Skip to main content

Full text of "Actes du Congrès international de botanique et d'horticulture d'Anvers"

See other formats


= 2 et £a à 
A pec 2 3 r 3 ( s 


ET Pa 
A te 


: ETATS 
RE te per DE trans 


Se ne re PE tait 
: MR Re er 
TRES 


DAT QT EEE 


Cr DE = 
RÉ R 
RC en 0 


RE en 


nie, Er, 
CIE st" 5 
Tu 

5 


hr a 


nr 
ptet Te 0 à Pr, 
DLLD LT MT PM TT. 


x 


= 
AN 


Qu | à nt LE 4 et} à 1 LA LA Ë L/ PA ue 


MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE. 


FÉDÉRATION DES SOCIÉTÉS D'HORTICULTURE 


DE 


BPLGIQUE 
ACTES DU CONGRES 


INTERNATIONAL 


BOTANIQUE ET D'HORTICULTURE 


2 n 
D'ANVERS 
ORGANISÉ SOUS 
LA HAUTE PROTECTION DE sA MAJESTÉ LéoPoLp IT, Ror DES BELGES 
ET SOUS LE PATRONAGE DU GOUVERNEMENT ET DE LA VILLE D'ANVERS 


PAR LE 


CERCLE FLORAL D'ANVERS 


avec le concours de la Société Royale de Botanique de Belgique, 
de la Chambre Syndicale des Horticulteurs Belges 
et de la Fédération des Sociétés d’horticulture de Belgique 
les 2, 3, 4, 5, 6 et 7 août 1885 
A L'OCCASION DE 
L’EXPOSITION UNIVERSELLE D’ANVERS 


ET EN COÏNCIDENCE AVEC 


L'ÉXPOSITION INTERNATIONALE D'HORTICULTURE 


ENS TR RE EEE RE LE PEER PS SE PE PT TS ET En 


GAND 
IMPRIMERIE C. ANNOOT-BRAECKMAN, AD. HOSTE, SUCC" 


1887 
| Re 5 


CONGRÈS INTERNATIONAL 


BOTANIQUE ET D'HORTICULTURE D'ANVERS 


ot — 


Août 1=S5 


AS 


NEA net F 


(20% ED , % 


_— - 


FÉDÉRATION DES SOCIÉTÉS D'HORTICULTURE DE BELGIQUE 


ACTES DU-CONGRES 


INTERNATIONAL 


BOTANIQUE ET D'HORTICULTURE 


D'ANVERS 


ORGANISÉ (SOUS 


LA HAUTE PROTECTION DE SA MAJESTÉ L£oOPOLD II, Ror DES BELGES 
ET SOUS LE' PATRONAGE DU GOUVERNEMENT ET DE LA VILLE D'ANVERS 


PAR LE 


CERCLE FLORAL D'ANVERS 


‘avec le concours de la Société Royale de Botanique de Belgique, 
de la Chambre Syndicale des Horticulteurs Belges 
et de la Fédération des Sociétés d’horticulture de Belgique 


les,2, 3, 4, 5, 6 et 7 août 1885 
A L'OCCASION DE 


L’EXPOSITION UNIVERSELLE D'ANVERS 


ET EN COÏNCIDENCE AVEC 


L'EXPOSITION INTERNATIONALE  D'HORTICULTURE 


GAND 
IMPRIMERIE C. ANNOOT-BRAECKMAN, AD. HOSTE, SUCC: 


1887 


: LA 
| ÿ U 11 DOUAI 


Li. 


2 a 6 k 
nt" L AL DAT ITU: à 


vs 4 + “E .… an A 
pi foi Abe AE itf, “ol af aus 


Y 


15MAY\ 


AVIS. 


Les « Actes du Congrès international de Botanique et d'Horti- 
culture d'Anvers » comprennent la reproduction de la sténographie 
des discussions qui ont eu lieu pendant les séances. La sténographie 
a été communiquée aux orateurs. 

La liste des adhérents au Congrès a été publiée dans le volume 
des « Rapports préliminaires » (pages 394-417); nous donnons 
ci-après les noms des membres dont l'adhésion est parvenue 
tardivement à la Commission organisatrice. Il en est de même des 
délégations officielles et de celles de plusieurs sociétés. 

En vertu de l’article 10 du Règlement du Congres, il a été 
procédé à la constitution du Comité exécutif, nous la faisons 
connaître plus loin. 


84587 


“Ab, : Ï 
. ‘ : 
t ‘ 
‘ . + 
. 
* 
à wi t l | 
, 
L/Pa Are L ir A7 
(1110 } (! si , (1 î "Ps 
11: 
, 
+ ll L 


} AUTRE. 


ul i sit à 


(14 


LI 
} 


S à 


1 VITALE Lie 
nllus#tts 


1 d'art 


TN 
' Ÿ 4 
AELA HE 1) 
va : T0 
ART TO 


HN T NIORES 


Car] 


| ne 
LÉ AO ER 
s À 


til" Sn 


ù 


COMITÉ EXÉCUTIF 


Président : 


M. CrEriN, Fr., directeur du Jardin botanique de l'État, membre 
de l’Académie royale des Sciences, à Bruxelles. 


Vice- Présidents : 


MM. Martens, Éd., président de la Société royale de Botanique 
de Belgique, professeur à l’Université de Louvain. 
Van GEERT, Aug., horticulteur, président de la Chambre 
syndicale des horticulteurs belges, à Gand. 


Secrélaire-Général : 


M. DE Bossonere, Ch., président de la Commission organisatrice 
et secrétaire-géneral du Congrès. 


Secrétaires : 


MM. MarcHaL, É., conservateur au Jardin botanique de l’État, 

président de la Société belge de microscopie, à Bruxelles. 

VAN GEERT, Ch., J', horticulteur, vice-président du Cercle 
Floral d'Anvers. 


Membres : 


MM. Bommer, J.-E., conservateur au Jardin botanique de l’État, 
professeur à l’Université de Bruxelles. | 
BRUNEEL, Oct., échevin, secrétaire de la Chambre syndicale 
des horticulteurs belges, à Gand. 
BURVENICH, Fr., professeur à l'École d’horticulture de l'État, 
à Gand. 


Le Sy pere 


MM. DE BosscHerE, G., horticulteur, architecte-paysagiste, 
| ‘à Anvers. 
DE BosscHERE, H., inspecteur des plantations communales, 
a Anvers. | 
DELRUE-SCHREVENS, président de la Société royale d’horti- 
culture, à Tournay. 
D'HAENE, Ad., horticulteur, à Gand. 
MiLLET, H., pépiniériste et professeur d’arboriculture, 
a Tirlemont. 
Pynagrt-Van GeerT, Éd., horticulteur, professeur à l’École 
d'horticulture de l’État, à Gand. 
‘ RopiGas, Ém., professeur à l'École d’horticulture de l'État, 
à Gand. 
Rousseau, M" E., botaniste, à Bruxelles. | 
Van HEuroKk, D' H., directeur du Jardin botanique 
d'Anvers. | 
Van HouTrTEe, L., horticulteur, à Gand. 
VERNIEUWE, T., fonctionnaire au Ministère de l’agriculture, 
à Bruxelles. 


LISTE SUPPLÉMENTAIRE 


DES 


MEMBRES DU CONGRÉS 


EMPIRE D'ALLEMAGNE. 


MM. 
JuNGBLUTH, D' B., médecin, à Aix-la-Chapelle. 
KRAMER, F., jardinier en chef du Flottbeck Park, à Hambourg. 
Mossrou, pépiniériste, à Treptow-lez-Bérlin. 
 ScaRÔDER, D' E., à Carlsruhe. 
VozkMAN, horticulteur, à Erfurt. 


BELGIQUE. 


AIGRET, CL., géomètre, à St-Gilles-lez-Bruxelles. 

Baumice, N., membre de la Société centrale d’horticulture, à Mons. 
Boonroy, instituteur communal, à Anvers. 

BRASSEUR, P., professeur à l'École normale de l’État, à Lierre. 
Buquer, père, rentier, à Groenendael. 

BurvENICH-DEWINNE, horticulteur, à Gendbrugge. 
CaRDoN, A., membre de la Société centrale d’horticulture, à Mons. 
CaroLy, à Lierre. 1 

CoGELs, À., propriétaire, à Anvers. 

Daizzy, E., à Bruxelles. 

Darzzy, J., à Bruxelles. 

DALLIÈRE, À., horticulteur, à Gand. 

DE Baucnies, J., secrét.-délégué du Cercle des naturalistes hutois, à Huy. 
Degrissy, docteur, administrateur de la Sociéte centrale d’horticulture, 
à Mons. | 

DE BruYycKker, P., à Ledeberg. 
De CLEENE, Enm., avocat, à Zele. 


se tie 


MM. 

De Cock, ÉM., boulevard d'Akkerghem, à Gand. 

DEFRESNE, M., à Anvers. 

DE GERLACHE, rentier, à Anvers. 

DELTEMME, CH., secrétaire-adjoint de la Société centrale d’horticulture, 
à Mons. 

DeTERME, J., à Mariembourg. 

Duaus, OcT., membre de la Société centrale d’horticulture, à Mons. 

Feys, FL., administrateur de la Société centrale d’horticulture, à Mons. 

ForGerT, à Mont-St-Amand. 

Fucus, L. fils, architecte de jardins, à Ixelles. 

HeynperiCkx, TH., brasseur, à Lodelinsart. | 

KENGEN, capitaine d'infanterie, à Lierre. 

LorGE, J., à Jette-St Pierre. 

MAEsEN, industriel, à Bruxelles. 

MicxieLs, G., professeur d’arboriculture, à Montaigu. 

MusscxE, juge de paix, à Tirlemont. 

Paques, M": E., à Liège. 

RICHE, E. aominetoour de la Société An ale d’arboriculture, à Mons. 

RoGGE, G., à Gand. 

Rosseet, A. L , délégué de la Société royale d'agriculture et de botani- 
que de Gand. 

SCHMITZ, D., à Anvers. 

SCHULTES, à Bruxelles. 

SPAE, B., horticulteur, à Gand. 

THiroux, EuG., administrateur de la Société royale Linnéenne de 
Bruxelles. 

VANDEN DRIESSCHE, horticulteur, à Gand. 

VAN EECKHAUTE, A. G., à Gand. 

VAN ÉECKHAUTE, fils, jardinier en chef au Jardin botanique de Gand. 

Van NERoM, à Anderlecht. 3 

VAN PE, E., propriétaire, à Bruxelles. 

VAN P£e, Me E., à Bruxelles. 

WANaAUVRE, J., secrétaire de la Société centrale d’horticulture, à Mons. 

WEHENKEL, D", directeur de l’École de médecine vétérinaire, à Cureghem. 


RÉPUBLIQUE FRANCAISE. 


ANDRÉ, ÉD., architecte-paysagiste, rédacteur en chef de la Revue horti- 
cole, à Paris. 

BaLy, N., au château de Bagatelle (Seine). 

BouLay, (abbé), professeur à l'Université catholique de Lille. 


— 11 — 


MM. 
CHATENAY-ABEL, à Vitry s/ Seine. 
CuRÉ, conseiller municipal, horticulteur-maraicher, à Paris. 
DEMEULENAERE, président de la Société d’horticulture, à Armentières. 
Duvaz, CL. E., horticulteur, à Versailles, 
DuvizLARp, à Arcueil, lez Paris. 
Leroy, pépiniériste, à Angers. 
VanDEN HEepE, Ch., horticulteur, à Lille. 
VizMoRIN, H., marchand-grainier, à Paris. 


GRANDE-BRETAGNE. 


BourTo, J.-B., Esq., Trewidden, à Penzance (Cornwall). 
Lewis. CASTLE, rédacteur du Journal of Horticulture, à Londres. 


ITALIE. 


Dr. C. MassazonGo, professeur à l’Université, directeur du Jardin 
botanique de Ferrare. 


PAYS-BAS. 
WALTER, F., juge de paix, à Hulst. 


ROUMANIE. 


le Dr. BRANDZA, professeur de botanique à l’Université, directeur du 
Jardin botanique et de la section botanique du Musée d'histoire 
naturelle, membre de l'Académie Roumaine, à Bucharest. 


RUSSIE. 


STAATS, G., jardinier en chef du Jardin botanique de l’Université 
impériale de Kharkoff. 


SERBIE. 


le Colonel Dr. Sava PeTrovirex, médecin de Sa Majesté le Roi, délégué 
du Gouvernement de la Serbie, à Belgrade. 


EMPIRE DU BRÉSIL. 


le Comte DE ViLLENEUVE, envoyé extraordinaire et ministre plénipoten- 
tiaire du Brésil, délégué du Gouvernement du Brésil, à Bruxelles. 

PzARRO, Jos Joaquim, professeur de botanique à l'École de médecine, 
à Rio-Janeiro. 


ATEN 2 


24 


RÉPUBLIQUE MEXICAINE. 


MM. | 
Toxez, J., propriétaire-horticulteur. à Cordova, Vera-Cruz. 


RÉPUBLIQUE ARGENTINE. 


Paropt, D., D' en pharmacie, botaniste, à Buenos-A yres. 
SPEGAZSINE, D’ CH., professeur d'histoire naturelle, à Buenos-A yres. 


ÉTATS-UNIS DE LA COLOMBIE. 


TRIANA, J., consul-général, à Paris. 
ILE: MAURICE. 


DaruTy, À., président de la Société d’acclimatation, à Port-Louis. 


DÉLÉGUÉS OFFICIELS (1). 


La dépêche officielle du Gouvernement du Brésil est parvenue trop tard à 
la Commission organisatrice, pour pouvoir être insérée dans le volume des 
« Rapports préliminaires. » | 


EMPIRE DU BRÉSIL. 


Le Comte DE VILLENEUVE, envoyé extraordinaire et ministre plénipoten- 
tiaire du Brésil, à Bruxelles. ) 
Binor, PEepro, horticulteur et botaniste-voyageur, à Petropolis. 


EMPIRE DE RUSSIE. 


A. Fiscter DE WAaLpHEIM, conseiller d'Etat, professeur à l’Université 
impériale et directeur au Jardin botanique de Varsovie. 


DÉLÉGUÉS DE SOCIÉTÉS (?). 


Société d’horticulture et d'histoire naturelle de l'Hérault (France) : 
MM. Émire PLANCHON, vice-président, et le D' Louis PLANCHON, 
membre. £ 

Verein zur Befürderung des Gartenbaues in den Preussischen Staaten, à 
Berlin : MM. le professeur D' P. Macnus, à Berlin, R. Mosisos, à 
Treptow-lez-Berlin et D' L. WiTrmack, professeur à Berlin. 

Flora- Gartenbau-Gesellschaft in Kôln : M. Juces NIEPRASCHK, dirécteur 
de l'Établissement « Flora. » 


(1) Voir la liste à la page 418 des « Rapports préliminaires. » 
(2) Voir la liste à la page 418 et suiv, des « Rapports préliminaires. » 


COMPOSITION DU BUREAU DU CONGRES. 


Haut Protecteur du Congrès. 


Sa Majesté LéoPop II, Roi des Belges, Souverain de l'État indépendant 
du Congo. 


Présidents d'honneur. 


MM. le Chevalier de Moreau, Ministre de rnqRe de l’industrie et 
des travaux publics. 
Léopold de WaEL, Bourgmestre d'Anvers. 


Vice-présidents d'honneur. 


MM. 

D' O. Drupe, professeur de botanique à la Kgl.-technische Hochschule, 
directeur du Jardin royal de botanique, délégué du gouvernement de 
Saxe, à Dresde. 

J. NiepRAsoxK, directeur de l'établissement Flora, à Cologne. 

D’ L. RADLKOFER, professeur à l’ Université, membre de l’Académie des 
sciences, à Munich. 

Dr L. WiTTMACK, professeur à l'Université et à l'Académie d’agricul- 
ture, secrétaire-général de la Soc. d’horticulture de Prusse, à Berlin. 

F. Hizzer, secrétaire du Landeskultur Rath du royaume de Bohême, à 
Prague. 

D' J. Pazacxy, docent à l’Université de Prague, député à la Diète de 
Bohême, inspecteur des collections botaniques du Musée de PS 
etc., à Prague. 

De Ex SR professeur, directeur de la station expérimentale, à 
Klosterneubourg, près Vienne. : 

C. BrarT, président d'honneur du Cercle Floral d'Anvers, à Anvers, 

F. CRÉPIN, directeur du Jardin botanique de l'État, membre de l’Aca- 
démie royale de Belgique, à Bruxelles. 


LL 


Der | (Na 


MM. 

C. Hansen, professeur d’horticulture à l’Académie royale supérieure 
d'agriculture et d’horticulture, à Copenhague. 

H. BaïLLon, professeur à la Faculté de médecine, directeur du Jardin 
botanique de la Faculté de médecine, à Paris. 

C. Bazrer, horticulteur, délégué du gouvernement français, à Troyes. 

Max. Cornu, professeur-administrateur au Muséum d'histoire naturelle, 
délégué du gouvernement, à Paris. 

CH. Joy, vice-président de la Société nationale d’horticulture de France, 
à Paris. 

J.É. PLANCHON, correspondant de l'Institut, professeur de botanique à la 
Faculté de médecine, directeur du Jardin des plantes à Montpellier. 

R. Ho, rédacteur du Journal of Horticulture, à Londres. 

F. SHirLeY HIBBERD, directeur du Gardener's Magazine, à Londres. 

F. ARDISSONE, professeur de botanique, directeur du Jardin botanique, 
directeur de la Société cryptogamique, à Milan. 

Dr P. A. SaccaRDo, professeur de botanique et directeur du Jardin 
botanique de l'Université, à Padoue. 

ENZWEILER, ingénieur agricole du Gouvernement, délégué de l’Institut 
royal grand-ducal de Luxembourg. . 

J. KRELAGE, horticulteur, délégué du gouvernement néerlandais, 
à Haarlem. 

D: MuLper, rédacteur en chef du Landbourwcourant, délégué du gouver- 
nement néerlandais, à la Haye. 

D'° J. HENRIQUES, professeur de botanique et directeur du Jardin 
botanique, à Coïmbre. 

A. FiscHer DE WALDHEIM, conseiller d'État, professeur de botanique 
à l’Université impériale, directeur du Jardin botanique, à Varsovie. 

Colonel D' Sava PETRovITCH, médecin de $S. M. le Roi de Serbie. 

A. DE CANDOLLE, associé étranger de l'Institut de France, à Genève. 

Comte DE VILLENEUVE, envoyé extraordinaire et ministre plénipoten- 
tiaire de $. M. l'Empereur du Brésil, délégué du gouvernement du 
Brésil, à Bruxelles. 

P. Binor, botaniste-voyageur, délégué du gouvernement du Brésil, 
à Petropolis (Brésil). 

D: J. TRiaNA, consul-général de la Colombie, à Paris. 


Commissaire général du Gouvernement belge. 


M. le comte AD. Dp'OULTREMONT, membre de la Chambre des repré- 
sentants. 


Déléqués du Gouvernement. 


MM. C. BERNARD, directeur de l’agriculture. 
E. Van Mons, secrétaire de l’œuvre des Congrès. 


L 


RTE tee 


Président : 
MM. 
En. MorreN, professeur à l'Université, directeur de l’Institut botanique 
et du Jardin botanique, secrétaire de la Fédération des Sociétés d’hor- 
ticulture de Belgique, éditeur de la Belgique horticole, ete. à Liége. 


Vice-Présidents : 


J. E. BommERr, professeur à l'Université, conservateur au Jardin 
botanique de l’État, à Bruxelles. 

J.-J. Kickx; professeur à l’Université, directeur du Jardin botanique et 
de l'École d’horticulture de l'État, à Gand. 

Ep. Marrens, professeur à l'Université, président de la Société royale 
de Botanique de Belgique, à Louvain. 

H. Van HEURCK, directeur-professeur au Jardin botanique, à Anvers. 

L. GiLLekeNs, directeur de l'École d'horticulture de l'État, à Vilvorde, 

A. VAN DEN WouweER, président du Cercle Floral d'Anvers. 

A. Van Gxerr, président de la Chambre syndicale des horticulteurs 
belges, à Gand. 


Secrélaire-Général : 


CH. DE Bosscuere, professeur à l'Ecole normale de l'Etat, à Lierre. 


Secrétaires : 


Fe. BURvENICH, professeur à l’École d’horticulture de l’État, à Gand. 

H. De BosscHERE, fils, inspecteur des plantations communales d'Anvers. 

DELRUE-SCHREVENS, président du Conseil d'administration de l’École 
d’arboriculture, à Tournai. 

An. D'HAENE, horticulteur, secrétaire-adjoint de la Chambre syndicale 
des horticulteurs belges, à Gand. 

É. MARCHAL, président de la Société belge de microscopie, conservateur 
au Jardin botanique de l'État, à Bruxelles. 

Ém. RopiGas, secrétaire-général du Cercle d’arboriculture de Belgique, 
à Gand, 

CH. Van G&ERT, Jr, vice-président du Cercle Floral d'Anvers. 


Secrétaires-adjoints : 


G. Caron, secrétaire de la Société royale Linnéenne, à Bruxelles. 

L. Coomaxs, trésorier de la Société royale de Botanique de Belgique, 
à Bruxelles. 

H. MizLer, pépiniériste et Pare à Tirlemont. 

L. Van HourTre, horticulteur, à Gand. 


COMPTE-RENDUS STÉNOGRAPHIQUES. 


Séance d'ouverture, le dimanche 2 août 1885. 


(Grande salle du Cercle artistique, lilléraire et scientifique d'Anvers). 


Présidence de MM. Léororn pe WAEL, Bourgmestre d'Anvers, président 
d'honneur du Congrès, et Epouarp MorREN, professeur à l’Univer- 
sité de Liège. 


Sommaire : Discours de M. le Bourgmestre DE WAEL, président d’honneur du 
Congrès, de M. Ép. MoRREN, président du Congrès et de M. CH. DE BOSSCHERE, 
président de la Commission organisatrice, 

Ordre du jour : La flore et les essais de culture au Congo, par MM. le Dr 
L. WiTTMACK, de Berlin et le D' H. BAïLLÔN, de Paris. 


La séance est ouverte à onze heures. » 


Au bureau prennent place : M. L. ne WAEL, bourgmestre d'Anvers 
et président d'honneur du Congrès, MM. les membres du bureau de la 
commission organisatrice et du comité de patronage et plusieurs délégués 
des gouvernements étrangers. Le gouvernement belge est représenté 
par M. C. BERNARD», directeur de l’agriculture; M. MorissEAU, chef du 
cabinet de M. le Ministre de l’agriculture, et M. le comte pu CHASTEL, 
secrétaire des sections étrangères à l'Exposition universelle. 

Plus de 450 membres assistent à la séance, ainsi qu’un grand nombre 
de membres du Cercle artistique, liltéraire et scientifique d'Anvers avec 


Ni — 


leurs dames. Des bouquets de fleurs ont été remis à celles-ci à leur 
entrée dans la salle. 


M. le Président d'honneur prononce le discours suivant : 


. Mesdames, Messieurs, 


Je dois à l’absence fortuite de M. le Ministre de l’agriculture, de 
l'industrie et des travaux publics, ainsi qu'à l'absence de M. le Gouver- 
neur de la province d'Anvers, l’insigne honneur de présider à l'ouverture 
solennelle du premier Congrès international de botanique et d’horticul- 
ture qui va se tenir dans notre ville. Soyez persuadés que j'apprécie cet 
honneur à sa véritable valeur, mais, tout en appréciant une telle dignité 
je ne laisse pas que d’être plus ou moins assailli par la crainte de ne pas 
être à la hauteur d’une pareille mission. 

Je me sens profondément honoré de pouvoir, à cette occasion, 
souhaiter la bienvenue à tant d'hommes intelligents, doués de connais- 
sances spéciales, qui viennent rehausser l'éclat de cette solennité. 

À vous tous donc, Messieurs, les représentants de l'Allemagne, de 
l’Autriche, du Danemark, de l'Espagne, de la France, de la Grande 
Bretagne, de l'Italie, du Grand Duché de Luxembourg et des Pays-Bas, 
du Portugal, de la Russie, de la Serbie, de la Suisse, du Brésil, de la 
République Argentine, des États-Unis, de la Nouvelle Bretagne, à vous 
tous, salut et bienvenue. (Applaudissements). 

Je remercie avec effusion tous les Gouvernements d’avoir bien voulu 
nous envoyer des délégués spéciaux pour débattre des questions aussi 
importantes que celles qui intéressent la botanique et l’horticulture, ces 
belles et nobles sciences qui ont le précieux avantage dont parle le 
dicton, de réunir l’utile à l’agréable,. 

Laissez-moi émettre ici un vœu, Messieurs, à l'ouverture des’ tra- 
vaux de ce Congrès auquel vont prendre part tant de spécialistes, tant 
d'hommes de talent, tant d'hommes d'élite, c’est que vos efforts réunis 
produisent les fruits que nous en attendons tous et sur lesquels nous 
comptons en toute assurance. Puissent les travaux du Congrès anversois 
s'étendre dans l’univers entier et faire que l’horticulture et la botanique 
continuent à marcher dans une voie de progrès et de prospérité. C’est le 
souhait que je forme ici de tout cœur en déclarant ouverte la première 
séance du Congrès international de botanique et d’horticulture d'Anvers. 
(Applaudissements). 

Maintenant, Mesdames, Messieurs, permettez-moi de vous dire le nom 
de l’homme éminent qui sera appelé à diriger vos débats. Au nom de la 


Commission organisatrice, je proclame comme Président du Congrès, 
Monsieur Edouard Morren..{A pplaudissements.) 


MIRE 


Les applaudissements que vous venez d'entendre prouvent que la 
Commission organisatrice a désigné l’homme qui paraît à l'assemblée le 
plus digne de présider les débats importants qui vont s'ouvrir. Je vous 
prie, Monsieur Morren, de prendre cette place et je ne doute pas que 
vous dirigerez les discussions de ce Congrès avec le talent qui vous est 
universellement reconnu. 


M. Morren, président. — Mon premier devoir est de vous dire, 
M. le Bourgmestre, combien je suis touché de la façon si cordiale et par 
trop aimable avec laquelle vous avez bien voulu vous faire l'organe et 
l'interprète de la Commission organisatrice. 

Je ne m'attendais pas, Messieurs, au grand honneur de présider vos 
débats. C’est ce matin que mes amis, qui se sont consacrés à l’organisation 
du Congrès d'Anvers, sont venus me surprendre en disant qu'ils 
comptaient sur ma collaboration et ma coopération. J’ai été assailli 
inopinément par des pensées très-diverses. J'aurais désiré, si je n’avais 
écouté que mes goûts personnels, me soustraire à cette charge, à ce 
devoir. Mais mon cœur a répondu pour moi. J’ai cru que je ne pouvais 
pas me désintéresser d’une œuvre aussi utile et aussi réussie que celle 
qui commence aujourd’hui. 

Ce n’est pas sans de grandes difficultés que les organisateurs du 
premier Congrès de botanique et d’horticulture d'Anvers sont parvenus 
à réunir tous les éléments qui en assureront le succès. 

Je n'ai pas cru non plus pouvoir me soustraire à cette direction, en 
présence de tant de personnes distinguées, de tant de confrères du pays 
et de l'étranger qui viennent aujourd’hui nous tendre la main, et nous 
donner des gages de leur sympathie et leur collaboration. Je puis vous 
assurer, Messieurs, que quant à moi, je m’appliquerai à diriger de mon 
mieux les débats du Congrès d'Anvers (Applaudissements). 


M. de Wael. — J'ai l'honneur dé faire connaître à l’assemblée que 
M. le Ministre de l’agriculture, qui a été empêché de présider à l’ouver- 
ture de ce Congrès, se rendra cependant à Anvers, entre midi et une heure. 
Il aura l’honneur de saluer les membres du Congrès, à 5 heures, au 
Musée Plantin. , 


M. Morren, président. — J'invite tous les délégués officiels des 
Gouvernements à bien vouloir prendre place au bureau. (Voir la liste 
de MM. les déléqués aux «< Rapports préliminaires, » p. 418). 

Il convient maintenant de compléter le bureau par la nomination d’un 
certain nombre de vice-présidents d'honneur. La commission organisa- 
trice propose à l’assemblée de les choisir entre les diverses nations qui 
sont réunies ici. (Marques d'adhésion). (Voir La liste aux « Actes du 
Congrès, p. 13). , 


TON 


Telle sera, Messieurs, si vous n’avez pas d'observations à faire, la 
composition du Bureau d'honneur. (Applaudissements). 

On va vous faire connaître la composition du bureau effectif du 
Congrès. (Voir la liste aux « Actes du Congrès, » p. 15). 


M. le Président. — Monsieur le Secrétaire-général CH. DE BossCHERE, 
en sa qualité de Président de la Commission organisatrice, va nous 
rendre un compte sommaire des travaux préparatoires du Congrès. 


M. Charles De Bosschere. Président de la Commission organisatrice. 


Messieurs, 


Il entre dans mes fonctions de président de la commission organisatrice 
de vous faire l’historique des travaux préparatoires du Congrès. Je serai 
bref, car vous avez hâte, je crois, d'entamer la discussion du point qui 
figure à l’ordre du jouf de cette séance. Je puis d'autant mieux résumer 
en quelques mots ce que j'ai à dire, que la publication des rapports pré- 
liminaires nous a permis de vous fournir les indications principales rela- 
tives à l’origine et à la marche de nos travaux. 

Lorsque le projet d'organiser à Anvers une Exposition Universelle fut 
définitivement adopté, le Cercle Floral décida immédiatement de réunir 
un Congrès international de botanique et d’horticulture. Il jugea que 
l’occasion était on ne peut plus favorable à une réunion de botanistes et 
d’horticulteurs de tous les pays, et nous le constatons avec bonheur, 
le Cercle Floral ne s'est point trompé. Les 650 adhérents qui, non 
seulement de tous les points de l’Europe, mais aussi des deux Amé- 
riques et de l’Afrique, ont répondu à son appel, en sont-la meilleure 
preuve. | 

L'Exposition Universelle n’est pas cependant la seule cause de l’extra- 
ordinaire affluence de confrères belges et étrangers. Il en est d’autres 
que je me permettrai de vous énumérer. 

Le Cercle Floral a demandé, dès l’origine, le concours moral de la 
Société Royale de Botanique de Belgique, celui de la Chambre Syndi- 
cale des Horticulteurs belges et celui de la Fédération des Sociétés d’hor- 
ticulture, concours efficace qui lui a été accordé avec un empressement 
auquel nous sommes heureux de pouvoir rendre hommage. 

Lorsque les premières bases de notre entreprise furent établies, nous 
nous adressâmes à l’administration communale d'Anvers, laquelle, avec 
sa sollicitude habituelle, nous accorda immédiatement son patronage et 
son concours financier. L'honorable bourgmestre, M. Léopold De Wael, 
voulut bien accepter la présidence d'honneur que la commission lui 
a offerte. 

À partir de ce moment notre Commission pouvait, sans trop présumer 
de ses forces, espérer un résultat sérieux de ses travaux. Le programme 


ds 00 


fut élaboré, et le principe — mis en avant par les promoteurs du Con- 
grès, — d'inviter les hommes compétents à rédiger des rapports prélimi- 
naires sur les divers points de ce programme, fut approuvé par la 
commission. à 

C’est alors que celle-ci s’adressa au Gouvernement pour solliciter Son 
patronage. Il lui fut accordé. Le gouvernement nomma une commission 
chargée de favoriser l’entreprise des organisateurs du Congrès et nous 
fàmes heureux de voir M. le Ministre de l’agriculture accepter la pré- 
sidence d'honneur. Notre œuvre acquit bientôt une importance que 
jusque là, nous n'avions pas osé entrevoir. Les gouvernements étrangers 
furent invités à envoyer des délégués au Congrès, les rapporteurs étran- 
gers désignés par la Commission organisatrice recurent, de notre gou- 
vernement, une invitation officielle à noùs honorer de leurs travaux; le 
questionnaire que nous avions élaboré en vue d’une enquête sur la situa- 
tion des études botaniques dans les principaux ‘pays de l’Europe fut 
envoyé aux gouvernements étrangers. par voie diplomatique. Vous con- 
naissez, Messieurs, les résultats que nous avons obtenus, grâce au puis- 
sant concours du gouvernement. 

L'œuvre dela civilisation du Congo qui venait de recevoir une brillante 
consécration, attira de bonne heure notre attention. Le questionnaire 
spécial, rédigé en vue des études que les membres du Congrès pour- 
raient utilement entreprendre sur la flore et les cultures du Congo, fut 
accueilli favorablement par l'Association internationale africaine. Grâce 
à son intervention, nous avons pu réunir quelques documents qui servi- 
ront de point de départ à un travail scientifique appelé à rendre de 
sérieux services à l'œuvre due à l'initiative de Sa Majesté Léopold II. 

Le succès qui, dès le commencement, avait couronné tous les efforts 
de la commission organisatrice, engagea ses membres à demander la 
haute protection du Roi. Sa Majesté, Messieurs, a, dans maintes circon- 
stances, témoigné de son Auguste sollicitude pour toutes les œuvres qui 
peuvent contribuer à la renommée de son pays et au progrès de la 
science. Le roi daigna accèder à notre demande. 

Dès ce jour la commission redoubla de zèle et les adhésions, les rapports 
et les marques de sympathie lui arrivèrent de tous côtés. 

Permettez-moi de vous en rappeler deux : l'administration commu- 
nale de la capitale du royaume et celle de la ville des fleurs, nous ont 
fait connaître leur intention de souhaiter la bienvenue aux membres du 
Congrès lors de l’excursion que ceux-ci feraient dans leurs villes 
respectives. Faut-il vous signaler les nombreux corps savants et les 
Sociétés botaniques et horticoles qui nous ont envoyé des délégués ? Qu'il 
me suffise de constater combien vous êtes accourus nombreux à notre 
appel et quels résultats féconds pour la science et le commerce, vos 
savantes discussions nous permettent d’entrevoir. 


el 


La Commission organisatrice s’est efforcée, Messieurs, de vous réser- 
ver dans l’antique cité flamande, l’accueil le plus sympathique et le plus 
cordial. Elle a osé compter sur votre dévouement au progrès de la 
science et elle vous convie à plusieurs réunions où des questions du plus 
haut intérêt attendent de vous une solution ardemment désirée 

Ces travaux laborieux ne doivent cependant pas vous absorber com- 
plètement. Aujourd'hui, nous vous invitons à visiter l'Exposition d’hor- 
ticulture dont la magnificence mérite à tous égards, les éloges les plus 
pompeux. Le Comité exécutif de l'Exposition Universelle a bien voulu 
nous autoriser à vous faire cette invitation. 1 

A cinq heures, Messieurs, nous ferons une visite au célèbre Musée 
Plantin-Moretus, grace à la bienveillante autorisation que l'honorable 
bourgmestre s’est empressé de nous accorder. Là, je pourrai vous’ 
montrer de quelle délicate attention vous êtes l'objet de la part de notre 
Président d'honneur, Monsieur Léopold de Wael. 

Votre présence à l’Assemblée générale de demain, qui se tiendra au 
local du Jardin botanique, nous fournira une occasion propice de vous 
prouver que la Ville d'Anvers entend conquérir des titres sérieux à 
l'attention du monde savant. Là, aussi vous pourrez saluer les gloires 
de la science botanique, les illustres Linné et de Jussieu, dont les bustes 
couronnent la facade de la nouvelle orangerie. Les noms de Charles de 
l’Escluze, de Mathias de l’Obel, de François Van Sterbeeck, de Rembert 
Dodoëns et de Barthélémy Dumortier, vous rappelleront les travaux de 
ces grands botanistes. Au Musée Plantin, vous pourrez admirer les 
premiers ouvrages de botanique. — qui datent du XVI° siècle — 
les œuvres célèbres de Dodoëns, de Clusius et de l’Obel, dont la mémoire 
est chère à tout homme de science et qui furent les précurseurs de cette 
pléïade de botanistes dont le grand Linné a ouvert la marche avec tant 
d'éclat. 

Messieurs, la Commission organisatrice a cru que la séance d'ouverture 
du Congrès actuel devait se faire dans une salle dont les peintures 
racontent le glorieux passé de la cité et en présence des autorités et des 
membres du Cercle artistique et scientifique d'Anvers qui s’estiment 
heureux de vous recevoir dans leur beau Musée. | 

Messieurs, au nom de la Commission organisatrice du Congrès inter- 
national de Botanique et d'Horticulture, je vous souhaite la bienvenue et 
je vous remercie du fond du cœur de l'honneur que vous lui faites en ce 
jour. Je remercie les autorités qui nous ont si vaillamént secondé, je 
remercie tous ceux qui, à un titre quelconque, ont contribué ou contri- 
bueront dans la suite à la réussite complète de vos travaux, dont le but 
est le progrès’de la science et la consécration de la bonne amitié qui 
réunit tous les savants de quelque pays qu'ils soient. C’est sous la haute 
protection du Roi que nous entamons nos travaux, c’est sous l'égide de la 


de D 


Paix, symbolisée par le majestueux Palmier qui domine cette assemblée 
que nous plaçons le Congrès d'Anvers. 


M. le Président. —- L'ordre du jour de nos travaux appelle la discus- 
sion d’une question qui a été libellée au programme en ces termes : « La 
Flore du Congo et les essais de culture et d'acclimatation entrepris dans 
le nouvel État libre. » Cette question d’une importance si actuelle à 
déjà fait l’objet d’un certain nombre de communications très-intéressantes, 
que la Commission organisatrice a fait insérer dans les quatre fascicules 
qui ont été distribués comme documents préliminaires. Ces notes, ces 
rapports, ces renseignements émanent de quelques anonymes et de 
Messieurs Fréd. Burvenich, père, professeur à l École d’horticulture de 
‘l'État à Gand, M. le lieutenant Haneuse, M. le lieutenant Storms, 
M. le docteur Maurice Staub, professeur au séminaire royal pour les 
écoles supérieures à Buda-Pesth, M. le lieutenant adjoint d'état-major 
Avaert, M. Calewaert, fils, d'Anvers, M. P. Van den Driessche, 
agent de l'Association internationale africaine, et M. le lieutenant 
Roger. 

Les bases de la discussion sont donc nombreuses et solides. Il serait à 
désirer que quelques-uns des auteurs de l’une ou l’autre de ces notes si 
intéressantes voulussent prendre la parole pour résumer la question. (1) 


M. Wittmack. — Vous me pardonnerez si je prends la parole. Je le 
fais à l’improviste et uniquement pour que la discussion puisse commen- 
cer immédiatement. 

Je n’ai pas encore lu le dernier fascicule des Rapports préliminaires 
du Congrès que je viens de recevoir à l'instant. Je constate qu'il contient, 
à la page 377, la notice sur la végétation du Bas-Congo, de Banana à 
Stanley-Pool, rédigée par M. Münkemeyer, un des quatre jeunes gens 
que j'avais choisis, à la demande de l'Association internationale du 
Congo, pour entreprendre en Afrique des cultures agricoles et horticoles. 
Il n’a pu se rendre ici par suite d'un empêchement, mais il a donné 
dernièrement à la Société d’horticulture de Berlin, une conférence dans 
laquelle il a très bien décrit la végétation du Bas-Congo. 

Il nous a rappelé que, quand le voyageur arrive dans ce pays assez 
triste, il ne conçoit pas de grandes espérances parce que de grands 
marais de Manguiers et de Phænix spinosa s'étendent sur les bords; les 
rives sont sablonneuses et couvertes de Cypéracées, de Graminées et de 
Papilionacées raides. 

Les marais s'étendent très-loin, mais là où ils finissent, l'aspect de la 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » les mémoires et les notes sur cette 
question : pp. 269-328 et 377-387. — 


2) — 


nature change, le terrain devient meilleur. Le sol se compose d’argile, 
ce qui convient mieux pour la culture, mais il a le désagrément de 
sècher très vite. 

Dans le Congo inférieur les plantes qui viennent très bien sont d’abord 
les Bananiers et le Manioc qui donnent une bonne nourriture. 

Le Manioc croît si bien qu’il suffit de couper une branche du tronc et 
de la jeter en terre pour la voir pousser bientôt après; elle y prend 
racine. 

Le Manioc se trouve même dans les contrées les plus éloignées de la 
mer, dans l'Ouest et dans l'Est de l'Afrique. On pourrait presque croire 
que c’est une plante du pays, mais elle a été évidemment importée de 
l'Amérique centrale où les voyageurs l’ont trouvée. 

Sur les pentes des collines viennent les Adansonia ou Baobab, arbres 
curieux, mais qui ont un bois très léger et dont les fruits ne valent pas 
grand’ chose. : 

D’après M. Münkemeyer, ce qu’il importe le plus d’avoir au Congo, 
ce sont des légumes. On ne saurait se faire une idée des services qu’ils 
rendent dans les pays chauds. 

Nous qui en faisons une consommation journalière, nous n’y prétons 
pas grande attention, mais là où l’on ne consomme ordinairement que 
des viandes de conserve — quand on en à — car il arrive qu’on ne mange 
pas de viande du tout — si l’on manque de légumes, l'estomac européen 
se débilite tout-à-fait, les forces de l’homme s’en vont et il lui est bien 
difficile de vivre. On a d’abord éprouvé beaucoup de difficultés à obtenir 
des légumes au Congo. 

M. le professeur Schweinfurth a reproché aux Portugais d’avoir passé 
200 ans dans ces contrées sans réussir à obtenir des radis (ÆZilarité). Ces 
reproches ne seront plus fondés aujourd’hui, car on a réussi la culture 
des radis, des choux, des betteraves, des raves, etc.. Je vois, en jetant 
un coup d'œil sur le rapport de M. Münkemeyer qui vient d’être 
imprimé, un passage où il dit que les radis, trois sémaines après qu’ils 
sont semés donnent un produit excellent. D'après les notes insérées dans 
le même fascicule vous pouvez voir que la laitue croît très bien dans ces 
pays, de même que les oignons et les haricots. 

Les pois viennent moins bien, ils ne donnent qu’une demi-récolte, 
mais on obtient de très bons résultats de la plantation des concombres, 
des melons et des tomates. 

La chose essentielle pour obtenir des légumes, c’est de créer de l’ombre 
d’abord. Sans cela, tout périt en quelques jours par suite de l’excessive 
chaleur du soleil. 

Pour avoir de l’ombre, il convient de couvrir les champs de légumes 
au moyen de châssis. On pourrait en fabriquer avec des branches d'arbres 
et d’arbrisseaux. Mais cela n’est pas pratique parce que les Termites se 


—"pA 


rendent sous ces branches et détruisent la récolte. On évite cet inconvé- 
nient en fabricant de bons châssis de bois. 

Les terrains du Haut-Congo sont beaucoup plus favorables aux 
plantations que ceux du Bas-Congo, mais ce qui serait absolument 
nécessaire, d’après M. Münkemeyer, pour y créer de grandes cultures, 
ce serait un chemin de fer .qui relierait le Congo inférieur au Congo 
supérieur, où le terrain et le climat sont beaucoup meilleurs. Malheu- 
reusement on ne peut pas vendre les marchandises du Haut-Congo 
parce qu'il est trop difficile de les transporter au Congo inférieur. 

Maintenant on doit employer à cette besogne des nègres qui ne portent 
pas plus de 30 kilos chacun. On reconnaîtra que ce moyen de transport 
coùterait un peu cher. | 


M. le Président. — Nous remercions M. Wittmack d’avoir commencé 
la discussion sur cet intéressant sujet. 


M. Baiïllon. — L'œuvre civilisatrice entreprise au Congo par la 
Belgique, est appelée à une grande renommée. C’est une conquête 
pacifique à laquelle la science ne saurait marchander son concours, mais 
qui ne peut aboutir à de grands et utiles résultats que si elle est conduite 
conformément aux principes scientifiques. 

Ce qui n’accompagne pas toujours les grandes et nobles actions, 
et que, cependant, votre généreuse nation est appelée à récolter, ce sont 
les avantages d’une entreprise, profitable en même temps qu’elle sera 
civilisatrice. 

Permettez donc à un des botanistes de l’Europe qui se sont le plus 
livrés à l'étude de la Flore de l’Afrique tropicale, de rechercher ici ce 
que le règne végétal peut vous offrir d'utile et de profitable dans vos 
établissements du Congo. 

Je n’ai pas, bien entendu, à m'arrêter longuement aux végétaux qui 
sont connus comme formant le fond de la végétation spontanée et des 
cultures de semblables pays. Le nom de ces plantes est dans toutes les 
bouches. 

Je n’ai pas besoin de vous dire qu’il y aura, pour votre commerce et 
celui du monde entier, un intérêt de premier ordre à produire dans les 
régions que vous allez coloniser, les plantes à matières colorantes, les 
plantes tinctoriales telles que les Indigos, les végétaux textiles tels que 
les Cotons et les Jutes. Mais vous aurez deux problèmes à résoudre : le 
choix des meilleurs espèces, variétés et races à choisir; et le choix des 
méthodes à appliquer à leur culture. 

Pour les essences tinctoriales telles que les Indigotiers, vous aurez à 
juger de la valeur comparative des /ndigofera tincloria, Anil, argentea 
et de quelques autres espèces qui croissent au Congo ou pourraient y 
être introduites. Une plante assez voisine des Indigotiers et qui donne 


MODE EE 


une matiere tinctoriale bleue dans certains districts brésiliens, l’Æscky- 
nomene sensiliva, devra être essayée dans ces régions. Il en sera de même 
de certaines espèces du genre Z'ournesolia ou Crozophora, qui végéteront 
parfaitement au Congo et qui pourront donner des produits analogues 
au Tournesol en pains que nous voyons préparer au Grand-Gallargues, 
dans la région méditerranéenne. Ce qu'il y a de plus probable, c’est 
qu’on devra de préférence s’en tenir, dans bien des cas, aux espèces que 
l'expérience et la tradition auront démontré aux indigènes être les plus 
productives. Mais si l’on fait alors intervenir les procédés perfectionnés 
de culture que nous possédons en Europe, il est aisé de prévoir qu’on 
verra succéder aux médiocres profits que s’assurent péniblement des 
populations encore ignorantes, des résultats véritablement colossaux. 

Les mêmes principes de sélection s'appliquent aux espèces de Coton- 
niers dont il faudra favoriser la culture. Les variétés à longue soie 
devront remplacer celles dont le brin est défectueux comme longueur, 
souplesse et solidité. Une expérimentation méthodique vous dira s’il 
n’y a pas lieu de substituer partout aux Gossypium herbaceum, arboreum, 
et anomalum, souvent cultivés dans ces contrées, les bonnes variétés de 
G. Larbadense qui fournissent aujourd'hui les bonnes sortes de cotons 
américains et qui sont d’ailleurs cultivées avec succès sur plusieurs 
points tropicaux du continent américain. 

Les peuplades de ces régions posséedent plusieurs autres textiles fournis, 
comme le coton, par des Malvacées; il conviendra de les populariser au 
Congo. L’Évonoué des Gabonais est dans ce cas : c'est l'Aibiscus tiliaceus 
ou Peritium tiliaceum, dont l'écorce, macérée dans l’eau sert à fabriquer 
de très bonnes cordes, « que l’on pourrait, dit M" Griffon-de-Bellay, 
confondre avec les cordes de chanvre travaillées en Europe ». Tout à 
côté de ce groupe se trouvent les Tiliacées auxquelles appartiennent les 
plantes à Jutes, les Corchorus. Dans presque toute l'Afrique tropicale, les 
C. olitorius, trilocularis, acutangulus, tridens, etc. sont de mauvaises 
herbes dont on peut régulariser la mise en exploitation, après que l’expé- 
rience se sera prononcée sur la valeur relative de ces espèces considérées 
comme textiles. . 

Ce que je viens de dire des matières tinctoriales et textiles, je puis le 
dire également des végétaux à matières grasses. La culture des Arachides 
et des Palmiers à huile, qui existe dans toute l'Afrique chaude, devra 
être favorisée et perfectionnée au Congo. Le Sésame (Sesamum indicum) 
y pourra être, avant peu, exploité sur une grande échelle : non pas 
seulement les races peu productives qui sont connues dans les cultures 
africaines, mais ces belles races ou variétés japonaises qui ont déja été 
essayées, par quelques curieux, dans le midi de l’Europe et qui doivent 
donner des produits plus beaux et plus abondants. Quand les graines des 
Sésames qui, comme celles des Arachis, couvrent à certains jours les 


HD 22 


quais de débarquement du port de Marseille et de tant d’autres grands 
centres d'introduction, auront pu être soumises à des procédés appropriés 
de décortication, elles enrichiront au centuple les populations européennes. 
On sait que l'huile de Sésame est douce, agréable, qu’elle rancit 
difficilement, et qu’elle peut supporter la comparaison avec les meilleures 
huiles d'olives; on sait qu’au Japon, où l’on n’usait ni de beurre ni de 
graisse, on n’employait, au temps de Thunberg, que l'huile de Sésame 
aux usages culinaires. 

Les semences des Ricins représentent aussi une source considérable 
de matière huileuse. Un regard jeté sur la précieuse collection des 
colonies portugaises, actuellement disposée dans le local de l'Exposition 
internationale d'Anvers, nous fait comprendre l’infinie variété des sortes 
commerciales de ces graines, leur multiple utilité, la facilité et l’abon- 
dance avec lesquelles elles croîssent dans les régions voisines du Congo, 
soit sauvages, soit à l’état de culture. 

Une autre plante du groupe des Malvacées joue un rôle bien curieux 
dans certaines portions du Congo; il sera facile de l’introduire, si elle n'y 
existe déjà, et de la multiplier dans la région dont vous entreprenez la 
conquête scientifique et commerciale. Je veux parler du Cola. La Noix 
de Cola, de Gourou, de Ngourow, encore appelée Noix de Cacao et Café 
du Soudan est la graine d’une Sterculiée, le Cola acuminata (Sterculia 
acuminata. — S. nitida. — #. verticillata), célèbre dans l'Afrique 
tropicale occidentale comme masticatoire, est dans ces régions l’objet d’un 
commerce considérable. Les Mahométans le regardent comme un fruit 
divin, apporté par le Prophète; aussi est-il exorbitamment cher dans les 
contrées un peu éloignées de celles où croit cet arbre. Il y a deux variétés 
de Cola : l’une à fruits rouges, et l’autre à fruits blancs; l’une et l’autre 
passent pour éloigner le sommeil, mais la dernière est réputée posséder 
cette proprieté à un plus haut degré. Il n’y a rien là de bien étonnant, 
depuis que M. Attfield et bien d’autres après lui, ont trouvé, dans la 
Noix de Cola, la théine dont M. Daniell avait soupçonné la présence. 
Ces graines sont recherchées sur toute la côte occidentale comme aphrodi- 
siaques, au moins comme antihypnotiques, ou employées comme antidys- 
sentériques. Il paraît que le voyageur peut rendre potables les eaux les 
plus saumâtres qu’il rencontre en y râpant une petite quantité de cette 
semence. La culture de cette plante ne doit pas être difficile au Congo; 
les nègres en font si grand cas qu'ils l’ont transportée avec eux jusque 
dans l'Amérique centrale ; c'est là qu’elle a été décrite comme type d’un 
nouveau genre de Sterculiées, sous le nom de Siphoniopsis monoicu. 

Un autre bel arbre de ces régions, également des plus ‘utiles, sera le 
fameux Baobab, l'Adansonia digitata, le géant de la végétation africaine 
tropicale. Son fruit renferme, en dehors des graines, une pulpe acidulée, 
rafraichissante, ultérieurement desséchée et farineuse, qui s’expédiait 


ROC Fes 


jadis en Europe, sous le nom de Terre de Lemnos. C'était alors, en Grêce 
eten Egypte, comme c'est aujourd'hui parmi les peuplades nègres de 
l'Afrique, un remède réputé, sous le nom de Douï, contre les diarrhées, 
les dyssanteries, les hémophtysies, les fièvres putrides, etc. La portion 
extérieure du fruit, vulgairement nommé Pain de linge, est une sorte 
d’écorce ligneuse, de farine très-variable, qui sert, comme les Calebasses, 
de vase et de récipient. Réduite en cendres, elle fournit une lessive 
alcaline qui sert à saponifier les huiles rances de palme. Les feuilles et 
les graines torréfiées entrent, en Nubie, dans la préparation d’une 
décoction anti-dyssentérique. 

La famille des Euphorbiacées sera riche, dans ces pays, en espèces 
utiles, soit ligneuses, soit herbacées. Les Maniocs, qui passent pour être 
d’origine américaine, ont pénétré parmi tous les peuples qui habitent les 
parties tropicales de l’Ancien-Monde. La richesse de leurs racines en 
matière amylacée, en tapioca, en fait un objet de consommation de 
premier ordre ; et l’on sait que, dans les pays chauds, le moindre morceau 
de tige, semé à la facon d’une graine, reproduit très-promptement une 
plante qui se charge bientôt de racines adventives tubéreuses, réservoirs 
des substances féculentes. 

Nous avons parlé des huiles extraites des graines de divers Ricins. 
L'Afrique chaude est encore un des lieux de production de l’huile de 
Grand Pignon, d'Inde ou de Barbarie, c'est-à-dire du Jatropha Curcas 
ou Grand-Médicinier, aussi recherchée par la médecine que par l’in- 
dustrie, et dont de nombreux spécimens se voient dans l'exposition 
africaine des colonies portugaises et françaises. 

Il y a certainement beaucoup de Vignes au Congo, et l’on sait quel 
bruit il à été fait, il y a quelques années, autour des Vignes du Soudan 
dont on espérait pouvoir introduire la culture en Europe. Mais ces 
Vignes n'auraient pu vraisemblablement supporter notre climat, et il n’a 
pas été prouvé que leurs fruits pussent servir à faire du vin. C’est ce qui 
arrivera pour la plupart des espèces africaines qui se trouvent au Congo 
ou qui pourraient y être introduites. Mais il y aura lieu d'examiner si 
quelques espèces indigènes n'ont pas un fruit susceptible d’être exploité 
pour la fabrication du vin, et si lé climat s'oppose à ce que certaines 
sortes, d'origine européenne ou américaine, soient introduites et 
cultivées. 

Ainsi que l’a très-bien dit tout à l’heure M. le Professeur Wittmack, 
dans des localités semblables à celles qu’on veut coloniser, il faut créer 
avant tout des abris pour les cultures herbacées, potagères, notamment 
pour nos légumes européens. Ces abris doivent être, autant que possible, 
naturels. Il faut créer à bref délai des plantations arborescentes. Mais 
les arbres ou arbustes doivent être choisis parmi ceux qui ont fait leurs 
preuves au point de vue de leur parfait développement dans les pays 


tropicaux. Heureux si, en même temps, ils peuvent donner des produits 
utiles, assurer à la consommation des bois précieux, des fruits alimen- 
taires en grand nombre! Les Manguiers, de la famille des Térébinthacées, 
sont précisément dans ce cas: ce sont des arbres fruitiers dont les 
variétés sont innombrables, comme celles de nos poiriers et pommiers 
par exemple. Leurs fruits sont souvent délicieux ; et l’on sait que 
certains d’entre eux sont tellement recherchés, que l'imagination des 
peuples tropicaux a bâti là-dessus des légendes, analogues à celles qui 
se trouvent à l’origine de bien des religions, au sujet du fruit qui aurait 
tenté les premiers parents de l’humanité. Il ne faudra introduire, soit de 
l'Inde soit des îles Mascareignes, que les meilleures variétés de Mangues. 
Elles peuvent être, avant peu, pour l'Europe, principalement à l’état de 
conserves, un objet d'importation analogue à ceux que l'Amérique a 
commencé à nous envoyer et dont il est probable qu’elle inondera 
prochainement nos marchés. On peut en dire autant au sujet des Ananas 
et de bien d’autres fruits que le voyage n’altérera pas. C’est à l'Europe 
à songer qu’elle pourrait tenter un essai de concurrence très sérieux, quand 
les cultures coloniales seront bien organisées dans les pays tropicaux, 
quand ceux-ci pourront produire à bon marché des fruits délicieux, 
abondants et susceptibles d’être préparés pour la consommation de facons 
très diverses. | 

Les Corossols, fruits des Anona sont dans le même cas que les Ananas. 
Ceux que l’on nomme Cœur de bœuf, Cachiman épineux, ete. sont consi- 
dérés par les habitants des tropiques comme surpassant par leur saveur 
tous les autres. L'Algérie commence à nous en importer quelques-uns ; le 
Congo pourra nous en procurer bien davantage. À la même famille appar-. 
tient une épice dont Clusius vantait déjà les qualités aromatiques et 
stimulantes. C’est le Poivre d'Ethiopie ou Poivre des nègres de Sérapion, 
fruit que les noirs ont aussi introduit dans le Nouveau-monde ; il est 
produit par un Xylopia qui croit très bien dans toute l’Afrique tropicale. 
Le Muscadier de Calabash, Calabash Nutmey des colons anglais, est la 
graine d’une autre Anonacée aromatique : le Honodora Myristica. Celui- 
ci a également suivi les nègres aux Antilles où il fleurit et fructifie; 1l 
fructifiera très-bien au Congo où il est bien possible qu'il existe déjà. 

J'arrive à des produits plus précieux encore. La culture des magnifi- 
ques plantes de la famille des Guttifères ou Clusiacées, rencontrera les 
conditions les meilleures dans vos établissements africains. Les plus 
importantes seront celles dont le latex est de couleur jaune et se solidifie, 
après son extraction, en une masse solide qui constitue la Gomme-gutte. 
Il y a, dans les diverses régions des tropiques, beaucoup de bons Guttiers 
qui n'ont pas encore été exploités. Leur suc laiteux, si actif comme 
purgatif-drastique, si utile, principalement, dans les arts, sera peut-être 
de bonne qualité dans les Garcinia ou autres genres voisins indigènes. 


= 00e 


En tous cas, les meilleurs Garcinia connus, si abondants en Annam et 
au Cambodge, comme le G. Æanburgi, l’une des grandes richesses de 
l’Indo-Chine, pourront être transportés au Congo; elles y trouveront 
des conditions climatériques analogues à celles de leur pays d’origine. Il 
y à là une source possible de revenus considérables. Il y a des arbres 
fruitiers remarquables dans cette famille ; tel est le Mangoustan (Garcinia 
Mangostana). Ses fruits coriaces renferment quelques graines en forme 
de quartiers d'orange, dont toute la couche superficielle constitue une 
pulpe d’une saveur exquise et parfumée, la plus délicieuse, dit-on, qu’on 
puisse savourer. Cette pulpe rafraichissante sera d’un grand secours aux 
Européens contre les ardeurs d’un climat tropical. 

L’Hazigne de Madagascar, dont l'introduction sera certainement facile, 
est aussi une Clusiacée, le Symphonia (Chrysopia) fasciculala. Son bois 
est de telle qualité, que sa tige élevée et droite constitue les plus beaux 
mats de navire. Son latex solidifié forme une sorte de gomme-résine que 
les indigènes emploient pour l'éclairage et pour une foule d’usages 
médicaux. Ils s’en servent à l’état de pureté, ou bien ils la mélangent, 
pour la préparation de certains onguents, avec la graisse produite en 
abondance par les semences. Cette graisse est, d’après les recherches de 
mon collègue, le professeur J: Regnauld, extrêmement analogue à 
certaines matières grasses d’origine animale; elle peut servir à divers 
usages culinaires. On comprend toute l'importance d’un pareil arbre pour 
le Congo où pourra aussi se cultiver un autre arbre de la même famille, 
l'Abricotier de Saint-Domingue, remarquable par les qualités de son 
fruit : c’est le Mammea americana, déjà cultivé dans plusieurs pays 
chauds de l’Ancien continent. 

Il y a un immense groupe de plantes dont on ne saurait trop recom- 
mander l'importation et la culture au Congo; c’est celui des Rubiacées, 
dont les écorces, souvent riches en matières tanniques, amères, jouent 
un grand rôle comme toniques, stomachiques, fébrifuges et sont, par là 
même, d’un grand secours dans les régions où peuvent régner les fièvres 
et autres accidents paludéens et où le tube digestif des Européens a 
souvent besoin d’être tonifié, débilité qu'il est par les conditions climaté- 
riques. C’est à cette famille qu’appartiennent en première ligne les 
Quinquinas. Introduits dès aujourd'hui à Angola, ils pourront peut-être 
donner des produits satisfaisants là où se trouveront des flancs de 
collines assez élevés pour présenter la nuit une certaine dose de fraicheur 
et d'humidité. Quoique rien jusqu'ici ne vaille les Quinquinas comme 
fébrifuge, il y a bien d'autres Rubiacées en Afrique qui pourront fournir 
des écorces suflisamment toniques et astringentes : on a cité plusieurs 
Zæora, Morinda, Guettarda, les Antirhæa de Bourbon et de Maurice 
qui, sous le nom de Bois de Lostena, servent au traitement des plaies, 
des ulcères et des abcès, les Danais qui, aux Mascareignes, portent le 


— 30 — 


nom de Bois-à-dartres, un grand nombre de Gardenia à écorce riche en 
tannin et le Sarcocephalus esculentus de Sierra-Leone,-qui a une écorce 
astringente, fébrifuge et des fruits considérés comme comestibles. Je ne 
parle pas ici des Caféiers, parce qu'il n’est pas probable qu'on ne puisse 
tenter avec succès la culture de ces arbustes, notamment celle des Cofea 
arabica et liberica, au moins dans certaines portions de la colonie; il 
faut, à cet égard, faire des essais nombreux et persévérants. 

A côté des Quinquinas, il y a des médicaments amers qui jouent un 
grand rôle en médecine et qui sont d’origine américaine. Ce sont des 
Rutacées du groupe des Quassiées ou Simaroubées, dont l’un est le 
Picræna excelsa, l'autre le Quassia amara, l'arbuste au Bois amer de 
Surinam. Or, chose remarquable, nous venons de rencontrer parmi les 
plantes de notre colonie du Gabon, c'est-à-dire dans des conditions de 
milieu très-analogues à celles qui sont réunies au Congo, un véritable 
Quassia, que nous avons nommé Quassia africana, et qui, pour l’amer- 
tume franche et intense, ne le cède en rien au Quassia amara du 
Nouveau-monde. 

Dans une autre division de la même famille, nous trouvons un autre 
arbre intéressant dont les Gabonais nous ont appris l'usage : c’est leur 
Oba, dont le nom scientifique est Zrvingia gabonensis et qui a été aussi 
appelé Mangifera gabonensis, attendu que c’est le Manguier sauvage de 
nos colons. Il fleurit plusieurs fois dans l’année et donne presque con- 
stamment des fruits dont la graine fournit le Pain et le Beurre de Dika. 
Les indigènes mangent le sarcocarpe pulpeux ; mais sa saveur térébin- 
thacée, analogue à celle des Mangues, est bien plus prononcée encore, 
de sorte que les Européens n’apprécient que fort peu un semblable . 
aliment. La graine seule sert à préparer le Pika. On brise les noyaux; 
les semences sont broyées dans un mortier, puis jetées dans un chaudron 
préalablement garni à l’intérieur de feuilles de Bananier; sous l'influence 
d’un feu lent et doux, la fusion se produit; puis la substance refroidie 
se prend en une masse tachetée de brun et de blanc. Les parties brunes 
constituent une sorte de cacao qui peut servir, étant sucré et aromatisé, 
à préparer ce que M. P. Rorke a nommé le CAocolat des pauvres. Sa 
couleur et sa consistance naturelles sont bien celles du Cacao; mais il 
n’en a pas le parfum. Les taches blanches représentent la matière grasse, 
le Beurre de Dika, assez analogue aussi à celui du Cacao. Il y a long- 
temps que MM. Gellé, frères, à Paris, Pilastre, à Rouen, et Mazurien, au 
Hâvre, ont proposé d'employer cette matière grasse à plusieurs usages 
industriels ; on en a préparé une substance analogue à la stéarine, des 
parfumeries fines, des cérats, des savons à base de soude. La substance 
brune a déjà servi, dit-on, à falsifier les chocolats. Les indigènes 
emploient d’ailleurs le Pain de Dika comme aliment; ils l’associent râpé 
à différents mets, principalement aux bananes cuites. Mais, peu délicats, 


CHE HE 


à ce qu'il paraït, sur les saveurs, ils se consomment guère qu’un Dika 
dont le goût est celui de la fumée; car les insectes en sont très-friands, 
et afin de prémunir les pains contre leurs attaques, on a l'habitude de 
les suspendre pendant plusieurs mois en dedans des habitations où ils 
recoivent la fumée de tout le feu qui se fait dans l’intérieur de la case. 
On voit donc qu’il faudrait appliquer à la préparation et à la conserva- 
tion du ZDika les procédés perfectionnés qui sont à la portée des 
européens. 

Au point de vue industriel, il est probablement plus important encore 
à l'heure qu'il est, d'introduire et de cultiver un certain nombre de lianes 
appartenant à la famille des Apocynacées, celle que représentent chez 
nous les Pervenches et le Laurier- Rose. Il est probable que, dans un 
avenir prochain, la culture de ces plantes sarmenteuses constituera au 
Congo la principale source de revenus commerciaux. Le suc propre et 
laiteux des Vahea ou Zandolfia et d’une trentaine d’autres plantes 
voisines, solidifié et condensé, représente la majeure partie des caout- 
choucs fournis par l’Afrique tropicale et les îles adjacentes. Il y en a 
beaucoup à Madagascar. De nombreux Vahea ont été introduits en 
Angleterre pour y être multipliés et de là envoyés aux divers centres 
horticoles des colonies tropicales des deux mondes; c’est un exemple à 
imiter dans toute nouvelle installation coloniale. 

Plus importante peut-être encore se présente de nous jours la question 
des Œutta percha. Ce sont des sucs propres ou latex d’arbres appartenant 
à la famille des Sapotacées. La première espèce de ce groupe qu’on ait 
connue comme produisant de la gwléa, était notre Palaquium Gutta, bel 

‘arbre de Singapour, qui à, plus anciennement, recu les noms d’Zsonandra 
et de Dichopsis Gutta. Rapidement, les riches forêts de Palaquium ont 
été détruites par une exploitation peu méthodique et mal raisonnée, et 
c'est grâce à une protection sévère que le gouvernement anglais doit la 
conservation d’un petit nombre d'individus destinés à assurer la 
reproduction de l’espèce. Mais à. Java, à Bornéo et ailleurs, d’autres 
espèces de Palaguium, quelques unes très-riches en gutta de première 
qualité, ont pu être substituées à la première espèce connue. On s’est 
aussi adressé aux arbres des autres genres de la famille des Sapotacées. 
Des Zsonandra, Payena, Siderozylon, Chrysophyllum, Sapota, Mimusops, 
Keratophorus, Imbricaria, Dipholis, Cacosmanthus, ete., au nombre de 
plus de cinquante, fournissent aujourd’hui, tant dans l’Inde, la Malaisie, 
la Sonde, que dans les régions tropicales américaines, des gutta de valeur 
diverse, dont le commerce et l’industrie s'emparent avec avidité, sans 
pouvoir, le plus souvent, parvenir à faire face aux demandes. Il n’y à 
guère de gouvernement européen qui, dans ces dernières années, n’ait 
institué des missions scientifiques et commerciales pour la recherche et 
l'exploitation des Sapotacées à gutta. Or, l'Afrique tropicale possède un 


ER, de 


certain nombre de ces plantes qui n’ont pas encore été utilisées. Elle sera 
un terrain excellent pour la culture des espèces asiatiques, océaniennes 
et américaines qu'on y voudra introduire. Elles formeront de magnifiques 
forêts et dans leur jeune âge, elles fourniront aux cultures herbacées les 
abris nécessaires dont il était question tout-à-l’heure. À joutez à celaque 
la plupart des bois de Sapotacées sont de première valeur pour l'ébénis- 
terie etles constructions. Les superbes Bois-de-naltle des îles orientales 
africaines sont produits par des arbres de cette famille, des Mimusops, 
des Zmbricaria, des Labourdonaisia, etce., et nous savons déjà que plusieurs 
de ces arbres portent des fruits excellents. Il y a aussi des Sapotacées 
très-riches en matière grasse, en beurres végétaux. La plus remarquable 
est le Butyrospermum Parkii, encore appelé à tort Bassia butyracea, qui 
forme d’immences forêts en Afrique et qui fournit au voyageur une 
matière grasse tout à fait propre à la préparation de sa cuisine de 
campement. Il est singulier que des échantillons complets de cet arbre 
arrivent si rarement en Europe, que si rarement de bonnes graines nous 
soient apportées pour propager ailleurs ce précieux végétal dont le bois 
est aussi, dit-on, de première qualité. 

C’est à la famille voisine des Ebénacées qu'appartiennent les bois les 
plus chers, les plus durs, les plus foncés de ces régions. Le commerce 
des bois d’ébène se fait, dans l'Afrique tropicale, sur une échelle consi- 
dérable. Et cependant nous ignorons presque toujours à quelle espèce 
d'Ébénier (Diospyros) appartient telle où telle sorte de bois à laquelle 
l’industrie accorde une valeur variable. L'étude de ces espèces, en même 
temps qu'elle permettra aux botanistes de les bien distinguer les unes des 
autres, amènera aussi les colons à n’introduire et à propager "que celles 
qui fournissent les meilleurs produits: 

Je ne parlerai pas ici des produits des Palmiers, notamment des huiles 
de palme dont l’Afrique envoie de si énormes quantités aux deux 
mondes; ni des cannes à sucre, ni des Ignames, ni des innombrables 
Aroïdées plus ou moins analogues au ZJ'aro des Polynésiens, ni des 
Tacca dont la portion souterraine est aussi une source abondante 
d'aliments amylacés, ni des arbres à fruits alimentaires féculents du 
genre Arlocarpus, ni des Patates douces, de la famille des Convol- 
vulacées, ni des innombrables produits des Figuiers : latex, fruits, 
gommes-laques, ni des Légumineuses alimentaires, ni des gommes, des 
bois, des cachous que peuvent fournir un grand nombre des arbres de 
cette vaste famille ; ni même des Graminées alimentaires, Sorghos, 
Millets, Maïs, Riz, etc. dont les rendements devront être énormes, 
relativement à ce qu’ils sont aujourd’hui, alors que ces céréales seront 
soumises aux procédés de la culture européenne. 

Mais parmi les Monocotylédones, il y aura à répandre la culture 
de certaines Liliacées utiles dont on peut déjà prévoir le rendement : les 


— 33 — 


Aloës, exploités comme plantes à produits médicinaux, ou bien cultivés 
pour leurs fleurs, comme il arrive dans certaines régions du pays d'An- 
gola, où le suc épuisé des fleurs sert à former des gâteaux alimentaires, 
employés aux usages culinaires, riches en tous cas en matière sucrée. 

Les Bananiers, si prodigues en fruits employés comme légume ou 
comme objet de dessert sont déjà nombreux. dans l'Afrique tropicale. Outre 
les espèces employées comme l’Ærsete dont Bruce faisait déjà ressortir les 
usages multiples pour les populations africaines, il est possible de multi- 
plier les espèces et les variétés riches en fécule ou en matière sucrée et qui 
suffisent presque à l'alimentation de certaines peuplades des pays chauds. 

L'Afrique tropicale est en même temps la patrie par excellence des 
plantes à épices aromatiques du groupe des Gingembres ou Zingibéra- 
cées. La culture du Zingiber oficinale peut facilement se transporter au 
Congo, de même que celle des nombreux Amomum et Alpinia qui don- 
nent des Cardamomes et des Galangas, ces épices et ces médicaments que 
votre Clusius connaissait déjà et dont il a donné des descriptions et des 
figures si remarquables pour l’époque. L’Arrow-root, extrait du rhi- 
zôme alimentaire du Maranta arundinacea, sera certainement d’une 
exploitation facile, de même que ses succédanés : le Toulema ou Tolo- 
mane et le Tikor ou Tikhar. Ce dernier donne une fécule. Le Curcuma 
longa est encore une Zingibéracée à cultiver. L'Alpinia oficinarum, 
l'herbe au Petit alanga, d'origine chinoise, est déjà introduite dans nos 
serres et sera facilement transportée en Afrique. L'Ælellaria repens, 
d’origine asiatique, de même que l’Amomum xanthioides, l'A. aromati- 
cum, l'A. maximum, croitront aussi bien au Congo que la Grande Mani- 
guette (A. Melegaeta) ou la plante aux Graines de Paradis (A. Granum 
Pañradisae) qui sont indigènes dans l'Afrique tropicale. 

En somme, dirigée suivant les principes de la science contemporaine, 
l’entreprise du Congo réserve à la Belgique autant de profit que d’hon- 
neur. Marchez! C'est au nom de la science qu’un de vos hôtes, reconnais- 
sant de l’accueil qui lui est fait en ce jour, vous convie à aller de l’avant . 
pour le plus grand intérêt de votre pays, de l'Europe civilisatrice, du 
monde entier, de l'humanité! (Applaudissements prolongés.) 


M. le Président. Je suis heureux que vos applaudissements ratifient 
l’impression si favorable que nous a faite l’intéressante communication 
de M. Baiïllôn. On ne pourrait mettre avec une meilleure grâce les 
enseignements de la science la plus élevée au service de la pratique, ni 
mieux faire ressortir tout ce qui peut .assurer l’avenir du Congo. 
(Applaudissements.) 

Plusieurs orateurs ont encore demandé la parole sur la question du 

Congo, mais, quelqu'intéressant que soit le sujet, je crois qu'il convient 
d'en remettre la suite à la séance de demain. (Adhésion) 

— La séance est levée à midi et demi. 


© 


qe Assemblée générale du 3 août 1885. 


Présidence de MM. É». Morrew, professeur à l'Université de Liège, et 
H. BAILLON, professeur à la Faculté de médecine de Paris. 
MM. É. Marcrar et Ëm. Ronicas, secrétaires du Congrès, remplissent 
les fonctions de secrétaires. 


Sommaire : Question du programme : La flore et les essais de culture du 
Congo, par MM. J. E. PLANCHON, J. TRIANA. CH. DE BoSsCHERE, J. PALACKY, 
M. Cornu, ÉD. MoRrREN, H. BAILLON, J. H. VAN HuLLE. — X/11"° question 
du programme : Avantages de l’unification de l’échellle thermométrique, par 
M. ÉM. RoDiGas. — V1" question du programme : Faire ressortir la meilleure 
méthode d’enseignement théorique et pratique de la botanique dans les écoles 
d’horticulture et d'agriculture. Développer ce qui doit faire partie de cet enseigne- 
ment, par J. NieprAsCHK. — ZX"° question du programme : Quelles sont les 
mesures à prendre pour vulgariser l’enseignement de l’horticulture, spécialement 
dans les centres ruraux? Quels sont les moyens à employer pour propager la 
culture des plantes dans les classes ouvrières? par MM. É. BENARY, J. PALACKY 
et Ém. RoDIGAS. 


La séance est ouverte à 10 heures. 


M. Cx. DE BosscHERE, secrétaire-général, procède au dépouillement de la 
volumineuse correspondance à laquelle l’organisation du Congrès a donné 
‘ naissance, et fait connaître les publications dont il est fait hommage à 
cette Assemblée. 


M. le Président. — Hier, la séance a été interrompue au moment où 
la question du Congo présentait le plus grand intérêt, grace à la commu- 
nication de M. Baillon. Nous allons continuer à traiter le même sujet. 

Je donne la parole à M. Planchon. 


M. Planchon.— Dans la très intéressante communication de M. Baillon, 


pr 


il a été question incidemment des vignes. C’est un sujet à l’ordre du jour, 
surtout les vignes du Soudan, sujet dont je me suis occupé depuis trois 
ans d’une manière spéciale et sur lequel je vous demande la permission 
d'appeler quelque temps votre attention. 

Les vignes des pays tropicaux ont été confondues avec les vignes des 
pays tempérés et elles ont été désignées sous le nom général de Witis. 
On a voulu les faire entrer presque toutes dans un seul genre. Je ne veux 
pas traiter la question botanique au long, mais je vous dirai seulement 
que c’est sur des vues très incomplètes du sujet qu’on était arrivé à méler 
les choses les plus disparates et à faire un soi disant genre Wüitis que l’on a 
subdivisé aujourd’hui d’après les feuilles simples,découpées ou composées. 
Cette division artificielle est commode dans certains cas, mais elle 
s'applique mal à des plantes aussi variables de feuillage que le sont les 
Ampélidées. 

Le genre Wüitis, tel que je le conçois, ne comprend que des espèces de 
la zône tempérée de l'hémisphère Nord. Il est parfaitement défini par ses 
fleurs polygames dioïques, sa corolle pentameère en capuchon, ses graines 
pyriformes avec deux fossettes centrales peu étendues. Ce sont les seules 
vignes qui donnent des vins de conserve, parce que l’alcool s’y produit en 
assez forte proportion. Un petit nombre d’espèces seulement entre dans la 
zône tropicale. | 

J'ai donné le nom d’Ampelocissus à des vignes tropicales dont l’aspect 
rappelle le plus souvent les vraies vignes, mais qui s’en distinguent par 
des fleurs toujours polygames monoïques, à 5 ou rarement 4. pétales 
s’ouvrant en étoile et par des graines ellipsoïdes à face ventrale présentant 
deux longs sillons, à côté d’une carène médiane. 

Le plus grand nombre des Ampelocissus appartiennent à l'Afrique 
tropicale. Mais il y en a aussi à Madagascar, dans l'Inde, dans l’Archipel 
Indien, en Australie, et chose inattendue, au Mexique et dans les Antilles. 

L'attention a été appelée sur ces Ampelocissus par une publication de 
M. Lecard, un jardinier français qui avait été en Cochinchine, puis au 
Sénégal. Je les ai appelées Vignes à tiges annuelles. I1 a cru qu'elles 
pourraient étre cultivées en Europe. Beaucoup de gens ont partagé cette 
idée, mais ils se sont préparé des déceptions. 

M. Ch. de Lavallée, M. Duchartre et moi, nous avons dit tout de suite 
qu’il était peu probable que les vigne: d’une région absolument tropicale, 
comme l'Afrique occidentale, puissent être cultivées en Europe. 

Même dans des serres chaudes, ces vignes sont très mal venues. J’ai eu 
beaucoup de peine à les conserver trois ans. J’en ai même beaucoup perdu. 

Sous le nom de Vignes Lecard on a confondu un vrai Cissus (Vitis 
Durandi Lecard) et divers Ampelocissus. 

