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ANNALES
DE L'ACADÉMIE D'ARCHÉOLOGIE DE BELGIQUI
ANNALES
L'ACADÉMIE D'ARCHÉOLOGIE
BE1.G10UE
XXII
2* SÉRIE, TOME DEUXIÈME.
ANVERS,
IMPRIMERIE J.-E. BUSCHMANN, RUE DES ISRAÉLITES.
! 866.
LIBRAI
LES
CATACOMBES DE ROME.
MÉMOIRE
M. EDMOND REUSENS,
Membre correspondant à Louvain.
Les catacombes de la campagne romaine sont les monuments les
plus anciens et les plus respectables qui se présentent à l'étude
de l'archéologue chrétien. Depuis leur découverte, qui eut lieu
vers la fin du seizième siècle , la question de leur origine a toujours
vivement préoccupé les savants. Bien longtemps on n'a vu , dans
ces cimetières souterrains , que des sablonnières ou des carrières
creusées par les Romains avant la naissance du Sauveur, et
utilisées par les premiers fidèles pour y ensevelir leurs morts.
Cette assertion , que nous avons tous rencontrée mille fois dans
des ouvrages, très-recommandables d'ailleurs par le fond et par
la forme, ne peut plus être soutenue de nos jours. Les recher-
ches et les explorations auxquelles se sont livrés, depuis environ
un quart de siècle , des hommes consciencieux et érudits , ont
démontré que les catacombes de Rome sont l'œuvre exclusive
des chrétiens. L'on peut dire, sans exagération aucune, que,
Commissaires rapporteurs : MM. G. Hagemans et F. Ourlet.
XXIX XXII 1
— 6 —
par leurs découvertes et leurs publications faites dans ces dernières
années, le P. Marchi et les deux frères de Rossi ont donné une
solution définitive à la question de l'origine des cimetières souter-
rains qu'on rencontre en si grand nombre dans les environs de
la ville éternelle.
Les travaux et les écrits de ces savants romains et d'autres
archéologues modernes nous ont servi de guide dans l'élude des
catacombes. Parmi ces derniers, nous aimons à citer l'abbé
Martigny dont l'ouvrage , intitulé Dictionnaire des antiquités
chrétiennes, nous a été d'un grand secours.
I. — DESCRIPTION DES CATACOMBES.
Les catacombes de Rome sont des souterrains creusés par les
chrétiens des premiers siècles pour y ensevelir leurs morts , pour
y exercer les cérémonies du culte et pour y trouver une retraite
dans les temps de persécution.
Les auteurs ecclésiastiques ne sont pas d'accord sur l'étymolo-
gie du mot catacombes. Les uns le font dériver des mots grecs
kcltci, sous, et kv/i/3o , excavation; d'autres de Tvfifios, tombeau,
tumulus, ou de k< //./?/;, vide d'une barque. Le P. Marchi lui donne
pour racine le verbe latin cumbo qui, dans ses composés accumbo,
decumbo, signifie être couché.
La dénomination de catacombes, pour désigner l'ensemble des
cimetières pratiqués sous le sol de la campagne romaine, n'était
pas en usage pendant les premiers siècles. On appelait alors ad
catacumbas la partie du cimetière de Saint-Calliste , près de
l'église de Saint-Sébastien où, selon une pieuse tradition, les
Romains avaient déposé momentanément les corps des apôtres
S. Pierre et S. Paul, pour les soustraire aux recherches des
chrétiens d'Orient qui étaient venus à Rome pour les enlever. Ce
n'est qu'an moyen âge , que le nom de catacombes fut donné à
L1L
tous les cimetières souterrains de Rome indistinctement, et même
à ceux qui ont été trouvés dans d'autres localités.
Les catacombes d'après la définition que nous en avons donnée,
avaient trois destinations :
4° La première et la principale était de servir de cimetières
aux chrétiens. C'est pour cette raison qu'elles forment avant tout
un vaste réseau de galeries destinées, non pas à servir de passage
ou de communication d'un lieu à un autre , mais à recevoir, dans
leurs parois, des tombeaux, disposés les uns au-dessous des autres,
par rangs plus ou moins multipliés, depuis trois jusqu'à douze,
selon le plus ou moins d'élévation de la galerie, et le plus ou moins
de solidité de la roche. D'ordinaire, les corps étaient placés dans
des niches oblongues, appelées locidi, et fermées par des tablettes
de marbre, ou par des briques (ordinairement au nombre de trois) ci-
mentées exactement avec de la chaux , afin que l'odeur des corps en
putréfaction ne pût s'en échapper. Les figures suivantes donneront
une idée exacte de la manière dont les tombeaux étaient scellés et
les corps déposés dans les niches sépulcrales.
Loculus'fermé par trois plaques en terre cuite.
Loculus en partie ouvert.
8 —
CYR/AC/tDVLCISSIMA- DEPOSim
IN PAGE VIXIT.ANNOSXXXV^
.IDI3VS. MARTIIS
l.oculus fermé par une plaque en marbre.
Ce qui nous frappe le plus, lorsque nous examinons attentive-
ment le plan des catacombes, c'est la régularité que présentent
les galeries. Quelques-unes courent en ligne droite sur une longueur
assez considérable et sont coupées, à des distances irrégulières,
par d'autres allées qui le sont à leur tour par de nouveaux
embranchements. Elles sont si étroites que d'ordinaire deux
personnes ne pourraient y marcher de front. C'est un véritable
labyrinthe où il serait téméraire et dangereux de se risquer sans
guide.
A ces galeries viennent aboutir, en plusieurs endroits, des
chambres sépulcrales que l'on appelle cubicula. Ce sont des espèces
de caveaux de famille , au fond desquels se trouve assez souvent ,
sous un monument arqué, nommé arcosolium !, un tombeau ren-
fermant les restes mortels de quelque illustre martyr. Ces
monuments (que l'on rencontre cependant aussi , en assez grand
nombre , dans les galeries comme tombeaux de simples fidèles
élevés à leurs propres frais) étaient construits habituellement dans
les cubicula par toute la communauté chrétienne ; ils servaient
d'autel lorsqu'au jour anniversaire du martyre, les chrétiens
venaient près de cette tombe tenir les assemblées, appelées stations.
La forme des cubicula est très-variée; il en est de circulaires,
' Voyez ci-dessous la ligure vis-à-vis de la page 11, représentant la vue de la basilique
souterraine du cimetière de Sainte-Agnès. On y trouve quatre de ces monuments arqués
ou arcosolia.
de semi-circulaires, d'oclogones, d'hexagones, de pentagones;
cependant la plupart sont carrés. Voici la vue perspective d'un
cubiculum carré, sans arcosoliam :
Cubiculum ou chambre sépulcrale.
Il est des cubicula qui contiennent jusqu'à 'soixante-dix loculi ,
rangés en dix étages. Les premiers chrétiens tenaient^beaucoup à
ce que leur sépulture fût placée le plus près possible de celle des
saints. C'est ce qu'ils appelaient être enseveli adjnartyres', ad,
ante, supra ou rétro sanctos. La pieuse dévotion'de reposer dans
le voisinage du tombeau d'un martyr était telle que, quand la
chambre sépulcrale n'était pas assez spacieuse pour recevoir tous
les membres d'une seule famille, on creusait des loculi^àans les
galeries, et l'on y plaçait une inscription pour dire "qu'ils appar-
tenaientàla sépulture collective du cubiculum conligu. LeP. Marchi,
— 10 —
dans son excellent ouvrage sur les catacombes * , en cite des
exemples. D'autres fois quand toutes les parois étaient garnies de
tombeaux, on ne se faisait aucun scrupule d'entamer, pour se
creuser de nouvelles niches, les décorations dont les chambres étaient
ornées. C'est une des causes qui nous ont fait perdre un grand
nombre de peintures murales des plus remarquables appartenant
pour le moins au deuxième siècle.
2° La seconde destination que les chrétiens ont donnée aux
catacombes, était de servir de lieu de réunion pour y célébrer les
cérémonies du culte , toutes les fois que , par les édits des empereurs ,
ils étaient empêchés de le faire au dehors.
Les cryptes souterraines des catacombes2 n'avaient été creusées
primitivement que pour servir à l'inhumation des chrétiens. Les
persécutions cruelles et sanglantes que l'Eglise eut à souffrir,
pendant les trois premiers siècles , furent cause que les catacombes
devinrent bientôt aussi les lieux où les fidèles se réunissaient pour
la célébration des Saints Mystères. C'est pour tenir leurs assem-
blées religieuses, que les premiers chrétiens ont construit, dans
leurs cimetières souterrains , ces oratoires que l'on désigne ordi-
nairement sous le nom iïéijlises ou de basiliques des catacombes.
• Ces églises, dit Martigny, sont d'une grande simplicité; quel-
quefois elles sont revêtues de stuc, décorées de peintures, de
colonnes, de pilastres et d'autres ornements sculptés dans la roche
elle-même. Dans les parois latérales, sont disposés parallèlement
des tombeaux sur i ou 5 rangs , et même plus , suivant l'élévation
1 Page 101.
* D'après Michel de Hossi (lloma solterranea, l, Analisi geologica cd archilcttonica ,
p. 23 et suivantes) le mot cryplae , au pluriel , désigne l'ensemble des souterrains , c'est-
à-dire tant les galeries que les chambres sépulcrales , et crypla , au singulier , l'une ou
l'autre à volonté. Selon le P. Marchi et les auteurs plus anciens, ce terme aurait été
en usage pour indiquer les petits oratoires où les fidèles se réunissaient, à certaines solen-
nités , pour célébrer les Saints Mystères. C'est , dans ce dernier sens , qu'il est commu-
nément employé par les auteurs qui ont écrit sur les catacombes.
,K . pi
rzii t
P/j.L) dune hasiZLqzie du Cimclici-c de Scubrvt&-Àqriès \
Cmpe d'une partie </<■ la même basilique
• jrchéologie deBelgiqu-
— 11 —
de la crypte. Un arcosolïum , qui servait ordinairement d'autel,
se trouve au fond de l'abside , à moins que cette place ne soit occu-
pée par la chaire du pontife: auquel cas , ou Yarcosolium manque
ou il se trouve trop élevé pour que les Saints Mystères aient pu y
être célébrés .... Ces chapelles souterraines ont une élévation bien
supérieure à celles des corridors ou voies sépulcrales , et à celles
des simples chambres funéraires appelées cubicula ; . . . elles sont
disposées de façon à se prêter au déploiement des cérémonies , tel
qu'il pouvait être en de pareils lieux et en de pareils temps, et aussi
à admettre -des réunions considérables, lesquelles néanmoins ne
pouvaient guère dépasser le nombre de soixante-dix ou quatre-vingts
fidèles.» Dictionnaire des antiquités chrétiennes , art. Basiliques.
Pour donner une idée claire et précise de ces basiliques souterrai-
nes, nous reproduisons, d'après le P.Marchi et d'après Perret,
le plan et la coupe d'une de ces chapelles souterraines, découverte
en 1842 au cimetière de Ste- Agnès , et qui, selon toutes les
probabilités, est antérieure au IIIe siècle. Nos lecteurs nous sauront
gré de leur mettre sous les yeux ce plan publié par le P. Marchi
et par Louis Perret. Ces deux ouvrages ne se trouvent probable-
ment pas dans beaucoup de bibliothèques belges.
On arrive à la chapelle par deux galeries I et G. Ces deux
entrées rappellent la discipline de l'église sur la séparation des
sexes. L'ensemble de l'oratoire se divise en quatre parties princi-
pales: le presbytère K, la salle J destinée aux hommes, la salle
0 destinée aux femmes, et enfin la salle H.
Le presbytère K était exclusivement réservé aux membres du
clergé. Au centre s'élève , taillé dans le tuf de la paroi, le siège L,
qui servait évidemment au pontife l. De chaque côté du presby-
4 La position du siège pontifical était la même dans les anciennes basiliques. Dans les
églises basilicales de la ville de Rome , la chaire du pontife se trouve encore aujourd'hui
au fond de l'abside ; dans ce cas , l'autel est placé au milieu du transsept.
— 12 —
tère, des bancs M, également taillés dans le tuf (dans l'intérieur
desquels sont pratiqués des loculi (b) pour la sépulture d'enfants)
sont adossés au pourtour et destinés aux assistants du pontife.
L'autel se plaçait au milieu. Le presbytère contient trois a rcosoUa (a);
il est séparé de la salle J par deux colonnes (c) sculptées dans le
tuf et revêtues de stuc.
La salle J est divisée en deux parties égales par deux piliers
supportant un arc-doubleau. Chacune de ces parties renferme un
arcosolium.
La salle 0, qui contient quatre arcosollo faj, est divisée en deux
parties presque égales , par deux colonnes adossées aux parois et
surmontées d'un arc. On voit , à l'endroit P , des vestiges d'un
pavé en marbre.
La salle H a deux arcosolia (a). Elle est coupée en deux parties
par la galerie IG. C'était une sorte de vestibule destiné, sans doute,
aux catéchumènes et aux pénitents.
Au-dessus de la galerie , au point d'intersection N de la
galerie GI et des entrées des salles JO, s'ouvre un luminaire,
luminare cryptae. On appelle ainsi l'ouverture verticale ou oblique,
d'environ un mètre carré , pratiquée dans la voûte et qui donnait sur
la campagne , ou plutôt dans les jardins et les vignes possédés
par des chrétiens. Cette ouverture servait à faire pénétrer l'air et
le jour jusque dans les galeries. A l'extérieur elle était entourée
d'un petit mur qui empêchait l'eau de pluie d'y entraîner des
alluvions. On ne peut mieux comparer ces luminaires qu'à nos
cheminées. Lorsqu'ils traversent des couches de tuf granulaire ou
lithoïde , ils sont sans revêtement ; s'ils rencontrent des couches
sablonneuses, les parois en sont soutenues par un ouvrage de ma-
çonnerie. Voyez vis-à-vis de la page 20 la figure représentant la
coupe d'une catacombe, à la lettre b.
Les chambres sépulcrales éclairées par un luminaire s'appelaient
cubicula clara. Dans les endroits qui ne recevaient pas de jour ,
— 13 —
on se servait de petites lampes destinées à guider la marche des
fidèles et à éclairer les cérémonies religieuses qui se pratiquaient
dans ces souterrains.
3° La troisième destination des catacombes était de servir de
retraite au souverain pontife , au clergé et aux fidèles dans les
temps de persécution.
S. Alexandre y trouva un asile au commencement du deuxième
siècle. Vers l'an 220 , S. Calliste séjourna quelque temps dans
le cimetière qu'il avait l'ait restaurer , et qui aujourd'hui porte
encore son nom. S. Etienne et S. Sixte II subirent le martyre
dans les catacombes , le premier en 257 , le second l'année sui-
vante. S. Caïus s'y tint caché pendant environ huit ans.
Qu'on nous permette en terminant ce paragraphe, de mettre sous
les yeux du lecteur la description que saint Jérôme dans son
Commentaire sur Ézéchiel , nous a laissée des catacombes ; elle
est encore en tout point exacte de nos jours : ■ Lorsque jeune
encore je me trouvais à Rome , pour m'y instruire aux belles let-
tres, j'avais coutume, le dimanche, de parcourir, avec des condis-
ciples de mon âge, les tombeaux des apôtres et des martyrs; et
souvent je descendais dans les cryptes. Ces excavations sont creu-
sées dans le sol , à une profondeur considérable. A droite et à
gauche , dans les murs , se trouvent les sépultures. L'obscurité y est
si épaisse qu'on croirait presque à la réalisation des paroles du
prophète : les vivants descendent dans l'enfer ] (Ps. liv, 46).
Quelques rares rayons de lumière tombent de l'orifice supérieur et
adoucissent un peu l'horreur de ces ténèbres ; on s'imaginerait
que c'est bien plutôt une simple ouverture qu'une fenêtre , qui
livre passage au jour. On n'y peut d'ailleurs avancer qu'à petits
' Dans le langage des Livres Saints les mots enfer , m/èrrcws^et inferi , signifient
le plus souvent tombeau. C'est en ce sens qu'il est employé dans l'endroit cité par
S. Jérôme.
— 14 —
pas. Une nuit profonde règne de toutes parts , et fait songer au
vers de Virgile :
Partout l'horreur, partout aussi le silence jette l'épouvante '.
II. — ORIGINE DES CATACOMBES.
Dans tous les temps , la sépulture des chrétiens a été un acte
religieux , accompagné des prières de l'Église. Mais c'est surtout
dans la primitive église, que l'ensevelissement des corps des mar-
tyrs et des fidèles était considéré comme un des plus stricts devoirs
que les vivants avaient à remplir envers leurs frères trépassés.
Du temps de S. Cyprien, les prêtres de Rome, écrivant au clergé
de Cartilage , insistèrent sur cette obligation : Quoi maximum
est, corpora martyrum aut ceterorum , si non sepeliantur ,
grande periculum imminet eis , quibus incumbit hoc opus.
(S. Cyprien, Oper. éd. Balus , Epist. h.). S. Ambroise allait
plus loin encore : Humandis fulelium reliquiis , dit-il , vasa
ecclesiae etiam initiata confringere, conflare , vendere licet.
(De officiis, n, § 1-42). Pour procurer même aux plus pauvres une
sépulture convenable , on avait formé des associations, dont les
membres payaient chaque semaine leur obole ; la somme recueillie
était affectée à la célébration des funérailles de ceux qui man-
quaient de ressources.
Ce respect pour les morts était basé sur la foi vive du dogme
' « Dum essem Romae puer et liberalibus studiis erudirer , solebam cum ceteris
» ejusdem aetalis et propositi , diebus dominicis , sepulcra apostolorum et martyrum
•< circuire , crebroque cryptas ingredi , quae in terrarum profunda defossae , ex utraque
» parte ingredientium , per parietes liabent corpora sepultorum, et ita obscura sunt
» omnia , ut prope modum illud propheticum complealur : Descendant ad infernum
« viventes (Ps. liv , 16), et raro desupcr lumen admissum borrorem temperet tene-
» brarum , ut non tam fenestram quam foramen dimissi luminis putes : rursumque pede-
■ tentim arceditur, et caeca nocte circumdatis illud Virgilianum proponitur :
« Horror unique animos , simul ipsa silentia terrent. »
Aen. II, 755.
— 15 —
de la résurrection de la chair ; il avait pour motif non pas une
importance exagérée que les fidèles auraient attachée aux restes
mortels de leurs frères , mais la pensée que ces corps appartiennent
à Dieu, et qu'un jour ils doivent être rendus à la vie, transformés,
glorieux et immortels.
Les premiers chrétiens abhorraient la coutume des païens qui
brûlaient les cadavres et les profanaient par des cérémonies super-
stitieuses. Dès qu'un chrétien avait rendu le dernier soupir, ses
proches parents lui fermaient les yeux et la bouche. Ensuite on
lavait le corps et on l'oignait avec de la myrrhe et d'autres aro-
mates, pour le préserver de la corruption. L'onction faite , on
enveloppait le cadavre d'un linceul qui s'attachait avec des bande-
lettes, soit pour que les aromates adhérassent plus parfaitement
aux chairs , soit pour empêcher le contact de l'air extérieur avec
le corps. Très-souvent on étendait une couche de chaux sur toute
la surface du corps. Cet enduit faisait autour du cadavre une sorte
de cercueil artificiel qui empêchait l'odeur résultant de la putré-
faction de s'échapper au dehors.
L'esprit de charité et d'union qui régnait parmi les premiers
fidèles, et qui faisait qu'ils se considéraient tous comme frères en
Jésus-Christ , les porta , dès le principe , à se créer des cime-
tières communs , tout-à-fait distincts des cimetières païens.
C'est dans les honneurs rendus aux restes mortels des défunts ,
dans les sentiments de fraternité qui animaient les premiers chré-
tiens et dans le désir de soustraire les tombeaux aux regards et
aux profanations des gentils que nous trouvons la raison de l'exis-
tence des cimetières souterrains ou catacombes.
Si l'on excepte l'Afrique où , dès les premiers siècles , on trouve
des areae ou sépultures chrétiennes à fleur de terre , tous les pays
convertis au christianisme offrent des nécropoles creusées sous
terre , qui portaient le nom de cryptae , et quelquefois aussi celui
tfarenarium ou arenaria. Il en existe encore aujourd'hui à Rome,
— 16 —
à Naples, à Chiusi, à Milan et à Alexandrie d'Egypte l. 11 y
en avait autrefois en Sicile, à Messine et à Syracuse; en Espagne,
à Elvire , à Saragosse et à Séville ; dans les Gaules , à Agaune ,
à Cologne et à Trêves. (Voyez Martigny, Dict. desantiq. chrét.,
art. Catacombes et Sépultures.)
Nous ne nous occuperons , dans notre exposé , que des cata-
combes de Rome , parce qu'elles sont les principales , les mieux
explorées et les plus illustres par les souvenirs historiques qui s'y
rattachent En effet, on peut les appeler, sans exagération aucune,
le berceau du christianisme.
La première question qui se présente à notre examen, c'est la
suivante : Les catacombes de Rome sont-elles V œuvre exclusive
des chrétiens? Ont-elles été creusées par eux principalement pour
y ensevelir les corps des fidèles; ou bien, ne doit-on y voir que
d'anciennes carrières, latomiae , ou des saisonnières abandonnées,
arenariae , pratiquées par les païens dans le but d'en extraire le
sable et d'autres matériaux utiles pour les constructions, et que
les chrétiens se seraient appropriées pour en faire leurs cimetières ,
et y tenir leurs assemblées religieuses pendant les persécutions?
A cette question capitale nous répondrons qu'à l'exception de
quelques petites parties d'anciennes sablonnières , appropriées par
les premiers fidèles pour en faire des lieux de sépulture, toutes
les autres excavations souterraines de la campagne de Rome ont
été creusées par les chrétiens seuls , dans le but prémédité d'y
ensevelir leurs morts et d'y pratiquer leur culte dans certaines
parties plus spacieuses disposées à cet effet.
Nous n'ignorons pas que , pendant plus de deux siècles , l'opi-
nion qui ne voit dans les catacombes , que des carrières et des
sablonnières utilisées par les fidèles, a été admise par plusieurs
' Voyez la description d'une catacombe découverte tout récemment à Alexandrie ,
dans le BuUetino ai areheologia cristiana , publié par le chevalier de Rossi , 1865 ,
pp. 57-64.
— 17 —
savants. Il faut cependant remarquer que tous les auteurs qu'on
cite comme ayant défendu ce système, ne se sont pas prononcés
catégoriquement sur la question grave et compliquée qui nous
occupe. Ainsi , par exemple , on s'appuyerait en vain sur le senti-
ment de Bosio; car, dans son grand ouvrage sur les catacombes,
il ne touche en aucun point la controverse agitée plus tard ;
ensuite il distingue clairement entre les saisonnières , grotte
arenarie , et les galeries sépulcrales, vie cemeleriali. fRoma sotl.
p. 4-91). Après Bosio (mort en 1629), les savants jusqu'à Buo-
narotli ont assez généralement affirmé, sur la foi de quelques
textes équivoques , que les catacombes de la ville éternelle avaient
une origine profane. Au commencement du dix-huitième siècle ,
Buonarotti et Boldetli reconnurent dans les catacombes des sablon-
nières agrandies par les chrétiens. Un peu plus tard , Lupi tira
les conséquences des principes posés par ses devanciers; il attribua
au travail des chrétiens la plus grande partie des excavations
souterraines. Chose remarquable, ces trois derniers avaient exploré
soigneusement la nécropole chrétienne, et y avaient, pour ainsi
dire, passé une bonne partie de leur vie, en dirigeant les fouilles
qu'on y faisait de leur temps. Boltari , dans sa Roma sotterranea ,
publiée de 1737 à 175-4, soutient que les catacombes ont été creu-
sées dans un but mercantile pour en extraire de la pouzzolane , et
qu'elles ont été converties en cimetières par les chrétiens. Séroux-
d'Agincourt , Raoul-Rochette et Rôstell ont embrassé , avec
quelques modifications, la théorie de Bottari, théorie complètement
abandonnée de nos jours , depuis que le P. Marchi et le chevalier
de Rossi ont soumis à un examen scientifique et approfondi la
question de l'origine des catacombes. Nous exposerons rapidement
les raisons décisives qu'ils allèguent pour prouver que les chrétiens
seuls ont pratiqué la plupart des excavations souterraines dans
l'intention d'en faire des lieux de sépulture et de prière. Leur
assertion s'établit par deux arguments principaux , dont l'un est
— 18 —
tiré de l'examen géologique du terrain , et l'autre de celui de la
structure ou des formes architectoniques des souterrains eux-
mêmes '.
1° Avant de développer le premier argument, il est indispen-
sable de bien connaître la constitution du sol de la campagne
romaine, c'est-à-dire les différentes roches, les terrains divers
qu'on y trouve.
Le sol de la ville de Rome et des environs est couvert, à une
assez grande profondeur, de roches volcaniques; ça et là, on
rencontre aussi des couches de sable marin et fluviatile. On ne
connaît guère que deux ou trois cimetières qui traversent des gise-
ments de ces deux dernières natures. La plupart sont creusées dans
le sol volcanique. Les roches qui composent ce sol , portent le nom
de tuf. On peut en distinguer trois espèces principales, savoir: le
tuf lithoïde , le tuf granulaire et le tuf friable; ce dernier pour-
rait , en quelque sorte , porter aussi le nom de sable. Le tuf
lithoïde est une véritable pierre , roussâtre et légère. Il très-propre
à être employé dans les constructions. Les anciens le nommaient
lapis ruber et saxum quadratum. Le tuf granulaire est moins
cohérent ; c'est un mélange de petites pierres et de matières sablon-
neuses; il tient le milieu entre le tuf lithoïde et le tuf friable. On
appelle pouzzolane la matière sablonneuse renfermée dans le tuf
granulaire et friable. « Sia granulaire , sia friab'de il tufa , se e
composto di materie aride , non terrose , e in piccoli grani , esso
e senipre quello, che chiamamo pozzolana » (Michel de Rossi,
ouv. cit., p. 19.) Les païens n'exploitaient que le tuf lithoïde et
le tuf friable : celui-ci, pour l'employer dans la préparation du
ciment; celui-là, pour en tirer des moellons. Ils négligeaient
1 Les arguments dont nous nous servons pour prouver notre thèse, sont tirés du
savant mémoire de Michel Etienne de Rossi (frère du chevalier Jean-Baptiste) intitulé :
Analisi geologica ed archiletlonica , et publié comme appendice du tome 1 de la
lioma sotterranea rrisliana, éditée à Rome en 1864.
— 19 —
entièrement le tuf granulaire, parce que d'un côté il n'avait pas la
consistance nécessaire pour pouvoir être employé comme pierre
dans les grandes constructions; et que de l'autre, il était trop
adhérent pour pouvoir être facilement réduit en poudre, et utilisé
dans les bâtisses.
Il résulte de ces considérations que , dans l'intérêt de leur
industrie , les païens , propriétaires des sablonnières et des carriè-
res, devaient rechercher les gisements de tuf lithoïile et friable,
et de préférence y faire des extractions.
Si les catacombes, comme on l'a prétendu autrefois, étaient
d'anciennes arenariae ou des latomies , elles devraient néces-
sairement suivre les veines de tuf lilhoïde ou friable; et ceux qui
les auraient exploitées , se seraient efforcés d'en extraire la plus
grande quantité possible de matériaux utiles. Or que voyons-nous
dans les catacombes? Les chrétiens laissent constamment en place
les couches les plus recherchées par les païens : les roches de tuf
friable, à cause de leur défaut d'adhérence qui les rendait impropres
à l'usage auquel ils destinaient ces souterrains; et celles de tuf
lithoïde, parce que, à raison de leur dureté excessive, elles
exigeaient un travail trop long et trop pénible. Ils montrent une
préférence marquée pour les roches composées de tuf granulaire;
car, outre la facilité que celles-ci offrent pour y pratiquer des
galeries, l'action de l'air leur donne en peu de temps la solidité
de la pierre , de sorte qu'on peut creuser des loculi dans leurs
parois, sans crainte de provoquer des éboulements.
2<> L'examen des formes architecloniques des catacombes nous
fournit aussi une preuve concluante pour établir qu'elles ont été
creusées par les chrétiens , principalement pour en faire des lieux
de sépulture. Ce sont partout des galeries longues , étroites x et
1 « Ce qui caractérise principalement les hypogées chrétiens, c'est que les allées sont
extrêmement étroites. Les moins larges , qui ne sont pas rares, ont de 55 à 70 centi-
— 20 —
profondes , s'entrecoupant à angle droit , et auxquelles aboutis-
sent les cubicula. Bien souvent elles sont situées à différents
niveaux, et passent les unes au-dessous des autres1. Leur
structure démontre clairement que la seule pensée qui dirigea
la main du fossoyeur, était de trouver le plus d'espace possible
pour ouvrir des niches funéraires. Leurs parois sont verticales,
tandis que celles des sablonnières décrivent une demi-ellipse con-
jointement avec la voûte. Cette dernière forme ne se prêtait en
aucune manière pour recevoir des loculi , d'aulant plus que,
dans les sablonnières, les allées avaient une très-grande largeur
(2 ou 3 mètres) ; puis elles suivaient les couches les plus utiles et
les plus productives, et, par là, décrivaient le plus souvent des
courbes. Le principe qui guidait les propriétaires, était le suivant :
Extraire le plus de matériaux au moins de frais possible.
Les fossoyeurs chrétiens 2 rencontraient-ils par hasard des
veines de tuf litlioïde on friable , ils rétrécissaient aussitôt les
galeries; celles-ci ne reprennent leurs dimensions habituelles,
qu'après avoir traversé ces gisements de pierre ou de sable. Ils
n'émoussaient jamais les angles résultant de l'intersection des
galeries, comme cela se pratiquait dans les sablonnières pour
faciliter l'exploitation ; et afin de ne pas nuire à la solidité des
voûtes, ils se contentaient de creuser, en cet endroit, de petites
niches destinées à recevoir des tombes d'enfants.
Lorsque, dans des cas exceptionnels, les chrétiens ont utilisé
mètres; leur largeur moyenne est de 75 à 90 centimètres; il en est peu qui aient un
mètre; et celles qui atteignent 1 mètre 20 centimètres, ou 1 mètre et demi , sont les
plus rares. » MlCH. DE Kossi , ouv. cit., p. 30.
' On pourra juger de la disposition relative des différents étages par la coupe d'une
partie du cimetière de Saint-Calliste , que nous plaçons ici en regard du texte.
* Ou appelait fossoyeurs , fussures , ceux qui étaient chargés du soin des sépultures
dans les catacombes. L'opinion de certains auteurs qui prétendent que les fossoyeurs
formaient un ordre à part dans la primitive Eglise , comme les acolythes et les exorcistes,
ne manque pas d'arguments solides. Voyez Maktigny , Dictionn. des anliq. chrét., art.
Fossorcs .
Mêtrcf-r-
Wax/cr Anvers
COUPE D'UNE CATACOMBE.
lOuu.N ce ÙeéMM uou^dvo.ut -iJuul, ?'apv ià fev pkvuclleo pulU'Lôeo pat ?
DEROSST^eà coup*** faï**ô <U*Mà iei àiffixento cUx^oo cVt tu. ici! on De
tSatut-dxL'l'ioU- pou. iWuf* une iDw 3c l'a ...a.itJic cW av;)a IV. u-J
1 Plan ait étage supérieui
'1 Deuxième plan .
.3 Troisième plan .
4 Quatrième plan .
~~> Cinquième plan .
AB
CD
EF
GH
.JK
Coupes des galeries au. > di0è)
' étages.
—•m mm Loculi ou tombeaux
ri ÂrcosoUa ou tombes arquées.
h Luminaire aboutissant au 2"u' eiage .
C Entrées de galeries et de chambres sépulcrales.
d Escalier conduisant au premier plan .
e , au 2 '".''pi un .
f du. """ iiua"."pLin.
g du. V." au Ve plan
7; (lu U"'' 'an .')'!'.' 'plan.
V Via Appia
T Riuneulun tombeau ptu/rii SUrU noie .\ppu-n ne
Annales de l'Académie d'archéologie de Belgique, tYXri,2e3éne. t il p.20.
— 21 —
d'anciennes arenariae , ils y ont fait , au moyen rie constructions
en briques, des parois verticales pour y placer les tombeaux. On
pourra se convaincre de la vérité de celte assertion par les deux
gravures suivantes qui représentent , en coupe et en perspective ,
une allée de sablonnière , transformée en galerie sépulcrale par
les chrétiens. Elle a été découverte dans la catacombe de S. -Hermès
par Michel de Rossi.
Coupe d'une galerie sépulcrale à la catacombe de St.-Hermès.
Perspective d'un côté de galerie, à la ratacomlie de St. -Hermès
Les formes architëctoniques des cimetières chrétiens et des
XXIX XXII 2
oo
arenariae sont tellement caractéristiques qu'il est impossible de
les confondre. Pour bien saisir cette difiërence , il suffira de jeter
les yeux sur les deux gravures que nous plaçons ici en regard.
La première représente une ancienne saisonnière transformée en
cimetière; la seconde une partie d'une catacombe creusée par les
chrétiens. Sur le plan de Yarenaria , l'œil le moins exercé dis-
tingue parfaitement entre les anciennes allées creusées dans un
but mercantile et les nouvelles excavations pratiquées par les
fidèles pour y trouver des lieux de sépulture. Le contraste est
plus frappant encore , lorsqu'on compare entre elles les iehnogra-
phies des deux excavations.
Avant d'aller plus loin , il nous reste à répondre aux difficultés
qu'on nous oppose.
1° On nous demande : En vertu de quel droit, de quelle
tolérance les chrétiens des trois premiers siècles ont-ils pu
posséder des sépultures communes? Les chrétiens étaient persé-
cutés par les païens; ils constituaient une communauté défendue
et proscrite par les lois de l'empire. Gomment s'est-il fait qu'ils
aient pu se créer des lieux d'inhumation qui leur appartinssent en
propre?
Voici, en substance, comment le chevalier J.-B. de Rossi
résout cette difficulté. Il fait d'abord observer , avec beaucoup de
justesse , qu'il ne peut être question que de l'existence des cime-
tières communs; parce que les chrétiens comme les païens, en
vertu des lois romaines, avaient la faculté de se faire ériger,
dans leur propriété, un tombeau ou un monument, ou de s'y
faire creuser un hypogée. La difficulté se rapporte donc uniquement
aux cimetières possédés par la société entière des fidèles, par
l'Église elle-même et dont l'existence ne pouvait être ignorée des
gentils.
Aux premiers temps du christianisme , les cimetières chrétiens
purent certainement exister paisiblement sous la tutelle des lois
A Galeries de lu sabUmrueres.
B Galeries creûséesparles ckre-
timsdam le. tuffframdaàv.
-D ( (Imstructionsen brumes faites
parles chrétiens.
J) Puits pour 'l'extraction de
la,JX>UX :o/iiin, ùi//i.'/i'/iiH/
en /ttiiuF vr .
et — -T-5*.
0~
V
PLAN
d'une sabloiuiiere convertie en Cimetière chrétien,
à la cataconibe de . ^f P/iseille .
■ .. s ùogiedeBeldique.tïXri, 2e Série. C II,p. 22.
PLAN
d une partie du 2 7".t'eta</c de ht Catxuvmbe
de Sain L- fa///, de .
ael'AcacLèTnie d'archéologie deBeljfique.tXXÏÏ, 2: Sèrie.cIT.p. ce
— 23 —
romaines et du droit privé. Dans le principe , ce n'étaient que des
lieux de sépulture existant légalement sous le nom de tombeau de
famille ou de tombeau d'un particulier. Les propriétaires légaux
y admettaient les restes mortels des martyrs et des chrétiens
pauvres. C'est, pour cette raison, que les plus anciens cimetières
portent presque tous le nom des personnes pieuses qui en ont
cédé l'usage à la communauté chrétienne, ou qui, comme nous
l'attestent les Actes des martyrs, recherchaient avec avidité les
corps des saints martyrs et des fidèles pour les inhumer dans leurs
propriétés. Ensuite, il existait une loi romaine qui autorisait les
associations dont le but était de se procurer en commun une sé-
pulture convenable , au moyen d'une contribution mensuelle de
chacun des membres. Enfin , nous savons par les témoignages des
auteurs contemporains, qu'au troisième siècle, l'existence des
cimetières chrétiens n'était un secret pour personne dans la ville
de Rome. Aussi les chrétiens furent-ils souvent molestés à cette
occasion par les édits des empereurs; et plusieurs d'entre eux
y trouvèrent la mort, après qu'ils s'étaient réfugiés dans les cata-
combes pour se soustraire à la rage des persécuteurs. Tout le
monde connait le cri féroce : Coemeteria claudantur , rapporté
par Tertullien , et qui marquait toujours une recrudescence dans
les poursuites dirigées contre les chrétiens. (Voyez de Rossi,
Roma sott., I, p. 102 ; et Bulletino ai archeologia crisliana ,
décembre 1865, p. 88-99.
2° Comment , nous dit-on encore , les chre'tiens proscrits et
persécutés pouvaient-ils creuser les catacombes sous les fonds
de propriétaires païens?
Nous ne nions pas qu'une grande partie de la nécropole
chrétienne , telle que nous la connaissons aujourd'hui , se trouve
sous des terrains qui autrefois appartenaient à des païens. Mais ,
de ce fait on ne peut, en aucune manière, conclure que ces
galeries souterraines aient été creusées du temps où les terrains
— 24 —
de la surface étaient la propriété des gentils. Dans son mémoire
sur les catacombes, Michel-Etienne de Rossi soumet à un
examen approfondi la grave question du développement des
cimetières chrétiens , en étayant de preuves solides les assertions
qu'il émet. Ce sont ces preuves et ces assertions que nous allons
résumer succinctement.
Les lois romaines , en déclarant les sépultures sacrées et invio-
lables, en assuraient la possession perpétuelle soit aux individus,
soit aux familles , soit aux communautés.
Les tombeaux étaient considérés comme des choses inaliénables
et retirées du commerce. Les monuments funéraires étaient ordi-
nairement entourés d'un espace de terrain plus ou moins grand,
qui portait le nom d'area adjecta; ils avaient des galeries souter-
raines, constituant une sorte de petit hypogée; enfin ils étaient
souvent entourés de l'habitation d'un gardien, et d'autres édifices,
d'une cour, de jardins et de champs qui, selon la formule
consacrée, cedebant monumento , faisaient partie intégrante du
monument.
A Rome, les cimetières chrétiens étaient souterrains et avaient
leur entrée dans les maisons , dans les jardins ou dans les vignes
des fidèles. On pourrait donc, au besoin, supposer que les chré-
tiens, à la faveur des ténèbres et à l'insu des païens, ont donné un
grand développement à des galeries cachées; mais cette conjecture
ne nous est pas même nécessaire pour trouver une' explication
satisfaisante.
La liberté que la loi garantissait aux chrétiens, était plus que
suffisante; elle leur accordait, comme à tous les autres citoyens,
la faculté d'avoir des monuments funéraires avec toutes leurs dépen-
dances. Sans aucun doute , ils ont profité de ces dispositions léga-
les pour acquérir des cimetières. D'ailleurs dans les commencements,
au premier et au deuxième siècle, il ne leur fallait pas un grand
— 25 —
nombre d'hypogées; car un lieu de sépulture avec les terrains ad-
jacents pouvait renfermer une multitude de lombes 1.
Il est donc vraisemblable que, pendant bien longtemps , les chré-
tiens n'ont eu que des cimetières d'une étendue médiocre , ne
dépassant guère les limites de leurs propriétés. Au quatrième siè-
cle , lorsque Constantin , par l'édit de Milan et d'autres lois posté-
rieures, eut confirmé solennellement les chrétiens dans la posses-
sion de leurs cimetières, et accordé des privilèges bien grands à
leurs lieux de sépulture , un développement extraordinaire se mani-
festa ; les galeries furent prolongées indéfiniment, et, en se rencon-
trant en plusieurs endroits , elles finirent par ne plus former qu'un
seul hypogée ayant des entrées et des niveaux différents.
La conjecture que nous venons d'émettre, n'est nullement gra-
tuite ; elle est basée sur des observations faites en différents
cimetières. Nous nous contenterons d'en citer une seule.
Lorsqu'on examine avec attention le plan de la catacombe de
Saint-Calliste , on reconnaît immédiatement plusieurs noyaux
d'excavations primitives , reliés entre eux par des escaliers et des
galeries à forte pente. 2 On trouvera de plus amples détails sur
cette question dans le mémoire cité de Michel-Et. de Rossi,
Roma sotterranea , I, Appendice, pp. 53-61.
3° Une autre question qu'on nous propose , est la suivante :
Quels moyens, nous dit-on, les chrétiens employaient-ils , pour
que la terre provenant de V excavation des souterrains ne trahit
pas l'existence des cimetières chrétiens?
' Gruter rapporte l'inscription suivante placée sur un monument funéraire : Huit
monumento cedtmt agri puri jugera decem. Dix arpents romains valent un peu plus
de huit hectares et demi. On peut juger, par cette citation , de l'importance et de
l'étendue qu'avaient certains mausolées. De Rossi a calculé que sous un espace carré
qui aurait 48 mètres à chaque côté , on peut creuser de 250 à 300 mètres de galeries ;
ce nombre sera doublé ou triplé, si l'on superpose différents étages.
2 Sur le plan d'une partie du cimetière de Saint-Calliste que nous avons reproduit
vis-à-vis de la page22, on distingue très-bien aux lettres A et B un monument primitif
avec une vaste area de forme rectangulaire, remontant jusqu'au milieu de notre dessin.
— 26 —
La réponse à cette question est plus facile qu'elle ne le parait
au premier abord. La difficulté est déjà résolue en partie par ce
que nous avons dit ci-dessus, p. 22, de la liberté que les lois
romaines accordaient à tout citoyen de se faire enterrer dans ses
propriétés, et de partager ce lieu d'inhumation avec ceux qu'il vou-
lait y admettre. En effet, si la loi garantissait à chacun la faculté
d'établir des cimetières communs , les chrétiens pouvaient en faire
usage aussi bien que les païens. Ils pouvaient , sous la tutelle des
lois, au vu et au su de tout le monde, se creuser des hypogées,
ayant une certaine grandeur. D'ailleurs, dans les commencements,
comme nous l'avons fait remarquer, leurs cimetières étaient bien
loin d'avoir l'étendue qu'ils ont acquise plus tard.
Si la réponse que nous venons de donner à la question proposée,
paraissait insuffisante, on pourrait avoir recours, pour expliquer
le fait , à une autre conjecture. On pourrait, comme le font quel-
ques auteurs , « supposer que , après avoir broyé et réduit en poudre
le tuf granulaire , on le vendait , bien moins dans des vues mer-
cantiles , que pour voiler sous les apparences d'un trafic la véri-
table cause des excavations On a pensé encore qu'on en
formait , dans les jardins des chrétiens , de petites collines artifi-
cielles sur lesquelles on jetait des graines d'herbes et de plantes qui
poussaient rapidement sur un tel sol et sous un climat si favo-
rable. » Mautigny, Diction, des antiq. chrét., p. 118.
< Il est un fait que nous pouvons du moins donner commme
certain, continue iMarligny à l'endroit cité, c'est que, lorsqu'on
avait tiré parti de toutes les parois d'un corridor pour y ensevelir
le plus grand nombre possible de cadavres; si la galerie n'offrait
aucun monument, tel que chapelles, cryptes de martyrs illustres,
lieux de réunion, etc., on y transportait, parce qu'on le pouvait
sans inconvénient, la terre provenant des fouilles. On conçoit qu'un
tel expédient dut absorber une grande partie de cette matière embar-
rassante. Boldetti atteste avoir souvent vérifié le fait par lui-même
— 27 —
et particulièrement à l'occasion de fouilles pratiquées, en 1716 , au
cimetière de Sainte-Agnès. On y découvrit des galeries toutes com-
blées de terre du haut en bas, et dont les parois contenaient jusqu'à
douze rangs de loculi, tous exactement fermés par des tablettes
de marbre et de terre cuite avec des épitaphes grecques et latines;
plusieurs de ces tombeaux avaient pour ornement des verres à fond
doré représentant des sujets chrétiens : mais aucun ne portait les
objets regardés comme indices du martyre. Néanmoins, des galeries
renfermant des tombeaux de martyrs furent quelquefois ainsi com-
blées afin de soustraire ces saintes reliques à la fureur des idolâtres.
De nos jours encore , les nouveaux explorateurs des catacombes
rencontrent souvent des galeries ainsi obstruées ; et plus d'une
fois le chevalier de Rossi a pu se glisser , pour examiner de près
les peintures des voûtes , dans les gaines produites par l'affaisse-
ment successif que ces terres rapportées ont subi dans le cours des
siècles. »
Enfin , on ne doit pas oublier qu'au moins depuis la moitié du
troisième siècle , les païens connaissaient l'existence des cimetières
chrétiens.
A° Nous avons à résoudre une dernière difficulté. On nous
oppose un grand nombre de textes tirés des écrits des auteurs
ecclésiastiques et des Actes des martyrs, où les cimetières chré-
tiens sont appelés tantôt cryptae arenariae , tantôt simplement
arenarium ; et l'on veut en conclure que les catacombes ne sont
autre chose que des sablonnières appropriées et arrangées par les
chrétiens l.
Nous n'examinerons pas un à un tous les passages dans lesquels
ces dénominations sont employées pour désigner les catacombes.
Il nous suffira d'indiquer brièvement la manière de répondre à la
difficulté proposée.
1 Mich.-Ét. dk Rossi reproduit la plupart de ces passages, dans le mémoire rite,
p. 12-17.
D'abord, pour ce qui concerne le terme de crypta arenaria,
Michel-Etienne de Rossi prouve d'une manière évidente , qu'on se
servait de ces mots pour désigner , non pas les fosses de pouzzo-
lane , mais les souterrains creusés dans les roches sablonneuses :
crypta colV aggettivo arenaria dovè indicare soltanto che il sot-
terraneo non era construite, ma escavato in una roccia arenaria.
Cette signification est confirmée par les faits. Trois points des
catacombes sont quelquefois appelés cryptac arenariae : le tom-
beau de saint Laurent, celui des saints Nérée et Achillée, et
celui de Tertullin. Le plus connu , le plus exactement déterminé
de ces trois points , est le tombeau de saint Laurent où , selon
le témoignage du Liber pontijicalis , l'empereur Constantin bâtit
une basilique supra arenariam cryptam. Le martyrologe d'Adon
dit, en parlant du même endroit, que saints Narcisse et Crescen-
tion furent déposés in crypta arenaria. La position de la crypte
de saint Laurent étant bien connue , il sera facile de vérifier si
le mot crypta arenaria doit s'entendre dans le sens de souterrain
creusé dans une roche contenant du sable , ou bien dans celui de
fosse de pouzzolane. Or, il est bien constaté que, dans le voisi-
nage de la basilique de Saint-Laurent , on ne trouve que du tuf
bien différent de la pouzzolane, et qui ne peut être utilisé en
aucune manière. Au cimetière de Domitille, où furent ensevelis
saints Nérée et Achillée , on peut constater le même fait : il ne
se trouve dans toute la catacombe que des couches d'un tuf n'ayant
rien de commun avec la pouzzolane. L'emplacement de la crypte
de Tertullin étant inconnu , il nous est impossible d'y trouver un
point de comparaison.
Le mot arenariam a une signification bien différente de celle
de crypta arenaria. Il est usité pour désigner les fosses de pouz-
zolane. Aussi, toutes les fois qu'on le rencontre dans les actes
des martyrs , il se rapporte à des cimetières voisins de sablon-
nières abandonnées, ou construits dans les sablonnières mêmes.
— 29 —
(Voyez sur celte question importante le mémoire cité de M. E. de
Rossi, Roma sotterranea, I, Appendice, pp. 12-39).
III. — HISTORIQUE DES CATACOMBES.
L'histoire des catacombes peut se diviser en trois époques ou
périodes principales : la période de formation , la période de res-
taurations et de visites pieuses et la période d'explorations scien-
tifiques.
I. La période de formation embrasse les quatres premiers
siècles.
Plusieurs cimetières de la ville éternelle datent du temps des
apôtres. D'après les auteurs les plus recommandables , on doit faire
remonter au premier siècle le cimetière de Saint-Pierre au Vatican,
celui de Domitille, celui de Priscille, deux des cimetières qui ont
porté le nom de Lucine , dont un sur la voie Aurélia et un autre
sur celle d'Ostie, et enfin celui qu'on appelait anciennement
ad catacuinbas. (Voyez ci-dessus p. 6). Ces hypogées primi-
tifs se distinguent des souterrains creusés plus tard par des tom-
beaux moins nombreux et par une décoration artistique et un
genre d'épigraphie tout à fait propres. « Les peintures et sur-
tout l'ornementation , dit le chevalier de Rossi en parlant d'une
chambre sépulcrale du cimetière de Domitille , diffèrent tellement
des produits des anciens pinceaux chrétiens; elles ont une si
grande ressemblance avec les décors des tombeaux païens , qu'on
ne se croirait pas dans le cubiculum d'un cimetière sacré, moins
encore dans une crypte historique d'illustres martyrs , si la scène
du Bon-Pasteur n'occupait la place principale et n'était accompagnée
de quelques autres indices trahissant l'origine chrétienne de ce
lieu » (Roma sotterranea, I, p. 187.)
Un des plus anciens cimetières chrétiens , est celui d'Ostrien ,
situé sur la voie Salara. Si l'on peut s'en rapporter à une pieuse
— 30 —
tradition, tradition que de Rossi croit assez fondée, ce serait dans
ce lieu même que saint Pierre aurait administré le sacrement du
baptême à un grand nombre de fidèles.1
Au second et au troisième siècle , les cimetières existants furent
agrandis successivement, et plusieurs nouveaux vinrent s'ajouter
aux anciens. De Rossi porte à vingt-six le nombre des cimetières,
ayant une étendue assez considérable , établis avant la conversion
de Constantin ; et il en cite cinq qui ont été creusés depuis cette
époque.
Pendant le règne de Constantin et des empereurs qui lui ont
succédé , on continua à ensevelir les corps des fidèles dans les
catacombes. Cependant les tombeaux à ciel ouvert commencèrent
aussi à être en usage. Dans le cours du quatrième siècle , on
vit les sépultures souterraines diminuer à mesure que les tombeaux
érigés à la surface du sol augmentaient. L'archéologue romain dont
nous avons fréquemment invoqué le témoignage, atteste qu'après
l'année 410 , on ne rencontre guère de vestiges de nouvelles sépul-
tures faites dans les catacombes.'2 La dernière inscription , avec
date certaine, trouvée dans les catacombes est de l'année 4-54;
elle se trouve sur un tombeau, pratiqué furtivement par des étran-
gers dans un arcosolium , dont la construction est beaucoup plus
ancienne que celle de la niche funéraire.
De ce que nous venons de dire, on peut conclure que les cata-
combes cessèrent de servir de lieu de sépulture au commencement
du cinquième siècle de. l'ère chrétienne. C'est depuis ce temps
qu'elles devinrent des sanctuaires visités par de pieux pèlerins,
dans le but d'honorer la mémoire des martyrs.
1 De Rossi, op. <-it. , pp. 189-191.
* « Les auteurs qui ont, traité cette question, ont constamment affirmé que l'usage
d'ensevelir dans les catacombes romaines fut en vigueur jusqu'à la tin du sixième ou
jusqu'au commencement du septième siècle. Dans mon ouvrage sur les inscriptions rhré-
liennps, j'ai montré la nullité de leurs preuves. Parmi les épitaphes sur lesquelles ils
t lent leur opinion , les unes sont plus anciennes qu'on ne le croit communément; les
autres sont étrangères aux cimetières souterrains. » De Rossi, Roma suit. , 1, p. 215.
— 31 —
II. La période de restaurations et de visites pieuses s'étend
des premières années du cinquième siècle jusqu'au commencement
du neuvième.
Les réparations et les embellissements des cimetières chrétiens
avaient déjà commencé au quatrième siècle. A peine la paix eut-elle
été accordée à l'Eglise par l'empereur Constantin, que l'on se
mit à rendre l'accès des catacombes plus facile en y pratiquant
des entrées larges et des escaliers commodes aboutissant directement
aux cryptes historiques * ; on multiplia les luminaires , luminaria
cryptae, pour faire pénétrer l'air et la lumière dans les souterrains ;
enfin on construisit des murailles et des voûtes destinées à prévenir
les éboulements et à servir de soutien aux édifices élevés à la
surface du sol Plusieurs oratoires furent décorés de peintures, de
mosaïques et de revêtements en marbre ; dans les tombeaux et les
chapelles, on restaura les anciennes inscriptions, et l'on en plaça
de nouvelles. Les travaux épigraphiques du pape saint Damase
méritent avant tout d'attirer l'attention de l'archéologue.
Pendant les quatre siècles suivants, les cimetières continuèrent
à être « des centres de dévotion, où affluaient les pèlerins de
tous les pays, avides de vénérer les restes des martyrs , d'entendre
leur éloge prononcé dans les cryptes mêmes par la voix du pontife
suprême et d'assister au divin sacrifice qui se célébrait sur la
pierre de leur tombeau , au jour anniversaire de leur déposition. »
(Martigny, /. c, p. 110). Les Souverains Pontifes s'attachèrent ,
avec un soin particulier, à orner les lieux les plus fréquentés et
à restaurer les parties délabrées par les injures du temps ou
dévastées par les peuples barbares. Symmaque , Vigile , Jean III ,
Sergius I, Adrien I et Léon III se distinguèrent entre autres par
leur zèle pour l'embellissement, des cimetières.
1 On appelle cryptes historiques les chambres sépulcrales où reposaient les restes
d'illustres martyrs. Du quatrième au neuvième siècle , ces tombeaux furent les sanc-
tuaires visités par la pieuse foule des fidèles.
- 32 —
En l'année 750, les Longobards, sous la conduite du roi
Aislulphe, ravagèrent les catacombes. C'est ce qui engagea le
pape Paul I à l'aire ouvrir les tombes des martyrs les plus vénérés
et les plus célèbres , afin d'en retirer les corps saints et les dis-
tribuer aux différentes églises de la ville de Rome. Malgré les
efforts généreux tentés par quelques-uns des successeurs de ce
pontife pour remettre en honneur les cimetières abandonnés et
tombant en ruine , le pape Pascal I fut obligé de suivre l'exemple
de Paul I. Le 20 juillet 817, on transporta à l'église de Sainte-
Praxède les corps de 2300 martyrs. « Après ces translations solen-
nelles , dit le chevalier de Rossi , les catacombes de Rome furent
considérées à Rome même comme ne renfermant plus de reliques
de grands saints. Cependant Sergius II et Léon IV en firent retirer
encore les corps de martyrs très-illustres, dirutis in coemeteriis
jacentta. Après ces deux pontifes , il n'est plus question que
très-rarement de recherches de reliques , faites dans les catacombes.
C'est certainement à cette époque qu'il faut rapporter la translation
au Panthéon de plusieurs charriots d'ossements de martyrs ,
translation qu'il ne faut pas confondre avec l'envoi de reliques * ,
fait à cette église par Boniface IV, longtemps avant qu'on eût
touché aux tombeaux des catacombes. » flioma sotterranea,
1, p. 221).
A partir du milieu du neuvième siècle , la nécropole souterraine
des chrétiens tombe dans un oubli si complet , qu'à peine il en est
1 Aux premiers siècles de l'Église, on distinguait entre le corps et les reliques d'un
saint. Par reliques, on entendait surtout les brandea, les huiles prises dans les lampes,
brûlant devant les corps des saints, les vêtements et autres objets ayant été à leur
usage. Les brandea étaient des morceaux d'étoffe qu'on avait appliqués sur les tombeaux
des saints, ou suspendus dans les lieux où reposaient leurs restes. Voyez Muratori ,
Anecdota ex Ambrosianae bibliolhecae codieibus, II , pp. 195 et 599. Nous ferons
remarquer que M. de Rossi , dans le passage cité, s'éloigne de l'opinion commune , qui
attribue à Bonifiace IV la translation au Panthéon d'une grande quantilé d'ossements de
martyrs extraits des catacombes.
— 33 —
encore fait mention dans les écrits des auteurs ecclésiastiques ou
de ceux qui nous ont laissé des descriptions de la ville éternelle.
III. Le commencement de h période d'explorations scientifiques
doit se placer en Tannée 1578. Ce fut alors qu'un cimetière
souterrain , découvert par le plus grand des hasards , attira
l'attention de toute la ville de Rome à cause des {teintures dont il
était orné , et des sarcophages qui y étaient déposés.
Nous n'ignorons pas que , dans le cours du quinzième et au
commencement du seizième siècle, les catacombes ont été visitées
par quelques personnes. Des inscriptions, trouvées en plusieurs
endroits sur les murailles , attestent ce fait. Mais il est à remar-
quer qu'un sentiment de dévotion, ou peut-être même la seule
curiosité et non le goût de l'étude ou des antiquités chrétiennes ,
donna lieu à ces visites '.
Le 31 mai 1578, des ouvriers occupés à extraire de la
pouzzolane dans une vigne située sur la droite de la voie
Salara, à deux milles environ de la ville de Rome, mirent à
découvert une ouverture qui aboutissait à un cimetière chrétien ,
décoré de peintures, de sarcophages et d'inscriptions. La nouvelle
de cette découverte imprévue se répandit aussitôt par toute la
ville, et des personnes de tout rang accoururent pour admirer
cette merveille, cette cité souterraine. « Ce fut ce jour-là, dit
M. de Rossi que naquit la science et le nom de Rome souterraine. •
Dès ce moment , il y eut des savants et des artistes qui se
mirent à copier et à réunir les peintures des catacombes. Le
premier qui se livra à ce genre de travail fut Ciacconius, de l'ordre
de S. -Dominique; il forma un musée de fossiles, de marbres et de
bronzes antiques, et réunit, dans un album, les dessins d'un
grand nombre de monuments chrétiens et de peintures des cata-
combes.
' Voyez snr ces visites J.-B. de Rossi , op. cit., I, pp. 2-12.
— 34 —
Vers la même époque , vint à Rome un gentilhomme de Louvain
nommé Philippe Van Winghe , neveu de l'antiquaire Antoine
Morillon. Mis en rapport avec Giacconius , il se lia bientôt d'amitié
avec lui. Après avoir vu les dessins faits sous la direction du religieux
dominicain , il se mit à parcourir les catacombes. Il reconnut
aussitôt que le dessinateur de Ciacconius avait manqué de fidélité;
c'est ce qui le décida à faire lui-même des copies plus exactes des
sarcophages et des peintures murales. Il s'appliquait à rechercher
la signification symbolique des scènes représentées communément
sur les parois des cimetières chrétiens , lorsqu'il fut enlevé subite-
ment à la fleur de l'âge, se trouvant à Florence pour y faire
des recherches archéologiques. Les manuscrits de Van Winghe
ont été vus et consultés à Rome par L'Heureux et par Bosio.
En 1622, ils se trouvaient à Tournai entre les mains des frères
Antoine et Jérôme Van Winghe. Rosweydus les mit à profit
pour les notes dont il enrichit l'édition des œuvres de S. Paulin de
Noie. Depuis lors on a perdu les traces de la collection principale
formée par le jeune Louvaniste. Il ne nous est parvenu de ses
écrits qu'un recueil d'inscriptions , conservé à la Bibliothèque
royale de Bruxelles, section des manuscrits, nos 17872-17873.
Il porte le titre suivant: Inscriptiones sacrae et prophanae col-
lectae Romae et in aliis Italiae urbibus a Philipo de Winghe,
Lovaniensi , Antonii Morillonii viri doctissimi e sorore nepotis,
qui, dam totam lustrât Italiam, in ipso juventulis flore Florentiae
occubuit, anno 1592. «
En même temps que Van Winghe , se trouvait à Rome un autre
Belge appelé Jean L'Heureux , et plus connu sous le nom de
Macarius. Né à Gravelines, en Artois qui, à celte époque, faisait
partie de la Belgique, il fit ses études à l'Université de Louvain
' Voyez sur les manuscrits de Van Winghe, De Umssi , Roma soltrrranea, l, p. I i
el suiv; el Bulletino ili arckeologia crisliana, isii."», p. 80.
— 35 —
et devint plus tard chanoine d'Aire, en France. Pendant un séjour
de vingt ans qu'il fit à Rome, il s'adonna avec une véritable pas-
sion à- l'étude des antiquités des premiers siècles chrétiens, et
composa sur cette matière l'ouvrage intitulé : Hagioglypta sive
picturae et sculpturae sacrae antiquiores praesertim quae
Romae reperiuntur, explicatae a Joanne L'Heureux (Macario).
Ce savant travail, prêt à être mis sous presse, ne vit cependant
pas le jour du vivant de son auteur. A sa mort , arrivée en 161 4-,
L'Heureux légua ses manuscrits au collège des Trois-Langues,
à Louvain. Miraeus, dans son Codex regularum et constitutio-
num clericalium (part. II, p. 97) nous apprend qu'en 1638,
l'imprimerie des Platin se proposait de publier les Hagioglypta;
mais rien ne fut fait. Le manuscrit passa de la bibliothèque du
collège des Trois-Langues dans celle des Bollandistes , où il se
trouvait encore en 1825, au moment de la vente publique de
ce riche dépôt littéraire. Il fut acquis par M. Lammens; celui-ci
le céda plus tard à M. Le Glay, le savant archiviste de Lille qui ,
en 1852, en publia la préface dans ses Nouveaux Analectes.
En 1855, le comte de l'Escalopier, pressé par les instances
du chevalier de Rossi , acheta à M. Le Glay le précieux manus-
crit. Le P. Garrucci ayant appris que l'ouvrage de L'Heureux se
trouvait à Paris , s'adressa au comte et lui exprima le désir de
pouvoir publier l'intéressant mémoire. L'autorisation demandée fut
accordée; et les Hagioglypta , approuvés pour l'impression depuis
plus de 250 ans, * furent confiés aux presses de Firmin Didot et
virent le jour en 1856, enrichis d'une préface et de notes dues
aux PP. Garrucci, Cahier et Martin.
A L'Heureux revient la gloire d'avoir le premier tenté et con-
signé dans ses écrits l'explication des monuments figurés de l'anti-
1 Le manuscrit porte l'approbation suivante de Luc de Druges : Potest evulgari.
Actum Audomaropoli, 22 junii 460S , censore Francisco Luca.
— 36 —
quité chrétienne. Son ouvrage est des plus remarquables et
renferme une foule d'explications et des renseignements dont nous
pouvons, même après les immenses progrès qu'a faits la science
archéologique , tirer un grand profit pour nos études.
Bosio, surnommé à juste titre le Christophe Colomb de Rome
souterraine, vivait en même temps que L'Heureux; ils étaient liés
par une étroite amitié, fondée sur la conformité des goûts et la
poursuite du même but. Bosio consacra trente-cinq ans de sa vie
et des sommes considérables à fouiller les catacombes dans tous
les sens. Au moment où il commença ses explorations, à peine
quatre ou cinq cimetières étaient connus en partie ; il en découvrit
environ trente, parmi lesquels il s'en trouvait de très-vastes. Il
les parcourut et se mit à les étudier, passant parfois des jours et
des nuits entières sous terre. Aussi fit-il une abondante moisson de
documents parmi lesquels les copies des peintures et des inscrip-
tions tiennent, sans contredit, le premier rang. Mais ce ne sont
pas là les seuls mérites de Bosio. Les recherches qu'il fit d3ns les
ouvrages des anciens sur les antiquités chrétiennes, sont tout
aussi remarquables que ses découvertes dans les catacombes. De
Rossi nous les fait connaître en détail dans la Roma sotterranea,
I, pp. 31-35.
Ce fut avec ces matériaux, qu'il entreprit le grand travail qui
renferme la description de tous les hypogées connus de son temps
sous le sol de la campagne romaine. Ce monument incomparable,
qui sera toujours une des mines les plus riches pour l'étude des
antiquités chrétiennes , ne fut publié que cinq ans après la mort
de Bosio (f 1629), sous le titre de Roma sotterranea *-. Les
exemplaires de ce livre furent recherchés avec tant d'avidité qu'on
1 Le frontispice de la Roma solterranea de Bosio porte la date 1 632. Cependant un
bref du Souverain Pontife du 6 octobre 1031 , placé à la fin de la table des chapitres ,
prouve que l'impression ne fut. pas terminée avant celle époque.
— 37 —
songea bientôt à en donner une traduction latine. Severano , qui
avait surveillé l'édition de l'ouvrage posthume de Bosio, en fît une
version très-fidèle, qui cependant n'a jamais vu le jour. En 4(351,
parut à Rome, en 2 volumes in-folio, une traduction due à
Paul Aringhi , intitulée: Roma sublerranea novissima pont
Antonium Bosium et Joannem Severanum. Bien que ce titre
semble promettre une édition revue et augmentée , la publication
d'Aringhi n'est , en aucune façon , préférable à l'œuvre originale
de Bosio.
Voici , rangés par ordre chronologique , les principaux ouvrages
publiés sur les catacombes depuis l'apparition de la Roma sotter-
ranea d'Aringhi jusqu'à nos jours. Nous nous contentons d'e
transcrire les titres et d'indiquer, en peu de mots, le jugement
qu'il faut porter sur leur valeur :
1° Boldetti, Osservazioni sopra i cimiteri de SS. martiri
ed antichi cristiani. Roma, 1720, 3 tom. ordinairement reliés
en un volume in folio.
Fruit de plus de trente années d'études dans les cimetières chrétiens , le livre
de Boldetti contient la description de plusieurs souterrains découverts depuis
la publication de l'ouvrage de Bosio. 11 esta regretter que l'auteur n'y ait pas
mis un peu plus d'ordre et de soins. Boldetti publia ses Osservazioni pour
répondre à l'accusation que quelques érudits faisaient peser sur les explorateurs
des catacombes, de procéder sans discernement aucun dans la reconnaissance
des reliques des martyrs extraits des catacombes. Marangoni , auteur des
Acta S. Viclorini et de l'opuscule De coemeterio sanclorum Thrasonis et
Salurnini, fournit à Boldetti les renseignements relatifs à la topographie et à
l'histoire des catacombes découvertes depuis Bosio.
2° Bottari , Seuil are e pillure sagre estralle dai cimileri di
Roma , pubblicate già dagli autori délia Roma sotterranea ed
ora nuovamente date in luce colle spiegazioni. Roma, 1737-
1754, 3 vol. in fol.
Ce savant comraenlaire sur les planches de Bosio, connu aussi sous le nom
de Roma sotterranea , ne s'occupe que de l'interprétation des monuments
figurés , tirés des catacombes de Borne. Les plans des différents cimetières
XXIX XXII 5
— 38 —
sont accompagnés d'une explication générale ; l'origine , la dénomination , la
situation et l'histoire des différents hypogées sont entièrement passées sons
silence. Enfin , de toutes les découvertes faites depuis le temps de Bosio , il
n'en est pour ainsi aucune qui soit mentionnée dans l'ouvrage de Boltari.
3° Marchi, soc. jesu, Monumenti délie arti cristiane pri-
mitive nella metropoli del cristianesimo disegnoti ed illustrait.
I. Architettura délia Roma sotteranea cristiana. Roma, 1 8-4-4
et suiv., in-4-°.
Dans cet ouvrage, le savant religieux établit, d'une manière péremptoire ,
l'origine exclusivement chrétienne des catacombes. A lui revient l'honneur
d'avoir résolu celte grave question si vivement débattue pendant plus de deux
siècles. (Voyez ci-dessus p. 16-23.) C'est le cimetière de Sainte- Agnès qui a
surtout été exploré par le P. Marchi. Les 2e et 3e parties de l'ouvrage ont
été abandonnées par l'auteur.
4-° Perret, Catacombes de Rome. Architecture , peintures
murales, lampes, vases, pierres précieuses gravées, instru-
ments, objets divers, fragments de vases en verre doré,
inscriptions, figures et symboles gravés sur pierre. Paris,
1852-1856, 6 vol. in folio.
La publication de Perret fut faite avec le concours du gouvernement fran-
çais. Ce qui manque à ce magnifique ouvrage, c'est la fidélité. M. Perret, en
voulant trop souvent embellir les peintures qu'il reproduit , s'écarte de la
réalité ; il fait une œuvre où l'imagination de l'artiste obtient une part beaucoup
trop large. Ensuite, plusieurs indications erronées se sont glissées dans le
texte explicatif qui accompagne les planches. Nous ne nions pas cependant que
la publication de M. Perret ait rendu de grands services à la science , en
réveillant chez plusieurs personnes le goût des antiquités chrétiennes.
5° G.-B. de Rossi , Roma solterranea cristiana descritta ed
illustrata. Tomo I. Roma, 186-4, in-fol.
Dans le premier volume , le seul publié jusqu'ici, l'auteur développe quel-
ques considérations sur les cimetières chrétiens en général, et en particulier
sur ceux de la ville de Dôme aux différentes époques qu'ils ont traversées ;
et enfin ii nous fait connaître les cryptes de Lucine à la catacombe de Saint-
Calliste. Les volumes suivants donneront successivement l'histoire et la description
détaillée des autres parties des catacombes. Les talents du chevalier de Rossi ,
son zèle intelligent dans la direction d^s fouilles, ses connaissances épigra-
phiques , ses publications précédentes , enfin une expérience de plus de vingt
— 39 — -
ans : tout nous fait augurer que l'ouvrage commencé sera un jour le travail le
plus complet et le plus savant sur la nécropole chrétienne de la ville éternelle.
Pour procéder avec une grande précision dans tout ce qui concerne les cata-
. combes , M. de Rossi , avant d'aborder la publication de la Roma sotterranea
s'est occupé, pendant de longues années, à reconstruire la topographie
ancienne des cimetières chrétiens , c'est-à-dire à déterminer d'une manière
exacte la situation respective des différents hypogées , au moyen de documents
retrouvés dans les écrits des auteurs ecclésiastiques du moyen âge. Les renseigne-
ments fournis par ces documents ont contribué largement aux belles décou-
vertes qu'il a faites au cimetière de Saint-Calliste. Les tombeaux de sainte
Cécile , de saint Corneille , et la chapelle où étaient ensevelis plusieurs papes
martyrs du troisième et du quatrième siècles ont été retrouvés , grâce à ces
données. M. le chevalier Jean-Baptiste de Rossi est puissamment secondé
dans ses travaux , par son frère Michel-Etienne. C'est ce dernier qui a levé ,
avec une exactitude inconnue jusqu'ici, les plans qui sont annexés à la
Roma sotterranea; et c'est à lui qu'est dû le savant mémoire intitulé :
Analisi geologica ed architettonica que, dans notre travail, nous avons
plusieurs fois mis à contribution.
Nous devons aux soins de M. J.-B. de Rossi deux autres publications
d'une grande importance pour l'archéologie chrétienne : le Bulletino di
areheologia cristiana , recueil paraissant tous les mois , et les Inscriptiones
ehristianae urbis Romae septimo saeculo anliquiores , dont le premier
volume a été publié en 1861.
Après avoir fait connaître les ouvrages les plus importants qui
traitent des catacombes de Rome, il ne sera pas sans quelque
utilité d'énumérer aussi les travaux qui , bien que d'une moindre
étendue ou consacrés à l'examen d'un point particulier, peuvent
venir en aide à l'archéologue dans l'étude des cimetières chrétiens.
Voici ceux qui méritent de fixer notre attention :
1° Fabretti, Inscriptionwn antiquarum q\m in œdibus
paternis asservantur explicatio cum emendationibus gruterianis
aliquot. Romae, 1699, in-fol. Le chapitre VIII, consacré aux
inscriptions chrétiennes , contient la narration de la découverte de
deux catacombes.
2° A. -M. Lupi, S. J. Disnertazioni , lettere ed altre opérette,
poste in luce da Fr. Ant. Zaccaria. Faenza, 1785, 2 vol. in4°.
— 40 —
3° Buonarruoti , Osservazioni sopra alcuni frammenti di
va si antichi di veiro ornati di figure trovati n'e cimileri di
Roma. Firenze, 1 7 1 ( > , in-i°.
4° Marangoni, Acta S. Victorini, cum appendice decoeme-
terio SS. Thrasonis et Satumini. Romae 1740.
5° Settele publia plusieurs dissertations sur les monuments
des catacombes dans le premier volume des Atti délia pontificia
academia di archeologia.
0° Seroux d'Agincourt, dans son Histoire de l'art par les
monuments, s'occupe de l'iconographie des catacombes.
7° Rostell consacre un long article aux catacombes de Home
dans l'ouvrage : Deschreibung der Sladt Rom, publié à Stuttgard
en 1830.
8° Raoul-Rociiette, S Mémoires sur les antiquités chré-
tiennesdes catacombes , insérées dans le tome XIII des Mémoîj'es
de l'Académie des Inscriptions. Paris, 1837-1838.
9° Gaume a public Home souterraine dans la seconde édition
des Trois Rome.
10° BouTiLiNi , // cemetero di Aproniano detto anche di
S. Eugenia sulla via latina. Roma 1810.
11° Spencei; Northcote, Guide dans les catacombes de
Home. Rome, 1851).
12<> Card. Wiseman, Fabiola ou l'église des catacombes.
(Roman historique).
13° Garhucgi , S. J., Yetri ornati di figure in oro, trovati
net cimileri cristiani di Roma raccolti e spiegati. Secunda edi-
zione. Roma, 1864, in-i°.
1-4°. De Rossi, Bulletino di archeologia cristiana. Ce recueil
mensuel, commencé en 1803, forme un volume in-i° par an.
— 41 —
L'histoire littéraire des catacombes que nous venons d'esquisser
à grands traits , nous fait connaître les principaux explorateurs
des hypogées chrétiens et les découvertes qui ont couronné leurs
recherches depuis le milieu du XVIIe siècle jusqu'à nos jours.
Observons, en terminant, que pendant la période d'explorations
scientifiques , les catacombes ont subi des altérations très-regret-
tables. Les translations de corps saints, abandonnées au IXe siècle
mais reprises au XVIIe, les explorations scientifiques conduites
parfois avec un zèle précipité et peu intelligent , les tentatives
faites pour détacher les peintures avec l'intention de les trans-
porter dans les musées, les extractions de matériaux utiles pour
les bâtisses , et plusieurs autres circonstances ont si profondément
dénaturé l'œuvre des premiers chrétiens , qu'en plusieurs endroits
elles l'ont rendue méconnaissable. Cependant, malgré ces dévasta-
tions, ces tombeaux vides, ces marbres brisés et ces peintures
arrachées et réduites en poussière , les catacombes de Rome sont
encore aujourd'hui les monuments les plus intéressants des pre-
miers siècles de l'ère chrétienne.
HISTOIRE ET ARCHÉOLOGIE.
LETTRE
par M. H. *< III l IUI %\>
MEMBRE TITULAIRE A HASSELT.
— v5^<«»qt^S=<^
Monsieur le Secrétaire perpétuel,
La commission d'organisation du Congrès archéologique inter-
national, dont l'Académie a pris l'initiative, a décidé que les
travaux seraient divisés en deux sections : l'une pour l'archéologie,
l'autre pour l'histoire.
Je trouve un précédent à l'appui de cette division. Les Comités
historiques des arts et monuments de France, ont également
divisé leurs publications en séries spéciales , faisant chacun l'objet
de bulletins particuliers : Histoire, Archéologie, Beaux-Arts.
Si cette division , comme je le pense , a pour mobile un simple
intérêt d'ordre, rien de mieux. Si elle était systématique, je me
permettrais de la critiquer comme péchant au point de vue de la
méthode : l'archéologie est une branche de l'histoire , et à mes
yeux les études archéologiques n'ont de valeur que si elles peuvent
de près ou de loin se rattacher à l'éclaircissement de points his-
toriques ; un musée d'antiquités doit être, non pas seulement un
Commissaires rapporteurs : MM A Wageker el A Van Hasselt.
— 43 —
bazar de curiosités, mais un dépôt public où les gens d'éludo
puissent trouver, au besoin, des matériaux pour déterminer le carac-
tère d'une époque, le degré de civilisation d'une nation même,
s'il est possible , pour suivre les traces des conflits entre les
peuples , enfin pour remonter le cours des âges , en fixant nos
origines et en précisant les éléments dont la combinaison nous a
faits ce que nous sommes.
Souvenons-nous du reproche lancé du haut de la tribune de
l'Académie royale de Belgique à certains archéologues, qui iront se
prosterner devant un informe pavé, s'il est du temps de Ghilpéric !
Séparons notre cause de ces archéologues-là , et laissons-leur leurs
magasins de bric-à-brac : nous n'avons rien de commun avec eux.
Mais , me dira-t-on , vous qui fouillez parfois la terre des champs
pour en exhumer des traces d'anciens bâtiments de l'époque romaine
et pour n'en rapporter souvent que de vieux clous , des tessons ,
des -fragments de tuiles et de briques, que faites-vous sinon
cela même que vous critiquez?
Eh bien ! au risque de paraître bien ambitieux peut-être , je
vous dirai quelle est ma pensée quand on me croit uniquement
occupé à rechercher d'aussi insignifiants débris. Veuillez-y voir
non pas une justification personnelle, mais une explication de ma
thèse : les études archéologiques doivent avoir l'histoire pour base
et pour couronnement.
Un fait s'est dégagé des fouilles opérées dans un grandjiombre
de tertres funéraires nommés tumulus, qui remontent à l'époque
belgo ou gallo-romaine : monuments plus importants que les
simples sépultures des cimetières , pleins d'objets souvent revêtus
du cachet le plus artistique , ils appartiennent selon toute vrai-
semblance au temps de la plus grande splendeur de l'Empire, qui
est aussi le temps où la domination de Rome était le mieux assise
dans l'univers ancien : j'ai nommé le second siècle et les règnes
de Trajan , d'Hadrien, d'Antonin-Pie et de Marc-Aurèle.
— 44 —
I
Or, d'après un relevé soigneusement fait de toutes les monnaies
trouvées en Belgique dans les tumulus, aucune, sans exception
à moi connue, n'est postérieure au règne de Marc-Aurèle l.
Voilà un fait assez singulier. La domination romaine dans
l'ancienne Belgique n'a cependant cessé que vers le 1V« siècle ;
pourquoi donc tout-à-coup cette interruption dans ce mode de
sépulture dispendieuse et par conséquent opulente , qui consistait
à jeter sur les cendres d'un mort une montagne de terre ayant
parfois plusieurs milliers de mètres cubes?
Voici un autre fait non moins remarquable : certaines substruc-
tions fouillées dans les environs des tumulus, et qu'a priori, à
raison de leur proximité et de certaines analogies dans les lieux-
dits, etc., l'on pouvait attribuer aux populations qui élevèrent ces
tertres , ont en effet , et à la dernière évidence , révélé cette
parenté; je n'en veux pour preuve que la découverte d'une paire
de petits trépieds en métal argenté ou étamé , de même grandeur,
de même forme , sortant évidemment des mains du même ouvrier ,
et dont l'un a été trouvé dans les tumulus à Grand-Fresin 2,
l'autre dans les substructions voisines de Petit-Fresin (Montenaken).
Et notez bien qu'il s'agit d'objets exceptionnels , présentant cette
particularité que l'un sans l'autre serait un objet unique.
Que sera-ce quand j'ajouterai que les fouilles dans l'établisse-
ment de Petit-Fresin , révèlent plusieurs monnaies , dont pas une
postérieure à Marc-Aurèle ? — Qu'un autre établissement, détruit
comme le précédent par un incendie , fournit le même sigle de
« La même observation a été faite pour certaines parties de la France par
M. de Caumont, Abécédaire ou rudiments d'archéologie (ère gallo-romaine) , p. 40,
note 1 , et l'abbé Cochet , La Seine inférieure historique et archéologique , p. 500,
a même fait la remarque qu'il y a entre le règne de Commode , le successeur de Marc-
Aurèle, et le règne de Gordien (191 à 238), une lacune d'un demi-siècle dans la série des
monnaies romaines trouvées dans une partie importante de l'ancienne Belgique.
* Voir l'un de ces trépieds dans !<• Bulletin des commissions royales d'art et
d'archéologie, t. II, p. 127 , t. 111, fig. 3.
— 45 —
potier NEH marqué sur ses tuiles? — Que ce second établisse-
ment, également appartenant à la population qui éleva un tumulus
voisin , ne contenait à son tour que des monnaies de Marc-Aurèle ou
de ses prédécesseurs? — Qu'enfin , chaque fois qu'il y a une rela-
tion positive à établir entre un tumulus et des substructions du
voisinage, jamais l'on n'atteint même le règne de Commode?
Où sera le fil conducteur qui nous guidera au milieu de ees
faits? En vain ouvre-t-on toutes les histoires de la Belgique pu-
bliées jusqu'ici *. Rien, ni sur la civilisation avancée dont les
tumulus portent témoignage , ni sur les populations qui auraient
élevé les établissements voisins , ni sur l'événement qui mit un
terme à l'existence de ceux-ci. Rien! Les historiens sautent quatre
siècles et passent de la conquête de César à l'invasion des Franks,
sans dire un mot du sort qu'eurent nos contrées dans l'intervalle2.
Mais n'existe-t-il pas dans quelque recoin des écrivains anciens,
l'un ou l'autre passage relatif à l'événement cherché, passage
qu'on aurait oublié ou dont la portée n'aurait pas été comprise?
Fouillons dans les livres, puisque la terre nous donne seule-
ment le fait brutal , sans explication , de la destruction violente
d'établissements importants , destruction contemporaine des pre-
miers Antonins.
Cherchons ....
* D'après une conversation que j'ai eue avec M. A. Wauters, le savant professeur
d'histoire , à l'hôtel de ville de Bruxelles et archiviste communal , j'ai lieu de croire
que son cours fait exception et que moins laconique que ses devanciers , il a donné des
détails plus complets sur la Belgique des premiers siècles et les événements dont elle
fut le théâtre.
* Un écrivain estimable qui a rendu de grands services à l'histoire , feu Schayes-,
cherche bien à établir ce que fut la Belgique sous la domination romaine , mais non ce
que fut la domination romaine en Belgique , ce qui est bien différent. Il parle des con-
quérants comme s'ils n'avaient fait que passer au-dessus de notre pays, et des vaincus
comme s'ils s'étaient perpétués purs de tout mélange avec les Romains ; dans plusieurs
parties de notre pays , la race des anciens contendants de César était complètement
éteinte : le nom des Nerviens est à peu près le seul des Belges des Commentaires ,
qui reparaisse encore sous l'Empire , pour la Belgique actuelle.
— 4f> —
Nous savons qu'un mouvement perpétuel agitait les barbares
qui se refoulaient sans cesse les uns les autres , sans parler du
mouvement du nord au midi , le long des côtes , des populations
antéhistoriques auxquelles on doit les monuments de pierres brutes,
improprement appelés celtiques, populations qui furent pourchas-
sées partout jusqu'en Afrique, où elles s'éteignirent l.
Nous savons, par Ammien Marcellin, que les Druides conser-
vaient le souvenir de populations étrangères qui étaient venues se
mêler aux Gaulois et formaient une partie de leur nation; les
Gaulois de Bellovèse et Sigovèse et de Brennus avaient à leur
tour fondu sur l'Italie; chez nous les Celtes avaient été chassés et
remplacés par les Nerviens et les Éburons , venus de la Germanie;
les Atuatiques avaient été laissés par les Cimbres comme arrière-
garde. . . .
En un mot , comme le fait observer un auteur très-judicieux ,
M. Fauriel, l'histoire des invasions des barbares est une histoire
datant de toujours, et César s'était parfaitement rendu compte de
la tendance envahissante des Germains en disant : « Il y a grand
péril pour les Romains à ce que les Germains s'accoutument peu
à peu à traverser le Rhin et à répandre sur la Gaule les flots de
leurs populations 2. •
.... Et tout à coup, au premier siècle, Rome aurait cessé en
Germanie la guerre d'agression, sans que jusqu'en 253, date
généralement assignée à la première invasion des barbares, les
Germains eussent repris l'offensive ! Voilà, disons-le hardiment,
qui n'est pas dans la nature de ces nations nomades ; elles étaient
douées de trop d'élasticité pour ne pas réagir, dès qu'elles ne se
• Vnir à cel égard cfe curieuses études de MM. Bertrand et Péraud, dans laftevtté
archéologique de Paris, année 180:J el suiv.
* « Vùttllaiim (îermanoa consuexeere Rhenttm transite et in Gallium ma jnam
earum multitu<linem venir? , pdpulo RomaffQ ptritulttm rulebat. » Caes. , licll.
Gall , 1 , 33).
- 47 -
sentaient plus contenues par une pression assez puissante; elles
étaient, du reste, continuellement refoulées elles-mêmes par
d'autres peuplades qui venaient derrière elles *.
Il s'agit , en un mot , de connaître les premiers reflux des
barbares sur la plage romaine , de tenir compte de tout flot qui a
balayé la grève et de ne pas se borner à considérer seulement
comme invasions dignes d'être mentionnées par l'histoire, celles qui
permirent aux envahisseurs de s'établir à demeure dans le pays
envahi.
Or des invasions nombreuses, réprimées il est vrai, mais assez
graves et sérieuses pour qu'on ne puisse les passer sous silence,
eurent lieu dès le règne de iMarc-Aurèle.
Sous cet empereur , un mouvement général eut lieu aux fron-
tières de l'Empire, depuis la Gaule jusqu'à l'Illyrie 2; les nations
barbares conspirèrent à l'envi contre Rome ; les unes poussant les
autres , elles envahirent de toutes parts le territoire de l'Empire :
en même temps que Marc-Aurèle guerroyé contre les Marcomans ,
ses généraux Pertina* et Didius Julien, l'un et l'autre empereurs
depuis , répriment sur d'autres points les invasions des Galtes et
des Chauques.
Cette dernière doit attirer tout spécialement notre attention ;
malheureusement, les historiens n'y consacrent que deux mots :
Didius Julien , gouverneur de la Belgique , ne parvint à résister
1 Exemples : sous Néron , les Ansibariens pulsi a Chauds (Tacit., Ann., XIII , 55);
sous Nerva , les Bruclères , pulsi a Ckamavis et Angrivariisi vie, narum consensu
nationum, Io., Genn., 33), sous Marc-Aurèle, les Marcomans dont il s'agira ci-après,
et autres nations pulste a superioribus barbaris , rusi reciperentur, bellum inferentibus.
1. Capitol , in M. Anlonin Phil. , XIV. etc.
1 « Génies omnes ab lllijrici limite usque ad Gallium conspiraverunl , ut Mar-
camamti , Narisci , Uermunduri , et Quaili , Suevi , Sannulœ , Latiïnges et Buvi ;
là aliique eum Viclovali , Sosibes , Sicoboles , Rhoxolani , Bustaruœ , Alani ,
Peucini , Custoboci. » J. Capitol, in M. Anlonin Phil., XXII.
— 48 —
à l'invasion des Clianques dans cette province , qu'en appelant
tumultuairement les habitants aux armes !.
Quand eut lieu cet événement?
La date en est fixée par les fastes consulaires : l'empereur en
mémoire des succès de ses lieutenants , les désigna tous les deux
pour le consulat ' et ce consulat où Pertinax et Julien furent à la
fois consuls subrogés, et qui suivit sans doute de très-près leurs
exploits, est de l'an 178 après J. C. , l'antépénultième année du
règne de Marc-Aurèle 5.
Or quel chemin suivirent les Chauques pour entrer en Belgique ?
Cette province, bornée par l'Escaut et la Seine , ne dépassait pas
le Rhin à l'est; les Chauques, peuplade d'Outre-Rhin , avaient
donc en tout cas ce fleuve à passer; mais sont-ils arrivés par la
voie de Cologne , ou par celle de Nirnègue ou de Xantes à Tongres?
La première évitait aux Chauques, qu'ils vinssent de l'Elbe ou
d'en deçà duWeser4, le passage de l'Ems, de la Lippe, etc., et leur
permettait de traverser le Rhin et la Meuse sur des ponts; enfin
une vengeance à tirer des Agrippiniens , qur* un siècle auparavant
avaient periidement massacré à Tolbiac une cohorte des leurs 5,
était un motif tout particulier pour attirer les Chauques vers
Cologne.
Les autres par Nirnègue et Xanten , les forçaient au contraire à
différents passages de rivières ; puis celle-là existait-elle bien au
second siècle? Ce qui donne lieu d'en douter, c'est que la première
* « Belgicum sancte ac diu rexit. Ibi Gauchis , Germaniœ populis qui Albim
(lumen accolebani , erumpentibus restait, tumultuariis auxiliis provincialium. »
Scaktian. , in Did. Julian., 1.
* Suite du passage de la note précédente : « ob quœ consulatum mentit testimonio
imperatoris. » Pour Pertinax , V. Xiphiun (Suétone , éd. Nisard , p. 043),
* GOLTZIUS, Cataluijus Consuluiii a Tiberio ad Justinianum , p. 217.
* D'après Tacite, Mor. Germ., xxxv, les Chauques conlinaient aux Frisons et par
conséquent à l'Ems; d'après Sparlian., I. cit., ils habitaient, outre Weser, les bords de
■ T\m., Hist., IV, 70.
— 49 —
indication certaine de cette voie se trouve sur la carte de
Peutinger, composée d'après Mannert au IIIe siècle, tandis que
l'itinéraire d'Antonin, antérieur peut-être l , n'en fait pas mention.
Enfin les Ghauques , pour arriver en Belgique , si cette province
était le but de leur expédition , se fussent certes créé bien gratui-
tement des obstacles à surmonter , en passant par le territoire des
Frisons et des Bataves.
Voilà le point historique à éclaircir, bien déterminé : n'est-ce
pas par la voie de Cologne à Tongres que les Chauques sont
entrés en Belgique, et les dévastations dont un grand nombre
d'établissements belgo-romains portent les traces, ne sont-elles
pas le résultat de cette invasion?
Cette pensée , et non le désir de trouver dans la terre de vieux
débris informes , a présidé à certaines fouilles opérées récemment dans
le pays d'Outre-Meuse, complémentairement à celles de la Hesbaye.
Grâce au concours pécuniaire du gouvernement belge et de
l'un des propriétaires , deux établissements ont été fouillés dans
des terrains du Limbourg hollandais (Houtem-S.-Gerlach et
JMeerssen) appartenant à deux de nos concitoyens, MM. de Matthys
(de Hoessell) et le baron Ludolphe de Lamberts-Cortenbach (de
M unsler-Bilsen). Ces établissements, dont l'analogie avec ceux
de la Hesbaye est frappante , longent la voie romaine que vient de
retrouver M. le vicaire Habets, de Berg-Terblyt , et qui de Cologne
se dirige sur Tongres, par Juliers et Maestricht. Ils portent des
traces de destruction violente , et du sein de la terre ne sont
sorties jusqu'à présent d'autres monnaies que du Haut-Empire et
antérieures à Commode.
L'attention est éveillée désormais sur celte nouvelle phase de
la question ; les fouilles vont continuer dans cet esprit , tant en
Belgique qu'en Hollande; l'on consultera les travaux antérieurs,
' Roulez, Observations sur les voies romaines de la Belgique , Gand, 1860 , p. G.
50
dont quelques-uns sont encore inédits, entre autres une notice
de M. Janssen , le savant conservateur du musée de Leyde, sur
les fouilles opérées par lui en 1852 au Ravenbosch *, établisse-
ment déjà exploré en 1771 par M. Pellerin , et situé dans la
continuation de la voie bordée par les villas de Meerssen et du
Rondebosch ; si , de l'ensemble de ces recherches comparées à
celles de la Hesbaye, il résulte qu'aucune monnaie postérieure
aux Antonins, ne se trouve dans aucun des établissements existant
avant l'invasion des Chauques , et exposés à leurs premières
fureurs à raison du voisinage de la route parcourue, il y aura
certes de quoi asseoir avec quelque chance de certitude un juge-
ment sérieux , et l'on pourra donner comme hypothèse fort vrai-
semblable, qu'avant d'être réprimés par Didius Julien, les Chauques
avaient pénétré fort avant dans la Belgique, et avaient eu le temps
d'y semer de toutes parts des ruines.
Cette hypothèse, arrivée à un tel degré de probabilité, aura au
surplus une portée très-grande pour saisir sur le fait et constater
l'état de la civilisation des populations belgo-romaines , à l'époque
des Antonins : à la différence peut-être des invasions postérieures
où les Franks, plutôt que de détruire, se sont approprié les habi-
tations des vaincus, les hôtes des établissements dévastés par les
Chauques , ont délaissé les ruines fumantes de leurs anciennes
demeures trop peu sûres ; ils se sont peut-être réunis en agglo-
mérations plus compactes, en abandonnant le système de villas
isolées , système dont la reprise des invasions barbares devait avoir
démontré l'insuffisance. Ces ruines où l'on retrouverait , sans
mélange de populations postérieures "2, les traces de la civilisation
' Il est à désirer que M. Janssen public au plus tôt ce travail.
* M. l'abbé Habets, vire -président de la société archéologique de Maastricht , a dans
les Publications de cette société (11, p 257 et suiv.) établi parfaitement que les bour-
gades hel^o-romaines sont restées des centres de populations sous les Franks. Or, si l'on
admet que la crainte des invasions a créé un grand nombre de nouveaux centres ou
— 51 —
de nos contrées au temps des Antonins , deviendraient ainsi autant
de Pompéi , comblés non plus par la lave du volcan , mais par
les nivellements de l'agriculture , et la voix qui sortirait aujour-
d'hui de la terre aurait le droit d'être écoutée , à cause de la
précision de ses révélations sur la civilisation antique arrêtée
brusquement à un moment donné.
Autre chose encore : l'on n'est pas fixé du tout sur l'époque
de la construction des grandes routes de l'empire romain ; on sait
seulement qu'Agrippa mit le premier la main, sous Auguste, aux
mailles du réseau ; mais jusqu'où mena-t-il son œuvre ?
A cet égard, M. Roulez conclut comme voici : « Aucune
preuve ne démontre qu'une ou que plusieurs des voies militaires
de la Belgique aient été construites sous le règne d'Auguste ; on
doit croire toutefois que l'établissement des principales de ces
voies remonte au temps des premiers empereurs1. »
Je crois cette conclusion parfaitement fondée , et je n'ai d'autre
prétention que celle de produire des preuves à l'appui.
La chaussée de Nivelles, dont j'ai exploré les abords en Hesbaye,
est antérieure aux tumulus qui la longent ; on sait en effet que
les Romains avaient l'habitude de placer leurs tombeaux sur le
bord des routes.
Or les monnaies intentionnellement déposées dans les caveaux
funéraires que surmontent ces tertres, ont permis de fixer l'époque
des sépultures : ces monnaies nous ont donné notamment les
règnes de Trajan et d'Hadrien comme ceux sous lesquels les der-
niers honneurs furent rendus aux défunts.
Mais la chaussée de Nivelles n'est pas une voie principale;
renforcé les centres préexistants, on peut parfaitement se rendre compte de la raison
pour laquelle les habitations isolées , non relevées après leur destruction , révèlent la
civilisation romaine sans mélange. L'isolement d'une villa belgo-romaine non fortifiée,
serait donc une présomption d'antériorité à la période des invasions.
' L. cit. p. i.
- :V2
c'est une simple voie secondaire sans existence indépendante, et
se ramifiant, sans continuation au-delà, à un tronc principal, la
grande voie de Tongres à Bavay.
Accessoire à celle-ci, elle est certainement postérieure; donc
conclusion évidente : la grande voie de Bavay à Tongres existait
au règne de Trajan.
Autre conclusion : donc aussi Tongres, station centrale et
importante de la voirie romaine, existait avant la première men-
tion incontestée qu'on trouve d'elle, (en laissant bien entendu de
côté la controverse sur la situation de l'Atuatuca de César, et sur
le passage de Pline relatif à la fontaine de la Civitas Tungrorum) ;
or, jusqu'ici, cette première trace est la mention de Tongres
faite par le géographe Ptolémée qui llorissait vers l'an 1-40 de
l'ère chrétienne.
Une cinquantaine d'années de gagnées pour l'antiquité de Tongres,
n'est pas chose indifférente; car, parla, on diminue d'autant la
solution de continuité qui est la principale arme des adversaires
de l'identité de Tongres avec l'Atuatuca de César ; par là , l'on
arrive peut-être à déterminer le sens précis du mot civitas
employé par Pline.
Et bien! cette cinquantaine d'années est encore acquise suréro-
gatoirement à Tongres, par les fouilles opérées; il n'a fallu pour
cela que de simples débris de tuiles. M. de Henesse mourut
avant l'exploration de l'établissement de Petit-Fresin dont le
second exemplaire du petit trépied fixe si bien la contemporanéifé
avec les tumulus de Grand-Fresin ; or M. de Renesse avait dans sa
collection (n° 300 de la seconde vente de celle-ci , qui eut lieu à
Gand le ht mars 4 86-4) un lot composé de divers fragments de
vases de terre à marque de potiers , trouvées à Tongres , et dans ce
lot, acquis par M. de Meester de Ravenstein et déposé en son
beau musée d'Hever près de Malines, se trouve un morceau de tuile
avec la marque NEH, la même dont je vous ai parlé plus haut.
— 53 —
Si le potier auquel appartenait ce sigle, vivait au commencement
du second siècle , les produits de sa fabrication , non façonnés
d'avance ni emmagasinés selon nos usages modernes, n'ont pu
servi sans doute qu'à des constructions de la même époque.
Je n'en suis pas encore , certes , à démontrer complètement
par là l'identité de Tongres avec Atuatuca ; mais qui sait si
quelque jour un autre morceau de tuile n'achèvera pas la démon-
stration. Supposez qu'un jour le sol de Tongres fournisse sur un
tuileau la marque de la XIVe légion, et voilà la question résolue.
Pourquoi? Parce que cette légion campa dans Atuatuca sous César,
et que depuis elle séjourna en Bretagne , en Pannonie et en
Dalmatie, et ne reparut plus que momentanément dans notre pays
lors de la lutte contre. Givilis.
Le plus petit fragment de vase antique , par ses dessins, par
l'inscription du nom du potier (car nous ne sommes plus au temps
où l'on dédaignait ces indications comme superflues 1) , peut don-
ner matière à des déductions précieuses. Quelque jour, un savant,
complétant l'ouvrage de F'roehncr sur les Inscriptions des vases
de terre cuite, déterminera l'époque et le lieu où vécut chaque
potier 2 ; alors les moindres débris de la céramique antique jetteront
un nouveau jour sur l'histoire des peuples, leur degré de civili-
sation, l'étendue de leurs relations commerciales, etc.
1 De Caylus , d'ordinaire si judicieux , s'est permis à cet égard une plaisanterie
peu digne de lui : « A quoi bon , dit-il (I, p. 121) , relever ces marques de potier?
On ne peut plus aujourd'hui donner la préférence à l'ouvrier. »
* J'y travaille pour la Belgique et je soumettrai le résultat de mes observations au
Congrès , en appelant son attention sur l'opportunité de semblable étude pour chacun
des pays de l'Europe. Les tessons paraîtront un jour non moins précieux que les mon-
naies, pour fixer les dates : il ne s'agit que d'en déterminer l'époque à l'aide des monnaies
trouvées, de la forme des vases , de celle des caractères des sigles , etc. Déjà , par
exemple, un très grand nombre de sigles, donnés par les Annales <le la société archéo-
logique de Namur, VII, p. 31 , sont dès à présent datés des deux premiers siècles,
parce qu'ils ont été trouvés dans le cimetière de Flavion , où une suite non interrompue
et complète de monnaies s'arrête brusquement à Commode.
XXIX XXII i
— 54 —
Ai-je tort, après cela, de revendiquer pour l'archéologie le
rôle si beau d'auxiliaire de l'histoire? Ai-je tort de séparer la
cause de la science de ces études sèches et superflues qui se con-
tentent d'énumérer les trouvailles, et soit timidité, soit tout autre
motif, ne se permettent jamais la moindre induction historique?
Pour ne parler que du genre de travaux ayant l'époque
romaine pour objet, je ne comprends pas qu'un explorateur
d'antiquités belgo-romaines relatives aux quatre premiers siècles ,
ne soit pas profondément versé dans la connaissance des écrits de
Tacite , de Pline , de Suétone , comme dans celle de Vopiscus ,
Spartien, Capitolin et des autres écrivains de l'histoire d'Auguste.
A moins d'un solide fondement historique, les études archéolo-
giques sont établies sur le sable, et autant en emporte le vent!
Persuadé que ma pensée est bien celle des organisateurs du
Congrès, je termine ici cette trop longue lettre en vous priant
d'agréer, Monsieur le Secrétaire perpétuel, l'expression de mes
sentiments les plus dévoués et' les plus empressés.
H. SCHUERMANS.
Hasselt , le 25 octobre 1865.
LA
GRANDE COMMANDERIE TEUTONIQUE
DE
VIEUX-JONCS1.
NOTICE
par M. ARNAUD SCHAEPKENS,
MEMRRE CORRESPONDANT A BRUXELLES.
A. Comnianderie de l'ordre Teutonique à Maestricht.
Les guerres des croisades , on le sait , donnèrent naissance à
des ordres mi-religieux , mi-militaires , destinés dès leur origine
Commissaires rapporteurs : MM. H. Schuermans et le baron Jules de St-Genois.
' La description de la commanderie est faite d'après des notes prises il y a quelques
années ; nous ne pouvons donc garantir au visiteur qu'il trouvera encore ce monument
dans l'état que nous le décrivons.
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— 57 —
à combattre pour la défense et la protection de la Foi et à soigner
les pèlerins pauvres et les militaires blessés ou malades. Les trois
grands ordres qui furent institués avec cette noble mission étaient
les Johannites ou Hospitaliers , qui devinrent plus tard chevaliers
de Malte , les Templiers et les chevaliers de l'ordre Teutonique.
Ces derniers avaient fondé, au XIIIe siècle, la grande comman-
derie de Vieux-Joncs dans le Limbourg, près de Hasselt. Elle était
le chef-lieu d'une des douze provinces ou bailliages teutoniques et
comprenait les commanderies particulières suivantes :
i. Nouveaux-Joncs, à Maestricht.
u. Saint-André , à Liège.
m. Fouron -Saint-Pierre.
iv. Gemert.
v. Cologne.
vi. Saint-Gilles, à Aix-la-Chapelle.
vil. Beekevort.
vin. Gruitrode.
îx. Ordenge.
x. Bernesheim.
xi. Seersdorff.
xu. Rammersdorff.
La grande commanderie l de l'ordre Teutonique de Vieux-Joncs,
près de Hasselt, a été, à différentes reprises, l'objet de recherches
historiques et archéologiques. Mantelius, dans son Historia Los-
sensis, a donné la date de sa fondation. Le Mire, dans son Opéra
diplomatica, et Foppens, dans la continuation du même ouvrage,
en ont publié plusieurs diplômes et une liste partielle des noms
de ses grands commandeurs. Pendant ces dernières années ,
d'autres auteurs ont illustré son histoire par de savants et sérieux
travaux. Nous citerons parmi ces derniers MM. A. Perreau 2 et
Serrure, de Gand , pour leurs recherches numismatiques, et feu
M. Wolters 5, pour sa description archéologique et historique du
1 L'archiduc Guillaume d'Autriche était le grand-maître de l'ordre Teutonique en 1861.
Le grand-maître actuel est l'archiduc Guillaume- François-Charles , né le 21 avril 1827.
* Recherches historiques et numismatiques sur la commanderie de Vieux- Joncs,
Bruxelles 1848, et M. Serrure par ses travaux insérés dans le premier volume de
la Revue numismatique Belge.
3 Notice sur l'ancienne grande commanderie des chevaliers de l'ordre Teutonique
dite de Vieux-Joncs, dans la province de Limbourg.
— 58 —
monument. Une notice, dont nous donnons le titre en note, a éga-
lement été insérée dans l'annuaire de la province de Limbourg ',
d'après le manuscrit de J.-S. Seesdorf, de 1607*2. Enfin Ernst cite
sur le même monument un manuscrit historique de Schreiber 3.
L'ordre Teutonique choisit pour siège de sa grande commanderie
dans nos contrées une chapelle élevée à l'occasion de la découverte
d'une statue miraculeuse de la Vierge, trouvée entre les roseaux
dans un endroit marécageux, près de Bilsen , et nommée, d'après
l'endroit, des Joncs (de JuncisJ; cette chapelle, érigée en l'hon-
neur de la Vierge, fut consacrée le 25 février 1216 par Thierry,
évêque d'Eslhonie , faisant alors fonction épiscopale dans l'évèché de
Liège. Arnould VI, comte de Looz, et sa sœur Mechtilde ou
Mathilde, abbesse de Munster-Bilsen , la donnèrent à l'ordre
Teutonique, avec toutes ses dépendances. Cette cession fut confirmée
en 1220 par Hugues de Pierrepont, alors évêque de Liège4.
Le plus ancien vestige qui existe encore de la commanderie
a été passé sous silence par ceux qui ont écrit son histoire dans
ces dernières années. C'est la grande pierre tombale qui orne
le milieu du pavé de l'église devant le chœur et qui ferme la tombe
d'Emond , évêque de Courlande , lequel était religieux de l'ordre
Teutonique et suffragant du diocèse de Liège ; il mourut le 1 3 dé-
cembre 1292.
Sur cette pierre , une des plus belles que nous possédions en
Belgique , mais fortement usée parce qu'elle se trouve au niveau
du dallage de l'église, au lieu d'être élevée 5, est gravé en creux le
« Notice historique sur la grande commanderie de l'ordre Teutonique de Vieux-
Joncs. (Annuaire de la province de Limbourg , Maestricht 1850).
s Le manuscrit de J.-S. Skksdohf, qui renferme les nouveaux statuts de l'ordre ,
provient des archives de la commanderie de Gruitrode dans la Campine belge. Il se
trouve aujourd'hui aux archives de la ville de Maestricht.
5 Balleg Biesen beschrieben, cité au 7me vol. pp. 373-374 de V Histoire de l'ordre
Teutonique. Eknst le cite également dans ses Suffragants de Liège.
* MiR/Eus, Opéra diplomatica, etc. Suppl. tome II, p. 988.
• Elle mesure 3 mètres 31 centimètres de long sur 1 mètre 68 centimètres de large.
— 59 —
portrait en pied de l'évêque, bénissant de la main droite et portant
la crosse pastorale de la main gauche. Au-dessus du baldaquin
gothique couronnant la niche qui entoure le portrait peint
en costume épiscopal , la mitre en tête , sont deux anges qui
balancent des encensoirs; au pied est un dragon; deux salamandres
vomissantes ornent le haut de la niche. La tète et la mitre de
l'évêque , ainsi que les têtes et les mains des anges , en marbre
blanc, sont incrustées dans la pierre bleue, et sur le bord de la
tombe on lit l'inscription suivante en caractères gothiques arrondis ;
Hnno imlleno bis ccnttno buobeno ac octogeno tïatum btbtt
(!!>« screno furia feato concluso sine molfsto orr ptus
(Smunbus çcrprubens coryoxe munbus
(Êonspkuus forma prafulgens lamp aie morum,
Snstructusque normâ confratrum Seutonicorum,
£aubibus tnstanbo tfmplum Çauli renooanbo.
Stoi'ii gaubea rra mors atroï ts et aubens
Ijunr aublimarâl rurontnsis pantiftcatus ,
3tqite bccornnt bncult mitnrque yaratus.
Cette inscription est citée par le baron de Wal , dans son
Histoire de V ordre Teutonique, publiée sans nom d'auteur.
La commanderie en elle-même est un des monu-
7/ ments les plus importants de la Belgique , par son
étendue et les différentes constructions dont elle est
formée, et qui datent pour la plupart du XVe, du
XVIe ou du XVIIe siècle; des armoiries décorent les
portes d'entrée.
Les jardins , les prés , les bois , les vergers et les
terres arables, qui entourent le monument, ont une
superficie de 157 bonniers, d'après une levée faite en 1819,
lorsque ce beau domaine fut mis en loterie par son proprié-
taire, au capital de 251,284 florins des Pays-Bas. En 1831,
60 —
l'évêque de Liège offrit 350,000 francs sur un prix de 400,000,
pour y établir la seconde section du séminaire diocésain.
(/S 6S)
Armes sculptes au-dessus des petites portes, à l'intérieur de la cour de la commanderie.
L'architecture religieuse est remplacée, dans la plupart des con-
structions , par l'art civil. Ce n'est plus que dans l'église que l'on
retrouve le souvenir de l'origine de l'ordre et des services qu'il a
rendus à l'humanité et à la religion.
Une vue d'ensemble du château, représentant le corps de bâtiment
principal, entouré des groupes des autres constructions et des
jardins, a été publiée dans les Délices du pays de Liège. Feu
M. Wolters a fait graver et placer en tète de sa notice la même
gravure , réduite dans ses dimensions. Sur cette planche on voit le
château, avec le pont jeté sur les fossés qui l'entourent. Quatre
tours à toitures prismatiques , couvertes d'ardoises, sont aux angles,
et à l'intérieur de la cour, formée par les quatre ailes de l'édifice,
se trouvent deux autres tours , dont l'une sert aux cloches et aux
timbres l de l'ancien carillon , et l'autre renferme l'escalier. Dans
1 II existe encore deux timbres ou cloches du carillon ; l'une est en forme de ruche,
sur l'autre le mouleur a applique' trois feuilles de rosier moulées sur nature. Sur la plus
grande des deux, servant à indiquer l'heure on lit:
Sanctus Lambertus a° dni lotiH revendu generose duo Joanne de Ghoer fialiœ de
61
le tympan de la façade principale , on voit deux écussons dont les
armes ont été enlevées. La date de 1767, qui est restée, rappelle
d'importants changements faits par le commandeur Reiclisach.
200 mèlres Échelle de i à 2500.
Plan de la grande commanderik de Vieux -Joncs.
A. Entrée principale.
B. BAlimont principal flanqué de tours.
Une grande cour oblongue , bordée des deux cotés de
bâtiments servant d'écuries , de remises et de magasins à
fourrages, précède le château. Les deux ailes qui forment ces
Juncis commendalore provinciali et dT Lamberlo wamesio ecclesiœ parocliialis
Sancti Andréa a rodien pastore ejusdem balim Schieffenario. y. i. u. t.
— 62 —
constructions sont reliées par un grillage en fer qui fait front vers
la campagne.
L'église , qui s'élève près de la commanderie , est d'un style
simple et n'a pas de caractère archilectonique prononcé. Elle fut
commencée sous le commandeur Frambert de Lichtenberg, mort
en 1605. Le comte Huin de Geleen, feld-maréchal de l'Empire et
grand commandeur de l'ordre, mort le 27 août 1656, la fit
achever. A l'extérieur elle rappelle par ses lignes l'ancienne église
ogivale. Composé d'une seule nef vaste et large, son chœur,
plus rétréci dans ses dimensions , se lie avec peine au monument.
Des parties de pignons , en style ogival , sont encore conservées
près du chœur, qui est décoré d'une statue de la Vierge avec la
date de 1637. Des croix de l'ordre et des têtes de lions, armes
du commandeur de Bocholt ', sont sculptées sur la frise qui borde
les côtés latéraux , sous le toit.
Les bâtiments , placés aux deux côtés de l'église et qui servent
de sacristie , portent à l'extérieur de la porte d'entrée la date de
1571. Les portiques sont liés à l'église et se prolongent jusqu'aux
fossés du château; ils portent la date de 1635. En partie démolis,
ils se composent encore de sept arcades en plein cintre à larges
archivoltes reposant sur des colonnes d'ordre toscan. La façade
qui donne sur le jardin est percée de fenêtres ogivales. Sous les
combles , on logeait les moines quêteurs qui se présentaient à la
commanderie , et on les nourrissait dans les caveaux ou cuisines.
Nous signalerons encore au visiteur l'une des entrées de la
commanderie , bâtiment isolé ayant l'aspect d'une porte et qui
servait anciennement de refuge à douze vieillards pauvres , et plus
tard d'école aux enfants. Elle est maintenant la demeure du vicaire
attaché spécialement à l'église. A l'autre bout de l'avenue se trouve
1 M. Serrure a publié dans la Revue numismatique belge (1" vol. , 2me série),
un jeton aux armes de ce commandeur avec la date de 1663.
— 63 —
l'hôtellerie , dont la porte est surmontée des armes du cardinal de
Schonborn, commandeur de l'ordre. Sur un moulin à Hoesselt,
non loin de Vieux-Joncs , sont sculptées les mêmes armes avec
l'inscription suivante :
Cardinal von schonborn bischoff
und furst von speir teutsch or-
dens provincial alte biessener baley.
Ce qui signifie : Cardinal de Schonborn, évêque et prince
(filrstj de Spire, commandeur provincial du bailliage de Vieux-
Joncs, de Tordre Teutonique.
L'intérieur de la résidence des commandeurs répond bien aux
lignes monumentales qu'elle présente au dehors. Ce sont , pour la
plupart, de grandes pièces bien éclairées, d'une forme régulière,
d'un goût simple et sans luxe architectonique. Les apparte-
ments , aujourd'hui privés de leur somptueux ameublement , ne
permettent plus, sinon dans quelques débris, de retrouver le
souvenir des richesses, du goût distingué et de l'amour des arts
de ces grands seigneurs qui, après avoir
brillé dans la carrière des armes, ve-
naient terminer leurs jours dans cette
paisible résidence d'été. La beauté de
la nature, la richesse d'une végétation
séculaire qui entoure cette demeure n'est
plus animée par le mouvement de ses
anciens habitants, et de temps en temps
la cloche qui marque l'heure, ou le
cri des animaux qui paissent dans
les prés, viennent seuls interrompre le
silence qui y règne.
Portrait d'un commandeur au-dessus
d'une cheminée dans l'une des tours.
- 64 —
Les appartements aux quatre angles étaient autrefois tendus
de damas, de couleur différente pour chaque tour, à l'imitation
des anciens châteaux royaux de France. C'était la tour rouge,
la jaune, la hleue et la verte. Les couleurs de leurs tentures
sont encore reconnaissantes , dans une ou deux de ces tours , à
des lambeaux qui pendent contre les murs, le long de leurs
châssis. Une des tours est encore décorée de peintures et de
portraits qui rappellent, par la variété des costumes du XVIIe siècle,
le type des figures des derniers commandeurs. Dans quelques
appartements il y avait du cuir de Gordoue , dans d'autres des
plafonds travaillés en stuc et des lambris de jonc tressé. Les
planchers portent encore les empreintes des coups de hache qu'ils
ont reçus à l'époque où les appartements servaient de greniers
d'abondance et de demeure à un régisseur, chargé de recevoir le
prix des fermages en nature, après la suppression de la comman-
derie par les républicains français.
Plusieurs toiles décorent les pièces au rez-de-chaussée et aux
différents étages; ce sont pour la plupart des portraits en pied,
ou à mi-corps, des personnages appartenant aux premières familles
allemandes dont ils portent les armoiries et qui sont peints entre
le XVIIe et le XVIIIe siècle. Leurs costumes diffèrent selon
l'époque et la mode du temps. Plusieurs commandeurs figurent
dans ces débris de la décoration du vieux château ; ils portent de
riches armures et sont armés de pied en cap et drapés du grand
manteau de cérémonie. Rien, cependant, ne surpasse en intérêt
pour l'artiste l'intérieur d'une des tours où sont groupés une suite
de portraits de femmes et d'enfants de la famille d'un des derniers
commandeurs. Le plafond de cette pièce est orné d'armoiries; cinq
besants d'argent y brillent sur un fond d'azur.
L'intérieur de cette demeure princière rappelle, par quelques
inscriptions des meubles et des portraits , les noms des chevaliers
ou commandeurs de l'ordre Teutonique. C'est une demeure splen-
— 65 —
dide délaissée, à laquelle les ravages du temps ont imprimé un
aspect de vétusté que la riche et luxuriante nature qui l'entoure
rend encore plus apparent.
La chapelle particulière des commandeurs est un simple
appartement au premier étage, relevé par la décoration d'un autel
en style Renaissance flamand flamboyant , qui est surmonté d'une
grande conque soutenue par deux génies. Dans le haut sont les
armes de Huin d'Amstenraedt avec celles de l'ordre Teutonique l.
Deux colonnes torses ornées, dans les creux, d'oiseaux et derinceaux
dorés se détachant sur un fond couleur de bronze , soutiennent le
couronnement. Le tableau qui décorait le milieu a été enlevé : il
représenlait l'Assomption de la Sainte Vierge. Ce beau retable, qui
porte si bien le caractère et la fougue de l'art flamand de la Renais-
sance, est placé dans une niche ou chapelle qui se ferme
à deux battants, et un escalier mobile y donne accès.
Plusieurs anciennes cheminées décorent encore les
appartements; sur l'une, qui est décorée d'un portrait
ovale d'un commandeur, on lit entre deux écussons
avec la croix de l'ordre, l'inscription suivante :
Anno Mille-no Centeno Cum Nonageno Tune, Alemanorum
Surreœit Nobilis Ordo.
1 L'écusson est écartelé ; le dextre porte la croix gringolée d'argent, ayant au centre
l'écusson orne' de trois balles de gueules sur champ d'argent.
Le senestre porte la croix de sable de l'ordre , lisérée de blanc ou d'argent.
L'écusson est surmonté du double heaume dont les ailes sont chargées de la même
croix.
— 66 —
L'ésrlise, comme nous l'avons dit, s'élève près du château.
Commencée sous Frambert de Lichtenberg, mort en 1605, elle
fut terminée sous le comte Huin de Geleen , mort en 1656».
Composée d'une seule nef vaste et bien éclairée dans le style du
XVlIe siècle, elle a ses murs latéraux ornés de pilastres, et des
bases de colonnes ogivales se montrent encore aux plinthes. Dans
les lignes d'ensemble de l'édifice, on reconnaît encore le
monument ogival démoli et que celui-ci remplace. Comme le
château, l'église a perdu la plupart de ses ornements et de ses
meubles. Sur le maitre-autel , dans le chœur, sont exposés des
reliques de sainte Elisabeth ; les huit chandeliers en argent qui
l'ornaient également autrefois n'existent plus. L'orgue , qu'on
range parmi les plus belles de la contrée , est aujourd'hui à
l'église d'Achel , village belge près de Ruremonde. Les vêtements
i Voici le texte de l'inscription de la consécration ou dédicace de l'église , qui est
gravée sur une pierre ou panneau ovale. Wolters l'a déjà donnée ainsi que la plupart
des inscriptions sépulcrales de l'église. Ces dernières ne sont pas suivies avec une
entière exactitude par ce laborieux investigateur :
URBANO VIII. PONT. MAX.
FERDINANDO III. ROM. IMP.
FERDINANDO BAVARO ARCHIEP.
ELECT. COL. ET EP. LEOD.
JO. CASP. SUPR. ORD. TEUT.
MAGISTRO.
ECCLESIA HAEC , CUJUS FUNDAMENTA AB EMUNDO HUIJN
DE AMSTENRODE COM. PROV. IACTA PER GODEFREDUM
COMITEM AB HUIJN DE GELEEN S. CAES. M CAMPIMAR
EJUS SUCCESSOREM UNA CUM AED1FICI0 ANNEXO
ABSOLUTA, A REV. m° D. HENRICO. EP. DIONIJS :
SUFFRAG. LEOD. IN HONOREMB. MARLE
DE1P. A. MDCXXXV1II, DIE
XII. SEPT. EST CONSECRATA.
EJUS DEDICATIO ANN1VERSARIA CELEBRATUR
DOMINICA POST NATIVITATEM EJUSDEM
B. MARLE, CUJUS ET.'ANNUNCIATIO HIC
S1NGUL1S ANN1S SOLEMNITER C0L1TUR.
— 67 —
sacerdotaux répondaient par la richesse du travail et de la matière à
la décoration des autels. Deux des trois autels , qui sont aux côtés
latéraux du chœur, renferment des tableaux de Gaspard de Crayer,
assez faibles de couleur et détériorés par le temps et le manque de
soins. Sur l'un est saint Georges, recevant de la main d'un ange
la bannière blanche avec la croix de gueules ; sur l'autre , consacré
à la Vierge, est le Christ mort sur les genoux de sa mère.
Ces toiles sont largement peintes et dénotent le talent du
célèbre artiste anversois, ou d'un de ses habiles imitateurs, qui
n'avait pas la vigueur du coloris de son maître. Au-dessus de la
petite porte qui conduit à la sacristie, à gauche du chœur, sont les
armes du baron de Bocholt , trois tètes de lion sur un écu à fond
de sable, couronnées. A côté on lit:
E. G. F. B. Scheffener.
T. 0. R. 1637.
C'est peut-être le nom de l'architecte de l'église , qui fut achevée
en 1638. Sans parler d'autres pierres sépulcrales qui se trouvent
dans l'église , signalons une grande dalle , placée dans le pavé
du chœur, et ornée au centre et aux quatre angles d'anges sonnant
la trompette , avec les mots Surgite, venite morlui ad judi-
ciam. Les noms des commandeurs Godefroid Huin , baron de
Geleen et de Wachtendonck , mort en 1656, et d'Edmond Huin
d'Amstenraedt , mort le 9 avril 1634, y sont mentionnés. Le
dernier était un grand bienfaiteur de l'ordre; en 1621, il fonda,
avec l'agrément du grand-maitre Charles d'Autriche , le collège de
l'ordre Teutonique à Louvain , afin que les jeunes gens qui se
destinaient au sacerdoce et qui voulaient entrer dans l'ordre pussent
fréquenter les cours de cette célèbre Université 1. Le second,
1 Valerius Andréas , Fasti. Academ. slud. gêner. I.oran. , p. 327. Nicolals
Vernuueus , Academ. Lovan. , p. 1-5.
- 68 —
Godefroid Huin , feld-maréchal dans les armées impériales , se
signala par sa bravoure dans la guerre contre les Suédois. Ces
deux noms sont donnés avec les mêmes dates par Foppens.
Godefroid , baron ou comte de Huin à Geleen , fit ériger la belle
porte d'entrée de la commanderie, dont l'aspect est monumental
et pittoresque. Une longue et large avenue conduit de là au corps
de bâtiment principal.
Nous terminons celte notice par une liste des grands comman-
deurs de l'ordre qui, comme nous l'avons dit, a déjà été publiée
par Foppens, en note, dans le quatrième volume qui fait suite à
l'ouvrage du chanoine Le Mire, intitulé Diplomatum Belgicorum
nova collectif), etc., en y ajoutant pour la compléter les dates et
les noms donnés dans l'annuaire ou Jaerboek van Limburg
de 1850.
LISTE
GRANDS COMMANDEURS DE L'ORDRE TEUÏOMQI 1
I. Thierry de Guldenhaupt 1267 .
II. Louis de Kinlwilre 1268.
III. Matthieu de Francfort 1271 .
IV. Hertnan de Hu-kle ou a Ryckel 1272.
V. Nicolas , seigneur de Uom 1278 .
VI. Thierry de llorst 1284. '
VII. Thierry de W'evelliocen ou Wevelighovet} 1292-1295.
VIII. Gauthier de Papenlioven 1300-1302.
' Entre ces deux derniers nom?, dans le manuscrit de Seesdoif, est placé Egbert d<
Stoekeni en 1283.
— 69 —
IX. Thierry, seigneur de Hollande , devint commandeur en 1307 '.
Hic fuit WilhelmiRom. Régis fîlius spurus, etc. obiit 1312.
X. Gérard, comte de Loo%, vivait en 1322. Il était fils du comte
Arnold de Looz et avait encore quatre frères dans l'ordre
Teutonique ; Conrad , Lambert, Werner et Vredebete.
XI. Rutger de Caudenbergh , succéda en 1325.*
XII. Jean de Hoentlwrst en 1328. r'
Fut en même temps commandeur du bailliage d'Utrecht et chan-
celier du duc de Brabant; il mourut en 1340.
XIII. Gérard van Printhaghen 1 329 .
XIV. Henry de Rondhorst ou Hondhorst 1 340 * .
XV. Conrard de Colen ou von der Kaulen 1 351 B .
XVI. Rutger de Vrimersen , Vlimersen ou Weimerslteim 1358 .
Fut également commandeur du bailliage d'Utrecht, et en 1358
grand commandeur de Coblence.
XVII. Renier de Hoen ou Hoensbroeck , fut en même temps commandeur
du bailliage d'Utrecht; il mourut en 1371 .
XVIII. Henri de Lewenberg ou Leeuwenberg 1371-73.
XIX. Renier de Hausen ou Hansen devint grand commandeur en 1389
et mourut le 24 mai 1410.
XX. Ivan ou Jean de Cortenbach, mort en 1434.
XXI. Théodore de Betgenhausen ou Betenhausen , mort en 1440.
XXII. Mathieu van der Straeten , mort en 1 460 .
XXIII. Nicolas van der Dusen \ mort en ,1467 .
XXIV. Jean van der Velde , mort en 1481 .
XXV. Gérard de Sombreffe , mort en 1482.
XXVI. Jean de Herck ou de Hauck , mort en 1503 .
XXVII. Maximilien de Eynatten , mort en 1512.
XXVIII. Gérard Streithagen, mourut le 21 janvier 1536.
XXIX. Winand Breil ou de Breiel, gouverneur de Frise , de Groningue ,
et d'Overyssel, mourut le 5 janvier 1554.
XXX. Jean de Ghoer, mort le 24 août 1572 .
XXXI. Henri de Ruysschenberg , mort à Cologne en 1603.
XXXII. Frambert Bock de Lichtenberg , mort le 16 novembre 1605.
' Le même manuscrit le place en 1317.
* Ou en 1324 , d'après le manuscrit précité.
5 Ou en 1333, idem.
* Ou Théodore de Rondorf.
5 Winand de Spaubeek est cité en 1343. et Conrad de Francfort en 1349.
0 Sa mort est placée à l'année 1476 d'après les Analectes de Mathieu, t. V.,
dans l'Annuaire du Limbourg , de 1850.
XXIX XXII !
cité
— 70 —
X XXI II . Edmond Huyn d'Amstenraedt ', mort le 9 avril 1634.
XXXIV. Gode froid Huyn , comte de Geleen, mort le 27 août 1657 .
L'obituaire de l'église de Saint-Nicolas à Maestricht, |>orte
27 Aug. 1657, obiit hic Trajecti excellentiss. et illustriss.
D. Godefridus cornes de Geleyn archicommendator Junce-
tanus. Req. in pace.
XXXV. Edmond-Gode froid, baron de Bocltolt , mort le 26 octobre.. . . 1690.
XXXVI. Henri de Wassenaer de Warmond, mort le 12 février 1707 ou 1709.
XXXVII. Damien Hugo, baron de Schonborn , évêque de Spire, mort
le 19 août 1743.
XXXVIII. Ferdinand-Damien-Henri baron deSickingen d'Ebernburg, élu
grand commandeur en 1743 , mort le 3 mai 1749.
XXXIX. Léopold de Steinen-, baron de Scherffen et Kessenich , mort le
29 juillet 1 766 .
XL. Frunçois-Jean-Népomucène , baron de Reichsach. II fit de
grands cbangements aux bâtiments de la commanderie , où il
termina ses jours.
XLI. Kerpen fut le dernier commandeur élu ou nommé ; il ne résida pas
à la commanderie.
* Edmond Huyn van Amsteraedt, commandeur, mort le 9 avril 1634 à Vieux-Joncs,
était cousin du commandeur Godefroid Huyn van Geleen, né vers 1595 et mort
à Maestricht, en 1657. Le Messager des sciences historiques de Belgique, a
publié une 'lettre de Huyn de Geleen au président Roose, datée de Vieux-Joncs le
19 mai 1643.
Voir Charles Rahlenbeck , Messager des sciences historiques de Belgique ,
année 1864.
1 Ce commandeur a fait don d'un ouvrage à la bibliothèque de la ville de Maestricht,
portant pour titre : Historisch Diplomatischer Unterricht von des hohen Teulschen
Ritterordens und inbesondere der Balley Hessen. On y lit la pompeuse inscription
suivante :
EX DONO
NOB1L. ET EXCELS. DOMIN1
BARONIS DE STEINEN
ILLUSTK. 0RD1N1S THEUT0N1C1
EQUIT1S
MAGNI COMMENDATOHES
BAILLI VAE DE JUNCIS
k* k" &»
1752.
UNE ANCIENNE
COLLECTION DE NUMISMATIQUE ET D'ANTIQUITÉS.
NOTICE
par feu M. ALBERT TOILLIEZ ,
MEMBRE CORRESPONDANT A MONS.
On a publié, durant ces dernières années, plusieurs inventaires
d'anciennes collections d'objets d'art et d'antiquité , dans le dou-
ble but d'aider à faire retrouver ces objets dispersés depuis par
tant de causes , et surtout de faire connaître l'état des connaissan-
ces artistiques et archéologiques à diverses époques. Nous croyons
que sous ce dernier rapport et par la naïveté de la forme , celui dont
nous allons nous occuper, offrira quelque intérêt. Nous en som-
mes redevable à notre ami M. Léopold Lefèvre , ingénieur civil à
Mons; il l'avait trouvé dans un paquet de hasard, acheté dans une
vente de livres et formé en grande partie d'ouvrages et de bro-
chures imprimés à Dijon.
Ce catalogue forme une plaquette petit in-folio , reliée en velin ,
et se compose de trois parties; la première, qui est imprimée et
comprend huit pages, a pour titre : Roollc des médailles et au-
Commissaires rapporteurs : MM. A. Scheler et II. Schoermans.
— 72 —
très antiqiiitez du cabinet de Monsieur Du Perier «, gentilhom-
me de la ville d"1 Aix en Provence, et il est déclaré à la fin que
toutes les susdites antiquitez sont extraites de six les plus ra-
res cabinets de la France. La deuxième et la troisième parties
sont manuscrites et sont intitulées, celle-là : Roolle des pièces que
je mestois réservées desquelles je ne me voulois point desfere ,
celle-ci : Aultre roolle des pièces que jay acquises de nouveau.
On remarque au recto du feuillet de garde du commencement,
la note manuscrite suivante : « Ce cabinet fut acheté en 1608 par
■ Messieurs d" Aix pour Monsieur De Guise, gouverneur de la
< province. • La troisième partie est terminée par une note ainsi
conçue : < Plus jay acquis despuis le susdit marché faicl par
• Monsieur de Bagarris par le commandement de sa Majesté
■ quarante médailles d'argent pour remplir leslroit d'icelles 2 et
• dont il y a , ou d'imperialles ou aultres une trentaine nettes et
» rares que jacorde de donner pardessus led. marché. Faict à Aix
■ le unxieme febvrier mil six cens et huict. Du Perier.
Enfin , au-dessous de cette note , se trouve l'attestation d'un
notaire royal héréditaire , dont la signature est illisible , portant
qu'il a collationné ledit roole pour le bailler à Messieurs les pro-
cureurs du pays.
' Ce Du Perier , gentilhomme (V Aix en Provence, ne serait-il pas François du
Perrier , fils de Laurent du Perrier , avocat au parlement d'Aix , dont Malherbe a
rendu le nom si célèbre en pleurant la mort de sa fille dans cette élégie bien connue :
Ta douleur, du Perrier, etc.? Plusieurs indices portent à le croire. Malherbe, qui l'avait
intimement connu durant son séjour à Aix , en parle comme d'un intime ami dans deux
lettres du 7 octobre 1607 et du l^ janvier 1608, adressées à M. du Peirèse. Ces dates
semblent plaider en faveur de cette identité. On serait tenté d'en trouver une preuve de
plus dans la forme même donnée à cette consolation à M. du Perrier: c'est à l'anti-
quaire surtout que le poète paraît s'adresser en évoquant cet Opheltés-Archémore, fils de
Lycurgue, roi deNémée, en faisant défiler devant lui ce cortège tout mythologique de
Tithon , de la Parque, d'Alcide , de Priam, etc. Du Perier , son catalogue le prouve ,
aimait et connaissait l'antiquité. Malherbe aurait-il choisi celle-ci , comme dérivatif aux
douleurs de son ami? La présente publication ouvre la porte à cette hypothèse.
* C'est-à-dire pour remplit les lacunes existantes dans la collection.
— 73 —
Il nous paraît résulter de ce qui vient d'être exposé que
M. Du Perier avait fait imprimer, dans une intention quelconque,
le catalogue d'une partie de sa collection et que le parlement d'Aix,
qui désirait offrir cette collection au gouverneur de la province ,
a voulu l'avoir toute entière , circonstance d'où sont provenus les
suppléments manuscrits.
Le duc de Guise dont il s'agit ici est Charles de Lorraine , fils
aîné de Henri-le-Balafré , qui fut assassiné aux Etats de Blois en
1588 ; l'un des chefs de la ligue de 1591 à 1594 , il avait fait
la paix avec Henri IV à la fin de cette dernière année et en avait
reçu à cette occasion , outre une somme de près de trois millions
de livres, le gouvernement de la Provence !.
C'était , comme on sait , l'usage autrefois que les villes et les
provinces fissent des cadeaux à leurs gouverneurs civils ou mili-
taires lorsqu'ils entraient en fonctions , aux personnages impor-
tants qui y passaient et même aux rois lors de leur avènement ;
cet usage existait aussi pour les corps constitués , les corporations
de métiers , etc. Les cadeaux consistaient d'ordinaire en sommes
d'argent, qui souvent étaient considérables. C'est ainsi qu'on estime
à 200,000 écus d'or les présents offerts à Philippe II , lors de
la tournée qu'il fit avec Charles-Quint, en 154-9, dans nos pro-
vinces, pour s'en faire reconnaître prince souverain 2. Deux anec-
dotes curieuses confirmeront ce que nous disons de l'importance
qu'avaient souvent cette sorte de cadeaux ; nous les avons trouvées
dans YEncyclopediana, Paris, Paulin, 1843. Lorsque le maréchal
de La Ferté fit son entrée dans Metz, les juifs vinrent pour le saluer
comme tous les autres ; quand on lui eût dit qu'ils étaient dans
l'antichambre : « Je ne veux pas voir ces marauds-là , dit-il ;
» ce sont eux qui ont fait mourir mon maître. » On fut donc leur
dire que M. le maréchal ne pouvait leur parler ; en témoignant
leurs regrets de cette circonstance , ils dirent qu'ils lui appor-
1 Bordier et Charton, Histoire de France, édition nouvelle, t. Il, p. 107 , col . 1
* Delewarde, Histoire générale du Hainaut, t. V, p. 455.
— 74 —
talent un présent de quatre mille pistoles ; le maréchal à qui l'on
rapporta promptement cela , répondit : « Faites-les entrer ; ces
• pauvres diables , ils ne le connaissaient ma foi ! pas , quand ils
• l'ont crucifié. 1 >
Le successeur de M. le duc de Vendôme 2 ( dans un gouverne-
ment de province , accepta la bourse de mille louis qui lui fut
présentée, selon l'usage, à son entrée; mais, lui dirent les magis-
trats, votre prédécesseur l'avait refusée. — -Oh! répliqua le
■■ nouveau gouverneur , ce monsieur de Vendôme était un homme
» inimitable 3. • L'argent était quelquefois remplacé par des pièces
d'orfèvrerie , mais nous croyons que le cas de l'offre d'une collec-
tion d'antiquités peut être regardé comme unique ; il prouve
l'estime qu'on faisait de cette collection. Il est très-probable que
ces dons n'étaient rien moins que volontaires et gracieux , bien
qu'on les qualifiât de cette manière , mais ici cela est certain puis-
qu'on voit par la note de M. Du Perier que le cadeau fait à M. de
Guise, n'était que l'effet d'un ordre du roi 4.
On peut se demander comment le catalogue , qui devait servir
de pièce à l'appui de l'acte d'acquisition de la collection , a pu
arriver en Belgique ; une adresse et une note inscrites sur l'un
des plats du volume montrent au moins qu'il est allé directement
d'Aix à Dijon , car la première porte : A monsieur monsieur
De Requeleyne, conr. au parlement , à la chorbonnerie , à
Dijon , et la seconde : Ce livre m'a été envoyé par M1'. Tomasin
de Maso g ne , conr. au parlement d'Aix.
Nous avons conservé l'orthographe de notre vieux catalogue;
mais nous avons ajouté la ponctuation , aux endroits où cela était
indispensable.
1 Ouvrage cité, p. 7, col. 2.
-' Sans doute, Louis-Joseph, troisième duc de Vendôme, célèbre général sous Louis XIV et petit-fils
de Césat de Vendôme, fils aîné de Henri IV el de Gabrielle d'Estrées.
' i)u\ rage i ilé . p. 56, col. I
4 Henri IV
ro
Roolle des médailles et autres antiquitez du cabinet de
Monsieur Du Perier, gentilhomme de la ville d'Aix en
Provence.
MÉDAILLES GRANDES DE CUYVHE ET DE METAIL DE COH1NTHE
Julius.
Julius Cœsar du revers d'Auguste.
Autre dudict revers.
Autre dudit Julius et Auguste d'un costé
et une navire au R.
Augusfus,
Augustus du R. de S. C restitué par
Nerva.
Tiberius.
Tibeiïus du R. des deux victoires.
Autre du Prince assis, tenant la Patere !.
Autre ou les testes de Qrusus et de Ger-
manicus sortent de deux cornes d'abon-
dance.
Caligula.
Caligula du R. de la couronne civique.
Autre des trois sœurs.
Autre de l'adlocution.
Autre du sacrifice.
Autre du triomphe de la Germanie.
Claudim.
Claudius de l'Espérance.
Autre de l'arc sur lequel est la figure
Equestre au milieu de deux trophées
des ennemis.
Autre de la couronne civique,
Nero.
Nero de l'Edifice.
Autre de la Course.
Autre du Port.
Autre de la Rome.
Autre de l'adlocution.
Autre du Temple de Jarius.
* « Pendant longtemps, dit Barthélémy dans son Manuel de numismatique ancienne, les
» numismatistes ont cru à l'existence des monnaies en airain de Corinthe, mais il est reconnu mainte-
» nant que c'était une erreur, fondée sur ce que plusieurs bronzes antiques sont composés d'un alliage de
» cuivre et d'autres métaux, principalement d'étain. »
On peut voir, au sujet de l'airain de Corinthe, les chapitres 3, G et 18 du livre XXXIV de l'Histoire
naturelle de Pline. On y voit que de son temps déjà on faisait passer pour fabriqués de ce métal
beaucoup d'objets qui ne l'étaient pas.
2 Patera , vaisseau de forme circulaire et peu profond, ressemblant à une soucoupe, et servant à
contenir des liquides et non des solides, par conséquent à boire, non à manger. (Becker, Quœst.
Plaut. p. 50), mais employé plus particulièrement pour faire des libations. On versait le vin dans la
patera, d'où on le répandait, soit sur la tète de la victime, soit sur l'autel. Les paiera; de qualité infé-
rieure étaient en terre, les plus précieuses en bronze, en argent, et quelquefois en or, richement ornées
et d'un beau travail ; quelquefois elles avaient une poignée, le plus ordinairement elles en manquaient.
Anthony Rich, Dict. des antiquités romaines et grecques. — Voir aussi M. G. Hagemans, p. 40G
de son Cabinet d'amateur, et le Bull descomm. Roi/, d'art et d'archëol., III, p. 327.
— 76 -
Galba.
Galba de la Rome assise.
Vilellius.
Vitellius de la Victoire escrivant dans un
escu.
Vespasianus.
Vespasianus de Titus et Domitianus.
Autre de la Paix.
Autre de la Victoire de la Iudée , escri-
vant dans un escu.
Autre de Mars victorieux.
Autre de la santé.
Autre de la Iudée captive.
Autre de l'Amphithéâtre.
Autre du Prince assis sur une chaire
curulle.
Titus.
Titus de la figure* Equestre.
Autre de Mars.
Autre de l'Espérance.
Autre du Piince à cheval , à qui Mars
donne la victoire.
Autre de la Iudée captive.
Domitianus.
Domitianus de la Victoire couronnant le
Prince.
Autre desjeux séculiers.
Autre du Prince tenant une colonne entre
ses bras et le pied sur le fleuve du Rhin.
Autre de Mars.
Autre du Prince sacrifiant.
Autre de l'Annone '.
Autre de la mémoire de Domitile.
Nerva.
Nerva de la Pyramide.
Autre de la concorde de l'exorcite \
Traianus.
Traianus du forum.
Autre de la Basilique.
Autre du Roy donné aux Parthes.
Autre du Prince tenant par le col un des
ennemis par terre.
Autre du pont du Danube.
Autre du Prince à cheval , poursuyvant ses
ennemis.
Autre de la Dace pleurant sa captivité ,
avec les trophées d'icelle.
Autre de la Déesse Ceres et de la mesure
du bled.
Autre d'un aqueduCifaict par le Prince.
Autre de la figure de la Paix tenant soubs
ses pieds le Roy de la Dace.
Autre de l'Italie alimentée.
Autre de la victoire escrivant dans un
escu.
Autre de la providence des Dieux.
Autre de la Fortune.
Autre encores de la Providence.
Autre de l'adlocution.
Hadrianus.
Hadrianus de l'Afrique.
Autre de la resinuissance.
Autre de l'exorcite de la Dace.
Autre de la Capadoce.
Autre du Congière 3.
Autre du Prince relevant de sa main toute
la terre figurée par Cybelle , Mère des
Dieux.
1 Traduction trop littérale du mot Annona qui , joint à Augusti, constate le soin qu'avait pris l'em-
pereur d'approvisionner Home.
* Traduction par trop littérale d'exorcitus.
"' Congiarium , largesse ou donation ayant consisté d'abord en un certain nomlirc de mesures (comjïi)
de vin , d'huile , de sel , et plus tard en sommes d'argent nue les empereurs faisaient distribuer au
peuple . à leurs frais.
— 77 —
Autre de la galère portant le Prince.
Autre de l'adlocution.
Autre du Prince relevant l'Espagne.
Autre relevant l'Achaie.
Autre ou le Prince reçoit le Monde des
mains de Trajan.
Autre de la providence des Dieux.
Autre de la Mauritanie figurée par un homme
tenant un cheval.
Autre de l'Espagne.
Autre de l'Egipte.
Autre du Prince sacrifiant.
Autre de la Iustice.
Autre de la libéralité.
Autre de la vertu.
Autre de Neptune.
Autre de la clémence.
Autre du sacrifice pour l'advenement du
Prince en Italie.
Autre de la Rome.
Autre de la seurté.
Autre de l'abondance.
Antoninus.
Antoninus du congiêre.
Autre de M. Aurelle en sa ieuuesse.
Autre de l'Italie assise sur le monde.
Autre du Triomphe.
Autre du Tibre.
Autre du temple d'Auguste restitué.
Autre de la Phenicie.
Autre de la Colomne.
Autre de la paix.
Autre du génie du Sénat.
Autre de la Furie.
Autre M. dudict Antoninus, ou Elius est
d'un costé et la figure de la concorde
au revers.
Autre de l'Annone.
Autre du bûcher ou l'on bruslait les corps
des empereurs , appelle Rogus.
Lutins.
Lucius de l'abondance , tenant le monde
en sa main.
Autre de la Gallere.
Autre d'un char tiré par deux serpents.
Autre de l'aigle sur le monde.
M. Aur elius.
M. Aurelius en sa ieuuesse , du vase, sim-
pule ', litue 2 et flambeau, simboles de
la religion.
Autre du prince relevant l'Italie.
Autre de la victoire triomphale de l'Arménie.
Autre de la santé.
Autre de Mars.
Autre de la Germanie , pleurant sa capti-
vité, au dessoubs des trophées du Prince.
Autre de la despouille de la Germanie.
Autre de la despouille des Sarmates.
Autre du Prince et de Lucius se tenant
par la main.
Autre de l'aigle portant l'ame du Prince.
Commodus.
Commodus du triomphe.
Autre de la santé tenant une patere au
devant d'une colomne sur laquelle il y
a un serpent.
Autre du congiêre.
Autre du voyage du Prince.
Autre du Prince se tenant par la main3.
Pertinax.
Pertinax de la providence des Dieux.
1 Simpulum, grande cuiller à long manche qui servait, dans les sacrifices, à puiser en petite quantité
le vin dans le cratère ou dans tout autre grand vaisseau, pour en faire des libations A. Rich, Dict
d'ant. rom. et gr.
2 Lituus, bâton augurai .
» Sic.
— 78
Septimius Severus.
Severus de l'advenement du Prince.
Albinus.
Albinus de la paix.
Bassianus.
Bassianus du cirque,
Gela.
Geta du Lyon berissé.
Macrinus.
Macrinus de la paix et de l'abondance.
Diadumeniamis de la paix.
Heliogabalifs.
Heliogabalus du Revers du Prince tenant
le monde en sa main.
Alex. Severus, du Revers de la victoire.
Maximinus, du Revers de la paix.
Maximus, du litue , simpule, vase et
strigillc *.
Gordianus Africanus pater , de la seurté.
Gordianus Africanus filius , de Rome vic-
torieuse.
Balbinus de la Concorde.
Pupienus de la libéralité.
Gordianus junior de la félicité du temps.
Philippus de l'Annone.
Pbilippus le fils de la paix éternelle.
Decius de Jupiter Capitolinus.
Crebonianus du Temple.
Volusianus de la paix.
Valerianus de Mars.
MEDAILLES PETITES DE BRONZE ET DE METAIL DE COMNTHE.
Julius Cœsar.
Julius du Revers d'Auguste.
Aiiyuslus.
Augustus du Temple de la providence.
Autre du fouldre de Jupiter.
Autre de la déesse Vesta.
Autre de l'aigle de Jupiter.
Autre du mesme Temple de la providence.
Autre de la Victoire , tenant le monde ,
restitué par Titus.
Marcus Agrippa du R. de Neptune.
Tiberius.
Tiberius de la Déesse Vesta.
Aultre du Revers de S. C.
Drusus de S. C.
Germanicus de S. G.
Pictas du R. de S. C.
Autre Tiberius des deux Victoires.
Caligula.
Caligula de la déesse Vesta.
Cluudius.
Claudius de la constance.
Autre de la liberté.
Nero.
Nero de Macellum Augusli *.
1 Strigilis, étrille ou racloir qui servait, en Grèce et en Italie, à enlever et à faire disparaître, en
grattant, l'humidité et les corps étrangers répandus à la surface de la peau par la chaleur du bain de
vapeur ou les vïelcnts exercices de la palestre. A. Rich Dicl d'ant rom. et gr
>'.< - IL u ' cnceinl bâtiment servant de nui. lu
— 79
Autre du Génie.
Autre de la Victoire.
Autre de l'Autel de la Paix.
Autre de l'Espérance.
Autre dudict Nero et Drusus de la course.
Gai ha.
Galba de la liberté publicque.
Vitellius.
Vitellius de la Victoire.
Vespasianus.
Vespasianus de la Victoire.
Autre de l'aigle sur le monde.
Autre des deux cornes d'abondance.
Autre de l'Equité.
Autre de la félicité publique.
Titus.
Titus de la seuilé du peuple Romain.
Autre de la paix.
Domitianus.,
Domitianus de la vertu.
Autre du Temple.
Autre de Mars victorieux.
Autre des ieux séculiers.
Nerva.
Nerva de la fortune.
Trajanus.
Trajanus de l'Arabie acquise.
Autre du Prince à cheval.
Autre de sa despouille.
Autre de la paix et de l'abondance.
Autres des armes dictes Ancilia.
Autre de Mars victorieux.
Hadrianus.
Hadrianus de la Pieté.
Autre de l'Espagne.
Antre de l'Alexandrie.
Autre de Mars.
Autre de la santé.
Antre de Cercs.
/Eli us.
/Elius de la Pannonie.
Autre de l'Espérance.
Antoninus.
Antonin. de M. Aurelle en sa ieunesse.
Autre de ses deux enfants, sortans de
deux cornes d'abondance.
Autre du Tibre.
Autre du Dieu Mars, couché avec llia Rhea,
mère de Romulus et Remus.
Autre du fouldre de Jupiter.
Autre de la Déesse Santé.
Lucius.
Lucius de la galère.
,1/. Aurelius.
Marc. Aurelius delà Galère.
Commodus.
Commodus de l'Italie assise sur le monde.
Autre du R. de la Masse de Hercules.
Autre de l'Aigle sur le monde.
Seplimius Severus.
Severus du lion portant Cibelle Mère des
Dieux.
Autre frappée en Grèce du R. du serpent.
Geta.
Geta de l'Espérance.
Macrinus.
Macrinus de la Foy des soldats.
Alexander Sevems.
Alexander du Triomphe.
Mareus, Julius , Philippus.
Pbilippus du chapeau de Triomphe , ou
est escrit : Votis decemnalibus S. C
— 80 —
MEDAILLES GRANDES DE CUIVRE ET DE MÉTA1L DE CORINTHE DES IMPÉRATRICES.
Agripina, Mère de Caligula , des deux
Meulles du carpentum.
Antonia Augusta du R. de Claudius ,
abillé en sacrificateur.
Iulia, fille de Titus, de la Déesse Vesta.
Sabina, femme d'Hadrianus, de la Con-
corde.
Faustina , femme d'Antoninus pius , de
l'Eternité.
Autre de Ceres.
Autre de l'Eternité.
Autre de Ceres.
Autre d'Augusta.
Autre d'Augusta victorieuse.
Autre du Croissant avec sept estoilles.
Faustine, femme de M. Aurelle.
Faustina de Diane.
Autre de Hilaritas.
Autre de la félicité du temps.
Autre du temple.
Autre de Veneri Genitiïei.
Lucilla, femme de Lucius.
Lucille de la Fecundité.
Autre de Iuno regina.
Autre de Hilaritas.
Crinpina, femme de Commodus.
Crispina de la Concorde.
Marcia. *
Marcia de la Concorde.
MEDAILLES D OR.
Cinna du R. du Temple.
Vespasianus du Taureau.
Titus du mesme R. du Taureau.
Hadrianus de Romulus et Remus allaictez
par la Love.
M. Aurelius de Hilaritas.
Faustina, femme du dict Aurelius, de la
Concorde.
MÉDAILLES D'ARGENT CONSULAIRES.
Romulus ou Quirinus de Ceres.
Sabinus du ravissement des Sabines.
Numa Pompilius de la proue d'un navire.
Ancus Martius de la figure équestre.
Junius Brutus du revers de Ahala.
Regulus du combat des gladiateurs contre
les Lyons.
Cœlius Caldus de l'Orient.
Marcia Otaci lia Scvcra, femme de Philippus
— 81
A. Postumius de la couronne d'espis de bled .
Restio du revers de Hercules.
jEnobartus de la proue d'un navire.
Fabricius du R. du Pont.
Sulla du revers de C. Pomp. Rufus.
Pompeius du ravissement des sabines.
Juba du temple.
Lucius Antonius du R. de l'Orient.
Marcus Antonius du R. d'Augustus.
Lepidus du revers d'Augustus.
MÉDAILLES D'ARGENT IMPÉRIALES.
Julius Cœsar, habillé en pontife , du
R. I. C. Cossutius.
Autre du R. de Pompei.
Autre du Dictateur perpétuel , de Venus
victorieuse.
Autre du Dictateur, de la foy , la paix, la
justice et de la religion et du monde.
Augustus du R. du triumvirat.
Autre du litue , du simpule et du vase.
Autre de la robe consulaire.
Autre de Tarpeia avec les boucliers des-
quels elle fut tuée.
Autre de la couronne civique.
Autre de la Patere.
Autre du Temple.
Tiberius de la Paix.
Caligula du R. d'Agrippina.
Claudius du Triomphe.
Nero en sa ieunesse.
Galba de la couronne civique.
Autre de Jupiter Custos.
Titus de la Vertu.
Domitianus de la fortune.
Nerva du litue , du simpule et du vase.
Trajanus du Prince à cheval.
Autre du Danube.
Autre de viaTraiana.
Adrianus de la libéralité faite aux soldats.
Autre de l'Afrique.
Autre du revers de Traianus.
Antoninus de M. Aurelle en sa ieunesse.
Lucius de la providence des Dieux.
M. Aurelius de la Paix.
Commodus de la fortune.
Macrinus de la seurté.
Alexandcr severus du Prince tenant le
Monde en sa main.
PIERRES GRAVEES.
Une grande Cornaline , d'une Venus regar-
dant un Cupidon qui porte un flambeau
et une pomme , estant sur un autel.
Un beau Jaspe rouge , de Marcus Antonius
et Lepidus.
Un Saphir d'eau, d'un Jupiter, estant sur
son Aigle.
Une grande Onyce blanche et grise , ou y
a la teste d'une femme et des lettres
grecques.
Une Sardoine , d'un terme.
Une Calcidoine, d'un Bassianus empereur.
Un Jaspe meslé , d'un Caligula empereur.
Un Granat, d'une teste incognue.
Une Topasse orientale , d'un Mars.
Un Lapis ou y a une teste d'homme , et
— 8.2 —
celle d'un mouton el d'un cheval . sous^-
lenues par les pit'ds d'un Cocq.
Une petite Onyce, de la teste d'un
Lysimachns.
Une autre Cornaline , d'un ours captivé
par deux Cupidons.
Autre , de la teste d'un Trajau.
Autre, d'une teste incognue.
Une autre de l'Escrevisse. '.
Une autre , d'un petit Bacchus monté sur
\m Bouc.
Autre ou y a des lettres puniques.
Autre fort antique, d'une teste barbue aussi
incognue.
Un Peridol, d'un Mars assis sur ses armes.
MÉDAILLONS DE BRONZE ET D ARGENT , QUI SONT MEDAILLES l'LL'S CRANDES
QUE LES ORDINAIRES.
Sertorius du H. de la Biche.
Hercules armé de la despouille du Lion ,
du R. de la foudre de Jupiter traver-
sant une mire.
Marcelinus consul , du R. du Temple de
la victoire.
Julius Ccesar du R. d'Auguslus.
Vespasianus du R. de Mars.
Trajanus du port d'Ostie.
Autre d'un char tiré par quatre Lyons.
Aurelius d'une figure tenant un cheval par
la main.
Faustina la Mère , de Gibelle trainee par
deux Lyons.
Faustina la Fille , du R. du Paon.
Commodus et Crispina, du R. du prestre
qui les marie , vota publica.
Autre munie de la peau du Lion, du revers
d'une colonnie.
Autre de Mars victorieux.
Aude dudicl Aurelius, tenant Lucius par
la main; frappée en Grèce, ayant une
province au R.
Septimius Severus de Mars.
Autre de deux temples.
Bassianus, frappée en Grèce des 2 temples.
Geta, du prince courant à cheval.
Diadumenianus du vase , du simpulc et du
litue.
Scipio , avec le triomphe de Carthage.
Philippus , père d'Alexandre le Grand ,
d'argent.
Aloxander, roy des Epirotes, aussi d'argent.
Ywtt petite teste de Faustine la Mère ,
n'ayant que h' bout du nez rompu.
Une teste de Fallas, de la grandeur du
naturel , armé'' de son morion , ayant
aussi le bout du nez el quelque peu du
morion rompu.
' Voir au sujet des pierres gravées uii étaient représentés les signes du Zodiaque, la notice de
M II Schubrhans sur une intaille trouvée au Rondenboscb sous Iloulcm [Limbourg hollandais).
Ann de l'Acad. d'arch di Belg., t 1,2' érii
83
Une teste de Diane, plus petite que le
naturel, reparé sur un buste nouveau.
Un Cupidon d'excellente main, aussi reparé
sur un buste.
Deux pieds de marbre d'un petit enfant,
aussi d'une main excellente.
Un grand vase ou une urne tout entière ,
aussi de marbre , avec son couvercle, ou
l'on mettait les cendres des morts, de la
hauteur d'un pied et demy.
Figures, et autres pièces et instruments de
bronze.
Un Neptune armé de son trident, porté
sur un monstre marin , de la hauteur
d'un pied , un poulu et une ligne et
demye.
Un Pallas, sans point de bras, de la hau-
teur de sept poulus neuf lignes et
demye.
Un Jupiter, aussi sans point de bras, de
la hauteur de cinq poulus huict lignes.
Un Mercure, sans point de mains, de la
hauteur de cinq poulus et trois lignes.
Autre Mercure, de la hauteur de quatre
poulus une ligne et demye.
Autre de la hauteur de deux poulus neuf
lignes et demye.
Un petit fleuve qui a les bras et les pieds
rompus, de la hauteur de deux poulus
et neuf lignes.
Une figure d'un jeune homme incognu ,
qui a une queue , ayant les aureilles
d'un satyre , la bouche et les temples
bandez , de la hauteur de onze poulus
onze lignes.
Un Hercules tenant sa massue, de la hau-
teur de trois poulus cinq lignes.
Une petite Satyre excellente , de la hauteur
de deux poulus six lignes.
Une petite teste d'un cheval Pégase.
Une masque appelée la bocca de la verita.
Une Luzerne * tout entière.
Un cachet ou est escrit : Q. Cœli Callisti.
Autre cachet ou est escrit :'L.AttiTrescentis
Une petite teste de la Clémence.
Deux mains trouvées dans un sépulcre
avec forces anneaux de bronze serrez
près desdictes mains, qu'on croit estre
d'un gladiateur.
Deux strigilles de bronze qui servoyent
pour les Bains.
Un couteau duquel on esgorgeoit la vic-
time aux sacrifices.
Un vase, aussi de bronze, servant pour
les bains, de la hauteur de cinq pou-
lus trois lignes.
Une petite teste de Mouton.
Deux grands anneaux servants pour mettre
aux bras desdits gladiateurs.
Un autre anneau façonné a goudrons *,
pour le mesme effect.
Un petit lévrier mangeant un lièvre.
VASES ET AUTRES INSTRUMENTS DE TERRE ANTIQUE.
Un grand vase de terre rouge , servant
pour les sacrifices ou y a des figures
peintes, de la hauteur de onze poulus
moins une ligne.
Pour hicerne, de lucerna, lampe.
C'est-à-dire à godroiis.
84 —
Autre vase de la même terre , aussi tout
entier , ou y a des ligures peintes , de
la hauteur d'un pied neuf lignes.
Un grand plat avec ses deux anses , aussi
tout peint et tout entier , de la mesme
terre rouge, de la hauteur de trois
poulus une ligne et demye , et de la
largeur d'un pied et un poulu.
Un autre instrument de la même terre ,
semblable à une boite.
Un autre fait d'une estrange façon , aussi
tout entier.
