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Full text of "Annales de chimie et de physique"

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ANNALES 


hK 


CHIMIE  ET  DE  PHYSIQUE. 


CINQUIÈME  SÉRIE. 
<878. 


PARIS.  -  IMPRLMERIE  DE  GAUTHIER-VILLxVRS 

Quai  des  Auçustiiis,  55. 


ANNALES 


DE 


CHIMIE  ET  DE  PHYSIQIE. 


PAR 


MM.  CHEVREUL,  DUMAS.  BOUSSINGAULT. 

REGNAULT,  WURTZ. 


AVEC    LA    COLLABOKATION     DR 


M.  BERTIN. 


/ 


CIKOVIEIVEE:  série.   --  TOiHE  XllI. 


PARIS, 
G.    iMASSON,    ÉDITEUR, 

LIBRAIRE     DE     l' ACADÉMIE      DE     MÉDBCIKE, 

Boulevard  Saint-Germain 

(en  face  de  l'École  de  Médecine). 


IMPRIMERIE  DE  GAUTHISR-VILLARS, 
Quai  des  Auguslins,  55. 

1878 


fs  ■ 

I» 


.  s 


ANNALES 


DE 


CHIMIE  ET  DE  PHYSIQUE. 


QUELQUES-UNES  DES  DONNÉES  FONDAMENTALES 
DE  LA  THBRHOCHIMIE  ; 


Par  m.  BERTHELOT. 


La  suite  de  mes  expériences  m'a  conduit  à  déterminer  de 
nouveau  quelques-unes  des  données  fondamentales  de  la 
thermochimie,  qui  se  sont  présentées  dans  le  cours  de  mes 
reclierclies  :  je  veux  parler  de  la  chaleur  de  formation  de 
Tacide  sulfureux,  de  la  chaleur  de  combustion  de  Poxydc 
de  carbone,  de  l'élhylène,  de  l'acétylène  et  de  la  benzine, 
enfin  de  la  chaleur  de  formation  des  composés  que  le 
brome  et  l'iode  forment,  tant  avec  l'hydrogène  qu'avec 
l'oxygène. 

Voici  le  résultat  de  mes  observations. 

I.  —  Acide  sulfureux. 

La  chaleur  de  combustion  du  soufre  intervient  dans  la 
formation  thermique  des  acides  oxygénés  du  soufre  ei 
de  leurs  sels.  Quoique  mesurée  à  plusieurs  reprises,  elhî 
n'est  pas  bien  connue.  En  effet,  les  nombres  des  di- 
vers observateurs,  rapportés  à  i6  grammes  de  soufre, 
S  4-  O*  =  SO*  gazeux,  sont  fort  discordants  : 

Dulong  ayant  trouvé -\-^\  ,6 

Hess -f-4i ,  I 

Andrews -f-  36,9 

Favre  et  Silbermann h- 35, 6 

tous  nombres  qui  s* appliquent  au  soufre  octaédrique. 


I 


6  »  BBRTHELOT. 

« 

Les  derniers  auteurs  attribuent  ces  divergences  à  la  for- 
mation de  Tacidesulfurique  anhydre,  opinion  qui  m'avait 
semblé  d^abord  douteuse,  a  cause  de  la  grande  quantité 
d'acide  anhydre  dont  elle  supposerait  la  formation.  En 
effet,  la  chaleur  dégagée  par  la  métamorphose  de  l'acide 
sulfureux  en  acide  sulfurique  anhydre 

SO'  -+  0  =  S0%  s'élève  seulement  à  -+-  17,2; 

elle  n'e^t  pas  même  la  moitié  de  la  chaleur  de  formation 
de  l'acide  sulfureux.  Depuis  il  m'est  venu  quelques  scru- 
pules, en  réfléchissant  que  la  présence  de  la  moindre  trace 
d'humidité  dans  les  gaz  doit  déterminer  la  formation  de 
l'acide  sulfurique  hydraté,  avec  un  dégagement  total  de 
chaleur  à  peu  près  double  de  celui  qui  répond  à  l'acide 
sulfureux. 

J'ai  cru  devoir  faire  de  nouvelles  expériences.  J'ai  em- 
ployé une  chambre  à  combustion  en  verre  mince,  très- 
légère,  d'une  capacité  assez  considérable,  et  disposée  de 
façon  à  pouvoir  voir  la  combustion  et  constater  s'il  y  a 
quelque  trace  de  soufre  sublimé  ou  d'acide  sulfurique 
condensé  ;  dernière  circonstance  qui  se  présente  en  effet, 
pour  peu  que  l'oxygène  ne  soit  pas  absuliunent  sec. 

Voici  le  dessin  de  cet  appareil  (Jig»  i)  : 

CCCC  est  la  chambre  à  combustion  en  verre,  figurée 
au  centre  d*un  calorimètre  d'un  litre,  lequel  est  disposé 
comme  dans  mes  autres  expériences. 

Cette  chambre  en  verre,  de  forme  cylindrique,  est  ter- 
minée par  deux  calottes  sphéroïdales.  Vers  sa  partie  infé- 
rieure s'ouvre  un  serpentin  de  verre  sss^  soudé,  enroulé 
autour  de  la  chambre  et  qui  se  termine  en  /par  un  tube 
vertical  ff,  recourbé  plus  loin  à  angle  droit  et  destiné  à 
éconduire  Facide  sulfureux  hors  du  laboratoire. 

La  chambre  a  combustion  est  munie  de  deux  tubulures 
verticales  à  sa  partie  supérieure.  L'une  d'elles,  plus  étroite, 
00,  porte  un  tube  recourbé  à  angle  droit,  l'i\  qui  amène 


UONMËES    FOHDlHEnTALBS    DE   LA    TMEBHOCBlUtE. 


7 


l'oxygène  sec  dans  la  chambre.  Cet  oxygène  est  débité  par 
un  gazomètre. 

L'autre  tubulure  plus  large,  K,  est  muuie  d'un  gros  bou- 
chon B,  par  lequel  s'engage  un  large  tube  vertical  T,  fermé 
à  sa  partie  supérieure  par  un  autre  bouchon  plus  petit,  6. 


C'est  par  ce  tube  T  que  l'on  introduit  le  charbon  en 
igniti on,  destiné  à  enflammer  le  souTre  (l'OirpIus  loin). 

Le  soufre  lui-même  est  placé  dans  un  petit  creuset  de 
biscuit  suspendu  par  un  fil  de  platine,/! 

Ce  fil  est  fiché  par  sa  partie  supérieure  dans  le  bou- 
oliouB,  11  traverse  deux  rondelles  de  mica,  m,  m,  destinées 
à  proléger  le  bouchon  contre  la  flamme. 


8  BEATHEl.OT. 

J'ai  employé  aussi  la  même  chambre  à  combustion  en 
verre  pour  brûler  l'oxyde  de  carbone  et  les  carbures  d'hy- 
drogène, sauf  à  en  modifier  légèrement  les  dispositions, 
comme  il  sera  dit  plus  loin.  Elle  me  parait  offrirde  grands 
avantages  sur  les  chambres  métalliques,  employées  par 
Duloug  et  par  MM.  Favre  et  Silbermann.  Non-seulemcni 
elle  est  beaucoup  plus  légère  :  ce  qui  permet  de  la  peser  sur 
des  balances  à  analyse  ordinaire  et  ce  qui  rend  très-pelilc 
Tinterveniion  de  la  masse  de  cette  chambre  évaluée  en 
eau.  Mais,  en  outre,  sa  transparence  permet  de  voir  et  de 
régler  la  combustion,  ce  qui  n'est  pas  facile  avec  les  cham- 
bres métalliques.  La  clôture  de  la  chambre  de  verre  est 
plus  facile  à  obtenir,  et  sa  forme  peut  être  modifiée  aisé- 
ment, suivant  les  besoins  de  chaque  expérience.  D'ailleurs 
la  construction  d'une  chambre  nouvelle,  appropriée  à 
chaque  cas  particulier,  est  facile ,  peu  coûteuse ,  et 
prompte  à  réaliser. 

Enfin  la  chambre  de  verre  peut  être  immergée  entière- 
ment, à  l'exception  des  tubulures,  sous  le  niveau  de  Teau 
du  calorimètre;  tandis  que  les  chambres  métalliques  les 
plus  usitées  offrent  une  surface  extérieure  considérable. 
J'ajouterai  que  la  cause  d'erreur  qui  résulte  de  cette  cir- 
constance est  d'autant  plus  atténuée  dans  une  chambre  de 
verre,  que  le  verre  est  moins  conducteur  que  le  métal. 

Mais  revenons  à  la  combustion  du  soufre.  Dans  mes  ex- 
périences, le  soufre  était  du  soufre  octaédrique  pur,  ne 
laissant  pas  de  cendres.  On  le  pesait,  avant  l'expérience, 
dans  un  petit  creuset  de  porcelaine,  et  on  avait  soin  de  le 
brûler  jusqu'à  la  dernière  trace.  Cette  précaution  m'a 
paru  indispensable,  les  combustions  incomplètes  fournis- 
sant des  nombres  peu  réguliers. 

Comme  contrôle  j'ai  cherché  à  peser  l'acide  sulfureux 
produit,  en  le  récoltant  dans  un  tube  de  Liebig;  mais  celte 
adjonction  rend  la  marche  des  combustions  irrégulîère. 
Après  avoir  vérifié,  dans  quelques  essais,  que  le  poids  de 


DONIVÉES    FOJKDAMENTÂLES    DE    LA    THERMOCHIMIE.  [) 

Tacide  sulfureux  concorde  avec  celui  du  soufre  à  -pf^  près, 
je  me  suis  borné  à  peser  le  soufre  brûlé,  Tacide  sulfureux 
étant  conduit  par  un  lube  hors  du  laboratoire. 

L'inflammation  du  soufre  éiaît  produite  à  l'aide  d'un 
très-petit  morceau  de  charbon  de  bois,  pesant  environ 
1  milligrammes,  que  l'on  enflammait  et  qu'on  laissait 
tomber,  par  un  large  tube,  aussitôt  refermé,  dans  le  creuset 
suspendu  à  l'intérieur  de  la  chambre  à  combustion. 

En  réglant  l'accès  de  l'oxygène,  la  combustion  s'effectue 
très-bien.  Elle  durait  dix  à  douze  minutes  dans  mes  essais; 
réchauffement  de  l'eau  du  calorimètre  se  prolongeant  en- 
suite pendant  quatre  à  cinq  minutes.  Voici  les  nombres 
obtenus  : 

Poids  Chaleur  dégagée 

du  par  iG  grammes  de  soufre 

soufre  brûU'.  S  -+-  0=  —  SC. 

0,867 -^    34,57 

o,82() -4-   34^54 

0,901 -f-  34,39 

0,860 -f-  34,70 

i 

Moyenne....        -+-  34^55 

Le  nombre  que  j'ai  adopté  comme  résultant  de  mes  essais 
est  plus  faible  que  ceux  de  mes  prédécesseurs;  ce  que  j'at- 
tribue en  partie  à  un  procédé  plus  exact  pour  apprécier  les 
corrections  dues  au  refroidissement  (*).  En  effet  ces  cor- 
rections ont  été  exécutées  à  l'aide  de  données  spéciales 
mesurées  dans  chaque  essai,  et  non  à  l'aide  de  coefficients 
déterminés  une  fois  pour  toutes,  comme  on  le  faisait  autre- 
fois. Leur  valeur  s'est  élevée  de  4  à  5  centièmes  seulement 
du  chiffre  total,  dans  mes  mesures. 

La  différence  entre  mes  données  et  celles  de  mes  prédé- 


(*)  Annales  de  Chimie  et  de  Physique,  /j**  série,  t.  XXIX,  p.  107,  iTS. 


I O  BEETHELOT. 


ccfsseurs  me  pataît  aussi  due  en  partie  à  une  formation 
moindre  diacide  sulfurique  anhydre,  formation  que  je  n^ai 
cependant  pas  réussi  plus  qu'eux  à  éviter  complètement; 
le  nombre  véritable  doit  donc  être  un  peu  inférieur  à 
4-34^55. 

Le  soufre  insoluble  (tiré  de  la  fleur  de  soufre)  donnera 
eicactement  le  même  nombre,  sa  transformation  en  soufre 
octaédrique,  vers  i8  degrés,  ne  produisant  ni  dégagement, 
ni  absorption  de  chaleur  d'après  mes  déterminations  (^). 

En  adoptant  cette  valeur  pour  la  réaction  suivante  : 

(i)       S-f-0»i=SO'  gaz  dégage -h 34, 55 

on  peut  calculer  la  chaleur  de  formation  de  l'acide  sulfu- 
rique et  des  sulfates.  La  formation  thermique  de  l'acide 
sulfurique  se  conclut  des  données  suivantes,  que  je  regarde 
comme  les  plus  exactes  : 

S  -f-  O'  =  SO^  gaz -f-34,55  {') 

SO'  gaz  -h  eau  =  SO^  dissous -h  3 ,85  (-) 

SO'diss.  -f-Clgaz  +  2HOr=S0»,H0élen(lii.  -4-36,95  (* 

H  4-Cl=  HCl  étendu -4-39,3     ;* 

H  -I-  O  r:::  HO +34,5        « 

D'où  je  lire 

SO^dissous-i-O -f- HO -f- eau  — SOS  HO  étendu    •  4-32, i5 

SO^  gaz  H-  0  -h  HO  -4-  eau  =  SO»,HO  étendu -r-36,  o 

S  -+-  0*  -4-  HO  -f-  eau  — SO^HO  étendu -H70,5 


(»)  Foir  mes  expériences,  Annales  de  Chimie  et  de  Pt^xsiijuey  4**  série, 
t.  XXVI,  p.  4G2. 
'»)  Berthelot. 
(')  Favre  et  Thomsen. 
(*;  Thomsen. 
(*}  Thomsen. 
(*')  Moyenne  des  auteurs. 


I 

t 


DONHÉES    FONDiMESTÂLES    DE    LA   TUEUMOCBIMIE.        I  I 

t 

On  a  encore  : 

S0»-4-eau  =  S0%H0élendu +18,7  0) 

SO»HOpur-l- eau  rrr  SOS  HO  étendu.,     -4-  B,5;') 

D'où  je  lire  : 

,2)  S  -4-  0^  =r  SO'  anhydre  dégage .....  -h5i , 8 

(3)  SO'  -hO  =  S03  anhydre -f-i?,?. 

(4)  S-+-0»-f-HO  =  SO\HO 4-62,0 

5)         S  -+-  0*  H-  H  —  SO<H +96,5 

On  a  enfin,  d'après  diverses  autres  données  que  je  sup- 
prime : 

Sh-0^-+-K    —S0*K  solide 1-171,1 

S-hO*-+-Na"SO»Na -4-i63,2 

S -f- 0< -4- Pb -- SO* Pb -+-107,0 

S -f- OM- Zn -zz  SO* Zn -1-116,7       / 

S  H-  0^  -t-  Cu  =r  S0«Cu -^  9>  »4 

II.  — ^Oxjde  de  carbone, 

J*ai  déterminé  de  nouveau  la  chaleur  de  combustion 
de  Toxyde  de  carbone,  quantité  importante  et  dont  la 
valeur  exacte  laisse  encore  quelques  doutes.  En  effet,  voici 
les  nombres  obtenus  par  les  divers  auteurs,  ces  nombres 
étant  rapportés  à  C*0'  =  38^',  et  à  la  réaction  : 

C202-h0*=:C»0<. 

Cal 

D*après  Dulong 73>75 

Favre  et  Silhermann 67,28 

Grassi 66,02 

Andrews 68,07 

Thomsen 66 ,  08 


(')  Berthelot. 

(*)  Divers  auteurs. 


12  BERTHELOT. 

La  moyenne  générale  des  quatre  premiers  nombres, 
seule  connue  à  l'époque  de  mes  premières  études,  étant 
69^**,  o,  j'avais  cru  pouvoir  adopter  cette  valeur  dans  mes 
anciens  calculs.  En  y  joignant  le  nombre  de  M.  Thomsen, 
cette  moyenne  tombe  à  68^*',  20. 

Tous  ces  nombres  sont  sujets  à  une  cause  d'erreur  assez 
sensible,  parce  que  Ton  n'avait  pas  réussi  jusqu'à  présent 
à  brûler  l'oxyde  de  carbone  pur.  Mais  il  avait  toujours 
fallu  le  mélanger  avec  de  l'hydrogène;  ce  qui  complique  à 
la  fois  les  mesures  de  poids  et  les  calculs  calorimétriques, 
l'exactitude  du  nombre  relatif  à  l'oxyde  de  carbone  étant 
ainsi  subordonnée  à  celui  dé  l'hydrogène. 

J'ai  obtenu  moi-même  par  voie  indirecte,  c'est-à-dire 
en  changeant  l'acide  formique,  d'une  part  en  oxyde  de 
carbone,  et  de  l'autre  en  acide  carbonique,  la  valeur 
68,5  {'). 

Il  m'a  paru  utile  de  mesurer  de  nouveau  la  chaleur  de 
combustion  de  l'oxyde  de  carbone.  J'ai  opéré  avec  la  cham- 
bre à  combustion  décrite  à  la  page  7,  et  modifiée  confor- 
mément à  \^fig.  2  (p.  i3),  par  l'introduction  de  deux 
tubes  concentriques  L  et  /,  destinés  à  amener  l'oxyde  de 
caibone  et  l'oxygène  à  travers  le  bouchon.  Ces  tubes  sont 
terminés  à  leur  partie  inférieure  par  une  feuille  de  platine 
p^  mince  et  enroulée. 

Je  suis  parvenu,  avec  l'aide  dévouée  de  M.  Ogier,  à  brûler 
ainsi  l'oxyde  de  carbone  pur  dans  l'oxygène.  Il  suflSt  de 
régler  convenablement  l'accès  des  deux  gaz,  à  l'aide  d'une 
petite  pince  posée  en  g  sur  le  tube  de  caoutchouc  qui 
amène  l'oxyde  de  carbone.  L'expérience  est  délicate  et  ne 
réussit  pas  toujours,  l'oxyde  de  carbone  s'éteîgnant  parfois 
subitement. 

Une  première  série  de  huit  expériences,  dans  lesquelles 


(*)  Annales  de  Chimie  et  de  Physique,  b^  série,  t.  V,  p.  3i6. 


DOKHÉES    FOl^DAMENTALES    DE    LÀ    THERMOCHIMIE.        l3 

l'oxyde  de  carbone  brûlé  a  élé  pesé   souâ  forme  d'acide 
carbonique,  ont  donné  comme  valeur  moyenne  :  -H  68,22.  ' 
Quelques-unes  de  ces  expériences  s' écartant  un  peu  de  la 
moyenne,  on  a  répété  les  essais.  Quatre  nouvelles  expé- 
riences conduites  avec  beaucoup  de  soin  ont  donné  des 

Fig.  2. 


résultats  concordant  à  2  ou  3  millièmes  près,  et  qui  con- 
duisent à  exprimer  la  chaleur  de  combustion  par  la  valeur 

H- 68, 12. 

J'adopterai  la  valeur  68,17,  ou  plus  simplement  68,2, 
comme  moyenne  définitive.  En  regardant  comme  exacte  la 
cbaleur  de  formation  de  l'acide  carbonique  donnée  par 


y 


l4  BERTBELOT. 

MM.  Favreet  Silbermann,  soit 

C^ (diamant)  -+-  0*=:  C'O*  dégage  4-  gf  "',00, 

la  chaleur  dégagée  par  l'union  du  carbone  (diamant)  et  de 
Toxygène  dans  la  formation  de  Toxyde  de  carbone  devient  : 

C'(diamant)H-0'  =  C*0»(28«^)dégage:  H-25^S8. 

Avec  le  carbone  amorphe,  il  faudrait  accroître  celte  valeur 
de  3,0^  soit 

C^( amorphe)  -4-  0*=  OO*  dégage  :  -h  28,8. 

m.   —  Éthjlène. 

Deux  combustions  régulières  de  l'éthylène  faites  aver 

cet  appareil,  en  pesant  l'eau  et  Tacide  carbonique  et  cii 

tenant  compte  des  traces  non  brûlées,  suivant  les  procédés 

de  MM.  Favre  et  Silbermann,  nous  ont  donné  pour  la 

chaleur  de   combustion  de    aS  grammes   d'éthylène    les 

nombres  . 

33i,  I 

337,9 
Moyenne.  . .     334,5 

résultat  concordant  avec  ceux  de  nos  prédécesseurs.  En 
effet,  les  nombres  de  Dulong,  Favre  et  Silbermann,  An- 
drews, Thomsen,  oscillent  entre  332, o  et  336,8,  la 
moyenne  étant  'iZ^^i. 

IV.  —  Acétjlène, 

La  combustion  régulière  de  ce  gaz  est  plus  difficile  Ix 
réaliser  que  celle  de  Télhylène.  Deux  essais  ont  fourni, 
pour  C*H*  =  26  grammes, 

3i2,o 
323,0 

Moyenne...     3i7,5 


DOJXNÉES    FOUDA MENTALES    DB    LÀ    THERSflOCHIMIE.        l5 

M.  Thomsen  a  obtenu  des  nombres  variant  de  3o8  àv3i5, 
en  moyenne  3i  i. 

J'ai  obtenu  moi-même,  en  brûlant  l'acétylène  par  voie 
humide  :  Sai  [voir  ce  Recueil,  5®  série,  t.  IX,  p.  1 65). 

Je  ne  reviendrai  pas  sur  les  conclusions  que  j'ai  tirées 
de  ce  nombre,  relativement  au  caractère  endothermîque 
de  la  synthèse  de  l'acéiylène  et  à  ses  diverses  transfor- 
mations [voir  le  Mémoire  cité,  p.  171a  i74)« 

V.  —  Benzine,  Om\ 

La  chaleur  de  combustion  de  la  benzine  n'a  jamais  été 
déterminée.  Nous  avons  trouvé  dans  une  expérience,  pour 
C**H^  =  78  grammes  : 

La  chaleur  de  combustion  égale  à  776. 

Mais  celte  quantité  demande  à  être  étudiée  d'une  ma- 
nière plus  approfondie. -Nous  y  reviendrons. 

VL  —  Acide  bronihydrique. 

La  chaleur  de  formation  de  l'acide  bromhydrique  a  été 
déduite  d'abord,  par  MM.  Favreet  Silbermann,  delà  cha- 
leur dégagée  lorsqu'on  déplace  le  brome  du  bromure  de 
potassium  au  moyen  du  chlore 5  ils  ont  donné  le  nombre 
suivant  : 

H  +  Br  liquide  -f-  eau  rrr  HBr  étendu  dégage  ...      +28,4 

M.  Thomsen  a  trouvé  exactement  le  même  nombre,  par  la 
même  méthode. 

Ayant  dissous  le  brome  pur  dans  la  potasse,  puis  réduit 
le  produit  par  l'acide  sulfureux,  en  présence  d'un  très-grand 
excès  d'acide  chlorhydrîque,  j'ai  trouvé  pour  la  chaleur 
de  formation  de  l'acide  bromhydrique  un  nombre  sensible- 
ment plus  fort  :  -f-  29,8. 

Quoique  ce  résultat  soit   obtenu   par    la    réunion  de 


l6  BERTHELOT. 

deux  expériences  successives,  il  conduit  à  supposer  que 
la  réaction  du  chlore  sur  le  bromure  de  potassium  pourrait 
donner  lieu  à  quelque  phénomène  secondaire  qui  aurait 
passé  inaperçu.  En  effet,  dans  une  expérience  d'ordre 
analytique  telle  que  celle-ci,  le  brome  n'est  pas  séparé  di- 
rectement et  en  nature,  mais  il  demeure  dissous;  de  sorte 
que  le  poids  du  brome  libre  n'est  pas  mesuré  d'une  manière 
immédiate  et  dans  les  conditions  mêmes  de  la  détermina- 
tion calorimétrique.  On  le  conclut  d'une  analyse  ultérieure, 
pendant  laquelle  certaines  transformations  sont  possibles. 
J'ai  cru  préférable  d'opérer  par  voie  synthétique,  c'est- 
à-dire  sur  le  brome  pur,  pris  sous  un  poids  connu,  et  que 
l'on  dissout  en  vase  clos,  c'est-à-dire  dans  une  fiole  calori- 
métrique, au  moyen  d'une  solution  étendue  d'acide  sulfu- 
reux. J'ai  obtenu  ainsi  : 


Poids 

Chaleur 

dégagée 

du  brome. 

par  Br  = 

=  8o»r. 

13,752 

•      .       -f-  •27»7 

à  i3° 

3,675 

-4-27,2 

à  i4% 

6 

5,653 

-h  26,7 

à   i5'> 

Moyenne ...        -h  27 , 2 

Ce  nombre  répond  à  la  réaction 
SO'  dissous  -h  Br  liquide  -}-  2  HO  =.  SO*,  HO  étendu  -»-  H  Br  étendu . 

On  en  tire,  d'après  les  chaleurs  de  formation  de  l'acide 
chlorhydrique  (au  moyen  des  éléments)  et  de  l'acide  sulfu- 
rique  (au  moyen  du  chlore  et  de  l'acide  sulfureux)  adoptées 
plus  haut  (p.  10)  : 

(  I  )      H  -h  Br  liquide  -f-  eau  =  H  Br  dissous  :  dégage. . .     -f-ag ,  5  ; 

nombre  que  je  crois  plus  exact  que  les  précédents,  parce 
que  l'état  initial  et  l'état  final  sont  mieux  définis. 
On  en  tire  encore  : 

(  2  )     H  H-  Br  gaz  -h  eau  =  HI  Br  étendu,  dégage  :  -f-  33 ,  i , 


DONNÉES    FONDÀMEKTÀLES    DE    LA    THERMOCHIMIE.        I7 

nombre  inférieur  seulement  de  6  unités  à  la  chaleur  de 
formation  de  Facide  chlorhydrique  dissous. 

J'ai  trouvé  d'ailleurs  [Annales  de  Chimie  et  de  Phjr^ 
siquey  4*  série,  i,  IV,  p.  477) 

HBr  gaz  -h  €jau  =.  HBr  étendu +20 ,0 

d'où  résulte 

(3)  H  4-  Br  liquide  1=  HBr  gaz -+-  9,5 

(4)  H  +  Br  solide   =  HBr  gaz -h  9,4 

(5)  H-f-Brgaz       =  HBr  gaz +i3,i 

VI.  —  Acide  iodhjdvique. 

MM.  Favre  et  Silberraann  ont  déduit  la  chaleur  de  for- 
mation de  Tacide  iodhydrique  de  la  chaleur  dégagée  lors- 
qu'on précipite  l'iode  de  Tiodure  de  potassium  par  le 
chlore,  soit 

H  -ri  solide  -h  eau  z=z  HI  étendu i5,o. 

M.   Thomsen  a    trouvé,   d'après  la  même   réaction  : 

4-  l3,2. 

J'ai  contrôlé  ces  nombres  par  voie  synthétique,  en  dis- 
solvant l'iode  dans  Tacide  sulfureux.  J'opérais  chaque  fois 
sur  la^'j^  d'iode.  Dans  mes  essais, 

SO»  étendu  + 1  solide  -i-  2HO 

z=z  SO^,  HO  étendu  4-  HI  étend  u,  a  dégagé -4-10,9 

Ce  nombre  a  été  obtenu  en  opérant  en  présence  d'un 
grand  excès  d'acide  sulfureux. 

En  opérant  avec  un  excès  à  peine  sensible,  j*ai  trouvé 
-h  11,2,  nombre  que  je  crois  moins  exact,  la  liqueur  de- 
meurant teintée  en  jaune.  D'après  le  chiffre -h  10,9,  on  a 

(i)        H -h  Isolide  -f-  eau  =  HI  étendu -hi3,2, 

c'est-à-dire  le  même  nombre  que  M.  Thomsen  a  obtenu 
par  une  réaction  différente.  ' 

Ann,  de  Chim,  et  de  Phjrs,^  5*  série,  t.  XIII.  (Janvier  1878.)  2 


1 8  BBILTHELOT. 

Cette  concordance  entre  l'expérience  synthétique  et 
Texpérience  analytique  s'explique  aisément  pour  Tiode, 
en  remarquant  que  dans  la  dernière  expérience  cet  élé- 
ment ne  demeure  pas  dissous  et  apte  à  des  réactions  secon- 
daires comme  le  brome  ]  mais  qu'il  se  précipite  en  nature 
et  presque  en  totalité. 

On  déduit  encore  de  ce  chiffre  (  *  ) 

(2)         H  -i-Igaz  +  eau  4- HI  étendu -f-i8,6; 

nombre  qui  est  à  peu  près  la  moitié  d'une  valeur  intermé- 
diaire entre  les  chaleurs  de  formation  des  acides  chlorhy- 
drique  et  bromhydrique  dissous  au  moyen  de  leurs  éléments 
gazeux.  Enfin 

(a)  H  + 1  solide  =  HI  gaz —6,3 

(4)  H-4-Igaz      =HIgaz —  o,q 

Les  nombres  qui  expriment  la  formation  thermique  des 
trois  hydracides  au  moyen  de  leurs  éléments  gazeux, 
c'est-à-dire 

-{-22, o  (H  4- Cl  gaz) 

-4-i3,i  (H-f-Brgaz) 

—  o,9(H-f-I    gaz) 

ne  sont  pas  fort  éloignés  des  rapports  simples  0:1:2,  que 
je  rappelle  en  passant. 

VII.  —  jicide  bromique. 

J'ai  opéré  sur  du  bromate  de  potasse  très-pur,  que  j'avais 
préparé  moi-même  et  analysé.  Je  l'ai  réduit  par  l'acide 


(*)  On  admet  ici  que  la  Yaporisation  de  l'iode  (1  =  127^)  à  zéro  absorbe 
—  5,4 9  valeur  obtenue  en  ajoutant  aux  chaleurs  de  fusion  et  de  Yaporisa- 
tion l'excès  des  chaleurs  spécifiques  liquide  et  solide  sur  la  chaleur  spéci- 
fique gazeuse  depuis  o"*  jusqu'aux  températures  de  fusion  et  de  Taporisation. 


DONNÉES    FONDAMENTALES   DE    LÀ    THERMOGHIMIE.  I9 

sulfureux,    en    présence  d'un   très-grand  excès    d'acide 
chlorhydrîque.  J'ai  trouvé  : 

IBrO^'K  -+-  eau  (5o parties)  à  i  i^absorbe ...      —  9,85 
Br  liquide  -h  0*  -4-  HO  -f-  eau 
=  Br  0%  HO  étendu  absorbe . . .      — 24 , 8 

M.  Thomsen,  en  réduisant  le  même  acide  par  le  chlo- 
rure stanneux,  a  trouvé — 21,8.  Mais,  en  substituant,  dans 
le  calcul  de  ses  expériences,  le  nombre  +  38,5,  qui  me 
semble  plus  exact,  au  nombre  -i-  38,o,  qu'il  a  adopté  pour 
la  percbloruration  du  chlorure  stanneux,  on  arrive  égale- 
ment à  —  24,8. 

On  tire  de  là 

(2)     Br  gaz  -4-  0*  -4-  HO  -f-  eau  =  BrOS  HO  étendu.     —21,2 

nombre  presque  double  de  la  chaleur  absorbée  dans  la  for- 
mation de  l'acide  chlorique  ( —  12,0). 

On  a  encore,  pour  l'acide  bromique  (et  les  bromates 
dissous) 

BrOSHO  étendu  :=HBr  étendu  -f-0« -f-i5,5 

BrOSKsoUde     =KBr-h0« +11,1 

valeurs  qui  sont  sensiblement  les  mêmes  que  pour  l'acide 
chlorique  dissous  (4-  16,8)  et  pour  le  chlorate  de  potasse 
solide  (-h  11,0). 

Vni.  —  jicide  hjpobromeux. 

Les  hypobromites  se  forment  aisément  par  la  réaction 
du  brome  sur  les  solutions  alcalines.  J'ai  trouvé,  en  pré- 
sence d'un  excès  d'alcali, 

NaO(iéq.  — 3"')  4-Br(i4^'3i8et    3^365)  à    9"...      -+-6,0 
KO    (iéq.=:4^^') -f-Br(i5,8oi  et   5,734)  à  11». .  .     -4-5,95 
BaO  (1  éq.=:6"')  -hBr  (12,096  et  12,339)  à  i3«. .  .      -f-5,7 

En  admettant  que  l'acide  hypobromeux  étendu  dégage, 
en  s'unissant  aux  bases,  la  même  quantité  de  chaleur  que 

2. 


20  beuthelot. 

Tacide  hypochloreux,  soit  -h  9,5,  je  lîre  des  chiffres  pré- 
cédents : 

(i)       Brliquide-f-0  4- eau  rrrrBrO  étendu. . .      —  6,7 
(2)       Brgaz        -4- 0 -T- eau  =  BrO étendu  ...      —  3,i; 

le  dernier  nombre  est  le  mêuie  sensiblement  que  pour  la 
formation  de  Tacide  hypochloreux  [ —  2,9  (*)]. 

Avant  de  pousser  plus  loin  ces  comparaisons,  il  faut 
étudier  la  formation  thermique  des  composés  oxygénés  de 
l'iode. 


%»%  *%%*%%**%%%%*  %v»  \ 


RECHERCHES  SUR  L  ACIDE  lODIQlIE; 

Par  m.  BERTHELOT. 


1.  Je  vais  exposer  les  résultats  que  j'ai  obtenus  en  fai- 
sant agir  Tiode  sur  la  potasse,  condition  dans  laquelle  on 
observe  les  formations  de  l'acide  hypo-iodeux  et  de  l'acide 
iodique^  j'examinerai  ensuite  la  réaction  de  l'acide  iodique 
sur  l'eau  et  les  alcalis  ;  enfin  je  comparerai  la  formation 
thermique  des  sels  oxygénés  qui  dérivent  du  chlore,  du 
brome  et  de  Tiode,  en  tâchant  d'en  déduire  quelques  don- 
nées nouvelles  pour  la  mécanique  moléculaire. 

2.  Si  l'on  dissout  Tiode  dans  la  potasse  étendue,  à  la 
température  ordinaire,  avec  le  concours  de  mon  écraseur, 
deux  effets  thermiques  se  succèdent  très- rapidement.  Pen- 
dant la  première  minute,  on  observe  un  abaissement  de 
température,  qui  s'élève  jusqu'à  — 0^,3,  lorsqu'on  dissout, 
par  exemple,  3i  grammes  d'iode  dans  5oo  centimètres 
cubes  d'une  solution  renfermant  7  équivalent  de  potasse 

• 

(*)  Fotr  ce  Recueil,  5*  série,  t.  V,  p.  338 


ACIDE    lODIQUE.  ^1 

par  litre.  Ce  phénomène  initial  répond  à  la  dissolution  de 
la  plus  grande  portion  de  l'iode  employé.  Des  effets  de 
même  signe  ont  lieu  également  avec  des  liqueurs  deux  fois 
et  quatre  fois  aussi  étendues. 

Aussitôt  ces  effets  produits,  le  thermomètre  remonte, 
par  suite  d'une  nouvelle  réaction,  qui  se  prolonge  pendant 
quatre  à  cinq  minutes,  tandis  que  la  totalité  de  l'iode  entre 
en  dissolution.  La  réaction  complète  peut  être  effectuée 
en  rapports  équivalents  (sauf  une  trace  d'iode  libre  ou  de 
quelque  autre  composé,  qui  jaunit  un  peu  la  liqueur).  A 
ce  moment,  la  liqueur  renferme  de  Tiodate  et  de  Tîodure 
de  potassium,  conformément  à  la  réaction  connue. 

3P  -f-  6K0  étendue  =  5KI  dissous  -f- 10*  K  dissous. 

3.  Le  phénomène  initial  me  parait  dû.  à  la  formation 
d'un  hypo-iodîle.  , 

I*  -f-  2  KO  étendue  =  10,  KO  étendu  H-  Kl  étendu  ; 

mais  ce  corps  n'a  qu'une  existence  momentanée,  et  il  se 
change  aussitôt  en  iodate,  à  la  température  ordinaire. 

On  sait  que  la  même  réaction  ne  se  produit  très-rapi- 
dement que  vers  loo  degrés  avec  les  hypochlorîtes. 

L'hypobromite  avec  excès  d'alcali  résiste  bien  plus  long- 
temps, même  à  lOO  degrés,  comme  je  l'ai  vérifié. 

4.  Cette  inégale  stabilité  des  trois  sels  est  explicable  par 
la  progression  inverse  des  stabilités  des  chlorate,  bromate, 
iodate,  ainsi  qu'on  le  verra  tout  à  l'heure.  L'acide  hypo- 
chloreux  libre,  au  contraire,  est  le  plus  stable  de  tous,  car 
on  peut  le  déplacer  à  froid  par  l'acide  carbonique,  et  même 
par  l'acide  acétique;  tandis  que  l'un  ou  l'autre  de  ces  der- 
niers acides,  mis  en  présence  des  hypobromîtes,  en  sépare 
aussitôt  du  brome,  comme  Balard  Tavait  observé  dès  l'ori- 
gine. Ce  brome  est  mêlé  probablement  de  quelque  autre 
composé,  ainsi  que  je  l'ai  reconnu,  d'après  la  mesure  de  la 
chaleur  dégagée  dans  les  deux  cas. 


22 


BERTHELOT. 


5.  Je  ferai  observer  encore  ici  que  la  formalîon  des  hy- 
pobromites  ne  suffit  pas  pour  expliquer  la  réaction  du  brome 
sur  les  alcalis.  En  effet,  celle-ci  va  beaucoup  plus  loin  que 
celle  du  chlore  :  ainsi  Teau  de  baryte  dissout  à  froid  près  de 
a  équivalents  de  brome.  Jusqu'à  i  y  Br  pour  Ba  O  =  768'',  5, 
la  liqueur  est  à  peine  teintée  ;  elle  n^offre  pas  Todeur  da 
brome  proprement  dite.  La  chaleur  dégagée,  à  ce  moment, 
soit -i-5^**,4>  oc  diffère  guère  de  la  chaleur  dégagée  par 
la  réaction  d'un  seul  équivalent  de  brome  (+5,7).  Il  y 
a  donc  là  quelque  chose  à  éclaircir. 

6.  Mais  revenons  à  la  formation  deThypo-iodite.  Quand 
on  ajoute  l'iode  à  la  potasse  étendue  par  fractions  succes- 
sives, en  deux  fois  ou  en  trois  fois  par  exemple,  chaque 
addition  donne  lieu  à  la  même  succession  de  phénomènes, 
c'est-à-dire  à  un  abaissement  de  température,  suivi  aussitôt 
d'un  réchauffement;  ce  qui  montre  que  l'effet  est  bien 
caractéristique  de  la  réaction  elle-même,  et  indépendant 
des  fractions  d'iode  et  de  potasse  déjà  combinées. 

Ces  effets  singuliers,  que  le  thermomètre  seul  peut  nous 
révéler,  demandent  à  être  précisés  par  des  chiffres  : 


l4-K0(i«^=2ii'),à  i4<>: 


Premier  effet  :  absorption .  • . 
Deuxième  effet  :  dégagement 


Effet  total. . . 


î-hK0(i'^  =  4^''),k  i5o: 

On  ajoute  la  moitié  de  Tiode  :  premier  effet. . 
»  *  deuxième  effet 

Effet  total . . 

On  ajoute  le  surplus  de  Tiode  :  premier  effet. . 

»  »  deuxième  effet 

Effet  total . . 

La  chaleur  totale  des  deux  effets  réunis. .  • . 


Cal 

—  o,58 
-f-  o,65 


0,07 


—  o,38 
-T-  o,3o 


0 

,08 

— 

0, 

ȕ9 

-+- 

0, 

»i7 

03 

>02 

—    O.IO 


AGIDB   lODIQUE.  a3 

I  +  KO(i*<»=8»%ài5°:- 

Premier  effet —  i  ,27 

Deuxième  effet «     -+-  1,18 

Effet  total .. .     —  o>o9 

7.  Observons  ici  que  le  premier  effet  thermique,  c'est- 
à-dire  le  refroidissement,  ne  fournit  pas  une  mesure  pré- 
cise de  la  chaleur  absorbée  dans  la  réaction  correspondante 
(formation  de  Thypo-iodite),  mais  seulement  une  limite 
supérieure;  attendu  que  le  réchauffement  succède  trop  ra- 
pidement. 

Ce  premier  effet  suffit  cependant  pour  établir  Vexis- 
tence  d^une  réaction  chimique  directe,  accomplie  av^ec 
absorption  de  chaleur;  phénomène  assez  rare  en  Chimie. 
Cette  absorption  surpasse  —  2,5  pour  la  réaction  : 

P  -h  2  KO  étendue  (  i"'  =  8^*1)  =  10,  KO  dissous  -+-  Kl  étendu. 

8.  La  même  remarque  s'applique  à  la  réaction  totale 
(formation  de  Tiodate),  dont  la  valeur  thermique  est  au 
contraire  mesurée  avec  beaucoup  d'exactitude.  La  forma- 
tion de  l'iodate,  au  moyen  de  Tiode  et  de  la  potasse,  répond 
à  une  absorption  de  chaleur,  quand  elle  a  lieu  dans  des 
liqueurs  étendues,  telles  que  i  équivalent  d'alcali  soit  dis- 
sous dans  4  et  8  litres  de  liqueur,  vers  i5  degrés. 

A  première  vue,  on  serait  porté  à  attribuer  cette  ab- 
sorption au  travail  nécessaire  pour  amener  Tiode  solide 
dans  Fétat  de  dissolution.  Sans  contester  d'une  manière  gé- 
nérale la  réalité  de  cette  interprétation,  observons  cepen- 
dant que  la  dissolution  de  l'iode  dans  F  acide  iodhydrique 
ou  dans  l'iodure  de  potassium  répond  à  un  phénomène 
thermique  nul,  diaprés  les  expériences  concordantes  de 
M.  Raoult  et  de  M.  Thomsen. 

9.  Ce  n'est  pas  seulement  l'état  dissous  de  l'iode  qu'il 
convient  d^nvoquer  ici,  mais  aussi  celui  des  autres  corps 
qui  concourent  à  la  réaction,  tels  que  la  potasse,  l'iodure 


a4  BERTHELOT. 

de  potassium  et  Tiodate  de  potasse.  Soit  la  réaction  entre 
corps  dissous  : 

61  (solide  ou  dissous)  -f-  6K0( i*«i  =  4'"ou  8"») 
=  5  Kl  dissous  +  10*  K  dissous. 

Elle  absorbe,  d'après  ce  qui  précède  :  —  o^*',6. 

Au  contraire,  si  Tiodure  et  Tiodate  étaient  produits  à 
Tétat  de  cristaux,   la  réaction  dégagerait  +3i,6. 

Si  Ton  rapportait  la  réaction  à  l'hydrate  de  potasse 
solide:  KO,  HO,  le  dégagement  de  chaleur  serait  porté  à 
4-  io6^*^,5.  A  la  vérité,  l'hydrate  de  potasse  KO,  HO  ne 
saurait  être  supposé  exister  dans  cet  état,  au  sein  des 
liqueurs.  Mais,  en  le  supposant  sous  la  forme  de  lliydrate 
cristallisé  :  KO,  HO -{-  aH'O*,  la  réaction  dégage  encore 

La  réaction  véritable  est  donc  exothermique,  mais  à  la 
condition  d^ écarter  V influence  du  dis so lisant,  en  rappor^ 
tant  les  phénomènes  à  Vétat  solide,  comme  je  propose  de 
le  faire  depuis  quelques  années  [Annales  de  Chimie  et  de 
Physique,  5®  série,  t.  IV,  p.  74)- 

10.  On  passe  de  là  à  l'acide  iodique  anhydre,  à  l'acide 
monohydraté  et  à  l'iodate  de  potasse  solide,  à  l'aide  des 
données  que  voici  : 

i^  lodate  de  potasse  dissous, 

IO«H(i*^=iï"')4-KO(r^=:ii^')==IO«Rdissous,ài3\  -4-i4,3o 
IO«H(i''^^=:4"»)H-KO(r*ï=4"')=:IO«K  dissous -l-i4,25 

Ces  nombres  surpassent  d'une  petite  quantité  la  chaleur 
de  neutralisation  de  Tacide  azotique  par  la  potasse;  excès 
que  j'ai  vérifié  par  la  méthode  des  doubles  décompositions 
réciproques,  c'est-à-dire  en  traitant  tour  à  tour  l'iodate  de 
potasse  dissous  par  l'acide  azotique  étendu,  et  l'azotate  de 
potasse  par  l'acide  iodique,  en  présence  des  mêmes  quan- 
tités d'eau. 


ACIDE    lODEQVE.  a5 

2**  Dissolution  de  l'acide  iodique  hydraté, 

10* H  cristallisé  (i  partie  -h  45  parues  d'eau)  à  12®. . .     — 2,67 

M.  Ditte  a  trouvé  —  2 ,  24  *,  M.  Thomsen  —  2517,  à  une 
température  un  peu  différente. 

3°  Dissolution  de  l 'acide  iodique, 

IO«H{i**ïr=  i^î*)  4- son  volume  d'eau  à  i3° — o,3o 

10«H(i^^  — 2"'J  Id.  —0,08 

I0«H(i*^  =  4"')  Id.  —0,0 

4°  Dissolution  de  l 'acide  iodique  anhydre. 

10*  pur  et  vérifié  (  i  partie  4-  4^  parties  d'eau  )ài2**...     —  0,81 

M.  Dîtie  a  trouvé  — 0,95-,  M.  Thomsen  — 0,89;  à 
une  température  un  peu  différente. 

5°  Dissolution  de  l 'acide  iodique  semihydraté. 

10*  H,  lOS  composé  bien  défini  (i  p. -1-4  5  p.  d'eau  à  12").     — 2,86 

6**  Les  trois  dissolutions  formées  par  l'acide  anhydre,  mo- 
nohydraté  et  semihydraté,  renferment  l'acide  dans  le  même 
état  moléculaire.  En  effet,  traitées  aussitôt  après  leur 
accomplissement  par  la  potasse  (i®*i=2^^'),  elles  ont  dé- 
gagé la  même  quantité  de  chaleur  : 

Pour  10» -4-14,28 

Pour  IO«H -f-i4,3i 

Pour  i(IO« H,  10») +14,35 

7°  Dissolution  des  iodates  de  potasse, 

lO^K  cristallisé  (i  partie  -h  4o  parties  d'eau)  à  12**. .  —  6,o5 

I0«K(i'*ï  =  2*^') -Hsonvolumed'eau  à  13*^ —  o,36 

I0«K(i^*i=:4iî')  Id.  —0,0 

10® K,  10* H  cristallisé  (  i  partie  -h  4°  parties  d'eau  ) . .  — 11,8 

H.  Formation  de  V acide,  —  De  ces  données  on  tire 

I  solide  +  0*4-  eau  =  10* HO  étendu. .      -+-22,6 

Ce  chiffre,  obtenu  par  voie  synthétique,  concorde  avec 


7.6 

la  valeur  +  2i,5  trouvée  par  M.  Thomsen,  k  Taide  de 
procédés  analytiques  ;  on  a  encore  : 

I  solide  -4-  O'  =  10*  anhydre -h23 ,4 

I  gaz  -f-  O*  =  10*  solide -m8,o 

I  solide  H-  O*^  -f-  H  -*-  eaa  =  IO«H  dissous. .     -4-57 ,  i 

I  solide  -+-  0«  -i-  H  =r  IO«H  cristallisé -^59,8 

10*  solide  -h  no  solide  —  IO«H  crisullisé . .      -^   i ,  1 3 

Il  résulte  de  ce  dernier  nombre  que  Tliydratation  de 
Tacide  iodique  ne  dégage  pas  plus  de  clialeur  que  celle 
des  hydrates  salins. 

On  a  enfin  : 

10*  solide  -*-  lO'H  solide  =  lO'H,  10».      -+-  o ,62 
10*  H  dissous  =  HI  dissous  4-0* — 4^  >9 

12.  Sels: 
IO«H  cristall.-f-KHO'sol.=IO«K  cristalL-+-H»0'  sol. .     +3i  ,5 

La  formation  de  Tiodate  de  potasse  solide,  définie  par 
le  chiffre  ci-dessus,  dégage  beaucoup  moins  de  chaleur  que 
celle  des  sulfate  et  azotate^  elle  surpasse  au  contraire  nota- 
blement celle  des  sels  organiques  monobasiques  *,  mais  elle 
est  comparable  à  celle  des  sels  des  acides  organiques  les 
plus  puissants,  tels  que  les  oxalates. 

En  effet,  j'ai  trouvé,  toutes  choses  égales  d'ailleurs,  c'est- 
à-dire  Tacide  hydraté,  la  base  hydratée,  enfin  le  sel  et  l'eau 
étant  tous  supposés  solides  : 

Azotate,  AzO^K H-4i  ,2 

Sulfate,  SO*K +4o»7 

lodate,  IO«K -h3i  ,5 

Oxalale,  C<K^O« +29,4 

Formiate,  C'HKO' +25,5 

Acétate,  OH^KO^ -f-21 ,9 

Benzoale,  C»<H*KO' ■. .  -1-22, 5 


ACIDE    lODIQUB.  ^J 

Soit  encore  l'iodate  acide  : 
IO«K  cristallisé  -f-  lO'H  solide  =  WK,  IO*H  solide. . .      -f-3,  i 

« 

valeur  de  Tordre  de  celles  des  sels  doubles  ordinaires. 
On  a  enfin,  depuis  les  éléments  : 

I  solide  4-  0«  -I-  K  =  IO«K  solide H- 1 ^3 , 9 

Avec  I  gazeux -h  1 29 , 3 

IO«K  solide  =  Kl  solide  4-  0« —  44,  i 

IO«K  dissous  =  Kl  dissous  -h  0« —  4^  ,4 

13.  La  chaleur  dégagée  par  la  formation  de  Tiodate  de 
potasse  solide  depuis  les  éléments  (-1-129,3)  surpasse 
celle  du  bromate  et  du  chlorafte  solides.    J'ai  trouvé,  en 

effet  : 

ClH-0«H-K:=rC10«Kdégage...  +  94,6 

Br  gaz  -f.  0«  -f-  K  =  BrO«K +  87 ,6 

Igaz+0«-+-K  =  IO«K -4-129,3 

On  sait  que  la  stabilité  relative  des  trois  sels  va  crois- 
sant, du  bromate  au  chlorate  et  à  Tiodate. 

C'est  'ce  qui  ressort  plus  nettement  de  la  comparaison 
des  chaleurs  mises  en  jeu,  lorsque  les  trois  sels  solides  se 
décomposent,  avec  mise  en  liberté  d'oxygène  ; 

ClO^K  =KCl  H- 0%  dégage -f-ii,o 

BrO«K=KBr-4-0%  dégage 4-ii,i 

IO«K     =:KI    -h  0%  absorbe — 44>i 

Non-seulement  la  décomposition  de  Tiodate  est  plus  diffi- 
cile, à  cause  de  son  caractère  endo thermique  ;  mais  elle 
est  accompagnée  de  phénomènes  de  dissociation,  Tiodure 
de  potassium  sec  absorbant  l'oxygène  libre.  J'ai  déjà  in- 
sisté sur  cette  question^  qui  est  fort  importante  (ce  Recueil, 
5®  série,  t.  XII,  p.  3i3). 

14.  Pour  achever  la  comparaison,  il  conviendrait  de 
l'étendre  aux  trois  acides  les  moins  oxygénés,  savoir  : 
acides  hypochloreuX)  hypobromeux,  hypo-îodeux.  Malheu- 


aS  BERTHELOT.  —  ACIDE  lODIQUE. 

reusement,  les  données  relatives  au  dernier  corps  sont  fort 
imparfaites,  la  chaleur  observée  dans  la  formation  de 
riiypo-iodite  étant  une  limite  inférieure  plutôt  qu^un 
nombre  absolu.  J'ai  trouvé  d'ailleurs  (t;oi>  plus  haut)  : 

I'sol.-4-2KO  étend.  =10,  KO  diss. -4-KIdiss. . . .      —-2.5  —  a 

I  sol. -1-0  gaz -h  eau  =  10  étendu. .. .     x  )  

10  étendu  -h  KO  étendue y  \  '  "^-^  —  "+-  ^  —  * 

Si  Ton  admet  que  l'union  de  l'acide  hypo-iodeux  avec  la 
potasse  dégage  la  même  quantité  de  chaleur  que  celle  de 
l'acide  hypochloreux,  soit /=  4-  9,  5,  on  aura 

c'est-à-dire 

I  solide  H-  O  -f-  eau  =  10  et.  absorbe —  4  »  5  —  « 

Cette  quantité  est  négative,  de  même  que  la  chaleur  de  for- 
mation des  acides  hypochloreux  ( —  2,9)  et  hypobro- 
meux   ( — 6,7). 

'Les  acides  chlorique  ( —  12,0),  bromique  ( — 24,8)  et 
iodique  (+  22,6)  s'écartent  bien  davantage  les  uns  des 
autres. 

15.  Comparons  les  trois  réactions  principales  dont  les 
systèmes  formés  par  un  corps  halogène  et  un  alcali  sont 
susceptibles. 

i«  3  Cl*  gaz -f- 6K0  étendue 

=  3(C10,  KO)  dissous -h  3 KCl  dissous,  -f-   76,2 

CIO*,  KO  dissous  -f-  5KC1  dissous. . .  -f-  94»^ 

6KC1  dissous  -HO* -f-iii,o 

Le  dégagement  de  chaleur  et  la  stabilité  vont  croissant 
de  l'hypochlorîte  au  chlorate  et  à  l'oxygène  libre. 

2*>  3Br'gazH-6KOétendue 

=  3(BrO,  KO)  dissous  -h  3KBr  dissous,  -h 67, 6 

BrOS  KO  dissous  4-  5KBr  dissous. . .  -I-549O 

6KBr  dissous  -HO» 4-74>4 


HÉTBT.    -^    PURIFICATION    DES    EAUX   GRASSES.  2g 

La  formation  de  rhypobromite  dégage  une  quantilé  de 
chaleur  un  peu  plus  grande  que  le  broinate  ;  ce  qui  explique 
la  stabilité  relative  du  premier  composé.  Mais  la  formation 
du  bromure  et  de  Toxygène  demeure  toujours  la  réaction 
qui  dégage  le  plus  de  chaleur.  On  sait  d^ailleurs  que  la 
potasse  concentrée  peut  donner  de  l'oxygène,  en  agissant 
sur  le  brome  libre. 

3«  3P  gaz +  6K0  étendue 

=  3(10,  KO)  dissous  -f-  3KI  dissous. .  -+-24,9 — 3a 

10*,  KO  dissous -f-  SKI  dissous. . .  .  -4-3i  ,8 

6KI  dissous -h  O** — 12,3 

Ici  la  formation  de  Tiodate  l'emporte  sur  toutes  les 
autres  ;  le  dégagement  de  l'oxygène  libre  entraînerait 
même  une  absorption  de  chaleur,  contrairement  à  ce  qui 
arrive  pour  le  chlorate  et  le  bromate.  Aussi  ce  dégagement 
n'a-t-il  pas  lieu  à  la  température  ordinaire 5  mais  il  s'ef- 
fectue seulement  avec  le  concours  d'une  énergie  étrangère, 
empruntée  à  l'acte  de  l'échaufTement. 

On  voit  que  les  principales  circonstances  chimiques  de 
la  formation  des  combinaisons  entre  l'oxygène  et  les  corps 
halogènes  sont  d'accord  avec  les  données  thermiques. 


MÉTHODE  CHIMIQUE  POUR  L4  PURIFICATION  DES  E4VX  6R4SSES 

DES  CONDENSEURS  A  SURFACES, 

PARTICULIÈREMENT  A  BORD   DES  JVA VIRES  A  VAPEUR^ 

Par   m.    HÉTET, 

Professeur  de  Chimie  à  Brest. 


Dans  les  nouvelles  machines  marines,  la  condensation 
de  la  vapeur  se  fait  par  contact,  à  Taide  de  condenseurs  à 
surfaces,  et  non  plus,  comme  autrefois,  par  injection. 

Les  avantages  attendus  de  cette  modification,  qui  em« 


3o  HÉTET. 

ployait  de  l*eau  distillée  chaude  à  ralimen talion,  étaient  : 
1°  la  suppression  des  dépôts  salins  ou  calcaires  et,  par 
suite,  l'absence  des  coups  de  feu  si  dangereux  qu'ils  pro- 
duisent 5  2**  l'inutilité  des  extractions,  la  salure  ne  pou- 
vant augmenter  dans  les  chaudières  ;  3^  enfin  l'économie 
notable  du  charbon. 

Mais  on  s'aperçut  bientôt  que  des  inconvénients  plus 
graves  avaient  pris  la  place  des  anciens  :  des  dépôts  de 
matière  grasse,  très-chargés  de  fer  enlevé  aux  chaudières, 
se  formaient  et  s^accolaient  aux  tôles  avec  une  très-forte 
adhérence.  Les  surfaces  de  chauffe  ainsi  recouvertes  n'é- 
taient plus  mouillées  et  des  coups  de  feu  pouvaient  se  pro- 
duire (comme  sur  le  cuirassé  le  Lagallissonnière) , 

Les  mêmes  effets  se  sont  produits  en  France,  en  Angle- 
terre, eu  Amérique,  partout  où  Ton  emploie  les  nouvelles 
machines  à  condensation  par  contact,  et  toutes  les  na- 
tions maritimes  recherchent  le  moyen  de  conjurer  une  si- 
tuation si  menaçante  pour  la  durée  et  la  résistance  immé- 
diate des  appareils  à  vapeur. 

En  outre,  la  vapeur  fournie  par  une  chaudière  chargée 
de  corps  gras  s'en  trouve  imprégnée  et  ne  peut  donner 
par  condensation  qu'une  eau  grasse  impotable.  De  là  l'im- 
possibilité de  faire  ainsi  à  bord  de  l'eau  distillée  pour  bois- 
son, et  l'hygiène  des  équipages  se  trotivait  compromise  sur 
un  point  important. 

Il  y  avait  donc  là  deux  questions  très-importantes  que 
j'étais  appelé  à  étudier  par  la  nature  de  mon  service 
comme  chimiste  de  la  Marine,  mais  elles  étaient  tellement 
connexes  qu'elles  constituaient  un  double  problème  pou- 
vant être  résolu  simultanément  par  le  même  procédé. 

Voyons  d'abord  comment  les  eaux  condensées  pour  l'ali- 
mentation sont  chargées  d'acides  gras  qui  rongent  les  tôles 
et  forment  des  savons  ferrugineux,  très-lourds  et  très- 
adhérents. 

La  vapeur,  en  passant  dans  les  tiroirs  et  dans  les  cylin- 


PURIFICATION   DES   EAUX   GRASSES.  3l 

dres^  réagît  sur  l'huile  de  graissage  et  la  décompose  en 
grande  partie  en  acides  gras  et  en  glycérine^  ces  produits 
sont  entraînés  au  condenseur,  où  ils  se  rassemblent  dans 
Teau  de  condensation,  qui  en  devient  laiteuse. 

Cette  émulsion  d'huiles  et  diacides  gras  (acide  oléique 
principalement)  est  lancée  dans  les  chaudières,  où  s'accu- 
mulent de  plus  en  plus  les  corps  gras  acides  qui  se  combi- 
nent au  fer  des  surfaces  pour  former  des  savons  très-ba- 
siques et  mélangés  d'oxydes  de  fer  en  proportion  variable. 

Nos  expériences  et  nos  analyses  ont  permis  de  constater 
que  les  j  de  l'huile  de  graissage  se  trouvent  décomposés 
dans  la  vapeur  en  acide  gras  et  glycérine  ^  l'autre  cinquième, 
restant  à  l'état  d'huile,  est  entraîné  également  par  l'eau 
d'alimentation. 

Un  grand  nombre  de  dépôts  de  chaudières  m'ont  été 
remis  et  j'ai  pu  constater  l'énorme  proportion  de  fer  en- 
levé par  les  graisses  acidifiées  dans  les  organes  de  la  ma- 
chine. 

En  février  1876,  le  commandant  du  Champlain,  croi- 
seur de  deuxième  classe,  dont  la  machine  est  d'environ 
5oo  chevaux  nominaux  (2000  chevaux-vapeur),  m'écrivait 
ce  qui  suit  : 

ce  J'ai  l'honneur  d'adresser  à  M.  Hétet  des  échantillons 
des  dépôts  recueillis  dans  une  des  chaudières  du  bâtiment. 

))  Il  semble  que  les  matières  grasses  ramenées  du  con- 
denseur à  surface  aux  chaudières  par  l'alimentation,  ainsi 
qu'une  certaine  quantité  d'huile  répandue  avant  la  chauffe 
sur  la  surface  du  niveau  d'eau  (*)  (pour  empêcher  les  en- 
traînements d'eau  aux  cylindres),  il  semble  que  ces  ma- 
tières grasses  aient  un  peu  attaqué  les  tôles.  La  chaudière 
dans  laquelle  ces  dépôts  ont  été  recueillis  a  seulement 
cent  trente  et  une  heures  de  chauffe.  » 


(*)  C'est  une  très-mauyaise  pratique  que  d'introduire  ainsi  de  Thuile 
dans  les  chaudières. 


3  3  BÉTET* 

Un  kilogramme  de  ce  dépôt  contenait  : 

Matières  grasses 4^0 

Oxyde  de  fer 565  ou  895  de  fer  métal. 

Sels  divers  (de  Teau  de  mer) . .        i5 

1000 

On  nettoya  la  chaudière  et  Ton  trouva  aïo  kilogrammes  de 
ce  dépôt  peu  homogène,  mais  qui  renfermait  au  moins 
83  kilogrammes  de  fer  (enlevés  à  la  chaudière). 

En  me  remerciant  de  mon  analyse,  le  commandant  du 
Champlain  exprimait  Topinion  que,  a  d'après  la  propor- 
tion d'oxyde  de  fer  trouvée  après  cent  trente  et  une  heures 
de  chauffe,  la  chaudière  devant  être  changée  lorsqu'elle 
est  à  demi  usée,  ne  durerait  pas  cinq  ans  à  cent  jours  de 
chauffe  par  année,  ce  qui  est  la  base  ordinairement  adop« 
lée.  Jusqu'ici  la  chaudière  marine  ne  devait  atteindre  la 
demi-usure  qu'au  bout  de  dix  ans  »  • 

Je  continuai  le  titrage  du  fer  dans  les  dépôts  des  autres 
chaudières  du  même  bâtiment,  et  voici  quelques  chiffres 
très-frappants  : 

1®  Fnce  verticale  des  lames  d'eau. 

{  Matière  grasse 200 

I  Oxyde  de  fer 7^5 

2®  Dessus  de  ciels  de  foyets, 

!  Matière  grasse igo 
Oxyde  de  fer «^SS 

3**  Fonds  des  chaudières, 

-..,      ,  (  Matière  grasse 4oo 

Bâbord  avant . . .  {  ^      ,     ,    ^  Z  ^ 

[  Oxyde  de  fer 570 

„  .,      ,  l  Matière  crasse 35o 

Tribord  avant ...',,    r  n  t- 

[  Oxyde  de  fer oaS 

^  .,      j       .,  \  Matière  grasse 370 

Tribord  arrière  . .  {  ^      ,     ,    -  J  ^ 

(  Oxyde  de  fer oo5 


PURIFICATION    DES    EAUX    GRASSES.  33 

En  résumé,  après  une  période  d'environ  cinq  jours  de 
chauffe,  les  chaudières  de  ce  bàliment  avaient,  au  net- 
toyage, donné  environ  looo  kilogrammes  de  dépôts  conte- 
nant 5oo  kilogrammes  de  fer  pris  aux  tôles  de  ses  chau- 
dières. Il  est  vrai  que  la  quantité  dhuile  de  graissage  avait 
été  plus  forte  qu'en  cours  ordinaire  de  campagne  ;  mais  le 
même  effet  fâcheux  s'est  produit  sur  tous  les  bâtiments  a 
vapeur  munis  de  condenseurs  à  surface,  dont  les  inconvé- 
nients sont  aujourd'hui  bien  connus  partout.  Tout  récem- 
ment l'Amirauté  anglaise  a  ordonné  une  enquête  sur  les 
causes  de  la  détérioration  rapide  des  chaudières  de  plu- 
sieurs navires  pourvus  de  condenseurs  à  surface. 

Puisque  ce  sont  les  acides  gras  qui  détruisent  les  chau- 
dières, le  remède  au  mal  consistait  â  obtenir,  d'une  ma- 
nière sûre,  pratique  et  peu  coûteuse,  la  neutralisation  de 
ces  acides  gras  et  la  saponification  de  Thuile,  afin  de  ne 
laisser  arriver  aux  bouilleurs  ni  acides  gras,  ni  matières 
grasses,  capables  de  les  attaquer,  de  les  ronger. 

Pour  atteindre  ce  but,  il  fallait  les  engager  dans  une 
combinaison  tout  à  fait  inoffensive  pour  les  surfaces  de 
chauffe  et  indécomposable  elle-même  par  le  fer  et  le  cuivre, 
en  outre  non  susceptible  d'adhérer  aux  tôles  5  enGn  en 
retenir  au  dehors  le  plus  possible. 

La  chaux  permettait  de  satisfaire  â  ces  conditions,  mais 
il  fallait  l'employer  sous  une  forme  appropriée  aux  cir- 
constances. Le  seul  moyen  pratique  était  l'usage  d'une 
dissolution  aqueuse  de  chaux,  pouvant  aller  chercher  et 
atteindre,  pour  s'y  combiner  en  savon  insoluble,  les  corps 
gras  divisés  à  l'infini  dans  une  quantité  énorme  d'eau  de 
condensation,  par  exemple  i  kilogramme  d'huile  pour 
10 000  litres  d^ eau  condensée  au  moins. 

C'était  là  la  grande  difficulté  du  problème,  et  elle  a  été 
vaincue  par  la  solution  très-diluée  elle-même  d'oxyde  cal- 
cique.  Lorsque  l'eau  de  chaux  arrive  se  mélanger  à  l'eau 
grasse  d'alimentation,  il  se  produit  deux  choses;  l'acide 

Ann,  de  Chim.  et  de  Phxs;  5*  série,  t.  XIII.  (Janvier  1878.)  3 


34  HÉTET. 

libre  (acide  oléique)  forme  Toléate  de  chai^x  en  particules 
très-fines,  facilement  entraînées  aux  chaudières  par  le 
courant.  Là  ce  savon  léger  et  spongieux  se  granule  par 
TébuUition  en  flottant  dans  le  liquide,  pour  se  déposer 
seulement  à  la  cessation  des  fei^x,  sous  forme  de  sable  ooli- 
thique.  Gomme  ce  savon  calcaire  n^est  point  adhérent,  on 
l'enlève  avec  rapidité  et  facilement. 

Quant  à  rhuile  non  décomposée  par  la  vapeur,  le  j, 
ai-je  dit,  de  l'huile  de  graissage,  elle  est  empâtée  par  l'eau 
de  chaux  et  forme  un  magma  butyreux  qui  reste  dans  la 
caisse  où  se  fait  la  réaction,  de  sorte  que  cette  partie  d'huile 
ne  retourne  jamais  aux  chaudières. 

Le  principe  de  la  méthode  consiste  donc  à  combiner  de 
la  chaux  aux  matières  grasses  entraînées  dans  Peau  de  con- 
densation, soit  les  acides  gras,  soit  les  graisses  elles-mêmes  ; 
en  outre  à  edectuer  les  combinaisons  et  à  les  compléter 
avant  l'arrivée  aux  chaudières  de  Peau  d'alimentation. 

Application  de  la  matière  aux  machines  soit  Jïxes^ 

soit  marines. 

Le  réactif  chimique,  Veau  de  chaux,  s'obtient  d'une 
manière  continue  en  faisant  agir  sur  de  la  chaux  éteinte  en 
poudre  tamisée  (telle  qu'on  l'emploie  pour  la  peinture) 
un  courant  d'eau  dérivé  du  courant  même  d'alimentation, 
après  qu'il  a  subi  la  réaction  qui  neutralise  les  acides  gras. 
De  cette  manière,  on  n'introduit  aucune  eau  additionnelle 
dans  la  circulation  générale. 

Celte  solution  de  chaux  est  obtenue  dans  un  petit  appa- 
reil, récipient  cylindrique  au  fond  duquel  on  fait  arriver, 
par  un  entonnoir  dont  la  douille  est  suffisamment  pro* 
longée,  la  chaux  et  l'eau  qui  doit  la  dissoudre. 

L'eau  saturée  d'oxyde  calcique  gagne  bientôt  la  partie 
supérieure  du  récipient,  tandis  que  Texcès  de  chaux  reste 
à  la  partie  inférieure  en  raison  de  sa  densité. 


PURIFICATION   DES    BAUX   GRASSES.  35 

C'est  à  la  partie  supérieure  de  cet  appareil  très-simple 
que  l'on  puise  l'eau  de  chaux,  pour  Tinjecter  dans  Peau 
d'alimentation  à  dégraisser.  Dans  le  cas  où  la  machine 
n'exige  qu'un  très-faible  graissage,  on  puise  Peau  de  chaux 
avec  un  vase  de  capacité  déterminée  et  on  l'introduit  dans 
le  courant  d'eau  grasse  d'alimentation,  à  Faide  d'un  vase 
à  double  robinet  muni  d'un  tube  de  niveau  et  en  opérant 
de  manière  que  l'écoulement  soit  à  peu  près  continu  (^). 

Si  la  machine  comporte  un  fort  graissage,  la  proportion 
d'eau  de  chaux  étant  très-élevée,  il  est  utile  et  même  presque 
indispensable  de  recourir  à  une  fabrication  courante  et 
mécanique  de  Teau  de  chaux,  au  moyen  d'une  installation 
que  je  vais  décrire  sommairement. 

Réglage  du  débit  de  Veau  de  chaux, 

La  proportion  de  chaux  n'a  de  rapport  obligé  qu'avec 
l'huile  de  graissage  \  théoriquement  il  faut  |  de  chaux 
hydratée  du  poids  des  corps  gras  5  mais  en  pratique  on 
double  cette  quantité,  proportion  beaucoup  trop  forte, 
mais  qui  assure  dans  tous  les  cas  la  complète  préservation 
des  chaudières.  (La  chaux  coûte  si  peu  qu'il  n'y  a  pas  d'é- 
conomie à  faire.) 

On  aura,  P  étant  le  poids  d'huile  en  kilogrammes  par 

p 
heure,  j  pour  la  chaux  à  verser  dans  l'entonnoir  du 

pient  où  se  fabrique  la  solution  \  il  convient  de  verser  la 
chaux  tous  les  quarts  d'heure,  comme  on  graisse  dans  la 
vapeur  d'une  manière  régulière. 

l^our  mesurer  facilement  la  chaux,  on  se  sert  de  petites 
mesures  de  25,  5 o,  100  grammes. 

P      . 

La  quantité  de  chaux  j  doit  se  trouver  en  dissolution  et 


(*)  Voir  Revue  maritime ^  avril  1876. 

3. 


réci- 


3d  DÉTBT. 

il  faut  débiter  un  nombre  de  litres  d'eau  de  chaux  qui  la 
contienne  5  vu  la  faible  solubilité  de  l'oxyde  calcique,  on 
compte  sur  i  gramme  au  plus  de  chaux  par  litre  ;  en  con- 
séquence, le  débit  en  litres  par  heure  sera  a5o  parties, 
pour  I  kilogramme  d'huile  =  a5o  litres,  qui  iront  se  mé- 
langer à  10 000  litres  d'eau  grasse  au  moins. 

Dans  les  grandes  machines,  pour  régler  exactement  et 
automatiquement  ce  débit  d'eau  de  chaux  et  son  mélange 
à  Peau  grasse  d'alimentation,  on  a  installé  un  système  de 
deux  petites  pompes,  actionnées  par  la  machine.  L'une 
fabrique  l'eau  de  chaux  à  l'aide  du  récipient  indiqué,  et 
l'autre  puise  la  solution  calcique  pour  la  lancer  dans  le 
tuyau  de  décharge,  dontl  a  partie  inférieure,  élargie,  forme 
caisse  à  réaction  (*). 

Le  mélange  parfait  des  deux  liquides  se  fait  là,  a  l'aide 
du  mouvement  de  l'eau  déterminé  par  les  pompes  alimen- 
taires ]  Toléate  calcique  est  entraîné  aux  chaudières,  mais 
l'huile  empâtée  reste  dans  la  caisse  et  l'on  s'en  débarrasse 
à  l'aide  d'un  robinet  inférieur  de  décharge. 

^pprouisionnement  de  chaux,  —  Chaque  navire  peut 
emporter  la  chaux  nécessaire  à  une  longue  campagne^ 
pour  une  machine  de  5oo  chevaux,  a  tonneaux  de  chauic 
correspondent  à  4000  heures  de  marche  à  grande  allure. 
Ce  n'est  ni  encombrant  ni  coûteux. 

Dépôt  (Voléate  de  chaux  des  chaudières,  —  On  pour- 
rait peut-être  se  préoccuper  du  savon  calcaire  qui  au  bout 
d'un  certain  temps  doit  s'accumuler;  il  est  facile  d'en  ap- 
précier le  poids,  sachant  que,  par  kilogramme  d'huile  de 
graissage,  il  peut  se  former  820  grammes  de  savon  de 
chaux.  On  a  reconnu  qu'on  peut  sans  inconvénient  les 
laisser  jusqu'à  la  proportion  de  i5  kilogrammes  par  mètre 


(*)  Ce  système  de  pompes,  pour  les  grands  navires,  a  été  établi  par  un 
savant  ingénieur  de  la  marine,  M.  Risbec,  chargé  de  diriger  les  expériences 
et  d'appliquer  la  méthode  chimique  de  M.  Hétet. 


PURIFICATION    DES   EAUX   GRASSES.  dj 

cube  d'eau  contenue  dans  la  chaudière,  ce  qui  correspond 
à  un  grand  nombre  de  jours  5  les  nettoyages  ne  sont  donc 
pas  à  faire  plus  fréquemment  qu'à  Tordinaire,  et  ils  se  font 
plus  facilement  et  plus  rapidement,  puisque  la  matière 
déposée  est  granuleuse  et  sans  aucune  adhérence. 

Fabrication  d^eau  distillée  pour  boisson.  —  La  règle  est 
de  faire  à  bord  de  Teau  potable  par  condensation  de  la  va- 
peur des  chaudières  dans  des  réfrigérants  spéciaux,  puis 
de  filtrer  cette  eau  sur  du  noir  animal.  Mais,  depuis  Tusage 
des  condenseurs  à  surface,  les  vapeurs  entraînant  des  acides 
gras,  on  avait  vu  les  réfrigérants  s'engorger  de  graisse,  et 
ils  ne  donnaient  plus  qu  une  eau  détestable,  qu'on  ne  pou- 
vait faire  servir,  ni  comme  boisson,  ni  même  au  lavage. 
Il  fallait  recourir  à  des  chaudières  spéciales,  soit  cuisines 
distillatoires,  soit  bouilleurs  à  double  vaporisation,  nou- 
velle dépense  et  nouvel  encombrement. 

Depuis  que  les  corps  gras  sont  fixés  à  Tétat  de  savon 
calcaire  et  qu'il  n'y  a  plus  de  graisse  libre  dans  les  chau- 
dières, la  vapeur  ne  peut  plus  entraîner  de  corps  gras 
volatils  et  donne  par  condensation  dans  le  réfrigérant 
réglementaire  une  eau  qui,  après  son  passage  dans  la  caisse 
au  noir  animal  en  grains,  est  parfaitement  limpide,  sans 
odeur  ni  saveur  et  fort  agréable  à  boire. 

J'ajouterai  que  les  eaux  grasses  de  toutes  provenances 
purifiées  par  l'eau  de  chaux  et  méthodiquement  peuvent, 
après  filtra ti on  sur  le  noir  animal,  être  propres  à  tous  les 
usages  économiques.  J'en  ai  fait  la  preuve  avec  les  eaux  les 
plus  grasses,  provenant  du  lavage  de  vaisselle  des  cuisines 
du  grand  hôpital  de  Brest. 

Conséquences  de  la  méthode. 

Les  expériences  nombreuses  faites  à  Brest,  sur  le  croi- 
seur le  Dupetit'ThouarSf  ont  donné  les  résultats  les  plus 
parfaits,  qui  ont  été  consignés  dans  les  rapports  des  com- 


38  HÉTET. 

missions  d'épreuves,  puis  dans  un  rapport  spécial  de 
M.  de  la  Poix  de  Fréminville ,  professeur  à  FÉcole 
Centrale,  ex-directeur  du  Génie  maritime. 

Voici  les  conclusions  de  ce  dernier  rapport  adressé  au 
Préfet  maritime  du  a®  arrondissement  : 

«  Brest,  le  i4  noTembre  1876. 

))  Monsieur  le  Vice-Amira.l, 

)>  Vous  m'avez  fait  Thonneur  de  me  demander  mon  opinion 
sur  les  résultats  obtenus  à  bord  du  Dupetit'Thouars ,  à  la 
suite  de  l'application  du  procédé  de  M.  Hétet,  pour  le  dé- 
graissage des  eaux  d'alimentation. 

»  Ces  résultats  appartiennent  'à  deux  ordres  de  faits  dis- 
tincts : 

»  1*^  Permettre  d'employer  l'eau  provenant  des  conden- 
seurs à  surface  à  la  distillation  et,  par  suite,  à  former  l'ap- 
provisionnement d'eau  potable; 

)>  2?  Prévenir  les  détériorations  rapides  des  chaudières, 
constatées  depuis  longtemps,  lorsque  celles-ci  sont  alimen- 
tées par  des  eaux  chargées  de  matières  grasses. 

»  La  possibilité  de  rendre  potable,  par  distillation,  les 
eaux  provenant  des  condenseurs  à  surface  présente  un 
intérêt  considérable,  puisqu'elle  dispenserait  des  chau- 
dières spéciales  employées  uniquement  à  faire  de  l'eau 
douce. 

))  Par  le  procédé  Hétet,  les  eaux,  ayant  été  préalableiAent 
dépouillées  de  graisses  libres,  le  sont  également  d'oléale 
de  chaux  qui  a  donné  lieu  à  des  dépôts  retenus  à  l'intérieur 
de  la  chaudière. 

))  Après  avoir  établi  les  filtres  dans  des  conditions  meil- 
leures, l'eau  est  arrivée  parfaitement  limpide,  et,  après 
l'avoir  dégustée  à  plusieurs  reprises,  il  m'a  ^té  impossible 
d*y  découvrir  aucune  saveur  sensible. 

))  Sous  ce  rapport,  le  problème  de  dégraissage  de  l'eku 
des  condenseurs  à  surface  semble  donc  avoir  reçu  une* sol u- 


PURIFICATION    DES    EAUX   GRASSES.  39 

tion  qui  serait  complète  si  elle  avait  la  sanction  d'une 
expérience  prolongée,  faite  au  cours  de  campagne  dans  les 
conditions  ordinaires  du  service. 

»  En  ce  qui  concerne  la  protection  des  chaudières,  co 
qui  est  de  beaucoup  le  point  le  plus  important  de  la  ques- 
tion, les  résultats  obtenus  paraissent  au  moins  aussi  com^ 
plets  que  pour  la  distillation.  Les  acides  gras  sont  saponi- 
fiés par  Teau  de  chaux  et  donnent  lieu  à  des  précipités 
solides  qui,  par  leur  nature  et  la  manière  dont  ils  se  dé* 
}>osent,  se  sont  montrés  d'une  innocuité  parfaite  à  l'égard, 
soit  des  surfaces  métalliques^  soit  des  chaudières  elles- 
mêmes.  Mais,  de  même  que  pour  la  distillation,  il  importe 
que  les  bons  résultats  constatés  aux  essais  soient  confirmés 
en  cours  de  navigation. 

»  Signé  :  de  Frémi» ville.  » 

« 

De  son  côté,  le  Préfet  maritime,  en  transmettant  tous 
les  rapports  au  Ministre  de  la  Marine,  faisait  ressortir  la 
valeur  du  procédé  Hétet,  au  double  point  de  vue  de  l'éco- 
nomie et  de  l'hygiène. 

Depuis  le  commencement  de  1877,  le  Dupetit-Thouars 
a  été  armé,  et  l'expérience  en  cours  de  navigation  est  faite  : 
elle  a  confirmé  les  excellents  résultats  des  essais^  tant  au 
point  de  vue  de  la  potabilité  de  l'eau  que  pour  la  préser- 
vation des  chaudières,  qui  n'ont  subi  aucune  altération 
provenant  des  eaux  d'alimentation. 

Un  autre  navire  de  l'état,  le  cuirassé  le  Colbertj  de 
l'escadre  du  nord,  est  également  muni  d'un  système  h 
dégraisser  par  l'eau  de  chaux  et  les  résultats  ont  été  trou- 
vés très-satisfaisants. 

En  présence  de  tous  ces  faits,  on  peut  dire  que  le  pro- 
blème est  résolu.  Les  chaudières  sont  conservées  et  du- 
reront plus  longtemps  qu'avec  les  anciennes  machines 
alimentées  par  les  eaux  salées  ou  calcaires  5  les  conden- 
seurs ont  retrouvé  tous  les  avantages  qu'on  en  espérait  et 


4o  HÉTET.    PURIFlCATlOlf    DES    KAUX    GRASSES. 

qui  sont  si  considérables;  il  n*y  a  plus  à  craindre  ni  dépôts 
salins,  ni  dépôts  gras  dans  les  chaudières-,  il  n'y  a  donc 
pas  de  coups  de  feu  à  redouter;  plus  d'extraction  néces- 
saire; on  réalisera  Téconomie  de  charbon  prévue. 

Mais  les  avantages  ne  s'arrêtent  pas  la  :  puisque  les 
chaudières  devaient  durer  dix  ans  et  qu'elles  étaient  usées 
en  quatre  ou  cinq  ans  par  les  corps  gras  des  condenseurs  a 
surface,  le  système  a  donc  pour  eAet  d'économiser  une 
chaudière  sur  deux,  ce  qui  se  traduit  par  des  sommes  con- 
sidérables dépensées  en  pure  perte  aujourd'hui  et  que  fera 
gagner  la  méthode  de  neutralisation  par  l'eau  de  chaux. 
Enfin  le  mauvais  état  des  chaudières  a  encore  pour  consé- 
quence très-fàclieuse  le  chômage  des  machines  et  des 
navires  qui  les  portent;  avec  des  chaudières  intactes,  les 
vaisseaux  de  guerre,  par  exemple,  seront  toujours  prêts  à 
marcher,  pour  défendre  l'honneur  et  les  intérêts  du  pays. 

Nota.  —  On  avait  pensé  à  employer  la  soude  pour  former  des 
savons  solubles;  ce  moyen,  qui  paraît  bon  théoriquement^  n'est 
pas  pratique. 

La  sonde  coûte  quarante  fois  autant  que  la  chaux  ;  il  est  impos- 
sible de  séparer  ainsi  les  huiles  non  décomposées  par  la  vapeur. 

Le  savon  soluble  qui  se  concentre  dans  la  chaudière  se  brûle 
au  contact  des  surfaces  chauffées  et  détermine  quelques  altéra- 
tions; pour  éviter  ce  fâcheux  effet,  il  faut  faire  des  extractions 
fréquentes,  et  alors  toute  Téconomie  des  condenseurs  à  surface  se 
trouve  changée,  on  en  perd  les  principaux  avantages. 

La  vapeur  provenant  d'une  chaudière  chargée  de  savon  so- 
luble ne  peut  fournir  par  condensation  de  Teau  distillée  potable. 


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L.   SMITH.   MÉTÉORITES  DE  ROGHBSTEll,  ETC.  4^ 


DESCRIPTION  DES  PIERRES  MÉTÉORIQUES  DE  ROGHESTER, 
DE  WARRENTON  ET  DE  GYNTUIANA, 

TOMBÉES    RESPECTIVEMENT     LES     21    DÉCEMBRE    1876,     3     ET 

23  JANVIER  1877.  Remarques   sur   les   chutes    anté- 
rieures   DE    météorites    dans     CES   MÊMES   RÉGIONS  ; 

Par  m.  LAWRENCE  SMITH, 

de  LouîsTille  (Kentucky). 


Une  courte  Notice  sur  les  trois  météorites  qui  forment 
le  sujet  de  cette  Communication  a  été  adressée  par  moi  à 
l'Académie  (*)  peu  de  temps  après  leur  chute.  J'avais 
attendu,  pour  donner  une  description  plus  détaillée  de 
leur  parcours  et  de  leur  chute,  de  pouvoir  me  livrer  à  un 
examen  plus  approfondi*,  c'est  ce  que  j'ai  fait  maintenant, 
car  on  m'a  qnvoyé  la  pierre  tout  entière  tombée  à  Cyn- 
thiana  et  une  bonne  partie  des  fragments  qu'on  a  recueillis 
des  deux  autres. 

Le  premier  point  intéressant  que  présentent  ces  trois 
météorites,  c'est  qu'elles  sont  tombées  dans  un  intervalle 
de  trente-deux  jours  et  dans  une  portion  limitée  de  terri- 
toire s'étcndant  sur  2  degrés  de  latitude  et  6  degrés  de  lon- 
gitude. En  second  lieu,  elles  diffèrent  entre  elles  quant  aux 
caractères  de  leur  structure,  et- chacune  d'elles  a,  en  outre, 
certaines  particularités  qui  la  distinguent  du  type  ordinaire 
des  pierres  météoriques.  En  troisième  lieu,  elles  sont  tom- 


(*)  Comptes  rendus  des  séances  de  l'Académie  des  Sciences,  t.  LXXXIV, 
p.  3g8,  et  t.  LXXXV,  p.  678.  J'ai  envoyé  des  échantillons  de  ces  météorites 
au  Muséum  du  Jardin  des  Plantes. 


4a  I*.    SMSTH.    MÉTÉORITES    DE    ROCHESTKR, 

bées  dans  une  bande  de  territoire  qui,  je  le  montrerai, 
a  été  le  réceptacle  de  toutes  les  masses  météoriques  dont 
on  a  observé  la  chute  et  qu'on  a  recueillies  aux  Etats-Unis 
(à  l'exception  de  2  kilogrammes  environ  de  ces  pierres). 

Météorite  de  lîochester  [Tndianà). 

Le  passage  de  cette  météorite  à  travers  Talmosphère  de 
la  terre  n'a  laissé  qu'un  faible  souvenir  de  sa  visite.  Elle  a 
cependant  été  observée  à  Bloomington  (Indiana),  lat.  89*' i  a', 
long*  86^ 32^,  par  le  professeur  Kirkwood,  astronome  dis- 
tingué, qui  m'a  communiqué  ses  observations  en  ce  temps- 
là,  et  qui  les  a  fait  connaître  subséquemment  plus  en 
détail  à  la  Société  philosophique  américaine,  avec  les  ob- 
servations qu'il  avait  recueillies  d*autres  personnes.  Aussi 
je  donnerai  simplement  un  aperçu  sommaire  des  phéno- 
mènes qui  ont  accompagné  sa  marche,  avant  de  décrire  les 
caractères  chimiques  et  minéralogiques  de  la  pierre  qui 
est  tombée. 

Le  bolide  apparut  le  ai  décembre  1876,  vers  9  heures 
du  soir  :  il  était  d'une  magnificence  extraordinaire,  et  mar- 
chait vers  Test,  en  passant  par-dessus  les  Etats  du  Kansas, 
de  Missouri,  de  l'IUînois,  d'Indiana,  de  TOhio,  et  sur  cer- 
taines parties  des  Etats  de  Pensylvanie  et  de  New- York. 
Quoique  nous  n'ayons  pas  d'observations  faites  dans  ces 
deux  deniiers  Etats,  le  professeur  Kîrkwood  est,  sans  nul 
doute,  dans  le  vrai  en  indiquant  ce  trajet  comme  son  vrai 
parcours.  A  Bloomington,  son  élévation  était  de  i5  degrés 
et  le  calcul  fait  pour  déterminer  sa  trajectoire,  là  où  elle  a 
été  observée,  montre  qu'elle  a  été  de  1000  à  iioo  milles 
(1600  à  1760  kilomètres)  en  longueur-,  on  suppose  que 
sa  hauteur  était  de  38  milles  (60  kilomètres)  au-dessus 
de  l'endroit  où  est  tombé  le  petit  fragment.  Dans  les  diffé- 
rentes parties  de  son  parcours,  le  bolide  lançait  des  fragments 
avec  le  bruit  ordinaire  de  ronflement  et  la  commotion  de 


DE   WA:KR£lfXON   ET  DB   GTIfTHIANiU  43 

Tatmosphère  qui  accompagnent  généralement  le  mouve- 
ment de  ces  corps.  Quand  il  traversa  TÉtat  d'Indiana,  il 
paraissait  suivi  d'une  série  de  petits  bolides,  dont  beau- 
coup avaient  la  grandeur  apparente  de  Vénus  ou  de 
Jupiler*  Sa  vitesse  par  rapport  à  la  surface  de  la  Terre 
semblait  être  de  8  à  la  milles  (la  à  19  kilomètres)  par  se- 
conde. On  raconte  que  les  manifestations  lumineuses 
de  ce  corps  étaient  remarquablement  belles,  et  qu'elles  ont 
à  peine  été  égalées,  mais  jamais  surpassées,  dans  aucune^ 
circonstance  antérieure  de  ce  genre.  La  cause  de  cet  éclat 
dépend  de  la  structure  physique  du  corps,  dont  nous  par- 
lerons plus. loin  en  détail. 

Le  fragment  tombé. 

Le  seul  fragment  de  ce  bolide  qu'on  sache  être  tombé- 
est  celui  dont  la  chute  eut  lieu  sur  une  ferme  à  3  milles 
(4800  mètres)  au  nord-ouest  de  Rochester,  lat.  4^  degrés^ 
long.  86  degrés.  Le  fermier  entendit  l'explosion  et  bientôt 
après  vit  un  corps  frapper  le  sol  à  peu  de  distance 
de  lui  ;  il  y  avait  i5  centimètres  de  neige  sur  la  terre  et  le 
lendemain  matin  il  trouva  la  pierre  qui  avait  rebondi  à 
peu  de  dislance  de  l'endroit  où  elle  était  primitivement 
tombée;  elle  n^avait  pas  pénétré  dans  le  sol.  La  pierre 
entière  pesait  un  peu  moins  de  4oo  grammes,  et,  comme 
nous  n^avons  entendu  parler  de  la  chute  d'aucune  autre 
masse,  il  est  raisonnable  de  supposer  que  le  bolide  a  été 
réduit  en  fragments  très-menus  et  en  poussière,  comme  les 
fragments  extrêmement  petits  de  l'aérolithe  de  Kepler  et 
autres  semblables.  La  manière  suivant  laquelle  la  matière 
fondue  de  l'extérieur  de  beaucoup  de  météorites  est  ré- 
pandue sur  leurs  surfaces,  en  traits  brillants  couvrant  des 
plans  fraîchement  rompus,  montre  clairement  que  cette 
désagrégation  s'opère  constamment  et  rapidement  pendant 
leur  passage  au  travers  de  l'air,  et  j'ai  dans  ma  collection 


44  I**    tMlTH.    MÉTÉORITES   DE   ROCHC8TER, 

un  grand  nombre  de  beaux  exemples  qui  viennent  à  Tappui 
de  ce  fait. 

Le  professeur  Kirkwood  est  d'avis  que  ce  bolide  n*a 
jamais  quitte  notre  atmosphère.  Cela  est  d'accord  avec 
mes  vues  générales  sur  ce  sujet,  à  savoir  qu'il  est  rare 
qu'une  météorite,  si  elle  pénètre  dans  notre  atmosphère, 
ne  soit  pas  entièrement  décomposée  en  fragments  ou  en 
poudre.  La  pierre  qui  nous  occupe  a  été  cassée  en  plu- 
sieurs petits  fragments  dont  je  me  suis  procuré  la  majeure 
partie,  les  autres  ont  été  perdus;  deux  ou  trois  seulement 
sont  entrés  dans  des  collections.  Ces  spécimens  sont  pré- 
cieux, car  la  pierre  est  une  des  plus  remarquables  de  son 
type.  Elfe  appartient  à  la  variété  pisolithique,et  cela  d'une 
manière  bien  nette  \  sa  couleur  est  grise^  elle  se  broie  aisé- 
ment entre  les  doigts  en  donnant  une  poudre  légère  (une 
partie  est  même  de  la  poussière  fine)  et  de  petits  globules. 
Quelques-uns  de  ces  derniers  sont  parfaitementspliériques  ; 
j'en  possède  des  échantillons  de  2  et  3  millimètres  de  dia- 
mètre. Elle  ressemble  d'une  manière  plus  étroite  à  la  pierre 
d'Ausson  (Montréjeau)  qu'à  aucune  autre  que  je  con- 
naisse, quoiqu'elle  soit  beaucoup  plus  friable. 

Cette  structure  oolithique  spéciale,  qu'on  voit  souvent 
dans  bien  des  parties  des  pierres  météoriques,  a  récemment 
beaucoup  attiré  l'attention.  Le  professeur  Tschermak,  de 
Vienne,  a  tout  dernièrement  publié  un  intéressant  Mé- 
moire sur  ce  sujet  (*). 

Le  poids  spécifique  de  la  pierre,  pris  sur  plusieurs 
échantillons  moyens,  est  de  3,55. 

Analyse  chimique. 
La  partie  pierreuse,  débarrassée  aussi  complètement  que 


(*)  Sitzungsherichte   dcr  K,  Ahademîe  der  Wîssenschmften,  t.   LXXI, 
p.  66i;  Vienne. 


DE   WARRElfTON   ET   DE   CYNTHIÂHÀ.  4^ 

possible  de  la  partie  métallique,  contenait  encore  une 
quantité  notable  de  troïlite  qu'on  ne  pouvait  séparer  mé- 
caniquement. La  quantité  de  soufre  trouvée  dans  cette 
portion  de  la  météorite  faisait  connaître  la  quantité  de 
troïlite  présente.  Elle  était  de  3,3 1  pour  loo. 

La  partie  minérale  pierreuse,  traitée  par  l'acide  cblorby- 
drique,  donne  : 

Partie  soluble 4?  9^^  pour  100 

Partie  insoluble 52 ,  20       » 

Sa  composition  est  la  suivante  : 

Partie  soluble.        Partie  insoluble. 

Silice 34,55  57,81 

Protoxyde  de  fer 27 ,  76  11  ,o4 

Aluinine traces  o ,  23 

Chaux traces  5 , 3 1 

Magnésie 36,3^  ^4997 

Oxyde  de  chrome »  0,10 

Soude 0,46  0,84 

99,14  100, 3o 

J'ai  séparé  complètement  quelques-uns  des  globules  de 
la  pâte  ambiante,  ce  qui  se  fait  aisément  en  frottant  un 
fragment  de  pierre  entre  les  doigts.  On  y  pouvait  distin- 
guer de  très-petites  paillettes  de  fer.  Pulvérisés  et  traités 
par  l'acide  cblorbydrique ,  ils  donnaient  à  peu  près  le 
même  résultat  que  la  pâte,  c'est-à-dire  :  partie  soluble  46,80, 
partie  insoluble  53, 20,  et  dans  la  partie  soluble  la  magnésie 
entrait  pour  34^48  pour  100^  ce  qui  montre  clairement 
que  les  spliérules  étaient  simplement  des  concrétions  de  la 
matière  ordinaire  formant  la  pierre. 

Le  fer  nickelifère,  qu'on  en  séparait  mécaniquement,  se 
compose  de  : 

Fer 94,49 

Nickel 4f  i^ 

Cobalt o,5i 


46  L.    SMITH.    MÉTÉORITES   DE   EOCHE8TER, 

La  quantité  de  fer  était  trop  petite  pour  qu^on  y  put 
rechercher  les  autres  éléments,  comme  le  phosphore  et  le 
cuivre  ^  ceux-ci  étaient  sans  nul  doute  présents,  mais  en 
quantités  extrêmement  petites,  comme  d'habitude. 

Constitution  minéralogique  de  la  pierre  de  Rochester. 

Un  examen  attentif  sous  le  microscope,  tant  de  la  sur- 
face brisée  que  d'une  section  usée  finement  par  le  frotte- 
ment, montre  que  la  pierre  se  compose  des  mono  et  bi- 
silicates  qu'on  trouve  habituellement  dans  ces  corps,  mêlés 
avec  du  fer  nickelifère  et  de  la  troïlite.  On  n'y  distingue 
rien  qui  ressemble  à  de  l'anorthite.  Les  trois  premiers 
minéraux  constituent  la  majeure  partie  de  la  pierre,  et  il 
est  possible  qu'il  s'y  rencontre  plus  d'un  type  de  chacun 
de  ces  minéraux. 

Le  fer  nickelifère  y  est  tout  à  fait  abondant,  bien  que  le 
professeur  Shepard  l'ait  estimé,  d'après  un  examen  super- 
ficiel, à  I  pour  loo.  Grâce  à  la  méthode  pleine  de  soins 
employée  pour  le  séparer,  je  trouve  dans  deux  échantil- 
lons moyens  qu'il  y  en  a  jusqu'à  lo  pour  loo.  Les  pail- 
lettes de  fer  sont  très-brillantes  et  lustrées;  elles  ont  l'air 
d'être  recouvertes  de  plombagine,  quoiqu'on  ne  trouve  pas 
trace  de  ce  dernier  minéral.  La  troïlite  ne  se  découvre  pas 
aussi  bien  à  l'œil  qu'au  moyen  de  l'acide  chlorhydrique. 
Une  des  sphérules  a  été  usée  de  manière  à  obtenir  une  sec- 
tion bien  finie  et  la  lumière  polarisée  a  montré  qu'elle 
contient  les  deux  classes  de  silicates  dont  on  vient  de  parler. 
Ce  fait,  comme  on  l'a  déjà  dit,  est  corroboré  par  l'analyse 
chimique. 

Je  considère  la  pierre  de  Rochesier  comme  composée 
des  minéraux  suivants  : 

Bronzite 46îOO  pour  loo 

Olivine 4'  9^^         ** 

Fer  nickelifère 10,00         » 

Troïlite 3, 00 

Fer  chromé o,  i5 


M 


DE  waureutok  et  de  cy»thia»à.  47 

Météorite  de  Warrenton  [Missouri). 

Le  3  janvier  1877,  vers  le  lever  du  Soleîl,  à  5  milles 
(8  kilomètres)  de  Warrenton,  dans  l'Etat  de  Missouri, 
lat.  38®5o',  long.  91^10',  des  observateurs  entendirent  un 
son  semblable  au  sifflet  d'une  locomotive  dans  le  loin- 
tain; d'autres  le  comparèrent  au  bruit  que  cause  dans  Tair 
le  passage  d'un  boulet.  Le  son  venait  du  -nord-ouest^  il 
devint  de  plus  en  plus  fort  pour  quatre  observateurs  près 
de  Warrenton.  En  regardant  en  l'air,  ils  virent  choir  un 
objet  qui  frappa  un  arbre  en  brisant   les  branches,  et 
tomba  par  terre  avec  un  bruit  de  craquement.  Les  obser- 
vateurs étaient  à  5o  ou  60   mètres  du  lieu  de  la  chute  i 
en  approchant  de  ce  point,  ils  virent  une  masse  de  pierre, 
brisée  en  un  certain  nombre  de   morceaux.  D'après  les 
fragments,  ils  supposent  qu'elle  avait  originairement  une 
forme  conique  et  environ  18  pouces  (o°*,45  )  de  longueur. 
La  neige  était  fondue,  et  la  terre  dégelée  dans  son  voi- 
sinage;  mais   les  morceaux,  quoique  chauds,  pouvaient 
facilement  être  pris  à  la  main.  Son  poids  a  été  estimé  à 
100  livres  environ;  mais  il  est  impossible  de  dire  si  cette 
évaluation  est   exacte  ou  non;  car  on  n'a  conservé  que 
10  ou  i5  livres  de  fragments  (dont  j'ai  plusieurs  en  ma 
possession),    la    plupart    de    petit    volume.     Quelques 
spécimens  sont  dans  la  collection  du  Collège  de  Yale;  le 
reste  est  dispersé  chez  les  habitants  du  pays  où  il  est  tombé. 
Pour  ce  qui  regarde  sa  température  au  moment  de  la 
chute,  je  puis  dire  que  j'ai  un  échantillon,  montrant  d*une 
manière  péremptoirc  que  le  bolide  n'était  pas  très-chaud 
au  moment  où  il  a  frappé  l'arbre  ;  car  une  portion  des 
fibres  ligneuses  d'une  des  branches  est  adhérente  à  la  surface 
et  engagée  dans  la  croûte  rugueuse  de  la  pierre;  ces  fibres 
délicates  ne  présentent  pas  la  moindre  trace  de  brûlure. 

Un  fait  à  noter,  en  ce  qui  regarde  la  chute  de  cette 
météorite^  c'est  qu'on  n'entendit  aucune  explosion,  qu'on 


48  L.    SMITH.    MÉTÉORITES   DE    BOCHESTEB, 

ne  remarqua  aucun  phénomène  lumineux  produit  par  son 
passage  à  travers  Taîr.  Cela  peut  être  dû  en  partie  à  cette 
circonstance,  que  la  chute  se  produisit  au  moment  du  leYer 
du  Soleil.  Mais  il  n'y  a  pas  de  doute  que  c^était  une  mé- 
téorite, lassée  de  son  mouvement  rapide  dans  Tatmosphère 
et  tombée  tranquillement  comme  un  oiseau  épuisé  dans 
son  vol.  Sa  direction,  autant  qu'on  a  pu  en  juger,  était  du 
nord-ouest  au  sud-est. 

Aspect  de  la  pierre • 

Etudiée  sur  les  divers  fragments  soumis  à  mon  observa- 
tion, elle  diffère  à  un  degré  marqué  de  celle  que  je  viens 
de  décrire  et  qui  tomba  seulement  quelques  jours  avant. 
Elle  a  ses  points  d'intérêt  spécial  et  ne  ressemble  à  aucune 
des  météorites  que  je  connais,  excepté  à  celle  qui  tomba  â 
Ornans,  le  ii  juillet  1868.  Mais  elle  ressemble  de  tous 
points  à  cette  dernière,  tant  au  point  de  vue  des  apparences 
physiques  que  de  la  composition  chimique.  On  peut  en 
juger,  en  comparant  mes  résultats  pour  la  pierre  de  War-> 
renton  à  ceux  de  Pisani  pour  la  pierre  d'Ornans  (Comptes 
rendus  de  V Académie  des  Sciences^  t.  II,  p.  663,  1868), 
quoique  sa  manière  de  présenter  les  résultats  d'analyses 
difTère  de  la  mienne.  Le  poids  spéciGque  qu'il  a  indiqué 
est  un  peu  plus  élevé  que  celui  que  j'ai  trouvé;  ceci  n'a 
rien  d'étonnant  dans  des  spécimens  différents  de  ces 
corps  poreux  de  nature  semblable.  La  croûte  de  la 
pierre  de  Warrenton  est  d'un  noir  terne  et  très-épaisse  ; 
dans  bien  des  endroits  de  plusieurs  centimètres  carrés, 
elle  a  de  2™"*,5  à  3™™,5.  C'est  la  plus  épaisse  que  j'aie 
jamais  vue.  Ces  endroits  se  rencontrent  là  où  la  croûte 
est  une  scorie  épaisse  qui  se  termine  quelquefois  brusque- 
ment sur  une  partie  plus  unie  de  la  croûte  \  cela  vient  sans 
doute  de  ce  que  la  matière  fondue  à  la  surface  est  ren- 
voyée en  arrière  et  en  sens  contraire  du  mouvement  de  la 


DE   WARRENTOJN    ET   DE   GYNTHIAlfA.  49 

pierre  et  qu'une  partie  de  la  surface  se  trouvant  également 
balayée,  elle  laisse  cette  partie  plus  unie,  tandis  qu'elle 
s'accumule  derrière  sous  forme  d'une  surface  de  scorie  (^). 
L'intérieur  de  la  pierre  est  d'une  couleur  uniforme  de 
cendre  très-noire;  elle  est  douce  au  toucher  et  s'écrase 
facilement.  Cela  explique  ce  fait  qu'elle  a  été  brisée 
en  fragments  par  son  choc  sur  le  sol.  Sa  structure  est 
caractéristique  et  les  globules  y  sont  très-petits.  Sa  densité 
est  de  39479  et  la  quantité  de  matière  métallique  qu'elle 
renferme  est  très-petite. 

Composition  chimique. 

La  pierre  pulvérisée  et  débarrassée  des  particules  métal- 
liques a  donné  à  l'analyse  une  quantité  de  soufre  corres- 
pondant à  3,5i  pour  100  de  troïlîte.  Le  fer  nickelifère  est 
en  très-petite  quantité  et  représente  2,01  pour  100  seule- 
ment. Les  minéraux  pierreux  traités  par  l'acide  chlor- 
hydrique  ont  donné  : 

Partie  soluble  dans  l'acide 80, 4^  pour  100 

Partie  insoluble  dans  Tacide i9>6o         » 

qui  se  décomposent  comme  il  suit  : 

Partie  soluble.        Partie  insoluble. 

Silice 33,02  56,90 

Protoxyde  de  IVr ^1  t^l  10,20 

Alumine 0,12  0,20 

Chaux traces  7 ,62 

Magnésie 28,41  22, 4' 

Oxyde  de  nickel i  ,54 

Oxyde  de  cobalt o ,3 1 

Soude 0,07  1 ,00 

Oxyde  de  chrome   »  o, 33 

101, o4  9^>66 


1. 


» 


(')  On  peut  voir  que  cette  description  de  la  croûte  correspond  par  faite* 
Aiin.  de  Chim,  et  de  Pkjs,,  5«  série,  t.  XIÏI.  (Janvier  1878.)  4 


DO  L.    SMITH.    MtTÉORITBS    DE    ROCHISTEB, 

J'ai  obtenu  o,33  pour  loo  d'oxyde  de  chrome,  ce  qui 
conduirait  à  o,5o  pour  loo  de  fer  cbromë,  si  le  chrome 
se  présente  sous  celle  forme.  Néanmoins,  il  n*y  a  pas  moyen 
de  décider  s'il  en  esl  ainsi,  quoique  cela  soit  probable,  le 
cbrome  étant  dans  la  partie  insoluble. 

L'oxyde  de  nickel,  à  l'exception  peut-être  d'une  très- 
petite  proportion,  appartient  à  la  composition  des  silicates 
solubles. 

Le  fer  nickelifère  a  donné  : 

Fer 88, 5i 

rfickei 10,21 

Cobalt 0,60 


99»3ï 


Constitution  niinéralogique  de  la  pierre  de  Warrenlon, 

L^examen  microscopique  ne  m'a  donné  aucune  indica- 
tion bien  claire  ;  car  il  n'est  pas  possibltî  de  préparer  une 
bonne  section  pour  robservalion.  Toutefois  l'analyse  chi- 
mique montre  les  mono  et  bisilicates  ordinaires  des  types  de 
l'olivine  et  de  la  bronzite.  Le  trait  le  plus  marqué  est  la 
prépondérance  de  Tolivine,  qui  forme  près  des  {  de  la  masse. 

La  proportion  des  minéraux  constituants  est  à  peu  près 
la  suivante: 

Olivint'    76,00  pour  100. 

Bronzite  et  pyroxène 18,00         ■ 

Fer  nickelifère 2 ,  00         »• 

Troïlite ^ 3,5o 

Fer  chromé o ,  5o         » 


ment  à  celle  de  la  pierre  dOrnans,  donnée  par  M.  Daubréo,  Bulletin  de 
la  SoL'it'té géologique  Je  Frauce,  i*  série,  t.  XXVI,  p.  yô;  1SG8. 


DE    WAR1LEKT0IC    ET    DE    GYUTHIANA.  Di 

Météorite  de  CjnthianaiJLeniVLQk^). 

J'ai  appelé  cette  météorite  pierre  fie  Cjnthiana,  quoi- 
qu'elle soit  tombé  à  9  milles  (i4  kilomètres)  de  cet  endroit 
dans  le  comté  d'Harrisson  (^)  -,  maïs  Cynthîana  est  le  point 
important  le  plus  rapproché  de  l'endroit  où  a  eu  lieu  la 
chute. 

Le  ^3  janvier  1877,  à  4  heures  du  matin,  plusieurs  per- 
sonnes virent  un  splendide  bolide  traverser  le  comté  de 
Monroë  (Indiana)  dans  la  direction  du  sud-est,  à  35  degrés 
environ  au-dessus  de  l'horizon.  Le  même  bolide  a  été 
observé  par  un  certain  nombre  de  personnes  dans  le  comté, 
de  Décatur  du  même  Etat,  latitude  39^27',  longitude 
85^28',  et  il  disparut  exactement  comme  s'il  touchait 
terre,  à  une  distance  qui  ne  paraissait  pas  dépasser  -|-  de 
mille  (400  mètres).  Comme  on  le  verra,  il  était  tombé  à 
une  distance  d'environ  60  milles  (96  kilomètres). 

Il  paraissait  tomber  perpendiculairement  à  la  surface  de 
la  terre.  Je  n'ai  pu  savoir  si  quelqu'un  a  vu  ce  fait,  en  ad- 
mettant qu'il  soit  vrai.  Dans  TElat  de  Kenlucky,  on  vit  le 
bolide  sur  une  grande  étendue  de  lerritoire.Le  phénomène 
était  accompagné  des  bruits  qu'on  entend  ordinairement 
dans  le  ciel  et  qui  annoncent  l'approche  de  ces  corps  ;  aussi 
une  grande  consternation  se  produisit-elle  parmi  les  habi- 
tants des  pays  environnants.  Heureusement  un  de  ces  ob- 
servateurs, fermier  intelligent,  entendit  un  corps  solide 
frapper  le  sol  5  il  se  rendit  immédiatement  sur  les  lieux  et 
retira  la  pierre  d'un  trou  d'environ  o™,4o  ;  c'est  la  pro- 
fondeur à  laquelle  elle  était  entrée  dans  la  terre. 


(*)  Je  saisis  ici  l'occasion  de  rectifier  une  erreur  que  j'ai  vue  dans  plu- 
sieurs catalogues,  entre  autres  ceux  de  Vienne,  du  British  Muséum  et  du 
Muséum  de  Paris.  Ces  catalogues  indiquent  la  chute  d'une  météorite  dé- 
crite par  moi  le  28  mars  i858  comme  ayant  eu  lieu  dans  le  comté  d'Har- 
risson  en  Kcntucky.  C'est  comté  d'Harrisson  en  Indiana  qu'il  faut  lire. 

4.  . 


52  L.    SMITH.    MÉTÉOB1TE8    DE    ROCHBSTEB, 

Quelques  jours  après  la  chute  et  avant  qu'elle  fût 
généralement  connue,  le  professeur  Kîrkwood  m'écrivît 
pour  me  faire  part  des  observations  recueillies  en  Indiana, 
et  m'engager  à  rechercher  la  météorite  quelque  part  dans 
la  région  où  elle  était  tombée.  Toutefois  j^avais  fait  les  ob- 
servations et  je  m'étais  procuré  la  météorite  avant  l'arrivée 
de  la  lettre. 

Caractère  de  la  pierre. 

Elle  est  anguleuse,  trouée  profondément  et  régulièrement 
sur  une  partie,  le  reste  étant  comparativement  uni .  La  croûte 
est  d'un  noir  terne,  et,  quand  la  météorite  me  parvint,  elle 

'  était  aussi  complètement  intacte  qu'au  moment  de  la  chute. 

-  Il  y  avait  cependant  une  partie  fraîchement  brisée,  de  a  à 
3  centimètres  carrés,  qui,  pour  un  observateur  superficiel, 
aurait  semblé  le  résultat  d'une  cassure  après  la  chute.  Maïs 
un  examen  attentif  me  montra  qu'elle  lui  était  antérieure 
et  avait  eu  lieu  avant  que  la  matière  fondue  de  la  surface 
se  fût  entièrement  refroidie  5  car  quelques  gouttelettes  de 
cette  matière  avaient  jailli  sur  la  cassure,  à  laquelle  elles 
adhéraient  solidement,  et  la  matière  fondue  elle-même  avait 
surmonté  une  arête  de  la  fracture.  Cela  n'avait  pu  provenir 
d'une  fusion  quelconque  de  la  surface,  qui  était  trop  fraîche 
et  trop  intacte  pour  avoir  été  portée  à  une  température 
aussi  élevée.  La  cassure  avait  donc  éié  produite  par  la  même 
cause  qui  avait  donné  naissance  aux  trous  (^). 

La  pierre  pèse  6  kilogrammes;  elle  appartient  à  la  va- 
riété des  brèches  dures,  et  présente,  quand  on  la  casse, 
une  surface  identique  à  celle  de  la  pierre  de  Parnallee,  à 
laquelle  elle  ressemble  dans  tous  les  autres  points  de  détail  ; 
les  taches  rondes,  d'un  jaune  très-pâle,  ayant  quelquefois 


(*)  Cela  a  été  mis  hors  de  doute  de  la  manière  la  plus  complète  et  la 
plus  claire,  par  le  professeur  Maskelyne,  dans  le  Philosophical  Magtizine, 
août  1876. 


DE   WARaBNTON    ET   DS   CYUTHIÀNÀ.  53 

5  et  6  millimètres  de  diamètre,  sont  disséminées  de  la  même 
manière  dans  la  pâte;  il  en  est  de  même  de  la  troïlite,  de 
la  structure  globulaire  de  certaines  parties  et  des  quelques 
particules  d'un  minéral  siliceux  noir. 

Par  une  singulière  coïncidence,  le  poids  spécifique  de  la 
portion  que  j'ai  expérimentée  est  le  même  que  celui  trouvé 
par  Maskelyne,  c'est-à-dire  3,4ï-  Sous  le  microscope,  elle 
présente  le  même  aspect  que  celui  qu'a  décrit  cet  auteur. 

Analyse  chimique. 

La  matière  pierreuse,  débarrassée  du  fer  métallique,  se 
composait  de: 

Matière  soluble  dansTacide  chlorhydrique . . .  56, 5o  pour  loo 
Matière  insoluble  dans  Tacidechlorhydrique..     4^9^^       ** 

Une  partie  de  la  portion  soluble  se  composait  de  troïlite, 
que  je  n'ai  pu  séparer  mécaniquement,  mais  qui  se  déduit 
des  analyses  suivantes: 

Partie  soluble.       Partie  insoluble. 

Silice 33 ,65  57 ,60 

Protoxyde  de  fer 3o,83  1 1 ,4^1 

Alumine 0,11  ^9  43 

Chaux .  traces  5, 70 

Magnésie 34,61  ^3,95 

Oxyde  de  chrome >»  o ,  38 

Soude »  I ,  ^4 

99,20  100,72 

La  portion  étudiée  contenait  5, 93  pour  100  de  fer  nicke- 
lifère,  composé  de 

Fer 90,64 

Nickel 8,35 

Ck)balt 0,73 


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2 


54  L-    SAilTH.    MÉTÉORITES    DE    BOCHESTER, 

Constitution  minéralogique  de  la  pien^e  de  Cynthiana. 

Les  minéraux,  dans  cette  pierre,  se  distinguent  facilement 
à  Toeil,  mais  se  voient  d'une  façon  bien  plus  nette  sous  un 
grossissement  moyen,  surtout  les  concrétions  rondes  et  dis- 
tinctes d'une  bronzite  d'un  jaune  clair.  La  troïlite,  les  pail- 
lettes métalliques  et  les  filaments  se  voient  aussi  facilement. 

On  n'a  pas  essayé  de  séparer  les  minéraux  pierreux  en 
quantité  suffisante  pour  l'analyse^  des  essais  quantitatifs 
ont  été  faits  pour  distinguer  leurs  caractères.  De  l'examen 
chimique  qui  précède  je  déduis  les  résultats  suivants,  qui 
donnent  à  peu  près  la  proportion  des  minéraux  consti- 
tuants :  « 

Olivine. 5o,oo 

Bronzite  et  pyroxène .  38, oo 

Fer  nickeiifère 6,00 

Troïlite 5,5o 

Fer  chromé o ,  Sa 

Il  n'y  avait  pas  de  cristaux  de  minéraux  visibles,  soit  k 
l'œil  nu,  soit  à  la  loupe. 

Remarques  sur  la  région  où  ces  météorites  sont  tombées. 

Dans  l'étude  des  trois  aérolithes  qu'on  vient  de  décrire, 
il  est  intéressant  d'examiner  la  région  dans  laquelle  ils 
sont  tombés,  en  ayant  égard  aux  chutes  précédentes  de 
date  récente. 

Dans  une  période  de  moins  de  dix-Luit  ans,  il  y  a  eu, 
dans  les  Etats-Unis,  douze  chutes  de  pierres  météoriques 
qui  ont  été  subséquemment  ramassées.  A  une  ou  deux 
exceptions  près,  je  les  ai  toutes  décrites  en  détail  et  j'en  ai 
fourni  des  écLantillons  aux  différents  cabinets  d'Amérique 
et  d'Europe. 


D£   WAHUBIïTOIf    ET    DE   CYNTHIÀNÀ.  55 

En  groupant  ensemble  toutes  ces  chutes  et  en  estimant 
la  quantité  de  matière  météorique  qui  les  accompagnait, 
j'ai  été  frappé  de  ce  fait  singulier,  que  huit  d'entre  elles, 
formant  un  total  de  plus  de  looo  kilogrammes  de  matière, 
se  sont  produites  dans  les  régions  de  la  Prairie  de  l'ouest, 
non  loin  de  chez  moi  ;  et  ces  chutes  sont  limitées  dans  une 
région  ne  dépassant  pas  le  huitième  de  la  surface  des 
Etats-Unis,  à  l'est  des  Montagnes-Rocheuses.  On  peut  sup- 
poser qu'une  raison  de  ce  fait  est  que  cette  région  a  une 
population  plus  dense  et  que  par  suite  il  y  a  plus  d'obser- 
vateurs. Ce  n'est  pourtant  pas  là  la  cause;  car  elle  ne 
contient  pas  beaucoup  plus  que  la  population  moyenne 
ordinaire  de  ce  pays-ci. 

J'ai  fait  un  croquis  de  la  région  où  ces  huit  chutes  ont 
eu  lieu;  un  coup  d'oeil  fera  connaître  leurs  positions  res- 
pectives. Il  est  accompagné  d'une  table  donnant  quelques 
détails  comparatifs  pour  chacun  d'eux. 


56  L.  SHira.  —  hétëoutu  db  sociiuteb. 

Kg.  I. 


DE   WARREBITON    ET    DE    GTlfTHIAMA. 


57 


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58  L.    SMITH.   MÉTÉORITES    DE    ROCHESTER,    ETC. 

Pendant  la  même  période,  il  y  a  eu,  aux  États-Unis, 
quatre  autres  chutes  de  météorites  pesant  en  tout  moins 
de  2  kilogrammes.  Elles  ont  eu  lieu  respectivement  : 

Latitude.         Longitude. 


28  novembre  1868 

34.30 

87 

9  décembre    1868 

34 .3o 

87.50 

6  octobre       1869 

32. 10 

85 

21   mai              1871 

44 -30 

6g.  10 

Ainsi,  dans  la  région  indiquée  ci-dessus,  nous  observons 
plus  de  bolides  que  dans  aucune  autre.  Le  professeur 
Kirkwood  en  a  récemment  décrit  sept,  vus  par  lui  ou  par 
d*autres,  depuis  juillet  1876  jusqu'en  février  1877.  Les 
pierres  de  trois  d'entre  eux  sont  celles  que  nous  venons  de 
décrire;  les  autres  bolides  n'ont  pas  laissé  trace  de  leur 
passage.  Dans  mes  observations  personnelles,  j'ai  noté, 
pendant  les  trois  dernières  années,  trois  spiendides  bolides 
qu'on-  a  vus  apparaître  dans*  le  ciel,  mais  dont  on  n'a  pas 
trouvé  de  fragments;  je  les  ai  décrits,  et  il  y  en  a  encore 
d'autres  qui  m'ont  été  dépeints  par  d'autres  observateurs. 

Une  circonstance  encore  plus  frappante  est  celle-ci  : 
dans  les  soixante  dernières  années,  il  y  a  eu  vingt  chutes 
bien  observées  de  pierres  météoriques.  Parmi  elles,  il  y  en 
a  juste  la  moitié  qui  sont  tombées  dans  la  région  dont  j'ai 
donné  le  plan,  en  rappelant  les  huit  chutes  des  dix-liuit 
dernières  années;  le  poids  qu'elles  représentent  est  de  près 
de  1200  kilogrammes  :  cette  quantité  est  vingt  fois  plus 
grande  que  celle  qu'ont  fournie  les  dix  autres  chutes  qui  se 
sont  produites  çà  et  là  dans  d'autres  régions. 

J'ai  mentionné  ce  fait  singulier,  non  pas  qu'il  ait  aucune 
signification  cosmique,  mais  simplement  comme  une  por- 
tion des  memoranda  que  je  liens  pour  mes  observations  et  de 
l 'étude  de  ces  curieux  traits  d'union  entre  le  ciel  et  la  terre. 

Avant  peu,  j'espère  réunir  ensemble  mes  études  spécu- 
latives plus  récentes  sur  ces  corps. 


%«««%%%««%%%%%%«%«%%«««««%««%% 


A.    BEETIN.    —    SDR    LES    TÉLÉPHONES.  5g 

SUR  LES  TÉLÉPHONES^ 

Par    m.    a.    BERTIN. 


Le  nom  de  Téléphone  devrait  être  réservé  pour  les 
appareils  qui  permetlenl  de  porter  au  loin  la  voix  à  la 
manière  des  tuyaux  acoustiques  5  cependant  le  premier 
qui  a  reçu  ce  nom  ne  permettait  que  le  transport  des  sons 
musicaux  et  encore  en  pelit  nombre. 

Cet  appareil  est  celui  que  M.  Reîss  de  Francfort  a  fait 
connaître  en  1860.  Il  repose  sur  la  propriété  qu'ont  les 
courants  électriques,  de  produire  des  sons  dans  les  électro- 
aimants. Ces  sons,  découverts  par  Page  en  1837,  ont  fait 
l'objet  des  recherches  d'un  grand  nombre  de  physiciens; 
on  en  trouvera  l'historique  en  tête  du  Mémoire  que  Wer- 
theim  a  consacré  à  ce  sujet  (*).  On  peut  les  produire  de 
bien  des  manières  :  l'une  des  plus  simples  est  de  placer 
une  tige  de  fer  ou  d'acier  dans  l'axe  d'une  hélice  ou  d'une 
bobine  traversée  par  des  courants  interrompus.  L'ai- 
mantation produisant  toujours  un  allongement  du  fer  et 
la  désaimantation  un  raccourcissement,  il  en  résulte  que 
le  passage  des  courants  interrompus  dans  la  bobine  doit 
produire  des  vibrations  longitudinales  dans  le  noyau.  Ce 
son  longitudinal  est  unique  et  ne  dépend  que  de  la  lon- 
gueur de"  la  tige  et  de  son  élasticité  :  de  plus  il  est  très- 
peu  intense  et  c'est  là  une  difficulté  très-grande  pour  le 
faire  entendre  dans  nos  cours.  Il  est  vrai  qu'il  est  le  plus 
souvent  accompagné  d'un  bruit  plus  facile  à  percevoir  et 
qui  provient  des  chocs  de  la  tige  contre  les  parois  de  la 
bobine,  lorsque  la  première  n'est  pas  exactement  dans  l'axe 
de  la  seconde.  Mais  ce  bruit  n'est  qu'accidentel  et  l'on  doit 


(')  J finales  de  Chimie  et  de  Phjrsiquet  3®  sérî*»,  t.  XXIII,  p.  3oa. 


6o  A.    BEKTllf. 

le  faire  disparaître,  car  il  est  étranger  aux  sons  galva- 
niques proprement  dits.  Il  est  évident  que  le  courant  qui 
traverse  la  bobine  peut  provenir  d^une  source  très-éloignée 
ou,  en  d^autres  termes,  que  Ton  peut  produire  à  distance 
les  sons  galvaniques  :  c'est  cette  production  des  sons  gal- 
vaniques à  distance  qui  constitue  Tappareil  que  M.  Reiss 
a  appelé  le  Téléphone  (*). 

Le  récepteur  R  (jig,  i)  de  ce  télégrapbe  acoustique  est  une 
petite  bobine  d'environ  i6  centimètres  de  long,  entourée 
de  six  couches  de  fil  fin,  dans  Taxe  de  laquelle  est  placée 
une  aiguille  à  tricoter  de  27  centimètres.  Cette  aiguille 
est  supportée  à  ses  extrémités  par  deux  chevalets  qui  repo- 
sent, ainsi  que  la  bobine,  sur  la  plate-forme  d^une  caisse 
résonnante  percée  de  deux  trous  ^  la  résonnance  de  cette 
caisse  peut  être  augmentée  par  celle  d'une  seconde  caisse 
également  percée  de  deux  trous,  qui  peut  servir  de  cou- 
vercle à  la  première  et  enfermer  tout  l'appareil. 

Le  transmetteur  T,  ou  Tiiiterrupteur,  a  la  forme  d'une 
boite  cubique  portant  latéralement  un  tuyau  à  pavillon 
par  lequel  on  peut  faire  entendre  un  son  qui  mettra  en 
vibration  l'air  de  la  boite.  Ces  vibrations  se  transmettent 
à  une  membrane  qui  ferme  la  boite  à  la  partie  supérieure 
et  les  vibrations  de  cette  membrane  serviront  à  interrompre 
le  courant  de  la  manière  suivante.  Au  centre  de  cette 
membrane  on  a  collé  une  petite  rondelle  de  platine  très- 
mince,  qui  communique  par  une  bande  métallique  avec  le 
bouton  A.  Au-dessus  de  la  rondelle  et  à  une  petite  distance, 
une  pointe  de  platine  est  suspendue  à  l'extrémité  d'une 
lame  en  communication  métallique  avec  un  second  bou- 
ton B.  Ces  deux  boutons,  ainsi  que  les  deux  boutons  d'at- 
tache C  et  D  de  la  bobine  du  récepteur,  sont  réunis  par 
deux  (ils,  entre  eux  et  avec  la  pile  P,  comme  l'indique  la 

(*)  KcBN,  Électricité  appliquée,  p.    lao.  —  Muller,  Traité  de  Physique, 
t.  H,  p.  387. 


SUR    LES   TÉLÉPBOIIES. 


figure.   L'uu  des  fils  de  communication  peut  être  rem- 
place par  la  terre. 

S!  l'on  interrompait  le  courant  de  la  pile  à  des  inter- 


valles périodiques  assez  éloignes  on  n  entendrait  dans  la 
boîte  résonnante  du  lecepleui  qu  une  succession  de  petits 
bruits  très  faibles  tels  que  ceux  qu  on  peut  produire  avec 
les  ongles  en  les  faisant  claquer  l'un  contre  l'autre  ;  mais 
ces  sons,  d'ailleurs  très-faibles,  étant  de  mëmeliauteur,  ne 
pourraient  servir  à  faire  des  signaux.  Il  n'en  sera  plus  de 


6a  ▲.  BERTin. 

même  si  Ton  produit  des  sons  de  hauteurs  diflerentes  dans 
la  boite  du  transmetteur,  soit  en  chantant,  soit  en  sifflant 
devant  le  pavillon  du  tuyau  que  porte  celte  boite.  L'air  se 
mettra  en  vibrations  qui  se  transmettront  à  la  membrane, 
celle-ci  en  vibrant  approchera  et  éloignera  périodique- 
ment la  plaque  centrale  de  la  pointe  placée  vis-à-vis,  et 
produira  dans  le  courant  des  interruptions  périodiques 
aussi  rapides  que  les  vibrations  des  sons  émis.  L'oreille 
placée  près  de  la  boite  du  récepteur  entendra  donc  une 
série  de  bruits  trop  fréquents  pour  être  perçus  séparément, 
mais  leur  succession  rapide  donnera  un  son  composé  dont 
la  hauteur  sera  la  même  que  celle  du  son  émis  dans  la 
boîte  du  transmetteur.  Une  gamme  chantée  dans  celle-ci 
produira  donc  dans  le  récepteur  une  gamme  correspon- 
.dante,  au  moins  dans  certaines  limites.  Ces  notes  sont 
comprises,  suivant  M.  Reiss,  entre  F  et  j"y  c'est-à-dire 
entre /bi  etja^,  ou  encore  entre  le^ade  la  seconde  octave 
du  piano  et  le  Ja  de  la  cinquième. 

Dans  les  expériences  que  M.  Reiss  a  faites  devant  le 
Congrès  scientifique  de  Francfort  (*  ),  les  sons  ont  été 
transmis  à  une  distance  de  loo  mètres*,  mais  il  n'y  a  évi- 
demment aucune  raison  pour  ne  pas  aller  beaucoup  plus 
loin. 

Ce  premier  essai  de  téléphone  n'a  pas  obtenu  tout 
le  succès  que  son  auteur  en  espérait  :  il  a  donné  seule- 
ment un  appareil  de  ^Physique,  qui  est  encore  peu  ré- 
pandu dans  nos  cabinets,  mais  il  n'a  jamais  pu  être 
employé  dans  la  télégraphie.  L'appareil  a  en  effet  des  dé- 
fauts que  la  pratique  révèle  immédiatement  à  l'expéri- 
mentateur. 

D'une  part,  la  transmission  des  sons  est  très-imparfaite. 
Les  vibrations  de  la  membrane  n'établissent  pas  toujours 


(  *)  Annuaire  de  la  Société  de  Physique  de  Francfort^  1860-18G1. 


SUR  les'  téléphonies.  63 

le  contact  entre  la  rondelle  et  la  pointe,  et  bien  des  sons 
n'arrivent  pas  au  récepteur.  On  a  mis,  il  est  vrai,  sur  le 
côté  de  la  boite  du  transmetteur  un  électro-aimant  h 
armature  vibrante  qui  assure  beaucoup  mieux  le  passage 
du  .courant;  mais,  les  interruptions  n'étant  plus  assez 
rapides,  on  ne  perçoit  plus  qu'une  série  de  cliocs  et  non 
plus  un  son  d'une  hauteur  déterminée.  D'autre  part,  le 
récepteur  reçoit  des  sons  tellement  faibles  qu'ils  sont 
difficiles  à  percevoir  et  qu'ils  disparaissent  au  moindre 
bruit  extérieur. 

Ces  défauts  ont  été  victorieusement  combattus  dans  le 
téléphone  de  M.  Elisha  Gray,  qui  a  été  expérimenté  à  l'Ex- 
position de  Philadelphie  (*). 

Les  interruptions  du  courant  sont  produites  par  les 
vibrations  de  diapasons  électriques,  mis  en  mouvement 
par  une  pile  locale.  Ces  diapasons,  formant  une  gamme 
chromatique  de  deux  octaves,  sont  placés  dans  une  boîte 
à  clavier,  dont  chaque  touche  fait  passer  le  courant  de  la 
pile  locale  dans  le  diapason  correspondant.  On  peut  donc, 
sur  cette  espèce  de  piano,  jouer  un  air  quelconque  dont  les 
notes  sont  comprises  entre  deux  octaves  consécutives. 

Chaque  diapason  qui  vibre  ouvre  et  ferme  le  courant 
d'une  pile  de  ligne  qui,  à  l'autre  station,  va  mettre  en 
activité  un  électro-aimant  ordinaire  à  deux  branches.  L'un 
des  pôles  de  cet  électro-aimant  est  fixé  à  une  armature  en 
fer,  tandis  que  l'autre  en  est  à  une  petite  distance,  jj  de 
pouce  ou  ^de  millimètre.  Dans  ces  conditions,  le  passage 
des  courants  interrompus  dans  Félectro-aîmant  produira 
des  vibrations  dans  l'armature  et  par  suite  un  son  d'une 
faible  intensité.  Pour  le  renforcer,  on  a  fixé  au  centre  de 
l'armature  un  pied  en  fer,  qui  est  appliqué  sur  une  caisse 
résonnante  de  grandes  dimensions.  L'électro-aimant,  fermé 


(*)  Scientific  American^  supplément.  New- York,  5  février  i8;G. 


64  A.    BERTIN. 

par  le  haut  et  renversé  sur  son  armature,  posée  sur  sa 
caisse,  rappelle  de  loin  les  gros  diapasons  à  caisse  réson- 
nante que  Ton  voit  dans  nos  cabinets. 

Telle  est  la  disposition  qui  a  permis  de  transmettre  à  de 
grandes  distances  une  mélodie  avec  une  intensité  suffi- 
sante pour  être  entendue  d'un  nombreux  auditoire.  Mais 
ce  n'était  pas  encore  le  téléphone,  c'est-à-dire  l'appareil 
pouvant  transmettre  la  parole  par  des  courants  électri- 
ques :  il  était  réservé  à  M.  Graham  Bell,  de  Boston,  de  ré- 
soudre  ce  problème  difficile. 

M.  Bell  a  commencé  à  travailler  à  son  invention  en  iS^S. 
Il  y  a  déjà  plusieurs  mois  qu'il  l'a  amené  à  sa  perfectioni 
mais  son  appareil  n*a  été  présenté  à  l'Académie  que  depuis 
peu  de  temps  par  M.  Bréguet(*).  La  Note  était  accom- 
pagnée d'une  figure  que  nous  reproduisons  ici,  et  qui 
représente  le  téléphone  en  grandeur  naturelle. 

Les  organes  du  téléphone  sont  renfermés  dans  une  enve- 
loppe en  bois  qui  a  la  forme  d'un  cornet  acoustique  et  que 
l'on  tient  à  la  main.  A  Tune  des  extrémités  on  voit  deux 
boutons  :  ils  servent  à  attacher  les  fils  de  communication, 
qui  réunissent  deux  appareils  semblables  placés  aux  deux 
extrémités  de  la  ligne.  Sur  une  ligne  télégraphique  l'un 
des  fils  serait  naturellement  remplacé  par  la  terre. 

A  l'extrémité  opposée  aux  boutons  d'attache,  le  bois  est 
creusé  comme  un  pavillon  d'instrument  à  vent.  C'est  ce 
pavillon  que  l'on  met  contre  l'oreille  pour  entendre;  c'est 
devant  ce  pavillon,  à  i  centimètre  à  peu  près,  que  l'on 
parle  lentement,  à  haute  voix  et  en  articulant  bien.  Quel 
effet  produiront  ces  paroles  sur  le  téléphone?  Pour  nous 
en  rendre  compte,  il  faut  le  démonter  et  examiner  ce  que 
contient  le  morceau  de  bois  que  nous  avons  entre  les 
mains.  Nous  y  trouverons  d'abord  dans  l'axe  un    long 


(*)  Comptes  rendus  des  séances  de  l'Académie  des  Sciences  du  29  oc- 
tobre 1877. 


SDK    LES    rtLtPBOBBS.  65 

cylindre  d'acier,  et  nous  reconnaltrODS  qa'il  est  aiatdntë. 
Kous  verrons  ensuite  que  cet  aimant  porte,  en  son  p6le  le 
plasvoiaindapavillon,  une  petite  bobine  en  bois,  entourée 


d'an  fil  de  cuivre,  dont  les  extrémités  viennent  aboutir  aux 
boutons  d'atlacbe  des  fils  de  ligne.  EnSn  nous  remarque- 
rons, devant  ce  pâle  et  à  une  très-petite  distance,  une  ron- 
delle de  t61e  mince,  fixée  par  son  pourtour  à  peu  près  an 
milieu  de  la  distance  qui  sépare  l'aimant  du  pavillon. 
Jnn.  de  Chim.  et  de  Phji.,  5*  sârie,  t.  X.11I.  [Janvier  1873.)         ^ 


66  A.  BERTnr.  —  son  les  téléphones • 

Quand  on  parle  conlre  le  pavillon,  cette  rondelle  vibre 
comme  une  membrane,  et  une  oreille  qui  serait  placée 
par  derrière  percevrait  tous  les  sons  émis,  avec  leur  arti- 
culation, leur  timbre  et  toutes  les  modifications  qui  dis- 
tinguent les  voyelles  dans  une  même  voix  et  les  différentes 
voix  les  unes  des  autres.  Ces  sons  seront  aussi  perçus  par 
Toreille  appliquée  au  pavillon  du  téléphone  qui  est  à 
Tautre  extrémité  de  la  ligne  ^  seulement  ils  ne  se  propa- 
geront plus  par  une  communication  directe  du  mouve- 
ment vibratoire,  mais  en  produisant  des  modifications 
exactement  correspondantes  dans  les  aimants  des  deux 
téléphones,  et  c'est  là  ce  quMl  y  a  de  vraiment  merveilleux 
dans  l'invention  de  M.  Bell. 

Les  vibrations  de  la  rondelle  de  fer  du  téléphone  par- 
lant ne  peuvent  se  produire  sans  changer  périodiquement, 
quoique  très-faiblement,  la  distance  de  cette  rondelle  au 
pôle  de  Taimant  qui  lui  fait  face.  Le  magnétisme  de  cet 
aimant  est  donc  modifié,  et  il  en  résulte  dans  la  bobine  qui 
Tentoure  des  courants  induits  correspondant  à  ces  modi- 
fications. Ces  courants  induits  se  transmettent  par  le  fil 
de  ligne  à  la  bobine  du  second  téléphone  et  modifient  à 
leur  tour  le  magnétisme  de  Taiinant  qu'il  renferme. 
L'attraction  de  cet  aimant  sur  la  rondelle  de  fer  qui  est 
placée  devant  lui  est  donc  variable,  et  cette  rondelle  est 
mise  en  vibration  d'une  manière  synchrone  avec  la  pre- 
mière. Les  vibrations  de  la  première  rondelle  sont  donc 
reportées  sur  la  seconde  et  l'oreille,  placée  derrière  celle-ci, 
perçoit  les  paroles  aussi  fidèlement  que  si  elle  était  der- 
rière la  rondelle  du  premier  téléphone,  avec  cette  diffé- 
rence, toutefois,  que  les  sons  sont  affaiblis  par  la  distance, 
comme  les  courants  qui  les  transmettent.  Tel  est,  en  peu 
de  mots,  le  jeu  des  forces  mises  en  activité  dans  le  télé- 
phone. On  ne  peut  s'empêcher  d'être  étonné  et  de  l'ex-? 
tréme  petitesse  de  ces  forces,  puisque  les  vibrations  de  la 
rondelle  parlante  ne  sont  pas  visibles,  et  du  parfait  ayn- 


A.    DITTE.    QUELQUES    PROPRIÉTÉS,    ETC.  67 

chronisme  de  leurs  transformations  successives,  puisque 
les  mêmes  modifications  de  cette  rondelle  se  reproduisent 
aux  deux  extrémités.  Il  est  bien  curieux  que  cet  instrument 
si  délicat  soit  en  même  temps  très-rustique,  de  telle  façon 
qu'on  peut  le  démonter  et  le  remonter  sans  précaution, 
remplacer  les  rondelles  par  d^autres  prises  presqu  e  au  ha- 
sard, sans  lui  faire  perdre  ses  qualités. 

Il  lui  manque  cependant,  pour  èlre  parfait,  la  possibilité 
de  faire  des  signaux  d'appel*,  car  enfin  on  aurait  beau 
parler  dans  le  premier  appareil,  si  le  second  n'est  pas 
appliqué  contre  l'oreille  de  celui  qui  doit  écouter.  Eu  ce 
moment  on  n'a  d'autre  ressource  que  de  frapper  avec  le 
doigt  contre  la  rondelle  de  fer  :  le  bruit  se  transmet  à  la 
rondelle  du  second  téléphone,  mais  il  est  trop  faible  pour 
attirer  l'attention  d'une  personne  distraite  ou  un  peu 
éloignée. 

On  reproche  aussi  au  téléphone  la  faiblesse  des  cou- 
rants qu'il  emploie  et  qui,  dans  les  transmissions  par  les 
,fils  télégraphiques,  les  laisse  sous  l'influence  prédomi- 
nante des  courants  voisins  ou  des  courants  terrestres. 
Mais  enfin,  tel  qu'il  est,  il  est  employé  en  Amérique,  il 
est  essayé  en  Europe  et  il  faut  espérer  qu'il  ne  sera  pas 
seulement  un  sujet  d'étonnement,  mais  encore  un  moyen 
de  communication  d'une  utilité  incontestable. 


%*< 


EX1VE3I  DE  QUELQUES  PROPRIÉTÉS  DE  L'ACIDE  BORIQUE  -, 

Pah  m.  Alfred  DITTE^ 
Professeur  à  la  Faculté  des  Sciences  de  Caen. 


Quand  on  dissout  de  Tacide  borique  anhydre  dans  l'eau, 
on  n'observe  rien  de  bien  remarquable  \  mais,  si  à  de  Tacide 
anhydre  et  pulvérisé  on  ajoute  une  quantité  d'eau  relative- 

5. 


'68  A.    DITTE. 

ment  petite,  par  exemple  le  double  de  son  poids,  et  qu'on 
agite  le  mélange,  on  voit  presque  immédiatement  Tacide  se 
gonfler  et  augmenter  de  volume  en  s'hydratant  ;  en  même 
temps  le  mélange  s^échauffe  beaucoup,  la  température  de 
la  masse  s'élève  presque  instantanément  a  loo  degrés,  et 
Teau  en  excès  se  dégage  brusquement  sousibrme  de  vapeur. 
Ce  grand  dégagement  de  chaleur  de  la  part  d'un  acide  peu 
énergique  surprend  au  premier  abord  ;  en  examinant  de 
près  ce  qui  se  passe,  j'ai  été  conduit  à  mesurer  la  quantité 
de  chaleur  qui  se  dégage  dans  ces  circonstances,  et  a  déter- 
miner quelques-unes  des  propriétés  de  ce  corps. 

I.  —  Chaleur  de  dissolution  de  V acide  boiique  hydraté. 

On  l'obtient  en  dissolvant  dans  Feau  un  poids  connu  dia- 
cide cristallisé  pur  et  réduit  en  poudre  fine  \  la  dissolution 
est  presque  immédiate,  et  la  température  s'abaisse.  La 
mesure  de  cet  abaissement  de  température  donne,  pour  la 
quantité  de  chaleur  Q  absorbée  par  la  dissolution  de 
I  équivalent  (6*2  grammes)  d'acide  hydraté  dans  l'eau  à 


i 5  degrés  : 

Cal 


—  3?.o8,i 

—  3149,7 

—  3i45,7 

—  33o8,8 

—  3o57 , I 

ej^  moyenne  Q=  3186,7.  Cette  valeur  de  Q  correspond 
à  la  formation  d'une  dissolution  à  peu  près  saturée  à 
i5  degrés,  c'est-à-dire  à  i  équivalent  d'acide  pour  ai3 
d'eau  environ  ;  si  l'on  étend  cette  liqueur,  on  n'observe 
qu'une  variation  de  température  très-faible  -,  en  ajoutant, 
par  exemple,  à  la  dissolution  la  moitié  de  l'eau  qu^elle  con- 
tient déjà,  ce  qui  correspond  alors  à  3ao  équivalents  d'eau- 
pour  I  d'acide,  l'absorption  de  chaleur  n'est  que  de 
—  a4i  calories. 


QUELQUES    PROPRIjÊTÉS    DE    l' ACIDE   BORIQUE.  69 

II.  —  Chaleur  d' hydratation  de  V acide  borique  anhydre. 

On  peut  Tévaluer  de  deux  manières  différentes  : 
I®  On  dissout  dans  l'eau  une  certaine  quantité  d'acide 
anhydre  et  l'on  observe  la  quantité  de  chaleur  Qi  qui  se 
dégage  ;  elle  représente  la  chaleur  d'hydratation  cherchée  ^, 
diminuée  de  la  chaleur  de  dissolution  Q  de  l'hydrate  formé. 
En  prenant  de  l'acide  fondu,  le  pulvérisant  et  le  tamisant 
rapidement,  il  n'attire  pas  d'humidité  en  quantité  appré- 
ciable, et  sa  dissolution  dans  l'eau  s'effectue  dans  un 
temps  très-court  (deux  à  trois  minutes),  ce  qui  rend  les 
mesures  faciles  •,  on  trouve  ainsi,  pour  la  chaleur  dé- 
gagée par  I  équivalent  d'acide  (35  grammes)  en  s'hydra- 
tant  : 


Qr 

Qt  +  Q-^. 

3071,5 

H- 6279,6 

3075,6 

-f- 6275,7 

3090 , I 

-f-  6255 , 4 

3229,3 

+  6394,6 

ce  qui  donne  pour  la  valeur  moyenne  ^=  4-63oi,3,  à 
14  degrés. 

2°  On  peut  aussi  introduire  dans  une  dissolution  saturée 
d'acide  borique  à  une  température  donnée  une  petite 
quantité  d'acide  fondu  finement  pulvérisé  *,  par  l'agitation 
du  mélange,  l'acide  s'hydrate  presque  instantanément,  et, 
en  opérant  sur  un  poids  de  matière  assez  faible  pour  que  la 
température  s'élève  peu  (de  i  à  2  degrés  tout  au  plus),  il 
est  facile  de  tenir  compte  de  la  petite  quantité  d'acide  qui 
se  dissout  dans  la  liqueur  par  suite  de  cette  faible  élévation 
de  température,  et  d'apporter  au  nombre  directement 
observé  la  correction  correspondante.  Dans  aucune  expé- 
rience elle  ne  s'est  élevée  à  plus  de  4  centièmes  du  résul- 


JO  A..    DITTE. 

tal  total.  On  trouve  ainsi  pour  la  valeur  de  ^: 

Cal 

-4-  6149, 8 

-1-  6197,7 

--  6276,9 

-  6207,9 

ce  qui  donne  pour  valeur  moyenne 

:^-- H- 6208,1. 

En  combinant  les   nombres   fournis  par  les  deux  séries 
d'expériences,  on  a 

^  —  -^  6254, 7. 

Ainsi  la  dissolution  de  Tacide  hydraté  absorbe  environ 
la  moitié  de  la  chaleur  que  Thydratation  de  l'acide  anhydre 
dégage,  ce  qui  explique  la  ditTérence  des  phénomènes  que 
l'on  observe  quand  on  ajoute  à  l'acide  pulvérisé  peu  ou 
beaucoup  d'eau. 

III.  —  Chaleur  spécifique  de  V acide  borique  hydraté. 
On  la  calcule  à  Taide  de  la  formule  de  Person 


me  -r-  m' c' 


m  -h  m' 


c  étant  la  chaleur  spécifique  de  l'acide  anhydre  égale  à 
0,23743,  d'après  M.  Regnault,  et  cf  celle  de  la  glace 
égale  à  o,5o4  ;  cela  donne 

•y  =:  0,3535 16. 

Si  l'on  ajoutait  à  de  l'acide  borique  anhydre  et  pulvérisé 
la  quantité  d'eau  exactement  nécessaire  pour  Thydrater^ 
la  chaleur  dégagée  suffirait  à  porter  la  masse  à  une  tempe- 


QUELQUES    PROPRIÉTÉS    DE    l'aCIDE    BORIQUE.  ^% 

rature  donnée  par 

62  X  0,3535 16 

.Or  une  partîe  de  cette  chaleur  est  employée  à  échauffer 
le  vase  dans  lequel  on  opère*,  mais,  sî  l'on  n'ajoute  qu'une 
petite  quantité  d'eau  en  sus  de  la  quantité  nécessaire  à  l'hy* 
dratation  de  Tacide,  on  voit  que  la  chaleur  restée  libre 
sera  encore  su'ffisante  pour  volatiliser  cette  eau  brusque- 
ment, tout  en  maintenant  la  masse  à  100  degrés. 

IV.  —  Densité  et  dilatation  de  V acide  borique  anhydre. 

Les  Traités  de  Chimie  donnent  pour  cette  densité  i,83, 
sans  indication  de  température  (^).  Voici  les  résultats 
de  déterminations  faites  sur  un  échantillon  d'acide  bo- 
rique très-pur,  maintenu  en  fusion  jusqu'à  disparition 
complète  de  l'eau,  et  préparé  très-obligeamment,  avec 
beaucoup  de  soin,  par  M.  Margotiet,  agrégé-préparateur  de 
Chimie  à  TÉcole  Normale  supérieure.  Les  mesures  effec- 
tuées dans  l'essence  de  térébenthine  bien  desséchée  ont 
donné  pour  la  densité  par  rapport  à  l'eau  : 

à     o" ^rm,8766 

à  12" ^r- 1,8476 

à  8o'> à   z  1,6988 

On  en  conclut  pour  la  valeur  du  coefficient  de  dilatation, 
entre  i  a  et  80  degrés, 

a;^:=:o,ooi3o86. 

V.  —  Densité  et  dilatation  de  V acide  bonque  hydrate, 
La  densité  que  donnent  les  Traités,  sans  dire  la  tempé- 


(  *  )  C'est  le  chiffra  donné  par  MM.  Dumas  et  Le  Royer  {Journal  de  Phy^ 
sique,  t.  XGII,  p.  40 1  :  Essai  sur  le  ^volume  de  V atome  des  corps). 


72 

A. 

DITTE. 

rature  correspondante 

ï,  est 

1,48. 

Voici  les  résultats  qne  j'ai 

obtenus  : 

Densité  à 

0". 

^— i,f>463 

» 

12". 

§--z  I  ,5172 

J— i,5i28 

» 

i4". 

to 

6o«. 

^=r.I,4l65 

>» 

8o». 

^ — 1 , 3828 

On  en  conclut,  pour  le  coefficient  de  dilatation  entre  la  et 
60  degrés^  puis  entre  12  et  80  degrés, 

^f.--^  0,0015429, 

A%zzz  0,0014785. 

VI.  —  Densité  moyenne  et  contraction  de  V acide  borufue 

hydraté. 

En  regardant  cet  acide  comme  formé  diacide  anhydre  et 

d'eau  solide,  de  manière  à  ne  pas  avoir  à  faire  intervenir 

un  changement  d'état,  la  densité  moyenne  qu'aurait  Tacide 

hydraté,  si  ses  éléments  s'étaient  unis  sans  changement  de 

volume,  serait 

D  :=  1 ,3oo3. 

Or,  ce  nombre  étant  plus  petit  que  la  valeur  réelle  de  la 
densité,  on  en  déduit  une  diminution  de  volume  au  mo- 
ment de  la  combinaison,  ce'qui  correspond  bien  à  un  déga- 
gement de  chaleur;  la  valeur  de  la  contraction  est 

C^ — ^ —  =  0,15912. 


VII.  —  Chaleur  de  contraction  de  l'acide  borique  liydraté. 

C'est  la  quantité  de  chaleur  nécessaire  pour  ramener, 
en  le  dilatant,  Tacide  borique  hydraté  au  volume  qu'il  oc- 


QUELQUES    PROPRIÉTÉS   DE    l'ACIDE   BORIQUE-  73 

cuperait,  s'il  s'étaît  formé  sans  contraction.  On  sait  qu'elle 
est  représentée  par  la  formule 


=  {b-)! 


7 


[d  densité  réelle,  D  densité  moyenne,  E  équivalent,  A  coef- 
ficient de  dilatation,  y  chaleur  spécifique  de  l'acide  bo- 
rique hydraté).  On  en  tire 

La  contraction  ne  peut  donc  qu'en  partie  rendre 
compte  de  la  chaleur  que  l'hydratation  dégage.  La  chaleur 
de  contraction  employée  à  échauffer  l'acide  hydraté  le  por- 
terait à  la  température 

\d    ;  a 

Ainsi  il  suffirait  de  chauffer  à  i36  degrés  l'acide  cristal- 
lisé, pour  que  sa  densité  devienne  i,3oo.  Malheureu- 
sement il  n'est  pas  possible  de  mesurer  dans  les  con- 
ditions habiyjelles  et  à  i36  degrés  la  densité  de  l'acide 
hydraté,  qui  perd  une  partie  de  son  eau  avant  cette  tem- 
pératures 


VIII.  —  Solubilité  de  V acide  borique  dans  Veau. 

Il  était  nécessaire,  pour  les  corrections  dont  j'ai  parlé 
plus  haut,  de  connaître  exactement  la  loi  de  solubilité  de 
l'acide  hydraté  dans  l'eau;  les  ouvrages  de  Chimie  ne 
donnent  que  très-peu  de  renseignements  à  cet  égard  et  en- 
core les  nombres  relatifs  à  loo  degrés  sont-ils  en  complet 
désaccord  les  uns  avec  les  autres.  Cette  solubilité,  déter- 


y4  A*   DITTE. 

minée  à  diverses  températures,  a  donné  pour  la  quanlité 
diacide  dissoute  dans  i  litre  d^eau  : 

Température.  BoO',  3H0.  BoO' correspondant. 

o  gr 

o ^9À1  '  ï  >oo 

12 29 ,  ?,o  1 6 ,  5o 

20 39,92  22,49 

40 69,91  39,50 

62 ii4,i6  64^50 

80 168,1 5  95,00 

102 291,16  164, 5o 

Ces  nombres  se  placent  sur  une  courbe  de  solubilité  ex- 
trêmement régulière,  dont  la  convexité  est  tournée  vers 
Taxe  des  températures,  et  que  représente  l'équation  empi- 
rique 

jrrir  19,4  -f-  0,63636  /  -h  o,oi66o8r'  —  0,00001604  ^; 

l'acide  borique  se  dissout  dans  l'acide  chlorhydrîque 
étendu,  bien  plus  facilement  que  dans  Teau  pure.  Il  ne 
parait  cependant  exister  aucune  combinaison  entre  les 
deux  acides,  au  moins  anhydres.  En  effet,  Tacide  borique 
fondu  et  pulvérisé,  soumis  à  l'action  d'un  courant  diacide 
chlorhydrique  sec,  n'en  absorbe  h  aucune  des  températures 
comprises  entre  —  6®  et  le  point  auquel  l'acide  fondu 
commence  à  se  ramollir. 

IX.  —  Cristallisation  de  V acide  borique  hydraté. 

Il  se  présente  habituellement  sous  la  forme  de  paillettes 
incolores,  transparentes  et  brillantes.  Après  avoir  vaine- 
ment cherché  à  en  obtenir  dans  l'eau  pure  des  cristaux 
mesurables,  je  l'ai  vu  se  produire  ainsi  dans  une  liqueur 
faiblement  acidulée  par  l'acide  acétique  et  contenant,  en 
outre,  du  nitrate  d'argent.  L'acide  borique  ne  donne  aucun 
précipité  dans  ces  circonstances.  La  liqueur  abandonnée 
dans  un  vase  ouvert,  à  l'obscurité  et  à  une  température 


QUELQUES    PROPRIÉTÉS    DE    LUCIDE   BORIQUE.  jS 

variable  de  r5  à  aS  degrés,  s'évapore  très-lentement.  Au 
bout  de  quelque  temps  apparaissent  au  fond  du  vase  ou 
adhérents  à  la  surface  terminale  du  liquide  de  beaux 
prismes  hexagonaux  transparents  qui  grossissent  peu  à 
peu.  Ils  atteignent  jusqu'à  6  et  8  millimètres  de  longueur 
sur  2  millimètres  d'épaisseur,  et  ne  présentent  aucune 
modification  apparente.  On  trouve  avec  eux  quelques 
paillettes  de  la  forme  ordinaire  de  Tacide  borique.  Les 
prismes  présentent  perpendiculairement  à  leurs  arêtes 
latérales  un  clivage  net  et  très-facile  qui  produit  des  sec- 
tions hexagonales.  Les  cristaux,  quoique  formés  dans  une 
eau  mère  renfermant  du  nitrate  d'argent,  ne  retiennent  pas 
trace  de  métal  après  un  lavage  à  l'eau  froide  ;  c'est  là  de 
l'acide  borique  trihydaté,  comme  le  montrent  les  nombres 

suivants  : 

1.  II.  Calculé. 

BoO^ 56,58  56, oo  56,45 

HO 43,4tî         44, oo         43,55 

100,00  100,00  100,00 

Ainsi,  comme  cela  se  produit  souvent  du  reste,  ce  sont 
les  impuretés  de  la  liqueur  qui  ont  rendu  dans  ce  cas  la 
cristallisation  plus  facile. 

L'hydratation  de  l'acide  borique  me  paraît  fournir  le 
sujet  d'une  expérience  propre  à  montrer  dans  un  cours, 
d'une  manière  très-simple  et  frappante,  le  dégagement  de 
chaleur  produit  dans  certaines  actions  chimiques.  En  opé- 
rant, par  exemple,  sur  100  grammes  d'acide  borique  et 
125  grammes  d'eau,  on  peut  fondre  en  quelques  instants 
un  lingot  d'alliage  de  Darcet  placé  au  milieu  du  mélange, 
en  même  temps  qu'il  se  dégage  une  grande  quantité  de 
vapeur. 


y6  E.    DUGLA.UX.    —    TENSION    SUPERFICIELLE 

SUR  LA  TENSION  SUPERFICIELLE 
DANS  LA  SÉRIE  DES  ALCOOLS  ET  DES  ACIDES  GRAS; 

Par  m.  E.  DUCLAUX, 

Professeur  de  Physique  à  la  Faculté  des  Sciences  de  Lyon. 


Simon  (de  Metz)  (*)  est  le  premier  physicien  qui  ait 
publié  des  recherches  suivies  sur  la  tension  superficielle 
des  liquides  autres  que  Teau  et  des  dissolutions  salines. 
Il  a  constaté  que  les  dissolutions  saturées  de  chlorhydrate 
d'ammoniaque   et  des   sulfates  de  potasse,  de  cuivre  et 
d'oxydule  de  cuivre,  s^élèvent,   dans  un  tube  capillaire, 
à  une  hauteur  supérieure  à  celle  qu'atteint  l'eau.  Comme 
les  constantes  de  capillarité  sont ,  toutes    choses   égales 
d'ailleurs,  proportionnelles   au  produit  de  la  densité  du 
liquide  par  la  hauteur  soulevée,  il  résulte  de  l'observa  tien 
de  Simon  que  ces  constantes  sont,  pour  les  dissolutions 
précitées,  supérieures  à  celle  de  l'eau,  et  ce  fait  devient 
intéressant  quand  on  songe  que,  parmi  les  liquides  homo- 
gènes, c'est  l'eau,  c'est-à-dire  la  substance  dont  l'équivalezit 
est  le  plus  faible,  qui  a  la  tension  superficielle  la  plus  con- 
sidérable. 