Grâce à la libéralité des administrateurs du Musée du Jardin botanique 
de Bruxelles, j'ai eu l'avantage d’avoir sous la main des échantillons types 


— 36 — 


des Vignes de Lecard. Des échantillons pareils m'ont été généreusement 
prêtés par l’herbier de l'Université de Genève. C’est grâce à ces matériaux 
que j'ai pu me retrouver dans les indications vagues et confuses de Lecard. 

Je vous distribuerai une petite note sur les Ampelocissus, où vous 
verrez figurer plus de 30 e:pèces. Ces plantes ont des raisins comestibles 
et le plus souvent des racines tubéreuses. 

Elles ont un mode de végétation tres spécial. A un moment donné, 
elles passent à l’état de repos. Les tiges se dessechent et quand l'humidité 
arrive, la plante s'élance. Elle à donc des tiges annuelles. Cela même 
rend à peu près impossible la culture de cette plante dans nos contrées. 

Les fruits des Ampelocissus sont quelquefois très gros et ressemblent 
tout à fait à nos raisins. J’ai vu des fruits qui m'ont été envoyés de diffé- 
rents pays. J’ai pu les étudier. Ils sont quelquefois énormes. Ceux de la 
vigne de Cochinchine sont également très gros. 

Seulement, le malheur c’est que ces fruits si gros, qui sont bons à 
manger, sont impropres à faire du vin de ‘bonne qualité. Des expériences 
nombreuses ont été faites et il en résulte que la vigne de Cochinchine 
donnerait un vin qui aurait de 4 à 5 °/, d'alcool. Peut étre que, avec une 
addition de sucre, on pourrait en tirer parti; mais c’est un vin qui, par les 
chaleurs, doit tourner et aigrir. 

Cela ne veut pas dire que les vignes du genre Ampelocissus. soient 
dépourvues d'intérêt. Elles ont d’abord un intérêt botanique et elles 
peuvent offrir un intérêt pratique pour les pays chauds. 

On sait que dans les pays à température trop élevée, la vigne d'Europe 
s’'emporte en bois et ne produit pas de fruits. Peut-être qu'il y aurait 
avantage à cultiver dans ces pays certains Awmpelocissus. 

Au siècle dernier, longtemps avant que Lecard, mort récemment, eut 
parlé des vignes à fruits comestibles du Soudan, l’illustre voyageur 
Commerson avait découvert à Madagascar une vigne qu’il a appelée dans 
ses notes Wigne éléphantine et dont un jardinier colonial de l'Ile de 
France, feu Martin, avait constaté les propriétés comestibles. (Awpelo- 
cissus elephantine, Planch.) 

Plus récemment, on a fait beaucoup de bruit autour de la Vigne de 
Cochinchine. C’est encore un Ampelocissus dont j'ai découvert un 
échantillon innommé dans l’herbier et que j'ai désigné sous le nom 
d'Ampelocissus Martini. 

Je n’insiste pas sur ce sujet. Il sera repris en détail dans la Monographie 
des Ampélidées que je prépare pour les suites au Prodrome de MM. Alph. 
et Cas. de Candolle. Ce que j’en ai dit suffira pour établir l'impossibilité 
de cultiver en Europe les Ampelocissus des pays chauds et pour laisser 
quelque espérance sur leur appropriation à la culture dans les régions 
tropicales. : 


M. Triana. — M. le professeur Baillon vous a retracé à grandes lignes, 


LE 


dans son chaleureux discours, les cultures de toute sorte qui peuvent être 
entreprises avec profit au Congo. Au nombre des plantes qu'il vous à 
signalées comme pouvant être introduites et cultivées dans ce pays, il ne 
pouvait manquer de mentionner les Quinquina dont les propriétés bien- 
faisantes sont si généralement connues. M. le professeur a ajouté avec 
raison que dans la famille des Rubiacées il y a différentes espèces qui 
jouissent de propriétés analogues. 

Jusqu'à une époque toute récente, on n'avait découvert des alca- 
loïdes auxquels on doit les principes actifs des Quinquina que dans le 
groupe générique tel que le constitua en premier lieu Linné sous le nom 
de Cinchona, et ce, au point qu’on s'était habitué à considérer comme un 
axiome qu’en dehors des espèces de ce groupe; il était presque inutile de 
rechercher les alcaloïdes propres aux Quinquina. Ce n’est que dans ces 
derniers temps qu’on a introduit dans.le commerce de la droguerie, en 
Colombie, une écorce sous le nom de Quinquina cuprea, qui a fourni les 
principaux alcaloïdes des Quinquinæ. On se perdait en conjectures, sur 
l’origine botanique de la plante qui fournit cette précieuse écorce, car on 
avait constaté par l'examen anatomique qu’elle ne pouvait pas provenir 
de la véritable espèce de Cinchona. Pendant plusieurs années on vendait 
cette écorce en grandes quantités pour la fabrication du sulfate de 
quinine. 

Après des démarches réitérées que j’ai faites pendant ce temps pour 
obtenir des renseignements, j'ai été assez heureux de découvrir que le 
_ Quinquina cuprea n'était pas autre chose qu'une plante que moi-même 

j'avais découverte en Colombie, appartenant à un genre voisin des 
. Cinchona et que j'avais signalée dans mes études sur les Quinquina sous 
le nom de Remijia pedunculata. 

A côté de cette première espèce de Æemijia est venu s’en placer une 
autre très-voisine, le Remijia Purdieana, dont l'écorce contient un nouvel 
alcaloïde appelé Cinchona mine, six fois plus actif que la quinine et dont 
les propriétés physiologiques sont des plus remarquables. 

Malgré que les alcaloïdes des vrais Quinquina se retrouvent dans ces 
deux Remijia, l'analyse chimique confirme la distinction générique des 
Remijia et des Cinchona, distinction déjà constatée de bonne heure par 
l'examen microscopique des écorces. Les Remijia ne contiennent pas de 
la Cinchonidine des espèces de Cinchona, ils renferment au contraire 
d’autres alcaloïdes nouveaux, comme l’homoquinine, ete. 

Nous arrivons au point spécial qui m'a engagé à réclamer votre indul- 
gence pendant quelques moments. 

Ce n’est pas seulement au point de vue de la composition chimique que 
la découverte des alcaloïdes des Remijia a renversé les données scienti- 
fiques généralement adoptées, mais aussi au sujet de l'habitat, de la 
propagation et de la culture des Cinchona. 


LA 


— 938$ — 


Les vrais Cinchona à alcaloïdes se rencontrent dans le haut des Cordil- 
lières des Andes; plus on montait, plus on était habitué à espérer que les 
alcaloïdes des écorces fussent plus abondants. Les plantes du climat tem- 
péré sont plus susceptibles aux influences défavorables et plus difficiles 
aussi à cultiver et à reproduire. Le choix du lieu convenable pour une 
nouvelle acclimatation est difficile; il faut qu’il réunisse plusieurs condi- 
tions qu’il n’est pas toujours facile de rencontrer ensemble au Congo. 

Les Remijia, au contraire, sont des plantes très rustiques, qui végètent 
dans des localités plus chaudes, dans des endroits moins ombragés, dans 
des forêts moins humides et naissent et prospèrent dans une terre plus 
aride et sèche. Sa reproduction s'opère facilement et parfaitement par le 
marcottage ; les soins à donner aux plantations doivent être moins minu- 
tieux que pour les Cinchona. 

C’est done, entre les plantes fébrifuges, au Remijia qu'il faudrait donner 
la préférence pour l’acclimation dans une contrée comme l'Afrique 
tropicale. 

Le gouvernement anglais a si bien compris les avantages que j'ai 
signalés dans ma brochure sur les Remijia, qu’au prix de l'or et de grands 
sacrifices, il s’est procuré des graines du Æemijia pedunculata, qui a par- 
faitement réussi dans l’Inde où, sans doute, sa culture prendra une grande 
extension. Le Remijia pedunculata finira par être préféré à toutes les 
autres espèces de Cinchona. L'initiative du gouvernement anglais portera 
des fruits au point de vue commercial et au point de vue humanitaire. 


M. Planchon. — Je voudrais savoir de M. Triana, qui est au courant 
de la question, si ce qu'a dit M. Auguste Saint Hilaire des Æemijia est 
exact. Il paraît qu'ils viennent au Brésil surtout dans les régions où les 
terrains sont ferrugineux. Ce serait peut-être une indication utile pour la 
culture de ces plantes. 


M. Triana. — Il y a deux groupes de ÆRemijia. Celui des espèces du 
Brésil premièrement décrites par Saint Hilaire sous le nom de Cinchona, 
et celui des espèces plus récemment découvertes en Colombie. Ils diffèrent 
notamment par leur port et d’autres caractères que j’ai signalés dans ma 
brochure. Les Remijia du Brésil végètent, comme l’auteur cité l’a fait 
remarquer, dans des terrains ferrugineux. Leur port est très différent de 
celui des Cinchona et leurs écorces ne contiennent pas d’alcaloïdes, d’après 
des renseignements qui m'ont été donnés, ce qui les éloigne sensiblement 
des Cinchona vrais. Les Remijia colombiens, au contraire, ressemblent 
beaucoup plus aux Cinchona par leur feuillage, par la forme et la grandeur 
de leurs capsules qui ont dù amener leur découverte et surtout, par leurs 
écorces qui renferment des alcaloïdes propres aux quinquinas, et d’autres 
nouveaux caractères qu’on a découverts dernièrement. 


M. Planchon. — Vous confirmez qu'il y a généralement une différence 


LR ee 


entre les Remijia du Brésil et les autres dont vous parlez dans votre 
brochure. 


M. Ch. De Bosschere. — Lorsque notre commission organisatrice a 
formulé, un peu à la hâte, le questionnaire que vous connaissez, nous 
avions l'intention de solliciter des membres du Congrès la confection d’un 
questionnaire définitif. Tous ceux d’entre vous qui ont recu à temps les 
documents préliminaires, ont du remarquer que le questionnaire qui y 
figure à la page 270, est loin d’être complet. D'un autre côté, le temps 
n’a pas permis aux spécialistes qui sont au Congo de répondre d’une 
manière convenable aux questions que nous leur avions adressées. 

Il y a quelques jours, j'ai eu l'honneur d’avoir une entrevue avec le 
Président de l’Association internationale du Congo, M. le général Strauch. 
Il m'a demandé si le Congrès ne pourrait pas rédiger un formulaire 
complet qui serait immédiatement envoyé au Congo, par les soins de 
l'Administration supérieure; les spécialistes qui s’y trouvent recevraient 
l’ordre de s'occuper de ce questionnaire, de fournir tous les renseigne- 
ments que les membres du Congrès désireraient obtenir et même de 
composer des collections de la flore et des productions naturels du 
Congo. Nous recevrions les réponses au questionnaire que nous adres- 
serions à l'Association internationale, vers la fin de l’année 1886. 

En 1887, la Société royale de Botanique de Belgique fêtera le 
25° Anniversaire de sa fondation. Nous désirons vivement qu’à cette 
occasion , nous puissions continuer l’œuvre du Congrès d'Anvers. Si, à la 
fin de 1886, nous recevons un travail satisfaisant du Congo, si d'autre 
part, on nous envoie des collections botaniques et autres, je crois que 
nous pourrons étudier facilement et sérieusement la question qui vous est 
soumise aujourd’hui et qui est non seulement loin d’être élucidée, mais à 
peine un peu connue des botanistes. 

En conséquence je prie l'assemblée de bien vouloir déterminer de quelle 
façon elle juge que nous pourrions arriver le mieux à la confection d’un 
formulaire complet. Je crois qu’il entre dans les vues de tous que les 
renseignements les plus détaillés puissent nous parvenir sur la flore 
du Congo. 

Je vous soumets la proposition, dont je viens de vous entretenir, au 
nom de l'Association internationale africaine, qui a pris l'engagement de 
faire répondre par ses agents envoyés au Congo, aux questions que vous 
voudriez bien lui poser. 


M. le Président. — Nous aurons à nous restreindre autant que possible 
dans les limites fixées par M. De Bosschere. 


M. Palacky. — Messieurs! Qu'il me soit permis d'appeler votre atten- 
tion sur une partie de la flore du Congo, non encore mentionnée, qui, à 
mes yeux, pourrait peut-être devenir assez lucrative. Jusqu'ici on n’a 


PP 


parlé que des forêts du Congo et de son agriculture,’ mais il y a aussi des 
S'avanes, de vastes terrains couverts de graminées plus ou moins arbores- 
centes, comme dans tout le centre de l’Afrique et même au delà. On les 
connait de la Nubie, du Kordofan, du Soudan de la région des grands lacs, 
comme de l’Angola (d’après Monteiro), et le célèbre Roggeveld au Cap de 
Bonne Espérance n’était autre chose qu’une Savane (d’Arthratherum pun- 
gens), que les moutons ont détruit d’après Bolus. Mon ami Stôcker, qui 
le premier a pénétré au sud-ouest de l’Abyssinie, m'a dit les avoir 
trouvées au sortir des montagnes éruptives du Schoa, et dans l’herbier de 
mon ami Molub, qui y est maintenant revenu du Zambèze, j'en ai vu des 
échantillons. Il suffit de citer les proportions de la collection Serpa Pinto 
— sur 65 espèces rapportées, 1l y a 25 graminées. W- 

Les Savanes paraissent s'étendre à mesure qu’on s’avance de l’ouest à 
l’est dans l'Afrique centrale. Monteiro nomme le bassin central la région 
des Savanes par excellence. Grant décrit des Savanes dans l’Unioro 
6’ (Cymbopogon finitimus), auprès du Nyanza (10’ Pennisetum Benthami) : 
Reade, Livingstone, Hartmann, Steudner et tant d’autres en ont parlé. 
Elles ne sont pas formées des espèces ligneuses comme dans les îles de la 
Sonde (vrais bambous), mais elles atteignent 20’ auprès du Nil (Andropogo- 
nées) 12’ (Saccharum spontaneum), mais dans l’Uganda seulement 3’, 8’ 
dans le Loango — dans la Bahiuda elles dépassent un chameau, au Zam- 
bèze ont les dit impénétrables. On les brûle chaque année pour qu’elles 
repoussent. 

Eh bien, je crois qu’on pourrait utiliser ces grandes Savanes facilement 
à l’élève des bestiaux. Cela ne demanderait pas de grands capitaux, 
puisque dans l'Afrique avoisinante le prix du bétail n’est pas élevé. On 
pourrait y employer facilement les indigènes malgré leur paresse. On 
n’aurait pas l'énorme dépense du défrichement des forêts, toujours si 
malsain, et au détriment du climat déjà si sec du pays. Le bétail est 
en ce moment très recherché, sur tous les marchés du monde. Conserves 
alimentaires, cuirs, cornes etc., tout cela s'écoule facilement, et est 
capable d’une consommation plus étendue, puisque le transport est plus 
facile que celui des lourdes denrées de l’agriculture. 

Seulement il faudrait songer à une alimentation plus régulière du bétail 
que n’est celle des indigènes, où par suite du brûlement des Savanes il y a 
chaque année une disette. Il faudrait, ou diriger successivement le bétail 
sur les contrées momentanément encore moins arides et non brülées — 
comme le fait la mesta espagnole des moutons, ce reste de la culture 
berbère — ou avoir recours au foin des branches coupées, comme les 
anciens Romains, ou comme on le fait aujourd’hui encore au Kashmir. 

Peut-être pourrait-on y joindre des expériences de domestication des 
grands animaux herbivores du pays, surtout des belles antilopes, pour 
élargir le cerele si restreint des animaux utiles à l’homme. Elles suppor- 


2 AE 


teraient mieux le climat et le paturage que les moutons, même les bœufs, 
qui aiment plus de sève dans la nourriture qu’il n’y en a ordinairement 
dans l'Afrique centrale. 

Enfin, permettez-moi de présenter en dernier projet, celui de la for- 
mation de parcs zoologiques comme, par exemple, à Léopoldville pour 
l'exportation des grands animaux des tropiques, devenus déjà si chers 
et si rares. L'Europe, avant la dernière guerre du Mahdi, achetait ces 
bêtes surtout au pays de Bogos et Kassala était le grand marché du 
commerce des lions, girafes, rhinocéros, antilopes etc. Les jardins z0ologi- 
ques de Gand et d'Anvers pourraient servir de dépôts d'écoulement pour 
la vente des animaux du Congo, par exemple des Plocéides (oiseaux) 
qui sont déjà assez répandus, même parmi les amateurs. 

Voilà ce que je puis dire dans le quart d'heure réglementaire. 


M: Max. Cornu. — Je suis chargé par mon ami Paul Sagot, qui s’est 
occupé de la culture tropicale de présenter ses regrets de ce qu'il n’a pu 
venir ici prendre la parole sur un sujet qui l’intéresse au plus haut point. 
Il m'a prié d'annoncer qu’il met la dernière main à un manuel de culture 
dans les régions tropicales, ce travail rentre absolument dans les questions 
que le Congres doit étudier. Il contiendra non-seulement des détails sur 
l’agriculture tropicale au point de vue des plantes, mais encore au point 
de vue de l'élevage du bétail. M. Paul Sagot, ancien chirurgien à la 
marine, est demeuré longtemps dans les tropiques. IL a passé sept années 
à la Guyane, où la France a un pénitencier important. Ses publications ne 
sont pas inconnues. Elles ont paru dans les bulletins de la Société d’horti- 
culture de France et de la Société botanique ; elles ont été remarquées. 
Il ya déjà là des détails très-intéressants sur les essais de culture, 
notamment des plantes alimentaires, des légumes de diverse nature. 
Il indique les essais qui ont été faits, les résultats obtenus, et les amélio- 
rations qui ont été atteintes par des perfectionnements successifs. Il 
examine les uns après les autres les légumes d'Europe, les variétés des 
régions tempérées, et celles des pays plus chauds. Il étudie les plantes 
qui ont réussi en Algérie, en Nouvelle Calédonie et il montre par quels 
degrés insensibles on peut arriver à transporter des plantes d'une région 
plus froide dans une région plus chaude. 

Les agriculteurs qui voudraient se rendre au Congo feront très bien 
d'étudier le volume de M. Sagot, qui renfermera des détails très-intéres- 
sants, soit d’une*application immédiate, soit d’une généralisation possible 
pour les cultures du Congo. 


M. Wittmack. — J’attire votre attention sur l’œuvre de M. P.-L. Sim- 
monds, Zropical Agriculture. Treatise on the culture, préparation, com- 
merce and consumption of the principal products of the vegetable kingdom. 
— London et New York, E. and P. Spow. 1877. In 8, 515 pages. 


ne. ANSE 


M. le Président. — Personne ne demandant plus la parole, je ferai 
une proposition qui pourra servir de conclusion à la question qui vient 
d'être traitée. Ce n’est pas seulement la Belgique aujourd'hui, c’est 
l'Europe, c'est le monde civilisé tout entier qui attend de l’État libre du 
Congo des résultats pratiques et une activité d'ordres divers. 

Pour nous restreindre à la botanique, je crois qu'il y aurait lieu 
d'organiser et de diriger une «exploration dans la région du Congo. 
Jusqu'ici c’est avec un vif sentiment de regret que je n’ai pas vu d’herbier 
ni de collection végétale d'aucune sorte rapportés de ces contrées par nos 
compatriotes si nombreux qui y ont été envoyés. 

Il y a à cela diverses raisons. Le but de leur mission n'était pas 
précisément celui que nous poursuivons. Les temps n'étaient pas propices 
encore. L’attention de ces premiers missionnaires de la civilisation là-bas 
n’était pas spécialement dirigée vers les sciences naturelles. Mais 
aujourd'hui que l'État libre est constitué, qu’il va avoir une sérieuse 
organisation, je crois que c’est un devoir pour nous en Europe et pour 
nous autres Belges surtout, qui aimons à nous rapprocher de l’œuvre du 
Roi, que de chercher à organiser le plus tôt possible une exploration 
botanique des régions du Congo. 

J'aurais voulu voir cette œuvre entreprise en Belgique par l’Académie 
ou par quelqu’une de nos institutions. Nous ne nous trouvons pas dans 
des conditions matérielles qui nous permettent d'accomplir seuls cette 
entreprise; cependant tous nous l’attendons, nous la désirons beaucoup. 
Nous ne pouvons sans doute pas aller immédiatement et directement 
étudier la flore du Congo sur les lieux. Il convient d'y envoyer quelques 
personnes particulièrement aptes et bien préparées. Ne serait-il done pas 
utile de constituer ici un comité international qui se mettrait à la 
disposition de l’État libre du Congo pour organiser et pour diriger 
l'exploration botanique de sa flore ? 

Les matériaux qui pourraient étre ainsi recueillis seraient répartis 
entre les membres de ce comité pour être étudiés par chacun d’eux 
suivant sa spécialité, suivant ses aptitudes. 

Je pense que le dénombrement de la flore du Congo ne saurait être 
entrepris par un seul botaniste. Il y a là matière à beaucoup de travail et 
à beaucoup d'activité. 

Le Comité se mettrait en rapport avec l'administration de l’État libre 
du Congo, il étudierait les produits des explorateurs #cientifiques. Il 
faudrait herboriser, préparer les collections, les envoyer en Europe, à 
Bruxelles d’où ces matériaux seraient répartis parmi ceux d’entre nous qui 
en manifesteraient le désir. 

Comme l’a dit M. De Bosschere, on pourrait déjà, pour 1887, arriver à 
un premier résultat. 

J'ai pris l'initiative de cette proposition parce que je ne vois pas sortir 


a LS 


des différentes communications qui ont été faites, une solution pratique, 
une réponse directe, adéquate à la question qui à été posée. 

Si vous jugez la constitution de ce comité possible, nous pourrions 
procéder à sa formation. 


M. Planchon. — Si on fait sappel aux différents gouvernements pour 
arriver à une mission d'exploration, ce qui est très-désirable, j'admets que 
ce soit à Bruxelles que se centralisent les envois. 

Dans ce cas les gouvernements qui auraient contribué à l'exploration 
auraient sans doute part aux collections. 


M. le Président. — Évidemment. 


M. Planchon. — Bruxelles se trouve étre le centre de l’administration 
politique du Congo. Mais comme il s’agit d'une œuvre à laquelle vous 
appelleriez les gouvernements à contribuer, il est naturel qu’on leur offre 
de leur en faire partager les bénéfices. Dans ces conditions je crois que la 
proposition qui nous est faite doit être accueillie. 

L'exploration a déjà commencé dans d’autres parties de l'Afrique. 
Plusieurs explorateurs récemment et autrefois dans l’ouest, les Portugais 
dans le sud, d’autres ailleurs, ont déjà réuni un grand nombre de matériaux. 
Mais pour l'intérieur de l’Afrique, il y a encore beaucoup à faire. On 
pourrait négocier avec les gouvernements sur la base que M. le Président 
indiquait tantôt. C’est une œuvre collective qui pourrait aboutir. On 
devrait y mettre une condition : c'est que Bruxelles serait le centre ou 

l’on enverrait le produit des explorations, mais que les collections seraient 
réparties équitablement entre les divers musées botaniques des pays qui 
auraient contribué à l’entreprise. 


M. Baïllon. — Peut-être que si le Congrès entier se prononçait en 
faveur de la mesure, afin qu'on put entrer définitivement dans la pra- 
tique, cela donnerait de la force à la proposition de l'honorable Président. 


M. Max. Cornu. — Je demande la permission de faire remarquer au 
Congrès qu’il y a eu déjà des missions envoyées par divers gouvernements 
dans des conditions semblables. Je ne sais si vous avez en mémoire le 
souvenir des missions qui ont exploré il y a deux ans l'Amérique du sud 
et notamment la Terre-de-feu. Il y a eu une série de missions qui ont été 
organisées par la France, l'Angleterre, l'Autriche, ete. et qui ont rap- 
porté les documents les plus intéressants sur ces contrées qui étaient très 
mal connues, documents particulièrement précieux pour la Météorologie. 

Si les gouvernements voulaient s'associer et envoyer, chacun de son 
côté, des missions vivant et agissant en commun, en bonne intelligence, 
des missions comme celle de l'Amérique du Sud, dans lesquelles on s’est 
réciproquement montré d’une extrême courtoisie, il y aurait à cela le 
plus grand profit pour la science et pour l’œuvre que la Belgique poursuit 


— AVS 


en ce moment. Ainsi, la proposition que l’on émet a déjà recu exécution 
dans d’autres pays et elle a produit les plus heureux résulats. 


M. Planchon. — Une seule expédition pourrait offrir des difficultés, 
alors même qu’elle réunirait des personnes de différentes nations. Je me 
rappelle avec tristesse ce qui s’est passé au siècle dernier lorsque la 
France et l'Espagne ont envoyé une mission au Pérou, Dombey d’une 
part, Ruiz et Pavon de l’autre. 

J'appuie l’idée qui a été mise en avant de former plusieurs missions, à 
la condit:on qu'au lieu d’être antagonistes elles s'entendent. Je veux bien 
que les travaux, les envois, soient concentrés à Bruxelles, mais il faudrait 
que ces missions, dans leur organisation, ressemblent elles-mêmes à 
l'État libre du Congo, qu’elles en fussent en quelque sorte l'image. 


M. le Président. — On conservera à la mission le caractère neutre et 
international que le Congo a lui-même et qu’il entend garder. 


M. Planchon. — On pourrait se partager le champ à explorer, et, au 
moyen des diverses délégations gouvernementales on créerait une 
émulation qui ne pourrait manquer d’être favorable à l’entreprise. 


M. Palacky.— I] serait bon de choisir le comité dans toutes les nations 
représentées ici et de lui donner des pleins pouvoirs pour agir comme bon 
lui semblerait dans cette question. Pourquoi? Parce qu’il ne dépendra pas 
du Congrès, il dépendra en premier lieu des gouvernements. Si nous 
donnons à ce comité une direction trop exclusive, il peut se faire que nous 
paralysions d'avance tous nos efforts et que nous gâtions notre œuvre 
d'avance. Si ce comité a le droit d'agir à sa guise, cette marque de con- 
fiance universelle que nous lui donnerons sera une recommandation auprès 
des gouvernements et lui permettra de traiter avec eux sur des bases plus 
larges. Nous ne pouvons entrer dans des détails. Mieux vaut done 
accepter purement et simplement la proposition de M. le Président et 
de recommander au Comité que nous choisirons, tout ce que les honora- 
bles préopinants ont dit qui mérite l'attention. Bornons-nous à décider la 
question de principe : la création d’un comité international en vue de 
l'étude de la flore du Congo. 


M. Lefèvre. — Ayez l'obligeance de faire exprimer un vœu par le 
Congrès, il aura plus de force qu'aucune commission même choisie d’une 
facon unanime. 


M. Ch. De Bosschere. — Il entre dans les intentions de M. le Prési- 
dent de solliciter un vœu, mais nous ne devons pas se: de vue l’art. 10 
du règlement du Congrès qui dit : 

« Le bureau du Comité de patronage et celui de la Commission organi- 
« satrice constitueront le Comité exécutif du Congrès. Ce Comité sera saisi 

de toutes les propositions, questions et documents adressés au Congrès. 


| es 


« Il pourra s’adjoindre les auxiliaires dont le concours lui paraîtra 
utile. » AE 

Je crois que cet article permet de vous donner pleine et entière satis- 
faction. Ma proposition serait la suivante: le bureau du Comité de 
patronage et celui de la Commission organisatrice s’adjoindront des 
délégués de toutes les nations représentées au Congrès d'Anvers. Ce 
comité exécutif, avec ces auxiliaires, ferait les travaux préparatoires à 
l'organisation de cette mission que vous désirez voir entreprendre dans 
l'Afrique centrale. Si nous avons des auxiliaires dans les différents pays 
de l’Europe, il nous sera très facile d'arrêter un plan général, définitif, et 
d'étudier la manière dont on pourrait le mieux, dans l'intérêt de tous, 
répartir les collections qui nous seront envoyées, arriver à la rédaction 
d’un questionnaire, etc. Ce serait en quelques sorte un comité d’études qui 
ferait les travaux préparatoires nécessaires. 

Lorsque ie Congrès aura émis le vœu de voir organiser une mission 
scientifique internationale, nous pourrons demander qu’on nous adjoigne 
des représentants de toutes les nations indistinctement. 

Le Comité de l’Association internationale du Congo se met entierement 
à notre disposition, comme j'ai déjà eu l'honneur de vous le dire tantôt. 

Dans l’intérèét de la science, nous devons profiter des dispositions 
bienveillantes des personnes qui se trouvent à la tête de l’entreprise 
du Congo (Marques d'adhésion). 


M. le Président. Je mets aux voix la proposition telle qu’elle vient 
d’étre formulée en excellents termes par M. Ch. De Bosschere. 
— La proposition est adoptée. 


M. le Président. — La proposition est done admise en principe. Il 
nous reste à désigner par pays, un ou plusieurs membres qui continueront 
l’étude de la question de la flore du Congo, qui se mettront en rapport 
avec l'administration de cet État, et qui organiseront directement, si cela 
est possible, l'exploration botanique de ces contrées. 


M. Ch. De Bosschere. — On pourrait, par pays, faire appel à la bonne 
volonté des membres présents ou à leurs amis. 

M. le Président. — La proposition est-elle appuyée? (oui! oui!) 

Le vœu est donc émis et la proposition est adoptée à l'unanimité, sans 
aucune observation. 


M. Ch. De Bosschere. — Je vais donner lecture, par ordre alpha- 
, bétique, des n6ms des représentants des divers pays. 


M. Baillon. — Je propose que le Comité organisateur du Congrès fasse 
lui-même le choix des membres. 


M. le Président. — I1 n’y a pas d'opposition ? 
— Cette proposition est adoptée. 


ÉS AGE 


M. Van Hulle. — Cette question du Congo sera-t-elle traitée par 
les sections ? 


M. le Président. — Elle est épuisée au point de vue général, ily a 
une quantité de détails dans lesquels nous ne pouvons pas entrer. 


M. Van Hulle. — A la dernière minute j'ai préparé un travail au 
sujet du Congo que j'ai soumis à quelques uns de mes collègues. Ils m'ont 
déclaré qu’au fond j'ai rason, mais qu'on pourrait y voir une note 
discordante dans ce concert harmoneux que nous entendons depuis 
longtemps relativement au Congo. Je vais suivre le conseil que mes amis 
m'ont donné et renoncer à la lecture de mon travail. Si le bureau me le 
permet, je déposerai entre ses mains les quelques lignes que j'ai griffon- 
nées à la hâte. 

Je laïsserai au bureau la liberté d’en disposer comme il l’entendra. 

Moi, fonctionnaire de l'État, je n'ai nullement l'intention de faire 
publier quoi que ce soit qui irait à l'encontre de la généreuse entreprise 
du plus pacifique des monarques (1). 


(1) Note de M. Van Hulle. Si la Belgique sentant le besoin de créer des colo- 
nies au delà des mers, avait pu les fonder aux États-Unis, en Californie, au 
Texas, au Mexique, au Brésil, en Australie, à la Nouvelle Zélande, là au moins 
elle aurait trouvé un sol fertile, un climat salubre. Au Congo ces deux éléments 
indispensables de colonisation semblent faire absolument défaut. 

Cela étant, peut-on y faire des essais de culture de rapport avec quelque chance 
de succès? Peut-on y acclimater facilement telle et telle série de plantes? 

D’abord deux mots au sujet d’acclimation. En principe nous la dénions à propos 
des végétaux. Le haricot, introduit dans nos cultures des régions tempérées depuis 
des siècles, est encore aujourd’hui aussi sensible aux froids de nos centrées qu’il 
l’a toujours été. Même fait pour lies pommes de terre, concombres, pourpier, etc. 
Nous dénions même jusqu’à un certain point l’acclimatation de l’homme : en 
effet, les nègres languiraient ici. les blanes succomberaient là-bas. Pour nous 
l’acclimatation n’est possible que par voie de croisement. Nous y revenons tout à 
l’heure. 

Entretemps le Congo restera presqu’entièrement peuplé de nègres et il n’y a 
que les produits de l’agriculture qui puissent les intéresser quelque peu. Au fait, 
enfants de la nature sauvage, les nègres se contentent d’elle et de leur l'berté; 
leurs désirs ne vont pas au delà. 

Pour ce qui est donc d’essais de culture, bornons-nous pour le quart d’heure à 
y faire cultiver plus rationnellement s’il se peut les plantes agricoles du Congo; 
à notre avis il ne servirait de rien de vouloir y pousser à la culture maraïchère. 
En effet, admettant qu'après avoir vaincu de grandes difficultés, on parvienne à 
produire, même abondamment tel et te] légume, qu'en fera-t-on ? Le vendre aux 
Congolans! C’est peu probable : pour la consommation des légumes, il faut la 
classe civilisée plus ou moins aisée et celle-ci, pendant de longues années encore, 
restera beaucoup trop clair semée au Congo pour faire vivre les maraîchers. 

A plus tard donc la culture maraîchère dans ces parages. L'agriculture, soit, 
car c’est par elle que doit débuter la prospérité d’un pays naissant. Toutefois, tel 


Le ARS 


M. De Bosschere. — Je vais donner lecture par ordre alphabétique 
des noms des personnes qui représentent au Congrès les différents pays. 


M. Hovelaque. — Pourquoi ne nommerait-on pas comme membres 
auxiliaires de la Commission organisatrice les Vice-Présidents du bureau 
pour former le Comité dont il vient d’être question ? 


M. le Président. — Cette proposition me parait très-sensée. 


M. Baillon. — Il y à des personnes de la plus haute compétence qui 
ne sont pas présentes ici et auprès desquelles il conviendrait de faire 
des démarches. 


M. le Président. — Vous permettez au Comité exécutif de s’adjoindre 
encore quelques personnes dont les noms lui seraient signalés? (Adhésion). 

La proposition est donc adoptée. 

(M. Baillon remplace M. Morren au bureau en qualité de Président.) 


M. le Président. — L'ordre du jour comprend un grand nombre de 
questions dont M. De Bosschere voudra bien vous donner lecture. 


M. Le Bosschere. — La premiere question que nous avons à discuter, 
et qui est comprise sous le numéro V du programme, est ainsi conçue : 

Dans quelle mesure conviendrait-il de développer l’enseignement de la 
botanique, de L'agriculture et de l'horticulture dans les établissements d’in- 
struction moyenne). 


ne peut encore ètre le cas que pour autant que dans ce pays il y ait non seule- 
ment le producteur, mais aussi le consommateur, le preneur, et d’ici à long- 
temps, peut-être jamais, les Congolans ne seront ni l’un ni l’autre. Comme le chat 
reste un chat, le nègre restera nègre ; on ne le rendra pas travailleur et intelligent. 

Si cela est, la première chose à faire pour civiliser le Congo, c’est d’y intro- 

duire, d’y implanter une autre race d'hommes, capables avant tout de supporter 
* leclimat, doués ensuite d’assez d'activité et d'intelligence pour pouvoir progresser. 

Étant admis 1° qu’il ne servirait à rien de cultiver si le produit de cette culture 
n’a pas de consommateur, 2° que pour cultiver il faut être travailleur et savoir 
supporter le climat, 3° que pour avoir des consommateurs il faut une population 
assez dense et accessible à la civilisation, 4° que les qualités requises à cette fin, 
les nègres ne veulent, les blancs ne peuvent les fournir, il reste cependant un 
moyen terme, à savoir le croisement entre Africains et Européens.On prétend que 
ce système n’a jamais donné des résultats satisfaisants. [1 nous semble cependant. 
qu’en prenant les soins voulus à propos des reproductions, comme on doit du 
reste le faire aussi en culture pour les porte-graines, qu’à la 3° ou 4° génération 
on serait probablement arrivé à une race de métis remplissant les conditions 
essentielles pour coloniser fructueusement le Congo. 

Puisse ce que nous venons de préconiser à propos de culture maraichère et 
d’acclimatation être de quelqu'utilité à ceux qui sont en situation et ont de l’in- 
térêt à seconder l’œuvre de civilisation si généreusement entreprise au Congo, 
par notre auguste souverain, le plus pacifique des monarques. 

(1) Voir aux « Rapports préliminaires » le rapport de M, G, KEMNA, pp. 9-16. 


M. Lefèvre. — L'installation du Cercle Parisien de la Ligue de 
l'Enseignement à l'Exposition d'Anvers, contient plusieurs séries d'images 
rentrant dans ce que nous appelons l’Znseignement par les yeux, autre 
forme de l’ÆZnseignement intuitif si fort en honneur en Belgique. 

Je demande au Congres de vouloir bien s’arréter à ces images, 
parce que je considère comme un devoir de soumettre, à des hommes 
pratiques et compétents, les ressources nouvelles offertes aux vwlgari- 
sateurs des connaissances utiles et à tous ceux qui doivent apprendre, 
d'autant plus que, dans le rapport de M. E. Laurent {l) je lis ceci : 
« Les images, quoiqu’on en dise, frappent toujours l'esprit, même chez 
« les profanes, et les impressions qu’elles produisent ne s’effacent pas 
« de si tôt de la mémoire » Page 235 des rapports préliminaires 
du Congrès. 

Est-ce, par excès d’amour pour la science ou par inhabileté à se servur 
d’une langue parfaitement claire, que nos devanciers ont fait, de la 
botanique, l’étude la plus sèche et la plus rebutante, quand elle devrait- 
étre la plus attrayante des sciences ? A qui la faute ? Nul ne le dira, mais 
nous qui nous occupons de l’enseignement de la science au premier degré, 
nous devons la dégager des choses abstraites dont on l’a enveloppée. 

Un de mes meilleurs amis, grand vulgarisateur, Aug. Bourguin a 
écrit (2) : « La botanique, c’est le jardin de Dieu; jardin délicieux, 
« plein de lumière, de couleurs et de parfums, arrosé par de beaux fleuves 
« et par des clairs ruisseaux. 

« Les savants sont venus dire : Ce jardin est à nous. Aussitôt, l’entou- 
rant d’un fossé large et profond, ils ont élevé, sur le revers, une 
baärricade, au pied de laquelle ils ont pris soin de semer, en guise 
de chausse-trappes, toutes sortes de barbarismes épineux. Une seule 
« porte est restée ouverte : la garde en est confiée à deux effroyables 
« dragons qui vous crachent à la face un qui vive dans une langue 
inconnue. 

« Messieurs les savants, qui connaissent le mot de passe, ont seuls accès 
en ce beau lieu. Ils y ont longtemps parlé latin, mais un latin que 
Cicéron aurait eu quelque peine à comprendre. De nos jours, ils parlent 
« grec, et quel grec! Les dames de la halle, dans Athènes, eussent bien 
« ri, Si l’on se fut avisé de parler ce grec-là devant elles. » 

Nous demandons qu'on ait pitié de l'enfance et de tous ceux qui 
ne peuvent accorder qu’un temps limité à l'étude. 

Le but de mon travail est de prouver que cela n’est pas impossible, 
il suffit, pour arriver à un résultat précieux, que nous supposions les 


À 


À 


À 


A 


À 


À 


À 


(1) Professeur à l’École d’horticulture de l’État, à Vilvorde. 
(2) La Perruque du Philosophe Kant. 


AO 


autres ignorants et que notre désir de les instruire égale leur empresse- 
ment à nous écouter. 

Trop longtemps on a fait de la science pour la science elle-même, 
c’est-à-dire pour les privilégiés; il faut enfin utiliser cette science, la 
vulgariser et la rendre accessible et aimable, si l’on veut que la science 
devienne une lumière pour tous. 

Dans mon enfance, j'ai entendu un chimiste se révolter à l’idée que 
j'émets. Etre savant et devenir industriel!... Avoir poussé l’analyse fort 
loin et passer de longues nuits à étudier les eaux livrées aux chaudières, 
à la teinture, au dégraissage de la laine et même les résidus impurs des 
usines !..... Il s’écriait à tout instant : « Matérialiser la science !... » 
L'avenir de l'industrie et des découvertes admirables étaient là pourtant, 
Je le dis à la louange des savants contemporains, il n’en est pas un 
seul qui ne soit fier d’avoir servi la cause de l’industrie la plus humble. 
Les rapports préliminaires du Congrès sont empreints de ces idées de vul- 
garisation et d'utilité générale. 

Qu'avons-nous à faire, nous tous qui nous occupons de l'enfance ? 
Imiter les chimistes dont je viens de parler; travailler pour le plus 
modeste des ateliers, celui où toute l'humanité doit se transformer : l’école 
primaire, l’école du peuple. 

« Ne muilipliez pas les élres, disaient autrefois les philosophes; 
« Buffon ne cessait de répéter aux naturalistes : Ve mullipliez pas les 
« noms sans nécessilé. Ces sages conseils n’ont guère été suivis. 

« La déplorable manie de changement a fait naître une science 
e nouvelle : la Synonymi (|), c'est-à-dire la concordance de tous les 
« noms successivement donnés à la même plante : science de mots et 
« non d'idées, mais absolument indispensable à qui veut se reconnaître 
« dans cette confusion. 

« Que faudrait-il pour renverser toutes ces barrières, et pour rendre, 
« comme le voulait Platon, Za science accessible à tous ? 

« Bien peu de chose. 

« Qu'un amant écrive pour sa maîtresse un traité de botanique, et 
« je réponds que tous ces retranchements tomberont d'eux-mêmes. 

« Quel beau livre ce serait ! Comme l'étude y serait rendue facile et 
« engageante ! Comme les mots seraient bien choisis, les définitions 
« simples, les descriptions riantes ! 


2 


(1) Je vous dois des remerciements, Monsieur, pour les noms arabes que vous 
m’avez envoyés; ils enrichissent #4 synonymie, déjà très-considérable du Maïs 
(Lettre du 25 janvier 1825, de Jacques Gay à Victor Jacquemont) d’après le 
travail de J. E. Planchon, correspondant de l’Institut, communiqué à la Société 
de Botanique de France. — Mai 1883. 


E. L. 


= Eee 


« Les amours des plantes, les mystères de la fécondation y seraient 
retracés d’un pinceau fidèle, mais délicat, chaste et plein d’innocence. 
« Les noms de famille, les affinités des fleurs indiqueraient bien 
leur degrés de parenté, leurs alliances, leurs rapports de bon voisi- 
« nage. 

« Les relations de la plante avec l'insecte, avec l'oiseau, avec le 
mammifère, avec l’homme lui-même, n’y seraient point omises. 

« Les couleurs, les parfums, les saveurs, — dont la botanique 
officielle ne s'occupe pas, — ont une signification mystérieuse qui 
reste à découvrir. Tout n'est-il pas symbole dans la nature ? » 

Cette manière de s'attaquer aux abus n’est pas sans charme; M. Léo 
Errera (1), à propos de la première question du programme, dit, p. 28 : 
« Aujourd’hui que cet état de choses a heureusement cessé, on se figure 
« cependant encore le botaniste tel qu’il était à cette époque et tel que 
« Schleiden l’a si spirituellement défini: marchand de latin et grand 
« accumulateur de foin desséché. » Je vous recommande ce passage 
très-fin où il est aussi question de latin barbare et d'herbes décorées. 


des noms les plus baroques. 


On dirait que Messieurs Hachette, les grands éditeurs francais, parti- 
rent de considérations semblables, lorsque, il y a quelques années, ils 
commencerent leurs collections d'images intéressantes à plus d’un titre. 

Qu'on ne se trompe pas sur la simplicité du-texte; il est parfaitement 
scientifique. Si on l’a dégagé de certaines longueurs ca n'a été qu’à force 
d'étude. Cette concision est d’autant plus admirable que, dans la masse 
des renseignements consignés, on trouve presque toute la botanique elle- 


« 


même. 


, 
A «+ 


Messieurs Hachette ont déjà publié : 
. 16 séries de 12 images ou 192 images ; 
Do Insectes EURE EEE 12 » . > 0 » 
3° Travaux agric.etindustr. 4 >» 12 >, 2 DRE » 


dGéegraphie. 4 demie AE > 12 > 1 2000 » 
Total 330 images 


1° Botanique den 


qui sont SOUS VOS yeux. 


Il ne pouvait être question de suivre un ordre complet dans la publi- 
cation de ces jolies choses; c'est seulement en variant les objets à sou- 
mettre aux enfants qu'il devient possible de leur donner une idée de la 
science compliquée dans laquelle ils pénètrent peu à peu. 

Dans le tableau que j'ai l'honneur de soumettre au Congrès, l'ordre 


(1) Docteur agrégé à l’Université de Bruxelles. 


The 


alphabétique (il facilite les recherches) a été établi sans distinction de 
famille. Le groupement par familles vient ensuite. L'enfant en entend 
d’abord parler vaguement, assez cependant pour en saisir les caractères 
généraux. L'indispensable, au début, est d'obliger l’écolier à reconnaitre, 
dañs l'image et par l'image, la plante trouvée dans le jardin paternel, 
dans la prairie, au bord du chemin, à la lisière du bois et dans l'épais- 
seur du taillis. 

Cela fait, la graine est semée; elle germera dans l'esprit de l'enfant. 

Supposons qu'il aiten mains les 8 images de la famille des Solanées : 
il saura, après avoir lu le texte, par ordre du maître, et aprés avoir 
revu l’image, par plaisir : 

1° Que l’Aubergine porte un fruit agréable mais ayant, avant maturité, 
un suc âcre et malsain ; | 

2’ Que la Zelladone est un poison violent. La plante, assez agréable, 
forme dans les lieux frais et humides, à la lisière des bois, des buissons 
d'un beau vert, et porte des fleurs brunes, ou plutôt violettes, en forme 
de clochettes ; 

3 Que le Dalura pomme épineuse est une belle plante ayant causé la 
mort d'enfants qui en avaient mangé ; 

4 Que la triste Jusquiame, dite l'herbe aux sorcières. du temps qu'il 
y avait des sorcières, peut aussi être appelée la dangereuse Jusquiame ; 

9° Que la Morelle douce-amère, jolie plante au feuillage vert, aime 
à trouver appui en s'entrelacant dans une haie ou s'appuyant contre 
un mur; ses longs rameaux verts et lisses pendent gracieusement. 
Son fruit d’un goût doucâtre d’abord, rempht ensuite la bouche d’äcreté 
et d'amertume ; 

6° Que la Pomme de terre ou parmentière à une jolie fleur. La fleur 
tomhée, le pistil grossit, devient une baie, c'est-à-dire un fruit en forme 
de boule, vert d'abord, puis rouge,enfin violet sombre, tendre lorsqu'il est 
muür. Au pied de la plante, sous terre, il se forme des {ubercules, des 
petites masses arrondies de substance farineuse, nourrissante, qui sont 
nos précieuses pommes de terre; 

7° Que le Tabac est une belle plante, dont les feuilles atteignent quel- 
quefois un mètre de longueur. Tabac, poison violent et remède utile. 
L'habitude de fumer les feuilles de tabac dessèchées et hachées ou de 
les prisér réduites en poudre, est une habitude coûteuse, qui a mille 
inconvénients et nui avantage; 

8° Enfin, que la Tomate, cultivée dans nos jardins,est un mets agréable 
ou l'élément principal d’une sauce. Il suffit de lire les rapports sur le 
Congo, pour apprécier la valeur de ce fruit. Je passe sur les détails 
Spéciaux capables de faire ressortir les différences existant entre ces 
8 plantes, mais je constate que déjà l'esprit de l'enfant, cherche une 
foule d’autres traits distinctifs ou des rapprochements curieux. Vienne 


pour lui l’âge de l'étude sérieuse, il saura bientôt se servir du livre et 
de la classification rationelle. 

Donnez, à un enfant, comme récompense, les 16 images représentant 
les Rosacées, il appliquera sans cesse ce nom à l'Églantine ou à /a Rose» 
s’il connait leur histoire. : 

Ecoutez la légende : « La frèle et charmante églantine de nos bois, 


« la rose sauvage au parfum si frais, porte des fleurs simples, e.-à-d. 


« n'ayant qu'un petit nombre de pélales. Seulement, ces cinq pétales, 
« séparés, et tenant à la plante par une partie rétrécie qui est ce qu’on 
» appelle l'onglet, larges, étalées en couronne, forment la corolie de la 
« fleur rose-päle ou blanche ordinairement, chez d’autres espèces rouge- 
« pourpre ou jaune-clair. 

« La nature n’a pas fait de roses doubles; elle a fait les roses sauvages. 
« Les roses doubles sont pour ainsi dire des créatures de l’homme. 

« Le jardinier, choisissant, parmi les sauvages, les plus belles et les 
« plus vivaces, les a transplantées dans son jardin; il leur a fourni la 
« terre la plus grasse sans cesse remuée et amollie; enfin il les a taillées 
« en retranchant des branches trop nombreuses et le feuillage inutile. 
« Par ses soins, la plante mieux nourrie qu'à l’état sauvage, est pour- 
« vue d’une sève surabondante. Et alors voici ce qui arrive : les fleurs 
« doublent, c.-à-d., qu’au lieu de cinq pétales seulement, elles en ont un 
« très-grand nombre. Une partie des é{amines du centre de la fleur, au 
« lieu de rester grêles et minces, grandissent, s’élargissent, se teignent 
« de vives couleurs et deviennent des pétales; la fleur est plus large, plus 
« fournie et plus touffue. Puis, quand le jardinier a produit par ces soins, 
« ces rosiers à fleurs doubles, il les multiplie tant qu’il veut, en leur 
« enlevant des bourgeons qu'il greffe sur des églantiers simples. — 
« C'est de la même facon que la culture produit, aves des fleurs simples 
« sauvages, toutes les belles fleurs doubles qui ornent nos jardins. » 

Désormais l’enfant connaît la rose. Grâce à l’idée juste qu’il possède 
de la famille des Rosacées, il n’hésitera pas à y faire entrer la ronce et le 
fraisier, 'aubépine et le framboisier, le pécher et l’abricotier, l'amandier 
et le cerisier, le prunier et le néflier, le pommier et le poirier, le coignas- 
sier et le sorbier. 

C'est ainsi, à petite dose, que les mots exacts entrent, avec l’image, 
dans la mémoire de l’enfant. 

C’est au professeur qu'il appartient de découvrir la science mise par 
l’auteur dans ces notices; le moyen le plus sûr de professer une science 
est de la posséder à un degré suffisant. Le système des livres plus ou 
moins gros dispense souvent le professeur d'études personnelles sérieuses ; 
l'image donnée aux élèves l’oblige à recourir sans cesse au livre, à la 
méthode. 

Que le maître sache; qu’il parle surtout! Un professeur qui suit et qui 


parle fait plus, pour sa classe, que toutes les bibliothèques du monde. 

M. T. Vernieuwe (1) a terminé son travail sur la VI* question du pro- 
gramme du Congrès, par ces mots: « L'enseignement du professeur 
« n’est fécond qu'à la condition que ce dernier soit lui-même un cher- 
« cheur, un savant : — (page 127). Je demande simplement à l’institu- 
teur, non d’être un savant, mais un sachant, parce que, M. H. Witte(2) le 
fait très-bien remarquer (page 129). « Nous n'avons pas ici à tracer à 
« l’instituteur le programme qu’il devra suivre dans son enseignement. 
« En homme intelligent, il saura se borner aux choses nécessaires, 
directement utiles et il s’abstiendra de s'étendre sur les théories, sur 
les problèmes de physiologie, auxquels les enfants ne comprendraient 
« rien ou qui finiraient par leur inspirer de la répulsion pour des notions 
« qui doivent rester simples et pratiques. » 

Dans son remarquable travail sur la IV* question du programme, 
l'Enseignement de la Crypltogamie, M. le D' Marchand, professeur à 
l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris, cite les paroles de Duhamel (3) 
(page 86). 

« Les obscurités que certaines choses peuvent laisser dans l'esprit des 
« élèves, et qu'il est quelquefois si ditiicile de dissiper, tiennent le plus 
« souvent à l’enseignement élémentaire. C’est presqu’au début d’une 
« science que se présentent les idées générales et les conceptions qui se 
« développent dans une exposition méthodique. Les commencementssont 
« donc ce qui doit le plus préoccuper ceux qui enseignent. Ils re doivent 
« rien laisser s’y introduire qui ne soit parfaitement clair, ils ne doivent 
« jamais dire : avancez et la foi vous viendra. » Le D' Marchand ajoute : 
(page 86) : 

— « L'enseignement primaire est donné à des enfants de 6 à 12 ans. 
« Pendant ces années l'esprit s'éveille et chaque chose le frappe, la 
« moindre semence de science trouve un terrain neuf et germe avec une 
« rapidité incroyable. Ce sont ces 6 ou 7 années que l’on doit utiliser 
« pour ensemencer le champ fécond des intelligences enfantines, tout en 
« se gardant de les fatiguer par des détails qui leur rendraient le travail 
« ardu et trop difficile. » 

Le D' Marchand termine ainsi: « Ces quelques notions habilement 
« inculquées à l'enfant, nous semblent suffisantes pour leur donner le 
« goût de pousser plus loin leurs études. Dans toute cette période, on 
« devra se garder de nomenclature et on devra réserver cette difficulté 
« pour ceux qui, déjà intéressés, demanderont d'eux-mêmes, un guide 


À 


À 


(1) Attaché au Ministère de l’agriculture, secrétaire adjoint de la Société Royale 
Linnéenne de Bruxelles. 

(2) Jardinier en chef du Jardin botanique de l’Université de Leide. 

(3) Mathématicien. Préface de sa géométrie, 


RARES 


« pour se reconnaitre au milieu des notions qu'ils ont déjà acquises et de 
« celles qu'ils veulent désormais acquérir.) p. 88. » : 

Grâce à l’image, plus de longues et pénibles heures d'étude. 

On peut ainsi, au lieu de surmener l'intelligence des enfants, 

1° Faciliter l'étude, la rendre agréable et utile; 

90 Tuer le livre bavard, phraseur, plein d'une science surfaite où les 
mots les plus biscornus sont de véritab'es épouvantails pour l'enfant ; 

8° Vulgariser les noms et les formes des choses à étudier; 

4° Faire connaître les qualités utiles ou nuisibles des plantes; 

5° Préparer l'enfant à l'herborisation, c’est à dire à l’étude aidée de 
l'expérience tant vantée par Carl Vogt : « Plus nous avançons dans les 
« sciences exactes, » a dit ce savant, « plus l'activité pratique, l'expé- 
« rience, viennent à occuper le premier plan, tandis que l'étude et 
« l'enseignement théoriques s’effacent davantage (1). » 

6° Ne pas charger la mémoire de choses inutiles, mais faire pressentir 
la nécessité de termes qui, plus tard, véritables synthèses, permettront 
aux hommes des mêmes études, de se comprendre sans discussions 
inutiles ; 

7° Faire admirer la nature jusque dans les choses les plus tb les 
plus dédaignées autrefois, alors que le savant chercheur n’y avait pas 
porté sôn œilet son esprit; 

8° Attacher l'homme à cette nature, son domaine, sa richesse, son 
bonheur, sa consolation... s'il sait voir que, parti lui-même de rien, il 
pénètre aujourd’hui les secrets d'une création si vaste qu’elle n’est point 
finie encore. 


Le professeur devra faire remarquer que de très-nombreuses plantes 
cullivdes existent à l’éal sauvage ou primitif. En comparant les deux 
états, il saura indiquer les résultats d’une culture bien entendue et les 
moyens employés pour obtenir l'amélioralion et la variété des espèces. 

Il aura également recours aux tableaux indiquant les organes des 
plantes ; toutefois il s'en servira avec discrétion, afin de ne pas empièter 
sur des connaissances au dessus de l'intelligence des enfants. Il initiera 
ces derniers à des faits généraux, capables d’éveiller, dans leur esprit, 
l'amour de l'étude et le désir de savoir. Ces phénomènes entrevus 
serviront de base aux recherches expérimentales qui viendront bientôt. 

Écoutez M. J. J. Kickx (prof. de botanique à l'Univ. de Gand), p. 37 : 
« Si les horticulteurs comprenaient ce que l'on entend par un groupe 
« naturel, par famille, genre, espèce, on ne les verrait pas si souvent 


(1) Citation du travail de M. Léo Errera, docteur agrégé à l’Université de 
Bruxelles, Carl Vogt. Zin frommer Angrif auf die heutige Wissenschaft. Breslau, 
1882 (p. 8 des rapports préliminaires). 


« chercher à obtenir un greffage ou une hybridation dans des conditions 
« absolument impossibles. » 

Comme tout se complique dans l’enseignement! Que de choses, il faut 
savoir si l’on veut rester simple! 

L'hiver n’est pas propice à l'étude de la botanique. Voilà ce qu’on 
répète, sans se dire que, dans la saison du froid, la nature accomplit un 
travail merveilleux parfaitement visible à l'œil habile à chercher. La loupe 
et le microscope fournissent alors l'occasion d’admirables causeries. 
Au printemps, chacun voudra se rendre un compte exact de tout ce qu'on 
lui a annoncé, prédit, promis, et l'ordre, sublime dans sa périodicité, des 
travaux et de la puissance de la nature n’en deviendra que plus sensible. 


Chaque lecon du maitre doit être un pas de plus fait, par l'enfant, 
vers une expérience plus grande. 

Cette lecon doit être, avant tout, un plaisir, un repos, une heure 
agréable. 

Si la lecon demeure stérile, c'est que le professeur ne l’a pas bien 
préparée; c’est surtout qu’il ne sent point la beauté de ce qu’il enseigne. 


Cela dit, il est évident que la V° question du programme prend un 
aspect tout nouveau. 

Il faut que nos enfants sachent; il est nécessaire que nos écoles 
soient des laboratoires utiles. 

C'est à peine si, aujourd’hui encore, le village voit un instituteur 
capable de parler, non pas botanique, mais jardinage ou agriculture. 
C'est près de lui que les futurs travailleurs de la terre devraient se 
former, et les programmes ne prévoient pas cette nécessité ! Il en résulte 
que la routine séculaire dure encore. Ici, des instituteurs qui ne savent 
pas; là, des cultivateurs qui n'ont pas la moindre idée de la fertilité de 
la terre. « IL est vraiment triste de constater, dit M. Kemna, p. 13, 
« dans des. pays où la culture du sol constitue le seul moyen de sub- 
« sistance, pour les grands comme pour les petits, une ignorance 
« profonde des connaissances élémentaires se rapportant aux travaux 
« des champs. » 


Notre collègue M. Van Hulle (1) a bien voulu me communiquer, sur 
la IX° question du programme du Congrès, un mémoire qu’il n’a pas 
craint d'intituler vw/garisation de l'enseignement de l'horliculture; j'y lis 
ces lignes aussi justes que courageuses, (p. 10): 

« Si dans le Conseil de perfectionnement l'intérêt horticole avait voix 
« au chapitre, nous demanderions, par exemple, pourquoi les livres de 
« classe ne pourraient contenir des passages relatifs à la physiologie 
« végétale, à la multiplication des plantes, ete. Ne pourrait-on pas 


(1) Professeur à l'École d’horticulture de Gand. 


« aussi bien apprendre à lire aux enfants dans un petit livre de culture 
« que dans un autre? Les devoirs qu'on donne, les problèmes qu’on 
« fait résoudre, seraient-ils moins instructifs, s'ils avaient trait à l'hor- 
« ticulture ? 

« Les ouvrages développés, très-utiles entre les mains d’une personne 
« déjà un peu au courant, seraient tout-à-fait déplacés dans une école 
« primaire. Pour approfondir une science, il faut l'aimer; or, le goût 
« naîtra bien plus en lisant un ouvrage très-élémentaire, au moins 
« facile à comprendre, qu’en compulsant des livres trop scientifiques. 
« Au surplus, l'enfant a trop de branches diverses à son programme; 
« il ne peut rien apprendre à fond; il suffit qu’il s’habitue à aimer 
« toutes les sciences, sauf à s'attacher plus tard à celle qui aura ses 
« préférences. » 

Est-il rien de plus clair, de plus juste, de plus honnête, de plus 
pratique ? C’est un professeur qui s'exprime ainsi; il sait toutes les 
difficultés de l’enseignement et, s’il veut des améliorations et des réfor- 
mes, c’est uniquement dans l'intérêt de ceux qui doivent apprendre. 
Est-il rien de plus légitime que semblable révendication ? 

M. Van Hulle ajoute : « Si nous déconseillons l'emploi des gros livres, 
« nous préconisons au contraire les herbiers, les dessins et les imitations 
« d’après nature. Ces planches murales, ces imitations en cire etc., non 
« seulement familiarisent constamment les enfants avec les plantes, 
« mais elles servent de démonstration pratique au maitre, lorsque les 
« plantes vivantes font défaut ou quand le mauvais temps ne permet pas 
« d’aller les voir au jardin ou aux champs. 

« Collectionner tout ce qui frappe utilement la vue, créer, enrichir les 
« musées botaniques scolaires, est une des mesures à recommander 
« chaudement en vue de vulgariser l’énseignement horticole. » 

C'est bien là, il faut le reconnaitre, la conclusion à tirer d’un tel 
exposé, au point de vue de l’enseignement général et de l'amélioration de 
la fortune publique. Il y va de l’avenir de l’enseignement populaire. 
C'est pourquoi nous demandons la simplicité du moyen. 

M. Van Hulle avait dit, dans son rapport (p. 114. Travaux prélimin. 
du Congrès) : « Puisqu'il s’agit ici de l’école primaire, émettons le vœu 
« que les livres de lecture mis entre les mains des élèves renferment, à 
« l'avenir, des notions succinctes et précises concernant la physiologie 
« des plantes, leur multiplication, leur culture etc. » 


Cela fait, il resterait encore quelque chose à accomplir. 

M. E. Laurent (p. 135) dit fort bien que « le cultivateur doit protéger 
« ses plantes contre leurs ennemis. Il est certain qu’il y a un intérêt 
« de premier ordre à vulgariser dans nos campagnes quelques saines 
« notions de pathologie végétale. Pour parvenir à ce but, il y a deux 
« moyens principaux : s'adresser aux populations rurales et attirer 


ee 


« l'attention des élèves des écoles d'agriculture et d'horticulture sur les 
« maladies et les parasites des plantes. 

« Dans le premier cas, c'est aux procédés habituels de propagande 
« qu'il faut avoir recours. On devrait répandre, dans le public, de 
« petites brochures avec figures, placer dans les écoles de village, des 
« gravures représentant les parasiles sous des grossissements considé- 
« Tables. » 

Les images que j'ai prié le Congrès de vouloir bien accepter, de la part 
de MM. Hachette, rentrent précisément dans ce programme; vous y 
voyez l'insecte à l’œuvre, la destruction qu’il opère est incaleulable. 

M. Aug. Lameere{l) en est effrayé, aussi demande-t-il (p. 45) que l’en- 
seignement spécial ne soit pas limité aux écoles d’horticulture et d’agri- 
culture. « Il devrait s’infiltrer peu à peu dans le peuple par l'école 
« primaire où l’histoire des principaux parasites figurerait sur des 
« tableaux pendus aux murs de la classe. » 

M. Laurent est aussi positif. Il dit, p. 235, « De même que nous 
« avons recommandé de multiplier les gravures sous les yeux des culti- 
« vateurs dans les campagnes, de même nous proposons de mettre, à la 
« disposition des élèves de nos écoles d'agriculture et d’horticulture, des 
« ouvrages où les maladies et les parasites des plantes soient figurés. » 

Il y a, je l'espère, unanimité de vues, dans le Congrès à cet égard. Cela 
donnera à vos conclusions une force considérable, car les savants qui 
travaillent à la vulgarisation des connaissances utiles sont comme les 
artistes qui secondent leurs projets et les éditeurs qui leur donnent le 
jour de la publicité, tous ont besoin d'être soutenus et encouragés. 

Que personne ne croie que mon intention soit de blâmer la science 
pure et ceux qui la cultivent. J'agirais du reste avec un manque de tact 
flagrant, puisque j'honore profondément les hommes illustres qui sont 
ici et près desquels je me sens bien petit. J’estime, au contraire, qu'ils 
comptent déjà parmi les bienfaiteurs de l'humanité ; leurs travaux n'ont 
qu’un but, embellir et enrichir le domaine de l’humanité. Qu'il me suffise 
de nommer M. Planchon, de Montpellier (2), l'homme modeste autant que 
savant. C’est lui qui, à force de recherches, sut déterminer la maladie de 
la vigne, trouver et dénommer le Phylloxera À peine eut-il appris que 
M. Maxime Cornu (3) avait mission d'étudier scientifiquement le terrible 
insecte, qu’il se mit à sa disposition, lui livra ses notes, le conduisit par- 
tout où la maladie ravageait la vigne. Il fit plus, il voua à son jeune col- 
lègue une amitié qui ne s’est jamais démentie. Combien d'hommes sont 
capables d’un pareil dévouement ? | 


(1) Secrétaire de la Société Entomologique de Belgique. 
(2) Directeur du Jardin botanique de Montpellier. 
(3) Professeur et administrateur du Museum de Paris. 


ENTER 


Encore un mot. M. Kemna (p. 15) dit, en terminant son rapport : e IL 
« sera facile au professeur d’intercaler dans son cours de botanique quel- 
« ques indications pratiques et simples sur l’horticulture, sur la taille des 
« arbres fruitiers, sur les diverses facons de les greffer, sur les petits 
« travaux de jardinage, etc. » Je me borne à faire remarquer que Mes- 
sieurs Hachette l’ont compris également. Vous avez sous les yeux 48 ima- 
ges sur les {ravaux agricoles et industriels(1). 


M. le Président — L'assemblée remercie l’orateur de sa très-intéres- 
sante communication. 


M. Rodigas. — Je désire qu’on donne lecture des questions du 
. programme, alors on décidera de quoi on va parler 


M. Ch. De Bosschere. — J'ai déjà commencé. Voici la suite des 
questions. 

VI. Faire ressortir la meilleure méthode d'enseignement théorique et 
pratique de la botanique dans les écoles d’horticulture et d’agriculture. 
Développer ce qui doit faire partie de cet enseignement. 

VIII. Comment faut-il enseigner les notions de physiologie végétale 
dans les conférences populaires sur l’horticulture ? 

IX. Quelles sont les mesures à prendre pour vulgariser l’enseignement 
de l’horticulture, spécialement dans les centres ruraux ? Quels sont les 
moyens à employer pour propager la culture des plantes dans les classes 
ouvrières ? | 

XIII. Avantages de l'unification de l'échelle thermométrique. — 


(1) Après le congrès, j'ai fait adresser à M. Ed. Morren, Président du Con- 
gres et professeur à l'Université de Liège, une collection de ces images ; voici 
la partie de sa lettre ayant rapport à la question traitée par moi : 

« Les images botaniques de MM. Hachette sont bien faites pour éveiller l’atten- 
« tion et exciter l'intérêt: elles charment et instruisent non seulement les 
« enfants mais aussi les parents. J'espère qu'elles seront appréciées comme elles 
« méritent de l’être et que la publication continuera en se complétant. 

« Le nom français et commun des plantes figurées est ici bien suffisant,au moins 
quand il est déterminatif, comme Guimauve, Violelte, Pâquerette, Riz, Ricin, 
« Caféier, mais il n’en est pas toujours ainsi Saule, Ortie, Ciguë, Prèle, Scabieuse, 
u Fougère... on demande quel Saule, quelle Prèle, quelle Fougère, quelle Ortie. 

« Je trouve les légendes de la série zoologique mieux faites, plus explicites. Il 
« conviendrait de donner toujours le nom générique et spécifique comme: Gesse, 
« odorante, Orchis tacheté, Erable sycomore, etc., non seulement parce que les 
« choses sont ainsi dans la nature et dans le langage, mais aussi pour développer 
« l'esprit d'observation et d'analyse. 

« Excusez-moi d’énoncer cette petite observation. J’exposerai les images de 
MM. Hachette dans mon Institut botanique et je les recommanderai dans nos 
« publications. Je les répandrai volontiers. 


£ 


Ep. MORREN, 
Directeur de l'Institut Botanique de Liège. » 


Lettre du 18 août 1885 à Emile Lefèvre à Anvers. 


2h ee 


. Moyens à mettre en œuvre pour arriver à l'adoption générale de l'échelle 
centésimale. | 

X VIT. Quels sont les remèdes employés jusqu'ici contre les ravages des 
pucerons et quels résultats ont-ils donnés ? 

XX. Convention internationale phylloxérique de Berne. Proposition 
d'en unifier et d'en généraliser l'application dans tous les pays. 

M. le Président. — Vous voyez combien nous sommes pressés par le 
temps. Toutes les questions dont on vient de vous donner lecture doivent 
être discutée dans la séance de ce matin et dans celle de l'après-midi. Il 
faut donc faire votre choix. 

M. Rodigas. — Un mot à propos de la question XIII : Avantages de 
l'Unificalion de l'échelle thermomé!ique (1). 

Je me bornerai à relire les conclusions de mon rapport. Nous avons 
l'honneur de proposer au Congrès de vouloir émettre les vœux suivants : 

1° de voir s'établir promptement une échelle thermométrique unique ; 

2° de voir adopter de préférence l'échelle centésimale, * 

3° de voir, en attendant que la réforme soit adoptée, les publicistes 
horticoles indiquer dans leurs écrits, la réduction en degrés centigrades 
des chiffres de température donnés d’après l'usage de leur pays respectif. 
- Aïnsi les Anglais qui se servent de l'échelle Fahrenheit indiqueraient 

en même temps les degrés centigrades. 

Chacun dans son pays préfère se servir de son système, comme c'était 
le cas pour le pied antique. Mais pour arriver à une solution comme on 
l'a fait au sujet de l’unité métrique qui commence à étre admise partout, 
pourquoi n'émettrait-on pas le vœu qui est indiqué dans les conclusions 
de mon rapport ? 

M. le Président. — Le vœu est exprimé d’une facon très-claire. 
Voulez-vous passer immédiatement au vote ? (Adhésion). 

Ce vœu est adopté à l’unanimité. 

M. Planchon. — Je demande qu'on revienne sur la question V du 
programme : dans quelle mesure conviendrail-il de développer l'enseigne- 
ment de la bolanique, de l'agricullure et de l’horticulture dans les établis- 
sements d'instruclion moyenne. 

M. le Président. — La discussion est continuée sur cette question. 


M. Planchon. — Nous venons d'entendre pour la millième fois les 
reproches adressés aux savants, aux botanistes Sur leur nomenclature. 
Lorsqu'on à voulu dans la science se servir uniquement des noms vul- 
gaires on .a compliqué la langue au lieu de la simplifier et il en est 
résulté les erreurs les plus graves. 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » le mémoire de M. E. RoniGas, 
p. 345-347. 


7608 


Un botaniste éminent, Lindley, dans son Vegelable Kingdom, a eu 
l’idée de mettre les noms vulgaires à la mode. Quand il n’en trouvait pas 
il en fabriquait avec des terminaisons de son choix. Il se fait aujourd’hui 
que l'ouvrage si remarquable de cet éminent botaniste renferme des 
noms qui sont devenus des énigmes même pour les anglais. Souvent le 
même nom vulgaire s'applique à des choses tellement différentes que 
cela donne lieu aux plus grandes méprises. 

Nous reconnaissons sans doute qu’il faut se mettre à la portée des gens 
da monde et des enfants; nous ne sommes pas des pédants, des savants en 
us qui veulent parler latin même à l’école primaire. Et si dans la nomen- 
clature nous mettons généralement le nom latin à côté du nom écrit dans 
notre langue, c'est pour être plus clairs et être compris partout. 


M. E. Lefèvre. — Ce que j'ai dit, c'est en me plaçant au point de vue 
élémentaire, et si ces Messieurs, au lieu de professer dans une chaire, 
professaient dans une école primaire, ils comprendraient mieux les difi- 
cultés qui résultent de certaines expressions cherchées qui reviennent 
continuellement. Ouvrez un livre de science, vous verrez que le savant, 
au lieu de chercher à vulgariser ce qu'il dit, parle toujours pour ceux 
qui savent. 

Je ne lui en fais pas un reproche, mais je serais très-heureux que l’on 
s'efforcat de simplifier les noms le plus possible et que toujours, à propos 
d’une définition ou d’une observation quelconque, on n’entassät pas des 
mots qui ne sont compréhensibles qu'au moyen d'études très longues et 
très spéciales. 

Je demande que, dans tous les ouvrages qui ont pour but l’enseigne- 
ment élémentaire et même l’enseignement supérieur à un certain degré, 
les savants aient pitié de ceux qui ne sont pas savants. Je me féliciterais 
pour ma part de voir ce progrès partir du Congrès d'Anvers. (4 pplaudis- 
sements.) 


M. Ch. De Bosschere. — Lorsque la Commission organisatrice a in- 
troduit la 5° question au programme, elle a simplement voulu continuer 
l'œuvre du Congrès botanique de 1880. Alors la question que M. Lefèvre 
vient de traiter a été discutée en séance spéciale. Des conclusions ont été 
présentées au Congrès botanique par notre honorable secrétaire M. Mar- 
chal, conservateur au jardin botanique de Bruxelles. Ses conclusions sont 
à peu près conformes aux idées qui viennent d'être émises par M. Lefèvre. 
Je dis à peu près parce qu'il y a certaines choses que je ne puis approu- 
ver dans les discussions soulevées par cet honorable membre. 

Il est inutile de reprendre une question qu'on à traitée à fond 
en 1880. Les conclusions adoptées par le Congrès de cette époque ont été 
mises à exécution par notre gouvernement. Nous avons donc obtenu 
pleine et entière satisfaction à cet égard. 


Oo 


Peut-être existe-t-il des ouvrages sur lesquels, au point de vue où l’on 
s’est placé, il y a quelque chose à redire, mais nous vous prions de vous 
occuper de l’enseignement moyen, de l’enseignement secondaire, le seul 
dont il soit question pour le moment. 

Je regrette vivement que M. Lefèvre ait saisi une occasion inopportune 
pour présenter sa thèse. S'il avait bien voulu prévenir d'abord l'assem- 
blée, on lui aurait assigné une heure à laquelle il lui aurait été loisible 
de développer ses idées. 


M. Lefèbre. — Pour ma part je n'ai point de regrets et je suis sûr 
que les idées que j’ai émises feront leur chemin dars le Congrès. 


M. le Président. — La discussion est close; nous passons à la 
question VI. 

Faire ressortir la meilleure méthode d'enseignement théorique et 
pratique de la botanique dans les écoles d'horticullure el d'agricullure. 
Développer ce qui doit faire parlie de cet enseignement. 


M. Niepraschk. — J'avais l'intention de répondre à la VIe question, 
mais ayant lu l'excellent travail de M. Vernieuwe, j'ai abandonné cette 
idée, car tout dans ce travail est dit si clairement et si nettement que je 
ne saurais plus rien y ajouter. D'ailleurs, je suis convaincu que tous ceux 
qui, comme moi, s'occupent de l'instruction des élèves en horticulture, 
seront complètement d'accord avec l'honorable rapporteur. 

Cependant, il y a un point sur lequel je voudrais attirer l'attention 
des membres du Congrès, c’est l’enseignement de la botanique dans les 
écoles supérieures, dans les lycées. (1) 

Messieurs, j'ai pu constater que la plupart des élèves qui sortent des 
classes supérieures des lycées pour entrer dans une école d'horticulture 
supérieure, avaient oublié en grande partie ce qu’ils avaient appris de la 
botanique. Je me suis demandé quelle pouvait être la cause de cette 
situation; j'ai trouvé qu’elle réside dans le fait que dans les lycées et 
autres écoles supérieures, la botanique n’est enseignée que dans les 
classes inférieures et qu'on ne s’en inquiète plus dans les classes supé- 
rieures. C’est ficheux pour les élèves qui commencent des études 
d’horticulture et il serait désirable et même nécessaire qu’on modifiàt 
sous ce rapport, le plan d’études et qu’on trouvaät le moyen d'enseigner 
aussi la botanique dans les classes moyennes et supérieures. 


M. le Président. — Si personne ne désire plus prendre la parole sur 
la même question, nous passerons à la suivante : 


(1) Voix aux « Rapports préliminaires les mémoires de MM. J. J. Kickx, 
pp. 55-39, T, VERN:EUWE, pp. 121-127. et Cars HANSEN, pp. 134-135. 


AGDE 


Comment faut-il enseigner les notions de physiologie végélale dans les 
conférences populaires sur l'horticullure ()? 

Personne ne demande la parole ? — Nous passons à la question : 

IX. — Quelles sont les mesures à prendre pour vulgariser l'enseigne- 
ment de l'horticullure, spécialement dans les centres ruraux ? Quelsvsont 
les moyens à employer pour propager la cullure des plantes dans les classes 
ouvrières (À) ? | 

M. Benary a la parole. 

M. Benary. — Si parmi les vœux qui seront formulés dans ces réu- 
nions, il en est un qu'il serait utile de voir réaliser, c'est certes celui 
qui se trouve dans le mémoire que M. Witte a présenté sur la IX": 
question qui nous occupe en ce moment et qu’il propose comme une 
des mesures à prendre pour vulgariser l'enseignement de l’horticulture : 
c'est la création de jardins scolaires. 

Messieurs, j'ai demandé uniquement la parole pour vous prier d’en- 
visager cette excellente idée aussi à un autre point de vue plus impor- 
tant encore, celui de l'hygiène ou de l’état sanitaire des élèves. 

Je crois, Messieurs, que la création de jardins scolaires constituerait 
un moyen puissant pour venir en aide à ceux qui, dans tous les pays 
d'Europe, font des efforts des plus louables pour arriver à la construction 
d'écoles bien exposées, bien aménagées, bien aérées, avec de grandes 
salles de classe où les élèves, souvent au nombre de 40 à 50, séjournent 
pendant 3 ou 4 heures sans interruption. Vous n’ignorez pas que ni les 
gouvernements ni les communes ne craignent de faire de grands saeri- 
fices pécuniaires pour faire de mieux en mieux sous ce rapport. Nous 
n'avons qu'à comparer l’état actuel des classes avec celui de jadis, pour 
qu'immédiatement nous nous sentions disposés à nous féliciter des 
progrès réalisés dans cette voie. 

Ceux d’entre vous, Messieurs, qui comme moi, parcourent souvent 
la campagne, auront remarqué sans doute que ces écoles sont, pour la 
plupart très-mal placées et se trouvent exposées au soleil, à tel point 
qu’on se demande où les élèves pourraient bien prendre leur récréation. 
On croit sans doute bien faire en plaçant ces écoles au centre de la 
commune afin que les professeurs et les élèves n'aient pas une trop 
longue course à faire pour y arriver. Mais dans les villages et les petites 
villes il n’y a pas de grandes distances à parcourir pour arriver à une 
des extrémités de la partie bâtie; on devrait donc plutôt construire les 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » le mémoire de M, E. LAURENT, p. 119- 
120. 