Un autre avec son anse, de terre noire,
aussi tout entier, de la hauteur de sept
poulus quatre lignes.
Deux benesliers ' ayant la teste d'une
Truye, servants pour les sacrifices de Ce-
res, aussi entiers, chascun de la hauteur
de six poulus huict lignes et demye.
Un autre vase de terre noire, aussi entier,
de la hauteur de sept poulus 5 lignes.
\]ne urne de verre entière, ayant encore
les cendres au dedans.
Toutes les susdictes antiquités sont extraictes de six les plus rares cabinets de
la France.
Roolle des pièces que je mestois réservées desquelles je ne
me voulois point desfere.
Une teste de marbre, de la grandeur du
naturel, ayant le nez reparé, que les
tings tiennent estre un Annibal et les
aultres un Hadrien Trajanus.
Une médaille de bronze de Ciceron , du
revers de l'adlocution.
Une médaille d'argent d'Artemise,du revers
d'une piramide faicte a degrés ou y a
de petites galires * et une figure audessus.
Une médaille de Cayus Marius , aussi d'ar-
gent , du revers du trophée des Cimbres.
Aultre médaille d'argent , de la femme de
Titus, avec le revers de sa fille Julia.
Aultre médaille d'argent, deMarcus Brutus,
du revers des deux poignets et le
chappeau de liberté.
Un petit vase d'agate, trouvé en Alexandrie.
Une cornaline montée en anneau , ou la
face de notre seigneur est gravée ,
poisant deux escus moins seize grains.
Un Julius Cœsar, gravé en cornaline ,
monté en anneau poisant ung escu et
demi moins cinq grains.
Un Hadrien taillé en camayeult * d'agate
rousse, blanche et noire, en anneau
poisant. deux escus douze grains.
' Ces vases avaient sans doute été regardés comme ayant servi à contenir de l'eau lustrale ; l'auteur du
catalogue en a naïvement fait des bénitiers.
« Galères?
■ Camée, de camahieu. Ce mot s'est conservé jusrjues assez avant dans XVII" siècle pour désigner le
camée; il a passé ensuite et est resté appliqué aux peintures monochromes, imitant les effets du camée.
De Laborde, Notice des émaux du Louvre, 11° partie, Documents et glossaire. Dans les nombreuses
citations de l'auteur, le mot est généralement écrit comme plus haut, mais on trouve aussi camayeu et
ramajeu. — Voir sur ce mot le Dictionnaire d'dtymotngie de M. A SCHELER..
85
Une onice ou le phare est gravé, aussi
en anneau poisant ung escu et demi
moins cinq grains.
Aultre onice , aussi fort belle , d'une teste
incogneue , en anneau poisant deux
escus quinze grains.
Un Julius Cassar gravé, tout de son long
assis sur ses jambes , faisant lui-même
sa couronne, tout neud , dans une pe-
tite cornaline , en anneau poisant un
escu trois grains.
Un Socrates dans une aullre cornaline ,
en anneau poisant un escu moings six
grains.
Une cornaline et agate blanche ou Ro-
mulus et Remus tétant la love , sont
gravés avec Faustulus et ficus Rumi-
nallis, en anneau poisant deux escus
moings seize grains.
Un Annibal gravé dans un prisme d'es-
meraude , eu anneau poisant un escu
neuf grains.
Une Faustina avec son gladiateur , gravés
dans un jaspe vert, en anneau poisant
un escu dix et huit grains.
Une Venus avec deux petits Cupidons ,
gravés dans une gira^solle , en anneau
poisant un escu moins vingt deux grains.
Un Solon gravé dans un jaspe vert.
Un médaillon de Tiberius , du revers du
triumphe.
Un médaillon d'Atinous, du revers du
mouton.
Un médaillon d'Adrianus, du revers delà
course.
Un médaillon de Didius Julianus , du
revers du triumphe.
Un médaillon de Gordianus , du revers de
Hercules combattant avec ung lion.
Un autre médaillon de Marcus Aurelius
en sa jeunesse du revers du prince a
cheval coronné par la victoire.
Aultre roolle des pièces que jay acquises de nouveau.
Une figure venue d'Egipte acheptee cinq
cens escus par feu Cazaulx, toute nue,
assise , tenant audevant de ses genoux
trois petites figures semblables à celles
qu'on trouve dans les corps des momies
de la haulteur de deux pans moins
quart '.
Une teste de marbre d'une femme in-
cogneue , presque de la grandeur du
naturel , n'ayant que le bout du nez
rompu.
Une lacrimoire * de marbre toute enthierre,
de la longeur de deux tiers de pan s.
Une médaille d'or de Philipus , père
d'Alexandre, du revers du Biga *, fort
nette, poisant deux escus.
1 Le pan ou empan est la mesure comprise entre l'extrémité du petit doigt et celle du pouce, la niaia
étant étendue ; il équivaut à 21 centimètres environ ; la station avait donc à peu près 37 centimètres .
4 Plutôt un unguentarium, flacon ou vase à parfums; on faisait cette sorte de vases d'albâtre ou de
verre et même de pierres fines. Voir sur les lacrymatoires deux dissertations de M. Roulez dans le*
Bull, de l'Acad. Roy. de Belgique, t. V et XXI, 2e partie
5 14 centimètres environ.
* Char traîné par deux chevaux.
XXIX XXII 0
86
Une médaille de Marcellus, nepveu d'Au-
guste , de bronze , du Théâtre.
Une médaille d'Antenous , du revers de
Priapus audevant d'un autel.
Un médaillon de cuivre de Dec.ius, du revers
de la Victoire, portant une couronne de
laurier.
Une grande médaille grecque d'argent ,
d'une Flora , ayant pour revers un Her-
cules avec des lettres grecques.
Aultre médaille d'argent d'un Mars , du
revers d'un espy de bled.
Une médaille de bronze de Lysimaclius, du
revers de Minerve victorieuse.
Une médaille de Galba, de l'adlocution ,
de bronze.
Un camayeult assez grand d'agate blanche
et de cornaline , de la teste d'une
femme incogneue ayant une aele au-
dessus des cheveux.
Une aiguë marine ou y a un monstre
marin s'apuyant sur un daulphin et
deux petites barques gravées.
Un Ancus Marcius gravé dans une cor-
naline.
Aultre cornaline petite , d'une Agripina.
Aultre de la teste d'une femme incogneue
tenant un rameau entre les mains.
Aultre, d'une impératrice incogneue.
Aultre , d'un vase avec des herbes a l'en-
tour dudit vase.
Une ametiste doublée d'un cristail ou y a
la teste gravée d'une femme aussi
incogneue.
Un jaspe rouge, d'un Hercules combattant
contre un lion, avec lettres qui disent
Cossuty.
Aultre petit jaspe ou sont gravées les
signes de quatre saisons de l'année.
Un camayeult petit d'agate blanche , de la
teste d'un homme avec son morion.
Aultre camayeult d'agate blanche , d'une
Faustine la lille.
Aultre encore ou y a petit Cupidon quy
porte des raisins , an devant duquel y a
ung petit chien.
Une petite onice, d'une figure tenant un
escu en la main sur une cuirasse.
Aultre petite onice ou y a un lion gravé
et un homme qui le suit, dict Androdus.
Aultre petite onice ou y a deux cornes
d'abondance sur lesquelles il y a deux
aigles et un trophée au millieu.
Plus jay acquis despuis le susdict marché faict par Monsieur de Bagarris par le
commandem* de sa Majesté, quarante médailles d'argent pour remplir lestroict d'icelles ,
dont il y a , ou imperialles ou autres , une trentaine nettes et rares que j'acorde de
donner pardessus led. marché. Faict àAix, le nnxieme febvrier mil six cens et huict.
DU PER1ER.
LE CHATEAU DU DIABLE
A QUAREGNON.
NOTICE
par M. LÉOPOLD DEYILLEBS,
Membre titulaire à Mous.
Sur le territoire de Quaregnon , non loin de leglise, à droite
de la grand'route de Mons à Valenciennes , s'élève un monument
en ruines , que le vulgaire désigne sous le nom fantastique de
Château du diable.
Château du diable à Quaregnon.
Commissaires rapporteurs : MM. E. Gens et F.-J. Delcouht.
— 88 —
Ce monument, aujourd'hui entouré de constructions privées,
consiste en une muraille épaisse , flanquée de contreforts et éle-
vée contre un monticule factice, en argile, ayant la forme d'un
cône tronqué et recouvert de végétaux. L'étendue qu'embrasse cette
muraille est de 25 verges environ.
Loin de nous l'idée de réfuter toutes les opinions émises depuis
Jacques de Guise jusqu'à nos jours , au sujet de ce monument
singulier. Il y a plusieurs années déjà qu'un antiquaire de mérite,
feu Désiré Toilliez , s'est acquitté de cette tâche , dans un autre
recueil l.
Notre intention est de chercher à déterminer d'une manière plus
positive , s'il est possible , l'époque à laquelle remontent les ruines
qui nous occupent.
Suivant Désiré Toilliez , le prétendu château aurait eu pour
origine un vaste tumulus funéraire de l'époque gallo-romaine ,
contre lequel on aurait élevé , au VIIe siècle , une maçonnerie en
grès houiller, afin d'y établir un oratoire chrétien. « Ce tumulus,
• ajoute-t-il , nous parait avoir été fouillé anciennement ; de
» nouvelles fouilles pourraient sans doute faire connaître l'époque
• de son établissement, mais non l'événement qu'il a voulu rap-
• peler et qui est resté inconnu. •
Nous admettons volontiers que le tertre autour duquel s'élèvent
les murs en ruines, puisse être un tumulus ; toutefois, cette opi-
nion aurait besoin d'être confirmée par une découverte d'objets
antiques. Or , il est à remarquer que , jusqu'ici , l'on n'en a jamais
vu aucun , bien que les habitants du voisinage prétendent que le
propriétaire de ce monticule y ait trouvé des pièces de monnaie
qu'en possesseur égoïste , il conserve mystérieusement et ne
veut montrer à personne. Du reste , il n'y a rien d'étonnant
1 Bulletins île la Société historique et littéraire de Tournai , t. Il , p. 328. — Voir
aussi le Rapport fait par M. le vicaire-général Voisin sur la Notice de M. D Toillikz ,
dans le même volume , p. 322.
— 89 —
que la bêche mette parfois au jour, sur ce tertre , des objets de
divers genres; l'essentiel serait que ces objets fussent examinés
par des personnes à même de connaître à quelle époque ils appar-
tiennent.
Nous nous résignons donc, en l'absence de preuves palpables,
à attendre, pour asseoir une opinion définitive à l'égard du tertre
en question , le moment où une fouille bien dirigée aura eu lieu
dans ce monticule.
Quant aux murs en ruines, il y a , comme sources à consulter
sur leur destination primitive , d'anciens écrits et la tradition. Nous
allons les passer successivement en revue et nous en tirerons une
conclusion , puisque tel est le but de cette notice.
Comme autorité respectable, nous citerons d'abord le passage
suivant d'une vie de saint Ghislain , écrite par un anonyme au
IXe siècle ou au commencement du Xe f : « Personne ne pourrait
dire combien était grand le pieux attachement que saint Ghislain
et la servante de Dieu Waudru s'étaient voué. Cet attachement
persévéra jusque dans leur vieillesse. Lorsque leur grand âge
ne leur permit plus de franchir la distance qui les séparait , ils
firent, de commun accord, bâtir à Quaregnon fin villa Quater-
nionej un oratoire en l'honneur de saint Quentin martyr, où ils
se rendaient pour y avoir des conférences. La sainte fit don de
cet oratoire à Ghislain , pour en affecter les revenus aux besoins
de son abbaye des saints apôtres Pierre et Paul , et pour y
recevoir les pauvres 2. »
Jacques de Guise 3 répéta mot pour mot ce passage de la vie
de saint Ghislain.
1 Cette date est fixée , comme l'a remarqué M. Voisin , par la mention que l'auteur
fait, à la fin de son récit, de l'invasion normande.
* La vie de saint Ghislain a été imprimée dans les Acla sanetorum Belijii , t. IV , p. 382.
•, Histoire du Hainaut, traduction du marquis de Fortia d'Urban, t. Vil, pp. 274-
277. M. de Fortia a confondu, dans une note, Quaregnon avec Mons . en disant que
la première de ces localités était l'ancien Castrilocus, Castriloc ou Châteaulieu. Chàteau-
lieu était l'emplacement du château de Mons.
— 90 —
Dans son « Pourtrait de Testât de mariage et de continence
■ fait sur la vie de la très-illustre S. Wautrude, comtesse de
- Hainau et patronne de Mons l, • p. 203, le père Jacques
Simon broda le récit de l'hagiographe de saint Ghislain , et il
ajouta, p. 75 de ses « Annotations sur les trois livres de la vie
• de S. Wautrude, • le § suivant :
De l'assiette de l'Oratoire S.-Quentin au village de Quarignon.
• L'on tient par tradition , comme m'a dit Monsieur le Prélat
moderne de S.-Guislain , qu'il fut dressé au village de Quarignon
(que nomme le Ms. des privilèges de la dite abbaye, Quaregnon
ou Quaternion) , sur un petit tertre ou colline que nous voyons
encore auiourd'huy à la main droite du chemin par où on va de
Mons à S.-Guislain, non guère loing de l'église du dit village.
L'on le peut aisément connoistre par quelques vieux murs
d'alentour, qui sont encore debout. •
Vinchant 2 parle de l'oratoire de Quaregnon de cette manière,
sous l'année 605 : « Environ ce temps, comme sainte Waltrude
et saint Gislain s'entretenoient souventeffois par visites de saintes
conférences avec désir de continuer ceste pratique salutaire,
voici que la dite sainte , estant jà devenue vieille et infirme ,
non pas pour l'âge, ains à cause de veilles, jeûnes et autres
austérités desquelles elle usoit , qui fut cause qu'elle ne put
aller, selon sa coustume , trouver saint Gislain à Celle3, ny
mesme ce saint aller au Chasteaulieu , pour l'infirmité de son
âge; de sorte donc que ces deux saints conclurent , d'un commun
accord , de faire bastir un oratoire au village de Quarignon ,
où ils pussent conférer ensemble. L'oratoire estant dressé fut
' Arras, 1629, in-8".
f Annales du Hainaut , MS. autographe déposé à la Bibliothèque publique de Mons.
— Éd. des BibL, t. 11, p. 118.
5 Nom du monastère fondé par saint Ghislain à Vrsidongue , et qui donna naissance
à la petite ville qui pofte !•■ nom du saint.
— 91 —
dédié en l'honneur de saint Quentin , martyr. Là se trouvèrent
par plusieurs fois les deux dits saints personnages pour se main-
tenir toujours en la gaie vigueur de l'esprit. Cet oratoire se
voit encore de présent en forme ronde , mais presque ruiné ,
situé sur une petite tertre ou colline que l'on voit à main droite
du chemin par où on va de Mons à la ville de Saint-Gislain ,
non vis-à-vis guère long de l'église du dit village de Quarignon.
• Quant aux revenus d'iceluy oratoire , sainte Waltrude les
donna avant mourir à la Celle des apôtres Saint Pierre et Saint
Paul , pour sustenter les religieux de la dite Celle , qui estaient
vraiment pauvres et de volonté et de revenus temporels , à raison
du nombre de religieux , qui se trouvoient en ce lieu attirés par
l'odeur de la sainteté de saint Gislain.
• Depuis, cest oratoire fut appelé l'Oratoire ou Chapelle de
• Sainte-Waltrude, pour les causes que nous voyerons cy-après. »
Le même annaliste 1 rapporte le motif qui fit donner à l'oratoire
de Quaregnon le nom de Chapelle de Sainte-Waudru , à la récon-
ciliation qui fut conclue , en 990 , entre les habitants de Mons et
ceux de Hornu , par l'intermédiaire du comte de Hainaut et de
l'abbé de Saint-Ghislain, lesquels firent porter les corps de sainte
Waudru etdesaintGhislain à l'endroit où l'on fit cette réconciliation.
« J'ay entendu , dit Vinchant , que le lieu où furent transportés
les dits corps saints et où fut fait l'accord entre les Montois et
les Hornutois, fut l'oratoire de Saint-Quintin , que l'on voit
encore, mais ruiné, près l'église parochiale du village de
Quarignon. Outre ce, qu'en mémoire et honneur de sainte
Waltrude , par laquelle tel accord a esté fait , certaine dame de
la maison de Borse fit dresser un autel en le dit oratoire,
qu'elle fit entièrement réparer ; mais , depuis , qu'il fut ruiné
par le feu. »
' Éd. des Bibl., t. 11, p. 204.
— 92 —
Delewarde 4 et De Boussu 2 attribuent la fondation de la chapelle
de Saint-Quentin à sainte Waudru et à saint Ghislain, qui la
firent bâtir pour s'y entretenir des affaires spirituelles. Ils ajoutent
que la sainte la donna à son directeur ; qu'il s'y trouvait annexé
un hôpital où l'on recevait les pèlerins, et qu'il reste encore des
débris de cet établissement.
Voici maintenant comment s'exprime à l'égard de l'oratoire de
Quaregnon , le savant dom Baudry, dans ses Annales de l'abbaye
de Saint-Gliislain 3 :
■ La grande union qu'il y avoit entre sainte Waudru et saint
Ghislain augmentait de plus en plus par les fréquentes confé-
rences qu'ils avoient ensemble, et comme la faiblesse de leur
âge avancé ne leur permettoit pas de s'e rendre visite aussi
souvent qu'ils le souhaitoient , ils résolurent, d'un commun
consentement, de bâtir, à mi-chemin de Château-Lieu et du
monastère de Saint-Gliislain, un oratoire à Quaregnon, à l'hon-
neur de saint Quentin, martyr, où ils eurent coutume de con-
férer ensemble sur les choses du ciel , jusques à leur extrême
vieillesse. La sainte donna cet oratoire à saint Ghislain, avec
l'hôpital qu'elle y joignit , tant pour l'entretien de ses religieux
que pour y recevoir les pauvres et les pèlerins, que notre
saint fondateur aimoit si tendrement qu'il croyoit recevoir
Jésus-Christ en leur personne : on voit encore aujourd'huy
quelques débris de cet oratoire , que les peuples circonvoisins
appellent communément la tour de Sainte-Waudru , et où les
plus simples croient , par une erreur grossière , que celle sainte
venoit de Château-Lieu par des lieux souterrains. »
' Histoire générale du Hainau, (1718), 1.1, p. 193-194.
* Histoire delà ville de Saint -Ghislain (1737), p. 18- 11*.
' Monuments pour servir a l'histoire des provinces de Namur, de Hainaut et de
Luxembourg , t. VIII , p. 250.
— 93 —
Enfin, l'abbé Hossart f attribue, sans aucun fondement, à la
darne de la maison de Borse, dont parle Vinchant , la construction
de l'oratoire de Saint-Quentin.
Par ce qui précède , on voit que les diverses versions de nos
anciens auteurs reproduisent , avec des amplifications , le texte de
la vie de saint Ghislain , qui a rapport à l'oratoire de Quaregnon.
On pourrait croire que ces amplifications ne sont que le fruit de
l'imagination de ces écrivains. Mais il est à noter qu'elles ont
pour elles l'autorité de la tradition locale.
En effet , il existe un souvenir vivace à Mons , à Quaregnon et
à Saint-Ghislain , que sainte Waudru et son directeur spirituel se
rendaient à Quaregnon , pour conférer ensemble. L'oratoire de
Saint-Quentin est indiqué par le peuple comme étant le lieu où
ils se réunissaient , et ce qu'il y a de remarquable , c'est que
le chemin qui passe au pied des ruines de cet oratoire conserve
le nom, pour la partie venant de Mons, de Chemin de Madame,
et, pour la partie venant de Saint-Ghislain , de Chemin de l'Abbé.
Une tradition non moins opiniâtre , quoique fort bizarre , prétend
que sainte Waudru allait à Quaregnon par une voie souterraine,
dont on montre encore aujourd'hui l'entrée présumée, à l'ancienne
châtellenie de Mons 2. Vinchant parle aussi d'un usage que l'on
avait, de son temps, lorsqu'on allait visiter la chapelle castrale,
le jour de saint Galixte , qui en était le patron. Il rapporte que les
Montois avaient la coutume de visiter, « portant flambeaux et
• luminaires, • le souterrain où les corps saints de la contrée
1 Histoire ecclésiastique et profane du Hainaut, (1792), t. I , p. 149.
5 Paridaens, Mons, sous les rapports historiques, etc. (Mons, 1819), p. 4 —
Hachez, Fêtes populaires à Mons, (1848), p. 23.
L'entrée dont il s'agit , donne simplement accès aux souterrains du château , qui
n'ont jamais été complètement explorés. Nous en avons examiné une partie, en 1858.
Mais il est réellement impossible de les visiter jusqu'au bout. C'est, d'ailleurs, ce qui
résulte d'un rapport adressé, vers 1811 , au préfet du département de Jemmapes, par
M. Lefèvre, géomètre à Mons. — Voir : Annales du cercle archéologique de Mons,
t. II, p. 420 , et nos Analectes montois , 1er fascicule.
— 94 —
avaient été déposés, lors du passage des Normands. « Et d'autant,
ajoute-t-il, que l'on croit que joignant le dit lieu, sainte Waltrude
prenoit souventeffois son repos sur la dure pour matter et
fortifier son corps, le dit peuple a aussy de coustume de visiter
et honorer le lit de la dite sainte, emportant quant eux quelque
peu de terre de ce lieu , et croyant qu'icelle terre les garan-
tiroit contre la foudre et tempestes de l'air, par les mérites de
la dite sainte ' . • Il est étonnant qu'après cela, Vinchant n'ait
pas relaté l'autre tradition concernant le souterrain de Mons à
Quaregnon , que n'a pas omise Dom Baudry , dans les Annales de
son abbaye.
Pour nous résumer, nous pensons que le monument en ruines ,
situé à Quaregnon , à droite de la route de Mons à Valenciennes ,
à une lieue et demie 0. de la première de ces villes et à une demi-
lieue de celle de Saint-Ghislain , est l'oratoire de Saint-Quentin ,
dont fait mention l'auteur de la vie de saint Ghislain ; que la
partie restée debout de l'édifice , en formait le soubassement ; enfin,
que cet édifice a pu être élevé sur un tumulus.
L'oratoire de Saint-Quentin , quoique ainsi appelé par nos
annalistes , devait être , selon nous , un petit monastère contenant
un hôpital : c'était bien certainement une dépendance de l'abbaye
de Saint-Ghislain, qui possédait la dime de Quaregnon.
Cet oratoire , s'il n'a pas donné naissance au village de
Quaregnon 2, a dû être sa première église paroissiale. Lorsque,
plus tard, il l'ut abandonné, on construisit une autre église, sous
l'invocation de saint Quentin, à l'endroit où s'élève l'église mo-
derne , qui a conservé cette invocation.
' Éd. des Bibl., t. Il, p. 154.
' Quaregnon est cité au nombre des alleux que sainte YVaudru donna à son monastère.
GiSLEiiEHTi Chronica Hannoniœ, éd. Du Ciiastelek , p. 15. — Chronique du Hainaul
et de Mons, publiée par A. Lacroix, p. 34.
TRÉSORS HISTORIQUES EN ANGLETERRE.
NOTICE
M. Jacques FELSENHART,
Docteur en philosophie et lettres à Bruxelles.
Il n'est pas permis à tout le monde d'aller à Corinthe ni d'aller
s'installer aux archives de Londres pour y déterrer les particularités
de l'histoire d'Angleterre. C'est ce que les Anglais ont saisi avec le
bon sens pratique qui les distingue. Bien que, comme dans la plupart
des cas, ils aient songé d'abord à eux-mêmes, ils n'ont pas moins
dévié du principe d'égoïsme, en rendant accessibles à tout le monde
leurs trésors historiques, entassés depuis des siècles dans d'obscurs
dépôts. Déjà en 1830, le gouvernement anglais avait institué une
commission chargée de mettre au jour les documents concernant
l'histoire d'Angleterre, à partir du règne de Henri VIII. En 1840,
le 25 janvier, cette commission fut réorganisée sur de nouvelles
bases. Elle se traça un programme et résolut de dresser des
catalogues analytiques de toutes les pièces intéressant la Grande-
Bretagne. Réduites en volumes, par le moyen d'analyses sub-
stantielles , claires et nettes , les archives anglaises viennent se
placer en quelque sorte sous les yeux de tout le monde. On
Commissaires rapporteurs : MM. A. Van Hassklt et le chevalier G. Van Havre-
— 96 —
les domine, on les parcourt d'un regard. C'est la great ex-
hibition des faits et des annales, le caravansérail des siècles
passés où s'asseyent , dans leur nudité , tous les grands hommes
d'Angleterre, que l'historien peut photographier sur place et
présenter au public sans retouches.
Depuis que l'impulsion a été donnée à l'esprit productif et
créateur de l'Anglais , les volumes d'archives anglaises se sont
succédé avec une rapidité croissante. Aujourd'hui, quatre-vingts ou
quatre-vingt-dix Calendars ont vu le jour. C'est le titre bizarre que
l'administration des archives anglaises a donné à ces gigantesques
travaux. Néologisme sui generis et, qui plus est, de l'invention du
Très-Honable Henri Hobhouse, conservateur des papiers d'Etat, que
l'Angleterre regrette, il s'est attaché, pour se perpétuer, à cette
longue série de volumes et ajoutera — le jour n'est pas loin — un
titre de gloire de plus à ceux que le parlement anglais s'est acquis,
en votant d'énormes subsides , sans amendement ni sous-amende-
ment, pour la publication de cette œuvre éminemment nationale et
par contre-coup cosmopolite.
Nous ne craignons pas de l'affirmer : les Calendars sont une
mine intarissable où poètes, romanciers et historiens trouvent leur
profit et l'archéologue des trésors inattendus.
En veut-on des preuves?
Ouvrons au hasard l'un de ces volumes. Il a environ 800 pages.
Mais quel muséum ! Il s'étend de la première année du règne
d'Edouard VI jusqu'à la 23e de celui d'Elisabeth, — de virginale
mémoire, — et embrasse un espace de trente-trois ans, de 1547
à 1580.
Comme nous l'avons dit plus haut ou comme nous l'avons fait
pressentir, noua sommes en présence d'un travail de réduction. Les
documents sont analysés, privés de leurs détails. Ils ne dispensent
pas toujours de recourir au texte original ; cela s'entend. Toutefois,
ces pièces sont un guide sûr, un fil conducteur à travers le dédale
des faits.
Dans le volume que nous avons sous les yeux, les intrigues de
Seymour, de Somerset, de Northumberland se dévoilent à mer-
— 97 —
veille. D'un seul coup d'œil, on pénètre les complots de Dudley,
de Throgmorton , au règne de Marie. La révolte de Wyatt s'y des-
sine nette et avec toutes ses péripéties. Ce sont des tableaux révolu-
tionnaires en relief de cette époque profondément agitée.
Après l'avènement au trône d'Elisabeth, il se fait dans les States
Papers un changement qu'il faut noter. Ce sont les détails de la
vie sociale qui abondent. Les Calendars les reflètent. Des particu-
larités, des délicatesses de la vie domestique de ce tyran en jupons
s'y révèlent en abondance et se brisent de mille manières à travers
le prisme de la cour. Une grande simplicité et le luxe royal poussé au
dernier degré y marchent de pair ou se heurtent. Des pensées,
jetées en germe, trois siècles auparavant, viennent à maturité dans le
XVIe tandis que l'invention de plusieurs machines , seulement à
l'aurore, laisse des vestiges dans ces Calendars , en attendant que
le XIXe y mette le sceau de sou génie particulier et progressif.
Malgré toutes les merveilles dont nous avons été témoins, qui
ne serait pas étonné, encore aujourd'hui, delà proposition de
Gawen Smith ? Elle date du règne d'Elisabeth et remonte vrai-
semblablement à l'année 1580. « Il s'agissait de construire un
phare sur Goodwin Sands l, vingt ou quarante pieds au-dessus de
Highwatermark et pouvant contenir ou mettre à l'abri 30 ou 40
personnes. » On le voit , les idées grandioses regardent toujours
du haut de quelque pyramide.
0 perspicacité des proverbes ! . . . nihil novi sub sole. — Qui se
fût dit que les revolvers pourraient bien dater de cette époque ,
si semblable à la nôtre, sur un autre fond, par l'agitation dans les
intelligences ?
Voici un fragment de lettre écrite par John Almain pour recom-
mander un de ses compatriotes à Fr. Walsyngham. Nous citons tex-
tuellement :
u Who had invented an harquebuse that shall contain ten balls or
pellets of lead , allh te which shall goe off one after an other, havinge
once given lire, so that with one harquebuse one man may kill
ten theaves or other enemies. »
1 Bancs de sable très-dangereux situés à la côte E. du comté de Kent.
— 98 —
« Qui (le compatriote) a inventé une arquebuse pouvant contenir
dix balles de plomb, lesquelles partiront l'une après l'autre, en
lâchant une seule fois la détente, de sorte qu'avec une arquebuse un
seul homme sera en état de tuer dix voleurs ou autres ennemis. »
Il a fallu trois siècles pour retrouver et généraliser cette inven-
tion fratricide. Les Anglo- Saxons en ont fait en grand la san-
guinaire expérience !
Dans un autre ordre d'idées, les lettres qui excitent le plus
l'intérêt sont celles de Sir Christopher Hatton à la reine Elisabeth.
C'est un tableau delà vie intime, souvent orageuse, de cette grande
et bizarre princesse, tableau de genre, où par inversion morale,
plus d'une vertu rend hommage à l'hypocrisie. C'est encore le
pandaemonium de toutes les passions serviles devant une seule
idole au pied de laquelle se traîne un peuple obséquieux de cour-
tisans.
Voici comment ces précieuses lettres ont été conservées au
public. Primitivement elles avaient été confiées à la garde de
Thomas Windebank, confident et secrétaire privé de la reine. Trans-
mises à son fils, sir Francis Windebank, secrétaire de Charles Ier,
elles ont été mêlées aux papiers d'État , lorsque Windebank alla ,
en 1640, chercher un refuge sur la terre de France. Depuis elles
ont été en dépôt dans l'office du secrétaire d'État, où elles ont été
gardées jusqu'à nos jours.
Les Calendars nous montrent avec détails Elisabeth formant le
dessein de mettre le royaume en état de défense par terre et par
mer. On y voit éclater la sagesse de cette souveraine ; elle agrandit
la marine, poursuit l'extinction de la piraterie et accorde les plus
grands encouragements aux entreprises aventureuses. Ici nous
sommes en présence des voyages de Hawkyns, de Furbisher, de
Gilberte, de Drake et d'autres. Les Calendars fourmillent de détails
sur ces expéditions. Ils sont aussi émouvants que pleins d'intérêt.
Encore aujourd'hui , on ne lit pas sans émotion l'accueil chaleureux
fait à. Drake après son voyage autour du monde. Pour sa
récompense , il lui fut payé argent comptant 100,000 livres.
C'est une somme énorme pour l'époque et une preuve que cette
— 99 —
Elisabeth, si avare, savait suivant les circonstances se dépouiller
de cette avilissante passion, surtout chez une reine. Écoutons les
Calendars :
Le 26 octobre 1581, la reine écrit de Richmond à Edmond
Treraagne, une lettre dans laquelle elle lui dit que Francis Drake
doit envoyer un certain lingot , mais qu'il faudra lui donner
100,000 livres et garder le secret de cette action.
Le 8 novembre 1580, Ed. Tremagne écrit à Walsingham : « qu'il
est grandement satisfait d'avoir été associé {par la reine) à
Christhopher Harris dans la mission auprès de Francis Drake;
que le butin et les captures de Francis se montent environ à un
million et demi et qu'il a laissé dix-mille livres entre les mains de
ce marin. »
En feuilletant les intéressants ouvrages dont nous nous occupons,
on est amené à un fait tout d'actualité. On y trouve le système de
défense de l'Angleterre ; on y voit qu'à l'époque d'Elisabeth il était
pourvu à cette nécessité par l'organisation d'une milice , par des
revues (monstres) fixées à des intervalles déterminés , par une sur-
veillance active, vigilante des côtes et surtout des lieux de débar-
quement ainsi que par le soin d'élever des chevaux dans les domaines
des gentlemen. Il y avait à cet effet des commissions qui se met-
taient en rapport avec la noblesse et la gentry. Ce sont les rapports
de ces commissions qui présentent l'intérêt le plus vif. Adressés
au conseil privé, ils formaient l'objet de la plus grande attention.
Parmi les plus remarquables et les plus intéressants, on peut citer
ceux du Warwickshire , non seulement pour les détails, mais aussi
parce qu'on y trouve des traces de W. Shakespeare et de sa famille.
L'extinction de la piraterie et le croisement des races chevalines y
sont à l'ordre du jour; c'est une preuve de plus que le caractère
britannique n'a pas varié. Enfin , les réponses des chefs à la justice
de paix , lesquelles étant relatives à l'exécution des lois contre les
vagabonds, à la police des Inns et Alehouses, à l'importation et à
l'exportation du blé (question déjà alors vitale pour l'Angleterre),
sont autant de sujets qui excitent au plus haut point l'attention du
statisticien et de l'économiste.
— 100 —
Il ne nous reste plus pour finir qu'à adresser au gouvernement
anglais le tribut de nos modestes éloges pour la libéralité avec
laquelle il a distribué aux bibliothèques publiques la riche collection
de ces Calendars. Quant à l'exécution typographique , elle est
parfaite. Les planches et les fac-similé ajoutés aux volumes, soit
pour éclaircir le texte, soit pour donner une idée des manuscrits, ne
laissent absolument rien à désirer. Enfin , ces documents ainsi
classés et analysés forment une riche mine où. tous les travailleurs
intelligents trouveront à glaner : les artistes y trouveront d'utiles
renseignements, et la littérature historique, en général, s'applau-
dira longtemps d'avoir découvert des ressources de tout genre.
DE L'ÉTAT ACTUEL
DES ÉTUDES ÉGYPTIENNES.
MEMOIRE
par M. F. DAURY,
BACHELIER EN THÉOLOGIE \ L 0 l V A I N .
Le titre donné à ces quelques pages doit paraître bien ambi-
tieux. Ne semble-t-il pas en effet annoncer que je vais exposer
complètement la théorie des écritures de l'ancienne Egypte , résu-
mer tous les ouvrages qui ont paru jusqu'à ce. jour , et porter sur
chacun d'eux un jugement magistral? Mais qu'on se rassure,
tel n'est pas mon but.
Je me propose simplement de donner un aperçu général de ces
travaux à la classe si nombreuse de personnes qui sont restées com-
plètement en dehors de ces études. Dans cet essai , j'aurai toujours
en vue l'homme dont toute la science égyptologique se borne à
savoir que sur les monuments de l'Egypte se trouvent certaines
figures étranges que l'on nomme hiéroglyphes.
Voici de quelle manière je divise mon sujet :
D'abord je donnerai une histoire abrégée de la naissance et des
Commissaires rapporteurs : MM. G. Hagemans et Le Grand de Reulandt.
XXIX XXII 1
— 102 —
progrès de la science égyptologique. En second lieu, j'exposerai
la partie philologique de cette science , c'est-à-dire , celle qui se
rapporte à l'interprétation même des monuments. En troisième
lieu, je dirai quelques mots des conséquences scientifiques, des
fruits que l'on tire de ces interprétations. Enfin , et en ceci je
demande d'avance pardon de ma témérité, j'oserai parler de ce
qui reste à faire , et surtout des obstacles qui se sont opposés
jusqu'à ce jour aux progrès de l'archéologie égyptienne.
I.
Le savant égyptologue anglais , M. Samuel Birch , a déjà traité ,
avec l'autorité qui s'attache à son nom , la première partie de mon
sujet l. Je me contenterai donc de l'esquisser, à grands traits.
Parmi les travaux sur les hiéroglyphes qui ont précédé l'expédi-
tion française en Egypte , on ne peut guère citer que l'ouvrage de
Zoega sur les obélisques 2. Zoega , dit M. Birch, était arrivé à
deux conclusions importantes, à savoir : que les hiéroglyphes sont
des lettres , et que les mots encadrés dans les cercles (cartouches)
sont des noms de rois. De plus il combattit l'erreur de ses devanciers
qui croyaient à l'emploi mystérieux des hiéroglyphes réservé à un
petit nombre d'adeptes. 11 avait, dit Champollion , formé un ta-
bleau de tous les signes hiéroglyphiques existants sur les obélisques
ou les monuments égyptiens conservés à Rome et dans divers cabi-
nets de l'Europe ; mais sa mort , trop tôt pour la science , vint
mettre un terme à ses utiles travaux 3.
Peu de temps après la mort de Zoega eut lieu l'expédition fran-
çaise, et, en 4799, la découverte par M. Boussard de la pierre si
1 An introduction to the study of egyptian hieroglyphs , by Samuel Birch.
London , 8°, 1857. Traduite en partie par M. Chabas , dans la Revue archéologique.
Paris, 1858.
1 l)i- origine obeliscorum, Romae, 1797.
3 Champollion, Grammaire égyptienne., introduction.
— 103 —
célèbre de Rosette. Cette pierre, qui se trouve maintenant au Musée
britannique , est de granit noir et de forme rectangulaire ; elle offre
trois inscriptions en caractères différents. L'inscription supérieure,
détruite en grande partie , est conçue en écriture hiéroglyphique ;
le texte intermédiaire est en écriture cursive , que l'on nomme
maintenant démotique , et enfin une inscription en langue grecque
occupe la troisième division. Ce texte grec contient un décret
rendu par les prêtres en l'honneur de Ptolémée V , et la dernière
ligne de ce texte indique qu'il devait être reproduit dans tous les
temples, de premier, de second et de troisième ordre, sous les trois
formes d'écriture : sacrée, enchorique , grecque. Dès lors, on
avait un point d'appui certain dans la comparaison des textes
égyptiens et de leur traduction grecque , on possédait la clef du
système hiéroglyphique ; il ne restait plus qu'à s'en servir.
Cependant il fallut encore bien des tâtonnements avant que l'on
arrivât à la science du déchiffrement. Sylvestre de Sacy, Ackerblad
et Young tentèrent quelques essais plus ou moins heureux. Le
dernier parvint même par des moyens mécaniques à déterminer le
sens de certains groupes.
Le fondateur de l'égyptologie est Champollion. Pour ne pas trop
m'étendre sur une histoire que tout le monde connaît , je vais dire
en deux mots comment il parvint à reconstituer l'alphabet hiérogly-
phique. Il compara entre eux les signes qui servent à écrire les
noms propres: Cléopatre , Ptolémée, Alexandre; puis, appliquant
à d'autres noms de rois les quinze signes phonétiques dont cette
comparaison lui avait donné la valeur , il lut les noms Autocrator,
Csesar, Sebastos, Cheops, Psammétique et une foule d'autres.
Enfin, et c'est en ce point surtout que consiste sa découverte , il
appliqua son alphabet non plus aux seuls noms propres, mais aux
textes eux-mêmes. Ce dernier pas franchi, la science était créée.
Le principal ouvrage de Champollion est sa grammaire égyp-
tienne qu'il nommait sa carte de visite à la postérité et qui ne fut
— 104 —
publiée qu'après sa mort. Il y caractérisa parfaitement les trois
genres d'écriture indiqués par Clément d'Alexandrie dans un célèbre
passage de ses Stromates , V, 047. « Ceux, dit cet écrivain, qui
parmi les Égyptiens reçoivent de l'instruction, apprennent d'abord la
manière d'écrire nommée épistolographique , secondement la hiéra-
tique, employée par les hiérogram mates (scribes), enfin l'hiéro-
glyphique , qui est la plus complète de toutes.
Toutefois Clin mpol lion n'a guère étudié que les écritures hiéro-
glyphique et hiératique. Sa grammaire contient le catalogue de la
plupart des signes qui y sont usités, et presque toutes les valeurs
attribuées à ces signes par le père de l'égyplologie ont été recon-
nues exactes. Champollion ne s'est guère trompé que dans la
transcription des caractères syllabiques. On trouve aussi dans cet
ouvrage presque toutes les formes grammaticales ; mais la syntaxe
n'y est pas traitée, et l'on comprend aisément que Champollion
n'a eu ni le temps ni le moyen de s'en occuper.
Après la mort de ce savant , son œuvre courut un grand
danger et tomba dans un discrédit dont peut-être elle ne s'est
pas encore complètement relevée dans l'opinion de bien des gens.
Le système qu'il avait établi fut attaqué , de nouvelles théories
furent proposées , d'anciennes rêveries furent renouvelées ; enfin ,
ce qui fut plus grave , des disciples de Champollion crurent que
l'imagination pouvait suppléer à la discussion rigoureuse des textes.
Grâce à cet abus on vil, par exemple, des hommes, qui d'ailleurs
ont bien mérité de la science , prendre une collection de lettres
pour une relation circonstanciée des faits rapportés dans l'Exode.
Cependant, des égyptologues sérieux entrèrent dans la lice , et
la philologie égyptienne put enfin progresser rapidement. En tète
de ces savants on doit citer M. Lepsius , qui débuta dans les
Annales de l'Institut de correspondance archéologique de Rome
par une lettre à M. Rosellini, et qui depuis s'est rendu célèbre
par une foule de publications. En France, M. le vicomte de Rougé
— 105 —
aborda le premier résolument un texte et le discuta dans tontes ses
parties. Parmi les nombreux ouvrages qu'il a publiés , on peut
citer comme particulièrement utile aux étudiants sous le rapport
philologique son Mémoire sur le tombeau cVAhmès, Paris 1851,
dans lequel, quoiqu'il ne s'occupe que de sept lignes d'hiéroglyphes,
il expose parfaitement la méthode que l'on doit suivre pour inter-
préter de longues inscriptions; sa traduction d'une stèle égyptienne
appartenant à la bibliothèque impériale,1 d'une stèle de Thoutmès,
son étude sur le rituel funéraire des anciens Egyptiens, entin sa
notice sur quelques fragments de l'inscription de Kanack. Tou-
tefois ces deux derniers ouvrages ne peuvent être utiles au point de
vue de la philologie qu'à ceux qui possèdent le texte égyptien du
rituel , et les Monuments d'Egypte publiés par Lepsius.
Parmi les nombreux auteurs qu'il faudrait maintenant citer, il n'en
est pas, je crois, qui se mette davantage à la portée des commençants
que M. Chabas. Il semble que son plus grand souci soit de montrer
jusque dans ses derniers détails, le mécanisme de sa traduction.
La seconde partie de ses Mélanges égyptologiques peut en quelque
sorte tenir lieu de chrestomathie égyptienne. Citons comme très-
utiles, à ce même point de vue, ses travaux sur les inscriptions de
Radesieh , sur un hymne à Osiris , sur l'inscription d'Ibsamboul ,
sur les inscriptions des mines d'or, sur le nom de Thèbes et enfin
sur le chapitre VI du rituel égyptien.
Je passe maintenant aux études faites sur l'écriture hiératique
qui nous fournit encore plus de matériaux que l'hiéroglyphique ,
pour la reconstruction de la langue perdue des pharaons. Citons
d'abord l'étude faite par M. Chabas sur le papyrus Prisse qui,
contenant des maximes de Ptah-Hotep, fonctionnaire du temps du
roi Àssa de la septième dynastie , est nommé à juste titre le plus
ancien livre du monde.
M. de Rougé a publié dans la Revue archéologique française en
1 Journal Asiatique. — Paris, 1 850 «t suiv.
— 106 —
1852 la traduction d'un papyrus nommé le roman des deux frères,
qui parait avoir été composé pour le roi Séti II. Dans la seconde
partie de ses Mélanges égyptologiques, M. Chabas a complété cette
première traduction.
En 1856, M. de Rongé a traduit un papyrus, (Sallier, III)
qui contient le récit poétique d'un exploit de Ramsès II , dans
l'une de ses expéditions contre les Chétas. En 1800, parurent les
articles de M. Goodwin sur les papyrus hiératiques, et la traduc-
tion du papyrus magique Harris de M. Chabas.1 En 1863, ce der-
nier traduisit encore une partie des papyrus hiératiques de Berlin.
MM. de Saulcy et Brugsch se sont surtout occupés de l'écriture
domotique et l'on peut dire que le dernier en a été véritablement
le Champollion. Entre plusieurs autres ouvrages, sa Grammaire
démotique, publiée à Berlin en 1855, contient les principes de la
langue et de l'écriture populaire des anciens Égyptiens. Malheu-
reusement le prix excessif de cet ouvrage le rend inutile et comme
non-avenu pour la plupart des jeunes égyptologues. Après avoir
déjà en 1851 fait connaître le livre intitulé Saï en sinsin (le livre
des souffles), M. Brugsch a dernièrement publié le texte et la
traduction de deux papyrus bilingues , c'est-à-dire hiératiques et
démotiques, ce qui rendra très-facile la comparaison des deux
écritures.
Jusqu'à ce jour, il n'existe pas d'ouvrage qui réunisse en un
faisceau tous les renseignements dispersés dans les livres que j'ai
cités et dans bien d'autres que j'ai passés sous silence , soit
parce que je n'ai pu les voir , soit parce que je dois y re-
venir plus loin. Il faut donc que l'étudiant, que je suppose muni
d'avance de solides connaissances dans la langue copte, se
forme par la lecture de ces ouvrages au mécanisme des hiéro-
glyphes. Quant au dictionnaire, chacun doit se le faire à soi-
1 C'est surtout dans ce magnifique ouvrage , indispensable d'ailleurs pour la connais-
sance de la mythologie égyptienne, que l'étudiant peut se former à la lecture des textes
hiératiques.
— 107 —
même. Le dictionnaire hiéroglyphique de Champollion ne con-
tient guère que les mots qui sont dans sa grammaire. Quelques
autres essais de lexiques ont été publiés par Sharpe : Rudiment
ofa vocabulary of cgyptian hieroglyphics, London, 1837; Birch
dans l'ouvrage de M. Bunsen : jEgyptens-stelle in der Weltge-
schichte; Brugsch , dans son étude sur la pierre de Rosette en
1851 et aussi dans sa traduction des papyrus bilingues Rhind:
On trouve de même des lexiques au tome second des Mélanges
égyptologiques et au papyrus magique Harris de M. Chabas.
Chacun doit donc réunir tous ces lexiques, les fondre en un seul
corps et y ajouter tous les mots nouveaux qu'il rencontre chaque
jour dans ses études ou ses lectures. On comprend de quelle
utilité il serait de réunir toutes ces notes , éparses dans les
portefeuilles des égyptologues ; on pourrait s'appliquer à faire
progresser la science pendant tout le temps que l'on dépense à
des recherches préparatoires et à des transcriptions matérielles.
II.
Je dois parler dans cette seconde division des diverses écritures
égyptiennes et de la langue qu'elles expriment.
On distingue trois espèces d'écriture : l'hiéroglyphique,
l'hiératique et la démotique. Les hiéroglyphes formèrent l'écriture
primitive des Égyptiens ; les deux autres , ne sont que des
abréviations successives de ces premiers signes trop compliqués,
qui demandaient une main habile pour les tracer, et exigeaient
une dépense de temps considérable. On rencontre souvent des
inscriptions qui tiennent en quelque sorte le milieu entre deux
écritures et nous montrent à l'évidence comment s'est fait le
passage de l'une à l'autre.
On commença par dessiner les objets d'une façon plus grossière
et l'on obtint des figures qui ressemblent à celles que les enfants
ébauchent parfois sur leurs livres de classe. Puis on simplifia les
signes, on n'en forma plus que les traits principaux, ainsi que
— 108 —
Champollion l'a démontre dans sa grammaire par des tableaux
comparatifs. On peut même dire que beaucoup de signes hiéra-
tiques , que ce savant croyait avoir été choisis arbitrairement ,
s'expliquent aisément par la comparaison avec les textes en hiéro-
glyphes cursifs que nous possédons.
Mais bientôt ces abréviations ne suffirent pas encore, on voulut
écrire avec plus de rapidité , tous les angles s'arrondirent , les
caractères durent généralement se tracer d'un seul trait, on les
simplifia d'avantage, et l'écriture démotique fut formée.
Toutes ces écritures se résument donc dans l'hiéroglyphique qui
est la plus complète. Je ne m'occuperai que de cette dernière
dans l'exposé succinct que je vais faire du système graphique des
anciens Egyptiens.
La série des hiéroglyphes comprend , comme le dit Champollion,
des images de toutes les classes d'êtres que renferme la création .
On peut les diviser de plusieurs manières; la division que donne
Clément d'Alexandrie me parait la plus simple : « L'écriture
» hiéroglyphique, dit-il, se divise en deux classes : l'une, cyrio-
• logique, emploie les premières lettres alphabétiques, l'autre est
> symbolique. » Je divise donc les hiéroglyphes en phonétiques et
idéologiques.
Les signes phonétiques sont des lettres ou des syllabes qui
jouent exactement le rôle de nos caractères alphabétiques. Par
exemple, une tige de roseau, un aigle, un bras avec la main
ouverte , désignent la lettre A ; une sorte de poule désigne la
lettre U ; une jambe , un oiseau de la famille des échassiers , la
lettre B; une bouche, la lettre R; un serpent cornu, la lettre F;
et ainsi du reste de l'alphabet. D'autres signes sont syllabiques.
On peut affirmer que presque tous les phonétiques simples sont
connus maintenant; il ne reste d'inconnus ou de douteux qu'un
certain nombre de caractères syllabiques.
Les caractères idéologiques sont ceux qui peignent soit réelle-
ment, soit par métaphore, l'objet que l'on veut signifier. Exem-
— 109 —
pies : © le soleil ; pour exprimer un animal on le dessinait.
De même ^^ une main , P^J une tète, etc.
Par métaphore : une pousse de palmier et le soleil réunis
signifient année {q , l'image de la lune /^ signifie mois ; la
partie antérieure d'un lion „_g/> : devant , ce qui est devant ,
chef, seigneur, mari, proue d'une barque, avant-garde d'une
armée , selon le contexte.
Mais on comprend aisément que ces sortes de signes sont sus-
ceptibles de plusieurs interprétations et, par suite, de plusieurs
prononciations. Ainsi le signe 0 désignant le soleil , se lit Ra ,
signifiant jour, il se lit Hrou. Ce même signe peut éveiller les idées
suivantes : heure, moment, temps, saison , année , éclat, éclatant,
lumineux , etc. Comment distinguer toutes ces significations ? D'une
manière extrêmement simple , c'est-à-dire à l'aide des caractères
phonétiques. Un même mot est donc écrit en double : une première
fois à l'aide de caractères alphabétiques, une seconde fois à l'aide
d'un ou même de plusieurs signes idéologiques, exactement comme
si en français pour désigner un cheval , on écrivait les caractères
c-h-e-v-a-1 et qu'ensuite on en dessinât la figure. Ce dernier
dessin est ce qu'on appelle le déterminatif. Le déterminatif et le
groupe phonétique s'expliquent mutuellement, car de son côté, le
groupe phonétique seul ne suffit par toujours à cause du grand
nombre d'homonymes que l'on rencontre en égyptien. Je donne
dans ma planche II un certain nombre d'exemples qui , beaucoup
mieux que toutes les théories , expliquent le rôle de l'élément
phonétique et de l'élément idéologique.
Si l'on demande maintenant quelle langue se retrouve sur les
monuments, je réponds que c'est, comme on doit s'y attendre, la
forme antique du copte, c'est à dire, de l'idiome dans lequel nous
possédons une traduction de la Bible et quelques autres ouvrages.
Certes , il y a des différences entre l'égyptien des Ramsès et celui
de nos livres coptes ; il y a même des variations dans l'écriture
— 110 —
antique , tellement que l'on distingue d'ordinaire du premier
coup d'œi! une inscription datant des Ptolémées d'une autre inscrip-
tion remontant par exemple à la 18e dynastie ; mais le fond
grammatical et lexicologique reste le même , et l'on peut dire avec
M. Chabas : c'est du copte et toujours du copie.
Il faut pourtant avouer qu'il reste encore bien des lacunes à
combler avant que nous soyons complètement maîtres de la langue.
Cependant , dit M. Chabas, malgré ses obscurités et ses bizareries
la langue des hiéroglyphes possède des avantages qui lui sont pro-
pres : il est toujours possible , le plus souvent môme facile de
distinguer l'intention générale d'un texte égyptien , et l'on n'est
jamais exposé à de grandes erreurs , comme dans l'investigation
des langues perdues à écritures alphabétique? , telles que le phé-
nicien et les dialectes araméens. Depuis plusieurs années, la science
du déchiffrement des hiéroglyphes possède des moyens analytiques
suffisants pour affirmer ses résultats généraux.
On sait qu'un dictionnaire des hiéroglyphes comprend nécessai-
rement deux parties : un catalogue des signes et un catalogue des
mots. Le catalogue des signes doit comprendre toutes les figures
usitées dans les hiéroglyphes :
4° Les ligures humaines debout , accroupies, assises ,
2° Les membres humains,
3° Les animaux : quadrupèdes, oiseaux, reptiles, poissons,
4° Les parties d'animaux.
D'ordinaire , on continue ta classer de même les autres signes
d'après leur nature : les objets célestes , les plantes , les bâtiments,
les ustensiles, etc. Mais, comme un dictionnaire est destiné non
pas à celui qui sait mais à celui qui ignore , je préférerais que
l'on rangeât les ligures simplement d'après leurs formes :
5° Les lignes droites ou à peu près droites ,
V)0 Les lignes courbes ,
7° Les signes cruciformes ,
— 111 —
8° Les signes ronds ou ovales, triangulaires, quadiangulaires ;
parmi ces derniers seraient rangés les bâtiments ;
9« Les signes compliqués dont la forme se rapproche soit de
la touffe du papyrus , soit des signes représentant les articulations
Mes, S'en, Xep ;
10° Enfin les figures qui ne peuvent trouver place dans aucune
de ces divisions, comme le chariot et plusieurs signes composés.
Cette division que j'ai suivie pour moi-même , n'est ni natu-
relle, ni scientifique, mais elle parle aux yeux. A côté de chacun
des signes doit se trouver sa valeur phonétique ou idéographique.
De même, cette partie du dictionnaire doit comprendre une liste de
tous les signes hiératiques et démotiques , qui renvoie le plus pos-
sible à leurs origines hiéroglyphiques. La seconde partie du dic-
tionnaire doit contenir tous les mots rangés d'après l'ordre
alphabétique , mais pourtant écrits avec les caractères hiérogly-
phiques ; il doit comprendre les variantes et indiquer les sources.
Il faut, dis-je, que les mots soient donnés en caractères hiérogly-
phiques, d'abord à cause des détermina tifs, et ensuite parce que
certains caractères sont spécialement affectés à l'écriture de cer-
tains mots.
On a plusieurs manières de déterminer le sens des mots encore
inconnus. Souvent les tableaux- sculptés ou dessinés présentent le
nom des objets à côté des figures. Pour ne citer qu'un seul exem-
ple, c'est ainsi que dernièrement M. Birch a découvert le nom
égyptien de divers jeux , et en particulier du jeu de dames qui
devait charmer les loisirs des défunts béatifiés. Dans le texte , les
signes déterminatifs sont d'un grand secours, en ce qu'ils donnent
parfois la figure de l'objet exprimé phonétiquement , et que du
moins ils indiquent l'ordre d'idées dans lequel on doit chercher la
signification. Mais le moyen principal consiste dans la comparaison
de divers textes dans lesquels se rencontre la même expression.
C'est pourquoi il est si important pour un égyptologue d'avoir une
— 112 —
foule do textes à sa disposition. Enfin les lexiques coptes peuvent
être invoqués pour fournir une présomption ou bien une confir-
mation.
J'emprunte à M. Ghabas, la liste suivante d'ouvrages dans les-
quels les monuments et les inscriptions sont reproduits avec soin :
Lepsius. — Denkmaeler aus JEgyplen und .Ethiopien, grand
in-folio, Berlin.
— Todtenbuch der .Egypter, in-folio, Leipzig.
Champollion. — Monuments de V Egypte et de la Nubie,
in-folio , Paris.
Prisse d'Avennes. — Monuments égyptiens, in-folio, Paris.
— Facsimile d'un papyrus hiératique.
Rosellini. — Monumenti Egiziani.
Leemans. — Monuments égyptiens du musée de Leyde.
Brugscii. — Monuments de l'Egypte, décrits, commentés et
reproduits, in-folio, Berlin.
Diverses collections publiées par Young, Berton, Sharpe, Greene
et Storert.
Les papyrus du musée britannique, les papyrus Belmore , et
enfin l'édition du Rituel funéraire , que donne maintenant
M. de Bougé, et les fouilles du Serapeum par M. Mariette.
III.
Tous les monuments de l'Egypte peuvent se rapporter à la
religion, à l'histoire, à la science ou aux belles lettres propre-
ment dites.
Nulle des publications faites jusqu'à ce jour n'a étudié complè-
tement la religion égyptienne ; cependant nous possédons sur ce
point, plusieurs' savantes dissertations. Je citerai en particulier
celle de M. Lepsius : Ueber den ersten /Egyplischen Gotter-
kreis, Berlin 1851 , et Ueber die Gotter der 4 Elemente bei
— 113 —
den Mgypten , Berlin 1857 ; la traduction d'un bel Hymne à
Osiris par M. Chabas ; celle de 17e chapitre du Rituel funéraire,
par M. de Rougé ; et un Mémoire sur la mère d'Apis, par
M. Mariette. Ajoutons à ces études la traduction du Livre des
Souffles , et de deux Papyrus funéraires bilingues , par
M. Brugsch, et les traductions de deux papyrus magiques
par MM. Birch et Chabas.
Nous possédons sur la religion des Égyptiens plus de matériaux ,
je pense, que sur tout autre religion de l'antiquité. Les murailles
des temples, les pierres des tombeaux , les papyrus contiennent
une mine presque inépuisable d'hymnes , de prières , de pratiques ,
de recettes magiques et de tableaux représentant les cérémonies
du culte. Pour comprendre l'importance de ces renseignements ,
il suffit de se rappeler que les Egyptiens ont été en rapport constant
avec les Juifs , et que d'un autre côté c'est dans les temples de
Memphis et de Thèbes que Pythagore , Platon et plusieurs autres
chefs de la philosophie grecque sont venus chercher la sagesse.
On sait aussi combien les doctrines égyptiennes eurent de part
à la formation de ces hérésies qui désolèrent l'Église naissante.
Plus nombreux encore sont les monuments historiques que nous
offre le sol de l'Egypte et lorsque tous ces documents seront
classés, nulle histoire dans l'antiquité ne sera mieux connue que
celle des Egyptiens. Mais c'est en parlant des études faites sur
ces monuments qu'il faut se garder de toute précipitation. Et voici
pourquoi : « Toutes les dates inscrites sur les monuments et dans
les papyrus de l'Egypte se rapportent non pas à une ère com-
mune , mais simplement aux années de règne des Pharaons.
Elles ne peuvent conséquemment offrir un moyen de nouer la
chaîne chronologique , sauf dans un petit nombre de cas , où
l'on rencontre quelques indications additionnelles, telles, par
exemple , que l'évaluation de l'intervalle qui sépare deux époques
de deux règnes différents. Aussi est-il vrai de dire que l'étude
— 114 —
> des monuments originaux est, quant à présent, impuissante à
» fournir les éléments d'une chronologie suivie. • (Chabas ,
Mélanges égyptiens.)
Le papyrus chronologique du musée de Turin , eût pu servir
de guide; mais il a été malheureusement mis en pièces pendant
qu'on le transportait d'un endroit à un autre; maintenant chaque
auteur en classe les débris selon les besoins de son système.
Les listes de Manéthon ne se prêtent pas moins docilement à tous
les remaniements possibles.
Nous devons cependant mentionner plusieurs essais, quoiqu'il
n'appartienne de les juger qu'aux chefs de l'égyptologie. Lesueur,
de Bunsen , Brunet de Presle , de Saulcy et d'autres ont cherché
à classer les dynasties. D'autres se sont occupés d'une partie de
cette vaste histoire ; ainsi M. Lepsius a étudié la XXIIe dynastie.
Ce même savant a discuté les fondements de la chronologie égyp-
tienne dans l'énorme volume intitulé : Die Chronologie der
Mgypter, qui fut suivi du Konigsbuch. M. Brugsch et M. Lauth ont
publié tous deux la première partie de deux histoires de l'Egypte.
On a voulu souvent fixer certaines dates au moyen de calculs
astronomiques; la seule chose à dire sur ces essais, est que jusqu'à
présent on n'a pas encore trouvé de base certaine sur laquelle on
pût les appuyer.
Je range encore sous la rubrique de l'histoire , les études
géographiques de M. Brugsch et de M. Jacques de Rougé , qui
publie maintenant, dans la Revue archéologique de France, une
série d'articles sur les textes géographiques du temple d'Edfou.
Les monuments de l'Egypte ne nous offrent que des biographies
séparées; il faut donc étudier chacune d'elles séparément. Lors-
qu'on possédera des traductions d'une valeur indiscutable , il est
probable qu'on y trouvera enfin des points de contact. M. de Bougé
qui a aussi jeté un coup d'œil sur l'ensemble de la chronologie
égyptienne dans son Examen de V ouvrage de M. de Bunsen a publié
— 115 —
plusieurs travaux sur divers points particuliers de cette histoire.
Son ouvrage sur la statue Naophore du Vatican , qui porte une
inscription relative au règne de Cambyse , est peut-être, dit
M. Chabas, le meilleur travail qu'on ait fait sur une inscription
historique. On doit aussi citer ses études sur plusieurs monuments
du règne de Thoutmès , et sur une stèle de Pianchi qui lui a fourni
quelques rapprochements heureux avec une prophétie d'Isaïe.
MM. Deveria et Lauth ont fait connaître le grand prêtre Baken-
Rhonsu. M. Chabas a expliqué l'inscription d'Ibsamboul qui
raconte une campagne de Ramsès II contre les Ghetas ; je dois
aussi citer ses publications sur les inscriptions de Radesieh et des
mines d'or. M. Mariette vient de publier quatre pages des archives
officielles de l'Ethiopie. M. Brugsch, en Allemagne, et M. Birch,
en Angleterre, ont aussi donné d'utiles travaux en ce genre.
Laissant donc de côté tous les systèmes , voici quelques résultats
historiques de l'égyptologie. Les fouilles de M. Mariette en faisant
connaître les stèles des Apis et celles des rois de l'Ethiopie , jettent
de grandes lumières sur les temps compris entre la XXIe et la
XXVIIe dynastie, c'est-à-dire depuis la fin des Ramsès, jusqu'à
l'invasion des Perses.
L'histoire des dynasties XVIII, XIX et XX est assez bien connue ;
M. de Rougé place au XVIIIe siècle le commencement de la
XVIIIe dynastie, c'est-à-dire l'époque de l'expulsion définitive des
Pasteurs, expulsion sur laquelle une longue inscription tirée du
tombeau d'Ahmès nous donne quelques détails. Cependant , dit le
savant professeur, il n'y aurait nullement à s'étonner si l'on s'était
trompé de deux cents ans dans cette estimation , tant les documents
sont viciés dans l'histoire , ou incomplets sur les monuments.
Un des travaux qui méritent une plus grande attention de la
part de ceux qui cherchent surtout dans les études égyptiennes des
points de contact avec les récits bibliques, se trouve dans les
Mélanges égyptologiques de M. Chabas. Ce savant examine la
— 116 —
question du synchronisme de Moïse et de Ramsès II. On avait
déjà sur ce point le récit de Manethon , et la probabilité donnée
par le long règne de Ramsès. M. Chabas a cherché dans les
Monuments égyptiens le fait rapporté dans l'Exode, I, 11 : « Il
• plaça sur lui des maîtres de corvée pour qu'ils l'affligeassent
» de leurs corvées , il bâtit les villes de Miskenoth pour Pharaon ,
» Pithom et Ramsès •
On trouve un papyrus qui contient une brillante description du
château de Ramsès II , château qui avoisinait soit la mer Rouge ,
soit la Méditerranée, et n'était certainement pas éloigné de la
frontière de l'Egypte , du côté de l'Asie. Le château s'appelait la
demeure de Ramsès, Pa-Rameses-meriamon.
Ce fait établi , M. Chabas tire de plusieurs manuscrits des détails
frappants sur les ouvriers qui ont travaillé pour ce Ramsès. Us
sont nommés Aperi , nom qui correspond exactement à l'hébreu
t3>w?:7-y comme Anup correspond à Anubis. Ces ouvriers
étrangers à l'Egypte, sont placés sous la surveillance de l'armée,
reçoivent leur nourriture tous les mois, et sont occupés à
traîner la pierre ou à d'autres travaux pour la ville de Ramsès.
Les mêmes Aperi ou Aberi furent occupés à bâtir le temple du
soleil de Ramsès II au sud de Memphis. Quoique les renseignements
trouvés jusqu'ici sur Pithom soient insuffisants, on ne peut qu'être
frappé des faits que j'ai résumés plus haut sur la ville de Ramsès,
et l'on ne doit conclure la presque certitude du synchronisme de
Moïse et de Ramsès II l.
Parmi les monuments qui se rapportent à la science , on doit
placer un papyrus médical du musée de Berlin , traduit en grande
1 On pourrait ajouter à ces traits qu'un prince de la cour de Ramsès se nommait
Mos ou Moses , prince royal ijouvernenr d'Ethiopie ; Flavius Josèphe dans son livre
des Antiquités judaïques , liv. 11 , chap. 10, raconte que Moïse , étant à la cour de
Pharaon , a remporté une victoire sur les Éthiopiens. Cependant cette identification pré-
sente encore de grandes difficultés.
— 117 —
partie par M. Chabas. On pourrait ramener à ce titre les docu-
ments astronomiques , par exemple les Zodiaques qui ont été
dernièrement étudiés par M. Lauth. Toutefois ces Zodiaques sont
d'origine trop récente pour que l'on puisse en tirer des conclu-
sions certaines sur les connaissances astronomiques des Égyptiens.
Enfin à l'article des belles-lettres on peut placer des poèmes et
des romans comme ceux qui ont été traduits par MM. de Rougé et
Chabas : le poëme de Pentaour et le roman des deux frères. A
toutes ces richesses joignons les documents judiciaires publiés dans
les manuscrits du musée de Leyde. La poésie égyptienne est la
véritable poésie biblique: on y retrouve souvent le même langage,
les mêmes figures, la même sublimité. Aussi, en faisant même
abstraction des lumières que l'histoire des Égyptiens doit apporter
à celle des Hébreux, en laissant de côté les richesses archéologiques
que l'Egypte nous fournit sur les mœurs, les coutumes, les
croyances de l'Orient, je crois pouvoir affirmer que l'étude de la
langue des hiéroglyphes est aussi utile à l'interprétation de l'Ecriture
sainte que celle de la langue arabe. Seule parmi les nations de
l'Orient, l'Egypte possède ce privilège, qu'elle nous est repré-
sentée en quelque sorte comme vivante. Elle se meut , elle agit
sous nos yeux dans ces tableaux qui recouvrent les murailles de
ses temples et de ses palais ; elle vit dans ces lettres particulières
que l'on retrouve après tant de siècles; elle vit dans la grandeur
de ses conquérants et dans leur stupicle orgueil , comme dans la
mesquine vanité des gouverneurs et des divers employés. C'est
donc l'Egypte que nous devons étudier quand nous voulons nous
transporter au milieu des contemporains d'Abraham, de Moïse et
de David.
IV.
Après avoir jeté un rapide coup d'œil sur le chemin qu'a
parcouru l'archéologie égyptienne depuis qu'elle a été créée par le
XXIX XXII 8
— 118 —
génie de Champollion , il est aisé de voir ce qui reste à l'aire. 11
faut avant tout, dit AI. Ghabas, augmenter nos ressources lexico-
logiques. C'est de la partie matérielle que l'on doit s'occuper
activement , c'est-à-dire de la recherche et de la publication des
monuments, de la traduction des textes faciles et familiers, qui
font avancer la science, peut-être plus lentement , mais qui
enrichissent le vocabulaire. Enfin ce qui; l'on doit chercher avant
tout , c'est la divulgation des études égyptiennes.
Mais à ce propos , on doit malheureusement tenir compte d'une
difficulté qui se rencontre spécialement dans cette branche d'études.
Seule peut-être maintenant entre toutes les sciences, l'égyptologie
doit encore prendre pour elle la devise de Bernard Palissy.
Certainement , il faut rendre grâce aux gouvernements qui ont
envoyé en Egypte des expéditions scientifiques , et qui en ont
publié les résultats. De même il faut rendre grâce aux particuliers
qui multiplient par l'impression les papyrus qui se trouvent en
leur possession. Mais presque toujours ces publications ne peuvent
être acquises que par ceux qui n'ont pas la volonté de s'en
servir. Ce sont d'immenses in-folio qui orneront une bibliothèque de
luxe, mais qui ne pourront pas trouver place dans celle de l'étudiant.
Et cependant ce sont là les livres qu'il faudrait feuilleter jour et
nuit , ce sont les livres au milieu desquels il faudrait vivre et sans
lesquels il est impossible de travailler au progrès de la science.
Un second obstacle à la diffusion de ces études, est le manque
de livres élémentaires et surtout, comme je l'ai déjà dit, le
manque de dictionnaire. Beaucoup reculent devant cette besogne
matérielle de collationner tous les textes expliqués et d'en extraire
tous les mots pour les ranger dans un manuscrit. De plus, il est
difficile de se procurer toutes les brochures éparpillées en France ,
en Allemagne, en Angleterre, qui, tirées à un petit nombre
d'exemplaires, exigent encore de grandes dépenses.
— 119 —
C'est à cette cause que l'on doit attribuer mon silence sur
plusieurs ouvrages que je n'ai pu lire et dont , par conséquent , je
ne pouvais pas parler. La moisson est grande , mais je crains
bien que les ouvriers ne continuent à manquer, aussi longtemps
que pour étudier l'égyptien il faudra être riche ou bien avoir
une grande bibliothèque publique à sa disposition.
— 120
APPENDICE.
Je fais suivre ce court essai de quelques planches que j'ai crues
nécessaires pour donner à mes lecteurs une idée plus claire du
système hiéroglyphique.
La planche I contient un extrait de l'alphabet hiéroglyphique,
dans l'ordre suivant: lre colonne: alphabet copte; 2e colonne:
prononciation figurée en lettres françaises; 3e colonne : signes de
l'alphabet français choisis, à défaut de caractères coptes, pour trans-
crire les textes hiéroglyphiques ; enfin 4e colonne : signes hiérogly-
phiques.
Parmi ces signes, il en est qui commencent à devenir syllabiques;
ce sont des consonnes qui renferment un son de voyelle. J'ai
indiqué ces signes sur le tableau.
L'alphabet copte n'est pas complet sur cette planche, parce que
l'ancien égyptien ou bien ne possédait pas , ou bien ne séparait pas
certaines articulations. Pour ne citer qu'un seul exemple , R et L
s'expriment par les mêmes signes.
La planche II contient une courte inscription hiéroglyphique.
J'ai cru devoir expliquer par un exemple ce que j'ai dit trop briève-
ment du déchiffrement des inscriptions. Dans ce but , j'ai parcouru
un volume des monuments de Lepsius , en cherchant un texte qui
ne fut ni trop long , ni trop court et qui en même temps fut assez
facile pour ne pas exiger de longue dissertation '. J'ai choisi une
inscription rapportée dans \esDenkmaeler, AbtheilungHI, PI. 175g.
Elle se trouve gravée sur un rocher entre Assouan et Philes; elle
n'est pas achevée et son auteur s'est même arrêté après avoir
1 J'ai aussi pris soin de n'apporter que des textes non encore expliqués, du moins à
ma connaissance , parce que j'ignore jusqu'à quel point je puis nie servir des travaux
déjà publiés.
— 121 —
gravé la première lettre d'un mot. Ce texte semble être un abrégé
d'une inscription du temple d'Ibsamboul (Denk III, 195.) L'ori-
ginal n'a que onze lignes , mais j'ai dû les diviser à cause de leur
longueur. Enfin je ferai remarquer que sur ma copie j'ai autant
que possible séparé les mois les uns des autres.
Je passe immédiatement à la lecture du texte :
Ligne 1. Renpe-t 2, abot S semou, heru 26, xer lien hor ra,
ka next, ma meri , .... (deux groupes idéographiques dont
la lecture m'est inconnue, mais dont le sens est : Seigneur de la
haute et de la basse Egypte).
2. Maq kem , aufu to-u (?), hor nub , user teru , aa nextu,
3. Suten xabe, hik petiu, sxer bs'tu, neb xps , neb ta-ti
4. Ra-user-ma-setep-en-ra , se ra, n xat-f, mai-f, neb s' au,
amen-mai-ra-mes-su , amen-ra suten neteru
5. num neb sa-mu-t meri, anx neter nefer mnt n , peh-li
6. ma se nu kera lier pka ra, maiu
7. xem het, hati-nef liefenu , m kem n
8. at sbti aa n mnfi-u-f ' , heru kera; set
9. n herit-f tou neb-u, rs'u to-mera-ti hik
10. am set, susxa-nf tas'u set n fêta, [ex
41. xeta-u , haku tma-u-sen, petpet nef
12 (pays) meh-tu amhennu xeru n herit-f,
13. xeta-u ha-nu ro n nu nifu-f, ta suten oun
1-4. kem m uui , het-u-sen meh m sxeru-f,
15. hems-sen n s'ubu xps'-f, bu sent-sen n. . . .
16. neb-t , fx-f n kera-u no uafur-mu aameh-
17. hu st'er-u n satennu maa-sen , suten res ape
18. mi-u sxerou, bu hauni a Cet-u-f neb
19. ii-n-f . ... ker xrt-u-sen er tbh
20. nif-u n anx, hmhmu-f user n to-kens
21. s'f-t-f her ter peti-u sakara, xeta ai
22. m qsi-t-u n bai- u-f suten xabe neb ta-ti
ra-user-ma-setep-en-ra
— 122 —
23. se-ra, n œat-f, neb sef amen-mai-ra-mes-su , amen-ra ,
num sati a
Outre quelques éraillures de la pierre, ce texte contient quelques
signes dont la lecture est encore douteuse ou inconnue, mais dont
le sens est certain. En voici la traduction :
1. L'an v2 , au mois 3e de la moisson (Epiphi) le 26e jour sous
sa majesté l'Horus-soleil , taureau puissant, aimé de la déesse
vérité , le roi de la haute et de la basse Egypte ,
2. qui prend soin de la terre de Kémé, (l'Egypte), qui châtie les
nations , l'IIorus d'or, riche en années, grand par les victoires,
3. le roi de la haute et de la basse Egypte, qui gouverne les
barbares , qui renverse les rebelles , le seigneur du glaive , le
seigneur des deux mondes ,
i. soleil, riche de justice , éprouvé par le soleil, tils du soleil,
de ses flancs, qui l'aime, Seigneur des diadèmes, Ramsèsmeiamon
(le bien-aimé d'Àmon), aimé d'Amon-ra , seigneur des dieux ,
5. et de Xoum de Samut; (il possède) la vie divine et gracieuse de
Monlh pendant des milliers d'années , (il est) vaillant
6. comme le fils de Non combattant sur les plages du soleil. Lion
7. au cœur ferme, il épouvante cent mille (hommes) dans l'espace
8. d'un instant; il est un mur grand pour ses soldats au jour du
combat ;
9. sa crainte se répand (la crainte qu'il inspire) sur tous les pays,
la joie est dans les deux Egyptes ; le roi est
10. en elles; il a élargi leurs frontières pour l'éternité. Terrassant
11. les Chétas ', s'emparant de leurs villes, il a foulé aux pieds
12. leur pays. Les peuples du Nord, les Amehenus (?) renversés
par la peur (qu'ils ont) de lui ,
13. et lis Chétas (disent) : Ah! (soient) à notre bouche ses
souffles ! Le roi fait être
' Petit-£lre faut-il lire simplement Alena-t-v, les Pasteurs de l'Asie, loiifornidment
a certaines variantes.
— 123 —
14-. l'Egypte en expédition , • leurs cœurs (des Egyptiens) sont
remplis de ses desseins :
15. ils sont assis sous l'éclat de son glaive, ils ne craignent pas
de nations (ils ne redoutent aucun peuple)
16. toutes. Il terrasse les guerriers de la grande eau verte (la
mer) , les (habitants du pays de) Amhou
17. sont renversés de même qu'eux. Le roi veille comme un chef:
18. justes sont ses desseins, aucune injustice n'est dans toutes
ses actions.
19. Viennent à iui les nations étrangères avec leurs enfants, pour
implorer
20. les souffles de vie. Il rugit et s'empare de la Nubie,
21 . (il est) bouillant d'ardeur pour détruire les barbares de
Sekali ; les Chétas implorent (?)
22. en se courbant ses esprits. Le roi de la haute et de la basse
Egypte, le seigneur des deux mondes, Ra user ma satep en
va (soleil riche de justice , éprouvé par le soleil) fils du soleil ,
de ses flancs , seigneur du glaive , Ramsès meiamon , amon-ra ,
Noum , Sati , A (Il faut compléter l'inscription en ces
termes : aimé d'Amon-ra , de Noum, de Sati et d'Anuk).
NOTES.
Voici sur ce texte quelques notes destinées à faire saisir plus
aisément le mécanisme des hiéroglyphes :
Ligne lre. On y rencontre beaucoup de signes idéologiques :
/<=>\ lune — mois. (7) soleil — jour. %^ épervier — le dieu
Horus — le roi. — ^^ taureau, v— * Dras armt^ d'une massue ,
symbole de la force, puissant. On trouve aussi très-souvent dans
le courant de l'inscription le même signe employé comme déter-
— 124 —
minatif des mots désignant une action qui se fait par la force ou la
violence.
Ligne 2e. Le signe © qui termine le second mot est le déter-
minatif de pays. On trouve à la même ligne et en d'autres
endroits le signe £==» qui signifie pays, nation. Je n'en connais
pas la lecture certaine.
Le dernier mot de celte ligne se décompose comme suit : au-
dessus la ligne brisée N , une branche d'arbre XT, les deux lettres
X et T puis le bras armé d'une massue comme déterminatif , enfin
les lettres T et U, puis les signes du pluriel. La branche d'arbre
peut être regardée comme le déterminatif du son xt. Il faut lire
nxt-u victoires.
Ligne 3e. Le mot hik, gouverneur, est déterminé par un homme
accroupi. — sœer, renverser, déterminatif : un homme couché et
le bras armé. — bs't-u, rebelles, déter. : le bout du nez, un
homme tenant des deux mains une massue au-dessus sa tête, puis
les signes du pluriel. Le bout du nez comme déterminatif semble
montrer que les Egyptiens coupèrent souvent le nez aux révoltés.
Voyez Diodore, liv. I, c. 70.
Ligne -4e. Les deux groupes enfermés dans les cartouches sont
les deux noms du roi Ramsès IL Cette inscription a donc été
gravée sur le rocher la deuxième année du règne du Pharaon ,
contemporain de Moïse.
Ligne 5e. Le terme : million d'années, est exprimé par un homme
accroupi, levant les mains et portant sur la tète le signe | année.
J'ignore la prononciation de ce signe dont le sens est certain.
Ligne 6e. Le fils de Nou est Osiris.
Je traduis le mot Ss^j^^peka ra les plages du soleil, à
cause des variantes ° ^ Q et D 1\ O (Denk. III , 195).
M. J. de Rouge cite dans ses études sur les inscriptions géogra-
phiques du temple d'Edfou la forme /J Q désignant un terrain
— 125 —
chargé de troupeaux. Le mot maki lion, est exprimé phonétique-
ment et idéographiquement.
Ligne 7e. Ramsès II semble avoir affectionné le titre hat hefenu
qui effraye des centaines de mille. Le têtard de grenouille déter-
mine le mot cent mille , à cause du grand nombre de ces animaux
que le Ntt en se retirant laissait dans les campagnes et les marais
de l'Egypte.
Ligne 8e. Dans un autre endroit on trouve : il plaçait son épée
comme un mur pour protéger ses soldats.
Le mot sat se dit proprement de l'eau qui inonde les campagnes ;
ici il est dit métaphoriquement de la terreur qui se répand dans
tous les pays. Les Pharaons se complaisaient dans cette idée. Le
même Ramsès est dépeint dans un autre endroit à peu près sous
les mêmes couleurs : « la crainte circule dans leurs cœurs , leurs
membres tremblent à cause de l'épouvante qu'il cause. » Ren * n
sent-f m xat-u sen , ha-u sen m sta er tera en herit-u-f.
Denk. III, 495, lig. 8.
Ligne 10e. Au lieu de susxa-nf ou trouve écrit snsxa hnf.
J'ai fait un léger changement en lisant C3 au lieu de ra. Il faudrait
de longues explications pour motiver cette correction que les égyp-
tologues comprendront à première vue. Je rends le verbe fx par
terrasser à cause de la phrase suivante : Su ma ka spet ab-tl ur
auat sfx sark nf em xftu f. « Semblable à un taureau muni de
deux cornes , le chef du troupeau , il terrasse , il détruit ses
ennemis. •
Ligne '12e. Le mot ainehennu est douteux ; peut-être faut-il
lire mehennu. Le premier signe n'est pas assez bien formé.
Ligne 13e. La prière des Chétas se traduit littéralement :
Utinam ori nostro flatus ejus ! C'est la formule pour laquelle les
1 Cette variante m est remarquable et fixe la prononciation du mot cf. Chabas
Mél. égyp., 1, 24. On connaît en outre la prononciation /•/■.
- 126 —
condamnés à mort imploraient leur grâce du Pharaon. Sur un
tableau rapporté, Denk. III, 211, on trouve la légende suivante :
Tel an ha-tu en to-u (?) neb nti em xfa
Parole des chefs des nations toutes qui dans la main (en la puissance)
hen-f ■ ur peh-ti neb suten next
de Sa Majesté : Grand en vaillance, Seigneur, roi victorieux,
ra aa en hem aa xopes' neb er
soleil grand de l'Egypte, grand par le glaive, Seigneur sur la
ton en bai s'fi-t-eq ma (éraillnre delà pierre) anima *
montagne de fer (?) ton ardeur comme . soit
n-nu p nef-u ssni nu su anx p nti em
à nous le souffle de nos narines ; c'est la vie , celle qui (vient)
kahoui-q.
de tes bras.
Il ne faut pourtant pas croire que les Chétas aient été exacte-
ment réduits à ce degré de misère; mais ce n'est pas ici le lieu
de rabattre l'orgueil de Sésostris.
Ligne 17e. J'ai changé ter tenu en sa tenu qui me semble
mieux convenir pour plusieurs raisons. On pourrait cependant con-
server ter tenu et avoir le même sens. Je me contente de
renvoyer à la stèle de Koultan , traduite par M. Chabas : les
Inscriptions des mines d'or.
On trouve la même idée. Denk. III, 195, ligne 13 :
Sar-u sen lier astet mea-sen sou.
Leurs chefs (sont) dans la stupéfaction (quand) ils voient lui ,
user-u~f peh-ti-f- mati mentu
ses richesses , son courage , semblable à Month ;
mata-f ape sen ma se nu.
il coupe leurs têtes comme le fils de Nou.
' Anima, au lieu de ha, confirme l'interprétation qu'a donnée de cette fonnulp
M i.oodwin , dans les Mélanges égyplologiques de M. Chauas. Tome II. 257.
EXTRAIT DE L'ALPHABET EGYPTIEN.
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SUITE DE L'INSCRIPTION. PL. M.
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TEXTES CITES DANS LES NOTES .
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Annales del'Acaièraie d'archéologie deBelgicjue.tXXII, Ze Série, t. IL
— 127 —
J'ai traduit res ape : veille comme un chef, à cause de la
phrase : Anx neter nefe ken res ape oua api an nu 2.-/". — Vie
divine et gracieuse, vainqueur, il veille seul chef qui n'a pas de
second. Denk. III. 186.
Ligne 18e. Je lis mi-u ou ma-u le premier signe à cause des
variantes : 7)^£ ma, juge, et ^f Q Q/'TT? m^u> dont on Peut
voir le sens sur une stèle d'Hamamat. Denk. III, 223 c. ligne 5.
T'e-tu , parole fait action , comme l'hébreu 727 .
Ligne 21e. Dans l'inscription de Kouban déjà citée, le même
Ramsès se vante de ce qu'il est craint jusqu'à Sekali ; c'était une
ville voisine de Méroé. Le dernier mot de cette ligne est très-
endommagé, je l'ai traduit par conjecture.
Nous ignorerons sans doute toujours quel est l'auteur de cette
inscription et pour quel motif il s'est arrêté après avoir tracé la
première lettre d'un mot. Pour avoir un sens j'ai dû compléter
anuk-t meri. Noum, Sati et Anuk étaient les grands dieux des
cataractes de Philes. Cependant il est aisé de voir que les mots :
« Le roi , etc. » forment le sujet d'un verbe qui n'est pas expri-
mé. D'après le style ordinaire des inscriptions , nous pouvons
présumer que celte phrase commencée devait contenir le sujet de
l'inscription et que tout ce qui précède n'est qu'un préambule em-
phatique du genre qui plaisait tant aux Pharaons. L'antiquité clas-
sique nous a parlé de l'orgueil insensé de Xerxès , mais on ne
saurait trouver ni dans les récits les plus exaltés des grecs , ni
dans les inscriptions cunéiformes , rien qui approche des louanges
que, par exemple , Ramsès II se fait adresser par le dieu Ptah
flans une inscription du temple d'Isamboul. Lepsius , Denk.,
111, 194.
LES CANONS DE BODVIGNES
MUSÉE ROYAL D'ANTIQUITÉS, D'ARMURES ET D'ARTILLERIE
DE BRUXELLES.
NOTICE
par M. P. HENRARD,
Membre titulaire à Bruxelles.
A une des baies de fenêtre du premier étage du bâtiment de
la Porte de Hal à Bruxelles, dans la salle où se trouvent les col-
lections d'armes, d'armures, etc., on remarque un certain nombre
de bouches à feu, projectiles, etc., provenant des fouilles faites
au château de Bouvignes, près de Dinant. • Ces objets — dit
une note du catalogue1 — d'une grande importance pour l'histoire
■ de l'artillerie à la fin du règne de Charles-Quint, ont été
• exhumés en 1858 du puits où ils avaient été jetés pèle-mèle
• avec les défenseurs du château de Bouvignes , lorsque les Fran-
• çais prirent celte ville d'assaut en 1554. »
Nous ne partageons pas l'avis du savant auteur du catalogue
quant aux noms qu'il donne aux diverses bouches à feu provenant
de ces fouilles, ni quant à l'époque qu'il leur assigne; mais avant
d'émettre notre opinion à ce sujet , nous donnerons une courte
description de chacune d'elles, en leur conservant provisoirement,
Commissaires rapporteurs : MM. le général Guillaume et le major du génie
A Castekman.
' Édition de 1864 , p. 57.
— 129 —
en face de leur numéro d'ordre, le nom sous lequel elles sont
cataloguées.
Z. 45. Un petit canon de main, à croc. (XVe siècle).
Ce canon , en fer forgé d'une seule pièce et long de près d'un
mètre , a la forme d'un tronc de cône terminé au tonnerre ainsi
qu'à la bouche, qui est légèrement renforcée, par huit pans coupés.
Son calibre est de 28 millimètres. La lumière est percée latérale-
ment à une petite distance du fond de l'âme; au-dessous est
brasée une pièce de fer servant à retenir la poudre d'amorce. Une
autre pièce de fer en forme de crochet est fixée à la paroi infé-
rieure, à quelque distance de la bouche.
Cette arme est d'un travail assez soigné, bien qu'elle ait été forée
excentriquemenl.
Nous pensons qu'elle doit être cataloguée de la manière suivante :
Coulevrine à main de rempart en fer forgé. (Milieu du XVe
siècle).
Ce fut vers l'an 1430 qu'apparurent pour la première fois les
coulevrines à main l ; bientôt nos communes possédèrent un très-
grand nombre de ces armes. En 1453 , Philippe-le-Bon emprunte
des coulevriniers à Malines s et les emploie à la garde des places
fortes dont il avait retiré les garnisons pour renforcer son armée
' La première mention authentique que nous en connaissions, appartient aux comptes
communaux de ia ville de Lille pour l'année 1433. Voir: De l'artillerie delà ville de
Lille au -/4e, •/5e, 16e et 17e siècle, La. Fons Mélicocq, p. 16.
* Gachard, Documents inédits, t. 11 , p. 126.
— 130 —
dans sa guerre contre les Gantois; déjà dès 1-465 Lille possède
un serment de coulevriniers.
La coulevrine fut employée, à l'origine, particulièrement à la
défense des murailles. Le poids , la longueur et le calibre consi-
dérable de celle que nous avons sous les yeux ne nous permettent
pas de douter que telle a été sa destination. De même que la
grande arbalète , la coulevrine de rempart ne s'épaulait pas ; son
fût en bois reposait sur l'épaule du tireur et son crochet s'appuyant
sur la paroi extérieure de la muraille , quand la bouche sortait
par le créneau on trou de canonnière, était destiné à résister au
recul.
Z. 40. Une bombarde en douves de fer battu, cerclées, se
chargeant par la culasse , avec boite. (XVIe siècle).
Cette bouche à l'eu est composée de deux pièces : la volée et la
chambre. La volée en fer forgé, du calibre de J93mi11, est formée
de neuf bandes de fer longitudinalement assemblées comme les
douves d'un tonneau , recouvertes de 9 manchons renforcés eux-
mêmes par 5 anneaux dont 4' sur des joints de soudure et le 5e à
la tranche à la bouche. Toutes ces pièces sont soudées les unes
aux autres.
Le fond de la volée reçoit le col de la chambre , prisme à huit
jians en fonte de fer et munir d'une anse en fer forgé, percée vers
le milieu de sa longueur et sous l'anse d'une lumière avec calice
peu profond.
— 131 —
Autre canon de la même espèce, mais dont rame n'a que
16 centimètres de diamètre, avec boîte.
De même modèle que la précédente , cette bouche à feu a un
calibre et une longueur moindres. Sa construction est analogue,
mais les anneaux de la volée ont la forme de moulures et deux
d'entre eux, un à la bouche l'autre vers la culasse, portent un
grain de mire en forme de trèfle ; la paroi de l'âme est détériorée
près de la bouche , sans doute par l'effet du tir. La chambre est
en fonte, cylindrique et munie d'une anse on fer forgé; la lumière
est percée assez près du fond de l'âme.
Cette bouche à feu, de même que la précédente, est un veugtaire
(en flamand vogheleer). En effet, les bombardes sauf celles de
très gros calibre , comme la Dulle Griete de Gand , qui à cause de
la difficulté de la fabrication et des transports se divisaient en
deux ou plusieurs pièces que l'on vissait les unes aux autres au
moment de la mise en batterie, avaient toujours leurs chambres
fixes et faisant corps avec la volée. Il n'en était pas de même du
veuglaire : cette bouche à feu, d'origine flamande comme son
nom l'indique , lançait des projectiles de pierre et composait au
XVe siècle la partie la plus considérable de l'armement des
remparts des villes et des châteaux ». Afin d'obtenir une certaine
1 Dans un inventaire de l'artillerie de l'hôtel de ville de Paris, dressé en 1505 mais
qui se rapporte à des armes déjà anciennes à cette époque , on compte 22 veuglaires
parmi i\ autres pièces d'artillerie, coulevrines, serpentines, mortiers courteaux etc
Vo.r : Etudes sur le passé et l'avenir de l'artillerie , par le prince Louis Napoléon
Bonaparte (Napoléon III). - t. I, p. 376 , (pièces justificatives)
— 132 —
rapidité de tir elle possédait deux ou trois chambres qui se char-
geaient isolément. On les fixait à la volée au moyen de coins en bois
ou en fer qui s'interposaient entre leur fond et le fût en bois auquel
la pièce était réunie au moyen de liens en fer ou quelquefois
simplement en cordes. Au-dessus de la charge de poudre on
enfonçait un tampon de bois tendre (tilleul, peuplier, etc.) de forme
tronconique, qui avait pour but d'augmenter la tension des gaz de
la poudre avant leur action sur le projectile.
Z. 48. Un petit fauconneau cerclé de 16 anneaux, égale-
ment en fer forgé, se chargeant par la culasse et muni de
sa chambre.
Cette bouche à feu, qui nous semble composée d'une seule lame
en fer forgé contournée sur elle-même comme nos canons de fusil ,
est renforcée de 1(> anneaux distants l'un de l'autre de 65 milli-
mètres, et d'un triple anneau à la bouche. Son calibre est de
40 millimètres , et sa longueur totale d'environ 37 fois ce calibre.
Elle est munie d'une chambre en fonte avec anse en fer forgé.
Nous ne croyons pas nous tromper en proposant pour cette
bouche à feu le nom de serpentine ; le fauconneau appartient en
effet plus particulièrement au XVIe siècle , et nous dirons tantôt
pourquoi nous pensons que les pièces d'artillerie que nous avons
sous les yeux n'appartiennent pas à cette époque.
Les serpentines n'étaient pas toujours à chambre, et se char-
geaient souvent par la bouche; leurs projectiles étaient en plomb
ou en fer forgé. 11 en était de même des coulevrines , et les
caractères qui différenciaient ces deux sortes de bouches à feu ne
sont pas, nous devons le dire, parfaitement connus.
— 133 —
Z. Trois boîtes ou chambres à feu de différentes grandeurs.
Ces trois chambres ou boites à poudre appartiennent à des
veuslaires. Toutes trois sont en fonte avec anse en fer forcé :
l'une a la forme d'un prisme à 8 pans comme celle du premier
veuglaire que nous avons examiné, et lui appartient peut-être éga-
lement; les deux autres sont cylindriques comme celle du second ,
et ont leur lumière placée latéralement à l'anse et très près du fond
de l'âme. Elles portent toutes deux la même marque en forme de
flèche que nous avons reproduite sur notre dessin , ce qui paraîtrait
indiquer qu'elles appartenaient l'une et l'autre à la même bouche à
feu, sur laquelle une marque semblable se reproduisait sans doute.
Ce qui différence particulièrement l'artillerie du XVIe siècle de
celle du siècle précédent, c'est la disparition presque complète des
pieds en fer forgé, remplacées presque partout par ceux en bronze
et en fonte de fer, l'adoption des tourillons et l'abandon du char-
gement par la culasse et des projectiles en pierre pour toutes les
pièces autres que les mortiers. Déjà dès la fin du XVe siècle, ces
caractères sont en partie ceux de l'artillerie que Charles VIII con-
duisait avec lui en Italie ; mais ces progrès n'avaient pas été
l'œuvre d'un jour, et avant la France les provinces soumises à
l'autorité des ducs de Bourgogne avaient vu s'effectuer ces diverses
améliorations.
L'artillerie de Charles-le-Téméraire, dont de nombreux spécimens
sont conservés dans les villes de Moral, La Neuveville et Bâle,
depuis le jour où elles restèrent entre les mains des Suisses après
\\l\ XXII 9
— 134 —
les fatales batailles de Granson et de Morat, présentent déjà
quelques uns de ces perfectionnements: le très petit nombre de ces
bouches à feu sont à chambres mobiles , quelques unes sont en
bronze ou en fonte de fer, plusieurs ont des tourillons. Les tou-
rillons étaient chose nouvelle assurément à cette époque, car s'il
en est qui font corps et ont été visiblement forgés ou fondus avec
les pièces dont ils font partie , il en est aussi qui sont appliqués
après coup à des pièces déjà anciennes, plus longues, plus pesantes
que les nouvelles. On voit que, comme à toutes les époques de
transition , on a essayé d'utiliser ce qu'on possédait en y appliquant
plus ou moins heureusement l'invention nouvelle *.
Or aucun de ces caractères ne se présente dans les bouches
à feu de Bouvignes. Toutes sont à chambre, toutes sont en fer
forgé, aucune n'a de tourillons. Nous en concluons qu'elles
appartiennent au XVe siècle, et, s'il nous fallait leur assigner une
date plus précise encore, nous les attribuerions au règne de
Philippe-le-Bon 2.
On pourrait nous objecter l'emploi de la fonte pour les chambres,
alors qu'il est communément admis que ce ne fut qu'au XVIe siècle
que ce métal servit à la fabrication des canons ; mais c'est là
une erreur que l'étude des comptes des villes , sources authen-
tiques s'il en fut, a permis de redresser. Dès le commencement
1 Voir Annales de l'Académie d'archéologie , 2e série, t. Ier, p. 283, noire mémoire
sur l'Artillerie en Belgique.
4 Dans une relation du siège de Bouvignes par les Liégeois en 1430 appartenant à la
chronique manuscrite de La Haye, dont M. Kervyn de Lettenhove donne des extraits
ilans son édition de Georges Chastelain, on lit (t. 11 , p. 117, note) :
« A cliascun costier de la ville de Bouvignes avait une grosse tour, des quelles on
« getait de chascune ung canon plus gros d'une tête, et estaient les dits canons affustés
pourjetter eu croix devant la porte du dit bolwerc, qui tuaient les communes par
» nions. »
Ne seraient-ce pas là nos deux veuglaires?
1 MS. de la bibl. impérial. Collection Le Grand. Éludes sur le passé et l'avenir
de C artillerie , t. I , p 37.r>.
— 135 —
du XVe siècle, en effet, on coulait en fonte de fer des canons de
petit calibre , et il en était de même des chambres de veuglaire ,
car dans un inventaire de l'artillerie existant à la bastille
St. -Antoine à Paris * en août 14-63, on lit : • Y a de ce qui fut
« laissé par les Anglais : Un gros vuglaire de fer fusté de
« bois ayant deux chambres de fonte. • Et en 1463, il y avait
déjà plus de trente ans que les Anglais avaient quitté Paris.
Toutes les chambres n'étaient cependant pas en fonte , et à côté
de celles que nous venons de décrire , s'en trouve une quatrième ,
dont le catalogue ne parle pas, en fer forgé, composée de cinq
anneaux soudés l'un à l'autre
et renforcés de deux cercles de
faible dimension, maintenant les
pattes de l'anse. La lumière est
très près du fond de l'âme , et
fortement évasée par le tir.
S'il nous était permis de proposer une explication à la présence
de ce matériel, en somme en assez bon état de service, dans le puits
d'où les fouilles de 1858 l'ont exhumé, nous inclinerions à penser
que les défenseurs de Bouvignes l'y ont précipité eux-mêmes pour
ne pas le voir tomber entre les mains de l'ennemi , quelque jour
peut-être que leur voisins les Dinantais , dont l'inimitié pour
Bouvignes nous a été révélée par maints chroniqueurs , les avaient
menacés d'escalade. It n'est pas en effet dans l'habitude des
vainqueurs de détruire l'artillerie des villes conquises , et au XVIe
siècle comme au XIXe, les bouches à feu étaient des trophées trop
glorieux pour qu'on ait préféré les détruire que de les emporter.
LA BASILIQUE DE S.WILLIBRORD
à. ECHTERNAGH, (Grand-Duché de Luxembourg).
NOTICE
par M. LE Dr A. NAMUR ,
MEMBRE CORRESPONDANT ÉTRANGER A LUXEMBOURfi.
Dans une riante plaine du pays de Luxembourg, à six lieues
et demie de la capitale du même nom , à quatre lieues de celle des
anciens Trevirs., sur la rive de la Sure, au milieu d'un vaste bas-
sin encadré par un cercle de hautes collines , s'élevaient jadis
majestueusement, à côté de l'ancienne abbaye des Bénédictins à
Echternach, les ruines de la basilique de St.-Willibrord , sans
contredit et d'après le jugement d'hommes experts le plus im-
portant monument religieux du Grand-Duché de Luxembourg. Nous
disons jadis, puisqu'aujourd'hui ces ruines sont remplacées par la
basilique même, nouvellement restaurée en grande partie.
C'est sur cette mémorable basilique que nous désirons attirer
l'attention des savants de tous les pays.
Pour apprécier d'abord la valeur historique de ce monument,
nous devons remonter à son origine.
A la fin du VIIe siècle la noble fille du roi de France Dagobert ,
sainte ïrmine, vivait dans le monastère d'Oeren à Trêves, dans
Commissaires rapporteurs : MM. Lr. Grand de Reulandt et F. Ourlet.
— 137 —
la pratique des plus précieuses vertus. Elle était si charitable,
qu'elle ne se refusait à aucune œuvre de piété ; elle ne possédait
de grands biens que pour faire de grandes largesses ; aussi trouvâ-
t-elle bientôt une occasion favorable de perpétuer son nom par la
création, à l'emplacement de la ville actuelle d'Echternach , d'un
petit monastère, destiné à soulager les pauvres et à offrir un asile
à des moines étrangers qui, en missionnaires, viendraient en ces
lieux pour y propager la foi chrétienne.
Cette contrée, comme nos sources écrites et surtout l'histoire monu-
mentale du pays le prouvent , était un siège principal du paganisme,
dont on retrouve encore des traces au Vile et au Ville siècle.
Il est constaté qu'à côté du petit monastère la pieuse princesse
fit aussi élever une église, du moins une chapelle, qui serait alors
à considérer comme une des premières églises fondées en ces lieux.
Il serait difficile de préciser la date de la construction de cette
église et d'en donner la description. On sait seulement qu'en 698,
lorsque le saint apôtre des Frisons, saint Willibrord qui plus
tard devint aussi l'apôtre du Luxembourg , arriva à Trêves ,
précédé de sa réputation apostolique et sous la protection de Pépin
de Herstal et des évoques Leotwinus et Basinus de Trêves , la
pieuse bienfaitrice de ces lieux lui offrit son monastère déjà
considérablement agrandi , pour lui servir d'asile et de retraite à
lui et à ses compagnons , lorsque dans leur sainte mission ils si;
verraient obligés de se soustraire aux poursuites des peuples payens,
qu'ils avaient à combattre par le glaive de la foi.
L'établissement devait servir en môme temps à former les
jeunes missionnaires. Il n'entre pas dans notre plan de faire
l'historique de ce bienfaisant établissement ; nous rappellerons
seulement qu'après avoir lutté pendant cinquante ans contre le
paganisme , saint Willibrord vint mourir à Echternach où il fut
enterré et où l'on conserve encore aujourd'hui avec une grande
vénération ses restes mortels.
— 138 —
Avant la mort de ce zélé propagateur de la foi , l'établissement
confié à sa direction avait été l'objet de grandes libéralités.
En 709 , la douzième année de Childebert 111 , Pépin deHerstal ,
qui protégeait et aimait saint Willibrord , soutint son établissement
avec autant de zèle que sainte Irmine, sa première bienfaitrice.
Extrait du Liber aureus Eptemacensis - Bibliothèque de Gotha. - XIIe siècle.
SAINTE IUMINE ET PEPIN PORTANT LA 11ASILIQIIE D'ECHTKRNACH.
Il leur fcéda en propriété , à proximité de la villa d'Irmine ,
une grande partie du terrain qu'il avait acquis du duc Théodard.
Aussi le Liber aureus d'Echternach , conservé à la bibliothèque
de Gotha , nous représente dans une belle miniature du XIIe siècle ,
— 139 —
Pépin et sainte Irmine , portant l'église qui y est représentée sous
la forme que probablement elle avait alors.
L'histoire proprement dite de la basilique de Saint- Willibrord
ne date que de l'an 1017.
L'abbaye et l'église primitive devinrent la proie des flammes.
L'abbé Uroldus commença la construction de la nouvelle église ,
qui est celle dont nous avons admiré et déploré les majestueuses
ruines et que nous sommes heureux de voir presque restaurées
complètement. Bientôt nous aurons la satisfaction de la voir se
relever entièrement de ses cendres pour être rendue au culte.
Achevée en 4031 , sous l'abbé Humbertus, elle fut consacrée
la même année par l'évèque Poppon de Trêves, et en présence de
Henri , duc de Bavière , s'opéra alors la translation des reliques
de saint Willibrord dans la nouvelle église. Par crainte des incur-
sions normandes, on avait caché ces précieuses reliques sous
terre, d'où elles furent retirées cette année, pour reposer en ce
lieu jusqu'à la suppression de l'abbaye en 1794.
Depuis lors elles furent religieusement recueillies et conservées,
et aujourd'hui elles reposent en paix sous le maitre-autel de l'église
paroissiale d'Echternach. La translation dans cette église a eu lieu
en 1828. Nous osons espérer qu'enfin, grâce aux sympathies de
l'univers catholique , elles reprendront place dans la basilique
restaurée, pour ne plus jamais abandonner ce vénérable sanctuaire
que saint Willibrord s'était choisi lui-même pour dernière demeure
de ses restes mortels.
L'église abbatiale qui nous occupe en ce moment ne fut pas
dès son origine ce qu'elle a été à l'époque de sa splendeur. Elle reçut
différentes modifications dans la suite des temps , comme nous le
ferons voir dans sa description.
Vu le développement progressif du bâtiment pendant plusieurs
siècles, nous ne serons pas surpris d'y reconnaître différents
— 140 —
genres d'architecture , qui admirablement combinés ont fait l'admi-
ration des hommes les plus experts ' .
Il est fort heureux qu'au XVIIIe siècle, époque à laquelle les
abbés Hartz (t 1720) et Grégoire Schouppe (t 1751) reconstrui-
sirent à neuf, dans un style qui a été critiqué à juste titre , les bâti-
ments de l'abbaye, l'église ne reçut que peu ou point de modifications,
de sorte qu'elle nous fut conservée dans la forme originale et fort
remarquable que nous allons décrire.
Dans la construction de cette basilique, nous aurons à distinguer
deux genres d'architecture : l'architecture romane qui caractérise
la forme primitive, et l'architecture gothique qui se manifeste aux
changements opérés dans le bâtiment au XIIIe siècle.
a. La basilique primitive — style roman — XIe siècle.
L'église primitive affecte, d'après un usage continué jusqu'au
XIe siècle, la forme d'une basilique romaine, avec cette différence
que le fond du chœur, qui originairement se terminait en hémi-
cycle , est rectiligne comme dans la plupart des monuments du
même genre en Angleterre.
Sous le chœur existe une crypte dans laquelle on entrait à droite
et à gauche par deux escaliers, aux extrémités des nefs latéra-
les. Ces entrées sont fermées aujourd'hui. Cette crypte est la plus
ancienne partie de l'édifice, la seule partie qui reste de l'église
primitive, devenue la proie des flammes en 1017. C'est dans
ce souterrain que saint Willibrord célébrait la sainte messe;
c'est là que sous l'autel de la Stc- Vierge il a été enseveli.
A l'entrée de l'église, il y a un porche mesurant dans un sens
14- pieds et dans l'autre 2 pieds 2 pouces.
' MM. Kugler de Berlin , Sclimidt et de Wilmowski de Trêves, de Lassaulx de
Coblence, Aiig. Reichensperger, etc.
— 141
L'intérieur de l'église est divisé en trois nefs par deux rangées
de gros pilastres alternant avec des colonnes d'ordre corinthien ,
Intérieur de l'église abbatiale d'Echteruach.
auxquelles plusieurs archéologues renommés ont attribué une
origine romaine. Ces pilastres et ces colonnes sont réunis par des
arcs cintrés ; à en juger par les impostes qu'on remarque encore
aux murs latéraux correspondant avec les pilastres , ceux-ci et les
— 142 —
murs étaient réunis de la même manière, ce qui fait un système
d'arcades symétriques qui frappent le visiteur à son entrée dans
le vénérable sanctuaire '.
L'emploi de colonnes romaines dans les églises chrétiennes n'est
pas un fait insolite. Le sénat de Rome avait orné l'arc de triomphe
de Constantin aux dépens de celui de Trajan. Les chrétiens sui-
virent aveuglement cet exemple. Ils exploitèrent sans pitié les
édifices de l'ancienne Rome ; les colonnes furent déplacées et ser-
virent à soutenir les arcades des nefs. Des colonnes semblables se
trouvent dans la cathédrale de Trêves. Nous nous demandons
naturellement d'où peuvent provenir les colonnes de notre basi-
lique. Les découvertes importantes faites en 1852 à proximité
d'Echternach , au lieu dit • Schwarzacht ■ , permettent de supposer
qu'il y avait autrefois en ces lieux des bâtiments très-considéra-
bles, qui ont pu fournir ces colonnes.
L'opinion généralement accréditée de l'origine romaine de
ces colonnes a été récemment combattue par M. le professeur
Auguste Mullendprff qui , pendant son séjour à Echternach , a
pris une très-large part à la restauration en question , (Organ
fur christliche Kunst). « Ces colonnes, dit-il, ne peuvent pas
» être classiques , puisqu'elles portent tous les caractères de la
• colonne romane » , ce qu'il cherche à démontrer.
L'église avait primitivement un plafond en bois , dans la nef
principale aussi bien que dans les nefs latérales, ce qui paraît
suffisamment prouvé par les peintures murales dont en a vu encore
des vestiges au-dessus des voûtes actuelles qui sont de date
postérieure.
Les murs paraissent avoir été décorés de semblables peintures
dans toute leur hauteur ; tel a été le cas dans la plupart des
bâtiments mis à découvert à Pompéi et dans les basiliques d'Italie.
' Vue de l'intérieur île la basilique , par M. lu professeur Behg.
— 143 —
Un exemple analogue de telles peintures se voit dans la cathédrale
de Trêves.
On ignore ce que ces peintures de notre basilique ont représenté.
Étaient-ce de simples décorations , des scènes de l'ancien ou
du nouveau Testament, ou des figures allégoriques et symboliques?
Les traces qui sont restées sont insuffisantes pour le démontrer.
Aux colonnes on- a encore remarqué des vestiges de couleur brun-
rougeâtre; aux chapiteaux des traces de vert et d'or.
Berthels, l'historiographe de l'abbaye (XVIe siècle), vit encore
de son temps les douze apôtres et des anges représentés sur les
pilastres et les colonnes. D'après une ancienne notice , plusieurs de
ces peintures ont été faites vers 1190 sous l'abbé Godefroid.
D'après le rapport du susdit M. Mullendorff, il ne reste abso-
lument rien des fenêtres primitives.
Quant aux tours de l'église , on prétend que des quatre qui
existaient, les deux qui sont contiguës au chœur appartiennent à
l'église primitive; les deux autres à côté de l'entrée de l'église,
sont attribuées à la moitié du XIIIe siècle. Cependant sur la minia-
ture citée du Liber aureus de Gotha , la basilique est déjà repré-
sentée avec quatre tours et cet ouvrage précieux date sans contredit
du XIIe siècle.
Voici les principales dimensions de l'ancienne basilique : la
longueur totale jusqu'à l'extrémité du chœur est de 65in20,
dont 17m00 pour le chœur.
Largeur de la nef principale 9m90, hauteur de cette nef 16m10 ;
largeur des nefs latérales respectivement 5m70 et 5m30 , y
compris l'espace occupé par les colonnes et les pilastres : hauteur
de ces nefs 8m4-0. Comment expliquer cette différence de largeur
des nefs latérales?
Pourquoi d'un autre côté l'axe du chœur forme-t-il angle
avec celui de la nef principale?
— 144 —
b. La basilique modifiée au XIIIe siècle — style gothique.
fJC 0J- C u XHIN
Plan et coupe d'après M. Schmidt de Trêves.
Au XIIIe siècle, la basilique fut modifiée d'après les progrès de
l'art à celle époque. Le gothique succéda au roman et au byzantin.
L'abbé Arnoldus (1242-1269) fit construire les voûtes ogivales
— 145 —
et les fenêtres qui existent encore en ce moment. Le plafond
primitif, qui était en bois, était de trois pieds à peu près au-
dessus de ces voûtes.
c. Modifications subséquentes.
Comme nous l'avons vu ci-dessus, la crypte primitive sous le
chœur avait son entrée par deux escaliers dans l'intérieur de
l'église. Plus tard ces entrées furent supprimées, probablement par
suite de la construction de la chapelle de St. -Sébastien , élevée à
côté du chœur par l'abbé Fisch en 4615. À cette époque on
augmenta l'espace de la crypte par un autre souterrain construit
sous ladite chapelle et l'on pratiqua une entrée extérieure. Les
trois chapelles, qui sont désignées sur le plan que nous publions,
reçurent les fenêtres qui durent disparaître à la place où l'on
accosta les chapelles , ce qui porterait à croire facilement que ces
chapelles sont contemporaines de l'église. Mais les retombées des
voûtes et les consoles sur lesquelles celles-ci reposent, permettent de
conclure à une époque postérieure , ce qui est confirmé du reste
par l'histoire même du monument. L'une de ces chapelles en effet
a été construite sous l'abbé Bertels , d'illustre mémoire (1594-
1607) ; une autre par l'abbé Fisch, celle de St. -Sébastien , qui
porte la date de 1615 inscrite dans le souterrain.
d. La basilique après la suppression de l'abbaye en 1795.
Lorsque la révolution de 1789 entraîna dans ses conséquences
la suppression des établissements religieux, l'abbaye d'Echternach
et sa basilique subirent le sort de toutes les institutions de l'espèce.
Abandonnées dès le 10 janvier 1796 par les derniers Bénédictins,
— 146 —
l'abbaye et son église furent vendues le 21 du même mois comme
domaine publie à une famille privée. Le nouveau propriétaire con-
vertit bientôt une partie de l'abbaye en fabrique de fayence et l'église
servit au même usage. On vit alors des hauts-fourneaux rem-
placer les autels dans cette vénérable enceinte , et l'industrie occu-
per la place réservée pendant des siècles au culte.
La première profanation du plus intéressant de nos monuments
religieux et artistiques, qui eut lieu le 7 novembre 1794 après la
première invasion des troupes françaises, ne fut que le commence-
ment d'une longue série de revers, que tous les amis de la religion,
des arts et de l'histoire nationale ont amèrement regrettés, sans
pouvoir les détourner de la déplorable victime. En 1 842 la moitié
de l'abbaye et de l'église redevint la propriété de l'État, et servit
dès lors de caserne au contingent fédéral luxembourgeois.
Il ne nous appartient pas de répondre à la question de savoir
si ce beau monument, unique dans son genre dans notre pays et
même en deçà des Mpes, d'après le jugement de M. Kugler," de
Berlin , n'aurait pas pu avoir un meilleur sort.
L'incurie, la construction susdite des fours, hâtèrent tellement
sa ruine, qu'après quelques éboulements, qui se succédèrent rapi-
dement dans la partie appartenant à l'État, on désespéra un
instant de la possibilité d'une restauration.
Nous ne pouvons passer sous silence que depuis 1842, avant
les derniers désastres, bien des démarches furent faites pour pro-
voquer la restauration de la basilique , ainsi que sa restitution au
culte, mais tous les efforts échouèrent malheureusement contre des
écueils indépendants de la volonté de ceux qui se sont interpo-
sés dans ce but.
Enfin une lueur d'espoir se lit jour. En 18G2 nous vîmes se
réveiller, comme par suite d'une inspiration supérieure, dans la
bourgeoisie même d'Echternach , un sentiment de pieuse vénération
— 147 —
et se former dans son sein , spontanément et comme par enchan-
tement, une association sous le nom d' Association de St -Willi-
brord , qui se proposa pour but d'aviser aux moyens de restaurer,
d'après le plan primitif, la basilique du saint auquel nous devons
en grande partie la fondation du christianisme dans nos contrées.
Nous avons félicité les Echternachois du noble sentiment qui les a
animés et fait des vœux bien sincères pour la réalisation de cette
louable tentative.
Ce que bien des écritures et des démarches orales n'ont pu
faire , la voix unanime du peuple est parvenue à l'accomplir.
Pendant plus de cinq mois , la nouvelle association eut à lutter
contre des obstacles et des préjugés de toute espèce ; mais encou-
ragée par la bienveillante protection du gouvernement Grand-Ducal ,
par celle de Mgr. le vicaire apostolique, évêque d'Halicarnasse,
et par la participation constante de la Société archéologique du
Grand-Duché, elle ne tarda pas à attirer sur le but de sa noble
entreprise l'attention de tous les amis de l'art et à aplanir une
foule de difficultés qui , jusqu'alors , avaient rendu infructueuses
les tentatives des années précédentes.
Le lundi de la Pentecôte 1862, l'association sortit enfin de
son état provisoire ; dans la réunion de ce jour, elle procéda à la
nomination d'un conseil d'administration. On déploya une activité
à toute épreuve et les habitants d'Echternach s'empressèrent de
répondre aux aspirations des hommes qui s'étaient imposé la
tâche d'accomplir le plus cher de leurs vœux, et offrirent la
somme de 6,000 francs pour exécuter sans aucun retard les tra-
vaux les plus urgents. A la nouvelle de ces généreux efforts , il
se forma à Luxembourg une association filiale, qui contribua et
continue encore à contribuer par tous les moyens possibles à
l'exécution de cette œuvre éminemment patriotique.
Au mois de novembre 1862, un événement de haute importance
— 148
fit naître les plus belles espérances. L'assemblée des États
autorisa le gouvernement Grand-Ducal à faire , en faveur de la
paroisse d'Echternach, la cession gratuite de la partie de l'église
appartenant à l'Etat. L'autre moitié avait déjà antérieurement été
généreusement donnée par les propriétaires qui en avaient fait
l'acquisition en 1790 J.
Dès lors la propriété du bâtiment fut assurée et le conseil
d'administration put sérieusement se mettre à l'étude des travaux
préparatoires de la restauration de l'église. Une question fort
importante, agitée déjà en 185G par M. l'ingénieur Hartmann
qui a bien voulu se charger de la direction des opérations de
restauration , celle de savoir s'il fallait reconstruire l'église d'après
le plan primitif, en se servant des anciens matériaux ou bien
s'il fallait la restaurer, fut soumise à M. Schmidt de Trêves,
l'auteur d'une notice fort précieuse sur notre monument. Après un
examen sérieux le savant architecte se prononça non seulement en
faveur d'une restauration , mais
il déclara en outre que selon lui
toutes les parties encore existantes
aujourd'hui, à quelques exceptions
près, pouvaient être sauvées et
conservées. Après cette déclara-
tion , on put espérer que le
monument conserverait sa valeur
historique, son empreinte originale
et offrirait toujours le plus grand
intérêt à l'archéologue cl à l'ar-
tiste.
Pénétré d'un sentiment de con-
• l'ai acte du donation du 2 juin 180-2, ilad. veuve Dondelinger céda, de concert avec
ses enfants, à la paroisse d'Echternach la moitié de l'église qui lui appartenait
— 1 49 —
fiance inébranlable, le comité-directeur se mit à l'œuvre, les
travaux furent organisés sous d'heureux auspices , et aujourd'hui
nous pouvons dire avec la plus vive satisfaction: il est sauvé
de la destruction qui le menaçait; il est conservé à jamais cet
important monument d'architecture , qui nous rappelle le souvenir
du saint apôtre qui répandit le premier les bienfaits du christia-
nisme dans nos contrées- Nos compatriotes et surtout les habitants
d'Echternach ont prouvé que la bonne volonté . sagement dirigée
vers un but commun, parvient à écarter les difficultés que d'abord
l'on peut croire insurmontables.
Aujourd'hui la belle œuvre n'est pas encore complète, mais il
ne reste plus à exécuter que les travaux aux tours et au portail ,
aux vitraux, à l'intérieur de l'église, aux meubles, aux ornements,
etc., de sorle que nous sommes en droit d'espérer qu'elle le sera
dans un avenir peu éloigné.
Pendant toute la durée des travaux , nous avons eu la satisfaction
de voir qu'on a évité autant que possible les écueils qui se pro-
duisent souvent dans la restauration des édifices. On a compris
qu'en supprimant quelque chose à ce qui existait et en mettant du
nouveau à la place, on ferait perdre de son caractère original
au monument que nous tenons à conserver et à faire apprécier.
Aussi a-t-on conservé les souvenirs du style romano-ogival qui
caractérise cette construction.
Rentrons un instant encore dans la crypte dont il a été question
plus haut.
Il est hors de doute que saint Willibrord vint mourir à
Echternach et que ses restes mortels ont reposé dans les lieux
mêmes qu'il a illustrés par un séjour mémorable , quoique souvent
interrompu pendant 41 ans. Il mourut en 739 à l'âge de 8i ans.
Son corps fut déposé dans la crypte du monastère sous l'autel de
la Ste-Vierge.
XXIX
150
— 151 —
Nous ne mentionnons pas ici les autres monuments sépulcraux
qui, dans la basilique, nous offrent quelque intérêt historique.
Comme lieu de sépulture de l'illustre apôtre , ce monument se
recommande de lui-même à la sollicitude des chrétiens de tout
l'univers.
Les reliques de saint Willibrord reposent encore aujourd'hui
dans le sarcophage primitif. Il ne nous semble pas sans intérêt d'en
reproduire ici le dessin ainsi que celui du mausolée en bois, de
date plus récente, qui le recouvre.
Comme monument religieux, notre basilique excitera sans doute
un intérêt général , auquel aucun savant ni aucun chrétien ne
voudra rester étranger.
flr^SO.
Sarcophage de saint Willibrord à tfchternach .
Comme édifice historique, il a d'abord une valeur toute parti-
culière pour le pays qui en a conservé les ruines et qui l'a réédillé.
Dans son origine, il est pour ainsi dire un monument national
pour la France, sainte Irmine et Pépin appartenant à notre
histoire commune , à une époque où aucune frontière ne nous
séparait de nos anciens frères des Gaules.
Ce monument pourrait-il être indifférent à la Belgique et aux
Pays-Bas ; saint Willibrord n'a-t-il pas exercé son saint ministère
— 152 —
dans la province d'Anvers ; n'a-t-il pas été l'apôtre de la Frise ,
comme il a été le notre ?
Nous nous estimerions heureux si par cette communication nous
avions éveillé quelque sympathie en faveur de notre monument
vraiment international.
Basilique de St.-Willibrord à Eclilernach an XVIe siècle.
KONINGSFEEST VAN HERTOG JAN IV
(1422)
DOOR
M. Lodewijk TORFS,
Briefwisselend lid te Antwerpen.
Na den dood van den te Azincourt gesneuvelden hertog Antonis
kwam de regeering van Braband in handen van een onmondig
jongeling, Jan IV, een hartstochtelijk liefhebber van de schiet-
spelen der gilden. Meermaals nam hij er zelf deel aan, en, door
zijnen gemeenzamen omgang met de gildebroeders , verworf bij de
populariteit van eenen goeden jongen, iels wat juist geen goed
regent is. Wijle Mgr. De Ram bezal van dezen jeugdigen vorsl
een afbeeldsel , hetwelk van zijnen persoon , als staatsman , geen
zeer voordeelig gedacht geeft. Dit kunststuk , hetwelk de geleerde
rector der katholijke Universiteit van den hertog Amedeus van
Beauffort ten geschenke had ontvangen , is in olieverw geschil-
derd op een paneelije van 34 centimeters hoogte op 24 breedte,
en voert het jaarlal 1422. Volgens het gevoelen van deskundigen
zou hetzelve echter het oorspronknlijk contrefeitsel niet wezen ,
maar wel eene kopij, naar gissing in de xvieeeuw vervaardigd. Men
kende het overigens ait eene teekening,\velke Mr de Reiffenberg
Commissaires rapporteurs : MM. Th. Van Lerius et le chevalier Léon de Ruubuise.
— loi. —
cr van gegevcn had in liet IVedeel zijner uilgave van de Barante's
Histoire des ducs de Bourgogne , teekening welke nauwelijks
melding verdient bij de keurige chrorao-lithographische plaal, door
Mgr. De Ram zelve er van bezorgd in de Bulletins de la Commis-
sion royale d'histoire, (3e série le deel), en door doctor P. -G. Van
dei\ Meersch in den Messager des sciences historiques (jaargang
1862) wedergegeven.
Nopens de hcrkomst van dit kopijstuk vvordt bericht , dat liet
vveleer de zaal van den Grooten Voet- of Kruisboog van Leuven
versierde, zonder dat men weet , hoe of wanneer het daar mag
gekomen zijn. Op den rug van het paneel bevindt zich een perka-
ment geplakt , bevattende negen-en-twintig vlaamsche rijmregels,
welke wij den lezer vooreerst willen onder- het oog brengen , al
wagon wij daarmede eene vijfde of zesde uitgave; maar bij aile
processen moeten de stukken blijken , zullen de rechters met kennis
van zake oordeelen. Zie hier dus deze boogschulterspoèzij , alleen-
lijk , en om straks te melden redens , hebben wij eenen anderen
tekst gevolgd dan dengenen van het perkament *.
Jean 4, Duc de Brabanl , a'isnê fils du Duc Anthoine de Drabant. IAÎÎ.
I . AIsmen duysent vierhondert en twee en twintigh telde.
L2. Dees Prins hot Lantjouwecl tôt Loven opstelde.
3. Sone van Hertogh Antonius , Hertogh Jan
A. Tôt Loven met den Cruysboghe een Cop wan ,
5. En heeft hem den Cruysboghe van Antwerpen geschoncken ,
6. Uaer menigh Guldebroeder heeft uyt gedroncken.
7. Soo beminde den Boghe onsen edelen Landts Ileere ,
8. Bewysende de Guide soo grooten eere ,
' Dezc tekst werd ons muégedeeld door Mr P. Génard , naar een handsclirift oj) het
stadsarchief. Van den tekst door Papebrociiii;s {Annales Anlverpienses , I, 31 4)
gegeven , en door Mertens en Torfs (Gesdiiedenis van Antwerpen, II , OU) overge-
noinen , was geen gebraik le maken , alzoo dezelve, door zoogezegde verbeteringen in
île spelling, blijkbaar ganscli is bedorven. Wat den tekst van het perkament betreft,
o|i enkele varianten na konn hij met den onzen overeen.
— 155 —
9. Dat hy met ons don vogel selve afsclïoot,
10. Met ilen Cruysboghc , alsoo t is gebleken bloot.
1 1 . Waervan dat men hielt fraey Coiiinckx feeste ;
12. My dede aile costen , minste ende meeste,
13. T'weïck dnen in ailes raaer vier en twintigh Peeters en was ,
14. Ende doen besette den ouden B-ighe op dat pas
15. Vier en twintigh Peeters erffelyck tôt meniorien
10. Op t Markgraefschap van Antwerpen om synder victorien ,
17. Alsoo langhe als 't schaepken gras soude eten ,
18. Daer wy brieven af bebben in onse seereten.
19. Ende noch eencn Cop beeft hy ons gegeven,
20. Daer Hertogh Jan slont op gesehreven.
21 . Als snlcken persoon dat gedaen beeft in elekx aenscbouwen ,
22. Laet ons dan den edelen Boghe in eeren houwen ,
23. Ende oock vastelyck in Christum betronwcn ,
24. Onsen naesten doende als ons selve mede ,
25. Soo leefdy Goetwillige in eeuwigen vrede.
26. Om de weldaet die vvy van hertocb Jan bebben ontfacm ;
27. Soo beb ickt gedaen ter liefden des Cruysbooghs verheven.
28. Op dat syn memorie nimmermeer soude vergaen ,
29. Ende dat se by de goetwillighe scbutters altyt sou leven.
Doen ter tyt en dede elcken gouwen Lovensen Peeter maer
xviij st. Anno Domini 1629.
Zie daar het geheele processtuk. Als dichterlijk gewrocht
behoort het zeker niet onder de bloemen van den vlaamschen
Helicon; maar hoe gebrekkig ook, het is zeer duidelijk, en zelfs
zoodanig, dat het ons verwondert , dat cenigen der beroepen
schrijvers reeds bij den aanvang over de twee eerste versjes bebben
kunnen strunkelen.
Baron Reiffenberg , bij voorbeeld , zag in het in 1422 le
Leuven opgestelde Lantjouweel niets minder dan de aloude
Universiteit dier stad , en Mgr. De Ham meende het Lantjouweel
te moeten houden voor eenen eertitel , door hertog Jan aan het
— 156 -
leuvenschc Kruisbooggild geschonken , als ware lietzelve h et gild
Iiij nilmunlendheid van hetgansche land gevvccst.Meer nog, Zijne
Hoogw. beweerde, dat van de twee koppen of bekers, van welke
in lict dichtje gesproken wordt, de Onde Voelboog van Antwerpen
er slechts ééri kreeg, de andere , benevens de rente op het Mark-
graafschap, zou den Kruisboog van Leuven voor zijn deel ontvangen
hebben.
Deze lezing, welke gansch verscheelt van degene door al de
antwerpsche geschiedschrijvers gevolgd1, is door Mr P.-C. Van
der Meersch zonder eenige bemerking aangenomen. Onderzoeken
wij ecns of zij eenigen grond bcefl; maar eerst zullen wij een
woord zeggen over de beleekenis van Lanljouweel.
Degene welke Reiffenberg er aan geheeht heeft, laat zich
glad wechcijveren door het feit,dat de Universiteit van Leuven eerst
in 142G vverd opgericht , weshalve de Aima Mater hier niet kan in
aanmerking komen. Een Landjuweel was anderzijdsgeen titel, maar
wel de hoogste prijs bij een referijn- of schietspel opgehangen. Over-
drachlelijk verstond men er ook de spelen zelve door, zooals onder
andere kan blijken uit het koninklijk octrooi voor het beroemd
rederijkersfeest van 15(31 , in helwelk gesproken wordt van « de
• snpplicatie der Violieren .... inhoudende hoe dat naevolgende
» die ordonnantie, costumen ende oude hercomen,van allen ouden
> tijden. . . geobserveert is in 'l opstellen van eenige Rcthorijcke
> spelen , divelch men noempt het Landtjuweel, enz. 2 »
Deze terechtwijzing zal wel voldoende zijn, om ons van verdere
nitweidingen over dit eerste punt te verschoonen ; en wat aangaat
1 Zie Papebrociiius , Annales , I, 313; MarsHALL, Bibliothèque des Antiquités
bdgiques , 1 , 122; MERTENS en TORFS, Gescliieileuis van Antwerpen, 11, 414;
Gens , Histoire. d'Anvers , p. 237. Indien Diehcxsens , in zijn Anlverpia , en
Le Poitevin de la Croix, in zijne Histoire d'Anvers, van het Koningsfeest van 1422
niet gewagen , dit is omdat het ondervverp des eerste zulks niet medebracht , en dat
de andere liet burgondische tijdperk met reuzenschreden is doorgestapt.
1 J.-F. WlLLEMS , Belgixch Muséum, 1, 161.
- 157 -
hel tweede, namelijk den zin van den iiihoiid van het geheele dichl-
stuk , Mgr. De Ram moet hel onbewust zijn gewéest, dat helzelve
op hel archief van Anlwerpen bestond , in een oud codex, uit
hetwelk het door den stadssekretaris Valckenisse aan pater
Papebrochius werd medegedeeld , die het in zijne Annales heeft
opgenonien. Mr Van der Meerscii schijnt deze bijzonderheid
even min bekend te zijn geweest, schoon het Ie deel der Annales
Anlverpienses over ruim twintig jareri in het licht verschenen en
op aile openbare bibliotheken voorhanden is 1. Het is nu maar
te weten , welke van de beide teksten voor den oorspronkelijke is
te achten. De vergelijking van hel schrift zou deze vraag misschien
laten ophelderen ; maar wij hcbben noch het perkament, noch het
codex gezien. Bij gémis daarvan moeten wij het ding nemen gelijk
het daar ligt. Nu , als wij er al de overtollige uitweidingen af-
schiften , dan krijgen wij een geraamte, aan hetwelk geen beentje,
geen vezeltje leuvensch te zien is. Men leze slechts met aandacht,
en men zal bcvinden , dat ailes aaneen hangt en slechts een gild
belreft, dat van den Ouden Voetboog van Anlwerpen.
En trouwens, wat leeren wij uit het rijmwerk van den naam-
loozen dichter?
Na den tijd en de plaals van hel Landjuweel aangeduid te
hebben (v. 4-2), berichl hij ons, dat Jan IV bij helzelve den vogel
afschoot, en dat hij den daarbij gewonnen kop aan den Kruisboog
van Anlwerpen vereerde (v. 3-6). Waarom aan ons gild en niel
aan een ander ? Omdat de herlog onze gildebroeders de eere deed
met hen te schieten ; hij was onder hun gezelschap (v. 7-10).
Daarom hield men Koningsfeest op 's hertogs kosten (v. 11-13) ;
1 Toen wij het Ie deel onzer Nieuwe Gescliiedenis van Antwerpen sclireven, ontbrak
ons tijd en plaats tôt een onderzoek van de hier besproken kwestie, en wij vergenoegden
ons te zeggen (bl. 95) : Jan IV, in 1422, « op een Landjuweel te Leuven , door het
» afschieten van den oppergaei eenen gulden kop of drinkbeker gewonnen bebbende,
» gaf denzelven ten geschenke aan onzen Ouden Voetboog. » Wij lieten daarniedc de
zaak in haar gehcel, zonder de eene of andeie lezing goed of af te keuren.
- 158 —
daarom stelde hij ecne rente in op het Markgraafschap van Ant-
vverpen, en niet op het hertogdom van Braband (v. 14-18). En
aan wie schonk hij den anderen kop ? — Aan ons) dat is aan
degenen die de vorige weldaden hadden genoten , aan de gilde-
broeders van den anlwerpschen Kruisboog (v. 19-20). Deze
laatslen worden overigens zeer klaarlijk aangeduid door hunnen
bekenden eerlitel van Goedwittigen (v. 25 en 29).
Aldus is het geheele dichtsluk , van het begin toi het cinde ,
ecne herinnering voor den Ouden Voetboog van Antvverpen. Edoch,
en voor zooveel wij welen , schijnt het leuvensche gild nooit op den
eerlitel van het onze te hebben aanspraak gemaakl. Te vergeefs
zochten wij er naar in de stukken door Mr Van Even aan
Mgr. De Ram uit het archief van Leuven bezorgd en door den
prelaat bij zijn opstel gevoegd. De groote gilde van den ouden
Kruisboog, heet in die beseheeden « de Zestige , Erfschullcn
• des broedersehaps der Zeven Weeden van 0. L. Vrouwe •, en
liet zijn deze Zestigen,\velke (in 1423 en niet in 1422) ter begeerte
van Jan IV werden ingesteld en van de stad Leuven (niet van deo
hertog) hunne ordonnance of règlement ontvingcn. Zij vonnden ,
wel is waar, het puik der leuvensche gilden, doch waren daarom
geen Landjuweel !.
Maar wij zullen nog verder gaan en wij beweren , dat de leu-
vensche Kruisboog, nevens eene kopij van hetportret, ook slechls
eene kopij van het dichtstuk bezat , en dat dit laatste oorspron-
kelijk le Antvverpen te huis behoorde. Zie hier, hoe wij ons
verklaren , dat ecn en ander zich op de gildekamer van Leuven
hebbe kunnen bevinden.
1 Bulletins de la Commission royale, d'histoire, 3c seïie, t. I, pp. 299-300. Hetlcu-
vensche gild liad zîjnen oorsprong genomen uit een broedersrhap van 0. L. V. van de
Zeven Weeën, helwcik aanvankelijk zijnen zetel had in de S. Calharinakapelle , op het
Kalhelijneveld. Het yaf zich in den jure 1 332 zijn eigen règlement, en was reeds in
1343 aïs sladsgild erkend geworden.
— 159 —
I Jet afbeeldsel van Jan IV voor een kopijstuk erkend zijnde,
nioct cr crgens een orîgîneel hebben bestaan. In de xve en xvie
ceuw was bel meermaals het gehruik , in de onderste lijst cens
tafereels eenig opschrift te plaalsen ; dit gebeurde bijzonder bij
kunslstukken voor genoolschappen vervaardigd. Uit den aanhef van
het dichtsluk blijkt, dat helzelve voor een porlret des hertogs van
Braband gemaakt werd. Overlezen wij nog eens de twee eerste
regels van dit opstel :
Alsmen duysent vierhondert en twee en tvvintigh telde
Dees Prins het Lantjouweel tôt Loven opstelde,
Dees Prins: — Welke prins? — Natuurlijk Jan IV, sone van
hertoch Antonius , zooals het verder luidt. Stonden de rijmen
tôt herinnering aan het Koningsfeest van 14-22 in de onderste lijst
van het tafereel geschilderd of waren zij op een peikament
geschreven? Dit doet er weinig aan; maar zeker behoorden zij lot
des hertogs portret, en wij laten ons voorstaan , dat toen de Leu-
venaars eene kopij van helzelve kregen, zij ook het dichtsluk
deden afschrijven , en alzoo zou er eene kopij op den rug van eene
andere kopij gekomen zijn.
Dit ailes samentrekkende, zal men het niet zeer vermetel vinden ,
indien wij er grond in zoeken tôt het vermoeden, dat het oor-
spronkelijk portret van hertog Jan IV zich op de kamer van onzen
Ouden Voetboog hebbe bevonden. Deze kamer behoorde onder die
huizen gestaan in de Gildenstraat, achter het Stadhuis, in 1576,
tijdens de spaansche Furie , afbrandden , bij welke ramp het
hertogelijk afbeeldsel met meer andere kunslschatten ligt kan ver-
loren zijn gegaan.
Thans hebben wij te onderzoeken , wanneer onze Oude Voetboog
de beide bekers kan gekregen hebben. Volgens het dichtsluk ge-
beurde dit in 1422; maar op welken tijd van dit jaar? Om deze
vraag op te lossen , wendden wij ons toi M'1 Alex. Pinchart ,
— 160 -
a fdcel i ngs-o verste bij 's Hijks archief te Brussel, die de goedheid
liail, ons'uit de algemeene rekening van Braband over gemeld jaar
liet volgende extract te zenden , waardoor wij in staat werden
gesteld, om bertog Jan gedurende zes weken op zijn heen- en weêr-
reizen voet voor voet te volgen.
A0 1422 op 13 Julij was de bcrtog te Leuven;
Van den fa lot dcn 19n te Wercbter ;
Den 19n dito te Rolselaer;
Den 20n en den 21n te Leuven;
Den 20" te Lier en te Anlwerpen ' ;
Den 23>i dito te Put te;
Van den 23n tôt den 25n te Bergen-op-Zoom ;
Den 20» van Putte naar Leuven terug ;
Den 27n dito te Haecht;
Van 28 Julij tôt 7n Augustij te Leuven ;
Den 7n Augustij te Tongerloo en te Turnhout ;
Den 19n en 2011 te Baerle en te Breda;
Van den 21» tôt 22" Augustij staat cr niets;
Van den 23n tôt den 30» was bel hof te Turnhout ;
Den 30n dito te Ilerenthals ;
Den 31n dito te Leuven, waar bet bleef.
Om deze bladzijde uit het huisboek van Jan IV niet te laten
verloren gaan , bebben wij ze gebeel afgescbreven; want al ver-
spreidt zij geen licbt ovcr ons boofdonderwerp , zij laat daaroni
niet onder andere opzichten belangrijk te zijn.
Opmerkelijk is vooreerst de snelbcid van eenige tocbten. Het
bertogclijk hof, betwclk, volgens de toenmalige gewoonle, te paard
reisde , moet nog al ferm doorgedraafd bebben , om in eenen dag
van Putte naar Leuven te komen 2 : die hofstoet, die in wilde vaart
' lu gezelschap van de hertogin , vrouwe Jacoba van Beijeren , en de heeren van
Nassau , van Diest en van Rolselaer.
' Blijkbaar wordt donr dit Putlc het nederlandsch-belgisch grcnsdorp bedoeld.
— 161 —
Je heidevlakte overvliegt, is een tafereel hetwelk wij onze schilders
van paarden en ruilers ter studie aanbevelen.
Maar voor een feest te Antwerpen , hetwelk natumiijk eenig
oponthoud zou veroorzaakt hebben , vinden wij in dit itinerarium
geene plaats; de bertog den 2211 Julij uit Lier in onze slad aan-
gekomen , was desanderendaags recds vveder wech. Aan eenen
anderen kant zeggen de bescheeden, door MrVAN Even opgelczen,
niets over hel Lan djuweel van 1422, waarbij het Koningsfeest
zou hebben plaats gehad ; maar de omstandigheid , dat de hertog,
na den 31" Auguslij te Leuven te zijn wedergekeerd, er zeer lang
verbleef en dat de leuvensche kermis met Seplember invalt, laat
veronderstellen , dat de schietspelen toen werkelijk plaats hadden,
en dat het dezelfde zijn, uit welke onze kruisboogschutlers met
den opperprijs terug kwamen.
Er heerscht overigens niet weinig verwarring in al wal nopens
de handelingen van Jan IV met onze schulgilden is aangeboekt.
Om er te laten over oordeelen , schrijven wij letterlijk af een
• Extract injt seker bescheet bevonden onder de pampieren ten
complaire van M. Lenaert Van den Poel, Canderen tyden
secretaris der Heerlyckheijt van Brecht, toecomende zyne
gen den Grave van Hoochstraeten ende onder andere be-
vonden dit naervolgende :
Op Ste Baven dach , anno xmie ende tweelf, hebben de
dekens en de oudermans van de guide van den Cruysboge
binnen Antwerpen , Hertoch Jan van Drabant in heuren Boecs *
Hoff genoeydt ten eelen met syn gesinne. De spyse die was: een
Hespe, een stuk Runtvlees, een Schaepen Sehouderc, eenen
Hamelen Boudt, eenen Bruynen Iludt spott 2 met prnymen ,
boter ende caes met een geroockte Tonge ende Frnyt , ende
gedroncken achlentwintich gelten "' Rinschen Wyn , ende heeft
i finngsltof? — 5 Hutspot. — ' Dp gelle Iii^ld twee potten.
— 162
• tvorsc. gekost ende by de Dekens in Rekcninge gebrocht oegen
• Carolus guidon. •
• Onder stont : colla ta concordat.
» Geteekend : Coeckmans. •
Toelsen wij nu dû Extract aan de geschiedenis , om ons te ver-
gewissen , wat bet collata concordat van den scribent Coeckmans
kan vvaard zijn , dan bevinden wij , dal Jan IV eerst in 1-415 herlog
van Braband werd en dat de Garolusguldens in zijnen tijd nog
niet geslagen waren. Wal het jaar- en dagdatum aangaat, beideti
lalen zich even min overeenbrengen met een vroeger bezoek des
jongen hertogs; edoch , helzelve wordt door den kanonik Snyders
gesteld omirent Ilaif-Vaslen 1-413 (14-1-4 n. s.) llij was toen
vergezeld van zijn vader en zijn broeder, en aile drie namen deel
aan het fecslmaal door de gildebroeders 1er gelegenheid der gaai-
schieting aangerichl '. Knoop dit nu ailes aaneen; wij, wij zien
er geen wech meê. Het eenigste wat echt schijnt, is het menu
van den disch, en dit bewoog ons de ganschc brok op le nemcn 9*.
Onverminderd mcergemelden beker, zou hertog Jan aan onzen
Ouden Voetboog ook vereerd hebben eenen gaai van louter goud ,
hangende aan ecne kelting van hetzelfde metaal. Dit sieraad,
hetwelk bij de zoogenaamde Koningsfeesten van liel gild door den
hoofdnian werd aan den hais gedragen , zou in 1794 den smell-
kroes hebben mogen ontsnappen en lhans nog hier of daar
bewaard wonlen 5. Wat de bekers betreft, dezelve zijn sinds lang
1 l'.M'Eunnc.iiirs , Annules Antverpienses ,1.1, p. 273 , ad A0 1413.
- Het stuk werd ons medegedeeld door Mr I'. Génard, stadsarchivist van Antwerpen.
' De steller van een arlikel : Réjouissances publiques à Anvers, voorkomende in de
Bibliothèque des Anlii/ belij., 1 , 122 , vvilde dit zoo weten , doch gaf er geen bewij-
zeii van. In i 85 i , bij de lentoonstelling van oude kunststukken tôt herdenking van de
vierde vei'ceuwing van S. Lucasgild , zou liet eene gelegenheid geweest zijn, om het
juweel uit te pakken, en men zager werkelijkeenehalsketting [Catalogue, p. 4-1, n°G09);
maar het zou die geweest zijn, welke de burgemeester Nik. Hockox , als lioofdman
dur Kolveniers, liad gedragen en in 1620 aan IU'iif.ns ten geschenke gegeven.
— 163 —
zoek geraakt. Beiden waren koslbare stukken van de onde drijf-
kunst. De vorirnaamste , de prijsbeker van hertog Jan, was van
verguld zilver, en is waarschijnlijk in 157(3 bij de algemeene
plundering van de stad met anderen huit verdwenen.
Desniettemin bleef men het Koningsfeest van herlog Jan
jaarlijks herdenken door een gastmaal genaamd de Vrije Brom ,
lerwijl buiten, boven de ingangspoort, een vergulde ijzeren sleutel
van vijfde hait' voet lengte werd uitgehangen. Deze sleutel zict men
afgebeeld , of liever liïj vormt het ruggestuk van eenen troon-
zelel , voorkomende op zekere schilderij van het Muséum van
Anlwcrpen , van welke wij nu ook iels willen zeggen, als met al het
voorgaande, naar men meent, betrekking hebbende.
Dit kunslstuk, onder n° 9G van den catalogus van 4857 voor-
komende, en aldaar (bladz. 88-90) door Mr den ridder Léo de
Burbure zeer nauwkeurig beschreven , verbeeldt een schutlersfeest
uit de XVe eeuw. Het is een lafereel vol leven en beweging, doch
zeer naïef van samenstelling, en zonder genoegzame kennis van
de regels der doorzichlkunde vervaardigd. De zinnebeelden van de
S. Joris- en de S. Sebasliaangilde geven le kennen , dat de
Kruis- en de Handboog aan het feest deel nemen. De gildekoning
zit in den Iroonzetel en een dienaar biedt hem in eenen beker te
drinken. Het tooneel is een bergachlig landschap , iets wat het
leuvensche en niet het anlwerpsche grondgebied kenmerkt. Mr de
Burbure deed ons dan ook opmerken , dat de plaals zich zeer goed
laat erkennen , als men onze schilderij vergelijkt bij de teekening
van den ouden burg van Leuven *.
1 Van Evkn , Louvain monumental, p. 117. Zie ook Schayes, Analectes, Annales
de l'Académie d'archéologie de Belgique , XI, 35. Zie hier eenigen der samentroflin-
gen door M1', dk Buiibuur in de schilderij van het antwerpsch Muséum en de teekening
van Mr. Van Even hcstatigl Links op de schilderij (u° 4 der teekening) ziet men des
hertogs wijnpei's ; in liet midden van ons tafereel (n° 1 der teekening) het kasteel
van Leuven , van hclwelk ellelijke gedeelten , zooals de inkompocrt enz. zich lalen
herkennen , alhoewel het gehouw in den aanvang der xvip eeuw grcrotelijks i> gewijzigd
— 164 -
Met beroemde Koningsfeest van 1-422 zou dierhalve in den tuin
van het herlogelijk kasteel van Leuven hebben plaats gehad , en
vvel in den herfst , uilwijzcns de met fruit beladen boomen. Dit
een en ander versterkt het daar straks geuile vermoeden nopens het
tijdslip van het feest , lerwijl etlelijke deloils der scliilderij zich
ook beter laten verklaren. Degildekoning, bij voorbeeld, zou nie-
mand anders zijn dan hertog Jan IV, en de sleutel op den rug
van den zetel afgebeeld , eene herinnering aan de S. Pcetersmannen
van Leuven. De beruchle beker is niefvergeten , en zou die zijn,
in welken men den hertog te drinken schenkt.
Volgens de getuigenis van Papebrochius bevond deze scliilderij
zich te zijnen lijde op de kamer van den Ouden Voelboog, en men
las onder dezelve een opschrift , luidens hetwelk zij door zokeren
Pieter de Gammerele was geschonken. Het stuk, in olieverw
gepenseeld zou éditer, maar eene kopij wezen ; immers, naar
sommiger meening zou het oorspronkelijk tafereel , even als des
hertogs portret, ten lijde van Jan IV zijn geschilderd , en de
vijf-en-twintig eerste verzen van het dichlstuk zouden oudtijds
tôt dit tafereel behoord hebben.
Wij gelooven gaarne, dat de woorden Dees Prias, enz., zich
zoowel op het portret als op het tafereel laten toepassen , zoodra
men aanneemt, dat de gildekoning werkelijk Jan IV voorstelt.
Maar al achten wij ons onbevoegd, om tusschen het origineel en
de kopij van een tafereel te beslissen , het zal ons geoorlofd
zijn te vragen , wat het wapen \d\\ Philips den Schoone, het-
welk in het hier besproken kunststuk prijkt , daar mag herinneren?
1s het werkelijk een kopijstuk , dan kan dit wapen, zoowel als het
jaarlal 1 493, niet veel meer beduiden dan de bepaling van bel
tijdslip der vervaardiging van deze kopij. Dan, dit is niet ailes.
geweest; rechts van liet lafereel (n° "2 der Leekening), de oude kommanderij van Chantrain ;
eindelijk in de verte, zijnde liet hoogste gedeelte der scliilderij (u" o der teekening) ,
di'ii verslerkten toren of zoogenaamden Verloren Kosl der onde omheining van Leuven.
165
Het opschrift door Papebrocijius bewaard, geeft duidelijk te
kennen, dat de gever in het daar zooeven gemelde jaar overleden
was. Laten wij het hier invoegen.
Dit. tafereel. gaf. Pieter. de. Gammerele.
Hier. ter. deser. stede.
Godt. verleent. syn. se!e.
Den. eeuwighe. vrede. IVl.CCCG.XCIlï.
Dus was de gever der schilderij n° 90 in 1493 dood en
begraven , en aangezien wij op het gebied der veronderstellingen
zijn , moet niets ons beletten te vragen , of die gever ook niet de
maker van het stuk zou wezen? De Liggere, het is waar, bevat
geenen Peter de Gammerele *; maar dit résister van S. Lucas-
gild klimt ook niet hooger dan het jaar 1453 , en vermils de on-
volmaekte uitvoering van de schilderij , volgens de kunstkenners ,
naar een vroeger tijdperk dan dat van Philips den Schoone
verwijst, dunkt het ons, dat wij zulke vraag niet zonder grond
hebben kunnen doen 2.
Wat er van zij, het tafereel n. 96 van ons Muséum moge even
als het portret van Jan IV een kopijstuk wezen ; het dichtje
mag aanvankelijk tôt het een of toi het ander behoord hebben , de
1 Deze naam , naar zijn uiterlijk aanzien , schijnt een Waal of Fransehman aan te
duiden ; maar wij zouden er veeleer een Duitscher in zien. Het fransche vnorzetsel de
werd in dien tijd hij de eigennamen allijd overgezet door van en dierhalve is de ons
vlaamsrhe lidwoord. De naam ziet dus op het bedrijf, de geaartheid of de afkomst des
persoons. Nu geeft Weiland geen enkel nederduitsrh woord op , dat met gam begint ,
en bij Kiliaen vindt men slechts het verouderde Gammandercruyt (fr. Germandrèe)
tegenwoordig iugekrompen tôt Manderkruid. Dit voldeed ons niet, en terwijl wij naar
eenen naamzochten, die ons misschien de plaats van 's mans herkomst zou laten raden,
kwamen wij op het saksïsr.he dorp Gamme neder. Als wij het dan reeht voor hebben ,
dan zou Gammerele (lees Gammeriel , want het moet rijmen met ziel) zooveel betee-
kenen als Gammenaer, Gammering en dan is Peter stellig een Duitscher.
2 Zie hier hoe Mr. de Burbure zich daarover in zijn verslag uitdrukt : « Je pense.... que
» l'original de ce panneau, qui accuse une imperfection artistique des plus caractérisées,
» surtout en fait de perspective , ne peut avoir été fait qu'à l'époque même où la fête des
» archers venait d'avoir eu lieu , et dans le but d'en perpétuer le souvenir à Anvers et à
» Louvain. »
— 166 —
hoofdzaak bij cleze verhandeling is, dat dit laatste geheel moet
worden uitgelegd , als zijnde voor den Ouden Voetboog van
Antwerpen gemaakt, al lieeft liet Koningsfeest dan ook te Leuven
plaats gehad.
— En de Vrije Brom , wat was dat ?
Te recht, wij hadden ons schier piichtig gemaakt aan liet ver-
zuim , hetwelk men onze geschiedschrijvers opzichtens dit feest
kan te laste lesriren. Over het alsemeen waren onze oude assen
geene opmerkers van hetgeen rondom hen omging. Gansch ver-
slonden in de studie der latijnsche en grieksche oudheid, of
verdiept in de uitpluizing van bestoven charters en diplomen ,
schenen zij het beneden huune waardigheid te achten, zich met
alledaagsche volksfeesten op te houden , en lieten dit graag over
aan de almanakmakers , tooncelschrijvers en verzenwevers. Het is
inderdaad in dezer schriften , alsook in degene van de geestelijken
handelende over godsdienst- en zedeplichten, dat men de spôren van
menige onzer volkszeden en de wortels van zeer gemeene spreek-
wijzen kan vinden.
Trouvvens, de anders zoo rijke woordenschat van Kiliaen heeft
ons in dezen niet kunnen helpen. Wel vindt men da'ar Brom,
spuma (schuim), in den eigenlijken zin van ditwoord, doch
hetwelk , als men vrije brom voor vrije sehuim wilde opvatten ,
niets zon beteekenen *. Ook bij de latere woordenboekmakers
vonden wij geen licht en stonden wij sinds lang vruchteloos op
den uitkijk, als wij in eens bij Willem Ogiep, te recht kwamen,
in de vyfde uyt-komst van het tooneelstuk de Hooveerdigheut.
Joosken, de knecht van jonker Fhanciscus, schetst daar aan
Beyken2, een der slachtoflers van zijns meesters vvulpschhcid,
' Aan de toepassing van het overdrachtelykt volksschuim , lie du peuple , fex
popuh , zal hier wel niemaml denken, foi,
Beyken, Bayhen, Bayen , Barbara. Ziê Willems Lyst van nederlandsche
amen in liet Belgisch Muséum , V, 395.
— 167 —
de, sclirale keuken van dezen laalste met de volgende woorden :
Ioosken.
Tôt syn schand ? dats niet , myn Meester draeght geen schaemt schoenen ,
Hy draeght leersen , en thuys sloffen van pompoenen,
Daer 't binnenstis uyt gehaelt, en voor ons beyd' gekockt.
In kleir vvater , met Amonitie-broot gebrockt.
Beyken.
Dats lackeren brom.
Ioosken.
Ja hadden wy t' slechts aile daghen ,
De Saus van aile spys syn goey geteerde maghen '.
Of wij bedriegen ons grootelijks , of vvij hebben hier het echte
woord vast , en brom zou zooveel beteekenen aïs dooreengemeng-
den kost, spijs , enz.
Vrije kost , dat laat zich in allen gevalle beter verstaan dan
vrije schuim. Men denke hier bij aan de rente in 1-422 op het
Markgraafschap gehijpothekeerd , tôt bekostiging van den jaarlijk-
schen maaltijd.
Hoe het zij , drie eeuwen later werd het Koningsfeest van
herlog Jan bij den Antwerpenaar nog herdacht, zooals kan blijken
uit de volgende nalezing uit een der bundels van hetstadsarchief, ons
door Mr P. Génard medegedeeld :
• Anno 1722 den 10 october hebben de Liefhebbers van den
Cruysbogh van den ouden Voetbogh seer solemnelyck ende op 't
prachtigste geviert het Dry honderd jaerigh jubilé van de memorie
van Hertogh Jan. Saterdaghs den 10 october, ten half ure elf,
naer het geluy der groote clocke , wiert aen den Autaer van den
ouden Voetbogh (in de hoofdkerk) door den Capellaen der selve
guide, Joannes Petrus Renders, gesonghen eene seer solemnele
Misse met een extraordinaris schoon Musiecke , in de welcke te-
genwoordig waeren den Edelen Heere Gansacker , buyten Borge-
1 W. Ogikii , De seven Hoofdsoiiden , uitg. van 1682. De Hooveerdigheyt, bl. 3i.
— 168 —
meesler , den Edelen Heere Knyf, binnen Borgemeesler , den
Edelen Heere Van Hove , out Borgemeester , met Myn Heer
Van Kessel , pensionnons , onde aile de Liefhebbers van den
Cruysbogh met hunne linysvrouwen ende ontallycke menighte van
menschen. Den Autaer van den ouden Voetbogh was op het alder-
costelyckste ende opt alderschoonste verciert. Boven den Autaer
stont dit jaerschrift :
MUnïfICo DUGI JoannI JUsta pIetas.
Voor de Misse , onder bel gbeklanck van trompetten ende
timbaelen , oock onder de Elevatie van de Heylighe Hostie ende
naer de Misse wierden veele groote viercamers afgesclioten.
eX aMore Joannïs DUCIs sGrIpsIt Joannes baptIsta
pIetersens. »
— En zoo was het uit zonder vrijen brom?
Apparentelijk was het zoo uit , immers Pietersens rept er niet
van even min als van de reden waarom Jan's nasredachtenis met
zulke liefde gevierd werd. Misschien oordeelde de vrome man
dit onnoodig , als zijnde een en ander zoo goed bekend als de
jaarlijksche begankenis naar Sint-Job, op den Dam.
Thans scheidt eene ruimte van anderhalve eeuw ons van dit
feest , en op dezen afstand komt het oude gildewezen ons voor als
een verslcten en uitterende lichaam, hetwclk de veele groote vier-
camers wel voor een oogenblik konden galvaniseeren, maar geene
niouwe levenssappen ingieten. Edoch , de instelling was van haren
eersten oorsprong reeds te verre afgeweken, dan dat lappen of
zalven nog zouden hebben kunnen helpen. Geheel ontzenuwd door
eene macht van vrijbrieven , geraaklen de antwerpsche schutgilden
allengs ondor de hand der zoogenaamde Smeerdekens, vervolgens
onder den voet der Republiek, die lien met al de andere geprivi-
ligièerde corporatiën vorpletterde (1794).
L'ÉGLISE DE NOTRE-DAME
A TONGRES.
MEMOIRE
par M. Ch.-M.-T.- THYS,
MEMBRE CORRESPONDANT A TONfiRF.à
L'église de Tongres, dont les légendes , les chroniques et les
traditions attestent l'antiquité, n'a pas, à notre connaissance, été
jusqu'à présent l'objet d'une relation historique complète ayant
pour but de rappeler son origine et de faire connaître toutes les
phases qu'elle a traversées avant de devenir ce qu'elle est , c'est-à-
dire un des plus remarquables monuments de la Belgique.