Plus  tard,  Buliginski  (*)  étudia  la  loi  de  variation  de  la 
tension  superficielle  avec  la  concentration  pour  les  solu- 
tions de  salpêtre  et  de  sel  ammoniac.  Si,  avec  lui,  on  ap- 
pelle A  la  valeur  de  cette  tension  pour  l'eau,  G  sa  valeur 
pour  une  solution  renfermant  sous  l'unité  de  poids  g  de 
sel  et  p  d'eau,  on  a,  pour  exprimer  la  relation  entre  la 
concentration  et  la  constante  de  capillarité,  l'expression 

G  =  A  (p  4- gr*), 


(*)  annales  de  Chimie  et  de  Phjrsique,  3*  série,  t.  XXXII,  p,  5. 
(•)  P^gg'  ^""f  *•  CXXXIV,  p.  44o. 


DES    ALCOOLS   ET    DES    ACIDES    GRAS.  ^^ 

OÙ  k  est  un  coefficient  plus  grand  que  l'unité  ,  variable 
d'un  sel  à  Tautre.  Cette  expression  peut  se  transformer, 
en  tenant  compte  de  la  relation 

et  devient  alors 

G±=A-^-gA{k  — i), 

ce  qui  prouve  que,  dans  les  limites  des  expériences  de 
Buliginski  y  jusqu'à  a5  pour  loo  de  sel,  par  exemple,  dans 
le  cas  du  chlorhydrate  d^ammoniaque,  la  tension  superfi- 
cielle croît  proportionnellement  à  la  richesse  centésimale 
de  la  solution.  La  loi  de  la  variation  est  donc  représentée 
par  une  ligne  droite. 

En  étudiant  le  même  sujet,  M.  Valson  y  a  introduit  une 
idée  nouvelle,  celle  de  compter  les  proportions  de  sel  dis- 
soutes non  plus  en  poids,  mais  en  poids  équivalents.  En 
dissolvant,  par  exemple,  dans  un  litre  d*eau,  des  poids  de 
divers  sels  égaux  à  leur  équivalent  exprimé  en  grammes, 
il  a  trouvé,  outre  une  loi  dite  des  modules]  qui  n'a  qu'une 
valeur  secondaii*fe,  le  fait  intéressant  que  voici  :  c'est  que 
les  dissolutions  ainsi  préparées  avec  les  chlorures,  bro- 
mures, iodures,  sulfates  et  nitrates  de  métaux  divers  avaient 
toutes  même  tension  superficielle. 

Cela  rendait  probable,  d'une  manière  générale,  Texis- 
tence  d'une  relation  simple  entre  la  tension  superficielle 
et  le  poids  équivalent  des  sels  employés.  Si,  en  particulier, 
la  loi  formulée  par  Buliginski  est  exacte  pour  ces  diverses 
substances,  les  droites  qui,  pour  chaque  sel,  représentent 
la  loi  de  variation  de  la  constante  capillaire  avec  la  concen- 
tration, doivent  passer  toutes  par  un  même  point,  lors- 
qu'on porte  comme  abscisses  non  plus  les  proportions  pon- 
dérales, mais  les  proportions  équivalentes;  comme  elles 
partent  aussi  d'un  même  point,  elles  doivent  se  confondre, 
ce  qui  revient  à  dire  que  la  loi  de  variation  est  la  même 
pour  toutes. 


yS  £.    DUCLA.UX.    TENSION    SUPERFICIELLE 

Celle  conclusion  vient  d'êlre  solidement  établie  par 
M.  Quincke  (^),  qui,  à  la  suite  d'expériences  multipliées 
sur  les  dissolutions  de  divers  chlorures,  a  cru  pouvoir  for- 
muler la  loi  suivante  :  «  La  cohésion  (c'est  le  nom  qu'il 
donne  à  la  constante  capillaire)  croît  à  peu  près  propor- 
tionnellement au  nombre  d^équivalents  des  divers  sels 
dissous  dans  loo  équivalents  d'eau.    » 

Le  mot  àpeuprès  est  nécessaire,  car  les  vérifications  de 
la  loi  sont  trop  souvent  approximatives.  Elles  ne  se  font 
pas  bien  pour  les  solutions  concentrées,  surtout  celles  de 
chlorure  de  calcium^  elles  pèchent  aussi  pour  les  dissolu- 
tions de  perchlorure  de  fer.  M.  Quincke  les  trouve  incor- 
rectes, en  outre,  pour  le  chlorure  de  potassium  et  lechlor-> 
hydrate  d'ammoniaque.  Pour  ce  dernier  sel  au  moins,  la 
chose  est  singulière;  Buliginski^  qui  Ta  étudié,  donne  pour 
lui  une  formule,  du  genre  de  celle  que  nous  avons  indiquée 
plus  haut,  et  dans  laquelle  le  coefficient  de  proportionna- 
lité est,  quand  on  fait  la  correction  nécessitée  par  le 
changement  de  variable,  à  peu  près  identique  à  celui  de  la 
formule  générale  de  même  forme  donnée  par  M.  Quincke. 
D*après  Buliginski,  le  sel  ammoniac  rentrerait  donc  dans 
la  loi  commune,  tandis  que,  d'après  M.  Quincke,  il  n'y 
obéit  pas.  Lorsqu'on  cherche  la  raison  de  cette  contradic- 
tion, on  s'aperçoit  que  M.  Quincke  a  mesuré  les  tensions 
superficielles  de  ses  liqueurs  par  deux  méthodes  différen- 
tes, celle  des  ascensions  capillaires  et  celle  des  bulles 
liquides,  et  qu'ayant  obtenu  des  résultats  discordants,  il 
adopte  arbitrairement,  en  vertu  d'idées  préconçues,  les 
nombres  fournis  par  la  seconde  de  ces  méthodes,  celle  qui^ 
comme  nous  le  verrons  bientôt,  exige  les  mesures  les  plus 
délicates,  celle  au  moins,  si  l'on  veut  n'envisager  que  le 
côté  pratique,  où  les  nombres  bruts  sont  les  moins  concor* 
dants.  Quand  on  prend  au  contraire,  dans  les  expériences 

(*)  Pogg.  Ann.^  t.  CLX,  p.  6;   1877. 


DES   A.LCOOLS    ET  DES    ACinES    GRAS.  jg 

mêmes  de  M.  Quincke,  les  nombres  fournis  par  la  mesure 
des  hauteurs  capillaires,  le  chlorhydrate  d  ammoniaque  ne 
diffère  pas  des  autres  chlorures. 

La  loi  posée  par  M.  Quincke  parait  donc  avoir  un  assez 
haut  degré  de  généralité.  Elle  semble  s'appliquer  aussi  aux 
solutions  alcooliques.  Il  est  permis  de  trouver  pourtant 
qu'elle  a  une  base  trop  élroile,  soit  parce  que  le  nombre 
d'équivalents  de  sel  en  solution,  qui  forme  la  variable  in- 
dépendante, est  astreint  à  osciller  dans  des  limites  assez 
étroites,  soit  parce  que  la  loi  ne  s'applique  plus  bien  lors- 
que les  solutions  sont  trop  concentrées.  Elle  est  néan- 
moins intéressante,  et  il  est  fâcheux  qu'en  elle  se  résume 
tout  ce  que  la  science  possède  d'établi  sur  la  corrélation 
très-certaine  entre  la  cofistante  de  capillarité  et  la  compo- 
sition chimique  des  liqueurs. 

Les  physiciens  ont  malheureusement  été  détournés  des 
recherches  sur  les  phénomènes  capillaires  par  une  très- 
fausse  idée  des  difficultés  qu'y  rencontre  l'expérimenta- 
tion. En  voyant  des  observateurs  habiles  ne  pas  s'accorder 
sur  la  vérification  d'une  loi  simple  comme  celle  de  Jurin, 
et  obtenir,  dans  des  conditions  identiques  en  apparence, 
des  résultats  tout  à  fait  discordants,  on  a  conclu  à  l'exis- 
tence de  causes  d'erreurs  inconnues,  et  par  suite  impossi- 
bles à  éviter.  Ces  idées  ont  pu  persister,  tant  qu'on  ne 
s'est  pas  rendu  un  compte  bien  exact  de  la  vraie  nature  et 
de  la  vraie  localisation  des  forces  agissantes;  mais  aujour- 
d'hui qu'on  sait  qu'elles  proviennent  de  la  couche  infini- 
ment mince  de  liquide  qui  recouvre  la  surface  libre,  on 
s'explique  toutes  les  difficultés  qu'ont  rencontrées  les  pre- 
miers expérimentateurs,  et  l'on  apprend  à  les  prévenir. 

Pour  le  cas  des  tubes  capillaires  par  exemple,  la  seule 
précaution  à  prendre  pour  avoir  des  mesures  exactes  et 
précises  est  de  laver  très-soigneusement  le  tube,  de  façpn 
que  le  liquide  le  mouille  bien  et  que  l'angle  de  raccor- 
dement avec  la  paroi  soit  nul.  En  dehors  de  ces  conditions. 


8o  £.    DUGLA.UX.    TENSION    SUPERF   ICiAlE 

toute  mesure,  avec  quelque  soin  qu'elle  soit  faite,  est  in- 
certaine, et  par  suite  inutile.  Mais  on  ne  les  réalise  pas 
toujours  avec  la  même  facilité. 

Avec  Teau  et  les  liquides  à  forte  tension  superficielle,  il 
suffitM'une  trace  imperceptible  de  matière  grasse  sur  les 
parois,  pour  que  celle-ci,  s'élendant  en  couche  mince  sur 
la  surface  libre,  diminue  dans  une  proportion  notable  la 
hauteur  soulevée.  Si  la  surface  capillaire  reste  quelque 
temps  exposée  à  Tair,  le  niveau  s^abaisse  encore  par  suite 
du  dépôt  de  poussière  qui  s'y  produit,  et  dans  laquelle  il 
existe  toujours  des  corpuscules  graisseux,  ainsi  que  le 
prouve  le  loucher  gras  de  toutes  les  poussières  un  peu  an- 
ciennes. Pour  éviter  ces  causes  d'erreur,  il  faut  recourir 
au  nettoyage  exact  des  tubes,  tel  que  Gay-Lussac  le  pra- 
tiquait, et  faire  la  lecture  de  la  hauteur  soulevée,  dès  que 
l'équilibre  s'est  établi. 

Avec  les  alcools,  les  éthers,  les  acides  gras,  les  essences, 
et  en  général  les  dissolvants  des  matières  grasses,  les  diffi- 
cultés que  je  viens  de  signaler  sont  moins  à  craindre, 
d'abord  parce  que  ces  substances  adhèrent  mieux  au  verre, 
ensuite  parce  qu'elles  redoutent  moins  l'influence  des 
matières  grasses,  dont  les  tensions  superficielles  sont  voi- 
sines des  leurs.  Mais,  avec  les  corps  de  ces  séries  qui  sont 
volatils,  par  exemple  les  alcools,  il  existe  une  autre  cause 
d'erreur,  c'est  que  leurs  solutions  aqueuses  s'appauvris- 
sent par  évapora  lion.  Dès  lors  leur  tension  superficielle 
augmente,  et  la  colonne  s'élève.  Avec  l'alcool  méthylique, 
j'ai  vu  la  hauteur  capillaire  augmenter  en  deux  heures 
de  ~  de  sa  valeur.  Avec  les  alcools  de  degré  plus  élevë, 
les  pertes  par  évaporation  sont  moindres;  mais,  commela 
tension  superficielle  change  très-rapidement  avec  la  pro- 
portion d'alcool  dissoute  dans  l'eau,  les  plus  petites*  varia- 
tions dans  la  composition  de  la  couche  superficielle  se  tra- 
duisent par  une  élévation  irès-sensible  du  niveau. 

Pour  se  mettre  à  Tabri  de  ces  deux  sortes  d'erreurs,  on 


DES    ALCOOLS    ET    DES    ACIDES    GKAS.  8l 

peut  employer  plusieurs  dispositifs;  voici  celui  qui  m'a 
paru  le  plus  simple  et  le  plus  sûr.  J'emploie  un  tube  de 
thermomètre  calibré,  d'un  diamètre  voisin  de -y  de  milli- 
mètre, de  façon  que  la  hauteur  d'eau  soulevée  soit  voisine 
de  i5  centimètres.  Avec  un  tube- plus  large,  la  sensibilité 
est  trop  faible  5  avec  un  plus  étroit,  la  colonne,  en  s'éle- 
vant  ou  s' abaissant,  subit  des  frottements  qui  l'entravent.  Ce 
tube,  usé  en  cône  à  sa  partie  supérieure,  est  assujetti  à 
une  potence  commandée  par  une  crémaillère.  L'extrémité 
pointue  pénètre  à  moitié  dans  une  petite  ampoule  en  verre 
soufflé,  reliée  par  son  autre  bout  à  un  tube  étroit  de 
caoutchouc,  terminé  par  une  poire  élastique  percée  d'un 
trou  :  c'est  avec  cette  poire  qu'on  manœuvre  à  distance  le 
liquide  dans  lequel  on  fait  plonger  le  tube  capillaire  après 
l'avoir  bien  nettoyé.  On  élève  d'abord  ce  liquide  au-dessus 
de  son  niveau,  et  on  le  laisse  retomber.  On  s'arrange,  au 
moyen  de  là  crémaillère,  de  façon  que  le  niveau  soit 
voisin  d'une  des  divisions  que  le  tube  porte  extérieure- 
ment: cela  est  commode  pour  rendre  toutes  les  expériences 
immédiatement  comparables.  Quand  on  en  est  arrivé  là, 
on  soulève  une  dernière  fois  le  liquide,  et  l'on  fait  la  lec- 
ture lorsque  le  niveau  est  devenu  stationnaire. 

Mais  le  niveau  atteint  est-il  le  niveau  normal?  Il  est 
facile  de  s'en  assurer.  On  se  met  d^abord  à  l'abri  des  er- 
reurs qui  pourraient  provenir  de  Fimparfait  nettoyage  du 
tube,  en  soulevant  celui-ci  doucement  au  moyen  de  la 
crémaillère.  La  hauteur  observée  au  cathétomètre  ne  . 
change  pas  si  le  tube  est  propre.  Il  faudrait,  pour  arriver  à 
ce  résultat  avec  un  tube  sale,  qu'il  fût  également  mal- 
propre et  également  mal  mouillé  dans  les  deux  cas,  chose 
tout  à  fait  improbable,  car  les  impuretés  sont  toujours 
très-minimes  et  très-locales,  si  ce  tube  a  été  bien  nettoyé. 
Restent  les  erreurs  qui  pourraient  provenir  du  change- 
ment de  composition  delà  surface  capillaire  ;  on  s'en  af- 
franchit en  produisant,  au  moyen  du  jeu  de  la  poire  de 

Ann.  de  Chim.  et  de  Phjrs,,  5®  série,  t.  XIIL  (  Janvier  ï  877.)  6 


82  B.    DUCLAtJX.    TEMSIOH    SUPERFICIELLE 

caoutchouc,  un  courant  ascendant  rapide  dans  le  tube  ca- 
pillaire. Les  gouttes  qui  viennent  perler  à  l'extrémîtë  supé- 
rieure tombent  dans  la  dilatation  ampullaireet  en  saturent 
Tair  intérieur  ;  quand  on  cesse  d'aspirer,  le  liquidere  tombe, 
et  Texpérience  n'est  jugée  bonne  que  lorsque ,  après 
deux  opérations  successives  ainsi  conduites,  le  niveau  ne 
change  pas.  Si,  avec  cela,  on  opère  dans  une  chambre  à 
température  constante,  où  le  liquide  étudié  ait  séjourné 
quelles  heures,  on  peut  admettre  que  Ton  connaît  bien 
la  température  delà  colonne  liquide,  et  ainsi  se  trouvent 
évitées  ou  réduites  à  leur  minimum  les  principales  causes 
d^nexactitinle  qui  peuvent  aiTecter  ces  expériences.  Quand 
on  est  outillé  et  exercé,  une  observation  ne  demande  pas 
plus  de  dix  minutes,  tout  compris. 

Ce  procédé,  le  plus  parfait  au  point  de  vue  théorique, 
est  supérieur,  au  point  de  vue  pratique  ,  à  la  méthode 
par  les  lames  parallèles,  où  il  y  a  de  trop  larges  surfaces  i 
nettoyer,  et  à  la  mesure  des  bulles  liquides  étalées  sur 
un  plan,  où  la  couche  superficielle  est  trop  exposée  au 
contact  de  Pair.  Il  peut  tout  aussi  bien  donner  les  valeurs 
absolues  des  tensions  superficielles  que  leurs  rapports  pour 
des  liquides  divers.  Mais,  quand  on  ne  recherche  que  ces 
rapports,  on  peut  recourir  à  d'autres  moyens  qui,  moins 
parfaits  en  théorie,  sont  d'une  pratique  plus  aisée. 

Tel  est  celui  où  Ton  utilise  les  lois  de  l'écoulement  par 
gouttes.  "Quand  on  fait  écouler  un  liquide  par  un  tube  ca- 
pillaire à  parois  épaisses,  on  sait  que  chacune  des  gouttes 
qui  viennent  perler  à  son  extrémité  se  développe  à  Tinté- 
rieur  d*une  espèce  de  sac  élastique  qui  se  gonfle  tant  que 
la  limite  d'élasticité  de  ses  parois  n'est  pas  atteinte,  et  se 
brise  après  s'être  creusé  en  gorge  lorsqu'elle  est  dépassée* 
Il  se  produit  sur  le  cercle  de  gorge  des  phénomènes  asses 
difficiles  à  analyser;  mais,  tant  que  les  gouttes  restent  dans 
de  certaines  conditions  de  similitude  faciles  à  réaliser, 
l'expérience  démontre  que,  pour  un  même  liquide,  les  poids 


^     DES    ALCOOLS    ET    DES    ACIDES    GKAS.  83 

des  gouttes  sont  proportionnels  aux  eirconférences  ou  aux 
diamètres  des  tubes  desquels  elles  se  détachent,  et  que  pour 
un  même  tube  et  des  liquides  divers,  les  poids  des  gouttes 
sont  proportionnels  aux  tensions  superficielles  de  ces  li- 
quides. 

C'est  cette  loi  que  Ton  peut  utiliser,  soit  en  pesant  les 
gouttes  qui  tombent,  soit  en  mesurant  le  nombre  de  gouttes 
fournies  par  un  volume  donné  de  liquide  de  densité  connue. 
Ces  deux  moyens  reviennent  évidemment  au  même;  mais 
le  second  est  plus  commode,  et  c'est  celui  auquel  je  me 
suiâ  arrêté.  J'emploie  un  compte-gouttes  du  volume  de 
5  centimètres  cubes,  pourvu  d'un  orifice  tel  que,  lorsqu'il 
est  rempli  d'eau  distillée  à  la  température  de  i5  degrés, 
cette  eau,  en  s'écoulant,  donne  exactement  loo  gouttes.  Si 
avec  un  autre  liquide  de  densité  d^  et  dans  les  mêmes  con- 

j.  .                                                 1                   loo d        ,  , 

ditions,  on  trouve  n  gouttes,  le  rapport j  qui  est  le 

rapport  du  poids  des  gouttes  de  ce  liquide  et  d'eau,  donne 
aussi  le  rapport  des  tensions  superficielles  de  ces  deux 
substances. 

On  voit  l'avantage  de  la  méthode.  La  surface  du  verre 
n'a  pas  besoin  dêtre  d'une  propreté  absolue  ;  il  suffit 
qu'elle  le  soit  assez  pour  qu'il  y  ait  adhésion  du  liquide,  ce 
qu'il  est  facile  d'obtenir.  La  séparation  ne  se  fait  jamais 
qu'un  peu  au-dessous  de  la  paroi  solide,  sur  une  surface 
capillaire  toujours  propre,  fraîche,  et  sans  cesse  renou* 
velée.  On  supprime  donc  à  la  fois  les  incertitudes  prove- 
nant du  liquide  et  de  la  paroi. 

Mais  on  ne  gagne  ces  avantages  qu'au  prix  de  quelque 
incertitude  sur  l'application  de  la  formule  indiquée  plus 
haut,  et  cette  incertitude,  Texpérience  seule  peut  la  faire 
disparaître.  La  théorie  ne  peut,  en  effet,  indiquer  que 
grossièrement  les  limites  dans  lesquelles  la  similitude  des 
gouttes  est  assez  grande  pour  qu'on  puisse  appliquer  la  loi 
que  nous  avons  énoncée. 

6. 


84  E.    DUCLAUX.    TENSION    SUPERFICIELLE 

Or  rexpérîeuce  montre  que  l'oriGce  capillaire  de  ma 

/.  .  ,  .  I  oo  d  . 
pipette  iournit  tres-exactemenl  Jes  rapports des  ten- 
sions superficielles  tant  que  n  est  compris  entre  loo,  va- 
leur qui  convient  à  l'eau,  et  i4o,  chiffre  voisin  de  celui  de 
Talcoolà  lo  degrés.  On  pourrait,  pour  aller  au  delà,  prendre 
un  orifice  plus  étroit  pour  assurer  une  similitude  plus  par- 
faite, et  prendre  alors  comme  terme  de  comparaison  non 
plus  l'eau,  comme  avec  l'orifice  le  plus  large,  mais  l'alcool 
à  lo  degrés.  Un  orifice  par  lequel  4  centimètres  cubes  d*eaii 
distillée  donneraient  loo  gouttes  pourrait  conduire  depuis 
n  =  i4o  jusqu'à  n  =  3oo,  et  l'on  pourrait  continuer  de  la 
même  façon  en  prenant  des  orifices  à  section  de  plus  en 
plus  faible  et  des  liquides  de  comparaison  convenablement 
choisis.  Mais  il  est  plus  commode  et  tout  aussi  sur  de 
n'avoir  qu'un  seul  compte-gouttes,  et  de  dresser,  en  com- 
parant ses  indications  avec  celles  que  fournit  la  méthode 
des  tubes  capillaires,  une  Table  de  correction,  disant  de 
combien  les  nombres  de  gouttes  qu'il  fournit  diffèrent  des 
nombres  qu'il  devrait  fournir,  si  la  similitude  entre  les 
gouttes  existait  à  tous  les  degrés  de  l'échelle. 

Avec  le  compte-gouttes  dont  je  me  sers,  et  tous  ceux  qui 
pourraient  être  construits  dans  les  mêmes  dimensions, 
voici  ce  qu'il  faut  retrancher  des  nombres  trouvés  par  ex- 
périence pour  avoir  les  nombres  théoriques,  ceux  qu^il 

faut  faire  entrer  dans  le  calcul  du  rapport : 

Jusqu^à  i4o  gouttes  n  on  retranche  o  gouttes. 

De  i4o  à  145  »  0,5 

145  à  i5o  »  1 

i5o  à  i55  "  I ,5 

i55  à  160  "  2 

160  à  170  »  2,5 

170  à  180  •'  3 

180  à  190  »  4 


DES    ALCOOLS    ET    DES    ACIDES   GRAS.  85 

De  190  à  200  gouttes,  on  retranche  5  gouttes. 
200  à  210                    «  6 

210  à  220  »  *] 

220  à  23o  '  8,5 

23o  à  240  »  10 

240    à    25o  ■*  II 

25o  à  260  '  12 

260  à  280  >'  i3 

280  à  3oo  >  14 

et  ainsi  de  suite,  en  retranchant  une  goutte  de  plus  pour 
chaque  vingtaine  de  gouttes  au  delà  de  3oo.  La  correction 
est,  on  le  voit,  toujours  assez  faible,  et  au  delà  de  3oo  gouttes 
n'a  pas  besoin  d'être  connue  à  plus  d'une  unité  près.  Une 
erreur  d'une  goutte,  dans  ces  limites,  n'affecte  que  la  troi- 
sième décimale  du  rapport  des  tensions,  décimale  qui  est 
toujours  incertaine,  quel  que  soit  le  procédé  employé. 

Lorsqu'on  veut  se  dispenser  de  compter  les  gouttes,  ce 
qui  est  d'ailleurs  plus  facile  et  moins  rebutant  qu'on  ne 
pense,  on  peut  se  servir  d'un  petit  appareil  facile  à  con- 
struire, et  qui  se  compose  d'un  simple  tournebroche  dont 
l'axe  nioteur  et  l'axe  résistant  portent  chacun  une  large 
poulie  de  caoutchouc  durci  ou  de  carton  comprimé.  Entre 
ces  deux  poulies  est  entraînée  une  bande  de  papier,  en- 
roulée au  préalable  sur  une  troisième  poulie  placée,  à  la 
même  hauteur,  à  une  certaine  distance.  Au-dessus  de  la 
portion  horizontale  de  cette  bande,  on  dispose  le  compte- 
gouttes  sur  un  support  convenable,  de  façon  que  les  gouttes 
soient  reçues  et  emportées  par  le  ruban  de  papier  qui  se 
déroule.  On  trouve  chez  les  marchands  de  papiers  peints 
des  rouleaux  de  papier  non  collé  que  Ton  découpe  de  la 
largeur  convenable,  et  qui  conserve  assez  longtemps  la 
trace  des  gouttes  reçues  pour  qu'il  soit  possible  de  les 
compter  aussitôt  l'écoulement  terminé.  Si  l'on  veut  en 
garder  une  trace  plus  durable,  on  peut,  avec  les  liquides 
aqueux,  frotter  d'abord  le  papier  avec  un  mélange  de  noix 


86  E.    DUCLAtJK.    TENSION    SUPERFICIELLE 

de  galle  pulvérisée  et  de  sulfate  de  fer  desséché,  qui  donne 
une  tache  d'encre  en  chaque  point  mouillé.  Avec  les  li- 
quides ne  renfermant  pas  d'eau,  on  pourrait  trouver  dans 
chaque  cas,  s'il  était  nécessaire,  un  phénomène  analogue, 
conduisant  au  même  résultat. 

C'est  surtout  par  ce  procédé  du  compte-gouttes  qu'ont 
été  faites  les  expériences  dont  je  '^aîs  rapporter  les  détails. 
J'indiquerai,  à  propos  de  chaque  corps  étudié,  quand  cela 
sera  nécessaire,  les  moyens  que  j'ai  employas  pour  le  pré- 
parer à  l'état  de  pureté,  et  je  donnerai  la  Table  de  corres- 
pondance entre  les  densités,  les  nombres  de  gouttes  et  les 
tensions  superficielles  de  ses  divers  mélanges  avec  l'eau.  Les 
nombres  de  gouttes  indiqués  sont  les  nombres  réels,  ceux 
qu'on  obtient  dans  le  compte-gouttes  de  5  centimètres 
cubes.  La  connaissance  de«x  nombre  de  gouttes  fournil  un 
moyen  de  dosage  très-précis,  de  beaucoup  supérieur,  sur- 
tout pour  les  alcools  à  équivalent  élevé,  à  celui  que  pour- 
rait fournir  l'étude  des  densités.  Les  tensions  superfi- 
cielles peuvent  se  conclure  des  nombres  de  gouttes  indi- 
qués, en  leur  faisant  subir  la  correction  signalée  plus 
haut. 

I.     —     SsaiE     DES     ALCOOLS. 

1  ^  Alcool  méthylique. 

L'alcool  était  celui  du  commerce,  purifié  par  les  procédés 
connus.  Il  bouillait  à  66  degrés  exactement,  et  sa  densité 
était  de  0,7995  à  i5  degrés.  J'en  ai  fait  avec  l'eau  des  mé- 
langes divers,  auxquels  j'ai  été  surpris  de  ne  pas  trouver  les 
densités  assignées  par  M.  H.  Sainte-Claire  Deville,  et  ce 
fait  m'a  inspiré  quelques  doutes  sur  la  pureté  dé  mon 
alcool,  que  je  n'avais  éprouvée  que  par  son  point  d'ébul- 
lition  et  sa  densité,  deux  caractères  fort  incertains,  on  le 
sait,  mais  qui  sont  encore,  parmi  les  constantes  physiques 
les  plus  facilement  mesurables,  ceux  qui  fournissent  les 
meilleures  indications.  Je  crois  qu'on  pourra  y  substituer. 


DÈS    ALCOOLS    ET    DES    ACIDES    GRAS.  8? 


j 


avec  grand  avantage,  la  mesure  de  Ja  tension  superficielle, 
beaucoup  plus  variable,  d'un  alcool  à  l'autre,  lorsqu'on 
emploie  les  mélanges  aqueux,  qu'une  autre  propriété  phy- 
sique quelconque. 

Lorsqu'on  a  des  doutes  sur  la  pureté  d'une  substance 
volatile,  il  n'y  a  qu'à  la  distiller,  et  à  essayer,  au  point 
de  vue  de  la  tension  superficielle,  les  premières  et  les 
dernières  portions.  Ce  n'est  que  dans  des  cas  tout  à  fait 
exceptionnels  que  les  deux  corps  dont  elle  pourrait  être 
formée  passeraient  d'un  bout  à  l'autre  de  la  distilla- 
tion, en  proportions  constantes.  En  fractionnant  les  pro- 
duits et  en  les  étudiant  au  compte-gouttes,  soit  tels  quels, 
soit  après  les  avoir  mélangés  avec  l'eau  en  proportions 
déterminées,  on  voit  avec  la  plus  grande  facilité  si  le  liquide 
examiné  est  homogène,  ou  si  c'est  un  mélange.  Pour  donner 
une  idée  de  la  sûreté  de  cette  méthode,  je  dirai  que  je  n'ai 
pas  réussi  à  trouver  dans  le  commerce  ou  à  préparer  par 
fermentation  un  acide  butyrique  résistant  à  celte  épreuve, 
,  et  que  je  crois  que  cet  acide  tout  à  fait  pur  est  encore  in- 
connua 

L'alcool  mélhylique  dont  je  me  suis  servi  s'est  au  con- 
traire montré  tout  à  fait  pur.  Je  ne  peux  donc  que  constater 
le  désaccord  qui  existe  entre  mes  nombres  et  ceux  de 
M.  H.  Sainte-Claire  Deville;  Voici  ceux  que  j'ai  obtenus  : 

Alcool  pour  loo  Nombre  Tension 

en  Toiumes.  Densité.  de  gouttes.         superficielle. 

I »      io4     0*962  • 

2 o>997*  ^^1  0,982 

3 »  1 10  0,905 

4 »  ii3  o,  880 

5 0,992g  ii6  o,856 

6 «  n8,5  0,840' 

7 »  120,5  0,824 

8 »  123  0,806 

9 *»  '^5  0,793 


88  E.    DCCLAUX.    TENSION    SUPERFICIELLE 

Alcool  pour  100  Densité  Nombre  Tension 

en  volumes.  à  j5  degrés.      dégouttes.         superfîcielle. 

lo OyÇ^S'jg  127  0,777 

1 5 »»  1 38  o  >  7  •  o 

20 0,9742  i47i^  0,660 

25 I.  1^7,5  0,620 

3o *  166  0,590 

35 »  174»^  o,56o 

4o 0,9500  182,5  o,53o 

45 .»  189  o,5o8 

5o 0,9345  196  0,488 

60 0,9234  207,5  0,458 

70 »  219  0,425 

80 0,8713  23o  0,392 

90 o ,  8462  247  ^  >  ^60 

100...  0,7995  277  o,3o2 

Lorsqu'on  traduit  sur  une  courbe  les  résultais  relatifs 
à  la  tension  superficielle,  on  remarque  un  point  d'inflexion 
au  voisinage  de  l'alcool  à  yo  degrés,  et  la  courbe  se  relève 
même  beaucoup  au  voisinage  de  l'alcool  absolu.  11  ne  faut 
pas  s'en  étonner,  A  la  température  d'ébullition  correspond 
une  tension  superficielle  nullf^  et  les  corps  très-volatils  à 
la  température  ordinaire,  comme  F^tsprit-de-bois  pur,  doi- 
vent avoir  une  tension  superficielle  a^â4Jltant  plus  faible 
qu'ils  sont  plus  voisins  de  leur  point  d'ébulliîîon. 


2**  Alcool  ordinaire. 

Les  moyens  d'obtenir  cet  alcool,  à  Tétalpur,  étant  bi^^^ 
connus,  je  n'y  insisterai  pas.  Voici  les  nombres  que  j^^' 
obtenus.  S^ 

s 
Alcool  p.  100  N.  de  gouttes         Tensions 

en  volumes.  Densités.  à  iS».  superficielles. 

' o>99^5  107  0,933 

^^ 0,9970  Ii3  0,88b 

3.....         0,9956  u8  o>775 


( 


uÈs  Alcools  bt  des  acidbs  6ba8.  89 

Alcool  p.  100  ,      N.  de  gouttes    '  Tensions  - 

en  volumes.  Densités.  à  1 5<^.        superficielles. 

4 0,9942  ii2j5  0,812 

5 0,9929  126,5  0,785 

6 0,9916  i3o,5  0,760 

7 0,9903  i34  Oj74o 

8.'....  0,9891  137,5  0,720 

9 o>9878  i4o,5  0,700 

10 0,9867  i44  0,682 

Il 0,9855  i47  o,665 

12.  ...  0,9844  i5o  o,65o 

i3 o,g833  i53,5  0,637 

i4 0,9822  i57  0,625 

i5.....  0,9812  160  o,6i5 

20 0,9763  176  o,568 

25 0,9711  195  0,527 

3o 0,9657  2o5  o>49^ 

35 0,9594  216  0,465 

4o 0,9523  226  o,44o 

45 0,9440  235  0,4^5 

5o.  ...  0,9348  243  0,410 

60 0,9141  25i  0,382 

70 0,8907  256  o,365 

80 ... .  o , 8645  259  o , 35o 

90 0,8346  261  o,338 

loo 0,7947  270  o,3o2 

La  courbe  des  tensions,  et  surtout  celle  du  nombre  de 
gouttes,  ont  une  tendance  manifeste  à  se  relever,  au  voisinage 
de  l'alcool  pur,  mais  les  titres  alcooliques,  pour  lesquels 
ce  fait  se  produit,  sont  beaucoup  plus  élevés  que  pour  Tal- 
cool  méthylique,  Talcooi  ordinaire  étant  moins  volatil. 

39  Alcool  isopropylique. 

L'alcool  que  j'ai  étudié  avait,  à  i5  degrés,  une  densité 
de  0,^97  et  bouillait  d'une  façon  continue  à  83  degrés,  à  la 


go  E.    DCGLIUX.    TENSION    SUPERFICIELLE 

pression  de  0^,74^.  U  était  miscible  à  Teauen  toutes  pro- 
portions; toutefois,  la  liqueur  se  troublait  un  peu  au  voi- 
sinage de  Talcool  à  4o  degrés.  Le  fait  ne  me  paraît  pas  dû 
à  une  impureté  quelconque;  car,'  en  soumettant  cet  alcool 
à  répreuve  délicate  dont  j'ai  parlé  à  propos  de  l'alcool  mé- 
tbylique,  je  n'ai  pas  trouvé  de  différences  sensibles  entre 
les  premiers  et  les  derniers  produits   de  la  distillatioq. 

Toutefois,  je  ne  considère  les  tensions  superficielles  du 
tableau  ci-dessous,  comme  définitivement  établies,  que 
jusqu'au  voisinage  de  4^  degrés.  Au-dessus  de  ce  litre,  il 
n'y  a  guère  que  celle  de  l'alcool  absolu  sur  laquelle  je  puisse 
compter. 

Voici  les  nombres  obtenus: 

Alcool  pour  100  Densiir  Nombre  Tension 

en  volumes.  à  i5  dej;i'os.       de  (jouîtes,     superficielle. 

5.. 0,9934     146     0,680 

10 0,9868     172     0,574 

18,2.....   0,9787     208     0,484 

25 »  225        0,430 

3o 0,9605  243  0,3^5 

4o 0,9477  277  o,35i 

60 0,9064  281  o,33o 

80 o,8584 

100 o>79y  ^78  o,3oo 

La  tension  superficielle  diminue  notablement  ici  quand 
on  passe  de  Teau  pure  aux  alcools  à  faible  titre.  Nous  al- 
lons voir  cet  effet  s'accuser  de  plus  en  plus. 

4**  Alcool  isobiitjlique .     ^ 

Cet  alcool  est  assez  facile  à  obtenir  pur.  Celui  dont  je 
me  suis  servi  bouillait  et  passait  tout  entier  à  la  distilla- 
tion à  la  température  de  107  degrés.  Il  avait  une  densité 
de  0,8064  à  i5  degrés. 


# 


\ 


)>ES    A.LGOOLS    ET    DBS    ACIDES    GHAS.  pi 

Alcool  pour  100  Densité  Nombre  Tenaion   • 

en  Tolumes.  à  là  degrés,  de  gouttes,  superficielle. 

0,2 »  107,5  o,g3o 

0,4 ^>  n5j5  Oy866 

e  ^ 

0,6 »  123  o,8î3 

0,8 »  i29>S  0,775 

1 j»  i35  0,742 

1,5.....  »  147  0,680 

2........  »  i57  0,640 

2,5 0,9950  168  0,600 

3 »  177  0,572 

4.* »  193  0,525 

5 0,9930  209  0,489 

6 0,9915  224  0,455 

7« »  239  0,4^0 

8 >  255  o,4io 

9. »  270  o,386 

10 0,9875  286  0,370 

5*^  Alcool  amy tique. 

L'alcool  que  j*ai  employé,  vendu  comme  pur  dans  le 
commerce,  a  été  redîstillé  sur  de  la  potasse  pour  le  séparer 
de  Féther  cenanthique  qui  le  souille  quelquefois,  etTonn^a 
recueilli  que  ce  qui  a  passé  en  tire  127  et  i3o  degrés.  Le 
liquide  obtenu  a  ensuite  été  redistillé,  et  Ton  n^a  employé 
que  la  portion  bouillant  entre  128  et  129  degrés.  La  den- 
sité était,  à  i5  degrés,  de  0,81 48.  Jen^ai  pu  le  dissoudre 
dans  Teau  en  proportions  supérieures  à  4  pour  loOj  et  en- 
core la  solution  obtenue  n'était-elle  limpide  qu'à  10  ou 
11  degrés;  elle  se  troublait  quand  la  température  remon- 
tait à  i5  degrés,  et  quelques  gouttes  d'alcool  aqueux  se  réu- 
nissaient a  sa  surface.  Voici  les  nombres  qui  se  rappor- 
tent à  cet  alcool  : 

Alcool  pour  100  Densité  Nombre  Tension 

en  Tolumes.  à  i5  degrés,     dégouttes.        superficielle. 

0,1 »  m  0,900 

o,a »  120,5  o,83o 

0,3 •  128,5  0,775 


93  £.    DUCLÀUX.    —    TEJfSION    SUPERFICIELLE 

Alcool  pour  100  Densité  Nombro  Tension 

en  Tolumes.  à  1 5  degrés,    do  goultos.        superficielle. 

o,4 »  i37  o>73o 

o,5 o»9994  i44>5  0,695 

0,6 »  1 5o  o ,  668 

0,7 «  i56  0,645 

0,8 »  161 ,5  0,625 

0,9 »  166,5  0,610 

1,0 0,9988  171,5  0,594 

1,2 »  181, 5  o,563 

1 ,4 "  189  o,538 

1 ,6 »  199  o,5i5 

1,8 »  207 ,5  o ,  495 

2,0...  .  0,9975  2i5,5  0,479 

2,5  ....      »  235  o,44' 

3 0,9966  254  0,408 

3,5 »  274  o,38o 

4,0 0,9955  291  o,358 

On  voit  ici  combien  les  plus  faibles  traces  d'alcool  amy- 
lîque  abaissent  la  tension  superficielle  de  Teau.  Cet  effet 
est  encore  plus  remarquable  avec  Talcool  caprylique. 

6^  alcool  caprylique. 

• 

Il  est  très -difficile,  sinon  impossible,  de  préparer  ce 
corps  à  l'état  absolument  pur.  Celui  que  j'ai  employé 
bouillait  au  voisinage  de  107  degrés  et  avait  pour  densité 
0,817.  Sa  solubilité  dans  Teau  était  très-faible,  mais  il 
est  difficile  de  la  mesurer;  si  Ton  ajoute  à  de  Teau  un 
poids  déterminé  d'alcool,  et  qu'on  agite,  une  partie  de 
Falcool  reste  fixée  en  couche  mince  sur  la  surface  de  l'eau 
et  les  parois  du  flacon,  et  il  est  difficile  de  savoir  le  mo- 
ment où  elle  a  complètement  disparu.  On  n'a  qu'un  seul 
moyen  d'en  être  averii,  c'est  de  mesurer  la  tension  super- 
ficielle des  diverses  liqueurs  qu'on  obtient  en  ajoutant  à  un 
poids  déterminé  d'alcool  des  volumes  d'eau  de  plus  en  plus 
grands.  Quand  cette  tension  commence  à  diminuer,  c'est 


DBS    ALCOOLS    ET   DES    AÇIDE8    GRAS.  qS 

que  tout  l'alcool  est  dissous  et  que  Teau  qu'on  a  ajoutée  en 
dernier  lieu  n'a  servi  qu'à  étendre  la  dissolution  primitive 
au  lieu  de  se  saturer,  comme  les  portions  précédentjes,  aux 
dépens  de  l'alcool  en  excès.  J'ai  trouvé  ainsi  que  la  solu- 
bilité maximum  de  cet  alcool  correspondait  à  1*^^,6  par 
litre  d'eau  5  en  étendant  d'eau  cette  solution  saturée,  j'ai 
obtenu  des  liqueurs  de  titres  divers  qui  m'ont  donné  les  ré- 
sultats suivants  : 

Alcool  pour  100  Nombre  Tension 

en  volumes.  de  gouttes.        superficieUe. 

o,oi5 12.5  o,8oo 

ô,o3. ........  143  Oï'joo 

0,04 i53  0,660 

o,o5 160  o,633 

0,06 167  0,606 

0,08 i83  0,545 

0,10..' 197  G,  521 

0,12 209  o ,  495 

o,  i5 23o  0,452 

0,16 235  O9444 

On  voit  combien  il  faut  peu  d'alcool  caprylique  pour 
abaisser  notablement  la  tension  superficielle  de  l'eau.  L'in> 
fluence  des  alcools  de  degré  supérieur  est  encore  plus 
grande,  mais  ils  sont  beaucoup  moins  solubles;  ils  sont 
très-difficiles  à  obtenir  à  l'état  pur,  et  je  n'ai  pas  poussé 
plus  loin  cette  étude.  Il  me  reste  à  parler  maintenant  de 
la  série  des  acides  gras. 

II.      ACIDES     GRAS. 

1**  Acide  forinique. 

Je  me  suis  servi,  pour  préparer  les  dissolutions  peu  con- 
centrées, de  Tacide  du  commerce,  qui  est  généralement  le 
prétendu  hydrate  à  56  pour  100  C*H*0*  -+-  4 HO.  Celui 


94  E-    DUCLAUXé    —    TENSION    SUPERFICIELLE 

que  j'ai  employé  bouillait  assez  régulièrement  à  io5^,'5  et 
avait  une  densité  de  x,i3o  à  i5  degrés. 

J'ai  déterminé  la  tension  superficielle  de  l'acide  pur  au 
moyen  d'un  échantillon  préparé  par  le  procédé  de  M.  Beiv 
thelot,  mais  dont  je  n'avais  pas  des  quantités  suffisantes 
pour  étudier  les  solutions  concentrées. 

Acide  pour  loo  Densité  Nombre  Tension 

en  Toiumes.         à  i5  degrés.      dégouttes.        superficielle. 

6,7 Ï.OÏ9  "4  0*894 

i3,5.    ...       i,o38  125  o,83o 

20,0 »  i34,5  0*789 

26,5 1,071  142,5  0,75* 

33,5 »   _  i5o  0,725 

40,0 i,io5  i58  0,705 

45,0 »  i63,5  o,685 

53,0 i,i3o  173  o,665 

ioo,o »  238  0,534 

« 

Cet  acide,  le  premier  de  la  série,  fait  très-peu  varier  la 
tension  superficielle  de  l'eau.  L'effet  va  encore  ici  être 
d'autant  plus  marqué  que  nous  aurons  affaire  à  des  corps 
d'équivalent  plus  élevé. 

2^  Acide  acétique. 

Je  n'ai  aucun  détail  particulier  à  donner  sur  ce  corps, 
que  l'on  peut  obtenir  dans  le  commerce  tout  à  fait  pur  et 
en  aussi  grandes  quantités  qu'on  le  désire.  Voici  les  nom- 
bres qui  s'y  rapportent  : 

Acide  pour  100       Densité  Nombre  Tension 

en  Tol urnes.      à  i5  degrés.  de  gouttes.      superficielle. 

1 1,001  106,5  0,940 

2 1,002  111,5  0,901 

3 i,oo4  ii5,5  0,869 

4 I ,oo55  119,^  0,841 

5 1,0075  123  0,819 


'          DBS    ALCOOLS    ET 

DES    ACIDES 

• 

GRAS. 

Acide  pour  100 

Densité 

Nombre 

Tension 

en  Yolumes.         à  ] 

1 5  degrés. 

de  gouttes. 

superficielle. 

6 

r,oo9 

126 

0,800 

7 

r , 0 I o5 

129 

0,782 

8 

[ ,OI25 

l32 

0,767 

9 

1 ,0145 

134,5 

0,754 

10 

1 ,oi55 

.137 

o,74i 

20 

I ,0275 

159,5 

0,644 

3o 

i,o4i 

177 

0,587 

40 

[ ,o5i5 

192 

0,547 

5o 

1 ,060 

206 

o,5i4 

60 

1,067 

217 

o,5o3 

70 

1,070 

23o 

o,483 

80. . • • . 

1,073 

247 

0,456 

90 

1,073 

264 

0429 

100 

I , o635 

279 

0,396 

95 


La  courbe  des  tensions  superficielles,  qui  est  très-régu- 
lière d'allures  avec  tous  les  corps  un  peu  éloignés  à  la 
température  ordinaire  de  leur  point  d'ébuUition,  subit  une 
flexion  sensible  avec  Tacide  acétique  dans  toute  la  région 
comprise  entre  4^  ^^  90  d'acide  pour  100  de  mélange. 
C'est  précisément  la  région  dans  laquelle  se  produit  aussi 
l'augmentation  anomale  de  densité  des  dissolutions 
aqueuses,  qui  donne  un  maximum  de  densité  au  voisi- 
nage de  Pacidc  à  80  pour  100  en  volume.  Les  deux 
faits  sont  évidemment  corrélatifs,  mais  la  corrélation  est 
difficile  à  expliquer  dans  Tétat  actuel  de  la  science.  Je  me 
contente  de  signaler  celte  particularité.  J'aurai  à  y  revenir 
quand  nous  arriverons  aux  conclusions  à  tirer  de  Ten- 
semble  de  ces  mesures. 

3*^  Acide  butyrique. 

J'ai  étudié  des  acides  butyriques  de  diverses  prove- 
nances, les  uns  fournis  par  des  fermentations  butyriques 
normales,  les  autres  obtenus  dans  la  fabrication  des  bou- 


96  E.    DUCLAUZ.    TEHSIOfi    SL'PEnFICIBLLE 

gies  stéariques.  Je  n^eti  ai  pas  trouvé  qui  ne  fût  mélangé 
d'une  petite  ({iianlîtc  d'acide  valérianique  on  proportions 
trop  faibles  pour  être  appréciables  h  l'analyse  organique, 
mais  pas  assez  petites  pour  échapper  nu  contrôle  de  la  dis- 
tillation fractionnée^  combinée,  comme  je  Tai  indiqué  plus 
haut,  avec  Tétude  de  la  tension  superficielle.  L'acide  va- 
lérianique fait  varier  celle  de  l'eau  beaucoup  plus  qu'un 
volume  égal  d'acide  butyrique,  et,  comme  il  passe  le  pre» 
mier  à  la  distillation,  il  est  assez  facile  dVn  déceler  la  pré- 
sence. Toutefois,  la  marche  de  la  distillation  est,  comme 
je  le  montrerai  dans  un  autre  travail,  trop  peu  différente 
chez  ces  deux  acides  pour  fournir  un  moyen  de  séparation. 
Leurs  autres  propriétés,  et  même  celles  de  leurs  sels,  sont 
aussi  trop  semblables  pour  permettre  facilement  de  les  iso- 
ler lorsqu'on  ne  dispose  pas  d'une  masse  considérable  de 
produits.  Je  n'ai  pu,  pour  ma  part,  obtenir  de  l'acide  bu- 
tyrique pur  en  quantité  suffisante  pour  préparer  des  disso- 
lutions dont  le  titre  dépassât  4  pour  100.  Cette  faible 
quantité  produit  heureusement  une  variation  notable  de 
tension  superficielle,  ainsi  qu'on  va  le  voir. 

Pour  les  titres  supérieurs  inscrits  au  tableau  ci-dessous, 
ils  ont  été  obtenus  au  moyen  d'un  alcool  renfermant  encore 
un  peu  d'acide  valérianique.  Us  donnent  par  conséquent 
un  nombre  de  gouttes  trop  élevé,  et  ont  une  tension  trop 
faible,  mais  d'une  quantité  qui  ne  dépasse  certainement 
pas  deux  unités  de  la  seconde  décimale. 

Aciilo  pour  100  Nombre  Tension 

en  Tolumcs.         Densité.  de  gouttes.  superficielle. 

0,5. .. .  »  120  o,838 

I »  i33  o,'y52 

2 1 ,001  i53  o,655 

3. . .  . .  »  1^0  0,589 

4 »i002  184  0,544 

5 »  ig6  o,5i 


BES   ALCOOLS   ET   DBS   ACIDES   GBAS.  97 

Acide  pour  loo  ?lombre  Tension 

en  volume.  Densité.  de  gouttes.       '  superficielle. 

6 i,oo3  208  0,48 

7 »  217  0,46 

8 i,oo5  227  0,44 

g 9  236  0,4^ 

10 1,006  243  o,4i 

Je  ne  donne  pas  les  nombres  relatifs  à  des  titres  plus 
élevés  ;  ceux  que  j'ai  obtenus  ne  méritent  aucune  confiance, 
à  cause  du  mélange  d'acide  valérianique.  Ce  n'est  que  pour 
des  solutions  très-concentrées  que  cet  acide,  dont  la  tension 
superficielle,  lorsqu'il  est  pur,  est  voisine  de  celle  de 
l'acide  butyrique,  n'intervient  pas  pour  modifier  notable- 
ment les  nombres  relatifs  à  ce  dernier  acide.  J'ai  trouvé 
que  celui  que  j'ai  employé,  avec  une  densité  de  o,  9672, 
donnait  274  gouttes  et  avait  par  suite  une  tension  superfi- 
cielle égale  à  0,370. 

Il  est  remarquable  que  les  solutions  aqueuses  de  cet  acide 
présentent,  comme  celles  de  l'acide  acétique,  un  maximum 
de  densité  qui  est  d'environ  1,007  au  voisinage  de 
20  pour  100  en  volume. 

Je  n'ai  pas  étudié  d'acides  gras  supérieurs,  parce  que  les 
moyens  de  les  préparer,  à  l'état  pur,  font  complètement 
défaut,  et  que  les  mesures  que  j'avais  à  faire  sont  trop  pré- 
cises pour  pouvoir  s'accommoder  d'une  impureté  quelcon- 
que, surtout  provenant  d'acides  à  équivalent  élevé,  dont  il 
suffit  de  quantités  très-faibles  pour  faire  varier  notablement 
la  teusion  superficielle  de  l'eau.  La  série  des  acides  gras 
présente  en  effet  le  même  phénomène  que  celle  des  alcools. 
Les  termes  d'un  ordre  élevé  exercent,  à  quantités  égales, 
une  influence  qui  va  en  grandissant  avec  le  poids  molécu- 
laire. Voici  ce  qui  le  prouve  :  si,  pour  avoir  des  nombres 
comparables,  on  part  de  dissolutions  très-étendues,  renfer- 
mant par  exemple  par  litre   ^  d'équivalent  ( O  =  100), 

Jnn,  d«  Chim,  et  de  Phys,.,  5"  série,  t.  Xllî.  (  Janvier  1878.)  7 


g9  E.    DTJGLAUX.    —    TENSION    SUPERFICIELLE 

voici  ce  que  doonént  les  liquides  obtenus,  au  compte- 
gouttes,  à  1 5  degrés  : 

> 

Eau  pure i  oo 

Acide  formique loi 

•     acétique i  o5 

»     propionique  (du  cyanure  d*éthyle). ...  1 13 

»     butyrique  (impur) i52 

»     valérianique  (de  la  racine  de  valériane).  i83 

»     caproîque  (bouillant  à  200  degrés  ) . . . .  263 

Le  peu  de  solubilité  des  acides  supérieurs  fait  qu^ils  se 
dérobent  à  cette  étude,  mais  la  loi  reste  la  même.  La  disso- 
lution saturée  d'acide  caprique  ne  renferme  pas  plus  de 
0^,4  ^^  cet  acide  par  litre,  et  donne  i33,5  gouttes,  ce  qui 
lui  donne  une  tension  superficielle  égale  à  o,  ^5,  la  même 
que  celle  de  la  dissolution  d*acide  formique  à  27  pour  100 
d'acide. 


GONGLUSIOlfS. 


Il  ne  nous  reste  plus,  pour  terminer,  qu'à  tirer  des  études 
qui  précèdent  les  conclusions  qu'elles  comportent.  Ces 
conclusions  peuvent  se  formuler  d'une  façon  très-simple. 

Si  Ton  construit  les  courbes  des  tensions  superficielles  des 
corps  étudiés,  en  prenant  pour  ordonnées  les  valeurs  don- 
nées de  ces  tensions  et  pour  abscisses  les  proportions  centé- 
simales, en  volume,  du  corps  auquel  elles  se  rapportent, 
on  voit  d'abord  que  toutes  ces  courbes  ressemblent  à  des 
paraboles  plus  ou  moins  allongées,  ou  plus  exactement  à  la 
courbe  exponentielle  j^  =  K  (e*—  i).  Il  n'y  a  d'exception 
que  pour  la  courbe  de  l'alcool  méthylique,  qui  présente  un 
point  d'inflexion  dont  nous  savons  la  raison  d'être,  et  celle 
deTalcool  ordinaire,  qui,  pour  les  mêmes  raisons,  s'inflécbit 
un  peu  au  voisinage  de  l'alcool  absolu,  très-volatil  aussi. 

Une  étude  plus  approfondie  montre  ensuite  que  les  va- 
leurs de  X  qui,  dans  les  diverses  séries  de  dissolutions,  cor* 
respondent  à  une  même  valeur  dey^  sont  proportionnelles 


DES  ALCOOLS  ET  DES  ACIDES  GRAS.  QQ 

entre  elles  dans  la  série  des  alcools  et  celle  des  acides  gras. 
Voici,  pour  le  démontrer,  un  tableau  où  l'on  a  calculé  pour 
des  mêmes  valeurs  de  j^  prises  tout  le  long  de  Téclielle,  les 
rapports  des  valeurs  de  x  calculés  en  prenant  pour  terme 
de  comparaison  Talcool  amylique,  celui  de  tous  les  alcools 
faciles  à  préparer  à  Tétat  pur,  qui  abaisse  le  plus  la  ten- 
sion superficielle  de  Teau. 

Valeur  des    A.  méthyl.    Aie,  éthyl.    Aie.  propyl.    Aie.  butyl.    Aie.  capryl. 


tensions. 

A.  amyl. 

Aie.  amyl. 

Aie.  amyl. 

Aie.  amyl. 

Aie.  amyl. 

.    0,90... 

33 

16' 

» 

2.7 

» 

o,85. . . 

34 

17 

)j 

2,8 

» 

0,80. . . 

34 

18 

9'i 

'-».8  . 

0,057 

0,75. . . 

33 

18 

» 

» 

M 

0,70. . . 

33 

18 

t> 

2,8 

0,061 

o,65. . . 

3i 

'7 

u 

2,6 

» 

0,66. . 

w 

18 

9,3 

2,6 

o,o63 

0,55. . . 

•I 

16 

M 

2,6 

» 

o,5o. .  • 

>• 

16 

11 

2,6 

0,064 

0,45. . 

•# 

16 

M 

2,6 

» 

o,4o. . . 

M 

16 

9'3 

2,6 

» 

On  n^a  pas  poussé  au  delà  du  terme  o,  4^  la  vérification 
pour  Talcool  métbylique,  à  cause  du  voisinage  du  point 
d'inflexion.  Pour  les  autres  alcools,  la  concordance  est  re- 
marquable, et  Taugmentation  de  tous  les  nombres  entre 
les  termes  p,  85  et  0,70  semblerait  indiquer  qu'entre  ces 
limites  la  tension  superficielle  de  Talcool  amylique  a  été 
évaluée  un  peu  trop  bas. 

Pour  la  série  des  acides  gras,  on  a  calculé  les  nombres 
en  les  rapportant  à  Facide  acétique,  à  cause  de  l'état  d'im- 
pureté relative  des  termes  supérieurs. 


Valeur  des  tensions. 


0,90.. 

o , 85 • . 
0,80. . 


Aeide  formique. 

Acide  butyrique. 

Aeide  acétique. 

Aeide  aeétique. 

2,9 

0,  10 

3,1 

G,  10 

3,0 

0,11 

7- 

lOO  s.    DUCLAUX.    TENSION    SUPERFICIELLE 

Acide  formique.       Acide  butyrique. 


Valeur  des  tensions. 

Acide  acétique. 

Acide  acétique. 

0,75 

3,0 

0,12 

0,70. . .     . 

2'9 

Oyio 

o,65 

3,0 

0, 10 

0,60  .... 

» 

0,10 

On  est  donc  autorisé  à  poser  la  loi  suivante  :  Si,  avec  les 
divers  alcools  ou  les  divers  acides  gras,  on  compose  des  dis- 
solutions à  des  titres  variés,  et  si  Ton  compare  entre  elles 
celles  de  ces  dissolutions  qui  ont  même  tension  superfi- 
cielle, les  proportions  centésimales  d^alcool  ou  d'acide 
qu'elles  renferment  seront  entre  elles  dans  un  rapport 
constant,  indépendant  de  la  valeur  de  la  tension. 

En  d'autres  termes,  si  x=/[y)  est  l'équation  de  la 
courbe  des  tensions  pour  un  corps  donné,  x  =  f^fiy)  sera 
l'équation  pour  un  autr«  corps,  k  étant  donné  par  les 
tableaux  qui  précèdent.  En  d'autres  termes  encore,  la  fonc- 
tion inconnue  de  j^,  qui  entre  dans  l'expression  ci-dessus, 
est  la  même  pour  tous  les  corps  d'une  même  série,  et  ne  se 
modifie  de  l'un  à  l'autre  que  par  l'introduction  d'un  coef- 
ficient constant,  caractéristique  de  chaque  corps. 

J'ai  cherché  en  vain  une  relation  entre  ce  coefficient  et 
le  poids  équivalent  de  la  substance.  Peut-être  mon  in- 
succès tient-il  à  ce  que  je  n'ai  pu  comparer  des  corps  de 
la  même  série,  car  je  n'ai  eu  à  ma  disposition  que  de  l'alcool 
isopropylique  et  isobutylique,  tandis  que  les  autres  alcools 
étaient  de  la  série  normale.  Je  me  suis  assuré  que  la  tension 
superficielle  était  une  des  constantes  physiques  qui  distin- 
guent les  corps  des  deux  séries.  Il  y  a  là  une  étude  &  faire. 

Quoiqu'il  en  soit  des  résultats  à  rencontrer  dans  cette 
voie,  la  loi  qui  précède  est  établie  sur  une  base  plus  large 
qu'aucune  des  lois  analogues  formulées  jusqu'ici.  Il  IM 
s'agit  plus  en  effet  de  reconnaître  la  même  tension  super-*, 
ficîelle  à  des  dissolutions  dont  les  richesses  en  sel  et  les  deii- 
sités  sont  voisines,  et  dont  les  constantes  de  capillarité 


DES    ALCOOLS   ET    DES    ACIDES    GRAS.  lOI 

s^éloignent  peu  de  celles  de  l'eau.  Nous  avons  opéré  sur  des 
liquides  où  ces  tensîous  sont  comprises  entre  i  et  0,4)  dont 
les  densités  pour  une  même  tension  varient  de  ^  de  leur 
valeur,  et  dont  les  teneurs  en  substances  actives  sont  très- 
différentes.  Si  l'on  compare,  en  effet,  les  termes  extrêmes 
de  la  série,  on  verra  que,  pour  produire  une  tension  super- 
ficielle égale  à  o,65  par  exemple,  il  faut  prendre  des  disso- 
lutions renfermant  par  litre  210  centimètres  cubes  d'alcool 
méihylique  et  seulement  o'*',  3  d'alcool  caprylique,  et  ces 
nombres  sont  entre  eux  comme  i  et  700. 

La  loi  ne  semble  pas  se  borner  d'ailleurs  aux  mélanges 
binaires,  et  j'ai  trouvé  qu'elle  s'applique  aux  mélanges  ter- 
naires, pourvu  qu'on  réalise  chez  ceux-ci  des  conditions  qui 
les  rendent  comparables.  Si,  par  exemple,  on  compose  des 
dissolutions  des  divers  acides  gras  renfermant  chacun  par 
litre  un  équivalent  d'acide,  et  si  Ton  mélange  ensuite  en 
proportions  différentes  ces  diverses  dissolutions,  on  ob- 
tiendra des  liqueurs  dont  l'acidité  totale  sera  la  même,  mais 
proviendra  de  quantités  variables  des  acides  employés.  Ces 
dissolutions  ontdes  tensions  superficielles  qui  varient  entre 
celles  des  liqueurs  normales  qui  ont  servi  à  les  former, 
tensions  qui,  comme  nous  l'avons  vu  plus  haut,  sont  très- 
différentes.  On  peut  donc  dresser  pour  elles  des  courbes  de 
tension  en  prenant  pour  abscisses  les  proportionsde  l'un  des 
acides  dans  le  mélange,  absolument  comme  tout  à  l'heure 
nous  prenions  la  proportion  de  substance  active  dans  sa  dis- 
solution dans  l'eau.  Si  l'on  compare  ces  courbes  entre  ell«s, 
on  trouve  encore  un  rapport  constant  entre  les  valeurs  des 
abscisses  qui  correspondent  à  une  même  ordonnée. 

Je  montrerai  dans  un  autre  travail  quel  profit  on  peut 
retirer  de  cette  variation  des  tensions  pour  calculer  ap- 
proximativement la  proportion  des  acides  gras  dans  le  mé- 
lange. J'aurais,  pour  le  faire  ici,  à  m'écarter  trop  de  mon 
sujet,  et  à  lui  faire  quitter  le  terrain  de  la  Physique  pure, 
sur  lequel  je  tiens  à  le  laisser. 

■  V 


lOa  B.    GUIMET. 


MÉMOIRE 
SUR  LA  FORMATION  DES  OUTREMERS  ET  LEUR  COLORATION-, 

Par  m.  E.  GUIMET. 


Lorsque  Ton  suit  les  phases  de  la  cuisson  de  routremer, 
tel  que  l'a  préparé  J.-B.  Guimet  et  tel  qu  on  le  prépare 
généralement  de  nos  jours,  on  observe  diverses  colorations 
qui  se  succèdent  Tune  à  Tautre  dans  l'ordre  suivant  : 

Brun. 

Vert. 

Bleu. 

Violet. 

Rose. 

Blanc. 

Ces  couleurs  sont  le  résultat  de  l'oxydation  successive  du 
mélange  primitif  de  kaolin,  de  soufre  et  de  carbonate  et 
sulfate  de  soude  destiné  à  préparer  l'outremer. 

En  effet,  lorsque  le  four  qui  contient  les  creusets  renfer- 
mant le  mélange  commence  à  rougir,  le  soufre  fond  et 
produit  immédiatement  avec  la  soude  des  polysulfures. 

Les  corps  qui  se  forment  alors  présentent  des  colora- 
tions diverses,  mais  sont  tellement  instables  en  présence 
de  l'air  et  de  l'eau  qu'on  ne  peut  les  définir.  Ils  paraissent, 
du  reste,  ne  devoir  leur  coloration  qu'aux  sulfures  qui  im- 
prègnent la  masse. 

Le  premier  produit  stable  est  le  brun  ^  il  apparaît  au 
moment  où,  le  four  s'échauffant  davantage,  on  voit  sortir 
des  creusets  des  flammes  bleues,  indices  de  la  combuslion 
du  soufre  se  transformant  en  acide  sulfureux. 

Lorsque  les  flammes  ont  cessé  d'apparaître,  cette 
transformation  est  achevée  ;  si  l'on  retire  un  creuset  du 
four,  il  est  rempli  d'une  matière  verte. 


FOKMATION  DES  OUTREMERS  ET  LEUR  COLORATIOIC.      Io3 

La  température  étant  arrivée  à  700  degrés,  le  bleu  com- 
raence  à  se  former. 

Si  à  ce  moment  on  continue  le  chauffage  en  laissant, 
comme  précédemment,  entrer  de  l'air  en  excès,  la  matière 
prend  une  nuance  violette,  puis  rouge  ou  plutôt  rose,  et 
enfin  l'outremer  devient  blanc. 

Cet  outremer  blanc,  mélangé  avec  un  peu  de  charbon 
et  chauffé  au  rouge,  reproduit,  selon  la  quantité  de  charbon 
ajoutée,  du  rose,  du' violet,  du  bleu,  du  vert  ou  du  brun. 

On  peut  aussi,  en  prolongeant  ce  chauffage  et  par  consé- 
quent Foxydation,  faire  redescendre  à  Tun  de  ces  produits 
•dérivés  du  blanc  tous  les  termes  de  la  série  et  transformer 
par  exemple  le  brun  en  vert,  bleu,  rose  et  blanc. 

Le  même  fait  s'observe  avec  un  mélange  de  sulfate  de 
soude,  de  kaolin  et  de  charbon,. qui  se  comporte  comme 
Ton tremer  blanc  mélangé  de  charbon. 

En  remplaçant  le  charbon  par  Fhydrogène,  le  sel  am- 
moniac, ou  tout  autre  corps  réducteur,  on  obtient  les 
mêmes  résultats. 

Ces  faits  semblent  bien  indiquer  que  la  marche  de  la 
coloration  suit  celle  de  l'oxydation.  Nous  allons  en  trouver 
des  preuves  dans  Texamendes  produits  dans  les  différentes 
périodes  du  chauffage. 

CARACTÈRES    DES    OUTREMERS.  . 

Ces  couleurs,  au  sortir  du  creuset,  contiennent  une  par- 
tie insoluble,  qui  est  la  matière  colorante,  et  une  partie 
soluble,  qui  comprend  les  produits  éliminés  de  la  combi- 
naison. 

Nous  allons  indiquer  dans  un  tableau  les  divers  carac- 
tèreis  de  ces  outremers  colorés  et  ceux  de  leurs  eaux  de 
lavage. 


I04  B.    GUIMBT. 

# 

Brun  et  vert. 

RéAGTIONS     DE    LA    MATIERE  REACTIONS     DES    EAUX     DE 

COLORANTE.  LAVAGE. 

CliaulT&s  au  rouge  sombre  au  Eaux  alcalines  fortement  co- 
con tact  de  Tair,  se  transforment  lorées  par  des  poly sulfures  de 
en  bleu.  sodium  qui  se  transforment  peu 

Traités  par  les  acides  étendus,  à    peu   en   hyposulfites    inco- 

dégagent   de  l'hydrogène   sul-  lores;  les  acides  y  déterminent 

furé.  Il  se  forme  un  dépôt  de  un  abondant  précipité  de  soufre 

soufre    et   le  produit   devient  et  un  dégagement  d'hydrogène 

blanc.  sulfuré. 

Bleu  parfait. 

Traité  par  les  acides  étendus,         Eaux  neutres  ne  contiennent 
dégage  de  l'hydrogène  sulfure    que  du  sulfate  de  soude  avec 
mélangé  à  de  l'acide  sulfureux  ;    des  traces  d^hyposulfites. 
il  se  forme  un  dépôt  de  soufre 
et  le  produit  devient  blanc. 

Le  violet,  étant  un  mélange  mécanique  de  bleu  et  de 
rose,  participe  aux  propriétés  de  ces  deux  outremers. 

Bose  et  blanc. 

Traités  parles  acides  étendus,  Eaux  acides  :  l'acidité  est 
ne  dégagent  que  de  l'acide  sul-  produite  par  un  acide  et  non 
fureux  ;  il  se  dépose  du  soufre  par  un  sel  à  réaction  acide  ;  les 
et  le  produit  devient  blanc.  eaux  ne  contiennent  plus  que 

des  sulfates  sans  traces  d'hypo- 
sulfîtes,  elles  contiennent  de 
l'alumine. 

Il  se  produit,  dans  ce  cas,  un  phénomène  remarquable  : 
le  fer,  dont  le  kaolin  contient  toujours  une  petite  quan- 
tité, et  qui,  jusqu^à  présent,  était  resté  insoluble,  mèléi  la 
matière  colorante,  le  fer,  disons-nous,  apparaît  dans  les 


FORMATION  DES  OUTREMERS  ET  LEUR  COLORATION.   I  o5 

eaux  de  lavage  qu'il  colore  fortement  en  jaune  brun,  et  se 
précipite  rapidement  à  Tétat  de  sous-sel  d'un  jaune 
ocreux.  La  chaleur  produit  immédiatement  ce  dédouble- 
ment. Si,  lorsque  le  fer  est  précipité,  on  traite  les  eaux  de 
lavage  par  l'ammoniaque,  il  se  précipite  une  quantité  con- 
sidérable d'alumine. 

PRODUCTION    DE    LA    MATIERE    COLORANTE. 

Examinons  maintenant  comment  s'opère  le  passage 
d'une  couleur  à  l'autre. 

La  transformation  du  brun  en  vert  n'a  pas  encore  pu 
être  étudiée  suffisamment  par  des  méthodes  de  laboratoire  : 
nous  ne  pouvons  donc  pas  en  parler  ici. 

TRANSFORMATION    DU    VERT    EN    BLEU. 

Dans  l'état  actuel  de  la  Science,  on  peut  dire  que  tous 
les  travaux  faits  pour  établir  une  différence  dans  la  com- 
position élémentaire  entre  le  vert  et  le  bleu  obtenu  par  le 
grillage  de  ce  vert  n'ont  abouti  qu'à  prouver  sous  ce  rap- 
port Tidentité  absolue  de  ces  deux  produits. 

Il  n'existe  pas  j^i  ^^  différence  dans  la  proportion  des 
éléments  qui  constituent  ces  deux  corps.  Or  l'oxygène  n'a 
pas  été  dosé  :  le  changement  de  couleur  ne  peut  donc  pro- 
venir que  d'un  changement  d'état  des  composés  sulfurés, 
changement  produit  sous  l'influence  de  l'oxygène. 

TRANSFORMATION    DU    BLEU    EN    ROSE. 

Il  y  a,  dans  ce  cas,  une  véritable  différence  entre  ces 
deux  corps. 

Nous  avons  vu,  par  Texamen  des  eaux  de  lavage,  que  de 
l'alumine  était  rendue  soluble;  les  analyses  démontrent 
que  les  proportions  de  soude  et  de  soufre  n'ont  pas  changé 
sensiblement. 


lo6  B.    GUIMET. 

Nous  nous  trouvons  donc  en  présence  d'un  outremer 
contenant  une  plus  grande  quantité  de  silice,  et  Ton  a 
souvent  attribué  la  coloration  rose  à  un  excès  de  silice. 

Il  n^en  est  rien.  Si  Ton  prend,  en  eflet,  de  Toutremer 
rose,  débarrassé  par  un  lavage  soigné  de  toute  l'alumine 
éliminée  pendant  la  transformation  du  bleu  en  rose,  cet 
outremer,  qui  contient  un  excès  de  silice,  chauffé  avec  du 
charbon,  se  transforme  en  un  outremer  bleu  qui  contient 
la  même  quantité  de  silice  et  d'alumine  que  Toutremer 
rose  avant  cette  transformation. 

C'est  donc  par  une  oxydation  que  la  coloration  rose 
est  obtenue,  et  Ton  vérifie  ainsi  les  conséquences  que  fai- 
saient prévoir  les  caractères  chimiques  de  ce  produit  (ab- 
sence de  dégagement  d'hydrogène  sulfuré  lors  du  traite- 
ment par  les  acides,  etc.). 

Nous  supposons  que  c'est  l'acide  sulfurique,  dont  la  pro- 
duction succède  à  l'acide  sulfureux  pendant  la  réaction, 
qui  désagrège  le  produit  en  formant  un  sulfate  d^ alumine 
soluble  :  c'est  aussi  cet  acide  qui  favoriserait  la  formation 
du  rose. 

D'après  les  caractères  indiqués  pour  ces  diflférenles  cou- 
leurs, nous  pouvons  définir  ainsi  les  outremers  :  a  Les  ou- 
tremers sont  des  produits  insolubles^  composés  de  silice^ 
d'alumine,  de  soude,  de  soufre  et  d'oxygène  ]  traités  par  les 
acides  étendus,  ils  se  décolorent,  et  cette  décoloration  est 
accompagnée  d* un  dépôt  de  soufre  et  du  dégagement  d'un 
composé  acide  du  soufre  » . 

DU     ROLE    DE    CHACUN    DES    CONSTITUANTS     DE     l'ouTKEMER. 

Oxygène.  —  Nous  lui  attribuons,  d'après  les  expériences 
ci-dessus,  la  production  de  la  couleur,  et  il  paraît  aujour- 
d'hui démontré  qu'en  son  absence  les  sulfures  ne  peuvent 
former  d'outremers;  il  faut  la  présence  d'hyposulfiles  pour 
la  production  d'une  couleur  stable. 


FORMATION  DES  OUTREMERS  ET  LEUR  COLORATION.      IO7 

Soufre.  —  Avec  les  mêmes  proportions  des  autres  con- 
stltuanis,  peu  de  soufre  donne  un  bleu  clair,  et  plus  la 
dose  est  augmentée,  plus  le  bleu  devient  foncé.  Toutefois, 
lorsque  l'on  est  arrivé  à  une  certaine  nuance,  qui  dépend 
des  proportions  des  autres  corps  dans  le  mélange,  tout 
l'excès  de  soufre  que  Ton  pourrait  introduire  serait  élimi- 
né, soit  par  volatilisation,  soit  â  Tétat  de  sulfate  de  soude. 

Soude.  —  La  proportion  de  soude  est  toujours  la  même 
dans  les  outremers  :  elle  est  de  3o  pour  loo  environ;  tout 
excès  de  soude  que  Ton  voudrait  faire  entrer  dans  le  mé- 
lange primitif  disparaîtrait  toujours  à  Tétat  de  sulfate  de 
soude,  grâce  à  Texcès  de  soufre  que  Ton  est  obligé  d'intro- 
duire dans  la  masse  pour  parer  aux  pertes  occasionnées, 
par  la  volatilisation  de  ce  produit. 

Silice,  —  Sa  proportion  est  sensiblement  constante  dans 
tous  les  outremers,  37  à  38  pour  loo  environ;  son  rôle 
n'a  jamais  pu  être  bien  défini. 

jilumine,  —  C'est  de  la  quantité  d'alumine  contenue 
dans  le  mélange  primitif  que  dépend  la  nuance  du  bleu. 
Quand  la  proportion  d'alumine  diminue,  celle  du  soufre 
augmente  de  la  même  quantité,  tandis  que  les  proportions 
respectives  de  silice  et  de  soude  ne  changent  pas. 

On  a  cru  jusqu'à  présent  devoir  caractériser  les  outre- 
mers clairs  ou  bleu  pur  et  les  outremers  foncés  ou  rosés 
par  la  dénomination  à^ outremers  pauvres  en  silice  et  riches 
en  silice. 

Le  fait  est  que  ces  outremers  contiennent  tous  la  même 
proportion  de  silice;  seulement,  pour  les  préparer,  on 
emploie  des  kaolins  plus  ou  moins  siliceux  :  c'est  ce  qui  a 
donné  lieu  à  cette  dénomination  erronée.  Si  l'on  examine, 
en  effet,  la  composition  d'un  outremer  clair  comparée  à 
celle  d'un  outremer  foncé,  on  verra  que  sur  loo  parties  de 
ces  corps  la  silice  et  la  soude  sont  représentées  par  le  même 
chiffre;  l'outremer  clair  contient  8  pour  loo  de  soufre  et 
l'outremer  foncé  en  con  tiendra  1 3  pour  loo,  et  dans  l'outre- 


I08  E.    6UIMET. 

mer  clair  il  y  a  5  parties  d'alumine  en  plus  que  dans  l'ou- 
tremer foncé* 

Une  variation  dans  la  quantité  d'alumine  est  suivie  par 
une  variation  en  sens  inverse  dans  la  quantité  de  soufre 
combiné. 

En  sorte  que,  en  se  servant  de  kaolins  de  compositions  dif- 
férentes, on  peut  faire  varier  la  nuance  du  produit  obtenu 
depuis  le  bleu  pâle  à  nuance  de  lapis  jusqu'au  bleu  foncé  à 
nuance  violette. 

En  résumé,  la  soude  et  la  silice  restant  sensiblement  en 
quantité  constante  dans  tous  les  outremers,  la  quantité  de 
soufre  combiné  peut  varier  environ  du  simple  au  double, 
tandis  que  la  quantité  d'alumine  contenue  à  l'état  de  com- 
binaison dans  le  produit  varie  dans  la  proportion  de  •;  en- 
viron. 

Les  outremers  ainsi  obtenus  présentent  au  microscope 
une  texture  cristalline  et  un  aspect  parfaitement  hom<^ène^ 
il  faut  donc  croire  que  la  proportion  de  soufre  et  d'alumine 
peut  varier  dans  les  limites  ci-dessus  sans  que  l'outremer 
cesse  d'être  un  corps  parfaitement  défini,  et  c'est  ce  qui  au- 
rait jusqu'à  présent  empêché  l'analyse  d'assigner  à  l'outre- 
mer une  formule  chimique  invariable. 

Il  fallait  donc  chercher  d'autres  procédés  que  l'analyse 
pour  étudier  avec  plus  de  précision  le  rôle  des  corps  qui 
constituent  l'outremer. 

C'est  pour  cela  que  l'on  a  fait  au  laboratoire  de  l'usine 
de  Fleurieux  des  expériences  de  substitution  qui  ont  abouti 
aux  résultats  suivants. 

On  a,  dans  le  mélange  primitif,  substitué  au  soufre, 
équivalent  à  équivalent,  le  sélénium  d'abord  et  le  tellure 
ensuite,  et  l'on  a  produit  les  couleurs  dont  nous  donnons  le 
tableau  ci-après,  en  même  temps  que  celui  des  outremers 
au  soufre  qui  leur  correspondent. 


FORMATION  DES  OUTREMERS  ET  LEUR  COLORATION.      lOp 

Outremers  au  soufre.      Outremers  au  sélénium.  .    Outremers  au  tellure. 


Brun. 

Brun. 

Vert. 

V 

Jaune. 

Bleu. 

Rouge  pourpré. 

Vert. 

Violet. 

j»             • 

1) 

Rose. 

Rose. 

Gris. 

Blanc. 

Blanc. 

Blanc. 

Ces  corps  présentent  les  mêmes  réactions  que  les  outre- 
mers au  soufre.  Comme  eux,  ils  sont  décomposés  par  les 
acides  étendus  avec  dépôt  de  sélénium  ou  tellure,  et  déga- 
gement d'un  gaz  sélénifère  ou  tellurifère. 

On  peu(  aussi,  en-  chauffant  avec  du  charbon  un  des 
composés  de  cette  série,  reproduire  tous  les  autres  compo- 
sés supérieurs. 

Depuis  longtemps  la  soude  avait  été  remplacée  par  la 
potasse  dans  la  préparation  de  l'outremer,  et  Ton  avait 
reconnu  que  le  produit  blanc  ainsi  obtenu  présentait  tous 
les  caractères  de  Toutremer. 

Les  bases  alcalines  et  terreuses,  comme  la  chaux,  la 
baryte,  la  magnésie,  la  litliîne,  etc.,  substituées  équivalent 
à  équivalent  à  la  soude,  donnent  toutes  des  corps  présentant 
les  mêmes  réactions  que  les  outremers  (décomposition  par 
les  acides,  dépôt  de  soufre  et  dégagement  d'acide  sulfhy- 
drique  ou  sulfureux). 

Ces  combinaisons  sont  incolores,  excepté  celles  que 
donne  la  baryte.  Ce  dernier  outremer,  en  général,  affecte 
une  nuance  grise;  mais,  dans  certaines  circonstances,  il 
parait  être  jaune.  Toutefois  nous  avons  obtenu  si  peu  de 
cet  outremer  jaune  qu'il  nous  a  été  impossible  de  le  carac- 
tériser. 

On  s'est  arrêté,  dans  ces  expériences  de  substitution, 
aux  métaux  dont  les  sulfures  sont  insolubles;  car,  le  lavage 
ne  pouvant  les  éliminer,  on  ne  peut  savoir  facilement  si 
l'on  est  en  présence  d'un  outremer  ou  d'un  silicate  mé- 


IIO       E.  GUIHBT.  FORMATION  D^8  OUTREMERS,  ETC. 

langé  de  sulfures  insolubles  et  pouvant  alors  prëseoter 
les  réactions  des  outremers. 

Nous  avons  essayé  de  substituer  Toxyde  de  cbrome  a 
l'alumine,  mais  cet  oxyde  agissant  comme  fondant,  i 
700  d^rés,  température  nécessaire  à  la  production  de 
Toutremer,  la  masse  s'est  fondue  et  par  suite  n'a  pas  pu 
offrir  les  propriétés  physiques  des  outremers. 

D'après  ces  études,  on  voit  que  le  soufre  uni  à  l'oxygène 
produit  la  coloration,  puisque,  lorsqu'il  est  remplacé  par 
les  corps  de  sa  famille,  l'outremer  change  de  couleur. 

La  soude,  si  elle  ne  produit  pas  directement  la  colora- 
tion, est  pourtant  nécessaire,  puisque  les  autres  corps  qu'on 
lui  substitue  dans  Toutremer  empêchent  la  coloration 
de  se  produire. 

Enfin  l'outremer  n'est  pas  un  corps  unique  :  il  existe 
toute  une  série  d'outremers,  les  uns  colorés  (outremers 
au  soufre,  au  sélénium  et  au  tellure);  les  autres  incolores 
(outremers  à  la  potasse,  à  la  chaux,  à  la  lithine,  etc.),  et 
l'étude  de  ces  corps  pourra  peut-être  jeter  un  jour  non- 
veau  sur  la  composition  chimique  de  l'outremer. 

Nous  avons  cru  devoir  publier  dès  à  présent  ces  ré- 
sultats, déduits  de  l'examen  impartial  des  nombreuses 
expériences  exécutées  à  l'usine  de  Fleurieux  et  des  analyses 
fournies  par  les  savants  français  et  étrangers  qui  se  sont 
occupés  de  l'outremer. 

On  voit  que  le  champ  des  explorations  théoriques  est 
encore  assez  vaste,  et  il  eut  peut-être  mieux  valu  attendre 
de  pouvoir  offrir  des  formules  positives. 

Mais,  comme  l'attention  du  monde  savant  est  depuis 
quelque  temps  attirée  sur  ces  questions,  il  est  important 
de  revendiquer  pour  J.-B.  Gui  met  l'honneur  de  la  dé- 
couverte de  la  série  des  outremers  au  soufre,  qu'il  avait 
préparés  et  étudiés  longtemps  avant  que  personne  fut 
même  parvenu  à  produire  induslriellemeni  l'outremer 
bleu. 


W«    HOBERTS.    FUSIBILITÉ,    ETC.  III 

Nous  tenions  aussi  à  signaler  les  importants  travaux 
des  chimistes  qui  nous  secondent  dans  nos  recherches. 

Je  citerai  particulièrement  le  Directeur  de  Tusine  de 
Fleurieux,  M.  Th.  Morel,  qui  a  trouvé  les  outremers  au 
sélénium  et  au  tellure,  et  M.  J.-F.  Plicque,  qui  a  entrepris 
la  synthèse  de  Toutremer  au  moyen  du  silico-aluminate 
de  soude. 

Les  expériences  se  poursuivent  avec  activité  et  Ton 
peut  dès  à  présent  entrevoir  que  la  composition  exacte 
de  Toutremer,  sa  formule  chimique,  s'il  en  a  une,  sera  « 
bientôt  révélée. 


«%»V%«r%%%V%«\'\%V%»V%%\%«r\«%\«% 


NOTES  SUR  U  FUSIBILITÉ,  LA  LIQII&TION  ET  LA  BENSITÉ 
DE  CERTAINS  ALLIAGES  D'ARGENT  ET  DE  CUIVRE,  DOR 
ET  DE  CUIVRE; 

Par  m.  Wichandler  ROBERTS, 

Membre  de  la  Société  Royale  de  Londres,  chimiste  de  la  Monnaie 

de  Londres. 


(Traduit  de  l'anglais  par  M.  E.  DcuAs, 
Essayeur  du  Bureau   de  la  Garantie  de  Paris.) 


ALLIAGES   d'argent    ET    DE    CUIVRE. 


Les  alliages  d^argent  et  de  cuivre  présentent  certaines 
particularités  physiques  et  chimiques  qui,  en  dehors  de 
leur  valeur  commerciale,  rendent  leur  étude  très-intéres- 
sante au  point  de  vue  scientifique. 

Une  de  leurs  propriétés  les  plus  remarquables  est  la  mo- 
bilité singulière  de  leurs  molécules  constituantes,  en  vertu 
de  laquelle  certaines  combinaisons  de  leurs  éléments 
sMsolent  et  se  groupent  spontanément  dans  une  masse 


lia  W.    &OBERTS.    FUSIBILITÉ,    LIQUÂTION 

d'alliage  en  fusion,  et  en  altèrent  ainsi  constamment  Tho- 
mogénéité.  Ces  irrégularités  de  composition  d'un  même 
lingot  ont  été  constatées  depuis  longtemps  déjà. 

Au  XYi®  siècle,  Lazarus  Erckern  en  parle  dans  un  de  ses 
ouvrages  comme  d'un  phénomène  avec  lequel  il  est  fami- 
lier. Jars,  dans  un  Mémoire  publié  en  1781,  établit  d'une 
manière  très-explicite  que  les  lingots  d'alliage  titres  bas 
d*argent  et  de  cuivre  sont  moins  riches  au  centre  qu'à  la 
surface. 

Depuis  le  commencement  du  siècle,  ces  alliages  ont  été 
l'objet  de  beaucoup  d'excellents  travaux.  M.  Darcet,  in- 
specteur général  des  Essais  en  France,  iit,  en  i8a4»  une 
série  de  recherches  sur  les  phénomènes  qui  accompagnent  ^ 
ce  refroidissement  après  fusion  des  alliages  d'argent  et  de 
cuivre.  Les  résultats  de  ces  expériences  ne  furent  point 
publiés;  maïs  M.  Levol,  en  i852,  dans  un  Mémoire  bien 
connu  sur  les  alliages  métalliques  (')  rappelle  que  Darcet, 
dans  ce  travail,  avait  pour  but  de  chercher  un  moyen  d'as- 
surer l'homogénéilé  des  lames  destinées  à  la  fabrication 
des  monnaies.  Il  ajoute  que  ces  essais  ne  semblaient  pas 
destinés  à  donner  des  résultats  satisfaisants,  et  je  crois, 
d'après  les  résultats  de  mes  propres  expériences,  pouvoir 
dire  que  cette  conclusion  doit  être  modifiée. 

M.  A.  Levol,  dans  ses  expériences,  coulait  le  métal  à 
examiner,  soit  dans  un  moule  cubique  de  o™,o45  de  côté, 
soit  dans  un  moule  sphérique  de  o°^,o5o  de  diamètre. 

Ses  conclusions  sont  que  le  seul  alliage  homogène  de 
cuivre  et  d'argent  est  celui  qui  contient  : 

Argent  ....     718,93 
Cuivré 281 ,07 

,  1000,00 


(*)  Sur  les  alliages  considérés  sous  le  rapport  de  leur  composition  chi" 
mique  {yénnales  de  Chimie  et  de  Physique,  3*  série,  t.  XXXVI). 


SX   DBJI6ITÉ   Dit   CERTAINS   ALLIA6BS.  Il3 

combinaison  définie  qui  aurait  pour  formule 

Ag'Cu*  (ou  Ag'jCu*  si  Ton  prend  63, 34  pour  équivalent  du  cuivre). 

Il  considère  tous  les  autres  alliages  possibles  de  cuivre 
et  d' aident  comme  des  mélanges  de  cet  alliage  défini  avec 
des  excès  variables  de  Tun  des  deux  métaux  primitifs. 

En  1860,  Matthiessen  (^  )  étudia  ces  alliages  avec  le  soin 
minutieux  qui  caractérise  tous  ses  travaux, et  il  les  décrivit 
comme  des  mélanges  mécaniques  des  deux  métaux,  sou- 
mis à  des  modifications  allotropiques  déterminées. 

La  courbe  des  conductibilités  électriques  amena  Mat- 
thiessen à  douter  de  Texactitude  des  conclusions  de  Levol 
au  sujet  d'un  alliage  défini  Ag^Cu*;  car,  dans  ce  cas,  cette 
courbe  aurait  dû  consister  en  deux  lignes  droites  conduisant 
respectivement  de  Falliage  de  Levol  au  cuivre  et  a  l'argent 
pur,  et  nous  observons  au  contraire,  en  examinant  la 
courbe  partant  du  cuivre,  que  le  pouvoir  conducteur  de  ce 
métal  éprouve  une  décroissance  rapide  par  l'alliage  à  ce 
métal  de  faibles  quantités  d'argent. 

De  l'alliage  qui  contient  10  pour  100  d'argent  à  celui 
contenant  65,  nous  avons  une  ligne  droite  et  nous  considé- 
rons les  alliages  intermédiaires  comme  des  mélanges  des 
deux  alliages  extrêmes.  De  ce  dernier  jusqu'à  celui  conte- 
nant 72  pour  100  d'argent,  nous  pouvons  avoir  des  mé- 
langes ou  solutions  des  alliages  à  65  et  72  pour  100. 

Ce  dernier  alliage,  dont  la  conductibilité  est  de.  63,7 
(celle  de  l'argent  fin  étant  prise  pour  100),  donne  le  point 
inférieur  de  la  courbe  et  correspond  exactement  à  l'alliage 
de  Levol,  Ag*,Cu'. 

Les  alliages  intermédiaires  entre  celui-ci  et  l'argent 
pur  peuvent  être  des  mélanges  ou  des  solutions  de  cet  al- 
liage normal  dans  de  l'argent  pur  ou  contenant  de  faibles 
quantités  de  cuivre. 


(*)  PhiL  Trans,f  ^,  ^^Z;  1860. 

Ann,  de  Chim,  et  de  Phys.,  5«  série,  t.  XIH.  (Janvier  1878.)  8 


Il4  W.    ROBE&TS.    —    FUSIBILITÉ,    LIQUÂTIOH 

Il  semble  donc  que,  s^il  existe  un  alliage  d'une  composition 
constante  d'environ  65  pour  loo  d'argent,  nous  devrions 
trouver  une  ligne  droite  entre  Talliage  à  72  pour  100  et 
celui  à  10  pour  100. 

J'arrive  main  tenant  àrcxposé  de  mes  propres  expériences. 

Il  me  sembla  d^abord  que  la  détermination  du  point  de 
>  fusion  d'une  série  d'alliages  de  cuivre  et  d^argent  devait 
donner  des  indications  précieuses  sur  le  mode  d'arrange- 
ment de  leurs  molécules  dans  la  solidification  d'une  masse 
d'alliages  de  ces  deux  métaux. 

Pour  cette  détermination,  j'ai  employé,  en  le  modifiant, 
le  procédé  décrit  par  Pouillet  pour  Tétude  de  la  chaleur 
spécifique  du  platine  à  de  hautes  températures  (^). 

Dès  que  Talliage  était  fondu,  on  y  plongeait  un  cylindre 
de  fer  tourné  d'un  poids  connu,  fixé  à  l'extrémité  d'un 
support  en  fil  métallique. 

Le  creuset  était  alors  retiré  du  feu,  et,  lorsque  l'alliage 
commençait  à  se  solidifier,  le  cylindre  de  fer  était  immé- 
diatement placé  dans  un  calorimètre  consistant  en  une 
double  enveloppe  métallique  en  cuivre  étamé,  semblable  k 
ceux  que  Ton  emploie  pour  la  détermination  des  chaleurs 
spécifiques  par  la  méthode  des  mélanges. 

11  était  essentiel  de  déterminer  d'abord  la  chaleur  spéci- 
fique moyenne  du  fer  employé,  entre  zéro  etla  température 
maxima  obtenue  pendant  les  expériences. 

Le  point  de  fusion  de  l'argent  était  un  point  de  départ 
très-convenable,  d'autant  plus  qu'il  a  été  déterminé  avec 
beaucoup  de  soin  par  M.  Becquerel  (^). 

Cette  détermination  s'est  faite  en  plaçant  un  fil  d'argent 
pur  dans  une  nacelle  de  porcelaine  enfermée  dans  un  tube 
de  porcelaine,  entouré  de  vapeur  de  zinc  bouillant,  dont  la 
température  a  été  fixée  par  M.  Deville  à  lo^o  degrés  C.  (•). 


(*)  Éléments  de  Physique^  6*  édition,  t.  II,  p.  564- 

j4nnales  de  Chimie  et  de  Physique,  l*  série,  t.  LXVIII,  p.  74. 
Comptes  rendus  des  séances  de  CJcadémie  des  Sciences^  t.  LVII,  p.  897, 


£T   DENSITÉ   DE   CEBTAlfîS    ALLIAGES.  IlS 

Cette  chaleur  ayant  ëtë  suffisante  pour  fondre  partiellement 
le  fil  d'argent,  on  peut  la  considérer  comme  représentant 
le  point  de  fusion  de  ce  métal. 

Pour  déterminer  la  chaleur  spécifique  du  cylindre  de  fer 
dont  je  devais  me  servir,  je  l'ai  plongé  dans  de  Fargent 
fondu,  puis  transporté  dans  le  calorimètre.  Il  est  bon  de 
remarquer  ici  que  la  couche  d*oxyde  qui  se  forme  à  la  sur- 
face du  fer  le  préserve  complètement  de  toute  soudure 
avec  Talliage  fondu,  mais  que  néanmoins  il  est  impos- 
sible d'empêcher  qu'une  faible  portion  de  Talliage  adhé- 
rent au  cylindre  ne  soit  emportée  avec  lui  dans  le  calori- 
mètre. Ce  métal  ainsi  emporté  involontairement  a  toujours 
été  recueilli  et  estimé  à  part. 

Pour  l'argent  pur,  0,6701  ont  été  pris  comme  chaleur 
spécifique  :  pour  les  alliages,  on  a  dû  faire  les  corrections 
nécessaires  en  déduisant  la  chaleur  spécifique  de  chaque 
alliage  de  celle  de  ses  éléments;  on  calculait  le  poids 
équivalent  du  fer  en  multipliant  le  poids  du  métal  intro- 
duit, par  sa  chaleur  spécifique,  et  en  divisant  le  produit 
de  cette  multiplication  par  la  chaleur  spécifique  du  fer 
déterminée  par  les  expériences  préliminaires. 

Ce  poids  était  ajouté  à  celui  du  fer  employé. 

Les  chaleurs  spécifiques  des  mélanges  à  de  hautes  tempé- 
ratures n'ont  pas  été  déterminées,  et  l'adoplion  des  nom- 
bres donnés  par  M.  Regnault,  dans  le  calcul  des  chaleurs 
indiquées  par  l' introduction  des  alliages  dans  le  calori- 
mètre, a  pu  élever  les  résultats  de  quelques  degrés. 

Les  résultats  des  expériences  ont  été  calculés  au  moyen 
de  la  formule 

p{T-B) 

p  est  le  poids  du  fer  employé; 
P  est  le  poids  de  l'eau; 

pV  et  p"(/'  les  valeurs  en  eau  du  calorimètre  et  du  ther- 
momètre; 

8. 


Il6  yv.    ROBEHTS.    FUSIBILITÉ,    LIQUATION 

T  la  température  initiale  du  fer  ; 
t  la  température  initiale  de  Teau; 
0  la  température  6nale; 
X  la  chaleur  spécifique  cherchée; 

Pour  une  expérience,  ces  quantités  ont  donné  les  chiffres 

suivants  : 

p 83«%i4o 

P 2»6o«',52o 

p'c'-hp^c^.  15,687 

T 1040°  C. 

i 16°  C. 

G 63*»  C. 

Le  poids  de  l'argent  entraîné  par  le  fer  était  de  S^*",  a66, 
dont  l'effet  calorifique  équivaut  à  celui  de  i^"^,  3o6  de  fer. 
.    La  valeur  corrigée  de  p  devient  donc 

83,  i4o  +  1 ,  3o6  =  84«'",446. 

Substituant  ces  valeurs  dans  la  formule  ci-dessus,  nous 

avons 

_  f9.6o,5?. -4-15,687)  (63-1 61  _    ^  , , 

''"       84,446(io4o-63)       -'5734. 

Trois  expériences  successives  ont  donné 

15795,     i555o,     15734, 
d'où  Ton  a  tiré  la  moyenne  adoptée 

.5693  ('). 

Nous  devons  faire  remarquer  que  cette  méthode  de  dé- 
termination de  la  chaleur  spécifique  du  fer  comporte  cer- 
taines causes  d'erreur. 


(*  )  Weinhold  donne  le  chiffre  0,1567  comme  celui  de  la  chaleur  spéci- 
fique du  fer  poli  entre  zéro  et  900  degrés.  {Annales  dePoggendorffy  t.  GXLIX, 
p.  ai/|.) 


ET^  DENSITÉ   DE   CEETAINS    ALLIAGES.  II7 

Les  principales  sont  : 

1®  La  perte  de  chaleur  rendue  latente  par  la  production 
et  Févaporation  d'une  petite  quantité  de  vapeur  d'eau  ; 

2^  La  petite  dîflférencequi  existe  entre  la  chaleur  spéci- 
fique du  fer  et  celle  de  la  mince  couche  d'oxyde  qui  se 
forme  à  la  surface; 

3**  La  perte  de  chaleur  éprouvée  par  le  fer  pendant  son 
transport  du  creuset  au  calorimètre  ; 

4**  Le  rayonnement  de  l'instrument. 

Le  point  de  fusion  du  cuivre  n'a  pas  été  exactement 
déterminé.  J'ai  éprouvé  de  grandes  difficultés  à  le  soumettre 
aux  expériences  du  calorimètre,  à  cause  de  la  ténacité  avec 
laquelle  il  adhère  au  fer.  Une  exactitude  rigoureuse  n^étant 
pas  absolument  nécessaire  sur  ce  point,  j'ai  adopté  le  point 
de  fusion  indiqué  par  le  D"^  Van  Riemsdijk  (*),  pour  le 
cuivre  rouge  =  iSSo*'  C. 

Chaque  alliage  a  été  synthétîquement  préparé  en  fondant 
ensemble  de  l'argent  pur  et  du  cuivre  pur,  et,  au  moment 
où  Talliage  fondu  était  retiré  du  fourneau,  une  portion 
était  réduite  en  grenaille  et  soumise  à  l'analyse. 

Les  indications  nécessaires  pour  la  détermination  di; 
point  de  fusion  de  chaque  alliage  étaient  fournies  par  une 
expérience  semblable  à  celle  par  laquelle  on  a  déterminé  la 
chaleur  spécifique  du  fer,  et  pour  le  calcul  il  suffisait  de 
ti'ansposer  les  termes  de  l'équation,  T  devenant  l'inconnue 
et  prenant  la  place  de  a:, 

px  ' 

la  valeur  de  x  étant  toujours  o,i5693  (chaleur  spécifique 
du  fer  déterminée  précédemment). 

Exemple.  —  Une  expérience  faite  pour  déterminer  le 


(  *  )  Archives  néerlandaises,  t.  III,  1868. 


Il8  W.    R0BERT8.    —   FUSIBILITÉ,    LIQVÀTIOM 

point  de  fusion  de  Talliage  à  820,7  donne  les  résultats 

suivants  : 

P 247«S74 

p'c'  ■^p"c" .     i5«s687 

t i5«C. 

0 56«  C. 

L'effet  caloriBque  de  l'alliage  entraîné  (3*',6o8)  équi- 
valant à  celui  de  i8',543  de  fer,  la  valeur  de  p  corrigée 

devient 

828%  55  -H  l«^543=:84«^093. 

Substituant  les  valeurs  aux  signes  dans  Féquation,  nous 

trouvons 

(a47,74+ 15.687)  (56 -»5)    ,  ^fi 
84,093x15693  "*" 

=;874»,42C. 

La  table  suivante  conlieni  les  résultats  des  expériences  : 

Points  de  fusion  des  alliages  d'argent  et  de  cuivre. 

Point 
Formule  de  fusion 

rtuméros.       Titres.  approximative.      observé.         Moyennes. 

1  1000        Ag »       io4o 

l  9"9>9 

2  9^5       Ag'Cu....  l   939,0  \      931, 1 

1  934,5 
/  874,6 

3  820,7     Ag»Cu....   ^9' '5  l   886,a 

900,5 

'  877,8 
/  882,4 
r     798       Ag'Cu».  .  !  885,4  [   887,0 

890*9 


ET    DEirSlTÉ    DE    CERTAINS 


Numéros.     Titres. 


5* 


6* 


8 


9 


10^ 


11* 


12* 


13'* 


H 


773,6 


750,3 


718,93 


63o , 29 


600 


569,6 


56i,i 


540,8 


5oo 


497 


Formule 
approximative. 

Ag'Cu.... 


Ag'Cu^  .  . 


Ag^Cu». 


AgCu. .  . 


Ag'Cu»..  . 


Ag'Cu»..  . 


Ag'Cu* .  .  . 


Ag'«  Cu*» .  . 


Ag^Cu» . . . 


Ag'»Cu".. 


ALLIAGES. 

Point 
de  fusion 
observé. 

(  85f,9 
857,9 
862,3 

852,3 
848,5 

868,4 
863,5 
879,5 

85i,9 

844,9 
837,6 

l  852,7 

854,9 
849,8 
858,6 
864,6 

897,6 
902,2 

(  9"), 8 
9'4,8 
927,2 

(  9'4»« 

916,0 
921,5 
927,6 

93  i, 9 

944»  ï 
945,6 

l  940,2 
973,0 

981,5 

955,6 


i'9 


Moyennes. 


858,3 


85o,4 


870,5 


846,8 


857,0 


899,9 


9'7,6 


9'9.8 


940,8 


962,6 


lao 


Numéros.         Titres. 


W*    nOBERTS.    —    FUSIBILITÉ,    LIQUATIOV 

Point 
•  Formule 

approximatlTe. 


15- 


459>4 


AgCu'. . . . 


16 


25o,5 


AgCu'.  •  • . 


de  fusion 

observé. 

Moyennet. 

953,5   j 

1   963,9  [ 

9603 

9^4 >i  ) 

1080,8   \ 

ii4i,8  1 
>"4»9  1 

• 

iii4,i 

III9.I  / 

17      G  (cuivre  pur) 


i33o 


La  courbe  suivante  représente  graphiquement  les  rësnllàls  ^ 
de  ces  expériences.  Les  coordonnées  sont  les  titres  d*iiae  . 
part,  les  points  de  fusion  de  l'autre, 

.  On  remarquera  que  cette  courbe  s'abaisse  rapidement 
du  point  de  fusion  de  l'argent  pur  à  celui  de  l'alliage  A 
925  de  fin,  qui  est  celui  des  monnaies  anglaises,  et  dont 
la  formule  est  approximativement 

Ag'  Cu. 

Les  alliages  désignés  par  les  n°*  7  et  8  présentent  vu 
intérêt  particulier;  le  premier,  dont  le  titre  est  718,93^ 
est  l'alliage  homogène  de  Levol,  et  j'avais  supposé  que  kcm 
point  de  fusion  serait  le  moins  élevé,  mais  l'expérieiiM 
m'a  démontré  que  celui  qui  porte  le  n^  8,  et  dont  le  tilÂB 
est  63o,  29,  ^fond  à  une]  température  moindre  que  a3%y. 

Cet  alliage,  dont  la  formule  est  Ag  Cu,  avait  déjà  pt^ 
sente  des  particularités  de  conductibilité  électrique  ^i 
l'avaient  signalé  à  Matthiessen  comme  devant  avoir  itile 
constitution  moléculaire  particulière.  >.  f  ' 

A  partir  de  ce  point,  la  courbe  détermine  les  points  dtf 
fusion  s'élevant  jusqu'à  1 33e  degrés,  qui  est  celui  du  cai^M' 
pur  pour  des  {illiages  dans  lesquels  la  proportion  de' CQ 
métal  s'élève  de  plus  en  plus.  "    - 

Pour  vérifier  le  point  de  fusion  des  alliages  n°*  7  et  8.. 


ET    ntatUi   DE   CKBTAIHS    ÂLLUCEB.  lai 


mm 

■■■■■■■«■■il 
-mmal 


IBI 


12a  W.    ROBERTS.    FUSIBILITÉ,    LIQUÀTION 

nous  en  avons  placé  des  copeaux  dans  un  creuset  couvert 
que  l'on  a  chauffé  au  moyen  de  la  vapeur  de  cadmium 
dont  la  température,  déterminée  par  M.  Deville,  est  de 
860  degrés.  L'un  de  ces  alliages  (n°  7)  a  fondu  en 
partie  le  second  (n^8)  complètement.  Il  est  donc  évi- 
dent pour  moi  que  les  points  de  fusion  des  alliages  indi- 
qués par  la  courbe  sont  tout  à  fait  exacts.  Il  est  possible 
cependant  que  Texamen  d^une  série  plus  complète  d'al- 
liages en  modifie  légèrement  la  forme.  Cet  examen  critique 
est  surtout  nécessaire  pour  les  alliages  voisins  de  celui 
à  49^9  c^i*  les  résultats  obtenus  jusqu'à  présent  diffèrent 
sensiblement  les  uns  des  autres,  et  en  outre  leur  moyenne 
s'écarte  de  la  ligne  probable  de  la  courbe. 

Je  ne  suis  pas  satisfait  de  mes  observations  sur  l'alliage 
à  773,  î  de  fin.  Cet  alliage  présente  un  intérêt  particulier; 
sa  formule  est  Ag'  Cu,  l'argent  étant  monoatomique. 

Depuis  que  ce  Mémoire  a  été  soumis  à  la  Société  Royale, 
j'ai  fait  quelques  expériences  complémentaires  sur  les 
alliages  de  ces  deux  parties  de  la  courbe. 

Le  calorimètre  que  j'ai  employé  pour  ces  nouvelles  obser- 
vations était  en  argent  poli ,  d'une  contenance  de  1 200  gram- 
mes d'eau,  dont  la  température  ne  s'élevait  jamais  au- 
dessus  de  i5  degrés;  l'équivalent  d'eau  de  cet  instrument 
était  seulement  de  i5s%72.  Les  niasses  de  fer  employées 
pour  transmettre  la  chaleur  étaient  semblables  à  celles 
qui  m'avaient  servi  dans  ces  précédentes  expériences.  La 
moyenne  de  plusieurs  opérations  très-concordantes  entre 
elles,  faites  avec  ce  nouvel  appareil,  m'a  donné  i5oo3 
pour  expression  de  la  chaleur  spécifique  du  fer. 

Les  résultats  que  j'ai  obtenus  dans  cette  nouvelle  série 
d'expériences  sont  ceux  que  Ton  a  marqués  d'un  asté- 
risque (*)  dans  le  tableau  dçs  points  de  fusion.  Ils  con- 
firment la  direction  primitive  de  la  courbe  pour  les  al- 
liages de  718  à  800  de  fin,  mais  éprouvent  une  déviation 
au  point  correspondant  à   l'alliage  n°  H  (Ag*Cu*).  Il 


BT    DEÀSITÉ    DE    GERTÀIlfS    ALLIAGES.  I  ^3 

peut  être  intéressant  de  rappeler  ici  que  les  expériences 
sur  lesquelles  Matthiessen  a  basé  la  courbe  des  conducti- 
bilités semblent  indiquer  une  déviation  au  point  corres- 
pondant à  l'alliage  4^9,4  (AgCu*)  (i5  mai  1875). 

Il  peut  être  curieux  et  utile  de  comparer  ces  résultats 
avec  ceux  obtenus  par  Rudberg  sur  les  alliages  de  plomb 
et  d'étain.  Il  a  constaté  qu'un  thermomètre  placé  dans  un 
alliage  fondu  de  ces  deux  métaux  indique  deux  points  sta- 
tionnaires  distincts  de  température  pendant  le  passage  de 
Tétat  liquide  à  l'état  solide  :  un  de  ces  points  est  toujours 
187  degrés  G. ,  et,  dans  l'alliage  Pb  Sn® ,  ces  deux  points  coïn- 
cident à  cette  température  (fait  duquel  Rudberg  conclut 
que  cet  alliage  est  le  seul  où  les  deux  métaux  se  trouvent 
chimiquement  combinés). 

J'espère,  en  continuant  ces  recherches,  arriver  à  déter- 
miner si  le  changement  d'état  des  alliages  d'argent  et  de 
cuivre  s'effectue  aussi  à  une  température  constante. 

Je  dois  mentionner  que  M.  A.  Riche  (*)  a  déterminé  le 
point  de  fusion  de  certains  alliages  de  cuivre  et  d*étain  au 
moyen  du  pyromètre  thermo- électrique  de  Becquerel,  et 
qu'il  a  obtenu  des  résultats  analogues  avec  les  alliages 
SnCu'  et  SnCu^;  mais,  pour  les  autres  alliages  de  ces 
mêmes  métaux,  les  résultats  didèrent  beaucoup  de  ceux 
que  nous  venons  de  mentionner. 

Il  est  difficile,  pour  le  moment,  de  montrer  la  relation 
qui  existe  entre  ces  résultats  et  les  phénomènes  de  la  li- 
quation  dans  les  alliages  d'argent  et  de  cuivre*,  mais  on 
peut  dès  maintenant  voir  que  dans  notre  courbe  les  al- 
liages n°*  7  et  8  occupent  des  positions  qui  concordent 
avec  celles  qui  leur  sont  assignées  dans  la  courbe  de  con- 
ductibilité électrique  de  Matthiessen. 

L'ordre  dans  lequel  se  classent  les  points  de  fusion  des 


(*)  Annales  de  Chimie  et  de  Physique,  4*  série,  t.  XXX,  p.  35 1. 


124  W.    nOBEHTS.    —    FUSIBILITÉ,    LIQBATIOM 

alliages  parait  démonlrer  que  la  liquation  est  le  résultat" 
de  l'ÎDégalilé  du  refroidissement  dans  une  masse  composée 
d'argent  et  de  cuivre,  el  il  csi  probable  que,  si  le  refroi- 
dissement était  considérablement  accéléré,  cette  liqi 
se  trouverait  très -modifiée. 

Dans  le  but  de  m'assurcr  de  la  vérité  de  cette  opinion, 
je  me  suis  servi  de  nioulcs  cubiques  (ayant  environ  43  mil- 


1 


on   pou va 


limèlres  de  côte),  que  ]'< 
rouge  vif,  et  dans  lesquels  on  poi 
et  uniformément  les  alliages  (') 

Tous  les  cubes  qui  ont  s^rvi  aux   expér 
coulés  dans  des  moules  coiisiruils  d.'  la  mèr 


it  cliauiTer  a 
:froidir  rapidement^ 


Le  premier  lingot  coulé  avec  un 


923  environJ 


('  )  Au  sujet  des  liii|;utB  ï  bas  titre,  Jars  a'oxprimo  Binai  dans  l'on 
luquel  je  nio  buïs  déjà  reporté,  p.  ^^i  :  •  Je  remarquai  par  des  expA*'! 
loiir  rondro  Igs  liagole  d'une  lenaur  plus  égala  dans  toulof  4 
leurs  pallies,   il  fnlJail  que  les  liDQOtières  fussent  nusGJ  cbaudes  qu'il  e 

J'ajouterai  que  certaines  eipériences  non  publiées,  /oitos  par  lo  D'  Boy- 
cott, ancien  essajeur  a  la  Monnaie  de  Calcalta,  out  démontré  que 
qualioii  des  alliages  d'argeut  et  de  cuivre  est  modillée  par  le  coulage  dani    | 
des  moules  de  sable  et  que  M.  E.  Scjd  proposa  eo  1871,  comme  uoe 
lioration  dans  la  Cabricalîon  des  monnaies,  l'emploi  des  lingotièros  de  fer    1 
chaudes  pour  les  Hlliagea  d'or  et  ceui  d'argent,  disant  que  les  lames 
guaiont  en  airaujjement  moléoulaîre  et  en  dactilité. 


r 


ET    DEHSITÉ    DE   C 


fut  refroidi  rapidement.  Sa  coinposiûon  cotiflrme  les  con- 
clusions de  M.  Levol.  Le  centre  est  d'un  titre  plus  élevé 
de  1 3,8  que  les  parties  extérieures. 


TerlicnJ. 

«.  9^4,6 

h.    93Ï,3          IJ.    ^■•■i 

6.  g?6,o 

1.    923,7      r.  ^-ïi 

c.  gig.i 

k.  9îî,3      î.    923 

d.  9Ï5,5 

/.    933,3 

e.   93., r, 

m.  953,9 

f-   925,0 

S-  gai. a 

«.  9aî,8 
p.  933,7 

'"• ?s 

Ipil 


1 


Le  second  cube,  coulé  avec  le  même  alliage  et  refroidi 
lentement,  tnoulre que,  danscccas,leséléineutsconsiituanis 
de  l'alliage  subissent  très-peu  de  transformations  molécu- 
laires, car  le  maximum  de  dilTérence  entre  les  diverses 
parties  de  ce  lingot  est  de  1,4. 


1 


Vu  cube  (le  l'alliage  monétaire  français  à  900,  refroïdîl 
rapidement,  présciue  une  diflérence  de  10,1  entre  les! 
centres  el  les  coins.  Le  même  alliage,  refroidi  lentcRientil 
ne  donne  plus  qu'une  variation  de  1,3. 


r 


ET    DBMSITÉ   DE    CERTAINS    ALLIAGES.  13^ 

La  dîQert-nce  Diaxima  trouvée  par  Levol  dans  les  dif- 
férentes parties  de  son  alliage  homogène  était  de  0,44- 

J'ai  trouvé  que,  si  le  refroidissement  est  lent,  celte  lio- 
nidgénéité  est  trouLlée,  et  qu'alors  les  parties  extérieures 
du  cube  deviennent  un  peu  plus  i-îches  en  argent  que  le 


Alliage  c< 


718.93 
>8,,07 


,,8.4 
7>8,3 


Le  cube  suivant  représente  les  résultais  d'une  expérience 
sur  l'alliage  dont  le  point  de  fusion  est  le  moins  élevé  el 
dont  la  composition  correspond  à  la  formule  AgCu.  Sa 
structure  est  intéressante,  car  les  densités  des  deux  métaux 
semblent  avoir  influé  sur  l'arrangement  des  molécules.  La 
portion  inférieure  se  trouve,  en  effet,  plus  riclie  que  la 
ponion  supérieure. 


I 


FUSIBILITÉ,    LIQDATION 


63o,3 
369,7 


I 


li  à  la  QDUlle, 


E3a,3 


La  difl'drence  maxima  est  de  21,1. 

Levol  avait  trouvé  dans  un  cube  de  son  alliage  les  anglei 
plus  riches  que  le  cenlre  de  -~~i  i  pour  moi,  le  seul 
sur  lequel  j'aie  conslatérellet  des  densi  lés  est  celui  à  6904] 
fin. 

La  figure  suivante  montre  le  résuliat  d<;s  analyse! 
diverses  portions  de  la  niasse  d'un  alliage  contenant  333,3 
de  fin  (AgCu'). 

Celle  masse  diffère  de  composition  tlans  ses  parties,  maïs    ■ 
aucune  loi  ne  semble  avoir  présidé  à  l'arrangcntcnt  de  ses 

ilécules  cousliluautcs. 


ET    DEAStTË 


vue 
T.nleil. 

ba 

Plan 

om. 

«.   343,8 

/ 

3iG,i 

i 

33i,j 

*.  333,0 

l. 

33î,o 

c.    337,5 

m 

33i,r. 

d.  33o,o 

n 

334,8 

e.  33i,o 

g 
h 

33i,u 
331,c 

a  goutle.. 


En  résumé,  ces  observalions  conduisent  k  penser  que  les 
alliages  d'argent  et  de  cuivre  dans  certaines  coiididous 
d'iioinogénéité,  comme  celui  de  Levol,  ne  sont  pas  aoumis 
à  la  liquation  lorsqu'on  les  coule  ddns  le  moule  à  la  tem- 
péralure  ordinaire  et  qu'on  les  refroidit  immédiatement. 

Pour  les  alliages  inférieurs  à  718,9  de  fin,  les  surfaces 
extérieures  sont  plus  riches  que  le  centre. 

La  courbe  de  fusibilité  montre  que  les  alliages  infé- 
rieurs à  35u  ont  un  point  de  fusion  plus  élevé  (\ae  les 
autres  et  que  l'argent  fin  lui-même. 

Il  ne  paraît  donc  pas  que  la  liquation  soit  due  à  u 
séparation  des  alliages  les  moins  fusibles  dans  une  masse 
d'argent  et  de  cuivre;  car,  s'il  en  était  ainsi,  les  parties 
extérieures  des  lingots  devraient  toujours  se  trouver  moins 
riches  en  argent  que  le  centre. 

Il  est  impossible,  pour  le  moment,  de  donner  une  expli- 
cation satisfaisante  et  complète  de  cette  reconstitution  mo- 
léculaire, mais  il  me  semble  qu'il  y  a  déjà  un  certain  inté- 

Jnn.  deCllim.  et  d,  Phy'.,  5"  »*rie.  t.  XIII.  (Janvier  .((73.)         9 


l3o  W.    ROBEKTS.    FUSIBILITÉ^    LIQUATION 

rêt  à  constater  que  les  mêmes  alliages  occupent  les  mêmes 
points  sur  les  courbes  de  fusibilité  et  de  conductibilité  élec- 
trique, et  que  la  disposition  des  molécules  d'un  alliage  dé- 
pend en  grande  partie  de  son  mode  de  refroidissement. 

J'ai  cherché,  sur  une  indication  de  M.  R.  Muller,  à 
déterminer  les  relations  eutreles  densités  de  l'argent  solide 
et  fondu. 

J'ai  employé  la  méthode  qu'il  a  inventée  et  dont  il  se 
sert  pour  la  détermination  de  la  densité  de  la  fonte  (^ )  en 
fusion. 

Un  vase  conique,  en  tôle  mince  de  Low-Moor,  d'une 
épaisseur  de  i  millimètre,  de  16  centimètres  de  hauteur 
et  d'une  capacité  intérieure  de  54o  centimètres  cubes 
environ,  fut  pesé  vide  d'abord,  puis  rempli  d'eau  distillée 
à  une  température  connue,  ce  qui  permit  de  déterminer 
exactement  sa  capacité  à  la  température  ambiante. 

De  l'argent  fondu  à  une  température  déterminée  exac- 
tement par  notre  méthode  calorimétrique  ordinaire  fut 
coulé  dans  ce  vase  en  observant  toutes  les  précautions 
indiquées  par  M.  Muller  pour  son  remplissage. 

Après  le  refroidissement,  le  cône  de  métal  fut  de  nouveau 
pesé  avec  son  contenu. 

La  surface  du  métal  fondu  dans  le  creuset  était  couverte 
de  charbon,  et,  comme  on  sait  que  l'argent  fin  en  fusion 
absorbe  une  partie  de  l'oxygène  de  l'air,  le  cône  était  rem- 
pli d'une  atmosphère  de  vapeurs  de  charbon. 

La  correction  la  plus  importante  qil'il  ait  fallu  apporter 
aux  résultats  de  cette  opération  est  celle  relative  au  chan- 
gement de  volume  du  vase  à  la  suite  de  Tintroduction  du 
métal  fondu. 

Les  différentes  qualités  de  fer  travaillé  présentent  de 
grandes  variétés  de  dilatation   par  la  chaleur.   Ce  fait   et 


(»)  Rapports  de  la  Société  Rojrale,  t.  XXII,  p.  3C6,  et  t.  XXIII,  p.  aoo. 


ET    DENSITÉ    DE    CERTÂIIiS   ALLIAGES.  l3l 

r accroissement  connu  de  cette  eicpansion  à  de  hautes  tem- 
pératures rendirent  nécessaire  de  déterminer  ce  coefficient 
moyen,  pour  les  températures  entre  zéro  et  le  point  de  fu- 
sion de  l'argent. 

Dans  ce  but,  nous  avons  adopté  une  modification  de 
la  méthode  de  Ramsdcn  :  le  fer  placé  dans  une  enve- 
loppe de  graphite  fut  entouré  d'argent  en  fusion.  L'in- 
dication du  micromètre  était  prise  lorsque  la  longueur  du 
fer  était  restée  invariable  pendant  un  certain  temps,  con- 
sidérant que  ce  moment  était  celui  de  la  solidification  de 
l'argent,  la  perte  de  la  chaleur  latente  de  la  liquéfaction 
rendant  à  ce  moment  la  température  constante. 

Un  grand  nombre  d'expériences  m'ont  donné,  malgré 
les  difficultés  qu'elles  présentaient,  des  résultats  que  je  crois 
exacts.  Les  nombres 

0,0000124^ 

0,00001254 

0,OOOOI2l5 

0,00001219 
0,00001271 

Moyenne...   0,00001240 

expriment   la  dilatation  linéaire    pour    i   degré   du    fer 

Low-Moor  employé,  j  usqu'à  la  température  de  fusion  de 

l'argent. 

Le  coefficient  moyen  de  dilatation  cubique  déduit  de  ces 

résultats  est. 

0,00008720. 

Ce  nombre  est  beaucoup  plus  élevé  que  celui  donné  par 
Rinmann,qui  serait  o,oooou8o8  pour  le  fer  travaillé,  entre 
i5  degrés  et  le  rouge  blanc. 

Le  tableau  suivant  donne  les  résultats  des  expériences 
faites  pour  déterminer  les  densités  de  l'argent  fin  et  de 
l'alliage  homogène  de  Levol  en  fusion.  Nous  avons  choisi 
cet  alliage  parce  que  sa  densité  à   l'état  solide  concorde 


l33t  W.    ROBERTS.    FUSIBILITÉ,    LIQUÀTIOH 

très-sensiblement  avec  celle  de  ses  éléments  constituants. 

La  dilatation  cubique  pour  l'argent  pur  était  dans  la 
proportion  de  9,4^12  :  10  ^Sy. 

En  déduisant  le  coefficient  moyen,  soit  io5o  d^rés, 
nous  trouvons  o^oooi  11 64  pour  i  degré. 

Le  coefficient  de  dilatation  linéaire  est 

0| 00003721. 

Le  coefficient  moyen  de  dilatation  linéaire  de  Targenl 
entre  zéro  et  100  degrés  est,  suivant  diflerents  auteurs, 
0^0000201 5. 

On  voit  donc  que  la  dilatation  de  l'argent  entre  zéro 
et  io5o  degrés  est  à  peu  près  le  triple  de  ce  qu'elle  serait 
si  elle  avait  suivi  la  même  loi  pour  toutes  les  températures. 

Le  coefficient  moyen  de  dilatation  linéaire  de  l'alliage  de 
Levol,  jusqu'à  son  point  de  fusion,  déduit  des  densités 
données  par  le  tableau,  est  o,oooo37o3. 

Mais  il  est  impossible  de  le  comparer  avec  celui  qu'il 
donnerait  à  de  hautes  températures,  tant  que  ce  dernier 
n'aura  pas  été  observé  d'une  manière  positive. 


VOLUME 

initial 

du 
cône. 

VOLUME 

du  cône 
rempli 

de  métal 
fondu. 

TEM- 
PÉBATURF, 

du 

métal 

liquide. 

POIDS 

du 
métal. 

DENSITÉ 

du 

métal 

liquide. 

métal 
soHd«. 

Argent 
pur. 

co 

536,6 
542,9 

co 

556,3 
564,4 

I143** 
1223 

Moyei 

kg 

5 , 2554 

5,3483 

ine 

9,4468 

9*4757 
9,4612 

10,57 

Alliage 
deLevol. 


735,13 
537,42 


778,06 
557,25 


1020 
Il3l 


kg 
7,0624 

5,0334 


IMoyenne 


9,0788 
9,o32i 
9,o554 


9»9<45 

(Levol). 


ET    DENSITÉ    DE   CERTAINS    ALLIAGES.  l33 


ALLIAGES    d'or    ET    DE    CUIVRE. 


Malgré  Fimportance  scientifique  et  commerciale  des  al- 
liages d'or  et  de  cuivre,  peu  d'entre  eux  ont  été  jusqu'à 
présent  étudiés  au  point  de  vue  de  leur  densité. 

En  1873,  me  trouvant  à  Prague,  je  saisis  cette  occasion 
pour  faire,  avec  le  professeur  Zenger,  de  cette  ville,  une 
série  d'expériences  au  moyen  de  la  balance  à  tangente ^ 
quMl  venait  d'inventer,  et  pour  chercher  à  déterminer  les 
relations  de  densité  qui  existent  entre  les  différents  alliages 
d'or  et  de  cuivre. 

Les  alliages,  pesés  d'abord  dans  l'air,  l'étaient  ensuite 
dans  Teau  \  un  miroir  fixé  au  fléau  de  la  balance  permet- 
tait de  mesurer  Finclinaison  de  ce  fléau  par  le  déplacement 
d*un  rayon  lumineux  qui  l'accroissait  beaucoup  ;  mais  ces 
expériences  n'eurent  pas  de  suite,  la  méthode  ordinaire  de 
peser  nous  paraissant  plus  simple  et  plus  sûre. 

La  possibilité  de  déterminer  le  titre  d'un  alliage  d'or  et 
de  cuivre  par  Tobservation  de  la  densité  a  été  récemment 
discutée  par  M.  O.-G.  Broch,  professeur  de  Mathémati- 
ques à  Christiania,  qui  a  conclu  d'une  série  d'expériences 
consciencieuses  (  ^  )  que  l'erreur  probable  d'une  seule  ob- 
servation sur  un  poids  de  90  grammes  environ  pouvait  être 
de  ±  0,00 14- 

Une  différence  de  zh  0,001  dans  un  alliage  d'or  appro- 
chant de  900  correspond  à  une  différence  de  densité  de 
zb  0,0019.  La  limite  d'erreur  dans  la  constatation  de  la 
densité  de  ces  alliages  correspond  donc  à  une  erreur  de 
titre  de  7—77,  et  le  D"^  Broch  en  conclut  que  l'on  peut  dé- 
terminer la  différence  de  titre  de  deux  masses  de  monnaies 
d'or  et  de  cuivre  avec  une  approximation  de  77777,  en  les 
pesant  successivement  dans  l'air  et  dans  Feau. 

(*)  Norwegicm  Njrt,  Mag,  for  Natursk.  Christiania,  1876. 


1,1  1  W      BOUKUTS.    --    FUSIBILITÉ,    LIQUATION 

1,11  iirrMriM-c,  (laii.H  ces  alliages,  de  métaux  autres  que  Tor 
ri  \v  iiiivrr  nn  pn^  un^  grande  importance  tant  que  leur 
Jrniiilr  nu  dinï^n;  pas  sensiblement  de  celle  du  cuivre. 

Ainni,  ni  dniis  un  alliage  à  900  on  remplace  i  millième 
«lu  rnivrn  par  1  millième  d'argent,  la  densité  calculée  s'é- 
\it\v  lin  I7,i6ïj'2  à  17,1722,  ce  qui  correspond  à  une  élëva- 

lion  ili-  litnMlc  rjfTi' 

Il  ml  f;/ïnéralcmcnt  admis  que,  par  les  procédés  actuels 
irintHuI,  Terreur  possible  est  de  77777,  et  M.  Broch  af- 
lii-iiiif  (Hie,  par  la  simple  constatation  des  densités,  on  peut 
iliî|(4rniincr  le  titre  d'un  alliage  avec  une  approximation 

(!i!S  observations  du  D*^  Broch  ont  servi  de  point  de 
di^nart  à  des  recherclies  plus  étendues,  dont  Tobjct  était 
ilo  constater  la  dilatation  ou  la  contraction  causée  par  la 
riSntiioii  en  alliage  de  Tor  et  du  cuivre  purs,  car  on  sait 
i|ue  peu  d'alliages  possèdent  la  densité  qu'indiquerait  le 
rulcul,  d'après  celle  de  leurs  éléments. 

Calvert  et  Thomson,  qui  ont  déterminé  les  densités  de 
beaucoup  d'alliages  (^),  ont  constaté  dans  le  cours  de  leurs 
recherches  que  les  alliages  de  cuivre  se  contractent  tou- 
jours. Ils  ne  paraissent  pas  avoir  expérimenté  les  alliages  de 
l'or  et  du  cuivre;  mais^  en  l'absence  des  observations  pra-» 
tiques,  on  pouvait  supposer  ces  alliages  soumis  à  la  même 
loi.  Matthicssen  a,  en  effet,  démontré  que  les  alliages  d'or 
et  d'argent,  d'or  et  de  plomb,  ont  toujours  une  densité 
réelle  supérieure  de  o,3  à  1,8,  à  la  densité  calculée  (*). 

Plus  récemment,  M.  Alfred  Riche  a  constaté  que  les 
alliages  de  cuivre  et  d'étainse  contractent  légèrement  et  ré- 
gulièrement lorsqu'ils  contiennent  au-dessus  de 48  pour  100 
d'étaiii,  et  qu'à   partir  de  ce  titre  la  contraction  augmente 


(•)  P/iii,  Mag.,  t.  XVUI,  p.  354  j  1809. 
(•)  PhiL  Trans,.        177;  i85o. 


ET    DENSITÉ    DE    CERTAINS    ALLIAGES.  l35 

brusquement  et  atteint  son  maximumautitrede38pour  loo 
d'ëlain,  alliage  dont  la  densité  est  supérieure  à  celle  du 
cuivre  pur.  On  voit,  par  la  courbe  (^)  qui  représente 
ces  variations,  que,  si  certains  de  ces  alliages  se  contractent 
ou  se  dilatent  d'une  manière  extraordinaire^  les  autres  se 
divisent  en  trois  groupes,  dont  les  densités  varient  réguliè- 
rement suivant  leur  composition. 

Ainsi,  par  exemple,  dans  ces  alliages  de  cuivre  et  d'étain, 
pour  ceux  qui  contiennent  4'^,^  29  et  18  d'étaîn,  la  déter- 
mination des  densités  donnerait  sur  leur  composition  des 
renseignements  très-incertains,  et,  si  les  alliages  de  cuivre 
et  d'or  se  comportent  comme  ceux  de  cuivre  et  d^étain, 
toute  méthode  de  détermination  de  leur  composition,  par 
la  comparaison  de  leurs  densités,  perdrait  beaucoup  de  sa 
valeur. 

Dans  le  but  de  déterminer  si  ces  alliages  dW  et  de  cuivre 
se  comportent  de  la  même  manière  que  ceux  de  cuivre  et 
d'étain,  nous  avons  préparé  par  voie  de  fusion  avec  de  l'or 
pur  et  du  cuivre  pur  une  série  d'alliages  dont  nous  avons 
vérifié  les  titres  par  les  méthodes  ordinaires  d'essai.  L'or 
avait  été  purifié  parles  moyens  adoptés  pour  la  préparation 
de  l'or  étalon  des  essais  (')• 

Quant  au  cuivre  que  nous  avons  employé,  sa  grande 
conductibilité  électrique  nous  garantissait  sa  pureté 

Gomme  on  se  proposait  d'appliquer  à  l'essai  des  mon* 
naies  ce  procédé  de  détermination  des  titres  par  les  den- 
sités, il  a  paru  logique  d'examiner  une  série  d'alliages 
sous  forme  de  disques  comprimés  avec  la  même  pression 
entre  des  coins  gravés,  car  on  sait  que  la  densité  des  mé- 
taux est  sensiblement   modifiée    par  le  recrouissage^  la 


(*)  Nous  donnons  la  courbe  de  ces  densités  sur  la  même  planche  qui 
porte  (p.  iS;)  le  diagramme  des  densités  des  alliages  d'or  et  de  cuivre. 

(*)  Quatrième  Rapport  annuel  du  Directeur  de  la  Monnaie  de  Londres  y 
1872.  Appendice^  p.  /j6. 


(  ■ 


l36  W.  ROBEUTS.    —   FUSIBILITÉ,    LIQUATION 

densité  de  l'oï*  varie,  dans  ce  cas,  entre  19,258  et  199367, 
et  celle  du  cuivre  entre  8,535  et  8,916  (*). 

Pour  la  détermination  de  ces  densités,  on  a  employé  la 
méthode  ordinaire.  Une  cage  de  fil  de  platine  était  8iia<* 
pendue  par  un  très-mince  fil  de  platine  sous  Fun  des  plft*^ 
teaux  d'une  très-délicate  balance  d'essai  de  Oertling  qui,' 
avec  cette  charge,  restait  sensible  au  0^*^,00001. 

Le  flan  de  métal  placé  dans  le  plateau  supportant  la  cage 
de  platine  était  équilibré  au  moyen  d'une  tare  de  plomb 
placée  dans  loutre  et  un  curseur  du  poids  de  oS',ooi. 

On  remplaçait  alors  le  flan  lui-même  par  des  poids  mé^ 
triques  aj  ustés  avec  soin,  et  le  poids  da  flan  se  trouvait 
ainsi  déterminé  avec  la  plus  grande  exactitude.  Le  AftÉ.. 
placé  alors  dans  la  cage  de  platine  était  plongé  daeiè 
de  Teau  distillée  que  Ton  faisait  bouillir  pendant  un  ûtr^ 
tain  temps  et  que  Ton  plaçait  ensuite  sous  le  récipièitti^ 
d'une  machine  pneumatique.  '-*>. 

Le  vase  contenant  Teau  distillée  ainsi  bien  purgée  d^Av 
était  alors  replacé  sous  le  plateau  de  la  balance.  La  cagélijl^ 
platine  y  était  raccrochée  et  Ton  rétablissait  Téquilibre'^,^ 
moyen  de  poids  placés  dans  ce  plateau.  La  lempéralMUv  " 
de  Teau  était  soigneusement  notée  pendant  la  durée  de^lri^;, 
pesée.  '  '•^i^*^ 

Le  flan  soulevé  avec  des  pinces  jusqu'à  la  surface' '«|[{m^^ 
Teau,  on  constatait  alors,  en  rétablissant  l'équilibre  dé  Ufi'jj^x 
balance,  le  poids  du  liquide  déplacé  par  la  cage.  ^  'ilykl 

Le  tableau  suivant  donne  le  résultat  de  ces  ezpérieoifMlfv^^ 

^U 

■   ■     ■  ••    •  »M.-^i^^»     . 

(*)  Quatrième  Rapport  annuel  du  Directeur  [de  la  Monnaie ^  i^flm  •.^igi^'^^ 
pendice,  p.  46.  '  ."*-  •  -' 

:-^«^- 

■  '  .  '. 
.  -■.' 

■I 


/•■■ 


XX   DKMSITi    SB   CEBTÀINS    ALLIAGES.  l37 

Diagramme!  de*  demités  dei  alliagei  d'or  et  de  eulure 
et  de  caivre  et  d'ètaln. 


i38 


W.     ROBERTS.   FUSIBILITÉ,    LIQUATION 


DcTisUcs  des  alliages  cl  or  et  de  cuivre. 


830y5. . 


8Ci,4.. 

[\u*Cu.]- 


lio  la 
limaille. 


Titre. 
1 

1,000.. 

980, I . . 

968,8.. 

958,3.. 
9Î8,/|.. 


9.38,5.. 
[Au'Cu.]. 


933,0. . 


912,8.. 


900,5. . 
Au'Cu.\     f        >i 


18.787 
i8,8'|5 
i8,8i3 

18,719 
i8,C:îy 
i8,r».)i 

i8,5i.> 
i8,32G 
18, .'170 

i8,iiy 
i8,i3o 
iS, loi 

i7,7.,G 


/ 


Dcnsllc 

» 

i  I9»*^'8Î 
ij),3ioS 
i9,3u7 
].S,8iOi  j 
i8,83j)i  ' 
i8,83Ga  ) 

i8,58i3  j 
18,5778 
iS,5824  ) 

iS,35r)8  \ 
18,3571  V 
18,3557  ) 

18, I i5o 

18, I2l3 

i8,ii5G  ) 

i7>9'^^1 
17,9335 

17,9332 

i;,793j 
17,7807 

i7i79'l-^ 
i7,5G65  J 
17,5077  > 

« 7:^^99   ) 

17, iG32 
17.1670 
17,1 G5o 

16,8086 
i0,8o58 
ir>,8o.'|i 

16/1809 
i0,/,8|O 
16, 4848 


Moyenne. 
4 


18,83*^5 


I»  •n««iU' 
ralrulé.». 


DifTi' renée. 
6 


i9,3io3  i9,3oJo*        -+-o,oi83 


18, 8355  -i-o,oo3o 


i7,568oî    17,6087 


-0,0407 


CoefQcieni 
de  dilatatiuR 
cubiqne 


0,0000424  > 


0,0000 {270 


i8,58o')  i8,58oi  ho,  0001        0, 00004 'i8| 


18, 356?  i8,30û5         —0,0043        0,00004296 


18,1173  18,1378         — o,02o5        0.000043.KS 


ï7»9'^-'|0  17»  9301  -fo,oo39        o,  000043  ij) 


17,7911  17,7956  -  o,oo'|5        0,00004326 


o,  0000)337 


17,1653  17,1750  —0,0097        0,00004360 


i6,8ot)2  16,8047         H-o,ooi5        0,00004380 


16, 4832  i6,403o  -+-0,0202        0,00004% 


La  cinquième  colonne  contient  les  densités  des  alliages 
calculées  dans  riiypotlièse  que  la  combinaison  ne  donne- 
rail  lieu  à  aucun  changement  de  volume,  et  ces  résultats 
sont  représentés  par  une  courbe  dont  les  coordonnées  sonl 


ET  DENSITÉ  DE  CERTAINS  ALLIAGES.         1  Sp 

d'une  part  les  proportions  de  l'or  dans  Talliage  et  de 
l'autre  les  densités. 

Les  densités  moyennes  des  flàiis  trouvées  expérimentale- 
ment sont  marquées  d'un  astérique  (*)  et  concordent  com- 
plètement avec  les  nombres  donnés  parles  calculs,  ce  qui 
permet  de  supposer  qu'il  n'y  a  pas  de  changement  de 
volume  par  suite  de  l'alliage  des  deux  métaux. 

Les  proportions  d'or  dans  les  alliages  examinés  varient 
de  860  et  980  millièmes  :  dans  ces  limites  se  trouvent  com- 
pris tous  les  alliages  monétaires  connus  jusqu'à  ce  jour. 

Nous  voyons  par  ces  expériences  que  l'on  peut  déduire 
le  titre  des  monnaies^  d'or  de  leur  densité  et  que  cette 
méthode  permet  de  vérifier  rapidement  la  valeur  d'une 
quantité  considérable  de  pièces  d'or  sans  les  détruire,  ce 
qui  peut  être  d'un  certain  intérêt  pour  la  vériflcation 
des  deniers  de  bottes.  Ce  procédé  n^est  pas  d'une  aussi 
grande  exactitude  lorsqu'il  s'agît  de  déterminer  le  litre 
d*une  seule  pièce,  les  causes  d'erreurs  ayant  plus  d'impor- 
tance pour  les  petites  masses  que  pour  les  grandes. 

il  n'est  pas  probable  que  les  alliages  soient  à  leur 
maximum  de  densité  lorsqu'ils  sont  sous  forme  de  flans 
comprimés,  car  on  sait  que  l'or  atteint  ce  maximuni 
lorsqu'il  est  précipité  de  dissolutions  à  l'état  très-divisé. 
Aussi,  dans  la  suite  de  ces  expériences,  avons-nous  em- 
ployé, d'après  les  indications  de  M.  Riche,  nos  alliages  à 
l'état  de  limaille. 

Cette  méthode  a  l'avantage  de  supprimer  les  erreurs 
provenant  des  cavités  qui  se  trouvent  dans  les  lingots 
fondus  et  des  différences  de  composition  intérieure. 

Un  grand  nombre  de  déterminations  ont  été  faites  dans 
ces  conditions,  mais  il  nous  a  été  impossible  d'obtenir  des 
résultats  concordants*,  quelques-uns  des  résultats  aind 
obtenus  sont  mentionnés  dans  la  seconde  colonne  de 
notre  tableau,  mais  ils  ne  sont  pas  satisfaisants,  et  nous 
n'avons  pas  poursuivi  ce»  expériences  pour  les  alliages 
au-dessus  des  938,5,  point  où  les   différences  entre  les 


l4o  ▲.    BARTHÉLElfY. 

densités  calculées  et   les  densités  expérimentales   com- 
mencent à  devenir  trop  considérables. 

Nous  exécutons  en  ce  moment  les  déterminations  des 
densités  d'une  série  complète  d'alliages  *,  mais,  sauf  le  cas 
de  quelque  déviation  irès-considérable  poursuivie  dans 
Iqs  parties  de  la  courbe  qui  restent  à  examiner,  nous 
croyons  que  Ton  peut  considérer  nos  résultats  comme  défi- 
nitifs et  concluants,  au  moins  dans  la  pratique. 


«%%%%%%%  WV%«i%%»%%%%%VX-\%%%«>%%V 


DE  U  RESPIRATION  DES  PLANTES  AQUATIQUES  SDBHERGÉBS  ; 

Par  m.  a.  BARTHÉLÉMY, 

Professeur  de  Physique  au  lycée  de  Toulouse,  Docteur  es  sciences. 


La  respiration  des  plantes  aquatiques  submergées  a  été 
jusqu^ici  peu  étudiée.  Les  quelques  physiologistes  qui  s'en 
sont  occupés  ont  tous  pris  pour  preuve  et  pour  mesure  de 
cette  respiration  les  bulles  gazeuses  que  ces  plantes  rejettent 
lorsqu'elles  sont  exposées  au  soleil.  Pour  recueillir  et 
analyser  ces  gaz,  on  place,  avec  MM.  Cloëz  et  Gratiolet, 
les  plantes  dans  une  cloche  pleine  d^eau,  dressée  sur  un 
réservoir  et  exposée  au  soleil. 

Les  résultats  ainsi  obtenus  sont  assez  dénués  de  vrai- 
semblance pour  que  les  auteurs  eux-mêmes  ne  les  aient 
donnés  qu'en  introduisant  certaines  réserves.  C'est  d*abord 
la  présence  de  Tazote  qu'on  attribue  à  la  décomposition  de 
la  plante,  bien  quMl  soit  soui^ent  en  quantité  phis  grande 
que  la  substance  de  la  plante  parait  en  contenir,  puis  le 
grand  volume  de  gaz  rejeté,  2  litres  en  dix  heures  dans 
Texpérience  de  MM.  Cloëz  et  Gratiolet,  et  qui  ferait  de 
cette  respiration  une  des  fonctions  les  plus  actives  du  règne 
4>rganique.  11  est  constant  aussi  pour  les  mêmes  auteurs 
que  les  gaz  en  dissolution  dans  Teau,  et  l'azote  lui-même^ 
sont  nécessaires  au  phénomène. 

Dès  mes  premières  recherches  sur  ce  sujet,  recherches 
qui  datent  de  plusieurs  années,  je  me  suis  demandé  si  ces 


HESPIRATIOn  DBS    PLANTES    AQrATIQOBS.  l4l 

dégagements  gazeux  considérables  avaient  réellement  une 
origine  physiologique  et  n'étaient  pas  provoqués  par  Fex- 
périence  èlle-méme. 

Voici  les  principales   expériences  qui   me    paraissent 
propres  à  élucider  la  question. 

1°  Dans  une  mare  assez  profonde  dont  le  fond  est  garni 
de  plantes  aquatiques  {Polamogeton,  Nayas,  etc.),  je  fais 
descendre  une  cloche  dont  le  bord  est  garni  de  trois  pointes 
destinées  à  maintenir  l'ouverture  au-dessus  du  fond  ;  la 
cloche  étant  entièrement  submergée,  la  température  de 
l'eau  de  la  cloche  est  celle  du  liquide  ambiant,  la  pression 
n'est  point  modifiée,  et  les  plantes  restent  soumises  aux  in- 
fluences naturelles.  Or,  dans  ces  conditions,  on  n'a  trouvé 
au  bout  de  cinq  jours  que  quelques  bulles  gazeuses  qui 
étaient  de  Fazote  presque  pur.  Une  autre  cloche,  dans  une 
mare  voisine,  est  restée  un  mois  en  place  et  n'a  présenté  au 
bout  de  ce  temps  que  a  ou  3  centimètres  cubes  de 
gaz,  bien  que  les  plantes  aient  atteint  dans  un  espace  de 
temps  un  volume  considérable. 

a^  Une  cloche  pleine  d'eau  est  maintenue  soulevée  sur 
des  Polamées,  de  telle  sorte  que  les  plantes  restent  au- 
dessous  du  niveau  extérieur  du  liquide,  tandis  que  la  partie 
supérieure  de  la  cloche  est  frappée  par  les  rayons  du  soleil. 
Alors  sur  les  parois  intérieures  de  la  cloche  se  produisent 
des  bulles  gazeuses  qui  finissent  par  se  détacher  ;  en  même 
temps  quelques  bulles  apparaissent  sur  les  feuilles  supé- 
rieures des  plantes  aquatiques,  sans  qu'on  puisse  dire  si 
elles  proviennent  de  la  plante  ou  du  liquide.  Le  phénomène 
s'arrête,  d'ailleurs,  bientôt. 

3°  Dans  une  partie  de  la  mare  moins  profonde,  on  dis- 
pose une  cloche  pleine  d'eau,  de  manière  que  les  plantes 
aquatiques  s'élèvent  dans  l'intérieur  de  la  cloche  au-dessus 
du  niveau  extérieur,  et  qu'on  retrouve  dans  les  conditions 
des  expériences  de  MM.  Cloëz  et  Gratiolet.  Un  thermo* 
mètre  plongé  dans  le  liquide  indique  une  élévation  rapide 
de  température,  et  l'on  voit  apparaître  sur  toute  la  surface 


l42  A.    BAUTBéLEMT. 

de  la  plante  des  bulles  grosses  au  sommet  de  la  plante, 
plus  petites  en  bas,  et  qui  cessent  de  se  produire  un  peu 
au-dessous  du  niveau,  tout  le  long  d'un  plan  horizontal.  A 
partir  de  ce  moment  des  chapelets  de  bulles  gazeuses 
s'élèvent  de  toutes  les  parties  des  plantes,  de  Faisselle  des 
feuilles,  des  fentes  du  parenchyme,  des  parties  mortes 
situées  au-dessus  du  niveau  d'équilibre. 

Si  on  laisse  les  plantes  aquatiques  dans  cette  situation, 
elles  meurent  et  disparaissent  peu  à  peu,  tandis  qu'une 
quantité  considérable  de  conferves  se  développent  et  enva- 
hissent toute  la  cloche  sous  forme  d'une  masse  rougeâtre, 
gorgéedebulles  gazeuses  formées  d'acide  carbonique,  d'azote 
et  d'oxygène. 

Transportées  dans  une  cuve  pleine  d'eau  distillée,  les 
PotaméesetlesiV//yrt5  nedonnent  que  quelques  centimètres 
cubes  de  gaz,  les  Yalisnéries  en  donnent  moins  encore. 
L'addition  d'acide  carbonique  dissous  ne  fait  que  hâter 
leur  décomposition. 

Comment  ne  pas  voir  dans  ces  dégagements  gazeux  l'effet 
combiné  d'une  diminution  brusque  de  pression  et  d'une  élé- 
vation rapide  de  température  sur  les  gaz  dont  sont  gorgées 
les  plantes  aquatiques,  dont  les  feuilles,  la  tige  et  même  les 
racines  sont  creusées  de  canaux  ou  de  cavités  cloisonnées 
à  vastes  méats?  El  peut-on  appeler  physiologique  une  exha- 
lation gazeuse  qui  ne  s'effectue  que  dans  des  conditions  ex- 
ceptionnelles et  sans  organes  déterminés  ? 

J'ai  puisé  pendant  plusieurs  jours  les  g«iz  ainsi  dégagés, 
en  ayant  soin  de  ne  pas  soumettre  les  plantes  à  une  succion 
trop  prolongée  et  de  ne  recueillir  chaque  fois  que  lo  cen- 
timètres cubes  de  gaz.  Le  premier  jour  j'ai  trouvé  gi  pour 
ICO  d'azoîe^  ledeuxième  jour  85  ;  le  troisième  jour  la  pro- 
portion d'oxygène  était  montée  à  20  pour  100;  le  quatrième 
jour  elle  est  de  28  à  3opour  100  et  reste  sensiblement  dans 
ces  limites  pendant  les  trois  jours  qui  suivent. 

La  plante  étant  restée  au  repos  pendant  huit  jours  el 
n'ayant,  pendant  ce  temps,  dégagé  que  des  traces  de  gaz, 


RESPIRATION    DES    PLAINTES    AQUATIQUES.  l43 

une  nouvelle  succion  m'a  ramené  à  la  proportion  de 
95  pour  100  d'azote. 

Il  semble  résulter  de  ces  e?cpér5enccs  que  les  plantes 
aquatiques  observées  dans  leur  milieu  naturel  et  à  l'état 
normal  ne  rejettent  pas  de  gaz,  même  au  soleil,  pas  plus 
que  les  animaux  aquatiques,  et  que  les  dégagements  que 
l'on  a  observés  jusqu'ici  sont  provoqués  par  l'expérience 
et  dus  à  l'atmosphère  gazeuse  intérieure. 

Pour  nous,  le  véritable  acte  respiratoire  dans  les  plantes 
aquatiques  consiste  dans  Tabsorpiion  de  l'air  en  dissolution 
dans  l'eau,  probablement  par  les  racines  qui  sont  gorgées 
de  gaz  formés  de  3o  à  36  pour  100  d'oxygène.  Cet  air 
remplit  les  cavités  de  la  plante,  de  sorte  que  l'oxygène  est 
absorbé  par  la  plante  ou  diiïusé  dans  le  liquide  extérieur, 
et  la  proportion  d'azote  est  d'autant  plus  grande  que  la  cir- 
culation de  cet  air  a  été  moins  active. 

Quant  à  la  respiration  chlorophyllienne  ou  cuticulaire, 
on  ne  peut  la  constater  que  par  l'étude  des  échanges  de 
substances  gazeuses  dissoutes  entre  la  surface  verte  et  le  li- 
quide ambiant.  C'est  là  une  question  difficile,  qui  m'occupe 
depuis  longtemps  et  qui  demande  encore  de  nouvelles 
études* 


*x%*\%'»\%\%\^*\^\>*%x*\%'%*\*\\ 


GRAVURE  SIR  VERRE  PAR  L'ÉLECTRICITÉ; 

Par  m.  planté. 


J'ai  décrit  précédemment  une  expérience  dans  laquelle  un  tube 
de  verre,  traversé  par  un  fil  de  platine  servant  d'électrode  à  un 
puissant  courant  vol  laïque,  se  trouve  creusé  instantanément  en 
forme  de  cône  ou  d'entonnoir,  au  sein  d*un  vollamètre  conte« 
nant  une  solution  saline.  Dans  d'autres  expériences  sur  les  effets 
lumineux  produits  par  un  courant  de  forte  tension,  au  contact 
de  réiectrode  positive  ou  négative  avec  les  parois  d'un  vase  en 
verre  ou  en  cristal,  humecté  d'une  solution  de  sel  marin,  j'ai  eu 
l'occasion  d'observer  que  le  verre  ou  le  cristal  était  fortement 
attaqué  aux  points  touchés  par  l'électrode,  et  que  les  anneau 


l44    G-  PLAHTÉ. —  GRAVURE  SUR  VBRRE  PAR  L^ÉLECTRICITÉ. 

lumineux  concentriques,  formés  tout  autour,  restaient  quelque- 
fois gravés  à  la  surface  du  verre  du  voltamètre.  En  employant, 
comme  solution  saline,  de  l'azotate  de  potasse,  il  fallait  une  force 
électrique  beaucoup  moindre  qu'avec  le  chlorure  de  sodium  ou 
d*autres  sels,  pour  produire  ces  effets. 

Ces  observations  m'ont  conduit  à  appliquer  le  courant  élec- 
trique à  la  gravure  sur  verre  ou  sur  cristal.  On  recouvre  la  sur- 
face d*une  lame  de  verre  ou  d'une  plaque  de  cristal  avec  une 
solution  concentrée  de  nitrate  de  potasse,  en  versant  simplement 
le  liquide  sur  la  plaque,  posée  horizontalement  sur  une  table  ou 
dans  une  cuvette  peu  profonde.  D'autre  part,  on  fait  plonger, 
dans  la  couche  liquide  qui  recouvre  le  verre,  et  le  long  des  bords 
de  la  lame,  un  fil  de  platine  horizontal,  communiquant  avec  les 
pôles  d'une  batterie  secondaire  de  5o  à  60  éléments;  puis,  tenant 
à  la  main  l'autre  électrode  formée  d'un  iil  de  platine  entouré, 
sauf  à  son  extrémité,  d*un  étui  isolant,  on  touche  le  verre,  re* 
couvert  de  la  couche  mince  de  solution  saline,  aux  points  où  l'on 
veut  graver  des  caractères  ou  un  dessin. 

Un  sillon  lumineux  se  produit  partout  011  touche  l'électrode, 
et,  quelle  que  soit  la  rapidité  avec  laquelle  on  écrive  ou  l'on  des- 
sine, les  traits  que  l'on  a  faits  se  trouvent  nettement  gravés  sur  le 
verre  (').  Si  l'on  écrit  ou  si  Ton  dessine  lentement,  les  traits  sont 
gravés  profondément;  quant  à  leur  largeur,  elle  dépend  du 
diamètre  du  fil  servant  d'électrode;  s'il  est  taillé  en  pointe,  ces 
traits  peuvent  être  extrêmement  déliés. 

On  peut  graver  avec  l'une  ou  l'autre  électrode;  il  faut  toute- 
fois un  courant  moins  fort  pour  graver  avec  l'électrode  négative. 
Bien  que  j'aie  obtenu  ces  résultats  en  faisant  usage  de  batte- 
ries secondaires,  il  est  clair  qu'on  peut  employer  de  préférence, 
pour  un  travail  continu,  toute  autre  source  d'électricité,  de 
quantité  et  de  tension  suffisantes,  soit  une  pile  de  Bunsen  d'un 
assez  grand  nombre  d'éléments,  soit  une  machine  de  Gramme  ou 
même  une  machine  magnéto-électrique  à  courants  alternative- 
ment positifs  et  négatifs. 


(  *  )  Oa  a  si  souvent  besoin  d'écrire  ou  de  marquer  des  traits  sur  le  verre 
dans  les  laboratoires  que  ce  procédé  y  trouvera  de  fréquentes  applications. 


K.    PICTET.    LIQUÉFACTIOR    DE   l' OXYGÈNE.         l45 

MÉMOIRE  SUR  LA  LIQUÉFACTION  DE  L'OXYGÈNE, 

LA  LIQUÉFACTION  ET  LA  SOLIDIFICATION  DE  l' HYDROGENE, 
ET  SUR  LES  THÉORIES  DES  CHANGEMENTS  d'ÉTAT  DES 
CORPS  ; 

Par  m.  Raoul  PICTET. 


Afin  de  rendre  la  lecture  de  ce  Mémoire  plus  facile,  nous 
l'avons  partagé  en  six  Chapitres,  traitant  chacun  un  sujet 
spécial  de  cette  étude. 

Le  Chapitre  I"  est  consacré  aux  Considérations  géné^ 
raies.  Nous  y  développons  le  but  de  ce  Mémoire  et  les  lois 
physiques  relatives  au  changement  d'état  des  corps. 

Le  Chapitre  II  contient  la  Description  des  appareils 
employés* 

Le  Chapitre  III  relate  les  Expéiiences  elles-mêmes. 

Le  Chapitre  lY  est  affecté  aux  calculs  pour  la  réduction 
des  observations  :  détermination  de  la  densité  de  Toxygène 
liquide^  des  températures  minima  et  des  tensions  maxima 
des  vapeurs  de  l'oxygène  liquide. 

Le  Chapitre  Vest  consacré  à  Y  Hydrogène. 

Le  Chapitre  YI  donne  les  Conclusions  que  l'on  peut  tirer 
de  ces  expériences  et  de  ces  résultats. 

I.  —  GoirsiDiRATioirs  générales. 

Tous  les  phénomènes  de  la  chaleur  ont  été  révélés 
primitivement  à  Fhomme  par  l'intermédiaire  du  sens  du 
toucher. 

L'impression  de  froid  et  de  chaud,  née  de  la  modalité 
particulière  des  sensations  tactiles,  a  été  tout  d'abord  attri- 
buée â  un  fluide  spécial,  le  phlogisfique,  ou  la  chaleur, 
répandu  dans  tous  les  corps  à  un  degré  différent.  Cette 
théorie,  admise  pendant  tant  de  siècles,  était  le  pendant  des 
liypothèses  alors  en  vogue  sur  la  lumière  et  devait,  presque 

j4nn,  de  Chim.ee  dePkys.,  5«8érie,  t.  XIH.  fFévriep  1878.)  lO 


l46  R.    PICTET. 

forcement,  découler  de  l'esprit  plutôt  analytique  qui  gui- 
dait  la  Science  à  cette  époque. 

Mais,  peu  à  peu,  plusieurs  catégories  de  phénomènes 
furent  rangées  dans  le  chapitre  de  la  chaleur,  bien  que  le 
sens  du  toucher  fût  complètement  exclu  de  Tétude  de  ces 
manifestations  calorifiques.  La  calorimétrie  prit  naissance, 
ainsi  que  l'étude  du  changement  d'état  des  corps.  Le  nom 
de  chaleur  latente  ou  insensible  est  encore  resté  dans  la 
littérature  scientifique,  et  précise  bien  cette  phase  particu- 
lière par  laquelle  a  passé  l'esprit  hamain. 

La  route  nouvelle,  ouverte  aux  investigations,  ne  tarda 
pas  à  faire  apparaître  un  champ  tellement  fertile  en  décou- 
vertes de  toutes  espèces,  qu'on  peut  affirmer  que  toutes  les 
connaissances  humaines  en  ont  profité. 