(2) Voir aux &« Rapports préliminaires » les mémoires de MM. H. J. VAN HULLE:; 
p. 113-118, H. Wirre, p. 128-131, Van RisseGnem, p. 343-344, et H. MILLET, 
p. 367-369. 


Ts 


écoles à l’un ou l’autre bout du village, dans un endroit ou règne le 
calme. Les terrains n’y étant pas très chers, il serait facile, nous 
semble-t-il, d'y créer les jardins scolaires dont parle M. Witte. 

Ces jardins scolaires seraient appelés à rendre des services sérieux, 
surtout si vous y plantiez des arbres, de grands arbres qui donneront de 
l'ombre, si vous y eréez un petit bocage silonné de sentiers où les élèves 
se proméncraient pendant les heures de récréation et respireraient de 
l'air pur, de l'ozone si vous voulez, qu'ils ne trouvent plus dans les 
classes à la fin de la première lecon de la journée, On peut aller plus loin 
et dire que, pendant la belle saison, certaines lecons pourraient se don- 
ner dans ces jardins sous l’ombrage des arbres, des leçons où les élèves 
peuvent se passer de la plume et de l’encrier. On pourrait aussi se dis- 

- penser de renvoyer les enfants pendant les fortes chaleurs comme cela se 
fait souvent. . 

Si les petites communes voulaient créer des jardins scolaires comme 
ceux dont je viens de vous entretenir, il est probable que les grandes 
villes songeraient bientôt à suivre leur exemple. 

Je termine, Messieurs, en déclarant que si ce Congrès réussissait 
à réaliser l’idée de la création des jardins scolaires, il pourrait se mon- 
trer fier d’avoir obtenu un pareil succès. 


« 


M. Palacky. — Je suis heureux d'apprendre au Congrès que dans 
mon pays les jardins scolaires existent depuis 15 ans. 

Tout maître d’école doit apprendre l’arboriculture à l’École normale. 
Ce n’est donc pas une nouveauté. J'ajouterai donc, pour étre sincère, 
que jusqu’à présent les résultats obtenus par ce système n'ont pas été 
brillants. 


M. Rodigas. — Je désire rendre hommage aux choses excellentes que 
M. Benary a dites et signaler en même temps les conclusions de deux 
rapports qui ont été remis à la plupart des membres du Congrès, au 
moins à ceux de notre pays. 

Les jardins scolaires, le jardin attenant aux écoles, ont certainement 
du bon. S'ils ne donnent pas toujours les résultats voulus, c’est probable - 
ment parce que les instituteurs ne sont pas encouragés comme ils 
devraient l'être. Sous ce rapport, je tiens à faire remarquer à ceux d’entre 
vous qui ont une influence quelconque sur les sociétés d’horticulture — 
et c'est le cas de presque vous tous — ce qui se pratique dans la pro- 
vince de Namur depuis de longues années. 

Tous les cinq ans la Société provinciale de Namur organise des con- 
cours. Un jury dont j'ai fait partie déjà 4 fois avec M. Del Marmol, le 
Président de la Société, se rend sur les lieux, va examiner les jardins, 
distribue des récompenses importantes, et encourage par conséquent dans 
une certaine mesure ceux des instituteurs, qui soignent le mieux leur 


ee 


2: (UE 


jardin. Ce sont presque toujours les meilleurs instituteurs qui obtiennent 
ces récompenses et ceux qui ont les élèves les mieux dressés sous tous les 
rapports. 

Nous avons constaté,en outre, avec plaisir, que la plupart de ces insti- 
tuteurs que nous avons eu l'occasion de primer dans les concours ont été 
nommés, à la suite de nos visites, inspecteurs cantonaux de l’enseigne- 
ment primaire dans la province. 

L'exemple donné par la Société agricole de Namur mérite d'être 
signalé. 

M. de Gerlache. — Uu simple mot, Messieurs, au nom des amateurs 
et en l’abscence d’autres que moi qui aiment tout ce qui a rapport à la 
botanique, aux plantes, à la végétation et qui n’ont pas le bonheur de 
comprendre très-bien tous les termes de la science. 

Ne pourrait-on pas dresser la liste des meilleurs ouvrages à consulter 
pour les étymologies grecques et latines des mots ? Comme les travaux 
du Congrès seront consignés dans une brochure qui nous sera distribuée, 
nous pourrions puiser là de précieux renseignements. Cette liste, pour la 
facilité de tout le monde, pourrait être publiée en français, ainsi que dans 
d’autres langues. 


M. le Président. — Vos paroles seront inscrites dans le compte-rendu 
de la séance; le vœu que vous avez formulé sera donc ainsi naturellement 
exprimé et il n’est pas douteux qu'on y donnera suite. 


M. Wittmack. — Il est à regretter que l'Allemagne n'ait pas beau- 
coup de jardins scolaires et que les jeunes instituteurs n’aiment pas de 
s'occuper de jardinage. 

. Dans notre société d’horticulture de Prusse nous avons tenté très sou- 
vent de réagir contre cette tendance et nous avons cherché à intéresser 
à nos efforts le gouvernement et tous ceux qui ont quelque influence. 
Mais les jeunes instituteurs sont tellement occupés pendant les 3 années 
qu’ils passent à l'École normale, qu'ils n’apprennent pas grand'chose 
relativement au point qui nous occupe. Ils sont bien forcés de suivre les 
cours de pomologie et d’arboriculture, mais en général ils regardent celà 
comme une chose inutile. 

Nous avons obtenu de meilleurs effets quand nous nous sommes adres- 
sés aux instituteurs qui étaient déjà en place. Lorsqu'on encourage les 
instituteurs des villages et des petites villes à planter des arbres et à 
créer des jardins, ils ne s’y refusent pas. Ces instituteurs qui vivent à la 
campagne ont beaucoup plus de goût sous ce rapport que les normalistes, 
mais il y a encore de grands progrès à réaliser à cet égard. 

Notre gouvérnement — comme cela se pratique ici et en France — 
organise des cours au printemps et à l'automne et les instituteurs vien- 
nent y apprendre l’arboriculture, surtout l'élevage, le greffage, la taille 
des arbres fruitiers. 


Lo ie 


En Angleterre et en Hollande on a fait des distributions de plantes aux 
ouvriers. Je prierai ceux qui connaissent cette question de s'en expliquer 
devant vous plus en détail. On a voulu essayer également à Berlin de ce 
système, mais on y a renoncé parce qu'on a remarqué qu'il est très 
difficile de contrôler ces plantes. ; 

On peut facilement donner des boutures pour les plantes en pot, mais 
il est malaisé de reconnaître si c'est la même plante que l’ouvrier repré- 
sente en automne et s’il ne l’a pas achetée au marché. Dans les petites 
villes, la chose peut se pratiquer facilement. Il existe là une Commission 
de surveillance dont le contrôle peut être sérieux, mais dans les villes 
comme Berlin, ce contrôle est presque impossible. 


M. Baltet. — C’est en Belgique que l’enseignement de l’horticulture 
a toujours été le plus développé depuis un grand nombre d'années. Si le 
point de départ de ce mouvement, comme l’a dit M. Rodigas, émane des 
environs de Namur, nous devons nous rappeler que les présidents de 
Sociétés, que les Comices agricoles ont trouvé jadis dans Pierre Joi- 
gneaux, un des nôtres, un auxiliaire puissant. Il a contribué à la propa- 
gation de l’horticulture et de son enseignement. Efforcons-nous, à notre 
tour de l’imiter, lui et ses successeurs. 

En France, nous avons institué les conférences qui sont données par 
des praticiens, dans les jardins et les vergers et l’enseignement de l’hor- 
ticulture est inscrit au programme de nos écoles. Ce que devra contribuer 
beaucoup à propager le goût de l’horticulture dans les campagnes, ce 
sera l'exemple fourni par les jardins attenant aux maisons d’école; là 
l'instituteur déjà formé à l’école normale, peut diriger un enseignement 
pratique des plus efficaces. Le maitre apprendra aux enfants à planter, à 

- semer, à faire des pépinières; c’est ainsi que l’on s'attache à la culture et 
au toit paternel. Il distribuera aux élèves des bons points utiles, se rap- 
portant à l’histoire naturelle ou au jardinage, et même de petits traités 
élémentaires. Les compositions qui sont faites journellement pourront 
emprunter leur sujet de rédaction à la botanique ou aux diverses bran- 
ches de l’économie rurale. 

Il est un autre moyen d'instruction : ce sont les promenades, les 
excursions, les visites aux exploitations, aux expositions horticoles et 
agricoles avec explications et démonstrations sur le terrain. Les élèves 
aiment beaucoup ce mode d’enseignement. Aussi disent-ils toujours 
après ces leçons pratiques : « Nous en avons appris plus dans éette 
journée d’excursion que pendant plusieurs semaines à l’école. » 

Ils ne se doutent pas cependant que c’est parce qu’ils ont appris à 
l’école les premières notions d'agriculture qu’ils peuvent voir avec fruit 
les bois, les champs et les jardins et s’y intéresser toujours. Espérons 
que les excursionnistes et les auditeurs aux Cours et aux Ecoles d’horti- 


ru 


J 


M ee 


culture jouiront de certaines facilités de voyage, couse on le voit en 
Belgique. 

Les encouragements, toutefois, font rarement défaut ici. Les Sociétés 
et les administrations se montrent disposées à récompenser et les maîtres 
et les élèves.«En forçant la jeunesse à apprendre à semer, à planter, 
à greffer, nous aurons contribué beaucoup plus à empêcher l'émigration 
des campagnes vers les villes, que par tant d’autres moyens qui ont été 
préconisés. Cultivateurs, propriétaires, citadins, ouvriers trouveront 
toujours au jardin, satisfaction et profit. 

La jeune fille ne doit pas rester étrangère à la culture des légumes et 
des fleurs, à l'emploi des fruits. Son rôle n’est-il pas d'assurer le bien-être 
et la joie à la maison ? 

Les cours pratiques d’arboriculture fruitière, de culture potagère ou 
d'entretien des jardins d'ornement sont suivis et goûtés par la popula- 
tion de tout âge et des deux sexes. L'État, les Conseils généraux ou 
municipaux, les Sociétés horticoles subventionnent les professeurs et 
publient souvent le résumé des lecons. 

L'’horticulture et ses sœurs viticole et sylvicole sont démontrées dans 
nos écoles supérieures ou moyennes d'agriculture, aussi bien que dans 
les fermes-écoles. Le personnel enseignant se recrute plus facilement 
aujourd'hui, grâce à la création de l’École nationale d’horticulture de 
Versailles si habilement dirigée et installée au milieu d’autres riches 
collections. Nous avons là une pépinière de professeurs, de chefs de 
culture, de maïtres jardiniers, destinée à rendre de grands services au 
pays. 

Je n'’insiste pas en présence du personnel enseignant des écoles d’horti- 
culture de Gand, de Vilvorde, de Tournai. 

Vous le voyez, Messieurs, nous avons largement emprunté à la nation 
qui nous offre l'hospitalité en ce moment même. D’autres États ont suivi 
la même voie. 

S'il nous fallait démontrer nos sentiments de reconnaissance, il suffi- 
rait de vous rappeler avec quel entrain nous nous associons aux témoi- 
gnages de sympathie décernés à vos savants et dévoués professeurs. 


M. Nierpraschk.—Je ne suis pas tout à fait de l'avis de M.Wittmack. 

Dans les pays rhénans, il existe des petits jardins à l’usage des écoles 
et on encourage les maîtres d'école en leur donnant quelques centaines 
de sujets à greffer. C’est surtout pour les arbres fruitiers qu’on entretient 
ces jardinets ; cela se pratique beaucoup dans les environs de Cologne; 
grâce à ce système les élèves réalisent des progrès très-satisfaisants. C’est 
un exemple qu'il serait bon d'imiter et dont on recueillerait les plus 
grands avantages. 


M. Fischer de Waldheim. -- A Varsovie, il y a un établissement — 
c'est le « Jardin pomologique » qui a pour but de propager la culture 


Et Ce 


des plantes utiles et surtout de celles qui se rapportent à la pomologie. 
Le gouvernement accorde une subvention de près de 5000 roubles pour 
l'entretien de ce jardin. Il y a près de 30 élèves praticiens qui y travail- 
lent et qui y apprennent comment il convient de cultiver, de tailler etc. 
les arbres fruitiers. On pousse le plus possible à la propagation des 
espèces utiles et nouvelles. Le but de cette institution est de tâcher de 
généraliser dans le pays autant que possible la plantation et la culture 
de ces arbres fruitiers. Chaque maïtre, chaque inspecteur ou directeur 
d’une école de l’enseignement du degré inférieur a le droit de demander 
chaque année un certain nombre‘d’arbres fruitiers qui lui sont délivrés 
gratuitement. Dans ces écoles à études du degré inférieur, il y à des 
instituteurs qui apprennent à connaître la culture de ces arbres. Vous 
comprenez, Messieurs, que cette institution peut porter des fruits, puis- 
qu'il a des arbres (Æüilarité). C’est un excellent procédé pour propager 
l’horticulture et spécialement la pomologie. Cette institution n’était peut- 
être pas connue jusqu'ici. C’est pourquoi je me suis permis de la signaler 
à votre attention. 


M. Van Hulle. — Vous avez pu lire dans les rapports préliminaires un 
résumé de mon travail, je prends la liberté d'en déposer sur le bureau 
une demi-douzaine d'exemplaires. Ils seront remis aux personnes qui 
s'intéressent spécialement à cette question. 


M. le Président. — Le Congrès vote des remerciments à M. Van Hulle. 


M. Magnus. — Chez nous l'administration envoie des professeurs 
nomades que nous nommons en Allemagne Wanderlehrer. 

Ils vont de village en village et enseignent populairement la greffe et 
tout ce qui se rattache à l’arboriculture. 

Ils commandent les espèces et les variétés d'arbres fruitiers d’après le 
climat et les conditions particulières de chaque endroit. 


M. Wittmack. — Les conférences de professeurs existent même au 
Japon et — chose étrange — les Japonais paraïssent avoir été les 
premiers qui avaient des instituteurs nomades. 

Je n’ai pas encore recu de réponse au sujet des plantes qui sont 
distribuées aux ouvriers. J'ai lu tous les rapports, mais dites moi donc, 
Messieurs de la Hollande, vos expositions sont-elles bonnes, utiles ? 
Et vaut-il la peine d'introduire cette institution en Allemagne ? Faites 
vous de cela une œuvre de charité, de philanthropie et l’amour des plantes 
at-il été plus répandu à la suite de vos expositions ? 


‘M. Krelage. — Quoique je ne sois pas préparé à discuter cette ques- 
tion, j'en dirai quelques mots en réponse à ce que vient de dire M. Witt- 
mack. Les distributions de plantes aux ouvriers et les expositions de 
fleurs qui permettent de constater les soins qu’ils leur ont donnés est une 


Le 


OS 


chose excellente si elle est bien appliquée, mais dans Ie cas contraire, elle 
peut offrir certains dangers et tourner à la plaisanterie. Il faut qu’on 
puisse contrôler l'emploi qui est fait des plantes et reconnaître si celle 
que l’ouvrier présente en automne est bien celle qu’on lui a remise 
sous forme de très jeune plante au printemps. Il y a un moyen de s’en 
assurer. Il s’agit de mettre une petite pierre marquée dans le pot de 
facon à ce que les racines des plantes touchent déjà un peu la pierre. On 
pourrait recourir à d’autres procédés. On peut par exemple faire des 
visites d'inspection chez les personnes qui ont recu des plantes. 

M. Wittmack a demandé si cette institution offrait de l'utilité pour les 
grandes villes. Je n’ai pas fait d'expériences à ce sujet. 

Dans les grandes villes on devrait procéder par quartiers, faire de 
petites associations qui auraient le contrôle des plantes. 

Le nombre dés plantes distribuées en Hollande, par ville, est environ 
de 4 à 5 mille. Dans une ville comme Berlin, il en faudrait 50,000. Le 
champ est bien vaste mais on pourrait diviser la ville ou tout au moins 
les quartiers habités par les ouvriers, en douze sections ayant chacune 
une organisation spéciale. Un grard centre comme Berlin doit être néces-. 
sairement divisé si on veut y faire avec fruit les distributions de plantes. 


M. Ch. De Bosschere. — Je me permets de vous demander s’il entre 
dans vos intentions de déclarer close définitivement la discussion des trois 
premières questions proposées à l'assemblée générale. Cet après-midi on 
commencera par la 17° question pour entamer ensuite la Convention 
phylloxérique. Je sais que plusieurs membres du Congrès désirent 
prendre la parole sur une des trois premières questions. Ces Messieurs 
pourront-ils parler alors que les objets à l'ordre du jour sont épuisés ? Je 
crois qu'il conviendrait qu’il en fût ainsi. 

M. le Président. — Aucune objection n'étant faite à cette proposition, 
je la déclare adopté. 

Notre ordre du jour se trouve ainsi entièrement réglé. 

La séance est levée à midi et demi. 


+ 


ET": Assemblée générale du 3 août 1885. 


Présidence de M. KRELAGE, délégué du Gouvernement des Pays-Bas. 


Sommaire : XVII" question du programme : Quels sont les remèdes employés 
jusqu'ici contre les ravages des pucerons et quels résultats ont-iis donnés ? 
MM. Ronicas, DruDE, DE NoBEeLE, NIEPRASCHK, DE SELYS-LONGCHAMPS, 
HoVELACQUE, WESMAEL, VAN HULLE, CH. DE BOSSCHERE, VAN HEURCK, WITT- 
MACK. — XX" question du programme : Convention internationale phylloxé- 
rique. Proposition d’en unifier et d’en généraliser l’application dans tous les 
pays. MM. Cornu, VAN HEURCK, WIiTTMACK, RoniGas, CH. DE BosSCHERE, 
KRELAGE, BALTET. 


. La séance est ouverte à 21/2 heures. 
L 
Siègent au bureau : MM. KRELAGE, président, CH. DE BossCHERE, 


secrétaire-général, MARCHAL et Ropicas, secrétaires. 


M. Ch. De Bosschere. — M. Sava Petrovitch, le délégué du gouver- 
nement de la Serbie, vient de faire hommage au Congrès de deux 
ouvrages de botanique : 1° la flore de Serbie; 2° un fascicule de plantes 
rares des environs de Belgrade. 

Ces deux ouvrages seront soumis à l'examen des membres du Congrès. 


M. le Président. — Nous abordons la XVII° question de notre 
programme : « Quels sont les remèdes employés jusqu'ici contre Les 
ravages des pucerons et quels résullats ont-ils donnés ? » (1) 


M. Rodigas.— La XVIIe question de notre programme a été suffisam- 
ment développée par deux de nos confrères de Gand, MM. L. De Nobele 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » les mémoires de MM. L. SPAE-VANDER- 
MEULEN, p. 48-49, AD. VAN DEN HEepe, p. 108-110, L. DE NoBeLE et Ep. 
PyNAERT-VAN GEERT, p. 259-268, 


et 


et E. Pynaert-Van Geert, ainsi que par un confrère de Lille. On a indiqué 
comme un des remèdes actuellement en vigueur, le tabac employé d’une 
certaine façon. Il s’agit, non plus de fumigations, mais de la vaporisation 
du tabac. Ce remède, je désire le constater ici, est très-efficace. IL tue 
directement les insectes sans trop nuire aux plantes. Je vois entrer un de 
mes honorables confrères de Belgique, M. de Nobele. Je lui cède volontiers 
la parole. 


M. Drude (Saxe). — Nous avons employé au Jardin botanique de 
Dresde le remède indiqué par M. Rodigas et qui consiste à brûler des 
extraits de tabac. Nous l'avons notamment utilisé pour la culture de la 
Victoria Regia. Les insectes ont été tués en peu de jours. 


M. De Nobele. — Vous avez pu voir, Messieurs, par le rapport que 
j'ai soumis au Congrès que je ne conteste nullement l'efficacité du jus de 
tabac, bien au contraire. Je suis convaincu qu'il constitue un insecticide 
puissant. À mon avis, en s'adressant au jus de tabac on ne s'adresse pas 
à la source qui doit fournir un principe actif suffisamment concentré aux 
conditions les plus économiques. Mes études ont porté sur la recherche de 
ce principe. Une opinion courante est qu’il réside dans la nicotine. Or, la 
chimie est là pour démontrer que cette croyance est erronnée. Dans les 
conditions ordinaires, quand le milieu chauffé n’est pas alcalin, si on 
chauffe une solution de nicotine, la nicotine, ne se dégage pas. 

Il y a donc lieu de rechercher ce qui la remplace. Mon opinion est 
formelle à ce sujet : ce sont les sels ammoniacaux. 

Les composés ammoniacaux agissent d’une facon directe sur les 
insectes. A la suite de cette 1'° théorie, j'ai fait, dans un sens scientifique, 
quelques petites expériences dont je vais vous exposer sommairement le 
résultat. J'ai pris du tabac en nature, je l’ai fait infuser pendant un 
certain temps dans l’eau. Puis, j'ai dirigé la vapeur des matières ainsi 
préparées sous des cloches où se trouvaient des insectes. Lorsque je 
débarrassai ces vapeurs des sels ammoniacaux en les faisant passer sur 
des substances imprégnées d'acide sulfurique, l’effet était nul. Quand on 
supprime le tabac et qu'on fait arriver sous des cloches à insectes du 
carbonate ou du chlorure d’ammoniaque, on constate que l’on a affaire à 
un insecticide puissañt. J’appelle votre attention sur ce point. 


M. Niepraschk. — Je désire vous signaler un autre remède contre les 
pucerons qu’on emploie beaucoup dans les pays rhénans, on l'appelle 
Krepin, inventé par M. Bovenschen à Créfeld. C’est un extrait de 
Pyrethrum, à ce qu’il parait. Il produit des effets merveilleux. 
Partout où l’on emploie ce remède, les pucerons meurent tout de 
suite. 

Il offre d’autres avantages encore : il ne nuit nullement aux plantes, 
pas même aux tiges jeunes et délicates. 


FINE 


M. le baron de Selys-Longchamps.— Les remèdes préconisés sont-ils 
applicables à la cochenille du pommier ? Il s’agit ici d'arbres en plein 
air auxquels on ne peut pas appliquer les fumigations. J’ai lu le rapport 
préparatoire. On y prononce le mot « cochenille » mais sans insister sur 
le remède. Chez nous, le Kermès est le plus grand fléau du pommier. 


M. Rodigas. — Les remèdes qui ont été recommandés sont aussi nui- 
sibles au règne animal qu’au règne végétal. Je suis étonné d'entendre 
M. Niepraschk recommander la poudre de Pyrèthre comme un remède 
efficace. Il résulte de mes expériences que la poudre de Pyrethrum, quand 
elle est brulée, endort l’insecte mais ne le tue pas. Le lendemain 
l’insecte se réveille après quelques heures de repos. Si l'insecte à une vie 
éphémère, ce sommeil forcé lui est très préjudiciable mais n’entraîne pas 
sa destruction. 


M. Niepraschk.— Je me suis peut-être mal exprimé. Je n'ai pas voulu 
parler d’une poudre, j'avais en vue un extrait liquide très concentré 
propablement préparé à l'alcool qui tue l’insecte. 


M. Rodigas. — Je demanderai à M. De Nobele s'il connaît cet extrait. 
M. De Nobele. -— C'est une essence. 


M. Hovelacque. — Dans quelle proportion emploie-t-on cette essence ? 
Est-elle utilisée pure ou avec un mélange d’eau ? 


M. De Nobele. — Je ne saurais le dire. 


M. Niepraschk. — Il y a beaucoup de remèdes recommandés contre 
les pucerons lanigères qui se trouvent sur les arbres fruitiers. J’en 
emploie un qui est fort simple : on prend une graisse quelconque, on la 
chauffe un peu et à l’aide de pinceaux, on l’étend sur les tiges ou sur 
les parties quelconques de l’arbre ravagées par les insectes. Ceux-ci 
meurent aussitôt faute de respiration. La graisse a l'avantage de 
s'étendre rapidement partout, même dans les fentes de l’écorce, où se 
trouvent des œufs des insectes. 


Un membre. — L'alcool ne peut-il servir? 
M. Niepraschk. — I fait du tort aux jeunes tiges. 


M. Wesmael. — A l’aide d'alcool étendu d’eau on détruit parfaite- 
ment les pucerons lanigères. En moins de quelques semaines je me suis 
débarrassé de ces insectes qui détruisaient tous mes pommiers. 

Un autre moyen très-pratique consiste à faire usage de pétrole qu’on 
étend avec un pinceau. Seulement il faut avoir soin, quand vous vous 
servez d'alcool, que votre jardinier ne le boive pas. Dans ce cas le remède 
n'opère pas. (Aires). 


M. le Président. — La section considère-t-elle la XVII° question 
comme suffisamment élucidée? Aucune conclusion ne nous est soumise, 


CRE 


M. Rodigas. — Je voudrais cependant que le Congrès aboutit à une 
conclusion. Ne pouvons-nous pas recommander l’usage du tabac ou. 
mieux encore des sels ammoniacaux. Disons aussi que l’on peut employer. 
l’alcool sans aucun effet dangereux pour les plantes. Mais je n'oserais 
pas préconiser l'emploi du pétrole si ce n’est en quantité excessivement 
minime. Encore doit-on le diluer dans l’eau. Nous savons tous que le 
pétrole tue autant deplantes que d’insectes. 


M. Van Hulle. — Il est à regretter que nous n’ayons pas parmi nous 
un des rapporteurs de cette question, M. Van den Heede. En son absence, 
permettez-moi de vous exposer en quelques mots ce que j'ai pu constater 
chez lui. Il s’agit de la destruction des insectes qui attaquent les plantes 
cultivées sous verre; nous parlerons tout à l'heure des plantes exposées 
en plein air. Voici un moyen que M. Van den Heede emploie avec le 
meilleur succès sur ses plantes de serres presque constamment tourmen- 
tées par des insectes, notamment les Gardenias et autres de cettecatégorie : 
il recourt tout simplement à la vaporisation du jus de tabac très concentré 
dont vient de vous entretenir M. Rodigas. J’insiste sur ces mots : 
jus de tabac très concentré. On se pourvoit de réchauds d'une forme 
spéciale, c’est-à-dire de tubes très longs, On en charge la partie inférieure 
de charbon que l’on allume. Quand le feu commence à se ralentir on y 
introduit le récipient contenant le jus de tabac qui ne tarde pas à entrer 
en ébullition. Les émanations qui en proviennent suffisent pour tuer tous 
les insectes, sans nuire en quoi que ce soit aux parties les plus tendres 
des plantes. Voilà, Messieurs, le procédé suivi par M. Van den Heede 
et dont il obtient les meilleurs succès. | 

Observons cependant qu’il est bon d'allumer le réchaud à l’air libre et 
de ne l’introduire dans les serres que quand les charbons ne fument plus. 

Quant aux pucerons lanigères auxquels M. le baron de Selys-Long- 
champs a fait allusion tout-à-l’heure, je suis un antagoniste des remèdes 
curatifs. Je me déclare au contraire partisan des moyens préventifs. 
Aussi dois-je plutôt déconseiller d'appliquer les remèdes indiqués, 
mêmes efficaces, sur les grands arbres de nos vergers, par exemple. En 
admettant que le remède indiqué tout à l’heure soit efficace, et il l’est, 
pensez-vous que ce ne soit rien de grimper sur de hauts arbres, d'atteindre 
à toutes les branches et de les brosser avec le liquide que l’on vient de 
citer ? ; 

Pour de petits arbres il en est autrement. Voici ce qui m'est arrivé 
dernièrement. — J'entre dans une pépinière. Je passe devant des 
centaines de pommiers de 7 à 8 ans et qui étaient vraiment de beaux 
arbres. Plus loin j'apercois le chef de la pépinière à genoux, en train de 
barbouiller avec du pétrole allongé d'eau, les greffons de l’année : — 
« Que faites vous là, lui dis-je ? » — « Je lave, me répondit-il, mes 
arbres avec du pétrole mélangé à un autre liquide, » — « Peine inutile, 


he 


fis-je, cela ne sert à rien, il faut tuer l'insecte, si non il reviendra 
l'année prochaine, » — « J'ai toujours eru ce remède peu sérieux, me, 
repliqua mon interlocuteur. Cependant, les pommiers de 7 à 8 ans, cette 
belle marchandise que vous avez remarquée, se sont trouvés il y a 5 ou. 
6 ans dans le même état-que ces greffons. Je les ai lavés une seule fois, le 
remède a agi, à preuve que mes arbres se portent aujourd'hui à 
merveille. » 

Si ce remède qui consiste à laver les parties atteintes avec du pétrole 
allongé d'eau a produit de tels effets chez ce pépiniériste, nous pouvons 
en conclure qu'il est recommandable, pour les jeunes arbres au moins. 


M. Rodigas. — Je suis de l'avis de M. Van Hulle. Ce qu’il vient de 
dire m'engage à insister pour que le Congrès veuille décider que l'emploi 
du jus de tabac et mieux encore des sels ammoniacaux, qui seuls agissent 
dans le suc de tabac très concentré, est un remède très actif contre les 
insectes dans les serres. 

Nous pouvons affirmer en second lieu qu’à l'extérieur on peut employer 
l’alcool avec de l’eau. 

En troisième lieu, comme l’a dit M. Van Hulle, l'emploi du pétrole 
peut-être bon, mais à la condition qu'il soit très dilué dans l’eau. Sans 
cette précaution, ce dernier remède peut-être considéré comme étant aussi 
nuisible aux plantes qu'aux insectes. 


M. le Président. — Les conclusions de M. Rodigas sont-elles appuyées ? 


M. E. Lefèvre. — Je ne crois pas que le Congrès puisse adopter des 
conclusions en ces termes. Des opinions sont émises; elles peuvent être 
prises en considération. Mais pourquoi les codifier? Nous ne pouvons pas 
conclure d’une manière si péremptoire. 


M. Rodigas. — Je suis étonné de ce que vient de dire M. Lefèvre. Tous 
les remèdes dont on vient de parler sont basés uniquement sur l’expé- 
rience et non pas sur des considérations purement théoriques. Le Congrès 
veut-il simplement se rallier aux propositions que je viens d'émettre sous 
réserve des expériences qui seront faites plus tard ? 


M. E. Lefèvre. — Je ne fais pas du tout une opposition systématique 
aux propositions de M. Rodigas. Je crois que la plupart des membres 
présents éprouvent les mêmes scrupules que moi. Je veux bien admettre 
que j'ai tort, mais je ne sais pas pourquoi ceux qui pensent autrement 
que moi auraient raison. 


M. Rodigas. — C’est pourquoi les conclusions sont mises aux voix. 


M. Cornu. — Nous expérimentons au Jardin des plantes à Paris, 
depuis près de 2 ans, l'emploi de la vaporisation du tabac; elle nous 
donne les meilleurs résultats. Nous employons le liquide qui est mis 


Rd 


en vente par les Manufactures de l’État sous le nom de jus de tabac; 
c'est un produit noir, qui nous est livré à O fr. 75 c. le litre(l). 

Nous avons été amenés à supprimer l’usage des réchauds; la colonne 
d’air sec et chaud, les particules de cendre soulevées par cette colonne 
montant du foyer occasionnent toujours des dégâts dans les serres, sur 
les Orchidées et les Fougères notamment. Les émanations du charbon 
sont toujours dangereuses pour les plantes délicates. Voici ce dont j'ai 
eu l’idée et qui nous a très bien réussi. On fait chauffer dans le four de 
la serre un certain nombre de briques. Ces briques, portées à une tempé- 
rature très haute, sont disposées dans un plateau de fonte. Quand élles 
sont toutes rangées, le jus de tabac qui a été placé dans une casserole 
muni d'un long manche est renversé brusquement à deux ou trois 
reprises sur cette surface chaude; aussitôt répandu, il entre immédiate- 
ment en ébullition. Au bout de 2 ou 3 minutes, une serre, même de grand 
volume, est remplie de vapeur de nicotine, Avec une vingtaine de briques 
disposées sur un double rang, on peut facilement vaporiser plus d’un 
litre de liquide. La vaporisation est immédiate. Elle se pratique sans 
aucune espèce de difficulté et le jus répandu ainsi fume encore pendant 
assez longtemps. 

Une fois le vase renversé, le jardinier doit se retirer rapidement, 
fermer la porte et laisser le poison faire son action. Même avec du jus 
de tabac à une haute dose, on n’a à craindre en général aucun accident 
non seulement pour les plantes molles, mais encore pour les fleurs 
d'Orchidées. La vaporisation du jus de tabac peut donc être considérée 
comme l’un des moyens curatifs à la fois les plus puissants et les plus 
simples pour la destruction des insectes nuisibles dans les serres. 


M. Van Heurck. — J'ai essayé le pétrole très dilué, à la dose d’un 
verre à bière dans un seau d'eau. Le D' Duquenne a indiqué le premier 
ce moyen. 


M. Wittmack. — On n’a pas encore cité le remède de M. Nessler, à 
Carlsruhe, contre les pucerons lanigères. Il est reconnu comme très- 
efficace. Il consiste en un composé de savon noir, avec 10 p. c. d'alcool 
amylique, 20 p. ce. d'alcool à 90 degrès et 70 p. c. d’eau. La partie la 
plus active dans ce mélange est l'alcool amylique, qui forme aussi le 
fond de l’insecticide Fichet. 


(1) La vaporisation du jus de tabac, substituée à la fumigation à l'aide des 
feuilles, donne des résultats bien plus complets; ce fait a été découvert par 
M BorzaRb, chef-jardinier chez M. le Be de Rothschild, à Paris; une sous- 
cription privée a été faite à ce propos pour lui offrir üne médaille d’or en 
récompense de cette découverte. 

(Note ajoutée à l'impression). 


PTE 


M. Cornu. — La composition est tenue secrète. Je ne la connais pas. 
Ce liquide est excellent. 


M. Wittmack. — Ce remède est surtout usité en plein air et pour les 
petites plantes. Il est vraiment efficace. On le recommande aussi dans le 
Grand-Duché de Bade, dans les provinces rhénanes, etc. Beaucoup de 
. Sociétés le préconisent aussi. Il y a encore un autre remède, c’est celui 

de M. Massias, actuellement jardinier de l’Université de Heidelberg. 
M. Massias trempe les plantes couvertes de pucerons ou de thrips, etc. 
dans de l’eau chauffée à 56° C(45°R), mais seulement pendant 4 secondes 
et il le répète plusieurs fois (voir Gartenseituig, 1882, p. 497). 


M. Rodigas. — Je suis heureux que MM. Cornu, Van Heurck et 
Wittmack aient soutenu ma thèse, qui renverse celle que M. Lefèvre 
aurait voulu voir triompher. 

Je maintiendrai done mes conclusions si vous me le permettez, sauf à 
y ajouter les mots suivants : « tout en tenant compte des expériences 
ultérieures que feront d’autres personnes non présentes à ce Congres, 
nous recommandons d'une manière spéciale les remèdes qui viennent 
d'être indiqués ». 

Je pense que de cette facon nous ne nous engageons pas trop. Nous 
ne combattons ni la science ni les expérimentateurs. 


M. Van Hulle. Je pense qu'il y a lieu de remercier tout spécialement 
M. Cornu pour la communication qu’il a bien voulu nous faire dans 
l'intérêt de nos horticulteurs. L'efficacité de la vaporisation du jus de 
tabac n’était plus douteuse. Mais ce qui laissait à désirer, c'était le mode 
d'emploi. Les essais faits à Gand ont donné lieu à des inconvénients qui 
provenaient surtout des réchauds. Le système de M. Cornu évite cette 
difficulté. Les horticulteurs de Gand, qui sont fort nombreux, sauront en 
profiter. 


M. Durand. — Je demanderai deux mots d'explication aux membres 
qui ont parlé de l'emploi des sels ammoniacaux. 

On a mentionné aussi le carbonate d’ammoniaque. Ce sel a une forte 
odeur. Je comprends son action. 11 a été question du chlorure d’ammo- 
niaque, lequel est un sel inodore. Je voudrais savoir d’une façon exacte 
comment on applique ces deux substances et si leur action est équi- 
valente. A-t-on employé d’autres sels encore? Et est-on arrivé toujours 
aux mêmes résultats ? 


M. De Nobele. — Cette question est assez complexe. Lorsqu'on parle 
de poison pour les insectes, il faut d’abord se rendre compte de quelle 
facon les toxiques agissent. L'alcool amylique pénètre dans l'organisme. 
Il y fait entrer un élément qui n’est pas normal aux tissus, mais les sels 
ammoniacaux n’agissent pas de la même façon. En injectant de l’ammo- 


en, 0 


niaque, sous une cloche renfermant des parties de plantes recouvertes 
d'insectes on n'obtient pas de résultats complets. En s'adressant, au 
contraire, à des substances qui renferment de l’ammoniaque c’est à dire 
aux sels ammoniacaux, capables de former des cristaux, on obtient des 
résultats concluants. 

Les insectes respirent par de petites ouvertures dites s/igmates. Je 
suppose que les sels vaporisés viennent pénétrer dans les stigmates à 
un moment déterminé et s’y trouvent à une température plus basse que 
celle de leur vaporisation. Les cristaux se reforment alors et bouchent 
les organes respiratoires, ce qui fait périr les animaux par asphyxie. 
Ce que je dis ici est une simple hypothèse. Quand on prend une cloche et 
qu'on y injecte de l'ammoniaque à une faible dose, l'effet est nul. Avec 
du sulfate ou du chlorure et en général avec n'importe quel sel ammo- 
niacal, on obtient des résultats positifs. Les insectes sont détruits. Cette: 
expérience est facile à faire. Elle n’exige qu'une cloche ét un sel 
ammoniacal. 

Je pense qu’on peut expliquer ainsi l’action des sels ammoniacaux 
alors que l'ammoniaque libre n’opère pas. Je ne veux pas dire que si on 
employait suffisamment d’ammoniaque, on ne tuerait pas les insectes, 
mais on aurait l'inconvénient de faire périr en même temps les plantes. 


M. Baïllon. — Ne pouvant ici parler de tous les remèdes proposés, 
surtout de ceux que je n’ai pas personnellement employés, je ne jugerai 
que deux modes de traitement : : 

1° Le tabac. Je l’ai vu essayer depuis plus de dix ans, toujours avec 
succès. On peut dans certains cas l’employer en décoction plus ou moins 
faible; mais les inconvénients de ce procédé ont été signalés. Plus ordi- 
nairement, nous mélangeons avec deux tiers d’eau un tiers du liquide 
qui se vend à Paris aux horticulteurs. La masse est placée dans la serre, : 
sur un petit réchaud de charbon de terre bien allumé, dans une bassine de 


fer, jusqu’à réduction totale en une boue brune et épaisse. Tous les 
insectes sont tués. 


2° L'insecticide Fichet. Cette préparation, dont le secret né m'est pas 
connu, réussit dans le plus grand nombre des cas; on en enduit les parties 
des arbres, notamment de ceux de plein air, des fruitiers, pour détruire 
les insectes, le puceron lanigère par exemple, etc. 

Il est évident que le chlorhydrate d'ammoniaque n’agit pas simplement 
à la façon du carbonate d’ammoniaque ou de tout autre sel qu’il suffit de 
chauffer pour obtenir un dégagement d'ammoniaque. Au point de vue 
pratique, je dois dire que le tabac que j'ai vu employer se vend à Paris au 
siége de la Manufacture centrale des tabacs. Je ne sais quelle préparation 
peuvent avoir subi les détritus de fabrication qu'on livre au monde 
horticole et il n’y a guère que les jardiniers qui emploient cette 
substance, désignée à tort par eux sous le nom de nicotine. Dans nos: 


== AN = 


serres, les modes d'application du remède varient; mais quand on prend 
les précautions voulues, auxquelles il a été fait tout à l’heure allusion, 
les résultats demeurent les mêmes. La prétendue nicotine dégage dans la 
serre une très-forte odeur de tabac, mélangée d'une autre odeur bien plus 
désagréable que celle du tabac que brülent les fumeurs. Tous des insectes 
sont tués, à ce que j'ai vu, sans aucun inconvénient pour les plantes. Je 
parle des espèces délicates et, entre-autres, des Orchidées. J'ai vu de ces 
plantes en fleurs soumises à ce traitement sans qu'un seul périanthe füt 
altéré. On peut donc affirmer que le résultat final est bon. 


M. le Président. — Je crois devoir remercier les orateurs qui ont si 
bien élucidé cette question. 

Je mets à présent aux voix la proposition de M. Rodigas. 

— Cette proposition est adoptée. 

Nous aborderons à présent la XX° question de notre programme : 
« Convention internationale phylloxérique de Berne. Proposition d'en 
unifier et d’en généraliser l'application duns tous les pays. » (1) 


M. Cornu. — La question des transports horticoles et des lois prohi- 
bitoires qui s’y rapportent est peut être une des plus graves question 
pour l’horticulture depuis quelques années. Elle met en jeu des conflits 
d'intérêts respectables; elle peut être étudiée au point de vue théorique 
ou pratique. Dans ces divers cas elle a donné lieu aux débats les plus 
passionnés. 

En France et dans d'autres pays, il y a des intérêts viticoles considé- 
_ rables, énormes, même; c’est sous la pression des viticulteurs effarés 
qu’on à tout d’abord édicté des lois prohibitives d’une dureté extrême. La 
première convention de Berne avait dépassé ce but et on a vu, dès qu’elle 
est devenue exécutoire, se dresser de véritables impossibilités ; il a fallu 
la modifier. 

_ Dans le 4° fascicule du Bulletin du Congrès, M. Krelage a tres juste- 
ment rappelé l'historique de la question, les réclamations de l'Allemagne, 
de la Suisse et de la France. 

Pour ce qui concerne notre pays, permettez-moi d'indiquer brièvement 
ce qui se passa. 

Les horticulteurs furent profondément émus des exigences de la loi 
nouvelle ; Les diverses Sociétés d’horticulture du pays tout entier s’enten- 
dirent et dans une pensée commune envoyèrent des délégués qui se 
réunirent en séance plénière au siége de la Société centrale et nationale 
d’horticulture de France. 


— 


() Voir aux « Rapports préliminaires » les mémoires de MM. J. H. KRELAGE, 
p. 329-342, le sénateur Rossi, p. 364- 366, et 0. BRUNEEL, p. 312-376, 


= fo 


Le président qui fut désigné était M. le comte Horace de Choiseul, 
sous-secrétaire d'État au Ministère des affaires étrangères, président de 
la Société d’horticulture de Melun. On désigna un certain nombre d’hor- 
ticulteurs les plus importants pour aller avec le Président, adresser 
leurs réclamations au Ministre de l’agriculture. Ces horticulteurs, vous 
les avez vus, se trouvent en grande partie à Anvers, soit comme membres 
du Congrès, soit comme membres du Jury de vos magnifiques expositions. 
C'étaient MM. Truffaut, de Versailles; Edouard André, l’un des direc- 
teurs de la Revue horticole; Louis Leroy, d'Angers; Nanson, d'Orléans. 
Ces demandes furent assez mal accueillies par la Commission supérieure 
du Phylloxéra où un seul membre, celui qui parle devant vous, eut 
l'honneur de les soutenir et de faire triompher ses convictions. 

On décida de se joindre aux États (l'Allemagne et la Suisse) qui deman- 
daient de modifier l’ancienne législation et une réunion nouvelle fut 
décidée. Elle se réunit le 3 octobre 1881, on daigna me choisir pour 
représenter mon pays. 

Une innovation des plus heureuse fut l’adjonction d'experts spécia- 
listes, horticulteurs véritables; il y en eut deux pour la France, 
MM. Louis Leroy et André et M. Auguste Van Geert pour la Belgique; 
la conférence fut de courte durée, mais leur influence sur les débats fut 
considérable et ne contribua pas peu à les asseoir sur leur véritable 
terrain, celui des faits. 

L'horticulture avait à lutter contre des intérêts redoutables. En 
France, la viticulture constitue une branche importante de la richesse 
publique; la production moyenne est annuellement d'environ 35 millions 
d’hectolitres de 20 à 30 fr. l’hectolitre en moyenne. L’horticulture est 
bien loin d'atteindre une importance aussi grande. 

Malgré l'inégalité de leur valeur commerciale, l’une des industries ne 
doit pas anéantir l’autre; il faut qu’elles puissent vivre en bonne intelli- 
gence ; les craintes exagérées doivent être réduites à de plus justes 
proportions. Dans l'esprit des viticulteurs, l'examen attentif des faits 
scientifiques et solidement établis, a ramené plus de sérénité; on a 
compris d'où venait le véritable danger et on a abandonné les sévérités 
excessives comme inutiles, vexatoires et poussant à la fraude. Mais dans 
tous les pays un semblable apaisement ne s'est pas encore produit et 
le commerce horticole international éprouve, de ce chef, une opposition 
très-grande à certaines frontières. 

Il y a un second ordre de prohibition qui part d’une source tout à fait 
différente et qui cependant n’a pas une importance moindre; il s’agit du 
conflit des intérêts horticoles proprement dits, opposés les uns aux 
autres, de nation à nation. Ce point doit être traité d’une façon très 
délicate, aussi est-il inutile d'y insister longtemps; certains législateurs 
pensent que les prohibitions sont de nature à favoriser les produits natio- 


ep TONES 


naux : de telle sort que le pays qui ne recoit rien de l'étranger encourage 
ainsi le travail intérieur, la production nationale. 

Ce n’est point une question de doctrine, ni un principe d'économie 
politique admis par les uns et attaqué pour les autres; les variétés 
horticoles, les plantes nouvelles, les porte-greffes de choix ne se créent 
pas à volonté comme les outils de l’industrie, comme des produits 
manufacturés : la prohibition absolue ne peut se soutenir; la prohibition 
partielle même est dangereuse pour l’horticulture qu’elle veut secourir. 

Nous sommes, en France, partisans d’une liberté suffisante pour ne pas 
trop gêner nos transactions horticoles, mais qui ne compromette pas nos 
intérêts viticoles ; or ces intérêts viticoles sont de beaucoup supérieurs 
à tous ceux des autres pays de l’Europe. 

La convention nouvelle signée le 3 novembre 1881 a apporté un adou- 
cissement réel à l’ancienne législation si dure. Ce qui caractérise les 
dispositions nouvelles c'est que les causes du danger véritable sont 
particulièrement spécifiées; que le commerce des vignes est hautement 
dénoncé comme périlleux : c’est en effet là qu’il faut veiller avec le plus 
grand soin ; c’est la vigne qui est le grand coupable. 

L'Allemagne, l’Autriche-Hongrie, la Belgique, la France, le Portugal, 
la Suisse, ont adhéré à la convention nouvelle. La Serbie et la Hollande 
s’y sont ultérieurement ralliées. La Belgique était représentée diploma- 
tiquement à la conférence par M. Delfosse, son ministre à Berne, qui à 
défendu les intérêts horticoles communs de la Belgique et de la France, 
avec une courtoisie parfaite. 

Malheureusement, deux grands pays pour lesquels l’horticulture a 
une importance considérable à cause de leur climat, n’ont pas voulu 
s’adjoindre à la Convention, ce sont d’une part l'Italie et de J’autre 
l'Espagne. Ce sont les deux puissances dont les délégués avaient le plus 
insisté pour introduire les conditions (si dures qu'elles ne purent êtres 
exécutées) de la première convention et cependant elles ne voulurent 
point y adhérer. 

Elles n’envoyèrent point de délégué à la Conférence destinée à adoucir 
la législation première. 

L'Italie et l'Espagne ont, sans contredit, des vignobles d’une haute 
importance que ces deux nations ont, avec juste raison, le devoir de 
protéger; mais il est incontestable, d'autre part qu’on y a exagéré les 
dangers que fait courir l'introduction des plantes vivantes. On peut dire, 
sans blesser personne, que la contrebande s'exerce à ces frontières d’une 
manière bien connue. 7 

Au mois d'octobre 1884, il y a eu à Turin, à propos de la brillante 
exposition nationale, un Congrès phylloxérique international, où j'ai eu 
l'honneur encore, de représenter mon pays. Dans cette réunion qui com- 
prenait un grand nombre de sommités viticoles de l'Italie, on pouvait 


A es 


déjà observer les heureux symptômes de l’apaisement des esprits au sujet 
des transactions horticoles internationales : deux orateurs seulement ont 
réédité ces théories bien dûment condamnées depuis longtemps sur la 
possibilité d’introduire le phylloxéra entre les tuniques des bulbes 
d’ognons et les racines des plantes à fleurs. M. le chevalier Costa, direc- 
teur du Musée zoologique de Naples, naturaliste éminent, a fait justice de 
ces craintes puériles : il a été approuvé par l’assemblée entière; enfin on 
peut dire qu'un grand nombre de membres du Congrès phylloxérique, 
notamment les présidents des Sociétés d’horticulture étaient partisans 
d'ouvrir largement les portes aux végétaux vivants venant de l'étranger : 
le Congrès a émis des vœux assez libéraux, ce qui paraît l’avoir retenu 
dans cette voie, c'est la crainte de ne pas être suivi par l'opinion publique. 

Il est désirable au plus haut point que cette opinion publique, éclairée 
par des savants Zoologistes tels que l'Italie en possède, revienne à une 
appréciation plus juste des faits et que cet important État donne son 
adhésion à la convention de Berne. 

L'Espagne, de même, devrait être moins sévère; ce pays est déjà très 
fortement contaminé; des vignobles d’une étendue énorme sont déjà 
envahis par le Phylloxera; le transport des produits de l’horticulture 
est une cause très faible de danger à côté de ce grand foyer d’infection. 

On peut représenter à cette puissance que le véritable péril consiste 
non pas dans le commerce loyal, mais dans la fraude. J'ai recu comme 
la plupart de nos confrères de la Société nationale d'Horticulture de 
France, une annonce très singulière, sous pli owvert. Le directeur d’une 
agence résidant à la frontière nous avertissait qu’il est en mesure de se 
charger de toute espèce d'exportation de plantes vivantes; et cela 
moyemant une rémunération relativement faible. 

L'existence d'agences semblables est parfaitement connue du gouverne- 
ment, au delà des Alpes; on sait que les plantes pénètrent ainsi en contre- 
bande et qu’il est pour ainsi dire impossible de s'opposer à cette fraude, 
qui s'exerce sur une grande échelle, par les montagnes. 

M. Édouard André a signalé devant les membres de la conférence de 
Berne, ce fait que des genres et des espèces de plantes nouvellement 
introduites en Belgique et en Angleterre étaient signalées presque 
aussitôt dans les expositions florales en Italie. Les plantes peuvent donc 
franchir les frontières malgré les lois prohibitives. Une loi sage et 
prudente mettrait un terme à cette contrebande que certaines personnes 
peu délicates ne répugnent pas à employer, et qui, sans contrôle possible, 
est la véritable source de contamination. 

Si, en effet, un commissionnaire peut faire entrer une Broméliacée ou un 
Palmier, qui l'empêchera d'introduire des Vignes, cause unique de taches 
nouvelles dans un pays sain : cet intermédiaire s'arrange pour demeurer 
inconnu et reste insaisissable. C’est probablement à des envois de ce 


+ ae 


genre qu'il faut attribuer les taches phylloxériques trouvées à la fron- 
tière italienne et quine peuvent être attribuées aux vignobles en contact, 
qui sont demeurés sains jusqu’à une assez grande distance. 

Des faits de cette nature sufliraient, à mon sens, pour engager les 
puissances à adhérer à la convention de Berne, ou tout au moins à 
permettre l'introduction des produits de l’horticulture dans des conditions 
déterminées. 

Il est nécessaire de faire remarquer qu’il y a dans l’histoire naturelle. 
du Phylloxera et dans les circonstances de sa propagation, des points qui 
sont depuis longtemps hors de doute et parfaitement acquis à la science; 
on ne peut les rejeter et ils sont le point de départ de toutes les lois 
régissant les transports horticoles. 

Je vous demande la permission de préciser ces quatre points qui sont 
absolument fondamentaux : dans toute discussion il faudra les admettre 
sinon: aucun règlement n’est possible, aucune législation ne peut être 
proposée. 

Ces propositions sont celles qui ont été admises dans la seconde séance 
plénière de la conférence de Berne ; on est forcé d'y faire appel quand on 
examine les clauses restrictives à ee au commerce horticole pour 
assurer la sécurité des vignobles. 

1° « La principale cause de l'invasion phylloxérique est le transport 
direct de l’insecte par des racines ou des fragments de racines de vignes 
(contaminées). » 

Le Phylloxera ne vit que sur des vignes proprement dites et même, 
pas sur toutes les espèces. 

2° « Le transport du Phylloxera à de grandes distances ne doit pas être, 
en général, attribué au vol naturel de l’insecte ailé; l'influence des trains 
de chemins de fer ne paraît pas avoir l'importance qu’on lui supposait. » 

La Belgique n’a pas de vignobles; cette remarque ne s'applique point 
à elle mais aux pays en continuité presque directe les uns avec les autres 
par leurs vignobles. La France avec l'Italie, l'Espagne, la Suisse. 

3° « La propagation à grande distance n’est pas déterminée par des 
Phylloxeras aptères errants; ces insectes qui sont dans ce cas sont tous 
des jeunes; ils ne peuvent vivre longtemps en dehors des vignes sans 
nourriture. » 

On aurait aussi le plus grand tort de supposer les insectes capables de 
résister à un séjour prolongé hors de terre; les transports à longue 
distance par des substances mortes, desséchées, sont de puériles suppo- 
sitions. | 

4 « Les plantes enracinées, cultivées en vases, ainsi que les produits 
de l’horticulture, non en contact avec des racines de vignes doivent 
être considérés comme sans danger. » 

Ces quatre propositions réduisent à leur juste valeur les dangers que 


6 


EE Vies 


l'horticulture peut faire courir à la viticulture. Je crois avoir le droit 
d'affirmer que beaucoup de cas de propagation par des végétaux autres 
que la vigne sont extrêmement douteux. 

J'ai beaucoup parcouru la France; j'ai visité des pays voisins : je ne 
connais pas un exemple de propagation du Phylloxera autrement que 
par le transport d’une vigne ou fragment de vigne phylloxérée dans 
un vignoble ou à proximité d’un vignoble. 

Quant au cas souvent invoqué de propagation par les instruments 
de travail, les trains de chemins de fer, par le foin, par le fumier, par 
les vêtements, les chaussures des travailleurs, par des arbres, plantes, 
dans une vigne, je n’en connais pas un seul cas authentique et démontré; 
il y a le plus souvent des indications précises du transport, volontaire 
ou involontaire, de fragments de vignes. 

J'ai fait un grand nombre d'expériences sur la contamination des 
vignes par le Phylloxera : sur six cents vignes en pots, sur les racines 
desquelles furent placés des racines phylloxérées il y en a eu peut-être 
une vingtaine chez lesquelles l’insecte transporté directement ne s’est 
cependant pas développé. 

Dans la nature, avec tous les obstacles qu’il rencontre pour gagner les 
profondeurs, le Phylloxera, même déposé sur le sol, a les plus grandes 
difficultés à trouver les racines ; que cela doit-il être quand l’insecte, qui 
est presque microscopique, doit parcourir une distance un peu notable à 
la recherche des vignes. 

Ce qui est vérilablement dangereux, c'est le commerce des vignes : aussi 
la convention de Berne l’a-t-elle laissé sous la responsabilité directe des 
gouvernements; mais pour l'horticulture proprement dite, la liberté la 
plus large doit être accordée. Les fougères, les orchidées, les plantes de 
serres, en général toutes les plantes qui croissent loin des vignes 
devraient être absolument libres. 

C’est par les échanges respectifs que l'horticulture des différents États 
s'enrichit et s'améliore; les voies nouvelles se multiplient, on prolonge 
les routes, on perce les tunnels; les tarifs de transports s’abaissent ; les 
chemins de fer apportent de loin les produits utiles : la prohibition 
annule tous ces bienfaits! 

En nous appuyant sur des données scientifiques, nous avons le droit 
de demander que tous les gouvernements prennent en considération les 
besoins de l’horticulture et en facilitent autant que possible les trans- 
actions internationales; toutefois, sans négliger en aucune facon les 
mesures véritables de prudence, les mesures étudiées longuement pour 
établir le texte de la convention de Berne sont génantes sans doute; mais 
elles permettent d'autoriser, avec des sanctions suflisantes, le commerce 
si utile pour tous, des plantes vivantes et de leurs produits. 


M. Van Heurck. — Il y a quelques années j'ai fait des expériences de 


LS Ve 


laboratoire avec des racines de vigne couvertes de Phylloxeras que 
M. Planchon avait eu la bonté de m'apporter. Je n’ai pu maintenir les 
Phylloxeras en vie, dans mon laboratoire, plus de 4 à 5 semaines. Ce fait 
confirme ce que vient de dire M. Cornu. 


M. Wittmack. — Je crois que nous sommes d'accord avec M. Cornu, 
qu’on n’a jamais prouvé que le Phylloxera ait été transporté par des 
poiriers, des pommiers ou des plantes de serre. Quand nous cherchons à 
convaincre le gouvernement allemand de cette vérité, on nous répond : 
vous autres professeurs, vous autres horticulteurs, vous tenez ce lan- 
gage, nous le savons, mais vous ne pouvez pas prouver que le Phylloxera 
ne se transporte point de cette manière et même par les sabots et les 
outils des travailleurs. 

Telle est la constante objection qu’on nous fait. Je crains fort que nous 
nous ne puissions en ce moment gagner le gouvernement allemand à un 
autre avis. 

Un grand point serait que la convention de Berne ne consistat qu’en un 
seul article ainsi concu : « le transport de vignes est interdit. » Cette 
défense suffirait. 

Mais j'ose à peine supposer d'insérer cette conclusion dans les vœux 
du Congrès, tant je crains qu’on ne l’accepte pas. Peut-être vaudrait-il 
mieux laisser la convention de Berne telle qu’elle existe. 

Je reconnais qu’on ne se montre pas trop sévère en Allemagne. Il est 
facheu x que l’Angleterre et l'Amérique du Nord aient refusé d’adhérer à 
la convention de Berne. Pour nous, en Allemagne, il est à regretter 
qu’on ne puisse pas importer des plantes de ces pays. Ainsi on ne peut 
pas même importer en Allemagne des plantes du Colorado, où jamais une 
plante de vigne n'a existé. En Hollande et en Belgique on est plus 
heureux que chez nous. On y a un paragraphe qui dit : « les plantes 
venant de pays qui n’ont pas adhéré à la convention de Berne seront 
visitées à la frontière par un expert. » 

L'Allemagne et les autres pays n’ont malheureusement pas de stipu- 
lation semblable. Faut-il que les pays qui se sont ralliés à cette conven- 
tion soient moins bien traités que ceux qui l’ont repoussée ? Nous avons 
demandé au gouvernement allemand de nous accorder la même faveur. 
On nous l’a refusé. Mais on nous a déclaré que chaque fois que nous 
* recevions des plantes d’autres pays, excepté l'Angleterre, l'Amérique du 
Nord et l'Australie où le Phylloxera existe en masse, on se montrerait 
très-large pour:chaque permission spéciale que nous demanderions. Ainsi 
nous obtenons des permissions pour chaque cas spécial, mais elles nous 
sont refusées d’une manière générale. 

Je prierai le Congrès d'émettre le vœu que tous les pays, qui ont adhéré 
à la convention de Berne, admettent librement les plantes venant des 
tropiques après qu’elles auront été visitées à la frontière par un expert. 


2 DE 


On me répondra que la chose se fait déjà à présent. Mais je voudrais 
que cette mesure füt régularisée et appliquée d’une facon constante. 
L'année dernière un importateur avait annoncé une grande vente aux 
enchères d’une collection d'Orchidées venues des tropiques, mais on ne 
voulait pas la laisser entrer directement à Hambourg et on était obligé 
de la faire entrer par la Belgique. 

Ce que nous désirons, c'est qu’on n’exige plus une autorisation spéciale 
pour chaque lot à introduire dans un pays. Je serais heureux que le 
Congrès émit un vœu dans le sens que je viens d'exposer. 


M. Rodigas. — Il est fâcheux de devoir constater, comme vient de le 
faire M. Wittmack, que les gouvernements se montrent si peu disposés 
à écouter la voix de la science avant de prendre des mesures d’un ordre 
supérieur. Je pense que les Congrès, qui ont la mission d'éclairer les 
gouvernements, doivent élever la voix pour prévenir des mesures désas- 
treuses ou pour y mettre un terme. Notre assemblée, composée des 
hommes compétents que nous avons l'honneur d’entendre ici, doit faire 
comprendre qu’on a tort de croire que les véhicules du Phylloxera se 
trouvent là où ils ne peuvent étre. Il est ridicule de faire croire au 
public que le Phylloxera se transporte, par exemple sur des bulbes; 
autant vaudrait lui dire que le Phylloxera peut se propager sur les 
plantes artificielles de M. Stein, de Breslau. Il importe que notre Congrès 
montre à tous les gouvernements combien ils nuisent aux intérêts de 
l’horticulture en laissant se répandre des idées en contradiction avec 
la science. 

Je propose donc qu’on adopte les conclusions qui nous sont soumises. 
Chaque État conservera le droit d'établir à ses frontières une quarantaine, 
mais l'essentiel est qu’on accorde une liberté aussi large que possible 
à tous les produits et objets quelconques qui ne peuvent pas transporter 
le Phylloxera. 


M. Ch. De Bosschere. — Je m'étais fait inscrire pour prendre la 
parole et pour présenter une proposition analogue à celle de M. Rodigas. 
Je suis heureux de constater que les conclusions de M. Rodigas se 
rencontrent avec celles de M. O. Bruneel, le secrétaire de la Chambre 
Syndicale des horticulteurs belges. M. Bruneel donne la liste des pays. 
qui ont adhéré à la convention de Berne. Je crois que M. Rodigas a 
répondu à votre désir à tous en demandant que tous les États soient 
instruits à fond de la question. Je propose que le comité exécutif du 
Congrès soit chargé de soumettre à tous les gouvernements le remar- 
quable exposé du représentant de la France, M. Max. Cornu. 

En l’absence de MM. O. Bruneel et A. Van Geert, qui ont été empéchés 
par une circonstance fortuite d'assister à notre séance, je me fais l’inter- 
prête des horticulteurs belges et je remercie d’une manière spéciale 


LS oHRe 


M. Max. Cornu pour les immenses services qu’il a rendus à l’horticulture 
en défendant d'une manière remarquable ses intérêts à la réunion de 
Berne. (Applaudissements). 


M. Cornu. — Je ne puis laisser passer une occasion comme celle-ci 
sans proclamer les services considérables rendus à la cause de l’horti- 
culture par M. A. Van Geert. Admis à la conférence de Bérne, M. A. 
Van Geert nous a signalé des difficultés qui, sans lui, auraient entravé 
certains arrangements. Je regrette vivement son absence aujourd’hui. 
Grâce à lui et à M. Delfosse, ministre de Belgique en Suisse, les négo- 
ciations de la convention de Berne ont été singulièrement facilitées. Si 
vous me votez des remerciments, je vous prie, Messieurs, d’en reporter 
la plus grande part sur M. A. Van Geert, président de la Chambre 
Syndicale des horticulteurs belges. (Applaudissements.) 


M. le Président. — Il me sera permis de dire quelques mots sur 
cette question qui m'intéresse autant que vous et pour la solution de 
laquelle j'ai fait quelque chose, comme M. Witimack a eu la bonté de 
le rappeler. La proposition de M. Cornu me paraît du plus haut intérêt. 
Je suis de l’avis de M. Cornu que les vœux si importants de notre 
Congrès doivent étre soumis à tous les gouvernements. Aïnsi que j'ai 
eu l'honneur de le dire dans le petit mémoire que j'ai écrit sur ce sujet, 
je crois qu’on doit aller plus loin encore. Les propositions que M. Cornu 
nous à soumises ne sont pas encore suflisantes. M. Witimack a fait 
observer avec beaucoup de raison que tous les gouvernements ont une 
tendance à se défier des mesures que l’on propose de prendre en faveur 
de l’horticulture. Nous n'avons qu’un seul moyen de remédier à cette 
opposition, c'est que des hommes compétents, des savants, rédigent des 
mémoires basés sur des expériences, pour prouver que toute contagion 
par le Phylloxera est impossible hors de la vigne. Si des publications 
semblables étaient faites en Espagne, en Italie, en Roumanie, par des 
hommes de ces pays mêmes, elles excerceraient plus d'influence que nos 
avis et, en tous cas, elles pourraient donner un poids considérable aux 
conclusions de notre Congrès. 

M. Wittmack a parlé de la position favorable de la Hoflande quant à 
l'introduction de plantes venant de pays qui n’ont pas adhéré à la con- 
vention de Berne. La Hollande est tout-à-fait sur la même ligne que la 
Belgique. Celle-ci nous a donné, dans les divers règlements de la question, 
un exemple excellent et, sauf de légères différences au point de vue légal, 
les règlements des deux pays sont les mêmes. Pour moi je considère que 
la Belgique et la Hollande sont tout-à-fait en règle en soumettant à 
leurs frontières, à l'inspection d’un expert officiel, les envois des pays 
qui n’ont pas adhéré à la convention de Berne. Une telle inspection est 
moins favorable que l'introduction simple par un certificat. Je crois que 


op 


cette thèse peut être fort bien défendue. Les mesures introduites dans 
les règlements de Belgique et de Hollande sont tout à fait dans le cadre 
de la convention et répondent ainsi à cette exigence que les pays non 
contractants ne soient pas traités plus favorablement que les autres. 
Il est désirable que tous les gouvernements suivent la même marche. 
On peut admettre des vœux généralisés comme le sont les propositions 
formulées par MM. Rodigas et De Bosschere ou basées sur les commu- 
nications de M. Cornu, mais aussitôt qu'il s’agit de règlements spéciaux 
on doit en laisser la rédaction aux divers gouvernements intéressés. 
Comment s’assurerait-on que les institutions légales d’un pays s'appli- 
quent aux dispositions arrêtées par un gouvernement voisin. Quant 
aux questions générales qui sont les mêmes pour tous les pays, je crois 
qu’il appartient à notre Congrès d'en dire quelque chose, mais les points 
spéciaux doivent être abandonnés, je le répète, à l’appréciation des 
divers pays intéressés. 


M. Ch. De Bosschere. — Je vous ai prié, Messieurs, de décider que le 
remarquable exposé de M. Cornu sera imprimé à un nombre considérable 
d'exemplaires, pour qu’on puisse le distribuer aux principaux intéressés. 
Mais en même temps je crois qu’il est fort utile que les divers gouver- 
nements sachent ce qui s’est dit aujourd’hui au Congrès international 
d'Anvers. Pour atteindre ce but, la Commission organisatrice vous 
propose d'envoyer les actes du Congrès ainsi que les rapports prélimi- 
naires à tous les gouvernements qui ont eu ici, non seulement des délégués 
officiels, mais des représentants officieux. De cette facon les commissions 
qui s'occupent de la question phylloxérique pourront suivre avec beau- 
coup de fruit vos discussions, approfondir le rapport de M. Cornu et 
arriver aux conclusions que nous désirons tous voir adopter. 

Voici la conclusion que M. O. Bruneel soumet à l'assemblée; elle est 
la même, comme j'ai déjà eu l'honneur de le dire, que celle de 
M. Rodigas. 

« Puisse le Congrès accueillir cette proposition : que tous les pays 
« adhèrent à la Convention phylloxérique du 31 novembre 1883 et 
« adoptent, en les étendant aussi libéralement que possible, les mesures 
« de réglementation intérieure et la formule du certificat édictées en 
« Belgique. » 

— Cette conclusion est adoptée. 


M. Ch. De Bosschere. — Nous avons en 2° lieu l'exposé de 
M. Cornu que j'ai proposé d'envoyer à tous les gouvernements étran- 


gers. Le Congrès se ralliera sans doute à cette proposition ? (Adhésion 
unanime). 


M. Baltet. — M. Rodigas a demandé que les végétaux fussent soumis 
à une quarantaine quelconque à la frontière, Il ne faut pas émettre ce 


? #4 


D QUE 


vœu qui pourrait être dangereux. Affirmons que les plantes en mottes, en 
racines, ne doivent pas subir de quarantaine, quelle qu’en soit la durée. 


M. le Président. — M. Rodigas n’insiste pas sur son amendement. 
Je propose d'adopter les propositions telles que M. De Bosschere les a 
formulées. (Adhésion). Quant aux discussions du Congrès nous pouvons 
laisser à la Commission organisatrice le soin d’en faire l’usage qui 
conviendra. (Adopté). 

Nous pouvons nous féliciter d’avoir terminé la discussion de cette 
importante question du Phylloxera. Puissent nos débats avoir des 
résultats fructueux. Je tiens à vous remercier, Messieurs, de votre 
concours unanime à cette œuvre. 


M. Ch. De Bosschere. — M. le Président me prie de donner lecture 
des communications arrivées au Bureau. 

La première émane de M. Lefèvre qui fait observer que l’enseignement 
primaire se subdivise en France en enseignement primaire élémentaire 
et en enseignement primaire supérieur. Par enseignement moyen on 
doit entendre l’enseignement primaire supérieur et non l’enseignement 
secondaire ou tout autre. 

M. le Docteur Drude m'a chargé de vous dire qu’il travaille en ce 
moment à une question qui vous intéresse et qui se rattache directement 
à celle que nous avons discutée ce matin : la flore du Congo. Il divise 
les régions de l'Afrique tropicale en provinces florales. 

M. Drude demande si sa communication figurera aux Actes du 
Congrès. Je crois que cette question est décidée d'avance; toutes les 
communications qui nous seront adressées paraîtront dans notre bulletin. 

Nous avons à l’ordre du jour de notre assemblée générale trois ques- 
tions qui intéressent l’enseignement : 

V. Dans quelle mesure conviendrait-il de développer l’enseignement 
de la botanique, de l’agriculture et de l’horticulture dans les établisse- 
ments d'instruction moyenne ? 

VI. Faire ressortir la meilleure méthode d'enseignement théorique et 
pratique de la botanique dans les écoles d’horticulture et d’agriculture. 
Développer ce qui doit faire partie de cet enseignement. 

VIIT. Comment faut-il enseigner les notions de physiologie végétale 
dans les conférences populaires sur l'horticulture ? 

L'heure est trop avancée pour vous prier d'ouvrir le débat sur ces 
questions, mais je prie les membres étrangers du Congrès de bien vouloir 
nous adresser à ce sujet les renseignements qui concernent leurs pays 
respectifs. Nous serons heureux d'insérer dans les Actes du Congrès les 
indications qu’ils voudront bien nous fournir. 

Il serait bon de décider dès maintenant quelles questions figureront à 
l'ordre du jour de nos deux séances de demain. 


LIT Q ER 


M. Baltet. — Au nombre des questions qui pourraient être traitées 
par les deux sections réunies je citerai la XIX°: « de l'opportunité de 
la création, dans les centres horticoles, de Sociétés de prévoyance mutuelle 
et d'épargne en faveur des jardiniers et de leurs familles. » Cette ques- 
tion humanitaire est digne de fixer notre attention. 


M. Wesmael. — Ne pourrions nous formuler l'après-midi des vœux 
au sujet des questions discutées le matin en sections ? 


M. Ch. De Bosschere. — Parfaitement. Reste à discuter quelle ques- 
tion nous aborderons demain matin dans la section d’horticulture. 


M. Baltet. — Réservons cette décision pour demain. Elle dépendra 
des membres présents. 


M. Durand. — J'appuye la proposition de M. Baltet. Il me semble que 
nous discutons un peu dans le vide en ce moment. 


M. Ch. De Bosschere. — Je ne suis pas tout à fait de l'avis de 
MM. Baltet et Durand. Mon but est d'éviter que nous ne nous trouvions 
demain matin dans l'embarras. Si nous décidons de commencer demain 
matin par la 3° question, les membres qui désirent prendre part à la 
discussion se trouveront à leur poste. Cette question vidée, la section 
verra quelle autre elle veut entamer. Les sections sont maitresses de 
régler leur ordre du jour comme elles l’entendent. (AdAésion). 


M. Wesmael. — Si les membres de la Section de botanique ne voient 
pas d’inconvénient à mettre en tête de leur ordre du jour la 3° question 
qui leur est soumise, lachose me serait fort agréable. Voici cette question: 

III. Quels sont, depuis le Congrès de Paris en 1878, les progrès réalisés 
en botanique dans les principaux pays du monde ? Installations botani- 
ques, musées, laboratoires, etc. Quelle a été, dans ces mêmes pays, 
l'influence des études botaniques sur les progrès de l’horticulture ? 

Je serais heureux de pouvoir développer demain les conclusions que 
j'ai préparés sur cette question. 

— La proposition de M. Wesmael est adoptée. 


M. Ch. De Bosschere. — Au sujet de la question XIX : 

« XIX. De l'opportunité de la création , dans les centres horticoles, de 
« sociétés de prévoyance mutuelle et d'épargne en faveur des jardiniers et 
« de leurs familles, » j'ai une proposition à vous soumettre. M. le délégué 
du gouvernement belge désire traiter cette question. J’ignore si M. Ber- 
nard, directeur au ministère de l’agriculture, à Bruxelles, sera encore 
ici demain. Voulez-vous m’autoriser à prévenir M. Bernard que cette 
question sera discutée dans notre prochaine séance du matin, mais que 


nous la remettrons à l'après-midi s’il ne peut se rendre plus tôt au 
Congrès ? (Adhésion). 


à 


RS 
So 


= aire 


M. Cornu. — Je demande que la question relative à la culture des 
Champignons utiles soit renvoyée également à la section de botanique 
comme rentrant directement dans les études de plusieurs membres du 
Congrès. Cette question pourrait même être traitée dans les deux sections 
à des points de vue différents. (Adhésion). 


M. le Président. — Si certaines questions intéressent les deux sec- 
tions à la fois on pourrait peut-être les traiter en assemblée générale 
du Congrès. 


La séance est levée à 5 heures, 


SECTION DE BOTANIQUE, 


Séance du 4 août 1885. 


Présidence de M. le D'L. Wirrmack, professeur à l'Université de Berlin. 


M. CH. De BosscnERrE, secrétaire-général, remplit les fonctions de 
secrétaire. 


Sommaire : Création d’un arboretum belge. Proposition de M. WESMAEL. — 
III" question du programme : Quels sont, depuis le Congrès de Paris en 1878, 
les progrès réalisés en botanique dans les principaux pays du monde? Installations 
botaniques, musées, laboratoires, etc. Quelle a été, dans ces mêmes pays, l’in- 
fluence des études botaniques sur les progrès de l’horticulture ? par MM. le D" 
WITTMACK, FISCHER DE WALDHEIM, H. BaiLLoN, Max. CoRNU, J. E. PLANCHON, 
Dr MaGnus, CH. DE BosscHERE. — 7"° question du programme; le rôle et l’organi- 
sation des laboratoires de botanique, par MM. le D' MAGxus, E. LEFEVRE, 
H. BaïLLon, Max. CoRNU, FISCHER DE WALDHEIM, J. E. PLANCHON, A. GRAVIS, 
WITTMACK. 


La séance est ouverte à 9 1/4 heures du matin. 


M. le Secrétaire-général. — Je crois répondre, à votre désir à tous, 
en invitant M. le professeur Wittmack à prendre le fauteuil de la 
présidence. (4 dhésion unanime). - 

Je me suis rendu ce matin chez M. le professeur Morren. J'ai le plaisir 
de vous annoncer que l’état de sa santé s’est sensiblement amélioré depuis 
hier. Je crois même pouvoir vous dire que notre honorable Président 
assistera à une partie de la séance de ce matin pour prendre congé de 
vous; il désire rentrer à Liége aujourd'hui même, afin de pouvoir se 
soigner convenablement. 


24 0 pe 


Nous avons recu comme hommage au Congrès, une flore d’un de nos 
botanistes belges, M. André Devos, conservateur du musée scolaire de 
l'État et membre de la Société royale de botanique de Belgique; c’est la 
Flore complète de Belgique. 

M. Jules BurvENICH, par une lettre en date du 3 courant, nous apprend 
que son père est gravement malade et qu'il lui sera de toute impossibilité 
de prendre part aux travaux du Congrès. 


M. le Président. — Nous avons décidé hier que nous commencerions 
aujourd'hui nos travaux par l'examen de la 3° question soumise à la 
section de botanique : 

« Quels sont, depuis le Congrès de Paris en 1878, les progrès réalisés 
en botanique, dans les principaux pays du monde? Installations botaniques, 
musées, laboratoires, etc. Quelle a été, dans ces mêmes pays, l'influence 
des études botaniques sur les progrès de l'horticulture? » (1). 


M. Wesmael. — I] y a deux mois à peine, nous étions réunis également 
dans les vastes salons de l’hôtel-de-ville d'Anvers où M. le Bourgmestre 
De Wael nous fêtait à l’occasion du Congrès agricole et forestier belge. 
Au nombre des questions mises en discussion figurait celle-ci : « Quelles 
sont les. zônes de la Belgique capables de recevoir comme plantations 
forestières les espèces de chênes américains naturalisés en Belgique? » 
J'avais été nommé rapporteur de cette question. Comme conclusion je 
demandai que le gouvernement belge créât, comme l’ont fait nos voisins 
du midi et de l'Est, un arboretum, de manière que nos agents forestiers, 
nos propriétaires,pussent trouver läréunies toutes les espèces naturalisées, 
susceptibles de rendre, au point de vue sylvicole, de nombreux services. 
Les conclusions de la section de sylviculture ont été les miennes et, à 
l'unanimité, le Congrès a émis le vœu de voir créer à Bruxelles ou dans 
les environs de lä capitale un arboretum. Depuis lors, mon idée a fait du 
chemin. Ce projet a été soumis à M. Folie, directeur de l'Observatoire. 
Pour ceux d’entre vous qui n’habitent pas la Belgique, je dirai que notre 
gouvernement fonde aux portes de Bruxelles, sur un terrain de 12 hec- 
tares, un nouvel Observatoire. Ce terrain est situé sur le territoire de la 
commune d’Uccle, dans le voisinage de la forêt de Soignes. M. le Direc- 
teur Folie à été heureux de ma proposition et je suis assuré de son 
concours. Je crois qu’il est inutile que je m'étende longuement sur 
l'utilité d’un arboretum. La France l'a reconnue; on n’a plus rien à y 
créer aujourd'hui sous ce rapport. En Allemagne nous avons vu M. le 
professeur Koch, réunir au Jardin Botanique de Berlin la plupart des 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » les communications en réponse à cette 
question : p. 137-222, et 353-360, 


> 


espèces arborescentes ligneuses susceptibles de vivre sous le climat du 
centre de l’Europe. En Angleterre, au Jardin de Kensington, existent de 
splendides collections. D’après mes renseignements, à Vienne et dans 
d’autres villes de l'Autriche et de l’Allemagne, on a également rassemblé 
tous les végétaux capables de vivre dans nos régions. 