A la vérité , quelques-unes de ses parties ont déjà été décrites;
en 1851 notamment plusieurs des principaux documents qui la
concernent ont été mis au jour , mais ces éléments épars n'ont
jamais été réunis et coordonnés , de manière à en faire découler le
récit des événements qui ont présidé à l'érection , à l'agrandisse-
ment et à la conservation de ce premier sanctuaire cisalpin.
C'est pour tâcher de combler cette lacune que nous présentons
aujourd'hui ce faible essai, résultat de recherches consciencieuses.
Commissaires rapporteurs MM. Le Grand de Reulandt et F. Durlet.
XXIX XXII H
V. 1677
— 1794
VI. 1794
— 1846
VII. 1846
— 1866
— 170 —
DIVISION.
I. 58 av. J.-C. —314 ap. J.-C, Conquête des Gaules par les Romains. —Éta-
blissement du christianisme. — Fondation
de l'église par saint Materne.
II. 314 — 799, Saint Servais. —Invasion des Huns.— Des-
truction de l'église.
III. 799 — 1240, Ogier-le-Danois. — Première reconstruction de
l'église. — Établissement du chapitre. —
Ruine de l'église.
IV. 1240 — 1677, Seconde reconstruction de l'église. — Destruc-
tion de la tour.
Grand incendie. — Première restauration.
Abolition du culte. — Concordat.
Seconde restauration.
APPENDICE.
A. Description du trésor et des ornements sacerdotaux :
1° Le trésor ,
2° Les ornements sacerdotaux :
i Les chapes,
il Les chasubles,
m Les anlipendia , vêla, etc.
B. Inscriptions des pierres tumulaires.
C. Catalogue de l'ameublement :
1° de l'église ,
2° de la chapelle claustrale ,
3° du cloître ,
4° des sacristies.
D. Catalogue des archives.
E. Inscriptions des cloches.
F. Tableau des membres du chapitre en 1796.
G. Liste des prévôts du chapitre.
II. Liste des doyens du chapitre.
I. Liste des plébans et des curés.
INTÉRIEUR DE LA COLLÉGIALE DE TONGRES .
■ 'logiedeBelgLCfue.tXXIl, Zp Série t II
,
— 171 —
INTRODUCTION.
L'église de Tongres , qu'elle ait été fondée sous la forme modeste
d'un oratoire ou d'une chapelle, remonte par son origine au berceau
du christianisme dans la Gaule-Belgique. Nos ancêtres, plus heureux
que tant d'autres peuples , ont été des premiers à recevoir la civi-
lisation chrétienne.
Deux ordres de faits ont amené cette situation.
La Gaule, conquise par César , fut divisée en provinces. La
Belgique, qui en était la .troisième, avait pour bornes l'Océan, le
Rhin , la Seine et la Marne. La guerre ayant dévasté cette province,
Auguste la repeupla par des tribus germaniques (31 av. J.-C.)1,
qui , après avoir passé le Rhin , prirent le nom de Tongres 2 et
bâtirent une ville autour de la forteresse romaine. Au témoignage
des écrivains contemporains , cette ville prospéra tellement qu'elle
devint bientôt très-florissante 5.
Agrippa , gendre de l'empereur, en fit le centre de trois grandes
voies militaires , la première venant de Bavay , la seconde allant
à Cologne et la troisième à Nimègue.
Dans cette avantageuse situation topographique la cité de Tongres,
admise aux droits des municipes et formant une étape stratégique
1 Qui primi Rhenum transgressi Gallos expulerint , uc nunc Tungri , tune
Germain vocati sint. Tacite , de Germania , cap. 2.
Pnocopius, de Dello golhico , lib. I, cap. 12.
WalckeiNaeu , Géographie ancienne , historique et comparée des Gaules , tome II ,
p. 284.
D'Anville, Notice de l'ancienne Gaule , p. 7.
1 Alualuca Thoringorum ou Tongrorum.
5 Tite-Live , Tacite , Pline le naturaliste , Ammien Marcellin , Procope.
Les vestiges de l'ancienne enceinte subsistent encore de nos jours.
Sous la domination romaine , VAtuatuca Tungrorum comprenait dans son gouver-
nement le pays de Liège , une partie du Luxembourg , le pays de Juliers, le Limbourg ,
Namur, la majeure partie du Brabant et la province d'Anvers. Le gouverneur militaire
de la province résidait à Lowaige où se trouvent encore quelques ruines d'une forte-
resse romaine.
— 172 —
entre Rome et le Rhin , était souvent foulée par les armées ; elle
se trouvait ainsi en contact avec la capitale de l'Empire , à laquelle
elle fournit des défenseurs f.
La Tongrie était soumise aux lois romaines quand surgit , au
milieu du monde payen , le christianisme qui devait le régénérer
et donner à l'humanité opprimée la liberté et l'égalité.
Rome traitait les peuples vaincus et incorporés dans son vaste
empire - en barbares et en esclaves ; aussi reçurent-ils avec em-
pressement l'évangile de Jésus-Christ , à l'abri duquel ils vé-
curent libres et détruisirent le colosse qui les avait subjugués.
Le christianisme apparut sous une forme simple et cependant
avec cette puissance irrésistible que Dieu a imprimée à toutes ses
institutions. La ruine du paganisme et du despotisme romain était
dans les desseins de la Providence et rien ne put l'arrêter.
Le Sauveur avait dit à ses disciples : « Allez et instruisez tous
les peuples » , et ses disciples, fidèles à leur divine mission, se
partagèrent les contrées pour la prédication de l'Évangile.
Saint Pierre et saint Paul prêchent à Rome même ; de là, le prince
des apôtres envoie ses missionnaires en Sicile , en Italie , dans
les Gaules et sur les côtes d'Afrique.
Pour la Gaule-Belgique , il choisit Euchère lequel , avec deux
jeunes lévites, Valère et Materne, se rendit à Trêves, ville déjà
très considérable du temps de César 3.
C'est de Trêves que la lumière de la foi se répandit sur les cités
de Cologne et de Tongres ; c'est à saint Materne que ces deux
' Annales de l'Académie , tome I , 3" liv. Journal de iinst. publique, fome I,
]i. 72 , et le recueil de Guuter.
* Cet empire le plus puissant qui ait jamais existé , comprenait cent vingt millions
d'habitants ; ses bornes étaient le Rhin et le Danube au nord , le Tibre et l'Eupbrate à
l'est , les déserts de l'Afrique au midi et le grand Océan à l'ouest.
3 L'empereur en fit la métropole de la Belgique, sous le nom A' A ugusta Trevirorum ;
elle devint la résidence du préfet du prétoire , et plus tard celle de plusieurs
empereurs.
— 173 —
villes durent leur conversion et la fondation du christianisme
dans leur sein l. Au pied du castellum d'Atuatuca , Materne bâtit
une église qu'il dédia à la Mère du Sauveur. Ce fut la première
qui reçut cette dédicace en deçà des Alpes.
Les événements et les circonstances qui ont précédé , accompagné
ou suivi l'établissement de cette église , forment la division natu-
relle de son histoire. En effet, après la conquête de la Gaule-
Belgique et l'anéantissement des Atuatiques et des Éburons, la
tradition montrera une tribu germaine passant le Rhin et prenant
le nom de Tungri qu'elle donne plus tard à la ville bâtie autour
du castellum; puis saint Materne, l'apôtre de la Tongrie, plantant
au pied de ce fort le signe de la rédemption et y érigeant , en
l'honneur de Marie , le sanctuaire que saint Servais reconstruisit
sous une forme plus vaste au IVe siècle; ensuite l'invasion des
hordes barbares détruisant, au Ve siècle, la ville et le temple que
le comte Oger , dit le Danois , releva de ses ruines et que le
pape Léon III consacra solennellement le 9 mai 80-4 , en pré-
sence de l'empereur Charlemagne et de sa cour.
Après le démembrement du vaste empire , les chroniques et les
archives raconteront l'invasion des Normands (881), la translation
du siège épiscopal à Liège par le pape Pascal II (1112) , la
vengeance de Gérard comte de Looz (1180) et la perfidie de
Henri I", duc de Brabant (1213).
Les mêmes documents diront les désastres qu'éprouva pendant
trois siècles la tour, successivement détruite , reconstruite, res-
taurée, cédée à la ville et incendiée en 1677 par le général
Calvo.
' En même temps d'autres apôtres évangélisèrent la Gaule romaine. Ce furent
SS. Sixte, Sinice et Menge. Ils fondirent l'église de Reims.
Saint Paul dans son épitre aux Romains , cliap. Ier , v. 8 , dit : Je rends grâces
d'abord à mon Dieu pour vous tous par Jésus-Christ , de ce que votre foi est annoncée
dans le monde entier.
— 174 —
Enfin , on verra le chapitre reprendre possession de la tour ,
rivaliser de zèle avec le magistrat pour en réparer les malheurs,
lorsqu'arriva la suppression du culte , l'anéantissement des corps
ecclésiastiques et la confiscation des biens par la force révolu-
tionnaire.
Depuis le concordat de 1801 , peu d'événements se présentent
jusqu'en 18-4G , époque à laquelle a commencé la restauration
en cours d'exécution.
I.
Conquête des Gaules par les Romains.
Etablissement du christianisme. — Fondation de ïéglise par
saint Materne ; an 58 avant J.-C. — 3J4 après J.-C.
Après avoir vaincu les Teutons et les Cimbres , l'armée romaine
envahit les Gaules (58 ans avant Jésus-Christ).
Les Alualiques, qui habitaient la contrée arrosée par le Jaer et
la Meuse, étaient entrés dans la ligue des Gaulois contre les
Romains. César tourna ses armes contre eux, les vainquit et les
réduisit en esclavage. Les Éburons , établis sur les bords de la
Meuse et de l'Ourthe, curent le même sort. On connaît les glorieux
malheurs de ce peuple qui , trop lier pour accepter le joug et trop
faible pour vaincre , périt tout entier sous les coups de l'envahis-
seur, après avoir tenu longtemps en échec les aigles romaines '.
Une tribu germanique vint habiter les terres rendues désertes
par l'anéanlissement de ces deux peuples. Cette tribu , après
avoir passé le Rhin , prit le nom de Tungri a ; le territoire
où elle se fixa fut compris dans la Belgique. Auguste avait établi
1 CÉSAR , de Jictt. Gall.
'■ Tacite, de Germania , cap. -2 , liv. 5 , u" 43.
dans les Gaules des divisions territoriales conformes à son système
politique et aux besoins de son vaste empire.
Ce système avait pour but de faire de la ville de Rome la patrie
de tous les peuples ; aussi les Romains introduisirent-ils chez les
nations vaincues, leur langage et leurs institutions : celles-ci sur-
vécurent à leur puissance *.
Rome avait la prétention d'imposer sa civilisation au monde connu;
mais il se faisait en même temps , dans la société , une autre
transformation : une civilisation meilleure s'élaborait mystérieuse-
ment sous la corruption des mœurs payennes.
Dans un petit coin de la Judée , naquit l'enfant divin qui venait
régénérer et sauver le monde. Cette naissance devait séparer
l'antiquité d'une ère nouvelle, envoyer un simple pêcheur pour
occuper le capitole et enseigner aux nations l'Évangile de la paix
et de la liberté.
Le commencement du christianisme dans les Gaules suivit de
de près la conquête de ce pays par les Romains. La ville de Trêves,
métropole de la Belgique , conserva sa prépondérance ; Cologne et
Tongres devinrent les cités de la seconde Germanie. Tongres ,
alors connue sous le nom A'Atuatuca Tungrorum, était déjà
très-remarquable par son étendue territoriale: une grande route
romaine la reliait à Cologne et à Bavay , la capitale des Nerviens 2.
La Tongrie comprenait tout le comté de Namur , les deux tiers
du Brabant , la partie orientale du Hainaut , le Luxembourg jus-
qu'à la Semoy 3 et tout le pays de Liège.
Pendant que la nouvelle cité romaine se développait, le prince
des apôtres envoyait ses disciples dans les diverses parties du
• Pline, Hist. nul., lib. 3, cap. 5. St. Augustin , de civilate dei, lib. XIX.
* Ammien Marcellin , historien du IVe siècle , cap. 15.
Aubert Le Mire , tome hr , page 635.
5 Behj rom., lib. 20, cap. 5. Plus tard Tongres prit le nom tfAugusla Tungrorum,
puis celui à'Octavia Tungrorum.
— 176 —
monde. Il choisit pour prêcher la foi du Christ dans les Gaules,
Euchèrc , Valère et Materne , le premier comme évêque , le second
comme diacre et le troisième comme sous-diacre.
Tous les trois traversent les Alpes , cheminent vers la cité de
Trêves et arrivent à Eli en Alsace ! où Materne , le plus jeune
d'entre eux , tombe malade et succombe. Accablés de tristesse ,
Euchèrc et Valère retournent à Rome et annoncent à saint Pierre
le malheur qui vient de les frapper. « Allez, leur dit le prince
» des apôtres , retournez à l'endroit où vous avez enseveli
» Materne , placez sur son corps ce bâton pastoral et le mort
> revivra 2. •
Les deux disciples, pleins de confiance et de foi, reviennent au
tombeau le quarantième jour après celui de la sépulture, exé-
cutent ce que le maître leur avait dit, et aussitôt Materne est rendu
à la vie 3.
Les trois missionnaires reprennent leur itinéraire et arrivent à
Trêves; ils y annoncent la parole divine, convertissent beaucoup
' Quelques auteurs disent que ce fait se passa sur les bords de l'Elli ou 111» ,
d'autres à Illkircli. V. Acta Sanctorum. Sept. IV , p. 382. D'autres encore appellent
cet endroit Igelenheim , v. Pertz , t. X , page 1 10.
* V. IUniGERUS apud Chapea ville , tom. I, cap. 6.
Ce miracle a été retracé en quatre tableaux peints par le paysagiste J.-I3. Juppin ,
de Namur, et dus à la générosité du prévôt Jean-René de Neufcourt qui les fit placer
dans le chœur de l'église actuelle, en 1722. La date du don se trouve inscrite sur
'e fronton des tableaux , qui présentent l'iconologie résumée de la vie et de la mission
apostolique de S. Materne.
Le premier tableau représente les trois disciples recevant leur mission de S. Pierre.
Le deuxième tableau représente la sépulture de Materne et ses compagnons le rappelant
à la vie par l'attouchement du bâton pastoral. Le troisième montre Materne plantant
la croix dans la capitale de la Tongrie , où il fonda son église. Enfin le quatrième
tableau figure la mort du saint et la contestation entre les Tréviriens et les Colonais
pour la possession de son corps enseveli à Trêves.
3 Le pape Innocent 111 , dans un traité de liturgie , Lib. de Myslcr. , c. 62 , et
dans sa déorélale cum venisset, tit. de sacra une t. , rapporte que S. Materne fut
ressuscité par l'attouchement du bâton de St. Pierre « Pcr baculum S. Pétri de
morte fuerat suscitaltts. » Voir aussi Daroniis , Mabillon, Pagi, Alexandre, Noël,
J.-E. D'arras, etc.
— 177 —
d'infidèles et fondent l'église qu'Enchère et après lui Valère gou-
vernent avec autant de zèle que de succès. A Valère succède
Materne que son ardeur pour la régénération des peuples conduit
à Cologne et dans la Tongrie où il répand abondamment la semence
de la foi.
Doué des plus belles vertus chrétiennes , rien ne résiste à son
zèle et à sa persuasion. A sa voix , les idoles disparaissent et les
temples payens sont convertis en églises.
Les Tongrois le reçoivent comme leur premier pasteur et
élèvent , au pied du caslellum , une chapelle que Materne dédia à
la Vierge Marie.
Celte dédicace, la première en deçà des Alpes dont le souvenir
est conservé précieusement dans les archives de l'église de Ton-
gres et consacré par une légende pieuse, remonte à l'origine
du christianisme. Nos pères s'en sont montrés, à tous les âges,
si fiers qu'on la trouve rappelée dans tous les monuments qui de
près ou de loin se rattachent à l'Eglise 2.
Saint Materne, troisième évèque de Trêves , a donc été le fonda-
teur et le premier évêque de Tongres *.
Des écrivains lui ont contesté la gloire de celte fondation,
d'autres le suppriment avec ses huit successeurs des dyptiques de
l'église de Tongres. Le cadre restreint de ce travail ne nous permet
pas d'entrer dans de longs développements sur ce sujet. Cependant
les traditions, les légendes et d'autres monuments historiques
semblent attester que déjà au premier siècle de notre ère la reli-
gion chrétienne avait pénétré dans la Gaule.
En 321 , un édit de l'empereur autorisa des libéralités en
faveur des églises chrétiennes. Un autre, donné l'an 324, ordonna
4 Prima cis Alpes B. M. V. consecrata , miraculis clara invoeatur,
2 St. Materne est représenté portant une église à trois tours pour symboliser son
apostolat, exercé simultanément dans les cités de Trêves, de Cologne et de Tongres.
— 178 —
que chaque cilé aurait son évèque propre l. En 325, les évèques,
au nombre de trois cent dix-huit, accourent de toutes les parties
de l'univers pour affirmer contre Àrius la divinité du Verbe.
Pour que la situation religieuse fut arrivée à cet état dès le
commencement du quatrième siècle , ne doit-on pas admettre la
fondation antérieure de nombreuses congrégations chrétiennes,
car à la fin de cette époque , de l'aveu même d'un historien
célèbre 2, la hiérarchie ecclésiastique et le gouvernement catholique,
interposé entre les maîtres du monde et les peuples, se trouvaient
déjà constitués.
Les Belges s'étaient d'ailleurs distingués de bonne heure par
la vivacité de leur foi ; ils avaient arrosé de leur sang les racines
de l'arbre sacré dont la sève devait être si féconde ; ils avaient
compris le rôle qui leur était réservé dans l'Empire romain , à la
veille de devenir l'Empire chrétien.
La conclusion naturelle est donc que la cité de Tongres a dû
recevoir la parole divine en même temps que Trêves et Cologne.
Récuser des traditions aussi bien étayées, aussi invariablement
conservées, parce que durant cette période de malheurs et d'igno-
rance l'histoire ne les a pas enregistrées, ce serait s'exposer à
mettre à néant les traditions les plus constantes.
Toutes les institutions ont leur généalogie obscurcie par les
mêmes causes. Rome, fondée par une poignée de brigands qui se
donnent des lois et entourent d'une enceinte leur nouvelle demeure ,
donna le jour à un peuple de héros et devint la reine du monde;
cependant elle ne trouva des historiens que plus de cinq siècles
après 3.
■ Loi première, C. de sacro sanelis ecclesiis, lib. I, Ht. "2.
Una quoique civitas episcopum proprium habet. 0. C. de episcopis et clericis ,
lib. I , fit. 3, 1. 30.
* GuiZOT, Histoire de la civilisation en Europe, 2c et 5e leçons.
5 Ce ne fut qu'après la première guerre punique que Fabius Pictor , Cineius et
Caton le censeur, écrivirent ses Annales.
— 179 —
L'histoire romaine ne dit mot de la mort du Sauveur ; cependant
Tibère, ayant reçu de Pilate les actes du procès du fils de Marie,
proposa de placer Jésus-Christ au nombre des dieux f.
« Qu'on ne me demande pas , disait déjà le chroniqueur
Harigère au dixième siècle, qu'on ne me demande pas en quel
âge ni sous le règne de quels empereurs ou consuls les
successeurs de saint Materne ont paru dans l'Eglise , ce qu'ils ont
fait durant leur vie, pendant combien d'années chacun d'eux
fut évèque : les invasions des Huns dans la Gaule ont à jamais
effacé le souvenir de tous ces saints hommes . 2»
Après S. Materne , l'église de Tongres compte huit évêques
jusqu'à S. Servais, ce sont : S. Navite, S. Marcel, S. Métropole,
S. Séverin, S. Florent, S. Martin, S. Maximin et S. Valentin.
La plupart d'entre eux reçurent la palme du martyre en luttant
contre l'idolâtrie et le despotisme 3.
L'histoire marque à grands traits les haines , les persécutions
contre lesquelles ces athlètes de la foi devaient soutenir leur
doctrine et défendre l'humanité.
La congrégation apostolique avançait cependant vers le but que
bientôt elle devait atteindre en dépit des proscriptions et des
massacres : les verlus des chrétiens faisaient haïr ceux qui les
pratiquaient, parce qu'elles étaient un reproche pour les vices
opposés.
La religion, qui devait conquérir le monde , était dénoncée comme
subversive de tous les principes sociaux. Mais l'heure de la déca-
dence avait sonné pour celte fière Rome qui longtemps fit trembler
tous les peuples.
Sous le règne de Trajan , des essaims de barbares, dont l'origine
' Eusèbe De Coes , historien du troisième siècle , chr. Anno Doni. 38.
4 Hamgerus, apud Chapeaville , tom. I , p. 23.
* FOULLON , 1,12.
— 180 —
est à peine connue , paraissent sur les frontières de l'Italie et
troublent l'Empire déjà vivement agité par des dissensions intestines.
C'est avec peine que Rome défend son immense territoire , surtout
vers le Rhin et le Danube aux bords desquels se pressent les peu-
ples du nord cherchant un climat plus doux et des terres plus
fertiles !.
Jusque là les légions avaient pu défendre le sol romain et
refouler les nations barbares qui le menaçaient; mais des assauts
plus terribles se préparaient à l'époque où saint Servais fut désigné
miraculeusement pour occuper le siège épiscopal de ïongres.
Après la mort de saint Valentin , le siège était resté vacant pen-
dant sept années entières. La crosse pastorale, déposée sur l'autel,
attendait qu'une main dévouée et courageuse ressaisit cet insigne
d'une dignité qui , dans ces temps malheureux , ne servait guère
qu'à désigner aux bourreaux les plus nobles victimes.
Enfin le peuple de Tongres s'étant réuni , selon l'usage , pour
élire un successeur à Valentin , il apparut au milieu de la foule
un jeune homme qui attira tous les regards. Celui-ci alla droit à
Servais , le conduisit à l'autel , lui remit le bâton pastoral et
disparut. 2.
Aussitôt Servais fut proclamé d'une voix unanime. Le nouvel
évèque justifia ce choix en gouvernant son peuple avec vigilance
et charité. Il prit possession du siège sous le règne de Constantin,
surnommé le Grand. Avec cet empereur, la religion était montée
sur le trône. Le christianisme, qui déjà avait trouvé protection
dans les principes de tolérance professés par Constance Chlore 5,
fut délivré dansles Gaules, plus tôt que dans le reste de l'Empire,
des persécutions qui avaient été au nombre de dix depuis Néron ,
jusques et y compris Dioctétien. Ces persécutions tout en ayant fait
' Scriîverils , Historiœ Augustœ sciiplores sex, p. 93'J.
1 Gilles d'Oiwal apud Ciiai'Eaville.
3 Le sage payen n'eslimail la religion des hommes que par leurs mœurs.
— 181 —
répandre des flots de sang' chrétien n'avaient eu d'autre résultat
que de raffermir la foi du Christ. Le sang des martyrs fut la
semence du christianisme qui se développa et se répandit dans
l'univers. Constantin protégea la religion et le clergé. Déjà un
édit de l'an 321 , avait autorisé les libéralités en faveur des églises '.
Celle de Tongres eut bientôt des possessions particulières , qui
s'accrurent successivement jusqu'à former le territoire d'un État
considérable. 2.
C'est sous l'empereur Constantin que les diocèses furent orga-
nisés : les métropoles des provinces devinrent les métropoles ecclé-
siastiques. Trêves conserva ce rang- vis-à-vis des cités de Cologne
et de Tongres ; elle devint même la résidence du préfet des Gaules
lorsque l'Empire fut divisé en quatre grandes préfectures. 3.
II.
Saint Servais. — Invasion des Huns. — ■ Destruction de l'église.
314-799.
L'organisation que nous venons d'indiquer était en vigueur à
l'avènement de saint Servais, dont le courage était à la hauteur de
sa mission. Malgré les troubles qui agitaient le pays, il développa
l'œuvre de saint Materne4 et bâtit, au milieu des ruines du castellum,
une église dont les vestiges furent retrouvés au XIIIe siècle •".
1 Loi 1 . C. de sacro sanctis ecclesiis, lit. 2.
'■ Louvrex, dissertation historique.
3 Lib. 36 , c. de episcopis et clericis, lib. I, lit. 4.
* Henschenius , Exeges. de cpisc. Tung. et Traject., cap, 5. Bollandus , Acla
Sanct., tome 3, fol. 2I0 et seq. Sirmond , Conc. GalL, tome I. Fleury , Histoire
ecclés. , tome XIV , p. 580. Aub. Mir^eus , Fasti Belgici , p. 251.
5 V. Reg. liber gratiarum ab anno 1407, n° 7 , du catal. , p. 195.
Jussus ab oclavia transire sepultus in isla
Praesul basilica , modo capsa clandor et ara.
Dealus Servatius.
Inscription qui entoure la figure du saint sur la grande châsse dite nood-kist , à
Maestriclit.
— 182 —
Les invasions des barbares ', qui vinrent inonder les Gaules sous
les successeurs de Constantin , forcèrent Servais à quitter sa ville
épiscopale et à transférer sa résidence à Maestricht, Trajectum
ad Mosam. En approchant de ce pont fortifié, le saint évêque fut
saisi d'un accès de fièvre et mourut le 13 mai 384 2. Son corps
fui enterré à côté de la route publique, ' à l'endroit où fut bâtie
plus tard l'église qui porte son nom *,
Rien de plus complet et de mieux rempli que la vie de
saint Servais. 11 moralisait et instruisait son peuple, conciliait ou
jugeait les différends et combattait en même temps avec ardeur
les hérésies et le paganisme. Il assista au concile d'Arles (314),
à celui de Sardique (347), au synode de Cologne (349) et au
concile de Rimini (359) , où il prit un grande part à la défense de
la foi catholique contre l'arianisme5.
• Eu 388 , les Francs-Saiiens , après une soumission apparente à l'Empire , firent
une nouvelle irruption dans la seconde Germanie et saccagèrent Tongres. AmmiëN
Marcellin , Grégoire de Tours.
s Grégoire de Tours, Histoire des Francs, lib. 2. cap. 5. (d. Gloire des
confesseurs, cap. 72.
V. Hubert Thomas , apud Schard , Rerum Germanicorum , tom. 1 , f° 337.
Placentius , Catalogus antist. Tung., f° G2.
G. Bucelinus , Catalogus episc. Tungr. in Germ, sacr. , pars 1 , f° 28.
Magnum Chronicum Belgicum, apud Piiessinger, corp.jur. publ., tome 1, f° 1702.
3 Voir l'opuscule de M. Eugène Gens, imprimé à Maestricht chez Bury-Lefebvre ,
année 1843 ; on y trouve la description des reliques conservées dans le trésor de
l'église de St. -Servais à Maestricht, ainsi que la copie de l'attestation écrite en 1039
et déposée dans le cercueil trouvé dans la crypte de l'église , par les évoques Nithanl
et Gérard. Nous appelons surtout l'attention sur les Nos 12 et 14 du catalogue sous les-
quels sont décrites les châsses renfermant les reliques des SS. Valentin , Martin ,
Monulphe et Gondulphe , évoques de Tongres ; il en consterait que la liste des
premiers évèques de Tongres est plus véridique que ne le pense M. Dufau, dont l'opinion
est ébranlée parles critiques modernes ; certes la grande crédulité fausse l'histoire,
mais le scepticisme conduit à un plus grand mal. Pour les époques obscures, les grands
faits semblent devoir nous guider.
* Ce fut saint Monulphe, 21e évêque de Tongres , qui au VIe siècle érigea une église
sur la tombe de saint Servais.
11 Au concile de Mayence , tenu sous le pape Léon IX , en 104'J , l'empereur
— 183 —
Il avait prédit l'invasion des barbares et la destruction de
Tongres. Cette prédiction fut accomplie lors de l'incursion des
Francs sur le territoire romain en 388 *, et surtout par l'invasion
d'Attila en 451 2.
Attila fut le premier , parmi les barbares , qui se fit un plan
d'envahissement ; il conduit au combat des troupes animées
d'un courage féroce ; toutes les nations sauvages soumises à son
destin marchent avec lui. Les rois des Gépides et des Ostrogoths
sont ses ministres; quant aux rois des nations obscures, ils se
perdent dans la foule des courtisans ; il n'a ni faste ni mollesse,
ni aucun de ces vices qui énervent l'âme et la flétrissent ; laborieux,
infatigable, il croit n'avoir rien fait pour sa gloire, disent ses
historiens, s'il lui reste une nation à subjuguer. Il reçoit dans sa
cabane les ambassadeurs de Théodose et de Valentinien , traitant
ces princes en sujets sans les avoir vaincus.
Ce barbare, à la tête de troupes innombrables, franchit le Rhin
et se précipite dans les Gaules 5. Le pays est dévasté et pillé ; la
terreur et l'effroi marchent devant lui. Il s'avance vers la Loire ;
Henri 111 , qui y assistait] avec une partie de sa cour , proposa l'approbation de la
légende de la vie et des faits de St. Servais , ce qui fut accordé.
Teiller, Histoire générale des auteurs sacrés, tome 23, p. 013.
Labbe et Cossart, Saerosancta concilia ad regium edilionem exacta, t. IV, p. 617.
Sirmond , Concilia antiqua Galliœ , t. 1 , p. 11.
• Ce fut entre ces deux époques, en 418, que la loi salique fut proclamée à
Tessenderloo, dans la Campine (Taxandrie limbourgeoise). C'est dans cette contrée que
Fharamond fut élu premier roi des Francs. Theudenier, fils de Ricomes , qui s'était
donné lui-même à Tongres le titre de roi des Francs , avait été pris et mis à mort
par les Romains.
* D'après Henschenius et Boucher , la ville de Tongres fut ruinée par les Huns
vers 385.
3 Déjà au commencement du IVe siècle , il n'y avait plus que 2400 Romains pour
occuper le Liltus Saxonicus , rivage de la mer qui s'étendait depuis l'Escaut jusqu'à la
Seine ; 600 hommes protégeaient la seconde Belgique et 500 seulement la première
Germanie.
Voir la Notice de Théodose et les Commentaires de Fanciroi.e dans le tome VII
des Antiquités de Gkevius.
— 18-1 —
lorsque les Romains et les Visigoths se réunirent par la crainte
que leur inspirait ce fléau des nations. Forcé de retourner sur ses
pas , il s'arrête dans les plaines catalauniques , appelées aujour-
d'hui les plaines de la Champagne.
À l'aspect des Romains , des Visigoths et de plusieurs autres
nations farouches dont les intérêts politiques sont les mêmes, Attila
prend la résolution de leur livrer bataille. Vaincu après un combat
opiniâtre et sanglant, il repasse tranquillement le Rhin et le
Danube pour aller, au-delà de ces fleuves , réparer ses pertes et
recruter une nouvelle armée.
Quelque temps après (452) , il pénètre en Italie et , quand on
le croit anéanti , il reparait plus redoutable que jamais. Tout est
saccagé sur son passage; Rome elle-même ne doit son salut qu'au
titre sacré que lui reconnaissent les étrangers et surtout aux
larmes du pape Léon , dont l'éloquence toucha le cœur de ce
formidable conquérant.
Il repasse ensuite dans les Gaules et se jette sur les contrées
Belgiques. Il marche jusque sous les murs de Tongres et s'empare
de cette belle et grande cité ! qui fut pillée , brûlée , dévastée et
depuis lors ne put se relever de ses ruines 2.
Thorismond, roi des Visigoths, secouru par des peuples belli-
queux en vient aux mains avec lui et le contraint d'aller chercher
une seconde fois au-delà du Rhin une retraite précipitée. Attila
meurt, les héritiers de ses vastes Etats se divisent, se livrent des
combats meurtriers et amènent promptement la chute de celte
effrayante puissance qui faisait trembler l'univers.
Après saint Servais les diptyques épiscopaux présentent un vide
de plus d'un siècle. L'antique cité de saint Materne était anéantie
et, de toutes les tribus qui habitaient le dictrict de Tongres, il ne
1 Tongres était à cette époque la cité , civitas , de la seconde Germanie.
* Voir Chai>e\vili.e, tome I, pages 47 et 378. Joknandes, De rébus golhicis ,
C. XXIV. km. Marcellin, lib. XIV, C. 5, lih. XXXI, G. 2.
- 185 —
restait plus qu'une chélive population , dispersée dans les forêts
avoisinantes. La garnison romaine s'était retirée dans le fort de
Lagium. Clovis prit ce fort en 482 et soumit par là le reste de la
seconde Germanie '.
Au concile d'Orléans, que ce roi convoqua en 511 , saint Rémi
métropolitain de Reims et les évèques de la Gaule déplorèrent
vivement la situation désastreuse de l'évêché de Tongres. Ils y en-
voyèrent comme évêque Agricolaiis dont la vie édifiante inspirait
la vénération 2.
Agricolaiis se rendit à Tongres ; n'y trouvant pas d'abri il
alla se fixer à Maastricht, et désormais les évèques de Tongres
continuèrent à résider dans celte ville protégée par de puissantes
fortifications.
Les successeurs d'Agricolaùs furent saints Ursicin , Désignât,
Résignât, Sulpice, Quirille, Euchère, Falco, Euchère et Domitien.
Plusieurs de ces prélats étaient fils de puissants leudes fixés dans
nos contrées. La dignité d'évêque était alors plus recherchée qu'au-
cune autre magistrature, qu'aucun autre pouvoir s.
A Domitien succéda en 558, comme 21e évêque de Tongres,
Monulphe, fils d'un leude du gau de Dinant. C'est à ce prélat
qu'est duc l'origine de la ville de Liège, qui plus tard jouera un si
grand rôle dans l'histoire de la patrie.
En l'an 578 , saint Monulphe sortit de sa résidence de
Maestricht pour aller visiter ses domaines de Dinant. Il arriva à
un endroit élevé d'où le regard s'étendait au loin ; vivement ému
devant les beautés silencieuses et sublimes de la nature, il s'écrie
tout à coup: « Voici la place choisie par le Seigneur pour le salut d'un
1 Voir Grégoire de Tours, Histoire des Francs , liv. II , chap. 27.
1 Bucherius, Delgium Roman., lib. XX , cap. 5 , retrace l'étendue de l'évêché de
Tongres tel qu'il avait été rétabli par saint Rémi.
1 Voir l'édit d'Atalaric , roi des Visigoths, dans le ie volume des Conciles de Dom
Bouquet , Recueil des historiens de France , préface du tome II.
XXIX XXII 12
— 186 —
grand nombre de fidèles, c'est ici que s'élèvera un jour une ville
riche et puissante , qui égalera les cités les plus influentes de la
Gaule ! »
En prononçant ces mots , il descendit dans la vallée et guidé
par la pensée du ciel il fonda , non loin de la Legia, un oratoire
qu'il dédia à SS. Cùme et Damien.
Depuis saint Monulphc jusqu'à saint Lambert, huit évoques se
sont succédés sur le siège de Tongres. Ce furent saint Gondulphe qui
songea sérieusement à relever Tongres de ses ruines ', saint Ebre-
giste, saint Jean dit l'Agneau, saint Amand , saint Remacle et
saint Théodart.
De ces prélats, SS. Amand et Remacle furent les plus célèbres
parleurs œuvres. Le premier exerça avec éclat à Gand et à Tournay
l'apostolat dont le roi Dagobert l'avait fait investir ; il fonda la
célèbre abbaye connue sous son nom et sous celui d'Elnoy ou
d'Elnone.
Le second, nommé évoque sur les instances du roi Sigcbert,
fut le fondateur de l'abbaye de Slavelot.
Vers G5G arriva à l'épiscopat un jeune homme appelé Lambert
ou Lant-bert, fils d'Aper comte de Wintershoven. Guidé par une
profonde piété il s'appliqua à propager la foi parmi ses ouailles ;
la Taxandrie, province qui reçut au XIIe siècle le nom de Campine,
fut surtout le théâtre de ses travaux apostoliques.
Lambert, en vrai serviteur de Dieu, attaqua couragement le vice
partout où il le rencontrait. Pépin de Herstal avait répudié sa femme
légitime Plectrude, pour s'attacher à la belle Alpaïde . -
L'évêque en fit des remontrances sévères au maire du palais
et le pria avec instance de rompre ces liens illicites. La Hère et
1 Egidius apud Chapeaville , tome 1 , p. 60. — Bouille , Histoire de Liège ,
tome I , p. 42. — Placentius , Calalogus anlist. Tungr., p. 51. — Fisen , Hist.
eccl. Leod., tome 1 , p. 82. — Archives de N.-D , MS. N° IX , f° CCXXIV.
* Chapeaville, tome I , p. 307. — ECKHART , De rébus Francise, orientait* ,
vol. I, p. 288, GODESCHALCUS, Ad. SS. vol. VI.
— 187 —
orgueilleuse Alpaïde jura d'en tirer vengeance : elle engagea son
frère Dodon, comte d'Avroy, à venger l'affront qu'elle avait reçue
et la mort de ses deux neveux, Gall et Riold, tués par les serviteurs
de l'évêque.
Dodon, à la tète de quelques-uns de ses tributaires, se rendit à
Liège et massacra pendant la nuit le courageux évêque de Tongres
(17 septembre 696) ».
Saint Lambert passe pour avoir le premier reçu les immunités de
son église du roi Clovis II et de Childéric , dont les chartes de
656 ont été confirmées par Ollion II en 981 2 et en 1206 par
l'empereur Henri II.
A saint Lambert succéda Hubert, aussi distingué par ses qualités
que par sa naissance ; il arriva à l'épiscopat dans les conditions
les plus favorables.
Le sentiment religieux s'était emparé des grands ; les familles
les plus illustres se faisaient gloire de se consacrer au service
de Dieu et le souvenir de la vie sublime et de la mort glorieuse de
saint Lambert, avait rehaussé l'éclat du siège de Tongres.
Hubert, que les légendes disent fils de Bertrand duc d'Aquitaine,
vécut d'abord à la cour du roi de Neustrie. Obligé de la quitter
pour se soustraire à la tyrannie d'Ebroïn , il se retira en Austrasie
auprès de Pépin de Herstal, son parent, et épousa Floribane fille
du comte de Louvain. Devenu veuf, il se plaça sous la discipline
de saint Lambert dont les leçons et les exemples le formèrent bien-
tôt au sacerdoce. Dans un voyage que Hubert fit à Rome, le pape
Sergius, informé du massacre de Lambert, le nomma évèque
1 Les restes du glorieux martyr furent transportés à Maestricht dans une barque qui
aborda au faubourg de St.-Pierre où le corps fut enseveli dans une chapelle élevée en
expiation du forfait. Cette chapelle , qui avait échappé au vandalisme , a été déplacée
depuis quelques années , par suite de la construction du canal latéral de la Meuse.
L'histoire du saint martyr a été écrite par l'évêque Francon , par les chanoines
Godescalc et Nicolas. Tous ces historiens rendent le plus éclatant hommage à ce noble
athlète de la foi et de la morale.
* Voir l'évêque Etienne et le chanoine Nicolas , cap. 45.
— 188 —
de l'église de Tongres, dignité que lui confirma Pépin de Héritai.
L'humble village de Liège s'était développé par degrés et trans-
formé en ville. L'évoque y bâtit une église au service de laquelle
il attacha vingt chanoines.
Investi par Charles Martel du gouvernement de la cité, Hubert
entoura Liège de murs , y publia des règlements de police et donna
des lois. Il fixa les poids et les mesures et, d'après l'historien
Louvrex, il établit un tribunal composé de quatorze membres
auxquels il donna un chef, appelé depuis grand maïeur.
On admet généralement que ce saint évoque transféra la rési-
dence épiscopale de Maeslricht à Liège, le 28 avril 709. L'illus-
tre prélat mourut à Tervueren le- 3 novembre 727, après
trente années d'épiscopat.
La résidence de nos évêques à Maeslricht et à Liège n'avait
cependant en rien altéré les droits de la cité de Tongres au siège
épiscopal ; d'ailleurs elle n'avait eu d'autre cause que la destruction
de cette antique cité et le défaut complet de protection au milieu
des ruines d'Atuatuca.
L'évèché de Tongres resta indépendant jusqu'en 74-5; le pape
Zacharie le fit alors passer sous la dépendance de la métropole de
Cologne et en 751. sous celle de la métropole de Mayence '.
III.
Ogier-le-Danois. — Première reconstruction de l'église. — Etablissement
du chapitre. — Ruine de l'église (799-1240).
Vers la fin du Ville siècle , surgit un homme de cœur que les
périls des combats et les malheurs avaient éprouvé. Il est connu
i Serrarius, Epist. S. Bonifacii, p. 191». Sirmond, Conc. uni. Cuil. I. 1, p. 558
il 581. LUMG, Spicileg. écries, t. 1, p. 5G1 et forzets I, p. 3. Lecointe , Ann.
e.-icl. franc, t. V. pp. 154 et 201. Labbk et CosSART, Concilia, t. VI, col. 1527 et
îr.ôT. Hartzheim , Conc. germ. t. I. p. 61, etc.
— 189 —
dans l'histoire sous le num d'Oger, d'Ogier ou d'Olger, surnom-
mé le Danois f. Ce brave paladin , compagnon d'armes des
Roland, des Olivier, des Renaud, était originaire d'Auslrasie 2.
Il s'était d'abord déclaré pour les fils de Carloman et, afin d'évi-
ter le ressentiment de Charlemagne , il se relira auprès de Didier
roi des Lombards. Plus tard ce prince lui rendit sa faveur et lui
donna même le comté de Looz 5.
Mais dégoûté de la carrière des armes et de la vie du monde ,
Ogier se relira dans le monastère de St.-Faron, près de Meaux *,
où il mourut. Ce noble chevalier, poussé par cette piété qui distin-
guait la liante société d'alors, reconstruisit l'église de Tongres.
Cette reconstruction appartient à la fin du VIIIe ou aux premières
années du IXe siècle 5.
La nouvelle église fut consacrée par le pape Léon III le 9 mai
SOI dans les circonstances suivantes. Charlemagne avait fait
reconstruire l'église d'Aix-la-Chapelle, lorsque Léon III, fuyant
Rome , vint réclamer le secours de l'empereur. Le Pape consacra
le dôme avec le concours de 300 évoques au nombre desquels se
trouvait Gerbald, évêque de Tongres. Celui-ci exposa au pontife que
l'antique église de saint Materne venait enfin d'être reconstruite
et le supplia de vouloir consacrer le nouveau temple. Léon III
se rendit à celte prière et vint avec toute la haute assistance
' Voir Monach. S. Gallens., lib. 111 , c. 26 , apud D. Bouquet.
1 La plus grande incertitude plane encore sur la vie de ce bienfaiteur de Tongres.
Quelques auteurs prétendent qu'Ogier était originaire du Danemark où son nom
llolger Dansvre était souvent cité dans les vieilles ballades populaires. D'autres sou-
tiennent qu'il naquit dans les Marches de l'Ardenne (Denne-MarcK). D'autres enfin,
comme Mantelius , Ilist. Loss. , p. 22 , en font nu comte de Looz. Ce qui est sans
conteste , c'est qu'Oger fut un des compagnons de Charlemagne et que son nom figure
avec honneur dans les romans français. Plusieurs églises (Tongres, Horion , etc.) le
revendiquent comme leur restaurateur. Voir Fisen , tome I, p. 110; Dyntery ,
Chronicon , lib. II , cap. XL1I , pp. 195 , 197 , 20i , etc.
' Voir Mantelius, Hist. Loss., fs 19 et 20.
* De Marne, Hist. du comté de Namur, Dissertations , p. 50.
* Chapeaville , Fisen et Pertz indiquent l'année 799.
— 190 —
présente à Aix-la-Chapelle consacrer l'église de Tongres 'i.
Ogier attacha à l'église vingt canonicats qu'il dota largement.
Ce fut l'origine du chapitre auquel l'évoque Richaire accorda
en 931 la dignité abbatiale qui , peu de temps après , fut
convertie en prévôté 2. On croit qu'une partie du beau cloître
roman encore debout et presque intact appartient à l'époque de
la reconstruction de l'église par le comte Ogier 3.
Cette construction a été plus vaste que celle que nous voyons
aujourd'hui. Destinée d'abord à abriter vingt chanoines, son enceinte
a dû s'étendre bien au-delà des bornes actuelles constamment rétrécies
au profit de l'extension urbaine. Elle renfermait alors un dortoir,
un réfectoire , une chapelle, une trésorerie, une salle capitulaire,
un parloir, une bibliothèque , une boulangerie , des cloîtres , un
lavalorium , etc.
Prèsde là, se trouvait unemaison et capelleh l'usage de l'évèque,
qui souvent se rendait à Tongres pour juger les contestations entre
ses vassaux ou pour visiter l'établissement confié à ses soins 4.
' Celle mémorable cérémonie a élé consignée dans les archives par la légende :
Anno a nativitate Dui 801. Léo SS. papa consecravit ecc. Tung. Marie 9 mai) que
ulim destructa fuit per Hunnos quam reedificavit Dux Ogerus Danus et ordinavit in eâ
20 canonicos. Reg. 5 du Catalogue , f° 195. Fisen , tome 1 , 17li. Anselme apud
Chai'eaville , tome I. 151.
* Fisen , tome I , page 213.
3 Le nom de chanoine fut donné dans le IVe siècle aux cénobites qui vivaient en
commun sous une règle commune. En G66 , le concile de Mérida (Espagne) autorisa
dans les cathédrales cette institulion dont saint Chrodegang , évoque de Metz , publia la
règle en 763. Successivement et déjà sous Louis-le-Débonnaire , l'institution perdit
beaucoup de son caractère primitif, la possession de biens en propre et la vie séparée
débilitèrent la discipline au point que plusieurs conciles, surtout celui de Trente, session XXII
et XXIV , crurent devoir intervenir ; l'Assemblée constituante supprima les chanoines
et quoique le concordat et les lois organiques les aient rétablis , l'institution n'a plus le
prestige qu'il eut jadis.
' IlEMiucounT , patron de (a temporalité , apud PolAIN , Hist. de Liège , tome 11 ,
in fine. — UnusTiiEMius , Res geslœ episcoporum Leodiens. et ducum Brabantiœ ,
f° 164. — Balcze , Capilularia regum francorum , tome II, p. 125 et seq. —
BuncHARDUS , lib. I, cap. 87 et lib. 111, cap. 33. — Ivo, p. III, cap. 38, et
p. V, cap. 103, Struvius, lier. germ.. script., tome 3, p. 211.
— 191 —
Voici comment un archéologue distingué, enlevé trop tôt à sa
patrie et aux beaux-arts , décrit celte relique du moyen âge.
« Le cloître de Tongres, sans contredit un de nos monuments
du moyen âge les plus curieux et les plus élégants , consiste
en un préau ou cour en carré long, qu'entoure une galerie à
arcades plein-cintre , dont les archivoltes retombent sur des
colonnettes cylindriques, alternativement isolées et accouplées,
couronnées de chapiteaux d'un dessin aussi riche que varié, et
qui reposent sur un stylobate continu. Celte suite d'arcades est
plusieurs fois interrompue par des travées massives en blocs de
sable et par deux portes qui s'ouvrent sur le préau ; au fronton
de l'une d'elles se trouve un bas-relief en grès ferrugineux très
délerriorié qui nous semble représenter la Ste Vierge assise sur
une chaise curule et entourée de deux anges adorateurs. Dans la
galerie à droite , s'ouvre une porte formée de deux arcades gé-
minées et séparées par une colonnette de même style que les
autres , cette porte donne accès à l'ancien réfectoire , à la salle
capitulaire et à la chapelle du chapitre \ leur construction
paraît dater de la même époque que celle du cloître. La chapelle
contient un autel en pierre fort ancien et dont la table est divisée
en trois compartiments qui encadrent des figures nimbées. La
longueur totale du cloître est de 46 mètres et sa largeur de 20.
Les galeries sont larges de 3 mètres et ne sont point voûtées.
» Le cloître est pavé de pierres lumulaires 2. . »
La reconstruction du temple et l'établissement du chapitre eurent
pour résultat de ranimer la cité de Tongres qui se repeupla peu à peu.
Sous le sceptre vigoureux de Charlemagne, les mouvements
extérieurs avaient été combattus et refoulés ; la paix et la sécu-
* Par acte reçu par le notaire Lismont le 20 septembre 1811 , l'emplacement
sur lequel se trouve le palais de justice a été distrait du cloitre et cédé à la ville ,
moyennant cinquante francs de rente annuelle.
* Schayes , Histoire de Varchitcclure en Belgique , t. 1 , p. 347.
— 192
— 193 —
rilé étaient revenus dans les cœurs des Tongrois, trop souvent et
trop cruellement éprouvés.
Mais fatalement destinée aux épreuves, Tongres ne jouit pas
longtemps de cette trêve tant désirée. Les Normands, que le glaive
de Charlemagne avait pu arrêter, profitant de la faiblesse de ses
successeurs et surtout de leurs dissensions intestines ' , s'étaient
massés vers la Meuse dans le but de saisir la première occasion
favorable à une irruption.
En 881 , les Normands pillent et incendient la cité de Liège , le
fort de Maestricht cl la ville de Tongres2. Les barbares qui s'étaient
répandus dans le Haspingau, l'Ardenne et la Ripuarie , continuèrent
à dévaster nos provinces jusqu'en 891.
La victoire remportée par le roi Arnulf et l'évèque Francon
[uès deLouvain, le 1er septembre 891, chassa ces aventuriers du
pays, cl depuis lors ils ne reparurent plus sur les rives de la
Meuse.
Ces désastres étaient à peine réparés qu'un nouveau malheur
vint affliger la cité. Le comte Gérard de Looz , en guerre avec
l'évèque Raoul de Zeringen, surprit la ville le 31 août 1180 "* et
' Vers le milieu du IXe siècle PAustrasie ayant été comprise dans le royaume de
Lotliaire , le diocèse de Tongres lit aussi partie de ce royaume. Alors la loi lomaine
régissait encore l'Eglise, mais déjà le droit tendait à devenir réel ou territorial de per-
sonnel qu'il était.
* V. UtGiNo.Nis, Chronicon apud Pertz, Mon. Germ. hht., tom. 1, f° 59-2.
Hi.ncmaiu remensis annales, apud Pertz, tom. I, f ° 513.
Annal. Fuld. pars tertia apud Pertz, tom. 1, fs 394 et 101.
Qesla Trevirorum apud Pertz, tom. X, f° 106.
Chronicon Xormannorum apud Pertz, tom. 1, f° 534.
Gest. abb. Trud. cont. tertia. pars I apud Pertz, tom. XII, f° 375.
Chronicon Turonense apud Boio_uet, vol. IX. f° 46. Chronicon sithiense , apud
BOUQUET, tom. IX , f° 71.
Vita Sli Rumoldi auclore Tlieoderico abbate S. Trudonis-, ibid. f° 150.
Bollandus acla SS. vol. 1, januarii f° 529.
3 Gilles d'Orval, Fisen et Foullon placent l'arrivée de ces événements en 1 1 70.
Sirl'vil'S, tom. III, p. 211, Bouille et Mantelius en 1178.
Les Annales deFloreffe, apud Pertz , tom. XVI, f* 625 indiquent 1179.
Les Annales de Lambert le Petit (Pertz , tome XVI , f° 649) et ['Histoire des
Gestes des abbés de St.-Trond, Pertz, tome XII, fos 335 et 369 les placent en 1180.
— 194 —
la livra aux flammes. Le palais épiscopal cl une grande partie de
la ville furent réduits en cendres. Le feu se communiqua à l'église
et y causa de grands dégâts.
Pour expier ce forfait, Gérard fonda l'abbaye de Herkenrode et
partit pour la Terre-Sainte.
Avant de continuer à dérouler le triste tableau des luttes terribles
qui ensanglantèrent le pays, on nous permettra de dire quelques
mots sur l'organisation du collège des chanoines , car bientôt les
destinées de l'église se confondront avec celle du chapitre.
Cette corporation jouissait de la dime de tous les fruits croissants
et naissants dans la ville et sa banlieue, qui comprenait les villages
de Coninxheim , Henis, Pirange , Rixingen, Neerrepen , Mulken
et Olfelken '. Elle avait pour dignitaires un prévôt, choisi parmi
les tréfonciers de St. -Lambert, un doyen du chapitre, un écolàtre ,
un chantre et un officiai.
Le prévôt conférait , outre les prébendes dans le mois de
l'ordinaire, l'écolâtrie, la chantrerie, la plébanie, la cure
de Mail , le rectorat de Coninxheim et les deux marguilleries de
la collégiale. Le doyen du chapitre était visiteur perpétuel apos-
tolique de l'hospice de St. -Jacques et du béguinage de St0. -Catherine,
à Tongres.
Jusqu'à l'an 909, les membres du chapitre vécurent en com-
munauté ; à cette époque l'empereur Othon leur permit de se
partager les revenus de la collégiale et de vivre séparément
dans les maisons bâties autour de l'église dans un rayon de
50 pas au plus 2. Les chanoines de N.-D. ne lardèrent pas à
user de celte faveur et s'établirent dans la partie supérieure de
1 Le chapitre de Tongres jouissait encore de la dîme des fruits croissants sur le
territoire de Berg et d'Elderen (concession de 1197), d'Offelken (1281), de Iloclenge
(1221), de Xendremael, de Russon (1250), de Zammelen el de Nieuwkerke en Flandre.
1 Statulaccclcsiœ Tungrensis de l'an 1218; charte du 8 des calendes de mars 1108.
Ré(t. N° o du catalogue.
. il
CHAPITEAUX DU CLOÎTRE ROMAN
— 195 —
la rue de Maestricht qui a conservé la dénomination iVcncloitres '.
En 1006, l'empereur Henri II fit passer le territoire de l'évcché
de Tongres sous l'autorité immédiate de Liège. Celte concession
fut suivie d'une autre plus importante encore. Tous les évèques ,
jusqu'à Obert, furent institués comme évêques de Tongres , nonob-
stant leur résidence à Maestricht et à Liège 2.
Richaire prit le premier, au milieu du Xe siècle, la quali-
fication d'évèque de Liège (voir son testament du 10 novembre
932); Eracle en fit de môme dans une charte de 961. Ces ten-
tatives furent suivies par leurs successeurs. Cependant Théoduin ,
dans une charte de l'an 1070 , est appelé évèque de Tongres \
Obert, arrivé au siège en 1091, comprit qu'en présence de ces
hésitations et surtout au point de vue du droit canon , Liège ne
pouvait régulièrement s'attribuer le siège qui appartenait légiti-
mement à Tongres , malgré le diplôme impérial d'Olhon II (980)
et celui de Henri II (1006.)
Profitant du crédit que ses services lui avaient donné auprès de
l'empereur Henri V, il fit agir celui-ci et obtint du pape Pascal II
la bulle de l'an 1112, qui transféra le siège épiscopal de Tongres
à Liège 4. Cependant la soumission de Tongres à l'évèque de
1 Ces encloîtres jouissaient de l'immunité ecclésiastique.
5 Au concile d'Orléans, tenu l'an 549, saint Domilien, à celui de Douzy, tenu en 871 ,
Franco, signèrent évêques de Tongres. V.Labbe, Collection des conciles, p. 1445.
Lettre du pape Zacliarie de 751 . — Albert Le iMire, tome I , p. 641 .
3 D'après les statuts de 1248, le chapitre archidiaconal de Tongres était composé de
vingt chanoines; six devaient avoir la prêtrise, six devaient être diacres, six sous-
diacres et les deux autres pouvaient être tonsurés. Les diacres et les sous-diacres étaient
tenus d'obtenir dans l'année le grade théologique correspondant à la promotion , sous
peine de perdre les fruits de la prébende et de se voir remplacés.
Tout chanoine était obligé de céder à l'anniversaire canonical une rente de quatre
mesures de seigle rachelable moyennant dix florins d'or, et à la collégiale une chape ou
seize florins d'or.
Statuta Eccl. Tongrensis , cap. de ordine et numéro.
Anselme, p. 170. — Bertholet , Uist. du Luxembourg.
* Recherches et discussions historiques sur la principauté de Liège , par le baron
de Crassier, p. 55.
— 11)6 —
Liège n'était pas complète. Des tiraillements, souvent répétés,
amenèrent enfin le pape Innocent IV à exempter le chapitre de la
juridiction épiscopale et à le l'aire relever directement du Saint-
Siège '.
Ce privilège que justifiait l'origine de l'ancienne cathédrale-mère
plaça la collégiale dans une indépendance à peu près complète 2
et lui procura la dignité archidiaconale 3.
On comprendra facilement la position de' cette ville, constam-
ment ruinée, pillée, saccagée, brûlée et dépouillée par une rivale
prospère et puissante, en se rappelant que Liège, dont Monulphc
avait prédit la grandeur future , ne cessait d'étendre sa puissance,
giàce aux évoques qui étaient venus s'y fixer. Ce fut d'abord
saint Hubert généralement regardé comme le fondateur et le légis-
lateur de cette nouvelle cité; ce furent Francon et Etienne auxquels
le roi Charles-le-Gros , Arnoul de Lorraine , Zuentebold , Louis
de Lorraine et Charles-le-Simple firent d'immenses libéralités et
accordèrent le droit de battre monnaie ; ce furent Richaire et
Farabcrl qui obtinrent de nouvelles dotations des empereurs Othon,
pour défendre leur autorité contre des vassaux trop puissants ; ce
1 1251. Innocent tus Episcopus servusservorum dei dilecto filio Preposito , Decano
il Capilulo ccclesie Tongrensis , Dyocesis Leodiensis salutem et apostolicam bene-
dietionem .
Sacro Sancla Romana ecclesia devotos et humiles fil i os assuele pietalis officia
propensius diligerc consuevit. El ne pravorum hominitm molestiis ayitenlur, eos
tanquam p'a mater sue proleclionis numine confovere. Qua pmpter dilecti in
domino filij vestris postula tionibus grato concurrentes assensu , ecclesiam et personas
veslras cum omnibus bonis que in presenliarum ralionobiliter possidelis et in
futurum justis modis prestante Domino poteritis adipisci sub beali Pétri et noslra
protectione suscipimus et presenfis scripli palroeinio communimus Nuit ergo, clc.
Dalum Laleraid II nouas aprilis. — Pontificatus nostri anno uwlecimo. V. Statut.
Ecci. Tungrensis f° XXIV, N" 3 du catal.
1 Vindiciœ Decani cl capituli insig. Coll. ceci. Lt. M. Tung, publié en 1682.
1 En 799 le concile de Tongres comptait 98 paroisses ; après 1251, il en restait encore
71 ou 78 qui continuèrent à former le concile de Tongres, quoique la ville même n'en
lit plus partie; jusqu'en 1251, Tongres avait également fait partie de l'archidiaconat
de Heshave.
— 197 —
fut enfin Notger lequel , alliant à un grand génie la bravoure
militaire, reçut en 980 d'Othon II non seulement la confirmation
de toutes les libéralités antérieures, mais encore le domaine de
l'antique cité de Tongres.
Sous l'épiscopat de Baldéric, la principauté s'accrut en 1012
du comté de Looz et en 1015 du marquisat de Franchimont.
Nithard y réunit, en 1010, la dernière partie de la Hesbayc et le
comté de Haspingau ; Théoduin , prince de la maison de Bavière ,
acquit de la comtesse Richilde la seigneurie du comté de Hainaut
avec Beaumont et Valenciennes, et Henri de Verdun , reçut de la
comtesse Ermengardc la ville de Waremme. Liège, on le voit,
prospérait chaque jour davantage , tandis que Tongres ne se rele-
vait que lentement de ses ruines. Le chapitre commençait à sup-
porter non sans murmures la position que lui avait faite la cité de
Monulplie. Encore quelques années de paix et la pensée amère de
sa puissance déchue allait s'effacer, lorsque de nouvelles catastrophes
vinrent réveiller ses douloureux souvenirs : il semblait que la fatale
prédiction de saint Servais dût s'accomplir entièrement.
À peine les dégâts que la guerre contre Gérard de Looz avait
occasionnés à l'église de N.-D. eurent-ils été réparés, qu'une
nouvelle guerre contre le duc Henri 1er de Brabant porta, en 1212,
le coup fatal au monument déjà gravement compromis.
Ce prince élevait des prétentions sur le comté de iMoha que
l'évêque de Liège possédait depuis longtemps. S'étant mis une
première fois en campagne et ayant obtenu la paix, il profita de la
quiétude de l'évêque pour rassembler une nouvelle armée.
A la tète de nombreuses troupes le duc se jette sur la Hesbaye,
la dévaste et ne s'arrête que devant les portes de Tongres.
En vain les quelques milices longroises commandées par le
vaillant Hubin Puilhes, seigneur de Ferme, avaient-elles essayé
d'arrêter l'armée du duc au pont d'Ovée1; accablées par le nombre
1 Reinf.ri Annales apud Pertz, tome XVI , f° 6G7.
— 198 —
elles avaient été obligées de plier et Hubin fut forcé de ramener
les débris de sa petite troupe (11 octobre 1212). La confusion
et le désespoir régnaient dans
Tongres. Hubin , prévoyant que
les faibles remparts ne pour-
raient résister aux attaques
d'une armée nombreuse et
aguerrie, conseilla aux plus
timides de se réfugier dans le
fort de Colmonl !.
D'autres, et en grand nom-
bre , s'étaient dès la veille reti-
rés à Liège emportant avec eux
la statue miraculeuse de N.-D.
et les reliquaires les plus pré-
cieux de la collégiale"2; le reste
des habitants se posta sur les
remparts.
Le duc, à la tète de ses trou-
pes, passe le Jaer et ordonne
l'assaut3, mais les ïongrois le
repoussent. Le grand nombre
de morts qui jonchent le sol prouve la vaillance des défenseurs
et l'acharnement des assiégeants; mais, trop peu nombreux pour
empêcher l'ennemi d'escalader les murs, les Tongrois sont obligés
de se réfugier dans la vaste église de N.-D. Hubin de Puilhes,
quoique grièvement blessé, en défend l'entrée pendant que les
Sceau du chapitre de Tongres. — XIIIe siècle
' Egidius apud Chapea ville, tome 2, p. 224. — Fisen, tome I, p. 291. — Foullon,
tome I, p. 322.— Mantelius, llist. Loss., p. 216.
1 V. Triumphiu S. Lamherli , p. 620. — Rf.ineri , Chromcon, apud. Bouquet,
tome XV111, f°625.
' REINER1 Annales, {oc. cit.
— 199 —
bourgeois lancent du haut de la tour sur les assaillants des pierres
et des moellons l.
Plusieurs heures se sont
déjà écoulées depuis le com-
mencement du siège et les
abords du temple sont jonchés
de cadavres. « Ne scay, dit le
• farouche duc , cuy est celle
> maison, ou Dieu ou le diable
> y est oreis, mais lequel gmj
» en soit sire deulx deux, et
> il soyt là ens, il serat ars
• ains guil puist estre wui-
• diet , » et joignant l'action
à la menace il mit le feu à
l'église.
Le monument presque tout
entier fut brillé; seul le beau
cloître échappa aux flammes.
Ce nouvel assaut avait amené
la ruine complète de l'église
Contre-sceau du chapitre de Tongres.- Mlle siècle, romane. Une restauration fut
jugée impossible; il fallut reconstruire le temple d'Ogier.
IV.
Seconde reconstruction de ïéglise. — Destruction de la tour.
(1240-1677).
Les archives ne fournissent qu'un seul document relatif au
1 Voici comment s'exprime le naïf Jean d'OuTREMEUSE, chroniqueur du XIVe siècle :
« Les habitants de Tongres en la thour sont monté et jectent pires et caltoux dont
» ils tuent /es barbenrhons. Le sire de Ferme gardoyt lu porte du mostier» »
— 200 —
magnifique temple qui fut élevé alors. La nouvelle construction
fut commencée le 31 mai 1240. En déblayant le terrain on
trouva fortuitement, à la profondeur de 22 pieds, les vestiges de
l'antique église construite par saint Servais ; ce fut sur ces
anciennes fondations qu'on assit le beau temple gothique encore
admiré de nos jours f.
Il est à regretter que le nom de l'architecte n'ait pas été con-
servé ; du reste celte lacune existe pour un grand nombre de nos
plus beaux monuments. Serait-il vrai qu'à celte époque glorieuse
de la belle architecture , les hommes de talent visaient à léguer à
la postérité plutôt une œuvre que leur nom ? Toujours est-il que
les travaux ont dû marcher avec élan et succès car, en 128G,
l'autel paroissial fut consacré en l'honneur de la Ste. -Trinité par
l'évêque Emond de l'ordre des chevaliers Teutoniques 2.
Voici la description que Schayes a donnée de ce bel et vaste
édifice :
« Construite en croix latine, mais à bras peu allongés, cette
magnifique basiliqueaGG mètres de longueur dans œuvre, dont 45
pour les nefs et 21 pour le chœur. La nef principale est séparée
de chaque côté de ses collatéraux par 12 colonnes cruciformes et
à chapiteaux ornés de feuilles frisées aux deux premières et à la
dernière travée, cylindriques et avec chapiteaux à crochets aux autres
travées. Le triforium qui règne au-dessus de leurs arcs en tiers
1 • Anna Dni il iO , pridie ealendas Junii inceptum est novum opus ecelesie
» Tungrensis et destruction est velus cancellum a fundamenlis et profundilate 23
» pedum casu invention est fundamentum antique ecelesie que credilur fuisse
i a lempore Beati Servalii et novum fundamentum est locatum super illud., V.
Arch. de l'église : reg. 7 du calai., p. 195.
' Voir : Archives de l'hôpital civil de Tongres , registre n° 39, p. 146 : Anno
Uni 1286 in vigiliâ omnium sanctorum conseci alum fuit allare prochiale in ecclesia
Tungrenti , p. Ikv. paire Dno Emmundo epo. ordinis fratrum Theulonicorum in
honorem SUe Trinilatis.
Archives de l'église, reg. n°4, fol. 161 . L'autel paroissial était placé à gauche du
chœur ; en 1794 , c'était l'autel dédié à saint Servais.
— 201 —
point , se compose de petites arcades lancéolées portées par des
colonnetles cylindriques dont les chapiteaux présentent le même
système d'ornementation que ceux des colonnes correspondantes
des nefs. Au transept droit et aux côtés latéraux du chœur, cette
galerie a des arceaux trilobés, mais au transept gauche les colon-
nettes cylindriques sont remplacées par des meneaux prismatiques.
Ces arceaux sont surmontés, à chaque travée, d'une fenêtre présen-
tant une triple lancette dont celle du milieu dépasse en hauteur les
deux ouvertures latérales. Le chœur, formé d'un seul vaisseau,
est éclairé de chaque côté par deux rangs de fenêtres superposées ;
celles du rang inférieur se trouvent derrière le triforium et se
composent de deux lancettes géminées comprises sous un arc ogival
majeur. Des deux vastes fenêtres dont sont ornés les murs plats
qui terminent les transepts , celle du transept droit est parti-
culièrement remarquable par la beauté de son dessin de style
rayonnant. Le chevet polygonal du chœur, dont l'architecture
rappelle le XIIIe siècle, est éclairé par de longues lancettes à
découpures. Au XIVe siècle doivent appartenir les chapelles qui,
ornées tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de panneaux et éclairées
chacune par une belle fenêtre mi-partie rayonnante et flamboyante,
bordent au nombre de dix les bas côtés de la grande nef1.
Leurs murs de séparation sont flanqués de colonnes cylindriques
qui reçoivent la retombée des voûtes ogivales et à nervures croisées.
Par son isolement, la régularité de son architecture et l'élégance
de son ornementation, l'église de Tongres ne dément pas exté-
rieurement la beauté de son intérieur. Des arcs-boutants à deux
rangs d'arcs superposés soutiennent les murs de la grande nef;
de simples contreforts renforcent ceux des bas côtés et du chœur.
La toiture des bas côtés est cachée par une gracieuse balustrade
' Cette opinion paraît d'autant plus probable qu'il conste de plusieurs testaments
conservés aux archives que les frais de construction de la plupart des chapelles ont été
supportés par la piété individuelle, voir reg. 7, fs 41, 45, 70, elc.
XXIX IIXX 13
— 202 —
découpée en quatre-feuilles encadrées. La grande tour carrée,
placée en tète des nefs, ne fut construite qu'en 1444. l Haute
d'environ 74 mètres et demi et large de 9 mètres, elle est
llanquée à ses angles de grands contreforts en retraite à quatre
étages de clochetons et percée de trois étages de fenêtres à meneaux
flamboyants8. »
En-dessous de la tour , se trouvait jadis , comme maintenant
depuis la restauration , la principale entrée par trois grandes portes
géminées , formées par trois arcades ogivales 3 , conduisant à un
grand porche en partie de style roman pur, ce qui semblerait
prouver que c'est là qu'est la partie la plus ancienne de l'église
rebâtie en 1240, ou un reste de l'édifice qui existait antérieurement.
On pénétrait dans l'église par quatre autres entrées, dont les deux
principales se trouvaient aux extrémités du transept et les deux
moindres au bas de l'église près de la tour. Celles du côté du
nord subsistent encore et méritent l'une et l'autre une mention
spéciale. Le portail du transept nord offre un fronton qui s'élève
à 29 mètres de hauteur; il se détache du mur et , jusqu'au tym-
pan, est garni sur les cotés de colonnettes sveltcs et élancées,
surmontées de pinacles à trois faces formant niches, dans lesquelles
se trouvaient des statuettes. Au-dessus de la porte ogivale dont
l'archivolte, creusée de profondes moulures, se termine par un pinacle
-' On verra ci-après que déjà en 1314 la tour reconstruite fut incendiée.
' Voici les dimensions exactes du monument : Hauteur de la tour, flèche comprise,
73 mètres; hauteur de la maçonnerie de la tour 47 mètres 50 cent.; hauteur du sol à
la voûte centrale 20 m. 12 c. ; hauteur du pied droit ajouté dans la tour 10 mètres.
Longueur exlérieure (tour et contreforts compris) 89 mètres ; longueur intérieure 81 m.;
longueur du transept 28 m. 50 c; largeur du transept 7 mètres 10 c; longueur
extérieure depuis la chapelle de Ste-Anne jusqu'à la tour comprise 122 met. 40 cent.
3 Ces trois portes mobiles ont été rétablies, ainsi que l'ancienne galerie qui servait
primitivement à l'exposition des reliques. Elle se compose d'une suite de colonnettes cy-
lindriques portant des arceaux trilobés. La niche centrale est décorée d'une grande statue
de la Vierge posée sur un piédestal , œuvres du statuaire Puyenbroek. Trois des quatre
entrées latérales seront aussi rétablies, la quatrième du côté du midi près de la tour est
remplacée par une sacristie.
— .'203 —
orné de qualre-feuilles et de trèlles à jour, dessinés par des tores
circulaires, se présente une grande fenêtre ogivale à lancette,
composée d'une arcade géminée, surmontée d'un œil de bœuf et
scindée en quatre divisions dans le sens de la hauteur par des
meneaux cylindriques. La naissance du tympan de ce fronton est
occupée par une galerie ou balustrade composée de quatre-feuilles
à jour et qui a l'air de s'appuyer sur des arcatures trilobées simulées
qui sont sculptées sur les façades du portail. Le tympan est orné
d'arcatures ogivales du même style que celles qu'elles surmontent ,
d'un groupe en haut relief représentant le couronnement de la
Ste. Vierge et de deux statues d'anges jouant de la cytare et de
la flûte.
Le portail près de la tour est encore plus remarquable ; il est
construit en forme de porche. Sa façade présente un grand arc
ogival simulé , encadrant une porte en arc surbaissé. L'espace ou
tympan qui sépare ces arcs est décoré au centre d'une statue de
St. Materne et entièrement sculpté à jour dans le style flamboyant.
L'arc majeur est couvert d'un fronton découpé au centre, avec
rampans bordés qui s'appuyent de chaque côté sur une tourelle
ornée de colonnettes et de niches. Les côtés latéraux du porche,
couvert d'une voûte ogivale , sont décorés de six statues d'apôtres
posées sur des socles en encorbellement et surmontées de dais.
Au fond , sous une arche ogivale , apparaissent les statues de la
Vierge et de deux anges surmontées de dais semblables. Au
bas se trouve la porte de l'église à arc plein cintre dont l'archi-
volte , formée de trois tores et ornée de statuettes couronnées de
dais représentant le jugement dernier, s'appuie sur deux colon-
nettes cylindriques ; c'est là encore , suivant toute probabilité , une
bâtisse antérieure à la construction de l'église actuelle. Ce portail
se compose donc de trois styles différents , sa porte intérieure
appartenant à l'architecture romane , la décoration de son porche au
style ogival secondaire et sa façade au style ogival flamboyant.
Ainsi que nous l'avons déjà énoncé , cette magnifique construc-
— 201 —
lion ne fut pas complète malgré les efforts du chapitre, puissam-
ment secondé par le Saint Siège. *
En effet, les archives démontrent qu'en 1274 2 le chanoine
Jean de Lewis fonda un autel en l'honneur de saint Etienne.
En 1300, le chanoine Lambert, natif de Villers-l'Évêque, fonda
quatre chapelles latérales. En 1312, Godefroid de Werm fonda
une autre chapelle dédiée à saint Nicolas et à sainte Catherine. En
1343, le clerc Henri deMerlemont, fonda une sixième chapelle qui
fut dédiée à saint Nicolas. En 1305, Jean Lebout de Gelmen et sa
femme Béatrix Thomas fondèrent une septième chapelle dédiée
alors à saint Sébastien , aujourd'hui à sainte Philomène. En 1403,
André Ileys de Reepen fonda la chapelle de tous les Saints au
fond de la galerie droite des cloîtres. Le lieu choisi pour cette
dernière fondation peut faire présumer qu'au commencement du
XVe siècle, les dix chapelles latérales se trouvèrent établies;
quoi qu'il en soit , les documents ne fournissent pas d'autres indi-
cations à se sujet 5.
Pendant que le chapitre s'efforçait courageusement de compléter
son œuvre, un incendie détruisit en 1314 la tour à peine recon-
struite. Il paraît que ce malheur fut occasionné par l'imprudence
des ouvriers.
Le chapitre, à bout de ressources, traita avec le magistrat pour
la reconstruction de cette partie de l'édifice el pour la refonte des
cloches4. La tour fut rebâtie, mais menaça bientôt ruine5
' Durant les XIIIe et XIVe siècles, les papes accordèrent plusieurs indulgences en
l'itveur de ceux qui contribueraient à celte grande œuvre et amenèrent beaucoup de
libéralités.
* Archives de l'église, registre n° 7, loi. 37, 41, 45 et 70, registre n° 118, folio 1 .
s Deux registres précieux contenant, d'après le plus ancien catalogue, les ebartes et
les actes se rapportant aux années 11G4 à 1590 et collectionnés par Salomon Henrici ,
n'ont pu être retrouvés lors de l'inventaire fait en 1843.
* Archives de l'église , registre n° C, page 233.
■ Kn 1434 (1435) le pape Eugène IV accorda cent jours d'indulgence à ceux qui
— 205 —
puisqu'un 1442 elle dut èlrc reconstruite ; une pierre encastrée
dans la façade occidentale de la tour porte que cette reconstruc-
tion fut commencée le 4 mai 1442 *.
Quarante années plus tard , on se retrouva devant une nouvelle
reconstruction dont les archives ne disent pas la cause. Cette fois
la ville, obérée dans ses finances, prit les résolutions les plus éner-
giques pour se créer des ressources. Malgré ses efforts, ce ne fut
qu'en 1583 qu'elle parvint à réédifier entièrement la tour, à y
rétablir les cloches, l'horloge et le carillon. Celte réparation, qui
avait coûté tant de soucis, était à peine exécutée que la foudre
incendia la tour, dans la nuit du G mai 1598. De la tour, les
flammes atteignirent les toitures et les charpentes de l'église et
l'on crut jin moment que toute la ville allait devenir la proie de
ce fléau destructeur : mais le courage et les efforts des habitants
arrêtèrent le danger 2 et la ville ordonna une nouvelle restauration.
Grâce à la générosité des Tongrois , du chapitre et de quelques
bienfaiteurs particuliers, le magistrat parvint à rétablir la tour,
les cloches, l'horloge et le carillon. La croix en fer fut replacée
sur la flèche en 1608 3.
visitèrent l'église et coopérèrent à la restauration du monument, fortement délabré par
une terrible tempête le 7 octobre 1434..
Voir Bulletin de la Soc. scient, du Limbourg , tome V, page 347 et le manuscrit
publié par la Société archéol. de Maastricht, tome I , page 72.
* t Anno a nativilate. Dni. M.CCCC.XLH. mesis. maii die quarta inceptum
fuit opus costructionis hujs tris.
Cette pierre a été scellée dans le pavement intérieur de la tour. Ne conviendrait-il
pas de conserver de cette façon le souvenir de la restauration de 184G.
* Les archives de l'église et de l'hôpital ont constaté cette crise dans des termes bien
expressifs. Voir à l'hôpital civil, le registre dit Sleper in fine.
3 Convention avec L. Bilquin et Hub. Hock du 15 août 1608. L'existence de la tour
fut encore une fois compromise en 1758, le 6 février le feu éclata dans la maison du
bedeau Jean Lambrechts et se communiqua aux bois et aux meubles placés sous la tour.
Heureusement quelques bourgeois parvinrent à éteindre cet incendie, qui n'occasionna
que. peu de dégâts. V. Passaet boeck der mercieren, f° 3.
— ^06 —
V.
Grand incendie. — Première restauration. — 1677-1794.
Après tanl de vicissitudes, Tongres fut affligée d'un nouveau
malheur, auquel elle ne devait pas s'attendre. Les guerres qui
ensanglantèrent le siècle précédent avaient épuisé les finances de
la ville. Le général Calvo, commandant la garnison française de
Maestricht , ne cessait cependant d'exiger le payement des imposi-
tions et cela sous menace d'exécution militaire. Ce payement n'était
qu'un prétexte; la cause de l'irritation était l'accueil que le
magistrat avait fait au prince d'Orange. Cette fatale rivalité
provoqua la plus cruelle des vengeances. Pendant la nuit du 28 au
29 août 1677, le comte Calvo envoya à Tongres des détachements
de troupes qui, dès leur arrivée, pillèrent la ville et la livrèrent
aux tlammes. La chronique dit « que le feu consuma la flèche et
• les charpentes de la tour ; que les cloches , l'horloge et le carillon
• furent détruits ; que les voûtes et les hauts murs furent calcinés ;
» (jue l'orgue, le jubé, les sacristies, les ornements et plusieurs
> reliques précieuses furent brûlés1. -
Les flammes détruisirent les églises de St. -Nicolas et de
St. -Materne , les chapelles des Jésuites et des Célestines, l'hôpital ,
la maison de ville, celle des échevins, les chambres des corps de
métiers, celles des compagnies bourgeoises et 501 maisons par-
ticulières "2. Dans la nuit du 48 au 10 septembre les Français
1 Les orgues étaient de la facture du célèbre André Séverin, le constructeur de ceHcg
de l'ancienne église abbatiale de St. -Jacques à Liège.
Voir la Belijitjue monumentale, t. II, p. 162, née non organa que cetera Belgii
magnificenlia superabant . . . . Voir l'induit du pape Innocent XI. Die extraordina-
rissen orgelen. . . Voir Bulletin du Limbourg, tome II, page iO.
5 Afin de stimuler le zèle, la ville avait institué une prime pour le premier seau d'eau
apporté à l'occasion d'un incendie. C'est Arnold Moers de Tongres qui fut primé d'un
patacon lors du désastre de 1077.
Arch. de l'église, rcg. n° 10, t'° 87.
— 207 —
revinrent et comptant les maisons qui avaient échappé au fléau ,
ils les livrèrent à un nouveau pillage et à l'incendie.
La consternation fut générale dans la malheureuse cité. Tout
était réduit en cendres et Tongres n'offrait plus qu'un vasle
champ couvert de ruines fumantes.
Louis XIV , instruit de la calamité qui venait de frapper la ville ,
envoya le cardinal de Bourbon pour visiter la collégiale. Dès le
10 septembre suivant, le chapitre prit des mesures pour restaurer
les ruines !, mais les contributions extraordinaires avaient épuisé
les ressources et ce ne fut que le 20 mai 1678 que des ingé-
nieurs , envoyés par le roi Louis XIV , vinrent visiter le temple et
dresser les plans d'une restauration complète. Louis XIV, grâce
aux prières du doyen Arnold Voets 2, envoya 20,000 francs au
chapitre afin de l'aider dans son œuvre réparatrice 5. Cette somme
bien minime, eu égard à l'énormité du désastre, fut entièrement
absorbée par les dépenses que nécessita la construction de nou-
veaux toits ; le 25 novembre 1678 on plaça la croix au-dessus
du chœur 4.
Le baron Edmond de Boehholz, commandeur des Vieux-Joncs ,
le baron de Renesse d'Elderen et l'abbesse de Herckenrode se
montrèrent les généreux protecteurs du chapitre de Tongres s.
De son côté, le pape Innocent XI autorisa la fabrique par une bulle
du 30 septembre 1682 à percevoir pendant l'année de grâce
1 Voir Archives de N . U. Registrum capitali Tongren. in quo describuniur com-
putus, de a0 1670, n° 10 du catalogue , f° 11. 1678 septembre le 10 et 20 pour dépens
des « ingénieurs qui ont visité l'église bruslée 3 f. 11 s. octobre le 3 et 4 pour dépens
et honoraires de deux maistres qui ont visité ladite église. » — « 3f. 19. 16. »
* Voir Bulletin de la Société scientifique et littéraire du Limbourg , tome II ,
pp. 45 et 57.
3 Ibid., p. 24 et suiv.
* Au milieu du transept se dressait avant l'incendie de 1677 une tour en bois.
5 Voir Archives de N. D. Registrum capitali Tongr,, de a0 1670 n° 10 du catal.
p. 26 , « pour icelle réparation M. le grand -commandeur, M. de Renesse baron d'Elderen,
» et Mme l'abbesse de Herckenrode ont fait libéralité d'arbres. »
— 208 —
les revenus de toutes les prébendes qui viendraient à vaquer pendant
les deux années subséquentes '.
Le 4 septembre 1684, le chapitre fit restaurer les arcs-bou-
tants par le maçon Lambert Dirick 2, et le i juin 1G85 il adjugea
pour la somme de sept cents florins une fois payée, la réparation des
des voûtes et des petites galeries à Gérard Van Clermont de
Maestricht 3. La même année, grâce à la générosité du prévôt
Jean d'Elderen, la fabrique put rétablir le jubé4.
Le 29 janvier 1687, la régence s'occupa de la refonte des
cloches; la fabrique intervint dans ces dépenses pour 1753
florins 5. Jean Minten , Paul de Voct et Claude Peeters furent
spécialement chargés de veiller à l'exécution de cette partie de la
restauration. La petite dépense supplémentaire que la refonte des
cloches occasionna à la ville semble avoir épuisé ses ressources ,
d'ailleurs déjà très-sérieusement compromises ; se trouvant dans
l'impossibilité de réparer la tour, la ville, par décisions des 2-1
et 29 décembre 1690 approuvées le 28 avril suivant, céda la
propriété de la tour au chapitre de Notre-Dame, sous condition que
les chanoines feraient restaurer le monument et que le magistrat
conserverait le droit de faire sonner la grande cloche à certaines fêtes
publiques, moyennant un juste salaire6. Rentré en possession
1 Voir Archives de l'église de N. I). Liber documenloritin , inceplusa0 1082 , u° 12
du catalogue , p. 19.
4 Archives de l'église de N. D. Registrum actorum . . . inceptum 1b' octobris 1681
usque 1717, n° 11 du catalogue, p. 17.
* Archives de l'église de N. D., même registre, n° 11 du catalogue f02'J.
1 Computus duorum millium florenorum bb ex donalione perillustris et generosi
Dotnini Johanis Baronis ab Elderen cathedralis ecclesie Leod. decanii et prepositi
Tungr.... 1686, Il aprilis solvi J. Massa pro reclure insignium perillustris
Dotnini prepositi aliorumque ornamentorum ligneorum apponendornm in Doxali
inferiori ecclesie si . 10 .
Archives de N. D. Registrum capiluli Tungr. . . ab unno 1070 n° 10 du catalogue
f° 31.
1 Voir Archives île X. D., même registre, i" 35, v°,
" Voir Archives de Cf. D. Liber documenlorum . . . inceptui a0 1682, n° 12 du
catalogue , f" 11 et Archives de la ville. Liber plebiscilorum 1177 in Une.
— 209 —
de la tour, le chapitre adjugea le 18 mai 1691 à Adam Wynants
d'Aix-la-Chapelle la construction des assises pour les cloches *.
Paul Joseph Grognart s'engagea le 8 décembre 1702 à fondre
une cloche pesant environ sept cents livres à -4 sous la livre.
Le 19 juillet 1703 Max Doupagne entreprit la construction de
la flèche2 et le 15 novembre 1707 M. -H. Biroquet celle de
l'horloge 3.
Ces différents travaux qui absorbèrent plus de 100,000 florins
furent dirigés par deux architectes, Adam Wynants d'Aix-la-Chapelle
et Nicolas Closson de Liège *.
Le 23 janvier 1710 , Georges Vanschoenbeeck, maître menuisier
à Liège, plaça de nouvelles stalles qui coûtèrent 2575 florins.
Le 12 décembre de la même année, Charles Nicolas Henaut et
Christaen Swertveger entreprirent pour 1250 fl. la confection
d'une porte en cuivre « large de G pieds, haute de 11 pieds et demi
ou environ, à ériger au chœur de l'église de Tongres 5. «
Enfin le 15 juin 1725, le chapitre fit fondre par Joseph Thomas
' Archives de N. D. Regislrum actorum.... 1684-4747, n° 1 1 du catalogue ,
f. 65 v°.
* Voir Archives de N. D., même registre n°ll du catalogue, f° 132 et 137.
* Voir Archives de N. D., même registre , n° 11 du catalogue f° 177, v°.
* Reçu de M. Oger, chanoine de Tongres huit pataeons pour payement des
dessins peines et vacations que j'ai faits pour raccommoder la tour de leur église
ce 21 mars 1691 , estoit signé Nicolas Closson architechte 21 octobris 4692, com-
pulum ivi cum operarys quos ad opus reparandoe turris impendit scepe memoratus
architecius M. Adamus Wynants aquensis
Voir Archives de N. D., Registrum capituli Tongr. ab anno 1610, n9 10 du
catalogue, î> . 79 et 80.
Voir Areh. de N. D. Regislrum actorum inceplum 16 #bns 168t usque 4747,
n° 11 du catalogue, f° 195.
5 Voir même registre f° S 10 v°.
Cette porte ainsi que la grille qui fermaient le chœur furent remplacées en 1751 par
une massive construction en marbre , due à la générosité du prévôt J.-L. Doyembrugge,
comte de Duras.
Voici l'inscription placée sous les deux groupes qui couronnaient cette séparation :
Joannes. LudoviciA. Doyembrugge. ex comitibus. De. Duras. Baro. ab. Rlderen.
Decanus. Leodiensis. Prœpositus Tongrensis, etc. A" 4731.
— 210 —
D'awir de Huy deux nouvelles cloches [ et le 28 juillet 1732 il
adjugea la construction du maître-autel à Martin-Benoit Termonia
pour la somme de 12,500 francs2.
11 fallut aussi réparer le dallage , fortement endommagé par
l'incendie : les dalles tumulaires avaient été brisées et beaucoup
de tombeaux s'étaient effondrés. Le 0 novembre 1736 3, le cha-
pitre traita avec Charles Grehain pour la livraison de carreaux
en marbre blanc et noir et le 29 mai 1739 il fit dresser par
l'architecte Etienne Fayn le devis des principaux travaux encore à
exécuter 4. Durant la même année le même architecte construisit
les six grands portiques en marbre 5.
La régence ayant refusé en 1733 de réparer le pavé qui s'étendait
depuis l'église de S. -Nicolas jusqu'à celle de S.-Martcrne, malgré
l'offre du chapitre de prendre à sa charge les frais occasionnés par
la réparation « de quatre pieds de chaque costé ce qui s'importeroit
« presque le tiers des cinquante neuf petites verges, • l'évêque
Georges-Louis par une sentence du 23 juillet 1733 la condamna
à cette réparation avec ordre d'y donner une prompte solution 6.
La bonne entente fut bientôt rétablie , et la pacification fut
cimentée par le don que la régence fit au chapitre, le 30 mai
1739, d'un emplacement près de la tour afin d'y élever une nou-
velle sacristie 7.
Les contributions nombreuses dont le clergé secondaire de la
principauté fut frappé de 1728 à 1730 8 ainsi que les passages
1 Voir Archives de N. D. Liber diversorurn negotiorum inceptus 26 feb.
11 19-1783, n° U du catalogue f° 48.
1 Voir même registre , f° 92.
5 Voir même registre , f° 99 v.
4 Voir même registre, f° 102 v.
8 Voir même registre, fs 128 et 129.
* Voir même registre, fs 94 et 95.
'■ Voit Archives de N. D. Liber diversorurn negotiorum.... inceptus 26 feb.
1719-1183, f° 106, n° 14 du catalogue.
' Voir même registre, fs 108-125.
— 211 —
continuels de troupes f empêchèrent la fabrique de continuer la
restauration du monument; ce ne fut qu'en 1750 qu'elle put son-
ger à remplacer les célèbres orgues d'André Séverin que l'incendie
avait détruites.
Le 1 l septembre, Jean-Baptiste Le Picard entreprit • de faire une
• orgue dans notre église pareille en toutes parties ei aussi bonne
» que celle qu'il a fait pour la noble abbaye de Herckenrode en
» 17 H. • Cet ouvrage exigea trois années de travail et coûta
10,000 florins de Brabant 2; la caisse, faite d'après les plans de
Le Picard , fut sculptée par Termonia et coûta 2900 florins 3.
Le maitre-aulel consacré à la Ste. Vierge avait seul échappé à
l'incendie de 1677; en 1(598 il fut transporté dans la nef gauche.
Les chanoines Goemans, Caroli et De Schell ainsi que le receveur
Vandermeer donnèrent une somme de 650 florins pour couvrir
les frais de déplacement et d'embellissement 4. Cet autel fut de
nouveau démoli en 1753 et remplacé par l'autel actuel dû à la
générosité du prévôt Jean-Louis Doyembrugge , comte de Duras 5.
Enfin après avoir fait refondre, le 22 avril 1782 6, par Joseph
et Nicolas Simon de Mons la grande cloche et traité le 27 août de la
même année avec Henry Donnay de Gland pour de nouvelles liga-
tures à attacher aux cloches 7 le chapitre fit confectionner par
François Chaudoir de Liège un nouveau carillon « très sonore et
1 Eu 1741, 4-2, i3 et 44. Voir même registre fs 152 et seq.
* Voir Archives de X. D. même registre folio 167. Le Picard fut aussi le facteur des
fameuses orgues de St.-Lambert à Liège. Voir Van den Steen , Essai sur lu vatli. de
Si. -Lambert, page 138.
s Voir Archives de X. D. même registre folio 167 v. ; l'acte porte la date du
1:2 février 1751.
4 Voir Archives de .V. D. Regislrum capiluli Tongr . . . de A0 1070 N° 10 du cata-
logue f° 95.
* L'acte porte la date du 2 avril 1753; cet autel coûta 4000 fis.
Voir Arcliives de N. D. Liber diversorum negotiorum inceptus l"> feb.
1719-1785, f° 172, n" 14 du catalogue.
6 Voir même registre, f° 256.
' Même registre, f° 257 v°.
— 212 —
» harmonieux do trois octaves aveu ses demis tons excepté le
• c diès et le mi bémol dans la basse de la pesanteur de cinq
• mille livres ou environ * !.
La régence par un récès du 9 octobre 1782 accorda un subside
de 1000 fis. payable en un ou deux termes et après le place-
ment -.
Le chapitre s'appliqua aussi à renouveler l'ameublement de
l'église et des sacristies; malheureusement cette tâche fut au-dessus
de ses forces. Toutefois, ce corps puissamment soutenu par le
Saint Siège s sut faire affluer les libéralités et faire face à une
dépense que les archives permettent d'évaluer à plus de 200,000
florins. Il a fait tout ce qu'il a pu dans ces circonstances bien
lalales, alors que l'immensité des perles ne lui permit pas de
travailler d'après un plan d'ensemble. D'autre part le bon goût
avait disparu avec l'art lui-même, et c'est là la cause qui a
amené des constructions , des restaurations reprochables sans
doute , mais que la critique pourrait quelque peu absoudre eu
égard à la difficulté de la situation. La postérité doit de la re-
connaissance au chapitre dont le courage et le dévouement lui
ont conservé plus d'une fois la belle et monumentale église qui
fera à jamais la gloire de Tongres. Ce collège qui avait sa raison
d'être soit dans son institution religieuse et morale 4, soit dans sa
mission tutélaire de conserver la collégiale ne faillit jamais à son
1 Voir Archives de l'église. Liber diversorum negotiorum . . . inceptus l'i feb.
1719-1785 , f° 258. L'établissement de ce carillon coûta au chapitre plus de 9000 fl.
* Alsoo sulk comt le tlienen lot plaisier en ornement von de geheele stadt. Voir
Archives de l'église, registre n° 14 du catalogue, f° 259.
5 Voir les bulles des papes Clément XI (29 nov. 1704), Clément XII (2 oct. 1731),
Benoît XIV (19 nov. 1757), Clément XIII (6 oct. 1761), etc. etc. Archives de l'église,
reg. , ii° 12 du catalogue, fs 86, 128, 234, 27 1, etc.
5 Presque tous les chapitres cathédraux et collégiaux s'appliquèrent à développer le
goût des études. Un écolàlre et plus tard un recteur des écoles instruisait la jeunesse
tmgroi.se. Outre le chapitre attaché à la collégiale, Tongres a eu depuis l'année 1424
— 213 —
devoir. Malgré l'énormité du désastre , il fit tous ses efforts pour
réparer les dégâts dus au vandalisme et à l'aveuglement d'une
soldatesque effrénée.
Un siècle n'avait pu suffire à la restauration de l'église , lorsque
le chapitre, presqu'au bout de son œuvre réparatrice, éprouva une
dernière catastrophe plus ruineuse que toutes les autres. Un grand
mouvement agitait les esprits , l'harmonie n'existait plus nulle
part, partout la société s'agitait et particulièrement dans la prin-
cipauté liégeoise, lorsque l'année 1789 vit surgir et se développer
la plus impétueuse agitation qui se fût jamais produite dans
l'esprit des peuples. Tongres , ville sans défense sérieuse , devint
le lieu d'étape ou de passage des bandes révolutionnaires. Après
la bataille de Jemmapes (6 octobre 1772) les républicains arrivè-
rent à Tongres. Un de leurs premiers exploits fut de mettre sous
scellé militaire le mobilier des églises1.
La bataille d'Aldenhoven (1er mars 1793) fit lever le siège de
Maestricht et évacuer Tongres par les Français , que les Autrichiens
remplacèrent dès le G du môme mois 2. Le comte de Briey, lieute-
nant-colonel commandant la garnison autrichienne à Tongres , lit
jusqu'en 1794, un chapitre régulier vivant sous la règle de Windesheim et voué
entièrement à l'instruction de la jeunesse,
Cette école latine a constamment obtenu une vogue justement méritée.
' L'an 1792, le 29 décembre, l'an premier de la république française, nous sous-
signé, commissaire établi provisoirement à l'effet d'exécuter en son entier l'art. IV du
décret de la convention nationale du 17 brumaire, nous sommes en conséquence des
ordres que nous avons reçus, transporté à la collégiale de Tongres où, après examen
fait de tout ce qu'elle pouvait contenir, avons trouvé ce qui suit, savoir :
N° 1. Trésorerie, etc. . . .
N° II. Sacristie des vicaires....
N° 111. Sacristie des chanoines. . . .
N° IV. Archives. . . .
N° V. Secrétariat . . .
N° VI. Sacristie des bénéficiers. . . .
Nous avons placé le tout sous scellé, établi gardien le citoyen Vandendriesch et clos
notre procès-verbal. (Signé) Keppel , off. liégeois : Chavanus , frater.
* Bûchez , Histoire parlementaire, tome XXIV, page 417.
— 214 —
immédiatement lever les scellés. Le chapitre eut la prudence de
mettre la circonstance à profit et de faire transporter tous les objets
précieux de la collégiale à Hambourg' !.
La bataille de Fleurus (26 juin 1794) ramena les Français à
Tongres et avec eux le gouvernement révolutionnaire. Le culte
catholique fut aboli ; l'église paroissiale de St. -Nicolas fut convertie
en temple de la Raison. La loi du 1er octobre 1795 incorpora
la Belgique à la France 2 et dès lors les lois portant suppres-
sion du culte et du clergé y reçurent leur exécution.
VI.
Abolition du culte. — Concordat. — (794-1846.
Par l'annexion de notre pays à la France tous les corps religieux
disparurent. L'assemblée constituante, qui trouva plus facile d'abattre
l'arbre que de l'émonder, supprima toutes les institutions qui dans
les siècles passés avaient si efficacement concouru à l'émancipation
de l'humanité, s
Le 8 frimaire an VII , le domaine 4 de l'État fit vendre par le
citoyen Dornac , receveur de l'enregistrement , le mobilier de
l'église collégiale. Des hommes dévoués 5 avaient fait circuler une
liste de souscription parmi les paroissiens; elle produisit i50 florins,
15 sols et un liard (à peu près 535 francs). Ils se rendirent adju-
dicataires des principaux meubles jusqu'à concurrence de plus de
1 Sous la surveillance du sacristain-prêtre Antoine Moumal, le môme qui tacha long-
temps à son domicile, à Tongres, les archives de l'église.
* La convention nationale avait, malgré l'évacuation de la Belgique, décrété le
8-12 mai 1793 la réunion du pays de Liège à la république française. Voir Polain ,
Ordonnances de la principauté de Liège, tome 11, p. 979, note.
5 La loi du 15 fruct. , an IV, supprima tous les ordres religieux.
La loi du 15 fiim. an VI supprima les chapitres séculiers , les bénéfices simples , etc.
* La loi du 4 pluviôse an IV (24 janvier 1790) autorisa la vente des domaines natio-
naux situés dans la Belgique et provenant des ci-devant bénéficiera, etc.
' MM . Lozer et Fiscar.
— 215 —
1700 francs, somme que ces concitoyens d'élite complétèrent
de leurs deniers. Attirés par la cupidité, quelques marchands
liégeois étaient venus pour en acquérir; ils furent très mal menés
par les bourgeois de Tongres et ne durent leur salut qu'aux
agents de la municipalité qui les escortèrent jusqu'à Hamal.
Parmi les objets si généreusement rachetés figurent les stalles
du chœur : elles furent adjugées pour 50 francs; les orgues,
pour 605 francs; le beau lutrin dinantais pour 105 francs;
une grande croix en fer pour 9 francs et l'un*des grands
tableaux du chœur pour 30 francs *. Le culte de nos pères
semblait donc anéanti pour toujours. La croix, ce grand symbole de
la rédemption humaine , avait été abattue ; le clergé était proscit ,
déporté 2 ; les édifices du culte étaient vendus ou profanés, le mobi-
lier môme qui devait servir à son exercice était exproprié ; tout en
un mot tendait sous le régime de la terreur à l'anéantissement de
la foi. Cependant l'homme n'avait pas compté avec Dieu et cette
puissance infinie trouvait peut-être à propos de faire éclater au
milieu de ce cataclysme même la force de sa loi.
En dépit de tous les calculs, en face de tous les bouleversements
et des crimes dont la révolution se souilla, surgit un homme qui
étonna la France et plus tard l'Europe entière.
Cet homme, arrivé par son génie et sa valeur au premier échelon
4 Archives de l'église. Liasses.
* Le doyen du chapitre, R. de Bellefroid , fut le 11 octobre 1797 condamné à la
déportation , étant prévenu d'avoir « des intelligences coupables avec le ci-devant
» Prince-Évêque de Liège, de chercher par tous les moyens à ralentir la publication de
» la loi salutaire du 19 fructidor, de se servir de son influence en assemblant son
» chapitre aux fins de faire rejeter la déclaration exigée des ministres du culte. » Il
paraît qu'ayant obtenu plus tard une mise sous surveillance il se réfugia en Weslphalie.
Le 30 juin 1798, vingt-quatre ecclésiastiques du canton de Tongres furent également
condamnés à la déportation .
L'arrêté du i novembre 1798 en condamna 89 autres à la même peine. Nous voyons
figurer sur la liste le pléban Régnier van Herck, L'Abaye, curé du béguinage et J. Lafontaine,
récollet à Tongres .
— 216 -
de sa grandeur future, comprit qu'il faut une croyance religieuse,
qu'il faut un culte à toute association humaine. Pénétré de cette
vérité que sans religion il n'y a ni paix, ni trêve sur la terre,
Napoléon (il avec le pape Pie VII le Concordat mémorable qui rétablit
le culte de la religion catholique, apostolique et romaine '.
Avant de monter sur le trône impérial , ce vrai philosophe
porta successivement la série des lois qui restituèrent au culte
les débris de son ancien patrimoine.
L'ancienne collégiale de Tongres recueillit une part bien minime
de ses anciennes dotations; celles-ci, composées pour la majeure
partie de prébendes et de bénéfices, se trouvèrent d'abord sous Ja
main-mise nationale et furent vendus.
La collégiale, rendue au culte, devint paroissiale et obtint, en
vertu des lois de restitution2, ceux des biens et rentes de la fabrique
de St. -Nicolas non encore vendus , ni découverts par les admini-
strateurs de la charité publique.
Cette restitution fut un grand bien , en présence du dénûment
infligé au culte. Toutefois les biens récupérés étaient grevés de
fondations dont les frais dépassaient les revenus. Aussi plus tard
la cour de Piome accorda-t-elle une réduction commandée par
l'équité et les besoins du culte 3.
Depuis lors aucun événement ne survint, si ce n'est que le
25 juillet 1809 la foudre incendia la flèche. Le dévouement des
habitants en arrêta promptement les progrès et les administrateurs,
afin d'éviter le renouvellement de semblables accidents, pourvurent
la tour d'un paratonnerre.
1 Loi du 18 germinal an X , art. 1 , 75.
* Arrêtés des 26 juillet et 20 décembre 1803.
5 Bulle du 18 juin 1825.
A CAapeUe du S.C.de Jésus
B „ cUS.1 Joseph/.
des''- Lucie,
de SyJ)omuiique
de la Vierge da douleurs.
duS t' de Marie/.
de S' Douât.
de S» Barbe.
ded.'Jndré
de S?I7rilomène
du Baptistère/.
.
PLAN DE L'ÉGLISE DE NOTRE-DAME À TONGRES.
— 217 —
Deuxième restauration (1846-1866).
VII.
La cathédrale de Tongres avait éprouvé tant de désastres
successifs, la mutilation de ce beau monument avait été si grande
qu'il était en quelque sorte impossible que le conseil de fabrique pût
songer à une restauration complète.
Les moyens dont disposait ce collège étaient d'ailleurs insuffisants
et les libéralités particulières n'auraient pu faire face à des besoins
toujours renaissants. La ville, également éprouvée, n'était pas
dans une meilleure situation et ne pouvait remédier par ses res-
sources à la pénurie dans laquelle se trouvait l'église.
Déjà en 1824- des tentatives furent faites pour obtenir du
gouvernement une coopération efficace à la restauration. Un devis
qui ne s'élevait qu'à 11,000 11. , soit 23,000 francs, fut soumis
au roi des Pays-Bas sous la date du 9 novembre 1824 ; mais
cette démarche, réitérée à la fin de 1825, resta stérile. Cependant
le temple était dans un état de délabrement complet, car depuis
qu'une main sacrilège avait été portée sur le sanctuaire et avait dissipé
toutes les richesses de l'antique collégiale, celle-ci était restée plus
ou moins abandonnée ; les travaux les plus nécessaires y avaient
à peine été exécutés et cela depuis plus d'un quart de siècle.
Cependant restaurer cette antique basilique était une pensée noble
et digne, qui certes méritait de trouver de l'écho dans le cœur de
Guillaume Ier. C'était conserver une de ces pages glorieuses du grand
livre de notre histoire, écrites en caractères de pierre : c'était
renouer la chaîne mystérieuse des temps et des souvenirs ; c'était
à la fois honorer le passé, enrichir le présent et assurer l'avenir ;
c'était bien mériter de la patrie que de léguer à nos fils le monu-
ment de leurs ancêtres.
XXIX XXII I i
— 218 —
Les événements politiques de 1830 rendirent la Belgique libre.
Celte situation désirée depuis des siècles , réveilla le patriotisme
et avec lui les souvenirs des brillantes époques de l'histoire
nationale.
Nos destinées politiques arrivèrent aux mains d'hommes d'élite,
comprenant le rôle que les provinces belges devaient accomplir
dans la société européenne. Il était donc naturel que les beaux-arts
obtinssent une prompte réhabilitation ; on comprit que le présent
ne devait pas être indigne du passé , qu'à côté de ce grand déve-
loppement industriel qui nous étonne, de toutes ces merveilles des
arts qui nous éblouissent, se trouvait une autre force plus puissante
qu'on devait instruire, améliorer, encourager et diriger vers le bien
et le beau ; on comprit qu'il fallait contrebalancer la force de ce
matérialisme envahissant en prenant soin de l'intelligence, de la
moralité , de l'âme enfin.
Le 7 janvier 1835 le gouvernement institua, sous le patro-
nage du Roi , un comité artistique pour la conservation et la
restauration des monuments du pays. Cette institution fut un
bienfait pour la Belgique; les hommes appelés à former cette
commission contribuèrent puissamment à préserver de la ruine
les monuments les plus remarquables de la patrie.
Il est des pays qui marquent par leur étendue territoriale ou
par leur force militaire; mais il a été donné à la Belgique de se
distinguer, à toutes les époques, par le génie, le culte du beau
et la civilisation qui en découle. Aussi, depuis sa régénération po-
litique, a-t-elle fait des progrès immenses et , malgré l'exiguïté de
son territoire, elle est parvenue à se placer au niveau des nations
les plus civilisées.
Le conseil de fabrique, nommé en 1838 à la suite d'un conflit
administratif, n'obtint la gestion des affaires que vers le mois de
juin 1813.
— 219 —
Durant ce conflit, l'ancien conseil avait cédé à la ville un ter-
rain triangulaire clos de murs et une partie des bâtiments connus
sous le nom d'anciennes écoles du chapitre *; la superficie du terrain
cédé était de 275 mètres carrés et faisait partie du cloître roman.
La ville en avait fait l'acquisition afin de dégager le Palais de Jus-
tice qu'elle faisait construire ; elle s'était engagée d'ailleurs à
rétablir, dans le style de l'édifice, les parties découvertes par la
démolition. La commission des monuments, informée de cette res-
tauration députa quatre de ses membres présidés par M. le
comte Amédée de Beauflort.
La députation, après examen et discussion, fixa l'alignement d'a-
près lequel la façade de la salle capitulaire devait être reconstruite
et M. l'architecte Roelands, l'un des membres de la commission ,
fut chargé de la rédaction du plan et du devis.
Le conseil de fabrique qui avait tant désiré d'attirer sur l'église
la sollicitude du gouvernement , s'empressa de signaler à la dépu-
tation la ruine qui menaçait l'ancienne cathédrale. Il n'eut qu'à se
féliciter du résultat de cette visite officielle.
La députation et particulièrement son honorable président pro-
mirent leur appui au projet de restauration complète. M. le comlc
de Beauflort, enlevé trop tôt à son utile mission , donna des en-
couragements et de précieux conseils afin de réaliser cette œuvre,
dont il entrevoyait la possibilité si l'on parvenait à réunir le
concours de la commune à celui de la province et des habitants. Le
conseil adressa d'abord au Roi, sous la date du 6 octobre 1844,
une requête dans laquelle , tout en exposant l'histoire de notre
basilique et en faisait ressortir son importance architectonique ,
il invoqua en sa faveur la sollicitude du gouvernement.
A la suite de cette démarche, M. Joseph Dumont , architccle-
dessinateur de la commission des monuments, fut chargé de rédiger
' Acte reçu par M. Lismont, notaire, le W septembre 1841.
- 2.'20 —
les plans, afin que le gouvernement pût apprécier l'importance
artistique du monument.
Peu de jours après, M. Dumont se rendit à Tongres pour
réunir les éléments de son travail. Le 27 mars 184-5, MM. Suys,
Bouiiat et Dugniolle, délégués par la commission, vinrent contrôler
ces études. Le plan fut rédigé en quatre feuilles1; l'architecte y
joignit un devis qui présumait une dépense de 272,000 francs,
échelonnée sur seize années, de '1847 à 1862.
Ces documents, après avoir été soumis h l'inspection du public,
reçurent l'approbation des corps administratifs intéressés à l'œuvre.
Un arrêté royal du 19 juin 184-6 approuva le projet de
restauration et chargea le conseil de fabrique de l'exécuter sons la
direction de la commission des monuments.
La fabrique délégua deux de ses membres pour solliciter du
département de la justice l'allocation de subsides permanents durant
la période des travaux. De son côté , le conseil communal fixa à
2,000 francs son intervention annuelle dans la dépense.
Le 0 juin suivant les délégués du conseil de fabrique , accompa-
gnés des sénateurs Louis comte de Renesse-Breidbach , Guillaume
comte d'Arscliot, des représentants comte Max de Renesse, Simons
et Huveners, fuient reçus en audience par le ministre de la justice,
M. le baron d'Anethan , et lui exposèrent l'objet de leur mission.
Grâce à l'appui dévoué de ces honorables députés, ce haut fonc-
tionnaire promit un léger subside de 3,000 francs sur l'exercice
en cours.
Afin d'attirer l'attention des hommes de goût sur l'antique cathé-
« Os quatre feuilles donnent 1° le plan horizontal , 2° la façade principale, 3° la
façade du nord , 4° le choeur et le transept. Il convient de compléter ces dessins par
Imii antres, savoir: la façade sud, le plan horizontal à la hauteur des voûtes, la
coupe longitudinale de toute l'église avec la tour , la coupe transversale du transept
vers le chœur, la coupe transversale dans les nefs vue vers la tour, la coupe du fond
des cloîtres, celles des chapelles qui se trouvent dans les cloîtres, en nue feuille
contenant 1rs détails.
— 221 —
drale deTongres, le conseil décida de faire graver par M. L. Wiener
de Bruxelles une médaille commémorative représentant l'église de
Noire-Dame de ïongres et la légende abrégée de son histoire :
Fondée par saint Materne; agrandie par saint Servais;
dévastée parles Huns; rétablie par Oger sous Charlemagne, 799;
consacrée par Léon III , le 9 mai 804; reconstruite, 1240;
restaurée, 1846.
A l'ouverture de la session du conseil provincial de 18-46,
les conseillers Jaminé , Thys, Hermans, Gaters, J. Schaetzen ,
de Bellefroid et Rigo recommandèrent vivement la restauration de
l'église de Tongres à la sollicitude de leurs collègues et obtin-
rent l'allocation d'un subside annuel de 2000 francs.
La première annuité fut inscrite au budget de l'exercice 1847 ,
sous la rubrique spéciale : subsides pour la restauration des
monuments.
Cette décision du conseil provincial provoqua un arrêté royal
en date du 20 juillet 1846 qui allouait un premier subside de
3000 francs, lequel servit au payement des plans et devis.
Un concours aussi encourageant dès le début engagea le conseil
à redoubler de zèle. Pour assurer l'approvisionnement des maté-
riaux de construction dont le principal élément était la pierre
blanche de Sichen , qui avait également servi lors de la reconstruc-
tion du monument au XIIIe siècle * , le conseil députa deux de
ses membres, MM. Reinartz et Thys accompagnés de deux archi-
tectes MM. Dumont et Ivens, pour se rendre aux carrières de Sibbe
près de Fauquemont, de Sussen et de Sichen. Celles de Sibbe
fournissent des blocs de la plus forte dimension , mais la matière
1 V. Archives de l'église, n° 11 du catalogue, f° 20.
Sous le rapport du coût, la pierre de France exige une dépense dix fois plus élevée.
Quant à la pierre de Sichen, dont l'emploi a été de tout temps considérable, il importait
seulement de bien distinguer les carrières et de choisir le produit dont le grain est. le
plus fin et le mieux adhérent.
ooo
esl très-grossière et poreuse; elle cède trop facilement à l'action de
l'air et de l'eau, surtout dans les constructions qui présentent
des parties saillantes. Le château d'Oost, construit intégralement
au moyen de blocs extraits à Sibbe , en fournit la preuve la moins
douteuse. A Sussen , dans les grandes carrières du Roosberg , la
pierre, quoique plus serrée que celle de Fauquemont, est cepen-
dant trop poreuse et trop fragile pour les ouvrages ornementés. A
Sichen les extractions donnent des blocs d'une dimension beaucoup
plus petite, mais d'une qualité bien supérieure. La pierre présente
un grain fin, dur et serré; la matière se raffermit au contact
de l'air et devient sonore.
Pour compléter l'expertise, des échantillons de ces diverses
carrières furent apportés à Tongrcs et soumis à de nouvelles
investigations qui firent donner la préférence à la carrière de
Sichen , connue sous la dénomination « in de byl. •
Afin de ne pas se trouver à la merci des carriers , le conseil
acquit des terrains dont le sous-sol était encore intact et fit
une convention avec Henri Box pour l'extraction des blocs et
leur transport au pied de l'église, à raison de fr. 14-20 par
mètre cube.
L'honorable comte de Beauiïort , président de la commission des
monuments, se rendit avec bienveillance à la demande du conseil
de fabrique, afin de régler le commencement des travaux. Il
présenta comme architecte-dirigeant M. Dumont , rédacteur des
plans, et comme surveillant des travaux M. Maximilien Genin ,
employé depuis plusieurs années à la basilique de St. -Hubert.
La restauration ne pouvant par la nature même des travaux
se faire que par régie, il fut décidé que l'architecte agirait sous le
contrôle de la commission des monuments ; que les ouvriers, placés
sous la surveillance immédiate du conducteur, seraient payés au
bout de chaque quinzaine sur un bordereau de présence journa-
lière et que les fournitures, commandées sur les indications de
— 223 —
l'architecte , seraient vérifiées et reçues par le surveillant, en
présence d'un ou de deux membres de la fabrique.
Les travaux commencés le 23 août 1846 furent rudes et
pénibles ; les faibles ressources se trouvèrent bientôt épuisées tant
par le prix des divers plans que par l'acquisition des matériaux
et surtout par l'établissement d'un échafaudage au haut de la tour.
Pour comble de malheur, un accident déplorable faillit tout compro-
mettre f, mais le courage et la persévérance triomphèrent de ces
obstacles; l'honneur de la religion et la gloire du pays le deman-
daient, le peuple des fidèles le réclamait.
Au printemps suivant le conseil de fabrique fit examiner de
près l'état de la tour. On découvrit que cette construction colossale,
bâtie en arcades superposées, avait considérablement souffert.
Depuis sa reconstruction au XVe siècle , on n'y avait fait que des
réparations plus ou moins heureuses et depuis l'incendie de 1677
elle n'avait plus été restaurée ni dans sa base ni dans ses massifs.
Après chaque sinistre on avait réparé les dégâts les plus saillants.
Les couvertures restèrent souvent et longtemps en souffrance; aussi
l'infiltration des eaux avait si notablement dégradé les massifs que
partout la maçonnerie était lézardée. Par suite d'écrasements et d'in-
clinaisons, la stabilité de tout le système se trouvait gravement com-
promise. Les fondations, assises sur un banc de sable, n'avaient
aucun ouvrage de renforcement dans le vaste creux qui en séparait
1 Ce vaste échafaudage était sur le point d'être entièrement terminé lorsque le
17 décembre une planche, échappée des mains raidies d'un ouvrier, alla s'abattre contre
l'hôtel de ville et atteignit malheureusement M. Pierre Joseph Ghinéau ; gravement blessé
à la tête , le patient fut transporté dans une des salles de la maison communale.
Quatre jours après, la victime de cet accident fatal succomba au milieu des regrets
unanimes de tous ses concitoyens. Ce déplorable événement arrêta les travaux à l'exté-
rieur de la tour.
La visite minutieuse de l'échafaudage fit constater que les intempéries survenues
subitement avaient seules donné lieu à ce malheur Après un échange d'explications les
travaux furent repris à l'extérieur, le 17 avril 1847, après que l'autorité locale, à la
sollicitation de l'architecte , eût défendu le passage et le stationnement près de l'édifice
en réparai ion.
o;2 4 —
les jambages. Les habitations adossées aux contreforts formaient une
autre cause de détérioration par leurs caves , par l'abus des
eaux pluviales et ménagères , par des empiétements et des exca-
vations.
Après le désastre de 1 077 pendant lequel les maçonneries
avaient été calcinées , l'assise des cloches avait été rétablie si mal-
heureusement que toute sonnerie à laquelle participait le grand
bourdon imprimait aux murs un mouvement désordonné et dange-
reux. Enfin pour l'amélioration de la voirie, le sol extérieur avait
été considérablement abaissé et avait mis à nu une partie des fon-
dations déjà en souffrance.
En présence d'un tel délabrement, il ne fut pas difficile de
comprendre que le devis estimatif ne répondrait point à la dépense
réelle. Il fallait nécessairement avant tout consolider les massifs ,
reprendre et fortifier les fondations, relier les murs crevassés dans
leurs noyaux , simplifier l'assise et le jeu des cloches , solidifier
la base de la tour par une maçonnerie intérieure élevée assez haut
pour supporter le poids des cloches et prévenir ainsi tout mouve-
ment irrégulier. Il était donc évident que les évaluations faites en
1845 seraient insuffisantes et que la période assignée aux tra-
vaux serait dépassée, car les ressources annuelles étaient limitées.
On jugea donc prudent de signaler cette situation à la commission
des monuments et de provoquer la visite des lieux.
Le 21 mars 184-8 , MM. Suys, Partoes , Roget et Dugniolle
se rendirent à Tongres. Après un examen minutieux de l'église, ils
approuvèrent les ouvrages déjà exécutés et prescrivirent ceux que
l'état de la tour réclamait. Les délégués n'hésitèrent pas à recon-
naître les dangers qu'offraient les travaux.
On continua la reprise des fondations qui furent notablement
renforcées par une nouvelle maçonnerie élevée jusqu'à la naissance
des anciennes galeries détruites par l'incendie. En terminant
les pieds droits de la tour par une voûte, on solidifia considéra-
— 225 —
blemcnt la base de l'édifice, et l'aspect du porche devint plus agréa-
ble. Au-dessus de cette voûte toutes les parois furent solidement
reliées par des tirants dont l'architecte Dumont avait indiqué la
combinaison. L'assise de la sonnerie devait ensuite être modifiée
de manière que le poids et le mouvement portassent sur la nou-
velle maçonnerie de renforcement, après avoir étage les cloches en
raison de leur poids et simplifié leur jeu.
Pendant que ces travaux extraordinaires s'exécutaient , la façade
principale de la tour se trouva restaurée au printemps de 1849;
la galerie centrale rétablie avait reçu la statue delà patronne, copiée
par le sculpteur Puyenbroeck de Bruxelles sur celle qui depuis un
temps immémorial existait sur l'autel de la Vierge. On résolut qu'en
commémoration de la reconstruction de 1240 , cette façade et la
statue seraient solennellement bénites le 31 mai, après une messe
exécutée par des chanteurs pyrénéens. Cette cérémonie, à laquelle
présida le curé-doyen délégué par l'évèque , se fit au milieu d'un
grand concours d'habitants ; la société d'harmonie , toujours dé-
vouée et prête à relever par sa présence l'éclat de nos fêtes ,
exécuta ses plus beaux morceaux de musique dans la galerie
reconstruite.
Les travaux de consolidation et ceux de restauration aux façades
latérales furent continués avec activité. Plus d'une fois le conduc-
teur, M. Genin, fit preuve de courage et d'un rare dévouement dans
l'accomplissement de ses devoirs. Animant les ouvriers par l'ex-
emple, il était constamment le premier à entamer les ouvrages
quand le danger faisait reculer ses compagnons. Sur la proposition
de son chef, le conseil de fabrique sollicita du gouvernement pour
M. Genin la décoration des travailleurs. Celle distinction bien
méritée lui fut décernée par arrêté royal du 15 juin 1851.
Dans le cours de cette année , on se vit dans la nécessité
d'exproprier , pour cause d'utilité publique, l'une des habitations
adossées à la tour »; l'imp.ort de celle démolition n'avait pas élé
- 22G —
porté au devis ; d'autre pari les travaux imprévus augmentaient
constamment. On jugea donc à propos d'en référer au gouvernement
et de solliciter une augmentation de subside. Cette démarche que
les circonstances justifiaient d'ailleurs fut bien accueillie. L'hono-
rable ministre de la justice iixa l'allocation annuelle à 12,000 fr.
En fouillant le sol de la tour, du côté nord , pour y con-
tinuer le soubassement et le trottoir , le hasard fit découvrir
le 16 avril 1852 d'abord environ 300 boulets en pierre calcaire
de tout calibre, dont quelques échantillons se trouvent au musée
national ; ensuite une fuite d'eau dans le conduit qui alimente la
fontaine publique. Jusqu'à deux mètres de profondeur les fondations
étaient entamées et le terrain joignant entièrement détrempé.
A mesure que l'avancement des restaurations le permit , on
plaça les grandes portes d'entrée au bas de la tour ; elles sont
l'œuvre des frères De Keyn de St.-Jossc-ten-Noode ; ensuite le
pied de la tour fut protégé par un grillage en fer avec candélabres
exécuté par Ch.-Ed. iMarneffe, fondeur à Liège, sur les dessins
de l'architecte Dumont.
Après sept campagnes consécutives , la tour se trouva restaurée
dans son ensemble ; le devis avait été notablement dépassé. Aussi,
sur huit comptes, de 1847 à 1855, soumis à l'approbation du
gouvernement , sept avaient été clos par un excédant de dépense
qui s'était élevé pour 1818 à fr. 5,728, pour 1851 à fr. 3,747,
et pour 185i à fr. 3,223; un seul, celui de 1850, présentait
un boni de fr. 251-50.
A la demande du conseil de fabrique, la commission des monu-
ments délégua MM. Remont, Roget et Dugniolle pour inspecter
les travaux. La vérification (Mit lieu le 7 avril 1853 et valut à
l'architecte des félicitations sur la réussite de ces importantes et
difficiles réparations. Les délégués arrêtèrent la série des travaux
1 L'expropriation de la maisonelle coûta, \ compris les frais d'instances, 8094 Fr
— 227 —
à entreprendre après l'entier achèvement de ceux qui étaient encore
en voie d'exécution.
Il fut convenu que tous les cheneaux seraient en cuivre rouge ;
que les soubassements et le trottoir, qui garantissaient déjà
le bas de la tour , seraient continués autour de l'église ; que la
sacristie du côté sud serait reconstruite dans le style gothique ;
enfin qu'on restaurerait intérieurement et extérieurement les nefs
et les chapelles latérales.
Dans cette conférence fut discutée aussi la reconstruction de la
flèche. La députation émit l'avis que le campanille existant ne pou-
vait être conservé, qu'il présentait une construction bâtarde et que,
très-disloqué d'ailleurs, il devait être reconstruit en pierre dure
de France ou de Rocheforl, afin de protéger la tour contre le feu
du ciel.
Cet avis reçut l'adhésion du conseil qui proposa d'établir dans
la tour des réservoirs destinés à retenir les eaux pluviales , afin
d'avoir toujours un premier moyen de sauvetage en cas d'incendie.
La députation accueillit cette idée et chargea l'architecte de pré-
senter un plan en harmonie avec la construction générale et
comportant les garanties indiquées.
Toutefois, en présence des nombreux dégâts imprévus, la
reconstruction de la flèche, bien qu'indispensable comme complé-
ment du projet, fut remise jusqu'après la restauration du chœur.
On suivit ponctuellement les instructions données par la com-
mission des monuments ; les massifs dégradés ou lézardés furent
soigneusement réparés. Ces ouvrages et ceux de restauration pro-
prement dits aux deux basses nefs absorbèrent plusieurs campagnes.
En 1858, les façades latérales se trouvant réparées extérieure-
ment et intérieurement, de même que les chapelles, le conseil de
fabrique demanda à la commission des monuments une nou-
velle visile des travaux , car il s'agissait d'après l'architecte
d'entamer la restauration des portails ; celui du côté méridional se
— 228 —
trouvait enclavé dans le prolongement du cloître et il désirait
voir ce monument dégagé. D'autres études occupaient en ce mo-
ment la commission qui fut forcée de différer sa visite, d'autant
plus désirée qu'un incident sérieux menaçait d'interrompre les
travaux.
Le conseil de fabrique apprit, au commencement de 1858, que
le crédit pour les monuments était épuisé ; que l'église de Tongres
avait été provisoirement rayée du tableau des allocations et ne rece-
vrait plus qu'un seul et dernier subside de GOOO francs sur l'exercice
1859. Cette nouvelle fut reçue avec d'autant plus de surprise
que le gouvernement avait été prévenu à temps que le devis
n'était point en rapport avec les grandes dégradations successi-
vement découvertes et que depuis 1845, époque à laquelle le devis
avait été rédigé, la main-d'œuvre et les matériaux avaient aug-
menté considérablement de prix. D'autre part, d'après ce devis même,
l'Etat n'avait pas encore fourni le contingent promis et il résultait de
l'instruction faite en 1846 que la restauration, échelonnée sur
seize années, serait subsidiée par l'Etat durant toute cette période.
La situation était critique et difficile ; cependant il eut été trop
pénible de voir cesser ou môme chômer des travaux aussi utiles
qu'urgents. Fort de l'appui bienveillant de tous les corps admi-
nistratifs , de celui de nos députés et surtout du dévouement
soutenu des Tongrois à leur monument, le conseil réclama du
département de la justice, sous la date du 25 mai 1858, la con-
tinuation du subside promis.
Une longue correspondance s'engagea afin d'établir que la
fabrique d'église, très-limitée dans ses ressources , avait voté en
1846 tout ce dont elle pouvait disposer; que depuis, les progrès
de l'agriculture avaient amené par l'augmentation de la valeur
locative une meilleure situation , et qu'en doublant son allocation
primitive, clic s'imposait un sacrifice que la moindre éventualité
pouvait rendre trop onéreux pour le service du culte; que la plus
— 229 —
forte partie des revenus de l'église se trouvait affectée à des fonda-
tions dont l'exonération était d'autant plus obligatoire que déjà,
en 1824-, on avait dû solliciter de la cour de Rome une notable
réduction sur le nombre des obits et des messes *.
Entretemps, la restauration perdit son habile architecte; la
mort enleva le 19 mars 1859, après une courte maladie,
M. Joseph Dumont, auteur des plans et qui pendant douze années
avait dirigé les travaux avec autant d'intelligence que de dévoue-
ment.
A la demande de la commission des monuments, le conseil
remplaça M. Dumont par son ancien élève , M. l'architecte
Schoonejans.
Le 8 juillet 1859, une députation composée de MM. Partoes ,
De Man et Jules Dugniolle, vint installer le nouvel architecte et
examiner avec lui toutes les constructions terminées ou en voie
d'exécution. Elle lui donna des instructions, résumées dans un
rapport adressé à M. le ministre de la justice le 18 février 1860.
Ce rapport avait surtout le mérite de faire ressortir l'urgence
de continuer la restauration, si l'on ne voulait bientôt se trouver
devant des ruines. La députation , après avoir constaté la parfaite
exécution des travaux terminés et le zèle intelligent avec lequel le
conseil de fabrique s'acquittait de sa mission, était persuadée que
l'État devait continuer et continuerait son intervention financière.
Elle chargea l'architecte de dresser le plan du rétablissement du
portail touchant à l'ancienne salle capUulaire et celui de la recon-
struction de la façade de ce dernier bâtiment. L'exécution en fut
différée jusqu'après la restauration du chœur et des transepts. De
son côté le conseil continuait ses démarches pour le maintien du
subside, lorsque le 14 septembre 1859 une circonstance heureuse
amena à Tongres M. Charles Rogier, ministre de l'intérieur; eelui-
1 BuUe papale en date du 18 juin 18*25 (aux archives).
— 230 —
ci accepta gracieusement l'invitation que lui lit le conseil de visiter
l'un des plus beaux monuments du pays. 11 était accompagné du
gouverneur de la province, du bourgmestre de la ville, du com-
missaire de district, des sénateurs et représentants de l'arrondis-
sement et de M. le comte Vander Straten-Ponthoz, grand maréchal
de la cour. L'honorable ministre examina le monument et son trésor
avec le plus vif intérêt; il admira ces nobles vestiges d'une époque
glorieuse, constata l'importance qu'avait eue l'antique cité de
Tongres et promit de recommander l'œuvre si intéressante de la
restauration à son collègue M. le ministre de la justice.
Tant d'efforts réunis pour défendre une cause aussi juste de-
vaient faire espérer un bon résultat. 11 se réalisa par l'intelligente
persistance de MM. de Renesse et Julliot qui , dans les discus-
sions à la Chambre, firent ressortir l'obligation pour la Belgique
de conserver ses monuments. M. Max de Renesse exposa les
grandes phases historiques de la cité et de l'antique cathédrale de
Tongres ; la longue série de malheurs qui avaient pesé sur elle
jusqu'au XVIIIe siècle, et proposa d'augmenter l'allocation pour la
restauration des édifices monumentaux, afin que celui de Tongres
pût être entièrement réparé '. Celte proposition fut adoptée et ces
infatigables protecteurs firent connaître au conseil l'heureux succès
qui venait de couronner leurs constants efforts.
Sous la date du 17 avril 18G0, le département de la justice
informa officiellement le conseil que le subside annuel de 12,000
francs serait continué pendant six années à compter de l'exercice
18G0. Les travaux de restauration furent poussés avec entrain ;
la réparation de l'abside, cette partie de l'édifice qui avait tant
souffert par l'incendie de 1G77 et dont, à cause de la détresse,
on avait été obligé de suspendre la voûte à la charpente de la
toiture, fut commencée au mois de mai 1800. Quatre immenses
' Annales parlent 1856-1863, pp. 1 34-1 36.
— 231 —
tableaux exécutés par le peintre Juppin de Namur et représentant
la mission de saint Materne dans la Tongrie couvraient depuis
1722 les larges parements du chœur. Quand on les enleva , la
détérioration la plus effrayante fut mise à découvert. Les murs pres-
qu'entièrement calcinés s'étaient détachés de ceux du transept ;
ils n'offraient plus aucune résistance et tombaient par fragments
sous la main des ouvriers. Les colonneltes du triforium avaient
considérablement dévié de leurs assises.
Les piliers supportant la retombée de l'arc majeur étaient brûlés
dans leur sommet , mutilés dans leur base et menaçaient d'entraîner
dans leur chute une partie de la voûte du transept ; la voûte
elle-même était fendue en plusieurs endroits, les pierres de taille
formant l'entablement du triforium étaient rompues , et le gros
mur avait une soufflure de plus de 60 centimètres ; en un mot
on constata avec effroi que tout le chœur était ruiné. Heureu-
sement les contreforts «extérieurs avaient déjà été réparés et
solidifiés ; les deux sacristies latérales étaient restaurées et venaient
offrir un utile appui.
Après avoir pris les précautions les plus indispensables, le conseil
manda l'architecte et sollicita d'urgence une visite des lieux par la
commission des monuments. Celle-ci députa le 6 août 1861
MM. Balat, De Gurte et Dugniolle présidés par M. le comte
de t' Serclaes, gouverneur de la province. La députation, à la vue
de cette situation grave et inattendue ordonna la construction
immédiate d'un solide étrésillonnement dont le plan devait être le
plus tôt possible soumis à son approbation. Elle ordonna en outre
de stater tous les autres travaux, afin d'appliquer les ressources
dont on disposait à la consolidation du chœur.
Le projet d'étrésillonnement , approuvé le 29 octobre , fut
exécuté immédiatement. La fabrique se vit encore une fois en
présence d'une dépense imprévue et devant une prolongation des
travaux , mais il n'était pas permis d'hésiter devant cette
impérieuse nécessité.
— 232 —
On mit la main à l'œuvre ; la reconstruction des colonnes de la
voûte et du gros mur latéral, l'ouverture de deux fenêtres bou-
chées, le rétablissement des arcades, des meneaux, des colonnettes,
des chapiteaux, des tores et des autres ornements du chœur occu-
pèrent les ouvriers pendant trois campagnes; mais tout s'exécuta
sans encombre et surtout sans accident. Ce résultat, la commission
royale n'avait pas osé l'espérer. En faisant disparaître l'ignoble
badigeon qui couvrait les paremenls du chœur, on découvrit d'an-
ciennes peintures murales que le 24- juin 1862 la députation, ac-
compagnée de MM. Piot, Geefs , Simonis , Schuermans, Perreau
et Driesen, inspecta avec la plus grande attention.
Après discussion , il fut admis qu'elles appartenaient à la fin du
XVe ou au commencement du XVIe siècle.
Voici le sujet de ces peintures à l'encaustique.
Au plan droit on voyait, en grandeur naturelle , Jésus-Christ
suivi de ses apôtres , d'après l'ordre indiqué par la Bible ; au plan
opposé la sainte Vierge , saint Joseph et les petits prophètes. Au-
dessus de chaque figure placée dans une niche trilobée , se trouvait
une série de médaillons quadrilobés représentant d'un côté les
différentes phases de la création , de l'autre celles de la Passion.
On décida de faire calquer ces peintures par le peintre
d'histoire Vander Plaetzen de Gand ; elles avaient été gravement
endommagées par le badigeon qui les recouvrait et d'ailleurs le
mauvais état des murs empêchait leur conservation.
Au fond de l'abside se trouvaient trois vitraux du XVIe siècle.
Ceux du milieu représentaient le calvaire; ceux de droite, la sainte
Vierge , saint Materne et saint Servais; celui de gauche, les
docteurs de l'Église.
On agita le point de savoir s'il fallait les conserver ou en
faire exécuter d'autres , conformes au style de l'église. Ce dernier
parti fut généralement goûté. Ou jugea même opportun d'orner
toul le chœur de verrières en style ogival.
— 233 —
Mais la question financière ne pouvait être perdue de vue.
Chaque nouveau vitrail devait coûter 6000 francs, et déjà Ton
ne pouvait restaurer l'édifice lui-même que pas à pas et en propor-
tion des subsides assurés seulement pour une période limitée.
Il n'appartenait pas au conseil d'engager l'église dans une grande
dépense , alors que , par suite de décès , le concours si utile des
habitants avait subi une diminution assez notable. Il fut en consé-
quence décidé que provisoirement, sous la direction de M. Constant
Claes peintre et membre du conseil , on ferait restaurer, par
M. J.-L. Vandenpoorten , les vitraux existants.
Pendant la restauration du chœur, la commission des monuments,
prévoyant l'insuffisance du devis que cependant M. Dumont avait
majoré de frs. 60,000, chargea l'architecte Schoonejans de lui
présenter un aperçu de tous les travaux qui devaient compléter la
restauration de l'église. Celui-ci rédigea un état détaillé s'élevant
à 176,000 frs., dont il échelonna la dépense sur huit années : de
1802 à 1870. Ce devis supplémentaire portait la dépense totale à
frs. 486,328.03, chiffre que le gouvernement admit et inscrivit
au tableau officiel annexé au budget du département de la justice.
Le conseil se trouvait donc encore une fois devant une situation
difficile qu'il s'efforça de surmonter en faisant entrevoir au gou-
vernement que son concours devrait être continué , afin d'achever
l'œuvre commencée; que d'ailleurs, plus tard, les moyens financiers
de la fabrique se trouveraient engagés pour longtemps par l'acqui-
sition d'un ameublement en harmonie avec l'édifice.
Celte espèce de prédiction venait d'être faite lorsque le hasard la
traduisit en action ; le conseil saisit avec empressement l'occasion
unique qui s'offrit à lui pour poser le premier jalon de l'ameuble-
ment futur de l'église.
M.François Malfait, sculpteur à Bruxelles, possédait un retable
sculpté en bois de chêne , provenant de l'église de Venray.
En 1830, alors que les finances de cette église se trouvaient
x\i\ xxn '5
— 234 —
dans le plus triste état, un prince russe du nom de SoltikotT,
grand amateur des beaux-arts , acquit le retable passablement
endommagé.
Il passa ensuite entre les mains de M. Malfait qui , après
l'avoir restauré, le montra aux artistes et à la commission des
monuments.
Ce collège s'empressa d'attirer l'attention du gouvernement
sur un meuble si précieux au point de vue de l'art, afin qu'il
n'échappât point à la patrie. Pendant que l'église de N.-D. du
Sablon à Bruxelles et d'autres essayaient de traiter avec le posses-
seur, le conseil de fabrique de Tongres chargea son président
d'aller à Bruxelles pour examiner ce retable. Renseigné de la
manière la plus certaine sur le mérite de l'objet et sur sa convenance
toute particulière pour notre église, celui-ci engagea vivement ses
collègues à voir par eux-mêmes cette remarquable sculpture.
Cet avis fut suivi. Tous les membres du conseil, d'accord avec
les habitants auxquels la photographie de l'objet avait été commu-
niquée, exprimèrent l'idée que l'on ne pouvait laisser échapper
une occasion aussi favorable d'acquérir un autel conforme à la
dédicace de l'église. A la suite de démarches soutenues, appuyées
par notre honorable gouverneur et par nos députés , l'État inter-
vint pour plus d'un tiers dans le prix d'acquisition. La ville et la
province votèrent un subside combiné de 1500 frs.; ainsi Tongres
obtint pour 12,000 frs. un magnifique autel en harmonie avec
le style général de son église.
Durant cette intéressante négociation, les travaux du chœur
avaient été poursuivis avec activité ; M. le Gouverneur comte de
t' Serclaes, accompagné de M. le greffier provincial, vint les visiter
le 27 avril 1863.
Le 15 juin suivant, M. le baron de Roisin membre de la
commission des monuments , accompagné de MM. Schoonejans et
Van Ysendyck architectes, se livra à un examen approfondi du
— 235 —
monument ; dans l'intérêt de l'art il en fit même dessiner plusieurs
parties.
Pendant la campagne de 180i, le chœur se trouva consolidé
dans ses parties principales. L'hiver fut employé à des travaux
intérieurs, tels que la restauration des voûtes des basses nefs et le
rétablissement des ornements du collatéral gauche. Le conseil,
d'accord avec la commission des monuments , avisa aux moyens de
vendre aussi avantageusement que possible l'ancien maître-autel
en marbre, placé en 1732. Ce déplacement était exigé afin qu'on
pût refaire les sculptures, relever l'entablement, y placer le nouvel
autel , réparer le dallage et remettre les verrières restaurées.
Enfin , grâce à l'intervention de la commission des momuments ,
l'ancien autel fut acquis par le conseil de l'église primaire
d'Andenne pour 4,500 frs., sous la condition expresse que la
démolition , l'enlèvement et le transport des pièces de marbre se
feraient aux frais, risques et périls de l'acquéreur. Cette opération
fut exécutée sans accident , au mois de juin 1865.
La restauration du temple n'avait pas été ralentie; en attendant
l'approbation du plan spécial au portail du transept méridional et
à la façade de la salle capitulaire, on restaura une partie des murs
du cloître vers le nord. Là encore on rencontra un délabrement
bien plus considérable qu'on ne l'avait supposé ; l'absence de solides
réparations et l'infiltration des eaux avaient agi jusque dans les
fondations *.
L'année 1865 fut marquée par des incidents inattendus et
regrettables : le 9 mars, M. l'architecte Léopold Schoonejans,
qui avait fait preuve de beaucoup d'énergie pendant sa trop courte
direction, fut enlevé, à la fleur de l'âge, par une maladie dont le
dénoûment fatal avait été précipité par son dévouement à ses
' On incrusta dans cette partie des murs du cloître quelques pierres tuniulaires qui
seront désormais préservées de l'usure. Il est à espérer que cette utile opération soit
continuée.
— 236 —
nombreux devoirs. M. Jules Dugniolle qui , comme secrétaire de la
commission des monuments, avait étudié et suivi pas à pas la
restauration, succomba le 1er mai de la môme année.
Peu de temps après, M. le ministre de la justice informa le conseil
de fabrique qu'en conséquence de sa dépêche du 17 avril 1860 le
gouvernement cesserait son intervention à partir de l'année 1866.
Le conseil se trouvait ainsi devant une double perplexité; mais il
ne perdit pas courage.
Le 28 mars, une députation de la commission des monuments,
présidée par M. le gouverneur de la province et composée de
MM. Wellens président, Remont, Piot, De Curte et Renard
membres , vint visiter les travaux. Après une vérification minu-
tieuse, la députation n'hésita pas à manifester sa satisfaction
de l'heureuse restauration du chœur. Elle constata de nouveau
le mauvais état de plusieurs colonnes de la nef centrale et donna
des instructions sur les travaux à exécuter afin d'achever le chœur.
D'accord avec le conseil de fabrique, elle décida que le nouvel
architecte ferait le récolement des travaux encore à exécuter
d'après le devis supplémentaire dressé par feu M. Schoonejans et
qu'un exposé détaillé de la situation des travaux serait adressé au
département de la justice.
Dans sa séance ordinaire du 2 avril suivant, le conseil de fabrique
nomma comme architecte de la restauration M. De Curte , membre
de la commission des monuments. Ce choix était dicté par la con-
sidération des talents reconnus de M. De Curte et de la parfaite
connaissance que celui-ci avait de nos travaux par suite des nom-
breuses visites qu'il y avait faites.
Le nouvel architecte dressa le tableau des travaux qui devaient
compléter la restauration et en fit l'objet d'un rapport à ses col-
lègues de la commission.
De son côté le conseil adressa le 10 juin 1865 à M. le minis-
tre de la justice un exposé tendant à ce que l'intervention de
l'État fût continuée.
— 237 —
Le 10 octobre suivant, une députation de la commission vint
inspecter les vitraux replacés au chœur et les travaux exécutés
depuis sa dernière visite. La commission centrale , sous la date du
24 du même mois, adressa son rapport au département de la
justice en exprimant le désir que les vastes travées du chœur
fussent ornées en bas par des stalles prolongées jusqu'à une
certaine hauteur, en haut par des peintures murales. Peu de temps
après M. l'architecte De Curte fournit le relevé des ouvrages qui
devaient compléter la restauration ; il évalua la dépense à
130,000 frs., y compris la construction d'une nouvelle flèche *.
En résumé, les travaux exécutés jusqu'au 1er janvier 1866 ont
eu pour résultat la restauration de la tour dans toutes ses parties ,
du corps de l'église dans ses deux nefs et ses chapelles , du chœur ,
du mur collatéral au nord du cloître, de l'extérieur des deux
portails existants, de toutes les toitures et de tous les trottoirs.
Pour compléter l'œuvre, il reste à continuer la restauration du
cloître et de l'intérieur des deux portails, à reconstruire la façade
de la salle capitulaire et la flèche de la tour, à ouvrir le portail
dans le transept sud et à y placer des portes.
A dix reprises différentes, la commission des monuments a fait
visiter les travaux par ses délégués. Dans toutes les circonstances
difficiles ce corps savant a protégé la restauration de l'église de
Tongres; son dévouement à la grande mission qui lui est dévolue
est un sûr garant qu'il continuera à soutenir l'œuvre jusqu'à son
entier achèvement.
' La dépense générale atteindra donc le chiffre de 500,000 frs.
— 238 —
APPENDICE.
A. — Description du trésor et des ornements religieux.
1° LE TRÉSOR.
De tout temps, parmi les payens comme parmi les chrétiens,
on a honoré les cendres de ceux dont les vertus étaient restées
gravées dans le souvenir des peuples. Les Hébreux d'après Dom
Calmet 1 conservèrent longtemps la verge d'Aaron , le serpent
d'airain et l'amphore qui avait contenu la manne céleste; Elysée,
dit le même auteur, ne voulut point se séparer du manteau du
prophète Élie. On sait de quel respect les Égyptiens et les
Komains entouraient les restes mortels de leurs aïeux et quels
honneurs sanglants les Germains rendaient aux dépouilles mortelles
de leurs parents , de leurs amis ou de leurs chefs.
Lorsque le christianisme vint dissiper les ténèbres de l'ido-
lâtrie et des fausses doctrines, dit M. Kervyn 2, de nombreux
martyrs arrosèrent de leur sang cette terre où l'Eglise triomphante
venait de surgir. Doit-on s'étonner de l'admiration enthousiaste
que le courage héroïque, presque surnaturel au milieu des plus
affreux tourments, inspirait aux premiers chrétiens? Chaque mort
glorieuse raffermissait la foi des néophytes et les préparait au
martyre. Aussi attachait-on le plus grand prix à la possession
d'une parcelle des précieux restes de ces nobles victimes.
Le respect que l'on n'a cessé de porter aux reliques dès les
• Dom C.M.MtT, Dut. de la bible.
' Kkiivyn de Volkaersbeke , Messager îles sciences historiques, 1859, p IT'.i.
— 239 —
premiers temps du christianisme a donné aux arts l'occasion de
se développer. La peinture, la sculpture et l'orfèvrerie se sont
chargées d'embellir les châsses et les reliquaires , et l'on peut
dire que la vénération pour les ossements des saints et des bien-
heureux a imprimé aux arts, dans les pays catholiques, un mou-
vement progressif surprenant que l'on chercherait vainement
ailleurs. Les temples non moins que les châsses, où reposaient les
reliques vénérées des saints, fournissaient aux artistes l'occasion
de déployer toutes les ressourses de leurs talents. Une noble
émulation s'établissait entre eux. Pleins de foi , ils s'inspiraient
du génie du christianisme pour créer les innombrables chefs-d'œuvre
que nous admirons encore aujourd'hui. « Les idées religieuses
et les sentiments qui en dérivent — dit M. Quatremère de
Quincy * — ont toujours été la source féconde où les arts ont
puisé. Ces idées et ces sentiments firent renaître la peinture et
l'alimentèrent pendant trois siècles. Il y eut aussi réciprocité de
services , si l'on peut dire , en ce genre. Les arts et les artistes
à leur tour contribuèrent à propager dans leurs images et à nourrir
les sentiments de la dévotion. Mais ce qu'il faut observer, c'est
que ces images n'arrivent réellement à produire tout leur effet ,
qu'autant que l'artiste reçoive de la foi entière qu'il porte aux êtres
et aux idées, dont il soumet à nos sens l'apparence sous une
forme déterminée, celte efficacité de croyance, qui est pour lui ce
qu'est l'intimité de persuasion dans sa cause, de la part de
l'orateur, c'est-à-dire le moyen d'action sur ceux auxquels son
ouvrage s'adresse. Non, rien ne peut suppléer la vertu de cette
correspondance d'affection entre le sujet à peindre et celui qui le
peint. »
L'ancienne cathédrale de Tôngres possède depuis les temps les
plus reculés un des plus beaux musées religieux cl artistiques connus.
' Ûuatremère de Quircy, Histoire de la vie et des outrages de Raphaël. Paris,
1835, p. 130.
— 240 —
Cette précieuse collection , témoin irrécusable de la haute antiquité
de l'église qui en deçà des Alpes fut la première dédiée à la
Mère du Sauveur, se compose d'objets de plusieurs catégories. Ce
sont d'abord des reliquaires remarquables, où le sentiment religieux
est dignement relevé par la poésie de l'art ; ce sont des ornements
principaux ou accessoires dont la facture et le style pur attestent
l'état de l'art aux belles époques et l'habileté dans l'exécution ;
ce sont enfin des vêtements sacerdotaux dont la richesse atteste
des sentiments de piété généreuse dignement interprétés par les
artistes du temps.
Ce magnifique ensemble que la sollicitude du chapitre collégial
a bien souvent sauvé du vandalisme , comme de la cupidité ,
n'avait reçu que les honneurs du plus stérile catalogue1 .
Les archives des années 1433, 1650, 1752, 1759 et 17902
fournissent des listes où très-souvent la valeur métallique est mise
plus en relief que la beauté de l'art.
Grâce aux progrès archéologiques qui distinguent notre siècle,
quelques-uns des reliquaires ont été l'objet d'une étude scien-
tifique intelligente. Nous sommes heureux d'en profiter dans l'intérêt
du grand monument qui mérite d'être signalé ; autant que faire se
peut, dans tous ses détails accessoires.
' Ces reliques étaient jadis exposées plusieurs fois 1 an à la vénération des fidèles :
d'abord du haut de la galerie qui surmonte l'entrée de la tour; ensuite faute d'espace
le chapitre se contenta de les étaler sur des tables dressées au transept. Un prêtre-
sacristain était spécialement chargé de l'entretien et de la conservation du trésor.
Antoine Moumal, le dernier qui occupa cet emploi, fut chargé en 1703 de transporter
les reliques à Hambourg. Il les ramena à Tongres en 1804. Ce vénérable prêtre mourut
en 1828 et fut remplacé par le sacristain laïque François Laminne. Voir Slalula ecclesie
Tungrensis , fui. II, n° 3 du catalogue.
GuicnviiDiN, Belgica sive inférions germamœ descrip. fol. U03.
* Voir les Archives de l'église : Liber gratiarum eapellanorum ecclesie Tongren.
inceplus anno I îôl folio CCXXV verso. N° 57 du catalogue.
Le catalogue publié en 1G50 par Jean Tournay, à Liège (1res rare) et les Archives
de Vèglise : Liber diverscrum negotiorum ci actorutn RR. 1)1). Décriai et Canonico-
rum cccles. Tungr. 1719-1783, fol. 175 et 178, n° U du catalogue.
241 —
Nous tâcherons de suivre l'ordre chronologique d'après les
époques indiquées par les savants archéologues qui ont facilité
notre travail ; mais avant de parler du trésor, on nous permet-
tra de dire un mot de la statue
de la Sainte Vierge , célèbre par
une infinité de miracles et qui a
reçu depuis les temps les plus
reculés le nom de : Prima cis
Alpes.
Cette statue, en bois de noyer,
de grandeur naturelle, présente
une admirable figure, chef-d'œuvre
de la statuaire du moyen âge ;
l'artiste l'a revêtue d'une longue
robe azurée et ornée d'arabesques
dorées , et d'un manteau d'or dou-
blé d'azur. Au lieu de sceptre elle
tient en main une grappe de rai-
sins, qu'elle semble présenter au
divin enfant en lui souriant avec
mélancolie. A la manière des ma-
dones italiennes, au lieu de cou-
ronne , sa tète n'est ornée que
d'une chevelure blonde relevée sur
les tempes et dont les flots soyeux et ondoyants descendent jusqu'au
milieu du dos ; une épée de chevalier suspendue à sa ceinture *
achève de la distinguer de toutes les autres images que nous
connaissons.
II est vraiment regrettable que le préjugé s'obstine à couvrir
Statue de Notre-Dame de Tongres.
' Voir Pascal, Institutions de l'art chrétien, chap. VII.
— 212 —
ce chef-d'œuvre d'une robe et d'ornements disgracieux qui dissi-
mulent entièrement ses formes ».
Évangéliaire avec plaque en ivoire sculpté.
Avant l'invention de l'imprimerie , les livres n'étaient pas aussi
répandus qu'ils le sont de nos jours. La rareté en augmentait le
prix; de là l'usage de couvrir et plus tard d'orner d'une couver-
ture les ouvrages les plus utiles et les plus recherchés. Garnies
d'abord d'un modeste velin, les couvertures des livres pieux
surtout furent bientôt l'objet d'un faste démesuré : c'était l'or,
l'argent et l'émail , c'étaient les pierreries et jusqu'aux diamants
qui servirent à leur ornementation. L'art du ciseleur n'y fut pas
étranger, sans pourtant y être indispensable; car les peuples encore
à demi barbares préféraient ce qui flattait leurs sens plutôt que
leur esprit, le matérialisme faussait leur goût et exerçait une
influence funeste sur les arts gallo-romains. « Les livres, dit
St. Jérôme , sont revêtus de pierres précieuses et le Christ nu meurt
1 En 1225 nous trouvons mentionnée, pour la première fois, la statue de N.-D. do
Tongres (a).
Les registres de la confrérie de N.-D. ne remontent pas au-delà de 1559 et la
plus ancienne copie d'acte contenue dans ces registres est du 17 décembre 1417 ('*).
Cette confrérie semble avoir élé rétablie au commencement du XVe siècle (c). Elle
était régie par 8 maîtres (meesteren), dont deux devaient être des chanoines et deux
des béuéficiers ; les quatre autres étaient choisis parmi les confrères les plus notables.
Guillaume Ruystenberch en 1 183 et Anne Mariants en 1570 léguèrent à la confrérie la
plus grande partie de leurs biens. Vers celle époque on avait déjà réuni aux revenus
île celte sodalité ceux du bénéfice de la présentation de la Ste-Vierge fondé le
23 juillet 1483 par Guill. Ruystenberch. Le 21 novembre 1607, Théodore Le Page
déposa sur l'autel de N.-D. deux étendards enlevés à l'ennemi et le 14 avril 1698 le
lieutenant-colonel , plus tard maréchal de camp , Pierre Daremberg (Hj de Tongres en déposa
un autre également enlevé aux troupes allemandes.
C) Voir Woltkus, Codex diplomalicus Losseiisis, n" 188, p. 103.
('') Voir Archives <le l'rijlise, registre n° 161 du cat. f° 33 verso.
ic) Voir même registre f" 26 verso. (d) Voir reg. n° 108, p. 31.
— 243 —
à la porto des églises1. » Dàlissier évalue à vingt-quatre le nombre
des évangéliaires que possédait Ste. -Sophie de Conslantinople,
tous dit-il de grand format, la plupart ornés de miniatures et
pesant chacun deux quintaux.
A mesure que la barbarie disparaissait pour faire place à l'art
byzantin, disparaissait également cet abus des richesses matérielles,
la ciselure et la sculpture firent de surprenants progrès et l'argent,
jusqu'alors follement dépensé , servit à encourager les beaux-arts.
Georges Cedrenius , écrivain du IXe siècle , est le premier qui
parle d'une reliure métallique 2 ; la notitia dignitatum utriusquè
imperii fait mention de grands livres carrés reliés en cuir de di-
verses couleurs et décorés sur les plats du portrait de l'empereur s ;
l'évangéliaire que Constant II donna à la basilique de Rome ruis-
selait d'or et de pierreries précieuses 4. Pendant le moyen âge
principalement on se servit de lames d'ivoire pour couvrir les plats
des livres liturgiques ; cependant on ne saurait déterminer d'une
manière certaine l'époque de l'application de la toreutique à l'orne-
mentation des livres; il paraît que la destination primitive des
dyptiques consulaires suggéra l'idée de faire servir ces tableaux à
un usage religieux ; on les désignait même sous le nom de imagi-
nes in modo evangeliorum 5. D'autres dyptiques ou tablettes en
ivoire servirent , jusqu'au Xme siècle, aux prêtres pour l'office des
morts ; d'autres enfin en forme de dyptique ou de triptique servirent
à la décoration des ambons et des devants d'autel.
Parmi ceux qui furent employés à l'ornementation des livres,
figure en première ligne celui de Notre-Dame de Tongres , dont
nous allons essayer de donner la description.
1 D'achery, Spïcilegium , 1723, t. II.
* Ciampini, Vetera monumenta, t. I, p. 131.
* Le moyen âge et la renaissance , t. V, f° 1 .
* Anastase, édition migne, t. IL num. 135.
* lbid. num. 393, 445, 569, 275, 573, et le trop fameux Diplyehon Leodieiise ,
consacré à la mémoire du consul Flavius Astvrius.
— 244
II HICHEELS ARC1IIT. UICI
109 iiMirirrii
J V u i i , i •
— 245 —
Au centre du plat supérieur d'un évangéliaire dont l'écriture
indique les caractères du IXe siècle se trouve enchâssée une plaque,
en ivoire sculpté, du plus beau travail de la deuxième moitié du
même siècle; elle représente le calvaire et la résurrection des morts
lorsque le Fils de Dieu expira sur la croix *.
Ce bas-relief, d'une facture austère un peu fière, mais de
bon goût à cause de l'absence de détails d'encadrement et de
décoration , semble indiquer que l'artiste , se sentant fort capable
de faire son œuvre belle , ne s'est pas soucié de la faire riche.
Au milieu se trouve représenté le Christ crucifié, autour de la
croix règne une bande continue , composée de quatre feuilles jux-
taposées. Le Christ est imberbe , sa tète n'est ni nimbée ni cou-
ronnée d'épines et les cheveux divisés en longues tresses des-
cendent de chaque côté du front. On ne remarque pas les clous qui
attachent le Christ à la croix; ses pieds posent sur un escabeau
(suppedanium) en forme de petite console 2. L'inscription (titulus)
en haut et le serpent au pied de la croix manquent ; mais au des-
sus de la tête du Christ, deux anges aux ailes déployées élèvent la
lance et le porte-éponge d'une main et de l'autre soutiennent une
couronne; plus haut, la main divine se dégage des nuages circon-
scrits par un demi-cercle dont les extrémités s'appuyent sur le
sommet de la croix; cette main, symbolisant la bénédiction de Dieu
le Père, se présente ici non par la paume, mais parle dos. A droite de
la croix, sous la figure d'une femme, s'avance l'Eglise catholique;
elle tient dans la main droite trois feuilles ou fleurs , symbolisant
la Sainte Trinité et dans la gauche une bannière flottante, insigne
de la puissance. Près d'elle et le regard élevé vers son fils mourant,
1 Ainsi que l'indiquent quatre plaques carrées en argent représentant les emblèmes
évangéliques gravées, et les cabochons, recouvrant de pieuses enluminures, qui ornent
le plat supérieur, ce livre a été relié de nouveau au XIVe siècle; cependant on a
conservé le beau glyptique dont nous donnons ie dessin.
1 Molanus, de picturis et imùginibus sacris, cap. LXXV, p. 138.
— 246 —
se trouve la Sainte Vierge dans l'attitude de la tristesse. A gauche,
une autre femme , la Synagogue , en s'en allant , détourne la tète
vers le Sauveur mourant et semble exprimer l'insulte et la colère.
Elle élève de la main droite une palme qui était l'attribut de la
Syrie ou de la Palestine dans l'antiquité. Saint Jean se trouve près
de la Synagogue ; de la main gauche il tient un rouleau, volumen;
sa tète est appuyée dans l'autre.