La  Théorie  mécanique  de  la  chaleur,  qui  en  est  sortie 
de  toute  pièce,  est  une  œuvre  immense,  où  la  Philosophie, 
autant  que  la  Physique  et  la  Chimie,  ont  trouvé  une  abon- 
dante moisson  de  faits,  d'explications,  de  rapprochements 
qui  ont  éclairé  d'une  vive  lumière  le  chaos  dans  lequel 
tâtonnaient  les  chercheurs  d'autrefois^ 

Cette  grandiose  découverte  consiste  à  supprimer  complè- 
tement le  phlogistique  ou  la  chaleur  en  elle-même  et  à  la 
remplacer  par  le  mouvement  des  particules  constituantes 
des  corps.  L'étude  de  la  chaleur  est  'devenue  l'étude  du 
mouvement  :  mouvements  intimes  d'atomes,  de  molécules 
invisibles,  que  le  microscope  ne  saurait  distinguer,  mais 
que  l'on  prouve  aujourd'hui  et  démontre  d'une  manière 
aussi  saisissante  que  si  on  les  voyait  directement. 

Le  terrain  de  la  lutte  s'est  ainsi  complètement  déplacé, 
et  l'étude  de  la  constitution  des  corps  est  devenue  une  con- 
dition essentielle  de  l'étude  de  la  chaleur.  Ces  deux  cha- 
pitres sont  inséparables  et  doivent  se  traiter  ensemble. 

La  Théorie  des  gaz,  telle  qu'elle  a  été  admirablement 
développée  par  M.  Clausius,  est  un  des  résultats  les  pins 
remarquables  et  les  plus  directs  de  ce  progrès  scienti- 
fique. 


LlQUÉFACTIOlî    DE    l'oXYGÈNE.  14/ 

Le  but  que  nous  poursuivons  dans  ce  Mémoire  est  de 
nous  servir  de  la  Théorie  mécanique  de  la  chaleur,  devenue 
classique  aujourd'hui  y  pour  expliquer  quelques  phénoi- 
mènes  anomaux  ou  semblant  tels,  qui  paraissent  plus  ou 
moins  contradictoires,  soit  avec  les  lois  générales  de  la  Phy- 
sique, soit  avec  la  théorie  de  M.  Clausius,  et  deles  ramener, 
par  la  méthode  expérimentale,  à  des  phénomènes  de  même 
nature  ne  créant  aucune  exception  aux  lois  précitées. 

ÂGn  d'établir  la  question  d'une  manière  bien  précise, 
nous  allons  décrire  en  quelques  mots  les  phénomènes  que 
nous  visons. 

Presque  tous  les  corps  connus  sont  susceptibles  de  passer 
par  les  trois  élats  :  gazeux,  liquide  et  solide. 

Pour  un  même  corps,  ces  trois  états  exigent  des  tempé- 
ratures différentes  :  l'état  solide  correspond  à  la  tempé- 
rature la  plus  basse,  l'état  liquide  à  une  température 
plus  élevée  et  l'état  gazeux  à  une  température  supérieure 
encore. 

On  admet,  en  conséquence,  que  les  particules  consti- 
tuantes des  corps,  appelées  molécules  et  atomes^  s'attirent 
entre  elles  et  tendent  à  se  rapprocher,  mais  qu'une  force 
opposée  résiste  à  cette  tendance  et  lutte  contre  cette  attrac- 
tion. Cette  force  serait  le  mom^ement  calorifique,  et  ce 
mouvement  est  en  rapport  avec  la  température. 

Cette  loi  générale  implique  l'idée  que  tous  les  corps, 
sans  exception,  sont  constitués  d'une  manière  analogue 
et  que  toutes  les  particules  constituantes  sont  soumises 
aux  forces  de  la  cohésion  et  du  mouvement  de  la  cha- 
leur. 

On  peut  déduire  de  là  que,  si  la  chaleur  diminue  de  plus 
en  plus  dans  un  corps  gazeux,  la  cohésion  moléculaire 
l'amènera  forcément  à  l'état  liquide  et  solide;  sans  quoi 
l'hypothèse  de  la  généralité  de  la  loi  serait  fausse. 

M.  Régna ult,  dans  ses  mémorables  expériences  sur  la 
compressibilitédes  gaz,  a  mis  en  lumière  un  point  impor- 
tant :  toutes  les  vapeurs  comprimées,  lorsqu'elles  arrivent 

10. 


l48  R.    PIGTET. 

près  du  point  de  leur  liquéfaction,  se  compliment  plus  que 
ne  rindique  la  loi  de  Mariotte  et  de  Gay-Lussac,  loi  qui 
s'applique  à  un  gaz  idéal  absolument  parfait. 

Ce  résultat  montre  évidemment  que  les  forces  molécu- 
laires, soit  la  cohésion,  s'ajoutent  à  la  pression  pour  rap- 
procher encore  les  molécules  libres  qui  pénètrent  dans 
leur  sphère  d'attraction  et  vont  se  précipiter  en  gouttelettes 
liquides. 

Toutes  les  vapeurs  des  liquides  connus,  depuis  les  va* 
peurs  de  mercure,  celles  de  Teau,  de  Talcool,  de  Tacide 
sulfureux,  de  Tacide  carbonique,  subissent  la  même  in- 
fluence; toutes,  elles  se  compriment  plus  que  ne  le  ferait 
un  gaz  parfait. 

Seuls,  les  gaz  appelés  permanents  échappent  à  cette 
altération  spéciale  aux  vapeurs,  nommées  ainsi  par  oppo- 
sition aux  gaz  parfaits. 

Us  éprouvent  même  une  altération  inverse  sous  raction 
de  fortes  pressions,  c'est-à-dire  qu'ils  se  compriment  moins 
que  ne  le  voudrait  la  loi  de  Mariotte  et  de  Gay-Lussac. 

M.  Regnault  a  montré  que  l'hydrogène  en  particulier 
se  comprime  passablement  moins  que  l'azote  et  Toxygène  ; 
les  deux  derniers  gaz  suivent  presque  ab^lunient  la  loi  de 
Mariotte  avec  des  écarts  extrêmement  faibles  pour  des 
pressions  de  3o  et  5o  atmosphères. 

Si  Ton  appelle  cov^olume  d'une  vapeur  la  différence  que 
Ton  observe  entre  son  volume,  sous  une  pression  et  une 
température  données,  et  le  volume  qu'elle  devrait  occuper 
si  la  loi  de  Mariotte  et  de  Gay-Lussac  était  rigoureusement 
exacte,  on  trouve  que  le  covolume  des  vapeurs  est  toujours 
positif,  tandis  que  celui  des  gaz  permanents  est  presque 
nul  ou  négatif. 

En  se  basant  sur  ces  résultats  et  admettant  la  théorie  de 
M.  Clausius  sur  la  constitution  des  gaz  et  des  vapeurs,  on 
est  appelé  à  reconnaître  que  certaines  molécules,  bien  que 
rapprochées  considérablement  les  unes  des  autres,  tendent 
plutôt  à  se  repousser  qu'à  s\ittirer^  puisque  la  pression 


LIQUÉFACTION    DE    L^OXYGÈNE.  l49 

augmente  plus  vite  que  le  calcul  ne  Tindique,  dans  Thypo- 
thèse  où  ]a  cohésion  serait  nulle. 

Pour  une  différence  de  volume  de  moitié,  c'est-à-dire  en 
comprimant  une  masse  gazeuse  dont  le  volume  est  i  et  la 
réduisant  à  un  volume  égal  à  1,  pour  les  gaz  permanents 
la  pression  a  plus  que  doublé,  pour  les  vapeurs  elle  reste 
inférieure  au  double  de  la  pression  initiale. 

Il  est  évident  que  ces  résultats  sont  un  puissant  argu- 
ment en  faveur  de  la  non-généralité  de  la  cohésion  y  qui  ne 
serait  qu'une  force  accidentelle  ou  spéciale  à  certains  corps 
et  pourrait  même  être  remplacée  dans  quelques  cas  par  une 
force  répulsive  et  opposée, 

M.  Natterer,  professeur  de  Physique  à  Vienne,  a  voulu 
déterminer  expérimentalement  jusqu'où  Ton  peut  com- 
primer les  gaz  appelés  permanents  et  quelle  est,  au  point 
de  vue  des  volumes,  Tinfluence  de  pressions  colossales  pou- 
vant atteindre  presque  3ooo  atmosphères.  Il  espérait  ob- 
tenir, par  l'intermédiaire  de  cette  puissance  gigantesque,  un 
changement  d'état,  à  cause  du  rapprochement  considérable 
des  molécules  gazeuses. 

Si  la  cohésion  des  molécules  gazeuses  eût  été  tant  soit 
peu  appréciable,  il  est  certain  à  première  vue  que  ce  chan- 
gement d'état  devait  s'opérer. 

Voici  quelques  chiffres  obtenus  par  M.  Natterer  dans 
ses  expériences,  faites  en  i854,  à  la  suite  des  observations 
recueillies  par  M.  Regnault. 

Hydrogène,  oxygène  et  azote.  '—  M.  Natterer  a  com- 
primé rhydrogène,  l'oxygène  et  Tazote  de  la  pression 
atmosphérique  jusqu'à  une  pression  de  2790  atmosphères. 
Il  réglait  ses  observations  de  la  manière  suivante  : 

Dans  le  même  espace  clos,  il  introduisait  progressive- 
ment des  volumes  égaux  d'hydrogène,  par  exemple  10  vo- 
lumes égaux  au  volume  initial.  Un  manomètre  spécial  et 
très-sensible  indiquait  la  pression  correspondante. 

Dans  le  tableau  suivant,  la  première  colonne  indique 
les  volumes  de  gaz  comprimés  dans  le  volume   primitif, 


i5o 


K.    PICTET. 


la  seconde  colonne  donne  les  pressions  observées  en  atmO' 
spbères,  et  la  troisième  les  différences  de  ces  pressions. 


HYDROGÊNE. 

OXTGÈHB. 

AZOTE. 

Yolam. 

Atmosph. 

^ — "^ 
Dur. 

Yolain. 

Atmosph. 

Diir. 

Volnm. 

Atmosph. 

MIT. 

0 

0 

0 

0 

0 

0 

* 

8 

8 

8 

7 

7 

' 

5 

5 

5 

i8 

18 

'7 

'7  1 

i5 

i5 

38 

38 

10 

• 

27 

#   1 

27  : 

.0 

35 

35 

10 

68 

68 

)    r^ 

,57 

.57 , 

7^ 

75 

78 

78 

Î    '" 

167 

167  1 

10 

85 

85 

10 

138 

i34 

337  • 

333  1 

t 

335 

340 

i38 

146 

13 

337 

243 

II 

335 

353 

13 

338 
348 

274 

387 

i3 

277 
387 

387 
298 

1 
II 

375 

385 

3o6 

331 

i5 

358 

438 

16 

357 

383 

T  *\ 

355 

444 

368 

454 

367 

494. 

12 

365 

466  ^ 

33 

418 
438 

539 
556 

!■' 

417 
427 

463 
479  - 

16 

4i5 
435 

600 
63o 

3o 

458 
468 

608 

637 

19 

457 
467 

539 
563 

24 

455 
465 

729  i 

764 

35 

488 

665 

\      . 

487 

614 

1 

A  ■■ 

485 

84o 

#  _ 

498 

685 

30 

497 

641 

27 

495 

883 

4a 

538 

775 

1  24 

537 

764  j 

36 

535 

1095 

;  ^ 

548 

799 

547 

800 

oyj 

545 

1159  : 

598 

930 

38 

597 

lOIO 

46 

595 

i546 

94 

608 

958 

607 

io56 

6o5 

i64o  : 

668 

ii34 

j  3o 

647 

1384  , 

1 

646 

3046 

678 

1164 

657 

i354 

70 

655 

3i56 

1,0 

768 

1434 

h. 

675 

3394 

laS 

768 

1471 

685 

3533 

838 
838 

1701 
1741 

40 

695 
7o5 

3654 
2790 

i36 

878 

1904 

44 

888 

1948 

908 

3o44 

hi 

918 

3098 

948 

3377 

P4/V 

958 

3347 

70 

978 

35o5 

89 

988 

3594 

998 

3689 

!  ,., 

1Q08 

2790 

101 

LIQUÉFACTION    DE   l'oXYGÈNE.  l5i. 

Nous  mettons  en  regard  les  trois  gaz  observés  ;  Toxygène 
ne  monte  que  jusqu'à  une  pression  de  i354  atmosphères, 
limites  supérieures  obtenues  pour  ce  corps. 

Le  tableau  précédent  prouve  d'une  manière  évidente  que 
la  loi  de  Mario tte  est  absolument  fausse  dès  que  l'on  dé- 
passe une  pression  de  loo  atmosphères,  cela  pour  les  trois 
gaz  étudiés. 

Pour  les  pressions  relativement  modérées,  c'est  l'oxygène 
qui  suit  le  plus  exactement  la  loi  de  Mariotte,  mieux  que 
Thydrogène.  Par  contre,  aux  pressions  supérieures  les 
écarts  s'accentuent  très-nettement,  et,  lorsque  l'on  a  com- 
primé 657  volumes  d'oxygène,  la  pression,  qui  devrait 
théoriquement  être  de  607  atmosphères,  est  égale  à  i354  at- 
mosphères, c'est-à-dire  plus  que  double. 

Dans  les  mêmes  conditions,  l'hydrogène  présente  une 
pression  de  iio4  atmosphères  et  l'azote  de  ai 56.  On  voit 
par  ces  chiffres  que  les  molécules  gazeuses  doivent  se  re* 
pousser  SL\ec  une  énergie  considérable,  puisque  10  volumes 
d'oxygène  amènent  une  augmentation  de  70  atmosphères 
et  de  110  pour  l'azote. 

Ces  résultats,  traduits  par  une  courbe  dont  les  abscisses 
représentent  les  volumes  comprimés  et  les  ordonnées  les 
pressions  correspondantes,  indiquent  une  tendance  mani- 
feste vers  une  limite  de  compressibilité  qu'il  n'est  pas  pos- 
sible de  dépasser.  Cette  limite  correspond  au  point  où  la 
courbe  devient  asymptotique  à  l'ordonnée  verticale.  Alors, 
pour  une  très-petite  augmentation  dans  la  quantité  de  gaz 
introduite  dans  le  volume  primitif,  la  pression  augmente 
d'une  quantité  infinie. 

C'est  ce  qui  doit  arriver  probablement  quand  on  a  amené, 
par  le  seul  fait  de  la  compression,  les  molécules  du  gaz  au 
contact  absolu.  Les  espaces  intermoléculaires  devenant 
nuls,  toute  4iiniiiution  de  volume  est  impossible,  à  cause 
deV impénétrabilité  de  la  matière. 

Ces  considérations,  appuyées  sur  des  faits  irrécusables, 


i5a 


R.    PICTET. 


semblent  donc  infirmer  d^une  façon  sérieuse  la  généralité 
de  la  cohésion. 

Il  semblerait,  d'après  ces  expériences,  ainsi  que  Tex- 
plique  M.  Clausius,  que  la  cohésion  moléculaire  pour  tous 
les  gaz  permanents  serait  nulle  et  que  les  écarts  de  la  loi 
de  Mariotte,  tels  que  nous  venons  de  les  exposer^  auraient 
pour  cause  essentielle  le  volume  matériel  des  molécules  et 
des  atomes,  leur  épaisseur  ou  leur  diamètre . 

Dans  les  vapeurs,  au  contraire,  la  cohésion  exercerait  de 
suite  son  action,  même  sous  de  faibles  pressions,  ce  qui 
motiverait  l'écart  en  sens  inverse  que  l'on  observe  en  com- 
parant les  vapeurs  et  les  gaz  permanents. 

Ce  sont  essentiellement  ces  phénomènes  et  ces  explica- 
tions, basées  sur  les  expériences  de  MM.  Regnault  etNat- 
terer,  et  la  théorie  de  M.  Clausius,  que  nous  désirons 
étudier  plus  à  fond,  et  cela  en  nous  servant  d'un  travail 
précédent  relatif  aux  rapports  qui  existent  entre  les  diffé- 
rentes propriétés  physiques  et  chimiques  des  liquides  vo- 
latils ('). 

Mous  avons  démontré  dans  le  travail  dont  il  s'agit  que, 
pour  une  même  température,  la  cohésion  de  tous  les  li» 
guides  est  la  même^  c'est-à-dire  que  les  forces  molécu- 
laires qui  lient  entre  eux  â  atomes  ou  2  molécules  d'un 
liquide  quelconque  ont  une  puissance  égale,  lorsque  la 
température  est  la  même,  pour  tous  les  liquides. 

On  peut  exprimer  ce  théorème  de  cette  manière  :  si  l'on 
prend  tous  les  liquides  volatils  à  une  même  température 
et  que  l'on  calcule  le  travail  dépensé  pour  arracher  de 
ce  liquide  à  cette  température  un  atome  a  et  le  rendre 
libre  de  la  cohésiou  qui  le  retient,  le  travail  dépensé  sera 
identiquement  le  même  pour  tous  les  liquides  sans  ex- 
ception. 

Cette  loi  prouve  que  l'état  liquide  ne  se  manifeste  pas 


(*)  Archives  des  Sciences  phjrsiques  et  naturelles^  t.  LY,  p.  66. 


LIQUÉFACTION    DE    l' OXYGÈNE.  l53 

indistinctement  quelle  que  soit  la  puissance  de  la  cohésion: 
il  faut  que  cette  cohésion  représente  une  certaine  puissance 
K  agissant  à  une  distance  /  entre  a  molécules,  de  telle 
sorte  que  le  travail  de  condensation  ou  de  volatilisation 
corresponde  pour  une  température  t  à  cette  quantité  con- 
stante. Sans  cette  condition  essentielle,  la  liquéfaction  ne 
saurait  être  obtenue. 

La  seule  force  connue  qui  lutte  directement  contre  la 
cohésion,  c'est  la  chaleur.  On  admet  qu^elle  donne  aux  élé- 
ments constitutifs  des  corps  des  mouvements  d^ oscillation 
pendulaire,  dont  l'amplitude  est  une  fonction  de  la  tem- 
pérature. 

Une  foule  de  considérations,  tirées  essentiellement  des 
variations  dans  les  chaleurs  latentes  internes,  telles  qu'elles 
sont  fournies  par  les  Tables  de  M.  Regnault,  des  lois  qui 
unissent  les  tensions  des  vapeurs  avec  la  température,  des 
lois  de  la  dilatation,  etc.,  etc.,  me  font  émettre  Phypothëse 
que  la  température  est  directement  proportionnelle,  sui- 
vant une  fonction  simple,  à  V amplitude  du  mouvement 
calorilique. 

Si  Ton  prenait  comme  mesure  une  fraction  très-petite 
du  millimètre,  analogue  à  celle  dont  on  se  sert  pour  me- 
surer les  ondulations  lumineuses,  on  trouverait  qu'une 
oscillation  double  correspond  à  une  température  absolue 
double;  une  oscillation  triple  comme  longueur  donnerait 
une  température  trois  fois  plus  élevée. 

Le  zéro  absolu  correspondrait  à  la  longueur  d'oscillation 
nulle,  comme  un  pendule  qui  serait  arrêté. 

Cette  définition  de  la  température  s'accorde  avec  celle 
que  nous  avons  donnée  précédemment  (  ^  )  :  elle  consiste  à 
dire  que  la  température  d'un  corps  est  absolument  définie 
quand  on  connaît  le  potentiel  dynamique  d'un  corps  entre 


(*)  Société  de  Phj'siqueet  et  Histoire  natufelle  de  Getièt^e,  séance  du  jeudi 
30  décembre  1877. 


l54  R.    VICTET. 

uae  température  t' quelconque,  prise  comme  point  de  dé- 
part, et  Une  température  t  variable,  mais  toujours  exprimée 
par  réquatîon  dynamique  où  elle  entre. 

Le  calcul  des  tensions  de  la  vapeur  d^eau  basé  sur  cette 
théorie  s'accorde  à  i  millimètre  près,  pour  toutes  les  tem- 
pératures comprises  entre  aoo  degrés  et  zéro.  ]Nous  pensons 
donc  pouvoir  donner  comme  très-probable  cette  expression 
de  la  température  et  nous  la  considérons  comme  la  mesure 
de  r amplitude  du  mouvement  calorifique. 

Est-ce  à  dire  que,  lorsque  Ton  a  un  corps  à  t°,  tous  les 
éléments  de  ce  corps,  sans  exception,  vibrent  de  telle  sorte 
que  les  amplitudes  soient  toutes  rigoureusement  égales  ? 
Nullement^  au  contraire  même,  certaines  vibrations  inter- 
fèrent entre  elles  et  produisent,  tantôt  des  vibrations  plus 
longues,  tantôt  des  vibrations  plus  courtes.  La  tempéra- 
ture du  corps  correspond  à  la  moyenne  de  tous  ces  mouve- 
ments élémentaires  et  donne  la  résultante  dynamique  des 
travaux  partiels  qui  constituent  la  provision  de  force  accu- 
mulée dans  ce  corps,  provision  que  nous  appelons  son  po^ 
tentiel. 

Cette  manière  d'envisager  l'action  de  la  cbaleur  peut  se 
démontrer  expérimentalement  par  les  changements  d'état 
des  liquides  en  vapeur  et  réciproquement. 

En  effet,  prenons  une  vapeur  quelconque  sous  une  pres- 
sion P  et  une  température  t. 

Dans  ces  conditions,  l'intervalle  intra moléculaire  qui 
sépare  les  molécules  libres  de  la  vapeur  est  inversement 
proportionnel  au  nombre  de  ces  molécules.  Pour  un 
nombre  double,  l'intervalle  sera  devenu  moitié. 

Appelons  K  la  puissance  constante  pour  tous  les  li- 
quides, qui  doit  représenter  l'énergie  de  la  cohésion  à  la 
température  t  et  appelons  /  la  longueur  de  F  oscillation  ca- 
lorifique correspondant  à  la  température  t. 

La  fig.  I  représente  a  molécules  de  cette  vapeur 
prises   à  la  pression  P  et  à  la  température  t.  La  dis- 


LIQUÉFACTION    DE   L^OXYGÈNE.  l55 

tance  des  molécules  A  et  B  est  AB  et  Ton  peut  faire  varier 
cette  distance  à  volonté  en  augmentant  la  pression  du  gaz. 

Fig.  I. 

L 


^ 


U<4 '■ r— i L 

r«- r *^ 

À  *  B*  B'  B 


€r^ 


Appelons  L  la  distance  minimum  à  laquelle  la  cohésion 
agît  avec  assez  d'énergie  pour  passer  par  la  valeur  K  et  soit 
AB"  =  /  la  longueur  d'oscillation  calorifique  correspon- 
dant à  la  température  t.  Nous  pouvons  suivre  pas  à  pas 
tous  les  phénomènes  qui  vont  se  passer. 

Il  est  évident,  dans  ce  premier  cas,  que,  tant  que  la 
pression  P  maintient  les  molécules  A  et  B  à  une  distance 
AB,  la  cohésion  ne  pourra  pas  amener  la  liquéfaction^ 
car  sa  puissance  est  inférieure  à  K,  limite  nécessaire;  par 
conséquent  on  pourra  comprimer  les  vapeurs  et  introduire 
dans  le  même  volume  une  nouvelle  quantité  d'éléments 
gazeux. 

Lorsque  la  pression  sera  arrivée  à  une  valeur  P,  la  dis- 
tance AB  sera  réduite  à  la  longueur  AB'.  A  ce  moment 
précis,  la  cohésion  étant  devenue  égale  à  K,  la  molécule  B 
se  précipitera  sur  la  molécule  A  et  formera  une  molécule 
de  liquide. 

Les  a  molécules,  dans  ce  rapprochement,  dévelop- 
peront beaucoup  de  chaleur,  puisque  la  première  oscilla- 
tion sera  égale  à  AB'  et  que  quelques  instants  plus  tard  elle 
sera  réduite  à  AB''.  La  force  vive  perdue  et  cédée  aux  parois 
du  réservoir  représente  la  chaleur  latente  de  condensa^ 
tlon:  c'est  le  travail  de  la  cohésion  entre  les  limites  AB' 
et  AB". 

Les  variations  de  volume  du  gaz  et  du  liquide  «condensé 

AB' 
permettent  de  déterminer  |e  rapport  des  longueurs  -rg:;^* 


|56  R.    PIGTET. 

Ce  changement  de  volume  est  considérable  pour  les  lir 
quides  de  volatilité  moyenne. 

Par  ce  moyen,  et  par  le  simple  jeu  de  la  loi  de  Mariette 
et  de  la  cohésion  moléculaire,  nous  nous  rendons  très>bien 
compte  de  la  manière  dont  se  passe  la  liquéfaction  d'une 
vapeur. 

Il  faut  commencer  par  rapprocher  les  molécules  jusqu'à 
une  certaine  limite  où  la  cohésion  est  suffisante,  puis,  dès 
cet  instant,  la  température  supposée  constante,  la  pres- 
sion l'est  aussi,  quelle  que  soit  du  reste  la  quantité  de  va- 
peur que  Ton  introduise  dans  le  même  espace.  La  pression 
V  sera  maximum.  La  chaleur  latente  dégagée  est  fonction 
des  longueurs  AB'  et  ÂB^'  et  du  nombre  de  molécules  qui  se 
condensent^  elle  l'est,  par  conséquent,  aussi  de  la  valeur 
de  K  correspondant  à  la  température  de  condensation  £^. 

Si  Ton  envisage  successivement  dans  les  mêmes  condi- 
tions doutes  les  vapeurs  connues,  on  doit  trouver  Texpli- 
cation  de  tous  les  phénomènes  correspondant  aux  change- 
ments d'état  gazeux  en  liquide. 

Faisons  cet  examen,  en  choisissant  les  liquides  dans  leur 
ordre  de  volatilité. 

On  peut  d'avance  reconnaître  que  la  puissance  avec  la- 
quelle 2  molécules  s'attirent  est  variable  suivant  la  na- 
ture du  corps. 

Plus  un  liquide  sera  fixe,  plus  son  point  d'ébullition 
sera  élevé  sur  l'échelle  thermométrique,  plus  la  cohésion 
réunit  avec  force  ses  particules  constituantes. 

Aussi  l'on  en  conclut  que  la  distance  à  laquelle  les  molé- 
cules de  ce  corps  s'attireront  à  une  température  t  sera  plus 
grande  que  la  distance  correspondant,  dans  les  mêmes  con- 
ditions, à  a  molécules  d'un  liquide  plus  volatil. 

Prenons  comme  exemple  l'eau  et  l'éther  sulfurique  et 
comprimons  leurs  vapeurs  à  une  température  de  3o  degrés. 
La  distance  AB^  pour  l'eau  sera  plus  grande  que  pour 
l'éther  ^  par  conséquent,  d'après  la  loi  de  Mariotte,  la 


LIQUÉFACTION    DE    L^OXYGÈNE.  167 

pression  de  la  vapeur  d'eau  sera  plus  faible  que  celle  qui 
correspond  aux  vapeurs  d'éther. 

Le  rapport  des  pressions  sera  exactement  proportionnel 
au  pouvoir  volatil. 

La  longueur  AB' correspond  à  3i"™,548  de  mercure 
pour  Teau  et  à  634"",  80  pour  l'ëther. 

Pour  les  deux  liquides,  la  pression  n'est  pas  la  même. 
Par  contre,  la  longueur  des  oscillations  calorifiques  AB" 
sera  égale  pour  les  deux  liquides  après  la  condensation. 
La  chaleur  latente  dégagée  dans  ces  deux  cas  sera  donc 
uniquement  proportionnelle  au  nombre  de  molécules  qui 
se  seront  combinées  par  la  cohésion  en  liquide,  à  une 
constante  K  spéciale  à  la  température  £  et  à  la  fonction  qui 
lie  Taccroissement  de  la  puissance  de  la  cohésion  par  rap« 
port  aux  distances  qui  séparent  les  molécules  A  et  B. 

En  comparant  successivement  Teau  à  Téther  sulfurique, 
à  Tacide  sulfureux,  à  Tammoniaque,  à  Facide  carbonique, 
on  voit  que  la  distance  AB'  à  laquelle  s'opère  la  condensa- 
tion diminue  de  plus  en  plus  à  mesure  que  Ton  choisit  un 
liquide  plus  volatil  ]  à  zéro  Teau  se  condense  sous  une  pres- 
sion de  4  millimètres,  Facide  sulfureux  en  exige  ii65, 
Féther  méthylique  1879,  enfin  Facide  carbonique  réclame 
près  de  3o  atmosphères. 

Il  est  évident  que  plus  on  choisit  des  vapeurs  rebelles  à 
la  condensation,  moins  il  y  a  d'écart  entre  le  volume  du  li- 
quide condensé  et  celui  des  vapeurs.  Cette  remarque  est 
importante,  car  elle  prouve  que  le  seul  élément  variable  est 
la  puissance  de  la  cohésion  suivant  la  nature  intime  des 
vapeurs. 

Nous  voyons,  par  tout  ce  qui  précède,  que  dans  la  con- 
densation de  2  molécules  gazeuses  A  et  6,  il  faut  réaliser 
deux  conditions: 

1®  Rapprocher  suffisamment  ces  molécules  pour  que  la 
distance  AB'à  laquelle  on  les  amène  corresponde  à  une  at- 
traction minimum  égale  à  K. 


l58  U.    PICTET. 

a^  Il  est  nécessaire  et  indispensable  que  la  distance  ÂB' 
soit  plus  grande  que  AB",  longueur  d^ oscillation  de  la 
température. 

En  effet,  si  l'attraction  des  molécules  gazeuses  est  faible 
et  que  pour  une  température  t  la  longueur  d'oscillation  l 
correspondant  à  la  température  soit  plus  grande  que  la 
distance  à  laquelle  on  doit  rapprocher  les  deux  molécules 
pour  que  la  puissance  de  la  cohésion  soit  K,  la  liquéfaction 
déifient  impossible^  puisquà  cette  température  t  F  écart 
minimum,  est  trop  grand  pour  permettre  le  changement 
d'état. 

Cette  seconde  condition  explique  entièrement  tous  les 
phénomènes  qui  se  rapportent  aux  gaz  appelés  permanents. 
Il  ne  suffit  pas,  pour  condenser  ces  gaz,  de  leur  faire  subir 
d'énormes  pressions,  il  faut  amener  la  longueur  d'oscilla- 
tion calorifique  à  devenir  inférieure  à  AB'  et,  pour  cela, 
il  faut  abaisser  leur  température,  il  faut  ôter  la  chaleur, 
réduire  les  mouvements  calorifiques  au  minimum.  Alors, 
AB^  étant  très-petit,  aussi  petit  que  possible,  on  peut 
espérer  que  la  distance  AB',  à  laquelle  la  cohésion  passe 
par  la  valeur  K,  sera  plus  grande  que  AB'^  Dans  ce  cas 
seulement  y  la  liquéfaction  s'obtiendra. 

Jusqu'à  présent,  on  croyait  que  la  pression  et  la  tempé'^ 
rature  étaient  ainsi  liées  ensemble  que  l'on  pouvait  tou^ 
jours  remplacer  l'une  par  Vautre.  Cela  est  vrai  dans  cer- 
taines limites  que  nous  avons  définies  par  cette  explication. 
Presque  tous  les  liquides  volatils  permettent  d'établir  la 
table  des  tensions  de  leurs  vapeurs  saturées^  ces  Tables 
indiquent  le  rapport  qui  existe  entre  l'augmentation  de  la 
pression  P  et  la  température  t.  Mais  ces  Tables  sont  abso- 
lument impossibles  à  donner  pour  des  valeurs  de  t  très- 
élevées,  et  l'expérience  a  prouvé  que,  pour  une  certaine 
température  t,  le  liquide  passe  spontanément  en  vapeur 
sans  changer  de  volume.  A  partir  de  ce  point,  la  liquéfac- 
tion des  vapeurs  ainsi  formées  devient  impossible. 


LIQUÉFACTION   DE   l'oXYGÈNE.  169 

Pour  Teau,  cette  température  est  intermédiaire  entre 
4oo  et  5oo  degrés.  Pour  Téther,  elle  est  plus  basse;  pour 
Tacide  sulfureux,  elle  n'atteint  pas  25o  degrés.  Pour  Tacide 
carbonique  et  le  protoxyde  d'azote,  elle  est  encore  moins 
élevée  ;  enfin,  pour  les  gaz  permanents,  Thydrogène,  l'oxy- 
gène et  Tazote,  ce  point  est  inférieur  à  la  température 
ambiante. 

Cette  explication  permet  donc  de  considérer  comme  gé- 
nérale la  loi  de  la  cohésion,  et  elle  montre  qu'il  est  indis- 
pensable, pour  liquéfier  ces  gaz,  de  se  servir  des  deux 
moyens  indiqués  : 

Obtenir  de  fortes  pressions  ; 
Obtenir  un  très^grand  Jroid. 

Ces  deux  moyens  sont  nécessaires,  doivent  s'employer 
simultanément  et  ne  peuvent  se  remplacer  par  aucun 
expédient. 

La  méthode  analytique  qui  nous  a  conduit  à  ce  résultat 
permet  de  nombreuses  applications.  Toutes  les  lois  qui 
régissent  les  variations  des  chaleurs  latentes  internes, 
externes,  les  tensions  des  vapeurs  volatiles,  les  chaleurs 
spécifiques,  les  mélanges  des  liquides  volatils,  les  mélanges 
de  gaz  et  de  vapeurs,  en  un  mot,  toute  la  calorimétrie 
et  la  Thermodynamique  se  résument  dans  le  problème  de 
Physique  que  nous  venons  d'exposer. 

Toutes  ces  applications  trouveront  leur  place  dans  un 
Mémoire  spécial  que  nous  préparons.  Ici,  nous  voulons 
seulement  démontrer  expérimentalement  que  les  déduc- 
tions précédentes  se  rapportant  aux  gaz  permanents  sont 
exactes. 

n.  —  Description  des  appareils. 

Dans  le  Chapitre  précédent,  nous  avons  établi  l'antago- 
nisme apparent  qui  existe  entre  les  vapeurs  et  les  gaz  per- 
manents, antagonisme  reposant  surtout  sur  les  anomalies 


l6o  B.    PICTET. 

de  la  loi  de  Mariotte  et  Timpossibilité  de  liquéfier  ces  gaz 
malgré  des  pressions  fantastiques. 

La  théorie  nous  a  conduit  à  reconnaître  la  nécessité  de 
modifier  Té  ta  t  des  gaz  permanents  de  deux  manières:  les 
soumettre  à  des  pressions  de  plus  en  plus  énergiques  et 
abaisser  leur  température  aussi  bas  que  possible. 

Nous  allons  maintenant  décrire  les  moyens  mécaniques 
que  nous  avons  choisis  pour  atteindre  ce  double  but. 

Avant  d^arrèter  un  dispositif  en  vue  d^un  résultat  bien 
défini,  il  faut  poser  toutes  les  conditions  requises  pour 
assurer  une  marche  régulière,  pour  éliminer  les  aleUy 
Timprévu,  qui  viennent  trop  souvent  à  la  traverse  voiler 
la  netteté  des  phénomènes  à  observer  et  introduisent  des 
éléments  perturbateurs  qui  gênent  Fexactitude  des  obser- 
vations. 

Pour  arriver  à  liquéfier  les  gaz  permanents,  nous  trou- 
vons cinq  conditions  essentielles  que  le  dispositif  méca— 
nique  doit  remplir.  Elles  sont  toutes  basées  sur  les  résul- 
tats connus,  relatifs  à  la  liquéfaction  des  autres  vapeurs. 
Ce  sont  : 

i^  Agir  sur  un  gaz  absolument  pur,  sans  aucune  trace 
de  gaz  étranger  ; 

a^  Disposer  d'une  compression  méthodique  de  ce  gax, 
pouvoir  atteindre  des  pressions  énergiques  et  pouvoir  me- 
surer ces  pressions  exactement  ; 

3^  Avoir  à  sa  disposition  les  températures  les  plus 
basses  possibles  et  pouvoir  les  maintenir  indéfiniment,  tout 
en  soustrayant  de  la  chaleur  à  ces  basses  températures  \ 

4°  Disposer  d*une  grande  surface  de  condensation  main- 
tenue à  ces  basses  températures  ; 

5^  Pouvoir  utiliser  la  détente  des  gaz  de  la  pression 
considérable  à  la  pression  atmosphérique,  dé  lente  qui, 
s'ajoutant  aux  moyens  précédents,  oblige  la  liquéfaction. 

Ces  cinq  conditions  sont  aussi  importantes  Tune  que 
l'autre.  Si  Ton  avait  un  gaz  impur,  la  liquéfaction  se  rap- 


<      LIQUÉFACTION   DE    l'oXYGÈIïE.  i6i 

porterak  peut-être  au  gaz  élranger  ]  les  lois  des  pressions 
rapportées  aux  températures  sont  troublées  parla  présence 
de  gaz  étrangers  dans  le  gaz  que  l'on  étudie;  il  faut  donc 
absolument  travailler  sur  un  gaz  chimiquement  pur. 
Comme  pression,  une  limite  de  800  atmosphères  nous  a 
paru  suffisante  pour  une  première  série  d'expériences. 
Nous  nous  servons  d'un  manomètre  métallique  exécuté 
exprès  dans  ce  but  chez  M.  Bourdon  et  gradué  avec  le 
plus  grand  soin  au  moyen  de  pressions  hydrauliques  me- 
surées à  la  balance.  Sans  être  absolument  parfait,  cet  ap- 
pareil présente  assez  d'exactitude  pour  que  l'on  connaisse 
une  pression  à  i  ou  2  atmosphères  près,  ce  qui  est  suffi- 
sant. 

Tout  le  système  de  la  production  des  basses  tempéra- 
tures fera  le  sujet  de  la  description  ci-après  ;  c'est  la  partie 
mécanique  la  plus  dispendieuse  et  la  plus  délicate.  Il  faut 
disposer  d'une  grande  surface  de  condensation  pour  les  gaz 
comprimés,  car  la  plupart  des  expériences  entreprises  pré- 
cédemment dans  ce  but  ont  échoué  faute  d'avoir  pris  assez, 
de  précautions  de  ce  côté-là. 

Une  surface  donnée  ne  condense  qu'un  poids  défini  de 
vapeurs.  Si  cette  surface  est  exiguë,  si  les  parois  sont  mau- 
vaises conductrices  de  la  chaleur,  le  phénomène  de  la  con- 
densation sera  excessivement  ralenti.  C'est  pour  cette  rai- 
son que  nous  ne  voulons  pas  nous  servir  de  tubes  épais  en 
verre  et  que  nous  donnerons  un  grand  développement  au 
tube  de  métal  destiné  à  opérer  la  condensation  du  gaz. 
Enfin,  dans  le  cas  où  la  pression  obtenue,  jointe  à  l'in- 
fiuence  de  la  température,  ne  suffirait  pas  pour  amener  la 
liquéfaction  à  Vétat  statique,  on  peut  la  contraindre  par  la 
détente  du  gaz. 

Supposons,  en  effet,  que  le  gaz  soit  comprimé  à  5oo  at« 
mosphères  de  pression  et  soit  maintenu  à  —  100^.  Dans 
ces  conditions,  il  serait  encore  gazeux.  Si  nous  le  déten- 
dons de  la  pression  5oo  atmosphères  à  la  pression  atmo-r 

.4nn,  de  Clxim,  et  de  Phys.,  5«  série,  t.  XIII.  (Février  1878.)        1 1 


l62  R.    PICTET. 

sphérique,  cette  détente  produira  uu  travail  considérable. 
Ce  travail  sera  fourni  au  détriment  de  la  température  du 
gaz,  mais  cet  abaissement  de  température  pourra  être  tel 
que  le  gaz  perde  toute  trace  de  chaleur  et  qu'une  partie 
de  ce  gaz  passe  par  le  zéro  absolu,  ce  point  particulier  où 
la  vibration  calorifique  est  nulle.  Dans  ce  cas,  évidem- 
ment, la  cohésion  y  si  elle  est  une  force  générale  y  amènera 
Fétat  liquide  et  même  solide  du  corps  étudié. 

Pour  appuyer  cette  déduction  sur  des  chiffres  plus 
précis,  nous  dirons  que  i  kilogramme  d^oxygène  par  le 
travail  de  détente  produirait  49664^^*"?  tandis  que  la  cha- 
leur totale  représentée  par  i  kilogramme  d'oxygène  de 
—  100®  au  zéro  absolu  n'est  que  de  87*^*^9  qui,  transfor- 
mées en  travail,  ne  font  que  i6334*^"' 

Ce  résultat  montre  donc  que  la  détente  complète  ne  sera 
pas  possible  ,*  mais  un  gaz  a  comme  caractère  distinctif  une 
détente  illimitée  :  donc,  ce  caractère  devant  se  peixlre  pen- 
dant le  mouvement,  une  partie  du  gaz  se  condensera  et 
passera  à  l'état  liquide  ou  solide.  Si  ce  changement 
n'avait' pas  lieu,  une  partie  du  gaz  deviendrait  une  pous- 
sière inerte,  et  alors  la  cohésion  ne  serait  point  une  loi 
générale  de  la  nature. 

C'est  donc  un  critérium  absolu  et  définitif.  La  détente 
des  gaz  comprimés  servira  de  preuve  irrécusable. 

Voilà  les  principales  conditions  qui  nous  ont  guidé  dans 
la  disposition  mécanique  que  nous  avons  adoptée  pour  la 
liquéfaction  des  gaz  permanents. 

Nous  allons  maintenant  décrire  sommairement  les  ap- 
pareils eux-mêmes. 

Ils  se  divisent  en  trois  parties  distinctes  : 

1°  Une  circulation  d'acide  sulfureux,  servant  à  pro- 
duire une  première  chute  de  température  5 

7?  Une  circulation  d'acide  carbonique  ou  de  protoxyde 
d'azote,  servant  à  amener  une  seconde  chute  de  tempéra- 
ture ; 


LlQUÉFÀCTIOIf    DE    L^OXTGÈNE.  l63 

3^  La  production  de  Toxygène  en  vase  clos,  mis  en 
communication  avec  Tacide  carbonique  solidifié  par  un 
long  tube  mince  complètement  noyé  dans  cet  acide  carbo- 
nique. 

La  PI.  1  représente  l'ensemble  du  dispositif  en  éléva- 
tion et  en  plan. 

C'est  dans  un  corps  de  bâtiment  appartenant  à  la  Société 
genevoise  de  construction  d'instruments  de  Physique  que 
ces  appareils  ont  été  disposés. 

M.  Th.  Turreltini,  le  directeur  de  cette  Société,  a  bien 
voulu  m' autoriser  à  me  servir  de  sq3  locaux  et  de  sa  ma- 
chine à  vapeur  pour  faciliter  mes  recheiches  et  mes  expé- 
riences. 

Je  profite  de  cette  occasion  pour  lui  en  témoigner  ma 
sincère  reconDaissance,  ainsi  qu'à  la  Société  qu'il  dirige. 
Tous  les  instruments  qui  m'ont  servi  ont  été  construits 
dans  ses  ateliers,  et  c'est  uniquement  grâce  à  leur  perfec- 
tion que  nous  avons  obtenu  des  résultats  précis  sans  aucun 
accident  quelconque. 

ha  fi  g,  I  de  la  PL  I  représente  en  élévation  l'ensemble 
des  appareils.  On  voit  d'abord  deux  grandes  caisses  U  et  V 
que  le  plan  de  la  figure  coupe  par  la  partie  médiane. 

Dans  la  caisse  supérieure  U  se  trouve  un  grand  tube  de 
cuivre  R,  ayant  o"',i2  de  diamètre  et  i"*,io  de  longueur. 

Ce  tube  traverse  la  caisse  de  part  en  part  dans  une  posi- 
tion légèrement  inclinée.  La  différence  de  niveau  entre  les 
deux  extrémités  est  de  o™,i2. 

C'est  dans  ce  tube  que  Ton  introduit  de  l'acide  sulfureux 
liquide  par  le  tube  2,  aboutissant  à  la  partie  inférieure  de 
ce  réservoir  sur  la  génératrice  supérieure  du  cylindre. 
Lorsque  Tacide  sulfureux  s'est  accumulé  dans  ce  récipient, 
de  telle  manière  que  le  niveau  du  liquide  touche  l'orifice 
du  tube  z^  la  surface  de  ce  liquide  est  maximum,  car  elle 
s'étend  d'un   bout  à  l'autre  du  tube  sur  la  plus  grande 

section. 

II* 


t 

164  ^*    PIGTET. 

Un  robiuet  r,  ayant  une  section  de  o°^,oao  de  diamètre, 
est  placé  sur  la  partie  supérieure  du  grand  tube  contenant 
Tacide  sulfureux.  Ce  robinet  fait  face  au  tuyau  d'entrée  du 
liquide  placé  à  Tautre  extrémité. 

Un  long  tube  de  0*^,025  de  diamètre  réunit  ce  robinet  r 
avec  l'aspiration  d'une  première  pompe  P. 

Si  Ton  met  cette  pompe  en  action  par  l'intermédiaire 
d'une  transmission  mécanique,  elle  produira  un  vide  con- 
sidérable sur  l'acide  sulfureux  contenu  dans  le  tube  R. 
Aussitôt  la  volatilisation  de  l'acide  sulfureux  sera  excitée 
et  la  température  de  ce  liquide  s'abaissera  promptement. 
Elle  deviendra  d'autant  plus  basse  que  le  vide  sera  plus 
parfait. 

Dans  les  laboratoires  de  Physique,  on  se  sert  générale- 
ment de  pompes  pneumatiques  pour  faire  le  vide;  ces  ap- 
pareils délicats  ne  pouvaient  convenir  à  ces  sortes  d'expé- 
riences qiii  demandent  une  continuité  de  marche  de  bien 
des  heures  et  la  soustraction  d'une  énorme  quantité  de  cha- 
leur ;  d'un  autre  côté,  les  pompes  ordinaires  ne  donnent 
pas  un  rendement  excellent  et  ne  permettent  pas  facilement 
d'obtenir  un  vide  (;pmplet.  J'ai  tourné  la  difficulté  en  ac- 
couplant deux  pompes  industrielles  semblables  à  celles  qui 
nous  servent  dans  nos  appareils  à  glace,  et  associées  de 
telle  sorte  que  l'aspiration  de  la  seconde  pompe  V  [PL  1, 
jîg,  2)  corresponde  à  la  compression  de  la  première  P. 

Grâce  à  cette  disposition,  les  espaces  nuisibles  de  la 
première  pompe,  les  fuites  latérales  du  piston,  les  petites 
imperfections  mécaniques  inhérentes  à  des  instruments  de 
grande  taille  et  industriels,  sont  complètement  supprimés, 
et  l'aspiration  devient  aussi  énergique  que  celle  de  la 
meilleure  machine  pneumatique. 

Quelques  chiffres  suffiront  pour  démontrer  la  remar- 
quable puissance  de  cet  accouplement. 

Avec  une  excellente  machine  pneumatique  faisant  le 
vide  à  -;  millimètre  et  ayant  des  cylindres  de  750  centi* 


LIQUÉFACTION    DE    L^OXTGÈNE.  l65 

mètres  cubes,  j'ai  fait  le  vide  sur  un  flacon  contenarit  de 
l'acide  sulfureux  liquide.  Le  poids  du  flacon  et  de  l'acide 
était  de  3 20  grammes.  Le  flacon  était  entouré  de  chiffons 
et  de  déchets  de  coton  pour  éviter  le  rayonnement  exté- 
rieur de  la  chaleur  et  la  conductibilité. 

Après  avoir  pompé  sans  arrêt  plus  de  trois  quarts 
d'heure,  étant  quatre  pour  nous  relayer,  la  température 
marquée  par  un  thermomètre  étalon  à  alcool  n'était  que 
de — 54°.  Vingt  minutes  plus  tard  elle  ne  fut  que  de 
—  55%  et  il  nous  fut  impossible  de  la  faire  baisser  davan- 
tage. 

Avec  les  deux  pompes  accouplées  ainsi  que  nous  l'a- 
vons décrit,  la  température  du  tube  R,  relevée  par  le 
même  thermomètre  à  alcool  indique  —  3o^  après  quatre 
minutes  de  marche,  —  4^*'  après  dix  minutes,  et  enfln  des- 
cend progressivement  jusqu'à  —  73®,  la  limite  la  plus 
basse  que  nous  ayons  pu  atteindre. 

Le  thermomètre  à  alcool  se  glisse  dans  un  petit  man- 
chon en  cuivre  dont  la  bouche  ouvre  contre  le  flanc  du 
grand  réservoir  R.  L'autre  extrémité  est  |fermée  et  tout  le 
tube  est  noyé  dans  l'acide  sulfureux  liquide.  On  verse 
dans  ce  manchon  un  peu  d'alcool  absolu  qui  établit  un 
contact  entre  les  parois  du  tube  et  le  thermomètre. 

Les  pompes  P  et  P'  sont  en  fonte;  elles  sont  construites 
sur  le  système  de  M.  Daniel  Colladon,  appliqué  aux  com- 
presseurs à  air.  La  tige  du  piston  est  creuse,  et  l'on  entre- 
tient une  circulation  d'eau  qui  permet  au  presse- étoupe 
de  se  conserver  longtemps  sans  subir  l'action  nuisible  de 
rélévatioû  de  température,  qu'il  est  presque  impossible 
d'éviter  sans  cet  artifice.  La  garniture  du  presse-étoupe 
est  composée  de  deux  parties,  séparées  par  un  anneau  mé- 
tallique. Cet  anneau  fait  l'office  de  chambre  et  sert  à  évi- 
ter les  rentrées  d'air.  Voici  comment  : 

La  seconde  pompe  P'  comprime  l'acide  sulfureux  jusqu'à 
une  pression  de  i  à  2  atmosphères  dans  un  condenseur  C. 


l66  *         a.    PIGTET. 

Ce  condenseur  est  en  cuivre  et  affecte  la  forme  d'une 
chaudière  tubulaire.  Un  courant  d'eau  ordinaire  traverse 
les  tubes  de  ce  condenseur  et  enlève  la  chaleur  fournie  par 
le  changement  d'état.  Puisque  la  pression  produite  par  la 
seconde  pompe  à  la  compression  dépasse  la  pression  atmo- 
sphérique, il  suffit  de  réunir  par  un  tube  Panneau  métal- 
lique logé  dans  les  deux  garnitures  des  deux  pompes  P  et 
P  avec  la  canalisation  qui  joint  la  pompe  P  au  conden- 
seur C.  On  ne  s'expose  ainsi  en  aucune  façon  à  des  ren- 
trées d'air  dans  l'appareil.  Cet  accident,  s'il  avait  lieu,  pa- 
ralyserait immédiatement  la  marche  des  pompes,  car  la 
pression  des  gaz  dans  le  condenseur  C  irait  constamment 
en  croissant  et  dépasserait  rapidement  les  limites  admises. 

Cette  précaution,  uniquement  du  domaine  de  la  pra- 
tique, est  absolument  indispensable  pour  assurer  un  fonc- 
tionnement de  quelque  durée. 

Le  volume  de  la  pompe  P  est  de  3  litres  par  cylindrée, 
ce  qui  explique  la  rapidité  avec  laquelle  la  température 
descend  dans  le  tube  R  dès  le  commencement  de  la  mise 
en  marche. 

Les  soupapes  des  pompes  P  et  P  ont  été  faites  avee  un 
soin  tout  particulier-,  elles  sont  en  acier  et  le  siège  des 
clapets  est  en  bronze.  Un  rodage  prolongé  permet  une  par- 
faite herméticité. 

Les  ressorts  à  aspiration  sont  très-doux  et  suffisent  sen- 
lement  à  faire  plaquer  la  soupape. 

La  vitesse  des  pompes  varie  entre  80  et  100  tours  par  , 
minute. 

L'acide  sulfureux  qui  s'évapore  dans  le  tube  R ,  grâce  à 
la  grande  surface  libre  du  liquide,  passe  dans  le  robinet  r, 
se  rend  dans  la  première  pompe,  de  là  dans  la  seconde , 
puis  dans  le  condenseur.  Là  les  vapeurs  se  condensent,  re- 
passent à  l'état  liquide  et  gagnent  la  partie  inférieure  du 
condenseur.  J'ai  placé  dans  cet  endroit  l'ouverture  du  tnbe 
z  qui  relie  le  condenseur  au  tube  R.  Un  robinet  de  réglage 


LIQUÉFACTIOir    DE    L'oXTGÈIfE.  ifi^ 

à  vis  q  peraiet  de  donner  à  la  section  de  Touverture  la  gran- 
deur voulue  pour  que  le  poids  du  liquide  qui  s*écoule  sous 
rinûuence  de  la  diflerence  de  pression  entre  le  condenseur 
et  le  tube  R  soit  rigoureusement  ëgal  à  celui  des  vapeurs 
aspirées  pendant  le  même  temps. 

Comme  ce  poids  est  extrêmement  faible,  quHl  représente 
seulement  quelques  grammes  par  minute,  il  suffit  d'en- 
tr^ouvrir  légèrement  le  robinet  ^,  en  donnant  à  la  clef  un 
dixième  de  tour  tout  au  plus. 

De  cette  manière,  le  niveau  du  liquide  dans  le  tube  R 
reste  constant. 

Le  cycle  d'acide  sulfureux  est  complet  et  la  chute  de 
température  obtenue  dans  le  grand  tube  R  est  constamment 
maintenue  par  le  travail  mécanique  des  pompes  P  et  P'. 

Celte  première  circulation  d'acide  sulfureux  n*est  quun 
expédient  pour  obtenir  de  l'acide  carboniqne  ou  du  prot- 
oxyde  d'azote  à  Tétat  liquide  en  quantités  assez  considé- 
rables. 

Si  l'on  voulait  condenser  par  des  pompes  ordinaires  de 
l'acide  carbonique  ou  du  protoxjde  d'azote,  il  faudrait 
pouvoir  comprimer  ces  gaz  sous  des  pressions  dépassant 
3o  à  4o  atmosphères,  même  en  utilisant  pour  la  conden- 
sation de  l'eau  très-froide» 

Ces  pressions  sont  irréalisables  sur  une  grande  échelle  : 
on  ne  peut  les  obtenir  qu'au  moyen  de  pompes  spéciales 
dont  le  débit  est  fort  limité  et  qui  ne  peuvent  nullement 
résister  à  une  marche  continue. 

Par  contre  y  si  nous  condensons  l'acide  carbonique  à 
une  température  de  — 65®,  la  pression  s'abaisse  à  4  ^u 
6  atmosphères  seulement,  pression  très-facile  à  obtenir 
au  moyen  de  pompes  semblables  a  P  et  P. 

Dans  ce  but,  j'ai  logé  au  milieu  du  tube  R  un  second 
tube  de  diamètre  moindre,  ayant  1™,ID  de  longueur  sur 
o"^,o6  de  diamètre. 

Ce  tube,  représenté  en  S,  est  conséquemment  baigné 


l68  R.    PTCTET. 

dans  racide  sulfureux  qui  Tenveloppe  de  Toutes  partSy  et 
il  participe  à  cette  basse  température  de  —  65".  Ce  tube 
S  sert  de  condenseur  à  l'acide  carbonique,  que  Ton  y 
comprime  par  Taction  de  deux  pompes  O  et  O',  en  tout 
semblables  aux  pompes  P  et  P  et  semblablement  disposées. 

L'acide  carbonique  est  fabriqué  avec  beaucoup  de  soins 
dans  deux  grands  bocaux  en  verre,  pleins  de  fragments 
de  marbre  de  Carrare  sur  lesquels  on  laisse  agir  de  Ta- 
cide  chlorhydrique  introduit  progressivement.  Le  gaz  qui 
se  dégage  est  lavé,  puis  desséché  par  un  grand  appareil 
plein  de  chlorure  de  calcium.  De  là  on  l'emmagasine  dans 
un  gazomètre  à  huile  G  [PL  I,  fig.  i  et  2) ,  ayant  i  mètre 
cube  de  capacité. 

Un  tuyau  c  relie  le  gazomètre  avec  un  robinet  à  trois 
voies  K  [PI,  lyfig*  2). 

Au  commencement  de  l'opération,  on  tourne  ce  robinet 
K  de  telle  sorte  que  le  gazomètre  G  soit  mis  en  communi- 
cation avec  l'aspiration  de  la  pompe  O  par  l'intermédiaire 
des  tubes  c  et  c'. 

Les  pompes  O  et  CK  ne  sont  mises  en  mouvement  que 
lorsque  la  température  inférieure  est  déjà  obtenue  dans  le 
tube  R  par  le  jeu  des  pompes  P  et  P. 

Immédiatement  la  condensation  de  l'acide  carbonique 
s'obtient  dans  le  tube  S,  sous  une  pression  indiquée  au 
manomètre  m.  Elle  est  variable  suivant  la  quantité  de  gaz 
qu'on  admet  dans  les  pompes  O  et  O^;  mais,  en  général,  elle 
reste  comprise  entre  4  ^^  7  atmosphères.  La  température 
de  l'acide  sulfureux  se  relève  toujours  un  peu  dès  que  les 
pompes  O  et  O'  se  mettent  en  activité. 

Ce  résultat  est  naturel,  puisque  l'acide  carbonique  qui 
se  liquéfie  cède  toute  sa  chaleur  latente  de  liquéfaction  à 
l'acide  sulfureux.  La  température  monte  ainsi  jusqu'à 
—  5o°.  Dès  qu'on  ralentit  la  condensation  de  l'acide  car- 
bonique, cette  température  redescend  aussitôt,  en  oscil- 
lant constamment  entre  —  5o^  et  —  65^* 


LIQUÉFAGTlOli    DE    l'oXYGEKE.  169 

Tout  le  gaz  contenu  dans  le  gazomètre  est  aspiré  par  les 
pompes  O  et  Cy  et  comprimé  dans  le  tube  S,  où  il  se 
liquéfie  facilement.  On  peut  ainsi  en  accumuler  plus  de 
2  kilogrammes  en  un  quart  d'heure. 

Une  fois  Tacide  carbonique  liquide  obtenu,  il  ne  reste 
plus  qu^à  l'utiliser  pour  la  condensation  de  Foxygène. 

Les  appareils  spéciaux  établis  dans  ce  but  se  trouvent 
dans  la  longue  caisse  Y,  située  juste  au-dessous  de  la  pre- 
mière. 

Cette  caisse  contient,  comme  la  caisse  U,  deux  tubes 
en  cuivre;  seulement  leurs  dimensions  sont  notablement 
différentes. 

Un  premier  tube,  extérieur  au  second,  a  exactement 
3",  70  de  long  sur  o",o35  de  diamètre  extérieur.  Il  est 
légèrement  incliné  vers  le  sol,  mais  dans  le  sens  opposé 
aux  tubes  R  et  S. 

Dans  les  Jig.  i  et  2  de  la  PL  /,  il  est  désigné  par  la 
lettre  D.  Ce  tube  correspond  au  réservoir  d'acide  carboni- 
que liquide  par  le  tuyau  f. 

Un  robinet  de  réglage  p  à  vis,  tout  à  fait  semblable  au 
robinet  de  réglage  de  Tacide  sulfureux,  permet  d'ouvrir 
ou  de  fermer  la  canalisation  et  de  régler  exactement  la  va- 
leur de  l'orifice  de  passage. 

J'ai  disposé  l'entrée  de  T acide  carbonique  liquide  vers 
le  milieu  du  long  tube  P,  pour  la  raison  que  j'indiquerai 
plus  loin. 

Une  seconde  bride /(P/.  /,  /îgr.a),  placée  dans  la  partie 
supérieure  de  D,  permet  d'ajuster  un  tuyau  c/'qui,  partant 
de  fy  établit  la  communication  entre  le  robinet  à  trois 
voies  K  çt  le  sommet  du  tube  D. 

Ces  dispositions  une  fois  connues,  voyons  comment  la 
seconde  circulation  fonctionne. 

On  commence  par  soutirer  le  gaz  du  gazomètre  préala- 
blement rempli.  Lorsque  tout  le  gaz  est  liquéfié  dans  le 
condenseur  S,  on  ouvre  le  robinet  de  réglage  p.  L'acide 


m.    PIGTET. 


170 

caThonuiiui  liquide  passe  dans  le  tube  t  et  abaisse  instan- 
tani^'mcril  la  température  de  toute  la  canalisation. 

Les  premières  gouttes  qui  tombent  dans  le  long  tube  D, 
rencontrant  un  métal  à  la  température  ambiante,  s'éva- 
porent rapidement.  Les  vapeurs  produites  retournent  se 
condenser  dans  le  conducteur  S. 

Une  seconde  quantité  de  liquide  descend  de  nouveau 
dans  le  tube  dès  que  Téquilibre  de  pression  est  rétabli  et 
amène  un  plus  grand  abaissement  de  température  des  pa- 
rois de  D. 

Ainsi,  progressivement,  Tacide  carbonique  descend  du 
tube  supérieur  S  dans  le  tube  inférieur  D.  Il  commence 
par  s'accumuler  dans  la  partie  la  plus  basse;  puis  le  ni- 
veau s'élève  progressivement  jusqu'à  la  partie  supérieure 
voisine  de  la  bride^*. 

Pendant  cette  opération  de  remplissage,  on  est  parfaite- 
ment renseigné  sur  ce  qui  se  passe,  par  le  jeu  du  mano- 
mètre m  indiquant  la  pression  dans  le  condenseur  S. 
Chaque  fois  qu'une  certaine  quantité  d'acide  carbonique 
liquide  descend  dans  le  tube  D  encore  chaud,  relativement 
a  la  température  très-basse  de  Tacide  carbonique,  on  voit 
une  brusque  élévation  de  a  ou  3  atmosphères  au  ma- 
nomètre m. 

Cette  augmentation  de  pression  disparait  promptement, 
puisqu'elle  n'est  produite  que  par  le  reflux  de  l'acide  ga- 
zeux, lequel  se  condense  de  nouveau  pour  redescendre 
une  seconde  fois  dans  le  collecteur  D. 

Lorsque  le  calme  du  manomètre  m  indique  que  tout  le 
tube  a  pris  la  température  correspondant  à  celle  de  l'acide 
sulfureux  en  R,  c'est-à-dire  environ  —  60°  à — 65°,  on 
tourne  le  robinet  à  trois  voies  K,  de  telle  sorte  que  le  ga- 
zomètre soit  isolé  et  que  l'aspiration  de  la  pompe  O 
s'adresse,  par  l'intermédiaire  des  tubes  c  et  cf,  à  la  partie 
supérieure  du  tube  D. 

On  doit  mettre  à  cette  opération  une  grande  précaution. 


LIQUÉFACTION    DE    l'oXYGÊWE.  I7I 

car,  si  l'on  ouvrait  brusquement  ce  robinet,  le  liquide 
contenu  dans  le  tube  D  se  mettrait  spontanément  en  ébullî- 
tion,  bien  que  la  température  soit  si  basse,  et  une  bonne 
partie  de  ce  liquide  s'engagerait  dans  la  canalisation  et 
dans  les  pompes.  Là,  la  température  élevée  développerait 
une  telle  quantité  de  vapeurs,  que  la  surface  du  conden- 
seur S  serait  tout  à  fait  insuffisante  pour  la  modérer.  La 
pression  atteindrait  3o  ou  4o  atmosphères  en  quelques  se- 
condes  et  Ton  aurait  certainement  un  accident  à  déplorer. 

C'est  donc  peu  à  peu  que  cette  communication  doit 
s'établir,  pour  diminuer  progressivement  et  lentement  la 
pression  qui  contient  l'acide  carbonique  liquide. 

On  laisse  quelques  minutes  encore  ouvert  le  robinet  de 
réglage  p,  afin  d'être  sûr  que  tout  l'acide  carbonique  li- 
quide est  bien  descendu  dans  le  collecteur  D.  La  différence 
de  pression  que  procure  le  jeu  des  pompes  amène  infailli- 
blement ce  résultat. 

On  ferme  le  robinet  de  réglage  p,  dès  qu'un  givre  in- 
tense blanchit  toute  la  canalisation  d^c^  signe  certain  que 
tout  le  tube  D  est  plein  de  liquide. 

A  ce  moment  commence  un  nouvel  et  considérable  abais- 
sement de  température. 

Le  vide  se  fait  sur  l'acide  carbonique  liquide  et  le  froid 
devient  si  intense  que  cet  acide  se  solidifie. 

Mesure  des  températures.  —  Il  est  impossible  de  se 
servir  de  thermomètre  à  alcool  pour  estimer  des  tempéra- 
tures aussi  basses.  La  contraction  et  la  dilatation  de  ce  li- 
quide ne  donnent  plus  aucune  «garantie  sérieuse. 

Je  me  suis  servi,  pour  la  mesure  de  ces  température,  de 
la  formule  suivante,  que  j'ai  déduite  directement  de  la 
Théorie  mécanique  de  la  chaleur  appliquée  aux  change- 
ments d'état  ; 

^F  ^    [V-4-(c~/')  (/^-0]43i  X  1,293  JX 274  (f^-/) 

P  io333[(274-f-f')'-- (274-4- r')  [t'^t)] 


172  H.    PICTET, 

P' 

Dans  cette  formule, /—  représente  le  ogarithme  népé- 
rien du  quotient  des  tensions  à  saturation  aux  tempéra- 
tures i'  et  t. 

i  est  une  température  iixe  prise  comme  point  de  départ, 
zéro  ou  100  degrés  si  possible,  ou  une  température  in- 
termédiaire donnée  par  un  thermomètre  étalon  \ 

t  est  la  température  à  déterminer  \ 

P  est  la  tension  observée  au  manomètre  à  mercure  lorsque 
le  vide  est  produit  :  cette  tension  correspond  à  la  tem- 
pérature t\ 

P^est  la  tension  des  vapeurs  à  la  température  t\  elle  est 
donnée  par  les  Tables  de  M.  Regnault  \ 

X' est  la  chaleur  latente  de  volatilisation  à  la  tempéra- 
ture i!\ 

c  est  la  chaleur  spécifique  du  liquide  moyenne  entre  t' ett; 

h  est  la  chaleur  spécifique  des  vapeurs  à  pression  con- 
stante \ 

i  est  la  densité  des  vapeurs  par  rapport  à  l'air,  densité  lé- 
gèrement variable  suivant  la  pression  P  et  dont  on  a 
Teslimation  exacte  par  la  loi  des  co volumes  fournie  par 
M.  Regnault. 

En  donnant  à  t  des  valeurs  successives  de  10  degrés  en 
10  degrés  inférieures  à  t'^  on  trace  la  courbe  des  tensions 
maxima  correspondant  aux  températures,  et  c^est  cette 
courbe  qui  permet  des  observations  de  température  trèa- 
exactes  et  rapides. 

Ce  n'est  pas  ici  la  place  de  démontrer  cette  formule,  ni 
les  équations  sur  lesquelles  elle  repose  ^  nous  dirons  seule- 
ment que,  appliquée  aux  vapeurs  d'eau,  d'acide  sulfu- 
reux, etc.,  elle  s'accorde,  au  millimètre  près,  avec  les 
Tables  de  M.  Regnault  entre  les  limites  t'  =  aoo°  et  t  =  o®, 
qui  correspondent  aux  maxima  des  écarts  observés,  étu- 
diés avec  le  plus  de  précision. 


LIQUÉFACTION    DE    l'oXTGÈNE.  1^3 

Nous  venons  d^exposer  comment  s'établit  la  seconde 
circulation  ^  celle  d'acide  carbonique  ou  de  protoxyde 
d'azote,  car  les  deux  gaz  peuvent  être  employés  indiilé- 
remment. 

Cette  seconde  circulation  amène  une  chute  de  tempéra- 
ture qui  atteint  —  120**  et  même  —  i4o**  lorsque  le  vide 
est  complet. 

Nous  passons  maintenant  à  l'oxygène  et  au  dispositif 
qui  permet  d'utiliser  ce  grand  froid  et  d'obtenir  une  pres- 
sion énergique. 

J'ai  disposé  dans  l'intérieur  du  long  tube  D  un  second 
tube  plus  petit  comme  diamètre,  mais  plus  long  que  le 
tube  D  d'environ  o",  5o. 

Ce  petit  tube  est  très-épais.  Son  diamètre  intérieur  est 
exactement  de  o"',oo4  et  son  diamètre  extérieur  de  o"*,oi5« 
La  longueur  de  ce  tube  A  (P/.  /,  jig.  i  et  2)  est  de  4"*,  i6« 

Ce  tube  A  traverse  les  deux  fonds  du  tube  D  et  dépasse 
ce  tube  de  quelques  centimètres  dans  la  partie  inférieure 
et  de  près  de  o'^jSodans  la  partie  supérieure.  C'est  ce  long 
tube  qui  doit  servir  de  réservoir  à  l'oxygène  comprimé. 

Dans  la  partie  inférieure,  ce  tube  de  cuivre  est  fileté  sur 
une  longueur  de  o",  06. 

Un  maqcbon  en  acier  se  visse  sur  le  tube,  qui  a  été  préa- 
lablement étamé. 

En  chauffant,  on  obtient  une  soudure  parfaite. 

Ce  manchon  en  acier  est  percé  de  deux  orifices.  Sur  l'un 
vient  se  fixer  un  grand  manomètre  métallique  m!  (PL  J, 
fîg.  I  et  2),  gradué  jusqu'à  800  atmosphères. 

Le  diamètre  de  ce  manomètre  est  suffisant  pour  que  Ton 
puisse  apprécier  assez  facilement  le  7;^  de  chaque  gradua- 
tion, correspondant  à  10  atmosphères.  On  peut  donc  esti- 
mer la  pression  à  i  atmosphère  près. 

Le  manomètre  communique  avec  la  partie  centrale  du 
tube  A  par  un  trou  pratiqué  dans  l'épaisseur  des  parois  de 
ce  tube,  en  face  de  l'ouverture  du  manchon. 


1^4  ^'    PICTET. 

Le  joint  du  manchon  et  du  manomètre  est  rendu  abso- 
lument hermétique  par  le  serrage  à  bloc  d'un  anneau  de 
cuivre,  comprimé  entre  les  deux  surfaces  planes  du 
joint. 

Cet  anneau  s*aplaiit  légèrement  et  s'incruste  dans  ces 
deux  surfaces  d'une  façon  si  intime  qu'aucune  fuite  n'est 
a  craindre. 

Le  second  orifice  du  manchon  d'acier  est  destiné  au 
passage  de  Toxygèue  liquide.  Il  est  placé  au-dessous  du 
manomètre  m\ 

Cet  orifice  est  très-étroit,  il  n'a  que  o™,oo3  de  diamètre. 
Une  petite  lance,  percée  d'un  trou  de  o™,  ooi,  vient  se 
fixer  à  vis  dans  l'ouverture  du  manchon.  C'est  par  son 
extrémité  que  les  gaz  comprimés  et  le  liquide  s'échappe- 
ront dès  qu'on  desserrera  la  vis  d'acier  v,  qui  ferme  l'ex- 
trémité du  tube  A. 

Ainsi  que  nous  l'avons  dit,  le  manchon  d'acier  enve- 
loppe de  toutes  parts  l'extrémité  du  tube  A. 

Si  l'on  ajuste,  en  face  de  l'orifice  de  ce  tube  et  parallè- 
lement à  son  axe,  une  vis  à  bout  conique,  filetée  dans  le 
manchon  même,  cette  vis  viendra  obstruer  entièrement  le 
tube  A  lorsque  la  pointe  se  sera  engagée  dans  Porifice  du 
tube. 

Une  forte  pression  ne  risque  pas  de  faire  baver  le  tube 
de  cuivre,  car  il  est  maintenu  dans  la  gaine  solide  qui  le 
protège. 

Ce  système  de  fermeture  donne  les  meilleurs  résultats^ 
La  partie  supérieure  du  tube  A  se  recourbe  vers  le 
sol  et   ce  tube   se   relie   à  un  gros  obus  de  fer  forgé  B 
{PL  lyfig'  I  et  a). 

Cet  obus  a  été  forgé  avec  le  plus  grand  soin,  de  ma* 
nière  à  assurer  la  qualité  exceptionnelle  du  métal  et  son 
homogénéité. 

On  a  pratiqué  dans  l'intérieur  une  cavité  cylindrique 
ayant  exactement  lôSp  centimètres  cubes  de  capacité.  Les 


\i 


LIQUÉFACTION    DE   l'oXYGÈNE.  1^5 

dimensions  extérieures  de  cet  obus  sont  de  o"*,  28  de  hau- 
teur et  de  o",  17  de  diamètre. 

Les  parois  de  ce  récipient  ont  une  épaisseur  moyenne 
de  o°',o35. 

Le  calcul  des  résistances  montre  qu'un  obus  pareil 
peut  résister  à  une  pression  de  plus  de  i5oo  atmosphères. 

La  réunion  du  tube  A  avec  Tobus  6  se  fait  par  l'in- 
termédiaire de  deux  joints  semblables  à  celui  du  mano- 
mètre m'. 

Un  bouchon  à  vis  en  acier  se  visse  à  bloc  sur  Textré- 
mité  du  tube  A  et  ce  bouchon  pénètre  lui-même  dans 
l'ouverture  de  l'obus.  Un  anneau  de  cuivre  sert  égale- 
ment de  garniture  pour  éviter  toute  espèce  de  déperdition 
de  gaz. 

Avant  de  faire  le  joint,  on  introduit  dans  l'obus  un 
poids  connu  de  chlorate  de  potasse  mélangé  de  chlorure  de 
potassium,  puis  on  visse  le  réservoir  B  à  l'extrémité  du' 
tube  A. 

Sous  l'obus  6,  on  [dispose  une  couronne  de  gaz,  telle 
qu'on  les  emploie  dans  les  fours  Perrot.  En  réglant  la 
flamme,  on  amène  progressivement  la  température  de 
l'obus  aux  485  ou  5oo  degrés  nécessaires  pour  le  dégage- 
ment complet  de  l'oxygène. 

Le  manomètre  mf  permet  de  suivre  constamment  la 
marche  de  l'opération. 

Ce  dispositif  dispense  de  l'emploi  des  pompes  pour  la 
compression  des  gaz.  La  réaction  chimique  est  la  source 
unique  de  la  pression. 

La  surfaee  du  tube  A  est  relativement  considérable, 
puisqu'il  y  a  3"*, 62  noyés  dans  l'acide  carbonique  solide. 

Nous  avons  fait  aboutir  le  tube  t  vers  le  milieu  du  tube 
D,  pour  ne  pas  risquer  d'élever  brusquement  la  tempéra- 
ture de  l'oxygène  liquéfié  qui  ira  s'emmagasiner  dans  la 
partie  inférieure  du  tube  A. 

En  effet,  l'acide  carbonique  liquide  contenu  dans  le 


1^6  R.    PIGTBT. 

tube  s  passe  dans  le  tube  D  à  une  température  qui  n'est 
pas  instantanément  le  minimum.  Il  faut  un  certain  temps 
pour  amener  l'abaissement  complet  de  sa  température; 
or  il  est  nécessaire  que  les  gaz  condensés  soient  à  l'abri 
de  cette  oscillation  calorifique. 

Le  cul-de-sac  compris  entre  l'orifice  de  la  tubulure  t  et 
le  manomètre  mf  résout  parfaitement  le  problème,  car 
l'acide  carbonique  cristallisé  qui  s'y  trouve  conserve  une 
température  constante  minimum. 

Telles  sont  les  dispositions  générales  que  j'ai  adoptées 
pour  tenter  expérimentalement  la  liquéfaction  de  l'oxy- 
gène. 

La  description  que  nous  venons  d'en  faire  étant,  par  la 
force  des  choses,  un  peu  longue  et  coupée  de  détails  secon- 
daires, je  vais  la  résumer  très-brièvement,  me  bornant  aux 
conditions  essentielles  et  les  présentant  dans  l'ordre  opposé 
à  celui  qui  vient  d'être  suivi. 

Le  but  que  nous  nous  proposons  est  de  liquéfier  le  gaz 
oxygène  au  moyen  de  basses  températures  et  de  fortes  pres- 
sions. 

Pour  produire  l'oxygène,  nous  nous  servons  d'un  obus 
creux  en  fer  dans  lequel  on  met  du  chlorate  de  potasse 
que  l'on  chauffe  progressivement. 

L'oxygène  se  comprime  dans  l'espace  clos,  par  sa  propre 
formation.  C'est  ainsi  que  nous  obtenons  les  pressions  con- 
sidérables. 

Afin  de  permettre  au  gaz  de  subir  les  basses  tempéra- 
tures, on  fait  communiquer  la  partie  supérieure  de  l'obus 
avec  un  long  tube  en  cuivre  à  parois  résistantes. 

La  pression  de  l'oxygène  s'y  établit  comme  dans  l'obus, 
et  un  manomètre  permet  de  la  mesurer  directement,  avec 
une  approximation  suffisante  pour  une  première  re- 
cherche . 

Autour  de  ce  tube  renfermant  l'oxygène  sous  pression  ^ 
nous  plaçons  un  second  tube  presque  aussi  long,  qui  com- 


LIQUÉFACTION    DE    L^OXTGÈlfE.  1  J^ 

munique  avec  un  réservoir  d'acide  carbonique  liquide. 

Par  un  robiuet  de  réglage  convenablement  disposé , 
on  laisse  passer  peu  à  peu,  dans  ce  long  tube,  suffisam- 
ment d*acide  carbonique  liquide  pour  le  remplir  jusqu'eti 
haut* 

Deux  pompes  font  ensuite  le  vide  sur  cet  acide  carbo- 
nique et  abaissent  la  température  jusqu'à  congeler  et  cris- 
talliser le  liquide; 

Alors  Toxygène,  soumis  simultanément  à  cette  basse 
température  et  à  l'énorme  pression  produite  par  la  réaction' 
chimique,  se  condense;  ce  qui  se  prouve  soit  par  l'ap- 
parence du  jet  projeté  par  l'orifice  du  tube  à  oxygène, 
soit  par  les  variations  de  pression  indiquées  au  mano- 
mètre.    ' 

'  Pour  obtenir  une  grande  quantité  d'acide  carbonique 
liquide,  nous  employons  un  expédient  mécanique  qui  con- 
siste à  déterminer  une  première  chute  de  température  par 
Tintermédiairede  l'acide  sulfureux. 

Les  appareils  ordinairement  employés  dans  les  labora- 
toires étant  beaucoup  trop  faibles,  cette  disposition  parti- 
culière les  remplace  et  permet  de  produire  la  liquéfaction, 
^oit  de  l'acide  carbonique,  soit  du  protoxyde  d'azote,  sur 
une  grande  échelle  et  avec  une  facilité  parfaite. 

Ces  deux  circulations  d'acide  sulfureuse  et  d'acide  car- 
bonique sont  permanentes,  c'est-à-dire  que  toutes  les 
quantités  de  vapeur  qui  sont  aspirées  par  les  quatre  pompes 
sont  transformées  en  liquide,  puis  repassent  constamment 
dans  les  tubes,  où  elles  subissent  une  nouvelle  volati- 
lisation. 

Le  travail  mécanique  des  pompes  représente  exactement 
\2i  cause  productrice  du  froid,  ^ 

Une  relation  intime  réunit  ces  deux  quantités  :  d'une  part 
le  nombre  de  kilogrammètres  fournis  par  la  machine  à  va- 
peur motrice,  de  l'autre  le  nombre  de  calories  absorbées 
par  la  production  du  froid. 

Ànn.  de  Chim,  etde  Phj^s.t^^  Kérie,  t.  XIII.  ( Février  1878.)  13t 


178  R.    PICTET. 

Les  températures  tendent  vers  un  état  de  régime  qui 
correspond  au  plus  grand  froid  quMI  soit  possible  de  pro- 
duire avec  les  moyens  décrits. 

Supposons  que  nous  assistions  dans  l'intérieur  du  tube  A 
(PI,  I^fig»  I  et  a),  à  la  liquéfaction  de  i  gramme  d^ oxygène. 
Le  changement  d'état  gazeux  en  liquide  développe  beaucoup 
de  chaleur.  Que  devient  cette  chaleur? 

Elle  passe  d'abord  au  travers  des  parois  du  tube  A  et 
agit  sur  r acide  carbonique  solide  qui  baigne  ce  tube.  Une 
petite  portion  de  ce  corps  passe  aussitôt  de  Tétat  solide  à 
l'état  gazeux.  Cette  modification  utilise  toute  la  chaleur 
fournie  par  Toxygène. 

L'acide  carbonique  gazeux  entraine  cette  chaleur  dans 
les  pompes  O  et  (y  et  l'apporte  dans  le  condenseur  S.  Là, 
l'acide  carbonique  reprend  sa  forme  liquide  et  cède  toute 
cette  chaleur  qu'il  avait  soutirée  à  l'oxygène. 

La  chaleur  dégagée  par  ce  second  changement  d'état  tra- 
verse à  son  tour  les  parois  métalliques  du  tube  S  et  passe 
dans  l'acide  sulfureux  liquide  qui  noie  ce  tube. 

Ici,  comme  précédemment,  une  quantité  définie  d'acide 
sulfureux  liquide  se  vaporise  et  fixe  cette  chaleur  par  son 
mouvement  moléculaire. 

Les  vapeurs  d'acide  sulfureux  vont  aux  pompes  P  et  P' 
et  sont  comprimées  dans  le  condenseur  C. 

Le  dernier  changement  d'état  s'opère  et  l'acide  sulfureux 
liquide  est  reconstitué. 

La  chaleur  abandonnée  pendant  cette  transformation 
traverse  les  parois  métalliques  du  condenseur  C  et  passe 
dans  le  courant  d'eau  ordinaire  qui  traverse  ce  conden- 
seur. 

L'eau  sortant  de  cet  appareil  possède  donc  toute  la  char- 
leur  cédée  par  V oxygène,  et  cette  chaleur  est  jetée  dans 
l'égout  avec  l'eau  de  condensation. 

Nous  avons  donc  utilisé  dans  ce  dispositif  cinq  change^ 
ment  s  d'états  successifs,  pour  ôter  à  l'oxygène  delà  ch«- 


LIQUÉFACTIOM    DE   JU^OXTGÈNE.  1^9 

leur  à  une  basse  température  et  amener  cette  chaleur  dans 
Tégout  mécaniquement. 

Nous  pensons  que  les  explications  qui  précèdent  suffi- 
sent pour  donner  une  notion  exacte  des  appareils  que  nous 
avons  construits  et  permettront  de  suivre  avec  clarté  la 
marche  des  expériences  que  nous  allons  relater  dans  le 
Chapitre  suivant. 

m.  ^ 

Relation  des  expériences. 

Avant  de  procéder  à  des  expériences  définitives  aussi 
complexes  que  celles  qui  nous  occupent,  on  doit  d'abord 
vérifier  la  marche  de  chaque  appareil  séparément  et  passer 
ainsi  du  simple  au  compliqué. 

Ces  préliminaires  ressortent  uniquement  du  domaine  de 
la  pratique,  de  la  Mécanique  proprement  dite.  Les  équa- 
tions, les  théories  n'y  jouent  plus  aucun  rôle. 

Ce  qu'il  faut,  c'est  d'avoir  des  joints  absolument  étan- 
ches,  des  soupapes  hermétiques,  des  frottements  aussi  doux 
que  possible,  des  garnitures  parfaites,  des  manomètres 
bien  exacts  et  corrigés,  des  thermomètres  précis,  des  subr 
stances  chimiques  absolument  pures-,  ce  sont  mille  détails, 
trop  longs  à  énumérer,  mais  dont  chacun  est  si  important 
que  le  plus  léger  oubli,  la  plus  petite  inadvertance  com- 
promet à  fond  le  succès  final. 

La  moindre  rentrée  d'air,  si  facile  à  concevoir  pour 
quatre  pompes  industrielles  marchant  avec  un  vide  baro- 
métrique, serait  une  cause  inévitable  d'arrêt.  Il  faut  la  pré- 
venir à  tout  prix. 

Dans  la  fabrication  de  l'acide  carbonique  par  Faction 
chimique  de  l'acide  chlorhydrique  sur  le  marbre,  il  faut 
dessécher  les  gaz,  vérifier  les  matières  premièi*es,  purger 
d'air  le  gazomètre  et  les  appareils. 

Pour  l'oxygène,  le  chlorate  de  potasse  doit  être  absolu- 

11. 


iSo  B.    PICTET. 

ment  aec  et  pur.  Il  faat  l'introduire  sans  qu^aucun  corps 
étranger  puisse  s^y  associer. 

Enfin  il  faut  s'entourer  de  mille  précautions,  et  ce 
qu'on  peut  affirmer,  c'est  qu'on  n'en  prend  jamais  trop. 

A  ce  sujet,  nous  devons  un  témoignage  de  reconnais- 
sance à  M.  le  D'  Monnier,  professeur  de  Chimie  bio- 
logique à  l'Université  de  Genève,  qui  nous  a  prêté  son 
concours  avec  une  bienveillance  parfaite,  ainsi  que  son  pré- 
parateur, M.  Walter,  et  M.  Bûrgin,  ingénieur,  attachés 
notre  Société. 

Les  premières  expériences  partielles  consistèrent  à  ob- 
tenir régulièrement  les  basses  températures  et  à  les  main- 
tenir pendant  plusieurs  heures,  de  façon  à  être  sûr  de  cette 
partie  essentielle  des  préparatifs. 

Il  nous  fallut  plus  de  quinze  jours  de  tâtonnements  et 
d'essais  continuels  pour  arriver  à  un  bon  résultat. 

Voici  en  quelques  mots  ce  que  nous  apprirent  ces  essais  : 

Le  premier  condenseur  que  j'avais  fait  pour  l'acidç 
carbonique  était  un  serpentin  en  cuivre,  baigné  dan&  un 
récipient  de  même  métal  qui  contenait  l'acide  sulfureux 
liquide. 

Or,  lorsque  la  température  de  l'acide  sulfureux  des- 
cendait au-dessous  de  —  65?,  l'acide  carbonique  se  soli- 
difiait dans  l'intérieur  du  serpentin-,  la  pression  à  la 
compression  atteignait  en  quelques  instants  la  et  même 
i4  atmosphères,  parce  que,  tout  le  serpentin  étant  plein, 
la  surface  de  condensation  se  trouvait  presque  entièrement 
supprimée. 

Cet  accident  me  conduisit  à  la  disposition  indiquée  dans 
la  PL  /.  Le  serpentin  a  été  remplacé  par  un  tube  de  o",o6 
de  diamètre,  et  de  cette  façon  les  congélations,  si  elles  ont 
lieu,  ne  sont  plus  à  craindre,  car  le  volume  disponible  est 
très-suffisant  pour  recevoir  tout  le  gaz  du  gazomètre. 

Dans  cette  première  série  d'expériences  préliminaires, 
j'ai  marqué  les  tensions  maxima  des  vapeurs  d'acide  car- 


LIQUÉFACTION    DE    L^OXYGÈKE.  l8l 

bonique  et  de  protoxyde  d'azoie  correspondant  aux  tempé- 
ratures indiquées  par  un  thermomètre  à  alcool  construit 
par  la  maison  Salleron,  de  Paris. 

Ces  résultats  ont  donné  des  chiffres  passablement  dif- 
férents de  ceux  qui  se  trouvent  dans  les  Traités  de  Phy- 
sique, spécialement  ceux  qui  concernent  le  protoxyde 
d'azote. 

Je  résumerai  plus  loin  ces  données  numériques  en  un 
tableau.         ' 

Une  fois  rompu  aux  mouvements  coordonnés  qu  exigent 
la  mise  en  train  successive  des  quatre  pompes  et  la  ma- 
nœuvre des  robinets,  je  procédai,  le  st2  décembre  1877  au 
matin,  à  une  expérience  complète. 

Voici  le  relevé  de  mes  notes,  prises  pendant  Texpé- 
rience  : 

Première  expérience  du  22  décembre.  —  Les  pompes  sont 
mises  en  action  vers  9  heures  du  matin.  La  température 
s'abaisse  rapidement  dans  le  tube  R. 

9**3o"*.  La  température  est  —  55®.  On  met  les  pompes 
d'acide  carbonique  en  fonctionnement.  Le  gazomètre  des- 
cend. Pression  de  Tacide  carbonique,  6  atmosphères. 
Elle  monte  lentement  pendant  la  marche  jusqu'à  8  atmo- 
sphères. 

9**  50".  La  température  est  —  49**^  la  pression  8**",  5. 

Je  ferme  l'admission  de  Tacide  carbonique  aux  pompes. 

ioî*2o™.  Température  — 65°,  pression  3**"*, 9. 

Je  rouvre  Tadmission  du  gaz,  mais  légèrement. 

io**4o"*«  Température  —  60",  pression  5  atmosphères. 

800  litres  de  gaz  acide  carbonique  sont  déjà  liquéfiés. 

Le  givre  couvre  le  bas  du  manomètre  m'  à  oxygène. 

10** 5o™.  On  visse  Tobus  au  tube  A. 

L'obus  est  chargé  de  700  grammes  de  chlorate  de  po- 
tasse mélangés  à  25o  grammes  de  chlorure  de  potassium 
piles  epsemble,  tamisés  et  parfaitement  desséchés. 

1 1  heures.  On  allume  la  couronne  de  gaz  sous  l'obus. 


]B2  £•    F1C3TT. 

L'acide  carliDnîqae  est  introduit  pins  abcmdamiiieBt  dms 
les  pompes.  La  pression  monte  à  i  o  ainio?pbèrcs.  teimpé- 
rature  —  4^**.  On  est  certain  qne  l'acJde  caiiionîqne  a  paase 
en  totalité  dans  le  loue  tube  D.  parc^  que  le  cî^Te  pamit 
sur  le  tube  t?»  qui  déboncbe  au  liauî  du  tube  D. 

1 1^  i5*.  On  mtel  en  communicatioc  le  tube  (^  axec  Fa»- 
piration  deE  pompes:  la  tempérLture  df  l'acide  a 
devient  un  minimum.  —  1 30*". 

II** 35".  Le  manomètre  de  l'oy^irène  indique  un 
menœment  dépression.  euTiron  5  atmosphères. 

Le  p^me  des  deux  circulations  d'aride  sulfurenx 
diacide  cailKmique  est  parfaitement  établi. 

12**  lo*.  Le  manomètre   à  OTr^ènr  marque   5o  al 


12**  i6™.  La  pression   monte   à  6o   atmoçpbcres, 

ainsi  qn*il  suit  : 


fc         B 

2.23 
2.29 
2.34 

2.36 

2.37.25». 

V3S 

2.3q 

2.3q. 

2.40 

2.42 

2.40 
2.5o 

I. 

I.  5 


70 

8d 

100 
i5o 

2D0 
4tK> 

5io 


525 
5:>6 


4:« 


La  pr»sion  est  stationnaire:  donc  tons  les 
chimiques  et  physiques  sont  terminés. 


LIQUÉFACTION    DE    L^OXTGEJIE.  l83 

La  condensation  a  provoqué  l^abaissement  de  pression 
signalée  au  manomètre,  et  tout  le  volume  représenté  par 
la  capacité  intérieure  du  tube  A  est  plein  d'oxygène  li- 
quide. 

Il  y  a  certainement  excès  de  gaz,  ce  qui  motive  une  pres- 
sion supérieure  à  celle  de  la  tension  maximum  correspoB- 
dant  à  la  température  de  l'acide  carbonique  solide. 

l'^io'*.  La  pression  est  exactement  470  atmosphères. 

J'ouvre  le  robinet  à  vis  qui  ferme  le  tube  A. 

Un  jet  liquide  sort  avec  une  grande  violence  et  revêt 
l'apparence  d'un  pinceau  blanc  éclatant.  Une  auréole 
bleuâtre  entoure  ce  jet  surtout  dans  la  partie  inférieure. 

La  longueur  du  pinceau  liquide  est  d'environ  o**,  10 
à  o**,  la  sur  un  diamètre  de  i^,5  à  a  centimètres. 

Le  jet  dure  trois  à  quatre  secondes  environ. 

Je  referme  le  robinet  régleur. 

La  pression  est  encore  de  396  atmosphères. 

En  quelques  minutes,  elle  descend  à  35  a,  où  elle  reste 
stationnaire  à  peu  près  à  trois  minutes. 

1*^  i8™.  Je  rouvre  le  robinet  à  vis.  Un  second  jet  liquide 
sdt't,  semblable  au  premier;  mais,  tout  de  suite  après, 
le  gaz  s'échappe  sous  l'aspect  aériforme  bien  caracté- 
risé. 

Le  gaz,  en  se  détendant,  produit  un  fort  brouillard  par 
sa  condensation  partielle;  cependant  il  est  évident  qu'il 
sort  de  l'orifice  sous  un  état  différent  de  celui  qu'il  revê- 
tait au  début  :  il  n'y  avait  certainement  plus  de  liquide 
dans  le  tube. 

1^  19™.  La  pression  est  de  5o  atmosphères.  Le  gaz  s'é- 
chappe en  continuant  de  produire  un  brouillard  bleuâtre 
très-apparent,  mais  sans  aucune  apparence  d'entraînement 
de  liquide. 

Des  charbons  légèrement  enflammés  placés  sous  la  lance 
au  moment  du  second  jet  s'allumèrent  avec  une  violence 
inouïe,  en  projetant  des  étincelles  de  tous  les  côtés. 


l84  H*    PIGTET* 

,  Cette  première  expérience  suffit  amplement  pour  dé- 
montrer expérimentalement  que  Toxygène  peut  se  liquë* 
fier. 

La  marche  des  pressions  est  un  caractère  plus  positif 
encore,  s'il  est  possible,  de  cette  démonstration  que  les 
apparences  du  jet  à  la  sortie.  Cependant  Taccord  complet 
qui  règne  dans  ces  phénomènes  connexes  et  la  possibilité 
d'introduire  dans  les  calculs  toutes  ces  données  numéri- 
ques nous  ont  engagé  à  reproduire  plusieurs  fois  de  suite 
cette  même  expérience,  pour  arriver  à  déterminer  la  iten^ 
site  de  Toxygène  liquide,  ainsi  que  la  tension  maximum 
pour  une  température  définie. 

Ces  deux  éléments  physiques  sont  les  plus  importants  à 
connaître  et  caractérisent  les  propriétés  générales  du  nou- 
veau liquide. 

Dans  ce  but,  nous  avons  reproduit  cinq  expériences  con- 
sécutives, qui  permettent  d'obtenir  des  moyennes  exactes 
numériques. 

Les  quantités  que  nous  avons  mesurées  avec  le  plus  de 
précision  sont  : 

i^  Le  poids  total  du  chlorate  de  potasse  et  du  chlorure 
de  potassium  introduit  dans  l'obus; 

7p  La  température  à  laquelle  la  réaction  a  lieu; 

3"^  Le  volume  exact  du  chlorure  de  potassium  qui  con- 
stitue le  résidu  ; 

4^  Le  volume  occupé  par  l'oxygène  ''comprimé  ; 

5°  Le  volume  du  tube  où  l'oxygène  doit  se  condenser; 

6°  La  pression  théorique  à  laquelle  on  devrait  parvenir 
s'il  n'y  avait  pas  de  condensation  ; 

7^  La  pression  obtenue  au  moment  de  la  décomposition 
du  chlorate  de  potasse  ; 

8^  La  pression. statique  après  la  condensation  ; 

9^  La  marche  du  manomètre  après  le  premier  jet,  lors- 
qu'une seconde  condensation  commence; 

lo^  La  pression  statique  après  la  condensation,  lorsque 


LIQUÉFÀCTIO»    DE   l'oXYGÈRE.  t8S 

* 

le  tube  est  entièrement  rempli  pour  la  seconde  fois^  cette 
pression  est  caractërisëe  par  la  fixité  de  raigii,iUe  durant 
plusieurs  minutes;  \ 

11^  Mêmes  observations  après  le  second  jet  \ 

la^  Déterminer,  par  la  position  de  Taiguille  du  mano- 
mètre, la  pression  maximum  à  laquelle  se  produit  la  con- 
densation. 

Cette  position  est  obtenue  lorsque  la  chute  de  Tai- 
guille  est  inférieure  à  celle  qui  devrait  correspondre  à  la 
condensation  d'un  volume  de  liquide  égal  au  volume  du 
tube  refroidi. 

La  fixité  de  cette  pression  est  un  caractère  précis  et 
infaillible  qui  permet  aisément  de  déterminer  cette  tension 
maximum. 

i3^  La  température  de  F  acide  carbonique  solide  dans 
l'enveloppe  du  tube  A  ; 

i4^  La  densité  de  Toxygène  gazeux. 

Ces  diverses  données  numériques  permettent  de  déduire 
la  densité  de  Vbxjgène  liquide  avec  une  assez  grande 
exactitude,  ainsi  que  nous  le  montrerons  plus  loin.  Comme 
il  n  est  pas  utile  d'encombrer  ce  Mémoire  de  chiffres,  nous 
nous  bornerons  à  relater  une  des  cinq  expériences,  faite 
le  27  décembre,  de  8  à  10  heures  du  soir. 

Les  autres,  ayant  eu  liejii  dans  des  conditions  analogues, 
ne  diffèrent  que  par  les  variations  observées  dans  la  durée 
des  jets  et  par  quelques  écarts  dans  les  pressions  extrêmes, 
écarts  que  nous  signalerons  dans  les  tableaux. 

Expérience  du  vj  décembre,  de  S  à  10  heures  du  soir. 
—  Les  pompes  à  glace  sont  mises  en  action  vers  8  heures 
et  peu  après  celles  à  acide  carbonique* 

A  9^  3o",  le  givre  apparaît  sur  le  tube  de  retour  c^,  te 
qui  montre  que  le  grand  tube  D  est  complètement  rempli 
d'acide  carbonique  solide. 

Notre  manomètre  métallique  ayant  un  écart  au  départ 
de  29  atmosphères,  nous  donnons  ci-dessous  les  pressions, 


|8C  IL.    FIGTET* 

corrigées  de  cette  différence  du  cadran,  différence. sans 
importance  du  reste  quant  à  leur  valeur  absolue* 

■       Pression, 
h       m      8  atm 

8 .  3^ •      5o 

O  •  0%j  •  20  ••••••••••••  DO 

8.45      70 

S. 00.  IQ 00 

8 . 5 1  •  40 •      9^ 

8.5^      100 

8.52. 3o aïo 

o  •  O^  •  4>3  ••••••••>•••   'OIO 

O • 92 • 99 ••••••••••••   000 

8.53 ^Qo 

o • 00 •IO*a*««»«***»*     020 

'  M  o • 30 ■ 00  ««X ••!•••■••       929 

O  •  90  •  49  •  ••«••••••••        9213 

8.54      ;    525 

8.55 5a3 

8,57 5oo 

•  8.59 489 

9.  O       4^0 

9-5      475       • 

9.10 472 

9'*5      47^ 

917      47Ï 

La  pression  étant  devenue  stationnaire,  j^ouvrele  robinet 
de  fermeture. 

Un  jet  liquide  s^échappe,  éclairé  par  un  faisceau  de  lu- 
mière électrique. 

On  distingue  nettement  les  mêmes  apparences  que  nous 
avons  déjà  décrites. 

Au  moment  de  la  fermeture,  la  pression  est  exactement 
de  432  atmosphères. 


LIQUÉFACTION    DE    l'oXYGENE. 


187 


h       m 

9.18 

9-^9 
9.20 

9.21 

9.22 

9.23 

9.24 

9.25 

9.26 

9  27 
9.28 

9-^*9 
9.30 

9.3i 

9.32 

9.35 


Pression, 
s  atm 

•  •  •  •  •  4^9 

4^^ 

^12 

/. 4o5 

395 

390 

. 386 

383 

38o 

379 

378 

378 

378 

378 

378 

378 


La  pression  est  devenue  stalionnaire  une  seconde  fois, 
le  manomètre  a  baissé  progressivement  de  432  atmosphères 
à  378,  où  il  est  de  nouveau  fixe.  Différence^  54  atmo- 
sphères. 

J'ouvre  le  robinet  de  sortie.  Il  s'échappe  un  jet  absolu- 
ment semblable  au  premier  et  sensiblement  de  même 
durée.  Dès  quMl  y  a  trace  de  gaz  à  Torifîce  de  sortie,  j'en 
conclus  que  tout  le  liquide  s'est  écoulé;  je  ferme  le  robinet 
instantanément» 

Pression. 


m 


atm 


9.35.15. 

291 

9.36  . 

285 

9.37     . 

280 

9-38   . 

276 

9-39   . 

272 

9.40   . 

272 

9.41   . 

272 

l88  H*    PICTKT. 

Pression, 
h        m  atm 

9-4^ 272 

9-43... 272 

9-44--- ^1^ 

9-45 27^ 

9-46 272 

g.5o. 272 

La  pression  est  pour  la  troisième  fois  constante^  seule- 
ment elle  n'a  baissé,  en  quinze  minutes,  que  de  19  atmo- 
sphères. 

La  précédente  fois  elle  avait  baissé  dans  le  même  temps 
de  54  atmosphères. 

J'ouvre  de  nouveau  le  robinet  de  réglage. 

n  sort  peu  de  liquide  et  presque  immédiatement  le  gaz 
seul  s^échappe. 

La  transition  est  tellement  visible  qu'elle  a  été  saisie  par 
plus  de  vingt  assistants  au  même  instant. 

Le  brouillard  produit  par  la  détente  du  gaz  est  extrême- 
ment marqué,  mais  l'apparence  générale  du  jet  est  pro- 
fondément modifiée  et  Ton  ne  saurait  confondre  ces  deux 
phases  successives. 

A  partir  de  cet  instant,  le  manomètre  ne  descend  pins, 
lorsqu'on  ferme  le  robinet;  il  est  absolument  fixe  après 
chaque  fermeture. 

PressioD. 

h      m  atm 

9.52 '  225 

9.53 225 

Nouveau  jet  gazeux. 

h       m 

9-^4 190 

9.55 190 

Jet  gazeux. 

h       m 
•  Q • 90.  **•.••••*«■•..        1 40 

9-57 • 143 


LIQUÉFAGTIOW    DB  L^OXYGÈNE.  l8p 

Jet  ^seax  assez  long. 

h      m  atm 

^    9-54 72 

9.55 .  ^2 

Dernier  jet  gazeux. 

h      m 
9.56.  ..••.,.. O 

L'expérience  est  terminée. 

On  enlève  Tobus  pendant  quUl  est  encore  diaud^  afin 
d'éviter  que  le  bouchon  à  vis  ne  se  grippe. 

On  bouche  lorifice  de  Tobus  avec  un  bouthon  de  li^ 
et  on  le  laisse  refroidir. 

Lorsqu'il  est  froid,  on  verse  de  l'eau  dans  Tintérieur^  de 
manière  à  faire  affleurer  le  niveau  au  joint  de  cuivre  sur 
lequel  vient  plaquer  le  bouchon  à  vis. 

Il  est  évident  que  cette  eau  occupe  le  même  volume  que 
remplissait  l'oxygène  pendant  l'expérience. 

On  connaît  exactement  le  poids  de  l'eau  versée  dans 
l'obus  au  moyen  de  deux  pesées  successives  de  Téprouyette 
dans  laquelle  cette  eau  se  trouvait. 

On  Ja  pèse  ayant  le  remplissage  et  après.  La  différence 
correspond  au  poids  de  l'eau  versée. 

Ce  poids  a  été  trouvé  exactement  de  944  grammes^  donc 
le  volume  est  de  944  centimètres  cubes. 

Une  autre  détermination,  que  l'on  fait  également  pen- 
dant la. durée  de  l'expérience,  consiste  à  lire  la  pression  P 
correspondant  à  l'aspiration  des  pompés  à  acide  carbo- 
nique, pour  connaître  la  température  à  laquelle  la  liqué- 
faction a  eu  lieu.  Ces  observations  ont  été  faites  k  plusieurs 
reprise$et  les  résultats  sont  tellement  identiques  dans  toutes 
les  expériences  que  les  moyennes  sont  absolument  exactes. 

Mous  signalerons  ici  un  point  secondaire,  mais  qui 
prend  de  l'importance  pour  l'évaluation  de  la  température 
de  l'obus  pendant  l'opération. 

Afin  d'éviter  tout  danger  d'explosion,  si  un  accident 


tgO  R.    PICTET. 

imprévu  venait  à  se  produire,  j*ai  entouré  Tobus  de  trois 
gros  anneaux  en  fonte,  superposés  les  uns  sur  les  autres. 
Ils  forment  une  sorte  d'épais  fourreau  ayant  o"^,  5o  de  haut, 
un  diamètre  intérieur  de  o™,  23  et  un  diamètre  extérieur 
de  32*^,5. 

Entre  Tobus,  qui  est  au  centre,  et  les  parois  de  ce  four- 
reau il  y  a  un  intervalle  circulaire  de  o'",o3,  par  où  cir- 
culent les  flammes  de  la  couronne  de  gaz. 

Cette  disposition  permet  à  Tobus  de  se  chauffer  très- 
également  partout  à  là  fois,  et  présente  surtout  l'avantage, 
lorsque  la  température  est  assez  élevée  pour  amener  la 
réaction  chimique,  de  conserver  cette  température  très- 
longtemps  sans  grande  variation.  Le  rayonnement  exté- 
rieur ne  peut  pas  agir  sur  Tobus  directement,  mais  n'in- 
fluence que  le  fourreau,  dont  Ténorme  masse  représente 
un  magasin  de  chaleur  suffisant. 

Nous  avons  cherché  dans  les  auteurs  les  plus  autorisés 
les  éléments  nécessaires  à  la  détermination  de  cette  tem- 
pérature assez  haute.  £»oit  par  le  ramollissement  du  verre, 
soit  par  les  températures  qui  amènent  le  rouge  sombre, 
soit  par  la  fusion  de  métaux,  soit  par  l'usage  du  thermo- 
mètre à  air,  on  peut  conclure  que  cette  température  est 
comprise  entre  480  et  5oo  degrés;  une  température  de 
5^5  degrés  serait  un  maximum  et  480  degrés  serait  trop 
faible. 

Gomme  la  flamme  du  gaz  est  éteinte  dès  que  la  réaction 
a  eu  lieu,  la  température  reste  &  peu  près  constante  pen« 
dant  la  demi-heure  qui  suit.  Nous  l'estimerons'  dans  nos 
calculs  à  485  degrés,  en  nous  basant  sur  le  fait  que  nos  ex- 
périences ont  assez  de  durée,  pour  donner  à  ce  chiffre  infé- 
rieur une  plus  grande  exactitude  qu'au  chiffre  supérieur. 

Sur  ce  point  là,  une  erreur  d'une  vingtaine  de  degrés  est 
admissible,  mais  elle  n'a  qu'une  influence  assez  faible  sur 
les  résultats  numériques.  ^ 

Sur  les  cinq  expériences  faites  pour  la  liquéfaction  de 


LIQUÉFACTIOiy    DE   I.'0XYGÈIfE.  I9I 

Toxygëne,  trois  ont  été  faites  à  Taide  de  Tacide  carbonique^ 
et  deux  à  Taîde  du  protoxyde  d'azote. 

Elles  ont,  du  reste,  été  dirigées  de  la  même, manière  et 
dans  des  conditions  aussi  identiques  que  possible. 

Ces  expériences  ont  eu  lieu  : 

i^  Le  lundi,  24  décembre,  de  9  heures  à  1  heure  avec 
Tacide  carbonique  ; 

!À°  Le  jeudi  27  décembre,  de  10  heures  à  midi,  avec 
Tacide  carbonique  ; 

3^  Le  jeudi  27  décembre,  de  8  à  10  heures  du  soir,  avec 
Tacide  carbonique  ; 

4^  Le  samedi  29  décembre,  de  4  ^  6  heures  du  soir,  avec 
le  protoxyde  d'azote  ; 

-     5^  Le  vendredi  4  janvier,  de  4  à  6  heures  du  soir,  avec 
le  protoxyde  d'azote. 

Nous  n'avons  pas  l'intention,  comme  nous  l'avons  dit,  de 
donner  in  extenso  tous  les  chiffres  correspondant  à  ces  expé* 
riences  par  heures  et  minutes,  mais  nous  groupons  dans  le 
tableau  ci^après  les  données  essentielles  qui  caractérisent  les 
phénomènes  de  liquéfaction  et  qui  serviront  de  base  au  calcul. 

Dans  chaque  expérience  nous  avons  introduit  dans  Tobus 
rigoureusement  la  même  quantité  de  chlorate  de  potasse, 
mélangé  de  chlorure  de  potassium. 

Ces  produits,  préparés  avec  le  plus  grand  soin  dans  le* 
laboratoire  de  Chimie  de  M.  Monnier,  ont  été  séchés,  fon- 
dus, puis  piles  avant  d'être  mis  dans  le  récipient. 

Les  quantités  dont  j'ai  fait  usage  dans  ces  cinq  expé* 
riences  étaient  : 

Chlorate  de  potasse 700'' 

Chlorure  de  potassium. .../..     3oo 

Les  observations  les  plus  importantes  se  rapportent  à 
cinq  phases  successives  dans  chaque  expérience.  Nous  enre- 
gistrons : 

1^  La    pression    maximum  obsen^e  au  manomètre 


19^  li*    PICTBT. 

après  la  production  totale  du  gaz  et  après  que  la  con-' 
densation  iest  opérée  dans  le  tube. 

Cette  pression  est  stationnaire  au  moins  pendant  un 
quart  d'heure. 

Elle  est  toujours  inférieure  à  la  pression  marquée  par  le 
manomètre  a  la  fin  de  la  réaction  chimique,  réaction 
extrêmement  brusque. 

a®  La  pression  après  le  premier  jet,  lorsque  l'on  yoît 
distinctement  que  le  jet  liquide  est  remplacé  par  un  jet  • 
gazeux. 

On  ferme  le  robinet,  et  Ton  marque  la  pression  instan- 
tanément. 

3^  La  pression  stationnaire  gui  suit  rabaissement  de 
pression  constamment  consécutif  à  cette  dernière  opéra- 
tion» 

La  condensation  de  l'oxygène  dans  le  tube  entraîne  cette 
diminution  de  pression. 

Quand  le  tube  est  plein  une  seconde  fois,  la  conden« 
sation  s'arrête  forcément  et  la  pression  devient  station- 
naire. 

4^  La  pression  après  le  deuxième  jet, 

5^  Im  pression  stationnaire  après  le  deuxième  jet. 

Dans  toutes  nos  expériences,  le  troisième  jet  n'a  jamais 
été  complet  ;  il  a  toujours  été  notablement  inférieur  aux 
deux  premiers,  ce  qui  prouve  que  la  condensation  n'a  pas 
pu  être  assez  abondante  pour  remplir  trois  fois  le  tuba 
refroidi. 

Nous  verrons  dans  le  Chapitre  suivant  comment  ces  don- 
nées numériques  peuvent  fournir  la  densité  de  l'oxygène  . 
liquide. 

Voici  le  tableau  des  cinq  expériences,  que  nous  dési- 
gnons par  les  numéros  1  à  5  en  tête  de  chaque  colonne  cor* 
respondante. 

Les  pressions  sont  corrigées  de  l'écart  du  manomètre  et 
représentent  les  .tensions  effectives. 


LIQUÉFÀCTIOir   DE    l'oXTGÈNE. 


ts3 


Tableau  des  résultats  numériques  obtenus  dans  cinq  expériences 
consécutives  sur  la  liquéfaction  de  l'oxygène. 


DÉSIGNATION  DES  PRESSIONS. 


i^'  Pression  maximum  stationnaire  de 

l'oxygène  avant  la  sortie  du  i*'' jet. 
a*>  Pression  indiquée  immédiatement 

après  le  i*"  jet  liquide. 
3<^  Pression  stationnaire  avant  le2*jet 

liquide,  durant  quelques  minutes. 
4°  Pression  après  le  a*  jet. 
5<*  Pression  stationnaire  avant  le  3*  jet 

liquide. 
6^  Pression  immédiatement  après  le 

3*  jet?  qui  est  très-court. 
7*»  Pression  stationnaire  après  le  3*  jet, 

environ  cinq  minutes  plus  tard. 
8**  Pression  après  le  4"  jet,  toujours 

gazeux. 


NUMÉROS  DES  EXPÉRIENCES. 


atm 
470 

367 

3o8 
385 

274 

n 


atm 
471 

339 
290 

271 

245 
253 


atm 
471 

433 

378 
291 

272 

V 


atm 
469 

400 

346 
285 

25x 

.2x5 

218 


atm 
469 

416 

36i 
296 

253 

205 
912 


Dans  le  Chapitre  suivant  nous  nous  servirons  des  résul- 
tats numériques  contenus  dans  ce  tableau  pour  le  calcul 
de  la  densité  de  l'oxygène  liquide  par  le  moyen  de  deux 
méthodes  différentes. 


IV.  —  Calcul  de  la  densité  de  l'oxtgàks  LiQtnDS. 

Tensions  maxima. 

Si  nous  discutons  les  résultats  des  expériences  relatées 
dans  le  Chapitre  précédent,  nous  pouvons  en  déduire 
plusieurs  conséquences  immédiates  sur  les  propriétés  phy- 
siques de  Toxygène  liquéfié. 

Pour  cela,  calculons  d^abord  le  poids  d^oxygène  dégagé 
pendant  la  réaction. 

Ann.  de  Chim,  et  de  Ph^s.,  5«  série,  t.  XUI.  (Février  1878.)  1 3 


194  ^*     PICTKT. 

Nous  avons  la  formule 

2KCI0»  =  KCl-i-0». 

En  la  rapportant  à  700  grammes  de  chlorate  de  potasse, 

on  a 

700  X  39, 16  =  274^%  12, 

Pour  avoir  le  volume  de  cette  masse  de  gaz  à  zéro,  il 
faut  diviser  ce  poids  par  le  poids  spéciGque  d, 

^=r  1,437  (Regnault), 

et  l'on  trouve 


1,437  -'9'    '*• 


Ces  191^^%  4  sont  portés  à  une  température  de  485  de- 
grés et  remplissent  un  volume  composé  de  deux  parties  : 

i^  L'espace  vide  au-dessus  du  chlorure  de  potassium; 

2^  Le  volume  du  tube  A,  de  Tobus  au  manomètre. 

Appelons  i^  le  premier  et  »/  le  second. 

Supposons  que  i^  et  1/  soient  à  la  même  température  de 
485  degrés.  Calculons  la  pression  finale  que  doit  produire 
la  production  de  1 91'*%  4  <!' oxygène^ 

On  suppose  exacte  la  loi  de  Mariotte  et  de  Gay-Lussac, 
et  l'on  pose 
f I )  p  —  ^9' »4  (274 +485)  1000 ^ 

^   ^  274  (P -HP')  ' 

1^  et  «^  s'expriment  en  centimètres  cubes. 

Les  pesées  de  Teau  nécessaire  pour  remplir  Tobus  après 
les  expériences  donnent  exactement 

p  =  944"^. 

Quant  à  i^,  il  est  égal  à  la  section  du  tube  multipliée 
par  sa  longueur  totale. 

Le  tube  a  o™,  004  de  diamètre  et  4^9 16  ^^  longueur; 
donc 

i/  =  ir(o,2)'  X  4"» '6  =  52*^,  25. 


LIQUÉFACTION   DB   l' OXYGÈNE.  IQS 

Remplaçant  dans  Téquation  (i)  i^  et  i^  pa^:  leurs  valeurs, 
on  en  tîre  la  valeur  de  P.  Nous  tenons  compte  de  la  tem- 
pérature de  485  degrés,  qui  agît  sur  le  volume  i^.  En  pre- 
nant pour  coefficient  la  dilatation  du  fer, 

K  =  0,0000122045, 

on  a  la  formule  finale 

(5,)       p^  191,4  (274 -+<  485)  1000 


^74[944(^  -h  485 X  3x0,0000122045)  -4-52,25] 
P  =  532«^^™,io. 

Nous  voyons  par  là  que  la  pression  correspondant  à  ia 
production  de  191^^^,  4  d^oxygène  est  au  maximum  de 
532»*°^,  10. 

Cette  pression  n'a  pas  été  atteinte,  mais  on  s'en  est  pas- 
sablement rapproché;  nous  avons  vu  le  manomètre  à  522, 
524)  5i7  atmosphères,  mais  il  n'a  jamais  dépassé  526 
(  troisième  expérience  ) . 

Par  contre,  la  pression,  après  avoir  assez  rapidement 
baissé,  s'arrête  à  une  valeur  fixe  pendant  plusieurs  mi- 
nutes. 

Cet  arrêt  dans  la  marche  de  T aiguille  du  manomètre 
est  un  indice  évident  que  la  condensation  s'est  aussi  arrêtée. 
Quelle  peut  en  être  la  cause  ? 

Une  seule  est  admissible,  c'est  que  le  tube  de  conden- 
sation est  rempli  de  liquide.  S'il  ne  l'était  pas,  la  conden- 
sation continuerait  infailliblement,  puisque  la  température 
est  maintenue  constante  par  l'action  de  plus  de  2  kilo- 
grammes d'acide  carbonique  solide  ou  de  protoxyde  d'a- 
zote. 

11  faut  donc  connaître  d'une  manière  précise  le  volume 
du  tube  où  la  condensation  peut  s'opérer. 

Entre  le  manomètre  m  et  le  sommet  du  tube  qui  contient 
l'acide  carbonique,  je  mesure  exactement  une  longueur  de 
3™,62. 

i3. 


ig6  R*    PIGTET. 

Donc  le  volume  t^  (où  Toxygène  se  liquéfie)  est  de 

if=zn  (0,2)'  X  3*" ,62  —  45^^467. 

La  température  de  ce  tube  est  d'environ  — lao®,  ce  qui 
contribue  à  diminuer  son  volume^  d'autre  part,  il  est  sou- 
mis à  l'intérieur  à  une  pression  considérable,  ce  qui  tend  à 
l'augmenter.  Ces  deux  causes  de  changements  produisent 
toutes  deux  des  efîets  très-petits,  numériquement  parlant, 
et  agissent  en  sens  contraire.  Nous  pouvons  donc,  sans 
grande  erreur,  nous  servir  de  ce  nombre  tel  quel. 

Calculons  pour  chaque  expérience  la  différence  qui 
existe  entre  la  pression  théorique,  à  laquelle  on  aurait  dû 
parvenir  sans  condensation,  et  la  pression  stationnaire 
obtenue  avant  le  premier  jet  ^  on  aura  de  cette  manière  une 
estimation  de  la  variation  de  volume  correspondant  au 
changement  d'état  opéré. 

1.  1.  8.  4.  8. 

Pression  théorique. .   532, 10  532, 10  532, 10  532, 10  532, 10 
Pression  observée. . .  ^'jo        47^         47  ^         4^        4^ 

Différence 62,10     61,10     61,10     63, 10     63, 10 

La  moyenne  de  ces  cinq  expériences  donne  pour  la  dif- 
férence le  nombre  62''",  i . 

On  peut  calculer  le  poids  en  grammes  représenté  par 
la  variation  de  i  atmosphère^  appelons-Fe ^.  On  a  la  for- 
mule 

donc  le  poids  F  de  l'oxygène  liquéfié  est  égal  k 

(5)  *'  =  li^|r^  =  6>«M, 

'  532*%  lo 

plus  le  poids  du  gaz  compris  dans  le  tube  avant  la  liquér 
faction. 

Nous  avons  supposé  dans  la  recherche  de  la  pression 


LIQUÉFACTION    DE    l'oXYGÈHE.  I97 

maximum  théorique  que  le  volume  total  i^  +  i^  occupé  par 
le  gaz  était  à  la  température  de  +  485^. 

Nous  devons  donc  calculer  le  poids  du  gaz  comprimé 
dans  le  volume  s^  à  485  degrés. 

Ce  poids  est  donné  par  la  proportion 

(6)  996,25 :274>  12  =  45*467  ••2^> 
d'où  X  est  déduit^  et  Ton  a 

ar=  I2«',5i. 

La  variation  moyenne  de  la  pression  observée  avant  le 
premier  jet  indique  la  variation  du  volume  correspondant 
auchangement  d'état;  donc  le  poids  du  gaz  condensé  est 
la  somme  du  poids  du  gaz  qui  se  trouv^ait  dans  le  tube 
aidant  la  condensation,  plus  le  poids  du  gaz  représenté 
par  la  diminution  de- pression. 

On  a  pour  sa  valeur,  en  appelant  ce  poids  R, 

(7)  R  =12,51 +62,1  xo8',5i5i7, 

R  =  44^',  5o2. 

■ 

Le  volume  occupé  par  ce  liquide  est  égal  à  u'  \  donc,  en 
appelant  J  la  densité  de  l'oxygène  liquide, 

et  l'on  en  tire 

44>5o2 

^^^=:^:=  0,9787. 

Telle  est  donc  la  densité  de  l'oxygène  liquide,  déduite 
des  observations  directes  relatées  dans  les  cinq  expériences 
faites  dans  ce  but. 

M.  Dumas,  Secrétaire  perpétuel  de  l'Académie  des 
Sciences  de  Paris,  nous  écrivait,  à  la  date  du  26  décembre 
dernier,  les  observations  suivantes  : 

«  Voulez-vous  me  permettre  d'ajouter  que,  si  je  ne  me 


198  B.    PICTET. 

trompe,  la  densité  de  l'oxygène  liquide  doit  être  égale  à 
celle  de  l'eau. 

»  La  densité  du  soufre  étant  2,  ce  que  j'ai  appelé  il  7  a 
près  de  soixante  ans,  à  Genève  même,  son  volume  atomique 
égale 

32 


—  j 
2 


soit  16. 

»  Les  corps  isomorphes  ayant  même  volume  atomique, 
si  celui  de  Toxygène  est  pris  pour  16,  on  aura,  pour  la 
densité  de  Toxygène  solide, 

16 
T6='' 

et  à  peu  près  ce  .chiffre  pour  la  densité  à  Fétat  liquide.. 

»  Le  volume  atomique  du  phosphore  étant  i5,5,  on  au- 
rait, pour  l'azote, 

et  plus  probablement  o,4S,  à  cause  de  l'état  dédoublé  de 
sa  molécule. 

)>  Le  volume  atomique  du  magnésium  étant  i3,8,  celui 
de  Thydrogène  serait 

1 
-—— -  =  0,07  au  moins. 
10,0 

»  Ce  volume  pourrait  être  beaucoup  plus  élevé,  si  l'hy- 
drogène, comme  le  potassium  et  le  sodium,  offrait  à  l'état 
libre  un  volume  très-supérieur  à  celui  qu'il  affecte  à  l'état 
combiné. 

»  Ces  présomptions  peuvent  avoir  quelque  intérêt  pour 
se  rendre  compte  de  l'éiat  probable  du  liquide  que  vous 
devez  obtenir.  Il  serait  très -intéressant  de  savoir  si  la  den- 
sité de  l'oxygène  liquide  se  rapproche  ou  s'éloigne  de  celle 
qu'on  serait  porté  à  lui  attribuer. 

»  Mais  le  problème  de  Mécanique  moléculaire  dont 


LIQUÉFACTION    DE    l'oXYGÈME.  IQQ 

VOUS  poursuivez  la  solution  vous  réclame  tout  entier,  et 
je  me  reprocherais  de  vous  en  distraire,  malgré  Tintérèt 
paternel  que  je  porte  à  la  détermination  du  volume  ato- 
mique. 

»  P. -S.  —  Si  l'hydrogène  est  un  mêlai,  comme  je  me 
suis  permis  de  le  supposer  dans  ma  jeunesse,  sa  conden- 
sation ne  pourrait-elle  pas  donner  lieu  à  un  amalgame  so- 
lide en  le  comprimant  sur  le  mercure  congelé? 

»  En  ce  cas,  la  tension  pourrait  être  détruite  ou  dimi- 
nuée; » 

Nous  sommes  très-heureux  d'avoir  pu  confirmer  expéri- 
mentalement les  prévisions  de  notre  illustre  maître,  et 
nous  pensons  que  cette  vérification,  obtenue  soixante  ans 
après  la  fondation  de  la  théorie  atomique,  est  un  beau 
trfomphe  pour  son  plus  ardent  et  savant  promoteur. 

Seconde  méthode,  —  Les  expériences  dont  nous  avons 
donné  les  chiffres  essentiels  permettent  une  sejconde  esti- 
mation de  la  densité,  estimation  moins  précise  que  celle 
que  nous  avons  obtenue  par  les  calculs  précédents,  mais 
qu'il  ne  faut  point  cependant  dédaigner. 

Voici  comment  nous  comprenons  cette  seconde  recher- 
che :  le  robinet  de  réglage  a  été  fermé  après  le  premier  jet 
d'oxygène  liquide,  au  moment  très-marqué  où  le  jet  li- 
quide était  remplacé  par  un  jet  gazeux. 

Le  brouillard  épais  produit  par  la  condensation  de 
Foxygène  à  Tétat  vésiculaire,  au  moment  de  la  détente,  ne 
trouble  absolument  pas  cette  observation,  qui  peut  se  faire 
par  plusieurs  assistants  simultanément. 

Donc,  au  moment  de  la  fermeture  du  robinet  à  vis,  on 
peut  assurer  que  tout  le  liquida  condensé  est  parti  par 
Torifice.  Le  tube  doit  être  plein  de  gaz  sous  pression. 

Ce  gaz  sort  d'un  obus  où  la  température  est  élevée  et 
pénètre  dans  le  tube  puissamment  refroidi. 

11  nous  faut  estimer  la  température  probable  du  gaz  au 
moment  de  la  fermeture  du  robinet. 


aOO  R.    PICTET. 


On  sait  que  les  gaz  prennent  avec  une  facilité  extraordi*- 
naire  la  température  des  enveloppes  qui  les  contiennent, 
surtout  quand  les  espaces  sont  restreints. 

Nous  devons  donc  déduire  la  température  du  gaz  du 
rapport  des  écarts  de  température  que  subiront  le  gaz  ^ui 
se  refroidit  et  le  cuivre  du  tube  qui  s'échauffe. 

On  connaît  le  poids  de  ces  deux  corps,  leurs  chaleurs 
spécifiques  et  leurs  températures  extrêmes  :  donc  la  solution 
est  possible. 

Calculons  le  poids  A  du  tube  de  cuivre. 

Les  dimensions  sont  : 


m 


Diamètre  extérieur   o,oi5 

»         intérieur o,oo4 

Longueur 3,620 

Densité SyQ^o 

On  a 

(8)  A=i7r(o,75)'—  (o,2)»362X8«%95, 

A  =  53198%  3. 

A  la  fin  du  premier  jet,  après  la  condensation  de  l'oxy- 
gène et  sa  projection  au  dehors,  on  peut  estimer  que  le 
maximum  de  la  température  du  cuivre  est  de  —  110^,  li- 
mite supérieure. 

Appelons  oc  le  nombre  de  degrés  dont  la  température  du 
cuivre  s'élèvera,  et^  le  nombre  de  degrés  correspondant  à 
rabaissement  de  température  de  F  grammes  de  gaz  compris 
dans  le  tube  sous  une  pression  P. 

On  peut  former  les  deux  équations 

(9)  5,3193  ca:  =  FK/, 

et 

(10)  ar-4-/=r485  —  (—  110)  =595. 

Dans  ces  équations,  c  est  la  chaleur  spécifique  du  cuivre, 
soit  0^094»  et  K  la  chaleur  spécifique  à  pression  constante 


LIQUÉFACTION    DE    L^OXYGENE.  aOI 

de  Toxygène,  soit  0,218a.  Quant  &  F,  il  est  donné  par  la 

formule 

i..\     T?     0,045467  X  1,4^7  (274  -f-  3:  —  1 10)  X  P 

274 

Résolvant  ces  équations^  nous  trouvons  comme  solutions 

numériques 

x=z     40, 

r  =  59I^ 

F=  i6«',59 
pour  P  =  4oo**"', 

Pour  chacune  des  cinq  expériences  faites,  nous  ajoute- 
rons au  poids  du  gaz  contenu  dans  le  tube  le  poids  d'oxy- 
gène correspondant  à  la  diminution  de  la  pression  obser- 
vée, au  moment  où  elle  est  redevenue  stationnaire. 

La  somme  représentera  le  poids  de  Toxygène  liquide 
avant  la  sortie  du  deuxième  jet. 

Première  expérience.  —  La  pression  initiale  est  de 
367  atmosphères.  La  formule  (11)  appliquée  donne  pour  F 

F  =  Q>q45467><:  1.437  ^168x867  ^    ,^,^     5^ 

274 

D'un  autre  côté,  nous  savons  que  la  pression  a  diminué 
progressivement  de  la  pression  întiliale  367  à  la  pression 
stationnaire  3o8.  La  difierence  est  de  59  atmosphères. 

Le  poids  correspondant  à  cette  différence  est  F. 

F'  =  o,5i5i7  X  59  =  3o«%395. 

La  somme  F  H-  P  représente  le  poids  d'oxygène  con- 
densé, etéquivautà  4^^'',  100. 

Cette  expérience  donnerait  pour  la  densité  de  l'oxygène 

liquide  la  valeur 

45 , I 00 

45746- =  o.99'9- 

Deuxième  expérience,  —  La  pression  initiale  est  de 
395  atmosphères. 

F=:  l6«',2I. 


a02  R%    PICTBT. 

La  pression  passe  progressivement  de  395  atmosphères 
à  339,  où  elle  reste  stationnaire. 

Cette  différence  est  de  56  atmosphères  : 

F  =  o,5i5i7X56  =  28,85, 
F-4-F'  =  45«%o6. 

La  densité  !v  *//—  =  0,0008. 
45,467  '^^ 

Troisième  expérience,  —  La   pression    initiale  est  de 

432  atmosphères. 

F=:  178'*  3o6. 

La  pression  descend  jusqu'à  378  atmosphères. 
La  différence  est  de  54  atmosphères. 

F'  =  54xo,5i5i7  =  27*%  126, 
F-i-F  =  45«%i26. 

T  J  .         ^     45  9    I  26  w 

La  densité  T.    ...    z=z  o,qq25. 
45,467  '^^ 

Quatrième  expérience.   —   La    pression    initiale    est 

4oo  atmosphères.  * 

Fr=i6«s59. 

La  pression  tombe  jusqu'à  346  atmosphères. 
La  différence  est  de  54  atmosphères. 

F'  =  54  X  o,5i5i7  =  27«%82, 
F-f-F'=44«%4i- 

La  densité  Tp—  =  0,0767. 
45,467  '^J   J 

Cinquième  expérience,  —  La  pression  initiale  est  4 16  at- 
mosphères. 

F=i6«%665. 

La  pression  s'abaisse  jusqu'à  36 1  atmosphères. 
Différence  55  atmosphères. 

F'  =  55xo,5i5i7=:28«',33, 
F-^F'  =  44«%995. 


LIQUÉFACTION    DE    l'oXTGÈNE.  ao3 

La  densité  ^7^*v?    ==  0,0806. 
45,467  '^  ^ 

Nous  pouvons  tirer  de  ces  cinq  expériences  une  moyenne 
générale  plus  exacte.  . 

On  trouve  pour  la  densité 

dz=z  0,9883. 

La  première  méthode  employée  nous  avait  conduit  à  la 

valeur 

€f=z  0,9787. 

La  différence  o ,  0096  est  du  même  ordre  que  les  erreurs 
d'observation. 

Nous  remarquons,  en  effet,  que  notre  manomètre  ne  peut 
indiquer  les  pressions  avec  exactitude  qu'à  i  atmosphère 
près,  et  que  nous  avons  dû  employer  les  chaleurs  spéci- 
fiques en  dehors  des  limites  où  leurs  déterminations  ont 
été  faites. 

L'abaissement  de  température  pendant  la  durée  des  expé- 
riences est  une  cause  permanente  d'écarts,  qui  tendent  tous 
àybrcer  la  valeur  de  la  densité. 

C'est  pourquoi,  tout  en  ayant  donné  la  valeur  de  la  den- 
sité tirée  des  cinq  expériences  au  moyen  des  variations  de 
pression  consécutives  au  premier  jet,  nous  pensons  que  la 
première  méthode  est  plus  sûre  et  nous  a  fourni  un  chiffre 
qui  se  rapproche  davantage  de  la  réalité. 

C'est  donc  le  nombre  0,9787  qui  nous  parait  le  plus 
exact. 

Tension  maximum  des  vapeurs  d^oxjgène,  -r—  Le 
second  élément  physique  que  nous  avions  en  vue  de  déter- 
miner avec  exactitude  au  moyeu  des  cinq  expériences 
relatées  est  la  tension  maxim^um  des  vapeurs  d'oxygène. 
Cette  détermination  est  encore  très-incomplète,  car  elle 
demande  un  nombre  beaucoup  plus  grand  d'expériences. 

Il  faut  pouvoir  faire  varier  les  températures  entre  cer- 


ao4  R«    PIGTET. 

taines  limites!  parfaitement  connues  et  observer  simultané- 
ment les  changements  de  pressions. 

Dans  cette  première  série  de  recherches,  notre  but 
étant  avant  tout  de  liquéfier  l'oxygène,  nous  avons  fait 
usage  du  minimum  de  température  que  Ton  pouvait 
atteindre  avec  nos  instruments. 

Kous  nous  sommes  servi,  soit  de  Tacide  carbonique,  soit 
du  protoxyde  d'azote  comme  liquide  auxiliaire^,  nous 
avons  eu,  par  conséquent,  deux  minime  correspondant 
chacun  à  l'un  des  deux  liquides. 

Les  données  numériques  contenues  dans  le  tableau  de 
la  page  ig3  nous  montrent  clairement  la  valeur  de  ces  deux 
minima,  l'un  à  la  température  de  l'acide  carbonique  solide, 
l'autre  à  celle  du  protoxyde  d'azote. 

Après  la  sortie  du  deuxième  jet  liquide,  la  pression  dans 
la  première  expérience  est  encore  285  atmosphères.  Cette 
pression  s'abaisse  progressivement  jusqu'à  la  limite  infé* 
rîeure  274?  où  elle  reste  stationnaire  et  invariable  pendant 
plusieurs  minutes. 

Cette  chute  correspond  à  une  diminution  de  1 1  atmo- 
sphères seulement. 

Le  poids  d'oxygène  liquéfié  durant  cette  chute  de  pression 
ne  dépasse  pas  6  grammes. 

Mous  sommes  certain,  par  conséquent,  que  le  tube  con- 
denseur 7ï'e5^ /^a^^/ezh;  donc,  si  la  tension  des  vapeurs 
d'oxygène  correspondant  à  la  température  de  l'acide  car- 
bonique solide  est  inférieure  à  274  atmosphères,  la  con-' 
densation  doit  continuer ^  mais  nous  voyons  qu'elle  s'arrête  ; 
par  conséquent,  la  tension  maximum  des  vapeurs  d'oxy- 
gène à  cette  température  est  exactement  2,'j^dXmosiphhTes. 

Les  trois  premières  expériences,  faites  avec  l'acide  car- 
bonique, nous  donnent  les  résultats  suivants  : 

Première 2'j4"*'" 

Deuxième ...    271 

Troisième 272 


LIQUÉFACTION    DE    l'oXYGENE.  905 

Les  deux  dernières  expériences,  faites  avec  leprotoxyde 
d'azote,  donnent  : 

Quatrième aSi**"^ 

Cinquième 253 

La  pression  est  moindre  avec  le  protoxyde  d'azote 
qu'avec  Tacide  carbonique. 

Pour  que  ces  chiffres  aient  une  signification  précise,  il 
faut  connaître  exactement  en  degrés  les  températures  aux- 
quelles ces  pressions  correspondent  :  sans  cela  la  pression 
maximum  observée  perdrait  tout  son  intérêt. 

Voici  les  déductions  successives  qui  nous  ont  permis  une 
première  approximation. 

Mesure  des  températures,  —  Nous  avons  indiqué  dans 
un  Chapitre  précédent  ui>e  formule  générale  que  nous 
avons  déduite  directement  de  la  Théorie  mécanique  de  la 
chaleur  par  l'analyse.  Cette  formule  lie  ensemble  les  pres- 
sions maxima  aux  températures  corresponidantes.  Elle 
comprend  en  outre  dans  ses  facteurs  la  chaleur  latente  de 
volatilisation  à  une  température  prise  pour  base,  ainsi  que 
la  différence  c  —  h  des  chaleurs  spéciâques  du  liquide  et 
de  la  vapeur.  Cette  formule  est 

^P  .""  io333[{274-f-f')='— (274-1- ^)(/'  —  /)] 

Dans  cette  formule,  on  suppose  connues  les  quantités 

suivantes  : 

F  à/',  X',  {c—k)  et  J- 

Comme  la  démonstration  analytique  de  cette  formule  n'a 
pas  encore  été  publiée,  nous  ne  nous  croyons  pas  autorisé  à 
nous  en  servir,  sans  Tavoir  vérifiée  au  moins  par  un 
exemple  appliqué  à  l'eau,  dont  tous  les  éléments  ont  été 
déterminés  avec  tant  de  soin  par  M.  Regnault. 

Nous  ne  voulons  nullement  remplacer  une  démonstra- 
tion par  un  exemple  \  mais  une  véri6cation  numérique  de 


dOli  R*    PICTET. 

Odilo  iiulure  aura  le  double  avantage  de  montrer  en  détail 
rriii|ilr)i  de  cette  formule  et  la  coïncidence  parfaite  des 
réiAullJil/i  numériques. 

Noui  reprendrons  cette  question  complètement  dans  un 
prochain  travail,  qui  n'est  point  encore  terminé. 

l'renons,  pour  la  vériGcation  numérique  de  la  formule, 
lui  données  suivantes,  tirées  des  tableaux  de  M.  Regnault  : 

/'".--  200*^5 

P',  correspondant  à  t'°  =  1 1688"*™,  96  de  mercure  ; 
8j  densité  de  la  vapeur  d'eau  donnée  par  la  courbe  des 
covolumes,  o  ,6a665  ; 

c —  A,  d'après  M.  Regnault,  entre  200^  et  8a^,  soit  o,544* 

Nous  avons  ainsi  choisi  un  écart  arbitrairement  assez 
grand,  car  t' — 1=  118°. 

On  a,  comme  formule  numérique  à  calculer, 

11688,96 
a: 

(464»3  -h  0,544*  ii8)43i .  1,293.0,62665.274.118 

io333[(274 -ï- 200)' —   274  +  200)118] 

En  opérant  les  calculs  par  logarithmes,  on  arrive  au 
résultat  suivant  : 

log.  niim 9*7747759 

log.  dénom 9,2414^47 

Différence o ,  53332 1 2 

log.  mod 0,3622157 

0,1711055  log.  de  ïj^S^S*]! 

log.  F 4>o67774o 

1,482871 

2,5849o3o  log.  384"*'", 5 1 
a;  =  38495i. 


LIQUÉFACTION    DE   l'oXYGENE.  ao^ 

Or,  si  nous  cherchons  dans  les  Tables  deM.Regnault  la 
tension  de  la  vapeur  d^eau  correspondant  à  82  degrés,  on 
trouve  qu'elle  est  égale  à  384°""*,  435. 

Cet  exeniple  suflGit  pour  montrer  que  notre  formule 
représente  avec  toute  exactitude  la  fonction  qui  lie  la 
température  aux  pressions. 

Nous  avons  le  projet  d'employer  cette  formule,  adaptée 
à  Tacide  sulfureux,  pour  remplacer  toutes  les  indications 
des  thermomètres  à  alcool.  On  aura  de  cette  manière  des 
thermomètres  dynamomètres  d'une  exquise  sensibilité,  qui 
remplaceront  les  données  complètement  aléatoires  des 
thermomètres  de  toute  espèce,  dès  qu'on  dépasse  —  20° 
ou  —  25°. 

La  réduction  complète  des  laborieux  calculs  numériques 
qu'exige  cette  transformation  n'est  pas  encore  finie,  car 
nous  voulons  obtenir  quelques  vérifications  expérimentales 
sur  les  éléments  encore  peu  connus  des  liquides  volatils 
employés. 

Nous  sommes  donc  encore  obligé  de  recourir  dans  une 
certaine  mesure  au  thermomètre  à  alcool. 

M.  Salleron,  de  Paris,  m'en  a  construit  une  dizaine,  gra- 
dués jusqu'à  —  100°  :  ce  sont  ceux-là  dont  je  me  suis  servi . 

J'ai  trouvé  que  l'acide  carbonique  se  transforme  en 
vapeur  sous  la  pression  de  760,  à  une  température 
de  —  80**. 

Mais  nos  pompes  produisent  un  vide  presque  absolu  sur 
cet  acide  carbonique  solide.  Les  thermomètres  ne  suffisent 
plus  du  tout  pour  connaître  même  approximativement  la 
température  que  l'on  amène  ^  il  faut  employer  la  formule 
thermodynamique. 

Pour  déterminer  la  valeur  de  X'pour  l'acide  carbonique 
j^ — 800,  j'ai  utilisé  deux  formules  précédemment  démon- 
trées dans  une  publication  déjà  mentionnée  (^).  La  première 

{^)  archives  des  Sciences  physiques  et  naturelles,  janyier  1876. 


ao8  R.    PIGTET. 

est 

^_„^  jio333(274--8o)^ 

1,298^x431  X274' 

quantité  multipliée  par  la  dérivée  des  pressions  par  rap- 
port aux  températures. 

La  seconde  donne  la  valeur  de  cette  dérivée,  que  nous 
appellerons  D  *,  elle  est 

_  o,o4i  X274 
274  —  80 

Effectuant  les  calculs  numériques  et  substituant  i  D  sa 
valeur,  on  trouve,  pour  X*^^, 

X«»  =  96^«i,  766. 

Nous  avons  pris,  pour  la  densité  à  zéro,  5=  i,5a4i 
(Regkault).  Une  fois  V  connu,  nous  avons  calculé  la 
courbe  représentée  dans  la  PL  II  au  moyen  de  notre  for- 
mule générale,  en  donnant  à  t  une  série  de  valeurs  de 

10  degrés  en  10  degrés. 

Les  abscisses  de  cette  courbe  représentent  les  tempéra- 
tures, et  les  ordonnées  les  tensions  correspondantes. 

Si  donc  on  connaît  les  pressions  marquées  au  manomètre 
à  mercure,  lorsqu'on  fait  le  vide  sur  l'acide  carbonique,  on 
connaîtra,  grâce  à  cette  courbe,  la  température  de  ce  corps. 

11  y  a  dans  cette  détermination  bien  des  éléments  que  Ton 
ne  connaît  que  par  à  peu  près,  bien  des  chiffres  à  corro* 
borer  avec  des  expériences  directes  \  aussi  ne  donnons-nous 
celte  mesure  des  températures  que  comme  une  premiè/e 
approx  imatio  n . 

Voici  le  calcul  pour  la  température  —  120®  : 

V=:96->,766, 
(c  — ^)  =  o,i947, 

déduit  par  des  analogies  de  corps  isomorphes. 


LIQUÉFACTION    DE    L^ OXYGÈNE.  SOp 

log  104,554=2,0193407 
log  1,5241  =  o,i83oi35 
log       1,2931=0,1115985 

log       4^1  =  2,6344773 

log  274  =  2*4377506 

log        4®  =  1 ,  6020600 

log  n  u  m .       8 ,  9882406 
log  io333  =  4,014^264 
iog  194' —  194  X  4^  =4,47^3225 

log  —  =  0,3622164 
m 


logdénom.       8,8517646 
log  quot.  =  o,  1364760  log  lie  i  ,36923 
log  760  =  2, 88081 36 
1 ,36923 

1 ,5i  i5836  log  de  32^»"^,  488. 

La  pression  correspondant  à  —  1 20°  est  de  3 2"", 488  de 
mercure. 

C'est  au  moyen  de  calculs  identiques  que  la  courbe  A 
des  tensions  de  Tacide  carbonique  a  été  établie. 

Nous  avons  fait  un  travail  absolument  analogue  pour  le 
protoxyde  d'azote. 

Le  résultat  est  donné  par  la  courbe  6,  calculée  de  10  en 
10  degrés. 

Nous  avons  pris  comme  point  de  départ  —  92°  avec  la 
pression  barométrique  de  Genève,  c'est-à-dire  780  milli- 
mètres. 

C'est  la  température  d'ébullition  de  ce  liquide  que  j^ai 
observée  directement. 

Les  deux  courbes  A  et  B  montrent  que  le  protoxyde 
d'azote  conserve  des  tensions  plus  fortes  que  l'acide  carbo- 
nique. 

On  peut  donc  descendre  avec  le  protoxyde  d'azote  à  des 
températures  plus  basses  qu'avec  l'acide  carbonique. 

Ànn.  de  Chim.  ei  de  Pl^s,,  5«  série,  t.  XIII.  (Féyrier  1878.)  1 4 


aïO  R.    PICTET. 

Nos  pompes  O  et  O',  qui  aspiraient  Tacide  carbonique 
vaporisé  dans  le  tube  D  {PL  1,  fig.  2),  faisaient  le  vide  à 
9  millimètres.  La  pression  oscillait  entre  8  et  12  milli- 
mètres, suivant  la  vitesse  des  pompes. 

Nous  pouvons  donc  admettre,  à  titre  provisoircy  que  la 
température  correspondant  aux  trois  premières  expé- 
riences faites  avec  V acide  carbonique  était  d'ent^iron 
—  i3o",e^  de  —  1^0^  pour  les  deux  dernières  faites  as^ec 
le  protoxjde  d'azote. 

On  déduit  de  ces  résultats  que  la  tension  maximum  de 
Toxygène  liquide  est 

Pression. 

*     o  a  :  m 

—  i3o 273 

—  i4o 262 

Une  différence  d'environ  10  degrés  amènerait  une  éléva- 
vatîon  de  pression  de  21  atmosphères. 

Telles  sont,  pour  le  moment,  les  conclusions  numé* 
riques  que  ces  premiers  essais  ont  fournies. 

Nous  avons  dit  précédemment  que  le  protoxyde  d'azote 
nous  a  donné  des  pressions  différentes  de  celles  qui  sont 
relatées  dans  les  Traités  de  Physique.  Voici  comment  nous 
nous  en  sommes  aperçu. 

En  faisant  les  études  préliminaires  qui  ont  décidé  le  dis- 
positif mécanique  employé,  j'ai  mis  en  regard  les  deux 
tableaux  suivants,  donnant  les  tensions  maxima  de  l'acide 
carbonique  et  du  protoxyde  d'azote  ;  c'était  pour  déterminer 
lequel  des  deux  liquides  il  fallait  choisir  pour  obtenir  le 
plus  grand  froid. 


Température. 

Acide 
carbonique. 

Protoxyde 
d'azote. 

0 
—87,2 

-84,4.... 

fllm 
» 

atm 
J  ,0 

I  ,10 

-81,7.... 

0 

I  ,22 

—80,0.  .  .  . 

1,0 

K 

—78,9.... 

1* 

1,37 

LIQUÉFACTION    DE    l'oXYGÈKE.  211 


.   Acide 

Protoxyde 

Température. 

carbonique. 

d'azote. 

Différences. 

0 

atm 

atm 

-77,2.... 

1,36 

» 

76,1.... 

u 

1,55 

— 73,3. . . - 

3» 

«'77 

70,5  ... 

2,28 

2,03 

—  0,25 

67,8.... 

)» 

2,34 

63,9 

3,6 

u 

— 62,2. . . . 

» 

3,11 

59,4 

4,6 

3,58 

-+-1 ,02 

—  5i  ,0.  . . . 

7'0 

5,36 

-1-1,64 

— 48)8. . .  - 

7'7 

» 

— 48>3. . . . 

» 

6,09 

—  37,2.  ... 

>i 

9.74 

—36,6.  . . . 

12,5 

9*9» 

H-2,59 

L'inspection  de  ce  tableau  montre  que  les  pressions  sont 
sensiblement  les  mêmes  pour  les  deux  liquides  ;  cependant, 
entre  les  températures  — y5^  et  —  36*^,6,  les  tensions  du 
protoxyde  d^azote  sont  constamment  inférieures  aux  ten- 
sions correspondantes  de  l'acide  carbonique.  Celte  raison 
me  décida  à  employer  d'abord  l'acide  carbonique,  qui 
devait,  d'ap.rès  ce  tableau,  donner  sous  le  vide  le  plus  grand 
froid. 

En  effet,  la  formule  qui  lie  les  tensions  aux  températures 
montre  que,  si  à  une  température  quelconque  un  liquide 
possède  une  tension  supérieure  à  celle  d'un  autre  liquide 
à  la  même  température,  cette  différence  subsistera  très- 
probablement  pour  toutes  les  températures  avec  le  même 
signe. 

Comme  les  températures  de  —  35^  à — do°  sont  beau- 
coup plus  précises  que  celles  que  m'avait  fournies  l'alcool 
à — 7 5**  et  —  So**,  j'ai  cru  devoir  attacher  plus  de  con- 
fiance aux  pressions  indiquées  à  ces  températures  moins 
basses. 

Mais  lorsque,  dans  les  deux  dernières  expériences,  je 

i4. 


212  A.    PICTET. 

remplaçai  l'acide  carbonique  par  le  protoxyde  d'azote  pur, 
fabriqué  au  moyen  du  nitrate  d'ammoniaque  cristallisé,  je 
trouvai  pour  ce  corps  des  tensions  notablement  supérieures 
à  celles  de  l'acide  carbonique.  Il  y  a  donc  eu  une  erreur 
manifeste  dans  les  tableaux  dressés,  il  y  a  quelques  années, 
par  Faraday  et  divers  expérimentateurs. 

Ces  diflérences  sont  si  marquées,  que  j'ai  cru  un  instant 
avoir  une  rentrée  d'air  qui  augmentait  la  pression  du  gaz 
à  la  condensation. 

Pour  être  sûr  du  contraire,  j'ai  condensé  tout  le  contenu 
du  gazomètre  dans  le  tube  S,  puis  je  l'ai  laissé  distiller. 
Les  vapeurs  rentraient  dans  le  gazomètre  lentement.  Après 
avoir  opéré  une  purge  abondante,  qui  devait  entraîner 
toute  trace  de  gaz  étranger,  les  pressions  indiquées  au 
manomètre  correspondaient  rigoureusement  aux  tensions 
maxima  du  protoxyde  d'azote  liquide. 

La  température  indiquée  par  le  thermomètre  à  alcool 
permettait  de  suivre  degré  par  degré  l'élévation  progressive 
de  la  température,  les  pompes  étant  en  arrêt. 

Cette  méthode  présente  l'avantage  sérieux  de  permettre 
une  observation  de  longue  durée.  La  température  indiquée 
au  thermomètre  est  certainement  égale  ou  très-légèrement 
supérieure  à  celle  du  protoxyde  d'azote,  de  sorte  que  les 
indications  du  manomètre  sont  dans  tous  les  cas  des  mi- 
nima. 

Voici  le  tableau  que  nous  avons  fait  pour  l'acide  carbo- 
nique et  le  protoxyde  d'azote  : 

Pro,toxyde 
Température.  d'azote. 

o  alm 

—9^ i,o 

—90 1,10 

— 88 1 ,  1 5 

—86 1,35 

— 84. ...  *  »îo 

^—82 I  ,72 

0 


LIQUÉFACTION    DE    LOXYGENE. 


îr 


210 


Température. 


80, 
.78 


— 76. . . . 

-74.... 


72.. 
■70.. 

68.. 
66.. 
■64.. 
62.. 
-60.. 
■58.. 
-56.. 
-54.. 

■52.. 

-5o.. 
48.. 
■46.. 

.44.. 

-40.. 

38.. 
36.. 
-34..- 


Acide 
carbonique, 
atm 

»o 
,i5 
,33 
,55 
,78 
2,08 

2,4l 

2,71 

3,10 

3,4^^ 
3,90 

4,40 

5,46 
6,10 
6,80 

8,o5 
8,72 
9,45 

10,25 
I  I  ,00 

11,90 
12,70 


Protoxyde 
d*azote. 

atm 

2, 12 
2,36 
2,60 
2,85 

3V5 

3,5o 

3,80 

4,20 

4,60 

5,o5 

5,5o 

6,10 

6,32 

7,o5 

7,63 

8,3o 

9,00 

9,60 

10, 3o 

1 1 ,02 

Il  ,70 

1 2 ,  5o 

13,19 


Diflerences. 

—0,96 
—0,97 
,o3 
,o5 

>07 

^07 
,09 

,ïO 

,i5 

,i5 

,10 

,20 

—0,86 

—0,85 

-o,83 

—0,90 

—0,95 

-0,88 

-o,85 

—0,77 

—0,70 

—0,60 

—0,49 


Ce  tableau,  dressé  directement  à  la  suite  d'observations 
répétées,  nous  montre  que  le  protoxyde  d'azote  a  constam- 
ment des  pressions  supérieures  à  celles  de  l'acide  carbo- 
nique, ce  qui  est  d'accord  avec  les  inductions  théoriques 
que  nous  avons  signalées. 

Nous  donnons  ce  tableau  in  extenso,  car  les  pressions 
inscrites  dans  les  Traités  de  Physique  sont  espacées  et  cor- 
respondent à  des  températures  trop  écartées • 

Nous  tenions  aussi  à  comparer  directement  et  dans  des 


ai4  R.    PIGTET. 

conditions  identiques  l'acide  carbonique  et  le  protoxyde 
d'azote. 

Le  tableau  général  de  nos  expériences,  tel  qu'il  est  relaté 
à  la  page  igi  de  ce  Mémoire,  nous  fournit  encore  une 
preuve  péremptoire  de  l'état  liquide  de  l'oxygène. 

En  effet,  pour  trois  expériences  (les  n^'*  2,  4  et  5),  le 
troisième  jet  d'oxygène  fut  très-court  et  je  fermai  presque 
subitement  le  robinet  régleur. 

Cette  manœuvre  permit  à  une  petite  quantité  d'oxy- 
gène liquide  de  rester  adhérente  aux  parois  du  tube. 

L'évaporation  rapide  abaissa  de  quelques  degrés  la  tem- 
pérature des  parois,  pendant  que  les  vapeurs  formées 
s'écliappaîent  par  l'orifice  du  robinet  de  sortie.  Au  moment 
de  la  fermeture,  la  pression  était  de  a45  atmosphères  dans 
la  deuxième  expérience.  Quelques  instants  plus  tard,  elle 
s'élève  jusqu'à  a53  atmosphères.  Cette  élévation  de  la  pres- 
sion, au  moment  où  la  production  du  gaz  est  terminée 
depuis  longtemps,  ne  s'explique  que  si  Ton  admet  qu'une 
petite  quantité  d'oxygène  repasse  de  l'état  liquide  à  l'état 
gazeux. 

La  conductibilité  des  parois  de  cuivre  du  tube  est  suffi- 
sante pour  établir  l'équilibre  de  température  très-rapide- 
ment. 

Dans  les  deux  autres  expériences,  la  pression  monta  de 
2i5  atmosphères,  à  2i3^etde  2o5  à  212  atmosphères. 

Solidification  de  l'oxygène,  —  Dans  les  troisième  et 
quatrième  expériences,  nous  nous  sommes  servi  de  la  lu- 
mière électrique  condensée  par  un  réflecteur,  pour  exami- 
ner l'apparence  des  jets  à  la  sortie  de  l'orifice. 

Cette  lumière  intense  nous  a  permis  de  distinguer  net- 
tement deux  parties  dans  la  veine  fluide  :  une  portion  cen- 
trale^ assez  diaphane,  ayant  2  à  3  millimètres  de  diamètre, 
et  une  portion  périphérique,  ayant  de  10  à  i5  millimè- 
tres, d'un  blanc  éclatant.  Ces  deux  nappes  concentriques 
ressemblaient  à  deux  cylindres  emboîtés  l'un  dans  Fautre, 


LIQUÉFACTION    DE    l'oXYGEME.  2i5 

l'extérieur  paraissant  être  fait  de  poussière  de  craie  ou 
de  neige.  Leur  longueur  avait  environ  lo  à  12  centimè- 
tres. 

Nous  avons  cherché  à  nous  rendre  compte  de  la  nature 
de  celle  substance  blanche,  à  savoir  si  ce  n'était  peut-être 
pas  de  l'oxygène  solidifié. 

Nous  nous  sommes  servi  pour  cette  recherche  de  la  po- 
larisation. En  examinant,  au  moyen  d'un  prisme  de  Nicol, 
la  lumière  réfléchie  à  angle  droit  par  rapport  aux  rayons 
incidents,  on  peut  aisément  distinguer  si  elle  est  polari- 
sée ou  non.  Le  réflecteur,  placé  à  2  mètres  de  l'orifice  du 
jet,  envoyait  sur  l'oxygène  des  rayons  horizontaux. 

M.  H.  Dufour,  professeur  de  Physique  à  l'Académie  de 
Lausanne,  eut  la  complaisance  d'examiner  la  lumière  ré- 
fléchie  par  le  jet,  en  se  tenant  de  telle  sorte  que  les  rayons 
observés  dans  l'analyseur  fussent  émis  normalement  à  l'axe 
du  réflecteur  parabolique. 

Pendant  le  jet,  le  prisme  de  Nicol  tournait  entre  les 
doigts  de  90  degrés.  Durant  la  rotation,  M.  Dufour  saisit 
distinctement  une  notable  diflerence  dans  l'intensité  de 
cette  lumière,  ce  qui  prouve  qu'elle  était,  partiellement 
au  moins,  polarisée. 

Cette  expérience ,  qui  doit  être  répétée  plusieurs  fois 
encore,  porterait  à  faire  croire  que  l'oxygène,  au  sortir  du 
tube,  se  volatilise  avec  une  telle  énergie  que  les  particules 
liquides  sont  transformées  en  petits  cristaux  solides, 
vraie  poussière  d'oxygène  gelé,  La  chaleur  de  l'air  am- 
biant retransforme  presque  instantanément  ces  cristaux 
en  gaz. 

Voilà,  dans  leurs  traits  généraux,  les  résultats  de  toute 
espèce  que  nous  ont  fournis  ces  expériences.  Us  sont  en- 
core bien  incomplets  et  demandent  à  être  vérifiés  et  sur- 
tout corroborés  par  d'autres  recherches  connexes.  Il  nous 
faut  essayer  de  rendre  cet  oxygène  liquide  ^visible  en  le 
condensant  dans  des  appareils  transparents.  Le  problème 


2l6  R.    PICTET. 

est  très-complexe,  hérissé  de  difficultés  pratiques;  on  doit 
empèclier  le  givre,  qui  se  dépose  de  suite  sur  les  surfaces 
froides  et  trouble  leur  apparence,  on  doit  avoir  des  joints 
étanches  avec  des  corps  fragiles,  etc.,  etc.  Enfin  nous  lut- 
terons et  nous  ferons  notre  possible  pour  tourner  tous  ces 
obstacles. 

V.  —  Liquéfaction  et  solidification  de  l'hydrogène. 

Après  avoir  obtenu  les  résultats  précédents  avec  le  gaz 
oxygène,  nous  avons  été  naturellement  conduit  à  opérer 
de  la  même  manière  sut  V hydrogène. 