Je demanderai donc à mes honorables collègues étrangers et belges 
d'émettre le vœu que le gouvernement crée en Belgique, à l'exemple de 
nos voisins du midi et de l'Est un arboretum (1). 

Depuis quelques jours l’administration forestière de Belgique, qui 
était placée sous la direction du département des finances a passé sous 
celle du ministère de l’agriculture. Elle se trouve ainsi où elle doit étre. 
Le gouvernement belge a consenti à opérer cette heureuse réforme à la 
suite des nombreuses réclamations que nous avons formulées dans nos 
congrès sylvicoles annuels, J'espère que l'assemblée toute entière voudra 
bien se rallier au vœu que je viens d’avoir l'honneur de lui soumettre. 


M. le Président. — Je crois que le Congrès sera unanime à appuyer 
le vœu de M. Wesmael. (Adhésion). 
Nous passons à la 3° question inscrite à notre ordre du jour : 


« Quels sont, depuis le Congrès de Paris en 1878, les progrès réalisés 
en bolanique dans les principaux pays du monde? [nstallations botaniques, 
musées, laboratoires, etc. Quelle a été, dans ces mêmes pays, l'influence 
des études botaniques sur les progrès de l'horticullure? » 


Je prierai un de mes compatriotes de dire quelques mots sur ce sujet. 
Nous avons recu le questionnaire du gouvernement belge trop tard pour 
répondre à cette question. M. De Bosschere a déjà dit dans l'introduction 
de son rapport qu'il n’avait pas été possible de recevoir les réponses. Je 
vous explique la raison de ce silence. 

Permettez moi, Messieurs, de vous entretenir un instant du Musée 
royal botanique de Berlin, qui a été créé depuis ce temps là. Ce Musée 
sous la direction de M. Eichler est, après ceux de Kensington et de 
Paris, le plus complet que je connaisse. Nous avons aussi un grand 
Musée, à l’école supérieure d'agriculture, qui a été installé depuis 1880 
dans un grand édifice. Sa partie végétale contient de riches collections 
concernant surtout la botanique appliquée. Nous possèdons depuis 1878, à 
Leipzig et à Gœttingen, des laboratoires dont on vous a déjà entretenu ici. 
Un nouveau jardin botanique avec Institut botanique sont installés à Kiel 
et si mon collègue, M. Drude, était présent, il pourrait vous parler de la 
réorganisation projetée du Jardin royal de botanique à Dresde. Ce serait 
une lourde tâche que celle de retracer tous les progrès accomplis par la 
science botanique et horticole dans tous les pays de l’Europe. 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » le mémoire de M. WESMAEL, p. 223-224, 


Mn) 


M. Fischer de Waldheim. — Je pense que Messieurs les membres du 
Congrès auront quelque intérêt à connaître les progrès que la botanique 
a accomplis depuis 1878 en Russie. Toutes les universités de Russie ont 
aujourd’hui des laboratoires de botanique. On s’y occupe non seulement 
d'anatomie et de physiologie, mais également de morphologie et de la 
partie systématique de la botanique. Ces laboratoires ont des collections 
précieuses et tous les autres matériaux nécessaires aux études. Chaque 
Université a un musée botanique assez grand pour donner une idée des 
plantes les plus intéressantes. Les élèves y trouvent des herbiers du 
pays et d’autres contrées et des échantillons d’un grand nombre de plantes 
dans des collections carpologiques, dendrologiques et microscopiques. 
La cryptogamie n’est pas oubliée, Nos collections cryptogamiques sont 
fort belles. Nous avons même, en Russie, de riches amateurs qui consa- 
crent de fortes sommes à ces installations. Les institutions établies dans 
des parties très-différentes du pays, propagent la science. Nous avons, 
par exemple, à Moscou, un laboratoire de botanique qui a été fondé il y a 
quelques années, grâce à un particulier qui n’était pas même botaniste, 
mais qui avait un grand amour pour notre science. 

Ce laboratoire de Moscou est parfaitement approprié aux études 
sérieuses. Il est installé au Jardin botanique dans un édifice à deux 
étages, muni de tous les instruments et de toutes les collections néces- 
saires. Vous voyez que cette installation est des plus convenables. À mon 
avis, de pareils établissements devraient toujours se trouver dans les 
Jardins botaniques. 

J'ai aussi quelques progrès à signaler en ce qui concerne le Jardin 
botanique de Varsovie. On y a placé un petit laboratoire. Les étudiants 
ont le loisir d’y étudier, pendant la bonne saison, les plantes du jardin, 
Il y a là également une bibliothèque assez riche en ouvrages d’horticul- 
ture et de botanique; elle est tout à fait séparée de celle de l'Université. 
J'ai tâché de fonder aussi un petit musée au Jardin botanique. L'Univer- 
sité de Varsovie elle-même possède un musée botanique doté de belles 
collections. Le laboratoire de botanique de l’Université doit être cité 
comme un établissement de premier ordre. 

MM. les membres du Congrès, qui ont visité St-Pétersbourg l’année 
dernière, ont pu se convaincre des grandes ressources que l’on y trouve 
pour l'étude de la botanique. Je n'en parlerai donc pas. Je vous citerai 
encore l'Université de la petite ville de Dorpat où, durant les dernières 
années, on a beaucoup fait pour la science. D’autres Universités russes, 
celles de Kiew, de Casan notamment, ont aussi des laboratoires de 
botanique, des musées, bref toutes les installations nécessaires. Le 
gouvernement russe ne néglige rien pour donner à toutes ces installations 
une grande valeur scientifique. Voilà ce que j'avais à dire, en quelques 
mots, sur les progrès réalisés, en Russie, dans le domaine botanique, 
durant ces dernières années, 


OL 


M. le Président. — Je remercie M. Fischer de Waldheim, au nom de 
la section, de sa très-intéressante communication. 


M. Baillon. — Cette question est tellement vaste qu'il est presque 
impossible de la traiter. Vous comprenez le sentiment d’embarras qu’é- 
prouvent les représentants d'un pays à parler de ce qui se fait chez eux; 
ils ont l’air de se décerner des éloges ou d'en réclamer pour leur patrie. 
Je ne m'occuperai donc pas du pays auquel j’appartiens; du reste, on 
peut regretter que les progrès matériels accomplis n’y soient pas plus 
considérables. Un voyage que nous avons fait en Russie et à travers 
une grande partie de l’Europe, nous permet de confirmer ce que vient 


de dire M. Fischer de Waldheim. Par suite, sans doute, du sentiment , 


auquel j'ai fait allusion il y à un instant, notre honorable collègue n’a 
pas voulu dire tout le bien qu’on doit penser du Jardin botanique 
impérial de St-Pétersbourg. Ce jardin admirable tient aujourd'hui un 
des premiers rangs en Europe. Dans les autres pays, on ne peut se 
faire une idée de cette création scientifique. L'installation des parterres 
réservés à la flore asiatique occidentale et aux plantes de plein air est 
de nature à rendre des services signalés à la science botanique, qui 
prend une si grande importance. 

Quant aux serres, elles sont d’une richesse extrême. Ce spectacle 
est merveilleux pour des gens d'Occident, Nous avons parcouru, au 
Jardin de la Tauride, sans fatigue, des serres d’une longueur de 2 kilo- 
mètres. 

Les plantes destinées à l’ornementation des domaines impériaux sont 
cultivées sur une échelle considérable et avec des procédés de reproduc- 
tion qui feraient grand plaisir à certains horticulteurs. Il est incroyable 
de voir avec quelle facilité on conduit ces plantes d'ornements. J’en 
ai été vivement frappé. 

Le laboratoire installé dans le Jardin botanique de Moscou est remar- 
quable, non par ses dimensions, car il n’est pas considérable, mais par 
l'excellence de ses installations. Je ne m'’occuperai pas de l’herbier de 
St-Pétersbourg. Sa réputation est universelle. Il va s’enrichissant de 
jour en jour, et il commence à se trouver en très-bon ordre. On n’aura 
bientôt presque plus rien à y faire. Au point de vue de l’ordre, le 
Musée botanique de Berlin est l’un des plus parfaits sous le rapport de 
l’arrangement. Cependant, il y a encore quelque chose à faire dans ces 
établissements. Aucun n’est à la hauteur de celui de Kew. Son grand 
mérite consiste dans l’ordre parfait des collections. On sait instantané- 
ment à quel point de vue on trouvera tel ou tel objet. Tous les établis- 
sements analogues de l’Europe n'ont qu’une chose à faire : c’est d’imiter 
ce qui se fait à Kew; ce doit être leur idéal pour le plus grand profit 
de la botanique. 

Le jardin de Kew, tout splendide qu'il soit, ne sera peut-être pas 


7 és fé. 


LE a 


aussi utile, au point de vue de l'enseignement, qu’un jardin planté comme 
celui de Vienne ou celui de Berlin, mais le jardin de Kew est supérieur 
en ce qui concerne les plantes d'ornement et les serres de toutes sortes. 

Au point de vue de ce que doit être une école de botanique, il n'y 
a rien à comparer à ce qui existe à Vienne. Avec les améliorations 
nouvelles, avec les agrandissements auxquels on travaillait encore 
l’année dernière, le jardin de Vienne est l’école la plus utile qui existe 
en Europe. Il est très bien disposé, très bien planté par groupes naturels, 
En outre, il est d’un accès agréable. Ce qui est remarquable, c’est la 
plantation des arbres. On se promène et on se repose dans d'énormes 
allées, remplies de toutes les essences de l’Europe et autres. Le bon 
étiquetage des arbustes et des arbres en favorise l'étude. Les plantes 
herbacées, comme les arbres et les arbrisseaux, sont accompagnées de 
toutes les indications nécessaires. Il y a là un progrès considérable. 

J'ai tenu à présenter ces observations, à l'honneur du Jardin botani- 
que de Vienne, qu’on peut actuellement proposer comme modèle à tous 
les autres pays. 


M. Cornu. — Malgré l'avis de M. Baillon, au sujet de l'embarras 
qu’on éprouve à parler de son propre pays, je demande la permission de 
dire quelques mots sur ce qui a été fait en France depuis sept ans. 

L'amélioration des études de botanique a commencé depuis près de 
18 ou 20 ans. A cette époque — M. Baïllon pourra le dire — fort peu de 
jeunes gens se destinaient à l'étude de la botanique. Lorsque j'étais 
étudiant, je fus à peu près le seul de mon âge qui désirat continuer ses 
études dans la voie de la botanique. Il n’en est plus de même aujourd’hui 
et les botanistes jeunes sont très nombreux. Depuis ce temps, des progrès 
incontestables ont été réalisés dans l’enseignement de la botanique élé- 
mentaire comme dans celui de la botanique supérieure. 

I° Z'nseignement primaire. — Pour la diffusion des connaissances élémen- 
taires de la botanique, une création très importante a été faite; elle est 
modeste dans chacune de ses applications, mais comme elle s'étend à la 
surface totale de la France, le résultat final est considérable. Le gouver- 
nement a établi depuis peu d’années, dans chaque département, un profes- 
seur chargé d’enseigner l’agriculture, l'horticulture et la botanique dans 
les écoles normales primaires. Ce professeur est nommé à la suite d’un 
concours, ouvert sur l’ordre du ministre. Le jury, chargé de juger le 
concours est, en général, composé de savants distingués et de spécialistes 
qui se transportent dans le chef-lieu du département où ont lieu les 
épreuves qui sont d’ailleurs publiques. Tous les départements de la 
France sont aujourd'hui pourvus d’un semblable professeur dont l’in- 
fluence sur les études primaires est incontestable. 

On doit encore signaler comme une amélioration très grande l’encou- 


L2 00h 


ragement donné aux sciences naturelles dans les écoles supérieures 
d'agriculture (Ecoles nationales distinctes des écoles pratiques). Les 
répétiteurs des différentes cours sont encouragés à poursuivre des 
recherches, à passer des examens ou à faire des cours supplémentaires 
des plus intéressants. L'école d'agriculture de Montpellier notämment 
est en relations intimes avec la Faculté des sciences et a obtenu le relè- 
vement rapide de l’enseignement des sciences naturelles. 

Il y a plus: dans plusieurs de ces écoles notamment à Montpellier 
encore, des professeurs de Faculté donnent des cours dont la valeur est 
considérable. 

Ile Enseignement secondaire. 

Ile Z'nseignement supérieur. — Une amélioration évidente a encore 
été introduite sous un autre rapport; cette fois pour l’enseignement 
supérieur dans les facultés de province, l'enseignement des sciences natu- 
relles était confié à un ou deux professeurs. Les trois branches des sciences 
naturelles étaient enseignées dans ces Facultés par un même professeur 
chargé des cours de géologie, de botanique ou de zoologie. Cette réunion. 
des cours en une même chaire est quelquefois très favorable pour les 
études. Ainsi, M. le D" Baïllon était chargé, à la Faculté de médecine de 
Paris de l’enseignement de la botanique et de la zoologie. II a accompli 
cette double tâche avec un égal succès, l’un des cours complétant rigou- 
reusement l’autre : mais il arrive fréquemment que l’un des cours est 
sacrifié à l’autre. 

Dans les Facultés des sciences en province, on a, pour la plupart des 
cas, dédoublé les chaires, de sorte que la botanique a un enseignement 
dégagé de celui des autres sciences naturelles. Le progrès accompli 
sous ce rapport est incontestable. On a choisi en général de jeunes 
botanistes pour donner ce cours. 

On a de pie créé, dans l’enseignement supérieur, un nouvel ordre de 
professeurs qu'on appelle des maîtres de conférences. Cette innovation 
a été introduite dans toutes les facultés de France, même au Museum 
d'histoire naturelle de Paris. Il en est résulté pour toutes les branches 
de la science, surtout dans le domaine de la botanique, une amélioration 
véritable sur l’ancien état de choses. En même temps qu'on instituait 
ces maîtres de conférences, le service des laboratoires était aussi beau- 
coup amélioré soit par l'agrandissement des locaux, soit par la fondation 
de laboratoires nouveaux, soit enfin par l’augmentation très sensible des 
subsides alloués. | 

Je n’entrerai pas dans de plus grands détails parce qu'il faudrait 
examiner les Facultés une à une, et étudier chacun de nos établissements 
d'enseignement; mais on peut dire que des progrès sérieux ont été accom- 
plis dans l’enseignement de la botanique depuis les sept dernières années 
et je pense qu’il est impossible de ne pas le reconnaître. 


ROME 


Ce mouvement est la continuation de celui qui a été commencé en 
France il y à plus de 18 ans, sous les auspices d’un homme qui a rendu 
les plus grands services à l’enseignement : je veux parler de M. Victor 
Duruy, qui a été Ministre de l'instruction publique sous l’Empire. Il fut 
un honnête homme dans toute l’acception du mot, il désirait le bien, le 
progrès et l’accomplissait même avec les ressources les plus restreintes. 
Ce mouvement se continue d’une façon visible; il nous fait espérer que 
nous pourrons réaliser le programme que nous avons au fond du cœur. 

Il s’est traduit d’une autre facon encore : les licenciés ès-sciences 

naturelles ont vu le niveau de leurs examens s'élever dans des proportions 
notables. Les questions posées aujourd’hui, sont plus étendues que celles 
qui étaient faites il y a 15 ou 20 ans, la science a marché et les connais- 
sances classiques se sont accrues simultanément. Les épreuves ont été 
multipliées, c’est-à-dire qu’au lieu d’une épreuve sur une seule des 
sciences naturelles, on en subit plusieurs qui sont, non seulement théori- 
ques, mais pratiques. Les épreuves pratiques sont relatives soit à la 
connaissance des plantes, soit à la détermination des fossiles, soit à la 
préparation d’un objet d'anatomie ou d’organographie; elles ont recu 
une extension plus grande. Malgré l’augmentation des difficultés le 
nombre des candidats est plus grand qu’autrefois. 
+ On sait qu’en France l’enseignement supérieur est absolument public 
et gratuit, cours, laboratoires etc. mais on fait plus encore : pour faciliter 
aux jeunes gens pauvres l'étude des sciences, on a institué depuis quelques 
années ce qu’on nomme des Bourses de licence. À la suite d'un examen, 
certaines jeunes gens reçoivent une subvention pécuniaire de 1200 fr. 
par an qui leur permet de suivre des cours et de passer leur examen 
de licence. Beaucoup de ces jeunes gens sont déjà licenciés es-sciences 
physiques et se préparent à la licence ès-sciences naturelles. Cette bourse 
peut-être transformée en bowrse d’agrégation ou de Doctorat: par ce 
moyen les jeunes gens peuvent conquérir le grade de Docteur ou le titre 
d’agrégé. 

Au Muséum d'histoire naturelle une somme annuelle de trente mille 
francs entretient ainsi vingt boursiers ; à la Faculté des sciences il en est 
de même aïnsi que dans les établissements de même nature. 

On le voit: si on considère l’argent consacré à l’enseignement de la 
botanique, le programme des examens, le nombre des professeurs, le 
nombre des chaires, le présent ne ressemble plus au passé. En peu 
d’années, nous avons réalisé des améliorations considérables. 


M. Planchon. — J’ajouterai un mot aux justes observations de 
MM. Baillon et Cornu. Nous sommes à la veille, en France, de rétablir 
le baccalauréat ès-sciences physiques tel qu’on l'avait autrefois, en 
rétablissant l’ancien baccalauréat ès-sciences mathématiques. 


7 


200 


Une des causes de l'affaiblissement des sciences d'observation, en 
France, a été la malheureuse idée de ne conserver qu’un baccalauréat, 
qu'on appelait complet, parce que les sciences naturelles n’y entraient 
pas. 

Ce fait est monstrueux, mais il a duré plus de 30 ans. J'ai vu les 
choses commencer lors de la bifurcation. On a supprimé complètement 
dans le baccalauréat, qui est le 1‘ degré d’études moyennes, d’études 
secondaires, les sciences naturelles. On les a rétablies depuis lors dans 
le baccalauréat qu’on appelle restreint. Maïs cela ne suffisait pas. 
J'attends beaucoup de progrès, pour l'enseignement en général, de la 
transformation qui se prépare. J'espère que le Conseil supérieur, qui s’in- 
spire aujourd’hui fort heureusement des vues des Facultés (nous sommes a 
cet égard sous un excellent régime de consultations), rétablira l’ancien 
baccalauréat ès-sciences physiques. En en faisant l’examen d’entrée des 
sciences médicales et pharmaceutiques, par exemple, et en réservant 
une part légitime aux sciences naturelles, on réalisera de très grands 
progrès. Comme on l’a dit: l’enseignement secondaire est intimement 
lié à l’enseignement supérieur. Ce sont les professeurs de l’enseignement 
secondaire qui forment la pépinière des maîtres de l’enseignement supé- 
rieur et réciproquement celui-ci réagit sur l’enseignement secondaire. 
Sous ce rapport nous sommes entrés dans une bonne voie. 


M. Cornu. — En parlant des améliorations apportées dans les exa- 
mens, j'ai omis de signaler ce qu’on appelle l'agrégation des sciences 
naturelles; elle est destinée à former dans les lycées des professeurs 
spéciaux de sciences naturelles, lesquels n’avaient pour ainsi dire pas 
d'existence légale. Ces professeurs étaient choisis parmi les physiciens 
et les mathématiciens. Actuellement les professeurs de sciences natu- 
relles sont choisis à la suite d’un examen spécial. Je suppose que ce 
terme d’agrégation vous est suffisamment connu, la fonction d’agrégé de 
l’université correspond à un examen tout à fait particulier. Il confère 
non pas un grade mais un litre avec un traitement spécial y attaché et 
qui s'ajoute au traitement de la fonction. 

J'ai exposé en termes sommaires ces choses qui pourraient étre 
longuement développées et dont l'importance est frappante. 


M. Magnus. — Je voudrais attirer l'attention sur l’Institut le plus 
important peut-être qui ait été créé en ces derniers temps pour les 
progrès de la botanique. Je veux parler du laboratoire pour des recher- 
ches microscopiques et scientifiques de Botanique dans le Jardin botani- 
que de Buitenzorg, à Java, établi et dirigé par M. Treub. Ce jardin 
et ce laboratoire sont sans doute connus de tous les membres du Congrès. 
Tous les botanistes sont invités de la facon la plus pressante à le visiter. 
Ils y trouveront et les places et les moyens pour les recherches ainsi 


PC 


qu'ample matière à études. On rencontre là des plantes qui ne se voient 
pas ailleurs. 

Je constate avec satisfaction que plusieurs Allemands ont déjà profité 
de cette offre bienveillante. L'Institut de Buitenzorg n'est pas seulement 
destiné aux recherches purement scientifiques. On y a également organisé 
des cultures merveilleuses de quinquina et récemment de caoutchouc. 
Je serais heureux qu'on voulüt reconnaître à Anvers la grande libéralité 
avec laquelle la Hollande a créé le Jardin et le laboratoire de botanique 
de Buitenzorg, dans l’île de Java. (Applaudissements). 


M. le Président. — Vous avez applaudi vivement les paroles de 
M. Magnus. 

Je suis sûr que M. Treub sera touché d’une telle marque de recon- 
naissance du Congrès. 


M. Baïllon. — Je vais plus loin : j'exprime le vœu que les membres 
du Congrès signent, séance tenante, une lettre qui sera adressée à M. le 
directeur du Jardin Botanique de Buitenzorg, pour le remercier de sa 
généreuse et grandiose idée. (Applaudissements). 


M. Ch. De Bosschere. — J’attire votre attention sur une demande 
que je me suis déjà permis de vous faire. Vous me trouverez peut-être 
exigeant. Je viens à chaque instant prier les membres étrangers du 
Congrès de bien vouloir nous envoyer le plus d’éclaircissements possibles 
sur les différents points du programme. Au risque d’abuser de votre 
obligeance, je réitère ma requête. Le but que la Commission organisatrice 
du Congrès a poursuivi est de s’instruire par les exemples que donnent 
les grands et les petits pays de l'Europe. | 

Cette 3"° question a pour objectif de nous apprendre ce que vous faites 
dans vos états respectifs. Nous désirons comparer les progrès que vous 
avez réalisés dans l'espoir que le Congrès en bénéficiera et que d’autres 
pays pourront également en retirer des avantages. 

Lorsque, sur ma proposition, cette question a été insérée dans notre 
programme, je me suis demandé par quelle voie nous pourrions le mieux 
et le plus sûrement arriver au but proposé. Ce n’est que tardivement que 
nous avons pu adresser le questionnaire que vous connaissez, aux 
gouvernements étrangers, par l'intermédiaire de notre département des 
affaires étrangères. Ce questionnaire se trouve à la page 137, 2° fasci- 
cule. Trois gouvernements ont répondu à notre appel : nous avons reçu 
des documents de l’Angleterre, des Pays-Bas et de la Suisse. Ces pièces 
sont arrivées trop tard pour être insérées dans les rapports préliminaires. 
Elles trouveront place dans les Actes du Congrès. Permettez-moi d'espérer 
qu'avant la publication de notre Bulletin, d’autres réponses nous par: 
viendront des gouvernements étrangers et même de plusieurs d’entre vous. 


— 100 — 


Nous serons très-heureux de les accueillir et nous en remercions 
d'avance les auteurs. 

La 2e partie de la question se rapporte plutôt à l’horticulture. Nous 
avons décidé hier de reporter à l’assemblée de l'après-midi les questions 
d'intérêt commun aux deux sections. Vous voudrez bien me permettre 
de prendre cet après-midi la parole sur la 2" partie de la question : 
« quelle a été, dans ces mêmes pays, l'influence des études botaniques 
sur les progrès de l’horticulture ? » 

Je crois que c’est une question à laquelle s’intéresseront à la fois les 
botanistes et les horticulteurs. 


M. le Président. — Je pense que nous pouvons déclarer pour le 
moment cette discussion close. (Adhésion). Nous passerons à l’examen de 
la question n° 1 ainsi conçue : 

I. Le rôle et l'organisation des laboratoires de botanique). 


M. Magnus. — Mon collègue, M. Wittmack a loué avec beaucoup de 
raison le Musée et le Jardin botanique de Berlin. Je regrette qu’on n'ait 
pas réuni à Berlin le laboratoire au Jardin botanique même. Il est curieux 
qu’à Berlin on n’étudie le développement des plantes qu’en ville, tandis 
que les plantes elles-mêmes croissent hors de la ville. 

J'ai déjà dit qu’il est très désirable qu’on annexe à chaque Jardin 
botanique un laboratoire pour les recherches sur le développement des 
plantes cryptogamiques, sur le développement des fleurs, sur la biologie 
etc. Cet usage est suivi dans les petites Universités de l’Allemagne. À 
Strasbourg, on peut étudier beaucoup mieux le développement des cham- 
pignons, de la biologie, qu’il n’est possible de le faire à Berlin où nous 
sommes très malheureux que les deux établissements soient situés si 
loin, l’un de l’autre. Il importe qu’on puisse étudier le développement 
des plantes sur les lieux mêmes où elles croissent et où l’on trouve les 
écoles d’horticulture ainsi que les jardiniers. 

Je voudrais que le Congrès exprimât le vœu qu’on réunit à tous les 
Jardins botaniques un laboratoire de botanique. 


M. Lefèvre. — Selon moi, les installations les plus complètes sous ce 
rapport, existent au Jardin botanique d'Edimbourg dont je n'ai pas encore 
entendu citer le nom. Si l’on voulait étudier l’organisation de ce jardin, 
qui est très considérable, comme vous savez, on pourrait, je pense, dans 
cet ordre d'idées, trouver une solution à la question. Je me reconnais 
incompétent pour la traiter. Aussi je me borne à vous la signaler. 


M. Baïillon. — Je crois qu’il y a beaucoup plus de jardins qu’on ne 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » les mémoires de MM. LÉO ERRERA, 
p. 17-29, A. FiscHER DE WALDHEIM, p. 60-64, et É. LAURENT, p. 80-82. 


re 


pere 


— 101 — 


semble le croire où les deux choses sont réunies. Je pense même que tel 
est le cas pour le plus grand nombre en Europe. Il est fâcheux, sans 
doute, que dans une grande ville comme Berlin, le laboratoire ne soit 
pas joint au Jardin botanique; mais il n’est pas toujours aisé de remplir 
ce desideratum. À Kew, le laboratoire, dit de Jodell, est très petit; mais 
tenu à la disposition de tous les savants, il n’est pas moins fort utile; 
il a été fondé aussi aux frais d’un particulier, grâce à un legs. Il ne 
faudrait donc pas placer Kew dans la même catégorie que Berlin. 

J'appuie également le vœu que les laboratoires soient placés autant 
que possible dans les Jardins botaniques. 


M. Cornu. — La l'° question porte : « Le rôle et l’organisation des 
laboratoires de botanique. Tout d’abord qu'entend-on par laboratoires 
de botanique ? C’est un mot moins précis qu’on ne le pense. 

Je considère comme extrêmement distincts les uns des autres les labo- 
ratoires de recherche et les laboratoires d'enseignement. Chez nous, par 
le mot de laboratoire de botanique, on a eu surtout en vue le local dans 
lequel l’enseignement pratique de la botanique se fait et se poursuit. 
Aussi voyons-nous un très grand nombre de ces locaux, souvent très 
spacieux, très bien aménagés, très bien disposés, qui ont coûté des 
sommes considérables, enclavés au milieu d’autres constructions, situés 
à un étage élevé, être somme toute assez médiocres au point de vue du 
travail de recherche. 

J’estime que celui qui veut se livrer à des travaux scientifiques sera 
plus à son aise, sera mieux placé pour ses recherches dans un local 
très petit, souvent insuffisant comme dimensions, mais à la condition 
que ce local soit à portée des serres et des cultures dans lesquelles 
prospèrent les plantes vivantes. 

Au Congrès de 1878, j'ai insisté sur la nécessité d’avoir une commu- 
nication directe entre le laboratoire de recherche et l'enceinte dans 
laquelle les plantes peuvent vivre et végéter, en bonne santé. Malheu- 
reusement ce desideratum n'est pas toujours réalisé. Je crois que dans 
beaucoup de cas on pourrait l’atteindre, si on voulait se contenter d’une 
installation très modeste. On doit laisser de côté les grandes et coûteuses 
appropriations, les beaux meubles, les riches vitrines, toutes choses 
excellentes en elles-mêmes, souvent nécessaires pour l'instruction et 
le travail des élèves, mais que les professeurs, les savants, n’ont pas 
toujours besoin d’avoir immédiatement sous la main. Dans un labo- 
ratoire réduit, sorte de petite chambre à modeste installation, mais en 
contact immédiat avec les végétaux indispensables, on serait dans 
d'excellentes conditions. On s’efforcerait de rester à l'abri des visites 
importunes, on ne serait pas géné par le passage d'un grand nombre de 
personnes, par les poussières quelles soulèvent et les germes de toute 
nature apportés involontairement. 


— 102 — 


Le mot de laboratoire de botanique a donc un double sens: Dans 
plusieurs des communications précédentes on a confondu les deux choses, 
me semble-t-il. Le laboratoire de recherche est une chose relativement 
simple matériellement, quand on à la liberté de s'installer où l’on veut 
et comme on le veut. 

Mais le laboratoire d'enseignement est généralement une installation 
plus compliquée. Il est sans doute le plus important et le plus nécessaire 
pour la vulgarisation de la science et l'étude de la botanique. Maïs en 
ce qui regarde les recherches de biologie notamment (je ne parle pas 
de la physiologie proprement dite) qui exige des appareils de physique 
ou de chimie, des fournaux, des étuves, etc., des locaux très modestes 
suffisent largement; dans ces conditions, si réduits qu'ils soient, on 
peut en tirer un excellent profit. 


M. Baillon. — Malgré le sentiment que j'ai exprimé, on est obligé 
quelquefois de parler de ce qui se fait dans son propre pays. En ce qui 
me concerne, je suis du même avis que M. Cornu; à la Faculté de méde- 
cine de Paris, nous avons annexé au jardin un petit laboratoire pour 
les botanistes. Nous serons très-heureux d'y recevoir votre visite. Ce 
laboratoire est peu considérable; il ne coûte pas cher; il n’est pas riche- 
ment doté; mais on y travaille bien. Le laboratoire d'enseignement à 
l'usage des élèves qui débutent dans l’étude de la médecine, occupe un 
local spécial. Il s'agissait de loger à certains jours jusqu’à 400 élèves 
dans le même laboratoire. La municipalité parisienne nous a accordé un 
vieil édifice hors d’usage, le Collège Rollin. La botanique a été installée 
dans les dortoirs qui occupent cinq immenses galeries, dans chacune 
desquelles on peut loger environ 120 élèves. Là, avec des ressources 
assez restreintes, — car le budget n’est pas riche pour ces choses-là — 
on à placé devant les fenêtres une série de planches qui servent de tables 
pour les observations. Avantage plus précieux encore pour nous et que 
nous avons pu nous assurer au bout de quelques années, grâce à des 
sommes légères qui nous ont été accordées, chaque élève est aujourd’hui 
pourvu d’un microscope simple et d'un microscope composé. Sous la 
direction d’un chef de travaux, aidé de cinq jeunes gens, appelés aides- 
préparateurs, nous pouvons donner l'instruction élémentaire de la bota- 
nique au grand nombre d’étudiants dont je viens de parler. 

Il en résulte un autre bien encore : dans le laboratoire plus sérieux de 
recherches, qui existe au Jardin botanique, nous sommes débarrassés 
des jeunes débutants qui sont quelquefois un peu turbulents et qu’il 
serait impossible de loger dans un très-petit laboratoire. Il s’est présenté 
un inconvénient : c’est que les débutants n’avaient pas de jardin à leur 
disposition sur le lieu même du laboratoire, J'ajoute que nous avons 
organisé un semblant de jardin autour du laboratoire de botanique. Il y 
avait là un petit terrain qui a été aménagé et cultivé de facon à fournir, 


re à 


— 103 — 


en quantité, aux étudiants de 1'° année de médecine, les plantes qui ne se 
trouvent pas en abondance dans la campagne. Je citerai comme exemples 
la Belladone et l’Aconit. 

Pour les plantes communes, nous avons un approvisionneur qui en 
apporte chaque jour des cargaisons énormes. Je signale ce fait, non pour 
prétendre que nous soyons arrivés à la perfection, mais pour montrer 
que nous marchons dans une voie excellente. 

On construit à Paris un nouveau laboratoire, dans les futurs bâtiments 
de la Faculté, pour les études pratiques d'histoire naturelle et de bota- 
nique. Or, ilest arrivé que le laboratoire informe, établi pour les débutants 
dans les vastes dortoirs du collège Rollin, a été strictement copié par 
l’architecte pour la construction des laboratoires nouveaux qui seront 
annexés au bâtiment neuf de la Faculté de médecine. On a jugé ce plan 
le plus utile, le plus convenable et le plus commode. Ce sera le même plan 
qui aura été trouvé si bon dans sa simplicité que l’on a adopté avec 
enthousiasme. Nous avons la promesse que les cours assez nombreuses 
de cet établissement nous seront livrées pour la culture de plantes 
analogues à celles auxquelles je faisais allusion tout-à-l'heure. Nous 
aurons ainsi le même jardin que celui que nous possédons actuellement 
aux portes du laboratoire d'instruction de nos élèves, mais il nous sera 
livré dans des conditions bien plus avantageuses encore. 


M. Fischer de Waldheim. -- L'idée émise par M. Cornu est très- 
pratique. Elle se trouve réalisée à Varsovie. Nous avons là un petit 
laboratoire de recherches, composé d’une chambre avec quelques instru- 
ments nécessaires. 

Nous avons aussi un laboratoire d'enseignement : c’est celui de l’Uni- 
versité, qui est plus vaste. Il donne place à 30 ou 40 personnes. Des 
installations semblables devraient être adoptées partout où l’on ne 
dispose pas de grands moyens. Les grands laboratoires installés dans 
les Jardins botaniques entrainent des dépenses que les gouvernements ne 
sont pas toujours disposés à supporter. 

Je propose donc au Congrès de bien vouloir appuyer l’idée de M. Cornu, 
à savoir : qu'il est bon d'établir les laboratoires de recherches dans les 
Jardins botaniques mêmes où il n’en existe pas encore et de créer des 
laboratoires d'enseignement dans les Universités. 


M. le Président. — Nous sommes en présence de deux propositions : 
M. Magnus demande que le Congrès émette le vœu que les laboratoires 
soient le plus possible en relation avec les jardins botaniques. 


M. Magnus. — Je propose que les laboratoires d'enseignement soient 
établis dans les villes et qu’on annexe un laboratoire de recherches à 
. chaque Jardin botanique. 


— 104 — 


M. Cornu. — Il y a lieu, je pense, de scinder la proposition. Nous 
dirons d’abord : Il y a deux sortes de laboratoires avec des besoins variés 
et des installations différentes : les laboratoires d'enseignement et les 
laboratoires de recherches. M. Magnus dit que les premiers doivent 
surtout se trouver en relation directe avec les Universités et les seconds 
avec les Jardins botaniques et les cultures de plantes. De la sorte les 
propositions sont interverties; la première devient la seconde et réci- 
proquement. 


M. Planchon. — Nous avons à la Faculté des sciences de Montpellier 
un double laboratoire; l’un se trouve à la Faculté à proximité du jar- 
din, l’autre se trouve au jardin même, et il est placé sous la direction 
du même professeur. Dans l’un, on donne l’enseignement pratique pour 
les licenciés; dans l’autre, le professeur qui a son laboratoire particulier 


peut, en traversant un simple vestibule, rejoindre les jeunes gens qui : 


préparent leurs thèses de Doctorat ès-sciences. Maïs ce sont Ilà des 


circonstances locales qu’on ne retrouve pas partout. Il n’y a pas grand, 


inconvénient à ce que le laboratoire d'enseignement pur, destiné à ce 


que nous appelons la licence, se trouve à une certaine distance du . 


jardin. Mais j'affirme qu’il y a nécessité d’avoir un laboratoire de 
recherches annexé au jardin même. 

J'ajoute qu'on ne doit pas se limiter au laboratoire particulier du 
professeur. IL faut que les jeunes gens qui préparent leur doctorat 
ès-sciences aient un laboratoire où ils soient séparés de leurs condisciples 
de la licence. Les derniers suivent une marche réglée d'avance, ils 
obéissent à un mot d'ordre. Les premiers doivent avoir une grande 
liberté. Chacun est isolé à côté de son voisin. On devrait scinder les 
deux choses et demander que le laboratoire de recherches soit annexé 
au Jardin botanique tandis que celui d'enseignement pourrait rester 
dans la Faculté. Cette connexion est naturelle et forcée. Je crois que 
M. Baillion n'’insistera pas pour qu’on dise que le laboratoire d’enseigne- 
ment doit être annexé au jardin. Il y a des endroits où les conditions 
locales ne permettraient pas de le faire. 


M. Baïllon. — C'est exiger beaucoup que de vouloir que tout 
laboratoire ait son jardin. Ce peut-être là un vœu platonique. En effet, 
ces installations entraïîneraient à des dépenses si considérables que bien 
peu d'États consentiraïient à les faire, J'admets parfaitement que nous 
devions tendre vers cet idéal. Il est une question qui n’est pas indiquée 
dans le programme du Congrès et à laquelle la force des choses nous 
conduit. Beaucoup de nos collègues d'Allemagne abonderont, je pense, 
dans ce sens. La création d’un centre botanique unique s'impose. ‘Peu 
importe qu’on l'appelle Institut botanique ou de tout autre nom. ‘Ces 


nes sd r été 


— 105 — 


centres botaniques existent déjà dans certaines villes. Tout ce qui 
concerne l’enseignement de la botanique s’y trouve réuni. Avec le grand 
morcellement qui existe dans certains pays, comme le nôtre, on fait 
des dépenses tres considérables pour arriver à des résultats relativement 
médiocres. En concentrant, au contraire, dans un seul centre tout ce qui 
est relatif à la botanique, il est évident qu'avec des frais moins élevés, 
on obtiendra des avantages plus grands. J'appelle donc la création dans 
mon pays de ce que l’on appelle ailleurs ies Instituts botaniques. Toute 
difficulté disparait dans cette hypothèse. L'Institut botanique est pourvu 
d'un très vaste jardin, renfermant tout ce qui peut être utile à la bota- 
nique. Dès lors il n’y a plus grande difficulté à créer, dans l’intérieur 
même de ces jardins, un certain nombre de laboratoires des deux ordres 
auxquels il a été fait allusion tout à l'heure avec raison. Il serait, je 
pense, parfaitement accepté dans notre pays que les laboratoires de 
recherches et les laboratoires d'enseignement pour les débutants fussent 
compris dans le même Institut botanique et logés, par conséquent, aux 
extrémités d’un seul et même jardin. On trouverait là grande économie 
et sensible avantage. Ce n'est pas à moi à faire ressortir l'utilité des Insti- 
tuts botaniques. J'espère que quelques uns de nos collègues d'Allemagne 
nous en parleront. Beaucoup d’entre nous sont allés visiter un Institut 
botanique de nouvelle création; celui de Liège. J'ai appris, ces jours 
derniers, que le modèle de l’Institut de Liège va être transporté jusqu’au 
fond de la Roumanie. Ce sont là de très bons exemples à suivre dans 
un pays comme le nôtre et dans d’autres aussi. Pour moi, l'idéal c’est 
l'Institut botanique, comme l’est l’Institut zoologique, l’Institut chimi- 
que, etc., dans un autre ordre d'idées, 


M. Planchon. — M. le professeur Baïllon sait bien qu’à Paris il y à 
des enseignements botaniques qui sont forcément distincts. L’enseigne- 
ment de la Faculté de médecine ne peut pas être conforme à celui de 
la Faculté des sciences. Le Muséum a un enseignement libre, absolument 
à part. Il y a des difficultés en France à réunir dans les Jardins botaniques, 
par exemple, des corps spéciaux. Je citerai un exemple. À l'école de 
pharmacie de Montpellier j'ai un petit jardin réduit à un certain nombre 
de plantes utiles. Les élèves les ont constamment sous les yeux parce 
qu'elles se trouvent à côté de la cour où ils s’assemblent en attendant les 
lecons. Si ces mêmes élèves devaient aller à l’école de médecine ils seraient 
privés de cet avantage. Par conséquent, tout en désirant la centralisation, 
il est certain que l’on peut avoir dans la même ville plusieurs établis- 
sements d'enseignement sur des points distincts. À Montpellier on a créé 
un Institut chimique et physique qui est admirablement installé, pourvu 
de tous les instruments du progrès moderne; il a coùté une somme 
considérable. Cet Institut ne sert que pour la médecine. Les professeurs 
de chimie des autres Facultés ont chacun leur laboratoire. On ne doit 


— 106 — 


pas subordonner l'enseignement d’un professeur à celui d’un autre. Je 
ne fais pas d’objection absolue à la création d’Instituts botaniques 
dans des villes qui ne sont pas dotés d'enseignements spéciaux. 
A Liège où existe une Université complète, l'Institut botanique peut 
servir aux médecins à condition qu'on leur attribue une division spéciale 
pour les plantes médicinales. Il ne faut pas oublier que les médecins ne 
sont pas appelés à être des botanistes purs; ils leur suffit de connaître 
les plantes usuelles et les principes de la physiologie et de la biologie; ils 
n’ont pas à recevoir un enseignement botanique complet. Je vois donc 
des difficultés sérieuses à fonder partout, au moins en France, des 
Instituts botaniques. 

En Allemagne, où la situation n’est pas la même, il est possible qu’on 
puisse le faire avec avantage. Mais je laisse à de plus compétents que 
moi le soin de se prononcer sur ce point. 


M, Gravis. — Messieurs, M" le professeur Ed. Morren espérait 
pouvoir vous entretenir de l’Institut botanique dont il est le Directeur. 
Il a même préparé, sur ce sujet, une notice destinée aux Actes du 
Congrès. Forcé malheureusement de quitter Anvers ce matin pour 
cause d’indisposition M. Morren m'a chargé de prendre la parole 
à sa place. Je vais donc résumer la notice qu’il m'a confiée (1) en 
m'attachant, surtout à ce qui se rapporte plus spécialement à l’ensei- 
gnement. 

L'Institut botanique de Liége constitue un établissement d’ensei- 
gnement supérieur, créé sous les auspices du gouvernement et de la 
ville, dans l'intérêt de l’enseignement universitaire. Il a été décidé en 
1336 et 1837 et commencé en 1840, grâce à l'initiative et à l’activité 
de Charles Morren. { 

Il est resté longtemps incomplet, inachevé, malgré nos démarches 
les plus réitérées : sans ressources et presqu’abandonné, il rendait peu 
de services à la science, son existence fut même un instant menacée et 
cela alors que les Chambres législatives venaient de mettre à la dispo- 
sition du gouvernement l'argent nécessaire pour le compléter et le 
mettre au niveau des exigences actuelles. Cette crise fut heureusement 
conjurée, grâce au concours de la population liégeoise et à la sollicitude 
du Conseil communal. On remit la main à l’œuvre en 1881, sur des 
bases nouvelles et l'inauguration put se faire le 22 novembre 1883, en 
présence des autorités communales, législatives, universitaires et admi- 
nistratives. 


(1) Cette notice a été publiée in extenso avec de nombreuses gravures et"photo- 
lithographies, dans /4 Belgique horticole, Janvier 1885, p. 31 à 56. 


— 107 — 


L'Institut botanique comprend trois divisions principales : le jardin, 
les serres, et les constructions. 

Les bâtiments de l’Institut botanique sont disposés en deux groupes 
attachés à droite et à gauche des serres hautes. Cette séparation était 
en quelque sorte imposée par les conditions topographiques et surtout 
par les circonstances locales. Elle est, du reste, sans inconvénient pour 
le service, l'aile droite étant affectée à l’enseignement quotidien, tandis 
que l'aile gauche est réservée aux collections et à certaines études 
spéciales. Ils sont peu élevés, construits en pierres et de style grec. 


Aile droite. — Enseignement. 


L’aile droite comprend les installations nécessaires pour l’enseigne- 
ment de la botanique. 

Un large vestibule sert de vestiaire et peut abriter les étudiants 
pendant les intempéries. 

L’Auditoire est une vaste salle en hémicycle, de neuf mètres de rayon 
et très élevée. Il compte 8 rangées de bancs concentriques, comprenant 
220 places numérotées. La chaire, élevée sur une estrade de deux 
marches, occupe le centre de la partie droite de la salle. Auprès d’elle 
se trouvent un tableau noir et mobile, des piédestaux, des tables, des 
bijoutières pour les plantes et les objets de démonstration et enfin des 
chevalets fixés au mur sur lesquels on dispose des tableaux graphiques 
se rapportant au sujet des lecons. 

Le laboratoire de démonstration est attenant à l'auditoire. On y expose 
pendant un certain temps, à la disposition des élèves, les objets de 
démonstration qui ont servi aux leçons : on y fait les démonstrations et 
les exercices pratiques élémentaires; on y expose les tableaux et les 
cartes utiles à l'instruction. Ce laboratoire est éclairé par cinq grandes 
fenêtres exposées au Nord et à l'Ouest et devant lesquelles sont de 
solides tables d'étude : contre les trumaux sont des armoires vitrées 
renfermant les microscopes les plus usuels. Les murs de ce laboratoire 
et en général de toutes les salles sont garnis de dessins ou d'objets 
botaniques les plus propres à éveiller l'attention et à exciter l'intérêt. 

Le Zaboratoire de recherches est une vaste salle bien éclairée par 6 
fenêtres, dont 3 au Nord et 3 au Sud. Devant chaque fenêtre se trouve 
une table, à laquelle deux travailleurs peuvent prendre place. La partie 
centrale est occupée par une longue table pour la lecture, le dessin, etc. 
De petites armoires vitrées sont attachées au mur entre les fenêtres et 
au niveau des tables; les étudiants y rangent leurs instruments et leurs 
notes après chaque séance, 

Deux armoires plus grandes contiennent divers objets d’un usage jour- 
nalier, ainsi qu’une bibliothèque classique comprenant un petit nombre 
d'ouvrages les plus utiles, tels que les meilleurs traités généraux, des 


— 108 — 


manuels techniques, des flores et des ouvrages pour la détermination 
des cryptogames. Cette bibliothèque est continuellement à la portée des 
élèves qui travaillent dans ce laboratoire. 

Une collection de matériaux d’étude, conservés à l'alcool, occupe une 
autre armoire : 600 flacons et 2000 tubes de trois grandeurs trouvent 
place dans ce meuble, grâce à une disposition intérieure spéciale. 

Ce laboratoire est en communication directe avec les serres où se font 
. certaines expériences et des cultures déterminées. Ainsi, par exemple, 
on à installé dans une serre voisine, une armoire vitrée pour la culture 
de divers cryptogames, surtout de mycètes ou champignons, et pour des 
expériences de physiologie. 

La salle du malériel communique avec les laboratoires dont elle con- 
stitue une dépendance. On y a placé une cage à évaporation, un lavabo, 
des produits chimiques, de la verrerie et divers ustensiles. Elle sert aussi 
de remise aux collections classiques, c'est-à-dire à tout ce qui doit le 
plus spécialement servir chaque année à la démonstration de l'enseigne- 
ment. 

Ces collections comprennent : 

1° Un herbier de démonstration, composé d'un grand nombre de types 
bien choisis, tant au point de vue scientifique pur qu’au point de vue des 
applications de la Botanique. Les neuf classes du règne végétal sont 
représentées dans cet herbier qui contient aussi, non seulement des 
phanérogames et des cryptogames supérieurs, mais encore les types les 
moins élévés en organisation, parmi les algues et les champignons. Ces 
derniers, naturellement, sont montrés sous le microscope. 

Pour les rendre d’un maniement plus facile, les échantillons ont été 
collés sur des feuilles de carton mince. Celles-ci sont classées et conser- 
vées dans des boîtes en bois. 

2° Une collection de préparations microscopiques relatives à l’anatomie 
et à la cryptogamie. Jusqu'ici cette collection était surtout composée de 
séries achetées à des préparateurs de profession, tels que MM. Amadio, 
Boecker, Bourgogne, Delogne, Duncker, Hoppe, Müller, Vize, Zimmer- 
man, etc... Ce fond primitif est peu à peu renouvelé par des prépara- 
tions plus fraiches et plus en rapport avec les besoins actuels de 
l'enseignement. Ces préparations nouvelles sont exécutées au laboratoire 
même par le personnel de l’Institut. Les meilleurs élèves concourent 
aussi à enrichir journellement cette collection. 

3° 400 tableaux de démonstration collés sur carton. Ces tableaux, 
dont le format moyen et de 090 de hauteur sur 070 de largeur, 
comprennent les belles séries de planches murales publiées par 
MM. Abhles, Dodel-Pont, Giwotowsky, Henslow, Kny, Lubarsch, 
Poulsen, Schnizlein et tant d’autres auteurs. 

D’autres tableaux ont été exécutés à l’Institut botarique par le 


— 109 — 


préparateur et par un artiste dessinateur attaché momentanément à 
l'établissement. Ils reproduisent, en les amplifiant beaucoup, les figures 
publiées par les meilleurs auteurs sur la morphologie générale, l'ana- 
tomie, la cryptogamie, la physiologie, la géographie botanique, etc. 
Quelques-uns, enfin, ont été dessinés d’après des préparations originales 
faites au laboratoire. 

4° Une collection de bois, fruits et graines. Cette collection n’est 
formée que des types vraiment classiques. Ceux-ci ont été choisis parmi 
les échantillons les plus grands et les plus démonstratifs qui composent 
la collection générale. Les fruits typiques communs sont recueillis 
chaque année en abondance afin qu’ils puissent être distribués aux élèves 
pendant les exercices pratiques. 

0° Des modèles en carton pierre, de grandes dimensions, représentant 
les divers états de développement des principales espèces de champignons 
polymorphes. 

6° Des modèles en cire représentant des ovules, des graines, des 
embryons, l’organogénie de la fleur, etc. 

Le cabinet du directeur est au centre de toutes ces installations et 
a vue, par deux fenêtres, sur l’ensemble du Jardin botanique. Il ren- 
ferme une bibliothèque choisie, formée d'ouvrages utiles, souvent de 
grande valeur; on y conserve aussi les microscopes et autres appareils 
les plus précieux. Il est orné de bustes et de tableaux se rapportant 
principalement à l’histoire de la botanique à Liège. 

Les salles des Herbiers sont situées au premier étage et comprennent 
un herbier général, un herbier belge et un herbier cryptogamique. Les 
deux premiers, fusionnés pour le moment, sont formés d’une soixan- 
taine d’'herbiers particuliers, dont la plupart ont été recueillis par des 
botanistes voyageurs dans les diverses régions du globe. (La liste de 
ses herbiers sera publiée.) 

Les armoires, d’un modèle nouveau, simples et commodes forment, 
400 casiers dans lesquels les fascicules sont déposés sans carton ni 
courroie. On peut ainsi parcourir l’herbier avec la plus grande facilité. 
La fermeture hermétique des armoires rend d’ailleurs inutiles les divers 
systèmes de boîtes, cartons, etc. 

L’herbier cryptogamique, relativement considérable, a été formé de 
l'herbier de M. le professeur Morren, auquel de nombreux exsiccatas 
ont été fusionnés. Parmi ces derniers on peut citer les plantes de 
Bellynck, Delogne, Desmazières, Gravet, Husnot, Libert, Mongeot, 
Nordstedt, Olivier, Oudemans, Piré, Rabenhorst, Roumeguère, Thümen, 
Westendorp, Winter et Wittrock. 

Dans les trois salles des herbiers, de grandes tables sont disposées le 
long des fenêtres et mises à la disposition des étudiants et d’autres 
personnes qui veulent étudier les plantes sèches. 


— 110 — 


La préparation des herbiers se fait dans une salle des greniers. Ceux-ci 
servent aussi de magasin pour les cristaux, les papiers, les cartons, 
certains produits chimiques ou autres. 

Les alcools, les acides et d’autres produits semblables, sont conservés 
dans les caves avec lesquelles on communique aisément. Le calorifère de 
l’auditoire est aussi établi dans le sous-sol. Enfin l’eau, le gaz et les 
sonneries électriques sont installés partout. Dans l’auditoire et plusieurs 
autres salles, des volets à fermeture hermétique permettent d'obtenir 
l'obscurité nécessaire, soit pour certaines expériences, soit pour des 
projections à la lumière solaire ou artificielle. 

Il serait nor moins aisé de pratiquer la photographie dans les labo- 
ratoires. 

Enseignement. 


I. Le cours de botanique est annuel et comprend une centaine de 
lecons. Il est suivi par les étudiants de la candidature en sciences natu- 
relles(1) ainsi que par ceux de la candidature en pharmacie. Pendant les 
dernières années, leur nombre fut, en moyenne, de deux cent cinquante. 

Le cours est divisé en deux parties : 

lo La botanique générale qui se résume en l'étude morphologique et 
biologique de la cellule. Cette partie, à laquelle sont rattachées l’anatomie 
et la physiologie générales des plantes, est traitée en une trentaine de 
lecons. 

20 La botanique spéciale qui comprend les principes généraux de la 
Taxinomie, l'étude des caractères généraux des neuf classes et la descrip- 
tion des principales familles du règne végétal. Pour chacune de ces 
familles, les principaux genres et les espèces les plus importantes sont 
cités à titre d'exemples. Ces types sont choisis tant au point de 
vue scientifique pur qu’à celui des applications à la médecine, à l’indus- 
trie, aux arts, ete... Cette seconde partie est synthétisée par le Tableau 
du règne végétal disposé suivant l’ordre de l'évolution, par M. le professeur 
Ed. Morren. 

Un cours de Géographie botanique est fait aux élèves du doctorat en 
sciences naturelles et des lecons approfondies sont données à ceux d’entre 
eux qui spécialisent la botanique. 

II. Démonstrations hebdomadaires. — Chaque semaine l'assistant fait 
aux étudiants une démonstration relative aux questions exposées au 
cours. Les collections du laboratoire servent à ces démonstrations. Les 
étudiants peuvent, pendant ces séances, consulter à leur aise les herbiers, 
les livres et atlas de la bibliothèque, revoir les planches murales, 


(1) En Belgique les élèves qui se destinent à la médecine doivent d’abord suivre, 
pendant deux ans, les cours de la Faculté des sciences et y ci le diplôme de 
candidat en sciences naturelles. 


— 111 — 


étudier des préparations mises au point sous des microscopes, demander 
des explications, en un mot, répéter les lecons du professeur en ayant 
sous les yeux toutes les pièces à conviction. 

III. Des exercices pratiques élémentaires ont été institués en faveur 
des élèves de la candidature en sciences et de ceux de la candidature 
en pharmacie. Ces exercices sont facultatifs et comprennent de douze 
à quinze séances de travail chaque semestre. Ils ont été fréquentés, 
pendant l’année académique 1884-85, par une cinquantaine d'élèves, 
qui furent divisés en quatre séries. Chaque série a travaillé au labora- 
toire une fois par semaine, pendant trois heures au moins. 

Le but des exercices pratiques élémentaires est de faciliter l’étude de 
la botanique en développant chez les élèves l'esprit d'initiative et 
d'observation. 

Au début de chaque séance, l’assistant rappelle en quelques mots les 
enseignements théoriques relatifs aux exercices à faire; il indique la 
manière d'opérer, les procédés à employer les réactifs dont il faut faire 
usage, etc. Les élèves se livrent ensuite à un éravail personnel : ils 
font eux-mêmes les préparations, les observent, prennent des notes et 
des croquis. 

Chaque élève dispose d’un microscope Vérick, modèle moyen, avec 
les objectifs n° 0, 2, 6; d’une série de réactifs ordinaires; d’une boîte 
contenant les instruments indispensables tels que scalpel, rasoir, aiguille, 
pince, lames, lamelles, etc. 

Voici maintenant le programme des exercices pratiques élémentaires : 

1° semestre : 

a) Maniement du microscope et confection des préparations. 

b) Étude générale de la cellule et des tissus. 

2° semestre : 

a) Morphologie de quelques types de cryptogames cellulaires et vas- 
culaires ; 

b) Étude spéciale des principales familles de plantes phanérogames (1). 

Pendant l'été les élèves étudient les familles naturelles, principalement 
les phanérogames en analysant les fleurs mises à leur disposition. Plu- 
sieurs herborisations sont organisées sous la direction du professeur ou 
de l’assistant. 

IV. Travaux des élèves du Doctorat en sciences naturelles. — Les élèves 
du Doctorat, qui approfondissent la Botanique, fréquentent journellement 
le laboratoire. Ils s’y livrent à des études de perfectionnement et à des 
recherches originales. Le programme de ces travaux ne peut être, on le 
conçoit, uniforme et constant. 


(1) On peut voir à l'Exposition d'Anvers une collection de 200 préparations 
environ, choisies parmi les meilleures de celles exécutées par les élèves qui ont 
pris part aux exercices pratiques élémentaires pendant l’année 1884-1885. 


— 112 — 


Aile gauche. — Collections. 


L’aile gauche, attaché à la rotonde du même côté, est exactement 
symétrique à l'aile droite, au moins du côté de la facade, tandis que 
par derrière les bâtiments de la botanique ont été, de côté, écourtés par 
ceux de la pharmacie. Cette aile gauche est actuellement réservée aux 
collections botaniques. 

Un corridor transversal, accessible du côté du jardin, conduit aux 
principales salles. 

Un laboratoire de physiologie est attenant à la rotonde tropicale : 
c’est une assez grande chambre rectangulaire éclairée par 6 fenêtres. 
On y a installé actuellement l’herbier des Broméliacées, renfermé dans 
de bonnes armoires en bois. 

Une Bibliothèque occupe une chambre voisine, très profonde, et peu 
éclairée par deux fenêtres seulement. Elle peut servir de lieu de réunion. 

Le Musée de botanique termine les bâtiments du côté gauche, comme 
l’auditoire les termine du côté droit. Il est haut de 11®, large de 15 et 
a la forme d’un hémicycle éclairé par deux rangs de sept fenêtres. Une 
large galerie en fer, supportée par des colonnes ornées et accessible par 
deux escaliers tournants, court le long des parois semi-circulaires, Les 
mycètes et les végétaux cellulaires sont installés dans cette galerie, 
tandis que les produits des Gymnospermes et des Dycotylées occupent 
le rez-de-chaussée. Ces collections se composent de bois, de fibres, de 
fruits, de graines et des produits les plus divers du règne végétal. Ils 
sont classés dans de grandes armoires vitrées de la manière la plus 
pittoresque et la plus instructive, tant pour les hommes de science que 
pour le public. Les spécimens les plus considérables ou les plus précieux 
sont conservés dans certaines vitrines particulières et appropriées. Au 
centre du Musée on a installé une forte colonne portant 24 grands 
panneaux suspendus sur des gonds mobiles, destinés à recevoir les prin- 
cipaux spécimens de la flore de Belgique et à,servir ainsi d’herbier 
public. Enfin, contre le mur droit du fond de la salle, on doit arranger 
une sorte de trophée de grandes tiges et de produits extraordinaires. Des 
bustes et des tableaux doivent compléter l’ameublement de cette salle 
de collection. 

La Salle des Monocotylées, située en arrière, continue et complète le 
musée principal. 

A l'étage quelques grandes salles et des greniers servent de remise 
pour les produits végétaux qui attendent le classement. 

D'autres salles, accessibles par un escalier dérobé, servent à la prépa- 
ration et à la conservation de graines. 

Diverses caves s'étendent sous la plus grande partie des bâtiments : 
on y conserve les pots, les terres, les bois, les charbons et, en général, 
une grande partie du matériel d'exploitation. 


— 113 — 


La cour de derrière est indispensable pour la préparation des terreau x. 

Quelques petites chambres, ménagées derrière les serres centrales, 
servent de remise aux outils, de cantine pour les ouvriers, d'atelier et 
enfin de logement pour le concierge. 

Un joli cottage, bâti à l'angle nord-est du jardin, entre les rues 
Louvrex et Fusch, sert d'habitation au jardinier en chef et à sa famille. 
On lui a réservé un petit jardin particulier. 


Le Personnel. 


Le personnel de l’Institut botanique de Liège est actuellement formée 
de la manière suivante : 

Le directeur de l’Institut, professeur à l'Université. 

Un assistant du cours de botanique, M. Auguste Gravis, docteur en 
sciences naturelles, chargé des démonstrations et de la surveillance des 
travaux pratiques faits par les élèves. 

Un élève assistant, M. Émile Bernimolin, docteur en sciences natu- 
relles, actuellement occupé à la détermination des plantes cultivées, au 
classement des herbiers et à la mise en ordre du Musée botanique. 

Un conservateur des collections, M. Pierlot, a spécialement dans ses 
attributions la tenue des registres d'entrée et des inventaires, la corres- 
pondance et les écritures. Un concierge est chargé du service des locaux 
et un garcon de salle est en même temps commissionnaire. 

Un jardinier en chef, M. Maréchal, veille à tout ce qui concerne la 
culture, l'entretien du jardin, l’étiquetage des plantes, la récolte des 
graines, etc. et il a, à cette fin, sous ses ordres un personnel de 9 ou 10 
jardiniers journaliers et de 4 apprentis, savoir : 

Un jardinier pour les grandes serres chaudes avec un apprenti. 

Un jardinier avec un apprenti, pour les grandes serres tempérées, le 
service des étiquettes, les graines, etc. 

Deux jardiniers, avec deux apprentis pour les serres basses, l’aqua- 
rium et le service de la cour. 

Un jardinier de plein air spécialement chargé de la conduite des 
arbres et des arbustes. 

Deux autres jardiniers pour la culture des écoles. 

Un jardinier pour l'entretien des pelouses et des eaux. 

Un journalier pour le service des fourneaux et le gros œuvre. 

Enfin un journalier pour les services techniques. 

Le service de la police est fait par un agent préposé de l'Administration 
communale. 

Les installations de l’Institut botanique de Liége et son organisation 
ont été inspirées par la volonté de le faire servir tout entier à l’ensei- 
gnement; d'abord et avant tout à l’enseignement universitaire et aux 
progrès des hautes études, mais aussi à l’enseignement public en général, 


8 


— 114 — 


à toutes les écoles qui veulent le visiter et y trouver des objets d’obser- 
vations, aux visiteurs qui viennent s’y promener et même s’y reposer. 
Tout ce qui le compose : jardin, serres, laboratoires, herbiers, bibliothè- 
que et collections est au service de la science et accessible à tous. 
Il est l'expression de l’union intime de la culture et du laboratoire 
qui, à Liége, s’entr'aident pour se fortifier mutuellement. 

L'Institut botanique de Liège est en relations scientifiques avec tous 
les Jardins botaniques du globe, avec lesquels il échange des plantes et 
surtout des graines. 

Il publie chaque année le catalogue des pee récoltées et il l'adresse 
à la plupart des établissements similaires du monde. 

Ces vastes relations ont donné lieu à la Correspondance botanique dont 
la publication est appréciée avec beaucoup de faveur. 

En terminant, permettez-moi, Messieurs, de rendre hommage au savant 
éminent, à l’illustre professeur, qui a doté la Belgique d’un établissement 
scientifique comparable à ceux dont se glorifient, à juste titre, les pays 
voisins. C’est aux efforts persévérants de M. Éd. Morren que nous devons 
l'Institut botanique de Liége que tant de botanistes étrangers sont déjà 
venus admirer. Puisse son œuvre grandir encore et porter, dans l'avenir, 
les fruits heureux que nous entrevoyons dès maintenant. (Applaudisse- 
ments prolongés.) 


M. Planchon. — Je ne veux pas laisser place à une fausse interpré- 
tation de ce que j'ai dit au sujet des Instituts botaniques. Je n’ai certai- 
nement aucune objection à élever contre un Institut tel que celui que 
mon ami, M. Morren, vient d'établir. C’est une grande gloire pour 
lui et la Belgique d’en avoir donné le modèle. Des circonstances particu- 
lières ont permis de réunir tout l’enseignement de la botanique dans le 
même local. Mais ailleurs, les jardins et laboratoires spéciaux ont leur 
avantage. Je désire que mes paroles soient consignées au procès-verbal 
parce que je ne voudrais pour rien au monde laisser croire que je n'ai 
pas l'admiration voulue pour un Institut comme celui de Liége. 


M. le Président. — Nous tiendrons note de la déclaration de M. le 
professeur Planchon. 


M. Cornu. — La question qui vient d’être soulevée par MM. Baillon 
et Planchon touche d’une manière directe la méthode d'enseignement 
de notre pays. 

On peut constituer les Établissements en partant de deux points de vue: 

le Les constituer en vue d’un but déterminé : produire des médecins, 
ou des pharmaciens, etc. avec des chaires multiples appropriées à ce but 
spécial dans chaque cas. 

2° Grouper ces chaires multiples en Établissements séparés où ne 
s'enseignera qu’une science, mais avec toutes les ressources qu’elle peut 


— 115 — 


offrir; par exemple : la botanique avec un jardin, des herbiers, etc. En 
un mot rencontrer sur un point tous les éléments disséminés. 

On peut choisir entre les deux méthodes; dans certains cas il y à 
avantage, dans d’autres, il y a des inconvénients à l’un ou à l’autre 
des systèmes. 

Lorsque des programmes, parfaitement définis, conduisent à une carrière 
déterminée et que le nombre des étudiants est assez considérable, il y a 
intérêt à séparer l’enseignement qui prépare à cet examen; cela facilite 
aux étudiants l'acquisition des connaissances exigées; on leur évite les 
tâtonnements, les pertes de temps, les études inutiles à l'obtention du 
diplôme. Le diplôme est le but: les chaires sont faites uniquement 
en vue d'y préparer des élèves. 

Si la botanique n’était enseignée que dans un seul Établissement on 
y verrait nécessairement se rendre les étudiants en médecine, les étudiants 
en pharmacie, les élèves qui se préparent à la licence ou au doctorat 
ès-sciences naturelles; il faudrait trois écoles de botanique ou au moins 
deux. On devrait sans doute adjoindre les cours de botanique qui sont 
faits chez nous dans une école spécialement consacrée à l’horticulture, 
il faudrait alors une école avec les types des plantes d'ornement: on 
juxtaposerait ainsi des cours qui n’ont guère d’autres rapports entre eux 
que le nom et des professeurs d’aptitudes très-différentes. 

En France, il y a un nombre de diplômes assez grand et les program- 
mes étant très-variés, il faut une préparation spéciale dans chaque cas : 
le diplôme indique la nature des études faites par l'étudiant. 

L'organisation de l’enseignement est d’ailleurs, en France, très diffe- 
rente de ce qu’elle est en Allemagne. On assimile à tort nos Facultés des 
sciences aux Universités Allemandes ; il y a une foule de jeunes gens 
qui n’ont jamais à utiliser l’enseignement de la Faculté des sciences. 

Les jeunes gens peuvent suivre des carrières tres différentes, acquérir 
une instruction très solide, très profonde, sans jamais avoir paru à la 
Faculté, Les écoles du gouvernement retiennent chaque année une 
grande partie de l'élite des jeunes gens de notre pays. Ceux-ci se sont 
préparés aux difficiles examens d'entrée, soit dans les Lycées de l'État, 
soit dans des pensions; ils entrent à l’École normale, à l’École polytech- 
nique, à l'École centrale, à l'École forestière, à l'École d'enseignement 
spécial, ete., etc. Ils achèvent leurs études et sortent désormais affran- 
chis d'examen, avec le diplôme qu'ils ont conquis. Ils n’ont plus rien 
à demander aux Facultés. 

Dans ces écoles constituées en vue d'obtenir un résultat déterminé, 
on écarte tout ce qui est inutile : on se trouve ainsi dans la nécessité de 
séparer les divers enseignements relatifs à la botanique. À Paris, par 
exemple, il y a une chaire de botanique médicale à la Faculté de médecine, 
avec son jardin réserve aux étudiants en médecine ; à l'École supérieure 


— 116 — 


de pharmacie, un autre cours distinct fait au point de vue restreint des 
drogues, avec un jardin réservé aux élèves en pharmacie; l'École 
normale qui forme des professeurs a ses divers cours avec son jardin. 


M. Baillon. — Il y en a partout. 

M. Cornu. — Le Museum, au contraire, où la botanique s’enseigne 
dans le sens le plus large, a cinq chaires très-générales et au Jardin 
botanique tres étendu, des collections variées de plantes vivantes. Les 
établissements spéciaux, autrefois réserves en un seul, seront successive- 
ment séparés pour pouvoir satisfaire à des besoins précis et nécessités 
par leur rôle; c’est un bien pour l’enseignement. 

M. Baillon. — Je me résume; il y a deux manières d'organiser l’en- 
seignement, soit en le groupant par rapport aux différentes espèces de 
sciences enseignées, soit en vue du diplôme à obtenir : chez nous c’est 
cette dernière méthode qui a prévalu. 

Pour le moment et pour notre pays il semble difficile de rien changer 
à cette ligne de conduite. 

Je ne veux pas éterniser un débat de cette nature. Il exigerait un 
examen très approfondi de la question. Toutefois je citerai deux ou 
trois faits topiques à l'appui de mon opinion. 

Je ne conteste pas le tassement de nos élèves. Est-ce que, dans un 
établissement tel que l’Institut botanique, il ne peut pas y avoir des 
types divers ? Est-ce que la variété ne peut pas exister dans l'unité ? 
Est-ce qu'il n’y a pas des avantages de toutes sortes à concentrer les 
forces et à diminuer les dépenses ? 

Je vais vous citer un exemple des inconvénients que présente le mor- 
cellement. Il y a des années où l’on n’enseigne pas à Paris la botanique 
phanérogamique, ou la physiologie, la cryptogamie, etc. J'ai besoin de 
ces parties de la science pour devenir botaniste, médecin, pharmacien, 
etc. L'enseignement supérieur compte à Paris six cours de botanique. 
Eh bien! il y a des années — je défie qu’on conteste le fait — où telle 
partie de la botanique, la plus importante, comme celle de la physiologie 
végétale, ne sera pas enseignée dans tout Paris. Le cas se présente. 
Pourquoi? Parce que ces forces immenses, représentées par une demi- 
douzaine de professeurs, sans lien, sans entente, ne sont ni réglées ni 
équilibrées. Si les maîtres étaient réunis dans le même centre, ils 
pourraient s'entendre, avoir un programme commun, de façon qu’un 
tel traîtât la physiologie végétale pendant ur ou deux ans, tandis que 
tel autre s’occuperait d'autre chose. Les cours spéciaux existeraient 
toujours. Quel avantage ne trouverait-on pas à disposer de beaux et 
riches jardins, qui profiteraient à tout le monde, aux étudiants en 
pharmacie, en médecine, comme aux autres, au lieu de n'avoir que ces 
pauvres et misérables jardins multiples, mal tenus, qui existent dans 
certaines Facultés de province. 


— 117 — 


M. Planchon a dit que les élèves de Montpellier trouvent tout 
bénéfice à se promener à côté des jardins en attendant l'heure des classes. 
A ce compte, si on donnait le cours là où est le jardin, l’enseignement 
s'en trouverait encore mieux. C'est un idéal. Je soutiens qu'il n’y a rien 
de meilleur que les Instituts botaniques tels qu'ils existent en Allemagne 
et en d’autres pays, au double point de vue de l’économie dans les 
dépenses et du développement dans la science. 

Si on pouvait avoir des doutes à ce sujet, ce qui vient d’être dit de 
l'Institut botanique de Liége suffirait certainement pour les lever. 

M. Planchon. — Là on a taillé en plein drap, on a fondé de toutes 
pièces. Certes, il peut y avoir avantage à suivre ce système là où il n'y 
a qu’un professeur, mais dans beaucoup de villes universitaires existent 
des établissements considérables qu’on ne peut pas déplacer, qu'on ne 
peut pas fondre ensemble parce qu’on ne les transporte pas à la main et 
que des enseignements spéciaux y sont attachés. Il faut bien reconnaître 
la spécialité de l'enseignement. Les Facultés des sciences et les Lycées 
ne peuvent avoir le même enseignement que la médecine et la pharmacie. 

En France, cette division des moyens matériels d'étude s’imposera 
longtemps encore. Créer une Université modèle, puis grouper tous les 
enseignements dans des palais spéciaux, c'est une œuvre que Paris 
pourrait réaliser. Mais je ne crois pas qu'il soit avantageux de faire 
vivre sous le même toit des professeurs d'enseignements différents. Il 
est bon, non pas d'isoler les élèves les uns des autres, mais d'améliorer 
les divers moyens d'instruction que possède une Université. Ainsi nos 
élèves en pharmacie vont dans le jardin commun aux Facultés de 
médecine et des sciences, mais dans ce jardin, une part est réservée à la 
botanique médicale; réciproquement les élèves en médecine peuvent aller 
au jardin de l'Ecole de pharmacie. 

Il sera difficile, pour longtemps encore en France, de créer un Institut 
idéal comme celui que rève M. Baillon. Somme toute, la réunion des 
cours de botanique dans un même local n’est pas près de se faire: la 
question est à étudier peut-être, mais en se gardant de sacrifier la 
spécialité des divers enseignements. 

M. Cornu. — M. Baïllon vient de dire qu'il y a eu des années à Paris 
où la physiologie n'était pas enseignée. Il a ajouté que si les professeurs 
étaient groupés en un Institut, ils pourraient s'entendre pour prévenir 
un cas semblable(l). L'argument de M. Baillon, bien qu'il paraisse très- 


(1) 11 est bon de dire que l’époque dont parle M. Baillon est déjà ancienne. 
Sous l'Empire, on avait supprimé deux (sur quatre) des chaires consacrées à la 
botanique pure. Le professeur de la Faculté des sciences a toujours traité la 
physiologie une année sur deux; au Muséum elle a toujours été enseignée au 
moins partiellement; aujourd’hui nous avons cinq professeurs qui peuvent, 
chacun à leur point de vue, traiter la physiologie végétale suivant le titre et les 
ressources de leur chaire. 


— 118 — 


puissant, ne me semble pourtant que spécieux. En effet, pour qu’un 
cours puisse en complèter un autre, il faut qu’il fasse partie du même 
ensemble de cours, ainsi que cela a lieu dans des établissements où 
l'enseignement est donné en vue du même objet, ainsi que cela existe 
actuellement chez nous. 

Il faut pour qu’un cours en complète un autre, que les différentes 
parties soient bien équivalentes et bien adaptées; or cela n’a pas lieu 
lorsque l’un des professeurs prépare les élèves en vue d’un examen, et 
un autre professeur en vue d’un autre examen. 

Le professeur qui s'adresse aux futurs médecins puise dans le fond 
scientifique commun d’autres préceptes que celui qui s'adresse aux élèves 
agronomes. Il serait déraisonnable de prendre moitié du cours chez l’un, 
moitié du cours chez l’autre, à ces deux enseignements ne se correspon- 
dant pas : ils sont distincts; l’un des cours ne peut suppléer à l’autre. 

Ajoutons en outre que plus l’enseignement est élevé, plus les questions 
sont approfondies et plus le nombre des lecons est considérable, la durée 
du cours, s’allonge : il faut plusieurs années pour traiter un sujet; celui 
qui désire le connaître à fond doit s'attacher au professeur et suivre la 
série entière de ses lecons, le développement intégral de son programme; 
dans ce cas, bien moins encore que dans le cas précédent, ce professeur ne 
pourra être remplacé par un autre. 

De même que nous rencontrons, en histoire naturelle, la spécialisation 
des organes chez les êtres organisés, qui donne des résultats plus précis 
que dans l’industrie, la spécialisation des parties conduit à des améliora- 
tions incontestables ; de même dans la science nous trouvons la spéciali- 
sation des enseignements qui permet de réunir d’une facon plus claire, 
plus exacte, de professer d'une manière plus abrégée, d'acquérir plus 
rapidement les connaissances exigées pour un but nettement défini sans 
perte de temps, sans tâätonnements. 

Un groupement des chaires différent (plus économique peut-être) qui 
constituerait sans doute un progrès réel pour des centres moins importants 
qu'unecapitale, serait probablement pour nous, à Paris, un pas en arrière. 


M. le Président. — Cette question est si intéressante, si vaste, que 
je crains que nous ne finissions jamais de la discuter. On voit que 
beaucoup de chemins mènent à Rome. Il ne sera pas possible d'organiser 
partout l’enseignement de la botanique de la même manière. Mais je 
crois que nous serons unanimes à nous rallier au vœu émis par 
M. Magnus, savoir : que chaque Jardin botanique soit pourvu d’un 
laboratoire de recherches. (Adhésion). 

Ce vœu est donc adopté. 


M. Ch. De Bosschere. — Je crois que M. le Président oublie un des 
vœux proposés, M, Cornu demande qu’on dise en premier lieu qu’il y 


— 119 — 


aura deux espèces de laboratoires; les uns de recherches et les autres 
d'enseignement. 

2me vœu : « Le laboratoire de recherches a le besoin le plus impérieux 
d'être établi au Jardin botanique. » M. Magnus propose de dire que 
chaque Jardin botanique sera pourvu d’un laboratoire de recherches. 


M. Baïllon.— Je vous prierai d'ajouter mon vœu personnel, qui est que 
chaque laboratoire soit accompagné, autant que possible, d’un Jardin ou 
d’une portion de Jardin. Il n’est pas certain que ce vœu se réalisera, 
bien qu’il soit désirable, selon moi, qu’on le mette à exécution. 


M. Planchon. — Nous ne sommes pas opposés à ce vœu 


M. Baiïllon. — Pourquoi y seriez-vous opposés ? Quel inconvénient 
peut-il vous présenter ? 


M. Planchon. — Au contraire. Formulé de cette facon le vœu a une 
autre apparence que celui par lequel on réclame les groupements dans 
un institut unique. 