Les coins supérieurs de la composition sont occupés par le soleil
et la lune, représentés sous la forme d'un homme et d'une femme
affrontés et portant chacun une torche. Le soleil est couronné
d'un diadème dont les rayons, rabattus sur le plan du tableau,
deviennent un nimbe dentelé qui encadre la face ; la lune a la tète
surmontée d'un croissant: tous deux semblent vouloir se cacher le
visage dans leurs mains , ce qui figure ici l'éclipsé , marque de
deuil universel l.
Les nuées sous les pieds des anges , comme autour du soleil et
de la lune, sont représentées par un procédé d'école assez singulier.
Sur le sol inférieur, sous le pied de la croix , sont assis en
vis-à-vis : à gauche l'Océan, un homme barbu, à la chevelure
négligée avec deux cornes en forme de serpents, tenant dans
la main droite un poisson et de la gauche épanchant une urne ;
adroite, la terre, une femme demi-nue allaite un serpent qui
entoure son bras droit , tandis que de la main gauche elle élève
une branche de laurier. Ces êtres mythologiques sont des types
modelés sur les symboles de l'art payen, dit l'abbé Cahier 2, mais
qui caractérisent assez les objets de leur symbolisme.
Entre ces deux personnifications , on voit les morts qui sortent
de leurs sépulcres et proclament le maître de la vie dans ce sup-
plicié du calvaire. Un des morts sort d'un petit édicule funéraire en
« Voir le MS. 9i28 de la bibliothèque royale de Belgique (Bibl. de Bourgogne).
* Voir Martin et CAHIER, Mélanges d'archéologie, vol. II, p. iC>.
— 247 —
l'orme de rotonde, un autre d'un tombeau quadrilatère, un troi-
sième paraît sortir de la mer.
Ce précieux dyptique mesure 18 cent, de haut sur 11 cent, de
large.
L'évangéliaire qu'il recouvre commence par les épitres de saint
Jérôme au pape Damase ; elles sont suivies d'un prologue et de
son explication qui occupent quatre feuillets.
Après les canons écrits entre des portiques, marqués au trait,
vient l'évangile de saint Mathieu ; puis celui de saint Marc et ceux
de saint Luc et de saint Jean, ces deux derniers remplissant quatre
vingt dix-huit feuillets.
Il n'y a dans ce manuscrit ni colophon, ni miniature : trois lettres
majuscules d'un beau style méritent seules d'être citées ; quant à
l'écriture, le copiste s'est exclusivement servi de caractères
romains minuscules.
Hauteur totale de l'évangéliaire 0.28,5 ; largeur 0.20.
Reliquaire de la sainte croix.
Ce reliquaire, qui extérieurement a la forme d'un volume in-4-0,
est en bois de chêne , recouvert d'une plaque de cuivre doré.
Destiné à être porté dans les processions, il est pourvu à la partie
supérieure de deux anneaux et d'un cordon.
Le revers est garni d'une plaque en cuivre rouge orné au centre
d'un médaillon circulaire doré, entouré de feuillages et représentant
la Mère du Sauveur assise sur un trône , la tête ornée d'une
couronne et d'un nimbe circulaire et tenant en main un lis.
L'enfant Jésus reposant sur les genoux de sa Mère est nimbé à
la forme crucifère ; il tient d'une main un fruit et bénit de l'autre.
La face présente un tableau dont le cadre offre en gravure sur
fond en émail champlevé * des médaillons carrés représentant les
' Les couleurs employées sont le bleu dont il y a trois nuances , le rouge , le blanc
et le vert; les carnations sont ordinairement en bleu.
— 248 —
dix premiers évoques de l'église de Tongres. Le premier, saint
Materne comme fondateur, tient de la main droite le bâton pastoral
et de la main gauche le livre des Évangiles. Les neuf autres,
saint Navite, saint Marcel, saint Métropole, saint Séverin, saint
Florentin , saint Martin , saint Maximin , saint Valentin et saint
Servais suivent l'ordre de leur institution et portent les insignes
épiscopaux, la crosse et la mitre.
Ces portraits sont séparés entre eux par dix médaillons gravés et
exécutés dans le système à la fois historique et figuratif. Le premier
représente Moïse, auteur du Pentateuque; d'une main, ce législa-
teur des juifs, élève une plume emblématique ; dans l'autre il porte
la coupe du sacrifice , aussi voit-on sur l'autel la victime expiatoire.
Au-dessus de la plume se trouve le T, forme symbolique de la
croix chez les Hébreux *.
Le deuxième représente les lévites apportant des victimes desti-
nées au sacrifice.
Le troisième retrace la vision du grand Constantin ; l'empereur
est endormi lorsqu'un ange lui présente le labarum avec cette
inscription : In hoc signo vinces.
Le quatrième représente la scène entre Cosroès, roi des Perses,
qui après la prise de Jérusalem enleva la Ste Croix et lléraclius ,
empereur romain, lequel ayant vaincu Cosroès reprit le bois sacré
et le replaça sur le calvaire.
Le cinquième reproduit la fameuse grappe de raisins apportée
de la terre promise par deux Hébreux.
Les sixième et septième représentent respectivement Élie Tes-
bites et la pauvre veuve de Sarepta , tenant deux morceaux de bois
placés en croix. Ce fut en faveur de cette veuve que le prophète
Elie fit deux miracles: la multiplication de la farine et de l'huile,
et la résurrection de son fils.
1 Hieromvm., ni Etec, cap 9.
Molanus , de picluris cl imaginibus sacris, cap. LXXV . , f 131
Lo a Ni'*) 11 A'1¥Q' STWS5M.
!i"ï V\ l"e '"("■ TojjTh 3~ 9 u. g çro
-■• ■■ Lel'Acaâ l'arch jiedeBd v .. . . irie.t ii
RELIQUAIRE DE LA STE CROIX
Arch"del.
— 249 —
Le huitième retrace le sacrifice tenté par le patriarche Abraham
sur son fils Isaac, figure de celui que Dieu le père fit de son fils
devenu homme.
Le neuvième représente les Israélites, regardant le serpent
d'airain.
Sur le dixième et dernier médaillon , on voit le serpent élevé
par Moïse et Aaron sur une colonne, image de la croix, surmontée
du mot Spes.
Le chanfrein, qui unit la bordure extérieure aux volets, est
composé de deux lisières en cuivre doré séparées en biais par une
bordure en argent blanc. Celle-ci est ornée d'un délicat travail de
ciselure , qui représente des lions et des lévriers alternant au
milieu d'une végétation merveilleuse. Sur les lisières se trouvent
deux inscriptions en vers hexamètres portant :
•j- Pontifes, menât, hos. inclita. Tongris. habere.
•j* Donec. eam. potuit. Hunnorum. gens, abolere.
Ces pontifes, la célèbre Tongrcs mérita de les posséder jusqu'à
ce que la nation des Huns pût la détruire.
-J- Hoc. salvatoris. tibi. Tongris. pignas. amoris. ■ —
■j- Legia. dat. lignnm. Cunctis. venerabile. signam. —
« Liège donne ce bois , ce signe du Sauveur vénérable à tous ,
> à toi , ô Tongres, comme un gage d'amour. »
Au centre du cadre se trouve le reliquaire proprement dit ,
renfermant sous cristal le bois sacré en forme de croix ; la relique
a cinq centimètres de longueur sur cinq millimètres de largeur : le
cristal qui la couvre est retenu par un liséré en argent. Au-dessus
se trouve le Sauveur, la tète environnée d'un nimbe crucifère et
bénissant à la manière latine en présentant la loi sacrée.
Aux côtés droit et gauche de la croix se voient la Mère de
Jésus-Christ et le fidèle disciple : tous deux sont nimbés; au-dessous
se trouvent l'Eglise et la Synagogue. L'Église est représentée sous la
figure d'une femme couronnée et nimbée tenant une croix à oriflamme
XXIX XXII iu
— 250 —
flottante et élevant un calice qui renferme le sang de la Rédemption.
La Synagogue est figurée les yeux bandés, détournant la tète de
la croix et tenant une tête de bœuf, pour représenter les sacrifices
de l'ancienne loi ; elle porte en outre un drapeau brisé et renversé,
symbole de la déchéance.
Les emblèmes évangéliques , émaillés sur des plaques semi-cir-
culaires en relief, ornent les quatre angles intérieurs de ce compar-
timent. Par respect, la sainte relique est couverte de deux volets en
cuivre doré offrant , à l'intérieur comme à l'extérieur, de riches
ciselures. Sur l'intérieur du volet droit, on voit en haut une femme
assise , ayant une couronne ouverte qu'entoure un nimbe circu-
laire et tenant dans ses mains un phylactère avec l'inscription :
« Impie desideriu meu. > C'est sainte Hélène priant Judas d'exau-
cer ses prières : près d'elle se trouve un bûcher allumé dont elle
semble menacer Judas qui est représenté sur la partie supérieure
du volet gauche , conduit par une troupe de soldats.
En-dessous du premier emblème, Hélène, sans couronne et armée
d'une pioche , est figurée cherchant l'instrument de la Rédemp-
tion. Elle est secondée dans sa pieuse opération par Judas, officier
dans les troupes de l'empereur Constantin , également armé d'une
pioche. Il paraît, d'après l'histoire, que Judas savait l'endroit où
était enfouie la croix. Sur la partie inférieure du volet gauche, on
voit sainte Hélène assise sur un trône; elle porte la couronne et
le sceptre, emblèmes de la puissance, et indique de la main droite
la vraie croix qu'elle eut le bonheur de retrouver. Sur la face exté-
rieure des volets, fermés par une agrafe en argent, se trouvent deux
séraphins aux ailes éployées et portant des encensoirs *. Le bord
extérieur du cadre est orné d'une bande en cuivre parsemée de
quatre-feuillcs au repoussé. Xe siècle. Haut. 0.289, larg. 0.20.
Largeur du cadre 0.02.
1 Voir les : Acta sanctorutn de l'année 1851 , volume du mois de mars, et le Bulletin
de lu Société scientifique et littéraire du Limbounj , tome I, page 1 et suiv.
Annale.
EVANGELIAIRE AVEC COUVERTURE AU REPOUSSE
— 251 —
Évangéliaire avec couverture au repoussé.
Le manuscrit, orné de la riche couverture que nous essayerons
de décrire, est un évangéliaire in-4° contenant les quatre évangiles,
d'après la version de saint Jérôme , et écrit en caractères romains
minuscules. Les évangiles sont précédés d'une préface et d'un
prologue de saint Jérôme et des canons d'Eusèbe de Césarée, avec
la lettre dans laquelle cet évêque du IVe siècle explique à Carpien
le butet l'utilité de ces tableaux. Après ces canons ou chiffres indica-
teurs qui occupent quatre pages et sont écrits entre des colonnes de
portiques romans à double et à quadruple arcade , vient l'évangile
de saint Mathieu qui comprend quarante feuillets (un a été coupé),
puis vingt-huit feuillets d'un ancien missel du XVe siècle , ensuite
l'évangile de saint Marc, auquel il manque les six premiers feuillets,
suivi par les deux autres évangiles au complet et remplissant quatre-
vingt-dix-neuf feuillets et demi.
Les sommaires occupent les dix derniers feuillets.
Au verso du dernier se trouve en capitales rustiques le colophon
que voici :
Ego servus servorum Di et fidelis discipulus etsi indignus
gleuhitr ob amorem œtemi Régis atque sci Berni Confes-
sons pro me omnibusq : Xpianis ab Adam in diem usq : Judicii
naseentibiis et pro Domno meo Loies Giwret abbate tributum
omni huias clero ecclesiae quantum valiierit de domo hortoq :
jussu di verboq : nobilis populi dimittente dedi hune librum
evangelistarum ecclesiae sci Berni in Episcopatu sci Machutis.
Quant obrem obsecro cunctos successores eiusdem ecclesiae tara
seniores quam etiam iuniores videlicet fidèles ut hune librum
nullus auferre presummat l aut per aliquàm occasionem aliquo
temporis spatio distrahere dein quicumq : illum furatus fuerit
1 Sum est ajouté dans le manuscrit.
9^9
aut aliquo modo ab ipsa ecclesia subtraxerit eocccpto cum reli-
quiis scorum in diebus festls aut lias likrulas a me conscriptas
de hoc folio eraserit aut ipsum folium malo ingenio inciserit a
scorum congregatione separalus et conventui diaboloru adlunctus
sil in die tremendi indien.
Dans ce manuscrit se rencontrent des variantes très-remarqua-
bles qui ne se rapportent qu'à des écrits d'une haute antiquité anté-
rieurs au IXe siècle. Par exemple, dans l'oraison dominicale (Math.
VI) on trouve d'abord : Pater noster qui in coelis es; c'est là une
transposition dont on ne trouve aucun exemple ailleurs ; puis : veniat
regnum tunm et plus loin: et ne inducas nos. etc. Lq mai Amen
est omis.
Aussi , est-il plus que probable que notre évangéliaire devance
l'époque où la transcription des livres commençait à se faire avec
exactitude ; on peut donc le rapporter à la fin du IXe siècle sans
courir grand risque de se tromper.
Du reste, l'exécution du livre décèle dans le copiste assez
d'habileté. Les quatre grandes initiales, composées d'entrelacs fine-
ment dessinés et enroulés avec art, sont d'une rare fantaisie; les
quelques enluminures sont très-originales. On y voit deux minia-
tures qui représentent saint Mathieu et saint Jean ; ce dernier
est revêtu de la toge et assis sur une chaise curule ornée de deux
tètes d'aigle ; il tient de la main gauche un livre ouvert et élève de
la main droite un calamus.
Les deux apôtres se détachent sur un fond rose et sont encadrés
par une bordure composée de trois filets de couleurs diverses ; au
reste, ces miniatures manquent absolument de relief, d'effet général
et de clair obscur. Un trait à l'encre , très-apparent , marque les
détails, les saillies et les contours de la robe et de la face. Les
figures courtes et massives des deux apôtres ont la tète et les
extrémités trop fortes. L'expression plutôt stupide que méchante
de la face est due à de grands yeux trop distants l'un de l'autre,
" oales fcl'À i inruedArchèologiedeBelgique,tXXFI, 2*S
Sènet ïï
£t<à'L:ùi ';..., 4. ..
SAINT JEAN L'EVANGE LISTE
Miniature du [Xe Siècle.
— 253 —
au nez long et droit, à la bouche fermée et bordée de lèvres
épaisses; les doigts sont crochus, les draperies raides, les contours
secs : en général les détails sont manques ; cependant , il y a dans
l'ensemble un air de grandeur qui étonne et, quoique réduite à la
plus simple des enluminures, celle des teintes plates, cette peinture
est cependant agréable par la pureté des formes et la vivacité des
couleurs.
Quant à l'écriture (onciale allemande) elle rappelle la manière
lombarde ; les mots sont séparés et il y a une espèce de ponctua-
tion, mais non pas la ponctuation anglo-saxonne introduite par les
diacres Paul Warnefrid et Alcuin, sur l'ordre de Charlemagne '.
Cet évangéliaire précieux par lui-même se trouve sous une riche
couverture2. Sur le dos et le revers, c'est un simple velours rouge,
' S. P. Servais Dirks, Bulletin de la Société scientifique et littéraire du Limboura
tome III, p. 191.
2 Les évangéliaires, surtout à cause des honneurs publics que l'Église leur rend dans ses
offices, ont été habituellement ornés au-dedans et au-dehors de tout ce que la calligraphie
et l'orfèvrerie pouvaient trouver de plus somptueux dans les ressources de leur art. Au
moyen âge les nobles , les princes et les rois témoignaient beaucoup de sollicitude pour
l'entretien et la conservation des livres liturgiques. Un diplôme accordé par Charlemagne
à l'abbaye de St-Bertin stipule que toutes les peaux du gibier tué devaient servir à la
reliure des livres du monastère. Geoffroi Martel, comte d'Anjou, prescrivit en 1050 que
le produit de la dîme des peaux de biche qu'il levait dans l'île d'Oleron serait employé
à la reliure des livres de la bibliothèque de l'abbaye de Saintes. Guillaume , comte de
Nevers, envoya en 1136 aux religieux de la grande chartreuse du parchemin destiné à
la transcription des manuscrits et des peaux de vache pour la confection des reliures
des livres de leur bibliothèque.
Skelton, poëte anglais du X Vie siècle, nous a laissé la description d'une de ces
somptueuses reliures qui l'avait émerveillé :
« Les fermoirs brillaient ; la marche était toute sillonnée de filets d'or et peinte de
» diverses manières : on y avait représenté des guêpes, des papillons, des plantes,
)> des fleurs. Un homme malade aurait recouvré la santé en voyant cette belle reliure ,
» ce beau livre couvert de soie et d'or ; ses fermoirs d'argent valaient mille livres; là
» vignette était éclatante de pierres précieuses et d'escarboucles et chaque autre ligne
» d'aurum mosaïeum. (V. Messager de 1853, p. 186.)
Si l'ornement extérieur de notre livre est bien moins ancien et précieux que le monu-
ment qu'il recouvre, évidemment ce dernier n'atteste pas moins son style et son époque.
11 se peut que la première couverture ait dû être renouvelée et qu'ainsi doive
s'expliquer ce contraste.
— 254 —
protégé par des lames d'argent placées dans le sens de l'épais-
seur et par cinq étoiles à six raies du même métal. Un splendide
repoussé en argent et vermeil recouvre en entier le plat supérieur.
Sur la bordure qui encadre le bas-relief, des chapiteaux gothiques
et de larges feuillages , se tordant en arabesques , supportent et
enveloppent de petits sujets sacrés , qui représentent deux fois le
baptême du Sauveur, le Père éternel bénissant à la manière latine,
la sainte Vierge avec l'enfant Jésus et les images de saint Jean-
Baptiste et de saint Jean-1'Évangéliste.
Les symboles évangéliques ciselés sur de petits médaillons car-
rés, jadis émaillés, sont placés en relief aux coins de la couverture.
Quatre cabochons en cristal, montés en argent, complètent la
décoration de cette bordure, en même temps qu'ils la protègent
lorsque le livre est ouvert : un chanfrein orné de rinceaux unit la
bordure à la plaque. Au centre de celle-ci , on voit sous une
arcade trilobée d'un dessin déjà indécis, la Vierge nimbée et cou-
ronnée. Elle porte sur le bras gauche l'enfant Jésus bénissant et
est accompagnée de saint Pierre et de saint Paul ayant pour attri-
buts la clef et le glaive aussi bien que le livre. Deux petites roses
à six feuilles se profilent au-dessus de l'arcade et trois entourent
la tète de la Vierge; plus bas on en remarque encore trois autres
à quatre feuilles.
La Mère du Christ dépasse de toute la tète les deux apôtres et
saint Pierre le prince des disciples est placé à la gauche de la Mère
du Sauveur. Ce sont là des significations symboliques habituelles
à l'esprit mystique des artistes du moyen âge !.
Les figures de la Vierge et des deux apôtres ne répondent pas
par le dessin à la délicatesse des détails de la bordure. A cela
on reconnaît l'ouvrage d'un artiste que ne guident plus les sévères
traditions de l'école ogivale.
1 Molanus, cap. XXXVII, f° 70.
ieï
;
RELIQUAIRE DE SAINTE URSULE
— 255 —
Ce bel évangétiaire était celui que jusqu'à la fin du siècle dernier
on présentait à baiser au doyen , à l'écolâtre , au chantre et aux
membres du chapitre après l'évangile de la messe capitulaire , avec
ces mots: « ecce lex sacra • '. XI Ve et XVe siècles 2.
Hauteur 336 millimètres, largeur 252.
Reliquaire de sainte Ursule.
Un autre ouvrage d'orfèvrerie important par la conception et la
facture mérite toute notre attention. C'est le reliquaire en vermeil
et cuivre doré de sainte Ursule.
Les reliques de la sainte, une vertèbre lombaire et un os du bras,
sont renfermées dans une tourelle à deux étages , réunis par un
anneau mouluré et orné de pierreries. Deux niches trilobées à jour
abritant les statuettes de deux saints relient cet anneau à la
couronne crénelée et ornée de pierreries qui surmonte la tourelle;
celle-ci est terminée par une flèche conique, garnie d'émaux trans-
lucides 3 séparés par huit séries de crochets , en forme de larges
feuilles frisées. Sur le fhuron qui couronne la flèche repose un
globe émaillé, supportant un aigle en vermeil.
Deux anges aux ailes éployées et revêtus de chapes sont debout
sur des piédestaux de forme hexagone et soutiennent la partie
supérieure de la tourelle. Celle-ci repose sur une double base
octogone allongée , dont la première est ornée de ciselures riches
et variées de forme géométrique.
La base inférieure en biais est séparée de la première par un
1 Cette coutume semble avoir remplacé une des plus anciennes cérémonies de l'Église,
c'est-à-dire le baiser de paix que le prêtre donnait en signe de paix ou de réconciliation
à quelques laïques avant la consécration. Le premier vestige de ce baiser de paix, on le
trouve dans une lettre du pape Innocent I (402) à l'évêque Decentius, V. Du Perray,
Traité des droits honorifiques, chap. XIII, p. 96.
Voir aussi rubricae générales ecclesiae collegiatae ac archi diaconalis beatae
Mariae Virginia oppidi Tungrensis, n° 2 de l'inventaire, f° 30.
1 Les lames d'argent du plat postérieur et les charnières portent la date de 1617.
3 Ces émaux représentent le chœur des anges formé par huit ligures d'anges ailés
placés dans des niches tribolées et jouant de différents instruments de musique.
— 256 —
pied droit formé d'une bande continue de quatre-feuilles découpées
à jour.
Elle est ornée de dix dessins en émail translucide représentant
les quatre évangélistes assis et les apôtres debout. D'élégants
rinceaux ciselés séparent ces dix plaques de forme carrée. Sur le
pied droit, #soutenu par quatre lions , on voit des têtes couronnées
alternant avec des mascarons et deux anneaux , par lesquels on
passait un cordon afin de faciliter le transport de ce petit monu-
ment qui ne mesure pas moins de 56 centimètres de hauteur.
Pied 0.328 sur 0.25. XI Vo siècle.
« Le moindre croquis, dit M. Petit *, expliquera mieux qu'une
» description , toute la grâce et la richesse de ce précieux
• reliquaire. Peut-être y reconnaitra-t-on , comme dans la plupart
• des ouvrages du XIVe ou du XVe siècle, des détails qui ne sont
■ plus d'un goût bien pur; mais ce qu'on ne saurait assez
• admirer, c'est l'heureux parti que l'artiste a su tirer d'une
• donnée aussi simple que celle d'enchâsser dans l'or une relique
» vénérée. Il en a fait jaillir une conception pleine de variété et
» de vie, où les détails d'architecture et les emblèmes de la
« religion , le métal précieux , les éclatantes couleurs des émaux
■ et des pierreries se mêlent et se confondent avec bonheur2. ■
1 Voir Bulletin de la Société scientifique et littéraire du Limbourg , tom I.
2 Ce reliquaire n'aurait-il pas servi de tour eucharistique ? L'étage inférieur pouvait
servir d'exposition et l'étage supérieur était destiné à contenir les hosties. Rien du reste
ni dans l'ornementation ni mt*me dans la forme générale de ce petit monument ne prouve
qu'il fut spécialement destiné à renfermer les reliques de sainte Ursule. Pourquoi les
émaux représentent-ils les apôtres et les évangélistes ? Que signifie l'aigle qui couronne
la flèche? Pourquoi les anneaux adaptés à la base? Pourquoi enfin des archanges
soutiennent-ils l'étage supérieur ?
V. de Caijmont, Bulletin monumental, tome IX, p. 321 , et Abécédaire d'arcli.,
p. 363. Viollet-le-Duc , Dict. raisonné du mobilier franc., tome 1, p. 246.
Grég. Tun , De gloria martyrum , lih. I , c. I , c. 86. Mabii.lon, Vetera Anulecla,
tome II, p. 57. Tuieiis , Dissertation sur les autels, ch. 2i.
D. D. Mahtène et Diiiund, Voyages littéraires , tome II, p. 67.
Du Gange, Traité historique du chef de saint Jean-Baptiste , p. 151.
Description des reliques de saint Corneille de Compicgne , p. 55.
RELIQUAIRE -CROIX
— 257 —
Reliquaires en forme de croix.
L'insigne de l'ignominie était devenu, par le sacrifice de l'Homme-
Dieu, l'emblème de la victoire sur le mal moral. Les siècles suc-
cessifs se plurent à l'orner et à l'embellir par une foule d'ingé-
nieuses modifications. L'instrument du salut fut entouré d'honneurs
particuliers et enrichi des trésors de la nature et de l'art : on
voulut que la croix fût un livre retraçant l'histoire complète de la
rédemption. Le trésor de Tongres possède cinq croix remarquables
dont trois servent de reliquaires ; les deux autres (3 et 4-) sont
des croix stationnâtes. Celle que nous décrivons sous le numéro 4
est exécutée dans le système à la fois historique et figuratif dans
le sens synthétique et mérite une mention spéciale.
1° Un pied hexagone évasé, orné de cabochons, soutient la tige
garnie d'un nœud ciselé et orné de six boutons chargés du saint
nom de IHESUS en niellure.
Un petit cylindre en cristal repose sur celte tige et renferme
des reliques de saint Géron martyr, de saint Thomas archevêque
de Cantorbery, des ossements de saint Thébain , de saint Ambroise,
de saint Gérard et de saint Silvain , évoques , et des reliques de
sainte Balbine.
Un double annelet en cuivre doré relie Je cylindre à la croix ,
dont le centre de forme carrée, est occupé par des fragments d'agathe
et d'autres pierres , provenant de la Terre Sainte et retenus par de
massifs crochets en cuivre.
Quatre rayons aux formes trèflées simples et ornent le centre ,
les branches en cristal, reliées par une bande en cuivre découpé,
se terminent par des médaillons circulaires niellés , renfermant
des reliques de la sainte Vierge, de saint Jean-Baptiste, de saint
Barthélémy et un fragment de la croix du Sauveur. XHIe siècle.
Hauteur 0.505.
— 258 —
2<> Voici une autre croix-reliquaire dont le pied de forme carrée,
un peu allongée , est orné de quatre cabochons en cristal montés
en cuivre.
Une mince tige circulaire garnie d'un massif annelet mouluré
et de branches en cristal reliés par des bandes en cuivre doré et
niellé repose sur cette base et soutient la croix. Le médaillon central,
en forme de quatre-feuilles, est protégé d'un côté par un béryl en
corne , de l'autre par une plaque en cuivre niellé : il renferme
quelques reliques inconnues.
Les branches en cristal s'échappent du centre et sont terminées
par trois médaillons-reliquaires en quatre-feuilles semblables.
Première moitié du XlVe siècle. Hauteur 0.435.
3° La troisième croix est une croix stationnale destinée à être
placée sur l'autel. Au milieu d'un pied hexagone évasé, orné de
niellures et de six cabochons (cinq manquent), s'élève une longue tige
en cristal, bordée de bandes en cuivre aux formes trèflées et coupée
dans la moitié de sa hauteur par un médaillon circulaire en cristal *.
Celte tige supporte la croix portant en cœur un médaillon ovale
en cuivre doré , ciselure en demi-relief , représentant sainte
Véronique le suaire en mains. Au revers, ce médaillon est fermé
par un béryl.
Quatre rayons polylobés en sections d'ogive et richement découpés
encadrent ce médaillon et s'harmonisent heureusement avec le
crétage dentelé ; les branches en cristal aux extrémités fleurdelisées
sont retenues par des festons. De gros fils en cuivre, qui traversent
et maintiennent cet ouvrage délicat et compliqué , s'adaptent au
pied de la croix et aux fleurons. Seconde moitié du XIVe siècle.
II. 0.590.
4° La quatrième croix stationnale quoique moins ancienne que
les trois autres est cependant fort remarquable.
1 Voir Sciiaepkens , Trésor de l'art ancien. Crux. 181f>, pi. XII.
— 259 —
Sur un pied hexagone évasé orné et de feuillages niellés et de six
cabochons montés en cuivre doré , placés aux angles , s'élève une
tige dont le nœud en cristal est surmonté d'un cylindre posé
verticalement; celui-ci est protégé par trois petits contreforts qui
terminent des pinacles
réunis par une couronne
avec crétage en cuivre
doré. Un anneau orné
de quatre-feuilles décou-
pées relie le cylindre
à la croix ; le centre
en est occupé par une
miniature de forme car-
rée , représentant le
Christ en croix , entre
la sainte Vierge et saint
Jean : deux anges re-
çoivent dans des coupes
le sang du Christ expi-
rant. Cette miniature aux
couleurs pâles et sur fond
d'or nous semble appar-
tenir au XVe siècle. Les
f.roix- reliquaire. Croisillons SOnt Ol'Ilés de
quatre plaques d'émaux translucides, représentant la sainte Vierge,
saint Jean , l'ange de la vie et l'emblème de la mort. Us sont
terminés par une fleur de lis double en cristal de roche.
Au revers, le médaillon représente la Vierge assise sur un
trône et offrant un fruit au divin enfant. Les émaux repro-
duisent les figures symboliques des évangélistes. XIVe et XVe siè-
cles. H. 0.630.
5° Une croix-reliquaire en argent , soutenue par une base en
— 260 —
forme de modillon porte en cœur un médaillon circulaire ,
renfermant une parcelle de la vraie croix. Ce reliquaire appartient
au XVIIIû siècle. H. 0.527.'
Reliquaires en forme d'ostensoirs.
Le trésor de l'église de Tongres possède , sous la forme d'osten-
soirs , sept reliquaires qui ont entre eux de grandes analogies.
1° C'est d'abord un ostensoir triptyque en argent, jadis doré
en partie , provenant de l'antique chapelle de St. -Materne qui fut
démolie en 1804- '.
Le pied hexagone en argent sert de base à une tige ornée d'un
nœud hexagone chargé de l'inscription niellée : got * gef * aie *
m y *.,. Cette tige supporte un petit monument en argent de forme
presque carrée , fermé par deux volets et couronné par un gable
hérissé de crochets , flanqué de deux pinacles et terminé par un
fleuron surmonté de l'oiseau de saint Jean.
Les deux volets étaient jadis ornés extérieurement de ciselures
et d'émaux; c'est avec peine qu'on distingue encore , à gauche, la
figure d'un chanoine debout portant une banderole : 0 mater Dei
mémento mei; à droite la silhouette d'un personnage agenouillé.
La dégradation n'est pas moindre à l'intérieur; sur le volet
droit on voit encore quelques traits qui semblent figurer l'archange
Gabriel tenant une banderole avec l'inscription : Ave gratla.plena.
Sur le volet gauche la Vierge agenouillée , complète la représen-
tation de l'annonciation. Le corps de ce petit triptyque est divisé,
dans le sens de la hauteur, en trois compartiments de grandeurs
différentes renfermant en bas des reliques de saint Etienne, au milieu
' C'était le seul temple payen de la Belgique qui avait résiste" au temps et aux hommes.
Une pierre informe , représentant la figure du soleil , qui se trouvait au frontipice
du trmple a été enchâssée dans le mur du chapitre où elle rappelle moins lu place du
monument que l'acte inqualifiable de son destructeur. V. Diuesen , Tongres cl ses
environs, p. 131.
: . fie . 1 . ['■•- : XXII . . ' .1
OSTENSOIR- RELIQUAIRE.
i
— 261 —
un petit os soutenu par un ange dont le torse apparaît à la partie
supérieure entre deux écussons armoriés. Le premier blason porte
burelé d'or et de gueules de dix pièces ; le second , au chef de
gueules, d'or losange de sable en pointe. Le gable est garni d'une
découpure trèflée qui s'harmonise avec les festons bordant ce
reliquaire. XVe siècle. Hauteur 0.276; largeur du carré 0.093.
2° Un autre ostensoir-reliquaire en argent doré mérite aussi
de fixer l'attention. Sur un pied à six lobes orné de rinceaux
ciselés s'élève une tige hexagone très-svelte et munie d'un nœud
orné de feuillages ciselés et de six boutons portant des roses
gravées.
Cette tige est surmontée d'un chapiteau sur lequel est posé
verticalement une plaque carrée ornée de chaque côté d'une rose.
Cette plaque accostée de deux bras polylobés , en sections d'ogive
richement découpées, soutient un verre cylindrique allongé dont les
extrémités sont enchâssées dans des édicules carrés ornés d'un
fenestrage ajouré. Ce cylindre contient des reliques de saint
Boniface, de saint Engelbert et de sainte Marguerite.
Les édicules servent de base à deux tourelles à trois faces
surmontées de pinacles à jour et reliés par des arcs-boulants trèfles
et par des balustrades ornées de quatre-feuilles ajourées à une
troisième tourelle qui s'élève du milieu du cylindre. XVe siècle.
Hauteur 0.42 diam. du pied 0.152.
3° Cet ostensoir-reliquaire en argent doré est à peu près sem-
blable au précédent, sauf le pied qui a la forme d'un hexagone
évasé orné d'un dessin géométrique au repoussé. Il y a également
une différence dans la forme des fenestrages ; il lui manque aussi
les fleurons qui couronnaient ses trois tourelles. Le cylindre renferme
les reliques de saint Fabien , de saint Siméon et de saint Corneille.
XVe siècle. Haut. 0.42, diam. du pied 0.14.
4° Voici le plus riche des ostensoirs que possède l'église de
Tongres ; cependant ce n'est pas le plus précieux , car déjà la
décadence se manifeste dans quelques détails tourmentés.
— 262 —
Ce reliquaire est en argent doré, repoussé et ciselé. Le pied
à six lobes est orné de pierreries et supporte la tige hexagone ,
munie d'un nœud ciselé à six boutons saillants portant le saint nom
de JHESUS entre deux fleurs émaillées. Au-dessus du nœud , la
tige est accostée de deux bras polylobés en sections d'ogive découpées
qui soutiennent une chapelle hexagone surmontée à chaque angle
d'un contrefort à triple rang de pinacles réunis par des arcs-bou-
tanls. Ceux-ci supportent une tourelle hexagone percée de fenes-
trages ajourées et surmontée d'une flèche pyramidale ardoisée,
hérissée de crochets et terminée par un Christ dont la croix est
fleurdelisée. Au pied du crucifix, mais au revers, se trouve la
sainte Vierge. XVe siècle. H. 0.515, diamètre du pied 0.175.
5° Ostensoir-reliquaire en argent doré , repoussé et ciselé. Sur
le pied à six lobes orné de festons et de tètes d'anges se trouve
l'écusson de la donatrice et cette inscription :
MECHTELT * SCHROOTS ! * VROUWE * VAN * WERM * A0 1640.
La tige cylindrique garnie d'un nœud circulaire soutient un
cylindre en cristal posé verticalement entre deux colonnes torses
ciselées et ornées de rinceaux travaillés à jour qui descendent en
accolade. 11 renferme une dent de sainte Gertrude , des reliques
de sainte Pétronille, un fragment d'os de saint Adalbert, évoque
de Prague , et des restes de sainte Pélagie. Les colonnes sou-
tiennent un dôme surmonté de la statue de sainte Gertrude debout,
la crosse (non voilée) et le livre en mains. H. 0.451, diam. de
la base 0.16.
6° Ostensoir-reliquaire en argent reposant sur une base à six
lobes. La tige hexagone est garnie d'un nœud circulaire et surmon-
tée d'une plaque ornée de fruits et de fleurs en ciselure et accostée
de chaque coté d'un bras en forme de double modillon. Les reliques
1 La donatrice appartenait à la brandie des Schroots qui portait : d'argent à trois
chevrons de sable.
OSTENSOIR-RELIQUAIRE
-■
— 263 —
de saint Sylvestre , de saint Valentin , des saints Innocents et de
sainte Olympe martyrs, sont enchâssées dans un cylindre en cristal
allongé et posé horizontalement : celui-ci est orné d'une crétage
fleuronné que surmonte un édicule cylindrique portant la croix. —
Les plaques circulaires en argent qui terminent les extrémités du
cylindre présentent les armoiries ciselées des donateurs. Sur le pied
de cet ostensoir on lit : Gerardus. Stevart. x et. Hermanus.
Hustin. 2 canonici. hujus. ecclice. Tungren : ad. Del. gloria :
honoreque. stor. quor. reliquiœ. hic. sunt. dederunt. A0 1634.
Haut. 0.40, diamètre de la base 0.16.
7° Ostensoir-reliquaire en argent. Sur la hase à six lobes se
trouvent l'Annonciation de la sainte Vierge, l'Adoration des mages et
d'élégants rinceaux ciselés. Le pied repoussé et estampé soutient la
tige hexagone garnie d'un nœud à six boutons en ciselure. Un
médaillon circulaire , entouré de rayons chargés de deux branches
de laurier, renferme des reliques de sainte Philomèle ; un globe
portant la croix couronne toute la composition. Sur le pied se
trouve :
In. honorem. Del. B. Marie. Virginis. et. omnium, sanc-
torum. ex. libérait, donalione. piarum. mentium. D. Arnoldus.
Gysbrechs. me fîeri. fecit. anno. 1604.
Le médaillon et l'auréole sont modernes. H. 0.37, diam. de
la base O.U.
8° Un ostensoir-reliquaire en argent ciselé et repoussé. Le
' La famille Stevart porte : écarlelé au premier et au quatrième de. . . . chargé d'un
lion couronne de armé et lampassé de.... au second et au troisième de
chargé d'une feuille de trèfle de. . . .
« Cette famille vient d'Ecosse et porte les mêmes armes que les Douglas, qui prirent
» ensuite le nom de Stewart, d'une fonction qu'ils avaient à la cour d'Ecosse. Ce nom
» dégénéra en Sluart, mais fut conservé intact dans notre pays. »
V. Catalogue du musée de Liège, p. 26.
* Le chapeau et les floches de protonotaire apostolique timbrent les armoiries de
H. Hustin qui porte : parti au 1 et au 4 de. . . . chargé d'un dextrochère armé d'une
épée de. . . . au 2 et au 3 de. . . à trois croissants de. . . . placés 2 et un.
— 264 —
pied circulaire supporte une auréole allongée, garnie au centre
d'un petit cylindre octogone en cristal posé verticalement qui ren-
ferme des reliques de saint Servais. Deux anges soutenant une
couronne terminent ce reliquaire moderne. H. 0.3G8.
Reliquaires en forme de statuettes.
Les douze statuettes-reliquaires dont nous allons donner une
description succincte ornaient jadis une grande châsse conservée
dans le trésor de l'église en 1433 *. Ces statuettes n'offrent en
général qu'un intérêt religieux. Les draperies tourmentées, l'exa-
gération de certaines parties , le défaut d'expression des physio-
nomies, enfin l'ensemble de la composition indiquent que c'est
l'œuvre d'artistes que n'inspiraient plus les belles traditions du
moyen âge.
Les détails , si l'on en excepte ceux des statuettes représentant
saint Jean-l'Evangéliste , saint André , saint Jean-Baptiste et le
Sauveur, sont négligés.
Voici la description de ces reliquaires: 1° une statuette du
Sauveur en argent doré en partie , debout sur une base octogone
en cuivre doré et en argent. De sa main gauche, il soutient un
globe en cristal surmonté d'une croix à oriflamme flottante; de sa
droite il bénit à la manière latine. Le nimbe crucifère fixé derrière
la tète du Sauveur est orné de pierreries et d'un camée. En guise
de bille il porte à la hauteur de la poitrine une améthyste entourée
de perles. Au bas de la robe se trouve l'inscription niellée Salvator
minuit. . . et au cou de la statuette est suspendue , à une longue
chaîne en or, une croix pectorale chargée de quatre-feuilles et
1 Voir : Archives de l'église, Registre N° 57 du Catalogue, f. 2^5.
Depuis nombre d'années ces statuettes ornent la maître-autel dans les grandes solen-
nités.
— 265 —
émailièe d'azur ', — • l»'c moitié du XVe siècle. Hauteur 0.368
millimètres ;
2° Une statuette de la sainte Vierge en argent, en partie
doré, debout sur une base octogone; la tète de la mère du Sauveur
est ornée d'une couronne trèflée garnie de pierreries et de perles
fines. Elle tient de la main droite un petit reliquaire en forme de
tourelle contenant de lacté béate Marie Virginie et sur le bras
gauche elle porte l'enfant Jésus. Sur le bord de sa robe on lit:
Sancta Dei genitrix ora pro nobis.
Une longue chaîne enroulée autour du cou de la Vierge supporte
une statuette de sainte Barbe, en argent doré, debout sous un dais
gothique. — lre moitié du XVe siècle. H. 0.360 millimètres.
3° Une statuette de sainte Anne, en argent doré en partie, debout
sur une base hexagone en cuivre doré. Elle porte sur le bras
gauche la sainte Vierge assise, tenant l'enfant Jésus sur ses genoux
et offre de la main droite un fruit au divin enfant. Le médaillon
placé au milieu de la poitrine contient des reliques. — lre moitié
du XVe siècle. H. 0.366 millimètres.
A° Une statuette de saint Pierre en argent doré en grande
partie. Le saint est représenté debout sur une base hexagone en
cuivre doré. De sa gauche il tient un livre ouvert; dans sa droite
il porte la clef; à côté de lui un reliquaire cylindrique, posé verti-
calement et terminé en forme de dôme surmonté de la croix ,
renferme deux dents du saint et un des clous de sa croix. —
lre moitié du XVe siècle. — Le nimbe est moderne. H. 0.372.
5° Une statuette de saint Paul en argent doré , debout sur une
base hexagone en cuivre doré ; de la main gauche il tient un
livre ouvert ; dans la droite , il porte un glaive. Sur le pied on lit :
Sanctus Panlust. Le reliquaire de même forme que le précédent
1 On croit généralement que c'est celle que portait le dernier doyen du chapitre Robert
De Bellefroid , chanoine honoraire de Saint-Lambert.
XXIX XXII 17
— 266 —
renferme un fragment d'os. lie moitié du XVe siècle. •— Le
nimbe est moderne. H. 0. 372.
6° Une statuette de saint Jean-Dapliste, debout sur un pied
octogone en argent ; le manteau de ce saint est doré et couvert
de niellures. De sa main droite il montre l'agneau sans tache nimbé,
qu'il porte sur le bras gauche. 11 tient dans la main gauche une
longue croix fleurdelisée ornée de perles et à oriflamme flottante,
brisée en partie.
Nous pensons que ce reliquaire a servi jadis à l'exposition du
saint Sacrement et que le médaillon circulaire protégé par un béryl
qui se trouve au milieu de la poitrine du saint recevait l'Hostie
avant que la discipline moderne n'eût défendu d'exposer le saint
Sacrement avec des reliques. Fin du XIVe siècle. H. 0.335.
7° Une statuette de saint Jean-1'Evangéliste , en argent doré
en partie, debout sur un pied octogone en argent ; dans la main
gauche il tient un élégant calice à six lobes , dont la tige garnie
d'un nœud orné de hachures et de six boutons supporte une coupe
ronde d'où s'échappent deux salamandres. « Il élève trois doigts
de la main droite pour témoigner de la vérité de la sainte Trinité.
Fin du XlVe siècle. H. 0.355.
8° Une statuette de sainte Hélène , en argent doré en partie ,
debout sur une base en cuivre doré. Elle porte la couronne im-
périale, tient une croix de la main droite et un livre ouvert dans
la main gauche. Sur le pied se trouve : Sancta Helena. A côté
d'elle un reliquaire cylindrique, posé verticalement et surmonté du
symbole de la résurrection , contient des fragments de la vraie
1 « Un piètre d'idoles ayant dit à cet apôtre qu'il croirait à son Dieu s'il avalait un
» calice rempli de poison. Saint Jean accepta ; mais Dieu permit que la mort sortit de
» la liqueur avant d'être bue, sous la forme d'un reptile. » dk Caumont. Abécédaire
d'archéoloyie , p. 235.
Quia ul Sanclus Isidorus scribit in libro de patribus novi testament! , bibens
lœtiferum kuwlum , non solum evasit periculum , sed eodem prostratos poculo in
vilœ reparavil slatum. » Molanus. De picturis et imaginibus sacris. cap. LXXI1I, p. 134.
— 2G7 —
croix et du sépulcre de Jésus Christ. lre moitié du XV'' siècle. Le
nimbe est moderne. Hauteur O.-iOO millim.
9" Une statuette de saint André, en argent doré en partie,
debout sur une base en cuivre doré. Sur le pied droit sont ciselées
les principales scènes du martyre de ce saint. De la main droite ,
il tient un livre ouvert; de la gauche, sa croix au milieu de laquelle
sont enchâssées des reliques. Près de lui un reliquaire cylindrique,
posé verticalement et orné au sommet de roses et d'une couronne
fleuronnée d'où s'échappe un dôme surmonté de la croix , renferme
un fragment d'os de ce saint. XVe siècle. Le nimbe est moderne.
Hauteur 0.4-05.
10° Une statuette de sainte Catherine, en argent doré en partie.
La sainte est couronnée ; elle porte de la main droite un livre ouvert
et tient de la gauche une épée. A ses pieds se trouvent la roue brisée
et une tourelle contenant un fragment du crâne de sainte Catherine et
une parcelle du mont Sinaï. lre moitié du XVe siècle. Le nimbe
est moderne. Hauteur 0.350.
41° Une statuette de saint Christophe, en argent doré en partie,
debout sur une base semi-circulaire en cuivre argenté et ornée
de belles ciselures de forme géométrique.
Le saint vieillard s'appuie de la main droite sur une branche
d'arbre renfermant des reliques et soutient sur l'épaule gauche
l'enfant Jésus. Il est figuré enfoncé dans l'eau jusqu'à la cheville *.
— Seconde moitié du XVe siècle. Hauteur 0.355.
12° Une statuette de saint Sébastien , en argent doré en partie,
debout sur une base circulaire en argent. Il est représenté percé
de flèches et attaché à un arbre dont le pied est formé par un
fragment considérable de l'humérus du saint. Seconde moitié du
XVe siècle. Hauteur 0.574.
Une base en cuivre doré de forme hexagone renferme les
1 Voir Molaiws , tir pictyris et imaginibus xacris. Cap. LXVI, p. 121.
268 —
reliques de saint Barthélémy. La sfalue en argent qu'elle suppor-
tait fut, ainsi que celle de sainte Lucie, brisée par des voleurs
dans la nuit du 20 au 21 février 1607 *.
Reliquaire de saint Laurent.
Reliquaires en forme de bras.
Le trésor de N.-D. possède sept reli-
quaires de cette forme. Deux seulement
méritent de fixer notre attention. Les
cinq autres en bois peint et doré ren-
ferment des reliques de saint Materne ,
des martyrs de Trêves et de Gorcum ,
une partie d'un os du bras de saint
Marlius , martyr, et un fragment d'os
de saint Clément.
Ces reliquaires présentent la forme
d'un avant-bras , drapé d'une manche
large à plis retombants : trois doigts
levés semblent, par leur position, at-
tester la vérité du mystère de la sainte
Trinité.
Deux de ces reliquaires sont recou-
verts de plaques d'argent et ornés de
bandes de cuivre doré, découpées en
quatre-feuilles ou chargées de rinceaux
1 1667 21 feb. de nocte lalrocinium comissum est in sacristia nostra cancellis
ferreis unius feneslre vi eujusdam ligni sis et fracta cista ferrea thésaurus
ublulus est.
Voir Archives de l'église, N° 10 du catalogue, f° 331.
Dinœ effigies S'œ Lucie et S>'1 Bartholomei fractœ par furem.
Voir Archives de l'église, Registre N° 14 du Catalogue, f° 180.
Nous trouvons encore deux autres statuettes en argent mentionnées dans les cata-
logues de 1752 et 1790. Elles représentaient la sainte Vierge et saint Materne et étaient
placées aux deux côtés du reliquaire de la sainte croix. Ce furent probablement celles
que le trésorier Ant. Mounial fut forcé de vendre à Hambourg en 1794.
Annales de l'Académie d'Archéologie le Belgique, iXXIl, 2'Sériet,JI
Anven-.
BUSTE REUÇUAIRE.
— 269 —
en filigrane de vermeil entourant des pierreries montées en cuivre
doré.
Ces deux reliquaires renferment une vertèbre et un os du bras
de saint Materne, de saint Laurent et des fragments des os du
bras et de la tête. Fin du XIIIe et commencement du XIVe siècle.
Hauteur 0.56 et 0.54.
Reliquaires en forme de bustes.
1° Un buste en cuivre doré et repoussé de sainte Pinosa, martyre.
Ce buste repose sur une base octogone irrégulière , soutenue par
quatre lions.
Les draperies ondulées sont ornées de niellures. Au milieu de
la poitrine entre deux bandes de cuivre posées verticalement et
chargées de rinceaux repoussés se trouve un cabochon en cristal
entouré de quatre rayons aux formes trèflées alternant avec des
pierreries. Le haut de la robe est garni d'une bande de cuivre doré
sur laquelle on lit : Caput. Sancte. Pinose. filie. régis. Cicilie.
La face en cuivre peint est encadrée par une riche chevelure
dorée retenue par une bande ornée de rinceaux. Une couronne
trèflée et ornée de pierreries dissimule l'ouverture du reliquaire
renfermant le crâne entier de la sainte. XIVe siècle. H. 0.4-32.
2° Un buste en cuivre doré de sainte Olive. La base octogone
irrégulière repose sur quatre lions dorés. Le buste en cuivre doré
uni est garni à la hauteur du cou d'une bande ornée d'un cabochon
en cristal et chargée de roses et de fleurs en cuivre appliqué. La
tète en bois peint et doré renferme un fragment considérable du
crâne de cette martyre, compagne de sainte Ursule. XVe siècle.
H. 0.425.
Agnus Dei , etc.
1. A un cordon en soie verle est suspendu un médaillon de
— 270 —
forme circulaire renfermant unAgnus Uei*. Il est recouvert decorne
translucide retenu par un petit cadre en cuivre émaillé et protégé
par une 'croix en cuivre légèrement pâtée. Celle-ci est chargée
de rinceaux émaillés et ornée au centre d'un écusson carré, repré-
sentant d'un côté un agneau pascal, la tète nimbée et portant une
croix à oriflamme llottanle ; de l'autre, le buste de la sainte Vierge
orné d'un nimbe. Ces deux figures sont en émail translucide. Sur
la bordure circulaire, garnie d'émaux, on lit d'un côté : Agn. D.
miserere mei cri. aïolis, et de l'autre : Ave Maria gracia pletia
Dus tecu. Bn. XIVe siècle. Diamètre 0.0G7.
2. Dans une petite caisse en bois sont enfermées 33 reliquaires
de forme ovale , portant d'un côté la figure du saint dont les reliques
se trouvent sous cristal de l'autre côté. Une miniature byzantine
représentant la sainte Vierge, nigra sed formosa , et une autre
montrant la face du Christ méritent une mention spéciale.
3. Une caisse plus petite que la précédente renferme une chaîne
et quatre croix modernes en or, huit médailles de Léon XII,
d'Innocent XI, de Clément VIII et de Grégoire XVI; une médaille
en argent portant en exergue Quos Dens conjunœit homo non
separet, et une autre avec une inscription allemande et la date
de 1635.
4. Sur une large corniche moulurée et ornée d'une bande con-
tinue de quatre-feuilles ajourées s'élèvent deux colonnettes torses
surmontées de pinacles à jour.
Le tympan, dont les courbes conduites en doucine sont ornées
de crochets à larges feuilles et surmontées d'un fleuron ouvert,
est garni d'un médaillon circulaire émaillé et entouré d'orne-
ments ajourés.
1 Ce sunt de petites rondelles de cire que le pape bénit la semaine après l'àipies et
que Ton distribue au peuple pendant l'octave de Pâques ou qui sont envoyées dans
toute la chrétienté. L'Agnus Uei renfermé dans ce médaillon est du Pape Jean XXII,
(1316-1334).
'
COFFRET A RELIQUES
phyTactèRe.
— 271 —
L'espace compris entre les deux colonnettes est occupé par
un autre médaillon circulaire entouré d'anges ailés et renfermant
un Agnus Dci. Fin du XVme siècle. Hauteur 0.18.
5. Un triptyque à peu près carré en bois de chêne peint en
rouge et parsemé d'étoiles dorées.
En ouvrant les deux volets , on voit la relique l fixée au centre.
Elle est placée sous cristal , garnie d'un cordon de perles fines et
entourée par un petit cadre en argent.
Des pendeloques, représentant des lettres gothiques en vermeil
découpé; des fleurs et des médaillons entourent ce cadre qui est
surmonté d'une broderie au long point qui représente le Père éternel
bénissant et entouré d'une auréole.
Sur le volet droit se trouve représenté un ange qui soutient de la
main droite une banderolle portant : Ave. Maria, gta. plena.
Uns. tecum.
Sur le volet gauche on voit la sainte Vierge debout , la main
droite appuyée sur un livre; à ses pieds se trouve le lis virginal.
Ces deux sujets sont peints sur un fond d'or parsemé de roses à
six feuilles. XVe siècle. H. 0.48, largeur 0.46.
6. Un coffret en bois de chêne recouvert de cuir et orné de
neuf losanges en cuivre repoussé et émaillé qui représentent des
fleurs de lis et des lions allongés et efflanqués, entourés de clous
protecteurs.
Sur le bas-côté droit un médaillon circulaire, en cuivre repoussé
et émaillé de blanc , représente un roi couronné , assis sur son
trône, tenant de la gauche un sceptre fleurdelisé et soutenant
de la droite un globe surmonté d'une croix.
Le couvercle est garni d'une bandelette en cuivre émaillé ,
qui représente des lis alternant avec des châteaux à trois tours
crénelées 2.
1 De capitigeo. béate. Marie. Virginia,
- « Tout le monde sait que la fleur de lis est le signe héraldique des rois de France
» et que les trois tours étaient les armoiries de Blanche de Castille , mère de saint Louis.
9.72
La serrure en cuivre est ciselée en forme de damier. L'intérieur,
garni d'une grossière toile blanche, renferme des reliques de saint
Gebandus, de saint Romain martyr, de saint Hyppolite et de ses
compagnons, de saint Laurent, de saint Damase et de saint Jean;
un petit Agnus Dei , un fragment de pierre et quelques reliques
sans nom. XHIe siècle. Haut. 0.10, long. 0.20, largeur 0.10.
7. Un reliquaire en bois de chêne à peu près carré. Le centre
en est occupé par une petite plaque de marbre rouge , retenu par un
cadre en cuivre; aux coins se trouvent les quatre emblèmes évan-
géliques entourés de rinceaux ciselés. Le bord est orné d'une
bande continue en cuivre doré couverte de rinceaux au repoussé.
XlVe siècle. H. 0.127, 1. 0.095.
Châsses.
1° Châsse en bois recouverte de velours rouge présentant la
forme d'un édifice terminé par un toit aigu. L'un des côtés est
accosté de deux colonnettes en cuivre ornées d'un annelet à
triple tore dont les chapiteaux , garnis de deux rangs de feuilles
d'acanthe, retombent en forme de crochet et soutiennent la corniche
saillante qui encadre les deux faces latérales. Un cordon chargé
de filigranes et de cabochons montés en cuivre dessine cinq médail-
lons circulaires encadrés dans un parallélogramme allongé. Celui-ci
en supporte un autre où se profilent quatre arcs de cercle chargés
d'arabesques en filigrane et de pierreries. Les médaillons en
cuivre ciselé et repoussé qui ornent ce côté représentent l'Annon-
ciation de la sainte Vierge , la Visitation de Marie , l'Annonce de
la naissance du Christ aux Bergers et la Naissance du Sauveur.
» Le lion allongé et efflanqué appartenait an royaume de Léon depuis longtemps uni
» à la Caslille sous la domination de la famille de la reine Blanche ; les deux royaumes
« une fuis réunis on en cumula les ai moines, « Dis Caumont, Abécédaire d'ar-
i héologie , p, 294.
— 273 —
Le médaillon central est occupé par une croix légèrement pâtée
en cuivre ciselé portant l'inscription INRI en émail champlevé. Le
soleil en émail rouge se trouve à droite et la lune en émail bleu
se trouve à gauche de la croix dont le cœur était jadis orné d'un
cabochon. De l'autre côté de cet édifice sept colonnettes en cuivre
cylindriques et détachées présentent au milieu de leur hauteur un
annelet composé de trois tores. Elles reposent sur une imposte
peu élevée et portent six arcatures continues et trilobées. Le fond
en cuivre repoussé et parsemé de petites losanges ornées de fleurs
existe encore en partie ; mais les six statuettes ont disparu.
Chacun des petits côtés est orné d'une statuette en bois peint et
doré, représentant l'une la sainte Vierge et l'autre saint Materne
(XVIIe siècle). Ces statuettes, un peu plus élevées que celles dont
était ornée l'une des grandes façades , sont encadrées par quatre
petits ornements en cuivre de la forme d'une épicycloïde à six
lobes, qui occupent une partie du gable où ils étalent leurs
feuilles concaves autour d'un clou à grosse tète.
L'auréole de la sainte Vierge , en émail rond , est ornée de
cercles et de feuilles de trèfle qui s'entrelacent et se combinent :
celle de saint Materne a disparu et a été remplacée par un cabochon.
Le toit très-aigu est recouvert de plaques d'argent ardoisées et
bordé de cabochons recouvrant de pieuses vignettes qui alternent avec
de petits émaux champlevés. Voici , d'après l'inventaire qui en fut
dressé en 4677 , la liste des reliques renfermées dans cette
châsse : des ossements de saint Servais, de sainte Elisabeth ', de
saint Julien , de saint Urbain et des onze mille vierges ; le crâne
de sainte Mechtilde ; des reliques de saint Pie , de saint Grégoire,
de saint Sylvestre , de saint François , de saint Paul et de
sainte Sabine ; un fragment de la colonne du Christ et plusieurs
1 V. de MontaliiMBEHT , Hist. <l<: sainte Elisabeth de Hongrie, p. 101.
— 274 —
autres reliques (XIIIe siècle). Hauteur jusqu'à la corniche 0.273 ;
hauteur totale 0.50 ; longueur 0.885 ; largeur 0.2G5.
2° Châsse en bois recouverte de velours rouge et construite en
forme de croix latine.
Les deux faces latérales sont ornées de médaillons circulaires
en argent ciselé et repoussé représentant, d'un côté la Consécration
de saint Materne, de l'autre côté Euchère et Valère recevant de
saint Pierre le bâton pastoral qui doit rappeler leur jeune
compagnon à la vie. Ces deux médaillons accostés de deux
pilastres cannelés qui soutiennent la corniche saillante sont séparés
par le croissillon avancé et orné d'une niche circulaire : celle-ci
est garnie d'une petite statuette en argent représentant l'apôtre
saint Jacques. Le reliquaire, placé au milieu de la poitrine du saint,
renferme un fragment de la vraie croix *.
Deux pilastres cannelés, placés de chaque côté de la niche,
supportent la corniche ornant les quatre faces de la châsse et
s'appuyeut sur une base moulurée soutenue par quatre petits pieds.
Le gable placé au-dessus de chaque statuette est orné de palmes
entrecroisées. La statuette , placée de l'autre côté , représente l'apôtre
saint Mathias ; les médaillons, Euchère et Valère ressuscitant
Materne, puis les apôtres ouvrant le tombeau de la sainte Vierge
vide el rempli de roses. Les petits côtés sont ornés de deux
médaillons circulaires représentant d'un côté la Réception de la
sainte Vierge au temple, de l'autre côté saint Materne prêchant
la foi dans la Tongrie. 2
Le toit de forme convexe est recouvert de plaques en argent
repoussé. Au pied de la statuette de saint Mathias se trouve gravé
le nom de l'orfèvre : L. Stox. fecit. (XVIIe siècle). Hauteur 0.575,
longueur 1.075, largeur 0.45.
1 Le nimbe du suint esl moderne ; la statuette esl du XV' siècle.
Cette (.'liasse a été restaurée sur les ordres du conseil de fabrique, il y a dix ans,
pai M Lambert Petcrs de Tongres,
- 275 -
3° Châsse en bois'2 recouverte de velours rouge de même forme
que la précédente. Les médaillons en cuivre argenté représentent
d'un côté sainte Sophite et sainte Faustine ; de l'autre le Sauveur et
la sainte Vierge. Les deux statuettes en bois peint et doré repré-
sentent deux évêques.
Le couvercle de forme convexe est en bois ; jadis doré. Celte
châsse renferme, d'après la liste qui en fut dressée en 1690 par
le prêtre-trésorier Lamberli , les reliques de saint Laurent martyr,
de saint Hippolyle et de ses compagnons , de saint Romain , de
saint Damase pape, de sainte Elisabeth, de sainte Valentine, de
saint Servais , de sainte Mechtilde, de saint Sylvestre , de saint
Vincent, de saint Paul, de saint Pierre, de saint Jacques, de
saint Urbain , deux des crânes des onze mille vierges , des osse-
ments de saint Léon , de sainte Barbe et de plusieurs autres saints
et saintes 1 (XVIlIe siècle). Hauteur 0.560; largeur 0.4.-03; lon-
gueur 1.040.
Reliquaire de saint Materne.
Le bâlon pastoral de saint Materne.
Cette relique de notre premier évèque est un simple bâlon de
voyage en bois légèrement recourbé à la partie supérieure et garni
au bas d'un pivot en cuivre. Elle avait échappé à tous les désastres
avant le grand incendie de 1677. Gravement endommagée par ce
terrible fléau, le chapitre eut soin d'en recueillir les débris qu'il
lit enchâsser dans une crosse en argent, portant le chronogramme
et l'inscription suivants :
sanCte tongrorUM apostoLe InterCeOe pro nobIs.
Pastorale, peduin. theca. servatur. in. ista.
Divi. Materni. mytra. qui. triplice. clams.
Primus. apud. Tungros. Iws. convertendo. resedit.
1 11 y a entre autres reliques des fragments considérables d'us de sainte Faustine recueillis
au cimetière de Sainte-Claire à Rome.
— 276 —
Cette crosse de forme circulaire est composée de plaques
d'argent reliées entre elles par des annelets. La volute très-courte
repose sur un nœud hexagone orné de feuillages et du buste de
saint Materne en gravure et se termine en feuillage recourbé. Une
partie de la volute et de la hampe est à jour et garnie de corne
translucide, ce qui permet de voir la relique l. XVIIIe siècle.
H. 1.38 avec la pointe.
Masses, etc.
Deux masses en argent de forme hexagone. La hampe garnie
de cinq annelets moulurés est terminée par un chapiteau circulaire
orné de feuillages en gravure. Sur l'une des masses se trouve la
statue en argent de la Vierge debout, soutenant l'enfant Jésus, et
sur l'autre celle de saint Materne également debout tenant de la
droite le bâton pastoral et soutenant de la gauche une église à trois
tours, emblème de son triple évèché 2. XVIIe siècle. H. 0.98.
Deux autres masses en bois garni de cuir et de larges anneaux
en argent , chargés de rinceaux en émail champlevé, sont lerminées
par un globe de même métal. Au-dessus de celui-ci , on a placé de
grandes plaques en argent repoussé et estampé, représentant
N.-D. de Tongres, couronnée par deux anges. Au bas se trouve
le chronogramme suivant :
In te aUXILIatrICe
ConfIDIMUs.
Binon fecit.
XVIIIe siècle. Hauteur totale 1.88.
Un index, en argent de forme hexagone effilée, terminé par une
1 Cette crosse est l'œuvre de Porfévre Binon, dont nous trouvons le nom marqué au
bas de la hampe.
- Ces masses étaieul autrefois portées dans les solennités pai les bâtonniers du prévôl
i't du chapitre,
— 277 —
petite main de même métal. Sur une des faces on lit: De Requite.
decan. Tongr. XVIIIe siècle. Longueur: 0.37.
Un index en bois d'ébène garni d'annelets et terminé par un
petit ornement en argent. Moderne. Long. 0.43.
Croix d'autel et de procession.
\o Ancienne croix d'autel mobile recouverte de plaques en argent
ornées de feuillages et de rinceaux en gravure. Le nimbe en cuivre
émaillé moderne du Christ placé au point d'intersection est au centre.
Les emblèmes évangéliques sont ciselés dans les médaillons circu-
laires qui précèdent les extrémités fleurdelisées de la croix. Au
revers, on voit les figures de la Vierge, de saint Servais, de saint
Lambert et de saint Hubert, ciselées et entourées de rinceaux; les
médaillons circulaires représentent saint Materne, saint Lambert,
sainte Catherine et saint Egide et les espaces intermédiaires sont
ornés de rinceaux. XVe siècle. H. 0.321. Largeur 0.253. Le
Christ moderne a une hauteur de 0.012.
Cette croix se trouve aujourd'hui sur une hampe moderne en
bois peint.
2° Une croix de procession en argent.
La hampe en bois de forme hexagone est recouverte de lames
en argent dorées en partie et ornées de feuillages sur fond niellé.
Elle est garnie de quatre nœuds circulaires en cuivre doré et ciselé
avec six boutons circulaires ornés des bustes, repoussés et ajourés,
de la sainte Vierge et de saint Materne alternés. La douille forme
un édicule hexagone reposant sur un chapiteau à feuillages dans
lequel s'emboîte la hampe. Les statuettes en argent de la sainte
Vierge , de saint Pierre , de saint Materne , de saint Servais , de
saint Lambert, de saint Remacle et de saint .... , séparés par des
contreforts à pinacles, occupent les niches aménagés dans chacun
des côtés. Au centre de la galerie trèflée et découpée à jour qui
— 278 —
couronne cet édicule s'élève une tige hexagone percée de lenes-
trages soutenant la croix.
Celle-ci est formée de plaques d'argent, dorées en partie.
Le Christ couronné d'épines est couvert d'une ample draperie ;
un nimbe circulaire en émail translucide occupe le centre de la
croix.
Les emblèmes évangéliques entourés d'anges portant les instru-
ments de la Passion sont ciselés dans les médaillons en quatre-
feuilles qui terminent les branches. XVe siècle. Hauteur totale
2.50. Largeur de la croix 0.018, Haut, du Christ 0.012.
La croix semble avoir subi une malheureuse restauration en
1G37, date marquée au revers.
3° Une croix de procession en cuivre argenté et doré, supportée
par un chapiteau circulaire, doré et orné de feuillages argentés.
La hampe en bois de forme circulaire est entourée de plaques
en argent reliées par quatre annelets dorés. XVlIIe siècle. H. 2.82.
4° Une croix d'autel en bois d'ébène; le Christ et quelques orne-
ments sont en argent. XVIIIe siècle H. 1.055.
5° Une croix d'autel en bois ; le Christ, le titre et l'emblème de
la mort sont en argent. XVIIIe siècle. II. 0.024.
Calices.
1° Un calice, avec patène et cuiller en argent doré, dont le
pied circulaire repose sur une base à six lobes ciselée et garnie d'un
pied droit orné de quatre-feuilles ajourées.
La tige hexagone très svelte est munie d'un nœud gravé et ciselé
orné de six boulons portant des fleurs de lis découpées. La fausse
coupe et le pied de la tige sont ornés d'une ciselure à jour. lrc moitié
du XVe siècle. 11. 0.233. Diam. de la base 0.16; diamètre de la
coupe 0.11.
Dans l'intérieur du pied , sur une plaque cachant l'ancienne
inscription , se trouve :
t Bidl voor de ziele va» Ch. Jo. Labbée 1S°28.
: iotfie de Belgique tXXIi, 2e Série, t 11
CROIX DE PROCESSION
'
LÙÂ S -%fx*f&r, s3n#ers
— 279 —
2° Un calice, avec patène et cuiller en argent doré, dont le
pied est octogone. La tige, le nœud et la fausse coupe sont ornés
d'arabesques estampés. Au-dessous du pied on lit: H. D. Cours
dono dédit S. n. A° 1750. Hauteur 0.200. Diam. de la base
0.15. Diam. de la coupe 0.095.
3° Un calice avec patène et cuiller en argent doré en partie. Le
pied est octogone ; la tige et le nœud portent des tètes d'anges
et de rinceaux ciselés et repoussés.
La fausse coupe est ornée des quatre symboles évangéliques ,
entourés de rinceaux estampés et ciselés. XVIIe siècle. Haut. 0.253.
Diamètre de la base 0.155. Diam. de la coupe 0.092.
4° Un calice , avec patène et cuiller en argent doré , dont le
pied circulaire repose sur une base à six lobes ornée de fleurs
de lis ciselées , repoussées et entourées d'une bordure de quatrc-
feuilles ajourées. La tige et la fausse coupe sont en feuillages
ciselés. Le nœud est garni de six boutons représentant des tètes
d'anges ciselées et repoussées. XVIIe siècle. Haut 0.2G5. Diam.
de la base 0.175. Diam. de la coupe 0.41.
5° Un calice avec patène et cuiller en argent doré, très-simple.
En-dessous du pied octogone, orné d'un Christ, on lit :
Sam altaris plebaniœ anno 1760 R. Van Herch p. H. 0.257
Diam. du pied 0.16. Diam. de la coupe 0.10.
6° Un calice en argent avecpatène et cuiller en argent doré. Sur
la base octogone qui supporte un pied circulaire on lit :
H. SAREN. A. T. — VAS SN. 0. P. N.
1739. H. 0.265. Diam. de la baseO.155.Diam.de lacoupeO,098.
7° Un calice en argent doré uni. La fausse coupe , le nœud et
la base sont ciselés. Au pied de la tige se trouve un Christ en
croix également ciselé. En-dessous du pied circulaire on lit :
J. II. Van Bloer.
XVIIIe siècle. Haut. 0.31. Diam. de la base 0.174. Diamètre
de la coupe 0. 107.
— 280 —
8° Un calice on argent doré. Le pied en cuivre doré à six lobes
coupés porte six émaux ehamplevés entourés de rinceaux et de
feuillages ciselés et repoussés.
La tige hexagone est gravée et le nœud est orné de six boutons
avec le saint nom de Jésus précédé de la croix. La fausse coupe
garnie de six feuilles d'acanthe est richement ciselée. Autour de la
coupe on lit : Calicem salutaris accipiam et nomen Domini
ïnvocabo.
La patène est ornée au centre de la ligure du suaire de sainte
Véronique gravée. (Don fait par M. le doyen Hcinartz en 1859).
H. 027. Diamètre de la coupe 0.107. Diam. de la base 0. 1G5.
Burettes.
1° Un plateau ovale en argent; la bordure est ornée de quatre
têtes d'anges ailés, de fruits et de feuillages repoussés et ciselés.
En-dessous on voit :
Capitulam Dongrensis (sic)
1652.
Diamètre 0.56 sur 0.41.
Durcîtes en argent repoussé et ciselé. H. 0.202, diamètre de
la coupe 0.10.
2° Un plateau ovale en argent dont la bordure est ondoyante de
même que celle des burettes. 1777.
3° Un plateau en argent avec burettes de même sans ornement
ni inscription.
4° Un plateau en argent avec burettes de même métal. Il n'y a
pas d'ornements, mais l'inscription prouve qu'ils ont été donnés par
J. II. VanBloer.
Pyxides.
1° Une pyxide ronde en cuivre doré. Le couvercle conique à
charnières est orné de légères ciselures et surmonté d'un petit
— 281 —
anneau qui servait à suspendre la pyxide au-dessus de l'autel dans
une bourse brodée sous un dais appelé ciboire. Fabrication
limousine. Diam. de la base 0.051 .
2° Une pyxide ronde en argent doré. Le couvercle est orné de
rinceaux formant des ogives qui encadrent le buste du Sauveur,
et ceux des douze apôtres en argent repoussé ; la fausse coupe
est ornée d'anges adorateurs , 1861. Haut. 0.09, diamètre de la
coupe 0.10.
30 Deux petites pyxides en argent de forme cylindrique sur-
montées de couvercles coniques terminés par des croix.
La partie inférieure sert de chrismatoire. Moderne. HauteurO. 1 1 .
Diamètre de la base 0.057.
Ciboires *.
1° Un ciboire en argent dont la coupe est dorée. Le pied circu-
laire orné de feuillages supporte une tige dont le nœud est garni de
festons et de feuillages. La fausse coupe, ciselée à jour, porte
trois médaillons ovales entourés de rinceaux, de fleurs et de fruits
ciselés et repoussés. Le couvercle en forme de dôme est orné de
feuillages et surmonté d'un globe portant la croix. Moderne.
H. 0.50. Diam. delà coupe, 0.128. Diam. de la base 0.16.
2° Un ciboire en argent doré. La base polygone est ornée d'un
pied droit en quatre-feuilles ajourées. Elle est garnie de pierreries
et de ciselures représentant les quatre symboles évangéliques , la
Cène et le Christ avec les disciples d'Emmaùs entourés de rinceaux
' Les ciboires avaient dans les premiers temps lafurme de tours (turres.) Ces tours
eucharistiques étaient tantôt conservées dans les sacristies ou les armarium, tantôt
suspendues au-dessus de l'autel ; c'est là l'origine des tabernacles adhérants à l'autel.
V. Santelli, de sacris synaxibus , c. 19. Perket, Catacombes de Rome , tom. IV,
pi. XIX n° 4. Mabillon, Vêlera analecta , tom. 11, p. 57. Gheg. Tir. De Gloria
marlyrum, lib. 1, c. 86. Mabillon, Disserl de aiym , c. 8. Gropper , De asserva-
tione Eucharistiœ , p. 451.
xxix xxil in
— 282 —
et de feuillages. Sur la partie supérieure de la coupe se trouvent
les deux inscriptions: Qui ma n ducat hune panem vivetinelernum,
et aperti sunt oculi eorum et cognoverunt eum.
Les angles de la tige hexagone, garnis par petits contreforts
qui séparent des émaux cbamplevés, représentent la sainte Vierge,
saint Materne, saint Servais, saint Lambert, saint Hubert et
saint Remacle.
Le nœud est garni de six boutons à autant de lobes émaillés et
ornés de pierreries et de fleurs.
La fausse coupe est formée de feuilles d'acanthe ciselées
repoussées et ornées de rinceaux.
Autour de la coupe on voit : + accipite et manducate et hoc
omnes : hoc est enïm corpus meum.
Au milieu du couvercle bordé d'un crétage de feuilles , s'élève
un édicule hexagone garni aux angles de contreforts et orné sur les
six faces de portiques trilobés abritant six anges adorateurs émaillés.
La flèche s'élève en forme de pyramide ardoisée, hérissée de crochets
et surmontée d'un crucifix fleuronné. 1853. Haut. 0.568. Diam.
de la base 0.175. Diam.de la coupe. 0.152.
Chrismatoires.
1° Un chrismatoire composé de deux vases cylindriques en
argent doré portés sur trois boules; les couvercles sont surmontés
de la croix.
Sur l'un se trouve la lettre 0 , sur l'autre la lettre G. Moderne.
Hauteur 0.087.
2° Un chrismatoire en argent de forme cylindrique posé verticale-
ment. Le couvercle est surmonté d'un globe supportant la croix.
Moderne. H. 0.224. Diamètre de la base 0.057.
— 283
Ostensoirs.
1° Un ostensoir en argent dont le pied circulaire repose sur une
base à six lobes ornée de rinceaux ciselés et de l'inscription suivante:
f Ad gloriam Dei et honorem Sancti Materni Maria de
Juede Dna de Werm fleri curavit anno 1597 . Orale pro ea.
Le pied orné des armoiries de la donatrice supporte la lige
hexagone garnie d'un nœud circulaire portant six têtes d'anges
ailées.
La monstrance jadis cylindrique, aujourd'hui remplacée par un
soleil , se trouve sur une base hexagone allongée.
Aux extrémités de cette base s'élèvent deux contreforts garnis
de niches abritant les statuettes de saint Materne et de sainte
Catherine. De jolis rinceaux travaillés à jour se profilent en
accolade le long de ces contreforts privés de pinacles.
Quatre colonnettes soutiennent un baldaquin en forme de tourelle
à six frontons surmontés d'une pyramide crochetée à jour et couronnée
d'une croix fleuronnée.
Une statuette de la sainte Vierge est placée dans l'étage infé-
rieur. La tourelle , les contreforts et les colonnettes sont du
XVe siècle. Le pied, le nœud et les rinceaux datent de 1597. Le
soleil , l'agneau pascal et deux anges adorateurs sont modernes.
Hauteur 0.562.
2° Un ostensoir en cuivre doré ; le pied polylohé est orné de fleurs,
de fruits et de tètes d'anges ailées au repoussé; la tige annelée
est garnie d'un nœud circulaire orné de trois têtes d'anges.
La monstrance en forme de cylindre s'élève d'une base polylobée,
ornée de six colonnettes supportant un baldaquin garni d'un crétage
de feuilles et surmonté d'un édicule circulaire que termine une
croix fleuronnée.
Cet édicule abrite une statuette de la Vierge immaculée et. sur
— 284 —
les culs-de-lampe attachés aux colonnettes se trouvent les statuettes
de la Vierge et de saint Materne .
Au bas de cet édicule deux anges soutiennent des banderoles
portant :
Ecce pa?iis angelorum.
foetus cibus viatorum. 1631.
Hauteur 0.740.
3o Un ostensoir en argent doré à double face. Le pied à huit
lobes est orné de huit médaillons en argent repoussé représentant
les quatre évangélistes, la Naissance du Christ, la Cène, le Cruci-
fiement et la Résurrection du Sauveur. Des feuillages émaillés et îles
grappes ciselées ornent la partie supérieure du pied qui soutient
une tige octogone ornée de fenestrages émaillés. Le nœud
repoussé et ciselé est garni de huit boutons émaillés portant
± M. D. C. C. C. L. X.
Des pampres en argent blanc s'élancent de la tige et soutiennent
en forme de console une base cylindrique ornée d'une bande
crénelée et des statuettes de saint Ambroise et de saint Grégoire.
La monstrance de forme cylindrique est accostée de six contre-
forts surmontés de pinacles et reliés entre eux par des arcs-
boutants ajourés. Sous ces arcs sont placés les statuettes de saint
Joseph, de saint Lambert, de saint Métropole, de saint Martin, de
saint Marcel et de saint Florentin , en argent blanc. Dans l'inté-
rieur du cylindre se trouvent deux anges adorateurs soutenant un
croissant garni de diamants.
Un dais arrondi , étoile et entouré de six frontons , couronne le
cylindre et supporte une tourelle dans laquelle est placée une sta-
tuette de la Vierge immaculée ; entre les contreforts de cet édicule
apparaissent deux anges tenant des instruments de musique. La
tourelle est dominée par une pyramide hexagone ardoisée et à
crochets, surmontée d'un crucifix fleuronné garni de diamants.
En-dessous du pied on lit :
— 285 —
M. Kusters, fabricant-orfèvre en style gothique à Liège, 1860.
Haut. 0.742. Diam. du pied 0.113.
Chandeliers d'autel.
1° Deux chandeliers d'autel en argent repoussé et ciselé. Le
pied circulaire repose sur trois lions; la tige cylindrique annelée
est ornée de feuillages , de fleurs , de fruits et d'anges.
Au pied on lit :
Capitulum. Tongrense.
fieri curavit 1644.
Hauteur 0658.
2° Deux autres chandeliers d'autel en argent repoussé. Ils ne
diffèrent des précédents que par la hauteur qui est de 0.605, sans
la pointe.
3° Deux chandeliers d'autel en argent repoussé et ciselé. Le
pied rond est soutenu par trois boules; la tige cylindrique annelée,
de même que le bassin, est ornée de feuillages.
Sur le pied droit on lit :
Mathœus Paulus Closar ,
archidiaconalis ecclesice Tongrensls
Deçà nus dédit an no 1718.
Hauteur 0.740, sans la pointe.
4° Huit autres chandeliers en argent dont le pied triangulaire
repose sur trois pattes de lion.
La tige annelée et le bassin sont ornés de feuillages. Acquis
en 1844. Hauteur 0.564.
5° Deux petits chandeliers d'autel en argent, à trois branches.
Modernes. (1843). Hauteur 0.585. Diam. du pied 0.17.
6° Deux girandoles à deux branches en argent repoussé et ciselé.
XVIIIe siècle. Hauteur 0.35, sans les pointes.
7° Deux girandoles à deux brandies en argent , modernes et sans
pointes. H. 0.27.
— 286 -
Encensoirs et navette.
lo Un encensoir en argent de forme courbe. Le couvercle est
formé d'une série d'arcs en accolade entrelacés qui encadrent de petites
ouvertures trèflées on composées de quatre-feuilles ajourées. 11 est
surmonté d'un édicule octogone à fenêtres géminées avec gable
crocheté garni de bustes et terminé par un clocheton à jour. Le
pied et la partie centrale de cet encensoir sont circulaires.
XVIe siècle. Haut. 0.31. Long, des chaînes 0.95.
2° Un encensoir en argent également de forme courbe. Le cou-
vercle offre une série de petites fenêtres avec pignons à jour garnies
de fleurons et surmontées d'un édicule octogone à fenêtres géminées
avec pyramide à jour.
La base et le milieu de cet encensoir sont circulaires. XVIe
siècle. Haut. 0.315. Long, des chaînes 0 96.
3° Un encensoir en argent de forme courbe. Le vase inférieur est
orné de dessins symétriques simples. Le couvercle est surmonté
d'un édicule octogone terminé par une pyramide ajourée. XVIIe
siècle. Haut. 0.38. Long, des chaînes 0.95.
-4° Une navette en argent coquille avec cuiller de même métal.
XVIIIe siècle. II. 0.1 16.
Bénitiers.
1° Un grand bénitier d'église en argent à six faces évasées, orné
au bas et au milieu d'un cordon mouluré et reposant sur trois
boules : l'anse est retenue par deux tètes de lion. XVIIe siècle.
Haut. 0.262 sans l'anse.
2° Un petit bénitier d'église en argent , à huit faces ornées de
légères ciselures. La forme générale est celle des balustres. XVIIe
siècle. Haut. 0.11.
ENCENSOIR
— 287 -
Lampes à cierges.
1° Une lampe à cierge en argent ciselé et repoussé. Le bassin
supérieur de forme circulaire est accosté de trois cariatides retenant
les chaînes. Un autre plus petit est relié au premier par six
modillons.
Sur le bord du bassin supérieur se trouvent les armoiries de la
donatrice * et la légende ex legato Barbara van Henis , quœ
obiit anno 1636. Haut. 0.521. Long, des chaînes 0.89.
2° Une lampe à cierge en argent repoussé. Le bassin supérieur
est circulaire et garni de quatre anges dont les bras tendus retiennent
les chaînes et dont les pieds sont posés sur le bassin inférieur orné
de tèles d'anges et terminé par une boule retenant l'anneau.
XVHe siècle. Haut. 0.523. Long, des chaînes 1.11.
3° Quatre lanternes en argent, composées d'ornements (leuronnés
et surmontées d'étoiles. Elles sont fixées sur une hampe en bois
garni de quatre annelets en argent; moderne. Haut, totale 2.48.
Haut de la lanterne 0.865.
Couronnes, sceptres, chapelets.
1° Une couronne ouverte, en argent doré, appartenant à la
statue miraculeuse de la sainte Vierge. Le bandeau est orné de
roses, de feuillages et de tètes d'anges en cuivre argenté et sur-
monté d'ornements fleuronnés à jour, terminés par des lis, des
feuillages et des boules. Une belle bague garnie de diamants orne
celte couronne. A l'intérieur se trouve l'inscription suivante :
D. Hermanus Hustin Decanus
D. Leonardus Paludanus canonicus
D. Egidius Vaes eapellanus
* La famille van Henis porte : d'argent aux trois chevrons (le sable accompagnés de
deux éludes en lïlief de même.
— 28S —
II. Lambertus Hubrechts sub-plebanus
Henricus Honthem
Jan Menten secretarius
Arnoldus Peœ consul
Joannes G a en Doclor
Willem Huysmans knaep van onse L. V. B.
Br Arnold Schaetzen Rentm?
van onse L. vrouive broderscap..
Fin do XVIIe siècle. Haut. 0.22. Diam. de la base 0.1G. Diam.
du couronnement 0.27.
2o Une couronne ouverte, en argent doré, composée d'ornements
fleuronnés surmontés d'étoiles garnies de perles en cristal. Elle fut
donnée par les élèves du collège de St. -Servais à Liège en 1810.
Haut. 0.175. Diam. de la base 0.142, du couronnement 0.265.
3° Une couronne ouverte en argent ornée de festons, de (leurs
de lis et d'étoiles garnies de pierreries : cette couronne appartient
à la statue de la sainte Vierge. Sur une banderolle on lit : DIVa ,
peCCatorVM, aVXILIatrIX. (1789). Haut. 0.195. Diam.de
la base 0.15. Diam. du couronnement 0,28.
4° Une couronne ouverte, en argent. Cette couronne appartient
à la statue de la sainte Vierge et est ornée de (leurs, de feuillages
et de pierreries. Don de -Mme CI. 1852. Haut. 0.14. Diam.
de la base 0. 10. Diam. du couronnement 0.29.
5° Une couronne en argent composée d'ornements fleuronnés
el surmontée d'une petite boule portant une croix moderne. Haut.
0.34. Diam. de la base 0.15.
6° Une couronne en argent doré composée d'une triple bande
d'ornements surmontés d'un globe portant une croix garnie de
diamants. Cette couronne appartient à la statue de l'enfant Jésus;
moderne. Don de M™ CI. Haut. 0.31. Diam. de la base 0.095.
7" Tue couronne en argent ornée de soleils et de fleurs de lis.
— 289 —
Celte couronne, surmontée d'un globe doré et d'une croix, appartient
comme les deux suivantes à la statue de l'enfant Jésus ; moderne.
Haut. 0.20. Diam. de la base 0.09.
8o Une couronne en argent composée d'ornements ajourés et
surmontés d'une boule portant une croix fleurdelisée ; moderne.
Haut. 0.17. Diam. de la base 0.085.
9° Une couronne en argent composée comme la précédente
d'ornements fleuron nés et terminée par la croix supportée par un
globe doré; moderne. Haut. 0.22. Diam. de la base 0.085.
10° Un sceptre en argent doré appartenant à la statue de la
sainte Vierge. La tige annelée et garnie d'ornements ciselés et
repousses est terminée par une fleur de lis couronnée. XVIIe siècle.
Haut. 0.51.
11° Un sceptre en argent doré, orné d'annelets ciselés et
repoussés. 11 est terminé par une étoile couronnée et surmontée
d'une fleur de lis. XVIHe siècle. Haut. 0.50.
12° Un sceptre en argent dont la tige est surmontée d'une fleur
de lis. Moderne. Haut. 0.425.
13° Un sceptre en argent surmonté d'une fleur de lis; ce
sceptre appartient à la statue de sainte Anne. Moderne. Hauteur.
0.20.
14° Deux globes en argent surmontés d'une croix. Moderne.
15° Une tige ornée de fleurs de lis en argent. Moderne. Haut.
0.522.
10° Une id. appartenant à la statue saint Joseph. Moderne.
Haut. 0.37.
17° Une vingtaine d'ex-votos en argent, de grandeur et de
formes diverses, offerts à la statue miraculeuse de Notre-Dame.
Modernes.
18° Un chapelet en argent appartenant à la statue de la sainte
Vierge. Les 90 grains en argent qui le composent offrent de
— 290 —
légers filigranes dessinant des fenestrages ajourés. Les dix grains-
dizaines en argent doré présentent à peu près les mêmes dessins
que les grains ordinaires, mais sont d'une dimension plus forte.
Un seul de ces grains est à charnière el mesure 0.1 05 de diam.
Un autre est de forme conique et dessine des fenestrages gothiques
ajourés. La longueur totale de ce chapelet est de 1.79 sans la
médaille en vermeil qui se trouve attachée au bas de la croix.
Cette médaille représente à V avers les écussons des 13 cantons
suisses attachés à une bande que tient une main placée au centre.
Au revers une croix ciselée en relief portant : Si Deus nobiscum
quis contra nos el les écussons des cantons de saint Gall (répé-
tés) Wallis , . Drihunt , Mulhouse, Botweil et Biel. XVIfe siècle.
Diam. 0.08.
Deux autres médailles sont attachées à ce chapelet; la première
est une médaille obsidionale en argent doré présentant à l'avers le
panorama du siège d'Elfsborg, avec l'exergue : Elfsburgum. ob-
session fortiter. a.\. may. expugnatum. féliciter XXIII. ejusd.
a. 1612 l. Lt au revers : un cavalier au galop tourné vers la
droite, l'épée élevée, avec l'exergue, imp. victor. Chrisliano ////.:
C: rex. Dani: non: vand. et goto: Diam. 0.052.
La seconde médaille aussi en argent doré présente à l'avers,
l'Adoration des rois-mages ciselé au trait et la suscription : Magi
ab orientent accesserunt puero soluta dicentes vir est. Math. 11.
Au revers: l'Adoration des bergers avec la suscription: natus est
nobis Salvator qui est Christus Dominus. Luc 11. XVIIe siècle.
Diam. 0.04-9. On remarque en outre :
a. Un médaillon en argent, en forme de losange entouré d'un
bourrelet tordu doré et orné de quatre fleurs de lis.
1 « Gliristiaen IV i ir>80-ltU8) alla mettre le siège devant Elfsborg qui capitula après
» une vive résistance. Les Danois trouvèrent dans le port six vaisseaux de guerre, de
» l'artillerie et des munitions. »
V. Eyriks, flisi. du Danemark , \> 257.
- 291 —
Il présente d'un côté la figure de la sainte Trinité, de sainte
Anne et de la sainte Vierge. De l'autre : le St-Sacrifice de la
messe offert par un pape couronné de la tiare. Ces deux sujets
sont ciselés au trait. Diam. 0.047. XVIe siècle.
b. Un médaillon en argent de forme ovale représentant d'un
côté le Christ et la Samaritaine, de l'autre le Christ rendant la
vue à un aveugle. XVIIe siècle.
Enfin une médaille en argent orné d'une bordure torse en argent
doré. Cette médaille représente sainte Barbe et la Vierge imma-
culée. Diam. 0.05.
19° Le chapelet de l'enfant Jésus , également en argent, ne
mesure que 0.97 de longueur. Les grains sont simples et les
grains-dizaines semblables aux grains ordinaires du chapelet de la
Vierge.
Deux médailles en argent y sont attachées, l'une représente
N.-D. de Montaigu , l'autre saint Hubert et le Christ en croix.
La médaille qui termine ce petit chapelet est en argent et
présente gravé d'un côté la Vierge des douleurs , de l'autre la
Vierge immaculée.
20° Un chapelet de cinq décades appartenant à la statue de sainte
Anne. Les grains ordinaires sont en cristal de roche; les dizaines
en argent de forme conique présentent de légers dessins en filigrane.
Une foule d'ex-votos, de croix, de reliquaires, de médailles, etc.
sont attachés à ce chapelet.
Parmi ces dernières se trouve une médaille semblable à celle
attachée au chapelet de la sainte Vierge et qui représente l'Adora-
tion des rois mages avec le millésime 1549.
Un autre médaillon en forme de losange est entouré par un
bourrelet tordu et doré, et terminé aux angles par quatre fleurs
de lis. Il représente d'un côté le Christ au roseau, de l'autre
côté sainte Anne, la sainte Vierge et l'enfant Jésus; gravure du
XVe siècle.
- 292 —
-M" Un chapelet avec grains en argent appartenant à la statue
de saint Antoine.
Une médaille circulaire représente la sainte Vierge et saint
Jean-Baptiste ; une autre en forme de losange : le pape officiant
et la Résurrection du Christ.
Un lis en argent portant une figure de sainte Vierge avec la
suscription R. L. 0. (Revu lelie onbesmet) est suspendu au bas
de ce chapelet '.
22u Un chapelet en argent appartenant à la statue de la sainte
Vierge.
Les grains circulaires et unis n'offrent rien de remarquable.
Long. 2 mètres.
Dinanderies , chandeliers, lutrin, girandoles.
De tout l'ancien ameublement la basilique de Tongres, il ne
reste plus que quelques beaux ouvrages en cuivre , sortis des cé-
lèbres ateliers des Copères 2 de Dinant si florissants avant la
terrible vengeance de l'implacable Philippe de Bourgogne, en
1466 s.
« Les produits en sont dispersés dans les églises et les collcc-
• lions de toute l'Europe ; mais il en est peu d'aussi remarquables
» que ceux de notre église, à la fois pour l'élégance de la forme
• et pour le volume4.
1 Ce lis faisait partie du la duc «ration que portaient les membres de la chambre
de rhétorique de Tongres, appelée le lis blanc et dont la devise était Ib'ijn lelie
onbesmet.
* Abréviation de coperslager ou de cuperes (cuprum, cuivre).
3 Mémoires de Jacques de Gleroq, édition Reiffenbekg , liv. V. chapitre Ov2.
/. de Henin [mémoires de) édit. de ReiffenberG. — Histoires des ducs île Bourgogne ,
vol. VI, page -146. — De Gehlaciik , Histoire de Liège, p. 15 , etc. — Gachahd, Coll.
i/.' documents inédits concernant l'histoire de lu Belgique, vol. Il, p. 197. — Le Grand
ht-, lin ilandt, Annules de l'Académie d'un h. de Belgique XXI, -■ série, tome I, p. 616
1 Voir Bulletin scient, du Limbourg , tome I, page 18.
CHANDELIER PASCAL.
- 293 —
C'est d'abord un chandelier pascal à pied circulaire reposant sur
une base octogone j ornée d'une bande en quatre-feuillcs ajourées
et supportée par trois lions ; sur la base inférieure en biais et
séparée de la première par un pied droit on lit :
-j- Jehans * Joses * de * Dînant * me fiste * lan * de gras *
M * CGC * LA' * et * XII.
Au milieu de cette base s'élève la tige ornée d'un triple annelet
mouluré, elle a la forme d'un fût de colonne dont la base octogone
est ornée d'une suite d'arcades trilobées à jour et dont le chapi-
teau, décoré de glands et de feuilles de chêne, se profile en hexa-
gone encadré dans un cercle et soutient le bassin muni de sa pointe2.
Ce fût était jadis orné d'un lutrin à jour où l'on plaçait le livre
pendant que le diacre chantait VExultet et de six branches en
forme de girandoles qui garnissent aujourd'hui l'abside du chœurs.
Elles offrent deux modèles très-distincts , l'un très-simple forme
des branches à cierge ornées de crochets et surmontées d'un
bassin rond crénelé.
L'autre, plus orné déjà, présente deux girandoles travaillées à
jour, ornées d'écussons et également munies d'un bassin rond
crénelé 4; au reste toutes nous montrent « comment avec rien,
» pour ainsi dire, les ouvriers des bonnes époques agençaient un
• meuble , dont le dessin mieux que la description rendra la
• grâce et la fantaisie. »
' Celte large base mesure 2 m. 20 de tour.
a Hauteur du chandelier, 2.595 m , sans la pointe.
5 Nous faisons des vœux pour que bientôt ce superbe chandelier soit rétabli dans sa
forme primitive. In pascka domini débet (prepositus) ponere super magnum candela-
brum inler chorum et cancelliim unum magnum cereum qui débet habere. viginti
libras cere inter candelam superioiem et inferiorem et V. Slatuta eccles.
Tungr.,în\ I, verso n° 3, du catalogue des arcnivesde l'église. 1601, vetusta corona
de cupro quœ ohm pendebat in choro ante magnum candelabvum vendita est libra
ad 7 st. pro 36 florenos.
V. Arch. de l'Église. Registre N° 10 du catalogue, fol. 331.
4 Une girandole semblable se trouve dans les cloîtres de la cathédrale de Liège.
M. Philips, lampiste à Liège, a cru devoir modifier la forme du bassin.
— 294 —
Quatre chandeliers d'élévation1 de formes simples et semblables
sont probablement aussi l'œuvre de Jehan Joses.
Un fut cylindrique décoré d'un quadruple annelet et surmonté
d'un élégant chapiteau qui soutient un large bassin rond garni
d'une pointe, s'élève sur une base supportée par quatre pattes de
lion reposant sur un cercle. Haut. 1.36.
Le lutrin qui se trouve au milieu du chœur est du même artiste.
Sur une base triangulaire , dont le pied droit en quatre-feuilles
ajourées inscrites dans un cercle est soutenu par trois lions, s'élève
une espèce de fût triangulaire orné de fenestrages ajourés , coupés
par une bande de quatre-feuilles ajourées, et terminés par des gables
crochetés et fleuronnés. Trois petits monstres sont assis sur cette
base2. La tourelle est flanquée, à ses trois angles, de contreforts
recevant l'extrémité supérieure des arcs-boutants qui se projettent
de trois pinacles détachés dont les bases reposent sur la pointe
du pied; sur le sommet de cette tourelle ornée de moulures et de
quatre-feuilles inscrits dans un cercle , on lit :
-j- HOC * OPUS * FEC1T * IOHANES * DCS 5 * IOSES * DE * DYONANTO * .
Trois autres petits monstres sont assis sur le sommet que cou-
ronne un globe, soutenant un aigle qui tient entre ses serres un
dragon renversé , symbole du paganisme vaincu par la foi.
* Ces chandeliers ont reçu ce nom parce que, placés de chaque coté de l'autel, ils
portaient des cierges qu'on allumait avant l'élévation et qu'on éteignait après la com-
munion.
* Nous nous permettons d'appeler l'attention des archéologues sur le lutrin el les
deux girandoles en cuivre jaune conservés dans l'église de Freeren (Limhourg).
3 Mis pour diclus.
* D'après un ancien registre intitulé : Veritas ab aiino 158,'i , N° 19 du catalogue,
Jean de Uinant avait fondé dans l'église de N.-U. de Tongres un anniversaire qui
devait y être célébré le 1 3 novembre de chaque année ; il avait affecté à l'exonération
de ce service deux bonniers de terre sis à S'heeren-Elderen. Ce Jehan Joses de Dinant
appartenait sans doute à la même famille que Jean Joset qui fut un des trois députés
du bon métier de la batterie de Dinant, envoyés le 13 novembre 1 i(î.r> au prince-
évèque Louis de Bourbon.
Nous voyons encore figurer un Jehan Joset de Dinant dans un acte du 20 février
1566. V. Annales de la Société d'archéologie de Namur, tome 3, p. 75.
ii:^*Sï&à
": "m ■ ' Cil Séne.t.II.
LUTRIN - AIGLE
H I.'âcKeek Av
Girandole ornée
Girandole simple.
(Annales de l'Académie d'archéologie de Belgique, t. XXII, §« série, t. II).
— 295 —
De ses ailes éployées il soutient les extrémités de l'arête desti-
née à retenir l'évangéliaire composée de deux salamandres qui se
mordent mutuellement la queue *. Hauteur 1.90 centimètres de
chaque côté du pied. Largeur distance entre les lions 0.77.
ORNEMENTS SACERDOTAUX.
I. — Chapes.
Avant de décrire d'une manière succincte les nombreuses chapes
que possède l'église de Notre-Dame , il ne sera pas inutile de dire
quelques mots de l'origine ainsi que des changements que les
idées, les habitudes et les lois ecclésiastiques ont apportés dans
ce vêtement que la religion seule a conservé jusqu'à ce jour.
Le mot chape (du latin capa) a toujours signifié un vêtement de
dessus. Ce vêtement dans les premiers siècles était commun aux
deux sexes , au prêtre comme au laïque , au noble comme au
manant. On l'appelait aussi vestis pluvialis , pluvial , car on
s'en servait spécialement pour se garantir des intempéries de l'air.
Le chaperon , qui d'abord forma un capuchon , perdit sa forme
primitive. Dans la suite les chapes elles-mêmes, au lieu de former
un habillement simple, furent décorées d'orfrois , ornés de brode-
ries, de pierreries, d'or et d'argent.
Ce luxe alla si loin que le concile de Metz, tenu en 888, vou-
lant mettre un frein à cet esprit qui avait aussi gagné les prêtres,
défendit l'usage des chapes aux gens d'église ; mais celte défense
ne fut jamais rigoureusement observée.
Plus lard s'introduisit l'usage de porter des chapes à manches ;
mais sous cette nouvelle forme le vêtement , à ce qu'il parait ,
présentait un caractère trop négligé ; le concile de Latran défendit
aux clercs et aux laïques d'en porter pour assister à l'office divin.
1 M. Philips, lampiste à Liège, a reproduit ces belles dinanderies , en omettant
toutefois de rappeler sur ses copies les originaux de Tongres.
— 296 —
Cette défense toutefois fut levée plus lard et par suite la chape
rouge fut réservée au pape, la violette aux cardinaux et aux
évêques et la blanche aux nouveaux baptisés.
De nos jours le mot chape ne s'applique plus qu'à ce vêtement
d'église s'étendant des épaules aux talons, s'agrafant sur la poi-
trine et dont le prêtre ne se revêt qu'en certaines circonstances
exceptionnelles '.
Les couleurs en sont variées et s'emploient indifféremment par
les prélats et par les simples prêtres.
Tout évêque devait après son ordination offrir à l'église métro-
politaine une cape 'professionnelle.
Le prince-évêque de Liège devait en offrir une au chapitre de
St-Lambert ; cet usage s'étendit aux prévôts des églises collégiales:
Conrad Thibaut , chevalier de Cavres de Peer, prévôt de Tongres,
fut le premier qui introduisit cet usage dans la principauté de Liège.
Cette circonstance explique la possession de plusieurs chapes
dont les armoiries attestent du reste l'origine.
Les prévôts de Tongres pouvaient se libérer de l'obligation de
donner une chape , en payant un droit fixe de 150 écus d'or
affectés à l'achat et à l'entretien des ornements sacerdotaux.
Voici l'énuméralion des principales chapes conservées à l'église
de Notre-Dame à Tongres :
1° Une chape en peluche noire unie galonnée et frangée d'or;
le chaperon en broderie au passé représente la sainte Vierge
allaitant l'enfant Jésus entouré d'une auréole d'or au milieu de
laquelle voltigent des anges réappliqués: ce sujet de forme circu-
laire est encadrée par une bordure chargée d'anges, de vases et
de fleurs en broderie réappliquée. Les orfrois également en bro-
derie au passé figurent diverses scènes de la vie de la sainte Vierge
dans une série de médaillons circulaires qui se détachent sur un
1 En Orient la chape serl île chasuble pour la célébration de la messe
- 297 —
fond de feuillage et de fleurs; le dessin uniforme, en broderie
réappliquée, nous semble appartenir à la dernière époque des
broderies d'Arras.
Sur l'orfroi gauche de cetle remarquable chape se trouvent
figurées la présentation de la sainte Vierge au temple par sainte
Anne et saint Joachim (la sainte Vierge monte les quinze degrés
mystiques du temple) , la rencontre de Joachim et d'Anne à la porte
d'or 1 et la Circoncision de l'enfant Jésus; sur l'orfroi droit l'annon
dation de la sainte Vierge , la Visitation de sainte Elisabeth et la
naissance de Marie, mère du Sauveur. XVIe siècle. Haut, du
chaperon 0.51. Larg. 0.53. Larg. des orfrois 0.33.
La bille , d'argent en partie doré , porte au centre sur un fond
jadis recouvert d'émail translucide, une statuette de la madone
debout, entourée d'anges adorateurs; les huit lobes qui l'entourent
représentent les bustes , en émail translucide , du Christ et de sept
apôtres. XVe siècle. Diam. 0.15.
2° Une chape en drap d'or moderne dont les broderies appar-
tiennent à la dernière moitié du XVIe siècle et sont d'un éclat ex-
traordinaire. Sur l'orfroi gauche sont figurés deux rois mages, la
présentation de l'enfant Jésus au temple, saint Augustin et saint
Ambroise; sur l'orfroi droit saint Pierre et saint Paul, deux saintes
femmes et l'Annonciation de la sainte Vierge.
Le chaperon en broderie au long point représente l'entrée du
Sauveur à Jérusalem. Cette scène forme un groupe de sept figures.
Tous ces sujets restaurés et réappliqués proviennent de l'église de
Martelange (Luxembourg). Haut, du chaperon 0.50; larg. 0.487.
Larg. des orfrois 0.24.
La bille, d'argent en partie doré, est de forme circulaire et
ornée au centre d'une statuette de la Vierge immaculée debout
1 Cette scène n'est pas représentée de la manière que les livres saints l'exigent :
« Coiiceptam esse beatam Virginem ex osculo , est fabulosum et obscurum » dit
Molanus dans son livre de picturis et imaginibus sacris. Cliap. LXX1I, fui 132.
XXIX XXII 19
298
sur un écusson représentant les armoiries du donateur. Fin du
XVIIe siècle. Diam. 0.125.
3° Une chape en soie damassée noire moderne. Sur le
chaperon se trouve le Calvaire , brodé au long point et réapplique
sur un fond d'or et d'azur. L'orfroi de gauche représente saint
Augustin, saint Grégoire et sainte Monique; celui de droite saint
Ambroise, saint Jérôme et sainte Hélène. Toutes ces figurines sont
brodées au long point et reportées sur un fond d'or mêlé d'azur et
de pourpre représentant un intérieur de temple. Nous pourrions
ajouter que ces broderies ont subi une restauration trop soignée et
que les couleurs sont en général trop éclatantes. Fin du XVIe
siècle.
Au lieu de bille , il y a une broderie représentant l'ancien sceau
de la ville de Tongres portant en exergue : ecclesia collegiala
B. Mar. Virg. Tungris. Haut, du chaperon 0.49. Larg. 0.45.
Larg. des orfrois 0.27.
4° Une chape en velours vert frangé et galonné d'or, parsemé
de paillettes d'or et orné d'arabesques brodées en cordonnets d'or
d'un dessin uniforme et symétrique ; le chaperon est garni d'un
médaillon circulaire représentant, travaillée en fine broderie, la
figure de saint Materne premier évoque de Tongres. Les orfrois en
or natté brodés en haut relief et exécutés dans les formes lourdes
de la Renaissance. Haut, du chaperon 0.552; larg. 0.513.
Larg. des orfrois 0.252.
La bille en vermeil est circulaire : un bord orné de feuillages
en argent encadre la statuette de la madone debout et entourée,
d'anges se détachant jadis sur un fond en émail translucide.
XVIIe siècle. Diam. 0.17.
5° Une chape semblable à la précédente : même bille. Le sujet
du chaperon représente la sainte Vierge.
0° Une chape en peluche satinée noire galonnée et frangée
d'or sans ornements. XVIIe siècle.
— 299 —
7° Une chape noire identique à la précédente.
8° Une chape en velours d'Utrecht vert galonné d'or , sans
franges, ni armoiries, ni ornements. XVIIe siècle.
9° Une chape en velours violet galonné et frangé d'argent dont
le chaperon et les orfrois sont ornés d'arabesques fleuries, brodées
en argent. Cette broderie dénote une œuvre de patience; les spi-
rales les plus curieuses se mêlent aux enchevêtrures les plus
compliquées ; le dessin du chaperon et des orfrois est uniforme
et se trouve reproduit trois fois de chaque côté. Au bas des orfrois
on remarque les armoiries du donateur Barthélémy Stravius, proto-
notaire apostolique et pléban de Tongres. Aucun sujet historié ne
se trouve sur cette chape du XVIIe siècle. Haut, du chaperon 0.55,
larg. 0.48, larg. des orfrois 0.37.
La bille en argent de forme circulaire est ornée au centre de la
statuette delà Vierge, debout, et entourée d'un bourrelet mouluré
et chargé de mascarons dorés. XVIIe siècle. Diam. 0.12.
10° Une chape en velours rouge avec paillettes et broderies en .
or; les orfrois et le chaperon sont chargés de broderies d'or
natté en haut relief sur fond rouge et or. Au milieu du chaperon
se trouvent les armoiries du donateur, Libert Loefts doyen du
chapitre de Tongres '. XVIIe siècle. Haut, du chaperon 0.551 ;
larg. 0.54 ; larg. des orfrois 0.282.
La bille d'argent doré a la forme d'un quatre-feuilles coupé ;
au centre, sur un fond chargé de niellures , se trouve une statuette
de la Vierge debout sous un dais gothique, orné de trois frontons
ajourés, flanqués jadis de pinacles et terminé par une tourelle
hexagone ardoisée. Deux contreforts surmontés jadis de clochetons
s'appuyent sur la base , encadrent la statuette et soutiennent la
tourelle. Les lobes et contre-lobes latéraux sont ornés à gauche,
de la figure du chanoine donateur, à genoux, entouré de fleurs et
1 D'azur au chevron d'argent, accompagné de trois gerbes d'or posées deux en chef
et une en pointe.
— 300 —
portant une banderolle avec les mots Miserere mei, à droite d'un
aigle et d'une figure d'ange soutenant un écusson armorié * recou-
vert d'émail translucide. Sur le bord de la bille , on voit entourée
de niellures l'inscription suivante : Ave. Gracia plena — Joes.
Cleinjas. can. Fin du XIVe siècle. Diam. 0.165.
11° Une chape en velours rouge brochée et frisée en or. Le
chaperon et les orfrois brodés d'or en haut relief sur fond d'argent
sont d'une grande richesse et représentent des vases, des fleurs,
des feuillages et d'autres dessins analogues. Le chaperon est orné
d'arabesques au milieu desquelles se trouvent les armoiries du
donateur Arnold Voels, doyen du chapitre de Tongres 2. Fin du
XV1I° siècle. Haut, du chaperon 0.561 , larg. 0.53, larg. des
orfrois 0.34.
La bille d'argent en partie doré forme un quatre-feuilles au
cjntre duquel se trouve, sur un fond parsemé d'étoiles, une sta-
tuette de la madone debout sous un dais gothique orné de frontons,
de pinacles et de contreforts ; les lobes latéraux sont ornés, à
gauche, de la figure du chanoine donateur agenouillé, adroite
d'un écusson armorié 3 gravé et recouvert d'émail. Le bord forme
une moulure ornée de Heurs en argent blanc et d'une torsade
enrichie d'émail translucide. XVe siècle, diam. 0.165.
12° Une chape en satin blanc frangé et galonné d'or; les orfrois
et le chaperon sont en brocart ; au milieu de celui-ci se trouvent
les armoiries du donateur Jean Erasme Larmoyer, chanoine de
Tongres 4. XVIIIe siècle.
13° Une chape en satin vert galonné et frangé d'or; elle est
recouverte de sarments et d'arabesques brodées en fils d'or et
1 D'argent à la fasce d'oi' accompagnée de douze pièces de vair rangées trois en chef
el neuf en pointe, quatre, trois et deux, au franc canton d'argent
* De sable au chevron d'or accompagné de trois pieds d'homme coupés de même
dont relui au point senestre de l'écu est contourné.
5 D'azur à la fasce d'or accompagnée de sept vairs d'argent rangés deux en chef et
cinq en pointe , trois et deux ; au franc canton d'argent chargé d'un lion de sable.
* D'azur au [ion d'argent portant dans la dcxlre un marteau couronné d'or.
BILLE DE CHAPE
— 301 —
d'argent dont le dessin uniforme et symétrique produit un sin-
gulier effet. Au milieu du chaperon se voient les armoiries du
donateur Mathieu Paul Closar, doyen du chapitre de Tongres *.
Commencement du XVIIIe siècle.
La bille, d'argent en partie doré, est orné d'une statuette de la
madone debout , placée au centre et entourée d'anges se détachant
sur un fond d'émail translucide; les huit lobes autour représentent
les bustes du Christ et de sept apôlres gravés et recouverts d'émail
translucide. XVe siècle. Diam. 0.15.
U° Une chape galonnée et frangée d'or dont la broderie en haut
relief a été réappliquée sur du satin blanc moderne. Le chaperon
brodé d'or natté sur fond d'argent est orné au centre des armoiries
du donateur Jean René de Neufcourt , chanoine de St.-Lambert
et prévôt de Tongres 2. Les orfrois de même que le chaperon
représentent des fleurs évidées et des sarments en broderie d'or
natté en haut relief. Cette chape très-riche appartient au com-
mencement du XVIIIe siècle. Haut, du chaperon 0.56; larg. 0.251 .
Larg. des orfrois 0.33.
La bille en argent doré est de forme circulaire et ornée d'un
double bord parsemé de fleurs et de feuillages en argent blanc
placés dans un creux entre deux torsades ; au centre se trouve
une statuette figurant la Vierge debout sur les nuages sous un
dais gothique et entourée d'anges portant des encensoirs ; le centre
de cette bille appartenant au XVe siècle , nous parait avoir été
restauré à la fin du XVIR Diam. 0.195.
15° Une chape en drap d'argent moderne parsemé de fleurs et
de fruits, frangé et galonné d'or. Sur le chaperon se trouvent
les armoiries du donateur François comte de Hinnisdael , cha-
• Parti d'argent à une rose de gueules entre deux cœurs de même posés en pal ,
parti d'or à la herse au naturel.
Burelé d'argent et de sable de huit pièces chargées d'un écusson d'or au sautoir de
gueules accompagné de quatre merlettes de sable.
— 302 —
nome de SU -Lambert et prévôt de Tongres ». XVIIIe siècle.
La bille en argent doré de forme circulaire est ornée de treize
ligures, ciselées en haut relief qui représentent saint Pierre
défendant son maître et blessant Malchus serviteur du grand
prêtre. Fin du XVIe siècle. Diam. 0.13.
16° Une chape en velours rouge galonné et frangé d'or. Au
milieu du chaperon sont appliquées les armoiries du donateur
Henri Walthère Van Beul, chanoine de Tongres. Commencement
du XVIIIe siècle. Cette chape n'a point de bille; une petite bande
de la même étoffe que le fond rattache les deux orfrois à la hauteur
de la poitrine.
17° Une chape semblable avec les mêmes armoiries.
18° Une chape en drap d'or moderne parsemé de fleurs rouges
et vertes garni de galons et de franges en or : au milieu du
chaperon se trouvent les armoiries du donateur Walrame Michel
comte de Borchgrave, chanoine de St. -Lambert et prévôt de N.-D.
de Tongres. Fin du XVIIIe siècle.
La bille d'argent en partie doré est circulaire et ornée d'une
représentation du Christ portant la croix : composition de treize
figures ciselées en haut relief. Fin du XVIe siècle. Diam. 0.13.
19° Une chape en salin rouge pâle, galonné et frangé d'or.
Au milieu du chaperon se trouvent les armoiries du donateur
Nicolas-Adam de Palmer , chanoine de la collégiale d'Augsbourg
et doyen de Tongres 2. XVIIIe siècle.
20° Une chape en soie damassée violette. Cette chape , acquise
il y a peu d'années, reproduit les dessins de ces nombreux orne-
ments sacerdotaux qu'on rencontre dans la plupart de nos églises
et dont la bizarrerie des couleurs ne le cède en rien à l'originalité
des emblèmes.
1 De sable au chef d'argent , chargé de trois merlettes de sable.
5 Parti au premier et au quatrième d'or à la fasce crénelée de gueules, au second
et au troisième de gueules à trois losanges d'or : l'écu a pour timbre un casque d'argent
el pour cimier un vol d'or et de gueules chargé de même que l'écu.
— 303 —
La bille d'argent en partie doré est de forme circulaire et ornée
d'une statuette de la Vierge immaculée debout et couronnée par
deux anges. Fin du XVIÏe siècle. Diam. 0.17.
21° Une chape en damas violet avec galons d'or ; le chaperon
seul est garni de franges d'or.
22° Une chape semblable à la précédente.
23° Une chape en peluche noire avec galons d'or sans orne-
ments ni armoiries.
II. Chasubles.
1° Une chasuble en satin rouge dont la croix est ornée de bro-
deries au petit point , réappliquées sur or et soie verte. Ces bro-
deries quoique coupées forment encore de gracieuses arabesques.
De chaque côté de la croix se trouve l'écusson des de la Marck.
Le vélum du calice est orné d'une petite broderie représentant
l'enfant Jésus entouré de nuages.
2° Un ornement complet en brocart de velours rouge et or.
La scène du médaillon central représente le Christ attaché à l'arbre
de la croix entre la sainte Vierge , saint Jean et les représentants
de l'humanité régénérée. Aux extrémités de la traverse se trouvent
deux adorateurs et, au bas, les figures bibliques du sacrifice d'Abra-
ham et du serpent d'airain. Sur la colonne sont brodées l'Annon-
ciation de la sainte Vierge , la Visitation et la Naissance du Sau-
veur. Le vélum en satin rouge ornée de broderies en or porte les
armoiries de la famille Voets. Les orfrois de la dalmalique et de la
tunique sont ornés de nombreuses figures de saints , parmi lesquels
on distingue les quatre évangelistes , saint Pierre, saint Mathias ,
saint Laurent , sainte Claire , saint Philippe, sainte Marie-Made-
leine , saint Judas , saint Paul , sainte Alénie, saint Grégoire ,
saint Augustin et sainte Catherine. XVIe siècle. Larg. des orfrois
de la chasuble 0.21. Larg. des orfrois de la dalmatique et de la
tunique 0.12.
3° Un ornement complet composé de trois pièces en brocart de
— 304 —
velours vert et or. La chasuble offre au centre de la croix une
grande scène du crucifiement ; au-dessus de la tète du Christ ap-
paraît le Père éternel , bénissant et couronné d'une tiare. Au
pied de la croix se trouve le groupe des saintes femmes en pleurs
et trois anges recueillant dans des calices d'or le sang qui jaillit
des plaies du Sauveur. Sous cette scène , reproduite avec beau-
coup de talent , on voit représenté le Christ portant la croix.
Sur la colonne on remarque les images de la sainte Vierge ,
de Jésus et de saint Joseph, se détachant sur un fond en conduire.
Chaque dalmatique est ornée de onze figures de saints et de
saintes fortement endommagées ; on reconnaît cependant saint
Pierre, saint Paul, saint Jean, saint André, sainte Barbe, sainte
Catherine, saint Ambroise, saint Augustin, saint Jérôme et saint
Grégoire.
Tous ces sujets ont été restaurés et réappliqués. Fin du XVe
siècle. Larg. des orfrois de la chasuble 0.187. Largeur des
orfrois de la dalmatique et de la tunique 0.11.
•4° Un ornement en velours rouge composé de chasuble , dalma-
tique et tunique avec orfrois brodés et réappliqués.
Le sujet principal de la chasuble, en forme de qualre-feuilles
coupées, représente la mort de la sainte Vierge brodée au long-
point C'est un travail très-remarquable, composé de douze iîgures.
A côté de celte scène que surmonte la figure de la sainte Trinité,
se trouvent (Jeux personnages qui nous paraissent représenter la
Palestine. Plus bas sont brodées les figures accouplées de saint
Pierre et de sainte Marie-Madeleine, de saint Paul et de sainte
Catherine.
Il est regrettable qu'une main vandale ait enlevé la partie infé-
rieure de ce dernier groupe pour mettre la chasuble au niveau des
goûts modernes. Sur la colonne se trouvent représentés saint
Jacques et sainte Ursule, saint André et sainte Geneviève.
Les orfrois de la dalmatique et de la tunique portent les figures
— 305 —
suivantes toutes brodées au long point: saint Paul, la sainte Vierge,
saint Aubin, saint Judas, sainte Marthe, saint Georges, saint
Pierre, saint Jean l'Evangéliste , saint François , sainte Apolonie,
saint Mathieu , saint Barthélémy , sainte Catherine, saint Sébastien,
sainte Barbe , saint Roch et saint Philippe ; fin du XVe siècle.
Larg. des orfrois de la chasuble 0.23. Larg. des orfrois de la
dalmatique 0.15.
5° Un ornement composé de trois pièces en soie blanche parsemée
de fleurs de lis, d'aigles biceps, de fleurs, etc. Le sujet principal
de la chasuble représente la naissance du Sauveur surmontée d'un
ovale en broderie moderne représentant l'ancien sceau de la ville
avec l'exergue -j- Ecclesia Collegialis B. Mar. Virg. Tungre.
Au-dessous se trouvent deux autres scènes brodées au long point
représentant la Visitation de Marie et l'Annonciation.
L'orfroi de la colonne représente le Père éternel nimbé et
couronné d'une tiare, la vision de Joachim, la rencontre de
Joachim et de saint Anne et le même sceau.
Les broderies des orfrois de la dalmatique représentent saint
Jacques le majeur, saint Jérôme, saint Thomas, saint Paul, saint
Georges, saint Jacques le mineur, saint Jean l'Évangéliste, sainte
Agathe, saint Ambroise, saint Philippe, sainte Barbe et saint
Laurent; celles de la tunique les figures de saint Pierre, de sainte
Catherine, de saint Etienne, de saint Jude, de sainte Marguerite,
de saint Augustin , de saint Grégoire , de sainte Madeleine , de
saint Biaise, de saint Jean l'Evangéliste, de sainte Gudule et de
saint Malhias. Ces broderies sont de toute beauté; l'exécution en
est admirable et leur conservation parfaite; XVIe siècle. Le fond
est moderne. Larg. des orfrois de la chasuble 0.19. Larg. des
orfrois de la tunique 0.11.
6° Ornement complet en soie damassée noire avec croix , cha-
peron et colonnes en broderie riche '. La chasuble , la dalmatique
' V. la chape n° 3.
— 306 —
et la tunique sont chargées d'un grand nombre de ligures de saints ,
parmi lesquelles on distingue celles des quatre évangélisles , de
sainte Barbe et de saint Aubin, de saint Paul et de sainte Paula,
des bienheureux Charles et Odon , de sainte Beda , de saint Jean ,
de saint Barthélémy, de sainte Monique , de saint Augustin , de
saint Jacques, de saint Thomas, de sainte Agnès, de saint
Etienne, de sainte Madeleine, de sainte Dymphne, de sainte Gudule,
de saint Mathias , de sainte Alénie, de saint Adélar, de saint
Barnabe, de sainte Ursule , de sainte Apolonie, de saint Apolon ,
de sainte Catherine, de saint Aubin, de saint Odile , de saint
Henri, de sainte Dorothée et de l'apôtre Simon.
Au milieu de la croix se trouve la résurrection du Sauveur. Il
est entouré de nuages et porte dans la main droite le signe de
la rédemption ; de l'autre il soutient un livre ouvert avec ['alpha
et Y oméga; aux extrémités de la traverse sont placés deux anges
adorateurs.
Les épaulières de la dalmatique et de la tunique portent des
sujets représentant des saints groupés deux à deux. Toutes ces
ligures ont été restaurées et réappliquées. XVIe siècle. Larg. des
orfrois de la chasuble 0.10, id. de ceux des dalmaliques 0.11.
7° Un ornement composé de trois pièces en soie violette
moderne avec broderies anciennes au long point réappliquées sur
brocart.
Le centre de la croix figure une grande scène de crucifiement
avec des anges recevant dans des vases le sang des plaies du côté
et des mains; au bas de la croix se trouve sainte Marie-Madeleine.
Une forme de sceau , avec l'inscription : ecclesia colle gialis B.
Mar. Virg. Tungre, sépare cette grande scène du médaillon repré-
sentant sainte Claire.
Sur la colonne on remarque saint François d'Assises, la sainte
Vierge et sainte Elisabeth de Hongrie. Les colonnes des autres
pièces sont également ornées de ligures de saints. Ce sont : saint
— 307 -
Laurent et saint Mathias, saint Amand et sainte Marthe, saint
Adrien et sainte Cécile , saint Mathieu et sainte Hélène groupés
deux à deux, saint Bonaventure, saint Biaise, saint Jean-Baptiste,
saint Jean l'Evangéliste, saint Antoine dePadoue, l'apôtre Philippe,
sainte Anne, saint Louis roi de France, sainte Barbe, saint
Barthélémy (deux fois), sainte Ursule , l'apôtre Jacques le majeur,
saint Lambert, saint Jude , sainte Marguerite, saint Hubert,
sainte Brigitte, saint Bernard, saint André, sainte Madeleine,
saint Pierre, sainte Catherine et saint Paul.
Sur les traverses qui réunissent les orfrois de la dalmatique et
de la tunique se trouvent deux figures d'anges portant les instru-
ments de la Passion. Toutes ces broderies du XVIe siècle ont été
trop soigneusement rentraites. Larg. des orfrois de la chasuble,
0.22. Larg. des orfrois des dalmatiques , 0.12.
8° Chasuble dalmatique, tunique et chape1 en sole blanche ornée
de fort belles broderies d'or natté en haut relief. Ces broderies
réappliquées se composent d'arabesques contournées.
Le centre de la croix offre dans une broderie semblable, un
médaillon orné du monogramme de Jésus entouré de rayons. Au
bas des ornements se trouve l'écusson du donateur , le doyen
Arnold Voets. Fin du XVIIe siècle.
9° Un ornement composé de trois pièces en brocart rouge et
argent et galonné en or. Au bas de la croix se trouvent les armoi-
ries du doyen de Palmer. XVIIIe siècle.
10° Un ornement en drap d'argent. La croix et les colonnes
de la chasuble et des dalmatiques sont en brocart rouge et or.
XVIIIe siècle.
11° Un ornement en soie damassée violette. La croix et les
colonnes des trois pièces qui composent cet ornemeut sont garnies
d'une broderie figurant des (leurs et des fruits de formes et de cou-
leurs variées. XVIIIe siècle.
1 V. la chape n° 11.
— 308 —
12o Un ornement en velours d'Utrecht vert. La croix et les
colonnes de la chasuble et des dalmatiques sont marquées par de
larges galons en or. Moderne.
13° Un ornement composé de trois pièces en soie damassée
blanche garnie de galons en or. Moderne.
1-4° Un ornement composé d'une chasuble et de deux dalma-
tiques en soie violette damassée avec galons en laine jaune.
Moderne.
15° Un ornement en soie damassée blanche, ornée de fleurs
rouges, bleues et vertes. Les galons de la croix et des colonnes
sont en or. Moderne.
16° Un ornement en soie violette semblable au précédent.
Moderne.
17° Un ornement en velours noir composé de trois pièces avec
galons en or. Moderne.
18° Un ornement en velours rouge moderne composé de trois
pièces. Le médaillon central de la croix représente la figure du
saint Esprit brodé en argent et entouré d'une auréole.
La croix et les colonnes sont chargées de broderies en haut
relief, composées d'arabesques de fleurs et d'épis.
III. Antipendia , vêla.
1o Un antipendium en soie verte chargée d'arabesques en
broderie de (ils d'or. Il est orné d'une large bande horizontale et
de deux bandes verticales ayant 0.20 cent, de larg. garnies de
broderies d'or en haut-relipf présentant des fleurs et des fruits.
Le médaillon central, en broderie au long point réappliquée,
représente la sainte Vierge portant l'enfant Jésus et saint Materne.
Aux deux côtés du médaillon se trouve l'écusson du donateur '.
Long. 3.35. Haut. 0.96. XVIIe siècle?
Burelé de six pièce» d'argent el de sinople au liun de gueules à la queue fourchue
hioclianl sui le (mit.
— 309 —
2° Antipendium en velours rouge orné d'une bande horizontale
et de cinq bandes verticales chargées de quatre figures et d'ara-
besques en broderie réappliquée de soie et de fils d'or. Toutes ces
pièces sont empruntées à un autre ornement et très-mal agencées.
XVIe siècle? Même long, et haut, étérioré.
3° Antipendium en soie verte ornée d'une bande horizon-
tale et d'une bande verticale de chaque côté. Elles sont chargées
de broderies réappliquées d'or en haut relief, présentant des cornes
d'abondance, des fleurs et des fruits. Long. 2.20. Larg. 1 .05.
XVIIe siècle.
•4° Antipendium, en soie mauve entremêlée de fils d'argent,
chargée de fleurs en or fin. La bande horizontale et les deux
bandes verticales sont bordées de galons et de franges en or.
Long. 3.35. Haut. 0.9G. Moderne.
5° Antipendium en soie blanche ornée d'une bande horizontale
et de deux bandes verticales chargées de figures en broderie de fil
d'or en haut relief. Il est décoré d'un médaillon central représentant
le saint nom de Jésus en broderie d'or. Long. 2.20. Haut. 1.02
Moderne.
6° Antipendium en soie moirée blanche ornée d'une bande hori-
zontale et de deux bandes verticales en brocart. Au centre se
trouve une Vierge immaculée entourée du chronogramme : Con-
CeptIone Sine Labe MarIe DICata. (1854). Long. 2.20.
Haut. 1 .05. Moderne.
7° Antipendium en satin mauve orné d'une bande horizontale
et deux bandes verticales en soie blanche chargée de fleurs. Au
centre se trouve le monogramme M. R. A. surmonté d'une
couronne et entouré d'une guirlande composée d'épis et de grappes
en broderies d'or. Long. 2.48. Haut. 096. Moderne.
8° Antipendium en soie violette ornée de bandqg en soie mauve
chargée de fleurs en broderie de soie. Long. 2.18. Haut. 0.96.
Moderne.
— 310 —
9° Antipendium en soie blanche damassée frangée et galonnée
en or. Long. 3.35. Haut. 96. Moderne.
10° Antipendinm en velours noir avec franges et galons en or
fin. Mêmes long, et haut.
11° Antipendium en peluche noire avec galons en or fin.
Mêmes dimensions. Moderne.
12o Antipendium en soie rouge avec (leurs en soie blanche
entremêlée de fils d'argent.
13° et 14° Deux antipendia en velours noir avec franges et
galons en or. Long. 2.20. Haut. 1.02. Moderne.
15° et 16° Deux antipendia en peluche noire avec galons
blancs. Long. 2.20. Haut. 1.02. Modernes.
17° Cinq antipendia de différentes couleurs et de peu de valeur.
Modernes.
18° Vélum en satin blanc parsemé de feuilles de vigne en
fils d'or. Au centre se trouve un pélican en argent entouré d'une
auréole. Moderne. Larg. 0.51.
19° Vélum orné au centre d'un pélican en argent entouré de
rayons et de sarments. Au bas, de chaque côté on remarque une
double corne d'abondance versant des grappes , des épis et des
fleurs. Moderne.
20° Vélum en satin rouge orné de grappes et de feuilles en fils
d'or. Au centre on voit une figure du saint Esprit, brodé en
argent et entouré de rayons. Moderne.
21° Vélum en brocart de velours cramoisi et or, orné de galons
en or et en argent.
D.
INSCRIPTIONS TUMULÀIRES.
Nous continuerons par la reproduction aussi littérale que
possible des épitaphes éparpillées dans les différentes parties de
l'église. Nous nous appliquerons surtout à les copier textuellement,
sans dénaturer ni les noms ni les dates. Le temps ainsi que le
frottement continuel des pieds sur la plupart des pierres sépul-
crales gisantes au cloître^ ont fait disparaître une foule d'inscrip-
tions peut-être très-précieuses pour l'histoire de notre église.
Dans la chapelle de St. -Joseph sur un monument en marbre
blanc et noir, placé à droite de l'autel, on lit :
I
Hic jacet
Rndus admodum ac amplissimus Dominus
D. MATHEUS PAULUS CLOSAR
œtatis suœ 67 per insignis archidiaconalis
ecclesise beafœ Mariae Virginis oppidi Tungrensis
Canonicatus 48 Uecanatus 32 Vir pietafi
Seraper intenlus ao singularis devotionis
Zelus, erga Dei-param Virginem Mariam
per insignis ecclesiae patronam cujus domus
prœcipue dilexit decorem
obiit anno 1735 die 22 februarii
Requiescat in pace.
— 312 —
2. Dans la mémo chapelle, au pied de l'autel sur une dalle en
pierre bleue, on lit :
Sepulchrum '
Canonicorum hujus
arcliidiaconalis
Ecclesiae
R M (renovatum) 1733
R. I. P.
Cette dalle, de 81 centimètres de large sur GO de long, recouvre
l'orifice du caveau des anciens chanoines. L'intérieur est bien
conservé et est divisé en deux chambres ou compartiments séparés
par un mur. La longueur totale du caveau est de 9,40 mètres, la
largeur 3,05 mètres, la hauteur 3,60 mètres. La voûte ainsi que
les parements cintrés sont en pierre de silex et en grés; les
angles en pierres de sable. Ce caveau s'étend sous les deux
premières chapelles à gauche 2.
3. Dans la chapelle du chapitre, à droite de l'autel :
/Elernitati
Sub marmore quoi! teris viator
Scpultus jacet
I{du» Ajm ac amplismus Dominus
D. ARNOLDUS VOETS
hujus ecclesiae cancu8 et decanus
qui moilis memor vivus sihi posait
Monumentum ....
Obiil A" 1703. Septembris die 17.
tu qui transis lege et ora
H. I. P.
Aux quatre coins se trouvent les années de prêtrise (29), d'âge
(69), decanonicat (42) et de décanat (25) du défunt.
1 Lors de la construction de l'autel de St. -Joseph , en 1822, la partie supérieure de
la dalle a dû être coupée.
4 Voyez registre N° 10, folio 400 verso.
— 313 —
Sepulchrum
honorati
SAREN burgim . . . .
die 25 aprilis
Domicellse
Voets
obiit 2 februarij 1712 . . .
Requiescat in pare
Disce mori
5. A gauche de l'autel :
%£$ Hic. jacet.
Venerabilis. vie. D1». THEODER1CUS. BATENSORN. DE BUSCODUCIS. ca-
nonicus. et. Scholasticus. huius. ecclie. —
qui. fundavit. cotidiana. missam. hora .... —
et. obiit. ano. a. nativitate. Dni. M CCCC. XXXVIII.
mensis. Augusti. die. XIII. orale,
pro eo.
6. Devant l'autel :
Hic. jacet. venerabilis. vir. D1^. JOHANES. DE. FLÉRON. '
canonicus. buj. ecclesie. et. ivestit. eccle&ie de ... .
qui. obiit. anno. a. nativitate. Dni.
M. quadragesim. sepmo. penultima. die.
mensis. februaiii
Hic. jacet. sepultus. venerabilis vir. —
raagister MARTINUS. MARTINI.... LOSCASTR1.
canonicus. et. scolasticus. huius. ecclesie. —
qui. obiit. anno. a. nativitate. Dni. —
MCCCCLXXX1II. mensis. Septembris. die XIII cuj.
aia. requiescat. in. pace. Amen.
' Il occupait en 1381 , la seconde maison claustrale; voir : Liber slatuiorum ecclesin-
Tungrensis , p. XXXIIII.
XXIX XXII 20
314 —
Hic jacet honorabilis
et generosus. vir. LÂBERTUS DE CORTTENBACH. canonicus.
obiit... mesis Septebris die vice.... sima sexta cuj'
aima requiescat in pace
Amen .
9. Sous un tableau à volets représentant la sainte Vierge , avec
l'enfant Jésus et saint Jean-Baptiste :
D. et M. THEODR1CUS. A SPROLANT et THEODR1CUS
ME11ERS : huius ecclesise successivi, cantores
avunculus. et nepos hic, fuimus. no sumus.
estis. no. erilis oibus det chiislus post.
hac vita. aeterna. amen.
A°~Ï6l7.
10.
© Hic. jacet. Dus.
THEODRICUS. DE. MALLE, canonicus.
qui. obijt. ano. Dni.
M.GCG.XLIX
oiate. pro. eo.
1 1 . Dans, les cl oi très
Hic jacet venerabilis
D. BARTHOLOMEUS
GOFFIN Capellan* bass.
huj. eccliae qui obijt
2G 8,iris A" 1652 fonda1»'
Missae hebdomalis rui
lector béué
apprecare
13.
U.
15
315
Mémorise
Reverendi adûî Domini ERASMI L).
LYMBOURG liujus archidiaconalis
eccliae Tongrensis Canonici qui
obijt 30 9>"-is 170-2.
JOHANNES ERASMUS LARMOYER hujus
ccclesiae Canonicus nepos et haeres
maîmestus posuit
Requiescat in pace.
Hic jacet sepultus Rdus ac venlis
D™8 D. GU1LHELMUS RESTIO insignis
eccliae collegiatse beatœ Mariœ
Virginis oppidi Tongren CanoCU8
qui obiit sub A.0 Dni 1627 mensis
Aprilis die terlia cujus anima
Requiescat in sancta pace.
Sepulchrum
AMANDI DE LAPIDE
insignis ecelesiae Tongren Canonici
qui
.... singulis diebus dominicis
in medio templi
Cantici inviolata
. . . . B. Virginis instituil
Dotavit obijt XII februarii a0 1630
mortuo bene precare.
Hic jacet révérend' et
generosus Dominus D.
JOANNES PAELIE buj' eccle
siae Decanus qui obijt
5* Martij A0 1612 ejus
aia requiescat in pace.
— 316 —
Au-dessus de cette inscription, sur une bande entourant l'écusson
du défunt, on lit :
S. JÔES evâ . . . fundator beneficij sub invoealione
B. Mariœ V.
16.
17.
Hic jacet /EG1D1US D.
SPAVVEN filius Gérard i
de Spawen ex-consulis
Tongreiisis et Margartœ
Scronx conjugum qui
Obijt 18 81)ri5 A° 1637
Requiescat in pace.
ac obijt 1 Api il. 1682 H unicus
doctoris IL. Huens et CLABE
VANDENREYDT conjugum filius.
Hodie mihi cras tibi
VALE
Hic jacet R. D. HERMANUS HUST1N
Dum vixit canouicus et decanus Tung.
fundator missse in allari B. M. V.
legendse diebus dornirricis et festivis
bora undeciina '
18.
Hic jacet
Rdn. rj„U8 HENRIGUS WALTERUS
VAN BEUL hujus eccfiae
senior canouicus et
jubilarius întatis 73
qui obijt 10
May 1708
Requiescat in pace
« Il mourut le 16 juin 1664. Voir Reg. 10, folio 301.
49.
20.
21
W
— 317 —
Sepulchrum
per-illustiïs et generosi Dni
GHRISTOPHORI A KERKEM
Canonici et Scliolastici Tungrensis
qui obijt 21 7bris 1645
Requiescat in pace
Deo. opt. Max.
Mémorise Dome JOANN^E DE HODAIGE
reliclœ quond. honlis ^Egidii de Lens
Leodien. conjngum dum viverent
Hic sepullse. Rlll,s D"s LAMBERT'
DE LENS huius eccliœ canr"s
eorum filius hic quoq'
sepultus moest' posuit qui obijt
1653 mensis Januarij
die 12 Requiescant in pace.
Hic Jacet Dom'» CEGILiA
GH1NEY rt:< q. honorati l)""'
Maximiliani Van Maie D.in
Bouchout et Juris-consulti
obiit 20 Maitij 1653.
Uen 5 Februarij 1745
sterft den lieer JACOBUS
FEST1ENS bezonderen
weldoender desers stats
weeshuys, ende syne
huysvrouw joufvronw
JOANNA GRÉGOIRE DE HARZÉ
sterft den 2 January 1760
Dewelcke beyde hier syn begraven
Godt wilt haerder
Zielen genadich zyn
Requiescant in pace.
23.
24.
25.
26,
318 -
Sepulchrum
D1» W1LH. VAN RUYSSEBOR.GH
benefacl. Confs 15. M. V. Tung.
H T V M '
A0 1738.
R. I. P.
I>. 0. M.
Hir jacet R,,m D.
ARNOLDUS JACMOTTE eappellanus
et vicarius ecclesise
15. M. V. oppidi Tungrensis
qui obijt 16 9b,is
1680. Reqniescat in pace.
D . 0 . M .
Piisque exuviis Reverendi admodum
Domini HIERONYMI MOERS I. U. L'us
a fato conjugis domicellee ANN^E
MARIEE AMERIC/E hujus ecclesise
canonici qui vivere desuit XI februani
1665 cui adjacent filii hic quoque
ranonici R. R. adm. D. D. HERMANUS et
GUILIELMUS HIERONYMUS quorum prior,
obiit 17 Aprilis 1658 aller 16 Xb^ 1676.
socero ae leviris poni curavit D. Hermanus Van
van den Bosch hujus oppidi
Scabinus
Requiescant in pace.
Sepulchrum I)1"
FRANCISCI BLAVIER
quondam canonici et
canloris hujus eccliae
qui obiit 22 Octobris
lf>82. Requiescal in pace
Renovalum
27.
- 319
Hic. jacent. hono'rabilis. vir.
WALTERUS. DE. HENISDAEL.
als. Rolarii. quondam. scabinus Tongren.
et. KATHERINA. DUNB1ERS.
cjus. uxor. qui. obierunt.
ano. a. nativitate. Domini.
M.CCCG.XXXIX.
Walter. vero. XXH. july. et.
Katherina V. Augusti
Oiate pro eis.
28.
88'. Hic. jacet. venerabilis.
Vir. D"u\ L1BERTUS DE COERSWERME.
olim. canonic? et. cantor. venerabilis. hujus.
ecclesie. —
Qui. obiit. ano. Dni. M.CCCC.LVI, mensis. Septembris.
die. uUima. Cujus. anima, requiescat. —
in. pace.
Amen .
29.
D . 0 . M .
Un; jaccl liunoratus vir HENRICUS LOERS
bujus insignis eeclesiœ receptor ac.
in eadem trium missarum hebdomadalium
fundator qui obijt ano 1681.
X1"-'5 die 14 et dom11* EL1SABETHA
EOERS ejus soror quae obijt 1690 2 7bris
Requiescant in pace.
30.
Hier ligt begraven Jf MARIA PEX
buysvrouwe van borgemeester
11ENR1CK VOETS die sterf den
7 dach Julii 1646 wiens
Siele Godt genadich sy
Den béer borgemeester
stierft den 30 April 1680
P.iilt voor die Sielen.
32.
— 320 -
Hic jacel R- U« GUILIELM,
HUSQUET sub-plebanus
Turigrt'ii et Capellan . .
huj. . eccliae qui 21 Jan
IG5t obdormivit in Uno
pro cuj. aia refrigio
funiiavii missam hebdomadalem.
Tu viator
precare .
Hier lieht begraven den
eersam. JOANNES LAMBERTI
die ghestorven is den 30 71""
arma 1676 ende MARIA PELSERS syne huysvrouwe
die is ghestorven den
18 Juny A° 1693
Parentibus suis adjacet R. D.
GUILIELMUS LAMBERTI 37
annis pastor in Piringen
hujus ecclia) Capellanus
et tliesaurarius jubillarius
Obijt 26 9b™ A» 1714
aetalis siiae 80
Requiescant in pace.
33. A droite do la chapelle de Ions les saints, une pierre tuniii-
lire enclavée dans le mur porte :
Hic jacet
propre sororem suam
MARIAM DE LA CROIX
defunctam 12 8lir>5 1727.
Reverendus admodum Dominus
JOHANNES DE LA CROIX
Sacerdos et Canonicus
Tungrensis per annos 46
qui annu œtatis 85
obiit 7ma Augusli
1730
Requiescant in pace
Fac modo quœ morieus facfa fuisse voles
— 321 —
34. Dans la chapelle do tous les saints à droite de l'autel,
(in lit sur une pierre sépulcrale :
Hic jacet lion1'5 ARNOLUUS SCHAETZEN
et dom»a ANNA VAN DYGK conjuges
morte dissoluti amore in . . . dissoluti
obiit hsec A0 1075 7h'is die 19*
hic A° 16-14 7bris die 20
ijuibus lector bene apprecare
.... posteri tibi
Ordine quem . . . que suo rapit illacrymabile fatum
effugium non est superesse diu
proies rmieste posuerunt
35
Hic jacet venblls Dnus
HUBERTUS STEVART J. U. L.
cacus Tongrensis qui
obiit Octobris die la A0 1608
3(1
Hic t jacet t sepultus i generosus t vir t
UUMICELLUS t JACOBUS t DE t OEPENBORCH t d'us t de t
betheii) t qui t
obyt t ano t a i nalivitate t
domini f M0 t Ve t Septimo t XI i luly. . . .
eterrraliter t in t sancta t pace t amen 1
37 Dans les cloîtres :
Hier onder ligt begraven ....
. P EUMANS borger
die sterft den en
joufvrouwe syne
huysvrouwe welke sterf A"
ir.33 den
38
40.
322 —
Hier ligt begraven
WILLEM I100NEN die sterfl
A° 1651 den 26 9brls
en CAÏHAR1NA PEUMANS
syn huysvrau is gestor-
ven A0 1640 den 12 Augusti
en GASPAR HONEN synen
soon stierf
Hic jacet sepultus
Rdu Qnoa GUiLHELMUS PEUMANTS insignis
ecclcsiae collegiatse B. M. Virginia oppidi
Tongrensis canonicus qui obyt anno
D"' 1650 mensis Augusti die 21
Requiescat in pace
I). 0. M.
Hic jacet honoratus Uns
MARS1L1US PEUMANS ex-consul
et bujns oppidi altae
Justitue Scabinus praeses qui
obijt ultinia die anni 1686.
ejusq.. ncpotes MARS : PEUMANS cations
Ruttensis et beneficiatus bujus ecclise
obiit 16'» Janrij 1695 et CHRIST. PEUMANS
receptor insignis Gapli Tongr qui
obiit anno 1737 A Feb.
His ce adjacet R. D. JOES. PEUMANS prbït.
benef. et thesaurarius hujus eccliae qui obijt
20 Junii 1752 cuin suo fratre R. I). PETRO
PEUMANS, presb, benef. Tungren qui obijl 17 T»r«
771 JOHANNES PEUMANS, benef. obijl 13 7bri' 17KI
il
- 323
U . 0 . M .
Pijsquc manibus amplissimi Domini
PI11L1PI VAN DEN REYDT hujus oppidi
altae lustitiae scabini praesidis
el ex Consulis fundator missse hebdlis
qui obijt Idibus
Xbris 1672. Parentumque ipsius
mémorise et gratitudiuis ergo
posuit JOËS MENTEN dicti oppidi
a seerelis
Requiescant in pace.
42. Sur une pierre enclavée dans le mur, au côté gauche de la
chapelle de Tous les saints, on lit :
IIIS
D. 0. M. S.
Venerabili viro et D. CAROLO COENEN
Herleu , Nicolaï
F. post vitara tum in variis
principum Belgii aulis, tum
in militia pro catholico Hispa-
niarum rege transactani, hujus
ecclesiœ B. Maris oppidi
Tongren X anis canonico ac
Lectionis psalmorum , miserere
mei Ueus, et de profundis, quolidie
per sacellantim , missam
horae Sextae, ad altare S. Joha-
nis Evag , celebrate , pro fidelium
animarum refrigerio recitadœ
pro fundatori Antonius
Monaeus ex testamento
havres poni cura vit
obiit A» Dni 1558 œtatis 58
Anima ejus Requiescat
in pace
— 3:2 i —
43. Un peu plus loin que cette dernière pierre, et comme elle
enchâssée dans le mur, on voit une niche sculptée en pierre de
sable et dont les moulures ont disparu sous une épaisse croûte
de chaux.
Elle est divisée en deux parties : la partie supérieure, d'une
hauteur d'environ 35 centimètres , représente saint Hubert au
milieu des forêts ; le cerf miraculeux est devant lui. La partie
inférieure de -40 centimètres de hauteur représente la Mère des
Douleurs, regardant le corps inanimé de son divin fils.
Deux colonnettes torses supportent un fronton trilobé ; cette
niche se termine en cul de lampe , sur lequel se trouve l'in-
scription suivante :
Hier : ligget : begrave : HOUBRECHT : VANDEN LIEBAERT :
die : sterf : — : int : jaer : ons : liere :
15:28 : du : 25 : dach : va : Augiisto : bidt : voer : die : ziele :
u.
Aimo . D"' . MCCCC. XXXII
prima . die . inensis . Apiilis .
obiit . honorabilis . vir . FORKENS . L)E
VORDA
45.
Aimo t Dni t M t CCCC
. , . . obyt i GERA.RDUS M1NEON \
...Mi CCCC i
.... die t . obiil . 1 BEATRIX i
uxor i GERARD! M1NEON t
orale t pro 1 eis t
— 325 —
46. Sous un tableau peint sur bois, remarquable par la
finesse d'exécution des figures , on voit en lettres gothiques ' :
Hier. ligt. begrave. lier. ART. VÂT PYRINGHË. conuT.
van deses. keiïe. die sterf. in. de. jaer. os. Heere.
M. 1111e e"n. XCVII. des.
XXIIII. dachs. va. de. eve. maet. op. sinte. materus
avot. wilt. bide. voer. die. ziele. om. Gods. wille
■47. Dans l'église collégiale de N.-D. à Tongres, se trouvait
jadis une pierre sur laquelle était représenté un gentilhomme
armé de toutes pièces, accompagné de son épouse ayant sa robe
doublée de vair et à côté de sa tète deux écussons sous vuids
avec cette inscription :
Anno Dni M'CCC'LXVI'XXVII die marty
obiit domicella MARIA DE ORORNE uxor
WALTERI DE BETUE armigeri
anima ejus requiescat in pace
ei Walterus p<ics obiit ano Dni MCCC. . . .
4-e
Anno Domini millesimo tricentesimo
LXXVI mensis Augusti die Xli obiit
JOHÈS deus LE BOUT DE GHELMEN
anima ejus requie>cal in pace. Amen.
Anno Domini millesimo. ...
mensis february die XXII obiit BEATRIX
filia JOHANNIS THO.VLE uxor JOHANNIS
LE BOUT DE GHELMEN, anima ejus
requiescat in pace Amen. *
1 L'extième pudeur des chanoines semble s'être alarmée à cause de quelque licence
trop naturelle aux peintres naïfs de cette époque , aussi une main fort chrétienne mais
peu artistique a impitoyablement gratté le haut du torse de la sainte Vierge. Cette pein-
ture appartient à l'école réaliste qui profana les nobles traditions des Memling et des
Van Eyck. Les idées étaient tellement faussées au XVIe siècle, que le concile de
Cambrai, tenu en 1565, prescrivit de ne placer dans les églises aucun tableau que du
consentement des évêques et d'enlever tous ceux qui seraient jugés indécents ou con-
traires aux types adoptés, quod non deceat neque prototypo eonyruat.
- V. Le Fokt , Liasses. Archives de VElat à Liège.
- 3^(5 —
49. Sous un tableau peint sur bois que, surmonte une double
galerie gothique en bois sculpté et qui représente la Vierge des
Douleurs transpercée de sept épées avec la légende : Sicut lilium
in ter spinas , ainsi que saint Florent portant la tiare et la crosse
et le chanoine défunt à genoux , on lit l :
Hic jacet sepultus venlis Dns FLORENTIN . . DE
DELFT scbolasticus dive bte Marie Virginis oppidi
Tongren qui obyt ano Uni millesimo quin-
getesimo Vicesimo sexto niesis novembiïs
die decimo tercio cuj.. aia requiescat in Sancla pace amen.
Cette œuvre est remarquable par le fini de son exécution.
50. Sur une croix en pierre bleue placée dans le préau
Ter memorie
van den erw
Heer ^EGIDIUS
PETRUS SAMONTS bénéficier
dezer kerke die sterft den '3
november 1701 ende siiner
ouders zi alhier begraven
!', . I . P .
51 . Dans les cloîtres :
Ano Uni MCCC XL1I1I
nltima die martis
Omit Dns .... UE M1LLEN
Scabinus Tongren Cujus aia
Requiescat in pare ....
1 On pense que la marque du peintre -f£ , maintefois accompagnée de deux autres
signes J) ;f , n'est autre chose que le monogramme grec du christ £ -/? auquel nos
peintres ont donné une forme gothique.
52.
53
— 327 -
I). 0. M.
Hier ligt begraven den eerbaren G1LIS SERONX
in zyn leven
Scholtet des eerweerdigen
Capitels van Tongeren
die sterft anno 1606 den 29 novembris
ende
Joufvrouwe CATHAR1NA KELUERMANS
zyne huysvrauwe
die sterft anno
. . . . Dni t M t CCC t
(cassée)
LXXVIl t mensis t July t die + XXI + obiit t L. . .NS t
RULANDI t âïta t ejus
requiescat t in pace t
54.
HELMO. A. MERA. quu
. KATHERINA. ejus.
. Sacerdos. et.
. . . memoriate.
. . Altéra anno XVe
in pace.
55.
. . . parentes. Dnor. SYM0NI8. et. GORELINI. DE.
LE . . . . ebs. mat. obiit. VIII . KÏ. post.
IX annos. orate. p. eis.
56.
Hic. jacet. sepultus. venerabilis. vir.
Dns
qui. obyt. âno. Dni. XV' XXVII.
mensis. january. die. XXX.
cuj. aia. requiescat. in pace.
— 328 —
►VJlVDeîKTORe * D7V£ ♦ COGll >SQ R£
58.
59.
— 329
Hier ligt begraeven den
eersaemen M'' GODEFRIDUS
DAENEN den weleken steerf
den 18 apis 1652 ende die eers-
aeme ALEYDIS COPIS alias NEL1SSEN
steerf
Bidt godt voor
die zielen '
D. 0. M.
Hic jaeet R . D . PETRUS
LEHÀULT dum vix.it cancus
Tungrensis qui fundavit duas
missas in Villario Epi unam
Dnicis dieluis alteram
Sabatinis obyt 20 7b-is 1663
Requiescat in pace.
Amen .
1 Les pierres tumulaires Nos 57 el 58 proviennent de la chapelle d'Ovée, sous Tongres.
X\i\ \\il
— 330 —
G.
CATALOGUE DE L'AMEUBLEMENT.
CHAPITRE I.
MOBILIER DE L'ÉGLISE.
Dans le chœur :
Le maître-autel, élevé en 1732 par Martin-Benoit Termonia,
forme une massive construction en marbre blanc et rouge de
St. -Rémi, qui bouche les trois fenêtres du chevet.
Cet autel y compris les deux marches a une hauteur de 9.68
et une largeur de G. 20.
La table proprement dite est en petit granit, de forme cubique
et ornée de carrés moulurés. Elle mesure 3. 50 de long sur
1 .30 de large et 1 .03 de haut. Sur la face antérieure on voit
l'ouverture de la cavité renfermant les reliques. Un gradin en
marbre noir poli sert de base au tabernacle en bois doré, surmonté
d'un crucifix et d'une couronne que tiennent deux anges '.
Sur une large base ornée de plaques en marbre blanc et rouge
s'appuyent six colonnes en marbre rouge avec chapiteaux dorés
supportant une frise en marbre blanc que surmonte une corniche
saillante richement moulurée. Un dais plein-cintre en bois peint et
doré, en forme de modillons, soutient deux anges portant les attri-
buts papaux et forme le fronton de ce véritable monument d'archi-
tecture moderne.
1 Sur le tabernacle est sculpté en bas-relief le sacrifice d'Abraham. Ce tabernacle est
dû à la générosité du doyen Closar ainsi que le prouve un cartouche placé au bas
et orné des armoiries du donateur avec l'inscription suivante :
INTREPIDE
HATHiSUS PAULUS CLOSAR HUJUS
PERINSIGNIS ARCHIDIACONALIS
ECCI.ESI.K CANONICVS UKCANUS D. 1).
— 331 -
De chaque côté de l'autel une petite porte cintrée est surmontée
des statues en bois de saint Materne et de saint Lambert *.
Cet autel vient d'être remplacé par un rétable en bois de chêne
sculpté provenant de l'église de Venray (Limbourg hollandais).
Ce rétable , jusqu'à présent peu connu , était , il y a vingt ans ,
enfoui dans l'humble église d'un petit village de la Campine qui,
ignorant le trésor qu'elle possédait dans son sein , le vendit au
prince russe Soltikoff. Cet amateur éclairé le fit transporter à Paris
et recourut vainement au talent des sculpteurs les plus en renom
pour le faire restaurer.
Franc. Malfait sculpteur de Bruxelles, appelé à Paris, entra
en relation avec le noble Russe , se chargea de rétablir ce type
de l'art dans sa beauté primitive et finit même par en devenir
propriétaire. Il le restaura avec cette intelligence qui prouve son
respect pour les anciennes traditions de l'époque ogivale et sa
profonde connaissance de l'art gothique.
Après toutes ces pérégrinations , l'église de Tongres , grâce
à de nombreuses démarches, acquérit en 1863 ce bijou de l'art
gothique.
On en est réduit aux conjectures sur le nom de l'artiste qui
exécuta cette œuvre remarquable 2. Tout ce qu'on peut affirmer à
cet égard , c'est qu'il faisait partie de la confrérie de St. -Luc
d'Anvers. La marque , brûlée sur un des côtés latéraux et répétée
sur chaque statuette , en fournit la preuve.
Ce rétable de 4.70 de haut sur 3.20 de large et 0.25 de
profondeur, a la forme d'une grande arcade surélevée , cantonnée
de deux arcs surbaissés qui surmontent les cases de dextre et de
1 L'autel en marbre vendu à l'église d'Andennes (Namur) a éé démoli au mois de
juin 1865 et le rétable a été placé au mois de mars 1866.
2 II paraît qu'un rétable du même artiste se trouve à Eroubourg en Bresse (France )
(Ce dernier rétable est sculpté en pierre de France.) Notre rétable a beaucoup d'analogie
avec celui que l'on voit dans l'église de Boenendael près de Bruxelles et qui représente
les différentes scènes du martyre de saint Christophe.
— 332 —
sénesfre ; il est divisé en huit compartiments disposés sur deux
rangs superposés et animés par de naïfs et gracieux personnages
placés sur un plan incliné d'après les lois de la perspective. Les
grands mystères de la vie de la sainte Vierge, patronne de l'église ,
forment le sujet des nombreux groupes qui composent cet autel.
La grande composition du milieu représente le mariage de la
sainte Vierge. Dix personnages , dont la hauteur varie de 25 à
30 centimètres, occupent ce compartiment; leurs costumes nous
rappellent le XVe siècle. Au pied de la sainte Vierge on remarque
deux anges debout soutenant sa robe traînante. Deux petits groupes
en haut-relief placés contre les parois de ce temple gothique repré-
sentent la naissance de la sainte Vierge et sa présentation au
temple.
Le premier compartiment à gauche , séparé du précédent par
des jambages composés d'un faisceau de nervures flanqué d'un
contrefort garni de crochets, forme un groupe de deux personnages
et représente l'Annonciation de la sainte Vierge ; à côté se trouve
la Visitation de Marie à sa cousine Elisabeth. On y voit également
Joseph et Zacharie.
La composition placée au-dessus représente l'Adoration des
Bergers. Celte composition de 18 figures nous montre l'enfant
Jésus couché sur un peu de paille entre le bœuf et l'âne. Sa divine
mère est à genoux près de lui ; saint Joseph portant une torche
et une équerre est à gauche au milieu d'un groupe de bergers :
deux anges adorateurs sont sur l' avant-plan.
Les deux petits groupes placés au-dessus représentent le refus
de l'offre de Joachim et Joachim consolé par l'ange.
A droite en bas nous voyons d'abord la Circoncision , composition
de sept personnages, et l'éducation de l'enfant Jésus, composition
de quatre figures.
