'ordre qu'il reçut de ne point abandonner la 
peinture et de s'y appliquer même de tout son pouvoir. 
Comme il n'avoit eu d'autre motif, en se faisant religieux, que 
de travailler efficacement à son salut par la pratique des ac- 
tions les plus pénibles et les plus humiliantes , il s'étoit ima- 
giné qu'avec et sous l'habit des chartreux, il avoit renonce 
pour toujours à la peinture. Cependant^ comme il se faisoit 
un devoir de n'avoir d'autres volontés que celles de ses supé- 
rieurs, qu'il regardoit comme tenir la place de Dieu, il se 
soumit aveuglement et sans réserve à tout ce qu'on exigeoit 
de lui. Il reprit donc le pinceau et fit ces magnifiques ta- 
bleaux qui font encore aujourd'hui l'ornement de la char- 



397 

treuse de Villeneuve. On en compte trois, dont le premier re- 
présente la Fuite en Egypte , le second, une Descente de Croix, 
et le troisième, qui est très-^stimé et plus petit que les autres, 
est une copie d'une Ânaonciation du Guide qui se trouve dans 
la chapelle de dom Prieur, et passe pour un chef-d'œuvre de 
l'art. Dom Berger, qui avoit reçu le frère Imbert et qui con- 
noissoit ses talens, le conduisit quelque temps après à Rome, 
où il eut occasion de faire connoissance avec tout ce qu'il y 
avoit alors de plus habiles peintres dans cette capitale du 
monde chrétien. 

De retour d'Italie, et dom Berger ayant reçu ordre de se 
rendre à Castres et ensuite à Marseille, le frère Imbert le sui- 
vit, et la chartreuse de cette dernière ville lui est redevable 
de six grands tableaux, entr'aulres, d'un Christ mourant sur 
la croix et dans les ténèbres , aux pieds duquel on voit la 
Madelaine et plusieurs autres figures. Ce tableau, d'une gran- 
deur prodigieuse, occupe aujourd'hui le fond du sanctuaire 
dans l'église de la chartreuse de Marseille. Il fait l'admiration 
des meilleurs connoisseurs et passe pour le chef-d'œuvre de 
son auteur. On en a refusé, dit-on, quarante raille livres (1). 

Il y a aussi un tableau du frère Imbert à la grande char- 
treuse de Grenoble, représentant saint Antoine anachorète, 
qui est aussi beau qu'il est estimé. Le cardinal de Janson, vou- 
lant l'avoir, en offrit six mille livres, et s'engagea d'en four- 
nir une copie faite par un des meilleurs peintres de Paris; 
mais le R. P. Général ne voulut point y consentir. 

Après la mort de dom Berger, arrivée à Marseille en 1719, 
le frère Imbert fut rappelé à la chartreuse de Villeneuve, et 



(1) Quelqu'un, qui connottee tableau et qui est capable d'en ju- 
ger, dit qiril a si fort noirci, qu'on a de la peine à distinguer les 
objets qui y sont représentés. (Note de Mariette.) 



a»8 

là» chargé de l'amplm pénible de mattre des frères noiriGes, 
il s'en aoquitta pendant longtemps avec autant de zèle 
que de succès. Malgré les devoirs indispensables de cette 
place» et quoique tout à taii livré à des exercices spirituels, 
il trouvoit encore assez de temps pour peindre » soit que ce 
fût dans l'intention de faire plaisir à ses amis, soit qu'il lui 
fallût obéir à ses supérieurs. Dans le nombre de tableaux qu'il 
ât alors, il y en a deux fort beaux qui sont dans l'église de la 
chartreuse de Marseille ; l'un est une Résurrection» qui a été 
copiée et recopiée ; et l'autre a pour sujet les disciples d'Em- 
maiis ; il perfectionna ce dernier peu de temps avant sa mort ; 
dans tous les deux» les figures sont représentées de grandeur 
naturelle. 

Enfin» chargé d'années» de fatigues, et le corps épuisé de 
pénitences, le frère Imbert tomba malade et sentit lui-même 
que sa fin approchoit. 11 reçut les secours de l'Eglise avec une 
piété et une présence d'esprit admirables, et, le jour de Sain^- 
Marc» 25 avril de l'année 1749» il consomma ce sacrifice» et 
mourut en paix dans la chartreuse de Villeneuve» dont il étoit 
proies. 