M. Ch. De Bosschere. — Est-ce que M. Baillon insiste pour que le 
Congrès émette le vœu qu'il y ait des Instituts botaniques dans les 
différents pays ? 

M. Baïllon. — J'ai dit que, suivant moi, la multiplication de ces 
Instituts était désirable. 


M. E. Laurent. — Est-ce qu'il existe réellement quelque part des 
laboratoires en dehors des Jardins botaniques ? 


M. Lefèvre. — Certainement. 


M. Baïllon.— A la Faculté des sciences de Paris il y a un laboratoire 
mais pas de Jardin. 


M. E. Laurent. — Il est inutile d'adopter la rédaction de M. Baïllon. 
Les laboratoires hors des Jardins botaniques constituent l'exception. Il 
est à souhaiter que l’on ne fasse jamais de laboratoire loin des Jardins 
botaniques Ce sont les laboratoires qui complètent les Jardins botaniques 
et non ceux-ci qui complètent les laboratoires. 


M. Baïllon. — Nous sommes d’accord. Puisqu’on dit qu’il y a des 
laboratoires qui n’ont pas de Jardin botanique, il est naturel que nous 
demandions qu’il y ait des Jardins botaniques près des laboratoires. 


M. Magnus. — Je veux que chaque Jardin botanique ait son 
laboratoire. Ce que je désire surtout c’est que chaque Jardin botanique 
ait son Institut où l’on puisse faire les recherches nécessaires à l’étude. 
Il est malheureux que dans certaines capitales, comme à Berlin, on ne 
puisse avoir un Jardin botanique pourvu d’un laboratoire, même 
d'enseignement, 


— 120 — 

M. Laurent. — Je soumets à la section la rédaction suivante : 

Le Congrès émet le vœu : 

« 1° Qu'il soit créé un laboratoire de recherches dans chaque Jardin 
« botanique; 

« 2° Qu'il soit établi un laboratoire d'enseignement dans chaque 
« Établissement où l’on enseigne la botanique, Universités, Écoles de 
« médecine vétérinaire, d'agriculture et d'horticulture. 


M. Ch. De Bosschere. — Il faut absolument que nous puissions nous 
mettre d'accord. M. Laurent vient de nous donner lecture de sa proposi- 
tion. Trois vœux nous sont ainsi soumis. Le 1®% est celui de M. Cornu : 


il faudrait deux espèces de laboratoires; les uns de recherches et les 
autres d'enseignement. 


M. Cornu. — Le Congrès s’associe-t-il à cette distinction qui me paraît 
fondamentale ? (Adhésion). 


M. Ch. De Bosschere.— Ce vœu est donc adopté. Le Congrès souhaite 
que chaque Jardin botanique soit pourvu d’un laboratoire de recherches. 
C'est la rédaction de M. Magnus qui a été adoptée et qui est en somme la 
même que celle que nous propose M. Laurent, 

8° vœu : « le laboratoire de recherches a le besoin le plus impérieux 
d’être établi au Jardin botanique. » 


M. Cornu. — C’est le même vœu. 


M. Ch. De Bosschere. — M. Baillon désire que chaque laboratoire 
soit pourvu d’un jardin. 


M. Cornu. Les laboratoires de quelque nature qu'ils soient. 
M. le Président. — Nous pouvons adhérer à ce vœu. 
M. Laurent. — On pourrait l'émettre à titre de remarque. 
M. Cornu. — Il peut très bien être présenté de la sorte. 
: M. Ch. De Bosschera. -— Vient enfin la proposition de M. Laurent. 


M. A. Gravis. — Aux trois vœux qui viennent d'être formulés, 
l'assemblée jugera peut-être convenable d’en ajouter un quatrième qui me 
semble être le complément des précédents. En voici l'énoncé : « Lorsque 
les circonstances le permettront, les laboratoires de recherches, les labo- 
ratoires de démonstration et le Jardin botanique, seront groupés en un 
seul Institut. » 


M. Cornu. — Je crois que dans certaines circonstances les Instituts sont 
la meilleure forme de groupement des établissements de botanique. Mais 
il y a des cas où ce groupement serait une gêne pour l’enseignement. 


— 121 — 


M. Gravis. — C'est pourquoi je dis : « Lorsque les circonstances le 
permettront... » 


M. le Président. — L'assemblée adopte-t-elle le vœu de M. Gravis ? 
(Adhésion). 


M. Cornu. — Je demande à dire un dernier mot pour essayer de 
démontrer que, dans certains cas, le groupement de tout ce qui se 
rapporte à la botanique, par exemple, dans un seul Institut constituerait 
un recul sur ce qui existe. Je prendrai comme exemple la ville de 
Montpellier. Il y a dans cette ville une Faculté de sciences qui donne 
l'enseignement supérieur, un Lycée qui donne l’enseignement secondaire, 
je passe l’enseignement primaire, la Faculté de médecine qui donne un 
enseignement appliqué aux futurs médecins, l'École de pharmacie qui 
donne l’enseignement de la botanique approprié à la pharmacie, l’École 
d'agriculture qui fait également de la botanique et enfin, une Station 
agronomique. 

Voilà six établissements dans lesquels la botanique se trouve repré- 
sentée à des degrés divers et avec des buts différents. Il est impossible 
que les mêmes professeurs se chargent de tous ces cours. L’enseigne- 
ment est distinct, il doit être donné à des endroits différents pour des 
élèves différents, aucun cours ne peut en remplacer un autre. Les élèves 
de 5e et de 6° ne recoivent pas le même enseignement que les élèves de 
l'École d'agriculture malgré la similitude des programmes. Dans 
chacun de ces établissements il y a plusieurs cours. Si ces cours sont 
séparés, c’est qu’il y a utilité de les maintenir séparés ; en réalité ils le 
sont comme fond, ils le sont comme forme; ille sont et doivent l'être 
comme conclusion, comme application, comme portée scientifique. Ce 
serait une lourde faute de grouper toutes ces personnes dans un méme 
établissement. Ils n'auraient pour bien unique que cette chose virtuelle : 
le nom abstrait de la botanique. En réalité ils sont distincts sous tous 
les rapports; ils sont différents comme but, comme aspirations, comme 
méthode d'enseignement, comme tendance. Ils se sont groupés de la 
facon la plus naturelle suivant l'intérêt précis des élèves, suivant l'en- 
semble des connaissances dont ils ont besoin. En réunissant tous ces 
cours dans un seul Institut botanique on grouperait des enseignements 
qui n’ont entr'eux qu’un lien absolument théorique. On sacrifierait une 
unité réelle en faveur d'une abstraction. 


M. Lefévre. — Je propose de mettre aux voix les propositions et les 
contre-propositions. On verra si le Congrès les adopte ou les rejette. 


M. le Président. — La section les a déjà adoptées. 


M. Lefèvre. — Elle ne s’est pas encore prononcée sur le 4 vœu qui 
émane de M. Gravis. 


— 122 — 


M. Ch. De Bosschere. — Il est bon de rappeler le texte de ce vœu 
« quand les circonstances le permettront, les laboratoires de recherches, 
les laboratoires de démonstration et les Jardins botaniques seront groupés 
dans un seul Institut. » 


M. Lefévre, — Sous cette rédaction, nous adoptons le vœu. 


M. le Président. — A propos de cette appellation d’Institut botanique, 
permettez-moi une observation. Ce terme peut donner lieu ici à des 
erreurs. En Allemagne, on entend par « Institut botanique » un Institut 
de l’Université où l’on apprend la botanique pure, non appliquée. Il y a 
d’autres installations pour l’enseignement technique ou appliqué. Dans 
le plus grand nombre de cas, ces Instituts botaniques ne sont même que 
des établissements où l’on enseigne l'anatomie, la physiologie et la 
morphologie. Il y en a d’autres qui enseignent la systématique. À Berlin, 
par exemple, il y a deux Instituts botaniques et une troisième installa- 
tion où est enseignée la botanique systématique. Tout n’est pas accumulé 
dans un seul et même établissement. 

La section se rallie-t-elle au vœu exprimé par M. Gravis? (Adhésion). 


M. Ch. De Bosschere. — Il est entendu que cette après-midi les 
sections de botanique et d’horticulture se réuniront pour discuter les 
questions d'intérêt commun. Cette assemblée générale commencera à 
3 heures. Elle aura lieu dans la salle du rez-de-chaussée, parce que 
M. le D' Van Heurck a besoin de notre salle l’après-midi pour préparer 
la séance de micrographie de ce soir. 


M. Planchon. Je demande qu'on soumette à l'assemblée générale la 
question des étiquettes. Il n’y a pas seulement ici une question matérielle 
en jeu. Je voudrais parier de l'étiquetage des plantes au point de vue de 
la valeur des noms (Adhésion). 


— La séance est levée à 12 !/, heures. 


a ES ss 


SECTIONS RÉUNIES. 


Séance du 4 août 1885. 


Présidence de M. A. Fiscner pe WaLpelM, professeur à l’Université 
impériale de Varsovie. 


M. Cu. De BosscHERE, secrétaire-général, remplit les fonctions de 
secrétaire. 


Sommaire : X/7"° question dw programme : Quel est le meilleur système 
d’étiquetage pour jardins botaniques, pour pares publics, pour jardins privés et 
pour serres? par MM. WIiTrMACK, PONCE, WESMAEL, PALACKY, PLANCHON, 
NiEPRASCHK, FISCHER DE WALDHEIM, KRELAGE, E. LAURENT, Cornu. X/X"° 
question du programme : De l'opportunité de la création dans les centres horticoles 
de Sociétés de prévoyance mutuelle et d'épargne en faveur des jardiniers et de 
leurs familles, par MM. BERNARD, D. LAURENT, BALTET. XV® question : La 
culture des champignons utiles est-elle susceptible de s'étendre? On demande un 
aperçu des espèces comestibles les plus communes et des espèces vénéneuses qui 
leur ressemblent le plus, par MM. J. E. PLANCHON, BAILLON, CORNU, MAGNUS, 
WITTMACE, PLANCHON fils, POoNCE, NIEPRASCHK, WESMAEL, FISCHER DE 
WALDHEIM. 


M. le Secrétaire-général. — Je crois être l'interprète de vos senti- 
ments, Messieurs, en priant M. Fischer de Waldheim, de Varsovie, de 
bien vouloir prendre la présidence de la séance. 


M. Fischer de Waldheim. — Avant d'accepter la présidence de la 
séance, je remercie bien sincèrement M. De Bosschere ainsi que les 
membres du Congrès. (M. Fischer prend place au fauteuil présidentiel.) 

Messieurs, nous avons à décider laquelle des questions de notre 


— 124 — 


programme sera portée à l’ordre du jour de la présente séance. Nous 
avons une réunion des deux sections de botanique et d’horticulture. Si 
je ne me trompe, nous étions d'accord hier pour entamer aujourd’hui la 
question des étiquettes et de décider : « Quel est le meilleur système 
d'éliquetage pour jardins botaniques, pour parcs publics, pour jardins 
Privés el pour serres. » Nous étions également d’accord, je pense, pour 
aborder la discussion de la culture des Champignons, question énoncée 
comme suit au n° 15 des travaux de la section d’horticulture : 

XV. La culture des champignons utiles est-elle susceptible de s’éten- 
dre? On demande un apercu des espèces comestibles les plus communes 
et des espèces vénéneuses qui leur ressemblent le plus. 

Si aucun des membres du Congrès n’a de modifications à proposer à 
ce programme, j'ouvrirai la discussion sur la question des étiquettes. 


Un membre. — Je ferai remarquer que c’est M. Planchon qui a 
demandé que cette question fut portée à l’ordre du jour et qu'il n’a pu 
être présent au début de cette séance. Je proposerai donc de retarder cette 
discussion. 


M. le Président. — Dans ce cas il ne nous reste qu’à aborder la 
seconde question. Mais je vois que M. Cornu, qui a bien voulu nous faire 
des communications importantes au sujet de la culture des champignons 
est également absent. 


M: Ponce. — La section d’horticulture a traité cette question et dressé 
un apercu des espèces comestibles les plus communes. Elle a trouvé que 
cette discussion appartenait plutôt à la section de botanique. Nous 
avons entendu dans cette séance des communications très intéressantes 
sur la culture des champignons en France. 


Un membre. — Je crois qu’il vaudra mieux prendre d’abord la ques- 
tions des étiquettes. 


M. le Président. — Quelqu'un demande-t-il la parole sur cette 
question ? 


M. Wittmack. — Messieurs, j'ai publié un petit rapport sur cette 
question (1). J'ai lu dans le premier fascicule un travail, par M. Hansen, 
sur la même question, ce qui m'a permis de constater que nous sommes 
tous les deux d'accord. Nous arrivons à peu près aux mêmes conclusions, 
c’est à dire, que les étiquettes en porcelaine sont les meilleures, les plus 
lisibles et les plus élégantes.Je me suis permis d'ajouter à cette conclusion 
l’avis qu’en cas de crainte d’une trop grande fragilité des étiquettes en 
porcelaine, c'est le fer émaillé qui devait être recommandé. J'ai fait 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » les notices de MM. CARL HANSEN, 
p. 110-111, et du Dr. L. WIiTrMACK, p. 361-363. 


— 125 — 


remarquer dans mon rapport qu'on serait peut être étonné que je n’aie 
pas fait mention des célèbres étiquettes de M. Crépin, au jardin botanique 
de Bruxelles, qui indiquent outre le nom, la patrie de la plante sur 
un planisphère. Mais elles sont en fer, peintes à l’huile, et cette couche 
de couleur est très peu résistante, c’est à dire qu’en 5 ou 6 ans elle tombe 
complètement et doit être renouvelée avec l'inscription. A part cet incon- 
vénient, je n'ai rien à reprocher à ces étiquettes que je trouverais magni- 
fiques si l’on pouvait arriver à les faire en porcelaine, puisqu'elles 
réuniraient ainsi le double avantage de l'élégance et de l'indication par- 
faite de la distribution des plantes sur le globe. Il est vrai qu’en l’absence 
d’un planisphère on pourrait avec fruit se servir des signes'convention- 
nels de M. Eichler, tels qu’il les a réunis dans son syllabus. Un astérisque 
placé au dessus d’une petite ligne horizontale, par exemple, signifierait 
« hémisphère boréal », tandis que l’inverse signifierait « hémisphère 
austral »; placé à la gauche d'une verticale, l’astérisque renseignerait 
la plante comme appartenant au Nouveau Monde et réciproquement. 
C’est une indication qui se ferait d’une manière plus simple que sur 
un planisphère. Il est vrai que la patrie de la plante n’est pas indiquée 
avec toute l'exactitude voulue, mais on s’en fait une idée suffisante. 

Je me suis peu étendu sur les étiquettes pour horticulteurs, parce que 
ceux-ci en ont de très convenables, en zinc, plusieurs maisons les fabri- 
quent et on en est très satisfait. 

Reste à examiner le mode d’attache des étiquettes. Qu'’elles soient 
en porcelaine, en fer émaillé ou en zinc, il faut absolument condamner 
le fil de fer ou toute autre attache en fer, parce que la rouille détruit les 
étiquettes, même lorsqu'elles sont en porcelaine. C’est une faute qu’on ne 
commet que trop souvent. On prend des étiquettes très élégantes et l'on 
croit que tout est dit lorsqu'on les a fixées au moyen d’une vis ou d’un 
clou en fer. Je recommanderai pour les étiquettes en porcelaine une vis, 
un clou ou fil en zinc ou un en fer zingué. On objectera que des fils 
ou des vis en zinc n'existent pas, mais elles ont existé, si pas à Anvers, 
du moins ailleurs, on pourrait donc encore les fabriquer. Remarquons 
que le fer zingué ne suffit pas toujours, parce que, par l'usage, le fer 
perd cette couche protectrice. 

Les tiges des étiquettes pourraient être en bois, mais sont alors insuf- 
fisamment durables. Il vaut mieux employer ici du fer zingué. 

Voilà, Messieurs, les observations que m'ont été suggérées par la 
question à l’ordre du jour. 


M. le Président. — Je remercie l'honorable M. Wittmack des intéres- 
sants développements dans lesquels il a bien voulu entrer. 


M. Ponce.— À Paris j'emploie, avec la majorité de mes collègues, le 
zinc, et j'ajouterai que jusqu’à présent nous n'avons rien trouvé de meil- 


leur : c’est-ce qu’il y a de plus convenable et de moins cher. La surface 
de ce métal recoit très facilement les inscriptions nécessaires, elle 
permet même de les effacer et de les remplacer sans peine. On nous a 
offert des étiquettes émaillées, des étiquettes en caoutchouc même, et 
d’autres encore, mais elles coùtaient bien cher, c'est à dire que leur prix 
s'élevait à 3, 4, 5 1/2 francs, ce qui fait réfléchir. Le zinc est tellement 
bon marché que nous l’avons aujourd’hui adopté de préférence à toute 
autre matière. 


M. Wittmack. — Je crois avoir dit aussi que les horticulteurs ont de 
bonnes étiquettes en zinc. 


M. Ponce. — Oui. Et puis elles ne sont pas lourdes. Il suffit de Les 
attacher avec un simple fil. 


M. Wittmack. — Je dois faire remarquer à l'honorable préopinant, 
que la question à résoudre ne se borne pas à préconiser une étiquette 
pour horticulteurs, mais aussi pour Jardins botaniques, pour jardins 
publics et privés, et pour serres. Dans les établissements d’horticulture 
et les pépinières on est, ainsi que je l’ai constaté, habitué à des systèmes 
très-simples, la matière première étant le bois, le plomb ou le zinc. Mais 
quant à ce dernier je dois faire observer que les inscriptions qu'il reçoit 
si facilement, deviennent aussi promptement illisibles. 


M. Ponce. — On les reécrit alors. 


M. Wittmack. —— C’est un inconvénient. Ainsi dans les serres à 
Orchidées les meilleures étiquettes en zinc ne sont plus lisibles après 
une année. 


M. Ponce. — J'ai tenu à constater quelles étaient en général nos 
préférences en fait de système d'étiquettes. Or, nous admettons que celles 
en zinc sont les meilleures et le meilleur marché. 


M. Wesmael. — L’honorable M. Wittmack a recommandé comme 
étant les meilleures, les étiquettes en porcelaine. Je dirai que j'ai été 
très grand partisan de ces étiquettes, mais que je les ai condamnées 
depuis l'hiver si rigoureux de l’année 1879-80, qui a tué et nos plantes 
et nos étiquettes en porcelaine. Je les avais employées pour l'étiquetage 
de mes arbres fruitiers. J’y avais peint les noms de mes variétés de 
pommes, de poires, je les avais passées au four; bref, elles paraissaient 
irréprochables. Mais par des températures de -19°,-20°,-21°, ces étiquet- 
tes se sont crevassées, fendillées, et ont même éclaté! Je les déclare 
excellentes, mais à la condition que nous n’éprouvions plus un hiver 
aussi rigoureux. 

Les étiquettes sur faïence sont moins bonnes encore. J'en ai fait faire 
à Nimy. Par des températures de -7°,-8° elles se sont, comme les précés 


sore 


dentes, fendillées et ont éclaté. Je crois donc qu’on peut recommander 
les étiquettes en porcelaine sans trop se fier à leur indestructibilité. 

D'autre part, l'honorable préopinant a aussi loué les étiquettes de notre 
honorable ami M. Crépin. Ce sont, vraiment, des étiquettes modèles et 
elles ne sont pas aussi altérables qu'on pourrait le croire. Si tous les ans 
on les enduit d’une couche légère de vernis copal, elles résistent pendant 
15 à 20 ans, et il faut avouer que c’est une bien petite besogne, qui 
peut être faite par les ouvriers au début de la saison printanière. 

Autre chose. Vous avez condamné avec beaucoup de raison, l'emploi 
de clous en fer. Je vous dirai cependant que nous avons près de Mons 
une usine qui se charge de recouvrir d’une couche de zinc, la tôle, le 
fil de fer et les clous. Dans mon jardin j'ai des étiquettes fixées à des 
troncs d'arbres à l’aide de vis trempés dans un bain de zinc, constituant 
à peine une galvanisation et cependant, depuis 10 ans qu'elles sont 
placées, elles sont restées intactes. Ces clous coûtent bien meilleur 
marché que ceux qu’on pourrait fabriquer en zinc. Cette même usine 
produit également un fil de fer galvanisé à l’aide duquel nous dressons 
nos contre-espaliers, Ce fil, encore une fois, est bien meilleur marché 
que le fil de zinc. Le fil de fer convenablement galvanisé, est à l'abri 
des intempéries. Jamais je n'ai constaté une tache de rouille sur ce 
métal. 

Je me résume, Messieurs, et je déclare encore que les étiquettes en 
porcelaine et en faïence ont de sérieux avantages, mais qu’elles ne 
résistent pas à une température exceptionnelle, que nous ne devons pas 
exclure de nos prévisions. 


M. le Président. — Messieurs, la question qui nous est soumise est 
complexe. Nous n'avons pas qu’à traiter les étiquettes en général, mais 
bien dans leur application aux Jardins botaniques, parcs, jardins privés 
et serres. Ne serait-il pas utile de scinder ainsi la question ? 


M. Palacky. — Je vous ferai remarquer, Messieurs, qu’il sera très dif- 
ficile d'indiquer la distribution de la flore sur le globe, même à l’aide d’une 
étiquette planisphère qui n’a pas une certaine étendue. Ne vaudrait-il pas 
mieux accepter la distribution admise en zoologie et procéder par ini- 
tiales conventionnelles. Il serait presqu’impossible de trouver des noms 
nouveaux; mais en réalité il n’y a pas de distribution nouvelle. On pour- 
rait parfaitement réunir en un groupe d’initiales ces diverses indications : 
« Cosmopolite, tropical, arctique, antarctique, néarctique (?) palearc- 
tique (?), etc. Il ne faudrait qu’une nomenclature acceptée, qui serait très 
facile, deux initiales pouvant rendre facilement les deux syllabes princi- 
pales du mot, comme N. A. pour nearctique(?) P. A. pour palearctique(?) 
eb ainsi de suite. Ce serait plus intelligible que l’astérisque, et l’on ne 
s'exposerait pas à renseigner comme appartenant à £owé un hémisphère, 


— 128 — 


une plante qui ne croît que sur une partie de celui-ci. Une étiquette 
planisphère serait très belle. 

Nous n'avons pas même un atlas qui indique complètement et en 
détail la distribution de la flore sur le globe. Mais en admettant qu'il 
existât, combien faudrait-il de soin pour figurer sur un planisphère une 
distribution quelconque ? Figurez-vous une serre avec 10,000 étiquettes. 
Il faudrait pour le travail des étiquettes des hommes spéciaux. Bref, 
l'étiquette planisphère est très belle en théorie, mais elle n'est pas 
pratique. L'indication par initiales, au contraire, est d’une grande sim- 
plicité : Robinia N. À. par exemple, serait une indication plus simple 
et aussi claire qu’une marque faite sur un planisphère. 


M. Planchon. — Je veux rester dans le sujet mais en l’élargissant un 
peu. Je suppose qu’il me sera permis de parler, non pas de l'étiquetage 
au point de vue matériel, mais de faire quelques remarques sur la 
mauière dont nos plantes sont nommées dans nos Jardins botaniques et 
dans les catalogues de graines qui répandent au loin les plantes de ces 
Jardins. Je ne fais de reproche à personne et j'en fais personnellement 
mon mea culpa; mais, sauf des exceptions, nos Jardins botaniques sont 
déplorablement étiquetés, et ce pour une raison bien simple. Pour les 
plantes vivaces, le professeur peut rectifier, mais pour les plantes annu- 
elles la chose est plus difficile. Il nous arrive notamment des centaines 
de plantes, qui ne répondent pas exactement aux noms annoncés dans 
les catalogues. J'ai cherché, par exemple, il y a quatre ans, à me créer 
à Montpellier une collection de Rhubarbes. J’ai à cet effet, demandé des 
spécimens de graines à tous les Jardins botaniques du pays et j'ai recu 
sous les noms les plus différents les mêmes espèces. 

Il y aurait peut-être un moyen d'éviter ces erreurs. Elles proviennent 
des jardiniers qui récoltent les graines. Le professeur ne peut pas vérifier 
tous les ans les centaines d'espèces de graines récoltées. Ce même jardinier 
recoit dans son jardin des centaines de plantes fausses qu’il met en place 
et que l'étudiant prend comme plantes exactes. Ce qu’il importerait donc 
de faire avant tout, c’est une révision complète de la nomenclature des 
plantes de nos jardins, ensuite de commencer par supprimer dans les 
catalogues une foule de vulgarités partout existantes sous des noms faux. 
Mais il y a plus. Dans les grands genres, les genres difficiles, on peut 
être sûr que la confusion règne partout. Je crois donc que chaque direc- 
teur de Jardin devrait s'attacher à faire récolter avec un soin particulier 
les graines intéressantes et spécialement les graines de sa région. Quand 
on aurait ensuite, en consultant le catalogue, demandé à chaque région 
les plantes qui y sont bien nommées, au bout d’un certain nombre d’an- 
nées les étiquettes de nos Jardins botaniques seraient bien plus exactes. 
Je le répète encore, je ne fais de reproches à personne. Je m'en fais à 
moi-même et je me suis mis à l'œuvre. La première année je n’ai pu 


— 129 — 


faire grand’ chose, naturellement. J'ai conservé autant que possible les 
plantes dont je suis sûr et j'ai commencé par en rayer quelques autres 
de mon catalogue. C’est un début; je continuerai ainsi que je l'ai dit. 
Je crois que si nous prenons l'habitude de ne pas tenir comme graines, 
la plupart des vulgarités des Jardins botaniques, portant souvent des 
dénominations fausses, si nous cultivons, au contraire, les plantes 
propres à la région, dont nous sommes absolument sûrs, et que nous en 
demandions autant aux autres régions, nous rendrons un véritable 
service à la science. 


M. Wittmack. — Je reviendrai un moment sur la partie matérielle 
de la question. Il est bien vrai que les étiquettes en porcelaine sont 
fragiles, mais j'ai recommandé aussi les étiquettes en fer émaillé. 

Si les étiquettes en porcelaine ont éclaté pendant l’hiver de 1879-1880, 
comme le disait l'honorable M. Wesmael, ne serait-ce pas parce que les 
tiges en fer sur lesquelles elles étaient fixées se sont contractées? 
M. Hansen, dans son rapport, a recommandé de mettre une plaque 
de caoutchouc entre l'étiquette et le tuteur. C’est un bon remède pour 
égaliser les tensions; mais je crains qu’une plaque de caoutchouc serait 
aussi détruite par un hiver aussi rigoureux que celui qui nous occupe. 

Quand au fil de fer zingué, je trouve que lorsqu'on l’emploie, la 
pellicule de zinc se détache. Pour cette raison il vaut mieux employer 
le fil de zinc pur. 


M. Wesmael. — Pour les vis j'ai parlé d'expérience. Quand au fil, 
si par la torsion la couche de zinc tombe, c’est que l'opération de la galva- 
nisation a été mal faite. Avec le fil de fer, galvanisé par l'usine que j'ai 
citée, cet inconvénient n’est pas à craindre et le fil peut être soumis sans 
danger à toutes les torsions. Quand à la destruction des étiquettes en 
porcelaine par le froid, elle n’est pas le résultat d’une contraction de la 
tige. C’est un véritable clivage qui s’est produit, et il est évident que le 
froid avait agi directement sur la porcelaine. 


M. Cornu. — Cette question des étiquettes est très importante, Nous 
avons au Jardin des plantes de Paris un atelier spécial qui a eu jusqu’à 
trois hommes occupés toute l’année à la confection des étiquettes. Dans 
l'École de botanique et ses annexes, il n'y en a pas moins de 10,000 à 
surveiller. Les étiquettes en porcelaine ont ce grave défaut que lorsque 
les plantes annuelles ont disparu ou bien qu’un certain nombre de 
plantes vivaces perdent leurs feuilles, elles restent inutilisées devant 
une place vide, elles constituent un poids mort considérable et un volume 
très grand quand on est obligé de les remiser. Elles sont très lourdes. 
Par tas de 500 à 600 on les met les unes contre les autres, il en tombe 
- un certain nombre et elles se brisent. Rien n'est plus fragile, même 
pendant la saison ordinaire. De là, la nécessité d’avoir en réserve un 


9 


— 130 — 


stock d'étiquettes pour remplacer celles qui sont détruites, ou bien de 
laisser les étiquettes à des places vides. Deux alternatives assez fâcheuses. 

Une étiquette sans plante irrite le visiteur. D'autre part, s’il faut trop 
renouveler les étiquettes, la dépense devient exagérée. À Paris, au 
Muséum, il y a des étiquettes en fer, rivées sur une tige oblique. La 
plaque est peinte au minium puis à la peinture verte. À la surface on 
marque à la peinture noire les noms latins et la patrie de la plante. 
Ces étiquettes ainsi faites peuvent durer de 6 à 7 ans. On pourrait rem- 
placer la plaque de fer par une plaque de zinc, le zinc étant enduit de 
peinture comme le fer et il y aurait une certaine économie d'exécution 
parce que le zinc se taille plus facilement que le fer. Avec une bonne paire 
de cisailles on coupe une plaque de zinc assez épaisse. 

Ce système si commode n’a pas pu être maintenu parce que la couche 
de peinture se soulève en certains points. Il se produit une oxyda- 
tion qui gagne de proche en proche sous la couche de peinture. Au bout 
d'un certain temps celle-ci se détache entièrement. Les couleurs différentes 
de la plaque indiquent les espèces médicinales, vénéneuses, industriel- 
les, ete. Somme toute, tandis qu'avec les étiquettes en fer la peinture 
va en se noircissant de plus en plus, le zinc conserve peu sa couche de 
peinture. 

A Paris de grands destructeurs de nos étiquettes ce sont les moineaux, 


qui sont très nombreux; ils déposent sur leur surface un acide qui brüle 


la peinture et fait disparaitre les caractères tracés. 
En résumé, nous avons après divers essais, dû conserver l’ancien 
système employé depuis de très longues années. 


Il y a une remarque à faire. Un grand avantage des étiquettes en fer 


c’est que lorsqu'elles sont vieilles et qu’on veut les remplacer, il suffit 
d’en râcler la surface ou de les passer au feu, pour obtenir une surface 
nette. 

Il à été essayé, il y a quelques années, un étiquetage différent pour 
les plantes de serre, et principalement pour les plantes aquatiques. Les 
plantes de l'aquarium de notre serre chaude sont étiquetées d’une 
manière spéciale. La partie plane est souvent exposée à différents prin- 
cipes d’altération, beaucoup plus graves dans une serre chaude, qu’au 
dehors. M. Brongniart fait essayer une étiquette qui parait être bonne. 
Elle consiste en une plaque de verre, à la partie postérieure de laquelle 
on a écrit avec de l'émail, le nom de la plante. Une couche d’émail 
coloré recouvre le tout. Ces étiquettes sont relativement voyantes, elles 
ne sont d’ailleurs pas soumises à des chocs, elles se trouvent suspendues 
au dessus de l’eau. Le nom se détache en transparence, de sorte que le 
visiteur lit avec une grande facilité. 

Les étiquettes placées horizontalement sont moins visibles. 

Ces étiquettes réunissent, je crois un certain nombre d'avantages, mais 


;l n'en est pas de même lorsqu'elles sont employées pour des plantes de 
serre placées à une distance moins grande de l'observateur. Pour ces 
dernières il y a chez nous, des étiquettes métalliques, peintes, attachées 
aux branches. Inutile d'ajouter qu'avec ce système il faut éviter que le 
fil métallique ne comprime et n'étrangle la tige ou la branche qui 
tient l'étiquette. 

Pour les arbres de pépinière, on doit avoir des étiquettes qui se lisent 
rapidement. Un constructeur de Clermont Ferrand, M. Girard-Col, a 
imaginé un système qui semble pratique et peu coûteux. C’est une 
étiquette en zinc mince. Ce constructeur, dis-je, fournit des étiquettes 
d’un bon marché extrême, en zinc très mince, mais que l’action d’une 
presse a renforcées en les dotant d’une petite gouttière qui les rend 
rigides. Elles se conservent très bien et durent trois ans. Elles noircis- 
sent, il est vrai, mais le nom se détache très bien sur le fond. Il suffit 
d'écrire au ‘crayon. La surface a été rendue mate par un acide et le 
crayon agit parfaitement. S'il est d’une dureté convenable, les étiquettes 
sont infiniment plus solides que les étiquettes ordinaires, en bois, qui 
sont altérées en 6 mois. 

Tout le monde connaît le système très commode de ces étiquettes en 
plomb sur lesquelles on imprime un numéro, et qu’on enroule autour 
d’une branche. Mais cet étiquetage ne peut étre qu’un xwmérolage, il 
renvoie toujours à un catalogue. C’est un système excellent dans un 
jardin où l'on ne veut pas que le personnel puisse à loisir mélanger les 
plantes. 

Mais il y a un autre système d'étiquettes dû à M. Forney, professeur 
d’arboriculture à Paris. Celles-ci consistent en de petites plaquettes de 
terre cuite. Elles sont solides, percées d’un trou, destiné au fil de fer à 
l’aide duquel on les accroche à la branche. On y inscrit le nom à l’aide 
d’un crayon à base de noir de fumée, analogue à nos crayons Conté. Ce 
système est presque aussi commode que le précédent et plus complet. 
Lorsque la poussière et le noir de fumée l'ont noircie, il suffit de la 
brosser. Le reproche que l’on fait à cette étiquette, c’est qu’elle se brise. 
Elle a des défauts et des avantages. Elle est aussi un peu lourde, dit-on, 
et peut, attachée à des sujets faibles, déterminer une certaine courbure; 
mais rien n'empêche d'employer pour des sujets faibles des étiquettes 
moins lourdes. 

Quant à nous, pour les pépinières, nous employons les étiquettes de 
Girard-Col, en zine, et pour l’École de botanique nous nous servons des 
étiquettes à tiges de fer, portant le nom sur une plaque de tôle. 

M. Niepraschk. — J'ai également essayé plusieurs systèmes d’éti- 
quettes, en porcelaine, zinc, fer et autres matières, mais j'ai toujours 
trouvé que les étiquettes en porcelaine sont assez fragiles. 

Il y a plusieurs systèmes d'étiquettes excellents, mais la grande difi- 


— 132 — 


culté est souvent l’attachage à la plante et surtout aux arbres. Pour les 
grands arbres, je n'ai trouvé qu’un moyen, le plus expéditif, c’est d'y 
clouer la plaque. Pour les autres, j'emploie les étiquettes percées 
de deux trous, un en haut et un en bas, par lesquels je passe le fil de 
fer; parce qu'avec un seul fil le vent fait balloter la plaque et que, non 
pas l'étiquette mais le fil de fer finit par s'user. Il est très-désagréable 
que dans un bon jardin fruitier une étiquette manque et la présence de 
celle-ci est du reste parfois d’une grande importance. Il faut donc s’y 
servir d'étiquettes d’une légèreté assez grande pour qu’elle ne puisse plus 
agir sur le fil d'attache. Celles de M. Girard-Col à Clermont-Ferrand 
répondent très bien à ce désideratum. 

Mais il y a une autre étiquette excellente au même titre, elle est 
inventée par MM. Radig et Krühler, à Schweïdnitz, et faite de carton 
pierre trempé dans une certaine huile. Cette étiquette est d’une légèreté 
extrême. L'inscription ainsi que la plaque sont très durables : enduites 
d’un vernis elles recoivent l'écriture, puis une seconde couche. Le bord 
est en outre renforcé de zinc ou de fer blanc. Je viens de contrôler 
de ces étiquettes placées depuis deux ans en plein air, et l'écriture n'avait 
pas souffert. 

Pour revenir un moment encore sur l’attachage, on a recommandé 
pour ce dernier le fil en caoutchouc; ce système est bon surtout pour les 
étiquettes légères. ; 

M. Planchon. — J'ai très peu à ajouter à ce qui vient d’être dit, mais 
comme j'ignore ce quis’est passé au commencement de la séance, je voulais 
poser quelques questions au sujet d'étiquettes dont j'ai fait l'expérience 
et au sujet d’autres qu'il y aurait intérêt à expérimenter. Je voudrais 
savoir si l’on a fait l'expérience des étiquettes sur zinc avec le chlorure 
de platine. C'est une encre qui se détache nettement et qui est d’un 
emploi très commode ; mais soit qu’on ait mal fait l'opération récemment 
au Jardin des plantes de Montpellier, soit défaut inhérent à l'encre, au 
bout de très peu de temps le zinc a produit de l’oxyde et l'écriture a 
faibli, De sorte qu’on n’a pas été satisfait, Je voulais donc demander 
si quelqu'un a observé les étiquettes sur zinc au chlorure de platine. 


M. Baïllon. — Je me suis servi de ces étiquettes. Le procédé auquel : 
vous faites allusion est déplorable. Au bout de très peu de temps les 
étiquettes ainsi traitées sont altérées de façons très diverses. 


M. Wittmack. — J'ai, dans mon rapport, cité les étiquettes de 
M. Girard-Col et de M. Brandes, à Hanovre. L'encre la plus résistante 
est le chlorure de platine, qui coûte cher du reste et j'ai fait remarquer 
aussi dans mon rapport que M. de $' Paul Hilaire, à Fischbach, en 
Silésie, qui est grand amateur d'Orchidées, a employé le chlorure de 
platine, mais qu’il a enduit l'étiquette d’une couche de vernis copal. 


— 133 — 
Un membre. — Pour l'intérieur, oui. 


. M. Planchon. — Pour ce qui est des étiquettes dont on renouvelle à 
l'encre grasse l'inscription, dans les climats méridionaux, surtout, elles 
s’effacent très vite et doivent donc être refaites souvent. C’est un incon- 
vénient d'autant plus grave que ce travail est souvent fait par des 
jardiniers, et que l’ouvrier même le plus intelligent commet facilement 
des erreurs. Or, vous savez que la moindre faute d'orthographe blesse 
non seulement les yeux mais la conscience du professeur. 

Pour ma part, j'ai pensé pouvoir accepter des étiquettes de M. Girard- 
Col, de Clermont-Ferrand, qui sont sur plaque de zinc et imprimées en 
creux. M. Girard-Col fait mordre le zinc par un acide et, après l'impres- 
sion en creux, il y passe du noir. Ces étiquettes sont très lisibles et 
durent très longtemps. La dépense est moins grande que pour les 
étiquettes en fer et elles ont l'avantage de ne pas nécessiter les renouvel- 
lements constants de l'écriture. 

Il faut distinguer aussi entre les étiquettes de plantes vivaces et celles 
de plantes annuelles. Par suite de l’inexactitude de noms plus fréquente 
pour ces dernières, si l'étiquette est à écriture fixe, elle fera souvent 
sptte figure. Je me suis décidé, soit à mettre les plantes annuelles en 
observation avant de leur donner place dans la partie publique du jardin, 
soit à employer pour cette dernière catégorie des étiquettes mobiles sur 
lesquelles on écrit à l'encre grasse ou au crayon. 

Une des causes pour lesquelles les étiquettes en bois sont inacceptables, 
même pour des plantes que l’on met temporairement dans un dépôt, se 
sont les escargots ou les guèpes qui en raclent souvent la surface écrite. 

Je parlerai encore d’un essai qui, s’il était fait avec plus de connais- 
sance de la technique, pourrait peut-être donner de bons résultats. C’est 
celui de l’étiquette sur verre avec un papier imprimé, que l’on applique 
sur le verso du verre en l’y collant à la gomme, après quoi l’on protège 
le tout par une couche de vernis copal. Ces étiquettes se renferment dans 
un petit cadre. Elles durent quelques années et sont magnifiques, — 
L'eau s’y est cependant introduite et elles ont été plus ou moins altérées, 
mais ce mal n’est pas grand. Ce qu’elles redoutent bien plus, c’est la 
gaminerie de certains élèves, qui les brisent souvent à coup de canne. 

En somme, c’est un système auquel j'ai renoncé pour prendre les 
étiquettes gravées sur zinc de M. Girard-Col. 


M. Baïllon. — Voici ce que l'expérience m'a appris sur la question 
qui nous occupe, et je ne parlerai ici que des étiquettes appliquées aux 
Jardins botaniques. Je puis dire que j'ai essayé toutes les étiquettes 
possibles et souvent dépensé de l'argent en pure perte. On peut être 
satisfait pendant quelque temps des étiquettes en zinc, notamment de 
celles que fabrique la maison Girard-Col. Mais on rencontre des difficul- 


— 134 — 


tés dans l'emploi des encres au chlorure de platine appliquées sur zinc. Il 
est difficile d'obtenir deux fois de suite des résultats identiques. Le succès 
paraît dépendre de l'épaisseur de l'encre ou de la quantité que la plume 
en dépose sur l'étiquette. Le sel n'est-il pas toujours également pur, 
également bien préparé? Je l'ignore. Mais placées en plein air, mes 
étiquettes se sont conservées un temps très inégal. Très souvent j'ai vu 
la surface écrite se soulever, s'épaissir, présenter des efflorescences 
salines. Les lettres noires peuvent devenir grises, puis blanchätres, 
disparaître ou devenir illisibles. | 

Je me suis bien mieux trouvé des étiquettes mises au commerce 
par la maison Girard-Col, mais qui sont d'un prix plus élevé. Elles sont 
imprimées en creux, comme il a été dit, et les dépressions de la 
plaque se remplissent d'une couleur noire, rouge ou autre. Au Muséum 
de Paris, ces étiquettes se sont mieux conservées lorsqu’aucun arbre ne 
les surplombait que quand elles ont été placées sous des feuillages. 
Aiïnsi, pendant quelques années, les Fougères de l'École de botanique 
étaient étiquetées avec ces modèles. L'année dernière, il a fallu les 
supprimer : aucune d'elles n’était demeurée lisible. J’attribue surtout 
ce mauvais résultat aux pluies qui tombaient d'arbres voisins (les Fou- 
gères sont plantées à l'ombre) et qui encroûtant la plaque, rendaient les 
mots tout à fait illisibles. 

Je crois très bon le procédé, en apparence rudimentaire, employé à" 
Kew et dans quelques jardins allemands. Un piquet de bois, fendu 
suivant son axe longitudinal, est enfoncé en terre. Sur la surface plane 
un peu blanchie et lissée, on écrit avec un simple crayon. Ces étiquettes 
se détruisent vite, sans doute; elles ne sont pas coûteuses; il est facile de 
les remplacer; chacun peut les refaire à la main. En général l'écriture 
au crayon bien noir est préférable à celle qu’on pratique avec des encres 
diverses. 

J'avais essayé d’un procédé qui se rapproche de celui dont vient de 
parler M. Planchon. Peu importe qu’on fasse une dépense un peu 
élevée, si le système doit durer longtemps, il y a souvent encore économie. 
J'aurais voulu un cadre vitré et parfaitement étanche dans lequel on eût 
pu introduire un carré de carte ou de papier, chargé d'inscriptions en 
aussi grand nombre que possible. Mon idée était d’y placer, non un 
simple nom, mais une demi-page de détails, d’y introduire, par exemple, 
un feuillet de livre que l'étudiant lirait tout en ayant la plante sous les 
yeux. J'avais donc songé à enclore l'étiquette dans un cadre métallique, 
analogue, quoique moins luxueux, à ceux dans lesquels on place les 
photographies. J'ai fait fabriquer les cadres en zinc, avec un fond, de 
zinc également, qui se glissait à coulisse dans des rainures du cadre, 
avec l'étiquette appliquée sur la face antérieure. Eh bien! se conservant 
assez bien à l'abri d’un mur ou encore dans les serres où l’on ne bassine 


seit 


— 135 — 


pas trop les plantes, de semblables étiquettes n’ont pu jusqu'ici demeurer 
étanches en plein air et sous l’action de pluies répétées. Ce n’est pas l’eau 
qui tombe et qui s’insinue dans le bord inférieur de l'étiquette, entre 
le métal et le verre, qui est le plus à craindre : c’est celle qui remonte 
par capillarité entre le verre et le bord supérieur du cadre métallique et 
qui finit par détremper et déliter complètement le papier écrit ou imprimé. 
Ce système sera bon quand on aura trouvé le moyen de fabriquer un 
cadre vitré complètement étanche. 

Aujourd’hui,je suis arrivé à ce que je crois de meilleur: des étiquettes 
en métal fondu, belles, un peu chères, analogues à celles que M. Fischer 
de Waldheïm à apportées ici. La preuve qu’elles sont très-bonnes, c’est 
que j'en connais qui servent depuis vingt ans et qui, si on les lave de 
temps en temps, tout en repeignant le fond (les lettres saillantes sont 
limées et brillantes), sont encore aussi bonnes que le premier jour. Un 
grand nombre de ces étiquettes sont employées pour l'indication du nom 
des rues, pour les plaques de voitures; on les rejeterait pour ces usages 
si elles ne duraient päs, si elles n'étaient pas économiques. La première 
mise de fond est seule un peu élevée ; on la regagne certainement. Je 
dois toutefois faire une restriction : ces étiquettes ne résistent pas aux 
chocs, aux coups secs frappés par les visiteurs des jardins, ni même, en 
hiver, aux brusques variations de température, si elles ne sont pas 
coulées en un alliage convenable. Il faut qu’elles soient fabriquées par 
un vendeur consciencieux car il y a des alliages, en général à 
plus bas prix, qui les rendent trop fragiles. Il faut choisir un alliage 
résistant; sinon l'étiquette se brise au niveau de la ligne qui joint les 
points d’attache de la plaque sur la tige-support. Il faut essayer les 
alliages; il ne faut pas chercher à réaliser des économies insignifiantes 
et mal comprises; il faut que les viroles d'attache soient soigneusement 
rivées. 


M. le Président. — Je remercie les divers orateurs qui ont bien 
voulu nous éclairer et je me permettrai de présenter à mon tour à 
l’assemblée une très belle étiquette en métal coulé, celle que j’ai montrée 
à l'honorable M. Baillon Ces étiquettes sont employées dans le jardin 
botanique de Varsovie, pour des plantes qui durent longtemps et dans 
une partie du jardin qui est visitée par des milliers de personnes. 


. Outre les inscriptions de la famille, du genre, de l'espèce, de l’auteur 


et de la patrie, en latin, elles portent le nom des plantes en russe et en 
polonais. Ces étiquettes sont très durables, elle ne coûtent pas trop cher, 
deux francs chacune. Un coup de bâton, peut, il est vrai, les casser 
comme d’autres auxquelles il a été fait allusion; mais l’attachage 
obviera beaucoup à cet inconvient. L'inscription est en relief, de sorte 
que la peinture de celle-ci peut être facilement renouvelée. Ces 


— 136 — 


étiquettes sont vraiment très pratiques pour des plantes durables, 
telles qu’arbres et arbustes. 


M. Witmack. -— J'ai recommandé aussi les étiquettes en fer émaillé, 
mais les étiquettes en porcelaine sont plus élégantes. 


M. Niepraschk. — M. Bouché, inspecteur du Jardin botanique de 
Bonn, me prie de dire un mot des étiquettes en bois de saule. Depuis 
quatre ans qu’elles sont fichées en terre, elles se tiennent très bien, elles 
paraissent donc recommandables. Cette étiquette est peinte en blanc et 
ensuite la pointe est trempée dans du bitume, c’est ce qui lui donne la 
durabilité. On en est très satisfait. 


M. Krélage. — Messieurs, comme je n'ai pas assisté au commence- 
ment de la séance, je dois faire appel à votre indulgence pour le cas où 
je répéterais l’une des considérations que l’assemblée a déjà fait valoir. 
Je traiterai la question des étiquettes non seulement au point de vue 
botanique mais aussi au point de vue horticole. Je désire aussi dire un 
mot de l'étiquette pratique telle que nous l’employons. 

Mais d'abord permettez-moi quelques considérations générales. Pour 
les plantes de pleine terre la première règle de conduite devra toujours 
être : l'étiquette, l'accessoire; le registre, le principal. Et celui-ci doit 
être tenu de telle sorte que toutes les étiquettes fussent-elles perdues par 
malheur, un homme intelligent puisse, sans connaître les plantes, les 
désigner absolument toutes, par leurs noms, au printemps suivant, 
d’après les emplacements qu’elles occupent. 

Il faudrait admettre comme règle d'administration l'existence d’un 
plan du jardin, tellement précis, qu'il ne puisse pas y avoir d'erreur 
lors d’un remplacement éventuel d'étiquettes. Ceci posé la question 
des étiquettes de pleine terre sera beaucoup simplifiée. On pourra 
enlever pendant la période d'hiver et emmagasiner toutes les étiquettes 
des plantes vivaces. C'est une précaution nécessaire dans les climats . 
plus septentrionaux, comme celui de la Hollande, par exemple, où 
nous avons des pluies abondantes, un terrain partout extrémement 
humide et de fortes gelées. On trouve aussi le temps de repeindre ces 
étiquettes, de les remettre à neuf s’il le faut, afin qu’elles soient prètes 
au printemps suivant. 

Pour les arbres nous employons des étiquettes en zinc. Je reviens 
sur ce sujet, parce que je me rappelle que dans ma jeunesse déjà, 
nous les employions pour les plantes de serres; nous avions un système 
très primitif alors, mais il est le meilleur; il n’est pas élégant, mais 
il procure des étiquettes très durables. Nous prenions une simple plaque 
de zinc, nous en raclions la partie supérieure pour la rendre rugueuse et 


— 137 — : 


sur une couche de peinture blanche, fraîche, nous écrivions le nom de 
la plante au crayon. Nous laissions bien sécher, puis nous recouvrions 
le tout d’une couche de vernis. Fichées en terre, ces étiquettes duraient 
énormément, il suffisait de les laver de temps à autre, et de les 
enduire d’une nouvelle couche de vernis. 

J'ai fait des milliers de ces étiquettes pour les plantes spécimens 
ou plantes mères de nos collections. Aujourd’hui on ne fait plus 
de collections aussi étendues, mais à cette époque là, pour ne pas 
faire d’erreurs de vente, chaque plante dont des multiplications étaient 
prises, était munie d'une étiquette en zinc. C’est un système très recom- 
mandable. Ces étiquettes peuvent se faire d'avance, pendant l'hiver. 
Je rappellerai qu'on ne pouvait pas toujours les mettre dans les pots, 
mais on les attachait alors, soit à la branche, soit au tuteur de la plante 
et elles avaient alors une forme ovale avec’ un trou au sommet. L’atta- 
chage est une chose difficile à trouver. Le fil de zinc se coupe, le cuivre 
n’est pas très convenable non plus, le fer galvanisé est meilleur je crois. 

Dans le Jardin botanique d'Amsterdam on a introduit il y à quarante 
ans des étiquettes en porcelaine portant l'empreinte des noms des plantes. 
Ces étiquettes étaient très bonnes, on les appliquait sur une plaque de 
bois. La difficulté était de les attacher et je ne me rappelle pas exacte- 
ment quel était le système suivi. Toujours est-il que l’attache ne doit 
pas être trop serrée, de sorte qu'il y ait toujours un peu de jeu. 

Enfin, je veux citer encore une étiquette sur papier ou vélin employée 
dans le temps au Jardin botanique de Leide. C’est une étiquette 
enfermée dans un tube de verre hermétiquement clos. Quoique fragile, 
cette étiquette est recommandable pour les plantes de serre, la rupture 
du tube de verre n’entrainant pas la destruction de l'étiquette. 


M. Niepraschk. — Ce système est excellent. Quant aux observations 
de l’honorable M. Krélage sur la nécessité de dresser un plan exact 
du jardin, elles sont très fondées. Je possède, quant à moi un plan de 
notre parc qui renseigne même jusqu'aux arbrisseaux plantés isolé- 
. ment sur les pelouses, de sorte qu’à l'aide de ce plan chacun pourrait 
retrouver les noms, occasionnellement perdus, des plantes et des arbres. 
En ce qui concerne le mode d'attache des étiquettes, je fais comme 
l'honorable M. Krélage vient de le recommander : j'ai fait élargir un 
peu les trous des vis, de sorte que celles-ci ne sont plus si serrées. 


M. le Président. — Quelqu'un demande-t-il encore la parole sur ce 
sujet? 


M. E. Laurent. — Je crois que les étiquettes en zinc, qui sont plus 
simples, ont encore un avantage sur les étiquettes plus compliquées. 
Quand on perd les plantes, les dernières étiquettes pourraient ne plus 


— 138 — 


servir. On pourrait parfois rester plusieurs années, sans retrouver 
certaines espèces et les étiquettes en zinc, au contraire, durent aussi très 
longtemps ; la plante étant perdue on peut enlever l'inscription et en 
faire une nouvelle étiquette. Le zinc est tres bon marché avec cela, de 
sorte qu’en définitive les étiquettes en zinc sont les meilleures comme 
prix et comme longue durée. 


M. le Président. — Il faut encore considérer plus ou moins l’étique- 
tage sous un autre point de vue. Pour des plantes vivaces, par exemple, 
qui peuvent durer tres-longtemps, on tient à avoir, surtout dans les 
jardins publics, des étiquettes qui, en même temps qu’elles soient très 
durables, laissent une impression agréable au public et attire même son 
attention. C’est là le but à atteindre. Il faut que le public s'arrête avec 
plaisir et lise le nom de la plante. 


M. Laurent. — À Vilvorde on a fait il y a 20 ans des étiquettes en 
zinc, très lisibles aujourd’hui. On arrive à de très-beaux résultats avec 
les étiquettes en relief. 


M. le Président.—Je crois que nous pouvons considérer cette question 
comme épuisée et faire un résumé. Il est impossible de formuler des 
conclusions précises, séance tenante, en vue des différents vœux émis ; 
mais nous pouvons recommander quelques systèmes d'étiquettes dans 
l'ordre des mérites qui paraissent leur avoir été reconnus. Ce sont, me 
semble t-il, en premier lieu les étiquettes en zinc, puis celles en fer 
émaillé et celles en porcelaine, pour plantes de serre, par exemple, à 
condition que l’on emploie un système d'attache convenable, surtout 
pour les écoles de botanique. Enfin, pour les serres chaudes et les bas- 
sins des serres chaudes on peut recommander les plaques en verre 
décrites par M. Cornu. 

On a recommandé le fer zingué. Il me paraît que le fil de fer 
galvanisé est celui auquel il faut donner la préférence. Voilà en quel- 
ques mots le résumé de ce que nous avons entendu. 


M. Cornu. — N'est-il pas possible de joindre au résumé les recom- 
mandations si justes et excellentes de M. Krelage : que le système 
d’étiquetage doit être doublé dans tous les Jardins botaniques, pour la 
sécurité du professeur et dans l'intérêt de la tenue du jardin, d’un 
registre avec des indications topographiques, ou la collection de ce dernier 
soit notée place par place. J'ai fait la triste expérience de l'embarras 
qui peut susciter l’absence ou la privation de documents de ce genre. 
(Adhésion.) 


M. le Président. — Messieurs, nos sections réunies sont encore 
appelées à traiter la question n° 19. 


— 139 — 


XIX. De l'opportunité de la création, dans les centres horticoles, de 
sociétés de prévoyance mutuelle et d'épargne en faveur des jardiniers 
et de leurs familles. 


M. le Secrétaire-général. — Messieurs, il y a d’autres questions 
encore. Il y a une partie de la 3° question que la section de botanique a 
réservée à l'assemblée générale et que voici : 

III. Quels sont, depuis le Congrès de Paris en 1878, les progrès 
réalisés en botanique dans les principaux pays du monde? Installations 
botaniques, musées, laboratoires, etc. 

Ensuite la tarification des envois horticoles par chemin de fer. 

La question relative à la culture des champignons. 

XV. La culture des champignons utiles est-elle susceptible de s’éten- 
dre? On demande un aperçu des espèces comestibles les plus communes 
et des espèces vénéneuses qui leur ressemblent le plus. 

Enfin la 19° question, relative aux sociétés de prévoyance mutuelle, 
devait être traitée dans les rapports préliminaires par un délégué du 
Gouvernement belge, M. Bernard. Comme l'honorable M. Bernard est 
présent à cette séance, je demanderai à l'assemblée s'il ne convient 
pas de l'écouter sur cette question, traitée parfaitement dans la section 
ce matin. (A dhésion.) 


M. Bernard. — Je suis à la disposition de l'honorable assemblée. Mes 
devoirs m’ayant retenu ce matin, j'ai regretté de ne pouvoir assister à 
votre séance. 

En traversant les galeries de l'Industrie de cette admirable Exposition 
universelle d'Anvers, j'ai été frappé par une sentence d'un économiste 
célèbre, M. Jules Simon. Dans son livre remarquable sur l’ouvrier, 
il nous disait : « Personne ne peut sauver l'ouvrier du paupérisme, 
si ce n’est l’ouvrier lui-même. » Cette vérité économique dont nous 
voyons les applications et les effets salutaires se multiplier autour de 
nous, doit nous engager, nous horticulteurs et amateurs d’horticulture, 
à l'appliquer à l'avenir de la population ouvrière qui s'occupe de notre 
science de prédilection. Si dans certains pays de l'Europe, les ouvriers 
jardiniers se sont associés contre les chances défavorables de maladies, 
d’accidents, il n’en a pas été de même en Belgique. Je regrette de ne pas 
voir à cette séance les délégués gantois; je les aurais engagés à porter 
leurs efforts vers la création de ces utiles associations qui viennent si 
eflicacement en aide à l’ouvrier. 

Vous connaissez le principe de la coopération. L’ouvrier épargne 
pendant les bons jours pour se créer un sort meilleur pendant l’'adversité. 
La pensée est éminemment chrétienne, c’est la prévoyance fraternelle 
appliquée aux besoins ultérieurs de la vie. 

Que de combinaisons heureuses nous voyons naître en France dans 


— 140 — 


les opérations de ces associations, qui suivent chez nos voisins une 
marche ascendante. Elles accordent des indemnités en cas de maladie, 
indemnités parfois très élevées, — des médicaments à toute la famille 
selon les besoins, — une pension viagère à l’époque de la vieillesse à 
chacun des affiliés, — des funérailles dignes d'un travailleur. 

En Allemagne aussi, ces associations appliquées aux besoins de 
l'ouvrier agricole, fonctionnent sous diverses formes. Vous connaissez 
tous ces belles institutions. En Belgique même, elles existent sur tous 
les points du territoire; mais il est regrettable qu’elles n'y aient pas été 
appliquées aux besoins de l'ouvrier agricole. C’est comme si ce dernier 
redoutait cette forme d'association, parfaitement légale cependant et 
protégée par la loi. Le gouvernement belge a accordé la personnification : 
civile à une société qui, au moyen de cotisations de deux francs par 
trimestre et par tête de bétail assurait chacun des affiliés contre les. 
risques de maladie et de mort du bétail. En Belgique la loi permet 
aux Sociétés de s’administrer librement. Le gouvernement n'est pas 
renseigné sur les Sociétés de cultivateurs établies dans le royaume. 

Une cotisation minime de fr. 1,50 par mois, mise en commun, 
produit les résultats les plus fructueux. Pourquoi nos compagnons 
resteraient ils plus longtemps exclus des bienfaits de l’association que les 
autres catégories d'ouvriers ? D’après le rapport de la Commission 
permanente de secours mutuels, qui aide avec bienveillance les associa- 
tions dans certaines circonstances et. qui modifie au besoin leurs statuts, 
qui écarte enfin les obstacles contre lesquels, à l’origine, les Sociétés vont 
se buter, dans le rapport de cette Commission, dis-je, je vois qu’en 1882 
il existait en Belgique 52693 mutuellistes, la moyenne était de 9,32 
obligations par mille habitants. Le nombre des Sociétés libres, qui 
transmettaient leurs comptes au gouvernement était de 176, il en existait 
assurément un chiffre beaucoup plus considérable. 

Je viens de vous dire qu'en Belgique la moyenne d’obligations par 
1000 habitants était de 9,32; en Angleterre, cette moyenne est bien plus 
considérable : par groupe de 1000 habitants on trouve 156 mutuellistes. 
En France, cette proportion est de 22,97. 

Dans ces divers pays, le capital réuni a atteint des chiffres consi- 
dérables. Dès maintenant, en Belgique, les Sociétés mutuelles possèdent 
in globo un capital de 1,800,000 francs, ce qui fait pour chaque socié- 
taire, en moyenne, un capital de réserve de 45 francs. En France, cette 
moyenne est plus élevée encore ; elle est de 54 francs par mutuelliste. . 

Or, que fait, en présence de ces résultats lentement et sûrement 
acquis, un petit sacrifice de fr. 1,50 par mois ? Je vois ici M. Ponce, qui 
connaît le mécanisme de ces associations : il ne me contredira pas quand 
j'affirmerai que bien des fois cette obole a sauvé de la misère des familles 
ouvrières. 


— 141 — 


C’est donc avec la plus intime conviction de faire œuvre utile, que 

_ j'engage les membres du Congrès à agir de tout leur pouvoir, à exercer 
toute leur influence dans leurs centres respectifs pour amener les 
ouvriers de la branche agricole à profiter des bienfaits de l’association 
mutuelle, et pour leur faire comprendre qu’au moyen de l'épargne de 
quelques sous par semaine, ils peuvent s’en assurer tous les avantages. 
Le Congrès qui à bien voulu introduire cette question, rendra un nou- 
veau service à la science, puisque pour avoir des ouvriers habiles nous 
devons les prémunir contre les chances défavorables résultant de maladie 
et d'accidents. Le Congrès aura fait œuvre humanitaire, puisqu'il aura 
fait entrevoir à l'ouvrier de la branche spéciale qui nous occupe, la 

. possibilité de soulager sa vieillesse et ses infirmités. 


M. Laurent. — Je crois devoir rendre hommage à la pensée si 
éloquemment développée par l’honorable M. Bernard ; j'ajouterai que 
l'Association des anciens élèves de l’école de Vilvorde a compris 
l'avantage de la mutualité. Notre Société n'existe que depuis un an 
seulement, mais confiants dans l’avenir, nous donnerons à notre œuvre 
toute l'extension possible. 


M. Baltet. — Ce matin, dans la section d’horticulture où cette 
question à été traitée, nous avons appris que l'honorable M. Bernard 
devait la présenter ici; je suis heureux de constater que ces deux 
délibérations se corroborent et se complètent mutuellement. Les orateurs, 
dans la séance de ce matin ont surtout insisté sur la modicité de la 
cotisation, les jardiniers n'étant pas exposés à des accidents aussi 
fréquents que les ouvriers des usines. Par cette modique cotisation on 
peut arriver à assurer des. secours médicaux aux familles affiliées, des 
pensions de retraite aux titulaires. On a cité des associations de cultiva- 
teurs, telles que les «Jardiniers de la Seine », et autres, organisées 
dans se sens. Le vœu que nous venons d'émettre confirme celui que nous 

_avons émis ce matin. 


M. le Président. — J'ouvre maintenant la discussion sur la question 
des Champignons. — On demande un aperçu des espèces comestibles les 
plus communes et des espèces vénéneuses qui leur ressemblent le plus(). 


M. Planchon. — Cette question a été traitée avec beaucoup de soin 
dans l’un des rapports. Pour la région de Montpellier je pourrais faire 
un apercu très-restreint; je n'ai guère de renseignements à ajouter à 
l'exposé si complet de M. Muller. J’ajouterai cependant une recomman- 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » le mémoire de M. C. ROUMEGUÈRE, 
p. l-8. 


— 142 — 


dation. Je crois qu’une des choses les plus importantes relativement à ce 
travail d'énumération de champignons vénéneux, serait de faire dans 
tous les pays, dans chaque région restreinte une topographie très-exacte, 
de la distribution des champignons comestibles et des champignons 
vénéneux. C’est un point capital. Mon fils a fait un premier travail 
d’ébauche de ce genre. Il reprendra le même travail pour la région de 
Montpellier, parce que cela a une importance pratique. 

Dans les Cévennes, par exemple, l'Oronge vraie (Agaricus aurantiacus) 
ne monte pas dans la région du Hêtre, tandis que l’Oronge fausse se tient 
généralement dans cette dernière région, tout en descendant parfois 
dans la zône de Chäâtaignier. Il faudrait que, dans un département, 
chaque canton eût sa carte de distribution des champignons bien établie 
et que cette carte, accompagnée de bonnes figures des champignons 
comestibles et vénéneux, fut affichée dans les écoles, les mairies, de 
manière à rendre familière, même aux enfants, la connaissance de ces 
espèces. C'est là un des côtés par lesquels la Cryptogamie pratique 
pourrait entrer utilement dans l’enseignement primaire et dans 
l'instruction générale du grand public. 


M. Baïllon. — Je désire que tout ce que je vais avoir l'honneur 
de vous dire, soit porté à l’actif de M. Boudier, zélé et savant mycologue 
de Montmorency, de qui je tiens la plupart des faits que j'aurai à jeter 
dans le débat. J'avais avec tant d’autres, déploré le vague qui règne 
généralement dans les ouvrages les plus sérieux, alors qu'il s’agit de la 
différenciation des champignons dangereux et des espèces non vénéneuses. 
Je voulais, dans un traité de Cryptogamie médicale pratique, faire 
connaître d’une facon spéciale, et non théoriquement ou d’une facon trop 
générale, les ‘espèces utiles et les espèces nuisibles. Il m'était nécessaire 
de m'adresser à des spécialistes et, ainsi que je l’ai dit, M. Boudier a 
bien voulu m'aider des conseils de sa grande expérience. Grâce à 
lui, embarrassé que j'étais d'arriver à un mode de groupement pratique, 
j'ai compris qu’on pouvait s'arrêter aux données suivantes. 

Parmi les espèces si nombreuses de champignons qui nous entourent, 
il y en a quelques-unes qui sont excellentes comme comestibles et aux- 
quelles aucun reproche ne saurait être adressé par personne : c’est là une 
première catégorie. 

Il y a aussi une catégorie de champignons qui, par contre, sont, aux 
yeux de tous, des espèces incontestablement vénéneuses, c'est à dire 
nuisibles. Leur nombre, dans notre flore, s'élève à une douzaine environ. 

Dans une troisième catégorie, peuvent se ranger des champignons, en 
nombre vraiment considérable, qui sont souvent signalés par les divers 
auteurs comme suspects. On pourrait qualifier la plupart d’entre eux 
d'indifférents. Sans doute, ils ne sont pas vénéneux et leur ingestion 


— 143 —- 


n’est pas suivi de véritables symptômes d’empoisonnement. Leur usage, 
et surtout leur abus peut produire et produit souvent de véritables 
accidents d'indigestion; ils sont simplement indigestes, surtout quand on 
les consomme en trop grande quantité. . 

On peut, en même temps, établir que la catégorie dont nous avons ici 
parlé en deuxième lieu, celle des champignons véritablement vénéneux, 
est de beaucoup la moins nombreuse. Il est donc plus facile de faire 
connaître cette catégorie au public que tout autre série d'espèces utiles 
ou vénéneuses. 

Partant de cette idée, M. Boudier a bien voulu figurer exactement, 
dans des aquarelles exécutées avec beaucoup de conscience et de talent, 
les espèces véritablement vénéneuses de nos environs. Il a pensé qu’on 
irait au plus pressé en faisant connaître, par des figures exactes, ces: 
espèces dont on doit d’abord se garder. Mais la difficulté, d’une nature 
très-sérieuse, qui se produit alors, est la suivante. Il faut que ces 
aquarelles soient reproduites avec une absolue fidélité, afin que la 
reproduction puisse être à l'infini distribuée au public et mise à la portée 
de tous; exposée, par exemple, dans les écoles, les lieux publics des 
campagnes, etc. Des gravures en noir, telles que celles qu’on intercale 
. dans tous les livres, sont absolument insuffisantes, parce que la couleur 
est indispensable à la distinction des bonnes et des mauvaises espèces. 
Si l’on se borne à donner dans le texte l'indication des couleurs, des 
teintes des diverses portions d’un champignon, mille hésitations arrêtent 
l’observateur dans la pratiqne. D’ailleurs, les couleurs employées géné- 
ralement dans l’industrie et les arts, sont loin d’être inaltérables; elles 
changent et s’effacent par le temps. On ne peut guère remédier à cet 
inconvénient qui fait que le plus habile est exposé à hésiter entre deux 
espèces voisines, l’une bonne et l'autre pernicieuse. Il est, en effet, 
certain qu’en dehors de la nuance exacte, la plupart des autres carac- 
tères sont souvent identiques dans deux espèces douées de qualités 
absolument opposées. L'observation de tous les ouvrages coloriés publiés 
depuis un siècle démontre assez que les teintes appliquées par les 
ouvriers coloristes, sont défectueuses ou le deviennent après une certaine 
période. 

Il n’y a donc qu’une chose à faire : essayer de faire représenter 
par la chromolithographie toutes les espèces vénéneuses de champignons, 
avec toute l'exactitude désirable et en se mettant autant que possible 
à l'abri des changements de teinte que produit l’altération des couleurs 
employées. Si l’on pouvait arriver à réunir, dans des tableaux populaires, 
à bas prix, et qui s’afficheraient partout, dans les villes et les 
campagnes, les chromolithographies des espèces vénéneuses auxquelles 
il vient d'être fait allusion, je crois qu’on aurait rendu un grand 
service à l'éducation populaire et je ne vois pas d'autre moyer, 


— 144 — 


de sortir à peu de frais de la difficulté sur laquelle est appelée notre 
attention. 


M. Cornu. Le nombre des champignous réellement vénéneux estrela- 
tivement restreint. M. le D' Quélet, d'Hérimoncourt, près Montbéliard 
(Doubs), l’un des hommes les plus versés dans la connaissance des cham- 
pignons none en a fait la révision; il en réduit la liste à une 
trentaine si j'ai bonne mémoire. 

Dans ce nombre, on ne doit pas compter les variétés ae indi- 
gestes, et surtout les spécimens trop vieux des espèces comestibles : les 
accidents produits par cette dernière catégorie de champignons ne 
rentrent pas dans ce qu’on appelle rigoureusement des empoisonne- 
ments. 

Il est remarquable que les accidents graves, suivis de mort, sont 
presque toujours dûs, au moins dans nos régions, à un petit nombre 
d'espèces; ces espèces sont confondues avec d’autres espèces comestibles. 
Suivant les points de la France, c’est tantôt l’une, tantôt l’autre. 
M. le D' Em. Planchon a spécialement étudié ce sujet dans sa thèse de 
doctorat, il peut en parler avec autorité. Cette question a déjà été traitée 
et le sera spécialement dans les actes du Congrès. 

Ainsi, dans le climat moyen, on croit reconnaître le champignon de 
couches (Agaricus [Psalliota] campeslris) dans les Oronges vénéneuses 
{4g. (Amanita) phalloides, Oronge ciguë ; Ag. (Amanita) mappa] qui ont 
de même un anneau et des lames plus au moins semblables mais blanches. 

Dans le midi de la France on confond la même espèce avec l’Ag. 
(Volvaria) glaucocephala qui n'a pas d’anneau, mais qui à des lames 
roses. 

On peut confondre la fausse Oronge Ag. (Amanila) muscarius, avec 
la vraie (Ag. (Amañnila) caesareus) qui a des lames jaunes et non 
blanches. , 

Une pareille erreur surprend ceux qui ont la moindre habitude de 
l’observation ; mais il est constant que certaines personnes apportent 
la plus extrême légèreté dans la récolte des champignons. En voici un 
exemple : 

Un empoisonnement se produisit à la suite d’un repas de champignons, 
il y a quelques années, dans le département du Doubs, sur la frontière 
Suisse; des Italiens qui travaillaient à l'établissement d’une route en 
qualité de terrassiers, moururent au nombre de sept à huit : ils avaient 
ramassé dans les bois des champignons ; ils les avaient fait cuire, pré- 
tendant les reconnaître facilement comme identiques à ceux qu’ils avaient 
l'habitude de manger dans leur pays; interrogés ensuite sur les carac- 
tères qui leur avaient permis de reconnaître ces champignons, ils répon- 
daient au médecin qu’ils avaient vu des champignons rouges et qu'ils 


— 145 


les avaient reconnus à leur couleur. On sait qu’elle correspond à nombre 
d'espèces de cette couleur, des comestibles et des vénéneuses. 

Très souvent, on voit des promeneurs, attirés par la belle forme, 
l’abondance, le coloris des champignons, les ramasser: on les rapporte 
à la maison, on essaie de voir s'ils sont bons ou mauvais. Une cuiller 
d'argent, une pièce de monnaie, noircissent dit la croyance populaire, 
quand on les laisse séjourner dans la casserole qui sert à la cuisson de 
champignons vénéneux ; si la cuiller ne noircit pas on peut, dit-on, les 
consommer sans danger. C’est celle erreur qui est la cause des accidents 
si fréquents chaque année, erreur qu'on ne parvient pas à déraciner. 

Cependant, dans beaucoup de cas, il serait possible d'éviter de fatales 
méprises en appliquant aux champignons les ressources que nous don- 
nent nos sens; un goût styptique, une odeur vireuse, désagréable nau- 
séeuse, se rencontrent dans un très grand nombre d'espèces vénéneuses ; 
mais, qui songe à employer ce moyen si simple de vérification ? 

Il est à remarquer que les animaux qui païssent dans les prés, et quel- 
quefois dans les bois, ne s’empoisonnent jamais avec des champignons, 
quoiqu’ils en mangent assez souvent : les vaches notamment font usage 
de l’odorat et du goût; les caractères puisés à cette source permettraient 
d'éviter bien des confusions. M. le D' Quélet en a fait un tres large 
usage et on en tire, même au point de vue de la classification, des résul- 
tats excellents ; il est absolument nécessaire de goûter les espèces du 
genre Æussula pour pouvoir les reconnaître à coup sûr. — Il suffit de 
très faibles quantités pour se rendre compte du goût; dans tous les cas il 
faut se garder d’avaler les doses, même très faibles, de la substance sou- 
mise à la mastication. 

Une bonne et franche odeur, agréable, sont d’un bon augure pour 
l'espèce qui la présente (1) et on pourrait presque tenter d'en manger. 


IT, — Utilisation des champignons développés dans la nature. 


Il se produit tous les ans, à l’époque de la saison des pluies, un nombre 
considérable de champignons; beaucoup d’entre eux seraient utilisables 


(1) Au cours de riches excursions mycologiques dans les hautes forêts du Jura, 
nous avons fait plusieurs tentives de ce genre, mon ami M. le Dr Quélet et moi, 
soit sur des espèces indiquées comme comestibles (Po/yporus ovinus) soit sur 
d’autres moins connues (Craterellus clavatus); c’est par cette méthode que j'ai 
reconnu de même emploi le Boletus granulatus et le B. luleus dont le premier 
est mentionné comme excellent. 

M. le Dr Quélet à fait un grand nombre de ces essais qui n’ont pas élé tous 
couronnés de succès, comme il le raconte lui-même dans la flore du Jura et des 
Voges. Cette méthode d’expérimentation ne doit être conseillée à personne. 
(Note ajoutée pendant l'impression). 

10 


— 146 — 


dans l'alimentation, notamment des classes pauvres qui sont le plus 
souvent privées de viande. L'utilisation de cette matière nutritive et 
douée parfois d'une saveur délicate, est très désirable; malheureusement 
la multiplicité des formes qui apparaissent alors et la confusion facile 
avec des espèces danger euses, rendent cette utilisation très difiicile. 
Dans la région méditerranéenne en France, la sécheresse du sol et 
la chaleur rendent assez rares les herbes potagères sauvages; les paysans 
se jettent avec avidité sur des champignons qu’on néglige absolument 
dans le nord. Le ZLactarius deliciosus, l'Ag. (Amanila) vaginatus; ils se 
rabattent même sur des espèces très médiocres l’Ag. (Armillaria)melleus 


et ses variétes. Ces diverses espèces se vendent couramment sur les 


marchés. 

Aux environs de Paris et dans le Nord de la France, on ne poursuit 
guère la cueillette des champignons que d'une manière locale; en 
dehors des communes, le choix des espèces est très variable. Sur 
les bords de la Loire on recherche l'oreille(Ag.[Pleurotus] Eryngi) ; 
près de Fontainebleau, le charbonnier (Russula cyanozantha); près 
de Montmorency, le champignon Polonais (Lactarius deliciosus); près 
de Nantes la langue de carpe (Ag. prunulus); l'Oronge n'existe qu’à 
l'état d'extrême rareté ; le Cèpe (Boletus edulis) n'est pas connu ou n’est 
pas recherché. 

Auprès de Bordeaux au contraire, l’Oronge et le Cèpe sont très 
activement surveillés et recueillis dans les bois, et ils y ont une juste 
célébrité. | 

Pour engager les paysans à profiter de cette matière nutritive, lar- 
gement produite par la nature et si malheureusement perdue sans aucun 
profit pour les classes pauvres, que faudrait-il faire ? 

Il faudrait leur faire connaître certaines variétés véritablement utili- 
sables et saines, et parfaitement faciles à distinguer. 

Il y en a d’abord quelques unes connues partout et presque partout 
recueillies au moins ça et là. Ce sont les Chanterelles (Cantharellus ciba- 
rius), l'Hydre sinué ou pied de veau (Zydnum repandum) ; ces espèces 
se vendent à Paris, depuis quelques années, à raison de 30 à 40 centimes 
le kilogramme; chez les épiciers et les marchands de comestibles on 
en voit de grandes quantités. 

Mais il y en a d’autres beaucoup plus abondantes et que personne ne 
recueille malgré leurs qualités précieuses. Ce sont notamment deux 
Bolets qui viennent en grande abondance dans le voisinage des pins 
Boletus luteus (B. annularius Bull.) et le Bolet granulé (Bolelus granu- 
latus Rostk.). 

On peut y joindre le Lactaire délicieux (Zactarius deliciosus) à lait 
rouge devenant vert; et l'Ag. (Pleurolus) ostrealus. 

Il faut, pour cela, être guidé dans la récolte par une personne par/aile- 


— 147 — 


ment au courant des espèces qu’elle indique et procéder successivement 
avec prudence; goûter avec elle l'espèce indiquée, préparée isolément, 
sans mélange avec une autre. Un seul champignon douteux ou vénéneux 
peut faire sentir son influence sur un ensemble considérable d’autres 
parfaitement inoffensifs. 

On peut, pour les premiers essais, employer des animaux, sur lesquels 
on jugera des effets produits. 