Au-dessus se trouve l'Adoration des rois mages, composée de
seize personnages. Les petits groupes représentent la vision de
— 333 —
sainte Anne et la rencontre d'Anne et de Joachim à la porte dorée
de Jérusalem.
La composition centrale supérieure , groupe de 13 personnages,
représente la mort de la sainte Vierge ; sur lavant-plan on remarque
les quatre évangélistes , dont les statuettes sont reproduites dans
des niches ménagées dans les nervures séparatives.
Au-dessus du dais ajouré qui couronne cette composition ma-
gistrale se trouve l'Assomption de la sainte Vierge soutenue par qua-
tre anges. Les petits groupes en haut-relief , placés sous la
guirlande de feuilles déchiquetées , conduite en serpentant de ma-
nière à dessiner d'élégants rinceaux ajourés qui encadrent cette
dernière scène , représentent les sept douleurs de Marie :
1° La présentation de l'enfant Jésus ,
2o La fuite en Egypte ,
3° La recherche du divin enfant par ses parents ,
4° La rencontre de Jésus portant sa croix ,
5° Marie au pied de la croix ,
0° La descente de la croix et
7° La mise au tombeau du Christ ,
L'œuvre entière est surmontée d'une statue d'ange portant
une banderole déroulée avec l'inscription : Isa/as XI. Des fleurons
déchiquetés et des pinacles hérissés de crochets complètent l'orne-
mentation supérieure de ce beau rétable.
Le fouillis des feuillages et des dessins architecloniques qui
régnent tout le long des nervures séparatives et sur les voûtes
couvertes d'ornements et de pendentifs rappelle les enchevêtre-
ments compliqués de l'art mauresque et constitue à lui seul un
travail de patience inouïe. Chaque partie de ce grand ensemble
s'harmonise avec le sentiment de la scène qu'il représente et laisse
reposer l'œil sans le fatiguer par des surcharges et sans l'épou-
vanter par de profonds vides. Du reste, cette œuvre est empreinte
d'un cachet d'originalité puissante qui distinguait l'art flamand au
— 334 —
XVe siècle, époque où les traditions gothiques, qui quelques années
plus tard s'effacèrent pour faire place au génie de la Renaissance,
étaient encore dans toute leur splendeur.
Trois gradins , coupés au centre par un tabernacle orné d'un
beau Christ , servent de base au rétable et sont dus au ciseau du
sculpteur F. Malfait. Le dessin en est d'une grande richesse.
Au-dessus du rétable , on remarque les vitraux restaurés
en 18G5 par M. Vander Poorten de Bruxelles et qui rehaussent
l'effet produit par ce bel autel.
Ces vitraux ornent le chevet du chœur. Le sujet de celui placé
dans la fenêtre centrale est le crucifiement du Christ : à droite
du crucifié se trouve la sainte Vierge , à gauche le disciple favori ;
au-dessus du portique qui encadre ce groupe , trois figures acadé-
miques représentent la Foi , l'Espérance et la Charité. Un pélican
surmonte cette composition qui fut exécutée aux frais de la fabrique
en 1550. Au pied , on a ajouté deux anges en grisaille portant les
instruments de la Passion , les armoiries du pape Pie IX et l'in-
scription suivante :
A0 na"s Uni VIIIe IV Léo ppa
consecv' eccla Tung. Mae
IX maii q' oli dslructa'
fu' |i liuos q' raedificav1
d' oger* Dans nrdiavit
1 ea XX caeos.
Le vitrail de droite représente les quatres docteurs de l'Église :
saint Augustin, saint Grégoire, saint Jérôme et saint Ambroise.
Celui de gauche la sainte Vierge, saint Materne et saint Servais.
Tous deux ont été exécutés en 1548 et offrent de beaux spécimens
d'étoffes damassées d'une grande richesse, sur lesquelles on dis-
tingue des fleurs peintes en apprêt.
Le dessin des figures est correct mais manque quelque peu
- 335 —
d'effet par suite de l'emploi des blancs, des jaunes et des couleurs
pâles. Le cerné se fond presque entièrement dans le modelé, et la
couleur en général reste subordonnée à la forme.
Sur l'autel, six chandeliers en cuivre repoussé , deux girandoles
et des canons.
Sur les marches de V autel se trouvent quatre chandeliers
d'élévation en cuivre; à droite le grand chandelier pascal * et de
chaque côté de l'abside trois girandoles en cuivre 2.
A gauche de V autel, une tablette en marbre blanc soutenue par
un aigle éployé en bois doré , un crucifix avec statuette de la
Vierge en bois sculpté , deux chandeliers en cuivre jaune bosselé
et annelé portant les armoiries du donateur et l'inscription suivante:
FRANCISCUS
ORANUS. ROTOE
AUDITOR
PKŒPOSITUS
ECCLESI/E
BEATiG
MARUE
TONGK
EN
Ces chandeliers sont du XVIe siècle.
Au milieu du chœur se trouve le beau lutrin en cuivre jaune 5 ,
deux sièges pliants et un pupitre en acier poli orné d'annelets et
de boules en cuivre. Deux grands chandeliers en cuivre dont les
pieds triangulaires et bosselés sont soutenus par trois griffes de
lion s'appuyant sur des boules; les tiges en sont annelées et les
bassins en sont circulaires. XVIIe siècle.
Les côtés latéraux du chœur sont ornés d'un double rang de
stalles superposées en bois de chêne, construites aux frais du
1 V. Le Trésor, art. Minauderies.
Idem.
r' Idem.
- 33G -
chapitre par Georges Van Schoonbeeck en 1710. Ces 50 stalles
(32 scalse et 24 formée chori) ont coûté 12,575 fr. Au-dessus
des stalles six grands tableaux dont quatre représentent les
principaux épisodes de la vie de saint Materne, et les deux autres
la Visitation de la sainte Vierge et la Fuite en Egypte , furent
donnés à l'église par le prévôt Jean René de Neufcourt, en 1722.
Les armoiries du donateur * et l'inscription suivante couronnent
ces tableaux.
Joes : Renatm : A Neufeour. — Conçus : Leod . archid :
eeeliœ : B : M : V : Tung : —
P-positus : anno. 1722.
Ils sont dus au pinceau du peintre namurois J -B. Juppin 2.
Ce sont de grands paysages historiques, avec des figures de gran-
deur académique peintes, à ce qu'il paraît, par un artiste du nom
de Plumier. Les paysages sont composés dans le genre du Poussin,
dit M. Marinus, et sont d'une exécution extrêmement large ; ce-
pendant sous le rapport de la composition, du sentiment et même
du coloris ils sont sans conteste inférieurs aux œuvres de ce
maître. Les fonds surtout sont remarquables par les détails et
la finesse de leur exécution.
Le chœur est clôturé par une construction en marbre d'une
certaine élévation. Cette clôture due à la générosité du prévôt
Jean-Louis D'oyenbrugge , comte de Duras , remplaça en 1751
le jubé ou l'ambon.
' Burelé d'argent et de sable de huit pièces chargées d'un éeusson d'or au sautoir
de gueules accompagné de quatre merlettes de sable.
* Juppin naquit à Namur en 1678, résida quelques années à Bruxelles et en Italie,
puis se fixa définitivement à Liège en 1717 ; il mourut à Namur le 5 septembre 1729
el fut enterré dans la collégiale de N.-D.
L'église de St. -Martin à Liège possède six grands paysages de ce peintre ; l'église de
Si Denis en possède quatre et la Société archéologique de Namur deux.
— 337 —
Deux grandes statues en bois représentant la Foi et l'Espérance
couronnent cette construction qui s'abaisse en forme de modillon
vers le centre !.
Une porte à claires voies, en cuivre jaune coulé , ferme l'entrée
du chœifr 2.
Dans le transept de droite :
Un autel en marbre rouge, à quatre colonnes, dédié à la sainte
Vierge et construit en 1754 dans le goût du maitre-autel aux frais
du chapitre par le même M.-B. Termonia pour le prix de 4, OOO fl.
C'est sur cet autel que se trouve placée la statue miraculeuse
de Notre Dame. Cette statue en bois , de grandeur naturelle à
laquelle les légendaires ont donné le nom de Prima cis Alpes,
est un chef-d'œuvre de la statuaire du moyen âge.
Vis-à-vis de cet autel:
Un grand crucifix avec Christ en bois est fixé au mur ainsi
qu'une girandole en cuivre repoussé; les Signa miraculorum ,
composés de plusieurs chaînes entraves, cuissarts, cadenas, etc.,
placés au-dessous, appartiennent au XVe siècle 5.
Une lampe en cuivre repoussé et doré portant les armoiries du
donateur et l'inscription :
J. R. a Neufeourl conçus Leod. archid. ecc. Tongrensis
prœposilas D. D. ao. 1719.
« Eu- dessous de ces statues et au-dessus de deux médaillons en marbre blanc, repré-
sentant les bustes en bas-relief de saint Jean et de saint Louis, se trouvent les armoiries
du prévôt avec cette inscription :
JOANNES : LUDOVICIJS. DOYENBRUGGE. EX. C0M1TIBUS.
DE. DURAS. BARO. AB. ELDEREN. DECANUS
LEODIENSIS. PR.ïPOSITUS. TONGRENSIS. A'10 1751.
* Les tableaux de Juppin ont été enlevés lors de la réparation du chœur et ne seront
plus replacés. La clôture en marbre a été démolie en 1863.
5 Une pieuse tradition rapporte que des pèlerins tongrois s'étant rendus en Terre-
Sainte furent à leur retour arrêtés par les Musulmans, jetés en prison et chargés de fers.
Ayant eu recours à la sainte Vierge ils furent miraculeusement délivrés, revinrent dans
leur ville natale el déposèrent leurs chaînes sur l'autel de la sainte Vierge.
— 338 —
Un banc en bois de chêne, style gothique, pour la confrérie du
saint Rosaire. Il fut sculpté en 1858 par Gielen de Tongres.
Une boite renfermant des porte-flambeaux en bois.
A droite de cet autel:
Un piédestal gothique surmonté d'un groupe représentant Notre
Dame de la Salette.
Un tronc carré en chêne sculpté, style gothique.
Trois bancs mobiles en chêne.
Sur l'autel :
Six chandeliers en étain, un petit crucifix avec Christ en argent
et des canons.
Dans le transept de gauche :
Un autel en marbre rouge, à quatre colonnes, dédié à saint
Servais, construit dans le goût de celui du collatéral droit. Sur
le frontispice se trouve SVT (Servatius).
Sur l'autel :
Six chandeliers en cuivre jaune et deux en étain , un petit cru-
cifix avec Christ en argent et des canons.
A côté de l'autel :
Trois bancs et un tronc gothique en chêne ; un piédestal go-
thique en bois peint , surmonté d'un groupe , moulé par les
frères Goyers , représentant la sainte famille.
Au haut des trois nefs:
Deux doubles bancs en chêne, style gothique, sculptés en 1858
par Gielen.
Deux tableaux en bois, fixés aux colonnes, indiquent les mem-
bres de la confrérie du saint Rosaire.
Dans la nef centrale:
Contre le troisième pilier du côté de l'évangile, la chaire de
vérité en bois de chêne sculpté, style Renaissance. Elle est de forme
circulaire et décorée des bustes sculptés en bas-relief des quatre
évanerélistes.
— 339 —
Le toit ou dais est surmonté de quatre modillons supportant un
globe orné de la croix.
Ce meuble, provenant de l'église d'un couvent, a été placé dans
la collégiale de Tongres lors du rétablissement du culte K
Basses-nefs , côté de l'évangile :
Dans la première chapelle , fondée en 1306 par le chanoine
Lambert de Villers-l'Évèque , se trouve un autel en marbre blanc ,
noir et rouge reconstruit en 1783 par le prévôt Léon-Michel
Walrame de Geloes, ainsi que le démontre l'inscription: Domus
altissimi decorem spirans. insigniq templi hujus , capitulo
gratos , ac memores sensus probare gestiens. hoc pietates mo-
numentum.
Consecrare volait
per illustris vir Car. JBta. Léon: Mich. Walramus. ex veteri
prosapia De Geloes S. R. I. cornes com. Lossensis. Par. eccl.
Sti Servatii Mosœ trajentensis S. prœposilus. coll. archid. Tun-
grensis p. coadjutor Cathed. Leod : can: archid: in Mechlen
Dns tlis in Tivez-Bergen-Daelgrimbg. Mechlen. Glabeik. etc. etc.
etc. — 1783.
Cette chapelle anciennement dédiée à saint Georges l'est aujour-
d'hui au Sacré Cœur de Jésus , dont le tableau orne l'autel. Ce
tableau d'un mailre inconnu est surmonté du chiffre du donateur 2.
Dans la deuxième chapelle, fondée par le même, on voit un
autel en marbre blanc, bleu et ronge, reconstruit par la confré-
rie du Rosaire en 1836, dédié anciennement à saint Laurent et
aujourd'hui à saint Joseph. Sur l'autel se trouvent deux chande-
liers en cuivre jaune, un crucifix en bois et des canons. Dans la
chapelle, un banc en bois de chêne.
' Il ^erail à désirer que, par uno heureuse occasion, on put doter l'église d'une chaire
en harmonie avec son style d'architecture.
- Il porte de sable à la croix dentelée d'or.
— 340 —
Au pied de l'autel se trouve l'ouverture du caveau servant à la
sépulture des chanoines , et contre le parement septentrional le
monument en marbre noir élevé à la mémoire du doyen Glosar * .
Anciennement les bénéfices de saint Laurent de sainte Agathe et
de la décollation de saint Jean , étaient desservis dans cette
chapelle.
Dans la troisième chapelle , fondée par Henri Henrot au
XIVe siècle, un autel en marbre bleu, blanc et rouge, reconstruit
par la confrérie et dédié anciennement à sainte Ursule et depuis
à sainte Lucie.
Sur l'autel se trouvent deux chandeliers en cuivre jaune , un
crucifix en bois et des canons.
Dans la chapelle un confessionnal sculpté en bois de chêne, sur
le fronton duquel on lit :
D. Joes Morsmans Can™s
eccliœ D. Mariœ V. Tung.
Cinq bénéfices étaient établis avant 1774 dans cette chapelle : ceux
de saint Judoce, de sainte Elisabeth, de la sainte Vierge, de saint
Jean et celui de la chaire de saint Pierre.
Dans la quatrième chapelle, fondée par Richald de Kudecoven
au XIVe siècle, un autel en marbre blanc et rouge établi par la
confrérie et dédié anciennement aux saints Crépin et Grispinien ,
et plus tard à saint Dominique 2.
Sur l'autel deux chandeliers en cuivre jaune , un crucifix en
bois et des canons.
Dans la chapelle un confessionnal en bois de chêne sculpté.
Deux bénéfices, celui de saint André et celui de saint Mathieu et
de saint Hubert, avaient leur siège dans celte chapelle.
' V. le n° 1 des Inscriptions tumuluires.
! En 1833 existait encore l'ancien autel en bois; an tableau représentai!) le Chrisl
el la suinte Vierge l'ornait (probablement celui indiqué plus loin sous le n° 45 des
épitaphes).
- 341 —
Dans la cinquième chapelle, fondée en 1306 par le chanoine
Lambert , se trouve un autel en marbre blanc et rouge à colonnes
cannelées, reconstruit par la confrérie de N.-D. *. Dédié ancien-
nement à sainte Marie-Madeleine, il l'est aujourd'hui à la Mater
Dolorosa. Sur l'autel on voit deux chandeliers en cuivre jaune, un
crucifix en bois et des canons; dans la chapelle, un confessionnal
en bois de chêne.
Outre le bénéfice de sainte Madeleine dont la collation apparte-
nait à l'écolâtre , deux autres bénéfices celui de saint Pierre et
de saint Paul et celui des deux saints Jean , fondés dès 1 24-8 ,
étaient desservis dans cette chapelle.
Basses-nefs , coté de Vépilre :
Dans la première chapelle fondée le 6 décembre 1312 par
Godcfroid de Werm un autel en marbre blanc et noir reconstruit
en 1783 par le prévôt De Geloes. Une inscription et les armoi-
ries du donateur attestent le don. 2
Au fond de l'autel se trouve un tableau représentant le sacré
cœur de Marie , entouré de trente-deux écussons formant les
quartiers de noblesse du défunt. Sur l'autel , deux chandeliers en
cuivre jaune, un crucifix en bois et des canons.
Le tableau qui ornait l'ancien autel en bois représentait la naissance du Sauveur.
d . 0 . m .
DOMUS AlIPLIbSlMI DECOREM
SPlRAi\S 1NSIGMQ' TEMPL1 HUJUS
CAPITULO GRATOS AC MEMORES SEN-
SUS PRORARE GESTIEiSS HOC P1ETATIS
MONUMËHTUJM COIVSECRARE VOlUIT
PER ILLUSTRIS VIR CAR. BTA LEON MI-
CHEL WALRAMUS EX VETERI PROSAPIA
DE GELOES S. R. I. COJIES PAR : COMIT :
LOSS : ECCL : STI SERVATII MOS.-E TRA-
JECTENSIS ET COLL : ARCHID : TUNGRENSIS
S. PR/EPOSITUS CATH. LEOD : CAN : ARCHID :
IN MECHLEN ET D. IN TWEZ-BERGEN
DAELGR1MBY MECHLEN GLACIER ETC. ETC. ETC.
1783.
— 342 —
Dans la chapelle un banc en bois de chêne et la statue de sainte
Anne, mère de la sainte Vierge. Trois bénéfices simples étaient
fondés dans cette chapelle savoir : ceux de saint Nicolas, de sainte
Catherine et du Sauveur.
Dans la deuxième chapelle, fondée par Walthèreen 1282, un
autel en marbre blanc, bleu et rouge, construit en 1830 par la
confrérie et dédié primitivement à la sainte Croix , après à
saint Donat.
Sur l'autel deux chandeliers en cuivre jaune , un crucifix en
bois , des canons.
Le confessionnal en bois de chêne sculpté qui fait face à l'autel
a été établi en 1849 et fait d'après les dessins de M. F. Durlet,
architecte à Anvers.
Dans la troisième chapelle, fondée par le chanoine Jean deSluse
vers 1350, un autel reconstruit en marbre blanc, bleu et rouge
par la confrérie et dédié à sainte Barbe.
Sur l'autel deux chandeliers en cuivre jaune, un crucifix en
bois et des canons.
Dans la chapelle un confessionnal en bois de chêne orné des
armoiries des donateurs les chanoines Larmoyer et Goemans.1.
Dans la quatrième chapelle dite des Rhéloriciens , fondée par
Henri de Merlemont clerc en 1313 , un autel dédié à saint André.
Démoli en 1837 et reconstruit en marbre par la fabrique aux
frais de la succession du docteur André Gbristiaens , cet autel
servait à l'exonération des bénéfices simples de saint Nicolas, de
saint Etienne, de la Nativité, de la Visitation et de l'Assomption
de la sainte Vierge 2.
R. adm. D. ,1. E. Goemans R. adm D. P. F. Larmoyer
Cane Tong. Cane Tong.
1 Dans eette chapelle se trouvait en 1836 l'autel en bois, surmonté delà statue de
sainl Nicolas, qui est placé dans la sixième chapelle.
— 313 —
Sur l'autel sont placés deux chandeliers en cuivre jaune , un
crucifix en bois et des canons.
Dans la chapelle se trouve un banc en bois de chêne.
Dans la cinquième chapelle, fondée en 132(3 par Jean Le Bout
de Gelmen et par son épouse Béatrix Thomas , un autel en marbre
blanc et rouge, donné par la confrérie de N.-D. et dédié ancienne-
ment à saint Sébastien , aujourd'hui à sainte Philomcne *. Sur
l'autel se trouvent deux chandeliers en cuivre jaune , un crucifix
en bois et des canons : dans la chapelle un confessionnal en bois
de chêne, style gothique, exécuté en 1850 sur les dessins de
M. F. Durlet.
Les bénéfices de cette chapelle étaient ceux fondés en l'honneur
de saint Sébastien et de la Vierge des sept douleurs.
Dans la sixième Chapelle , fondée au XIVe siècle , un autel
en bois sculpté portant la date de 1634 surmontée des armoiries
de la famille Witten , et dédié aujourd'hui à saint Hubert. Le
tableau qui orne cet autel représente l'Adoration des Bergers et est
copié d'après Otto Venius 2. Sur l'autel se trouvent un petit taber-
nacle en bois , deux chandeliers en cuivre jaune , un crucifix en
bois et des canons. A droite de l'autel on voit des fragments de
peintures murales du XVe siècle.
Dans cette chapelle sont placés les fonts baptismaux ; ils sont
en marbre rouge de forme circulaire , portés sur un pédicule carré
et munis d'un couvercle en cuivre repoussé sur le bord duquel on
lit : Fait-par-Jean-Kirsch , chaudronniée à Liège 1793.
Au bas des nefs :
Deux doubles bancs en bois de chêne, exécutés par Ghristiaens
Peltzer, ont été placés en 1845.
1 On y voyait avant la reconstruction de cet autel en 1835 un tableau peint sur bois
représentant la décollation de saint Siméon.
s L'ancien autel en bois était encore orné en 1833 d'un tableau représentant l'insti-
tution de la Fête-Dieu.
— 344 —
Un trône gothique en chêne , neuf bancs mobiles à l'usage des
paroissiens indigents et -450 chaises publiques.
Le jubé est en bois de chêne sculpté, avec accolades dorées au
milieu desquelles un écusson portant trois lis blancs entourés d'épi-
nes avec la légende : Sicut lilium in ter spinas.
L'orgue est placé dans une caisse en bois de chêne sculpté. Le
jeu modelé sur celui qui existait à l'abbaye de Herckenrode a été
construit par Jean-Baptiste Le Picard le 14 septembre 1750,
moyennant 10,000 florins. La caisse qui est l'œuvre de Martin-
Benoit Termonia a coûté 2,900 florins.
L'entrée de l'église placée sous le jubé est fermée par une porte
en cuivre à claires voies qui jadis se trouvait au chœur. Elle porte
l'inscription suivante : Christiaen Schwertflcger Leod'ms me
fecit Ao 1711 : et coûta 1250 fis.
Dans la grande nef contre les piliers se trouvent douze giran-
doles avec réflecteurs en cuivre. A la voûte sont suspendues six
lampes en cuivre émaillé dites coronae lucis , exécutées en 1855
par le sieur Philips lampiste à Liège, au prix 1800 fis. Aux
murs qui séparent les chapelles latérales sont appendues 14 gra-
vures coloriées et encadrées formant le chemin de la croix •.
CHAPITRE II.
Mobilier de la chapelle claustrale :
Un autel antique présentant une table en pierre bleue appuyée
sur un sarcophage en pierre de sable , divisé en trois niches à
sommets trilobés. Ces encadrements moulurés protégeaient trois
figures de saints dont il ne reste plus que les auréoles. Le
rétable est orné d'un grand bas-relief en marbre blanc repré-
sentant la Naissance de la sainte Vierge et de six autres petits
bas-reliefs en marbre représentant des personnages célèbres de
l'ancienne loi, parmi lesquels on reconnait Moïse, Judith, Salomon,
Il serait ;i désirer queces enluminures lussent remplacées par dos vitraux
— 345 —
et David. Deux autres sujets en plâtre représentent Adam et Eve
mangeant le fruit défendu, et Adam et Eve chassés du paradis.
Sur l'autel un petit tabernacle en bois doré; quatre chandeliers
en étain et une statue de l'immaculée Conception.
A gauche une armoire, un fauteuil, quatre grands bancs, huit
petits bancs et un Christ en bois sur fond de velours noir encadré.
Aux murs sont accrochés quatorze tableaux de grandeurs diffé-
rentes :
'1° Un tableau sur toile de grande dimension représentant saint
Servais recevant les clefs épiscopales du prince des apôtres. Il
formait le panneau principal d'un tryptique dont les volets sont
perdus. Ce tableau est signé M. Dumoulin.
2o Un tableau sur toile de forme allongée représentant la
transfiguration du Christ.
3° Un tableau sur bois en losange représentant le Christ
délivrant les âmes du purgatoire.
4° Un petit tableau peint sur toile représentant sainte Catherine.
5° Un autre tableau, pendant du précédent, représente saint
Georges.
G0 Un tryptique, peinture sur bois, dont le panneau principal
représente la sainte Vierge portant l'enfant Jésus sur ses genoux;
saint Jean-Baptiste et une troupe d'enfants entourent ce groupe
central. Sur le volet de droite figure le portrait du chanoine Van
Sprolant, et sur celui de gauche le portrait du chanoine-chantre
Théodore Meyers, neveu du précédent.
Sur la face postérieure, sont peints la sainte Vierge et saint
Materne en grisaille. Au bas de ce tryptique se trouve l'inscrip-
tion rapportée au n° 9 des épitaphes.
7° Un tableau peint sur toile représente saint Dominique rece-
vant le costume de son ordre et sainte Barbe.
8° et 9° Deux volets représentant sainte Hélène et Constantin-
le-Grand, peintures sur bois.
XXIX XXII -1-1
— 346 —
10° Un volet, peinture sur bois, représentant saint Jean-1'Evan-
géliste et sur le premier plan le portrait du donateur agenouillé.
Le Sauveur du monde est peint sur le revers.
1 1 o Un volet, peinture sur bois, pendant du précédent, repré-
sente saint Materne et le portrait du chanoine donateur agenouillé
l'aumusse de petit gris sur Pavant-bras.
Saint Pierre se trouve représenté sur le revers.
12° Un volet, peinture sur bois, représentant saint Servais et
saint Hubert.
13° Un tableau de forme carrée, peint sur toile, représentant
saint Materne et saint-Servais , et sur l'avant-plan le portrait du
doyen Guillaume Kersmeckers agenouillé.
14° Un tableau peint sur toile, avec cadre orné de modillons et
surmonté d'une frise, représente sainte Apolonie; sur la partie
supérieure du cadre on voit les armoiries des donateurs (Witlen
et Pex) et le millésime 1619.
Dans la salle du conseil de fabrique :
Une grande table en chêne, sept fauteuils en chêne, un poêle,
une grande armoire renfermant les archives et trois lampes.
CHAPITRE III.
Dans les cloîtres :
Un confessionnal en chêne sculpté portant la date de 1688 *.
Vingt piédestaux en bois.
Dans les cloîtres se Irouvent les tableaux suivants :
1° Le panneau principal d'un Iryptique dont les volets sont
perdus. Ce tableau encadré est peint sur toile et représente l'in-
stitution de la Fête-Dieu.
' Il est actuellement placé dans la chapelle du Sacré-Cœur de Jésus.
— 347 -
2° Un volet, peinture sur bois très-détériorée , représentant saint
Malhias et saint Jean.
3° Un volet dont on ne voit que la face postérieure représentant
la sainte Vierge en grisaille.
4° Un grand tableau peint sur toile, très-détérioré, représen-
tant saint Donat et portant la suscription suivante : Sancte Donate
0. P. N.
5° Un tableau, peinture sur toile, représentant le portrait du doyen
Guillaume Iversmeckers , à genoux ; derrière lui se trouvent deux
évêques.
6o Un tableau, peint sur toile, représentant Bernardin de Men-
doza délivré du purgatoire par sainte Thérèse; copie d'un tableau
de Rubens dont l'original se trouve au musée d'Anvers, n° 267.
7° Un volet, peinture sur bois représentant le portrait d'un
chanoine à genoux et la figure de saint Éloi.
8° Un tableau peint sur toile , représentant le martyre de saint
Erasme.
Nous y trouvons de plus , une niche en bois doré dont les bords
sont ornés des instruments de la Passion ; sur le pied on lit :
Attendue et videte sicut est
dolor sicut dolor meus.
Une autre niche à double compartiment, en bois peint ; on y lit :
D. 0. M.
S. M. Crispini et Crispiano
A. D. Joannes Erasmus
Larmoyer huius eccliœ
canonicus et cantor 1722.
Deux niches vitrées en chêne sculpté.
Une grande niche vitrée renfermant un Ecce Homo.
Un tableau-index en bois de chêne sculpté, destiné à la con-
frérie du St. -Sacrement; il porte la date de 1725.
Dans la chapelle de Ste.-Annc, fondée au XIIe siècle, par Ydule
sœur de Jean , un autel en bois marbré , portant :
— 348 —
DUa Elisabeta Yoets R^ D. -Franc.
Vander Meeren J. U. L. D. D. anno 1712.
Dans la chapelle de loua les Saints, fondée vers 1408 par
André Reys, seigneur de Reepen :
Un autel en bois de chêne, style gothique de la fin du XVe siècle,
avec tableau représentant la naissance du Sauveur.
Diverses statues de saints.
CHAPITRE IV.
Dans la grande sacristie :
Cinq armoires en chêne servant à renfermer les objets néces-
saires au culte.
Une grande armoire en chêne , doublée de tôle , renfermant le
trésor , les chapes et les vêtements les plus précieux.
Sur les armoires, trois châsses antiques, trois miroirs, quatre
petits bas-reliefs en marbre occidental. Trois tableaux sur toile
représentant saint Norbert recevant l'habit de l'ordre des Pré-
montrés des mains de la sainte Vierge , saint Norbert acceptant de
saint Augustin les règles de son ordre et le Christ au roseau.
Deux autres tableaux sur bois du XVe et XVIe siècle avec inscrip-
tions 1. Un crucifix en ivoire sur fond de velours noir, quatre bras-
reliquaires en bois et quelques cornes garnies de cuivre.
Dans la vieille sacristie , quatre grandes armoires renfermant
les habillements des clercs, les cierges, les Heurs artificielles, les
antipendia et divers vieux objets dont le détail n'offre aucun in-
térêt.
Dans la sacristie au bas de l'église , deux armoires en chêne
sculpté renfermant divers objets, un confessionnal en chêne sculpté,
un tableau , un poêle et six chaises.
' Voir les fyitaphes n08 46 et 49.
349 —
D.
CATALOGUE DES ARCHIVES DE L'ÉGLISE.
TABLE.
PREMIERE SECTION.
Manuscrits concernant le chapitre et les églises qui en dépendaient.
I. Chapitre de N. -D. — Documents historiques N° 1 à 19
II. Chapitre de N.-D. — Biens et rentes » 19 à 49
III. Chapitre de N.-D etc. — Biens , rentes, cens , mandats et dîmes
appartenant au doyen , au chantre , à
l'écolàtre, aux vicaires, aux bénéficiers,
etc » 49 à 74
IV. Plébanie. — Documents historiques et revenus i 74 à 86
V. Pléb\nie. — Protocoles des plébans et des subplébans » 86 à 101
VI. Bénéficiers. — Documents historiques. — Biensetrentes » 101 à 127
VII. Église de St. -Nicolas. — Documents historiques. — Biens, rentes
et cens » 1 27 à 1 40
VIII . Chapelle d'Offelken.— Documents historiques et revenus » 140 à 143
IX. Chapelle de Mulken. — Documents historiques et revenus » 143 à 152
X. Procès Soutenus par le chapitre, les bénéficiers,
les chapelains , les plébans, etc » 152 à 166
XI. CoiNFrtÉRiES. — Documents historiques et revenus » 166 à 178
XII. Varia. — Chanoines réguliers. — Obituaire de
St-Jean. — OiatoiredeN.-D. — Mense
épiscopale. — Méliersdes boulangers,
etc » 178 à 191
XIII. Nouveaux registres.— Administration des biens. — Délibéra-
tions du conseil et du bureau des
marguilliers, correspondance des tré-
soriers, restauration deTéglise, etc. .. . » 191 à 210
— 350 —
DEUXIÈME SECTION.
Manuscrits et imprimés concernant la liturgie , la théologie, etc.
Manuscrits N° I à XLI
Imprimés » XLI1 à L1V
TROISIÈME SECTION.
('liai les, diplômes , Imlles et autres documents sur parchemin N° là 39
Ul'ATlilEME SECTION.
Liasses.
C4T4L0GL
PUEMIEHE SECTION.
Chapithe de N.-D. — Documents historiques.
(Jaune) '
(Ch. D)
1 . Petit in-folio , relié en veau : à la couverture est attachée une chaîne : Ancien
rituel du Chapitre, manuscrit sur velin de 214 feuillets, XVe siècle. La
première page manque.
2. In-folio, relié en veau, intitulé : Ruhicae générales eeelesiae collégiaux ac archi-
diaconalis Deatœ Maria.1 Virgiuis oppidi Tungrensis, anno 1778, compilât» et
conscriptœ. Ms. sur papier.
3- ln-f', cartonné, intitulé : Liher statutorum eeelesiae Tungrensis, Ms. sur parchemin
de 54 feuillets (XVe siècle) ; quelques actes du XVIe et XVIIe siècle y ont été
insérés. (Ce registre était , ainsi que le N° 1 , relié en veau ; une chaîne en fer
servait à le fixer à un pupitre en pierre pour en empêcher l'enlèvement. En
1857, la couverture , qui était en mauvais état, fut otée et une reliure moderne
remplaça l'ancienne).
4. In-12, relié en veau, intitulé : Nova statuta eeelesiae Tongrensis anno 1529,
Ms. sur papier de 152 feuillets.
5. ln-f°, cartonné, intitulé : Liber gratiarum ab anno 1407, contenant des extraits
des deux registres de documents rassemblés par le chanoine Salomon Henrici
ainsi que l'indication des pièces les plus importantes qui concernaient les
chapelains de Tongres (1164-1069). — Page 143 : différents extraits du Liber
' Afin iln facilitei les recherches, chaque subdivision est indiquée soi le dos 'in registre par uni'
couleur différente,
_ 351 —
diversorum negoliorum Capituli Tongrensis (de 1595-1609). Page 176 des
extraits : ex manuale diversorum negotiorum venerabilis Capituli per Henricum
Vlieck, (1 582-1597). Page 191 : Des extraits du : Liber diversorum negoli-
orum et testamentorum de Ouwerx (1544 à 1601). — In fine : extrada (a) ex
manuale Ponthière (1633-1666). (b) Ex manuale Vlieck (1608-1619). (c) Ex
libro negotiorum capituli anliquo ('le 1400 à 1553).
6. ln-f°, cartonné de 26 pages, intitulé : Kepertorium litterarum et testamentorum
Capli: Tongrensis 1565. (Le premier feuillet manque).
7. In-f°, relié en veau, intitulé : Liber diversorum negotiorum antiquorum. Anno
(1400-1491).
8. In-f° , relié en veau, intitulé : Liber decimarum slutorum admissionum ad
can-ctus et benef. testamentorum et aliorum negotiorum incipiens anno (1412-
1422). F0 100 incipiunt stuta de anno (1439-1453) et alia negotia diversa.
F0 178 : manuale Conrardi Ouwerx de anno (1540-1572).
9. lu-f°, relié en veau , intitulé : Liber testamentorum et aliorum diversorum
negotiorum venerabilis Capituli Tongrensis jam noviter inceptus 1609 usque 1662,
(Détérioré).
10. ln-f°, relié en veau, intitulé : Registrum adm. Rdi Capituli Tongren. in quo
describuntur computus magistrorum labricœ, visitationesarchidiaconales, et alia
tam praedictum Capitulum , quam ecclesiam concernentia. Item capellanorum
bona incipiendo f° 193 ; de A.0 (1670-1 794j.
11. ln-f°, relié en veau, intitulé : Registrum actorum concernentium varia negotia
R. R. Adm. dd. decani et cauonicorum perinsignis colltœ et archidiaconalis
ecclesiae Tuugrensis inceptum 16 octobiïs 1681 etc. usque 1717 pro tempore
notarijs /Egidio de la Court, ^Egidio de Ponthière, F. de Fontaine et Cuil.
ab. Cours.
12. ln-f°, relié en veau, intitulé : Liber documentorum et aliorum diversorum
negotiorum Rdi adm. Capituli iusignis Ecclesiae Collegiatae R. M. V. oppidi
Tongren. inceptus Anno 1682-1766.
13. ln-f°, relié en veau, intitulé : Liber stipalis bonorum ecc'esiarum Capellarum,
altarum, Luiniuarum et Pauperum, arcbidiaconatus, Majoris et Perinsignis
Collegiatae ecclesiae Tuugrensis subditorum renovalus anno (1700-1728). Pro
tempore notario Guil. Cours.
14 ln-P, relié en veau, intitulé : Liber diversorum negotiorum et actorum reverendorum ,
admodum Dominoruin Decani et Canonicorum Perinsignis Collegiatae et archidia-
conalis Ecclesiae Tuugrensis inceptus vigesima quinta februarij (1719-1783).
Pro tempore notario Carolo Van den Nieuwendorpe.
15. ln-f°, relié en veau, intitulé : Manuale registrum negotioru diversoru venerabilis Capli
Tuugren per Henricu Vlieck inceptu et ipsius sumptibus , factu anno (1582-1598)
sunt et aliaru partiu (manque la tin).
16. In-f°, cartonné, intitulé: Index des débiteurs du chapitre de Tongres 1750.
17. ln-f°, cartonné, portant: Liber solutionum et quittantiarum R R adm. D. Duorum
Canonicorum (1789-17 ni).
— 352 —
18. Grand in-f°, relié en veau, intitulé: Allas représentant les biens de l'illustre
chapitre de Tongres , dessiné par Gérardot de Sermoise , 1793.
II.
Chapitre de N.-D. — Biens et rentes.
Jaune. F.
19. In-f°, relié en veau , portant au dos: Veritas ab anno 1385 et intitulé: Registrum
redituu fabrice eeclie béate maie Tongren leodien., diocès. Ordinatum per Dum
Johem Keymus pbrm Capellanu ejusdem eccie Anno a nat. Dni M°CCC° octuage-
simo quinto. — F0 240 : sequi tre jacen in Widoe an0 1534. — F0 246 : Diploma
in favorem Notkeri episeopi Tung.de A0 905, etc. Declaratio concily christianitatis
Tung. 7 Jan. 14G1.
20. In-f°, relié en veau, portant au dos: Antiquior Veritas anni 1385 et in fine Con-
cordia Cum D. D. huensibus pro décima de Vliermael, et intitulé : Registru redilu
fabrice eeclie ïïte Marie Tongren leodien. dioce. ordinatu p. Dum Johem Keymus
plirm Cappm eiusde ecce anno a nat Dni 1385. — F0 99 : Inventariu de bonis
quondam. Egidij Cloeslerneer de Ruttis que p. mediatate filio suo et p. alia
medietate mandato et mense sti spit. Tongren. dicit. legasse ut tdii Heere. —
F0 106: ista st bona de pecunys dni Gerardi dm de Heere milit. qui obijt ano a
nat. dni 1398 in die bti Dyonisij et de pecunijs quoda dni Joins de Antey Canci
et Scolastici eeclie nrae Tongren. qui obijt ano 1397 16 Junij etc
F0 116 Mensuratio. . . . terrar, sit. apud Wydoe facta nona aplis A0 1526 p.
leon de Vlytinge geometr. (1597. 13 Juin) — Concordia Cum DD. huensibus
pro Xa de Vliermale.
21 . In-f°, relié en veau, intitulé : Registrum Sacristiœ ecclesie Collegiate R. M. Virginis
oppidi Tongrensis erecte anno 1655 ipso die ven. Sacramenti (1737).
22. In-f° , cartonné intitulé: Computatio redituu bonor. et obventoru fab. Tongren.
levator. p. Dum. Johem Keymus recepto... m. Johem de Fléron et mgrm
Gerardu de Heere canon... Admistratores seu mgros dete fabrice ano
(1387-1404, Incomplet).
23. ln-f° relié en veau , intitulé: Liber slutorum 1458 nsque ad Annum 1622 nec non
expositiones in emphiteusim et hereditates.
24. In-f°, relié en veau, intitulé : Registru seu liber redituu et bonor. membri pbendar.
Venerabilium dnor. Decani et Capli eeclie Collegiate Rte Marie Spr Vginis
Tongre. Collect. p. me Willielmu de Meera Receptore membri pdieti ex divs
registris antiqs eeclie jamdicte p. ao XVe XXXII0 Sm Regra (107 pages).
Census anniversarior. eeclie Rte Marie Semp Vg. opidi Tongren. solvend. apud
Tongr. ipa die Stephani martir. p. me Willielmu de mea eorumd. reeeptorem
conceptus pro ano millio quigetesio undecio secundu regra (35 feuillets). Manmile
reddituu an" p. ano XVe XX11I Sm regra (16 feuillets). Registrum manuale
Redditum bnnorum p. ano 1515 (43 feuillets). Registrum manuale, etc. p.
ano 1516 (43 feuillets). Registrum sensuum caponura pro ano XVe Deeio sexto
— 353 —
(9 feuillets). — Registrum seu liber Rediluum bonorum , etc.... pro ano
millio quingentesio septio (2 feuillets).
25. In-f°, relié en veau, intitulé: Manuael oft register Librecht Mofels rentmeester
der eerw. Capittels tôt Tongeren beginnende naeder registeren int' jaer (1561-
1565).
26. In-f°, relié en veau, portant au dos: Registrum fabricse ecclesise 1562-1567
(incomplet). Anniversarioruni et fabricse.
27. ln-f°, relié en veau , portant au dos: Manuale anniversarior. et fabricse ab ano
1630 usque 1635 receptore Huberto ab Hennisdael.
28. ln-f° , relié en veau portant au dos: Computus anniversarioruni inler ornnes ab
anno 1660 usque ad 1669. (1660 et 1661 incomplets).
29. In-f°, relié en veau, intitulé : Manuale fabricse pro annis 1771, 72 et 73.
Registrum fabricse ecclesise Tungrensis.
30. In-f°, relié en veau, intitulé: Registrum solutionum factarum par Fredericum
Tournay receptorem tam ex Registro inter omnes quam inter Canonicos solos
Reverendis Adm Dominis Dccanos et Canonicis per insignis Collegialse etarchidia-
conalis ecclesise B. M. V. oppidi Tungrensis nec non solutionum factarum per
eundem receptorem ex membro inter omnes venerabilibus Dnis Beneficiatis ejus-
dem ecclesise incipiens pro A0 (1771-1782).
31 . ln-f° , relié en veau , intitulé : Liber stuluum membri fabricse perinsignis Colltae
ac arcbidiaconalis ecclesise B. M. V. oppidi Tungsis inceptus 15 febrij 1773
notario ex Consule P. S. Winckelsels — (1792).
32. In-f°, relié en veau, intitulé: Registrum fabricse ecclesise Tungrensis pro annis,
1774, 1775 et 1776.
33. Grand in-f°, relié en veau, intitulé: Registrum fabricse ecclesise Tungrensis pro
annis 1777, 1778 et 1779.
34. In-f°, relié en veau, intitulé: Manuale fabricse pro anni 1780 et sequentibus
(-1786).
35. Iu-f°, cartonné, intitulé : Registrum seu manuale mandati pro 178. .. .
36. Petit in-f° , cartonné portant au dos: Manuale prebendarum juxta reformat. Anni
1781.
37 . In -f° , relié en veau , intitulé : Novum registrum anniversariorum commune inter
R. R. adm. D. D. canonicos et R.R. D. D. bénéficiâtes perinsignis collegialse
et arcbidiaconalis ecclesise Tungrensis ad mentem ultimse transactionis de data
27 martij 1783 hic folio 80 registratse redactum incipiens pro anno (1783-1789).
38. ln-f°, relié en veau, intitulé: Liber solutionum factarum tam R. R. adm D. D.
canonicis quam beneficiatis residentibus ex registro anniversariorum nunc juxta
ultimam transactionem de data 27 martij 1783 ad Decanum et Capilulum spec-
tante , inceptus anno (1783-1789).
39. Grand in-f° cartonné, intitulé : Computus membri fabricse Perinsignis collegialse
et arcbidiaconalis ecclesise B. M. V. oppidi Tungrensis receptoris vices supplente
pro anno 1785 et 1786.
40. Grand in f°, relié en veau, intitulé: Regislrum manuale fabricse per insignis
— 354 —
collegiaUe et archidiaeonalis ecclesia; B. M. V. oppidi Tungrensis pro anno 1789
et duobus sequentibus ordine alphabetic.o redactum.
il. Petit in— P», cartonné, intitulé: Projectum reformations mauualis anniversariorum
pro 1786.
42 . Grand in-f°, relié en veau, intitulé : Registrum mamiale fabricœ pei insignis c ollegiala;
et archidiaeonalis ecelesiae B. M. V. oppidi Tungrensis pro anno 1789 et duobus
sequentibus ordine alpbabetieo redactum.
43. In- f", relié en veau, intitulé : registrum anniversariorum perinsignis collegiatae
et archideconalis ecelesiae B. M. V. Oppidi Tungrensis inter R. R. adm. B. B.
Canonicos Solos. (Sans date ; le receveur P. Michiels a employé les 41 pre-
miers feuillets pour y inscrire les titres des rentes dues à la fabrique jus-
qu'en 1831).
il. ln-f», oblong , relié en veau, portant au dos : Liber censuum de crucibus
Y.xillatis, ab anno (1441-1615).
45. ln-f° , relié en veau, intitulé : Registrum censuum de crucibus vexilatis , Solven-
dorum in insigni ecclesia collegiata B. M. V. oppidi Tongren , in hebdomadu
Peutecostes (1620-1747).
40. ln-4° , relié en veau, intitulé: lucipit liber divisionu accidentaliu inceptus anno
Xllllc LXX octavo sedm regra ecclie Tongren. In festo bli Egidij abbat.(1478-
1563).
47. ln-4°, en parebemin de 7 feuillets, intitulé : Silig. anni LXXXX décime anui
LXXXX1 in siligne etordeo.
Pensiones quas d. ecclesia p. anno LXXXX1 , i. silig. (L'écriture nous paraît
être du XVe siècle; les noms des chanoines qui occupaient les 12 maisons
claustrales et qui vécurent vers cette époque semblent conlirmer cette opinion).
48. ln-f°, relié en velin , intitulé: Registrum pro annis 1768-69 et 70, manuale
censuum membri inter legentes.
III.
Chapitre de N.-D. — Biens , rentes , cens , mandats et dîmes apparte-
nant au doyen, au chantre, à l oculaire, aux vicaires, aux bénéjiciers, etc.
Jaune, c.
49. In-f°, relié en veau, intitulé: Registrum membri inter cantores scu vicarios
insignis ecelesiae collegiatie Bealae Mariae Virginis inceptuin et renovatum per
me christiauum Pibus ejusdem ecclesia; orgauistam et hnjus membri administra-
torem incipiendo ab anno Domini 1739 mense Xl,,is (-1798).
.Mi. lu-P , relié en veau, intitulé : Register toebeboorende die Eerw. Ilceren Deken
en de Capittel van 0. L. V. Kerke Tongeren van bonne incompsten soo in
rogge , spelt, baver, gelde als huyspacht. llem van de Goederen vaut' man-
daet en de refusien der selver Keicke voor die jaeren 1699, 1700, 1701.
Rcntmeester Christian Peumans. '.
' Sepl registres in- P des mandats dont 6 reliés .-oui déposé m bureau de bienfaisance de Tongres .
ils portent pour tilrc :
— 355 —
51. Petit in-f, relit! en veau, intitulé; Cliens Register van onser liever Vrouwen
hofft tôt Haeren toebehoorende die seer eerw. heeren Deken en de Capittel van
0. L. V. Kercke Tongeren die sy hebben tôt Haeren, Bommersboven, Sammel,
Vliermael , Niel en de daer ontrent en de wordt opgehouden dry Konigen dagh
binnen Haeren beginnende A°~(l 736-1 747)
52. Petit in-f°, cartonné, intitulé : Chens Register van onse lieve vrouwen hofft tôt
Haeren toebehoorende die eerw. heeren deken en de Capittel van 0. L. V.
Kercke Tongeren die sy hebben tôt Haeren, Bommershoven, Sammel, Vliermael,
Niel ende daer ontieut ende wordt opgehouden dry Koningen dag binnen
Haeren beginnende anno (1736-1793).
53. Petit in-f°, relié en velin, intitulé: Chensen toebehoorende die eerw. Heeren
Deken en de Capittel der collégiale en archidiaconale Kercke van 0. L. V.
Tongeren vallende jaerlyx te betalen s' sondags naer H. H. dry Koningen binnen
den dorpe van Genoels-Elderen voor t'jaer 1775 secundum registra (-1795).
5i. ln-f° cartonné intitulé : Cheensen der eerw. Heeren Deken ende Capittel van
onse L. V. Kercke Tongeren vallende jaerlycx te betaelen tôt Hardelingen op
St.-Andries dagh glierenoveert voort jaer (1749-1771).
55. ln-f° relié en veau, intitulé : Liber censuum capituliTong. inceptus anno (1783-1794).
56. ln-f° relié en velin, intitulé : Registrum omnium redituum capellanorum seu fra-
ternitatis ecclesiœ B. Mariae Tungrensis conscriptum anno Dni 1389 per d. Jhoem
Cuen pbrm et capellanum ecelesiae pdclae seu reclorem altaris assumplionis
B. Mariae, Renovalum per D. Joannem Keyen subplebanum Anno Dni 1709
(1442-1780).
57. ln-F, relié en veau, intitulé : Liber gratiarum capellanorum ecelesiae Tnngren.
inceptus anno (1431-1599) (très-fatigué).
58. ln-f°, relié en veau, intitulé : Liber negotiorum atque stutorum capellanorum
Tongrensium (1561-1671).
59. ln-4°, relié en veau, intitulé : Regm redituum et bonorum membri dicti inter
Cantores oppidi Tongren, renovatum anno Domini XVe LXXV111 Smrgra reuovatu
p. d. Joem Cappea capellanu et receptore (1579-1612). Registrum bonorum
ac reddituum membri dicti inter cantores ecclie béate Marie Virginis oppidi
Tongren. inceptum anno 1612 (-1634). — Registrum membri inter cantores
ecelesiae, Beatae Marias Virginis oppidi Tongrensis renovatum per dominum
Hippolitum Le Rouge Ejusdem ecclesise succentorem anno (1656-1664).
1. Registrum mandali eccl. B. M. V. Tung. 1500 — 1G94
2. id. id 1G77 — 1683
3. id. id 1772 — 1780
4. id. id 1778 —
5. id. id 1779 — 1787
(i id. id 1788 — 1790
7. id id 1792 — 1794
11 parait qu'un grand nombre de registres, ayant appartenu au chapitre de Tongres, se trouvent au
creffe ciu tribunal de Hasselt.
— 356 —
60. Petit in-f°, relié en parchemin, intitulé : Registrum membri inter canlores ecclie
B. Maris V. oppidi Tongrensis alias Registrum Vicariorum dictae ecclesiae réno-
vation a0 R"' 1675, per Uernicum Pelsers receptorem liujus membri , succenturem
dicta; ecclesiae (-1739).
61. In-f°, relié en parchemin, intitulé : Registrum omnium reddituum dnorum
sacellauorum eccliae Bealae Mariae Virginia oppidi Tongren. conscriptum anno
1580 per loem Bierwar pbrm et sacellauum dicte ecclie seu redorera altaris
sancti Judoci.
62 et 63. Petit in-f° relié en veau, intitulé : Registrum actorum et agitatorum in
capitulo capellanoru Tongren. incipien. ipso die S. Remigv in anno XVIe vigesimo
nono (-1692) Liber decretorum Dnorum capellanorum Eccliae Beatae Maria;
Virginis oppidi Tungren inceptus , a0 (1629-1691 .)
64. ln-f°, relié en veau, intitulé : Liber decretorum Uominorum capellanorum Ecdesiar
Beatae Maria; Virginis oppidi Tongr. incept. Anno (1691-1174).
65. Petit in-f° cartonné, intitulé : Liber decretorum et negotiorum RR. DD. capella-
norum insignis eccliae Collegta? et parochialis B. M. V. Tungsis temp'ire Eg.
Nossent secrius (1767-177-1.)
Jaune L.
66. In-f°, relié en veau, intitulé : Hic liber documentorum et litterarum concernentium
reditus et bona RR. D. capellanorum Ecclesiae Tongrensis de membro inter
legentes conscriptus per R. Micliaëlem Fusarium , dictae Ecclesiae Capellanum
(1384-1481) et restauratur cum indice anno 1746 per R. D. C. Pibus.
67. In-f°, cartonné, intitulé : Liber negotiorum seu manuale magistrorum Capellanorum
ecclie Ble Mariae Tongren. inter legentes (1476-1482).
68. In-f°, cartonné, intitulé : Registrum Stutorum de terris pactuarys Capellanorum
Tongren, inter legentes (1476-1576). Suite du précédent numéro.
69. Grand in-f°, relié en veau, intitulé : Registrum membri inter legentes Rdorum
Dnorum Capellanorum eccliae Beabe M. V. oppidi Tungrensis (1642-1666)
70. In-f°, relié en parebemin , intitulé : Regisler der clieensen en huispacblen toebe-
boorende die eerw. beeren Capellanen van het member onder die lesende in de
Collégiale Kereke van onse lieve vrouwe binneu Tongeren deur my Robert
Winckelsels als rentmeester vernieuwt vallende die clieensen jaerlyx on Si Stevens
ende St. Jan-Baplisle dagll begiiuiende bet jaer XVIIe (1700-1793).
7 I . In-f°, relié en parchemin, intitulé: Registrum documentorum et literarum concernen-
tium bona veneb. d. d. capellanorum ecclesiae B. M. V. Tungrensis de membro
inter legentes anno 1701 registratum. Tune temporis dicti membri receptor
Robertus Winkclsels (-1753).
72. In-f", cartonné intitulé : Hic liber con Unet documenta et literae concernentium
(sic) reditus et bona revendorum Dominum capellanorum de membro inter
legentes incipiendo ab anno Uouiini (1746-1778) (Incomplet).
73. ln-f°, cartonné, intitulé: Registrum manuale L) D. Dnorum capellanorum membri
inter legentes lam in siligne spelta quara in pecunis pi m A" 1797 etiam continens
reslanlias ab anno 1791 usmic 1796 inclusivis. Aux f'x 68-70 se trouvent les
comptes jusqu'au -- septembre 1802,
— 357 —
IV.
Plebanie. — Documents historiques et revenus.
Rouge A.
74. In-f° cartonné contenant les revenus et les cens perçus par Jean Coen, pléhan de
Tongres en 1423 (les deux premiers feuillets manquent). Au f 56 se trouve :
Registrum censuum et caponum plebanie eccie bte Marie Tongren. Conscriptum
per me Paulum Stellinx Capellanum ccie prcripte a0 (1482-1518).
75. In-f°, dépareillé , intitulé : Registrum censuum et redituum Plebaniae Ecclesiœ
bealae Mariée Virginis Civitatis Tungrensis conscriptunm anno Dni (1449-1474)
per Joem Boten Plebanum Tungrensem.
76. In-f° , cartonné, intitulé : Registrum plebaniae Tungrensis conscriptum per
D. Michaelem horrerarium de bocholdia ejusdem plebaniae plebanum (sans date).
In fine : Register der plebanien van onser liever vrouwen kercke van Tongren
gemach in den jaer (1502-1525).
77. In-f°, cartonné, intitulé : Registrum dni Tilmanni Ofkens ab anno (1505-1539).
Registrum Joannis Ofkens plebani 1539-1559.
78. In-f°, cartonné, intitulé : Registrum omnium provenluum seu redituum plebaniae
coll,ae ecclesiae beatisimae virginis et matris marias opidi Tongrensis diocesis
leodiensis conscriptum per me d. et M. Lambertum de Valle eusdem ecclesiae
plebanum pro annis residentiae sive possessionis meae quorum primus est 1567
secundum registra post mortem bonorabilis viri d. Michaelis horrearij immediati
mei praedecessoiïs , etc.... (1567-1581).
79. In-f°, relié en veau, intitulé : Registrum plebaniae Tungrensis pro anno 1582,
conscriptum per Hermannnm Vanderheyen (1582-1627).
80. lu-f°, relié en parchemin: Registre des revenus de la plebanie de Tongres,
sans titre ni date. Ecriture du XVRe siècle.
81. ln-4°, relié en veau, intitulé : Registrum solutionum redituum plebaniae Ton-
grensis anno 1627. Item stutus Urrarum et illorum conditiones appositae. Item
solutionum redituum altaris B. Mariae in Beeringen cujus sum rector. Item
reditum altaris S1 Judoci Loscastri cujus rector est amplissimus Bs Richardus
PauliStravius Arcbidiaconus cujus ego sum constitutus receptor. Item creditorum
ex offieio pastorali ab anno (1627-1636) conscriptum per me Barthoiomeum
Slravium plebanum Tongrensem.
82. In-f", relié en veau, intitulé : Registrum redituum censuum plebaniae Tongrensis
descriptum per me Barthoiomeum Stravium plebanum Tongrensem anno
Domini (1627-1640).
83. In-f°, relié en veau, intitulé : Registrum plebaniae oppidi Tungrensis per me
Barthoiomeum Stravium Plebanum Tungren conscriptum incipiens ab anno incar-
nalionis Dni 1640 Residentiae meae vero decimo quarto (-1653).
84. ln-f°, relié en veau, intitulé: Registrum plebaniae Tungren, per me Barthoiomeum
Stravium plebanum Tungrensem seu personam conscriptum incipiens ab anno
incarnationis Dni 1653 residentiae vero mcae vigesimo octavo. (-1668 Incomplet).
— 358 —
85. In-f° olilong, relié en veau, intitula: Registrum plebaniae Tungrensis per me
Lambertum Ceulemahs piebanum Tongrensem conscriplura incipiens ub anno
Domini (1709-1743).
85bis In-f°, cartonné", intitulé : Registrum canonum doniorum ail plebaniam Ton-
grensem spectantium (1709-1740).
85*« In -f° cartonné, intitulé: Reditus plebaniae Tongrensis in granis etc. (1710-1735).
V.
Plébame. — Protocoles des pîébans et des subplébans.
Rouge B.
86. In-4o, cartonné , intitulé : Protocollum Domini Joannis Ofkens plebani Tungrensis.
1542-1558.
87. In-4°, cartonné, intitulé: Protocollum Micbaëlis Horrearii 1544-1567.
88. ln-f° cartonné, intitulé : Protocollum Laurenty Brabants subplebani. 1508 usque
1578.
89. In- f° cartonné , intitulé: Protocollum Lambérti Devalle, plebani Tongrensis, anno
1569 usque 1581.
90. In-f' cartonné, intitulé : Protocollum Tilmanni Boesmans subplebani ab anno
1579-1580. — Protocollum Autotiy Hulselmans 1591-1593.
91. In-f° cartonné, intitulé: Protocollum Hermanni Vanderheyen plebani Tungrensis
1582-1587.
92. Petit in-P, cartonné, intitulé: Protocollum Stepliaui Identy plebani Tong. 1587-
1592.
93. In-f° cartonné, intitulé : Protocollum Laurenty ab Aertsberg subpleb. T. ab a"
1589-1615
94. In-f°, cartonné, intitulé: Primum Protocollum Theodorici Deckery pleb T. 1591-
1616.
95. In-f-, cartonné, intitulé: 21»" protocollum Tbeod. Deckery pteb. T. 1616-1627.
96. Petit in-fo, cartonné, intitulé: Protocollum Bartholomey Boes subpleb. T. 1023-
1634.
97. In-f°, cartonné, intitulé: Protocollum Bartholomei Stravii pleb. T. ab anno 1027-
1629.
98. In-f°, cartonné, intitulé: Protocollum Werici Hosset subplebani 1632-1637.
99. Petit in-f° , cartonné, intitulé : Protocollum Guilielmi Iluskel subpleb. T. 1637-
1649.
100. Petit in-F\ intitulé: Protocollum Husket, subplebani Tung. 1639-1654 (en feuilles).
VI
BÉNÉFICES. — Documents historiques, biens et rentes.
Rose.
101 . ln-i°, relié en veau, inlilulé : Uegister van die goederen des bénéficie oft altaer
der vindinge van liet II. Cruys wesende iu de archidiaconale Kerke Tongeren
— 359 —
voor het jaer 1753, beginnunde volgens luydl der aide registers en possession
der betalinge : synde reclor den heer N. Jacobs (-1788).
102. In 4°, cartonné, intitulé: Dit syn de renten van Inventionis des beyligen Cruys
nltaers in onser liever Vrouwen Kerke Tungren gescrevenen in jaer (1590-1626).
103. In-4°, relié en parchemin, intitulé : Registrum bonorum et provenfuum Altaris
inventionis Stae Crucis in ecclia coltà Btœ Mariae Virginis Tongrensis siti Reno-
valum pro hoc anno 1665 redore dno Hennanno Marcelis Tongrensi (-1703).
104. In-4°, relié en veau, intitulé : Registrum altaris S11 Spiritus siti in ecclesia béate
Marie Virginis oppidi Tongren. redore ejusdem Liberto Loeffsinceptum A0 dni
1620 secundum Regra ac fundati P. Walteru vinitorem oppidanum Tongren.
circa annu Dni XIIe LXXX1I ad secundum pilare dexteru in ptada ecclia quod
cum alys oibus ad pilaria fundatis altaribus Anno hoc 1620 depositu et ex
ordinatione Nuncy Apostolici translatu ad Capella Vicina S1* Crucis gaudetq.
eu alys in oibs membris (-1657).
105. In-f° oblong, relié en parchemin, intitulé : Registrum simplicis beneficii sub in-
vocationc B. M. Virginis et sancti Joannis Evangelistae secundœ fondationis per
quondam Reverendum Dominwm Joannem Pael decanum in ecclesia Tongrensi
pro a° (lege-no-1).
106. ln-4° , relié en veau, intitulé : Registrum altaris Su Sebastiani in ecclia B. M. V.
Tungren. fundati cujus modo rector est Dnus Slephanus Franciscus del Hasse
inceptum pro anno 1677 (-1791). — In fine Registrum Su Nicolaï Tungren.
sub invocatione S'œ Agathee (1678-1693).
107. In-f°, relié en veau, intitulé : Manuale registrum altaris nativitatis B. M. V. ar-
chidiaconalis ecclesiae oppidi Tungrensis (1698-1734). — In fine sequunlur
exposita de 1739-1755.
108. In-f°, intitulé : In nomine Domini Amen : Begister der bempden , erven en renlen
toebehoerende die eewige bediening opgericht door den heer Loers.
109. In-f°, relié en veau. Intitulé : Regisler waerinne geregistreert staen de aclen ende
andere gereclits'vverken der goederen ende incompsten gelaeten ende gelegateert
aen het eeuwig Benificie (corrigé desveriture) in de archidiaconal en collegiaten
kercken onser lieven vrouwen der stadt Tongeren gefondeert door wylen den
achtbaren Henricus Loers in synen leven Rentmeester der voorschreven seer
eerw: capittels van onser lieven vrouwen alhier in den jaere ons Heeren XVIe
vier en tachentich den dry en twintichsten dagh des maendts November (-1729).
110. Iu-f°, relié, formant : Le registre sommier indiquant le testament et les actes qui
rétablissent la fondation de la bourse Loers. — La copie des comptes. — L'état
des biens et rentes affectés à ladite fondation, etc.
111. In-4° , relié en veau, intitulé : Registrum Reneri Gaen altaris oium setorum in
ambitu Tungrensi rectoris pro anno (1680-1754).
112. In-4°, relié en veau, intitulé : Registrum altaris omnium sandorum in ecclesia
Tungrensi fundatum et dotatum per dnum Andream Reys (1717-1726) Don de
Mme Stas-Stevens. A la fin 19 feuillets de chants sacrés commençant par : « homo
quidam fecit cœnam magnam , etc. »
— 360 —
113. In-4", cartonné, intitulé; Registrum pertinens ad Petrum Autonium Bafthels ,
concernant les biens du bénéfice de tous les Saints (1787-1838).
114. ln-f°, relié en veau, intitulé : Registrum bonorum proventuum et redituum altaris
sub invocatione Sta! Gertrudis in collegiata fundati cujus olim rector fuit
R. d. Franeiscus Lecocq S1' Pétri flandro insulensis canonicus pro anno 1707
cnjns suecessor fuit JoèsLecocq frater ipsius bodierno tempore decanus et cano-
nicus visetensis nunc iterum succedens Joés Godfridus Troignee basbanicus nunc
iterum succedens MatbiasCliristianus LabbeeTungrensis anno 1793 (1707-1798).
Les quinze premières pages manquent.
115. ln-f° , cartonné, intitulé : Registrum redituum et proventuum altaris S' Servatij
in collegiata arcbidiaconali ecclesia R M. V. oppidi Tung. fundati cujus pro
tempore modernus rector est Tbomas Goffarl clericus ejusdem diocesis renovatum
anno 1738. — Registrum altaris nativHatis beatœ Maria? Virginis archidiaconalis
ecclesia? in oppido Tungrensi pro A0 1738 secundum prœcedentia registra cujus
rector pst Tbomas Goffart receptus et admissus 20 junii 1738. (-1800). Donné
à l'église de N.-D. par Mr A. Moreau-d'Oreye.
116. Oblong, relié en veau, intitulé: Registrum reddituum et Ronorum Reneficiy altaris
Sancti Nicolaï siti in ecclesia S. Nicolaï in oppido Tungrensi (1722-1759).
117. In-f°, relié en veau, intitulé: Registrum beneficii sub invocatione Catbedrae Sancti
Pétri in ecclesia Tungrensi cujus est rector R. D. Deodalus .lerna. Renovatum
anno (1725-1794) F0 58. Registrum residentiae et anniversariorum (1724-1787)
F0 69. Registrum Membri Capellanorum inter legentes pro anno 1725 secundum
registra (-1787;.
118. In-4°, cartonné, intitulé: Registrum Redditum altaris Sancti Nicolaï siti in ecclesia
béate Marie Vir. Tongren in prima Capella cujus rector est D. Johannes Ricbet
de Wonck supra .lecoram (1568-1621).
119. Oblong cartonné, intitulé: Registrum subplebania; sub invocatione Sancti Nicolai
in ecclesia R. M. V. oppidi Tongrensi in corporate cura beneficio prnedicto anno
1592 cum obligatione ratione beneficy ad missam quindenalem in prima Capella
rétro crucem magnam et miraculosam in eademque Capella alter subplebanus
cliam habet suum beneficium cum eodem onere ; qiise bénéficia libéra fundala
fueruntaDno Godefiido de Werm. A0 1312. Cujusanima et parentum et amico-
rum defunctorum Requiescat in pace et amicis viventibus dignetur Deus benedicere
rector beneficy dicte sub invocatione Sancti Nicolai modo est Joannes Keyen ante
Petrus Stcffen, etc. incepit anno 1701 Joes Keyen item subplebania; délièrent
gaudere medietate accidentium plebania; secundum incorporationem factam per
D. Ernestum Episcopum et principem Leodiensem 1592, 2l Octobris (1729-
1739).
120. In-f°, relié en veau, intitulé: Registrum subplebania; sub invocatione S1' Nicolai
in ecclesia R. M. V. oppidi Tungrensis incorporais cum beneficio praedicto A0 1 592
cum obligatione ratione beneficy ad missam quindenalem in prima Capella rétro
Crucem magrram et miraculosam; in eadem que Capella aller subplebanus babet
suum beneficium cum eodem nnere quse bénéficia libéra fundala fuerunl a Domino
361
Godefrido de Werm A0 1312. Rector dicti benefieij modo est Antonius Ceulemans
Trudonensis antœ Joès Keyen piae mémorise etc. incipit A0 1739. Successif anno
1742 circa festum S1' Joannis Baptistse Matliias Smolders S. T. B. Foriundus
exOverhelt in Campinia anno 1716 factus pastor in Comitatu de Hooren prope
Mosam eodem anno circa festum S1' Joannis successit Guilielmus Heckelers
oriundus ex Sluysen prope Tungros successit anno 1786, circa festum S1' Joan-
nis, blae Renerus Prenten oriundus ex magna Spauwen post quienalem possessio-
nem alterius subplebanise. Pro hoc regislro dedi hœredibus pradecessoris mei
mediam Carolinam quse a successore meo débet restitui haeredibus meis. Ita
testor R. Prenten Subplebanus (1712-1 789).
121 . In-4° cartonné, intitulé : Manuale registrum beneficii. S. Agathae in ecclesia S. Ni-
colaï Tungris, 1710-1819.
122. Petit in-f°, relié en parchemin, intitulé: Taxa cleri. Rescriptio beneficiorum cuni
solutione taxarum (1768-1792).
123. ln-f° cartonné, intitulé: Registrum altaris seu benefieij B. M V. Visitationis ante
sanclarum Mariae Catharinœ et Baibarœ olim fundati ab Henrico de Merlemont
in archidiaconali ecclesia B. M. V. Tungrensis Renovatum a redore Christiano
Alexandro Zanders anno 1782 (-1792).
124. In-f°, relié en parchemin, intitulé : Alexander Massin beneficatus atque vicarius.
Bénéfice de S'-Étienne, Registre aux rentes, cens, etc. 1786-1798.
125. In-4°, relié en veau, intitulé : Registrum seu redditus altaris Sli Salvatoris in Col-
legiata B. Marias Virginis oppidi Tongrensis, anno (1660-1718).
126. In-1°, Cartonné intitulé: Regislrum altaris Inventionis S. Crucis in ecclia
B. M. V. oppidi Tongrensis siti cuius est modernus rector 1). Arnoldus de
Castro incipiens pro anno (1625-1669). V. N»s. 101 et 102.
VII.
Église de St. -Nicolas. — Documents historiques, biens, rentes et cens.
Couleur cuir.
127. In-f°, relié en veau intitulé : Soc waert dit register bescreven van heer Jan
Coen persoen der Kercken van Tongren de Renten landen ende cheese des
geluchts van sinter Claes Kercken van Tongeren in den Joer des gebuerte ons
heeren Jhesu Cliristi doemen screeff dusent vier honderd ende vyffteen den
XXlll dachs van Julie (-1666).
128. In-f°, oblong, relié en parchemin intitulé : Manualen van Sl-Nicolaes Kerck
Tongeren 1515-1606.
129. In~4°, cartonné, intitulé: Verdraech boeck der eerw : Heeren pastoers en
laeten der Kercken van Sinter Claes binnen Tongren gemackt den achden dach
october 1588 (-1672).
130. In-f°, relié en parchemin intitulé : Register en rekeninge van jœrlycken incomsten
der keiken van S'-Nicolaes in de Sladt Tongren voor het jaer 1608 (en 1609)
Register van S.-Nicolaes Kercke der Sladt Torgren pro annis 1070-1694.
XXIX XXII -2:!
— 362 —
131 . ln-f°, relit? en parchemin intitulé : Register van Sl-i\'icolaes Kerke der Stadt Ton-
gren pro annis 1673-167G , 1703-1736.
132. ln-4°, relié en veau, intitulé: Reces Boeck des eerw. heer plebaen ende der
heeren laete van die parochiale Kerke Sinte-Nicolaes Tongren begonst den
vjfden aprilis (1700-1784).
133. ln-f°, relié en veau , intitulé : Liber negoliorum oft Boeck der fundatien legaten
en de andere Weldaeden &&c. in de parochiale Kerke van Sint-Nicolaes der Slad
Tongeren by een vergaedert anno 1711 (-1790).
134. lu-f1, cartonné, intitulé : Recollectie soder weeckelycke en andere gefondeerde
Missen als jaergetyden.
N. B. Met den teneur in 't coït der selver fundatien en informalie oock in
cort over den actuelen validitydt en invaliditydt der selver legaeten in die
Parochiale Kercke van Sint-Nicolaes binnen Tongeren opgesoecht anno 1715.
135. ln-f", relié en veau, intitulé: Begister van S.-NiculaesKerck Tongren pro (1734-1 74-1).
13G. ln-f', relié en veau, intitulé: Register oft rekeninge van S. -Nicolaes Kercke Ton-
gren pro annis 1755-1776.
137. In-f°, relié en veau, intitulé : Register der Kerke van den H.-Nicolaus binnen
Tongeren ab anno 1785 (-1798)
138. Iu-fo, relié en veau, intitulé: Register der Kercke van S'-Nicolaus te Tongeren.
139. Revenus et anniversaires de l'église de S'-Nicolas.
VIII.
Chapelle d'Offelken. — Documents historiques et revenus.
Vert. 0.
140. ln-40, cartonné, intitulé: Redditus Capéllœ de OlTelken, anno 1570, secun-
dum regislra (-1590).
141. In-f°, relié en parchemin, intitulé: Registrum omnium reddituum Capellae
Scli-Huberti pagi de Offelken prope Tung. cujus Rector est M. Lamb. a Bus-
co sacellanus Tung. (1628-1713). In fine: Namen der broeders en suslers van
het loffelyck broederschap van S.-Hubertus opgerigt in de Capelle van Olfel-
ken A0 1606. Nomina mortuorum, conjugatorum, baplisatorum et confirmato-
rutn capellœ de OlTelken (1666-1710).
142. ln-f0, relié en veau, intitulé : Novum registrum omnium redituum capellœ sancti
Huberti pagi de Offelken prope Tung. inceptum a die 24 juny 1717
(-1798). Cujus rector est Joannes Godcfiidus van Waeyenberch Bruxellensis.
IX.
Chapelle de Mulken. — Documents historiques et revenus.
Vert. M
143. ln-f°, oblong, cartonné , intitulé : Registrum Capellse de Mulcken prope Tongros
pro anno 1547 , renovatum per Honorabilem viium dum Arnoldu de l'alude
— 363 —
eanonieum ecclie collégiale S Juis in insula apud Leodienses et Rectorem capellae
piîîis (-1G10).
144. In-f°, oblong, relié en veau intitulé : Registrum bonorum eapellœ Sli.-Egidij
de Mulken renovatum a Dno Liberto Loeffs ejusdem Capella; Redore anno
1616 (-1705).
145. ln-f°, cartonné : Registre de la mense du St. -Esprit à Mulken de 1040-1650.
Le litre manque.
146. In-4°, relié en veau , intitulé : Rcgister des geluchts van Mulcken van den pacht
der toostlanden ende renthen voor bet jaer duysent ses hondert ende tween-
vyfticb gevallen gescrevnn door H. Gilis Vans pastoor tôt Mulken (-1675).
147. In-4°, cartonné , intitulé : Register des heiligen geest van Mulcke van den pacht
ende toostlanden en renthen voor bet iaer duysent ses hondert ende tween-
vyftich gevallen ghesrrevcn door M. Gilis Vaes , pastoor tôt Mulcke (-1674).
148. In~f°, cartonné , intitulé : Register des geluchs van Mulcken van den pacht der
toostlanden ende renthen voor het jaer duyzent seshonderd ende negen en
sevenlicht gevallen; geschreven door heer Thomas Timmermans, pastoor van
Mulcken. (-1709).
149. In -4°, relié en veau, intitulé : Register raeckende de incompsten derPasIorye van
Mulken vernieuwt in den jaere 1735 (-1792).
150. In-4°, relié en parchemin, intitulé : Register behelsende de rekeniuge van het
gelurlit Mulcken sedert het jaer 1742 (-1781).
151. In-fn, relié en veau, intilulé : Registre des biens-fonds et rentes appartenant
à la chapelle de St -Gilles à Mulcken. 1819.
Procès soutenus par le chapitre , les bénéficiers , les chapelains,
les plébans , etc.
Amarante.
152. In-4°, cartonné , portant au dos : R. D. Decanus et capitulum contra bénéficiâtes
eccl. Tongr. 1774. Imprimé à Rome Typis , Bernaho 1773 et 1774.
153. In-f", cartonné, intitulé : In causa reverendi Domini van Herck plebani Tungrensis
opponentis contra Revrrendos admodum Dominos Decanum et Capitulum insignis
collcgiatse et arcbidiaconalis ecclesiœ dicti opidi impétrantes. 1779.
154. In-f°, cartonné, intilulé : In causa Rndi Domini Lamberti Ceulemaus plebani
Tungrensis Citali opponentis contra nobilem dominum capitaneum Joannem
Guilielmum de Menten de Malbourgb (1726).
155. In-f°, cartonné, intilulé : In causa RR. admodum DD. Decani et Capiluli insignis
ecclesiae collegialae an arcbidiaconalis B. M. V. Tungrensis, contra RR. admodum
DD. Decanum et capitulum ecclesiae collegiatœ et arcbidiaconalis B. M. V.
Huensis (1765). Procès relatif à la restauration des églises de Vliermaul et de
Hoesselt, première partie (page 1-515).
156. In-f°, cartonné, intitulé : In causa Rndorum adm DD. Decani et capituli insignis
— 364 —
ccclesiae Collégial» et arcliidiaconalis oppidi Tungrensis contra RR. adm duos
decanum et capiluliim insignis ecclesi» collégial» et arcliidiaconalis oppidi Huensis
(1779) 2*e partie, pages 515-85-i.
157. In-f°, cartonné, intitulé : In causa R. R. admoduni D. D. decani et capital!
insignis ecclesi» collégial» et arcliidiaconalis oppidi Tungrensis contra R. R.
admoduni D. D. decanum et capitulum insignis collégial» oppidi Huensis.
3e partie, pages 1-G2 et pages 855-969.
158. In-f°, cartonné , intitulé : In causa R. R. admoduni D. D. decani et capitulum
collégial» R. M. V. Huensis. 4e partie , pages 970-1379.
159. In-f0, cartonné, intitulé: lu causa R. R. admoduni D. D. decani et capituli
insignis ecclesi» collégial» arcliidiaconalis R. M. V. Tongrensis contra R. R. ad-
moduni D. D. decanum et capitulum ecclesi» collégial» arcliidiaconalis R. M. V.
Huensis 1788. 5* partie , pages 1-159, 1387-1657.
160. Iu-4°, cartonné, portant au dos : Clerus leod. contra facullatem Lovaniensem 1744,
intitulé : Signatura grali» coram sanctis^imo R. P. Spinello Leodien indultorum
super excessibus pro clero Civitatis Patri» et Diocesis Leodiensis conlra univer-
sitatem seu facultatem artium oppidi Lovanii Meckliuiensis Diocesis. Restrictus
Facti etJuris. Rom» ex typographia rev. cam. aposlolic» 1744.
ICObisLe même que le n° précédent.
161 . In-i'°, cartonné, intitulé : In causa Rndi Domini Reneri Van Herck oppidi Tungrensis
plebani inhiberi curanlis contra Georgium Fits iuhibitum. 1767).
162. In-f, cartonné, intitulé : In causa Rndi Dni Van Herck citati contra Unos Cliefneux
et Warimont appelantes 1773. — Decanus et capitulum eccli» Tungrensis
conlra Rev. Van Herck 1771.
163. ln-l°, cartonné, (1772): Imprimés relatifs au procès entre le chapitre deTongres
et celui de Huy , touchant la restauration des églises de Vliermael et de Hoesselt.
164. In-f, cartonné, intitulé: In cau?a Reverendi Domini Lamberli Ceulemans pastoris
Tongrensis opponentis avocantis conlra Reverendum Mathiam Truyens Reguinagij
ejusdem oppidi recforem impetraiitem. (1718-1721).
165. ln-f°, cartonné, intitulé : In causa Reverendi Domini Van Herck plebani Tungrensis
opponentis contra reverendos dominos decanum et capitulum insignis collégial»
arcliidiaconalis ecclesi» dicti oppidi Tongrensis impétrantes (1779).
XI.
Confréries. — Documents historiques et revenus.
Bleu.
166. In-f", relié en veau, intitulé : Manuale Register der erffreinten toebehoerende
onser liever vrouwen Rruderscap der s'adt Tongre gevallen Auiio XVe en
LXV1 naeden Register gemaeckt duer Aerdt Rosch ter tiet reintmiester de
vscreven Riuderscappen (-1570).
167. Petit in-f", cartonné, intitulé : Tabula der erffreinten ende landen toebehorender
den Allaer presenlalionis Marie ad fabrica , in der H. Kercke onser liever
vrouwen der sladt Tongre -1559.
— 365 —
Tabula der erfieinten ende landen tocbehooreiidc der Bruderscappen onzcr liever
vrouwen der stadt Tongeren ende volghen nae die reinle des altaers voer-
screve. (U17-1589).
168. ln-f°, relié en parchemin, intitulé: Toustboeck waeriu oick staen aengeteekend
die naemen van die aengenoemen Droeders in onze live vrouwe Broederscliap
deser stadt Tongeren (1654-1786).
169. Iu-f°, relié en parchemin, intitulé: Register van 0. L. V. Broederscliap der stadt
Tongeren pro annis 1757-1759.
170 ln-f°, relié en parchemin, intitulé : Register van 0. L. V. Broederscliap der stadt
Tongeren, pro annis 1757.
171. In-f°, relié en parchemin, intitulé : Register van 0. L. V. Broederscliap Ton-
geren voor 1781 tôt 1795 (1806 inclus).
172. In-f°, relié en veau, intitulé : Register onse lieve vrouwe broederscliap Tongeren
(sans date). — Register van Sinte Barbara Broederscliap. — Register van Sinte
Anna Broederscliap.
173. In-f°, relié en parchemin, intitulé : Register van de Broederscappe van S' Anna
binnen de oude ende vermaarde stadt Tongeren deur my Robert Winckelsels
als secretaris van de selve Broederscap in 7ber 1709 vernieuwt (-1772).
171. ln-f°, relié en veau, intitulé : Register toestaende de Broederscliap van de heilige
Maeghet en Martelaerse Barbara in der Collegiater Kerken onser lieve vrouwen
Tongeren behelsende de statuten ende Pauselycke Bulleu ordonnanlien passaten
en Naemen der Broeders ende Susters des selve gemacht vernieuwt ende be-
schreven door my Thomas Georgius de Fontaine, Secretaris in den jaer XVp
sesen tachentich (sur les trois premières pages le secrétaire de Fontaine a des-
siné les armoiries de plusieurs membres de la confrérie (-1787).
175 In-f°, relié en veau, intitulé : Liber continens nomiua et cognomina Confratrum
et Consororum Augustœ Confraternitatis Smi Altaris Sacramenli Tongris insti-
tuts Dominica prima adventus incidente in 2dum diem Becembris anni 1736 nec
non eorumdem obitum ac Missas pro ipsis in altari privilegiato celebratas quorum
nomina etiam in lihro vilœ scripta sint (-1767).
176. ln-f°, relié en veau, intitulé : Piegislrum proventuum et expositorum Confrater-
nitatis Sanctissimi Eucharisliœ Sacramenti , Tongris instituts Dominica prima
Adventus. Incidente in 2um diem decembris anni 1736.
177. Iii-4°, cartonné, intitulé : Rekeninge van het Broederscliap van den H. Donatus
(1781-1797).
XII.
Varia. — Chanoines réguliers. — Obituaire de S t. -Jean. — Oratoire de
N.-D. — Même épiscopale. — Métier des boulangers, etc.
Jaune pâle.
178. In-f°, relié en veau, intitulé : Novum slipale ex veteri contractu omnium bonorum
immobilium hœreditatum , Reddituum censuum debitoru spectans ad Rdos Dnos
— 360 —
Canonicos Regulares Tongrcnses (sans date) P. 32-1. — Repertorium omnium
copiarum Reliviorum Testamentorum aliarum que lilterarum in codicem non
relatarum, ordine alphabetico hic designatarum 10 9bris 1 756 P. 370. Index
seu calalogus oium Litterarum originalium in archive- juxta organuni in eccliâ
depositarum P. 404, F0 1. Stipale Denuo Renovatum in quo pro moderne- statu
cum novis jungenlijs ponuntur in charta figurativa omnes agri nostri 1751 ,
f° 234. Index novi stipalis A0 17G1. In fine: Samelen 2 laet hoven den eersten
genoemt Vischcrs-hoff. Den anderen Reys-huff ons coomtnde van Daniel van
Colmont, etc. (Don de Mr le Notaire Vrindts).
179. In-f", relié en parchemin : Index du n° précédent. Idem.
180. In-f°, MS. sur veliu de 48 feuillets : Obituaire de l'église de S'. -Jean à Tongres :
écriture des XVe et XVIe siècles.
181 . In-f°, relié en veau , intitulé : Registre appartenant au cloistre de l'oratoire de la
glorieuse Vierge de Marie dit le Clause à Tongres de cens et rentes, terres et
revenus dudit cloistre (1693-1696).
182. In-f°, relié en velin , intitulé : Register der Grondcynsen , pacht en halfscheyt
landereyen onder Herderen, Riempst, etc. geleegen alsook den Toi lot Millen
toestaende aen S. C. H. den Heere Prins Bisscbop van Lnyck gemaeckt en
hernieuwt door P. Nivar admodiateur van S. C. H. voorsc. (1757-1777).
183. In-f°, relié en velin , intitulé : Registre aux cens et terres affermées au quartier de
Riempst et Herderen comme aussi du droit de péage à Millen vulgairement dit
Tul appartenant à la mense épiscopale de son Altesse Monseigneur le Prince-évêque
de Liège avec les citations et renvois tant au registre précédent fait par l'amo-
diateur P. Nivar en 1777, qu'aux textes divisés, de même la séparation et dis-
tinction des textes des propriétaires étrangers qui étaient confondus avec ceux
de leurs fermiers. Puis le sommaire alphabétique de tous et chaque textes
et ensuite copies authentiques des baux de terres affermées, fait à Maeslricht
pendant les années 1784, 1785, 1786, 1787 et 1788 (par E. Ruylers.)
184. ln-f°, cartonné, intitulé: Extract der Namen van aile die gehouden syn te betalen
de cynsen ten bthoeve der bisseboppelycke Tafel van Z. C. H. den Heere Prins
bisschop van Lnyck wegens de grnnden en erven onder Herderen, Riemst
Millen en daer omirent geleegen zynde daer by gcvoegt waer inné deeze cynsen
bestaen met aenvvyzing der folio tôt de texten in t' hoofd register der woonplactze
der débiteurs, hunne jaerlyksche verschulheid in geld en graenen alsmede de
betaelingen en leverantien gedaen voor de jaeren beginnende 1786 en eindigende
1791.
185. In-f°, relié en veau, intitulé: Registre aux cens seigneuriaux dus à la mense
épiscopale de S. A. G l'évêque et prince de Liège au quartier de Herderenne ,
Rhiems , Mellin et dépendance contenant la nature desdits cens avec démons-
tration des textes et leurs folios dans le registre principal , la demeure des débi-
teurs et leur dette annuelle , tant en grain qu'en argent fait par Armand Ledoux
pour le temps de son amodiation qui a commencé au St. -Jean 1792 jusqu'au
St. -Jean 1798.
— 367 —
186. In-4", relié en veau , intitulé : Registrum parvi hospitalis renovatum annol"l3
Ab Arnoldo Joseplio Dcstordeur beneficiato Tungren. ac Redore Qnartœ Capellae
d'Offelken, née non una Cum duo Rubens ab arcbidiaconali capitulo Tungren.
Constitutis ad legendum primum Sacrum die Mercnrii et die Veneris cnjus-libe
hebdomadae ad altare beatse Marias Virginis. (-1820).
187. In-4°, relié en veau , intitulé: Marguillerie (1726-1797). Revenus et droits des
Marguilliers de l'église archidiaconale de Tongres.
188. In-f°, cartonné, intitulé: Cheyns register toestaende Jouffrouwe Marie Cecilia de
Ticken welcken wordt bctaelt in drn boff van Wydoye op St. Stevens darh van
bel jaer 1711 ende door Arnold de Tieken gecontinueert ende syne huysvrouwe
(-1759).
189. In-f°, oblong cartonné, intitulé : Nomina eognomina conditiones et qualitates
omnium civium et incolarum civitatis Tongrensis conscripta anno 1736 mensis
Aprilis die 23 et conlinuata per dies sequentes. — In fine descriptio parochia—
norum ecclesias nostrse parocbialis St.-Joannis Baptistœ Tongrensis fada per me
subplebanum infra scriptum cum matriculario nostro R. D. Bloemen 1736,
24 April. Dloer : parochianen der stad Tongeren.
190. Oblong, relié en parchemin, intitulé: Dit Register hort toe hetgoet Becker ambacbt
geuanit dcn rekenboeck inboudende aile rekeningen van aile meysters begint in
bet Jaer ons liefs heeren Jésus Christi M. D. C. LXIII den 28 January als meys-
ters warcn Ardt Willemans ende Jan Derden Commissaris Willem Meer, etc.
(1663-1764).
XIII.
Nouveaux registres. — Administration des biens. — Délibérations du
conseil et du bureau des marguilliers. — Correspondance des trésoriers.
— Restauration de l'église, etc.
191. In-fo, relié en veau, intitulé : Uécolement des rentes et biens-fonds encore exis-
tants de la fabrique des églises primaire et de St-Jean-Baptisle, auxiliaire de la
ville de Tongres, ainsi que des rentes et biens-fonds transférés et aliénés desdites
fabriques de même que anéantis par la suppression des corporations prises en
découvertes, contestés et rédimés donnés en engagère ainsi que le compte conte-
nant les recettes et dépenses de ladite fabrique pour Tan 1816.
192. In-f°, cartonné, intitulé : Journal concernant les dépenses de l'adjudication et entre-
prise des travaux de blanchissage de l'église de N.-D. de la ville de Tongres et
autres dépenses des réparations de l'église et dépenses pour honoraires de
Mrs les Vicaires pour 1818, ainsi que les dépenses pour la contribution foncière
de l'an 1818 et autres notes et dépenses à observer sur la fin de ce Journal,
aussi dépenses pour l'an 1819 à la page 12.
193. ln-f°, relié, intitulé : Église primaire de Notre-Dame de Tongres, gestion adminis-
trative et restauration de l'église, 1838-1866.
194. In-f°, relié, intitulé: Documents relatifs à la restauration de l'église de N.-D. de
Tongres, 1843-1866.
— 368 —
195. ln-f°, relié en cuir vert, intitule' : Littera A, Sommier des recettes.
196. In-f°, relié en cuir vert, intitulé: Littera B, Sommier des receltes.
197. ln-f°, relié en cuir vert, intitulé: Littera C, Sommier des recettes.
198. In-f°, relié en cuir vert, intitulé: Littera Cn. Sommier des recettes.
199. In-fo, relié en cuir vert, intitulé: Littera D. Sommier des recettes.
200. ln-f°, relié en cuir vert : Sommier des titres de propriété de N.-D.
201 . Idem. des chapelles.
202. ln-f°, relié en veau marbré, intitulé : Journal des recettes et des dépenses.
203. In-f°, relié en veau marbré: Contenant le détail des fondations et anniversaires.
204. ln-4°, relié en veau : Contenant l'indication des remboursements et réapplicats
faits. Idem du trésor et des morceaux de musique.
205. ln-f°, couvert en toile grise: Contenant d'anciens comptes de recettes et dépenses
suivi d'un exposé des anniversaires et des services fondés.
206. Petit in-f°, cartonné, intitulé: Catalogues de 1707-1834-1844 et 1805, des archives
de l'église N.-D. à Tongres.
207. Petit iii-f<\ cartonné, intitulé : Premier registre aux délibérations, 1838 à 1851.
208. Petit in-f°, relié, intitulé : Second registre aux délibérations à partir du 6 avril
1851 jusqu'au. . . .
209. Petit in-f° cartonné, intitulé: Registre de correspondance, 1838 à 1866.
DEUXIÈME SECTION.
Manuscrits et imprimés concernant la liturgie , la théologie , etc.
Manuscrits 1.
I. Évangéliairc in-fo, relié en veau, avec garniture cn cuivre, MS sur velin de
234 feuillets, à 2 colonnes; écriture du XVe siècle.
II. Antiphonaire , grand in-f° relié en veau, avec garniture cn cuivre ciselé, MS sur
velin de 218 feuillets, intitulé: Adusum perinsignis Collegiatae et archidiaconalis
ecclesiœ Beatae Marise Virginis oppidi Tongr. sumptibus f abri ose anno 1738. —
Nicolaus Roland Leodius fecit. La fin manque.
III. Antiphonaire, grand iu-f°, relié en veau, avec garniture en cuivre ciselé, MS sur
velin, de 221 feuillets, intitulé : Ad usum perinsignis Gollegiatse et Archi-
diaconalis ecclesiœ Beata) Mari» Virginis oppidi Tongrensis sumptibus fabricœ ,
anno 1738 Nicolaus Roland Leodius fecit..
IV. Antiphonaire, grand in-f° relié en veau, avec garniture en cuivre, MS sur velin ,
sans titre , renfermant 287 feuillets , commençant par : In festo bealœ Maris
Egyptiare in primis Vesperis ante et ps fiàles; écriture du XVe siècle.
V . Antiphonaire , grand in-f", relié en veau , avec garniture en cuivre , MS sur velin,
contenant 302 feuillets, commençant par : In festo beata? Mariœ Egypliace in
primis vesperis ant. et ps fialcs; écriture du XV1' siècle.
1 Les quinze premiers numéros ont été trouvés en 184C lors de la démolition d'un mur dans la tré-
sorerie de l'église.
369
VI. ln-f°, relié en veau plein , avec garniture en cuivre , MS sur veliu , de 828 pages ,
sans l'index, intitulé : Liber / Delpare/ MaternoqUe/ epIsCopo / saCer/ Canlans/
aD aqUILaM offICIa / et MIssas totIUs annl / ConCeLebranDa / per DoMInos
VICarlos/ CLare praetonantes/ plo arCliIDIaConaLIs tongrensls In DesIDerlo.
Expensis fabriese Conscriplus per J. L. Fesljens Tongrens.
VII . Graduel sur velin , grand in-f°, reliure en bnis , couverture en veau plein , restaurée
et garnie de coins en cuivre. Belle écriture du XVe siècle (grandes lettres dorées ,
coloriées et très-omées) 575 feuillets sans l'index; le premier feuillet manque.
VIII. Graduel, MS sur velin, grand in-f°, reliure en bois, couverture en veau plein ,
garnie d'ornements en cuivre ; manuscrit du XVe siècle de 575 feuillets ;
l'index a été ajouté. Les deux premiers feuillets sont lacérés.
IX. Passionnai du mois de décembre, grand in-f°, relié en veau, MS sur velin de 282
feuillets, à deux colonnes, commençant par les mots : Incipit passio sancti
Andrée apostoli Écriture du XVe siècle ; défectueux du titre et des derniers
feuillets. L'index se trouve à la page 245.
X. Passionnai du mois de juillet, grand in-f°, relié en veau plein, MS sur velin à
deux colonnes de 244 feuillets commençant par les mots : Sermo beati Hieronimi
prbi de assuptione Sle Marie virg. ad Paulam et Eustochium ; écriture du
XVe siècle. L'entête , les dernières pages et l'index ont disparu. La reliure en
bois recouvert de veau et orné de cabochons en cuivre a beaucoup souffert.
XI. Grand in-fo, relié en veau, avec garniture de cuivre, MS sur velin intitulé :
Proprium Sanctorum , 1 87 feuillets , sans l'index ; écriture du XVIIe siècle.
XII. Grand in-fo, relié en velin , portant 2 Octobris : Offieium Angeli Custodis Sinister,
1647, 10 feuillets; écriture du XVIIe siècle.
XIII. Grand in-fo, relié en veau, intitulé : Ad sinistram, commençant par les mots :
In festui SS. Nois Jesu. 15 feuillets; écriture du XVIIe siècle.
XIV. Grand in-f°, relié en veau noir, intitulé : Offieium Su Joseph. Confessons plis
B Marlae Vlrglnls / tUngrensIs fabrICœ eXpensls , / boUrgeoIs , et sCrlpsIt et /
DeVoVIt, 12 feuillets; écriture du XVIIIe siècle.
XV. Grand in-f°, relié en veau noir, intitulé : Offieium Scli Joseph. Confessons sumptibus
fabricœ anno 1748 , 12 feuillets; écriture du XVIIIe siècle.
XVI. Antiphonaire en parchemin très-détérioré et tout dépareillé , commençant au
feuillet 99 ; écriture du XVIe siècle.
XVII. Graduel, grand in-f°, relié en veau , intitulé : Liber canonicorum regul. Tungr. ad
usum cantorum A0 1706, commençant par les mots: Venite pro tempore
paschali seu paschate.
XVIII. Antiphonaire, grand in-folio, relié en veau avec garniture en cuivre, commen-
çant par : dominica 1 Advent. ad primas et secundas vesperas. R. Page 94 ;
proprium sanctorum in feslo nativitalis domini ad primas vesperas R. Incomplet
à la fin; 142 pages; écriture du XVIIe siècle.
XIX Antiphonaire, petit in-f°, MS sur velin, relié en veau de 191 pages intitulé :
P. P. T. B. D. L. V. anno 1797. Tungrensis. Commençant par les mots :
Salvum me fac. Détérioré.
— 370 —
XX. Antiphonaire , pciit inf°, MS sur velin avec agrafes et coins en cuivre de
200 pages : liber fcsloruni , sans entête. — Délérioré.
XXI. Antiphonaire, petit in-f°, MS sur velin , relié en veau de 83 feuillets, portant :
In usum insignis eccles. Tungrensis ; sans entête ; hymnes à la première page
commençant par les mots : Anth. de Dta. Maria Vge decanlâda Cora Ymagie
eide ah advetu Dni usq nat. xpi. Orné d'une miniature représentant l'Annon-
ciation de la Sle Vierge; XVe siècle.
XXII. Petit in-f°, MS sur velin, relié en veau noir avec garniture en cuivre, de
85 feuillets sur deux colonnes . commençant par « Ferla secunda ad funtes
collecta. » Écriture du XVe siècle. Plusieurs ajoutes ont été faites en tête. La
dernière partie, intitulée : Commemoratio pro pluribus defunctis, fut ajoutée
en 1737.
XXIII. Petit in-f°, MS sur velin, relié en veau noir, de 23 feuillets (3 feuillets
manquent). Antiphonaire du XVe siècle. A la page 24 calendriers et tables,
vigiles et vêpres pour le jour des morts et pour les obsèques des chanoines ;
écriture du XVIIe siècle ; page 41 , calendrier des fêtes mobiles de 1669 à 1700 ;
écriture du XVIIe siècle. In fine : Fragments extraits de l'obituaire du chapitre.
XXIV. In-4° , relié en veau , intitulé : Lectiones quadragesima) ad usum per insignis et
archidiaconalis ecclesiae B M. V. oppidi Tungrensis : thoMas hazeUs VIoLInlsta
LeoDIUs sCr'psit. 88 pages, incomplet; écriture du XVIIIe siècle.
XXV. In-f°, broché , intitulé : Lectiones hebdomadae majoris scripsit Nicolaus Josephus
Bourgeois Poeta Tungris a0 1743 , 24 pages.
XXVI. In-f°, relié en veau noir, intitulé : Ofiicium defunctorum Reverendo admod : Domino
J. Vaudenier perinsig, ecclesiae collegiatae et archidiacon. B. M. V. Tungris
canonico neenon canton vigilantissimo dedicatum A° 1748.
Pages non numérotées. — In fine : Ordo cantandi officium defunctorum in
ecclesia Tungrensis in vesperis malutinis et laudibus defunctorum in die animarum.
En 1860 on a mis en tête de ce vol. un Graduale romanum.
XXVII. Oraisons, in-4°, relié en veau, intitulé : feria 4* cinerum et feria 5a in cœna
domini ; 68 feuillets; écriture du XVIIIe siècle A la page 59 : Benedictio fonlis ;
écriture du XVe siècle.
XXVIII. Passionnai in-f°, relié en veau noir, portant imprimé sur la couverture : Capituli
Tungrensis anno 1680 ; pages non numérotées, à filets et tranches dorées.
\\l\. Antiphonaire in-4°, relié en veau noir, intitulé : Responsoria in stationibus in medio
templi in solemnioribus Feslis cantanda 1696. Ad usum RJi Dni Erasmi de
Limbourg canonici Tongren ; pages non numérotées (XVIIe siècle).
XXX. Antiphonaire in-4", relié en veau noir, intitulé : In festo conceplionis B. M. V. ad
primas vesperas ; pages non numérotées (XVIIIe siècle).
XXXI. ln-4°, relié en veau noir, garni de petits clous en argent, intitulé : Officium defunc-
torum ad usum Reverendi ad modum ac amplissimi. Dni Mathei Pauli Closar
insignis ac archidiaconalis ecclesiae Tungrensis Decani anno 1731. Pages non
numérotées.
XXXII. antiphonaire in-4°, relié en veau noir avec agrafes en argent, 47 feuillets;
écriture du XVII» siècle, intitulé : In die nativitatis Domini.
— 371 —
XXXIII. Id. de 47 feuillets.
XXXIV. 1(1-8°, relié en veau , pages non numérotées : Pièces pro necessitatibus presen-
tilius ex Sacra Scriptura et ecclesia? orationibus desumptae boUrgeols Me
eXaraVIt; pHsqUe fabrICae qUaestorlbUs DICaVIt.
XXXV. In-8°, relié en veau, pages non numérotées, intitulé : Preces pro necessita-
tibus prœsentibus ex Sacra Scriptura et ecclesise orationibus desumptœ ; écri-
ture du XVIIe siècle.
XXXVI. Processionnal in-i°, relié en veau noir, intitulé : In festo natalis Dni. . . (107
feuillets détériorés) ; écriture du XVIIe siècle.
XXXVII. Processionnal in-8°, MS sur velin , relié en veau avtc agrafes en cuivre,
portant : Liber Dominorum Canonicorum Tongrensium ; 71 feuillets, commen-
çant par : In die natal Dni processio fit p. Claustru etc.; écriture du XVe siècle.
XXXVIII. Processionnal in -8°, MS. sur velin de 167 feuillets, relié en veau avec
agrafes en cuivre; les derniers feuillets sont détériorés; écriture du XVIe siècle ;
commence par : In pma dnica advetus Dni ad possessione
XXXIX. Passionnai in-f°, relié en veau avec agrafes en argent, doré sur tranche, pages
non numérotées , portant : Ad usum perinsignis eccliœ collégiale et archidia-
conalis B. M. Virginis oppidi Tungrensis A° MDCCXLVII sumptibus fabrice
Nicolaus J Bourgeois fecit.
XL. Graduel in-f°, MS. sur velin , relié en veau noir, de 51 pages, portant : Liber ad
usum perinsignis collégiale et arcbidiaconalis ecdesie B. M. Virginis oppidi
Tungrensis anno MDCCXXXXII.
XLI. Graduel in-f°, relié en veau, sans entête; très-détérioré.
Imprimés.
XL1I. Iu-f0, relié en veau, avec agrafes en cuivre, intitulé : Epistolœ et Evan-
gelia totius anni Autwerpiae ex officina Plantiniana Balthazaris Moreti
MDCLXXXVI.
XLIII. Petit in-f°, relié en veau avec agrafes en cuivre, intitulé : Missale ad usum
insignis ecclesie Leodiensis Anhverpie typis Johannis Ruremunden 1552.
XLIV. In-f°, relié en veau , intitulé : Missale Romanum Antwerpie ex officina Planti-
niana Balthazaris Moreti MDCLXXXI1. In fine : Appendix ad missale Romanum
continens varias missas et commemorationes proprias S. S. dioc. Leod. 1707.
XLV. In-f°, relié en veau, intitulé : Missale Sacri ordinis predicatorum. Parisius,
apud viduam Claudii de Hansij MDCCXXI.
XL VI. In-f°, relié en veau, intitulé: Missale Romanum Antwerpie. Détérioré.
XL VIL In-4°, relié en veau et doré sur tranche, intitulé : Breviarium Leodiense... Leodii
in officina typographica Everardi Kints et démentis Plomleux MDCCLXVI.
Les quatre parties.
XLV11I. In-4°, relié en veau, avec garniture en cuivre et doré sur tranche, intitulé :
— 372 —
Breviarium Leodicnsc . . . . même édition , à la lin plusieurs feuillets MSS ,
intitulés : Officia propria ecclesiœ Tungrensis. (La pars hiealis manque.)
XLIX. In-i°, relie en peau de chagrin brune, à filets dorés et doré sur tranche, inti-
tulé : Breviarium Leodiense même édition. Don de M. le chanoine de
Saren. (Lapais verna manque.)
L. ln-f°, dépareillé, intitulé : Mean observationes et res judicala?. Tome I.
Ll. In-4°, cartonné, intitulé : lu titulum XLI , libri III, decretalium dissertatio
canonica de divinis offieiis. Romse 1771.
LU. Missel in-fo, dépareillé, commençant à la page 41.
LUI. Grand in-fo, reliure en bois, couverture en veau plein avec agrafes et coins
en cuivre, intitulé : Bibiia Sacra quid in bac editione a theologis Lovaniensihus
praestitum sit eorum prœfatio indicat. Anlwerpiœ ex oflicina Chrislopbori Plan-
tini MDLXXX11I.
L1V. ln-f° , relié en veau noir, intitulé: Miss;e defunctorum Juxta usum ccclesiœ
romans. Anlwerpiœ ex architypographia Plantiniana MDCCLIII.
TROISIÈME SECTION.
Charte*, diplômes, bulles et autres documents sur parchemin. i
1° XIIIe siècle.
N° 1 . lv208. Dalum in die béate Lucie Virginis et martyris anno Dni MCC octavo.
Sentence rendue par Marchoald , archidiacre de Liège et prévôt de Tongres ,
contre quelques chanoines, quelques bénéficiées et contre le pléban Nicolas ,
accusés d'inconduite.
Original sur parchemin ; le sceau est perdu.
N° '2. 1271 . — Datum âno Dni M0 CC° LXX primo, feria tertia post dominicain Judica.
1 Presque toutes les chartes dont nous donnons ici l'analyse ont été transcrites en 1598 , par le
chanoine Henri Salomon dans deux volumes in-folio qui, formaient les Libri Chartarum ecclcsiœ
Tungrensis.
Le premier volume comprenait la copie authentique de plus de 100 diplômes, etc., donnés depuis
l'année 1 104 jusqu'à 1403.
Le second volume renfermait plus de 300 chartes et se terminait à l'année 1590. C'était le recueil le
plus complet des sources concernant le chapitre de l'église de Tongres. Diplômes, huiles , paix , sta-
tuts , records , mandements, conventions , décrets, testaments, nominations , en un mot tous les docu-
ments précieux ou utiles s'y trouvaient réunis.
Ces cartulaires, œuvres de patience, avaient demandé plusieurs années d'un travail intelligent et soutenu
pendant lesquelles le chanoine Henri Salomon avait été dispensé de toute assistance au chœur et aux
autres offices religieux Ou conservait également dans la librairie de N.-D. (plus tard op den spiegliel)
les chartes originales ; elles étaient ainsi que le prouve le Uepertorium dressé en 1505 (voyez le n* 6
de la première section) soigneusement gardées dans des tiroirs (Capsuke) numérotés et étiquetés.
En 179i, les archives furent déposées chez le prétre-sacristain Antoine Minimal jusqu'en 1810. Qua-
rante chartes échappèrent à la convoitise d'antiquaires peu scrupuleux. Trente-deux autres furent trans-
portées à Paris , où elles figurent sous le n° 9209, fonds latin, de la Bibliothèque impériale. Les
précieux cartulaires et beaucoup de chartes tombèrent entre des mains inlidèles.
— 373 —
Sentence arbitrale rendue par Marchoald prévôt de Tongres, Amel doyen
de St. -Denis à Liège et Peanus chanoine de N.-D. à Tongres, au sujet d'un
différent qui avait surgi entre le chapitre et l'écolàtre de N.-D. relativement à
la résidence de ce dernier.
Original sur parchemin avec des fragments du sceau, avec conlre-scel du
doyen Amel en cire brune ; les deux autres sceaux sont perdus.
Transcrit dans le premier cartulaire sous le n° 62, fol. 36.
N° 3. 1284. — Daturn anno Domini MCC ocluagesima quarto feria sexta post domini-
cam Jubilate.
Sentence rendue par Guillaume de Attrebalo chanoine do St. -Lambert à
Liège, nommé juge par l'évêque Jean , pour terminer le différend qui s'était
élevé relativement à la situation de l'autel paroissial dans l'église de Tongres.
« L'autel en bois, jadis placé au milieu de l'église, sera démoli et la messe
» paroissiale sera dite désormais à l'autel établi par l'écolàtre Régnier à
» droite du chœur. »
Original sur parchemin , le sceau est enlevé.
Transcrit dans le premier cartulaire sous le n0 68, fol. 44.
2o XIVe siècle.
No 4. 1307.— Anno nativitatis Domini M°CCC° Septimo indictioue quinta IX Kal.
Augusti Pontificatus Dni Clementis pape V1' anno secundo.
Décision du prévôt Albert Codolus accordant à la fabrique le revenu de la
seconde année de grâce de toute prébende cannoniale qui viendra à vaquer
pendant les trente années suivantes, afin de l'aider dans l'achèvement de la
construction du temple.
Original sur parchemin avec paraphe et signature du pléban Guillaume,
les deux sceaux pendant à des bandes de parchemin sont enlevés.
Transcrit dans le premier cartulaire, sous le n° 75, fol. 60.
N° 5. 1348. — Acta fuerunt hœc Tongris in Capilulo ecclie Ble Marie predicte sub
anno nativitatis ejusdem domini millesimo tricentesimo quadringentesimo oc-
tavo. Indiclione prima mensis novembiis die VIII.
Instrument notarié dressé par Arnold Rufi de Tongres, constatant que le
doyen, le chapitre et les bénéficiera ont remis à six arbitres la solution de quel-
ques différends qui s'étaient élevés entre eux.
Original sur parchemin revêtu de la signature dudit notaire et muni
de son paraphe.
Transcrit dans le premier cartulaire, sous le n° 114, fol. 117.
No 6. 1353. — Acta fuerunt hase Leodii in hospitio habitationis dicti dni Pbilippi ao
nat. Dni millo CCC° quinquagesimo tertio.
Instrument notarié passé par devant Guillaume dit de Gembloux, notaire im-
périal et clerc du diocèse de Liège, constatant la transaction faite entre le doyen
et le chapitre d'une part et le prévôt de l'autre au sujet des oblations faites
— 374. —
par divers chrétiens devant un vieux crucifix placé vis-à-vis de la table dite
de la fabrique.
Original sur parchemin , revêtu de la signature et du paraphe du notaire,
de l'approbation du prévôt, du doyen et du chapitre de l'église de Tongres
ainsi que de celles d'Englebprt évêque de Liège , du vice-doyen et du
chapitre de St. -Lambert , muni du scel en cire rouge du prévôt Ange de
Filys-Ursi et du scel et du contre-scel du chapitre de Tongres. Le sceau
de l'évoque et celui du chapitre de St. -Lambert manquent.
Transcrit dans le premier carlulaire de l'église sous le n° 119, f° 1"23.
N" 7. 1355. — Datum anno a nativitate Dni millésime tricentesirao quioquagesimo
quinto mensis Junij die décima seplima.
Ordonnance rendue par le chapitre de N.-D. et relative à la perception
des revenus échus et des arriérés du dit chapitre.
Original sur parchemin muni d'un fragment du scel du chapitre
pendant à une double queue de parchemin.
N° 8. 1359. — Anno a nat. Dni millio CCO quinquagesimo nono indictione duo-
decima mensis februarij die vicesima tertia hora summe misse decantate.
Instrument notarié dressé par Nicolas dit le Pevreis de Sombreffe notaire
impérial et de la cour de Liège , clerc du dit diocèse , constatant la pro-
testation faite par le chapitre de Tongres contre la nomination de Jacques
de Visschel que Ange de Filys-Ursi prévôt de Tongres, d'après le conseil du
chanoine deNoithof, venait dénommer recteur du béguinage de Tongres. Le
chapitre avait nommé Walter de Cortenaken , en remplacement de Jacques
de Gunia décédé.
Original sur parchemin revêtu de la signature et du paraphe du notaire.
Transcrit dans le premier cartulaire sous le N° 125, fol. 130.
N° 9. 1371. — Anno a nativitate Dni millésime tricentesimo septuagesimo prmo.
Indictione nona mensis octobris die penultima.
Instrument notarié, dressé par le notaire Nicolas clerc du diocèse de Liège,
constatant la sentence arbitrale prononcée par Antoine de Fies et Martin
Benty au sujet de difficultés survenues entre le prévôt et la fabrique de
l'église de Tongres , relativement aux droits respectifs des adversaires et à
certaines charges à supporter par l'une ou l'autre des deux parties.
Original sur parchemin revêtu de la signature et du paraphe du
notaire de même que du vidimus du prévôt Renard de I'ypemo du
doyen et du chapitre de l'église N.-D. Les quatre sceaux qui y
pendaient sont enlevés.
Transcrit dans le premier cartulaire, sous le n° 113, fol. 164.
Nu 10. 137i. — Acta fuerunt liée in capitulo eclesie béate Marie Tungrcnsis , anno
a nativitate domini millésime tricentesimo septuagesimo quarto indictione
duodecima mensis Junij die décima septima.
Instrument notarié dressé par Nicolas dit Beerken , notaire impérial et de
la cour de Liège et du diacre du même diocèse, relatant une sentence arbitrale
— 375 —
portée par Guillaume Je Hernario chanoine , Jean Daniel Déballe et Régnier
son frère, touchant quelques terres appartenant à l'église de N.-D.
Original sur parchemin avec la signature et le paraphe du notaire de
même qu'avec le vidimus des arbitres.
Les deux sceaux sont enlevés.
N° 11 . 1830. — Anno a nativitate Domini millesimo tricentesimo octuagesimo mensis
Julij die undecima.
Instrument notarié dressé par Gilles Anima de Tongres, notaire impérial
et de la cour de Liège, portant déclaration que devant le chapitre de N.-D.
sont comparus : les jurés et le conseil de la ville, les recteurs et les mambours
de la chapelle de St. -Jean et de St. -Nicolas d'une part, elle pléban Jean Ave
Maria d'autre part , que les premiers ont reconnu et déclaré que de temps
immémorial le service divin se faisait journellement dans l'église de St.-Nicolas
et dans celle de St. -Jean et que le vice-doyen et le chapitre ordonnèrent de
continuer régulièrement le service.
Original sur parchemin revêtu de la signature et du paragraphe du
dit notaire.
Le sceau est enlevé.
Transcrit dans le premier cartulaire , fo 284.
N° 12. 1390. — Anno a nativitate domini millesimo tricentesimo nonagesimo feria
quarta post festum beati luce evangeliste.
Instrument notarié dressé par Guillaume Abbatis de Tongres , clerc du
diocèse de Liège et notaire impérial, constatant la défense faite par le chapitre
de Tongres d'écrire dans les livres appartenant à ladite église.
Original sur parchemin revêtu de la signature et du paraphe du
dit notaire.
Le sceau est enlevé.
Transcrit dans le premier cartulaire sous le nu 159, fo 203.
N° 13. 1396. — Gbeschiet tôt Werrae in den Jare ons heren gheboerte dusent drie
hondert sesse ende neghentich des vyf ende twintichste dags van Junio.
Accord passé entre Gilles Heze écoutête , Guillaume van Vriherme , Jean
Van Lichtvelt , Pierre Horremont , Guillaume Cleynen de Hoesselt , Jean
Jacobs , Godenart Van Werme et Jean Swogher, échevins de la cour de
justice de Werme tenu par le seigneur Henri Marchéal , seigneur de
Auvilgen en Condroz et de Werme, chevalier de Werme, d'une part et
M. Gérard Van Heer, chanoine de Tongres, au nom du chapitre de N.-D.
d'autre part : Henri Marchéal s'engage à payer au chapitre les cens ,
rentes et dîmes des biens de Harlingen possédés par ledit chapitre.
Original sur parchemin. Trois sceaux enlevés.
Transcrit dans le premier cartulaire sous le n° 108, fol. 109.
3° XVe siècle.
N° 14. 1403. — Anno a nativitate Domini millesimo quadringentesimo tertio,
376
indictione secundura stilum curie Lcodien. undecima ; mensis decembris die
décima nctava.
Ordonnance rendue par le chapitre de Tongres concernant la nomination
d'un nouveau doyen en remplacement de Radulphe de Rivo , décédé.
Original sur parchemin avec signature et paraphe du notaire Guillaume
dit Ahatis de Tongres : le sceau qui pendait à une double queue de
parchemin est perdu.
Transcrit dans le deuxième cartulaire sous le n° 2, fol. 1 p. 2.
N° 15. 1404. — Datum et actum Tungris in aula domus claustralis bonorabilis viri
domini Walteri de Malle canonici ecclesie béate Marie Tungrensis predicte.
Anno a nalivitate Domini millésime- quadringentesimo quarto indictione duode-
cima die quarta mensis octobris hora post summam missam in dicta ecclesia
Tungrensi decantatam.
Provision de Gérard de Heers au doyenné de Tongres; cette provision
fut donnée sur la demande du pape Boniface ta Gérard fils naturel de Gérard,
seigneur de Heers, licencié es lois, chanoine-diacre de Notre-Dame et
recteur de la chapelle de Binderveld , malgré les instances de Nicolas Burin
licencié es lois et doyen de l'église de N.-D. à Huy.
Original sur parchemin avec signalure et paraphe du notaire Guillaume ;
le sceau est enlevé.
N° 16. 1424. —Anno Domino millésime quadringentesimo vicesimo quarto mensis Julij
diè décima septima.
Lettres par lesquelles les chanoines réguliers de l'hospice fondé par Richard
de Luyke constituent une rente perpétuelle d'une mesure de seigle à
payer chaque année au pléban de Tongres , le jour de la fête de la Purifica-
tion de la Sainte Vierge pour lui tenir lieu des oblations qu'on faisait lors
des enterrements dans ledit couvent.
Original sur parchemin , traces du sceau des chanoines réguliers et
grand sceau de la ville de Tongres en cire brune.
Le sceau du pléban Jean Coen manque.
Transcrit dans le deuxième cartulaire sous le n° 36, f° 24.
N° 17 . 1435. — Anno a nalivitate Domini quadringentesimo tricentesimo quinto, indictione
décima tercia mensis Junij diè tercia hora slalim post summam missam in
ecclesia Leodiensi decatantam.
Instrument notarié dressé par Woulghcrus de Rosele de Turnhout , clerc
du diocèse de Cambrai , notaire impérial de la cour de Liège , constatant
l'accord fait entre Théodore Batcnsoen écolâtre, Libert de Corswarem chantre,
au nom du chapitre de Tongres d'une part , et Henri de Houtcn de Lens-sur-
Gcer , Jean Volsamque de. ... , Jacques de Gerenvilhe et Collard d'Ammely
île Birgeley , d'autre part,- au sujet des oblations à faire chaque année dans
l'église de Tongres, le jour de la Pentecôte.
Original sur parchemin avec la signature et le paraphe du notaire de
Rosele.
Transcrit dans le deuxième cartulaire, sous le n° GO, f°56.
— 377 —
N° 18. 1441 . — Anno a nativitate Domini , millésime» emadringentesimo quadragesimo
primo , indictione quinta die deçjnia nona mensis Octobris.
Acte notarié dressé" par le notaire Gisbert de Brochuyse de Urdinge, clerc
du diocèse de Cologne et notaire impérial, constatant la garantie donnée au cha-
pitre deïongrespar Jean de Waclitendonrk prévôt de Cologne, pour le paye-
ment des frais que pourrait occasionner sa nomination au canonicat vacant
dans l'église de Tongres.
Original sur parchemin avec signature et paraphe du notaire.
Transcrit dans le deuxième cartulaire sous le n° 75, f° 73.
N'o I8bisl444.. — Dat. Rome apud sanctum petrum anno incarnalionis dominice mille-
simo quadringentesimo quadragesimo quarto.
Bulle du pape Eugène IV accordant au chapitre la faculté de réunir
en un seul bénéfice, à cause du peu de revenus de la fondation et de la
difficulté de trouver des bénéficiers capables, les fondations du saint Sauveur et
de la sainte Vierge dans la chapelle de Merlemont à celles de saint Pierre
et saint Paul , de saint Lambert , de sainte Anne et de saint Servais.
Original sur parchemin ; plomb pendant à un cordon en soie rouge
et jaune portant à l'avers tEugenius PP. IV et au revers deux têtes avec
la suscriptiou SPASPE.
Transcrit dans le deuxième cartulaire sous le n° 84, f° 8"2.
N° 19. 1452. Datum Rome apud sanctum Petrum anno Incarnalionis Domini millesimo
quadringentesimo quinquagesimo secundo quinte» nonnarum Octobris Pontifi-
catus nostri anno sexto.
Bulle du pape Nicolas , accordant à Herman Zamien , Recteur de
l'autel de saint Jean-Évangéliste le rectorat de l'église de St. -Martin
à Veustherck.
Original sur parchemin en mauvais état, le sceau est enlevé.
N° 20. 1458. — Geschiet int jaer der Saliger geboerte ons hère Jesu Christi dusent
vier hundert ende vyftich ende acht in die maent van februario sies daech.
Lettres de l'écoulête et des échevins delà cour de Herck près de Colmont,
constatant l'acquisition d'une rente de sept mesures de seigle faite par Chré-
tien Roberts , au nom des chapelains de Tongres , de Henri Mont de Koelmont.
Original sur parchemin avec deux fragments de sceau; les cinq autres
sont enlevés.
N° 21. 1476. — Int joir dusent vierhondert ende zes ent seventich den negge en
twynticlisten daechs in novembry.
Lettres des jurés et tenants delà cour censale du chapitre à Widoie , con-
statant l'acquisition faite par Henri Alphurus et Jean Vantricht chapelains de
Tongres au nom des bénéficiers , d'une rente d'une mesure de seigle affectée
sur une maison et courtil situé sous la juridiction de Widoie , et appartenant
à Guillaume Marcelys, fabricant de drap et habitant de Tongres.
Original sur parchemin ; les sept sceaux sont enlevés.
XXIX XXII 24
— 378 —
No 22. 1° 1471. — Anno a nativitate domini millesimo quadringentesimo septuagesimo
primo mensis Januarij die vicesima quarta.
Lettres du doyen et du chapitre de N.-D. approuvant la fondation d'un
bénéfice dans l'église de St.-Nicolas, faite par Mabilie veuve de Jean Tels et
autorisant la consécration de l'autel sous l'invocation de la sainte Vierge et de
saint Nicolas, à condition d'\ affecter un revenu de cinq muids de seigle,
mesure de Tongres. Le recteur de son coté était obligé de célébrer trois
messes par semaine pour le repos de l'âme de la fondatrice et de son mari.
Original sur parchemin.
2° 14-71. — Anno a nativitate domini millesimo quadringentesimo septuagesimo
primo mensis januarij die vicesima septima
Lettres du pléban Jean Boten par lesquelles il reconnaît à Mabilie veuve de
Jean Tels le droit de nommer les trois premiers bénéficiers de l'autel de
St.-Nicolas qu'elle venait de fonder dans l'église de St.-Nicolas à Tongres.
Original sur parchemin avec la signature du pléban ; le sceau qui réunis-
sait les deux pièces est enlevé.
3° 1471. — Anno a nativitate domini millesimo quadringentesimo septuage-
simo primo mensis martij die undecima.
Attestation donnée par Jean, évêque de liber iensem, constatant qu'il a con-
sacré l'autel et qu'il l'a dédié à la sainte Vierge et à saint Nicolas.
Original sur parchemin ; le sceau est enlevé.
No 221,is. 1475. — Anno a nativitate domini millesimo quadringentesimo septuagesimo
quinto die vero secunda mensis martij.
Bulle de Guillermus cardinal et évêque d'Ostie, Philippe cardinal et évêque
de Poitiers , Ange évêque de Prénesle , Marc cardinal de saint Marc ,
Baptiste de sainte Anastasie, Olivier de saint Eusèbe , Etienne de saint
Adrien, Philippe de saint Pierre et de saint Marcelin, etc.. accordant,
à la demande de la confrérie de Sainte-Barbe , de son recteur Egide de
Hamme et du prévôt Laurent Hugo d'Elderen , une indulgence de cent jours
à ceux qui visiteront la chapelle de Sainte-Barbe , les jours de sa fête , celui de
l'assomption de la sainte Vierge , le dimanche après la fête de la dédicace
de l'église , le jour de la fête de St.-Laurent et de Sl0-Catherine. Cette
indulgence était accordée afin d'aider la confrérie dans la réparation , l'entretien,
etc. , de la dite chapelle et des ornements religieux nécessaires à la célébration
du culte '.
Original sur parchemin ; les sept sceaux sont enlevés.
1 Nous donnons ci-joint le calque réduit à la moitié de sa grandeur du mut Guillermus dont la pre-
mière lettre tourneurc est formée d'enroulements, de feuilles et de fleurs réunies par des lignes capricieu-
sement disposées.
Cette lettre sert de cadre à une miniature représentant la face du Christ entourée d'un nimbe
crucifère Le trait n'est plus tracé à la plume mais remplacé par une bande noire : au reste le XV siècle
•■si l'époque l'a plus brillante de l'histoire de la miniature. « Il semble , dit M. Durieux dans son mémoire
sur les Miniatures de Cambrai , que le moyen âge agonisant ait épuisé tout ce qui lui restait d'origi-
nalité, de génie même, pour varier les ornements dont il a décoré les manuscrits. » Les couleurs les plus
— 379 —
N° 23. 1477. — In den joer ons heren Jesu-Christi dusent vier hondert seven ende
seventich.
Lettres des tenants-jurés de la cour censale appartenant à Damoiseau
Goswin van Widoe constatant l'acquisition faite par Walter Pruymaerts,
chapelain de l'église de N.-D. d'une rente de quatre mesures de seigle
de Guillaume Bausmans , fils d'Arnold Bausmans de Pirange et de son
fils Arnold Bausmans, assisté de son tuteur Jean Reys
Original sur parchemin ; les sept sceaux sont, enlevés.
N° 24. 1490. Datum anno a nativitate domini millesimo quadrigentesimo nonagesimo
mensis augustij die vicesima quarta.
Lettres de Jean de Homes , évoque de Liège, approuvant la fondation
faite par Jacques Guldevoet, Tilman de Clivis et par d'autres pieuses
personnes du bénéfice de St.-Michel , archange , dans l'église de St. -Jean
à Tongres.
Original sur parchemin avec signature de Coitenbach ; le sceau est
enlevé.
Transcrit dans le premier cartulaire sous le n° 16° f° 250.
N° 25. 1494. — Datum Rome apud sar.ctum petrum anno Incarnationis dominice
millesimo quadringentesimo nonagesimo quarto.
Bulle du pape Alexandre aux abbés de St. -Laurent à Liège et de
Ste.-Gertrude à Louvain et au doyen de N.-D. à Aix-la-Chapelle, par
laquelle il les nomme juges afin de terminer le procès qui s'était élevé
entre le chapitre de N.-D. et l'écolàtre Jean Billiton , relatif à la résidence
et aux charges de ce dernier.
Original sur parchemin avec vidimus du notaire; le sceau est enlevé.
N° 26. 1492. — Anno a nativitate domini millesimo quadringentesimo nonagesimo
secundo mensis februarij die vicesima quarta.
Lettres du chapitre de N.-D. confirmant, l'accord fait entre le
pléban Jean Boten et les chanoines réguliers de Tongres qui s'étaient
engagés à payer annuellement le jour de la St. -Etienne deux chapons
au chapitre.
chatoyantes s'étalent à l'envie sur les rinceaux multicolores qui forment la lettre principale ; le lapis
lazuli , le carmin d'Orient et le vert de sinople ne le cèdent en rien à l'éclat de l'or.
Les autres lettres onciales du mot Guillermus sont peintes alternativement en bleu ou dorées.
Par un singulier caprice d'artiste, particulier aux types conventionnels des traditions byzantines, la face
de l'Homme-Dieu est modelée par de larges demi-teintes noires et par des ombres légères tracées en
blanc.
Sur la même charte se trouve une miniature représentant sainte Barbe revêtue d'une robe d'azur et d'un
manteau de pourpre doublé de siuople. Dans la main gauche elle porte un livre et de la droite elle sou-
tient une tour. Le manteau d'une grande ténuité de couleur et dont les plis parallèles ne manquent pas
de grâce et de légèreté est seul achevé ; le reste n'est qu'ébauché et a subi une retouche au trait noir.
Comme d'habitude l'habile imagier a négligé de signer son œuvre ; c'est du reste selon toute pro-
babilité le factum d'un enlumineur attaché à la chancellerie papale.
— 380 —
Ils s'étaient engagés en outre à n'enterrer aucun habitant de la ville
dans leur cimetière sans avoir payé les droits dus de ce chef à l'église
de N.-D.
Original sur parchemin ; deux sceaux enlevés (détérioré).
Transcrit dans le deuxième cartulaire f° 167.
N° 27. 1491. — Datum sic et actum in monasterio nostro in aula alla sub anno a
nativilate domini millesimo fpjadringentesimo nonagesimo quarto indic-
tione duodecima die vero Martis décima nona mensis augusti hora
vesperorum vel quasi.
Acte dressé par Nicolas Marchant , notaire apostolique et impérial ,
constatant la décision portée par Bartholomé de Longo-Campo, abbé
de St-Laurent à Liège, par l'abbé de Ste-Gerlrude à Louvain et par
le doyen d'Aix-la-Chapelle nommés juges par le pape Alexandre VI
pour te'rminer le différend qui s'était élevé entre le chapitre de Tongres
et Jean Billiton, écolatre de cette église. Ils ordonnent à ce dernier de
résider dans ia paroisse de Tongres et de payer les droits de sa charge.
Original sur parchemin avec signature et paraphe du notaire. Un
sceau enlevé.
• Transcrit dans le deuxième cartulaire sous le n° 165 f°. 173.
N° 28 1495, — Datum anno a nativitate domini millesimo quadringentesimo nonage-
simo quinto mensis maij die vero vicesima.
Nouvelle sentence rendue par les mêmes et confirmant celle du
19 août 1494.
Original sur parchemin avec signature de Nicolas de Virgine , notaire.
Le sceau pendant à une queue de parchemin est enlevé.
Transcrit dans le deuxième cartulaire sous le n° 166 , fol. 175.
N" 29. Sans lieu ni date.
Page en parchemin , écriture du XVe siècle , faisant partie d'un registre
terrier et indiquant les terres du chapitre de Tongies, situées dans la
campagne de Widoie.
Transcrit dans le deuxième cartulaire sous le n» 20, fol. 21 .
-1°. — XVI" siècle.
v 30. 1545, Datum ex Civilate Noslra Leodiensi anno domini millesimo quingentesimo
quadragesimo quinto mfmsis decembris die duodecima.
Lettres de l'évêque Georges d'Autriche nommant Gilles Dumonts, prêtre
du diocèse de Cambrai, chanoine de la collégiale de Sle-Croix à Liège.
Original sur parchemin avec signature du prince-évêque Georges et
vidimus du secrétaire Weert; le sceau manque.
— 381 —
5°. — XVWe siècle.
N" 31.1680. — Datura in civitate nostra Leodiensi sub signatura viearij nostri in
spiritualibus generalis pti et sigillo nostro solito , hac quinta Julij 1G80.
Lettres de Maximilien-Henri de Bavière , prince-évêque de Liège au
pléban Daniel Peeters pour lui recommander , à cause des nombreuses
occupations du vicaire-général Ernest de Surlet, de visiter le couvent de
Ste-Claire à Tongres et pour lui permettre l'accès de ce couvent aussi
souvent que cela sera nécessaire, à condition d'envoyer au vicaire pré-
nommé la relation écrite de sa visite.
Original sur papier avec signature du vicaire -général baron de Surlet.
Le sceau manque.
6°. - XVIII» siècle.
N" 32. 1702. — Datum Rome in Curia innocentiana hac die 19 julij 1702.
Lettres de Charles de Mannis protonolaire apostolique référendaire à la
cour de Rome, accordant à Daniel Peetersune remise de quatre mois pour
se défendre contre Nicolas Creir, nommé comme lui pléban de Tongres.
Original sur parchemin avec, signature de Charles de Mannis ; le
sceau manque.
N" 33. — 1730. Anno Domini xvijc trigesimo mensis januarij die vigesima quarta.
Lettres de Michel Clercx, archidiacre de la Hesbaie , nommant Renier
Van Herck, marguillier, vicaire et desservant de la messe du matin
dans l'église de Grand -Jamine. Les charges en avaient été remplies par
Sébastien Barlholeyns , curé de Grand-Jamine , depuis le départ de
Vincent Motmans.
Original sur papier avec signature de M. Clercx, de G. Stevart ,
secrétaire , et de Ch. Frésart , notaire , avec la constatation par le curé
S. Bartholeyns que Marcel Bartholeyns a pris possession du dit bénéfice
le 9 févriei 1730 au nom de Renier Van Herck ; le sceau manque.
N" 31. 1758. — Datum Rome apud S. Mariam Majorem sub annulo Piscatoris die
XV11I julij MDCCLVI1I pontificatis nostri anno primo.
Bulle du pape Clément XIII , établissant l'autel de la Ste. -Croix ,
situé dans l'église de N.-D. à Tongres comme autel privilégié et y
attachant des indulgences spéciales.
Original sur parchemin avec signature de Ed. Stoupy, vicaire-général
et de J. Horius.
N° 35. 1764. — Datum Rome apud Sanctam Mariam Majorem decimo kalendas marti
anno sexto.
Certificat délivré par Jean-Baptiste Denis, secrétaire, constatant que Léo-
nard Bottin , prêtre du diocèse de Liège, a obtenu le bénéiice fondé sous
l'invocation de la chaire de St. -Pierre dans l'église de N.-D. à Tongres.
Original sur papier; sceau et signature dudit secrétaire avec la signi-
fication faite au chapitre de Tongres par J. Moreau, secrétaire.
— 382 —
N° 36. 1766.— Datum Rome apud S. Mariam Majorem sub annulo Piscatoris die XII
septembris MDCCLXV1 pontificatis nostii anno nono.
Bulle du pape Clément XIII , prorogeant de six mois la nomination de
Renier Van Ikrck , comme pléban de Tongres , afin de faire connaître la
démission donnée par le pléban Renier Van Herck, oncle du postulant.
Original sur parchemin avec signature de Pofficial Briinner; le sceau
est enlevé.
No 37. 1771. — Datum sub signatura et sigillo nostro praesentibus sub imprcsso, sub
anno a nalivitate Domini millesimo seplingentesimo septuagesimo primo
mensis aprilis die vicesima tertia.
Permission accordée par Gaspard-Lambert Clercx , prévôt de Liège, à
Arnold Gilson de Tongres d'épouser Thérèse Bensdal de Liège.
Original sur papier avec signature de Lambert Clercx.
N° J77G. — Veneris die 19a aprilis 1776.
Ordonnance rendue par le doyen du chapitre , de célébrer le Jubilé uni-
versel accordé par Pie VI, le 28 avril 1776, et de faire des processions.
Original sur papier, avec signature du secrétaire P. S. Winckelsels.
QUATRIÈME SECTION.
LIASSES.
Nous eussions désiré terminer le classement des archives de
l'église , qui se trouvaient dans le plus grand désordre , mais le
temps nous a manqué.
Parmi les liasses dont le classement est achevé, il s'en trouve
une portant au dos : Matrimonia solemnizata Tungris ab anno
1567-1G36; quatorze liasses de testaments , conventions, con-
trats, etc., dressés par les plébans et subplébans depuis l'année
1630 jusqu'en 1794- ; une liasse relative à un procès soutenu par
le recteur du Béguinage contre le pléban se rapportant à l'année
1720 et une autre relative à des procès soutenus par le pléban
Ceulcmans contre le chapitre , contre les subplébans ou contre
les bénéficiers. Une autre liasse contient de nombreux documents
relatifs à la Révolution française.
Enfin , outre dix-neuf cartons renfermant les minutes et les
comptes de la restauration de l'église depuis 1847 jusqu'en 1865,
— 383 —
nous avons encore remarqué une grande quantité de comptes, budgets,
procès, etc., tant de l'ancien chapitre que de la fabrique actuelle.
E.
INSCRIPTIONS DES CLOCHES.
1
Marie Vlrglnls honorl
eX CapItVLI Donc
Divœ Virgini dicata fabrieaî
Expensis Ma refundor
Joseph Simon Nicolausque
Filii Lolharingi refondunt.
t
IHS
Q8 Salus populi gloria
Sub Maternî pracsidio ex Tungrensis
Capituli gratia refusa.
Sancte Materne
(Armoiries.) Ora pro nobis.
Edmondus Godefrid. Baro.
in Bockholtz Orey
perillustris ordinis
Teutonici commendator
provincialis.
(Armoiries.)
Joès Ludovicus Baro
De Elderen deca-
nus cathedralis
Ecclesise Leodiensis
prœpositus Tungrensis.
384 —
IHS
eX [nslgnls oCtaVIaril CapltULI MUnere
ha;C refUsa et sanCtae Anna? ConseCrata
Sains populi gloria
Joès Vandermeer nunc secto Consul
Libertus Morsmans juris ulriusque
Licentiatus consul
Salus populi
Gloria.
(Armoiries.) (Armoiries.) (Armoiries )
Joannes Minten Paulus Voedt Glaudius
hujus oppidi .1.. U. L. Peeters juratus
Medirus juratus Drossardus et receptor
in Rutten ; Tungr.
Restaurationi turris et campanis refundendis
curatores.
A.B. 1687.
Exurens lurrim calvo prodegit et aéra
Chaudoir Leodiensis
FabrlCa at eXUstUM DUpLICat
aerls opUs.
Josepho Virginis Sponso Capitulais
Tungrense gratuito refudit.
5.
In Honorem divi Pétri gratuito
Capituli œre refusa
Salus populi
Gloria.
A.
n.
385 —
6.
Sancli Pauli nomen gessi et gero Me
refudit Paulus Josephus
Grognart Leody anno 1703.
Haec reparalio fit sed per
fabricam
ex fabrice Dono divo Paulo devovetur.
7.
Chaudoir. - 1733.
N.-B. Sur les trois autres cloches on ne voit que le nom du fabricant Chaudoir.
F.
TABLEAU DES MEMBRES DU CHAPITRE EN 1796.
Voici la composition du chapitre collégial et archidiaconal de
Notre-Dame au moment où la Révolution française, abolissant le culte
divin, vint supprimer le dernier vestige de la primitive cathédrale..
Date de la réception.
23 sept. 1793. Coesar-Marie-Constantin comte deMÉAN DE BEAUR1EUX,
chanoine tréfoncier du chapitre calhédral de Liège en 1784, président
delà chambre des finances, chancelier de la principauté, etc., etc.
Prévôt , décédé à Liège le 19 juillet 1833.
Chanoines.
1 1 août 1763. Robert-Jean-Dominique de BELLEFROID de COLMONT, né à
Tongres le 30 octobre 1750, chanoine de Tongres le 11 août 1763 , élu
Doyen le 21 avril 1789 , mort à Tongres le 16 février 1827.
13 juin 1758. François-Joseph-Louis baron d'EVERLANGE de W1TRY, né à
Witry (Luxembourg) en 1735, décédé à Tongres le 24 vend, an II.
10 février 1761. Antoine-Bernard MOREAU, né à Liège en 1730, chantre en
1778 , décédé à Tongres le 15 octobre 1813.
en 1762. Nicolas GUERMANT, né à Awans le 12 juillet 1727, protono-
taire apostolique et curé de Bernau , décédé à Tongres le 10 avril 1807.
en 1764. Arnold baron de SERAINGde HOLLOGNE, prévôt de la collégiale
des 12 apôtres à Cologne et officiai, décédé à Tongres le 27 pluviôse an VII.
13 janvier 1767. Joseph-Antoine d'OMALIUS.
20 avril 1769. Antoine-Lambert de GROUTARS, chanoine de St. -Pierre à
Liège , mort à Sclessin.
— 386 —
29 novembre 1770. Jean-Pierre MAILLART , sous-diacre né à Liège le
29 novembre 1748, chanoine du chapitre impérial de St. -Servais à
Maestricht le 21 août 1789, décédé à Tongres le 2 octobre 1810.
10 septembre 1771. François-Melciiior, vicomte DE LA FONTAINE
D'HARNONCOURT.
2 septembre 1772. Paul-Eustache-Arnold-Joseph VAN DER MAESEN, né
à Maestricht en 1754, écolâtre en 1785, décédé à Tongres le 10
novembre 183G.
En 1774. Lambert-Jacques-Charles-Barthélemy MAGNÉE, né à Liège en
1755 , décédé à Tongres le 9 août 1818.
En 1776. François-André GUERMANT.
12 octobre 1778. Henri-Joseph D'HUVETTERRE, officiai en 1783, chanoine
de St. -Pierre à Anderlecht en 1786, décédé à Bruxelles.
En 1780. Antoine Baron d'EVERLANGE DE VITRY, né à Vitry (Luxembourg)
en 1745 , décédé à Tongres.
En 1784. Arnold-Charles-Joseph MAGNÉE, né à Liège, décédé à Horn.
En 1788. Balthazar-Arnold DE BELLEFROID , Dé à Tongres le 29 octo-
bre 1767, décédé bourgmestre de Pirange le 9 mai 1849.
En 1 789. Laurent-Antoine DE MALSEN, né à Zolre en 1 740, décédé à Tongres
le 16 octobre 1811.
21 mai 1792. Jean-Michel-Laurent DE SAREN , né à Tongres le 11 août
1769 , prêtre en 1794, décédé à Tongres le 13 janvier 1853 *.
31 juillet 1792. Pierre-Antoine BARTHELS , né à Tongres, décédé à Win-
tershoven le 30 janvier 1838.
14 mars 1793. Mathieu-Jacques BETTONVILLE.
Secrétaire du chapitre.
— J. A. VAN DEN DRIESC11E, notaire apostolique et immatriculé de Liège,
élu secrétaire du chapitre en remplacement de Paul-Servais Winckelsels,
décédé le 16 janvier 1783.
1 Ce fut le dernier chanoine de l'église collégiale de Tongres et à ce titre nous
croyons pouvoir lui consacrer quelques lignes. Le jeune de Saren , après avoir terminé
ses études humanitaires chez les chanoines réguliers , se rendit à Rome où il entra au
collège germanique ; après y avoir achevé son cours de philosophie et de théologie ,
il revint dans sa ville natale. Nommé coadjuteur de son frère Henri-Balthazar de Saren,
chanoine de N.-D., le 21 mai 1792, il fut ordonné prêtre en 1191; en 1796 il se
réfugia en Westphalie , revint en 1802 et alla se fixer à Chênée , mais bientôt il revint
à Tongres où il passa le reste de ses jours , à la grande édification de tous ceux qui
l'ont connu.
— 387 —
Receveur du chapitre.
Antoine-Godefroid LOIX, nommé en 1792.
Agent et homme d'affaires du chapitre.
Frédéric TOURNAY, nommé le 2 avril 1792.
Ecrivain du chapitre.
Antoine-Godefroid LOIX, prêtre, nommé le 4 septembre 1788.
Pléban.
Renier VAN HERCK, né à Grand-Jamine le 22 février 1733, prêtre en
1757, curé de Rixingen en 1758, subpléban de Tongres en 1762,
pléban en 1767 , décédé curé de Tongres le 7 septembre 1808.
Subplébans.
Séverin-Materne SGHAETZEN , né à Tongres le 30 février 1766, prêtre
en 1787, sub-pléban en 1793, desservant de l'église de St.-Jean et de
l'hôpital en 1803, décédé à Tongres le 21 janvier 1826.
Henri HENROTTE, né à Millen en 1750, prêtre en 1774, subpléban en 1794.
BénépZciers qui avaient droit de résidence.
Mathias GROUWELS, bénéficier de St.-Jean-Baptiste, né à Itteren en 1721,
décédé à Tongres le 20 prairial an VI.
Jean 1ERNA , bénéficier de St.-Pierre et de St. -Paul, vicaire de N.-D., né à
Glain en 1725, décédé à Tongres le 7 avril 1806. La collation de ce bé-
néfice appartenait au doyen et au plus ancien chanoine,
Remacle DE RISWYCK, maître de chant, recteur de la chapelle de St.-Materne
et bénéficier de St. -Servais : ce dernier bénéfice fondé au XIIIe siècle
par Ricbald de Rudecoven vit ses revenus augmentés successivement par
les donations du chanoine Jean de Huldertingen en 1274 et de l'écolàtre
Jean de Antey, le 9 juin 1397.
IN. COURS, bénéficier de la conception de la Ste. -Vierge.
Jean-Joseph HENROTTE, bénéficier de St.-Georges et de St. -Sébastien ,
recteur de N.-D. de Anima à Rome. Le bénéfice de St. -Sébastien avait été
fondé en 1365 par Jean Lebout de Gelmen et par sa femme Béatrix Thomas.
Le bénéfice et la chapelle St. -George avaient été établis en 1305 par le
chanoine Lambert de Villers-l'Évêque.
Antoine-Joseph BINON , bénéficier de l'invention de la sainte Croix : ce
bénéfice fondé en 1309 par Henri Henrot fut uni le 17 février 1782 à la
plébanie, mais la bulle papale ne devait sortir son entier effet qu'après la
mort du titulaire.
— 388 —
Robert GILISSEN, né à Tongres en 1728, prêtre en 1752, décédé à
Tongres le 8 février 1821 , bénéficier des deux saints Jean.
Nicolas-Pascal MAILLART , né à Liège le 23 décembre 1 730 , bénéficier
de St. -Hubert et de Ste. -Cécile, organiste et vicaire de Notre-Dame.
Jean-Guillaume LABHAYE, né à Tongres en 1742, prêtre et vicaire en
1766, bénéficier de la chapelle de Ste. -Anne. Cette chapelle, reconstruite au
XVIIc siècle ', fut fondée au commencement du XIP> siècle par Ydule sœur
de Jean. Guillaume Labhaye mourut à Tongres le 31 décembre 1810.
J. LOUWETTE , bénéficier de Ste. -Barbe. Ce bénéfice avait été fondé vers le
XIVc siècle par le chanoine Jean de Sluse.
Toussaint SCHAFFS, né à Moulingen en mai 1743 , prêtre en 1768, béné-
ficier de S'e. -Agathe , décédé à Tongres le 1 janvier 1813.
Mathieu-Chrétien LABBÉE, né à Tongres en 1772, prêtre en 1796,
bénéficier de la chaire de St. -Pierre , décédé desservant des hospices de
Tongres le 13 mars 1810.
Robert DE BELLEFR01D , doyen du chapitre et bénéficier de St. -Jean
l'Évangéliste. Ce bénéfice avait été fondé en 1267 par l'écolâfre Renier.
H.-J. GOFFART , bénéficier de la Stc.- Vierge; il mourut le 3 octobre 1791
et le bénéfice resta vacant.
Arnold JANSEN, né à Bommershoven en 1733 , prêtre en 1756, recteur de
la chapelle des Lépreux dédiée à St. -Antoine et située hors de la porte de
Maeslricht.
N. BOUX, bénéficier de fautel de St. -Nicolas fondé le 11 juin 1343 par Henri
de Merlemont.
Jean GUERMANT , bénéficier de l'autel dédié à St.-Judocc. Cet autel fut
fondé vers le commencement du XlVe siècle par le chanoine Jean Otton.
Olivier SCHAFFS, né à Moulingen en 1749, bénéficier de l'autel dédié au
St. -Esprit. Ce bénéfice avait été fondé vers 1282 par un certain Waltcr,
vigneron à Tongres.
Pierre-Antoine BARTHELS, chanoine, bénéficier de la chapelle de tous
les saints. Cette chapelle avait été fondée et dotée vers 1406 par André
Reys seigneur de Repen ; les revenus de ce bénéfice furent augmentés
par la donation faite le 26 avril 1630 par l'épouse du bourgmestre Henri
Vincquedes.
Jean-Michel POLLAERS, né à Oplieux le 19 décembre 1749, prêtre en
1772 , bénéficier de l'Assomption de la sainte Vierge, décédé à Tongres le
22 juillet 1821.
1 Le chanoine Denis Scronx augmenta les revenus de cette chapelle le 18 novem-
bre 1587.
— 389 —
Alexandre ZANDERS , né à Tongres en 1746, prêtre et vicaire en 1780,
bénéficier de l'autel dédié au Sauveur , décédé à Tongres en 1823.
N. SCHMISING, bénéficier de l'autel de St. -André.
Alexandre-Joseph DE VOET, né à Hoesselt, prêtre et bénéficier de l'autel
de la S'e. -Croix , fondé en 1309 par le chanoine Henri Henrot.
Jean-Michel-Laurent DE SAREN, chanoine de la collégiale et desservant
de la fondation faite le 23 novembre 1684 par Henri Loers \
A. N. MASSIN, bénéficier de l'autel dédié h saint Etienne. La chapelle ainsi
que le bénéfice avaient été fondés en 1274 par le chanoine Jean de Lewis.
Antoine-Bernard MOREAU , chanoine de la collégiale et bénéficier de l'autel
de St. -Michel. La collation de ce bénéfice appartenait au chantre de N.-D.
Guillaume-Arnold LOIX , né àTongrcs en 1756, prêtre en 1780, recteur
des écoles, décédé à Tongres le 3 février 1806.
N. VOS, bénéficier de l'autel placé sous l'invocation de l'Annonciation de la
Ste. -Vierge. Cet autel situé dans la chapelle du chapitre avait été fondé et
doté en 1461.
Hurert-Denis MOREAU, bénéficier de St. -Laurent, décédé à Orey.
Henri-Joseph D'HUVETTERRE , chanoine de la collégiale et bénéficier de
l'autel de S'e-Marie-Madelaine. C'était le plus ancien bénéfice fondé dans
la collégiale; avant la reconstruction de la tour en 1442 il y avait au bas
de l'église une chapelle dédiée à sainte Madelaine; le chanoine Jean de
Huldertingen augmenta les revenus de ce bénéfice en 1274.
Guillaume-Louis FRANÇOIS, né à Tongres le 29 mais 1770, vicaire, puis
bénéficier de l'autel de la Visitation de la Sl'-Vierge fondé, paraît-il, en
1343 par Henri de Merlemont.
KNAPEN, bénéficier de S'e-Catherine.
Guillaume-Martin BOOTEN, né à Tongres en 1744, bénéficier de l'autel de
laSte-Vierge et de St.-Jean l'Évangéliste. Ce bénéfice avait été fondé par le
doyen Pauli en 1612 et augmenté en 1625 par le chanoine Barthélemi
Briet de Tongres. Booten mourut à Tongres le II juillet 1811.
Antoine-Godefroid LOIX, né à Tongres en 1748. prêtre en 1773, écrivain
du chapitre le 4 septembre 1788, receveur du chapitre en 1792, recteur
de la confrérie de la Sle- Vierge.
' Les arrêtés de 1818 et du 22 février 1822 avaient placé cette fondation parmi celles
des bourses d'études. Un arrêté roy;d de 1854 rectifia cette erreur qui fut la cause de
la conservation des biens de ce bénéfice, simple.
Le fondateur Henri Loers fut baptisé à Tongres le 19 février 1617; il était fils de
Henri Loers et de Gertrude Pex et mourut receveur du chapitre de Tongres le
14 décembre 1G84.
— 390 —
A ces différents bénéfices dont nous venons d'indiquer les desservants, il faut
ajouter :
Celui de St.-Mathieu et de St. -Hubert, fondé au XHIe siècle par Richard de
Rudecoven et uni au doyenné le 25 juin 1784,
Celui de Ste-Élisabeth, fondé par Henri Henrot,
Celui de la Décollation de saint Jean-Baptiste,
Celui des Sept Douleurs établi avant 1655 dans la grande sacristie,
Celui de Ste-Gertrude,
Celui de l'Exaltation de la Ste-Croix fondé vers le XIVe siècle ; ce bénéfice
dont les revenus avaient été considérablement augmentés par la donation,
faite par Marie, Anne et Gilles Witten et approuvée par révoque le 1'" juin
1683 , fut uni au rectorat de Berg le 9 juin 1787,
Celui de St. -Nicolas fondé le 6 décembre 1312 par Godefroid de Werm et
uni le 21 octobre 1592 à la première subplébanie,
Celui de la Nativité de la sainte Vierge
Et celui de St. -Lambert, desservi par l'organiste et dont l'autel était placé à
la gauche du chœur.
Noms des prieurs, chapelains, curés et bënéfîciers qui prenaient leurs
institutions canoniques du chapitre archidiaconal.
— Louis-Hubert JANSEN, né à Tongres en 1770, prêtre en 1795, prieur de
l'hôpital de St. -Jacques le 20 octobre 1795 décédé à Tongres le 6 janvier
1809.
— Pierre-joseph L'ABBAYE, né à Tongres en 1747, ordonné prêtre en 1771,
curé du béguinage de Sle-Catherine en 1788 et bénéficier de l'autel de
Ste_Agathe fondé dans l'église de St. -Nicolas.
— Chrétien LIESENS, né à Genoels-Elderen le 6 mai 1769, curé de Mail et
Sluse. La collation de cette cure appartenait au pape et au prévôt de
Tongres.
— Toussaint SCHAFFS, recteur de l'autel dédié à la sainte Vierge et placé dans
l'église de Mail ; la collation de ce bénéfice appartenait au curé de Mail.
— Jean-Arnold SCHMISING, né à Tongres en 1725, prêtre en 1748, recteur
de Hcnis en 1756 4 .
— N. W1LMOTS, recteur de Pirange.
— Jean-Martin D'HUYS, né à Rixingcn en 1762, ordonné prêtre en 1786,
recteur de Rixingen en 1788.
— N. RAMAECKERS, recteur de Widoie.
' En 1795, il eut comme coadjutcur son neveu Jean-Dominique Selimising, né à
Tongres en 1755, frère mineur en 1775, lecteur en théologie en 1782, gardien du
couvent de Tongres en 1795, décédé à Tongres le 27 mars 18U.
— 391 —
— BOELEN, recteur de Neerrepen.
— Renier VAN HERCK, bénéficier de l'autel de la Ste.-Vierge à Neerrepen.
— Mathieu Herman l'ABBÉE, né à Tongres en 1750, prêtre en 1773, sub-
pléban en 1780, recteur de la chapelle d'Offelken en 1791.
— François-Lambert-Joseph BERDEN, né à Tongres le 28 septembre 1733,
prêtre en 1757, recteur de l'église de Coninxheim en 1760, bénéficier de
l'autel de N.-D. établi dans la même église.
— Antoine DEVIVIER, né à Glons le 3 septembre 1749, recteur de la chapelle
de Mulken en 1783, décédé à Tongres le 8 juillet 1818.
— Winand GEUTEN, bénéficier de l'autel de St. -Denis fondé en 1425, dans
l'église de St. -Nicolas par Antoine Moens de Tongres. Cette fondation
fut approuvée le 20 mai 1435 par le cardinal Julien légat du Saint-Siège.
— Renier VAN HERCK, recteur du bénéfice de St. -Nicolas, fondé par Mabilie
veuve de Jean Tels, le 27 janvier 1471 , dans l'église de St. -Nicolas à
Tongres; la collation de ce bénéfice appartenait au pléban.
— N. LATOUR, bénéficier de l'autel de St.-Éloi, établi dans la même église;
la collation de ce bénéfice appartenait également au pléban de Tongres.
— Jean VAN OOST, bénéficier de l'autel de N.-D., fondé dans l'église de
St. -Jean à Tongres; la collation de ce bénéfice appartenait depuis le
22 avril 1780 au pléban.
— Pierre DAENEN , nommé bénéficier de l'autel dédié à sainte Catherine le
16 janvier 1764. Ce bénéfice établi dans l'église du béguinage de Tongres en
1495, par 12 béguines, fut autorisé le 26 août 1490 par Jean de Hornes.
— Livin JANNÉ, bénéficier de saint Joseph dans la même église; ce bénéfice
fondé par Marguerite d'Elderen , béguine , fut approuvé le 24 juillet 1525
par l'évêque Érard.
— Pierre GHYSENS, né à Tongres en 1769, prêtre en 1795, recteur de
N.-D., fondé dans l'église du béguinage par Marie de Steyvord et érigé en
bénéfice par le chapitre le 28 février 1515.
— Joseph DEPLOIGE, né à Tongres en 1757, prêtre en 1782, vicaire du
béguinage en 1784.
— Louis COENEN, né à Looz en 1768, prêtre en 1791, vicaire du béguinage
en 1792 '.
— Antoine MOUMAL, né à Villers-l'Ëvêque en 1761, prêtre en 1787, trésorier
de la collégiale le 10 octobre 1790, décédé à Tongres.
— Jean-Michel POLLAERS, bénéficier et prêtre sacristain.
— Pierre WYNANTS, né à Tongres en 1766, prêtre en 1791, marguillier de
St.-Jean , porte-verge du chapitre.
1 Le bénéfice de saint Jean-Baptiste fondé dans l'église du même nom était desservi
par un des vicaires de l'église collégiale ; il en était de même du bénéfice de St.-Michel
fondé en 1 190 par Jacques Guldevoet.
392
LISTE DES PRÉVÔTS DU CHAPITRE.
Dès les premiers siècles de l'Église on voit apparaître des pré-
vôts , prepositi fprœ ponerej , placés à la tète de ces réunions de
clercs qui plus tard (Ve siècle) prirent le nom de chanoines.
L'apôtre saint Paul 1, saint Cyprien 2, Tertullien s désignent
sous le nom de prévôts les évoques, chefs des presbytères.
Les évoques dirigèrent longtemps seuls les chapitres et adminis-
trèrent les biens des collégiales : mais l'étendue de leurs diocèses ,
et les. charges augmentées avec le nombre toujours croissant des
fidèles , les obligèrent de s'adjoindre quelques membres du clergé
chargés spécialement de la direction des chapitres collégiaux. Ces
prêtres prirent le nom de dispensatores, procuratores , defensores
ou cura tores : leur mission était à la fois spirituelle et temporelle *.
Bientôt ils furent appelés abbates, titre que l'évêque Richaire
confirma en 938 pour la collégiale de Tongres ».
Ce titre à'abbas ne tarda pas à apporter de la confusion , car
souvent on ne distinguait pas assez entre une abbaye ou chapitre
régulier et une autre communauté religieuse ou chapitre séculier
qui n'avait de commun avec le premier que le nom ; aussi au
« Ep. ad Ileb. CX1II , v. 17. Obedite prepositis vestris et subjacete eis. Ipsi enim
pervigilant quasi ralionem pro animabus vestris reddituri
2 Pamelius inCypr. ad martyres. Quantum perniciosa res est ad sequentium lapsuni
ruina prepositi , in tantum contra utile est et salutare , cum se episcopus per firma-
mentum Qdei fratribus prœbet imitandum
s Tertullianus ad martyres. . . .
* V. Régula cunonicorum , les canons 138 et 139 du concile d'Aix-la-Chapelle ,
tenu en 816, et le canon 24 du concile de Reims , tenu en 813 , id. f° 90.