Tout  le  dispositif  mécanique  que  nous  avons  employé 
pour  le  premier  gaz  pouvait  servir,  sans  aucun  changement 
pour  le  second. 

Il  suffisait  de  déterminer  une  méthode  chimique  bien 
précise  donnant  de  V hydrogène  pur,  sans  eau ,  sans  trace 
de  gaz  étranger,  et  laissant  dans  Tobus  un  résidu  non 
volatil. 

Ces  deux  conditions  sont  indispensables  si  Ton  veut 
opérer  avec  précision  et  ne  pas  troubler  les  indications  de 
l'expérience  par  l'introduction  de  facteurs  dont  il  est  im- 
possible de  mesurer  les  effets. 

Pour  ces  motifs,  j'ai  écarté  les  moyens  reposant  sur  la 
décomposition  de  l'eau,  soit  par  les  métaux  alcalins,  soit 
par  la  pile,  et  je  me  suis  arrêté  au  procédé  suivant,  sur  le 
conseil  de  M.  Monnier. 

M,  Berthelot  a  démontré  dans  la  synthèse  de  l'acide 
oxalique  et  de  F  acide  formique  que,  si  l'on  mélange  du 
formiate  de  potasse  avec  de  la  potasse  caustique,  on  ob- 
tient, en  chauffant  le  mélange  à  2^5  degrés,  de  l'hydre-  ^ 
gène  absolument  pur  sans  trace  d'eau  ni  de  substance 
étrangère. 

Voici  la  formule  qui  explique  la  réaction  : 

4  CHO'K  -f-  2  KHO  =  C'0*K'  -t-  2  CO»K»  +  H*. 


LIQUÉFACTIOM    DE    L'OXYGÈWE.  2ly 

Ajoutons  un  excès  de  potasse,  la  réaction  suivante  se 

formera  : 

C^O<K'  -h  2  KHO  =  2  CO»K^  -h  H^ 

Total  pour  l'hydrogène  H'* . 

Le  résidu  consiste  uniquement  en  carbonate  de  potasse 
qui  reste  dans  Tobus  et  n'est  point  volatil. 

Les  expériences  préliminaires,  faites  au  laboratoire,  me 
donnèrent  des  résultats  très-satisfaisants. 

La  réaction  marche  très- régulièrement,  sans  soubre- 
saut, et  la  température  est  fixe  à  22S  degrés. 

Voici  la  charge  de  formiate  de  potasse  et  de  potasse 
que  nous  mîmes  dans  l'obus,  lors  de  la  première  expé- 
rience, faite  le  jeudi  10  janvier,  de  7  heures  à  9  heures  du 

soir  ; 

Formiate  CHO'K 12618'^ 

Potasse  KHO 5oo 

Le  tout  fut  préalablement  chauffé  à  i5o  degrés  pour 
chasser  toute  trace  d'eau  et  donner  une  certitude  absolue 
de  la  pureté  du  mélange. 

L'obus  lui-même  fut  chauffé  à  i5o  degrés  pour  éviter  de 
toute  manière  l'influence  de  l'humidité. 

Ces  préparatifs  terminés,  l'obus  fut  fixé  à  sa  place  et 
l'opération  commença. 

Les  pompes  à  acide  sulfureux  condensèrent  le  prot- 
oxyde  d'azote  régulièrement  comme  dans  les  expériences 
précédentes,  et  bientôt  le  givre  épais,  qui  apparut  sur  le 
manomètre  à  oxygène,  nous  indiqua  que  l'on  pouvait  ac- 
tiver la  production  de  l'hydrogène. 

Voici  le  relevé  de  mes  notes,  prises  pendant  l'expé- 
rience : 

8*"  32".  Le  givre  est  intense  partout  sur  toute  la  canali- 
sation de  protoxyde  d'azote^ 

La  pression  de  l'hydrogène  est  de  5o  atmosphères. 


21 8  R.    PICTET. 

Pression. 

h        m  atm 

8.34 60 

8.35 70 

8.38 80 

8.43 90 

8.45 92 

La  flamme  du  gaz  est  un  peu  baissée,  pour  ne  pas  trop 
chaufler  les  parois  extérieures  de  l'obus  et  égaliser  la  tem- 
pérature. 

Pression. 

m  atai 

8.47           100 

8.5o       112 

8.52       i4o 

8.56       i5o 

8.58       170 

8.59       190 

9.   o       200 

9.     I               2l5 

9  .     I  .  45 240 

0.2 260 

9.4        3oo 

9.5       340 

9.  5.3o 35o 

9.6       370 

9.  6.  i5 4°^ 

9.  6.3o ^So 

9.   7       5oo 

9.  8       55o 

9-9       ^90 

f               9.  io.3o   640 

9.  II       65o 

9.ii.3o« 652 

La  pression  est  presque  stationnaire,  après  avoir  monté 


LIQUÉFACTION    DE    L  OXYGENE.  21 9 

graduellement  pendant  quarante  minutes^  j^ouvre  le  robi- 
net de  fermeture. 

Le  jet  est  éclairé  par  une  forte  lumière  électrique. 
Au  moment  de  l'ouverture,  on  vit  jaillir  par  Torifice  de 
la  lance  un  jet  opaque  d'une  teinte  bleu-acier  très-carac- 
térisée,  La  portion  opaque  avait  environ  ©"^,14  de  lon- 
gueur et  un  diamètre  de  o"^,oi5  à  o'",oao  environ. 

Au-dessous  de  cette  partie  bleue,  non  transparente,  on 
distinguait  nettement,  au  travers  d'un  fort  brouillard  pro- 
duit par  la  condensation  vésiculaîre  de  l'hydrogène,  une 
zone  blanchâtre,  moins  bleue  que  celle  dont  elle  était  la 
continuation,  et  suffisamment  translucide  pour  permettre 
de  distinguer  les  objets  fortement  éclairés  qui  se  trouvaient 
de  l'autre  côté. 

Au  même  instant  nous  entendimes  un  bruit  strident, 
aigu,  comparable  à  celui  que  produit  une  barre  de  fer 
rougîe  jetée  subitement  dans  l'eau,  puis  simultanément 
sur  le  sol  un  crépitement  très -caractéristique,  rappelant  le 
son  de  grenaille  projetée  à  terre. 

Le  jet,  au  lieu  de  rester  continu,  comme  cela  se  passait 
avec  l'oxygène,  devint  intermittent 5  il  ne  s'échappait  plus 
que  par  saccades  hors  du  long  tube. 

Chaque  projection  était  accompagnée  du  crépitement 
dont  nous  venons  de  parler. 

Après  quelques  secondes,  je  fermai  le  robinet  de  réglage: 
la  pression  était  encore  à  870  atmosphères. 

Cette  pression  baissa  progressivement  jusqu'à  820  at- 
mosphères, puis  remonta  lentement  et  durant  plusieurs 
minutes  jusqu'à  33o  atmosphères. 

A  9^  18"*,  je  rouvris  le  robinet  de  fermeture. 

Un  jet  extrêmement  court  sortit  avec  une  violente  pro- 
jection de  corpuscules  solides,  puis  l'orifice,  quoique  ou- 
vert, ne  laissa  plus  rien  échapper. 

Le  manomètre  marquait  3i5  atmosphères. 

Voyant  cet  arrêt  complet  dans  rémission  de  l'hydrogène. 


220  R.    PrCTET. 


nous  conclûmes  de  suite  que  sa  solidification  s^était  pro- 
duite dans  Tintérieur  du  tube. 

Pour  nous  en  rendre  compte,  je  fis  arrêter  les  pompes 
qui  aspiraient  les  vapeurs  de  protoxyde  d'azote  et  j'ou- 
vris le  robinet  de  réglage,  de  manière  à  amener  une  con- 
densation de  vapeurs  de  protoxyde  d'azote  dans  le  tube  D. 

Cette  manœuvre  contribua  à  faire  remonter  la  tempé- 
rature :  aussi,  à  chaque  instant,  les  décharges  d'hydrogène 
devinrent-elles  plus  fréquentes;  elles  se  suivaient  toutes 
les  demi-minutes  et  conservaient  les  apparences  que  nous 
avons  signalées.  Environ  un  quart  d'heure  après  l'ouver- 
ture du  robinet  de  réglage,  la  dernière  décharge  eut  lieu 
et  la  pression  revint  à  zéro. 

Nous  pouvions,  vers  la  fin  de  l'expérience,  allumer  le 
gaz  qui  sortait  par  l'extrémité  de  la  lance  entre  les  déchar- 
ges; mais,  dès  qu'une  projection  violente  se  produisait,  la 
flamme  s'éteignait. 

Cette  première  recherche  ne  permet  d'avoir  aucune  no- 
tion sur  la  densité  de  Thydrogène,  liquide  ou  solide,  car 
^  les  observations  ne  nous  ont  pas  permis  d'enregistrer  des 
chiffres  précis  sur  la  quantité  d'hydrogène  conservé  à 
chaque  instant  dans  le  tube.  L'intermittence  des  décharges, 
la  congélation  partielle  ou  totale  de  l'hydrogène  liquide,  les 
variations  du  manomètre,  toutes  ces  brusques  modifica- 
tions imprévues  ont  mis  du  désarroi  dans  nos  observations 
et  nous  devons  les  reprendre  avec  beaucoup  de  soin  pour 
obtenir  quelques  chiffres  définitifs. 

Cette  expérience  permet  cependant  de  considérer  comme 
acquise  la  possibilité  de  liquéfier  l'hydrogène  sous  une  pres- 
sion de  65o  atmosphères  et  —  i4o^.  Cette  pression  est 
dans  tous  les  cas  supérieure  à  la  tension  maximum  des 
vapeurs  d'hydrogène  correspondant  à  —  i4o®. 

Quant  à  la  solidification  de  t hydrogène,  on  pouvait 
non-seulement  la  prévoir,  mais  même  la  prédire  d'avance 
à  cause  du  faible  poids  atomique  de  ce  corps. 


J 

LIQUÉFACTION    DE   L^OXYGÈME.  221 

On  sait  que  les  chaleurs  latentes  des  liquides  sont  sensi- 
blement en  raison  inverse  du  poids  atomique  des  vapeurs 
qu'ils  développent, 

La  formule  exacte  qui  donne  la  chaleur  latente,  ainsi 
que  nous  l'avons  démontré,  est 

^  io333  (274  -4-  r)  X  o,o4i 

1,293^X431  ' 

dans  laquelle  à  correspond  à  la  densité  limite,  c'est-à-dire 
au  poids  atomique. 

t  est  la  température  du  point  d'ébullition. 

Or,  si  l'on  applique  cette  formule  à  l'oxygène  liquide  et 
à  l'hydrogène,  on  voit  que  les  valeurs  de  X  pour  chacun  de 
ces  liquides  doivent  être  à  peu  de  chose  près  dans  le  rap- 
port des  poids  atomiques. 

En  effet,  ces  deux  liquides  ont  été  obtenus  à  la  même 
température  de  —  i4^°î  sous  des  pressions  qui  ne  dif- 
fèrent pas  considérablement  l'une  de  l'autre.  Les  tempé- 
ratures d'ébullition  pour  chacun  de  ces  deux  corps  ne 
doivent  pas  être  distantes  de  plus  de  20  à  25  degrés  au 
maximum. 

Ainsi,  en  appelant  1  la  chaleur  latente  de  l'oxygène  et 
7!  celle  de  l'hydrogène,  on  doit  avoir  le  rapport 

V  _  (274_-f-_o_«  ^ 

274  "^  ^'correspond  à  la  température  absolue  du   point 
d'ébullition  de  l'hydrogène  et  274  +  '  est  la  température 
absolue  du  point  d'ébullition  de  l'oxygène. 
Le  rapport  des  poids  atomiques  est 


1=  16; 


a 

donc  il  est  tj^ès^probable^qne  le  rapport  des  chaleurs  la- 
tentes est 


X  -  (274  H- 0  «' ^ 


222  R.    PICTET. 

c'est-à-dire  que  la  chaleur  latente  de  Thydrogène  est  au 
moins  lo  fois  supérieure  à  celle  de  Toxygène. 

Si  cette  hypothèse  est  vraie,  dès  que  le  liquide  con- 
densé peut  s'évaporer  de  nouveau,  la  quantité  de  chaleur 
absorbée  par  ce  changement  d'état  est  tellement  considé- 
rable que  le  liquide  restant  est  forcé  de  se  congeler  en  se 
solidifiant. 

En  se  basant  sur  le  rapport  des  poids  atomiques,  i  kilo- 
gramme d'hydrogène  condensé  absorberait  plus  de  2000  ca- 
lories ! 

Il  n'y  a  rien  d'étonnant  que  l'expérience  ait  confirmé 
ce  que  les  équations  thermiques  annonçaient  comme  très- 
probable,  et  celle  vérification  est  une  preuve  de  plus  à 
l'appui  des  bases  sur  lesquelles  est  fondée  la  Théorie  méca- 
nique de  la  chaleur. 

D'ici  à  quelques  jours  nous  reprendrons  de  nouvelles 
expériences  sur  la  liquéfaction  de  l'hydrogène  et  nous  tâ- 
cherons de  recueillir  les  produits  de  la  condensation,  afin 
de  mieux  les  étudier.  Il  sera  effectivement  très-utile  de 
constater  l'apparence  physique  de  ce  corps,  que  toutes  les 
analogies  font  considérer  comme  un  métal  et  qui  semble 
bien  en  avoir  revêtu  le  caractère  dans  l'expérience  que 
nous  venons  de  rapporter. 

VI.   —   Conclusions. 

Il  nous  est  impossible  de  terminer  ce  Mémoire  sans  énu- 
mérer  en  quelques  mots  les  conclusions  que  l'on  peut  tirer 
de  ces  expériences  sur  la  liquéfaction  des  gaz,  et  sans  rap- 
peler les  résultats  très-semblables  obtenus  tout  dernière- 
ment par  M.  L.  Cailletet,  de  Paris. 

INous  avons  cherché  à  concilier  les  phénomènes  princi- 
paux qui  concernent  les  gaz,  appelés  permanents,  avec  la 
loi  de  Mariotle,  la  théorie  de  M.  Clausius  et  les  expé- 
riences de  MM.  Regnault  et  Natterer. 


LIQUÉFACTION    DE    L  OXYGÈNE.  223 

L'antagonisme  apparent  qu'un  raisonnement  précipité 
faisait  naître  entre  la  loi  de  la  cohésion  et  les  principes  de 
la  Théorie  mécanique  de  la  chaleur  disparait  entièrement 
en  faisant  intervenir  un  facteur  nouveau,  qui  est  la  Ion- 
gueur  d'oscillation  calorifique. 

Dans  les  expériences  de  M.  Natterer,  que  nous  avons 
relatées  au  tableau  du  premier  Chapitre,  on  voit  les  pres- 
sions augmenter  bien  plus  rapidement  que  ne  l'indique  la 
loi  de  Mariotte  5  est-ce  l'effet  simplement  de  la  dimension 
des  atomes  ou  des  molécules  des  gaz,  ainsi  que  le  dit 
M.  Clausius? 

Non  certainement,  car,  si  cette  cause  était  la  seule  en 
jeu,  l'écart  devrait  être  très-peu  sensible  jusqu'à  une 
pression  assez  élevée,  suffisante  pour  mettre  les  molécules 
presque  au  contact,  puis  passerait  brusquement  à  une 
valeur  considérable,  que  motiverait  l'impénétrabilité  de  la 
matière. 

Au  lieu  de  cela,  nous  voyons  les  écarts  de  la  loi  de 
compressibilité  des  gaz  augmenter  progressivement,  mais 
sans  secousse,  et  passer  d'une  valeur  nulle  à  une  valeur 
élevée  pour  les  fortes  pressions. 

Cela  nous  indique  clairement  que  la  loi  de  Mariotte  est 
rigoureuse  pour  les  gaz,  tant  que  r écart  moyen  des  molé- 
cules est  encore  plus  grand  que  la  longueur  d' oscillation 
calorijique  correspondant  à  la  température  de  ce  gaz. 

Dès  que  cet  écart  devient  égal  à  cette  longueur  d'oscil- 
lation, la  pression  croît  plus  vite  que  ne  l'indique  la  loi  de 
Mariette,  puisque  la  force  du  calorique  s'ajoute  à  la  près 
sion  des  gaz.  Si,  à  ce  moment,  on  comprime  encore  le  vo- 
lume gazeux,  on  rencontre  un  obstacle  de  plus  en  plus 
puissant,  car  les  vibrations  calorifiques  s'effectuent  avec 
une  intensité  qu'aucune  force  ne  peut  maîtriser. 

Les  expériences  faites  sur  la  dilatation  des  solides  et 
des  liquides  prouvent  que  ces  dilatations  se  produisent 
avec  une  énergie  supérieure  à  la  cohésion  moléculaire. 


224  ^*    PICTET. 

On  arrive  ainsi,  dans  la  compression  des  gaz,  à  rencon- 
trer des  résistances  aussi  puissantes  que  celles  qu'opposent 
les  liquides  et  les  solides. 

Nous  avons  dit  que  les  forces  moléculaires  de  la  cohé- 
sion devaient  passer  par  une  valeur  particulière  k  pour 
que  Tétat  liquide  pût  prendre  naissance. 

Cette  valeur  de  k  est  une  fonction  de  la  température 
égale  pour  tous  les  liquides. 

Il  est  facile  de  se  rendre  compte  physiquement  de  la 
nécessité  d'une  semblable  condition. 

Supposons  un  volume  gazeux,  à  une  pression  quel- 
conque, et  admettons  que  la  condensation  liquide  ait  com- 
mencé. 

Quels  sont  les  caractères  physiques  particuliers  de  l'état 
de  cette  vapeur  et  de  son  liquide  ?  Evidemment,  le  liquide 
doit  présenter  une  densité  supérieure  à  celle  des  va- 
peurs et  Ton  doit  distinguer  la  surface  de  contact  qui  les 
réunit. 

L'augmentation  de  densité  des  vapeurs,  au  moment  de 
la  condensation,  est  une  preuve  du  plus  grand  rapproche- 
ment des  molécules  \  mais,  avant  la  condensation,  ces  mo- 
lécules ne  s'attiraient-elles  pas  du  tout? 

Elles  s'attiraient  certainement  5  à  chaque  choc,  deux 
molécules  se  saisissaient  par  leur  force  d'attraction,  mais 
la  température  et  les  vibrations  calorifiques  correspondant 
à  ce  travail  élémentaire  de  condensation  les  désagrégeaient 
de  suite  et  empêchaient  l'état  liquide  d'être  stable. 

En  fait,  la  cohésion  moléculaire  agissant  d'une  manière 
égale  dans  toutes  les  parties  de  cette  masse  gazeuse  et 
nulle  part  avec  assez  d"" énergie  pour  rendre  la  condensa- 
tion stable,  le  gaz  garde  sa  forme  gazeuse. 

Vient-on  maintenant  à  augmenter  le  nombre  des  molé- 
cules gazeuses  et  à  abaisser  la  température,  la  séparation 
va  de  suite  s'opérer  dans  le  milieu  gazeux  et  le  liquide  se 
précipitera  vers  le  fond  du  réservoir. 


LIQUÉFACTION    DK    l' OXYGÈNE.  225 

En  effet,  la  puissance  d'attraction  ayant  augmenté  par 
le  rapprochement  plus  grand  des  molécules  et  par  là  dimi- 
nution de  Tamplitude  des  oscillations  calorifiques,  lorsque 
a  molécules  se  seront  soudées  ensemble  par  la  cohésion, 
elles  ne  trouveront  plus  les  éléments  dynamiques  néces- 
saires pour  se  soustraire  à  cette  influence,  qui  deviendra 
définitive. 

Dès  cet  instant,  la  condensation  s^opère  sans  arrêt  et  le 
liquide  s'accumule  dans  le  fond  du  condenseur. 

Il  y  a  donc  nécessairement  une  limite  nettement  tran^ 
chée  dans  tout  milieu  gazeux  qui  se  condense.  Cette  limite 
correspond  au  point  critique,  tel  qu'on  l'appelle  aujour-» 
d'hui. 

Au  point  critique,  l'attraction  moléculaire  est  égale  à  A, 
constante  pour  tous  les  liquides  à  la  même  température. 

Les  expériences  que  nous  avons  signalées  tendent  aussi 
à  donner  ulie  preuve  certaine  du  fait  que  tous  les  liquides 
passent  forcément  par  l'état  gazeux  à  une  certaine  tempér 
rature,  quels  que  soient  la  pression  et  le  ^volume  sous  les- 
quels on  les  maintient. 

Par  une  très-heureuse  coïncidence,  la  plupart  des  phé- 
nomènes observés,  relatifs  à  la  condensation  des  gaz  per- 
manents, ont  été  dévoilés  presque  au  même  moment  à 
Paris  et  à  Genève. 

Cette  coïncidence  a  un  double  avantage^  d'abord  de 
donner  un  degré  de  certitude  absolue  aux  phénomènes  eux- 
mêmes,  puis  de  démontrer  que  toutes  les  déductions  logi- 
quement enchaînées  à  la  Théorie  mécanique  de  la  chaleur 
trouvent  une  sanction  complète  quand  on  les  transporte 
du  doinaine  purement  spéculatif  dans  le  domaine  de  la 
Physique  expérimentale. 

M.  Cailletet,  au  moyen  d'une  disposition  des  plus  élé- 
gantes et  d'une  simplicité  parfaite,  a  donné  une  preuve 
irrécusable  delà  liquéfaction  des  gaz  permanents. 

Ses  expériences,  antérieures  aux  miennes,  sont  basées 

Ann,  de  Chim.  et  de  Phys.,  5«  série,  t.  XUI.  (Février  1878.)  l5 


/ 


asti  n*  PiCTET. 

uniquement  sur  rinfluence  thermique  due  à  la  détente  des 
gaz.  Elles  peuvent  se  reproduire  facilement  et  en  présence 
d'un  nombreux  public. 

En  1828,  c'est-à-dire  il  y  a  juste  cinquante  ans, 
M.  D.  CoUadon,  Membre  correspondant  de  TAcadémie 
des  Sciences,  fit  à  Genève  de  nombreuses  tentatives  pour 
arriver  à  liquéfier  les  gaz  incoercibles  et  notamment  Fair 
atmosphérique.  Son  appareil  (^),  représenté  dans  la  PI.  /, 
fig,  3,  était  assez  semblable  à  celui  de  M.  Gailletet.  Voici 
en  deux  mots  le  dispositif: 

La  pression  était  produite  par  une  pompe  hydraulique  ; 
elle  se  transmettait  par  une  tubulure  à  vis  Ce  à  rintérienr 
et  dans  le  haut  d'un  très-fort  cylindre  creux  d'acier  B, 
rempli  partiellement  de  mercure. 

Dans  le  cylindre  6  plongeait  un  tube  en  verre  T,  ouvert 
par  le  bas  et  soudé  à  sa  partie  supérieure  à  un  second  tube 
1!,  en  verre  épais,  dont  le  diamètre  intérieur  n'avait  que 
!"*■*,  5  à  2  millimètres. 

Le  second  tube  sortait  du  cylindre  B  en  traversant  leçon* 
vercle  allongé  A,  auquel  il  était  soudé  à  la  gomme  laque; 
on  le  pliait  ensuite  à  la  lampe  d'émailleur,  et  son  extrémité 
recourbée  l!  pouvait  être  refroidie  et  rendre  la  liquéfaction 
visible,  si  l'on  parvenait  à  la  produire. 

Les  gaz  expérimentés  remplissaient  tout  le  tube  T  au 
commencement  de  l'expérience. 

M.  Colladon  a  opéré  avec  des  températures  de  —  3o*^ 
et  des  pressions  qui  ont  atteint  4^0  atmosphères  sans 
obtenir  de  résultat. 

Malheureusement,  la  Théorie  dynamique  de  la  chaleur 
n'était  pas  encore  connue;  car,  sans  cela,  en  ouvrantbrus» 
quement  le  robinet  de  l'échappement  de  l'eau,  la  liqué- 


(  ^  )  Les  pièces  principales  de  cet  ancien  appareil  existent  encore,  et  sont 
conservées  depuis  plusieurs  années  dans  les  bureaux  de  la  Société  gencH 
Toise  pour  la  construction  des  instruments  de  Physique. 


LIQUÉFACTION    DE   l'oXYGÈNE.  23^ 

faction  des  gaz  permanents  aurait  eu  lieu  depuis  cinquante 
ans. 

M.  D.  CoUadon  nous  a  facilité  notre  travail  par  ses  pré- 
cieux conseils  et  nous  lui  en  témoignons  ici  notre  profonde 
gratitude. 

L^étude  que  nous  avons  commencée  dans  ce  Mémoire 
demande  à  être  complétée  par  de  nombreuses  expériences. 
Il  faut  encore  accumuler  une  foule  de  renseignements  de 
toute  nature  pour  donner  aux  résultats  numériques  une 
parfaite  exactitude. 

Ce  que  nous  espérons  surtout,  c'est  que  ce  genre  de  re- 
cherches fera  considérer  l'emploi  du  froid  dans  les  labora- 
toires de  Physique  comme  an  moyen  essentiel  pour  T étude 
des  forces  moléculaires. 

Qui  sait  si  les  cristallisations  et  certaines  réactions  chi- 
miques ne  trouveront  pas  dans  ces  procédés  des  conditions 
particulièrement  favorables  ? 

Une  des  causes  principales  qui  ont  arrêté  la  plupart 
des  expérimentateurs,  c'est  le  manque  de  moyens  méca- 
niques, trop  dispendieux  pour  pouvoir  être  à  la  portée  de 
tous. 

Grâce  à  la  Société  genevoise  pour  la  construction  d'in- 
struments de  Physique,  j'ai  eu  à  ma  disposition  un  maté- 
riel mécanique  d'une  grande  valeur,  que  Ton  peut  estimer 
au  moins  à  5o  ooo  francs. 

C'est  uniquement  par  le  fait  de  cette  bonne  fortune  que 
j*ai  pu  réussir  dans  ces  recherches. 

.  Il  serait  à  désirer  que  les  grands  laboratoires  eussent  à 
leur  service  des  moyens  analogues  :  ils  faciliteraient  mille 
travaux  d'un  intérêt  incontestable  et  auxquels  il  faut  re- 
noncer faute  d'instruments  suffisants. 

Nous  compléterons  ce  Mémoire  dès  que  nos  expériences 
nous  auront  fourni  de  nouveaux  matériaux. 


i5. 


L.    MOUTON.    BÉFLEXlOlî    MÉTALLIQUE,-  ETC.        Sap 

SUR  L4  RÉFLEXION  MÊTALipE 
DES  RAYONS  CALORIFIQUES  ORSGIIRS  POLARISES-, 

Par  m.  L.  MOUTON. 


Les  expériences  qui  ont  été  exécutées  sur  la  réflexion  de 
la  lumière  polarisée,  et  en  particulier  celles  de  M.  Jamin  (^) , 
mettent  nettement  en  évidence  un  certain  nombre  de  lois 
s'appliquant  à  tous  les  corps  réflécliissants  et  que  je  vais 
résumer. 

D'abord,  si  Ton  fait  réfléchir  un  nombre  quelconque 
de  fois» sur  un  miroir  quelconque  un  rayon  polarisé  dans 
les  azimuts  déterminés  par  le  plan  d^incidence  et  le  plan 
perpendiculaire  (azimuts  principaux),  il  reste  toujours 
polarisé  dans  le  même  plan  après  la  réflexion. 

Ce  principe,  qui  découle  naturellement  de  l'idée  qu'avec 
Fresilel  nous  nous  faisons  d'un  rayon  polarisé,  a  été  du 
reste  établi  expérimentalement  pour  le  verre  et  les  mé- 
taux, par  Brewster  (  *  ) . 

Combiné  avec  celui  de  la  coexistence  des  petits  mouve- 
raents,  il  entraîne  une  importante  conséquence  pratique  : 
pour  étudier  l'action  de  la  réflexion  sur  un  rayon  primiti- 
vement polarisé  dans  un  azimut  quelconque,  on  n'a  qu'à 
le*décomposer  en  deux  polarisés  dans  les  azimuts  princi- 
paux ]  la  direction  de  leurs  vibrations  n'ayant  pas  été 
cHangée  par  la  réflexion,  ils  n'ont  pu  éprouver  que  des 
changements  de  phase  et  des  variations  d'amplitude. 

Les  variations  d'amplitude  peuvent  s'exprimer  par  la 
multiplication  des  amplitudes  incidentes  par  deux  nombres 
I  (vibration  parallèle*au  plan  d'incidence)  et  J  (vibration 


(*")  Voir  Annales   de  Chimie  et  de  Physique  y  3*  série,  t."  XIX,  XXII  et 
XXIX. 

(')  Annales  de  Chimie  et  de  Physique ^  3f  série,  t.  XIX,  p.  29G, 


a3o  L.    MOUTON,    RÉFLEXION    MÉTALLIQUE 

perpendiculaire  à  ce  plan),  ces  deux  nombres  éianl  sup- 
posés toujours  positifs  et  évidemment  au  plus  égaux  à 
Tunité. 

La  définition  des  modifications  apportées  aux  phases 
demande  quelques  explications. 

Un  changement  quelconque  produit  dans  la  phase  d'un 
mouvement  vibratoire  peut  toujours  être  considéré  comme 
résultant  d'un  certain  chemin  parcouru  dans  l'air  ^  Je  phé- 
nomène de  la  réflexion  peut  ainsi  s'assimiler  à  la  traversée 
d'une  lame  cristalline,  traversée  qui,  convertie  en  air, 
donne  un  chemin  d  pour  la  vibration  parallèle  au  plan 
d'incidence  et  un  chemin  (f  pour  l'autre. 

Mais  il  se  produit  ici,  à  l'observation,  un  fait  pasticulier 
que  n'offrent  pas  les  plaques  minces.  Par  suite  du  retour- 
nement, de  l'observateur  qui  naturellement  se  place  de 
façon  à  recevoir  dans  l'œil  le  rayon  réfléchi  comme  il  y 
recevait  le  rayon  incident,  la  vibration  située  dans  le  plan 
d'incidence  parait  frappée  d'un  changement  de  signe,  ou, 
si  Ton  aime  mieux,  d'un  retard  d'une  demi-onde  qui  n'est 
qu'apparent.  Ainsi  il  est  bien  évident  qu'à  l'incidence 
normale  les  deux  rayons  ont  été  identiquement  modiflés, 
et  pourtant  le  plan  de  vibration  primitif  parait  avoir  subi 
une  rotation  de  90  degrés^  c'est  que  l'observateur  s'est  re- 
tourné, et  qu'il  n'en  continue  pas  moins  à  définir  par  sa 
droite  ou  sa  gauche  la  direction  positive  de  l'axe  de  coor- 
données situé  dans  le  plan  d'incidence. 

Je  crois  qu'il  est  naturel  de  ne  pas  faire  entrer  cette 
demi-longueur  d'onde  dans  l'expression  physique  du  phé- 
nomène -,  les  résultats  d'observation  ainsi  modifiés  se 
trouvent  alors  immédiatement  comparables  à  ceux  que  four- 
nissent les  théories  mécaniques,  où  Naturellement  on  cou* 
ierve  toujours  le  même  système  d'axes  de  coordonnées- 
J'appellerai  donc  différence  de  phase  produite  par  la  j'é- 

/Zexzbn  l'expression  — : — »  qui  sera  par  conséquent  nulle 


DES    ILAYOnS    CALORIFIQUES    OB8CU11S    POLÀHISÉS.       2i3i 

pour  l'incidence  normale;  la  courbe  obtenue  en  prenant 
pour  abscisses  des  longueurs  proportionnelles  aux  angles 
d'incidence  de  zéro  à  90  degrés  et  pour  ordonnées  les  va- 

leurs  correspondantes  de  — r —  sera  la  courbe  des  diffé- 
rences de  phase  ;  on  aura  une  courbe  correspondante  des 

I 

rapports  -• 

«I 

Cela  posé,  outre  le  principe  de  Brewster  cité  plus  haut, 
les  résultats  acquis  pour  la  réflexion  delà  lumière  peuvent 
s'énoncer  ainsi  (^)  : 

La  courbe  des  différences  de  phase,  partant  de  l'origine 
à  Ijncidence  normale,  atteint  pour  tous  les  corps  la  va- 
leur ~  à  l'incidence  rasante  ou  90  degrés  \  cette  valeur  est 
positive  pour  les  métaux  et  les  substances  transparentes 
d'indice  supérieur  à  1,46  environ. 

La  forme  de  cette  courbe  diffère  avec  les  substances  ré- 
fléchissantes. Ainsi,  pour  les  métaux,  elle  semble  s'élever 
d'une  façon  continue  de  zéro  à  90  degrés;  pour  le  verre, 
elle  reste  sensiblement  confondue  avec  l'axe  des  abscisses 
jusqu'à  l'incidence  brewsterienne;  puis,  s'élevant  brusque- 
ment, elle  atteint  une  valeur  sensiblement  égale  à  sa  limite 
supérieure  j. 

Enfin,  pour  une  substance  donnée,  la  forme  de  la  courbe 
se  modifie  d'une  façon  continue  quand  la  longueur  d'onde 
de  la  lumière  réfléchie  se  modifie  elle-même  d'une  façon 
continue. 

Quant  aux  valeurs  du  rapport  -9  elles  partent  de  l'unité 

pour  l'incidence  normale  et  paraissent  y  revenir  pour  Vin- 
cidence  rasante  \  la  courbe  qui  les  représente  est  également 
propre  à  chaque  substance  et  à  chaque  longueur  d^onde, 
mais  elle  présente  avec  la  précédente  cette  relation  re- 

j,    _  ■       ■  ■       ^_.-^^_-^— — 

(')  Annales  de  Chimie  et  de  Fhjrsique^  3*  série,  t.  XXIX,  p.  28:1. 


23a  L.    MOUTON.    RÉFLEXION    MÉTALLIQUE 

marquable  que  toujours  la  valeur  -  est  minimum  à  Vinci- 

dence  pour  laquelle  la  différence  des  retards  est  7  (*)• 

Je  me  suis  proposé,  dans  ce  Mémoire,  de  rechercher 
comment  se  modifient  les  lois  précédentes,  quand,  sortant 
du  spectre  lumineux,  on  fait  réfléchir  sur  des  miroirs  mé- 
talliques des  radiations  purement  calorifiques  occupant 
dans  le  spectre  général  des  positions  bien  déterminées  de 
plus  en  plus  distantes  du  rouge. 

Je  décrirai  successivement  la  disposition  expérimentale, 
le  mode  d^opération  et  de  calcul,  et  je  donnerai  en  troisième 
lieu  les  résultats  que  j^ai  déjà  obtenus.  • 

Ce  travail  a  été  fait  au  laboratoire  d^enseignement  delà 
Physique  qu'a  organisé  M«  Desains  à  la  Sorbonne.  On  y 
retrouvera  donc  le  dispositif  expérimental  qui  lui  appar- 
tient ('). 

I.  —  Disposition  experimentalf.. 

La  source  de  chaleur  est  la  lampe  de  MM,  Bourbouze  et 
Wiesnegg,  dans  laquelle,  comme  on  le  sait,  un  capuchon 
de  toile  de  platine  est  maintenu  au  rouge  blanc  par  la  com- 
bustion du  gaz  d'éclairage  et  d'un  courant  d^air  amené  par 
une  trombe  à  eau  à  une  pression  constante  d'environ 
20  centimètres  de  mercure.  Dans  ces  conditions,  cette  source 
est  d'une  remarquable  constance,  et  elle  présente  de  plus 


(^)  On  Toitsans  peine  que  cette  manière  d'enyisager  les  faits  traduit  fi- 
dèlement les  résultats  classiques  de  Fresnel  relatifs  au  verre;  derant  tou- 

-,     ,        ,  ..       ,  no  .         sin(*  —  r)       tang({ — r) 

jours  prendre  la  valeur  positive  des  coefficients  - — 7-. '-  et j-. ( , 

"*  ^  ^  SIn(^^-^)        tang(«-Hr)' 

on  remplace  le  changement  de  signe  de  ce  dernier  à  l'incidence  brewate-- 

rienne  par  une  différence  de  marche  brusque  de  -  entre  les   deux  compo- 
santes. 

(*)  yoiry   entre  autres,  Comptes  rendus  des  séances  de   Vyicadémie  des. 
Sciences  du  i4  mai  1877,  p.  io56. 


DES    RAYONS    CALORIFIQUES    OBSCURS    POLARISÉS.       a33 

Favantage  d'un  grand  développement  du  spectre  calorifique 
obscur. 

La  lampe  est  placée  dans  une  première  pièce,  à  3o  cen* 
timètres  environ  de  la  cloison  qui  sépare  cette  pièce  de  la 
voisine  ^  cette  cloison  est  tapissée  de  feuilles  de  cuivre  et 
percée  d'un  trou  où  est  encastrée  à  hauteur  de  la  lampe  une 
lentille  de  verre  ordinaire  de  1 5  centimètres  de  foyer.  Dans 
la  seconde  pièce,  sur  un  solide  banc  d'optique  articulé  se 
trouvent  :  i^  un  énorme  prisme  biréfringent  avec  alidade 
et  cercle  divisé,  à  image  extraordinaire  redressée  et  acbro- 
matisée  :  c^est  le  polariseur  ;  2^  une  plaque  de  verre  à  in- 
clinaison variable  et  mesurée  autour  d'un  axe  horizontal, 
destinée  à  compenser  les  effets  de  polarisation  produits  par 
le  prisme  disperseur  qu'on  va  voir  (*)  5  3®  un  écran  percé 
d'une  fente  sur  laquelle  se  forme  l'image  extraordinaire  de 
la  lampe  ;  l'image  ordinaire,  en  tournant,  est,  dans  toutes  les 
orientations  du  polariseur,  interceptée  par  l'écran  ;  pliisloin 
se  trouve  une  lentille  achromatique,  puis,  au  centre  o^ne 
articulation  du  banc,  le  miroir  sur  un  cercle  gradué  me- 
surant l'incidence.  Le  faisceau  réfléchi  est  reçu  sur  un 
prisme  de  verre  ordinaire,  puis  traverse  un  nouveau  prisme 
biréfringent  analyseur,  semblable  au  polariseur,  et  se  résout 
finalement  en  deux  spectres  dont  l'extraordinaire  demeure 
fixe  et  pur  pendant  la  rotation  de  l'analyseur,  l'ordinaire 
tournant  autour  sans  jamais  empiéter  sur  lui.  Le  spectre 
extraordinaire  tombe  sur  une  pile  thermo-électrique  li-* 
néaire,  dont  l'ouverture  est,  comme  celle  de  la  fente,  de 
I  millimètre  environ,  communiquant  avec  un  excellent 
galvanomètre  de  M.  Ruhmkorff  {'}.  Cette  pile  était  munie 


(')  J'ai  emprunté  l'idée  de  cette  lame  compensatrice  au  trayail  de 
MM.  Fizeau  et  Foucault  {Annales  de  Chimie  et  de  Physique,  3*  série, 
t.  XXX,  p.  i47> 

(  *)  On  arriye  facilement  à  apprécier  le  70  ^^  degré,  ce  qui  suffit;  le 
gaWanomètre  n'étant  jamais  dans  un  repos  asbolu,  les  méthodes  d'am- 


a34  L*    MOUTON.    HÉFLEXION   MÉTALLIQUE 

d'une  vis  permettant  de   la  déplacer  parallèlement   aux 
bandes  du  spectre. 

Tous  les  systèmes  optiques  analogues  au  précédent  pré- 
sentent un  réglage  délicat  :  c'est  celui  des  sections  princi- 
pales des  polariseur  et  analyseur  par  rapport  à  un  azimut 
bien  déterminé.  L'emploi  des  prismes  biréfringents  permet 
de  simplifier  ce  travail.  Prenant  pour  ligne  de  repère  la 
direction  du  fil  à  plomb,  on  amène  d'abord  la  ligne  0-180 
du  limbe  du  polariseur  ou  analyseur  à  coïncider  avec  cette 
direction  ;  puis,  plaçant  ce  fil  à  plomb  à  la  place  de  la 
lampe  et  l'éclairant  par  derrière,  l'alidade  du  prisme  étant 
fixée  au  zéro,  on  amène,  par  le  mouvement  à  frottement  dur 
indépendant  de  cette  alidade,  les  deux  images  négatives  du 
fil  qui  se  projettent  sur  l'écran  fente  à  coïncider.  L'alidade 
se  trouve  ainsi  accompagner  la  section  principale  du 
prisme,  et  donne  par  conséquent,  si,  comme  c'était  le  cas, 
on  en  utilise  l'image  extraordinaire,  la  direction  même  des 
vibrations  qu'on  étudie. 

II .  —  Mode  d*opi£ration  et  de  calcul. 

J'ai  opéré  sur  trois  longueurs  d'onde  que  je  désigne  par 
^19  ^8)  ^39  réparties  dans  la  partie  obscure  du  spectre,  et 
sensiblement  symétriques  par  rapport  au  rouge  extrême, 
Xj  du  jaune,  X,  du  vert-Weu  et  X3  du  bleu-indigo.  Trois 
traits  verticaux  étaient  à  cet  effet  tracés  sur  un  écran  ac- 
compagnant la  pile,  et  l'extrémité  rouge  du  spectre  lumi- 
neux étant  amenée  à  coïncider,  par  exemple  avec  le  trait 
marqué  i,  la  fente  de  la  pile  se  trouvait  frappée  par  les 
radiations  obscures  dont  je  désigne  par  li  la  valeur 
moyenne,  etc. 


plification  des  angles  ne  présentent  ici,  le  plus  souyent,  que  des  avantages 
illusoires. 


DES    BAYOUS    CALORIFIQUES    OBSCURS    POLARISÉS.       ^35 

Ayant  été  témoin  d'une  partie  des  expériences  par  les- 
quelles M.  Desains  a  étudié  la  rotation  imprimée  par  une 
plaque  de  quartz  perpendiculaire  aux  plans  de  polarisation 
des  rayons  calorifiques  obscurs  (*),  j'ai  pu.  parle  même  pro- 
cédé, fixer  cette  rotation  pour  les  trois  longueurs  d*onde 
que  j'ai  employées.  Avec  une  plaque  de  quartz  droit  qui 
donnait  à  la  lumière  du  sodium  une  rotation  exacte  de 
loo  degrés,  les  rotations  correspondant  aux  radiations  X,, 
Xs9  ^8  ont  été  respectivement  32,  i6  et  lo  degrés.  En 
prenant  la  loi  de  Biot,  au  moins  comme  première  approxi- 
mation, on  obtiendrait 

>,  z=o"",ooio,     >2  =  0,0014    et    >3=:  0,0018. 

Ces  chiffres,  dont  le  dernier  est  supérieur  au  triple  de 
la  longueur  d'onde  des  raies  D,  donnent  une  idée  du  secours 
qu'on  est  en  droit  d'attendre  de  l'étude  des  phénomènes  ca- 
lorifiques au  point  de  vue  de  l'établissement  ou  de  la  véri* 
fîcation  des  théories  optiques. 

Je  n'avais  pas  à  démontrer  les  principes  de  Brewster 
relativement  aux  rayons  calorifiques  obscurs.  Dès  18499 
MM.  delà  Provostaye  et  P.  Desains  (')  étudiaient  ce  que 
devenaient  après  leur  réflexion  des  rayons  calorifiques  pri- 
mitivement polarisés  dans  l'un  ou  l'autre  dès  azimuts 
principaux,  constataient  que  la  réflexion  ne  modifiait  pas 
le  plan  de  polarisation  et  établissaient  les  lois  de  la  varia- 
tion de  leur  intensité  avec  l'incidence.  Aussi,  dans  toutes 
les  séries  d'expériences,  la  vérification  de  ces  principes 
était  mon  critérium  du  bon  réglage  des  divers  appareils  et 
de  l'état  du  galvanomètre,  les  déviations  de  celui-ci  de- 


(*)  Comptes  rendus  des  séances  de  VAc€uiémie  des  Sciences^  i4  mai  1877^ 
p.  io56. 

(*)  Annales  de  Chimie  et  de  Physique^  3«  série,  t.  XXVII,  p.  109  et  sui- 
vantes. 


a36  L.  MOUToir.  —  réflexion  métallique 

vant,  dans  les  différents  azimuts,  indiquer  des  intensités 
conformes  à  la  loi  de  Malus. 

Voici  un  exemple  entre  autres  : 

Métal  des  miroirs;  incidence  65  degrés;  polariscur  à 
90  degrés,  c^est-à-dire  chaleur  incidente  polarisée  dans  le 
plan  d'incidence  5  longueur  d'onde  Xj. 


I. 

II. 

m. 

IV. 

Intensités 

Azimuts 

Déviations 

d'après 

de  Tanalyscur. 

(jalvanométriques. 

Intensités. 

la  loi  de  Malus 

0 

0 

90 

l3,I 

1 

î 

0 

0 

0 

0 

45 

6,6 

o,5o 

o,5o 

3o 

3,3 

0,-25 

0,^5 

60 

9>8 

0,75 

0,75 

Même  disposition  ;  polariseur  à  zéro,  c'est-à-dire  cha- 
leur incidente  polarisée  perpendiculairement  au  plan  d'in- 
cidence. 


Azimuts  Déviations  . 

de  l'analyseur,    galvanométriques. 


o 

3o 
60 


o 
10 

o 
5,1 

7,4 

2,5 


Intensités 

d'après    . 

Intensités. 

la  loi  de  Malus. 

I 

I 

0 

0 

o,5i 

0,50 

Oi74 

0,75 

0,25 

0,25 

Les  nombres  de  la  colonne  III,  intitulée  Intensités,  ont 
été  calculés  en  supposant  la  proportionnalité  aux  intensités 
des  impulsions  galvanométriques  ;  leur  conformité  avec 
ceux  de  la  colonne  IV  peut  être  considérée,  ainsi  que  je 
le  faisais,  comme  une  preuve  du  bon  réglage  des  appareils, 
en  même  temps  qu'elle  pourrait  être  invoquée,  s'il  en  était 
besoin  y  comme  une  justification  de  toute  la  méthode. 

Quand  le  rayon  incident  est  polarisé  dans  un  azimut  autre 


DES    HAYOKS    CALORIFIQUES    OBSCURS    POLARISÉS.       2^^ 

que  zéro  ou  90  degrés,  la  réflexion  le  rend  en  général  ellip- 
tique. C'est  donc  aux  propriétés  d'un  tel  rayon  qu'on  doit 
demander  les  procédés  expérimentaux  destinés  à  fournir  le 

rapport  -et  la  différence  de  phase  — - —  définis  plus  haut. 

•I  A 

Je  ne  ferai  qu'énoncer  ici  celles  de  ces  propriétés  sur 
lesquelles  je  me  suis  appuyé,  renvoyant  pour  leur  démon- 
stration aux  Études  de  réflexion  métallique  de  la  lumière 
de  M.  Jamin  (*). 

Le  plan  d'incidence  est  horizontal  ;  l'observateur  rece- 
vant le  rayon  réfléchi  en  jpleine  poitrine,  je  prends  l'axe 
des  X  dans  le  plan  d'incidence,  et  la  partie  positive  de  cet 
axe  toujours  dirigée  vers  la  droite  de  l'observateur,  sup- 
posé inconscient  du  demi-tour  qu'il  a  opéré  5  l'axe  des  Y  est 
perpendiculaire  au  précédent  et  se  dirige  de  bas  en  haut  : 
les  angles  seront  comptés  comme  d'habitude  de  OX  vers  OY, 

1°  Mesure  de  r(*)»  —  Si  la  vibration  incidente  fait  un 

angle  a  avec  l'axe  des  X,  ses  deux  composantes  ont  pour 
amplitudes  cosa  et  sina^  et  après  la  réflexion  Icosa  et 
Jsina.  L'analyseur  placé  successivement  dans  les  azimuts 
zéro  et  90  degrés,  on  aura  dçux  lectures  galvanométriques 
proportionnelles  à  l'cos'a  et  J*sîn'a,  Bien  que  les  vérifi- 
cations de  la  loi  de  Malus,  rapportées  plus  haut,  montrent 
la  proportionnalité  des  déviations  galvanométriques  aux 
intensités  calorifiques  dans  les  limites  où  j'opérais,  j'ai  pré- 
féré toujours  disposer  de  l'angle  a^  dans  celte  première 
mesure,  de  façon  à  rendre  à  peu  près  égales  les  deux  lec- 
tures. Si  a  et  (3  sont  ces  deux  déviations,  on  a 


i=tong«y/| 


(^)  Annales  4,e  Chimie  et  de  Phjrsique,    3«  série,  t.  XIX,  p.  Sai  et  sui- 
vantes. 

(•)  Comptes  rendus  des  séances  de  l'Académie  des  Sciences^  2  avril  1877. 


a38  L.    MOUTON*    RÉFLEXION    MÉTALLIQUE 

2®  Mesure  de  — - — •  —  Après  avoir  traversé  un  prisme 

de  spalh,  dont  on  n'utilise  que  Timage  extraordinaire,  un 
rayon  elliptique  présente,  quand  la  section  principale  du 
prisme  coïncide  avec  le  grand  axe  de  l'ellipse,  un  maxi- 
mum d'intensité;  avec  le  petit  axe  un  minimum;  et  si 
l'on  étudie  ces  intensités  dans  des  couples  d'azimuts  a  et 
a  +  90^,  en  allant  du  grand  axe  au  petit,  la  première 
l'emportera  sur  la  seconde  tant  que  l'azimut  a  sera  com- 
pris entre  le  grand  axe  et  45  degrés  de  cet  axe,  pour  lui 
devenir  inférieure  dès  que  a  aura  dépasse  cette  bissec- 
trice des  axes. 

On  peut  donc  par  ce  moyen  fixer  l'azimut  des  bissec- 
trices des  axes  de  l'ellipse,  et  on  le  peut  d'autant  mieux 
que  c'est  autour  de  ces  bissectrices  qu'une  même  varia- 
tion Aa  produit  dans  les  deux  lectiu'es  rectangulaires  une 
plus  grande  différence.  J'ai  pu,  dans  les  bonnes  séries,  le 
fixer  à  \  degré  près. 

A  ces  avantages,  déjà  utilisés  par  de  Senarmont  pour  la 
lumière,  s'en  joignent  de  spéciaux  aux  études  calorifiques  : 
d'abord  il  n'est  demandé  à  la  source  de  chaleur  que  d'être 
constante  pendant  la  durée  de  chaque  couple  d'observa- 
tions, et  j'ai  pu  rendre  cette  durée  très-courte  par  un  mou- 
vement spécial  avec  buttage  permettant  de  faire  tourner 
rapidement  et  sans  approcher  de  la  pile  l'analyseur  de 
90  degrés  ;  en  second  lieu,  les  mesures  se  terminent  par 
deux  valeurs  égales  des  déviations  galvanométriques  :  c'est 
un  avantage  qu'apprécieront  ceux  qui  ont  eu  occasion  de 
se  servir  de  galvanomètres  très-sensibles. 

L'azimut  des  bissectrices  des  axes  de  l'ellipse  étant 
ainsi  déterminé,  on  en  tire  l'azimut  w  des  axes  eux-mêmes 
en  ajoutant  ou  retranchant  45  degrés. 

Il  est  bon  de  faire  plusieurs  mesures  avec  différents  azi- 
muts de  la  vibration  incidente,  et  d'avoir  soin,  on  eu 
verra  tout  à  l'heure  la  raison,  de  disposer  de  cet  azimut 


DES    RAYONS   GALOBIFIQUES    OBSCURS    POLARISÉS.       a3g 

de  façon  que  Tangle  o)  soit  toujours  moindre  qu'une  ving- 
taine de  degrés. 
Cela  posé,  soient 


t 

X  z=r.  COSa  COS  27r— » 

T 

t 

Y  =  sinacos2îT- 

T 


les  composantes  de  la  vibration  incidente. 

On  observera  après  la  réflexion,  d'après  ce  qui  a  été  dit 

plus  haut, 

X  z=.i  COSÛ  COS27r  1- |ï 

\T         1        A  J 


(  t        d'^ 
X  =  J  sina  cos27r  I  — r- 


que  l'on  peut  écrire,  par  un  simple  changement  de  Tori- 
gine  des  temps, 


X'='  à  ces  a  ces  2  TT  —  5 


(t        1       d-d!\ 
j  =  Jsm«  C0S2  7rl  —  H — u 

et  en  posant 

/ 1       d  —  d!\        -  I  cos  a 

27r )=d     et     ■-—. =:COta 

\2  ^      /  J  sm  a 

t 
xz=z  COSaCOS27r  -i 


j  =  sin  a  C05(  27r-;  H-  <y  j  • 


Ce  sont  les  formules  d'où  part  M.  Jamin  (^)  et  que  je 
reproduis  pour  n'avoir  pas  à  répéter  ses  calculs. 

Il  résulte  de  la  nature  même  de  la  fonction  cosinus,  qui 
définit  le  mouvement  lumineux,  que  la  quantité  d  ne  peut 

(*)  Annales  de  Chimie  et  de  Physique,  3«  série,  t.  XIX,  p.  Saa. 


a4o  L.    MOUTON.    KÉFLE^XION    MÉTALLIQUE 

être  connae  qu'à  un  multiple  près  de  27r,  Nous   devons 
donc  la  considérer  comme  comprise  entre  zéro  et  27r. 

L'équation  de  Tellipse,  trajectoire  du  mouvement  dont 
X  Ql  y  sont  les  composantes,  est 


.T 


2 


J*  51  .ry 


ces*  a         sin^a        sina  cosa 


cos^  =  sin'^1 


et  rinspectîon  de  cette  équation,  où  J  n'entre  que  par  son 
cosinus  et  le  carré  de  son  sinus,  nous  montre  que  toute 
étude  de  ce  mouvement,  basée  uniquement  sur  les  pro- 
priétés de  Tellipse,  sera  impuissante  à  indiquer  si  ^  est 
compris  entre  zéro  et  tz  ou  entre  tt  et  2  7r. 

Voyons  quelles  seront  les  conséquences  de  cette  ambi- 
guïté pour  ce  qui  concerne  le  nombre  — - —  que  nous 

A 

cherchons  à  déterminer. 

Il   est  évidemment  nul  à  l'incidence  normale  et  l'on  a 

par   suite,   pour  ce  cas,   5  =  tt.   Si   donc  — : —  se  déve- 

loppe  en  valeurs  positives,  cî  va  de  tt  à  zéro  ;  s'il  se  déve- 
loppe, avec  l'incidence,  en  valeurs  négatives,  5  va  de  7rà  aTr.. 
Ainsi  les  procédés  simplement  basés  sur  les  propriétés 
de  la  lumière  elliptique  ne  sauraient  indiquer  laquelle  des 
deux  composantes  est  en  avance  sur  l'autre.  Telle  était  la 
méthode  du  quart  d'onde  de  M.  de  Senarmont,  qui  dit  lui- 
même  que,  pour  combler  cette  lacune,  il  faut  avoir  recours 
à  un  autre  mode  d'expériences  (*). 

Le  même  doute  sur  Je  signe  de — r —  existe  dans  le  pro- 
cédé que  j'ai  employé  et  pour  les  mêmes  raisons.  Je  n'ai  pas 
cherché  à  le  lever,  et  voici  pourquoi  :  la  méthode  du  com- 
pensateur dç  M.  Jamin  ne  présente  pas  cette  lacune,   et 


(*)  Annales  de  Chimie  et  de  Phjrsique^  a*  séri*»,  t.  LXXIU,  p.  36o. 


DES    RAYOINS    CALORIFIQUES    OBSGDBS    POLARISÉS.       24 1 

el lé  établi  t  netlemen l  que,  pour  les  métaux,  le  nombre 

A 

est  positif,  quelle  que  soit  la  lumière^  or  j'ai  constaté,  à 
mesure  que  je  m'éloignais  du  spectre  lumineux  dans  les 
radiations  calorifiques,  une  telle  continuité  dans  l'en- 
semble des  phénomènes,  que  je  ne  crois  pas  que  Taccrois- 
sement  de  certitude  sur  ce  signe,  qui  résulterait  d'expé- 
riences directement  faîtes  dans  ce  but,  compenserait  les 
difficultés  que  ces  expériences  paraissent  présenter. 

La  quantité  cî,  considérée  ainsi  comme  comprise  entre 
zéro  et  71,  se  trouve  alors  déterminée  sans  ambiguïté,  par  la 
formule 

COS(î=  ^ — , 

tang  2a 

dans  laquelle  o)  désigne  l'azimut  de  l'un  des  axes  de  Tel- 
lipse  et  a  l'angle  défini  plus  haut. 

La  grande  influence  que  produirait  une  erreur  faite 
dans  la  détermination  de  o),  si  cet  angle  était  dans  les  en- 
virons de  45  degrés,  explique  pourquoi  il  est  bon  de  disposer 
toujours  de  la  polarisation  incidente  pour  faire  tomber  co  d(ï 
façon  que  tang  20)  ne  s'éloigne  pas  trop  de  l'unité  en  va- 
leur absolue. 

L'exemple  suivant,  tiré  de  mon  livre  d'expériences,  et 
que  je  ferai  suivre  des  calculs  qui  s'y  rapportent,  fera  du 
reste  bien  comprendre  la  méthode,  en  même  temps  qu'il 
donnera  une  idée  du  degré  de  confiance  qu'on  peut  accor- 
der aux  résultats. 

Il  se  rapporte  au  miroir  de  verre  platiné,  sous  l'inci- 
dence de  70  degrés,  la  pile  recevant  les  radiations  de  lon- 
gueur d'onde  Xj. 


Ann,deChim,etde  /*Arx.,5«8érie,  t.  XUI.  (Février  1878  );  16 


a4^ 


L.    MOUTON.    —    RÉFLEXION    MÉTALLIQUE 


Azimut 


!<>  Détermination  de —* 
Azimut 


delà  vibration  incidente.      de  l'analyseur. 


xX^  •  •   •   •   •       •   • 

3o 


o 

9« 
o 

90 


Déviations 
galvanométriques. 

o 

2,2 
8,2 

3,3 
3,8 


2°  Détermination  de  S, 


Vibration  incidente  à  /|5^. 

Déviations 
Analyseur.       (^alvanométriques. 


Vibration  incidente  à  5j**. 


0 

2,2 

90 

8,3 

6S 

4,B 

68-^90 

5,8 

69 

5,2 

69  rn  90 

5,2 

70 

5,4 

701^:90 

5,1 

Valeurs 

aux  axes. 

0 
24 

0.7 

24_i.90 

9.7 

I 

déviations 

Analyseur. 

(ralvanométriquos 

0 

0 

1.4 

90 

II 

60 

6 

60  J-l  90 

6,3 

61 

6,2 

61     90 

6,2 

62 

6,4 

62 .     90 

6 

Valeurs 

aux  axes. 

0 
16 

0 
0,4 

iô-»-9o 

12 

Calcul  de-   —  J'ai  pour  cela  deux  expériences  :  la  prc- 

«I 

mièrc,  où  la  vibralion  incidente  est  à  45  degrés,  donnerait 

I  /2T2 

immédiatement  -=  i/  — ^  =  o,52.  La  seconde,  dont  le 

J  V    ^^2;  .      ' 

résultat  est  plus  digne  de  confiance,  à  cause  de  la  presque 
identité  des  deux  déviations,  donne 


j  =  tang3ooy/— :=o,54 


DES    RAY019S    CALORIFIQUES    OBSCURS    POLARISÉS.       Q^i 

Calcul  de  $.  —  On  a  là  aussî  deux  séries  d'expériences  : 
dans  la  première,  où  la  vibration  incidente  est  à  4^  degrés, 
on  trouve  le  petit  axe  de  Tellipse  à  24  degrés  5  l'angle  a> 
est  ainsi  égal  à  24  degrés,  d'où  20)  =  48°  ^  on  a  du  reste 

oota -~  -  ;  on  en  déduit  a  =  6i°43',  d'où  2a  =  123^26'. 

•I 

La  formule  qui  donne  $  est  cos  S  = »  dont  le  numéra- 

^  taDg2a 

teur  est  positif  et  le  dénominateur  négatif;  comme  d'ail- 
leurs l'arc  d  est  compris  entre  zéro  et  7:,  il  suit  que  son 
extrémité  tombe  dans  le  deuxième  quadrant,  et  j^ai  par 
suite,  en  ne  prenant  que  des  angles  compris  dans  les  Tables 
de  logarithmes, 


C0S(7r  —  3) 


tang  '1 80  —  1 23**  26'  ) 


d'où  (tt  —  J)  en  degrés  =  42^48'. 

Dans  la  seconde  série,  la  vibration  incidente  est  à  55  de- 
grés, d'où   cota  =  -col 55**  :  on  trouve  a  =  69^21'^,  d'où 

2a  =  i38°43'-  On  a  d'ailleurs  w  =  16°,  d'où  20)  =  32°. 
En  opérant  comme  plus  haut,  il  vient  pour  tt  —  â  en  de- 
grés la  valeur  44^23^ 

Détermination  [de  — : — Nous  avons  posé 


I        d—  d   \ 

27r| : )  =  o 


I  \ 

* 


2  ^         / 

relation  dans  laquelle  5  est  exprimé  en  unités  de  rayons. 

1VT  •  '^  —  d'       \         S  .  - ,  . 

Nous  en  tirons  — :^ —  = 5  et,  si  nous  désignons  par 

X  2       27r  or 

$1  la  valeur  de  d  en  degrés,  on  a 

277.Î, 
^  =  ■36^' 

d'où 

A  2      3bo 

l6. 


^44  I"    MOUTOK.    —    RÉFLEXION    MÉTALLIQUE 

et  par  suite  les  deux  séries  d'expériences  que  nous  venons 
de  calculer  nous  fournissent  :  la  première 

d—d'      49.«48' 
et  la  seconde 

j'adopte  o,  1^2. 

Je  n'ai  pas  besoin  de  faire  remarquer  avec  quelle  netteté 
se  détermine  l'azimut  des  bissectrices  des  axes  de  l'ellipse  ; 
elle  est  d'ailleurs  confirmée  par  la  concordance  des  résul- 
tats. 

On  peut  aussi  noter  la  constance  de  la  source  qui  est 
indiquée  par  Tinvariabilité  presque  complète  de  la  somme 
des  deux  nombres  mesurant  les  intensités  dans  deux  azi- 
muts rectangulaires. 

Résultats  obtenus. 

J'ai  opéré  jusqu'à  présent  sur  trois  miroirs  :  d'acier,  de 

métal  des  miroirs  et  de  verre  platiné. 

Les  tableaux  suivants  résument  les  résultats  que  j'ai 

obtenus  : 

jicier. 


Différences 

,       ,         fi      fi' 

I 

idenees 

.     de  phase  • 

Rapport  - 

Longueur  d'onde  >l,. 

45 

insensible 

0,86 

5o 

0,02 

0,84 

55 

o,o3 

0,82 

6o 

o,o5 

0,80 

65 

0,09 

0,76 

70 

o,i5 

0,70 

75 

0,19 

0,62 

79 

0,25 

0,53 

80 

0,26 

0,55 

82 

o,3i 

0,5 

DES    RATOMS   CALORIFIQUES   OBSCURS   POLARISÉS.       ^45 


Différences  de 

Incidences. 

phase  • 

y. 
Longueur  d'onde  >!,. 

Rapport  - • 

U 

5o 

M 

0,88 

55 

0,01 

o,85 

60 

o,o3 

0,78 

65 

0,06 

0,75 

70 

0,10 

0,64 

75 

o,i5 

0,62 

80 

0,20 

0,55 

81 

0,22 

o,5i 

8a 

0,25 

o,5i 

83 

0,29 

Longueur  d'onde  Ji,. 

0,55 

0 

5o 

» 

0,90 

60 

0,01 

0,80 

75 

0,12 

0,60 

80 

0,18 

0,55 

82 

0,22 

o,5i 

83  J- 

0,25 

Métal  des  miroirs. 
Différences  de 

0,49 

Incidences. 

,        d-d' 
phase  — : —  • 

Longueur  d'onde  îl,. 

Rapport  -• 

0 

60 

0,08 

0,88 

65 

0,  1 1 

0,80 

70 

o,i5 

0,70 

75 

0,20 

0,61 

80 

o,3o 

Longueur  d'onde  >,. 

o,65 

65 

0,06 

0,84 

70 

0,  10 

0,78 

75 

0,  16 

0,70 

80 

0,26 

0,62 

^4^  I.    MOUTON.    —    RÉFLEXION    MÉTALLIQUE 


Verre  platiné. 

Différences  de 

Incidences. 

,        d-d' 
phase  — — • 

Longueur  d^onde  X^. 

Rapport  -  • 

65 

0,07 

0,72 

70 

0,12 

0,54 

75 

0,19 

0,48 

80 

0,27 

0,46 

Si  Ton  examine  chacun  des  tableaux  précédents,  on  y 
voit  d'abord  se  reproduire  les  résultats  généraux  que  j'ai 
rappelés  plus  haut,  relatifs  à  la  lumière,  à  savoir  : 

1**  Les  différences  de  phases  parlant  de  zéro  s'élèvent 
progressivement  à  mesure  que  s'accroît  l'angle  d'inci- 
dence ; 

7?  La  valeur  de  -?  partant  de  i  à  l'incidence  normale, 

•I 

va  en  diminuant,  passe  par  un  minimum,  puis  tend  de 

nouveau  vers  l'unité  ; 

I  ' 

3^  La  valeur  minimum  du  rapport  --  correspond    tou- 

jours  à  Tîncidence  pour  laquelle  la  différence  de  marche 

est  -7 j  c'est-à-dire — ^ — =o,25. 
4  ^ 

Si,  maintenant,  pour  un  même  miroir,  on  compare  les 
séries  de  différences  de  phases  correspondant  aux  diverses 
longueurs  d'onde,  il  s'en  dégage  un  enseignement  qui  a 
peut-être  quelque  importance. 

Je  vais  mettre  en  regard,  dans  le  tableau  suivant,  pour 
l'acier,  les  valeurs  successives  des  différences  de  phases  re- 
latives à  la  longueur  d'onde  du  thallium  (  o'"*",  ooo534  )  1  du 
sodium    (o™"*,ooo5888)   (*),  et  celles  qui  correspondent 


(*)  Les  résultats  relatifs  au  sodium  résultent  d'eipériences  nombreuses 
et  concordantes  faites  journellement  par  les  élèves   du   laboratoire   aa 


DES    RÀTOnS   CALORIFIQUES    OBSCURS    POLARISÉS.       a/^J 

aux  longueurs  d'onde  plus  grandes  encore  X^,  X^,  >.3,  dont 
on  a  vu  plus  haut  les  valeurs  approchées  : 


Thallium 

Sodium 

K 

^. 

•'• 

Incidences. 

0,000534. 

0, 000588. 

0,0010. 

o,ooi4î 

0,0018. 

0 

4o 

o,o4o 

o,o3o 

0 

0 

0 

45 

0,060 

0,045 

0 

0 

0 

5o 

0.080 

o,o65 

0,02 

0 

0 

55 

0, 100 

o,o85 

o,o3 

0,01 

0 

6o 

0,1 15 

0,1  o5 

o,o5 

o,o3 

0,01 

65 

0,  i55 

0, 145 

0,09 

0,06 

i> 

70 

0,200 

o,i85 

0,  i5 

0,10 

a 

75 

o,25o 

0,240 

0,19 

o,i5 

0,12 

76 

m 

o,25o 

» 

)» 

» 

79 

M 

» 

0,25 

» 

» 

80 

0,320 

o,3io 

0,26 

0,20 

0,18 

82 

» 

u 

o,3i 

0,25 

0,22 

83} 

» 

• 

u 

n 

0,25 

Ce  tableau  dessine  nettement  la  marche  du  phénomène, 
au  moins  en  ce  qui  concerne  Tacier.  Ainsi  la  différence 

de  phase  — : —  est,  à  une  incidence  de  4^  degrés,  o,o4o 

pour  la  lumière  du  thallium,  o,o3o  seulement  pour  le  so- 
dium, et  insensible  pour  les  radiations  obscures.  A  5o  de- 
grés, tandis  qu'on  a  déjà  0,080  pour  le  vert,  o,o65  pour 
le  jaune^  on  commence  à  avoir  0,02  pour  Xj  et  rien  encore 
pour  les  deux  autres.  La  différence  de  phase  ne  commence 
à  être  appréciable  qu'à  55   degrés  pour  Xj,  à  60  degrés 


moyen  de  l'appareil  et  du  compensateur  de  M.  Jamin,  construit  par 
M-  Duboscq.  Ceux  qui  se  rapportent  au  thallium  ont  été  déterminés  avec 
soin  par  Tun  d'eux,  M.  Curie,  aujourd'hui  préparateur.  La  source  lumi- 
nense  était  un  brûleur  Laurent,  dans  la  capsule  duquel  on  plaçait  des 
grains  d'alun  de  thallium.  Une  cuve  remplie  d'une  dissolution  de  chlorure 
de  cuivre  arrêtait  la  raie  jaun&tredu  thallium  et  surtout  les  raies  du  sodium 
qu'on  trouve  toujours  en  spcctroscopie.  On  peut,  du  reste,  rapprocher  ces 
résultats  des  tableaux  de  M.  Jamin. 


^4^  A.    ROSEUSTIEHL.    RECHERCHES 

pour  Xj.  Aussi,  tout  en  se  tenant  inférieures,  les  diffé- 
rences de  phases  relatives  aux  plus  grandes  longueurs 
d'onde  croissent-elles  avec  rincidence d'une  façon  d'autant 
plus  rapide  que  ces  longueurs  d'onde  sont  plus  grandes. 
Si  Ton  considère  en  particulier  le  point  où  la  différence 
de  phase  est  o,25,  ou,  autrement  dit,  où  la  différence  de 

marche  est  y?  incidence  de  polarisation  rétablie  après  deux 
4 

réflexions,  comme  le  désigne  M.  Jamin,  on  le  trouve  à 
^5  degrés  pour  le  vert,  à  ^6  degrés  pour  le  jaune,  à  y  g  de- 
grés pour  X,,  82  degrés  pour  a,,  83-^  degrés  pour  X,. 

Des  faits  analogues  se  constatent  dans  les  deux  autres 
miroirs  que  j'ai  étudiés. 

Ainsi,  pour  ces  corps,  la  courbe  représentative  des  dif- 
férences de  phases  reste  d'autant  plus  longtemps  confondue 
avec  l'axe  des  incidences  que  la  longueur  d'onde  est  plus 
grande 5  par  suite,  l'intervalle  est  d'autant  plus  long  pen- 
dant lequel  la  réflexion  produira  simplement  une  rotation 
du  plan  de  polarisation  incidente,  tandis  que  d'autant  plus 
court  se  trouve  celui  dans  lequel  la  lumière  ou  la  chaleur 
réfléchie  sera  polarisée  elliptiquement. 


UECDERCIIES  SUR  LES  MATIÈRES  COLORANTES 
DE  LA  GARANCE  (  3«  Mémoire  )  ; 

Par    m.    a.     ROSENSTIEHL. 


La  pseudopiu^nirine. 

Mes  dernières  recherches  sur  les  matières  colorantes  de 
la  garance  ont  eu  pour  résultat,  non  de  modifier  les  con- 
clusions générales  de  mes  Mémoires  précédents,  mais  les 
idées  reçues  sur  la  constitution  de  la  pseudopurpurine  et 
sur  la  relation  qui  existe  entre  elle  et  les  autres  matières 


SUR    LES    MATIERES    COLORANTES    DE    LA    GARAINXE.      ^49 

colorantes  de  la  garance  qui  en  dérivent.  Il  m^a  donc 
paru  utile  de  résumer  les  faits  actuellement  connus,  aûn 
(le  bien  fixer  letat  de  nos  connaissances  sur  les  principes 
immédiats  colorants  de  cette  intéressante  rubiacée. 

La  pseudopurpurine  est  celle  des  matières  colorantes 
rouges  de  la  garance  qui  a,  été  découverte  la  dernière, 
cjuoiqu'elle  soit  en  réalité  la  plus  abondante. 

Il  faut  attribuer  cette  circonslauce  à  sa  grande  insta- 
bilité •,  les  nombreux  observa  leurs  qui  ont  fait  de  la  garance 
Tobjet  de  leurs  recherches  ont  tous  employé  des  moyens 
trop  énergiques  pour  opérer  l'extraction  des  principes 
colorants  :  ils  ont  détruit  la  matière  primordiale  et  n^en 
ont  recueilli  que  les  débris.  Il  était  réservé  à  M.  E.  Kopp  de 
donner  à  l'industrie  un  extrait  qui,  étant  fait  à  froid  et 
avec  un  végétal  n'ayant  subi  aucune  opération  chimique 
préalable,  représentât  à  peu  de  chose  près  la  matière  colo- 
rante telle  qu'elle  est  contenue  dans  la  garance. 

C'est  en  prenant  pour  point. de  départ  ce  produit,  connu 
sous  le  nom  de  purpurine  commerciale,  que  MM.  Schût- 
zcnberger  et  Scliiffert  ont  découvert  la  pseudopurpu- 
rine [Bulletin  de  la  Société  industrielle  de  Mulhouse, 
t.  XXXIV,  p.  jo,  1864  ).  Ce  produit  en  constitue  la  plus 
grande  partie. 

L'analyse  élémentaire  a  donné  comme  moyenne  de  six 
combustions  concordantes  des  chiffres  que  MM.  Schiitzen- 
herger  et  Scliiffert  ont  traduit  par  la  formule 

d'après  laquelle  sa  molécule  aurait  contenu  2  atomes 
d'oxygène  de  plus  que  la  purpurine  et  3  do  plus  que  l'ali- 
zarine.  Cette  relation  simple  semblait  confirmée  par  le 
fait  observé  par  les  auteurs,  que  la  pseudopurpurine  se 
transforme  en  purpurine  par  la  sublimation  ou  par  l'action 
de  l'alcool  à  4-  200  degrés  C. 

MM.  Graebe  et  Lieberman,  après  avoir  fixé  la  consti- 


à5o  A.    ROSENSTIEHL.    —    BECHERGHES 

tution  de  Talizarine,  ont  proposé  pour  la  pseudopurpii - 
rîne  la  formule  C**H®0*,  d'après  laquelle  elle  aurait  élé 
une  télraoxyanthraquinone.  Ces  auteurs  ont  fait  remarquer, 
du  reste,  que  les  analyses  de  MM.  Schûlzenberger  et  Schif- 
ferl  s'accordaient  aussi  bien  avec  C"®H*'0*  qu'avec  la 
formule  qu'ils  proposaient. 
On  a  en  effet  : 

C"H''0^  C«*H'0°.  Trouvé. 

C 60,60  61,76  61 

H 3,o3  ^«94  ^ 

Cette  constitution  a  été  généralement  admise,  car  elle 
établit  entre  les  matières  colorantes  de  la  garance  un  lien 
fort  naturel,  ainsi  que  cela  ressort  de  la  comparaison  des 
formules: 

Alizarine  et  purpuroxanthine . . . .     C'^H"0^ 

Purpurine C'*H»0^ 

Pseudopurpurine C*  H*0" 

Plus  tard,  j'ai  démontré  que  la  pseudopurpurine  est 
une  matière  très-instable  (  Comptes  rendus  des  séances  de 
V Académie  des  Sciences^  t.  LXXIX,  p.  680^  1874).  Sa 
conversion  en  purpurine  se  fait  plus  facilement  qu'on  ne 
l'avait  cru  jusqu'alors.  J'ai  fait  voir  qu'il  n'est  pas  néces- 
saire de  la  faire  chauffer  à  -h  200  degrés  avec  l'alcool, 
mais  que  la  seule  ébullition  à  la  pression  ordinaire  est 
suffisante. 

D'après  les  idées  qui  étaient  admises,  j'ai  envisagé  cette 
transformation  comme  une  réduction,  dans  laquelle  l'al- 
cool lui-même  avait  pu  intervenir  comme  désoxydant. 
Mais,  ayant  poussé  plus  loin  mes  expériences,  je  vis  qu'une 
solution  aqueuse  d'alun  et  même  Teau  pure  étaient  aussi 
aptes  que  l'alcool  bouillant  à  opérer  cette  transformation. 
Le  dissolvant  ne  pouvait  plus  dès  lors  être  considéré 
comme  intervenant  chimiquement,  et  je  dus  admettre 
que  cette  réduction,  si  réduction  il  y  avait,  devait  avoir  eu 


SUR    LES    MATikRES    COLORANTES    DE    LA    GARANCE.     aSi 

lieu  au  détriment  d'une  partie  de  la  substance  même  de  la 
pseudopurpurî  ne. 

Divers  produits  secondaires,  acides  et   cristallisables 
qui  se  forment  simultanément  et  en  petite  quantité,  me 
paraissaient  justifier  cette  interprétation. 

Toutefois,  même  expliqué  de  cette  façon,  le  phénomène 
n'en  restait  pas  moins  remarquable,  presque  sans  ana- 
logue. La  pseudopurpurine  apparaissait  comme  un  oxy- 
dant énergique,  capable  de  brûler  une  partie  de  sa  propre 
substance,  à  une  température  peu  élevée.  Elle  rappelait 
par  Li,  jusqu'à  un  certain  point,  l'eau  oxygénée,  dont  elle 
paraissait  partager  le  mode  de  décomposition  et  même 
l'instabilité. 

Mais,  si  les  rapports  entre  la  purpurine  et  la  pseudo- 
purpurine avaient  été  en  réalité  tels  qu'on  les  admettait, 
on  aurait  du  pouvoir  passer  de  la  première  à  la  seconde 
par  une  oxydation  ménagée:  c'est  ce  que  j'ai  tenlé  de 
faire  (*).  Tenant  compte  de  l'instabilité  de  la  pseudopur- 
purine à  une  température  voisine  de  loo  degrés,  j'ai  opéré 
au-dessous  de  ce  degré  et  dans  divers  milieux.  J'ai  em- 
ployé comme  tels  l'eau  et  les  dissolutions  alcalines,  l'acide 
acétique  cristallisable,  l'acide  sulfurique  5  comme  oxydants^ 
l'eau  oxygénée,  divers  peroxydes,  les  acides  manganique 
et  cliromique,  l'oxygène  du  pôle  positif  de  la  pile.  Ei» 
opérant  méthodiquement  avec  ces  divers  réactifs,  j'ai 
constaté  qu'aucun  d'entre  eux  n'était  apte  à  transformer 
la  purpurine  en  pseudopurpurine. 

Voyant  alors  que  l'oxydation  simple  ne  conduisait  pas 
au  but,  j'ai  choisi  une  méthode  détournée. 

J'ai  essayé  de  substituer  le  groupe  (OH)  au  groupe  SO'H 
d'un  dérivé  sulfurique  de  la  purpurine.  Ce  dérivé  n'avait 
pas  encore  été  préparé.  L'acide  sulfurique  ne  se  prêtant 


(*  )  Comptes  rendus  des  séances  de  V Académie  des  Scitnccs,  t.  LXXXIV, 
p.  559  et  1092. 


33 J  A.    BOSEfiSTlEHL.    RECUERCHES 

pas  à  cette  substitution,  j^ai  opéré  avec  Tanhydride  :  les 
■vapeurs  de  ce  corps  furent  condensées  sur  de  la  purpurine 
pure  et  sèche  ^  celle-ci  se  dissout  dans  Tanhydride  fondu, 
sans  s'altérer  ;  une  goutte  de  cette  dissolution,  projetée  dans 
Teau,  produit  un  précipité  de  purpurine  :  on  a  dû  chauffer 
le  mélange  pendant  trente  minutes  environ  au  point 
d^cbullitiouderanhydride,  pour  obtenir  un  produit  entiè- 
rement soluble  dans  Teau  à  froid,  avec  une  couleur 
orangée  intense.  .« 

Ce  dérivé  sulfurique  n'a  été  ni  isolé  ni  analysé  \  voici 
cependant  ses  caractères  : 

Les  sels  alcalins  sont  solubles  dans  Tcau  avec  une  riche 
couleur  violette,  les  sels  de  chaux  et  de  bai  vie  sont  insolu- 
blés.  Il  déplace  aisément  Tacide  carbonique  des  carbonates, 
ce  qui  oblige,  quand  on  veut  éloigner  l'acide  sulfurique  libre 
du  produit  brut,  en  saturant  par  le  carbonate  de  baryte, 
d  opérer  avec  précaution,  sans  quoi  toute  1&  matière  colo- 
rante passe  dans  le  résidu  insoluble.  Il  teint  les  mordants 
d'alumine  (sur  coton)  en  violet  rouge,  comme  l'alizarine 
fila  pseudopurpurine,  mais  d'une  couleur  plus  vive;  les 
mordants  de  fer  se  colorent  en  violet  plus  bleu  que  celui 
de  l'alizarine:  ces  couleurs  résistent  à  l'eau  de  savon  bouil- 
lante, mieux  que  ne  le  font  celles  de  la  pseudopurpurine, 
moins  bien  que  celles  de  l'alizarine. 

Pour  obtenir  ces  teintures  avec  un  produit  aussi  acide, 
il  faut  neutraliser  partiellement  l'acide  sulfoconjugué  par 
un  carbonate  ou  un  acétate  alcalin  et  opérer  à  une  tempé- 
rature peu  élevée,  autrement  les  oxydes  d'aluminium  et  de 
fer  sont  dissous  sur  place  et  enlevés  du  tissu  par  la  ma- 
tière colorante. 

Chauffée  avec  la  soude  ou  la  baryte  caustiques,  la  ma- 
tière s'altère  ;  il  se  forme  des  sulfites  et  une  matière  colo- 
rante qui  teint  comme  la  purpurine.  Cette  transformation 
ne  se  fait  qu'à  une  température  supérieure  à  celle  qui  dé- 
truit la  pseudopurpurine,  de  sorte  que,  «au  point  de  vue  de 


SUR    LES    MATIERES    COLORANTES    DE    LA    GARAIfCB.      253 

la  synthèse  de  celle-cî,  rexpérîence  a  été  négative;  maïs 
elle  a  montré  que  l'introduction  de  SO' H  dans  la  molé- 
cule de  la  purpurine  produit  un  corps  qui  ressemble  plus 
qu'aucun  autre  à  la  pseudopurpurîne  :  ce  qui  est  un  indice 
et  dénote  une  analogie  de  constitution.  Conduit  ainsi  à 
douter  de  la  valeur  des  idées  admises,  je  n'ai  pas  tardé  à 
observer  une  réaction  de  nature  à  me  metire  sur  la  voie. 

Ayant  chauffé  la  pseudopurpurine  sèche,  dans  un  bal- 
lon muni  d'un  tube  de  dégagement,  afin  de  la  convertir 
en  purpurine  par  l'action  de  la  chaleur  seule,  j'aî  constaté 
un  dégagement  régulier  d'acide  carbonique  à  i8o  degrés  C. 
Il  est  resté  dans  le  ballon  de  la  purpurine  pure. 

Un  fait  analogue  venait  du  reste  d'être  signalé  par 
MM.  Schunck  et  Rœmer;  une  matière  colorante  jaune, 
qu'ils  venaient  de  séparer  de  la  purpurine  commerciale  et 
qu'ils  représentent  par  la  formule  C^'H'O®,  se  dédouble, 
au  moment  de  sa  fusion,  en  CO*H-  C^*H®0*  ;  ce  dernirr 
corps  est  la  purpuroxanthîne  de  M.  Schûtzenberger  [Be- 
richte  der  chemischen  Gesellschafty  t.  X,  p.  172). 

Dans  une  première  expérience,  j'ai  déterminé  par  diffé- 
rence la  quantité  d'acide  carbonique  dégagée  par  la  pseu- 
dopurpurine séchée  dans  le  vide  à  100  degrés  C.  J'ai 
trouvé  i4î4  pour  100;  le  calcul  demande  i4)6  si  l'on  re- 
présente la  réaction  par 

Maîsla  formule  C**H®0'',quiseuleaurail  pu  rendre  compte 
de  ce  dédoublement,  ne  s'accorde  pas  avec  les  analyses 
faites  par  MM.  Schûtzenberger  et  Schiffer t,  ainsi  que  cela 
ressort  de  la  comparaison  des  chiffres  suivants  : 

(^isjjsQT      Moyenne  de  six  analyses 
(calcul).  concordantes  (' ). 

C 60  61 

H 2,66  3 


(^)  ScHUTZEKBEAGER,  Matièrts  colorantes,  t.  II,  p.  i3o. 


254  A.    nOSEMSTIEHL.    RECHERCHES 

La  différence  de  i  pour  loo  sur  la  richesse  en  carbone 
me  semblait  devoir  être  due  à  la  présence  de  purpurine 
dans  le  produit  analysé. 

La  purpurine  contient  en  effet  : 

C 65,62 

H 3,12 

Cela  était  d'autant  plus  probable  que  la  séparation  de 
ces  deux  corps,  par  l'analyse  immédiate,  ne  s'effectue  qu'a- 
vec la  plus  grande  difficulté.  On  sait  que  MM.  Scliùtzen- 
berger  et  Schiffer t  ont  employé  dans  ce  but  l'alcool  absolu 
bouillant,  qui  ne  dissout  que  la  purpurine.  Mais,  en  réa- 
lité, quelque  nombreux  que  soient  les  traitements  alcoo- 
liques, l'alcool  se  colore  toujours  et  Ton  n'arrive  jamais  à  un 
épuisement  complet.  Le  résidu,  formé  par  la  pseudopurpu- 
rine, est  alors  recristallisé  dans  la  benzine  ;  mais  cette  opéra- 
tion n'est  pas  dénature  à  éliminer  la  purpurine  restante  :  son 
effet  principal  consiste  à  séparer  la  pseudopurpurine  des 
produits  insolubles  qui  l'accompagnent.  Mon  but  devait 
être  dès  lors  de  démontrer  la  présence  de  la  purpurine  dans 
le  produîtpréparé  d'après  les  indications  de  MM.  Schûtzen- 
berger  et  Schiffert,  et  ensuite  de  rechercher  une  méthode 
qui  permît  de  préparer  la  pseudopurpurine  à  l'état  de  pu- 
reté et  de  l'analyser. 

La  recherche  de  la  purpurine  dans  ce  produit  est  uni^ 
opération  délicate,  à  cause  de  l'instabilité  de  la  pseudo- 
purpurine*, car,  dès  qu'on  lui  fait  subir  le  contact  d'un  li- 
quide chaud  ou  seulement  tiède,  on  ne  peut  plus  affirmer 
que  la  purpurine  que  l'on  en  retire  ainsi  y  ait  été  préexis- 
tante^ elle  peut  être  le  résultat  d'une  altération.  Pour  dé- 
cider la  question,  je  me  suis  servi  de  l'essai  de  teinture. 
J'ai  démontré  (Compter  rendus  des  séances  de  V  Académie 
des  Sciences,  t.  LXXX,  p.  laSy)  que  la  pseudopurpurine 
teint  les  mordants  seulement  dans  l'eau  distillée.  En  pré- 
sence de  I  équivalent  de  carbonate  de  calcium  dissous  dans 
l'eau»  elle  se  précipite  totalement,  tandis  que  dans  les  mêmes 


SUR    LES    MATIERES    COLORANTES    DE    LA    GARANCE.     355 

conditions  la  purpurine  atteint  en  teinture  son  rendement 
maximum.  Cette  différence  de  propriétés  a  été  utilisée  pour 
précipiter  partiellement  la  pseudopurpurine  des  bains  de 
teinture.  Par  une  série  d'essais  méthodiques  faits  à  basse 
température,  j'ai  obtenu  des  couleurs  permettant  de  con- 
clure à  la  présence  de  purpurine  dans  le  produit.  Ce 
point  établi,  restait  à  trouver  une  méthode  de  séparation. 
M.  SchûlZenberger  a  utilisé  l'insolubilité  de  la  pseudo- 
purpurine dans  r alcool  bouillant. 

J'ai  démontré  dans  le  temps  que  dans  ces  conditions  il 
y  a  toujours  transformation  partielle  en  purpurine,  et  que, 
si  Ton  prolonge  suffisamment  Taction  de  Talcool  bouillant, 
la  transformation  de  la  pseudopurpurine  est  totale. 

Pour  éviter  cette  décomposition,  j'ai  traité  de  la  pseudo- 
purpurine irès-divisée,  par  l'alcool  absolu  à  5o  degrés  C, 
çn  renouvelant  le  liquide  dès  qu'il  s'était  coloré  5  l'essai  de 
teinture  permettait  de  constater  que  la  partie  dissoute  était 
bien  de  la  purpurine;  en  continuant  ces  traitements,  j'ai 
du  reconnaître  que  l'alcool  se  colorait  toujours,  et  qu'il 
arriverait  un  moment  où  tout  mon  produit  serait  trans- 
formé en  purpurine. 

J'ai  analysé  la  portion  non  dissoute  dans  l'alcool  tiède, 
après  que  la  moitié  du  produit  environ  eut  été  enlevée  par 
le  dissolvant,  et  voici  le  résultat  de  cette  combustion  : 


C 
H 


Analyse  de  MM.  Schûtzen 

I. 

II. 

Calcul. 

berger  et  Schiflert. 

60,4 

60,5 

60,00 

61 

2'79 

2,85 

2,66 

3 

Il  montre  que  la  portion  insoluble  présente  une  composi- 
tion qui  se  rapproche  plus  de  celle  demandée  par  la  for- 
mule C^^H^O',  que  les  chiffres  obtenus  par  MM.  Schût- 
zenberger  et  Schiffert,  et  sur  lesquels  on  s'était  appuyé 
pour  établir  la  formule  C**H^O^.  Mais  le  résultat  n'est 
pas  encore  satisfaisant:  les  proportions  de  carbone  et  d'hy- 


256  À.    IlOSEIfSTIEHL.     RECHERCHES  ' 

drogène  dénotent  la  présence  de  purpurine  dans  le  produit, 
résultat  confirmé  par  les  essais  de  teinture. 

J'ai  opéré  alors  sur  une  nouvelle  portion  de  pseudopur- 
purine, que  j'ai  dissoute  dans  de  l'eau  chargée  de  carbonate 
de  soude,  en  opérant  à  froid  et  rapidement.  La  dissolution 
limpide  a  été  saturée  par  un  acide  et  le  précipité  de  pseu- 
dopurpurine très-divisé  mis  en  suspension  à  froid  dans  un 
grand  volume  d'alcool,  qui  s'est  coloré  en  brun,  par  la  dis- 
solution de  purpurine  hydratée.  En  renouvelant  ralcool 
4  ou  5  fois,  il  arrive  un  moment  où  il  se  colore  en  rouge 
faible,  et  l'essai  de  teinture  montre  que  ce  qui  est  en  dissolu- 
tion n'est  plus  de  la  purpurine,  mais  de  la  pseudopurpurine 
pure.  Pour  loo  grammes  de  matière  première,  on  a  em- 
ployé environ  20  litres  d'alcool. 

Le  produit,  séché  à  100  degrés  dans  le  vide,  a  donné  à 
la  combustion  les  nombres  suivants  : 

I.  os^,8i25  de  matière  ont  donné  : 

Cendres. . .   o,oo45,     CO^  .  .    i  ,7885,     H'O.  . .   o,2o55. 
n.  o^^SS^S  de  matière  ont  donné  : 
Cendres...   o,oo3,     CO^. .  .    1*179»     H'O...   0,1 35. 

D'après  ces  données,  on  calcule  la  composition  suivante  : 

1.  II.  C'H'O'. 

C 60,35  60,1 5  60,00 

H 2,82  2,80  2,66 

Ces  résultats,  eu  égard  à  la  diflGculté  que  présente  la 
purification  de  ce  corps,  ne  s'éloignent  pas  assez  de  la  for- 
mule C**H"0''  pour  que  cette  dernière  ne  soit  pas  admis- 
sible^ elle  est  confirmée  d'ailleurs  par  le  dédoublement 
que  j'ai  observé. 

Pour  démontrer  que  ce  dernier  est  net  et  se  fait  bien 
réellement  d'après  l'équation 

C'»H»0'  =  C02+C'<H«0% 


SUR    LES   MATIÈRES    COLORANTES    DE    LA    GARANCE.      ^5^ 

j'ai  fait  une  nouvelle  combustion,  divisée  en  deux  phases, 
la  première  ayant  pour  but  de  doser  directement  l'acide 
carbonique  résultant  du  dédoublement,  la  seconde  d'éta- 
blir la  composition  centésimale  du  résidu.  A  cet  effet, 
la  portion  du  tube  à  combustion,  contenant  la  matière 
(placée  dans  une  nacelle),  a  été  chauffée  au  bain  d'air  à 
180  degrés  C.  pendant  deux  heures,  dans  un  courant  d'air 
pur,  traversant  très-lentement  l'appareil.  Celui-ci  était 
d'ailleurs  disposé  comme  pour  une  analyse  élémentaire. 

Quand  le  dégagement  d'acide  carbonique  eut  cessé,  les 
appareils  à  brûler  ont  été  pesés,  puis  remis  en  place  j  après 
avoir  engagé  alors  le  tube  dans  le  fourneau  à  combustion, 
on  a  achevé  l'analyse  en  brûlant  le  résidu  dans  un  courant 
d'oxygène.  Les  résultats  de  l'expérience  sont  les  suivants  : 

Matière  ok%644S»  dont  à  déduire,  pour  cendres,  o,oo35. 

Acide  carbonique  dans  la  première  phase 0,095 

Acide  carbonique  dans  la  seconde  phase i ,  2^3 

Eau  dans  la  première  phase o  ,006 

Eau  dans  la  seconde  phase o,  i53 

D'après  ces  chiffres,  la  quantité  d'acide  carbonique  for- 
mée est  de  i4>9  *•  le  calcul  demande  1496. 
La  composition  du  résidu  serait  la  suivante  : 

Calcul  pour  €"  H*  o». 

C 65, 3i  65,62 

H 3,16  3,12 

Les  expériences  sont  donc  parfaitement  d'accord  avec  la 
formule  C^'lt^O'',  d'après  laquelle  la  pseudopurpurine 
serait  un  acide,  tel  que  l'acide  salicylique,  que  la  chaleur 
dédouble  en  acide  carbonique  et  en  phénol,  ou  l'acide  an- 
thranylique,  qui  à  la  température  de  sa  fusion  se  scinde 
très-nettement  en  acide  carbonique  et  en  aniline. 

Elle  contiendrait 

C"H*(C'0^)(HO)^(COHO). 

Ann,  de Chim,et  de  Phys.,  5«  série,  t.  XIII.  (Février  1878.}  1 7 


258  A.    ROSENSTIEHL.    RECUERCHES 

Sa  nature  d'acide  est  confirmée  par  la  manière  dont  elle  se 
comporte  vis-à-vis  des  bases,  manière  qui  la  distingue  de 
toutes  les  autres  matières  colorantes  de  la  garance. 

Elle  ne  peut  plus  être  considérée  comme  dérivant  de 
Tanthracène  lui-même,  mais  bien  d'un  composé  méthylé 
de  cet  hydrocarbure. 

Propriétés  de  la  pseudopurpurine. 

A  Tétat  cristallisé,  elle  se  présente  sous  forme  de  pail- 
lettes d'un  assez  beau  rouge.  A  Tétat  de  siccité,  elle  peut 
être  cliauflee  à  i6o  degrés  sans  se  décomposer  ;  mais,  à  partir 
de  cette  température,  elle  commence  à  se  dédoubler,  et  à 
i8o  degrés  le  dégagement  de  gaz  carbonique  est  régulier. 

Le  chloroforme  et  la  benzine  la  dissolvent  à  TébuUition, 
en  petite  quantité,  sans  Taltérer.  Elle  cristallise  en  se  sépa- 
rant de  ces  milieux. 

L'eau  et  Talcool  la  dissolvent  à  peine  à  froid,  sans  l'ai* 
térer-,  en  présence  de  l'eau,  elle  peut  être  chauffée  jusque 
vers  loo  degrés  pendant  le  temps  nécessaire  à  la  teinture; 
le  dédoublement  se  fait,  il  est  vrai,  d'une  manière  con- 
stante, mais  sur  une  si  petite  échelle,  que  l'ensemble  de  la 
nuance  obtenue  en  teinture  n'en  est  pas  sensiblement 
modifié.  En  solution  alcoolique,  la  décomposition  est  plus 
rapide;  la  couleur  rouge  de  cette  solution  vire  à  Torangé 
par  une  légère  élévation  de  température,  et  Ton  constate 
facilement  que  ce  qui  est  alors  en  dissolution  n'est  plus 
que  de  la  purpurine.  Elle  se  dissout  à  frqjd  dans  les  les- 
sives alcalines  caustiques;  dans  ce  milieu  elle  se  trans- 
forme rapidement  en  purpurine  hydratée. 

Les  carbonates  alcalins,  en  dissolution  dans  Teau,  la 
dissolvent  en  se  colorant  en  rouge  et  sans  l'altérer  aussitôt; 
l'alcool  en  précipite  un  sel  que  l'eau  décompose  facilement 
en  pseudopurpurine  qui  devient  libre,  et  en  un  sel  plus 
alcalin. 


SUR    LES    MÀTlkHES    CÔLORAIITES    DE   LA    GARANCE.     Qjp 

Cette  propriété  m^a  permis  de  préparer  la  pseudopur- 
purine bien  cristallisée  *,  on  abandonne  la  dissolution  alca* 
line  additionnée  d'alcool,  à  l'air,  dans  des  vases  couverts.  ' 
Bientôt  la  matière  colorante  se  dépose  sous  forme  de  la* 
melles  brillantes  d'un  rouge  foncé.  On  la  débarrasse  du 
liquide  mère  par  un  lavage  prolongé  à  Teau  froide. 

Elle  se  dissout  à  froid  dans  une  solution  aqueuse  de 
bicarbonate  de  soude,  avec  une  couleur  d'un  rouge  orangé. 
Les  carbonates  alcalino-terreux  sont  décomposés  par  elle; 
Tacide  carbonique  est  déplacé,  et  il  se  forme  des  sels  inso- 
lubles que  cet  acide  dissous  dans  l'eau  ne  décompose  plus: 
cette  propriété,  qui  atteste  sa  nature  d'acide,  la  distingue 
des  autres  matières  colorantes  de  la  garance.  II  en  résulte 
qu'elle  ne  teint  pas  les  mordants  d'alumine  et  de  fer  en 
présence  d*eau  calcaire;  elle  ne  les  teint  que  dans  l'eau 
distillée  [Comptes  rendus  des  séances  de  ï Académie  des 
Sciences  y  t.  LXXX,  p.  laS^).  Les  nuances  obtenues  sont 
caractéristiques.  Les  mordants  d'alumine  se  colorent  en 
violet  rouge  et  en  rose  violacé,  ressemblant  aux  couleurs 
de  l'alizarine  pure:  elles  sont  seulement  plus  vives;  les 
mordants  de  fer  se  colorent  en  un  gris  violacé  que  j*estime 
être  le  cinquième  violet  bleu,  -^  ou  Yôde  rabat.  Cette  cou- 
leur est  si  différente  du  violet  de  l'alizarine,  que  la  con- 
fusion n'est  pas  possible;  du  reste,  toutes  les  couleurs 
obtenues  à  l'aide  de  la  pseudopurpurine  se  distinguent 
par  leur  peu  de  stabilité  ;  les  passages  en  bains  de  savon, 
loin  de  les  aviver,  les  dégradent  rapidement* 

La  facilité  avec  laquelle  elle  est  précipitée  par  les  sels 
calcaires,  ainsi  que  son  instabilité,  fait  que  son  rôle  en 
teinture  est  nul. 

Elle  se  dissout  partiellement  dans  l'eau  d'alun:  cette  so- 
lution est  rose  et  fluorescente  comme  celle  de  la  purpurine; 
si  l'on  élève  la  température  au  delà  de  5o  à  60  degrés,  la 
transformation  en  purpurine  s'effectue  peu  à  peu.  Les 
alcalis  précipitent  de  celte  solution  alunée  une  laque  rose, 


26o  À.    ROSEKSTIEHL.     -^    RECHERCHES 

employée   en    peinture  à   l'iiuile  et   en    impression   sur 
tissus* 

L'usage  de  cette  laque  doit  être  fort  ancien.  Robiquet  et 
Colin  en  parlent  dans  leur  Mémoire  sur  la  garance,  lu  k 
l'Académie,  le  6  novembre  1826  [annales  de  Cliimie  et 
de  Physique,  t.  XXXIV,  p.  225).  Ils  citent  un  procédé  de 
préparation  de  M.. Mérimée,  qui  est  encore  à  peu  de  chose 
près  celui  suivi  aujourd'hui  dans  les  fabriques  d'indiennes: 
la  garance  lavée  à  l'eau  alcaline  est  mise  en  digestion  avec 
une  dissolution  d'alun  tiède,  qu'on  additionne  ensuite 
d'alcalis,  qui  précipitent  la  matière  colorante  mélangée  de 
plus  ou  de  moins  d'alumine  en  excès. 

Ainsi  qu'il  a  été  dit  plus  haut,  la  pseudopurpurine  ne 
se  dissout  pas  totalement  dans  l'eau  d'alun  ;  une  portion 
forme  une  combinaison  aluminique  insoluble,  difficilement 
attaquée  par  les  acides  étendus,  mais  que  l'acide  sulfurjque 
concentré  dissout  en  régénérant  la  pseudopurpurine,  si 
l'on  a  eu  soin  de  ne  pas  élever  la  température. 

L'eau  d'alun  peut  servir  à  extraire  la  pseudopurpurine 
directement  de  la  garance,  d'après  ce  qui  précède,  mais  le 
procédé  ne  permet  pas  de  l'en  extraire  en  totalité,  à  cause 
de  la  formation  de  cette  combinaison  insoluble,  et  il  ne 
la  donne  pas  à  l'état  de  pureté,  parce  qu'il  y  a  toujours 
transformation  partielle  en  purpurine,  pendant  les  mani- 
pulations. 

J'ai  étudié  avec  une  attention  particulière  les  produits 
de  Faction  de  l'eau  bouillante  sur  la  pseudopurpurine  ;  je 
rappelle  que,  quand  on  opère  par  voie  sèche,  Tacide  carbo- 
nique et  la  purpurine  sont  les  produits  uniques  du  dédou- 
blement; mais,  en  présence  de  l'eau,  le  phénomène  se 
complique. 

Outre  qu'une  partie  de  la  purpurine  s'hydrate  pour  for- 
mer ce  que  M.  Schûtzenberger  appelle  matière  orange 
ou  purpurine  hydratée,  une  petite  quantité  de  pseudo- 
purpurine  échappe  au  dédoublement  et  parait  subir  une 


SUR    LES    MÀTIEUES    COLORANTES    DE    LA    GARAKCE.      Qi6l 

réduction  particulière.  Il  se  forme  environ  i  pour  loo 
d'une  matière  colorante  jaune  {*),  que  je  décrirai  dans  un 
autre  Mémoire  et  dont  la  composition,  d'après  les  analyses 
effectuées  par  MM.  Schunck  et  Rœmer  ('),  serait  C*'H*0^; 
elle  diffère  de  la  pseudopurpurine,  d'après  cela,  par  un 
atome  d'oxygène  en  moins. 

Jusqu'à  présent  il  me  manque  toutes  les  données  pour 
expliquer  cette  réduction,  qui  reste  un  phénomène  tout 
aussi  singulier  que  l'était  la  formation  de  purpurine 
aux  dépens  de  la  pseudopurpurine,  avant  les  présentes 
recherches. 

J'ai  donc  dû  examiner  la  question  de  savoir  si  cette  ma^ 
tière  colorante  jaune  ne  préexistait  pas  dans  la  pseudo- 
purpurine elle-même  ;  car  jusque-là  je  n'avais  opéré  que 
sur  le  produit  préparé  d'après  les  indications  de 
MM.  Schûtzenberger  et  Schiffert;  celui-ci,  retenant  en- 
core avec  opiniâtreté  une  certaine  quantité  de  purpurine, 
pouvait  aussi  avoir  retenu  de  la  matière  colorante  jaune. 

Pour  lever  mes  doutes  à  cet  égard,  j'ai  fait  avec  soin 
une  expérience  comparative,  dans  laquelle  j'ai  employé 
4o  grammes  de  pseudopurpurine  préparée  par  le  procédé 
de  MM.  Schûtzenberger  et  Schiffer t,  et  lo  grammes  du 
produit  pur  de  l'opération  même  dont  l'analyse  m'avait 
conduit  à  la  formule  C^'H'O''. 

Aucun  de  ces  deux  produits  n'abandonnait  aux  dissol- 
vants la  moindre  quantité  de  matière  colorante  jaune  ; 
mais,  quand  on  les  eut  fait  bouillir  avec  de  l'eau  pendant 
trois  heures  et  que  la  décomposition  eut  été  achevée,  on 
trouva  la  matière  colorante  jaune  dans  les  deux  cas  et  en 
quantité  proportionnelle.  Les  4o  grammes  en  ont  donné 
o^',  4  et  les  I  o  grammes  o^*",  i . 


(*)  Comptes  rendus  des  séances  de  l'Académie  des  Sciences ^   t.  LXXXUI, 
p.  827,  et  t.  LXXXIV,  p.  559. 

(')  Berichte  der  deutschen  chemischen  Gesellschaft,  t.  X,  p.  172. 


a6a  À.  nosEKSTiEHL.  —  recherches 

Ce  n'est  pas  ici  le  lieu  de  détailler  ces  expériences.  Je  ne 
les  cite  que  pour  appuyer  sur  ce  point,  que  la  matière  colo- 
rante jaune  se  trouve  toujours  pai-mi  les  produits  de  la 
destruction  de  la  pseudopurpurine  même  la  plus  pure, 
tandis  qu'on  ne  la  trouve  pas  dans  la  pseudopurpurine 
avant  sa  destruction. 

On  serait  donc  autorisé  à  conclure  qu'elle  est  réellement 
un  produit  de  cette  destruction  même. 

Mais  il  manque  encore  une  preuve  à  l'appui  qni  per- 
mette de  contrôler  cette  conclusion^  c'est  un  procédé 
permettant  de  transformer  régulièrement  la  pseudopurpo- 
rine  en  ce  dérivé  jaune. 

Cette  partie  de  mon  programme  n'est  pas  encore  ache- 
vée. Néanmoins  les  essais  de  réduction  qui  vont  suivre 
présentent  de  l'intérêt  à  un  autre  point  de  vue. 

Quand  on  attaque  par  l'amalgame  de  sodium  une  dis- 
solution de  pseudopurpurine  dans  une  solution  aqueuse 
de  bicarbonate  de  soude,  la  coloration  rouge  orangé  de  la 
liqueur  fait  place  à  un  jaune  brun  ;  le  contact  de  Pair  ra- 
mène la  coloration  primitive,  et  les  acides  séparent  du 
liquide  un  précipité  qui  n'est  autre  que  la  pseudopurpn- 
rine  non  altérée.  11  s'est  donc  formé,  sous  l'influence  de 
l'amalgame  de  sodium,  un  produit  d'addition  d'une  grande 
instabilité. 

De  la  poudre  de  zinc  a  été  introduite  dans  la  solution 
sulfurique  froide  de  pseudopurpurine.  La  masse  rouge  se 
colore  peu  à  peu  en  jaune  vert^  cette  coloration  se  main- 
tient quand  on  verse  le  mélange  dans  l'eau  et  qu'il  reste 
un  peu  de  zinc  en  excès.  Le  produit  de  la  réduction  se 
précipite  5  mais,  à  mesure  qu'on  le  lave,  il  se  colore. 

Il  est  passablement  soluble  dans  l'eau  pure  et  teint  les 
mocdants  d'alumine  en  jaune  orangé;  il  s'altère  rapide- 
ment à  l'air  et  se  transforme  en  pseudopurpurine  :  cette 
transformation  est  plus  rapide  en  solution  alcaline.  Son 
instabilité  ne  m'a  pas  permis  de  l'analyser  :  mais,  d*après  ses 


SUR    LES    MATIEKES    COLORAUTES    DE    LA    GARANCE.      263 

caractères,  il  doit  être  évidemment  considéré  comme  un 
produit  d'addition,  analogue  à  l'indigo  blanc,  tel  qu'on  en 
obtient  avec  la  plupart  des  oxyantbraquinones. 

Il   présente  de   Tintérèt  au  point  de  vue  suivant. 

On  sait  que  la  garance  contient  la  matière  colorante 
sous  forme  d'une  combinaison  incolore  et  soluble  dans 
l'eau;  ce  n'est  qu'au  contact  de  l'air,  et  peu  à  peu,  que  la 
matière  colorante  se  développe. 

Ces  combinaisons  incolores  et  solubles  sont  considérées 
comme  des  glucosides,  et,  pour  la  garance  en  particulier, 
M.  Schunck  décrit  sous  le  nom  de  rubian  un  corps  qui 
se  dédouble,  d'après  lui,en  glucose  et  en  alizarine.II  parait 
rationnel  d'admettre  que  ceé  substances  incolores  ne  sont 
pas  les  glucosides  des  matières  colorantes  elles-mêmes, 
mais  ceux  des  produits  hydrogénés,  analogues  au  composé 
que  je  viens  de  décrire. 

Arrivé  à  ce  point,  il  me  parait  intéressant  de  résumer 
l'état  actuel  de  nos  connaissances  sur  les  matières  colo- 
rantes de  la  garance. 

On  en  connaît  cinq  : 

La  pseudopurpurine C'*H*0' 

L'orange  de  garance C'*H*0* 

La  purpurine C'*H*0* 

La  purpuroxanthine  et  l'alizarine C'*H*0* 

N'oublions  pas  que  la  purpurine  peut  encore  se  pré- 
senter sous  forme  d'hydrate,  dont  la  solubilité  dans  l'alcool 
est  plus  grande  que  celle  de  la  purpurine. 

De  ces  cinq  matières,  quatre  se  produisent  aux  dépens  de 
la  pseudopurpurine,  dans  les  circonstances  les  plus  fré- 
quemment réalisées  pendant  le  travail  industriel,  puisque 
le  contact  seul  de  l'eau  chaude  suffit.  Le  produit  prin- 
cipal est  la  purpurine  et  son  hydrate.  La  purpuroxanthine 
et  l'orange  de  garance  ne  se  produisent  qu'en  petite  quan- 
tité. 


a64  TRUCHOT. 

L'alizarine  n'a  pas  encore  été  obtenue  en  partant  des 
autres  matières  colorantes  de  la  garance. 

Les  choses  se  passent  comme  si  la  garance  contenait 
deux  glucosides,  celui  qui  correspond  à  l^alizarine  et  celui 
qui  correspond  à  la  pseudopurpurîne.  Au  point  de  vue 
industriel,  il  est  bon  de  faire  observer  que  Tinstabilité 
remarquable  de  cette  dernière  est  une  circonstance  heu- 
reuse; car  ni  elle  ni  Talizarine  n^ auraient  donné  à  un 
végétal  Timportance  extraordinaire  qu'a  su  conquérir  la 
garance  :  la  pseudopurpurine  est  une  matière  colorante 
trop  peu  solide,  et  l'alizarine  donne  des  couleurs  trop  peu 
brillantes.  La  production  de  purpurine  dans  les  conditions 
du  travail  industriel  a  corrigé  à  la  fois  ces  deux  défauts. 
La  pseudopurpurine  est  remplacée  par  une  matière  pro- 
duisant des  couleurs  bon  teint,  et  dont  la  nuance,  se  mêlant 
à  celle  de  Talizarine,  leur  donne  l'éclat  qui  a  tant  fait  re- 
chercher le  rouge  garance. 


DE  LA  FERTILITÉ  DES  TERRES  YOLCANIQIIES -, 

Par  m.  TRUCHOT, 

Professeur  de  Chimie  à  la  Faculté  des  Sciences  de  Glermont, 
Directeur  de  la  station  a{prononiique  du  Centre. 


C^est  un  fait  bien  connu  que  les  terres  volcaniques  sont 
en  général  douées  d'une  fertilité  exceptionnelle.  Il  suffi- 
rait d'ailleurs,  pour  s'en  convaincre,  de  parcourir  TAu» 
vergne  en  observant  l'état  des  cultures  ou  seulement  l'as- 
pect du  sol  et  en  se  rendant  ensuite  compte  de  sa  nature* 

Telle  montagne  est  couverte  d'une  herbe  qui  nourrit  de 
beaux  troupeaux,  telle  autre  est  aride,  brûlée,  stérile  :  or 
il  n'y  a  pas  à  s'y  tromper,  la  première  est  volcanique,  la 
seconde  granitique. 

Il  arrive  souvent,  dans  le  département  du  Puy-de-Dôme^ 


FERTILITÉ    DES    TERRES    VOLCANIQUES.  ^65 

qu'autour  d'un  même  village  on  rencontre  des  sols  volca- 
niques et  des  sols  granitiques  contigus  qui  ne  diffèrent  ni 
d'exposition,  ni  d'altitude,  mais  seulement  par  leur  compo- 
sition chimique,  et  là  encore  la  fertilité  est  très-difierente  : 
les  cultivateurs  expriment  ordinairement  la  bonne  qualité 
d'une  terre  en  disant  qu'elle  est  volcanisée. 

II  était  dès  lors  bien  naturel  de  rechercher,  dans  la  com- 
position des  terres  et  des  roches  qui  les  ont  produites  par 
leur  désagrégation,  lés  éléments  qui  contribuent  à  la  ferti- 
lité de  ces  terres  et  de  plus  l'ordre  d'importance  de  ces 
mêmes  éléments.  C'est  ce  qui  a  été  souvent  fait  et  discuté. 
Tout  récemment  (*)  M.  le  D^  Pietro  Gavazzi,  dans  un  tra- 
vail institulé  :  Analyse  chimique  et  poui^oir  fertilisant 
des  laides  et  autres  substances  rejetées  par  les  volcans , 
fournit  de  nombreuses  analyses  de  roches  volcaniques  et 
arrive  à  cette  conclusion:  «  que  la  composition  chimique 
des  laves  et  autres  produits  volcaniques  permet  d'expliquer 
scientifiquement  la  raison  pour  laquelle  les  matières  vomies 
par  les  volcans  fécondent  les  terres  d'une  manière  si  pro- 
digieuse )) . 

Mais  les  analyses  consignées  dans  ce  travail  ne  signalent 
point  la  présence  de  l'acide  phosphorique,  les  analystes 
auxquels  elles  sont  dues  n'ayant  point  dosé  cet  élément.  Or, 
comme  il  me  semble  établi  que  l'acide  phosphorique  entre 
pour  une  grande  part,  sinon  pour  la  plus  grande,  dans 
l'appréciation  qui  peut  être  faite  de  la  fertilité  d'une  terre 
eu  égard  à  sa  composition,  j*ai  pensé  que  la  conclusion  du 
savant  D"*  Gavazzi,  si  vraie  qu'elle  soit  d'une  manière  . 
absolue,  n'était  pas  en  rapport  avec  les  prémisses,  et  je  de- 
manderai la  permission  de  revenir  une  fois  de  plus  sur 
ce  sujet  intéressant. 

Lorsqu'on  étudie  le  développement  des  végétaux,  on  ar- 


(*)  Annales  de  Chimie  et  de  Phjrsique,  5®  série,  t.  XI,  p.  244;  1877. 


266  TRUCHOT. 

rive  à  reconnaître  qu'ils  doivent  de  toute  nécessité  trouver 
dans  le  sol  de  l'humus  et  de  l'acide  phosphorique  ;  et  comme, 
d'autre  part,  les  cendres  de  ces  végétaux  renferment  de  la 
potasse  et  de  la  chaux,  on  a  pu  en  conclure  que  ces  deux 
derniers  éléments  sont  pour  le  moins  très-utiles. 

Quant  à  la  silice,  k  l'alumine,  au  fer,  au  manga- 
nèse, etc.,  les  sols  les  plus  pauvres  en  général  en  étant 
surabondamment  pourvus,  il  n'y  a  pas  h  s'en  occuper  5  de 
sorte  qu'au  point  de  vue  de  la  fertilité  résultant  de  la  com- 
position du  sol  il  suffit  de  considérer  les  quatre  éléments 
suivants:  l'humus,  l'acide  phosphorique,  la  potasse  et  la 
chaux. 

L'humus,  matière  carbonée  et  azotée  dont  la  combustion 
dans  la  terre  fournit  l'acide  carbonique  destiné  à  solubi- 
liser le  phosphate  de  chaux,  est  entretenu  dans  le  sol  par 
la  culture. 

La  potasse  existe  naturellement  et  en  proportion  ordi* 
nai rement  suffisante  dans  tous  les  sols;  elle  provient  snr^ 
tout  de  la  désagrégation  des  feldspaths  qui  ont  fourni  Far-^ 
gile,  et  les  terres  granitiques,  pourtant  si  peu  fertiles, 
contiennent  une  grande  quantité  de  cet  alcali.  Aussi,  lors- 
que, après  des  fumures  ordinaires,  on  veut  amender  une 
terre  au  moyen  des  engrais  industriels,  s'adresse-t-on  de 
préférence  aux  phosphates. 

La  chaux  qui  constitue  la  majeure  partie  des  terrains 
calcaires,  qui  existe  en  proportion  suffisante  dans  les  ter- 
rains volcaniques,  manque  dans  les  terres  siliceuses.  Les 
chaulages  sont  indispensables  pour  obtenir  de  ces  derniers 
des  produits  abondants,  mais  chacun  sait  que  la  chaux 
ajoutée  ne  suffit  pas  pour  entretenir  la  fertilité  :  bien  plus 
des  chaulages  exclusifs  amènent  la  stérilité,  parce  que  cet 
élément  met  en  oeuvre,  s'il  est  permis  de  s'exprimer  ainsi, 
les  engrais  azotés  et  phosphatés,  et  partant  épuise  la  ré- 
serve du  sol. 

Il  n'en  est  plus  de  même  de  Tacide  phosphorique  :  beau- 


FEKTILITÉ   DES   TBRRES    VOLCANIQUES.  2167 

coup  de  terres  sont  eicposées  à  en  manquer.  L^ addition  des 
phosphates  réussit  toujours  5  la  pratique  a  trouvé  la  solu- 
tion de  la  question,  à  savoir  l'importance  capitale  de  l'a- 
cide phosphorique,  et  l'a  résolue  en  demandant  à  Tîn- 
dustrie  des  quantités  de  plus  en  plus  considérables  de 
superphosphates. 

Aussi  M.  de  Gasparin,  à  qui  TAgronomie  est  redevable 
de  nombreuses  analyses  de  terres  et  d'observations  de  la 
plus  haute  importance  qui  en  ont  été  déduites,  n'hésite 
pas  à  affirmer  qu'une  classification  divitiale  des  terres  doit 
être  ordonnée  d'après  le  dosage  de  l'acide  phosphorique. 
Il  appelle  : 

1°  Terrain  très-riche,  celui  qui  contient  plus  de  2  mil- 
lièmes d'acide  phosphorique  \ 

7?  Terrain  riche,  celui  qui  en  contient  de  1  à  2  mil- 
lièmes ; 

3°  Terrain  moyennement  riche,  celui  qui  en  contient 
de  I  demi-millième  à  i  millième  ; 

4°  Terrain  pau^^re,  celui  qui  en  contient  moins  de 
I  demi-millième. 

Cela  posé,  qu'il  me  soit  permis  de  reproduire  ici  des 
analyses  qui  montreront  bien  cette  importance  de  l'acide 
phosphorique. 

Je  mettrai  en  regard,  dans  le  tableau  suivant,  les  quan- 
tités de  chaux,  de  potasse  et  d'acide  phosphorique  ex- 
traites de  roches  granitiques  et  de  roches  volcaniques,  sub- 
divisées en  laves  et  en  trachytes. 

On  a  dosé  dans  100  parties  : 


TRUGHOT. 


^■■' 


<> 

^ 


9 


©WIUSATION   DBS  ROCHES. 


CHACX. 


POTASSE. 


Roches  granitiques. 


3 


i;rttuit»  de  Bourgnon  (Truchot) 
i;rdiiite  de  Trézioux  (Truchot)  . 
OMuite  de  Theix  (Truchot) . . . . 

Moyennes. . 


9, 

,I04 

3 

,100 

2. 

,4oo 

2, 

201 

Boches  ^volcaniques  (trachytes). 

I>^oinitedu  Puy  de-Dôme  (Truchot) 

»  »  » 

lYnchyte  du  Mont-Dore  (Truchot). 

Moyennes 

Roches  volcaniques  (laves). 

Lave  de  Gravenoire  (de  Losaulx).. . 
Lave    de   Gravenoire  partiellement 

décomposée  (Truchot) 

Lave  du  Puy-de-Dôme (Kosmann,.. 

Moyennes 


3,712 

3,5o4 
4,110 


3,775 


10, 

700 

1,380 

9j 

870 

i,o5o 

3, 

58o 

1,960 

S, 

120 

1,427 

ACIDE 

ph08phO> 

rique. 


0,040 

0,099 

traces 

0,160 
0,332 
0,371 

o,oi5 
0,048 
0,037 

0,046 

0,28s 

o,o33 

0,096 
0,109 
0,217 


o,i3i 


0,860 

1,100 

0,680 

0,880 

J*«ttrais  pu  étendre  ce  tableau,  mais  les  moyennes  n'au- 
rtient  pas  été  sensiblement  modifiées  et  les  chiffres  obte- 
^^  sont  suffisamment  significatifs. 

Je  ferai  remarquer  d'abord  que  les  trois  classes  de  ro- 
'lies  analysées  correspondent  à  des  sols  de  fertilité  bien 
différente.  Les  terres  formées  par  les  granités  de  Bour- 
«QOD  j  de  Trézioux  et  de  Theix  sont  relativement  très- 
médiocres;  et  ce  n'est  qu'après  des  chaulages  et  l'addition 
^'engrais  phosphatés  que  des  agriculteurs  habiles  en  ont 
lire  un  bon  profit. 

Les  terres  formées  par  les  trachytes  sont  naturellement 
plus  fertiles,  mais  beaucoup  moins  cependant  que  celles  de 
la  troisième  catégorie,  c'est-à-dire  formées  par  les  laves. 

Sans  doute  la  proportion  de  chaux  croît  dans  ces  terres 


FERTILITÉ    DES    TERRES    VOLCANIQUES.  ^69 

CD  raison  de  la  fertilité  \  cependant  on  ne  songera  pas  à 
attribuer  à  cet  élément  le  rôle  prépondérant,  car,  comme 
cela  a  été  observé  précédemment,  les  cbaulages  seuls,  sans 
addition  d^engrais  phosphatés,  ne  procureraient  qu'une 
amélioration  apparente  et  momentanée,  et  en  réalité  amè- 
neraient plus  ou  moins  vite  la  stérilité. 

11  est  impossible,  en  second  lieu,  d'attribuer  à  la  po- 
tasse un  effet  prédominant,  puisque  les  roches  de  la  se- 
conde classe  qui  contiennent  la  chaux  et  Tacide  phospho- 
rique,  en  bonne  proportion,  sont  très-riches  en  alcali  et 
en  particulier  le  sont  plus  que  les  laves,  tout  en  formant 
des  sols  de  moindre  valeur. 

Reste  Tacide  phosphorique  :  les  dosages  correspondants 
pour  les  trois  catégories,  qui  sont  entre  eux  comme  les 
nombres  1,4?  ^6)  ^<^^^  significatifs  et  montrent  bien  que 
l'acide  phosphorique  donne,  plutôt  que  la  potasse,  la  me- 
sure de  la  fertilité  d'une  terre  arable. 

Si,  au  lieu  de  considérer  la  composition  des  roches,  on 
compare  les  éléments  trouvés  par  l'analyse  dans  les  terres 
elles-mêmes,  on  arrive  à  la  même  conclusion. 

Le  tableau  qui  suit,  disposé  comme  le  précédent,  c'est- 
à-dire  présentant  trois  catégories  de  terres,  par  ordre  de 
fertilité  croissante,  contient  également  les  quantités  trou- 
vées de  chaux,  de  potasse  et  d'acide  phosphorique  dans 
loo  parties  de  terre.  On  y  a  ajouté  de  plus  les  proportions 
d'azote  et  de  carbone  des  matières  organiques  qui  consti- 
tuent le  quatrième  facteur  important  de  la  fertilité. 

Les  échantillons  ont  été  choisis  de  manière  à  représenter 
encore  la  moyenne  générale. 


a^o    tru<:hot.  — febtilité  des  terres  volcaniques. 


os 


d'ordre. 


l 
2 
3 


4 
5 
6 


7 
8 
9 


DÉSIGNATION  DES  TERRES. 


CHAUX. 


POTASSE. 


GiLBBOIlB 

ACIDE 

dM 

phospbo- 

AZOTE. 

matières 

rique. 

orga- 
niques. 

Terres  granitiques. 


Terre  de  Bourgnon  (Truchot). . 

Terre  de  Theix  (Truchot) 

Terre  du  Chéry  (Truchot) 

Moyennes 


o,3oo 
trace» 
traces 


0,129 
0,345 
o,4o5 


0,290 


0,089 
0,086 
0,074 


0,066 


o,i85 
o,o53 
0,066 


Terres  volcaniques  (laviques). 


Terre  de  Beaumont  (Truchot)..  i,6ûo 

Terre  d'Aubièrc  (Truchot) a ,600 

Terre     de    Saint-Jacques ,    près 

de  Clermont  (Truchot) >  2,800 


Moyennes. . . . 


2,333 


0,226 
0,160 

0,269 


0,2i8 


o,/|o3 
o,3o4 

0,208 


o,3o5 


0,  fOI 


o,io5 
0,218 

0.247 


3,640 
o,4i5 

0,030 

1,358 


0,930 
i,Sio 

3,685 


0,197      i,8o5 


Terres  d'alluvion. 


Terre  de  Pont-du-Château  (P.  de 
Gasparin  ) 

Terre  de  Montdésir,  près  do 
Clermont  (Truchot) 

Terre  de  Sarlière  (Truchot)  .... 

Moyennes 


3,853 

0,280 

0,416 

■ 

9»  970 

0,548 

0,296 

o,3io 

8,340 

0,  i35 

o,3o4 

0,210 

7,387 

0,417 

0,339 

0,260 

1,145 
1,464 

i,3o4 


Les  remarques  précédentes,  relatives  à  la  chaux  et  à  la 
potasse,  s'appliquent  de  même  au  cas  des  terres.  Si,  d'une 
part,  les  terres  d^alluvion,  les  meilleures  sans  contredit, 
contiennent  plus  de  potasse  que  les  terres  volcaniques,  de 
l'autre,  celles-ci  en  renferment  moins  que  les  terres  gra- 
nitiques, qui  leur  sont  inférieures  de  beaucoup. 

La  quantité  de  carbone  constituant  les  matières  orga* 
niques  est  sensiblement  la  même  dans  les  trois  cas.  Quant 
à  l'azote,  il  faut  reconnaître  que  la  proportion  croît  avec  la 
fertilité  et  il  n'y  a  pas  bien  longtemps  qu'on  s'accordait  à 
trouver  dans  cet  élément  seul  la  mesure  de  la  valeur  d'un 


E.   PELIGOT.   — !•  DU    VERRE    ET    DU    CRISTAL,    ETC.       2^1 

sol.  Toutefois,  les  chiffres  du  tableau  précédent  montrent 
que  les  termes  de  la  progression  ne  s'accroissent  pas  aussi 
rapidement  que  ceux  que  fournit  Tacide  phosphorique. 

Il  me  semble  donc  permis  de  conclure  que  le  D*^  Ga- 
vazzi,  en  attribuant  la  fertilité  des  matières  vomies  par  les 
volcans  aux  doses  de  silice,  d'alumine,  d'oxyde  de  fer,  de 
chaux,  de  magnésie  et  de  potasse  que  l'analyse  y  a  con- 
statées, a  négligé  de  considérer  l'élément  le  plus  impor- 
tant de  tous,  l'acide  phosphorique,  que  les  auteurs  des 
analyses  n'auraient  point  déterminé. 

Kl  je  prendrai  la  liberté,  en  terminant,  de  reproduire 
Tune  des  conclusions  auxquelles  m'a  conduit  un  premier 
travail  sur  les  terres  d'Auvergne  (  *). 

L'acide  phosphorique  est  l'élément  principal  de  la  fer- 
tilité des  terres  d'Auvergne  et  les  sols  volcaniques  doivent, 
en  grande  partie,  leur  supériorité  à  une  proportion  notable 
de  cet  acide  phosphorique,  rendu  d'ailleurs  plus  facilement 
soluble  et  assimilable  par  la  présence  de  la  chaux. 


\%«*\«\»\%\»*\*^»\^  %%■%»» 


SUR  LA  COMPOSITION 
DU  VERRE  ET  Dll  CRISTAL  CHEZ  LES  ANCIENS; 

Par  m.  EuGiNK  PELIGOT. 


Occupé  dans  ces  derniers  temps  d'un  travail  d'ensemble 
sur  l'industrie  du  verre,  j'ai  été  conduit  à  rechercher  quelle 
était  la  composition  des  verres  chez  les  anciens.  Cette  étude 
n'a  pas  encore  été  tentée  ;  les  auteurs  qui  ont  écrit  sur  la 
verrerie  antique  ont  admis,  en  eifet,  sans  discussion,  que 
les  matières  premières  mises  en  œuvre  avec  une  incompa- 
rable habileté  par  les  anciens  verriers  ne  différaient  en 
rien  de  celles  dont  on  fait  usage  aujourd'hui. 


(  *)  Annales  agronomiques  y  1. 1;  187  5. 


aya  e.  peligot. 

Telle  n'est  pas  mon  opinion  :  le  verre  ordinaire  et  le 
cristal  plombeux  avaient  autrefois  une  composition  qui 
différait  notablement  de  celle  des  produits  similaires  mo- 
dernes. C'est  ce  que  je  me  propose  d'établir,  en  m'appuyant 
tout  à  la  fois  sur  les  textes  des  anciens  auteurs  et  sur  l'ana- 
lyse chimique  des  verres  antiques. 

Ferre  ordinaire,  —  On  sait  que  la  matière  vitreuse  qui 
sert  à  fabriquer  les  objets  si  divers  qui  composent  la  gobe- 
leterie  est  de  nature  différente,  en  raison  de  son  prix  et 
des  habitudes  des  pays  dans  lesquels  elle  est  mise  en  œuvre  ; 
chez  nous,  elle  est  composée  de  silice,  de  soude  et  de  chaux  ; 
en  Bohème,  la  potasse  remplace  la  soude*,  pour  les  verres 
à  glace  et  à  vitre,  les  matières  employées  sont  le  sable,  la 
soude  et  la  chaux;  ainsi  trois  substances  entrent  toujours 
dans  la  composition  de  la  verrerie  moderne.  Je  ne  parle, 
bien  entendu,  que  des  verres  incolores. 

Les  verriers  de  l'antiquité  procédaient  autrement;  ils 
n'employaient  que  du  sable  et  un  fondant  alcalin  (^). 


(*)  Tout  le  monde  connaît  le  récit  de  Pline  sur  l'origine  du  verre  :  des 
marchands  phéniciens  étant  descendus  à  terre,  près  de  l'embouchure  du 
fleuve  Bélus,  tirèrent  de  leur  navire  des  blocs  de  natron  {giebas  nitri  è 
nave  subdidisse)  pour  supporter  le  vase  qui  devait  servir  à  cuire  leurs  ali- 
ments; Faction  du  feu  ayant  fondu  ces  blocs  avec  le  sable  sur  lequel  ils 
étaient  posés,  il  en  résulta  un  liquide  transparent  qui  était  du  verre. 

Le  texte  de  Pline  peut  donner  lieu  à  des  interprétations  fort  différentes, 
en  raison  du  sens  qu'il  convient  d'attribuer  au  mot  nitrum.  Est-ce  du  ni- 
tre,  c'est-à-dire  du  salpêtre,  de  l'azotate  de  potasse  que  vendaient  ces  mai^ 
chands,  ou  bien  est-ce  du  natron,  c'est-à-dire  du  carbonate  de  soude?  Le 
lieu  de  la  scène  rend  cette  dernière  hypothèse  assez  vraisemblable.  Mais, 
d'un  autre  côté,  on  comprend  mieux  la  fusion  de  blocs  de  nitre  sous  Tin- 
fluence  d'une  température  assez  peu  élevée  (fusion  donnant  un  liquide,  ie 
cristal  minéral^  qui  n'est  pas  du  verre,  mais  simplement  du  nitre  fondu) 
que  la  vitrification  du  sable  par  la  soude  en  plein  air,  dans  les  conditions 
indiquées  par  l'historien  latin.  Aucun  traducteur,  il  est  vrai,  n'hésite  à  tra* 
duire  nitrum  par  nitre.  Mais  les  verriers  et  les  chimistes  admettront  plus 
volontiers  que  ce  mot  signifie  soude,  d'autant  mieux  que  celui  de  natrum, 
la  soude^  que  connaissaient  certainement  les  anciens,  ne  se  trouve  dans 
aucun  dictionnaire  latin.  L'auteur  de  la  préface  du  Traité  de  Vart  de  la 


ou    TERRE    ET    DU    CRISTAL    CHEZ    LES    ANCIEITS.        3^3 

Ainsi  Plîne,  qui  donne  dans  le  XXXVP  Chapitre  de  son 
Histoire  naturelle  de  précieux  renseignements  sur  la  fabri- 
cation du  verre,  la  décrit  dans  les  termes  suivants  : 

«  Aujourd'hui,  à  l'embouchure  du  fleuve  Vultume,  en 
Italie,  sur  la  côte,  dans  un  espace  de  6000  pas,  entre 
Cnmes  et  Liternum,  on  recueille  un  sable  blanc  très- 
tendre,  et  on  le  broie  au  mortier  ou  à  la  meule  ^  ensuite, 
on  y  mêle  3  parties  de  nitre,  soit  au  poids,  «oit  à  la  me- 
sure; le  mélange  étant  en  fusion,  on  le  fait  passer  dans 
d'autres  fourneaux  :  là,  il  se  prend  en  une  masse  à  laquelle 
on  donne  le  nom  d^ammonitre.  Cette  masse  est  mise  en 
fusion  et  elle  donne  du  verre  pur  et  des  pains  de  verre 
blanc.  Cet  art  a  passé  même  en  Gaule  et  en  Espagne,  où 
1  on  traite  le  sable  de  la  même  manière.  » 

Ce  mode  de  travail  diOère  peu  de  celui  qu^on  suit  aujour- 
d'hui :  les  matières  premières,  avant  d'être  fondues,  étaient 
chauffées  dans  un  four;  elles  éisàenl  Jittrées,  ainsi  qu'on 
le  fait  encore  pour  diverses  espèces  de  verres,  mais  ces 
matières  étaient  du  sable  et  de  l'alcali,  de  la  soude  et  non 
pas  du  nitre,  ainsi  que  le  disent  tous  les  traducteurs  de 
Pline.  J'ajoute  que  la  recelte  donnée  par  Pline  est  certai- 
nement erronée  quant  aux  proportions;  car,  en  fondant 
I  partie  de  sable  avec  3  de  soude,  on  obtient  un  produit 
soluble  dans  l'eauj  qui  n'est  pas  du  verre  (*). 

Néanmoins,  l'exclusion  de  l'élément  calcaire,  qui  assure 
à  la  verrerie  moderne  son  inaltérabilité  relative,  n'était 


Ferrerie,  d'Antoine  Neri,  le  baron  d'Holbach,  adopte  une  version  ampli- 
fiée; il  suppose  qu'à  l'endroit  où  s'arrêtèrent  ces  marchands  «  il  se  trouva 
une  grande  quantité  de  l'herbe  communément  appelée  kali,  dont  les  cen- 
dres donnent  la  soude  et  la  rochette;  il  s'en  forma' du  verre,  la  violence 
du  feu  ayant  uni  le  sel  et  les  cendres  de  la  plante  avec  du  sable  et  des 
pierres  propres  à  se  vitrifier  ».  Il  n'est  nullement  question  de  cendres  dans 
le  récit  de  Pline. 

(')  Voici  le  texte  latin  :  Deln  miscetur  {arena)  tribus  pewtibus  nitri  pon* 
dere  vel  mensura,  ac  Uquata  in  alias  fornaccs  transfuntUtur, 

Jnn.  de  Chîm.  et  de  Phys.,  5'  série,  t.  XIII.  (Février  1878.)  18 


tky4  PELIGOT. 

pas  absolue  \  car  le  sable  propre  a  fabriquer  le  verre  con- 
tient souvent  du  carbonate  de  chaux  et,  dans  un  autre 
passage,  Pline  parle  de  Temploi  de  la  chaux  comme  d^un 
progrès  réalisé  de  son  temps  : 

«  Depuis,  dit-il,  tant  Tesprit  de  l'homme  est  inventif  (ut 
est  astuta  et  ingeniosa  solertia)^  on  ne  se  contenta  pas  de 
mêler  de  la  soude  à  la  matière  du  verre,  on  y  joignit  aussi 

de  la  pierre  magnétique Pareillement  on  commença  à 

y  ajouter  de  petites  pierres  luisantes  de  toutes  les  espèces, 
ensuite  des  coquilles  et  des  sables  fossiles.  » 

Il  ne  parait  pas  que  cette  indication  ait  été  mise  a  profit 
par  les  verriers  de  son  temps  et  même  de  temps  beaucoup 
plus  rapprochés  de  nous  \  car  presque  aucune  des  recettes 
qui  nous  ont  élé  transmises  ne  fait  mention  de  la  chaux  qui 
se  rencontrait  *,  néanmoins,  dans  le  mélange  vitrifiabled'ane 
façon  accidentelle,  et  pour  ainsi  dire  inconsciente,  apportée 
soit  par  le  sable,  soit  par  le  fondant  alcalin  dont  on  faisait 
usage.  Alphonse  Barbara,  dans  son  Traité  de  métallurgie^ 
recommande  de  mêler  a  parties  de  sable  transparent  ou 
de  farine  de  pierres  fondues  au  feu  et  i  partie  de  soude. 
D'autres,  selon  lui,  prennent  ^  parties  de  cendres  et 
I  partie  de  sable  :  Perez  de  Vegos  indique  les  mêmes  pro- 
portions. Au  XVI®  siècle,  Agricola,  dans  son  Traité  De  re 
metallica,  donne  comme  il  suit  la  manière  de  faire  le  verre  : 

«  Pour  faire  le  mélange  des  matières  fusibles  pulvé- 
risées, on  observe  de  mettre  2  parties  contre  i  de  nitre,  de 
sel  fossile  ou  de  sel  tiré  des  plantes  \  on  y  joint  un  peu 
d^aimant.  On  pense  de  nos  jours,  aussi  bien  qu'ancienne- 
ment, qu'il  a  la  propriété  d'attirer  la  liqueur  du  verre  de 
la  même  manière  qu'il  a  celle  d'attirer  le  fer,  de  le  nettoyer 
et  de  le  rendre  blanc,  de  vert  ou  nébuleux  qu'il  était  ;  le 
feu  consume  ensuite  Taimant.  d 

Dans  les  notes  ajoutées  au  Traité  de  l'art  de  la  verrerie, 
publié  à  Florence  par  Neri  en  i6ia,Kunckelditque,  «  pour 
fabriquer  le  verre,  il  convient  d'employer  200  livres  de 


DU    TEKRB   ET   DV   CRISTAL   CHBZ    LES   ÂSCIElfS.        3^5 

silice  de  la  pierre  à  fusil  et  i4o  à  i5o  livres  de  sel...  ;  on 
ajoute  de  la  magnésie,  ainsi  nommëef  dit-il,  parce  qu'elle 
ressemble  par  son  poids  et  sa  couleur  à  Taimant,  qui,  en 
latin,  s^ appelle  magnes  )>.  On  sait  que  Toxyde  de  manga- 
nèse, que  les  verriers  de  tous  les  temps  ont  employé  comme 

i  substance  décolorante,  est  désigné  par  les  anciens  auteurs 
tantôt  comme  de  la  pierre  d'aimant,  tantôt  sous  le  nom  de 
magnésie. 

D  serait  facile  de  multiplier  ces  citations.  En  présence 
de  ces  textes,  il  m'a  semblé  qu'il  était  intéressant  de  déter- 
miner,  par  l'analyse  chimique,  la  composition  d'un  certain 
nombre  de  verres  antiques^  mais  le  choix  des  échantillons 
n'est  pas  facile.  J'ai  du  donner  la  préférence  à  ceux  qui 
n'offrent  pas  une  irisation  trop  prononcée,  cet  aspect  étant 
du  à  la  séparation  des  éléments  terreux  qui  se  sont  réunis, 
pour  ainsi  dire,  à  la  surface,  par  suite  de  la  disparition  de 
l'élément  alcalin  sous  l'influence  des  agents  atmosphé- 
riques ;  d'un  autre  côté,  les  verres  formés  avec  le  sable  pur 
et  les  sels  fournis  par  le  lessivage  des  cendres  ont  du 
disparaître  depuis  bien  longtemps  :  ils  appartenaient  à  la 
catégorie  des  verres  solubles  que  Fuchs  a  découverts  de  nos 
jours',  de  sorte  que,  en  réalité,  parmi  les  verres  antiques 
que  j'avais  à  ma  disposition,  ce  sont  peut-être  les  yerres 

<         les  mieux  fabriqués,  c'est-à-dire  ceux  qui  contenaient  le 
plus  de  chaux,  que  j'ai  soumis  à  l'analyse. 
Voici  la  composition  de  ces  verres  : 

Silice 66,7  66,0  67,4  70,9  69,4  69,4 

Chaux 5,8  7,2  2,7  7,9  6,4  7,1 

Alumine,  oxydes  de  fer 

et  de  manganèse ...  •  2,8  3,o  5,7  4r^  ^99  2,8 

Soudeet  potasse. .... .  24»7  28,8  24*2  16,7  21,3  20,7 

100,0     100,0     100,0     100, o     100,0     100,0 

Tai  constaté  dans  la  plupart  de  ces  verres,  dont  plusieurs 
viennent  d'Âutun  et  dont  la  fabrication  remonte  proba- 
blement au  II*  siècle,  la  présence  simultanée  de  la  potasse 


2y6  PELIGOT. 

et  de  la  soude  ;  elle  témoigne  de  la  nature  des  cendres  de 
végétaux  marins  qui  avaient  servi  de  fondant. 

On  voit  que  dans  tous  ces  verres  la  proportion  de  chaux 
est  minime  ;  elle  est  la  moitié  ou  le  tiers  de  celle  qu'on 
rencontre  aujourd'hui  dans  les  verres  de  récente  fabri- 
cation. 

Il  n'y  a  pas  bien  longtemps,  d'ailleurs,  que  le  rôle  de  la 
chaux  dans  la  vitrification  est .  apprécié  à  sa  juste  valeur. 
Ainsi  ce  n'est  qu'en  Tannée  1756  que  Pierre  Deslandes, 
directeur  de  Saint-Gobain,  substituant  le  salin  aux  soudes 
brutes  d'Âlicante,  ajoutait  de  la  chaux  à  la  composition 
pour  remplacer  les  matières  terreuses  que  le  lessivage  avait 
écartées  :  le  verre  à  glace  que  M.  Dumas  analysait  il  y  a 
trente-cinq  ans  ne  contenait  que  3,8  pour  100  de  chaux  ; 
relui  qu'on  fabriquait  en  Angleterre  en  i85i  n'en  renfer- 
mait pas  beaucoup  plus,  d'après  les  analyses  de  M.  Salve- 
ta  t.  J'ai  analysé  récemment  un  verre  de  vitrage  tellement 
altérable,  qu'on  a  dû  le  remplacer  par  un  autre  ;  il  ne 
contenait  que  3,6  pour  100  de  chaux. 

L'altération  profonde  que  les  verres  subissaient  autrefois 
sous  l'influence  de  l'eau  et  des  agents  chimiques  est  établie 
par  de  nombreux  témoignages  :  je  me  bornerai  à  invo- 
quer oelui  de  Bernard  Palissy  qui,  dans  un  livre  publié 
eu  i563,  s'exprime  ainsi  : 

((  Et  quant  à  ce  que  je  t'ai  dit,  qu'aucunes  pierres  ne  se 
consomment  à  l'humidité  de  l'air,  je  te  dis  à  présent,  non- 
seulement  les  pierres,  mais  aussi  le  verre  auquel  il  y  a  une 
grande  quantité  de  sels  ;  et  qu'ainsi  ne  soit,  tu  trouveras 
es  temples  de  Poitou  et  de  Bretagne  un  nombre  infini  de 
vitres,  qui  sont  incisées  par  le  dehors,  par  l'iniure  du 
temps \  et  les  vitriers  disent  que  la  Lune  a  ce  fait;  mais 
ils  me  pardonneront  :  car  c'est  l'humidité  des  pluies  qui 
a  fait  dissoudre  quelque  partie  dudit  verre  (^)  ». 


(*)  Recepte  véritable  par  laquelle  tous  les  hommes  de  la  France  pourront 


DU    VERRE    ET    DU    CRISTAL    CHEZ    LES    ANCIENS.        277 

Aujourd'hui  que  rinfluence  de  la  chaux  sur  la  qualité 
du  verre  est  réconnue,  tous  les  verres  bien  fabriqués  en 
contiennent  12  à  i5  pour  100  de  leur  poids  \  cette  pro- 
portion, à  laquelle  on  est  arrivé  lentement  et  par  tâton- 
nement, représente  à  très-peu  près  équivalents  égaux  de 
chaux  et  d* alcali  ;  elle  établit  entre  la  verrerie  ancienne  et 
la  verrerie  contemporaine  une  ligne  de  démarcation  qu'il 
m'a  paru  utile  de  mettre  en  lumière. 

Kerre  plombeux.  Cristal,  —  A  quelle  époque  remonte 
la  découverte  du  cristal  composé  de  silice,  d'oxyde  de 
plomb  et  de  potasse  ?  Cette  question  a  donné  lieu  à  de 
nombreuses  controverses  :  elle  a  généralement  reçu  de  la 
part  des  archéologues  et  des  chimistes  une  solution  qui, 
à  mon  humble  avis,  n^est  pas  fondée. 

Il  est  établi,  par  des  documents  irrécusables,  que  les 
anciens  introduisaient  du  plomb  dans  un  certain  nombre 
de  leurs  compositions  vitreuses.  On  rencontre  ce  métal 
dans  le  verre  hématin  ;  il  parait  certain  que  les  imitations 
de  pierres  précieuses  qu'on  faisait  du  temps  de  Pline  et 
aussi  au  moyen  âge  étaient  fabriquées  avec  des  matières 
riches  en  plomb. 

Plusieurs  chimistes  ont,  d'ailleurs,  constaté  la  présence 
du  plomb  dans  des  verres  dont  la  fabrication  remonte  à 
des  temps  très-anciens  :  parmi  eux  je  citerai  en  première 
ligne  Fougeroux  de  Bondaroy,  membre  de  TAcadémie 
royale  des  Sciences,  qui  a  publié  dans  les  Mémoires  de 
cette  Compagnie,  en  1787, un  travail  concernant  Texamen 
d'un  verre  désigné  sous  le  nom  de  miroir  de  f^irgile, 

a  Entre  les  raretés  et  les  richesses  de  différentes  espèces 
qui  font  partie  du  trésor  de  Saint-Denys,  en  France,  on 
conservait  une  substance  transparente,  de  forme  ovale, 


apprendre  à  multiplier  et  à  augmenter  leurs  thrésors,  etc.,  par  maistre  Ber- 
nard Palissy,  ouurier  en  terre  et  inuenteur  des  rustiques  figulines  du 
Roy.  (Édition  de  Cap). 


378  PBLIGOT. 

longue  de  i4  pouces  dans  son  plus  grand  diamètre,  de 
12  pouces  dans  son  petit,  et  épaisse  d*un  bon  pouce,  à 
laquelle  on  a  laissé  le  nom  vulgaire  de  miroir  de  f^irgile  : 
le  poids  total  de  ce  morceau  était  d'environ  3o  livres  ; 
sans  prétendre  fixer  à  ce  verre  une  antiquité  aussi  reculée, 
on  assure  quMl  est  depuis  les  premiers  temps  que  ce  trésor 
a  été  établi  dans  cette  maison 

))  Le  verre  est  bomogène,  d'un  vert  mêlé  avec  du  jaune; 
il  est  poli  sur  les  deux  surfaces  ;  mais  les  bords  semblent 
n'avoir  pas  été  usés  et  conservent  l'empreinte  du  moule 
qui  lui  a  donné  la  forme,  i  pouce  cube  pèse  1600  grains  ; 
le  pouce  cube  du  verre  des  volcans  pèse  800  grains  ». 

Pour  déterminer  quel  est  le  métal  qui  entre  dans  la  com- 
position de  ce  verre,  l'auteur  a  mélangé  cette  matière, 
préalablement  réduite  en  poudre  très-fine,  avec  du  flux 
noir;  à  l'aide  d'un  feu  très-violent,  il  a  obtenu  un  culot 
de  plomb  malléable,  dont  la  densité  était  égale  à  ii,24- 
Il  estime  que  ce  verre  contient  environ  la  moitié  de  son 
poids  de  terre  vitrifiable,  c'est-à-dire  d'oxyde  de  plomb. 
Il  ajoute  : 

a  Je  crois  qu'il  n'y  a  pas  un  siècle  qu'on  a  commencé  à 
se  servir  de  cbaux  de  plomb  pour  donner  de  la  pesanteur 
aux  cristaux,  et,  certainement,  depuis  ce  temps,  ce  moyen 
est  réservé  comme  secret  dans  les  verreries.  Les  Anglais 
l'ont  employé  dans  l'espèce  de  verre  pesant  qu'ils  nomment 
flint'glass,  qui,  s'il  était  de  bonne  qualité,  remplirait  les 
désirs  des  astronomes  et  de  tous  ceux  qui  font  usage  des 
lunettes  achromatiques;  et  à  Paris,  pour  les  verres  appelés 
strasSy  du  nom  de  leur  inventeur.  Si  ce  verre,  dit  de  Vir- 
gile^  est  ancien,  s'il  est  factice,  on  connaissait  donc,  il  y  a 
longtemps,  le  moyen  de  faire  du  verre  lourd,  en  ajoutant 
de  la  cbaux  de  plomb  aux  verres  de  sable.  » 

Cette  opinion  serait  parfaitement  fondée  si  l'auteur, 
connaissant  mieux  la  nature  du  cristal  anglais,  avait 
recbercbé  et  constaté  dans  le  miroir  de  Virgile  la  présence 


DU    VERRE    ET    Dl}    CRISTAL    CHEZ    LES    ANCIENS.         ^yQ 

de  la  potasse.  La  même  observation  s'applique  à  d'autres 
travaux  qui,  tout  en  mettant  hors  de  doute  l'existence  du 
plomb  dans  divers  échantillons  de  verres  antiques,  n'ont 
pas  établi  que  la  potasse  ou  la  soude  entrait  aussi  dans  leur 
composition.  Ainsi  M.  Girardin  a  examiné  un  petit  vase 
à  parois  fort  épaisses,  d'une  pâte  fine  et  blanche,  trouvé 
en  1843  aux  environs  de  Rouen,  dans  un  cercueil  en  pierre 
d'origine  gallo-romaine^  ce  cercueil  renfermait  d'autres 
verres  plus  grossiers,  des  médailles  à  l'effigie  de  Constantin 
le  Grand,  etc.  M.  Girardin  a  trouvé  du  plomb  en  propor- 
tion notable  (qu'il  n'a  pas  déterminée)  avec  trace  de 
cuivre.  «  Maintenant,  dit-il,  il  ne  peut  rester  douteux  que 
les  anciens  n'aient  connu  la  fabrication  du  cristal.  »  Plus 
tard,  en  18499  le  même  chimiste  a  trouvé  également  du 
plomb  dans  un  fragment  de  verre  blanc,  provenant  d'un 
cercueil  d'enfant  trouvé  dans  un  vaste  cimetière  gallo- 
romain,  que  M.  l'abbé  Cochet  avait  découvert  dans  la 
propriété  de  MM.  Souday  frères,  à  Canyj  un  autre  frag- 
ment blanc,  transparent,  de  forme  irrégulière  et  de  la 
grosseur  d'une  aveline,  trouvé  dans  le  même  cimetière,  le 
confirme  dans  l'opinion  qu'il  avait  émise  antérieurement 
sur  la  fabrication  du  cristal  chez  les  Romains  (^). 

La  même  observation  doit  être  faite  en  ce  qui  concerne 
l'examen  fait  par  M.  Chevreul,  à  la  demande  de  M.  Fillon, 
de  divers  objets  d'archéologie  trouvés  dans  le  département 
de  la  Vendée  :  ce  Parmi  les  diilérentes  substances  vitreuses 
que  renfermait  le  tombeau  de  saint  Médard-des-Prés,  il  y 
avait  un  échantillon  fort  différent  des  verres  de  bouteilles 
par  sa  transparence  et  sa  propriété  incolore.  Cet  échan- 
tillon contenait  de  l'oxyde  de  plomb*,  il  appartenait  donc 
an  verre  plombeux  appelé  cristal  et  se  distinguait  par  plus 
de  densité  et  moins  de  dureté  d'un  ustensile  de  forme  cylin- 

(  *  )  Girardin,  Mémoires  de  V Académie  des  Inscriptions  et  Belles^Lettres 
[Savants  étrangers,  t.  VI 5  1860). 


a8o  PELIOOT. 

drique  façonné,  dont  une  portion  était  creusée  en  canal  : 
cet  ustensile  était  du  véritable  cristal  de  roche  (^)  »• 

En  s'appuyant  sur  ces  témoignages,  tous  les  archéo- 
logues admettent  que  les  anciens  connaissaient  le  cristal. 
Un  passage  du  Traité  d*Eraclius,  ayant  pour  titre  :  De 
coloribus  et  artibus  Bomanorum^  semble  venir  aussi  à 
Tappui  de  la  thèse  qu^ils  soutiennent.  (On  ne  connaît  pas 
la  date  précise  de  cet  écrit,  mais  le  moine  Théophile,  dont 
l'ouvrage  est  du  x*ou  duxi*  siècle,  parle  d'Eraclius  ;  ce  der- 
nier cite  Isidore  de  Séville  qui  vivait  au  vu®  siècle  ;  il  faut, 
par  conséquent,  placer  entre  ces  deux  époques  le  Traité 
d'Eraclius.) 

Voici  le  passage  en  question,  d'après  la  traduction   de 
M.  Bon  temps  : 

a  Du  verre  fait  auec  le  plomb.  —  Prenez  du  plomb 
neuf  le  plus  pur^  mettez-le  dans  un  vase  de  terre  neuf  et 
calcinez-le  jusqu'à  ce  qu'il  soit  réduit  en  poudre,  et  lais- 
sez-le refroidir.  Prenez  ensuite  du  sable  et  mélez-le  avec 
la  poudre  de  plomb,  dans  la  proportion  de  2  de  plomb 
pour  I  de  sable,  et  mettez  le  mélange  dans  un  creuset 
éprouvé,  que  vous  placerez  dans  le  four  et  ferez  fondre, 
comme  nous  l'avons  indiqué  précédemment,  et  vous  bras- 
serez souvent  le  verre  jusqu'à  ce  qu^il  soit  bien  fondu. 

»  Si  vous  voulez  du  verre  vert,  prenez  de  la  limaille  de 
bronze  [limaturam  auricalci)  et  ajoutez-la  au  plomb  dans 
la  proportion  convenable.  Si  vous  voulez  en  faire  des  vases, 
vous  opérerez  avec  la  canne,  comme  nous  l'avons  indiqué, 
et  vous  ferez  refroidir,  avec  les  précautions  prescrites,  toutes 
les  pièces  fabriquées  dans  le  four  de  recuisson,  où  vous 
mettrez  le  creuset  avec  ce  qui  restait  de  verre  vert.  » 

Ce  produit  n'est  pas  du  cristal,  assurément  :  c'est  un 
silicate  simple  de  plomb  qui  peut  d'ailleurs  être  moulé  ou 


(*  )  Cbevrecl,  Mémoires  de  V Académie  des  Sciences f  t.  XXII. 


k 


DU    VERRE    ET    DU    CRISTAL    CHEZ    LES    AMCIENS.        sSl 

soufflé,  en  donnant  des  produits  très-lourds,  mais  très  fra- 
giles, contenant  la  moitié  ou  les  deux  tiers  de  leur  poids 
d'oxyde  de  plomb;  le  miroir  de  Virgile,  les  imitations  de 
pierres  précieuses  faites  par  les  anciens,  du  temps  de  Pline, 
et  par  les  Juifs,  au  moyen  âge,  probablement  aussi  les 
produits  vitreux  de  l'époque  gallo-romaine  étudiés  par  plu- 
sieurs chimistes,  les  flacons  en  verre  très-dense  conservés 
dans  divers  musées  semblent  avoir  été  faits  avec  cette  ma- 
tière. On  avait  cru  que  dans  les  verres  trouvés  dans  les 
catacombes,  verres  dont  le  fond  est  garni  d'une  feuille  d'or 
découpée  et  gravée  que  recouvre  une  lame  de  verre,  celui-ci 
était  du  cristal;  mais  M.  Darcel  n'a  pas  trouvé  de  plomb 
dans  la  couverte  transparente  qui  protège  la  feuille  d'or. 

Ce  qui  établit  bien  nettement  que  le  vrai  cristal  n'est 
pas  connu  depuis  bien  longtemps,  c'est  ce  passage  de 
M.  Âlliot,  extrait  de  V Encyclopédie  méthodique  : 

«  La  chaux  de  plomb  se  vitrifie  seule  et  sans  mélange; 
mais  le  verre  qu'elle  produit  corrode  les  creusets  et  passe 
au  travers  de  leurs  pores...  Pour  s'opposer  à  cet  effet,  on 
fond  2  parties  de  chaux  de  plomb  avec  i  partie  de  sable 
blanc  ou  caillou  pulvérisé;  ce  mélange  produit  un  verre 
très-fluide,  jaune  et  très-dense,  qu'on  désigne  assez  com- 
munément par  l'expression  de  verre  de  plomb,  » 

Comme  ce  verre  «  s'échappe  encore  quelquefois  des  creu- 
sets, »  l'auteur  ajoute  :  «  qu'il  a  éprouvé  que  le  verre  de 
plomb  était  mieux  contenu  dans  des  creusets  qui  avaient 
servi  à  fondre  du  verre  ordinaire  et  qui  avaient  été  bien 
exactement  vidés  que  dans  des  pots  neufs.  Au  reste  on  a 
pris  le  paiti,  pour  obvier  plus  efficacement  à  ce  danger, 
de  ne  pas  fondre  le  sable  uniquement  avec  la  chaux  de 
plomb  et  d'employer  en  outre  un  fondant  alcalin.  » 

C'est  probablement  aussi  de  ce  même  verre,  sans  po- 


(•)  Encyclopédie  méthodique,  t.  VIII,  p.  5o3;  1791.  {Art  du  ferre.) 