Il ne faudra jamais faire cuire les champignons sans les examiner 
tous individuellement, éliminer les douteux, rejeter ceux qui sont trop 
âgés. 

Il est prudent, en général, de ne recueillir qu’une seule espèce à la fois 
afin d'éviter les confusions. ; 

Il est indispensable de ne mettre dans le panier de la récolte que les 
spécimens choisis par celui qui connaît véritablement l'espèce dont il 
s’agit. 

Il est bon d'éviter d'admettre dans l'opération de la cueillette des 
enfants trop jeunes ou des personnes trop peu expérimentées. 

Tout cela paraît sans doute un surcroît trop grand de précautions, mais 
on n’en saurait trop prendre. 

Le persil, si généralement employé dans nos campagnes dans tous les 
aliments, n’est pas utilisé sans un examen très minutieux, dans la crainte 
de le voir confondu avec la ciguë (Conium maculatum) qui cependant 
cause de temps en temps encore des acccidents. 


III. — Culture des champignons. 


L'extension de la culture des champignons appliquée uniquement au 
champignon de couche (4g. (Psalliola) campestris) est un sujet qui a été 
souvent proposé aux études des botanistes. 

On pourrait peut-être faire quelques pas de plus dans cette voie. En 
Chine et au Japon, la culture de certaines espèces sur des troncs d’arbres 
se fait régulièrement, paraît-il. Chez nous on observe souvent des pous- 
sées successives de l'Ag. (Pleurolus ostreatus) sur les vieux troncs d’ar- 
bres, j'en ai observé des exemples; la grande valeur du bois, chez nous, 
est un obstacle au développement de cette culture; mais il est possible de 
trouver un substratum moins cher (je l'ai vu vivre sur des amas de 
copeaux et de sciure de bois) ou une espèce poussant sur une substance 
moins coûteuse. 

_La Morelle comestible se vend, à Paris, un prix élevé, sur le pied de 
12 francs le kilogramme, elle est rare et très estimée. Or, on l’a, en 
plusieurs endroits, recueillie sur des débris de tubercules de Topinam- 
bours; M. E. Roze, un de mes amis, a fait une enquête spécialement 
dirigée sur cette question et on en trouvera les résultats consignés dans 


— 148 — 


la Revue Mycologique de M. Roumeguère, à la date de trois ou quatre 
années. 

Des essais directs pourraient être faits : je sais qu’il y en a d'entrepris 
depuis plusieurs années. 

Malgré tout, le champignon de couche possède des qualités très pré- 
cieuses. Le mycélium se transporte aisément; il demande un temps très 
court pour arriver à produire des fructifications. Dans la nature cer- 
taines espèces, sinon toutes, demandent sûrement plusieurs années. 

Il est d’ailleurs l’un des meilleurs que l’on connaisse : l’un des plus 
fins comme goût et des plus parfumés. Il n’exige, en outre, qu’un substra- 
tum très facile à obtenir, le fumier de cheval qui est commun dans les 
grandes villes. 

C’est la question du substratum qui est la plus grave ; pour pouvoir 
cultiver avec succès une espèce déterminée, il faudrait savoir ce qu'elle 
exige et, dans bien des cas, la complexité des éléments sur lesquels le 
mycélium rampe, fait qu’on est dans l'incertitude des conditions réelle- 
ment nécessaires. 

Le champignon de couche a encore une autre qualité précieuse, c’est: 
de fructifier régulièrement et ex {oute saison : c'est une espèce remontante. 
L'Oronge, le Cèpe, le Mousseron vrai, la Morille, n’ont qu’une saison, 
l’automne pour les uns le printemps pour les autres, époques en dehors 
desquelles on les chercherait vainement. L’Aq. campestris se développe 
toute l’année, quand l’eau et la chaleur lui sont départies avec la mesure 
convenable; la succession des fructifications est régulière et constante 
pendant plusieurs mois. 

La culture sur des substratum artificiels, très différents de ceux que 
les champignons rencontrent dans la nature, a été essayée par divers 
botanistes notamment par M. le prof. de Bary et M. le prof. Brefeld; on 
peut en particulier citer le développement de l’Agaricus melleus obtenu 
par ce dernier, non plus sur le tronc des arbres vivants, à demi morts ou 
morts, mais sur du jus de pruneau. Des résultats de cette nature mon- 
trent le chemin qu'on pourrait faire dans cette voie, de la recherche des 
substratum artificiels pour la question spéciale qui nous occupe. 


M. Magnus. — La statistique nous apprend que la plupart des 
empoisonnements sont produits par des champignons qu’on récolte comme 
appartenant aux espèces comestibles les plus communes. En Allemagne, 
c'est l'Æelvella esculentu qui produit le plus grand nombre d'accidents. 
Deux professeurs de pathologie, M. E. Bostroem, d’Erlangen, et M. Ron- 
fich, de Breslau, ont, après de patientes recherches, découvert la nature 
du principe vénéneux des /Zelvella frais, et indiqué un moyen simple 
de les rendre inoffensifs. Le principe vénéneux est extrait de ces plantes 
par la décoction, et en donnant à boire, par exemple, à des grenouilles, 


— 149 — 


l'eau provenant de cette décoction, elles meurent avec tous les signes 

d'un empoisonnement. On a fait aussi cette expérience sur des chiens et 

d'autres animaux. Dans tous les cas cette décoction préalable pour des 

champignons dont on n’est pas sûr est absolument nécessaire. Dans 

l'espèce Helvella, comme je viens de vous le dire, elle débarrasse la plante 
de ses principes nuisibles et la rend parfaitement comestible. Par contre, 

il faut ajouter que des familles entières qui récoltent ces espèces dans les 

bois de Bohême, pour en prendre tous les jours à leur diner, ont payé 

de la vie un manque de précautions en les préparant. 

M. Bostroem et M. Ronfich, ont démontré que l’empoisonnement par 
les Æelvelles peut être reconnu aux troubles qu’il provoque dans l’organi- 
sation du sang. Leur poison produit notamment un effet spécial sur les 
globules rouges du sang. 

J'ai dit que la décoction annihile le principe vénéneux. J’ajouterai 
qu’à l’état sec de la plante, ce principe n'existe pas non plus. Il est 
évaporé ou décomposé. 

Un autre champignon qui produit parfois des empoisonnements dans 
notre pays, mais qui semble n’agir que sur certaines constitutions c’est 
la truffe superficielle(?) (Scleroderma). Il est défendu, à Berlin, de vendre 
ces champignons, et il existe même une prescription de police très 
sévère à cet égard. Dans les pays, du reste, où les champignons sont un 
article de consommation importante, les règlements de police y relatifs 
doivent être très sérieux. À Rome, par exemple, j'ai appris à connaître, 
il y a une. dizaine d'années, une institution de surveillance de ce genre, 
très remarquable : la police chargeait notamment M. le docteur Lanzi 
d'examiner toutes les espèces de champignons apportées sur le marché, 
pour confisquer les espèces nuisibles. À Genève cela se pratique aussi. 


M. Wittmack. — Les Æelvelles, dont parle l'honorable M. Magnus 
sont des Morilles, si je ne me trompe. 

Quant à moi, je m'étais proposé d'appeler l'attention de Messieurs les 
horticulteurs et les botanistes, sur la culture artificielle de ces champi- 
gnons, qu'aujourd'hui nous cherchons dans les vallées et les champs. 
C’est une culture très-importante, que nous sommes très loin d’avoir 
pratiquement résolue. Depuis 50 ans on m'a dit qu'elle était possible 
mais, chose curieuse, les essais sérieux qui ont été tentés sont bien 
rares. Il me semble que pour arriver à un résultat il faudrait la coopé- 
ration des horticulteurs et des botanistes, et je m'adresse spécialement, 
à ceux de nos collègues qui s’occupent des cryptogames, pour les enga- 
ger à chercher un mode de culture qui soit praticable en grand. N'est-il 
pas regrettable qu’un grand nombre de champignons pour lesquels nous 
sommes tributaires de la prodigalité plus ou moins grande de la nature, 
ne soient pas cultivés? À Dresde, on a fait des essais dans ce sens, il y a 


— 150 — 


quelques années. On y a cultivé des champignons par semis des spores 
et on a obtenu certains résultats. A Hambourg, cette culture a été 
recommandée également; mais, faute de résultats suffisants, on l’a aban- 
donnée. D’autres industriels ont obtenu des résultats sérieux par la 
culture en grand ce sont : MM. Pelin et les frères Burchard. Ces derniers 
ont loué à cet effet les grandes halles de l’ancien abattoir, qui convenait 
très bien pour l’exécution de leur projet. Ils disposent ainsi de 2500 m. 
carrés de couches. Trois fois par an ils font le tour de cette couche, 
chaque semis devant avoir quatre mois pour se développer. Ces couches 
rapportent 3 kilos par mètre carré. 


M. Planchon fils. — Le champignon de couche se cultive spéciale- 
ment sur de petites planches. 

Parmi les champignons très-vénéneux, je dois citer l’Agaricus panthe- 
rinus, qui contient, d’après ce que j'ai pu observer sur des animaux, un 
poison plus violent que la fausse Oronge elle-même. Je tiens beaucoup 
à signaler cette espèce dangereuse. L’empoisonnement qu’elle occasionne 
présente les mêmes symptômes que celui que produit la fausse Oronge, 
et les deux champignons doivent contenir le même alcaloïde. L’Agaricus 
pantherinus le contient, je crois, en plus forte proportion et c’est celui 
qu’on doit surtout éviter car il ressemble assez à certaines bonnes espèces 
(Ag. vaginalus p. ex.). 

On vient de citer aussi les Voloaria comme étant vénéneux et je ne 
le contesterai pas absolument, mais j'en doute. Je citerai l’exemple d’une 
personne très recommandable, membre de la société d’horticulture de 
Montpellier, qui mange parfaitement et ordinairement, l’Agaricus glojo- 
cephalus. Il m'en a montré un plat tout préparé. Ceci n'empêche que 
ce champignon passe pour un des plus toxiques. Les expériences que j'ai 
faites personnellement ont eu un effet négatif. Dans certains cas, il peut 
toutefois avoir occasionné des accidents. 

Je citerai deux autres champignons comestibles, très répandus et qui 
pourraient être plus utilisés. L'un qui a un goût délicat est l'Amanita 
vaginata. Il est appelé grisette à cause de sa couleur grise. 

Un autre qui est moins délicat, mais important à cause de sa fécondité, 
c’est l'Agaricus ovoideus. Lorsqu'il sort, il en pousse en général plusieurs 
à la fois. J'en ai trouvé des touffes de 12 à 15. Ils sont parfaite- 
ment sains et comestibles et une simple touffe suffit pour nourrir une 
famille. 

Le Lactaire délicieux qui vient d’être signalé est excellent. Il était peu 
consommé il y quelques années ; c’est un champignon qui, en général, 
n’attire pas les clients. Le Boletus granulatus est bon aussi; comme 
on l’a constaté il est laissé de côté par bien des consommateurs. Il ne 
mérite pas ce dédain. 


STE 


Je voudrais répondre quelques mots à ce qui à été dit relativement au 
goût des champignons. L’honorable M. Cornu a défendu cette thèse que 
le goût est le meilleur caractère, la pierre de touche la plus sûre des 
champignons. Il faut s’en méfier cependant comme de tous les autres 
caractères. Le goût de l'Amanila bulbosa, par exemple, n’est pas assez 
accentué et certaines gens ne'se laisseraient pas arrêter par lui. On a 
parlé tantôt du champignon couleur de miel qui n’est mangé que 
lorsqu'on a rejeté la première et la deuxième eau. Le goût, avant cette 
opération, n’était donc pas un caractère péremptoire pour le faire rejeter. 
Je rappellerai aussi que dans certains pays on mange des Lactaires 
Lactarius piperatus d'un goût poivré ; le goût n'empêche pas que le cryp- 
togame soit comestible. J'en conclus qu'il faut rejeter tout caractère 
superficiel de goût ou de couleur. 


M. Baïllon. — Ce que je vais dire montre combien on aurait tort de 
tenir absolument compte, en fait des champignons vénéneux, de ce que 
l’on appelle « la tradition ». 

La Grisette, dont il vient d’être question, a une mauvaise, parfois 
même une très mauvaise réputation, qu'elle doit sans doute à sa couleur. 
C’est cependant une espèce comestible. 

L'Agaricus piperatus, dont il a aussi été parlé, a, quand il est cru, 
une détestable saveur, qui le fait rejeter par bien des personnes. Et 
cependant il y a des contrées où on le recherche comme aliment. Il faut 
ajouter qu’on le mange généralement bien cuit et qu’alors il perd la plu- 
part des caractères organoleptiques qui font que bien des gens ne consen- 
tiaient pas à le manger. 

I] faut donc toujours tenir compte du mode de préparation auquel les 
champignons sont soumis. 

J'ai entendu citer par M. Chatin, qui s'occupe beaucoup de champi- 
gnons, l’histoire suivante, relative à la fausse Oronge, l’une des espèces : 
que l’on considère comme très-dangereuse dans presque tout le pays. Il se 
trouvait en herborisation dans le Sud-Est, il vit une personne instruite, 
un juge de paix, qui récoltait ce champignon. Il s’informa si l'on man- 
geait ce champignon et crut devoir prévenir qu'on le considérait partout 
comme vénéneux. Non, répondit son interlocuteur; nous le mangeons 
d'ordinaire et sans danger; nous le faisons cuire d’une façon convenable. 

M. de Lanessan a vu une marchande de la halle de Paris, vendre la 
fausse Oronge. Son étal en était chargé. Il crut devoir la prévenir que 
ce champignon était vénéneux. « Non, dit elle, l'inspecteur l’a vu et n’en 
a pas interdit la vente; le reste ne me regarde pas.» Je m'attendais, en 
raison de « la tradition », à voir dans les journaux de la semaine le récit 
de quelque horrible empoisonnement dû à l’usage de ces fausses Oronges ; 
je n’ai rien pu trouver de pareil dans les gazettes. 


— 152 — 


Le Boletus luridus est une des espèces que la « tradition » indique 
comme les plus vénéneuses. Il est en général complètement rejeté en 
France. Cependant, nos collègues allemands savent que notre ami 
Ascherson a vu ce champignon consommé en quantité dans certaines 
localités de la province de Brandebourg, et cela, à ce qu’il paraît, sans 
inconvénient. 


M. J. E. Planchon. — La fausse Oronge est mangée dans beaucoup 
de régions. 

L'honorable M. Fischer pourrait-il nous dire ce qu'il y a de vrai ou 
de faux dans ce fait que les Russes mangent ce champignon vénéneux ? 
Les paysans, dans les Cévennes, le font macérer dans l’eau salée et 
jettent celle-ci, après quoi ils mangent le champignon. Cela se fait 
ainsi en particulier, autour du mont Lozère et dans certaines localités 
montagneuses de l'Ardèche (Forêt de Mazan, par exemple). 


M. le Président. — Ce champignon se mange, en effet, en Russie et 
au Kamschatka et parait ne contenir aucun principe nuisible pour les 
habitants des régions septentrionales. D’autres champignons plus ou 
moins vénéneux y sont aussi mangés sans inconvénient. 


Un membre. — Tout dépend de la préparation. 


M. Ponce. — On a mis en doute tantôt l'efficacité de l'épreuve des 
champignons par la décoloration qu’elle produit sur les pièces d’argen- 
terie. Je crois pouvoir affirmer que le moyen est absolument sûr et des 
plus simples, Mettez une cuillère en argent dans le vase dans lequel vous 
opérez la cuisson. Si la cuillère se noircit, jeiez hardiment vos cham- 
pignons ! 

M. Niepraschk. — On sait bien où pousse le champignon comestible 
à l'état sauvage; c’est surtout dans les pâturages. Cependant on le 
trouve quelquefois aussi, dans des endroits tout à fait extraordinaires, 
comme c’est, par exemple, le cas chez moi : il pousse là où je fais 
enterrer les poissons morts de notre aquarium. 


M. Wesmael. — Bien qu'ayant pris la parole ce matin dans la séance 
de la section horticole, sur la culture des champignons, je me permettrai 
d'ajouter ici quelques paroles à ce qui vient d’être dit. 

Depuis quelques mois on fait usage à Mons, pour cette culture, de la 
tourbe. Celle-ci nous est expédiée de Hollande, fortement comprimée 
par l’action d’une presse hydraulique et à l’état sec. Cette tourbe est 
répandue à la surface du sol dans nos écuries et retirée lorsqu'elle est 
suffisamment imbibée d'urine et de crottin. Le produit a alors quelque 
chose de très analogue à la vieille tannée. A l’aide de cette tourbe, un de 
mes amis a construit une couche de champignons qui a donné ce résultat 
favorable que, dès le jour où la couche a été lardée, le laps de temps qui 


— 153 — 


s'était écoulé pour l'apparition des premiers champignons était de 
moitié moindre que le temps nécessité pour une même couche faite avec 
du fumier ordinaire. 

Ce fumier est mis en tas, il développe une température douce qui 
se maintient aussi après la récolte des champignons. Ce fumier est très 
convenable pour la culture des petites plantes de parterres mosaïques. 
Une couche de 5 centimètres d'épaisseur provoque une végétation luxu- 
riante de toutes les petites plantes d'ornement. 

L'emploi de ce fumier de tourbe prendra certainement un très grand 
développement en Belgique, vu la facilité avec laquelle on peut l'obtenir. 
Il constitue un substratum excellent pour toutes les cultures de plein air. 


M. Magnus. — La culture qui promet le plus, c'est celle des truffes et 
M. le Ministre de l'Agriculture de Prusse a ordonné des études sur la 
nature et le développement de celles-ci en vue du développement de cette 
culture. On les cultive beaucoup dans le sud de la France. 

J'apprendrai encore à l'assemblée que M. Frank, de Berlin, chargé de 
ces recherches, vient de démontrer que les jeunes racines de beaucoup 
d'espèces d'arbres sont envahies et enveloppées par un mycelium souter- 
rain, qui appartient vraisemblablement aux truffes et autres champignons 
hypogés, comme les Elaphomyces, dont la nature parasitaire sur les 
racines des sapins à été démontrée. Il est donc très probable, que les 
truffes croissent sur les racines des arbres vivants. On les a trouvées sur 
les racines des chênes et d’autres arbres. 

Il importe beaucoup de connaître le mode de développement et partant 
d'apprendre à connaître la meilleure méthode de culture de cette plante. 
M. Franck s’en est occupé activement. 


M. le Président. — Messieurs, la discussion de cette question me 
semble épuisée et nous pourrions conclure. Je vous propose de dresser, 
séance tenante, une liste des champignons que l'assemblée admet comme 
étant réellement vénéneux. Procédons par une liste préparatoire, dont je 
prendrai les noms.M.Cornu, par exemple, veut-il m'aider dans cette tâche ? 


M. Cornu. — Le Congrès peut dresser une liste pareille, mais je 
crois qu’il serait plus pratique de nommer à cet effet une commission 
choisie parmi les membres des sections réunies, Cette commission pourrait 
parfaitement, en une seule séance, indiquer les espèces sur les qualités 
desquelles tout le monde est d'accord. Si en ce moment nous procédons 
précipitamment, nous risquons de commettre des erreurs. 


M. le Président. — Le Congrès adoptera sans aucun doute cette 
proposition de l’honorable M. Cornu et peut passer immédiatement à la 
constitution de cette commission. MM. Cornu, Planchon père et fils, 
Magnus, Wittmack, par exemple, pourraient en faire partie. Le Congrès 
désignera d’ailleurs d'autres membres, s’il le juge convenable. 


— 154 — 


M. le Secrétaire-général. — Messieurs, j'appelle votre attention sur 
la séance de la section de botanique de demain, à l’ordre du jour de 

laquelle se trouvent plusieurs questions importantes, entre-autres celle 
qui concerne l’enseignement de la cryptogamie. Il reste en outre pour 
la section d'horticulture la seconde partie de la 3° question. 

Plusieurs membres m'ayant prié d'examiner s’il ne serait pas possible 
de clôturer les travaux du Congrès demain à midi, afin de leur permettre 
de visiter l'Exposition d’horticulture, je pense, Messieurs, que nous 
pourrions, à l'issue des deux séances de section, nous réunir en assemblée 
générale et clôturer les travaux avant une heure. Le désir exprimé par 


nos honorables confrères me semble trop légitime pour ne pas y accéder. 
(Adhésion). 


M. le Président. -- La séance est levée à 5 h. 40 m.. 


SECTION DE BOTANIQUE, 


Séance du 5 août 1885. 


Présidence de M. le D' $S. PerrovircH, délégué de la Serbie. 


M. E. MarcHAL, secrétaire du Congrès, remplit les fonctions de 
secrétaire. 


Sommaire : Z7"° question du programme : Quelles sont les meilleures 
méthodes à employer pour traiter les monographies de genres à espèces nom- 
breuses? par J. E. PLANCHON. — IV"* question du programme : Quel est le déve- 
loppement à donner à l’enseignement de la cryptogamie aux différents degrés 
d’instruction? par MM. J. E. PLANCHON, BAILLON, CoRNu, MAGNUS, CH. DE 
BosscHERE, LEFÈVRE, FISCHER DE WALDHEIM. — VIlme question du programme : 
Quel est le développement à donner au cours de pathologie végétale dans les écoles 
d’horticulture et d’agriculture? par MM. MAGNUS, PLANCHON, E. LAURENT, 
Cornu, CH. DE BosScHERE, KRELAGE, FISCHER DE WALDHEIM, PLANCHON. 
— Communication de M. le professeur RADLKOFER : L'application de la méthode 
anatomique aux Myrsinées et les moyens d’appliquer cette méthode. Discussion : 
MM. WITTMACK, PLANCHON, KRELAGE, BAILLON, RADLKOFER. Communication de 
M. J. l'RIANA: Publication des dessins de botanique de Mutis. Discussion : 
MM. PLANCHON, CH. DE BOSSCHERE. 


M. le Secrétaire-général. — Messieurs, nous devons procéder à la 
nomination d’un Président pour la séance de ce matin. Je vous propose 
d’acclamer en cette qualité M. le D' Petrovitch, délégué du gouverne- 
ment de la Serbie.(Adhésion unanime). 

J'ai différentes communications à faire à la section de botanique. 

M. le D' Kanitz, directeur du Jardin botanique, à Koloszvar, Autriche- 
Hongrie, s'excuse de ne pouvoir participer aux travaux du Congrès. 


— 156 — 


M. le D' Planchon fait hommage au Congres de plusieurs de ses tra- 
vaux. 

M. le D' Henriques, directeur du Jardin botanique de Coïmbre, Portu- 
gal, nous a envoyé un fascicule du bulletin de la «Sociedade Broteriana. » 

J'ai recu de M. le Président de la section une note sur les progrès 
réalisés en botanique dans le royaume de Serbie. Nous insérerons cette 
note comme toutes les autres communications dans les « Actes du 
Congrès. » 

Je tiens ici un superbe album de Fougères de la Nouvelle-Zélande 


que M. Lefèvre met à votre disposition, si vous voulez bien l’examiner - : 


après la séance. 


M. le Président. Nous avons encore à traiter les questions suivantes. 

N° II. Quelles sont les meilleures méthodes à employer pour traiter les 
monographies de genres à espèces nombreuses ? 

N° IV. Quel est le développement à donner à l’enseignement de la Cryp- 
togamie aux différents degrés de l'instruction ? 

N° VII. Quel est le développement à donner au cours de pathologie 
végétale dans les écoles d'horticulture et d'agriculture ? 

Par laquelle de ces trois questions préférez-vous, Messieurs, ouvrir 
vos débats ? 


M. Planchon. — M. De Candolle a traité la question n°2 si magis- 


tralement que pour ma part je n'ai plus rien à dire. (Vive approba- 
tion) (1). 


M. le Président. — La section veut-elle alors passer à l'étude, 
de l’enseignement de la cryptogamie qui fait l’objet de la question n° IV? 
(Adhésion) (?). 


M. Planchon. — La cryptogamie occupe légitimement une large 
place dans la Botanique actuelle. En France on lui donne une part dans 
le programme de la licence de sciences naturelles, mais c’est surtout par 
le côté anatomique et physiologique qu’on l’y considère. La connais- 
sance pratique des cryptogames, notamment des champignons, n’est guère 
représentée que par la chaire de cryptogamie de l’École supérieure de 
Pharmacie de Paris. On laisse aux cryptogamistes, savants et amateurs, 
l'initiative de l'étude des espèces. Et pourtant, c’est au Muséum que 
serait naturellement placé le centre de ces études, soit pour l’enseigne- 
ment oral, soit pour la création d'un grand herbier cryptogamique dont 


(1) Voir aux «Rapports préliminaires » le rapport de M. DE CANDOLLE, p. 50-55. 
(2) Voir aux « Rapports préliminaires » les mémoires de MM. ARDISSONE, 


p. 30-34, Dr. M. STAUB, p. 56-59, C. H. DeLoGxe, p. 71-74, et Dr. L. MARCHAND, 
p. 83-107. 


— 157 — 


les éléments y sont déjà, mais attendent un arrangement définitif. 
M. Cornu n’a pu que mettre en train une œuvre aussi immense, qui 
réclamerait une chaire spéciale et des aides particuliers pour être menée 
à bonne fin. 


M. Baiïllon. — Puisque les cryptogamistes émérites qui assistent à 
cette séance, ne veulent pas prendre la parole sur cette question, je me 
résigne à l’examiner à un tout autre point de vue. Je déclare cependant 
être, sur le fond même de la question, de l’avis des honorables préopinants. 
L'abandon dans lequel se trouve l’enseignement élémentaire de la cryp- 
togamie, est une affaire d'habitude, de routine. Jusqu'à présent, nous 
avons été presque complètement privés de l’enseignement, à tous les 
degrés, de cette partie de la botanique. La cryptogamie est placée non 
seulement à un rang secondaire, mais surtout à un rang inférieur. On à 
supposé que, lorsque les élèves de tous les genres et degrés d'école 
seraient suffisamment familiarisés avec l'étude de toutes les autres bran- 
ches de la botanique, alors seulement il serait bon de les initier à l’ensei- 
gnement de la cryptogamie. C’est une manière de voir analogue à celle 
qui veut que, dans beaucoup d'écoles, on commence l'étude des sciences 
naturelles par la zoologie, puis qu’on continue par la botanique, et que 
la géologie ne vienne qu’en dernier lieu. Bien des enseignements ont déjà 
réagi contre cette coutume. Mais on a beaucoup moins renoncé à faire 
précéder l’étude de la cryptogamie par celle de la phanérogamie. On 
peut cependant dire que c’est le système contraire qui devrait être suivi, 
si l’on considère comme logique d’aller, dans les études botaniques, 
du simple au composé. 

Quand il s’agit de l'enfance, par exemple, il est plus simple de com- 
mencer par l'étude des cryptogames, à la condition qu’il sera fait un 
choix judicieux des objets à étudier. Or, le choix est d'autant plus facile 
que les matériaux d’étude sont plus multipliés. On a même l'avantage 
de les posséder dans presque toutes les saisons, et surtout à des époques 
de l’année où Les matériaux phanérogames font généralement défaut. 
L'emploi du microscope est évidemment une des difficultés qui ont fait 
remettre à une époque avancée des études, l’examen des cryptogames. 
Mais il y à un grand nombre de ces végétaux qui n’ont pas besoin, pour 
être étudiés d’une facon sommaire, des grossissements considérables 
auxquels on suppose qu'il faudrait constamment avoir recours. 

On pourrait en dire autant de l'étude de la cryptogamie dans l’enseigne- 
ment secondaire ou moyen. Si l’on donnait aux élèves de nos lycées 
l’habitude et quelque peu le goût de la cryptogamie élémentaire, ils 
pourraient, dans leurs nombreuses promenades aux environs des villes, 
observer et récolter un certain nombre d'échantillons des plantes les plus 
communes. Il m'a paru toujours déplorable que des jeunes gens ne sachent 
point distinguer une Mousse, un Lichen, une Conferve. Ces végétations 


— 158 — 


vertes, qui se montrent à la surface des eaux douces, ne passent que trop 
souvent pour des mousses d’eau. Les Lichens sont souvent considérés 
comme des mousses croissant à la surface des arbres, des pierres. Ne 
serait-il pas facile de récolter ces exemplaires vulgaires de prétendues 
mousses et le professeur ne devrait-il pas avoir des notions suffisantes 
de cryptogamie systématique pour donner à ses élèves quelques détermi- 
nations générales, leur indiquant pourquoi telle plante est ou n'est pas 
une mousse, un lichen, une algue d’eau douce, etc.? 

Quant à l'enseignement supérieur, ce qui vient d’être dit est stricte- 
ment exact. La cryptogamie est demeurée plus théorique que pratique 
dans cet enseignement. On fait des cours entiers de cryptogamie à 
l'amphithéâtre. Mais lorsqu'il s’agit de la pratique, les étudiants n'ont 
souvent d'autre ressource que leur bonne volonté individuelle. Comment 
en serait-il autrement, alors que les botanistes de profession se trouvent 
dans la presque impossibilité de travailler fructueusement. Peut-on, par 
exemple, imaginer rien de plus défectueux que l'organisation nouvelle 
de notre plus grand herbier, celui du Muséum de Paris? On a séparé 
complètement l’herbier des cryptogames de celui des phanérogames : ils 
sont placés dans des rues différentes. Il semble que les cryptogames ne 
soient plus des plantes, puisqu'on ne peut les voir dans l’herbier classique 
de l'établissement. Il faut faire, pour les trouver, je ne sais quel trajet 
auquel presque tout le monde se refuse. Par une singulière contradiction, 
les Fougères qui, je le sais, sont pour certains botanistes, moins des 
cryptogames que les autres, sont restées avec l'herbier des phanérogames. 
Les autres cryptogames, celles qu’on a le plus besoin de consulter pour 
les déterminations, parce qu’elles sont difficiles à reconnaître dans les 
livres, se trouvent dans des conditions à peu près inaccessibles. Tous les 
botanistes qui travaillent et qui font passer l'observation et la pratique 
avant la théorie, feront donc des vœux pour que tout l’herbier du 
Muséum de Paris et des établissements analogues, soit rassemblé dans un 
même local. Je ne vois pas d’inconvénient à ce qu’on sépare dans deux 
compartiments contigus la cryptogamie et la phanérogamie. Cette divi- 
sion est même toute naturelle. Mais je voudrais que le tout fut rapproché 
dans un même local. Il ne faudrait pas de barrière infranchissable entre 
les cryptogames et les phanérogames; ces barrières n'existent pas dans 
la nature. 

Ce que nous disons de l’enseignement supérieur, concerne aussi les 
enseignements spéciaux et appliqués comme celui, par exemple, de la 
botanique médicale. Jusqu’à ces dernières années, dans nos Facultés de 
médecine, l’enseignement de la cryptogamie était peu en honneur. Il 
semblait si difficile à aborder, qu'on s’abstenait généralement de l’intro- 
duire à l’amphitéâtre. On se bornait le plus souvent à quelques généralités 
théoriques qui n’apprenaient rien et qui servaient tout au plus pour les 


—1159 — 


examens. Or, on sait généralement ce que valent ces examens et l’on 
peut dire que, même dans les Facultés des sciences, ces épreuves ne 
prouvent pas grand’ chose. On est aujourd’hui très disposé à faire des 
séries de licenciés-ès-sciences naturelles qui se fabriquent à peu de 
frais et l’on peut dire que bien peu d’entre eux ont des droits au titre 
de naturaliste. On se borne à leur enseigner des choses trop générales 
et trop théoriques. J'ai tellement été frappé de cette insuffisance au point 
de vue pratique, que j’ai tenté de remédier au mal. S'il est permis 
de se citer soi-même en pareille occurrence, j'ai voulu que l’enseignement 
de la cryptogamie médicale fût surtout pratique. ‘J'ai voulu montrer 
des faits, des objets, présenter des figures exactes là où les objets 
eux-mêmes pouvaient faire défaut. Avec cette facon de procéder, j'ai 
vu disparaître l'indifférence habituelle de nos étudiants. Ils ont suivi 
les lecons avec intérêt; ils ont surtout mordu à toutes les notions prati- 
ques qui leur étaient offertes ; on aurait pu les mener très loin, et sans 
peine, dans cette voie. 

Pour ces raisons, et en attendant qu’on fasse mieux et davantage 
pour l’enseignement de la botanique à tous les degrés, je demande 
qu'on réserve une plus grande place à la cryptogamie et surtout 
à la cryptogamie pratique. Il ne faut pas sacrifier les cryptogames 
aux phanérogames et l’on doit se demander s’il n’est pas préférable de 
débuter par la cryptogamie dans l'étude de la botanique systématique, 
j'entends la systématique élémentaire. De là l’utilité d’un vœu qui pour- 
rait être formulé, s’il est jugé convenable par le Congres. 


M. Cornu. — Je ne prends la parole que sur une invitation directe de 
M. le D: Baillon. Comme j'ai été mêlé directement à ce qui s’est passé 
au Muséum d'histoire naturelle de Paris, on comprendra la réserve qui 
m'est imposée, surtout aujourd'hui. 

Quant à l’enseignement de la cryptogamie par le laboratoire c’est, 
à mon sens, une chose particulièrement utile tant au point de vue de cet 
enseignement même qu’à celui de l'application des méthodes expéri- 
mentales. Je crois que c’est par la cryptogamie que les méthodes expéri- 
mentales de culture s’introduisent le plus aisément. Il est certain que 
les grands progrès réalisés dans la botanique depuis 25 ou 30 ans sont 
dûs à des méthodes de culture. Ainsi beaucoup de grandes découvertes 
relatives à la fécondation, relatives à l’hybridation et à une foule de faits 
de biologie sont dues à ce qu’on à abandonné l'étude sur les plantes 
sèches pour s'attacher à l'étude des végétaux vivants et continuant à 
vivre. Des progrès énormes ont été accomplis en biologie avec les expé- 
riences de culture. C’est la cryptogamie qui permet de les réaliser le plus 
facilement. D'abord les cultures sont très simples; elles n’exigent que 
quelques millimètres carrés de surface. Quoiqu'elles soient si réduites, 


— 160 — 


elles ne permettent pas moins d'en déduire des conséquences physiolo- 
giques du plus haut intérêt. Qu'on s'occupe des cryptogames qui pro- 
duisent les maladies de l’homme et des animaux, qu’on étudie les. 
cryptogames qui engendrent les maladies des plantes, il en résulte des 
faits physiologiques d’une haute importance. 

La question de l’ensemencement des germes et de la dissémination des 
spores est résolue par des expériences de cette nature. L'enseignement 
des laboratoires devrait attirer l’attention sur ce point parce qu’il en 
découle des conséquences graves pour l'hygiène populaire et la santé 
générale de l’homme et des animaux. 

A ce point de vue le laboratoire de la cryptogamie a donc sa raison 
d’être dans l’enseignement général et même dans l’enseignement très- 
élémentaire. Ainsi, il serait très bon d’insister, dans les écoles d'horticul- 
ture, dans les écoles d'enseignement primaire ou secondaire, sur l’action 
déterminée par tous ces germes qui sont charriés de toutes parts et con- 
taminent nos aliments, nos fruits, nos légumes, nos plantes cultivées etc. : 
C’est par l'observation continuée pendant plusieurs jours dans un labora- 
toire que ces faits peuvent être vérifiés, frapper l'esprit, être admis enfin 
partout d’une facon complète et faire partie de l'éducation individuelle. 
Sous ce rapport, la cryptogamie doit exercer une influence profonde sur 
l’enseignement populaire. En voici quelques exemples très simples : 

Les fruits, ainsi que l’a démontré M. Brefeld, le premier — et cela est 
d’une importance considérable dans la vie ordinaire — les fruits qui se 
gâtent dans l'endroit où on les conserve, dans les fruitiers, montrent 
généralement comme point de départ de l’altération, une solution de 
continuité dans l’épiderme. Suivant le genre de cryptogame qui se déve- 
loppe autour de cette blessure, l’altération se produit dans un sens ou dans 
un autre. 

Mille autres cas pourraient étre cités : ainsi les horticulteurs ver- 
raient qu’en arrosant leurs cultures avec des liquides chargés de 
certains germes, elles peuvent être mises à mort. Par les eaux péne- 
trent un grand nombre de maladies des racines, les anguillules, champi- 
gnons divers; en arrosant les semis de fougères avec des eaux qui 
contiennent des spores de Vaucheria, on constate que ces semis sont 
rapidement entravés par le développement d’un byssus vert ; les pro-, 
thalles ne se forment pas, ou du moins ils ont à soutenir une lutte dans 
laquelle ils succombent souvent. Si d’autre part, on apporte dans les 
arrosages des germes de certaines moisissures, il se produit à la surface 
du semis un réseau de filaments fatal au développement des plantes. 
Une des maladies les plus redoutables pour les boutures herbacées dans 
les serres se nomme « a loile ». Elle a causé dans les environs de 
Paris et à Paris même des dégâts considérables. Elle est constituée 
par le développement d’un réseau très délicat de Mycélium qui frappe 


— 161 — 


de mort toutes ces jeunes boutures, au niveau du sol. Ce champignon 
n’est pas unique; il y a, à mon sens, d’après quelques observations, 
plusieurs champignons qui produisent les mêmes effets. Ces effets sont 
si désastreux qu’on a vu chez nous des horticulteurs obligés de céder 
la place, de fuir devant cet ennemi, et d’abandonner le siège de leur 
exploitation. 

Si les horticulteurs savaient combien certains parasites invisibles à 
l’œil nu sont dangereux et comment les germes en arrivent dans leurs 
cultures, ou bien s'ils avaient des indications qui leur permettraient d’en 
concevoir l'importance, ils pourraient retirer de cette connaissance le 
plus grand profit et probablement ils arriveraient à arrêter la marche 
de plus d’une maladie qu’on ne sait pas encore enrayer. 

Je cite ces exemples pratiques pour montrer que des choses très 
simples peuvent avoir des conséquences considérables. Une chaire de 
cryptogamie n’exige qu’une installation très restreinte, en dehors des 
livres et des collections qui lui sont nécessaires. On peut, avec un certain 
nombre de cloches et de bocaux, dans une petite salle, avec une serre 
étroite, poursuivre des recherches pendant des années et se trouver dans 
des conditions très favorables. On a, d’une part, le grand attrait des 
études ; d'autre part, la modicité des installations. Pas n’est besoin de 
coûteux appareils, de grands espaces, de sujets d’études dispendieux, 
difficiles à entretenir. Pour les cultures, les germes de ces cryptogames 
se trouvent dans la campagne. On les y récolte aisément. Les échanges 
entre botanistes sont faciles; dans un millimètre cube, il peut y avoir 
des millions de ces germes. On se trouve donc dans des conditions véri- 
tablement peu dispendieuses pour entreprendre des études de cet ordre : 
elles ont en outre un intérêt considérable. On sait le nombre de questions 
actuelles qui rentrent dans l'examen des végétaux inférieurs; depuis 
des siècles, il n’y a pas eu de sujets plus intéressants que ceux qui 
sont à l’ordre du jour et qui rentrent dans les études de la cryptogamie. 
Les végétaux inférieurs se rattachent à tout ce qui nous entoure et 
interviennent sans cesse autour de nous; aussi la cryptogamie doit-elle 
entrer pour une part notable dans l’enseignement primaire, moyen, 
supérieur et particulièrement dans l’enseignement agricole et horticole. 


M. Magnus. — Je ne m’occuperai que des développements à donner 
à l’enseignement de la cryptogamie dans les universités. 

J'ai également donné des lecons de cryptogamie. Mon expérience me 
porte à croire qu'on doit surtout réserver pour l’université les démon- 
strations et les méthodes d'investigation, comme M. Cornu vient de le 
dire. Il est dangereux de ‘s’attarder aux singularités nombreuses que 
l'étudiant apprendra à mieux connaître dans les livres spéciaux quand 
il sera à même de les comprendre. Les démonstrations et les méthodes 
doivent surtout occuper les étudiants dans les universités. 

fl 


] 


— 162 — 


M. le Président. — Nous devons tirer une conclusion de ce débat. Je 
crois que tous les orateurs désirent que l’enseignement de la cryptogamie 
soit plus développé qu'il ne l’est actuellement et qu’on l’introduise même 
dans les écoles d’horticulture, comme dans les écoles primaires et 
secondaires où il ne figure pas encore. (Adhésion). 


M. Planchon.— Nous sommes tous d'accord là-dessus. J'avais exprimé 
un vœu spécial. Comme je vois qu’il n’est pas appuyé par M. le professeur 
du Muséum de Paris, je n’insiste pas. Je n'ai pas méconnu l'importance 
des méthodes de culture, non plus que l'importance de la partie biologique 
des champignons. Je reconnais que ce sont des questions d'ordre général, 
des questions d'hygiène qui dominent tout. Seulement je croyais qu’on 
pouvait se placer au point de vue pratique, de la pratique courante, sur- 
tout pour les champignons et que l'on avait intérêt à posséder un 
enseignement systématique sur ces organismes. Tout le monde est d'accord 
que l’enseignement systématique de la cryptogamie a son importance, ne 
fût-ce que pour déméler les états divers de ces êtres polÿmorphes. Avec 
des connaissances générales d'évolution on y arrive bien vite. Je n’insiste 
pas, dis-je, parce qu’il me semblait que je devais être surtout appuyé par 
le professeur de culture. 


M. Cornu. —Il me semble, M. le Président, qu’on pourrait formuler le 
vœu du Congrès en résumant ce qui a été dit par les différents orateurs. 
Ce vœu comprendrait deux parties : la première constaterait les bons 
effets de l’enseignement et de la méthode tirés des végétaux inférieurs à 
tous les degrés; la deuxième consisterait à émettre le désir que l’en- 
seignement de la cryptogamie fût particulièrement fondé sur des 
exemples. Je crois qu’on pourrait adopter la rédaction suivante : 

« La cryptogamie,qui a une importance très grande, doit être introduite 
dans l'enseignement primaire et secondaire. Pour l’enseignement supé- 
rieur il serait désirable d'établir des chaires spéciales. Cet enseignement 
de la cryptogamie, à tous les degrés, doit être basé sur des démonstrations 
faites avec des plantes vivantes et des cultures. » 


M. Baïllon. — 11 me semble que nous n'avons pas à insister sur les 
moyens d'application. Si nous demandons que l’enseignement de la cryp- 
togamie soit favorisé à tous les degrés, cette rédaction me paraît suff- 
sante. Quant aux moyens d'exécution, qui sont des points de détail, je ne 
crois pas aisé de les formuler dans un vœu. 


M. Cornu. — Il serait désirable de voir introduire ce vœu. 


M. Baiïllon. — On pourrait le faire au point de vue pratique. « Quel 
« est le développement à donner à l'enseignement de la cryptogamie aux 
« différents degrés de l'instruction ? » Après avoir formulé ce vœu on 
pourrait ajouter : « en insistant sur les moyens pratiques. » 


PR RS RC 


— 163 — 


M. Ch. De Bosschere. — Je désire savoir ce qu’on entend par les 
développements à donner à l’enseignement de .la cryptogamie, par 
exemple, à l’école primaire. Quelle partie de la cryptogamie convien- 
drait-il d'y enseigner ? 


M. Planchon. — Vous ne pouvez, dans l'instruction primaire, songer 
à parler beaucoup de détails anatomiques. L'esprit de l'enfant n’est pas 
apte à recevoir ces notions. Mais avec quelques règles très simples, on 
parvient aisément à montrer la différence qui existe entre une mousse, 
un lichen et une algue. Il faut s'en tenir aux généralités pour être 
. pratique, surtout dans l'école primaire. 


M. Cornu. — Il serait très désirable de faire entrer à l’école primaire 
certaines notions indispensables et de faire connaître aux commençants 
des groupes qui constituent autour de nous la moitié peut-être du règne 
végétal (algues, champignons, mousses). J’ai en vue aussi les phénomènes 
les plus importants de la fermentation et de la décomposition, par 
exemple, des aliments, la fermentation du pain, du fromage, ete. Une 
foule d'opérations diverses sont fondées sur le développement des végé- 
taux inférieurs; toute l'hygiène repose là-dessus. C’est une question 
fondamentale et rien qu’à ce titre la cryptogamie mériterait d'obtenir 
une part considérable dans l’enseignement. Beaucoup de gens du peuple 
s’imaginent que les soins de propreté du corps sont des choses unique- 
ment réservées aux riches. Cette erreur est fondamentale. Toutes 
les classes de la société sont directement et réciproquement intéressées 
aux questions d'hygiène et solidaires entre elles. Quand les habita- 
tions d’une ville ou d’un village. sont mal soignées, quand des foyers 
d'infection y existent ou s’y déclarent, toute la population en souffre. 
Rien qu’au point de vue de l'hygiène, la cryptogamié mériterait 
d'être enseignée. De même pour les aliments; il est bon d'étudier 
leurs modifications et leurs altérations par l'influence de certains 
organismes; il est nécessaire de faire connaître dans l’enseignement 
primaire des végétaux qui, comme je le disais tout à l'heure, forment 
la moitié du règne végétal. Un sol stérile est couvert d’un nombre 
énorme de végétaux inférieurs; une terre où l’on ne voit pas un brin 
d'herbe est entièrement occupée par des cryptogames. On voit ces 
populations végétales se renouveler sur des espaces énormes, sur des 
kilomètres carrés de superficie. Il est regrettable que dans l’enseignement 
élémentaire on ne dise pas un mot de ces végétaux. On ne parle 
jamais des phénomènes employés couramment dans la vie usuelle, 
dans l’industrie (fermentation, etc.) et qui sont dûs aux végétaux 
inférieurs. Cependant on pourrait apprendre aux enfants, comme l’a 
dit M. Baillon, par des explications fort simples, à distinguer les 
mousses, les lichens et les algues. N'est-il pas regrettable que, non 


— 164 — 


seulement les gens illettrés, mais même des gens du monde, ignorent ce 
que sont ces plantes répandues en si grandes quantités sur toute 
la surface du globe. 


M. Ch. De Bosschere. — J'appelle votre attention sur le rapport de 
M. Marchand qui traite de l’enseignement de la cryptogamie aux diffé- 
rents degrés; il examine l’enseignement primaire, secondaire et supé- 
rieur. L’exposé que vient de faire M. Cornu complètera ce que M. Mar- 
chand a dit dans son rapport. 


M. Baïllon. — Voici les conclusions du rapport de M. Ardissone. Le 
texte de la quatrième question est très-net. En remplaçant les mots 
« écoles de pharmacie, » par ceux-ci « écoles à tous les degrés » et en 
substituant au mot « micrologie » celui de « cryptogamie », on aurait 
une solution très satisfaisante de la question. Le vœu serait, dès lors, 
ainsi formulé : 

« Que dans les écoles à tous les degrés et dans les écoles d’application 
« des ingénieurs, l’enseignement de la botanique soit organisé de telle 
« facon que la cryptogamie y ait la part qui lui revient au point de vue 
« de son importance pratique. » 


M. Cornu. — J'insiste pour que l’enseignement de la eryptogamie 
soit basé principalement sur des démonstrations pratiques et des 
méthodes de culture. 


M. Lefèvre. — J'ai été fort heureux d'entendre MM, les professeurs 
des Facultés de médecine et M. le professeur du Muséum de Paris. S'ils 
consentaient à rédiger un petit programme élémentaire, comprenant une 
ou deux pages, sur cette question de l’enseignement de la cryptogamie, 
je leur offrirais une publicité très grande : celle de nombreux journaux 
et publications et celle du bulletin de la Ligue française de l’enseigne- 
ment, c'est à dire, une réclame tirée à plus de cent mille exemplaires. 
Je suis sûr à l'avance que la question traitée à un point de vue pratique 
ferait ainsi un très grand pas. 


M. le Président. — L'idée est très bonne. Pour la réaliser je propose 
de nommer un petit comité dont feraient partie MM. Baillon, Cornu et 


Planchon. Ils rédigeraient le programme sommaire demandé par 
M. Lefèvre (Adhésion). 


M. Ch. De Bosschere. Ne vaudrait-il pas mieux s'adresser à un plus 


grand nombre de spécialistes afin que l'idée püt s'étendre à plus d’un 
pays? 


M. Planchon. — Quand on est trop nombreux et de pays différents 
on ne s'entend pas. 


— 1605 — 


M. Baïllon. — Le principe a été admis; on s’adressera, pour les points 
de détail, aux gens compétents de chaque pays. 


M. Léfèvre. — On pourrait également extraire les points les plus 
saillants du remarquable travail de M. Marchand. Les subdivisions de 
son travail sont admirablement faites. 


M. le Président. — Nous laisserons le comité, qui vient d’être nommé, 
libre d’agir comme il le jugera convenable. (Adhésion). 


M. De Bosschere. — Je prie M. Baïllon de bien vouloir formuler 
nettement le vœu qu'il soumet au Congrès. 


M. Baïllon. — Je propose de dire : « Le Congrès exprime le vœu que, 
« dans les écoles à tous les degrés — j'y comprends les écoles d’horticul- 
« ture, — l’enseignement de la botanique soit organisé de telle facon que 
« la cryptogamie y ait la part qui lui revient au point de vue de son 
« importance. » 


M. Cornu. — Nous pourrions ajouter : « il importe que cet enseigne- 
« ment soit fondé principalement sur des démonstrations pratiques et 
« des expériences de culture. » 

Je ne crois pas qu'on puisse appeler autrement qu’une culture la 
fermentation du vin, la modification si spéciale du moût de raisin et de 
bière. Il en est de même de la fermentation butyrique qui se fait sur une 
large échelle, dans des conditions différentes, quand on laisse pourrir des 
végétaux ou que l’on fabrique du fromage. On pourrait citer une foule 
d'expériences de tous les genres. D’autre part, il est facile de donner un 
exemple d’une démonstration pratique : blessez un fruit et déposez-y le 
germe de la décomposition. C’est une culture. Le nom parait pompeux 
mais la chose est simple. 


M. Magnus. — Je voudrais bien préciser, comme M. Baillon, que 
dans les écoles supérieures, dans les universités, on doit prendre en 
premier lieu des méthodes de culture, de recherche et de démonstra- 
tion. Comme je l’ai déjà dit, il importe que les étudiants ne s'arrêtent 
pas aux singularités dont l'explication se trouve dans les livres spéciaux. 


M. Cornu. — II me semble que M. Magnus insiste sur ce fait: l’on 
devrait dans les universités, enseigner les méthodes de recherche d’une 
façon générale plutôt que de développer des cas particuliers. 


M. Fischer de Waldheim. —— Je donne aux étudiants-naturalistes, à 
l’université de Varsovie, un cours de cryptogamie spécial de deux ans. 
Pendant ce temps les étudiants sont obligés de s’initier aux parties de la 
science dont je fais la démonstration dans le laboratoire; je leur montre 
également les méthodes de culture. Ce mode d'enseignement donne de bons 
résultats. Donc j’approuve complètement ce que vient de dire M.Magnus. 


— 166 — 


M. Planchon. — Il faudrait restreindre le vœu aux termes posés par 
MM. Baillon et Cornu. Le reste est une affaire de détail. Du reste, les 
observations de M. Magnus seront consignées au procès-verbal, 


M. Ch. De Bosschere. — Il est fort difficile de formuler ces Yœux 
d'une manière exacte séance tenante. Tout ce qui a été dit dans les diffé- 
rentes séances du Congrès vous sera transmis. Vous serez invités à revoir 
vos discours et à corriger les erreurs que la sténographie pourrait y 
glisser. De cette façon tout le monde aura pleine et entière satisfaction. 


M. Magnus. — Encore un mot sur cette question de la cryptogamie. 
En Allemagne on considère comme une chose très importante de donner, 
dans les écoles d'agriculture et d’horticulture, des notions générales sur 
la nature des champignons parasites, qui produisent les maladies des 
plantes cultivées et il faut s’y resteindre. Cette méthode a produit les 
meilleurs résultats (1). 


M. Planchon. — Nous sommes d'accord sur l'importance capitale de 
l'étude des maladies parasitaires des plantes. Il n’y a donc plus qu'à 
appuyer le vœu que dans les écoles d'agriculture et d’horticulture, on 
s'occupe de la cryptogamie, surtout de l’étude des champignons. 


_ On pourrait y joindre les galles et autres excroissances produites par 
les insectes. 


M. É. Laurent. — Comme conclusion de ce débat, j'ai l'honneur de 
proposer au Congrès la rédaction suivante : 

Le Congres émet les vœux: 

« 1° qu’il soit créé un cours de pathologie végétale däns les diverses 
« écoles d’horticulture et d'agriculture et que ce cours ait un but essen- 
« tiellement pratique; 

« 2° que ce cours soit appuyé par des expériences de culture. » 


M. Planchon. — Ce que propose M. Laurent se pratique à Montpellier 
et donne de bons résultats. 


M. Cornu. — Je proposerai de restreindre l’énoncé du vœu de 
M. le professeur Laurent pour lui donner plus de généralité. Au lieu 
de demander que des recherches personnelles soient faites, je deman- 
derai que des expériences soient faites. 

Il y a une chose qui a été contestée pendant longtemps, qui l'est 
encore quelquefois dans certains pays, par exemple en Angleterre : le 
transport de la rouille de l’épine-vinette sur le blé; l’effet nuisible du 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » les notices de MM. AUG. LAMEERE, 
p. 42-45, et E. LAURENT, p. 234-236. * 


— 167 — 


Berberis sur les céréales. On fait à cet égard des expériences très simples 
et qui réussissent aisément. On laisse en contact pendant quelques jours 
un poirier avec un genévrier sabine atteint par le Podisoma juniperi 
sabinae. Le poirier est bientôt contaminé. 

Ces expériences éclaireraient les praticiens et permettraient aux agri- 
culteurs et aux horticulteurs de se débarasser de certaines causes de 
maladies. 

J'appuie donc de toutes mes forces le vœu de M. Laurent en restrei- 
gnant son énoncé. 


M. Laurent. — Je me rallie à l'opinion de M. Cornu. 


M. Ch. De Bosschere. — Dans le rapport de M. Lameere sur la même 
question, je trouve à la page 4 un passage sur lequel je désire consulter 
l’assemblée. Il est ainsi conçu : . 

« Mais il ne faudrait négliger aucun soin pour leur donner (aux jardi- 
niers) une connaissance complète des quelques parasites qui se rencon- 
trent le plus fréquemment et dont les autres pourraient être rapprochés 
par une similitude dans la manière de vivre, les dégâts commis et les 
remèdes à employer contre eux. Et il ne serait point nécessaire à cet 
effet de beaucoup charger les programmes actuels : les détails relatifs 
aux parasites végétaux prendraient naturellement place dans le cours 
de botanique, et une dizaine de lecons d’entomologie suffiraient pour 
expliquer ce que c’est que l’insecte, comment il vit et se transforme, 
quels sont les ravages causés par les plus redoutables, et quels moyens 
l’on a de s’en préserver. 

« Si je ne craignais de sortir du cadre tracé, j’insisterais encore sur la 
nécessité de ne pas limiter cet enseignement aux écoles d’horticulture 
et d'agriculture : 4 devrait s'infiltrer peu-à-peu dans le peuple par l'école 
primaire, où l'histoire des principaux parasiles fiqurerait sur des tableaux 
pendus aux murs de la classe. Le campagnard apprendrait ainsi à faire 
connaissance avec les ennemis qui lui rongent ses récoltes, et sa vigi- 
lance serait éveillée : il faut bien reconnaître en effet que les cultiva- 
teurs éprouvent journellement des dommages à leur ‘insu et qu'il est 
malheureusement trop tard souvent quand ils s’apercoivent de l’exis- 
tence du fléau. Je ne serais pas étonné que le même fait se produisit 
pour le Phylloxera inconnu de presque tout le monde, et trop bien 
organisé pour que ses ravages ne s'étendent pas jusque chez nous: l’on 
signalera probablement sa présence lorsqu'il aura, depuis longtemps, pris 
possession du pays. 

« Trop de millions sont annuellement employés à couvrir d'écailles les 
ailes des papillons ou à polir la cuirasse des coléoptères pour que nous 
ne fassions pas les efforts nécessaires à les détourner de cette destination : 
puisse le vœu que le Congrès émettra sans doute en ce sens, ouvrir les 


— 168 — 


yeux à ceux qui ont entre les mains les destinées de l’agriculture et de 
l'industrie horticole ». 

Un troisième vœu serait donc concu comme suit : 

« 3° (Le Congrès émet le vœu) que des notions sur les parasites des végé- 
taux de grande culture soient répandues dans les campagnes par l’inter- 
médiaire de l’enseignement primaire et de conférences populaires. » 


M. Baillon. — C’est extrêmement sensé, . 


M. De Bosschere. — Nous pourrions accepter cette proposition 
comme 3° vœu. 


M. Cornu. — Elle rentre dans le vœu de la 4° section. 


M.É. Laurent. — Il y a encore un moyen de répandre en Belgique 
la connaissance des parasites des végétaux. L'enseignement horticole 
belge comprend non seulement des écoles d’horticulture mais aussi des 
conférences populaires. On n’y parle jamais de pathologie végétale. On 
pourrait résumer le vœu de M. Lameere et le mien dans cette rédaction 
unique : « il serait à désirer qu’on répandit dans les campagnes, par le 
moyen des écoles primaires et des cours populaires, la connaissance des 
parasites des végétaux. » 


M. Krelage. — Le dernier vœu exprimé sur cette question me paraît 
si important que je propose de l’élargir encore et d’y comprendre les 
Sociétés d’horticulture. La Société d’horticulture de Haarlem dite : A/ge- 
meene vereeniging voor bloembollen-culluur (Société générale pour la 
culture des plantes bulbeuses et tuberculeuses), à consacré, durant les 
trois dernières années, une partie de ses fonds à des recherches sur les 
maladies des plantes bulbeuses. 

Les maladies des Jacinthes principalement ont donné lieu à ces études. 
Ces travaux sont terminés et ont été formulés dans deux rapports des 
plus intéressants. Les autres recherches n’ont pas encore eu une solution 
si positive. Aussi les continue-t-on dans la mesure du possible. Par les 
soins de notre Société, une monographie sur les Narcisses a été publiée 
également. 

Au début, les cultivateurs ne se sont pas montrés très favorables à nos 
recherches parce que le but ne leur en était pas connu. Mais plus tard, 
lorsque mon ami, M. le professeur Hugo de Vries, d'Amsterdam, eût 
expliqué dans une assemblée de tous les membres de la Société, la grande 
importance des recherches sur les maladies des plantes bulbeuses, nous 
avons obtenu qu’on mit un crédit illimité à la disposition de la direction 
pour des recherches spéciales. Je crois que ce que nous avons fait en 
cette circonstance pourraït être imité ailleurs, Quand des maladies 
éclatent parmi certaines plantes, il serait à désirer que les Sociétés qui 
ont des fonds chargeassent un homme compétent, un botaniste, de se 
livrer à des investigations sérieuses. Je me réfère finalement à une note 


= où = 


que j'ai offerte au Congrès en réponse de la question IT paragr. IV et 
qui a été accompagnée des divers travaux de notre Société. Ces brochures 
sont à la disposition de l’assemblée. 


M. Cornu. — J’appuie de toutes mes forces ce que vient de dire 
M. Krélage. Je demande la permission de citer un fait semblable qui 
s’est produit à Paris. 

Un groupe de onze maraïchers, dont M. Curé, conseiller municipal 
à Paris est le président, a proposé un prix de 10,000 francs pour celui 
qui trouverait le moyen de débarrasser les laitues d’une maladie qui 
les décimait. Il serait bon d'offrir des prix aux personnes qui s’occupe- 
raient de monographies spéciales sur les maladies des végétaux. 


M. Krélage. — De semblables recherches sont organisées en ce 
moment en Hollande par des sociétés particulières. Aïnsi, la fabrique 
d'alcool, à Delft, qui est une grande association industrielle, a engagé 
le docteur M. W. Beyerinck, qui était à l’Institut agricole de l'État 
à Wageningen; elle lui a construit un laboratoire spécial. M. Beyerinck 
a fait un voyage pour étudier de pareils laboratoires afin de pouvoir 
faire construire celui de Delft d’après ses idées. Tout en travaillant 
pour cette association industrielle, il ne lui est pas interdit de publier 
d’autres travaux scientifiques. À mon avis, la méthode la plus sûre est, 
non pas d'offrir des prix considérables, mais d'inviter les personnes 
compétentes à s'occuper exclusivement des questions sur lesquelles on 
désire être éclairé. Offrir un prix est quelque chose de vague. On se 
livre à des tentatives et on n'obtient pas le prix. Un temps précieux est 
ainsi perdu. Quand des personnes compétentes se livrent à de semblables 
recherches, elles obtiennent toujours des résultats utiles, lors même 
qu'elles n'arrivent pas au but qu'on leur assigne. 


M. Fischer de Waldheim. — Il y a quelques années, nos grandes 
plantations de choux en Russie ont beaucoup souffert d’une maladie 
qui n’était pas bien connue. Une Société horticole russe a offert un prix 
de 1000 roubles à celui qui ferait des recherches sur cette maladie et 
fournirait le moyen de s’en débarrasser. Ce prix a attiré l'attention des 
botanistes. Grâce aux recherches de M. Woronin nous savons maintenant 
que cette maladie des choux (maladie digitoire ou hernie) est produite 
par un organisme des plus simples — le Plasmodiophora brassicae. En 
même temps on a pu proposer des moyens pour combattre la maladie. 
Il est évident que de pareilles mesures, sortant du sein des Sociétés 
horticoles, doivent donner d'excellents résultats. 


M. Planchon. — On pourrait peut-être ajouter au vœu un paragraphe 
* portant que les Sociétés d’horticulture ou autres, intéressées dans ces 
questions, sont invitées à proposer des prix pour l'étude des maladies 
parasitaires des végétaux. (AdAésion.) 


—. 170 — 


M. L. Radilkofer. — Sur l'application de la méthode anatomique aux 
Myrsinées et sur les moyens d'appliquer celte mélhode. 

Messieurs, après avoir établi dans mes études sur les Sapindacées la 
méthode ‘anatomique et après avoir obtenu des résultats bien favorables 


dans ma monographie des Serjania, j'ai conçu le projet d'appliquer 


cette méthode à d’autres familles et de lui donner une application plus 
générale. C’est ce que j'ai développé dans un discours intitulé : « Uber 
die Methoden in der botanischen S'ystematik, inbesondere die anatomische 
Methode », publié par l’Académie des sciences de Munich en 1883. Je 
le dépose sur le bureau de M. le Président du Congrès. 

En dehors de mes travaux, j'ai engagé mes élèves de l’Université de 
Munich, les uns à étudier certaines familles au point de vue anatomique, 
les autres à rechercher dans les différentes familles, la constance de 
certains caractères anatomiques, pour en déterminer la valeur systé- 
matique. Un de ces travaux fait par deux de mes élèves, MM. Bokorny 
et Blenk, concerne les ponctuations transparentes communes aux feuilles 
de diverses plantes et qui constituent un moyen facile de distinguer 


certains groupes. Tel est le:cas de la famille des Myrsinées et particu- 


lièrement du genre Myrsine dont les ponctuations sont dues à des sortes 
de glandes internes, ou, pour dire plus exactement, à des lacunes remplies 
de résine. Il était étonnant de voir quelques espèces paraître dépourvues 
de ces glandes; c'était particulièrement le cas de trois plantes de 
l’herbier de Munich, étiquetées sous les noms de A/yrsine mitis Spring., 
Myrsine marginata Hook. et Cybianthus fuscus Mart. 

L'étude du bois de ces mêmes plantes, faite par un autre de mes élèves, 


M. Solereder à l’occasion d’une recherche sur la valeur systématique 


des tissus ligneux, a fait soupconner, pour deux de ces plantes, que ce 
n'étaient pas des Myrsinées. C'était le /. milis et le M. marginata. 
Pour le SEL UNE cette observation n’était pas applicable et un examen 
plus approfondi m'a montré que l'indication de M. Bokorny sur l’absence 
des glandes était simplement une erreur. Elles existent, mais sont pige 
difficiles à observer que dans les autres Myrsinées. 

Voici ce qu’une investigation plus exacte m’a démontré pour les deux 
Myrsine : 1° le M. marginala étudié en même temps sur un petit 
fragment de la plante originale recu de M. le D" Olivier, m'a montré le 
caractère des Sapotacées et doit être nommé Chrysophyllum marginatum ; 
20 le M. mitis montrait les caractères d’une Ilicinée. C’est la plante 
décrite par M. Sonder sous le nom d’//ex capensis avec le synonyme de 
Sideroxylon mile Jacq. M. Sonder n'a pas précisé si cette plante est 
identique au Sideroæylon mile L., ou si la plante de Linné est la même 
que le Sideroxylon melanophlæum L. Cette question avait un intérêt 
spécial, car dans le premier cas la plante aurait dû s'appeler Z/ex mitis 
d'après les lois de la nomenclature botanique de M. Alph. De Candolle. 


— 171 — 


Il y a quelques mois, j'ai demandé des renseignements sur les spéci- 
mens de ces mêmes plantes renfermés dans l’herbier de Linné; je n’ai pu 
me renseigner suffisamment malgré l’obligeance de M. Jackson. Dans 
l’herbier de Linné se trouvent deux exemplaires (bien incomplets) sous 
le nom de #. melanophlœum, mais aucune plante ne porte le nom de 
S. mile. Cela résulte de ce que Linné n’a pas distingué suffisamment ces 
deux plantes auxquelles il a attribué comme synonyme la même phrase 
de Commelyn. 

Je me suis persuadé, par les communications de M. Jackson, qu'il 
serait trop long d'exposer ici,.que l’un de ces deux spécimens n’est 
pas véritablement un Myrsine, mais plutôt identique à l’Jlex capensis 
Sonder, Comme je me rends sous peu en Angleterre, j'espère par 
l'examen anatomique, pouvoir démontrer l’exactitude de cette con- 
clusion. | 

Il serait difficile à un botaniste, qui n'est pas familiarisé avec la 
méthode anatomique, d'arriver au résultat indiqué avec des matériaux 
incomplets. Je tiens à attirer spécialement sur ce point l'attention des 
membres du Congrès. 

Les exemples de difficultés telles que celles que je viens de citer sont 
fréquents. Aussi serait-il nécessaire de voir disparaître les nombreux 
obstacles qui s'opposent au perfectionnement de la botanique systéma- 
tique. C'est ce que j'ai indiqué dans mon discours dont je viens de vous 
parler. Il peut se résumer en deux-mots: Organisation du travail et 
distribution des matériaux en rapport avec celte organisation. 

Il existe en Europe une douzaine de centres botaniques importants, 
entre lesquels il conviendrait de répartir le travail d’une étude complète 
définitive des espèces végétales. Chaque centre recevrait un groupe déter- 
miné pour lequel il disposerait de tous les matériaux dispersés dans les 
diverses collections. Je prends un exemple. Supposons que Bruxelles soit 
destiné à s'occuper des Thalamiflores. Tout ce que les grands herbiers de 
l’Europe possèdent sur ce groupe serait confié à la direction du Jardin 
_ Botanique de Bruxelles, qui s'engagerait à accomplir le travail de revi- 
sion. Les spécimens-types seraient conservés indéfiniment à Bruxelles, 
sans toutefois aliéner la propriété qui resterait celle des herbiers ayant 
fait le prêt. Quant aux doubles ils seraient restitués. 

Par cette combinaison, on pourrait faire une étude complète des 
Thalamiflores tant au point de vue de la morphologie externe que de 
l’anatomie. 

Je n’espère pas que cette idée soit réalisée d’ici à bref délai, mais je la 
soumets au Congrès dans l'espoir qu’elle fera son chemin et que lors d’une 
prochaine réunion de botanistes, elle puisse être discutée. Je souhaite 
que dans le cas où cette hypothèse se réalise, une commission interna- 
tionale, formée des directeurs des jardins botaniques intéressés, soit 


— ]72 — 
chargée de prendre les mesures nécessaires pour la mettre en pratique (1). 


M. Wittmack. — Nous devons être fort obligés à M. Radlkofer de 
nous avoir présenté ce travail. Tous les botanistes, tous les spécialistes 
savent combien il est difficile de réunir des matériaux semblables. 
Espérons que ce vœu se réalisera plus tard s’il ne doit pas recevoir 
une application immédiate. Malheureusement le grand album de Kew 
ne communique pas ses plantes. Tant que ces communications ne seront 
pas la règle, nous ne parviendrons pas à notre but. Toutefois le Congrès 
ferait chose sage de se rallier au vœu de M. Radlkofer. 


M. Planchon. — Je crois qu'il faudra, dans la proposition de 
M. Radlkofer, prendre ce qu’elle à de pratique. Nous trouvons son vœu 
réalisé à peu près dans la mesure du possible, grâce à l'habitude que 


M. de Candolle a prise, en vue de son grand travail pour la continuation. 


de l’œuvre de son père, de faire réunir entre les mains des monographes, 
les matériaux dispersés dans ies différents herbiers. Je dis « des mono- 
graphes » d’une famille quelquefois vaste, quelquefois étroite. Mais 
supposer que cette concentration pourra se faire pour des groupes plus 
étendus, c’est rêver l'impossible. Je ne crois pas que les grands herbiers 
albums d'Europe se privent, même pour un temps court, de tout un 
ensemble de plantes. 

De plus, il ne me parait pas possible de demander aux Lenbien de 
l'Europe le sacrifice de ce qu'on appelle les types. Ce qu’on peut 
espérer, c’est qu'on distribuera libéralement, de plus en plus, dans de 
crands centres, les duplicata de ces types. Les grands herbiers le font. 
Celui de Kew lui-même a suivi cet exemple. Il peut y avoir ainsi des 
erreurs, il y en aura certainement mais on arrivera de la sorte à avoir 
des types à peu près partout. 

Certes, il y a une idée généreuse dans ce projet de concentration de 
matériaux dans des centres déterminés, mais je crois qu’il faut se borner, 
pour arriver à un résultat pratique, à des monographies. Pour ma part, 
je ne crois pas pouvoir appuyer l’idée que des groupes immenses de 


(1) Revenu d’Angleterre, je peux maintenant ajouter que ma supposition sur 
l’idendité du S?deroxylon mite L. avec l’Zlex capensis Sonder s’est, bien vérifiée, 
mais doit être modifiée. Les deux exemplaires du Siderozylon melanophloeum, 
que j'ai vus à Londres, représentent en effet une même plante, le Myrsine 
melanophlaea R. Brown; mais à côté d’eux se trouve aussi le type du Sideroæylon 
mite L., de l'étiquette duquel le mot « mite » a été découpé par hasard. Cette 
plante est tout-à-fait la même que le Myrsine mitis Spreng et l’Zlex capensis 
Sonder. Comme je l’ai indiqué ci-dessus et comme je l’ai exposé au & Meeting 
of the British Association for the Advencement of Science at Aberdeen », le 
14 septembre 1885, elle doit done s’appeler //ex mitis. 

Munich le 23 novembre 1855. L. RADLKOFER, 

(Note ajoutée pendant l'impression). 


D de NT 


— 173 —. 


plantes soient centralisés sur un seul point, au risque d’en priver ailleurs 
les travailleurs pendant tout un temps. On pourrait seulement émettre 
le vœu que les échanges de plantes entre les divers herbiers s'étendent 
de plus en plus, de manière à favoriser les recherches des monographes. 
Dans ces limites-là, j'appuierai le vœu; pour le surplus on vise un idéal 
qu'on n’a pas d'espoir sérieux de réaliser. 


M. Krélage. — Sans vouloir entrer dans la question qui me paraît 
élucidée, je voudrais attirer votre attention sur un autre point. Nous 
autres horticulteurs, nous avons un grand respect pour les Jardins bota- 
niques. Nous tâchons d’en tirer profit, mais ces jardins pourraient être 
encore d’une utilité plus importante pour l’horticulture. En général, ces 
jardins possèdent des collections de plantes de différents genres. Ne serait- 
il pas possible d'établir dans chaque Jardin botanique, à côté de ces 
collections générales, une collection spéciale d’une certaine famille ou 
d’un certain genre, dont on garderait toujours une collection aussi com- 
plète que possible? Toutes les cultures qui font l’objet de nos études 
pourraient se trouver ainsi réunies dans les divers Jardins botaniques. 
Les horticulteurs éprouvent de grandes difficultés à garder toujours dans 
leurs collections toutes les plantes possibles. 

Ils ont aussi à tenir compte de la mode qui se jette tantôt sur un végé- 
tal et tantôt sur un autre. Si on pouvait parvenir à conserver tous les 
types du règne végétal dans les divers Jardins botaniques qui s’appli- 
queraient à cultiver chacun une certaine famille restreinte, on rendrait 
service, non seulement à l’horticulture, mais aussi à la science, qui se 
procurerait aisément tous les individus nécessaires aux études. Cette 
question est des plus importantes parce que dans les lieux natals, par 
diverses raisons, les plantes indigènes deviennent souvent rares et 
risquent de se perdre. On pourrait de cette facon tâcher de les garder 
en état vivant dans les cultures. 

Les Jardins botaniques qui ont de grandes ressources à leur disposi- 
tion s'occuperaient des familles plus importantes et dont l'entretien est 
coûteux. Les autres pourraient s'occuper d’une famille ou d’un genre de 
plantes vivaces dont l'entretien est relativement peu coûteux. Il n’y à 
pas un seul Jardin botanique, même avec les ressources les plus res- 
treintes, qui ne pourrait pas donner son apport à cette œuvre utile, 
(Applaudissements.) 


M. Baïllon. — La question que vient de soulever M. Krélage est 
particulière aux plantes cultivées. Quant à ce qui concerne les collec- 
tions d’herbiers, je ne crois pas qu'aucun Congrès puisse réaliser la 
généreuse conception de mon ami M. Radlkofer. Les règlements d’une 
foule de grands albums s'opposent absolument à la distribution des 
plantes. Si vous insistiez pour qu'ils fussent violés, on vous enverrait 


— 174 — 


promener, permettez-moi cette expression vulgaire. Nous pouvons 
émettre un vœu, c’est que les grands herbiers communiquent les types 
d'une même famille à celui qui s'occupe d’une monographie, même qu’on 
lui en donne les doubles. Le Congrès pourrait adresser une circulaire 
däns ce sens à tous les directeurs d'albums pour les engager à se 
départir, dans l'intérêt général, de la règle qu'ils se sont imposée ou qu'ils 
ont acceptée. Nous ne pouvons exercer ici qu’une influence morale, 


M. Radikofer. — Toutes les objections que l'on élève contre mon 
idée ne sont pas si graves que les inconvénients subis par la science 
avec la pratique existante. Je n'ai voulu qu'émettre mon idée. J'espère 
qu’elle fera son chemin. 


M. le Président. — Je pense que la proposition de M. Radlkofer 
et celle de M. Krélage seront appuyées par la section. (Adhésion). 


M. Triana. — Publication des dessins de botanique de Mutis. 
Messieurs, en parcourant la belle exposition d'horticulture organisée 
par les soins de la Société royale d’agriculture et d’horticulture 
d'Anvers, qui vient d’être inaugurée, je me suis cru transporté soudaine- 
ment dans une forêt tropicale, Je dirai mieux, dans une forêt de la 
Colombie, car malgré que cela puisse étonner plusieurs personnes, une 
grande partie des plantes qui donnent tant d'éclat à l'exposition sont 
originaires de mon pays. 

J'ai donc éprouvé une véritable satisfaction en voyant autour de 
moi, dans l'exposition, ce choix remarquable de végétaux que j'avais 
jadis contemplés avec enthousiasme au début de ma carrière. Comme 
d'anciennes connaissances qu'on retrouve au bout de longues années, 
je les ai saluées de mon regard attentif, ravi de les revoir jeunes 
et luxuriantes, pleines de fraicheur et plutôt rehaussées d’une beauté 
nouvelle que leur ont donné les soins d’une culture intelligente, loin de 
leur pays natal. Inutile d’insister sur l'impression que J'ai éprouvée à la 
vue de cét ensemble de plantes artistiquement groupées, remarquables à 
différents titres, surtout quand c’est moi-même, j'ose le dire sans vouloir 
me flatter, qui ai fait connaître le premier ici, dans ce pays, plusieurs 
de ces belles conquêtes de l’horticulture ornementale. Doux souvenir de 
jeunesse qui me rattache involontairement à la Belgique. Je les ai vues 
sous la voûte verdoyante, tiède et embaumée des hautes forêts vierges, 
grimpant et escaladant les arbres séculaires, ces Odontoglossum, ces 
Oncidium, ces Epidendrum, ces Caltleya, ces Anguloa, ces Masdevallia, 
ces Slanhopea, ces Gongora, etc. etc. qui entrelacent leurs guirlandes 
ou confondent leurs fleurs singulières et capricieuses. Sur les troncs 
robustes des arbres ou cachées dans l’inextricable confusion de verdure, 
je les ai trouvées ces magnifiques Aroïdées, Broméliacées, Marantacées, 
etc. qui font l'admiration du visiteur, tels que ces Anthurium, Caladium, 


: 
‘a 
| 
| 
| 
| 
1 


Mr 


Dieffenbachia, Philodendron, Spathiphyllum, ces Maranta à feuillage 


 panaché, ces Picairnia, Billbergia, Guzmania, Vriesea, ete. Là-bas, les 


fougères en arbre coudoient les palmiers et leur disputent l’élégance 
générale de leurs formes. Plus à la lumière se tiennent ces Oreopanaz et 
d’autres arbustes qui sont devenus aujourd’hui un besoin dans l’ornemen- 
tation. 

Dans les lieux humides se tiennent plus modestement les Æ'ucharis, 
les Crinum, les Amaryllis et bien d’autres plantes à feuillage panaché. 

Je n’en finirais pas si je voulais faire l’énumération de tant d’autres 
plantes que la Colombie a fournies à l’horticulture en Europe en général 
et particulièrement à la Belgique, ce pays qui a tant contribué à 
répandre, à entretenir et à épurer le goût des plantes exotiques dans 
l'ornementation. Mais ne croyez pas, Messieurs, que ce jardin privi- 
légié, que cette pépinière de si belles découvertes horticoles ait pu être 
épuisé. De nouvelles surprises attendent toujours les explorateurs, à 
preuve ces Anthurium Andreanum et A. Gustavi qui étonnent les ama- 
teurs. 

Ce ne sont pas seulement les plantes ornementales qui abondent en 
Colombie. On y trouve aussi des végétaux remarquables utilisées en 
thérapeutique, en industrie, dans les arts, etc. 