' V. Kiskn , Foui.lon , Ciupkayille et les autres historiens de Liège.
— 393 —
XIIIe siècle substitua-t-on la qualification de pmpositus fprœ-ponere)
à celle iï abbas *.
La nomination du prévôt de Tongres appartenait à l'évêque de
Liège et quoique son choix ne fût limité par aucune règle, d'ordi-
naire le prévôt était chanoine de la cathédrale de St-Lambert 2.
Ceux-ci n'avaient pas toujours le caractère sacerdotal et leur rési-
dence était fixée auprès de l'évêque. A Tongres, où la charge d'âmes
exigeait continuellement leur présence , ils se firent remplacer par
des légats ou vice-prévôts, prenant le nom de persona, investitus
ou plebanus. Lorsque par une bulle du pape Innocent IV le cha-
pitre fut affranchi de la juridiction spirituelle de l'évêque de Liège
et élevé à la dignité archidiaconale , ce collège obtint le droit de
nommer ses prévôts pendant tous les mois de l'année.
Une habitude constante et de plus le besoin d'une protection effi-
cace engagea le chapitre à restreindre son choix parmi les chanoines
Tréfonciers. L'élection devait être ratifiée par le pape endéans les
six mois et le nouveau prévôt devait, la main sur le livre des
évangiles, prêter le serment prescrit par les statuts 3 ; ensuite il
1 Abbas secularis Tongrensis ecclesiœ non abbas sed prsepositus appellatur. V. Jura
preposili Eccl. Tung. , p. 6.
Walo abbas Tungrensis. V. Chapeaville , tora. 11 , p. 76. Albertus Codolus de
Parma' canonicus Leodiensis et secularis ecclesiœ Tungrensis abbas. V. Archives de
l'église, registre «° 7 , f° 77.
2 V. Archives de l'église , registre n° 3, f°ij et n° 8, f° 57. Voir aussi les bulles
de Sixte V, des nones de mai 1585 et d'Urbain VIII , des kalendes d'avril 1626 , décla-
rant que les prévôts ne peuvent être élus que parmi les chanoines de St. -Lambert.
Ces deux bulles furent données à la demande du chapitre des Tréfonciers.
s Voici le serment que prêtait le prévôt , le jour de sa réception :
« Ego N. juro me habere canonicum ingressum in ista prepositura ad quam sunï
presentatus et quod fidelis ero ipsi ecclesie ïongrensi. Item juro quod ecclesiam Ton-
grensem personnasque et libertates ipsius ecclesie pro posse meo defendam. ac privilégia
consuetudines. ordinationes statuta licita et honesta servabo. Item juro quod bona
ipsius ecclesie et prepositure fideliter pro meo posse conservabo et si que perdita vel
alienata sint recupabo ac omnia onera débita ratione dicte prepositure in ecclesia
Tongrensi michi incumbentia supportabo. Sic Deus me adjuvet et hec sancla dei evan-
gelia corporaliter a me tacta. »
XXIX XXII -J5
— 394 —
était proclamé prévôt par le doyen *. Ses fonctions se bornaient à
défendre les intérêts, les droits et les libertés du chapitre, à
veiller à l'entretien de l'église , de son mobilier et de ses orne-
ments et à procurer le luminaire 2 , l'encens et les vases sacrés.
Son administration devint donc purement temporelle. Il jouissait
des dîmes de Mall-Sluse, de Jamine et de Bolens près de Hannut 3.
Annuellement vers les Pâques chaque habitant devait lui payer
deux deniers appelés deniers du feu 4.
Le prévôt avait une cour de justice composée d'un maycur, de
sept échevins et d'un secrétaire, ils élaient appelés hommes de
fief du révérend seigneur prévôt ; il avait de plus un forestier
et un porte-verge 5. Sa juridiction comprenait l'église, les cloîtres
et lous les bâtiments qui en dépendaient, le cimetière et les mai-
sons des chanoines. Cependant il n'avait aucune juridiction, soit
spirituelle , soit temporelle, sur les chanoines ou sur les autres
1 Voici la formule usitée pour faire celte proclamation :
« Ego. N. . . . Decanus Tungrcnsis nominibus meo et omnium in his milii consen-
tienlium invocata gralia spiritus sancti et gloriosissime virginis Marie ecclesie lnijus
patrone Reverendam admodum et perillustrem. Dominum canonicum Leodiensem
ut in spiritualibus et temporalibus providum in nostrum ac liujus nostre ecclesie
preposilum eligo electum pronuntio et in communitate coram vobis publico. In Domine
patris et filii et spiritus sancti. » Voir Arcbives de l'église, reg. n° 5 in fine, f° 8.
* Il ne faut pas confondre le luminaire avec le mot luminaria servant à désigner les
revenus de la fabrique.
5 Le prévôt Hugues céda en 1197 au chapitre les dîmes de Berg , de Hardelingen, etc.
Le prévôt Marcuald lui céda en 1244 celles de lierg et d'Aldor (Elderun).
1 Voir Stutula ceci. Ttingr. Archives de l'église, n° 3 du catalogue , f° Il :
« Ad custodiam perlinet. ... et census capitalis de hominibus qui sunt de familia
(paroisse) béate Marie in Tungris et notandum quod quidam qui sune de familia béate
Muiie solvunt censum capitalem custodi ad luminaria ecclesie et illi ponunt censum suuin
super sioistrum cornu altaris
« Item quolibet anno in paseba Domini quilibet manens in opido Tungrensi qui babet
focum ut liospicium pur se tenetur dare duos denarios leodienses qui vocantur denaria
ijînis »
'• Lu mayeur et le forestier élaient révocables à volonté, mais les échevins étaient
nommés ;'i vie. Voir Archives de l'église , registre n° 7 du catalogue , p. 221.
— 395 —
prêtres attachés à la collégiale. Le prévôt avait encore le droit de
préséance à l'église ; au chapitre il n'avait que voix consultative 1.
Le nouvel élu devait, le jour de son installation, donner 150 écus;
celte somme était spécialement affectée à l'achat d'ornements
religieux 2.
En 1584, le prévôt Thibaut de Gavres introduisit l'usage de
donner une chape dont la valeur ne pouvait être moindre de
100 écus.
En 1585 une bulle du pape Sixte V, donnée à la demande du
chapitre de St. -Lambert, ordonna que les prévôts de toutes les col-
légiales de la principauté de Liège devaient être choisis parmi les
chanoines Tréfonciers. Cette ordonnance fut renouvelée par une
bulle du pape Urbain VIII , donnée le premier des kalendes
d'avril 1626.
En 1763, le prince-évèque demanda à Sa Sainteté de confier
la nomination du prévôt de Tongres à l'évêque ; mais le chapitre
prévenu obtint le 4 des nones de mai 1764 une bulle confirmant
les droits que le Saint-Siège lui avait octroyés en 1254 s.
Dans le principe le prévôt avait la collation de presque tous les
bénéfices et de toutes les charges de la collégiale de Notre-Dame ;
l'institution canonique ou la confirmation appartenait à l'évêque.
Depuis 1254 le prévôt ne conféra plus et dans le mois de l'ordi-
naire seulement que la chanlrerie, Técolâtrerie, la plébanie, la cure
de Mail et Sluse , le rectorat de Coninxheim , celui du béguinage
de Tongres , et les deux marguilleries de N.-D. Il nommait aussi
aux canonicats de N.-D. vacants pendant les mois de l'ordinaire 4,
1 Louvrex, dis. 8, n° 16. — Mean , observ. 279 , n° 3.
e Voir Sohet , Inslitutes de droit , liv. I , titre XV , chap. IV , n° 32 , et registre
n° 10 du catalogue , p. 482.
3 Voir Archives de l'église , registre n° 14 , p. 165.
4 Ces mois étaient ceux de février, d'avril, de juin, d'août, d'octobre et de décembre.
— 39G —
les antres étaient réservés au pape et l'institution canonique des
nouveaux élus appartenait au chapitre archidiaconal.
Voici les noms des différents prévôts de la collégiale de Tongres
depuis le commencement du XIIe siècle :
1 . Le premier prévôt de Tongres que nous trouvons est FRÉDÉRIC. Il était
fils d'un comte de Namur d'après de llenisdael et tréfoncier de S1. -Lam-
bert. C'est en sa qualité de prévôt que nous le voyons figurer dans un
décret du 8 des kalendes de mars 1 108 réglant la succession aux maisons
claustrales *.
2. Eu 1131 WALO, fils d'un comte de Montaigu, ligure parmi les membres
du chapitre calhédral avec la qualification d'abbé de Tongres 2.
3. SIMON, chanoine de St. -Lambert à Liège et prévôt de Tongres, fut chargé
par le chapitre de N.-D., la 12e indiction de l'année 1164, d'établir une
pieuse confraternité entre le chapitre de Tongres et le monastère de
Heylissem 3.
4. Arnulphe DE GR1MBERGE , chanoine de Liège, était prévôt de la collégiale
de Tongres en 1178.
5. Hugues DE PIERREPONT, chanoine de Liège, grand prévôt de St. -Lambert
en 1 19-1 et prévôt de Tongres, donna en 1197 au chapitre de Tongres les
obédiences de Berg, Hardelingen , Widoie, Henis, Pirange, Olfelken et
Herck \ Promu à l'épiscopat en 1200, il renonça à la prévôté et nomma
à sa place
6. RAOUL ou RODOLPHE, chanoine de St. -Lambert, archidiacre de Liège et
prévôt de Nivelles. En 1204 celui-ci confirma les donations faites par
son prédécesseur \
7. MARCHOALD , chanoine de St. -Lambert, archidiacre de Liège et prévôt de
Tongres, réprimanda le jour de sainte Lucie 1208 plusieurs chanoines
dont la conduite n'était pas exempte de reproches °.
8. RODOLPHE, chanoine de Liège et prévôt de Tongres, donna au chapitre de
N.-D. en 1215 toutes les obédiences qui appartenaient à la prévôté. Cette
donation faite du consentement de l'évèque Hugues et approuvée par le
chapitre de Liège fut confirmée par le pape Honorais 111 en 1224 7.
9. JEAN, chanoine de St. -Lambert, pénitencier du pape, doyen de Liège et
' Voir Slatuta ecclesiœ Tongrensis , n° 3 du catalogue, f° XXXVI.
* Voir CiiAPEA ville , Gest. Pont. Tung., tome 11, p. 70.
3 Voir Slatuta ecclesiœ Tungrensis , n° 3 du catalogue , fo XXV.
1 Voir Archives de l'église. Liasses.
5 Voir ibidem.
Voir lu n" 1 des chartes.
Voii Archives de l'église. Liasses.
— 397 —
prévôt de Tongres, permit en 1240 aux béguines de Sainte-Catherine , de
fréquenter l'église de l'hôpital établi hors de la porte de la Croix à Ton-
gres et d'avoir un directeur spirituel '.
10. Le prévôt MARCUALD, chanoine de St. -Lambert, archidiacre de Liège, céda
au chapitre l'église et la dîme de Berg en 1244. En 1248, il fut chargé
par l'évêque Henri et par le cardinal Pierre, légat du S. -S., de visiter
l'église de Tongres et de réformer les statuts du chapitre 2.
En 1257, il consentit à l'établissement de l'église du Béguinage à l'endroit
dit : Mure 5.
11. Herman DE RAVELSBERCH, chanoine de St.-Lambert en 1288, prévôt de
Tongres en 1295, mourut le 15 octobre 1297. Il fonda un anniversaire
que le chapitre devait faire célébrer annuellement le jour de son décès *.
12. Albert CODOLUS de Parma, chanoine de St.-Lambert et prévôt de N.-D.
rendit une décision en faveur du chapitre, le 9 des kalendcs d'août 1307 6.
1 3 . Angèle DES URSINS (de filiis URS1), chanoine de Liège, prévôt de Tongres
en 1353. En 1356 il nomma recteur du béguinage Jacques de Visschel ;
le chapitre de Tongres protesta contre celte nomination le 23 février 1357 6.
14. Renaud DE PYPERNAU, chanoine-tréfoncier et prévôt de N.-D. de Tongres
est cité dans un acte du 31 octobre 1371 7.
15. Guillaume SCHEN'CK, chanoine de St.-Lambert figure comme prévôt de
Tongres dans un acte de 1390 8.
16. Jean DE HACCOURT, chanoine de Liège en 1388, prévôt de Tongres. Il
assista à la ratification de la paix de Tongres ou des XVI , signée le
28 août 1403. Il mourut en mars 1410 9.
17. Godefroid de VLODORP, chanoine de St.-Lambert en 1412, doyen d'Aix,
prévôt de Tongres en 1413. Il mourut le 3 novembre 1416UI.
18. Bertrand DE BOVERIA, chanoine de Liège et prévôt de Tongres. En 1426
il nomma un écolàtre ".
19. Jean BARË DE SURLET, chanoine de St.-Lambert et de St. -Martin à
1 Voir Archives du béguinage. lïeyister der fundatiens en collaliens , fo 51 .
2 Voir Statuta ecclesiœ Tunyrensis , no 3 du catalogue, fo XXI.
3 Voir Archives de l'église , reg. no 10 du catalogue , fo 370.
* Voir idem , reg. n° 19 du catalogue, fo 40.
b Voir le no 4 des chartes et registres no 7 , f° 77 , no 5, fo 00.
6 Voir le no 8 des chartes.
7 Voir le no 9 des chartes et le registre no 5 du catalogue, fo 70.
8 Voir Archives de l'église, reg. no 7 du catalogue, fo 117 verso.
9 Voir ibidem, fo209.
10 Voir ibidem.
" Voir Jura prœposili ecclesiœ Toiiyrensis . Leod. 1G56, p. 9, reg. no 7, p. 216
et reg. no 8, fo 54 verso.
— 398 —
Liège en 1420, prévôt de N.-D. à Tongres, de St. -Denis à Liège et de
N.-D. à Maeseyck. Il conféra un canonicat à Emeric Groy, le 3 janvier
1435 ' et mourut le 12 mars 1446.
20. Jean DE WACHTENDONCK, chanoine de St.-Lambert et prévôt de N.-D.
de Tongres en 1411 2.
2!. Guillaume DE CLUGNY, chanoine de St.-Lambert en 1469, protonotaire
apostolique, administrateur perpétuel des évèchés de Wormset de Poitiers,
grand chancelier de France sous Louis XII, évèque de Poitiers et prévôt
de Tongres. Il nomma le 9 août 1476, Arnold Lamberti recteur du bégui-
nage de Tongres en remplacement de Jacques de Biessen, alias Kcrsmec-
kers décédé \
22. Jean DE SUBLET, chanoine de Liège et prévôt de Tongres en 1484 *.
23. Pierre DE CORTEMBACH , licencié es lois, chanoine de St.-Lambert le
. 23 avril 1486, prévôt de Tongres le 21 août 1487, chanoine de St. -Paul,
cardinal, sigilifer de St.-Lambert, archidiacre du Hainaut, mort le 2 avril
1520 6.
24. Arnold-Charles BARON DE LALAING, chanoine de St.-Lambert le 7 avril
1520, prévôt de Tongres le 25 juin 1520, archidiacre du Hainaut, évoque
de Canaries °.
25. Gilles DE LA BLOCQUER1E, licencié en théologie, chanoine de St.-Lam-
bert le 6 juin 1516, prévôt de Tongres le 16 juillet 1520, grand officiai de
Liège et grand archidiacre du Hainaut 7.
26. Guillaume D'ENCKEVORT, licencié en théologie, chanoine de St.-Lambert
en 1506, prévôt de Tongres le 19 mai 1523, archidiacre de la Famennc,
évèque de Tortose , cardinal en 1523, évèque d'Utrccbt, mort à Rome en
juin 1534 8.
27. P. ASCANIUS , chanoine de St.-Lambert, prévôt de Tongres le 4 octobre
1538, évèque d'Arménie °.
28. Arnold Chevalier DE BOCHOLTZ zu Broeck, chanoine de St.-Lambert
en 1544, prévôt de Tongres le 16 février 1549 10, prévôt de Liège le
I Voir Archives de l'église , reg . no 8 du catalogue , fa 55 verso ,
s Voir ibidem.
3 Voir ibidem , reg. no 57 du catalogue , fo 120 verso.
4 Voir ibidem, reg. no 5, fo 10 verso.
" Voir ibidem , reg. no 46 et reg. no 5 , fo 19 verso.
" Voir ibidem , reg. no 5 , f° 23 et reg. n° 4G , f°
7 Voir Vindiciœ decani et capituli Tong. Leod. 1656 , p 16.
" Voir Delvaux , Biographie liégoise, p. 41.
II Voir Archives de l'église, reg. n° 46, f°
'" V. Archives de l'Hôpital, registre intitulé : Sleper, f° CCV1.
399
2 août 1558, écolàlrc puis costc clans la métropole de Mayence, costo et
chantre de St. -Etienne à Mayence , prévôt de St -Adalbert à Aix-la-
Chapelle, de N.-D. aux. degrés à Cologne et de Hildesheim , prieur de
Sf.-Séverin en Condroz, coste de St-Lamhert , mort le 25 janvier 15G8.
29. Jean VVITTEN de Tongres \ , chanoine, de N.-D. , puis chanoine de
St.-Lamhert en 1533, grand-écolâtre, archidiacre d'Ardennes, prévôt de
Tongres en 1568 , grand chancelier.
Par disposition testamentaire du 18 décembre 1582 il fonda deux bourses
d'étude et mourut à Liège le 7 mars 1584.
30. François d,ORANUS(D'[1EUR), chanoinede St.-Lamhert, prévôt de Tongres
en 1684, auditeur de la sainte Rote. Il donna à l'église deux chandeliers
en cuivre bosselé et prit sa démission deux mois après son élection 2.
31. Conrad THIBAUT, Chevalier de Cavre de Peer, chanoine de St-Lam-
bert le 2 août 1543, prévôt de Tongres le 17 mars 1584, prévôt de
St. -Martin et grand prévôt de St.-Lamhert, renonça à la prévôté de
Tongres le 14 avril 1594 3.
33. Gérard VOSSIUS de Looz *, licencié es arts et docteur en théologie, pro-
tonotaire apostolique, chanoine de St.-Lamhert le 6 septembre 1586,
chanoine de St. -Jean à Liège, prévôt de Tongres en 1594 5. Mort à
Liège le 25 mars 1609°.
33. Arnold Chevalier DE BOCHOLTZ de Groesbeeck d'Orey, chanoine
de St.-Lamhert en 1620, prévôt de Tongres en 1626.
34. Ernest DE BILEHÉ de Vierset , chanoine de St. -Lambert en 1621,
prévôt de Tongres le 15 février 1632, conseiller privé de son altesse le
prince-évêque, archidiacre de Campine et des conciles d'Eick, Beringen
Susteren , Wassemberg , Ravenstein et Megen , mort le 6 juin 1646. 7.
1 Jean Witten naquit à Tongres vers 1510 de Gillis Witten et de Gertrude Vrancken.
Le prévôt Jean Witten fut, enterré dans la première chapelle à droite du chœur de
l'ancienne cathédrale de S'-Lambert à Liège. « Elle était remarquable par son devant
d'autel en bois avec des figures en marbre qui s'y trouvaient incrustées et représen-
taient le grand chancelier Jean Witten et un Tréfoncier son collègue, les genoux enterre;
les mêmes personnages et leurs patrons, étaient peints sur les vitraux. » V. Van den
Steen. Essai sur la cath. de St. -Lambert, page 57.
2 V. Archives de l'église , registres n° 5, f° 176 et n° 15, f° 292.
Il était fils de François d'Heur et de Catherine de Pottier. V. Loyens, Recueil des
bourgmestres de Liège, p. 381.
3 V. Archives de l'église, reg. n° 5, f° 188, n° 15, f° 33.
* Il naquit à Looz en 1547 de Guillaume Vossius et de Jeanne Voskens.
5 V. Archives de l'église, registre u° 5 du catalogue, f° 170.
6 V. Bouille, Histoire de Liège, tome III, p. 100; Jos. Daius , Histoire de Looz ,
tome 11, p. 20.
7 V. Archives de l'église , registre n° 5, fol. 20.
400
35. Arnold BARON DE HOENSBROECK Quadt-Mechelen , Bociioltz, Be-
niNC.EN OSTHAMECAN, clianoinc de St. -Lambert en 1 G3G , nommé prévôt
de Tongres en 1646, prévôt de Hildesheim, chanoine de Magdebourg et
d'IIalberstad. Son élection ayant donné lieu à quelques difficultés, le pape
nomma, le 3 juillet 1646 ,
30. Laurent DE MÉAN, docteur en droit , ' clianoinc de Liège en 1039, archi-
diacre du Hainaut et des conciles de Slatlc , Chatelet, Thuin et Florennes
en 1059 , écolàtre de St -Lambert en 1644. 11 soutint un long procès con-
tre Arnold de Iloensbroeck et finit par triompher. De Méan , froissé de ce
que le chapitre avait pris le parti de son concurrent, publia en 1050 une
brochure intitulé -.Jura prœpositi eccîesiœ Tongrensis, dans laquelle il
s'attribua des pouvoirs qu'aucun autre prévôt n'avait eus avant lui. Le
chapitre de son côté lança une réponse véhémente sous le titre de Vindicœ
Decani et Capituli. . . D. M. V Tongris. Le prévôt publia une nouvelle
brochure et le chapitre se préparait à y répondre , lorsque l'autorité
supérieure intervint et fit cesser ce petit scandale2. 11 mourut à Liège, le
4 avril 1082.
37. Ulderic Arnold de RENESSE raron d'Elderen, chanoine de St.-Lam-
bert, le 9 septembre 1007, prévôt de Tongres en 1077, mort le 15 dé-
cembre 1089.
38. Pierre-Norrert DE SIMON1S de Liverlo, docteur es droits, seigneur de
Betho , chanoine de St. -Lambert, le 27 août 1070, prévôt de Tongres en
1090, prévôt de Saint-Denis, mort le 20 septembre 1091 3.
39. Jean-René DE NEUFCOUBT de Sluse , licencié es droits, chanoine de
St. -Lambert en 1077, et prévôt deN.-D. de Tongres en 1091. Ce digne
'Laurent de Méan naquit en 1G06 de Pierre de Méan, échevin de Liège et com-
missaire déciseur de S. A. à Maestricht , et d'Anne Gherinx fille du médecin tongrois
Phillippe Gherinx. Il mourut à Liège le 4- avril 1682 et fut enterré au vieux chœur de
la cathédrale sous une pierre tumulaire portant:
SEPULCHRUM
Reverendi admodum et perillustris Dni Laurenlii de Mean hujus eccîesiœ dura vixit
Canonici et scholastici ne in eadem Harmonica urchidiaconi ; eccîesiœ D. M. V.
oppidi Tongrensis Prœpositi, etc.
V. Recueil des bourgmestre de Liège , par Loyers, p. 182.
* Voir Duplication Htlérarum executorialium in favorem perillustris /{,u adm
Domini D. Laurentii de Mean canonici et archidiaconi in ecclesia Leodiensi, nec
non prœpositi Eccîesiœ Collegialœ B. M. V. oppidi Tongrensis.
contra
/.'//. 1)1). Capitulum Decanum et canonicos dicta' Eccîesiœ Tongrcn. relaxatorum .
(Leod. 1G82 , brochure de 19 pages.)
' 11 rebâtit le chœur de l'église de Mulken ainsi que le prouve l'inscription qu'on lit
sur les vitraux.
— 401 —
ecclésiastique contribua beaucoup à la restauration de l'église, ruinée par
l'incendie et donna les six grands tableaux qui ornent le chœur, une lampe
à cierges en cuivre doré et une chape très-riche. Il mourut à Liège le
23 octobre 1720.
40. François-Chevalier DE HINNISDAEL, comte de Craynhem St.-Pierre1
et de St. -Etienne sur Woluwe, chanoine de St. -Lambert, après la
mort de son épouse2 le 7 octobre 1716 3; prévôt de Tongres le 18 novem-
bre 1720, mort à Malines le 0 juillet 1728. Il donna une chape encore
conservée au trésor l.
41. Jean-Louis d'OYEMBRUGGE , comte de Duras, baron d'Elderen et de
Roost, chanoine de St. -Lambert en 1720, abbé de Dinant, archidiacre
d'Ardcnnes le 27 novembre 1720, prévôt de Tongres en 1720, grand
doyen de St. -Lambert le 7 avril 1729, prévôt de St .-Lambert , archi-
diacre des conciles de Bastogne et de Stavelot , conseiller privé de Son
Altesse le prince-évèque, mort le 18 avril 1753. Il donna la porte en
cuivre et la séparation en marbre du chœur de l'église.
42. Charles-Nicolas-Alexandre comte D'OULTREMONT de Warfusée 5,
chanoine de St. -Lambert le 5 octobre 1737, prévôt de N.-D. en 1753,
élu prince-évèque de Liège, duc de Bouillon, marquis de Francbimont ,
comte de Looz et de Homes, baron de Herstal le 20 avril 17G3 c, inauguré
le 11 juin 1764. Il renonça à la prévôté en 1763 et fut remplacé par
43. Walramme-iMichel comte DE BORCHGRAVE 7 , baron d'Elderen ,
1 II était fils do Mathieu Lambert de Hinnîsdael , s1' de Moiislreuil et de Jeanne
Marie de Simonis. François de Hinnisdael fui créé comte par lettres patentes de Charles VI,
le 10 février 1723.
Voir Archives de l'Etat à Liège. Diplômes impériaux, II, p. 347.
2 Son épouse , morte à l'âge de 20 ans , se nommait Marie-Anne-Florenee-Thérèse
de Berchcm.
3 Son tombeau en marbre blanc sculpté par Delcourt se trouve à Tongres dans l'église
de l'hôpital. .
* Voir le n° 15, des chapes.
* Charles comte d'Oultremont naquit à Liège le 26 juin 1716 et y mourut le
22 octobre 1771.
6 En 1763 il demanda au Saint-Siège de confier la nomination des prévôts àl'évèque
de Liège; mais le pape Clément envoya le 4 des nones de mai 1764 une bulle confir-
matoire des anciens droits du chapitre de Tongres. Voir Archives de l'église , registre
n° 14, fo 165.
7 11 était fils de Michel-François baron de Borchgrave , seigneur de Bovelingen et de
Marie de Geloes, chanoinesse d'Espinal.
Les membres de la famille de Borchgrave reçurent le titre de comtes du S. E. B.
par lettres patentes de 1745. Voir Archives de l'Etal à Liège. Lefokt, III , p. 366 à 369.
Ibidem Diplômes impériaux et C. P., II, p. 311.
— 402 —
de Gënoels-Elderen, Seilles, Membruggen et Mali., chanoine de
St. -Lambert en 1741. Il devint grand prévôt de St. -Lambert le 13 novem-
bre 1772 , président de la chambre des finances de la principauté de Liège,
membre des nobles des comtés de Looz et de Namuret mourut au château
de Gcnoels-Elderen le 19 juin 1782.
Il fit don au chapitre de la chape décrite sous le n° 18.
H. Charles-Jean-Baptiste-Léonard-Michel WALRAMME, comte de Geloes
et du saint Empire Romain, chanoine de Saint-Lambert en 1759, pair
du comté de Looz, prévôt de St. -Servais à Maestricht , président de la
chambre des finances de S. A., prévôt de Tongres en 1782, archi-
diacre de Brabant et de Mechelen, seigneur de Mechelen , de Daelgrimby,
Twez-Bergen, Glabeek , etc.
Il donna les deux autels en marbre qui se trouvent dans les deux premières
chapelles de l'église de N.-D.
45. Ferdinand-Conrard Baron de HAXE de Hamal, Seign. de Bierset,
Hamal, Nederheim, Paifve, etc., chanoine tréfoncier après la mort de
son épouse en 1749, prévôt de Ste. -Croix, archidiacre d'Ardennes et des
conciles de Stavelot et de Bastogne , prévôt de N.-D. de Tongres le 22
août 1791, grand prévôt de Liège le 15 juillet 1782, mort en 1793. Le
dernier prévôt de la collégiale fut
46. César-Marie-Constantin Comte de RIÉAN et de Beaurieux, chanoine
Tréfoncier en 1784, président de la chambre des finances de S. A., prévôt
de St. -Jacques à Liège, prévôt de Tongres le 23 septembre 1793 , mort
à Liège le 19 juillet 1833.
II.
LISTE DES DOYENS DU CHAPITRE.
L'église grecque fut la première qui, imitant ce qui existait
déjà dans l'administration civile et militaire, divisa le clergé eu
doyennés l.
A la tète de chaque doyenné elle plaça un decanus {SeicaSapxo<; ,
chef de dix hommes).
' On se servait du mot Decanus chez les Romains pour désigner un juge inférieur
qui rendait la justice à dix villages.
Les Deeani étaient préposés sur dix ofiieiers inférieurs dans le palais des empereurs
de Constantinople.
— 403 —
Il parait que ces premiers doyens furent de simples laïques ,
considérés plutôt comme des protecteurs que comme des chefs : vers
le VIIIe siècle les abbés ou prévôts, qui jusqu'alors avaient nommé
les doyens, cédèrent ce droit aux chapitres : ils s'en réservèrent
l'approbation et l'évoque eut l'institution canonique lorsque les
doyens devinrent les chefs spirituels des chapitres.
Après la bulle donnée en 1254 par le pape Innocent IV, les
doyens de N.-D. furent élus par le chapitre f et reçurent l'insti-
tution canonique du Saint-Siège.
Aussi à la mort du doyen Radulphe de Rivo , arrivée le
3 novembre 1403, le plus ancien chanoine convoqua-t-il de suite
après les obsèques* tous les chanoines résidents afin de pourvoir
au remplacement du doyen décédé. Celte fois, d'après la chronique,
deux partis se trouvèrent en présence. Quelques chanoines voulaient
nommer Gérard de Heers licencié ès-lois , diacre et recteur de la
chapelle de St. -Jean-Baptiste à Bindervelt ; les autres se pronon-
çaient en faveur de Nicolas Burin , doyen de Huy et chanoine de
Tongres.
Pour mettre un terme à ces dissensions intestines qui souvent
avaient divisé les membres du chapitre, le vice-doyen Gilles de Fies
fit décider que les élections se feraient désormais au scrutin secret
et que les bulletins seraient recueillis par trois scrutateurs nommés
parmi les membres du chapitre assistés du notaire et de deux témoins.
Quinze chanoines furent présents au vote du 18 décembre 1403;
Gérard de Heers obtint 1 2 voix , fut admis à la prestation du ser-
ment prescrit par les statuts 2 et proclamé doyen du chapitre.
1 Electio decani pertinet ad canonicos Tungrenses et quotienscumque vacat Decanatus
dicli canonici résidentes debent intrare in capitulum et perfigere certam diem ad
eligondum decanum.
Voir Statuta ecclesiœ Tong., n" 3 du catalogue, f° iiij.
- Voici la formule du serment que le doyen devait prêter au chœur de l'église en
présence du chapitre des bénéficiers , du pléban et des recteurs :
» Ego N. juro me habere canonicum ingressum in isto decanatu de quo michi auctorita-
— 404 —
Nicolas Burin s'opposa à cette élection soutenant que l'élu
Gérard était fils naturel du chevalier Gérard, seigneur de Heers;
le pape Boniface IX la confirma cependant, mais décréta, le 12 des
kalendes de mai 1404, qu'à l'avenir on n'admettrait aucun cha-
noine qu'après avoir justifié qu'il était descendant légitime dans
les deux degrés de ses ascendants l.
Après cette digression nous signalerons en quelques mots les
prérogatives attachées à la dignité décanale.
Le doyen de Tongres jouissait partout de la primauté 2, il exerçait
sa juridiction sur les chanoines et sur tous ceux qui dépendaient
du chapitre; il fixait les réunions en dehors des trois chapitres
généraux , surveillait la conduite des chanomes et des autres
subordonnés et punissait les déliquants 5.
11 avait l'obligation d'entendre la confession des chanoines et
te apostoliea est provisum et quod nicliil dedi vel promisi pro ipso assequendo. Item
juro hereditates jura et bona ipsins decanatus que invenero conservare et si que dispersa
vel alienata fuerint pro posse reeuperare. Item juro cum capitulo liujus ecclesie residen-
tiam facere personalem , ac i n fia annum nunc incipientem me ad ordinem sacerdotalem
quantum in me fuerit facere ac procurare promoveri. Item juro oflîcium débita ac onera
dicti decanatus per me seu suflicientem hujus ecclesie canonicum prebentatum si absens
sive impeditus ex legitimis causis fuero exercere facere et sustenlare nec non libeitates
statuta et consuetudines hujus ecclesie et presertim statulum et consuetudinem de dic-to
decanatu non tenendo absque canonicatu et prebenda inviolabilité!1 observare. Item
juro in eventum in quem canonicus prebendatus hujus ecclesie non remansero quod
decanatui sine aliqua diflicultate ac ejus possessioni cedam , ipsumque realitcr dimitlam
et admissionem ad ipsum decanalum habitam pro non facta babebo. Item juro me pre-
missa omnia pro posse meo observaturum sic me deus adjuvet et bec sancla dei euangelia. »
V. Slaluta eccl. Tong., f° XL111.
1 Cette défense fut renouvelée par l'évêque Gérard de Groesbeeck , en 1580. V. Ar-
chives de l'église , registre n° 5 , f° 1 16.
8 Stallus decani in clioro est in sinistro choro in summo stallo et similiter in ca-
pitulo V. Statuta , f° iiij.
3 Oflîcium decani est exercere jurisdictionem et disciplinam in omnes canonicos et vi-
carios et clericos chori et omnes emancipatos et plebanos et eorum vicarios ac omnes
sacerdntps célébrantes in capellis quibuslibet et altaribus ville Tungrensis et in capellis
pertinentibus ad parochiam tungrensem. V. Statuta, f° iiij.
Decanns jurisdictionem exercet in suppositos ecclesiae scilicet notarium quatuor vergife-
ros, receptores , villicos prapositi et capituli, advocatum, syndicum, fiscum , rectorem
scolarum, duos submonitores, mensuratorem et pistorcm. Voir Nova statuta ecclesiœ
Tongrensis , n° 4 du catalogue , p. 99.
— 405 —
des bénéficiera , de célébrer la messe aux principales fêtes de l'année
et les obsèques des chanoines défunts. Aus?i les statuts pres-
crivaient-ils que l'élu qui n'était pas prêtre devait recevoir la prê-
trise endéans l'année de sa nomination au doyenné *.
Le doyen de N.-D. conférait le rectorat de la chapelle dédiée
à Sle-Marie-Madelaine et celui de la chapelle des Lépreux ;
plus tard il conféra aussi le rectorat de Sammelen et le bénéfice
de la Ste. -Vierge et de St. -Jean-Baptiste fondé en 1612 par le
doyen Pauli 2.
Les revenus attachés au doyenné modiques dans le principe
consistaient en quelques cens payés par les communes de Vrechele,
de Bindele , de Vlude, de Gherwen, de Lende, de Bridai et
à'Erpenkeym 3 ; plus tard on y ajouta une partie de la dime des
fruits croissant à Berg et à Elderen ainsi qu'une redevance à
charge de la cure de Nieuwkerken (pays de Waes).
Voici par ordre chronologique les noms des doyens du chapitre
de Tongres , mentionnés dans les archives :
). EUAI1US était doyen du chapitre en l!6i; il fut député avec le prévôt
Simon, par le chapitre de Tongres, pour établir une confraternité avec les
membres du monastère de Heylissem *.
2. ROBERT était doyen en 1 193 , il mourut le 28 juin 1 194 \
3. GORDAN était doyen vers 1195°.
4. PIERRE était doyen en 1206 \
5. JACQUES l'était en 1220 8.
1 V. Statuta eccl. Tong, no 3 du catalogue , f° XII verso.
* V. Archives de N.-D., registre n<> 10 du catalogue, fu 3U.
3 Le 25 juin 1784, le doyen et le chapitre de Liège unirent le bénéfice de St. -Mathieu
et de St. -Hubert au doyenné.
* V. Statuta eccl. Tongr., n° 3 du catalogue, f° XXV.
5 V. ibid., f° XXXVI.
e V. Jos. Dams, Hist. de Looz , t. II, p. 7 des documents historiques de l'église.
7 V. Stalula f° XXXVII. Le doyen Pierre occupait à cette époque la quatrième
maison claustrale.
8 V. ibid., f° XXXVII verso.
— 406 —
G. En 1234 nous trouvons à la tète du cha-
pitre GILBERT \ il fut remplacé par
7. AMEL;le 1 octobre 1236, il porta un
jugement en faveur des frères et sœurs
de l'hôpital de Tongres contre les
héritiers de Merica s.
8. En 1267 ROBERT était revêtu de la
dignité décanale 3.
9. JEAN était doyen en 1273 *.
10. En 1307 le prévôt et le chapitre de
Tongres décidèrent que les revenus,
cens et dîmes perçus par Técolàlre
le seraient désormais par le receveur
du chapitre qui paierait annuellement
à l'écolàtre 70 mesures de grains.
ULRIC est qualifié de doyen dans cet
acte daté du 3 juillet 1307 5.
11. JACQUES DE CODOLUS, chanoine de
N.-D. en 1307, figure comme doyen
en 1317 \
12. GILLES est indiqué comme doyen dans
un acte de 1345 7.
13. JACQUES DE ADAiMIS DE PARMA était doyen en 1359 ; il fonda un anni-
versaire à célébrer annuellement le jour de sa mort (20 mai) 8.
14. RADULPHE (Rodolphe ou Raoul) DE RIVO, né à Bréda vers le milieu du
XIVc siècle, maître es arts, licencié es lois, bachelier es droit canon et
chanoine de N.-D., fut élu doyen vers 1381 °.
Pendant son séjour à Tongres, il composa une chronique comprenant les années
1347 à 1383. Cette chronique intitulée : Gesla trium ponti ficum Leodiensi uni
Engelberti a Marka Joannis de Arkel et Arnoldi de Home, fut publiée
1 V. Archives de l'hôpital. Parchemin n° LXXXIX. De euria de merica. Nous
reproduisons le dessin du sceau de ce doyen.
8 V. Archives de l'hôpital, n° LXXXIX des parchemins.
" V. mêmes archives, parchemin n° LX1.
1 V. mêmes archives , parchemin n° LXX1V.
5 V. Archives de l'église N.-D. Registre n° 7 du catalogue, p. 77 et registre n°3,
f° XXXVI verso.
0 V. Ibidem, p. 78 et reg. n" 3, f° XXXVII.
7 V. Archives de l'hôpital, parchemin n° XCVI.
8 V. Archives de l'église N.-D. Registre n° 19, P9, registre n° 3, P XXXVII et
registre n° 5, f" 67.
'J V. Stalula eccles. Tongrensis, n" 3 du catalogue, f" XXXIII.
— 407 —
par le chanoine Chapeaville dans le troisième volume de ses Gesla Ponti-
ficum. 11 laissa encore : De canonum observantia liber, imprimé à Cologne en
1568 et à Rome en 1590 ' ; Calendarius ecclesiasticas generalis, imprimé en
1568 à Louvain. Depsalterio observando, manuscrit déposé à la bibliothèque
royale sous le numéro 2,000 * ; Manipulas de gramatica , un Marlyro-
logium en vers et un Catalogus librorum manuscriptorum per Belgium.
Le doyen de Rivo s'appliqua à faire revivre l'observance rigoureuse des
statuts 3 ; il testa le 5 novembre 1401 \ mourut à Tongres le 3 novembre
1403, et fut enterré devant la chapelle de tous les Saints \
15. Gérard DE HEERS, fils naturel de Gérard, seigneur de Heers, succéda à de
Rivo. Il était licencié es droit, chanoine de N.-D. en 1394 et recteur de
la chapelle de Bindervelt. Son élection donna lieu à quelques difficultés
mais fut approuvée par le Saint-Siège. Comme son prédécesseur, Gérard
fut un bibliophile distingué. Il testa le 23 mars 1408 ° et mourut à
Tongres le 19 octobre 1410.
16. Son successeur immédiat nous est inconnu: nous pensons que ce fut Arnold
YWANI, qui après la mort de Gérard occupa sa maison claustrale 7.
17. Le 3 mai 1445, G1SELBERT DE EEL fut élu doyen; il était chanoine de
N.-D. depuis le 5 septembre 1430. Après sa mort en 1457 8 le chapitre
choisit pour lui succéder :
18. Régnier TIELEN, chanoine de N.-D. depuis le 1er mai 1450 9.
19. Guillaume CALDENBERCH succéda à Tielen et mourut le 9 février 1484 ,0.
20. Guillaume KERSMECKERS fut élu le 14 mars 1484 " et après sa mort rem-
placé par
1 V. Dibliolheca palrum, tom. XIV. col. 1618. et Maxima bibliolbeca veterum
patrum, tom. XXVI, f° 289.
* Voir le jugement porté sur la chronique de Radulphe par Bektholet dans le discours
préliminaire de son Histoire de l'église et de la principauté de Liège. Bulletin de l'insti-
tut archéol. liégeois, tom III, p. 291.
3 V. Archives de l'église N.-D. registre n° 3, du catalogue, f° XXXIII.
i V. mêmes archives registre n° 7, du catalogue, f° 215.
5 Chaque année le jour de la commémoration des morts , le chapitre se rendait en
procession à l'endroit où le doyen Radulphe était enterré et y récitait le de profundis.
V. Archives de l'église Rubricœ générales ecclesiœ, registre n° 2 du catalogue, p. 62.
6 V. Archives de l'église, registre n° 7, f° 106.
1 V. Archives de l'église, registre no 3, f0 XXXVII verso.
8 V. mêmes archives, registre n° 57 du catalogue, f° 149 et 274.
9 V. mêmes archives, registre n° 8, f° 160.
10 V. mêmes archives, registre n° 57, f° 30.
" V. mêmes archives, registre n° 46, f° 12. Il portait : d'argent à lafasce d'or accom-
pagnée de neuf pièces de vair rangées trois en tête et six en pointe quatre et deux ,
au franc canton de gueules chargé d'un A d'or.
— 408 —
21 . Guillaume TIERSSEMETIS qui testa le 5 avril 1508 « .
22. Guillaume KERSMECKERS, probablement neveu de l'avant-dernier doyen,
fut reçu chanoine de iN.-D. le 2 mai 1505. Après la mort de Tierssemetis, il
fut nommé doyen le 9 août 1508 : il donna un tableau dont il n'existe
plus que les deux volets , représentant le donateur à genoux ; derrière lui
se trouvent deux évêques.
23. En 1570, Henri VAN ES était doyen ; il avait été reçu chanoine le 10 sep-
tembre 1540; il testa le 14 octobre 1578.
24. Hugo M1LIT1S lui succéda ; il mourut en 1596.
25. Jean PAEL ou PAULI, licencié es lois, chanoine de Tongres depuis le 7
janvier 1591, fut élu doyen le 11 juin 159G *. Son élection fut continuée
peu de temps après par le pape Clément VIII. 11 testa le 23 février 1612 s,
légua sa maison au chapitre et fonda un bénélice simple qu'il plaça sous la
protection de la sainte Vierge et de saint Jean-Bapliste : la collation de ce
bénéfice fut réservée à ses successeurs dans le décanat. Pael mourut à
Tongres le 5 mars ICI 2 et fut enterré dans l'allée droite du cloître où l'on
voit sa pierre tumulaire *.
26. Arnold WITTEN succéda au doyen Pael : il testa le 21 mars 1633 ° et
mourut à Tongres le 29 septembre 1637.
27. Mathieu DE CASTRO fut choisi en remplacement d'Arnold Witten , le 4 no-
vembre 1637 °. Son élection fut à ce qu'il paraît confirmée, le 13 novembre
1637, parle prévôt Ernest de Billebé 7. 11 testa le 21 janvier 1626 8 et
mourut le 9 août 1638.
28. Lidert LOEFFS, chanoine de Tongres le 21 février 1628, fut élu doyen en
1638 °. Son élection semble avoir été confirmée, par le même prévôt le
2 octobre 1638 >o. Il fonda un anniversaire, donna une chapeau chapitre
et mourut à Tongres le 4 janvier 1654.
29. Son successeur fut Herman HUSTIN, chanoine de Tongres depuis le 20 jan-
vier 1613. Son élection eut lieu le II février 1654 " et donna lieu à
quelques difficultés qui heureusement se terminèrent à l'amiable. En 1643,
1 V. Archives de l'église , registre n° 5 , f° 21.
* V. Archives de l'église de N.-D., registre n° 10, f" 316.
3 V. mêmes archives, registres n° 9, f(1 5 , n° 10, f" 311 et n° 105, f' 1.
1 V. Le n° 15 des épitaphes.
5 V. Archives de l'église, registre n" 9, p. lf>7.
0 V. Archives de l'église, registre nu 10, p. 31(i.
7 V. Jura prœpositi ceclesiœ Tongrensis, p. 15.
8 V. Archives de l'église, registre n° 10, f<> 322.
9 V. Archives de l'église, registre n0 9, p. 104.
"' V. Jura prœpositi, p. 15.
" V. Archives de l'église, registre u° 10, p. 310.
— 409 —
il donna un reliquaire en argent encore conserve" dans le trésor de N.-D. \
Herman Hùstin testa le . . . mars 1G21 ; il était sur le point de célébrer
son jubilé de cinquante années de canonicat lorsque la mort vint le sur-
prendre le 1G juin 1662 2.
30. Léonaiid PALUUANUS, licencié es lois, chanoine de St.-Martin à Russon, et
chanoine de Tongres depuis le 6 octobre 1652 3, fut élu doyen en rem-
placement de Herman Hustin. 11 mourut à Tongres le 1er novembre \qqq
et le chapitre nomma à sa place
31 . Pieuue DEL VAUX, chanoine de N.-D. depuis le 9 mars 1651 ; ce doyen
mourut à Tongres le 26 septembre 1679 \
32. Aknold DE VOET ou VOETS, né à Tongres le 4 mars 1634 \ chanoine de
N.-D. le 22 septembre 1660, prêtre en 1674, succéda le 16 février 1680
à Del Vaux.
Les démarches constantes de ce digne doyen engagèrent le roi Louis XIV
à donner 20,000 francs pour la restauration de l'église brûlée par le
général français comte Calvo, mais cette somme fut absorbée par rétablis-
sement d'un nouveau toit. Voets abandonna généreusement à la fabrique
la plus grande partie des revenus de sa prébende , donna un ornement
complet G en satin brodé d'or, provoqua la générosité des citoyens , des
chanoines, du prévôt et du commandeur des Vieux-Joncs, obtint des
bulles du Saint-Siège et mena à bonne fin l'œuvre si difficile qu'il avait
commencée. En mourant il eut la consolation de voir l'église rétablie,
si pas dans son antique splendeur , du moins convenablement restaurée.
Pendant sa vie il fit construire dans la chapelle du chapitre un tombeau
recouvert d'une plaque en marbre blanc , mentionnant l'époque de sa
mort, 17 septembre 1703, son âge 69 , ses années de canonicat 42 ,
de prêtrise 29 et de doyenné 23 7.
33. Mathieu-Paul CLOSAR de Liège , chanoine de Tongres depuis le 13 jan-
vier 1687, avait été témoin du dévouement de son prédécesseur, aussi
marcha-t-il noblement sur ses traces ; il compléta la restauration de
l'édifice en meublant l'église , donna le tabernacle qui ornait le maître-
autel , offrit une belle chape au chapitre , reconstruisit la première
V. le reliquaire ostensoir, n° 6.
V. Archives de l'église, registre n° 9, p. 360.
V. Archives de l'église, registre n° 9, fos 287 et 339.
V. Archives de l'église, registre n° 9, p. 283.
V. Il était fils de Henri De Voet et de Marie Pex.
V. le ii° 1 1 des chapes et le n° 8 des chasubles.
V. le n° 3 des épitaphes.
XXIX XXII 26
— 410 —
maison claustrale et mourut à Tongres le 22 février 173i, âgé de 67 ans.
Il fut enterré dans le caveau destiné spécialement à la sépulture des
chanoines; ses héritiers lui firent élever un monument en marbre hlanc
et noir , dressé contre le mur de la chapelle dédiée à saint Joseph.
31. GoDEFHOiD-PiEnnE de REQU1LÉ , chanoine de N.-D. , succéda à Closar
en 1735. Aucun fait important ne s'accomplit pendant le temps que dura
son décanat ; il mourut à Tongres le 18 mars 1752.
35. Jean-Balthazar de PRÉ fut nommé en remplacement de de Requilé. Il
était chanoine de N.-D. depuis le 12 octohre 173G et avait été sur le
point de succéder à Closar. Le doyen de Prez mourut à Tongres en 17GG.
II paraît que les difficultés qui s'élevèrent entre les memhres du chapitre,
empêchèrent la nomination d'un nouveau doyen, car depuis 17G6
jusqu'en 1775 nous trouvons à la tète du chapitre des vice-doyens choi-
sis annuellement.
3G. Enfin en 1775 Nicolas-Adam de PALMER , chanoine de Bonn et d'Augs-
bourg , membre du chapitre de Tongres depuis le 7 avril 1753 et
officiai en I7G2, fut élu doyen. Il administra avec zèle les biens de
l'église , rétablit la discipline dans le chapitre et donna un ornement
complet en satin rouge à la fabrique.
Le doyen de Palmer mourut en 178(J et fut remplacé le 21 avril de la
même année par
37. Bohert-Jean-Dominique DE BELLEFROID DE COLMONT, né à Tongres
le 30 octobre 1750. Il était fils de Chrétien-Arnold de Bellefroid, seigneur
de Colmont et d'Hélène-Rose-Élisabetb Driesens. Après avoir achevé
ses études chez les chanoines réguliers , le jeune Robert se rendit à Rome
où il étudia la théologie : quoique absent il obtint le 11 août 1763 une
prébende dans la collégiale de Tongres et le 21 avril 1789 il fut élu
doyen du chapitre. Il venait d'être nommé chanoine honoraire de la
cathédrale de Liège lorsque la révolution française éclata. Condamné à la
déportation par arrêt du Directoire du 11 octobre 1797 pour « avoir eu
» des intelligences coupables avec le ci-devant prinec-évèque de Liège
» et s'être servi de son influence en assemblant le chapitre aux fins de
» faire rejeter la déclaration exigée des ministres du culte » il obtint
cependant une mise sous surveillance et se réfugia en Wcstphalie.
Revenus à Tongres en 1801, les membres du chapitre supprimé voulurent
partager entre eux les reliquaires et les ornements sacerdotaux de
l'ancienne collégiale ; le digne doyen de Bellefroid céda généreusement
sa part à la fabrique et fit partager son noble désintéressement par tous
ses anciens confrères.
Boberl de Bellefroid fut le dernier doyen du chapitre de N.-D. , qui exista
pendant 10U0 ans depuis Charlcmagne jusqu'à Napoléon 1er. il mourut à
Tongres le 1G février 1827.
411 —
LISTE DES PLÉBANS ET DES CURÉS.
Le pléban ' de Tongres , assisté des deux subplébans, devait
administrer les sacrements et instruire dans la religion les habitants
de la ville de Tongres et de sa banlieue. C'était donc le véritable curé
de cette communauté religieuse. La nomination du pléban appar-
tenait au Saint-Siège cl au prévôt. Le chapitre archidiaconal donnait
l'institution canonique au nouvel élu 2. Le pléban était protono-
laire apostolique ; il devait tenir régulièrement les registres des
naissances , des mariages et des décès 3 et avait la collation des
rectorats de Henis, de Widoie , d'Oflelken et de Rixingen , du
rectorat et du bénéfice de la Stc. -Vierge à Neerrepen , des béné-
fices de St. -Nicolas, de St.-Eloi et de Ste. -Agathe, fondés dans
l'église de St. -Nicolas , et de celui de la Ste. -Vierge fondée dans
l'église de St. -Jean à Tongres.
En 1562 les bénéfices de St. -Nicolas et de Ste. -Catherine
furent incorporés dans les subplébanies ; la collation en passa
au pléban qui renonça à celle des chapelles de Pirange et de
1 De Plebs, peuple, curam plebis liabens. Les plébans portaient indifféremment les
noms de inve&tîbus, persona, jilebanus, etc. On trouve fréquemment dans les actes du
XIVe et du XVe siècle : Die persoen van Tongeren, etc.
2 Le pléban jouissait du droit de résidence avec les autres bénéiieiers de la collégiale.
3 V. Conc. Frid. sess. XXIV.
Avant son entrée en fonctions , il devait , la main posée sur l'évangile , prêter le
serment suivant prescrit par les statuts :
« Ego N. juro me habere canonicum ingressum in isla plebania ad quam sum admis-
sus. Item juro esse obediens et tidelis Domino preposilo decano et capilulo islius ecclesie
tanquam vero meo archidiacono in omnibus licilis et honestis. Item juro me nunquam
contra dictos decanum et capitulum facere conspirationem nec per me vel alios palam vel
occulte fieii procurabo sed contra conspiratores taies si que essent dictis decano et capi-
lulo totis viribus assistere. Item juro hereditates jura et bona dicte plebanie que invenero
pro meo posse conservare et que perdita vel alienata fuerint recuperare, »
— 412 —
Mulcken ; cet échange fut approuvé le 21 octobre 1592 par le
prince-évéque Ernest tic Bavière l.
Par transaction conclue entre le chapitre et le pléban , ce der-
nier céda le 22 avril 1780 la collation du bénéfice simple de la
St0.-Vierge fondée dans l'église de St. -Jean. En compensation
de cette cession , une. huile du 25 janvier 1783 unit le bénéfice de
l'invention de la sainte Croix à la plébanie.
Les règles de conduite spéciales aux plébans et aux suhplébans
avaient été stipulées par le prévôt Marcuald en 1248 et par le
nonce CaralTa en 1529 2.
1 . Le premier pléban indiqué dans les archives est NICOLAS. 11 fut démis de
ses fonctions par le prévôt Marcuald en 1208 3.
2. TUÉOBALD, doyen de St. -Denis à Liège, lui succéda 11 vivait encore en 1 248 4 .
3. En 1272 s GODEFROID investilus Tongrensis et protonotaire apostolique
dressa le testament de la béguine Mella de Scarmnrc6.
4. En 1380 JEAN dit AVE MARIA était pléban. 11 testa le 20 août 1400 7.
I! avait reçu le surnom de Ave Maria parce que ce fut lui qui le premier
« Item juro me cedere si aliquis habeat melius jus in ista plebania. Item juro nicliil
contra slatula libertates jura et consuetudincs bonas antiquas et approbatas hujus ccclesie
scienter altemptare neque atlemptari contra ipsas per me , alium vel alios directe vel
indirecte proeurabo sed ipsas pro posse meo defendere diligenler et conservare. Item
juro contentus esse portione quani predecessores mei plebani liujus ecclesîe babuerunt
de dicta plebania nec super augmcntalionc portionis plebania capitulum per me alium vel
alios nulle modo aliquo tempore palam vul occulte vexabo vel proeurabo quovis modo.
Item juro ecclesiam istam anuiversaria omnia et fabrieam pro posse meo ubicumque
fuero et potero promovere. Item juro servitium et oflieium dicte plébanie sccundiim sui
fundationem institutionem que statuta et consiietudiueni hujus ecclesie lideliter eum suis
oneribns per me et coadjutores suflicientes quos singulis annis sieut moris est dielis
decano et capitulo presentabo facere et exercere Item juro me omnia premissa facturum
observaturum et adimpleturum sic Ueus me adjuvet et bec sanela Dei ewangelia. »
« V. Archives de l'église, registre n° 3, f" XX1I1 et registre n" 4, f° 2.
s V. Archives de l'église, registre u° 10, f° 1.
15 V. le n° 1 des chartes.
4 V. Archives de l'église, registre n° 3, f° XXIII.
1 Archives de l'ancien béguinage de Tongres, déposées à l'hôpital. Liassc-leslam. n° 17.
" Malgré toutes nos recherches il nous a élé impossible de combler la lacune qui
existe entre les plébans Godefroid et Jean.
1 V. Archives de l'église, registre nn 85, f" 102 et registre n° 7, i'° 208.
— 413 —
introduisit à Tongres l'usage d'annoncer (rois fois par jour Yangelus ou
Y ave Maria >.
5. Jean eut pour successeur G0DFR01D GOEX qui, brise par l'âge, permuta
le 10 septembre 1410 2 avec
6. JEAN COEN, bénéficier de l'autel de l'assomplion de la sainte Vierge. Par
testament du 6 octobre 1139 3 Coen augmenta les revenus de la fondation
de son prédécesseur.
7. JEAN BOTEN ou BOETEN lui succéda le 19 octobre 1139*. Les succes-
seurs immédiats de Boten , furent
8. Jean VANDERBECK , nommé le 15 août 1 490 s.
9. Tilman OFRENS, nommé le 30 août 1512°,
10. Jean OFKENS, nommé le 28 février 15i0, mort à Tongres le 15 mars 1560 7,
11. Michel HORREAR1US de Borcbolt, nommé le 31 octobre 1561 s et
12. Lambert DE VALLE (vanden Daele) de Bois-le-Duc, nommé le 6 juillet
1567 par le prince-évèque délégué du pape9.
13. Herman VANDERHEYEN, de Bruxelles, fut nommé pléban en 1582 et eut
pour successeur ,u
14. Etienne IDENTIUS , nommé le 27 juin 1587 ■«.
15. En 1593 Théodore DECKERIUS (Deckers) lui succéda. Il mourut à Tongres
le 18 septembre 1626 et eut pour successeur IS
16. Barthélemi STRAVIUS ,s (Slrauven) , bachelier en théologie, nommé en
1626 et confirmé par le chapitre le 9 mars 1627 '*; le pape Urbain VIII
le nomma protonotaire apostolique le 12 novembre 1626 Stravitis recon-
' Les bulles des papes Jean XXII en 1316 et Callixte II en 1456 établirent cette
pieuse pratique dans toute la chrétienté. V Dict. hist. des cultes relig. établis dans
le monde, vol. II, et le grand Répertoire universel des sciences ecclésiastiques, p 46.
Le chapitre de Tongres approuva la fondation faite par le pléban Jean le 1!) sept.
1438. V. Archives de l'église, registre n° 5, f° 2.
■ V. Aichives de l'église, registre n° 8, f° 37.
3 V. même registre, f° 40.
* V. Archives de l'église, registre nJ 8, f° 66.
5 V. Archives de l'église, registre n° 8 du calalogue, f° 80.
c V. Archives de l'église, registre n° 77.
7 V. le même registre, in medio.
8 V. Archives de l'église, registre n° 76, f° 1°.
0 V. Archives de l'église, registre n° 78 du catalogue, f° 1°.
10 V. mêmes archives, registre n° 79.
o V. Archives de l'église, registre n° 92 du catalogue.
,s V. Archives de la ville: Regisler mortùorum.
13 Barthélémy Stravius naquit à Looz vers 1600, de Herman Strauvon et d'Elisabeth
Honinx.
11 V. Archives de l'église, registres nos 81, 82, 83 et 84.
— 414 —
struisit en 1G31 la maison pastorale, donna à la collégiale une chape * et
mourut en 1GG8 victime de son dévouement s.
17. Daniel PETERS, qui succéda à Stravius, cul à soutenir un procès contre
Nicolas Creyer qui avait été nommé par le chapitre. Il triompha de son
compétiteur et mourut à Tongres le 31 août 1708 3.
18. Jacques BUECKEN, licencié en théologie qui lui succéda , fut en 1700
nommé curé de Ste -Catherine a Maestricht et chanoine de St. -Servais.
10. Lambert CEULEMANS l succéda à Jacques Buecken. 11 mourut le 31 octo-
bre 1741 et fut remplacé par
20. Léonard KARFS, subpléban de Tongres. Celui-ci mourut le 12 juillet 1712.
21. Pierre-Dominique JANSEN de Tongres lui succéda la même année. Il
avait été subpléban et curé de Widoie. Jansen mourut en 1740.
22. Régnier VAN I1ERCK fut nommé en 1750. Brisé par l'âge et inhabile à
remplir les devoirs de sa charge il donna sa démission en 1707 et mourut
à Tongres le 30 octobre 1760.
23. Son neveu Régnier VAN IIERCK , né le 22 février 1733 à Grand-Jamine ,
curé de Rixingen et subpléban de Tongres, le remplaça eu 1767. Ce
fut le dernier pléban de Tongres. Condamné à la déportation , il fut
obligé de se cacher pendant la tourmente révolutionnaire ; mais ayant
obtenu sa mise sous surveillance , il s'empressa de revenir au près de son
troupeau. Il parvint à soustraire les ornements religieux à la rapacité des
inspecteurs français, empêcha la vente du mobilier de l'église de St. -Jean
et racheta celui de l'église de St. -Nicolas qu'on venait de convertir en
temple décadaire. Grâce à ses efforts persévérants, le domaine restitua la
plus grande partie des biens des églises de St. -Jean et de St. -Nicolas.
En 1801 il bénit le nouveau cimetière, établi conformément à l'art. 2 du
décret du 23 prairial an XII , et mourut curé de Tongres le 7 sep-
tembre 1808.
24. Jean-Nicolas LEXIS, né à Maestricht , ancien religieux du couvent des
Beggards de cette ville, le remplaça en 1800. L'envie et la jalousie lui
suscitèrent de nombreuses dillicultés qu'il parvint à vaincre par la patience
et la bonté. 11 mourut à Tongres le 22 octobre 183G.
25. M. Jean-Léonard REINARTZ, né à Waubach (Limbourg hollandais) le
' V. la description des chapes, n° !).
* On conserve encore à la maison pastorale le portrait de cet homme dévoué.
8 Voici ce qui se trouve marqué sur le registre des morts après l'inscription du décès
de Peters : Benefaetor omnium siimlins ist in ecclesia Su Johannis.
* Ce fut par ses soins que le pape Clément XII approuva, en 173G, rétablissement de
la confrérie du St. -Sacrement dans l'église de N.-D. V. Archives de l'église, registre
— 415 —
23 juillet 1806 , ordonné prêtre en 1830 , vicaire puis curé de Houthem-
St.-Gerlache , fut nommé doyen de Tongres le 8 novembre 1836 et
installe le 21 décembre de la même année '.
Tous les ecclésiastiques du canton auxquels s'étaient associés les habitants
de Tongres et des environs célébrèrent le 22 mai 1855 le jubilé de 25 ans
de prêtrise et le 3 juin 1862 celui de 25 années de décanat de notre
respectable pasteur i.
nn 175 du catalogue, f°3. Voici le chronogramme composé pour en conserver le souvenir :
CoxfiutehnItas
saCiiosanCtI saCkaMent!
zeLoso poi'ULI ToxgkensIs CoNCUnsU
eXUrc-It.
1 Un arrêté royal du 26 décembre 1838 éleva la cure de la 2e classe à la lere.
2 V. Jabelfeesl van tien wel-eerweerden Ileer J.-L. Reinarts , pastoor-deken
le Tongerçn, gevierd op tien 5 jttny 1862, gévolgd van de feestrede, uitaespro-
lien tloov tien Ileer L. Rabais. Tongeren , 1863.
LES
MERCENAIRES dits BRABANÇONS,
AU MOYEN AGE.
NOTICE
par M. P. HENRARD,
MEMBRE TITULAIRE A BRUXELLES,
_Bj=«)=*3— .
L'obligation du service militaire était l'un des caractères fon-
damentaux de la féodalité. Sa durée, indéfinie sans doute dans le
principe , n'avait pas tardé à être limitée par des usages fondés
particulièrement sur la pauvreté de la petite noblesse, et bientôt
il avait été de règle que les fiefs ordinaires n'obligeaient à servir
que pendant une période de quarante jours , les fiefs de chevalier
vingt jours et les fiefs de haubert- dix seulement l. Le royaume
de Jérusalem, vu sa position particulière , formait seul une excep-
tion : la durée du service y était d'un an 2.
Limité par le temps, le service militaire l'était aussi par la
distance ; certains vassaux ne devaient suivre leur seigneur qu'à
une journée de marche de leur fief, d'autres à moins encore.
1 Ducange, Feudum militiœ.
* Assises de Jérusalem, c. 230.
Commissaires rapporteurs : MM. le général Guillaume et A. Pinchart.
— 417 —
Il devait résulter nécessairement de ces restrictions l'impossibilité
matérielle de tenir campagne; on pouvait faire une expédition ,
surprendre un château, ravager une petite étendue de pays, il
était à peu près impossible de tenter une conquête ou même d'as-
siéger une ville.
A la vérité , les vassaux consentaient fréquemment à prolonger
la durée de leur service à la condition d'être indemnisés par une
solde ou par le butin ; mais la grande quantité de serviteurs,
souvent non combattants, qu'ils emmenaient avec eux exigeait pour
son entretien des frais considérables dont le payement, parfois irré-
gulier, amenait des mécontentements qui se traduisaient presque
toujours par la désertion de gens qu'aucune obligation féodale ne
retenait plus sous les armes.
Aussi les princes préféraient-ils , pour leurs expéditions de
longue haleine, faire marché à moindre prix avec des aventuriers,
sortis pour la plupart des rangs du peuple , poussés dans la carrière
des armes par l'absence de sécurité résultant des querelles jour-
nalières des barons et qui embrassaient avec la même indifférence
toutes les causes pourvu qu'elles offrissent butin et profils.
Les provinces belges , en proie dans toute leur étendue aux
désordres créés par des luttes qu'à son éternel honneur l'Église
avait essayé de restreindre à l'aide de trêves ou de paix de Dieu
qui s'étendirent bientôt au reste de la chrétienté , avaient de
bonne heure fourni de ces soldats, renommés parmi les plus vail-
lants et qui avaient été porter au loin leur humeur batailleuse.
Sans remonter plus haut que le XIe siècle , on avait vu dès
1017 Tostig, frère du roi saxon Harold, tenter la fortune sur
les côtes septentrionales de l'Angleterre avec des aventuriers
rassemblés en Frise, en Hollande et en Flandre *.
Hogeri deHovedln, Annales, p. 448; apud lier uni anglic. script., éd. Savile.
— 118 —
Quand Guillaume-le-Conquérant avait fait publier son ban de
guerre dans les provinces voisines de Normandie , offrait une forte
solde et le pillage de l'Angleterre à tout homme robuste et de haute
taille qui voudrait le servir de l'épée, de la lance et de l'arbalète ' ,
il en était encore venu un grand nombre des Flandres. Parmi ceux
qui se (irent remarquer dans cette expédition , les annalistes nous
ont conservé les noms de Gilbert de Gand , qui était l'un des com-
mandants d'York quand cette ville fut reprise par les Danois venus
sous les ordres du fils et du frère du roi Swcn au secours des Saxons
(10G9) 2 , de Dreux Bruère, qui eut en partage toute l'Ile formée
par l'Océan et les rivières à la pointe la plus orientale de l'Yorkshire
et épousa même une parente de Guillaume 3 , de Gherbaud enfin
qui porta le premier le nom de Comte de Cheslcr *.
En 1088, sous le règne de Guillaume-le-Roux , parmi les
aventuriers normands que Robert fils d'Aymon introduisit dans la
vallée de Glamorgan à la faveur de la guerre civile qui avait éclaté
chez les Gallois méridionaux, on remarque les noms de Robert de
St-Quentin et de Jean le Flamand 3.
Plus tard encore , pendant les guerres que quelques gentils-
hommes normands firent à Guillaume-le-Roux et à Henri Ier, en
faveur de leur frère aine Robert, une grande quantité de Flamands
passèrent le détroit appelés par l'un ou l'autre des deux partis
sur la promesse d'être largement récompensés par les domaines
pris sur les Gallois ou les Normands vaincus; et quand, sous
Henri I?r, Richard comte d'Eu, en Normandie, conquit la province
galloise de Divet ou de Pembroeke , ce furent ses auxiliaires
1 Oai)F.mc Vital, p. 4D5 et Roman deRou.
-' Chron. Saxon, Gîbson, p. 174.
' DugdaWs baronage, p. GO. — Monast. anglic. , 11, p. 796.
' Orderic Vital, p 5*22. — Thierry, Hist. de lu conquête d'Angleterre, liv.1V.
'• Cambrian Biography , p. 197, liv. VIII.
— 419 —
flamands qui, à cause de son adresse à tirer de l'are, lui donnèrent
le surnom de Slrongboghe resté héréditaire dans sa famille l.
A cette époque donc ces aventuriers formaient déjà un corps,
irrégulier sans doute et peu discipliné, mais distinct des autres et
très-nombreux puisque le surnom qu'ils donnent à leur chef et
qui prévaut bien qu'appartenant à une langue étrangère à celle que
parle le noble Normand , est adopté par lui : baptême populaire
qui lui est une assurance de la fidélité de ses parrains.
Cependant ce ne sont pas encore là , dans toute l'acception du
mot , des mercenaires ; ce sont plutôt des colons conquérant en
soldats la terre sur laquelle ils vont s'établir, luttant sans cesse
pour la conserver et transmettant à leurs descendants celte habi-
tude des armes qui, près d'un siècle plus tard (1170) sous les
ordres du petit-fils de Richard Slrongboghe,- après avoir fait d'eux
les alliés utiles de Dermot , fils de Morrogh , roi du territoire de
Leinster en Irlande, les conduira à la conquête de cette île 2.
Mais il n'en est plus de même des bandes que nos provinces ,
déjà alors si riches et si peuplées 3, fournissent bientôt en grand
nombre et qui abandonnent le pays pour aller sous l'un ou l'autre
chef se mettre à la solde des étrangers.
En M 39, dans la lutte qui éclate en Angleterre entre Etienne
de Chartres, proclamé roi le 2G décembre 1137, et l'empress
Malhilde , les bandes qui soutiennent l'un et l'autre parti et dont
Guillaume d'Ypres, fils naturel de Philippe frère de Robert II
comte de Flandre, est l'un des chefs, sont en grande partie com-
posées de Bretons et de Flamands 4, que les annalistes dépeignent
comme des loups affamés. Elles furent longtemps le soutien le plus
1 Giraldus Cambrensis, Itinérar, Walliœ,\i. 724. — AU'J. Thierry, liv. VIII.
■ Giraldus Cambrensis, flibernia expwjnata; Camdea , Anglica , Hibernica, etc.
pp. 760 et 761. (V. Aug. Thierry, liv. X).
3 Suger , Vita Ludovici Grossi; Dom Bouquet, t. XII.
4 Currebatur ad euni au omnium generum militibus et a levis armaturœ bominibus
maximèijiie ex Flandrià et Britannià (Ap. Scriplores rerum francicarum, t. XII, p. 23).
— 120 —
énergique du roi Etienne , et après le bataille de Lincoln (1141)
où l'empress eut la victoire , Guillaume d'Ypres avec ce qu'il put
en ramasser continua la guerre et fit remettre Etienne en liberté.
La province de Kent lui fut donnée en récompense, et plusieurs
de ses compagnons sortis des derniers rangs du peuple durent à
leur vaillance des titres de noblesse: ainsi Gilbert, fils de Walter,
l'ut créé comte de Lincoln ' et le Flamand Théobald devint le fon-
dateur de l'illustre maison des Douglas d'Ecosse2. Mais à la mort
d'Etienne, Henri d'Anjou, en prenant possession de la couronne
(1 15-1) se hâta de faire quitter l'Angleterre à tous ces étrangers 3;
ta leur arrivée sur le continent ils allèrent grossir les rangs des
mercenaires connus sous le nom de Brabançons et qui, parlant la
même langue qu'eux , étaient en quelque sorte leurs compatriotes.
C'est vers le milieu du XIIe siècle que ces derniers avaient
commencé à se faire connaître. Sans doute bien des causes avaient
concouru à la formation de leurs bandes : les débris de l'expédition
d'outre-mer et les victimes des grandes inondations qui changèrent
si souvent à cette époque la configuration de notre littoral y appor-
tèrent leur contingent, mais aucun de ces faits généraux ne donne
l'explication du nom particulier qu'elles portent et sous lequel elles
se rendirent célèbres entre toutes dans l'histoire.
Ce nom de Brabançon qui apparaît alors pour la première fois
avec la signification de mercenaire , à l'exclusion de celui de
Flamand jusqu'alors généralement donné aux soldats de cette
espèce levés dans nos provinces 4, prouve évidemment que ce
furent les habitants du Brabant qui, au moins à l'origine, en
fournirent la plus grande part, et c'est aux événements dont cette
' Hearne, Liber niger Scaccarii, vol. II, fol. 399.
* Van Brussel, Hist. du commerce et de la marine eu Belgique , t. 1, p. 155.
Voir aussi sur Guillaume d'Ypres la Notice du chanoine De Smet, dans le tome XV des
Nouveaux mémoires de l'Académie royale de Belgique.
* Walt. Hemingi-ort, lib. II, c 1, ad ann. MCLIV.
1 Notice sur Guill. d'Ypres , p. 5.
— 421 —
province fut le théâtre à celle époque qu'il faut demander les
causes de leur formation.
Or, parmi ceux qui remplissent cette période si obscure encore
de noire histoire nationale , deux surtout nous paraissent y avoir
contribué tout particulièrement : la guerre de Grimbergen et
l'hérésie de Tanchelin.
La querelle qui avait éclaté entre Godefroid-le-Barbu et les
Bcrlhoud , à propos du refus de ces grands feudalaires de rendre
hommage au duc de Brabant pour la seigneurie de Grimbergen ,
n'était pas encore apaisée lors de l'avènement de Godefroid III et
depuis vingt ans que duraient les hostilités « la misère et la mort,
• dit le religieux d'Afïïighem continuateur de Sigebert de Gem-
• bloux ', s'était répandue comme une maladie contagieuse sur la
• seigneurie de Malines et le pays environnant. » Tour à tour
ruinés par les deux partis, les laboureurs quittaient le sol qu'ils
arrosaient en vain de leurs sueurs, laissant leurs terres incultes
ou, pour résister à l'oppression , se constituaient en bandes armées
dont les représailles devaient nécessairement dégénérer en bri-
gandages.
Après la destruction de la forteresse de Grimbergen (1154), qui
termina cette guerre dont le fait principal, la bataille de Ransbeke
(11-47) où Godefroid III assista dans son berceau suspendu à un
arbre, est encore controversé 2, le Brabant recouvra pour quelque
temps la paix et la tranquillité ; mais bien peu de ceux que ces
troubles prolongés avaient déshabitués du travail relevèrent leur
chaumière incendiée et retournèrent à la charrue ; unis et les armes
à la main ils s'étaient faits les égaux de leurs oppresseurs ; ils
restèrent en armes.
1 Ad an. MCLIX.
- Voir Examen critique de$ anciens monuments sur lesquels les historiens ont
fondé le récit de lu guerre de Grimbergen , par le chanoine de SjikT. Mémoires de
l'Académie, t. XV.
— 422 —
D'autres victimes, celles du fanatisme religieux, étaient venues
se joindre à eux. Au commencement du XIIe siècle , vers 110G ,
à la faveur du schisme qui avait éclaté dans l'Eglise, l'hérésiarque
Tanchelin ou Tanchelm qui se prétendait fils de Dieu , niait la
présence réelle de J.-C. dans l'Eucharistie et déclamait surtout
contre la hiérarchie ecclésiastique et la perception de la dîme, avait
eiitrainé à sa suite une grande masse de peuple non seulement à
Anvers où il avait commencé ses prédications, mais dans le diocèse
d'Ulrecht, le Brabant et môme les Flandres.
Banni en 1115 par le duc de Brabant et peu de jours après
assassiné par un prêtre , Tanchelm avait eu pour successeur le
moine défroqué Everwacher et le forgeron Manassès , qui conti-
nuèrent les prédications jusqu'en 1 12i. A celle époque saint Norbert
et douze religieux de l'ordre des Prémonlrés, qu'il venait de fon-
der, furent appelés à Anvers , et , « en moins d'un an , dit un
• historien ' , il eut ramené an bercail de l'Église tous les
< esprits égarés , et l'hérésie se trouva si complètement exler-
• minée qu'il n'en est plus question désormais dans les annales
• anversoises. •
En réalité l'hérésie avait si peu disparu que trente-cinq ans
plus lard elle était encore prêchée à Cologne avec éloquence par
Arnold, Harsile et Thierry. Egbcrt , abbé de Schonau, envoyé
pour les réduire au silence et n'étant pas parvenu à les convaincre
de leur erreur, les livra au bras séculier qui les condamna au
bûcher -.
Dans le Brabant, les disciples de Tanchelm avaient sans doute
été soumis à la même juridiction, et persécutés, bannis comme
leur chef, ils avaient dû quitter leur patrie. Quelques-uns peut-
être allèrent coloniser l'Allemagne; d'autres plus nombreux se
réunirent à ceux que la misère avait voués au brigandage.
' Eue. Gkns , Histoire tic la ville d'Anvers, p. 38.
■ I). Cu.mi-t, Histoire île Lorraine, t. II, p. 570.
- 423 —
Celle double origine se manifeste par les noms de cotereaux et
de Routiers que ces bandes portèrent bientôt concurremment avec
celui de Brabançons et par leur conduite à l'égard du clergé.
En effet, partout où elles portent leurs dévastations, ce sont
particulièrement les prêtres et les moines qui deviennent leurs
victimes. « Ces pillards, larrons infâmes et excommuniés, dit
■ la Chronique de St-Dehis *', grand dol'eur faisaient, car ils
» ardaient les monastères et les églises et traînaient après eux es
• liens les prêtres et les gens d'église. • Et plus loin encore,
elle les appelle ■ ramas de robeurs et pillars qui ardaient les
» monastères et fustigaient les clercs. » Tous les écrivains reli-
gieux dépeignent les Brabançons avec les mêmes couleurs et le
3e concile de Latran , les assimilant aux Albigeois , les accuse de
se conduire comme des payens à l'égard des chrétiens dont iis
n'épargnent ni les églises, ni les monastères, ni l'âge, ni le sexe.
Tantôt à la solde de la noblesse féodale , tantôt combattant pour
leur propre compte, ils étaient devenus un fléau pour l'Europe
centrale, quand vers M 64, à la persuasion du clergé, Frédéric
Barberousse, Louis VII, le duc de Lorraine, le comte de Cham-
pagne et un grand nombre d'évèques et de nobles se réunirent à
Vaucouleurs pour s'entendre afin de les anéantir. Un traité fut
signé par l'empereur et le roi de France , par lequel ils s'enga-
geaient à poursuivre, chacun sur son territoire respectif, les
Brabançons, cavaliers ou fantassins, sauf ceux qui s'étaient
mariés sur les terres de quelques seigneurs ou mis à leur solde
avant la convention. Mathieu de Lorraine et Henri de Troyes se
porlèrenls garants du traité, les évoques lancèrent l'excommunica-
tion sur quiconque employerait ces mercenaires , et les nobles
jurèrent de ravager ses terres dans les quarante jours qui suivraient
l'avertissement 2.
1 T. 11 , chap. 2.
* D. Martkne , Ampliss. coll., t. 11, col. 880 et suiv., el Dibl. de l'école des
Chattes, t. 111, p. 125 et suiv.
- 434 —
Rien ne prouve cependant que ce traité ait jamais reçu son
exécution , car deux ans plus tard Frédéric avait à sa solde un
corps nombreux de Brabançons , et c'est à leur tête que Christian
de Buch, archevêque schismatique de iMayencc, pénétra à sa suite
en Italie pendant l'automne de 11GG et contribua l'année suivante
à la capitulation de la ville éternelle ».
Quand , après avoir échappé à l'épidémie qui ravagea son année
et emporta ses principaux officiers , l'empereur dut reprendre le
chemin de l'Allemagne devant les forces que les communes lom-
bardes alliées entre elles avaient réunies contre lui, ce fut encore
à Christian de Buch et a ses Brabançons qu'il dut la conservation
de la ville de Cè:ies qui seule lui resta fidèle -. Aussi en 1174-,
en rentrant en Italie par le mont Cénis, son armée était-elle
composée en majeure partie de Brabançons auxquels s'étaient joints
un grand nombre de Flamands 3 et de Liégeois que les successeurs
de l'évèque Henry de Leyen , à son exemple, envoyèrent au secours
de l'empereur 4.
Il n'était pas seul du reste à employer ces bandes : en 1166
Guillaume de Chalons en entretenait également 5; mais ce furent
surtout les rois d'Angleterre qui.cn les prenant à leur service, leur
donnèrent une énorme extension et les firent se décupler.
Henri-lc-Jeunc, couronné roi par l'évèque d'York pendant la
vie cl par les ordres de son père Henri II , qui avait semblé par
' Moi!Ex.\ , p. 1145. Braibemones qui erant forlissimi . . .
■ Aluekt Stad., ad anno 1 172 : Ciun Brabantims per Lombardiam et Thusciam
otnnia depopulans.
3 Romuald, Chronc, p. 212e : n ... collecta magna muliitudine Brebitionum el
amaliorura conductiliorum miliium , luli potenter intrav'U. — Vila Alc.r. III , p. 103 D :
« Ilabebat enim circa s<; multitudinem copiosam barbaries genlis , quos de Platidria et
aliis circumpositis locis elegerat » —V. de Haulleville, Histoire des communes
lombardes, t II , liv. Il , cliap. III.
' Chapeaville, vol. 11 , p. 105.
r' Grande chronique de France. Hist. de France, t. XII, p. 205. « Li Cuens GuiUaume
de Cliâlons, . . . assembla grant poplc d'une gent que on apele Brabançons. •>
— 425 —
là vouloir le mettre sur le même rang que lui, mais ne lui accordait
en définitive que de vains honneurs sans aucun pouvoir, avait voulu
hâter la prise de possession réelle de la couronne d'Angleterre et
en 1183, aidé de ses deux frères, Richard comte de Poitiers et
Geoffroy comte de Bretagne , auxquels s'étaient joints le roi de
France et le comte de Flandre , il s'était révolté contre son père
et avait entraîné dans sa cause une grande quantité de barons
que leur haine pour Henri II lui avait donnés pour alliés.
Celui-ci, pris au dépourvu et ne pouvant réunir autour de lui
qu'un petit nombre de vassaux restés fidèles , appelle à son aide
les Brabançons f. Il en rassemble jusqu'à 20,000 en Normandie 2.
A la tète de 10,000 d'entre eux, il marche sur le roi de France ,
l'atteint près de Verneuil , massacre son arrière-garde et l'oblige
à traiter 3 ; rejoignant ensuite l'autre partie de ses troupes qui
avait pénétré en Bretagne, il met les Bretons en déroute et les
force à s'enfermer dans leurs châteaux et dans la ville de Dol qu'il
prend en quelques jours 4.
Après avoir essayé de conclure la paix à Gisors, il marche avec
ses Brabançons contre son fils Richard qui s'était jeté dans le
Poitou et l'Angoumois, s'empare de Saintes, de Taillebourg, et
dévaste toute la frontière du Poitou. Puis sur l'avis qu'il reçoit du
passage en Angleterre de Henri-le-Jeune et du comte de Flandre
qui se sont alliés au roi Guillaume d'Ecosse , il s'embarque avec
ses mercenaires à Harfleur, descend dans son royaume, surprend
et écrase ses ennemis qui trop surs de la victoire avaient éparpillé
leurs forces 5.
' Benedict Petroburg , ap. script, rer. gallic. et francic, t. XIII. p. 155. Biaban-
ceros suos, de quibus plus cœteris confidebat. . . .
! Roger, de Hoved. , p. 534 : Viginti millia Biabancenorum qui lldelitei servie -
runt illi.
3 Guil. Neubrig, lib. Il, c. 28 et Bhompton. Chron. ann 1173.
* Guil. Neubrig , lib. II , c. 28, p. 204. Éd. Hearne.
5 Guil. Neubrig, lib. II, c. 20. — Dom Bouquet , t. XIII.
XXIX XXII 21
— 420 —
11 repasse ensuite le détroit assez à temps pour forcer le roi
de France et le comte de Flandre à lever le siège de Rouen (1 174),
et bientôt après oblige ses fils à demander la paix (30 septembre).
Comme on le voit les bandes brabançonnes sont devenues de
véritables armées. De leur origine il ne reste plus rien que le nom,
et encore tend-il à disparaître devant celui plus général de
routiers l ou de colereaux 2 , qui s'adressait également à tous
les mercenaires de cette époque , Aragonais , Basques , Navarrois,
Mainades [mcijsneden) ou Tiaverdins.
Ce nom de routiers dérive du latin rupta ou ruta (paysan ou
laboureur) bien plus sûrement que du vieux mot français rot ou
rolte, troupe. Comme celui de cotereau 5, qui signifiait habitant
des campagnes 4, il rappelait la classe où se recrutaient ces mer-
cenaires; originaires de tous pays, Flamands, Gascons, Allemands,
Hennuyers, Brabançons 5, la plupart sont des serfs qui se sont
arrachés à la glèbe pour chercher la sécurité et l'indépendance que
1 Guil. Neubrig, « Stipendiais Brabantionem copias, quos rutes vocant »
2 Cil Caterel, cil Brebaçons , ce sont deables, dit au Xlil« siècle Gauthier de Coinsi,
dans ses Louanges de N.-D., lib. II, cap. II, 2, v. 310.
3 Coterie a longtemps signifié une société de paysans tenant des terres viles ou
roturières; tenir en coterie se disait en opposition de tenir à fief et à cens. Coller, en
anglais, signifie encore paysan, colti , en wallon de Liège, cultivateur. (Voir aussi
Gantrel , Mémoire sur la part que les Flamands ont prise à la conquête d'Angleterre
par les Normands. — Nouvelles archives historiques, t. 11 , p 323 et suivantes).
4 Daniel, Histoire de la milice française, p. 140, fait dériver le nom de Cotereaux du
grand couteau ou coterel dont ils se servaient dans le midi de la France. C'est le contraire
qui est vrai. Ce nom était en effet usité en Flandres et en Angleterre longtemps avant
l'existence de ces bandes armées. (Voir Galbert , Vie de Charles-le-lion , p. 19 et
Monaslicum Anglicanum, t. III, p. 305). Dans un manuscrit de la Bibliothèque impériale
de Paris (suppl. fr. n° 2489, fol. G, v°) renfermant une vie de S. Thomas de
Canierbury par Garnier de Pont-S^-Maxënce , on trouve que le prélat comme
chancelier d'Angleterre :
De chevaiers vassals grant mesnies teneit
Et duns et livreisuns richement lur deneit ;
Kortereus et archers et sergans reteneit.
'■' GiraLD Cambr., liv. C. « Coterelli Flandrenses conducti. » Gauf. Vos, Chron.
c. 73. « Primo Basculi, post roodum Theutonici, Flandrenses, et ut ruslice loquar,
Brabansons , Hannuyers. . . »
— 427 —
leur pairie leur refuse. Dès lors, vivant en soldats, s'ils s'arrêtent
c'est en pays conquis , s'ils s'attachent à la terre c'est à celle que
la victoire leur a donnée ; jamais chez eux ces aspirations à
retourner aux lieux qui les ont vus naître et où ils n'ont trouvé
que misère et tyrannie.
Après la paix de 1174, Henri II conserva à sa solde une partie
de ses Brabançons à la faveur de l'impôt de 60 sous angevins par
fief de haubert qu'il fit payer à ses barons sous le nom de • droit
d'escuage » pour les exempter du service militaire. Les autres
furent congédiés et , obligés de demander au butin de chaque jour
leurs moyens d'existence, ils recommencèrent leurs dévastations.
Prenant pour centre de leurs opérations quelque château fortifié,
ils s'en servent comme place de refuge et de là dévastent tout le
pays aux environs et particulièrement les biens du clergé, qui use
contre eux des armes temporelles et spirituelles. Ainsi , c'est à la
voix de Gérard, évèque de Limoges, qu'en 1 177 Adhémar V et les
populations du Limousin marchent contre le château de Beaufort,
s'en emparent et massacrent 2,000 routiers, hommes et femmes,
qui l'occupaient l ; en 1179, c'est Pons, évèque de Narbonne ,
qui lance contre eux l'interdit , et , la même année , le concile de
Latran décrète contre ceux qui les emploient et les soutiennent les
peines ecclésiastiques réservées aux hérétiques et accorde la pro-
tection de l'Église et des indulgences à ceux qui les combattent 2.
Mais il était difficile de réunir contre eux tous les membres de
celte noblesse féodale qui, sur une moindre échelle, vivait de la
même vie. Les grandes guerres seules avaient le privilège de faire
cesser leurs brigandages pendant qu'ils étaient employés comme
troupes régulières contre l'ennemi. Tel fut le cas en 1181 quand
Philippe-Auguste , après s'être soustrait à la tutelle du comte de
1 Geoffroy de Vigeois, p. 446, t. XII, du Recueil des Hist. de France. — Voir
Bibl. de l'école des Chartes, t. 111, p. 123. Les Routiers au XIIe siècle par GéraUD.
* Coll. des conciles de Mansi, t. XXII, cal. 232, 233.
— 428 —
Flandre, vit tout-à-coup ce dernier entraîner à la révolte ses vas-
saux auxquels il avait fait croire que le roi de France voulait raser
leurs châteaux '. Incapable de résister, Philippe avait appelé à son
aide Henri II , qui lui envoya ses trois fils conduisant les fieffés
d'Angleterre et 10,000 Brabançons. Quelques succès en Bour-
gogne ramenèrent bientôt une grande partie de la noblesse à la
cause du roi, et la médiation de Guillaume, archevêque de Reims,
suspendit les hostilités entre Philippe-Auguste et le comte de
Flandre.
Le licenciement des deux armées rendit les Brabançons à leur
vie de désordre. Ils se répandirent sur la France entière « s'at-
» tachant au peuple comme une véritable vermine • , dit un chroni-
queur, enlevant toute sécurité aux relations commerciales et
obligeant les malheureux habitants des campagnes à chercher un
refuge dans les villes fermées , qui bien souvent elles-mêmes
n'étaient pas à l'abri de leurs dévastations.
Parmi ces dernières, la ville de Puy en Auvergne souffrait
particulièrement de leur présence dans ses environs. La fête de
l'Ascension voyait en effet se réunir chaque année dans ses murs
les nobles et les marchands du pays et de l'étranger, source de
bien-être pour les habitants , source de profits pour les chanoines
de l'église où était exposée la Vierge miraculeuse , but de ce
pèlerinage. La peur des routiers ayant considérablement diminué
le nombre des pieux voyageurs , les offrandes s'en ressentirent
considérablement. C'est alors que profilant de la simplicité d'un
pauvre charpentier nommé Durand , qui avait la coutume de passer
la nuit en oraison dans l'église consacrée à la Mère de Dieu, un
chanoine eut l'idée de lui faire apparaître la Vierge elle-même qui
lui commanda de réprimer les colereaux qui dévastaient la
campagne 2.
1 Raoul de Dicbt, Imag. hist., ad anno 1181 , p. 012.
1 Grandes chroniques de France, t. IV, p. 21. Éd. P. Paris.
— 429 —
Durand annonça bientôt au peuple la mission qu'il avait reçue
du ciel ; le chanoine se fit l'apôtre et le prédicateur éloquent de
cet illuminé, le peuple crédule s'attacha à ses pas et bientôt fut
fondée la Confrérie des amis de la paix. Au moment de revêtir
l'uniforme composé d'un chaperon de toile blanche qui leur couvrait
la tête et d'une image en plomb de la Vierge du Puy avec
les mots : « Agnns Dei qui tollis peccata mundi , doua
nobis pacem, • les confrères promettaient de travailler de tout
leur pouvoir à la destruction des routiers, colereaux.et Bra-
bançons. On les compta bientôt par centaines de mille. Philippe-
Auguste , alors en guerre dans le Berry , détacha vers eux
quelques-uns de ses hommes d'armes pour les diriger, et cette
troupe innombrable mais indisciplinée se mit en campagne à la
recherche des bandes. Dix-sept mille Brabançons qui se rendaient
en Bourgogne, en traversant le Bourbonnais et le Berry après
avoir dévasté l'Aquitaine au nom du roi d'Angleterre !, atteints
par les encapuchonnés , se laissèrent massacrer presque sans ré-
sistance près de Gharenton 2 le 20 juillet 1183 : onze à douze
mille d'entre eux restèrent sur le terrain. D'autres bandes pres-
que aussi nombreuses tombèrent encore dans l'Auvergne et le
Rouergue sous les coups des confrères de la paix ; mais bientôt,
orgueilleux de leurs succès, ceux-ci ambitionnèrent l'honneur de
détruire toutes sortes d'abus. Ils parcoururent les campagnes en
prêchant l'égalité au nom de l'Evangile , défendant aux seigneurs
d'exiger aucune redevance de leurs terres, aucun travail de leurs
serfs. Cette jacquerie anticipée menaçant de prendre d'immenses
proportions, les nobles furent obligés de se liguer à leur tour pour
leur faire la chasse. L'année 1184 en vit détruire des milliers;
beaucoup d'entre eux allèrent grossir les bandes de routiers contre
lesquelles ils avaient pris les armes.
« Vita Lucii, 111, p. 476, cal. 1, A (Murât., script., t. III.)
2 Limite des départements de l'Allier et du Cher.
— 430 —
C'est que ces mercenaires étaient toujours certains de trouver salut
et protection sous l'étendard d'Angleterre ; en 1189 les Braban-
çons forment la principale force de l'armée que le roi Richard
Cœur-de-Lion conduit en Palestine ; ce sont ses chefs Mercader,
Geoffroy de La Haye, Guill. Gorram et Ph. le Gallois qu'il nomme
ses fidèles dans une charte qui est arrivée jusqu'à nous *, et c'est
à leur intention qu'il promulgue, au moment de s'embarquer, ces
statuts de discipline si sévères mais si bien en rapport avec l'espèce
d'hommes qui composaient ces bandes. Quiconque avait tué , y
était-il dit , devait être enseveli avec le cadavre de sa victime ou
jeté avec lui dans la mer; quiconque avait levé le couteau sur un
autre avait le poing coupé. Le blasphème ou l'injure se payait une
once d'argent par parole mauvaise ; le voleur était tondu comme
un champion, couvert de poix bouillante et roulé dans la plume,
puis débarqué dans cet état aussitôt que la terre était en vue 2.
A son retour , c'est encore avec ses fidèles Brabançons
que le roi Richard va combattre Geoffroy de Rançon , comte
d'Angoulème vassal des Plantagenets , qui s'était donné au roi de
France , et Mercader les conduit 5 ; c'est Mercader qui après la
rupture des conférences de Verneuil avec Philippe-Auguste s'em-
pare d'Issoudun 4; c'est près de lui encore que se trouvait
Richard quand devant le château de Ghaluz il est frappé par le
trait d'arbalète qui devait causer sa mort , et c'est ce chef de bandes
qui, malgré la prière du roi mourant, suspend à un arbre au
moyen d'une courroie , l'arbalétrier qui s'était avoué l'auteur de
cette mort 5.
1 Pièces justificatives des Comles-Evéques , par H. Géiiaud. Bibl. de l'école des
Chart. t. V, p. 36.
1 Ryuer, Diplom. collect., t. 1.
s Rogeri de Hoveden, ad anno 1194.
* Rigord, Gest. Philip. Aug., Duchesne, t. V, p. 35.
5 Rogem de Hoveden, ad anno 1109.
— 431 —
Les rois de France pendant un certain temps eurent aussi des
routiers à leur solde. Philippe-Auguste , qui avait appris à les
apprécier, compta même Cadoc, l'un de leurs chefs créé plus tard
seigneur de Gaillon, parmi ses favoris ; mais c'était particulièrement
à la guerre de siège qu'il les employait , témoin Château-Gaillard
en Normandie dont il ne s'empara qu'avec leur aide (1204) !, et
le siège d'Angers où il les envoya directement en marchant à la
conquête de Poitou ; ce furent encore eux qui , placés sur sa flotte
dans sa campagne de Flandres , se montrèrent les plus avides
dans le pillage de la ville de Damme. Ces mercenaires cependant
lui étaient moins nécessaires qu'aux rois anglais : sous son
règne en effet le pouvoir royal avait grandi aux dépens de la
noblesse qui s'était vue écrasée maintes fois dans ses tentatives de
rébellion ; après la mort du roi Richard , la conquête des provinces
qui relevaient de la couronne d'Angleterre avait été pour les nobles
vassaux une source de profits qui les avaient retenus sous les armes
passé le temps accoutumé. De nouveaux fiefs avaient été créés,
d'autres s'étaient arrondis, l'hommage simple avait presque partout
été remplacé par le lige qui obligeait le vassal à suivre son seigneur
dans toutes ses expéditions et à ses propres dépens ; à le servir
contra omnes et feminas qui possunt vivere et mori, comme
s'exprimaient les actes de ligéité 2; et les armées royales, plus fortes
et plus fidèles que jamais , avaient pu rejeter l'aide de ces bandes
de Gascons et d'Aragonais qui menaçaient de s'éterniser, grâce à
la protection que leurs services militaires leur avaient value.
En Angleterre , au contraire , Jean-sans-Terre , sans cesse en
lutte avec la noblesse, avait repris à son service les Brabançons de
son frère Richard, et Lupicare et Brandimer avaient succédé
1 Guill. le Breton, Philippéide, ch. 8.
* Boutaric, Institutions militaires de la France, p. 12-1.
— 432 -
comme chefs à Mercader dont le nom disparait de l'histoire avec
celui du roi dont il avait été le fidèle compagnon.
Ce n'était pas un des moindres griefs des barons anglais que
l'existence sur leur sol de ces étrangers armés dont quelques-uns
avaient été revêtus de charges de la couronne ou avaient obtenu
des titres de noblesse ou des manoirs fortifiés '.. Aussi quand,
devenus les maîtres, ils se firent octroyer par le roi Jean la Grande
Charte , base de toutes leurs 'libertés , ils lui firent signer l'enga-
gement de chasser tous les étrangers - tous les parents de Gérard
• d'Ath, savoir: Engelram , André et Pierre, Guy de Sanzelles ,
» Guy de Cisoing, la femme de Gérard d'Ath avec tous ses
• enfants, Geoffroy de Martène et ses frères et généralement tous
» les Flamands et tous les routiers qui travaillent à la destruction
» du royaume 2. »
Mais aussitôt qu'il put s'échapper de leurs mains, Jean-sans-
Terre s'empressa d'appeler à son secours de nouvelles bandes bra-
bançonnes auxquelles il promit le partage des fiefs de son royaume ,
et qui lui permirent de recommencer la guerre avec succès 3.
Sa mort dispersa les routiers dont un grand nombre quitta
l'Angleterre ; les autres continuèrent à y vivre à la solde de la
couronne ou des barons. En 1220, la noblesse anglaise insista
pour obtenir leur renvoi définitif et une proclamation publiée à cet
effet à Londres ordonna à tout étranger non commerçant de quitter
le royaume4. L'armée de Henri III en 1224 en possédait cependant
encore un grand nombre parmi lesquels nous citerons Godscale de
Maghclines et Henri de Capclle.
Sur le continent, au commencement du XIIIe siècle, nous
trouvons les Brabançons, fidèles à leur origine, dans les rangs
1 Parmi les Flamands que le roi Jean s'était attachés on remarque Richard <■ Fl\n-
dhensis, » shérif de Cornouailles et Robert, avoué de Béthune, dont le père Baudouin
fut créé comte d'Albemarle. (En. VanBhussel, t. I, p. 24.)
» Em. Van Biu:ssel, t. I , p. 213, note.
■• Mathieu Paris, p. 221 à 231.
1 Em. Van Biilssel , t. 1, p. 21 i.
— 433 —
des Albigeois, et leur nom cilé parmi les routiers que le comte
de Toulouse au concile de St-Gilles, en 1209, prend l'engage-
ment de chasser de ses terres *.
En 1214, ils sont les plus intréprides parmi les confédérés
qui combattent contre l'armée française de Philippe-Auguste dans
la plaine de Bouvines. Une partie de ceux qui survécurent passèrent
en Angleterre, mais un plus grand nombre encore périt dans le
désastre de la flotte que Hugues de Boves conduisit à l'île de
Wight au secours du roi Jean et qui périt toute entière, ense-
velissant dans les flots plus de -40,000 victimes.
Au commencement du XIIIe siècle, l'affaiblissement de la féoda-
lité avait fait succéder une trêve relative aux querelles particulières
et sans cesse renaissantes des siècles précédents ; le commerce et
l'industrie avaient aussitôt pris un merveilleux essor, et partout
s'était fait sentir un besoin de paix et de sécurité qui devait rendre
les peuples moins patients à supporter les brigandages des routiers,
en même temps que la création des milices communales leur per-
mettait de se défendre et offrait aux souverains le moyen de se
passer du service des mercenaires.
Dans le midi, après la paix de 1229 qui fit cesser la croisade
contre les Albigeois et licencier un grand nombre de routiers '2, on
4 D. Vaissète, Hisl. du Languedoc, t. III, p. 163. — Les Croisés comptaient aussi
des rouliers dans leurs rangs. Ils embrassaient du reste toutes les causes et peut-être,
lors du siège de Constantinople par les Croisés en 1203, les défenseurs de la tour de
Galalha que quelques historiens appellent des Waranges (Villoison , Dissertation
sur lesWarangues), que Villehardouin nomme Angles et Danois, mais où d'autres ont vu
des sergents deLouvain et de Hollande (Bibl. des Croisades, t. III, p. 14; lettre du Cle. de
S.-Pol au duc de Brabant) , n'étaient-ils que des Brabançons qui, au retour de la
croisade , s'étaient mis à la solde des empereurs grecs.
1 II y avait des Brabançons dans Avignon assiégé. Pu. Mouskès, vers 26073, (t. Il ,
Ed. de la Comm. d'histoire), dit:
Et ci firent gianl vilaunie
Les Aubugois , et felonnie
As Braibençons et as Flamens
Et as autres estranges gens
Qu'il tenoient en lor soudée.
- 4,34 -
vit se former à Rocadamour une fédération de seigneurs et de
communes dans le but de se défendre contre leurs courses et leurs
extorsions.
Dans le nord , on usa d'un moyen qui devait être employé
encore dans la suite par Duguesclin et Charles VII à l'égard des
Grandes Compagnies et des Ecorcheurs. Il existait en Allemagne sur
les bords de l'Elbe , aux environs de Staden, une secte hérétique qui
portait le nom de Sladings. Une expédition fut préparée contre eux ;
Henri , (ils du duc de Brabant, Arnould d'Audenarde, les comtes de
Clèves et de Hollande et beaucoup d'autres seigneurs entraînèrent
à leur suite les Brabançons qui , revenus dans leur patrie , con-
sumaient dans le désordre leur besoin d'activité, les jetèrent sur
ces malheureux qui furent presque tous massacrés et leur distri-
buèrent leurs terres (1233).
Ainsi disparurent ces bandes qui pendant près d'un siècle
s'étaient rendues si redoutables par leur courage et leur nombre.
Mais l'esprit d'aventure qui les animait subsista longtemps encore
après eux dans nos provinces et en 1380, lors de l'invasion des
Anglais en France , parmi ceux qui vinrent se ranger sous leurs
étendards on comptait, dit Froissard , beaucoup de Flamands, de
Brabançons et d'Hennuyers « lesquels où qu'ils soient et qu'ils
• vont, veulent estre en vins et en viandes et en délices jusques
» au cou '. »
Nous n'abandonnerons pas ce sujet sans dire un mot de la com-
position et de la manière de combattre des Brabançons. Fantassins
pour la plupart , un certain nombre d'entre eux cependant com-
battaient à cheval ainsi qu'il résulte des termes mômes du traité
entre Louis VII et Frédéric Barberousse dont nous avons parlé plus
haut. La lance ou plutôt la pique , nationale chez les Germains ,
était leur arme de prédilection et ils y étaient parfaitement exercés.
' Fuoissaud, liv. Il , chap. 65.
— 435 -
Divisés en petites troupes , rangés en demi -cercles « comme le
• chœur d'une chapelle » , dit Guillaume le Breton, ils formaient de
la sorte autant de petites redoutes vivantes laissant entre elles des
intervalles pour le passage de la cavalerie. qui , après la charge,
venait se reformer sous leur protection *.
A Bouvines (1214) ils résistèrent ainsi, sans être entamés à la
première charge de Philippe-Auguste et à l'effort des milices com-
munales qui se firent écraser par la cavalerie impériale , passant
dans les intervalles2. A la fin de la bataille, un corps de 700
d'entre eux ne succomba que sous les coups de 2000 fantassins
que Thomas de St-Valéry lança contre eux, et une autre bande,
qui combattait sous les ordres du comte de Boulogne, ne fut taillée
en pièces par 3000 sergents à cheval qu'après qu'on eût roulé
sur eux, à force de bras, des chariots de guerre pour la rompre.
Vaillance inutile, mais qui prouvait qu'après douze siècles le courage
des Belges, exalté par César, n'avait pas dégénéré.
1 Chron. de St.-Denis, V. Bkial, p. 411 ; le comte de Bologne avait « un double
parc de sergens à pied , bien armés, joints et serrés ensemble à la circuité et manière
d'une roue ; dedans ce cercle il y avait une petite entrée par où le comte revenait et
sortait quand il voulait. »
* Guil. le Brkton , ch. XI, p. 607.
RENSEIGNEMENTS
CONCERNANT
L'AMIE D'ANTOINE VAN DYCK
A SAVENTHEM.
NOTICE
par M. L. GALESLOOT
MEMBRE TITULAIRE A BRUXELLES.
Dans une notice précédente ' je disais que j'espérais que
M. Van den Broeck parviendrait à établir la filiation de la belle
et intéressante maîtresse , ou plutôt de la prétendue d'Antoine Van
Dyek. J'ai la satisfaction de faire connaître à l'Académie que les
recherches de M. Van den Broeck ont eu un heureux résultat. Mais
avant d'en donner le résumé , il importe de relever une erreur
commise par le capitaine Van Ophcm dans l'attestation annexée à
la notice précitée , parce que cette erreur pourrait faire suspecter
quelque peu le témoignage de ce neveu d'Isabelle. Il importe aussi
de prouver auparavant que c'est bien Isabelle qui fut recherchée
en mariage, à Savenlhem, par l'illustre peintre anversois, attendu
que plusieurs des auteurs qui parlent de cet épisode de sa vie ,
1 Voy. les Annales de /' Académie, tome XX, p. 36.
Commissaires rapporteurs : MM. le chevalier Gustave van Havre et. Th. vanLeuius.
— 437 —
Mensart entre autres * , citent toujours une Anne van Saventhem
ou Van Ophem , comme étant celle qui fit une si vive impression
sur son cœur.
La mémoire a mal servi le capitaine Van Ophem quand il dé-
clare que le tableau de saint Martin à Saventhem a été peint vers
1629. Le séjour de Van Dyck dans ce village remonte à l'an 1621 .
Il doit s'y être arrêté pendant une partie du printemps et pendant
tout l'été de cette même année ; vers l'automne il partit pour
Venise avec le chevalier vénitien Nanni , envoyé par Rubens
pour déterminer son élève à se remettre en voyage. Il avait alors
22 ans. En 1629 il était de retour d'Italie depuis trois années ,
et déjà il était question de son passage en Angleterre où , comme
on sait , il vécut jusqu'à sa mort. Celte erreur de date du capitaine
est bien excusable chez un vieillard âgé de quatre-vingt-onze ans ,
mais il n'a pas pu se tromper en désignant sa tante Isabelle comme
ayant été recherchée par Van Dyck. Il était , comme il conste de
divers actes et du testament 2 , le confident chargé des affaires de
cette tante , qui lui avait laissé un bel héritage. Ce témoignage
si positif du capitaine suffirait à lui seul pour lever tout doute ,
mais je suis en mesure d'y ajouter la preuve irrécusable qu'Anne
Van Ophem n'est certainement pas la personne à qui Van Dyck
faisait une cour si assidue à Saventhem. Anne était la sœur
ainée d'Isabelle ; elle était mariée dès 1613, au moins , à Jean
Goossens 5 , puisque leur premier enfant connu fut baptisé en
l'église de Ste-Catherine le 2 août 1614. Elle et son mari, à
qui elle avait donné une nombreuse lignée , ont toujours habité
Bruxelles , tantôt dans la paroisse de Ste-Catherine , tantôt dans
1 Le peintre amateur et curieux. Voy. aux pp. 1G0, 16I et 195 de la lre partie,
où il parle d'un tableau de Van Dyck qui se trouvait au château de Tervueren et repré-
sentant, selon lui, Anne Van Ophem ou van Saventhem, la maîtresse du peintre.
* Voy. aux Annexes, n° 111.
! Voy. ibid. la généalogie, sub. n° 11.
— 438 —
celle de St-Géry, ce qui est démontré par les actes de naissance des
enfants qui se suivent de près et dont le dernier est né en 1G30.
Les époux Goossens étaient déjà morts en 1G35, lors du partage
des biens des parents d'Anne.
Maintenant on se demande comment le nom d'Anne a été sub-
stitué à celui d'Isabelle ? Pourquoi , dans la tradition , ce nom a
prévalu plutôt que celui de Madeleine ou de Marie, autres sœurs
d'Isabelle qui, n'étant pas mariées en 1621 ', résidaient probable-
ment avec cette dernière chez leurs parents? Ce sont là des ques-
tions difficiles à résoudre, et je crois qu'il vaut mieux attendre la
découverte de quelque document positif qui les tranche, que de se
perdre à cet égard dans le dédale des conjectures. Quant à avoir
si Isabelle a été la maîtresse , dans la mauvaise acception de ce
mot, du célèbre artiste, cette insinuation injurieuse pour notre
héroïne , de la part de quelques écrivains , est tout-à-fait erronée.
La vérité est que Van Dyck recherchait vivement la main d'Isabelle
Van Ophem qui , comme nous l'avons vu , demeurait chez ses
parents et qu'il ne put l'obtenir. Le témoignage de Van Gestel ,
auteur contemporain de la prétendue du grand peintre, est formel
à cet égard. Voici l'expression dont il se sert : . . . . filia incolœ
hujus pagi (Saventhem) quœ ipsi in amore erat et cujus nuptias
AYIDÈ SOLLICITABAT ET TAMEN OBTINERE NON VALU1T. Ce refus
peut avoir été basé sur le jeune âge d'Isabelle, car nous verrons
qu'en 1621 elle n'avait guère que 16 ou 17 ans. Peut-être
Hubens lui-même a-t-il insisté auprès du drossard et de sa femme
pour empêcher ce mariage , qui eût pu détourner son élève de
se rendre en Italie et de s'y perfectionner dans son art.
Après avoir prouvé qu'Isabelle Van Ophem est bien celle qui
avait su fixer si longtemps le volage Antoine , je ferai connaître
1 Voy. la généalogie.
— 439 —
tout ce que les investigations de M. Vanden Broeck et mes propres
recherches nous ont appris sur cette intéressante personne.
Isabelle, ou mieux Elisabeth Van Ophem comme elle signait
d'habitude, descendait de la noble famille de ce nom '. Elle était
le septième enfant de Martin Van Ophem2 qui fut, pendant
quarante-trois ans , d'abord raaïeur de Saventhem, ensuite drossard
de la baronnie de ce nom , et d'Anne Vander Elst , qui parait
avoir apporté une jolie fortune à son mari. On ne sait rien de
positif sur la naissance d'Isabelle, les registres de la paroisse de
Saventhem, où elle est probablement née, ne remontant qu'à
l'année 1674-. Selon toute apparence, elle vint au monde vers
1605. Elle est désignée comme étant encore célibataire dans
l'acte de partage des biens de ses parents 5, du 28 mars 1635.
Ses sœurs s'étant toutes mariées jeunes et Isabelle ayant tardé
assez longtemps à prendre un époux , pourrait-on en conclure que
le souvenir du brillant cavalier , de l'artiste riche et déjà célèbre
qui avait demandé sa main ne s'est pas éteint de sitôt dans son
cœur? Je ne sais. Ce qu'il y a de certain c'est qu'elle conserva
l'amour des tableaux, car l'on verra, par son testament, qu'elle en
possédait une belle collection. Quoi qu'il en soit, la prétendue de
Van Dyck fut mariée deux fois. Elle épousa d'abord François
De Niel ou De Nielle , sur la famille duquel je n'ai aucun ren-
seignement, sauf que je vois que' la sœur de François épousa le
baron de la Massa 4. Un acte du mois d'octobre 1655 prouve
qu'à cette époque De Nielle vivait encore.
Après la mort de ce premier époux, Isabelle devint la femme de
Nicolas Croiseau ou Croisseaux , commissaire aux vivres au ser-
1 Voy. l'annexe n° I.
* Voy. la généalogie.
3 Elle hérita pour sa part d'une vingtaine de bonniers de terre.
* Voy. la généalogie.
— 440 —
vice de l'Espagne , dont la famille m'est inconnue. Je n'ai pu
trouver la date d'aucune de ces deux unions d'Isabelle, qui n'eut
jamais d'enfants. Elle décéda à Vilvorde, où elle et son mari
paraissent avoir passé les dernières années de leur vie , le
12 février 1 70 1 . Groiscau l'avait précédé dans la tombe le 29 juillet
1088. D'après le désir qu'elle en témoigna dans son testament,
Isabelle Van Ophem fut enterrée dans l'église du couvent de
Tenlroost \ à Vilvorde, à côté de son mari. Aucune pierre tu-
mulaire, ni inscription n'y rappelle aujourd'hui leur mémoire. La
demeure des époux Groiseau à Vilvorde est inconnue aussi. Gomme
malheureusement la toile où Van Dyek avait représenté sa belle
maîtresse sous les traits de la Vierge est perdu à jamais, nous ne
savons rien de sa personne, sinon qu'elle était douée d'une grande
beauté. L'amour du grand artiste en est une preuve suffisante.
Isabelle paraît avoir conservé une bonne santé et une grande
énergie jusque dans l'âge le plus avancé. A quatre-vingt-dix ans
ou approchant, en 1694-, elle soutenait encore un procès contre le
magistrat de Vilvorde, qui voulait loger chez elle le colonel de
Matha, au service des Provinces-Unies. (Elle avait droit sans doute
à l'exemption du logement militaire, comme veuve d'officier). La
signature de son testament est tracée d'une main bien ferme pour
une femme de si grand âge. J'ai cru devoir donner le texte de ce
testament en entier, parce qu'il émane d'une personne intéressante
à divers titres. On y verra que, eu égard à l'époque où elle vivait,
Isabelle était riche.
La généalogie et les renseignements sur la famille Van Ophem
sont l'œuvre de M. J. Vanden Broeck , rentier à Bruxelles, qui a
eu l'obligeance de me les communiquer. Les actes divers que j'ai
cités reposent aux Archives du royaume.
' Voy. pour l'iiistoire de ce couvent, A. Waiters, Histoire des environs de Bruxelles,
tome II, p. 500.
— 441 —
ANNEXES.
I.
Notes diverses concernant les VAN OPHEM.
On trouve les armoiries rie la famille Van Ophem , d'argent à la bande fuselée de
gueules de cinq pièces , dans l'Histoire de la ville de Bruxelles par Henné et
W.\UTEns, tome 11, page 547, planche XIX, (dessin A). Le blason complet avec la
devise « Iktrout op Hem » se trouve dans les manuscrits Nos 15960 et 15961 de la
Bibliothèque de Bourgogne, à Bruxelles.
Les Van Ophem étaient nobles. Ils sont cités comme tels par Butkens, depuis Henri III,
duc de Brabant. Ils ont été alliés à plusieurs familles distinguées du pays et de l'étranger,
entr'autres à des familles ducales de Venise, comme les Mocenigo. Un Jean d'Ophem
signa la fameuse charte de Cortenberg de 1312, et fut l'un des seigneurs que le duc de
Brabant chargea, en 1316, de renoncer, en son nom, aux alliances conclues entre son
pays et le Hainaut. Le chevalier Adam d'Ophem assista, en 1336, au traité de
Termonde, conclu entre la Flandre et le Brabant; en 1339, le chevalier Lambert,
seigneur d'Ophem, promit de suivre le duc Jean III à la guerre contre la France, à
la condition qu'il lui serait payé trente livres de vieux gros. Un Jean d'Ophem , chevalier,
était un des chefs de l'armée du duc Wenceslas à la bataille de Bastweiler, en 1371.
Les fonctions d'amman de Bruxelles ont été occupées en 1341 et 1342 par Josse
Van Ophem; en 1378 par Jean Van Ophem; en 1388 par sire Jean Van Ophem
chevalier, lequel est cité comme maître d'hôtel des ducs de Brabant, en 1390, 1403
et 1411.
Un Guillaume Van Ophem était châtelain de Vilvorde en 1406.
En outre , plusieurs Van Ophem ont été bourgmestres , échevins et receveurs de la
ville de Bruxelles, depuis 1410 jusqu'en 1627.
Un André Van Ophem a été prélat de l'abbaye de Coudenberg à Bruxelles , de 1688
à 1705.
Par suite du mariage de Guillaume Van Ophem (renseigné sub. 3 au document ci-joint)
avec Isabelle Clutinck, lille de Jean et de Jeanne Van Coudenberg, leurs descendants
se rattachent aux lignages de Bruxelles par trois voies différentes , à savoir : Ophem ,
Clutinck et Coudenberg.
Parmi les nombreux domaines que la famille Van Ophem de
Bruxelles a possédés aulrefois, nous citerons la château d'Herlaer à
Vilvorde (VoirWAUTEBS, Hist. des environs de Bruxelles, tome II ,
page 520). Ce domaine fut vendu en 1459 par Henri Van Ophem ,
chevalier, de concert avec son frère Jean et sa fille Marguerite à
Jean de Bourgogne, fils naturel du duc Jean-sans-Pcur.
242 —
Fragment généalogique de la famille VAN OPHEM ,
d'après des actes authentiques et inédits.
1 . Corneille Van Ophem, (ils de Jean, était, en 1390 et 14-11, un des huit chefs de la
gilde de la draperie à Bruxelles; il faisait partie du lignage de Sweerts en 1406.
Il épousa Marie Van der Balelit dite S'Box, dont Gérard qui suit.
2. Gérard Van Ophem épousa Marguerite Van Vorsihuysen et procréa: Guillaume qui
suit sub 3 , Catherine , Adam , Jean et Gérard Van Ophem , lequel épousa Mar-
guerite Schobers ou Cockers dont postérité, dans laquelle se rencontre Jacques
Van Ophem, receveur général de Brabant, seigneur d'Over et de Neder-IIeembeek ,
d'Aa et de la franchise de Luttre, créé chevalier le 12 août 1025, mort conseiller
et commis des domaines et finances des Pays-Bas, le 23 février 1648; son unique
enfant, Maiie-Ëlisabeth Van Ophem, épousa don Paul-Melchior De Villegas, dont
est issue la famille des comtes de Villegas encore existante.
3. Guillaume Van Ophem, fils du précédent, épousa Isabelle Clutinek, fille de Jean,
échevin de Bruxelles, et de Jeanne Van Coudenberg. Ils habitaient Saventhem où
ils ont été enterrés devant le chœur de l'église. Le mari est mort en 1483. Le
partage des biens de leur succession doit avoir été fait devant les hommes de fief
et échevins de Saventhem et Strrrebeek , le 15 juillet 1497. Ils ont eu des
enfants parmi lesquels le suivant:
4. Engelbert Van Ophem, épousa Marguerite Vander Meeren, de la famille de J. Vander
Meeren , seigneur de Saventhem, Sterrebeek, etc., bourgmestre de Bruxelles. Ils
ont été enterrés à Saventhem près de leurs parents. Le partage de leurs biens a
été fait par acte passé devant les échevins de Saventhem, le 26 février 1537.
Ils ont eu les enfants qui suivent :
a. Martin Van Ophem, qui a été marié à Pélronille Cretsaerts , dont postérité.
b. Ursule Van Ophem, qui épousa Antoine Lemmcns, dont postérité.
c. Catherine Van Ophem, qui épousa Jaspar Van den Horycke, dont postérité
</. Michel Van 'Ophem, qui épousa: 1° Elisabeth R y dams, 2° Marie Kemmers ou
Ue Kemers. C'est de lui que descend Michel Van Ophem, docteur et premier pro-
fesseur en médecine à l'Université de Louvain , marié : à 1° Marguerite Weyms,
2° à Marguerite Diericx, et dont une fille, Jeanne Van Ophem, née à Louvain dans la
paroisse de St-Pierre, le 23 avril 1638, épousa François-Ferdinand Van Ophem ,
mentionné ci-après sub 9.
e. Maximilien Van Ophem, renseigné ci- après sub 5.
/'. Jean Van Ophem, sans alliance connue et qui est mort sans postérité.
(/. Guillaume Van Ophem, qui épousa Elisabeth De Kempcnere, dont postérité.
h. Engelbert Van Ophem, mort sans postérité.
5. Maximilien Van Ophem , fils du précédent, épousa Catherine Stroobants. Leurs enfants
— 443 —
sont dénommés dans trois actes de vente de biens passés, l'un devant les écher
vins de Saventhem, le 22 janvier 1590, et les deux autres devant les échevins de
Tervueren, le 19 juin 1598 et le 5 juin 1601 ; ces enfants sont :
a. Engelbert Van Ophem, qui épousa Barbe Culens. Ils habitaient Saventhem et ont
laissé une nombreuse postérité, comprenant les auteurs de M. Van Ophem, notaire à
Aerschot, de M. Van Ophem, brasseur au Château d'Oi' à Uecle, et de Gertrude
Van Ophem , qui fut mariée à Henri Govaerts, bis-aïeule maternelle de M. Jean
Van den Broeck, ancien administrateur-gérant de la Société des manufactures de
glaces, etc., rue de Jéricho, à Bruxelles.
b. Martin Van Ophem, renseigné ci-après sub 6.
c. Jean Van Ophem, dont la postérité est inconnue.
(/. Ursule Van Ophem, qui épousa Jean Van Mastraeten, dont trois filles.
6. Martin Van Ophem, fils du précédent, épousa Anne Mariaens , dont Martin ren-
seigné ci-après , sub 7, Guillaume ou Guillelmine, Engelbert, Jérôme et François
Van Ophem, ce dernier baptisé en l'église de Sle-Gudule à Bruxelles, le 22 janvier
1588. A l'exception du suivant, les autres fils paraissent être morts sans
postérité.
7. Martin Van Ophem, fils du précédent, épousa Anne Van der Elst, fille de Lambert
et de Madeleine Cuelens. Ce Martin a été le premier drossard de la baronnie de
Saventhem, et dans un manuscrit faisant partie des archives héraldiques du Mi-
nistère des affaires étrangères à Bruxelles, n° 5, tome 6, folio 61, on trouve
l'inscription lumulaire suivante portant en lète les armes du défunt qui sont :
d'argent à la bande fuselée de gueules de cinq pièces :
» Hier leyt begraeven den Eersaemen .lu1' Martin Van Ophem , in synen leven
» meyer ende eersten Drossaert deser baenderye van Saventhem, heerlichede van
» Sterrebeke, den tytvan 43jaeren, die slerft den 1 december intjaer ons Heeren
» 1634. Ende die Eersame Jouffrouwc Anne Vander Elst, syne huysvrouwe, die
» slerft den 23 mey 1633. Bidt Godt voor de sielen. »
Le partage de leurs biens a été fait par acte passé devant les échevins de
Saventhem le 28 mars 1635. Leurs enfants sont:
a. Martin Van Ophem, qui épousa Marie Van Meerbeek ; il est mort sans postérité.
b. François Van Ophem, renseigné ci-après sub 8.
c. Anne Van Ophem qui épousa Jean Goossens, dont 8 enfants baptisés à Bruxelles,
dans les paroisses de Ste- Catherine et de St-Géiy, le premier le 2 août 1614
et le dernier le 13 janvier 1630. Père et mère n'existaient plus à la date de l'acte
de partage du 28 mars 1635 énoncé plus haut; leur plus jeune fille, Elisabeth
Goossens , a été mariée avec Martin Bubens , dont postérité.
d. Pétronille Van Ophem, mariée 1° à Léonard de Mallhys, 2°à Nicolas Van Gemel ;
elle est morte sans postérité.
e. Madeleine Van Ophem qui épousa à Saventhem , le 15 janvier 1623 , Jean Finet
ou Phinet. Les registres de la paroisse de S,e-Gudule à Bruxelles renseignent
4 de leurs enfants, baptisés le premier le 30 janvier 1625, le dernier le 21 octobre
1630. La mère était morte lors du partage des biens de ses parents, le 28 mars
— 444 -
1635 ; l'une de ses filles a été mariée au docteur François Lombaerts, dont postérité.
/'. Marie Van Opheio qui épousa , à Saventhem , le 28 septembre 1625, Guillaume De
Coninck , dont 4 enfants baptisés dans la paroisse de Sle-Gudule à Bruxelles , le
premier le 9 septembre 1626 et le dernier le 18 avril 1632. La mère était morte
lors du partage des biens de ses parents, le 28 mars 1635.
rj. Isabelle ou Elisabeth Van Opliem, qualifiée de célibataire dans l'acte de partage
des biens de ses parents, passé le 28 mars 1635, a épousé aptes en î,es noces
François De Nielle, (ils de Christophe et de Marguerite Van Nyverzeele, dont la fille
Marguerite épousa Charles baron de la Massa. Les époux De Nirlle-Van Ophem
vivaient en octobre 1655. En secondes noces Isabelle Van Ophem a épousé
Nicolas Croiseau, Commissaris van vivers au service de Sa Majesté , avec lequel
elle vivait en mars 1678. Le testament du dit Croiseau a été passé devant le
notaire Jérôme De Druyn à Bruxelles, le 17 juillet 1688; il y est qualifié d'époux
d'Isabelle Van Ophem , laquelle signe Elisabeth Van Ophem. Celle-ci a fait son
testament par acte passé le 16 mai 1694, devant le notaire F. Lelieboom à
Vilvorde. Elle est morte le 12 février 1701 à Vilvorde et son mari, N. Croiseau,
le 29 juillet 1688, aussi à Vilvorde. Aucune trace d'enfants.
/(. Jeanne Van Ophem , qualifiée de célibataire dans l'acte de partage des biens de ses
parents, passé le 28 mars 1635, et qui épousa après Henri Van Pauhuysen, licencié
en droit. La femme est morte avant le 22 octobre 1655 et n'a pas laissé de pos-
térité ; son testament a été passé devant le curé de Wechtere , le 5 novembre 1651.
François Van Ophem , fils du précédent et drossard de Saventhem , s'est marié à
Bruxelles, dans la paroisse de Sle-Gudule , le 15 février 1618, à Isabelle De
Hullegaerden, fille de Paul, médecin de l'archiduc Albert, et de D11,J. . . . Kichardt.
Le mari est mort le 10 décembre 1680; son testament a été passé devant le
notaire Claessens le 9 juillet 1677 ; la femme doit être décédée le 27 février 1714.
Leurs enfants sont :
a. François-Ferdinand Van Ophem renseigné ci-après sub 9.
b. Isabelle Van Ophem, fille dévote.
c. Marie-Thérèse Van Ophem, qui a été mariée à Pierre- François- Félix De Mey ,
dont postérité.
d. Catherine Van Ophem dont la suite est inconnue.
e . Alexandre-Nicolas Van Ophem, cornette au service de Sa Majesté, épousa à
Bruxelles, dans la paroisse de Sl8-Gudule, le 21 août 1697, Claire Sotelo ; il est
mort avant mars 1718, laissant une fille: Isabelle-Claire Van Ophem, baptisée
dans ladite paroisse de Sle-Gudule, le 18 février 1698, et qui s'est mariée dans la
même paroisse le 6 octobre 1727 à Antoine-Joseph Hagheman, dont postérité.
/'. Antoine Van Ophem, chanoine d'Anderlecht, enterré dans l'église des Auguslius
à Bruxelles le 11 octobre 1721 , comme il conste des registres de la paroisse
de Sle-Gudule.
fj. Henri-Gabriel Van Ophem, marié : 1° à Gertrude Van Muysenwinckel et
2° à Marie Van Herdenbergh , alias Van Oudenbcrg, dont postérité encore existante
mais déchue.
— 445 —
/(. Guillaume-Antoine Van Ophem, baptisé dans la paroisse de S'e-Gudule à Bruxelles ,
le 16 mai 1668 et dont la suite est inconnue.
9. François-Ferdinand Van Ophem , fils du précédent, a été drossard de Saventhem,
capitaine de cavalerie au service de Sa Majesté et seigneur de Bourgival sous
Isque '. 11 épousa à Bruxelles, dans la paroisse de S'e-Gudule, le 15 novembre
1676, Jeanne Van Ophem rensc ignée plus haut sub 4. On ignore la date du décès
de la femme ; le mari a été enterré dans l'église de Si-Pierre, à Louvain , le 27
septembre 1740. Ils ont eu deux enfants dont on ne connaît pas la postérité
et qui sont :
«. Nicolas-François Van Ophem, baptisé dans la paroisse de Finisterrc à Bruxelles,
le 9 janvier 1678.
b. Charles -Livin Van Ophem, baptisé dans la paroisse de Sle-Gudule à Bruxelles,
le 29 mai 1680.
III.
Testament d'Isabelle VAN OPHEM.
In Nominé Domini Am:n. By den inhauden van desen tegenwoordigen openbaeren
instrumente van testamente zij kont ende kennelijck eeneniegclijcken dat in den jaere
ons Heeren 1694, op den 16e dags der maent van meye, voor mij openbaer nots bij den
souverijnen Baede van Brabànt gpadmitteert , binnen de stadt van Vilvoorden reside-
rende , ende in de prensentie van de getuijgen hier onder geuoempt comen ende
gecompareert is in propren persoene Joe Isabella van Ophem , wede wijlen den heere
cornmissaris Croiseau, mij Not.s wel bekent , gezond van lichaeme, gaende ende staende,
haere memorie ende verstant wel maehtieh wesende ende gebruijkende , gelijk dat ons
is gebleken. Be welcke bekende ende verclaerde dat zij , aenmerkende de broosheijt der
menschelijcker natur ende datter niet sekerder en is dan de doodt, ende niets onsekerer
dan de uure der selver; ende daeromme wel bedacht sijnde, onbedwongen van jemanden soo
sij sijde ende verclaerde , heeft gemaeckt geordonneerd ende gesloten , maeckt ordon-
neert ende sluijt bij desen haeren testamente ende vuijtterste wille , wederroepende ,
casserende, doodt ende te niet doende aile andere voorgaende testamenten , codicillen ofte
donatien, voor datum van desen gemaeckt, bekent ende gepasseert , wiHende ende
begeerende dat dit haer testament ende vuijtterste wille sal stadt grijpen , van weerden
gehauden worden , ende sijn volcomen effect sorteren sa! , t' sij bij forme van testament
codicille donatie inter vivo Ivel causa mords , oft andersints , soo ende gelijck t'selve
alderleerst sal connen bestaen , schoon aile gerequireerde solemniteijten soo volgens
rechten a!s costuijmen hier inné niet en waeren geobserveeit , aen de welcke sij heeft
gerenuntieert , gelijk sij renuntieert mits desen.
1 Bourgival, (Voy. l'Histoire des environs de Bruxelles , tome III, p. 480 et 501).
— 446 —
lu den jeersten beveelt sij testatrice haere ziele, soo wanneer de selve sal comen te
scheijden vuijt haeren lirhaeme aen Godt Almaehtig, haeren Schepper, Maria sijnder
gebenedeijder Moeder , ende aile den hemelschen geselschappe ende hacr doodt lichaem
ter geweyde aerde, begeerende t'selve begraeven te worden in de kereke vanOnse-L.-Vro.
ten-Troost alhier alwaer haeren man saliger is begraeven , ende dat volgens haeren
standt ende comlitie , begeirende dat corts naer hacr afllijvichheijt zutten worden gecc-
lebreert twee hondert gelesene missen van requiem, voor ieder der weleke sal worden
betaell ses stuijv. , ende dat in alsulcken cloosters ende kercken daer lut haeren naer te
noemen exécuteur testamentair sal gelieven.
Commende voorts totter dispositie van aile haere tijdelijke goederen , hacr bij Godt
Almachlieh op deser werelt verleent, soo lact ende maekt zij restatrice aen Jowe Maria
Theresia van Opbem , docliter wijlen den heere François van Ophem , in sijnen levene
drossaert van het graefschap van Erps , Quarebbe ' bandcrye van Saventhcm , Sterre-
beke ende Nossegem , ende vro. Isabella de Hullegaerde , des testatrice broeder en
swaegerinne , alsnu getrauwt melten heere De Meye , de somme van vier duysent
guldens cens , boven die meubelen die sij testatrice aen baer metten levende lijve heeft
gegeven , ende van nu an" is genietcnde, mitsgaders alnoch boven die lyffrente van vier
hondert guldens t'sjaers aen haergemaekt ende gelegateert bij wijlen haeren man saliger, deu
heere commissaris Croiseau , volgens sijnen testamente gepasseert voor den Nots Hiero-
nijmus De Bruijn ende sekere getuigen op den , de welke sij naerder testatrice
alllijvicheijt sal trekken ecde vinden tôt laste van de erffgenaemen desselfs haeren man
saliger; sluijtende de selve haere nichte Maria-Theresia van Ophem daermede vuijt haere
voordere goederen , begeirende dat de selve hacr mrtte voorsch. vier duijzent guldens
eens, boven die meubelen ende lijffrente sal vergenoeght ende content hauden , sonder
iet voorders te connen ofte moegen te pretenderen tôt laste van haere te nomincrenc
erffgenaeme vuijt wat hooffde het sij ofte niet.
Item, laet ende maekt sij Testatrice aen Joffe Isabella Van Ophem, geestelijcke dochtere
haere nichte ende meter -, sustere der voorsijrie Joe Maria-Theresia den ledekant met
cen groen behansel , bedde , hooftpullinck , sargie ende silvere weijwater vat
Item , laet ende maekt de voors. Isabella Van Ophem de somme van twee hondert
guldens eens de weleke sij naer de Testatrice alllijvicheijt sal trekken en vinden tôt laste
van den proviadoor Thenarts oft sijne erffge.
Item , maekt ende laet sij teslatric aen Joffe Catharina Van Ophem , haere nichte ,
sustere der voors. twee Jouff" het ledekant met het blauw behansel, bedde, hooftpullinck.
Item , maekt end*s legateert sij testatrice aen Jue Maria Goosscns, begijntje op het groot
begijnhoff lot Mechelan eene renl van vier hondert guldens capitael, die sij testatrice, is
trekkende lot laste van den heere p.b.re 3. De Couinck , wooneude lotBrussel, weleke
voors. rente is maer op simple obligatie.
1 Quarebbe , aujourd'hui Querps,
'-' C'est-à-dire filleule.
•" Presbyter.
— 447 —
Item, maekt en legateert sij testatrice aen Joffe Catliarina Goossens, suster der voors.
Jouffe begijner, eene rente van hondert guldens capilael , met die verloopen van die,
tût iaste van die wede van Frans Lombarts , getrauwt met lieer Meer drossaert der
Banderije van Meerbeeck.
Item , laet ende maeckt sij testatrice aen de selve Joffe Calharina Goossens hondert
guldens eens, die sij testatrice is trekkende ende naer haere afflijvicheijt sal vinden lot
laste van den proviadoor Thenarts oft sijne erffgenaeme.
Item, maekt ende legateert sij testatrice alnoch aen de voorss. Joe Catliarina Goossens
boven die rente van hondert guldens capitael en boven die hondert guldens eens, tôt laste
van proviadoor Thenarts haer roodt behansel met het haute ledikant, bedde ende twee
paer slaeppelaekeiis ende een halff dosijn van haer Testatrice hemden ende vijftig guldens
eens in gelde.
Item, soo laet ende maeckt sij testatrice aen Maria De Molder voor haeren getrauwen
dienst een halff blinder lants gelegen tôt Saventhem in lut Goddevelt, tegcnwoordich in
huere beseten bij Bertel Janssens.
Item, maekt ende legateert sij testatrice aen .lonkr Nicolaus-Franeiscus Van Ophem
sone wijlen ' tien heere capiteijn van peerden Françnis-Ferdinande Van Ophem, ende
vre Van Ophem , de somme van drie hondert guldens eens , de welcke sij testatrice is
vindende en naer haere afflijwicheijt sai moeten Irekken van den proviadooi Thenarts of
sijne erffge.
Item, laet ende maeckt sij testatrice aen Joc Isabella Rubbens de somme van vyftict
guldens eens die sij testatrice heeft geleent aen haer matant van Naemen.
Item, laet ende maekt aen Guillaume-François De Meye haeren peter* de somme van
hondert guldens eens die welcke sij is vindende tôt laste van den proviadoor Thenarts
ofte sijne erffge.
Comende voorts totle dispositie van aile haere resterende goederen , soo meubelen a!s
immeubelen , van wat natuere die selve moegen wesen , egeene vuitgeesondert nochte
gereserveert , soo laet ende maeckt de testatrice aile die selve aen heer François-Fer-
dinande. Van Ophem, heere vanBourgival, capiteijn van peerden, d'heer Nicolaus-Alcxander
Van Ophem, cornet gereformeert ten dienste van sijne Ma', d'heer Henricus-Gabtïel Van
Ophem , ende d'heer Guiilielmus-Antonius Van Ophem , mitsgaeders aen Jouff™ Isabella
ende Catharina Van Ophem, aile kinderen van wijlen den voors. François Van Ophem
ende vroe Isabella de Hullegaerde , nomirende de selve haere eenige ende universele
erffgenaemen , met vollen recht van justitutie om aile deselve goederen bij hun respectieve
hooffde gelijk gedeijlt ende gepartageert te worden. Willende ende begeijrende dat aile
het geene voorsch. is punctuelijck sal worden onderhauden ende achtervolght , sonder
contradiclie. Ende op dat dit. haer testament en vuijlterste wille te beter saude worden
achtervolght ende volbracht in aile sijne puncten, soo ist dat sij testatrice kiest ende stelt
voor exécuteur testamentair van dit haer testament den voors. heere Franchois-Fer-
1 C'est une erreur comme on le verra plus bas. Le capitaine est mort en 1740.
Voir la Généalogie, sub. II.
- Filleul.
— 448 —
dinand Van Ophem , capiteijn van peerden &*, haeren neve , met vollen maglit van ailes
te doen ende dirigeren naer rechten , laelende aen den selven daer voor , boven het
geene voors. is , eene van haere sclioonste sehilderijen naer sijnen keus.
Adhererende nijettemin alteijt sij testatrice haer minderen , meerderen ende veran-
deren soo dickwils het haer goet duncken ende gelieven sal nopende dit haer Testament.
Aldus gcdaen ende gepasseerl binnen Vilvoorden, ten dage, maende ende jaere als boven,
ter prcsentie van Gillis Lanbeers, Franchois Langenberg, als getuijgen hier over ge-
roepen en gebeden , de welcke beneffens die testatrice gevraeghl sijnde oft sij conden
sehrijven , heeft den voorss. Franchois Langenberg geantwoordt neen , ende den voors.
Gillis Lanbeers, beneffens de testatrice dut jae , ende dienvolgens de minute doser
beneffens mij notaiis onderteekent.
Signé Elisabeth VAN OPHEM.
Signe Giellis LANBEERS.
+
Dit is lift hantmerck van Frans. Langenberg
verclaerende niet te connen sehrijven.
Mij présent als Nots.
Quod allestor
F. LEL1EBOOM ff Nots.
o
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té
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P
en
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O
LA CHASSE DE S. REMACLE
A STAVELOï.
NOTICE
par M. Arsène de NOUE,
MEMBRE CORRESPONDANT ÉTRANGER A MALMEDY.
Le 1er octobre 1795, l'ancienne principauté de Stavelot, em-
portée par le flot ravageur de la Révolution , était incorporée à la
France; elle perdait son nom à jamais. Elle était bien vieille, elle
avait vécu onze siècles et quarante-sept ans.
La tempête avait déraciné jusqu'aux fondements séculaires ; non
seulement le prince et les moines de cette principauté ecclésias-
tique avaient pris le chemin de l'exil , mais les monuments mêmes
de son antique histoire avaient disparu. Les documents, la biblio-
thèque , les objets d'art , les souvenirs , tout était enlevé et l'admi-
rable église , chef-d'œuvre du style romano-byzantin , n'avait pu ,
malgré sa splendeur , arrêter la main sacrilège du vandalisme
révolutionnaire.
Cependant, après le vaste naufrage, deux épaves vinrent échouer
Commissaires rapporteurs : MM. A. Van Hassfxt el M.-L. Polaix.
— 452 —
aux rivages de la patrie ; chose étonnante , ce furent deux vieilles
reliques de vieux et grands saints : saint Remacle , le fondateur,
et saint Poppon , le restaurateur du onzième siècle.
Nous allons nous occuper du cercueil qui contient le corps de
saint Remacle et décrire cette châsse , l'une des plus précieuses et
des plus belles que possède la Belgique.
Ce vieux souvenir de la fondation qui résume aujourd'hui tout
ce qui reste de ces temps antiques , ces reliques vénérables , ce
sarcophage devant lequel l'historien , l'archéologue s'arrêtent
pensifs, nous force de remonter avec lui la source des âges et de
redire en sa présence, dans une esquisse rapide, ce que fut ce
fondateur , ce qu'a été sa fondation avant de décrire l'objet artis-
tique, cette gloire de Stavelot et son plus précieux trésor.
I. — SAINT REMACLE.
La vie de ce grand apôtre des Ardennes a été écrite pour la pre-
mière fois au neuvième siècle , cent quatre-vingts ans après sa
mort, par un moine de l'abbaye de Stavelot et Mabillon nous a
conservé sa légende *; c'est ce même anonyme qui a composé le
premier livre des miracles 2. Au Xe siècle , un autre moine de
Stavelot , l'immortel Notger, dont de savants travaux ont aujour-
d'hui complètement vengé la mémoire sacrée, retoucha ce premier
travail 3 ; au même siècle , le chroniqueur Hariger amplifia la
version de Notger 4. Fisen, dans ses Flores, Laurenty , dans sa
chronique, nous ont donné de nouvelles éditions, et enfin Ghes-
quièrc et les Bollandistcs ont couronné ces travaux biogra-
< Sœcul. secundo Beued. , page 488
2 Histoire littéraire de. France, V, 94.
5 Apud Snrium V , 3 sept.
1 Apud Chapeau ville , tome 1. Thietmar, dont parle Chapeauville , n'est autre que
le vieil auteur de Stavelot.
— 453 —
phiques 1, el partout où ont passé ces savants pionniers, ils ont,
à travers les ronces de la chronologie et les mystères de la légende ,
tracé les larges et royales voies où le voyageur même le plus
inexpérimenté ne peut plus s'égarer.
Remacle était né de parents nobles , dans la province de la
première Aquitaine. Son père avait nom Albuce, sa mère était
Mattime ou iMariana. Les savants placent l'année de sa naissance
entre 612 et 624.
Sa vie s'écoula pendant le septième siècle, siècle de sainteté et
de gloire pour l'Eglise et de la fondation des monastères d'Occident;
époque à la fois vivace et aux mœurs barbares, origine de la puis-
sance de ces fiers Maires du Palais , un des vieux honneurs de la
Belgique et de la décrépitude royale , où le peuple traita la royauté
comme une vieille loque et les rois comme des reliques vivantes
que l'on place à l'ombre solitaire des sanctuaires monastiques ;
jour de départ enfin, au milieu des assassinats de rois, de reines
et d'enfants de rois, de la prépondérance des Francs orientaux sur
les Francs occidentaux.
Saint Remacle fut d'abord l'élève de saint Sulpice ; saint Eloi ,
cet ardent propagateur de la vie monastique, le distingua bientôt et
le plaça dans le monastère de Solignac qu'il avait fondé et qui
était déjà florissant (637); saint Remacle en devint le premier
abbé 2.
Dagobert, ce roi qui résume si bien son siècle, ce bon roi
qui fut un empoisonneur , un débauché et pourtant le fondateur de
Saint-Denis , ce capitole des Français où se conservaient leurs
chroniques, avec les cendres royales, comme les pièces à l'appui
des faits , Dagobert appela Remacle à sa cour , ce qui a fait dire à
1 Ghesquière , Acta 55. Belg.— Acla SS. 3 Sept.— Fisen, Flores Eccles. Leod.,
p. 396. — Manuscrit Laurenty.
°- Mabillon, parte 2. Sœruli 3 bened. — Tom. 1, A.nnalium pp. 352 et 353.
— 454 —
quelques biographes postérieurs qu'il le nomma son chancelier ' .
Sigebert avait succédé au bon roi dans l'Austrasie (632) et ce
fondateur de monastères rencontra dans Remacle le saint architecte
de ses libéralités inouïes 2. Saint Judon de Metz sacra saint Remacle
qui devint évoque régionnaire, selon Mabillon et Martène , c'est-
à-dire sans diocèse fixe , mais destiné à porter l'Évangile aux
nations idolâtres 3. Au milieu de ces courses apostoliques, notre
saint jeta les fondements du monastère de Cugnon sur la Semoi
et en devient le premier abbé (64-4-647) 4.
Cependant c'était la destinée de Remacle de semer en tous lieux
des monastères sous ses pas fécondants. Il s'enfonce dans les
déserts et les vastes solitudes de l'Ardenne.
Il traverse les fagnes, fanias transit, arrive sur les bords de la
Warchennc et trouvant ces lieux , dit le légendaire , favorable à
l'habitation par leurs eaux poissonneuses et leurs gras pâturages,
il y renverse les pierres de la Diane germaine, bénit les fontaines
et en ces lieux il plante la croix; Malmedy est fondé (648).
Après une administration de trois ans, saint Amand résigne
ses fonctions d'évêque de Maeslricht 3. « Le peuple, l'élection des
prêtres , l'assemblée des grands , l'acclamation de tous les ordres »
appellent saint Remacle pour le remplacer sur ce siège illustre
(650) 6. Il n'oublie pas cependant ses chères Ardennes.
1 Non satis constat, dit Mabillon, Ann. bened. II, p. 834.
* Duodecim monasteria œdificavit inter quœ eminents Stabulaus et Malmunda-
rium. Vila St-Sigerberli ap. Ghesquière , III, 07.
3 Mabillon, / c. Acta SS. — Martène, Impérial Stabul. vindicia, 21 .
1 Martène, Amplis, collect. Il, p. 6 et Mabillon, //, 1091 et annalium I, 352.
— Galtiu Ctiristiana II, 185. — Acta SS. I Februarii, p. 371.
5 Nous disons Maestricht et non Tongres , parce qu'il n'est plus guères permis au-
jourd'hui, après les judicieux commentaires de Henschenuîs et de J. Veluius (Giiksquièiie,
III, 431-437) d'admettre l'autre opinion.
0 650. D'après les documents de Stavelot , Amand a régné trois ans , c'est incontesté,
mais on diffère sur l'époque de son avènement. Fisen et Chapeauville le fixent à l'an
637 ; Alberic à l'an Oit ; Henschenius à 647 ; Mabillon et Maktène après 017 ;
LtcoiNTE et St. Marthe placent l'élévation de saint Remacle i 653, Calmet à 652,
Pagi ;> 649.
— 455 —
Malmedy était situé dans le diocèse de Cologne , il s'avance
donc, dit Notger, vers l'Occident , traverse le ruisseau de Challes
qui formait la limite des deux diocèses , arrive au pied d'une
montagne sur les bords de l'Amblève , mais s'apercevant que ces
lieux étaient trop resserrés dans les montagnes, revient vers l'Orient
et fonde son monastère dans un lieu qui , depuis des temps reculés ,
s'appelait Stabulaus (650). C'était l'année de son élévation au
siège de Maestricht , la deuxième du pontificat de Martin , la
troisième depuis la mort de Dagobert. Il conserve la charge d'abbé
et donne à ses disciples les règles et les exemples des moines
d'Egypte et des solitaires de la Thébaïde, et vaque en môme temps
aux innombrables devoirs de l'administration de son vaste diocèse.
Sigebert apprit avec joie cette nouvelle plantation de la foi dans
les solitudes de l'Ardenne et l'enrichit de ses dons.
L'évêque Remacle établit un de ses moines du nom de Théodart
pour administrer, pendant ses absences, les deux monastères et
bientôt (660), fatigué du tumulte, il revient dans sa chère solitude
et choisit ce même Théodart pour son successeur au siège de
Maestricht ex permissu Régis et Principum et Clerï totiusque
populi assensu.
Le retour de saint llemacle attira de nombreux disciples à
Stavelot, et si l'on ne peut, en aucun cas, compter parmi eux
ni saint Lambert ni saint Hubert , il fut le maître de saint Théodart,
de Babolin et d'Hadelin , ce noble d'Aquitaine , le fondateur et le
premier abbé de Celles près de Dinant que Pépin de Herstal combla
de largesses qui tournèrent plus tard au profit de Visé.
Tout ce que dit Notger des donations faites à saint Hemacle
et de son voyage à Rome ne supportent pas la critique historique;
Notger n'était pas fort en chronologie.
L'année de la mort de ce grand homme est encore couverte
d'obscurité. Nous la fixons à l'an 669. Mabillon la reporte à l'an
661, puis la retarde jusqu'en 664, Martènc après 666, Lecointe
— 456 —
à l'an 068, les Bollandistes à 669, Fisen , Bortholet et Dewez à
l'an 675, le moine Sigebert et Laurenty à 691. Ces différentes
suppositions proviennent de la manière dont les divers auteurs
datent les diplômes des fondations.
Nous n'avons ni le pouvoir ni le droit de discuter les innom-
brables miracles dont les hagiographes ont parfumé les vénérables
reliques de saint Remacle. Cependant le pays de Stavelot peut
être justement fier de son fondateur et sa sainteté a été reconnue
comme incontestée et incontestable par toutes les autorités compé-
tentes *. Son culte est honoré dans de nombreux diocèses dont
nous ne citerons que ceux de Liège , Trêves , Cologne , Verdun ,
Wurtzbourg, Mayence, Tournai et Cambrai 2.
Sa fondation avait jeté de profondes racines, il est resté au
milieu d'elle jusqu'à son écroulement, car, nous dit Martène qui
visita ces lieux célèbres avant la Révolution , « outre le corps de
saint Remacle , on montre encore dans le trésor sa chasuble , son
étole , son manipule , sa chape , ses sandales , sa cucule et son
peigne ». Tout cela a disparu, mais le corps du fondateur et son
cercueil reposent encore aux lieux où fut autrefois la capitale du
pays de Stavelot.
II. — l'ancien pays de stavelot.
Remacle avait donc planté son pays dans un coin austrasien de
la sombre Ardenne dont la vaste forêt, dit César, baignait ses racines
au Rhin , traversait la Moselle, étendait ses bras gigantesques sur
le pays Rhénan pour aller porter ses ombres aux flots de l'Océan.
L'aigle romaine y avait étouffe dans ses serres l'Eburonie vaillante
1 Mabillon , Secund. Sec. Dened. 488. — Molanus indiculum sanct. et natales
— MiR/EUS in fuslis , p. 510. — A. S. S. S sept. — Marlijroloijii , Galesini Pari-
siensis. — Mautène, Ampl. Coll. VI. 675.
* Acta SS. Tom I, febr. p. 635. — Breviarium Coloniense, anni 1498.
— 457 —
qui s'y était abritée et l'avait englobée dans la seconde Germanie;
mais chassée elle-même , Rome avait reculé devant les barbares
et en 532 ce pays faisait partie de l'Austrasie *. C'est dans cette
contrée que Remacle fonda Stavelot , qui devint ville et donna , à
l'instar de toutes les capitales voisines, son nom au pays. Ce bap-
tême imposé par le saint résista, intact et glorieux, à tous les bou-
leversements. L'Austrasie perdit son nom, la Lorraine s'en empara,
Stavelot suivit les destinées de ce dernier pays2 et passa avec lui
à l'Allemagne (922-925). Lorsque Sigismond fit de ce grand état,
une confédération d'états (141 1) et qu'Albert eût divisé l'Allemagne
en six cercles , le pays de Stavelot fut incorporé dans le cinquième
qui comprenait le Bas-Rhin , les Pays-Pas et la Westphalie. Plus
tard, à la nouvelle division en dix cercles, dans la diète de
Cologne (1512), division confirmée par Charles V, le pays de
Stavelot fit partie du huitième cercle : celui de Westphalie, le plus
abondant en hommes de guerre. Enfin , Stavelot ne perdit son nom
qu'avec la destruction du vieil empire d'Allemagne. Bien qu'ap-
partenant à la grande famille féodale, les chefs du pays de Stavelot
sauvèrent leur petite principauté par la force de leur caractère
religieux , et empêchèrent qu'elle ne fût ensevelie sous les ruines
de la féodalité.
Dans les derniers temps et jusqu'à la Révolution, la principauté
de Stavelot , bornée au nord par le duché de Limbourg , à l'est
et au sud par le Luxembourg , au nord-ouest par le marquisat de
Franchimont et le Condroz, se composait des postelleries de Stavelot
' Grégoire de Tours, Hist. livre 5, chap. 14 , 19. — Annales metenses ad
annum 688. O&terliuden, Luijden , Liulen , Laden, Leuten des Osters habitants
orientaux. Puis, Notger in vita S1 Remacli dit: Austrasia osler-reicli. — Freueg chap.
38 et 40. — Aimoin lib. 4. Chap. v27.
2 L'abbaye de Stavelot est spécialement mentionnée dans le célèbre partage entre
Mersen et Herstal (870) et attribuée à Louis de Germanie. Annal, bert. a0 869. Apud
BoucQut/r Vil, p. 109. — Mir/eus, Opéra diplomatica , vol. I, p. 28.
— 458 —
et de Matmedy et du comté de Logne, formant ensemble une popu-
lation de 28,000 habitants.
Ce petit pays , épanoui à l'ombre de la libre, exempte et impé-
riale abbaye, ne releva jamais au temporel que de l'empereur et
au spirituel que du siège apostolique , immédiatement. Et cela dès
son origine. En effet, bien que situé au comté d'Ardenne qui l'en-
serrait de toutes parts, Stavelot ne figure dans aucun des nom-
breux diplômes qui font mention de ce célèbre gau. La plus grande
propriété des rois d'Austrasie fut la forêt des Ardennes et ces rois
ne l'appelaient jamais autrement que notre forêt1. Stavelot y trouva
son enclave sacrée et devint, dès l'abord, franchise ecclésiastique
dans la propriété privée du souverain.
Nous ne voulons pas refaire ici l'histoire de ce petit peuple,
mais présenter dans une esquisse rapide les particularités saillantes
et uniques dans l'histoire civile et ecclésiastique qui ressorlent de
la constitution primitive et de la suite de l'histoire de cette princi-
pauté.
Dès l'origine, l'abbé de Stavelot cacha sous sa cucule des droits
régaliens et nous apparaît sous le double aspect avec lequel il
traversa le moyen âge et les temps modernes. Dans l'ordre
spirituel , comme membre immédiat de l'Eglise romaine et chef
ecclésiastique; dans l'ordre temporel, comme haut vassal de l'empire
et membre de la grande famille féodale et ensuite de celle des
souverains. Voyons donc dans ces deux ordres cet assemblage
tout à la fois , pour parler selon l'archéologie polyamatype et po-
lychrome.
L'abbaye de Stavelot, qui ne relevait que de Rome 2 , était com-
1 In Terra noslra silvà Arduennense. Diplôme de Sigebert. Martène, ampl. coll. II, 6.
— In forestre nostra Arduenna fondation de Cugnon. — Lacomblet , Urkundenb.,
1, p. 20, in silvâ nostra Arduenna.
* Bulles de Silvestre de l'an 1000 apud MartÈne amplis, collect. 11, p. 54, -
de Grégoire V , de l'an 996. Ibidem , p. 52 , — de Léon IX , de l'an 1019. Ibidem ,
p. 07 et suiv. les trois dernières bulles en original aux archives de Dusseldorf.
— 459 —
posée de deux monastères égaux, Stavelot et Malmedy , frères
jumeaux qui , dès leur origine géminée , avaient été réunis cano-
niquement et à perpétuité pour ne former qu'une abbaye impé-
riale , libre et exempte *.
Dès le VIIIe siècle, nous voyons les grandes abbayes, dans
leur riche exubérance, tantôt fonder des colonies ■, tantôt recevoir
des rois d'autres monastères en dons : sous Charlemagne , sous
Pépin-le-Bref qui donna au pape Paul le monastère du mont
Soracte3, dont son frère Carloman avait sanctifié les cellules; tan-
tôt recueillir dans leur sein et sous leur protection des monastères
déchus. Dans tous ces cas, ces monastères n'étaient que des Celles
ou prévôtés qui ne possédaient ni les droits réels d'aliénation , ni
les droits personnels de profession, ni ceux à' élection. Stavelot et
Malmedy, enfants du même fondateur, reçurent seuls la plénitude
de ces trois espèces de droit : Prior et malmimdariense monas-
terhim, disait l'empereur Léopold , cum Priore et monasterio
Stabulensi unum abbatial et principatus corpus sunt, quem ad-
modum ex actis, ac ipsismet Stabulensinm elogiis et observantiœ,
continuai vetustate constat.
Nous n'ignorons pas que plusieurs prieurés en France , ceux de
Cluny par exemple, jouissaient de grands droits, mais nous
attendons toujours la preuve que leurs moines aient eu droit
d'élection; tout au plus si leur prieur seul, dans quelques Celles,
venait s'asseoir inter pares du monastère supérieur, aux grands
jours des élections.
L'abbaye de Stavelot qui n'était à'aucun diocèse se composait
de deux monastères dont l'un, Stavelot, était situé dans le diocèse
de Liège, et l'autre, Malmedy, dans celui de Cologne. La petite
rivière de la Ghalle formait la séparation , et lorsque l'Europe
1 Specilegium Ecries., IV, 781.
■ Captul. aquisgrani canon., 45.
s Epistola Carolina, XII.
— 460 —
tenait ses assises à Vienne pour parquer les peuples et les nations,
cette petite rivière et cette séparation diocésaine fut encore admise
pour la frontière entre la Prusse et les Pays-Bas. Cent ans après
la fondation de saint Remacle, l'abbaye de Foulde reçut aussi son
patrimoine de fondation des deux côtés de la Foulde qui séparait
aussi deux diocèses, mais l'abbaye n'était pas géminée.
Enfin une dernière particularité ecclésiastique se rencontre dans
le caractère des abbés.