28  a  PELIGOT. 

lasse,  que  parle  Merret,  médecin  anglais,  dans  les  notes 
ajoutées  par  lui  à  V^rt  de  la  verrerie,  de  Néri  ;  «  Le  verre 
de  plomb  n^est  pas  en  usage  dans  nos  verreries  d'Angle- 
terre à  cause  de  sa  trop  grande  fragilité.  » 

Ce  produit,  en  même  temps  qu'il  était  fragile,  devait 
être  très-altérable  ;  c'est  encore  de  lui  qu'il  est  probable- 
ment question  dans  cette  autre  Note  de  Merret  :  «  Quer- 
cetanus  assure  avoir  vu  un  anneau  fait  de  verre  de  plomb, 
qui,  trempé  pendant  une  nuit  dans  du  vin,  lui  donnait 
une  qualité  purgative  sans  jamais  perdre  celte  propriété.  » 
[jirt  de  la  verrerie,  de  Néri,  p.  i53.) 

J'ajouterai  que  si,  conformément  aux  indications  d'Era- 
clius,  le  verre  plombeux  était  fait  avec  du  sable  et  de 
l'oxyde  de  plomb,  il  ne  pouvait  renfermer  que  ces  deux 
corps  :  les  formules  des  anciens,  pour  le  verre  ordinaire, 
ne  mentionnent  que  deux  substances  servant  à  le  fabri- 
quer, le  sable  et  Talcalî,  bien  qu'il  en  contienne  toujours 
nne  troisième,  la  chaux,  celle-ci  étant  apportée  par  les 
deux  premières  \  il  ne  peut  en  être  de  même  pour  le  verre 
de  plomlr,  attendu  que  ni  le  sable  ni  Toxyde  de  plomb  ne 
peuvent  y  introduire  une  substance  auxiliaire,  la  potasse 
ou  la  soude,  en  notable  proportion. 

Ainsi,  dans  mon  opinion,  aucun  texte,  aucune  analyse 
n'établit  que  le  véritable  cristal,  le/Iint-glass  des  Anglais, 
ait  été  connu  des  anciens.  Je  ne  prétends  pas,  d'ailleurs, 
que  son  existence  fût  absolument  ignorée  lorsque  les 
Anglais  ont  commencé  à  développer  sa  fabrication  pour  les 
objets  usuels;  on  lit,  en  effet,  dans  Vjirt  de  la  verrerie,  de 
Néri,  au  Chap.  LXIII,  la  recette  suivante  pour  faire  le 
verre  de  plomb  avec  le  plomb  calciné  et  la  fritte  de  cristal, 
c'est-à-dire  avec  du  verre  blanc: 

<(  Manière  défaire  le  verre  de  plomb.  —  Plomb  calciné 
i5  livres,  fritte  de  cristal  12  livres.  Après  dix  heures,  la 
matière  est  fondue.  On  la  jette  dans  l'eau  :  on  trouve  son- 
vent  au  fond  du  creuset  du  plomb  réduit;  on  le  remet  au 


BBRTIN.  STRUCTURE  OPTIQUE  DE  LÀ  GLACE.   283 

feu  et  on  le  travaille  au  bout  de  dix  heures.  Il  convient  de 
mouiller  le  marbre  et  de  n'en  prendre  que  peu  a  la  fois.  » 

Mais  cette  indication  est  donnée  au  milieu  d'une  multi- 
tude de  recettes  et  de  procédés  qui  n*ont  pas  la  moindre 
valeur;  l'auteur  ne  lui  attache  aucune  importance.  Ce 
verre  serait,  d'ailleurs,  plutôt  du  strass  que  du  cristal; 
car  il  contiendrait  au  moins  60  pour  100  d'oxyde  de 
plomb. 

Il  résulte  de  cette  discussion  que,  bien  qu'on  trouve 
dans  les  temps  passés  des  indications  sur  les  verres  plom- 
beux,  c'est  bien  aux  Anglais  qu'on  doit  attribuer  l'hon- 
neur d'avoir  créé  dans  leur  flint-glass,  qui  est  pour  nous 
le  cristal  ordinaire,  un  produit  nouveau  qui,  par  les  pro- 
grès apportés  à  la  qualité  et  au  choix  des  matières  pre- 
mières servant  à  les  fabriquer,  est  devenu  sans  conteste, 
entre  les  mains  des  verriers  modernes,  la  plus  belle  matière 
vitreuse  qu'il  soit  possible  de  produire.  » 


«\\\'%%\%%\\V\%%%VV\%V-l\\'%V%%V 


SUR  U  STRUCTURE  OPTIQUE  DE  LA  GUCE  ; 

Par    m.    BERTIN. 


La  glace  est  une  des  premières  substances  dans  lesquelles 
on  ait  observé  les  anneaux  de  la  lumière  polarisée.  Elle 
figure  en  effet  sur  la  première  liste  des  corps  tant  cristal- 
lisés qu'amorphes,  chez  lesquels  sir  David  Brewsler  décou- 
vrit ce  curieux  phénomène.  Le  Mémoire  de  ce  grand  phy- 
sicien est  daté  du  28  décembre  18 13.  On  le  trouvera  dans 
les  Transactions  philosophiques  de  i8i4>P«i8jà2i8; 
il  est  accompagné  de  figures  représentant  les  nouveaux 
anneaux,  mais  on  remarquera  qu'ils  sont  notablement 
différents  de  ceux  que  nous  connaissons.  Les  premiers 
anneaux  traversés  par  une  croix  noire  ont  été  observés 


284  BERTI^. 

presque  simultanément  et  d^une  manière  indépendante  dans 
le  spath  d'Islande  par  WoUaston  (juillet  1814)9 Biot  (3  dé- 
cembre i8i5)  et  Seebeck  (i8i5)  [Transactions  philosO" 
phiques  de  1818,  p.  2i3,  note).  Le  D**  Brewster  les  a 
figurés  dans  son  Mémoire  du  i^^juin  1817,  inséré  dans  les 
Transactions  philosophiques  de  1818,  Mémoire  où  la  glace 
est  classée  parmi  les  cristaux  positifs.  Les  journaux  alle- 
mands, qui  passent  pour  si  bien  informés,  ne  contiennent 
aucune  trace  de  la  découverte  de  Brewster  \  mais  elle  a  été 
signalée  dans  une  publication  française,  le  Journal  de 
Physique  de  Ducrotay  de  Blainville,  en  octobre  1817 
(t.  LXXXV,  p.  398).  Je  copie  textuellement  : 

Sur  la  structure  optique  de  la  glace. 

1  Nous  apprenons  que  le  D**  Brewster  a  trouvé  que  des  masses 
de  glace,  même  assez  grandes,  de  2  à  3  pouces  d'épaisseur, 
formées  sur  la  surface  d'une  eau  tranquille,  étaient  aussi  parfai- 
tement cristallisées  que  du  cristal  de  roche  ou  du  spath  calcaire, 
tous  les  axes  des  cristaux  élémentaires^  correspondant  à  ceux 
d*un  prisme  hexaèdre,  étant  exactement  parallèles  les  uns  aux 
autres  et  perpendiculaires  à  l'horizon.  Ce  résultat  inattendu  a  été 
obtenu  en  transmettant  la  lumière  polarisée  à  travers  un  morceau 
de  glace  dans  une  direction  perpendiculaire  à  sa  surface.  Une 
série  de  bandes  concentriques  supérieurement  colorées,  avec  une 
croix  rectangulaire  obscure  passant  par  le  centre,  se  dévelop- 
pèrent et  furent  d'une  nature  opposée  à  celle  que  le  D'  Brevrster 
a  découverte,  il  y  a  quelques  années,  dans  le  béryl,  le  rubis 
et  d'autres  minéraux  ».  [Journal  de  V Institution  royale^  octo- 
bre 1817 )  . 

Brewster  a  rappelé  tous  ces  faits  en  1834)  dans  un 
article  du  Philosophical  Magazine  traduit  dans  les  Anna-' 
les  de  Poggendorff  sous  le  titre  de  Forme  cristalline  de 
la  glace.  Comment  se  fait-il  que  cette  découverte  soit  restée 
ignorée  si  longtemps,  au  point  que  M.  Kobbell,dans  son 
Histoire  de  la  Minéralogie,  parue  en  1864,  Tattribuait 


STRI3CTURE    OPTIQUE    DE    LÀ    GLACE.  285 

encore  à  Manc,  qui  l'a  publiée  dans  le  Journal  de 
SchweiggeVy  en  1828.  Il  n'est  pas  étonnant  que  d^autres 
aient  pu  Toublier. 

Quoi  qu^il  en  soit,  la  lumière  polarisée  nous  offre  des  res- 
sources précieuses  pour  étudier  la  constitution  de  la  glace.  Il 
suflStd'en  observer  une  lamed^épaisseur  moyenne,  i  centi- 
mètre par  exemple,  souslemicroscopepolarisant.  Si  Ton  voit 
des  anneaux,  c'est  que  la  lame  est  perpendiculaire  à  Taxe  :  si 
l'on  ne  voit  pas  d'anneaux,  il  faut  éclairer  le  microscope  à 
la  lumière  de  la  lampe  monochromalique,  que  nous  devons 
également  au  D^  Brewster  \  nous  apercevrons  alors  soit  les 
franges  régulières  des  cristaux  obliques  ou  parallèles, 
soit  les  franges  irrégulières  des  cristaux  maclés.  Dans  le 
premier  cas,  une  taille  convenable  nous  ramènera  à  la 
direction  perpendiculaire  à  l'axe  ;  dans  le  second  cas,  on 
observera  la  lame  amincie  dans  l'appareil  de  Norremberg, 
à  lumière  parallèle  \  elle  apparaîtra  comme  une  mosaïque 
colorée  indiquant  une  cristallisation  confuse. 

J'ai  étudié  par  cette  méthode  la  structure  de  la  glace 
dans  des  conditions  variées  (*)• 

Dans  les  stalactites  de  glace  qui  pendent  en  hiver  aux 
déversoirs  des  pompes,  la  cristallisation  est  confuse.  Elle 
Test  également  dans  le  givre  qui  se  dépose  contre  les  vitres 
de  nos  appartements  et  qui,  d'abord  opaque,  devient  trans- 
parent par  le  dégel. 

Quand  l'eau  gèle  dans  un  vase  en  verre  exposé  à  l'air 
froid,  la  glace  se  forme  d'abord  contre  les  parois,  en  aiguilles 
ou  en  lames,  qui  tantôt  pénètrent  obliquement  dans  le 
liquide,  tantôt  s'étendent  à  la  surface  de  l'eau.  La  première 
couche  de  glace  qui  se  forme  ainsi  à  la  surface  est  sans  con- 
sistance, et  sa  cristallisation  est  confuse:  on  s'en  doute  d'ail- 
leurs quand  on  observe  attentivement  les  canaux  et  les 
bassins  qui  commencent  à  se  prendre.  Mais,  dès  que  cette 


(')  Mémoires  de  la  Société  des  Sciences  de  Strasbourg^  t.  VI;  186  ). 


286  BERTIH. 

couche  est  devenue  solide,  dès  que  son  épaisseur  a  atteint 
quelques  millimètres,  elle  donne  de  beaux  anneaux,  ce  qui 
indique  que  le  glaçon  est  un  cristal  unique  dont  Taxe  est 
perpendiculaire  à  la  surface  de  Teau,  comme  Va,  observé  le 
D'  Brewsier. 

On  peut  empêcher  la  formation  de  la  glace  contre  les 
parois  en  les  garantissant  contre  le  refroidissement,  par 
exemple  eu  mettant  le  vase  dans  un  vase  plus  grand   et 
remplissant  l'intervalle  avec  du  sable.  La  glace  se  forme 
alors  uniquement  à  la  surface  de  l'eau  et  son  axe  est  verti- 
cal. Il  est  doDC  perpendiculaire  à  la  surface  de  refroidisse- 
ment; mais  en  sera-t-il  toujours  ainsi?  Pour  le  savoir,  j'ai 
fait  geler  Teau  dans  deux  cuves  rectangulaires  en  bois  dont 
Tune  des  parois  latérales  était  remplacée  par  une  vitre. 
Dans   Tune  des  cuves  la  vitre  était  verticale;   dans   la 
seconde,  elle  était  inclinée  de  4^  degrés,  c'est-à-dire  que  la 
normale  extérieure  à  cette  face  était  inclinée  de  4S  d^rés 
au-dessus  deThorizon.  Les  vases  étant  remplis  d'eau  et  fer- 
més par  des  couvercles  en  bois  furent  placés  sur  une  fenêtre 
au  nord,  par  une  journée  très-froide,  les  deux  faces  vitrées 
exposées  au  rayonnement  de  l'espace.  L'eau  intérieure  ne 
tarda  pas  à  geler  contre  les  vitres,  et  au  bout  de  quelques 
heures  je  pus  détacher  du  verre  des  lames  de  glace  assez 
épaisses,   parfaitement  régulières  dans  la  partie  centrale 
et  donnant  de  très-beaux  anneaux.  La  glace  avait  donc  son 
axe  horizontal  dans  le  premier  vase,  tandis  que  dans  le 
second  il  faisait  un  angle  de  4^  degrés  avec  l'horizon.  Dans 
aucun  des  deux  il  n'était  vertical,  mais  il  était  dans  tous 
deux  normal  à  la  vitre,  c'est-à-dire  normal  à  la  surface  de 
refroidissement. 

U  n'est  pas  besoin  du  reste  d'appareils  spéciaux  pour 
constater  ce  fait.  Qu'on  fasse  geler  l'eau  dans  une  terrine, 
par  une  belle  nuit  d'hiver;  le  plus  souvent  on  trouvera  la 
terrine  recouverte  d'une  couche  de  glace,  au  fond,  sur  les 
parois  et  à  la  surface  de  l'eau.  La  glace  du  fond  est,  comme 


STRtJCTURE    OPTIQUE    DE    LÀ    GLACE.  287 

celle  de  la  surface,  à  axe  vertical  \  mais  la  glace  des  parois 
aura  sou  axe  perpendiculaire  aux  parois. 

Ainsi  voilà  la  loi  générale  :  Vaxe  de  la  glace  est  per- 
pendiculaire à  la  surface  de  refroidissement. 

J'ai  cherché  si  cette  loi  était  encore  vraie  pour  la  glace 
artificielle.  Celle-ci  se  forme  dans  des  moules  prismatiques 
rectangulaires  placés  debout  dans  une  solution  de  chlorure 
de  potassium  refroidie  à  plusieurs  degrés  au-dessous  de 
zéro.  Quand  la  température  du  liquide  est  comprise  entre 
zéro  et  —  1^9  5,  la  glace  est  transparente  :  à  des  tempéra- 
tures plus  basses,  qui  sont  celles  de  la  marche  indus- 
trielle, la  glace  devient  opaque,  par  suite  de  l'empri- 
sonnement des  bulles  d'air  que  l'eau  abandonne  en  se 
solidifiant.  Mais  on  peut  l'avoir  transparente  par  des  pro- 
cédés particuliers  qui  ont  le  plus  souvent  pour  effet  de 
troubler  la  crists^llisation.  J'ai  essayé  la  glace  de  M*  Tellier 
et  tout  récemment  celle  de  M.  Pictet.  Ces  glaces,  quoique 
très-belles,  présentent  une  cristallisation  confuse;  mais  on 
n'en  peut  tirer  aucune  conséquence  contre  la  loi,  parce  que 
nous  avons  affaire  à  une  cristallisation  qui  est  à  la  fois 
brusque  et  troublée. 

C'est  un  phénomène  analogue  à  celui  que  j'ai  observé 
dans  la  glace  glaciaire  (').  Au  sommet  des  glaciers  on 
trouve  d'abord  le  Tîép'é^qui  n'est  que  de  la  neige  agglutinée, 
puis  au-dessous  la  glace  de  néwé;  l'un  et  l'autre  sont 
formés  de  cristaux  maclés  sans  aucune  orientation.  Vient 
ensuite  la  glace  glaciaire  qui,  d'abord  hétérogène,  se  trans- 
forme petit  à  petit  par  des  fontes  et  des  regels  successifs  en 
une  glace  orientée  semblable  à  la  glace  d'eau.  Si  le  glacier 
est  jeune,  s'il  n'a  qu'un  faible  parcours,  l'orientation  est 
à  peine  sensible*,  mais,  si  la  glace  est  vieille,  si  le  glacier  a 
un   très-long  parcours,  la  masse  d'eau  congelée  dans  son 


(*)  Comptes  rendus  des  séances  de  V Académie  des  Sciences ,  t.  LXIII, 
p.  346,  1866. 


a88       BERTIN.  STRUGTORE    OPTIQUE    DE    LÀ    GLACE. 

intérieur  devient  prépondërante  et  Torientation  verticale 
des  cristaux  presque  parfaite.  Ces  observations  ont  été  con- 
firmées depuis  par  celles  que  M  VI.  Charles  Grad  el  Dupré 
ont  faites  sur  des  glaciers  différents  de  ceux  que  j'avais 
visités  (*). 

Il  est  remarquable  que  la  différence  de  structure  de  la 
glace  naturelle  et  de  la  glace  artificielle  se  manifeste  non- 
seul  emen  t  dans  les  phénomènes  de  pol  arisation ,  mais  encore 
dans  la  belle  expérience  de  M.  Tyndall,  connue  sous  le  nom 
Ae fleurs  de  la  glace.  Cette  expérience  se  fait,  comme  on  sait, 
en  faisant  passer  un  faisceau  lumineux  très-intense  à  tra- 
vers une  lame  de  glace  ordinaire  dont  on  projette  Tirnage 
sur  un  écran  à  Taide  d'une  lentille.  On  voit  apparaître  sur 
le  tableau  des  figures  à  six  rayons,  semblables  à  des  Qeurs, 
qui  indiquent  la  fusion  des  cristaux  de  la  glace  par  la  cha- 
leur du  faisceau  lumineux  qui  la  traverse.  Avec  la  lampe 
oxjhydrique,  la  glace  naturelle  perpendiculaire  à  Taxe  m'a 
donné  ces  fleurs  très-facilement  ^  la  même  glace  taillée 
parallèlement  à  Taxe  n'a  donné  que  des  traces  semblables 
à  celles  des  fleurs  vues  par  leur  tranche.  La  glace  artifi- 
cielle de  M.  Pictet  a  montré  quelques  plages  dans  lesquelles 
apparaissaient  des  fleurs  de  petites  dimensions,  tandis  que 
le  reste  du  champ  n'en  produisait  pas.  Me  défiant  de  mou 
habileté,  j'ai  eu  recours  à  M.  Duboscq,  qui  est  très-habitué 
à  ce  genre  d'expériences;  nous  avons  obtenu  les  mêmes 
résultats. 


(*)  Bulletin  de  la  Société  des  Sciences  naturelles  de  Strasbourg;  1869. 


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J.    BOUSSINGAULT^  -—  FOVCTIOHS   PHYSIQUES,    ETC.    S189 

tStmt  SUR  LES  FANGTiONS  PHYSIQUES  DES  FEUILLES  : 
TRANSPIRATION,  ABSORPTION  DE  LA  VAPEUR  AQUEUSE, 
DE  l^AU,  DES  nATIÈRES  SALINES; 

Pae  m.  Joseph  BOUSSINGAULT. 


I.  L'eau  puisée  dans  le  sol  par  les  plantes,  quand  elle  ne 
se  fixe  pas  dans  l'organisme,  est  déversée  dans  Fatmosphère, 
par  suite  de  l'évaporation  accomplie  à  leur  surface,  et  d'au* 
tant  plus  rapidement  que  la  température  est  plus  élevée, 
l'air  plus  sec,  plus  agité.  Aussi  la  transpiration  des  parties 
vertes  des  végétaux  est-elle,  sinon  interrompue,  du  moins 
grandement  atténuée  durant  la  nuit,  pendant  la  pluie  ou 
le  brouillard  ;  Haies  a  cherché  à  l'évaluer  dans  ses  mémo- 
rables expériences  sur  la  quantité  de  liqueur  que  les  arbres 
tirent  et  transpirent. 

Une  plante  venue  dans  un  pot,  et  dont  on  connaissait  la 
suHace  des  feuilles,  était  pesée  matin  et  soir.  Le  sol  étant 
maintenu  humide,  dans  une  série  d'observations  exé- 
cutées en  juillet  sur  un  grand  Soleil,  Haies  trouva  que  la 
plante  perdait  par  la  transpiration,  en  douze  heures  de  jour  : 

En  moyenne 56^ ,  6  d'eau 

Au  maximum 8do,5 

La  surfaoe  des  feuilles  étant  de  i^^^€a^  il  en  résulte 
qu'en  douze  heures  de  jour  l'eau  sortie  de  i  mètre  carré 
pesait: 

En  moyenne ......      156^8 

Par  décimètre  carré  et  par  heure o,  i3 

Au  maximum o,  196 

Haies  ne  dit  pas  s'il  entendait  par  surface  les  deux  côtés 
du  limbe.  Comme  il  est  évident  que  la  ti-anspiration  a 

Jnn.  dû  Chim,  et  de  Phys,,  5«  série,  t.  XIU.  (Mars  1878.)  I9 


2QO  J.  BOUSSIHGAULT. 

lieu  par  les  deux  faces,  dans  le  cours  de  mes  recherches, 
on  a  pris  pour  la  superficie  de  la  feuille  la  somme  des  deux 
surfaces. 

Yoici,  diaprés  Haies,  pour  quelques  plantes,  la  quantité 
d'eau  transpirée  en  une  heure  pendant  le  jour  par  i  déci- 
mètre carré  de  feuilles  : 

Choux  :       moyenne o, a55 

maximum 0,336 

Feigne  :        moyenne o,  1 1 

Pommier  :    moyenne 0,2a 

maximum o,  25 

Citronnier:  moyenne . .  0.09 

maximum 0,12 

Les  expériences  faites  sur  la  menthe,  le  poirier  nain,  le 
houblon  ne  sont  pas  discutables  au  point  de  vue  qui  nous 
occupe,  parce  que  Haies  n'a  pas  indiqué  la  surface  des 
feuilles  ;  il  s'est  borné  à  constater  que  la  menthe  n'a  pas 
transpiré  la  nuit,  que  les  feuilles  du  poirier  ont  perdu  plus 
d^eau  par  la  transpiration  qu'il  n'en  est  entré  dans  l'ar- 
buste par  les  racines  ;  que  les  plants  de  houblon  ont  tran- 
spiré davantage  sur  les  bords  que  dans  Tintérieur  de  la 
houblonnière 

Dans  les  expériences  que  j'ai  exécutées,  j'ai  tenu  d'abord 
à  procéder  exactement  comme  Haies.  Toutefois,  on  n'a  pas 
seulement  mesuré  la  transpiration  d'une  plante  pendant 
douze  heures  de  jour,  par  la  raison  que  l'état  de  l'atmo* 
sphère  varie  pendant  cet  intervalle.  On  a  déterminé  l'eau 
dissipée  par  l'évaporation,  les  feuilles  étant  exposées  au 
soleil,  à  l'ombre  et  pendant  la  nuit.  Pour  chaque  observa- 
tion, on  a  noté  la  température  de  l'air^  son  état  hygromé* 
trique  indiqué  par  le  psychromètre. 

Le  sujet  de  la  première  observation  fut  un  topinambour 
[Helianthus  tuberosus)  développé  dans  un  pot  vernissé  i 


i    PHYSIQUES   DKS   FEUILLES.  3QI 

Vexténenr,  Comme  dans  respérience  fondameatale  de 
Haies,  tontes  les  dispositions  avaient  été  prises  pour  que 
l'humidité  ne  se  dégageât  pas  directement  de  la  terre  T^é- 
tale  ;  un  couvercle  en  caoutchouc  était  ajusté  à  la  base  de 
la  tige  et  suri  es  pourtours  du  vase.  Deux  tubes  de  verre  a,  a', 
d'une  assez  grande  section,  traversaient  le  couvercle  pour 
introduire  l'eau  d'arrosage  et  laisser  pénétrer  l'air  {_fig.  i). 
Fig.  i. 


Tout  le  système  pesait  6  kilogrammes.  La  balance  chargée 


de  et  t>ôid&  était  setisible  à  o^*^)!.  Les  expériences  ter- 
minées, on  â  pris  la  surface  des  parties  certes  : 

Surface  d'un  côté  des  feuilles 3762*^ 

Stirface  double,  les  deux  côtés  du  limbe. . . .     75a4 

Surface  des  pétioles 85,5 

Surface  de  la  tige 1 1 1 ,6 

Surface  totale 77^^  >  i   (*)• 

Première  observation^  29  août  1866. 

h        m 

La  plante  exposée  au  soleil  de. . .     8.20  du  matin, 
à 4  •  3o  de  l'après-midi. 

Temps  écoulé 8.10 

f  r 

Eau  évaporée  indiquée  par  la  balance 102,0 

Par  heure . .      i  a ,  49 

Par  heure  et  par  décimètre  carré o,  16 

o 

A  midi,  température  à  Fombre M»5 

Psychromètre ^^  (  *  ) 

Ciel  nuageux. 

UHelianthus  tuberosus  est  resté  exposé  en  plein  soleil, 
par  un  vent  d'est  assez  fort^  aussi  les  feuilles  sont-elles  de- 
venues légèrement  flasques,  comme  il  arriva  du  reste  pour 
les  plants  d'un  champ  de  topinambour.  On  voit  que  dans 
la  grande  culture,  comme  pour  le  sujet  de  l'observation, 


(*)  On  a  mesuré  la  surface  des  feuilles  de  deux  manières  :  i<*  en  dé- 
coupant un  morceau  de  papier  ayant  la  même  superficie  que  la  feuille,  le 
pesant  après  avoir  pris  le  poids  d'un  décimètre  carré  du  même  papier; 
3<*  en  collant  sur  un  marbre  toutes  les  feuilles  de  la  plante  ajustées  et  dis- 
posées en  un  parallélogranmiey  ce  qui  convient  iurtout  quand  les  fenUlat 
sont  nombreuses  ou  quand  elles  sont  de  ^ndes  dimensions. 

(')  Le  degré  psychrométrique  indiquant  Tétat  hygrométrique  oq  Ilia- 
midité  relative,  déduite  de  la  différence  observée  entre  le  thermomètre 
sec  et  le  thermomètre  mouillé. 


FONCTIONS   P9YSIQVEa  P99   FEUILLES.  2^5 

Févaporation  à  la  surface  des  feuilles  devait  avoir  été  plus 
rapide  que  Tasceasion  de  Teau  introduite  par  les  racines. 
A  4^30"^  du  soir,  à  l'ombre,  toutes  les  feuilles  étaient  re- 
dressées* 

Deuxième  observation,  2g  et  3o  août  i866. 

he  ap,  YHelianthus  tuberosus  fut  pesé  à  4^30*^  dtt  Wtt 
et  placé  dans  une  situation  où  il  ne  pouvait  pas  recevoir 
le  soleil.  Le  matin  du  jour  suivant,  le  3o  août,  on  le  pesa 
à  io^3o™;  il  avait  perdu  : 

Eau a3*^,o 


• 


Au  lever  du  soleil,  température. i8 

Etat  hygrométrique 71 

Tant  à  Tombre  qu^à  l'obscurité,  la  plante,  en  dix-buit 
heures,  avait  perdu  23  grammes  d'eau  ; 

gr 

P>r  heure ï  ,  »8 

Par  heure  et  par  décimètre  carré o,o32 

Troisième  observation^  5  septembre  i866. 

La  plante  fut  exposée  au  soleil  à 9*35  matin 

»  retirée  à 5.35  soir 

il     I        ■  ■ 

Temps  écoulé 8.00 

FoLU.  perdue ^ SoiS^o 

Par  tieure 44  >  3^ 

Par  heure  et  par  décimètre  carré i>  i^i 


• 


Température  à  l'ombre f^J%Q 

Psychromètre 32, o 

Vent  d'est  assez  fort. 

On  voit  combien  une  température  élevée,  le  vent,  la 
sécheresse  influent  sur  la  transpiration. 


^94  '•  boussiugàxjlt. 

Quatrième  observation^  5  et  6  septembre, 

La  plante  fut  mise  à  l'ombre  dans  un  lieu  où  elle  ne 
pouvait  pas  recevoir  les  rayons  du  soleil  levant. 

b        m 

Exposée  le  5  septembre  à 5 .45  soir. 

Pesée  le  6  septembre  à 6.45  matin. 

Temps  écoulé 1 3 .  oo 

Eau  évaporée 48 ,  o 

Par  heure 3 ,64 

Par  heure  et  par  décimètre  carré 0,091 

A  8  heures  du  matin,  le  6  septembre  : 

o 

Température 20,9 

Psychromètre 60,0 

Cinquième  observation^  6  et  ']  septembre. 

h        m 

Exposition  du  6  septembre  à 6.45  matin. 

))  au  7  septembre  à 8.  i5 

Temps  écoulé 25 .  3o 

i5  heures  de  jour  au  soleil  :  io^3o™denuit. 

Eau  évaporée aa8,o 

Par  heure 8,94 

Par  heure  et  par  décimètre  carré 0,116 

6  septembre,  8  heures  du  matin. 

Température aS/o 

Psychromètre 5o>o 


FOnCTlOfTS    PHTSIQUB8   DES   FEUILLES.  2g5 

Sixième  observation^  6  septembre. 
8^  1 5"*  du  matin  jusqu'au  i  o  septembre,  8^  1 5"  du  matin  : 

Il     m 

Heures  du  jour 36. o 

Heures  de  nuit 36. o 

Temps  écoulé 96-0 

Eau  évaporée 777 >oo 

Par  heure 8,09 

Par  décimètre  carré  en  une  heure O9I1 

7  septembre,  9  heures  du  matin  : 

o 

Température 20, 5 

Psychromètre 60,0 


9  septembre,  à  5  heures  du  soir  : 

o 

Température 22,6 

Psychromètre 63 , 5 

Septième  observation^   10  septembre, 

La  plante  est  restée  dans  l'obscurité  du  10  septembre,  à 
8^3o™  du  matin,  au  12  septembre,  à  8^3o"*  du  matin  : 

h 

Temps  écoulé 4^.00 

Eau  évaporée 8a  ,00 

Par  heure i  ,71 

Par  heure  et  par  décimètre  carré o,o43 

1 2  septembre,  à  5  heures  du  matin  : 

o 

Température 23 , 2 

Psychromètre 74»o 


296  J.  BOUSSUTGAULT. 

Huitième  observationy  12  septembre. 

La  plante  dans  Tobscurité  du  12  septembre,  8**3o"  du 
matin,  au  i4  septembre,  8^3o"  du  matin  : 

h 

Temps  écoulé 48yOo 

Eau  évaporée 48»  00. 

Par  heure i ,  00 

Par  décimètre  carré  et  par  heure o,oa5 

i4  septembre,  à  8^3o™  du  matin  : 

Température i4>Ô 

Psychromètre 95,S 

Neuvième  observation^  i4  septembre. 

h        m 

La  plante  exposée  au  soleil  à 8 .  3o  du  matin. 

Retirée  à J^.oo  du  soir. 

Temps  écoulé 7 .  3o 

Eau  évaporée 2o5 ,  o5 

Par  heure 27»  33 

Par  décimètre  carré  et  par  heure 0,69 

o 

A  midi,  température  de  l'air 24» 00 

Psychromètre 3oyOo 

Temps  calme. 

Dixième  observation ^  il^et  i5  septembre, 

La  plante  exposée  à  l'abri  du  soleil  du  i4  septembre, 
5  heures  du  soir,  jusqu'au  1 5  septembre,  7  heures  du  matin  : 

h       m 

Soit  à  Tombre  pendant a.  56 

Pendant  la  nuit 11  ..^4 

Temps  écoulé i4 «oo 

Elau  évaporée 27,06 

Par  heure i  ,96 

Par  décimètre  carré  et  par  heure o,o5 


FOIfCTIOlia  PHYSIQUES  DES    FEUILLES.  397 

Le  i5  septembre,  à  7  heures  du  matin  : 

Température i4»^3 

Psychromètre 70, 00 

Onzième  observation,  i5  septembre, 

La  plante  au  soleil  dans  un  champ  : 

Exposée  à , 7. 20  du  matin. 

Pesée  à 5 .  00  soir. 

Temps  écoulé 9-4o 

Eau  évaporée aoo^S 

Par  heure ^o^pS 

Par  heure  et  par  décimètre  carré o^SaS 

A  4  heures  du  soir  : 

Température 22,6 

Psychromètre 3 1 , 5 

Les  feuilles  sont  devenues  pendantes  vers  2  heures  de 
l'après-midi.  Les  feuilles  de  topinambours  et  de  bette- 
raves de  la  grande  culture  se  trouvaient  dans  le  même 
Aat;  elles  étaient  flétries  dès  10  heures  du  matin.  Dans 
les  plantes  des  champs,  comme  dans  la  plante  en  expé- 
rience, l'eau  du  sol  n'arrivait  donc  pas  assez  vite  pour 
remplacer  Teau  évaporée  à  la  surface  des  parties  vertes. 
Vers  le  soir  les  feuilles  commençaient  à  se  redresser. 

Douzième  observation ^  iS  et  16  septembre, 

La  plante  est  restée  à  l'ombre  et  à  l'obscurité  depub 
le  i5,  à  5  heures  du  soir,  jusqu'au  16  septembre,  à  7^80"^ 
du  matin  : 

h       ai 

Temps  écoulé , 14. 3o 

Eau  évaporée 44> 7 

Par  heure »  .  . .  .       3 ,908 

Par  décimètre  carré  et  par  heure 0,078 


apS  J.  BOUSSIRGAULT. 

i6  septembre,  à  7  heures  du  matin  : 

Température i4>2 

Psychromètre 89,0 

Treizième  observation ^  16  septembre. 

La  plante  à  l'ombre  : 

Exposée  à 7 .  3o  du  matin. 

Retiré  à 5 . 3o  du  soir. 

Temps  écoulé i  o .  00 

Eau  évaporée 65 ,  o 

Par  heure 6^5 

Par  heure  et  par  décimètre  carré 0,084 

A  I  heure  du  soir  : 

o 

Température 20,0 

Psychromètre 36, 5 

Quatorzième  observation,  19  septembre, 

La  plante  au  soleil  fut  exposée  pendant  une  demi-heure 
à  un  vent  très-fort,  occasionné  par  le  jeu  d'un  tarare  em- 
ployé au  nettoyage  du  blé  : 

Eau  évaporée 36, 00 

Par  heure 72 ,00 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o ,  96 

Ayant  fait  cesser  la  ventilation,  l'air  étant  calme,  la 

plante  est  restée  au  soleil  \  on  l'a  pesée  une  heure  après  : 

rr 
Eau  évaporée 29  »  00 

Par  décimètre  carré  en  une  heure 0,74 

Le  thermomètre  à  l'ombre  marquait  22  degrés. 

Si  la  ventilation  eût  été  plus  forte,  la  plante  n'aurait 
pas  résisté.  Je  me  propose,  dans  un  travail  spécial,  d'exa- 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  299 

miner  l'effet  d'un  vent  intense  et  prolongé  sur  la  végétation. 
Les  résultats  fournis  par  le  topinambour  dans  la  pre- 
mière quinzaine  de  septembre  de  l'année  1866  se  résument 
ainsi  : 

État 

Température     hygrométrique  Eau  transpirée  par  les 

La  plante  exposée  :                 à                   de  l'air  feuilles  par  heure  et  par 

>   «                      Tombre.       indiqué   par   le  décimètre  carré. 

psychromètre. 

o                          o  gr       ' 

Au  soleil  (1) ^4,5  62,0  o,  16  ciel  très-naageux. 

Au  soleil  (3). ....      .  27,6  82,0  1,12  ciel  découvert. 

Au  soleil  (9) 24,0  20,0  0,69 

Au  soleil  (il; 22,6  0,53 

Au  soleil  (i4] 22,0  0,74 

Au  soleilet  obscurité  (5)..  22,8  5o,o  0,116 

Ausoleiletobscurité(6). .  21, 5  61,7  0,110 

A  l'ombre  (2) 18,0  71,0  o,o32 

Arombre[i3) 20,8  36,5  0,084 

Ombre  et  obscurité  (4)..  20,9  60,0  0,091 

Ombre  et  obscurité  (10) .  i4f2  76,0  o,o5 

Nuit  (7). 23,2  74,0  0,043 

Nuit  (12) 149^  59,0  0,028 

Nuit  (8) i4,6  96,0  0,025 

L'élévation  de  la  température,  la  sécheresse,  le  vent  ont 
favorisé  la  transpiration,  tandis  qu'une  atmosphère  re- 
froidie, calme,  humide  l'a  fortement  atténuée. 

Ainsi,  par  heure  et  par  mètre  carré  de  parties  vertes,  le 
plant  de  topinambour  a  perdu  en  moyenne  : 

Au  soleil 65  grammes  d'eau 

A  l'ombre 8  » 

Pendant  la  nuit. 3  » 

Haies,  ayant  plongé  dans  l'eau  la  racine  d'un  pommier 

,       nain,  trouva  qu'en  dix  heures  de  jour  l'arbre  avait  absorbé 

6^,So4  de  liquide,  tandis  que  par  les  feuilles  il  en  avait 

perdu  y!^^y  o3 1 .  L'absorption  par  les  racines  avait  doue  été 


300  J.  BOU68IKGAUI.T« 

.moindre  que  Févaporation  par  lès  parties  vertea.  Des 
branches  de  pommier,  de  poirier,  de  cerisier^  d'abricotier 
portant  toutes  leurs  feuilles  et  ayant  leur  extrémité  plon- 
gée dans  Peau,  en  aspirèrent  en  douze  heures  de  jour  4^ 
à  848  grammes,  et  néanmoins  elles  étaient  plus  légères  le 
soir  que  le  matin,  tandis  que  des  branches  semblables  ef- 
feuillées n'en  aspiraient  plus  que  28  grammes  et  pesaient 
plus  le  soir  que  dans  la  matinée.  La  quantité  de  liquide 
aspirée  par  les  branches  feuillues  diminuait  d'ailleurs  rapi- 
dement, à  ce  point  que  les  feuilles  se  flétrissaient  en  quatre 
ou  cinq  jours,  effet  que  Haies  attribuait  à  un  resserremeiU 
des  vaisseaux  séveux  opéré  à  la  section  transversale  d«ft 
branches. 

De  ces  faits,  il  semble  déjà  résulter  que  Taspiratioii  àe 
Teau  dans  l'organisme  végétal  est  déterminée  par  la  trans* 
piration,  par  Tévaporation  accomplie  à  la  surface  de» 
feuilles.  Il  en  résulte  aussi  qu'une  branche  isolée  ne  parait 
plus  posséder  la  même  force  d'aspiration  que  quand  elle 
fait  partie  de  l'arbre,  puisque,  bien  que  son  extrémité 
plonge  dans  un  réservoir,  l'eau  qu'elle  en  tire  ne  suffit  plas 
pour  remplacer  celle  qui  est  éliminée  par  l'évaporation. 

Existe-t-il  donc  une  force  qui  s'ajonte  à  la  transpiration 
des  parties  vertes  pour  faire  monter  l'eau  du  sol  dans  la 
plante?  Cette  force  réside-t-elle  dans  les  racines?  C^esC  ee 
que  Haies  pensait  avoir  prouvé  dans  une  expérience  capi- 
tale faite  le  i3  août  ly^d.  «  Ayant  creusé  le  sol  au  pied 
d'un  poirier,  il  choisit  une  racine  d'un  demi-pouce  de  dia- 
mètre, dont  il  coupa  l'extrémité.  Le  chicot  fut  introduit  et 
fixé  dans  un  tube  de  verre  de  i  pouce  de  diamètre  et  de 
8  pouces  de  longueur  qu'il  remplit  d'eau  et  auquel  il 
ajouta  encore  un  autre  tube  ayant  18  pouces  de  longueur  et 
j  de  pouce  de  diamètre,  dont  l'extrémité  plongeait  dans  un 
vase  contenant  du  mercure.  »  Le  chicot  de  racine  aspira 
Feau  qu'il  touchait  avec  une  telle  vigueur  qu'en  six  mi- 
nutes le  mercure  s'éleva  à  la  hauteur  de  8  pouces.  La  force 


FOlfCTlOnS    PHYSIQUES   DES   FEUILLES.  3oi 

de  succion,  tout  au  commencemeat  de  Tobservation,  équi- 
valait à  une  colonne  d'eau  de  2™™,  76.  Cette  succion  était* 
elle  opérée  par  la  racine  ou  plutôt  par  la  tige  souterraine 
de  la  racine?  Les  expériences  de  Haies  prouvent,  en  effet, 
que  cette  force  n'est  pas  particulière  aux  racines,  puisque 
les  branches  garnies  de  feuilles  l'exercent  aussi.  Le  mer- 
Ctit^  de  la  jauge  dans  laquelle  plongeait  la  section  d'une 
branche  de  pommier,  d'un  rejeton  de  vigne,  s'éleva  de 
plusieurs  pouces.  L'ascension  du  mercure  s'arrêtait  dès 
que  la  branche  était  dépouillée  de  ses  feuilles.  Dans  ce  cas^ 
l'ascension  de  l'eau  serait  donc  déterminée  uniquement  par 
la  transpiration  des  feuilles.  Toutefois,  la  force  ascendante 
diminue  rapidement,  les  feuilles  se  dessèchent,  ce  qui  n'ar- 
rive pas  pour  une  plante  pourvue  de  racines  en  contact 
avec  un  sol  humide. 

En  prenant  pour  point  de  départ  les  expériences  du  phy- 
siologiste anglais,  on  a  cru  devoir  mesurer  cette  transpira-* 
tion,  c'est-à-dire  déterminer  la  quantité  d'eau  que  les 
feuilles  laissent  échapper  à  l'état  de  vapeur,  soit  au  soleil, 
soit  &  l'ombre,  quand  la  plante  est  pourvue  ou  privée  de 
racines. 

Première  observation  (21-22  mai  1867),  Pohnia 

Une  branche  coupée  à  midi  27^  a  été  plongée  par  sa 
base  dans  un  vase  jaugé  contenant  de  l'eau  et  exposée  au 
soleil.  La  surface  simple  des  feuilles  était  de  o'^^,  201  (^), 
soit,  pour  les  deux  côtés  du  limbe,  0^*^,402  : 

Eau  Poids 

de  la  jauge,    de  la  branche, 
m  ce  gr 

Branche  mise  k-. . .     midi  3o  4^  65  «6 

Retirée  à 5**  .00  4*  6i  ,3 

Temps  écoulé. .        4**«3o  —  5  —  4,3 


(  *  )  L'orifice  de  la  jauge  était  fermé  par  un  tampon  de  coton  pour  em- 
pêcher révapoKftli^ii  de  la  surlkct  de  l'eatt. 


3oa  J*  BOUSSINGAULT. 

ffr 

La  branche  avait  aspiré  dans  la  j  auge  :  eau.  •      5,0 
Elle  en  avaitperdu 4>3 

Eau  disparue 9,3  en4**  3o" 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o8'^,o5i 

On  remarquera  que  près  de  la  moitié  de  l'eau  évaporée 
avait  été  fournie  par  les  feuilles,  l'aspiration  ayant  été  bien 
loin  de  suffire  à  Tévaporation. 

Deuxième  observation» 

La  branche  a  été  replacée  dans  la  jauge,  exposée  à 
l'ombre  \  on  Ta  retirée  le  jour  suivant  à  9  heures  du  matin. 

Eau  Poids 

de  la  jauge,     de  la  branche. 

n      ^  ce  fr 

Le  ^i  mai. ...       5  soir ^i  61 ,3 

Le  22  mai....        9   matin 37  61,0 

Temps  écoulé.     16  —  4  —  o,3 

Eau  évaporée  en  vingt  et  une  heures 4>3 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o^^ ,  oo5 

La  transpiration  a  été  très-faible  à  Tombre  et  pendant 
la  nuit.  L'eau  évaporée  représente  à  très-peu  près  celle  que 
la  plante  avait  soutirée  à  la  jauge.  L'aspiration  avait  été 
suffisante,  parce  que  la  transpiration  fut,  pour  ainsi  dire, 
nulle. 

Troisième  observation  ( 3  Juillet).  —  Menthe  avec  racines. 

La  surface  totale  des  feuilles,  au  nombre  de  treize,  était 
de  a  décimètres  carrés  y  compris  celle  des  tiges: 


*»       "  ce 


Exposée  au  soleil  à.     8.45         Eau  dans  la  jauge.     aia,o 
Retirée  à i .   5  „  ao5,a 

Temps  écoulé 4.^10         Eau  évaporée. .  yTï 


/  . 


FONCTIONS.  PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  3o3 

Par  décimètre  carré,  en  une  heure o^'^,8!24 

A  9**  du  matin,  tempér .     aa** , o       Psychromètre.     38° ,  o 
A5*>3o"^  »  24^,0  »  28*»,  5 

La  plante  a  été  placée  à  Tombre. 

h        m  ce 

Mise  après  midi  à.     1 .   5         Eau  dans  la  jauge.     2o5 , 2 
Retirée  à 4  •  3o  »  202 , 8 

Temps  écoulé. ...     3  •  25  Eau  évaporée 2,4 

Par  décimètre  carré  en  une  heure 08*^,360 

A  4^3o"^. 

Température ^3*^,  4 

Psychromètre 33°, o 

Quatrième  observation  [^juillet),  —  Menthe  sans  racines. 

Un  plant  portant  quinze  feuilles  d'une  surface  totale 
de  2^°^^ 9  2  a  été  plongé  dans  la  jauge  aussitôt  qu'on  eut 
séparé  les  racines. 

L'exposition  eut  lieu  au  soleil  : 

h       m  ce 

Misa 8.   o         Eau  dans  la  jauge.      17994 

Retirée i.io  »  i77>5 

Temps  écoulé. ...     5 .  10         Eau  évaporée 1,9 

Par  décimètre  carré  en  une  heure oS'^,  16 

A  9  heures  du  matin  : 

Température 22°, o 

Psychromètre 39°, o 

L'appareil  étant  à  l'ombre  : 

h        m  ce 

Exposé  à i.io         Eau  dans  la  jauge.      i77>5 

Retiré  à 4-35  »  176,3 

Temps  écoulé ... .     3.25         Eau  évaporée. .. .  1,2 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o^',  1^9 


3o4  '•  BOU88IHGAULT. 

La  menthe  avec  racines,  soit  ao  soleil,  soit  h  Fombre, 
a  perdu  plas  d'eau  que  la  menthe  sans  racines. 

Cinquième  observation  (  7  Juillet),  —  Jpoine, 

On  a  opéré  sur  une  graminée. 

On  a  enlevé  d'un  champ  une  toufie  d'avoine  que  l'oii  a 
plantée  dans  du  sable  humide  contenu  dans  un  vase  en 
verre.  Un  couvercle  en  caoutchouc  était  ajusté  de  manière 
que  Tévaporation  ne  pût  avoir  lieu  que  par  les  parties 
vertes. 

Le  vase  fut  enfoncé  dans  le  sol  pour  le  protéger  contre 
l'ardeur  du  soleil;  c^est  par  la  balance  qu'on  a  déterminé 
l'eau  transpirée  :  ' 

oq 

La  surface  des  feuilles  était i45!i,o 

Surface  des  tiges aSi ,  o 

Superficie  des  parties  vertes 1708 ,0 

h        m  gr 

Exposée  au  soleil  à .      9*27         Poids  de  la  jauge .      8 1 5 ,  o 
Retirée  à i  •  4o  »  80 1 , 5 

Temps  écoulé .....     4  •  1 3         Eau  évaporée. ...        1 3  >  5 
Par  décimètre  carré  en  une  heure o^^,  189 

  10  heures  du  matin  : 

Température a5*',9 

Psychromètre 5i°,o 

Avoine  : 

Les  plants  ayant  une  surface  de  17  décimètres  carrés» 
placés  dans  du  sable  humide,  ont  été  exposés  pendant  la 
nuit  : 

h       m  gr 

Le  soir  à 10. 3o        Poids  de  la  jauge.     797>o 

Retiré  le  8  juillet  à       3.55  mat.  »  793yO 

Temps  écoulé. ....       5 .  a5         Eau  évaporée . .  4,0 

Par  heure  et  par  décimètre  carré o^,o44 


FOHCTIOIfS    PHYSIQUES   DBS   FEUILLES.  3o5 


Sixième  observation  (7  aoât  1867).  —  Maïs  avec  racines. 

cq 

La  surface  des  feuilles  a  été  trouvée  de 5a38 

Surface  de  la  tige oaaa 

Surface  totale  des  parties  vertes  du  plant 546o 

I.  Exposition  au  soleil  : 

h        m  ^  gr 

A 10.40        Poids  de  la  jauge.     2023,0 

Retiré  à 3.3o  »  1960,0 

Temps  écoulé. . .       4  •  ^o         Eau  évaporée ....         62,5 
Par  décimètre  carré  et  en  une  heure o*"",  a36 

Ail  heures  du  matin  : 

o 

Température ^7^7 

Psychromèlre 61, 5 

II.  Le  même  appareil  placé  à  l'ombre  : 

b        m  gr 

Mis,  aprèsmidi,à.     3.3o         Poids  de  la  jauge.      1960,5 
Betiré  à 6.25  »  1949^0 

Temps  écoulé. ...     2.55         Eau  évaporée. ...         11,0 
Par  décimètre  carré  et  en  une  heure ©^'^,069 

A  7  heures  du  soir  : 

Température 18°, 4 

Psychromètre 60°,  5 

Septième  observation  [10  août)  :  Oignon, 

I.  Exposition  au  soleil  : 
Surface  totale  des  parties  vertes 6^^yoZQ 

h        «         ,  gr 

Exposé  à 9 .  40  matin    Poids  de  la  jauge. .     257 , 7 

Retiré  à 3.5  »  a47 , 7 

Temps  écoulé .     5 .  25  Eau  évaporée. ...       10,0 

Ânn.eU  Cliim.  etde  Pkjrs,,  S^  série,  t.  Xm.  (Mars  1878.)  20# 


3o6  j.  boussiugault. 

Par  décimètre  carré  en  une  heure 08*^,475 

Température. .  .    ai  ,5 

Psychromètre 7^  t  o 

n.  L'appareil  placé  à  l'ombre  : 

h       m  ^  ^  g  r 

Exposé  à 3.5  Poids  de  la  jauge .     247,7 

Retiré  à 7-4û  m  M7»3 

Temps  écoulé.     3.45                 Eau  évaporée. . .  o,S 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o^,o34 

III.  Un  plant  auquel  on  avait  enlevé  la  bulbe  a  été 
introduit  dans  la  jauge.  La  surface  totale  des  feuilles 
était o°',0266 

Exposition  au  soleil  : 

h       m  ^  ^  ff 

Exposé  à 9-4^  Poids  de  la  jauge.      196,0 

Retiré  à 3.4o  »  ^93,^ 

Temps  écoulé.     6.00  Eau  évaporée. .  .  a, 8 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o*',  18 

A  10  heures,  température ai^,6 

IV.  Appareil  placé  à  Tombre  : 

h        m  gr 

Exposé  à 3.40  soir.        Poids  delà  jauge     193, ti 

Retiréà 7.40  soir.  »  i93»o 

Temps  écoulé .     4*^0  ^^ti  évaporée ...  0,2 

Par  décimètre  carré  en  une  heure 0^,019 

Psychromètre 65^, o 

Après  Tablation  de  la  bulbe,  la  plante  n'a  plus  transpiré 
à  beaucoup  près  autant. 

Ces  observations  viennent  à  Tappui  du  fait  énoncé  pré- 
cédemment, que  l'aspiration  de  l'eau  du  sol  par  le  végétal 


FoncTions  physiques  des  feuilles.  3oy 

est  surtout  dé  ter  mi  née  parla  transpiration  des  feuilles,  puis- 
qu'elle a  lieu,  du  moins  pendant  un  certain  temps,  sans  le 
concours  des  racines,  mais  alors  elle  n^estpas  continue;  les 
racines  paraissent  donc  douées  d'une  puissance  d'injection, 
comme  d'ailleurs  Haies  l'a  reconnu  dans  l'expérience  sur  la 
force  de  la  sève  à  l'époque  des  pleurs  de  la  vigne,  alors 
qu'il  n'y  a  pas  encore  de  feuilles.  Au  reste,  Péjaculation  des 
liquides  accumulés  dans  les  organes  souterrains  n'est  pas 
particulière  à  la  vigne  et  ne  se  manifeste  pas  seulement  au 
printemps,  ainsi  que  Haies  le  pensait  ;  elle  est  constante 
pour  l'agave  américain,  les  lianes,  les  palmiers.  Il  suffit 
d^en  couper  la  tige  un  peu  au-dessus  du  niveau  du  sol  pour 
en  voir  sortir,  quelquefois  en  abondance,  de  la  sève  dont 
on  extrait  des  matières  sucrées  produisant  des  boissons 
alcooliques*  Hoffmeister  a  d'ailleurs  montré  que  les  arbustes, 
les  plantes  herbacées  émettent  plus  ou  moins  de  sève  en 
tottte  saison,  quand  on  en  coupe  la  tige  près  des  racines  ; 
il  a  pu,  à  Taide  d'un  appareil  manométrique,  en  mesurer  la 
force  ascensionnelle,  souvent  considérable.  Toutefois  il  j 
aurait  lieu  de  rechercher  si  des  gaz  comprimés  ou  formés 
par  la  fermentation  de  matières  sucrées  dont  la  sève  n'est 
jamais  exempte  ne  contribuent  pas,  en  s'échappant,  à  ré- 
mission du  liquide. 

Une  pression  exercée  sur  la  section  d'une  branche  feuillée 
supplée  momentanément  à  Taction  des  racines.  Haies  croyait 
que  si  l'effet  n'était  pas  permanent,  c'était  parce  que  des 
parties  ligneuses  des  branches  finissaient  par  être  oblitérées. 
On  ne  conçoit  plus  cette  oblitération  quand  on  injecte  de 
Teau  distillée;  et  il  est  probable  que,  si  la  pression  exercée 
par  la  colonne  liquide  n'agit  pas  comme  la  force  d'injec- 
tion attribuée  aux  organes  souterrains,  c'est  que,  dans  le 
premier  cas,  il  n'arrive  que  de  Peau  dans  la  tige,  tandis 
que,  dans  le  deuxième  cas,  il  vient  de  Teau  et  de  l'air  dont 
le  rôle  ne  saurait  être  contesté,  depuis  les  intéressantes  expé* 
riencesdc  M.  Jamin. 

20. 


3o8  J.    BOVSSIirGÀULT. 

Dans  Topinion  de  Haies,  la  pression  exercée  sur  la  sec- 
tion d'une  branche  plongée  dans  l'eau  remplacerait  donc  la 
force  d'injeclîon  attribuée  aux  racines. 

Le  17  août,  il  cimenta  un  tube  de  verre  long  de  9  pieds 
et  de  Y  pouce  de  diamètre  à  une  branche  de  pommier 
de  5  pieds  de  long  et  de  |  de  pouce  de  diamètre;  ayant 
versé  de  Teau  dans  le  tube,  il  constata  que  cette  eau  baissa 
de  3  pieds  en  une  heure.  La  branche  ayant  été  coupée  ensuite 
à  i3  pouces  au-dessus  du  point  d'attache,  il  la  plaça  dans 
un  vase  contenant  de  l'eau  :  elle  absorba  18  onces  de  liquide 
en  dix-huit  heures  de  jour  et  douze  heures  de  la  nuit,  où 
Tévaporation  a  dû  être  insignifiante.  Voyons  de  combien  la 
pression  d'une  colonne  d'eau  de  9  pieds  a  favorisé  la  trans- 
piration. En  réduisant  les  mesures  anglaises,  on  trouve  que, 
sous  une  pression  équivalant  à  20  centimètres  de  mercure, 
en  une  heure,  pour  une  même  surface  de  feuilles,  le  volume 
de  l'eau  disparue  a  été  de  a3a  centimètres  cubes,  tandis 
que  par  la  seule  force  d'absorption  le  volume  éliminé  de 
la  jauge  n'a  plus  été  que  de  28*^^,  3. 

Pour  se  former  une  idée  exacte  de  la  faculté  de  trans- 
piration exercée  dans  ces  deux  conditions,  il  eût  fallu 
connaître  l'étendue  de  la  superficie  des  parties  vertes.  Les 
expériences  que  je  vais  rapporter  ont  été  faites  pour  com- 
bler cette  lacune  en  cherchant  a  évaluer  Tévaporation 
opérée  à  la  superficie  des  feuilles,  soit  par  la  simple  force 
d'absorption,  soit  en  favorisant  cette  absorption  au  moyen 
d'une  pression  exercée  sur  la  section  de  la  tige. 

2  mai  1867.  —  F  igné, 

I.  Un  jet  dont  la  surface  des  feuilles  (les  deux  côtés  du 
limbe)  avait  o^^yii6%  a  été  plongé  dans  l'eau  par  sa 
base. 


FOMCTIOnS    PHYSIQUES   DES    FEUILLES.  '6og 

Eau  Poids 

dans  la  jauge,  du  rameau, 
h  ^  co  gr 

Au  Soleil  à 8  du  matin 70,0         96,0 

Retiré  à i  deTaprés-midi.    68,0         89,6 

Temps  écoulé. ...      5    Eau  disparue.       2^0  6,5 

a,o 

Eau  évaporée 8,5 

Par  décimètre  carré  de  feuilles  en  une  heure. . .       0,075 

L'aspiration  n'était  pas  assez  énei^ique  pour  remplacer 
l'eau  que  les  feuilles  transpiraient;  aussi  ont-elles  été  visi- 
blement flétries.  En  cinq  heures  l'eau  disparue  tant  de  la 
jauge  que  des  feuilles  pesait  8^'y5.  La  branche,  en  per- 
dant 6^^, 6  d'eau,  n'en  avait  donc  pris  que  2  grammes  à 
la  jauge. 

II.  On  a  fait  alors  intervenir  la  pression.  Un  jet  de 
vigne,  dont  les  feuilles  présentaient  une  surface  de  o"*^,  18 
a  été  liée  à  un  tube  dans  lequel  on  versa  de  Teau,  de 
manière  que  la  section  du  rameau  supportât  une  colonne 
de  i^jaS. 

Poids 
du  rameau. 

h  ID  gm 

Au  Soleil  a 8 .  10  du  matin 7^9^ 

Retiré  à i  .04  de  l'après-midi.         68,5 

Temps  écoulé 4* ^4  3,7 

Diminution  de  l'eau  dans  le  tube 8,0 

Eau  totale  évaporée ii« 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o,  182 

A  9  heures  du  matin  : 

Thermomètre  à  l'ombre 20,7 

Psychromètre        »         72,0 

La  transpiration  a  été  doublée  par  l'influence  de  la 
pression,  mais,  même  dans  cette  condition,  l'eau  n'est  pas 
entrée  en  quantité  suffisante  pour  remplacer  celle  qui  était 


3lO  J.   BOUSSIJNGAULT. 

sortie  par  Tëvaporation  et,  dans  les  deux  cas,  elle  a  été 
anormale  et  de  peu  d'importance.  Aussi  les  feuilles  sont- 
elles  devenues  flasques,  ce  qui  n'arriva  pas  aux  feuilles 
d'une  vigne  en  pleine  terre;  et  même  en  supposant,  ce 
qui  est  probable,  qu'il  entrait  moins  d'eau  venant  du  sol 
qu'il  n'en  sortait,  la  différence  n'était  pas  assez  forte  pour 
affecter  le  port  des  feuilles,  comme  il  est  arrivé  pour  les 
rameaux  détachés  de  la  vigne.  Les  racines  favoriseraient 
donc  l'introduction  de  l'eau  du  sol  dans  la  plante  bien 
autrement  que  la  pression  exercée  sur  la  section  d'une 
branche. 

Deuxième  observation  (8  septembre  1867).  — Wtgne. 

I.  La  surface  des  feuilles  portées  par  le  rameau  exposé 
au  soleil  était  o"ï,3862. 


h       m 

Au  soleil  à. .     8.40  du  matin 5ao,6 

Retiré  à  . . . .      5.2a  de  l'après-midi. 


Temps  écoulé     8.4^  Eau  disparue. . 


Poids 

Poids 

de  la  jaug«. 

du  rameau. 

520,6 

98*,'5 

5o4»o 

78,5 

16, 6 

ao,o 

20,0 

36,6 

06%II 

Eau  évaporée. . 
Par  décimètre  carré  en  une  heure . .  . 

II.  Dans  une  expérience  exécutée  parallèlement,  on  a 
fait  intervenir  la  pression  d'une  colonne  d'eau  de  a",  7, 
la  surface  des  feuilles  étant  de  o"^,79. 

Poids 

du  rameau. 

h        m  ^  gr 

Au  soleil  à 8 .  40  du  matin aoa ,  5 

Retiré  à 5.22  deTaprès  midi. . .      i83,8 

Temps  écoulé 8.42  18,7 

Eau  injectée  par  pression 78,  i 

Eau  évaporée. 96,8 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o«',  i4i 

Le  8  septembre,  le  temps  fut  très-beau,  l'air  calme. 


FOIÏGTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  3ll 

  3  heures  :  température  de  Tair a6^,  a 

»  psychromètre 36°,  5 

Les  feuilles  n'ont  pas  transpiré  plus  sensiblement  sous 
Finâuence  de  la  pression  ;  l'eau  injectée  n'a  pas  suffi  pour 
subvenir  à  leur  transpiration,  puisqu'elles  ont  perdu  près 
de  19  grammes. 

Troisième  observation  (3o  août  1867).  —  Mûrier  blanc. 

I.  L'extrémité  d'une  branche  dont  les  feuilles  présen- 
taient une  surface  de  93^"^*>,84  a  été  disposée  dans  une 
jauge. 

Poids  Poids 

de  la  jauge,    de  la  branche, 
h        m  ^  gr  fr 

A 10.00  du  matin.  616,95  i^Jf^ 

Retirée  à 4*^o  607,50         i36,a 

Temps  écoulé. .  .     6.20  —  9>45       — 11,0 

11,00 

20,4s 

L'eau  aspirée  a  été  à  peu  près  la  moitié  de  l'eau  trans- 
pirée  par  la  branche. 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o*',o35 

A  1  heure  :  température  de  l'air 24®,  5 

»  psychromètre 62**,© 

On  fit  parallèlement  une  autre  expérience  sous  la  pres- 
sion d'une  colonne  d'eau  de  2™,4o. 

La  surface  des  feuilles  était  de  84  décimètres  carrés. 

h        m  gr 

Au  soleil ,  à .  .  .    10.00       Poids  de  la  branche . .      147,10 
Retirée  à 4*^o  »  i43,i5 

Temps  écoulé. .     6.20                         »  — 3,95 

L'eau  injectée  dans  la  branche 49>70 

Elau  évaporée. 53 ,65 

Par  décimètre  carré,  en  une  heure 0,10 


3ia  J.  BOUSSIIIGAULT. 

La  transpiration  des  feuilles  a  été  fort  différente  dans 
les  deux  cas.  La  pression  a  fait  pénétrer  beaucoup  plus 
d'eau  dans  la  branche  que  la  simple  aspiration  n'en  avait 
introduite;  néanmoins  cette  pression  n'en  a  pas  encore 
fourni  assez  pour  remplacer  celle  qui  sortait  par  Févapo- 
ration  ;  les  feuilles  en  ont  encore  perdu  environ  4  grammes. 

Quatrième  observation  (3  septembre  1867).  —  Marronnier 

dinde. 

I.  Une  branche,  ayant  une  surface  de  feuilles  de  i  ao  dé- 
cimètres carrés,  a  été  disposée  pour  l'aspiration. 

Poids  Poids 

de  la  jauge,      de  la  branche. 

h        m  gr  gr 

Exposition  au  soleil ,  à .     8.55  54I9I  i63yi 

))  à.     4*35  498^3  i46»3 

Temps  écoulé 7-4^         — A^y^        — 16,8 

16,8 

Eau  évaporée. . .     59,6 
Par  décimètre  carré  en  une  heure o^^'jOÔj 

Les  feuilles  étaient  légèrement  flétries. 

II.  On  a  fait  intervenir  la  pression  d'une  colonne  d'eau 
de  2°",  40. 

Surface  des  feuilles i83''"'',76 

Poids 
de  la  branche. 
h       m  %t 

Exposition  au  soleil,  à 8.3o  186,8 

»  à ^.0.0  166,3 

Temps  écoulé 7.5o  — 20, 5 

Il  était  entré  dans  la  branche,  eau 86, 5 

Eau  évaporée 107 ,0 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o^'jOjS 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  3l3 

Malgré  la  pression,  Teau  introduite  n'a  pas  pénétré 
assez  promptement  pour  subvenir  à  la  transpiration. 

Sur  107  grammes  d'eau  évaporée,  les  feuilles  en  avaient 
fourni  ao^"^, 5.  Ainsi,  sous  Tinfluence  d'une  assez  forte 
pression,  elles  n'ont  pas  transpiré  beaucoup  plus  que 
quand  l'eau  était  puisée  dans  la  jauge  par  la  simple  aspi- 
ration. La  différence  n'a  pas  dépassé  7.  On  a  pu,  d'ail- 
leurs, se  convaincre  que  la  quantité  d'eau  injectée  dans  la 
branche,  par  l'effet  de  la  pression,  diminuait  assez  rapi- 
dement. 

h       m  b       m  ce 

De     8.3o  à     9.80  Eau  injectée 35^8 

9 .  ao  à  II .  45  »  a6y6 

II  .4S  à     2.20  »  lifS 

2.20  à     4*^o  '^  9^6 

sêTî 

II  avait  fait  très-beau  ;  l'humidité  de  l'air  était  assez  forte. 

Température  de  l'air.      Psychromètre. 
o 

8  heures 18,6  77 

Midi .      22,7  ^9 

2  heures  après-midi 24^9  47>S 

Cinquième  observation^  4  septembre  1867  :  Châtaignier. 

I.  La  branche  ayant  une  surface  de  feuilles  de  40^^918  a 
été  exposée  en  plein  soleil. 

Poids  do  la  jauge.    Poids  de  la  branche, 
h       m  ^  rr 

A 11.54    529,15      i58,6 

A 4«4o    499>5o      157,0 

Temps  écoulé ..t       4*46       — ^9>65  — 1,6 

1 ,60 

Eau  évaporée 3i , 25 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o^',  164. 


3l4  BOUSSINGAULT. 

II.  En  faisant  intervenir  la  pression  d^une  colonne  d'eau 
de  2",4o- 

Surface  des  feuilles 9^^^^  ^4 

Poids  de  la  branche. 

h  gr 

A II  .54  170,0 

A .      4«4<>  174»  3 

Temps  écoulé .. .       4*46  +4*3 

Eau  injectée  dans  la4>ranche 242,8 

En  retranchant  Teau  restée  dans  la  branche,  on  a  ; 


Rf 


Eau  évaporée a38 , 5 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o,555 

L'évaporation  sousTinfluencede  lapression  a  été  troisfois 
aussi  forte  que  sans  son  intervention,  et  T eau  injectée  a  suffi 
et  audelà  pour  remplacer  l'eau  évaporée,  puisque  labranche 
enaacquis  plus  de  4  grammes.  Le  ciel,  pendant  Texpérience, 
est  resté  d'une  grande  pureté.  Le  vent  soufflait  de  Test 
avec  assez  de  force,  l'air  était  sec;  aussi,  dans  nos  cultures 
de  betteraves ,  les  feuilles  étaient  flétries.  Celles  de  la 
branche  du  châtaignier  avaient  conservé  leur  rigidité. 

o 

A  II** 3o™  température 25,8 

»  psychromètre 45,5 

Sixième  observation  du  j  septembre  1867.  —  Sapin. 

Suivant  Haies,  les  arbres  toujours  verts  transpirent 
bien  moins  que  les  autres;  c'est  à  cette  circonstance  qu'il 
attribuait  la  résistance  de  certaines  plantes  au  froid  de 
l'hiver,  parce  qu'  a  elles  n'ont  besoin  de*ne  conserver 
que  très-peu  de  nourriture,  à  peu  près  comme  les  ani- 
maux à  sang  froid,  qui  ne  transpirent  pas  beaucoup,  peu- 
vent passer  l'hiver  sans  prendre  d'aliments.  »  Aujourd'hui 


FONCTIONS    PDYSIQDBS   DES   FEUILLES.  3l5 

cette  analogie  ne  saurait  être  admise,  mais  il  est  de  faii 
(jue  les  feuilles  toujours  vertes  consomment  moins  d'eau 
que  les  autres  pour  maintenir  leur  fraîcheur^  c^est  très- 
probablement  pour  cette  raison  que  les  arbres  verts  résis- 
tent à  de  grandes  sécheresses,  soit  parce  que  réellement  les 
feuilles  transpirent  peu,  soit  que,  comme  les  plantes  grasses, 
elles  accumulent  dans  leurs  vaisseaux  trachéens  une  réserve 
d*eau  pendant  la  saison  des  pluies,  soit  simplement  enfin 
parce  que  la  rigidité  des  aiguilles  dissimule  la  perte  en  eau. 

La  mesure  de  la  surface  des  aiguilles  d'une  branche  de 
sapin  ne  se  fit  pas  sans  difficulté.  On  y  parvint  en  collant 
ces  aiguilles  sur  une  plaque  de  verre,  dont  on  connaissait 
la  superficie. 

I.  Exposition  au  soleil  : 

L'extrémité  d'une  branche  de  pin  maritime  fut  mise 
dans  une  jauge. 

dq 

La  superficie  des  feuilles  était ^^tSj 

La  surface  double 8i,i4 

Poids  Poids 

de  la  jauge.  de  la  branche, 

h        m        ^  gr  gr 

A p.iomatin  676,6  a53y5 

A 4       soir  664,7  249,4 

Tempsécoulé.     6.5o  — 11,9  -^4>i 

Eau  sortie  des  aiguilles 4  »  ^ 

Eau  évaporée i5,o 

Par  décimètre  carré,  en  une  heure 06^,027 

L'eau  aspirée  n'a  pas  suffi  pour  remplacer  Teau  éli- 
minée par  la  transpiration.  Les  aiguilles  en  avaient  perdu 
4*%ifle  tiers  à  peu  près  de  la  quantité  évaporée  en  6*^50™. 

U.  On  a  fait  intervenir  la  pression  d'une  colonne 
d'eau  de  2^,4^.  La  surface  des  aiguilles  de  la  branche 
éuit  100^^48. 


3i6  j.  boussiugault. 

Au  soleil  à.  . .     9.  lo           Poids  de  la  branche.  327,0 

»        à* ..     4*00                            ^^  3 19,2 

Temps  écoulé.     6.5o                            »  — 8,3 

Eau  entrée  dans  la  branche 23 ,7 

Eau  évaporée 32, o 

Par  décimèire  carré  d'aiguilles  en  une  heure. . .      0^*^,044 

Sous  pression,  la  transpiration  a  presque  doublé.  Néan- 
moins Teau  injectée  n'a  pas  été  suffisante  pour  compenser 
celle  qui  était  sortie. 

7  septembre,  —  Ciel  découvert  durant  les  observations  \ 
air  calme  et  chaud  : 

o 

A  3  heures,  température  à  l'ombre 27,6 

»  psychromètre 32,  o 

On  voit  combien  les  aiguilles  de  sapin  ont  peu  trans- 
piré nonobstant  une  forte  chaleur  et  une  grande  séche- 
resse. 

Septième  observation j  g  septembre  i866.  —  Maïs» 

I.  Un  plant  a  été  coupé  au-dessus  du  collet  delà  racine 
et  mis  dans  une  jauge.  On  a  trouvé  pour  la  surface  des 
parties  vertes  : 

dq 

Feuilles 19»  00 

Tige 4>  70 

Surface  totale 23,70 

Exposition  au  soleil  : 

Poids  de  la  jauge.     Poids  du  plant. 

h       m  '       ^  sr 

A 8.5o  698,60  128,0 

A 5.10  638,85  ii3,8 


Temps  écoulé.     8.20  — 59,65  — i4>a 

Eau  évaporée 73 ,85 

Par  décimètre  carré,  en  une  heure o«',374 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES   FEUILLES.  ilj 

L'observation  a  été  continuée  en  maintenant  la  plante  dans 
l'obscurité. 

II.  Placée  dans  un  cellier  le  9  septembre  : 

Poids  de  la  jauge.    Poids  du  plant. 


A 

Retirée  le  10  à. 

h        m 

5       soir 
8.12 

638785 
638. 80 

ii378 
107,5 

Temps  écoulé. 

i5. 12 

— o,o5 
6,3o 

6,3 

Eau  évaporée 6,35 

Par  décimètre  carré,  en  une  heure o8'^,o2 

0 
A  7  heures  du  soir,  température  de  Tair 24^0 

Psychromètre 83 ,0 

ni.  La  section  d'un  plant  de  maïs  a  été  soumise  à  la 
pression  d'une  colonne  d'eau  de  2",  70. 

Surface  des  feuilles a5 ,34 

Surface  de  la  tige 6,66 

Surface  totale 32^oo 

Exposition  au  soleil  : 

h       m  gr 

A 8.5o  matin.       Poids  du  plant.     i4o,5 

A 5.26  »  i32,8 

Temps  écoulé.     8.36                                 «  — 7,7 

Eau  injectée  dans  le  plan 221 ,0 

Eau  évaporée * .  . .     228,7 

Par  décimètre  carré,  en  une  heure 0*^,83 

o 

A  10  heures  du  matin,  température  ...    22,6 

»  psychromètre 64,0 

Au  soleil  la  transpiration  a  été  près  de  trois  fois  aussi 
forte  sous  l'influence  de  la  pression  qu'elle  l'avait  été  lorsque 
la  base  de  la  tige  plongeait  dans  l'eau.  Cependant  l'eau 
ipjectée  n'a  pas  encore  suffi  pour  compenser  la  perte  occa- 


3l8  J.  BOUSSIIIGAVLT. 

sionnée  par  l'ëvaporatioii  ;  ces  feuilles  en  ont  perdu  près  de 
8  grammes. 

De  Tensemble  de  ces  expériences  il  ressort  que,  si  Ton 
plonge  dans  Teau  une  section  fraîchement  pratiquée  à  Fex- 
trémité  d'une  branche  ligneuse  ou  d'une  tige  herbacée,  ce 
liquide  monte  dans  les  feuilles  où  il  s'évapore  plus  ou  moins 
promptement  suivant  la  nature  du  périsperme  et  les  cir- 
constances atmosphériques.  L'ascension  est  accélérée  par 
la  pression,  mais  dans  les  deux  cas,  c'est-à-dire  par  l'aspi- 
ration déterminée  uniquement  par  les  feuilles  ou  par  la 
même  aspiration  aidée  de  la  pression,  Teau  introduite  dant 
la  tige  serait  encore  insuffisante  pour  remplacer  celle  que 
les  feuilles  laissent  passer  à  l'état  de  vapeur  au  soleil  et 
même  à  l'ombre^  les  organes  verts  perdant  plus  d'eau  qu'ils 
n'en  reçoivent.  Aussi  voit-on  bientôt  les  feuilles  se  flétrir, 
se  faner.  Il  faut  le  reconnaître,  le  phénomène  de  l'aspira- 
tion, par  suite  de  la  transpiration  des  feuilles,  n'est  per- 
manent que  sur  une  plante  entière  établie  dans  une  terre 
suffisamment  humide.  Si  par  l'effet  d'un  soleil  ardent, 
d'un  vent  impétueux,  d'une  grande  sécheresse,  les  feuilles 
se  flétrissent,  s'inclinent  vers  la  tige,  comme  cela  arrive 
fréquemment  dans  les  cultures  pendant  les  fortes  insola- 
tions, durant  les  vents  chauds,  cet  état  est  passager  et  dis- 
parait avec  les  causes  qui  l'ont  provoqué.  Ainsi,  par  un 
abaissement  de  température,  par  rhumidité  de  l'air  am- 
biant, les  feuilles  accumulent  alors  dans  leur  paren- 
chyme l'eau  qu'elles  reçoivent  du  sol,  elles  ne  la  dissipent 
plus;  le  matin,  après  une  nuit  fraîche  succédant  à  une 
chaude  journée,  on  les  trouve  généralement  redressées,  si 
le  sol  n'a  pas  subi  la  dessiccation;  rien  de  semblable  n'ar- 
rive aux  feuilles  d'une  branche  détachée  de  l'arbre,  aux 
feuilles  d'une  tige  herbacée  :  elles  ne  récupèrent  pas  la 
nuit  l'eau  perdue  pendant  la  chaleur  et  la  sécheresse  du 
jour,  bien  que  leur  extrémité  soit  maintenue  dans  le  li- 
quide, d'où  il  faut  conclure  avec  Haies  que  les  racines  in- 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  3l9 

tervienneDt  évidemment  dans  rintroduction  de  Peau  du  sol 
dans  la  lige.  Esl-ceréellement  une  force  d'injection?  C'est 
ce  qui  n'est  peut-être  pas  suffisamment  établi?  Est-ce  par 
Timbibition  de  Teau  venant  de  la  terre  humide,  imbibition 
qui  se  continue  ensuite,  de  proche  en  proche,  de  la  racine 
à  la  tige,  de  la  tige  aux  pétioles  et  aux  feuilles  ?  Il  en  ré- 
sulte néanmoins  que,  pour  apprécierlaquantitéd'eau  qu'une 
plante  laisse  échapper  par  la  transpiration,  il  faut  l'ob- 
server quand  elle  est  dans  une  situation  normale  où  tous 
ses  organes  fonctionnent  :  c'est  ce  que  Haies  a  fait^  pour 
Y Helianthus ,  le  choux,  la  vigne,  en  faisant  usage  de  la  ba- 
lance. 

Toutefois  cette  méthode  des  pesées  n'est  pas  applicable 
aux  végétaux  de  grande  dimension.  On  a  vu  que  Haies  a 
cherché  à  tourner  la  difficulté,  en  observant  sur  les  bran- 
ches détachées^  mais  alors  on  sort  des  conditions  ordi'^ 
naires,  et  en  réalité  ce  que  l'on  constate^  c'est  surtout 
le  progrès  de  la  dessiccation  des  feuilles  adhérentes  à  la 
branche,  par  la  raison  qu'elles  ne  reçoivent  plus  l'eau  que 
leur  amèneraient,  par  injection  ou  par  imbibition,  les  ra- 
cines et  la  tige.  Aussi,  quand  Haies  opéra  sur  une  des 
branches  isolées  pour  démontrer  le  fait  de  l'aspiration  at- 
tribuable  à  la  transpiration,  il  ne  donne  plus  la  surface 
des  feuilles,  il  ne  cherche  plus  à  établir  le  rapport  existant 
entre  cette  surface  et  le  volume  d'eau  transpirée. 

L'injection  favorise  certainement  l'introduction  de  Peau 
âans  la  tige  et  par  suite  dans  les  feuilles,  suppléant  ainsi, 
dans  une  certaine  mesure,  aux  fonctions  des  racines.  Mais 
on  a  vu  aussi  que  laquantité  d'eau  introduite  par  ce  moyen 
a  constamment  diminué,  malgré  la  persistance  de  la  pres- 
sion, diminution  que,  dans  les  expériences  décrites  plus 
haut,  on  ne  saurait  attribuer  à  l'oblitération  des  tissus 
causée  par  des  matières  terreuses,  puisque  l'on  a  toujours 
injecté  de  l'eau  distillée,  de  l'eau  pure. 

Les  racines,  la  tige,  les  feuilles,  bien  que  remplissant 


3aO  1*    BOUSSIIfGÀULT. 

des  fonctions  distinctes  et  en  quelque  sorte  indépendantes, 
concourent  simultanément  à  Tintroduction  et  à  la  circula- 
lion  de  l'eau  dans  la  plante,  cela  est  incontestable.  Les  ra- 
cines agissent  surtout  par  endosmose;  leur  épiderme, 
n'ayant  pas  d'ouverture,  de  stomates,  transmet  l'eau  aux 
cellules  qui  la  font  refluer  vers  la  tige.  Le  tissu  ligneux,  par 
l'effet  de  la  capillarité,  par  l'imbibition,  dirige  le  liquide 
dans  les  cellules  des  feuilles,  d'où  il  sort  en  partie  par 
l'évaporation.  C'est  ainsi  que  l'eau  du  sol  introduite  et 
transformée  en  sève  ascendante,  en  traversant  Toi^ane 
souterrain,  arrive  dans  le  parenchyme  chargée  de  prin- 
cipes fertilisants.  Dans  les  feuilles,  par  le  fait  de  leur 
transpiration,  la  sève  est  concentrée;  les  matériaux  qu'elle 
a  empruntés  à  la  terre  sont  acquis  à  l'organisme,  où,  après 
avoir  été  modifiés  par  la  lumière,  ils  sont  répartis,  distri- 
bués par  la  sève  descendante. 

Si  l'eau  que  transpirent  les  feuilles  était  immédiatement 
remplacée  par  l'eau  qu'apporteraient  les  racines,  le  phé- 
nomène de  la  circulation  serait  très-simple;  mais  générale- 
ment, ainsi  que  je  crois  l'avoir  prouvé,  pour  des  temps 
égaux  il  n'y  a  pas  égalité  entre  la  quantité  de  liquide  in- 
troduite par  les  organes  souterrains  et  les  liquides  dissipés 
par  les  organes  aériens.  Au  soleil,  par  exemple,  les  feuilles 
perdent  une  fraction  de  leur  eau  de  constitution,  et  sans 
aucun  doute  la  perte  serait  encore  plus  prononcée  sans 
l'humidité  qu'elles  tirent  de  la  tige.  Le  tissu  ligneux  se 
comporte  alors  comme  un  réservoir,  comme  un  régulateur 
ayant  pour  effet  d'atténuer  l'inégalité  d'action  des  deux 
organes  exerçant  des  fonctions  opposées.  La  plupart  des 
v^élaux,  durant  les  périodes  de  longue  sécheresse,  suc- 
comberaient sans  cet  intermédiaire;  leur  existence  dans 
cette  condition  défavorable  est  d'autant  plus  assurée  que 
la  masse  humide  interposée  entre  les  racines  et  les  feuilles 
est  plus  grande  ;  c'est  pourquoi  les  arbres  supportent  mieux 
la  sécheresse  que  les  herbacées,  à  moins  que,  comme  les 


FO^GTIOMS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  3^1 

cactées,  ces  plantes  ne  renferment  dans  leur  parenchyme 
une  très-forte  reserve  d'eau,  protégée  par  une  cuticule 
peu  perméable.  Pour  les  feuilles  des  plantes  en  pleine 
terre,  il  parait  difficile  de  déterminer  la  perte  en  eau 
qu'elles  subissent  durant  leur  transpiration.  Il  n'y  a  d'in- 
dice de  cette  déperdition  que  leur  changement  d'aspect^ 
elles  deviennent  flasques,  pendantes,  si  elles  ne  sont  pas 
suffisamment  rigides . 

C'est  ici  qu'il  convient  de  faire  remarquer  que,  si  les 
feuilles  d'un  végétal,  planté  dans  une  terre  humide,  per- 
dent pendant  le  jour,  surtout  au  soleil,  plus  d'eau  qu'il 
n'en  vient  par  les  racines,  il  en  résulte  qu'en  évaluant  la 
vitesse  de  l'ascension  de  la  sève  d'après  des  pesées,  ainsi 
que  l'a  fait  Haies  dans  son  expérience  «  sur  la  quantité  de 
liquide  que  les  arbres  et  les  plantes  tirent  et  transpirent  n, 
on  est  exposé  à  commettre  une  erreur,  puisque  l'on  sup- 
pose, ce  qui  n'est  peut-être  jamais  le  cas,  que  l'eau  trans- 
pirée  est  immédiatement  remplacée  par  celle  de  la  sève 
ascendante.  Or  il  est  de  la  dernière  évidence  qu'une  partie 
de  cette  eau  transpirée ,  accusée  par  la  balance,  ne  vient  pas 
de  traverser  actuellement  la  tige,  puisqu'elle  a  été  fournie 
par  les  feuilles  en  voie  de  dessiccation.  La  perte  que  Ton 
constate  provient  donc  à  la  fois  des  feuilles  et  des  tiges. 
Elle  n'exprime  pas  la  faculté  de  transpiration  attribuée  à 
la  feuille  considérée  isolément  et  qui  dépend  nécessaire- 
ment de  l'organisation,  du  nombre  des  stomates,  de  l'é- 
paisseur du  parenchyme,  du  plus  ou  moins  de  perméabilité 
de  l'épiderme.  On  est  alors  conduit,  pour  estimer  la  faculté 
de  transpiration,  à  observer  sur  des  feuilles  détachées  de 
la  plante^  mais  alors,  on  le  conçoit,  l'observation  ne  doit 
pas  être  prolongée,  parce  que  la  feuille  abandonnera  son 
eau  de  constitution  d'autant  plus  lentement  à  mesure 
qu'elle  en  contiendra  moins  par  l'effet  de  l'évaporation. 

Jnn,  de  Chim.ec  de  Phys.t  5^  série,  t.  XIII.  ( Mars  1878.}  21 


332  J.    BOUSSIKOAULT. 


S  n. 


TRANSPIRATION    DES    FEUILLES    AU    SOLEIL    ET    A    L  OMBRE. 

Si  l'oQ  touche  une  feuille  suffisamment  rigide  attenant 
à  une  plante,  par  exemple  à  la  vigne,  on  éprouve  une 
sensation  de  fraîcheur-,  alors  même  qu'elle  est  en  plein 
soleil,  sa  température  est  inférieure  à  celle  de  la  main^ 
maintenant,  qu'on  en  brise  le  pétiole,  de  manière  qu'elle 
ne  soit  plus  suspendue  que  par  quelques  filaments,  son  épi- 
derme  deviendra  chaud  au  toucher. 

Il  est  facile  d'expliquer  celte  différence  de  température. 

SI  une  feuille  ne  s'échauffe  pas  sensiblement  au  soleil,  lanl 
qu'elle  est  en  communication  avec  la  plante,  c'est  qu'elle 
reçoit  incessamment  de  la  sève  aqueuse  venant  du  soL  hu- 
mide :  Tévaporation  accomplie  à  sa  surface  contribue  d'ail- 
leurs à  en  maintenir  la  fraîcheur-,  mais,  aussitôt  la  rupture 
du  pétiole,  la  feuille  s'échauffe  immédiatement  et  cela  par 
deux  raisons  :  la  sévene  parvient  plus  dans  ce  parenchyme^ 
et  l'évaporatîon  devient  moindre  à  la  surface  du  limbe  : 
aussi  la  feuille  commence- t-elle  à  se  faner  ^  toutefois  l'effet 
n'est  pas  instantané.  La  feuille  ne  meurt  pas  aussitôt  qu'elle 
cesse  d'être  en  communication  avec  le  végétal  :  l'eau  dont 
elle  est  pénétrée  continue  à  s'évaporer,  et  il  y  a  tout  lieu 
de  croire  que  pendant  un  temps  limité,  il  est  vrai,  elle 
transpire  comme  si  elle  était  fixée  à  la  tige;  si  donc  on 
pesait  une  feuille,  aussitôt  après  l'avoir  détachée,  et  qu'en- 
suite on  la  fixât  sur  la  branche  à  la  place  qu'elle  occupait, 
elle  continuerait  à  transpirer,  et  si,  après  une  courte 
exposition,  on  la  pesait  de  nouveau,  la  différence  de  poids 
indiquerait  Teau  perdue  dans  l'intervalle  des  deux  pesées. 
L'exactituJe  reposerait  sur  la  rapidité  des  opérations. 
Quelle  que  soit  l'habileté  de  l'observateur,  une  pesée  faite 
à  une  balance  de  précision  exige  du  temps,  surtout  quand 
il  s'agit  d'accuser  des  différences  de  quelques  milligrammes. 


F0MCTI0I9S    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  3^3 

Il  y  a  plus,  une  feuille  qui  aura  été  placée  au  soleil  éprou- 
vera, pendant  le  transport  sur  le  plateau  de  la  balance, 
une  perte  qui,  pour  des  temps  égaux,  ne  sera  pas  ce  qu'elle 
avaU  été  durant  son  exposition,  par  la  raison  qu'elle  con- 
tinue à  transpirer.  L'observation  deviendrai  t  alors  impos- 
sible, parce  que  les  corrections,  si  Ton  voulait  en  intro- 
duire, approcheraient  et  dépasseraient  même  quelque- 
fois la  différence  de  poids  qu'il  s'agirait  de  constater. 
Heureusement  qu'une  feuille,  quand  on  vient  de  la  cueil- 
lir, garde  pendant  quelques  instants  un  poids  à  peu  près 
invariable,  lorsqu'elle  est  immédiatement  enfermée  dans 
une  atmosphère  très-limitée.  Dans  cette  condition,  la  feuille 
plaeée  sur  la  balance  a,  par  conséquent,  le  poids  qu'elle 
avait  sur  la  tige.  C'est  ainsi  que  l'on  a  procédé.  Aussitôt 
détachée,  on  enfermait  la  feuille  dans  une  boite  plate  en 
étain,  très-légère,  fermant  en  tabatière;  une  fois  pesée, 
on  la  remettait  dans  la  boîte  pour  la  reporter  sur  la  plante 
oà  on  la  fixait,  par  son  pétiole,  au  moyen  d'une  pince  à 
ressort  à  la  même  place  où  on  l'avait  prise.  On  notait 
l'heure  au  commencement  et  à  la  fin  de  l'exposition. 
Ensuite,  après  la  deuxième  pesée,  on  mesurait  la  surface 
de  la  feuille. 

Cette  méthode  des  pesées  rapides  n'a  sans  doute  rien 
de  neuf,  on  a  dû  l'employer  en  Physiologie  :  elle  donne,  je 
C|rois,  des  résultats  d'une  exactitude  suffisante. 

Après  avoir  consulté  le  chronomètre,  le  thermomètre, 
le  psychromètre,  on  connaissait  : 

I®  La  durée  de  l'exposition  de  la  feuille; 

a**  La  température  et  l'état  hygrométrique  de  l'air; 

3^  La  superficie  de  la  feuille. 

Les  feuilles,  aussitôt  détachées  du  plant,  n'étaient  restées 
exposées  au  soleil  ou  à  l'ombre  que  durant  peu  de  temps, 
si  ce  n'est  pendant  la  nuit,  alors  que  l'évaporation  est  ex- 
trêmement faible;  c'est  seulement  en  procédant  de  la  sorte 
qu'il  est  permis  d' admettre  qu'une  feuille  libre,  exposée  à 

2T. 


324  J*  BOUSSINGADLT. 

Tair^  émet  à  très-peu  près  la  quantité  de  sapeur  qu'elle 
eût  émise  dans  le  même  espace  de  temps,  si  elle  était 
restée  sur  la  brandie. 

Je  rapporterai  maintenant,  comme  exemple,  une  série 
d^observations  faites  sur  des  feuilles  de  vigne,  prélevées  sur 
le  même  cep. 

I.  i8  mai  1866,  3  feuilles  : 

Poids  des  feuiUes.      Surface. 
rr  cq 

Au  soleil,  à.. .      i2'*32"  ii>76  579>2 

»  à...      i2**5o  10,75 

Temps  écoulé.       o'^iB  Eau  évaporée.     1,01 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o^'SS 

Température  20**, 3,  psychromètre  45^)5,  vent  d'ouest. 

II.  Observations  pendant  la  nuit  : 

Poids  des  feuiUes.    Surface. 

23  mai  à y'^oo"'  soir  4>44  444*9 

24  mai  à fî*"3o  malin  4»3i 

Temps  écoulé.    10** 3o     Eau  évaporée.     o,i3 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o8',oo3 

Température  i5°,  psychromètre  80**,  ciel  couvert,  vent 
d'ouest. 


III.  3i  mai 


Poids  de  la  feuille.       Surface. 


A 5*»45°'  matin  3%2o  56878 


6^i5  2,945 


Temps  écoulé.     o''3o  Eau  évaporée.  0,275 

Par  décimètre  carré,  en  une  heure o^'^  ao5 

Température  I7®j4j  psychromètre  66^,  ciel  nuageux,  air 
calme. 


FOlîiCTIOlfS 

PHYSIQUES    DES   FEUILLES. 

325 

IV.  3i  mai  : 

Poids  de  la  feuille. 

Surface. 

Au  soleil 9**io 

4^320 

cq 

243,8 

«     g^^h 

49IOO 

Temps  écoulé..  0^*27  Eau  évaporte.  0,220 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o«',  200 

Température  20^,6,  psychromèlre  53®,  air  calme. 

V.  3i  mai  : 

h 

Au  soleil 11.42 

»  12.7  soir. 

Temps  écoulé o .  25 

Poids  de  la  feuille 4 9 35o       Surface. .      333^,8 

V  3,730 

Eau  évaporé*' o, 220 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o",445 

Température    22°, 4 >  psychromètre  56  degrés,  ciel  pur, 
vent  d^ouest  très-fort. 

VI.  3i  mai  : 

h        m 

A  l'ombre 3 .  00 

»  3.20 


Temps  écoulé o .  20 

gr 

Poids  de  la  feuille 4>56o       Surface. .      ^^g^^S 

»  4>33o 

Eau  évaporée o,23o 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o*',  i53 

Température,  25°, o,   psychomètre  56  degrés,  ciel  cou- 
vert, calme. 

VIL  3i  mai  : 

h        m 

A 5.54 

»   6.10 


Temps  écoulé 0.16 


'\ll6  J.    BOUSSINGAULT. 

Poids  de  la  feuille 4>5ao       Surface..     33o*^,4 

»  4»  420 

Eau  évaporée o,  100 

Par  décimètre  carré  eu  une  heure o,ii3 

Température    19°,!,  psychromèlre  69",  ciel  nuageux, 
rai  me. 

Observation  faite  pendant  la  nuit  : 

h        m 

i*** juin,  soir 6.00 

'2  juin,  matin 6.00 

Temps  écoulé 1 2 .  00 

gr 

Poids  de  la  feuille 4>42o       Surface.  •     33o'^. 

»  4>^oo 

r.au  évaporée o ,  220 

Par  décimètre  carré  en  une  heure. .  , 0,006 

Température   i3®,45  psychomètre  84  degrés. 
1  juin,  à  Tombre  : 

h        m 

A 7 .  3o  matin 

»  9  20 

Temps  écoulé i  .5o 

gr 

[^oîds  delà  feuille 5,490       Surface..     435*^,8 

*    »  4.950 

?"iau  évaporé*? ô,54o 

Par  décimètre  carré  en  une  heure 0,067 

Température  14*^*5  psychromètre  89  degrés,  vent  nord- 
ouest. 

Observations  faites  pendant  la  nuit  : 

h       m 

J)  juin 7.00  soir. 

10 juin 5.45  matin. 

Temps  écoulé 10 .45 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  327 

Poids  de  la  feuille 3,93o       Surface. .     3 12*^ 

»  3  y  610 

Eau  évaporée o,3ao 

Par  décimètre  carré  en  une  heure, ...    0,010 

Température  i4°>8,  psychromèlre  j6  degrés. 

h       m 

ao  juin,  au  soleil 8.45 

» 9  •  I  îi 

Temps  écoulé o  27 

gr 

Poids  de  la  feuille 5,o5o       Surface. .     33i"^,9 

))  49^50 

Eau  évaporée o ,  5oo 

Par  décimètre  carré  en  une  heure 0,328 

Température  18®, 6,  psychromètre  56  degrés,  ciel  pur, 
"vent  d'est  faible. 

20  juin,  au  soleil  : 

b        m 
»  A Il  .3o 


); 


II  .'45 


Temps  écoulé o .  1 5 

gr 

Poids  de  la  feuille 5,75o       Surface. .      263"^^ 

»  5,3oo 

Eau  évaporée o,45o 

Par  décimètre  carré  en  une  heure 0,684 

Température  20", 2,  psychromètre  47® j  ciel  pur,  vent 
d'est  très-fort. 

h        m 

ao  juin,  au  soleil 4«  i5 

»  5.o5 


Temps  écoulé. o .  5o 

gr 

Poids  de  la  feuille 4>9oo       Surface. .      240*^. 

»  4^520 

Eau  évaporée o,38o 


3a8  J.    BOU8SIVGÀULT. 

Par  décimètre  carre  en  une  heure o,  190 

Température  a2°,8,  psychromèlre  63",  venl  N,-E.  assez 
fort. 

20  juin  à  l'ombre 9*iS 

»  P*3o 

Temps  écoulé o  •  1 5 

gr 

Poîds  de  la  feuille 5, 270       Surface. .     33a*^,4 

»  5  y  Sac 

Eau  évaporée o ,  200 

Par  décimètre  carré  en  une  heure 0,240 

Température  18**, 6,  psychromètre  80  degrés. 

h        B 

21  juin,  au  soleil 1 1 .33 

»  1 1 ,  5o 


Temps  écoulé 0,17 

Poids  de  la  feuille ^,990       Surface. .     332*^,5 

»  5 ,  690 

Eau  évaporée o,  3oo 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o6',3i8 

21  iuin,  au  lever  du  soleil  : 

J         '  h      m 

»  A 5.52 

»  A 6.08 

Temps  écoulé 0.16 

gr 

Poids  de  la  feuille 5, 5 20       Surface. .     276*^,8 

»  5 ,  23o 

Eau  évaporée o ,  290 

Par  décimètre  carré  en  une  heure 0,393 

22  juin  h  l'ombre,  pendant  la  pluie,  le  cep  étant  sous 
un  abri  : 

h      m 

Matin 7 .  3o 

Midi 1 2 .  48  soîr. 

5.18 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  3^9 


gr 


Poids  de  la  feuille 5,4io       Surface . .      292*^*^, i 

»  5,33o 

Eau  évaporée 0,080 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o,oo5 

Température  i3°,75  psychromètre   100,  vent    d*ouest 
très-fort. 

Observation  faite  pendant  la  nuit: 

h       m 

22  juin 8.45  soir. 

23  juin 5.55  matin. 

Temps  écoulé 9«io 

gr 

Poids  de  la  feuille 5 ,  54o       Surface. .      298'^'ï,8 

»  5,45o 

Eau  évaporée 0,090 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o,oo3 

Température  i4"jO>  psychromètre  80  degrés,  vent  sud- 
ouest  très-fort. 

A  partir  du  2!ï  juin  i866,  le  vent  souffla  du  sud-ouest;  sa 
force  augmenta  graduellement-,  le  26,  c'était  un  ouragan, 
des  arbres  furent  déracinés,  brisés.  Les  feuilles  desséchées 
pendaient  sur  la  branche  5  les  plantes  herbacées  souffrirent 
encore  davantage.  Les  feuilles  des  topinambours,  de  bet- 
teraves, étaient  flétries.  Seule,  la  vigne  avait  résisté.  Cette 
circonstance  d'une  sécheresse  aussi  intense  donna  lieu  à 
une  observation  intéressante  :  plusieurs  feuilles  séparées 
du  cep  furent  fixées  sur  la  tige  au  moyen  d'une  pince.  En 
moins  d'une  heure,  elles  devinrent  tellement  sèches  que 
l'on  pouvait  les  pulvériser  en  les  froissant  dans  la  main, 
tandis  que  les  feuilles  attachées  au  cep  conservèrent  leur 
souplesse,  leur  Jraîcheur,-  on  peut  dès  lors  juger  de  la 
quantité  d'eau  qu'elles  recevaient  du  sol,  pour  être  main- 
tenues en  cet  état. 


33o  J.    BOUSSIUGAULT. 

Le  26  juin,  à  a  heures  : 

o 

Température  à  l*ombre  pendant  Touragan.. .      20,4 
Psychromètre Sg ,  o 

L'air  était  très-sec  sans  doute,  mais  c'est  surtout  à  la 
rapidité  de  son  renouvellement,  à  la  force  du  vent,  quMI 
faut  attribuer  la  grande  dessiccation  éprouvée  par  les 
feuilles,  lorsque  la  sève  n'arrivait  pas  assez  rapidement 
dans  la  plante  pour  remplacer  l'eau  évaporée. 

Résumé  des  observations  faites  sur  la  transpiration  des  feuilles 

de  la  vigne. 


Ean  transpi 

rée  par  déci- 

mètre carré 

Tempé- 

Psychro- 

Dates et  heures. 

en  1  heare. 

ratare. 

mètre. 

RemtitpiM. 

Au  soleil  : 

18  mai  i865, 

midi.  .. , 

..     o,5So 

0 
30,3 

0 

45,5 

• 

Vent  d'ouest. 

3i     » 

6''  matin 

...      O,305 

i7>4 

66,0 

Calme. 

3i     » 

g**  matin 

...      0,300 

30,6 

53,0 

Calme. 

3i     » 

midi  . . . 

...      0,446 

32,4 

56 

Vent  d'O.  très-fort. 

30  juin, 

b^  matin 

...      0,180 

14,8 

76 

Calme. 

QO     » 

9^*  matin 

...      0,328 

18,6 

56 

Vent  d'est  faible. 

90      B 

midi. .  . . 

..      0,684 

30,2 

47 

Vent  d'est  t.-fort. 

20      » 

4**  soir.., 

..      0,190 

33,8 

63 

Vent  N.-E. 

31      » 

midi..  . . 

..     0,383 

30,2 

5o 

Vent  N.-E.  fort. 

33      » 

6^  matin 

. ..     0,393 

33,8 

46 

Vent  N.-E.  fort. 

A  Tombre  : 

3i  mai 

3^  soir.. 

o,i53 

30,  I 

56 

Calme. 

3i     » 

6^  soir. . . 

o,ii3 

19»! 

69 

Ciel  nuageux,  calme. 

2  juin 

8^  matin 

0,007 

14, l 

89 

Vent  N.-O. 

20    » 

9^  matin. 

0,340 

18,6 

80 

Tent  E.  faible. 

23      » 

10^  matin 

o,oo5 

i3,7 

100 

Vent  d'O.,  pluie. 

Pendant  la  nuit  : 

33  mai, 

*» 

o,oo3 

i5,o 

80 

Ciel  couv.,  V.  d'O. 

3i     » 

» 

0,006 

i3,4 

84 

Vent  N.-O. 

9  j«>n» 

» 

0,009 

18,4 

7^ 

Vent  N.-O.  fort. 

32     » 

» 

o,oo3 

14,0 

80 

Vent  S.-O.  fort. 

Je  mets  à  la  suite  de  ce  tableau  quelques  observa- 
tions faites  sur  des  feuilles  cueillies  sur  la  même  vigne, 
l'année  1868. 


FOfîGTIOKS    PHYSIQUES    DES    fEUILLES.  33 1 

*        Eau  transpl- 
rée  par  déci- 
mètre carré 
desfeailles  Tompé-  Psyohro- 


Dates  et  henrds  des  observations. 

en  I  beare. 

ratare. 

mètre. 

Remarqaes 

ai  juillet,  2^  à  l'ombre.... 

0,i4 

0 

18,3 

0 
57 

3"*  à  Tombre. . . . 

0,37 

30,0 

45 

•^7  juillet,  lo*'  à  Tombre.. . 

0,11 

i5,6 

66 

Ciel  couTert. 

3o      »        ï^  k  Tombre.... 

0,09 

i5,7 

73 

» 

3i       »       7''mat.  àTombre. 

o,o6 

i3,o 

81 

» 

3  août,  6^  mat.  à  l'ombre. 

0,01 

11,0 

96 

» 

»       midi  au  soleil 

0,34 

13,0 

90 

5  août,  7^  mat.  au  soleil. . 

0,31 

i3,4 

89 

Vent  d'O.,  ciel 

»        7^*  mat.  à  Tombre.  • 

0,09 

i3,1 

89 

» 

»        8^  soir  au  soleil . . . 

0,57 

14,3 

75 

»        3*»  soir  à  l'ombre.. 

o,i3 

i4,3 

75 

»        5^  soir  à  l'ombre. . 

0,08 

13,0 

90 

4  sept.,  To^mat.  àTombre. 

0,13 

.  18,6 

79 

»         lo**  mat.  à  l'ombre. 

0,13 

18,6 

79 

Comme  moyenne  on  a  pour  Teau  transpîrée  par  i  dé- 
cimètre carré  de  feuilles  de  vigne  du  même  cep  : 

Par  i5  observations  au  soleil o,3554 

Par  i5  observations  à  l'ombre »       0,1119 

Par     4  observations  pendant  la  nuit..       o,oo52 

Transpiration  des  feuilles  de  houblon, 

I.  Sur  la  limite  d'une  lioublonnière  établie  au  bord  de  la 
Saûer,  au  pied  du  Liebfrauenberg,  on  a  coupé,  à  la  base, 
deux  liges  enroulées  sur  la  même  perche.  Leurs  extrémités 
furent  introduites  dans  Teau  d'une  jauge,  le  3o  juin  1869. 

h       m  ce 

Exposé  à 9*  10  matin.     Eau  dnns  la  jauge,     aooo 

Retiré  à.  .  . . .      3,58  soir.  »  161 5 

Tempsécoulé.     6.48  Eau  disparue. .. .        385 

o 

Température aS 

Psychroraèire 60 

Air  calme. 


33a  J.  B0US8IVGAULT. 

La  surface  des  feuilles  (les  deux  côtés  du  limbe)  étant 
de  2™*^,  92,  on  trouve  pour  l'eau  transpîrée  par  décimètre 
carré,  en  une  heure,  o^',  194. 

Le  ciel  était  sans  nuages,  mais  on  remarquera  que,  sur  un 
pied  touffu  de  houblon,  la  plus  grande  partie  des  feuilles, 
ne  recevant  pas  directement  la  lumière  du  soleil,  fonc- 
tionnent, en  réalité,  à  l'ombre. 

IL  Dans  Tintérieur  de  la  houblonnière ,  on  a  coupé 
deux  tiges  enroulées  à  la  même  perche.  Les  sections  des 
tiges  ont  été  placées  dans  une  jauge  le  1"  juillet  1869. 

Surfaces  des  feuilles 3"',a 

Exposé  à 9*  17  nia  tin.     Eau  dans  la  jauge,     aooo 

Retiré  à 5 .  i4  soir.  »  1S90 

Temps  écoulé.     6.48  Eau  disparue. ...        4^0 

Eau  iranspirée  par  décimètre  carré  en  une  heure,     o*',  189 

o 

Température ao,5 

Psychromèlre. .... 6a, o 

Air  calme. 

UI.  Les  observations  ont  été  reprises  lors  de  la  cueillette 
des  cônes,  en  septembre. 

Les  extrémités  inférieures  de  deux  tiges  ont  été  plon- 
gées dans  la  jauge  : 

h       m  co 

Le  19  à 1*44  Eau  dans  la  jauge.     1000 

))     à  5.i4  »  389 

Temps  écoulé.     3.3o  Eau  disparue. ...        6ii 

o 

Température i4»3 

Psychromètrc 60,0 

Calme. 

Poids  des  feuilles 84o 

))     des  cônes 770 

')     des  tiges 787 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  333 

La  surface  des  feuilles  et  des  tiges  était  de  9°^^,  5a.  Il  n  a 
pas  été  possible  d'évaluer  celle  des  cônes. 

On  trouve  pour  l'eau  transpirée  par  décimètre  carré, 
en  une  heure o^*",  i83 

Ces  observations  donnent  bien  le  poids  de  Teau  ayant 
pénétré  dans  la  tige,  mais  elles  n'indiquent  pas  celui 
que  les  feuilles  ont  perdu;  il  est  vraisemblable  qu  elles  en 
ont  réellement  laissé  échapper  plus  qu'elles  n'en  ont  reçu 
de  la  jauge.  Quant  à  l'eau  évaporée  à  la  surface,  seule  la 
balance  pouvait  permettre  d'en  fixer  la  quantité  éliminée 
au  soleil,  puisque  dans  une  houblonnière  les  plants  sont 
généralement  à  l'ombre. 

h       m 

IV.  27  septembre,  au  soleil  :  à 1 1 .06 

»  à 1 1 .  36 

Temps  écoulé o .  3o 

»r  eq 

Poids  de  la  feuille i  ,81     Surface.  170 

«  1,47 

Eau  évaporée o,34 

Par  décimètre  carré,  en  une  heure 0^*^,382 

h       m 

27  septembre,  à  l'ombre,  à 1 1 .  10 

»  »  a 1 1 .40 

Temps  écoulé o .  3o 

gr  CQ 

Poids  de  la  feuille i  .5o     Surface.  122,5 

»        •      1.35 

E^u  évaporée o.i5 

Par  décimètre  carré,  en  une  heuro 0^24 

0 
An  heures,  température 20, 8 

psychromètre 68^  o 

Les  feuilles  détachées  des  tiges  dépensent  donc  par  la 
transpiration  beaucoup  plus  d'eau  qu'il  n'en  monte  par 
l'aspiration.  Il  est  vrai  que  dans  la  houblonnière  elles  ne 
sont  pas  dans  des  conditions  aussi  favorables  à  Tévapora- 


334  J*    BOOSSIRGÀULT. 

don.  Néanmoins  la  perte  pourrait  être  assez  forte  pour  af- 
fecter leur  fraîcheur,  si  durant  robscurité,  alors  que  la 
transpiration  est  à  peu  près  nulle,  la  plante  n'accumulait 
pas  reauque.les  feuilles  émettent  pendant  le  jour. 

Cherchons  maintenant  à  évaluer  ce  qae  transpirait  une 
vigne  du  Liebfrauenberg,  durant  les  mois  de  juin,  juillet 
et  août,  alors  que  les  ceps  étaient  en  pleine  vigueur.  Les 
feuilles  sur  lesquelles  ont  porté  les  expériences  dont  les 
résultats  ont  été  consignés  avaient  été  recueillies  sur  une 
treille  en  plein  vent,  dirigée  de  Test  à  Touest,  d'une  lon- 
gueur de  38  mètres  sur  une  hauteur  de  i  mètre,  présentant 
par  conséquent  au  midi  une  surface  de  33  mètres  carrés. 
Par  des  mesures  prises  sur  plusieurs  points,  on  a  trouvé 
que  les  feuilles  garnissant  un  espace  de  i  mètre  carré  of- 
fraient une  surface  simple  de  i^%y6y  soit  pour  les  deux 
faces  du  limbe  3'°'*,  52.  La  surface  évaporatoire  de  la  treille 
était  par  conséquent  de  i34  mètres  carrés. 

A  l'époque  des  observations  : 

La  durée  du  jour  était  de i5  heures. 

La  durée  de  la  nuit  de i4        » 

Les  feuilles  d'une  vigne,  même  par  un  ciel  découvert, 
ne  sont  jamais,  toutes  à  la  fois,  exposées  au  soleil.  Il  en 
est  une  notable  partie  placée  à  Tombre.  On  peut,  je  crois, 
supposer  que,  dans  le  cas  le  plus  général,  la  moitié  au  moins 
n'est  pas  éclairée  par  la  lumière  directe,  d'où  il  résulterait 
que  la  transpiration  de  i  mètre  carré  de  feuilles  en  une 
heure,  dans  la  journée,  irait  au  plus  à  23^%  4  d'eau. 

A  l'obscurité,  Teau  transpirée  en  une  heure  par  mètre 
carré  n'a  pas  dépassé  o^",  5.  Les  surfaces  totales  des  feuilles 
de  la  treille  étaut  de  i34  mètres  carrés,  on  aurait  pour  la 
quantité  d'eau  évaporée  en  vingt-quatre  heures  : 

En  i5  de  jour 47, o3 

En  i4  de  nuit o>97 

Ea  a4   48, oo 


FONCTlOfîS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  335 

La  treille  en  plein  vent  laisserait  donc  sortir  48  kilo- 
grammes en  vingt-quatre  heures,  un  jour  de  soleil.  Par 
un  temps  couvert  la  transpiration  n'irait  pas  au  delà  : 

kg 

Pendant  le  jour,  dv 22,61 

Pendant  la  nuit,  de ^>97 

23,58 

Transpiration   des  fouilles   de  betterave  dite 
•  Globe  jaune. 

Je  résumerai  les  observations  faites  le  18  juillet  1866  : 

Poids  de  la  feuille.      Surface, 
h       m  gr  eq 

I.  Au  Soleil  à 10.45  8,00            188, S 

»  11.00  7*78 

IL  A  l'ombre....  5.22  10,27           386,5 

»  5.53  9» 9^ 

m.  La  nuit 7.30  7f^7           238,4 

19  juillet 5.55  6,00 

Eau  transpirée 
Eau  évaporée   par  décimètre 

déduite  carré  en  Psychro- 

des  pesées.        une  heure.     Thermomôtre.    mètre, 
fr  gr  00 

I.  Au  Soleil...       0.22  0,466  3 1,8  33 

II.  ATombre..       0.37  0,174  3 1,0  43 
m.  Nuit 1.17           o,o5o           18,2  86 

Il  peut  être  curieux  de  rechercher  Teau  renfermée  dans 
l'organisme  des  plants  de  betteraves  occupant  un  hectare 
&  l'époque  de  Tarrachage. 

Dans  le  globe  jaune  on  a  dosé  : 

Dans  100  de  racines.    Dans  loo  de  feuilles. 

Matière  sèche..  .        12.2  11. 2 

Eau 87.8  88.8 

100.0  lOO.O 


336  J.   BOUSSIMGAULT. 

Le  i5  septembre,  sur  i  hectare  emblavé,  on  a  compté 
18224  plants. 
Par  diverses  pesées,  on  a  trouvé  dans  un  plant  : 

Racines. . . .    iSooS' 

Feuilles...      6'4o         Surface...      i"**,q3 

La  totalité  des  plants  sur  i  bectare  pesaient. .  .  39000 

Ayant  :  racines. .    27300*^6     renfermant  eau. . .  23969 

»       feuilles...    11700  »  )>  10389 

Eau  engagée  dans  les  plants  d'un  bectare 34958 

La  surface  double  de  feuilles  d'un  plant  moyen  serait, 
d'après  le  poids,  2  mètres  carrés. 

Surface  rapportée  à  Thectare,  36  000  mètres  carrés  en- 
viron. 

En  adoptant  pour  Teau  transpirée  par  mètre  carré 
de  feuilles  en  i  beure  la  moyenne  des  observations, 
23  grammes,  soit  par24beures552  grammes,  on  aurait  pour 
l'eau  que  pourront  transpirer  en  un  jour  les  36ooo  mètres 
carrés  de  feuilles  à  l'époque  de  leur  plus  grand  développe- 
ment, 20000  kilogrammes^  Ce  cbifiTre  est  sans  doute  beau- 
coup trop  élevé,  par  la  raison  que  les  jours  pluvieux,  par 
un  temps  couvert,  la  transpiration  est  certainement  infé- 
rieure à  celle  déduite  de  quelques  expériences,  mais  il 
établit,  et  c'est  là  le  point  intéressant,  que  la  masse  de 
l'organisme  contiendrait,  et  bien  au  delà,  Teati  que  la  tran- 
spiration pourrait  dissiper  en  vingt-quatre  heures. 

L'eau  entrant  dans  la  constitution  des  plants  de  bette- 
raves a  évidemment  pour  origine  le  sol  d'où  elle  a  été 
amenée  surtout  par  la  transpiration  des  feuilles.  On  ne  se 
fait  pas  généralement  une  idée  de  l'énorme  volume  de  li- 
quide séquestré  par  certaines  cultures.  Pour  fournir  l'eau 
indispensable  à  la  végétation,  la  terre  doit  donc  en  ren- 
fermer des  quantités  considérables.  Haies  a  posé  et  résolu  la 
question  par  des  moyens  bien  simples  5  je  le  citerai  textuelle- 
ment «  afin  de  voir  combien  la  terre  contient  d'humidité, 


FONCTIONS   PQTSIQUSft   DES    FEUILLES.  iSS^ 

et  pour  jauger  les  réservoirs  de  la  nature  contre  la  séch^ 
resse  de  Tété  et  les  provisions  qu'elle  a  mises  dans  le  sein 
delà  terre  pour  fournir  à  la  grande  dépense  qu'elle  est 
obligée  de  faire  pour  la  production  et  l'entretien  des  viégé- 
taux»  (*). 

Le  3i  juillet,  Haies  fit  enlever  successivement)  à  partir 
delà  surface,  dans  le  sens  vertical,  3  pieds  cubiques  dé 
terre,  qu'il  exposa  à  Tair  jusqu'à  ce  que  cette  terre  devînt 
poudii^use  et  assez  sèche  pour  être  impropre  à  la  végétation. 

Ht     onces  !!▼     onces 

I  ^^.  pied  cubique  a  pesé ...      i  o4  •  4  i      perdit  en  séchant ...     6 .  ii 

2*  »  »  ...       106.6 -j  »  »  ...     10.0 

3*  »  »       ...     iii.j  »  »       ...8.8 

D'après  ces  pesées  on  aurait,  à  partir  de  la  superficie  du 
terrain^  jusqu'à  la  profondeur  : 

De  o™,  3  pour  l'eau  d'un  mètre  cube  de  terre ...    1  o3 

Deo'",3ào"»,6  »  »  ...    i6ar 

Deo",6ào™,9  »  »     *  ...    i36 

Admettant  pour  l'hectare  9000  mètres  cubes  de  terre 
attaquable  par  la  charme,  en  y  comprenant  le  sous-sol,  il  se 
«trouverait  dans  le  sol,  en  juillet,  I2i5mètrescubesd'eau,  et, 
en  prenant  pour  le  mètre  cube  de  terre  i3oo  kilogrammes, 
on  arriverait  à  une  teneur  en  eau  libre  de  8à  i3  pour  100. 
Des  plesées  faites  en  Alsace  ont  donné  au  printeinps 
12  pour  100  d'eau,  dans  la  terre  légère  et  fertile  du  Lieb- 
frauenberg.  Il  s'agit  ici  d'une  terre  ameublie  et  fort 
éloignée  du  maximum  d'imbibition,  cas  danslequel  les  terres 
arables  se  chaînent  de  très-fortes  quantités  d'eau^  surtout 
quand  elles  sont  riches  en  humus;  il  eu  est,  par  exemple,  qui 
en  retiennent  jusqu'à  5o  pour  100.  Cette  eau  libre,  évaluée 


^)  HjtLBB,  Stati^ae;  traduction,  p.  4o. 
(')  Le  pied  cube  ang^ûs  éi^le  aS^^S  36. 

Ann.  de  Chim.  et  de  Ph/s.,  5«  série,  t.  XIII.  (Mars  1878.)  22 


338  3.    BOU88I1IGÂVLT. 

par  Haies,  concourt  à  la  végétation,  parce  quWle  n*est  pas 
engagée  dans  une  combinaison  minérale  :  c'est  pour  les 
plantes  une  réserve  d'autant  plus  assurée  que  le  terrain 
a  plus  de  profondeur.  C'est  ainsi  que  Thumidité  du  sous- 
sol,  et  des  zones  mêmes  qui  lui  sont  inférieures,  s'élevant 
par  imbibition,  par  capillarité,  abreuve  la  superficie  de  la 
terre  et  préserve  les  cultures  des  extrêmes  sépberesses.  H 
y  a  plus,  dans  un  sol  ameubli,  par  Tefiet  du  refroidisse- 
ment nocturne,  la  vapeur  émise  par  les  couches  sous-ja- 
centes  se  condense  sur  les  racines  dans  des  limites  très- 
restreintes  sans  doute,  et  les  mouille  à  la  manière  de  la 
rosée. 

Transpiration  des  fouilles  de  châtaignier. 

Surface  207  centimètres  carrés. 

Poids 

de  la 

feaîlle. 

h       m  ff 

I.  3i  août  1867,  soleil  à  . . .       9*34  matin  i  ,6S 

)>  à. ..      10.34  lySâ 

Temps  écoulé i  .0     Eau  évaporée  0,16 

n.  A  Tombre  à 9«3o  i»73 

})  à 10. 3o  1,65 

I • 00  G , 08 

Eau  transpirée  par  décimètre  carré  en  une  heure. 

I.  o ,  08    (  Température  20  degrés,  psychromètre  60  degrés, 
n.  0,04  (         ciel  très-nuageux,  air  calme. 

« 

Deux  observations  faites  au  commencement  d'aoâit,  sur 
des  feuilles  attenant  à  une  branche^  donnèrent  pour  Teau 
transpirée  par  décimètre  carré  en  une  heure  : 

I.  Au  Soleil...   0,55  (  Température  a6  degrés,  psychro- 
U.Al'ombre..  o,i6  "»*'«  45  degré»,   Yent   d'est 

l         assez  fort.  •* 


FONCTIONS    PHYSIQUES   DES   FEUILLES.  SSp 

A  la  fin  d'août  ou  abattit  un  châtaignier  âgé  de  35  ans. 
On  profita  de  cette  circonstance  pour  mesurer  la  surface 
des  feuilles,  qu'on  trouva  de  i3o  mètres  carrés  sur  un 
côté  du  limbe,  soit  260  mètres  carrés  pour  la  superficie 
totale  (*). 

Le  châtaignier  avait  commencé  à  verdir  le  i"  avril,  il  fut 
abattu  le  3i  août.  Les  feuilles  que  Ton  avait  comptées  et 
mesurées  s^étaient  développées  en  cinq  mois  ou  i5a  jours; 
leur  développement  en  surface  simple  avait  donc  été  en 

1 3o°^*i 
moyenne  par  vingt-quatre  heures  de =  o^^jSSS. 

La  majeure  partie  des  feuilles  sur  un  arbre  aussi  touffu 
sont  presque  toutes  à  l'ombre;  dans  celte  condition,  Téva- 
poration  étant  de  10  grammes  d'eau  par  mètre  carré  en  une 
heure,  on  aurait  pour  la  transpiration  de  l'arbre  en  10^ 45"^ 


('}  Pour  mesurer  les  feuilles  on  les  divisa  en  huit  catégories  ayant  h 

peu  près  la  même  surface. 

Le  nombre  était  igaS^,  pesant  ensemble  33836  grammes. 

Les  surfaces  du  limbe  étaient  : 

me 
Première  catégorie ^,']2 

Deuxième  catégorie 24  y  01 

Troisième  catégorie 4yi^ 

Quatrième  catégorie 4i6^ 

Cinquième  catégorie 38,  sS 

Sixième  catégorie 20,74 

Septième  catégorie 24  iqS 

Huitième  catégorie 1 8 ,93 

Surface  totale i3oy37 

33835 
Pour  le  poids  moyen  de  chaque  feuille,  on  a  :—  =  i^f  1337. 

Poor  le  poids  des  feuilles  développées  en  vingt-Kiuatre  heures, 

338'i5        .         -- 

=  iSoïf,  IDD. 

102 

33833 
Pour  le  poids  du  mètre  carré  de  feuilles,  — 5 —  =  174*^,81. 

Poids  à  très-peu  près  égal  à  celui  des  feuilles  isolées  sur  lesquelles  on  fait 
les  expériences  sur  la  transpiration.  Les  feuilles  pesaient,  en  effet,  de 
iB'.GS  à  IV,  73  par  décimètre  carré. 

22. 


34o  J*   BOUSSINGÀULT. 

de  jour,  5  octobre,  107^%  5  par  mètre  carre,  et  en  prenant 
pour  surface  les  deux  côtés  du  limbe,  260  mètres, 
28  litres  d'eau.  Ce  serait  là  un  minimum,  puisqu'il  est  des 
feuilles  qui  ne  sont  pas  k  Tombre. 

On  a  réuni  en  un  tableau  l'ensemble  des  observations 
sur  la  déperdition  d'eau  éprouvée  par  les  feuilles  exposées 
à  l'air.  La  transpiration  est  rapportée  à  ce  qu'elle  aurait 
été  pendant  une  heure  pour  une  surface  de  i  décimètre 
carré  au  soleil,  à  l'ombre,  à  l'obscurité  \  on  s'est  borné  â 
en  présenter  un  résumé  dans  lequel  on  n'a  pas  cru  devoir 
introduire  les  résultats  fournis  par  les  branches  feuillues, 
ces  observations,  dans  ce  cas,  ayant  été  trop  prolongées. 
Pour  faire  ressortir  l'importance  des  expériences  exécutées 
à  la  lumière  diffuse,  je  répéterai  qu'à  un  instant  quel- 
conque de  la  journée,  même  par  un  ciel  sans  nuage,  les 
feuilles  d'une  plante  herbacée,  et  à  plus  forte  raison  les 
feuilles  d'un  arbre,  ne  sont  jamais  toutes  à  la  fois  éclairées 
directement  par  les  rayons  solaires.  Aussi,  comme  mon 
père  l'a  dit  dans  un  de  ses  Mémoires,  partout,  dans  les 
forêts,  c'est  surtout  à  l'ombre  que  s'accomplissent  les  phé- 
nomènes de  la  vie  végétale  ;  sous  l'équateur,  par  exemple, 
il  n'y  a  réellement  que  les  feuilles  rigides  et  redressées 
qui,  à  certains  moments  de  la  journée,  reçoivent  le  soleil 
sur  toute  leur  surface. 

Transpiration  des  feuilles,  par  heure  y  pour  une  surface 
de  I  décimètre  carré.  (Moyennes.) 


Noms 
des  plantes. 

Exposition. 

Eau 
transpirée. 

Thermomètre 
à  Tombre. 

Psyehro- 
mètre. 

Topinambour 

» 

Soleil. 
Ombre. 

gr 
0,70 

0,16 

0 
25 

20 

0 

58 

it           4 

Jour  et  nuit. 

0,32 

22 

60 

*>            < 

Nuit. 

o,o5 

17 

7» 

Vigne .... 

19             •    •    •    •         •    * 

Soleil. 
Nuit. 

o,36 
o,oo5 

«9 

i5 

60 

"37 

\ 


FOUrCTIOIïS    PHTSIQT}ES    DBS    FEUILLES.  34l 

Noms  Eau         Thermomètre    Psychro- 

des  plantes.  Exposition.  transpirée.      à  Fombre.  mètre. 

gr                          o  o 

Houblon Soleil.  o,38  21  68 

»        Ombre.  0,22  17  71 

Châtaignier...  Soleil.  o,3i  26  4^ 

»         ...  Ombre.  0,10  22  60 

Marronnier.  . .  Soleil.  o,54  26  4^ 

»          ...  Ombre.  0,08  22  67 

Polonia Soleil.  0,22  23  84 

»       Ombre.  0,08  23  84 

Catalpa Soleil.  0,21  24  4? 

»      Ombre.  0,09  18  68 

Mûrier  blanc. .  Soleil.  o,52  ig  78 

»  Ombre.  0,08  19  78 

Platane .Ombre.  o,  10  18  59 

Chêne Ombre.  0,10  23  64 

Noyer Ombre.  o,o5  21  80 

Poirier .  .....  Soleil.  0,29  26  79 

Pommier Ombre.  0,09  24  75 

Pécher Ombre.  o,i3  23  77 

Sapin Ombre.  o,i4  25  4^ 

Oranger Soleil.  0,1 5  22  5g 

>»        Ombre.  0,08  24  76 

Laurier-cerise.  Soleil.  0,24  26  65 

»            .  Nuit.  0,01  20  78 

Laurier- rose . .  Soleil.  o,3o  22  60 

»           . .  Ombre.  0,12  22  60 

Laurier-sauce.  Soleil.  0,06  22  4^ 

»           .  Ombre.  0,02  18  85 

Lilas Soleil.  o,34  20  65 

>    Ombre.  o ,  1 3  20  65 

Houx  (jeune).  Soleil.  o,3o  17  56 

Houx Ombre.  0,08  i3  57 

Framboisier..  Ombre.  0,1 3  19  80 

Lierre Soleil.  0,05  8  78 

>»     Ombre.  o,o25  i5  84 

»      Nuit.  0,00  12  90 


34^  7*  BOVSSIKGÀULT. 

Noms  Eau          Thermomètre     Psychro- 

des  plantes.  Exposition,     transpirée.  à  Tombre.  mètre. 

gr  o  o 

Hortensia....  Ombre.          o,io  26  76 

Âsclepiada .  .  .  Ombre.          o,25  21  5g 

Cactus  op. . . .  Soleil.            0,49  22  4^ 

»        ....  Ombre.          o,o5  17  94 

Agave Soleil.           0,20  21  49 

»      Ombre.          0,07  21  49 

Betterave Ombre.          0,19  3i  43 

»       Nuit.            o,o5  18  86 

Menthe Ombre,          o ,  25  22  33 

»      Nuit.            0,04  i3  78 

Boussingaultîa.  Soleil.           0,70  27  35 

»           .  Ombre.          0,20  25  5o 

Oignon Soleil.           0,48  21  72 

»      Ombre.           o,o4  21  72 

Pervenche . .    .  Soleil.           o  >  39  26  56 

»        Ombre.          0,29  23  84 

Tabac Ombre.          0,17  20  75 

Convolvulus . .  Ombre.          0,22  22  58 

Haricot  nain . .  Ombre.          0,1 4  22  63 

Maïs Soleil.           Oy3i  21  Sg 

»    Ombre.          0,09  i5  60 

»    Nuit.            0,02  8  61 

Avoine Soleil.           0,26  27  4^ 

»      Ombre.          0,12  27  4^ 

»      Nuit.            o ,  06  21  54 

Concombre...  Soleil.           0,74  26  4^ 

»         ...  Ombre.          0,4^  26  4^ 

»          ...  Nuit.            0,01  20  88 

Choux Ombre.          o,25  24  81 

Colrave Ombre.          0,27  24  81 

L'intensité  de  la  transpiration  varie  naturellement  sui- 
vant la  proportion  d'eau  contenue  dans  les  feuilles,  pro- 
portion qui  est  loin  d'être  la  même  dans  le  courant  de  la 
journée^  elle  change  d'après  la  température,  l'état  hygro- 


FONCTIONS    FHT8IQCES   DBS    FEUILLES.  343 

métrique,  le  calme  ou  l'agitation  de  l'atmosphère.  Voici 
les  différences  qu'on  a  constatées  lorsque  les  observations 
ont  été  assez  nombreuses. 

La  variation  dans  le  poids  de  Feau  transpirée  en  une 
heure,  pour  une  surface  de  feuille  de  i  décimètre  carré, 
a  été  : 


Noms  des  plantes. 
Topinambour .... 

'  •    •    •    • 

Vigne  


Platane 

Laurier-cerise. . . 


Exposition. 

Au  soleil. 
A  r ombre. 
Au  soleil. 

» A  Tombre  (*). 

Marronnier Au  soleil* 

»  A  Tombre. 

Au  soleil. 
Au  soleil. 
A  Tombre. 
Au  soleil. 
Au  soleil. 
A  Tombre. 
A  Tombre. 
A  Tonibre. 
A  l'ombre. 
A  Tombre. 
A  l'ombre. 
A  Tombre. 
A  Tombre. 
A  l'ombre. 
A  Pombre. 


Menthe 

Mais*  ^ . 


Châtaignier 

Lilas. 

Mûrier  blapc 

■  « 

Chêne 

Oranger 

Catalpa 

Boussingaultia. .  .  . 

Pervenche..  . .  . .  . 

Concombre 


Eau  transpirée. 

De  1,12  à  o,23 
De  o,i6  à  o,o4 
De  0,68  à  o,i8 
De  0,27  à  0,06 
De  0,64  à  0,33 
De  o,3o  à  0,11 
De  o,  i4  à  0,07 
De  o,3o  à  0,20 
De  0,10  à  o,o5 
De  0,82  à  0,33 
De  o,4o  à  0,24 
De  0,11  à  0,07 
De  0,10  k  0,09 
De  0,16  à  0,10 
De  0,08  à  o,o5 
De  0,06  à  o,i3 
De  0,09  à  o,  i5 
De  o,o4  à  0,10 
De  Q,i2  à  0,09 
De  0,29  à  o,3q 
De  0,37  à  0,52 


Je  placerai  ici  des  observations  de  M.  Risler,  sur  quel* 
ques^unes  des  feuilles  figurant  dans  le  tableau  ci-dessus.  Les 
différences  sont  quelquefois  assez  prononcées,  ce  quitient 

(')  En^.ne  faisant. pas  entrer  dans  la  moyenne  deux  observation^  faite* 
le  ai  juin  et  le  2  août,  la  première  pendant  qu'il  pleuvait,  l'appareil 
étant  à  l'abri  de  la  pluie  ;  la  seconde  par  un  temps  très-humide ,  le  psy- 
chroraètre  marquait  100  degrés. 


344  ^*  BOUSSIHGAULT. 

vraisemblablement  à  ce  que  les  résahats  ont  été  obtenus 
par  un  autre  procédé  et  dans  d'autres  conditions  météoro- 
logiques (*). 

Eau  transpirée  par  heure  et  par  décimètre  carré 

de  surface  foliaire* 

gr  »r 

Choux o,25         A 0,90 

Pommier. .    o ,  28 

Maïs 0,16 

Avoine.    o,i4        A o,5o 

Vigne o,r2 

Chêne 0,06 

Sapin o,o5 

Les  feuilles  exposées  à  Fair,  par  cela  même  qu'elles  ne 
reçoivent  plus  de  sève  ascendante  en  quantité  suffisante, 
perdent  plus  ou  moins  de  leur  consistance  \  Feffet  prodnit 
est  d'ailleurs  différent,  suivant  les  espèces  végétales*  Ainsi 
les  feuilles  de  la  vigne,  du  platane  dont  l'eau  de  constitu- 
tion est  de  66  pour  100,  en  perdant  7—  de  leur  poids,  ne 
changent  pas  visiblement  d'apparence.  Il  n'en  est  plus  de 
même  pour  des  feuilles  moins  rigides  \  une  perte  de  —^  de- 
vient manifeste  par  un  commencement  de  flétrissure,  elles 
se  fanent.  C'est  ce  qu'on  observe  non-seulement  sur  les 
herbacées,  mais  sur  les  feuilles  des  arbres,  tels  que  le  ca- 
talpa, le  polonia;  la  flétrissure  cesse  aussitôt  que  la  sève 
vient  à  affluer. 

La  transpiration  à  Tombre  est,  comme  on  l'a  vu,  bien 
moins  prononcée  qu'au  soleil.  J'ajouterai  que  pendant  les 
premiers  moments  elle  paraît  être  proportionnelle*  à  la 
durée  de  l'exposition:  c'est  du  moins  ce  que  semblent 
établir  des  expériences  faites  le  16  septembre  1867  sur 
une  feuille  de  Polonia;  détachée  de  l'arbre  à  9  heures  du 

*  ■  -  I  1  --       ■ ^  — . — 

(')  RiSLVR,  Sur  Vévaporation  du  sol  et  iht  plmntes,   1871* 


F01ICT10I9S    PHYSIQUES    DES    FEUIIXES.  345 

matin,  elle  pesait  a»'', 29.  Après  l'observation,  par  une 
dessiccation  opérée  à  Tétuve  chauâiée  à  100  degrés,  elle  a 
laissé  o^*^,  695  de  matières  fixes  et  renfermait  par  conséquent, 
au  moment  de  la  cueillette,  18^^,595  d'eau,  soit  69,27  pour 

100. 

Une  feuille  d'une  dimension  égale,  prise  sur  la  même 
branche,  au  même  instant,  à  9  heures,  fut  suspendue  â 
l'ombre  et  pesée  à  plusieurs  reprises*  Voici  les  poids  enre- 
gistrés : 

Ean  Eau               Eaa  Eaaperdad 

contenue  perdue            perdue            Ean  rapportée 

dans  depuis  le        exprimée       perdue  à  une  £tal 

Durée           Poids        la  feuille  commencenit  en  centièmes    pendant  exposition  hygro- 

de                 de          au  moment  de              de  l'eau        chaque  de  30*  Tempéra-    métri- 

rezposlHon.    la  feuille,   de  la  pesée,  l'expérience.       initiale,     exposition,  de  dorée.  tore..        qoa. 

h  fT  gr  o                 o 

0,0  3,29  1,59:)  gr  gr                 gr                gr  l4)7  1^ 

o,3o  Q,25  1,555  3,04  o,5i  o,o4  o»o4  i4»^  7^ 

o,3o  3,32  1,525  0,07  4i39  0|03  9*^^  '^>^  7' 

1,0  3,12  1,425  0,17  10,66  0,10  o,o5  17,6  84 

1,0  3,06  1,365  0,23  14,42  0,06  o,o3  17,8  66 

1,0  1,96  1,365  0,33  30,69  ^f^^  ^>^^  '7>7  ^^ 

1,0  1,91  i,3t5  0,38  23,82  o,o5  0,025  16,8  63 

1,0  1,87  i>i75  0,4a  36,33  0,04  0,320  i5,8  64 

1,0  1,83  1,135  0,47  39/17  ^»^^  0,035  9,3  86 

17,0  1,33  0,635  0,97  60,81  o,5o  o,oi5  II. 8  86 

Pendant  les  premières  heures,  de  9  heures  du  matin  à 
2  heures  de  l'après-midi,  les  quantités  d'eau  transpirées 
ont  été  sensiblement  les  mêmes  pour  des  temps  égaux, 
jusqu'à  ce  que  les  24  centièmes  de  l'eau  constitutionnelle 
aien^t  été  dissipés.  A  partir  de  la  sixième  heure  la  transpi- 
ration a  diminué.,  La  feuille  retenait  l'eau  avec  plus  de 
force.  Il  en  résulte  que  la  transpiration  déterminée  sur  Une 
feuille  isolée  par  deux  pesées  exécutées  à  de  courts  in- 
tervalles doit  représenter  à  fort  peu  près  ce  qu'elle  aurail 
été  si  cette  feuille  fût  restée  sur  la  plante. 

Il  peut  paraître  surprenant  qu'une  feuille  où  il  entre  46 
70  à  80  pour  100  d'eau,  et  dont  quelquefois  l'épaisseur  ne 
dépasse  pas  7^  de  millimètre,  retienne  ce  liquide  avec  ass^ 


346  J.  BOUSSINGÀULT. 

de  force  pour  n^en  laisser  s'échapper  à  Tombre  que  4  À 
5  centigrammes  dans  une  heure  pour  une  surface  d'un 
décimètre  carré,  bien  que  la  température  atteigne  et  dé- 
passe même  26  degrés,  et  que  l'état  hygrométrique  de 
l'atmosphère  soit  fort  éloigné  du  point  de  saturation. 
Dans  de  semblables  conditions  un  décimètre  carré  de 
papier  mouillé  suspendu  à  Tair  serait  sec  en  quelques 
instants.  Si  les  feuilles  ne  se  dessèchent  qu'avec  lenteur, 
c'est  qu'elles  sont  enveloppées  d'un  tissu  épidermique  qui 
modère  singulièrement  l'évaporation.  Aussi  est-ce  à  l'ab* 
sence  de  ce  tissu  qu'il  faut  attribuer  la  prompte  dessic- 
cation des  plantes  aquatiques  quand  on  les  sort  de  l'eau. 
Il  m'a  semblé  intéressant  de  mesurer  ce  pouvoir  modéra- 
teur deTépiderme. 

Le  22  septembre  1867,  on  a  choisi  sur  un  eâc//i5  opuntia 
deux  articles  de  même  surface  j  à  l'un  on  a  enlevé  l'épî- 
derme. 

Exposition  à  l'ombre  : 

Poids  du  cactus. 

Avec  Tépiderme.  Sans  Tépiderme. 

h        m  gr.  fr. 

A  II. 38  matin 11, 33  79I4 

A    4*^8  soir 11,18  4>97 

En  5.00    Eau  évaporée.     o,i5  29I7 

Eau  évaporée  par  heure. , .     o,o3  0,4^4 

Ainsi,  à  surface  égale,  le  cactus  sans  épiderme  a  perdu 
quatorze  fois  et  demie  autant  d*eau  que  le  cactus  qui  n'en 
était  pas  dépouillé.  La  surface  simple  des  cactus  était  de 
23  centimètres  carrés  (  surface  des  deux  côtés  :  46  centi- 
mètres carrés).  La  transpirationducactusavec  son  épidémie 
a  eu  lieu  à  raison  de  oS',o65  par  heure  et  par  décimèlW 
carré.  Quant  à  la  transpiration  du  cactus  privé  d'épiderme, 
il  fut  impossible  de  la  ramener  à  ce  qu'elle  aurait  é\é  par 
décimètre  carré  et  par  heure,  par  la  raison  que  le  volume 


FONCTIONS    ^JËTSIQrSS   DES   FEUILLES.  347 

de  Tarticle  avait  considérablement  diminué  ;  de  23  cekiti^ 
mètres  carrés,  la  surface  simple  était  réduite  à  i5  centi- 
mètres carrés. 

Temp.  de  l'air.      Psychromètre. 
o  o 

A  3  teures i7>4  94 

A  4  heures 17,8  5g 

Le  cactus  est  resté  exposé  jusqu'au  25  septembre. 

Avec  épiderme.    Sans  épiderme. 
gr.  gr. 

Le  22  septembre,  à  4^*  38"* .  .  11,18  4 ,  97 

Lé  25  septembre,  à  4^  38° . .  10,78  1,71 

En  72  heures,  eau  perdue. . .  0,40  3, 26. 

Par  heure o,oo55         o,o45 

Parheureetpardécim.  carré.  0,012  » 

On  voit  quel  obstacle  Fépiderme  apporte  à  la  transpi- 
ration. C'est  ce  qui  explique  pourquoi  un  fragment  de 
plante  grasse  conserve  si  longtemps  sa  vitalité.  Ainsi,  le 
2  octobre,  le  cactus  portant  son  épiderme  pesait  encore 
9S%95^en  sept  jours  il  avait  diminué  de  i^^23,il  possédait 
toujours  la  faculté  de  décomposer  F  acide  carbonique.  Le 
cactus  sans  épiderme,  à  la  même  date,  ne  pesait  plus  que 
o5%5;  et,  bien  qu'ayant  conservé  une  teinte  légèrement 
verte,  il  ne  fonctionnait  plus.  C'est  parce  qu'ils  sont  pro- 
tégés par  un  tissu  épidermique  peu  perméable  que  les 
fruits  échappent  à  une  dessiccation  rapide,  l'évaporation 
accomplie  à  leur  superficie  étant  extrêmement  faible.  On  en 
jugera  par  les  expériences  que  je  vais  faire  connaître. 

I.  Prune  Quetsch,  17  août  1869.  Surface  :  57  centimètres 
carrés. 

Poids. 

gr 

Exposée  à  Tombre,  à  midi ....  «     6o,i5  )  Température  :  i5®. 
»»  à6''3o™,soir.     59)95  )  Psychromètre  :  70®. 

En  ô'^So™,  perte 0,20  Par  heure  et  pardécî^» 

mètre  carré:  o«',o54» 


348  J*  BOUSSIlfGÀULT. 

IL  Prune  de  reine-Claude  ayant  son  épiderme;  surface:  38%5* 
Exposée  à  l'ombre. 

Poids. 

Le  27  août,  à  2^  87°*,  soir  ....      23 ,  29  )  Température  :   1 4**» 
Le  28  août,  à  8*^25"*,  matin. . .     22,70  )  Psychromètre :  78®. 

En  17*^40™,  perte 0,69  Par  heure  et  par  déci- 
mètre carré  :  o«',o86. 
Le  26  août,  à  6^  3o™  soir 22 ,  3o 

En  9^5o*'',  perte o,4o  Parheureet  par  déci- 
mètre carré  :  o«%  1 06. 
Le  29  août,  à  8^29",  matin 21 ,92 

En  13*^53",  perte o,38  Par  heure  et  par  déci- 
mètre carré  :  o»',  07 1 . 
Prune  de  reine-Claude  dépouillée  d'épîderme.  Surface  :  35%55. 

Exposée  à  Tombre  : 

Poids. 

gr 

Le  27  août,  à  2^20™,  soir 2o,3i  )  Température:  14**. 

Le  28  août,  à  8^  20™,  matin     ...      i6,49  i  Psychromètre:  71*, 

En  18  heures,  perte 3,82  Par  heure  et  par  déci- 
mètre carré  :  o*'',63. 
Le  28  août,  à  6*» 35™,  soir i4,52 

En  10^  i5™,  perte i  ,97  Par  heure  et  par  déci- 
mètre carré  :  o«'  58. 

Le  29  août,  à  8'»23™  matin i3,i75  Par  heure  et  pardé- 

cimètre  carré  :  o'*',29. 

La  perte  éprouvée  par  la  prune  de  reine-Claude  k  l'ëtat 
normal  a  été,  pendant  4i**3i™,de  o8',o87  par  heure  et  par 
décimètre  carré  de  surface. 

La  perte  éprouvée  par  la  reine-Claude  dépouillée  d'épi- 
derme  a  été  en  moyenne,  en  quarante-deux  heures,  de  0^*^,50 
par  heure  et  décimètre  carré.  La  perte  a  naturellement 
diminué  à  n^esure  que  l'exposition  se  prolongeait  et  Ton 
remarquera  qu'elle  fut,  à  la  même  température  et  au  même 


FONCTIOKS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  349 

état  hygrométrique,  environ  six  fois  plus  forte  pour  la 
prune  sans  épiderme. 

I.  Pomme  exposée  à  l'ombre  : 

Température i5°,o     Psycliromètre . . . .       74^  >o 

A  l'état  normal,  surface io3*^^,2 

Poids. 

ET 

10  octobre  1869,  à  10^  mat.     70,75 

1 1  octobre  1 869^  à^  i  o  mal .     70 ,635 

En  24  heures,  perte o,  ii5  Par  heure  et  par  déci- 
mètre carré:  o^fOoS 
i3  octobre  à  10^  mat 70,600 

En  48  heures,  perte o,o35  Par  heure  et  par  déci* 

mètre  carré  :  o*',ooo7 
2  novembre,  à  10^  mat 68,17 

En  480  heures,  pertes  ....       2,43    Par  heure  et  par  déci- 
mètre carré  :  o*',oo5 

o 

A  la  fin  des  observations  :  température i4>o 

))  psychromètre 75, b 

IL  Pomme  dépouillée  de  son  épiderme,  exposée  à  l'ombre. 
Surface 97*^^>3 

Poids, 
gr 

10 octobre,  10  heures  matin.     66,75 
II  octobre,  10  heures  matin.     60,275 

En  24  heures,  pertes 6,475  Par  heure  et  par  déci- 
mètre carré  :     o*'',277 
1 3  octobre,  i  o  heures  matin*     Sg ,  37 

En  48 heures,  perte 0,905  Par  heure  et  par  déci- 
mètre carré  :  o'%020 

Durant  les  premières  vingt-quatre  heures  l'eau  perdue 
par  la  pomme  pelée  a  été  55  fois  plus  forte  qu'avec  la 
pomme  ayant  sa  pelure. 


36o  3.  BOUSSINGÀULT. 

Pendant  quatre  cent  quatre  vingts  heures  d'exposition 
la  perte  par  la  pomme  ayant  sou  épiderme  a  été  assez 
régulière,  à  peu  près  oS',o4  à  o6'^,o5  par  heure  et  par  déci- 
mètre carré.  La  pomme  pelée,  au  contraire,  a  d'abord  subi 
une  perte  considérable  qui  a  diminué  rapidement. 

C'est  un  fait  établi  d*ailleurs  par  mes  recherches  sor 
Tosmose  et  Tendosmose  des  feuilles,  des  fruits  et  des  racines 
que  le  tissu  épidermique  ne  laisse  passer,  par  la  transpi- 
ration, que  de  la  vapeur  aqueuse  émanant  cependant  des  solu- 
tions plus  ou  moins  sucrées  renfermées  dans  le  parenchyme. 
En  effet,  après  une  transpiration  assez  prolongée  pour  que 
Teaude  constitution  soit  réduite  aux  deux  tiers  de  son  poids 
initial,  on  n'aperçoit  pas  à  la  surface  de  la  feuille,  du  fruit, 
de  la  racine,  aucune  trace  de  matières  concrètes,  à  moins 
qu'il  n'y  ait  eu  déchirure  ou  altération  (  *  ).  J'ai  eu  récent- 
ment  l'occasion  de  constater  l'absence  des  principes  sucrés 
à  la  superficie  de  grains  de  raisin  suspendus  à  l'air  depuis 
trois  mois,  quoique  le  jus  remplissant  les  cellules  en  contint 
plus  de  0,07  au  commencement  delà  dessiccation.  Les 
grains  de  raisin  étaient  ridés  ^  en  les  lavant  avec  soin  à 
l'aide  d'un  pinceau  de  blaireau,  l'eau  de  lavage  ne  déter- 
mina aucune  réduction  en  la  chauffant  avec  la  liqueur 
cuivrique.  La  perte  qu'une  feuille  subit  en  transpirant 
amoindrit  l'énergie  de  ses  fonctions  ^  en  effet,  il  résulte 
d'observations  faites  par  mon  père  que  l'aptitude  à  décom- 
poser l'acide  carbonique  sous  l'influence  de  la  lumière  baisse 
au  fur  et  à  mesure  que  les  feuilles  abandonnent  de  leur  e4iu 
de  constitution.  Voici  quelques-uns  des  résultats  obtenus 
avec  des  feuilles  de  laurier-rose,  introduit  dans  de  l'air 
atmosphérique  contenant  de  l'acide  carbonique  : 

I.  Feuille  renfermant  :  eau 0,60 

Gaz  acide  carbonique  décomposé 16^^,00 


(*)  J.  BoQSSiNGAULT,  Annales  de  Chimie  et  de  Physique,  4«  série,  t.  XXI3L» 
p.  36o. 


FOircTioirs  physiques  des  feuilles.  35  i 

II.  Feuille  ne  renfermant  plus  que  :  eau  ....  o,36 
Gaz  acide  carbonique  décomposé ii^^,oo 

III.  Feuille  ne  renfermant  plus  que:  eau ....  o,  29 
Gaz  acide  carbonique  décomposé o^°,oo 

La  feuille  II  avait  perdu  les  o,4o  de  Peau  initiale  et  la 
feuille  m  les  o,  52. 

Les  feuilles,  quand  elles  ne  reçoivent  pas  une  quantité 
de  sève  ascendante  capable  de  remplacer  Teau  éliminée 
durant  la  transpiration,  perdent  de  leur  consistance; 
Taspect  qu'elles  prennent  alors  est  fort  différent  selon  les 
espèces  végétales.  Si  chez  les  unes  il  suffit  d^une  perte  de 
o^*^,  16  de  Teau  constitutionnelle  pour  commencer  à  se  flé- 
trir, il  en  est  d'autres  qui  restent  rigides  en  éprouvant 
une  perte  beaucoup  plus  forte.  L'état  que  prend  une 
feuille  exposée  à  l'atmosphère  dépend,  d'un  côté,  de  la 
facilité  av^c  laquelle  elle  laisse  échapper  l'eau  et,  de 
l'autre»  du  plus  ou  moins  de  rapidité  dans  l'ascension  de  la 
sève.  Mais  il  n'y  a  pas  ordinairement  simultanéité  d'in- 
tensité dans  les  deux  fonctions,  et  cela  est  concevable  si 
l'on  considère  que  la  température,  l'état  hygromé- 
trique de  Pair,  le  vent  agissent  d'une  manière  très-pro- 
tioncée  sur  l'évaporation  sans  influencer  notablement  le 
mouvement  ascensionnel  de  la  sève.  Aussi  la  proportion 
d'eau  dans  les  feuilles  doit-elle  varier  et  varie-t-elle  en  effet 
dans  le  cours  de  la  journée,  ainsi  qu'on  a  pu  le  reconnaître 
dans  une  série  d'expériences  faites  en  août  1869,  consistant 
à  marquer,  sur  un  même  rameau,  trois  feuilles  aussi  sem- 
blables que  possible.  On  en  pesait  une  à  7  heures  du  matin, 
1^9  deux  autres  à  3  heures  et  à  8  heures  du  soir  ;  après  les 
pesées,  chaque  feuille  était  séchée  à  l'étuve  chauffée  à 
100  degrés.  Yoici  les  résultats,  les  feuilles  étant  ramenées 
&  une  surface  de  i  décimètre  carré  :    . 


35a  J.  boussiugavlt. 

Feuilles  ramenées  à  une  sarfaee  Dans  loo  yruiBiM 

,  de  I  décimètre  carré.  de  feuilles. 

Heares  Poids        Matières  Matières 

Plantes.  des  pesées,     desfeallles.      fixes.  Eau.  fixes.  Eau. 

h  gr  gr  gr 

Boussingaultia. .     7  matin        5,32        o,'i8        5, 04  5,26        94*74 

»            ..3  soir  5,53  o,4o  5,i3              7,23  9a>77 

»            ..8  soir  5,91  0,38  5,53             6,43  93»57 

Tignc 7  matin  1,28  o,43  0^85  33,59  ^^ti^ 

»     3  soir  1,56  o,55  1,01  35,95  64*75 

']>     8  soir  1,75  0,57  1,18  32^57  67,4^ 

Concombre.  ...     7  matin  2,47  o,52  1,95  21, o5  78,95 

o        ...    3  soir  2;65  o,63  2,02  33, 78  76, a3 

n        ....     8  soir  2,43  0,53  1,90  31,81  78,19 

Cerise 7  matin  3,82  1,62  2,i5  i^ti^  ^7»^ 

»       3  soir  3,63  1,60  1,97  4^;73  54>38 

»     8  soir  3,81  1,48  a, 33  38,84  61,16 

Les  feuilles  désignées  pour  les  pesées  avaient  des  dimen- 
sions à  très-peu  près  égales,  cependant  on  ne  saurait  affir- 
mer qu'elles  aient  eu  une  identité  absolue  de  composition^ 
on  peut  voir  que  le  matin  elles  renfermaient  plus  d'eaUi 
qu'au  milieu  du  jour  la  proportion  diminuait  ensuite  pour 
revenir  le  soir  a  ce  qu'elle  était  au  lever  du  soleil. 

Dans  les  conditions  où  l'expérience  a  été  faite,  la  terre 
et  l'atmosphère  étaient  assez  humides;  il  faisait  peu  de 
vent.  Lorsque  le  sol  est  desséché,  ce  qui  coïncide  presque 
toujours  avec  la  sécheresse  et  l'agitation  de  l'air,  il  arrive 
que  les  feuilles  ne  récupèrent  pas,  pendant  la  nuit,  l'ean 
qu'elles  ont  perdue  dans  le  jour.  Elles  restent  penchées  vers 
la  tige;  leur  vitalité  est  comme  suspendue  jusqu'à  l'arrivée 
de  la  pluie.  C'est  là,  du  reste,  une  étude  que  j'aborderai, 
lorsque  j'aurai  terminé  d'exposer  ce  qui  est  relatif  à  la 
transpiration. 

§  in.  —  Transpiration  des  feuilles  par  Vun  et  Vautre 

côté  du  limbe. 

Dans  ce  qui  précède,  on  a  considéré  comme  surface 
évaporatoire  la  surface  totale  d'une  feuille,  c'est-à-dire  la 
somme  des  deux  surfaces  opposées.  On  a  bien  ainsi  la 


FOlïCTIOJVS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  353 

quantité  de  «vapeur  aqueuse  émanée  d'une  feuille,  mais  on 
ne  distingue  pas  celle  émise  par  chaque  côté  du  limbe.  Chez 
la  plupart  des  feuilles,  la  surface  supérieure,  celle  tournée 
vers  le  ciel,  est  plus  lisse,  d'un  vert  plus  foncé,  porte 
moins  de  stomates  que  la  face  dirigée  vers  la  terre.  Les 
feuilles  ainsi  constituées  ont  une  position  à  peu  près  hori- 
zontale, tandis  que,  lorsqu'elles  sont  pourvues  de  stomates 
en  nombre  à  peu  près  égal  sur  les  deux  faces,  comme  cela 
a  lieu  pour  les  graminées,  leur  port  est  presque  vertical. 
On  est  tout  naturellement  porté  à  croire  que  la  transpi* 
ration  devait  être  plus  forte  par  le  côté  pourvu  de  perfo- 
rations, établissant  une  communication  plus  directe  de 
Tair  extérieur  avec  le  parenchyme* 

La  question  a  été  abordée,  d'abord  indirectement,  par 
Charles  Bonnet,  après  qu'il  eut  reconnu,  avec  Calendrini, 
«  que  les  feuilles  des  arbres,  comme  celles  des  herbes,  sont 
toujours  dirigées  de  façon  que  leur  surface  supérieure 
regarde  le  ciel  ou  l'air  libre  \  l'inférieure,  la  terre  ou  l'inté- 
rieur de  la  plante  \  que  la  surface  supérieure  est  ordinai- 
rement lisse  et  lustrée,  sans  nervures  saillantes;  que  la 
surface  inférieure  est,  au  contraire,  pleine  de  petites  aspé<- 
rîtes,  ou  garnie  de  poils  courts  ;  que  ses  nervures  ontdn 
relief;  que  sa  couleur  est  toujours  plus  pâle  que  celle  de  la 
surface  supérieure,  qui  n'a  que  peu  ou  point  de  lustre  (  ^  )•  » 
Charles  Bonnet  pensait  que  ce  des  différences  aussi  frap- 
pantes avaient  une  fin  »,  et,  d'après  les  idées  assez  confuses 
de  l'époque  sur  la  nutrition  des  végétaux,  il  considérait  la 
surface  inférieure  des  feuilles  comme  «  destinée  à  pomper 
la  rosée  qui  s'élève  de  la  terre  »  ;  aussi  Bonnet  ne  se  préoc- 
cupe-t-il  pas  de  la  transpiration,  il  cherche  uniquement  à 
établir  qu'une  feuille  en  contact  avec  l'eau  en  absorbe  plus 
par  sa  face  inférieure  que  par  sa  face  supérieure. 


(*)  Charles  Bon:<et,  Recherches  sur  V  usage  des  feuilles, 

Ann.  de  Chim,  et  de  Phjrs,,  5*  série,  t.  XIII.  (Mars  1 878.)  23 


354  ^'    BOUSSIIfGAVLT. 

Il  posait  (c  sur  de  l'eau  plusieurs  feuilles  d*une  même 
espèce,  de  façon  que  les  unes  fussent  humectées  par  leur 
surface  supérieure,  les  autres  par  leur  surface  opposée.  » 
L'absorption  était  mesurée  par  la  diminution  du  volume 
du  liquide.  Des  dispositions  adoptées  par  Ch.  Bonnet,  il 
ressort  clairement  qu'il  mesurait  à  la  fois  les  effets  de 
deux  phénomènes  distincts,  puisque  l'absorption  de  Peau 
par  la  surface  d'une  feuille  répondait  naturellement  à 
Tévaporation  accomplie  à  la  face  opposée.  Les  résultats,  du 
reste,  n'eurent  rien  de  bien  saillant.  Pour  les  herbacées, 
les  feuilles  vécurent  à  peu  près  aussi  longtemps  en  absor- 
bant l'eau  par  Tune  ou  l'autre  face. 