Vous tous, Messieurs, qui aimez les plantes, vous devez d’après ce que 
je viens d'énumérer, vous intéresser naturellement à cette Flore de 
la Colombie qui vous procure tant de richesses à différents points de 
vue; et c'est à ee titre que je vous demande un moment de bienveillante 
attention. ! 

À la fin du siècle dernier, quand la connaissance des plantes exotiques 
passionnait les esprits en Europe, l'Espagne, sous les auspices du roi 
Charles III, monarque éclairé et ami de tout progrès, organisa et main- 
tint longtemps trois grandes expéditions pour explorer la végétation des 


. colonies espagnoles de l'Amérique, 


L'une alla au Pérou et au Chili dans la région méridionale, l’autre 
visita le Mexique dans la région septentrionale et la troisième fut fondée 
(1798) dans les régions centrales, à la Nouvelle Grenade, aujourd’hui 
la Colombie. 

C'est de cette dernière que je désire vous entretenir pendant quelques 
instants. 

La direction de la dite expédition fut confiée à Mutis, célèbre botaniste 
espagnol, qui put disposer de la libéralité du gouvernement espagnol, 
qui n’épargna aucune dépense, pendant les trente années que dura, à peu 
près, cette entreprise. 

L'expédition eut à son service des aides-naturalistes, zoologistes, 
botanistes, astronomes, ete. et ce qui était plus remarquable, on fonda 
sous la direction des peintres espagnols, une école de dessinateurs 


— 176 — 


néo-grenadiens, qui devinrent eux-mêmes de véritables artistes dessina- 
teurs de plantes. 

Tout ce personnel si nombreux, qui comptaitau moins trente personnes, 
travailla avec ardeur et assiduité, pendant la longue période de l'existence 
de l'expédition, à amonceler les matériaux d’une Flore du pays qu'avait 
projetée Mutis. On arriva ainsi à réunir de grandes collections d'objets 
d'histoire naturelle, minéraux, végétaux et animaux; on prépara de 
nombreux herbiers; on rédigea des notes et l’on fit des descriptions. 
Enfin, on confectionna une nombreuse, grandiose et brillante collection 
de dessins de plantes, d’après nature, sur beau papier grand in-folio, 
les uns à la plume, les autres admirablement coloriés à la manière des 
miniatures, tous étonnants d’exactitude et de finesse, rivalisant presque 
d'éclat avec leurs originaux. 

Jamais on n'avait mis à exécution une œuvre aussi grandiose et en de 


telles proportions, et je ne sais pas si l’on pourrait songer aujourd’hui. 


ou plus tard à en entreprendre une semblable. 

Humboldt et Bonpland, en arrivant à Bogota, furent ravis d’admiration 
à la vue de ces dessins magnifiques et des richesses scientifiques réunis 
au sommet de la Cordillère des Andes, alors presque inaccessible au 
voyageur, et ils payèrent leur tribut d’admiration à Mutis. 

Malheureusement, au commencement du siècle (1808), Mutis mourut 
sans avoir même commencé sa Flore, ouvrage colossal à en juger d'après 
les matériaux qui étaient restés en voie de préparation. A la mort du 
savant directeur, ses collections restèrent comme isolées et indépendantes 
les unes des autres : les dessins, les plantes desséchées qui avaient servi 
de modèles, les descriptions ou notes manuscrites, n'avaient pas la numé- 
ration concordante si désirable, aucun lien ne les réunissait. Pour la 
plupart, ces éléments divers manquaient de classification et de dénomi- 
nations techniques que, du reste, il était presque impossible de leur 
donner à une époque ou presque toutes les plantes de la contrée 
étaient inconnues pour la science. 

Survint après (1810) la proclamation de l'indépendance des colonies 
espagnoles, et au moment où le mouvement révolutionnaire fut momen- 
tanément comprimé, le général pacificateur Morilor, étant arrivé triom- 
phant à Bogotä (1814), reconnut la valeur exceptionelle et la richesse 
des collections formées par l'expédition botanique du nouveau Royaume 
de Grenade. Il prit tout ce qui se trouvait dans l'établissement et expédia 
à Madrid, sous la garde d’un de ses lieutenants, les herbiers, dessins, 
manuscrits et objets d'histoire naturelle; le reste fut vendu. A leur 
arrivée, les collections furent déposées au Jardin des plantes et grâce à 
Lugasca, son directeur, qui comprit tout l'intér# scientifique et toute la 
valeur intrinsèque et artistique qu'elles coniportaient, surtout les 
dessins et les manuscrits, obtint du roi, les fonds nécessaires pour la 


| 
1 
| 


— 177 —- 


confection des armoires, avec boîtes en bois doublées de fer blanc, pour 
renfermer et conserver précieusement ces dessins comme un véritable 
trésor. Les dessins, en particulier, ont été retrouvés intacts au bout de 
tant d'années et comme s'ils venaient de sortir des mains des artistes. Les 
herbiers restent dans leurs caisses encore assez bien conservés, d’après 
ce que j'ai pu voir et les manuscrits n’ont pas été détériorés. Je n’ai 
pas vu les collections d'histoire naturelle. 

Le gouvernement espagnol, comprenant la nécessité de faire profiter 
la science de tant de documents importants, si chèrement acquis, 
nomma, à diverses reprises, pour les mettre en ordre, les classer et 
déterminer, des savants espagnols. Lagasca fut le premier chargé de cet 
important et difficile travail qui fut confié après à Pavon, un des explo- 
rateurs du Pérou et du Chili qui s'était familiarisé avec la végétation 
Sud-Américaine, et ainsi en furent nommés d’autres moins célèbres. 
Mais, on se heurta toujours à des difficultés, pour ainsi dire, insurmon- 
tables, à cause de l’état, d’après ce que je viers de vous dire, où se trou- 
vaient les collections. Le défaut de numération et de corrélation naturelle 
et indispensable entre les dessins, les herbiers et les descriptions, l’insuf- 
fisance d'indications utiles et surtout d'analyses des organes reproduc- 
teurs accompagnant les dessins, ou la circonstance de se trouver sur des 
feuilles séparées, rendaient la classification de ces documents à peu près 
impossible. 

C’est ainsi que ces matériaux ont dû rester de longues années renfer- 
més et ignorés presque complètement du monde savant, au préjudice de la 
science. Il était nécessaire, pour débrouiller ce chaos, d’avoir vu toutes 
ces plantes à l’état vivant dans leur pays natal, il fallait les avoir étu- 
diées, classées et déterminées d'avance afin de pouvoir les reconnaître à 
la simple inspection et arriver à leur donner leur nom et leur assigner 
leur rang dans la classification. Sans cela, les recherches devenaient lon- 
gues, pénibles et la plupart du temps, infructueuses. 

Par des circonstances exceptionnelles qu’il est inutile de rappeler ici, 
je me suis trouvé dans les conditions ci-dessus indiquées, et préparé 
d'avance pour rendre la tâche moins diflicile, moins longue, tout en 
ayant la probabilité d’exactitude dans les déterminations, afin que 
l'œuvre puisse se trouver à la hauteur qu’exigent les connaissances 
actuelles sur la botanique. 

J'avais parcouru les mêmes régions que Mutis pour étudier la même 
végétation, et comme lui j'avais formé un grand herbier. Après avoir 
étudié les plantes vivantes, j'étais venu en Europe avec mes collections 
et, entouré de tous les moyens qu'offrent les pays civilisés, je complétais 
mes déterminations et recherches sur toute cette végétation. 

Je pouvais donc reconnaître assez facilement au coup d'œil, sur le 


dessin, la plante qu’il représentait et lui assigner son nom scientifique, 
12 


— 178 — 


ou déterminer les échantillons d’herbier. Désireux de rendre utiles ces 
matériaux précieux venant de mon pays, j'insistais à plusieurs reprises 
auprès du gouvernement espagnol, pour obtenir la permission d’entre- 
prendre le classement et la dénomination, surtout de la partie la plus 
importante, c’est-à-dire, des dessins. Enfin, il n’y a pas longtemps que 
cette autorisation m’a été accordée par la munificence du gouvernement 
qui a à sa tête, le jeune, illustre et éclairé monarque, Alphonse XII, 
auquel je me plais à donner ici un témoignage public de gratitude et de 
reconnaissance au nom de tous ceux qui aiment la science. 

J'ai donc profité de cette permission ample et généreuse, que j'ai 
obtenue par l’entremise de son Excellence M. Carlos Holguin, ministre 
plénipotentiaire des États-Unis de Colombie en Espagne, et avec l’aide 
de mon gouvernement, je me suis mis à l’œuvre. Après un rude et 
opiniâtre labeur de quelques mois, je suis arrivé à classer et à déterminer 
techniquement la collection de plus de 6000 dessins. Elle constituerait 
aujourd’hui un grand et magnifique album composé de 40 volumes. Tous 
les dessins qui représentent la même espèce, soit en noir, soit en couleurs, 
se trouvent réunis; les espèces du même genre, ainsi que les genres, se 
suivent dans l’ordre de la méthode naturelle. 

J'ai formé, en outre, dans le même ordre, un catalogue général des 
dessins d’espèces, genres et familles, avec l'indication du nombre et de 
la nature des dessins qui représentent chaque espèce. J'ai voulu aussi 
conserver la liste avec l’'énumération primitive des dessins dans la dispo- 
sition où je les avais trouvés. Le résumé complet des dessins, indique 
qu’il y a à peu près 2000 espèces de plantes représentées et qu’elles le 
sont en général par deux, même trois, ou plus de dessins dont il 
y a, en général un en couleur et les autres en noir, à la plume. 

Ces documents précieux pour la science, sont aujourd'hui à la portée 
du public au Jardin des plantes de Madrid et peuvent être facilement 
et fructueusement consultées au profit de la botanique ou de l’art. 

Le trésor qui risquait d’être perdu a été sauvé, ce qui était le point 
essentiel et le plus important; mais il serait désirable de pousser plus 
loin le rachat entrepris. Aujourd’hui on peut bien songer à la reproduc- 
tion des dessins si admirablement faits. À une autre époque, le projet 
aurait été presque impraticable, surtout suivant le plan primitif, à 
cause du prix élevé qu’aurait coûté la gravure, du grand nombre de 
eraveurs qu’il aurait fallu employer et du temps qu’aurait exigé l’exécu- 
tion de l’œuvre. Mais grâce aux progrès accomplis actuellement dans la 
gravure par des procédés mécaniques et d’après l’étude approfondie que 
j'ai faite de la question, l’entreprise est devenue praticable, relativement 
économique et d'exécution rapide. 

Parviendrai-je à pouvoir entreprendre la seconde partie de la tâche ? 

Pourrai-je me flatter en moins de la commencer ? 


RL ‘é duc nes 


— 179 — 


Je l'ignore, parce que cela dépend de circonstances indépendantes 
de ma volonté et surtout de l’aide et de l’appui qui pourraient m'être 
accordés. 

Je ne doute pas que je trouverai, en Colombie, un concours empressé 
en faveur de cette idée, mais il pourrait être paralysé par des événe- 
ments imprévus. C'est pour cela que je fais appel ici aux botanistes et 
savants européens dont l’encouragement serait précieux. Je viens donc 
Messieurs, vous prier de vous intéresser à une œuvre qui, comme je l’ai 
dit en commencant, doit vous être sympathique; je viens vous demander 
votre action personnelle ou officielle, afin de m'aider dans la mesure du 
possible en faveur de cette œuvre grandiose pour la botanique. 


Nous avons soumis à votre examen les spécimens des photogravures 
obtenus à très bon marché. On faciliterait la publication en la mettant 
à un prix minime, qui ne serait que le prix de revient de l'impression et 
du tirage, sans compter l'énorme dépense qui a été faite pour l’établis- 
sement des originaux. 


M. Planchon. — M. Triana a accompli son œuvre d’une manière 
très-satisfaisante. IL a eu le mérite très grand de publier les dessins 
originaux de Mutis relatifs au Quinquina. Il en a fait une œuvre 
très-sérieuse. Il est plus capable que personne de faire connaître aux 
savants les trésors qui sont restés ainsi enfouis, pendant près de cent ans, 
dans les archives du Jardin botanique de Madrid, qu’il a eu le mérite de 
retrouver et de mettre en lumière. ?: 

Le Congrès doit accueillir le vœu de M. Triana, que les Gouverne- 
ments qui sont à la tête des sciences, qui ont de grandes collections, 
favorisent par des souscriptions et des encouragements la publication 
d’une œuvre aussi importante que celle des dessins de Mutis. 


M. le Président. — Je pense que tout le monde est d’accord. 


M. Ch. De Rosschere. — L'insertion de la communication de M.Triana 
dans les actes du Congrès et l’expression du vœu qui vient d’être émis, 
permettront à M. Triana de déclarer qu’il a obtenu pleine satisfaction 
au Congrès d'Anvers. Nous nous empresserons de donner à cette com- 
munication la plus grande publicité possible. 


M. Triana. — Je remercie M. De Bosschere. Le moyen qu'il indique 
est le plus puissant d’aider à la publication, 


M. Ch. De Bosschere. — La Section botanique avait chargé une 
commission spéciale, composée de MM. Baïllon, Cornu, Planchon, père 
et fils et Wittmack, de dresser une liste des champignons vénéneux et 
des champignons comestibles. Cette liste vient de m'être transmise. Nous 
l’insérerons dans les Actes du Congrès. 


— 180 — 


Nous avons adopté hier une proposition tendant à terminer les tra- 
vaux du Congrès ce matin même. Plusieurs membres de l'assemblée 
m'ont exprimé le désir de voir remettre l'assemblée générale à l’après- 
midi. Je devrai pouvoir donner lecture de tous les vœux quiont été 
exprimés aux assemblées générales antérieures ainsi que dans les diffé- 
rentes sections, seulement ces vœux ne sont pas encore définitivement 
rédigés. 

Je pourrai, grosso modo, vous en donner connaissance. 

M. Planchon. — On pourrait s’en rapporter au bureau. 


Un membre. — D'autant plus qu’il a été entendu que les vœux 
seraient adressés à leurs auteurs pour en revoir les formules. 


M. le Président. — Alors toutes /es questions sont épuisées. 
La séance est levée à midi et demi. 


mt" pe nn CD 


SECTION HORTICOLE,. 


Séance du 4 août 1885. 


Présidence de M. CARL HANSEN, professeur à l’Académie supérieure 
d'Agriculture et d'Horticulture de Copenhague. 


M. Cu, Van GEerr, J', secrétaire du Congrès, remplit les fonctions de 
secrétaire. 


Sommaire : XZe Question du programme : L'utilisation des eaux d’égoût des 
grandes villes. Quels sont les résultats obtenus dans les divers pays ? Quels sont 
les moyens à mettre en œuvre pour généraliser la pratique du sewage? par 
MM. Bons, CH. JOLY, PALACKY, DE GERLACHE, MERTENS. — X Ve Question du 
programme : La culture des champignons utiles est-elle susceptible de s'étendre ? 
On demande un aperçu des espèces comestibles les plus communes et des espèces 
vénéneusés qui leur ressemblent le plus, par MM. WESMAEL, BALTET. — 
XVIIIe Question du programme : Quels sont les remèdes employés jusqu'ici 
contre les ravages du Phylioxera et quels résultats ont-ils donnés? par MM. BaL.- 
TET, MERTENS. — X7Xe Question du programme : De l'opportunité de la création 
dans les centres horticoles, de Sociétés de prévoyance mutuelle et d'épargne 
en faveur des jardiniers et de leurs familles, par MM. PALACKY, BALTET. — 
XXIe Question du programme : Tarification et conditions des envois horticoles 
par chemin de fer, par MM. BALTET, Joy. 


La séance est ouverte à 9 1/2 heures ; 


M. le Président. — L'ordre du jour comporte cinq questions de la 
plus haute importance. Je crains que nous n’ayons pas le temps voulu 
pour les traiter, aussi j'engage les orateurs à être aussi brefs que, 
possible, 


— 182 — 


Voici deux des questions qu’il s’agit de traiter : 


X. De l'emploi des engrais artificiels pour la culture des plantes dans 
les serres, les appartements et les jardins(), 

XI. L'utilisation des eaux dégoût des grandes villes. Quels sont les 
résultats obtenus dans les divers pays? Quels sont les moyens à mettre en 
œuvre pour généraliser la pratique de sexage? (À) 

La parole est à M. Boëns sur la XI° question du programme. 

M. Boëns ayant réclamé le manuscrit de son discours, nous nous voyons 
dans l'impossibilité de le reproduire ici(3). 


M. Ch. Joly. — M. Boëns aurait dû se placer, dans son travail, non 
pas au point de vue de l’inventeur, mais au point de vue général. Nous 
connaissons tous l’amour paternel des inventeurs pour leurs découvertes, 
mais avant de les discuter dans un Congrès, il faudrait qu’elles aient été 
examinées par des hommes spéciaux et soumises au contrôle de l’expé- 
rience. Si l’on procédait autrement, les discussions n’auraient pas de fin 
et elles se passeraient en d’interminables discours sur les mérites de 
chaque invention. Ceci dit, j'arrive au sujet pour lequel j’ai demandé la 
parole. 

Quand on étudie les deux grandes lois qui régissent le monde : /a loi de 
vie et La loi de mort, on reconnaît que tout corps organisé, que ce soit un 
animal ou un végétal, est soumis, lorsque la vie l’a quitté, à une loi uni- 
forme, à une série de transformations, qui sont opérées par des organismes 
vivants que la nature a préparés pour accomplir son œuvre et que les 
médecins désignent sous le nom de microbes, de ferments, etc., mais que 
j'appellerai les ouvriers de la mort, parce qu’ils sont chargés de trans- 
former tout ce qui a eu vie: ils se transforment eux-mêmes successi- 
vement au fur et à mesure de l’accomplissement de leur œuvre. Si tous 
les êtres organisés n'étaient pas soumis à cette loi providentielle, la vie 
ne pourrait pas exister à la surface du globe. 

Eh! bien, c’est dans cette période de transformation, ou de fermentation, 
qu’est le danger pour nous, c'est là que doivent se concentrer les efforts 
des hygiénistes, c’est là ce qui fait que l’on doit ou désinfecter sur place, 
ou chasser au loin, par tous les moyens possibles, tout ce qui a servi à 
nos besoins et que la nature rejette par les moyens que vous connaissez. 
Nous avons hélas! l'habitude, par incurie ou par ignorance, de laisser 
séjourner près des habitations les déjections animales et les détritus de 
tout genre : nous nous empoisonnons nous-mêmes. C’est le cas d’appli- 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » le mémoire de M. L. DE NOBELE, 
p. 225-233. 

(2) Voir aux « Rapports préliminaires » le rapport de M. Joy, p. 65-10. 

(3) Note du Secrétaire-Général. 


— 183 — 


quer le proverbe: «l’homme ne meurt pas, il se tue». Qu’on examine les 
causes de cette légion de maladies: fièvre jaune, choléra morbus, vomito 
négro, fièvre typhoïde, fièvre pernicieuse, etc., tout cela provient de la 
même cause, produit des phénomènes presque semblables et ne disparaitra 
que par l'observation rigoureuse des lois de l'hygiène. Pourquoi hélas! 
nous apprend-on, dans nos classes, tant de choses superflues et rien ou 
presque rien de la science suprême, celle qui nous conserve la santé sans 
laquelle tous les biens de ce monde ne sont rien ? 

Mais nous sommes réunis pour étudier uniquement les questions hor- 
ticoles et ici, la question est double : laissons l'hygiène aux médecins et 
ne nous occupons que de l’utilisation des eaux d’égoût ; qu'il soit bien 
convenu, une fois pour toutes, que les détritus animaux et végétaux ne 
doivent, à aucun prix, séjourner près de nos habitations : ce serait déjà 
là un grand pas de fait, si chacun de nous était bien convaincu de 
cette vérité. 

Qu'’allons-nous faire de tous ces détritus des villes? Allons-nous agir 
comme les Chinois ou comme cela se fait dans le nord de la France et 
dans les Flandres, recueillir les matières à l’état frais pour les répandre 
sur nos champs? Franchement, l’agriculture y gagne, mais nos mœurs 
répugnent à ce moyen barbare. Allons-nous faire des canalisations sépa- 
rées sous nos rues, pour les télégraphes, les téléphones, les eaux de 
rivière, les eaux de source, le gaz, les eaux de pluie et les eaux ména- 
gères comme on le propose à Paris? Vraiment, c’est bien compliquer la 
question et s’exposer à des dépenses énormes. — En économie domes- 
tique, tout ce qu'il y a de plus simple est le meilleur. Pas de machines à 
entretenir, pas de clapets, pas de robinets, pas de valves qui fonction- 
nent mal, deux simples syphons, l’un au départ des eaux vannes, l’autre 
à l'entrée de l'égout, puis pour ces égouts une pente suffisante et quand 
la pente est faible, des chasses d’eau automatiques deux fois par jour. 
Voilà, en un mot, toute la question pour la majorité des villes. Je n’ai 
pas besoin d’ajouter qu’on ne draine pas Venise ou Amsterdam, comme 
Paris ou Bruxelles. Employer des moyens artificiels pour épurer nos 
eaux vannes est une utopie jugée depuis longtemps: le moyen est 
bon pour certains cas particuliers, mais nous nous placons toujours 
ici au point de vue général. Qu'il soit bien entendu surtout, que si 
l'on n’a pas le droit d’empoisonner l’air que nous respirons, si l’on a 
fait des lois contre les établissements insalubres, on n’a pas plus le 
droit d'empoisonner les eaux des rivières et de détruire les poissons 
qui sont, dans certains pays, une source d’alimentation si abondante et 
si économique. 

Déjà en 1826, plusieurs savants, MM. Chevreuil, Wurtz et Dumas, 
consultés sur le meilleur moyen de désinfecter les eaux des distilleries, 
avaient conseillé d’adjoindre aux usines des terrains spéciaux pour y 


— 134 — 


faire de l'irrigation et pour profiter de la propriété si remarquable que 
possède le sol pour la désinfection des matières organiques. Depuis ce 
moment, on n’a rien trouvé de mieux et l’on ne trouvera jamais rien de 
plus simple et de plus pratique, surtout quand il s’agit de volumes 
d'eaux vannes considérables. Imiter la nature, voilà le but à atteindre, 
comme elle nous le montre à chaque pas, quand elle fait jaillir de la terre 
sous forme d'eaux pures, les pluies qui ont entrainé les poussières 
atmosphériques, à travers les détritus de tous genres qui jonchent 
le sol. 

Où faudra-t-il conduire les eaux d'égoût ? Evidemment sur des terrains 
perméables quelles que soient leurs autres qualités, puisque les eaux van- 
nes renferment presque tous les éléments nécessaires à la culture : au 
premier abord, c'est à qui n’aura pas les eaux d'égoût près de sa 
propriété, comme s’il s'agissait d’un cimetière! N’a-t-on pas vu cela à 
Genevilliers il y a 15 ans ? Ah ! comme l’on crierait aujourd’hui 
si l'on portait les eaux ailleurs! Disons de suite que les procédés 
de culture à l’eau d’égoût sont quelque peu différents des autres : il 
faut irriguer d’une manière intermittente les racines des plantes, au 
moyen de billons, en écartant les sillons d'irrigation de mètre en mètre 
par exemple : et qu'on n'oublie pas ici que l'hiver, les eaux vannes ne 
gelent pas, car ces eaux circulant dans les égouts, conservent longtemps 
la température du sol. 

On a craint les maladies provenant des irrigations et l’on a bâti là 
dessus des montagnes d'erreurs. Qu'il me suffise de demander s’il y a des 
maladies spéciales parmi les égoutiers ou les vidangeurs, s'il y en a à 
Pantin et à Bondy où sont les vidanges de Paris, s’il y en a à Edimbourg, 
à Milan, à St-Étienne, à Berlin et à Valence ou à Grenade, où l’on utilise 
les eaux d’égoût depuis si longtemps. Et à Genevilliers, où les expé- 
riences se font sur 600 hectares aujourd’hui, y a-t-il plus de maladies 
qu'ailleurs? Ah! que la mauvaise foi et l'ignorance ont beau jeu dans 
ces questions! Mais je dois insister ici sur une vérité qu'on oublie: 
jusqu’à présent, on s’est occupé d’amener les eaux dans les villes, sans 
savoir ce qu’elles deviendraient quand elles auraient servi à nos usages 
domestiques : on a bien voulu payer pour les amener, mais on hésite 
à payer pour s’en débarrasser: il le faudra cependant et on l’a dit 
cent fois, l'argent qu'on dépensera en égoûts, en soins d’hygiène, 
en propreté, on l'économisera sur les frais d’hôpitaux et l’on aura 
prolongé la vie humaine. A l’œuvre donc, messieurs les Conseillers 
municipaux: voyez où le choléra, cette année, fait le plus de victimes, 
n'est-ce pas dans les villes où les lois de l'hygiène sont le moins 
bien observées ? | 

Je n’aime pas, en général, l'intervention de l'autorité, quand il s’agit 
d'intérêts que nous pouvons gérer nous-mêmes; mais, dans le cas qui 


| 
| 
| 


— 185 — 


nous occupe, il est bon que les villes prennent l'initiative, quelles se 
procurent les terrains nécessaires, qu’elles y amènent des cultivateurs en 
leur offrant des avantages particuliers et temporaires. Rien n’est conta- 
gieux comme l'exemple et comme la pratique : on l’a vu à Genevilliers, 
près de Paris; quelques maraïchers intelligents ont ouvert la voie, 
d’autres ont suivi, entraînés par leur intérêt et par la vue des faits; 
aujourd’hui, la population y a quintuplé depuis cinq ans et la valeur 
locative de terrains presqu’incultes, a monté de 90 fr. à 4,500 fr. 
l’hectare. 

Je me résume : il n’y a pour les grandes villes qu’un moyen simple, 
pratique et économique d'utiliser les eaux dégoût, c’est de les déverser 
en proportion convenable et d’une manière intermittente sur des sols 
perméables et cultivés. Qu'on vienne visiter, sans parti pris, sans vues 
d'intérêt privé, les champs de Genevilliers et l’on se demandera com- 
ment, en 1885, il est encore tant de villes décimées par les maladies 
infectieuses, quand la nature leur offre un moyen simple et pratique 
d'assurer la propreté de nos habitations et, par suite, la longévité 
humaine. 


M. le Président. — Nous remercions M. Joly de son intéressante 
communication. 


M. Palacky. — Y a-t-il quelqu'un ici qui pourrait nous expliquer les 
expériences qui ont été faites à Milan ?(1) Sans doute nous profiterons des 
expériences de Genevilliers, mais tous les terrains ne se prêtent pas au 
même systême. À Prague, par exemple, nous n’avons pas de plaine 


(1) M. le Prof. Dr. GAETAN CANTON, directeur de la & R. Scuola superiore di 
agricoltura » à Milan, a bien voulu, à notre demande, nous fournir les renseigne- 
ments suivants, ce dont nous le remercions ici publiquement : 

“ La ville de Milan, située au milieu d’une large plaine arrosée depuis long- 
temps par de nombreux canaux, a su, depuis longtemps aussi, utiliser ses eaux 
d’égoût pour l’arrosement des prairies d’hiver (marcite), qui donnent de huit à 
neuf coupes par an, avec un produit de 1000 à 1200 qx. d’herbe par hectare. 

« Le Nirone, le Seveso, le Lambro méridional et le Nedefosso, entrent dans la ville 
par la partie la plus élevée, formant sous les rues et sous les maisons un réseau 
compliqué de petits canaux, destinés à recevoir la plupart des matières fécales et 
des résidus inutilisables des industries. 

« Tous ces petits canaux se réunissent avant de sortir de la ville dans un grand 
canal qu’on appelle Vefabbia (Vehet alibi). Hors de Milan, la Vetabbia va arroser 
les prairies d'hiver qui, à cause de cela, peuvent se passer d’une fumure directe 
quelconque, quoique à prèsent, la Vetabbia ne reçoive pas autant de matières 
fécales et de résidus des industries qu'autrefois. 

“ Les eaux de la Vetabbia perdent de leur faculté fertilisante d'autant qu’elles 
s’éloignent de la ville et qu’elles ont déjà arrosé des prairies. 

« Le prix de fermage pour les fermes qui jouissent des eaux de la Vetabbia près 


— 186 — 


d'irrigation ni surtout de gravier. Les roches ne se décomposent pas 
assez vite, de sorte que je crois que l’on ne peut pas y employer ce 
système. Nous possédons de la chaux, mais nous n’avons pas du déchet 
de charbon, comme à Paris et à Bruxelles. 

À Rastadt on emploie, depuis une trentaine d'années, le système japo- 
nais des tonnages mobiles empotés. C’est celui qui a produit le meilleur 
résultat financier. 

Chez nous, nous avons mesuré tous les terrains qu'on peut irriguer et 
ils ne suffisent pas. Il faudrait un système en rapport avec les besoins 
de la localité. 


M. de Gerlache. — Dans le pays de Waes, nous faisons transporter 
dans les campagnes tous les déchets de la ville, non seulement les 
matières fécales, mais les mauvaises eaux des usines, des établissements 
industriels et on les utilise à la facon de Genevilliers. 

Ces matières sont enlevées par des entrepreneurs qui les transportent 
comme engrais et les livrent à l’agriculture et surtout aux jardiniers 
maraîchers qui les emploient. 

Au moment des découvertes de Pasteur il y a eu de l’affolement. Les 


de Milan, est de 500 à 550 fr. l’hectare et l’ensemble des impôts de 110 fr, éga- 
lement par hectare. 

« Ces fermes ne produisent avantageusement que de l’herbe, n’ont que des 
vaches, quelques chevaux pour les transports et bien peu de bœufs. 

« Un exemple expliquera mieux ce que je viens de dire: 

« Une ferme, à Gudo Visconti, de 58 hectares et dans les conditions susdites, 
compte: 


Prairies d'hiver (marcite), hectares . . . 33.3 


id; + Ven’assolement 1.100 MMA EN POSNIES 
Blé‘ebmaiss tn PIN ES IEP ARNO 
Bâtiments? 05 1020 Me LAMPE TERRE 


Total hectares 58 


« Dans cette ferme se trouvent 83 animaux : 73 vaches, 4 bœufs et 6 chevaux. 

« Le produit annuel en lait est de 34 hectolitres par vache, qu’on achète en 
Suisse et que l’on paye de 600 à 700 fr. par tête. 

« À cette ferme on produit: 


Lait : 2500 hectolitres vendus à 15 fr. l’hect, . . .fr. 37.500 
On vend: 900 quintaux de foin à10 fr. . . . . . » 9000 
90 hectolitres de blé à 20 fr. . . . . . » 1.800 
421 hectolitres de maïs à 15 fr. . . . . n (6.319 
Del'herbe pour Le .  : CONS 


« Le fumier produit 1370 tonnes évaluées à 6 fr. la tonne. . 
« Les dépenses, sans compter les impôts, sont calculées ordinairement au tiers 
du produit brut. » 


RTE 


voisins craignaient d’être empestés, mais on est un peu revenu de ces 
idées. 

Je ne connais pas M. Boëns. Il réclame un vœu du comité exécutif du 
Congrès. C’est une question très délicate. Les études du genre de celles 
qu’il a faites sont toujours envoyées à des commissions d'ingénieurs, ou à 
la commission supérieure des travaux publics. Cela entraîne des len- 
teurs, mais c’est une garantie nécessaire. 

Le gouvernement n’autoriserait pas une Administration publique à 
consacrer des capitaux considérables dans une affaire s’il n'y a pas des 
hommes spéciaux, des ingénieurs, des hommes de science et de pratique 
qui ont étudié le système que vous voulez employer. 

Je crois, que la publication dans les mémoires du Congrès, du travail 
de M. Boëns est le maximum de ce que le Congrès peut faire. Il nous 
faudrait des mois, des années d’études avant de connaître et de pouvoir 
recommander son système. Je ne parle pas contre son procédé, mais je 
me place au point de vue du règlement du Congrès. 


M. Mertens. — J’abonde dans le système de l'honorable M. Joly, 
d'autant plus que, pour les grandes villes, il s’agit dans l’espèce d’une 
énorme dépense. 

À Anvers nous dépensons 670,000 fr. pour le service de la régie, c’est 
à dire, pour l’enlèvement des boues, des immondices. 

Nous avons le système français Talard. 

Les vidanges s'enlèvent en plein jour, le produit de ces vidanges ne 
paie que la moitié du coût annuel de ce service. Chaque ville doit néces- 
sairement agir selon la configuration de son terrain. Nous serions fort 
heureux de rencontrer un système qui allégerait cette charge annuelle. 

Sur le chiffre de 670,000 fr. il y aurait moyen de créer une annuité 
pour trouver un service mécanique. 

La ville de Bruxelles qui a une altitude supérieure à celle de certaines 
parties de la Campine, ne pourrait-elle, par une simple canalisation, y 
conduire ses eaux de sewage ? 

Les grandes villes doivent se débarrasser au plus vite des eaux qui leur 
sont défavorables par leurs émanations et les conduire au loin où elles 
pourraient, dans la bruyère, s’évaporer et y laisser un dépôt fertile. 

Quand à faire insérer dans les Actes du Congrès, le plan de M. Boëns, 
je n’en vois pas l'utilité, le plan n’est pas même fait sur échelle. Rien n’y 
est indiqué. C’est un essai fort louable mais qui doit avoir la garantie de 
l'expérience acquise. Nous devons nous placer sur le terrain de la pra- 
tique sans laquelle on ne fait rien de bon. 

Nous avions à Anvers, au 31 décembre 1884, 26070 maisons, presque 
chaque maison a sa fosse. L’Administration est convaincue que, dans 
l'intérêt de l’agriculture, pour que la gadoue ne se perde pas, ces fosses 
doivent avoir une certaine contenance. 


— 188 — 


Je viens de voir à l'Exposition universelle, dans le compartiment de 
Bruxelles, un rapport sur le service de la régie. 

À Bruxelles, il paraït qu’il n’y a que 78 fosses à gadoue, tout le reste 
passe dans les égoûts. 

À Anvers rien ne passe dans les égoûts en fait de gadoue. 

En 1852, sur les 13626 maisons existant à Anvers, il n’y en avait que 
1368 dépourvues de fosses. De 1853 à 1884 inclus, il a été construit 
13578 nouvelles maisons sans compter les reconstructions totales ou par- 
tielles. Le nombre des maisons dépourvues de fosses, doit donc être nota- 
blement diminué. 

Pour obtenir une solution pratique de la question on pourrait l’intro- 
duire au programme du prochain Congrès de botanique et demander aux 
membres de chaque pays, d'expliquer d’une façon succincte et claire, 
comment les grands centres se débarrassent de leurs eaux d'égoût 
(eaux de sewage) de la gadoue et des balayures des rues en été 
et en hiver. 


Dans nos Chambres législatives, une pétition a été présentée en 1853, 
concernant les mesures qui pourraient être adoptées pour empêcher la 
perte des engrais de ville et pour garantir en même temps l'intérêt de 
la salubrité publique. 

Une enquête très-intéressante à été faite à ce sujet, elle est reproduite 
dans les Annales Parlementaires (voir Chambre des représentants 30 jan- 
vier 1854 et mars 1854 (N° 121) Engrais des villes.— Rapport page 1125 
à 1143 inclus). L'enquête a été faite par M. Schmit, professeur agrégé 
à l’université de Liége, qui a recueilli tous les renseignements sur 
86 localités, les plus importantes de la Belgique. En prenant ce travail 
pour base, il serait facile de le continuer jusqu’à l’époque actuelle. 


M. Joly. — Malheureusement l'opinion publique n’est pas suffisam- 
ment éclairée à cet égard. Nous pourrions émettre un vœu dans ce sens. 

Nous devons tous être convaincus que la culture à l’eau d’égoût peut 
se faire pour la culture maraïchère. Il faudrait dire que le Congrès, con- 
vaincu que la culture à l’eau d'égoût est à la fois avantageuse au point 
de vue des industries particulières, émet le vœu que les Administrations 
communales etautres dirigent leurs études vers l'extension de ces cultures 
pour l’amélioration des champs dans les abords des villes. 

Les villes ont toujours des champs, de grandes cultures, des jardins, 
on ne peut émettre qu’un vœu général qui prouve qu’on s’est occupé de 
la question. 


M. le Président. — Voici le texte de la proposition de M. Mertens : 

« Le Congrès émet le vœu, qu’au prochain Congrès, chaque ville inté- 
ressée envoie des délégués chargés d'indiquer les moyens qu’on emploie 
dans ces villes pour se débarrasser de la gadoue et des balayures. » 


— 189 — 


M. Ch. van Geert propose de compléter le vœu en y ajoutant: « tout 
en venant en aide aux grandes cultures. » 
Ces deux propositions sont elles adoptées ? (Adhésion unanime). 


M. le Président. — Nous passons à la question XV : Za culture des 
champignons utiles est-elle susceptible de s'étendre? On demande un aperçu 
des espèces comestibles les plus communes et des espèces vénéneuses qui leur 
ressemblent le plus? (1) 


M. Wesmael. — Depuis quelque temps, en Belgique, on fait usage 
comme litière des chevaux de nos grandes compagnies de tramways et, 
dans certaines villes, pour les chevaux de la cavalerie, de la tourbe qui 
nous est expédiée de Hollande. Cette tourbe, pour la débarrasser de 
l'énorme quantité d'eau qu’elle recèle au moment de l'extraction, est 
soumise à l’action de puissantes presses hydrauliques et expédiée 
sous forme de cubes. Au moment où elle arrive, elle est donc comple- 
tement sèche. Il y a utilité à la conserver à l’abri des eaux pluviales, 
de manière que la dessiccation soit complète quand on l’emploie à l'écurie. 

On la dépose à la surface du sol à l’état de morceaux de la grosseur 
du poing, et par le piétinement des chevaux, quelques heures après, 
cette tourbe est réduite à un état analogue à celui du tan. Elle à la 
propriété d’absorber des matièrés liquides, d'emmagasiner de grandes 
quantités d'ammoniaque et elle constitue un engrais des plus riches en 
matières azotées. 

Ce qu'il y a de remarquable, c’est la facilité avec laquelle on crée des 
champignonières à l’aide de la tourbe en question, alors qu’elle a passé 
par les écuries. 

Nous avons un horticulteur à Mons qui, dans une serre de 35 à 40 
mètres de longueur a, le long des murs, installé une couche. Il est curieux 
de voir l'énorme quantité de produits que l’on récolte tous les jours, et 
la grosseur des champignons. Ce qu’il y a de plus frappant, c’est le peu 
de temps qui sépare le dépôt du blanc du jour de la première récolte. 
Nous avons constaté qu'elle était obtenue en 4 semaines, tandis que, 
quand on emploie du fumier de cheval ordinaire, ce laps de temps est 
beaucoup plus considérable. 

Dans la confection des couches à l’aide du fumier de paille, comme 
on la pratique en Belgique, on à l'habitude de recouvrir la meule d’une 
couche de terre d’une épaisseur de 2 à 3 centimètres, opération qui est 
complétement inutile dans la culture de l’Agaric comestible à l’aide du 
fumier de tourbe. 

Ce fumier se vend à des prix très-bas. La Société des Tramways 
‘bruxellois nous l’expédie à raison de un fr. les 100 kilos. Cent kilos 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires »le mémoire de M. C. ROUMEGUÈRE, p. 1-8. 


— 190 — 


ont, à peu près, un mètre cube en volume. Dans ces conditions on peut 
établir des champignonières à des prix excessivement minimes, 

D'autre part, lorsque la culture du champignon est terminée, nous 
sommes en présence d’un excellent engrais, pour la petite comme pour 
la grande culture. 

Cet engrais de tourbe est excessivement précieux quand on l’emploie 
comme couverture, comme paillis pour les semis et surtout pour la 
mosaïculture. 

Le sol ne se dessèche pas, les racines des plantes à feuillage se 
développent très bien. 

Je me résume en disant que, au nombre de toutes les matières 
employées jusqu’à présent pour la création des couches à champignons, 
la substance la plus convenable est le fumier de tourbe. 


M. Baltet. — J’ajouterai que ce fumier est excellent pour les plan- 
tations d'arbres, surtout dans les terrains secs et sablonneux. 

Dans nos pépinières nous avons un fond tourbeux. Nous ne mettons 
pas de fumier, c’est la tourbe qui, mélangée à des terres nouvelles, de 
natures différentes, alluvions, sables, calcaires, forme le chevelu des 
arbres de la pépinière. De sorte que, lorsqu'on a planté des arbres, cet 
engrais est des plus précieux pour aider à la formation des jeunes che- 
velus : c’est un emploi qu’il faut propager. 

Quant aux champignons inédits pour la consommation, leur propa- 
gation en sera lente, témoins l’Igname, le Cerfeuil bulbeux, parfaitement 
inoffensifs et qui ont si peu de succès sur nos marchés. 


XVIIIe Question. — Quels sont les remèdes employés jusqu'ici contre 
les ravages du Phyllozera et quels résullats ont-ils donnés? 


M. Baltet. — J'ai été délégué pour étudier différentes opérations et 
spécialement le greffage de la vigne de Bordeaux à Nice, de Dijon à Mar- 
seille, etc. J'ai parcouru tous les vignobles. Il y a trois systèmes princi- 
paux pour détruire le phylloxera. D'abord le sulfure de carbone, le 
sulfocarbonate de potassium, procédés coûteux. Les syndicats de proprié- 
taires, les administrations avec des subventions du ministère ou des 
administrations départementales, peuvent en faire la dépense tout en 
agissant énergiquement. Comme il est difficile d'atteindre un insecte 
invisible, on recommence l'opération l’année suivante. 

Un autre moyen de destruction du phylloxera, mais qui n’est appli- 
cable que dans certaines situations, c'est la submersion. Voilà pourquoi 
le Midi réclame avec tant d’insistance la dérivation du Rhône et l’éta- 
blissement de canaux qui puissent fournir de l’eau à certaines époques 
déterminées. Il faut avoir de l’eau à sa disposition, renouveler l'opération 
et amener des engrais spéciaux, car ce lavage pourrait finir par fatiguer 


— 191 — 


le sol et enlever les principes fertilisants utiles à la vigne ou nuire à la 
saveur du raisin. 

Un dernier procédé, plus praticable, se résume dans la plantation de 
cépages qui résistent à l'ennemi souterrain et se prêtent au greffage de 
nos cépages vinifères. Les espèces américaines issues des Vitis cordifolia 
(var. riparia) et monticola (var. rupestris) ont fourni ces types. Il y a eu 
des déceptions au début, il a fallu essayer beaucoup de plantes avant de 
connaître celles qui pourraient le mieux réussir. Les déceptions sont sur- 
tout venues de ce qu’on à fait des greffages sur des boutures, sur des 
rameaux, dans des terrains insuffisamment préparés. La plante est alors 
devenue rachitique. Mais l’accroissement en superficie, des terrains 
cultivés au moyen de plants américains, prouve la valeur du systéme. 

Après 5 ou 6 années de greffage sur les plants choisis dans les espèces 
résistantes, tout va bien et une seule récolte indemnise le vigneron des 
sacrifices qu’il a faits depuis le moment de la plantation. 

La présence du bourrelet de la greffe sur l’arbuste contribue à la 
concentration sur le branchage des éléments atmosphériques. Il en résulte 
plus de fertilité au cep et plus de qualité au vin. On a reconnu, en outre, 
que beaucoup d'espèces qui ne vivraient pas franches de pied, réussissent 
au greffage. Donc par la greffe on pourra varier la nature du vin. 

Dans les pays menacés, un moyen de lutter contre le mal, c’est de se 
syndiquer. Que les vignerons forment une fédération de finance et de 
travail ; la mutualité et l’union leur permettront de lutter avec succès. 

Si l’horticulture a souffert de l’invasion phylloxérique, nous n’en 
sommes pas moins reconnaissants à l’État et à toutes les administrations, 
d’avoir secondé les propriétaires pour ramener les vignobles à leur 
ancienne prospérité. 


M. Mertens. — N’a-t-on pas trouvé un ennemi qui puisse dévorer le 
phylloxéra ? 


M. Baltet. — Pour détruire un animal invisible, il faut un ennemi 
invisible: c’est ce qui est difficile à trouver. 

Lorsqu'on nous apporte un végétal d’un pays étranger, si l’on n’a pas 
importé son ennemi, nous pourrons vivre longtemps sans craindre de le 
perdre. 

Mais le phylloxera a, en une année, produit des millions d'enfants. La 
nature fournira son ennemi, peut-être tout ce que l’on a dit à ce sujet ne 
s’est pas encore confirmé. | 


M. Mertens. — Il y a encore, dans cet ordre d'idées, la plantation 
d’une plante intermédiaire, 


M. Baltet. — À diverses époques, il a été question d'introduire dans 
les vignobles des plantes à odeur forte. Je les ai essayées, mais le résultat 


— 192 — 


n’a pas été concluant. J'avais également supposé qu'en en fouissant des 
rameaux verts de sapin, le phylloxera disparaitrait. Les effets de ce 
procédé n’ont pas été les mêmes partout; on l’a abandonné. On a essayé 
d’entourer les vignes de sable à la suite des cultures luxuriantes dans 
les sables marins d’Aigues Mortes ; on a dû y renoncer. 

Je me résume : quiconque visiterait les pays vignobles frappés par le 
fléau pourra se convaincre des efforts tentés par les intéressés. Au début 
de l'invasion, appliquer énergiquement les remèdes insecticides; recourir 
à la submersion quand les circonstances le permettent, enfin si la vigne 
succombe, chercher une dernièrs planche de salut dans la greffe des 
cépages sur plant résistant. Ce systême prend chaque année une exten- 
sion considérable. J'ai le droit d’en être fier, car le premier j’ai conseillé 
l'emploi du Witis riparia, le plus répandu aujourd’hui, au titre de 
porte-grefte. 


XIX. — De l'opportunité de la création, dans les centres horticoles, de 
sociétés de prévoyance mutuelle et d'épargne en faveur des jardiniers et de 
leurs familles. 


M. Palacky. — Je désire appeler votre attention sur le mode de crédit 
agricole qui existe en Bohème. Tout possesseur d’une terre est, par ce 
J'ail même,membre d’une société de crédit mutuel dans le district où il a 
sa terre. Ce sont ses concitoyens qui décident de la limite du crédit. Tous 
les propriétaires choississent un Comité qui est chargé de distribuer 
l’argent. Ces sociétés, qui sont au nombre de 300 environ, réescomptent 
dans les grandes banques du pays. Elles ont un point d’appui dans la 
banque centrale du crédit foncier de Bohème. 

Cette manière de procéder est une solution d’un problème économique 
très difficile, dans le sens le plus large et le meilleur. Tout propriétaire, 
par le fait même qu’il possède, a donc droit à un crédit que ses propres 
concitoyens lui accordent et il choisit lui-même ses juges. 

Les sociétés disposent d’un fonds considérable: vingt deux millions de 
francs. Elles distribuent aussi l’intérêt de ces fonds, mais la chose essen- 
tielle c’est que chaque propriétaire a droit au crédit. S'il est mauvais 
créancier, les censeurs, que les propriétaires choisissent, le lui retirent. 

Ces sociétés nous ont rendu de grands services, dans la crise actuelle 
surtout, dans la crise sucrière de l’année passée qui a profondément 
atteint mon pays. Chaque année on doit recevoir 20 à 30 millions de 
francs d'impôts sur les betteraves. Or, vous savez ce qui s’est passé l’année 
dernière. Ces sociétés ont empêché bien des faillites et de la disette. 

La philantropie recommande cette solution. Si en Belgique tous les 
cultivateurs formaient des associations mutuelles de ce genre, je ne 
doute pas qu’ils s’en trouveraient très bien. 


ART TT SE 


— 193 — 


M. Baltet. — M. Bernard se proposait de traiter la question de 
l'opportunité de la création de Sociétés horticoles de prévoyance mutuelle. 

Jusqu'ici, il n'y a pas beaucoup de ces sociétés, elles seraient cepen- 
dant très-utiles. On pourrait en examiner le fonctionnement et le régler 
d’après ce qui se passe dans les sociétés ouvrières. Il y à beaucoup de 
sociétés de secours mutuels qui embrassent toutes les classes de tra- 
vailleurs. Il y a les caisses d'épargne, puis les corporations de métiers, 
de professions. Nous avons des corporations de jardiniers, de vignerons, 
de laboureurs. Elles ont différents titres : St-Fiacre, St-Vincent, S'-Éloi, 
etc. Souvent ces corporations n'ont qu’un but, célébrer la fête annuelle, 
puis assister aux enterrements d’un des affiliés ou d’un membre de sa 
famille. l 

J'avais eu le projet d'organiser une société entre les jardiniers de mon 
pays, mais les entraves administratives d'alors m'ont arrêté, Je n’ai pas 
besoin de dire que ces associations doivent être distinctes en tous points 
des sociétés et comices agricoles ou horticoles. Le but n’est plus le même 
et la caisse d'épargne et de prévoyance ne doit pas être soupconnée 
de pouvoir servir à un autre usage. 

Dans l'industrie, il y a beaucoup de risques, la vie est moins longue, 
les besoins y sont grands et les accidents de travail assez fréquents. La 
culture offre plus de sécurité. Les jardiniers vivent plus longtemps et 
sont moins souvent malades. A vec une cotisation relativement faible, on 
pourrait intéresser et le chef de famille et les autres membres (femmes, 
vieillards, orphelins) suivant les statuts qui seraient adoptés. 

D'après l’organisation actuelle de certaines sociétés, le médecin est 
appelé gratuitement au chevet du malade, et les médicaments, les four- 
nitures de pharmacien, sont distribués soit gratuitement, soit moyennant 
une faible rétribution si la dépense dépasse les limites habituelles; ces 
conditions sont acceptables, 

Il y aurait encore quelque chose à prendre dans nos corporations de 
vignerons, ce sont les journées de travail en cas de maladie, pratiquées 
par les sociétaires. Lorsqu'un jardinier tomberait malade, ses voisins, 
ses confrères, pourraient venir faire sa besogne suivant leur temps et 
suivant leur nombre. Ce serait là une coopération humanitaire qu’il 
importerait beaucoup d'établir. 

La somme versée par chacun constituerait un petit capital qui, à un 
certain âge, pourrait servir, soit à doter la fille à son mariage, soit à aider 
le garcon à faire son service militaire ou à créer un établissement de 
jardinage. Habituellement, quand les jardiniers placent leurs enfants, 
ils leur achètent un terrain, les fournissent de matériel. Le versement 
mensuel formerait, par conséquent, un petit capital au bout de quelques 
années, 20 ans par exemple, ce qui ne serait pas à dédaigner. 

La pension de retraite a été introduite dans nos sociétés des sapeurs- 


15 


— 194 — 


pompiers, dans les sociétés de secours mutuels. La retraite est basée 
sur l’âge du sociétaire et sur la durée de son sociétariat. Le règlement 
des sociétés industrielles attribue volontiers un franc par jour. La 
quotité a son importance, alors que le sociétaire arrive à l’âge où l’on 
est fatigué, rompu par le travail et qu'on n’a plus la force de se créer 
des moyens d’existence. 

Voilà quelques données générales sur l’organisation des sociétés de 
prévoyance. Tout se perfectionnerait. Au bout de quelques années on 
verrait s’il n’y a pas lieu de modifier les statuts. 

Il conviendrait donc d'émettre un vœu au point de vue de l'utilité maté- 
rielle, morale et philanthropique qu’il y aurait d'organiser des caisses de 
prévoyance en faveur des travailleurs de la terre, en y intéressant d’une 
facon toute spéciale les vieillards, les veuves et les orphelins. 

XXIe Question. — Tarification el condilions des envois horticoles 
par chemin de fer(). 


M. le Président. — Cette question a été traitée dans un Congrès, à 
Paris, au mois de mai. 


M. Baltet. — Nous demandons toujours que les végétaux, les produits 
vivants voyagent rapidement. Je ne dirai pas par les trains express, 
mais il y a des vitesses moyennes, c'est la petite vitesse hâtée ou la 
grande vitesse un peu ralentie. Ici, on dit Tarif n° 1, Tarif n° 2. Les 
plantes devraient voyager comme les animaux, car ils ont l’un et l’autre 
besoin d’arriver en hâte à leur point de destination. 

Demander que les prix ne soient pas élevés, c’est la condition réclamée 
par tout le monde; mais il s’agit surtout d'éviter des lenteurs dans les 
points de bifurcation, dans les transits. Il faudrait que les wagons com- 
plets jouissent d’une réduction du prix de transport. On taxe les arbres en 
l'e catégorie, et la moitié en plus; cette majoration est onéreuse. Un 
chargement complet est réduit à la 3° ou à la 4° catégorie ; mais le proprié- 
taire, qui n’a qu'un petit lot d'arbres, ne peut envoyer un wagon complet. 
Quant à songer au groupement de lots de ce genre, il faut y renoncer. 

La Belgique a obtenu beaucoup de satisfaction sous ce rapport. Pour 
les expositions elle fait voyager ses produits en grande vitesse et ne 
paie que pour la petite vitesse. Nous voulons les mêmes avantages. On 
a dit avec raison qu'il est à désirer que les autres puissances imitent la 
Belgique pour les facilités de transport, 

En France, depuis la guerre de 1870, quand nous expédions des 
végétaux en Allemagne, nous sommes obligés de payer d'avance, le 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » les mémoires de MM. À. AMELIN, 
P. 132-134, et An, D'HAENE, p. 348-392. 


OR EE 


L ét td “tie Ms. à à nn. À ot ons à 


— 195 — 


transport jusqu’à la frontière, ce qui ne se faisait jamais auparavent, 
Généralement c’est le destinataire qui paie le transport. 

Pourquoi inventer un système vexatoire pour l'expéditeur et qui ne 
peut qu’entraver les affaires ! 

Il serait vraiment à désirer que les diverses compagnies puissent 
établir un tarif uniforme ; un Congrès international aurait ensuite plus 
de force pour réclamer une unification générale entre les différents 
Etats. 


M. Joly. — Il y a une commission constituée à Paris pour la solution 
de cette question. J'ai l'honneur d’en être le Président. Nous attendons 
M. Léon Say pour pouvoir arriver à des mesures d'exécution. Comme il 
a beaucoup d'influence (il est directeur du chemin de fer du Nord), nous 
ne désespérons pas d'aboutir, non seulement sous le rapport du prix, mais 
aussi au point de vue de la rapidité du transport et de la délivrance des 
produits. 

On n’a pas idée de la barbarie avec laquelle les choses ont lieu. Nous 
expédions beaucoup de plantes d'Algérie sur Paris et sur d’autres villes 
de France. Un envoi arrive à Alger, il y reste un jour, il faut le mettre 
sur le navire. À Marseille nouveau transbordement, nouveau délai. Il y 
a un progrès immense à réaliser à cet égard. C’est le vœu de la commis- 
sion qui est établie à Paris. Quand nous nous réunirons, j'espère que cette 
question viendra à l’ordre du jour et qu’on aboutira à un résultat. 

Les fruits et les légumes jouent un très graud rôle dans l'alimentation, 
. surtout aujourd’hui qu'il n’y a plus de saisons et qu’on mange dans le 
Nord les fruits du Midi, deux mois avant qu’on en ait soi-même. La 
question de la délivrance des produits acquiert, par le fait même, une 
importance considérable. 

Il y à une maison de Turin qui prend tous les produits qu’elle peut 
trouver dans toute l'Italie. Cette maison envoie quelquefois 50 wagons 
à Saint-Pétersbourg et dans d’autres villes du Nord. Elle a des wagons 
complets qui passent par le St-Gothard. 

Nous avons encore beaucoup à faire au point de vue du transport des 
fruits et des légumes, mais nous avons le ferme espoir que, dans un 
avenir prochain, des progrès seront réalisés dans cet ordre de faits. 


M. Baltet. — Le transport des produits horticoles cueillis a déjà subi 
quelques améliorations. Les fleurs de Nice voyagent maintenant par 
trains rapides dans des conditions très favorables. Pour les fruits et 
les légumes il y a des sections sur la ligne de Lyon où le prix est 
relativement minime. 

La Belgique a un système de transport très-avantageux, signalé par 
M. Rodigas, dans les bulletins du Cercle d'Arboricullure. 

Il y a des régions en Belgique qui produisent beaucoup de fruits, 


EX 


Tongres notamment. On en expédie beaucoup en Angleterre. On 
indique aux stations des producteurs les prix de vente, les jours de 
marché de Londres, les jours d'embarquement et le dernier cours de 
vente. Le ministère de l’agriculture qui a installé, dans ses bureaux, 
une division des chemins de fer, ne fournit-il pas aux producteurs des 
paniers d'emballage, pour les fruits et légumes transportés, avec retour 
gratuit ? 

Voilà de l'administration paternelle, tant au point de vue des com- 
pagnies, qu’au point de vue des producteurs. Tout le monde y trouve 


son compte. 
M. le Président. — Je remercie les orateurs qui nous ont fourni des 


éclaircissements sur cette question. 
La séance est levée à 5 heures. 


te mit de dt de 


ess de 


SECTION DE CULTURE MARAICHÈRE ET FRUITIÈRE, 


Séance du 5 août 1885. 


Présidence de M. ParaAcKy, professeur à l'Université de Prague. 


M. H. De Bosscnere, secrétaire du Congrès, remplit les fonctions 


de secrétaire. 


Sommaire : X7V"* question du programme : Quels sont les fruits et 
les légumes dont la culture peut s’étendre et être avantageuse à la consommation 
intérieure et à l'exportation ? Installation de halles dans les ports d'embarquement 
pour la vente directe, par les producteurs, de légumes et de fruits d'exportation, 
par MM. H. MieT, BALTET, GILBERT, NIEPRASCHK, É. DURAND, DELRUE- 
SCHREVENS, THEYSKENS, HANSEN, TYMAN, PALACKRY, FAUVEL. — XVI"* question 
du programme : Nos méthodes de culture des arbres fruitiers sont-elles suscepti- 
bles de se perfectionner? par MM. BALTET, MILLET. 


La séance est ouverte à 9 1/2 heures. 


M. le Président. — Appelé à l'honneur de présider cette séance, 
je viens vous en remercier au nom de mon pays, dont je suis le représen- 
tant parmi vous et que tant de liens fraternels unissent depuis des siècles 
à la Belgique. 

La question XIV, dont nous abordons la discussion, est ainsi conçue : 

« Quels sont les fruits el les légumes dont la culture peut s'étendre et 
être avantageuse à la consommation intérieure et à l'exportation? Jnstal- 
lation de halles dans les ports d'embarquement pour la vente directe par des 
producteurs de légumes et de fruits d'exportation (). » 


(1) Voir aux « Rapports préliminaires » les mémoires de MM. DELRUE- 
SCHREVENS, P. 15-19, F. BURVENICH, p 247-256, et A. AMELIN, p. 257-258. 


— 198 — 


M. H. Millet. — Les fruits dont il faut surtout recommander la 
culture sont les beaux et les bons fruits de commerce. Si on me deman- 
dait quels sont les fruits que l’on doit cultiver, je donnerais le conseil 
de visiter d’abord les exploitations et de voir quelles sont les variétés 
qui produisent, dans chaque endroit, les plus beaux fruits et les plus 
demandés par le commerce. C'est-à-dire, je conseillerais d'étudier les 
fruits locaux puis, de faire un choix parmi les plus beaux et les meil- 
leurs fruits, et d’en faire l'essai dans les différentes localités; car il est à 
remarquer que certains fruits viennent parfaitement dans telle localité et 
y sont d’un excellent rapport, qu'ils soient cultivés en plein vent, ou en 
espaliers, tandis que, plantés dans d’autres localités, ils ne réussissent 
pas. Il y a là une question d'expérience qui nous force à recourir aux 
connaissances spéciales des personnes qui s’occupent de ces plantations 
dans chaque localité. 

Par exemple, dans le pays de Tournai, certains fruits viennent admi- 
rablement en plein vent, tandis que dans d’autres localités, malgré tous 
les soins, ils ne réussissent bien qu’en espalier, et même à très bonne 
exposition. 

J'ai vu à Liège d’admirables poiriers (Beurré d'Hardenpont), des 
arbres gigantesques qui, en plein vent, donnent des fruits que vous 
n'obtiendriez peut-être pas en espalier à Anvers, ou dans d’autres con- 
trées. Par conséquent nous ne pouvons dire d’une facon générale : cul- 
tivez tel ou tel fruit. Nous devons d’abord examiner ce que la nature 
nous donne dans les diverses localités. Faisons ensuite notre choix 
parmi ces variétés, et essayons-en de nouvelles. Parmi celles-ci j’ai cru 
bien faire de vous apporter quelques échantillons d’un fruit qui réussit 
admirablement chez nous, qui est d’une fertilité extraordinaire et qui 
est mür déjà depuis environ 15 jours : voici ces échantillons. Je dois 
vous faire remarquer cependant que ces fruits n’ont pas acquis leur 
plus grande grosseur. 

Voici pourquoi. Ce sont les produits de pommiers greffés sur francs 
âgés seulement de 3 à 4 ans. De plus, ils sont cultivés en pépinière à 
l'ombre des autres arbres. Lorsque l'arbre est arrivé à un âge plus adulte, 
et qu’il est exposé parfaitement en plein air, les fruits sont de moitié plus 
gros, et de qualité supérieure encore. 

Cette pomme c’est le Comte Orloff, qui mürit du 20 juillet au 5 ou 10 
août. L'arbre est tellement fertile que nous sommes obligés d'enlever des 
fruits, même lorsqu'il se trouve en pépinière et qu'il est jeune. Tous les 
fruits que vous avez sous les yeux sont récoltés sur de jeunes arbres. Je 
vous conseille d'en faire l'essai car, à l'époque où mürit ce fruit, nous 
n'avons encore que quelques abricots et quelques pêches. 

Je recommande cette variété pour la culture en verger, comme nos 
Belles-fleurs, nos Court-pendues et d’autres variétés de ce genre, mais je 


— 199 — 


la recommande particulièrement pour la culture en buissons et sur franc. 

La grande fertilité de cette variété permet de la cultiver partout. J'ai 
fait des plantations en buisson, dans des sols ingrats, secs, arides, dans le 
pays de Verviers, de Spa, sur des montagnes et dans le schiste. Dans ces 
contrées, qui certes ne sont pas les plus favorisées du pays, on obtient 
des fruits splendides. Il faut encore remarquer la grande rusticité de cette 
variété. Pendant l'hiver de 1879 à 1880, qui a été si rigoureux, elle a 
résisté parfaitement. Tous les autres sujets ont été gelés. Le pommier 
Comte Orlof, ainsi que la Duchesse d'Oldenbourg n'ont pas été atteints. 

Je crois donc que nous pouvons, en toute confiance, conseiller de mul- 
tiplier les plantations de cette variété, 

Vous savez que la plantation des arbres fruitiers, au point de vue de 
la spéculation commerciale, est à l’ordre du jour et pour cause : elle est 
d'un rapport considérable lorsqu'elle est faite convenablement et que 
l’on sait choisir les bonnes variétés. 

Eh! bien, Messieurs, je vous engage beaucoup à cultiver le Comte 
Orloff en buisson, en haut-vent, dans tous les coins où vous pourriez 
planter un Seringat, un Lilas ou autre chose. Vous ne manquerez pas 
d'obtenir des résultats magnifiques. 

A l’époque où mûrit ce fruit, nous n’avons guère encore que le raisin 
de serre. 

Nous avons eu dimanche dernier un splendide banquet au Grand 
Hôtel. Nous a-t-on présenté une belle pomme, une belle poire? Non. Je 
crois donc que si nous faisions parvenir aux marchés des grands centres 
et des villes d'eaux, la pomme Comte Orloff qui mürit si tôt et qui est 
relativement bien fine, on en retirerait les plus grands profits. 

Il y a certainement beaucoup d’autres variétés de fruits qui sont 
recommandablés. Nous avons parmi nous des pomologues des plus 
distingués qui, je l'espère, voudront bien nous éclairer à ce sujet et nous 
aider de leurs conseils. 


M. Baltet. — Les variétés fruitières destinées à la consommation 
intérieure et à l'exportation doivent être de nature robuste, au double 
point de vue de la culture facile et rémunératrice, et de la docilité 
aux remaniements de l’emballage et du transport. La liste doit en 
être restreinte et cependant elle doit comprendre un nombre suffisant 
d'espèces, étant données les utilisations multiples de nos fruits. 

En voici quelques exemples. 

Porriers. — A côté des Williams, Duchesse, Louise-Bonne, Clairgeau, 
Diel, Amanlis, Mérode, Durondeau, si productives et tant demandées, il 
ne faut pas oublier les variétés suivantes qui ont également fait leurs 
preuves : 

Beurré Dilly et Dubuisson, bonnes poires d'automne, nées en Belgique ; 


— 200 — 


Beurré Lebrun très fertile, beau fruit allongé, d'origine troyenne, 
comme les trois variétés ci-après; 

Charles Cognée, arbre généreux, bon fruit d'arrière-saison, robuste en 
plein air; 

Charles-Frnest, joli arbre, joli fruit de novembre; 

Docteur Jules Guyot, véritable William, privée du goût musqué, 
arbre des plus généreux ; 

Délices Cuvelier, fruit belge, beau et bon; 

Doyenné de Montjean, sorte de Doyenné gris d'hiver; 

Duchesse de Bordeaux, arbre fécond, bon fruit d'hiver; 

Favorite de Clapp, la plus jolie, peut-être, des variétés de première 
saison ; 

Madame Treyve, c'est une poche remplie d'eau sucrée; 

Marguerite Marillat, arbre fertile, beau et bon fruit; 

Nouvelle Fulvie, bon fruit d'hiver, assez robuste aux intempéries; 

Olivier de Serres et Passe-Crassane, arbres trapus, excellents fruits 
d'hiver; 

Président Mas, fruit de bonne vente et de bonne qualité; 

Pierre Joigneaux, arbre des plus vigoureux, fruit beau et bon. 

PommiErs. — Les pommes les plus recherchées aux Halles sont les 
Calville blanc, Reinette du Canada, Reinette grise, Reinelle franche, 
Api rose, Belle-fleur, mais dès que les variétés ci-après seront plus 
connues, le consommateur et le négociant en fruits les réclameront tout 
autant : 

Astrakan rouge, arbre robuste au froid, joli fruit coloré, de premiere 
saison; 

Belle-fleur jaune, arbre pyramidal par ses formes et remarquable par 
sa qualité, le fruit mérite le nom de « Calville-reinette »; 

Baldwin, arbre très fertile, fruit tardif, coloré, rustique à l'exportation; 

Calville de St-Sauveur, pour basse-tige, d’une grande production; 

Cellini, arbre robuste, généreux, joli fruit strié, d'automne; 

London pippin, arbre ramifié, fécond, fruit beau à voir, bon à manger; 

Pippin de Parker, genre Reinette grise; arbre de production soutenue; 

Pippin de Sturmer, fruit ferme, juteux, tardif, lent à se flétrir; 

Reine des Reinettes, arbre fécond, joli fruit, de première qualité; 

Reinette Bauman, floraison demi-tardive, fruit coloré rouge sang, 
abondant; 

Reinette de Caux et Reinelte de Cuzy, arbres robustes, pour verger, 
bons fruits de consommation et de marché; 

Transparente de Croncels, arbre des plus vigoureux et des plus robustes 
au froid, beau fruit recherché pour les desserts et pour la fabrication des 
gelées ; 

Wagener, arbre productif, fruit coloré d'un goût agréable. 


— 201 — 


PRUNIERS. — La ÆReine-Claude et la Mirabelle, incomparables de 
qualité, n'empêchent pas le mérite des suivantes; 

Coë à fruit violet, beau fruit de maturité tardive; 

Des Béjonnières, presque l’égale des Reine-Claude et Mirabelle; 

Mirabelle précoce, bon petit fruit de marché ; 

Reine-Claude d'Althan, genre de Reine-Claude violeile; 

Reine-Claude d'Ecully, forme vigoureuse et exquise du type ; 

Tardive musquée, bonne espèce pour la table, la pâtisserie, le séchage. 


M. Millet. — J'ai signalé la pomme Comte Orlof. Il y a sans doute 
d’autres variétés de pommes et de poires très recommandables. Signalons- 
les; essayons-en la culture. 


M. Gilbert. — Dans cet ordre d’idées je me permettrai de recom- 
mander une pomme qui vient un peu plus tard, mais qui peut rivaliser 
avec le Comte Orlof. Elle est également d’une grande fertilité. C’est la 
Rose de Virginie. 


M. Millet. — La Duchesse d'Oldenbourg est également un fruit 
superbe, d’une production des plus abondantes. Il y en a encore bien 
d’autres: 

Je recommanderai notamment le Rambourg Papeleu, qui est un fruit 
admirable que l’on ne saurait trop propager. 


M. Niepraschk. — Il est bon de recommander ces variétés, mais elles 
ne peuvent pas convenir pour toutes les contrées, pour tous les pays. 
En Allemagne il y a également eu des Congrès de pomologie. On a dressé 
des listes d'espèces recommandables, mais elles ne peuvent servir que 
pour le milieu de ce pays. Pour le Nord et le Sud, il faudrait une autre 
liste. Dans les pays rhénans et à Cologne notamment, nous avons des 
collections de toutes sortes. Mais j'ai trouvé que quelques uns de ces fruits 
. recommandés ne venaient pas chez nous. Nous avons souvent de fortes 
gelées tardives dont il faut tenir compte. 

La Pergamotte Crassane, par exemple, n’a pas du tout réussi. Tous les 
arbres de cette espèce que j'avais en pyramide et en espalier ont été 
gelés pendant les derniers hivers rigoureux. Les arbres ne sont pas tout 
à fait morts, mais ils ne donnent que quelques mauvais fruits. Il faudrait 
donc dresser une liste d'apres les pays. 

Quant au Comte Orlof, je crois que nous l’avons chez nous sous le nom 
de Foxley's russian apple. Notre climat n’est pas propre à toutes les 
espèces de pommes, mais celle-là y vient très-bien. Je vous la recom- 
mande, elle a un bon goût et une odeur exquise. 

Nous avons encore une autre variété qui est peut-être déjà mûre 
maintenant et qui est excellente: c’est l'Astrukan. Je n'ai pas cette 
variété sur haute tige, ou en pyramide, mais sur cordon. Elle n’a jamais 


— 202 — 


souffert des gelées. Les arbres restent en bonne santé et tous les ans j'ai 
eu des fruits. 


M. Baltet. — À mon avis, les méthodes ne sont guère susceptibles 
de se perfectionner, mais c’est leur application qui demande às être 
examinée de près et à être perfectionnée. Il faudra toujours tenir compte 
des milieux où la plantation sera installée, examiner quelles sont les 
conditions de sol et de climat, s’enquérir des vents s'ils sont froids, secs, 
chauds, examiner s'il y a des brouillards, de la chaleur, etc. Il ne faut 
pas mettre, par exemple, des fruits d'hiver dans les terrains secs, où la 
sève s'arrête de bonne heure. En Algérie et dans le midi de la France, 
on ne pourrait avoir ni des pommes à floraison tardive, ni des poires 
d'hiver, alors que la sève s'arrête au mois de juillet. On doit-y planter 
des arbres précoces, abricotiers, cerisiers et autres fruits d'été. 

Ce côté de l'arboriculture, a-t-il été abordé par les auteurs ? Rarement, 

En examinant la condition dans laquelle on se trouve, il faut savoir 
si l’on doit appliquer les tailles longues, les tailles courtes, les formes 
buissonneuses ou plates. En Hollande on ne cultive pas comme en 
Espagne. On parle de traditions; c'est l'expérience de nos ancêtres, — 
il ne faut pas la confondre avec la routine. — Il conviendra d’en tenir 
compte dans une juste mesure en l'associant aux conséquences du 
progrès moderne. 


Quant aux fruits locaux il faut s’y attacher, non comme fruit, mais 


comme méthode de culture, en appliquant les perfectionnements de 
l’arboriculture. 

A ce sujet on ne peut qu'engager les planteurs à suivre les conférences, 
les Congrès, ete. C’est ainsi qu’on arrivera à un progrès sérieux. Il faut 
que les amateurs, les Sociétés d’horticulture et d’arboriculture étudient 
les fruits qui sont peu connus et les diverses méthodes de culture, pour 
les recommander quand ils donnent de bons résultats, de manière que 
tout y gagne, les producteurs, les consommateurs, et les industries 
auxiliaires de l’arboriculture. 


M. Durand. — En 1879-80, il y a eu un fait qui m’a semblé intéressant 
et qui s’est passé dans la province de Liége, J'ai eu l’occasion de remar- 
quer que dans la vallée de la Vesdre, dans la vallée de l’Ourthe, les 
pommiers ont été gelés complètement, tandis que dans les parties plus 
élevées ils ont résisté. 

Je demanderai si le pommier Comte Orloff a résisté dans les vallées 
au bord de l’eau. 


M. Millet. — Mes cultures ne sont pas au bord de l’eau, tant s’en faut, 
car à 300 mèétres de ma demeure le sol est de 15 mètres moins élevé que 
chez moi. Mes arbres ont été gelés parce qu’ils étaient vigoureux et sains. 
Ceux qui n’ont pas été gelés sont les arbres qui avaient été replantés, 


be. 


I 


— 203 — 


dont la sève s'était retirée avant l’arrivée des grands froids qui ont été 
précoces cette année-là. Les variétés Comte Orloff et Duchesse d’Olden- 
bourg qui ont résisté au milieu des autres, se trouvaient dans des condi- 
tions identiques. C’est ce qui me fait dire que ces variétés sont plus 
rustiques que les autres. Elles viennent de Russie. Nos Court-pendues, nos 
Belles-fleurs et d’autres variétés ont succombé, mais les deux pommiers 
dont je parle ont si bien résisté que je n’en ai pas perdu un seul arbre. 


M. Delrue-Schrevens. Je n'aurai que quelques mots à ajouter au 
rapport que j'ai eu l'honneur d'adresser au Comité organisateur. Il serait 
d’ailleurs superflu d'entrer dans de longues dissertations pour démontrer 
toute l'importance de la question que nous sommes appelés à examiner. 

Je ne me dissimule pas les difficultés qu'elle présente et les contesta- 
tions qu’elle peut soulever. En effet, le climat, le sujet, l'exposition et 
la nature du terrain exercent une influence si considérable sur la qualité 
des fruits, que des divergences d'opinion doivent nécessairement se 
produire quant à leur valeur et à leur qualité. 

Il serait donc téméraire de vouloir déterminer d’une manière générale 
et précise les variétés les plus recommandables. Je me suis borné à 
indiquer une quinzaine de variétés de poires que je considère de premier 
choix et qui pourront être multipliées et propagées sans crainte de 
déception. Ce sont : le Citron de Carmes, le Doyenné de Juillet, \' Epargne, 
le Beurré Giffart, le Bon chrétien William, le Beurré Dilly, le Beurré 
Degallait, le Beurré Durondeau, la Louise Bonne d'Avranches, le Beurré 
Dumont, la Fondante des Bois, le Beurré Diel, la Casteline, le Doyenné 
du comice et la Nouvelle Fulvie. 

Bien d’autres variétés pourraient étre ajoutées à cette liste. Le Beurré 
d'Amanlis, le Beurré superfin, le Seigneur Esperen, le Beurré Hardy, 
la Marie-Louise, le Soldat Laboureur, la Duchesse d'Angoulème, la 
Bronzée d'Enghien, le Passe-Colmar, le Beurré d'Hardenpont, la Berga- 
motte Esperen, sont également des fruits précieux pour la culture en 
plein vent, mais les uns manquent de rusticité, exigent impérieusement 
un terrain profondément défoncé et largement amendé, les autres n'étant 
pas suffisamment adhérents à l'arbre, perdent une partie de leur récolte 
aux premiers vents de l'équinoxe ; plusieurs enfin produisent parfaitement 
dans les jardins de ville, mais se gercent et se maculent à la campagne. 
Il appartient donc aux propriétaires et aux cultivateurs de faire un choix 
judicieux et de s’assurer s'ils se trouvent dans des conditions favorables 
pour planter ces variétés. 

N'oublions pas de mentionner les poires à cuire et notamment le 
Martin sec et le Catillac, deux fruits de grande production, de conser- 
vation facile et résistant parfaitement au transport. 

Le développement de la culture des variétés que nous venons d'indiquer 


— 204 — 


donnerait certainement aux cultivateurs un rapport des plus lucratifs et 
des plus rémunérateurs. En approvisionnant nos marchés de tous ces 
fruits délicieux, les classes déshéritées de la fortune trouveraient des 
jouissances qui leur sont inconnues. La propagation de tous ces. fruits 
d'élite aurait donc pour résultat, non seulement d'augmenter la richesse 
publique, mais elle constituerait en même temps une œuvre essentiel- 
lement humanitaire. 


M. Baltet. — Vous savez que, depuis quelques années, les États-Unis 
et le Canada expédient, surtout à Liverpool, des quantités de fruits 
qui sont emballés en tonneaux. La pomme populaire en Amérique est 
la Verwlown Pippin. Une autre qui tend à se propager c’est la Baldwin. 
L'arbre est excessivement fertile, son fruit est coloré et se vend toujours 
mieux sur les marchés que l’autre qui est verte. Elle est lente à se flétrir 
et lourde au poids. Dans les essais comparatifs qu’on a faits, on a même 
trouvé qu'elle était la plus lourde. Comme la vente se fait au poids, les 
producteurs américains ont trouvé qu’elle était du plus grand profit. 
C'est absolument ce qui se passe quand on cultive des fraises, on préfère 
les plus grosses et les plus pesantes parce qu’un panier d’une sorte 
(Æéricart) est vendue 2 fr. de plus qu’un panier d’une autre sorte 
(Marguerite), à cause de la différence de poids. C’est le côté commercial, 
mais nous ne pourrions recommander une variété que lorsque le fruit 
est méritant. Il n’y à rien à dire contre ceux de la nature que j'indique. 

Nous avons étudié la pomme Comte Orloff dans un terrain tourbeux 
qui, dans les parties basses, a subi jusque 30 degrés de froid: il y a très 
bien résisté. La Rose de Bohème, pomme allemande, les Zrisck peach et 
M. Gladstone, pommes anglaises, ont également résisté dans les mêmes 
conditions. 