Les moines de Stavelot suivirent d'abord la règle de saint
Colomban * et se rangèrent bientôt sous la bannière de saint
Benoit, de cet ordre célèbre qui devait, par une triple gloire,
convertir l'Europe, défricher ses déserts et rallumer dans son
sein le flambeau des sciences. Nous trouvons à la tète de chaque
abbaye un abbé (abba , père). Ces abbés dans la suite des temps
'furent tantôt réguliers , c'est-à-dire élus selon les règles cano-
niques; tantôt abbés commendataires , aux tristes jours où les
abbayes furent données en fief à de hauts personnages ou à des
soldats et Charles Martel ouvrit la marche en les donnant à ses
soudoyers; tantôt abbés mitres, avec droit de porter les insignes
de la prélature; tantôt abbés-évêques, avec juridiction épiscopale,
tantôt princes-abbés avec droit de siège et voix délibérative aux
diètes de l'empire; tantôt enfin abbés-laïques et abbés-comtes,
c'est-à-dire non revêtus du sacerdoce. Or l'abbaye de Stavelot,
pendant le cours des longs siècles de son existence, vit à sa
tête des abbés revêtus de tous ces différents titres, avec cette
distinction toutefois , quoi qu'en dise le savant Martône , que les
abbés-évêques ne le furent que ex accidente et jamais ipso facto ,
c'est-à-dire que la qualité d'évèque ne fut , dans aucun temps ,
inhérente à la dignité abbatiale de Stavelot.
Si nous passons à l'ordre civil , nous rencontrons encore dans
' Gallia Christiana , III . 940.
— 461 —
la principauté de Stavelot quelques particularités exclusives.
Le prince-abbé ne relevait que de l'empereur et son pays
jouissait de la grande immunité.
Lorsque les rois permettaient à de pieux anachorètes d'élever
leurs tintoria in locis vastœ solitudinis , ils apposaient toujours
à la concession le devoir fiscal de payer la redevance que l'on
appelait census. C'était de règle ; les monastères qui prétendaient
en être exempts devaient, ainsi qu'on le voit dans le 6e canon du
concile d'Orléans (511), fournir la preuve qu'ils jouissaient de
immunitate. C'était une reconnaissance de souveraineté. Stavelot
en fut revêtu dès son origine *.
L'abbé de Stavelot fut prince, d'abord d'après le principe
adopté , selon Tacite , chez les Germains pour tous les chefs qui
jus per pagos et vicos dixerant 2, et ensuite il devint prince
d'empire votum et sessionem in comitiis habens 3.
Mais ici se présente encore une particularité. Les monastères
exemptés du census n'en devaient pas moins le service militaire et
le payement de quelques tributs à l'empereur 4 ; les princes seuls
en étaient exempts et cependant Stavelot fut le seul monastère
dont l'abbé fut élevé à la dignité de prince et dut en même temps
le service militaire. De là l'existence, au pays de Stavelot, de ces
puissants avoués dont nous avons ailleurs retracé la turbulente
histoire.
En outre les abbés de Stavelot étaient comtes de Logne , de ce
château-fort dont les grandes ruines redisent aux échos du rocher
gigantesque les formidables noms de Wibald , de Léon X ,
' Ut hoc totum teneant atque possideant cimi emunitate Charte de 666 apud
Polain , Recueil de lois, p. 3.
2 Coringius. Dissert, de civibus imperii.— Bœilokus, lib. 7, Nolitia Imperii Romani.
3 Anno 813 Carolus Episcopis, abbalibm m loco positis Rheganus tit. 2. 6. 10. —
Hincmar , de ord. palatii. Epist. M.
4 Apud Baluzium, tom. I, p. 589. Nolitia île monasteriis quiregi mihtiam debent.
— 462 -
de François Ier, de Charles V, du Sanglier des Ardennes, de Nassau
et enfin d'Albert et d'Isabelle *, et murmurent au voyageur la tou-
chante légende de la grotte à la galle d'or.
Nous rappellerons enfin en passant les célèbres écoles de Sta-
velot, les rivales de celles de Liège et déjà célèbres avant elles;
un seul exemple suffit pour prouver leur supériorité , c'est qu'au
temps de Poppon , au onzième siècle, elles fournissaient des abbés
à quinze des plus illustres abbayes de l'époque ; nous citerons les
noms de ses chroniqueurs Jean, Zantfliet, Everhelme ; de ses
grands-mailres Druthmar , Notger , Reinard , Thierry ; de ses
grands hommes Wibald , Poppon ; de ses artistes , ces fameux
copistes du onzième siècle , ces modernes peintres et sculpteurs :
les Delcourt, les Ruxthiel. Mais nous n'oublierons pas ces belles
bibliothèques et tous ces grands ouvrages classiques sauvés par
Wibald et ses moines; son chartier qui ne le cédait en importance
pour le nombre et la valeur des documents qu'à celui de St-Denis.
Il n'y a pas jusqu'au langage qui ne puisse , dans cet ancien
pays , appeler les sérieuses études de l'archéologue et du savant.
En effet, le pays de Stavelot , par son enclave dans le diocèse de
Cologne, fit reculer la langue tudesque jusqu'à ses frontières.
L'église de Stavelot était encore un chef-d'œuvre du style
romano-byzantin et elle contenait des richesses archéologiques
immenses.
Toutes ces grandeurs , toutes ces richesses avaient traversé les
siècles, cachées sous la robe d'humilité de ces puissants moines ;
tout a été dispersé, tout cela a disparu , et nous allons nous occuper
de la dernière ruine qui est le résumé de toutes ces grandes choses
et qui a été pendant douze siècles le muet témoin de toutes ces
splendeurs et de tous ces abaissements.
' Études historiques sur le pays île Stavelot, pag. "203-283.
— 463 —
III. — LA CHASSE.
La première étude de l'archéologue devant un monument est de
préciser son acte de naissance. Les uns, et ce sont les savants, pro-
cèdent par synthèse et donnent au monument son baptême de visu
et a priori par la constatation de ses caractères formels , techniques
et architectoniques ; on sait cependant à quelles hypothèses et à
quelles étranges erreurs cette grande méthode conduit l'investiga-
teur par l'incertitude même de ces caractères et de ces formes
plastiques. En effet, est-on d'accord sur le caractère même pré-
dominant de l'art gothique, sur l'ogive? Sur son origine? Sur
l'époque où elle est apparue aux yeux charmés de l'Europe?
D'autres, au contraire, préfèrent la preuve analytique et cherchent
dans les monuments historiques l'âge des chefs-d'œuvre que le
moyen-âge ou l'antiquité nous ont légués. C'est la marche la
plus sûre, si on peut la combiner avec la première; elle reste la
plus convaincante en général lorsqu'on l'emploie môme seule et
que l'on ne la fait pas dépendre de subtiles hypothèses , d'inter-
prétations de textes et de discussions contestées. Devant la châsse
de saint Remacle, nous serons assez heureux pour produire ces
preuves incontestables puisées aux sources historiques.
Le savant Martène nous dit d'abord1: « On croit à Stavelot que
c'est saint Goduin , quatrième abbé qui a fait faire cette châsse,
parce que, dit-on, c'est lui qui le tira de l'oratoire de Saint-Martin
où il avait été enterré pour le transférer dans la principale église
où i,l l'exposa dans un lieu éminent, mais elle ne nous paraît pas
d'une si grande antiquité; je serais plus porté à croire que c'est
l'ouvrage de saint Poppon ou de Wibaldus. »
Nous trouvons l'origine de la fausse tradition de Stavelot dans
le passage suivant d'un ancien manuscrit publié par Marlène 2 et
1 Voyage littéraire de deux Bénédictins , II, p. 157.
- Maktène, Amplissima Colleit., Il, col. 60.
— 464 —
qui porte : « Nam sicut a patribus noslris veredicâ relatione est
relatum scripto que proditum , Goduinus , qui quartus in regimine
loci beato confessori abba successit (670), ab oratorio Sli Martini,
ubi prius humalum continebatur, in monasterium principale SS.
apostolorum Pétri et Pauli ab ipso sagaci industrie constructum
ac consecratum offîciosà devotione VII. Galend. Julii transtutit
(Vide Bollandini operis lom V Junii pag. 4) quseque etiam in
tain magnifico negotio expediebunt , congruo honore effleaciter ad
implavit. Siquidam lecticam auro , argentoque suis expensis
dignâ decoris prserogativà fabricatam pneparavit, in quam jam
arida ossa a corruptâ ejus carne sequestrata locavit, retroque
altare prœscriptorum apostolorum in sublime, ut esset omnibus
evidens, condigno apparatu statuit. »
Bien que Martène , d'après les termes mêmes de l'auteur ,
proclame que l'écrivain qui raconte celte invention du cercueil de
Remacle en 1040 soit un témoin oculaire, sa narration toute
entière prouve le contraire, et ce n'est qu'un pseudo-turpin au
petit pied. La preuve archéologique et historique en est évidente.
Dans les premiers siècles du moyen âge , les corps des saints
reposaient dans les cryptes sous les souterrains des autels, et les
temples formaient comme leur mausolée ; ce n'est que vers le
XIe siècle, dans les églises d'Occident, que ces corps saints furent
tirés de leurs cryptes , pour être exposés sur les autels à la
vénération des fidèles , dans de riches reliquaires représentant aux
XIIe et XIIIe siècles des chapelles et des églises '.
Mais la fausseté de tout ce récit apparaît mieux encore aux
yeux de l'histoire. Cet anonyme nous raconte des faits extraordi-
naires du règne de saint Poppon, dont Everhelme, l'ami, l'écrivain
de la vie de ce grand homme , ne nous dit rien dans sa longue
biographie ; il y a plus , cet anonyme oculaire fait succéder à
D1 Fu. Bock , Der reliquienschatz w Aachen, 18G0, p, 43.
— 465 —
saint Poppon dans l'abbaye de Stavelot , un abbé [Petrus contre
l'existence duquel l'histoire, la chronologie, la suite des abbés et
tous les dyptiques de l'abbaye protestent à la fois.
La tradition de Goduin repose donc sur une fausse historiette ,
mais la vue de la châsse même et son élégante splendeur renverse
mieux encore cette hypothèse. Enfin Goduin est mort en 685 , et
sur l'un des longs côtés de la châsse nous allons trouver la statue
de saint Lambert, mort en 709 c'est-à-dire après saint Goduin.
C'est la fable du loup et de l'agneau.
Notre châsse ne peut non plus dater des VIIIe et IXe siècles ,
époque où les Normands (812-934) ,
La très-horrible gent
Qui fust dezous le fermament ,
laissaient sur leurs pas , à travers les Ardennes , cette longue
traînée de feu et de sang dont Reginon de Prume nous a décrit
les navrants spectacles , avec les abbayes désertes , les temples
détruits, les moines pauvres et errants, et n'apportant plus, pen-
dant de longues années encore, au pied des sanctuaires ruinés,
que l'ignorance et quelquefois la dépravation.
Serait-ce saint Poppon qui a fait construire ce reliquaire ? Et
l'abbé à l'auréole qui se trouve dans l'écusson , avec la crosse
et la mitre, sur la partie extérieure du trône de la Vierge, n'est-il pas
la signature de l'auteur? Nous ne le pensons pas, parce que d'abord
les trônes du Sauveur et de la Vierge qui ornent les deux pignons
sont évidemment des ajoutes et postérieurs à la confection de la
châsse ou tout au moins travaillés dans les derniers temps de son
achèvement; ensuite les abbés de Stavelot n'obtinrent que sous
Wibald le droit de porter les insignes de l'épiscopat * ; enfin
1 Jaffé, Bibliotheca rerum germanicarum epist. Wibald. 430 pag. 566 et epist.
431 pag. 567.— Martène, Ampliss. colkct. 11, epistolœ W/ftaMi 404 et 405. Études
historiques sur le pays de Stavelot, pag. 255 et 72.
XXIX XXII 29
— 466 —
Éverhelme , qui dans la vie de saint Poppon énumère avec de longs
détails ' non-seulement les églises construites par ce grand homme
mais même les calices d'or dûs à ses libéralités, ne dit pas un mot
de la châsse de saint Remacle dont les reliques cependant furent
portées en grande procession, sous saint Poppon et àStavelot même,
par l'empereur d'Allemagne.
Serait-ce Wibald?Nous n'oserions ici répondre par la négative;
bien de graves présomptions au contraire nous portent à regarder
Wibald comme le premier promoteur de notre beau reliquaire.
C'est d'abord la profonde vénération de cet homme illustre pour
saint Remacle 2. Nous trouvons ensuite dans les lettres de Wibald,
sa correspondance avec un orfèvre auquel il reproche ses lenteurs :
Soient homincs artistse frequentius non observare promissa, dum
plura ad aperandum recipiunt quam perficere possunt; radix omnium
malorum cupiditas 5.
Nous savons que Wibald a enrichi ses églises de précieux
monuments d'orfèvrerie; nous connaissons ses rapports nombreux
avec l'Orient, le voyage de son frère en Palestine avec l'empe-
reur Conrad , et nous y trouvons l'origine de ces innombrables
gemmes orientales qui sont semées à pleines mains sur le cercueil
de Remacle.
Enfin l'histoire archéologique nous apprend que les particuliers
ou les communautés qui se proposaient d'ériger un monument de
l'art y consacraient de longues années , qu'ils amassaient successi-
1 Mabillon, Acta SS. Dend. VI. page 515.
2' VVibaldus Bernardo Episc. « Venientes ante altare illud, ubi benedietionem episco-
palem in nomen et ofticium Abbatis suscepimus, (20 avril 1130), commovit nos repente
quidam familiaris et intimus amor queni ad patronum ojusdem Ioci , sanctissimum vide-
licet confessorem atque Pontificem Christi Remaclum. Apud Jaffé, epist. 150pag. 256. —
Apud Martène epist. 131. Et encore apud Jaffé epist. 176 pag. 297 et Martène
epist. 160.
3 Apud Jaffé epist. 119. — Apud Martène epist. 100.
— 467 —
vement, comme de bonnes œuvres, l'or, l'argent, les pierres
précieuses et les faisaient parvenir à l'artiste auquel de longues
années étaient nécessaires pour mettre la dernière main à ces
chefs-d'œuvre qui demandaient tant de science , tant d'art et des
connaissances théoriques et pratiques si variées et si étonnantes.
Lorsque l'on s'arrête, saisi d'admiration, devant la châsse de
Stavelot qui porte l'empreinte de plusieurs époques on est donc
en droit de conclure que le souffle d'Orient , apporté par Wibald
en ces lieux célèbres , a fait éclore sur notre sol cette riche flo-
raison byzantine. Toutefois , elle ne parvint à son splendide et
entier épanouissement que dans la seconde moitié du Xlle siècle
et nous pouvons en produire la preuve historique.
Mabillon * nous a conservé deux lettres, l'une de 1263 l'autre
de 1268, adressées par les moines de Stavelot à l'abbé Àrchambaud
de Solignac qui leur avait demandé des reliques de saint Remacle.
Dans la première, nous lisons ce qui suit : « Verum quia de
corpore ejus fSti RemacliJ ad prsesens aliquid consolatorium vestrse
paternitati sincère, sicut desiderii nostri affectus expostulat,
transmittere non valemus; ne vestra tamen precatio apud nos
frustrari videatur, cum illam summo proponamus studio ad im-
plere; de baculo pastorali , de casulâ, in quâ jacuit tumulatus,
et de sandaliis ejus vestrse devotioni transmittimus istâ vice :
scientes indubitanter , quod de corpore memorati Patroni nostri
vestrse pietati condecentem transmittemus portionem , cùm de
CAPSA IN CAPSAM , QUAM GLORIOSAM FIERI FECIMUS , tvansfem
contigerit corpus : quod erit in brevi , Domino disponente.
Datum Stabulaus anno Domini millesimo ducentesimo sexagesimo
tertio, idibus Junii. ■
Dans la lettre de 1268 des mêmes moines, nous voyons qu'ils
accomplissent leur promesse en envoyant à Solignac un bras de
1 Sœculo 2 lienedictino , page I09'2.
— 468 —
saint Hcmacle dont le corps avait été solennellement transféré dans
la nouvelle et glorieuse châsse : « per quos (nuntios) veslrœ
dilectioni transmittimus brachium venerabilis Patris nostri R. Re-
macli , et de reliquiis undecim millium Virginum ; nec non et de
reliquiis Thebœorum martyrum. • C'était le 13 mai 1268 , sous le
règne de ce trop célèbre Henri de Gueldres , le prince de Stavelot
dont Zantiliet nous a laissé le portrait en deux lignes :
C'était un homme de grande naissance , de mœurs dépravées ,
sanguinaire, avare et débauché. »
La seconde question à résoudre est celle-ci : Quel est l'auteur
de ce chef-d'œuvre?
Ce nom glorieux , nous ne pourrons le tirer de l'oubli de ces
siècles religieux ; connaît-on le nom de ces géants , de ces grands
bâtisseurs de cathédrales , de ces immortels ouvriers, de ces
sublimes anonymes? Cependant , si nous ne pouvons rendre à
l'admiration des siècles ce nom enseveli dans son humilité , nous
pouvons au moins reconnaître l'école , l'atelier d'où est sortie la
lipsanotheca de Stavelot.
Outre les célèbres argentiers et émailleurs de Limoges , deux
immortelles confraternitates aurifabrorum florissaient au XIe et au
XIIe siècles dans les chefs-lieux des deux diocèses, au milieu des-
quels était assise , libre et indépendante , la principauté ecclésias-
tique de Stavelot : nous avons nommé Liège et Cologne. Les
précieux reliquaires de Cologne, ceux d'Aix-la-Chapelle en partie;
l'ont la gloire de Cologne ; mais Liège a le droit de revendiquer
les magnifiques reliquaires de saint Servais de Maastricht, de Huy,
de Tournai et de Stavelot. Ce point a été fixé par le chanoine Bock*.
Mais passons à la description :
La châsse de saint Remacle forme un long quadrilatère de forme
basilique, recouverte d'un toit à dos d'âne, terminée aux deux
1 Bock , loco citalo , pago 49.
— 469 —
côtés allongés par deux frontons avec pignons à angles droits.
Elle mesure en longueur un mètre 96 centimètres , en largeur
59 centimètres , en hauteur 82 centimètres depuis le plan hori-
zontal de la base jusqu'à l'élégante galerie supérieure qui la cou-
ronne. Son poids est de 215 kilogrammes. Elle forme malgré sa
masse un gracieux et svelte ensemble.
Ce qui frappe tout d'abord , c'est l'époque de transition qu'elle
représente dans toutes ses parties , les proportions géométriques des
statues , des bas-reliefs, des rondes-bosses, l'expression grave et
religieuse des personnages , le parallélisme exact des plis pressés
des tuniques avec leurs pierres précieuses enchâssées , le tout
obtenu par le procédé sur du moulage , l'absence de perspective
aux genoux et aux pieds sans chaussure , les sujets représentés
en bas-reliefs sur les versants du toit et qui sont ceux générale-
ment adoptés au XIIe siècle, les nimbes, tous en forme de disque
et en émail opaque , espèces de plats placés à l'arrière-plan et
derrière toutes les tètes des saints personnages, semblables à ceux
que portent les anges et les saints de la cathédrale de Paris ; puis,
d'autre part , la statue du Christ élevée à l'un des frontons , belle
d'expression malgré la raideur des membres , frappante de ressem-
blance avec des statues de reliquaires du XIIIe siècle , et sur un
trône orné du trilobé , ces dais aux riches découpures , ces trèfles ,
ces quatre-feuilles émaillés , ces violettes , ces feuilles entablées ,
ces émaux cloisonnés ; tout cela forme un caractère arehitectonique
de l'époque de transition du style roman au style ogival. Nous le
plaçons donc entre le reliquaire de Charlemagne et celui de la
sainte Vierge d'Aix-la-Chapelle , dont le dernier surtout a avec lui
de grandes ressemblances , si on en excepte toutefois sa forme qui
n'est déjà plus celle d'une basilique mais celle d'une croix latine.
Le fini du travail , la richesse des ornements , cette perfection
de tous les détails , la beauté des statues et surtout des bas-reliefs
planiformes des champs creux et carrés du toit, le grand art
— 470 —
déployé dans la fusion sur l'argent et le cuivre de tous ces émaux
en champ-levé, et même cloisonnes dans les pommes d'amour ,
l'enchâssure des pierres précieuses avec leurs [délicats filigranes,
la ciselure des parties saillantes de cette belle frise à jour, des dais
et surtout de l'admirable broderie en cuivre qui s'enroule avec ses
grillons , ses monstres , ses animaux fantastiques autour de la base,
et enfin ces pommes d'amour qui s'élèvent gracieuses, délicates, avec
leurs émaux variés, leurs fleurs, leurs prodigues variétés au-dessus de
la frise et de chaque dais, cette multitude de gemmes orientales, de
topazes, anémyses, rubis, émeraudes, saphyrs taillés en cabochons;
tout cela place , sans conteste , la lipsanotheca de Stavelot parmi les
plus beaux reliquaires qui nous soient restés des XIIe et XIIe siècles.
Malheureusement , le cœur se serre en contemplant l'œuvre du van-
dalisme et peut-être aussi des transports , et la dégradation de la
chasse et la triste absence d'un grand nombre de pierres précieuses.
Nous ne possédons pas les connaissances voulues pour pouvoir
apprécier la valeur de ces joyaux , nous ne pouvons du reste les
soumettre aux deux épreuves ordinaires concernant la dureté et la
double réfraction, mais plusieurs ont certainement de la valeur,
bien que les pierres les plus précieuses aient été enlevées et particu-
lièrement une agate d'un grand prix , dont Martène nous parle et
qui représentait un empereur romain l.
Venons au détail : sur le premier fronton on voit la statue du
Sauveur, haute de 27 centimètres; il est assis sur un trône velu d'une
longue tunique, tenant de la main gauche et avec une grande raideur
le globe et la main droite portée en avant avec les deux premiers
doigts levés et la chevelure dorée (ypvaoxopa) au feu. Il est abrité
1 On sait, que la plupart des riches reliquaires sont ornés d'onyx , de camées romains
et payens de grande valeur cl nous renvoyons pour l'appréciation de ces pierres , leur
symbolisme , leur importance archéologique et au point de vue chrétien , au savant
travail du célèbre Ckeuzer. Zur Gemmenkunde. A'itike yesclmillene Steine, Lcipsick
1834.
— 471 —
sous une forme de trèfle en plein-cinlre qui sert d'encadrement
au tympan. Comme nous l'avons déjà dit, ce trône , ainsi que celui
de la Vierge à l'extrémité opposée, sont des ajoutes ou plutôt datent
des derniers temps de la confection.
On lit autour de la statue et dans l'arrière voussure l'inscription
suivante en lettres d'or sur fond d'azur :
►& SOIaVSKB GT.€(RMOaPv$0 GV.
,ntr GRe^- e -vBeiutfo * % ■
Soins ab œtemo creo c une ta , creata guberno.
Ce n'est pas encore l'écriture gothique , mais nous avons
remarque dans les autres inscriptions plusieurs JH gothiques.
Ce vers est encore une date, par le caractère et par le fonds.
Ce ne sont pas les caractères romains, qui ont régné jusqu'au
XIIe siècle , et ce ne sont pas non plus les caractères anguleux et
gothiques du XIIIe siècle. En outre ce genre de vers léonin , dans
cette fausse imitation de quelques vers de Virgile , n'a été mis en
vogue que par Leonius, religieux de Saint-Viclor à Paris, qui vivait
vers le milieu du XIIe siècle.
Sur l'autre portail on voit également assise sur un riche trône
et sous un dais semblable , ornée d'un riche diadème tout endom-
magé et dont les pierres ont été enlevées, la mère du Sauveur tenant
son fils sur ses bras et avec une inscription qui est de nouveau un
vers léonin inscrit en lettres d'or sur fond d'azur et avec les mêmes
caractères et qui porte :
Tu michi nate pater, et tu michi filia mater.
La statue de la Vierge a 33 centimètres de hauteur.
Derrière ces deux haut-reliefs on voit le nimbe circulaire et tout
le gable du pignon est fermé par un espèce d'appareil réticulé, mais
— 472 —
opaque et qui ne laisse pas pénétrer l'œil dans l'hiéron. Une chose à
remarquer c'est l'apposition aux deux côtés du trône de la Vierge
de deux ronds au milieu desquels se trouvent des écussons
triangulaires représentant l'un un abbé et l'autre une haie au na-
turel. Nous ne connaissons pas le porteur de ces armes.
Comme dans tous les reliquaires similaires, les deux longs côtés
sont ornés des statues des douze apôtres et de celles de saint
Remacle et de saint Lambert , abrités sous d'élégants dais triangu-
laires surmontés de pommes d'amour plus petites mais de même
forme que celles qui couronnent le monument et dont nous parlons
plus bas.
Les apôtres sont assis , revêtus de tuniques presque uniformes
dans les regonflements et les plis, et pieds nus; saint Remacle au
milieu, d'un côté, et saint Lambert de l'autre sont revêtus des
habits pontificaux et de chaussures pointues.
Chaque statue a son dais et est séparée par d'élégantes colon-
nettes qui ont été enlevées du côté de saint Lambert , partie beau-
coup plus détériorée et dont plusieurs dais sont découronnés de
leurs pommes. Les nimbes aux émaux fuses en champ-levé sont
variés à l'infini. Les pommes d'amour avec quelques émaux cloi-
sonnés représentent des fleurs et ont la forme de grandes pommes.
Ces statues , avec le nom du saint autour du plein-cintre de la
niche en lettres d'or sur fond bleu , sont placées dans l'ordre
suivant et portent leurs attributs ordinaires :
1° Saint Pierre tenant les clefs de la main droite et de la main
gauche une croix enrichie de pierres précieuses dont plusieurs
manquent.
2° Saint André , le Protoclète , portant la croix de son supplice ,
(crux decussata).
3° Saint Jean avec les Évangiles et la chaudière d'huile bouil-
lante dans laquelle il fut jeté.
Saint Remacle en habits pontificaux parsemés de pierres précieuses,
tenant le livre des Evangiles.
— 473 —
4° Saint Jacques le mineur; ses emblèmes manquent.
5° Saint Barthélémy , portant d'une main le couteau avec lequel
il fut écorché vif avant son crucifiement et de l'autre l'Évangile
qu'il prêcha en Arabie.
6° Saint Simon (Zelotes) , déroulant un phylactère qui porte ces
mots : Pax in nomme Domini.
De l'autre côté :
7° Saint Thadée (Jude et Lebbée le courageux), avec son épitre.
8° Saint Mathieu avec son Évangile.
9° Saint Philippe avec la croix sur laquelle il fut crucifié à
Hiérople pour s'être opposé au culte des serpents.
Saint Lambert, avec les livres saints.
10° Saint Thomas (Dydyme) avec l'Évangile et la lance sym-
bolisant son martyre chez les Parthes.
11° Saint Jacques majeur avec un long bâton qui paraît avoir
été ajouté à la place du glaive qui lui trancha la tête.
12° Saint Paul avec le glaive.
Les tuniques de ces apôtres sont semées de pierreries qui se
répandent sur les livres , sur les colliers ; les figures sont graves
et religieuses mais inférieures pour la beauté d'expression et de fini
aux bas-reliefs qui représentent sur les plans inclinés du toit les
mystères et dont nous allons nous occuper. Ce sont encore les
sujets qui sont fréquemment traités au XIIe siècle par les or-
fèvres, les statuaires et les ciseleurs. Ces méplats sont divisés de
chaque côté en quatre quadrilatères dont les bas-reliefs représentent,
Du côté de saint Remacle:
\o L'Annonciation. L'ange présente à Marie un cartouche
portant le salut: Ave Maria, gratia plena.
2o La Naissance de J.-C. Saint Joseph, Marie couchée près de
l'enfant Jésus au berceau , et dans l'arrière-plan la tète d'un bœuf.
3° V Adoration des mages. Les trois mages, la mère et l'enfant.
■4° La Présentation au temple. Ce tableau qui nous a paru le
— 474 —
mieux réussi ; le plus beau et le plus remarquable se compose de
cinq figures : Marie présente l'enfant à Siméon , elle est suivie de
Joseph et d'Anne la prophétesse. La scène est simple, mais pleine
de vie, les personnages sont d'une belle expression, d'une onctueuse
gravité, ils sont sans raideur et les habillements ont de la mollesse.
Du côté de saint Lambert :
1° La Cène, saint Pierre est aux pieds du Christ. Parmi les
douze apôtres, la tète de saint Jean qui se détache isolée sur le sein
de son Dieu produit un effet singulier par l'absence de toute
perspective et par la raideur de la pose.
2° Le Crucifiement. C'est la traduction de la sublime scène
tracée par saint Jean: Slabant antem juxta crucem Jesu mater
ejus et soror matris ejus Maria Cleophoe et Maria Magdalena.
Et discipulum stantem quem diligebat En outre,
une des figures a les yeux bandés. Serait-ce peut-être le symbo-
lisme de l'aveuglement des juifs?
3° La Résurrection. Ce tableau avec ses deux gardiens dormants
est sans perspective.
4° L'Ascension. Treize figurants , deux anges et le Sauveur
déroulant un phylactère avec ces mots: Viri galilœi quam mira-
mini et quemadmodum vidisti eum.
Nous arrivons enfin à la belle galerie formant frise où l'artiste
a déployé comme à la base toutes les délicatesses de la ciselure et
vaincu toutes les difficultés de la fusion des émaux. Celte élégante
broderie percée à jour est surmontée de ces pommes d'amour qui,
selon quelques auteurs , symbolisent les fruits et les fleurs des
bonnes œuvres qui s'élèvent, comme un pur encens de suavité
odorem suavitatis , vers les cieux et selon d'autres comme de riches
couronnements, comme des ornements naturels et tout-à-fait artis-
tiques nécessaires pour donner de l'élévation, de la légèreté, de
la grâce au monument.
Ces pommes, qui donnent la plus haute idée de la perfection des
— 475 —
creusets employés à la fusion, sont mobiles. Elles sont formées
d'émaux en champ-levé et cloisonnés de nuances diverses qui
représentent des fleurs, des violettes, des trèfles, des lis, dans des
vases circulaires tantôt ovales tantôt en forme de cœur. Les pom-
mes des deux extrémités et celles du milieu, en effet, sont ovales et
les réceptacles des fleurs en forme de cœur, tandis que les inter-
médiaires, plus petites de forme, sont cylindriques; les premières
sont en outre octogones, les secondes quadricapsulaires. Ces
ornements , ces percées , ces émaux , ces filigranes, tout enfin est
d'une élégance, d'une finesse remarquables et retient l'œil ébloui
de tant de perfections.
Quant à la matière , toutes les statues , les trônes , les bas-
reliefs, enfin toutes les rondes-bosses sont en vermeil et le reste
en cuivre fortement doré. Les plaques sont clouées , comme dans
tous les reliquaires similaires *, sur des vaigres ou planches en
bois formant cercueil intérieur, au milieu duquel se trouve, entourée
de soie rouge, la petite boîte qui contient les ossements de
saint Remacle.
L'état défectueux de cette châsse s'explique d'une part par les
tempêtes qu'elle dut traverser , par les longs voyages et plus
particulièrement par le dernier. En effet, à l'approche du flot
dévastateur qui venait de France, les moines emportèrent leurs
trésors et que pouvaient-ils, après leur Dieu, avoir de plus
précieux que les restes sacrés de leur fondateur. La châsse resta
donc , avec les pauvres exilés , sur la terre étrangère pendant dix
ans et ils la ramenèrent fidèlement avec le reliquaire de saint
Poppon au pays de Stavelot, avec les jours réparateurs. Ces reliques
furent reconnues par l'autorité légitime et placées dans l'église pa-
roissiale de Saint-Sébastien dont elles sont le plus bel ornement2.
' Dr Justi. Elisabeth die keilige, pag. 241. — P. SS. Kaentzeler, Der die Gebeine
Karls des Grossen &ù Aachen enthaltende Behàlter, page 4.
2 Officia SS. Ecoles. Leod. Die III sept. pag. 7.
- 476 —
En 1860, l'évêque de Liège procéda de nouveau à la reconnais-
sance de ces reliques et l'église de Malmedy, qui ne possédait rien
qui rappelât son fondateur, obtint une portioncule de saint Remacle.
Quoi qu'il en soit , dans son état actuel , la llpsanotheca de
Stavelot est encore aujourd'hui l'un des chefs-d'œuvre les mieux
conservés et les plus remarquables du XIIe et du XIIIe siècle; elle
est une des plus riches floraisons de l'orfèvrerie , de la ciselure ,
de l'art de l'émailleur de ces siècles chrétiens ; elle se place
hardiment à côté des célèbres reliquaires de Cologne , d'Aix-la-
Chapelle, de Marburg et de tous ceux sortis des ateliers de Liège.
Elle nous fait vivement regretter la perte de ces objets d'art que
les moines ignorants de Stavelot avaient accumulés dans leur
monastère : ces calices d'or, ces ornements dûs à la munificence
de saint Poppon et dont parle l'auteur de sa vie , ces dinanderies ,
ces couronnes, ces reliquaires de Malmedy et de Stavelot, ces
rétables de Wibald dont le manuscrit de Laurenty nous a révélé
l'existence; grandes et belles choses qui ont été emportées par
la Révolution et par ses suppôts subalternes.
LA VEUVE,
FABLIAU INÉDIT DE GAUTHIER LE LONG,
TROUVÈRE TOURNAISIEN ,
PUBLIÉ PAR
M. AUG. SCHELER,
Membre titulaire à Bruxelles.
Le manuscrit de la bibliothèque royale de Turin coté L. v. 32 ,
le même qui m'a été d'un si grand secours pour l'édition des Dits
de Baudouin de Condé , renfermait aussi , perdu dans une suite
de poésies d'un contenu moral ou dévot , la pièce inédite suivante
dont j'ai pris copie avec toute la fidélité possible.
Ce qui captivait particulièrement mon attention , en rencontrant
la pièce de Gauthier Le Long , c'est moins son mérite littéraire ,
lequel d'ailleurs n'est en aucune manière inférieur à celui de la plu-
part des pièces du genre publiées dans ces derniers temps, que la
circonstance que le nom de l'auteur appartient à l'histoire litté-
raire du pays et que cette unique pièce du poëte tournaisien n'est
connue encore que par une sèche et imparfaite analyse, faite
il y a 90 ans par Le Grand d'Aussy (t. III , p. 55).
Commissaires- rapporteurs : MM. L. Galesloot et P. Henrard.
— 478 —
Voici ce qu'on trouve à son sujet dans V Histoire littéraire de
France (t. XXIII, p. 172) qui, ainsi que M. Arthur Dinaux
dans les Trouvères de la Flandre et du Tournaisis (p. 185),
range Gauthier parmi les poètes du XIIIe siècle :
«C'est encore un fâcheux tableau des ménages de la bourgeoisie
que les aventures de la Veuve qui , après avoir fait parade de sa
douleur à la mort, de son premier époux et avoir refusé tour à
tour en mariage, par coquetterie plutôt que par désespoir, un
riche bourgeois de Tournai , puis le jeune Baudouin , Godefroi ,
Favin *, Guillebot , Jean, choisit enfin , comme l'héroïne du fabu-
liste, un malotru dont il faut qu'elle endure la mauvaise humeur,
les reproches et même les coups de bâton. Le récit de Gauthier
Le Long ne saurait être comparé aux deux fables de Lafonlaine
(liv. VI, fable 21; liv. VII, fable 5), mais ne manque cepen-
dant ni de vivacité , ni d'esprit. Imbert (t. I, p. 268), cette fois,
en a fait une assez jolie nouvelle. •
Dire que le poëme est un fabliau du moyen âge retraçant une
scène d'intérieur de la vie bourgeoise, c'est faire prévoir que le
ton en sera quelque peu libre et que le langage des personnes qui
y figurent portera l'empreinte de cette crudité d'expression qui se
mêlait si facilement aux expansions du vieil esprit gaulois.
Au point de vue de la langue je n'y ai rien remarqué qui dis-
tinguât notre auteur ; en ce qui concerne le tour et la grammaire,
j'y ai retrouvé toutes les particularités de l'époque. Par contre ,
j'ai découvert un certain nombre de termes nouveaux qui pa-
raissent appartenir au terroir et dont je ne suis pas toujours
parvenu à déterminer ni même deviner la signification. De ce
chef seul la pièce méritait d'être soumise à l'attention des archéo-
logues de la langue.
Quelques passages sont restés obscurs par suite de la défectuo-
1 Lisez Focuin
— 479 —
site de notre texte. Malheureusement , Le Grand d'Àussy ne nous
a point indiqué le manuscrit qui lui a servi pour son analyse (le
mot traduction ne convient nullement) et MM. Leclerc et Dinaux
qui, après lui, se sont occupés de Le Long , ne paraissent pas en
connaître non plus. Cela m'a privé de l'avantage de recourir à un
collationnement pour parer à l'inintelligibilité de plusieurs endroits
de notre fabliau. Les quelques corrections que j'ai introduites dans
le texte et qui sont signalées au bas des pages ne seront point
contestées , je pense , par les érudits compétents.
Je laisse la question de la nationalité de Gauthier Le Long dans
le vague où elle se trouve ; la mention de Tournai au v. 336
peut n'être amenée que par la rime , il est vrai , et n'autorise pas
à autre chose qu'à placer la scène du fabliau dans les environs de
cette ville. Cependant on est en droit d'inférer de certains traits
du poëme , surtout des nombreux noms propres qu'il renferme ,
que l'auteur connaissait parfaitement le théâtre sur lequel il pro-
duit l'héroïne de sa composition.
Quelques éclaircissements philologiques placés à la suite du
poëme trouveront bon accueil , je l'espère , auprès des amateurs
de la philologie romane.
— 480
LA VEUVE.
Sangnour, je vous velh chastoyer:
» Ne devons aler ostoyer
» En un ost dont nus ne retorne. »
Saveis cornent on les atorne,
5 Chiaus ki sont en cel ost semons ?
On les lieve sor .ij. limons,
Si les port' on de grant ravine
Vers le mostier, pance sovine ,
Et sa feme le siet après.
10 Chil qui à li montent * plus près,
Le tiennent , par bras et par mains ,
Des pâmes batre, c'est do mains;
Car ele crie à haute vois :
« C'est merveilhe comment je vois ,
15 » Dulce dame, sainte Marie,
» Con sui dolante et esmarie !
» Jà Diés ne doinst que 2 je tant voie
» Ke je repas par ceste voie ,
>> Si soie avec mon sangnour mise ,
20 » Cui je avoi ma foi promise.
» Mult m'est ceste .vie aspre et sure ;
» C'est merveille comment je dure. »
Devant l'entrée del mostier ,
Là recommence son mestier
i Ms. moule.
* Ms. con p. que.
— 481 —
25 De criher haut et durement.
Et li prestres isnelement,
Ki convoite l'offrande à prendre ,
lleuve les chandoiles esprendre ,
Ne ne fait pas longes trioles
30 Car ilh convoite les chandoiles.
Cant li services ' est fines
Et li cors ensi atorneis
K'ilh est couchiés, toz en envers2
En terre noire avec les vers ,
35 La dame cort après salhir.
Ki dont le veïst tressalhir
Et les œlz ovrir et clugnier,
Et l'un poing en l'autre fichier ,
Il desist bien , selonc mon sens :
40 « Ceste puet bien perdre son sens. »
Cant li cors fu en terre mis ,
Es vos entor li ses amis ,
Ki tost le ramoinent ariere
Et si le tienent par deriere
45 Et à son hostel le ramainent.
Si voisin , ki entor li mainent,
Li font boire de l'aiguë froide,
Por ce que ses duez li refroide.
A l'entrée de sa maison,
50 Là recommence sa raison
De crier haut et durement :
« Vrai Diex ! que j'ai le cuer dolant !
» Sire , qu'asteis vos devenus ?
» Vous n'esteis mie revenus?
55 » Sire, con vos m'esteis enblez !
» Con nostre avoirs estoit dobleiz
* Ms service. L'sest réclamé par la grammaire et la mesure.
2 Ms. evers.
XXIX XXII 30
— 482 —
• Et que no choze nos venoit ,
» Et con ilh vos bien avenoit
» Aler contreval vostre cort !
60 » Con vos seioient vo drap cort ,
» Sire! Ousi faisoient li nuef ,
» Ki furent fait à l'anrenuef.
»> Ahi ! con j'ai awant songié ,
» Encor ne l'aie je annonchiet,
65 » De lais songes et de hisdeus !
» A bien le m'avertisse Deus !
» Sire , encor songoie l'atryer
» Ke vos astiés en ce mostier ,
» S'astoieut andui li hus cloz ;
70 » Or astez vos en terre encloz :
» Chist songes est bien avoiris.
» Si songai que astiés 1 vestis
» D'une grande 2 chape à piron ;
» En celé aiwe faisiés le pion ,
75 » Ains puis ne reveniés desore:
» Or astez mors en mult pou d'oie.
» Et puis me vint en mon avis ,
» Mais je le conte mult envis :
« Chaiens venoit .i. colenbiaus ,
80 » Ki mult estoit et gens et biaus ,
» Ki s'asioit dedens mon soing,
» Et cest assiet refaisoit soing,
» Mais ne sai que ce senefie.
» Sire , à ceste dan-aine fie. . . »
85 Dont commence 3 li runemens ,
Li conseil et li parleinens
i Ms. que von astiés.
1 Le Ms porte ijranl ; le féminin grande étant lout aussi usuel que j/ran/, du temps
de Gauthier Le Long, Ji-l'ai préféré ici dans l'intérêt de la mesure.
5 Ms. Dont recomence , leçon contraire à la mesure
- 483 —
Des parentes et des cusines,
Et des veehiens et des voisines,
' Si li dient: — « Ma dulce amie,
90 a Or ne vos desconfortez mie ,
» Mes lessiés tôt ce duel ester;
» Penseis de vos remarier.
— » Remarier ? maie aventure ! 1
» Teneis en pais , je n'en ai cure. »
95 Li autres dist : — « Ma belle done,
» Vos reprendereis un preudome
• Ki ne sera faus ne lechieres. * —
Ki dont le veïst faire cbières
Et respondre par mal talent :
100 — i Certes, je n'ai de ce talent ,
» De Damedeu soit ilh maudis ,
» Ki jà mais me dira tez dis ,
» Car ne moi vienent pas à bel. »
Or maudist ele son lembel.
105 Or vos lairons chi de la dame ,
Qui conte son duel et son dame , "2
Si dirons après de celi
Ki ne volt faire bien por li.
Ilh fu meneis à la grant cort ,
110 Où on le fist tenir mult cort ;
Se ilh ne sout rendre raison ,
On le prist à poi d'ocoison.
Sovent regratoit sa maisnie ,
Cui ilh avoit suëf norrie ,
115 Et ses parens et ses amis ,
Où il avoit son avoir mis ,
' Ms. Par maie aventure.
* Ms. Son dampne.
— 484 —
Et si huce à dolente chière
Sa molhier, qu'il tant avoit chiere;
Mais la dame est en autre point :
120 Unedolors al cuer li point,
Ki le sorlieve en contremont,
Car li doiens le resomont,
Ki désire à mangier char crue ,
Ki n'est de paon ne de grue ,
125 Ains est des andoilles pendans
Où li plusor sont atendans.
La dame n'a mais de mort cure,
Ains soi reblanchoie et rescure
Et fait janise et molekins
130 Et redresse ses raverquins
Et fait cos muscas acorez
Et commence ses estinez
Et veste reube à remuyers.
Ausi con uns ostoirs muiers,
135 Ki se va par l'air enbatant,
Se va la dame déportant ,
Mostrant son cors de rue en rue.
Mult simplement les gens salue
Et les encline jusqu'en terre ;
140 Mult sovent clout la boce et serre,
Or n'est ele pas perecheuse ,
Dure ne aspre ne tencheuse,
Ains est plus dolce que canelle ,
Et plus tornans et plus isnele
145 Ke ne soit rute ne venvole;
Avec les œlz li cuers s'en vole.
Or vos ai dit de sa manière ,
Con faitement elle se mire;
— 485 —
Or vos raconterai briément
150 Un petit de son errement.
Le lundi comence son œvre;
Dont n'encontre blonde ne noire
K'ele ne face à li entendre ,
Por tant k'ele le vœlhe atendre.
155 Mnlt est or ses corages liez;
Ele l'envoie en plusor liez
Où. on n'a gaires de li cure.
La nuis n'est onkes si oscure
Ke ses cuer9 ne voist en nuiere ,
160 Et dist sovent: « Ce m'est aviere,
» Je avenrai bien à celui,
» Il a mult bial valet l en lui;
» Et chil n'aroit cure de mi
» S'or en parolent 2 mi ami ,
165 » Et chil autre ne m'aroit cez ,
» Il n'a mie valhant douz œz;
» Chil est trop haus et chil trop vies,
» Je poroie bien faire miés. »
Ensi toute nuit estudie,
170 Car ilh n'est Ici li contredie,
Et cant ce vient la matinée,
Si dist : « De bune œre fui née
« Ke n'ai mais privé ne estrange
, 5
175 » Ne brun ne blanc ne bis ne roz;
»> Or est mes chenevaus derous. »
Or n'a ele soing de lochier ,
Ne de plaidier ne de closcier ,
Ains se fait mult et clere et saine.
180 Sovent pour le blanchir se saine,
Et s'ele a la teste chenue,
' Ms. valez, leçon contraire à la grammaire qui veut la formé du régime.
• Ms. enparoleur.
' Lacune d'un vers.
— 486 —
A mult envis la porte nue ;
Ains se fait sovent sage et simple
Et si remet avant sa guimple
185 Por ses viez grenes l recovrir
Ki rasemblent az œs ovrir.
Or n'a ele soin g de repunre ;
Il ne l'estœt mie semonre,
S'on fait noces, qu'ele n'i soit ;
190 Or n'a ele ne fain ne soit,
Or ne li faut fors que li rains
Ki le mal li cache des rains ;
Celui aquiert bien et porcace.
Ses enfans ensus de li chace
195 Et bece ausi con la geline
Ki desouz le cok s'ageline.
Nuitons devient ses eschalcire
Et si fait chandoiles de cire ,
K'elle offre par us et par nombre,
200 Ke Dex des enfans le descombre
Et ke la pute mors les prengne.
« Por eus ne trui je qui me prengne ;
» A ! qui s'i oserait enbattre ! »
Dont se rêva à iauz conbattre ,
205 Si fiert et grate et pice et mort
Et les maudist de maie mort.
Ce fait la dame, et plus aseis;
Car s'ele a deners amasseis,
Volentiers avec li les porte,
210 Et dist : « Uns lions devers la porte
» Me les 2 paia dès huy matin , »>
Puis nome Tybert et Martin,
Ki l'en doient encore .vii. tans ,
Et si li paierout par tans,
1 Ms grates.
' Ms l.r mes.
— 487 —
215 a Mon essient ains ' .xv. dis. »
Mult se fait rice par ses dis,
Et s'ele encontre nouveliere,
Ki d'annonchier soit costumière,
Lors s'acoste dejoste ii ,
220 Et se li dist : — « Ce poise mi ,
» Ke ne sui auques vostre acointe ,
» Car vos n'esteis mie trop cointe,
» Si vos ai grant picha amée
» Et si me sui sovent esrnée
225 » D'aler o vos esbanoyer ;
» Il ne vos doit pas anoyer
» Se je parole un poi à vos —
» Car vos deveis monter à nos,
» Ce me soloit ma mère dire, —
230 » Mais je ai en mon cuer grant ire
» De mon sangnour que j'ai perdu ,
» Mais mi ami m'ont deffendu
» Ke je laisse mon duel ester,
» Car je n'i puis riens conquester.
235 » Certes, mes sires m'iert mult bons,
» 11 me faisoit mult de mes bons
» Et de chauoher et de vestir ;
» Il m'avoit fait jà ravestir
» De sa maison et de son estre.
240 » Il avoit mult le cuer honeste,
» Mais ilh n'avoit point de délit
» Ke li preudome ont en lor lit :
» Car cant mes sire astoit couchiés,
" M'ert ses eus en mon sainch 2 tichiés,
245 " Là s'endormoit tote la nuit,
» Si n'en avoi autre déduit ;
M* ii ni.
Ms . Saireh
— 488 —
» Ce nie devoit mult enuier.
» Certes, jà nel vos quier noier,
» Mes sires est d'avoir sopris
^50 » Anchois que je l'ewisse pris,
» Et j'astoie une baiselette
» A une tenre marnelette,
» Et vos astiés uns enfanchons
» Ausi petis eom uns pinchons,
255 » S'aliés corant après vo mère,
» Ki à la moie estoit commère,
» S'ame soit hui en bon repos !
» J'ai asseis et pailes et pos,
» Huges et sièges et chailis ,
260 » Blances cuetes et dras de lis,
» J'ai assez draz lingnes et langues,
» Si ai encor de douz lanages :
» De la grosse, de la menue.
» Ma maisons n'est mie trop nue,
» Ains i pert al dit de tamaint,
» Que preude femme et riche i maint
565 » Car, certes, j'ai mult bel harnais,
» Je ai encor tez .ij. benaus,
» Li uns en fu fais al m'estor,
270 » A l'or reverseit tôt entor ;
» Mes sires l'avoit forment chier...
» Mais je n'ai cure d'anunchier
» Se j'ai ce ke Dex m'a doné.
» Vos conissiez bien Deudoné,
275 » Et aussi faites vos Herbert
» Et Balduin , le filh Gobert :
» Saveis vos riens de lor afaire ?
» 0 ! n'i * veuc mariage faire ;
» Mais c'est merveilhe de la gent :
280 » On quide en tel liu de l'argent
Ms. " ne ni.
— 489 —
» Où 'il n'en a mie pi en té,
» Li plusorsunt mult endeté ;
» Mais je sui riche femme à force.
» On voit asseiz del fust l'ascorce ,
285 » Mais on ne seit qu'il a dedens ;
» Lor 2 avoirs va aussi ke vens,
» Mais li miens est bien apparans,
» Je fai asseis de dras par ans,
» Et si sui preude feme et sage,
290 » S'ai awant eu maint message
" De plusors 3 qui sont ci parent :
» Li melhor en sont no parent.
» Enne connissiez vos Gomer ?
» Celui ose je bien nomer.
295 » Por Gomer ne le di je mie,
» Mais je vos dirai, dulce amie,
» L'atrier me dist une devine,
» Ki me fist estendre4 sovine
» Et muchier parmi un chercler 5,
300 » Ke je aroie un jouvencel :
» Car, certes, j'ai mult bel avoir
» Por un bel jovenciel avoir.
» Dulce amie, penseis de mi,
» S'ilh y avoit nul vostre ami
305 » Ki auques fust preus et seneiz,
» Il seroit mult bien asseneis.
» Et vos, soies preus et senée,
» Car s'astoi par vos assenée,
» Vos en ariés bon guerredon,
< Ms. Or p. où.
' Ms. Lors.
" Ms. plusor ; il faut un s au cas -régime.
4 Ms. estaindre.
5 La rime indique que chercler représente un vocable alléié; je corrigerais volon-
tiers chercel , mais ce mot ne convient pas pour le sens (on ne peut guère se cacher ,
tout de son long, dans un cerceau) , à moins que chercel ne représente aussi quelque
forme patoise du bas-latin sarcellus, cercueil.
— 490 —
310 » Se Diex me face vrai pardon.
» Mais je ne vos velh tant prometre,
» Conques ne m'en soch entremettre,
» Mais sachiés mult bien, tôt de fit,
" Se la chose torne à profit,
315 « Tos en sereis mult bien chauchie.
* Or prendez garde en la chauchie
» Et en x essem et en nœf bore ,
» Queis est li fiz dame Ginbort
» Et li fiz sangnour Godefroit2 ;
320 » Il se fist avant ier mult froit 2,
» Cant on l'aparla d'Issabel.
» S'ilh vos devoit venir à bel,
» Je ne m'en départisse anuit,
« Mais je crien qu'il ne vous anuit :
325 » Je vos mech jor al diemenche,
» Si sera avec vos Clamence,
» S'arons des pûmes et des nois
» Et de cel bon vin de l'Onois.
» Alez à Deu, dame, mais ent
330 » Revenez moi veoir sovent.
» Chil qui maint delez vo maison
» Me samble de mult graut raison ,
» Il m'a awant mult regardée ,
» Mais je me sui mult bien gardée
335 » Conques vers lui ne me tornai.
» II maint 5 uns preudons à Tornai ,
n Ki m'appartient de par mon père,
» Si m'a parleit d'un sien compère
» Ki est et riches et manans
340 » Et est mult près de lui manans ,
1 J'ai ajouté le premier en . pour compléter le ver?
2 Ces deux vers sont intervertis dans le manuscrit.
\1 / munit
— 491 —
» Mais il est vies, ce m'at on dit,
» Si l'ai awant asseis maudit :
» Car foi que doi à Saint Linart,
» Suer, je n'ai cure de vielhart ,
345 » Et puis qu'il vient à la bescosse
» Je n'ai cure de garbe scose.
» Or vous dirai d'un mien parent
« Il ne maint mie chi parent,
» Il me volait rendre converse. . . .
350 Celé le fiert à palme enverse,
Et à ce mot si s'en départ ,
Et celé s'en va d'autre part ,
Ki en maint liu le dist et conte.
Or en orés par tens le conte ,
355 Con faitement la dame esploite.
Car Golyas forment le coite
Et li maus dont ele est esprise ,
Qu'ele en a un sachiet à prise.
Puis qu'ele le tient en ses las ,
360 II se puet bien tenir por las :
S'il ne sait auques d'enviaus ,
S'il n'est remuans et isniaus ,
Et s'il ne sait bien cottener
Et bien froier et cropener,
365 II iert al matin mal venus;
De ce ne li puet aidier nus ,
Qu'il n'ait sa loche mal lavée
Tantost con la dame iert levée.
Or est li cas batus en l'estre,
370 Or comence li maus à naistre
Et la noise et li reprovier.
» Nos avons chaiens ,i. brehier,
Ms beseizlce.
— 19:2 —
» Un defeli, un dehuré!
" Haï! corn Demedex me heit,
375 » Ki tant ou de preudomes chiés,
» Et de cortois et d'ensignés,
» Si pris un chaitif par nature.
» Tôt chil aient malaventure
» Qui m'en fisent assenement,
380 » Car ilh m'ont mis en grant tormeut.
» Il ne demande autre dangier
» Con de dormir et de mangier :
» C'est ses déduis et ses depors.
» Toute jour ronke con i. pors;
385 » Et ne suije bien mal venue,
» Cant ilh me sent delez li nue
» Et ilh se torne d'autre part ?
» A poi ke li cuers ne me part.
» Sire, ce ne faisiés vos mie ,
390 >< Ains m'appeliés très dulce amie,
» Et je vous appeloie ami,
» Dont vous retourniez devers mi,
» Si me baisiés mult dolcement
» Et disiés al commencement :
395 » » Ma bêle dulce kastelaine,
» » Con vos avez dulce l'alaine ! » »
» Et chiz ribauz me tient plus vil
» Ke le fumier de son cortilh ;
» Je ne le doi gaires amer.
400 » Car fuist il ors ultre la mer! —
» Et chil respont à celé fois :
— -) Dame, vos astez en defois,
» Je vous aire mult envis,
» Car trop aveis torbé ce vis.
105 » On ne puet mies totans faire ,
» Ce savez bien , icel afaire.
— 493 —
» Quez dyables le feroit tôt tans ! <
» En non Dieu , je sui recreanz :
» Se vilain ont biaz bues par hores,
410 » Si ne sont mies tos tans mores;
» On puet bien si destraindre l'ive,
» K'ilh n'i a sève ne salive.
» Si m'avez destraint et sachié ,
» Ke vos m'avez à mort jugié
415 » Et ke, bien veoir lepoés,
» On dist que je sui craventés.
» Ce est voirs , par sainte Marie :
» Trop a li hons la char hardie ,
» Cui li dyables sy sorprent,
420 » Ke vielhe feme à enfans prent ,
» Car il n'iert jà .i. jor sans lime .
» Venez avant , ma dame grime ,
» Si me paies les .xxx. mars
» Ke me promesistes domars
425 » Entrosque je fesoie l'euvre
» Où ilh covient la crupe muevre. 2
— » Aï » fait ele, « fouz cou vers,
» Vous dewistis iestre convers 3
» U rendus à une abeïe !
430 » Voir, je devroi estre banie ,
» Cant je lessai por vos Jehan ,
» Ki a sa terre et son ahan ,
» Et Godefroi et Balduin ,
» Et Gillebert et Focuin ,
435 » Si pris trestot le plus malvais
» Ki soit d'Orliens jusqu'à Bialvais.
1 II faul , pour satisfaire à la mesure , ou lire dyables en deux syllabes ou effacer
le pronom le. Le dernier parti est le meilleur, puisqu'il faut lire dyubles en trois syllabes
quelques vers plus loin .
* Ms. crupe mure.
3 J'ai lu convers dans le Ms ; je pense qu'il faut ou couvers (cache*) ou avers ou
cuivers (perfide) ou pervers.
— 494 —
» Tant m'aveis tolut et emblé ,
» Ke n'ai mais avaine ne bleiz ;
» Bien est ma maison escovée.
440 » Vous astez d'une orde covée,
» Car je conoi bien vo parentes ,
» Les chaitives et les dolen tes,
» Et yo serors et vos aintains ,
» Ki toutes sont ordes putains;
445 s Et ne fu celé vo cusine ,
» Ki tante fois a jut sovine 1
» Et out .xiiii. en fan s d'un prestre ' ?
» Vos ne deveiz mies bons estre. » —
A ce mot li preudons li saut ,
450 Ilh ne dist mie « Dex vos saut »,
Ains le saisi par ses linbars ,
Se li doue des esclubars :
Tant li promet et tant li done ,
Ke tous ses dis li gueredone.
455 Cant ilh l'en ot donet asseis,
Tant qu'il fu sus lens et lassés ,
La dame en sa chambre se muce
Tôt sans chapel et sans amuce.
Là suce ses couz et repose
460 Et dist sovent à chief de pose :
« Leres , con vos m'aveis traïe !
» Or m'a Dieu la mort otroïe ,
» Et si me mete en tele voie
» Où je l'ame mon sangnour voie ,
465 » Et ke la moie le porsiwe
» Et k'ele soit avec la siwe » .
Atant dcfent l'uis à ovrir,
Et si se fait bien chaut covrir ,
Si fait faire des chaudelés 2,
Les premiers nmis de ce? deux vers, h el et, sont intervertis dans le Ms
Ma Et si fait fuite de ehaudelhes.
— 495 —
470 Des restons et des wastelés,
Si se banane tant et atempre ,
Et main et soir, et tart et tempre,
Ke celé chose est trespassée.
Or est garie et respassée ;
475 Ce m'est avis et ce me samble
Qu'andoi sont revenu ensemble.
Tant k'il pora ferir des maz ,
Sera tous pardonnez li maus.
Or est li biaus cliaz rehuchiez ,
480 Or n'est illi férus ne tochiez ,
Ains est li cossins retorneiz
Et li escames destorneis ;
Or est illi amez et servis ,
Or a ilh tôt à son devis ,
485 Et si vos di bien de rechief :
» Pitiet de cul trait leus de chief ».
Vos ki les femmes despitiés,
Por Deu vo pri et por pitié ,
Sovengne vos à icele hore
490 K'ele est desous et vos desore.
De vos qui esteis aduin,
i
Ne soies de riens en esmai :
Li aduin ont melhor mai
495 Ke n'ont li félon conbatant,
Ki les noises vont commenchant.
Gauthiers li Lons dist en la fin
Ke chil n'a mie le quer fin
Ki sa feme laidenge et koze
500 Ne ki li demande autre kose
Ke ses autres voisines font.
Jà n'en vuelh parler plus parfont 2.
' Ce vers manque au manuscrit.
* Ms. ;'ep. ./«.
— 496 —
NOTES EXPLICATIVES.
1 Chasloyer, enseigner, donner un avis.
2 Osloyer , aller en guerre ou camper. Je traduirai : « N'allons pas camper dans
un lieu dont personne ne revient. » C'est, ce me semble , un avis motivé par
les folles exclamations de la veuve , qui appela la mort à son secours pour
soulager sou deuil et à qui mil en a pris. Le Grand d'Aussy, dans son simulacre
de traduction, rend ainsi ces deux vers : « Je. veux vous parler d'une grande
bataille dans laquelle tout le monde succombe à son tour. » Cela me fait
supposer qu'il a lu Ke devons, etc., au lieu de Ne devons, ce qui en erfet rendrait,
celte entrée en matière plus facile à comprendre.
K Saveis , la désinence eis alterne dans mon Ms. avec es.
8 Pance sovine, la panse en l'air ; cp. vv. 298 et M6.
9 Siet , suit; forme insolite pour siut , sieut. — 5a pour lor; transition brusque
du rapport numérique, transition familière aux trouvères.
10 o Ceux qui lui tiennent de plus près. «
1 1 Tienenl, retiennent, empêchent.
12 Do = dou , du Ou bien serait-ce une variété de vis (de vivre) ?
1 i Vois, je marche.
1 7 « Que Dieu ne permette que je le voie (= qu'il m'arrive, en ail. dass ich es erlebe),
que je repasse par ce chemin. »
22 Durer, continuer d'exister.
25 Crilier ; h diérétique, resté dans trahir, envahir.
28 Rueve (prononcez reuvé), indic. prés, de rouver, demander, commander.
29 Triole est un substantif omis dans les glossaires ; je n'bésiste pas à le rapporter
au verbe Irioler que je trouve dans Roquefoit avec le sens de « aller et venir,
perdre son temps. » Quant à trioler, j'y vois le même radical qui a donné
delrier (retarder), joint à un suffixe diminutif.
37 Clugner est le même mot que cligner. On trouve aussi ciuigner et cliner.
■13 Ramoinent, deux vers plus bas ramainent, ramènent. Le présent moine de mener
est parfaitement correct.
46 Mainenl, = lat. manent, demeurent
48 Duez, nom. sing. de duel, deuil.
— 497 —
53 Asteis, esteis (êtes), astez-, est encore une forme courante dans les patois du Nord ;
elle se rapporte à l'infinitif ester = stare.
62 Anrenuef, nouvel an ; litt. renouvellement de l'année ; renuef est le subst.
verbal de renouer. Je n'ai encore rencontré le terme anrenuef que dans Jean de
Condé, Dit de le mortel vie, 89 ; il manque aux glossaires.
63 Awant, auparavant, dans le temps, récemment; cp. v. 290.
64 Encor suivi du subj., = bien que.
65 Le sens ancien et fondamental de hicdeus, hideux est « borrible » (pr. ce qui
fait dresser les cheveux). Le mot vient de hispidus.
66 Avertir, détourner.
67 L'atryer, l'autrier, l'autre jour.
73 Je ne sais ce que c'est qu'une chape à piron. Ce dernier mot serait-il un nom
propre, de sorte qu'il s'agirait de la « chape à Pierre, le voisin » ?
74 Pion, subst. verbal de plonger, en picard plonquer.
81 Soing, sein. Au v. 244 nous aurons la forme sainch.
82 « Et cette circonstance me donnait également à réfléchir. » Assiet, subst. verbal
de asseoir, donc action de s'asseoir.
85 Runement, murmure, du verbe runer.
86 Li conseil est un nominatif pluriel.
87 Vechien, voisin, it. vicino , esp. vecino.
94 Tenir en pais , se tenir tranquille , se taire.
98 Faire chieres, faire des mines.
104 Je ne sais ce qu'il faut entendre par lernbel.
107 Ce passage m'embarrasse fort; quel est le malheureux dont il va être question et
« ki ne volt faire bien por li? » Rien ne l'indique et l'on ne devine pas comment
il se rattache à notre histoire. Le Grand d'Aussy, dans son analyse, ne touche
pas d'une syllabe à cet épisode , qui pourrait bien s'être glissé par mégarde dans
le contexte de notre manuscrit. — Serait-il question de la manière dont le
mari, si chaudement pleuré, était traité de son vivant? Plusieurs petits traits du
récit rendent cette conjecture peu plausible.
107 Celi. « Vers le milieu du XIIIe siècle, dit Burguy (1 , 155), on commence à voir
introduire cheli pour chelui. »
112 A poi d'ocoison , pour le moindre motif.
126 Atendre à , rechercher.
129 Janise (ou jainse?) m'est inconnu; molehin s'appelait la fine étoffe de toile
dont on faisait les vêtements légers, puis, par extension, les robes faites de
cette étoffe. Delà les mots mulquinier , midquinerie.
130 et suiv. Raverguins, cosmuscas acorez, estinez(ou eslivez), remuyers sont pour
moi des termes inintelligibles, sur lesquels j'appelle l'attention des lexicographes.
134 Ostoirs muiers , autour qui a passé la mue.
142 Tencheuse , querelleuse.
145 Ce vers reste également à expliquer. Rute et renvoie servent de termes de com-
paraison à l'attitude dégagée , aux mouvements vifs et fringants de la jeune
XXIX XXII 31
— 498 —
veuve ; sont-ce des plantes, des animaux ? Venvole ne m'est connu que comme
exprimant « chose sans valeur » ; Renart, I, v. 3909-10 :
Et que il tient tout à vanvole
Certes son dit et sa parole.
146 L'Allemand dit: « Aus den Augen , aus dem Sinne. >» Loin des yeux, loin du
cœur. _ ,, Qui procul ex ocnlis , procul est a limine mentis. »
148 Se mirer , ici — prendre soin de sa personne, pour paraître sous les aspects les
avantageux.
156 Je corrige ici , au profit du sens et de la mesure, Et l'envoie en Ele l'envoie.
Ce liez , qui semble mis ici pour lieux , est fort étrange. Lieux ne peut en
aucune manière prendre la forme liez ; ce mot représente donc le pluriel de
let, côté, sous une forme diplithonguée que je ne me souviens pas d'avoir
jamais rencontrée ailleurs. « Elle fait promener son cœur de tous les cotés,
s'arrêtant tantôt à Paul, tantôt à Pierre. »
159 Je ne comprends pas l'expression en nuiere.
160 C'est aviere , = c'est avéré. Aviere paraît être , comme délivre, un de ces
adjectifs radicaux dégagés de verbes de la première conjugaison dont la langue
italienne est particulièrement riche. Je ne l'ai encore rencontré que dans Philippe
Mouskès, compatriote de Gauthier Le Long, où je trouve au v. 10,805 : ce
m'est aviere.
161 Tournure bien connue de l'ancienne langue pour dire : « C'est un beau garçon. »
Voy. Dits de Baudouin et de Jean de Condé , t. II, ma noie, p. 409, v. 34.
164 Et quant à celui-là , il n'aurait souci de moi, si mes amis allaient lui en souffler mot.
165 Ne m'arait œz , ne me serait pas nécessaire, ne me conviendrait pas.
176 « Voilà tout mon tissu de projets rompu. » Chenevaus , auj. canevas.
177 « Dès lors elle se soucie fort peu de réfléchir sur le pour et le contre. » Lochier ,
être ébranlé , hésiter.
179 « Mais elle s'empresse de se rendre aussi fraîche et séduisante que possible. »
180 « Souvent toutefois elle se tourmente (lit t. elle fait le signe de la croix) sur ce
que ses cheveux commencent à grisonner. »
184 Guimple , morceau d'étoffe dont les femmes se couvraient la tête et dont elles
se servaient quelquefois , comme aujourd'hui , de voiles.
185 Grenes , voy. ma note du Glossaire de Lille, p. 9.
186 Ce vers reste obscur. « Qui frappent la vue du premier regard * ?
187 Repunre , sens neutre , se cacher , se tenir à l'écart.
191-2 « Que le rameau qui lui chasse le mal de ses reins. »
193 Aquerre, ici = requerre.
195 Bechier signifie d'ordinaire becqueter ; je ne sais si ce sens convient ici.
197 J'attends d'autrui les éclaircissements sur le sens de ce vers.
205 Pice , de picliier , piquer.
215 Par tans, bientôt, cp. v. 354.
21" Nouveliere , une caucannière.
220 Ce discours est plein de naturel, de vie et de mouvement.
— 499 —
221 Cointe, fier, hautain.
224 S'esmer, avoir envie.
225 Esbanoyer , s'amuser, et particulièrement « faire un tour de promenade. »
229 « Car vous devez, au dire de ma mère, être un peu de la famille. » Monter à,
n'a pas d'autre sens ici. Il est synonyme Appartenir, qui vient plus bas, v. 337.
Voy. aussi v. 10.
232 De /fendre , ici = ordonner. — 237. Mes bons, mes caprices.
237 Chaucher (chausser), fournir de vêtements, synonyme de vestir ; ep. v. 315.
238 « Il m'avait déjà mis en possession... »
249 Estre d'avoir sopris est une curieuse expression p. possédait de la fortune.
251 Baiseletle , fillette.
258 Pailes signifie ici , à ce qu'il me semble , non pas des tissus de drap ou des cou-
vertures, mais des poêles de cuisine , et répond ainsi non pas kpallium, mais
à palella. Ce dernier type a d'abord fait paële (paesle), puis par contraction
paile; ep. catena , chaëne , chaîne. La conversion enfin de ai en oi , adonné
tant pour paile = pallium , que pour paile =putella, le mot moderne poêle.
259 Chailit de chaëlit , chaalit , comme paile de paële ; auj. châlit , voy. mon
Dictionnaire d'étymologie.
260 Cuele (prononcez keute) , ailleurs coûte, kieute , etc., matelas, lit de plume.
262 De deux sortes de laine.
267 Harnais parait s'appliquer ici à tout l'ameublement de la maison.
268 Benaus de benal , benel , diminutif de benne , banne , mot appliqué à différents
meubles destinés à renfermer des objets : panier , vase à mesurer , botte ,
tombereau Je ne sais pas à quel objet la veuve fait ici allusion ; il devait être
précieux puisqu'il était garni (bordé ou doublé) d'or tout autour. — Notez ici
la mauvaise rime harnais : benaus.
269 Al m'est or , à mon installation ; c'est le seul sens que je puisse trouver à ces
mots ; mais comment estor, subst. verbal de estorer (instaurare), se trouve-t-il
employé comme féminin ?
272 Tout en protestant qu'elle ne tient pas à vanter ses richesses , elle le fait avec
une intention bien marquée qui n'échappait pas à la commère.
284- Ascorce, écorce; as p. es, : comme astez p. estez. — Pour la pensée, cp. Scarron:
On juge du bois par l'écorce
Et du dedans par le dehors.
291 Ci parent, voy. pi. loin, v. 348.
292 No parent (nos égaux) , de notre taille (sous le rapport de la fortune), ou , ce
qui est plus probable , de notre âge.
295 La veuve excepte Gomer du nombre de ceux qui lui ont fait des propositions (v. 290.)
306 Assenei , établi , marié.
307 « Et vous, mettez-y toute votre bienveillance à mon égard et votre intelligence. »
Cette répétition des mêmes adjectifs , employés deux vers plus haut , fait
mauvais effet.
311 Tant équivaut ici à tant seulement.
— 500 —
312 « Car je n'ai jamais su en agir ainsi » (c.-à-d. promettre pour ne pas tenir).
316 et ss. La veuve signale à sa commère quelques noms qu'elle recommande parti-
culièrement à son attention et dont elle indique, à ce qu'il paraît, la demeure,
par les mots en la chauchie (chaussée) et les autres qui suivent. Je renonce
à faire le commentaire de ces derniers.
320 Cette froideur envers Isabelle de la part du « fils à M. Godefroit » a pour la
veuve de l'importance, comme on pense bien. — Sentant qu'elle a déjà fait
assez de confidences , celle-ci a l'air de cesser ici son entretien et de ren-
voyer sa commère au dimanche; mais au moment de le faire (au v. 331), il
lui vient une nouvelle idée, qui la fait déborder de nouveau.
325 Voy. pour la forme diemenche , mon Diciionnaire d'étymologie.
326 Je n'ai pas connaissance de ce bon vin de l'Aunois,
320 Alez à Dieu (avec Dieu) , formule variée de à Dieu vos cornant. — Cet ent
(= en) ; placé à la fin du vers, constitue un enjambement peu gracieux.
3 15 Bescosse se trouve , dans le glossaire de Barbazan (d'où il a passé dans celui de
Roquefort), traduit par secousse , agitation. Cette signification convient par-
faitement ici, prise dans un sens obscène.
346 Garbe scose (ou escosse), gerbe dont on a fait sortir le grain et dont il ne reste
que la paille. Cp. Philippe Mouskès , 5466 :
Mi chevalier de prime baibe
Si n'ont cure tfescouse barbe ',
c.-à-d. ils ne se contentent pas d'une gerbe secouée, d'une gerbe de paille.
Barbe p. gerbe se trouve dans les locutions bien connues barbe de paille ou
barbe de feurre.
348 Où parent, dans ces parages, voy. ma note , Dit du lévrier de Jean de Condé,
v. 1347.
349 La commère, impatientée de ces bordées de confidences, lève tout à coup le pied,
sans même laisser à son interlocutrice le temps d'achever sa phrase.
350 « Du dos de la main ».
356 Le sens de celte locution proverbiale est facile à saisir; je n'avais, cependant,
pas encore rencontré le géant Goliath , grâce à sa parenté onomastique avec
goulu. Goliafre personnifie la concupiscence charnelle.
361 Enviaus (de enviai), provocations, agaceries. Voy. Baud. de Condé , p. 425.
363 Collener (peut-être faut-il lire colrener), s'approcher charnellement, vient sans doute
de coule , keute (= culcila) ou de contre (=culcitra). Hécarl donne cotronner.
Les deux verbes qui suivent sont des synonymes. Pour cropener , cp. v. 426.
367 J'attends un inlci prête pour ce vers, dont le sens précis m'échappe.
372 Brehier m'est inconnu; c'est sans doute une forme Yariée de brehain , impuissant.
373 Undefeû, un défunt (defunclus , qui a cessé de fonctionner). Le mot est un
composé de feu (d'où notre adj. feu) , mort , sur l'élymologie duqui-l je
1 M du Reiffenberg a bien mal compris ce passage en l'interprétant ainsi : Barbe secouée: « Qui ne
se font pas prier pour secouer la barbe à quelqu'un , c'est-a-dire hardis , perillens. ><
— 501 —
renvoie au Dictionnaire de Littré. (Ce savant philologue aurait pu citer encore
l'expression durfeil , malheureux , que je trouve dans le lai de l'Oiselet
(Barbazan, 111, p. 126), et qui prouve en faveur du primitif fuîulus).
Defeil p. défunt est aussi consigné dans le glossaire du comte Jaubert. —
Uehurè m'est inconnu. Serait-ce un composé de de + eiiré, malheureux , la
lettre h servant simplement de signe diététique?
375 Chiés est inexplicable. Le vers exprime : « qui ai refusé ou laissé passer tant
de beaux partis ».
379 « Qui me l'ont indiqué et proposé pour mari ».
381 Dangier a ici un sens extraordinaire, déduit de celui de garde, protection , savoir :
« soins, égards ».
384 Ronker p. ronfler est nouveau pour moi. Roquefort a rouchier , et le glossaire
montois de M. Sigart donne roukler, qui reproduit le flam. rockelen, ail. rôcheln.
400 Ors , hors , dehors.
402 Eslre en defois signifie d'ordinaire : être interdit, défendu ; mais ici le sens ne s'y
accommode pas. Celui-ci paraît être « vous êtes dans votre tort ».
408 Un recréant est celui qui n'en peut plus.
410 Je ne saisis pas le sens de mores.
410 Ive, jument, du latin equa.
421 Lime , chose qui ronge, chagrin ; cette application métaphorique du mot lime se
rencontre aussi dans l'italien lima.
422 Grime, chagrine , irritée. Cet adjectif manque , avec cette signification, dans
les glossaires français. Nous le trouvons dans les troubadours avec le même
sens, ainsi que les dérivés grimât; grinar, grinena, grinos. Pour son étymo-
logie, voy. mon Dictionnaire. Littré ne connaît pas notre grim comme un ancien
adjectif de la langue ; Diez n'en fait pas mention non plus.
424 Domars , variété de demars dimars , dies Martis, mardi.
432 Alian, peine, labeur, — labour, — terre de labour, champ. Voy. l'article
ahanz, dans le Dictionnaire wallon de M. Grandgagnage.
439 Escover , balayer; bas-latin scopare , de scopae , menues branches , d'où le vfr.
escouve , qui a laissé les diminutifs écouvette et écouuillon.
449 Li saut, s'élance sur elle; cette locution salir à est fréquente, cp. Jean de
Condé, Lévrier 973 : A lui viennent et chius lor saut (cp. v. 998 , Et il lor
lance enmi les vis).
450 Limbars m'est inconnu ; c'est sans doute quelque dérivé de limbus , bordure,
lisière , bandeaux?
451 Esclubars constitue encore une nouvelle acquisition pour un futur dictionnaire de
la langue romane. Sa signification se présente d'elle-même. Quant à son
origine, on serait tenté de mettre en avant le flam. kloppen , ail. kloppen.
456 5ms semble être p. sous et le nom. sing. de soûl, forme conlracte de saoul,
rassasié. Ou est-ce l'adv. sus , dessus , à expliquer par « à faire cette opéra-
tion ? » — Lens , lent, qui se ralentit par suite de faiigue.
460 A chief de pose , après s'être reposée.
— 502 —
463 La pauvre femme, abîmée d'humiliations, appelle la mort pour aller rejoindre son
premier mari.
466 La forme siwe (p. seue , sieue , soue , soie) paraît être particulière à l'idiome
de Tournai ; elle se produit dans une charte de Tournai de 1230, insérée au
tome II de la Chronique de Ph Mouskès.
469 Chaudelet , « échaudé , biscuit, gâteau plat et sans œufs » (Roquefort). Les
dictionnaires de Bescherelle et de Littré donnent le mot avec l'orthographe
chaudelait, défini par « espèce de gâteau composé de lait , de farine et d'anis. »
470 Reslon, raton, crêpe. A Mons on dit aussi reton. — Wastelet , diminutif de
wastel , gâteau.
47" Ferir de maz n'est pas clair. — La paix revient au ménage ; la femme redouble
d'attentions.
486 Je ne saisis pas le sens de ce dicton.
487 La moralité qui suit perd de vue la première partie du fabliau, qui nous pré-
sente la veuve inconsolable et si tôt consolée ; elle ne se rapporte qu'au dernier
tableau, en prêchant aux maris la pitié pour les faiblesses de leurs épouses.
491 Aduin (prononcez adouin) est un mot inconnu; il paraît signifier : doux, pacifique.
594 Mai , bon temps , plaisir.
L'ENCEINTE ACTUELLE DE 'CONGRES
A-T-ELLE UNE ORIGINE ROMAINE?
NOTICE
PAR M. LE CHEVALIER C. DE BORMAN ,
MEMBRE CORRESPONDANT A SCHALKHOYEN.
Cette question a été résolue affirmativement par la plupart de
nos archéologues qui , comme on sait , assignent à la ville trois
enceintes différentes, remontant toutes trois au temps des Romains*.
D'après ces écrivains, les murs qui renferment les remparts
actuels auraient été construits et reconstruits à différentes époques
sur des substructions ou des soubassements, dont l'origine romaine,
disent-ils, ne saurait être révoquée en doute; de façon qu'en aucun
temps la ville de Tongres ne se serait étendue au-delà des limites
que nous lui connaissons aujourd'hui. Quant à la troisième enceinte,
celle qui s'élève dans les champs d'alentour et dont l'impérissable
solidité semble défier les hommes et le temps , elle servait , nous
dit-on , « indépendamment de sa destination de première ligne de
1 Parmi ces archéologues on range à tort feu notre savant confrère A.-G.-B. Schayes.
Tout ce qu'il a dit des murs de Tongres ne se rapporte évidemment qu'à l'enceinte
extérieure.
Commissaires rapporteurs: MM. H. Schuermans et le chevalier L. de Burbure.
— 504 —
défense, à abriter et à protéger la population des campagnes qui
venait s'y réfugier lois de l'apparition de l'ennemi. »
Cette circonstance anormale d'une triple ou, pour mieux dire,
d'une double enceinte (le castellum? ne paraissant avoir été
qu'une espèce de fort intérieur) , l'explication tant soit peu singu-
lière qu'on en donnait et surtout la différence essentielle qui
caractérise les deux enceintes , puisque l'une s'élève sur le sol
primitif, tandis que l'autre est construite sur un rempart de terre
muni d'un fossé, ces motifs, dis-je, m'avaient depuis longtemps
fait concevoir des doutes sur la prétendue antiquité des remparts
de Tongres , doutes qui ne furent point dissipés par l'inspection
que je fis à diverses reprises de ces murs , entre les portes de
Liège et de St-Trond , c'est-à-dire aux endroits mêmes où l'on
prétendait retrouver les caractères les plus anciens.
J'acquis bientôt la conviction que si l'antiquité de la grande
enceinte restait inattaquable , l'origine de la seconde ne pouvait
remonter au-delà du moyen âge , voire môme qu'elle ne dépassait
pas le XIIIe siècle.
Je ne nie pas qu'on y trouve des vestiges nombreux de matériaux
beaucoup plus anciens : mais c'est précisément parce que les murs
de Tongres contiennent des fragments de ciment , de tuf , de
tuiles à rebords et autres débris de constructions romaines, que
j'affirme qu'ils n'ont pas été bâtis par les successeurs de César.
Jamais le peuple-roi ne se fût avisé d'édifier les remparts d'une
cité avec de vieux matériaux pris dans les décombres.
Le moyen âge, au contraire, n'y regardait pas de si près ; le
numéraire était rare, les transports onéreux; on s'emparait des
éléments que l'on trouvait sous la main. Témoin la lourde Vliermacl,
le chœur de la vieille église de Guygovcn, le château de Colmont,
etc., constructions datant du Xe au XIIe siècle, où la tuile romaine
ramassée dans les champs voisins et employée, faute de mieux, s'est
conservée parfaitement reconnaissable. Mais pourquoi chercher
— 505 —
ailleurs des exemples : les murs de Tongres eux-mêmes n'ont-ils
pas été reconstruits en 1499 4 avec les pierres provenant des
démolitions de Golmont ?
Qui donc oserait, après cela, affirmer que pour bâtir ces mêmes
murs au XIIe ou au XIIIe siècle on n'ait pas démoli des fragments
considérables de la grande enceinte. Cette supposition si naturelle
expliquerait mieux que toute autre la similitude des ciments analysés.
Au surplus, je ne me suis pas proposé d'entamer une discussion
en règle , mon but est uniquement de produire un document qui ,
s'il ne tranche pas la question, sera au moins de nature à ébranler
la conviction si absolue de mes adversaires. Il en résulte à l'évi-
dence que le fossé qui s'étend entre les portes de St-Trond et de
Coninxheim n'a été creusé qu'en 14-47 ou environ2, et qu'aupa-
ravant il y avait à sa place des maisons et des jardins. Cette pièce ,
qui intéresse encore à d'autres titres , est tirée du cartulaire des
chanoines réguliers de Tongres, gros in-folio copié en l'an 1558
sur un volume plus ancien et offrant , par conséquent , tous les
caractères désirables d'authenticité.
Avant d'en mettre le texte sous les yeux de mes lecteurs , je ne
crois pas inutile d'en donner une analyse succincte.
Les chanoines réguliers de l'ordre de St-Augustin , établis à
Tongres depuis une vingtaine d'années seulement, y avaient si bien
prospéré qu'ils s'étaient trouvés en mesure d'avancer à la ville une
1 Voir mon Histoire du château de Colmont , p. 30. Une copie du registre aux
plébiscites place ce fait en 1509 , mais le registre original porte : Op den lesten dag
van meye Aa xcix.
- M. Driesen sera bien embarrassé de justifier son assertion , lui qui écrivait en 1860 :
« Les fossés de la ville de Tongres, comblés aujourd'hui en partie et destinés à
» disparaître dans un avenir prochain , sont sans contredit le plus ancien vestige de
» l'antique Atuatuca. Les assises des murs qui les dominent sont évidemment de
» construction romaine; mais les fossés eux-mêmes remontent plus haut, puisque
» Sabinus et Cotta trouvèrent tout fait le camp d'Atuatuca qu'ils se contentèrent
» probablement de fortifier davantage. »
— 506 —
somme de cent postulats destinés à parfaire un capital de quatre
cents florins du Rhin, que la ville devait à l'évèque de Liège. De
plus, ils avaient cédé à la ville tous les droits et avantages qu'ils
retiraient d'une propriété située juste à côté de la porte de
St-Trond , à gauche en sortant, où se trouvait autrefois la maison
d'un certain Tilman Cockarts et qui était indispensable à l'achè-
vement du nouveau fossé ; enfin ils avaient renoncé, au profit de
la ville , à une petite rente hypothéquée sur un jardin situé entre
les portes de St-Trond et de Goninxheim et converti récemment
en nouveau fossé.
En retour de ces avantages la ville dut leur faire aussi quelques
concessions. D'abord, elle leur céda le terrain situé entre les murs
et le fossé de la ville depuis la Porte de pierre ou de Goninxheim,
Steynre poort, jusqu'au Jaer, ainsi que le rempart intérieur,
avec la condition expresse qu'ils ne pourraient pratiquer dans les
murs ou les remparts aucune porte, ni ouverture quelconque. En
second lieu, elle exempta les réguliers de l'établissement d'une
roue hydraulique destinée à conduire, par tuyaux, les eaux du Jaer
dans la ville. Enfin, il fut stipulé que si la régence menait à bonne
fin le projet qu'elle avait d'amener en ville les eaux de quelque
fontaine située aux environs , le couvent contribuerait dans la
dépense pour une somme de quarante florins du Rhin , mais qu'il
aurait le droit de faire à la conduite une prise d'eau, par des
tuyaux dont le diamètre intérieur ne pourrait excéder celui du petit
scel de la ville.
— 507 —
ANNEXE.
In den naem Gods, Amen. Wy borghemeisteren ende gesworen raet ende allen
die gemeynten der stadt van Tongren gemeynlick doen condt ende kenlick allen
lueden , daer toe tuyghen ende gestaen vermits desen openen onse lettren , dat
wy om der minlicker gonsten wille op dese lyt ons geschiet vermits den eerbaren
Religiosen des cloesters ende godshuys van der regulieren onser stadt , als van
der summen van hondert postulatus gulden, die wy bekennen ontfaen ende
bekeert le hebben in die summe van vier hondert rynsgulden , die wy sint
Jansmisse neest voorleden sculdich waren te betalen onsen lieven genedighen
heer van Luydick , ende overmits dat sy ons verleent ende gegeven liebben allen
alsulcke bâte als sy hebbende waren aen die plaetse ende hoefken buyten ende
neven cruysport ter slincker liant gelegen als men ter vorschr. porten wtgaet ,
daer Tilman Cokarts woense opstonde , ons ende onser stadt zeer grootelick
dienende om den nuwen grave die daer neven begonnen was te volmakene ,
ende noch meer overmits dat sy te weten die selve religiose heeren des cloesters
der Regulieren voersc. ons ende onse stadt vorsc. quyt gescolden hebben ten
ewighen daghen alsulcke vier penninghen ceis end eij capuynen die wy bon jarlix
sculdich waren van eynre plaelsen , die eens eynen hoff te wesen plach , gelegen
tusschen die voersc. Cruysport ende Stynreport onser stadt, die nu bekeert is
in den niuiven graven neestvoerscreven. Daerom ende oeck om lions goets innich
ende devoet gebets wille , dat sy daegelix doende syn voer ons ende int gemeyn
voer allen kerstenheyt, soe bekennen wy voer ons ende onse nacomelingen hon
ende honnen nacomelingen wederom verleent ende gegeven te hebben , alnoch
verlenen ende gheven peyselick ende vredelick te hebbene , te besittene , te
bantplichten ende te gebruycken ten ewighen daghen alsulcke plaetse als
gelegen is buyten Miser stadt muere, alrenaest hons cloesters voersc, te weten
tusschen die moer ende dat water van onser stadt grave gelegen tusschen
steynreport vorscreven ende Velinx torn , comende tôt aen die Jecker metten
ghange ende walle binnen des selven moers reyckende ende streckende van
Steynreporten doere Velinx toren vorscreven tôt Loerre waecket toe, staendeop den
bornick van den smalenwyer, ende dit alsoe verre alst onser stadt toebehort ende
aengaet , ende anders niet ; by alsoe ende claerlick daer in ondersproken dat die
heren des cloesters voersc. noch lion nacomers nu noch in toecomende tyden in
die muer noch in den wa! in egheynre wys eynighe gaten , dueren noch porten
maken en sullen noch laten maecken. Ende overmits de punten voer ende nae-
bescreven soe hebben wy affgenomen ende quytgescouwen den selven heren ende
honnen nacomelinghen voer ons ende onse nacomelinghen ten ewighen daghen
alsulcken last ende cost van te bouwene wter Jekeren onser stadt voersc. met
eynen rade alsulcken fonteyn oft waterpyp als sy ons sculdich waren , beheltelick
— 508 —
ons ende onse nacomelingen ten ewighen daghen ons aysements van gliange te
liebbene ende te gebruyckene alsoe dicke ende menichwerwen , als sich des
nootgeboren sali , van water van brande van vuere oft ter moer ter weringhe te
trecken in manire van orloghe , oft oeck die muere , torne, waketten , oft sgelyx
te doen berbouwen oft te hermaken met mans personen gelyck der brieff daer
aff wesende claerlick begrypt ende inbelt. Oiulersproecken oeck daer in , dat soe
wanneer onse stadt in toecomende tyden gemaect zal bebben een fonteyn , dat
Godt gbeve, spruvtende , oft comende wt sprinckbornen als staende syn te Loyde
oft daeromtrent oft op andere goede bequeme plaetsen onser stadt wel dienende ,
water ghevende binnen onser stadt voerscreven , als dan ende niet eer soe
sal dat voorsc régulier cloester ons noch te goede doen , gheven ende verbon-
den staen te belalen in hulpen des costs der selver onser fonteynen , die
summe van xl rynsgulden eens , by alsoe dat dat cloester vorsc. des waters oft
conducts van der stadt fonteinen , ter neester plaetsen daer die fonteyn oft conduct
hen alreneest comen sal, eyn portie oft quanliteit , die bon nootdorstich sy , le
minsten alsoe veel waters als eyn pyp dragben macb , die de wytde hedde onser
stadt cleyne segels van saecken , opden rugge ons groten segels hier gedruct is ,
hebben sullen , genieten ende gebruycken altyt , het sy van binnen oft van onder
der aerden oft daer boven te leyen ende te brengen , te des selven cloeters behoeff
ter steden ende ter plaetsen, daer den cloester aire best bequemelick syn sali,
gelieven ende genueglien , sonder der stadt fontyn oft conduct te quetsene oft te
hinderen in eyniger wys , ende al op des cloesters cost anxt ende scade alsoe
verre als honre portien ende quanliteit die sy daer wt hebben oft hebben sullen ,
aengheit en aendreecht ende anders niet ende al sonder argeliste.
In luygenisse der waerheit allen der dingen voerscreven , soe hebben wy bor-
geineisteren gesworen ende raet der stadt van Tongren voerscreven, met wille
weten , consent ende gemeynen gevolch allen der ambachten onser stadt vor-
screven , onsen groten segel melten cleynen achter daer op druckende desen
opene lettren doen aenhangen. In den jaer der zeliger geborlen ons liefs heren
Jesu Christi dusent vierhondert ende xlvij in junio xxvi daghe.
Aldus onderteikent : Walterus Rotarii, secretarius oppidi predicli.
(Archives du gouvernement provincial à Hasselt. —
Cartulaire du couvent des chanoines réguliers de
de Tongres , f° 418 v").
ÉGLISES DES ENVIRONS DE MONS.
NOTICE
PAR
M. LÉOPOLD DEVILLERS,
MEMBRE TITULAIRE A MONS.
Les églises paroissiales des environs de Mons sont généralement
des édifices modernes ou sans importance au point de vue monu-
mental. II n'en était pas de même autrefois. Mais la manie de tout
remplacer nous a privé de plus d'une construction curieuse sous
le rapport architectonique. C'est ainsi que récemment nous avons
vu démolir deux petites églises qui , certes , n'étaient pas dénuées
de cachet artistique. Nous voulons parler de l'église de Mai-
sières , dont le chœur était situé à gauche de la nef, et de celle
de Ciply qui avait un aspect si pittoresque ».
Sans doute , on ne manquera pas de nous objecter que ces
édifices tombaient de vétusté et que , en outre, les paroissiens y
étaient trop à l'étroit. Mais sont-ce bien toujours là les véritables
motifs qui font tant désirer la démolition de choses qu'on ne
sait guères remplacer convenablement? Ces motifs sont, du reste,
' Une vue de l'église de Ciply a été lithograpliiée dans la Collection de vues prises
dans l'ancienne enceinte et dans, les environs de la ville de Mons par G. L'Heureux,
peintre et dessinateur (Mons, 1826.)
Commissaires rapporteurs : MM. le chevalier L. de Burbure et A. Casterman.
— 510 —
peu sérieux à nos yeux, nous l'avouons, et l'expérience vient à
l'appui de notre opinion. Si, par exemple, nous examinons de
près la nouvelle église de Cuesmes, les nombreuses lézardes que
nous y apercevons nous la font considérer comme bien plus
caduque que l'édifice ancien i ne pouvait l'être , et pour prouver
combien le second motif est souvent conlrouvé, nous raconterons
un fait qui s'est passé dans l'église de Giply, sous le règne de
Marie-Thérèse. A cette époque , les habitants de ce village
prétendaient que leur curé, décimateur de sa paroisse, devait, aux
termes des anciennes chartes du Ilainaut , apporter son contingent
à l'agrandissement de l'église , vu que la population s'était fort
accrue. Mais le pasteur sut, par un stratagème assez plaisant,
éluder cette demande. Il invita, un jour de fête, tous ses paroissiens
à se rendre exactement à l'église quinze jours après, ayant quelque
chose d'important à leur communiquer. Au jour indiqué, chacun
y arriva avec empressement. Le curé engagea ses ouailles à s'ap-
procher de lui le plus près possible, puis leur dit de se retourner
pour s'assurer que l'emplacement vide qu'ils laissaient derrière eux
élait plus que suffisant pour contenir les personnes absentes. Ainsi
fut terminé le différend.
Disons maintenant quelques mots de ce qui est encore digne
d'être cité des églises de nos environs.
C'est, d'abord, le beau porche de l'église de Baudour. Ce porche
abrite des bancs , placés de chaque côté et surmontés d'arcades à
"meneaux à jour. Dans le fond, est la porte de l'église. L'ensemble
de cette construction est pur, harmonieux, et les proportions en
sont excellentes.
L'église d'Obourg avant sa reconstruction, devait être bien
curieuse, si l'on en juge par ce qui reste de l'édifice ogival,
savoir : la tour et le portail pratiqué dans le soubassement de
1 Ce dernier édifice se trouvait sur un autre point de la commune. La nouvelle église
est au centre du village , à front de la Placé.
— 511 —
cette tour. Si ce portail ne peut pas être cité comme un modèle
ses ogives et ses ornements, malgré quelques irrégularités assez
choquantes , produisent un fort bon effet , ainsi que l'a fait
portail de l'église d'odourg.
remarquer M. l'architecte Vincent ', et sa situation sur une hau-
teur contribue beaucoup à lui donner un caractère de majesté peu
ordinaire. Le bas-relief placé au sommet du portail est traité d'une
1 Rapport fait au conseil provincial du Hainaut par la députation permanente,
session de 1865, p. 224.
— 512 —
façon fort naïve. Il représente saint Martin à cheval, tenant l'épée
haute d'une main et abandonnant, de l'autre, la moitié de son man-
teau au diable, qui a pris la figure d'un pauvre homme. Au-dessus
de ce sujet, on voit dans un phylactère un millésime (15..), dont
les deux derniers chiffres sont usés. Le clocher se termine par une
flèche élevée et tlanquée de quatre aiguilles. A l'intérieur, on
remarque sous la tour une belle voûte ogivale, dont les comparti-
ments sont en briques d'un beau rouge et les arêtes en pierre
calcaire.
Quant à l'église moderne, il est impossible d'imaginer rien de
plus mesquin, et on ne pourrait en souffrir la vue, si l'on n'était
arrêté par un tableau de maître , qu'un pinceau maladroit a pré-
tendument restauré. Ce tableau provient d'un petit oratoire con-
struit en 1 G 16 sur le territoire d'Obourg , à l'honneur de saint
Macaire1. 11 représente la translation du corps de saint Macaire.
Le fond de ce tableau est rempli par un paysage dont l'ensemble
embrasse une vue de Mous, d'Obourg cl de l'abbaye de Saint-
Denis-en-Broqueroie. Cette toile rappelle le souvenir de la solen-
nité qui eut lieu le 28 septembre 1G15, lorsque le clergé, les
députés des états de llainaut et le magistrat de Mous vinrent
jusqu'au pont d'Obourg recevoir des mains de l'abbé de Saint-
Denis, Henri de Buzegnies, la châsse de saint Macaire qui avait
été envoyée de Gand par l'archevêque Vander Burch pour être
exposée, à Mons, à la vénération publique, à l'effet d'obtenir par
la puissante intercession de ce patron la délivrance de la peste
qui sévissait en cette ville.
L'église d'Hyon, quoique datant de 1527 (millésime du
clocher), n'a aucun caractère monumental. Elle est entièrement
construite en briques. Sa porte d'entrée, au bas du clocher, est
encadrée d'une ogive en pierre bleue. Nous avons relevé dans la
1 V. F. Hachez, La peste de 1648 à Mons, pages 8 à 12.
— 513 —
nef de cette église, l'épilaphe suivante qu'accompagnent les quar-
tiers de noblesse des défunts :
ICI GIST MESSIRE PHILIPPE
FRANEAU CHEVALIER SEIG1'
DE HYON. ARRE ET ATTRE. VENIZE
&. &., EN SON VIVANT PRÉVOST
DE LA VILLE DE MON'S. QUI
TREPASSA LE 16e IOUR D'AVRIL
1586. PRIE DIEU POUR
SON AME.
1CY GISENT MESSIRE SEVERIN
FRANEAU CHEVALIER SEIGr DE
HYON &a ET DAME ADRIENNE
VAN DER RURG SON ESPOVSE. ET
MESSIRE PHILIPPE FRANEAU SEIG1".
DE HYON, RARON DE GOMEGNIES,
SON FILS, GENTILHOMME DE
L'HOSTEL DE L'ARCHIDUC ALBERT,
ET DAME CATHERINE BARBE d'yVE
SON ESPOVSE , ET MESSIRE PIERE
JOSEPH SEIGr DE HYON LEUR FILS
CAPITAINE AU SERVICE DE SA MAlté
CATHOLIQUE, MORT LE 18 DE JUIN
1683 EN CÉLIRAT. ET DAMe CLAIRE
JOLENTE FRANEAU DAME DUDIT
HYON, SA SŒUR, MORTE LE 31 MAI
1716, ET PYIS DAME ADRIENNE
ISABELLE FRANEAU DAME DUDIT
LIEU MORTE LE JANVIER
1727.
REQUIESCAT IN PACE.
L'église ogivale d'Havre, dont les fenêtres ont conservé leurs
XXIX XXII 3-2
— 514 —
meneaux, n'offre d'intéressant que deux épitaphes de membres de
la famille des seigneurs de cette localité; nous y reviendrons, en
parlant du château. Cette église date de la seconde moitié du
XVIe siècle. Le chœur a été construit en 1569, ainsi qu'on le
remarque par deux pierres , posées l'une à l'intérieur et l'autre à
l'extérieur du chevet. La première porte trois fleurs de lis d'or
sur fond d'azur et le millésime 1509. Sur la seconde, on lit :
PAR C. P. DE CrOY
A° 1569.
LES ANCIENNES BANQUES DE TONGRES.
NOTICE
par M. GÉRARD JANSEN,
ARCHÉOLOGUE A TONGRES.
Au XIIIe siècle, il existait à Tongres une rue appelée, comme
aujourd'hui, rue des Chiens, lionstrate, vicus cank ou viens
canum i.
La description que nous en trouvons dans les archives contem-
poraines serait encore fidèle aujourd'hui, si la forme des maisons
n'avait pas changé après le grand désastre de 1677 2.
Mal alignée, mal pavée, éclairée par le soleil et par la lune,
c'est un réseau de petits bourbiers confinant par une extrémité au
forum ou Grand'Place et par l'autre à la petite rue des Dames ,
dames traie.
Avant 1269, la rue des Chiens était exclusivement habitée par
des juifs qui s'y livraient à des transactions de prêt et de troc.
' Archives de l'église N.-D. à Tongres. Viens diclus honstrate dans le Veritas
ab anno 1383 , p. 121 , n° 19 du catalogue Vicus canis dans le même registre,
p. 46. . . . Vicus canum dans le Register censuum et caponum plebanie A0 1423 ,
page 15 , n° 14 du catalogue.
* Bulletin de la Société scientifique et littéraire du Limbourg , tom. II , p. 41,
note première.
Commissaires rapporteurs : MM. H. Schuermans et le chevalier L. de Buiîbure.
— 516 —
On ignore vers quelle époque ils fixèrent leur séjour à Tongres ;
seulement plusieurs vieux documents échappés aux désastres
du temps nous font entrevoir que déjà, avant le Xe siècle, les
marchands israélites exerçaient leur commerce d'argent dans
presque toutes les lionnes villes du pays de Liège. Ils y occupaient
un quartier spécial entièrement séparé des autres parties de la
ville et stigmatisé, en signe do mépris, par une épithète mal
sonnante *.
Les juifs ne participaient pas à la jouissance des droits civiques
et les habitants ne pouvaient communiquer avec eux que pour
autant qu'ils eussent besoin de leurs offices. Quand ils venaient
s'établir dans une bonne ville, la régence les soumettait à une
taxe semblable au droit dont les bestiaux sont encore frappés sur
la plupart de nos marchés.
La réprobation universelle à laquelle on les vouait, avait
cependant moins pour cause ranathème que l'église catholique
faisait et fait encore peser sur eux , que leur insigne mauvaise foi
devenue proverbiale. A Huy, par exemple, à raison de leur con-
duite, le magistrat dut les proscrire à jamais de la ville 2.
Vers la fin du XIIe siècle, quelques-uns prétendent que ce fut
vers le milieu du XIIIe, d'autres reculent la date jusqu'au XVe,
les juifs furent remplacés dans les opérations de banque, dans
toute la chrétienté , par les Lombards 3.
1 A Huy on appelait la rue des Chiens chinrue , à Liège chinstrée, et dans plusieurs
villes flamandes, telles que Maestricht , Ilasselt , St~Trond , Maeseyck et Tongres. . . .
hondstraet.
' Saumery, Hélices du pays de Liège, tome II, p. 21.
8 M. Beugnot prétend que l'institution primitive des banques est due aux juifs qui se
décorèrent du nom de Lombards, un jour que le roi les eût bannis de France avec
toutes leurs mauvaises spéculations. [Des banques publiques deprêt sur gages et dfi
leurs inconvénients , Paris, 1829).
M. Géraud , en s 'appuyant sur le livre de la taille de Paris sous Philippe-le-Bel,
assoie lui que le nom de Lombards fut donné aux commerçants italiens qui s'établirent
en France vers la fin du XIIe siècle. (Pu. Lebas , Dictionnaire encyclopédique,
tome II , p. 305.)
— 517 —
A Tongres, les Lombards occupèrent pendant quelque temps la
rue des Chiens comme leurs devanciers, sans être comme eux
livrés au mépris public *. Plus tard ils se confondirent avec les
autres habitants et, vers le XIVe siècle, une maison importante
dirigée par un Lombard 2 se trouvait établie dans la rue du Caillou
ou du Galet , kydel ou kieselstrate 3. Ailleurs les Lombards se
fixèrent généralement dans une même rue qualifiée de leur nom
générique ou du nom de leurs opérations : rue des Lombards ,
Lombardslraet , Lombardslreet à Londres et pont au Change à
Paris 4.
Les premiers Lombards qui soient venus en Belgique y furent
employés par les papes à la perception de X annale, espèce d'impôt
dont étaient grevés les bénéfices ecclésiastiques 5. Dans certains
endroits ils formaient entre eux une confrérie présidée, comme
presque toutes les corporations du moyen âge , par deux maîtres
et deux gouverneurs.
La nécessité d'avoir de ces argentarii était devenue alors ur-
gente. Nous n'avons pas trouvé le vrai motif de ce besoin, car
les archives de ce temps l'attribuent à des causes variables. Chose
acquise à l'histoire pourtant , c'est que les dépenses militaires
contraignaient quelquefois les seigneurs à faire de gros emprunts
et , pour obtenir de l'argent , à mettre leurs propriétés en gage.
Il est arrivé bien souvent, pendant les luttes fratricides qui ont
1 Archives du bureau de bienfaisance : Reghter van Doervaert , A" 1500 , f° xiij
« het huys van Jean Moersmans geleghen neffens dat lonibardenhuys in die hondstrale. »
* Archives de N.-D. — Stipule spectans ad Râos Regulares tungrenses, f° 196,
n° 178 du catalogue
« Haec doraus sita est in de Kiedelstrate binnen Tongren neffens en tusschen die
» wooningen lysens voorscreven ter lombaerden huys en de Trichterslrate wert. »
5 Par suite d'une corruption d'orthographe , cette rue porte aujourd'hui le nom de
rue des Sarraux, Kielenstraet.
* Léopold Devillehs , La chapelle des Lombards à Mons , Annales de l'Académie
d'archéologie, t. xvii , p. 135.
' Statula ecclesie Tungrensis , fol. xxv , n° 3 du catal. — Bulla de annata camere
apostolice de Grégoire XI, a0 1372.
— 518 —
désolé le règne des princes de la foi et du glaive, que des villes
entières furent réduites à néant et que l'envahisseur inhumain
obligea les rares habitants échappés au carnage de recourir aux
libéralités d'une ville voisine pour payer les exorbitantes contri-
butions dont il frappa sans pitié les ruines fumantes de leur mal-
heureuse patrie '.
Les Lombards savaient habilement profiter de ces terribles
moments de désarroi et parfois ils spéculaient d'une manière
odieuse sur la gène publique. Bientôt la population ne les prit
pas moins en horreur que les juifs ; aussi réclama-t-elle avec
instance la suppression de leur honteux trafic.
Dans le concile général de Latran , tenu en 1215, le pape
Innocent III lança contre eux l'anathème synodal , intimant aux
fidèles la défense de les fréquenter 2. En 1302, Févêque Adolphe
de Waldeck , suivant à la lettre les ordres partis du Vatican , les
chassa ignominieusement de son diocèse 3.
Mais les exactions militaires avaient occasionné une extrême
pénurie d'argent; tous les petits bourgeois et manants étaient
complètement ruinés et les seigneurs eux-mêmes ne pouvaient plus
suffire aux impôts par leurs revenus , de sorte que bientôt les
souverains furent obligés de tolérer de nouveau , dans une cer-
< Archives communales de Tongres; Liber plebiscilorum, f° xxvij : décision du magis-
trat du 6 décembre 1199 « van gbeen gelt kunnen te gheven om de ruyters te betalen
» soo verre die van St-Truyden gelyck ons sicgelen want onder den gemeynen man
>> geene peiiningen en wistop te brengen ».
* « Synodali décrète statuimus ut si de cœtero quoeunque pretexlu Judœi a Christia-
» nis graves immoderata seu usinas extorserint, Christianorum eis participium subtra-
» liatur, donec de immoderato gravamine salisfecerint competenter. Unde Christiani,
« compellantur ab eorum commercio abstinere ».
{Traité des billets, de 16Si , p. 249.)
5 « Hic Adolphus Lombardos usurarios quos scabini leodienses lucri gratia confovebant
» ai inatus non clypeo vcl galea , sed mitra et baculo pastorali , fractis domorum suarum
foribus a civitate penitus exlirpavit. »
(Chai'Ealville, Gesta pontificum Leodiensium; t. II; p. 358 — Fisen ,
Hisloria ecclesiœ Leodiensis, tome II, f°. 41.
— 519 —
taine mesure, les Lombards et leurs subtilités usuraires. Pour les
attirer ils furent même contraints de leur accorder certains privi-
lèges. A Liège « ils furent admis — ce qui , jusqu'alors , leur
avait été refusé par les bulles romaines et les statuts synodaux1
— à jouir des sacrements , à être enterrés en terre chrétienne
et à faire les oblations aux prêtres. Leurs femmes, leurs enfants
et leurs domestiques eurent droit aux mêmes égards de la part
des ecclésiastiques 2. On leur octroya , en outre , le droit de
bourgeoisie, le libre exercice de leur commerce et l'exemption
des corvées, des tailles et du service militaire3. »
Les mêmes privilèges leur furent octroyés à Tongres. Le 1 «"juillet
1570, Michel Pourguyn demanda au magistrat l'autorisation
d'établir une table de prêt pour un Piémonlais, appelé Mathieu à
la Franck, dont il se portait garant. La régence s'empressa d'accé-
der à sa demande et, le 8 août de la même année, Mathieu à la
i Un extrait des statuts synodaux de l'an 1287 , publiés par l'évêque Jean de Flandre,
donnera, pensons-nous, la mesure des rigueurs employées dans ce temps contre les
usuriers dont la contagion s'étendit , d'après M. De Decker , jusque dans le sanctuaire.
« I. Excommunicamus et excommunitatos denunciamus omnes usuraiios manifestos ,
» et sigulis diebus dominicis et festivis a quolibet sacerdote denuntientur exeommunicati.
» II. Nullus sacerdos oblationes manifestorum usurariorum recipiat nec ad commu-
» nionem eos admittat , nisi usurarius manifestas satisfecerit de usuris.
» 111. Nullus testamentis manifesti usurarii intersit, nec ad penitentiam vel commu-
» nionem eos admittat, nisi de usuris satisfecerit secundum formam constitutionis domini
» Gregory pape, et testamenta manifestorum usurariorum qui secundum formam dicte
» constutionis sati>fecerint ad sacramenta ecclesiaslica admittantur
» V. Percipimus etiam singulis sacerdotibus paroebialibus, quod moneant in parocbiis
» suis fréquenter in generali et in speciali de quibus constiterit usurarios , et infamatos
» publiée de usuris aut contractibus illicitis désistant infra septemdies a tempore dicte
» monitionis : alioquin ex tune ipsi usurarii et preemptores excommunicentur in speciali,
» et diffamati si se non purgaverint , pro convietis habeantur, et si taliter monili et
» excommunieati reseipiscere noluerint , nominatim excommunicentur. ». — Slatuta
synodalia ecclesie leodiensis, A0. 1287.
* Lettre du prévôt de Liège de 1 349 dans le Bulletin de l'Institut liégeois , t. III .
p. 318.
5 « Civitas concedit fœneraforibus immunitatem a corvatis , tàliis et servitia belli ;
» item , jus civitatis et libéra? negotionis. » — Epitoma documentorum civitatis
leodiensis : Statut du "28 mai 1349
— 520 —
Franck put tenir une maison de prêt ou de gage (lecnhuis) à con-
dition de se faire admettre dans un des douze corps de métiers de la
ville. Il avait la permission d'échanger les monnaies, de prendre
des effets à gage sauf des armes ou des munitions de guerre et de
faire, au taux hebdomadaire d'un sou par florin , des prêts ne
dépassant pas la somme de six florins de Brabant. Les dépôts et
les emprunts étaient garantis par des lettres de gage qui pouvaient
être renouvelées quand elles étaient lacérées ou perdues , mais qui
devenaient caduques le jour où l'engagement réciproque du préteur
et de l'emprunteur cessait d'exister.
Pour être assimilés aux autres citoyens de la ville et jouir
comme eux du droit de cité (het porterscappej et du droit de bour-
geoisie fhet borgerseappe) les banquiers , de même que leur fa-
mille et leurs employés, étaient tenus de faire élection de domicile
dans la cité et de jurer fidélité au prince-évêque , au magistrat et
aux us et coutumes du pays de Liège. Ils ne contribuaient qu'aux
charges et aux impôts civils et se trouvaient exempts des corvées
et du service militaire. La durée de leur concession était ordinai-
rement de douze années pendant lesquelles les milices citoyennes
devaient veiller à l'inviolabilité de leur domicile, et les cours de
justice les admettre à tout prouver sans témoins sous la foi du
serment.
A Mathieu à la Franck succéda, le 1er août '1582, Dominique
Ramelis. Moins heureux que son prédécesseur, celui-ci vit en peu
de temps tous ses fonds compromis par de malheureuses spécula-
tions. Pour qu'il pût se libérer honorablement envers ses créan-
ciers, le magistrat fut obligé de lui accorder la permission de
vendre sa concession au changeur Busla de Hasselt. Le 31 octobre
1586, les deux banquiers passèrent un contrat qui fut ratifié par
le conseil des métiers le 31 décembre suivant. Busla fournit à
Ramelis une somme de 2,250 florins pour payer les dettes de la
banque, le conserva dans ses fonctions de directeur et lui promit
— 521 —
un appointeront de 5 livres flamandes ou 30 florins de Brabant,
prenant cours à partir du 1er janvier 1587.
Huit ans plus tard, le 28 juillet 1605, la régence délia Busla
de son engagement et consentit à ce qu'il cédât son comptoir à Jean
Mutis auquel elle octroya, le 20 septembre 1606, une nouvelle
concession de douze années , à charge de payer annuellement pour
l'entretien des édifices publics une somme de 25 florins de Brabant 1.
Bien que nos ancêtres eussent gratifié les Lombards de nombreux
privilèges , ils conservaient néanmoins une certaine méfiance pour
leurs opérations financières. Soyons plus justes, nous qui voyons
le résultat de leurs œuvres, et disons que si l'histoire contempo-
raine leur reproche de honteuses dilapidations, la postérité leur
est redevable d'un des meilleurs moyens de transactions commer-
ciales connus jusqu'à ce jour. En vérité, ne nous ont-ils pas fait
connaître la lettre de change, cet acte par lequel une personne
cède à une autre , pour un prix convenu , les fonds dont elle est
créancière et qui nous permet de disposer de notre argent en toute
occurence sans trop de frais et sans perdre un temps précieux?
Dans le principe, la lettre de change consistait en une simple
procuration ou billet délivré par le propriétaire à celui qui allait
toucher pour lui soit une créance, soit le revenu d'un bien ou
l'intérêt d'un capital. Avant l'établissement des routes postales,
les voyages lointains étaient fort dispendieux ; c'est pourquoi
plusieurs personnes, confiantes dans la loyauté publique que l'on
considérait alors comme la plus sûre hypothèque , avaient pris
l'habitude, pour régler leurs affaires en pays étranger, de se servir
de l'intermédiaire des voyageurs.
Les anciens ne connaissaient pas l'usage d'échanger de l'argent
contre des lettres ; aussi le droit romain ne mentionne-t-il que le
cambium ou le change des monnaies. Plusieurs historiens, il est
' V. Liber negotiorum ab anno 4SI7, pp. 61, 150, 154 verso, 166 et annexes n°» 3,
i , 5 et 6 .
— 522 —
vrai, trop fortement épris de la rugueuse civilisation romaine,
aiment d'attribuer à celle-ci tous les grands bienfaits d'ordre
social. Cependant, dans le cours de leurs arides recherches, ils
n'ont pas trouvé, si nous ne nous abusons, que sur les marchés
de l'ancienne Rome on ait jamais donné au papier une valeur
conventionnelle équivalente à la valeur monétaire des métaux. Les
lettres équimonétaires ont été introduites au moyen âge , selon
Merlin , ■ pour éviter le transport réel de l'argent ce qui, outre
les frais et les risques, apportait un relard considérable au com-
merce que l'on ne vit fleurir que depuis l'usage des lettres de
change. Soit que le négociant tire des lettres de change, soit qu'il
prenne sur place des lettres tirées par d'autres négociants, il
est payé de ses ventes ou il paye ses achats en lettres de
change '. >
On a confondu longtemps les lettres de change avec les contrats
de change, espèce de convention écrite que les marchands forains,
allant aux marchés de Champagne, de Lyon et de Brie, faisaient
avec les personnes qui leur achetaient à crédit. En 1294, Philippe-
le-Bel frappa ces contrats d'un impôt appelé pîte. C'est l'ordon-
nance mal interprétée de ce prince qui a fait dire à Giovanni
Villani, dans son Histoire universelle, et à Savary, dans son
Parfait négociant, que l'invention des lettres de change était
antérieure aux Lombards et que l'honneur en revenait aux juifs.
Mais Dupuis de la Serra, qui offre plus de crédit en celte matière,
assure d'accord avec l'historien de Rubys qu'elle fut l'œuvre des
Gibelins de la Lombardie. Ceux-ci, après leur défaite par les
Guelphes, s'étaient retirés à Amsterdam où ils établirent le com-
merce des lettres de change (polizza di cambioj pour toucher le
revenu des biens qu'ils avaient délaissés dans leur pays natal.
Quoi qu'il en soit , le premier édit qui fait mention des lettres
1 Merlin , Répertoire de jurisprudence , t. XVIII, p. 15;).
— 523 —
de change fut donné par Louis XI, au mois de mars 1462;
les lettres-patentes de Philippe de Valois du 6 août 134-9, que
l'on invoque quelquefois , n'ont trait qu'au change public des
monnaies.
« Selon toutes les probabilités, les lettres de change avaient chez
■ nous une origine très-ancienne. Liège, siège d'une des princi-
> pales églises de la chrétienté , avait des rapports très-fréquents
• avec Rome et les autres grandes villes de l'Italie '. »
Il en était de même du chapitre de Tongres , plus ancien
que celui de Liège. A dater du XIIIe siècle, les jeunes cha-
noines avaient la permission d'achever leurs études théologiques
en pays étranger, dans certaines universités spécialement indiquées
par le statut canonial et dans ce cas ils touchaient le revenu de
leur canonicat au moyen de lettres de change 2. Ces lettres, con-
tresignées par le recteur de l'université , devaient être envoyées
tous les trois mois au chapitre , sous peine pour les étudiants de
perdre le revenu de leur prébende. Comme il eût été difficile,
sinon impossible, pour les prébendiers, vu le manque de correspon-
dances régulières, de communiquer à temps avec leurs supérieurs,
ils avaient recours au changeur qui leur escomptait leurs cachets.
L'origine des changeurs (wisseleerenj est fort ancienne. De
temps immémorial ils ont fait le change des monnaies et le com-
merce des billets. Lorsque la Belgique gémissait sous le joug
espagnol et que les Nérons de Castille , pour mieux opprimer les
' Volumus quod liuiusmodi canonicus in studio residens pre ipso anno secundo sid ea
portione contentus quod reciperet de huiusrnodi grosso si in ecclesia predicta personaliter
resideret. Transactis autem dictis duobus annis recipet ut superius est declaratum.
Loco vero huiusrnodi studii sunt haec in alemania, saxonîa. In regno francie. Parisius.
Aureliani et suessio et provincia Monspesulan. In Ytalica Bononum et Padua. In hijs
locis vigent studia generalia. — Slatula ecclesie Tungrensis , fol. x... Décret du
1-2 mars 1336.
* Archives de N.-D. — In libro gratiarum ab anno 4407, n° 5 du catal. 1° Lit—
tera studii Johannis Nicolaï du 13 juin 1453 ; 2° celle de Coniard Gaveren du 2 sep-
tembre 1582 ; 3° une«autre de Arnold Witten du 24 avril 1584 , etc
— 524 —
vigoureuses gildes flamandes , portaient sans cesse des entraves à
leurs florissantes industries et dirigeaient contre elles les plus
fanatiques persécutions, la plupart des marchands de Tongres
transportèrent leur commerce sur des" places étrangères et, pour que
le fruit de leurs peines ne devint pas la proie du tyran, ils con-
fièrent à leur retour leur argent aux banquiers.
Les halles de Mous, d'Aix-la-Chapelle et d'Amsterdam étaient
les plus fréquentées par nos marchands, quoiqu'on y exigeât d'eux
un fort droit de stationnement (htt hallegelt). C'est que le ciel
y était calme et serein et que l'on y respirait un air libre.
A la suite de la suppression des marchés de la Flandre, Londres
et Amsterdam acquirent le monopole du commerce. Ce droit devint
alors si exorbitant que le magistrat de Tongres, pour éviter que
nos commerçants ne se ruinassent et que la ville ne perdit son
unique source de prospérité, avisa de mettre ce tribut à la charge
du trésor communal *. Dans cette circonstance, pour acquitter
régulièrement la dette , il recourait au changeur qui seul , à cette
époque, n'était pas entravé dans ses opérations. C'était aussi le
changeur qui faisait parvenir aux marchands forains le prix des
céréales , qu'en temps de guerre ou de famine ils achetaient pour
compte de la ville, à la halle d'Amsterdam. Ayons hâte de dire
que pendant celte période de troubles incessants et d'indicibles
cruautés la misère était tellement grande dans le pays que l'on n'y
trouvait plus de quoi suffire à son existence.
Toutes les industries chômaient à Tongres. Les tisserands et
les drapiers émigraient en grand nombre vers l'Allemagne ,
l'Angleterre et l'Italie où les jalouses rivales des opulentes cités
de Gand , de Bruges et d'Anvers les attiraient par l'appât des en-
couragements considérables qu'elles accordaient à l'industrie2. Les
' Liber plebiscitorum ab anno 1 i77 , fui. clxxy. Décision du magistrat en date
du 28 avril 1545.
' \'ous avons trouvé plusieurs preuves de ces émigrations lointaines dans les registres
— 525 —
ouvriers belges , dont les mœurs étaient rigides et la mâle activité
se retrempait dans l'émulation , parvenaient quelquefois à réaliser
dans leur nouvelle patrie de grandes fortunes. Quand , après
quelques années d'exil , ils voulaient regagner leurs pénates , la
peur d'être rançonnés pendant le voyage leur donnait souvent de
vives inquiétudes. Heureusement qu'ils trouvaient toujours un
banquier auquel ils pouvaient confier le montant de leurs petites
économies jusqu'à ce qu'un temps plus propice leur permît de
recueillir sans crainte les fruits de leur travail.
Dans plusieurs localités les changeurs jouissaient, non sans
qu'ils le méritassent, de la plus grande confiance. La régence les
investissait même du droit de contrôler les monnaies; eux seuls
d'ailleurs étaient au courant de la valeur des titres monétaires.
Sous le régne d'Érard de la Marck, la confusion de ces titres
était telle et le nombre des pièces fausses et fictives si considérable
que ce prince, pour assurer le crédit de son trésor, fut obligé de
décréter un tableau officiel des monnaies ayant cours légal dans le
pays de Liège et d'édicter les peines les plus sévères contre ceux
qui émettaient de la fausse monnaie *. Le nombre des différentes
espèces de monnaies d'or et d'argent, dont la circulation fut alors
des métiers et dans les archives de la ville. Voici ce que nous lisons, entre autres, dans le
Liber plebiscilorum , fol. cix :
« Wilhem Danen laken meker heeftgewerct 30 milen boven Norls (Niort?) als oick te
» Florentie ».
1 Au siècle dernier le faux monnayage prit une telle extension que les évoques ont
senti plus d'une fois le besoin de lancer des mandements sanglants contre les faux mon-
nayurs; nous citerons entre antres : 1° le mandement exécutoire de George-Louis du
14 mars 1726 , réitérant la déclaration que les fabricateurs ou recuigneurs d'espèces
d'or et d'argent ne doivent jouir d'aucun privilège qui puisse empêcher qu'on ne
s'assure de leur personne , et stipulant , en outre , que ceux ou celles qui contreferont
de la monnaie au coin de quelque prince étranger seront passibles de la peine de
mort, à la potence , et 2° l'édit de Charles déclarant que les fausses pièces d'un sou
marquées aux armes du prince, Jean-Théodore, et composées de cuivre jaune, ne sont
point recevables et que les fabricateurs de telles pièces seront poursuivis et châtiés
comme coupables du crime de faux.
(Liste chronologique des édits du pays de Liège, pp. 124 et 319).
— 526 —
autorisée, s'élevait à plus de deux cents. Cette profusion de
genres de monnaies n'est pas étonnante à une époque où presque
toutes les bonnes villes et beaucoup de grands seigneurs usaient
du droit régalien.
Comme la plupart des cités du pays de Liège, Tongres eut un
atelier monétaire dont la rue de la Monnaie (Muntstraet) conserve
encore le souvenir. Ce qui nous permet de croire qu'anciennement
on y monnayait, ce sont d'abord les vieux coins de monnaies
déterrés , il y a peu d'années , aux portes de la ville ; ensuite les
trois pièces de monnaies tongroises dont nous essayerons de
donner la description :
l°Gros tournois frappé par l'évèqueJean d'Arckcl (1364-1 378);
Av. Buste d'évêqne mitre de face, portant sur la poitrine l'écu
d'Arckel. Légende :
: IOH . EP S.LEOD : : ;
le tout encadré par une bordure de fleurs de lis, au-dessus de
la mitre du buste les armes d'Arckel ;
Rev. Dans le cliamp une croix pattée, traversant la 2e légende.
Légendes :
S8 BNDICTV ; S1T NOME \
DNI I NRI ; IHV \ XP1
MON — ETÀ — TON — GNS
2° Demi gros tournois au même type :
Av. Légende : — X ion : ep — s : leod X
Rev. Légendes : — sit . NOME : DNI :
NR : - - BNDICTV
MON — ETA — TON — GRS
3o Florin d'or frappé par l'évêque d'Arnould de Horn (1378-
4390).
Av. Deux écussons (l'un au double aigle, l'autre au lion à
gauche dans un cercle à six ogives trilobées dans leur intérieur :
Légende : Clefs en sautoir; arnoldvs.
EPS . LEODIENS
— 527 —
Rev. Saint Pierre assis dans une niche tenant clef et croix;
Légende : moneta (deux clefs en sautoir) tongn '.
Dans les anciens comptes de la ville il est souvent fait mention
d'un muytmeester ou directeur de la monnaie et d'un koermeester
ou réviseur, tous deux nommés et salariés par la régence. Le
réviseur avait le contrôle des espèces monnayées et exerçait des
poursuites contre les faux monnayurs. L'épreuve qu'il faisait subir
aux monnaies consistait principalement à les faire résonner sur
une pierre dure, et il jugeait de leur valeur ou du degré de l'alliage
par le son métallique qu'elles rendaient 2. Lorsque l'atelier moné-
* Nous devons ces quelques renseignements sur l'atelier monétaire de Tongres à la
gracieuse obligeance de M. A. Perreau , numismate distingué et président de la Société
scientifique et littéraire du Limbourg.
La première monnaie dont nous avons donné la description figure dans l'histoire
numismatique du comte de Renesse-Breidbach, pi. VIII ; la seconde fait partie de la
collection du petit séminaire de St-Trond et la troisième se trouvait anciennement dans le
cabinet de M. Vandermeer, à Tongres. Ce sont les seules monnaies tongroises que nous
connaissions. Il existe en outre deux méreaux tongrois dont l'un , en cuivre gravé , se
trouve dans le cabinet de M. Perreau ; il appartient à l'ancienne corporation des teinturiers.
Av. Deux ouvriers occupés l'un à teindre , l'autre à tordre des écheveaux de fil: au-
dessus de la couronne
Rev. Dans le champ, au centre d'une bordure guillochée : JAN — VAN DE
DRIESSCHE.
L'autre méreau, en plomb, fut frappé pour le chapitre de l'église N.-D.; il est dessiné
dans l'ouvrage de M. de Renesse précité, pi. 75 :
Av. Buste à droite de la Vierge dans un cercle perlé
Rev. *C* — BMV* — 'TVN*' 1679.
Ce fut au moyen de ces méreaux que le chapitre constata, à partir de l'année 1601 ,
la présence des chanoines au service divin. A l'entrée du chœur, chaque chanoine ou
bénéficier recevait un jeton de présence qu'on lui échangeait à la fin du mois contre
une monnaie équivalente. Plus tard , au XVIIIe siècle, le distributeur des méreaux fut
remplacé par un punctator qui annotait la présence des chanoines sur une tablette
au moyen d'un petit point dont il appostillait leur nom.
Voir Liber Gratiarum ab anno H07 , fol. 157 verso et les liasses du chapitre:
Decretum de plumbetis distribuendis a° 1601 post agnus Dei et post benedictus
et magnificat pastores qui legitimi impediti et habent diebus dominicis in proces-
sionibus habet plumbetum de 2 gdran. aliis verô diebus de 1 gretlse. distribntor habet
f. lb. per annum reddent plombeta , in capitula singulis mensibus.
4 Ou désignait cette opération par le mot klinkmuyten ou klinkmuyteren , ex-
pression qui , il y a environ trente ans , était encore familière à nos écoliers. Nous
pensons que le mot minjl n'est qu'une abréviation de muynt (monnaie) occasionnée par
l'omission du thylte qui remplaçait la lettre n dans les vieilles écritures.
— 528 —
taire fut supprimé *, le contrôle des monnaies échut en partage
au directeur du comptoir d'échange.
La première indication précise des tables de prêt et de change
que nous trouvions dans les archives communales remonte au
28 mai U79 2.
L'évêque de Liège délégua alors Jean Sonderlanls, chanoine
de N.-D., pour concéder une banque à un mercier du nom de
Renier Gaens.
Pour toutes les opérations à faire, le changeur pouvait perce-
voir un droit de change d'un liard par griffon , à condition de
n'émettre d'autres monnaies que celles du pays de Liège. 11 avait
en outre la mission de confisquer les pièces étrangères qui n'accu-
saient pas le poids légal et de marteler ou d'échiqueter toutes les
pièces fausses ou fictives, excepté en temps de gène, quand la
circulation des monnaies était libre et l'agiotage puni d'une
amende de 20 florins du Rhin ; la même peine frappait ceux qui
exerçaient clandestinement le commerce de l'argent 3.
' L'annotation suivante nous fait supposer que cette suppression eut lieu vers la fin
du XIVe siècle : « Eene plaels gecoght van Andries Reys [mort en HOô ou 140i) en
» Walterus van Elderen genaemt die munt in die muntstraet geleghen met aile haere
d toebehoorten coomende langhs in die boerkensstraél (rue des manants) tôt het goed
» van Jan Tyssens ende op d'ander zyde tôt aen bruylofshuys. »
— Novum stipule spectans ad reverendos canonkos requlares tongrenses f° 199,
* V. Annexe 111.... Nous trouvons une indication plus ancienne mais beaucoup
moins précise dans le registre n° 106 du catalogue de la bibliothèque de N.-IJ. fol. j :
« En 13G5, un wisseleer, Jean Lebout de Gelmen , et sou épouse Béatrix fondèrent
» la chapelle de St. -Sébastien dans l'église de N.-D. »
5 « Op den IXden dag van broemaent Int jaer (XIVe) LXXXV is geroepen aender
» stadt pyroen byherman buysmans-boede dat gheyn raan Wisseleer noch ander so \vy
» hy sy enich golt gulden noch silveren penninghen coepen noch vircoepen en sali
« noch sich mechticu maken enighen wissele te halden oft oeck vreempde munien off
» nuwe munten inder stadt inbrenghen hy en hehbe ten eerste daer van tconsenl ende
» Igemuede van onzen genedighen heren ende der synre stadt ende so wy hyr in dy
» contrarie dede sal verburen aen den heeren ende aen dy stadt twiutieli ryus gulden
» van den wclcken den aenbrengher oeck gericht syn sal vanden deerden pennick. .la
» het en waere dan enich gebroken gelt oft gebroken silver sonder argelist. »
(Liber plébiscitant)/! de i'ill , f° xix . . . . )
On voit dans ce petit édit , comme on pourrait le voir d'ailleurs dans un millier
— 529 —
Dans le courant du XVIe siècle , les Lombards quittèrent la
ville de Tongres et cédèrent leurs banques à d'honnêtes bourgeois
qui héritèrent de leur nom , mais non pas de l'habitude de se con-
centrer dans une même agglomération.
La rue des Chiens ou des Juifs, autrefois un coin réprouvé,
fut réhabilitée avant l'année 1600, et à l'époque où les Lombards
quittèrent la ville elle était déjà habitée par des familles très-
honorables.
Vers ce temps à peu près, remonte l'institution des monts-de-
piété dans le pays de Liège. Ferdinand, archevêque de Cologne
et prince-évèque de Liège, en décréta l'établissement provisoire
par un mandement daté de Bonn , le 5 avril. Cette innovation
utile n'était pas du goût de la turbulente population de Ste-Wal-
burge à laquelle d'amères déceptions avaient trop souvent appris
à se défier des généreuses dispositions de leurs souverains; elle
réclamait fiévreusement la conservation des anciens Lombards.
Quatre années plus tard, le 26 juillet 4625, l'évoque osa publier
ses « règles et privilèges et institution générale des mont-de-
» piété de Liège et comté de Looz. » La surintendance générale
de ces nouvelles institutions, héréditaire et libre de toute charge,
fut confiée à Simon Monilet qui avait déjà présidé antérieurement,
en la même qualité, à l'érection des monts-de-piété provisoires ».
Le 2-4 décembre 1626, l'official de Liège accorda l'autorisa-
tion d'ériger à Tongres une succursale du monl-de-piété de Liège.
d'autres pièces authentiques , que la délation et l'espionnage n'étaient pas moins encou-
ragés par les princes- évêques que par les autres autocrates du moyen âge; l'excitation
à la haine du prochain était au reste une des armes favorifes de ces prétendus apôtres
de la charité chrétienne. Encore prenaient-ils un soin égal des bourses et des consciences
de leurs ouailles. Le juge , le délateur partageaient , par exemple , avec le législateur le
produit des amendes ; ainsi le justiciable était toujours assuré que les lois étaient exé-
cutées aussi rigoureusement qu'elles avaient été élaborées.
1 Monts~de-pieté du pays de Liège et comté de Looz, par R. P. Louys du Cha^teaU,
provincial des Frères-Mineurs conventuels. — Liège, 1628, p. 17.
P. De Decker. Etudes historiques et critiques sur les motits-de-piété en Belgique.
— Bruxelles , 1844 ; p. 99 et suivantes.
XXIX x\ll 33
— 530 -
Elle fut installée dans une maison de la rue des Chiens appartenant
au secrétaire Gérard Van Castert. Lorsque, le 13 octobre 104-3,
la maison fut vendue par les héritiers de Van Castert, l'intendant
général chargea son caissier Tilman Fesljiens de l'acheter pour
compte de l'administration. Depuis que les administrateurs avaient
loué cette maison , ils en supportaient les frais d'entretien et de
réparation ; ils n'auraient donc pas aimé qu'un autre profilât des
dépenses qu'ils y avaient faites 4.
En ce moment la bulle du pape Léon X semblait avoir porté
tout son fruit. Les pratiques usuraires étaient sévèrement défendues
par tous les souverains et la justice poursuivit à outrance ceux
• qui nullo labore, nullo sumptu, nullo periculo lucrum fœtus
' que conquivant -. • Ce furent les édiles de Padoue qui, en
1-491, donnèrent l'exemple de la répression de l'usure et insen-
siblement ce honteux abus disparut. Néanmoins on rencontrait
encore dans certains endroits des tripots où l'on recevait clan-
destinement des objets à gage , quand il n'y avait déjà plus que
les monts-de-piété qui eussent une existence légale, mais on
sévissait avec rigueur contre ces pratiques immorales.
Le 28 janvier 1732, l'évêque Joseph Clément publia un édit
qui punit de 50 florins d'amende et, en cas de récidive, d'une
peine corporelle celui qui dorénavant tiendrait encore des Lombards
secrets 5.
A Tongres, le mont-de-piélé (de bergh van bermhertichheyt)
' V . Annexe n° V
* Nous ne savons pas au juste quand Léon X porta ce décret ; mais il est générale-
ment accrédité que ce fut en 15-11 à son retour du dernier concile de Latran où il
défendit si chaleureusement les droits des pauvres et la charité universelle. Au concile de
Matines, tenu l'an 1570 , celte bulle fut longuement discutée par h' cardinal de Granvelle
ri pir l'illustre évoque d'Ypres , Cornélius Jausenius, le promoteur de la doctrine dissi-
dente à laquelle fut donnée plus tard le nom de Jansénisme. — La condamnation de
l'usure pur récriture , les saints canons et la tradition île l'Église , par Nicolas
Cochois , docteur en théologie de la faculté de Paris , Angoulème , l(i"2.
M. Polain , Recueil des ordonnances <lt la principauté de Liège, vol, 1, p. 529
— 531 —
fut fondé dans le but de procurer aux personnes nécessiteuses des
secours d'argent à un taux peu élevé; de plus, une grande partie
de son médiocre bénéfice était alTecté au soulagement des pauvres.
Comme toutes les institutions de ce genre qui se trouvaient dans
le pays de Liège, il était plutôt une source philanthropique qu'un
sordide moyen de spéculation et de lucre. Son administration était
dirigée par un intendant fsurintendent), un comptable fsecretaris)
et. un caissier (cassier) qui se trouvaient sous la surveillance
immédiate des commissaires-généraux de Liège (de heeren pro-
tecteurs van den prince van LudickJ. Ceux-ci avaient le contrôle
de toutes les opérations financières, avec la mission spéciale de
veiller sur les abus usuraires.
Les employés du mont-de-piété n'étaient pas plus exempts
des taxes et des impôts que les autres bourgeois de la ville fsy
sullen (jeexecuteert ivorden als voor prince penninghe en de
gabellenj. Ils n'avaient pas, comme anciennement les facteurs de
la banque, des privilèges, ni des exemptions et en temps de guerre
ils étaient obligés, sous peine d'exécution militaire, de se faire
incorporer dans la milice citoyenne. En temps de paix , pour jouir
des droits civiques, ils devaient faire publier au son du tambour
(met den trommelslachj qu'ils faisaient élection de domicile dans
la cité fzich porter laten roepen) et acheter le bénéfice d'une
corporation civile fhet voll recht van een ambacht coopenj.
A cette époque, la mauvaise foi s'était déjà insensiblement
éteinte chez les peuples et l'habitude d'adoucir momentanément la
gène de son semblable en lui prêtant de l'argent, à faible intérêt,
avait partout pénétré dans les mœurs. Les personnes qui détenaient
des fonds se bornaient à les placer en rentes hypothécaires. Ainsi
les spéculations de banque restèrent exclusivement du domaine du
haut commerce et des Crésus. Ici encore il s'offrait rarement des
difficultés sérieuses et l'on a très-peu d'exemples à citer d'une trans-
action commerciale ou financière qui ne se soit pas faite loyalement.
L'usurier était pris en aversion el mis au ban de la société. Tuut
— 532 —
le monde se méfiait de ses allures. S'il faisait encore quelques
rares victimes, c'était chez les indigents dont il escomptait la mi-
sère et l'infortune.
Le mont-de-piété, avec l'organisation et le but que celte insti-
tution a encore aujourd'hui, procurait des bienfaits réels à nos
ancêtres; aussi, jusqu'à la révolution française, exista-t-il toujours
à Tongres une maison où l'on prêtait de l'argent sur des nantis-
sements, moyennant un modique intérêt.
Le 4- pluviôse an II, la convention nationale avait ordonné qu'il
lui serait fait un rapport « sur la question de savoir s'il était utile
• au bien général de conserver les monts-de-piélé. • Ce rapport
ne fut pas publié. Les monts-de-piélé légalement établis conti-
nuèrent de subsister, mais ils subirent de notables modifications.
La loi du 17 thermidore an III conféra la direction des monts-
de-piété aux administrations départementales et plus tard le décret
de messidor an XII leur imposa un conseil administratif composé
des membres du conseil général des hospices et des représentants
des actionnaires. Ce conseil devait le régir au profit des pauvres,
empruntant là un usage qui avait vieilli dans le pays de Liège.
L'administration du mont-de-piété de Tongres n'avait pas attendu
pour se dissoudre et cesser ses opérations que les lois françaises
fussent en vigueur dans notre pays. La veille du soulèvement des
patriotes égalitaires, les portes du comptoir de Tongres furent
fermées et depuis lors la nécessité de les rouvrir ne s'est plus
fait sentir *.
\ Il est vrai que le conseil municipal , consulté par le préfet de la Meuse inférieure
sur l'utilité d'établir un inont- de-piété à Tongres « lettre du 5 septembre 1811, »
réjuiut « d'approuver dans toutes ses parties ledit projet et pria le préfet de vouloir con-
» liibuer à accélérer l'époque où la classe malheureuse de la société devra à ce nouveau
a bienfait de Sa Majesté la jouissance des avantages qui en résulteront pour elle ; »
mais il n'a jamais été donné suile à cette résolution.
(Séance du conseil municipal de Tongres du 8 novembre 1841).
533 —
ANNEXES
28 Mai 1479.
Concession pour l'établissement d'une banque à Tongres faite au mercier
Renier Gaens par Jean Sonderlants , chanoine du chapitre de N.-D., délégué
à cette fin par l'évêque de Liège.
Ick lieer Jan Sonderlants canonick inder kerken Collegiael onser liever vrouwen
Tongren in naem ende van wcgen ons genadighen heren van ludick na dinhalt
mynre conimissien. Ende wy burgemeisteren geswoeren ende Raedt der stadt
Tongren voerss: hebben belieft ende geconsenteert ende met deser tegenwor-
digen leltercn believen ende consenteren dat Reyner Gaens Cremer nu vorlaen
der stadt Tongren voerscreven wisseleer syn sali Ende termyn van sesse jaren
lanck durende aengaende op sint iohans Dach baptisten in iaer in.c.c.c.c. ende
lxxix Ende die Wisselbanck te halden ende te gcbruyken Als men dat van outs
scbuld geweest is te useren. Allen gbelt te geven ende te nemen na synen rechien
prys ende valoere ghenen gelt boger off minre te prysen otï te geven den enen
dan den anderen ende so hy dat selve nemen welde bebalven syn gewoenlyc
wisselgelt te weten van elken grypen eyn ortken van enen boden ende des gely-
ken van allen gelde na quanteteyt synre weerden daer dat voer ghenge ende
gheve is Item die voerss: Reyner en sal gène nuwe moente in die voerss: stadt
brengen noch die utgeven off bestaden die en sy ten iersten gesedt ende gengich
gemaect by onsen genedigen heer ende synre stadt van ludick. Oec sal hy elken
bebelpen alsullicb gelt Als men aen hem versuekende syn sull soo verre Reyner
voorss : sulke penninghen by hem heeft sonder argelist. Ende off dat sake weer
dat enige nuwe moente die onweerdich off ongengich weer binnen der voerss:
stadt bracbt worde en dat te synre conden queme. Dat sal hy schuldich syn te
openbaeren aen heer ende stadt Off oock tsake waer dat hem voer die liant queme
Enich valscb penninck vcrselvert off verguldt, dien penninck sal by mogen
breken off onlweye snyden sonder daer met te mesdoen oft te canlengeren van
ymant. Allen deese voerss: poentcn heeft der voerss: Reyner geloeft ende ten
— 534. —
heyligen geswoeren wael ende wetlelye te halden. Des wy heer Jan voerss : in
naem ons genedigen heren onser properen siegell ende wy Burgemeisteren
geswoeren ende Raeilt in naem der voerscreven stadt onser stadt ziegele deser
letteren hebben aengehangen int iaer ons heeren dusent vierhondert negenend-
seventich des xxviij daeclis van meye.
(Extrait des archives de la ville de Tongres , Heyisler plebiscitorum , ab anno
1 177, fol. vj verso.)
II.
18 Juillet 1522.
Mandement du prince-évêque Erard de la Marck , réglant le cours ni le
changé des monnaies.
Erard van der Marck by der ghenaden Gods Cardiuael Ertz busscop van Valence
busscop tôt ludick Herloghe tôt Billion ende Grève lot Loon , etc. Onsen lieven
getruwen ende zeer beminde lioglien scoltet van Ludick Baelliu van pont damer-
court van thuinli , Condros ende baspegou drossert ons lants van loon stockem
Bilsen peelt en montenaken scolthet onser steden van boy ende loon voorts alleu
anderen onser scholteten ende anderen officieren ende honnen stadt belderen of
substituten. Salut. Alsoe wy over langhet tyt gerne provisie ende Règle geset
hadden. Inden loop van der muynten van gelt ende silveren die onbeboorlyck
gbelopcn beeft ende soo wy aenmercken nioghen noch dagelyx zo langen zo meer
lopen mocht tôt grote achterdeel binder en scade van onsen ondersaten ende
Lande int ghemeyne daerdureb als bere ende prince van den landen den die
dispositie van der muynte toebehoort ut cracbt van onse Regalia , cnz.
Wy by rade advis ende deliberatie van den werdigen onsen Lieven ende zeer
beniinden proest , deken ende Capittel van ludicb ende melten gedeputeerden van
onse staten nu o:ilangs vergadert binnen deser onser stadt ludick. llebben
gbesloten ende gheordineert voor dit mael dat van nu voorlaen die pennigen van
goldc ende silveren sullen loop bebben in onse landen tôt sulckcn pryze, als ghy
bide copie van den ordonnance die wy hier met sinden sien suit gbetekent byenen
van onse secretaris tolter tyt toe wy anders sullen geordineert hebben ende also als
wy dat beviuden sullen orbarlyxt te zyn voor dat ghemeyn waelvaert wye wael
dat Inde naeghcburen land die mointe loop beeft In swaren ende ledich werde.
Ontbieden Ucb daerome zeer ernstelyck bevelende tsamen ende enenyelicken
van ucb besonder dat ghy op den neesten merckdaech nae dat deze onse mande-
menten ucb ghelevert sullen werden doet publiceren utroepen ende bevelen
alumine daer men gbewoonlyck is utroepen publication te doen van onsent wegen
dat nyemanl van wal staet ofl conditie hy zy en presumeer te neraen oit uf
- 535 -
Jeghevcn de vooi'Scrcven peningeu anders dan nac innehalt van den voorscreven
ordinantien op die pêne hier navolgen te weeten ierst dat die sjene die daer legen
deden sullen verboren die penengen die zy aldus ghepresenleert ende utghegeven
sullen hebben ende daer toe dat ghene zy metten selven peningen zullen gecocht
hebben oft in communicatie gestalt ende die selve peyne confiscalie ende boele
sullen gedeylt ende appliceert werden nemelyck eyn derdeel tôt onss profyt dander
derdeel den heer of stadt daer ondcr dat selve gheperpetreert of gescbiet solde
zyn ende eyn derdeel dea ghenen die dat excess aenbrengen soll ende openbaren.
Ende waert bevonden dat der amptman olT officier van der vlecken naedat hem
dat Rapport van den excess gedaen ware neyt en volchden die correctie als boven
gliedaeu te zyn het waer onse officier of van den voorss- heer als baellieu drossert
scoltet scepen of anderen off officier van der stadt of steden als borgmeestereii
ende derghelykeif zy sullen ghecorrigeert worden sonder rernissie oft eniger dis-
siuiulatie voordyerste werff ende voorder tweeden werff sal dobbel verbeuren van
Igbene dat bovenghescreven steyt te deylen ende bekeren als boven Ende zo vere
liy dat derdewareff dede so sal hy ghepreveert zyn van zyne officien ende ghecor-
rigeert werden arbitralyck ghelyck als wy in onsen raedt vinden sullen sculdich
zyn te ghescien item oft yemant enige vreemde stucken van golt of silveren hadde
die alwyle nyet ghevalueert en zyn by zal die selve stucken mogen sien lalcn oin
die werde te weeten sonder yet te verbueren doch en zal by die nyet mogen
utgheven communiceren noch in betalingen van enigen anderen dingen laten ten
sy dat die selve penningen yerst gheviseteert ende ghevalueert werden by lieden
die zieb des verstaen op die pêne als boven item om dat voortyts onze ordinan-
tien ende evaluatie van der muynten qualick gehalden syn gheweest nyet
alleyn by ghebreck van den officieren dan oeck sonderlingen durch die ghe-
richeyt van deghenen die sich onderwanden hebben van taffeltterie ende
anderen desgelycken pratiquen ende ouder dat sebyn van den selven pra-
tiquen hebben die penningen van golde ende silveren ghebiketeert die besten
ende swairsten uten besten ghenomen die anderen besneden gesmolten ende
affiniert soe dat die beste muynten gaen buten onss landen wy ons daerop
te versien hebben nu verboden ende verbieden mets dezen onsen brieven
sulckc pratiquen ende manier van doene op die peyne ghecorrigeeit te werden
also hoghe als van differie ende openbaer crimineel misdaet Ordineren als
boven off van nu voortaen yemant bennen ons land bevonden waren van wat staet
hy zy die sal onderwonde taffeletterie te holden off enige billon te copen off ver-
copen noch enigen pennengen te bikeleren van golt of silveren loep hebbende
bennen onss land of anderen die verboden zyn noch oeck eniger anderen materie
van golt ende silver die anderswae te draghen dan op onse muynte om aldaer le
verwercken die ghene die dat deden sullen of sal voor dyeste waerff verbruecken
die pennengen of materie die by sue utghedragen sal hebben ende daer by die
— 536 —
boete bctalen te wetene voor elcken pennick Iwee yolde gulden en voorelcken
silveren pennick een dobbel stuiver tappliceren als boven ende voor die tweede
waerff sal verboren ende betalen boven die voorsscreven peyne tôt onse profyt
vyflicb der voorscreven gulden. Ende ofif die derde reyze ghebuerde sal die penc
arbitraire zyn ende gbecorigeert werden sonder enigen remissie waert oeck
yemant bevonden die enigen penningen besnede badde gbewaschen oft enich sins
ghcinindert of ghefalsificecrldie sal gbecorrigeert werden als eenen valscber van der
muynten toebeboort. Item omme te benenien dat bedroeb ende valsheyt die pen-
ningbe voortytsgbedaen moghen hebben onder dat schyn van wisselereu ut willen
ende is onse meyninghe ende beveel dat nyemant wy hy zy en sal zich mogen
onderwinden van wisselen by en sal tyerst ende voor al overbringen certilicatie
van der stadt of steden daer hy sal willen resideren ende die officie exerceren
van zynen goeden famé ende bequaèmheyt in dess stuck ende daer op onsen
brieven van commissie in beboerlycke forme metten instructien ende ordi-
nantien daer toe dienenden verwernen op die peyne die hier boven gescreven
zyn van de taffeletterie. Bevelen voorts ende ordineren als boven dat die
borgbemeysters van onss stadt hulick ende van aile anderen onsen steden ons
lants sullen van stonden aen nae die publicatie van dezen onss mandementen
doen makeu elck drie copie van onss ordonantie ende evaluatie boven geruert
ende metten selve doen ghepubliceert daer af dat ene gesadt sal werden open-
baerlyck voor die doere van der principaler kercken de ander inden inganck van
die stadthuys ende die derde op ten groten raarckt van de voorsscreven stadt.
Ende om dat men dess ons mandementen in diverse plaetzen behoeven sal soe
is onse wille ende beveel datmen aen die copie getekent met enen van onss
secretar gheloven hebben sali gbelyck aend originalen. In orkonde der waerheyt
soe hebben wy onsen hantteyken gbesadt ende secreet signet doen drucken hier
onder aen dess onsen mandementen die ghegeven is in onser stads ludick
den xvij«» dach Julij Anno xvc xxij Aldus on dergetekent Erardt. ende byden
secretar H. Bardoul ende aldus by collatie ghedaen ende originalen ende concordert
11. Bardoul.
Die valuatie van de golde ende muynten die loop hebben sullen inde lande
van ludick ghepubliceert aen den peroen xxj« augusti a0 xxij.
GOLDE MUYNTE. Gulden. Btuver.
Der groot Reael van oestryck x
Der rozenobel v
Die halve ende vierendeyl nae advenant.
Der nobel benricus 'i'j x
Die halve ende vierendeyl nae advenant.
Der Angelott van Inghelant iij v
Dat guide toyson litfj
53<
Gulden.
Der borgoens Leuw ij
Die twce deylen nae advenant.
Den postulatus Arnoldi
Die bonrbons postulatus gulden die ij Ingelsce wagen \
sullen r
Des postulaets hontgens gulden /
Der lovenscbe peter
Der goltgulden van frankfort \
Der golde gulden van braudeborch
Der goltgulden van den busscop van Coelne .
Der golde gulden van Coelne
Der bomscbe goltgulden
Der goltgulden van den busscop van metze .
Der bayersce goltgulden
Der goltgulden van den busscop van trier.
Der goltgulden gbeslagen in zassen
Der oestrycksce gulden ........
Enùe aile andere golde gulden die ghemoent zyn
boven Coelne in almoignen cnde ghevalueert in
brabant.
Der goltgulden van limborch
Der goltgulden van luneborch
Der goltgulden van bremen (
Der yerste gulden van gulick )
Der goltgulden von zwolle I
Der goltgulden van denemarcken I
Der goltgulden van deventer f
Der goltgulden van dormonde
Der nuwe utrecbgulden gemaect by den busscop
ffriderick van utrecbt
Der goltgulden van muynstre
Der dobbel goltgulden van cleve
Der dobbel van horne
Der brytaenscberyder
Die savoysche crone
Die crone van guize
Die crone van thoulousen
Die crone van tordes
Die cleinmer van gheldre
xiii.j
xxv iij
xxv
XXV j
xxxviij
\
xlnj
— 538 —
Gulilen Sluver
Der guldcn van nummcghcn metlen aer .... wij
Der golde Pliilippus i
Der Jolrannis scilt r
Der dobbelen Erardus \
Der guide fredericus van Vrieslant v;m Zasse )
Der Reaele van keyzer Karlc iij vj
Der halve Reael xxxiij
Den keyzers guide Karolus \\\y
Der dobbel ducaet van Gastillie iiij vj
Der hongers ducaet. \
Der ducaet van portugacl /
Der ducaet van Castillie
Der liourgoensclie ryder
Die halve nae advenant
Der pauweslyck ducaet van vtalieu ,
Der veneetsce ducaet I
Der floreuschc ducaet . f
Der Jenuces ducaet . / *"*
Die salut \
Der ducaet van boulongne
Eride aile andere ducaten van ytalien
Die corone metter sonne f x I j
De halve nae advenant )
Die crone van den konick I
Die schuytkens van mechelcn \
Die wilde crone van switzen metten slotel ende dry
cruyzen xwv
Den aldeu Reael i
Die auwe crone vry te voet \
Der andries guide met St. Andries cruys . \
Den gwilhelmus scilt /
Den marceguld van Bourbon met bilden van onser (
lieve vrouwen. . )
Die auwe Ulrich gulden
Die auwe ryders van geldre
Der hinsbercli ingel
Der bourbons leuwe
Die nuwe ryders van geldre i
Die nuwe guide van utrecht »
Der pliilippus clinckert van ghewicbt .
Der bavers gulden
Ni
XI. V
xxij
XXVJ
XMJ
XIX
XIX
— 539 —
(Julden. Sluver
Der rodolphus guidon \
Den martinus guidon j
Den gulden berline j
Den iiuwen badems gulden van Utrechl . )
Der hornspostulalus xiij
Der Erardus postulatus xij ss
Der postulatus van gulliek ... .... xij
Der gulden inetten ayer j
Der cleyn gulden metter werelt \
Der emptergulden van frieslant xxv
Der coppenolsgulden xxiiij
Der goltgulden van loraine )
Der goltgulden van melz ) '"'
IX
DIE Z1LVERE MOENTE.
Der grote pennick van zassen t
Der grote penninck van poolhen ^
Der groot zilveren Reael vj ss
Dat silveren toyson /
Den dobbelen karolus Imperator 1 J ^
Die simpele nae advenant
Die ingelsce stoter \
Den dobbelen van vranckryck /
Der coolschstoter *i ■•
Die dobbelen griffons
Die simpele nae advenant
Der dobbel brabans stuiver j
Die dobbel van horne J
Die simpele nae advenant ende dat vierendeyl
Dat dubbel vueryzeren metten twee leuwen .
Die metzpenninck
raechelsche ende bourbon
Der dobbel karlyn van portugael \ iij
Der philippus van namen
Der dobbel kerlyn
Die portingaloos
Die simpol nae advenant.
— 540 —
Der iohannes braspenninck
Der carolus met S. Andriescruys
Der dobbel philippus ende carolus
Die simpel nae advenant.
Der melaeiis sleper
Der Savoyss sleper.
Der sleper van Sint bernarts berglie
Der sleper gemaect tôt berne boven metten ayer.
Der sleper gemaect te fryborcli met ene busscop en
die andcren met enen casteel en enen aer daer boven
Die slepers metter bonetten
Die slepers metten hiennden ende enen busscop sitlen.
Die snapbanen van gelre
De cleyn snaphanen
Item aile penningen van sint marten ende andere die
ghelopen liebben op ij ss. iij ort
Die frans stuver .
Diecoelssstuver
Der penninck van deventer
Der penninck van nuys met twe grote scilde.
Der stuver van beynsberch,
Die sargie van britaigne
Die hollants tbuyn
Die Erardus stuver
Die molemen van gulick
Die dobbel van Lutzemborcb .... .
Die sneebercb penninck van zasseu
Die cleyn penninckens die men lieet crusorts.
Die rader wit penninck
Die vierdels van slepers
Die dobbel karoly van Gelre
Die ganze van clcve
Die woersey
Die penninge métier g :
Die vleemsblanck
Die auwe tbuyne
Die franse karolus
Die penningen van Sint Stcven. ......
Ende die penningen van Coraynen ende die ander nae
advenant
iulden. Stuver
xxxix ss
ij en iij oit
x en vii ss
ix ss
viij
iiij
ij en xij ss
XLVSS
iiij en iv ss
xij ss
xxvij ss
ij en j ort
j en iij ort
xxj ss
XX ss
— 541
Gnlden
eken
Die grote dobbele van de voorss penninghen
Die penningen van Castillien met den v]
Die bobbel bnerengrossen ....
Die boerengross
Die savoysche blancken
Die bourbons blancken melter vlammen
Die auwe aexesse buysche.
Die penninck vlaemer botgen .
Der coppenoll van ghent ....
Die penningen melten barden .
Die penningen métier zoocli .
Die cleyn penningen van boni.
Die cleyn penningen van gnllick .
Die cleyn penningen van Aken.