Les  feuilles  des  arbres,  si  l'on  en  excepte  les  lilas  et  les 
trembles,  absorbèrent  par  leur  face  inférieure  plus  d'eau 
que  par  leur  face  supérieure  (  *  ) . 

Ch.  Bonnet  déduit  de  ces  observations  que  a  les  plantes 
tirent  l'humidité  par  leurs  feuilles  ^  qu'il  y  a  une  étroite 
communication  entre  ces  feuilles;  que  cette  communica- 
tion s'étend  à  tout  le  corps  de  la  plante-,  que  Ton  peut  dire 
que  les  végétaux  sont  plantés  dans  l'air,  à  peu  près  comme 
ils  le  sont  dans  la  terre;  que  les  feuilles  sont  aux  branches 
ce  que  le  chevelu  est  aux  racines  :  que  c'est  surtout  à  l'aide 
de  leurs  feuilles  que  les  plantes  nées  dans  un  territoire 
ingrat  ne  laissent  pas  d'y  faire  de  grands  progrès,  les  rosées, 
les  brouillards  et  les  pluies  leur  fournissant  d'abondantes 
nourritures,  et  dont  elles  perdent  d'autant  moins  qu'elles 
ont  plus  de  bouches  préparées  pour  la  recueillir.  De  li 
vient  encore  que,  dans  certaines  contrées,  les  rosées  suf- 
fisent presque  seules  pour  l'entretien  des  plantes  (*)•  » 

Une  fois  admis  que  la  rosée  était  absorbée  par  la  surface 
inférieure  des  feuilles,  Ch.  Bonnet  fut  conduit  à  supposer 
que  le  phénomène  opposé  à  l'absorption,  la  transpiration. 


(•)  Gn ARLES  Bonnet,  Usage  des  feuilles. 
(»)  IbiJ, 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  355 

avait  lieu,  priiicipalementpar  la  surface  supérieure,  «  irès- 
propre  à  la  faciliter  par  son  extrême  poli,  par  l'absence 
de  poils,  d'aspérités  ». 

Ainsi  chaque  côté  du  limbe  de  la  feuille  d'une  plante 
ligneuse  aurait  une  fonction  spéciale  :  Tun,  d'absorber 
l'eau  météorique  5  l'autre,  de  la  laisser  échapper  après  avoir 
retenu  les  matériaux  fertilisants  qu'elle  pouvait  contenir. 

Il  est  curieux  de  voir  un  observateur  aussi  sagace  faire 
une  large  part  à  l'intervention  de  la  rosée  dans  la  nutrition 
végétale,  et  cela  pour  justifier  la  fonction  importante  qu'il 
attribuait  à  la  face  inférieure  des  feuilles.  Pour  vérifier  si 
les  surfaces  se  comportaient  réellement  ainsi,  Ch.  Bonnet 
plongeait,  dans  des  tubes  remplis  d'eau,  le  pétiole  des  feuilles 
de  même  espèce,  de  même  dimension  {fig*  2)  \  il  enduisait 

Fig.  a. 


les  feuilles  d'huile  d'olive,  les  unes  sur  leur  surface  supé* 
rieure,  les  autres  sur  leur  surface  inférieure;  d'autres 
feuilles  n'étaient  pas  enduites.  On  mesurait  Tévaporation 
par  l'abaissement  du  niveau  du  liquide  dansle  tube.  Puisque 
la  face  supérieure  était  principalement  destinée  à  la  transpi- 
ration, les  feuilles  enduites  d'huile  sur  cette  face  devaient 
moins  transpirer  que  celles  enduites  d'huile  sur  la  face 
opposée;  or  il  arriva  précisément  le  contraire  :  sur  vingt 
et  une  espèces,  le  marronnier  d'Inde  fut  la  seule  dont  les 
feuilles  huilées  sur  la  face  supérieure  aspirèrent  moins 
d'eau,  ou,  si  Ton  veut,  transpirèrent  moins  que  lorsqu'elles 
étaient  huilées  sur  la  face  inférieure. 

23. 


356  J.    BOUSSISGAULT. 

Les  feuilles  du  rosier,  de  la  vigne  du  Canada  en  aspirè- 
rent à  peu  près  la  même  quanti  té,  quels  que  fussent  les  côtés 
huilés.  Les  feuilles  des  autres  espèces  aspirèrent  toutes 
davantage,  lorsque  c'était  la  face  supérieure  qui  avait  été 
enduite  d'huile. 

Les  feuilles  des  plantes  herbacées  se  comportèrent  de  la 
même  manière.  Ch.  Bonnet  en  conclut,  contrairement  à 
sa  prévision,  que  n  la  surface  inférieure  des  feuilles  n'est 
pas  moins  destinée  à  la  transpiration  qu'à  la  nutrition  ».  Il 
aurait  dû  conclure,  car  ses  expériences  semblaient  le  prou- 
ver, que  cette  face  inférieure  est  surtout  destinée  à  la  tran- 
spiration. 

Au  point  de  vue  de  Tétude  de  la  transpiration,  les  expé- 
riences deCh.  Bonnet  furent  faites  dans  des  conditions  peu 
favorables,  dans  un  appartement  clos,  dont  l'air  était  pro- 
bablement peu  éloigné  du  point  de  saturation,  et  à  une 
température  à  peu  près  constante.  La  durée  de  l'observation 
était  d'ailleurs  trop  prolongée  pour  supposer  que  l'eau  dis-: 
parue  dans  les  tubes  eut  toujours  pénétré  par  le  pétiole  en 
quantité  suffisante  pour  remplacer  l'eau  évaporée.  En  effet, 
les  expériences  rapportées  dans  la  première  partie  de  ce 
travail  montrent  que,  si  l'on  eût  observé  non  pas  dans  une 
chambre  fermée,  mais  en  plein  air,  par  conséquent  dans  des 
conditions  de  température  et  d'état  hygrométrique  fort  va- 
riables, l'eau  n'aurait  certainement  pas  monté  assez  vite 
du  tube  dans  la  feuille  pour  remplacer  l'eau  dissipée.  Sans 
doute  la  lenteur  avec  laquelle  l'eau  parcourt  le  pétiole  im- 
mergé n'est  pas  manifeste  sur  des  feuilles  rigides  telles  que 
celles  du  noyer,  du  cerisier,  du  pommier,  du  laurier,  du 
lierre,  etc.,  mais  elle  le  devient  sur  des  feuilles  molles, 
flexibles,  à  mince  épiderme.  L'insuffisance  du  pétiole  pour 
amener  l'eau  dans  le  parenchyme  est  promptement  accusée. 
Une  feuille  de  concombre,  à^Helianthus,  de  mauve,  placée 
dans  de  telles  conditions,  ne  tarde  pas  à  être  fanée,  même 
à  l'ombre,  surtout  si  l'air  est  sec  et  agité.  Alors  le  Yolume 


FOWCTIOKS    PHYSIQUES    DES   FEUILLES.  3Sj 

d^eau  disparue  dans  la  jauge  ne  représente  plus,  à  beaucoup 
près,  le  volume  de  Teau  que  la  plante  a  transpirée.  Oo  a 
insisté  ailleurs  sur  ce  que  dans  maintes  conditions  météo- 
rologiques, alors  même  que  le  sol  est  très-humide,  l'eau, 
tout  en  parvenant  dans  les  racines,  dans  les  tiges,  dans  les 
pétioles,  n'y  pénètre  pas  en  quanti  té  suffisante  pour  four- 
nir à  Tévapo ration  des  feuilles  :  je  reviendrai,  d^ ailleurs, 
sur  cette  question  intéressante. 

Il  y  avait  donc  lieu,  selon  moi,  de  reprendre  les  expé- 
riences deCh.  Bonnet.  On  a  déterminé  comparativement 
la  transpiration  à  la  surface  inférieure  et  à  la  surface  supé- 
rieure d  une  înème  feuille,  en  faisant  usage  de  la  balance. 
Le  côté  du  limbe  que  l'on  voulait  empêcher  de  transpirer 
était  recouvert  de  suif  préalablement  maintenu  en  fusion 
à  i3o  degrés,  pour  en  expulser  l'eau  ou  les  matières  vola- 
tiles. On  l'appliquait  sur  la  feuille  quand  la  température 
ne  dépassait  plus  celle  de  Tair. 

La  fedille  ayant  un  côté  recouvert,  on  la  pesait  après 
l'avoir  mise  dans  une  boite  en  métal.  On  fit  d'abord  quel- 
ques essais  pour  savoir  si  le  suif  s'opposerait  à  la  transpi- 
ration, et  l'on  reconnut,  non  sans  surprise,  que  l'enduit 
gras  n'était  pas  un  obstacle  absolument  infranchissable  à 
la  vapeur  aqueuse;  au  moins  on  put  se  convaincre  qu'une 
feuille  recouverte  de  suif  sur  toute  sa  superficie  éprouve 
néanmoins  une  légère  perte  quand  elle  reste  exposée  à  l'air 
libre.  Voici  quelques  pesées  : 

Feuilles  enduites  de  suif  sur  les  deux  côtés. 

Dorée 
de 
rexposition.  Poids. 

Lauriei^cerise i  heure  au  soleil.  3,i8 

»  I  heure  au  soleil.  3,io5 

»  I  heure  au  soleil.  5,4^ 

Lilas I  heure  au  soleil,  i  ,7!< 

Laurier  «cerise i  heure  à  l'ombre.  5, 07 

Marronnier i  heureàTombre.  i  ,47 

Châtaignier i  heureàTombre:  3, 61 


irfaoe. 

Perte. 

Perte  par 

décimètre 

carré. 

co 
100 

o,oi5 

o,oi5 

101 

0,020 

0,020 

195 

0,010 

o.ooS 

loH 

0,020 

0,019 

137 

0,010 

0,007 

212 
217 

o,oao 
o,o3o 

0,007 
0,014 

338  J.    BOUSSIJNGAULT. 

Ainsi,  les  feuilles  enduites  de  suif  ont  perdu  de  leur 
poids.  La  perte  est  réelle  ;  on  ne  saurait  l'attribuer  à  quel- 
ques prfncipes  volatils  ou  à  une  combustion  du  corps 
gras,  car  le  poids  d'une  lame  de  laiton  d'un  décimètre  carré 
recouvert  de  suif^  suspendue  au  soleil  pendant  une  heure, 
n'a  pas  varié.  Néanmoins,  dans  les  pesées  exécutées  sur 
des  feuilles  dont  une  partie  de  la  surface  était  séquestrée, 
on  n'a  pas  cru  devoir  introduire  de  correction.  On  opé- 
rait sur  deux  feuilles  semblables,  cueillies  au  même  mo- 
ment, l'une,  par  exemple,  ayant  Vern^ers  sous  le  suif  :  la 
transpiration  alors  n'avait  lieu  que  par  l'endroit.  L'autre 
feuille  était  enduite  sur  l'endroit  pour  que  la 'transpiration 
se  fit  par  T envers.  Dans  quelques  cas,  pendant  qu'on  me- 
surait l'évaporation  sur  chacun  des  côtés,  on  la  mesurait 
aussi  simultanément  sur  une  feuille  entière  ne  portant  pas 
d'enduit  gras,  pour  voir  si  la  somme  des  quantités  d'eau 
transpirées  par  l'envers  et  par  l'endroit  difiererait  de  la 
quantité  d'eau  transpirée  par  la  totalité  d'une  feuille  dont 
les  deux  côtés  resteraient  libres.  Enfin,  pour  atténuer  une 
cause  d'erreur  provenant  de  ce  que  deux  feuilles  de  même 
dimension,  de  même  âge,  pourraient  renfermer  des  pro- 
portions distinctes  d'eau,  on  a  quelquefois  comparé  sur  une 
feuille  unique  la  transpiration  de  chacun  des  côtés  du 
limbe,  en  la  divisant  en  deux  parties  symétriques,  suivant 
le  sens  de  la  nervure  principale. 

Voici  les  observations  faites  pendant  le  mois  d'août  : 


FONCTIONS    PHYSIQUES   DES    FEUILLES. 


359 


e 
o 

^      ^     ^ 

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mm  h     -2  **  r2 

w  o     oa  O  oa 


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J.    BOUSSIKGÀULT. 


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FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  36 1 

Les  diflérences  entre  la  transpiration  accomplie  sur 
chaque  côté  des  feuilles  ont  été  plus  fortes  au  soleil  qu'à 
l'ombre.  En  éliminant  le  laurier-rose  et  le  maïs,  dont  les 
observations  ont  quelque  chose  d^anormal,  on  trouve,  pour 
le  lilas,  la  vigne,  le  poirier,  l'oranger,  le  topinambour,  le 
houx,  le  catalpa,  la  boussingaultîa,  le  convolvulus,  Tas- 
clépiade,  le  pêcher,  que  Teau  transpirée  par  l'endroit  des 
feuilles  est  à  la  transpiration  par  l'envers  ::  i  :  4>3. 

En  prenant  une  moyenne  des  observations  à  Tombre, 
l'eau  transpirée  par  l'endroit  et  l'envers  des  feuilles  aurait 
été  dans  le  rapport  de  i  :  a,4*  L^  transpiration  a  été  à  peu 
près  la  même  sur  les  deux  côtés  du  limbe,  pour  : 

Au  soleil.        A  Tombre. 

Le  marronnier 5,2  4>8 

Le  maïs 0,8  0,8 

La  pervenche 5,5  4>3 

Dans  quelques  expériences  on  a  comparé  la  somme  des 
quantités  d'eau  évaporée  sur  chacun  des  côtés  de  la  feuille 
pris  isolément  à  l'évaporation  accomplie,  sur  une  feuille 
entière  de  même  dimension.  Voici  les  résultats  : 

Somme  de  Tcau      Eau  transpirée 

transpirée  par  la 

par  chaque  côté.      feuille  entière.         Différences. 

Laurier-rose o,2o5  o,2o5  0,000 

Laurier-cerise. ...  0,1 52  0,112  o,  o4o 

Laurier-ceiise.    .  0,1 85  0,128  0,057 

Lilas 0,229  0,170  0,095 

Marronnier o,2o5  o,i85  0,020 

Châtaignier 0,1  o5  0,080  o,o25 

Vigne 1 ,  160  I  ,o85  0,076 

Framboisier o,i85  o,i65  0,020 

Si  là  transpiration  d'une  même  feuille  dans  un  espace 
de  temps  égal  est  trouvée  plus  forte  quand  on  la  déduit 
d'observations  faites  sur  un  seul  côté  du  limbe,  cela  peut 


36a  J*    BOUSSIMGAULT. 

tenir  à  ce  que  ]a  vapeur  émise  n'a  qu^une  issue  :  quoi  qu'il 
en  soit,  il  résulte  de  cette  série  d'expériences  que,  dans  les 
mêmes  circonstances  de  température  et  d'état  hygromé- 
trique de  Tair,  la  transpiration  est  généralement  plus  forte 
par  l'envers  que  par  l'endroit  d'une  feuille. 

§  IV.  —  Rapport  de  la  surface  évaporatoire  des  feuilles 
à  la  surface  absorbante  des  racines. 

Dans  les  conditions  normales,  l'eau  que  les  feuilles  trans- 
pirent est  remplacée  par  celle  que  les  racines  puisent  dans 
le  sol.  Pendant  la  journée  la  transpiration  est  souvent 
assez  énergique  pour  que  la  sève  ascendante  n'arrive  pas 
assez  rapidement  dans  le  parenchyme.  Les  feuilles  aban- 
donnent alors  une  partie  de  leur  eau  de  constitution  :  c'est 
ce  qui  a  lieu  par  les  effets  combinés  de  la  chaleur,  de  la 
sécheresse  et  du  vent.  Lorsqu'il  survient  un  ralentissement 
dans  Tévaporation  par  suitedu  refroidissement  ou  du  calme 
de  l'atmosphère,  dans  la  nuit,  ou  par  un  ciel  couvert,  par 
un  brouillard,  les  feuilles  récupèrent  bientôt  l'eau  qu'elles 
ont  perdue,  parce  que  les  racines  ne  cessent  de  fonctionner 
que  lorsque  tout  l'organisme  est  en  quelque  sorte  saturé 
d'humidité,  état  qui  ne  peut  se  maintenir  que  si  la  terre 
fournit  autant  d'eau  qu'il  en  sort  par  la  transpiration. 

Lorsqu'une  branche  détachée  de  l'arbre,  ou  une  tige 
portant  des  rameaux,  mais  dont  on  a  coupé  les  racines,  est 
mise  dans  l'eau,  dans  de  la  terre  humectée,  la  transpira- 
tion feuillue  a  lieu  d'abord  comme  sur  un  végétal  entier  ; 
toutefois  la  restitution  de  l'eau  transpirée  se  fait  avec  une 
telle  lenteur  que  bientôt  les  feuilles  se  dessèchent  et 
meurent,  la  durée  de  leur  vitalité  dépendant  de  l'eau 
approvisionnée  dans  la  tige. 

En  effet,  une  branche,  une  tige  isolée  offre  une  grande 
différence  avec  une  plante  complète  dans  leur  contact  avec 
la  terre  humide.  L'eau,  pour  arriver  dans  l'organisme,  pë- 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  363 

nètre,  dans  le  premier  cas,  par  une  section  de  peu  d^éten- 
due  superficielle,  tandis  que.  dans  le  second  cas,  alors  que 
les  racines  interviennent,  la  surface  absorbante  est  con- 
sidérable et  diffère  infiniment  moins  de  la  surface  des 
feuilles.  Ainsi  Haies  a  trouvé  qu'un  Helianthus  ayant, 
hors  de  terre,  une  surface  feuillue  de  39  pieds  carrés,  avait 
des  racines  présentant  une  surface  de  i5  à  16  pieds  car- 
rés. Le  rapport  de  ces  surfaces  était  donc  ::  i  C  s>4-  Un 
cbou  ayant  une  surface  de  feuilles  de  19  pieds  carrés 
présentait  une  surface  de  racines  de  i  à  2  pieds.  L'aire  de 
la  section  des  tiges  était  : 

Pour  V Helianthus 1    pouce  carré. 

Pour  le  choux 7  de  pouce. 

Le  rapport  existant  entre  l'étendue  superficielle  des  or- 
ganes souterrains  et  celle  des  organes  aériens  d'une  plante, 
c'est-à-dire  la  relation  entre  la  surface  absorbante  enfouie 
dans  la  terre  et  la  surface  évapora  toi  re,  doit  donc  être  pris 
en  considération. 

Les  racines,  quel  que  soit  leur  mode  de  fonctionner, 
doivent  puiser  d'autant  plus  d'eau  dans  le  sol  qu'elles 
sont  plus  développées,  et  l'inaptitude  de  la  section  d*une 
tige  à  une  absorption,  même  momentanée,  pourrait  bien 
dépendre  en  partie  du  peu  de  surface  qu'elle  présente  a 
l'eau  ou  à  la  terre  humectée.  Une  expérience  que  Perrault 
fit  à  l'occasion  d'une  vive  discussion  sur  l'analogie  du  mou- 
vement de  la  sève  dans  les  arbres  avec  la  circulation  du 
sang  chez  les  animaux  montra  que,  dans  certaines  limites, 
un  organe  sufiEisamment  développé  remplit  en  quelque  sorte 
une  des  fonctions  des  racines.  Haies  soutenait  qu'il  n'y 
avait  pas  de  circulation  dans  les  plantes  et  qt^e  les  expé- 
riences entreprises  pour  la  prouver  établissaient  simplement 
l'existence  d'un  mouvement  rétrograde  d'une  partie  de  la 
sève  parvenue  au  sommet  du  végétal;  il  répéta  toutefois 
l'expérience  de  Perrault  sur  des  branches  de  cerisier,  de 
groseillier,  de  pommier,  portant  chacun  deux  rameaux 


364  J*    BOUSSINGAULT. 

feuillus,  dont  Tun  plongeait  dans  un  vase  plein  d'eau, 
tandis  que  l'autre  restait  en  dehors. 

Les  branches  suspendues  dans  Tair  furent  promptement 
fanées;  celles,  au  contraire,  ayant  un  rameau  submergé 
conservèrent  leur  vigueur  :  le  groseillier  pendant  onze  jours, 
la  vigne,  le  pommier  durant  plusieurs  semaines,  «  d^oùil 
est  clair,  dit  Haies,  que,  soit  par  la  quantité  d'eau  que  la 
transpiration  doit  dissiper  en  onze  jours  et  que  les  feuilles 
doivent  tirer  pour  conserver  leur  verdeur,  soit  par  la  con- 
sommation de  l'eau  dans  les  vaisseaux,  les  rameaux 
avaient  tiré  toute  cette  quantité  à  travers  les  feuilles  du 
rameau  plongé  dans  l'eau  » . 

La  seule  conséquence  que  Haies  déduisit  fut  «  combien 
il  est  probable  que  les  végétaux  tirent  la  pluie  et  la  rosée 
surtout  dans  la  saison  sèche  (  ^  ) .  » 

Sans  doute,  il  en  résultait  la  preuve  de  la  perméabilité 
des  feuilles,  mais  il  paraîtra  singulier  que  Haies  ne  fut  pas 
frappé  du  fait  principal,  à  savoir  que  les  feuilles  du  ra- 
meau submergé,  eu  égard  à  la  forte  proportion  d'eau 
qu'elles  avaient  introduite  dans  le  rameau  qui  ne  Pétait 
pas,  s'étaient  comportées  comme  des  racines . 

Charles  Bonnet  aussi  avait  reconnu  qu'une  ou  plusieurs 
feuilles  maintenues  dans  Peau  pommaient  nourrir,  ce  sontses 
expressions,  une  ou  plusieurs  autres  feuilles  appartenant 
à  la  même  brachiole.  Or  on  a  vu  maintes  fois,  dan«  le 
cours  de  ce  travail,  qu'en  se  bornant  à  plonger  dans  l'eau 
la  section  d'une  branche  ou  un  pétiole,  les  feuilles  exposées 
à  l'air  se  fanaient  rapidement.  U  est  donc  permis  d'attri- 
buer la  plus  longue  durée  de  leur  existence,  dans  les  con* 
ditions  de  l'expérience  de  Perrault,  à  la  faculté  d'absorption 
des  feuilles  submergées.  Les  feuilles  tenues  à  l'air,  même 
dans  ces  conditions,  ne  restent  vertes,  il  est  vrai,  que  pen- 
dant un  temps  limité,  mais  on  ne  doit  pas  oublier  que,  si 


(^)  Halbs,  Statique  des  végétaux^  Gh.  IV,  t.  I,  p.  lor. 


FOKCTIOUS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  365 

elles  eussent  appartenu  à  une  plante  entière  dont  les  racines 
plongeaient  dans  de  l'eau  pure,  elles  ne  se  seraient  pas  mieux 
conservées,  par  la  raison  que  ce  liquide,  amené  soit  par  le 
concours  des  racines,  soit  par  le  concours  des  feuilles,  ne 
renfermerait  pas  les  principes  fertilisants  répandus  dans 
la  terre  et  que,  par  conséquent,  malgré  le  carbone  qu'elles 
tireraient  de  l'atmosphère,  une  plante  placée  dans  une  telle 
situation  finirait  par  succomber. 

L'expérience  de  Perrault  est  capitale  lorsqu'on  l'envisage 
à  ce  point  de  vue  que  des  feuilles  submergées  déterminent 
l'ascension  de  l'eau  dans  une  branche  quand  leur  surface 
approche  de  la  surface  des  feuilles  exposées  à  l'air  et  faisant 
partie  de  la  même  branche.  Cette  expérience  a  semblé  assez 
intéressante  pour  être  répétée  en  faisant  intervenir  la  ba- 
lance, et  cela  d'autant  mieux  qu'elle  jette  de  la  lumière  sur 
cette  question  encore  controversée  :  l'absorption  de  l'eau 
liquide  par  les  parties  vertes  des  végétaux. 

Observation  faite  sur  le  platane  et  sur  le  lilas, 

I.  On  a  choisi  une  jeune  branche  formée  de  deux  ra- 
meaux A  et  B  (fig.  3), 

On  rapportera  les  observations  sur  le  platane. 

La  surface  des  feuilles  de  A  maintenues  dans  l'eau  était 

de  2024  centimètres  carrés. 
La  surface  des  feuilles   de   6   exposées  à  l'air  était  de 

1933  centimètres  carrés. 

Le  ilacon  contenant  l'eau  était  bouché  par  un  liège  ayant 
une  entaille  sur  le  bord  pour  laisser  passer  la  tige. 

Le  27  septembre,  à  7  heures  du  soir,  l'appareil 

établi  dans  le  jardin  pesait 4^ygo^'^ 

Le  2*8  septembre,  à  7  heures  du  matin 4^85 

Eau  évaporée  en  douze  heures,  la  nuit 5 

Par  décimètre  carré  de  feuille,  en  une  heure*.    0^^,021 


L*  »6  «n  n>«''n  =  température i5°,8 

1              psychromètre gi" 

Air  calme. 

hf  38  septembre,  à  7  heures  du  matiu,  appareil . .  4°85 

a             à  5''3o'"  dusoir 4°a8 

Eau  évaporée  eu  10''  So"'  au  soleil 57 

Pardécimètre  carré  de  feuille  en  une  heure o8',3o 

Le  aS  septembre  à  3  heures,  température 16%  00 

11                         psychromètre 87 

Air  calme,  ciel  pur. 


Le  38  septembre,  à  5''3o'°  soir,  appareil j  .  4o38 

Le  29  septembre,  à  7''  o'"  matin 4026 

Eau  évaporée  en  i3''  3o"  pendant  la  nuit a 

Par  décimètre  carré  de  feuille  eu  une  heure o ,  008 


« 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  36^ 

Le  2g  k  y  heures  du  matin  :  température.. i5°,'0 

))  psychromètre go° 

Aircal  me. 

Le  29  septembre,  à  7  heures  du  matin,  appareil. .      4026 
Le  2  octobre,  à  i  heure  après  midi 386o 

Eau  évaporée  en  cinquante-quatre  heures,  le  jour 

et  la  nuit 166 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o^^,  16 

Température 12a  1-5** 

Psychromètre ^4  à  91** 

Le  9  octobre  à  9  heures  du  matin,  appareîL  . .  .      3694,5 

Eau  évaporée  en  1 48  heures,  jour  et  nuit idi  ,5 

Par  décimètre  carré  en  une  heure o,o4 

Depuis  le  29  septembre,  le  thermo- 
mètre vers  le  lever  du  soleil  a 

O  0 

indiqué 5  à     y 

Le  psychromètre  de 80  à  90 

A  2  heures,  thermomètre i3  à  i4 

Psychromètre 70  à  73 

Vent  d'est. 

Si  l'on  considère  l'eau  évaporée  pendant  la  nuit  comme 
nulle,  on  trouve  pour  la  transpiration  des  feuilles  de  pla- 
tane pendant  la  journée  par  décimètre  carré  en  une  heure  : 

Le  28  septembre o ,  3o 

Du  29  septembre  au  2  octobre o,  20 

Du  2  au  9  octobre o ,  07 

Les  feuilles  en  contact  avec  Tair  avaient  conservé  toute 
leur  fraîcheur;  la  diminution  constatée  dans  leur  transpi- 
ration à  partir  du  29  septembre  est  expliquée,  d'un  côté, 
par  l'abaissement  de  la  température  et  l'accroissement  de 
rhumidité  de  l'air. 

L'eaii  de  la  jauge  dans  laquelle  plongeaient  les  feuilles 
fonctionnant   comme  racines,    puisqu'elles  fournissaient 


,    BOUSSISOADLX. 


l'eau  ëvaporée,  avait  gardé  sa  limpidité.  Cepeadant,  bien 
que  les  feuilles  submergées  présentassent  une  belle  teinte 
verte  et  l'apparence  qu'elles  avaient  avant  leur  submersion, 
elles  étaient  enduites  d'une  légère  coucbe  d'une  matière 
visqueuse  qu'on  en  détacKait  aisément  par  le  frottement, 

II.  Dans  une  expérience  faite  sur  des  feuilles  de  betteraves 
attenant  à  la  racine  et  dont  une  partie  plongeait  dans  l'eau, 
tandis  que  l'autre  éuit  dans  l'air  (^^.  4)t  le  résultat  fat 


bien  différent  ;  on  avait  coupé,  en  C,  le  corps  de  labetterave. 
En  un  jour  les  feuilles  placées  k  l'air  furent  toutes  flétries; 
lecolletdela  racine  n'établissait  pas  une  communication anf- 
fîsaute entre lesfeuilles  submergées  etcelles  qui  nel'étaient 
pas. 

III.  Afin  de  bien  établir  que  dans  l'expérience  sur  le 
platane  la  transpiration  avait  diminué  par  le  fait  du  re- 


FONCTIOHS   PHYSIQUES    DBS    FEUILLES.  369 

froidîsGemeni  de  l'atmosplièi'e;  on  rapportera  une  série 
d'observations  sur  la  vigne  pendant  laquelle  on  a  siiÎTi  avec 
beaucoup  d'attention  les  variations  du  thermomètre  et  du 
psychromètre. 

Le  8  septembre  1868,  un  rameau  fut  plongé  dans  l'eau 
parsa  base.  La  surface  des  feuilles  submergées  F  était  i5  dé- 
cimètres carrés  (^^.5);  celle  de  16  feuilles  maintenues  hors 
Fig.  5. 


de  l'eau  ^3  décimètres  carrés.  Un  rameau  semblable  fut  en 
même  temps  plongé  dans  l'eau  par  sa  base,  la  section  de  la 
tige  ayant  1  centimètre  carré. 

On  plaça  les  appareils  au  soleil  : 
Le  8  septembre  à  ii^'Ôo"  du  matin,  l'appareil  k 

feuilles  immergées  pesait. ., 4443 

Le  9  septembre,  à  5''3o°'  du  malin ,      44^0 

Eau  évaporée 2'S 

AmuOti  dt  Chim.  et  de  Phjn.,  S*  lérie,  t.  Xlll.  (Mm  1878.)      34 


ijO  J.    BOUSSIirGÀDLT. 

La  transpiration  nocturoe  est  si  faible  en  septembre 
qtt>'<^B  peut  la  négliger  et  admettre  pour  la  durée  de  l'expo- 
sition au  jour  5^  4o°*^  P^i*  conséquent,  on  aurait  pour  Teau 
transpiréepar  décimètre  carré  de  feuille  en  unebeure.  o*%  17 

Le  8  septembre  la  température  monta  à 27^,4 

Le  psychromètre  indiquait 60® 

Le  10  septembre  à  5^  3o"  du  matin,  le  poids  de 

l'appareil  était iSpS 

Eau  évaporée  le  jour  et  la  nuit  depuis  le  9  à  la 

même  heure 22 

Adoptant  12  heures  pour  la  transpiration  dans  la 
journée,  on  a  par  décimètre  carré  en  une  heure .      ©^""joS 

Les  feuilles  se  trouvaient  en  très-bon  état.  Tout  au  con- 
traire, celles  dont  la  section  de  la  tige  seule  plongeait  dans 
Teau  étaient  flétries  et  pendantes  ^  par  leur  section  d'un  cen- 
timètre carré,   il  n^avait   pas  pénétré   assez  d'eau  pour* 
subvenir  à  la  transpiration. 

Voici  les  pesées  faites  à  différentes  époques.  La  perte  de 
poids  eicprime  l'eau  évaporée  par  les  feuilles  en  contact  avec 
l'air,  dont  la  surface  totale  (les  deux  côtés  du  limbe)  était 
de  23  décimètre  carrés  au  début  de  l'expérience.  Cette  eau 
ayant  été  absorbée  par  les  feuilles  submergées  ayant  une 
surface  de  i5  décimètres  carrés,  on  a  joint  au  tableau  la 
température  de  l'air  mesurée  à  l'ombre,  et  les  indications 
psy chromé  triques . 

Eaa 
éyaporée. 

Par  déci-  j^„  ,gy^  £nj„ 

Depuis  mètre  carré  du  «olell.  a«kSkMres. 

Poids  la  de  feuilles  m,  ^,  ■  ■ 

ide         précédente  en  Tempe-    Psychro-    Tampé*    Piydvo- 

Dates.  Heures.  Tappareil.        pesée.  une  heure.  rature.       mètre      rakar«.     mèirs. 

h    m  «r 

Sept.  8         11.4^  444^  gr  gr  o  000 

9       5.2a  44^0  23        0,170         24,0       4»       27,4      39 

10  5.3o      43g8      22    0,080     i4,4    63    28,8  '  3i 

11  5.3o      4375      23    o,o83     i3,5    82   38»a   34 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  37 1 

Eaa 
éyaporée. 

PardécI-  Auleror  Entre 

Depuii   mètre  carré  daaolell.  a  et  8  heurei. 

Poids              la        defeallles  ,,          .n  . — — ,      -     ^ 

de        précédente       en  Tempe*    Psyohro-  Tempe-    Psychro- 

Dates.        Heares.                    l'appareil,     pesée.       uneheare.  rature,      mètre.  rature,      mètre, 

h     m                                  gr              gr         gr  6                o  o              o 

12  (*)   5.3o                         4355            20          0,076  i5,2          78  19,4        66 

i3  6.3o                      4334»^  30,5  0,072  12,2  79  19,9  5o 

14  6.3o                       4^19)^  i^»o  o,o65  10,8  65  27,2  87 

18  6.3o                       l\'x\%  101,5  0,097  9»7  72  22,3  36(') 

19  3.3o  (')  ap.  midi.  417^  4^}^  0,098  i5,o  68  26,4  ^9 
24  6.0  matin.              t\\o^  65, 0  0,079  ^^y^  7^  21,0  57 

NoY.  2        6.0  ('*)  matin.        4^^^  108,0      0,020        11,0  96        i4}6        72 

Jusqu'au  24  septembre,  la  transpiration  des  feuilles,  si 
l'on  en  excepte  la  première  observation,  fut  assez  régu- 
lière; à  partir  du  9,  les  températures  minima  et  maxima, 
l'étal  hygrométrique  de  l'air  ne  présentèrent  pas  de  grands 
écarts.  Après  cette  date  le  vent  d'ouest  domina,  le  temps  de- 
vint pluvieux.  Il  y  eut  de  forts  brouillards,  des  gelées 
blanches;  la  température  baissa  notablement;  Fhumidité 
se  maintint  assez  près  du  maximum.  La  transpiration 
devait  diminuer  :  c'est  ce  qui  arriva.  La  pesée,  faite  le  a  no- 
vembre, ne  donna  plus  qu'une  évaporation  de  o^'^joa  par 
décimètre  carré  en  une  heure.  Les  feuilles  du  rameau  se 
comportèrent  comme  celle  d'une  vigne  voisine  en  pleine 
terre  ;  elless  supportèrent  sans  souiSrir  la  forte  chaleur  et 
la  sécheresse  amenées  par  le  vent  d'est  qui  régna  jusqu'au 
19 septembre;  elles  restèrent  fermes,  alors  que  les  feuilles 
des  betteraves  de  la  grande  cultj^re  étaient  flétries.  Même 
en  plein  soleil,  les  feuilles  de  l'appareil,  exposées  à  l'air. 


(*)  Une  feuille  d'une  surface  de  11 5^,  i  est  détachée  par  accident.  La  sur- 
face exposée  à  Tair  devient  2i'=4,85. 

(')  Moyenne  des  observations  :  vent  d'est  très-fort  le  i5  septembre. 

(')  Un  vent  violent  soufQant  de  l'ouest  oblige  à  rentrer  l'appareil. 

(^  )  Une  gelée  matinale,  survenue  le  28  septembre,  a  fait  tomber  cinq  feuilles 
ayant  ensemble  une  surface  de  9^^,65.  La  surface  évaporatoire  a  été  ainsi 
réduite  de  12^^,22. 


Sja  J.    BOUSSIirGÀliLT. 

procuraient  une  sensation  de  fraiclieur  à  la  main;  le 
20  septembre  quelques-unes  portaient  des  points  jaunes 
que  l'on  voyait  aussi  sur  les  feuilles  de  la  vigne  en  pleine 
terre.  Le  a6  septembre,  il  y  eut  un  fort  brouillard,  elles 
prirent  une  teinte  jaune,  puis  Taspect  automnal. 

On  était  à  l'époque  de  la  chute  des  feuilles,  le  rameau 
en  perdit  plusieurs.  Le  2a  octobre,  on  mesura  une  jeune 
pousse  et  un  bourgeon  survenus  depuis  le  commencement 
des  observations.  Geltefeuille  tardive  avait  une  nervure  de 
55  centimètres.  Quand  on  démonta  l'appareil,  deux  jeunes 
feuilles,  provenant  du  bourgeon,  offraient  une  superficie 
de  5o  centimètres  carrés.  Les  feuilles  submergées  depuis 
deux  mois  étaient  vertes  et  enduites  d'une  substance 
gluante,  ainsi  qu'on  l'avait  observé  sur  les  feuilles  immer* 
gées  du  platane.  L'eau  du  flacon,  devenue  trouble,  s'ë- 
claircit  bientôt  en  laissant  déposer  un  sédiment. 

En  résumé,  dans  ces  observations,  les  feuilles  de  l'ap- 
pareil A  en  contact  avec  l'air  ont  transpiré  à  peu  près 
comme  elles  l'eussent  fait  si  le  rameau  qui  les  portait  eût 
appartenu  à  une  plante  en  pleine  terre.  Les  feuilles  sub- 
mergées ont  fonctionné  comme  surface  absorbante  k  la 
manière  des  racines*,  elles  présentaient,  d'ailleurs,  avec  ces 
organes,  cette  analogie,  que  l'étendue  de  leur  superficie 
différait  peu  de  celle  des  feuilles  exposées  à  l'atmosphère. 

Dans  deux  autres  expériences,  en  1 871,  on  se  borna  â 
constater  la  durée  de  la  vitalité  des  feuilles  sans  mesurer 
leur  transpiration.  • 

L  Une  pousse  de  laurier-cerise  fut  disposée  de  manière 
que  les  feuilles  submergées  eussent  une  surface  égale  à 
celles  qui  ne  l'étaient  pas.  Les  feuilles  exposées  à  l'air  se 
maintinrent  en  parfait  état  pendant  quatre  mois,  de  juin  k 
octobre. 

IL  Un  plant  de  topinambour,  mis  à  ce  régime,  ne  ré- 
sista qu'alors  que  les  feuilles  plongées  dans  l'eau  eurent  une 
surface  quatre  fois  aussi  étendue  que  celles  qui  fonction- 


FOIÏCTlOnS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  373 

aaient  à  Tair  libre.  Lorsque  Tinsolation  était  forte,  les 
feuilles  placées  à  Pair  se  fanaient,  maïs  elles  se  redres- 
saient pendant  la  nuit.  Quelques  feuilles  se  développèrent 
au  sommet  de  la  tige.  L'exposition  dura  trois  mois,  de  juillet 
à  septembre. 

Comment  les  feuilles  submergées  introduisent-elles 
Teau  dans  les  feuilles  du  même  rameau  qui  ne  le  sont  pas? 
Est-ce  par  endosmose,  est-ce  par  imbibition,  par  capilla- 
rité? 

Ce  qui  semble  évident,  c'est  que,  pour  que  l'introduction 
se  réalise,  il  faut  qu'il  n'y  ait  pas  de  solution  de  conti- 
nuité entre  Tépiderme  de  la  surface  absorbante  et  Tépi- 
derme  de  la  surface  évaporatoire,  ainsi  qu'il  arrive  dans 
les  conditions  normales  de  la  végétation  où  Tépiderme  en- 
veloppe la  plante,  depuis  les  feuilles  jusqu'aux  racines. 

L'eau  pénètre  donc  le  tissu  épidermique  des  feuilles 
submergées,  de  mèmequ'elle  pénètre  celui  des  racines,  et, 
quoiqu'on  ait  dit,  ce  tissu  possède  à  la  fois  la  faculté  ab- 
sorbante et  la  faculté  évaporatoire.  Dans  une  feuille,  le 
côté  interne  del'épiderme  en  contact  avec  le  parenchyme 
absorbe  des  liquides,  et  si  la  cuticule  qui  la  recouvre  ne  les 
laisse  pas  suinter,  si  elle  n'est  pas  mouillée  k  l'extérieur, 
elle  offre  néanmoins  un  libre  passage  à  Teau  qui  en  émane 
à  l'état  de  vapeur  ^  en  un  mot,  la  cuticule  prélève  de  l'eau 
en  touchant  un  corps  humide,  et  la  cède  à  Tair  ambiant 
quand  il  est  à  un  état  hygrométrique  inférieur  à  loo  de- 
grés du  psychromètre. 

§  V.  —  Absorption  de  Veau  parla  surface  des  feuilles. 

• 

Dans  la  saison  chaude,  par  un  temps  sec  persistant,  la 
végétation  est  en  quelque  sorte  suspendue,  les  feuilles 
tombent  comme  en  automne^  naturellement  les  herbacées 
sont  toujoursplus  atteintes  que  les  arbres.  Il  n'est  pas  rare 
de  voir,  après  de  fortes  insolations,  les  feuilles  des  bette- 


374  '•    BOUSSI1V6ÀULT. 

raves,  des  topinambours,  des  cueurbîtacées,  des  grandes 
cultures,  devenir  molles,  fanées  à  la  fin  du  jour;  puis,  si, 
après  le  coucher  du  Soleil,  l'atmosphère  est  calme,  on  les 
retrouve  vivaces  le  lendemain  matin.  C'est  que,  la  nuit, 
rhumidité  de  Pair  est  un  obstacle  à  la  transpiration;  Teau 
arrivant  du  sol  s'accumule  dans  l'organisme  ;  ensuite,  si 
l'air  n'est  pas  agité,  si  le  ciel  est  pur,  la  rosée  déposée  sur 
les  feuilles  les  pénètre.  L'eau  réparatrice  vient  alors  de  la 
terre  et  de  l'atmosphère.  Ce  qui  tend  à  faire  croire  au  con- 
cours de  la  rosée  dans  le  redressement  des  feuilles  fanées 
dans  les  circonstances  que  je  viens  de  signaler,  c'est  ce 
qu'on  voit  maintes  fois  dans  un  champ  de  betteraves.  Les 
feuilles  flétries  des  plants  placés  sous  les  arbres  ne  se  re- 
lèvent pas  le  matin  quand  la  terre  est  bien  desséchée  à  la 
surface:  c'est  qu'alors, étant  abritées,  elles  ne  reçoiventpas 
de  rosée,  parce  qu'elles  ne  se  refroidissent  pas  en  rayon- 
nant vers  l'espace;   dans  tous  les  cas,  la  flétrissure  des 
feuilles  est  due  à  ce  que  la  sève  ne  monte  pas  assez  vite 
pour  remplacer  l'eau  transpirée.  C'est,  au  reste,  ce  qu'éta- 
blissent surabondamment  les  expériences  que  j'ai  décrites 
et  qui  montrent  que  les  plantes  conservent  leur  état  de 
langueur  occasionnée  par  la  chaleur  et  la  séchieresse,  jus- 
qu'à ce  que  la  pluie  imbibe  leurs  feuilles,  avant  même 
qu'elle  soit  entrée  assez  profondément  dans  la  terre  pour 
atteindre  leurs  racines. 

Cette  action  efficace  de  la  pluie,  de  la  rosée,  du  brouil- 
lard, en  un  mot  celte  absorption  directe  de  l'eau  par  les 
parties  vertes  des  végétaux  ayant  été  niée  par  les  uns, 
admise  par  les  autres,  il  en  est  résulté  une  confusion  que 
je  vais  essayer  de  faire  disparaître.  On  a  vu  que  Calandrini 
et  Ch.  Bonnet  accordaient  aux  feuilles  l'aptitude  d'as- 
pirer, de  condenser  les  météores  aqueux  qu'ils  envisa- 
geaient comme  étant  une  nourriture  essentielle  aux  plantes. 
On  a  beaucoup  écrit  sur  ce  sujet  ;  je  me  limiterai  à  résumer 
ici  les  observations  de  M.  Duchartre. 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  3^5 

I.  Des  branches  feuiilées,  dont  la  section  avait  été  soi- 
gneusement mastiquée,  ont  été  plongées  pendant  quelque 
temps  dans  Teau,  elles  ont  augmenté  de  poids  en  propor- 
tions variables  suivant  les  espèces.  M.  Duchartre  croit 
pouvoir  en  conclure  que  si  les  feuilles  sont  dépourvues  de 
la  faculté  d'absorber  la  vapeur  aqueuse  répandue  dans  Tair, 
par  compensation  elles  possèdent  celle  d'absorber  Teau 
liquide  qui  les  mouille,  telle  que  la  pluie,  le  brouillard,  la 
rosée  (*). 

II.  Des  recherches  entreprises  dans  le  courant  de  Tété 
et  de  l'automne  i856  «  établissent  le  principe  que,  con- 
trairement aux  idées  reçues,  les  plantes  n'absorbent  pas 
l'eau  de  la  rosée  qui  les  mouille,  quelque  abondante  qu'elle 
puisse  être,  du  moins  dans  nos  climats  et  dans  les  con- 
ditions ordinaires  de  la  végétation,  et  que  le  seul  effet 
qu'elle  produise  est  d'arrêter,  par  sa  présence,  la  transpi- 
ration qui  eût  eu  lieu  sans  elle  (').  » 

m.  Revenant  sur  ce  sujet,  M.  Duchartre  dit,  en  1860  : 
«  On  a  pensé  de  tout  temps,  et  l'on  pense  encore  au- 
jourd'hui, que  l'eau  de  la  pluie  qui  mouille  les  parties 
extérieures  des  plantes  pendant  un  temps  plus  ou  moins 
long  est  absorbée  par  elles  et  vient  ainsi  concourir  à  la 
nutrition.  »  C'est  là  une  opinion  qui  n'est  pas  appuyée  sur 
des  expériences  directes.  J'ai  cru  qu'il  y  avait  intérêt  à 
reconnaître  si  elle  est  l'expression  exacte  des  faits.  Des 
pieds  jeunes  cl  vigoureux  de  Fuchsia  globosa,  de  Veronica 
tindlefana,  de  Flox  decussata  ont  offert  ce  fait  remar- 
quable que,  après  être  restés  exposés  à  la  pluie  même  pen- 
dant dix-huit  heures,  ils  n'ont  pas  subi  une  augmentation 
de  poids  appréciable^  ils  ont  plutôt  éprouvé  une  légère 


(*)  Comptes  rendus  des  séances   de  V  Académie  des  Sciences  y  t.  XLII, 
p.  790. 

(■)  Comptes  rendus  des  séances  de  V Académie  des  Sciences,   t.  XL VI, 
p.  204. 


376  J.    BOUSSIIfGÀDLT. 

diminution.  Il  semble  logique  de  conclure  de  là  que  leurs 
parties  extérieures,  liges,  rameaux  herbacés,  feuilles  tant 
jeunes  qu'adultes,  se  sont  montrées  dépourvues  de  la  faculté 
d'absorber  Teau  qui  mouillait  et  lavait  longuement  leur 
surface  (*)• 

Les  divergences  dans  des  résultats  obtenus  à  Taide  de 
méthodes  irréprochables  tiennent,  je  crois,  à  une  circon- 
stance que  je  formulerai  plus  bas.  La  vérité  est  que  les 
parties  vertes  des  végétaux  peuvent  absorber  ou  ne  pas 
absorber  l'eau  liquide,  la  rosée  et  même  la  vapeur  aqueuse, 
suivant  les  conditions  dans  lesquelles  elles  se  trouvent. 
Avant  de  les  signaler,  je  rapporterai  ici  ce  que  j'ai  ottsenré 
au  Liebfrauenberg. 

On  était  au  25  juillet,  depuis  vingt  jours  il  n'avait 
pas  plu  ]  à  l'ombre  le  thermomètre  marquait  de  ai  à  3o  de- 
grés, le  psychromètre  36  à  4o  degrés  ;  le  vent  soufflait  de 
l'est  presque  sans  interruption.  De  petites  pervenches, 
placées  en  bordures  dans  le  jardin,  présentaient  des  feuilles 
tellement  penchées  qu'elles  touchaient  les  tiges.  La  terre 
était  sèche,  poudreuse  jusqu'à  une  profondeur  de  10  i 
i5  centimètres.  Les  arbres  commençaient  à  se  dépouiller, 
de  jeunes  pommiers  plantés  en  automne  périrent,  les 
plants  de  betteraves,  de  topinambours  étaient  flétris; 
seuls,  la  vigne,  le  tabac  ne  paraissaient  pas  soufirir;  plu- 
sieurs fois,  au  reste,  j'avais  eu  l'occasion  de  reconnaître 
combien  ces  plantes  résistent  à  la  sécheresse. 

I.  J'ai  voulu  voir  si  les  pervenches,  après  une  séche- 
resse aussi  intense,  absorberaient  la  vapeur  aqueuse. 

A  8  heures  du  matin  on  en  détacha  un  rameau  pesant 
4  grammes,  sur  lequel  il  se  trouvait  vingt  feuilles  ayant 
une  surface  de  33 1^^^, 2,  soit  pour  les  deux  côtés  du  limbe 
662^^,4.  Le  rameau  fut  introduit  sous  une  cloche  dont  les 

N 

(')  Comptes  rendus  des  séances  de  l'Académie  des  Sciences,  t.  L,  p.  SSg. 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  877 

parois  mouillées  reposaient  sur  de  Teau  exempte  d'acide 
carbonique. 

gr 

A  8  heures  du  matin,  poids  du  rameau 4»^^ 

Après  vingt-cinq  heures  passées  dans  une  atmo- 
sphère saturée  de  vapeur  d'eau 4>i5 

Augmentation  de  poids o,  i5 

Je  ferai  remarquer  que  le  rameau  de  pervenche  était 
resté  : 

A  la  lumière  difïuse  pendant  seize  heures. 

A  l'obscurité  (la  nuit)  pendant  neuf  heures. 

Cette  circonstance  est  à  noter,  parce  que  l'air,  ne  ren- 
fermant pas  de  gaz  acide  carbonique,  les  feuilles  n'avaient 
pu  fixer  du  carbone  durant  la  journée,  tandis  que  la  nuit 
elles  en  avaient  perdu  par  la  combustion  respiratoire,  de 
sorte  que  l'accroissement  de  poids  a  dû  être  un  peu  supé- 
rieur à  celui  indiqué   par   la   balance. 

Pendant  leur  séjour  dans  l'atmosphère  saturée  de  va- 

peur,  les  feuilles  auraient  absorbé  ^-V-7  =  o«',0!i3  d'eau 

par  décimètre  carré  de  surface. 

Immédiatement  après  la  pesée,  le  rameau  fut  replacé  sous 
la  cloche  où  il  est  resté  douze  heures  à  la  lumière  diffuse. 

Au  commencement  il  pesait 49^^ 

A  la  fin 4»^^ 

Augmentation  en  douze  heures o,o5 

L'absorption  de  la  vapeur  aqueuse  fut  moins  prononcée. 

Il  est  donc  évident  que  les  pervenches,  dans  l'état  ou 
elles  étaient  après  avoir  éprouvé  une  longue  sécheresse, 
ont  enlevé  de  l'eau  à  l'atmosphère  dans  laquelle  elles 
étaient  confinées.  L'absorption  de  la  vapeur  eut  lieu  avec 
une  grande  lenteur  ^  on  ne  pouvait  prolonger  l'expérience: 
le  plant  durait  pu  en  souffrir. 


378  J.    BOUSSINGAULT. 

n.  En  sortant  de  Fair  humide,  le  même  rameau  de  per* 
venche  a  été  plongé  pendant  douze  heures  dans  de  l'eau  ne 
contenant  pas  d'acide  carbonique  ;  après  immersion,  égoutté 
et  essuyé  avec  un  papier  buvard  : 

Le  rameau  a  pesé 9»  38 

Avant  l'immersion,  il  pesait 4 9^0 

Eau  absorbée . .      5 , 1 8 

Toutes  les  feuilles  étaient  redressées,  fermes,  d'une  belle 
teinte  verte.  Elles  avaient  fixé  o^'^,  778  d'eau  par  surface 
d'un  décimètre  carré.  Durant  l'immersion,  la  température 
s'était  maintenue  à  21  degrés. 

III.  Le  même  rameau  a  été  suspendu  à  Tair  : 

"P"!"'' ; 9'^M  Différence. .. .      o^MS 

Une  heure  après 9,20  ) 

Deux  heures  après 8,85  j  Différence  . . .     o8'',35 

Le  thermomètre  marquait  20,  le  psychro mètre  85  degrés. 
La  perte  de  poids  provenait  de  la  transpiration  des  feuilles. 

Durant  la  première  heure,  cette  perte  a  été  de  oS'^oayj 
dans  les  deux  heures  qui  ont  suivi  par  décimètre  carré  et 
par  heure  0,026. 

Le  27  juillet,  avec  un  vent  d'ouest,  il  survint  une  plaie 
qui  tomba  presque  sans  interruption  pendant  quarante- 
huit  heures. 

Le  29,  les  pervenches  du  jardin  étaient  relevées  ;  cepen- 
dant la  pluie  n'avait  pas  encore  pénétré  le  sol  à  plus 
de  2  ou  3  centimètres  de  profondeur,  au-dessous  la 
terre  était  encore  sèche.  Les  feuilles  des  plants  disposés  en 
bordure  avaient  donc  absorbé  l'eau  pluviale,  de  même 
qu'alors  qu'elles  étaient  submergées. 

IV.  Le  3o  juillet,  après  la  pluie,  un  rameau  très-vîvace 
de  petite  pervenche  resta  plongé  dans  l'eau  pendant  doaze 


FOIiCTiONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  '^79 

heures,  ainsi  qu'on  avait  fai  t  prëeédemment  pour  un  ra- 
meau portant  des  feuilles  flétries  : 


gr 


Avant  rimmersion,  le  rameau  pesait 5,oo 

Après 5 ,  o3 

il  n'y  avait  eu  qu'une  absorption  d'eau  insignifiante. 

V.  Dans  le  mois  d'août,  après  une  nouvelle  période  de 
forte  sécheresse,  les  feuilles  d'un  asclépiade  penchaient  sur 
la  tige^  à  6  heures  du  soir  on  en  cueillit  une,  elle  pesait 
S^'jSa,  sa  surface  double  (dés  deux  côtés  du  limbe)  était 
262  centimètres  carrés;  on  la  mit  dans  l'eau^  où  elle  resta 
plongée  jusqu'à  8  heures  du  matin. 

Poids  de  la  feuille  avant  l'immersion 5,82 

Après 8 ,  20 

Eau  absorbée  en  quatorze  heures 2,38 

Par  décimètre  carré  de  surface 0,07 

Après  l'immersion,  la  feuille  est  devenue  rigide  et  d'une 
belle  teinte. 

VI.  A  la  fin  d'août,  après  une  pluie  continuelle,  les 
feuilles  de  l'asclépiade  du  jardin  reprirent  leur  aspect  nor- 
mal, tout  était  reverdi,  suivant  l'expression  des  jardiniers. 

On  détacha  d'un  pied  d' asclépiade  deux  feuilles  pesant 
ensemble  9^^,00,  ayant  une  surface  double  de  287  centi- 
mètres carrés  ]  les  feuilles,  après  immersion,  ne  changèrent 
pas  de  poids,  elles  n'absorbèrent  pas  d'eau. 

YII.  A  la  même  époque,  la  terre  étant  humide,  on 
cueillit  à  9  heures  du  matin  : 

1®  Deux  feuilles  de  pla- 

*  gr  ^  cq 

tane  pesant  ensemble. .  12,8  Surface  double  844 

2^  Deux  feuilles  de  vigne.  8,2  )>  4^0 
3*^  Deux  feuilles  de  Bous- 

singaultia 7,8                  »  /32 


38o  J.    BOUSSIIIGÀULT. 

Les  feuilles  de  platane  et  de  vigne  furent  cueillies  an 
soleil,  les  feuilles  de  BoussingauUia  à  Tombre.  Toutes, 
après  la  cueillette,  restèrent  dans  l'eau  durant  sept  heures  : 

Platane.  Yî|^e.      Booflûnganltia. 

fT  cr  gr 

Poids  avant  rimmersion. .  .    .      12,8  8,2  7,0 

Après i3,i  8,3  7,8 

Différence o,3  0,1  0,0 

Si  l'on  considère  l'ëtendue  des  surfaces  des  feuilles,  l'ab- 
sorption a  été  très-faible. 

Par  décimètre  carré  :  platane o,o35 

»  vigne o,oa5 

Ces  feuilles,  lorsqu'on  les  arracha  de  la  plante,  à  9  heures 
du  matin,  étaient  déjà  en  transpiration,  transpiration  qui 
devait  être  plus  prononcée  que  pour  les  feuilles  de  Boussîn- 
gaultia  que  les  rayons  du  Soleil  n'avaient  pas  frappées. 

YIII.  Au  commencement  de  septembre,  il  n'avait  pas 

plu  depuis  deux  jours;  la   terre  était  bien  imbibée.  On 

cueillit  le  matin  à  8  heures  : 

Snrfooe 

doaUe. 

ir  rq 

!•  Deux  feuilles  de  vigne  pesant  ensemble.     8,5o  77a 

2®  Deux  feuilles  de  Boussingaultîa 5,3o  212 

3"  Une  feuille  de  laurier-cerise 3,27  m 

Les  feuilles  ont  été  submergées  pendant  quatre  heures  : 

Vigne.        BoussingauUia.      Laurier-ceiiae. 

...  ^'  ^'  *■■ 

Poids  avant  ]*immersion.     8,5o  5, 20  3, 27 

Après 8,90  5,3o  3,29 

Différence 0,40  0,10  0,02 

Eau  absorbée  par  déci- 

mè^tre  carré o,o52  0,047  0,01 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  38 1 

Sur  les  mêmes  plants,  recevant  le  soleil  depuis  le  matin, 
on  cueillit  à  6  heures  du  soir  : 

Surface 

double. 

gr  cq 

i^  Sur  la  vi{>nedeux  feuilles  pesant  ensemble.     13,9         700 
2^  Sur  la  Boussiogaultia 5,9         200 

Les  feuilles  furent  placées  sous  Teau  pendant  quatre 
heures  : 

Vigne.  Boussingaultia. 

«r  gr 

Poids  avant  Timmersion i3,9  5,o 

Après i4,5  5,5 

0,6  0,5 

Eau  absorbée  par  décimètre  carré.       o , 086  o ,  25 

Ainsi  les  feuilles  cueillies  le  matin  ont  absorbé  moins 
d^eau  que  celles  qui  l'ont  été  à  la  fin  de  la  journée.  Ce  fait 
suffit  pour  montrer  nettement  les  conditions  dans  lesquelles 
les  parties  vertes  absorbent  ou  n^absorbent  pas  d'eau.  La 
feuille  d'une  plante  végétant  dans  un  sol  humide  ren- 
ferme, au  lever  du  soleil,  un  maximum  d'e^u  de  constitu- 
tion; aussitôt  qu'elle  commence  à  transpirer,  si,  comme  il 
arrive  ordinairement,  l'eau  qu'elle  émet  n'est  pas  com- 
pensée par  celle  qu'amène  la  sève  ascendante,  il  7  a  com* 
mencement  de  dessiccation  et  par  suite  aptitude  à  l'ab- 
sorption. 

Par  une  sécheresse  persistante  les  feuilles  finissent 
par  ne  plus  remplir  qu'imparfaitement  leurs  fonctions 
aériennes;  arrivées  à  un  certain  d^ré  de  siccité,  elles 
peuvent  même  condenser  la  vapeur  aqueuse  de  l'air;  il  en 
est  tout  autrement  quand  la  feuille  est  pourvue  de  son  ean 
constitutionnelle  :  son  poids  n'augmente  plus  ni  par  la  sub- 
mersion, ni  dans  une  atmosphère  saturée  d'humidité. 

On  doit  donc  reconnaître,  avec  les  cultivateurs  et  les 
jardiniers,  qu'après  de   longues  sécheresses  la  pluie,  la 


38a  J*    BOUSSUfGAULT. 

rosée,  en  pénétrant  directement  les  feuilles,  contribuent  à 
ranimer  la  vitalité  du  végétal. 

Exposées  à  une  pluie  persistante,  les  feuilles  se  compor- 
tent autrement  que  les  fruits;  lorsqu'elles  ont  toute  Teau 
de  constitution,  elles  cessent  d'en  absorber.  Aussi  leur 
épiderme  n^est-îl  pas  déchiré  par  suite  d'un  accroissement 
de  volume,  comme  il  arrive  pour  les  prunes,  les  cerises, 
les  raisins,  etc.,  et,  à  moins  qu'elles  ne  soient  a  cet  état 
morbide  qui  détermine  l'apparition  de  la  miellée,  leur 
surface  ne  présente  aucune  substance  concrète^  cependant 
elles  contiennent  dans  leurs  cellules  des  matières  solubles, 
du  saccharose,  des  sucres  réducteurs,  des  sels  alcalins, 
d'où  il  faut  bien  conclure  que  la  cuticule  n'enlève  que  de 
l'eau  pure  au  parenchyme  qu'elle  enveloppe  pour  l'émettre 
en  vapeur  pendant  la  transpiration.  Cette  émission,  on  Ta 
démontré,  diminue  avec  la  perte  de  l'eau  constitutionnelle  ; 
parvenue  à  un  état  avancé  de  dessiccation,  la  feuille  se  dé- 
tache de  la  branché  et,  par  la  submersion,  ne  reprend 
plus,  à  beaucoup  près,  l'eau  qu'elle  a  perdue.  C'est  une 
feuille  morte. 

Les  expériei;ices  sur  la  transpiration  et  l'absorption  de 
l'eau  par  les  feuilles,  en  tenant  compte  des  circonstances 
météorologiques,  de  la  température,  de  l'état  hygromé- 
trique, de  l'agitation  de  l'air,  tendent  donc  à  établir  que, 
dans  les  conditions  normales,  l'ascension  de  la  sève  est  en 
retard  sur  l'évaporation  accomplie  à  la  surface  des  feuilles. 
En  effet,  elles  montrent  qu'une  plante  ne  transpire,  on 
pourrait  dire  ne  fonctionne,  que  dans  une  atmosphère  non 
saturée.  Aussi  toujours,  par  un  temps  humide,  souvent 
pendant  la  nuit,  les  organes  aériens  n'émettant  plus  de  va-^ 
peurs,  l'assimilation  cesse  ou  diminue.  L'eau  aspirée  par 
le  fait  de  la  transpiration  est  le  véhicule  des  principes  fer- 
tilisants répartis  dans  le  sol,  tels  que  les  composés  azotés, 
'  les  sels  alcalins  et  terreux.  Une  feuille  ne  fonctionne  donc 
complètement  qu'autant  qu'il  y  a  évaporation  à  sa  surface; 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  383 

et  qu'on  ne  croie  pas  cependant  qu^alors  qu'elle  est  confi- 
née momentanément  dans  une  atmosphère  saturée,  il  n'y 
a  pas  exhalation  de  vapeur.  La  preuve  qu'il  n'en  est  pas 
ainsi,  c'est  que,  dans  cette  situation  anormale,  on  voit  ap- 
paraître des  gouttelettes  sur  les  parois  de  la  cloche  qui  l'a- 
brite, c'est  qu'alors  la  température  de  la  feuille  séquestrée 
est  notablement  supérieure  à  celle  de  l'air  ambiant;  il  est 
aisé  de  s'en  assurer,  et  c'est  pour  avoir  méconnu  cette  dif- 
férence de  température  que  des  observateurs  ont  attribué 
à  la  lumière  le  pouvoir  de  provoquer,  comme  la  chaleur, 
la  transpiration  des  organes  verts  des  végétaux. 

C'est  pendant  une  sécheresse  prolongée,  par  des  vents 
persistants  amenant  la  dessiccation  du  sol,  que  le  retard  de 
l'ascension  de  la  sève  ascendante  sur  la  transpiration  est 
plus  prononcée,  à  ce  point  que  les  plantes  succomberaient 
rigoureusement  si  la  pluie,  la  rosée,  le  brouillard  n'inter- 
venaient pas;  si,  en  un  mot,  l'eau  liquide  ne  possédait  pas 
la  propriété  de  pénétrer  dans  l'intérieur  des  feuilles  en 
leur  restituant  l'eau  de  constitution  qu'elles  avaient  laissé 
échapper,  remplaçant  ainsi  celle  que  les  racines  ne  sau- 
raient fournir  en  quantité  suffisante  tant  que  la  terre  est 
sèche. 

Dans  les  contrées  arides,  où  la  pluie  est  si  rare  qu'elle 
devient  un  événement,  les  fortes  rosées,  les  brouillards 
fréquents  sont  les  sources  principales,  sinon  uniques,  qui 
entretiennent  la  végétation.  Dans  des  régions  chaudes  in- 
tertropicales, éloignées  des  fleuves,  mon  père  a  vu,  par  un 
temps  calme  et  une  nuit  sereine,  la  rosée  déposée  en  telle 
abondance  sur  les  plantes  refroidies  par  le  rayonnement 
nocturne  qu'elle  ruisselait  sur  le  sol  en  ^l'abreuvant  pro- 
fondément. C'est  ainsi  que  des  météores  apportent  aux 
feuilles  d'abord,  à  la  terre  ensuite,  et,  par  conséquent, 
aux  racines,  Teau  nécessaire  à  la  végétation. 


384  J-    BOUSSINGAULT. 

§YI. — Absorption  y  par  les  feuilles,  des  sels  en  dissolution» 

Dans  ce  qui  précède,  il  a  été  établi  que,  dans  certaines 
conditions,  les  feuilles  absorbent  Peau  où  elles  sont  8ul>- 
mergées.  J'ai  dû  rechercher  si  les  substances  salines  péné- 
treraient dans  leur  parenchyme  en  même  temps  que  les  di»- 
solutionsdont  elles  font  partie.  La  question  est  intéressante» 
car  dans  le  cas  d'une  pénétration  le  rôle  des  feuilles  ne 
serait  plus  borné  à  l'introduction  de  Feau  dans  l'orga- 
nisme. 

Les  expériences  pour  constater  cette  absorption  des  sels 
ne  sont  pas  exemptes  de  difficultés.  En  raisonnant  d'après 
ce  qui  se  passe  avec  les  organes  souterrains,  on  ne  devait 
mettre  en  contact  avec  les  feuilles  que  des  dissolutions  extrê- 
mement diluées.  Ainsi,  selon  de  Saussure,  tel  sel  favorisant 
la  végétation  par  sa  nature  devient  nuisible  par  sa  quan* 
tité.  En  général,  une  dissolution  présentée  à  une  racine  ne 
doit  pas  dépasser  une  teneur  de  0,002  à  o,oo3  de  matière 
saline^  au  delà  de  ces  limites,  Téminent  physiologiste  a 
vu  que  tt  les  sels  dissous  sont  absorbés  par  les  spongioles 
en  moins  grande  raison  que  l'eau  dans  laquelle  ils  sont 
dissous  ». 

Dans  les  observations  portant  sur  des  racines,  la  solution 
que  l'on  fait  intervenir  peut  être  maintenue  à  un  degré 
constant  de  concentration.  Il  n'en  est  plus  ainsi  en  agis- 
sant sur  des  feuilles  dans  les  conditions  où  elles  fonction- 
nent, par  la  raison  que  la  dissolution,  restant  exposée  a 
l'air,  tend  à  se  concentrer  en  un  liquide  qui  cesse  d'être 
absorbable.  On  a  obvié  à  cet  inconvénient  en  faisant  usage 
d'un  sel  fort  peu  soluble  et  n'exerçant,  même  à  l'état  con- 
cret, aucune  action  nuisible  sur  les  plantes,  le  sulfate  de 
chaux.  L'eau  n'en  dissout  environ  que  0,002  à  la  tempéra- 
ture de  i5  à  20  degrés.  Il  arrive  alors  qu'en  plaçant  à  Pair 
la  dissolution,  l'eau,  en  se  desséchant,  laisse  bien  déposer 


FONCTIONS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  3So 

des  cristaux,  mais  le  liquide  qui  les  recouvre  ne  contient 
toujours  que  o,oor2  de  sulfate. 

Cette  propriété  du  sulfate  de  chaux  fournît  un  indice 
précieux  pour  reconnaître  si  une  feuille  absorbe  ou  n'ab- 
sorbe pas,  ou,  enfin,  n'absorbe  qu'une  fraction  du  sel  en- 
trant dans  la  dissolution  touchant  sa  surface.  Ainsi,  en 
exposant  à  l'air,  sur  une  lame  de  verre,  ou  dans  un  verre 
de  montre,  une  goutte  de  cette  dissolution  saline,  ayant  un 
volume  de  ~  de  centimètre  cube,  voici  ce  qu'on  observe  : 
après  quelque  temps  la  goutte  a  disparu,  et  l'on  trouve  à  sa 
place  une  tache  très-visible  à  l'œil  nu,  offrant  sous  la  loupe 
une  zone  d'aiguilles  de  sulfate  de  chaux.  Maintenant,  en 
posant  la  même  dissolution  sur  une  feuille,  trois  cas  peu- 
vent se  présenter  :  i"  la  goutte  laisera  un  résidu  ayant  un 
volume  égal  à  celui  qu'elle  laisserait  sur  la  lame  de  verre  ; 
2°  le  résidu  sera  moins  volumineux   quelquefois,  même  à 
peine  perceptible;  3°  la    goutte  disparaîtra  sans  laisser 
aucune  trace.  La  feuille,  dans  le  premier  cas,  n'aura  pas 
absorbé  de  sulfate;  dans  le  second  cas,  il  y  en  aura  une 
partie  d'absorbée, 'et  dans  le  d^^rnier  cas  la  totalité  du  sel 
aura  pénétré  dans  le  tissu  végétal.  Quand  la  goutte  laisse 
sur  la  feuille  une  faible  tache,  une  fraction  du  sel  qu'elle 
renfermait,  c'est  qu'alors  l'évaporation  a  eu  lieu  plus  rapi- 
dement que  l'absorption,  et  cela  est  si  vrai  qu'il  suffit  de 
poser  sur  celte  tache  une  goutte  d'eau  pure  pour  la  faire 
disparaître.  Si  la  tache  persistait  tout  en  ayant  diminué 
de  volume,  il  suffirait  d'une  nouvelle  addition  d'eau  pour 
l'éliminer.  Il  n'y  aurait  que  sur  une  surface  de  feuille  Im- 
perméable que  ce  résidu  de  sulfate  de  chaux  résisterait. 

Pour  obvier  à  une  trop  prompte  évapora tion,  on  a,^dans 
plusieurs  expériences,  recouvert  les  gouttes  de  dissolution 
avec  un  petit  verre  de  montre  dont  on  graissait  légèrement 
le&bord&  pour  déterminer  l'adhérence,  dâ  manière  à  inter- 
cepter là  communication  avec  Tair  ambiant;  on  suivait 
ainsi,  sous  >€e  verre,  la  disparition  graduelle  du  liquide. 

Annales  de  Chim,  et  de  Phys.,  5«  série,  t.  XIIl.  (Mars  i8;8.)      25 


386 


j.  boussiugault. 


Cette  disposition,  indiquée  dans  la  Jig.  6,  convenait  sur- 
tout lorsque  la  feuille  n'était  pas  douée  d'un  pouvoir 
absorbant  énergique. 

Fig.  6. 


H,  Terre  de  montre.  —  I,  {;outte  de  dissolutioii. 

Je  rapporterai  maintenant  quelques  observations,  me 
réservant  d'en  présenter  un  plus  grand  nombre  lorsque 
j'aurai  terminé  les  recherches  que  j'ai  commencées  sur 
l'absorption  des  sels  par  les  organes  verts  des  végétaux. 

I.  Le  1®' juillet,  dans  l'après-midi,  on  a  pris  dans  un 
champ  de  luzerne  quatre  feuilles  exposées  au  soleil  depuis 
le  matin,  une  partie  de  leur  eau  de  constitution  ayant  été 


FOMCTIOKS    PUYSIQIJBS   DES    FEUILLES.  38^ 

dissipée:  leur  faculté  absorbante  devait  être  alors  plus 
active. 

A  5  heures  du  soir,  on  déposa  deux  gouttes  de  solution 
de  sulfate  de  chaux  sur  Tendroit,  et  deux  autres  gouttes 
sur  Tenvers   de  deux  feuilles  : 

o 

Température 19 

Psychromètre 62  (*). 

Le  lendemain,  2  juillet,  au  matin,  les  gouttes  avaient 
disparu  sans  laisser  de  résidu;  ainsi,. par  Tendroit  comme 
par  Tenvers,  le  sulfate  de  chaux  était  entré  dans  les 
feuilles. 

II.  Le  2  juillet,  à  4  heures  du  soir,  on  cueillit  deux 
feuilles  de  vigne  ;  sur  Tendroit  de  Tune  et  sur  Tenvers  de 
l'autre,  on  posa  trois  gouttes  de  dissolution  : 

•  o 

Température 20 

Psychromètre 60 

Le  3  juillet,  à  8  heures  du  matin,  toutes  les  gouttes 
avaient  disparu  sans  laisser  de  taches.  On  plaça  deux  au- 
tres gouttes  de  solution  sur  Tendroit  et  sur  l'envers  des 
mêmes  feuilles.  A  3  heures  de  Taprès-midi ,  c'est-à-dire 
sept  heures  après*,  la  surface  des  feuilles  était  très-nette. 

A  la  même  date,  on  posa  des  gouttes  de  solution  sur  Ten- 
droit  et  l'envers  de  feuilles  de  haricot,  de  trèfle,  de  châ- 
taignier^ de  choux-raves  cueillis  l'aprcs-midi,  au  soleil. 
Les  feuilles  furent  portées  à  Tombre  dans  une  grande  salle 
où  la  température  varia  de  19  à  22  degrés,  le  psychro- 
mètre de  59  à  63  degrés. 

Vingt-quatre  heures  après,  toutes  les  gouttes  posées  sur 
les  deux  faces  des  feuilles  de  trèfle  et  de  châtaignier  avaient 
disparu   sans   laisser   aucune    trace.   Les  gouttes   persis- 


(•)  Thermomètre  sec,  19  degrés;  thermomètre  mouiUé,  i5  degrés;  ten- 
sion, i3%89;  humidité  relative,  63  degrés. 

25. 


388  J.   BOUSSIHGAULT. 

taieut  sur  les  autres  feuilles.  Ce  n'est  qu'après  une  expo* 
silion  de  irenle-sîx  heures  qu'elles  disparurent  sur  l'en- 
droit et  Tenvers  des  haricots  et  sur  l'envers  des  choux - 
raves  :  sur  Tendroit  du  choux,  on  voyait  à  la  loupe  une 
zone  de  petites  aiguilles  de  sulfate  ,  que  l'addition  d'une 
goutte  d'eau  élimina. 

III.  Le   5   juillet,    sur   des  feuilles  de  mûrier  blauc, 
cueillies  le  matin,  on  déposa  deux  gouttes  de  solution  sur 

l'endroit  et  sur  Tenvers.  Une  des  gouttes  fut  recouverte 
d'un  verre  de  montre. 

  9  heures,  les  feuilles  ont  été  placées  à  l'ombre^  la 
température  se  maintint  entre  i8  et  19  degrés,  le  psy- 
chromèire  entre  yS  et  77  degrés  ;  à  midi,  sur  l'endroit,  la 
goutte  non  recouverte  avait  disparu,  le  sulfate  de  chaux 
était  entré  dans  les  feuilles. 

Le  6  juillet,  au  matin,  la  goutte  posée  sur  l'endroit  et 
recouverte  était  encore  visible  :  elle  persista  jusque  vers 
2  heures. 

IV.  Le  10  juillet,  on  mit  en  observation,  k  8  heures  du 
matin,  des  feuilles  de  laurier-cerise,  de  laurier-rose,  d'as- 
clépiade. 

L'endroit  et  l'envers  reçurent  deux  gouttes  de  solution  : 
l'une  des  gouttes  abritée,  le  thermomètre  se  tint  entre  ao 
et  22  degrés.  Le  psychromètre  marqua  de  74  à  85  degrés. 

A  5  heures  du  soir: 

Laurier-cerise, — Sur  l'endroit,  la  goutte  libre  avaitlaissé 
une  trace  de  isulfate. 

Sur  l'envers  il  n'y  eut  pas  de  résidu. 

Laurier-rose,  —  Sur  l'envers  comme  sur  l'endroit»  les 
gouttes  disparurent  sans  laisser  de  sulfate. 

Asclépiade»  —  La  goutte  libre  a  laissé  un  résidu.  La 
goutte  abritée  sous  le  verre  de  montre  est  restée  entière. 

Les  goût  les  abritées  ont  persisté  jusqu'au  11  juillet.  En 


FO:%CTIO»S    PHYSIQUES    UES    FEUILLF.S.  iSif 

fait,  sur  l'asclépîade,  l'absorption   du  sulfate  a  été  très* 
iente,  incomplète. 

V.  Le  II  juîllei,  sur  deux  feuilles  de  topinambour,  et 
sur  deux  feuilles  de  betteraves,  cueillies  à  7  heures  du 
matin,  on  posa  sur  l'endroit  et  sur  l'envers  trois  gouttes 
de  solution  :  Tune  d'elles  était  abritée.  On  a  exposé  à 
l'ombre  : 

o 

Température à4 

Paychromètre 67 

A  10  heures  : 

Topinambour,  —  Sur  l'envers,  toutes  les  gouttes  étaient 
dissipées  sans  avoir  laissé  de  sulfate. 

Sur  l'endroit,  les  gouttes  restèrent  trois  ou  quatre 
heures  de  plus. 

Betteray^es,  —  A  u)  heures,  sur  l'endroit  et  sur  l'envers, 
Ics^outtes  persistaient  :  leur  disparition  n'eut  lieu  qu'après 
vingt-quatre  heures.  L'absorption  avait  été  fort  lente,  mais 
complète.  Il  n'est  resté  sur  l'endroit  qu'un  indice  de  sel. 

Le  11  juillet,  sur  des  feuilles  de  marronnier  d'Inde 
prififes  à  9  heures  du  matin,  on  posa  trois  gouttes  de  solu- 
tion. A  midi  toutes  avaient  disparu  en  laissant  une  tache 
sur  laquelle  on  mit  une  goutte  d'eau  pure.  Le  soir  l'eau 
ajoutée  et  les  taches  n'étaient  plus  visibles. 

Des  expériences  semblables,  et  qu'il  serait  inutile  de  rap- 
porter en  détail,  ont  été  faites  sur  des  feuilles  détachées  de 
i:oncombre,  de  platane,  de  grande  pervenche,  de  lierre,  de 
i'iris,  de  pécher  et,  constamment,  la  dissolution  de  jsulfate 
(le  chaux  a  été  absorbée  en  tout  ou  en  partie  par  l'endroit 
et  par  l'envers.  Lorsque,  après,  il  restait  une  zone  de  sul- 
fate, il  suffisait  de  faire  intervenir  un  peu  d'eau  pure  pour 
déterminer  l'absorption  totale  du  sel. 

Il  parut  singulier  que  ia  dissolution  déposée  sur  une 
feuille  sans  être  recouverte  se  dissipât  souvent,  sans  prOf 


SpO  J.  BOUSSINGÀULT. 

duire  un  résida,  ce  qui  impliquait  une  absorption  plus 
rapide  que  révaporation  du  dissolvant.  Cela  tient  à  ce  qoe 
la  feuille  se  dessèche  d^autant  plus  vite,  durant  rexposition, 
qu'elle  est  à  une  température  un  peu  supérieure  à  celle  de 
l'air;  qu'on  n'oublie  pas  d'ailleurs  que  sa  surface  est  fré- 
quemment de  plus  de  i  décimètre  carré,  par  conséquent 
beaucoup  plus  étendue  que  celle  du  liquide  avec  lequel 
elle  est  en  relation.  S'il  arrive  qu'elle  transpire  peu^  Teau 
de  dissolution,  n'étant  plus  absorbée  qu'avec  lenteur,  s'éra- 
porera  en  abandonnant  la  plus  grande  partie  du  sel  qu'elle 
contenait  :  c'est  alors  qu'on  aura  un  résidu,  une  tache  de 
sulfate. 

Dans  une  autre  série  d'expériences,  on  déposait  sur  les 
feuilles  des  gouttes  de  dissolution  renfermant  o,oo3  desul* 
fa  te  dépotasse,  de  nitrate  de  potasse,  de  chlorure  de  sodium, 
de  nitrate  d'ammoniaque.  On  a  pu  reconnaître  facilement 
Tabsorption  du  sulfate  et  du  nitrate  de  potasse,  dans  les 
conditions  où  le  sulfate  de  chaux  était  absorbé.  Il  n'en*  a 
plus  été  ainsi  pour  le  chlorure  de  sodium,  pour  le  nitrate 
d'ammoniaque.  Il  se  formait,  par  suite  de  l'évaporation, 
une  solution  concentrée  que  les  feuilles  ne  prenaient  plus, 
surtout  quand  on  observait  à  l'air  libre  :  aussi  les  résultats 
obtenus  avec  ces  agents  manquaient-ils  de  netteté.  Pour 
que  les  solutions  très-diluées  de  sulfate  et  de  nitrate  de 
potasse  fussent  directement  absorbées  en  totalité,  il  fallait 
des  conditions  météorologiques  exceptionnellement  favora- 
bles ;  presque  toujours  elles  laissaient  une  tache  de  sel  qu^on 
ne  faisait  disparaître  que  par  des  additions  d'eau  réitérées. 

Jusqu'ici  on  avait  observé  sur  des  feuilles  détachées;  on 
a  répété  les  expériences  en  agissant  sur  des  feuilles  atte- 
nant à  la  plante 

I.  Le  1 1  juillet  le  ciel  était  sans  nuages,  l'air  calme,  k 
3  heures  le  thermomètre  marquait  26  degrés,  le  psychro- 
mètre  5  r . 


FOMCTlOlfS    PHYSIQUES    DES    FEUILLES.  Spi 

  7  heures  du  soir  on  mît  des  gouttes  d*une  dissolution 
de  sulfate  de  chaux  sur  des  feuilles  de  rose  trémière,  de  vigne, 
de  géranium,  d'asclépiade,  de  laurier-cerise.  Les  gouttes 
furent  déposées  sur  l'endroit;  on  comprend,  en  effet, 
qu'il  était  impossible  de  les  faire  tenir  sur  Tenvers  des 
feuilles. 

Le  lendemain  à  7  heures  du  matin,  sur  les  feuilles  de  la 
rose  trémière,  il  restait  un  cercle  de  cristaux  de  sulfate, 
l'absorption  du  sel  n'ayant  été  que  partielle. 

Sur  les  feuilles  de  concombres,  de  haricots,  de  laurier- 
cerise,  l'absorption  avait  été  entière.  Sur  quatre  feuilles  de 
vigne  touchées  avec  la  dissolution,  trois  avaient  absorbé 
la  totalité  du  sulfate  dissous;  la  quatrième  retenait  quel- 
ques cristaux.  Sur  Fasclépiade,  trois  feuilles  sur  quatre 
avaient  absorbé  le  sulfate.  Sur  toutes  les  feuilles  de  géra- 
nium, il  resta  une  zone  de  cristaux  :  l'absorption  n'avait 
été  complète  sur  aucune.  Il  fallut  ajouter  de  Teau  à  plu- 
sieurs reprises  pour  faire  disparaître  le  résidu  salin. 

IL  Le  2!2  juillet,  à  7  heures  du  matin,  dans  un  champ 
de  topinambours,  on  marqua  sur  un  plant  vigoureux  trente* 
six  feuilles;  sur  chacune  d'elles  on  déposa  une  goutte  de 
solution  de  sulfate  de  chaux. 

A  10  heures,  trente- trois  gouttes  avaient  disparu  sans 
laisser  la  moindre  trace  :  sur  trois  feuilles  on  apercevait 
une  zone  de  sulfate. 

La  température  était  de  a3  degrés,  le  psychromètre 
marquait  6q. 

On  mit  une  goutte  d'eau  pure  sur  les  taches  de  sulfate 
restées  sur  les  trois  feuilles  :  en  moins  d'une  heui^e  ces 
taches  n'étaient  plus  visibles. 

Si  l'absorption  du  sulfate  de  chaux  a  été  aussi  prompte, 
c'est  que  les  feuilles,  sous  l'influence  de  l'insolation,  trans- 
piraient énergiquement;  déjà,  par  l'efTetde  la  dessiccation, 
elles  devenaient  pendantes.  C'est  à  cette  propriété  du  sul- 


Zg2  J.  BOOSSIJIGAULT. 

fate  de  chaux  de  ne  jamais  présenter  à  U  feuille  qn'one 
solution  à  0,002,  à  OyOo3  de  sel,  que  les  résultats  doivent 
d'avoir  été  aussi  précis. 

On  essaya  de  faire  absorber  du  sulfate  et  du  nitrate  de 
potasse  par  des  feuilles  attenant  aux  plantes.  L'absorption 
fut  plus  lente  que  Tévaporation  du  dissolvant;  aussi  il  en 
résultait  des  taches  qu'on  ne  faisait  disparaître  qne  par 
une  addition  d'eau. 

La  pénétration  du  sulfate  de  chaux  en  dissolution  con- 
duit à  modiCer  les  opinions  émises  sur  le  mode  le  plus 
avantageux  de  plâtrer  un  champ.  Bien  qu'on  obtienne  de 
bons  effets  du  plâtre  en  l'incorporant  au  sol  pendant  les 
labours,  il  faut  que  l'usage  d'en  saupoudrer  les  feuilles 
soit  justifié,  puisqu'il  a  prévalu.  Il  est  vrai  qu'on  en  entre- 
voit la  raison  dans  cette  règle  que  tout  engrais  pulvérulent 
doit  être  distribué  aussi  également  que  possible.  Or  rien 
ne  peut  contribuer  autant  à  une  bonne  répartition  du  gypse 
que  de  le  répandre  au  printemps  sur  des  plantes  ayant  Jic- 
quis  un  certain  développement.  On  opère  par  un  temps 
calme,  le  matin,  de  façon  à  faire  adhérer  aux  feuilles  en- 
core couvertes  de  rosée  le  plâtre  qui  ne  s'en  détache  ensuite 
qu'à  mesure  que  le  vent  les  agite  :  il  est  ainsi  projeté  dans 
tous  les  sens  (*). 

Maintenant,  en  se  fondant  sur  les  expériences  qu'on  vient 
de  faire  connaître,  il  est  peut-être  permis  d'admettre  qne  le 
plâtre  n'est  pas  simplement  retenu  mécaniquement  par  la 
rosée;  qu'une  partie  se  dissout  et  entre  directement  dans 
les  feuilles,  de  même  qu'il  y  pénètre  en  passant  par  les 
racines  quand  il  a  été  introduit  dans  le  sol  :  il  y  a  cette 
seule  différence  que  par  le  saupoudrage  il  parvient  plus 
promptement  dans  l'organisme. 

On  a  pu  remarquer  que  l'envers  des  feuilles  absorbe  le 


(*)  Économie  rurale,  t.  U,  p.  29,  a*  édition. 


FOSCTIOffS    PHYSIQUES    DES   FEUILLES.  Sp.^ 

plus  vite  les  dissolutions  salines  :  c^cst  aussi  ce  qui  a  lieu 
pour  l'eau  pure. 

Voici,  comme  exemple,  un  résultat  enregistré  le  3 1  août 
sur  une  branche  de  mûrier  blanc  :  on  cueillit  deux  feuilles 
semblables.  Sur  l'envers  de  l'une  et  sur  l'endroit  de  l'autre 
on  déposa  à  midi  une  goutte  d'eau  d'un  volume  de  ~  de 
centimètre  cube  qu'on  couvrit  d'un  verre  de  montre. 

Le  i"  septembre,  à  7  heures  du  matin,  l'eau  placée  sur 
Tendroit  conservait  son  volume  initial,  tandis  que  l'eau 
mise  sur  l'envers  avait  été  absorbée.  La  dîflerénce  entre 
les  facultés  absorbantes  de  chaque  côté  du  limbe  est  d'au- 
tant plus  marquée  que  la  structure,  l'aspect  de  l'envers  et 
de  l'endroit  sont  plus  distincts^  elle  est  presque  nulle  chez 
les  feuilles  de  graminées,  dont  les  deux  côtés  ont  une  con- 
stitution physique  à  peu  près  uniforme. 

Ainsi  le  côté  de  la  feuille  qui  absorbe  le  plus  facilement 
l'eau  serait  le  côté  par  oùla  transpiration  est  la  plus  active. 
Comme  les  feuilles,  les  pétales  ont  absorbé  le  sulfate  de 
chaux  en  dissolution.  Les  fleurs  sur  lesquelles  on  a  agi 
sont  le  lys,  le  pétunia,  la  capucine,  le  zinia,  le  glaïeul, 
l'œillet  de  Chine,  l'escholtia,  la  pensée,  la  rose,  l'altaea, 
la  gueule-dc-loup. 

En  absorbant  l'eau  liquide  dans  les  conditions  qu'on  a 
indiquées,  à  savoir  quand  elles  perdent  par  la  transpira- 
tion une  partie  de  leur  eau  de  constitution  amenée  par  la 
sève,  les  feuilles  peuvent  introduire  dans  l'organisme  d'une 
plante,  ainsi  que  le  font  les  racines,  des  principes  fertili- 
sants :  des  sels  ammoniacaux,  des  composés  ni  très  même, 
des  sels  alcalins  et  terreux  tenus  en  suspension  clans  l'air  et 
que  la  rosée  arrête,  retient,  dissout.  L'absorption  de  l'eau 
liquide  par  les  feuilles,  bien  qu'amoindrie  dans  une  atmo- 
sphère humide,  ne  cesse  pas  absolument,  alors  même  que 
l'humidité  atteint  son  maximum,  par  cette  raison  déjà  men- 
tionnée que  les  feuilles,  à  la  lumière,  ont  une  température 
supérieure  à  celle  de  l'atmosphère  ambiante.  C'est  ainsi 


394  PELLET.  ACTlOlf  DE  DIVEaSES  SVB5TAVCES 

que  dans  les  terrains  marécageux,  sur  les  tourbières,  les 
plantes  rampant  à  la  surface  transpirent  néanmoins  pen- 
dant la  journée,  faiblement  sans  doute,  mais  assez  pour 
donner  accès  à  l'eau  des  météores  et,  avec  cette  eau,  à  des 
principes  fertilisants,  puisque  les  feuilles  sont  aptes  à  les 
prendre  dans  l'atmosphère  comme  les  racines  les  prennent 
dans  la  terre. 


ACTIOS  DE  DIVERSES  SIBSTANCES  SDR  LE  SIICRE 

CRISTALLISABLE; 

Par   m.   h.    PELLET. 


Divers  chimistes  se  sont  occupés  de  Taction  de  diverses 
substances  sur  le  sucre  cristallisable.  On  connaît  les  tra- 
vaux de  MM.  Dubrunfaut,  Kulmann,  Soubeiran,  Man- 
mené,  Malagutti  et  A.  Girard. 

M.  Girard  spécialement  a  déterminé  la  quantité  de 
glucose  formée  pendant  les  opérations  du  raffinage,  et  les 
expériences  de  ce  savant  tendent  à  démontrer  que  «  c'est 
très-probablement  à  une  altération  du  glucose  préexistant 
et  à  Tinfluencc  exercée  par  les  produits  de  cet(e  altération 
sur  le  saccharose  qu'est  duc  la  transformation  de  ce- 
lui-ci »  (').  Mais,  pour  les  essais  faits  par  M.  A.  Girard,  la 
mélasse  avait  été  seule  employée.  Or  ce  produit  est  très- 
complexe,  et  chacune  des  matières  entrant  dans  sa  compo- 
sition pouvant  avoir  une  action  spéciale  sur  le  sucre,  nous 
avons  divisé  nos  expériences,  et  nous  avons  étudié  : 

I®  L'action  du  temps; 

2^  L'action  de  la  température; 

3"  L'action  de  la  concentration  des  liqueurs; 


(*)  A.  Girard,  Comptes  rendus  des  séances  de  V Académie  des  Sciences; 
17  juillet  1876. 


SUR    LE    SUCRE    CRISTALLISABLE.  igS 

4^  L'action  du  glucose; 

5*^  L'action  des  sels  minéraux; 

6*^  L'action  des  sels  organiques. 

i**  jiction  du  temps, 

a.  Solution  sucrëe  à  3o  grammes  de  sucre  pour  loo  cen- 
timètres cubes,  conservée  90  heures  à  la  température  de 
aS  à  a8  degrés  : 

Glucose. 

Avant  l'essai,  les  3o  grammes  de  sucre  renfermaient.     0,0067 
Après  la  conservation o ,  54oo 

Glucose  formé o,5343 

ce  qui  correspond  à  1,78  de  glucose  pour  100  de  sucre. 

b.  Solution  sucrée  à  60  grammes  de  sucre  pour  100  cen- 
timètres cubes,  conservée  comme  ci-dessus  dans  des  vases 
de  même  forme  : 

Glucose. 

Avant  Tessai,  les 60  grammes  de  sucre  contenaient.     0,01 14 
Après  la  conservation .  .  . .  .^ o ,  1 1 70 

Glucose  formé o,  io56 

d'où  pour  100  de  sucre,  o,  176. 

On  déduit  donc  que,  à  froid,  le  glucose  se  forme  d'autant 
plus  vite  que  la  solution  est  plus  concentrée» 

a**  jiction  dp  la  chaleur. 

c.  Solution  sucrée  à  3o  grammes  de  sucre  pour  100  cen- 
timètres cubes,  chaufTéc  a  60  degrés  4^  heures. 

gr 

Glucose  contenu  avant  l'essai 0,0067 

Glucose  formé  après  l'essai i  ,568o 

Glucose  formé. ...      i  ,5623 
d'où  glucose  formé  pour  100  de  sucre,  5,2. 

d.  La  solution    sucrée  à  60  grammes  de  sucre   pour 


3q6  PELLET.   ACTION  DE  DIVE1.SES  SUBSTANCES 

loo  ceniî  mètres  cubes,  chauffée  dans  les  même  condi lions, 
contenait  : 

Glucose. 

Avant  Pessai o,oi  14 

Apres  Tessai o,33oo 

Glucose  formé. .  .      o,3i86 

ou  0,53 1  de  glucose  pour  100  de  sucre. 

La  chaleur  augmente  donc  considérablement  la  pro- 
portion de  glucose,  mais  les  solutions  sucrées  concentrées 
s'altèrent  moins  rapidement  que  les  solutions  faibles. 

On  remarquera  que  les  rapports  de  glucose  dans  les 
essais  i^  et  2^  sont  sensiblement  les  mêmes, 

3°  Influence  du  glucose. 

c,  100  centimètres  cubes  solution  sucrée  à  3o  pour  100 

H-  1*^,595  glucose,  après  3o  heures  de  chauffage       "^^î^®- 
à  5o-6o  degrés 2 ,  244 

/•  100  centimètres  .^cubes  sohition  sucrée  à  3o  pour  100 
+  3*^,190  glucose,  dans  les  mêmes  conditions  ren- 
fermaient      4>"0 

g.  Solution  normale  à  3o  pour  lod,  chauffée  3o  heures.     0,398 

Dans  Texpérience  e,  on  a  : 

Glucose  total 2,244 

A  déduire  glucose  de  la  solution  normale. . . .      0,898 

Différence i  ,85i 

A  déduire  glucose  ajouté i  «595 

Glucose  formé 0,266 

ou  o,8S  pour  100  de  sucre. 
Dans  rexpérîence^,  on  a  : 

Glucose  total 4>  ^  ^^ 

A  déduire  glucose  de  la  solution  normale.  . . .     0,893 

Différence 3, 717 

A  déduire  glucose  ajouté 3, 190 

Glucose  formé 0,527 

on  1 ,75  pour  100  de  sucre. 


SUR    LE   SVGRB'CmSTALLISABLE.  3gy 

Le  glueose  a  donc  aidé  la  transformation  du  sncre  cris- 
tallisable  eu  matière  incristallisable,  et  cela  proportionnel- 
lement h  la  quantité  ajoutée. 

M.  J.-W.  Gunning,  dans  un  Mémoire  sur  le  même 
sujet,  conclut  de  ses  essais  que  «  ni  les  mélanges  syn- 
thétiques de  saccharose  et  de  sucre  inverti,  ni  la  mélasse  de 
sucrerie  centrale  ne  subissent  un  changement  de  composi- 
tion appréciable  lorsqu'on  les  chauffe  à  l'état  neutre  dans 
des  conditions  de  temps  et  de  température  qui  ne  sortent 
pas  trop  des  limites  ordinaires  du  rafGnage  ». 

Or,  pour  une  mélasse,  M.  J.-W.  Gunning  a  trouvé  que  : 

Glucose. 

A  rétat  normal,  elle  contenait .\  .      i8,6 

Après  60  heures  de  chauffe  à  «jo  degrés,  elle  contenait.      19,3 

En  supposant  5o  pour  100  de  sucre  cristallisable,  on  voit 
cpa'il  y  a  eu  i^**,  4  de  glucose  formé  pour  100  de  sucre, 
chiffre xentrant  daus  ceux  que  nous  venons  d'exposer. 

Il  est  vrai  de  dire  que  M.  J.-W.  Gunning,  en  prenantdu 
glucose  à  I  pour  100  et  à  3,7  pour  100,  le  tout  saturé  de 
sucre,  chaufTé  60  heures  à  70  degrés,  n'a  pas  vu  le  glucose 
augmenter  sensiblement. 

Cela  tient  très-probablement  à  ce  que  ce  savant  a  expé- 
rimenté sur  des  liquides  saturés  de  sucre,  pouvant  contenir 
66  kilogrammes  de  sucre  pour  100  kilogrammes  de  solu- 
tion, et  que  Faction  du  glucose  a  été  nulle. 

En  se  reportant  à  nos  essais,  on  voit  quVine  solution  de 
sucre  à  60  pour  100  centimètres  cubes  a  fourni  dix  fois 
moins  de  glucose  qu^une  solution  faite  à  3o  grammes  pour 
100  centimètres  cubes, 

■  ■     ■ .  • 

4°  action  des  sels  minéraux. 

100  centimètres  cubes  d'une  solution  sucrée  à  3o  pour 
100,  additionnée  de  iS',5  d'un  mélange  formé  de  : 

Azotate  de  potasse . . .  ^. .  . .     a ,  5 

Chlorure  de  potassium i  ,5 


3g8  PBLLET.  ACTION  DE  DIVEISES  SUBSTAMCES 

rapport  dans  lequel  on  trouve  généralement  ces  sels  dans 
les  mélasses,  ont  donné  : 

Après  45  heures  de  chauffe  à   55®,  60. 

Glucose  total 3,98 

La  solution  normale  après  le  même  temps 

de  chauffe  contenait  glucose i  «35 

» 

D*où  glucose  formé  par  la  présence  des 

sels a  ,58 

ou  8,6  pour  100  de  sucre. 

Il  est  à  supposer  que  cette  action  énergique  du  mélange 
salin  aurait  été  bien  moindre  sur  une  solution  à  60  centi- 
mètres  cubes  pour  100. 

L'étude  séparée  de  Faction  du  nitrate  de  potasse  et  de 
chlorure  de  potassium  a  donné  les  chiffres  suivants  : 

i3o  centimètres  cubes  solution  sucrée  à  10  pour  ioo-i-5'' 
.de  sel,  ébullition  4^  minutes,  volume  réduit  à  70  centi* 
mètres  cubes. 

Glucose  formé  pour  100  centimètres  cubes 

dans  la  solution  normale 0,087     0|083 

Glucose  formé  pour  100  centimètres  cubes 

dans  la  solution  normale +K Cl 0|iii     0,1 3i 

»  »  -i-KO,AzO*..     0,100     0,125 

Le  chlorure  de  potassium  parait  un  peu  plus  énei^Ique 
que  r azotate  de  potasse. 

L'azotate  d'ammoniaque  exerce  une  action  très-rapide 
sur  le  sucre. 

En  chauffant  100  centimètres  cubes  d'eau,  10  grammes 
de  sucre,  5  grammes  du  sel  ammoniacal,  ébullition  3o  mi- 
nutes, tout  le  sucre  est  transformé  en  glucose  (')• 


(*)  Voir  aussi  les  travaux  de  Maumené  (Journal  des  fabricants  de  suere; 

187/,). 


SUR    LE    SUCRE    CRISTALLISABLE.  899 

On  a  fait  en  outre  les  essais  suivants  : 

GlncoM  formé  en  excès    sar  e^ul 
de  la  solution  sucrée  normale. 

Glucose  pour  Glucoee  pour  100  do 
Bain-marte.  AzO'^AzH>,HO.   Chauffée.  100  de  sucre,      sel  ammoniacaL 

«r  gr  gr 

/    loo*"  solution  sucrée.    +o,oo5  3o"*      0,00077  o,oi4  i5,4 

fn  »  +0,010  3o"  0,0020  0,04  30 

n  »  -f-o,o5o  3o"  0,0067  0,1 14  11,4 

o  m  -4-0,10  3o"  0,0076  o,i5a  7,6 

p  »  normale.  3o"  0,0026  0,062  » 

q  »  normale             6^  o,oo6d  0,11  » 

r  -4-o,oo5  3o™  0,0086  0,06  1200 

s  •  +0,010  30™  o,o3i3  0,61  5ioo 

c  *  +0,030  3o"  0,0623  0,93  18600 

5**  jiction  des  sels  organiques. 

De  la  mélasse  de  betteraves  on  a  extrait  une  partie  des 
sels  organiques  par  le  sous-acétate  de  plomb. 

Le  précipité  plombîque  lavé,  décomposé  par  Thydrogène 
sulfuré,  fournit  un  liquide  acide  :  cette  liqueur  a  été  saturée 
par  de  la  potasse  sodée  (  4  parties  de  potasse,  i  partie  de 
soude,  rapport  de  la  potasse  à  la  soude  dans  un  grand 
nombre  de  mélasse) . 

On  a  mis  3  grammes  de  ces  sels  avec  loo  centimètres 
cubes  d'une  solution  sucrée  à  3o  pour  loo.  Après  4S  heures 
de  chauffe  à  5 5 -60  degrés,  on  a  eu: 

Glucose  dans  la  solution  normale i  ,35 

Glucose  dans  la  solution  normale  plus  les 

substances  organiques i  ,4^ 

Glucose  formé o,o5 

soit  Oy  i5  pour  100  de  sucre. 

De  tous  ces  essais  on  déduit  : 

i^  Que  sous  l'action  du  temps,  de  la  chaleur,  les  solu- 
tions sucrées  faibles  s'altèrent  plus  rapidement  que  les  so*- 
lutîons  concentrées  ; 

2°  Que  le  glucose  aide  la  transformation  du  sucre  en 
glucose,  et  cela  proportionnellement  à  la   quantité  exi»« 


400  E.    BOURGOIM. 

tante,  mais  que  raciîon  du  glucose  devient  nulle  sur  le 
saccharose  lorsque  les  liqueurs  sont  saturées  de  sucre 
(Jéduit  des  expériences  de  M.  Gunning); 

3^  Que  les  sels  minéraux  agissent  fortement  sur  le  sucre 
à  une  certaine  température; 

4**  Que  les  sels  organiques  ont  une  très-faible  action; 

5^  Que,  dans  les  mélasses  de  raffinerie,  la  quantité  de 
glucose  qu^on  y  rencontre  provient  de  Taction  multiple  du 
temps,  de  la  chaleur,  du  glucose,  des  sels  minéraux,  en 
outre,  bien  entendu,  de  la  quantité  de  glucose  normal  exis- 
tant dans  les  sucres  raffinés  et  relégué  dans  les  mélasses. 

Enfin  un  point  qui  n'a  peut-èlre  pas  été  suffisamment 
étudié,  c'est  Faction  du  noir  sur  la  transformation  du  sucre 
en  glucose,  point  que  nous  comptons  étudier  prochai- 
nement. 


IV»A«« 


SUR  LA  SOLUBILITÉ  DE  QUELQUES  ACIDES  ORGANIOUBS 
DANS  L  ALCOOL  ET  DAKS  L'ÉTDER; 

Par  m.  E.  BOURGOIN. 


On  enseigne  que  Tacide  tartrique  est  insoluble  dans 
Téther,  tandis  que  les  acides  organiques  qui  s'en  rappro- 
chent le  plus  sont  notablement  solublcs  dans  ce  véhicule. 
Ayant  reconnu  que  cette  exception  n'existe  pas,  j'ai  été 
amené  à  comparer  entre  elles  les  solubilités  d'un  certain 
nombre  d'acides  organiques  dans  l'éther  et  dans  racool. 

Mes  expériences  ont  porté  sur  les  acides  suivants  :  oxa- 
lique, succinique,  tartrique,  citrique,  gallique,  benzoïqae, 
salicylique  et  phtalique. 

Toutes  les  déterminations  ont  été  faites  sur  des  solutions 
saturées  à  la  température  de  i5  degrés,  par  la  métho46 
volumétrique,  à  Taide  d'une  dissolution  titrée  d'eau  de 
baryte.  Cette  méthode  est  très-exacte,  à  la  condition  toute- 


SOLUBILITÉ.    ACIDES   ORGANIQUES.  4^1 

fois  d*effectuer  les  pesées  dans  un  petit  flacon  bouché  à 
l'émeri,  afin  de  se  mettre  en  garde  contre  toute  évapo- 
ration. 

Je  me  suis  servi  d'éther  pur,  d'alcool  à  90  degrés  et  d'al- 
cool absolu. 

L'éther,  privé  d'alcool,  a  été  déshydraté  sur  un  grand 
excès  de  chlorure  de  calcium  fondu.  L'alcool  absolu  du 
commerce,  renfermant  toujours  une  petite  quantité  d'eau, 
a  été  traité  d'abord  par  de  la  chaux  vive,  ensuite  par  du 
sodium,  jusqu'à  ce  que  ce  métal  restât  sans  action  à  froid, 
puis  distillé  lentement. 

Cela  posé,  voici  maintenant  le  résultat  de  mes  dosages: 

I.   —  Acide  oxalique. 

1°  Éther. 

Solution  saturée 7,323 

Exigé  pour  la  saturation .     85  div.  d'eau  de  baryte  (  '  ). 

On  a  donc,  pour  la  quantité  d'acide  dissoute, 

85  X  qo  ^^ 

.-g3g--=:  0,09.589. 

100  parties  de  la  dissolution  saturée  renferment  par 
conséquent  1,25  d'acide  oxalique,  et  100  parties  d'éther 
en  dissolvent  i  ,266  à  la  température  de  i5  degrés. 

2®  Alcool  à  go  degrésm 

Solution  saturée 5,078 

Divisions  d*eau  de  baryte.  .  .  6o4 

Acide  dissous o,65o82 

100  parties  contiennent 12,816 


(')  1,003  (S* H* 0')  exigeant  pour  la  saturation  854  divi&ions  d'eau  de 
baryte,  i  molécule  (2  équivalents)  exige 

25i^<»?  =  835,5. 

1,003 

Ann,  de  Chim,  et  de  Phys.,  5*  série,  t.  XHI.  (Mars  1878.)  26 


402  E.    BOURGOIN. 

3°  Alcool  absolu. 

Solution  saturée 5,887 

Divisions  d'eau  de  baryte.  . .  969 

Acide  dissous i  ,o333 

Dans  100  parties.  • '9»^^ 

n.  —  Acide  succiniQUK. 

i«  Éther. 

Solution  saturée 4)^^^ 

Divisions  d*eau  de  baryte.    .  37 

Acide  dissous o,o52^6 

Dans  100  parties i  ,249 

2°  Alcool  à  go  degrés. 

Solution  saturée 5,o58 

Divisions  d'eau  de  baryte    .  .  894 

Acide  dissous .  o,5566 

Dans  100  parties.  •  .    11  ,oo4 

3**  Alcool  absolu. 

Solution  saturée 6, 3 18 

Divisions  d'eau  de  baryte.  .  .  3i2,5 

Acide  dissous 0,44' 

Dans  100  parties 6,98 

III.  —  Acide  ta&triqus. 

i«  Éther, 

Solution  saturée 10,16 

Divisions  d'eau  de  baryte    .  .  22 

Acide  dissous 0,0895 

Dans  1 00  parties o ,  889 


I 


SOLUBILITÉ.    ACIDES    ORGÀITIQUES.  4^Z 

Daus  une  autre  série  d'essais,  j'ai  obtenu  un  résultat  qui 
se  confond  avec  le  précédent  : 

Solutions  saturées ^9781  ^9^44 

Divisions  d'eau  de  baryte.  .  .  19,5  11 

Acide  dissous o,o35  0,01976 

Dans  100  parties 0,398  0,891 

2°  Mcool  à  90  degrés. 

Solution  saturée 5,3o5 

Divisions  d'eau  de  baryte.  .  .  861 

Acide  dissous i  ,5462 

Dans  100  parties 29, 146 

3°  Alcool  absolu. 

Solution  saturée 4>537 

Divisions  d'eau  de  baryte.  .  .  5i5 

Acide  dissous 0,92487 

Dans  100  parties 20,385 

IV.  —  Acide  citrique* 
i«  Éther» 

Solution  saturée io,4o2 

Divisions  d'eau  de  baryte.  . .  i5o 

Acide  dissous o ,  2298 

Dans  100  parties 29^09 

2°  Alcool  à  90  degrés. 

Solution  saturée .  5,362 

Divisions  d'eau  de  baryte.  .  .  i2JO 

Acide  dissous i  ,854 

Dans  100  parties 34*576 

3®  Alcool  absolu» 

Solution  saturée ^fSgS 

Divisions  d'eau  de  baryte. ...     781 

Acide  dissous 1,1 2028 

Dans  100  parties 4^*  ^^^ 

a6. 


4o4  C-    B0UBG013Ï. 

V.  —  Acide  gallique. 
i«  Êther. 

Solution  saturée 4»64^ 

Divisions  d'eau  de  baryte.  .  .  s>8.5 

Acide  dissous o,  1 16 

Dans  loo  parties 2 ,5o 

2°  Alcool  à  go  degrés. 

Solution  saturée 3l,  121 

Divisions  d'eau  de  baryte. ...  i45 

Acide  dissous ^  ^  ^9 

Dans  100  parties 18990 

3"  Alcool  absolu. 

Solution  saturée 4^485 

Divisions  d'eau  de  baryte. .  .  3o8 

Acide  dissous i ,  aSSy 

Dans  100  parties 27 ,9^ 

VI.  —  Acide  benzoique. 
!«>  Éther. 

Solution  saturée 3 ,843 

Divisions  d'eau  de  baryte   .  .  3i4 

Acide  dissous 0,9172 

Dans  100  parties 23,86 

2®  Alcool  à  90  degrés. 

Solution  saturée 4)^^^ 

Divisions  d'eau  de  baryte.  . .  4^4 

Acide  dissous i  ,326 

Dans  100  parties ^9^^ 

3"  Alcool  absolu. 

Solution  saturée 5,670 

Divisions  d*eau  de  baryte.  .  .  618 

Acide  dissous i  ,8o53 

Dans  100  parties 3i  ,84 


SOLUBILITÉ.    —    ACIDES    ORGASIQUES.  J^oS 

VII.  —  Acide  salictlique. 

Ce  corps  est  très-soluble  dans  Talcool  et  dans  l'éther.  Je 
me  suîs  servi  d'un  acide  de  synthèse  très*pur,  comme  le 
prouve  le  dosage  suivant  : 

Matière o ,  254 

Exigé  pour  la  saturation 76,5  div.  d'eau  de  baryte. 

d'où  l'on  déduit  pour  l'équivalent 

41762,5x0,254  . 
^ -i38,4. 

La  théorie  exige  i38. 


«>  Éthi 


i"  Ht/ier. 

Solution  saturée. 5,298 

Divisions  d'eau  de  baryte.  .  .  538 

Acide  dissous i  ,7777 

Dans  100  parties 33,55 

2°  Alcool  à  90  degrés. 

Solution  saturée 5, 187 

Divisions  d*eau  de  baryte.    .  4^5 

Acide  dissous i  ,5365 

Dans  100  parties 29,622 

3°  Alcool  absolu. 

Solution  saturée 11,715 

Divisions  d'eau  de  baryte. ...  i ,  176 

Acide  dissous 3,886 

Dans  100  parties 33, 17 

VIII.  —  Acide  phtalique. 

i*>  Éther. 

Solution  saturée 7  >3og 

Divisions  d'eau  de  baryte ...  25 

Acide  dissous 0,04968 

Dans  100  parties 0*679 


4o6 


E.    BOURGOUr.    —    SOLrBlLlTÉ,    ETC. 


2®  Alcool  à  go  degrés» 


Solution  saturée 

Divisions  d^eau  de  baryte. 

Acide  dissous 

Dans  loo  parties 


6,791 
358 
0,7115 
10,478 


3°  Alcool  absolu. 

Solution  saturée 

Divisions  d'eau  de  banrle . 

m 

Acide  dissous 

Dans  100  parties 


6,575 
3o3 
0,602 
9,i56 


Ces  déterminations  permettent  de  calculer  les  quantités 
d'acide  dissoutes  par  100  parties,  en  poids,  d'éther,  d'al- 
cool à  90  degrés  et  d'alcool  absolu  à  la  température  de 
i5  degrés.  On  obtient  alors  le  tableau  suivant  : 


Acides. 

Éther. 

Alcool  absolu.  A 

coolàgodegr 

Acide  oxalique .  . 

I  ,  266 

23,73 

14.70 

»»     succinique. 

1  ,  265 

7,5i 

12,59 

»     tartrique.  . 

0,400 

25,6o4 

4I9I35 

»     citrique. .  . 

2,26 

75,90 

52,85 

»     gallique  .  . 

2,56 

38,79 

23, 3i 

»     benzoïque. 

3 1,35 

46,68 

4i»62 

»     salicylique . 

. .     5o,47 

49,63 

42,09 

»     phtalique  (< 

).      0,684 

10,08 

11,70 

(*)  Obtenu  par  oxydation    de  la  naphtaline,    d'après    le  procédé    de 
MM.  Depouilly. 


L.    TKOOST»    HYDRATB   DE   CHLORAL.  407 

SOIIVELLB  METHODE  POUR  ETABLIR  L  ÉQUIYALENT  EN  VOLUHE 
DES  SUBSTANCES  TAPORISABLES.  ÉQUIVALENT  DE  LA  VAPEUR 
D'HYDRATE  DE  GHLORAL  -, 

Par  m.  L.  TROOST, 


La  détermination  de  Téquivalent  en  volume  des  sub- 
stances vaporisables  joue  un  rôle  important  dans  les  dis- 
cussions qui  ont  Heu  depuis  un  certain  nombre  d'années 
relativement  à  la  théorie  atomique. 

D'après  cette  théorie,  tous  les  composés,  amenés  à  l'état^ 
gazeux,  et  pris  sous  leur  poids  moléculaire,  devraient  oc- 
cuper le  même  volume.  Cependant  l'expérience  a  fait  con- 
naître des  exceptions  assez  nombreuses  à  une  relation  aussi 

absolue. 

Dans  le  cas  où  la  densité  expérimentale  surpasse  la  den- 
sité théorique  et  où  par  suite  le  gaz  occupe  un  volume 
moins  grand  que  le  volume  prévu,  les  partisans  de  la  théo- 
rie atonïique  admettent  que  la  vapeur  est  formée  de  molé- 
cules complexes  résultant  de  la  condensation  de  molécules  ^ 
simples,  qui  seules  suivent  la  loi  générale. 

Dans  le  cas  où  le  gaz  occupe  au  contraire  un  volume 
plus  considérable  que  celui  qui  lui  serait  assigné  par  la 
théorie,  ils  supposent  que  le  corps  soumis  à  l'expérience 
est  décomposé  en  des  substances  plus  simples,  susceptibles 
de  se  recombiner  pendant  le  refroidissement. 

Telle  est  la  conclusion  à  laquelle  ils  sont  arrivés  pour 
l'hydrate  de  chloral.  En  effet,  ce  corps  représenté  par  son 
poids  équivalent  C*HCI^O%  H*0*  occupe  8  volumes, 
c'est-à-dire  un  volume  double  de  celui  qui  est  occupé  par 
un  très-grand  nombre  de  composés  organiques.  On  en  a 
conclu  que  l'hydrate  de  chloral  gazeux  était  un  mélange  de 
vapeur  d'eau  et  de  chloral  anhydre.  Cette  conclusion  ne 
m'a  pas  paru  appuyée  par  les  preuves  rigoureuses  que  l'on 


4o8  X..    TROOST. 

est  en  droit  d^exiger  dans  des  questions  de  cette  impor- 
tance. Je  me  suis  décidé  à  reprendre  la  question  et  à  cher- 
cher une  méthode  nouvelle  qui  permit  de  constater  par  des 
expériences  directes  si  une  vapeur  est  un  simple  mélange, 
ou  si  elle  est  formée  par  un  composé  défini. 

ÉTUDE   DE    LA    VAPEUR    d'hYDRATE   DE    GHLORAL. 

M.  Dumas,  après  avoir,  il  y  a  plus  de  quarante  ans,  par 
la  détermination  de  la  densité  de  vapeur  du  chloral  an- 
hydre, montré  le  premier  comment  on  doit  fixer  la  formule 
dés  composés  neutres  volatils,  a  pris  la  densité  de  vapeur 
de  l'hydrate  de  chloral  et  obtenu  le  nombre  2,76  ^  il  en  a 
conclu  que  ce  composé  est  formé  de  4  volumes  de  vapeur 
de  chloral  et  de  4  volumes  de  vapeur  d'eau  sans  conden- 
sation (*).  L'équivalent  de  Thydrate  de  chloral 

C*HCPO*-4-H«0* 


correspondrait  donc  à  8  volumes  de  vapeur  (densité  théo- 
rique 2  y  86). 

bans  ces  derniers  temps,  M.  Naumann  ayant  repris  la 
*  détermination  de  cette  densité  de  vapeur  à  78  degrés  et 
à  100  degrés,  et  ayant  obtenu  à  ces  températures  les  nom- 
bres 2,81  et  2,83  très-voisins  de  celui  de  M.  Dumas,  n'a 
pas  hésité  à  en  conclure  que  T hydrate  de  chloral  ne  peut  à 
ces  températures,  et  même  aux  températures  ordinaires, 
passer  de  l'état  liquide  à  Tétat  gazeux  sans  se  décomposer 
complètement  en  4  volumes  de  vapeur  de  chloral  et  4  vo- 
lumes de  vapeur  d'eau  (').  En  d'autres  termes,  la  vapeur 
d'hydrate  de  chloral  n'existerait  pas.  Ce  qui  se  dégage,  à 
toute  température,  de  l'hydrate  de  chloral  liquide  serait  un 
mélange  de  vapeur  de  chloral  anhydre  et  de  vapeur  d'eau. 
Nous  nous  trouvons  ainsi  en  présence  d'un  fait  incon- 

(*)  Dumas,  jé finales  de  Chimie  et  de  Physique ^  t.  LVI,  p.  i32  et  i36. 
(*)  NAoKAim,  Deutsche  Chemische  Gesellschaft,  t.  IX,  p.  8aa. 


• 


HYDRATE    DE    CHLORÀL.  4<^9 

testable  et  de  deux  interprétations  contradictoires.  Pour 
résoudre  la  question ,  il  faut  une  méthode  qui  permette 
d'établir  rigoureusement,  par  des  expériences  directes,  si 
la  vapeur  fournie  par  l'hydrate  de  chloral  est  réellement  un 
mélange  de  4  volumes  de  vapeur  de  chloral  anhydre  avec 
4  volumes  de  vapeur  d'eau,  ou  si,  au  contraire,  cette  vapeur 
existe  à  l'état  de  composé  défini  représentant  8  volumes. 

Dans  l'hypothèse  de  M.  Naumann,  la  vapeur  d'hydrate 
de  chloral,  dont  la  force  élastique  est  F,  doit  se  conduire 
comme  un  mélange  de  volumes  égaux  de  gaz  sec  et  de  va- 
peur d'eau  ayant  chacun  une  force  élastique  -• 

Dans  l'hypothèse  de  M.  Dumas,  la  vapeur  se  conduira 
d'une  manière  très-différente,  mais  qui  pourra  varier  avec 
les  conditions  des  expériences,  si  le  composé  déGni  gazeux 
possède  une  certaine  tension  de  dissociation. 

Ainsi,  si  l'on  opère  aux  températures  où  la  tension  de 
dissociation  du  composé  est  nulle  ou  insensible,  la  vapeur 
se  comportera  comme  un  gaz  complètement  sec  ayant  une 
tension  F. 

Mais,  si  l'on  opère  à  une  température  plus  élevée,  où  le 

composé  a  déjà  une  tension  notable  de  dissociation,  la 

vapeur  se  comportera  comme  un  mélange  d'un  gaz  sec 

F 
ayant  une  tension  toujours  supérieure  à  -  et  de  vapeur  d'eau 

F 
ayant  une  tension  toujours  inférieure  à  -)  et  d'autant  plus 

inférieure  à  cette  valeur  que  l'on  opère  à  une  température 
moins  élevée. 

En  résumé,  le  problème  revient  à  déterminer  l'état 
hygrométrique  d'un  gaz,  question  qui  peut  se  résoudre  par 
l'observation  d'un  simple  phénomène  physique. 

Les  phénomènes  de  dissociation  qui  ont  déjà  conduit  à 
tant  de  conséquences  importantes  peuvent  fournir  la  so- 
lution  de  ce  problème  d'hygrométrie  et  des  problèmes 


4lO  L.    TROOST. 

analogues.  Je  montrerai,  en  effet,  que  la  dissociation  de 
composés  convenablement  choisis  et  introduits  dans  les 
vapeurs  soumises  à  Texpérience  conduit  à  une  méthode 
générale  pour  reconnaître  si  ces  vapeurs  sont  des  composés 
définis  ou  des  mélanges  de  composés  plus  simples.  L'étude 
de  la  vapeur  donnée  par  ITiydrate  de  chloral  fournît  un 
premier  exemple  de  l'application  de  cette  méthode,  qui 
sera  ensuite  appliquée  aux  alcoolates  de  chloral,  et  aux  sels 
ammoniacaux  susceptibles  de  se  vaporiser  à  une  température 
peu  élevée. 

Le  corps  employé,  tout  en  étant  avide  d'eau,  devra  déga- 
ger moins  de  chaleur  que  le  chloral  en  se  combinant  avec 
l'eau.  Le  corps  qui  remplira  celte  condition  sera  nécessaire- 
ment peu  stable,  et  jouira  par  cela  même  de  la  propriété 
de  se  dissocier  à  la  température  de  Texpérience. 

Le  sel  qui  satisfait  le  mieux  jusqu  ici  à  cette  condition 
est  l'oxalate  neutre  de  potasse  2KOC*0*+2HO.  Il  était 
naturellement  désigné,  grâce  aux  expériences  calorimé- 
triques de  M.  Berthelot.  En  effet,  ce  sel  anhydre  ne  dégage 
que  peu  de  chaleur  (i"^,6)  en  s'unissant  à  a  équivalents 
d'eau  (solide).  Il  a  déjà  à  78  degrés,  température  la  plus 
favorable  aux  expériences  sur  l'hydrate  de  chloral,  une 
tension  de  dissociation  qui  est  notable  tout  en  restant 
très'éloignée  de  la  tension  maximum  de  la  vapeur  d'eau 
à  la  même  température,  condition  que  j'ai  reconnue  indis- 
pensable pour  que  la  loi  des  mélanges  des  gaz  et  des 
vapeurs  puisse  s'appliquer. 

Description  de  V appareil.  —  Malgré  la  nécessité  d'ex- 
périmenter sous  très-basse  pression,  il  n'en  fallait  pas 
moins  opérer  sur  des  poids  notables  de  matière,  pour  ob- 
tenir des  résultats  suffisamment  précis.  J'ai  été  ainsi  con- 
duit à  modifier  le  tube  de  M.  Hofmann  de  manière  à  dis- 
poser d'une  capacité  de  3 00  à  400  centimètres  cubes  au 
lieu  d'une  chambre  barométrique  de  ^o  à  5o  centimètres 
cubes  seulement.  L'appareil  employé  dans  toutes  les  expé- 


HYDR1.TE    DB    CHLORAL.  4" 

rieuces  se  compose  d'une  chambre  cylindrique  en  verre  Â 
de  4%^  environ  de  diamètre  et  de  3o  centimètres  de  hau- 
teur; elle  est  terminée  à  une  de  ses  extrémités  par  un  tube 
capillaire  i;  de  a5  à  3o  centimètres  de  long  ;  à  son  autre  ex- 


irémité,  elle  est  soudée  à  un  tube  barométrique  B  de  3  cen- 
timètres de  diamètre  et  de  i  mèire  de  hauteur.  Ce  tube  est 
dÎTisé  en  millimètres  et  en  parties  d'égale  capacité.  On 
connaît  de  même  la  capacité  de  la  grande  chambre  et  celle 
du  tube  capillaire. 


4l^  L.    TaOOST. 

Pour  se  servir  de  cet  appareil,  on  commence  par  le  des- 
sécher en  le  faisant  traverser  pendant  vingt-quatre  heures 
par  un  courant  de  gaz  sec,  puis  on  le  place  verticalement, 
de  manière  que  Textrémité  libre  du  tube  barométrique 
plonge  dans  une  cuve  à  mercure  E  ^  on  recourbe  à  angle 
droit  l'extrémité  du  tube  capillaire  supérieur  et  on  la  met  en 
communication,  par  des  tubes  desséchants  à  potasse  mono- 
hydratée,  avec  une  trompe  Sprengel  et  une  machine  pneu- 
matique ordinaire.  On  fait  d^abord  le  vide  à  2  ou  3  milli- 
mètres dans  l'appareil  et  dans  la  trompe  à  l'aide  de  la 
machine  pneumatique,  puis  on  fait  marcher  la  trompe; 
on  obtient  ainsi  un  vide  plus  parfait  que  par  toute  autre 
méthode.  On  maintient  le  vide  sec  pendant  au  moins  douze 
heures,  puis  on  ferme  au  chalumeau  la  partie  supérieure 
du  tube  capillaire. 

On  entoure  alors  l'appareil  d'un  manchon  de  verre  D  de 
6  centimètres  environ  de  diamètre  et  de  plus  de  i  mètre 
de  hauteur.  L'extrémité  inférieure  du  manchon  est  fermée 
par  un  bouchon  de  liége,  fixé  au  tube  barométrique  qui 
le  traverse  suivant  son  axe. 

Son  extrémité  supérieure  est  fermée  par  un  bouchon 
traversé  par  un  large  tube  I  communiquant  avec  un  serpen- 
tin refroidi.  Pour  porter  l'appareil  à  une  température 
constante,  de  78  degrés  par  exemple,  on  porte  l'alcool  k 
Tébullition  dans  une  petite  chaudière  en  cuivre  F:  la  va- 
peur se  rend  dans  le  manchon  par  un  tube  de  verre  h  qui 
traverse  le  bouchon  fermant  la  partie  inférieure  de  ce  man- 
chon ;  la  vapeur,  après  avoir  échauffé  l'appareil  dans  toute 
sa  hauteur,  va  se  condenser  dans  le  serpentin  K,  s'écoule 
dans  le  vase  L,  et  retourne  à  la  chaudière  par  un  tube 
mp  qui  descend  jusque  près  du  fond  de  celle-ci.  La  va- 
peur qui  s'est  condensée  dans  le  manchon  retourne  elle- 
même  à  la  chaudière  par  un  tube  n  qui,  partant  du  bouchon 
inférieur,  se  réunit  à  celui  mp  qui  ramène  le  liquide  con- 
densé.   On  a  ainsi   un    courant  continu  de  vapeur  qui 


HYDRATE   DB    CHLORÀL  4  >  '^ 

permet  de  maintenir  constante  la  température  de  l'ap^ 
pareil  pendant  autant  de  temps  que  Ton  voudra.  Un  ther- 
momètre, suspendu  dans  le  manchon  à  la  hauteur  de  la 
chambre  cylindrique,  donne  la  température  de  la  \apeur.  ' 

Pour  éviter  autant  que  possible  tout  refroidissement, 
on  enveloppe  le  manchon  avec  un  feutre  de  i  centimètre 
d^épaisseur,  dont  on  écarte  les  bords  pendant  quelques 
instants  lorsque  l'on  veut  observer  le  niveau  du  mer- 
cure. 

Cet  appareil  sert  i**  pour  déterminer  la  tension  de  disso- 
ciation du  sel  à  employer 5  2?  pour  prendre  la  densité  de 
vapeur  de  l'hydrate  de  chloral  ;  et  3**  pour  faire  agir  sur 
cette  vapeur  le  sel  hydraté  qui  satisfait  aux  conditions 
préalablement  énumérées. 

Nous  avons  vu  que  le  sel  utilisé  est  l'oxalate  neutre  de 
potasse.  Avant  de  l'employer,  on  le  pulvérise  et  l'on  main- 
tient la  poudre  pendant  trois  à  quatre  jours  sous  une 
cloche  en  présence  de  l'acide  sulfurîque  concentré.  On  se 
débarrasse  ainsi  de  toute  eau  hygrométrique  ou  mécani- 
quement interposée,  ce  dont  on  s'assure  «par  l'analyse  du 
sel  desséché  (*)• 

Pour  débarrasser  la  poudre  ainsi  obtenue  de  l'air  qu'elle 
peut  condenser,  on  la  met  dans  un  petit  cylindre  en  toile 
fine  de  platine,  fixée  à  l'extrémité  d'un  fil  de  même  métal 
et  l'on  introduit  le  cylindre  ainsi  rempli,  sous  le  mercure, 
dans  la  partie  supérieure  d'un  très-large  et  très-long  tube 
barométrique  dont  la  chambre  a  un  volume  de  200  centi- 
mètres cubes.  Le  sel  est  maintenu  vingt-quatre  heures 
dans  le  vide.  On  le  retire  ensuite  à  l'aide  du  fil  de  platine, 
et  en  le  maintenant  sous  le  mercure,  on  le  fait  passer  dans 
l'appareil  où  on  le  pousse  jusqu'à  ce  qu'il  arrive  dans  la 


(*)  Une  plus  longue  exposition  en  présence  de  Tacide  sulfurique  fait 
perdre  au  sel  un  peu  d'eau  de  cristallisation,  ce  qui  n'a  pas  d'inconvénient 
pour  les  expériences. 


4l4  ^'    TROOST. 

grande  chambre  vide.  On  peut,  grâce  au  fil  de  platine,  lé 
maintenir  à  une  distance  déterminée  du  niveau  du  mer- 
cure, ou  faire  varier  cette  distance  h  volonté,  de  manière  à 
faciliter  la  diffusion  de  la  vapeur  d^eau  émise  parce  sel. 

Pour  déterminer,  dans  cet  appareil,  la  tension  de  disso- 
ciation de  Toxalate  neutre  de  potasse  hydraté,  on  introduit, 
avec  les  précautions  que  je  viens  d'indiquer,  un  poids  d*oxa- 
late  à  peu  près  égal  à  celui  qui,  dans  les  expériences  ulté- 
rieures, doit  être  mis  en  contact  avec  l'hydrate  de  chloraL 
On  maintient  la  température  constante,  soit  à  78  d^rés 
environ,  par  un  courant  de  vapeur  d'alcool,  soit  à  100  de- 
grés, par  un  courant  de  vapeur  d'eau,  jusqu^à  ce  que  la 
force  élastique  de  la  vapeur  d'eau  émise  par  le  sel  reste 
sensiblement  constante. 

La  tension,  qui  pendant  les  premières  heures  augmente 
rapidement,  ne  varie  plus  ensuite  qu'avec  une  extrême 
lenteur.  Au  bout  de  douze  heures  elle  a  été  trouvée  de 
53  millimètres  à  78  degrés  et  de  182  millimètres  à  99^,3. 
Ces  nombres  ne  représentent  pas  rigoureusement  la  tension 
-limite  de  dissociation.  Celle-ci  a,  par  des  expériences  plus 
prolongées,  pu  être  fixée  à  60  millimètres  pour  la  tempé-> 
rature  de  78^96  et  à  200  millimètres  pour  la  température 
de  100  degrés. 

La  méthode  que  j^ai  employée  comporte,  dans  son  appli- 
cation au  problème  proposé,  trois  modes  opératoires  dif- 
férents qui  se  contrôlent  mutuellement.  Je  les  décrirai 
successivement  en  indiquant  leur  valeur  relative  et  les  ré- 
sultats auxquels  ils  conduisent. 


L  —  Premier  procédé. 

Dans  le  premier  procédé,  qui  se  présente  le  plus  natu- 
rellement à  Tesprit,  on  commence  par  faire  vaporiser  dans 


HYDRATE    DE    CHLORAL.  4^^ 

l'espace  vide  un  poids  connu  et  convenable  (*)  d'hydrate 
de  chloral^  puis,  après  avoir  noté  la  température  et  la 
pression,  on  introduit  Toxalate  neutre  de  potasse  cristallisé 
et,  suivant  que  la  tension  augmentera  ou  non  dans  l'appareil 
après  un  séjour  prolongé  du  sel,  on  en  pourra  conclure 

• 

que  l'hydrate  de  chloral  existe  ou  est  complètement  dé- 
composé  (*).  Pour  cela,  introduisons  l'oxalate  hydrata, 
dont  la  tension  de  dissociation  eslfy  dans  la  vapeur  fournie 
par  l'hydrate  de  chloral,  et  ayant  une  force  élastique  F  plus 
grande  que  le  double  de/*. 

Si  rhydrate  de  chloral  est  complètement  décomposé,,  le 
sel  se  trouvera  en  présence  d'une  proportion  de  vapeur 
d'eau  plus  grande  que  celle  qu'il  peut  émettre  à  la  même 
température^  il  ne  se  dissociera  donc  pas,  de  sorte  qu'a- 
près l'introduction  du  sel  hydraté,  la  tension  totale  de  la 
vapeur  contenue  dans  l'appareil  ne  devra  pas  changer, 
quelque  prolongé  que  soit  son  contact  avec  le  sel  hydraté  : 
la  tension  restera  égale  à  F. 

Si  l'hydrate  de  chloral  existe  tout  entier  à  l'état  de  va- 
peur non  décomposée,  le  sel  devra  se  dissocier  comme  dans  . 
un  gaz  sec  \  la  tension  totale  devra,  par  suite,  augmenter 
et  tendre  vers  la  somme  de  la  force  élastique  de  l'hydrate 
de  chloral  et  de  la  tension  de  dissociation  du  sel,  c*est- 
à-dire  vers  F  H-/.  Elle  l'atteindrait  même  si  la  loi  des 
mélanges  des  gaz  et  des  vapeurs  était  rigoureusement  ap- 
plîcable  et  si  Thydrate  de  chloral  n'avait  pas  de  tension 
sensible  de  dissociation  à  la  température  à  laquelle  on 
opère. 

Si,  à  la  température  de  l'expérience,  la  vapeur  d'hydrate 


(*)  C'est-à-dire  tel  qu'en  passant  à  Tétat  gazeux  il  ait  une  tension  très- 
inférieure  à  sa  tension  maximum  à  la  température  à  laquelle  on  opère. 

(  ')  L'hydrate  de  chloral  était  parfaitement  pur  et  bien  cristallisé  ;  je  le 
dois  à  l'obligeance  de  M.  Personne;  il  fondait  à  46  degrés  et  distillait  à  la 
température  constante  de  97°»  5. 


4lÔ'  L,    TROOST. 

de  chloral  a  une  certaine  tension  de  dissociation,  la  ten- 
sion finale  devra  dépasser  F,  tout  en  restant  inférieure  à 

F-H/. 

Ce  premier  mode  opératoire  est  celui  qui  parait  le  plus 
simple  :  c'est  celui  que  j'ai  employé  d'abord,  mais  je  n'ai 
pas  tardé  à  constater  dans  son  application  des  difficultés 
spéciales  ;  je  n'y  insisterais  même  pas  si  M.  Wurtz,  qui  l'a 
employé  depuis,  n'avait  cru  pouvoir  tirer  de  ses  expériences 
nue  conclusion  contraire  à  celle  à  laquelle  j'étais  arrivé. 
Ces  difficultés  tiennent  à  la  lenteur  avec  laquelle  se  fait 
l'eflBorescence  de  l'oxalate  neutre  de  potasse  cristallisé. 

Nous  avons  vu  plus  haut  que,  même  dans  le  vide,  elle 
ne  se  produit  rapidement  que  dans  les  premières  heures.  Si, 
au  lieu  d'opérer  dans  le  vide,  on  opère  dans  Pair  sec,  la 
dissociation  se  fera  plus  lentement;  elle  se  fera  beaucoup 
plus  lentement  encore  au  contact  d'une  vapeur  dense, 
comme  celle  de  l'hydrate  de  chloral. 

Dans  la  vapeur  d'hydrate  de  chloral,  sous  faible  pres- 
sion, la  dissociation  se  fait,  pendant  les  premières  heures, 
avec  une  rapidité  comparable  à  celle  que  l'on  observe  dans 
l'air  sec  ou  dans  toute  autre  vapeur  inerte  (^)  ;  mais  elle 
devient  ensuite  de  plus  en  plus  lente  au  fur  et  à  mesure 
que  la  tension  augmente. 

Dans  la  vapeur  d'hydrate  de  chloral  prise  sous  forte 
pression,  ce  n'est  qu'avec  une  extrême  lenteur  que  se  fait 
Tefflorescence  du  sel,  même  dans  les  premières  heures; 
mais,  dans  ce  dernier  cas  comme  dans  le  premier,   on 


(*)  En  effet,  si  dans  la  Tapeur  d'hydrate  de  chloral  à  loo  degrés  et  sous 
la  pression  de  aoi"^,  5  on  introduit  environ  it^,b  d'oxalate  neutre  de  po« 
tasse  (sec  et  ayant  séjourné  douze  heures  dans  le  Tide),  on  constate  qu'au 
bout  d'une  heure  dix  minutes  la  force  élastique  de  la  Tapeur  d'eau  émise 
par  le  sel  était  de  83  millimètres. 

La  dissociation  du  sel  s'était  donc  faite  dans  l'hydrate  de  chloral,  avec 
une  rapidité  comparable  à  celle  avec  laquelle  elle  s'est  produite,  dans  les 
expériences  de  M.  Wurtz,  au  milieu  de  la  vapeur  d'éthylate  de  chloral. 


HYDRATE  DE  CHLORAL.  4^7 

constate  que  l'oxalate  neutre  de  potasse  se  dissocie  dans 

rhydraie  dechloral.Si,  par  exemple,  on  introduit  l'oxalate 

dans  la  vapeur  d'hydrate  de  cliloral  ayant  une  pression  F 

F 
telle  que  la  tension  —  de  la  vapeur  d'eau  qui  se  trouverait 

libre,  sMl  était  entièrement  décomposé,  serait  notablement 
supérieure  à  la  tension/  de  dissociation  du  sel,  on  constate 
que  la  pression  augmente  peu  à  peu^  quoique  très-lente- 
ment. L'hydrate  de  chlorai  n  était  donc  pas  entièrement 

.F 

décomposé;  car,  si  cela  était,  la  tension  -de  la  vapeur  d'eau 

libre  dans  le  mélange  eût  été  notablement  supérieure  à  la 
tensiouy^de  dissociation  du  sel  introduit  et,  par  suite,  ce- 
lui-ci n'aurait  pu  se  dissocier. 

Mes  expériences  préliminaires  m'avaient  prouvé  que 
l'hydrate  existait  à  l'état  de  vapeur  j  mais  elles  m'avaient 
eu  même  temps  montré  l'utilité  de  modiEer  les  conditions 
de  l'expérience  à  cause  de  la  lenteur  extrême  avec  laquelle 
se  fait  la  dissociation  du  sel  dans  ces  circonstances. 
M.  Wurtz,  croyant  répéter  les  expériences  que  j'avais  pu- 
bliées (sans  indiquer,  faute  de  place,  la  marche  suivie), 
a  employé  ce  premier  mode  opératoire  (*)  et  est  arrivé  à  des 
résultats  semblables  à  ceux  que  j'avais  obtenus  après  le 
même  nombre  d'heures  de  chauffe. 

Dans  l'une  des  expériences  qu'il  donne  comme  ayant  été 
faite  dans  les  meilleures  conditions,  à  la  température  de 
78  degrés,  dans  un  tube  d'Hofmann  ordinaire,  on  voit  que 
l'introduction  de  Toxalate  neutre  de  potasse  dans  la  vapeur 
d'hydrate  de  chlorai  fait  peu  à  peu  baisser  le  niveau  du  mer- 
cure de  8  millimètres,  de  sorte  que  si  l'on  calcule  la  pres- 
sion F  que  possède  l'hydrate  de  chlorai  dans  le  volume 
final,  en  tenant  compte  du  volume  de  l'oxalate  introduit, 

(*)  Comptes  rendus  de  V ^académie  des  Sciences,  t.  LXXXIV,  p.  977  et  1262. 
Jnn,  de  Chim,  etdePhys.,  5«  série,  t.  XIIÎ.  (Mars  1878.)  27 


4l8  L.    TROOST. 

on  reconnaît  que  cette  pression  a  augmenté  d'environ 
10  millimètres  au  bout  de  cinq  heures.  On  en  doit  con- 
clure que  le  sel  se  dissocie  dans  la  vapeur  d'hydrate  de 
chloral  ayant  une  tension  de  i34™™9  5.  Cet  hydrate  de 
chloral  n^était  donc  pas  entièrement  décomposé,  puisque, 

si  cela  était,  la  tension — - — ^  =  67™",  25  de  la  vapeur 

d'euu  libre  dans  le  mélange  eut  été  supérieure  à  la  tension 
de  dissociation  du  sel,  et^  par  suite,  celui-ci  n'aurait  pu  se 
dissocier.  On  ne  peut  donc  pas  conclure  de  cette  expé- 
rience que  riiydrate  de  chloral  est  entièrement  décomposé 
à  y8  degrés  en  vapeur  d'eau  et  en  vapeur  de  chloral  an- 
hydre. La  conclusion  forcée  est  qu'il  existe,  dans  Tappareil, 
de  l'hydrate  de  chloral  à  l'état  de  gaz  composé,  distinct 
d'un  mélange  de  chloral  anhydre  et  de  vapeur  d'eau. 

Ce  premier  procédé  indique  donc  nettement  le  sens  du 
phénomène  à  observer,  surtout  quand  on  opère  dans  les 
conditions  que  nous  venons  de  rappeler  ^  nous  allons  voir 
comment,  par  un  second  procédé,  on  peut  arriver  facile- 
ment à  obtenir  la  tension  limite  du  mélange  et,  par  suite, 
à  résoudre  plus  complètement  le  problème. 

IL  —  Second  procédé. 

Le  second  procédé,  inverse  du  premier,  consiste  à  faire 
vaporiser  l'hydrate  de  chloral  dans  un  espace  renfermant 
déjà  une  certaine  dose  de  vapeur  d'eau  émise  par  le  sel 
hydraté  :  suivant  que  la  tension  de  cette  vapeur  d'eau  s'a- 
joute ou  non  à  celle  de  l'hydrate  de  chloral,  on  en  conclut 
que  celui-ci  existe  ou  est  décomposé.  A  cet  effet,  on  n^in- 
troduit  l'hydrate  de  chloral  dans  la  chambre  barométrique 
qu'après  que  l'oxalate  neutre  de  potasse  hydraté  y  a  été 
maintenu  assez  longtemps  pour  acquérir  sa  tension  de  dis- 
sociation* 


HYDRATE    DE    GHLORÀL.  ^  4^9 

Expériences  à  la  température  de  y 8  degrés,  —7  Un  vo- 
lume exactement  mesuré  (i  centimètre  cube  environ,  soit 
i^'^jSoo)  d'oxalale  neutre  de  potasse  pulvérisé,  pur,  sec  et 
privé  d'air  par  son  séjour  dans  le  vide,  est  introduit  dans 
l'appareil,  dont  la  partie  supérieure  forme  une  chambre 
barométrique  de  280  à  3oo  centimètres  cubes.  On  main- 
tient la  température  à  78  degrés  environ,  au  moyen  d'un 
courant  de  vapeur  d'alcool,  aussi  longtemps  qu'il  est  néces- 
saire pour  que  la  force  élastique  de  la  vapeur  d'eau,  émise 
par  le  sel,  y  acquière  à  très-peu  près  la  tension  de  disso- 
ciation pour  celte  température. 

Le  sel  ainsi  effleuri  est  dans  de  bonnes  conditions  pour 
absorber  rapidement  de  la  vapeur  d'eau.  C'est  alors  qu'on 
introduit  un  poids  déterminé  d'hydrate  de  chloral.  Au  bout 
d'un  quart  d'heure  environ,  on  note  la  pression  et  on  la 
trouve  égale  à  la  somme  des  pressions  calculées  pour  l'hy- 
drate de  chloral  et  la  vapeur  précédemment  émise  par 
l'oxalate  de  potasse.  11  n'y  a  donc  pas  eu  absorption  de 
vapeur  d'eau  dans  cette  première  partie  de  l'opération. 
L'expérience  continuant,  ou  reconnaît  que  la  pression 
ainsi  observée  n'est  pas  absolument  stable  :  elle  diminue 
lentement  d'une  petite  fraction  de  sa  valeur.  C'est  ce  que 
l'on  peut  constater  dans  le  tableau  suivant,  qui  résume  les 
expériences  que  j'ai  faites  ,  en  suivant  cette  marche  à  une 
température  qui  est  restée  comprise  entre  78^,4  ^t  78*^»  6; 
le  volume  final  occupé  par  le  mélange  était  compris  entre 
289  et  290,5. 

l.  II.  III.        IV. 

gr  gr  gr  gr 

Poids  de  l'hydrate  de  chloral  employé...       0,1295    o,i3o    o,i34    0,124 

Pression  observée  après  rintroduction  de  ^^^  ^^  ^^        „„ 

l'hydrate  de  chloral 176,0  172,0  188,0     162,8 

Pression  observée  trente  minutes  après  la 

première  mesure >74>5  171  »5  187,0     iC2,8 

Pression  observée  deux  heures  après  la  pre- 
mière mesure 171 iO  I70>*  182,0     162,8 

27. 


» 


» 


4^0  L«    TROOST. 

I.       II.       m.      IV. 

Pression  observée  cinq  heures  après  la  pre-  mm         mm         mm  mm 

mière  mesure 169  »         176,0         » 

Pression  observée  neuf  heures  après  la  pre- 
mière mesure 167  »         173,0 

Pression   observée  douze  heures  après  la 

première  mesure 166,9  »         173,0 

Pression  que  Ton  aurait  observée  dans 
l'hypothèse  où  il  n'y  aurait  aucune  ten- 
sion de  dissociation  de  l'hydrate  de 
chloral ,  ni  action  réciproque  des  va- 
peurs        i79>7       *8o,5     184,0     175,1 

Pression  que  Ton  aurait  observée  dans 
l'hypothèse  d'une  décomposition  totale.       ii9>7       i30        134        ii5 

Ainsi  la  vapeur  d'hydrate  de  chloral,  loin  de  se  con- 
duire, en  présence  du  sel  effleuri,  comme  une  vapeur 
entièrement  décomposée  en  volumes  égaux  de  chloral 
anhydre  et  d'eau,  ayant  chacun  une  tension  d'environ 
60  millimètres,  se  comporte  au  contraire  comme  un  com- 
posé défini  ayant  à  peine  une  tension  sensible  de  disso- 
ciation (*).  On  pourrait  se  demander  si  la  présence  du 
chloral  dans  le  mélange  n^empêchait  pas  l'absorption  par 
le  sel  effleuri  de  la  vapeur  d'eau,  qui  s'y  trouvait  à  l'état 
libre.  Il  n'en  est  rien  :  en  effet,  après  avoir  vaporisé  l'hy- 
drate de  chloral  dans  l'espace  où  se  trouve  le  sel  effleuri, 
et  avoir  constaté  la  lenteur  extrême  avec  laquelle  varie  la 
pression,  j'introduis  une  ampoule  contenant  une  quan- 
tité d'eau  inférieure  à  celle  qu'aurait  fournie  l'hydrate  de 
chloral  s'il  s'était  décomposé  en  eau  et  en  chloral  anhydre 
au  moment  de  la  vaporisation. 

Dans  ces  circonstances,  on  voit,  et  l'expérience  a  été 
répétée  plusieurs  fois,  qu'au  bout  d'un  quart  d'heure  les 
7~  environ,  et  au  bout  d'une  demi-heure  les -^  de  la  va- 


(  *  )  La  différence  entre  la  tension  théorique  et  la  tension  observée  peut 
être  attribuée,  au  moins  en  partie,  à  Tinexactitude  de  la  loi  des  mélanges 
des  gaz  et  des  vapeurs. 


HTDBÀTB    DE    CHLORAL.  4^^ 

peur  d'eau  introduite  ont  été  absorbés  (*);  le  reste  finit 
par  disparaître,  mais  plus  lentement.  Il  en  aurait  été  de 
même  pour  la  vapeur  d'eau  provenant  de  l'hydrate  de 
chloral,  si  cet  hydrate  s'était  réellement  décomposé  en  se 
vaporisant.  Le  tableau  qui  précède  montre  qu'il  ne  s'est 
rien  produit  de  semblable. 

L'hydrate  de  chloral  existe  donc  à  l'état  de  composé 
défini  gazeux,  à  la  température  de  78  degrés. 

Expériences  à  la  température  de  100  degrés.  —  D'après 
les  faits  qui  précèdent,  la  vapeur  d'hydrate  de  chloral  pa- 
raît avoir  une  tension  de  dissociation  sensible,  quoique 
très-faible  à  78  degrés  \  il  est  dès  lors  évident  que  si  l'on 
opère  à  une  température  plus  élevée,  à  100  degrés  par 
exemple,  la  tension  de  dissociation  de  la  vapeur  d'hydrate 
de  chloral  sera  plus  forte  qu'à  78  degrés. 

A  la  nouvelle  température,  comme  à  la  première,  il  est 
indispensable  de  se  placer  dans  des  conditions  telles  que 
la  loi  des  mélanges  des  gaz  et  des  vapeurs  soit  applicable, 
c'est-à-dire  qu'il  faut  opérer  sous  de  faibles  pressions.  En 
effet,  M.  V.  Regnault  a  démontré  que,  dans  les  mélanges  de 
deux  vapeurs  fournies  par  des  corps  susceptibles  de  disso- 
lution réciproque,  la  tension  totale  observée  est  toujours, 
pour  les  fortes  pressions,  très-inférieure  à  la  somme  des 
pressions  partielles;  elle  peut  même,  dans  le  voisinage  du 
point  de  saturation,  ne  pas  dépasser  la  tension  de  l'une  des 
vapeurs  isolées.  Les  expériences  faites  sous  des  pressions 
un  peu  fortes  ne  sauraient  donc  conduire  à  aucune  con- 
clusion  (').  Il  faut  opérer  sous  une  pression  aussi  faible 
que  possible. 


(*)  Le  sel  était  maintenu  à  une  distance  verticale  de  35  centimètres  au- 
dessus  de  la  surface  du  mercure,  sur  laquelle  se  produisait  la  vaporisation 
de  Teau.  La  vapeur  d'eau  devait  donc  se  diffuser  dans  le  mélange  gazeux 
pour  arriver  au  contact  du  sel  effleuri. 

(')  J'ai  constaté,  par  des  expériences  directes  faites  dans  le  même  appa- 


4^2  L.    TROOST. 

On  y  parvient  en  introduisant  dans  la  chambre  baromé- 
trique où  se  trouve  le  sel  effleuri  un  poids  d'hydrate  de 
chloral  qui  ne  doit  guère  dépasser  ^5o  milligrammes  pour 
l'appareil  que  j'ai  employé.  La  force  élastique  de  la  vapeur 
d'eau  que  fournirait  ce  poids  d'hydrate  de  chloral  dans 
l'hypothèse  d'une  décomposition  totale  serait  alors  inférieure 
à  la  tension  de  dissociation  du  sel.  Dans  ces  conditions, 
pour  un  volume  gazeux  supérieur  à  3oo  centimètres  cubes, 
et  la  température  étant  maintenue  entre  99  degrés  et  gg^^S^ 
voici  ce  que  j'ai  observé  : 


I. 


II. 


m.     IV. 


gr  gr  gr  gr 

Poids  de  l'hydrate  de  chloral  employé. . ..       o,a56    0,289    o,3i4    ^y^91 

Pression  observée  quelques  minutes  après  mm         mm         mm        mm 

l'introduction  de  Thydrate  de  chloral .. .       896,5    386,0    366, o    364)5 

Pression  observée  trente  minutes  après  la 
première  mesure 895,5    384,5    364*0    364)0 

Pression  observée  deux  heures  après  la  pre- 
mière mesure 398,0    882,0    36o,o    362,6 

Pression  observée  cinq  heures  après  la  pre- 
mière mesure 889,0    876,0    355,5    36i,4 

Pression  observée  neuf  heures  après  la  pre- 
mière mesure 885,5    374;7    354,8    359, a 

Pression  observée  douze  heures  après  la  pre- 
mière mesure 882,5    374,7    354,8    358,3 

Pression  observée  vingt-quatre  heures  après 
la  première  mesure 882,0        »        354,8    358,9 


reil,  qu'un  mélange  d'hydrate  de  chloral  et  de  vapeur  d'eau,  ayant  des  ten- 
sions séparées  de  443  millimètres  et  de  227  millimètres,  acquérait  seule- 
ment une  tension  de  612  millimètres  au  lieu  de  la  tension  de  670  milli- 
mètres qu'indique  la  loi  des  mélanges  et  des  vapeurs.  J'ai  constaté  de 
même,  par  des  observations  qui  seront  publiées  ultérieurement,  que  si, 
dans  l'appareil  contenant  de  l'alcool  méthylique  sous  une  pression  de  45o 
à  5oo  millimètres,  on  introduisait  un  poids  de  méthylate  de  chloral  ca- 
pable d'acquérir  dans  le  même  espace  une  tension  de  80  millimètpes,  la 
tension  totale  ne  dépassait  pas  la  tension  de  l'alcool  méthylique  seul.  J'ai 
reconnu  qu'au  contraire  la  loi  de  Dalton  s'appliquait  aux  mélanges  d'hy- 
drate de  chloral  et  d'eau  comme  aux  mélanges  d'alcool  méthylique  et  de 
méthylate  de  chloral  quand  on  opérait  sous  basse  pression. 


HYDRATE    DB    CHLORAL.  4^3 

I.  II.  III.         IV. 

Pression  que  l'on  aurait  observée  dans  Thy- 

po thèse  où  il  n*y  aurait  aucune  tension 

de  dissociation,  ni  action  réciproque  des 

vapeurs 429*0    4>4>o    38i,6    38o,o 

Pression  que  Ton  aurait  observée  dans  Vhy- 

pothèse  d'une  décomposition  totale 3i4,5    807,0    290,8    290,0 

Les  pressions  observées  :  382  millimètres,  374"% 7? 
354"*™, 8  et  358""",  2  démontrent  que,  loin  de  se  conduire 
à  loo  degrés,  en  présence  du  sel  effleurî,  comme  une  vapeut* 
entièrement  résolue  en  volumes  égaux  de  chloral  anhydre 
et  d'eau,  ayant  chacun  une  tension  d'environ  i5o  milli- 
mètres, l'hydrate  de  chloral  gazeux  se  comporte  au  con- 
traire comme  un  composé  défini  ayant  une  faible  tension 
de  dissociation,  et  encore  la  différence  entre  la  tension 
totale  théorique  et  la  tension  observée  pourrait-elle  être 
attribuée,  au  moins  en  partie,  à  quelque  action  réciproque 
des  vapeurs.  L'hydrate  de  chloral  existe  donc  à  l'étal  de 
composé  déEni  gazeux  à  la  température  de  99  degrés 
comme  à  celle  de  78  degrés. 

IIL  —  Troisième  procédé. 

Le  troisième  procédé  est  d'une  application  plus  simple 
que  les  précédents  \  il  exige  comme  eux  la  connaissance  de 
la  tension  de  dissociation  du  seL 

On  déterinine  d'abord  la  vaporisation  d'un  poids  connu 
d'hydrate  de  chloral  dans  l'appareil  \  on  note  le  volume  et 
la  pression,  puis  on  introduit  dans  cette  vapeur  un  corps 
qui  soit  capable  d'absorber  une  partie  de  la  vapeur  d'eau 
libre  que  l'hydrate  de  chloral  pourrait  contenir. 

Au  premier  abord,  l'emploi  de  corps  desséchants,  comme 
le  chlorure  de  calcium,  semble  devoir  résoudre  le  problème 
et  par  suite  permettre  de  reconnaître  si  un  gaz  est  un 
composé  défini  ou  un  mélange  d'un  gaz  et  de  vapeur  d'eau. 


4M  '      L.    TROOST. 

Maïs  on  rencontre  une  difficulté  qui  limite  le  nombre  des 
substances  susceptibles  d'être  utilisées. 

Le  chlorure  de  calcium  dégage  beaucoup  plus  de  chaleur 
que  la  vapeur  de  chloral  anhydre  en  se  combinant  avec  la 
vapeur  d'eau;  il  s'emparerait  en  conséquence  de  l'eau,  que 
celle-ci  soit  libre  ou  combinée  au  chloral ,  et  ce  phéno- 
mène chimique  empocherait  toute  conclusion  relative  à  la 
constitution  physique  de  la  vapeur.  Le  chlorure  de  cal- 
cium devra  donc  être  rejeté,  ainsi  que  tous  les  composés 
qui  dégagent  beaucoup  de  chaleur  en  s'hydratant. 

Le  corps  employé,  tout  en  étant  avide  d'eau,  doit  dé- 
gager moins  de  chaleur  que  le  chloral  en  se  combinant 
avec  l'eau.  Ce  n'est  que  s'il  remplit  cette  condition  qu'il 
ne  décomposera  pas  l'hydrate  de  chloral.  Ce  corps  est  encore 
l'oxalate  neutre  de  potasse  pur  5  mais,  pour  cette  expérience, 
il  doit  avoir  été  complètement  déshydraté  par  son  séjour  k 
Fétuve  à  100  degrés. 

Le  poids  d'hydrate  de  chloral  employé  doit  être  tel  que 
la  vapeur  d'eau  qu'il  contiendrait,  à  l'état  libre,  dans  l'hy- 
pothèse d'une  décomposition  complète,  ail  une  tension 
supérieure  à  la  tension  de  dissociation  du  sel. 