Le frère Imbert étoit d'une taille un peu au-dessous de la 
médiocre. Il avoit l'air vénérable» des manières simples et 
beaucoup de politesse. 11 étoit doué d'un talent singulier pour 
enseigner le dessein ; aussi a4-il eu un grand nombre d'é- 
lèves qui se sont distingués dans la suite; entr'autres» 
M. Etienne Parrossel, qui excelle pour l'histoire, et M. Man- 
glard, qui se distingue dans les grandes marines. M, Duparc, 
habile sculpteur, mort depuis quelques années à Paris, se glo- 
rifioit d'avoir appm à dessiner sous le frère Imbert. Il étoit 
aussi fort consulté pour juger des ouvrages, et on lui rend 
cette justice, qu'il a principalement excellé dans le dessein et 
dans le coloris. Et c'est ce qui a fait la réputation dont il 
jouit» par rapport à l'art qu'il professoit» tandis que, par son 



s»» 

exactitude à remplir les devoirs de son état et sa longue per- 
sévérance dans le bien, dont il ne s'est jamais démenti jus- 
qu'au dernier soupir de sa vie , il s'est préparé une gloire 
beaucoup plus solide et qui ne finica jamais. 

Mariette ajoute ici la note euivante : Ce Mémoire a été dressé 
sur les indications qu'ont fournies les RR. PP. Chartreux, 
avec lesquels le frère Imbert a vécu ; ainsi,il ne faut pas pren- 
dre tout à fait à la lettre les éloges qu'on y fait de ses talens 
supérieurs. Le frère Imbert ne manquoit pas de mérite ; sa 
manière vise même assez au grand ; mais , avec cela, il ne 
sera jamais compté parmi les peintres de premier ordre , ni 
ses tableaux ne seront payés ce qu'on les estime ici. 

INDIA (bbrnardino], de Vérone. Palladio en parle comme 
d'un des meilleurs peintres de son temps, et il cite de ses ou- 
vrages dans plusieurs palais b&tis par Palladio à... (1). 

INTERNÂRl ( JEAN-BAPTISTE), né à Rome et disciple de 
Marc BeneGale, fut un des artistes qui furent appelés à Bresde 
en 1750, et auxquels on commit le soin de faire des desseins 
des pr'mcipaux tableaux de la galerie électorale, pour servir 
de guide aux graveurs qui les dévoient mettre en estampes. 



I (1) Il en est question dans ces deux passages du second livre : «Le 
stanze di questa fabrica (del Conte Ottavio dei Thieni, in Yicenza) 
sono State ornate di bellissimistucchi damasser Alessandro Vittoria 
et messer Bartolomeo Kidolfi, e di pitture da messer Ânselmo Ca- 
nera e messer Bernardine India veronesi, non second! ad alcuno 
de' noslri tempi. » El plus loin : a In Pogliana, villa del Vicentino, 
è la fabrica del cavalier Pogliana ; le sue stanze sono ornate di pit- 
ture e stuccbi bellissimi da messer Bernardine ludia e messer An- 
selme Canera pittori veronesi et da messer Bartolomeo Ridolfi 
scultore veronese. » Deir architeitura di And. Palladio, Yenetia, 
Bart. Corampello, 1581, f», lib. 3, p. 12,58. — Cf sur India Vasari, 
dans la vie de Tarchitecte Veronais Michèle San Micheli. 



MtltrUM 



400 

Aussi froid que tous les autres dessinateurs qui furent em- 
ployés au même travail, il se contente de faire des desseins 
peines, et les graveurs , enrichissant encore et n'ayant rien 
qui les animât, ne produisirent que des copies assez impar- 
faites d'excellens originaux, qui perdirent ainsi beaucoup 
dans celte transmutation de forme. Cet ouvrage achevé, ou 
plustost interrompu par la malheureuse guerre qui désola la 
Saxe, iDtemari passa à Varsovie en 1756, et, y ayant trouvé 
de quoi exercer son pinceau, qui étoit fait pour peindre le 
portrait au gré de ceux qui désirent de l'éclat et de la res- 
semblance, mais se livrant trop à la chymie et même à la re- 
cherche de la pierre philosophale, il ne fut que très-rarement 
occupé de sa profession et mourut à Varsovie en 1761. 11 
avoit un talent particulier pour dessiner des caricatures dans 
le style du Ghezzi. Math. Ostereich et Joseph Ganale en ont 
gravé plusieurs, et l'on a même la sienne réunie à celle d'Os- 
tereich, tous deux vêtus en moines, qui a été gravée en 1749, 
Mémoires recueillis par M. de Heinecken, 1. 1, p. 217. 

INGRÂM (jean), graveur et dessinateur de l'Académie 
royale des sciences, ne me paroît pas , dans ce poste, à sa 
place. Il pouvoit prétendre à quelque chose de mieux. 11 eût 
continué à graver des morceaux de composition, car il aune 
assez belle pointe ; mais il a préféré un état sûr et tranquille 
et y fait bien ce qu'il y fait. Il est né à Londres. 

ISAC (GASPARD), le père ; Claude, son fils, graveurs. 



FIN DC DEUXIÈME VOLUME. 





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