S'il nous fallait signaler les variétés de pommier qui ont bravé les 
rigueurs du grand hiver, nous nommerions encore les Zransparente de 
Croncels, de Vigne, Belle de Pontoise, d’origine française ; Joséphine 
Kreuter, que nous avons recu d'Autriche ; les Astrakan, Borovitsky, 
Alexandre, Transparente blanche et autres variétés d'origine russe. À ce 
sujet, nous rappelerons que la province de Moscou a d'immenses vergers 
(arbres en buisson et groupés) composés des principales sortes : Zitowka, 
Anisowka, Anlonomka. Nous en avons recu des greffons de l'honorable 
D' Regel de St. Pétersbourg. Déjà, la culture et la fructification nous ont 
fait reconnaître dans Axtonowka, la Cellini des Anglais que nous avions 
jugée assez méritante pour figurer dans notre « Traité de culture 
fruitière ». ; 

En même temps, nous avons reconnu la Zondon pippin dans les 
Calville du roi et Citron d'hiver de quelques pomologues. N'est-ce pas 
une nouvelle preuve qu’il convient d'étudier minutieusement la nomen- 


| 
| 
| 


ed VU CR 


— 205 — 


clature et l'habitat des fruits locaux avant de les propager ou de les 
recommander ? 


M: Millet. — M. Delrue vient de donner une liste de fruits recomman- 
dables dans le pays de Tournai, le paradis de la Pomologie. Je signalais 
tout-à-l’heure que le Beurré & Hardenpont recommandé par M. Delrue 
pour la culture en plein vent, et qui vient parfaitement dans les vallées 
du pays de Liège, ne vient pas du tout en plein vent dans les autres 
localités belges, malgré tous les soins qu'on lui donne. Il ne vient pas 
non plus en buisson ni en haut vent. C’est pour cela que je recommande 
l'étude des bonnes variétés locales. Je ne puis recommander pour être 
planté en plein vent le Bon Chrélien William. C'est une excellente 
variété, mais chez nous, au premier vent, lorsqu'elle est à demi-grosseur, 
elle se détache. C’est le vent qui fait la récolte : le pédoncule n’est pas 
assez solidement attaché. 

Je ne sais si dans les localités que vous habitez ce fruit ne tombe pas au 
premier coup de vent. Je vous engage à bien examiner ce point avant de 
le faire entrer dans la culture en grand. 


M. Theyskens. — Je donne complètement raison à M. Millet, 
lorsqu'il dit que bien des variétés, telles que le Beurré d'Hardenpont, 
préconisées pour la grande culture de spéculation en verger, ne donnent 
aucun résultat en Belgique. Je trouve aussi que pour les cultures de ce 
genre on recommande généralement, dans les traités d’arboriculture 
comme dans les Congrès, bien trop de variétés. Pour ce qui regarde le 
poirier, je ne connais pas un arbre donnant de meilleurs résultats dans 
notre pays, que le Double Philippe. Il est très vigoureux; il vient bien 
dans tous les sols, même en pleine Campine, pourvu qu’on prenne les 
soins nécessaires lors de la plantation. Le fruit gros et abondant se vend 
régulièrement pour l'Angleterre à des prix tres élevés. La consommation 
en Belgique même en est énorme, car sans être de toute première qualité, 
il figure avantageusement sur la table du riche comme sur celle de 
l’ouvrier. C’est la vraie bonne et belle poire populaire du pays. 

Une variété encore fort recommandable c'est la Calebasse Bosc. 
Excellent fruit de table, connu comme tel de chacun, il se vend toujours à 
un prix très élevé. Les marchands, dans les grandes villes, le recherchent 
particulièrement. L'arbre est cependant moins vigoureux que le Double 
Philippe et je ne conseille pas de le planter dans les sols maigres de la 
Campine. Si aujourd’hui j'avais à planter un verger dans une terre de 
valeur moyenne, je planterais neuf Double Philippe sur un Calebasse Bosc. 

Dans les sols privilégiés, par exemple aux environs de Tournai, on 
pourra faire un choix parmi les autres variétés préconisées. 

Quant aux pommiers, les bonnes variétés sont encore le Cowrt-pendu 
et la Belle-fleur quoique bien des Æeineltes soient très recommandables. 


— 206 — 


Depuis quelques années la culture des arbres fruitiers et entr’autres du 
poirier et du pommier en buisson ou sur demi-tige, tend à s'établir en 
Belgique. À cet effet on greffe sur Coignassier et sur Doucin. Ces cultures 
sont très lucratives et d'autant plus agréables qu’elles produisent trois 
ou quatre ans après la plantation, contrairement aux vergers plantés en 
haut-vent qui ne donnent qu'après une dizaine d'années de plantation. 
Elles se font beaucoup en Angleterre et j'en ai vu de très remarquables 
aux environs de Londres entre Hayes et Hampton-Court. Les arbres ne 
sont plantés qu’à trois ou quatre mètres de distance les uns des autres. 
La chûte des fruits qui empêche bien des variétés très méritantes d’être 
cultivées en haut vent est peu à craindre dans ces plantations. En effet, le 
vent a peu de prise sur les arbres qui n'acquiérent que trois ou quatre 
mètres de hauteur; on peut les abriter par des plantations de Conifères 
et aussi les relier entr'eux par des fils de fer galvanisés pour obvier au 
balancement. 

Pour la culture du pommier faite de cette facon, je recommande surtout 
les Reinettes et entr’autres la Reinetle de Caux et la Reine des Reinetles. 
On y ajoutera quelques variétés à très gros fruits comme le Grand 
Alexandre, le Warner's King, etc. 

Pour le poirier, je ferai un choix de variétés donnant de bonnes et belles 
grosses poires de table. Je les choisirai de manière à avoir des fruits mûrs 
avant et après le Double Philippe, c’est à dire, avant et après l'époque de 
la grande abondance des poires du marché. Ce seront des fruits à emballer 
soigneusement dans des caisses, petits paniers et non pas à vendre par 
100 kilos. 

Voici, à mon avis, les variétés les plus estimables: 

Avant le Double Philippe: 

1° le Peurré d'Amanlis, beau et excellent fruit. 

20 le Bon Chrétien William, gros et très bon. 

Après le Double Philippe. 

1° La Poire de Tongres, fruit excellent et magnifique, mûr en 
Novembre. ; 

2° La Duchesse d'Angoulême, très beau fruit, excellent dans les sols 
sablonneux. Novembre. 

3° Le Beurré Dumont, gros fruit de toute premiere qualité, mür en 
Novembre, Décembre. 

4° Le Beurré Six, excellent fruit très gros pour Décembre. 

5 Bergamotte d'Esperen, arbre très productif. Excellent fruit de 
Janvier à Mars. Recommandable surtout pour les sols sablonneux. 

On peut ajouter à ces variétés la Calebasse de Tirlemont, qui d’après 
M. Millet, est un excellent et beau fruit. 


M. Millet. — Lorsqu'on cultive au point de vue du commerce je crois 


Cr 


— 207 — 


aussi qu'on doit se borner à un petit nombre de variétés pour l'exportation 
et même pour les expéditions à quelque distance de chez soi. Il faut 
pouvoir envoyer des quantités assez considérables. 

Les marchands ne vont pas trouver un amateur chez qui ils rencontrent 
la plus belle collection de poires et de pommes, chez qui ils pourront se 
procurer 100 fruits d’une espèce et 100 d’une autre. Il vous demanderont 
plutôt : combien de centaines de kilos pourrez-vous me servir de telle ou 
telle variété ? 

Pour un amateur, pour celui qui veut charmer ses loisirs, une belle 
et riche collection de pommes, de poires, de prunes, de pêches etc., 
c’est parfait! Mais, pour le commerce, ne collectionnons pas : bornons- 
nous à cultiver peu de variétés et cultivons-les bien et en masse, pour 
pouvoir les écouler facilement. 

À St-Trond, on cultive une mauvaise poire que l’on appelle Æoo! Stock 
ce qui signifie bâton de choux. Or, cette marchandise se vend en moyenne 
930 fr. les 100 kilos et on en expédie en Angletterre autant qu’on en a. 

Les fruits sont mangés dans les rues de Londres par les bambins et les 
ouvriers et ils sont d’un rapport considérable. 

Il ne faut rejeter aucun fruit qui donne un produit rémunérateur. 
Aussi conviendrait-1l de demander des renseignements sur les variétés 
cultivées dans les divers pays. Chacun de nous mentionnerait ies fruits 
les plus récommandables de telle ou telle localité, en donnant un petit 
apercu de la culture qui leur convient le mieux. Cela pourrait nous 
aider à connaître les meilleures variétés pour le commerce et celles qui 
produisent le plus. 


M. Hansen. — Je partage tout à fait l'avis de M. Millet, qui dit qu’il 
faudrait, dans tous les pays, dresser une liste des meilleures espèces. Cela 
s'est déjà fait dans quelques pays ; il est fort intéressant pour nous, 
étrangers, de suivre les articles publiés sur ce sujet par le Bulletin du 
Cercle d’arboriculture de Belgique. 

Nous avons un avantage dans le Nord, c’est que certains fruits y sont 
plus parfumés qu'ailleurs. Il y a notamment la pomme Graastener 
(en allemand : Gravensteiner) qui se développe très bien chez nous et y 
est fort apprécié; on n’en exporte pas beaucoup, sauf parfois à Paris. 
Il me semble qu’une pomme aussi excellente et, avec elle, plusieurs 
autres excellentes variétés, sont beaucoup plus recommandables pour le 
dessert que les oranges acides. 

Nous avons en Danemark bien des variétés qui ne seraient pas 
dédaignées dans d’autres pays. Voici, par exemple, une poire, le Comte 
von Molike dont, en ces dernières années, on a vendu beaucoup d’arbres, 
sous le nom de Xoi Christian. 

Les facilités que les moyens de communication offrent aujourd’hui, 


— 208 — 


permettent de faire des échanges sur une vaste échelle. J'ai eu le plaisir 
d’être utile à plusieurs de mes correspondants en France, en Allemagne, 
en Autriche, ete., en leur envoyant des greffes d’arbres fruitiers danois ; 
s’il y en a parmi vous, Messieurs, qui veulent faire des essais, je me ferai 
un véritable plaisir de vous envoyer des rameaux. 

Je ne puis assez me féliciter, Messieurs, de pouvoir, à titre d’étranger, 
rappeler à un Congrès international, les grandes obligations que nous 
devons aux Belges. C’est à eux que nous sommes redevables des bonnes 
et belles variétés que nous possédons. Des pomologues de tous les pays 
ont pu se rattacher, en qualité d’adeptes ou de confrères, aux grandes 
célébrités belges. Je suis convaincu, Messieurs, qu’il n’y à parmi vous 
personne qui ne désire s'associer à l'hommage de sympathie et de haute 
estime que nous présentons aux arboriculteurs belges. 

(Vifs applaudissements). 


M. Niepraschk. -- Je viens d'entendre recommander la poire William; 
c'est une bonne poire d’espalier, mais en haut-vent elle réussit rarement 
chez nous. C’est pour éviter ces déceptions que je voudrais avoir une liste 
dressée par région. On a recommandé également, le Beurré d'Harden- 
pont : chez nous cette bonne poire devient pierreuse. Ce n'est donc pas 
une poire de commerce pour notre pays. 

Comme l’a très bien dit M. Hansen il y a le Gravensleiner qui est 
recommandé partout en Allemagne. Il a jadis obtenu le 1° prix au 
Congrès de Reutlingen; c’est une pomme qui vient très bien dans toutes 
les parties de l'Allemagne et qui réussit presque dans tous les pays de 
l’Europe. 

J’appuie donc l’idée de dresser une liste générale, par pays, et par 
localités, là où c’est nécessaire. 


M. Tyman. — La question qui nous occupe à fait l'objet de discussions 
dans plusieurs Congrès. La grande culture a été discutée au Congrès de 
Bruxelles en 1880. En 1881 elle a fait l’objet de nos travaux au Congrès 
de Mons. Je ne parle que des poires. 

Au Congrès de Bruxelles de 1880, le questionnaire comprenait la ques- 
tion suivante : 

À Quelles sont, d'après la qualité du sol, l'altitude et l'exposition, les 
meilleures et les plus produclives variétés de fruils de verger à planter dans 
les diverses provinces de Belgique? 


À. — Pommes. 
B. — Poires. 
B. Même question pour les jardins de ferme et de métairie. La liste 
qui a été arrêtée à l'assemblée générale en 1881 comprenait pour les 
bonnes zônes 17 numéros. 


clé 


Le 


—— 2091 


«+ Double Philippe. 

. Beurré d'Amanlis. 

. Bergamotte d'automne. 

. Louise bonne d'Avranches. 
. Joséphine de Malines. 


Beurré Capiaumont. 


. Calebasse Bosc. 

. Durondeau. 

. Beurré-Gifart. 

. Cuisse-Madame. 

. Rousselet de Reims. 

. De Curé. 

. Besy de Chaumontel. 

. Triomphe de Jodoigne. 
. Conseiller à la Cour. 

. Catillac. 

. Marie Louise Delcourt. 


La section a recommandé spécialement pour les terres sablonneuses. 


Le 
Les 
3. 


Beurré Diel. 
Bergamotte d'automne. 
Rousselet de Reims. 


Vous voyez qu'on a fait la distinction d’après le sol. Cela n’est pas sans 
importance. 


Au Congrès de Mons qui a eu lieu l’année suivante, en 1881, le ques- 
tionnaire portait: 

Des meilleures variétés de fruits du Tournaisis et de leur culture. 

Le rapporteur était M. Griffon, professeur à l'École d’arboriculture de 


Tournai. 


Dans son rapport il présente, comme poiriers hautes tiges, 14 variétés. 


F © © Œ 1 © OUR co E9 + 


= 


. Beurré Durondeau-. 

. Beurré de Gallait. 

. Beurré Dubuisson. 

. Beurré Dilly. 

. Bergamotle d'automne où Beurré Cuvelier. 
. Beurré Dumont. 

. Crassane Dumortier. 

. Beurré de Ghelin. 

. Beurré des Augustins. 

. Castelline. 

. Louise bonne d'Avranches. 

1022 


Beurré d'Hardenpont. 


— 210 — 


13. Passe Colmar. 
14. Beurré Rance. 
Dans cette nomenclature ont été acceptées sans débats, les variétés 
suivantes : 
1. Beurré Durondeau. 
2. Beurré Dilly. 
8. Délices Cuvelier. 
4. Louise bonne d'Avranches. 
Ont été négligées : 
Beurré de Gallait, pas assez connu. 
Beurré Dubuisson, trop chétif pour la grande culture. 
. Beurré Dumont, ne convenant pas pour la grande culture. 
. Beurré de Ghelin, id. 
. Beurré des Augustins, pas assez connu. 
. Castelline, trop petite. 
. Beurré d'Hardenpont. 
Passe Colmar. 
. Beurré Rance. 


Les trois dernières variétés ne convenant pas pour la culture en 
plein vent. cé 

La Crassane Dumortier, variété fort douteuse. La section aurait voulu 
voir figurer dans cette liste quelques autres variétés très recomman- 
dables, telles que : Double Philippe, Beurré d'Amanlis, Joséphine de 
Malines, Nouvelle Fulvie, Besy de Chaumontel, Beurré Giffart, Calebasse 
Bosc, Cuisse Madame, etc. 

La question posée aujourd’hui est celle de savoir quels sont les fruits 
dont la culture peut s'étendre et être avantageuse à la consommation 
intérieure et à l'exportation. Cette question ainsi posée doit se rapporter 
à la grande culture, c'est ainsi, me semble-t-il, que l'honorable rappor- 
teur l’a traitée. 

Nous allons passer en revue les variétés ou les espèces préconisées par 
M. Delrue-Schrevens. 

Beurré Dilly, fertilité ordinaire. — Cet arbre a un grand défaut, qui 
doit le faire négliger pour la grande culture; son bois est trop fin et il 
se met très laborieusement à fruit. 

Beurré de Gullail, toujours inconnu. 

Beurré Dumont, laisse à désirer pour la grande culture : le fruit se 
crevasse trop souvent et demande une très bonne exposition ; en espalier, 
il est du reste succulent. 

Beurré Diel. Absolument pas : Le Beurré Diel exige, sous notre 
climat, l’espalier au mur et en plein midi, sinon il devient pierreux, se 
crevasse et tombe avant maturité; pour les sols sablonneux seuls, il pour- 
rait y avoir une légère exception. 


bts te en te un nn nd 


cite 


Castelline, produit d’une manière convenable sur cognassier, mais 
cependant pas suffisamment pour la grande culture; cet arbre a un 
avantage, c’est qu’il n’a pas besoin de serpette. Il reste donc : 


Beurré Durondeau. 

Louise bonne d'Avranches. 
Fondante des Bois. 

Doyenné du comice d'Angers. 
Nouvelle Fulvie (Grégoire). 


Cette liste ainsi arrêtée semble très exclusive. 

Il y a d’autres espèces de poires qui ne sont pas sans mérite et dont la 
grande culture peut être vivement recommandée. 

Je propose d’y adjoindre, sauf discussion, les variétés suivantes : 


. Double Philippe. 

. Beurréd'Amanlis. 

. Bergamotte d'automne. 
. Joséphine de Malines. 
. Beurré Capiaumont. 

. Calebasse Bosc. 

. Beurré Gifart. 

. Cuisse Madame. 

. Rousselet de Reims. 

. De Curé. 

. Besy de Chaumontel. 
. Triomphe de Jodoigne. 
. Conseiller à la Cour. 

. Calillac. 

. Marie Louise Delcourt. 


ei pi Hi bu bi Hi 
OÙ D D 0) mm © © OO I Où Or À y NN = 


Une autre variété est surtout digne d'occuper une place dans cette 
liste : elle a un mérite exceptionnel; seule elle a résisté aux froids 
tardifs de l’année dernière et encore cette année elle n’a pas laissé mar- 
chander sa bonne volonté. C’est le Beurré Six qui a été négligé dans 
tous les Congrès, parce que le mérite de ce fruit n’a été reconnu qu’à 
la suite des intempéries du printemps 1884. 

Voici la description de cette variété : 


Beurré Six. (Six). F. n. 1. 
Synonyme : Six. 


V. Nos poires, Van Houtte, P1. K. 
Poire de première qualité, mürissant en novembre et décembre, chair 
blanc-verdâtre, des plus fines, fondante, contenant quelques filaments, 


— 212 — 


d’une eau excessivement abondante, sucrée, acidulée, possédant un 
arôme exquis. 

Arbre de moyenne vigueur, se greffant sur franc et sur cognassier, très 
recommandable pour haut-vent, formant des pyramides des plus remar- 
quables et bien garnies, venant bien aussi en espalier, d’une fertilité 
régulière. — Précieuse variété. Fruit volumineux. 

M. Palacky. — L'’Autriche est un pays d'exportation de fruits plutôt 
que de légumes. Goritz (?) seule (Gürtz allem.) est si favorisée qu’elle 
produit toute l’année. Son principal produit est le choux-fleur d’hiver 
qui remplit presque tous les marchés pendant cette-saison. 


Pour les fruits il n’y a que deux pays d'exportation, ce sont le Tyrol 
méridional et la Bohème. Cette partie du Tyrol exporte surtout des . 


pommes en Autriche et en Allemagne. Parmi ces pommes, la plus chère 
et la plus connue est la Xosmarinapfel, qui a l'odeur du romarin. 
(Rosmarinus officinalis.) 

J'ai assisté aux débats relatifs à l'impôt foncier à la commission 
autrichienne dont j'étais membre. Là, il a été établi d’une manière 
générale, que le rendement moyen de chacun de ces arbres est de quarante 
fr. par an. C'est sur cette base que l’impôt est fixé. Cet arbre ne vient que 
sur le versant méridional du Tyrol et dans des prés qui sont bien arrosés, 

Comme ses branches sont très larges il faut au moins, dans la plan- 
tation, laisser quinze mètres d'intervalle entre les arbres. 

Il ya une grande maison d'exportation, la Société anonyme, aupa- 
ravant Rigler, qui exporte ces pommes en les emballant très bien et qui 
Jes vend très cher. 

La culture des arbres fruitiers en Bohème est en décadence par suite 
des conditions climatériques. Nous souffrons d’une grande sécheresse l'été. 
On mange en Bohème, en certaines quantités, même des poires de Cali- 
fornie. On exporte des cerises, des pommes, des poires (si l’année est 
bonne). Les variétés du Nord sont ordinaires, je ne veux pas les recom- 
mander. Il y a aussi l'exportation des prunes qui se pratique chez nous, 
spécialement dans la vallée de l’Elbe. 

Il y a dans un village (Dolan), une excellente variété de prune, mais 
ce n’est pas une variété constante. Elle dégénère et c’est la localité qui 
lui donne ses qualités. Cet arbre croît sur un terrain d'exposition méri- 
dionale très fertile et bien arrosé. 

Je ne parlerai pas des pruniers de la Bosnie. Ce n’est pas un arbre 
fruitier, c’est un arbre forestier, qui ne demande aucun soin. Je ne le 
mentionne que pour mémoire. 

Les États-Unis exportent des poires jusqu’en Autriche. Le Vaccinium 
macrocarpum est une variété de Myrtille qui rapporte beaucoup et qui 
donne lieu à des affaires comportant des chiffres énormes. Il croit dans les 
marais et dans les tourbières du nord des États-Unis. Comme il y a des 


J 
. 4 


— 213 — 


tourbes en Belgique il serait peut-être possible d’y faire cette culture. 
C'est un fruit très sec qui contient beaucoup de tannin. Il est très bon 
pour la digestion et ne coûte pas grand’chose. Les personnes qui pour- 
raient s'intéresser à cette culture trouveront des renseignements dans 
les rapports annuels du Ministère de l'Agriculture des États-Unis. Je me 
mets au service des membres du Congrès qui désireraient avoir ces 
renseignements. 


M. Hansen. — Il y aurait beaucoup à dire encore sur cette question, 
La variété de pomme, le Graastener danois, dont j'ai parlé, qui se porte 
très bien chez nous et qui produit les meilleurs fruits du Danemark, ne 
réussit pas partout comme, par exemple, à Angers, où M. André Leroy 
ne la considérait que comme une bonne pomme à cuire. Vous savez que le 
duché d’Oldenbourg a des possessions dans le Holstein, cette pomme s’y 
développe très bien, d’après ce que M. l’Inspecteur des jardins de la cour 
grand-ducale d’Oldenbourg m'en a dit, tandis que dans l’Oldenbourg 
lui-même, elle est de qualité inférieure. Cela prouve que les renseigne- 
ments que l’on récolte de tous côtés ont une très grande importance. 
Il faudrait dresser des listes dans tous les pays et les dresser par contrées. 
Nous avons eu, à Copenhague, un Congrès et une Exposition scan- 
dinave de fruits; il a fallu diviser le petit Danemark en plusieurs 
régions. On a décerné des prix pour le nord et pour le midi du Jutland, 
* pour les îles, puis pour la Suède, la Norwège, etc. 

Le plus grand malheur pour l’arboriculture, c’est le grand nombre de 
variétés que l’on possède. On s’est trop longtemps trompé en croyant que 
les variétés qui réussissent dans un pays, réussiront également dans les 
autres. Après les Allemands, ce sont les jardiniers danois qui ont voyagé 
le plus; de là cette multitude de variétés cultivées au Danemark et 
rapportées un peu de partout. 

De bonne heure, je me suis livré à l'étude spéciale des fruits, de sorte 
qu’il m'a été possible, avant l’âge de vingt-cinq ans, de recueillir, de 
dessiner et de décrire mille variétés de fruits, principalement des pommes 
et des poires cultivées en Danemark. 

Le travail le plus important à effectuer aujourd'hui dans les jardins 
fruitiers, est celui qui consiste à choisir avec discernement dans la masse 
des variétés qui nous envahissent continuellement. Dans ce but, il faudra 
prendre des notes minutieuses sur les arbres et leurs fruits; s'attacher 
surtout à observer la rusticité des arbres et même de leurs fleurs, et 
s’assurer comment ces dernières résistent à la gelée blanche, etc. Il y a 
bien des choses à étudier, entre autres les propriétés des fruits, surtout 
par rapport à l’époque de la maturité, la durée de leur conservation, leur 
prédisposition à se gâter, etc. 

Il est, de nos jours, très facile, d'échanger non seulement des idées et 
des observations, mais aussi les fruits et de faciliter de cette façon, l'étude 


— 214 — 


d'une matière aussi importante pour tous les pays où l'on cultive et 
apprécie les fruits. 


M. Palacky. — M. le secrétaire me communique un projet de 
résolution qui me paraît très sage. On propose que le Comité exécutif 
du Congrès se mette en rapport avec les spécialistes étrangers, pour 
se communiquer les fruits les plus recommandables de leurs localités 
respectives ; pour demander des renseignements sur les variétés cultivées 
dans les différents pays, sur les conditions qui leur sont nécessaires pour 
se développer et surtout sur les terrains qui leur conviennent. 

Si cette proposition est acceptée, il y aurait lieu, pour chaque membre 
du Congrès, de donner des renseignements et d'en demander à ce Comité. 


M. Delrue-Schrevens. — Je désire ajouter quelques mots aux obser- 
vations très judicieuses qui ont été présentées. Nous avons constaté, 
bien souvent, que des fruits très méritants, très recommandables à tous 
les points de vue, restaient localisés pendant de nombreuses années, 
dans les régions où ils avaient été obtenus. Cet état de choses, éminem- 
ment déplorable, tient à la difficulté extrême de faire parvenir aux 
sociétés étrangères, des spécimens de ces fruits afin de les faire connaître 
et apprécier. Et cela, uniquement à cause des ennuis et des tracasseries 
que l’on éprouve à la frontière, où les colis sont ouverts, visités, 
déballés et toujours détériorés! 

Tous les gouvernements de l’Europe étant réprésentés à ce Congrès 
international de Botanique et d'Horticullure, je demande si nous ne 
pourrions pas profiter de cette circonstance heureuse, pour tâcher 
d'obtenir de toutes les nations européennes, l'autorisation d’expédier direc- 
tement, en FRANCHISE DE DouANES, des spécimens de fruits, aux Sociétés 
régulièrement constituées et reconnues ? 

Pour éviter tout soupcon de fraude, les colis dont le poids et la 
dimension pourraient être déterminés, seraient préalablement visés, soit 
par le Consul, soit par d’autres agents expressément désignés; ce qui 
donneraît tous les apaisements et toutes les garanties désirables, Ce serait 
en un mot, le Zibre échange pomologique ! Si cette proposition que j'ai 
l'honneur de vous soumettre est adoptée, Messieurs les délégués des 
gouvernements pourraient s'entendre avec le Comité exécutif, pour la 
négociation. 


M. Tyman. — J'appuie la proposition de M. Delrue. Seulement il 
ferait bien de ne pas la développer comme il l’a fait. Si elle était conçue 
dans des termes plus simples, plus élémentaires, elle aurait plus de 
chances de succès. 

Je me contenterai de formuler un vœu pour que ces relations s’éta- 
blissent entre les différentes catégories des membres du Congrès et je 


— 215 — 


m’arréterais là. Je laisserais les membres du Comité exécutif seuls juges 
de la manière d'opérer, c’est-à-dire, de la manière dont ils doivent s’y 
prendre. C’est l’unique moyen d'arriver à un bon résultat. 


M. le Présidènt. — La question XXI a été traitée hier. La note de 
M. Delrue sera communiquée au Comité exécutif. 

Je vous propose de voter la résolution de M. Millet : 

« Le Comité exécutif du Congrès pourrait se mettre en rapport avec 
les spécialistes étrangers pour se communiquer les fruits les plus recom- 
mandables de leurs localités respectives. » 


M. Millet. — Je vous prie d'ajouter un mot à la demande de M. Delrue. 
On parle de l’échange de fruits, je propose d’y ajouter: «et des greffons. » 


M. le Président. — Personne ne s'oppose à l'adoption de cette 
première résolution? — Adopté. 

Voici la seconde partie. Il s’agit de demander des renseignements sur 
les variétés cultivées dans les différents pays, sur les conditions qui leur 
sont nécessaires pour se développer le plus et surtout sur les terrains qui 
leurs conviennent. — A doplé. 

Nous transmettrons la résolution au Comité exécutif qui arrangera la 
chose comme cela lui conviendra au point de vue de la rédaction. 

Je crois que M. Delrue n’insistera pas sur sa proposition. Il lui est 
donné satisfaction par celle qui vient d'être adoptée. 

Il s’agit maintenant de décider si la section émet le vœu qu’on 
facilite les transports de fruits et qu’on leur donne la franchise de 
douane. 

Je suppose que vous accepterez l'amendement de M. Millet qui propose 
d'ajouter aux fruits les greffons. — Marques d'adhésion. 

Un membre. — Le visa du Consul serait peut-être une formalité 
difficile à remplir. On n’a pas toujours le Consul sous la main. 


M. Millet. — Dites alors: « légalisé par le bourgmestre ou le maire 
de la commune. » 


M, le Président. — Je propose de dire: « légalisé par les autorités. » 
— Adopté. 

Est-ce que la section accepte l'amendement de M. Delrue ? — À dhésion. 

Le Bureau sera chargé avec MM. Delrue et Millet de s'entendre sur la 
rédaction. L'heure étant avancée je vous prierai de monter à l'étage 
où les deux sections doivent se réunir. 


M. Fauvel. — Un mot seulement. Parmi les fruits recommandables 
on n'a pas recommandé la Zransparente de Croncels que nous devons à 
M. Baltet et qui a le mieux résisté pendant l'hiver de 1880. La modestie 
de M. Baltet l’a empêché d’en parler. 

La séance est levée à 11 1/2 heures. 


Assemblée générale du 5 août 1885. 


Présidence de M. le D'H. Van HEURCK, directeur du Jardin botanique 
d'Anvers. 


M. E. MarcHar, secrétaire du Congrès, remplit les fonctions de 
secrétaire. 


Sommaire : Les vœux exprimés au Congrès, par MM. Ch." DE BOSSCHERE et 
PLANCHON. — Lettre à adresser à M. le D' TRreuB, à Buitenzorg. — Discours de 
clôture, par MM. BERNARD, CH. DE BOSSCHERE, VAN HEURCK, BAILLON. 


La séance est ouverte à midi. 


M. le Président. — Messieurs les présidents des sections sont invités 
à prendre place au bureau, ainsi que M. BERNARD, délégué du gouver- 
nement belge. J’ai l'honneur d'ouvrir l’assemblée générale. 

J’accorde la parole à M. Ca. De BosscHere pour les communications 
qu’il a à faire. 

M. Ch. De Bosschere. — Ces communications se réduisent à fort peu 
de chose. 

Dans une séance antérieure, je crois avoir dit que tous les membres 
du Congrès qui, à un titre quelconque, ont pris part à nos travaux, 
recevront la copie de la siténographie de leurs communications. Chaque 
membre sera appelé à corriger lui-même son travail. 

Nous aurons soin de mentionner dans les Actes du Congrès que nous 
avons adopté ce mode de contrôle. De cette manière, chacune des 
personnes citées sera responsable des opinions qu’elle a émises. 


M, Planchon. — C'est parfait. 


— 217 — 


M. Ch. De Bosschere. — Je demande la parole pour vous donner 
connaissance de la lettre que nous nous proposons d'envoyer à M, le 
D' Treus, directeur du Jardin botanique de « Buitenzorg ». 

Nous devons la rédaction de cette lettre à l'obligeance de M. Baillon, 


MONSIEUR ET TRÈS HONORÉ COLLÈGUE, 


« Le Congrès de botanique, réuni en ce jour à Anvers, a pris connais- 
sance de l’invitation adressée par vous à tous les botanistes de l'Europe, 
de se rendre au laboratoire de Buitenzorg pour y étudier les merveilles 
de la flore tropicale. Sur la proposition d’un de ses membres, le Congrès 
a décidé qu’il vous serait immédiatement adressé une lettre de remer- 
ciments et de félicitations, signée de tous les membres présents. 

Ils font des vœux pour le succès de l’entreprise généreuse et si 
profitable aux intérêts de la botanique, dont vous avez eu l’heureuse idée 
et ils vous prient, Monsieur et très honoré Confrère, de vouloir bien 
agréer l'assurance de leur reconnaissance et de leur affectueux dévoue- 
ment ». (Applaudissements). 


Comme moyen d'exécution, Messieurs, je propose que cette lettre soit 
déposée sur le bureau, afin que, tous, vous puissiez avoir l’occasion de la 
signer. Seulement comme beaucoup de botanistes sont absents en ce 
moment, je me charge de prendre la lettre avec moi demain à Bruxelles 
et vendredi à Gand, afin de pouvoir recueillir le plus grand nombre de 
signatures possible. 

Le comité d'organisation du Congrès se chargera ensuite de l'expé- 
dition. 

M. Baillon. — On pourrait inscrire les absents. Il y a différents 
professeurs qui ne sont plus ici. 


M. Ch. De Bosschere. — Nous le ferons(l), 


(1) Voici le texte de la lettre que M. le directeur Treub nous a adressée en 
réponse à celle que nous lui avons transmise au nom du Congrès: 


Buitenzorg (Java), le 28 septembre 1885. 
MONSIEUR ET TRÈS HONORÉ COLLÈGUE, 


En vous accusant la réception de votre lettre du 16 août, ainsi que de celle du 
Congrès d'Anvers, en date du 3 août, je ne sais comment exprimer ma vive 
reconnaissance. 

Les marques de sympathie et d'adhésion à l’entreprise que je tente, dans 
l'intérêt de notre science, m'ont causé la plus agréable des surprises. Venant 
d’une assemblée aussi compétente à taxer l'utilité de l'initiative que j'ai osé 
prendre, elles constituent pour moi un précieux encouragement. 


— 218 — 


M. Bernard, délégué du Gouvernement belge. — La Société de 
Botanique de Belgique aura l'honneur, Messieurs, de vous recevoir 
demain à Bruxelles. Ce n’est donc pas adieu que nous allons nous dire, 
mais au revoir. 

Les horticulteurs gantois, la Chambre syndicale des horticulteurs 
belges et la Société royale d'agriculture et de botanique de Gand auront 
le plaisir de vous compter parmi eux vendredi prochain. 

Je tiens cependant à accomplir un devoir de reconnaissance, au nom du 
Gouvernement, au nom des botanistes et des horticulteurs belges, en 
remerciant d'abord les Gouvernements et les Chefs d'État qui ont bien 
voulu désigner à ces assises scientifiques des délégués officiels et toutes 
les institutions scientifiques qui nous ont envoyé ici leurs représentants. 

La haute valeur des rapports préliminaires, la portée pratique des 
discussions de ces jours derniers, nous prouvent assez combien le choix 
de ces délégués a été heureux! 

La Belgique, Messieurs, en a été grandement honorée ! 

Le Gouvernement belge étudiera avec une soigneuse attention vos 
savantes délibérations et il répondra certes à vos sentiments à tous, à 
votre amour du progrès et de la science, en tâchant de réaliser, dans la 
sphère de ses attributions, les vœux, les motions, que vous avez présentés, 
que vous avez développés avec une si haute autorité scientifique. 

Je vous remercie et je remercie spécialement les organisateurs du 
Congrès, et tout particulièrement M. Charles De Bosschere et ses adjoints 
qui, depuis plus d’un an, se sont dévoués à l’œuvre du Congrès! 


(Applaudissements). 
Encore une fois, merci à tous ceux qui ont apporté leur concours à 
cette œuvre si utile. Au revoir, Messieurs. (Applaudissements). 


M. Ch. De Bosschere. — Au nom de la commission organisatrice du 


D'autre part, elles m’engagent à compter sur le plaisir de voir souvent des 
collègues de l’Europe, dans la station botanique de Buitenzorg. 

Vous voudrez bien, Monsieur, être l’interprête de mes sentiments auprès des 
membres du Congrès. 

En second lieu, je vous présente mes sincères remerciements pour l’envoi des 
Rapports préliminaires et des Actes du Congrès, que vous avez eu l’extrême 
obligeance de me premettre. Je ne manquerai pas à vous en accuser plus tard la 
réception. 

Veuillez agréer, Monsieur et très honoré Collègue, avec l'expression réitérée 
de ma gratitude, l'assurance de ma considération la plus distinguée. 


(Signé) M. TREUB. 
Monsieur Ch. De Bosschere, 
Secrétaire-général du Congrès international 
de Botanique et d’Horticulture d'Anvers (1885). 


219 — 


Congrès international de botanique et d’horticulture, je ne puis que me 
joindre au délégué du Gouvernement, pour vous exprimer les mêmes 
sentiments de reconnaissance ! 

Je ne veux pas abuser de vos moments, j'aurai plusieurs fois encore 
cette semaine l’occasion de vous dire plus longuement combien nous vous 
sommes tous reconnaissants des services éminents que vous avez rendus 
à la science, et aussi de la bienveillance avec laquelle vous avez répondu 
à notre appel. 

Si notre Congrès produit quelques fruits, ce sera grâce à votre assiduité 
aux séances, grâce à la science et au dévouement que vous avez si 
généreusement prodigués à la solution des questions qui vous étaient 
soumises. 

Encore une fois merci de tout cœur, au nom de la Commission orga- 
nisatrice ! (Applaudissements). 


M. H. Van Heurck. — Avant de nous séparer, je crois, Messieurs, 
qu’il est de notre devoir à tous, de témoigner notre reconnaissance toute 
spéciale à M. Cu. De BosscHERE qui s’est dévoué d’une façon exemplaire 
pour l’accomplissement de la tâche dont il avait pris généreusement 
l'initiative. 

Pendant un an il a fait l'impossible pour parvenir à faire réussir le 
Congrès. Ses efforts ont été récompensés de la façon la plus brillante. 

Nous devons lui en témoigner toute notre gratitude. 

(Longs applaudissements.) 

Je vous remercie, Messieurs, de l'honneur que vous avez fait à notre 
Jardin Botanique en y tenant le Congrès. Ses séances ont été une digne 
inauguration des nouveaux locaux que notre Administration communale 
y à fait établir. Notre Jardin est le dernier reste de l’ancienne École de 
médecine qui y avait été établie, au commencement de ce siècle, en 1802, 
sous la République francaise et qui fut supprimée plus tard. Aujourd’hui, 
il n’est plus rattaché à aucun établissement d'instruction, mais il n’en 
rend pas moins des services à l’enseignement public et aux nombreux 
visiteurs qui le fréquentent. 

Vos importantes séances feront date dans l’histoire du Jardin. Je vous 
remercie encore une fois, Messieurs, de l'honneur que vous lui avez fait 
et je déclare close la session du Congrès international de Botanique et 
d’Horticulture d'Anvers. 


M. Baillon. — Au nom de tous les membres du Congrès, au nom de 
tous les étrangers qui ont été invités à y prendre part, et qui ont reçu 
ici un accueil si cordial, permettez-moi de remercier du fond du cœur 
toutes les personnes qui nous ont si bien accueillis, toutes celles qui se 
sont dévouées à cette œuvre, toutes celles dont on vient de faire ressortir 
les mérites d’une façon si éclatante : M. le délégué du Gouvernement, 


— 220 — 


M. le directeur du Jardin botanique d'Anvers, M. Ch. De Bosschere, la 
Commission organisatrice dont il est l’un des dignes chefs, toutes les 
personnes en un mot qui nous ont donné tant de témoignages de 
sympathie que nous n'oublierons jamais, soyez en convaincus ! 

| (Longs applaudissements). 


La séance est levée à une heure et demie. 


RÉCAPITULATION 


des vœux émis par le Congrès international de Botanique et 
d'Horticulture d'Anvers. 


I. Le Congrès émet le vœu qu’un Comité international soit constitué 
et se mette à la disposition de l'État libre du Congo pour organiser et 
diriger l’exploration botanique de sa flore. 

(Voir les discussions, l'° partie des Actes du Congrès, p. 22-A7). 

II. Le Congrès émet les vœux: 

1° De voir s'établir promptement une échelle thermométrique unique ; 

20 De voir adopter de préférence l'échelle centésimale. 

3° De voir, en attendant que la réforme soit adoptée, les publicistes 
horticoles indiquer dans leurs écrits, la réduction en degrés centigrades 
des chiffres de température donnés d’après l’usage de leur pays respectif 

(Discussion : p. 59). 

III. Le Congrès recherchera les moyens d'encourager et de généraliser 
la création de jardins scolaires. 

(Discussion : p. 62-66). 

IV. Le Congrès admet les trois propositions suivantes : 

1° L'emploi du jus de tabac et mieux encore des sels ammoniacaux, qui 
seuls agissent dans le jus de tabac très concentré, est un remède très 
actif contre les insectes dans les serres. 

20 A l'extérieur, on peut employer l'alcool étendu d’eau. 

3° L'emploi du pétrole peut être très bon, mais à la condition qu'il soit 
très dilué dans l’eau. Sans cette précaution, ce dernier remède peut être 
considéré comme étant aussi nuisible aux plantes qu’aux insectes. 

(Discussion : p. 69-77). 

V. Le Congrès exprime le vœu que le Gouvernement crée en 
Belgique, à l'exemple de nos voisins du Midi et de l'Est, un arborelum. 

(Discussion : p. 91-92). 

Le Congrès admet en principe : 

Il y a deux espèces de laboratoires : les uns de recherche et les autres 
d'enseignement. 

Le Congrès émet les vœux : 


chape 


1° Que chaque Jardin botanique soit pourvu d’un laboratoire de 
recherches. 

2 Qu'il soit établi un laboratoire d'enseignement dans chaque établis- 
sement où l’on enseigne la botanique : universités, écoles de médecine 
vétérinaire, d'agriculture et d’horticulture. 

3° Quand les circonstances le permettront, que le laboratoire de 
recherches, le laboratoire d'enseignement et le jardin botanique soient 
groupés en un seul Institut. 

(Discussion : p. 100 à 122). 

VII. Systèmes d'étiquettes recommandés par E Congrès. 

1° Les étiquettes en zinc; 

2° Les étiquettes en fer ne et celles en porcelaine pour les plantes 
de serre, surtout pour les Jardins botaniques, à condition que l'on 
emploie un moyen d’attache convenable. 

2° Pour les serres chaudes et les bassins des serres chaudes, les plaques 
en verre décrites par M. Cornu. 

Moyen d'attache recommandé : le fil de fer galvanisé. 

Le Congrès estime que le système d’étiquetage doit être doublé, dans 
les jardins botaniques, pour la sécurité du professeur et dans l’intérêt de 
la tenue du jardin, d’un registre avec plan du jardin, où les collections de 
ce dernier soient notées point par point. 

(Discussion : p. 124 à 138). 

VIII. Le Congrès émet le vœu que des associations de prévoyance 
mutuelles soient constituées dans les centres agricoles et horticoles qui 
permettent l'établissement de ces institutions. 

(Discussion : p. 138 à 141). 

IX. Le Congrès charge une commission de dresser une liste des 
champignons qui sont réellement vénéneux et une des champignons 
comestibles recommandables. 

X. Le Congrès émet les vœux : 

1° Qu'il soit créé un cours de pathologie végétale dans les diverses 
écoles d’horticulture et d'agriculture et que ce cours ait un but 
essentiellement pratique. 

2° Que ce cours soit appuyé par des expériences de culture ; 

3° Que des notions sur les parasites des végétaux de grande culture 
soientrépandues dans les campagnespar l'intermédiaire de l’enseignement 
primaire et de conférences populaires ; 

4° Que les recherches sur les maladies des plantes cultivées soient 
encouragées le plus possible. 

(Discussion : p. 156-169). 

XI. Le Congrès appuie le vœu de M. Radlkofer qui demande que le 
travail d’une étude complète et définitive des espèces végétales soit 
réparti entre les centres botaniques importants de l'Europe. Chaque 


— 223 — 
centre s’occuperait d’un groupe déterminé pour lequel il disposerait de 
tous les matériaux dispersés dans les diverses collections. 

(Discussion : p. 170-173). 1 

Le Congrès appuie également le vœu de M. Krelage qui demande 
si l’on ne pourrait pas conserver tous les types du règne végétal dans les 
divers Jardins botaniques qui s’appliqueraient à cultiver chacun une 
certaine famille ou un genre déterminé. 

(Discussion : p. 173-174). 

XII. Le Congrès exprime le vœu que dans les écoles à tous les degrés, 
y compris les écoles d’horticulture, l’enseignement de la botanique soit 
organisé de telle facon que la Cryptogamie y ait la part qui lui revient au 
point de vue de son importance. Il importe que cet enseignement soit 
fondé principalement sur des démonstrations pratiques et des expériences 
de culture. 

XIII. Le Congrès émet le vœu qu’au prochain Congrès, chaque ville 
interessée envoie des délégués chargés de faire connaitre les moyens 
qu’on emploie dans ces viiles pour se débarrasser de la gadoue et des 
balayures, tout en venant en aide aux grandes cultures. 

(Discussion : p. 182-189). 

XIV. À. Le Congrès exprime le vœu que tous les pays adhérents à la 
Convention phylloxérique du 31 novembre 1883 adoptent, en les éten- 
dant aussi libéralement que possible, les mesures de réglementation 
intérieure et la formule du certificat édictées en Belgique. 

B. Le Congrès adopte les conclusions scientifiques de M. Cornu : 

1° La principale cause de l'invasion phylloxérique est le transport 
direct de l’insecte par des racines ou des fragments de racines phyllo- 
xérées. 

2° Le transport à grande distance ne doit pas étre, en général, attribué 
au vol naturel de l’insecte ailé; l'influence des trains de chemins de fer 
ne paraît pas avoir l'importance qu’on lui supposait. 

3° La propagation à grande distance n’est pas déterminée par des 
phylloxéras aptères errants : les insectes qui sont dans ce cas sont tous 
des jeunes ; ils ne peuvent demeurer longtemps en dehors des vignes, 
sans nourriture. 

4° Les plantes enracinées et cultivées dans un vase à fleurs, ainsi que 
les produits de l’horticulture, non en contact avec les racines des vignes, 
doivent être considérés comme sans danger. 

C. Le Congrès exprime le désir que l'exposé que M. Cornu a fait de la 
question phylloxérique, au Congrès d'Anvers, soit envoyé à tous les 
gouvernements et que toute la discussion soit jointe à cet exposé. 

(Discussion : p. 77-87). 

XV. 10 Le Congrès exprime le désir que le Comité exécutif se mette 
en rapport avec les spécialistes étrangers pour obtenir la communication 


L'on 


réciproque des fruits et des greffons des espèces et variétés fruitières les 
plus recommandables de leurs localités respectives. 

2° Le Comité exécutif est invité à demander des renseignements sur 
les variétés cultivées dans les différents pays, sur les conditions qui leur 
sont nécessaires pour se développer le mieux et surtout sur les terrains 
qui leur conviennent, ë 

3° Le Congrès émet le vœu que des démarches soient faites pour obtenir 
de toutes les nations européennes, l’autorisation d’expédier directement, 
en franchise de douane, des spécimens de fruits, aux Sociétés régulièrement 
constituées et reconnues, 

(Discussion : p. 197 et suivantes), 

XVI. 1° Le Bureau du Congrès se mettra en rapport avec les délégués 
des Sociétés d’horticulture officiellement représentées au Congrès, afin de 
rechercher les moyens d'obtenir la suppression du cubage ou majoration 
de 50 °/, sur le prix réel, là où cette clause est maintenue dans les tarifs 
de transports ; 

2° Le Congrès émet le vœu de voir adopter, par toutes les compagnies 
et administrations de chemins de fer, l'établissement d’un service plus 
accéléré pour le transport des arbres, des arbustes et des plantes vivantes 
de toute nature, qui sont des marchandises sujettes à une prompte 
détérioration ; 

3° Le Bureau du Congrès, d'accord avec les délégués des Sociétés 
adhérentes, fera toutes les démarches nécessaires pour obtenir que les 
produits de l’horticulture soient vérifiés d'urgence par les bureaux de 
douane, afin d’entraver le moins possible la rapidité du transport. 


COMPTE RENDU 


DE LA 


SÉANCE DE MICROSCOPIE 


DONNÉE PAR 


M. LE D: H. VAN HEURCK 


professeur-directeur au Jardin botanique d'Anvers 


PAR 


M. Maxime CORNU 


professeur-administrateur au Muséum d'histoire naturelle, à Paris, 
délégué du Gouvernement francais au Congrès nternational de botanique 
- et d’horticulture d'Anvers. 


Le programme du Congrès promettait une séance de Microscopie par 
M. le D' Henri Van Heurck; la haute compétence de ce savant, ses 
nombreuses découvertes, ses travaux importants sur ce sujet, assuraient 
le succès de cette séance. Elle devait avoir lieu à son domicile particulier. 

Le nombre des personnes qui se firent inscrire pour y assister fut si 
grand, qu’il devint nécessaire de choisir un local suffisamment vaste 
pour contenir cette aflluence. 

On se réunit dans l’une des salles du premier étage des bâtiments du 
Musée, au Jardin botanique de la ville, dont M. le D' Van Heurck est 
le directeur. 

Sur une grande table étaient disposés, dans un ordre parfait, les 
instruments qui devaient servir aux démonstrations. | 

Des préparations furent mises sous les différents microscopes grands et 
petits, au nombre de six, et chacun passa en revue les curieux objets 
soumis aux observations; le sympathique professeur donnait d’abord 
une explication générale et ajoutait, avec une bonne grâce parfaite, tous 
les détails supplémentaires qu’on lui demandait. 

Un grand nombre de Dames, qui n'avaient pas craint d'affronter 
l’aridité des questions scientifiques, manifestaient leur étonnement à la 
beauté du spectacle qui s'offrait à leurs yeux : l'élégance de la forme, 
la singularité des ornements que présentent les Diatomées ou les écailles 
des papillons (toutes choses auxquelles nous sommes habitués dès long- 
temps), trouvaient des admiratrices enthousiastes. 

Les micrographes venus à cette soirée trouvaient dans d’autres parties 
du programme des objets du plus haut intérêt pour eux. 


15 


— 226 — 


Il était nécessaire de classer et de séparer les sujets divers, diver- 
sement intéressants pour chaque groupe de personnes. 

La séance peut se diviser en plusieurs parties, 

On pouvait y voir des objets microscopiques grossis plus ou moins 
et dont quelques-uns étaient très curieux, même pour les savants. 

Les excellents microscopes permettaient d'observer les détails des 
test-objets réputés les plus difficiles et les plus délicats. 

On pouvait y passer en revue des instruments très variés, des objec- 
tifs des meilleurs constructeurs, des microtômes, etc.; une collection 
très complète d'appareils relatifs à la microscopie proprement dite, la 
photomicroscopie, etc. 

Mais la partie la plus remarquable a été la résolution du problème 
si important de l'éclairage des objets pour l'observation de la micro- 
photographie, par le moyen de la lumière électrique, mise à la portée 
de tous par M. le D' Van Heurck. 

Chacun, suivant la tournure de son esprit, pouvait s'attacher à telle 
ou telle partie, porter son attention sur tel ou tel ensemble d'objets 
exposés sur la table. 

Les -progrès les plus récents de la microscopie étaient exposés par 
M. Je D' Van Heurck d’une manière claire, simple et précise : on y 
sentait le savant, maître de son sujet et pouvant dire « guorum pars 
magna fui »; mais il ne l’a fait qu'avec la plus extrême modestie, il 
semblait en demander pardon; bref il a conquis son auditoire par la 
parole comme par les objets qu’il montrait. 

Parmi les préparations curieuses qu’on a pu observer dans cette 
intéressante séance, on pourrait citer un grand nombre de Diatomées, 
soit isolées, soit réunies; il faut citer spécialement les merveilleuses 
préparations de Müller qui montrent, rangées régulièrement suivant des 
lignes parfaitement droites, de nombreuses espèces appartenant à des 
genres très divers. Ce sont de véritables collections d’une grande utilité 
pour les spécialistes qui s'occupent de Diatomées. 

Les bouquets de Dalton offrent l'exemple d’une habileté semblable; 
mais là, elle est mise au service d’un effet à la fois pittoresque et 
artistique ; on a profité de l'apparence irisée dûe à un phénomène com- 
plexe (lames minces et réseaux) qui donne lieu à des couleurs très 
brillantes; on a composé, avec des Diatomées et des écailles d’ailes de 
papillons, des bouquets de fleurs microscopiques, comme celles qui sont 
fabriquées à l’aide d’élytres d’insectes : ces préparations ont eu un grand 
succès de curiosité; on ne pouvait se lasser de les admirer. 

Non moins curieuse est la préparation microscopique de Webb, con- 
tenant une écriture microscopique faite à l’aide d’une machine spéciale 
et d'une pointe de diamant. L'ensemble apparaît à l'œil nu comme 
un grain de poussière sur la lame, et cependant c’est le Pater nosier 


— 227 — 


tout entier, avec des caractères d’une petitesse telle que « la bible toute 

entière, » dit Webb, « pourrait être écrite six fois sur un pouce carré. » 
La partie scientifique de l'auditoire a admiré trois grands magnifiques 
microscopes montés pour la circonstance : l’un de Ross, l’autre de Powell 
et Lealand et un troisième de Nachet (grand modèle à renversement). 

On a pu y examiner successivement diverses préparations d’histologie 
végétale; le bacille en virgule du choléra dont il a été question si 
souvent cette année et que peu de personnes ont vu encore, a excité 
l'attention au plus haut point. 

Il à été possible de voir avec la plus extrême netteté les stries des 
test-objets les plus difficiles : le PZeurosigma angulatum, le Surirella 
gemma, le Grammatophora subtilissima, le Van Heurckia rhomboides et 
surtout l’Amphipleura pellucida. 

On a vu également avec une parfaite évidence les stries des réseaux 
de Nobert; pendant bien des années elles ont défié les efforts des micro- 
graphes; il nous est possible de voir le 19° système de stries. 

M.H. Van Heurck a construit deux appareils spéciaux pour obtenir des 
réseaux semblables à ceux de Nobert ; le premier qui remonte à l’année 
1874 donnait des résultats satisfaisants ; le second construit en 1885 
a permis d'obtenir des divisions surprenantes de ténuité et de finesse. 

Ces diverses observations au microscope ont été, pour prendre un peu 
de repos, suspendues par la conférence très intéressante de M. le D” 
Van Heurck sur les avantages de la lumière électrique. 

À mesure que les constructeurs obtenaient des grossissements de plus 
en plus forts, la quantité de lumière envoyée dans l'œil sous forme 
_ d'image devenait de plus en plus petite; on a employé successivement 
des concentrateurs coûteux et compliqués, des sources de lumière de plus 
en plus vives, également très coûteuses, sans compter la lumière solaire 
dont l'emploi nécessite une installation compliquée et chère. 

Ces sources de lumière sont également des sources de chaleur ce qui 
ne contribue pas peu à les rendre incommodes. 

La lumière électrique réalise de très grands progrès : M. le Dr 
Van Heurck s’est appliqué, depuis 1881, à en rendre pratique et à en 
préconiser l'usage, 

Cette lumière permet de voir, avec facilité, des détails invisibles ou 
peu visibles avec les moyens d'éclairage ordinaires, et ce, d’abord parce 
qu’elle renferme plus de rayons bleus et violets que la lumière des 
lampes ou du gaz et, ensuite parce qu’elle a une intensité spécifique 
plus considérable que les autres lumières artificielles et permet donc 
l'emploi de rayons beaucoup plus obliques. 

Il signale ensuite des appareils qui sont à la portée de tous les 
micrographes pour la production de l'éclairage électrique. Ces appareils 
sont simples et peu coûteux. Les deux principaux sont : 


Rp, (ee 


222 


I. La pile Leclanché, avec le dispositif que M. Swan a adopté pour 
pouvoir facilement la mettre en action et la laisser reposer. Nous ne 
pouvons entrer dans tous les détails de cette méthode d’assembler 
les éléments Leclanché; nous conseillons vivement de lire l’important 
mémoire de M. le D° Van Heurck sur /a lumière électrique appliquée au 
microscope (Journal de micrographie, mai 1883). 

Elle à l’inconvénient de ne pas permettre des observations de plus 
d'une dizaine de minutes; après ce laps de temps il faut donner quelques 
instants de repos à la pile. 

Toutefois M. Swan vient de produire actuellement des lampes qui 
demandent si peu de guanlilé (ce que les électriciens nomment les 
ampères) de courant, que la pile Leclanché-Swan permettra à l’avenir un 
éclairage continu. 

La pile Leclanché-Swan a l’avantage de rester active très longtemps : 
M. H. Van Heurck en possède une batterie qui fonctionne actuellement 
depuis érois ans, sans qu’on ait duü y toucher. 

IT. Pile Trouvé. — M. H. Van Heurck a indiqué à M. Trouvé la 
disposition des appareils pour les applications au microscope. 

Nous empruntons le passage suivant au Synopsis des Dialomées de 
Belgique p. 220-224, où le sujet est exposé avec une très grande netteté. 

« On connait la pile Trouvé : c’est une pile à treuil de 6 éléments. 
« Chaque élément, composé d’une plaque de charbon et d’une plaque de 
« zinc, plonge dans un bac en ébonite, contenant une solution sursaturée 
« de bichromate de potasse, faite d'après une formule publiée par 
« M. Trouvé (1). 

« C’est une modification de sa grande pile que l'inventeur vient de 
« disposer pour les recherches de la microscopie. 

« La lanterne électrique, pour microscope, se compose du générateur 
« électrique et de la lampe, unis ensemble, ou séparables à volonté. Le 
« tout réuni forme un appareil aussi élégant que commode à employer 
« et que le micrographe peut disposer sur un coin de sa table de travail. 

« La pile fig. 1 se compose d’un petit bac en ébonite D mesurant 
« 15 centm. de long., sur 10 c. de largeur et 18 c. de hauteur, divisé 
« intérieurement, jusqu'aux 2/3 de la hauteur, en 6 compartiments 
« destinés à former autant d'éléments. 

« Intérieurement ces compartiments communiquent par une très petite 
« ouverture. 


(1) Cette solution se fait ainsi : dans un grand vase en grès on met 1 kilo de 
bichromate de potasse, on ajoute d’abord 8 lit. d’eau et ensuite deux litres d’acide 
sulfurique du commerce que l’on verse très lentement, par mince filet, en remuant 
constamment à l’aide d’un tube de verre. Le liquide s’échauffe fortement pendant 
l'opération et on le laisse refroidir avant de l’employer. Avec les quantités que 
nous venons d'indiquer on pèut charger douze fois la pile. 


— 229 — 


« Les parties actives, attachées inférieurement au couvercle E, sont 
« disposées en six rangées, chacune d'elles correspondant à une des cases 
« du bac en ébonite. Chacune de ces rangées constitue un élément et est 
« formée de deux baguettes de zinc allié placées entre trois baguettes de 
« charbon. Les 6 éléments sont accouplés en tension par des contacts 
« disposés symétriquement et élégam- 
« ment sur la surface supérieure du 
« couvercle qui porte aussi deux bor- 
« nes pour la prise du courant. 

« L'appareil d'éclairage est disposé 
« sur la face antérieure de la boîte et 
«est formé par le photophore Hélot- 
« Trouvé. 

« En 1882 lorsque nous décrivimes 
« l'installation delalumière électrique 
« pour le microscope, nous placions la 
« lampe dans une caisse sur laquelle 
« nous mettions le microscope. La lu- 
« mière arrivait directement au con- 
« denseur à travers une lentille plano- 
« convexe disposée au dessus d’une ne ue sp Je Photo 
« ouverture de la caisse. 
« Le photophore, imaginé par MM. Hélot et Trouvé et destiné par lui à 
servir pendant diverses opérations chirurgicales, de même qu’à l’exa- 
men des cavités du corps : gorge, 
oreilles, ete., est au fond la même 
disposition que la nôtre mais réalisée 
d’une facon beaucoup plus pratique. 
« Le photophore est constitué par 
« un tube en cuivre nickelé (toutes les 
« autres pièces de l'appareil sont éga- 
« lement nickelées) où la lampe, qui 
« est d’un modèle spécial, à filament 
« droit, occupe la partie médiane. Gaupe ide: PROD 


ARR R À 


« Postérieurement le tube porte un miroir réflecteur en verre argenté et 
« antérieurement, un 2° tube, qui glisse dans le premier, et porte ure 
« lentille condensatrice. Ce deuxième tube permet de varier l'écarte- 
« ment de la lentille à la lampe, et par suite, permet d'obtenir à volonté 
« des rayons convergents, divergents ou parallèles. La lentille conden- 
« satrice étant libre dans sa monture, elle peut être tournée avec la face 
« bombée en avant ou en arrière. 

« Comme la lumière du réflecteur peut nuire dans certaines observa- 
« tions très délicates, nous avons ajouté un petit disque noirei, qui peut, 


— 230 — 


« dans ces cas, recouvrir le réflecteur; dans ces mêmes occasions nous 
« plaçons, devant ou derrière la lentille, un diaphragme qui enlève la 
« lumière donnée par les bords du condenseur. 

« Toutefois, quand le micrographe voudra obtenir de l'appareil tous 
« les résultats qu’il peut donner, ce n’est pas l’ensemble que nous venons 
« de décrire qu'il faudra employer, mais dans ce cas, le photophore devra 
« être isolé de la pile et disposé sur la monture spéciale que nous avons 
« dessinée ci-contre. 

& Le pied, qui est très lourd, porte un tube fendu de 20 centimètres de 
« hauteur, faisant office de ressort, sur lequel glisse, à frottement très- 
« doux, un deuxième tube pouvant être arrêté à toutes les’ hauteurs. Ce 
« second tube porte deux attaches a a’; l’une placée à la partie inférieure, 
« l’autre à la partie supérieure. 
« Chacune de ces attaches consiste 
«en une petite sphère en acier 
« portant une tige munie d’un pas 
« de vis. La sphère est serrée entre 
« deux plaques métalliques con- 
caves dont l’antérieure, percée 
« au milieu, laisse passer la tige 
« filletée. Le photophore se visse 
« sur cette tige et peut donc, par 
«suite des mouvements de Ja 
« sphère, être placé dans toutes les 
« directions désirées. 

« La pile peut alimenter fort 
«bien, pendant environ deux 
« heures, la lampe spéciale que 
« M. Trouvé met dans son photo- 
« phore, en donnant une lumière 
« qui peut être utilisée dans cer- 
« tains cas de photomicrographie, mais qui est beaucoup trop vive pour 
« les recherches microscopiques usuelles. 

« Nous avons, en conséquence, fait une petite modification à la pile : 
« les éléments étant montés en tension sur le couvercle et l’accouplage 
« des éléments étant visible à la surface extérieure de celui-ci, nous avons 
« simplement établi une prise de courant à chaque élément. Il en résulte 
«que l’on peut ou bien n’employer d’abord que 4 ou 5 des éléments et 
« ajouter les autres quand la pile s’affaiblit, ou bien utiliser des lampes 
« beaucoup plus faibles et leur donner juste la force électro-motrice 
voulue tout en prolongeant le temps d'éclairage. Même, si l’on voulait, 
« par exemple, employer les lampes Stearn qui ne prennent que deux 
éléments et accoupler les six éléments en trois séries de deux élé- 


A 


A 


ES 


= 


À 


— 231 — 


« ments chacun, on pourrait avec une seule charge de la pile obtenir 
« de 4 à 5 heures de lumière suffisante pour les travaux les plus délicats 
«et même suffisante pour la photomicrographie à l’aide de forts 
« grossissements. 

« L'entretien de la pile est fort simple et ne demande guère plus de 
« temps que la préparation d’une lampe à pétrole. 

.. « Lorsque la pile est épuisée, on dévisse les deux boutons A B et on 
« enlève la bague qu'ils maintiennent. On prend ensuite la poignée F et, 

_<en la soulevant, on enlève du coup le couvercle et les éléments; on verse 
« le liquide épuisé, on lave à l’eau le petit bac, on y verse 800 grammes 
« du liquide neuf qu’on a préparé d’avance, on remet le couvercle, la 
« bague et les deux boutons, et la pile est prête à fonctionner. 

« Tout cet ensemble prend beaucoup plus de temps à décrire qu’à 
« exécuter. 

« La pile ne répand aucune odeur, aucune vapeur acide; elle fonc- 
« tionne à titre d’essai, depuis plusieurs jours, sur notre table de travail, 
« placée à côté du microscope, et la vue seule nous révèle sa présence. » 

Comme application des procédés d'éclairage qu'il à ainsi fait entrer 
dans la pratique du miscroscope. M. le D' Van Heurck montre la 
résolution en perles, des stries de l’'Amphipleura pellucida. Ce résultat 
important a été obtenu par lui au mois d'octobre 1884; il a pu montrer 
les épreuves photographiques comme preuve à l'appui de son assertion. 

Cette résolution en’ perles a fait un très grand bruit dans le monde 
micrographique; on pensait que le microscope ne permettait pas l’obser- 
vation de détails aussi délicats. 

Comme on le voit, cette soirée a été des plus intéressantes pour tous les 
assistants ; les uns ont été charmés par le spectacle d'objets curieux et 
élégants, les autres par des nouveautés scientifiques incontestables; mais 
tous ont été touchés de la bonne grâce, de la simplicité, de la modestie 
avec laquelle M. le professeur Van Heurck a exposé le résultat de ses 
recherches personnelles et a mis à la disposition de tous, les précieux 
instruments, les objets de haute valeur de sa collection d'objets micro- 
graphiques. 

Au cours de ce compte-rendu sommaire, beaucoup de choses techniques 
ont dû être omises : on consultera avec fruit le programme de la séance 


qui rend fidèlement les sujets que le Congrès a vu successivement 
soumis à son examen. 


CONGRÈS INTERNATIONAL DE BOTANIQUE ET D HORTICULTURE 
D'ANVERS (1885). 


TUE = 


SÉANCE DE MICROGRAPHIE : 
donnée au MUSÉE du JARDIN BOTANIQUE D'ANTERS. 


PAR M. ze D' Henri Van Heurck 


LE MARDI 4 AOÛT A 8 1/2 HEURES DU SOIR. 


———00 HP 0-0— 


DÉMONSTRATIONS 


1. Appareils pour l'éclairage électrique du microscope. 
2. Avantages de l’éclairage électrique, par incan descence, dans les recherehes 
de la micrographie. 
3. Photomicrographie. 
‘ 4, Emploi de l’éclairage électrique. 
1. Recherches d’histologie végétale et animale. 
2. Eclairage de corps opaques. 
3. Résolution de tests : Pleurosigma angulatum. 
Surirella gemma. 
Van Heurchia rhomboides. 
Amphipleura pellucida en stries. 
» » en perles. 
Test de Nobert y compris le 19° groupe. 
4, Objets divers: Bacilles du choléra. 
. Typen platte. 
Ecriture de Webb. 
Bouquets de Dalton. 
5. Comparaison d'instruments et d'objectifs. 


INSTRUMENTS EXPOSÉS. 
1. MICROSCOPES. 


1. Microscope grand modèle de Powell et Lealand. 

2, Patent stand binoculaire de MM. Ross & C°. 

De ” » ” (modèle spécial construit 
pour M. H. Van Heurck). 

4, Radial arm de MM. Ross & C°, (modèle spécial construit pour M. H. Van 
Heurck, en Avril 1885, pour l’application de l'éclairage électrique). 

5. Microscope grand modèle renversé de M. Nachet. 

6. » ” » de M. WNachet. 

1: » » » de M. Zartnack. 

8. ” » » de M. Zeiss. 


— 233 — 


9. Premier microscope achromatique, construit d’après les plans de M. de 
Sellique : Avril 1824, 
10. Microscope universel de Charles Chevalier (entre 1835 et 1840). 


KE » de Raspail (vers 1845). 

12. ” à trier les Diatomées. 

15. » à faire les ty pen-platte. 

14. ” _oxyhydrique de M. Æ. Van Heuwrck. 

15. » photo-électrique de Gaiffe, régulateur Gaiffe. 

16. » ) de Duboscq à régulateur Serrin. 


2. CONDENSEURS. 


Condenseur de Abbe à petit angle. 


d » à grand angle. 
Wenham's Reflex illuminator. 
Spot Lens. 


Condenseur de Swift. 
Reade’s double hemispherical condenser. 
Diatomescope . 


5. OBJECTIFS 


Amici (1860). Un objectif à sec et un objectif à immersion 
PBénèche divers objectifs à sec, 1/122 à immersion. 
Bezu Hauser et Cie (success. de Prasmomski), série complète, à sec, à immersion 
et homogènes. 
Hartnack 1. Série complète à sec, à immersion et homogènes. 
2. Série à immersion dans l’eau et homogènes, (nouvelle formule de 
juillet 1885, ouverture numérique 1, 3 au minimum). 
Hasert 1[8° à immersion dans l’eau. 
Nachet objectif divers ; 1/12° homogène (juillet 1885). 
Powell et Lealand 1js° new formula, avec trois frontales de rechange, à sec et à 
immersion. 
Ross et C? ] 1}2 pouce, 2/5 p. et1/2 pouce de 80°. 
Tolles 15° et 1f6e à l’eau ; 1/10 et 1/25e homogènes. 
Zeiss aa; À: BB; CC; D, DD; E;F. 
125 (L) immersion dans l’eau. 
112 et 118 homogènes, 


MICROMÉTRIE ET TESTS A LIGNES 


Série de micromètres du 1/10 au 1/1000° de millimètre, 

Micromètres oculaires. 

Micromètre à fils parailèles. 

Portrait de Wobert avec sa machine à diviser. 

Test de Vosert à 19 et 30 groupes. 

Machine à diviser de M. ÆZ. Van Heurck (1874) et spécimens de travail, Elle peut 


diviser le millimétre en 1500 parties. 


— 234 — 


Nouvelle machine à diviser de M. ÆZ. Van Heurck (Avril 1835), et spécimens 
du travail. 

Peut, théoriquement, diviser le millimètre en dix mille parties, — Pratiquement 
a divisé, jusqu'ici, le millimètre en cinq mille parties. 


POLARISATION. 
Appareils simples. 
Appareils à micas et à sélénites. 


SPECTROSCOPIE. 


Microspectroscope de PBrowning — Abbe. 


MICROPHOTOGRAPHIES. 


Epreuves du D' Woodward. 
Epreuves et appareiïls du Dr Æ, Van Heurck. 


MICROTOMES. 
Microtome de Topping. 
» de Rivet. 
» à congélation de Cathcart. 
» de Zeiss. 


» de M. Æ. Van Heurck (1869). 
» de M. 4. Van Heurck, (1872). 


DIVERS. 


Apertomètre de ÀGbe. 

Appareil à couper le verre mince. 

Préparations systématiques de Hüller. 

Préparations du D' Hopfe. 

Préparations de Cole. 

Dessins sur verre (guillochés), 

Bouquets de Dalton. 

Ecriture microscopique de Peters et de Web. 

Platine mobile de 7o/es. 

Synopsis des Diatomées de Belgique, par M. H, Van Heuwrck : Texte, Atlas, ne 
et Types (600 préparations) etc. 


TABLE DES MATIÈRES 


DES 


ACTES DU CONGRÈS INTERNATIONAL 


DE BOTANIQUE ET D’HORTICULTURE D’ANVERS. 


INTRODUCTION . 

Composition du Comité ant du onares 

Liste supplémentaire des membres du Congrès . 

Délégués officiels . 

Délégués de Sociétés . 

Composition du Bureau du Conpres 

It PARTIE. COMPTE-RENDUS STÉNOGRAPHIQUES 
SÉANCE D'OUVERTURE du 2 AOÛT. 

Discours de M. le ie de WAEL, président d'honneur du 
Congrès . ; 

Discours de M. Ép. Monaen. pr es dent di Ce : 

Discours de M. Cx. DE A président de la ra organi- 
satrice du Congrès . 

La flore et les essais de re au Coupe. 

Discours de M. le professeur L. WITTMACK . 

BevursdeM\le/Dr EH BAILLON: «1. 10, 21e 

IT ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DU 3 AOÛT. 

Suite de la discussion de la flore et des essais de culture au Congo . 

XIIIe Question du programme : Avantages de l’unification de l’échelle 
thermométrique. — Discussion A AN MP MEL SE TENTE: 

VIne Question du programme : Faire ressortir la meilleure méthode 
d'enseignement théorique et pratique de la botanique dans les écoles 
d'horticulture et d'agriculture. Développer ce qui doit faire partie de 
cet enseignement. — Discussion . . ND Le RON NS CT 

IXme Question du programme : Quelles sont les mesures à prendre pour 
vulgariser l’enseignement de l’horticulture, spécialement dans les 
centres ruraux ? Quels sont les moyens à employer pour propager la 
culture des plantes dans les classes ouvrières? — Discussion . . . 

IIMe ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DU 3 AOÛT. 

XVIINe Question du programme : Quels sont les remèdes employés 
jusqu'ici contre les ravages des pucerons et quels résultats ont-ils 
HAT D RD rSCUASION UNION LEE LS EME ET CRT AR EEE 

XXe Question du programme : Convention internationale phylloxéri- 
que. Proposition d’en unifier et d’en généraliser l’application dans 
TOUS IS pAYEL = DNECHETON IN 1, ENS 1, 14 HAINE OR NS 


22 


58 


69 


— 236 — 


SÉANCE DU 4 AOÛT (matin). Szcfion de botanique - . AN. dE 
Création d’un arboretum beige. : RE : 
IIIme Question du programme : Quels sont, depuis le Congrès de Paris 

en 1878, les progrès réalisés en botanique dans les principaux pays 
du monde? Installations botaniques, musées, laboratoires, etc. Quelle 
a été, dans ces mêmes pays, l'influence des études botaniques sur les 
progrès de l’horticulture? — Discussion . . JR 
Ire Question du programme : Le rôle et l’ RENE Lee labo de 
botanique. — DisCuSsion + 2. 0 


SÉANCE DU 4 AOÛ (soir). Sections réunies . . .… . Re 


XIIme Question du programme : Quel est le meilleur et. détique- 
tage pour jardins botaniques, pour pares publics, pour jardins privés 
et pour serres. — Discussion. . . He QUE 
XIXme Question du programme : De Reno à de : création, fans les 
centres horticoles, de sociétés de prévoyance mutuelle et d'éphiont en 
faveur des jardiniers et de leurs familles. — Discussion . . . . . 
X Ve Question du programme : La culture des champignons utiles est- 
elle susceptible de s'étendre? On demande un aperçu des espèces 
comestibles les plus communes et des espèces vénéneuses qui leur 
ressemblent le plus "D isCUSS10n RE 


SÉANCE DU 5 AOÛT. Section de botanique. 1 & DORE 


IIme Question du programme : Quelles sont les meilleures méthodes à 
employer pour traiter les monographies de genres à espèces nom- 
breuses. — Discussion. . . - RU: |: 

IVme Question du programme : Quel pe le développement à donner à 
l’enseignement de la Te aux différents degrés d'instruction ? 
— Discussion . . + 40VRRS 

VIImMe Question du programme : Quel … le déve ppeson donner au 
cours de pathologie végétale dans les écoles d’horticulture et d’agri- 


culture? — Discussions. 1 NU SNS Ur (Ne te ON RE 
Communication de Me De RADLKOFER M CN 
Communicationtde MS Je TRIANA 


SÉANCE DU 4 AOÛT (matin). Secéion horticole. + . . . … 
XIe Question du programme : L'utilisation des eaux d’égoûts des 
grandes villes. Quels sont les résultats obtenus dans les divers pays? 
Quels sont les moyens à mettre en œuvre pour généraliser la pratique 
du sewage?— iscussion:: - SRE vs SA 
X Ve Question du programme : La culture des champignons His est- 
elle susceptible de s'étendre? On demande un aperçu des espèces 
comestibles les plus communes et des espèces vénéneuses qui leur 
ressemblent le plus. — Discussion (suite) v. p. 141. . . . . . 
XVIIIme Question du programme : Quels sont les remèdes employés 
jusqu'ici contre les ravages du Phylloxera et quels résultats ont-ils 
donnés? ==1 Discussion Lx 11 Mules à ns Let us De be NS 


Pages. 


92 


100 
123 


156 


156 


156 
170 
174 


181 


182 


189 


190 


XIXme Question du programme : De l'opportunité de la création dans les : 


centres horticoles de sociétés de prévoyance mutuelle et d'épargne en 
faveur des jardiniers et de leurs familles, — Discussion (suite) v.p. 189. 
XX7Me Question du programme : Tarification et conditions des envois 
horticoles par chemin de fer. — Discussion . + + «+ + + + + 


192 
194 


237 — 


SÉANCE DU 5 AOùT. Section de culture maraîchère et fruitière. 


XIVe Question du programme : Quels sont les fruits et les légumes dont 


Pages 


la culture peut s'étendre et être avantageuse à la consommation | 


intérieure et à l’exportation ? Installation de halles dans les ports 
d'embarquement pour la vente directe, par les producteurs, de légumes 
et de fruits d'exportation. — Discussion . . . . + . . + . 
X VIme Question du programme : Nos méthodes de culture des arbres 
fruitiers sont-elles susceptibles de se perfectionner? — Discussion. 


ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DU D AOÛT. 


Les vœux exprimés au Congrès . :. Rs Re 2. ee 
Lettre à adresser à M. le Dr TREUB, à Done EE c0 SE CRE 
Doom de COR 


Récapitulation des vœux émis par le Congrès international de Botanique 
M Egriculture d'Anvers ©.  . , « . +. . ©". «+. . 


Compte-rendu de la séance de Microscopie donnée par M. le Dr. H. VAN 
HEuRrCK, professeur-directeur au Jardin botanique d'Anvers, par 
M Maxime CoRNU, professeur-administrateur au Muséum d’histoire 
naturelle, à Paris, délégué du Gouvernement français au Congrès 
MER CU. oO . . : 


197 


197 


216 
217 
217 


221 


19 
ot 


New York Botanical Garden Library 
QK1.15 1885a 


en 
International Botan/Actes du Congres int , 


UN JU 


8 4755 


) 


LR LE RSS 


lat 


Là 
AU 
LAN) 


RARINANAS 
RATER 
[LOC LES 
ARAT 
NES 
RENS 


SENS 
DUT 
# À 


SES 


MO ME 


Pr 
= ES 


Uh) à k 


Ni 


“ 


LUE 


PTE le hr 
RTS Se 


’ 


\ À: 


CE Er 
TIR 


“ pr 
ER Tree 


LL O 
ges 
Fe 


LE RS TE PL LT 
PR RER EST ITTS 


PL mas 
PS