SI mer.
iij en viij ss
iij en iij ort
XXX ss
XV ss
i en iij ss
xwiij ss
ix ss
Nocbtans verslaen dat allen stucken goûts hier boven gevalueert sullen hon
gew dit hebben oft bestaet werden ten vvissel naer die werde van honnen ge-
wichte Ende die penningen die hier boven nyet ghevaluert in zyn en sullen
eghenne wyse loop hebben sy en syn tyerst gbeasseyeert ende ghevalueert by lude
daerop gbeeedt van wege myns beeren daertoe expers ende des verstaende mer
der wisseler sal hebben dan van die werde gheven volgende der ordinantien die
daervan gegbeven sullen werden Ende der voorscreven wisseler sal voor synen
arbeyt bebben van wisselen van thien stuyvers eyn ort stuver oick eest condi-
tioneert ende gheordineert datmen sal moghen betalen ende rekenen voor enen
van die voorsscreven guldens twee gbemeyn guldens. Aldus ghcsloten ende gheor-
dineert by myneu voorscreven heeren des xviijen daechs Julii Inden jare xvc
xxij tegewordicb meester Leone Cansellier Jo Ferret ende meer andere van
zynen rade.
By expresse beveel myns voorsscreven ontsienlyken béer H. Bardoul.
(Extrait des archives communales de Tongres , Liber negotiorum ab
anno 1511 ad 1585, fol. xxxiiij).
III.
8 Août 1570.
Accord fait par la régence de Tongres avec. Michel Pourguyn pour
l'établissement d'une maison de prêt.
Wy Borgemeesleren Geswoeren Baet ende de allen die ondersaeten ende inwoen-
deren den sladt Tongeren in L gemeyn met bare vrybeyt ende bewende. Alleu
— 542 —
den geenen dië desen onscn opene brieffven sullen aensien versfaen oft lincren
lesen. Groelc imien oppersten heere Godt almachtich met kennissc der waerheit
der dîni^lieti nae bescrevcn syn kennelyck ende openbacr. Alsoc wy ontfangen
bebben gehadt die oetmoedige supplicatie van onscn lieven ende welbeminde
Michiel Pourguyn oui alliier in desc stadt te mogen oprichten ende halden taffel
van leningen om eenen yegelicken des van noden hebbende , te gerieven nae
voerder inhalt der voerscreven supplicaticn. Soe hebben wy Borgemeesleren
geswoeren Ract ende allen die ondersaeten uit gemeyn daertoe specialyck ter
gewonlycke plaetsen vergadert zynde (aenmerkende t'selve niet tôt achterdeyl
der ondersaeten , meer tôt groeten voerdeel te tenderende) den voorss: Micbiel
geconsentert alsullix te moegen doen in manieren naebescreven ende nae dien
Micbiel voerscreven alsoe gesint ende beraeden was, om voerss: taffel halden
van leenen in deser stadt te resigneren ende oever te geven in onscn handen
toi behoeff matbis à la franck piedmonteser welcke resignatie met ons consent
geschiet synde soe bebben wy in die plaetse des voerss: michielen aengenoemen
ende selve geconsenteert te mogen doen ende halden den voerss: malhis à la
Franck lombart in allen manieren als oft micbiel voorss: t'selve hadde mogen
doen overmits condiliën naebescreven.
In den iersten dat wy den voerss: matbis syne huysvrouwe met synen huysge-
sinne ende diensboeden ontfangen bebben ende by desen ontfangen om in deser
stadt ende baer vryheyt te wonen te geschien den termyn van twelleff iaeren
continuclyck doen nae den anderen nae volgende beginnende van den iersten
daege (1er maent july deses iaers 1570 ende uytgaende ten gelycke daege nae
de voerss: xij iaeren als boven verstreeken zynde. Overmits byden voerss: malbis
synne gesinne, facteurs ende commitleerde te betaelen allen gabellen , cysen
imposten ende anderen gerechligheyd en subiectien gelyck als wy ende aile ande-
ren borgeren deser stadt doende zyn uytgenoemen dat der voerss: matins syne
dienaers facteurs ende buysgesinne sullen zyn quyt ende exempt inder waecken
welligen matliys coopman lombart boven genoempt syne huysvrouwe buysgesinne
syne dienstboeden wy genomen ende ontfangen bebben nemen ende ontfangen by
desen in onscr porlerschap ende borgherschappe bewaernis ende deiïensie den
voerss: termyn duerende ende soe verre die hier woenendc zyn Alsoe dat sy
sullen albier vryelyck mogen woenen in deser stadt ende vryheyt van Tongeren
als voerss: es ende sullen onderbalden gebruyeken ende genieten der stadt privi-
legii'ii vryheil ende aide gewoenlcn der zelver stadt allet gelyck anderen borgeren
beheltclyck dat der voerss: mathys ende die van zynen weegen albier zal blyven
resideren ende wonen sicb tcrslont doen sullen in een der Ivveleff ambachten
deser sladt ende denzelven ambacht sicb te presentereu ende sicb doen porter
roepen nae inhall der stadt privilégier] ende uzantien der stadl ende den ambacht
eydl doen van de gelrouwiclieyl als anderen goeden borgeren ende als dan dacr
— 543 —
Wiéde bev'ryèn hnnne daegelyxsfche huysgesinne Endc vorts om lionne comen-
schappe te mogen dodn te copen vercoepen Wysselen lenen ende voirts met
honnen penninghen goedren ende commenscliappen in aile maniereï) le doen
lionne ptoffyt nochtans gracelyck ende redelyck alsoe deckk ende meniehmael
alst lion gnciduncken zal Onlfangende alleynlyck voor die pennige van sess
gulden brabans gerekent twintich stuver brabans voor ellicken guidon eenen
sluver gelycke munte ter weke ende alsoe te doen onder penningen boven oft
onder die voerscreven somme nae advenant der penningen wel verstanden dat
der voerss: mathis niet en zal mogen surrogeren oft slellen eenen anderen lombart
in zyn plaetse voerscreven sonder consent Rorgemeisleren geswoeren ende Raet
Endc desgelyx soe cen sullen wy oick niet mogen duerende desen lermyn van
twelff iaeren voerss: accepterai eenen anderen om taeffel van leninge te liolden
inder voerscreven stadt ende hue vrybeit bel een waer dan dat der voerss: mathis
zicli selve des ontsloech oft deporteerden oft dese tegenwoerdige woerden voerss:
termyn gerenoccert en waere. Item wy gcloeven den voerss: mathis dat ghevn
crysvolck byder stadt oft regenten der sel ver geforciert en zal worden in synen
oft van zynen facteurs buyss ten waer met zynen oft honnen believen deur
orloghe peyss oft wat anderen manieren dattet waer. Item dat wy den voerss:
mathys oft zynen facteurs om der commenscliappen vercopinge leninghe oft
bandelingen wille die sy doen mochten met honnen peningen ende waercn die
sy selve oft bonne gesinne sullen gestelt en ingeset hebben in bonne plaetse oft.
woeninge moegen handelen doen ende gebruyeken nae honnen profFyt honnen
wille ende goet duncken. Item dat der voerss: lombart noch ymant van tsynen
wegen niet en zullen moegen pennige doen op enich harnas oft geweer van den bor-
geren deser stadt ofthaer vrybeit. Item oftgebenrde dat der voerss: mathys syne volck
oft familie hadde gecocht oft geleent op enighe pand iuwele oft coinmenschappe
hoe die dan gelcgen waeren ende daer nae aen die zelve iuwelen oft panden gc-
beurden enige diverye die zelve gestoelen oft verloeren weren oft enichsins by anderc
occasie wy dat dan waer niet te vinden eene waere soe es voerwaert dat die gheene
dien sullighc iuwelen oft panden toebehoraide waeren zullen voldaen ende betaelt
worden naden valeur honner panden oft iuwelen daer inné die gène die den
verloren pant toehehorende waeren sullen voldaen ende betaelt worden naden
valeur honner panden oft iuwelen daer inné die gène die den verloren pant toe-
hehorende was sullen gelicht zyn metten cyde ten heyligen om sullix te affirmerai
dwellich der voerss: lombart oft zyn volck zal hehoercn te bclalcn behalffven daer
aen aff te corten wes daer op geleent waer metten verloop daerop die voerss:
mathis oft zynen facteurs sulle gelocht zyn bon te vcrclcren. Item oft ymants
op enighe panden gelt ontlecnt hadde aen den voerscreven mathis oft zyne
facteurs ende sy lion brieffken dat sy van den lombart onlfangen hadde verloeren
badden ende middere tyt honne panden geerne solde qiryten oft te hebben van
- 544 —
l.iiii geerne een ander brieffkcn om hunne panden alsoe geerne te versekercn Soe
sullen die zelve lombarts alsulligen partyen sullix versueckeride onder behoirlycke
cautie ende borgen lion pand laeten volgen eenermits betaelende wes die pand ver-
stand hebbea metter leeningen oft sullen lion scryven een ander brieiîke gelyck den
iersten Item wy conseillerai ende accorderen den voorscreven mathys syne com-
mitteerde huysgesirtne ende dienacre soe wanneer sy bewaert hebben enighe panden
oft iuwelen van wat sorte oft valeur Datse waeren een iaer ende dry maendcn dat sy
terstont nacden voerss: termyn die zelver sullen moegen vcrcoepen penwcerd ende
daer met doen lion eyghen profyt als van honnen eygen goede sonder enighe calen-
geringe van ons noch van ymants anders van welligen iaer ende dry maent oft ymant
sich daer tegen wolde opponeren oft wederseggen als dal den termyn niet om een
weer oft oick tegen die lancheit des tyts oft die quantiteyl der penningen die liy oft
synegesellen dienaers oft gesinne op enige panden oft iuwelen sullen geleent heb-
ben soe willen wy ende conseteren dat den voergcnoemptde mathys lombart syrien
volck dienaere knechten oft cnighen van hon in zynen huysse dan residerende
sal oft sullen gelocht worden van den lyde ende somme gells die simpclen eyde
sonder enich weder seggen. Item oft gewiele dat enicli persoen tsy mans oft
vrouwen persoonen van wat staete sy zyn waeren in den huyss der voerss:
lombarts soe en willen wy niet soe verre sullix es om te comenschappe gelt te
draegen oft van hon te hebben dat onze officiers oft dienaers sullen moegen
arresteren oft vatighe die voerss: persoenen aen lyff noch aen goet die wyle ende
soe lange als zy zyn sullen in den voerss: huysse zy willen oick niet dat men
zal moegen arresteren commeren noch doen oft laeten | aenhaiden enighe
guederen daer op zy sullen geleent hebben oft gecomcnschapt hier inné altyt
uytgesloeten aile delinquanten ballingen oft andere ende apprehensibel geweesen
zynde ende der stadt oft lants vyantden om der hoocheyt ons genedichten heeren
ende der stadt privilegien niet ofï te nemen by desen sonder argelist worts
willen wy dat der voerss: mathys syn knechte ende huysgesinne sullen gc-
nieten ende gebruycken allen privilegien franchisen vryheden ende aisullige
uzantie gelyck als gebruyckt hebben ende gebruycken die borgers der voerss:
stadt Tongeren. In der zelver ende haere vryheyt continuelyck woonende Ist
daeromme dat wy gebieden allen borgeren oflicicren ende ondersaetcn deser voerss:
stadt ende der vryheit die deesen tegenwoerdighen brieffven sullen aensien
oft hoeren lesen dat sy sullen syn behulpich ende byslandich den voerscreven
mathys synen gesinne dienaren ende familie. In allen saecken ende affairer) ende
lion bereyt ende alsoe verdict) als onze eyghene personen, Nochtans expresselix
protestcrende dat wy by verleeninge van deesen tegenwoordighen privilegien
gheensins een willen crencken affueemen oft contravineeren die inrediche ons
aire heeren en de princhen ende Bischop van Luyck harloch van buillon grave
van loon ende Item hier inné noch expressclyck geconditionneert Ingevalle in
— 545 —
toecomende tyden enighe manieren tusschen ende lombarl oit zynen luyde ende
enighe andere partyen dieu sy gelt mocht geleent bebben oft andere zaecken
spruytende uytter selver commcnschappen oick hier niet uytgedruyckt sullen
altyt Borgemeisteren geswoeren ende Raet deser stadt daer off een eenerboeft zyu
om allen alsullix te slecbten eude nietmants anders. Ende tôt meerder zekerheyl
allen des voerss: es bebben Borgemeisteren geswoeren ende raet voerss: met wille
weten ende consent allen der gemeynten tsamelyck ende groeten ziegel der stadt
tongeren voerss: desen tegenwoerdigben letteren angehangen inde iaer der zaliger
geboorten ons lyffs beeren Jesu Christi dnysent vyffhondert (seventicb den aclulen
dacb Augusti.
(Extrait des archives de la ville de Tongres; Liber
negotiorum ah antio 1514, fol. 168.)
IV.
27 Juillet I582.
Concession faite par le magistral de Tongres à Dominique Ramelis pour
l'établissement d'un comptoir d'échange.
Wy borgeineestcren geswooren raet ende allen die onderdauen ende tinne
woenderen der stadt Tongeren int gemeyn ende baer vrybeyt ende bewinde allen den
gheencn die desse onsse opene biieffen sullen aensien verstaen oft hooren leesen
groete inden oppersten heere almechticb met kennisse der waerheyt der dingen
naebescreven ende kennclicke ende openbaer alsoe wy ontfangen bebbende die
oetmoedige supplicatie van Dominicq Ramelis oui alhier in dese stadt te mogen
halden taeffel van leeninge om een yegelicken des versoeckende en van noode
hebbende te gerieven nae voorder inhaldt synre gepresenteerdre supplicatie sne
bebben wy bovengescreven daerloc speeialick ter gewoeulicken plaetsen vergaedert
synde de voersscrevcn dominicq geconsenteert tselve te mogen doen ende dat
voor een termeyn van xij jaeren deen achter den anderen volgende beginnen nae
dat van desen en dat met sullicken conditien bier nae volgende ierst dat wy die
voorsscreven dominicq syne buysse ende huysgesinne ontfangen hebben ende by
desen ontfangen in deser stadt ende haere vrybeyt te woenen daer hem sullix
aider bequemelixst sali duncken te geschieden een termyn van tweelff jaere als
boven beginnende ten iersten augusti a0 158*2 ende expireren te gelycken ter-
myne opt eynde der xij jaeren overmijts by den selven dominicq huysgesinne
facteurs oft gecommitteerde te betaelen aile gabellen accysen imposten ende
andere gerechticheydcn ende subiectien als wy ende aile andere borgeren deser
stadt doende syn uttgenoemen dat der selve dominicq sal met syn huysgesinne
facteurs ende comitteerden quyt ende exempt syn met vvaecken nemende mits
deven den zelven dominicq huysshe boeden huysgesinne ende ontfangen in onsse
XXU XXII 34
— 546 —
licwaemis ende defensie den voerscreven terrayn duerende soe were die selve hier
wonende syn alsoe dat die selve alliier in de stadt ende vryheyt vry snllen mogen
woonen ende snllen onderhalden ende genieten (1er stadt privilegien vryheyt ende
aide gewoonlen beheltelick dat der voerschreven dominicq alliier hlyft resideeren
sali sich doen in een anibacht ende poorter doen roepen ende doen een eydt van
trouwen ende alsoe syn huysgesinne bcvryden ende voorts om lion comenscap te
mogen doen te coepen vcrcoepen wisselen leenen ende voorts met lionne goede
comenscap ende penningen honn'en meesten proffyt le doen nochtans gracelick
ende redelick ontfangende alleenlick voor die leeningen van ses gulden bb. gere-
kent xx st. bb voer elicke gulden een stuver gelycken munte ten weecken ende
alsoe vorts te doen anderen leeningen onder oft boven den taxt der zoe voer-
screven naer advenant der penningen wel verstaende dat der selve dominicq niet
en sali mogen snrrogeren sonder consent van borgcmeesteren geswooren ende
raet ende desgelycx en sullen oick niet mogen duerende die tormyn es boven
ymanden accepteeren enen anderen om laefi'el van leeningen te moegen halden
ten ware dat dominicq sich des zelver ontslach ende deporteerde. Item en zall den
zelven dominicq by de stadt oft baere regenten gheen crychsvolck geforcert
werden in syn huys oft in syns facteurs ten ware met syn oft bonne believen
duer orloge peys oft wat ander manieren dattet woerc. Item dat \vy den selven
dominicq oft syne factoers om der couienscappen vercoepingen leeningen oft
bandelingen die sy mogen doen met honnen penning en goeden molesteeren by
ons selven oft ymant anders maer sullen met bonne penningen ende waeren die
sy zelve oft honne gesinne sullen gestclt ende inné geset hebben in bonne plaetse
oft woninge mogen handelen doen ende gebruyeken nae bonne proffyt wille ende
goedduncken. Item dat den voerscreven Lombart noch niemant anders van synen
tweegen ende sali mogen leeninge doen op eenicb geweer de borgerenoft onderda-
nen toebehoorende. Item oft gebuerde dat der selver dominicq syn volck oft familie
bedde geleent op eenige panden , iuweelen oft comensebap of hoet dan ware ende
lict gebuerde dat den die selve stucken gebuerde eenige dievereye oft dat dieselve
verloeren gestoelen oft by eenige occasic verdonckert woorden, soe ist gevoerwaert
dat den geene die sulige panden toebeboren sullen voldaen worden naede valeur
hunuc panden oft iuweelen daer inné dcrgbeene die de valeuren panden toebehoo-
rende waren met eyde gelocht sullen syn te allirmeren de bellicb der lombart oft geyn
welck zall moeten betalen behalven daer afï le corten des drop geleent waer metten
valoer daerop die voersscreven dominicq offl syn facloers sullen gelocht syn bon le
verclieren. Item oft yemantenige panden gelt ontleent bedde aen den voorsscreven
dominicq oft syrien factoers ende sy bon briefken dat sy van den lombart offt syne
factoers ontfangben hedden verloeren liedden ende middelrc lyt bunne pand gbeerne
zouden quyten oft te hebben een ander briefken om bunne panden alsoe te ver-
seeckeren soe sullen die selve Lombarts die selve partyen sullix versueckende
onder beboirlycke cautie ende borgen bon panden Iaeten volgen myts betaelende
- 547 —
wes die parnl verstanden hebben metter leeningen oft sullen hun scryven een
ander briefken gelyck die eersten. Item wij consenteeren ende accordeeren die
voorscreven dominicq syne commilteerden huysgesinne ende dienaeren zoe wan-
neer sy bewaert bcbben eenige panden oft iuweelen van wat sorte oft valeur datse
vvaren een jaer ende dry maenden dat sy terstont naer voorscreven termyn die
selve mogen vercoepen ende druet doen bon eyghen proffyt als van bon eyghen
goederen zonder eenighe calengeeringe vari ons oft yemant anders van welligen
jaer ende dry maenden oft ymant sicb daegen woude opponeeren als dat de termyn
niet omme en ware oft oick tegen die lanckhêyt destyts oft die quantiteyt der
penningen die by oft syne gesellen dienaers oft gesinne op eenige pand oft iuwee-
len sullen geleent bebben soe willen wy ende consenteeren dat dominicq syn
volck dienaers knecliten oft eenige van bon en syne buysse dan resideerende sali
oft sullen gelocht woorden van den tyden ende somme gelts die ende wanneer
sy affirmeeren geleent te bebben metbonnen simpelen eyden sonder weederseggen .
Item oft geviel dat eenige persoen mans oft vrouw soenen van wat staete sy
dan waeren in die lombnrts huys waren soe ende willen wy niet soe verre sullix
es om te comenscappen gelt te dragen oft van lion te bebben dat onsse officiers
oft dienaers sullen mogen arresteeren oft vangen die voorscreven persoenen aan-
lyff oft aengaet die wylen ende soe lange als sy sullen syn inde voersscreven
huvsse ende willen oick niet dat men sali mogen arresteeren comen nocb doen
oft laeten aen halden eenige guyderen daerop sy sullen geleent bebben oftgecoment-
scapt hier inné allyt utgesloeten aile delinquanten ballingen oft andere repprehen-
sibel geweesen synde inde derstadt oft slants vianden om der bocbbeyt ons G. H.
ende der stadt privilegien niet aefY te heinen zonder argelist voorts willen wy dat
der voersscreven dominicq syn knecbten ende huysgesinne sullen genieten
ende gebruycken aile privilegien fraucbisen vrybeyden ende al sullicke usantien
als gebruycken bebben ende gebruycken die borgers der voersscreven sladt
Tongeren ende selvcr ende baere vryheyt continuelick wonende is domme dat
wy gebieden aile borgeren officicren ende ondersaten deser voersscreven stadt
ende der vrybeyt bye dièse tegenwoordige brieffnen zullen aensien verstaen oft
hooren leesen dat sy sullen syn behulpich ende die bystandich die voersscreven
dominicq syne dienaers ende familien allen zaecken ende affairen ende bon bereyt
ende alsoe veerdich als onsse eygene persoenen nocbtans expresselick contestee-
rende dat wy by verleeninge van dese tegenwoordigen privilegien geensins en
willen crencken, affirmeren oft contravenieeren die Jurisdictie ons beeren prin-
chen ende busscop tôt luyck bertocb tôt buillion grave tôt loen ende, etc. Item
hier in es nocb expresselick gewouden in gevallen in loecomen lyd eenigen twist,
dubium oft dubbel verstand oprees in Ueniger manieren tusscben de Lombart oft
zyne luyden en eenige andere parteyen die sy gelt mocbten geleent hebben oft
ander saecken spruytende utter selver commenscappen hier inné oick niet uitge-
druckt sullen allyt borgemeesterengeswooren ende raet datteen overloest zyn om
— 548 —
ailes alsullix te slichten ende niemant amlers lot mecrder sekerheyt allet des voers-
screven es hebben \w borgemeisteren geswoeren ende raet voersscreven met wil-
len weeten ende consent allen der gemeynten tsamelick den groeten siegel der stadt
Tongren voersscreven dese tegenwordighe laten aengehangen int iaer der saliger
geboerle ons heere Jesu Christi alsmen screeff duysent vyff honderl ende tween-
tachenlich de seventwintichste dach Jnlij.
(Extrait des archives communales : Liber negotiorum a0 1X17-1X85. fol. 151).
V.
ai Décembre 1580.
Ratification fuite par la régence de Tongres d'une convention conclue entre Dominique
Ramelis et Dominique Bush de Ilassell pour l'amortissement des dettes de lu
banque de Tongres.
Alsoe Dominicq Ramelis die wisse] taeffel deeser stadt met consent van béer
emle stadt sommige iaren heeft gchalden nae luvdt der voeiwaerdeu daervanzynde
ende dmr faute van gelde sicb vinden es ten achter ende niet connen genocb
doen ilen borgeren ende an der e die sulcx van doenen hebben mocbt soe ist dat
der selve Dominicq opt waelbelieven van borgemcstcren ende geswoeren ende
rayde es geaccordeert met Dominicq Busla lialden die wissel laeflel van Uasselt
ende heeft den selven Busla gestall in zyn plaelse mijts conditien dat der selve
Busla hem Dominicq Ramelis sal voer die proprietyl des buys ende bolfs als
voer aile pand in syns Ramelis buys verpandt slaende loi betelinge syhre schuld
ende opgenomen gelde sali geeven die hoer van xxijc ende vyfticb gulden brabants
ende. zall den selve Ramelis duerende den tyt der privilégie!) als subslituyt ende
knecbt laeten in buys ende boll voerscreven ende die taeffel balden op den naem
ende tôt profyt des voerscreven Busla bebalven getrouwe wandelinge rekeninge
ende reliqua ende zall der selve Dominicq Busla voer syncn arbeyt ende dienst
iaerlyx geeven die somme van vyflich pont vieems tôt ses gulden brabants bet
pont duerende den termyn voerscreven ende sali deesen dienst aengaen den iersten
january anno 1587 des heeft Busla gereserveert een van bonre nasien te mogen
noemen om die voerscreven taeffel te helpen besoingeeren ende die rekeninge n
iaerlix te inngen hoercn ende te doen oft by Busla selve pressent ware zall oick
derselve Busla sculdicb zyn het voersc. buys tôt synre cost Le onderbalden ende
Ramelis zall hem met zyne huysfrouwe ende familie met der voerscreven gagien
onderbalden. Actum den lysten decembris anno I58G.
Op den leysten decembris anno 1586 présent beyden borgemeesteren Hercken-
roye senior en iunior .Mansboven geswoeren ende der voerscreven Busla geaccep-
teerl in die plaetse van Dominicq Ramelis emle dat met aile conditien ende
— 549 —
voerwaerdcn soe Ramelis tselvc lieeft sich verobligeert aile de selve voerwaerde
nae te gaen in handen valck borgemeester.
(Extrait des archives de la ville de Tongres :
Liber negotiorum ab anno 1517-1585, fol. 165).
VI.
!«■ Août 1606.
Octroi fait pur les administrateurs de la cité de Tongres à Jean Mutin de l'emploi
et des droits de banquier.
Wy Borgemeesleren gesworen eude Raedt met ter gemeynte bennen ende
buyten der stadt ende vryheyt van Tongeren aile den genen die dese sullen sie
verstaen oft boren lesen in de genade Gods saluyt. Doen te weten ende opcnbaer
dat also Jan Mutis was gecomen ut onsen consent luyt onsen registeren van date
28 July 1605 deur overlaten Dominicq Busla tôt. de wissel taefelen oft van lee-
ningen gedurende een termyn desselven Busla ende want der selve maer noch
cltelycke maenden en durden lieeft aen ons gesuppliceert op den 4 7bris 1605
oitmoedelyck om hein te willen vergonnen nae expiratie desselven eynen nieuwen
toust van xij iaeren so hebben wy op den xx 7btïs naest voerscreven nader ge-
woonten vergadert synde daerop verdragen ende geslolen dat wy geconsenteert
verleent ende geoctroyeert hebben ende mils desen verlenen ende octroyeren den
voerscreven Jan Mutis te mogen hier inde stadt ende vryheyt exerceren die
wissel taefîel oft van leninge op panden oft anders sins mit desen volgens voer-
waerden ende conditien. Ierst dat wy den voerscreven Mutis ende so voit
mutatis mutandis beginende den 1 Augusli 1606.
Nae de woorden (nae advenant der poincten) ende mits des sali hy aende stadt
rentmeesteren tôt der stadt bouw betaelen xxv guldens brabants waer van den
eersten pacht vallen sal den 12Augusti 1607 ende soo vorts van iare tôt iare den
xij iaren durende.
(Extrait des archives de la ville de Tongres :
Liber negotiorum ab anno 1517 , fol. 150).
Cette concession fut prorogée pour un nouveau terme de douze années, le
22 septembre 1617.
Vil.
6 Octobre 1643.
Procuration donnée par Simon Monilet, surintendant du mont-de-piétè de
Tongres , à son, caissier Tilman Festiens pour l'achat de la maison
Van Castert.
lnt jaer 1 643 den 6 8ber soo is voor my openbaer notaris ende der getuygen
nae bcscbreven personelyck gecompareert den eersamen heer Simon Monilet
— 550 —
suriutendent van den bergh van bermherticheyt binnen Tongren des welcks btefft
achtervolgens het consent ende conslitutie aen liem gegeven door de eerwerdige
ende hoogheboren heeren protecteurs van de bergh van bermherticheyt des lanls
van luyk de 5 Xb'ji 1612 geconstituert ende gemachticht soo hy constiluert en
mechticht myts dese Tilman Festiens cassiers van den bergh van bermherticheyt
binnen Tongren en in naem ende stede van de berg voorscreven le hoegen ende
koopen seecker huys ende aenhanck met proclamatie geleghen in de hontstraet
frecht nae steender porte acliter Lucas Tiecken) toebehoorende die represen-
tanten secretaris Gerart Van Gastert ende dat in voege ende manicren soo seecker
accort is gemaeckt ende gesloten tùsschen die représentante» voorscreven ende
Simon Monilet ende anders niet van werde te haïtien ailes sgeens wesint geen
voorscreven is sal gehandelt en de gebesoiniert worden onder obligalte van syne
persoon ende goederen ter wat plaelse geleghen ut in amplissima forma consen-
terende in realisalie ende approbatie deses voor aile heere bancken ende gerichten
daer het van noode mochte weesen daer toe constiluerende allen ende een ydere
die des last sal willen aennemen , actum binnen Tongren ten huyse daer Tilman
Festiens tegenwerdich in is woonende op iaer, maende ende dach als boven daer
by tegenwerdich ende aen waere eersaeme personen Ardt Schaetzen ende Lenart
Haets als loffwerdige getuygeo hier toe geroepen ende gebeden ende was onder-
teekent ende wy mathys noelmans uotaris publicus ad permissa reqnisilus in fidem
ende onderteeckeut Walterus Van Buel secretaris
Cette pièce est extraite d'un registre intitulé : « Regisler van den berch van
bermherticheyt der stadt Tomjeren beginnende int iaer 1626 , in-folio. »
DE L'ÉMAIL CHEZ LES ROMAINS.
NOTICE
PAR
M. H. SCHUERMANS,
MEMBRE TITULAIRE A HASSELT.
Philostrate, qui fut contemporain de Septime-Sévère , écrit les
lignes que voici , mises pour la première fois en lumière par
Buonarotti : Tavra (/>açe rà ^pœ/iara touç èv 'fl/téavâ Bapfidpovs
éy^ew T(ô %a\Ka>&ia7rvpcp, rà êe avvaçrisGaL , kcli \i6ovsvai , kcll
a(ot,€Lv à iypà(pr} (Icon. , I, 28). Les barbares de l'Océan, dit
cet ancien , étendent des couleurs sur l'airain ardent ; elles s'y
unissent, deviennent aussi dures que la pierre, et les dessins qu'elles
figurent se conservent. >
Heyne et les archéologues d'Angleterre pensent qu'il s'agit là
des barbares des îles de l'Océan : èv TLtcéavcî) , et par consé-
quent des Bretons, mais M. Ernest Lemaitre, ne renonçant pas à
l'attribution de la fabrication de l'émail aux Celtes de la Gaule ,
émet l'avis que les émailleurs du continent donnaient peut-être
leurs produits comme provenant de la Grande-Bretagne, pour
échapper à la fiscalité des empereurs qui, l'industrie étant connue,
Commissaires rapporteurs : MM. G. Hagemans et le chevalier de SchouthEETE
de Teiivareyt.
en eussent bien vite accaparé les procédés et ruiné les ouvriers,
en exagérant les impôts1.
Tandis que de Laborde*, se fondant sur le passage cité de
Philostrate, croit tout au plus pouvoir faire remonter l'invention
de l'émail au IIe siècle de l'ère chrétienne, M. Ernest Lemaitre 5
va au-delà , et il trouve les premiers émailleurs parmi les Druides
du temps de César. Les Gaulois à cette époque, dit-il, n'étaient
plus des sauvages, mais, à dater de l'occupation romaine, leur civi-
lisation disparut avec l'indépendance qui faisait la vie de leur
nationalité. « Je ne pourrai jamais croire , dit-il , que dans l'ère
des Césars, quand la guerre civile en permanence désolait les
provinces et quand le lise dévorait ce que la guerre avait épargné,
un peuple esclave ait pu songer à créer un art nouveau. Le faste
de l'époque ne serait pas une bonne explication d'une pareille
anomalie, d'abord parce qu'on ne voit pas les grands d'alors, les
Romains des palais impériaux , adopter ce genre d'ornements ;
ensuite parce que le despotisme et la corruption développent, il
est vrai, les besoins du luxe, mais ne se chargent pas d'ordinaire du
soin d'y pourvoir. » De là , la conclusion que les plus habiles
orfèvres de la Gaule avaient sans doute suivi dans l'ile de Bretagne
les Druides, leurs patrons, et que Philoslrale fait allusion à ces
barbares.
Voilà ce qu'on écrivait il y a peu d'années.
Depuis, une véritable révolution s'est faite à cet égard dans la
science , et on en revient tout simplement à cette idée de Benvc-
nuto Cellini (Trait., p. 46) : Era in uso quest' artc (l'émail),
appresso gli antichi.
Tandis que de Laborde niait l'existence de l'émail fiiez les
1 C. Daly, Heeue générale de l'architecture et des travaux publics, XIV, cul. 335
el suivantes.
1 Notice des émaux, bijoux et objets divers exposé» dans les ijaleries du Louvre,
l'aiis, 1853, p. 17 et suivantes.
" Dau, /. cit., et Essai (inédit) sur la religion îles Celles, en. VII.
— 553 —
Egyptiens et discutait avec Kiigler la question de savoir s'il y
avait de l'émail dans les bijoux de la tombe de Meroë , où il ne
voyait rien que des pierres incrustées dans de l'or, en ajoutant que
« si l'on avait trouvé un seul émail cbez les Egyptiens, on en eût
» trouvé des milliers, » M. Mariette exhumait du cercueil de la
reine Aah-Hotep (XVIIIe siècle avant l'ère chrétienne) des bijoux
■ contenant de la pâte de verre dans de petites alvéoles1 •, et
les découvertes successives du même genre autorisaient Labarte 2
à affirmer, en citant de nombreux bijoux émaillés des Grecs et des
Etrusques, que l'art d'émailler date de la plus haute antiquité et
n'est guère ni l'invention ni même le monopole des Celtes.
Certes , il ne résulte pas de cela que l'émaillure ne fut pas pra-
tiquée par les Gaulois ; le Grec Philostrate, dans le pays duquel
cette industrie était probablement tombée en désuétude, a été peut-
être frappé de l'extension de cet art , ignoré de lui , dans les
contrées voisines de l'Océan (la Gaule et l'île de Bretagne où il
accompagna Seplime-Sévèie) : de là il aura conclu, par erreur,
pour ces pays exclusivement à tous autres.
L'extension de cet art a même dû être assez grande dans les
contrées habitées par les peuples d'origine celtique : tandis que l'émail
cloisonné était plus tard mis en usage par les peuples d'origine
germanique, l'émail champlevé ou en taille d'épargne fut au moyen
âge fabriqué avec tant de succès à Limoges , que le nom de cette
ville lui fut appliqué. Qu'y a-t-il d'impossible que dès le temps des
Romains (et ce ne serait pas le seul exemple d'une même industrie
continuée aux mêmes lieux: draps d'Arras , de Winchester, etc.),
les Lémoviques se soient signalés par leurs connaissances spéciales
dans l'art d'émailler, et que Philostrate, dans son style figuré et
par opposition à la partie plus centrale de l'empire, les ait appelés
- barbares de l'Océan. »
1 Ualy, 1860, col. 100, pi. I, II, III.
- Histoire des arts industriels au moyen âge et il l'époque de la lienuissance ,
111, u. 382 et suivantes. .
— 554 —
Ce ne sont là que des hypothèses auxquelles on est bien obligé
de recourir en présence d'un texte gênant, on doit l'avouer, mais
gênant pour tout système quelconque, autre que celui de M. de
Laborde.
Or , ce système-là , déjà ébréché en Egypte , en Étrurie et
dans la Grèce elle-même, l'est de plus en plus par les découvertes
faites dans nos contrées.
J'omets l'Italie romaine, et cependant elle aussi pourrait fournir
son contingent de preuves contraires ; mais, à un émail rapporté
de Rome par M. de Meester de Raveslein et déposé dans son
magnifique musée d'Hever, M. de Laborde pourrait objecter que
c'est un objet venu des bords ou des côtes de l'Océan et ramené
par le hasard à son lieu d'origine
Je me borne donc à parler des émaux si nombreux trouvés dans
la Gaule et dans l'île de Bretagne. La plupart, si ce n'est tous
comme le dit très-bien Labarle ', ont été fabriqués à l'époque de
la domination romaine et sous l'influence du goût romain.
Qu'on étudie les bijoux émaillés trouvés par Roach Smith 2, par
de Montfaucon 5, par Cochet *, par les auteurs du Jahrbilcher des
Vereins von Aller thumsfreunden im Rheinlande5, par Bruckner6,
par les archéologues de Namur ' , en Angleterre , en France , en
Suisse , en Allemagne et en Belgique , et l'on se convaincra de la
profonde vérité de l'observation de Labarle : tous les objets décrits,
1 Loi:, cil, p. 505.
* The antiquities of Richborough, tieculver and Lymne , in Kent, pp. 79, 83, 84,
lig. 1 et 2 ; Illustrations of the Roman Londoh, p. 125, 126, pi. XXX11I, lig 4, 6,
U, 15.
■ 111, p. 72, pi. XXXV11I.
* Normandie souterraine, p, 307, pi. XV, lig. 4.
r' XXXVIII, p. 47, pi. 1.
" Auteur anonyme du livre intitulé : Versuch einer Bèschreibung hislorischer mut
natiirlicher Werkivurdigkeilen des AHerthitmer von Augusla Rauracorum oder
Augusl, pp. -2945, 2963, 3011 , pi VII, lig. Il ; pi. XV11I, Gg. 21.
1 Annales de la Société archéologique de Namur, 111, p. 210, pi. 111 , lig. 10 ;
IV, p. 91, pi. Il, lig. L.; Haozbur, IV, pi. II, lig. 5 el 6; V, p. 44.
— 555 —
toujours façonnés en champlevé , appartiennent bien aux Romains,
sinon par la fabrication, au moins par le fini de l'exécution et par
les ornements. Ce sont pour la plupart des dessins étalés comme
les rayons d'une roue et figurant alternativement des damiers et
des rosaces. L'émail des incrustations en mosaïque est formé de
particules d'une substance vitreuse, ajustées, unies et fixées sur
champ de cuivre,* plus rarement d'argent. Souvent les deux cou-
leurs des cases des damiers , étant différentes de la nuance du fond
dans lequel on les a incrustées , ont dû être insérées l'une dans
l'autre, après que l'une d'elles avait déjà été jetée comme un
second fond dans le fond principal ; ce second fond travaillé à
son tour au rouet, au burin où à l'échoppe a reçu, en taille
d'épargne , la troisième nuance d'émail dans l'émail même.
Mais ce n'est rien de démontrer la contemporanéité des émaux
avec l'empire romain ; celui-ci a eu une durée de plusieurs siècles
et, par conséquent, les exemplaires d'émail qui viennent d'être cités
peuvent bien être postérieurs à Septime-Sévère et à Philostrate.
Reste à rechercher si quelques émaux ne peuvent être attribués
à une époque antérieure , et le sujet en vaut bien la peine , car
voici une recommandation de la première des remarquables
Instructions du comité historique des arts et monuments en
France : « les objets en bronze qui présentent des vestiges
• d'émail, doivent être recueillis avec grand soin, comme propres
» à éclaircir une partie peu connue de l'industrie ancienne. »
Or les fouilles opérées en notre pays sont ici d'un utile secours.
M. Joly a fouillé à Ellezelles , aux environs de Renaix , un
cimetière belgo-romain d'au moins 322 sépultures; il a trouvé
une série nombreuse de monnaies du Haut-Empire allant de Trajan
à Marc-Aurèle '.
Dans la province de Namur , a été exploré le cimetière de
1 Mess, des sciences liist. , 1840 , p. 202, pi xv, et Collections scientifiques de la
cille de Renaix , p. 11).
— 556 —
Flavion où sur 120 monnaies d'Auguste à Commode on en a relevé
seulement deux de ce dernier empereur, tandis que celles de Trajan
et de ses trois successeurs abondaient '.
A Elouges, même coïncidence: toutes monnaies du Haut-Empire
ne dépassant pas le règne de Marc-Aurèle 2.
Et dans chacun de ces trois dépôts, dont on peut (ixer l'époque
la plus rapprochée de nous au règne des premiers Antonins, on
a mis la main sur des bijoux émaillés en très-grand nombre,
surtout à Flavion.
Dans la villa du Rondenbosch, où j'ai trouvé l'onyx dont j'ai
rendu compte dans les présentes Annales 3, je n'ai pas décou-
vert au sein de la ferre de monnaie plus récente (pie de la seconde
Faustine, et les sigles fîgulins (ou marques de potiers) que j'y ai
rencontrés sont tous de ceux que je crois pouvoir attribuer aux
deux premiers siècles : rio(ma)s , brariatvs , sur les poteries
grossières; amabilis, g.en.itop, , etc., sur des poteries sa-
miennes. Eh bien , là encore a été découvert un émail : bouton
orné au centre d'un mil et armé en-dessous d'un tenon.
Enfin, circonstance bien plus décisive encore, des tumulus de
Bartlow-Hills en Angleterre, dont les sépultures sont datées par
une monnaie d'Hadrien 4, a été exhumée une magnifique tasse de
bronze émaillé, portant les dessins les plus riches et les plus purs.
Nous voilà en arrière à peu près d'un siècle sur le texte de
Philostrate.
L'objet du Rondenbosch , dont je viens de parler, mérite de
retenir un instant l'attention , non pas seulement parce qu'il dé-
termine le rôle de ces boulons à tenons , décombres en si grand
nombre dans les subslructions antiques, et bien décidément des
1 Annales de la Société archéologique de Namur , VU , pp. 1 et suiv. , pi. III ,
IV , v.
; Annales du Cercle archéologique </e Mans, VI, pp, 117 et 125.
"' 1, p. 427 (II" série.)
4 Arckaeologia , XXV et suiv.
— 557 —
boutons à rattacher des parties de vêtements et non des orne-
ments de harnais (eût-on songé à fabriquer des bijoux en mosaïque
d'émail pour les chevaux!), — non pas seulement pour la merveil-
leuse délicatesse de son travail microscopique dû à un artiste de
la meilleure époque , — non pas pour sa fraîcheur encore admi-
rable au moment de l'exhumation , — mais pour le sujet qu'il
représente et qui est tout romain.
Je m'explique.
M. Hagemans ' , après avoir parlé des ex-voto déjà en usage
chez les anciens et figurant différents membres du corps , parmi
lesquels des yeux offerts à Esculape , ajoute qu'ils avaient aussi
des amulettes et des symboles que la superstition , dil-il , introdui-
sit à l'époque des Antonins (précisément l'époque par hypothèse
de la destruction de la villa du Rondenbosch) , et ajoute : • on
• portait surtout ces amulettes contre les maladies et les influences
■ démoniaques; Vinvidia ou le mauvais œil étant fort redouté,
• on avait des amulettes pour se protéger contre lui. On portail
- des ijeux pour se préserver du mauvais œil ; ce qui prouve
> que ces amulettes n'avaient pas toujours trait à la guérison des
• maladies d'yeux , c'est que l'on trouve, gravés sur pierre, de
• pareils emblèmes entourés d'animaux, symboles d'influences
> néfastes , qui les attaquent. •
xMacrobe parle aussi d'amulettes en forme de cœur et des
bulles contre l'envie (invidia de invidere , regarder de travers,
voir d'un mauvais œil , expressions proverbiales ayant eu primi-
tivement le même sens quHnvidere) : « NonnuUi credunt, dit-il,
ingenuis pueris altributum ut cordis figuram in bulla ante pec-
tus annecterenl ; quam inspicientes ila demain se homines cogi-
tarent si corde praeslarent. Bulla geslamen erat triumphan-
' Un cabinet d'amateur , p. 357. V. aussi Aroiti , Le fascino e l'amuleto conlro
del fasvitio presso gli antichi.
— 558 —
tiutn, quant in triumpho prae se gerebant inclusis intra eam
7'emediis quac crederent advenus invidiam valentissima 1.«
Si dès le règne d'Hadrien et en tout cas sous les deux Antonins ,
les objets d'émail avaient déjà autant de vogue, si ces objets
reilètent à un aussi haut degré l'intluence romaine et décèlent
non seulement dans les dessins, mais encore dans les sujets re-
présentés , les usages et le culte de la métropole, on peut affirmer
sans crainte que la fabrication des émaux n'était pas le monopole
d'une population barbare dans le sens moderne du mot , mais que
si certains provinciaux (les barbares de Philostrate) s'occupaient
spécialement de cette branche de l'art , c'était toujours en vue de
la civilisation romaine avec laquelle ils étaient en contact direct ,
surtout sous Trajan , Hadrien , Antonin-Pie et Marc-Aurèle.
Pas n'est besoin pour arriver à cette conclusion de soutenir
avec Ernest Lcmaitre que cette industrie remontait môme aux
Druides (aucun exemplaire connu ne permet semblable attribution);
pas n'est besoin d'étudier avec Proudhon - l'organisation des
Gaulois du temps de César , vraisemblablement beaucoup plus
avancés en civilisation qu'on ne le croit généralement ; la seule
chose que j'aie eu l'intention de démontrer est l'erreur de Philostrate
ou plutôt des écrivains qui s'appuient sur lui pour soutenir que
l'art d'émailler, inconnu aux autres peuples, était le monopole
des Gaulois ou des Bretons. Ceux-ci, certes, travaillaient l'émail ,
les découvertes de nos contrées le démontrent ; mais leur travail ,
poussé jusqu'à la perfection , avait en vue de satisfaire aux exi-
gences du luxe romain : il n'y avait rien d'exclusif à eux dans
leur industrie, et, dès le second siècle, cette industrie était
toute à la mode romaine.
' SmiBN , I, VI.
' L'Indépendance bi'ltje du 18 novembre 18G5 annonce un travail posthume de
PROUDHON pour démontrer, contre l'opinion île l'auteur de la Vie de César, que les
Gaulois étaient d'une civilisation très-avancée.
LE CHATEAU D'HAVRE
NOTICE
PAR
M. LËOPOLD DEVILLERS,
MEMBRE TITULAIRE A MONS.
Havre est un village situé à une lieue trois quarts E. de
Mons et auquel se rattachent de nombreux souvenirs historiques ,
à cause surtout de son ancien château.
Vers le XIIe siècle , cette terre fut cédée par le comte de
Hainaut à son châtelain de Mons , pour être maintenue par tous
ceux qui rempliraient cette charge héréditaire. En 1102, Henri,
châtelain de Mons et seigneur d'Havre, fit un accord avec l'abbé
de Saint-Denis-en-Broequeroye, sous l'agréalion du comte, au
sujet de la coupe des arbres de sa forêt.
La seigneurie d'Havre comprenait, outre la châtellenie de Mons
et ce qui en dépendait (le Béguinage et la Guérite) , Havre,
Ghislage et Beaulieu , et sept autres villages à clocher, savoir :
Ghlin , Goegnies-Chaussée, Havay, Ihy, Biévène, Àcren et
Everbecq. Cette seigneurie, d'abord baronnie , fut érigée par
Philippe II en marquisat, en 157-4, puis en duché, en 1627.
Commissaires rapporteurs : MM. le chevalier L. dk Buhbure et A. Casterm^n.
— 560 —
Elle appartint successivement aux maisons d'Havre, d'Enghien,
d'Harcourl, de Dunois-Longueville et de Groy l.
L'écn des armes d'Havre portait : gironné d'or et de gueules
de dix, ayant sur chaque giron de gueules trois croix recroisées
d'or. Ces armes ne différaient de celles d'Enghien que par les
couleurs.
CHATRAU n'HAVflÉ.
Le château d'Havre est aujourd'hui presque abandonné, à
l'exception de la partie occupée par l'intendant et des bâtiments
1 La seigneurie d'Havre parvint à la famille de Croy par échange entre Philippe ,
comte de Portien , seigneur de Groy, chevalier de l'ordre de la Toison d'or, chambellan
de Charles-Quint, et la duchesse de Longue ville. Cet échange fut agréé par Charles-Quint,
en juillet 1518. — Aro//ce sur les archives du due. de Caraman , par .M. GaCHARO ,
(Bull, de lu commission royale d'histoire, t. XI, p. 109i.
— 561 —
de la ferme. Une Ibis par an , de joyeux convives s'y rendent à
un repas de chasse, après lequel le vieux manoir recouvre sa par-
faite solitude.
Ce château a pourtant conservé un cachet féodal bien carac-
téristique et mériterait certes une restauration intelligente. Vu
du côté des prairies , il a un aspect tout-à-fait pittoresque qu'il
doit particulièrement à son donjon , au chevet et à la flèche de sa
jolie chapelle.
Le château d'Havre, tel qu'on le voit aujourd'hui, a été bâti
en 1603 sur les ruines du précédent, que le duc d'Anjou
avait pris et. dévasté en 1578. Le prince Charles-Alexandre de
Croy, marquis d'Havre, comte de Fonlenoy, qui épousa Yolende de
Ligne , lit faire cette reconstruction. Voilà pourquoi les devises de
ce seigneur et de sa dame se trouvent répétées dans diverses salles
du château :
Je soutiendrai/ Croy. — J'aideray Ligne.
Une vaste enceinte de murs enclôt le château avec la ferme,
les prairies et les jardins qu'arrose la Haine. Après avoir passé
une longue allée, on arrive sur un pont flanqué de deux grosses
tourelles peu élevées 1 et qui servaient jadis de prisons. La façade
du château longe la cour. De hautes fenêtres, une tour dite la
Tour (rEnghien flanquée d'une tourelle que surmonte la double
croix de Lorraine , des écussons aux armes de Groy-Solre placés
1 Ces tourelles se terminent aujourd'hui par des plates-formes. Elles ont dû être
plus élevées autrefois et encadrer une porte en maçonnerie qui a disparu , de même
que le pont-levis. On voit dans le vestibule du château , encastrée dans la muraille,
une petite pierre bleue, carrée, sur laquelle sont sculptés l'entrée d'un château, et
derrière cette entrée un donjon. L'entrée est composée d'une porte cintrée , élevée sur
trois marches , entourée d'un mur rustique et flanquée de deux jolies tourelles à toitures
aiguës. Ces tourelles, de même que le donjon, sont surmontées de bannières. Au bas
de la pierre dont il s'agit , sont gravés ces mots : ciiatav : d'havre. M. Malbrun ,
intendant du château , nous a dit que cette pierre avait été trouvée dans une chapelle
de l'église de St-Nicolas-en-Havré , à Mons , et qu'elle lui avait été donnée par
M. Lebrun, brasseur en cette ville. 11 serait curieux de savoir à quelle circonstance
se rattachait son existence dans l'église de St-Nicolas-en-Havré.
XXIX XXII :i:>
— 562 —
au-dessus des [tories d'entrée, les supports de ces armes, qui sont
deux sauvages armés de massues, servant de girouettes : voilà ce
qu'offre de particulier celle façade à laquelle nous préférons celle
opposée, dont nous publions le dessin.
A l'intérieur, l'archéologue visite avec intérêt : la chapelle dont
la voûte et les trois gracieuses fenêtres ogivales méritent une at-
tention spéciale , el où l'on trouve encore la tribune des anciens
seigneurs; puis, la cuisine avec sa vaste cheminée et ses voûtes
à nervures, noircies par d'épaisses fumées séculaires; enfin, les
trois tourelles renfermant des escaliers qui donnent accès aux divers
étages et qui sont situées auprès de la tour, contre la chapelle et
à l'extrémité de la salle d'armes. Cette dernière salle, quoique
fort délabrée, est encore très-remarquable. Sa cheminée, en pierre
de taille, est soutenue par deux colonnes doriques, cannelées.
Sur le manteau de cette cheminée sont sculptés trois blasons
portant les armoiries de Charles-Alexandre de Groy et de son
épouse : celui du milieu est entouré du collier de l'ordre de la
Toison d'or. Sous ces blasons, on lit les devises :
Ji'. sousliendray . Croy.
Sans. fin. Croy. h 503.
Jy. ayderay. Ligne.
Au bas de la cheminée est une plaque en fer de fonte , portant
un autre blason , avec la devise :
layme <jvi mayme. 1603.
Aux extrémités des poutres du plafond et au-dessus des fenêtres,
on voit, sculptées en bois et peintes, les armoiries avec leurs
supports au naturel, des familles dont on lit les noms el parfois
la devise : Croy, Ghâteaubriant, Bourbon, Renenbourc, Lallain ,
Wassenaer, Ligne, Sans fin Croy, Noeufchaslel , Paleologue de
Bissipal, Dompmarlin , Lamarck , etc. Les supports sont des
hommes sauvages, des lions et des cerfs.
— 563 —
Le reste du château n'offre , comme vestiges de sa splendeur
d'autrefois, que quelques tableaux qui ne sont pas sans mérite et
une foule de portraits ,de la famille seigneuriale , relégués dans
une mansarde.
Un poète, auquel nous avons déjà fait un emprunt, à propos de
la chapelle de Saint-Antoine-en-Barbefosse , a décrit le château
d'Havre, en 1606. Ses vers donnent une très-bonne idée de ce
que fut ce château. Nous les reproduisons en appendice.
L'annaliste Vinchant (Ms., t. 2) parle d'une manière assez détaillée
du château d'Havre, dont il fait remonter l'origine à une époque
fort reculée. « Retournant au chasteau de Havre, dit-il, je trouve
> que son bastiment est très-ancien , d'autant que d'ieeluy est fait
» mention au siècle 1000, au tems de la bataille donnée en
» Brocqueroye1; qu'il fut prins par deux fois es guerres deBrabant,
» trois fois es guerres de Flandres, une fois es guerres de France,
» sous le duc de Bourgoigne , de sorte qu'après avoir esté ruiné
• par feu , les seigneurs de Groy le réparèrent ; mais que , depuis
» l'an 1579, à cause des troubles du pays et guerres intestines,
» il fut délaissé par les seigneurs, d'autant qu'ils estoient occupés
• aux affaires publiques, tellement qu'il fut gasté, tantost parles
» paysans, tantost par les garnisons, jusques à tant qu'après l'an
• 1600, il reprint son premier lustre sous le comte de Fontenoy,
» messire Charles-Alexandre , qui y fist bastir tout ce bastiment
» que l'on voit estre souslenu de pilliers et arcures , et y fît
» réparer tout ce que le temps, feu et guerre avoient ruiné. La
» structure du dit chasteau at de longueur environ trois cents pieds,
1 La bataille de Saint-Oenis-en-Brocqueroye eut lieu en 1072, entre l'armée de
Richilde , comtesse de Hainaul , et celle de Robert-Ie-Fiison , comte de Flandre.
Gérard , seigneur d'Havre , y portait le guidon de la comtesse Richilde. On conjecture
que le champ de bataille fut à proximité du presbytère d'Havre, où l'abbaye de Saint-
Denis possédait quelques biens qu'on appelait les Bonniers sanglants et les Murtes-
Haies (Dumetum mortis). Hossart, Histoire ecclésiastique et profane du Hainaul,
t. 1, p. 202.
— 564 —
contenant trois estaiges l'un sur l'autre , avec tours bien mas-
sonnées et eslevées , notamment celle qui se dict du nom
iVEnghien, avec pont magnifique. Il y a de l'eau à l'entour,
de largeur environ cent quatre-vingts pieds. La cour de dedans
al en longueur quatre-vingts pieds, en largeur septante. La
rivière de llayne environne les jardins, lesquels sont embellis
de Heurs, herbaige , arbres, viviers et labyrintes , et entourés
de part et d'autre de bayes et portiques magnifiquement éla-
bourés.
■ Audit chasteau y at une chapelle érigée en bénéfice, en laquelle
l'archevesque de Cambray , Maximilien de Berghes , remit et
consacra un autel l'an 1G02, à la requeste du susdict comte de
Fontenoy, en mémoire et honneur de la Vierge Marie, saint
Philippe et sainte Yolende. En icelle reposent plus de trois cents
reliques de saints , approuvées par lettres authentiques du pape
Clément VIII , qui, à l'occasion d'icelles, donna indulgences
remarquables. L'on y voit un estandart que les mutinés soldats
de Ruremonde firent bénir avec certaines cérémonies par Henry
Cuyck, évesque de Ruremonde, et puis l'offrirent, après qu'ils
eurent receu leur payement, audit comte de Fontenoy, qui sor-
loit d'ostaige. Il y a tel escriteau au costé desdits estendars :
Joy qui chantera cy pondus ces eslandars ,
Le seigneur de ce lieu ayant esté hotaige
A Ruremonde,, auprès des mutinés soudarts ,
Une mort accomplit que la cure d'advantaige (?)
Les receut d'eux (ô délite) et pour .servir à Dieu ,
Obéir à son prince et aider sa patrie ,
Il y fust aresté , et l'évesque du lieu
Les bénissant de sa main avecq cérémonie. •■
Nous dirons, pour compléter le récit de Vinchant, que la colla-
tion de la chapelle caslrale d'Havre appartenait au seigneur. Le
(I mars I7S7, Antoine-Joseph Meral , prêtre séculier qui la
desservait depuis le' 18 décembre 1732, lit la déclaration de ses
— 565 —
revenus au gouvernement. On y lit que les charges consistaient en
deux cent-huit messes par an, à dix palars chacune , qu'on pouvait
célébrer au château ou ailleurs, à l'heure et à la volonté du duc.
Il n'existe pas de titre de cette fondation.
L'église paroissiale d'Havre est. à quelques pas du château '.
Nous publions dans l'appendice, sous B, le texte de deux épitaphes
qui sont conservées dans le chœur de cette église et qui rappellent
la mémoire de la princesse Anne de Lorraine, épouse de Philippe
de Croy, duc d'Arschot, et celle de Charles-Alexandre de Groy,
marquis d'Havre, comte de Foutenoy, chevalier de la Toison d'or,
chef des finances des Pays-Bas, qui fut tué d'un coup d'arquebuse
« que luy tira un poltron, • et qui l'atteignit dans son hôtel à
Bruxelles, le 9 novembre 1(52-4 2.
Une chapelle, dédiée à Notre-Dame de Bon-Vouloir, située
à l'extrémité du hameau de ce nom et à une faible distance du
château d'Havre , renferme les tombeaux de plusieurs autres mem-
bres de la famille de Croy-Havré. Nous nous occuperons de ce
petit édifice dans un article spécial.
1 Celte église est érigée sous l'invocation de saint Martin. L'abbaye de Saint-Ueni*-
en-Brocqueroye en avait le patronage. Il s'y trouvait autrefois une chapelle de Notre-
Dame qui fut fondée en 1305 par Sohier d'Engliien , chevalier, châtelain de Mons et
seigneur d'Havre.
2 Vinchant, Annales du flainaut , éd. des Bibl., t. V, p. 392.
— 566
APPENDICE.
Exhaits du volume intitulé : Description de l'assiette, maison et
MARQVISAT d'HaVRÉ, RÉDIGÉE ENVERS FRANÇOIS, Mon* , imprimerie
de Charles Michel, 1006, in-fH, et dédié auprince Charles-Alexandre
De Croy.
Enfin , après mainte campagne veue,
De pins en plus agréable à ma veue,
Je voy soudain aparestre à mes yeux
De ton Havre le palais gracieux.
Je vois parestre alors sans nul obstacle
Ceste maison comme un autre miracle ,
Son pont superbe et l'anticque lion
Armé en teste , et tout à l'environ
Un grand fossé de quatre-vingt pas large,
Où mainte source aussi son eau descharge ,
Et que la Haine environne partout
Quazi de l'un jusques à l'autre bout.
Je dis la Haine et la mesme rivière
Dont le Hainault a son estre première,
Dont le Hainault porte encore le nom ,
Ceste-là, di-je, entoure ta maison
Et ung verger aux yeux fort agréable,
Tout plain de fruict rare et fort délectable ,
Lequel il semble, à cause des ruisseaux ,
Estre en une isle estant tout circuit d'eaux :
Car le fossé de ta maison superbe
D'ung endroict baigne et arose son herbe,
— 567 —
Et en tirant vers les prez au dehors
La Haine court tout au long de ses bords.
Là, au printemps, ce qu'on peut voir de rare
Des belles fleurs , que nature bigarre ,
Dessus chesque arbre, et encore en esté
De fort bons fruictz en grande quantité
Il s'i en treuve, et, pour conclure en somme,
De toute sorte. A l'un coing est ung dôme
Dont l'ung des boutz va rendre dedans l'eau ,
Et dans lequel maint jeune héronneau
Tu fais nourrir , affin qu'estant fort d'aesle,
Il puisse avoir pour demeure nouvelle
Tes beaux grands bois et libre s'y brancher
Sur les plus hautz et sa vie y chercher
Pour y peupler d'une fertille race
D'autres hérons. Puis , poursuivant, je passe
Ung cabinet et m'en vois au jardin
Où j'aperçoy tout de nouveau soudain
Une fort belle et fort grande vollière
Plaine d'oyseaux d'espèce singullière ,
Entre lesquels estoient fortz faisaus
Et des plus beaux; sortant de là-dedans,
Je considère et regarde la face
De ton chasteau , qui tenoit en espace
Par sa longueur trois cent piedz à peu près;
Le bastiment faict de pierre de grès ,
Si relevé qu'il y a triple estage,
Dont tout le grès est pris au voisinage
De ton Havre et autour son pourpris.
Ayant doncveu par-dehors ton logis,
J'entre en la cour, en longueur contenante
Quatre-vingtz pas et de largeur septante.
A l'un costé, de grandz rangs de pilliers
(Tous travaillez d'excellens ouvriers),
Dessus lesquels est une gallerie
De huict-vingtz piedz. Puis, il me prit envie
— 568 —
De voir unglieu , où en maint divers lieu
Paroissoit là ung rondacbe, ung espieu,
Picques, plastrons, la pluspart à l'espreuve ,
Harq'buze à eroeq, enfin partout je treuve
De quoy pousser le plomb et l'éviter ,
De qnov garder la vie et pour Poster.
Et pour remedde au feu et à la rlame
Tout aussi bien qu'à l'homicide lame,
Presque àchescun de tous les soliveaux
Estoient de rang atachez plusieurs seaux.
Bref, il sembloit une image d'allarmes ,
Aussi son nom c'estoit la Salle aux Armes.
Dedans la salle estoit mainte devize,
J'entendz la salle au bout du degré size ;
L'une dizoit: Je soustiendray croy ,
J'y aidray ligne ; en un autre je vy :
J'ayme qui m'ayme : ô devise admirable !
Et d'autant plus qu'elle est fort véritable
Et qu'elle semble au vray à ton humeur,
Car à qui t'ayme estes amy de cœur;
Aussy doit-on aymer cil qui nous ayine ,
Et cependant tous ne sont pas de mesme :
Tel fera mine et dira tous les iours
Nous estre amy, qu'en soi-mesme au rebours
Son cœur le pense et d'un effect contraire
En nostre mal sera nostre adversaire;
Tant d'estre ingratz on en voit d'entachez !
Après, je vy aux soutiens des planchez
De tes ayeux les armes dont le lustre
Des Rois Hongrois vient de la tige illustre ,
Et je trouvay , mesurant sa longueur ,
Soixante pas, et vingt pas sa largeur ,
Et sa hauteur à l'essai eslevée.
— 569 —
Le poêle cite ensuite la petite salle aux Cerfs :
Et comme d'eux ma vue je retire ,
Je voy soudain la forme d'un satyre ,
Tout faict de bronze, et par cincq lieux divers
Jetter de l'eau par des canaux couvers
Et enfermés dans l'espoisse muraille
Dont le conduit qui ceste eau la luy baille
Est au-dessoubs au niveau du fossé ,
Auquel m'estant , pour me voir, abaissé,
J'en vis la source assez large et profonde
Pour se pouvoir baigner dedans son onde ,
Et dans le fondz , tant son cristal est net !
Il n'y a rien si petit en effet
Qu'on ne peut voir en sa forme parfaicte.
Le poète en vient à la chapelle , puis ajoute :
Ceste chapelle estant donc ruinée
Et prophanée encor depuis l'année
Mille cinq cens et soixante et dix-neuf,
Tu commenças à la refaire à neuf
L'an mil six cens , et encore avec elle
Ce grand logis dont la face est si belle,
Ce grand logis que du jardin l'on voit.
Le poète s'étend ensuite sur la vue du château et cite:
La belle tour d'Enghien surnommée.
Il parle de l'église d'Havre, qui est dédiée à saint Martin :
J'entre à l'église où je vois en la voûte
J'ayme qui m'ayme et tes armes auprès.
H fait l'éloge de la situation et des environs du château
Car la nature est plus belle que l'art.
A ton abord , de quelle et quelle part
— 570 —
Que l'on te voye et qu'à toy l'on arrive,
L'on voit partout une agréable rive,
De beaux ruisseaux doucement murmurant,
Bordez partout d'arbres à double rans ,
Semez de rieurs , qu'il semble qu'à l'envie
Pour t'embellir elles ayent prie vie.
Là sont des prez en tout temps esmaillez
Là sont des bois tousiours verts enfeuillez ,
Là mille champs et de tous grains fertilles ,
Là près de toy maintes fort belles villes.
Là d'ung endroit t'environnent les bois,
Où maint grand cerf a rendu les abois ,
Où maint brocard encor jeune de ruze
N'a sceu fuir le coup de l'harquebuze ,
Où maint lapin se voit pris dans les retz
Voulant fuir la dent de tes furetz ,
Où maint chevreul pour n'estre pas prou viste
Et où maint lièvre au partir de son giste
A esprouvé 'la vitesse et les dentz
De tes lévriers et de tes chiens courantz ,
Où la perdrix par le chien arestée
J'ai veu souvent tirée et emportée,
Et quelquefois qu'on a couppé les blez
Tous ses petits auprès d'elle assemblez
Se sont veuz pris d'un seul coup de tirasse.
Enfin, il n'est nulle sorte de chasse,
Soit à l'oiseau , au chien et aux filletz ,
Qu'elle ne soit autour de ton palais.
J'ay voyagé par maint pays estrange,
J'ay veu maint lieu qui mérite louange ,
Mainte maison et maint riche chasteau,
Maint grand pallais que l'on tenoit pour beau
Mais la beauté de ton Havre illustre
— 571 —
De tout en tout en efface le lustre.
Quand je m'amuse or d'une et d'autre sorte
A contempler des yeux tout alentour
Maint pavillon , mainte superbe tour ,
Mainte grand' salle et mainte gallerie ,
Maint cabinet, mainte tapisserie ,
Maint meuble exquis et maint rare tableau ,
Maint riche vaze et maint riche joyau,
Dis-je , pendant qu'à cela je m'amuze :
Je ne sais pas expliquer à ma Muze
Par quel bonheur je fus tant fortuné
D'avoir esté en ce lieu amené.
B.
Epitaphes de l'église d'Havre.
Dans le chœur , du côté gauche en entrant :
ICI GIST LE CŒUR DE HAUTE ET ILLUSTRISSIME PRINCESSE ANNE
DE LORRAINE, DUCHESSE D'ARSCHOT , PRINCESSE DU St. EMPIRE ET DE
CH1MAY, MARQUISE DE HAVRE, ET 9">e FILLE DESÉR.™ PRINCE ANTHOINE DUC
DE LORRAINE, ET DE MADAME RENÉE DE ROURBON, LAQUELLE AYANT ÉTÉ
ALLIÉE AVEC HAULT ET ILLUSTRISSIME PRINCE PHLE SIR DE CROY, DUC D'AR-
SCHOT, EN L'AN 1548, EST DÉCÉDÉE EN L'AN 1568 , ÉTANT SON CORPS INHUMÉ
A HAVRE LE PRIEZ DIEU POUR SON AME
Au milieu du chœur, sur une pierre plate
D. 0. M.
CAROLUS ALEXANDER
DUX CKOYACUS, PR1NCEPS S. R. 1MPER1I,
MARCHIO HAVRECH1US, COMES FONTENOYUS, ET
EQUES AUREI VELLERIS,
SUPREMUS F1NANTIUS PR^EFECTUS ,
SP1R1TU AD CŒLUM N1TENS,
BRUXELL.-E CORPUS, HIC COR SUUM SEPELIR1 V0LU1T
UT QUEM VIVUS AMAVIT LOCUM
AFFECTU ETIAM POSTUMO COMPLECTERETUR.
0B11T PR1DIE 1D. NOVEMR. ANNO M. DC. XXIV.
LA CHAPELLE
VOTRE-DAME DE BOiY-VOULOlR
A HAVRE.
NOTICE
PAK
M. LÉOPOLD DEVILLERS.
MEMBRE TITULAIRE A MONS.
Malgré ses proportions très-modestes, la chapelle de Notre-Dame
de Bon-Vouloir est l'un des monuments les plus intéressants des
environs de Mons.
Celte jolie chapelle se trouve dans une charmante situation , à
l'extrémité du bois d'Havre et au centre d'un hameau qui se
prolonge jusqu'à la chaussée du Rœulx *. Les chemins qui y mènent
de toutes parts sont fort pittoresques et bien entretenus.
L'édifice est solidement construit en briques et en pierres. La
première pierre en fut posée par la duchesse d' Havre , le 22 mai
1625.
Commissaires rapporteurs : MM. A. Casïkhman et P.-.I. De Cuvceu.
i Un estaminet voisin de celle Châiisstëê a conserve" l'enseigne : Au prince Eugène ,
en souvenir sans doute de ce que le prince Eugène de Savove établit son quartier-
générai à Havre, lors du siège de Mons en septembre 1700.
— 573 —
Cette chapelle , destinée à abriter l'image de Notre-Dame de
Bon-Vouloir, fut élevée en peu de temps , grâce au zèle du curé
d'Havre, Robert Dicqueman, et à la pieuse générosité de la maison
d'Havre, d'un oratorien de Mons nommé François Descamps et de
plusieurs autres personnes.
A l'extérieur, le petit édifice n'offre d'apparent que son clo-
cheton , ses six fenêtres à ogive et les cartouches en bois qui
supportent la corniche. Ces cartouches sont au nombre de 72 ,
dont M grosses et 61 petites; les premières représentent des
figures d'anges et les autres, des têtes fantastiques et grimaçantes.
La façade est percée de deux fenêtres ogivales, entre lesquelles
est posée une pierre aux armes de Croy-Havré. Un œil-de-bœuf
surmonte l'écusson. A la base de cette façade est construit en
hors-d'œuvre, clans l'ordre toscan, avec entablement, un porche
carré en pierres de taille et percé de trois portes. Au côté prin-
cipal est une niche avec une statue de la Vierge. Une croix de fer,
portant en chef deux massues, supports des armes de Croy-Havré,
surmonte ce porche. Deux semblables massues en fer sont placées
au-dessus du chevet de la chapelle.
L'intérieur présente un ensemble peu commun d'œuvres d'art.
Ce qui attire particulièrement l'attention , c'est la charpente ,
entièrement à découvert : deux fortes poutres, arrondies et sculp-
tées, relient les murs latéraux. A chaque extrémité de ces poutres,
une tète de crocodile semble soutenir un faisceau d'arabesques.
Sur les murs s'appuient six cintres, qui sont soutenus latéralement
par deux vergues.
L'autel de la chapelle a été donné par l'infante Isabelle qui
visita l'oratoire, ainsi que la reine Marie de Médicis , en août
1631 i. Le rétable se compose d'un portique corinthien, orné de
1 Marie de Médicis fit présent à la Vierge d'une robe magnifique. — Annales de
— 574 -
colonnes et de pilastres engagés , en marbre , et encadrant un
tableau qui représente l'Assomption de la Sainte Vierge. Sous ce
tableau, dans une niche richement garnie, repose la statuette de
Notre-Dame de Bon-Vouloir. Cette statuette était attachée à l'un
des trois tilleuls qui croissaient sur l'emplacement de la chapelle,
avant la construction de celle-ci, et où les processions de la paroisse
d'Havre faisaient ordinairement une station. On conserve, derrière
l'autel, le tronc du tilleul auquel l'image était appendue.
Une balustrade en marbre noir, gris et blanc sépare le sanc-
tuaire de la nef. Six écussons aux armes de Croy-liavré sont
sculptées sur les plus gros balustres.
Des lambris en chêne régnent de chaque côté de la chapelle.
Cette boiserie est partagée de part et d'autre en cinq comparti-
ments, dont trois sont occupés par des inscriptions relatives à
l'histoire et aux miracles de Notre-Dame-de lion Vouloir et les
deux autres par des tableaux. Ces toiles représentent : V An-
nonciation, la Visitation, la Naissance du Sauveur et la
Purification.
Dans le bas de la chapelle, on remarque le jubé, et, à gauche
en entrant, un banc d'œuvre à quatre places, bien sculpté.
Entre les deux fenêtres du côté gauche, un monument de la
piété filiale rappelle la mémoire de l'un de ceux qui ont contribué
à la construction de la chapelle. C'est un tableau , entouré d'un
encadrement funèbre, représentant l'oratorien François Descamps
avec son père Fr. -Jacques Descamps, qui fut bailli et receveur de
la terre d'Havre : tous deux sont à genoux devant un crucifix, le
premier vêtu d'un ample surplis et l'autre en costume de magistrat.
Au-dessous, on lit l'inscription suivante :
f Académie d' archéologie de Belgique , tome XIV, p. t99. — Hhtoire de l'origine ,
progrès et miracles de Notre-Dame de lion-Vouloir au duché de Havre. (Mous,
François Waudret , 103'.), in-120).
— 575 —
M~RE FRANCHOIS DESCAMPS, PBRE DE
L'ORATOIR A L'HONNEUR DE DIEU
ET DE LA GLORIEUSE VIERGE MARIE.
AUSSY EN MÉMOIRE DE FR. JACQUES
DESCAMPS SON PÈRE, S' DE PELOINGNE ,
LEQUEL PAR L'ESPACE DE CINCQUANTE
CINQ ANS AT EXERCÉ TANT L'OFFICE
DE BAILLY CÔË DE RECEPVEUR DE
HAVRE, DÉCÉDÉ LE XXII* DE NOVEMBRE
XVI<= VINGT CINQ, A FAIT METTRE
CEST EPITAPHE VOUS RECOMMANDANT
SON AME D'UN PATER ET AVE MARIA. 1631.
En face de ce tableau funéraire se trouve une toile représentant
saint Jean-Népomucène.
Deux mausolées modernes et quatre inscriptions tumulaires de
membres de la famille de Groy et de personnes qui ont fondé des
messes dans la chapelle, achèvent la décoration de celle-ci. Nous
y avons copié les épitaphes, sur marbre blanc, que voici :
D. 0. M.
SEREN1SS1MA PRINCIPISSA MARIA THERESIA ,
LANTGRAVIA HASSI/E-DARMSTADL-E, NATA
DUCISSA DE CROY ET D'HAVRE, COR SUUM
HIC DEPONI V0LU1T, UT IB1 ESSET MORTUUM
UBI FUERAT VIVUM ; 0B1IT A" 1715,
20 MARTII , BONONI/E IN ITALIA UBI
CORPUS EJUS SERVATUR IN CŒNOBIO SANCT/E
CATHARIN/E REQUIESCAT IN PACE.
D. 0. M.
HOC SUB MARMORE QUIESC1T COR
ILLUSTR1SSIMI PRINCIPIS DUC1S DE CROY
D'HAVRE. PARUM VIXIT SI ANNOS, DIU
SI VIRTUTES DINUMERAS. 0BI1T DIE MEXS1S
MAI! 10°, ANNO 1725. REQUIESCAT IN PACE.
— 576 —
La collation de la chapelle de Notre-Dame de Bon-Vouloir appar-
tient à la famille de Groy. La fête principale de la patronne se
célèbre le jour de V Assomption, le 15 août.
A l'époque de la Révolution française, la chapelle avait été
vendue comme domaine national. Mais l'adjudicataire, M. Maghe,
propriétaire à Mons , ne la fit pas démolir ; il y lit déposer des
récoltes, et lors du rétablissement du culte il la remit au sieur
Malbrun, intendant du château d'Havre, et la chapelle fut rendue
au culte.
On voit encore , dans les environs de Mons , les débris de quelques établissements
religieux, tels que les abbayes de Saint-Ghislain , de Saint-Denis et de Bélian. Maisees
débris sont sans importance, au point de vue monumental. Nous ne leur consacrerons
donc aucun article spécial. C'est la monographie de ces monastères qu'il serait désirable
de voir entreprendre.
DES STYLES A ÉCRIRE,
NOTICE
pah M. H. SCHUERMANS ,
MEMBRE TITULAIRE A HASSELT.
Chacun connaît, sur les styles , et le mot
figuré d'Horace : saepe shjhim vertas, et l'épi-
gramme énigmatique de Ccelius Symposius *:
De summo planus, sed non ego planus in imo,
Versor utrinque manu , diverso munere fungor :
Altéra pars revocat quidquid pars altéra fecit.
Cet ustensile destiné d'une part à inscrire
des caractères dans la cire des tablettes,
d'autre part à aplanir cette cire pour les cor-
rections, n'est-on pas tenté, a priori, de le
reconnaître dans ces instruments, si abon-
dants parmi toutes nos fouilles, instruments
qui sont d'un côté armés d'une petite spatule
ou d'un cuilleron propre à prendre la cire et
à l'étendre, et de l'autre terminés en pointe.
En voici quelques-uns de grandeur naturelle.
Et voyez cependant à quoi l'on s'ingénie
quelquefois : un savant français, Grignon "2, a
considéré ces objets comme des cure-oreilles ,
et pour contre-partie ne réfléchissant pas sans
1 Poelae latini minores, VI, 478.
* Proces-verbal des fouilles opérées an Châtelet entre Sl-Di;ier et Joiwille ,
p. CXXXV1II.
Commissaires rapporteurs : MM. G. Hagkmans et le chevalier dk Schouiheetk
DE ÎERVARENT.
XXIX XXII *S
— 578 —
doute que les dents des Romains étaient aussi rapprochées les unes
des autres que nos dénis modernes, il se figura que la pointe de
ces instruments servait de cure-dents.
Je vais citer textuellement mon auteur :
«... .Beaucoup de cure-oreilles , petits instruments composés
» d'une lige cylindrique ou en forme de fuseau allongé , unie ou
• ornée de lilels, de spirales et de cordons. Un des bouts est
» terminé en pointe et pouvait servir de cure-dents. L'autre finit
» en une petite palette déprimée et arrondie qui est inclinée au
» plan de sa tige. »
Cela est plaisant , mais ce n'est pas la seule erreur à laquelle
la petite spatule « inclinée au plan de la tige • a donné lieu.
Roach Smith, archéologue qui a rendu les plus grands services
à la science et dont la présente critique n'aura pas pour portée
de diminuer en quoi que ce soit le mérite, Roach Smith, lui, a vu
dans ces objets des ligulae ou cuillers pour extraire les parfums
des bouteilles à long col où ils étaient souvent contenus. Cette
erreur, il la répète dans plusieurs de ses ouvrages1.
Je dis « cette erreur > , car c'en est bien positivement une :
elle est démontrée par des fouilles opérées dans notre pays. Le
cimetière de Flavion 2, près de Namur, a montré dans une de
ses fosses sépulcrales des tablettes à écrire romaines (avec la
représentation de la louve allaitant Romulus et Remus) , et à ces
tablettes adhérait encore un étui dans lequel se trouvaient de ces
prétendues cuillers à long manche de Roach Smith ; celles-ci ne
peuvent donc avoir été que des styles.
Par contre, l'on a parfois vu des styles où il ne fallait pas en
voir : les auteurs des siècles derniers, Cliifflet , Du Molinet,
1 Antiquities of Richborough , Reculver and Lymne, p. 103; Illustrations of
Roman London, pi. XXXVI, Qg. fi.
* Annales de lu société archéologique de Namur, VII, p. 10, pi. VI, fig. 1.
— 579 —
Petau l, prenaient les fibules pour des styles se repliant sur eux-
mêmes, et ils se donnaient même la peine parfois, témoin Polenus
dans son supplément à Graevius2, de représenter par le dessin
la manière dont on tenait ces fibules pourécrire; or, bien que de
Montfaucon 5 ait affirmé que de son temps plus personne ne ver-
sait dans cette erreur , on la retrouve encore aujourd'hui dans le
recueil si estimé d'Antony Rich 4.
Combien d'erreurs de ce genre, nos neveux, plus avancés que
nous , ne relèveront-ils pas à leur tour dans nos attributions si
hypothétiques parfois ! Notre excuse est la suivante, qui sera aussi
celle de Grignon , de Roach Smith et -de Rich : pour la science,
mieux vaut une erreur qu'on puisse réfuter qu'un silence auquel
on ne puisse répondre.
' Bulletin des Commissions royales d'art el d'arcliéologie (mars et avril 186G),
V. j). 168, et même observation faite par de Lo.ngpériek , Revue d'archéologie j
livraison d'août 1866, p. 107.
"- Bull, cité, 111, p. 1115.
3 Id., III, p. 48 et 356.
* Dictionnaire d'antiquités grecques et romaines , V° Graphium.
LOFFICIALITÉ
ET LES
ËCHEVINS SYNODAUX
A ANVERS.
ÉTUDE HISTORIQUE
par M. LOUIS TORFS,
Membre correspondant à Anvers.
De toute ancienneté, les cours ecclésiastiques ont soutenu leur
compétence pour connaître des délits d'infraction à la foi conjugale.
Cette prétention n'était pas admise partout sans contestation et, en
Belgique , elle occasionna souvent des conflits entre le clergé et
les magistrats communaux. Dans les localités où cette compétence
était reconnue légale , il surgissait parfois des plaintes sur la
manière dont cette juridiction était exercée et les abus qui en
résultaient. La commune lésée prenait alors son recours au pape ,
afin d'obtenir le redressement de ses griefs. Les annales de la
ville d'Ypres nous offrent un curieux exemple d'un de ces recours.
11 était arrivé notamment» que lorsqu'un bourgeois de cette ville
venait d'être accusé d'adultère, l'olTicial, le doyen et d'autres
ecclésiastiques en exigeaient et lui extorquaient (exigunt et eœlor-
quenlj nne certaine somme d'argent, alors même qu'il n'était ni
convaincu du fait, ni condamné. Sur les représentations faites à
ce sujet au souverain pontife par les échevins d'Ypres, Innocent IV
Commissaires rapporteurs : MM. G. Hageuans et \ Van IIa^sklt.
— 581 —
adressa à l'évêque de la Morinie, siégeant à Thérouanne, une bulle
datée du 5 des calendes de mars 1246 (3 mars 1247 n. st.), pour
l'inviter à rappeler ces ecclésiastiques à leur devoir et à employer
au besoin contre eux les censures spirituelles *.
En généra! , les autorités laïques ne voyaient pas de bon œil
celte immixtion des cours ecclésiastiques dans les affaires séculières;
les souverains entravaient l'action de ces tribunaux partout où ils
le pouvaient, et pour le sujet qui nous occupe, nous nous borne-
rons à citer les lettres des rois de France Philippe VI (1336) et
Charles VI (13S9) , défendant à l'évêque d'Amiens de connaître
des faits d'adultère et d'infliger de ce chef aux délinquants des
peines ou des amendes 2. La compétence de Poflicial dans ces
affaires semble n'avoir été reconnue en France que par rapport aux
clercs tonsurés. Du moins, le parlement de Paris en jugea ainsi
dans un procès entre le magistrat et l'évêque de Tournai. Par sa
sentence du 20 mai 1396, ce parlement donna gain de cause au
magistrat, en décidant que celui-ci était en droit de connaître de
tous les faits concernant les clercs mariés, en tant que ces faits
ressortissaient de la juridiction temporelle. Quant à l'évêque, il
pouvait en user comme de coutume dans les affaires criminelles
concernant les clercs portant l'habit et la tonsure de prêtre 5.
Cette distinction entre la juridiction spirituelle et la juridiction
temporelle était également observée à Anvers dans toutes les actions
judiciaires. Dans celte ville, c'était un principe incontesté qu'aucun
bourgeois ne pouvait être distrait de ses juges naturels, les éche-
vins. Ce principe, consacré par les coutumes et confirmé par toutes
les chartes de Joyeuse Entrée, était absolu et ne prêtait pas à équi-
voque, au moins quant aux habitants de la ville. Aussi, l'éche-
1 Diegeiuck , Inventaire des archives île la ville d'Ypres, 1 , 63.
- Ch. MUSSELY , Inventaire des archives de la ville de Courtrai, 1, Il fi, 133.
1 Ibidem, ibidem, I , 136.
582
vinage maintint-il de tout temps avec une remarquable fermeté son
droit d'attraire devant son tribunal tous les individus, nés ou natu-
ralisés bourgeois d'Anvers, accusés de quoique crime ou délit.
De temps immémorial cependant , le principe avait dû fléchir
lorsqu'il s'agissait de la correction d'une catégorie spéciale de
délits , cl il était intervenu à ce sujet entre l'évèque et la com-
mune un accord dont le texte original parait perdu , mais dont
l'article vij du code des anciens droits et coutumes de la ville
d'Anvers nous a conservé le résumé. Voici la traduction de cet
article , dont nous donnons également le texte flamand en note '.
< vij. Item, que l'on a coutume de déférer par les échevins syno-
• daux , et qu'on est obligé de déférer au doyen rural vingt-sept
» couples de gensou moins et pas davantage. Et avec ceci, d'après
» les anciens droits et usances de la ville , ni l'évèque , ni le
• doyen ne pourront accuser on évoquer de la part du Synode
■ aucun bourgeois on bourgeoise de plus. •
Ce serait ici le lieu d'entrer d'abord dans quelques détails sur
l'oriffine et l'organisation des cours synodales du diocèse de
Cambrai et en particulier de celle d'Anvers, si les renseignements
ne nous faisaient défaut. On peut seulement présumer que si
l'organisation des anciens archidiaconats de ce diocèse doit être
fixée au xie siècle , celle des doyennés ruraux ne remonte pas plus
haut. Ce qui est certain, c'est que, dans les monuments que nous
avons pu consulter, les archjprètres ou doyens de la chrétienté
du district rural d'Anvers ne commencent à apparaître que dans
la seconde moitié du xmc siècle 2.
1 « Art. vij. Item, dat men bidon Seyntscepenen jaerlix ouer pleeght te geuen, ende
» sculdich is ouer te genen den landeken xxvij paer imk , of daer onder, ende nict
ii daer bouen. Ende hier mede soe en mach de bisschop nocli de landeken rie gheenen
» porlre noch portersse meer belasten noch voertroepen vanden Zeynte, na doude
h reclit ende hercomen vander sladt. »
: L'institution des archiprôtres dans l'Église était assurément de beaucoup antérieure,
et on cite les cai s du concile de Tp.urs de 561 comme un des plus anciens docu-
— 583 —
Ces dignitaires qui, dans l'origine, avaient pour mission de
veiller à l'observance de la discipline ecclésiastique , étaient de
droit présidents des synodes (assemblées des curés de leurs districts),
qu'ils devaient convoquer au moins une fois par an. Dire comment
ils en vinrent à s'attribuer le droit de connaître d'affaires purement
civiles, exigerait une étude à laquelle nous ne sommes pas pré-
paré, et il n'est pas moins difficile de préciser l'époque à laquelle
l'espèce de transaction entre le pouvoir spirituel et l'autorité sécu-
lière fut introduite à Anvers.
Le document dans lequel l'article cité se trouve consigné est
un code des anciens droits politiques des Anversois , formant l'ap-
pendice le plus important du Corcboeck ou code de la police mu-
nicipale d'Anvers au moyen âgei. Il a été reconnu que ce recueil
date du XIVe siècle et qu'il a été rédigé en partie vers la tin du
règne du duc Jean III et en partie au temps de Philippe-le-llardi.
D'après ces indications, il n'est pas douteux que l'institution
des échevins synodaux ne soit fort ancienne. Toutefois, nous pen-
sons qu'on ne peut la faire remonter au-delà du xnc siècle et
qu'il faut peut-être la rapporter au XIIIe. Quoi qu'il en soit, on
doit se figurer* les Seyntschepenen comme des officiers représen-
tant la commune auprès du Seynt ou tribunal ecclésiastique, confor-
mément à la définition que Corneille Kilianus a donnée de ces mots:
5inïic,5fynof, velus, Sijnodus. Bcyt\û-5(\y;^cn, Sinîi-5d)q)cn,
Syndicat; , defensor iuris publici , ciuium aduocatus et defensor.
ments qui en fassent mention ; mais on conçoit, que cette institulion a subi depuis lors
Lien des modifications, selon 1rs besoins des temps et des diocèses, avant que les titu-
laires fussent préposés à l'administialion spirituelle des districts ruraux. M. l'abbé
Ue Riduer a donné quelques détails sur ceux de Liège. Von Analecles peur servir
ù l'Iiisl. ecclés., 1 , 247-48.
' Ce précieux codex, si intéressant pour la connaissance des mœurs de celte époque,
existe en ms. aux archives communales. Mektens et Torfs Tout publié' in extenso
dans le 11e vol. de leur Gesdriedenis nui Anlwerpen , t846, et les Bibliophiles
(jaiilo/s en ont donné une seconde édition eu 1M.VJ.
— 584 —
On sait que Kilianus rédigea son Dictionnaire étymologique
à Anvers , où il passa la plus grande partie de sa vie, et qu'il fut
conséquemmcnt à même d'apprendre la signification d'une foule
de mois du vieux dialecte anversois. Cette circonstance, indépen-
damment de l'autorité lexicographique du prote de Plantin , donne
à son interprétation une valeur particulière , sur laquelle nous
reviendrons après en avoir fini avec l'article vij.
Cet article, disions-nous, résume l'accord primitif fait entre le
clergé et la commune, et il serait intéressant de savoir dans
quelles circonstances et sous quels auspices cet accord fut conclu.
Malheureusement, les annales d'Anvers surit muettes sur ce point
et le laconisme de l'art, vij ne permet pas d'en rechercher toute la
portée, sans risquer de s'égarer dans des inductions plus ou moins
spécieuses. Rien que sur ce chiffre 27 , par exemple, on pourrait
établir des hypothèses à perte de vue. Pourquoi , pourrait-on
demander, ce nombre 27 , au lieu de 25 ou de 30 ? Etait-ce
une moyenne, et, dans l'affirmative, d'après quelles bases celte
moyenne avait-elle été établie? Car ce chiffre ne semble pas être
aussi innocent qu'il le parait , surtout s'il doit s'appliquer à la
ville d'Anvers seule et non à tout le territoire du marquisat.
Vingt-sept couples représentent un total de cinquante-quatre per-
sonnes, ce qui, eu égard à la population d'alors, accuserait un
état d'immoralité qu'on révoquerait volontiers en doute, si des faits
et des actes nombreux ne venaient corroborer cette appréciation.
Une esquisse rapide de cet état ne sera pas ici hors de propos.
Au xive siècle, le relâchement des mœurs avait fait de grands
et déplorables progrès chez nous , aussi bien que dans le reste de
l'Europe. Les pénalités établies contre la prostitution, la fornica-
tion et le concubinage avaient été aussi impuissantes que les lois de
l'Église pour arrêter le débordement. L'adultère, si rare chez les
Germains, si sévèrement puni parles barbares qui se partagèrent
les dépouilles de l'Empire romain , était devenu un délit des plus
— 585 —
fréquents *. Dans beaucoup de nos villes, il existait pourtant des
règlements pour sa répression 2. Généralement on imposait aux
délinquants de grosses amendes, des pèlerinages lointains ou un
bannissement à terme 3 et parfois à perpétuité , sous peine d'avoir
les oreilles coupées , ou quelque autre correction arbitraire, si les
bannis s'aventuraient à rentrer dans leurs fovers 4. L'ignominie
qui s'attachait aux adultères pendant leur vie, ne les quittait pas
après leur mort ; dans certains diocèses , l'administration de
l'Eucharistie et de l'Extrème-Onclion leur était refusée, ainsi que
la sépulture en terre sainte, fussent-ils morts repentis 3. Le mal
a dû être bien grand pour que l'on ait jugé nécessaire, afin de
1 Cfr. Schayes, Les Pays-Bas avant et durant la domination romaine; 1" édit.,
t. I. p. 197-198.
* Cvn\aekt , Bijdragen lot het onde strafregt van Vlaenderen , pp. 21 et 116.
Aux diverses localités qu'il cite, il aurait pu ajouter la pelite ville d'Ysselstein , pro-
vince d'Utrecht , où la femme adultère était astreinte à faire un dimanche le tour de
l'église, à l'extérieur , ayant au cou une chaîne à laquelle était attachée une lourde
pierre . Ce genre de correction était aussi ancien que généralement usité aux Pays-Bas,
pour châtier les femmes coupables de calomnies, d'injures, etc. On le trouve men-
tionné dans les vieilles coutumes d'Anvers et de Bruxelles, de Landrecîes et de Middel-
bourg. A Delft , la pierre était portée sur la tête : Voir Codex diplom. néerl. de la
Soc. histor. d'Utrecht, t. IV, 2* part., page 125; Kronjk , Ibid., 1856, p. 76;
Can.naerx, Ouv. cité. , p. 166; Merte\s et Turfs , Gescli. van Anliverpen, II, 4-30.
3 Notre Coreboeck prononçait la confiscation de Yoverste decsel (manteau ou chape-
ron) des coupables récidivistes ou à défaut une amende de 20 ëcus (scilden). Voir aussi
les amendes, graduées d'après le nombre des récidives , comminées par l'art. 7 du
chap. XX des coutumes d'Anvers de 1582.
* Une condamnation de ce genre fut prononcée à Anvers, en 14-11, à charge
d'une nommée Catherine Van Cureghem. — En cas de circonstances aggravantes , la
justice criminelle procédait dans les formes, comme en 14-78, lorsqu'une femme
adultère d'Anvers, qui avait fait assassiner son mari, fut enterrée vive sous le gibet
et son complice exécuté par le glaive. Ces peines terribles semblent des réminiscences
de la justice des anciens Saxons contre les femmes coupables du délit d'adultère.
(Cfr. Schayes, Op. et loc. cit.)
5 Nous croyons devoir interpréter ainsi l'accord intervenu en 1458 entre le
magistrat de Malines et l'évêque de Cambrai, en vertu duquel les adultères repentis
pouvaient recevoir l' Extrême-Onction et être inhumés en terre sainte. Mais s'ils gué-
rissaient et retombaient dans leurs anciens désordres , ils devaient être poursuivis selon
les coutumes de Cambrai. Van Doren , Inventaire des archives de Malines, I, 141.
— 586 —
sauvegarder l'honorabilité de la magistrature, d'interdire les
charges publiques aux individus qui auraient eu commerce criminel
avec des femmes mariées. A Anvers et à Bruxelles , on avait exclu
de l'échevinage tous ceux qui se trouvaient dans ce cas *. Cette
disposition avait été ensuite étendue aux doyens des métiers, à tous
les autres officiers de la ville et même aux pauvres participant à
la table du Saint-Esprit , lesquels étaient prévenus qu'ils seraient
privés des bénéfices de l'assistance publique -.
Une réflexion fort simple se présente ici : contre des excès tels
que l'incontinence, l'ivrognerie, etc. , qui ne nuisent qu'à leurs
auteurs, on ne prend guère des mesures que lorsqu'ils se multi-
plient au point d'alarmer la société. Ne pourrait-on donc pas en
conclure que les dispositions précitées furent provoquées par des
faits de scandale public dans la hiérarchie administrative? Cela ne
nous paraît pas douteux et les exemples ne feraient pas défaut, si
on voulait dépouiller les anciens sommiers judiciaires 5. Indépen-
1 Ordonnance du magistrat de Bruxelles du mois de niai 1429. — Edit général de
Charles-Quint du 4 oct. 1540. — Coutumes d'Anvers de 1582, chap. IV, art. 10. Les
adultères qui se trouvaient en fonctions devaient donner leur démission.
* Papebrochius , Annales Antverpienses , t. I, p. 375 ad An 1434. Nous ne
parlons pas des clercs tonsurés que cette lèpre doit avoir également atteints, à en juger
par une taxe spéciale à payer au doyen rural par les femmes en relevailles api es no
double adultère (duplici adulterio vet ex presbytero) , taxe que les statuts du doyenné
d'Anvers de 14 12 el de 1 180 fixèrent à 12 sous neufs. Voir Analectes pour servir à
l'histoire ecclésiastique, 1, 231 et 111, 391.
z M. Cannaeut, dont nous citions tout à l'heure l'ouvrage sur la justice criminelle en
Flandre, rapporte (p. 23-57) le jugement prononcé, le 9 novembre 1554, contre cinq
employés de la ville de Gand , accusés d'adultère. Tous les cinq forent condamnés à
faire nu pieds et en chemise, amende honorable devant le tribunal des échevins et dans
l'église île St-Bavon , où ils devaient offrir un cierge pesant quatre livres. Indépen-
damment des amendes et des frais de geôle à payer par chacun d'eux, tons furent
déclarés infâmes et inhabiles à occuper désormais aucun emploi. Ce jugement, observe
M. Cannaeki , prononcé contre cinq employés publies à la fois, a ihï faire sensation,
même dans ie temps là. Pins loin (page 116) il rapporte, d'après le ballinc Bouc dtr
Sicile van Ghendl, la condamnation au bannissement de 29 adultères à la fois
(20 déC. I 180), et relie de 24 autres individus <2i aOÛl 1 196). Ces exemples vieilli, ni
à l'appui de ce (pie nous disions plus haut sur la fréquence des infractions à la foi con-
Mi XIV et ;iu XV iêl le
— 587 —
daroment de cette considération , le chiffre 27 , en tant qu'il doive
s'appliquer uniquement à la ville d'Anvers, se présente avec un
caractère tout particulier ''. Ces 27 couples à déférer annuellement
à l'ofticial de Cambrai ne forment qu'un chiffre relatif. En effet,
il ne comporte pas les adultères en dehors du contingent réservé à
la cour synodale, ni ceux qui parvenaient à se soustraire aux
investigations de la justice.
Au résumé, de quelque manière que l'on veuille envisager l'ar-
ticle vij , sa concision rend impossible toute appréciation exacte
de sa portée. Partant, nous ne savons s'il faut féliciter le clergé
d'une certaine condescendance dans celte affaire , ou ta commune
de son esprit de fermeté, ou tous les deux de leur sagesse, de leur
discrétion, de leur entente cordiale, etc. Eu égard à l'époque, il
semble bien qu'il y ait lieu de leur adresser de ces éloges ; mais
en fin de compte , on ne saurait se dissimuler qu'une des plus
importantes immunités de la commune avait reçu une atteinte.
Celle-ci doit l'avoir senti et avoir cherché une occasion qui lui
permît de rentrer dans la plénitude de son privilège , en vertu
duquel tous les habitants sans exception n'étaient justiciables que
du tribunal échevinal.
Cette occasion s'otïrit-elle pendant le fameux schisme d'Oc-
cident? — Question insoluble, faute de documents. Tout ce que
l'on sait, c'est qu'à l'origine de ce schisme, le chapitre d'Anvers
se rangea du côté d'Urbain VI, siégeant à Rome, et refusa de
reconnaître Jean T'Serclaes, nommé à l'évêché de Cambrai par
l'antipape Clément VII. Dans les actes qui intervinrent en 4390
entre le chapitre et le successeur de cet évèque, André de Luxem-
bourg, la question du Seynt ne paraît pas avoir été soulevée, et il
n'y a pas lieu de s'en étonner , cette affaire d'intérêt communal
' Le concordat de 1440, dont nous nous occuperons plus loin, ne parle en effet
nue dis adultères des deux sexes de la ville d'Anvers.
- 588 —
concernant essentiellement le magistrat. Le chapitre de Notre-Dame
n'avait rien à y voir, bien que la dignité et les fonctions de doyen
rural du district d'Anvers fussent souvent conférées à un de nos
chanoines, et précisément à l'époque dont nous nous occupons,
le pléban Lambert de Rode s'en trouvait revêtu l.
Après André de Luxembourg jusqu'à la fin du schisme, deux
prélats occupèrent successivement le siège de Cambrai : Pierre
d'Ailly (139(3) et Jean de Gavre (141 1). Au rapport de Diercxscns,
tous les deux durent passer par les conditions auxquelles le cha-
pitre avait subordonné son obédience à leurs prédécesseurs; mais
ce ne serait pas sans difficulté qu'on aurait obtenu leur assenti-
ment. Tout au moins Pierre d'Ailly , qui devint plus tard cardinal
et qui fut une des célébrités les plus influentes de son temps,
résisla-t-il pendant quatre ans, avant de consentir à accepter
l'accord de 1390. Nous ignorons si Jean d.e Gavre se montra plus
accommodant; toujours est-il que le chapitre fut encore une fois en
dissentiment avec l'ordinaire diocésain, sans que la question du
Scynt paraisse y avoir été mêlée.
Quoique incomplètes, ces indications nous paraissent suffisantes
pour laisser entrevoir que le schisme d'Occident avait créé , à
Anvers comme ailleurs, un état anormal qui a pu influer sur les
relations du clergé avec les autorités civiles. Toutefois, il n'en
résulte pas que les bons rapports fussent altérés partout. Du moins
à Anvers nous n'avons trouvé aucun indice qui prouverait que la
commune jugea le moment opportun pour se débarrasser de la
juridiction du Scynt en matière d'adultère; car pour toutes les
autres affaires de son ressort, l'officialité continuait à fonctionner.
La rigueur de cette juridiction fut même quelque peu tempérée par
' Dans un acte de 1375: « Lambertus de Rode S. Ode (Su Odemode inditione
Buscoducensis) Plebanus et canonicus, » Dans un autre de 1389 : « Lamberlut
» de Rode, decanus christianilath Antverpiensis. » Cfï. Mertens el Tokfs ,
V. Gesch. v. Antw 015-16, et P. Génard, (0. L. V. op 't Slaeksken), p. 18.
— 589 — •
Jean de Gavre, qui conféra au doyen rural d'Anvers le pouvoir de
suspendre pour trois semaines les exécutoires de la cour spiri-
tuelle de Cambrai 1. Resterait à savoir si ce fut une mesure tem-
poraire ou permanente.
Quoiqu'il en soit, ce n'est que plusieurs années après la fin du
schisme, après la crise provoquée par la hulke de Galloo et proba-
blement à la faveur des perturbations amenées par cette crise, que
l'on apprend que la commune avait trouvé moyen de se soustraire
à l'obligation de déférer annuellement un nombre déterminé d'adul-
tères à l'oiïîcial de l'évèque.
Des événements de cette crise , causée par l'enlèvement d'une
patache que le duc de Bourgogne avait fait placer à Galloo pour y
percevoir à son profit un droit de tonlieu, nous n'avons pas à nous
occuper, et nous noterons seulement qu'après la réconciliation
de la commune avec le duc Philippe-le-Bon , les bourgmestres ,
échevins et conseillers furent absous par le vicaire-général de
Cambrai. L'acte d'absolution, daté du 3 octobre 1440, est conçu
en termes généraux et sans aucune restriction ; il absout nos ma-
gistrats de tous les méfaits par eux commis' et perpétrés contre la
juridiction ecclésiastique et spirituelle de leur évèque 2.
En quoi et quand cette juridiction avait-elle été méconnue ? —
C'est ce que le diplôme nous laisse ignorer ; mais un mois plus
tard intervint entre la commune d'Anvers et l'évèque de Cambrai,
Jean de Bourgogne, un concordat qui prouve que la question de la
juridiction de l'official avait été agitée et débattue, soit avant, soit
après la levée de l'excommunication encourue par le magistrat.
Cet acte, daté du 4 novembre 14-40, rappelle la stipulation de
* Diplôme du IG avril lil2. D'après la version sommaire que M. Vkiuchtek nous
donne de ce document, d'après une copie insérée au Clemenlyn Boeck, fol. 71, il
semble que ce sursis s'appliquait seulement aux cas d'attentats contre les ecclésiastiques
et d'infraction aux immunités de l'Église. (Voir Inventaire des archives d'Anvers ,
p. 78).
* Voir MEKTE^s et Tokfs, ouvrage cité, aux annexes III, 570.
590
l'ancien concordat, relative au nombre1 des adultères à déférer à
['officiai ; il expose brièvement les arguments produits de part et
d'autre, et nous apprend que les échevins synodaux devaient être
élus par l'évèque ou avec son autorisation, et prêter serment entre
les mains du doyen de la chrétienté. Finalement, il est dit qu'en
vue de conserver la paix et la concorde, il avait été convenu, pour
un terme de cinq années, que l'évèque, le doyen rural ou un dé-
légué du prélat pourrait citer, punir et corriger, en présence des
synodaux, tous les adultères d'Anvers de l'un et de l'autre sexe,
sans aucune distinction , et que s'il était prononcé des amendes ,
deux tiers du produit en reviendraient à l'évèque, à titre d'au-
mône, le tiers restant devant demeurer à la disposition de l'official
et des échevins synodaux 4.
Ainsi fut mis à néant l'accord qui depuis un temps immémorial
avait régi la matière. La commune , au lieu de rentrer dans la
pleine jouissance du privilège qui conférait aux échevins exclusi-
vement la connaissance de toutes les affaires judiciaires, dut céder
au clergé toute une catégorie de délits , celle des infractions à la
foi conjugale , et du même coup on enleva au magistrat le droit
de se faire représenter au Synode par des délégués de son choix ,
afin d'y défendre les privilèges de la. ville.
Ceci nécessite une explication détaillée, d'autant plus qu'elle
nous conduira à rechercher la nature des fonctions des échevins
synodaux et la position respective de la commune et du clergé
dans cette question , avant et après la conclusion du nouveau con-
cordat. Dans ce but , il convient d'abord de bien préciser la
qualification donnée à ces fonctionnaires.
S'il est incontestable (et ceci est bien connu) que le titre
d'échevin fschepen , scabinm), dans son acception primitive ,
1 Le texte de ce diplôme a été publié par Mektens et Torfs, ouv. cité, III,
p. 571. Nous avons néanmoins jugé utile de le reproduire à la lin de cette étude.
— 591 —
désignait un juge, on serait pourtant dans l'erreur, si on voulait
arguer de ce fait pour soutenir que les échevins synodaux sié-
geaient originairement à la cour spirituelle d'Anvers en qualité de
juges. L'article vij de l'ancien code politique distingue en effet
le Seijnt assez nettement des Seyntschepenen, en attribuant à ces
derniers la charge de déférer à la cour spirituelle les 27 couples
accusés d'adultère *.
Nos échevins synodaux du moyen âge étaient officiers de la
commune et indépendants du Synode. Sans avoir dans ce tribunal
la position que des membres de l'échevinage occupaient jadis dans
certains collèges et tribunaux subalternes , ils avaient néanmoins
avec eux cette analogie qu'ils appartenaient également au
magistrat qui gouvernait la cité; en un mot, ils étaient délégués
par leurs collègues avec mission de déférer au Synode les 27 couples
adultères et de veiller à ce que, dans les procédures, il ne fût
commis aucune infraction aux droits et privilèges de la bourgeoisie.
A ce point de vue, il se comprend que nos échevins synodaux
n'étaient pas plus échevins du Synode que leurs collègues ne
l'étaient de la Halle-aux-Draps : de. même que ceux-ci , ils ont dû
tenir leur titre d'échevins de leur qualité de membres ou d'anciens
membres de l'échevinage 2.
Cette explication , que nous croyons la véritable parce qu'elle
est basée sur les coutumes d'Anvers , présente ce double avantage
qu'elle nous donne l'étymologie naturelle du mot Seyntschepen et
' Il importe de faire remarquer que le mot compose Seyntschepenen n'est pas traduit
dans le diplôme par Scabini Synodi , mais par Scabini Synodales ; du reste , il
serait oiseux d'entrer ici dans une dissertation grammaticale pour établir en quoi des
échevins du Synode peuvent différer d'échevins synodaux.
* Les échevins qui siégeaient autrefois au tribunal des drapiers (Lakenhal) , aux
chambres des pupilles, des conciliateurs, des secours contre incendie, etc., étaient ou
membres effectifs du magistrat en fonctions ou anciens membres de ce corps. Leur
mandat n'était que d'une année , mais il pouvait encore être continué par une réélection.
Voir les Coutumes d'Anvers, Chap V, VII et XLIII , et notre Nouvelle Histoire de
la ville, t. Il, eh. V , p. 123.
591
permet de concilier ce titre avec l'interprétation qu'en a donnée
Kilianus. Elle va également nous permettre d'apprécier la portée
du concordat de 144-0.
Nous avons déjà reproduit cotte interprétation lexicographique
qui , au premier abord , semblait inconciliable avec la qualification
d'échevins, mais que nous pouvons maintenant admettre en toute
confiance. Elle nous représente nos échcvins synodaux comme des
syndics, des mandataires de la commune, des avocats, des défen-
seurs du droit public de la cité. De cette définition, on ne peut plus
explicite, on devait naturellement inférer qu'il appartenait au
magistrat d'Anvers de nommer et d'assermenter ses représentants
auprès de la cour spirituelle , et il est probable qu'il en fut ainsi
dans le principe; mais le concordat modifia cet élat de choses.
Par cet acte, en etfet, l'évèque de Cambrai se réserve le droit
de choisir les échevins synodaux , et certes il n'en aurait pas fait
une stipulation formelle, si le magistrat ne lui eût pas disputé ce
droit. Déplus, il est dit que les élus prêteront serment entre
les mains de son délégué, le doyen rural. Celui-ci est investi du
droit de déférence, mais sous l'obligation de n'appliquer les
corrections aux coupables qu'en présence des échevins synodaux,
qui partageront avec lui un tantième du produit éventuel des
amendes encourues '.
Nous voici loin du fameux article vij , et il est permis de pré-
sumer que notre magistrat, placé dans d'autres circonstances,
se serait refusé à signer une convention qui lui enlevait , avec la
1 Cette participation aux amendes paraîtrait à bon droit singulière , si les échevins
synodaux avaient et é les avocats des accusés; mais celle idée, serait contraire à
la lettre et à l'esprit de l'interprétation de Kilianus. On ne peut voir dans celte répartition
des amendes qu'une indemnité de présence d'ailleurs généralement en usage. C'est
ainsi que nos échevins communaux se partageaient jadis entre eux le produit des
amendes de police, jusqu'à ce que Charles-Quint, par son édit du 9 juin 1544 , eût
ordonné que ce revenu serait attribué à la caisse communale. (Voir notre Nieuwe Ge-
schiedeiiis van Anlwerpen f t. II, chap. II, p. 40).
— 593 —
nomination des délégués de la commune, tout contrôle sérieux sur
les décisions du Synode. Mais il avait affaire à forte partie : on ex-
ploitait contre lui la situation tendue et le désir de voir mettre au
plus vite un terme à la mésintelligence enfantée par la question de
la hulke, dont les traces n'étaient pas encore entièrement effacées.
Nos échevins, en adhérant à toutes les conditions posées par Jean
de Bourgogne, ont facilement pu croire qu'ils se ménageaient par
là un moyen de se réconcilier sincèrement avec son frère naturel ,
le bon duc Philippe. D'ailleurs, le concordat n'avait qu'un carac-
tère temporaire; ce n'était qu'un essai ; à l'expiration de la période
quinquennale , on aurait le loisir de le faire modifier ou même d'y
renoncer, quitte à braver de nouveau les foudres de l'Eglise.
Voilà, pensons-nous, ce qu'on a dû se dire à Anvers et ce qui
a pu déterminer la commune à prendre son parti du concordat du
4 novembre 1440. Il est digne de remarque qu'il fut conclu à
une époque où de toutes parts surgissaient des réclamations contre
les empiétements de la juridiction ecclésiastique. En vue d'y faire
droit, Philippe-le-Bon statua, quelques années après, que les cours
spirituelles ne pourraient faire exécuter leurs jugements sans
l'autorisation des magistrats (1447) l. Plus tard, les deux membres
séculiers des Etats de Brabant déclarèrent vouloir résister à ces
empiétements, en accordant aide et protection à ceux qui seraient
injustement poursuivis (i486).
Nous ne savons pas au juste en quelle année le magistrat
d'Anvers , se prévalant de la charte ducale et de la déclaration
des Etats, se trouva en opposition avec l'épiscopat; mais il résulte
' A propos de cette charte, M. Verachter n'a pas remarqué que celles enregistrées
au Primum volumen Privilegiorum , fol. "271, et au recueil Collectanea Privilegio-
rum , fol. 325 , respectivement sous les dates du 3 janvier 1444 et du 3 janvier 1447,
sont, quant à la teneur, la même pièce. Par conséquent, les chartes inscrites par lui
pp. 117 et 124 de son Inventaire, constituent un duplication d'autant plus singulier
que l'analyse qu'il donne de l'une ne concorde pas avec l'antre.
xxix xxn 31
— 594 —
d'actes patents qu'il refusa de reconnaître la compétence illimitée
de la cour spirituelle de Cambrai en matière de testaments, de
contrats matrimoniaux et de biens amortis du clergé. Mal lui en
prit : le corps écbevinal tout entier fut excommunié et la ville
frappée d'interdit par Henri de Berghes , qui occupait alors le
siège de Cambrai. Pour fléchir le prélat, il fallut négocier, sup-
plier, se soumettre et s'engager à laisser exécuter les sentences
synodales rendues dans les affaires relatives aux trois points con-
testés (1-490); moyennant cette condescendance, l'excommunication
et l'interdit furent levés (14-91).
Les deux actes qui mirent un terme à ce conflit ont été publiés
par Diercxsens *. Quoique sans importance pour notre sujet , il
en ressort toutefois ce fait, que la question de la juridiction ecclé-
siastique en matière d'adultère ne s'y trouva pas mêlée. Cette juri-
diction aurait donc continué d'être exercée sans contestation depuis
1440, d'après les conditions stipulées par le concordat de cette
année. Ce qui est certain, c'est que ce concordat avait été renouvelé
avant ou pendant le conflit et qu'il fut successivement prolongé
jusqu'à trois fois. Nous inscrivons ici pour mémoire les dates de
ces quatre renouvellements :
1480, 30 octobre, concordat continué pour 9 années 2.
1491, 13 janvier, . . . 12
1501, 14 novembre, • - » 12
1514, 30 mai, . . 12 .
1 Antverpîa Christo nascens et crescens, t. II, p, 144 et 146. Ces deux pièces sont
en flamand, Tune du 19 septembre 1190 l'autre du 13 janvier 1191. Les archives d'Anvers
possèdent l'original de cette dernière, muni des sceaux de l'évêque et de la ville.
L'original de l'autre , èmanè du magistral, doit se trouver à Cambrai.
s M. VekaChtck (Inventaire, p. 1G0) annotant l'acte de 1480, assigne à la pro-
longation une durée de dôme ans. C'est une erreur dont nous ne nous serions pas
douté, si la version de Paperrochius (Annules Antv., I, p. 403) n'eût éveillé notre
attention. Vérification faite aux archives d'Anvers par le conservateur de ce dépôt,
M. P. Génakb, il a <5lé constaté que le concordat de 1440 fut prolongé en 1480
pour neuf ans
— 595 —
On remarquera sans doute que le laps de temps d'une date à
l'autre ne correspond pas à la durée de la période pour laquelle le
concordat fut prorogé. Le moins que l'on puisse en conclure,
c'est que les renouvellements se faisaient irrégulièrement et qu'on
leur donnait peut-être un effet rétroactif, en comptant à la nouvelle
période le temps écoulé depuis l'expiration du dernier acte.
On était alors au moment de la naissance de la Réforme et on
devine sans peine les conséquences que la négation du principe
d'autorité devait entraîner pour la juridiction ecclésiastique.
Au surplus, les esprits y étaient en quelque sorte préparés,
car depuis longtemps il se manifestait une répulsion qui croissait
et devenait plus vive à mesure des efforts faits d'autre part pour
étendre cette juridiction dans le domaine des affaires purement
civiles. Après la charte de Philippe-le-Bon (14-1-7) et la déclara-
tion de deux membres des Etats de Brabant (1486), dont nous
parlions tout à l'heure, Maximilien d'Autriche (14-80) et Philippe-
le-Beau (1496) avaient à leur tour publié des ordonnances , décla-
rant que les particuliers ne pouvaient être actionnés devant les
cours ecclésiastiques du chef de contestations personnelles , profanes
et civiles, sauf celles spécifiées par lesdites ordonnances *. Ajou-
tons, pour être juste, que l'abus ne procédait pas du clergé seul;
les plaideurs doivent y avoir contribué pour une bonne part,
puisque Charles-Quint, par son édit du 2 décembre 1522, fut
amené à menacer de fortes amendes ceux qui introduisaient devant
les tribunaux ecclésiastiques des affaires essentiellement du ressort
des juges civils 2.
Qu'au fond de tout cela il se soit trouvé une certaine rivalité de
métier, c'est admissible; mais, à Anvers , on n'avait pas attendu si
1 Cf. les Placcaert Boechen van Vlaenderen, I, 4-9, 51, et Diegeiuck, Inventaire
des anliives d'Ypres, IV, 60.
2 Placcaert Boecken , cités, I], 58. M. DiEGEitiCK a donné une analyse complète de
cet édit remarquable, dans son excellent Inventaire des archives d'Ypres, V, 146.
— 596 —
longtemps pour mettre les citoyens en garde contre l'immixtion
illégale du clergé dans des contestations judiciaires. C'est à cette
intervention que fait allusion un article du Coreboeck \ et c'é-
taient des préoccupations du même genre qui avaient provoqué
l'institution des échevins synodaux.
Cette courte esquisse de l'état de l'opinion et de la législation au
commencement du xvie siècle , ne paraîtra pas superflue si on
la rapproche du fait du renouvellement irrégulier du concordat de
144-0. Eu effet,' on peut se demander si cet acte fut encore
renouvelé après l'expiration de la période qui avait pris cours en
1514. Le père Papebrochius penche pour l'affirmative; mais ce
n'est chez lui qu'une présomption qu'il n'appuie d'aucun argument,
et nous devons constater que ni Louis Guicciardin , qui entre dans
tant de détails sur la composition des collèges administratifs et judi-
ciaires d'Anvers, ni le secrétaire-archiviste Henri De Moy, qui a
laissé un traité manuscrit sur les offices de notre ville , ne font
nulle part mention des échevins synodaux. Il convient de dire que
le tribunal de l'oflicialité était une institution purement ecclésias-
tique dont ils avaient d'autant inoins à s'occuper que, depuis le
concordat de 1440, le magistrat n'avait plus d'influence sur la
nomination des représentants de la commune ou de l'élément civil
auprès de ce tribunal.
D'autre part, cependant, il doit paraître singulier que les
Réformés, qui se souciaient des synodes et des cours spirituelles
autant que des tribunaux de l'inquisition , se soient empressés de
consacrer dans le code des coutumes d'Anvers un chapitre tout
entier à une institution rappelant l'ancien tribunal synodal. Était-
ce une réminiscence d'un chapitre semblable qui aurait été inséré
dans les coutumes de 1531 , de 1547 ou de 1570? A cette ques-
i « Art. cliij. Item, wie cuen portre van Antwerpen moyede oi-ht daghede in
» gheesteleken ghedinghe tonrechte dit sal staen na die priuilegien van der
stal « (Mertens en Tours, ouv. cit. Il, 476.)
— 597 —
tion, qui a déjà été soulevée ailleurs, nous regrettons vivement de
ne pouvoir répondre , les recherches que nous avons faites dans
le but de retrouver la trace de ces trois recueils, n'ayant pas
abouti jusqu'à ce jour *.
Nous devons, en conséquence, nous borner à constater que c'est
dans le code connu sous le titre de Coutumes imprimées, élaboré
par les avocats Charles Gabry et Philippe Van Malery (1578),
revu par une commission de jurisconsultes (1580), sanctionné par
le magistrat et imprimé chez Plantin (1582), que c'est dans ce
code, disons-nous, que les synodaux apparaissent pour la première
fois sous la dénomination de syndicaux fSyndicalenJ . Toutefois,
les Réformés conservèrent aussi la dénomination de Seyntsche-
penen, peut-être dans le sens de Senalus syndicâlis , vulgo dépu-
tait, version que Kilianus a donnée de ce composé à côté de celle
rapportée plus haut.
Quoi qu'il en soit , le tribunal des Seyntschepenen , réorganisé
avec des éléments séculiers, se composait de douze membres, dont
deux échevins de l'année , deux anciens échevins, quatre membres
de la bourgeoisie et quatre hommes des métiers. Il se renouvelait
par tiers tous les ans et ses membres, comme ceux des autres tri-
bunaux subalternes, étaient choisis par le magistrat. Il avait connais-
sance , en première instance , de tous les abus et délits en fait
d'adultère, de fornication, de concubinage, de défloration de jeunes
filles et de tout ce qui s'y rattachait. Il avait également connais-
sance des empêchements dirimants en fait de mariage et de toutes
1 Les trois compilations de 1531 , 1547 et 1570 étaient connues dans l'ancien bar-
reau d'Anvers sous les titres respectifs de Guide n Boeck, Consuetudines anliquissimœ el
Consueludines antiques.. Envoyés l'un après l'autre à Bruxelles pour être homologués
au Conseil souverain de Brabant, formalité qui ne fut jamais remplie , ces trois recueils
sont restés en manuscrit. Ce que ces codices sont devenus , nous l'ignorons. Celui du
Gulden Boeck que l'on avait dit exister à la Bibliothèque royale, sous le n° 15,375,
s'est trouvé être un récis'if de coutumes civiles et commerciales, sans aucun rapport avec
l'institution des échevins synodaux , et d'après une information à nous adressée par
M. le conservateur Alvin , le Gulden Boeck est inconnu ou introuvable dans ce dépôt.
— 598
les affaires matrimoniales. Il jugeait sur la citation d'un chef-
homme, à ce commis par le collège échevinal , qui remplissait en
même temps les fonctions d'accusateur des parties et celles d'exé-
cuteur des sentences. Les actes étaient enregistrés par un se-
crétaire ou un greffîer de la ville et les citations étaient intimées
par un officier de la verge-courte. Avant d'entrer en fonctions,
les syndicaux devaient prêter serment entre les mains du magis-
trat, et il semble qu'il leur était alloué une indemnité. Leurs
arrêts , du reste , n'étaient pas souverains , mais pouvaient être
réformés par le haut tribunal des échevins , sur appel d'une des
parties , mais les appelants devaient au préalable verser, à titre de
cautionnement , une somme qui restait acquise à la caisse syndicale,
en cas de rejet du pourvoi.
Tel est le résumé des principaux articles du chapitre X des
liechten en Coslumen de 1582. Ces dispositions, comme on le
voit, s'écartent entièrement de celles du concordat de 4440, qui
avait fait des défenseurs du droit public des suppôts de l'officialité.
Elles constatent un retour vers l'article vij de l'ancien code
politique , moins l'élément clérical, dont la Réforme déclinait toute
compétence dans les affaires civiles. Ne pourrait-on inférer de là
que si les compilations de 1531, 1547 et 1570 renfermaient un
chapitre relatif aux synodaux , ce n'est pas à ces sources que les
rédacteurs du code de 1582 seraient allés emprunter l'organisation
du tribunal des syndicaux ?
On peut se demander aussi si cette institution n'était pas un rouage
inutile; car si l'on peut dire que l'instance à deux degrés offrait une
garantie pour les parties plaidantes, cette garantie était amoindrie
par l'article 3 , portant que les bourgmestres et échevins avaient
également connaissance en première instance de toutes les affaires
de la compétence du tribunal syndical qui auraient été instruites
à la diligence de l'écoutètc , et qu'ils pouvaient les retenir à leur
gré , s'il ne leur convenait pas de les déférer au susdit tribunal ,
— 599 -
dont la juridiction s'étendait sur la ville et sur le marquisat d'Anvers.
Au surplus, il serait inutile de nous étendre davantage sur celle
institution , car il y a lieu de douter qu'elle ait jamais fonctionné.
Le fait est qu'aux archives communales d'Anvers, il n'existe pas de
trace de registres ou de dossiers provenant du tribunal des syndi-
caux, pas plus que des actes de leurs devanciers les synodaux.
Voyons comment les uns avortèrent et les autres disparurent au
milieu de la tourmente excitée par les troubles de religion.
On connait la vive opposition que rencontra la création de nou-
veaux évéchés aux Pays-Bas (1559). Nulle part celte opposition
ne fut plus violente qu'à Anvers , où la Réforme comptait de
nombreux prosélytes. La bulle concernant l'érection et la cir-
conscription de cet évêché est du 11 mars 1561 et elle ne put être
exécutée que neuf ans après , par l'installation du docteur François
Sonnius (1570). Naturellement, les évèques de Cambrai et de
Liège conservèrent pendant tout ce temps l'administration spiri-
tuelle sur les territoires désignés pour constituer le nouveau
diocèse, et par conséquent la jurisprudence suivie à l'égard des
adultères a dû continuer d'être observée , bien entendu dans
l'hypothèse du renouvellement périodique du concordat de 1440.
En devenant le siège d'un évêché, Anvers devait aussi voir s'éri-
ger une cour épiscopale; mais on cherche vainement quelque ren-
seignement à ce sujet dans la bulle de 1561. Ce détail était aban-
donné à l'évèque, qui allait succéder aux droits et aux prérogatives
jusqu'alors possédés par l'ordinaire de Cambrai. Or, comme celui-
ci n'avait aucune juridiction sur le chapitre de Notre-Dame qui ,
en vertu d'un antique privilège , relevait directement du Saint-
Siège et avait sa cour spirituelle particulière à côté de celle de
l'official de Cambrai, il en résulta un conflit qui n'était pas encore
aplani à la mort de Sonnius (1576) l.
1 II résulte d'une bulle de Léon X (15v2i) et d'une charte de Charles-Quint (1 522
«lue lu chapitre d'Anvers avait anciennement juridiction civile et criminelle sur les
— 600 —
Ce conflit du reste n'a pu suspendre le cours de la justice ec-
clésiastique. Divers faits rapportés dans la Petite Chronique
d'Anvers autorisent au contraire à croire que cette justice conti-
nuait à fonctionner. C'est ainsi que nous voyons d'abord le chanoine
François Doncker poursuivre les personnes décédées sans sacre-
ments, dont il faisait exhumer les cadavres, pour les faire trans-
porter au champ du gibet (GalgeveldJ ; et d'autres part deux indivi-
dus, accusés de complicité dans l'assassinat perpétré sur le curé et
le chapelain de Berchem , incarcérés , non à la prison civile du
Steen, mais à la tour des Boulangers (BakkerstorenJ , c'est-à-dire
à la geôle de la cour spirituelle *.
Après les événements qui livrèrent Anvers aux États et l'adminis-
tration aux mains des Réformés (1577), l'exercice de toute juridic-
tion ecclésiastique se trouva naturellement interrompu et lorsque
la ville rentra sous la domination du roi d'Espagne (1585), trois
années à peine s'étaient écoulées depuis la promulgation du code
des Rechten en Costumen. En admettant que pendant cette courte
période , signalée d'ailleurs par des crises diverses et un long
bénéficiera, chapelains et suppôts de l'église de N-D.; mais que pour l'exécution des
sentences , il devait recourir au juge séculier. Ce privilège, qui rendait le chapitre indé-
pendant de l'évêque de Cambrai et que ce collège prétendait maintenir contre L'évêque
d'Anvers, fut cassé et annulé par Grégoire XIV (1591). Cfr. Diercxsens, Antverpia, III,
269 -277 ; IV, 214 ; VU, 231-265 , et De Ram , Synopsis actorum Ecdesiœ Antver-
piensis , p. 30.
1 L'exécution de ces deux criminels eut lieu le 30 juin 1571 avec un appareil inusité
et des tortures atroces, qui paraissent avoir été motivées par le caractère du crime, un
double homicide sacrilège, et par la qualité des deux misérables, affiliés aux brigands
dits Gueux des Dois. Les condamnés, complètement nus et placés dus à dos dans la
charrette de la justice, furent conduits au lieu du supplice par un long détour dans la
ville. Dans le cortège, précédé d'un trompette, on remarquait M Boulez, alcade de la
garnison espagnole, M. Van Immerseel, écoutôte d'Anvers et la verge-rouge de Brabanf,
le fameux Spelleken, avec les principaux officiers de la justice, tous à cheval. Le
bourreau de Bruxelles assistait son compère d'Anvers. Après avoir été, à sept ou huit
carrefours, pinces de tenailles ardentes , de façon que des lambeaux de chair leur pen-
daient de tous côtés, les patients furent menés devant le presbytère de Berchem, où le
bourreau coupa au plus jeune le poing droit , el ensuite au Galgeveld, où tous les deux
furent brûlés vifs. (Anlw. Chronyhje , 1713, p. 230-231).
— 601 —
siège, on ait songé à organiser le tribunal des syndicaux, il est
douteux que celui-ci ait pu fonctionner. Ce qui est certain , c'est
qu'après la reddition d'Anvers , on n'entend plus parler ni des
syndicaux, ni des synodaux. Le silence de Henri De Moy à ce
sujet nous parait surtout significatif; on peut en inférer que les
uns et les autres avaient fait leur temps, du moins comme institu-
tions communales !.
Nous n'avons pu nous assurer si le chanoine François Doncker,
cité ci-dessus, agissait en qualité d'official en titre, et ce n'est
qu'après que le chapitre fut revenu de l'exil et eût institué un
vicariat-général sede vacante (oct. 4585), que nous rencontrons les
premières traces certaines de l'officialité qui devait désormais rem-
placer celle de l'évêque de Cambrai. Ce fut à l'archiprètre Simon
Moors que furent confiées les fonctions d'official2. Comme déraison,
les délits d'adultère, etc., restaient de la compétence de la nouvelle
officialité , ainsi qu'on peut le voir par un décret de l'évêque Jean
M ira eus du 12 janvier 1606, ordonnant de dénoncer à l'officialité
certaines personnesqui, n'étantque fiancées, vivaient maritalement3.
Cetle juridiction , du reste, en tant que dérivée du droit cano-
nique, ne semble pas avoir été contestée; mais, comme contraire
au droit coulumier de la ville, elle parait avoir soulevé des récla-
mations dont nous devons prendre acte en les résumant brièvement.
Après le refus du Conseil de Brabant d'homologuer les Cou-
tumes de 1522, le magistrat d'Anvers fit rédiger en 1608 un
nouveau code connu sous le nom de Coutumes compilées ,
amalgame de vieux et de neuf, qui provoqua des critiques acerbes
' L'archiviste Henri De Moy , qui avait élé secrétaire de la commission de révision
des Coutumes de 1582, ne vint à décéder qu'en 1610. Il savait donc parfaitement ce
que ces coutumes, ainsi que celles de 1570 et de 1608, contenaient relativement aux
synodaux et aux syndicaux. Cependant, comme nous l'avons déjà dit, dans son traité
des offices , il ne parle ni des uns ni des autres.
2 De Ram, Synopsis aclorum Ecclesiœ Antv. pp. 33 et 154.
5 De Ram, opus citât., p. 48.
— 602 —
de la part de Van Huffel. Dans un mémoire qu'il adressa à ce
sujet au collège échevinal, le U août 1610, il signale cette com-
pilation comme « étant en grande partie un tas de droits ima-
• ginaires, nouvellement inventés et fabriqués par des individus
• qui ne s'étaient fait aucun scrupule non seulement de changer
» entièrement les termes des coutumes de 1570 et de 1582,
» mais qui avaient en outre eu l'audace d'y intercaler de leur
• autorité privée une foule de nouvelles dispositions *. «
Or , parmi les nouveautés insérées dans cette compilation de
1608, se trouve un chapitre X qui remplaçait le chapitre corres-
pondant du code de 1582 traitant des syndicaux. Mais ce nouveau
chapitre ne serait-il pas la reproduction ou un remaniement d'un
chapitre analogue des coutumes de 1570? C'est ce qu'il est im-
possible de décider. Quoi qu'il en soit, le nouveau chapitre traite
« De divers autres juges dans la ville d'Anvers, » et le premier
article porte : « Dans cette ville ont aussi leur juridiction , en
• premier lieu , mon révérend seigneur l'Evèque et son Officiai ,
» en causes relevant de sa compétence , ce que l'on nomme la
■ cour spirituelle 2. »
Chose bizarre! les coutumes de 1608, comme toutes les précé-
dentes, ne furent pas homologuées ; mais de même que celles de
1582, que le barreau d'Anvers invoquait comme légales , le cha-
pitre X de la compilation de 1608 pouvait être considéré comme
tacitement légalisé.
Une cour spirituelle existait donc de droit et de fait à Anvers ;
elle fonctionnait régulièrement , publiquement ; ses premiers sta-
tuts, rédigés par Liévin Torrcntius , avaient été publiés le 26 août
1 Iîeileneii lot handhoudinge van de costumai dersladl legen aile nieuwiijheden.
Cité par Mertens el Torfs, Gesch. van Anlw., V, 515.
4 Van verscheijden anderen rechteren der stadt. Art. !. Binnen d«sn stadt hebben
omk liun gereclil , ici st myn Eerwcerdich Hecrw den Bisscliop ende syrien Oflkiai'l in
sakeii t'synder kenuisse staende , bel welck is I tendu lie! geeslèlyck Hoff
— 603 —
1594, après la mort de ce prélat1 . Jean Malderus , un de ses
successeurs , conformément à ce qui avait été arrêté dans les con-
férences des évêques belles tenues à Malines (1017), fit paraître
un manuel pour la procédure à suivre devant les cours épiscopales,
en attendant que le métropolitain de Malines eût pu éditer quelque
chose de plus complet 2.
Dans les conférences dont il s'agit ici , les évêques de nos pro-
vinces flamandes avaient élaboré le projet des statuts des cours
ecclésiastiques de ces provinces, comprenant alors l'archevêché de
Malines, les évêchés d'Anvers , de Bois-le-Duc , de Gand , de
Bruges , d'Ypres et de Rurcmonde (12 oct. 1017). La révision
de ce projet traîna en longueur, et ce ne fut que sept ans après,
que la rédaction définitive en fut adoptée dans une assemblée des,
prélats, tenue à Bruxelles (15 oct. 1024). Ces statuts parurent
l'année suivante à Malines, en un volume in-4°.
A cette époque , les cours ecclésiastiques avaient beaucoup perdu
de leur ancienne importance. Leur personnel et leur juridiction
avaient été également réduits. Jadis une cour spirituelle avait un
nombre de suppôts si considérable , qu'on l'estimait suffisant pour
repeupler partiellement une ville en décadence 3. Mais après la
* Slalula curiœ, episcopalis Antverpiensis. Le savant chanoine Gasparoli, d'Anvers,
possédait le ms. authentique de ces statuts, qui n'ont pas été imprimés. Une copie en
existe à la Bibliothèque royale à Bruxelles. (Dr Ram , Synopsis , p. 39.)
* Cette publication était accompagnée d'un mandement en date du 12 mars de la
même année. Voici le titre du manuel : Modus procedendi in curiâ ecclesiastieâ , Antv.
H. Verdussen, 1619, in-12°. (Cf. PaQUot , Mémoires, I, 7, édit. in-f°). — Comme
se rapportant au même sujet et ne sortant pas du cercle de l'oflicialité d'Anvers, nous
inscriions ici la curiosité bibliographique suivante : Praclica criminalts canomca in
qua omnia flagitia quœ a devis commitli possunt , authoreB. Diai> de Luco , Antv.,
Bellerus, 15f>3, in- 12°.
3 C'était l'idée des magistrats d'Ypres, lorsqu'ils demandèrent que la cour spirituelle
de Thérouanne fût transférée en leur ville. Chailes-Quint y consentit et donna des ordres
en conséquence (1522). Par l'accord relatif à l'exemption des accises en faveur des sup-
pôts de ladite cour, nous voyons que celle-ci se composait de l'oflîcial, ses vicaires et se-
crétaires, d'un scelleur et d'un receveur, d'un nombre non indiqué de promoteurs , de
massiers , de procureurs et d'avocats. De ces deux dernières classes de praticiens, douze
- 604 —
célèbre ordonnance de Charles-Quint du 2 décembre 1522, ten-
dant à restreindre la concurrence qu'elles faisaient aux tribunaux
civils , d'autres édits avaient successivement enlevé à ces cours di-
verses attributions. C'est ainsi qu'elles ne pouvaient plus prendre
connaissance de procès concernant des dîmes novales (1520). Il leur
avait été interdit de lancer des censures ou des excommunications
contre les juges civils (1531). Si les offieiaux se croyaient lésés
par quelque décision de ceux-ci, ils devaient s'adresser à l'autorité
supérieure par voie de requête (1540). Ils devaient procéder de la
même manière pour réclamer les criminels assujettis à leur juridic-
tion (1570). Cette juridiction s'étendait sur tous les ecclésiastiques
tonsurés , les étudiants des universités et des séminaires, ainsi que
sur les individus qui avaient transgressé certains commandements de
l'Église, notamment celui relatif à l'observance des dimanches et
jours de fête (1587); mais quant à ce dernier point, les archi-
ducs avaient décidé que les tribunaux spirituels n'avaient rien à
voir dans les permissions délivrées par l'autorité civile pour tra-
vailler pendant les jours non ouvrables (1607) !.
Nous ne faisons que résumer rapidement quelques-unes des
restrictions apportées au xvie siècle à l'exercice de la juridiction
ecclésiastique, jadis assez puissante pour faire fléchir le pouvoir
civil devant ses analhèmes. Il était déjà loin le temps où sous
prétexte d'infraction, l'official lançait l'excommunication contre tout
un corps de magistrats , lui infligeait des amendes honorables et
pécuniaires, lui imposait des messes et des pèlerinages et l'abreu-
vait d'humiliations"2. Le clergé belge lui-même avait compris que
au moins devaient être répulés suppôts de la cour , aussi bien que les procureurs des
âmes (?) et par suite jouir de l'immunité. Malgré cet accord et quoique approuvé par
l'empereur et le pape, le transfert.de la cour de Thérouanne éprouva de nombreux obsta-
cles avant qu'il pftt s'effectuer. (Cfr. Diegeiuck, Inventaire des archives d'Ypres,
V. 138-11, 153-56 , 179-81 et 259).
1 Placcarts de Flandre, Index général, p. 197-99. — Ibid. de Brabant, passim.
" Ces désagréments arrivèrent en 1373 au magistral deMalines; mais il est vrai que
— 605 —
ces temps n'étaient plus ; on en trouve la preuve dans les actes du
concile provincial de Malines , recommandant aux juges ecclésias-
tiques de procéder avec mansuétude et modération dans l'applica-
tion des amendes et de conduire les procédures avec le moins de
frais possibles (1586).
Ainsi désarmées vis-à-vis du pouvoir civil et contestées dans
leurs attributions judiciaires à l'égard des particuliers, les cours
spirituelles nous apparaissent au commencement du xvne siècle
dépouillées en grande partie du prestige mystérieux et effrayant qui
les entourait autrefois.
D'après les statuts de 1624, les cours épiscopales devaient se
composer de l'oflicial ou juge-président, d'un scelleur (sigillifer,
segelaerj, d'un avocat fiscal, d'un promoteur, d'un greffier, de
commissaires-assesseurs, d'huissiers appelés appariteurs et du
geôlier de la prison ecclésiastique. Nous ne comptons pas les avocats,
les procureurs, qui, pour être admis à instrumenter devant la
cour , étaient tenus d'avoir le grade de docteur ou au moins celui
de licencié en droit civil et en droit canon.
Vers la fin du xvme siècle, celte organisation n'avait guère
l'infraction était grave. 11 s'était permis de chasser et de bannir de la ville le doyen de
Saint-Rombaut, deux curés et cinq ou six clercs. L'excommunication lancée par l'official
de Cambrai ayant été annulée par la cour épiscopale de Reims , l'évêque Gérard de
Dainville se pourvut en appel à Rome, et le pape commit cette affaire à son légat, l'évêque
de Sabine. Ce prélat donna tort au magistrat et le condamna à rétracter publiquement
sa sentence de bannissement; à réinstaller honorablement dans leurs maisons le doyen et
les deux curés ; en leur demandant très-humblement pardon ; à leur payer ainsi qu'à
l'évêque de Cambrai, une forte indemnité pécuniaire. Moyennant toutes ces conditions
l'excommunication et l'interdit devaient être levés ; mais en retour de cette faveur le
magistrat devait encore faire célébrer 50 messes hautes et 50 messes basses et y assister.
Notons encore que la cour spirituelle ne s'étant pas fait représenter par un délégué
à la rétractation publique , faite, à portes ouvertes à l'hôtel de ville de Malines , le
magistrat se vit obligé d'envoyer une députation à Cambrai pour y faire amende hono-
rable devant la cour. Quant aux clercs , accusés de certain méfait non spécifié , leur
affaire fut remise aux juges ecclésiastiques. Diverses pièces de ce curieux procès
ont été analysées avec soin parM. Van Doren, Inventaire des archives de Malines,
I, 63-71.
— 606 —
varié, comme on peut le voir dans les Mémoires de Ncny , qui
ajoute : « On peut se pourvoir devant les juges royaux , à titre
• d'oppression , contre les procédures et les sentences des tribu-
» naux ecclésiastiques , toutes les fois que les juges de ces tribu-
> naux contreviennent directement aux lois de l'État , ou qu'ils
» procèdent non servato juris online *. •
Les attributions de l'oflîcial étaient aussi étendues qu'impor-
tantes. Les assesseurs ou conseillers qui l'assistaient étaient choisis
par lui , et Neny, en employant le mot ordinairement, semble
donner à entendre que cette assistance n'était pas obligatoire. La
nomination des appariteurs ou huissiers et celle du geôlier était
également à la discrétion de l'oflicial , entre les mains duquel les
avocats et les procureurs devaient prêter serment, avant d'être
admis à plaider devant la cour.
Dans tout cela, on n'aperçoit pas ombre de nos ci-devant syno-
daux, non plus que dans les quelques actes ou procédures de la cour
épiscopale d'Anvers que l'on a pu nous communiquer. Ces actes
ont rapport à d'autres délits que ceux déférés à l'ancienne cour
synodale statuant en présence des délégués de la commune.
Nous en sommes donc réduit à des conjectures quant à la
jurisprudence suivie à l'égard des adultères publics, c'est-à-dire de
personnes non mariées habitant notoirement ensemble "2. Cependant,
à en juger par ce qui se passait ailleurs, on est porté à croire que
ces délinquants continuaient à être déférés à la juridiction de la
* Neny, Mémoires historiques et politiques, Brux. 1785, p. 287. Ceci était con-
forme à l'édit perpétuel de 1611. Cfr. à ce sujet un travail de M. X. Lelièvre sur
la juridiction ecclésiastique au comté de Namur, et inséré dans les Annales de la
Société archéologique de Namur, t. Vil , p. 50.
s L'article 7 du chap. XX des Hechlen en Costumen nous semble devoir être inter-
prété dans ce sens : « Item, dit cet article, les personnes trouvées coupables d'adultéré,
» sans toutefois cobabiter publiquement ou tenir ménage ensemble, encourront pour la
» première fois une amende de 24, pour la deuxième fois une de 18 et pour la troisième
» fois une de 72 florins carolus , indépendamment d'autres peines arbitraires. »
— G07 —
cour spirituelle , pour autant toutefois que cette juridiction ne fût
pas en opposition avec les coutumes locales.
En effet, il appert de quelques jugements, rapportés par
M. Gannaert, qu'au xvme siècle les oiïîeialilés de Matines et
de Gand continuaient à évoquer devant leur tribunal les individus
accusés d'adultère public et à les condamner, s'ils étaient trouvés
coupables. Les peines consistaient en amendes honorables à l'église
ou devant la cour, en prières et pratiques de dévotion, en empri-
sonnement au pain et à l'eau et même en bannissement à terme
hors du diocèse f.
Au témoignage du président Neny , les cours ecclésiastiques
fonctionnaient encore sur tous les points du pays , à l'époque où
il rédigeait ses Mémoires (1780). Fortement ébranlées par les
édits de Joseph II, mais non abattues, ces institutions ne dispa-
rurent que sous le nivellement universel opéré par la République.
En terminant ici notre travail , nous avions l'intention de donner
la série chronologique des officiaux de l'évêché d'Anvers; mais
nous en avons été empêché par les lacunes que présentent les
notes que nous avons pu recueillir. Nous nous bornerons donc à
quelques données générales.
En confrontant ces notes avec la liste des archiprètres 2, nous
avons pu nous assurer que beaucoup de ces dignitaires ont cumulé
la charge d'official avec leurs fonctions archipresbytérales, et que
presque tous ont été des licenciés en droit civil et en droit canon. Les
* Cannaekt, liydragen, etc. aux annexes, p. 413 sqq. Ces affaires se rapportent toutes
à la première moitié du xvme siècle et les inculpés étaient des individus des deux sexes
du plat pays.
* Publiéi! par feu Mgr. De Ram, Synopsis, p. i 54. C'est la liste des archiprètres de
la ville, qu'il faut distinguer des archiprètres du district. Ces derniers continuaient la
série des anciens doyens ruraux {landdekens) ; et parmi ceux qui furent revêtus de cette
dignité , nous trouvons le chanoine Jean-Louis de Cahvajal, In dislrictu Antverpiensi
christianatis decanus t 1729 , auquel on doit une importante fondation en faveur
des pauvres d'Anvers. (Voir son épitaphe Inscrip. fun. et monum. de la province
d'Anvers, I, 108.)
— 608 —
termes dont nous nous servons indiquent qu'à cet égard il n'exis-
tait pas de règle absolue. En effet, nos notules donnent le titre
d'offlcial à trois chanoines de Notre-Dame qui ne furent jamais
archiprêlres ' , et le premier qui occupa celte dernière dignité ,
Simon Moors , ne fut que licencié en théologie.
D'après ces considérations , nous aurions eu bien des chances
de nous tromper en dressant une liste chronologique des ofïîciaux
calquée sur celle des arehiprètres en nous basant sur le grade de
licencié es droits. En attendant que de nouvelles recherches nous
permettent de dresser une liste authentique de nos hauts-juges
ecclésiastiques , nous nous contenterons de signaler parmi ceux qui
ont rempli cette charge, le savant Jean Gevartius (*j* 1613),
le célèbre François Zypeus (f 1650) , le docte Paul Van
Halmale (j 1711) et Fraxçois-Antoine-Étienne Bruynincx
(■|*1791), lequel légua tous ses biens aux pauvres de la ville
d'Anvers.
1 Jean Gevartius, François Zypeus et François-Godefroid Ullens.
609 —
ANNEXES.
Concordat conclu le 4 novembre iMO entre Jean de Bourgogne , évéque de
Cambrai, et le magistrat de la ville d'Anvers, concernant les personnes coha-
bitant en adultère.
Vniiiersis présentes litteras inspecturis Iohannes de Burgundia , Dei gratia,
Episcopus Cameracensis , Necnoii Burgimagistri, Scabini et Consules opidi
Antwerpiensis, Cameracensis diocesis Salutem in domino. Notum facimus ,
quod, cum lis orta foret, aut saltem oriri speraretnr inter nos Episcopum
Cameracensem , ex vna , et nos Burgimagistros , Scabinos et Consules dicti
opidi Antwerpiensis, ex altéra partibus , occasione et ad causam punitionis et
correclionis adulterorum et adulteriorum per personas vtriusque sexus in prefato
opidi commissorum et perpetratorum, nobis episcopo dicente punitionem et cor-
rectionem eorumdem , vtpote terminum ecelesiasticorum et ad forum et examen
ecclesiasticum spectantiurn et pertinentium taliumque delinquentium ad Curiani
nostram Cameracensem , vel alibi in nostra diocesi citandorum ac pro punitions
et correctione eorumdem tociens quoeiens opus videretur euoeandorum auctori-
tatem et facultatem ad nos, dicti loci ordinarium um ac olïicialem nostrum
Cameracensem de iure communi spectasse et perlinuisse, ac spectare et per-
tinere debere : nobis vero Burgimagistris Consulibus et Scabinis econtra
asserentibus quod de vsu et consuetudine a tali tantoque tempore, de cuius
iuitio seu contrario hominum memoria non existit, introdeutis et pro iure
observatis ad Scabinos Synodales per nos aut de auctoritate nostra electos et
assumpos , ac in manu decani Christianitatis loci iuratos , eorumdem adul-
terorum delationem pertinere, nec quoscumque extra muros opidi prelibati
pro premissis trahi ; sed nec aliquos vitra numerum viginti septem parium
per prefatos Scabinos Synodales dumtaxat deferendos, per nos Episcopum
aut ofticiales nostros quoslibet punire posse seu debere. Tandem temporum
indisposilione viarumque distermibus (?) ac certis aliis merito pensandis attente
consideratis, maturaque deliberatione prehabita pro bono pacis et concordie inter
610
nos nutriende el conseruande tractatum amicabilem desuper iniuimus quinquennio
a die date presentium inchoando duraturum , in hnnc modum : videlicet, quod
nos Episcopus prelibatus seu decanus Christianitatis loci vel alius a nobis super
hoc deputandus vtemur libère dicto durante quinquennio, auctoritatc et
facultate animaduertendi in omnes et singulos adulteros seu in adulterio mani-
feste deprehensos vtriusque sexus in dicto opido Antwerpiensi résidentes vnde-
eumque nobis aut depulato seu deputaiido predicto deferendos , ac eos ibidem
puniendos et corrigendos in presencia scabinorum synodalium iuxla forma solita
electorum et iuratorum, ad premissa per nos vel decanum predictum aut aliuni
commissarium nostrum euocandorum tociens quociens visum fuerit expedire.
Et si fortassis contingat punitionem et correctionem huiusmodi adulteriuni
commitentium in emendam pecuniariam conuerti , quod huiusmodi emenda
pro duabus partibus nobis episcopo ad opus elemosine nostre veniet applicanda.
Et de reliqua tercia parte Decanus aut commissarius nostre ac Scabini Syno-
dales supradicti disponere poterunt ad sue libitum voluntalis. Absque tamen
acquisitione sev preiudicio iuris in petitorio aut possessorio , tam nostri
Episcopi prelehati ac successorum nostroruin quam nostrum prefatorum Burgi-
magistrorum , Scabinorum et Consulurn, et successorum nostrorum pro tempore
existentium. In cuius rei testimonium présentes litteras nostri Episcopi ac
opfiîi Antwerpiensis prefati ad causas fecimus sigillorum appensionem com-
muniri. Datum et actum anno domini millesimo quadringentesimo , quadrage-
simo, die quarfa mensis nouembris in Bruxella.
Copie du temps au Grand Livre des privilèges
de la ville d'Anvers , fis 19 et 272.
LE BAKKERSTOREN.
Ce donjon , un des principaux de l'ancienne enceinte d'Anvers et que l'on voit
représenté dans toutes les vues du port antérieures au xixe siècle , indique par
sa position sur la contrescarpe du fossé de la première enceinte urbaine, qu'il a
tlù faire partie du système île défense établi à la suite du premier agrandisse-
ment (1201-1214). Il existait donc avant l'année 1304, que quelques écrivains
lui assignent comme date d'une reconstruction totale coïncidant avec les travaux
ellcctués pour le troisième agrandissement de la ville. Quoi qu'il en soit, leBak-
kerstoren, placé en avant de l'ex-pont à l'Ail, doit être considéré comme le point
de départ de la ligné de fortifications qui s'étendait le long du lleuvc, entre le
cinal au Beurre et le canal Saint-Jean, et sur laquelle se trouvaient établies trois
— 611 —
autres tours , mais de moindre dimension que celle dont nous nous occupons
dans cette note et dont la destination primitive a dû être de proléger rentrée du
fossé de la première enceinte.
Mais serait-il vrai, comme quelques-uns le prétendent, que la corporation des
boulangers aurait contribué pour la majeure partie, sinon pour la totalité, dans
les frais de cette massive construction , qui en aurait conservé le nom de Bak-
kerstoren? 11 est permis d'en douter, aucune preuve n'ayant été produite jusqu'ici
à l'appui de cette assertion. — Il en est de même de l'opinion que le nom serait
dérivé des briques (baksteenen) qui auraient été spécialement employées à celle
bâtisse, ce qui est une pure supposition.
A côté de ces deux hypothèses, il y en a une troisième, d'après laquelle bakker
(boulanger) serait tout simplement une corruption de baken (fanal ou fanaux) ,
et cette conjecture, quoique peu accréditée parmi les érudits d'Anvers, ne nous
paraît pas sans quelque apparence de fondement.
En effet, dans la vue de la ville de l'an 1500 ou environ, publiée dans la
Topographie d'Anvers de 1828, on remarque sur le pont, au pied du donjon, un
objet qui a toute la forme d'une gigantesque lanterne ou fanal. Or, ce pont,
autrefois et avant le voûtement du canal au Beurre connu sous les noms de
pont aux Pommes (Appel bru (/} et de pont à l'Ail (Lookbrug), s'appelait en 1424
pont des Veilleurs (Wakersbrurj). Il y eut donc là anciennement un poste de
nuit, et qu'y aurait-il d'étonnant à ce qu'il s'y trouvât également une lanterne "? Mais
aussi quoi de plus ordinaire que de voir un nom rationnel se transformer
dans la bouche du peuple en sobriquet. Entre Bakkersloren et Bakensloren il n'y
a qu'une différence de deux lettres , et puis , le voisinage de la tour des Pois-
sonniers (Yischverkooperstoren) a pu contribuer à la corruption du nom.
Malgré ces considérations plus ou moins spécieuses , nous sommes obligé
d'avouer que dans tous les documents qui nous ont passé par les mains, nous
n'avons trouvé nulle mention d'un Bakensloren. Dans le procès-verbal du relevé
des foyers de 1490, le nom de notre donjon se trouve écrit Backers torre. Partout
ailleurs c'est Backers- ou Bakkersloren, dénomination à laquelle nous avons dû
nous rallier, comme étant justifiée par l'usage.
Sous le rapport architectonique, cet édifice ne présentait rien de bien caracté-
ristique , sinon comme spécimen d'une cinquantaine d'autres tours qui couron-
naient l'enceinte de la ville d'Anvers au commencement du xvie siècle. Seulement,
ainsi que nous l'avons dit, ses dimensions étaient bien plus fortes. C'était une tour
de forme ronde, élevée de deux étages, percé chacun d'une rangée circulaire
de petites fenêtres carrées. Le bâtiment était surmonté d'un pignon en ardoises,
bordé d'une corniche et percé de deux ou trois lucarnes. Par suite de sa position
sur la plage, dite le Sablon, [la. base du donjon baignait dans l'Escaut et le rez-de-
chaussée était si bas, que les fenêtres de cette partie de l'édifice avaient tout
l'aspect de soupiraux de cave: aussi lors des grandes crues du fleuve, la salle
basse a dû être exposée à l'envahissement des eaux.
- 612 —
Du reste , nous ne savons rien de précis quant à la distribution intérieure ;
mais à l'extérieur on cherche en vain quelque trace d'une -cheminée, signe
certain d'une civilisation plus rapprochée de notre temps que celle du xiv° siècle.
Que le dessinateur ait oublié ce détail , ou que le tuyau se trouvât de l'autre côté
du pignon, nous estimons que la vue d'Anvers citée ci-dessus nous représente
le donjon dans son aspect primitif.
Bien que nous avions signalé le Bakkerstoren comme la prison de la cour
spirituelle, il n'était pas exclusivement affecté aux délinquants justiciables de celle
cour : on y enfermait aussi des prisonniers d'autres catégories, qu'on ne pouvait
loger à la prison civile du Stecn , soit par défaut de place , soit parceqn'on
voulait les traiter avec certains égards.
C'est ainsi qu'en 1477 les métiers mutinés y colloquèrent tous les écbevius
qu'ils avaient pu arrêter. (Bertryn, Chronyke, ad A"1). Pendant les troubles du
XVie siècle, la tour servit de prison militaire à la garnison espagnole (1571) el
aux .Malcontents qui tombaient entre les mains des troupes des États (1580;.
Dans la soirée du 29 mars 1582, huit de ces derniers parvinrent à s'évader dans
une nacelle, sans doute en se glissant par les soupiraux de la salle basse (Wii-
i.k.ms, Mengelingen, p. 157).
Au Bakkerstoren se rattachent, aussi quelques souvenirs de la garde bourgeoise
du xvite siècle. Le règlement de 1G23, pour le service de cette garde, porte qu'on
v confinera les individus arrêtés par les rondes de nuit et trouvés porteurs d'une
rapière ou d'un poignard. Le même logement était promis aux sentinelles qui se
seraient endormies à leur poste ou qui se seraient laissé enlever leur arme
à leur insu et seraient hors d'élat de payer l'amende. (Ordonnance du magistrat
du 19 avril Km, art. 25 et 15).
Voilà tout ce que la chronique nous raconte sur le Bakkerstoren, que la Répu-
blique incorpora sans façon avec les autres fortifications aux domaines nationaux.
A cette époque, le bâtiment , faute d'entretien, était dans un état fort délabré, ci
la démolition des ouvrages le long du fleuve ayant été décidées en vue d'établir
les quais actuels, le vieux donjon se trouva naturellement voué au marteau démo-
lisseur (1797). Ce fut le premier pas fait pour l'ouverture de la belle et spacieuse
communication qui conduit du quai Van Dyck vers l'intérieur de la ville. Cetle
importante amélioration de la voirie n'a pu toutefois se réaliser que bien longtemps
après. Pendant plus de trente ans, on ne vit là qu'un amas informe de ruines el
de masures, jusqu'à ce que la ville, ayant acquis deux vieilles propriétés sises
sur le pont à l'Ail , il put cire procédé au voùlemenl et au pavage du canal au
Beurre (1833). Ainsi disparurent les derniers vestiges de la prison de la cour
spirituelle d'Anvers.
TVIILE DES MATIERES.
PAGE.
Les catacombes de Rome , par M. Edjio.nd Reusens , 5
Histoire et, archéologie , par M H. Schuermans . . 42
La grande commanderie de l'ordre Teutonique de Vieux-Joncs , par M. Arnaud
Schaepkens 55
Une ancienne collection de numismatique et d'antiquités, par feu M. Albert Toilligz 7 1
Le château du diable à Quaregnon , par M. Léopold Devillers 87
Trésors historiques en Angleterre , par M. Jacques Felsenhart 95
De l'état actuel des études égyptiennes, par M. F. Dauky 101
Lus canons de Bouvignes du Musée royal d'antiquités, d'armures el d'artillerie de
Bruxelles, par M. P. Hknrard 128
La basilique de St-Willibrord à Echlernach (Grand-Duché de Luxembourg), par
M. A. Namur 136
Koningsfeest van bertog Jan IV, door M. Lodewijk Torfs 153
L'église de Notre-Dame à Tnngres , par M. Cil. -M. -T. Tnvs 160
Les mercenaires dits brabançons, par M. P. Hëïvrard '. 4-16
Renseignements concernant, l'amie d'Antoine Van Dyck , par M. L. Galesloot. 436
La châsse de saint Remarie à Stavelot, par M. Arsène de Noue 451
La veuve. — Fabliau inédit de Gauthier Le Long , trouvère tournaisien , par
M. Aug. Scheler 477
L'enceinte actuelle de Tongres a-t-elle une origine romaine?, par M. le chevalier
C. DE BOKMAN 503
Églises des environs de Mous, par M. Léopold Devillers 509
. lies anciennes banques de Tongres, par M. Gérard Jansen 515
De l'émail chez les Romains, par M. II. Schuermans 551
Le château d'Havre , par M. Léopold Devillers 559
La chapelle de Notre-Dame de Bon-Vouloir à Havre, par M. Léopold Devillers. 572
Des styles à écrire, par M. H. ScHUEUUANS 577
L'officialité el les échevins synodaux à Anvers, par M. Louis Tours 580
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