C'est  ce  qui  a  été  réalisé  dans  les  expériences  suivantes  : 

I.  II.  lîî.       IV. 

gr  gr  gr  gr 

Poids  de  l'hydrate  de  chloral  employé.       0,191       0,196     0,4975    OjSigS 

Température  de  la  vapeur. 78°,  2  à  78"»,  4         99"» 2  à  99'*,3 

Pression  observée  avant  l'introduction  ^^  ^^  mm  mm 

du  sel  déshydrate 181, 3       i85,6      44^»^      4^3,0 

Pression  observée  deux  heures  après  l'in- 
troduction du  sel  hydraté 181,5       i85,o      44o»o      4^2,0 

Pression  observée  cinq  heures  après  l'in- 
troduction du  sel  hydraté 181,5       i83,o      440)0      45a>0 

Pression  observée  neuf  heures  après  l'in- 
troduction du  sel  hydraté 181,5       i85,o      44o»o      452 jO 

Pression  observée  vingt  heures  après  l'in- 
troduction du  sel  hydraté 181,5         »         440,0     4^2,0 

L'introduction  de  l'oxalate  neutre  de  potasse  pur,  com- 


HYDRATE  DB  CBLORAL.  4^^ 

plétement  déshydraté,  n'a  donc  pas  fait  varier  la  pression 
de  la  vapeur  d'hydrate  de  chloral.  Or,  si  cet  hydrate  de 
chloral  était  un  simple  mélange  de  chloral  anhydre  et  de 
vapeur  d'eau,   la  force   élastique  de   cette  vapeur  d'eau 

==  92"*™,  5  dans  une  expérience  faite  à  78  degrés,  et 

- — =  226"™  dans  une  expérience  faite  à  99  degrés,  étant 

très-supérieure  h  la  tension  de  dissociation  du  sel  pour 
la  température  correspondante,  le  sel  déshydraté  se  serait 
emparé  de  toute  la  quantité  de  cette  vapeur  qui  correspond 
à  l'excès  de  sa  force  élastique  primitive  sur  la  tension  de 
dissociation  du  sel,  et,  par  suite,  la  pression  du  mélange 
aurait  notablement  diminué. 

Le  tableau  qui  précède  montre  qu'il  ne  s'est  rien  produit 
de  semblable,  quoique  le  contact  de  la  vapeur  avec  le  sel 
ait  été  maintenu  pendant  vingt  heures. 

J'ai  complété  l'une  des  expériences  faites  à  78  degrés 
par  une  vérification  qui  la  rend  encore  plus,  démonstrative. 
Après  avoir  constaté  que  le  volume  restait  constant,  j'ai 
introduit  dans  la  vapeur  d'hydrate  de  chloral  une  ampoule 
contenant  un  peu  moins  d'eau  que  n'en  aurait  fourni  l'hy- 
drate de  chloral  s'il  avait  été  entièrement  décomposé  5  j'ai 
alors  observé  que  cette  eau  est  absorbée  d'abord  rapide- 
ment par  le  sel,  puis  plus  lentement,  jusqu'à  ce  qu'il  n'en 
reste  plus  que  la  quantité  qui  correspond  sensiblement  à 
la  tension  de  dissociation  de  l'oxalate  de  potasse. 

On  est  donc  amené,  par  ce  dernier  procédé,  à  la  même 
conclusion  que  par  le  précédent,  à  savoir  que  l'hydrate  de 
chloral  existe  à  l'état  gazeux. 


En  résumé,  la  méthode  nouvelle  que  j'ai  appliquée  dans 
ce  Mémoire  prouve  : 

1*^  Que  la  vapeur  d'hydrate  de  chloral  n'a,  à  78  de- 


4^6  «  DAUBRÂB. 

grés,   qu'une  tension   de  dissociation  à  peine    sensible. 

2^  Que,  si  à  loo  degrés  la  tension  de  dissociation  est 
sensible,  la  plus  grande  partie  de  la  vapeur  d'hydrate  de 
chloral  n'en  existe  pas  moins,  à  cette  température,  comme 
à  78  degrés,  à  Vétat  de  composé  défini  gazeux^  distinct 
d'un  mélange  de  deux  vapeurs^ 

3°  Que  son  équivalent  en  volumes  correspond  à  8  vo- 
lumes^  comme  M.  Dumas  l'a  annoncé  le  premier. 

Cette-  conclusion  est  celle  à  laquelle  M.  Berthelot  a  été 
conduit  également,  par  l'étude  calorimétrique  de  Thydrate 
de  chloral,  sous  ses  trois  états  solide,  li({uide  et  gazeux. 


RAPPORT 

SUR  l'intérêt  que  présente  Li.  CONSERVATION  DE  CER- 
TAINS BLOCS  ERRATIQUES  SITUÉS  SUR  LE  TERRITOIRE  FRAN- 
ÇAIS, ET  SUR  l'ouvrage  DE  MM.  FALSAN  ET  CHANTRE, 
RELATIF  AUX  ANCIENS  GLACIERS  ET  AU  TERRAIN  ERRA- 
TIQUE  DE    LA    PARTIE   MOYENNE   DU    BASSIN    DU    RHÔNB^ 

Par  m.  DAUBRÉE. 


Les  vestiges  imposants  que  la  période  glaciaire  a  laisses 
à  la  surface  de  l'Europe,  antérieurement  à  la  période  ao- 
tuelle,  sont  des  témoins  irrécusables  d'un  phénomène  d'un 
haut  intérêt.  Non- seulement  ce  phénomène  représente  un 
régime  climatérique  bien  différent  de  celui  dans  lequel 
nous  vivons,  mais  encore  il  a  exercé  une  influence  des  plus 
considérables  sur  le  relief  d'une  partie  des  continents, 
ainsi  que  sur  la  nature  et  la  disposition  des  alluvions  qui 
en  recouvrent  de  vastes  étendues. 

Des  surfaces  polies  et  striées,  caractéristiques  du  frotte- 


COnSERYATION    DES    BLOCS    ERRATIQUES.  4^7 

ment  des  glaciers,  se  reconnaissent  çà  et  là  sur  les  roches, 
lorsqu'elles  ne  se  sont  pas  désagrégées  ultérieurement  et 
qu'elles  n'ont  pas  été  recouvertes  par  la  terre  végétale; 
mais  ce  sont  des  circonstances  comparativement  rares.  Les 
vestiges  glaciaires  les  plus  fréquents  consistent  dans  les 
blocs  erratiques ,  qui  sont  disséminés  de  toutes  parts; 
quelquefois  ils  sont  encore  accumulés  les  uns  sur  les  autres 
à  l'état  de  moraines. 

Le  fait  fondamental  que  ces  blocs  servent  à  constater  a 
paru  si  surprenant  qu'on  n'y  aurait  pas  ajouté  foi,  sans  les 
preuves  les  plus  démonstratives.  Aujourd'hui,  ce  fait  n'est 
plus  douteux;  aussi  les  blocs  erratiques,  que  des  caractères 
certains  distinguent  des  blocs  épars  ordinaires,  sont-ils  à 
considérer  comme  d'importants  monuments  de  l'histoire 
du  globe,  de  véritables  monuments  historiques. 

Mais,  en  beaucoup  de  lieux,  ces  blocs  sont  évidemment 
recherchés  comme  matériaux  de  construction  ;  ce  sont  sou- 
vent des  roches  cristallines,  très-résiilantes,  qui  sont  d'au- 
tant plus  appréciées  que,  transportées  par  d'anciens  gla- 
ciers, des  régions  élevées  où  elles  s'étaient  formées,  elles 
ont  été  apportées  au  milieu  de  plaines  dépourvues  de  cette 
sorte  de  matériaux.  Aussi  ces  blocs  erratiques  sont-ils,  de 
toutes  parts,  exploités  de  la  manière  la  plus  active,  et 
chaque  jour  leur  nombre  diminue  considérablement.  Si 
cette  destruction  continue,  nos  descendants,  privés  de 
la  vue  de  ces  témoins  du  passé,  pourront  à  peine  croire 
au  phénomène  imposant  qu'ils  caractérisent  avec  certi- 
tude. I 

Bien  des  personnes,  même  en  dehors  des  géologues,  se 
sont  émues  de  cette  destruction  que  l'on  pourrait  qualifier 
d'acte  de  vandalisme,  et  des  moyens  ont  été  proposés  pour 
y  porter  remède,  au  moins  dans  une  certaine  mesure. 

En  Suisse,  des  mesures  conservatrices  ont  été  prises,  à 
la  suite  d'un  Rapport  fait  en  1867,  par  la  Commission  géo- 


4^8  DAUBRÉB. 

logique  suisse,  présidée  par  M,  Sluder,  et  sur  l'initiative 
de  deux  savants  très-distingués,  MM.  Alphonse  Favre  et 
Soret.  Les  résultats  auxquels  ont  abouti  les  efforts  persé- 
vérants de  ces  savants  sont  consignés,  chaque  année,  dans 
des  rapports  spéciaux.  Dans  le  canton  d'Argovie  par 
exemple,  sous  Tactive  direction  du  conseiller  d'Etat 
chargé  du  département  de  Tlnstruction  publique,  plu- 
sieurs circulaires  contenant  des  instructions  ont  été  pu- 
bliées ;  des  conférences  à  ce  sujet  ont  été  faites  par  un 
professeur  aux  régents  des  diverses  écoles  cantonales,  qui 
ont  été  invités  à  indiquer,  sur  des  sections  d'une  carte  à 
grande  échelle,  les  principaux  blocs  erratiques  de  leur 
district. 

Dans  la  partie  de  la  France  qui  appartient  au  dé- 
partement de  la  Haute-Savoie ,  les  blocs  erratiques  ont 
également  bénéficié  des  efforts  des  deux  naturalistes 
suisses. 

Mais  les  dépôts  glaciaires  ne  sont  pas  restreints  h  ces 
régions  de  hautes  montagnes  ^  ils  s'étendent  sur  une  partie 
du  sud-est  de  la  France,  et  ils  y  présentent  des  caractères 
qui  les  rendent  particulièrement  intéressants,  ainsi  qu'il 
résulte  d'un  travail  que  deux  géologues  de  Lyon  viennent 
de  terminer. 

Déjà,  au  retour  de  son  voyage  en  Provence,  de  Saussure 
avait  signalé  les  blocs  d'Auberîve.  En  1837  >  ^^'  Itîer 
décrivit  les  blocs  alpins,  dispersés  au  sommet  des  monta- 
gnes du  Buget,  près  de  la  Charireuse-de-Portes.  En  même 
temps,  MM.  Fournel,  Leymerie,  Thiollîère  poursuivaient 
les  mêmes  études  dans  toute  la  région  ;  mais  ces  observa- 
teurs distingués  n'avaient  pu  se  dégager  de  l'hypothèse 
d'un  transport  par  de  grands  cours  d'eau. 

Quelques  années  plus  tard,  en  i858,  M.  E.  Benoit,  imi- 
tant MM.  Edouard  Colomb  et  Blanchet,  attribua  ces  phé- 
nomènes à  rinfluence   plus   ou  moins  directe   d'anciens 


COirSERVATION    DBS    BLOCS    ERBATIQUES.  4^g 

glaciers,  qui  auraient  envahi  la  vallée  du  Rhône  jus(}u'à 
Lyon,  Bourg  et  Vienne.  Il  reconnut  alors  des  moraines 
calcaires  provenant  de  petits  glaciers  jurassiens.  Dans  le 
Dauphiné,  M.  Scipion  Gras  et  surtout  M.  Lory  ont  fait 
sur  la  même  question  des  études  bien  connues. 

Sur  l'invitation  de  M.  Alphonse  Favre,  qui  avait  étudié 
de  la  manière  la  plus  précise  ces  phénomènes,  tant  en 
Suisse  que  dans  la  Haute-Savoie,  MM.  Faisan  et  Chantre 
poursuivirent  avec  activité  les  études  qui  avaient  été  faites 
antérieurement  sur  le  bassin  du  Rhône. 

Après  dix  années  d'exploration,  ils  ont  tracé  les  ré- 
sultats de  leurs  recherches  sur  six  cartes  du  Dépôt  de  la 
Guerre  au  75177.  Le  terrain  glaciaire,  au  lieu  d'y  être  re- 
présenté par  des  teintes  plates,  y  est  figuré  par  des  sys- 
tèmes de  lignes,  analogues  à  celles  qui  sont  adoptées  pour 
indiquer  les  courants.  Ces  lignes,  qui  ne  sont  en  quelque 
sorte  que  la  reproduction  complète  des  stries  gravées  par 
les  glaciers  sur  les  rochers  du  bassin  du  Rhône,  ont  été 
relevées  avec  beaucoup  de  soin  par  les  auteurs  de  la  carte: 
elles  expriment  donc  le  sens  des  mouvements  des  anciens 
glaciers. 

C'est  ainsi  qu'on  reconnaît  que  ces  anciens  glaciers 
avaient  des  proportions  colossales.  A  Culoz,  à  Chambéry, 
à  Grenoble,  l'épaisseur  de  la  glace  approchait  de  looo  mè- 
tres. Cette  masse  de  glace  était  rencontrée  par  une 
autre  branche  du  glacier  du  Rhône,  qui  d'une  part,  par 
un  rebroussement  sous  un  angle  d'environ  4^  degrés,  re- 
montait au  nord,  au  lieu  de  descendre  vers  le  midi,  et, 
d'autre  part,  envahissait  la  grande  vallée  de  la  Suisse  pour 
descendre  dans  celle  du  Rhin,  à  partir  des  montagnes  du 
Buget  et  de  la  Chartreuse,  au  milieu  desquelles  le  grand 
glacier  poussait  des  rameaux,  rencontrant  de  petits  glaciers 
locaux.  Le  niveau  supérieur  de  la  glace  s'abaissait  con- 
stamment vers  l'ouest,  et  cet  abaissement  était  propor- 


43o  DlUBRÉE. 

tionncl  à  répanouissement  horizontal  du  glacier,  au  mi* 
lieu  des  plaines  du  Dauphiné,  du  Lyonnais  et  dans  celles 
des  Dombes.  Dans  le  Bas-Dauphiné,  une  espèce  de  seuil 
formé  par  de  la  molasse  s'opposait  à  l'écoulement  de 
la  glace  vers  le  midi,  et  la  forçait  à  se  diriger  vers  la 
Bresse. 

Depuis  Bourg  jusqu'à  Vienne,  Thodure  et  au  delà,  en 
passant  par  Lyon,  on  peut  suivre,  sans  interruption,  les 
moraines  terminales  de  cet  immense  glacier  épanoui  en 
éventail  :  son  vaste  périmètre  était  compris  entre  les  Alpes 
de  la  Savoie  et  du  Dauphiné,  d'un  côté  \  et,  de  Fautre, 
entre  les  montagnes  du  Beaujolais  et  du  Lyonnais.  Le  pas- 
sage de  la  glace  est  attesté,  soit  par  des  stries  gravées  sur 
les  rochers,  soit  par  des  amas  de  cailloux  striés^  soit  enfin 
par  des  blocs  erratiques. 

Un  texte  explicatif  accompagnera  la  carte,  pour  servir  à 
la  monographie  géologique  des  anciens  glaciers  et  du  ter- 
rain erratique  de  la  partie  mo^^enne  du  bassin  du  Rhône. 
Le  travail  est  complété  par  des  coupes  longitudinales  et 
transversales  de  l'ancien  glacier  du  Rhône,  ainsi  que  par 
une  série  de  figures  des  principaux  blocs,  assez  habilement 
représentés  pour  en  donner  une  idée  exacte,  de  moraines 
et  de  surfaces  moutonnées  et  striées,  caractéristiques  du 
frottement  des  glaciers. 

Quelque  intéressants  que  soient  ces  monuments  de  notre 
ancienne  histoire,  ils  disparaissent  chaque  jour,  comme  il 
a  été  dit  plus  haut.  Les  blocs  du  mont  de  Si  on,  ceux  du 
Vuache  sont  exploités  sans  relâche,  le  bloc  de  la  Commau- 
derie,  près  de  Beiley,  vieutd'être  détruit,  de  même  que  celui 
de  la  Chartreuse  de  Cortez,  qui  était  célèbre  pour  avoir 
été  signalé  le  premier  sur  le  sommet  des  montagnes  da 
Buget;  un  bloc  gigantesque,  situé  à  Saint-Genis*Laval, 
près  de  Lyon,  au  milieu  dVn  pays  granitique,  vient  d'être 
brisé  pour  servir  à  la  construction  d'une  maison,  et  Je 


CONSSavATlON   DES    BLOCS    EIVRATIQUBS.  4^1 

beau  bloc  de  granité  porphyroïde,  la  belle  pierre  Vieil leile, 
qui  dominait  le  marais  des  £checs-en-Dombes,  a  subi  le 
même  sort.  En  Beaujolais  on  ne  brise  pas  les  blocs,  mais 
on  les  enfouit  dans  des  fosses  profondes;  puis  on  les  couvre 
de  terre  et  de  plants  de  vignes  :  c'est  ainsi  qu'à  Nuelle,  à 
Durette  et  ailleurs,  la  physionomie  des  anciennes  moraines 
se  modifie  chaque  année. 

Il  est  donc  temps  d'agir  activement,  afin  d'épargner  à 
notre  pays  la  perte  irréparable  d'objets  scientifiques  ;  il  ne 
s^agit  d'ailleurs  que  de  la  protection  d'un  nombre  très- 
restreint  de  ces  blocs,  c'est-à-dire  de  ceux  qui  méritent 
d'être  conservés  à  cause  de  leur  volume  considérable,  de 
leur  position  étrange  ou  caractéristique,  ou  bien  enfin  des 
légendes  qui  s'y  rattachent. 

Des  contrées  de  la  France,  autres  que  les  Alpes,  pré- 
sentent également  d'imposants  monuments,  des  phéno- 
mènes erratiques  :  telles  sont  particulièrement  les  Vosges 
et  les  Pyrénées. 

Dans  un  Rapport  étendu  et  intéressant,  qu'il  a  bien 
voulu  nous  adresser,  M.  Alphonse  Favre  nous  a  fait  con- 
naître : 

i^  Ce  qui  a  été  déjà  fait  pour  la  conservation  des  blocs 
erratiques  sur  le  territoire  français,  dans  le  département 
de  la  Haute-Savoie,  à  la  suite  de  demandes  que,  pendant 
dix  ans,  il  a  adressées  en  commun,  avec  M.  le  professeur 
Soret,  à  MM.  les  Préfets  de  la  Haute-Savoie,  aux  Prési- 
dents de  la  Société  géologique  de  France,  etc.,  et  de  né- 
gociations fort  longues,  quoique  ces  deux  savants  aient 
rencontré,  toujours  et  partout,  la  plus  parfaite  obli- 
geance. 

2**  Ce  qui  a  été  fait  sur  le  territoire  suisse  pour  la  con- 
servation des  blocs  erratiques,  à  la  suite  des  propositions 
faites  en  1866;  presque  tous  les  gouvernements  de  can- 
tons se  sont  empressés  de  faire  rechercher  les  masses  erra» 


43 2       DAUBRÉE.  GONSEiiyi.TION  DES  BLOCS  ERRATIQUES.  . 

tiques,  non-seulement  par  suite  de  la  recommandation  du 
département  fédéral  de  Tlntérieur,  mais  parce  qu'ils  y 
étaient  poussés  par  les  Sociétés  cantonales  d'Histoire  natu- 
relle. C'est  ainsi  que  la  recherche  des  blocs  erratiques  est 
devenue  partout  populaire  parmi  les  naturalistes  de  toutes 
sortes  :  botanistes,  pharmaciens,  entomologistes,  géologues 
et  autres. 

3°  Les  mesures  qui  seraient  à  prendre  pour  conserver 
quelques-uns  des  blocs  erratiques  situés  sur  le  territoire 
français. 

Ce  Rapport  de  M.  Alphonse  Favre,  auquel  sont  joints 
de  nombreux  documents  imprimés,  sera  du  plus  grand  se- 
cours dans  la  question  qui  nous  occupe. 

Dans  un  récent  Comité  secret,  l'Académie  a  manifesté 
l'intérêt  qu'elle  porte  à  ces  blocs  erratiques,  à  titre  de  véri- 
tables monuments,  en  nommant  dans  son  sein  une  Com- 
mission spéciale  chargée  de  veiller  à  la  conservation  de 
ceux  de  ces  blocs  qui  sont  les  plus  intéressants,  Commis- 
sion qui,  dans  les  principales  régions,  aura  des  délégués 
pour  atteindre  ce  but. 


». 


'«%«'«««««%«««*^««v«««««««%v««« 


WAHHEN  DE  LA  RUE  ET  HUGO  W.  MULLER.     4^3 

EXPÉRIENCES  SUR  LA  DÉCHARGE  DiSRUPTiVE, 

FAITES  AVEC  LA  PILE  A  CHLORURE  d' ARGENT  (*); 

Par  mm.  WARREN  DE  LA  RUE  et  Hugo  W.  MULLER. 

(Extrait  par  M.  Mascart.) 


I.   —  Description  et  usage  de  la  pile. 

Il  y  a  quelques  années  ('),  nous  avons  eu  l'honneur  de 
soumettre  k  l'Académie  les  résultats  des  expériences  faites 
avec  la  pile  constante  à  chlorure  d'argent.  La  pile  dont 
nous  nous  sommes  servis  en  1875  était  de  324o  éléments^ 
dans  ce  moment,  nous  avons  8o4o  éléments  en  action  et 
2960  nouveaux  prêts  à  être  chargés,  ce  qui  fera  un  total  de 
1 1000  éléments.  Tout  d'abord  la  pile  était  composée  d'élé-  . 
ments  en  forme  de  tubes  ouverts  par  le  haut,  et  le  zinc  ■ 
était  amalgamé.  Plus  tard,  les  tubes  furent  fermés  avec  des 
bouchons  de  caoutchouc  vulcanisé  percés  d'un  trou  pour 
laisser  passer  la  baguette  de  zinc,  un  fil  d'argent  commu- 
niquant avec  le  chlorure  d'argent  en  poudre  passait  entre  le 
bouchon  et  la  paroi  du  tube  et  était  couvert  de  plusieurs 
feuilles  minces  de  gutta-percha  pour  le  protéger  contre 
l'action  du  soufre  renfermé  dans  le  caoutchouc  vulcanisé 
et  pour  empêcher  le  contact  avec  la  baguette  de  zinc.  ' 
L'amalgamation  du  zinc  a  l'avantage  d'empêcher  l'éner- 
gique adhérence  du  chloroxyde  de  zinc  qui  se  forme  dans 
la  pile,  mais  elle  présente  l'inconvénient  grave  d'amalgamer 
peu  à  peu  et  finalement  de  couper  le  fil  d'argent  (  ')  ^  nous 


(*)  Phil.  Trans.y  Part  I,  vol.  169,  p.  55-12 f. 

(')  Comptes  rendus  des  séances  de  l'Académie  des  Sciences,  t.  LXVll, 
p.  794-798  (1868);  t.  LXXXI,  p.  G86-7/16  (1875). 

(')  On  peut  remplacer  l'argent  par  le  platine,  mais  cette  substitution 
serait  très-dispendieuse. 

iinn.  deChim,etde  P/i/f,,5»  série,  t.  XIH.  (Avril  1878.)  28 


I 


4^4  WARBEN    DE    Li    HUE   ET    HUGO  \T7  1 

avons  piéféié  ne  pas  amalgamer  le  zinc  quand  la  pile  doit 
être  en  action  pendant  une  ou  pltisieiirs  années.  Enfin  on 
a  employé,  comme  en  1868,  le  cliloriire  d'argent  fondu, 
ce  qui  diminue  la  résistance,  comme  on  le  verra  plus  loin, 
et  l'on  a  substitué  aux  bouchons  de  caoutc^houc  vulcanisé, 
qui  faisaient  souvent  fendre  les  tubes,  des  bouchons  de 
paraffine. 

La   iig.  I   représente  une  pile  de  ao  éléments,  sous  la 


dernièie  l'orTiie  que  nOus  .ivoiis  adoptée.  On  a  dessiné  à  pan 
les  parties  dont  elle  se  compose,  savoir  la  lige  de  zinc  Z,  le 
cylindre  de  chlorure  d'argent  Ag  Cl,  fondu  sur  le  fil  d'ar- 
gent aplati  SW,  le  cylîndi'e  de  parchemin  végétal  Vp  ou- 
vert auxdeiix  bouts,  ce  même  cylindre  de  parchemin  en 
place  au  tour  du  cylindre  de  chlorure  d'argent,  enfin  le  bou- 
chon en  paraffine  C,  percé  de  deux  trous  par  l'un  desquels 
passe  la  lige  de  zinc  et  dont  l'autre  sert  à  l'inlroducliou  du 
liquide;  ce  dernier  est  ensuite  fermé  par  une  petite  tige 
de  paraffine  pp.  Le  parchemin  a  pour  but  d'empêcher  le 
contact  du  zinc  et  du  chlorure;  il  est  enroulé  plusieurs 
fois  sur  un  moule  pour  en  former  un  cylindre,  puis  collé 


I 


DÉCHARGES    DISRUPTIYES.  4^5 

sur  le  bord  par  un  vernis  h  la  gomme  laque  et  serré  par 
un  fil  pour  empêcher  qu'il  se  déroule. 

Les  vases  sont  des  tubes  de  verre  à  fond  plat  de  i4  cen- 
timètres de  hauteur  et  28  millimètres  de  diamètre  ;  les  fils 
d'argent  sont  des  lames  de  20*^, 3^  de  longueur,  de  i™™,  27 
de  largeur  et  de  o"",  aS  d'épaisseur,  pesant  chacune  o^^.  88. 
Les  baguettes  de  chlorure  d'argent  ont  54  millimètres  de 
long,  7"*",  6  de  diamètre  et  pèsent  i  a^',  97.  Les  tiges  de  zinc 
ont  1 5*^5  24  de  longueur,  5°*™,  6  de  diamètre  et  sont  percées 
à  la  partie  supérieure  d'un  trou  de  a""*,  5  de  diamètre, 
dans  lequel  le  fil  d'argent  de  l'élément  voisin  est  introduit 
et  serré  par  une  goupille  (*  ). 

Le  liquide  employé  est  une  dissolution  de  chlorhydrate 
d'ammoniaque,  renfermant  23  grammes  de  sel  par  liire 
d'eau.  Les  vases  peuvent  être  clos  d'une  manière  absolue 
sans  craindre  un  dégagement  d'hydrogène,  en  fondant  le 
bouchon  de  paraffine,  à  l'aide  d'un  fer  chaud,  le  long  de  la 
paroi  du  verre  et  aulour  de  la  tige  de  zinc.  Généralement 
on  casse  beaucoup  de  tubes,  soit  au  moment  de  la  ferme- 
ture, soit  sans  cause  apparente,  et  le  plus  souvent  par  le 
fond  après  que  le  liquide  a  élé  introduit;  la  perte  peut 
atteindre  33  pour  100. 

Les  vases  d'une  série  de  20  éléments  sont  placés  sur  une 
monture  en  acajou  SS'  portée  par  quatre  pieds  d'ébonite/, 
de  1*^,2  de  hauteur.  Des  fils  N  et  P  couverts  de  gutta- 
percha,  le  second  supporté  par  une  vis  de  pression  5c,  isolée 
sur  de  l'éboniie,  permettent  de  relier  chaque  série  de 
20  éléments  avec  les  suivants. 

Ces  séries  sont  rangées  dans  des  armoires  renfermant 
les  unes  1080  éléments,  les  autres  1200. 

Lajig,  2  représente  une  pile  de  1200  éléments  dans  une 
armoire,  posée  sur  des  pieds  en  ébonite  E,  dont  les  dimen- 


(')  Le  prix  du  chlorure  d'ar£;enl  et  de  Targent,  y  compris  le  travail,  est 
d'environ  a'',  5o  par  élément. 

a8. 


r 


436 


sions  ititGni 


it   i"',4o9  (le  liauleui-,  i°',<j(in  de  lai 
ei  o",  43 17  de  profondeur. 


I 


Dans  li 


laque  art 


■  la  d,t 


Qne  sorie  de  clef  (/Ig.  3  et  4)  qui  permet  de  meltre  les 
pôles  en  comnmnicaiion  avec  deux  conducteurs  Ag' et  Z', 
lermlnéa  au  dehors  {Jig.  5)  par  des  cavités  dans  lesquelles 
ou  peut  introduire  des  chevilles  de  coulact  A  et  h'.  Des  fils 
conducteurs  de  l'^'-.jSde  diamètre,  recouverts  de  gulta- 


J 


DÉCHIRSES  DISHCPTIVES,  4^7 

perclia,  sonl  instat'res  le  long  du  mur,  el  l'un  d'eux  est 

Fi|>.  3. 


'^J'aïiiifc. 


interrompu  en  C  dans  le  voisinage  do  chaque  armoire  par 

Fie-  j. 


deux  pièces  méiallïques  A  etZ,  distantes  de  i',6;  on  peut 


[ 


438  WARREN    DE    Li    RUE    ET   BtGO    W.    MlîLLEIl.  ^^ 

introduire  dans   le  circuit  la  pile   conespotidanie  à  l'aide 
des  chevilles  h  tt  h',  ou  bieu  isolt:r  ces  deux  dernières  dans 


Fb    5 


1^  ■wii'ijiiÉiiiLiiiaiiiii^^ 


des  cavités  en  ébonile  disposées  n  cei  efl'ut  ci  luiiiiii  li.;,  toii- 
ducteurs  A  el  Z  par  une  cheville  niétalliijue. 

La  plie  fonctionne  d'autanl  mieux  qu'on  l'emploie  plus 
fréquemment;  quand  elle  reste  longlemps  en  repos,  il  se 
forme  une  coiiciie  très-adhérenle  d'oxyclilorure  de  zinc 
qui  iatroduit  une  énorme  résistance  dans  chaque  élém 


J 


DÉGHABGE8    DISRUPTIVE8,  439 

et  réduit  beaucoup  rintensitë  du  courant  que  Ion  peut 
obtenir  dans  un  circuit  de  faible  résistance^  cet  inconvé- 
nient est  négligeable  quand  il  s'agit  d'étudier  les  distances 
explosives  ou  de  faire  des  expériences  avec  les  tubes  à  gaz 
raréfiés. 

L'intensiié  du  courant  est  remaixjuablement  constante  : 
si  Ton  ferme  la  pile  par  un  circuit  peu  résistant  muni  d'un 
galvanomètre,  Taiguille  reste  immobile  pendant  plusieurs 
heures  ;  nous  avons  eu  l'occasion  de  le  vérifier  bien  des  fois. 
Ainsi  une  pile  de  lo  éléments  fut  réunie  par  deux  galva- 
nomètres avec  un  vase  renfermant  une  dissolution  de 
1  partie  d'azotate  d'argent  dans  5  parties  d'eau.  Les  deux 
électrodes  étaient  en  argent  et  furent  pesées  au  commence- 
ment et  à  la  fin  de  l'expérience.  Le  courant  fut  continué 
pendant  une  heure,  les  deux  galvanomètres  indiquant  des 
déviations  absolument  constantes  : 

L'électrode  positive  avait  perdu 0,617 

L'électrode  négative  avait  gagné 0,616 


Moyenne o,6i65 


.  /»  .     .   o,6i65         „..  o  1 

qui  laisai  t  -—7 =  o^*^,  000 1713  par  seconde. 


ce 

36oo 


La  résistance  de  la  pile  était  de  55  ohms,  celle  de  l'élec- 
Irolyte  de  3  ohms  et  celle  des  galvanomètres  de  5,a4i  ^^^' 
mant  un  total  de  63***"™,  24.  La  réduction  d'argent  par  chaque 
élément  pour  une  résistance  de  i  ohm  est  donc,  pendant 
une  seconde,  de 

0,0001718X63,24  „  Q~5 

— -— î  nr  o«^  00 1  oo33 . 


10 


Une  expérience  semblable,  faite  avec  un  voltamètre  dont 
la  résistance  était  de  20  obms,  a  donné  en  36o  secondes 
7*^*^,  21 33  de  gaz  mélangés,  ramenés  aux  conditions  nor- 
males de  température  et  de  pression,  ce  qui  correspond  à 
0^%  ooio35  d'argent  réduit  par  seconde  et  par  élément  pour 
une  résistance  de  i  ohm.  Si  Ton  admet  que  les  résistances 


4io  WARREUf    DE    LA    HUE    ET    HUGO    W-    MCU.E«. 

oni  été  bien  mesurées,  il  en  résulterait  que  dans  ce  dernier 
cas  environ  5  pour  loo  du  courant  auraient  passé  sans 
produire  une  décomposition  correspondante  de  Teau. 

Pour  éliminer  les  petites  erreurs  dues  à  l'éTalnatiou  de 
la  résistance  intérieure,  on  a  groupé  lo  éléments  en  surface, 
de  façon  à  en  constituer  un  seul  dont  la  résistance  était 
de  o***™,297^  ^°  ^'*  réuni  à  un  électrolyte  à  nitrate  d'ar- 
gent avec  des  résistances  totales  qui  ont  varié  de  I9672  â 
jQgohm^  1^5.  La  déviation  du  galvanomètre  est  restée  con- 
stante pendant  trente  heures  et  la  moyenne  de  quatre  expé- 
riences a  donné  i™^*',o945  d'argent  réduit  par  seconde 
pour  une  résistance  de  i  ohm.  Comme  la  force  électro- 
motrice de  la  pile  est  égale  à  i^°**,o3,  il  en  résulte  pour 
I  volt  et  I  ohm  i"8',o626,  au  lieu  de  i^^*",  i363,  nombre 
donné  par  M.  Kohirausch. 

La  force  électromotrice  de  la  pile  à  chlorure  d'argent  a 
été  déterminée  plusieurs  fois  par  comparaison  avec  Tétalon 
à  sulfate  de  mercure  de  Lati mer -Clark,  lequel  est  de 
i^^^S4S79  ^^  mesurant  l'intensité  du  courant  obtenu  dans 
un  circuit  de  très-grande  résistance.  On  a  obtenu  ainsi 
les  nombres 

1 ,059 

1 ,002 

I  ,o3i 

dont  la  moyenne  est  i,  o3. 

La  résistance  intérieure  de  la  pile  dépend  de  la  distance 
du  zinc  au  chlorure  d'argent,  et  surtout  de  l'état  du  chlo- 
rure, suivant  qu'il  est  en  poudre  ou  en  baguettes  fondues. 
La  résistance  des  éléments  à  chlorure  en  poudre  est  d'en- 
viron i5  ohms^  elle  est  seulement  de  5  ohms  quand  le 
chlorure  est  fondu.  Toutefois  celte  résistance  augmente 
graduellement  et  d'une  manière  continue,  à  cause  du  dé- 
pôt adhérent  d'oxychlorure  qui  se  forme  sur  la  tige  de 
zinc. 

Nous  avons  déterminé  aussi  la  force  électromotrice  des 


DÉCHARGES    DI8RVPTIVES.  44  ^ 

éléments  dans  lesquels  on  remplace  le  chlorure  d'argent 
par  un  autre  sel  lialoïde  et  nous  avons  trouvé  : 

volt 

Pour  îe  chlorure  d'argent i  ,o3 

»        bromure       »        0,908 

iochire  »»        Oj'^SS 

Ces  éléments  peuvent  être  combinés  avec  les  éléments 
à  chlorure,  de  manière  à  constituer  un  nombre  exact  de 
volts.  Ainsi  : 

TOltS 

3  éléments  au  chlorure  valent  3  X  i  ,o3. .  .      3,og 
I   élément  au  bromure 0*908 

Total  pour  4  éléments 3»99^ 

Moyenne  pour  i  élément 0,9996 

ou  sensiblement  i  volt. 

Quand  le  dépôt  d'oxyclilorure  a  donné  lieu  à  une  grande 
diminution  de  Tintensilédu  courant  dans  un  court  circuit, 
il  convient  de  remettre  la  pile  en  état  en  grattant  les  tiges 
de  zinc,  ce  qui  se  fait  sans  difficulté.  Ainsi  2400  éléments 
chargés  le  i5  décembre  iSjS,  après  avoir  fermé  la  pile  par 
un  court  circuit  pendant  une  demi-heure  pour  bien  la 
mettre  en  marche,  donnaient  dans  un  voltamètre  2  centi- 
mètres cubes  de  mélange  gazeux  par  minute  ;  le  9  avril  1 877 
la  pile  ne  donnait  plus  que  o*^*^,  45  par  minute.  Alors  20  élé- 
ments furent  démontés,  les  zincs  grattés,  et  cette  pile  de 
20  éléments  donna  2",  85  par  minute.  Toutes  les  piles 
furent  alors  remises  en  état  :  les  piles  n°*  6  et  7  contenant 
chacune  1200  éléments  donnèrent  chacune,  après  dix 
mois,  5i4  grammes  d'oxyclilorure  de  zinc  ;  la  pile  n**  5  de 
1200  éléments  fournit  894  grammes,  et  la  pile  n"  4  de 
1200  éléments  809  grammes,  seize  tnois  après  avoir  été 
chargée  (*). 


(')  On   a   reconnu  depuis   qu'un   moyen  très-cxpéditif  de  remettre  ]a 
pile  en   état  consiste  à  introduire    dans  chaque  élément,  qui   renferme 


44^  WÀRRElf    DE    LA    RUE    ET    HUGO    W.    MULLEE. 

Le  dépôl  d'oxychlorure  est  en  plaques  hexagonales  et 
correspond  à  la  formule  1 5  Zn  0, 3  ZnCl*  -f-  ao  H*0, comme 
rindiquent  les  analyses  suivantes  : 

Trouvé.  Calculé. 

Zn 58,33     58,33         «  59,07 

O H  W  U  12,08 

Cl 11,82    11,82    1 1 ,4o        10,72 

H'O "7>4o     16,20         V  18, i3 

Cette  formation  d'oxychlorure  de  zinc  n'est  pas  particu- 
lière à  la  pile  au  chlorure  d'argent  *,  elle  a  lieu  aussi  dans 
toutes  les  piles  où  le  zinc  plonge  dans  une  dissolution  d'un 
chlorure  neutre  (chlorure  de  zinc,  chlorure  de  sodium, 
chlorhydrate  d'ammoniaque). 

II.  —  Disposition  des  appareils. 

Pour  mesurer  la  longueur  de  Tétincelle,  nous  employons 
le  micromètre  à  décharges  représenté  par  la  jig.  6.  La 
monture  est  en  ébonite.  Le  pas  de  la  vis  est  de  -^  de  pouce 
et  le  bouton  d'ébonite  A  permet  d'évaluer  yttt^  ^®  pouce 
sans  difficulté.  On  peut  adapter  à  la  partie  inférieure  de  la 
vis  des  extrémités  polaires  de  différentes  formes,  et  me- 
surer des  distances  entre  elles  et  le  plateau  inférieur  D 
jusqu'à  29™°*, 5.  Les  bornes  C  et  C  communiquent  sépa- 
rément avec  la  vis  et  le  plateau  et  servent  à  attacher  les 
fils  de  communication. 

Le  même  instrument  peut  être  placé  sous  la  cloche  d'une 
pompe  pneumatique,  quand  on  désire  faire  des  expériences 
dans  l'air  atmosphérique  ou  dans  d'autres  gaz  à  différentes 
pressions  (Jig»  17). 

Le  commutateur  est  représenté  par  les  Jig.  7  et  8.  Les 


55  centimètres   cubes  de   liquide,    i    centimètre  cube  d'une  dissolution' 
d'acide  cblorhydrique  de  densité  égale  à  1,16. 


DÉCBIEOES    DIBIDPTIVBS.  44^ 

pâles  de  la  pile  communiquent  avec  deux  lames  méialli' 
ques  S  et  S'  que  l'on  peut,  i  l'aide  d'un  levîerea  ébonile  H, 
amener  en  conlact  à  droite  ou  à  gauche  avec  les  conduc- 
teurs B  et  B'.  Ces  conducteurs  communicjuenl  en  croix,  de 
sorte  que,  si  les  deux  bornes  P  et  N  sont  reliées  avec  la  vis 


Fig.  6, 


et  le  plateau  du  micromètre  à  décharges,  la  vis  sera  posi- 
tive icgàand  le  levier  aura  la  position  indiquée  par  la^^.  7 
et  négative  aà  contraire  si  le  levier  est  abattu  de  l'autre 
côté.  De  mftnQëj  les  communications  sont  supprimées 
quand  le  levier  est  dans  la  position  verticale  (^g-.  8).  Iln'y 
a  pas  à  craindre  que  la  rupture  du  circuit  par  ce  commu- 
tateur produise  d'arc  électrique,  parce  que  la  double  dis- 
tance de  ^  à  S  et  de  S  à  B  atteint  6',  33,  et  l'on  a  reconnu 


444  WAKBEK    DE    1.*    RUE    ET    HUGO    W.    MULLXS. 

que  l'arc  électrique  s'éleînl  si  les  pôles  sont  séparés  de  3', 8, 
même  quand  la  pile  renferme  8o4o  éléments. 


Pour  d'aunes  expériences  il  a  ete  nécessaire  d'emploi 

Fis    S 


DÉCHARGES    DtSKlIPTlVBS.  44^ 

grand  nombre  de  fois  par  seconde.  La  ^g.  g  représente 
celui  (jiii  nous  a  paru  le  plus  commode.  Deux  lames  ÂC 
et  BD  sont  situées  de  part  et  d'autre  d'un  disque  en  ébonite 
auquel  on  peut  imprimer  une  rotation  rapide.  Des  ressorts 
k  angle  droit  appuient  alternativement  sur  les  deux  lames 

Fig.  9. 


qui  communiquent  séparément  avec  les  deux  pôles  Ag 
et  Z  de  la  pile;  les  ressorts  communiquant  avec  les  fîts 
Ag*  etZ'  y  envoient  des  courants  alternativement  de  sens 
contraires.  Cet  appareil  renverse  le  courant  35a  fois  par 
Seconde  pendant  que  la  manivelle  fait  4  tours,  vitesse  qu'il 
est  facile  de  réaliser  à  la  main;  d'autres  disques  ont 
même  permis  de  produire  jusqu'à  aiia  interruptions  par 
seconde. 

Nous  pouvons  introduire  dans  le  circuit  des  résistances 
métalliques  isolées  avec  le  plus  grand  soin  et  allant  de 
I  ohm  à  [  mégohm.  Pour  des  résistances  plus  grandes, 
nous  avons  employé  des  colonnes  liquides  formées  d'un 
mélange  à  parties  égales  d'eau  et  de  glycérine  ou  simple- 
ment d'eau  pure.  Quatre  tubes  ainsi  préparés  avaient  des 


44^  WARREN    DE   "LA    ItUB    ET    HUGO    W.    MULLER. 

résistances  égales  respectivemeDt  à 

2,69,     4>     6,i5,     3o,5 


,    T 


mégohms,cequi  faisaii  une  résislance  totale  de  43, 34  niég- 
ohms.'Ces  résistances  diminuent  graduellement,  par  suite 
de  la  dissolution  des  sels  ammoniacaux  qui  existent  dans 
l'air,  et  il  est  nécessaire  quelquefois  de  renouveler  entière- 
ment les  liquides. 

EuGn  nous  avions  installé  sur  le  trajet  du  courant^  pour 
en  déterminer  Tintensité,  une  boussole  des  tangentes  isolée 
avec  des  soins  particuliers  et  aussi  différentes  bobines  d'in- 
duction, sur  le  fil  secondaire  desquelles  on  interposait  un 
galvanomètre  de  Thomson  très-sensible,  .aGn  de  manifester 
les  c^scillations  du  courant,  comme  on  le  verra  plus 
loin. 

Tous  ces  appareils  pouvaient  être  introduits  dans  le  cir- 
cuit et  supprimés  en  quelques  secondes  à  Taide  de  che- 
\illes,  comme  celle  que  nous  avons  décrite  plus  haut  pour 
les  différentes  piles. 

III.  —  Dis  lances  ej  plosi\^es  aux  pressions  atmosphériques 

ordinaires. 

La  décharge  de  la  pile  avec  un  ou  deux  pôles  en  forme 
de  pointe  présente  plusieurs  phénomènes  intéressants,  qui 
précèdent  le  passage  véritable  de  rélincellc  et  qui  n'ont 
pas  lieu  avec  d'autres  formes  d'extrémités  polaires,  par 
exemple  des  sphères  ou  des  disques. 

Dans  ce  dernier  cas,  la  nature  des  métaux  n'a  pas  d'in- 
fluence sur  la  distance  explosive.  Les  expériences  répétées 
avec  des  conducteurs  de  même  forme  et  le  même  nombre 
d'éléments  ont  toujours  donné  des  résultats  d'une  constance 
remarquable,  quel  que  fût  Tintervalle  des  expériences, 
c'est-à-dire  quel  que  fut  l'accroissement  de  résistance  in- 
troduit dans  la  pile  par  la  formation  d'oxychlorure  de  zinc. 


DÉCHARGES    DISBDPTI\ES.  447 

La  longueur  de  V étincelle  dépend  donc  essentiellement 
du  nombre  des  éléments  et  de  leur  force  électromotrice. 

Par  exemple,  un  grand  nombre  d'expériences  ont  été 
faîtes  à  cinq  époques  très-différentes,  le  24  février,  les  9  et 
10  juin  et  le  20  octobre  1876,  et  le  5  juin  1877,  avec 
des  conducteurs  terminés  par  des  surfaces  spliériques  de 
S*',  81  de  diamètre,  dont  le  rayon  de  courbure  était  de  7*^,  62  5 
dans  deux  autres  séries  d'expériences,  faites  le  12  février  et 
le  1 3  juin  1876,  les  surfaces  sphériques  avaient  1*^,97  de 
rayon  de  courbure  et  des  diamètres  égaux  respectivement 
k  i*^,o5  et  i*'9  79- 

Tous  les  résultats  des  expériences  ont  été  portés  sur 
papier  quadrillé,  puis  traduits  en  courbes,  et  Ton  a  déter- 
miné ainsi,  pour  chaque  série,  la  distance  explosive  cor- 
respondant à  un  nombre  d'éléments  variant  d'une  manière 
régulière,  comme  l'indique  le  tableau  suivant  : 


Nombre  d'éléments. 


«  / 

u 
3 
O 


o 

o 

t. 
•s. 

s 

s 


I  

II  

m  

IV   

v  

vil 

Moyenne 
Vlll  .... 


fSO 
mm 
O , o3 1 7 

o,o3i7 
0,0.317 
0,0354 
o,o3i7 

0,0354 
0,0396 
o,o3i7 


« 

5 


o 
o 

a 

s 


Nombre  d'éléments.      SOOO 

mm 

1    0>^779 

Il 0,5918 

III    0,6045 

IV 0,5664 

V  0,5715 

Vil  0,5079 

Moyenne...      0,5700 
Vlll o,584i 


600 
mm 
0,0640 

o,o63o 
o,o635 
o,o5o8 
o,o635 
o,o5o8 
0,0593 
0,0571 

4000 
mm 
0,8443 

0,8808 
0,8788 
0,8636 
0,8533 
0,7874 
o,85i3 
o,85o7 


1000 

mm 

0,1 334 
0,1219 
0,1219 
0,1016 
o,i3oi 
0,0978 
o,  1 178 
0, 1270 


6000 
mm 
,126 

,172 
,lH2 
,143 
,139 
,060 
,i34 
,i4G 


1500 
mm 
0,2337 

0 , 2 1 59 

0,2223 

0,2095 
o,3i59 
0,1968 
0,3157 

0,3l49 

6000 
mm 
// 

1,481 

1,461 
1,442 

1 ,4o3 
// 

Ij447 
1,448 


tooo 

mm 

0,3333 
0,3366 
0,3493 
0,3238 
0,3238 
0,2839 
o,325i 
0,3238 

7000 
mm 
1/ 

1,784 

»»797 
1,752 

1,702 

rr 

ï>7J9 
1,760 


1600 
mm 
0,4509 

0,4573 
0,4826 
0,4509 
0,4317 
o,4o63 
0,4466 

0,4449 

8000 
mm 
it 

2,095 
2,095 
2,070 
3,019 

/f 
3,070 
2,078 


On  a  ensuite  tracé  une  nouvelle  courbe  \III,  qui  repré- 
sente aussi  exactement  que  possible  la  moyenne  des 
observations  individuelles.  Cette  courbe  se  distingue  très- 
nettement  d'une  droite  et  montre  que,  au  moins  jusqu'à 
8000  éléments,  la  distance  explosive  n'est  pas  absolument 


44^     WARREM  DE  LA  RUE  ET  HUGO  W.  MULLBR. 

proporiionnelle  9a  nombre  des  éléments.  On  peut  déduire 
de  celte  courbe  le  tableau  suivant,  qui  donne,  pour  une  dif- 
férence de  potentiel  exprimée  en  volts,  la  distance  explosive 
dans  Tair  à  la  pression  ordinaire,  entre  deux  surfaces 
sphérîques  de  7*^,  62  de  rayon  et  de  3^,  8  de  diamètre  : 

Augmentation 

de  la  longueur 

de  rétincelle 

pour 

1000  volts 

en  plus. 


Volts. 
25o 


5oo 


^fjo 


1000 
i5oo 
2000 
25oo 
3ooo 
35oo 
4ooo 
45oo 


5ooo 


55oo 


Gooo 
65oo 
7000 


7600 


8(»()o 


Distance 
explosive. 

mm 

o,o?.54 
0,0572 
0,0889 
o ,  1 224 
0,208 3 
o,3i3i 
0,4317 
o,5ô88 
i^ ,  (;<S58 
<),8i()3 
o,f)588 
I  ,o()8o 
T  ,.>.45o 
I ,0070 


I , 5420 


I  ,G8()o 
I ,8410 
1 ,9()5o 


DilTé- 
rences. 


Entre 
volts. 

O 


3i8 
3.7 
335 
859 
1048 
it86 


127 1 


1270 
i335 
1395 
1392 

I  Î70 


1420 


i55o 


1470 
i:")20 
i54<) 


et 


1000 

et 
2000 

et 
3ooo 

et 
4000 

vi 


5ooo 


<'t 
6000 

et 
7000 

et 
8000 


mm 


0 ,  1 22.4 


0,1907 


0 , 2.457 


O , 2605 


0^2787 


o , 2890 


o ,  3020 


o,3o6o  ■ 


DÉCHARGES    DISaUPTIVES.  449 

On  voit  qu'à  partir  de  2000  volts  chaque  addition  de 
1000  volts  donne  sensiblement  le  même  accroissement  de 
distance  explosive,  mais  que  cependant  cet  excès  continue 
de  croître  très-lentement,  au  moins  jusqu'à  8000  volts. 

Ces  résultats  sont  d'accord  avec  la  conclusion  de  sir 
W.  Thomson  (^),  qu'une  pile  de  55 10  éléments  Daniell 
est  capable  de  produire  une  étincelle  dans  Tair  ordinaire 
entre  deux  surfaces  légèrement  convexes  à  la  distance  de 


mm 


Afin  de  rendre  la  comparaison  plus  facile,  nous  avons 
traduit  en  volts  les  nombres  publiés  par  sir  W.  Thomson 
en  prenant  la  valeur  3  X  10*°  pour  le  rapport  de  l'unité 
électromagnétique  à  l'unité  électrostatique. 


Force 

Différence 

Force 

Différence 

électrostatique 

de  potentiel 

électromo- 

de potentiel 

Centi- 

par 

des  surfaces 

trice 

en  volts 

mètres. 

centimètre. 

opposées. . 

en  volts. 

par  ccntimèt. 

0 , 0086 

267,1 

2,3o 

690 

8o23o 

0,0127 

267,0 

3,26 

978 

77000 

0,0162 

262,0 

3,33 

999 

78660 

0,0190 

224,0 

4,^6 

1278 

67260 

0,0281 

200,6 

5,64 

1692 

60220 

0 , o4o8 

161 ,5 

6,18 

1864 

45450 

0 , o663 

144, 1 

8,11 

2433 

43210 

0,0684 

139,6 

8,16 

2446 

41870 

0,0688 

i4o,8 

9^69 

2907 

42260 

0 ,  0904 

134,9 

12,20 

366o 

40490 

0 , I o56 

l32,  I 

13,96 

4i85 

39630 

0,  i326 

i3i  ,0 

17,36 

6208 

39310 

Les  moyennes  des  résultats  obtenus  avec  la  pile  à  clilo- 
rure  d'argent,  les  24  février,  9  el  10  juin,  19  et  20  oc- 
tobre 1876,  sont  :  ^ 


(*)  Proc,  Roy.  Soc,  vol.  X,  p.  338. 

Afin,  de  Chim,  et  de  Phys.,  5*  série,  t.  XUI.  (Avril  1878.) 


2( 


4^0  WlRRElf    DE    LA    RUE    ET    HIGO    W.    MCLLER. 


Différence  de  po- 

EMF en   élé- 

tentiel en  Tolts 

CentimètreB. 

ments  AgCI. 

EMF  en  Tolts. 

par  centimètre. 

0,01263 

1080 

IT  l3 

88060 

0,01461 

I900 

1236 

84590 

0,03642 

2160 

2225 

61090 

o,o44i4 

2400 

2472 

56oio 

0,06410 

3240 

3336 

57o5o 

0,07619 

3600 

3708 

48660 

0,09404 

4320 

4449 

47320 

0, I i44o 

4800 

4943 

432  TO 

0 , 1  s».5 1 0 

5400 

5562 

44460 

0, i435o 

588o 

6o56 

42210 

0,15970 

6440 

6674 

41780 

0,17840 

6960 

7168 

40180 

0,19170 

7560 

7785 

40160 

0,21010 

8040 

8281 

39420 

Nos  expériences  indiquent,  en  général,  une  différence  de 
potentiel  plus  grande  pour  une  étincelle  donnée  que  celles 
de  sir  W.  Thomson,  mais  la  marche  des  phénomènes  est 
absolument  la  même  dans  les  deux  cas. 

On  doit  remarquer  que,  malgré  Taccord  des  distances 
mesurées  entre  les  extrémités  les  plus  rapprochées  des  sur- 
faces pour  la  production  des  étincelles  dans  des  expé- 
riences fréquemment  répétées,  il  arrivait  rarement  que 
réiincelle  éclatât  exactement  aux  points  les  pi  us  rapprochés 
de  deux  conducteurs. 

L'accroissement  de  distance  explosive,  pour  des  accrois- 
sements successifs  du  nombre  des  éléments,  est  beaucoup 
moins  rapide  dans  le  cas  de  deux  surfaces  sphériques  que 
si  l'explosion  a  lieu  entre  une  pointe  et  un  disque.  Il  s'en 
faut  donc  de  beaucoup  que  la  distance  explosive  soit  pro- 
portionnelle au  carré  du  nombre  des  éléments,  comme 
dans  le  cas  d'une  pointe  et  un  disque  ou  de  deux  pointes 
que  Ton  verra  plus  tard. 

La  différence  des  résultais  que  nous  avons  oblenuspour 


DiCHAltOES    BISKUPTITE*.  4^1 

des  surfaces  sphëriques  de  7", 6a  de  rayon  avec  ceux  de  sir 
W.  Thomson,  relatifs  à  d«s  surfaces  légèrement  convexes, 
nous  a  détermines  à  opérer  avec  des  disques  de  ■°<77a  de 
rayon  dont  la  distance  aux  bords  était  de  o""*,i  i5  quand 
les  centres  étaient  en  contact.  Trois  séries  d'expériences 
réalisées  dans  ces  conditions  ont  été  réduites  en  courbes-, 
on  en  a  déduit  ensuite  une  courbe  moyenne  dont  la  table 
suivante  (p.  4^^)  donne  les  principales  valeurs. 

Les  courbes  qui  représentent  ces  expériences  et  celles  de 
sir  W.  Thomson  sont  presque  identiques;  les  différences  ei 
les  irrégularités  qu'elles  présentent  paraissent  dues  à  des 
erreurs  accidentelles. 

Nous  avons  déterminé  aussi  la  distance  explosive  entre 
deux  cylindres  concentriques,  à  l'aide  de  l'appareil  repré- 
senté par    la  fig.  10.  Le  cylindre  A,   de  6S3.Ï  de   lon- 


gueur ei  1^,243  de  diamètre  intérieur,  et  le  cylindre  B, 
tous  deux  en  laiton,  sont  placés  dans  une  monture  en  ébo- 
nite  parfaitement  centrée;  en  montant  sur  un  tour  le 
cylindre  intérieur,  on  diminue  peu  à  peu  son  diamètre 
dans  le  cours  des  expériences  pour  faire  varier  la  distance 
des  suifares.  La  quantité  de  matière  enlevée  à  chaque  opé- 
ration ne  représentait  pas  une  couihe  de  plus  de  o™°',oa  d'é- 
paisseur, de  sorte  que  la  distance  explosive  était  déter- 
minée avec  une  approximation  de  o'"™,oi.  Ces  résultats 
ont  servi  à  construire  une  courbe,  dont  on  a  déduit  la 
table  de  la  page  4^3. 

^9* 


45a   wirreu  ob  la  rue  et  hugo  w.  mulleb. 


Deiix  surface»  plane». 


Volts. 

25o 
5oo 
760 
1000 
i5oo 
2000 
25oo 
3ooo 
35oo 
4000 
45oo 


5ooo 


55oo 
6000 
65oo 


7000 


7500 
8000 


Distance 
explosive. 


mm 


0,0592 

G, iao6 

0,1841 
0,2477 
0,3555 
0,4317 

o,5i44 

o,64i3 
o , 7695 
0,9206 
I , 0920 
r ,2520 
I ,8720 
1 , 4620 
I ,6190 
1,7780 
I , 9380 
2, 1020 


Entre 
Différences.        volts. 


614 

635 

636 
1078 
762 
827 
1269 
1282 
i5i  1 


1714 


1600 
1200 
900 
1570 
1590 
1600 
1640 


o 


et 


1000 

et 
2000 

et 
3ooo 

et 
4000 

et 
5ooo 

et 
6000 

et 
7000 

et 
8000 


Augmentation 

de  la  longueur 

de  l'étincelle 

pour 

1000  TOltS 

en  plus. 


\ 


mm 


0,2477 


o,i84o 


0,2096 


0,2793 


>      o,33i4 


o , 2 I 00 


\       o , 3 I 60 


o , 3240 


d4gb^«)Ges  DiSftUPTnrB6« 


4^Z 


Deux  cylindres  concentriques, 


Volts. 

25o 
5oo 
750 
1000 
i5oo 
2000 
25oo 
3ooo 
35oo 
4000 
4500 
5ooo 
55oo 
6000 
65oo 
7000 
7500 
8000 


Distance 
explosive. 


mm 


o , 0432 
o,o838 
o, 1270 
o , I 752 
0,3073 
0,4826 
0,6806 

0,9143 

i,i43o 
I ,3410 
1,4980 
I ,663o 
1,7680 
I , 885o 


2,0110 


2,i33o 
2,2860 
2,4430 


Entre 
Différences.        volts. 


406 
432 
482 
l32I 

1753 

1980 
2348 

2276 

1980 

1670 
i65o 
io5o 
1 170 
1260 
1220 
i53o 
1570 


et 


1000 

et 
2000 

et 
3ooo 

et 
4000 

et 
5ooo 

et 
6000 

et 
7000 

et 
8000 


Augmentation 

de  la  longueur 

derétincelle 

pour 

1000  volts 

en  plus. 


mm 


0,1762 


0,3074 


0,3328 


o,3256 


o , 3220 


0,2220 


0,2480 


o,3ioo 


454    WARREN  DIS  Ui    RUE  ET  HUGO  W*  MULLBR. 

M.  Gaugain  (^)  a  étudié  la  distance  explosive  autre  des 
cylindriques  concentriques  avec  des  potentiels  beaucoup 
plus  élevés  ;  il  a  constaté  que,  si  le  cylindre  intérieur  reste 
constant,  la  densité  électrique  sur  ce  cylindre,  au  moment 
de  fexplosion,  est  indépendante  de  la  distance  explosive, 
et  que  cette  densité  croît  quand  le  rayon  du  cylindre  inté- 
rieur diminue.  Dans  ces  expériences ,  la  densité  élec- 
trique Il  sur  le  cylindre  intérieur  est  représentée,  à  un  fac- 
teur près,  par  la  formule 

N 


1         ^ 

rlog- 


dans  laquelle  N  désigne  le  nombre  des  éléments,  R  et  r  les 
rayons  des  deux  surfaces  entre  lesquelles  se  produit  l'étin- 
celle. 

On  obtient  ainsi  : 


Nombre 

Distance 

Densité 

d'éléments 

explosive 

électrique 

N. 

R  — r. 

mm 

fi.. 

I200 

0,226 

1245 

2400 

0,671 

874 

36oo 

1  ,25o 

:44 

4800 

1 ,641 

789 

588o 

1,895 

863 

6960 

2,182 

918 

8o4o 

2,535 

961 

Il  résulte  delà  que,  pour  les  petites  étincelles,  la  densité 
explosive  est  variable  aussi  bien  qu'entre  des  surfaces 
sphériques  et  des  surfaces  planes.  La  densité  diminue 
même  d'abord,  puis^ugmente  à  mesure  que  le  nombre  des 
éléments  va  croissant. 


(*)  Annales  de  Chimie  et  de  Physique,  4«  série,  t.  VIII,  p.  ii5-ii8. 


DÉGHAROES    DlSADPTiTES.  4^3 

Quand  rélincelle  éclate  entre  une  pointe  et  un  disque, 
la  disianee  explosive  présente  aussi  une  constance  remar- 
quable pour  un  même  nombre  d'éléments,  mais  la  forme 
de  la  pointe  a  une  grande  influence. 

Ainsi,  entre  un  cône  de  20  degrés   et  un  disque,  la 

distance  explosive  était  de  4""»674  ^ivec  564o  éléments, 

et  de  6"*"*, 782  avec  8o4o   éléments,  tandis  qu'avec  une 

pointe  [fig*    II)  (X  quatre  fois  plus  grande  et  Y  gran- 

Fîg.   II. 


dcur  vériiable)  dont  la  forme  se  rapproche  de  celle 
d'un  paraboloïJe  de  même  longueur  et  de  même  base 
que  le  cône,  IVtincelle  était  de  6°*", 02  pour  564o  élé- 
ments, et  de  8™™,7i2  pour  8o4o  éléments.  Les  rapports 

4>674  ^,       6,78?.  0/  •!       • 

^-^  =  0,7764  et  g-'—  =  0,7784,  presque  identiques, 

représentent  la  proportion  qui  existe  entre  la  longueur  de 
l'étincelle  relative  à  une  pointe  conique,  et  celle  de  l'étin- 
celle oblenue  avec  une  pointe  parabolique. 

La  longueur  de  Tétincelle  dépend  aussi  du  signe  de  la 
pointe.  Pour  de  grandes  tensions,  de  5ooo  à  8000  élé- 
ments,  la  décharge  disruptive  est  plus  longue  quand  la 
pointe  est  positive*,  mais,  avec  un  nombre  moindre  d'élé- 
ments, c'est-à-dire  de  1000  à  3ooo,  elle  est  plus  longue 
quand  la  pointe  est  négative. 


456  WARREM    DE   LA    RUE  ET   BOGO   W*   MVLLER. 

LoDgaear  de  Tétine^e.  Rapport. 

Pointe -4- 


éments. 

Pointe  - 

nm 

8o4o 

8,71a 

564o 

5,779 

3240 

1 ,524 

2160 

0,724 

1080 

0,086 

4,826 

Pointe—. 

1,8 

3,25i 

'»7 

1 ,524 

1,0 

1 ,016 

0,71 

0,127 

0,67 

Pour  déterminer  la  forme  de  pointe  la  plus  avanta- 
geuse, on  a  fait  un  grand  nombre  d'expériences  avec 
des  pointes  très-variées,  dont  on  dessinait  ensuite  le  profil 
au  microscope,  quand  elles  paraissaient  produire  un  effet 
bien  marqué.  La  forme  la  plus  favorable  parait  corres- 
pondre à  une  courbe  méridienne  dont  les  ordonnées  équi- 
(listantes  varient  comme  les  racines  carrées  des  nombres 
impairs  i,3,5,...5  les  sections  correspondantes  varient, 
par  suite,  dans  le  rapport  des  nombres  impairs.  La  plus 
grande  partie  de  la  courbe  s'écarte  peu  d'une  parabole^  et, 
en  construisant  une  pointe  en  forme  de  paraboloïde  dont 
le  sommet  est  alors  émoussé,  on  a  obtenu  sensiblement  les 
mêmes  résultats. 

Un  très-grand  nombre  d'expériences  ont  été  réalisées  à 
diverses  époques  avec  des  pointes  paraboliques  et  des  disques, 
en  faisant  la  pointe  tantôt  positive  et  tantôt  négative.  Tous 
les  résultats  ont  été  réduits  en  courbes,  et  l'on  a  déterminé 
ainsi  une  courbe  moyenne  représentant  l'ensemble  des 
observations  pour  le  cas  où  la  pointe  est  positive  et  placée 
au-dessus  du  disque.  Les  nombres  suivants  montrent  que 
la  dislance  explosive  est  très-sensiblement  proportion- 
nelle au  carré  du  nombre  des  éléments. 

Distance  explosive  entre  une  pointe  -f-  et  un  disque  — . 

Nombre  d'élômonts.         1000  2000  3000  4000  5000  COOO  7000         WMH) 

lum  mm  mm  mm  mm         mm         mm  mm 

Distanco  obs....     0,1:195    o,56i3     1,407      2,616    l\yOZ%    0,689    7>^^4    ^i9^î 

»        cale...     o,i385    o,5588     1,237      2,236    3,^93    5,029    6,845    8,93( 


\ 


.  DÉCHARGES    DlSRUPTiVE5.  4^7 

La  même  méthode  a  été  employée  pour  déterminer  la 
distance  explosive  entre  deux  pointes  paraboliques.  La 
distance  explosive  est  encore  proportionnelle  au  carré  du 
nombre  des  éléments. 


Distance  explosive  entre  deux  pointes  paraboliques. 


ombre  d'ôlémonts.    1000 


mm 


2000 


mm 


8000 


mm 


4000 


mm 


SOOO 


mm 


6000 


mm 


7000 


mm 


Distance  obs.    0,127      o,533      i,3/|6      2,794      ^,^'ii      6,32Ô      8,280 
»        cale.     0,107      0,687      1,4^2      2,545      3,977      5,728      7^798 


8000 

mm 
10,18 

10,18 


Les  courbes  de  la  fig,  \i  donnent  le  résumé  de  toutes 
ces  expériences. 

Fig.  12. 


; 

la 

/ 

/ 

.9 

/    / 

3 

/ 

^   / 

8 

/ 

/ 

// 

/ 

7 

A/ 

,^/ 

/ 

CO 

6 

■y 

h- 

W 

5 

-j 

/ 

[/ 

1 

4 

// 

// 

3 

4. 

\ 

V 

/ 

:SCC«^SÎÎÎ^ 

^--""^^ 

"2 

/ 

""^^^ 

y^ 

'^^' 

"       ^^.^^ 

ts^^^*" 

1 

.^^â==-- 

1 

^-.«««^ 

ÉLÉM 

ENT5 

1000 


2000 


^00 


4000 


5000 


6000 


7000 


eooo 


Quand  on  met  la  pile  en  communication  avec  un  con- 


458.         WA.RREff    DE    Là    RUE    ET    HUGO  W.    MULLER. 

densateur,  les  étincelles  sont  plus  épaisses  el  donnent  une 
explosion  d'autant  plus  violente  que  la  capacité  du  con- 
densateur est  plus  grande.  La  distance  explosive  entre 
des  surfaces  sphériques  reste  la  même,  mais  entre  une 
pointe  et  un  disque  elle  est  considérablement  diminuée. 
Ainsi,  avec  un  condensateur  de  o^iSS  microfarad  et  une 
pile  de  8o4o  éléments,  on  a  obtenu  : 

Distance  explosiTe 

sans  av^c 

Extrémités  polaires.  condensateur,     condensateur. 

mn  nm 

Deux  surfaces  sphériques 2,08  2,08 

Pointe  positive  et  disque  négatif.         8,64  6,81 

Avec  un  condensateur  de  l'i  microfarads,  les  8o4o  élé- 
ments ont  donné  entre  un  disque  plan  et  une  pointe  posi- 
tive mousse  (il  est  impossible  de  conserver  des  pointes  ai- 
guës avec  de  pareilles  décharges)  une  distance  explosive 
de  6*"™, 73. 

L'élincelle  véritable  entre  une  pointe  et  un  disque  est 
précédée  par  une  décharge  lumineuse,  une  sorte  d'effluve. 
La  quantité  d'électricité  qui  passe  alors  est  très-faible 
par  rapport  à  celle  que  donnent  l'étincelle  et  la  formation 
de  Tare,  mais  elle  est  suffisante  pour  produire  une  vive  lu- 
mière dans  un  tube  à  gaz  raréâé.  Ainsi,  avec  la  pile  de 
8o4o  éléments,  dont  4800  au  chlorure  fondu  avaient  une 
résistance  de  5  ohms,  et  3^40  au  chlorure  en  poudre 
avaient  une  résistance  de  1 5  ohms,  ce  qui  faisait  une  ré- 
sistance totale  de  72  600  ohms,  on  a  obtenu  pour  Tin tensi té 
du  courant  : 

weber 
Dans  un  court  circuit 0,1  i4o 

Après  une  étincelle  à  8"**",64  et  la  formation  de 
Tare,  la  résistance  totale  du  circuit  extérieur 
étant  trouvée  (le  58  000  ohms o,o634 

A  9™"*, 4,  la  résistance  exlérieiire  étant  trouvée  de 

327  mégohms,  avec  la  pointe  positive 0,000024? 


DÉCHàEGES    DISRUPTiVES.  4^9 

weber 
A  la  distance  de  9'^"^,4>  résistance  de  274  niég- 

ohms  et  pointe  négative o, 0000802 

A  7"*™, 63,  résistance  de   181  mégohms  et  pointe 

négative o,oooo458 

Distance  de  29"^, 4^»  résistance  Je  S890    még- 
ohms» pointe  positive  ou  négative o,oooooi4 

Si  l'on  prend  pour  unité  le  courant  qui  a  lieu  avec  une 
résistance  extérieure  nulle,  on  voit  que  Tintensité  a  été 
réduite  à  o^Si  par  la  formation  de  Tare,  puis  k  0,000217 
et  0,0000123  aux  distances  de9™",i4  et  de  29"", 46.  Il 
résulte  de  là  que  la  formation  de  TefBuve  entre  une  pointe 
parabolique  et  un  disque,  à  la  distance  de  9°^,  14)  ne  di- 
minue la  différence  des  potentiels  d^une  pile  de  8o4o  élé- 
ments que  de  v^.     ?  c'est-â-dire  moins  de  2  éléments. 

IV.  —  Propriétés  rie  Vétincelle. 

La  lumière  qui  jaillit  entre  les  pôles  est  très-visible, 
même  à  la  distance  de  29™",5.  Quand  on  rapproche  les 
pôles,  la  pointe  étant  positive,  il  se  produit  un  sifflement 
très-fort,  et  même  un  brait  de  crécelle.  Le  disque,  surtout 
quand  il  est  positif,  se  couvre  d'une  couche  métallique 
mince  qui  prend  Tapparence  des  anneaux  de  Newton. 

Il  y  a  encore  une  décharge  lumineuse  très-apparente  bien 
au  delà  de  la  distance  mesurable  par  notre  micromètre,  qui 
est  de  29'*", 5.  Ainsi  on  peut  mettre  en  évidence  le  pas- 
sage (l*uii  courant  entre  des  pôles  séparés  de  i3  à  i5  cen- 
timètres, en  interposant  un  tube  de  Geissler  entre  la  pile  et 
un  des  pôles,  car  ce  tube  devient  lumineux,  quand  même 
le  courant  est  trop  faible  pour  donner  une  lueur  appré- 
ciable entre  les  extrémités  polaires  de  l'excitateur. 

A  Toeil  nu,  la  décharge  ressemble  à  un  fllet  lumineux 
entouré  d'une  auréole  phosphorescente.  Qu^nd  on  Tob- 


r 


4S0  VrlRBEM    DE    LA    BVE   ET    HCGO    W.    MDLLBB.  ^^ 

ser»e  avec  un   microscope,    la    poinle  éiaal  positive,   la 
décharge  paraît  formée  d«  plusieurs  rayons  de  lumière  vi- 


agiiés,  comme  on  le  \oil  fig.  i3.  La  fig.  i4  repré- 
le  partie  de  la  déchargi;  quand  la  pointe  est  négaiîve. 


I 


Pour  étudier  ces  décharges,  nous  avons  employé  uu  mi- 


I 


DÉCHARGES    Di-SRIifTIVes. 

croscope  coudé  {fig.  i5),  muni  dans  l'angle  du  tube  d'un 
miroir  lournaut  auquel  on  pouvait  donner,  à  l'aide  d'ti 
poulie  W,  une  rotation  de  i  j  tours  par  seconde.  Toute  la 
monturedel 


contre  les  accidents.  Le  miroir  tournant  montre  que  la  dé- 
charge eu  effluves  est  in  termine  nte.  Quand  la  pointe  esl  po- 
sitive, une  vitesse  modérée  sépare  la  décharge  en 


distinctes,  comme  rijidiqucnt  ]e;i  dessins  de  gauche  de  la 
J(^.  16.  La  déchaîne  parait  plus  coulîuue  avec  la  pointe  né- 
gative, de  sorte  que  l'image  (^/ig-.  16  à  droite)  se  montre  ha- 
bituellement au  microscope  comme  une  nappe  lumineuse 


462     WARREll  DE  L4  AVE  ET  HUGO  W.  MULLER. 

plus  brillante  au  voisinage  de  la  pointe.  La  différence  des 
sons  produits  dans  les  deux  cas  concourt  à  indiquer  que  la 
pointe  positive  donne  une  décharge  moins  continue. 

Quand  on  introduit  dans  le  circuit  une  résistance  con- 
sidérable, par  exemple  de  4  mégohms,  le  caractère  de  la 
décharge  est  complètement  modifié.  On  obtient  alors,  à 
une  distance  un  peu  moindre  que  dans  le  cas  ordinaire, 
une  série  plus  ou  moins  rapide  d^étincelles  brillantes, 
tout  à  fait  analogues  à  celles  d'une  petite  bouteille  de  Leyde 
et  qui  percent  le  papier  de  trous  très-petits. 

Si  Ton  place  sur  le  disque  du  micromètre  à  étincelles  une 
bande  de  papier  à  lettre  bien  desséchée,  d'une  épaisseur 
de  o™™,  1079  et  de  la  même  largeur  que  le  disque,  qui  pré- 
sente une  surface  de  11^^,401,  il  y  a  une  adhérence  très- 
forte  entre  le  papier  et  le  disque  aussitôt  que  les  branches 
de  Fexcitateur  sont  réunies  à  la  pile.  L'adhérence  est  plus 
forte  quand  la  pointe  qui  est  au-dessus  du  disque  est  néga- 
tive. Avec  une  distance  de  9™™,  14^  il  faut  exercer  une 
traction  de  1944  grammes  si  la  pointe  est  négative,  et  de 
1166  grammes  si  la  pointe  est  positive,  pour  faire  glisser 
le  papier  sur  le  disque. 

Afin  de  mesurer  Tadhérence  du  papier  dans  ces  condi- 
tions, on  a  placé  une  bande  de  papier  sur  le  disque  et  on  l'a 
chargée  de  poids  jusqu'à  ce  qu'elle  résistât  aux  mêmes  trac- 
tions; les  charges  correspondantes  ont  été  respectivement 
de  84o36',8  et  de  34686',  6. 

Or,  si  deux  surfaces  parallèles  présentant  une  super- 
ficie de  I  i«^,4oi  et  séparées  de  0™°*,  <079  (l'épaisseur  du 
papier)  sont  éiectrisées,  et  si  l'attraction  qui  s'exerce  entre 
elles  est  égale  respectivement  à  84o36',8  et  à  34686'^, 6, 
on  peut  calculer  la  différence  de  potentiel  de  ces  deux  sur- 
faces; on  trouve  ainsi  i38o6,  i5  volts  pour  le  premier  cas 
qui  correspond  à  la  pointe  négative,  et  8869,89  volts  pour 
le  cas  de  la  pointe  positive.  Ce  dernier  résultat  n'excède 
pas  beaucoup  le  nombre  de  volts  correspondant  à  l'expé- 


DÉCHARGES    DISKVFTI VE6,  4^3 

liénce,  8281  pour  8040  éléments,  mais  le  premier  dépasse 
le  nombre  des  élémenis  employés  dans  le  rapport  de  1,67 
à  I .  Cet  e\cè6  est  dû  sans  doute  à  la  formation  de  zones 
électrisées  dans  l'épaisseur  du  papier,  et  la  différence  rela- 
tive aux  signes  électriques  parait  liée  à  la  facilité  inégale 
avec  laquelle  une  pointe  laisse  échapper  l'élecrricilé  posi- 
tive ou  l'électrîcilé  négative. 

Quand  on  remplace  la  pointe  par  une  surface  sphérique, 
on  observe  à  peine  de  phénomènes  lumineux  avant  la 
décharge  disruplive,  et  il  ne  se  manifeste  qu'une  adhérence 
presque  înappréciabFe  entre  les  pôles  et  la  bande  de  papier. 
Le  seul  effet  que  l'on  remarque  est  que  la  bande  prend  ha- 
bituellement une  position  diagonale  entre  les  pôles  et  laisse 
passer  un  courant  très-faible,  même  s'ils  sont  séparés  par 
une  grande  distance. 

Lorsque  le  pôle  supérieur  est  terminé  par  un  iil  de  pla- 
tine de  o™"*,o5  de  diamètre  et  d'environ  i5  millimètres  de 
longueur,  maintenu  à  une  distance  convenable  du  disque 
inférieur,  ce  Gl  prend  une  oscillation  rectiligne,  circulaire 
ou  elliptique 5  l'extrémité  devient  lumineuse  et  rend  la 
trajectoire  parfaitement  visible.  L'amplitude  du  mouve- 
ment est  plus  faible  si  le  fil  est  positif;  avec  8o4o  éléments, 
elle  atteint  10  millimètres  pour  une  distance  de  8™™,  5, 
tandis  que,  si  le  fil  est  négatif,  la  pointe  est  beaucoup 
plus  brillante  et  l'amplitude  atteint  environ  21  millimètres. 
Si  l'on  interpose  une  résistance  de  4  mégohms  dans  le  cir- 
cuit^ il  se  produit  de  temps  en  temps  des  décharges  statiques^ 
dont  l'entrelacement  avec  la  ligne  lumineuse  continue  tra- 
cée par  la  pointe  produit  1rs  apparences  les  plus  variées. 

Dans  ce  qui  précède  on  n'a  pas  tenu  compte  des  varia- 
tions de  la  pression,  de  la  température  et  de  l'état  hygro- 
métrique de  l'air.  On  n'a  pas  trouvé  que  ces  variations 
eussent  une  influence  appréciable,  surtout  dans  un  labora- 
toire qui  était  chauffé  pendant  l'hiver.  Il  n'est  pas  douteux 
cependant  qu'une  grande  élévation  de  température  n'aug- 


464     WAKIBR  DB  LA  BDB  ET  HUGO  W.  MOLLKB. 

mente  beaucoup  )a  distsDCc  explosive,  comme  od  peal  s'en 
assurer  eu  mettant  les  pôles  dans  la  flamme  d'une  lampe  à 
alcool  isolée;  avec  8040  éléments,  on  obtient  ainsi   des 

Fie.  i;. 


étincelles  (le  23""".,  4  entre  une  puinte  et  une  boule  et  de 
3o  millimètres  entre  deux  pointes. 

Quand  les  pôles  sont  placés  auprès  de  deux  tlammes  Je 
gaz  provenant  d'un  même  tube  en  communication  avec  le 
sol,  la  (lamine  voisine  du  pôle  négatif  est  attirée,  et  celle 
qui  est  près  du  pôle  positif  est  repoussée;  ce  phénomène  a 
été  observé  par  M.  Neyreiicuf. 


DÉCHARGES    DISRUPTIVES.  4^5 

Dans  Ja  plupart  des  cas,  la  nature  du  métal  n'influe  pas 
surlalongueur  de  l'étincelle;  c'est  ce  qui  a  lieu  pour  le 
laiton,  le  cuivre,  l'argent,  Tacier,  le  platine,  le  magnésium 
et  le  zinc.  Cependant  Taluminium  présente  une  exception 
frappante  quand  on  l'emploie  sous  forme  de  pointe,  et 
donne  une  étincelle  beaucoup  plus  longue.  Avec  une 
pointe  positive  d'aluminium,  l'étincelle  est  plus  longue  que 
pour  les  autres  métaux,  dans  le  rapport  de  1,242  à  i. 

Pour  étudier  les  décharges  dans  les  différents  gaz  à  la 
pression  atmosphérique  ordinaire,  il  a  suffi  de  mettre  le 
micromètre  à  étincelles  dans  une  cloche  en  verre,  avec  des 
dispositions  convenables  pour  établir  les  communications 
électriques  et  faire  varier  la  distance  explosive  [fig*  17). 
On   a    ainsi  obtenu  avec  8o4o  éléments  : 

Distance  explosive  entre  deux  surfaces  sphériques, 

m 

Rapport  des  distances 
explosives  comparées 

Nature  du  gaz.        Distance  explosive.  à  Tair.        à  l'hydrogène. 

mm 

Air  atmosphérique.  .. .  2,08  1,000  ^1^47 

Hydrogène 3, 81  1 9829  i  ,000 

Oxygène 2,08  1,000  t)»547 

Acide  carbonique i  ,96  0,989  o,5i3 

Entre  une  pointe  positive  et  un  disque  négatif. 

Air  atmosphérique. ..  .   J        '^^  1,000  0,5783 

Hydrocène \     /  ^  i  ,808  1 ,0000 

Azote  (air  o,3oo) ... .       10,21  ï»34o  o,7i53 

i     5,38  ^  , 

Oxygène ^^  0,674  0,8718 

Acide  carbonique |      .'   ^  0,44"  0,2409 

L'influence  de  la  nature  du  gaz  sur  la  longueur  des 

Ànn.dcChim.et  </«  r/trf.,5« série,  t. XIII.  (Avril  1878.)  3o 


nez   ET    HUGO    W-    M11U.EH. 

étincelles  aux  pressions  ordinaires  est  un  pliénomène  spé- 
cial, qui  ne  parait  lié  ni  à  la  densité  du  gaz  ni  à  sa  visco- 
sité mécanique.  On  peut  désigner  celte  propriété  particu- 
lière aous  le  nom  de  viscosité  électrique,  le  rapport  des 
distances  explosives  obtenues  pour  deux  gaz  mesurant  le 
rapport  de  leurs  viscosités  électriques. 

L'apparence  del'arc  n'est  pas  la  même  dans  les  différents 
gaz,  ainsi  qu'où  peut  le  voir  par  les  dessins  de  \z  fig.  ift 


Le  dessin  n"  \  représente  l'arc  dans  l'air-,  cet  i 
examiné  au  microscope,  présente  une  apparence  de  stra- 
tification évidente,  spécialement  dans  l'espèce  de  boule  qui 
entoure  le  fuseau  brillant  du  centre;  les  stries  sont  ex- 
trêmement rapprocbées  et  on  ne  les  distingue  qu'avec 
difficulté,  même  à  l'aide  du  miroir  tournant. 

Dans  l'hydrogène  (n"  2},  avec  la  pointe  positive,  le  fuseau 
central  de  l'arc  est  entouré  d'une  magnifique  auréole  bleue 
semblable  à  une  cloche  en  verre  éclairée  par  une  lumière 
fluorescente  et  très-brillante  sur  le  disque.  Quand  la  pointe 
est  négative  (n°  \),  l'arc  se  meut  très-rapidement  et  forme 


A 


DÉGHAfiGES    DISRCTPTIYES.  4^7 

une  espèce  d'étoile  sur  le  disque  positif.  Dans  ce  cas,  avant 
que  la  décharge  disruptive  ait  lieu,  une  auréole  trës-pàle, 
en  forme  de  cloche  et  ayant  une  teinte  olive-foncé,  s'étend 
de  la  pointe  jusqu'à  la  périphérie  du  disque. 

L'arc  dans  Tazote  est  d'un  violet  rougeâtre.  Dans  Toxj- 
gène,  il  présente  une  apparence  analogue  à  celui  qu'il  a 
dans  Tair.  Le  dessin  n^  3  montre  sa  forme  dans  l'acide 
carbonique. 

Il  résulte  de  là  que  dans  les  tubes  à  gaz  raréfiés  l'emploi 
de  l'hydrogène  et  d'électrodes  en  aluminium  présente  les 
conditions  les  plus  favorables  pour  le  passage  des  courants 
électriques. 

L'étincelle  jaillit  à  la  distance  de  12"*"%  7  entre  deux 
pointes  placées  dans  un  tube  qui  renferme  de  l'alcool  ab- 
solu et  qui  est  muni  d'un  orifice  permettant  aux  vapeurs 
de  s'échapper.  M,  Bleckrode  a  communiqué  à  la  Société 
royale  un  Mémoire  Sur  la  conductibilité  électiique  et 
Vélectroljse  des  composés  chimiques  (*),  où  il  a  décrit 
des  expériences  exécutées  dans  notre  laboratoire.  Je  rap- 
pellerai seulement  ici  que  certains  liquides,  tels  que  le 
sulfure  de  carbone,  la  benzine,  le  bichlorure  d'étain, 
l'acide  chlorhydrique,  le  cyanogène,  le  zinc-éthyle,  sont 
violemment  agités  pendant  le  passage  des  courants,  quand 
même  la  source  de  l'électricité  est  un  condensateur  qui 
se  décharge  lentement  à  travers  le  liquide,  mais  sans 
éprouver  de  décomposition  électrolytique  :  le  liquide  est 
repoussé  par  le  pôle  négatif  et  attiré  par  le  pôle  positif. 
Il  est  à  remarquer,  par  exemple,  que  le  chlorure  de  lithium 
est  facilement  décomposé  par  4  éléments  Bunsen,  tandis 
que  l'acide  chlorhydrique  résiste  à  la  force  électromotrice 
de  564o  éléments. 


(»)  Proc.  Roy,  Soc,  n»  175;  1876. 


468     WimREll  DE  L4  BUE  ET  HUGO  W*  MULLEK. 


V.  —  Emploi  des  condensateurs. 

Nous  avons  fait  à  ce  sujet  un  grand  nombre  d'expé- 
riences, dont  nous  uMndîquerons  ici  que  les  principaux 
résultats. 

Un  condensateur  de  47?^  microfarads ,  cbai^é  par 
1080  éléments,  volatilise  26^,67  à^^n  fil  de  platine  de 
o"™,  127  de  diamètre 5  avec  un  condensateur  de  4^î8  mi- 
crofarads chargé  par  8240  éléments,  on  volatilise  la  même 
longueur  d'un  fil  de  o"™,3i7  de  diamètre.  Les  sections,  et 
par  suite  les  poids  des  deux  fils,  sont  dans  le  rapport  de 
6,25  à  I,  tandis  que  le  rapport  des  deux  valeurs  de  Ténei^ie 
électrique  est  égal  à  8,5. 

Nous  avons  constaté  qu'il  n^y  a  ni  allongement  ni  rac- 
courcissement dans  un  fil  métallique  soumis  à  une  forte 
décharge  électrique,  comme  celle  d'un  condensateur  d'une 
capacité  de  4^)8  microfarads  chargé  par  8240  éléments, 
laquelle,  comme  on  vient  de  le  voir,  est  capable  de  volati- 
liser un  fil  de  platine  de  27  centimètres  de  longueur  et 
de  o"™,3i7  de  diamètre. 

Ainsi  un  fil  de  fer  de  20*^,  3  de  longueur  et  de  o"*™,  76  de 
diamètre  a  éprouvé  un  allongement  de  0^^,952  el  a  repris, 
après  le  refroidissement,  sensiblement  sa  longueur  primi- 
tive; cette  dilatation  correspondrait  à  un  échauflement 
d'environ  3oo  degrés,  bien  inférieur  à  celui  qui  pouvait 
avoir  lieu,  de  sorte  que  l'allongement  du  fil  doit  être  at- 
tribué uniquement  à  la  chaleur. 

Nous  avons  déterminé  le  nombre  d'équivalents  chimiques 
qui  correspond  à  la  charge  d'un  condensateur  de  4^,8  mi- 
crofarads en  mettant  un  voltamètre  sur  le  trajet  de  la  pile 
au  condensateur.  La  communication  était  main  tenue  chaque 
fois  pendant  deux  minutes,  quoique  le  dégagement  de  gaz 
cessât  environ  après  3o  secondes  5  les  gaz  continuent  en- 
core à  se  produire,  mais  en  quantité  minime,  même  au  bout 


DECHARGES    niSHUPTiVES.  4^9, 

d'un  temps  très- long,  ce  qui  correspond  aux  pertes  élec- 
triques. L'opération  était  répétée  quatre  ou  cinq  fois  pour 
que  le  volume  du  gaz  fût  mesurable.  On  a  ainsi  obtenu 
avec  une  pile  de  3a4o  éléments,  en  réduisant  le  volume  des 
gaz  mélangés  à  la  température  de  zéro  et  la  pression  de 
760  millimètres: 

ce 

I. 0,022.76 

II.  ^ 0,02256 

III o,o2i56 

IV . .      ...    .     0,02487 

Moyenne.  .     0,02294 

ce  qui  correspond  à  o^^^'jOiàîo^  d'eau  décomposée  ou  à  un 
dépôt  d'argentde  o^^»^,  i66i45.  D'après  M.  Kohlrauscli(^), 
I  weber  pendant  une  seconde,  c'est-à-dire  la  quantité 
d'électricité  que  possède  un  farad  chargé  au  potentiel  de  i 
volt,  produit  i^^^^iiôi  d'argent,  ce  qui  ferait  pour  notre 
condensateur  un  dépôt  de 

I  ,i363  X  4^,8  X  32^0  X  T  ,o3  ^ 

=r:0"'8%l623, 

lOOOOOO 

nombre  plus  faible  de  2,3  pour  loo  que  celui  que  nous 
avons  obtenu. 

La  quantité  d'eau  décomposée,  c'est-à-dire  la  quantité 
d'électricité  qui  correspond  à  la  charge  totale  d'un  conden- 
sateur, est  proportionnelle  au  nombre  des  éléments.  On  a 
obtenu,  par  exemple  : 


Nombre 

Rapports 

d'eau 

décomposée. 

d'éléments. 

Rapports. 

1. 

il. 

Moyenne 

1080 

I 

I 

î 

I 

2160 

2 

2 

1,5 

1,75 

3240 

3 

3,33 

a,5 

2,9' 

(*)  P^SS^'  ^'"'•»  ^^^'  CXLIX,  p.  175;  1873. 


e  d'éléments. 

Longueur  du  Û1. 

1080 

mm 
25,4 

2160 

101 ,6 

>» 
8240 

127 
266 

u 
et 

279 
33o 

470  WAURBir    DE    LA    RUE    ET    HUGO    W.    XULLER. 

L'énergie  électrique  du  condensateur  étant  alors  propor- 
tionnelle au  carré  du  nombre  des  éléments,  les  effets  de 
volatilisation  doivent  être  dans  les  rapports  de  1,4  ^^  9* 
Avec  un  fil  de  platine  de  \  de  millimètre  de  diamètre  et  un 
condensateur  de  4^98  microfarads,  on  a  ainsi  obtenu  : 


Chauffé  à  la  lemp.  de  fusion. 

Volatilisé. 

Au  point  de  fusion. 

Volatilisé. 

Réduit  en  globules. 

Au  point  de  fusion. 

Les  décharges  de  ces  condensateurs  produisent  des  se- 
cousses très-pénibles  à  recevoir,  et  nous  avons  cherché  à 
quel  point  elles  peuvent  être  dangereuses.  On  a  fait  passer 
la  décharge  du  condensateur  de  4^,8  microfarads  chargé 
par  2160  éléments  sur  un  lapin,  à  Taide  de  deux  conduc- 
teurs qui  étaient  placés  Tun  dans  Foreille  et  Tautre  dans 
la  gorge  5  elle  n'eut  d'autre  effet  que  de  paralyser  pendant 
une  heure  les  pattes  antérieures.  Nous  avons  même  reçu 
celte  décharge  accidentellement  à  diverses  reprises  :  la  se- 
cousse est  violente  et  le  malaise  dure  pendant  plusieurs 
heures  ^  dans  ce  cas  la  peau  est  percée  de  nombreux  petits 
trous  et  cautérisée  au  point  où  passe  l'étincelle.  Toutefois 
la  décharge  par  Je  moyen  d'un  organe  vivant  est  très- 
incomplète,  et,  quand  on  réunit  de  nouveau  les  armatures, 
on  obtient  une  détonation  presque  aussi  grande  que  sMl 
n'y  avait  pas  eu  de  perte  électrique.  Un  de  nous  a  reçu  la 
décharge  de  8o4o  éléments  sans  condensateur. 

De  même,  la  volatilisation  d'un  fil  métallique  n'utilise 
qu'une  partie  de  la  charge.  Le  condensateur  de  4^98  mi- 
crofarads, chargé  avec  2160  éléments^  a  été  graduellement 
déchargé  par  la  volatilisation  d'un  fil  de  platine  de  3o*^,4  de 
longueur  et  de  0°*?,  o5i  de  diamètre,  et  le  potentiel  était 


DÉCHARGES   DISRUPTIYES.  47^ 

évalué  chaque  fois  à  l'aide  d'un  électromèlre  à  cadrans. 
On  a  ainsi  obtenu  : 

Déviation  de  Pélectroinètre.  le  condensateur 

'  D 

ëtant  à  pleine  charge 200  1  ^  ^ ^  ^^ 

Déviation  de  rélectromètre  après  6  décharges  i5o  )  * 

ï>                             II         »  IIO     J-^=:8,i8 

i5        u  80  Vr  =  8,oo 

18       »  55  Vr=8,i25 

Movenne. ...      8,16 

La  volatilisation  du  fil  dépensait  donc  chaque  fois  y—-, 
c'est-à-dire  environ  4  pour  100  de  la  charge  primitive. 


VI.  —  Effets    d'induction. 

Le  diagramme  {fig*  19)  montre  la  disposition  des  expé- 
riences. La  pile  AZ  est  en  communication  permanente  avec 

F>8f-  19- 


S      ^^WLsam 


Vi 


COIL 


le  condensateur  C  ]  le  circuit  formé  par  la  pile  et  le  fil  pri- 
maire de  la  bobine  peut  être  ouvert  ou  fermé  à  l'aide  d'une 
clef  K,  et  Ton  fait  mouvoir  à  la  main  l'interrupteur  à  ro- 
tation B. 


47^  WARREN    DE    LÀ   BITS   ET   HUGO   W.    MULLE&. 

Voici,  par  exemple,  des  expériences  faites  avec  une  bo- 
bine de  Apps  construite  pour  donner  dans  l'air  des  étin- 
celles de  i5  centimètres  et  dont  les  dimensions  étaient  : 

Nombre  de 
Longueur.  Diamètre.         Résistance.         tours. 

mm  ohiDf. 

Fil  primaire .. .     60™, 34  i,65i  0,22  aSo 

Fil  secondaire. .       8^",447        0*1727         4900,00         24^00 

Avec  un  condensateur  de  o,  1807  microfarad,  cette  bo- 
bine fournit  une  succession  rapide  d'étincelles  de  i5  centi- 
mètres quand  la  pile  est  formée  de  6  grands  éléments  au 
bichromate  de  potasse.  La  pile  produisait  par  minute 
i52  centimètres  cubes  de  mélange  gazeux  dans  un  volta- 
mètre de  17  ohms  de  résistance.  La  pile  à  chlorure  d'argent 
produisait  seulement  dans  les  mêmes  circonstances  o*^*^,  5 
de  gaz,  c'est-à-dire  3oo  fois  moins  5  cependant  elle  fournit 
avec  la  bobine  des  effets  aussi  grands  et  même  supérieurs 
à  ceux  que  donnait  la  pile  au  bichromate. 

Avec  1080  éléments  et  un  condensateur  de  0,4^18  diî- 
crofarad,  on  obtenait  une  étincelle  de  9  centimètres  en 
déchargeant  le  condensateur  par  la  clef  K,  mais  il  ne  se 
produisait  qu'une  étincelle  très -faible  au  moment  de 
l'ouverture  du  circuit. 

Avec  2280  éléments  et  le  même  condensateur,  on  obte- 
nait Tétincelle  complète  de  i5  centimètres  et,  en  tournant 
a  la  main  le  commutateur  à  roue,  on  en  pouvait  produire 
44  pareilles  par  seconde. 

Avec  3480  éléments  dans  les  mêmes  conditions,  on  ob- 
tenait  62  décharges  de  i5  centimètres  par  seconde. 

Avec  3480  éléments  et  deux  condensateurs  formant  une 
capacité  de  0,9222  microfarad,  non-seulement  on  avait 
les  mêmes  étincelles  épaisses  entre  les  extrémités  du  fil 
secondaire,  mais  d'autres  étincelles  plus  longues  que 
i5  centimètres  éclataient  de  toutes  parts  quand  le  commu- 
tateur produisait  212  contacts  par  seconde. 

Les  décharges  étaient  encore  plus  puissantes  avec   le 


OéCHARGBS   DISHUPTIVE8.  47^ 

même  nombre  d'éléments  et  4  condensateurs  formant  une 
capacité  de  1,4887  microfarad. 

Il  parait,  diaprés  cela,  que  les  piles  à  potentiel  très-élevé, 
associées  avec  des  condensateurs,  sont  très-avantageuses 
pour  produire  des  effets  dMnduction.  LdL  ch^LVge  accumulée 
dans  le  condensateur  passe  dans  le  fil  primaire  à  chaque 
fermeture  du  circuit  et  les  effets  sont  dus,  en  partie  au  po- 
tentiel, en  partie  à  la  charge  électrique. 

Vn.  —  Décharges  dans  l'air  à  des  pressions  inférieures 

à  la  pression  atmosphérique. 

Nous  n'avons  fait  encore  à  ce  sujet  qu'un  petit  nombre 
d'expériences,  parce  que  le  micromètre  à  étincelles  n'avait 
pas  une  course  assez  étendue.  Avec  une  pile  de  8o4o  élé- 
ments, on  a  obtenu  entre  une  pointe  et  un  disque  : 

Produit 
de  la  distance 
Fraction  Distance  explosive 

Pression.      d'une  atmosphère,      explosive.      Rapports,   par  la  pression. 

mm  mm 

760  I  8,64  I  I» 

326,82  âTTTT  I7>28  l  0,8598 

229,17  ârfr?  25,92  3  0,9046 

ï97>29  nrn  3o,23  3,5        0,9086 

Dans  ces  conditions,  la  distance  explosive  n'est  donc  pas 
tout  à  fait  en  raison  inverse  de  la  pression. 

Avec  la  même  pile  et  deux  surfaces  sphériques  de  76""*,  2 
de  rayon  et  38"",  1  de  diamètre,  on  a  obtenu  : 

Produit 

de  la  distance 

Fraction  Distance  explosive 

Pression,      d'une  atmosphère,      explosive.         Rapport,  par  la  pression. 

mm  mm 

760  I  2,01  I  I 

602  -r^  2,54  1,26  0,999 

4^4*7  TTâl  5,08  2,52  1,375 

299^5  TThr  io>i6  5,o4        1,986 

i4i>5  T^'i  20,32  10,08        i>876 


474    WARREM  DE  LA  RUE  BT  HUGO  W.  MVLLER. 

Avec  des  surfaces  sphériques,  la  distance  explosive  croit 
plus  rapidement  que  l'inverse  de  la  pression.  Ces  résultats 
semblent  indiquer  qu^à  une  pression  convenable  la  distance 
explosive  serait  la  même  entre  deux  surfaces  sphérîques 
qu'entre  une  pointe  et  un  disque. 

Post'Scriptum,  —  Nous  avons  répété  plus  récemment 
les  expériences  relatives  à  la  distance  explosive  dans  Pair 
avec  la  nouvelle  pila  qui  venait  d'être  mise  en  état  et  qui, 
ajoutée  à  Tancienne,  formait  un  total  de  ii  ooo  éléments. 
Les  résultats  obtenus  pour  différentes  formes  d'extrémités 
polaires  ont  servi  à  tracer  des  courbes  dont  on  a  déduit  les 
nombres  suivants  : 

Distance  explosÎTe  entre 


Cylindres 

Nombre 

Deux 

Pointe  H- 

concen- 

Surfaces 

Surfaces 

['éléments . 

points. 

disque  — 

triques. 

planes. 

sphérîques. 

mm 

mm 

mm 

mm 

8000. . 

10,  16 

8,636 

2,5l4 

2,241 

2,078 

9000. . 

12,09 

9,665 

2,900 

2,590 

2,382 

lOOOO. . 

i4,oi 

iOj79 

3,328 

2*939 

2,667 

II 000. . 

15,75 

12,01 

3,800 

3,25i 

2,97^ 

IIOOO. . 

16,29 

12,42 

3,926 

3,36o 

3,078 

La  dernière  ligne  indique  les  distances  qui  eussent  été 
probablement  atteintes  si  la  pile  entière  avait  été  dans  le 
même  état  que  les  éléments  nouvellement  montés. 

On  peut  remarquer  que  les  résultats  relatifs  à  deux 
pointes  se  placent  sensiblement  dans  le  prolongement  de  la 
courbe  représentée  fig.  12,  tandis  que  pour  une  pointe  et 
un  disque  la  distance  explosive  est  sensiblement  plus  petite 
que  celle  qui  résulterait  de  la  loi  du  carré  du  nombre  des 
éléments. 

Lorsque  la  pile  de  11 000  éléments  est  disposée  en  ten- 
sion, Tisolement  doit  être  surveillé  avec  grand  soin^  il  y 
a  alors  des  pertes  sensibles  qui  peuvent  avoir  quelque  in- 
fluence sur  la  longueur  des  étincelles. 


DÉCHAUGES    DISBLIPTIVES.  4?^ 

La  pile  de  iiooo  éléments  donnejlieu  à  im  phénomène 
emarquable  qui  précède  la  production  d'une  étincelle  et 


la  formation  de  l'arc,  confirmant  encore  ce  qui  a  été  dit 
plus  liaut  sur  la  plus  grande  conLinuIté  de  la  décharge  a 
pôle  négatif  qu'au  pôle  positif.  Avec  deux  pointes  et  la  pile 


4^6  A.    BBRTIN. 

entière,  il  se  produit  une  aigrette  continue  au  pôle  né- 
gatif, tandis  que  le  pôle  positif  donne  des  décharges  en 
jets  lumineux  intermittents  qui  enveloppent  Taigrette  né- 
gative sans  troubler  sa  forme.  Ce  phénomène  est  représenté 
fig.  20  avec  un  grandissement  dans  le  rapport  de  4  à  i. 


«%««%«««  %%%«4  %«««%«%«  %%«%%  V 


THÉORIE  ÉLÉMENTAIRE  DES  LEOTILLES  SPDÉRIQUES 

HIKCES  OU  ÉPAISSES  s 

Pae    m.    a.    BERTIN. 


INTHODUCTIOir. 


1.  Un  rayon  lumineux  qui  traverse  une  lentille  sphé- 
rique  est  dans  le  même  cas  que  s'il  traversait  un  prisme 
formé  par  les  plans  tangents  au  point  d^ncidence  et  au 
point  d'émergence.  Les  prismes  déviant  toujours  les  rayons 
vers  leurs  bases,  on  voit  de  suite  que,  si  tous  les  prismes 
élémentaires  ont  leurs  bases  tournées  vers  l'axe  de  la  len- 
tille, les  rayons  émergents  convergeront  vers  cet  axe,  c'est- 
«à-dire  que,  si  la  lentille  est  à  bords  tranchants,  elle  sera 
convergente.  Si,  au  contraire,  les  prismes  élémentaires 
ont  leurs  bases  tournées  vers  les  bords  de  la  lentille,  les 
rayons  sortiront  en  s'écartant  de  l'axe,  c'est-à-dire  que,  si 
la  lentille  est  à  bords  élargis,  elle  sera  divergente. 

Les  prismes  élémentaires  ont  des  angles  variables  et 
d'autant  plus  grands  qu'ils  touchent  la  lentille  en  des 
points  plus  éloignés  de  l'axe  \  la  déviation  qu'ils  produisent 
est  donc  plus  grande  pour  les  rayons  périphériques  que 
pour  les  rayons  centraux;  les  premiers  convergent  plus 
près  de  la  lentille  que  les  seconds.  Il  en  résulte  une  disper- 
sion des  foyers  sur  l'axe  qu'on  appelle  l'aberration.  Celte 
aberration  est  toujours  petite,  et  on  la  traite  comme  une 
correction  à  faire  au  foyer  des  rayons  centraux.  C'est  par 
les  rayons  centraux  qu'il  faut  donc  commencer  l'étude  du 


THÉORIE    DES    LENTILLES    SPHÉRIQUES.  477 

phénomène;  c'est  cette  étude  qui  constitue  la  Théorie  élé- 
mentaire des  lentilles. 

2.  Il  importe  de  bien  définir  les  rayons  centraux.  Ce 
sont  ceux  qui  traversent  la  lentille  sous  de  petits  angles, 
c'est-à-dîre  sous  des  angles  .assez  petits  pour  qu'on  puisse 
les  confondre  avec  leur  sinus  ou  leur  tangente.  Ainsi  tout 
angle  x,  que  nous  considérerons  dans  la  lentille,  sera  assez 
petit  pour  qu'on  puisse  écrire 

arnr  sinx  =  tangx     et     cosjr--i. 

Analytîquemeni,  cela  veut  dire  que  l'angle  x  est  assez 
petit  pour  qu'on  puisse  négliger  sa  deuxième  puissance. 
Géométriquement,  cela  veut  dire  que  dans  un  triangle  rec- 
tangle, dont  un  angle  aigu  est  très-petit,  on  peut  prendre 
pour  mesure  de  cet  angle  le  rapport  du  côté  opposé  à 
l'autre  côté  de  l'angle  droit  (tangente)  ou  à  son  hypoté- 
nuse (sinus).  Dans  les  figures  dont  nous  aurons  besoin 
pour  nous  faire  comprendre,  ces  conditions  seront  tou- 
jours censées  remplies;  mais  nous  ferons  les  angles  grands 
pour  rendre  les  figures  intelligibles. 

Dans  ces  conditions,  la  loi  de  la  réfraction,  sini  =72  sin  r 

(loi  de  Descartes),  pourra  être  remplacée  par  celle-ci,  qui 

est  plus  simple,  z  =  nr  (loi  de  Kepler).  Mais,  pour  éviter 

toute  ambiguïté,  nous  prendrons  l'habitude  de  l'écrire  sous 

la  forme  suivante  : 

/?r=:r  const., 

c'est-à-dire  que,  quand  un  rayon  traverse  une  surface,  le 
produit  de  l'indice  du  milieu  par  l'angle  que  le  rayon  fait 
avec  la  normale  est  constant  des  deux  côtés  de  la  surface. 

I.  —  Théorie  des  lentilles  minces. 

3.  Définitions,  —  On  ne  s'est  pas  contenté  de  se  borner 
à  l'étude  des  rayons  centraux,  on  a  encore  éliminé  de  cette 
élude  l'épaisseur  de  la  lentille,  c'est-à-dire  qu'on  a  sup- 
posé la  lentille  assez  mince  pour  qu'il  n'y  eût  pas  de  dif- 


478  ^      BBRTIK. 

férence  appréciable  entre  le  point  d^încidence  et  le  point 
d'émergence  du  rayon  lumineux.  Dans  ces  conditions,  la 
lentille  doit  être  figurée  par  un  plan  ^  mais  son  axe  est  tou- 
jours reconnaissable,  puisque  c'est  la  ligne  des  centres  des 
deux  surfaces. 

On  a  été  encore  plus  loin  dans  la  simplification  du  pro- 
blème :  on  a  supposé  que  les  milieux  étaient  les  mêmes  de 
chaque  côté  de  la  lentille,  et  c'est  ainsi  qu^on  expose 
habituellement  la  théorie  élémentaire.  Mais  cette  suppo- 
sition est  inutile,  elle  enlève  au  problème  sa  généralité, 
sans  le  simplifier  notablement. 

Nous  supposerons  donc  que  les  rayons  lumineux  se  meu- 
vent d'abord  dans  un  premier  milieu  d'indice  n^ ,  puis 
traversent  la  lentille  mince  d'indice  n^  et  enfin  sortent 
dans  un  troisième  milieu  d'indice  /«s»  C'est  ce  qui  arrive- 
rait, par  exemple,  dans  le  cas  d'une  cuve  à  eau  fermée 
par  une  lentille  qui  recevrait  les  rayons  solaires  dans  l'air 

dans  ce  cas  m,  nr:  i,  n^  =  -<>  Wj  =  ^  )  •  Nous  admettrons, 

2  6J 

pour  faire  la  figure,  que  la  lentille  est  convergente,  qu'elle 

reçoit  de  la  lumière  divergente  et  que  le  faisceau  qui  en 

sort  est  convergent.  Les  résultats  que  nous  obtiendrons  se 

généraliseront  facilement  par   un   emploi  judicieux  des 

signes  des  quantités  qui  entreront  dans  nos  équations. 

Fig.  I. 


( 


4.  Points  conjugués.  —  Soit  donc  01  {fig.  1)  une  len- 
tille infiniment  mince  dont  les  centres  de  courbure  sont 


THÉOAIE   DES    LEJTTILLES    SPHÉRIQT7ES.  479 

C  et  Cj  supposons  qu'un  point  lumineux  P  placé  sur  Taxe 
envoie  sur  la  lentille  un  rayon  PI,  et  cherchons  ce  qu'il 
devient  après  avoir  traversé  la  lentille  suivant  les  lois  de 
la  réfraction  :  admettons  que  la  première  surface  le  ré- 
fracte en  IP'^  et  la  seconde  en  ÏP,  Si  nous  menons  les  nor- 
males CK  et  CK'  au  point  I,  nous  devrons  avoir 

/l,(PIK)=:.-/î,(P"IC), 

/i,(P"IK')=r=/Î3(P'IK'). 
Mais,  en  se  reportant  à  la  figure,  ces  équations  donnent 

/îi(tt>  H-  a)  =  /?2(«  —  a'''), 

w,(û>'  -ha")  —  7Î3(«'  -H  a' I, 
ou  bien 

7î,a  -+-  n-iO."  =r  («a  —  W|)«, 

/îja' — /z,a"=:  («a  — -  Ws)w'; 
d'où  en  ajoutant,  pour  éliminer  a", 

7i,a  -4-  Waa'  =  («2  —  /?,)«  -f-  (/?a  —  /ig)  w'. 

Mais  tous  ces  angles  étant  petits  peuvent  se  mesurer 

par  leurs  tangentes,  par  exemple  «  =  —9   ..»;  si  donc 

nous  posons  p  =  OP,  p'  =  OP',  R  =  CO,  R'  =  C'O,  et  si 
nous  supprimons  le  facteur  commun  01,  notre  équation 
deviendra 

/z,        /?3       n^  —  rty        n^  —  n^ 


p      p'  K  R' 

Cette  équation  donne,  pour  toute  valeur  de  p,  une  va- 
leur de  p'  indépendante  de  la  direction  du  rayon  incident  5 
donc  tous  les  rayons  partis  de  P  concourent  en  F,  et  réci- 
proquement \  ces  deux  points  s'appellent,  pour  cette  raison, 
des  points  conjugués.  La  lentille  transforme  donc  le  cône 
de  lumière  incidente  en  un  second  cône  de  lumière  ré- 
fractée. Le  sommet  du  premier  cône  est  le  point  lumi- 
neux, le  sommet  du  second  est  V image. 


48o  A.    BEETIV. 

5.  Fojers  principaux.  —  Si  dans  cette  équation  on  fait 
p  ={  QO  y  on  trouve  pour  p^  une  certaine  valeur  f  donnée 
par  la  formule 

De  même,  pour/?'  =  oo  ,  /?  prend  une  autre  valeury*lelle  cpie 


/2i  _  I  «a  — /2i    ,    n^  —  ni] 


Quand  le  point  lumineux  est  à  l'infini,  le  faisceau  lumi- 
neux que  reçoit  la  lentille  est  un  faisceau  parallèle.  Nous 
voyons  donc  que  tous  les  rayons  parallèles  à  l'axe  con- 
courent en  deux  points  F  ou  F',  suivant  le  côté  par  lequel 
ils  frappent  la  lentille.  Ces  deux  points  F  et  F'  s'appellent 
les  foyers  principaux  ou  simplement  les  foyers.  Ils  sont 
situés  sur  Taxe  de  la  lentille  à  des  distances  de  celle-ci 
f^^f  qu'on  appelle  les  distances  ou  les  longueurs  focales. 

Ces  distances  ne  sont  pas  égales  \  leur  rapport  est, 
d'après  les  formules  précédentes, 


J         ni 


c'est-à-dire  que  les  longueurs  focales  sont  proportionnelles 
aux  indices  des  milieux  extrêmes* 

Si  les  milieux  extrêmes  sont  les  mêmes,  comme  on  le 
suppose  ordinairement,  ou  si  n^  =  m,  ,  on  a 

Dans  ce  cas,  il  y  a  encore  deux  foyers  placés  de  part  et 
d'autre  de  la  lentille,  mais  à  la  même  distance. 

L'expression  àa  f  se  simplifie  alors  beaucoup^  car,  en 
désignant  par  n  l'indice  de  la  lentille  par  rapport  au  milieu 

extérieur,  c'est-à-dire  —  ou  —  »  les  formules  précédentes 
deviennent 


>=(«-i)(i  +  ^)' 


THÉORIE    DES    LENTILLES   SPHÉR1QUES.  4^^ 

ce  qui  est  Tcxpression  ordinaire  de  la  longueur  focale  en 
fonction  des  rayons  de  courbure. 

6.  Equation  des  points  conjugués,  —  Si  dans  l'équa- 
tion (a)  on  divise  tous  les  termes  par  le  second  membre, 
on  y  introduit  les  valeurs  àefelf\  et  elle  devient 


(0 


f     f 

-4- --=3  1: 
P       P 


c'est  la  première  équation  fondamentale  de  la  théorie 
des  lentilles.  Si  Ton  suppose  les  indices  extrêmes  égaux, 
on  vient  de  voir  que/'  =/*,  et  l'on  a 

I         I         r 
P       P        f 

c'est  l'équation  ordinaire.  Elle  n'est  pas  plus  simple  que 
la  précédente,  mais  elle  est  moins  générale. 

7.  Image  d'un  point  hors  de  l'axe.  Plans  conjugués. 
—  Soient  F  et  F'  {fig.  2)  les  foyers  d'une  lentille  OK 

Fig.  2. 


et  Y  un  point  hors  de  l'axe;  cherchons  son  image.  Un 
rayon  YI,  parallèle  à  l'axe,  se  réfractera  dans  la  direction 
IF'^  passant  par  le  second  foyer.  Un  rayon  YFJ  passant 
par  le  premier  foyer  se  réfractera  en  JY'  parallèlement  à 
l'axe.  Les  deux  rayons  réfractés  se  rencontreront  en  Y',  qui 
sera  déjà  le  point  de  concours  de  deux  rayons  partis  du 
point  Y;  mais,  pour  prouver  que  les  points  Y  et  Y'  sont 
conjugués,  il  faut  plus  que  cela,  il  faut  prouver  que  tous  les 

Ann,  de Chim.  eu  de  Phys„b^  série,  i.Wll,  (Ami  1878.)  3l 


4*83  A.    BERTIH. 

rayons  partis  de  Y  concourent  en  Y',  et  c*est  ce  qae  nous 
allons  faire. 

Remarquons  d'abord  que  les  projections  sur  l*axe  X,  X' 
des  deux  points  Y,  Y'  sont  conjuguées.  En  effet,  en  posant 
OF=/,OF=/,OX  =  p,OX'  =  ;>',XY  =  y,X'Y'  =  /, 
on  a,  par  les  triangles  semblables  FOJ  et  YIJ, 

^   ^  x-^f     P 

et,  par  les  triangles  semblables  F'OI  et  Y'IJ, 

X       ^f 

x-^y    p' 


On  en  conclut 

et  par  conséquent  les  points  X  et  X'  sont  conjugués. 

Pour  prouver  que  Y  et  Y'  le  sont  pareillement,  il  suffit  de 
montrer  qu'un  rayon  quelconque  passant  par  le  point  Y, 
tel  que  ZYK,  a  pour  conjugué  le  rayon  KY'.  Il  faut  donc 
démontrer  qu'en  joignant  le  point  K  avec  le  point  Y'  on  a 
un  rayon  qui  coupe  Taxe  en  un  point  Z!  qui  est  le  conju- 
gué de  Z,  soiiOZ  :::^  2  et  071  =  z*\  en  élevant  des  perpendi- 
culaires à  l'axe  par  les  deux  foyers,  on  voit  de  suite  par 
les  triangles  semblables  que 


^à) 

( 

1  ^ 

KD 

ko' 

KD' 

ko' 

D'autre 

part, 

on  a 

pour 

e  point  X 

/ 

KD 

OJ 

d'où 

Kl 

IJ 

/      KD-f-OJ 
ô""        KJ 


=  1, 


TnÉORIE    DES    LEKTILLES    SPHÉRIQUES.  ^^3 

on  a  aussi  pour  le  point  ;X' 

/)'  ""  KJ  * 
Les  points  X  et  X'  étant  conjugués,  il  faut  que 

ce  qui  exige  que 

KD-f-KD'  -f-OJ=:KJ; 
d'où 

KD  -^  KD'  —  KO. 

Mais  celte  relation,   transportée  dans  les  équations  (J), 
nous  donne 

z       z 

c'est-à-dire  que  les  points  z  et  z'  sont  conjugués. 

Ainsi  il  est  démontré  que  les  points  Y  et  Y'  pris  hors 
de  Taxe  sont  conjugués  quand  ils  sont  obtenus  par  la  con- 
struction précédente.  Mais  ces  points  appartiennent  à. deux 
plans  menés  perpendiculairement  à  l'axe  par  deux  points 
conjugués  X  et  X'  :  ces  deux  plans  sont  donc  des  plans 
conjugués,  c'est-à-dire  que  tous  les  points  de  ces  plans  sont 
conjugués  deux  à  deux.  Les  distances  de  ces  plans  conju- 
gués à  la  lentille  sont  toujours  donnés  par  l'équation  i. 
Il  y  a  de  même  des  plans  focaux  qui  sont  les  plans  per- 
pendiculaires à  l'axe  menés  par  les  deux  foyers.  Mais  ceux- 
ci  ne  sont  plus  conjugués,  chacun  d'eux  Tétant  pour  un 
plan  situé  à  l'infini  de  l'autre  côté  de  la  lentille. 

8.  Grandeur  des  images,  —  Dans  les  plans  conjugués, 
les  lignes  conjuguées  ont  deux  dimensions  j^  eiy  entre  les- 
quelles nous  venons  de  trouver  les  équations  (i)  et  (c). 
En  divisant  ces  équations  membre  à  membre,  nous  obtien- 
drons la  suivante  : 

L=-rp 
y   jp' 


A. 

BERTIN. 

fy 
p 

fy' 
p' 

484 
ou 

Telle  est  la  seconde  équation  fondamentale  de  la  théorie 
des  lentilles.  La  première  donnait  la  position  des  images, 
la  seconde  donne  leur  grandeur. 

Toutes  les  deux  s'appliquent  au  cas  ordinaire  où  les 
deux  milieux  extrêmes  sont  les  mêmes  :  on  a  vu,  en  effet, 
que  si  7?3  =  72,,  y  =/  ;  on  a  donc  -alors 

équation  qui  n'est  pas  beaucoup  plus  simple,  mais  qui  est 

moins  générale  que  la  précédente. 

9.  Centre  de  similitude  ou  nœud,   —  Tout  point   du 

premier  plan  conjugué  ayant  son  image  dans  le  second, 

y 
et    le    rapport  —  de  deux    dimensions  de   l'image  et    de 

l'objet  étant  constant,  l'objet  et  l'image  sont  semblables. 
En  joignant  deux  points  conjugués  tels  que  Y  et  Y',  la 
ligne  YY'  coupera  l'axe  en  un  point  N  qu'on  appelle  le 
nœud  et  qui  sera  le  centre  de  similitude. 

Ce  point  est  à  une  distance  ON  de  la  lentille  du  côté  du 
foyer  le  plus  long,  et  cette  distance  doit  satisfaire  aux  con- 
ditions suivantes  : 

Similitude  des  triangles  XNY  et  X'NT. . .    .    ^  =  ~ —^ 


XFY  et  OFJ. 


r 

r 
y' 


p'       ON 

P-f 
f     ' 

f 

X'F'Y'etOF'T..,.    ^  =    ,        „ 

y     p  — / 

Les  deux  dernières  équations  donnent  la  suivante  : 


r'     p'-i/'-f) 


9 


THÉORIE   DES    JLEilTILLES    SPHÉaiQUES.  4^5 

et,  en  la  comparant  avec  la  première,  on  en  conclut 

ON  =f  -/. 

Ainsi  le  nœud  ou  le  centre  de  similitude  est  un  point 
fixe  du  système.  Il  est  sur  Taxe,  du  côté  du  foyer  le  plus 
long,  à  une  distance  de  la  lentille  égale  à  la  différences^ — j. 
C'est  par  ce  point  que  passent  tous  les  rayons  tels  que  YY' 
qui  traversent  la  lentille  sans  déviation  • 

Dans  le  cas  ordinaire  où  /ij  =«5,  on  sait  ^}^^f=f\ 
on  voit  donc  que  ON  =  o,  c'est-à-dire  que  le  nœud  se  con- 
fond avec  le  milieu  de  la  lentille  :  on  Tappelle  alors 
centre  optique. 

10.  Equation  de  Newton,  —  Newton,  dans  son  Optique, 
compte  les  distances  des  points  conjugués  non  pas  à  partir 
de  la  lentille,  mais  à  partir  des  foyers  (  ^).  Soient  q  et  ^'ces 
distances  XF  et  X'P  [fig*  ^)  >  les  triangles  semblables 
donnent  immédiatement 


y     1    f . 

on  en  conclut 

qq'  =ff' 

Dans  le  cas  ordinaire  où  ?ij  =  /«a,  on  sait  que  f=J\  et 
alors 

Cest  Téquation  de  Newton.  Au  premier  abord  elle  parait 
plus  simple  que  Téquation  (i);  mais,  comme  elle  se  prèle 
moins  bien  à  la  discussion,  on  y  a  renoncé,  et  Ton  s'en 
tient  à  la  première. 

Telles  sont  les  propriétés  générales  des  lentilles  minces. 
Elles  se  résument  en  deux  équations  et  une  construction 

(*)  Optique,  Livre  I,  !'•  Partie»  axiome  VI,  4*  «as. 


486  A.    BBBTIK. 

géométrique.  Ces  équations  sont 

Cas  général.  Cas  particulier  w,  =  w,. 

/        /'  I  I         T 

P        P  P        P        / 

^  ^  p"  p'  '  r'^p' 

Les  premières  sont  plus  générales  et  presque  aussi  simples 
que  les  secondes. 

Quant  à  la  construction  des  images,  on  ne  peut  rien 
trouver  de  plus  simple  que  le  trapèze  YIY'J  [fig*  îi).  Dans 
le  cas  ordinaire  (hi  =  «s)  le  point  N  se  confond  avec  O,  et 
Ton  peut  construire  les  images  avec  le  triangle  YIY',  mais 
sans  aucun  avantage. 

II.    —    TuiORlE  DKS  LENTILLES  EPAISSES  OU  THEOBIE  DE  GaUSS. 

H.  L'épaisseur  des  lentilles  n'est  jamais  nulle  et  elle 
n'est  pas  toujours  négligeable  :  il  faut  donc  en  tenir  compte. 
Si  on  l'introduit  dans  les  calculs,  les  équations  deviennent 
irès-compliquées  ;  mais  on  peut  leur  rendre  leur  simplicité 
primitive  en  changeant  l'origine  des  distances  à  mesurer. 
Tel  est  le  but  que  s'est  proposé  Gauss  dans  ses  Recherches 
diop triques,  publiées  en  i84o  (*)  et  traduites  en  i85i  par 
M.  Bravais  (*).  Par  son  importance,  la  théorie  de  Gauss 
méritait  une  place  dans  l'enseignement,  mais  la  forme  ana- 
lytique que  l'auteur  lui  avait  donnée  lui  en  a  longtemps 
interdît  l'entrée  5  aussi  les  professeurs  se  sont-ils  efforcés 
de  lui  donner  une  forme  géométrique  plus  élémentaire  (*). 
Parmi  ces  tentatives,  la  plus  heureuse  me  paraît  être  celle 
qu'a  publiée,  en  1866,  M.  Neumann,  professeur  de  Mathé- 
matiques à  l'Université  de  Tubingue  (*).  J'ai  eu  connaîs- 


(^  )  Mémoires  de  Gcettingue, 

(')  Annales  de  Chimie  et  de  Physique^  3*  série,  t.  XXX lU,  p.  209  à  294. 
(")  Voir  la  thèse  de  M.  Martin  dans  ces  Annales^  4*  série,  t.  X,  p.  385- 
455;  1867. 

(*)  Die  Haupt  und  Brennpunckte  einer  Linsensjrstemes  ;  Leipzig,  1866. 


THÉORIE    DES    LENTILLES    SPBÉRIQUES. 


487 


sance  de  sa  brochure  lorsque  j^étais  encore  à  Strasbourg  \ 
mon  collègue  el  ami  M.  Bach  en  a  fait  une  traduction  libre 
qu'il  m'a  communiquée.  C'est  en  m'aidant  de  ces  deux 
opuscules  que  j'ai  commencé  mon  enseignement  à  TEcole 
Normale  :  c'est  en  le  perfectionnant  chaque  année  que  je 
Tai  amené  à  la  forme  simple  que  je  vais  exposer. 

J'examinerai  successivement  le  passage  de  la  lumière  à 
travers  une  surface,  deux  surfaces  et  un  nombre  quelconque 
de  surfaces. 

1^  Réfraction  à  irax^ers  une  surface. 


12.  Points  conjugués.  —  Soit  A  {fig*  3)  le  point  milieu 
d'une  calotte  sphérique  dont  le  centre  est  en  C  et  qui  sé- 


pare deux  milieux  réfringents  d'indice /i  et  n'(  nous  sup- 
poserons n'^n)\  nous  appellerons  la  ligne  CA  l'axe  de  la 
surface.  Un  point  X  placé  sur  l'axe  enverra  des  rayons 
dans  tous  les  sens;  un  rayon  quelconque  XI  se  réfractera 
en  X'I  en  suivant  les  lois  de  la  réfraction.  Menons  d'abord 
la  normale  CK  au  point  I;  en  nous  reportant  à  la  6gure, 
nous  écrirons  : 

D'après  la  loi  de  Kepler «XIK  —  /z'X'IC, 

Ou  d'après  la  Géométrie.  ...      «  (w  -h  a)  =  /z'  («  —  a') 
Ou  bien n ot, -\-  n' a!  =  [n'  —  /z)  w. 

Pour  mesurer  les  trois  angles  o),  a,  et  od  au  moyen  des  trois 


10 

10          10 

R'     ** 

/?  -f-  AO       p^ 

n 
P 

p'          R 

488  A.    BEKTI». 

longueurs  AC  =  R,  AX  =zp  et  AX'  =;/,  remarquons  que, 

si  nous  abaissons  la  perpeitdiculaire  10  sur  Taxe,  nous 

aurons 

AO  =  R(i  — cosw), 

et  comme,  d'après  la  définition  des  rayons  centraux, 
cosw  =  I,  nous  en  conclurons  que  AO  =  o.  Nous  pour- 
rons alors  écrire,  en  mesurant  les  angles  par  leurs  tan- 
gentes, 

_      10  10         _      10         10        ,_      10  lO 

^'"'R  — AO~"r'     ""/^-f-AO^y     *~p'  — AO~~y 

d'où 

Cette  équation  donne  pour  p'  une  valeur  indépendante  du 
rayon  incident.  On  en  conclut  que  tous  les  rayons  partis 
du  point  X  concourent  en  X'  et  réciproquement;  X  et  X' 
sont  les  points  conjugués  ou  les  images  Fun  de  Tautre. 

13.  Plans  conjugués.  —  Un  point  Y,  pris  en  dehors  de 
l'axe  AC,  est  dans  les  mêmes  conditions  que  le  point  X; 
car  la  ligne  CY  est  la  direction  d*un  rayon  de  la  sphère, 
tout  comme  CX.  Le  point  conjugué  de  Y  sera  donc  en  Y' 
sur  le  nouvel  axe  CA',  et,  si  CY  =  CX,  on  aura  de  même 
CY'=  CX'.  Donc  tous  les  points  d'une  petite  calotte  sphé- 
rique,  ayant  pour  rayon  CX,  ont  pour  conjugués  les 
points  d'une  seconde  calotte  sphérique  ayant  pour  rayon 
CX'.  Cesdeux  calottes  ont  le  même  axeCA,et,  comme  elles 
sont  petites,  elles  se  confondent  avec  leurs  plans  tan- 
gents, qui  sont  perpendiculaires  à  l'axe  aux  points  X  et  X^. 

Donc  les  plans  menés  perpendiculairement  à  l'axe  par 
les  points  conjugués  sont  des  plans  conjugués.  Tout  point 
de  l'un  d'eux  a  son  conjugué  ou  son  image  dans  le  second, 
sur  une  ligne  qui  passe  par  le  centre  de  courbure  de  la 
surface.  Les  images  sont  semblables  et  le  centre  de  simili- 
tude est  en  C. 


THÉORIE  DES  leutilles  sphériques.  4^9 

14.  Foyers  principaux.  —  Si,  dans  l'équation  (a),  on 
faîiy*=  00  ,  on  trouve  pour  p*  une  certaine  valeur  /', 

n  —  il 
si  Ion  faity  =  oo  ,  on  trouve  pour  p  une  valeur  y, 


f=ZJ 


n  —  n 


Il  y  a  donc  deux  foyers,  de  chaque  côlé  de  la  surface,  à 
des  dislances  inégales /* et /^',  qn'on  appelle  les  longueurs 
focales.  De  même  qu'il  y  a  des  plans  conjugués,  il  y  a  des 
plans  focaux. 

Le  rapport  de  ces  longueurs  focales  est  le  même  que 
celui  des  indices 

et  leur  différence  est  égale  au  rayon  de  courbure  de  la 

surface 

f  -f^  R. 

15.  Equation  des  points  conjugués.  — Si  dans  l'équa- 
tion [a)  on  divise  tous  les  termes  par  le  second  membre, 
on  y  introduit  naturellement  les  longueurs  focales,  et  elle 
devient 

p     p 

équation  que  nous  avons  déjà  trouvée  au  n^  6. 

16.  ConstJULCtion  des  images.  —  Notons,  nuQ^fois  pour 
toutes,  que,  puisque  nous  remplaçons  les  surfaces  sphéri- 
ques  par  leurs  plans  tangents,  il  est  inutile  de  les  figurer 
courbes,  et  nous  allons  dorénavant  les  représenter  par 
une  simple  droite. 

Soit  donc  AI  une  surface  réfringente,  dont  les  foyers  F 
et  P  déterminent  Taxe,  et  soit  T  un  point  hors  de  Taxe. 


490  A.    BEBTUI. 

Pour  coDstmire  son  image,  tirons  d'abord  TI  :  ce  rajon 
parall^e  a  Taxe  se  réfracte  suivant  IF;  tirons  ensuite  TFJ, 
rayon  qui  passe  par  le  foyer  :  il  se  réfracte  parallèlement 

Fig.  h. 


F' 


X' 


ii 


\  ' 


'I 


à  Taxe.  Les  deux  rayons  réfractés  se  coupent  en  T',  et  nous 
savonsqu*ils  s'y  coupent  tous  (n°  13);  Y' est  donc  l'image  ou 
le  point  conjugué  de  Y,  et,  en  abaissant  des  perpendicu- 
laires sur  Taxe,  X'Y'  sera  Timage  de  XY. 

17.  Grandeur  de  V image.  —  Soient  toujours  AX  ^^  />, 
AX'==;/,  AF  =/,  AF=/,  et  posons  XY=  y  et  X'T  ==/. 
Les  triangles  semblables  donnent  : 

A  gauche 


à  droite 
d'où 


y 


p' 
f 


p 


/'y 


Telle  la  seconde  équation  fondamentale.  Nous  l'avons 
déjà  trouvée  au  n°  8. 

18.  Equation  de  Newton.  —  Si  l'on  mesure  les  dis- 
tances des  points  conjugués  à  partir  des  foyers,  en  posant 
FX  :=  ^  et  PX'  =  (ff  la  même  figure  nous  montre  par  les 
triangles  semblables  que 


THÉORIE    DES    LEmriLLES    SPBÉRIQUES.  49^ 

d'où 

comme  nous  l'avons  déjà  trouve  au  n°  10. 

2**  Réfraction  à  travers  deux  surfaces.  —  Lentilles, 

Les  deux  surfaces  étant  sphériques  forment  une  lentille 
ordinaire.  Nous  admettons  que  ces  surfaces  servent  de  sé- 
paration à  trois  milieux  différents  d'indices  /ii,  n^y  n^.  Ces 
indices  sont  quelconques,  de  même  que  la  lentille;  mais 
nous  construirons  les  figures  dans  l'hypothèse  où  la  len- 
tille est  convergente,  et  d'un  indice  /ij  plus  grand  que  les 
deux  autres  :  ce  sera,  par  exemple,  une  lentille  biconvexe 
placée  entre  l'air  et  l'eau.  Son  axe  est  la  ligne  des  centres 
des  deux  surfaces. 

19.  Points  conjugués,  —  Foyers  principaux,  —  Un 
point  Xi  placé  sur  l'axe  de  la  lentille,  dans  le  premier  mi- 
lieu, a  dans  le  second  un  point  conjugué  Xa,  et  celui-ci  a 
un  point  conjugué Xj  dans  le  troisième  milieu;  Xi  etX^ 
sont  donc  conjugués.  Si  le  point  Xi  s'éloigne  k  l'infini,  le 
point  Xs  tend  vers  un  point  limite  F',  qui  est  le  foyer  delà 
lentille  dans  le  troisième  milieu  ;  de  même,  si  le  point  X» 
s'éloigne  à  l'infini,  son  conjugué  Xi  tend  vers  un  point 
limite  F,  qui  est  le  foyer  de  la  lentille  dans  le  premier 
milieu. 

Il  y  a  donc,  dans  ce  cas  comme  dans  le  précédent,  des 
points  conjugués  XiXs  et  des  fojers  principaux  F  et  P. 
Il  y  a  de  même  des  plans  conjugués  et  des  plans  focaux. 

20.  Plans  principaux.  —  Soient  A  et  B  (fg.  5)  les 
deux  snrfaces  réfringentes  ;  F  et  F'  les  deux  foyers  du  sys- 
tème. Nous  savons  déjà  que  tout  rayon  Sa  parallèle  a  l'axé 
dans  le  premier  milieu  converge  dans  le  second  vers  un 
point  As)  qui  est  le  foyer  de  la  surface  A  dans  le  seçogid 
milieu;,  il  converge  ensuite  dans  le  troisième  milieu  i^arA 


493  *■    KBTia. 

le  point  F'.  Le»  directions  des  deux  rayon»  à  l'entrée  et  à 
la  sortie  se  rencontrent  en  on  point  1';  abaissons  de  ce 


Fig.  5. 

X 


point  une  perpendiculaire  l'P  sur  l'axe,  et  che relions  à 
déterminer  la  position  du  point  P'. 

Les  triangles  semblables  PI'F'etBSF'  donnent 

FF'  =  Br  ~; 

les  triangles  semblables  Âa  Âi  etBSÂi  donnent 


Les  points  A,B,  Â,etF  étant  fixes,  le  second  membre  de 
cette  équation  est  constant  ;  le  point  P*  est  donc  toujours  à 
la  même  distance  du  foyer,  quel  que  soit  le  point  où  le 
rayon  incident  a  rencontré  la  surface.  On  savait  déjik  que 
tout  faisceau  cylindrique  parallèle  à  l'axe  donne  en  sor- 
tant un  faisceau  conique  passant  par  le  foyer  F':  on  voit 
maintenant  que  le  cane  et  le  cylindre  se  coupent  snÏTan  ton 
plan  fixe  l'F'.  Ce  plan  s'appelle  un  plan  principal;  il 
coupe  l'axe  en  un  point  P'  qui  est  un  point  principal.  Il  y 
a  de  même,  du  càté  de  la  première  surface,  un  autre  plan 
principal  IP  et  un  autre  point  principal  P. 

La  considération  des  points  principaux  est  l'idée  fonda- 
mentale de  la  théorie  de  Gauss.  C'est  en  prenant  ces  points 


TBÉOUIB  DES    LENTILLES    SPHÉRIQUES.  49^ 

pour  origines  des  distances  à  mesurer  qu'il  est  arrivé  à 
donner  à  la  théorie  des  lentilles  épaisses  la  même  sim- 
plicité qu'à  celle  des  lentilles  minces. 

21 .  Construction  des  images,  —  Soient  PI,  PT  (  fig.  6) 
les  plans  principaux  de  la  lentille,  F  et  F'  ses  foyers.  Cher- 
chons l'image  d'un  point  Y  placé  dans  le  premier  milieu. 

Menons  le  rayon  YI'  parallèle  à  l'axe,  jusqu'à  la  ren- 
contre du  deuxième  plan  principal  en  F,  et  tirons  son  con- 
jugué \'W  dans  la  direction  passant  par  le  second  foyer  F'« 
Menons  également  le  rayon  YFJ  passant  par  le  premier 
foyer  5  le  rayon  réfracté  correspondant  sera  JY'  parallèle  à 


^ 

r 

Fîg.  6. 

I 

r 

\k' 

^\F 

P 

X' 

2 

\ 

j 

\ 

j' 

\' 

l'axe.  Les  deux  rayons  réfractés  se  coupent  en  Y',  qui  sera 
le  point  conjugué  de  Y.  Les  plans  perpendiculaires  à  l'axe, 
XY  et  X' Y',  seront  les  plans  conjugués,  et  X'  Y'  sera  l'image 
deXY. 

Ne  pas  confondre  les  lignes  de  construction  avec  les 
rayons  lumineux  :  YII'F',  par  exemple,  n'est  pas  un  rayon 
lumineux,  au  moins  sur  tout  son  parcours*,  si  le  rayon  in- 
cident rencontre  la  première  surface  au  point  a  (fig»  5), 
et  si  le  rayon  réfracté  en  sort  au  point  |3,  le  rayon  lumi- 
neux sera  réellement  YajSF^. 

En  appliquant  la  construction  précédente  au  point  I,  on 
trouve  le  point  F.  Les  plans  principaux  sont  donc  conju- 
gués, et  leurs  points  conjugués  sont  sur  une  parallèle  à 
l'axe.  On  pourrait  le  voir  directement  en  remarquant  que 
les  points  I  et  I'  sont  les  points  de  rencontre  de .  deux 


494  A.    BERTI5. 

rayoiis  conjugués,  savoir  :  SI  et  FF'  d'uae  part,  et  d'autre 
partFIetSl'(/^.5). 

22.  Construction  des  rayons  conjugués, —  La  constraction 
précédente  ne  nous  apprend  à  tracer  que  deux  rayons  con- 
jugués et  cela  dans  des  conditions  toutes  spéciales.  Il  faut 
aussi  pouvoir  tracer  le  conjugué  d'un  rayon  quelconque. 

Soit  XR  {fig*  7)  un  rayon  donné  dans  le  premier  milieu; 
il  coupe  le  premier  plan  focal  en  L  et  le  premier  plan 
principal  en  R.  Le  point  L  étant  dans  le  plan  focal,  tous 
les  rayons  qui  en  émanent  sortent  de  la  lentille  parallèles 
entre  eux.  Oril  y  en  a  un,  W,  qui,  étant  parallèle  à  Taxe, 
se  réfracte  en  FF'  passant  par  le  foyer  5  donc  le  rayon  LR 

Fig.  7. 


O^J"^ 

R 

R'( 



IH^. 

\y 

y^^\ 

I 

v\^ 

.^ 

K 

1 
1 
1 

X 

F 

AI 

1» 

P'iB 

1 
1 
1 
1 
1 
1 

L' 


X' 


se  réfractera  parallèlement  a  FF'.  Le  point  R  ayant  pour 
conjugué  le  point  R',  le  rayon  conjugué  de  LR  s'obtiendra 
en  menant  par  R'  une  parallèle  R'L'  à  FF'.  Cette  parallèle 
coupe  le  second  plan  focal  en  L',  tel  que  L'F'  =  IR;  on  la 
tracera  donc  en  prenant  LT'  =  IR  et  joignant  le  point  R' 
au  point  L'. 

Nous  n'avons  encore  là  que  des  lignes  de  construction. 
Si  elles  rencontrent  les  faces  A  et  B  de  la  lentille  aux 
points  a  et  P,  la  marche  réelle  du  rayon  sera  X«pX'. 

23 .  Équation  des  points  conjugués . — Reportons-nous  à  la 
fig.  6.  Corapiant  les  distances  à  partir  des  points  princi- 
paux, désignons  par /et  y  les  longueurs  focales  PF  et  PF' 
et  par  ;;  et  p'  les  distances  des  points  conjugués  PX  et  PX'  ; 
puis   représentons  par  y  et  y  les  dimensions  respectives 


THÉORIE    DES    LENTILLES    SPHÉRIQUES.  49^ 

XY  ei  X' Y'  de  l'objet  ei  de  son  image.  La  fig.  6  nous  don- 
nera immédiatement  les  relations  suivantes  : 
Par  les  triangles  semblables  JFP  et  JYI, 


— > 


jr  -^f       P 
par  les  triangles  semblables  IF' F  et  l'Y'J', 

jr-\-y        p'  ' 

d'où,  en  ajoutant, 

PP 

équation  identique  à  celle  des  n*'*  6  et  15. 

En  comparant  les  triangles  qui  ont  leur  sommet  en  F  et 
ceux  qui  ont  leur  sommet  en   F',   on  aura   (en  posant 

FX  :^  q,  FX  -.  q') 

y~y~~  q" 

d'où 

qq'  ^-ff, 

seconde  forme   de  l'équation  des  points  conjugués  déjà 
trouvés  aux  n°'  10  et  18. 

23.  Grandeur  des  images.  —  Au  lieu  d'ajouter  les  deux 
équations  posées  au  commencement  du  numéro  précédent, 
si  nous  les  divisons,  nous  aurons 

•        /  5 

y     P   P 

d'où 

..  fy    /y 

2)  —  =:  —y} 

P  P 

équation  identique  à  celle  des  n^*  8  et  17. 

Nous  retrouvons  donc  et  la  construction  des  images  et 
les  équations  fondamentales  (i)  et  (2)  que  nous  avons  déjà 
obtenues,  soit  dans  le  cas  d'une  lentille  infiniment  mince 


496  ^*   BBaXIH. 

(n^'  6  et  8)  soit  dans  le  cas  d*une  seule  surface  (n^  15  et  17). 
Seulement  il  ne  faut  pas  oublier  que  dans  ces  deux  cas  les 
lettres  p^  p'tf^J'  désignaient  des  distances  aux  surfaces 
réfringentes,  tandis  que  maintenant  elles  représentent  des 
distances  aux  plans  principaux. 

24.  Points  nodaux.  —  Outre  les  relations  précédentes, 
qui  constituent  la  théorie  de  Gauss,  un  de  ses  collègues  de 
Gôttingen,  M.  Listing,  a  encore  trouvé  dans  les  lentilUes 
deux  points  singuliers  auxquels  il  a  donné  le  nom  de pox/1/5 
nodaux  [Knotenpunchte)  (*).- 

Les  rayons  partis  d^un  même  point  étant  déviés  par  la 
lentille  dans  des  sens  différents,   il  faut  nécessairement 

Fig.  8. 


X; 

^ 

\ 

i                ^ 

1 

^^^C 

1» 

-\N 

P" 

N' 

V 

^ 

4 

\.' 

X 

\ 

\ 

^x 

\ 

1 

m 

qu'il  y  en  ait  un  qui  ne  soit  dévié  ni  d'un  côté  ni  de 
Taulre,  et  qui  sorte  dans  la  même  direction  qu'il  est 
entré.  Soit  YN  {fig'  8)  un  de  ces  rayons  tombant  sur 
une  lentille  dont  les  plans  principaux  sont  P  et  P  et  les 
foyers  F  et  F'.  Puisqu'il  doit  sortir  parallèlement  à  sa  di- 
rection primitive,  il  faut  que  le  point  d'Incidence  et  le 
point  d'émergence  ne  soient  pas  du  même  côté  de  Taxe;  il 
faut  donc  que  le  rayon  incident  soit  convergent  ou  qu'il 
rencontre  l'axe  à  droite  du  point  P,  en  N  par  exemple.  Le 


(*)  Gôttinger  Studierif  V  Partie,  p.  52;  i845.  Quelques  auteurs  attri- 
buent ces  points  à  Môbius,  mais  le  Mémoire  que  Môbius  a  publié  sur  les 
lentilles,  en  1829,  ne  contient  rien  de  semblable.  On  le  trouve  dans  le 
Journal  de  Crelle,t,  V,  p.  ii3;  il  est  analysé  dans  les  Nouvelles  annales 
de  Mathématiques  de  Terquem  etGerono,  t.  IV,  p.  667;  i845. 


THÉORIE   DES    LENTILLES    SPHÉRIQUES.  497 

conjugué  du  poinl  N  sera  un  certain  point  N'  donné  par 

l'équation 

_  /.       _/___ 
PN  "^  P'N'  ~"  *' 

ce  qui  nous  montre  que  le  point  N'  sera  à  droite  du  point 
V.  Les  deux  rayons  conjugués  parallèles  sont  YN  et  Y'N'  : 
ils  coupent  l'axe  aux  deux  points  conjugués  N  et  N'  qui 
sont  les  points  nodauXj  et  ils  coupent  deux  plans  conju- 
gués en  des  points  Y  et  Y'  déterminés  par  la  construction 
ordinaire.  En  conservant  les  notations  employées  précé- 
demment, les  triangles  semblables  de  la  figure  nous  donne- 
ront successivement 

L  _   NX   _    )p-t-PN 

r'  ""  w'X'  ~/?'  — p'w' 

y  ~  FP  /    ' 

y  ~  F'x'  ~^  p'  —f' 

Des  deux  dernières  on  conclut 

y~p'-{f-/y 

Ainsi  les  points  N  et  N'  doivent  satisfaire  aux  deux  équa- 
tions 

et 

PN        P'JS'~ 

On  voit  immédiatement  que  ces  deux  équations  sont  satis- 
faites par  la  solution 

PN  =  P'  N'  =/'  — /. 

Lespoints  nodaux  se  trouveront  donc  en  portant,  à  partir 

Annales  de  Chim.  et  de  Phys.,  S*  série,  t.  XIII.  (Avril  1878.)      32 


498  A-    BERTIK. 

des  points  principaux,  du  côté  du  foyer  le  plus  long  F',  des 
longueurs  égales  entre  elles  et  à  la  différence  des  foyers,  ou 
encore  en  portant  de  F  vers  F  une  longueur  égale  kf  et 
de  F'  vers  F  une  longueur  égale  à/*. 

25.  Centre  optique.  —  Soient  maintenant  A  et  B  {fig»9) 
les  deux  faces  de  la  lentille,  N  et  N'  ses  points  nodaux. 
Tout  rayon  incident  qui  passe  par  le  point  N  sort  dans 
une  direction  parallèle  passant  par  le  point  M^  Un  cône  de 
lumière  qui  convergerait  en  N  donnerait  un  second  cône 
qui  divergerait  de  N'^  N'  est  Timage  du  point  N.  Mais  on 
ne  peut  passer  d^un  cône  à  Tautre  qu'à  Taide  des  deux 

Fig.  9. 


autres  cônes  intermédiaires  formés  par  les  rayons  inté- 
rieurs à  la  lentille. 

Si  nous  considérons,  en  effet,  deux  rayons  conjugués  TN 
et  Y'N'  qui  percent  la  lentille  aux  points  a  et  S,  nous  re- 
marquerons qu^ils  donnent  un  rayon  intérieur  aS  qui  coupe 
Taxe  de  la  lentille  au  point  O.  Les  triangles  semblables 
ONa  et  ON'S  d'une  part  et  AOa  et  B06  d'autre  part 

donnent 

ON        Oa       OA 


ON'       06 


OB 


Ainsi  le  point  O  partage  Tépaisseur  de  la  lentille  et  la 
distance  des  noeuds  en  parties  proportionnelles.  C'est  donc 
un  point  fixe  dans  la  lentille  5  on  peut  l'appeler  le  centre 
optique. 

Un  faisceau  de  lumière  incidente  qui  converge  en  N  se 


THÉORIE    DES    LEIITILLE8    SPHÉRIQUES.  499 

transforme  dans  la  lentille  en  un  faisceau  de  rayons  qui 
convergent  en  O  ^  leurs  prolongements  forment  un  second 
cône  intérieur  qui  diverge  du  point  O  et  qui  sort  de  la  len- 
tille en  divergeant  du  poîntN.Les  trois  points  N,  0,N'  sont 
conjugués  :  de  même  que  les  deux  points  nodaux  sont  les 
images  Tun  de  Tautre  à  travers  la  lentille  tout  entière,  ils 
sont  aussi  les  images  du  centre  optique  à  travers  chaque 
face  de  la  lentille,  et  réciproquement  le  centre  optique  est 
l'image  des  deux  points  nodaux  à  travers  les  faces  de  la 
lentille. 

Dans  tout  ce  qui  précède  nous  nous  sommes  servis  des 
foyers  et  des  points  principaux  comme  s'ils  étaient  connus  ; 
mais  nous  n'avons  pas  appris  à  les  déterminer  :  c'est  ce 
qu'il  nous  reste  à  faire. 

26.  Calcul  de  la  distance  des  foyers  à  la  lentille.  — 
La  lentille  est  limitée  par  deux  faces  A  et  B.  La  première, 
la  face  A,  de  rayon  R,  a  deux  foyers,  l'un  dans  le  premier 
milieu  et  Tautre  dans  le  second  ;  nous  les  désignerons  par 
les  lettres  Ai  et  As  et  nous  appellerons  a^  et  a,  leurs  dis- 
tances à  la  face  A.  Nous  savons  déjà  par  le  n°  14  que 

/it  R  /îjR 


n-t  —  iit  n*  —  fit 


De  même  la  face  B  de  rayon  R'  a  deux  foyers  Bg  et  Bs 

dans  le  deuxième  et  le  troisième  milieu,  et  leurs  distances  à 

la  face  B,  que  nous  appellerons  b^  et  b^^  sont  données  par  les 

deux  équations 

,  /I2R'  ,  /I3R' 


«2  —  /^,  /h  —  fh 

Enfin  nous  désignerons  par  e  la  distance  A  B  ou  l'épaisseur 
de  la  lentille,  et  par  (f  et  c^'  les  distances  des  deux  foyers  F 
et  F'  aux  faces  de  la  lentille. 

En  nous  reportant  à  \3.  fig,  5,  nous  voyons  que  le  rayon 
parallèle  à  l'axe  Sa  irait  concourir  en  Ag  dans  le  second 
milieu,  mais  que  la  seconde  face  de  la  lentille  le  recevant 

32. 


5oO  A.    BEETIN. 

en  6  le  fait  conyerger  en  F'  dans  le  troisième  milieu.  Le 
point  F'  est  donc  le  conjugué  du  point  A,  par  rapport  à  la 
seconde  surface  et^  en  appliquant  à  ces  points  la  formule 
générale  du  n°  6,  nous  aurons 


d'où 


h 


BP  =  BA, 


b,  -^  BA.  ' 


ou  bien 


Û2  -f-  6,  —  e 
Op  trouverait  de  même 


a»  -h  6j  —  e 


Les  distances  f  et  ((/  des  foyers  à  la  lentille  sont  donc 
connues. 

27.  Calcul  des  deux  longueurs  focales  J^f.  —  Ces 
deux  longueurs  focales  sont  PF  et  PF'  {fig*  5).  Nous  avons 
trouvé  au  n°  20 

P'r=BF^'     ou    /'=-'-^i-. 
BA,  «,—  <?' 

d'où,  en  remplaçant  o^  par  sa  valeur, 

a^  -h  bi  —  e 
On  trouverait  de  même 


ai  -h  bi  —  e 


28.  Rapport  des  longueurs  focales.  —  On  voit,  d'après 
ce  qui  précède,  que 

f       «I  bi 


THÉORIE   DES   LBHTILLES    SPHÉRIQUES.  5oi 

Mais,  d'après  les  valeurs  des  longueurs  focales]élémentaîres, 
on  a (26) 


donc 


et 

0^            »3 

ni 

7l' 

n 

en  appelant  vl  et  n  les  indices  des  milieux  extrêmes. 

Les  longueurs  focales  sont  donc  proportionnelles  aux 
indices  des  milieux  extrêmes,  et,  quand  ces  milieux  sont  les 
mêmes,  les  longueurs  focales  sont  égales, 

29.  Distance  des  plans  principaux  aux  surfaces  réfrin- 
gentes. —  Soient  X  etxf  ces  distances  AP  et  BP  {fig»  5), 
elles  sont  égales  kf —  <^  Gif  —  ç'  5  on  a  donc 


X  rrr  ; ^       x 


On  en  conclut 

R' 


xr         bx  rio  —  n 


3 


at  R 


«a  —  «I 


SI  713=  flj, 


f!  — ^ 

a:  ""  R 


30,  Cas  où  les  milieux  extrêmes  sont  les  mêmes,  —  Si 
n,  =  fZj,  toutes  les  relations  précédentes  se  simplifient.  Pour 
les  mettre  sous  la  forme  la  plus  simple,  nous  désignerons 
pamPindicede  la  lentille  par  rapport  au  milieu  extérieur, 

c'est-à-dîre  que  nous  poserons  71  =  —  =  —  • 

1°  Les  deux  longueurs  focales  sont  les  mêmes,/*'  =f 
car  nous  avons  vu  (n°28)  qu'elles  sont  proportionnelles  aux 
indices  extrêmes. 

2^  Les  points  nodaux  se  confondent  avec  les  points  prin- 
cipaux (n^  24). 


5o2 


A.    BBBTIV. 


3^  Les  distances  des  plans  principaux  aax  faces  de  la 
lentille  sont  proportionnelles  aux  rayons  de  ces  faces,  car 

nous  avons  vu  (n°29)  que  —  =  — -  • 

4^  La  valeur  de  la  longueur  focale  devient  (n®  27) 


d'où 


^applications.  —  Appliquons  ces  formules  à  quelques 
cas  simples. 

A.  Cas  d\ine  boule,  —  Ici  R'  =:  R  et  c  =  aR. 

i^  Il  n'y  a  qu'un  plan  principal  \  c'est  le  plan  diamétral 
perpendiculaire  à  Taxe^  car  x!=  a:  =  R. 

^    J  =f=  ) 

3°  Distances  des  foyers  à  la  lentille,  ç= —  • 

Par  exemple,  dans  une  boule  d'eau  et  une  boule  de  verre, 
on  aurait  : 

Boule  d^eau "  ==  t>    /=2R,     y=    R, 

Boule  de  verre '^  =  ^%    /=  |  R,     y  =  j-R. 

B.  Lentille  plan  convexe.  —  IciR'=  oo  .  On  trouve 
alors 

Longueur  focale f= * 

e 
Distances  des  plans  principaux j?  =  o,     x'  =  —^ 

Distances  des  foyers cp  =/y     <f'=/ • 

3 
Si  la  lentille  est  en  verre  d'indice  -  ? 

2 


THÉORIE   DES    LEJNTILLES   SPHÉRIQUES.  5o3 

C.  Demi-boule,  '• —  Il  faut  faire  dans  ce  qui  précède 
€f  =  R,  ce  qui  donne 

-  R  ,       ïv  ^  ,  R. 

/= 5    x:=:o     et     a:=— ,     ç  ==/   et    9=^—, ij 

n  —  I  n       ^  ^        n{n  —  i) 

pour  une  demî-boule  en  verre 

31.  Cas  des  lentilles  infiniment  minces.  —  Si  l'on  fait 
e  =  o  dans  les  formules  précédentes,  elles  deviennent: 

1°  x  =  a/=o;  les  plans  principaux  se  confondent 
avec  le  plan  réfringent  de  la  lentille  :  il  n*y  a  plus  qu'un 
point  nodal,  qui  est  à  une  dis  tance  y*' — y  de  la  lentille 
(n°9). 

2°  Les  distances/,/*',  /?,  p'  se  comptent  alors  à  partir  de 
ce  plan  réfringent  et  l'on  retrouve  les  équations  (i)  et  (a) 
des  n<>»  6  et  8. 

4^  Ces  formules  elles-mêmes  se  réduisent  aux  formules 
ordinaires  des  lentilles  quand  on  suppose  à  la  fois  les 
lentilles  infiniment  minces  et  les  deux  milieux  extérieurs 
identiques  :  le  point  nodal  ou  le  centre  optique  est  alors 
sur  la  lentille. 

En  résumé,  on  voit  que  la  théorie  ordinaire  des  lentilles 
n'est  qu'un  cas  particulier  d'une  théorie  plus  générale  qui 
peut  être  présentée  assez  simplement  pour  être  substituée  à 
la  première  dans  l'enseignement. 

3^  Réfraction  à  travers  plus  de  deux  surfaces. 

32.  Plans  conjugués,  foyers  principaux,  — Quel  que 
soit  le  nombre  des  surfaces,  pourvu  qu'elles  soient  centrées 
sur  le  même  axc,un  point  lumineux  placé  sur  Taxe  devant 
la  première  donnera  un  point  conjugué  à  travers  cette  sur- 
face^ celui-ci  en  donnera  un  second  à  travers  la  seconde  et 
ainsi  de  suite.  Si  le  premier  point  s'éloigne  a  Tinfini,  le 


5oj  &.    BEItTin. 

dernier  tend  vers  un  point  limite  qui  est  un  foyer  pnn< 
cipat.  Si  le  deraier  point  conjugué  tend  vers  l'infîni,  le 
premier  tend  vers  ttn  autre  point  limite,  qui  est  un  autre 
foyer  principal.  Ce  système  aura  donc,  comme  celui  d'une 
et  de  deux  surfaces,  des  points  et  des  plans  conjurés,  des 
foyers  et  des  plans  focaux.  On  va  voir  qu'il  a  de  même  des 
plans  principaux. 

33.  Cas  de  trois  surfaces.  —  Soient  ni,  Oi,  /ii,  »»  les 
indices  des  quatre  milieux,  séparés  par  trois  surfaces  sphé- 
riques  A,  B,  C  (fig.  10}  centrées  sur  le  même  axe.  Les 
deux  premières  A  et  B  forment  une  lentille  dont  les  points 
principaux  sont  P  et  P'  et  les  foyers  principaux  F  et  F'. 


,1 

rig.i 

/ 

Ji    r.    1 

^^^.^^-^ 

s- 

r^ 

V 

«■ 

Supposons  que  derrière  cette  lentille  se  trouve  une  troi- 
sième surface  C,  quï  sépare  le  troisième  milieu  d'indice  «j, 
du  quatrième  milieu  d'indice  n^  ;  et  soient  c%  et  c*  les  lon- 
gueurs focales  de  cette  surface  dans  ces  deux  milieux. 
Nous  admettons,  pour  construire  la  figure,  que  la  nou- 
velle surface  est  convergente  comme  la  précédente. 

Un  rayon  parallèle  à  l'axe  SI'  convergerait  en  F'  si  la 
troisième  surface  n'existait  pas  ;  mais  il  la  rencontre  en  f, 
et  cette  surface  le  fait  converger  en  G'  qui  est  dans  le 
dernier  milieu  le  foyer  du  système  des  trois  surfaces.  Le 
rayon  G'/  rencontre  le  rayon  incident  en  J',  qui  se  pro- 
jette sur  l'axe  en  Q'  et  je  vais  prouver  que  Q'  est  le  m£me 
pour  tous  les  rayons  incidents  parallèles  à  l'axe. 


THÉORIE   DES   LENTILLES    SPHÉaiQUES.  5o5 

En  effet,  si  l'on  désigne  sa  distance  au  foyer  G'  "ç^t  f\ , 
on  aura  par  les  triangles  semblables 

/;    _  J^Q^  ou  Pl^  __  FF  ou  f 
CG'  ■"         Cv         ■"        CF'        ' 
d'où 

„CG' 


/;  =f 


CF 


On  en  conclut  que  le  point  Q'  est  fixe  ;  c'est  donc  le  nou- 
veau point  principal. 

Mais  les  points  G'  et  F'  sont  conjugues  par  rapport  à  la 
surface  C;  on  aura  donc  d'après  l'équation  (i),  n°  IS, 


^3          .         ^^                I- 

CF    '   CG' 

d'où 

CG'             c, 

CF'        c,  -h  CF'  ' 

et  par  conséquent 

•^  1          ^      .    r«i7/ 

Il  y  a  également  vers  la  gaucbe  un  autre  point  principal. 
Pour  le  trouver,  considérons  un  rayon  S'K  tombant  pa- 
rallèlement à  l'axe  sur  la  surface  G  :  cette  surface  le  ferait 
converger  en  Cj 5  qui  est  son  foyer  dans  le  milieu  d'indice  n^. 
Ce  rayon  vient  rencontrer  le  plan  principal  P'I'  de  la 
première  lentille  en  un  point  R',  et  il  s'agit  de  trouver 
pour  cette  lentille  le  rayon  conjugué  du  rayon  KR'.  Il 
suffit  pour  cela  d'appliquer  la  construction  indiquée  au 
nO  22.  Ce  rayon  se  mouvant  dans  le  milieu  d'indice  tis, 
il  faut  le  prolonger  jusqu'à  la  rencontre  du  plan  focal 
de  la  lentille  dans  ce  milieu,  c'est-à-dire  jusqu'en  U,  puis 
porter  son  attention  sur  les  points  \1  et  R^  Menons  par 
L'  un  rayon  parallèle  à  l'axe  jusqu'à  la  rencontre  du  pre- 
mier plan  principal  en  I  :  il  donnera  un  rayon  réfracté, 
IF  passant  par  le  foyer  de  la  lentille  dans  le  milieu  i.  Le 


5o6  A.    BBRTUr. 

rayon  L'R'  qui  part  du  plan  focal  sortira  parallèlement  à 
celui-ci  ^  mais  le  point  R'  a  pour  conjugué  le  point  R,  situé 
à  la  même  hauteur  sur  le  premier  plan  principal.  Le  rayon 
émergent  aura  donc  la  direction  RG  parallèle  à  IF,  et  le 
point  G  sera  le  foyer  du  système  triple  dans  le  premier 
milieu. 

Ce  rayon  émergent  RG  rencontre  le  rayon  incident  S'K 
en  J,  qui  se  projette  sur  Taxe  en  un  point  Q  qui  sera  le 
preipier  point  principal  du  système  des  trois  surfaces.  En 
effet,  en  désignant  par/^i  sa  distance  QG  au  foyer  G,  les 
triangles  semblables  nous  donnent 

y^  _  QJ  _  CK^  __  CC^our, 
PF  ~"  i?I  ~  FL'  ""  c,  -f-  CF'' 
d'où 


/.- 


cr 


Nous  voyons  donc  d'abord  que^i  est  constant  et  par 
conséquent  que  le  point  Q  est  fixe  :  c'est  donc  le  premier 
point  principal. 

Nous  remarquons  ensuite,  en  comparant  les  valeurs  de 
/i  et  de/', ,  que 

oUf  en  tenant  compte  des  relations  des  n^'  14  et  SS, 

■       ;2nr  ~~'  —  .        ^-^* 

Ainsi  le  système  de  trois  surfaces  se  comporte  comme 
une  lentille  :  il  a  deux  points  principaux  Q  et  Q',  deux 
foyers  principaux  G  et  G',  et  les  longueurs  focales  comptées 
à  partir  des  plans  principaux  sont  proportionnelles  aux 
indices  extrêmes. 

33.  Réfraction  à  trai^ers  un  nombre  quelconque  de  sur^ 
faces.  — En  généralisant  la  démonstration  précédente,  nous 


THÉORIE   DBS   LENTILLES   SPHÉ1UQUE8.  &Oy 

pouvons  dire  que  si  un  système  a  deux  plans  principaux  et 
deux  foyers  principaux,  dont  les  distances  aux  plans  princi- 
pauxsont  proportionnelles  aux indicesdesmilieuxextrèmes, 
il  en  sera  de  même  si  nous  ajoutons  à  ce  système  une  nou- 
velle surface  centrée  sur  le  même  axe  que  les  précédentes, 
et  nous  arrivons  ainsi  au  théorème  général  suivant  : 

Un  système  quelconque  de  surfaces  centrées  sur  le 
même  axe  a  toujours  deux  plans  principaux  P  et  P'^ 
deux  foyers  principaux  F  et  F',  et  le  rapport  des  deux 
longueursfocalesfet  f  est  toujours  égal  au  rapport  des 
indices  des  milieux  extrêmes. 

En  d^autres  termes,  ce  système  se  comporte  comme  une 
lentille.  Tout  ce  que  nous  avons  dit  des  lentilles  lui  est 
applicable,  et  nous  devons  regarder  comme  générales  no- 
tamment les  équations  fondamentales  (i)  et  (2)  et  la  con- 
struction des  images  [fig*  6). 

On  voit  donc  qu'on  pourrait  sans  grandes  difficultés  gé- 
néraliser dans  renseignement  élémentaire  la  théorie  des 
lentilles  épaisses.  Les  difficultés  ne  commenceraient  que 
si  Ton  voulait  calculer  la  position  des  foyers  et  des  plans 
principaux^  mais  alors  on  n^aurait  rien  de  mieux  à  faire 
qu'à  se  reporter  au  Mémoire  original  de  Gauss.  Ces  calculs, 
du  reste,  ne  sont  pas  absolument  nécessaires^  car  ce  n'est 
jamais  par  le  calcul,  mais  par  Texpérience,  que  l'on  déter- 
mine les  quatre  points  fondamentaux  d'un  système  optique, 
et  les  méthodes  expérimentales  imaginées  dans  ce  but  sont 
d'une  grande  simplicité. 


5o8  RICBB.    —    DOSAGE   DU   MAJrGAJIESB, 

itlOUI  SDR  LE  M8A6E  DU  lARGASÈSI»  M  PLID,  M 

emu,  m  zinc  et  m  nickel,  et  sur  ^analyse  iee 

ALUA6ES  DE  CES  HfiTADL-, 

Par  m.  Alveed  RICHE, 
Professeur  de  Chimie  à  l'École  supérievre  de  Pharmacie  de  Paris. 


Les  nombreuses  analyses  que  j'ai  exécutées  dans  les  re- 
cherches que  je  poursuis  depuis  plusieurs  années  sur  les 
alliages,  recherches  que  j'ai  publiées  dans  ce  Recueil  ('), 
m'ont  conduit  à  modifier  et  à  simplifier  le  mode  de  dosage 
de  plusieurs  métaux,  et  c'est  l'ensemble  de  ces  perfection- 
nements qui  Tait  l'objet  du  présent  Mémoire. 

La  méthode  dont  je  fais  usage  repose  sur  l'emploi  du 
courant  électrique.  Elle  est  simple,  rapide  et  très-pratique, 
car  les  opérations  s'exécutent  en  quelques  heures,  sans 
qu'on  ait  pour  ainsi  dire  besoin  de  s'en  occuper,  si  ce  n'est 
pour  les  mettre  en  marche  et  pour  les  arrêter.  Elle  est 
économique,  parce  qu'elle  n'exige  qu'un  ou  deux  éléments 
de  pile  de  petites  dimensions.  Elle  est  d'une  grande  exac- 
titude, souvent  d'une  rigueur  absolue,  comme  l'établissent 
les  nombreuses  synthèses  détaillées  dans  ce  Mémoire. 

Cette  méthode  s'applique  au  manganèse,  au  plomb,  au 
cuivre,  au  nickel  et  au  zinc.  Le  cuivre  elle  nickel  se  dosent 
déjà  par  la  pile  dans  quelques  laboratoires,  mais  j'ai'  mo- 
difié la  manière  d'opérer. 

Les  piles  dont  je  fais  ordinairement  usage  sont  la  pile 
Bunsen  et  la  pile  Leclauché.  On  peut  remplacer  avec  avan- 
tage la  première  par  la  pile  Marié-Davy,  dont  l'emploi  est 
plus  pratique  :  à  deux  éléments  Bunsen  on  substitue  trois 
éléments  Marié-Davy. 

(*)  Annales  de  Chimie  et  de  Physique^  4"  sériei  t.  XXX,  p.  35 1. 


DO    PLOMB,    DU    COtTIlB,    DC    ZIRC    ET   DU    ZIICKKL.       5og 

L'appareil  où  se  passe  l'action  décomposante  sur  la 
solution  saline  se  compose  d'un  creuset  de  platine,  de  la 
dimension  uauelleinent  employée  dans  les  laboratoires,  et 
d'une  iame  de  platine  dans  le  cas  du  plomb,  da  cuivre,  du 
zinc  et  du  nickel.  Cette  lame  est  taillée  en  tronc  de  cône 
ouvert  aux  deux  extrémités,  reproduisant  sensiblement  la 
forme  du  creuset  clans  lequel  elle  doit  être  suspendue  sans 
le  toucher  (/tg.  i);  elle  constitue  le  p61e  n^atif,  et  le 


creuset  est  le  pôle  positif.  Ce  cône  porte  deux  ou  trois 
ouvertures  longitudinales  de  petites  dimensions;  par  ce 
moyen,  le  liquide  reste  homogène  et  le  courant  passe  ré- 
gulièrement. L'écarteraent  entre  le  cône  et  le  creuset  est 
de  a  à  4  millimètres. 

Dans  le  cas  du  manganèse,  le  cône  est  remplacé  par  un 
fil  de  platine  contourné  en  spirale. 

Le  cône  ou  le  fil  de  platine  est  suspendu,  sans  le  toncher, 
dans  le  creuset,  au  moyen  d'un  support  {Jîg-  a)  qui  se  com- 
pose d'une  tige  de  verre  plein,  verticale,  A,  assujettie  dans 
une  planche  en  bois  ou  dans  une  plaque  de  métal  B.  Sur 
ce  montant  isolant  s'adaptent,  par  te  moyen  de  vis  :  i<*  un 
anneau  en  laiton  C  {fig.  3),  dans  lequel  se  place  le  creuset, 


-   D09AGB   DO    HiUGAIlfeSB, 


qui  s'y  trouve  légèrement  pressé  par  le  moyen  d'une  vis  d 
qnï  sert  également  à  fixer  le  fil  de  cuivre  qui  est  lié  au 
pôlecbarbon  ;  a"  une  tige  en  laiton  E  (fig.  4),  portant  deux 


ouvertures  dans  lesquelles  pénétre  une  vis  :  l'une  i  permet 
de  suspendre  le  c6ne  de  platine  dans  le  creuset,  l'autre  /  ■ 


reçoit  le  fil  de  cuivre  qui  communique  au  pôle  zinc.  Afin 
de  maintenir  toujours  les  contacts  aussi  parfaits  que  pos- 
sible, le  laiton  est  platiné  ou  doré.   Pour  empêcher  les 


DU    PLOMB,    DU    CDITRE,    DU    ZIBC    ET   DS    NICKEL.       5ll 

projections  de  liquide,  od  recouvre  le  creuset  de  deux  demi- 
disques  provenant  d'un  verre  de  montre  coupé  en  deux 
parties.  Quand  on  opère  à  chaud,  ]e  creuset  est  placé  dans 
une  capsule  pleine  d'eau,  disposée  sur  un  fourneau  ou  sur 
un  bec  de  gaz.  L.&Jïg.  a  représente  l'appareil  monté. 


Tout  autre  appareil  en  verre  ou  en  porcelaine,  dans  le- 
quel seraient  deux  lames  de  platine  communiquant  avec 
les  pâles  de  la  pile,  pourrait  remplacer  celui-là.  Je  me  sers 
très-avantageusement,  pour  les  essais  de  nickel ,  d'un  vase 
à  précipité,  en  verre  de  Bohème,  qui  contient  comme  élec- 
Fiff.  5. 


trode  négative  un  cylindre  plein  de  platine,  et  comme 
électrode  positive  un  réseau  cylindrique  de  toile  de  platine. 
Ces  deux  électrodes  appuient  sur  le  fond  du  vase,  qui,  étant 
profond,  coulient  beaucoup  de  liquide. 

Dans  certains  cas  oii  j'avais  hesoin d'une  action  rapide, 
le  pôle  positif  se  composait,  outre  ce  treillage  en  platîae 


5l3  niCBB.    —    DOSAGE    DU    UÀDGIMËSB, 

qui  en  k  l'ext^riear  du  p61e  négatif,  d'une  spirale  de  pla- 
tine intérieure  au  pâte  négatif. 

Dans  les  essais  de  laiton,  où  j'avais  une  quantité  de  li- 


quide assez  forte,  je  faisais  usage  d'un  vase  {^g-  5)  et  d'un 
cylindre  en  platine  ouvert  aux  deux  extrémités  {fig.  6). 


I.  —  Masgi.ii^b. 

A.  Manganèse  seul.  —  Si  l'on  expose  à  l'action  de  un 
ou  de  deux  éléments  Bunsen  une  solution  de  sulfate,  de  ni- 
trate ou  de  chlorure  de  manganèse,  il  se  forme  au  p6le 
positif  du  bioxyde  de  ce  méul,  qui  se  détache  et  flotte  ou 
qui  se  dépose.  De  temps  à  antre  on  soulève  les  verres  pen- 
dant les  premiers  temps  de  passage  du  courant,  et  l'on  in- 
jecte de  l'eau  avec  une  pissette  pour  détacher  les  goutte- 
lettes liquides  entraînées  sur  le  verre  par  les  bulles  de  gaz. 
Si  l'on  avait  un  appareil  un  peu  profond  ou  qu'on  voul&t 
simplement  préparer  du  bioxyde  de  manganèse,  on  em- 
ploierait trois  éléments  pour  avoir  une  séparation  ra- 
pide. 


DU    PLOMB,    DU    CUIVRE,    DU   ZIIÏC    ET    DU    HICKEL.       5l3 

Lorsque  la  liqueur  ne  renferme  qu'une  petite  quantité 
de  manganèse,  on  ne  fera  usage  que  d'un  seul  élément. 

Quand  on  a  constaté,  par  l'essai  de  quelques  gouttes  de 
liqueur,  au  moyen  du  sulfhydrate  d'ammoniaque,  qu'elle 
ne  contient  plus  de  manganèse,  on  laisse  passer  le  courant 
pendant  une  demi-heure  encore  pour  être  bien  certain  que 
tout  l'oxyde  est  précipité,  on  décante  la  liqueur  sur  un 
filtre,  sans  chercher  à  y  faire  tomber  l'oxyde,  et  on  lave 
avec  soin  le  creuset,  la  spirale  et  le  filtre.  On  place  le  filtre 
et  la  spirale  dans  le  creuset,  que  l'on  sèche  et  que  l'on  porte 
ensuite  au  rouge  vif  pour  changer  le  bioxyde  en  oxyde  sa- 
lin. Il  est  nécessaire  de  recommencer  la  calcina tion  jusqu'à 
ce  que  deux  pesées  consécutives  accusent  le  même  poids.  Si 
Ton  a  pris  la  tare  du  creuset  et  de  la  spirale  ensemble,  et 
qu'on  y  ajoute  le  poids  de  la  cendre  du  filtre,  on  a  les  élé- 
ments pour  calculer  le  poids  du  manganèse. 

Lorsqu'on  opère  en  liqueur  sulfurique,  la  spirale  néga- 
tive reste  intacte,  et  l'on  n'a  pas  à  la  calciner  dans  le  creu- 
set. C'est  seulement  dans  une  solution  nitrique  que  du 
bioxyde  se  fixe  sur  la  spirale.  Ce  fait  est  lié  à  la  décompo- 
sition de  l'acide  nitrique  sous  l'influence  du  courant  : 
l'acide  azotique  est  attaqué  par  l'hydrogène  provenant  de 
la  décomposition  de  l'eau,  et  se  décompose  en  oxydes  in- 
férieurs, puis  en  ammoniaque.  Cette  action  est  rapide, 
car,  après  huit  heures,  une  solution  d'azotate  de  manga- 
nèse, additionnée  de  7  centimètres  cubes  d'acide  azotique, 
est  devenue  alcaline.  Le  dépôt  adhérent  sur  le  fil  négatif 
se  produit  lorsque  la  liqueur  s'affaiblit  en  acide  et  devient 
ammoniacale. 

Celte  précipitation  sur  le  pôle  négatif  n'a  pas  d'incon- 
vénient lorsqu'il  s'agit  de  doser  ce  métal  dans  un  de  ses 
sels  ou  dans  tout  autre  produit  qui  ne  contient  plus  que 
du  manganèse,  comme  dans  un  bronze  au  manganèse  où 
Ton  a  déterminé  le  cuivre  5  il  n'en  est  plus  de  même  si  l'on 
dose  le  manganèse  en  présence  d'un  sel  de  magnésie  ou 

Jnn,de Chim.etdePhxs.,:}^ séne,%.\lU,  (Avril  1878.)  33 


5l4  AICHB.    DOSAGE   DU    MÀKGAnÈSE, 

d'alumine,  parce  qu'il  arriverait  un  instant  où  il  n'exis- 
terait plus  assez  diacide  pour  tenir  ces  bases  en  dissolution, 
et  alors  on  aurait  une  surcharge  de  manganèse. 

Dans  ces  cas,  il  convient  donc  d'agir  en  liqueur  sulfu- 
rique  pour  des  recherches  rigoureuses. 

Voici  quelques  résultats  obtenus  avec  une  solution  sul- 
furique  de  manganèse,  dont  lo  centimètres  cubes  repré- 
sentaient 06%  596  Mn'O*. 

I.  Avec  I  élément,  en  six  heures  : 

1^^  contenant  0*^,1  ig  ont  donné  0*^,119; 

II.  Avec  2  cléments,  en  cinq  heures  : 

5*^*  contenant  o**',?.98  ont  donné  0^^,2985; 

III.  Avec  2  éléments,  en  sept  heures  : 

10*^^  contenant  o*'',596  ont  donné  0^,596. 

La  température  de  Feau  avait  oscillé  entre  65  et 
90  degrés.  La  solution  saline  avait  été  additionnée  de 
2  à  6  gouttes  d'acide  sulfurique. 

IV.  5  centimètres  cubes  d'une  solution  d'azotate  de  manga- 
nèse, fournissant  à  la  calcination  o^,o45  d'oxyde  salin,  ont  été 
soumis  au  courant  d'un  élément.  Après  trois  heures,  la  liqueur 
ne  contenait  plus  de  manganèse.  La  calcination  a  fourni  o*'',o45 
d'oxyde  Mn^'O*. 

V.  10  centimètres  cubes  de  la  même  solution  ont  fourni,  en 
quatre  heures,  o*'',090  Mn'O*. 

J'ai  fait  quelques  expériences  avec  une  pile  Marié-Davy 
dont  le  zinc  avait  i4  centimètres  de' hauteur  et  8  centi- 
mètres de  diamètre. 

VI.  Liqueur  nitrique  fournissant  à  la  calcination  0^^,080  de 
Mn'O*.  On  a  obtenu,  après  quatre  heures,  0^^,080. 

VII.  10  centimètres  cubes  d'une  liqueur  sulfurique  ont  donné, 
en  sept  heures,  0^^,600  d'oxyde  salin,  et  il  ne  restait  pas  dans 
le  liquide  filtré,  comme  d'ailleurs  dans  les  essais  précédents,  une 
quantité  de  manganèse  égale  à  o^^^S. 


DU    PLOMB,    DU    CUIYRB,    DU    ZINC   ET    DU    NICKEL^       5l5 

Nous  verrons  plus  loin  le  moyen  par  lequel  on  s'en  est 
assuré  dans  la  liqueur  soumise  au  courant,  et  dans  laquelle  . 
on  n'avait  plus  de  précipité  par  le  suif  hydrate  d'ammo- 
niaque. 

On  opère  généralement  à  chaud  pour  diminuer  la  durée 
de  l'opération ,  mais  elle  est  tout  aussi  exacte  à  la  tempé- 
rature ordinaire. 

VIII.  On  a  exposé  le  soir,  à  raction  de  deux  éléments  Bunsen, 
une  solution  devant  fournir  0*^,344  Mn^O*.  La  pesée  a  donné  ce 
nombre. 

IX.  Dans  les  mêmes  conditions,  on  a  déposé  0*^,702  d^oxyde 
à  o*'',ooo5  près. 

On  arrive,  par  cette  méthode,  à  doser  des  proportions 
extrêmement  minimes  de  manganèse.  La  meilleure  ma- 
nière d'opérer  consiste  à  réduire  la  liqueur  à  un  faible 
volume,  et  à  la  soumettre  à  chaud,  dans  un  petit  creuset, 
à  l'action  de  i  élément  Bunsen,  Marié-Davy  ou  Leclanclié, 
après  l'avoir  acidulée  avec  i  à  4  gouttes  d'acide  sulfu- 
rique.  Si  la  solution  contient  oS',ooo5  Mn'O*,  le  dépôt 
est  très-net,  et  il  apparaît  encore  avec  o^^oooa,  ou  même 
0^*^,0001. 

On  décèle  des  quantités  plus  faibles  en  soumettant  le 
liquide  à  2  éléments  Bunsen ^  à  la  température  ordinaire, 
dans  un  verre  ou  dans  une  capsule  de  porcelaine  où  ar- 
rivent deux  fils  de  platine  formant  les  pôles  de  la  pile. 
On  a  préparé  une  liqueur  dont  chaque  centimètre  cube 
fournit  par  la  calcination 

08*^,000013  Mn^O*. 

I  centimètre  cube  de  celte  solution,  acidulée  par  2  gouttes 
d'acide  sulfurique  étendu  de  quelques  centimètres  cubes 
d'eau,  prend  une  teinte  rose  très-nette.  La  coloration  est 
encore  manifeste  avec 

o»"", 0000026  Mn'0% 

33. 


5l6  KICHE.    • —   DOSAGE   DD    MAHaASkSE, 

el  elle  est  perceptible  avec 

qui  représente  moins  de  un  millionième  de  gramme  du 
métal. 

Ces  dernières  proportions,  fondues  avec  du  carbonate 
de  soude,  ne  donnent  pas  une  teinte  appréciable  à  la  masse 
refroidie. 

C'est  par  remploi  comparé  de  pareilles  liqueurs  titrées, 
contenant  des  quantités  très-faibles  de  manganèse,  qu'il 
m'est  possible  d'affirmer,  dans  les  essais  relatés  ci-dessus, 
qu'ils  étaient  exacts  à  oS'^,ooo5  d'oxyde  Mn*0*. 

B.  Manganèse  en  présence  de  divers  métaux.  —  Ce 
métal  se  dose  aussi  exactement  par  la  pile  en  présence 
du  cuivre,  du  zinc  et  du  nickel.  On  trouvera  des  détails  sur 
ces  points  dans  les  chapitres  où  l'on  traite  de  ces  métaux. 

La  précipitation  se  fait  sans  difficulté  lorsque  la  liqueur 
contient  des  sels  alcalins,  alcali  no- terreux  et  terreux. 

X.  On  a  pris  0^^,200  de  sulfate  d'alumine  et  une  solution 
de  sulfate  de  manganèse,  produisant  08^,247  Mn'0%  acidulée  par 
quelques  gouttes  d'acide  sulfurique.  On  a  obtenu,  par  l'action 
de  deux  éléments,  o8*",246  d'oxyde  Mn'O*,  et  la  liqueur  n'en 
renfermait  pas  1  milligramme. 

XI.  Même  résultat  avec  o**",2oo  de  sulfate  de  magnésie. 

XII.  o*',oo6  d*alumine,  à  l'état  d*azotate,  ont  été  mélangés 
avec  5  centimètres  cubes  d'une  solution  d'azotate  de  manganèse 
donnant  à  la  calcination  o^',ooo5  d'oxvde.  Le  creuset  était  re- 
couvert,  après  l'action  d'un  élément,  d'un  enduit  irisé  d'oxyde 
Mn^O%  et  le  liquide  décanté  ne  s'est  pas  coloré,  par  fusion,  avec 
le  carbonate  de  soude. 

XIIL  On  a  obtenu  des  résultats  aussi  concluants  avec  les 
mémos  doses  de  manganèse  en  présence  des  sels  de  potasse,  d'am- 
moniaque, de  zinc  et  de  nickel. 

XIV.  On  a  ajouté  à  une  solution  titrée,  représentant  o**",oooo5 
Mn^O%  quelques  gouttes  de  sels  de  soude,  d'ammoniaque,  de 
chaux,  de  magnésie,  et  3  ou  4  gouttes  d'acide  sulfurique  :  la 


DU    PLOMB,    DU    CUIVRE,    DU    ZIMC    ET    DU    NICKEL.       5l7 

coloration  rose  s*est  montrée  comme  si  le  sel  de  manganèse  était 
pur. 

Si  dans  Tessai  du  manganèse,  en  présence  d'alumine,  de 
magnésie,  etc.,  on  avait,  par  défaut  d'acidité,  entraîné 
une  petite  quantité  de  ces  bases  dans  le  dépôt  d'oxyde  de 
manganèse,  on  n'aurait  qu'à  redissoudre  celui-ci  par  quel- 
ques gouttes  diacide  sulfurîque  en  excès,  et  à  soumettre  à 
la  pile  de  nouveau.  Comme  cette  deuxième  liqueur  ne  ren- 
ferme qu'une  très-faible  quantité  du  sel  étranger,  Toxyde 
de  manganèse  se  précipite  à  l'état  de  pureté. 

Lorsque  la  proportion  d'oxyde  de  manganèse  précipité 
est  faible,  cet  oxyde  se  dépose  adhérent  sur  le  creuset, 
sous  forme  d'un  enduit  brun  ou  irisé. 

C.  Manganèse  et  fer.  —  Le  manganèse  ne  se  sépare 
pas  par  la  pile  en  présence  du  fer  en  excès.  J'ai  fait,  dans 
cette  voie,  un  très-grand  nombre  de  tentatives  qui  sont 
restées  infructueuses.  Je  poursuis  cette  étude  en  ajoutant 
à  la  liqueur  divers  sels,  des  acétates  notamment,  car  la 
séparation  facile  du  manganèse  dans  les  fontes,  les  aciers 
et  les  fers  serait  très-importante  à  réaliser. 

Soit  une  liqueur  contenant 

o«%5oo  Fe     et     o8%354  Mn^O*  : 

on  observe  au  pôle  positif  un  dépôt  brun  vers  la  surface  du 
liquide,  et  au  pôle  négatif  une  matière  noire  cristalline; 
l'un  et  l'autre  sont  en  très-petite  quantité.  Dès  que  le  cou- 
rant cesse,  les  deux  dépôts  se  redissolvent  avec  une  extrême 
rapidité. 

Voici  la  théorie  de  ce  phénomène  :  la  matière  brune  qui 
se  forme  sur  le  creuset  à  la  surface  du  bain  est  du  bioxyde 
de  manganèse.  La  substance  cristalline  du  pôle  négatif  est 
du  fer.  Dès  que  le  courant  cesse,  le  fer  se  dissout  dans 
l'acide,  et  il  en  résulte  du  sulfate  de  protoxyde  de  fer  qui, 
réduisant  le  bioxyde  de  manganèse,  le  ramène  à  l'état  de 
sel  de  protoxyde.  Il  se  passe  donc,  dans  ces  circonstances. 


5l8  miCHE.    DOSAGE   DU    MAHGAaÈSE,      ' 

une  action  identique  à  celle  qui  se  produit  dans  FaiBoage 
du  verre  lorsqu'on  y  ajoute  du  bioxyde  de  manganèse  pour 
peroxyder  le  silicate  de  protoxyde  de  fer. 

Ce  phénomène  n'a  lieu  d'une  manière  complète  que  si, 
coiùme  dans  Texemple  précédent,  le  fer  est  prédominant 
sur  le  manganèse.  Lorsque  ces  deux  métaux  sont  environ 
à  poids  égaux,  ou,  à  plus  forte  raison,  si  le  manganèse  est 
en  excès,  le  bioxyde  se  dépose,  et  le  dosage  peut  être  voi- 
sin de  Texactitude  par  suite  d'une  compensation  :  il  reste 
un  peu  de  manganèse  dans  la  liqueur,  et  le  bioxyde  préci- 
pité entraîne  un  peu  de  fer.  Je  ne  citerai  qu'un  exemple, 
qui  montre  qu'on  arrive,  par  ce  moyen,  à  déceler  de  très- 
petites  quantités  de  manganèse. 

XYI.  On  a  soumis  à  la  pile  ; 

i*^*^  d'une  liqueur  contenant  o«'',ooo4  Mn*0*; 
i'^*^  ))  «  o«',ooo5  Fe. 

Le  bioxyde  s'est  précipité,  et  il  pesait  environ  o™^',  5. 

Dans  le  cas  où  le  fer  et  le  manganèse  sont  associés  dans 
une  matière,  le  mieux  est  de  précipiter  le  fer  après  sa 
peroxydation  par  le  carbonate  de  baryte. 

XVII.  On  a  pris  : 

o**",  200  de  fer  en  solution  azotique, 

o«%ooo4  Mn'O^  à  Tétat  d'azotate  dans  une  liqueur  titrée. 

On  a  précipité  le  fer  par  le  carbonate  de  baryte,  filtré, 
débarrassé  la  liqueur  de  baryte  par  l'acide  sulfurique, 
filtré  de  nouveau,  évaporé  la  solution  presque  à  sec,  et 
repris  par  de  l'eau  faiblement  acidulée  d'acide  sulfurique^ 
puis  on  a  soumis  le  liquide  au  courant  de  deux  éléments  : 
la  liqueur  a  pris  une  coloration  rose  très-nette. 

Un  grand  nombre  d'essais  exécutés  en  vue  de  rechercher 
et  de  doser  le  manganèse  dans  le  sang,  dans  le  lait  et  dans 
l'urine,  par  la  méthode  combinée  du  carbonate  de.  baryte 
et  de  la  pile,  m'ont  donné  d'excellents  résultats  qui  sont 


DU    PLOMB9    DU    CUIVRB9    DU    ZINC    ET    DU    JNICKEL.       Sip 

publiés  dans  les  bulletins  de  TAcadémie  de  Médecine  et 
dans  le  Journal  de  Pharmacie  et  de  Chimie  (juin  1878). 

II.   —  Plomb. 

Les  travaux  classiques  de  Becquerel  ont  montré  que  les 
sels  de  plomb  se  décomposent  par  la  pile,  à  la  température 
ordinaire,  en  plomb  métallique,  qui  se  rend  au  pôle  néga- 
tif, et  en  bioxyde  de  plomb,  qui  recouvre  le  pôle  positif. 

J'ai  observé,  d'une  part,  que  si  l'on  opère  à  chaud  en 
solution  nitrique,  le  plomb  métallique  disparait  en  peu 
d'insiants,  et  même  que  le  plus  souvent  il  ne  se  forme  pas, 
tout  ce  métal  étant  transporté  au  pôle  positif  sous  forme  de 
bioxyde^  et  d'autre  part,  que  si  la  solution  est  fortement 
acide,  il  ne  se  précipite  pas  de  plomb,  même  à  froid,  sur  le 
pôle  négatif  :  tout  le  métal  est  transformé  en  bioxyde.  Ce 
sont  ces  dernières  conditions  que  je  cherche  à  réaliser;  dès 
lors,  il  est  à  peu  près  indifférent  d'agir  soit  à  froid,  soit  à 
chaud.  Je  préfère  cependant  placer  l'appareil  au  bain- 
marie,  vers  60  à  90  degrés,  pour  être  certain  d'éviter  la 
formation  du  plomb  métallique  au  début  et  pour  accélérer 
la  réaction. 

On  n'emploie  qu'un  élément  Bunsen  ou  Marié-Davy. 
Pour  de  petites  quantités  à  déposer,  un  élément  Leclanché 
suffit,  et  même  est  préférable.  Lorsque  la  proportion:  de 
plomb  n'atteint  pas  3o  milligrammes,  le  dépôt  étant  très- 
adhérent  au  platine,  on  met  en  communication  le  pôle 
positif  avec  le  cône.  Si  la  quantité  de  plomb  est  plus  con- 
sidérable, on  fait  communiquer  le  creuset  avec  le  pôle 
positif.  On  siphonne  la  liqueur  lorsque  l'analyse  est  ter- 
minée, sans  arrêter  le  courant,  parce  que  le  bioxyde  de 
plomb  se  dissout  sensiblement  dans  l'acide  nitrique  de  la 
solution  électrolysée.  Cette  opération  se  fait  très-aisément 
au  moyen  d'un  siphon  fixé  dans  un  flacon  et  portant  un 
autre  tube  par  lequel  on  aspire.  Le  liquide  du  creuset  est 


5aO  RICHE.    DOSAGE   DU    MAKGAlltSE, 

recueilli  dans  le  flacon,  et  Ton  remplît  trois  ou  quatre  fois 
le  creuset  avec  de  Teau,  qu'on  siphonne  dans  le  flacon  par 
le  même  système.  De  cette  façon,  il  ne  se  dissout  pas  trace 
d'oxyde  de  plomb,  et  toute  la  liqueur  étant  recueillie  sans 
perle  peut  être  utilisée  à  des  dosages  ultérieurs. 

Le  creuset  est  ensuite  séché  vers  io5  à  120  degrés  et 
pesé.  On  le  reporte  dans  Téiuve,  et  on  le  pèse  de  nouveau; 
il  est  rare  que  les  deux  pesées  ne  soient  pas  concordantes. 

D.  Plomb  seul,  —  On  a,  dans  ces  temps  derniers, 
émis  des  doutes  sur  la  nature  de  cet  oxyde  ainsi  préci- 
pité, et  Ton  a  contesté  que  ce  fût  du  bioxyde  à  l'état  de 
pureté. 

Pour  m'en  assurer,  j'ai  pesé  des  quantités  très-diverses 
de  plomb,  que  j'ai  données,  sans  les  lui  faire  connaître,  à 
M.  Yver,  jeune  chimiste  à  qui  revient  une  grande  part 
dans  l'exécution  de  ce  travail.  Après  avoir  obtenu  l'oxyde, 
il  l'a  envisagé  comme  du  bioxyde,  et  il  l'a  ramené,  par  le 
calcul,  à  Fétat  de  plomb  métallique.  Le  poids,  déduit  du 
calcul,  se  confond  avec  le  poids  du  plomb  pesé  et  soumis 
a  1  essai. 


Plomb 

État 

Force 

Temps 

Plomb 

donné. 

de  la  liqueur. 

électrique. 

de  Texpérience. 

<»lcul( 

s.  *    •   • 

0,190 

peu  acide. 

1  clém.àchaud 

5  heures. 

0,189 

IL.. 

0,190 

•» 

1  élém.  à  froid 

» 

0,190 

m.. 

o,2o3 

\^^  acide  azot. 

1  élérii.  n  chaud 

V 

o,ao3 

IV.. 

o,3o8 

>i 

» 

)} 

0,807! 

V... 

0,801 

a 

M 

6  heures. 

0,801 

VI.. 

?. ,  ooo5 

6*^*=  acide  azot. 

I  éléiD.  à  froid 

nuit  enf* 

ï'999' 

vu. 

0,011 

0*^*,  5  ac.  azot. 

I  élém.  à  froid 

3  heures. 

0,012 

VIIL 

0,002 

très-acide. 

1  élém.  à  chaud 

» 

0,002 

IX.  o***,  000025  de  plomb  dissous  dans  20  centimètres  cubes 
laissent  apercevoir,  par  l'action  de  la  pile,  un  enduit  nuageux  de 
bioxyde  de  plomb  sur  la  paroi  du  creuset,  tandis  que  cette  même 
liqueur  ne  fournît  rien  de  sensible  avec  l'iodure  de  potassium, 
et  se  teinte  très-faiblement  avec  Thydrogène  sulfuré. 


DU    PLOMB,   DU    CUIVRE,    DU    ZINC    ET    DU    IfICKEL.       521 

Dans  ces  divers  essais,  la  liqueur  ne  précipite  plus  par 
Facide  sulfhydrique  après  l'action  électroly tique, 

E.  Plomb  uni  à  d'autres  substances,  —  Dans  le  cha- 
pitre où  l'on  traitera  du  cuivre,  on  apprendra  à  séparer  le 
plomb  de  ce  métal. 

Les  essais  suivants  montrent  que  Ton  peut  déterminer 
de  petites  quantités  de  plomb  en  présence  des  métaux 
étrangers.  L'action  était  de  2  heures  et  obtenue  avec  un 
élément  Bunsen  : 


Sels  étrangers 

Plomb 

Plomb  pesé. 

0^,200. 

État  de  la  liqueur. 

calculé . 

X 

o,oro 

Azotate  de  nickel 

q.q.  gouttes  ac.  azot. 

0,0Ï0 

XI 

0,010 

»        d'alumine 

■  » 

0,0095 

XII 

o,o5o 

M        de  zinc . . 

A- 

0 , 0495 

XIII . . . 

0,010 

»        de  chaux 

tt 

0,0095 

XIV. . . . 

0,010 

de  bar V  te 

m 

u 

0,0095 

À.V  .  «  •  . 

0,01 i5 

»        de  strontiane 

2°*'ac.  azotique. 

0,011 

XVI. . . . 

0,010 

»        de  magnésie 

i«5 

0,010 

XVII. . . 

o,oio5 

»        de  soude 

a              V 

o,oio5 

XVIII .  . 

0,010 

»        de  potasse 

*>              t> 

0,010 

xVlJv*  <   .  * 

0,010 

Sel  de  chrome  en  excès 

»•              » 

o,oio5 

JvJV.    •  .  •  • 

o,oio5 

o«%24o  KO,  AsO* 

i>              u 

o,oio5 

XXI .  . . 

o,oii5 

o'^Sôo  azot.  d'urane 

i>             » 

o,oii3 

xxn... 

o,oi3 

o«',475  azotate  de  cadra. 

2^^^  ac.  azot. 

o,oi3 

XXIII . . 

0,010 

o^^oioFe 

i«<^       » 

0,0098 

XXIV.. . 

0 , oo55 

o«',oi2  Fe 

2**^       « 

o,oo58 

XXV... 

0,0195 

o«',oi5Fe  (un  élém.  Leclanché]  2*^*=     » 

0,01943 

Si  la  liqueur  n'est  pas  très-acide  dans  le  cas  du  plomb 
mélangé  au  fer,  il  se  sépare  au  pôle  positif  du  bioxyde 
de  plomb  contenant  un  peu  d'oxyde  de  |fer.  U  en  est  de 
même  pour  le  plomb  en  présence  du  cadmium,  du  stron- 
tium et  du  cobalt. 

XXV  ^/x.  0,010     o*', 200  azotate  de  cobalt 2*^^  ac.  azot.     o,oio3 

F.  Plomb  et  argent.  —  La  séparation  s'opère  sans  diffi- 
culté, parce  que  l'argent  se  dépose  au  pôle  négatif. 


52a 


RICHE.    DOSAGE    DU    MIHGÀIIESB, 


Argent  dans' 

nitrate  d'ar- 

Acide 

Plomb 

Argent 

' 

Plomb  pesé. 

gent  titré. 

azotique. 

calculé. 

pesé. 

XXVI... 

0,200 

0, 00882 

2*^<= 

0,199 

0 , oo385 

XXVII . . 

0,02l5 

0,019 

,CC 

0,021 3 

0,019 

XXVIII.. 

o,oio5 

0,0241 

,cc 

0,0108 

0 , 0245 

XXIX... 

0,0022 

0,894 

» 

0,0020 

Le  premier  essai  a  duré  quatre  heures  et  les  autres  deux 
heures.  On  opérait  à  chaud. 

Ou  a  fait  quelques  essais  sur  des  sels  organiques  de 
plomb;  je  les  résume  brièvement. 

XXX.  De  l'acétate  de  plomb  additionné  d'acide  acé- 
tique concentré  donne,  avec  un  élément  à  chaud  ou  à  froid, 
du  bioxyde  de  plomb  au  pôle  positif  et  du  plomb  métallique 
au  pôle  négatif.  C'est  l'expérience  primitive  de  Becquerel. 

XXXI.  Du  formiate  de  plomb  en  dissolution  dans 
l'eau  chaude  donne  des  traces  de  bioxyde  au  pôle  positif  et 
du  plomb  non  adhérent  au  pôle  négatif.  Il  se  dégage  de 
nombreuses  bulles  de  gaz  contenant  de  Thydrogène  et  de 
l'acide  carbonique. 

XXXII.  Si  l'on  ajoute  de  Tacide  oxalique  dans  une  so- 
lution d'azotate  de  plomb  et  qu'on  la  soumette  au  courant, 
il  ne  se  dépose  pas  de  bioxyde  de  plomb.  06^^,01 1  de  plomb 
ont  été  dissous  dans  quelques  gouttes  d'acide  azotique;  on 
ajoute  un  excès  d'acide  oxalique  et  l'on  expose  la  liqueur  au 
courant  d'un  élément  pendant  quarante  minutes.  Le  pôle 
négatif  porte  un  dépôt  adhérent  et  très-beau  de  plomb  mé- 
tallique pesant  0^*^,0105.  Les  bulles  nombreuses  qui  se 
dégagent  sans  cesse  rendent  difficile  une  détermination 
quantitative. 

Deux  éléments  Marié-Davy  sont  très-convenables  pour 
le  dosage  du  plomb. 


;  Acide  Durée 

Plomb  pesé,  azotique.      de  l'expérience. 

XXXm..     o8',ioo        2"  4^vers8o\ 

XXXIV..     2«^O025      5"      :nuit  cm"  à  fpoid. 


Plomb  calculé. 

entre  o ,  0995  et  o ,  10 
2,0025 


DU    PLOMB,    DU    CUIVRE,    DU    ZIWC    ET    DU    IflCKEL.       6a3 

Avec  deux  éléments  Bunsen  on  obtient  de  mauvais  ré- 
sultats, parce  qu'il  se  porte  du  plomb  non  adhérent  au  pôle 
négatif. 

De  même  qu'on  verra  plus  loin  que  j'ai  appliqué  cette 
méthode  si  simple  de  l'électrolyse  à  la  recherche  directe 
du  cuivre*  dans  le  vinaigre  et  dans  diverses  substances 
prises  à  Tinlérieur  du  corps  comme  aliments  ou  comme 
médicaments,  j'ai  trouvé  à  son  aide  du  plomb  dans  deux 
vins,  dans  deux  échantillons  de  sous-nitrate  de  bis- 
muth, dans  de  l'oxyde  d'antimoine  et  dans  de  l'oxyde  de 
fer. 

On  m'apprend  qu'hier  M.  Carnot,  ingénieur  des  mines, 
a  observé  la  présence  du  plomb  dans  un  grand  nombre 
d'échantillons  de  sous-nitrate  de  bismuth  des  pharmacies. 
Je  désire,  par  ces  mots  me  laisser  le  droit  de  continuer  mes 
recherches  dans  cette  voie. 

Je  m'occupe  également  de  la  précipitation  du  mercure 
par  la  pile.  Ce  métal  se  dépose  sous  l'influence  d'un  élé- 
ment Leclanché  au  pôle  négatif,  et  le  cuivre,  le  zinc,  le 
nickel,  les  sels  alcalins  et  al  cal  ino- terreux  restent  dans  la 
liqueur.  Quant  au  plomb  et  au  manganèse,  ils  se  séparent 
au  pôle  positif. 

J'ai  enfin  commencé  des  recherches  sur  le  dosage  de 
l'arsenic  dont  on  trouve  ordinairement  de  faibles  propor- 
tions dans  les  laitons  et  dans  le  sous-nitrate  de  bismuth. 
Il  se  précipite  sous  l'influence  d'un  élément  Leclanché, 
tandis  que  le  cuivre,  le  nickel,  le  zinc  et  les  autres  métaux 
qui  se  portent  comme  lui  au  pôle  négatif  ne  se  déposent 
pas  dans  ces  conditions.  Le  bismuth  se  précipite  au  pôle 
négatif  avec  un  élément  Bunsen. 

III.  —  Cuivre. 

Le  cuivré  n'est  déterminé  par  l'électrolyse  que  dans  un 
petit  nombre  de  circonstances,   malgré  les   publicatioBS 


5a4  RICHE. DOSAGE    DU    MÀNGAlfESE, 

très-intéressantes  faites  sur  ce  sujet  par  M.  Soret('), 
M.  Lecoq  de  Boisbaudran  ('),  M.  le  Directeur  des  tra- 
vaux chimiques  des  usines  du  Mansfeld(')  et  M.  Herpin, 
qui  démontrent  que  ce  mode  de  dosage  est  susceptible 
d'une  très-grande  exactitude. 

La  principale  cause  de  cette  résistance  est  la  nécessité 
reconnue  par  MM.  Lecoq  de  Boisbaudran  et  Herpin  d'o- 
pérer en  liqueur  sulfurique.  En  effet,  dans  la  majeure 
partie  des  recherches  métallurgiques  ou  légales,  la  matière 
est  en  solution  nitrique,  et  il  faut  Tévaporer,  calciner  le 
résidu  avec  de  Tacidc  sulfurique  :  ce  qui  constitue  une 
opération  longue,  délicate,  parce  qu  elle  expose  à  des 
pertes  par  projection  de  matière,  et  désagréables  par  les 
vapeurs  acres  qu'elle  dégage. 

Dans  les  usines  du  Mansfeld  on  opère  en  liqueur  ni- 
trique, mais  avec  un  courant  électrique  fort  qui  exige 
l'emploi  de  batteries  de  grandes  dimensions,  et  alors  le 
métal  est  peu  adhérent.  Si  cette  installation  est  réalisable 
dans  une  usine  où  Ton  fait  de  nombreux  essais,  elle  est 
trop  coûteuse,  trop  embarrassante  pour  l'introduire  dans 
un  laboratoire  ordinaire.  L'opération  a  Finconvénient,  en 
outre,  d'exiger  douze  heures. 

L'emploi  de  la  liqueur  sulfurique  est  beaucoup  plus 
simple.  M.  Lecoq  de  Boisbaudran  se  sert  de  trois  éléments 
Bunsen  faiblement  chargés.  M.  Herpin  fait  usage  d'un 
seul  élément  Bunsen  chargé  dans  les  conditions  ordinaires. 
Cette  manière  d'opérer  offre  Tinconvénient  d'une  grande 
lenteur  lorsqu'on  se  propose  de  faire  un  dosage  rigoureux, 
parce  que  les  dernières  traces  se  séparent  difficilement. 

Le  procédé  que  j'emploie  diffère  des  précédents  en  pe 
qu'on  opère  avec  autant  d'avantages  en  liqueur  nitrique 


(*)  SoBET,  jinnales  de  Chimie  et  de  Physique,  t.  XXXH. 
(')  Lecoq  de  Boisbaudran,  Bulletin  de  la  Société  chimique,  t.  VU»  p.  4^> 
(')  Usines  du  Mansfeld  et  Herpin.  —  Bulletin  de  la  Société  d^Encoura^ 
gement,  novembre  1874. 


DU   PLOMB,    DU    CUITRE,    DU    ZINC    ET    DU    NICKEL.       5a5 

qu'en  liqueur  sulfurique,  et  quW  fait  intervenir  une  tem- 
pérature de  60  k  90  degrés  qui  permet  d'activer  la  préci- 
pitation et  d'enlever  les  dernières  traces  de  cuivre  dans  la 
liqueur. 

On  trouvera  aussi  la  description  de  quelques  essais  qui 
ont  été  réalisés  avec  succès  dans  une  liqueur  ammoniacale. 
L'élecirolyse  peut  être  appliquée  à  une  solution  étendue 
renfermant  de  l'acide  chlorliydrîque  et  des  chlorures, 
mais  il  faut  employer  un  courant  faible  qu'on  obtient  en 
éloignant  les  deux  pôles  d'un  petit  élément  Bunsen.  Le 
dépôt  est  mat,  peu  adhérent,  et  ce  moyen  n'est  pas  à  re- 
commander. Lorsque  la  liqueur  est  chlorhydrique  ou  con- 
tient de  l'eau  régale,  il  faut,  soit  la  ramener  à  être 
sulfurîque  ou  nitrique,  soit  la  rendre  ammoniacale. 

G.  Cuwre  seul.  —  On  évapore  presque  à  sec  la  solution 
nitrique  ou  sulfurique,  on  la  reprend  par  l'eau  et  on  la 
soumet  à  l'action  d'un  élément  Bunsen  vers  60  à  90  degrés. 
Le  cuivre  se  sépare  très-rapidement  sous  forme  d'un  enduit 
très-adhérent,  d'un  beau  rouge,  que  l'expert  peut  pro- 
duire dans  les  débats  judiciaires.  On  obtient  rigoureuse- 
ment le  cuivre  dissous  si  l'on  a. soin  (la  précaution  est 
nécessaire)  de  retirer  le  cône  sans  arrêter  préalablement  le 
courant  et  de  le  plonger  aussitôt  dans  l'eau  distillée  5  puis 
on  le  sèche  vers  5o  à  60  degrés  et  on  le  pèse.  En  opérant 
ainsi,  la  liqueur  ne  se  colore  pas  lorsqu'on  y  verse  du 
ferrocyanure  de  potassium. 

Voici  quelques  résultats  synthétiques: 


Cuivre 

Cuivre 

introduit. 

Détails  de  rexpérience. 

Temps. 

trouvé. 

er 

h 

^'" 

I 

o,oo5 

(jq.  goût.  ac.  azot. 

I 

0,000 

II. .. 

o,o5o 

M                                    l> 

o,o5o 

III. . 

o,25o 

i",5ac.  azot. 

i.3o  ™ 

o,25o 

IV... 

o,5oo 

2^<=            » 

2 

0,4997 

V.... 

0,700 

y 

2.3o 

0,700 

VI... 

1 ,000 

4'''' 

3.3o 

o»9995 

Rion  par  lo  ferro> 
cyanure  dans  la 
liqueur. 


5a6  RIGHB.    DOSAGE  DU  màhgànese. 

En  opérant  à  la  température  ordinaire,  o8',a5o  de  cuivre 
n^étaient  pas  précipités  entièrement  après  neuf  heures. 

VIL  On  a  préparé  une  liqueur  titrée  dont  26  centimètres 
cubes  contenaient  oS'',oooi  de  cuivre  et  on  les  a  soumis  à 
la  pile  :  il  s'est  déposé  sur  le  cône  un  voile  de  cuivre  très- 
nef,  o^"^, 00002  de  cuivre  s'aperçoivent  sans  hésitation  à  la 
formation  d'une  légère  auréole  rouge. 

H.  CuiWe  en  présence  de  corps  étrangers.  —  Les 
synthèses  dont  l'énumération  détaillée  suit  permettent 
d'affirmer  que  la  précipitation  totale  du  cuivre  réussit  en 
présence  de  la  plupart  des  corps  avec  lesquels  il  peut  être 
mélangé,  alors  même  que  le  cuivre  est  en  très-petite  quan- 
tité, et  ces  substances  en  forte  proportion  : 


Cuivre 

introduit. 

VIII.... 

o,oo5 

IX 

o,oo5 

Jv  •    •     •   .    . 

0,002 

XT 

0,020 

XII.... 

0,020 

XIII .  . . 

0,020 

XIV.  .  . 

0,020 

XV 

0,021 . 

XVI . . . 

(  o,oi3 
(  0,020 

XVII. . . 

0,002 

XVIII . . 

o,2oo5 

XIX .  . . 

O,O0l5 

XX 

o,oi3 

XX  bis. 

0,  io4 

Détails  de  rexpérience. 


gr 


0 ,  200  Fe  un  excès  d'ac.  azot. 

o ,  5oo  Zn  2*^''  acide  azotique,  i  heure 

1 ,5oo  CaAzO*'  »  »  » 

o,5oo  BaAzO*  qq.  goût.  d*ac. 

o,5oo  IVIgAzO^*  » 

o,5oo  AP3(AzO«.)     « 

o,5ooNaAzO'  *> 

o,5oo  KAzO® 

0,600  Azot.  d'urane 
o,5oo  NiAzO* 

PbAzO'en  gr.  excès 

o6%oio5Pb 

28^,Pb  la  nuîtent.  à  froid 

0,600  CdAzO«  I  heure  à  chaud 

o,4oo  borate  de  soude     2  heures  à  chaud 


0*^*^,5  acide 
2**  3o"* 


Cuivre 
trouvé. 

0,0045 

o,oo5 


0,002 


0,020 

0,0205 

0,020 

0,0205 

0,021 

o,oi3 
0,020 

0,002 

0,201 

o,ooi5 

o,oi3 

o, io35 


On  peut  également  doser  une  forte  proportion  de  cuivre 
en  présence  d'une  petite  quantité  de  corps  étrangers. 


DU    PLOMB9    DV    CVIVaE,    DU    zinc    ET   su    ZflCKEL.       5^7 


XXI... 

0 , 2005 

o,oio5  Pb 

0,201 

XXII.. 

o,aoo 

0,010  azot.  d'iirane 

0,200 

XXIII . 

cr,3oo5 

traces  de  cadmium 

o,3oo 

I.  Cuistre  et  plomb.  —  On  met  en  communication  le 
cône  avec  le  pôle  négatif;  le  cuivre  seul  s'y  porte.  Quant 
au  plomb,  il  se  dépose  sur  le  creuset  et  on  le  sépare  de  la 
liqueur  comme  il  a  été  dît  [voir  ^p.  5 19,  Analyse  des 
bronzes  et  laitons) . 


Plomb 

Cuivre 

Plomb 

•   Cuivre 

iatroduit. 

introduit. 

Acidité. 

Temps. 

trouvé. 

trouvé. 

0,200 

0,100 

i"AzO«H 

h    m 

4.3o  à  chaud 

0,19925 

0,100 

0,002 

i  ,000 

excès 

4*3o  à  chaud 

0 , 002 I 

0^9995 

2  ,  ooo5 

o,ooi5 

5cc 

toute  la  nuit 

'»9998 

0,001 5 

J.  Cuivre  et  manganèse,  —  On  soumet  d'abord  la 
liqueur  à  Faction  d'un  élément  \  le  cuivre  se  dépose  sur  le 
cône  négatif  et  des  flocons  de  bioxyde  de  manganèse  flot- 
tent dans  la  liqueur  et  se  déposent  sur  le  creuset.  Lorsque 
le  cuivre  est  entièrement  précipité,  on  injecte  sur  le  cône 
de  l'eau  distillée  qui  enlève  sans  difficulté  la  totalité  des 
flocons  de  bioxyde,  ainsi  que  la  liqueur  contenant  du  man- 
ganèse, puis  on  continue  le  courant  avec  deux  éléments. 
Le  dosage  du  cuivre  est  rigoureux.  Pour  celui  du  manga- 
nèse, on  se  reportera  aux  précautions  indiquées  (p.  5i3). 


Matières  employées. 


Matières  obtenues. 


«r 


YYTi7     (  o>5oo  Cu     o,43oMn*0*     o,4995Cu  0,4295  Mn*0* 

0,200  Cu     0,700  Mn'O*     0,1995  à  o*', 200       0,7492 

K.  CuiVre  en  présence  du  fer,  —  Le  dosage  du  cuivre 
présente  une  difficulté  dont  il  faut  être  averti,  surtout 
quand  on  opère  en  liqueur  nitrique.  Si  l'on  maintient  très- 
longtemps  au  voisinage  de  100  degrés  la  température  du 
bain-marie,  la  liqueur  brunit  et  dépose  sur  le  cône  avec  le 


528  mCHB.    DOSAGE   DU    MAUGÀNÈSE, 

cuivre  des  hydrates  ou  des  sous-seis  de  fer  qui  se  déta- 
chent diflBcilement  ou  même  imparfaitement,  et  le  cuivre 
présente  une  surcharge  dont  on  est  averti  par  la  teinte 
brune  du  dépôt,  ou  par  des  plaques  foncées  qu  on  aperçoit 
de  côté  et  d'autre  sur  le  cuivre. 

On  évitera  ce  danger  en  ne  chauffant  pas  le  bain  au- 
dessus  de  70  degrés. 


Matières  < 

employées. 

Détails  de  l'expérience. 

Matière 
obtenue. 

A.Jx.J'k.  t  .   , 

gr 

o,ioo5  Cu 

0,020  Fe 

ce 

I  AzO«H 

h 
2 

gr 
0,  100: 

XXVI .   . 

0,100    Cu 

0, 100  Fe 

2     • 

2 

0,100 

XXVII.  . 

0, I025  Cu 

o,5oo  Fe 

4  • 

2 

0,102 

Cet  accident  est  beaucoup  moins  à  redouter  en  liqueur 
sulfurique. 

XXVII  o8'-,268  Cu     26',5oo  Fe  S0«  4-  7UO       2«»         o«%268 

On  a  encore  résolu  cette  difficulté  en  ajoutant  à  la 
liqueur  un  grand  excès  d'ammoniaque  et  en  soumettant  à 
Faction  de  la  pile  la  solution  bleue  tenant  l'oxyde  de  fer  en 
suspension. 

XXIX.  On  a  pesé  o^'^jogS  Cu  et  oS'',5ooFe  ,  on  les  a 
dissous  dans  Facide  azotique,  on  a  sursaturé  la  liqueur  par 
Fammoniaque,  et  on  Fa  abondonnée  toute  une  nuit  à  Fac- 
tion d'un  élément.  Le  lendemain  le  cuivre  était  rigoureu- 
sement précipité  et  pesait  oS',095. 

XXX.  oS'',946  de  cuivre  seul  ont  été  précipités  exacte- 
ment dans  les  mêmes  circonstances. 

02*^,500  de  cuivre  ont  été  précipités  exactement  en  six 
ou  sept  heures. 

Pn  réaliserait  la  séparation  du  cuivre  en  liqueur  ammo- 
niacale beaucoup  plus  rapidement  avec  deux  éléments  Bun- 
sen :  o^'^jSoo  ont  été  précipités  en  quarante  minutes,  et 
t  gramme  en  une  heure.  Seulement  le  dépôt  est  brun,  au 
lieu  de  présenter  la  belle  teinte  rouge  du  cuivre,  et  il  se 


DU    PLOMB,    DU    CUIVRE,    DU    ZINC    ET    DU    ZflCKBL.       5^9 

trouve  des  points  où  Tadhérence  est  faible,  de  sorte  qu^il 
e&t  à  craindre  que  pendant  la  dessiccation  il  ne  se  détache 
de  la  poudre  métallique. 

La  présence  d'un  grand  excès  de  sels  ammoniacaux  ne 
paraît  pas  retarder  Faction  • 

Le  cuivre  peut  être  également  précipité  avec  exactitude 
dans  une  liqueur  ammoniacale  avec  un  élément  en  présence 
du  zinc. 

XXXL  oS',g5o  Cu  ont  été  précipités  sans  qu'il  en  restât 
dans  la  liqueur. 

L.  Cuivre  et  argent.  —  Si  l'argent  est  en  proportion 
notable,  on  commence  parle  précipiter  à  l'état  de  chlorure 
en  suivant  la  méthode  ordinaire,  puis  on  sursature  la 
liqueur  par  l'ammoniaque,  et  on  la  soumet  en  cet  état  au 
courant  d'un  élément  Bunsen,  comme  il  vient  d'être  dit 
dans  le  paragraphe  précédent. 

Si  l'argent  se  trouve  en  faible  proportion  dans  la  liqueur, 
—  s'il  ne  dépasse  pas  0^^^,0105  —  on  peut  le  précipiter  par 
la  pile  sans  toucher  au  cuivre  en  employant  un  seul 
élément  Lechanché  petit  modèle.  L'argent  déposé  sur  le 
cône  négatif  est  pesé  ;  le  cône  est  passé  à  l'acide  nitrique 
et  reporté  dans  le  bain  électrolysé  cette  fois  par  un  élé- 
ment Bunsen  qui  précipitera  le  cuivre.  Cette  méthode  peut 
être  employée  avec  succès  pour  l'essai  des  cuivres  argenti- 
fères. 

M.  On  peut  déterminer  le  cuivre  dans  des  liqueurs 
autres  que  nitriques,  sulfuriques,  chlorhydriques  ou  am- 
moniacales. 

1®  Acide  acétique.  —  oS',494  d'acétate  de  cuivre  addi- 
tionnés de  quelques  gouttes  d'acide  acétique  ont  été  soumis 
au  courant  de  un  élément  à  chaud  pendant  trois  heures.  Le 
cuivre  s'est  déposé  très-beau,  très-adhérent. 

XXXII  i ,     Résultat  pratique ...   o'' ,  1 58     Pas  de  cuivre  dans  la 

»       théorique        o«'',i575      liqueur  théorique  • 
Ann.  de  Chim,  et  de  Phys.,  5«  série,  t.  XIII.  (Avril  1878.)  34 


530  mCHB.    —   DOSAGB  DO    MiLNGA»tSB, 

Recherche  du  cidi^re  dans  les  vinaigres  commerciaux. 
—  L'attention  a  été  récemment  appelée  par  M,  Pasteur 
sur  la  présence  du  cuivre  dans  les  conserves  de  légumes 
remarquables  pakriniensité  de  leur  teinte  verte. 

Ayant  eu  roccasî>h^  de  faire  dans  ces  temps  derniers  des  - 
observations  du  même  tordre  sur  un  produit  alimentaire  de 
consommation  journalière,   le  vinaigre,  j'ai  appliqué  à  la 
recherche  du  cuivre  le  procédé  électrolyiique  dont  nous 
venons  de  parler.  "-^tî» 

Le  premier  vinaigre  sur  lequel  Oi!^^  porte   mes 
m'avait  été  envoyé  de  l'est  de  la  France/  ^^^    ^,^^ 
l'analyse  complète,  parce  que  l'on  supposai  ^  î^  * 
maît  des  substances  toxiques.  Après  m'ètre  asc**"    .  ^ 

plomb  ne  s'y  rencontrait  pas,  je  recherchai  lecîl  -       '     ' 

•  I  •      •.         j    j         '  sur  sa 

comme  un  premier  examen  ne  laissait  pas  de  doute 

présence,  je  m'attachai  à  le  doser  avec  soin,  et  je  consc   / 

que  ce  vinaigre  en  contenait  de  27  à  3o  milligrammes  p. 

litre,  soit  environ  90  milligrammes  d'acétate  de  ce  métal .^^ 

Comme,  à  ma  connaissance  du  moins,  on  n'a  pas  signalé 
la  présence  du  cuivre  dans  les  vinaigres  d'alcool  ou  de  vin, 
et  que  l'on  conseille  même,  pour  reconnaître  si  du  vinaigre 
ne  renferme  pas  de  l'acide  acétique  obtenu  par  distillation 
des  acétates  de  cuivre,  de  rechercher  dans  le  liquide  la 
présence  de  ce  métal,  parce  qu'il  est  le  plus  souvent  entraîné 
de  petites  quantités  d'acétate  de  cuivre  dans  la  distillation 
de  ces  sels,  je  (is  prendre  du  vinaigre  chez  douze  débitants 
de  Paris,  habitant  des  quartiers  différents,  et  j'obtins  les 
résultats  suivants  : 

Dans  trois  d'eux,  il  n'existait  pas  de  cuivre. 

Dans  deux,  il  n'y  en  avait  que  des  traces. 

Dans  les  sept  autres,  il  s'en  trouvait  une  proportion 
variant  de  5  milligrammes  à  i5  milligrammes  par  litre. 

Tous  ces  vinaigres  étaient  vendus  sous  la  désignation  de 
vinaigres  de  vin  ou  d*alcool  ;  l'analyse  m'a  montré  qu'un 
des  échantillons  cuivreux  était  du  vinaigre  de  vin  et  le  nom 


DU    PLOMB,    DO    CUIVRE,    DU    ZINC   ET   DU    KICKEL.       53 1 

du  fournisseur  m'a  prouvé  pour  deux  autres  qu'ils  étaient 
formés  de  vinaigre  d'alcool. 

Je  m'adressai  directement  au  fabricant  de  vinaigre  d'al- 
cool, de  la  maison  duquel  sortait  un  des  vinaigres  cuivreux, 
et  je  pris  moi-même  des  échantillons  au  sortir  des  foudres 
dans  lesquels  il  est  soutiré  pour  la  livraison  au  détail  : 
l'analyse  n'y  décela  pas  traces  de  cuivre. 

Des  renseignements  que  j'ai  pris  chez  divers  marchands 
en  détail  il  résulte  que  le  cuivre  qui  se  trouve  dans  cer- 
tains vinaigres  provient  de  la  mauvaise  volonté  ou  de  la 
négligence  des  débitants,  qui  contreviennent  aux  règle- 
ments de  police  en  substituant  des  robinets  de  cuivre  aux 
cannelles  en  bois,  et  des  entonnoirs  en  étain,  munis  de 
douille  en  cuivre,  aux  entonnoirs  en  bois  ou  en  gutta- 
percha. 

L'essai  suivant  démontre  la  rapidité  avec  laquelle  le 
vinaigre  attaque  le  cuivre.  On  a  introduit  4  litres  de  ce 
liquide  dans  un  flacon  en  verre  muni  d'un  très-petit  robi- 
net en  laiton;  puis,  après  avoir  mouillé  l'intérieur  du 
robinet  en  faisant  couler  quelques  gouttes  de  vinaigre,  on 
a  soutiré  le  liquide  après  deux  jours  :  les  premières  por- 
tions écoulées  renfermaient  20  milligrammes  de  cuivre  par 
litre,  et  le  reste  en  contenait  i5  milligrammes.  La  liqueur 
a  été  versée  plusieurs  fois  dans  le  flacon  et  soutirée  :  après 
douze  jours,  on  y  a  constaté  60  milligrammes  de  cuivre 
par  litre. 

Ce  métal  a  été  signalé  depuis  longtemps  dans  certains 
condiments  préparés  au  vinaigre,  et  Ton  attribue  exclusi- 
vement sa  présence  aux  vases  dans  lesquels  on  les  fabrique. 
L'origine  doit  en  être  souvent  le  vinaigre  où  ils  sont  con- 
servés dans  des  bocaux  en  verre.  Ainsi  des  cornichons  ne 
contenant  pas  de  cuivre  ont  été  tenus  immergés  pendant 
huit  jours  dans  du  vinaigre  cuivreux  :  au  bout  de  ce  temps, 
les  cornichons  renfermaient  10  centigrammes  de  cuivre 
par  kilogramme,  tandis  que  le  vinaigre  n'en  contenait  que 

34. 


53a  miCHK.  —  dosagb  du  mahgabèsb, 

4  centigrammes;  par  conséquent,  le  cuivre  s'est  sëparé 
du  liquide  où  il  était  en  dissolution  pour  se  fixer  à  Tétat 
insoluble  sur  certains  principes  organiques.  Le  cuivre 
provenait  donc,  non  pas  de  la  préparation,  mais  du  mode 
de  conservation  des  cornicbons,  et  le  fabricant  peut,  dans 
certains  cas,  ne  pas  être  répréhensible  lorsqu'on  trouve  du 
cuivre  dans  ses  produits. 

Pour  doser  le  cuivre  dans  le  vinaigre  ou  dans  un  liquide 
analogue,  il  est  inutile  de  Tévaporer  à  sec  et  d'incinérer  le 
résidu  pour  le  reprendre  ensuite  par  de  l'eau  acide.  Au 
début  de  ces  essais^,  je  soumettais  directement  le  vinaigre 
à  la  pile,  et  si,  ce  qui  est  fréquent,  le  dépôt  était  noirâtre, 
je  le  dissolvais  sur  la  lame  de  platine  avec  quelques  gouttes 
d'acide  nitrique,  puis,  après  avoir  évaporé  cette  liqueur, 
je  redissolvais  le  résidu  dans  l'eau,  et  j^exposais  la  solution 
nouvelle  au  courant  qui  précipite  le  cuivre  à  l'état  de  pu- 
reté. J'ai  reconnu  ensuite  que  ce  double  traitement  était 
inutile,  si  Ton  a  soin  d'ajouter  au  vinaigre  quelques  gouttes 
d'acide  nitrique  avant  de  le  soumettre  à  la  pile.  Le  cuivre 
se  dépose  adhérent,  avec  sa  couleur  caractéristique,  et 
l'opération  complète  exige  une  demi-heure  au  plus  en  opé- 
rant sur  75  à  100  centimètres  cubes  de  vinaigre.  L'opéra- 
tion réussit  tout  aussi  bien  avec  le  vin,  la  bière,  le  cidre, 
l'eau-de-vîe,  l'eau  sucrée,  etc. 

2°  Acide  phosphorique.  —  Du  phosphate  de  cuivre  a 
été  dissous  par  l'acide  azotique,  puis  soumis  au  courant 
d^un  élément  à  chaud  pendant  une  heure.  Le  cuivre  pesait 

08^,024. 

Du  phosphate  de  cuivre  a  été  dissous  dans  l'acide  pbos- 
phorique  étendu.  Le  cuivre  pesait  0^^,026. 

Le  métal  était  très-beau  et  très-adhérent,  et  les  liqueurs 
ne  se  coloraient  pas  en  présence  du  ferrocyanure.  L^acide 
phosphorique  est  ensuite  dosé  dans  les  liqueurs  sans  diffi- 
culté. 

3°  Acide  tartrique.  —  Du  tartrate  de  cuivre  a  été  dis- 


DU    PLOMB,    DU    GUITRE,    DU    ZllfC   ET   DU    HICKEL.       533 

SOUS  dans  quelques  gouttes  d'acide  azotique  et  soumis  au 
courant  d'un  élément  pendant  une  heure  environ.  Le  cuivre 
très-net  pesait  08*^,020,  et  la  liqueur  ne  donnait  rien  par 
le  ferrocyanure. 

N.  Le  dosage  du  cuivre  est  très-exact  avec  deux  éléments 
Marié-Davy  : 


Cuivre 

Cuivre 

employé. 

Temps. 

Détails  de  \\ 

îxpépience. 

trouvé. 

XXXII . . 

fr 

0,004 

h     m 
0.20 

2  élém. 

de 

70 

à  85» 

0,004 

XXXIII . 

0, io33 

i.3o 

» 

o,io3 

XXXIV. 

o,^5i 

H 

0 

0 , 2607 

XXXV . . 

o,5o2 

2.1 5 

M 

0 , 5o I 5 

XXXVI . 

0,761 

3.3o 

» 

0,7607 

Un  seul  dosage  a  été  fait  avec  la  pile  au  bicliromate  de 
potasse  :  le  résultat  a  été  bon,  la  liqueur  était  ammonia- 
cale. 

Cuivre  employé.  Cuivre  trouvé. 

i«*',oo2  i«',ooi5  A  froid  toute  la  nuit. 

IV.  —  Zinc 

P.  Zinc  seul.  —  Lorsqu'on  soumet  au  courant  de  deux 
éléments  Bunsen  une  liqueur  tenant  du  zinc  en  dissolu- 
tion dans  l'acide  azotique,  puis  rendue  ammoniacale,  il 
se  forme  au  pôle  négatif  un  dépôt  de  zinc  métallique  qui 
se  détache  en  fragments  lorsqu'il  est  un  peu  abondant.  Ce 
n'est  qu'avec  une  proportion  très-faible  de  zinc  qu'on 
peut  espérer  faire  un  bon  dosage. 

I.  o"%oio  de  zinc  ont  été  dissous  comme  je  viens  de  le  dire 
et  soumis  à  la  pile.  On  a  obtenu  sur  le  cône  négatif  o"%oio  de 
zinc,  et  la  liqueur  ne  précipitait  pas  par  le  sulfhydrate  d'ammo- 
niaque. 

Si  l'on  soumet  à  l'action  des  deux  éléments  la  liqueur  ni- 


534  EICHB.    —   D08A6B   DG    MAHGAJlàSB, 

trique  sans  la  sursaturer  par  Fainmoniaque,  il  ne  se  forme 
pas  de  dépôt  dans  le  cas  où  la  liqueur  est  très-acide,  et 
on  l'obtient  au  bout  d'un  certain  temps,  qui  est  variable, 
lorsque  la  solution  est  peu  acide.  On  arrive  aussi,  dans  ces 
conditions,  à  des  déterminations  exactes  si  la  proportion 
de  zinc  est  faible. 

Zinc  Conditions  Zinc 

employé.  Acidité.  de  l'expérience.       trouTé. 

gr  gr 

IT.       0,020       4  ^  ^  go"^'^  ^2^*^^     2  élém.  à  froid       0,021 
III.      0,0225  »  »  0,023 

lY.      0,020  »  2  élém.  à  chaud     0,020 

Le  dosage  du  zinc,  dans  ces  conditions,  n^est  donc  pos- 
sible que  sur  des  poids  très-faibles,  et  il  n'est  pas  pratique, 
par  suîtederirrégularilé  et  de  la  lenteur  du  dépôt.  J'ai  été 
fort  longtemps  avant  de  me  rendre  compte  de  leur  cause, 
qui  est  cependant  fort  simple.  L'hydrogène  produit  dans 
la  solution  nitrique  soumise  à  l'électrolyse  commence  par 
réduire  Tacide  azotique  libre  ou  combiné,  et  le  zinc  n'est 
mis  en  liberté  que  quand  tout  Tacide  azotique  est  décom- 
posé; de  telle  sorte  que  Ton  retombe  sur  le  dosage  en  li- 
queur ammoniacale,  qui  fournit  du  métal  à  Tétat  de 
mousse  non  adhérente. 

Il  faut  donc  nécessairement  renoncer,  pour  le  dosage  du 
zinc,  à  l'emploi  de  liqueur  ammoniacale  ou  nitrique. 

On  obtient,  au  contraire,  des  résultats  d'une  grande  ri- 
gueur et  un  métal  très-adhérent  lorsqu'on  électrolyse  des 
solutions  sulfuriques,  et  voici  la  manière  dont  il  convient 
d'opérer  : 

On  dissout  le  zinc  dans  l'acide  azotique,  on  évapore  la 
liqueur  avec  un  excès  d'acide  sulfurique,  de  façon  à  chasser 
l'acide  azotique;  on  sature  par  l'ammoniaque,  et,  après 
avoir  ajouté  au  liquide  environ  5  grammes  de  sulfate 
d'ammoniaque,  on  l'acidulé  par  3  à  5  ou  6  gouttes  d'acide 
sulfurique. 


DU    PLOMB,    DU    CUIYKB,    DU    ZIJVG    ET   DU   KIGKEL.       535 

Cette  solution  est  soumise  à  Télectrolyse  avec  deux  élë-* 
ments  Bunsen.  Le  zinc  se  dépose  aussitôt  très-adhérent) 
d'un  blanc  bleuâtre.  Pour  que  l'opération  réussisse  parfai- 
tement, il  faut  ajouter  encore  vers  le  milieu  de  l'éleclro- 
lyse  4^5  grammes  de  sulfate  d^ammoniaque. 

On  peut  agir  à  la  température  ordinaire  en  entourant  le 
creuset  d'eau  froide,  ou  laisser  la  température  s'élever  na- 
turellement par  Faction  du  courant*,  mais  il  ne  faut  pas 
échauffer  la  liqueur  comme  pour  la  détermination  du  man- 
ganèse, du  plomb  et  du  cuivre. 

Il  est  nécessaire,  lorsque  la  quantité  dé  zinc  à  déposer 
est  un  peu  forte  ou  lorsqu'on  fait  des  dosages  rigoureux, 
de  saturer  par  Tammoniaque  la  liqueur  qui  a  fourni  le 
zinc,  del'aciduler  par  a  à  3  gouttes  d'acide  sulfurique  et  de 
la  soumettre  au  courant  une  seconde  fois  pendant  une 
demi-heure  à  une  heure. 

.Voici  quelques  résultats  synthétiques  pris  parmi  un  fort 
grand  nombre,  car  nous  avons  eu  la  plus  grande  peine  à 
déterminer  les  conditions  de  réussite  certaine  du  dosage 
du  zinc. 

Électrolyse  dans  un  vase  refroidi. 

Zinc  déposé  État 

Zinc  Durée  Zinc        dans  la  2^  élec-  de  la  liqueur 

introduit,  de  la  i'*  expérience.      trouvé.  trolyse.  après, 

jr  gr 

V o,o55  5  heures.  o,o55  rien  /    Rien  par  le 

VI 0,101  I»  o,ioi5  »  \       sulfhy- 

VII....  p,î20  »>  o,i9.o5  »  ]    (Irate  d'am- 

VIII...  0,161  »  0,161  »  (     moniaque* 

IX....  0,1 i5  4  heures.  0,1 i35  o,oqi  » 

X o,ii3  »  o,iii5  0,001  » 

XI....  0,1 5o5  »  0,1445  o,oo55  » 

Quand  on  abandonne  l'opération  à  elle-même  pendan 
la  nuit,  il   arrive  quelquefois,  le  sulfate  d'ammoniaque 
manquant   et   Tacide  sulfurique  étant    en    trop   grande 


536  ftICBE.    DOSAGE   DU   M1KGÂBÈ8B, 

aboudance  dans  la  liqueur,  que  le  dépôt  s'opère  mal  et 
disparait  par  places.  On  peut  obtenir  cependant  de  bons 
résultats. 


Temps 

Zinc  déposé 

État 

Zinc 

de  la  i'*  élec- 

Zinc 

pendant  la 

de  la  liqueu 

introduit. 

trolyse. 

trouvé. 

a»  électrolyse. 

après. 

XII... 

o , I 095 

la  nuit. 

fr 

0,109 

» 

(  Rien  par  h 

XIII.. 

0,1725 

i» 

0,1725 

» 

(  sulfhydratc 

XIV. . . 

0,164 

» 

o,i635 

o,oo5 

■ 

JikV  . .  •  • 

0,  i63 

» 

0,162 

0,001 

1» 

Électrolyse  dans  un  vase  non 

refroidi. 

XVI. . . 

0,007 

2   heures . 

0,007 

rien. 

» 

xvu.. 

0,107 

3  à  4  heures. 

0,1073 

■ 

a 

XVIII  . 

0,1117 

3  heures. 

0,109 

0,002 

M 

XIX... 

o,i3i 

» 

0 , I 3o5 

o,ooo5 

k 

^LA.  •  •  • 

0,262 

» 

0,260 

o,ooi5 

U 

XXI... 

o,4i85 

5  heures. 

0,4187 

o,ooo5 

è 
M 

XXII.. 

o,7385 

» 

0,7365 

0,002 

U 

XXÎII.. 

I ,2275 

4  heures. 

1,223 

0,004 

1> 

Dans  la  Communication  que  j'ai  faitesur  ce  sujet  à  TA- 
cadémie  des  Sciences  (séance  du  23  juillet  1877,  t.  VIU, 
p.  226),  j'ai  annoncé  que  ce  dosage  du  zinc  pouvait  s'o- 
pérer en  solution  sulfatée,  acidulée  par  l'acide  acétique. 
J'ai  reçu,  depuis  cette  époque,  un  travail  de  MM.  Parodi 
et  Mascazzîni  qui  recommandent  cette  méthode  sans 
donner  de  détails  sur  la  manière  d'opérer.  J'y  ai  renoncé, 
parce  qu  elle  est  plus  lente  et  qu'elle  est  d'une  exécution 
plus  difficile. 

L'acide  acétique  se  décomposant,  ainsi  que  Tacétate 
d'ammoniaque  qui  s'est  formé  par  la  saturation  de  l'am- 
moniaque, la  liqueur  s'enrichit  en  ammoniaque  qui,  ne 
rencontrant  pas  une  quantité  d'acide  sulfurique  suffisante 
pour  la  saturer ,  rend  la  liqueur  alcaline,  et  le  dépôt 
cesse  d'être  adhérent.  Si,  pour  une  raison  quelconque, 


DU    PLOMB,    DS    CtriTRBy    DU    tUHC    ET   DU    SICKEL.       53^ 

On  se  trouve  agir  en  liquide  acétique,  ou  évitera  cet  incon- 
vénient grave  en  saturant  la  liqueur  presque  complète- 
ment par  l'acide  sulfurique,  avant  de  Taciduler  par 
Tacide  acétique,  et  en  y  ajoutant  du  sulfate  d'ammo- 
niaque. Mais  on  comprendra  qu'il  est  plus  simple  et  plus 
rationnel  d'opérer  en  solution  sulfurique.  Néanmoins; 
voici  quelques  résultats  obtenus  dans  des  liqueurs  où,  le 
zinc  étant  à  Tétat  de  sulfate,  on  a  acidulé  par  l'acide  acé-  , 
tique  : 

Zinc  Temps 

employé,   de  Topération.  Acidité.  i*  dépôt.   3*  dépôt, 

gr  ^  fr 

XXIV. .     o ,  006     2  heures .     2**  acide  acétique .  o ,  oo55     rien. 

XXV. ..     0,02-0  >  acide  acétique  en  excès.         0,020 

XXVI..     0,076  •  »  •  0,074     o,ooi5 

Q.  Séparation  du  zinc  des  antres  métaux.  Zinc  et  ar^ 
gent.  —  Si,  comme  dans  certains  produits  de  métallurgie 
et  d'affinage  de  l'argent,  on  avait  du  zinc  contenant  moins 
de  0^^,010  d'argent  dans  la  prise  d'essai,  on  pourrait  le 
séparer  en  soumettant  la  liqueur  à  l'action  d'un  élément 
Leclanché.  L'argent  se  dépose  seul  sur  le  cône  négatif. 

Zinc  et  cuivre.  —  On  fait  passer  le  courant  d'un  élément 
Bunsen  dans  la  solution  sulfurique,  nitrique  ou  même 
ammoniacale.  Le  cuivre  se  dépose  seul  sur  le  pôle  négatif. 
On  rend  alors  la  liqueur  sulfurique,  si  elle  ne  Test  pas,  en 
opérant  comme  il  a  été  dit  plus  haut,  et  Ton  dose  le  zinc 
avec  deux  éléments. 

Zinc  et  plomb»  —  Dans  la  solution  nitrique  on  sépare 
le  plomb  comme  on  Ta  recommandé  ci-dessus,  avec  un  élé- 
ment Leclanché  ou  Bunsen,  et  l'on  dose  le  zinc  dans  la  li-^ 
queur  rendue  sulfurique  (p.  535). 

Zinc  et  fer.  -~*  Il  est  indispensable  de  commencer  par 
enlever  le  fer  de  la  liqueur  en  le  précipitant  par  l'ammo- 
..  niaque  \  on  dose  ensuite  le  zinc  par  la  pile. 

Zinc  et  manganèse.  —  On  fait  passer  le  courant  de  deux 


i 

s 

D 

le 
i- 
le 
te 


538  miCBB.    BOSIGB    DU    MABGAB^B, 

éléments  Bunsen  dans  la  liqueur  sulfurique  des  deux  mé- 
taux préparés  dans  les  conditions  nécessaires  pour  y  opé- 
rer le  dosage  du  zinc  (p.  535). 

Le  zinc  se  dépose  seul  au  pôle  n^atif,  il  est  très-adhé- 
rent. Le  bioxyde  de  manganèse  se  sépare  à  l'autre  pôle 
sous  forme  de  flocons  non  adhérents,  à  moins  que  la  dose 
de  manganèse  ne  soit  très-faible.  Quand  l'opération  est 
terminée,  on  retire  le  cône  comme  on  doit  toujours  le  faire, 
sans  arrêter  préalablement  le  courant,  on  le  lave  bien  et 
on  le  pèse  après  dessiccation.  (Pour  la  détermination  du 
manganèse  i;oir  p.  5 12) 

XXYII.  On  a  pris  o^*^,  io53  de  zinc  associé  à  du  manganèse 
en  excès,  on  a  obtenu  o*',  io5  Zn. 

XXVIII.  0*^,0935  ont  fourni  o^'ïOgS. 

Zinc  et  magnésie.  —  Le  dosage  du  zinc  réussit  bien  en 
ajoutant  quelques  gouttes  d'acide  de  plus  dans  la  liqueur. 

XXIX.  0*^,125  Zn,  mélangés  à  o*"^, 200  Mg  SO*,  ont  fourni 
o«',i255  Zn. 

XXX.  o«'',o4^,  Zn  mélangés  à  o^',2oo  Mg  SO*  ont  donné 
os',045  Zn,  et  il  ne  reste  pas  de  zinc  dans  la  liqueur. 

Si  le  dépôt  de  zinc  contenait  un  peu  de  magnésie,  on  le 
dissoudrait  dans  quelques  gouttes  d'acide  sulfurique  et  Pou 
recommencerait  la  précipitation  du  zinc  en  présence  du 
sulfate  d'ammoniaque. 

Zinc  et  sels  alcalins.  —  Les  sels  alcalins  ne  gênent  pas 
la  précipitation  du  zinc. 

XXXI.  o<'',o6i5  Zn,  additionnés  de  5  grammes  de  sulfate  al- 
calin, ont  donné  o>'',o62Zn^ 

En  appliquant  les  données  précédentes,  on  arrive  sans 
difficulté  à  déterminer  la  composition  des  laitons  et  des 
bronzes  par  cette  méthode. 


DU    PLOMB9    DU    CUIVKE,    DU    ZIMC    ET    DU    SfICKEL.       53g 

V.  —  Laitons. 

R.  L'alliage  est  dissous  dans  Tacide  nitrique;  on  chasse 
la  majeure  partie  de  l'acide  par  la  chaleur  et  Ton  expose 
la  liqueur  étendue  au  courant  d'un  élément  Bunsen  vers 
70  degrés  (p.  SaS). 

Le  cuivre  se  sépare  seul  au  pôle  négatif,  et  le  plomb  se 
dépose  au  pôle  positif.  Lorsque  le  cuivre  est  entièrement 
précipité,  on  retire  le  cône,  on  le  lave,  on  le  sèche  et  on  le 
pèse. 

On  intervertit  les  pôles,  de  manière  que  le  pôle  positif 
soit  le  cône  sur  lequel  s'était  porté  précédemment  le  cuivre 
qu'on  en  a  enlevé  par  l'acide  nitrique(p.  5ig).  (Si  l'on  était 
pressé,  on  ferait  usage  de  deux  cônes,  et  l'on  pourrait  ainsi 
avoir  le  plomb  peu  d'instants  après  le  cuivre).  On  ajoute  i  à 
2  centimètres  cubes  d'acide  azotique  et  Ton  fait  passer  le 
courant  d'un  élément  Bunsen  ou  mieux  d'un  élément  Le- 
clanché.  Le  plomb,  qui  s'était  déposé  sur  le  creuset,  est 
transporté  sur  le  cône.  On  lave,  on  relire  celui-ci  et  du 
poids  debioxyde  de  plomb  on  déduit  le  poids  du  plomb  en 
le  multipliant  par  0,8661. 

Le  fer  ne  s'est  pas  déposé,  parce  que  l'on  avait  eu  soin 
d'aciduler  fortement  le  liquide.  On  précipite  le  peroxyde 
de  fer  par  l'ammoniaque  .et  on  le  dose  par  les  méthodes 
ordinaires.  Le  poids  d'oxyde  de  fer  multiplié  par  0,70 
donne  le  fer  métallique. 

La  liqueur  est  évaporée  à  sec  ;  le  résidu  est  arrosé  d'acide 
sulfurique,  chauffé  pour  chasser  l'acide  et  changer  l'azo- 
tate en  sulfate.  On  sursature  par  l'ammoniaque  et|  après 
avoir  ajouté  à  la  solutiQn  5  grammes  environ  de  sulfate 
d'ammoniaque,  et  3  à  5  gouttes  d'acide  sulfurique  en  excès, 
on  la  soumet  au  courant  de  deux  éJéments  Bunsen.  Au 
bout  de  deux  heures  on  met  encore  5  grammes  de  cristaux  de 
sel  ammoniacal  dans  la  liqueur  et  l'on  arrête  l'opération 
après  quatre  ou  cinq  heures.  Je  fais  cette  opération  dans  le 


54o  RICHE.    DOSAGE   DU   XlJRGÂHÈSB, 

gobelet  décrit  [p.  5ii.  {ûg.  5)].  Un  grand  creuset  servirait 
aussi  bien.  On  refait  passer  le  courant  dans  la  liqueur 
pendant  une  demi-heure  pour  s'assurer  que  tout  le  zinc  est 
précipité  ou  pour  en  recueillir  les  dernières  traces. 

Voici  quelques  résultats  : 

Ces  dosages ,  préparés  par  moi,  ont  tous  été  faits  pa» 
M.  Tver  qui  ignorait  la  quantité  des  métaux  introduits  : 

Poids  des 
Poids  des  métaux  trouTé 

métaux  donné         i**  analyse.  a*  analyse. 

gr  ffr  KT 

XXXI.  Gu 0 ,  320  0 ,  220  0 ,  22o3 

Fe o,oo5  o,oo5  0,0048 

Zd 0,111  o,iio5  0,1117 

XXXn.      Cu o  [3585  o'^BSg 

Fe o ,  oo5  o ,  007 

Pb 0,0295  0,0298 

Zn • 0,1 60  0,1 595 

gr  gr 

XXXni.      Gu o,3oi5  0,3617 

Fe o,oi35  0,0145 

Pb 0,0255  0,0255 

Zd o,i52  o,i5i5 

gr  gr 

XXXIV.      Cu o,5o6  o,5o6 

Fe o,o2i5  *      0,022 

Pb o,o335  0,034 

Zn o,4i25  0,412 

On  avait,  pour  ce  dernier  dosage  de  zinc,  formé  avec  la 
liqueur  200  centimètres  cubes  dont  on  avait  pris  seulement 
5o  centimètres  cubes  \  on  a  obtenu  o^',  io3.  Aujourd^ui 
nous  opérons  sur  la  moitié  ou  même  sur  la  totalité. 


VI.  —  Bronzes. 


S.  L'essai  s'exécute  comme  celui  des  laitons.  On  en  prend 
4^8  grammes  suivant  leur  composition.  On  les  attaque 


DU    PLOMB,    DU    CUIYRE,    DU    ZINC    ET    DU    KICKEL.       54l 

par  Tacide  azotique  et  l'on  dose  Tacide  métastannique  avec 
les  précautions  ordinaires. 

La  liqueur  filtrée  est  recueillie  dans  une  fiole  de  200  cen- 
timètres cubes  et  Ton  y  dose  les  autres  métaux,  en  opérant 
sur  40  ou  5o  centimètres  cubes,  comme  on  Ta  dit  plus  haut 
pour  le  laiton. 

Poids  Poids 

des  métaux  donné.  des  métaux  trouvé. 

XXXV.      Sn 0,1695  Sn 0,1703 

Cu 3,863  Cu 3,8625 

Zq 0,0595  Zn 0,060 

Pb o ,  Il  o  Pb 0,111 


XXXVI. 


I. 


Sn. 
Cu 
Pb 

Zn 


II. 


0, 160 

3,780 

o,oi5 

o,i6o5 
3,780 

0,Ol52 

o,i6o5 

3,780 

o,i5i5 

o,o4o 

o,o4o 

o,o4o 

xxxvn. 


Analyse  du  bronze  de  la  Monnaie  : 

Sn 3,726 

Cu 94, 280  argent  (traces) 

Pb.,...     o,3i8 

Fe traces 

Zn 1 ,  780 

100, 104 


VII.  —  Nickel. 


T.  Nous  avons  eu  Toccasion  de  faire  un  grand  nombre 
d'analyses  du  minerai  de  nickel  de  la  Nouvelle-Calédonie, 
soit  pour  MM.  Cbristofie  etO*^,  soit  pour  la  Banque  ou  la 
Compagnie  foncière  de  la  Nouvelle-Calédonie. 

Nous  avons  d'abord  fait  usage  de  la  méthode  électroly- 
tique,  telle  qu'elle  est  employée  aux  usines  de  Mansfeld  et 


54^  EfCBE.    DOSAGE   DD    MAHGAlfÈSE,  ETC. 

de  la  maison  Christofle,  mais  noas  avons  reconnu  qu'elle 
présente  un  inconvénient  lorsque  (et  c'est  le  cas  pour 
les  minerais  de  la  Nouvelle-Calédonie)  le  nickel  est  as- 
socié  au  magnésium  et  au  manganèse. 

Au  lieu  d'opérer  en  liqueur  ammoniacale,  on  fait  Télec- 
trolyse,  avec  deux  éléments  Bunsen,  en  solution  légèrement 
acidulée  par  l'acide  suif uri que  et  vers  60  à  80  degrés  de 
température. 

I.  On  a  pns  une  liqueur  renfermant  o>'',io48  de  nickel. 
On  a  obtenu  par  la  pile  o'^,  io5  après  deux  heures  de  courant. 

n  ne  reste  pas  de  nickel  dans  la  liqueur.  Néanmoins,  il 
est  toujours  prudent,  comme  dans  le  cas  du  zinc,  de  sou- 
mettre une  seconde  fois  le  liquide  à  Faction  du  courant. 

Nickel  et  cuivre.  —  La  matière  soumise  à  l'action  d'un 
seul  élément  Bunsen  ne  donne  qu'un  dépôt  de  cuivre,  soit 
en  liqueur  nitrique,  soit  en  liqueur  sulfurique  (p.5a5).Le 
liquide  éleclrolysé  renferme  tout  le  nickel  qu'on  précipite 
soit  en  solution  ammoniacale,  soit  en  solution  faiblement 
acide. 

Nickel  et  plomb.  —  On  détermine  le  plomb  dans  la  li- 
queur azotique  [voir  p.  5 19)  au  moyen  d'un  élément  Le- 
clanché,  puis  on  dose  le  nickel. 

Nickel  et  manganèse,  —  Il  faut  opérer  en  liqueur  sul- 
furique et  faire  agir  deux  éléments.  Le  nickel  se  porte  seul 
au  pôle  négatif  et,  lorsqu'il  est  complètement  précipité,  on 
enlève  le  cône  et  on  le  pèse  après  lavage  au-dessus  du 
creuset.  On  continue  l'action  pour  terminer  le  dépôt  du 
manganèse  s'il  était  en  proportion  assez  forte,  ce  qui 
n'est  pas  le  cas  dans  les  minerais  de  nickel,  pour  qu'il 
ne  fût  pas  entièrement  formé. 

IL  Dans  un  essai  on  a  employé  o*',  io4  Ni  et  une  quantité  de 
manganèse  correspondant  à  o*'',247Mn*0^ 

Après  trois  heures,  on  a  trouvé  Ni  =  0,104  et  ^P^ès  six  heu- 
res o«',246  Mn»0*. 


A.    MUNTZ.    —    FERMENTATION    ALCOOLIQUE.  $43 

Nickel  et  magnésie.  —  La  séparation  se  fait  exactement 
en  liqueur  sulfurique. 

III.  On  a  opéré  sur  o**^,  i54  nickel  et  o>'',20o  sulfate  de  ma- 
gnésie. La  liqueur  a  été  acidulée  par  4^6  gouttes  d'acide  sulfu- 
rique et  soumise  pendant  deux  heures  au  courant  de  deux  élé- 
ments vers  70  à  80  degrés. 

On  a  obtenu  o>',  i54  nickel,  et  la  liqueur  ne  se  colorait  pas 
parle  sulfhydrate  d^ammoniaque. 

Ces  recherches  ont  exigé  un  travail  extrêmemem  considé- 
rable, que  mes  occupations  m'empècliaient  d'exécuter  seul, 
et,  si  elles  ont  été  menées  à  bonne  fin,  c'est  grâce  au  labeur 
et  à  la  sagacité  de  M.  Yver,  jeune  chimiste  attaché  au  la- 
boratoire du  Ministère  de  TAgriculture  et  du  Commerce, 
où  elles  ont  été  poursuivies  depuis  deux  ans. 


/«%%«%«  •«««^V%«,«%%%««««««r 


RECHERCHES 
SUR  LA  FERMENTATION  ALCOOLIQUE  INTRACELLULAIRE 

DES  VÉGÉTAUX; 

Par  m.  a.  MUNTZ. 


Dans  une  série  de  Notes  intéressantes  (*),  MM.  Le- 
cbartier  et  Bellamy  ont  montré  que  des  fruits,  des  racines 
et  des  feuilles,  soustraits  à  l'action  de  l'oxygène,  deve- 
naient le  siège  d'une  fermentation  alcoolique  caractérisée 
par  un  dégagement  diacide  carbonique  accompagné  de 
production  d'alcool,  sans  que  l'on  pût  constater  dans  leurs 
tissus  l'apparition  de  levure  alcoolique. 

On  pouvait  voir  dans  ces  résultats  curieux  la  conflrma- 


(^)  Comptes  rendus  des  séances  de  V Académie  des  Sciences f  t.  LXIX, 
p.  336. 


544  *  ^-    MUIITZ. 

tion  des  prévisions  exprimées  par  M.  Pasteur,  dès  1861, 
4ans  le  Bulletin  de  la  Société  chimique  (^). 

M.  Pasteur  avait  déduit  de  certaines  vues  sur  les  causes 
de  la  fermentation  que,  si  des  plantes  pouvaient  continuer 
à  vivre  à  l'abri  de  Pair,  dans  une  atmosplière  de  gaz  acide 
carbonique,  elles  deviendraient  alors  des  ferments  pour 
les  matières  sucrées ,  c'est-à-dire  qu'elles  se  comporte- 
raient comme  la  levure  de  bière.  MM.  Lechartier  et  Bel- 
lamy,  à  la  suite  de  nouvelles  recherches ,  admettent  au- 
jourd'hui' cette  manière  de  voir  que  M.  Pasteur  avait,  du 
reste,  appuyée  en  répétant,  sur  des  grappes  de  raisin,  les 
expériences  de  ces  savants,  avec  cette  difierence  qu'il  leur 
donnait  une  durée  très-courte  (*).  Des  expériences,  faites 
sur  des  champignons  soustraits  à  l'action  de  l'oxygène, 
me  conduisirent  à  un  résultat  analc^ue  ('). 

Toutefois,  cette  interprétation  donnée  aux  expériences 
dont  il  vient  d'être  parlé  souleva  des  contradictions,  et 
M.  Fremy  (*)  crut  devoir  attribuer  le  phénomène  observé 
à  de  la  levure  de  bière  formée  dans  les  tissus,  faisant  ren- 
trer ainsi  ce  phénomène  dans  le  cas  d'une  fermentation 
alcoolique  normale. 

Pour  lever  tous  les  doutes  et  pour  déterminer  certaines 
conditions  de  cette  fermentation  alcoolique,  de  nouvelles 
recherches  m'ont  paru  nécessaires  :  elles  forment  l'objet 
de  ce  travail.  Je  n'ai  pas  eu  seulement  pour  but  de  con- 
stater s'il  y  avait  production  d'alcool  dans  les  tissus  végé- 
taux soustraits  à  l'influence  de  l'oxygène,  mais  surtout  si 
cette  action  pouvait  se  produire  dans  la  cellule  a)ivante. 
Pour  cette  dernière  question,  M.  Gayon(')  était  déjà  ar^ 


(*)  Études  sur  la  bière ,  p.   255. 
(*)  Ibid.^  p.  260. 

(  ")  Annales  de  Chimie  et  de  Physique,  5*  série,  t.  VIII,  p.  56. 
(*)  Comptes  rendus  des  séances  de  (^Académie  des  Sciences j  t.  LXXXIII 
p.  180. 

(•)  Ibid. 


FERMEriTÀTIOIf    ALCOOLIQUE    inTIlACELLULAlBE.        545 

rivé  à  un  résultat  affirmatif.  Ce  savant,  répétant  les  expé- 
riences de  MM.  Lecharlier  et  Bellaniy,  avait  vu  la  fermen- 
tation alcoolique  s'arrêter  lorsqu'on  mettait  les  fruits  en 
présence  de  substances  antiseptiques,  qui,  comme  on  sait, 
entravent  ou  même  annihilent  les  manifestations  vitales. 
Mais  je  me  suis  attaché  à  opérer  dans  des  conditions  dif- 
férentes de  celles  où  s'étaient  placés  les  expérimentateurs 
qui  m'avaient  précédé. 

En  m'appuyant  sur  certaines  expériences  de  de  Saus- 
sure (*)  et  de  M.  Boussingault  (*)  sur  les  effets  nuisibles 
de  l'acide  carbonique  peu  dilué  dans  la  végétation,  j'ai  cru 
devoir  rejeter  l'emploi  de  ce  gaz  et  lui  préférer  l'azote, 
comme  plus  inerte.  Mais  la  principale  innovation  de  mes 
essais  consiste  à  ne  pas  opérer,  comme  on  l'avait  fait  avant 
moi,  sur  des  parties  détachées  d'une  plante  :  fruit,  racine, 
feuilles.  Ces  organes  n'étaient  pas  dans  les  conditions  nor- 
males de  la  vie.  J'ai  opéré  sur  le  végétal  entier,  en  pleine 
végétation,  non  arraché  du  sol  dans  lequel  il  s'était  déve- 
loppé et  encore  apte,  l'expérience  étant  terminée,  à  re- 
prendre ses  fonctions  ordinaires  au  contact  de  l'oxy- 
gène atmosphérique.  Je  me  suis  appliqué,  en  outre,  à 
restreindre  la  durée  de  mes  expériences,  afin  de  donner 
plus  de  netteté  aux  phénomènes  observés  et  aussi  afin 
d'éviter  l'asphyxie  des  plantes,  c'est-à-dire  la  cessation  de 
vie  par  l'absence  trop  prolongée  de  l'oxygène  ('). 

Le  gaz  dans  lequel  on  a  fait  végéter  les  plantes  est  l'azote, 
gaz  inerte  par  excellence;  il  a  été  préparé  en  absorbant 
l'oxygène  et  l'acide  carbonique  de  l'air  au  moyen  de  l'a- 
cide pyrogallique  et  de  la  potasse.  Le  végétal  soumis  à 
l'expérience,  développé  dans  la  terre  contenue  dans  un  pot 
de  fleurs,  était  placé  sous  une  grande  cloche  renversée  sur 


(*■)  Recherches  chimiques  sur  la  végétation^  p.  3i. 
(')  agronomie  y  t.  IV,  p.  Sag. 
(■)  Ibid,,  p.  3i. 

Annales  de  Chim.  et  de  Phjs,,  5«  série,  t.  XIII.  (Avril  1878.)      35 


546  A.    HUHTZ. 

un  cl'istallisoir  d'un  diamètre  plus  grand,  daos  lequel  on 
versait  une  quantité  plus  que  suffisante  d'une  dissolution 
d'acide  pyrogallique  additionnée  de  potasse.  On  avait  soin 
qu'aucune  partie  du  végétal  ne  touchât  les  parois  de  la 
cloclie  {{ig.  1).  L'acide  pyrogallique  qu'on  a  employé  pro- 


venait de  résidus  de  fabrication  de  l'acide  sublimé,  résidus 
qu'on  a  pu  se  procurer  en  grande  quantité,  et  qui  absor- 
bent environ  moiiié  autant  d'oxygène  que  l'acide  pur. 

Par  suite  de  l'absorption  de  l'oxygène,  le  liquide  noir 
montait  dans  la  clocbe;  il  rentrait  alors  de  l'air  qui  rem- 
plaçait l'oxygène  absorbé  jusqu'à  ce  que  la  cloche  fût  en- 
tièrement pleine  d'azote.  On  versait  alors  du  mercure  dans 
le  crisiallisoir  pour  isoler  complètement  l'atmosphère  de 
la  cloche. 

Au  bout  de  vingt-quatre  heures,  on  s'en  est  assuré  par 
des  expériences  dîrecies,  l'oxygène  était  intégralement  ab- 
sorbé dans  les  conditions  dans  lesquelles  on  s'était  placé, 
en  employant  des  cloches  d'une  capacité  de  36  à  3o  litres. 


FERMEWTÀTION    ALCOOLIQrE    I W TRACE LLUL AIRE.        547 

L.^azote   ainsi   obtenu    n'élait  cependant  pas  absolument 
pur.  On  sait,    d'après   les   expériences  de    M.    Boussin- 
gault  {*)  et  celles  de  M,  Calvert  ('),  que  Tabsorption  de 
Toxygène  par  le  pyrogallate  de  potasse  donne  naissance  à 
de  petites  quantités  d'oxyde  de  carbone.  Ce  cas  s'est  pré- 
senté dans  ces  expériences.  Cependant  ce  gaz  n'a  pas  sur 
les  végétaux,  suivant  de  Saussure  ('),  "une  action  compa- 
rable à  celle  qu'il  exerce  sur  les  animaux,  et  se  comporte 
vis-à-vis  des  premiers  comme  un  gaz  inerte,  même  lorsqu'il 
existe  à  haute  dose  dans  une  atmosphère.  On  a  donc  pu  ne 
tenir  aucun  compte  de  sa  présence  à  l'état  de  iraces.  On  a 
cependant  voulu  avoir  une  idée  de  la  proportion  dans  la- 
quelle il  existe  dans  l'azote  préparé.  L'analyse  eudiomé- 
trique  a  été  impuissante  à  en  déceler  la  présence  avec  cer- 
titude ^  on  a  dû  faire  passer  une  grande  quantité  du  gaz 
préparé  sur  une  colonne  d'oxyde  de  cuivre    chauffé    au 
rouge,  et  recueillir  dans  un  tube  à  potasse  l'acide  carbo- 
nique formé. 

1°  4^^*, 800  d'azote  provenant  de  6^^*,076  d'air  ont  donné: 

gr 

Acide  carbonique  dosant  l'oxyde  de  carbone. .        0,029 
Équivalant  à  oxyde  de  carbone 0,018 

soit,  en  poids, 

I  d*oxyde  de  carbone  pour  336,8  d'azote  obtenu, 
ou 

I  d'oxyde  de  carbone  pour  100,6  d'oxygène  absorbé. 

0?  9***,5oo  d'azote,  provenant  de  12**^020  d'air,  ont 
donné  : 

gr 

Acide  carbonique  dosant  l'oxyde  de  carbone..       o,o55 
Équivalant  à  oxyde  de  carbone o,o322 

—  ■         ■    ■  ■-■■■.  ■  ■■         W       ■     ..  ^    ■  ■  ■  Il  !■!    ■  ■  ■  ■  —      - ■■.,._■,■_■,-,- ,  ..^. 1^ 

(*)  Comptes  rendus,  t.  LVII,  p    889. 

C«)  /Wrf.,  p.  873. 

(*)  Recherches  chimiques  sur  la  'végétation^  p.  208. 

35. 


548  A.  MuriTz. 

soit,  en  poids, 

I  d'oxyde  de  carbone  pour  872  d'azole  obtenu, 
ou 

I  d^oxyde  de  carbone  pour  110,2  d*oxygène  absorbé. 

On  voit  que  ces  proportions  d'oxyde  de  carbone  sont  ex- 
trêmement faibles;  elles  n'ont  pu  avoir  aucune  influence 
sur  la  marche  des  expériences,  comme  les  résultats  qui  sui- 
vent le  feront  voir,  puisque  les  végétaux  qui  avaient  vécu 
dans  ce  milieu  n'en  ont  nullement  souffert.  Pour  constater 
l'effet  produit,  c'est-à-dire  pour  voir  s'il  y  avait  eu  fermen- 
tation alcoolique,  on  s'est  borné  à  constater  la  présence  de 
l'alcool.  Les  essais  faits  pour  doser  exactement  ce  corps 
n'ont  pas  donné  des  résultats  satisfaisants  :  on  s'est  donc 
contenté  d'un  essai  qualitatif  qui  permit  en  même  temps 
d'évaluer  d'une  manière  approximative  la  quantité  d'al- 
cool produite.  Mais  la  constatation  certaine  de  l'alcool  était 
suffisante  pour  résoudre  le  problème  qu'on  s'était  posé  ;  il 
ne  s'agissait,  en  effet,  que  de  savoir  s'il  y  avait  eu  ou  non 
formation  d'alcool. 

La  réaction,  qu'en  raison  de  sa  netteté  on  a  préférée  à 
toutes  les  autres,  est  la  production  d'iodoforme  déjà  em- 
ployée par  M.  Lieben  (*)  et  par  M.  Berthelot,  comme  four- 
nissant une  méthode  sensible  pour  reconnaître  la  présence 
de  l'alcool.  On  a  cherché  à  donner  à  cette  réaction  un  de- 
gré de  sensibilité  et  de  certitude  qui  ne  laissât  rien  à  dési- 
rer. On  a,  du  reste,  à  diverses  reprises,  isolé  l'alcool  par 
une  distillation  fractionnée  et  Temploi  du  carbonate  de 
potasse  cristallisé,  et  l'on  a  pu  constater  son  identité. 

La  plante  sur  laquelle  on  opérait  était  placée  dans  un 
ballon  de  2  litres  avec  100  centimètres  cubes  d'eau.  Ce  bal- 
Ion  communiquait  avec  le  serpentin  renversé  qu'emploie 


(')  Annalen  der  Chemie  und  Pharmacie,  t.  VI;  1870. 


FERMENTATION    ALCOOLIQUE    INTRACELLULAIRE*        549 

M.  Schloesing  pour  le  dosage  de  Tammoniaque ,  et  qui 
constitue  un  appareil  à  fractionnement  d^une  grande  per- 
fection. 

On  amène  à  rébullition  et  Ton  recueille  dans  un  tube  à 
essai  les  lo  premiers  centimètres  cubes  qui  passent  à  la 
distillation.  On  ajoute  à  la  liqueur  distillée  2  grammes  de 
carbonate  de  soude  pur  cristallisé  et  08*^,1  d'iode  réduit  en 
poudre.  Un  excès  d'alcali  rend  la  réaction  moins  sensible. 
On  chauffe,  en  agitant ,  à  une  température  voisine  de 
60  degrés,  jusqu'à  ce  que  l'iode  ait  disparu.  Par  le  refroi- 
dissement, il  se  forme  un  dépôt  jaune  de  paillettes  cba- 
toyantes  douées  d'une  odeur  caractéristique.  Lorsque  ce 
dépôt  est  peu  abondant  ou  peu  accentué,  on  peut  être  fixé 
sur  sa  nature  en  ayant  recours  au  microscope  {*).  En  effet, 
l'iodoforme  ainsi  obtenu  se  présente,  sous  un  fort  grossisse- 
ment, sous  la  forme  de  tables  hexagonales  très-régulières, 
souvent  isolées,  souvent  aussi  groupées  de  manière  à  for- 
mer des  étoiles  d'une  structure  très-élégante,  qui  permet- 
tent de  reconnaître  ce  corps  avec  facilité. 

Ainsi  aidée  de  la  distillation  fractionnée  et  de  l'emploi 
du  microscope,  cette  méthode  de  recherche  de  l'alcool  de- 
vient d'une  sensibilité  comparable  à  celle  des  réactions  les 
plus  délicates  de  la  Chimie  minérale.  On  a  voulu  voir  jus- 
qu'où pourrait  aller  cette  sensibilité,  et,  dans  ce  but,  on  a 
fait  les  expériences  suivantes  : 

I.  Un  litre  d'eau  a  été  additionné  de  i  centimètre  cube 
de  vin  contenant  10  pour  100  d'alcool.  C'était  donc  -^  de 
centimètre  cube,  c'est-à-dire  77^-^  d'alcool  qu'on  avait 
ajouté  à  l'eau.  On  a  distillé,  à  l'appareil  à  fractionnement, 
et  fait  une  première  prise  de  12  centimètres  cubes  qui  a 
donné  un  abondant  dépôt  d'iodoforme.  La  deuxième  prise, 
de  12  centimètres  cubes  également,  a  donné  la  réaction 
avec  une  grande  netteté.  En  examinant  le  dépôt  au  mi- 

(^)  M.  LielM^n  (Mémoire  cité)  a  déjà  conseillé  remploi  du  microscope. 


55o  A.    MVlfTZ. 

croscope,  avec  un  grossissement  de  600  diamètres,  on  a  vu 
en  grande  quantité  des  lames  hexagonales  accompagnées 
d'étoiles  à  six  branches.  La  Jig.  2  montre  ces  cristaux  vus 
au  microscope. 

L'expérience  à  blanc,  faîte  avec  un  litre  de  la  même 
eau,  traitée  de  la  même  manière,  en  employant  les  mêmes 
réactifs,  n'a  pas  donné  les  paillettes  d'iodoforme,  et  le 
microscope  n'en  a  pas  décelé  la  présence. 

II.  On  a  cherché  à  reculer  la  limite  de  sensibilité  de  la 
réaction,  et  dans  ce  but  on  a  distillé  à  Talambic  ordinaire 
10  litres  de  la  même  eau.  On  a  recueilli  le  premier  litre 
qui  a  passé  à  la  distillation  et  on  Ta  fractionné  dans  le  ser- 

Fig.  2. 

O 


pentin  de  M.  Schlœsing.  Le  liquide  passé  en  premier  lieu, 
d'un  volume  de  10  centimètres  cubes,  n'a  pas  montré  au 
microscope  les  cristaux  caractéristiques.  On  a  conclu  à 
l'absence,  dans  celte  eau,  de  l'alcool  ou  de  toute  autre 
substance  pouvant  donner  de  Tiodoforme. 

On  a  pris,  en  second  lieu,  10  litres  de  la  même  eau*,  on 
y  a  ajouté  i  centimètre  cube  de  vin  contenant  -pj-  de  cen- 
timètre cube  d'alcool.  Ce  mélange  contenait  donc,  en  vo- 
lume, ^^Q\Qo  d'alcool.  On  a  opéré  comme  il  vient  d'être 
dit,  et  l'on  a  obtenu,  dans  les  10  centimètres  cubes  recueillis 
en  premier  lieu  dans  le  fractionnement  par  l'appareil  de 
M.  Schlœsing,  im  dépôt  de  paillettes  jaunes  encore  vi- 
sibles à  l'œil  nu,  et  qui,  examiné  au  microscope,  a  montré 
de  nombreuses  tables  hexagonales  accompagnées  d'étoiles 


FERMENT  ATI  OK    ALCOOLIQUE    IliTBAGELLULAlIlE.        55  l 

de  formes  très-élégantes.  On  a  donc  pu  constater,  avec 
une  grande  facilité,  la  présence  de  niTTô  d'alcool  dans 
l'eau. 

III.  Une  expérience  semblable  a  été  faîte  avec  le  même 
succès,  en  introduisant  o^"^, 06  d'alcool  dans  1 8  litres  d'eau. 
Dans  ce  dernier  essai,  on  a  donc  retrouvé  3 ^  J ^ ^  ^^  d'alcool 
dans  l'eau.  Les  cristaux  d'iodoforme  observés  au  micro- 
scope sont  représentés  dans  la  fig,  3. 

On  a  pu  évaluer  approximativement ,  d'après  l'abon- 
dance de  Tiodoforme  obtenu,  la  quantité  d'alcool  produite 
par  les  végétaux  soustraits  à  l'action  de  l'oxygène.  Des  es- 


Fîg.  3. 


o 


sais  préalables  ont  montré  que  la  quantité  d'iodoforme 
produite  est  sensiblement  proportionnelle,  dans  certaines 
limites,  à  la  quantité  d'alcool  existante,  lorsqu'on  opère 
dans  les  mêmes  conditions.  On  a  eu  des  types  en  em- 
ployant des  proportions  d'alcool  connues,  et  l'on  a  pu 
classer  de  la  manière  suivante,  d'après  l'examen  du  dé- 
pôt, les  quantités  d'alcool  obtenues  dans  les  expériences  : 
quantités  inférieures  à  o6'^,02',  quantités  comprises  entre 
o8'^,o2  et  oS'^,o5  5  quantités  comprises  entre  o8'^,o5  et 
0*5"^,  10,  entre  o8'',io  et  oS'^,20,  etc. 

On  voit ,  par  ce  qui  précède ,  qu'on  peut  constater 
l'existence  de  quantités  extrêmement  petites  d'alcool  et 
qu'on  peut  conclure  à  l'absence  de  ce  corps  toutes  les 
fois  qu'on  obtient  une   réaction  négative,  malgré  la  re- 


332  A.    MUIfTZ* 

cherche  au  microscope;  qu'on  peut,  au  contraire,  con- 
clure à  la  présence  de  l'alcool  dans  les  conditions  de  ces 
expériences,  lorsque  Ton  obtient  les  cristaux  nettement 
caractérisés  d'iodoforme.  En  appliquant  cette  méthode  de 
recherche  aux  expériences  mentionnées  plus  bas,  on  a  pu 
conclure  avec  certitude  à  la  présence  ou  à  Tabsence  de 
r alcool  dans  les  végétaux  examinés.  Dans  toutes  les  expé- 
riences dont  le  résultat  a  été  positif^  la  production  d'al- 
cool a  été,  du  reste,  assez  notable  pour  que  la  réaction  fût 
d'une  grande  netteté  et  que  l'observation  n'exigeât  pas  de 
la  méthode  toute  la  sensibilité  qu'elle  comporte. 

On  a  donc  eu  pour  apprécier  l'effet  produit,  d'un  côté, 
une  réaction  nettement  affirmative;  de  l'autre,  une  réac- 
tion absolument  négative.  C'est  au  moyen  de  celte  mé- 
thode de  recherche  qu'on  a  abordé  le  problème  qu'on 
s'était  proposé  de  résoudre.  Je  puis  ajouter  que  des  ex- 
périences faites  à  blanc  n'ont  laissé  aucun  doute  sur  la  va- 
leur de  la  méthode. 

Septembre  1876.  —  Un  rameau  de  vigne,  garni  de 
feuilles  bien  saines,  a  été  placé  sous  une  cloche  qu'on  a 
remplie  d'acide  carbonique.  La  cloche  était  soustraite  à 
l'action  de  la  lumière.  Au  bout  de  vingt-quatre  heures,  on 
a  distillé,  avec  i5o  centimètres  cubes  d'eau,  la  moitié  du 
rameau,  pesant  avec  les  feuilles  46  grammes.  On  a  obtenu 
un  abondant  dépôt  de  paillettes  d'iodoforme.  L'autre  moi- 
tié du  rameau,  la  section  plongeant  dans  l'eau,  a  été  re- 
placée à  Tair  libre;  les  feuilles,  déjà  malades  par  suite  de 
leur  séjour  dans  l'acide  carbonique ,  n'ont  pas  tardé  à  se 
faner. 

C'est  à  la  suite  de  cet  essai  qu'on  s*est  décidé  à  placer  les 
plantes  dans  un  gaz  inerte. 

ig  juillet  1877.  —  Deux  plants  de  betteraves,  bien  vi- 
goureux, vivant  dans  la  terre  contenue  dans  un  pot  de 
fleurs,  ont  été  placés  sous  la  cloche  avec  l'acide  pyrogal- 
liquc  et  la  potasse.  L'expérience  a  été  faite  à  l'obscurité. 


FERMENTÀTIOlf    ALCOOLIQUE    INTRACELLULAIRE.        553 

Le  séjour  dans  Tazole  a  été  de  vingt-quatre  heures  (*)  ;  les 
plantes  ne  paraissaient  nullement  avoir  souffert  de  la  pri- 
vation d'oxygène.  L'un  des  plants  a  été  replacé  à  Tair  et 
a  continué  à  vivre  et  à  se  développer  normalement. 

Les  feuilles  de  l'autre  plant,  pesant  35  grammes,  ont 
été  distillées  avec  i5o  centimètres  cubes  d'eau.  Les  lo  cen- 
timètres cubes  qui  ont  passé  en  premier  lieu  ont  donné  un 
dépôt  caractérisé  d'iodoforme,  qu'on  a  estimé  correspondre 
à  oS'^joS  à  0^*^,10  d'alcool. 

Un  plant  semblable,  placé  dans  Tair  ordinaire  confiné 
et  traité  de  la  même  manière,  n'a  donnée  polir  un  même 
poids  de  feuilles,  aucune  trace  d'alcool. 

10  juillet  1877. — Deux  plants  de  betteraves,  bien  vigou- 
reux et  plus  développés  que  les  précédents,  ont  été  placés 
dans  Pazote  pendant  quarante-huit  heures.  Au  bout  de  ce 
temps,  les  feuilles  de  l'un  de  ces  plants,  pesant  53  grammes, 
ont  été  distillées  avec  i5o  centimètres  cubes  d'eau.  On  a 
obtenu,  dans  les  10  centimètres  cubes  de  liquide  passé  en 
premier  lieu,  une  quantité  d'iodoforme  peu  diflerente  de 
celle  qui  correspondrait  à  10  à  i5  centigrammes  d'alcool, 
soit  environ  -j-~^  du  poids  des  feuilles. 

L'autre  planl,  après  son  séjour  dans  l'azote,  a  continué 
à  vivre  et  à  s'accroître  normalement. 

Les  feuilles  d'un  plant  semblable,  d'un  poids  sensible- 
ment égal  à  celles  dans  lesquelles  on  a  constaté  la  présence 
de  l'alcool  et  ayant  vécu  à  l'air,  n'ont  donné  aucune  trace 
d'iodo  forme. 

28  septembre.  —  Deux  plants  de  betteraves,  dont  les 
racines  étaient  fixées  dans  la  terre  contenue  dans  un  vase 
en  verre,  ont  été  placés  dans  l'azote  pendant  quarante- 
six  heures.  Au  bout  de  ce  temps,  on  a  distillé  avec  iSocen- 


(*)  L'absorption  de  l'oxygène  exigeant  environ  vingt-quatre  heures,  on 
n'a  compté  comme  séjour  dans  Tazote  que  le  temps  total  diminué  de 
vingt-quatre  heures. 


S54  J^'    MUHTZ. 

timètres  cubes  d^eau  87  grammes  de  feuilles  de  Tun  des 
plants.  On  a  obtenu  une  quantité  dModoforme  qu'on  es- 
time correspondre  it  ^l  k  10  centigrammes  d'alcool,  soit 
près  de  -^—î  ^"  poids  des  feuilles. 

On  a  distillé  également,  avec  i5o  centimètres  cubes 
d'eau,  4s  grammes  de  la  racine  du  même  plant  coupée  en 
petits  morceaux.  On  a  obtenu  encore  une  notable  formation 
d'iodoforme,  correspondant,  à  l'estimation,  à  celle  qu'au- 
raient donnée  5  à  10  centigrammes  d'alcool,  soit  environ 
•—jj  ^^  poids  de  la  racine. 

L'autre  plant,  après  son  séjour  dans  Tazote,  a  continué 
à  prospérer,  et  n'est  mort,  au  bout  de  vingt  jours,  que  par 
la  dessiccation  accidentelle  du  sol  dans  lequel  il  vivait. 

Un  plant  semblable,  ayant  vécu  à  l'air,  a  été  également 
examiné  :  56  grammes  de  feuilles  distillées  avec  i5o  cen- 
timètres cubes  d'eau  n'ont  donné  aucune  trace  d'iodo- 
forme. i65  grammes  de  racines  distillés  avec  i5o  centi- 
mètres cubes  d'eau  n'ont  donné  aucune  trace  d'iodoforme. 

D'autres  expériences  faites  sur  des  plants  de  betteraves 
à  divers  états  de  développement  ont  donné  invariablement 
les  mêmes  résultats,  c'est-à-dire  présence  d'alcool  dans  les 
organes  du  plant  ayant  séjourné  dans  l'azote,  absence  d'al- 
cool dans  le  plant  placé  dans  l'air  comme  terme  de  com- 
paraison, et,  enfin,  continuation  de  la  vie  dans  le  plant 
replacé  à  l'air  après  un  séjour  de  vingt-quatre  h  quarante- 
huit  heures  dans  l'azote. 

Les  racines  de  betteraves  acquièrent  quelquefois  des  di- 
mensions considérables.  On  s'est  demandé  si  l'intérieur 
d'une  pareille  racine  n'était  pas  un  milieu  soustrait  à  l'ac- 
tion de  l'oxygène  atmosphérique,  et  si,  par  conséquent,  les 
cellules  placées  au  centre  ne  fonctionnaient  pas  comme  des 
cellules  privées  de  l'action  de  l'air.  On  a  distillé,  avec 
i5o centimètres  cubes  d'eau,  i5o  grammes  de  la  partie  in- 
térieure d'une  racine  représentant  approximativement  une 
sphère  de  20  à  22  centimètres  de  diamètre  et,  dans  le  li- 


FERMEA'TATIOIV    ALCOOLIQUE    INTRACELLULAIRE.        555 

qui  Je  recueilli,  on  a  cherché  l'alcool  ;  on  n'a  pu  en  découvrir 
aucune  trace.  Il  est  donc  à  présumer  que  l'oxygène  pénètre 
dans  les  cellules  les  plus  centrales  de  la  racine  de  la  bette- 
rave. 

21  juillet,  —  On  a  semé  du  maïs  dans  la  terre  de  jar- 
din contenue  dans  des  pots  à  fleurs.  Les  plants  venus  à  la 
lumière  diffuse  étaient  d'un  beau  vert.  Quand  ils  eurent 
atteint  aS  à  3o  centimètres  de  hauteur,  on  plaça  l'un  des 
pots  contenant  treize  plants  sous  une  cloche  dans  laquelle 
on  introduisit  l'acide  pyrogallique  et  la  potasse.  Au  bout 
de  trente-six  heures,  on  mit  fin  à  Texpérience.  Le  séjour 
dans  l'azote  avait  donc  été  d'environ  douze  heures.  Dix 
plants  pesant  39  grammes  furent  distillés  avec  i5o  centi- 
mètres cubes  d'eau.  Dans  les  8  centimètres  cubes  distillés, 
on  put  constater  la  présence,  par  la  production  d'io- 
doforme,  d'une  quantité  d'alcool  estimée  entre  5  et 
lo  centigrammes. 

Les  trois  autres  plants  non  arrachés  restèrent  à  l'air 
après  le  séjour  dans  l'azote  et  continuèrent  à  se  déve- 
lopper. 

Huit  autres  plants  semblables,  pesant  34  grammes,  et 
qui  n'avaient  pas  été  privés  du  contact  de  l'air,  n'ont  donné 
aucune  trace  d'alcool. 

26  septembre.  —  Plants  de  géranium,  Durée  de  l'ex- 
périence :  cinquante-deux  heures. 

Le  séjour  dans  l'azote  a  élé,  par  suite,  de  vingt-huit 
heures  environ. 

Une  branche  d'un  plant  resté  dans  l'air ,  pesant 
49  grammes,  n'a  pas  donné  la  réaction  de  l'alcool. 

Une  branche  du  plant  placé  dans  l'azote,  pesant 
38  grammes  9  a  donné  de  l'alcool  estimé  correspondre 
à  o«%o2. 

Ce  plant  mutilé,  après  le  séjour  dans  l'azote,  a  continué 
à  vivre. 

ag  septembre.  —  Plants  de  jeunes  choux.   Durée  de 


556 


A.    MUlfTZ. 


Texpérieiice  :  soixante  et  onze  heures.  Le  séjour  dans  Ta- 
zole  a  donc  été  de  quarante-sept  heures  environ. 

Deux  plants  placés  dans  Tazote  et  pesant  28  grammes 
n'ont  pas  donné  la  réaction  de  l'alcool. 

Deux  plants  placés  dans  Tazote  et  pesant  25  grammes 
ont  donné  très-nettement  la  réaction  de  l'alcool. 

Le  plant  témoin  replacé  à  l'air,  après  son  séjour  dans 
1  azote,  a  continué  à  vivre. 

3o  octobre.  —  Plants  de  choux  plus  développés  que  les 
précédents  :  résultat  identique. 

29  septembre.  —  Plants  de  Lamium  album  non  en  flo- 
raison. Durée  de  l'expérience  :  soixante  et  onze  heures; 
séjour  dans  l'azote  :  environ  quarante-sept  heures. 

Huit  plants  restés  à  l'air  et  pesant  26  grammes  n^ont 
pas  donné  d'alcool. 

Six  plants  placés  dans  Tazote  et  pesant  21  grammes  ont 
donné  la  réaction  de  l'alcool  très-nettemenl.i 

Deux  plants,  après  leur  séjour  dans  l'azote,  ont  continué 
à  vivre. 

29  septembre, —  Plants  de  Portulacca  non  fleuris»  Du- 
rée de  Texpérience  :  soixante  et  onze  heures  ]  séjour  dans 
l'azote  :  environ  quarante-sept  heures. 

Neuf  plants  restés  à  l'air  et  pesant  40^"^* 5  n'ont  pas 
donné  d'iodoforme. 

Neuf  plants  placés  dans  l'azote  et  pesant  4^  grammes 
ont  donné  notablement  d'iodoforme. 

Quatre  plants,  après  leur  séjour  dans  l'azote,  ont  con- 
tinué à  se  développer. 

Un  grand  nombre  d'expériences  semblables  aux  précé- 
dentes ont  été  instituées  en  employant  diverses  plantes 
herbacées,  dans  les  conditions  normales  de  la  vie,  ou  des 
branches  coupées  de  végétaux  arborescents  garnies  de 
feuilles.  On  a  opéré  tantôt  à  l'obscurité,  tantôt  à  la  lu- 
mière. Les  résultats  obtenus  ont  été  les  mêmes. 

Je  citerai  cependant  deux  expériences  dont  le  résultat 


FERMENTATION    ALCOOLIQUE    INTRACELLULAIKE.        55y 

dijfTère  des  précédents,  eu  ce  sens  que  les  plantes  u^ont  pas 
survécu  au  séjour  dans  l'azote.  Ces  deux  exceptions  méri- 
tent d'être  notées  et  expliquées  :  elles  n'infirment  en  rien 
les  conclusions  auxquelles  conduisent  toutes  les  autres 
expériences. 

3  octobre,  —  Plants  de  chicorée.  Durée  de  l'expé- 
rience :  quarante-neuf  heures;  séjour  dans  l'azote  :  environ 
vingt-cinq  heures. 

Trois  plants  restés  à  l'air  et  pesant  25  grammes  n'ont 
pas  donné  d'iodoforme. 

Trois  plants  placés  dans  l'azote  et  pesant  22  grammes 
ont  donné  la  réaction  de  l'alcool. 

Les  plants,  en  sortant  de  l'azote,  n'étaient  pas  bien 
portants;  on  a  pu  constater  Texistence  de  mucor  en  plu- 
sieurs endroits  des  feuilles;  aussi  les  témoins  replacés  dans 
l'air  n'ont  pas  tardé  à  mourir.  Ce  cas  ne  s'est  présenté  que 
cette  seule  fois  dans  les  nombreux  essais  qu'on  a  faits,  et 
rend  celte  expérience  instructive  en  montrant  que  l'enva- 
hissement par  un  organisme  microscopique  étranger  a  été 
rapidement  mortel  pour  ces  végétaux. 

Juillet  1877.  —  ^^*  plants  de  maïs  étiolés,  venus  à 
l'obscurité  et  ayant  une  tigelle  haute  de  25  à  3o  centi- 
mètres, ont  été  placés  sous  la  cloche  avec  l'acide  pyro- 
gallique  et  la  potasse.  L'expérience  a  été  faite  à  l'obscu- 
rité. 

Les  plants  témoins  restés  à  l'air  ne  contenaient  pas 
d'alcool. 

Les  plants  restés  dans  l'azote  pendant  vingt-six  heures 
ont  donné  de  l'alcool  en  quantité  très-appréciable. 

Mais  les  plants  témoins,  après  leur  séjour  dans  l'azote, 
sont  morts  au  bout  de  deux  jours.  Il  est  probable  que  les 
tissus  délicats  du  végétal  étiolé  ont  été  asphyxiés  rapide- 
ment dans  le  gaz  inerte.  Peut-être  aussi,  et  c'est  une  ques- 
tion qui  mérite  d'être  examinée,  les  traces  d'oxyde  de 
carbone  existant  dans  l'azote  ont-elles  eu ,  sur  le  végétal 


558  A.    MUUTZ.  FERMEHTATIOW    ALCOOLIQUE. 

étiolé,  une  action  nuisible  qu  elles  n'ont  pas  sur  le  végé- 
tal vert  (*). 

En  résumant  toutes  ces  expériences  et  n'éliminant  que 
les  deux  dernières,  dont  le  résultat  anormal  s'explique 
aisément,  on  voit  que  les  faits  observés  ont  été  les  mêmes 
dans  tous  les  essais. 

I®  Les  plants  témoins  conservés  dans  Taîr  ne  conte- 
naient pas  d'alcool  dans  leurs  tissus. 

a**  Les  plants  placés  dans  l'azote  renfermaient  des 
quantités  d'alcool  très-notables ,  atteignant  souvent  7;^ 
du  poids  de  la  plante. 

3°  Les  plants  témoins  qui  avaient  été  placés  dans  l'a- 
zote ont  continué  à  vivre  et  à  se  développer  normale- 
ment. 

Ces  recherches  -apportent  donc  une  nouvelle  confirma- 
tion aux  idées  qui  ont  été  émises  par  M.  Pasteur:  elles 
montrent  de  plus,  avec  une  grande  netteté,  que,  chez  les 
végétaux  supérieurs,  la  cellule  vwante  est  apte,  en  l'ab- 
sence de  loxygène ,  à  fonctionner  comme  les  cellules 
des  champignons,  en  produisant  une  véritable  fermenta- 
tion alcoolique. 

Ce  travail  a  été  fait  à  l'Institut  agronomique. 


(*)  Des  expériences  faites  depuis  la  rédaction  de  ce  travail  me  font 
croire  que  l'oxyde. de  carbone  n'exerce  pas  une  action  plus  délétère  sur 
les  végétaux  étiolés  et  même  sur  les  végétaux  cryptogamiques  que  sur  les 
plantes  vertes. 

L'analogie  des  fonctions  des  plantes  dépourvues  de  chlorophylle  avec 
les  fonctions  des  animaux  |et  l'action  énergique  de  l'oxyde  de  carbone 
sur  les  derniers  m'avaient  porté  à  rechercher  si  ce  gaz  délétère  exerçait 
sur  CCS  deux  ordres  d'êtres,  comparables  à  bien  des  points  de  vue,  une 
action  identique.  Ces  prévisions  n'ont  pas  été  confirmées  par  l'expérience. 


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H.  LANDOLT.  —  POUVOIR  ROTATOIRE.       559 

RECDERCUES  SUR  LE  POUVOIR  R0T4T0IRE  ; 

Par  m.  LANDOLT  (*). 


Extrait  par  M.  Bertim. 


Les  corps  doués  du  pouvoir  rolatoîre  se  divisent  en  trois 
classes  :  i^  ceux  qui  ne  le  possèdent  qu'à  Tétat  cristallisé  ; 
2^  ceux  qui ,  au  contrai  re,  ne  le  possèden  t  qu'à  l'état  amorphe 
ou  en  dissolution  ;  3°  enfin  ceux  qui  gardent  celte  propriété 
dans  tous  les  cas,  aussi  bien  quand  ils  sont  cristallisés  que 
lorsqu'ils  sont  dissous. 

On  connaît  déjà  seize  corps  de  la  première  classe,  ce 
sont  : 

1"  Le  quartz.  q*»  L'hyposulfate  de  plomb. 

2<*  Le  cinabre.  io<*  Le  sulfo-antimoiiiate  de  soude. 

3**  Le  chlorate  de  soude.  ii°  L'acétate  d'urane  et  de  soude. 

4*^  Le  bromate  de  soude.  12*^  Le  maticocamphre. 

5"  Le  periodate  de  soude.  i3**  Le  benzyL 

6°  L'hyposulfate  de  potasse.  1 4"  Le  sulfate  d'éthylandiamine. 

«7'*  n  de  chaux.  iS**  Le  carbonate  de  guanidine. 

8°  "  de  strontiane.         lô"  La  diacétyl phénol phtaléine. 

La  seconde  classe  ne  contient  que  des  substances  car- 
bonées qui  se  produisent  dans  les  corps  organisés  ou  qui  en 
dérivent  par  une  décomposition  chimique  simple.  Quelques- 
unes  jouissent  du  pouvoir  rotatoire  dans  les  deux  sens. 
M.  Landolt  a  réuni  dans  le  tableau  suivant  les  substances 
actives  naturelles  connues  jusqu'ici  et  leurs  principaux 
dérivés  : 


(*)  Annales  de  Liebig^  t.  CLXXXIX,  p.  2 '|  1-837;  1877. 


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Pinus  larix;  essence  de  tem- 
pline,  du   Pinui  pieta  et  du 

Chlorhydrates  de  térébenihéne. 

Terécarophène. 

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RECHERCHES    SUR    LE    POUVOIR    ROTATOIRE.  §65 

On  connaît  ainsi  120  substances  actives  naturelles,  dont 
environ  60  tournent  à  gauche,  5o  à  droite  et  10  des  deux 
côtés  :  leurs  dérivés  actifs  sont  également  très -nom- 
breux. 

Ces  corps  cristallisent  le  plus  souvent  dans  un  système 
biaxe,  et  dans  ce  cas  il  n'y  a  plus  à  se  demander  s'ils  pos- 
sèdent le  pouvoir  rotatoire  cristallin.  Quelques-uns  ce- 
pendant sont  uniaxes,  et  parmi  ceux-ci  il  y  en  a  deux  qui 
possèdent  le  pouvoir  rotatoire  aussi  bien  à  l'état  cristallisé 
qu'en  dissolution  et  forment  la  troisième  classe  des  sub- 
stances actives.  Ce  sont  ;  le  sulfate  de  strychnine,  qui  cri- 
stallise dans  le  système  quadratique  (Des  Cloizeaux),  et 
l'alun  d'amylamine,  qui  cristallise  dans  le  système  régulier, 
(Lebel). 

Dans  les  corps  de  la  première  classe  à  pouvoir  rotatoire 
cristallin,  ce  pouvoir  doit  être  attribué  à  un  certain  groupe- 
ment des  molécules  qui  se  manifeste  aussi  par  l'hémiédrie. 
Mais,  dans  les  corps  de  la  seconde  classe,  le  pouvoir  rotatoire 
est  atomique,  c'est-à-dire  qu'il  lient  à  la  constitution  de  la 
molécule  elle-même,  puisqu'il  se  manifeste  même  dans  le 
corps  en  vapeur. 

Pour  expliquer  la  rotation,  il  faut  alors  admettre  une 
condensation  irrégulière  de  l'éther  autour  des  molécules  du 
corps,  et  cette  irrégularité  doit  tenir  à  la  construction  des 
molécules  elles-mêmes.  Suivant  M.  Pasteur,  on  doit  les  di- 
viser en  deux  classes  :  1**  celles  qui  peuvent  se  superposer 
à  leur  image  dans  un  miroir,  telles  que  les  molécules  cu- 
biques, et  1^  celles  dont  les  images  ne  leur  sont  pas  super- 
posables,  et  alors  elles  peuvent  se  présenter  sous  deux 
formes  opposées.  C'est  parmi  ces  dernières  que  se  rencontre 
le  pouvoir  rotatoire;  leurs  molécules  sont  constituées  d'une 
manière  dissymétrique. 

Il  en  résulte  alors  des  propriétés  optiques  analogues  à 
celles  des  substances  suivantes: 


566 


L.    LÀJVDOLT. 


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RECHERCHES    SUR    LE    POUVOIR    ROTÀTOIRE.  56y 

Tous  les  corps  actifs  ea  dissolution  ou  à  l'ëtat  liquide 
dévient  le  plan  de  polarisation  de  la  lumière  qui  les  tra- 
verse d'un  angle  a,  qui  est  proportionnel  à  F  épaisseur  /sous 
laquelle  on  les  observe,  à  la  densité  d  de  la  dissolution  et 
enfin  à  sa  concentration,  c'est-à-dire  au  poids  p  de  sub- 
stance active  contenue  dans  un  poids  i  oo  de  la  dissolution , 
de  sorte  qu'en  appelant  p  un  coefficient  constant,  on  a 

Idp 

^   lOO 

Le  coefficient  p  s'appelle  le  poiwoir  rotatoire  spécifique. 
C'est  celui  que  présenterait  le  corps  pur  (pourp  =  loo) 
s'il  avait  pour  densité  i  et  pour  épaisseur  l'unité 

lOOa 

^ ""  Idp' 

Cette  formule,  que  l'on  doit  à  Biot,  suppose  que  le  pou- 
voir rotatoire  est  constant.  Biot  avait  lui-même  constaté 
que  dans  certains  cas  cela  n'avait  pas  lieu.  Les  recherclies 
nouvelles  de  M.  Landolt  prouvent  que  ces  cas  sont  extrê- 
mement nombreux,  et  alors  il  y  a  lieu  de  se  demander  ce 
que  c'est  que  le  pouvoir  rotatoire  d'un  corps. 

Quand  on  cherche  à  le  déterminer  à  l'aide  de  dissolu- 
tions de  plus  en  plus  concentrées,  la  formule  précédente 
donne  pour  p  des  nombres  différents.  En  appelant  q  le 
tant  pour  loo  delà  substance  inactive  (c'est-à-dire  loo — p), 
les  expériences  peuvent  être  représentées  par  l'équation 
empirique  suivante  : 

p  r=  A.  -4-  B ^  -i-  C^% 

dans  laquelle  le  plus  souvent  C  est  nul. 

Le  coefficient  vrai  de  la  substance  est  jOq  =  A,  correspon- 
dant à  ^=  o,  c'est-à-dire  au  cas  où  la  substance  est  pure. 
Il  a  une  autre  limite  pioo»  correspondant  k  q  =  lOo,  c'est-à- 
dire  au  cas  où  la  dissolution  du  corps  est  infiniment  éten- 


568  h.    LANDOLT. 

due.  La  différence  est  plus  ou  moins  grande  et  tantôt  posi- 
tive, tantôt  négative,  suivant  le  corps;  dans  tous  les  cas, 
elle  varie  d'une  manière  continue  avec  g. 

Ainsi,  le  pouvoir  rotatoire  spécifique  p  augmente  à  me- 
sure que  la  dissolution  devient  plus  étendue  pour  le  tar- 
trate  d'élhyle  et  pour  Tessence  de  térébenthine.  Il  diminue 
dans  les  mêmes  circonstances  pour  le  camphre  et  pour  la 
nicotine.  Si  Ton  prend  pour  abscisses  le  tant  pour  loo 
de  la  substance  inactive  et  pour  ordonnée  le  pouvoir  rota- 
toire spécifique  p  calculé  par  la  formule  de  Biot,  les  varia- 
lions  de  p  sont  représentées  en  général  par  des  droites  ou 
par  des  lignes  à  courbures  très-peu  prononcées ,  excepté 
pour  la  dissolution  de  nicotine  dans  Teau,  qui  donne  une 
courbe  très-accentuée,  dont  la  convexité  est  tournée  vers 
l'axe  des  a:,  les  valeurs  de  p  étant  successivement  : 

Pour    q  

P 

Nous  ne  pouvons  reproduire  la  figure  de  ces  courbes, 
mais  nous  allons  donner  le  tableau  des  résultats  que 
M.  Landolt  a  obtenus  sur  différents  liquides  observés,  soit 
avec  l'appareil  de  Mitscherlich,  soit  avec  le  polaristrobo- 
mètre  de  Wild. 

On  n'en  peut  plus  douter,  après  avoir  lu  ce  tableau,  le 
pouvoir  rotatoire  spécifique  d'un  corps  en  dissolution  n'est 
pas  une  constante,  il  varie  avec  le  degré  de  concentration, 
tantôt  dans  un  sens,  tantôt  dans  un  autre.  Pour  le  con- 
naître, il  faut  faire  plusieurs  observations  sur  des  dissolu- 
tions de  plus  en  plus  étendues,  et  déterminer  au  moyen  de 
ces  observations  la  courbe  ou  la  formule  empirique  des 
pouvoirs  rotatoires.  Alors,  on  s'apercevra  que,  pour  toutes 
les  dissolutions  du  même  corps,  les  courbes  partent  d'un 
même  point  ou  que  toutes  les  formules  empiriques  ont 
sensiblement  le  même  terme  A,  indépendant  de  la  va- 
riable :  c'est  ce  terme  constant  qui  représente  le  pouvoir 


o 

20 

40 

60 

80 

100 

i6i°,3 

1 12 

89 

82 

77 

74.' 

RECHERCHES    SUR   LE   POUVOIR   ROTÀTOIRE.  56g 

rotatoire  spécifique  du  corps  pur,  quels  que  soient  les  dis- 
solvants qu'on  ait  employés  pour  l'observer  en  disso- 
lution • 


SUBSTANCES. 


Essence 
de  térébenthine 


Essence 
de  térébenthine 


Acétate 
d'éthyle. 


Camphre. 


Nicotine. 


SENS 

delà 

rotation. 


DISSOLVANTS. 


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Moyenne, 


Acide  acétique 

Éther  acétique 

Éthcr  acétique  monochloré. 

Droite. .  /  Benzol 

Diméthylaniline 

Esprit-de-bois 

Alcool 


Moyenne, 


o 


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Eau.  . 


Moyenne 


POUVOIR  ROTATOIRE  p 


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36,97 
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»4»i7 


14,16 


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8,27 

8,4^ 
8,09 


8,26 


55,5 
55,2 

55,7 

55,2 
55,8 
56,2 

54,4 


55,4 


161,55 
160, 83 
161,29 


161,06 


// 


38,79 

39,79 
40,72 


// 
i5,35 


If 
10,19 

'»»i9 

28,12 


41,8 
5o,8 

49  »o 
38,9 

40,9 
45,3 

4i»9 


n 


i38,59 
74, i3 


DIFFÉRENCE. 


o 


1,82 
2,82 

3,83 


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» 


4-  1,92 

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H-20,o3 


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-4,4 
-6,7 
-16,3 

— »4»9 
—10,9 

— 12,5 


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— 87,16 


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8III  LE  HIGROPHOHB  M  H.  HDGIIS; 

Pae  m.  a.  BERTIN. 


Après  avoir  admire  les  effets  merveilleux  du  téléphone 
de  Bell,  oa  songea  à  en  augmenter  la  puissance.  Comme 
les  mouvements  de  la  membrane  du  téléphone  sont  pro- 
duits par  les  passages  alternatifs  de  faibles  courants  induits 
dans  sou  électro-aimant,  la  première  idée  qui  vient  à  l'esprit 
est  de  lancer  dans  cet  électro-aimant  le  courant  d'une  pile, 
que  Ton  interrompra  ensuite  d'une  manière  convenable. 
Le  passage  du  courant  produira  une  attraction  de  la  mem- 
brane sans  la  faire  vibrer  et  le  téléphone  restera  muet; 
mais  la  suppression  du  courant  permettra  à  la  membrane 
de  revenir  à  sa  position  première,  et  il  en  résultera  une 
vibration  d'une  amplitude  relativement  grande,  qui  se  tra- 
duira par  un  bruit  d'une  grande  intensité.  Si,  par  exemple, 
on  produit  ces  interruptions  à  l'aide  d'une  râpe,  intro- 
duite dans  le  circuit,  et  sur  laquelle  on  frotte  l'un  des 
pôles  de  la  pile,  ce  frottement,  quoique  faible,  produit 
dans  le  téléphone  un  bruit  intense  qui  peut  être  entendu 
de  loin. 

Mais  ce  genre  d'interruption  est  grossier,  il  ne  peut  faire 
rendre  au  téléphone  que  des  bruits  confus.  Pour  faire  par- 
ler l'instrument,  il  faut  que  l'interrupteur  soit  suscep- 
tible de  vibrer  à  l'unisson  de  tous  les  sons  qu'il  reçoit  avec 
les  modifications  de  timbre  et  d'articulation  que  comporte 
la  parole  :  c'est  là  toute  la  difficulté.  La  complication 
extrême  des  phénomènes  de  la  voix  et  de  l'ouïe,  tels  que 
nous  les  connaissons,  nous  aurait  fait  autrefois  regarder 
cette  difficulté  comme  insurmontable.  Mais  le  téléphone 
d'abord,  le  phonographe  ensuite,  nous  avaient  montré  de- 
puis que  ces  mouvements  si  compliqués  trouvaient  leur 


SI]R    LE   MIGROPHOnE    DE   M.    H06BES.  Sjl 

résultante  dans  les  mouvements  simples  d^une  membrane 
ou  d'une  pointe.  On  pouvait  donc  espérer  que  Tinterrup- 
leur  synchrone  de  la  voix  s'obtiendrait  aussi  d'une  manière 
simple. 

Dans  une  première  tentative  déjà  bien  réussie,  M.  Edison 
avait  obtenu  cet  interrupteur  par  les  vibrations  d'une 
membrane  qui  ^pressant  contre  une  tige  de  plombagine 
intercalée  dans  le  circuit,  établissait  par  cette  tige  un 
contact  plus  ou  moins  parfait,  et  produisait  par  consé- 
quent des  variations  dans  l'intensité  du  courant. 

M.  Hughes,  l'heureux  inventeur  du  télégraphe  impri- 
mant, vient  de  donner  de  ce  même  problème  une  solu- 
tion encore  plus  simple.  Son  interrupteur,  auquel  il  adonné 
le  nom  de  microphone ^  a  été  présenté  à  l'Académie  des 
Sciences  par  M.  du  Moncel  dans  la  séance  du  i3  mai. 
IVl .  du  Moncel  ayant  eu  la  complaisance  de  l'expérimenter 
devant  moi,  je  l'ai  fait  reproduire  immédiatement  :  l'appa- 
reil est  tellement  simple  que  les  personnes  les  moins  expé- 
rimentées peuvent  en  monter  un  en  quelques  instants. 

Il  se  compose  d'une  petite  tige  de  charbon  de  cornue  ou 
de  plombagine,  tenue  verticale  entre  deux  dés  de  charbon 
de  cornue  collés  contre  une  planchette.  Les  deux  charbons 
sont  creusés  de  deux  petits  trous  ronds  ou  deux  crapau- 
dines  entre  lesquelles  se  place  la  tige,  dont  les  deux  bouts 
sont  taillés  en  pointe  mousse.  La  pointe  inférieure  repose 
dans  la  crapaudine  inférieure,  tandis  que  la  pointe  supé- 
rieure flotte  librement  sur  les  bords  du  trou  pratiqué  dans 
le  charbon  d'en  haut.  La  tige  est  donc  très-mobile,  et  elle 
établit  entre  les  deux  charbons  un  contact  variable,  quand 
elle  est  en  mouvement.  Ce  qu'il  y  a  d'extraordinaire,  c'est 
que  ce  mouvement  de  la  tige  soit  toujours  synchrone  de 
la  vibration  sonore  qu'elle  entend  et  qui  lui  est  transmise 
soit  par  l'air,  soit  par  la  planchette.  Si  donc  on  fait  passer 
dans  un  téléphone  le  courant  d'une  petite  pile  de  un  à 
quatre  éléments  Leclanché,  et  qu'on  intercale  dans  le  cir- 


Sj2  A.    BBRTIN. 

cuit  le  microphone,  la  tige  de  Tinterrupteur  se  mettra  à 
vibrer  quand  on  parlera  devant  la  planchette  (à  un  déci- 
mètre par  exemple),  et  il  en  résultera  des  variations  de 
contact  qui  seront  absolument  synchrones  de  1  émission  de 
la  voix  et  qui  se  traduiront  dans  le  téléphone  par  la  trans- 
mission de  la  parole  avec  une  netteté  absolue  et  une  in- 
tensité plus  grande  que  par  les  procédés   ordinaires.  La 
lecture  à  haute  voix  peut  être  entendue,  même  quand  le  pa- 
villon du  téléphone  n'est  pas  appliqué  tout  contre  l'oreille. 
La  planchette  qui  porte  les  charbons  ne  peut  pas  se  tenir 
verticale  sans  être  fixée  sur  une  planchette  horizontale  qui 
lui  sert  de  support.  Le  courant  transmet  distinctement  au 
téléphone  tous  les  bruits  qui  se  produisent  sur  cette  plan- 
chette, le   tic-tac  d'une  montre,  les  mouvements   d'une 
mouche  renfermée  dans  une  boite,  etc.,  etc.  En  passant  le 
doigt  sur  la  planchette,  qui  est  brute  et  par  conséquent 
rugueuse,  le  téléphone  rend  un  bruit  strident.  Il  est  bon, 
pour  amortir  les  oscillations  étrangères,  que  la  table  sur 
laquelle  repose  le  microphone  soit  recouverte  d'un  tapis, 
et  alors  le    simple  frottement  des  genoux  de  l'opérateur 
contre  les  pans  de  ce  tapis  occasionne  dans  le  téléphone  des 
bruissements  qui  se  mêlent  aux  autres  sons.  En  un  mot,  le 
microphone  rend  sensibles  les  sons  les  plus  faibles,  et  il 
n'est  pas  étonnant,  comme  l'annonce  M.  Hughes,  que  les 
médecins  songent  à  l'employer  pour  l'ausculta  lion. 

On  peut  employer,  pour  faire  la  tige  tremblante,  un  corps 
conducteur  quelconque.  Ce  qui  convient  le  mieux,  c'est  une 
baguette  de  graphite  (charbon  de  cornue)  ou  un  crayon  de 
plombagine, surtout,  dit  M.  Hughes,  si,  après  l'avoir  chauffé 
à  blanc,  on  le  refroidit  en  le  plongeant  dans  du  mercure. 
Mais  ces  crayons  sont  très-compactes,  et  je  n'ai  pas  trouvé 
que  leur  immersion  dans  le  mercure  modifiât  sensiblement 
leur  propriété  (*). 

(*)  C'est  un  de  ces  crayons  que  j'emploie  :  il  a  0^,002  de  diamètre  et 


SCJR    LE    MIGROPHOUE    de   m.    HUGHES.  678 

La  tîge  n'étant  pas  serrée  entre  les  charbons  établit  un 
contactîmparfaît  que  ses  vibrations  changent  d'une  certaine 
manière.  C'est  comme  si  Tou  introduisait  dans  le  circuit 
une  résistance  variable  ;  les  changements  de  cette  résistance 
seront  sensibles  si  la  résistance  de  la  ligne  est  petite  ;  mais 
on  comprend  qu'ils  ne  le  seraient  plus  si  cette  résistance 
était  grande,  et  le  microphone  cesserait  alors  de  fonc- 
tionner; j'ai  trouvé,  en  effet,  que  le  téléphone  ne  transmet 
plus  le  son  de  la  montre,  quand  on  introduit  dans  le  circuit 
une  résistance  de  2000  unités  Siemens  ou  de  200  kilomè- 
tres defil  télégraphique.  Suivant  M.  Hughes,  dont  l'appa- 
reil est  sans  doute  plus  parfait,  la  sensibilité  du  micro- 
phone serait  cinq  fois  plus  grande  5  mais  il  doit  y  avoir 
une  limite,  quelle  qu'elle  soit. 

Dans  une  nouvelle  lettre  communiquée  à  l'Académie 
par  M.  du  Moncel  dans  la  séance  du  20  mai,  M.  Hughes 
annonce  que  le  microphone  parle  avec  une  intensité  plus 
grande  que  celle  du  phonographe,  quand  on  intercale  dans 
le  circuit  une  petite  bobine  d'induction  et  qu'alors  il  pro- 
page le  son  à  toute  distance.  Il  annonce  également  qu'eu 
substituant  au  téléphone  un  galvanomètre,  le  microphone 
devient  un  thermoscope  très-sensible  5  mais  il  n'indique 
pas  comment  il  faut  disposer  l'appareil  dans  ces  deux  cas. 


o^jOS  de  hauteur.  Les  deux  dés  en  charbon  ont  o™,oi5  de  côté.  Les  deux 
planchettes  proviennent  d'une  petite  caisse  d'emballage  ;  elles  ont  o™,  1 0  de 
long,  o™,o5  de  large,  o™,oo5  d'épaisseur  et  ne  sont  pas  rabotées. 


5^6  TABLE   DES    MÀTlàAES. 

««  '        •  11  1  Pagei. 

Mémoire  sur  le  dosage  du  maDganèse,  du  plomb,  du 
cuivre,  du  zinc  et  du  nickel,  et  sur  l'analyse  des  alliages 
de  ces  métaux  ;  par  M.  Alfeid  Riche 5o8 

Recherches  sur  la  fermentation  intracellulaire  des  végé- 
taux; par  M.  A.  Muntz 543 

Sur  le  microphone  de  M*  Hughes;  par  M.  A.  Beetin.  . .  .     670 


FIN  DE  LA  TABLE  DES  MATIÈRES  DU  TOME  XII  (5^  SÉRIE). 


I  ERRATUM, 


Page  88,  ligne  31,  rétablir  ainsi  la  phrase  commencée: 

A  la  température  d'ébullition  correspond  un  état  particulier  de  la  sur- 
face qui  s'annonce  longtemps  à  Tayance  par  une  variation  plus  rapide  de 
la  tension  et  qui  peut  même,  comme  on  sait,  se  traduire  par  une  ten- 
sion superficielle  nulle. 


PARIS.  -  IMPRIMERIE  DE  GAUTHIER-VILLARS, 

Quai  des  Augustins,  55. 


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